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1 HARVARD COLLEGE LIBRARyJg
:
'f^'- DICTIONNAIRE
DES HÉRÉSIES,
j_ DES ERBELRS ET DES mmU.
MÉMOIRES
yow Mrrvlr • l'iilsiolrc
\tES ËGAREMENS DK I.ESI'RIT HUMAIN
r*R lUPI-^T A l* IIEUI.1UK (.ll&£.TItmilt
TOMB SEQOm '
I tinn^. tliiei amjiW \w- mn si -iiigmiiiiL'u 'io plcuouti Jiiitb,
Par «. dp (■Eunniill,,
PARIS,
A. BOÏEB, ÉDITErB,
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DICTIONNAIRE
DES HÉRÉSIES,
m MEURS ET DES SCHISMES.
PARIS. — TYPOtiRAPUlE DL COSSON, RUE DU FOUR-S.U!<T -GEHHAIN, 47.
1
DICTIONNAIRE
DES HÉRÉSIES,
DES ERREURS ET BES SCHISMES,
MÉMOIRES
Pour ieni[ à l'hiitare
DES ÉGÀREMËNS UË L'£SPR1T HDMAIN
PAR RAPronT A LA iiËUciaN cun£Tl£^'^&.
TOME SECOND.
PAH V, DE PBRRODIL.
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A. KOÏER, lïDlTEtK,
Ml , pUce du rdau-HuiiL
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MÉMOIRES
POUB SEBV1B A L'HJSTOIHB
DES ÉGAREMENS
DE L'ESPRIT HUMADl
PAR RAPPORT A LA RELIGION CHRÉTIENNE.
JACOBEL. Vi.f/«HiBsiTES.
JACOBITES, Kuiychiens on Monopbyihn de Sjrîe, aiosi i^ '
jieli'S du Dom d'un fnaieui Eutjaliien nommé Jacques BandéeoB
A^atah, qui ressuscita, pour aiDEÎ dire, l'Euljrchiairisme, pres-
qu'éteint ptr le concile de Clialcédoioe , par les lois des empe-
reurs et par les divisions des EutjchîeDs.
L'élection des éviques et leurs disputes sur la religion avaient
purtag^ les Eutycbiens en une îutinilé de petites sectes qui se dé-
clilraieul; ils élaioDl d'ailleurs sans pasteurs, sans lïrèques, et
l>*s chefs de ce parti, rcn fermés dans des prisons, prévoyaient
<|iie c'iîtait fait de l'Eulychianistne s'ils n'ordonnaient un pi-
iri^irclie qui réunit les Eutychiensel soutint leur courage au mi-
lieu des malheurs dont ils étaient accables.
Sévère , pulriarche d'Autioche, et les éféques opposés comme
Itii au concile de Chalcédoine , choisirentpour cela Jacques Bara
di'e ou Zuntale, l'ordonnèrent évéqiie d'Ëdesse, et lui confùrÈPcnl
Il dignité de uiétropoliUiD (ceaménique.
Jacques était un moine simple et ignorant, maisbrûlanldexËlei
a qui crut pou-roir compenser, par son aclivilÉ ei par l'auBtérit*. J
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"^ ' DICTIONMmE
DES HÉRÉSIES,
IIES ERREIRS ET DES SOltiMS,
MÉMOIRES
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DES KGARE.MKNS DE LESI'RIT IKWkVs
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A. IIOYER. ÉDlTKrH,
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DICTIONNAIRE
DES HÉRÉSIES,
m MEURS ET DES SCHISMES.
PARIS. — TYPOURAPUIE DE COSSON, RUE DU FOUR-S.UNT -liEIlMAlN, 47.
■ JAC S
parce qu'elle l'avaîi absorbée , et qu'elles «'éiai^nt confondues eu
une seule subslance, devaieut naiurelleinetii supposer que ce
tnème principe d'unioa avait iieii par rapport tu pain et nu vin
dans l'eucliarkElie ; ils devaient expliquer ces paroles de la con-
sécralioD, Ceci ett mon enfpi, comme ils expliqualitnt cuIIk de
saint Jean, Le Verbe a ité {ail chair, le Verbe a éSé [ait Aoninie: or,
ce sens est liieu différeui de rimpinution , puisque dans rimpa-
nation on suppose que le pain reeie , apris la consécration , tel
qu'il était auparavant.
Lorsque les Honophjsit^s ou JacoLites ont reconnu qu'en effet
la nature divine et b nature humaine n'étaient point conrondups ,
mais qu'elles étalent disiinctes quoique unies, ils n'ont point
pen&é que le piiîn fût conrondu avec lu personne de Jésus-Cbrist ;
ils ont pensé qu'il lui était uni personnellement , mais en deve-
nant le corps de JésuE-Clirisl dans le sens dans lequel Jésns-Chritt
l'ataii dit, et que les paroles de lu consécration oITrenl, ce qui
n'est pas contraire au dogme de la transiubslantiatiou : rien n'o-
bligeait les Jacobiles de s'écarter du sens des catholiques et de
recourir au dogme de l'impanaiion.
Je di& de plut que , quand les Jacobites seraient dans les prin-
cipes de V\m[ianatian , on ne pourrait dire que les Jacoliîtes soient
les premiers auteurs du dogme de In Iransaiibslantialion , et qu'on
soit passé de la croyance de l'impanatioD ï la crojance de U
innssnbsian lia lion.
L'iupanalion conduisait plus naturellement au sens figuré de
Calvin et k nier la présence réelle qu'A reconnaître la transsub-
stantiation, qui est une suite de la pr<>sence réelle. Ce n'est donc
point dans la croyance des Uonophysites que le dogme de la
trans5ul>staniiation a pris naissance , comme le pn^iend M, de la
Les Jacobiles élisent leur patriarche , qui , après son élection ,
obtieut des princes dans l'empire desquels il se trouve un di-
plôme qui le confirme dans l'exercice de sa dignité et qui oblige
tous les Jacobiles i lui obéit ' .
U s'est élevé de temps en tem|is des schismes parmi les Jaco-
biles , souvent sur l'élection des patriarches , quelquefois sur la
liturgie : le plus cansidéralde est celui qui a divisé le paLriar
d'Alexandrie de celui d'Anliocbe. La cause de eu schisme Tul que
* AHcman, Bibl. or., t. S. DisserU de Uonopby«t., art S.
6 JAG
dans rÉglite cl*Antioche ob mêlait de Thuile et du ael dam I0
pain de Teucharistie : on trooTe dans les liturgies orientales éê
M. Renaudot et dans M. Asseman les rites des Jacobites.
11 y. a parmi les Jacobites beaucoup de moines : les uns mmI
réunis , les autres vivent séparés dans des cellules et dans des dé»
serts, ou habitent sur des colonnes, d*où ils sont appelés stjlilM ;
les supérieurs de tous ces monastères sont soumis aux évèquee.
Les gouverneurs des provinces ne donnent pas gratuitement to
diplôme des patriarches , et leur avarice rend les dépositioDS dft
patriarches très-fréquentes ^.
Les Jacobites ont beaucoup de jeûnes , et les jeûnes chei em
sont très-rigoureux : ils ont le carême, le jeûne de la Vierge, le
jeûne des Apôtres , le jeûne de Noël , le jeûne des Ninivites, et ces
jeûnes durent chacun plusieurs semaines ; de plus , ils jeûneit»
toute Tannée le mercredi et le vendredi.
Pendant tout le carême aucun Jacobite ne peut ni boire de
vin , ni manger de poisson , ni se servir d^huile ; Tinfraction de
ces lois est punie de Texcommunication ; il n*est permis de mtt-
ger ni lait , ni œufs , les vendredis et les mercredis.
Ils font consister presque toute la perfection de FÉvangiledans
Taustérité de ces jeûnes , qu'ils poussent k des excès incrojables :
on en a vu qui , pendant beaucoup d'années , ne vivaient dorant
tout le carême que de feuilles d'olivier K
Les hommes qui se dévouent à ces austérités et qui ont des
mœurs si pures mourraient plutôt que de recevoir le concile de
Ghalcédoine, et n'ont cependant point une foi différente de celle
que ce concile propose.
Les Jacobites ont donné de grands hommes , des historiens, des
philosophes, des théologiens. Les plus éclairés ont été les plus
disposés k la réunion avec l'Église romaine : communément ils se
sont beaucoup moins occupés à s'éclairer qu'il inventer des pra-
tiques de dévotion et à trouver dans ces pratiques des allusions
pieuses ou des sens cachés , comme on le voit par ce que M. As-
seman nous a donné de leurs ouvrages '.
La secte des Jacobites n'a point été aussi florissante et aussi
étendue que celle des Nestoriens ; il y a eu des rois nestoriens,
^ Asseman, ibîd.
2 La Crozc, Christ d*Ëthiopie.
* Asscmaoy Bibl. oriepit», t. 2t
*
JAN
«t îl d'v a poiut eu de rois jacoliites ; on croit que ccUe secte ua
compte pas aujourd'hui plus île ciii(|uanle familles '.
Quelques auleurs, lelsque Jacques de Vilri et Willebranti,
appvlleut Jacobins les personnes de la secte que nous venons da
(léurlre *.
Outre tes auteurs que nous ayons elles sur les Jacobilea, on
peut consulter M. Simon et les auteurs que nous avons eild« à
l'article CorHTES '.
JANSÉNISME, système erroné de Jansénius. Yoyti l'ariicU
JANSÉWItStCornéiius), évèque U^pres.
JVof/rt lur sa tie.
Ce prélat , dont on a tant parlé aprèi sa mort h caas« des er^
leurs qu'il ;iTail répandues dans quelques-uns de ses ouvrages ,
spécialement dans le livre inlitulË Auguilitiui , vint lU monde le
Û octobre 1683, t Accoy, villagQ du comté de Lecrdum , en
Hollande. Ses parens , Jmn Olhf «t Lynije tiinArrt , sKisant pn
fortuné», mais gens de bien et surtout reeoiuniBDdflbles par leur
atlachenieni à la ralii^ian cailioliqoe , apercevant en lui , d(« son
«nfance, une grande emie de s'iuitruire , des dispotitions pont
J'élude, et espérant de le voir entrer un jour dans l'état eeelésia»- J
iique , l'envoyèrent à Leerdam , oil il apprit les élémens de la J
grammaire, ensuite i Ulrecbt, oA il fit ses bumaDilés, de lA h (
Lonvain , oii , aidé des secours que lui fournissaii an jeune '
boDime Tort riche, il éindia d'abord en rhétorique chec les Jésuites,
puis en philosophie dans un autre collège. Ce fut dans ce dernier
cours qu'il montra une aptitude singulière pour les soirnoes ab»-
iraites ; il j brilla tellement qu'k la fin il emporta le premiei
rang entre les maîtres ès arts de M) promution.
Ce luccés lur valut une place dans le collège Adrien. JacqnM J
1 Janton , qui en était piincipal , ayant reinnrqué dane eet élève dei '
^,|ai}grés distingués eu théologie , de l'aiiplicalion et un grand dé- '
^ÊêÊ) àe te aignal«r, s'attacha k lui et conduisit ses études avee un
^Kria particulier. Ce fut Ik que Jansénius remontra Duver};er de
^ t AsueDinii, BibL o<
I ' Jacques de Vilr), IlisL d<
lem>Sninle.
I ' La crojalioc et la meurs ds* Dallons ilu tevant, par Moni.
le Jérusalem. Willebrand, Itinéraire (le la
8 JAN
Hauranne , si connu dans la suite sous le nom d*abbé de Saint-
Cyran , et qu'il se lia avec lui d'une amitié qui fut aussi étroite
que constante. Pensées , sentimens , desseins , travail , erreurs ,
tout devint commun entre eux. Janson^ leur maître, très-engoué
des opinions de Baîus , quoique déjà condamnées deux fois par le
saint Siège , les inspira à ces deux étudians ^ ; et jamais , dit un
historien , leçons ne furent reçues avec plus de docilité ni mieux
gravées dans le cœur. On pourrait ajouter que jamais élèves ne
montrèrent plus d'ardeur à soutenir et à répandre la doctrine de
leur maître.
Cependant , la santé de Jansénius s'étant altérée à force d*ap-
plication et de travail , on lui conseilla de changer d'air. Duver-
ger le plaça d'abord à Paris , chez un conseiller au parlement , en
qualité de précepteur , et quelques années après , il l'emmena à
Bayonne , sa patrie , où Jansénius fut fait principal d'un collège
nouvellement érigé dans cette ville. Là, ces deux intimes se livrè-
rent avec un zèle presque incroyable à l'étude des Pères , surtout
de saint Augustin , dans l'intention et avec l'espérance d'y trou-
ver des armes pour défendre d'une manière triomphante la doc-
trine que Janson leur avait donnée pour les vrais sentimens du
docteur de la grâce. 11 est aisé de s'imaginer combien une pareille
disposition dut leur faire prendre facilement le change et les éloi-
gner de la vérité. Aussi , ce fut là , et au milieu de ces lectures
influencées par le préjugé , que Jansénius , secondé par son ami
et vivement pressé par ses sollicitations , posa les fondemens du
système qu'il développa dans son trop fameux Augustinus,
Après un séjour d'environ dix ans en France, Jansénius re-
tourna à Louvain , où Janson , qui avait sur lui des vues particu-
lières , comme nous le dirons bientôt , le reçut à bras ouverts et
lui procura la principalité du collège de Sainte-Pulchérie , ét:i-
biissement qu'on venait de fonder à Louvain pour y élever des
théologiens destinés à la défense de la foi. Les soins que lui im-
^ Fdler prétend que ce docteur soutint dans la suite des thèses pu-
bliques diamétralement opposées à ces erreurs. Ce serait une preuve de
son retour à Torthodoxic et à la soumission due à TÉglisc ; mais ce re-
tour a dû être tardif, car nous avons pour garans le père Duchesne,
Hist. du Balan.; Ducreux, Siècles chrétiens; Toornely, De gratîA
Christ.; d*Âvrigny, Mémdies chronol. ctdogroat.;Bergier, Dict. tbéo-
log.y qui disent que ce fut on école que Jansénius puisa ses erreurs.
JAN 9
po&aii celte place n'alisotbèreni pas tout son temps , il pa employa
Ue partie h cultiver la Uiéologie, maie mds perdre de vue sok
cher Àtigiatiaiu,
En 1619 il fut promu su doctorat, quoiqu'il n'eût pas corn-
plilé les années d'études ihéotogiques prescrites par les statuts de
la Faculté, mais par suite d'une dispense honorable que sou profes-
seur lui avait obtenue do gou^emeur des Pa;s-Bas. Nous ne par-
lerons pas ici de deux vu;a|;es qu'il Bt ^n Espagne de la part de
l'OniTersilâ, pour ea soutenir les intérêts i la coor de Madrid
contre les Jésuites , je veux dire pour empêcher que les le';ons de
philosophie et de théologie remues chez ces Pères pussent serrïr
i prendre les degrés de ces facultés. Cens mission eut tout le suc-
cès qu'on en espéruit. Nous ne dirons rien , non plus , de ce qu'il
fit ï Salamanque pour gagner à son parti les docteurs de celle
célèbre Université. Duchesne assure, d'après Jansëui us lut^nême
et d'autres monumens, que l'ioquisilion , informée de ses dè-
□lari'hes, allait le faire arrêter s'il n'eût pris subiti*meut ta fuite '.
Quoi qu'il en soit, il fut cependaot nommé, en MÏM, ï une
chaire rojale d'Écriture sainte , el en 1C36 k l'éTèchÉ d'Yprea.
Il n'occupa pas loog-iemps ce si^e , puisqu'il niourui de la peste <
le G mat 1638, tgè d'environ cinquante- trois ans.
On a de lui des «iminenMir« sur quelques parties de l'Ëiri-
lure sniule , estimés , et que Feller trouve pleins d'érudition et
Écrits avec uetleté, Quelques auteurs prélendeut que son Hari
galtica* , diatribe viruleuie contre nos rois , fut surtout ce qui lui
gïgna les bonnes grïces de la cour d'Espagne et lui valut sa no-
mination il l'évéché d'Vpres. On a aussi ses letlresï Duvergerde
Uauranne, imprimées t Louvain, 1651, sous ce litre: ffaJMsn»
du Jttnttnitau déctnmerîe , ou Leliret de Janiénmi à l'abbé de Saint-
Cura» , depuit 1617 jutqa'en 1633. Uais l'ouvrage de cet eut
<;ii'il entre dans le plan de ce Dictionnaire de faire particulière- ,
l'^eol connaître i cause des erreurs qu'il contient et des grandel I
isputesqu'ila occasionées dausI'Ëglise, c'est V Anguittaut.
l'tutin de Jitnténiu» dans ce livre,
peniail quetqiiefoU lui-mtme, »
i( à cet égard , re qn'll
OH taint&Uge.
Bafus, qui avait passé une partie de sa vie dans l'agitation et 1
> IliiLdu Balanisme, I. A, p, 31Ï et suit., Cdit. de Douai, at-br.
10 JAN
les dispuleg , tantôt rétrtoUnt , Untôt renouvelant tes erreun i
avait répandu sa doctrine dans des écrits épars , sans ordre, saM
liaison et sans suite. Jacques Janson , son élève et son disciple ,
sentit qu'un ouvrage où tous les points de cette doctrine iérateDt
rassemblés , liés, et formeraient un système bien cottdnU , bleni
soutenu , la présenterait sous un tout autre jour > et y gagnemil
plus sûrement des partisans. Mais n*ayant pas le loisir de blllr
lui-même un ouvrage de cette nature, lequel demandait, outre des
talens rares, une étude profonde et un travail immense, il jeta les
yeux sur Jansénius « son élève , et qui , comme nous TaTOns dit ,
partageait ses senti mens. Janson ne pouvait s'adresser mlem.
« Esprit subtil et pénétrant ; talent d'embrasser un grand sujet» de
» l'envisager dans tous ses rapports et d'en distinguer habile*
» ment toutes les parties, pour mettre chacune à sa place ; con*
» naissance détaillée des opinions qu'il fallait établir et de celles
» qu'il fallait combattre; habitude de méditer sur ces objets,
> de les creuser , de les considérer dans leurs principes et dans
» leurs conséquences les plus éloignées ; application constante ,
» infatigable, qui savait aplanir ou surmonter toutes les difficultés;
» netteté dans les idées, facilité dans le style ; en un mot, la réu-
» nion de tout^ les qualités nécessaires au succès ^ > d'un ou-
vrage difficile et de longue haleine : voilà ce que Janson rencon-
tra dans Jansénius , et ce qui détermina son choix.
Jansénius se chargea volontiers de l'entreprise , et il 8*y livra,
pendant vingt ans, avec une ardeur qu'on a peine à concevoir. Si
on l'en croit sur parole, afin de mieux en pénétrer les sentlmensei
la doctrine, il avait lu plus de dix fois toutes les œuvres du célè-
bre évèque d'Hippooe , et environ trente fois ses traités contre les
Pélagiens' , merveille, si l'on peut parler ainsi, que firent sonner
* Siècles chrétiens, t. 9, p. 64 et suiv.
s Synopsis vits Jansen., à la tête de l'Âugustinus. Il était de mode
en ce temps-là, cbet les novateurs, de se flatter d'avoir bien étudié les
ouvrages du saint docteur de la grâce. Batus disait les avoh* lus neuf
fois. Avant lui, Calvin se vantait d'en connaître parfaitement l'esprit ei
la doctrine. Les sectateurs de Luther avaient aussi dicté la leçon aux
Jansénistes, en ftibant honneur à leur maître d*avofr rendu, en quel-
que sorte, la vie à saint Augustin et en accusant les théologiens ortho-
doxes de ne pas connaître ce père, même de ne l'avoir pas lu.
Voyez Hist. du Baïaa, L 2. De bsresi jansenianà» 11b. 3, disp. i,
cap. 2.
bt«Dl>aulB«gdiirnn
JAN 11
tieaitUcipIn ; naîi merveille qu'on croîn
rii|ipelle \e» occupa lions divergentes et
avliipli^B que durent lui dunner lei ronciioos dont il se trouvi
eMtÎDuellenieot chargé , ses diEFérens loyagei en Espagne ei en
FftBM , l« rainiiière de la parole qu'il eisr<,4ii fréquemmenl ea
tbaire, ma études théologiques , les écrita qu'il composa sur di~
TV» obj«ta el spécialeoient sur l'Ëcrilure sainte , la lecture dtrs
antrei Pères de l'Eglise, turlom de ceui qui ont vécu entre Ori-
gèae el taini AugusUa, dont il parlait si mal * , la rAdacliou Ubo-
neuse el pleine de discuisioiis du livre dont noua parlons ; lea
MtfUTemena qu'il se donna, de concert avei^ Duverger, pour ména-
gM k ce livre un accueil favorable et de nombreux partisans, etc.
Oitoi qu'il en soit , il eonnajaiait au moins aussi liien les produc-
tions ténébreuses des bérâliques du XVI' el (lu XVII- sièrie. C'est
M que déiiiuntrenl las plagiats multipliés qu'un lui a n>procliiti
d'y avoir taiis. Kn effet , le P. Déoliamps prouve, dans son excel-
lent traité D« harrti jnuteniaita, que ce Tut dans ces sourcfs em-
poisonnées que iauséniua poisa tout eu qu'il annonijait comme de< i
déconveries jusqu'alora inconnuei , la plus grande partie de «es
Mtertiona kélérôdoxes , le* preuves dont il les appuyait , les ré-
ponses qu'iV ftiiaail aux ohi«cltona conirairei it »on système *.
Dupin prétend que Jaiitéuiu^ tairtpT'il l',4iipiiMiNu jiiHir déffit'
dre la doelrist île* cgu*um drt faeull/t d» Ik^lugU^ daLaet'ain et
de Douai , contre In AriU dtt profktseurt jAiiUt, et douê le def-
efîH de comàaim In iritliaieiu de* Scolaitiquei qu'il erageU op-
pctfy à i-fux de Mil» ÀuiitMin mr la ijrdee et la préititmatioa '.
^^ îioua ne nierons point ce fait, avoué [tar l'alibé du Horgues
it ces rares inlermediiiirM. surtout Ici Grecs, d'£lre InlectA I
> Rien de plus plaisant que ce nnc ruconle ce Père, dans le cliap. 3,
'. I, deceIrailË. Un deses amis, partisan dlslingué des opinions uou-
u llu* et qui connaissait paKnitcmcnl I Angiistinus, tlanl arriTé cliei
lui, eut occasion d'y parcourir avec soin un outrege de Dumoulin sur
la grtee et le libre arbitre ; il j trouva tant de rapports dans lus senli-
■CMs, deni lï* eipres^ons ef de loole manière, qu'il soutint avec che-
Itarquecelteprnduclion du ministre calviiiiïtt^impriméevingt ans avant
le Ihre île Jantiiiins, n'en Ëluit qu'un aliréeA tout rfcemmenl mis au
)»ar, el on ne put le dbiuader qu'i;ii lui mtllanl iloiaullcs yeiu Icli-
brquî se trouvait stpar^ derauiiaye.
•lUsl. cciIWiil.duilia-aepliÈineHjtl,'.
^^
<2 JAN
reconnu, en quelque sorte , par la faculté de théologie de Douai ,
du moins quant aux censures dont il s*agit , et cet aveu de notre
part confirme plutôt qu*il n*infirme ce que nous avons avancé tou-
chant le dessein du docteur de Louyain. Mais ce qui montre en-
core mieux le but de Jansénius de faire revivre le Baïanisme tout
pur, c'est 1* un manuscrit de sa main , que Ton conservait à Lou-
vain , et qui fut cité dans le procès de Pasquier Quesnel. Ce ma-
nuscrit, queDuchesne assure avoir lu en entier, commençait ainsi:
Ad excmandoi apophases niagiitri noitri MichaelU » c*esl^-dire »
pour excuser ou défendre les ientimem ou les propoiitiont de notre
mailre Michel * ; 2» le titre qu*il avait d'abord donné à son livre :
selon quelques écrivains , dit Toumely * , il Tavait en premier
lieu intitulé Apologie de Batus ; mais la crainte d'irriter le saint
Siège et de s'attirer par cela seul une foule de contradicteurs el
d'ennemis l'engagea à changer ce titre insolent en un autre
guère plus modeste et beaucoup plus captieux , c'est celui qu'on
lit aujourd'hui ; 3* la doctrine qu'il enseigne dans l'Aic^iM/tiitM. Le
théologien que nous venons de citer rapporte onze propositions
de Baîus que Jansénius renouvelle : les unes regardent la liberté,
d'autres la possibilité des commandemens de Dieu, quelques-unes
les œuvres des infidèles, et dans le reste il traite de Tétat de pure
nature '. Mais Duchesne , dans le parallèle qu'il fait des erreurs
de ces deux novateurs, démontre qu'il y a entre la doctrine de l'un
et de l'autre une conformité si parfaite, qu'on peut dire que celle
de Tévéque d'Ypres est comme la glose qui suit la lettre de la
doctrine du chancelier de l'Université de Lonvain.
Quoique notre théologien n'ignorât pas que ses sentimens
avaient été condamnés d'avance , en grande partie/par Pie V et
Grégoire XHl, il était néanmoins tellement affectionné à son en-
treprise, au rapport de Libert Fromont, un de ses meilleurs amis,
qu'il se croyait né uniquement pour elle , et qu'il consentait de
grand cœur à mourir aussitôt qu'il l'aurait achevée *. Cependrint
il chancelait ou craignait quelquefois. Plut J'avance , écrivaitrii à
Sainl-Cyran, plus l'affaire me donne de ftayeur.,. Je n'ose dire ce
que je pense touchant la prédestination el la grâce, de peur qu'avant
' Hist. du Baîan., 1. Â.
2 De grat. Christ., 1. 1, p. 335.
^ Ibid., p. 33 L et seq.
* Synops. vit Jansen«
JAN 1B
^vtlontieioHprilft menri, if »r m'utrU-e et qui esi arrWd à d'an-
tra , ■.*'esi-!i-dire, d'ilte conitamné... tl avoue qar ti ta dofirine
praeitàélre éi'eaUe, il paiurail puur uit homme en diTireel un franc
rtneuT... Il déclare qu'il n'atpire plut ù aucune digniW araitém -
^at, par la crainte que, «'iJ iui arrivait de produire tet wntimeiu ,
il nt révollit contre lui tout te monde... Il priWoîi que le» décou-
rertesqu'ila Culles dans Mini Augiuiin eaateroni un grand ^lan-
afnunU... W fera tntorle que ton livre ne paraîtra qu'aprtt ta mori,
afin de ne point iespoierù voir le reile de tet Jouri t' écouler dauM
l'agilaliaii et le trouble... Eoûo, jamait on ne pourra Ui pertuader
que l'ÂugUBliiius tait uajour approuvé tet Juge* ; mais il tinil par
*Vi) consoler, le pouvoir Iramontain étant, diuii-il, ce que j'ettime
I ta moindre clwie '. Ainsi parlait l'iio m me du monde qui cherchait
^lérilé atvc le plus d'ardeur ei de franvhUc , un des plus sainU
•1 un des plus savant prélats qu'ail eus l'Eglise, au dire du parti.
Jiaiénïus tient quelquero'u un autre langage dans ton Tameux
MTTige: rien de plus éditiaDt et do plus respectueux envers le
Hint SiËge que la déclarjtion insérée dans le livre préli
Mji. 20, n° i, et dans la conclusion de tout l'ouvrage '. 11 renou-
vela M soumission, dans son testament, onedciui-lieure avant
mort. U^jï <iiie){(ues jours auparavant il avait écrit en ces lern
ù l'rba'tn VIU : • le me Iromiic asEurcmeot, si bpluparl
• qui s/sont appliqui^ i pénétrer les senliniens de suint AugeU^
1 lin nescsoNtélmngenienl mëiiris eux-mêmes. Si je parle selon
■ la vérité ou si je me trompe dans mes conjectures , c'est ue <jiie
> fera connatlre cette pierre , l'unique qui doive nous servir de
• pierre de touche , contre laquelle se brise tout ce qui n'a qu'un
• vain éclat sans avoir lasolidité de la vérité. Quelle chaire coa>
• sulierons-noua , «inoo celle oli la perfidie n*a point iI*acuÈt
• A quel juge enfin nous en rapporterons-nous, 'sinon au lieulc^^
g lUDt de relui >iui est la voie, la vérité etla vie, dont U conduits
>t i couvert de l'erreur , bien ne permettant jamais qu'on su
rompe en suivant les pas de son vicaire en terre!... Ainsi, tout
« que j'ai pensé, dit ou écrit dans ce labyrinthe hérissé dedls-
■buIcs, pnur découvrir les véritables eentimens de ce maître très-
Bprofond , Cl par ses écrits , el par les autres oionumcos de VEr
iiou-
t Voge: HiiL du Baian., I. i; i
hjM et seq.
1 1 Vogtt le» mCma.
Tourne)]!, De grol. Clirlst.,
M
14 JAN
» gliseromaine, jerapporteauxpiedsdeTOtreSaînteté, approQTant,
» improuYaDt,rétraetant, selon qu*il me sera prescrit par cette voii
» de tonnerre qui sort delà nue du Siège apostolique*. »
Il serait difficile de concilier de si beaux sentimens envers le
chef de TÉglise avec oe que Tauteur écrivait à Saint-Cyran, et
même avec ee qu^il dit quelque part dans son AugusHnus ^, tou-
chant la même autorité » si Ton ne savait, d*après une expérience
constante, que les novateurs ont, au besoin, deux langages diffé-
rens : un pour leurs intimes et leurs affidés, qui est la vraie pensée
de leur cœur ; et un tout contraire pour le public , ou pour ceux
qu*ils redoutent , et celui-ci n*est que Texpression de la politique
et du déguisement. Mais puisque ce théologien est mort dans la com-
munion catholique, et avec les sentimens, du moins à Textérieur,
d*un enfant de TËglise envers celui qui en est le chef visible, « on
• doit croire , dit M. Tabbé Ducreux , que , s*il eût survécu k la
» publication de son livre , il eût souscrit tout le premier aux dé-
• cisions des souverains pontifes qui Font condamné dans la
» suite •.
SitHème êê JamUntM^ ei hêuon dê$ propêtiUmu emidammét»
ëvecee tifitéme.
Induit en erreur par cette maxime de saint Augustin :«// ext né-
eesêaire que tumsagissiom conformément à ce qui nous plaît le plus *,
maxime dont il avait mal saisi le sens , et que cependant il ne
cesse d^apporter en preuve , Tévéque d'Ypres fonde toute sa doc-
trine sur la délectation relativement victorieuse , c*est-à-dire sur
la délectation qui se trouve actuellement supérieure en degrés à
celle qui y est opposée. Un savant nous donne une idée juste du
système de ce prélat en le réduisant à ce point capital : • Que ,
» depuis la chute d'Adam, le plaisir est Tunique ressort qui re-
» mue le cœur de Thomme; que ce plaisir est inévitable quand il
> vient , et invincible quand il est venu. Si ce plaisir est céleste,
• il porte à la vertu ; sHl est terrestre , il détermine au vice, et la
» volonté se trouve nécessairement entraînée par celui des deux
> qui est actuellement le plus fort. Ces deux délectationa , dit
* Mém. chronol. et dogmatf t. Sf p. 80.
< Hist du Balan.
' Siècles clirét, t 9.
* Sccuadûm iil operemur necesse est, quod ampliôs nos dele«tat«
I
I
I
JAN 1$
> l'uaieur i sont coainui l<is deui Lassius il'iiiio balaoï-e : l'un un
• peui moDier uns que l'uuirii no dosceinle. Aiusî , l'Iiuainie l'tit
• iaiiudbloQieiil, quoique toIodUi rentrât, la bien ou le uibI , «i<-
• loa qu'il Ht dominé jiar la grâce ou lu cspiillU '• > Voili , ilil
le t'. d'Airignf , le fond de l'oufrage do Janiiniue ; touies lei
aulres parties , spécialement les cinq pruposiliong condaïuiitSes ,
qui renrertneut cumme la quintesseuoe de cet ouvrage , n'eu soûl
que des suites el des corollaires.
Aiiui, U Tolonlé de riiomine eu encbtiloée , HtuniM oéceiui-
rrmenl i la délecUtion acLuellemeal prépoodénute, c'eil-i-dire,
i celle i(UÎ se troure, daas l« moment déuisif de lu déterui nation,
supérieure en degrés il la duleclaliou opposée. Dans locouUit des
deiti déleciatiouB , »'il y a entre l'une el l'autre un équilibre par-
fait, tu «olonté. dans cette lijpoUièse , ne peut rien ui pour la
vertu, ni pour le vice. Si la délei'litîon terretlre l'cDipurte sur
h céleste d'un seul degré, l'homue fait alur» nécetsaireiDCDi le
mal 1 et, le voDlraire arrivant , il eiubraise nécestuiremeul le parti
de la vertu.
Ainsi , daiks ce ijslinie , il u'j a point de grice suffisante pco-
prumrat dite , c'eai-^-ilice de gricc t^ui , sans se réduire à l'acte
(parce qnc l'homme j létUta «olonUi renient et de son pro)>re
l'hoia), donna néanmoins tout «e qu'il but ntùdiateinenl ou im-
nitïdialeaient pour pouruir Caire te bien et résister b la concupia»
ceuce qui se Tari actueUeuienl sentir. Jausénius rejette eiprcssé-
ment ccLie urAce *, el efle nepeul, non plus, se concilier avec sa
ilociriuf, uonoie ou le verra dans le raîsounemeat qui suivra la
deuxième propos Jlion cuuduinnée.
Ainsi, quelt/iiei comnumd'Bitni dt bieu tant impoitiblri à de»
hammt» jiitut qui veulent kt accomplir, et qui {ont, à tel effet, det
effort», ttlon le* force* prétrntei gu'ilient ; et la grâce qui trt leur
rendrait poniMtt leur manque ', car ces justes pècbeut quelque-
' Vojei d'Avrigny, Mém. clironol. CI dOBOisI., t. î. p. 79 cl luiv.;
Fdin-, IHcl. blit., nuDiot JadCni»; BerK<er,DlcI. delhéol., art. Jin-
sintWKi Tourndj, Tract, de^rat. Clirist., t t, p. ï7Jel seq.. etc.
• HInc ctiara claret, cur Aupistinus omnem oraninil gralÎBm purt
sullicliiilem, live ante Ddeffli slve etiiun post Gdem aurerat. Lib. h. De
gral, Chrin., cap. 10.
* Aliqaa Deiprscepta, hominibutjuitii volentibus, etconanllbusM'
cundùm pneseotes quos habcnt vires, mot iinpoMibilla i Ucest quoqoé
Ulis gntia qua possibilia QauU Preiniire propotiiien cutdamuM.
16 JAN
fois; donc don la concupiscence est supérieure en degrés à la
grâce ; donc ils sont entraînés nécessairement au mal ; donc ils
n*ont pas la gr&ce nécessaire pour pouvoir faire le bien qui est
commandé, et éviter le mal qui est défendu. Car la petite grâce
qu*admet Jansénius ne donne point un pouvoir relatif , mais ab-
solu , et qui n*a aucun rapport à la concupiscence actuellement
sentie , à laquelle elle est inférieure : elle ne peut donc produire
aucun effet.
Ainsi, dans l'état de nature tombée, an ne réiUte jamais à la grâce
intérieure^. Car, résister à la grâce, c*est la priver de Teffet qu'elle
peut avoir dans les circonstances où elle est donnée : or, ou cette
grâce est supéiieure à la concupiscence qui se fait actuellement
sentir, ou elle y est égale, ou même inférieure : dans la première
supposition y elle produit nécessairement son effet , on n'y résiste
donc pas, on ne peut même y résister ; dans les deux autres sup*
positions , elle est rendue nulle et comme paralysée par la concu-
piscence , qui , ou la retient en équilibre , ou remporte sur elle ,
et alors elle ne peut avoir d'effet ; donc on ne la prive point
encore de l'effet qu'elle peut avoir dans la circonstance ; donc
on n*y résiste pas non plus.
Ainsi, pour mériter et démériter dans Vétat de nature tombée , il
n'est pas nécessaire que C homme ait une liberté exempte de nécessité;
mais il suffit qu'il ait une liberté exempte de coaction ou de con-
trainte *. Ceci est évident : suivant le système, l'homme est néces-
sairement entraîné par la délectation qui domine , c'est -â-dire qui
se trouve supérieure en degrés sur la délectation opposée ; il n*a
donc pas une liberté de nécessité. Cependant il mérite ou démé-
rite véritablement en cette vie, puisqu'il sera récompensé ou puni
dans la vie future, ainsi que la foi nous l'apprend, et que l'auteur
l'admet lui-même; donc, pour mériter et démériter, il suffit d'avoir
une liberté exempte de contrainte.
Ainsi, supposé, ce qui n'est pas, que les Semi-Pélagiens admet-
talent la nécessité delà grâce intérieure prévenante pour chaque ac-
tion en particulier, même pour le commencement de la foi, ils étaient
* Interiori gratis , In statu nature laps» , nunquàm resislitur.
Deniièmc proposition condamnée
^ Ad merendum et demerendum, in statn naturae laps», non requi-
rllur in homine libertas à necessitate, sed sufBdt Jiberlas à coacUone«
Troisième proposition condamnée. -
l
JAN 17
Mf/liguti en ce 911'iFt nmlof^nl ^ue cette grâce fit telle que la m-
lenli de l'homme put g réfuter im y oMr <. En eOel, quicijiique
oie la grlce efficace par elle-même euLendue i U maniëre de Jaii-
SÛniu9, et Déces&ïire pour opérer réellemeal le bien , esl héréti-
que, suivanluel auteur. Or, les Semi-Pélagiens, qui enseigna irai
qu'on pouvait résister ï la grloe préveoaDte, nécessaire pour cha-
que bonne œuTte en particulier, niaieut par-lï même la grice effi-
cace (le Jansénius; iU étaient dont' lii'rétiques , selon lui.
Ainsi, c'tti un« erreur leiai-pélagienne lie dire que J^iut-Cbritl
tu mort , ou qu'il a répandu ton tang généralement pour ioia lei
hoamet *. Car Jausénius n'admettant pas la grlce sudisanle pro-
prement dite, mais seulement ou une grAce eflicace qui consiste
dans la délectation céleste, supérieure en degrés , ou une petite
grlce qui ne peut opérer aucun elîet , il suit de M que ceux qui
M perdent n'ont pas eu les secours sufGsans pour pouvoir Taire
leur salut, el que par conséquent Jësus-Chrisl n'est pas véritable-
ment mort et n'a pas répandu sou sang pour leur obtenir ces m ~
mes secours.
De la liaison qui se trouve entre les cinq propositions que nom
«enoni de rapporter, avec la délecUitian relativement victoricuie,
quieït lab;i&e du sjslème de rétâqued'Vpres, il résulte chire-
luent que ces mêmes propositions sont de ce prélat, etqn' elles se
trouvent vérilablement dans le litre qui renferme son système. U
serait aisé de montrer qu'elles sont toutes en etTet dans l'^tt^Hif j-
siM, ou quant ï la lettre même, ou du moins quant au sens ; mais .
après ce qui ■ été défini sur ce point par le jugement du saint
Sié^se, qui esl devenu celui de l'Ëglise entière , qu'est-il besoift. _
de preuTe ultérieure ? Nous renvoyons donc nos lecteurs an
logiens qui traitentde ces matières; âTonrnel;, àBailly, etc., etc.^
qui rapportent les textes même de Jansénius i cet égard.
> Semipelagiani admîtlebanL przienientiii gralix intcrioris nécessita- I
ten ad singulos aclus, eiiam ad inilium Ddci, et in hoc tranl hxretiel,
quAd vellciil eam gralîam lalem esse, cui posset humana voluulas rc-
«stcre, tel obtempcrare. Quatrième pruposilioncondaoïnte.
* Semipdagiauum est dicere Clirislam pro omnibus omnlni) bomini-
Inu morluum esse, anl sanguinem fudisse. Cinquiimv proposition
coodamnéc.
18 JAN
Condamnation de» dnq propositiom ; tem dam lequel eliei ont éti
eondamnéâi; ce qu'on est obligé de croire en conséquence; vérités
établies par les bulles sur cet objet.
Les cinq propositions ont été censurées ainsi qn^il suit :
La l*; comme téméraire, impie » blasphématoire , frappée dV
nathème * et hérétique ;
La II*, comme hérétique;
La III*, comme hérétique ;
La IV% comme fausse et hérétique;
La y« , comme fausse , téméraire, scandaleuse ; et étant enten-
due en ce sens, que Jésus^Christ soit mort pour le salut seulement
des prédestinés *, impie, blasphématoire , injurieuse, dérogeant à
la bonté de Dieu, et hérétique '.
Ces propositions ont été condamnées comme étant la doctrine
de Véf éque d'Ypres *, comme extraites de son Une intitulé, ^ar-
ffustinuSf dans le sens même de Tauteur ", sens tel qn*elles le pré-
sentent naturellement, et que Tannoncent les expressions mêmes
dans lesquelles elles sont conçues *•
Il suit de là quMl n*est pas permb de penser q«e ces proposi-
tions ne sont pas de Jansénius , et quelles ont été condamnées
dans un sens étranger, dans un sens contrair^anz sentlmens de ce
A M. Pluquet ayant traduit ees mots, œnafhematê damnatam^ par
ceux-ci, digtu (Canaihème^ nous pensons qo*ll s*e8t trompé, i* parée
que sa ? ersion ne rend pas rexpreôlon latine dt la bulle ; 2« parce qne
rhérésie de la proposition avait été d^à proscrite par le oondle de
Trente.
2 Jansénius enseigne (1. 3, De grat Ghrist« c 2i) que saint Augus-
tin n*a(liuet point q^e Jénii-Chritt soit mort, ait répandu son sang et
prié pour le salut éternel des infidèles qui meurent dans ^infidélité ou
des justes qui ne persévèrent pas ; et il ajoute que, sulfant le même
saint docteur^ Jésus-Christ n'a pas plus prié son Père pour leur déli-
vrance étemelle que pour ta délivrance du diable*
s Voyez la bulle d*Innocent X, C&m occasione,
A Bref d'Innocent X aux éyéques de France, en date du 29 septembre
I65A.
s Bulte d'Alexandre VII, du 15 octobre 1656, et formulaire du même
pape.
* Bref d'Innocent XII, adressé aux évéques de Flandres, sous la date
du 5 février 169Â, et bulle de Clément XI, Vineam Domini sabaoth.
»
doct«nr, M qu'il a luî-intme rejeli ; Bill il Aii( tro\rt de t»
el prore»»*riielwaclre :
I- Que le» cinq prupusitioni dnnl 11 s'agit »onl hérétiques.
S* Qu'elle* sobi ilins \'Aii§»Uiniii de Jnnat-niui.
3* Qu'ellM loiil condaiDDéES et bërtiiquM dnns le seni
priMDteai , et dftn» le gph» jiiéme de riuieur, c'eai-ï-d
le sens que le livre loui entier offre nilii relie ment.
4' Que le «ilence respectueiit ne siirSt pas p our n«ndfe !i P
glise la wium'issi on qu'elle > druit d'exiger, et qu'elle exigea
elTet, t Ml i^gird , de tom te> Hdète*.
Le» Mentit éla biles )iir lee ballei doivent tm opposas m
erreurs contenues dans les prupositim» condamnéca. Ces térilih
soni donc celles-ci :
1. < L'huinnie juste qui s'efforce d'accomplir les pri^ceples a ,
» dans le luonant défi^ïf de ion actioD, lit gr&ce qui Ici Inl rtDd
• Tfialitemenl finïblt* ; u'est-à-dire l'iioiiiaie juste qui i
■ d'ubteryer U loi a uu puutoir «ni, réel, délié el d^ijSHâ p
■ consenlii' k la Rrtce conime pour y résister ; il n'eil puiut ta
■ au-dessus de tet furet» préttitlet , parce que Dieu l'aido .
> meseTTÎt (l«l'cxptewiiindeH. Bosquet ', soit pour faire ce qu'il
■ peutd6ik, suit puur deiaiintleT la gTÏcc de le pouvoiri soit pour
■ priiliquer le* préi^efAea eu om-oiéiiief , au, pat une humble du-
• mande, obtenir h grice de le f^îre *. •
il. 'DansrélaldeDalureloinbt'e, lajfrice n'ublteiil pas loujnurs
■ l'eFTel pour lequel elle est donnée de Dieu, el qu'elle peut avoir
r rflativenient i la coocupisïMCH qui gefailpréaenlement sentir*.
III. ■ Pour mériler ou démériter, dans l'état de nature totn-
■ bée , il ne sallit pas que la volonté ne aoït point forcée , tnsis
> U faut qu'elle soit «leiupie de toute Déceaaîié uon-seulemeni
> inmualile et absolue , mais uiètne relative ; c'eat-li-dirB , il est
■ nécessaire que la volonté puisse actuellement surmonter la
• délectation opposée qui se fait sentir '. Eu conséqiieni??, le vo-
t lontaire, s'il est nécessité , n'est pas libre d'une Iiberi6 qui siif-
• lise pour le mérite ou pour le déniérile de la vie présente '. >
* JttatiC de réSei. moral,
a U. delà Giambre, Réalité du Junsi'nîsme il^montréCi
* Bs'lly, Tract, de gral.
* Baillr. ibid.
s TewMl;, De gnl, ad usun lemiDar. In-ia. Pari>i 173».
20 JAN
IV. Tout catholique doit tenir pour faux que les Semi-Péla-
giens aient admis la nécessité de la grâce intérieure prévenante
pour chaque action en particulier, et même pour le commencement
de la foi; il doit croire que si ces mêmes hérétiques eussent admis
de cette sorte cette grâce, ils n*eussent point été hérétiques en ce
qu*ils eussent youlu qu'elle fdi telle que la volonté humaine pût »
dans la circonstance, y résister ou y obéir.
y. « Jésus-Christ a mérité, par sa mort, à d*autres qu*aux pré-
» destinés , des grâces vraiment et relativement suffisantes pour
» opérer leur salut, et ce n'est point une erreur semi-pélagienne
» de dire qu'il est mort pour obtenir à tous les hommes des secours
9 sufBsans relativement au salut ^. »
Réflexiom sur le système de Jansénius.
m
Ce système est si révoltant, qu*on s'étonnerait qu'il eût pu trou-
ver des partisans et des défenseurs , surtout parmi des hommes
érndits et distingués par des talens éminens, si Tonne savait, d'a-
près les leçons afflgeantesque nous donne l'histoire, à quels excès
l'esprit humain est capable de se porter dès qu'une fois il a fermé
les yeux aux lumières sages de la droite raison et de la foi. Nous
n'avons pas cru devoir réfuter , dans cet article , une doctrine si
odieuse : les jugemens solennels et réitérés par lesquels le saint
Siège l'a condamnée , et que l'Ëglise entière a elle-même adoptés,
jugemens qui se trouvent, ou rapportés, ou cités dans ce Diction-
naire *, doivent suffire pour en inspirer de l'horreur â tout véri-
table fidèle, et pour fixer irrévocablement sa croyance à cet égard.
Si quelques-uns de nos lecteurs désirent s'instruire â fond sur
cette matière, les secours ne manquent pas: ils pourront consulter
une foule d'écrivains orthodoxes qui se sont élevés avec force
contre cette hydre, depuis sa naissance jusqu'à nos jours '. D'ail-
^BaiUy, Degrat.
' Voyez ci-dessus, et Tarticle BaIanisiib.
* Nous conseillons, entre autres bons ouvrages, le livre intitulé : De
hœresi jansenianâ^ par le P. Déchamps, auqud les Jansénistes n*ont
pas entrepris de répondre ; le Traité de la grâce, de Toumely, soit odui
que nous avons dernièrement cité, et qui est en un seul volume in-12,
soit celui qu'il dictait en Sorboone, lequel forme deux volumes in-8 ;
le Dictionnaire de théologie de M. Bergier, dont il faut lire un grand
nombre d'articles ; Touvrage de Bf. de la Chambre, cité plus haut dans
une note; Recueil historique des bulles. ••. concernant les erreurs de
»
I
ICO 2)1
leurs, quel Mtriiomme de bon sens, (]ui, pour peu <]u'ilv<!ui1lerélli- I
cfair, ne toit pas , dans ce désasireui sjsiËiiie, le renrers^nicut le
ptuscomplelde loute l'espéra dcc chréiienoe, de loute morilerai-
•oanable , de toute liberié itas rbomme , de toute justice dans
En effet, si rhonime suit nécessairement l'ailniit de la délecta-
tion qui domine ; s'il fait intin ciblent en t le bien ou le toa\, suivant
que cette délectation vient du ciel ou de la terre ; si , au moment
décisif de l'action , il ne peut point choisir entre le« deux partis
qui se présentent , où est ta liberto? Consistera-t-elle en ce qu'il
agit volonlatrement , arec inclination , sans répugnance et sansy
être Torcé par un prïocipe eitériear 7 Celte liberié de Janséuîu*
nériie-i-elle, dans le cas dont il Vagit, lenom de liberté ■ Est-ce li
l'idée que nous en donnent l'Ecriture , notre sens intime , la rai-
■Oo elle-mêoie? Eb ! s'il en est ainsi, en quoi l'bomnie est>ilen ce
point élevé au-dessus de la brute? S'il ne peut vraiment choisir
entre le bien et le mal qu'il se sent pressé de faire on de laisser ,
oli estson mérite , quand il opère l'un? son démérite, quand il se
précipite dans l'autre ? A quoi bon des préceptes, des averlisse-
mens, des menaces ? El, dans celle horrible hypothèse , le ciel est-
il unetécDmpeuief les supplices de l'enfer sont-ils juiles» Quoi!
Dieu puniraiiï jamais un malinéviiable, la transgression, ouplu-
Uil le défaut d'observation d'uu commandement impossible Ji ac-
complir , au moment même où l'on y a manqué? Quelle idée on
nous donne de Dieu! Serait-il notre père? Pourrions- no us l'aimer,
espérer en sa miséricorde , noua confier en sa bonté?
Un système si alTreux ouvre une large porte au désespoir, ik
libertinage le pluseOréné; il attaque le souverain fUre jusque daai.ï
(et attributs ; il détruit les principes de ta morale ; il tend i re»* i
f erser la religion par ;c3 fondemens ; il fait de l'homme une raa-
diine, il suffit donc de l'avoir montré en lui-même et dans les con-
*éqiicnces qui en découlent pour l'avoir réfuté: c'est un monstre
qui se décbire et se décore de ses propres deuts.
I ICONOCLASTES, i-'esi-à-dire, briseurs d'images. Léon Isaurie»
Ult le chef de cette secte, dont nous allons exposer l'origine etk
Kprogrès, et que nous réfuieroDs ensuite.
M( deu dcmlPTs siècles..,, c
unpa, etc., de, etc.
is le concile de Trente jusqu'il notre I
22 ICO
De Voriginê des Iconoclastes.
Depuis GomtaDtin-le-Grandi presque tous les empereurs avaient
pris part aux querelles qui s'étaient éleyées parmi les chrétiens, les
uns par politique, les autres gagnés par leurs officiers et par leurs
eunuques : on les avait presque toujours vus , décidés par leurs mi-
nistres ou par leurs favoris, soutenir la vérité ou protéger Terreur.
La part qu'ils avaient prise aux disputes de religion, les éloges
qu'ils recevaient du parti qu'ils favorisaient leur avaient inspiré
du goût pour ces sortes d'occupations. Les courtisans qui vou*
laient les déterminer en faveur d'un parti , leur représentaient
qu'il était beau d'interposer leur autorité dans les querelles de
religion, et traitaient les querelles des théologiens comme des af-
faires de la plus grande importance et propres h éterniser la gloire
des empereurs ; en sorte qu'il était heureux pour un empereur
d'avoir pendant son règne quelque hérésie ou quelque dispute
théologique qui fit du bruit.
Ainsi, après la condamnation d'Eutyches et lorsque tout com«
mençait à être tranquille, Justinien ayant vu à Constantinople
des moines revenus de Jérusalem , qui avalent extrait quelques
propositions des ouvrages d'Origène et qui voulaient les faire con-
damner, l'empereur saisit cette occasion pour juger des matières
ecclésiastiques , donna un édit qui condamnait Origène, Tfaéodo-
ret et Ibas , et fit assembler un concile pour approuver son édit *.
Philippicus ne fut pas plus tftt parvenu à l'empire, qu'il prit le
parti des Monothélites , laissa ravager les terres de l'empire par
les Bulgares, et fut déposé.
Anastase , qui était très-savant et que le peuple mit à la place
de Philippicus, ne prit pas moins de part aux affaires ecclésiasti-
ques, et Ait chassé par Théodose.
Léon Isaurien , qu' Anastase avait fait général des troupes de
l'empire, refusa de reconnaître Théodose , se fit proclamer empe-
reur, et fit mourir Théodose.
Léon était natif d'isaurie, d'une famille obscure, et avait servi
comme simple soldat ; il Ait couronné le S mars 716, et jura entre
les mains du patriarche Germain de maintenir et de proléger Ure^
ligion catholique.
^ C'est la dispute connue sous le nom de la dispute des trois diapltfe%
qui fui termina par le cinquième concile général.
t
ICO )S^
pRT son ^uralion , L^on éiuit incapable <ie prendre
quwiioas théologiqnes, ei'vaubiicepeDitBDt,UDmine ses prt'flécM' d
seun.qu'oii du qu'il avait proië^é l'Eglise, Tâii des rfiglen
la rdigion, el conteriélu Toi.
Il mil eu de grandet linisons avee les Juifs et a*ec les Sarra-
sins : ces deui aecles élaienl ennemies des images, et Léon leur
avait eotendu parler de l'usage dccimagescomme d'une idnlllrie ;
il ivïil pu lui-même prendre une partie de leurs tdies. plus Faeilet
i saisir pour un soldat que les subtilités théutogiques. Ilerutse
ligDiler en abulifssni les images , et la dixième année de son rè-
gne il publi» un édil par lequel il ordnnnail d'aballre lee images *.
A h publication de l'édii , le peuple de Consianlinople se ré-
volta > el le palriarcbe s'opposa ï son eii^culion ; mai* Léon Dt
iftarger le peuple , les images furent détruites et le palriarclie
Cermain fut déposé.
Léon envoya son édit !i Rome , pour le faire exécuter : (
goire II lui éiTivit avec.beautoup de fermeté, et lui assura que
{•eilples ne rendaient point aux images un culte idoittre ; il l'a'
lit que c'itaii auxévfques et non aux empereurs b iuger des do|
mes eccléiiutïques; que comme les èiiquei ne se mélenl poilitl
des aff*ires sëeutières , il faut aussi que les cnipereurt s'abstient J
Dent des affaires eci'léaiiEtiques*.
Léon , utile de la rësisiance Je Grégoire, envoya det tMissIu^
j( Rome pour la luer ; mais le peuple découvrit tes assassins el twi
|j|l mourir: toute l'Iialie se souleva alors contreLéon, dont legna* |
fernenieni duretlyrannique avait disposé lesesprits A la révolte, i
Ces troubles, pnurune pratique qu'il n'appartenait |Kiint li Léo
de coodamner quand elle ;iurait été répréhensible , ne détourné'
real |Hiinl cet empereur du projet d'abolir les images; il fut ai
' I vie ï faire exécuter son
CUpéU
nlulie.
inCopmnymc, QlsdeLéon, suivit le projetde son pAre^
1^ pour mieux établir la discipline qu'il roulait introdui
'letConïtantiuople: plus de tr '
I Les évéquee de ce concile reconnaissent les six premiers cou*
f* Ccilrenvt, Zonnre, Censlanlin Manant*.
* Greg. S, ep. 1. l-ono., 1. 7. l:uri:n,, ad ai", îï', ili
* Corr., t. '. roi c. Coati. '■ Mt. a.
U ICO
ciles» et prétendent que ceux qui autorisent le culte des images
sapent Tautorité de ces conciles : ils prétendent que les images
ne sont point de tradition venue de J^us-Ghrist, des apôtres où
des Grecs ; qu*on n'a point de prière dans TËglise pour sanctifier
les images, et que ceux qui les honorent retombent dans le paga-
nisme.
Des raisons ils passent aux autorités , et allèguent les passages
de rÉcriture dans lesquels if est dit que Dieu est un esprit , et
que ceux qui Tadorent doivent Tadorer en esprit et en vérité ;
que Dieu n*a jamais élé vu de personne, et qu'il a défendu à son
peuple de faire des idoles taillées.
Enfin on a'appuie, dans ce concile , sur le suffrage des Pères ;
mais les passages que Ton cite ne concluent rien contre Tusage
des images tel que les catholiques Tadmettent , ou sont falsifiés et
tronqués.
Après ces raisons et ces autorités » le concile de Gonstantinople
défend à tout le monde d'adorer et de mettre )dans les églises ou
dans les maisons particulières aucune image , à peine de déposi-
tion si c'est un prêtre ou un diacre , et d'excommunication si
c'est un moine ou un laïque. Le concile veut qu'ils soient traités
selon la rigueur des lois impériales , comme des adversaires des
lois de Dieu et des ennemis des dogmes de leurs ancêtres.
Le concile de Gonstantinople fui rejeté par les Romains ; mais
l'autorité de L'empereur le fit recevoir et exécuter dans une grande
partie des églises d'Orient : on baimit , on exila , on condamna à
uiurt ceux qui s'opposèrent au concile et à l'édlt de l'empereur
contre les images.
Gomme les moines étaient les plus ardens défenseurs des ima-
ges , il fit un édit portant défense à qui que ce fût d'embrasser la
vie monastique ; la plupart des maisons religieuses furent confis-
quées dans la capitale, et les moines furent obligés de se marier,
même de mener publiquement leurs fiancées par les rues ^.
Gonstantin mourut en 775, et Léon IV son fils lui succéda. Le
nouvel empereur fut d'abord occupé par les guerres des Sarra-
sins et par des conspirations; mais lorsqu'il fut paisible, il renou-
vela tous les édits de son père et de son grand-père contre les ima-
ges, et fit punir avec la dernière sévérité ceux qui contrevenaient
à ces édits. G'ctait une fureur que la haine de cet empereur contre
* Théophane, Gedren.,ad< an, Const. 49t}9t
Il plus avoir de rom-
I
ICO
ceux qui liODoraieut les images : il n
merce ivec rimijëratrice, parce qu'il avait trouvé des iiiiuges dans
»D cabinet ; il voulut savoir ceux de qui elle les avnil reçues , e(
les fit périr dans les lunrmens '.
Léon mourut peu de temps aprëf, et Constantin Porphy rogénêie
lui succéda ; mais comme il u'étaii Igé que de dix ans , sa mère
Irène pril en main les rênes de l'empire. Irène, qui avaitconservé
de la dévotion pour les images, voulut rétablir leur culte; elle
écrivit au pape Adrien pour assembler un concile kNicée; te con-
cile a'autrii l'aa 787 ; il était composé de plus de deux cent cîn-
quRDle èiéques ou archevêques.'
On y lui d'abord les lettres de l'empereur et de l'impéraliicc ,
qui dèclarenl qu'ils ont assemblé re concile du consenlenienl des
pairbrcbes ; qu'ils laissent une entière liberté aux évéques de dire
leur sentiment.
Plusieursdesévéquesqui avaient condamné le culte des images
reconnurent leur faute ei furent admis au concile. Outil voir dans
ce concile que l'usage de» images n'est point contraire bi lu reli-
gion, comme le concile de ConstantinopleTavait prétendu, et qu'il
pouvait être utile ; on le prouva par l'exemple des chérubins de
Varclie, pardea passages de saint Grégoire, de saint Basile et de
uinl Cyrille, qui supposent que les images étaient en usage dans
l'Iôi^Iise du temps de ces Pères ; que par conséquent les Pères du
concile de Coosiantinople araieui mal raisonné sur les passages de
l'Écriture qui déreodeui de faire des idoles, lorsqi "
conclu que c'était un crime de faire des images.
I>e concile n'avait pas besoin de pronveraulre chose, elles
marques de UU. Dupîn et Basnage sur l'insullisance des
mens des Pères du concile ne sont pas justes *.
e concile, après avoir prouvé que l'usage des images n'est point'
inel , prouve que la tradition les autorise de temps immémo-
i>l, et que l(s ebrétleus n'adoraient point les images comme ils
!lKloreatDieu;maisqu'iIs les embrassent, les.iiilueni et leur rende ut
dte 1 pour témoigner la vénération qu'ils uni pour les saints
qu'elles représentent.
Les Pères du concile font voir ensuite que les passages dont le
eoDcila de CunsUnliDople s'auiorise n'attaquent que le culte ido-
' Tbtepbane, ad. an. A. Leonis, Cedrcn.
» Diipin. ContnnerM* du battième rfècle. Basnage. HisI
Mint^^^
H ICO
lâtre, el non pâs \é cnlte que TÉglise chrétienne rend tox images ;
Us font encore Toir qne les évéques du concile de GonsUntinople
ont souvent lal&ifié les passages des Pères qu'ils citent.
Le concile déclara donc qu'on pouvait placer des croix et des ima-
ges dansFÉglise et dans les maisons, même dans leschemins: savoir,
les images de Jésus-Christ el de la Vierge, celles des anges et des
sainis ; qu'elles servent à renouveler leur mémoire et à foire naî-
tre le désir de les imiter ; qu'on peut les haiser et les respecter,
mais non fkas les adorer de l'adoration véritable , qui n^est due
qu'à Dieu seul; qn'oa pent lesmBbellir, parce qne Thonnear qu'on
leur rend passe à l'objet , el que ceux qui les respectent, respec-
tent ce qu'elles représentent *,
Le eoneile de Nicée ne fut pas également bien reçu partout :
nous examinerons séparément comment il fut reçu en Occident.
Constantin, qui ne pardonnait pas à sa mère le mariage qu'elle
lui avait bit faire avec une fille sans naissance , la dépouilla de
toute l'autorité , et défendit d'obéir au concile de Nicée.
Nicéphore, qni succéda à Constantin et à Irène , était engagé
dans les erreurs du Manichéisme , il était d'ailleurs occupé à se dé-
fendre contre les ennemis qui attaquaient l'empire ; il négligea la
dispute des images.
L'empereur Léon V, qui monta sur le tr6ne après Nicéphore et
après Michel, n'eut pas plus tôt ini la guerre avec les Bulgares et
avec les Snrrasins, qu'il s'appliqua à abolir les images , et publia
un édit pour les faire 6ter des églises et pour défendre de leur
rendre un culte.
Mîckel-le-Bègne» qui le détrôna, était natif d'Armorium , ville
de Phrjgie habitée principalement par des Juifs et par des chré-
tiens chassés de leur pays pour cause d'hérésie ; il avait pris beau-
eovp de leurs opinions ; il observait le sabbat des Juifs , il niait
la résurrection des morts et admettait plusieurs autres erreurs
eendamnées par l'Église : il voulut faire examiner de nouveau la
question des images, mais les troubles qui s'élevèrent dans Tem-
pire l'empêchèrent d'exécuter son dessein*.
Théophile , son fils , persécuta les défenseurs du cuhe des ima-
ges; mais l'impératrice Théodora, qui gouverna l'empire après la
mort de cet empereur , rappela tous les défenseurs du culte des
* Conc, t 7.
> CedrcB. In Miehaa
I
I
images, ei banuii les Iconoclasm; ella ohaiiM de aon »i<rge Jein,
jMiriarctiedi'Coasuiniipuple> et oiii ï m place H^iboftius, moine
tr£»-zélé pour le culle des images : le second concile de Nicée ,
i]ui avaîi approuvé leculM des iiu«gre, eul force de loi dansuiute
retendue de l'empire. Le parli d<-s tcanocliisles TuL enliËrenieul
dÉlruilsoutriii]pénLriueTbéodora,Bprèia*oirBubsUlé130iD<^ <.
L'iiupûrau-ice , après avoir aD^nii ce parti , aluqui le« Uani-
chéens, ijui s'éiaieui eitrômemenl routtipliés. On trouvera, i l'ar-
tii'le tlAKiciiSï,» , quels noyeai Tli^odora employa cooiro les
Manîchéeiis, et quels eiTets ces mojeni produigireot.
Ce ce que l'on pentait ilunt l'Occident tiir U culte iet im*tet ,
ftndatit lc$ trouble* de l'OcitHl.
L'usage des images s'éiaît établi en Occident aussi bien qu'w
Orient , miia on ne leur rendait point de culte.
Le P. Uabillou conjecture que la différence des Orientaux et
des Krnçaais ii cet égard veouit de la dilT^'rente manière dont on
bonorait lea empereurs et les souverains eu Orient et eu Occi-
dent I.
En Orient, et communément dansVempire romain, on cAlébniL
des îties en l'honneur des empereurs qui avaient bien mérité du
peuple: le souvenir des venus el des bienruits des empereurs
anima les peuples; la reconnaissance orna les statues, leur
adressa des remerclmens et des éloges, les entoura d'illomina-
lions : tels étaient les Iionneurs que l'on rendait tous li!s ans t la
statue de Cunstaniin-le-Crand, et que Julien reprocbail aux chré-
tiens comme de» actes d'idol&trie ^.
Lors donc que l'usage des images Fut établi dans l'Église d'O-
rient , il était naturel que les fidèles passassent de la contempla-
tion des images à des sentimens de respect pour les objets qu'el'
les représentaient, et i des démonstrations eitérieurei de ces
sentimens.
Dans l'Occident , où les arts étaient encore dans l'enfance , oit
les princes étaient des conquérans barbares et preique égaut ï
leur* soldats, on ne rendait point les mêmes honneurs aux cbels;
ili n'avaient point de statues de leurs princes ou commandans ;
■ Cedren., Zonar., Gljcas,
' UahUlon, PixU lu & sicc. Bcuh!.
' Tbdodorel, Bisl., 1. 3, c. SA. PbilaHorE., U I, c i6>
28 ICO
on ne leur rendait point les mêmes honneurs qu*en Orient : ces
hommages étaient absolument inconnus dans les Gaules , et les
images n'y étaient destinées qu'à apprendre au peuple les points
les plus importans de la religion ; on n*y rendait de culte qu'à la
croix*.
Les évéques des Gaules trouvèrent fort mauvais que les Pères
du concile de Micée autorisassent un semblable culte pour les
images.
Ils étaient surtout offensés du mot d^adoration que les Pères
du concile de Nicée avaient employé pour désigner le culte qu'on
rendait aux images : ce mot , employé dans TOrienl pour signifier
un sentiment de soumission et de respect , n'était en usage dans
les Gaules que pour exprimer l'hommage rendu à l'Être suprême.
On ne crut donc pas que le mot adoration fût susceptible d'un
bon sens lorsqu'il s'agissait des images , et le concile de Franc-
fort ne condamna le concile de Nicée que parce qu'on croyait en
Occident que les Pères du concile de Nicée entendaient» par
adorer le» images, leur rendre un culte tel qu'on le rend à Dieu ,
comme on le voit par le second canon de ce concile, conçu en ces
termes : « On a proposé la question du nouveau concile des Grecs,
» tenu à Constantinople, pour l'adoration des images, dans lequel
» il était écrit que quiconque ne voudrait pas rendre aux images
» des saints le service ou l'adoration , comme à la divine Trinité,
» serait jugé anathème. Nos très-saints Pères du concile ,ne vou-
» lant en aucune manière de l'adoration ou servitude , ont con-
» damné ce concile d'un commun consentement*.*»
On ne trouve point dans les actes du concile de Nicée qu'il ait
ordonné d'adorer les images des saints comme la Trinité; ces pa-
roles paraissent donc avoir été ajoutées , en forme d'explication ,
par le concile de Francfort , pour faire voir qu'il ne condamnait
^ Ainsi* longue le pape Adrien envoya les décrets du second concile
de Nicée en France, les évêques furent choqués des honneurs qu'on
rendait en Orient aux statues des empereurs; ils trouvaient mauvais
que Constantin et Irène, dans leur lettre pour la convocation du concile
de Nicée, eussent pris des titres aussi fastueux que ceux qu'ils se don-
naient; ils reprirent cette eipression de la lettre de Constantin et d'I-
rène, par celui qui régne avec nous, ils trouvèrent que c'était une té-
mérité insapportable à des princes que de comparer leur règne à celui
de Dieu. Lib. Carolini, préface. Dupin, Bibliot, t. 7, p. &72,
S Sirmond, Goncil. Galliap, t. 2,
I
TCO A«
B images , tpprouvé par le concile de Nic^e , ipi'auuint
que les Pères de ce concile eoleiidaienl pur le uo( adcralioii un
culie de lairie, tel qu'on le retid i Dieu.
Le concile de Francrorl ne regardait donc pas comme une ido-
Utrie de rendre aux images un culle difl'i^renl du culte de l.itrïe :
OD ne voit point que les évéques des Gaules aient regardé cutnme
des idolAlres les évêques d'Italie et d'Orieut qui I
En eiïel, lorsque la question des imaites fut apporta dans les
Gaules, on se divisa : les uns prétendirent qu'il ne fallait leur
rendre aucune espèce de culte, cl les autres étaient d'avis qu'un
leur en rendit un'.
Les Pères du concile de Francfort avaient d'ailleurs des raisons
piriicdières de s'opposer au culte des images , qui leur paraissait
Douieau : les Allemands, dont les evéques assistèrent en grand
nombre k ce concile , étaient nouvellement convertis à la foi par
le ministère de saint iloniface , archevêque de Majence , sous Pé-
pin, père de Charlemape. Les évèques allemands CTaigna'Kmt que
ces nèophjtes ne retombassent dans l'iilolfitrie b la vue des images
auxquelles on tendrait un culte; c'e^l pour cela qu'ils se conten-
Itrent do les exhorter ï ne point profaner les images , sans beau-
coup les exborler i les bonorcr.
Il est donc certain que la conduite des Pères du concile de
Francfort n'a rien de contraire â l'esprit du concile de Nicée , et
qu'ils ne condamnaient point comme un acte d'idolâtrie le culte
que l'Église rend aux images.
Le concile de Francfort fut tenu ran79-t.
Dans le commencement du neuvième siècle , en SU , on tint en
France, i Paris, une assemblée d'évéques, les plus liabiles du
royaume, qui décidèrent qu'il ne fallait pas défendre l'usage des
images , mais qu'il ne fallait pas les honorer.
G-tte décision du concile de Paris n'est pas une condamnation
absolue du culle des images, comme il est aisé de le voir parles
actes du concile : les Pères comballcnl le jugement du concile de
Nic4«, qoi ordonne le culte des images, et ne prononcent nulle paît
que ce culle suit une idolâtrie , comme on le voit par les lettres
dont les députés furent chargés pour le pape.
Le concile de Paris n'élait donc point favorable aux Iconoclastes;
■ Mtbillon, Prxr. in A «c Bcnedict.
30 ICO
il les condamna mêmef et ne refusa d'admeltre le culte des imagef
que comme on rejette un point de discipline , puisqu*ils ne se se*
parèrent point de la communion des églises qui rendaient un
culte aux images.
Les évéques de France et d'Allemagne restèrent encore quelque
temps dans cet usage ; mais enfin le culte des images étant bien
entendu partout , et Tidolàtrie n*étant plus à craindre , il s'établit
généralement et dans assez peu de temps ; car nous voyons , au
commencement du neuvième siècle, Claude, évêque de Turin,
condamné par les évéques pour avoir brisé les images et écrit
contre leur culte , qui s'établit généralement dans les Gaules avant
le dixième siècle. Voyez rarticle Claude de Tuein.
Les Vaudois, qui voulurent réformer l'Église au commencement
du douzième siècle , les Albigeois et cette foule de fanatiques
qui inondèrent la France , renouvelèrent les erreurs des Icono-
clastes , et après eux Wiclef , Calvin et les autres réformés ont
attaqué le culte des images et accusé l'Église romaine d'idoUtrie;
tous leurs écrits polémiques sont pleins de ce reproche , et les
hommes les plus distingués de la communion prétendue réformée
se sont efforcés de le prouver ^.
Pour mettre le lecteur en état de juger si cette accusation est
fondée , il ne faut que comparer ce que nous avons dit de i'ori*
gine et de la nature de l'idolâtrie avec la nature et l'origine du
culte que l'Église romaine rend aux images.
Par ce que nous savons sur l'origine et les pratiques de l'i-
dolâtrie, tout était sur la terre l'objet de l'adoration, excepté
i DaUsus, L àf De hnaginibua. Spanheim, EiercUationes kistoricae,
de origine et progressu controv. loonomachia saecnlo 8"», oppostia
Maimburgio et Natal. Alexandre ; 1685, in-4% Forbesios, Instit., U 9,
1. 7. Basa., Hist. eccles., t 2, L 22, 23. Préservatif contre la réunion
avec TÉglise romaine, par Len&nt, t, i, p. 3, lettre i. De Tidoiatriede
l^Église romaine, fn-i2. Rival, Dissert, historiques, dissert. 4*
Ce sujet, qui a (hit pour les Protestans un motif de schisme, M. de
Beansobre prétendait qu'il ftiUait le traiter en badinant, le ridicule
étant, selon lai, plus propre à décider cette question qnc le sérient.
G*est deot principe quMl est parti pour nous donner ces longues et en-
nuyeuses plaisanteries sur les fiusies imafes de Jésus^Christ et sur la
Vierge, rdne de Pologne : Tcnnui qu'elles causeront à quiconque en-
treprendra de les lire dispense d'y répondre. Voyez la Dibliot. germa-
nique, 1. 18.
ICO
UM. Lee bomniM, prositrn^ loi piedt An idoles,
tt'BIleiidateDi leur bonheur que des puisasocet rliiniériques qu'ils
j crujiient allacliées el qu'ils regnrdnient comuiu les trairs
causes du bien et du niiil : l'Être suprCme , la source de \ou» les
biens. De s'offrait pas ï leur esprit.
V*)U le crime de l'idolâtrie , elle anëantiuiit la Providence,
elle empêchait rbomnie de s'élever ù Dieu : les hoDiines , inrecUi '
de l'idolâtrie , ce rapportaient pas à Dieu , comme il leur vraie
cause , les biens dont il les comblait, et les malheurs destinés k
rappeler l'homme k Dieu le cunduisaieul aux pieds des idoles ; ils
ne rcganltieot pas Dieu comme leur deruiëre fin , ils la lu
dans les plaisirs des sens.
L'idolâtrie eropéchaic donc riiorome de rendre ï Dieu le cnlla f
qu'il lui doit et qu'il exige ; elle curroiupait d'ailleurs la moralt, i
parce qu'elle attribuait tous les Tices et tous les crimes ii 0
Aires surnaturels qu'elle propusiii k l'hommage et au respect dM 1
bomraes. Voyons l'urigioe et la nature du eulle des images daa j
l'Eglise calholiiiue.
Oe l'origin» el de ta »
ie quf. l'Égliie
K.lOUtr
Au milieu de la curruplioi
clioisil un peuple qui lui rendit ud culte li^itinie. Tandis quelos
■talions i^laieut ensevelies dans les ténèbres de l'idoUlrie, les
Juifs coaaaiuaieni que l'unirers avait pour cause une inlelligcnoe ,
I loute-puïsssnte et souveraîuenieot sage ; ils n'adoraient que ci
l'tBInlIiiip.nei
Iligencc , et le culte des idoles était cbei eui le plus grand d<
La religion cbrélicnne i^leva davanUge l'esprit bui
enseigna une morale sublime ; elle cbangea toutes les idées e
Unile* les Tiies des bummes; elle leur apprît avec infiniment pli» i
de clarti^ et d'étendue qu'une intelligence infiniment sage fl 1
Unt^puissanle avait créé le monde , et qu'elle destinait l'homnifl 4
fc un bonheur Siernel ; elle apprit que tout arrivait par la volonté i
<ia celte intelligence , qu'un cheveu ne tombait pas de 1b lèie sao»
son ordre , et qu'elle avait dirigé A une Gn tous les êvénemena;
elle démontra l'inutilité , l'eilravagance et l'impiété de l'idotl
tfie ; elle apprit à toute la terre qu'il fallait adorer Dieu en espi
et en véiîté; c'en pourquoi les païen» traitaient les p
82 ICO
chrétiens comme des hommes sans religion et comme des athées.
Cependant il est certain que, dès le temps des apôtres, les
chrétiens avaient un culte visible et des lieux où Us s'assem-
blaient pour prier et pour offrir Teucharistie ^.
Les Pères des trois premiers siècles nous parlent des lieux où
les chrétiens s'assemblaient , de leurs évéques , de leurs diacres,
de leurs églises *.
Ainsi , lorsque Origène , Lactance , M inutius Félix , Âmobe ,
ont dit que les chrétiens n'avaient point d'autels , ils ont voulu
dire qu'ils n'avaient point d'autels ornés d'idoles comme ceux des
Païens , ni d'autels sur lesquels ils offrissent des sacrifices san-
glans , comme les Gentils et à la manière des Juifs.
L'ancienne Église n'avait ni images, ni reliques sur les autels,
dans l'institution du christianisme; au moins nous n'en avons
point de preuves authentiques , et le silence des Païens et des
Juifs, lorsque les chrétiens leur reprochent l'absurdité des idoles,
autorise à croire qu'en effet les premiers chrétiens n'avaient point
d'images.
Elles ne sont point en effet essentielles \ la religion , et, dans
un temps où tout était encore plein d'idoles , les premiers pas-
teurs ne voulaient pas exposer la foi des nouveaux convertis en
leur mettant sous les yeux des images et en leur rendant un culte;
peut-être craignaient-ils que les défenseurs du paganisme ne pu-
bliassent que le christianisme n'était qu'une idolâtrie différente ,
et qu'ils ne le persuadassent au peuple ignorant et qu'il était
aisé de tromper dans un temps où la religion chrétienne n'était
pas encore assez connue pour que les calomnies des Païens à cet
égard ne fussent pas reçues favorablement, si les chrétiens
avaient eu des images dans les lieux où ils s'assemblaient pour
prier et pour offrir l'eucharistie.
C'était donc une conduite pleine de sagesse que de ne pas ad-
mettre les images dans les temples des chrétiens pendant les
premiers siècles.
* Act, c. 3, V. &2, A8 ; c 30, v. 7.
> Jgnat., Ep. ad Magnes., ad Philadclph. Cicm. Alex. Tert., De idol,
c. 7; advcrsùs Valent, c. 2. De coron. miHt., r. 3. Cypr., De oper. et
eleemosyn., p. 308. Ep. 5A ad Gomel. Amob.i U A, p. 153. Vo^tt les
preuves de tout ceci plus détaillées dans Bingham, Antiqailates eccle-
liasticai, I. 8 ; dans lîUemont, Hisl. des empereurs, t 5, art. 6.
ICO 83
L» religion chr^llenne Gt de grands progrès ; ses dogmes fu-
renl annoncés « connus ; les Pères et les pasteurs apprirent aux
chn'tiens et à loule lu (erre que tout était soumis aux décrets de
l'Etre iupréme; que les hommes ne sont rien par eux-mêmes,
iiu'ils n'ont rien qu'ils n'aient reçu et dont ils puissent se gIo>
On ne craignit plus alors que les chrétiens tombassent dans
l'idolitrie , qu'ils pussent croire que les génies gouTemaieut le
monde «t qu'on put penser que ces génies étaient attachés à la
toile snr laquelle on avait tracé des figures.
Alors on admit dans les églises des images destinées à repré-
senter les combats des martyrs et les liistoires sacrées , pour in-
struire les simples; ces images étaient couinie les livres où tons
les chrétiens pouvaient lire l'histoire du christianisme , et lea
images n'eurent point d'abord d'autre usage dans les églises.
Les fidèles, touchés des objets que les images représentaient,
témoignèrent, par des signes extérieurs , l'estime qu'ils avaient
pour ceux qui étaient représentés dans les images.
Ces marques de respect né Turent pas généralement approuvées;
il j eut des étéques qui regardèrent alors les images comme des
germes de auper&iition -, d'autres les estimèrent utiles pour l'in-
struction des fidèles , et il j en avait qui regardaient les hom-
mages rendus aux images comme des elTels d'une piété louable,
pourvu qu'ils fe rapportassent aux originaux et aas satnli.
L'usage des images ne Tut donc p.is établi d'abord dans toutes
les i^lises ; il fut permis on défendu , selon qne les évéqnes , pour
ns particulières, le crurent utile ou dangereux par rap-
dispositions de ceux qui lionoraient les images.
On voit , par le neuvième hjmne de Prudence et par les seiv
de saint Grégoire de N^sse , par saint Ekisile et par tous les
Pères cités dans le second concile deNicée, que les images étaient
tn usage dans l'Orient dès le quatrième siècle ' .
Il est donc certain que l'usage des images et leur culte était
nsex général dans l'Ëglise au quatrième siècle, et qu'il u'ëlait
point regardé comme une idotlirîe; que ceux qui le défendaient
M eundamnaient point ceux qui l'autorisaient.
Ce culte d'ailleurs n'était pnint contraire k la loi qui déreod
d'adorer autre cliOM que Dien ; car il n'eut pas contraire i U
iBinghami jlnliquil, eccles., U 8
84 ICO
raison ou k la piété d*honorer la représentatioa d*un homme ver-
tueux et respectable , et Ton ne craignait pas que les chrétieus
auxquels on permettait d'honorer les images leur rendissent un
culte idol&tre ; on leur apprenait que ces saints n'étaient rien par
eux-mêmes , qu'ils n'avaient été vertueux que par la grâce de
Dieu , que c'était à Dieu que se terminait l'honneur qu'on leur
rendait.
L'Église n'enseignait pas que les esprits bienheureux fussent
attachés aux images, comme les Païens le croyaient des génies ;
elle apprenait que les saints représentés dans les images devaient
à Dieu leurs vertus et leurs mérites ; que Dieu était la cause et
le principe des vertus que nous honorons dans les saints.
Le culte que les fidèles instruits rendaient aux images n'était
donc point un culte idolâtre , et les églises qui défendaient le
culte des images n'ont point reproché à celles qui les honoraient
d'être tombées dans l'idolâtrie.
La permission du culte des images dépendait du degré de lu-
mière que les pasteurs voyaient dans les fidèles et de la connais-
sance que ces pasteurs avaient de leurs dispositions particulières.
Ainsi Sérénus, évêque de Marseille, brisa les images de som
église parce qu'il avait remarqué que le peuple les adorait, et le
pape saint Grégoire loue son zèle , mais il blâme son action parce
qu'elle avait scandalisé le peuple et qu'elle ôtait aux simples un
moyen d'instruction très-utile et très-ancien : c'était ainsi que
parlait saint Grégoire à la fin du sixième siècle.
Lors donc que les peuples furent bien instruits sur la nature du
culte que l'Église autorisait par rapport aux images , ce culte se
répandit et s'établit dans presque toute l'Église , depuis le second
concile de Nicée.
Le culte que l'Église catholique rend aux images n'est donc
pas un culte idolâtre. La décision du concile de Trente et le soin
qu'il prit pour corriger les abus qui auraient pu se glisser dans ce
culte , le prouvent évidemment : pour s'en convaincre, il suffit de
jeter les yeux sur l'histoire même du concile de Trente, par Fra
Paolo , et sur les notes du P. le Gourayer ^
Ge culte une fois établi, c'est une grande témérité à un parti-
culier, ou môme â quelques églises particulières , de ne voidoir
pas suivre cet usage et de condamner ceux qui honorent les
*■ Édition de Londres, t 2, p. 683, 647, note 8,
K
ICO
35 I
tmigH. Les prihendas r^romlés n'fiaîenl donc point autorisés h
»e i^Ttt âe l'Ëglise romaine parce <|u'e1I<.' approuvait le cului
d'-s imagi's . puisqu'elle n'approuvait point un culte idolâtre : t'esl
pour cela que les théologiens de Sanmur ue rejettent le culte des
images admis par les catholiques que parce que Dieu défend de
Ktïre aucune image taillée , et qu'ils prétendent que ce préleito
■ lien pour les chrétiens comme pour les JolPs.
Mais il est clair que ces théologiens donnent trop d'étendue ï
la défense que Dieu Gt aux Jnirs : il est clair que la ilëfense faite
aui Juifs ne défend que le culte idoUtre et non point absolumeui
le culte des images : tes chérubins placés sur l'arche , le serpent
d'airain , prouvent que tout usage des images n'est pas interdit
par relie lui. Pour faire à l'Ëglise culhotique un crime du culte
qu'elle rend aux images , il faut faire Toir qu'il est contraire i la
religion , ï la piété ou i la foî, c'est ce qu'on no peut pron»er :
c'est piinr cela que rt^'^-tise anglicane , les Luthériens et des Cal-
TÏnistes célèbres ue condamnent l'usage des images que comme
dangereux poor les simples'.
Hais, dit M. Kîval , lorsqu'une chose n'est pas nécessaire, ni
de nécessité de principe ditio , ni de uécessîté de nature , et
qu'elle est d'ailleurs sojetle il des ubus dangerem, comme l'usage
et le cahc des images , le bon sens ne leut-U pas qu'on la sup-
Je répond.E, 1* que ce n'est point h un parlioiller ï entre-
prendre de faire c«lle suppression , quand elle serait raisonnable ;
que c'est àl'Kglise, ou qu'il liui abolir dans l'Église toute notion
de hiérarchie et de subordination ; que par conséquent les Vaudois
« les Calvinistes sont inexcusables de s'être séparés de TÉglise i
ODse du culte des images.
Je réponds , 2* que l'abus du culte des images est facile i pré-
venir, et qu'il n'est pas difficile de faire connatire aux simples
fidèles quelle est ta nature du culte que l'Ëglise autorise par rap-
port lux images.
^(_)e réponds , 3" que la suppreision du culte des images ne ra-
^^Bhsnll pu les Prolestins A l'Église, comme HHival l'insinue:
^^ *BUtoire du vicui cl du nouveau Testament, par M. Basnagc; Ams-
leMam, In-foL Dîsserlii lions hisloriiiucs, par Pierre Bival. disserl, i,
p. m.
iRhs), UiiJ..p. 2T.7.
36 JOA
les ministres savent bien que les abus dans lesquels on tombe f
par rapport aux images, sont faciles à prévenir, et ce n'est pas ce
qui empêche la réunion.
En effet, les Protestans sont si bien instruits sur les abus du
culte des images , qu*il n'y a point à craindre que jamais ils y
tombent , et d'ailleurs TËglise condamne aussi bien qu'eux ces
abus : le culte des images ne doit donc pas faire un obstacle à leur
réunion à l'Église romaine.
On peut Toir, sur le culte des images , Pere^ûu , De traditioni'
Inu , part. 3 ; Lindanus PanopU, 1. 3 , c. 23 ; Alanuê Copw contra
Magdehurgenie* , dial. 4 et 5 ; Bellarm. Naial, Alex, in tœc. 8 ,
dissert. 6; HUL de$ conc. généraux.
JÉRÔME DE PRAGUE , disciple de Jean Hus.
IMPECCABLES, branche d'Anabaptistes. Yoyex^ à l'article Ana-
baptistes , leurs différentes sectes.
INDIFFÉRENS , branche d'Anabaptistes. Voyez leur article.
JOACHIM , abbé de Flore, en Calabre , avait acquis une grande
célébrité sur la fin du douzième siècle , sous Urbain III et sous
ses successeurs.
Le livre des sentences de Pierre Lombard avait une grande ré-
putation ; mais quoiqu'il ait servi de modèle à tous les théolo-
giens qui l'ont suivi , il n'était cependant pas approuvé générale-
ment : l'abbé Joachim écrivit contre le livre des sentences ; il
attaqua entre autres la proposition dans laquelle Pierre Lombard
dit qu'il y a une chou immense, infinie ^ souverainement parfaite,
qui est le Père , le Fils et le Saint-Esprit.
L'abbé Joachim prétendait que cette chose souveraine dans la-
quelle Pierre Lombard réunissait les trois personnes de la Trinité
était un être souverain et distingué des trois personnes , selon
Pierre Lombard , et qu'ainsi il faudrait^ selon les principes de ce
théologien , admettre quatre dieux.
Pour éviter cette erreur, l'abbé Joachim reconnaissait que le
Père , le Fils et le Saint-Esprit faisaient un seul être , non parce
qu'ils existaient dans une substance commune, mais parce qu'ils
('•taient tellement unis de consentement et de volonté, qu'ils l'é-
taient aussi étroitement que s'ils n'eussent été qu'un seul être :
c'est ainsi qu'on dit que plusieurs hommes font un seul peuple.
L'abbé Joachim prouvait son sentiment par les passages dans
lesquels Jésus-Christ dit qu'il veut que ses disciples ne fassent
qu'un , comme son Père et lui ne font qu'un ; par le passage de
I
I
I
JOA H
uînl Jetn , qui réduit l'unilé de personoe à l'unité de témol-
goige.
L'abbé Joachiru était donc TritbÈisIe, et ne reconnaisEait que
de bouche que le Père, le Fils et le Satot-Esprit ne Taisaient
qu'une essence et une subsiauce.
L'erreur d« l'abbé Joachim Tut condamnée dans le concile de
Latrao-, maia on ti'y fit pas mention de sa personne, parce qu'il
avait soumis ses ouvrages au saint Siège <.
L'erreur de l'abbé Joacbim n'eut point de défenseurs , mais elle
a été renouvelée par le docteur Sherloli.
Il s'était élevé depuis quelque temps des disputes en Angle-
terre sur la Trinité , ei le SocinianiEuie ; avait Tait du progrès.
Hais Sherlok prit la défense de la foi contre les Sociniens , et tS-
cba de faire voir qu'il n'y a point de contradiction dans le mjaLère
de la Trinité ; et comme toutes les difficultés des Sociniens sont
appujées sur ce que ce mystère suppose que plusieurs personnes
iiubsisteol dans une essence numériquement une , M. Slierluk re-
cherche ce qui fait l'essence et l'unité numérique de ta subetiii
Comme il distingue deux sortes de subsunces , il reconnaît deii;|
tories d'unités. _
\st subitance matérielle est une par l'union ou par la juxtapirf'l
sitiun de ses parties ; mais la substance spirituelle n'ajant polnl
de parties, eJlea un autre principe d'unité.
{.'uDÎié dans les esprits créés, c'est-ï-dire l'uniié numérique,
qui fait qu'un esprit est distingué de lousies autres esprits, n'est,
selon lui , que la perception , la connaissance que chaque esprit a
de lui-même, de ses pensées , de ses raisonnemens et de ses ai-
TeciioDS (on la conscience).
l'n esprit qui a seul conuaisi^ance de tout ce qui se passe en
lui-même est dès lors distingué de tous les autres esprits , et les
autres esprits , qui semblablement connaissent seuls les pensées ,
tODt distingués de ce premier esprit.
Supposons maintenant, dit U. Sherlok, que trois esprits créés
loieut tejlemeni unis que chacun des trois esprits connaisse aussi
• S. Th., Opnscul. 11 Malbieu Paris, ad an. 1179. Nntsl. Alex, in
sec 13. D'Ar^cntré, Collecl. Jud, , I. 1 , p. 119. Il est hors di
vraisemblance de prétendre, avec l'apolagHte de l'abbé Joachin
«Ile doctrine lui a éli taussfmenl imputée i rapologisle n'en donne
j
I
3S JOA
clairement les altcctîons des deux autres que les siennes propres ;
il esl sOr, dit U. Slierlok , que ces trois personnes seront une
chose uuinériquemeal une , parce qu'elles ont entre elles le mËme
principe d'unité qui se Irouve dans cbacune prise séparément et
C'est ainsi, selon ce théologien, qu'on doit expliquer b Iri-
DÎté; car Dieu (ou l'Elsprii infini, et non pas un corps iniini-
ment étendu] n'a pas une unité de parties, parce qu'il esi sans
Ainsi , les trois personnes de la Triiiilé se connaissent récipro-
quement toutes trois autant que chacune se connaît ; les trois per-
sonnes ne font qu'une seule chose numériquement, ou plutôt
l'unité numérique ; c'est ainsi que les facultés de notre âme fur-
Dient tine substance numériquement une.
C'est par ce moyeo que l'unité , qui dans les esprits créés n'est
que morale, devient essentielle dans les trois personnes , qui sont
aussi étroitement unies entre elles que l'homme est uni à lui-
même , el non pas comme un homme esl uni i un autre homme.
H. Sberlolc conËrme ia conjecture |>ar les paroles de Jésus-
Clirisl dans saint Jean : Je mis daai mon Père , et mon Pire eit en
mot; car, dit-il, il Taut prendre les paroles de Jtl-s us-Christ dans
leur sens propre et naturel ou dans un sens métaphorique : or, on
ne peut les prendre dans un sens métaphorique, car la métaphore
suppose esseDliellement la similitude qui se trouve entre des
choses naturelles réellement existantes ou possibles, el l'on ne
peut dire qu'une expression est une méthapliort s'il n'y a ni re peut
j avoir danslanaiurerien de semblableïcedonil'eipressioo donne
l'idée.
Or, il n'j a rien dans la nature qui soit dans un autre, de
manière que cet aulre-lii soit ea lui ; car si un être était dans un
»aUe, il serait coulonu par cet autre , el par conséquent serait
plus petit , et il serait plus grand s'il contenait l'autre ; ce qui esl
contradictoire.
11 faut donc prendre lea puroles de Jésus-Christ dans un sens
propre : or, il n'j a qu'une seule espèce d'union mutuellement
comprëbensive ; savoir, la connaissance que vhaquc être a de
l'autre. Si te Fils , dit H. Sherluli , a connaissance de tout ce qui
esl dans le Père, de sa volonté, de son amour, etc., comme il l'a
de sa propre volonlé , de son amour, alors il cuniieut le Père ; le
Père est tout entier en lui , parue qu'il connaît qu'il a ce qui est
M
t
JOA S9
dins là Ptre. Il ea fatii dire autant de chaque jversoiiDe de la Tri-
njlé i l'égard des autres'.
On regarda reiie hypothèse comDie un vrai trilliéisme , et elle
fdl attaquée par Ira théologiens anglais.
n est aisé de voir, I " que cette h jpoih&se est un vrai trilbêisme
et qu'elle suppose en effet trois substances oêcessaires, éteN
nelles , incréées , ce qui est absurde.
2* Il est faui que la connaissance parfaite qu'une «ubstam»
spirituelle a d'une autre ue fasse de ces deoi substances qu'une
■eule substance numérique ; car al«rs Dieu ne serait point en ef-
fet distingué des Suies humaines, ce qui est absurde.
3° M. Sberiok suppose que deux substances spirituelles peu-
ut aïoir la uiâme conscience ; mais c'est une ion tra diction fur-
Éielle que de supposer la même conscience numérique dans pl»f
^urs sobsunces, et si le fera, le Fils et le Saint-Esprit n'ont
numérique, ce sont (rois personnes dans one
'ÎKole et même substance.
i* L'unité de substance est telle, dans ladivioiié, qu'elle s'allie
;-4ependaot avec la distinction des personnes i ur, dans riijpoihèse
de U. Sheclok , il n'j aurait en elTet aucune distinction entre les
personnes divines ; il telombe dans le Sabellianisme , et n'admet
^'une distÎDciioa de nom ; toute autre distinction détruirait
cette uuiV numérique qai eal son objet.
JOACIIIMITES. C'est le nom que l'ou
rent la doctrine de l'abbé Joacbîni, non !
la morale.
L'abbé ioachim visait ï une perfeci
tait détrliatoé contre la corruption du siècle ; il était eicessivft- 1
menl prévenu pour la vie érémitique et pour ce qu'on appelle la |
Tîe intérieure et retirée ; il ne voulait pas que l'on «e buruât k It I
pratique des préceptes de l'Ëvangile.
Quelques personnes prirent de lï occasion de dire que la loi df j
l'Évangile était imparfaite, et qu'elle devait être suivie par une
lai plus parfaite ; que cette loi était la lui de l'esprit , qui devait '
être élemetlo.
Cette loi de l'esprit n'était que la collectloi
cette fausse spiritualité dont les Joachlmites faisaient profcâsloïki
' Justification de ladoctrioe do la Trinité.
i
r la Trinité, mais bw I
n extraordinaire ;
L.
40 JOV
et qu'ils renrermaîent dans un livre auquel Us donnèrenl le nom
(l'Évangile éternel.
Les joschiiniles stipposaienl dans la religion trois époqufs: h
première commençiil au temps de l'ancien "reslainent ; la seconde
au nouTeau Testament ; maïs le nouveau Tesiameni n'étuii pas
une loi parfaite, il devait finir et Taire place à une loi pins par-
faite i qui sera éternelle : cette loi est La morale de l'abbé Joa-
chim , que l'on donne dans l'f;vangile éternel. Or, on y enseigne
que . pour prêcher l'Ërangile éternel , îl faut être déchaussé ; que
ni lésus-Christ , ni Ips apttlres , ti'ont atteint la perrecliou de la
vie conlempIaliTe ; que depuis Jésus-Chrisl jusqu'i l'abbé loa-
chim la vie active avait été utile ; mais que , depuis que cet abbé
avait paru sur la terre , la vie active était devenue inutile , et que
b vie contemplative dont cet abbé avait donué l'eiemplc serait
bien plus utile.
Tels sont les principes de l'Évangile éternel: il était rempli
d'extravagances, Toodées ordinairement sur quelque interpréta-
tion mystiquede quelque passage de l'Écriture sainle *.
L'Ëvangile éternel a été attribué ï Jean de Borne, seplième gé-
néral des Frères Mineurs ; d'autres l'attribuent i Amauri ou h
quelqu'un de ses disrîplcs; quoi qu'il en soit, il est certain que
plusieurs religîeui approuvèrent cet ouvrage , el quelques-uns
d'entre eux voulurent enseigner celte doctrine dans l'Université
de Paris, l'anlïSi".
L' Évangile éternel a été condamné par Alexandre IV, et parle
concile d'Arles, en 1260 3.
JOVINIEN avait passé «es premières annéen dans les austérités
de la vie monastique, vivant de pain el d'eau, marchant nu-pieds,
portant un babit noir, et travaillant de ses mains pour vivre.
11 sortit de son monastiïre qui était i Uilan, et se rendît k
Rome : faiîgué des combats qu'il avait livrés i ses passions , ou
séduit par les délices de Rome, il ne tarda pas à se livrer aux
plaisirs.
Pour justifier aux jeux du public , et peut-être i ses propres
jeux , ton changement, Jovinien soutenait que la banne chère el
1 Natal. Alei. In SBf. 13 , e. R, art. A. D'Argentr^, ColIccL Jud.,
I. 1, p. ISS.
LEO
l'ibâiinenee nViaient en eltes-mâmes ni bonnes ni mauvais^!, et 1
qu'on pouvait oser îndilTéreDinienl de louies les viandes, pourva
qu'on en u^l aiec action de grilcra.
Comme Jovirien ne se bornait point au plaisir de U bonne
chère , il préleudil que la virginité n'éuiipas un étal plus par-
fail qne le mariage ; qu'il étaîl faux que la mtre de Notre-Seî-
gneur fût demeurée vierge après renfantenient , ou qu'il fallait,
comme les Manichéens , donner !t Jésus-Christ on corps faniastî-
(|ue; qu'an resle, ceux qui avaient été régénérés par le baptême
uc pnuvaieni plus être vaincus par le démon ; que la grâce du bap-
Ii'^me égalait lous les hommes, elque, comme ils ne nié ritaienl qui-
par elle, eeui qui la conservaienl jouiraient dans le ciel d'une ré-
compense cga le. Saini Augustin dit que Jovinien ajouta !i toutes
ces erreurs le sentiment des Stoïciens sur l'égalilé des péthés '.
Jovinien eut beaucoup de sectateurs à Rome : on vît une mul-
tude de personnes qui avaient vécu dans U continence et dans la
mortification renoncer ï une austérité qu'ils ne croyaient bonne
i rien, se marier, mener une vie molle et voluptueuse, qui neTai-
■aii perdre, selon eux , aucun des avantages que U religion nous
Oromet.
■r^ Jovinien fui condamné par le pape Slrice, et par une assemblée
KévéquesAMilan*,
W Saioiiéromeaécritcontre Jovinien, et soutenu les droits de U
virginité, de manière à faire croire qu'il condamnait le mariage ;
on ï'en plaignit , et il Ht voir qu'on l'Interprélait mal : c'est donc
injustement que M. Barbejrac lui reproche de s'être contredit.
n
IKABALF.. Voyf: Cauhaie.
KOUAKRES. Voye^ Quaquehs.
LÀ
LD
K
LAimOYANS. secte d'Anabaptistes. Voue: cet article.
LEON ISAIRIEN. Voi/« IcoKocuSTia.
Ambr,> ep> il, Aog., in Sab,, c. S. De hxres.
1 Ep. Kric., L 1. Cunc, p, 1034. Ambr., ep. A3.
42 tOL
LIBERTINS» bnnche d'Anabaptistes.
LOLLARDS, branche de Frérots ou de Béguards , qui eut pour
chef Gaultier LoUard.
Malgré les croisades qai avaient exterminé tant d'hérétiques ,
malgré les inquisiteurs qui en avaient fait brûler une infinité ,
malgré les bûchers allumés dans toute TEurope contre les sectai-
Tes, on voyait à chaque instant nattre de nouvelles sectes, qui bien-
tôt se divisaient en plusieurs autres, lesquelles renouvelaient
toutes les erreurs des Manichéens, des Cathares, des Albigeois, etc.
Ce fut ainsi que Gaultier Lollard forma sa secte. Il enseigna
que Lucifer et les démons avaient été chassés du ciel injuste-
ment, et qu'ils y seraient rétablis un jour ; que saint Michel et les
autres anges coupables de cette injustice seraient damnés éter-
nellement, avec tous les hommes qui n'étaient pas dans ses senti-
mens : il méprisait les cérémonies de TÉglise, ne reconnaissait
point rintercessiott des saints, et croyait que les sacremens étaient
inutiles. Si le baptême est un sacrement, dit Lollard , tout bain
en est aussi un, et tout baigneur est Dieu ; il prétendait que riios-
tie consacrée était un Dieu imaginaire ; il se moquait de la messe,
des prêtres et des évêques , dont il prétendait que les ordinations
étaient nulles ; le mariage , selon lui, n'était qu*une prostitution
jurée.
Gaultier Lollard se fît un grand nombre de disciples , en Au-
triche, en Bohême , etc.
Il établit douze hommes choisis entre ses disciples , qu'il nom-
mait ses apôtres, et qui parcouraient tous les ans TAllemagne pour
affermir ceux qui avaient adopté ses sentimens : entre ces douze
disciples, il y avait deux vieillards qu'on nommait les ministres
de la secte; ces deux ministres feignaient qu'ils entraienttous les
ans dans le paradis, où ils rece vaient d'Enoch et d'Élie le pouvoir de
remettre tous les péchés à ceux de leur secte , et ils communi-
quaient ce pouvoir à plusieurs autres, dans chaque ville ou bour-
gade.
Les inquisiteurs fîrent arrêter Lollard, et, ne pouvant vaincre
son opiniâtreté , le condamnèrent ; il alla au feu sans frayeur et
sans repentir: on découvrit un grand nombre de ses disciples, dont
on fit, selon Trithème, un grand incendie.
Le feu qui réduisit Lollard en cendres ne détruisit pas sa secte ;
les Lollards se perpétuèrent en Allemagne , passèrent en Flandres
et en Angleterre.
LUC u
Lm démêlés de ce rojanme avec la cour de Rnme coDcilièri.tii
aux Lolhtdi Vafteetioa de brancoai* d'AngtiU , el leur leeie; flt
du progrès ; mais le etergé fil parler (contre eui In lois le* plus
sévères , et le crédit des coniniuiies ne piit empêcher qa'on ne
brAlit les Lollards : cependiDt on ne les détruisil point ; ils se
réanireot aux WicléSies, et prAparèrent la mine du clergé d'An-
gleterre et le schisme de Henri Vtll , tandi» que d'autres l^llards
préparaient en Bohème les esprits pour leserrenrsde Jean Hua et
pour la guerre des Hnniles ' .
LtClF'ËRIE.VS, schismaliques ({ni se séparèrentde l'Eglise ea-
lliulique parce qne le concile d'Aleiandrle avait reçu i la péDi-
tence les évéques du concile de Ricuîoi : voici l'ocGasiait àa ce
schisme.
Après ta mort de Constance , lulien rendit i ions les exilés la
liberté , et les évéques catholiques travaillèrent au rélablisiement
delà pjiidans l'Église. Saint Athan»se et saint Euièbe de Verceil
aïsembierent onconnleà Alexandrie, l'an 3tiâ , dans lequel on
Gl on décret général pour recevoir â li communion de l'Eglise
iDuslcs évêqnes qui avaient été engagés dans l'Artanigine : comme
rËglised'Antiocbe était divisée, un y envoya Ensébe , avec des
insimciionspour pacifier celle Église.
Lucifer , au lien de m rendre k Alexandrie avee Eusëbe, était
allé directeineul à Aiitioche, et un y avuit ordonné évéque Pau-
lin: ce choix ne Et qu'augmenter le trouble, et il était plu* grand
que jamais lorsqu'Eusébe arriva ; il fut pénétré de douleur de
toir que Lncifer, par ta précipitation , eût rendu le mal presque
taeurable; néanmoins il ne btlma pas Lucifer ouvertement,
Lncifer fut offensé de ce qu'Eu^be n'approuvait pu ce qu'il
avait Tait ; Il se sépara de s» communion et de celle de tous le*
évéquec qui avaient re(;u i Ij pénitence les évéques tombé* dans
r.Srianieme.
Lucifer s'était rendu illustre dans l'Église par son mépris pour
le monde, par son amour pour les leiires saintes, par la pureté de
ta vje. par la constauce de sa foi : il (dît une Imprudence, on ne
l'a ppi audit pas. Il hait tout te monde; il cherche un préleile pour
te séparer de tous les évéques ',el croit trouver une jusle raison
' Dopln, qualon. itMe, p. tSfl. D'Argentré, Colled. juilicior,, t. ).
' Sulpic Sever., I. S, Amliin,, Oral, de obitu tSaliri, Aiig. ■(■. .''0.
H.viTon. In d'aï, adtersût LocU^.
44 LUT
de s'en séparer dans la loi qu'ils avaient faiic pour recevoir h Ii
pénilence ceux qui sonl lombes dans l'AriaDÎsmc.
VoUk comment le caractère décide souvent un homme pour le
scliisme et pour l'hérésie.
Lucirereui des sectateurs, maisen petit nombre; its étaient ré-
pandus dans la Sardaigne et en Espagne : ces sectateurs présentè-
rent une requéteaui empereurs Théodose, Valentinien et Arcade,
dans laquelle ils font proression de ne point communiquer , noo'
seulement avec ceux qui avaient consenti â l'hérésie, mais encore
avec ceux même qui communiquaient avec les personnes qui étaient
tombées dans l'Iiérésie; c'est pour cela qu'ils sont en petit nom-
bre, disent-ils, et qu'ils évitent presque tout le monde : ilsassurenl
que le pape Damas , saint llilaire , saint Athanase et les autres
confesseurs, en recevant les Ariens i la pénitence , avaient Iralii
la vérité.
Lucifer mourut dans son schisme.
LUTHER, auteur de la réforme conuue sous le nom de reli);i<ia
luthérienne. Nous allons examiner l'origine et le progrès de celle
réforme ; nous exposerons ensuite le systÈme ihéologique de Lu-
ther et nous le réfuterons.
De l'orifitne da Lullu^raiiiime,
Luther naquit il Isleb , ville de Saxe , sur la On du quinzième
siècle (1483).
Après avoir aciievé ses études de grammaire '4 Magdebourget
i Eiseaach , il hl son cours de philosophie ï Erfurt , et fut reçu
maître es arts dans l'Université de cette ville; il se livra ensuite ù
l'étude du droit, et se destinait au barreau. On coup de tonnerre
qui lua Uses eûtes un de ses amis changea sa desiinaiion elle
détermina il entrer dans l'ordre des religieux augiislins.
Il étudia en théologioà Witteinherg, y acquit le degré de doc-
teur , fut fait prolesseur, ei devint célèbre au commencemeul du
seizième siècle.
L'Europe était iranqullle, et tous les cbrélieoa y vivaient dans
la communion et snus l'obéiss-ince de l'Ëglise de Rome. Léon X
occupait le siège de saint Pierre : ce pape avait apporté uu punti-
flcai de grandes qualités; il connaissait les belles-leitres , il aimait
el favorisait te mérite; il avait de l'humanité, de U bonté, une ex-
trême libéralité, et une si i;rande aibbilitv, qu'où trouvait quelqae
I
I LUT
chose de pins qn'bumaiD dans toutes »
raljté et n ficililé ï donner épuisèrenl bienlâl les trésors de Ju-
les 11, auquel iUuccédait, el absorbèrent sesrerenus '.
Cepeadanl Léon X ToriDaleprojet d'acbeverlamagnifiqueéglise
de Sainl-Pierre, el accorda des indulgences ï ceni qai coDlribue'
raient aux frais de cel édifice : la bulle des iodulgenceit fut expé-
diée, et Léon X donna une partie des revenus de celte indulgence
i différentes personnes, leur assignant le revenu de quelque pro-
Dans ce partage il fil don de tout ce qui détail retenir de la
Saxe et d'une partie de l'Allemagne i sa sœur, qui chargea Ar-
cliambaud de celle levée de deniers. Arcbambaud en Hi une ferme,
et les cullecleurs ou fermief* confièrent la prédication des indul-
gences aux dominicains.
Les collecteurs el les prédicateurs des indulgences leur allri-
buèrentnneeOicacité extraordinaire, el, en précbani l'indulgence,
menaient une vie scandaleuse. Plusieurs de ces négocians spiri-
tuels, dit Guichardin , en vinrent jusqu'il donnera vit prit etk
jouer dans les cabarets le pouvoir de délivrer les ïmes du purg^ i
tmre*.
Luther s'éleva contre les excès des catlecleurs et des prédica-
teurs des indulgences et contre les désordres de ceux qui les pr£- '
cbaîenl; c'est l'objet d'une de.fes lellresh l'arrhevéque de Majen-
ce: il étudia la znatléredes indulgences, et publia des ibésesdani
lesquelles il censurait amëremeni les abus des indulgences, el ré-
daisail leur effet presque ù rien.
Tetzel , dominicain, qui était k la tète des prédics
dulgences , fit publier et soutenir des ibèses contraires dans la |
Vdie de Francfurt , en Brandebourg.
Ces thèses furent comme la déclaration de guerre: plus
théologiens se joignirent S Teliel , el prirent la plume pour Ik
défense des indulgences ; la dispute s'écbauffa. Lntber, qui était
d'un caractère violent , s'emporta et passa les bornes de la mode*
ration, de la charité et de la subordination ; il fut cilé i Rome , el
Léon X donna une bulle dans laquelle il déclarai! la validité dea
indulgences , prononçait qu'eu qualiti
■Guichardin,!. Il, lA.
> Guichardin, I. 18, il. li. nsinalil nd an. t.5na, n.
Hiil. du Imh., I. 1, wss, e. Scckcndorfiur Malmli.
48 LUT
Pierre ei dp vicaire de Jésus-Christ , il avait droit d'en acrorder;
que c*éiait la doctrioe de l'ËgHse romninc , maîtresse de touLes
les Ëglises, et qu'il fallait recevoir celle doctrine pour vivre dans
sa communion : il donna ensuite une bulle, dan« laquelle il con-
ibtnaail U doclrioe de Luther , ordonnait de brQIer ses livres, et
le déclarait lui-même hérétique s'il ne se rélraclaît pas dans un
temps qu'il marquait.
Luther appela de cetle bulle nu concile , et comme l'électeur
de SaKB avait goûté les sentimens de Luther, ce docteur eut assez
de crédit pour faire brûler 1 Witlemberg la bulledeLéon X.
Celle audace, qui dans Luther étail un eSei de son caracIËrc, se
trouva par l'événement un coup de politique. Le peuplc,qui vit brû-
ler par Luther la bulle d'un pape , perdit machinalement celte
frajreur religieuse que lui inspiraient les décrets du souverain
pontife et la confiance qu'il avait aux indulgences : bientOt Lu-
ther attaqua , duns ses prédications , les abus des indulgences,
l'autorité du pape et les eicés des prédicateurs des indulgences;
il les rendit odieux et se (itun grand nombre de partisans.
Les prédications de Luther commeuçaienl ï Taire beaucoup de
bruit, lorsqu'on tint une diète ï Worms (en 1S21]. Luther j Tut
cité, etl'on fit un décret conlrelui: dans cedécret, Charles-Quint,
après avoir raconté comment Luther lâchait de répandre ses er-
reurs en Allemagne, déclare que voulant suivre les traces des em-
pereurs romains, ses prédécesseurs, pour satisfaire il ce qu'il doit
i l'honneur de Dieu , an respect qu'il porte au pape, et à ce
qui est dû k la dignité impériale dont il est revêtu, du conseil el
du consentement des électeurs, princes el États de l'empire, et en
exécution de la sentence du pape il déclare qu'il lient Martin
Luiher pour notoirement hérétique , et ordonne qu'il soit tenu
pour tel, de tout le monde , défendant Ji tous de le recevoir ou de
le protéger, de quelque manière que ce soit; commandant i tous
lei princes et Ëists de l'empire, sous les peines portées, de le
prendre et emprisonner après le terme de 31 jours expirés , et de
poursuivre ses complices, adhérens et fauteurs, de les dépouiller
de leurs biens, meubles, immeubles, etc.
Lorsque cet édit eut passé , Frédéric de Saxe fit partir secrète-
ment Luther, elle fit conduire en lieu sûr; maison n'exécuta point
le décret de ladièie contre les partisans de Luther.
Ainsi l'Église de Rome, à laquelle tout était soumis , qui avait
irmé l'Europe entière, fait trembler les soudans, dépoi^ les rois,
ICI
»
%
donné des royaumes; Rome, b qui tout obéissait, vît sa puissance '
■' celle de l'empire échouer coulre Lullier et contre ses disciples.
CeUe espèce de phénomène êuil préparé depuis loag-lemps;
W guerres, qui ariient éteint les arts et les sciences dans l'Occi- '
dent, aTaient produit de grands alius dans le clergé; il s'était
élevé, dans ces siècles barbares , des sectaires qui ataieni attaqué
ces abus, et le prétexte de les réformer avait concilié des secta-
teurs aux Heoriciens, aui Pétrobusiens, aux Albigeois, aux Vau-
dois. elc.
Les foudres de l'Ëglise , lesamiées des croisés , les bûchers ds
l'inquisition avaient détruit toutesces sectes, et, dais l'Occident,
tout était soumis au pape et uni A l'É\i\iie romaine.
Les papes et le clergé , accoutumés depuis le oniième siècle i
tout subjuguer avec l'anaihème cl les indulgences , ne conoais-
saient presque point d'autre moyen que la fui'ce pour combattre
l'bérésïe ; ils employaient les foudres de l'Ëglisc contre tout ce
qui s'opposait ù leurs desseins ou 1 leurs intérêts, qu'ils coni
daient souvcut avec ceux de l'Ëglise clde la relitiiun : ainsi ,
puis les guerres descroiséâiOnaviitTu les papes déposer les soov»-
rainsqui ne leur obèissaienl pas ; des antipapes excommunier les
rois qui reconnaissaient leurs concurrens dans le sauTeraiu pon-
tifiial, délier du sermcni de Cdëlité les sujets de ces souverains ,
accorder des ioduIgcDces ï ceux qui les combaluaieot, donner
Icursrojaumesâceux qui les conquerraient; ou avait tu lespeii-^J
pies abandonner leurs souverains , sacrifier leur fortune, pougm
obéir aux décrets des papes et pour gagner les indulgences.
La profonde ignorance peut donner une longue durée i uns- J
pareille puissance ; elle pourrait même être immuable parmi det [
peuples qui ne raisonneraient point j mais il s'en Cillait beaucoup
que l'esprit des peuples d'Allemagne fût dans cet étal d'imiiiobî.>
lité et de quiétude : toutes les seetes réformatrices qui s'étaient j
élevées depuis les Henriciens , les Albigeois et les Vaudoia,
laienl rffugiiïcs en Allemagne, elles y avaient des partisans ca- I
chés, qui Idchaienl de faire des prosélytes et qn! répandaient des i
principes contraires à la foi et b Tsuiorité de l'Ëglise : les livres -|
de Wiclef, de Jean Hus, s'y étaient multipliés, et ou les lisait.
I.«SKeriaires cachés et une paKie des ouvrages de Wiclef et
de lein llus attaquaient des excès mauilcsies et une autorité J
dont l'ibus incommodait presque tout le monde; ainsi l'Egliac dt i
ftomeet le clergé avaient beaucoup d'ennemis aecrcls.
H LUT
Cet enDemÎB n'élaleot poinl des TaDatiquei ignorans , rid!cuteB
ou dùbsuuhéi : c'éuieQldesbomniMqui raisunnaieni, qui préteo»
daieol De point alUquer l'Rg1i«e , mais les abus dont les Ddèles
alitent scHndaliBéB, ei qui dâiruisaieuL la dUcipliae. On avait vu,
dans les conciles de Conslance et de 631e , des hommes célèbres
par leurs lumières ei par leurs vertus demaniJer, mais inutile'
lemeni, la réforme des abus -, on lojiait qu'on nepouvajt l'espérer
et l'ubienir qu'en rérurmant les abus malgré le clergé et la cour
de Rome , mais son autorité toujours redoutable cunlenaîl tout
te monde, el il y availdans une inlioilé d'esprits uuc espèce d'é-
quilibre entre le désir de la réforjuc et la crainte de l'aulorilé du
Lutlier, en attaquant l'autorité du pape , les indulgences et le
clergé, rompit cet équilibre qui produisait ce calme dangereux
que l'on prend pour de la tranquillilé; il communiqua ï une infi-
nité de peraonueâ l'esprit de révolte contre l'Ëglise , et se trouva
tout ï coup i la tête d'un parti si considérable, que les princes
d'Allemagne crurent ne pouvoir eiécuter le décret de la diélc
contre Luther saus exciter une sédition.
D'ailleurs, plusieurs de ces princes n'avaient accédé i ce décret
qn'avec répugnance : ils ne voyaient qu'avec beaucoup de peine
sortir de leurs États les sommes immenses que les directeurs des
indulgences enlevaient ; ils n'étaient pas lâchés qu'on attaquât et
qu'un resserrùt la puissance du clergé qu'ils redoutaient el dont
ils souhaïlaient l'abaissement : entio les armes du Turc , qui uie-
nri^aienl l'empire, Urenl craindre qu'il'ne fût dangereux d'allu-
mer en Allemagne une guerre de religion, semblable à celle qui
avait désolé la Bohème un siècle aupuravanl.
AÏDsi le temps, ce novateur si redoutable, avait insensiblement
tout préparé pour faire échouer contre un reliijieux augustin l'au-
lorilé de l'Église et la puissance de Charles-Quint et d'une
grande partie des princes d'Allemagne.
lin progrè» de Laitier dfpn'o ton rrlour à Wiltemberg juiiqtCit
la diilede fiurgmùerg.
Luther revint il Willemberg; l'Université adopta ses senlimens;
' Voj/e: sur lous ci-s fails k'S tiisl. cl les auU wlé. do ces d.fféien»
lempï) le conr. de Consl.; le coin, de Fiturj; Bussui^t, Hisl. du Fr. el
dn Var.; (Julrh., HisL del'Ëgl. gall.
li
rilédesLWéquei, et l'ordrft
e d^ecck-tiaile ou de pré-
en écrivint aux Évéques , i
, que c'est U nouvelle
c un iriagiiîfique mé|irii
lo litre s'appeler
LLT
& ; abolil U messe, on attaqua l'auio
■émede l'épiscoput: Luther prit le iv
icaieur de 'Wîitemberg , «fin , dii-il
■ qu'ils ne préleDdent cause d'ignoranc
> qualité qu'il se donne 1 lui-niéroe , t\
• d'eui et de Saliin ; qu*il pourrait 1 aus»
■ gëlistepar la giice de ftieu; queirtecert«rDemeatJégu&-Cbrîit
• le Dommalt aiasi, et le tenait pour ecclésiaste *. >
En letiu de cMte céleste niIssioD , Luther Taisait tout dans l'É-
glise; il pr£cbait, il corrigeai! , il retranchait dea cérémoniei , it
en établissait d'autres , il instituait et destituait; il établit méine
un évéqiic i Nuremberg : son imagination véhémente ëcbauDb le*
esprits ; il l'onimuniqua son enthousiasme; il devint l'apAtre el l'o-
rude de la Saxe el d'une grande partie de l'Allemagne : étonné
de la rapidité de ses progrès , il ae crut en elTet un homnie ex-
traordinaire. • Je n'ai pas encore mis la main i la moindre pierre
■ pour la rcDverser,di«aii-il; je n'ai fait metirele Feu i aucun mo-
• nastëre; mais presque tous les monailèrei sont ravagés par nu
^^ I plume et par ma tioucbe, el on publie que sans violence j'»i mirf I
^L> kcul tait plus de mal nu pape que n'aurait pu luire aucun roi I
^B* avec toutes les forces de son royaume *. •
^P Luther prétendit que ces succte étaient l'effet d'une force si
' naturelle que Dieu donnait ïsesécrils et il ses prédications; i
publiiiil , et le peuple le crojait : aiientif aux progrùs de i
empire sur tes esprits , Il prit te ton des prophètes contre cetnc I
qui s'opposaient il sa doctrine. Après les avoir eihoriés t l'em-l
brasser , il les menaçait de crier contre eui s'ils refusaient d* J
s'y soumettre : • Ues prières, dit-il i un prince de la r
• Saie, ne seront pas un foudre de Salmouëe ni un vain murmurç I
^^ » dans l'air : on n'arrête pas ainsi la voii de Lulber, et je son- I
^^^ li*iteque Votre Altesse ne l'éprouve pas i son dam : ma prière
^^Best on rempart iovinrible , plus puissant que le diable même ;
^^B uns elle 11 j a long-temps qu'on ne purlcrail plus de Luther ,
^^VM on ne s'élonnura pas d'un si grand inii^Je '! °
^^H Lorsqu'il menaçait quelqu'un des jugemens de Dieu , volU
^H * Ep- ad falio nominat. Ord. eplicoporum , opcrum Lulheri , t. 3,
M. SOS. HUt. dtt Variai., t. t, p. 30.
*T. 7, fui. SOT, 50». Hist. des Variai., I. t, p. 31),
' Epw adCeorg. duc. Soi., i, 3, bl. A91.
11.
ÊO LUT
eassie^dii qu'il lisali dans les dét-Tets éternels ; sur sa parole, on
lEnail pour assuré, Jaus son parti, iju'il j aiait deux AQlcchrisls
clairemeDi marqués dans l'Erriture , le pape et le Turc , dont Lu-
tlier annonçait la ruine prochaine. Ce n'était pas seulement le
peuple qui crojait que Lutherélail un prophète : les savans, les
ihéologicus , les hommes de lettres de son parti , le regardaient
pour tel, unt l'einpire de l'imigi nation et de l'eniLousiasine est
étendu*.
L'eeclésiasie de Wittemberg ne jouissait cependant pas tran-
quillement de son triomphe; sa révolte euniru l'Église occusiona
une foule de sectes fanaiiqnes et sédiiieusps , qui ritagi.Tent une
partie de rAllemagne. Carlostad voulut életer dans Wiltemberg
une secte nouvelle ; Lutter lui-même fut attaqué dans une infinité
d'écrits : il répondit I tout , attaqua le clergé , prêcha contre la
corruption des mœurs et traduisit la Bible en langage vulgaire;
tout le monde lut sa version , et tout ce qui pouvait lire prit part
aux dispuLet de religion.
L'Ëcrilure seule était, selon Luther, la règle de la foi, et
chacun était en droit de l'interpréter : ce principe séduisit un
nombre infini de personnes, en Allemagne, en Bohême et en
Hongrie; mais c'était surtout dans la Saie et dans la basse Aile-
magne que les sectateurs de Luther s'étaîeul multipliés et qu'ils
élaieui animés d'un zèle ardent et capaUe de tout eatr^rendre.
Du Lulhéiai
e devait la diile de Nuremberg jiuqii'ii la àiile
d'Augibourg.
Telle était l'étendue du Luthéranisme lorsque les états d'Alle-
magne a'assemhléreni 1 Nuremberg. Léon X était mort , et
Adrien VI lui avait succédé : ce nouveau pontife eDVUjia ï la diète
un nonce pour se plaindre de la liberté qu'on accordait à Luther,
et de ce qu'on ne tenait puiut la main !t l'exécution de l'édit de
Worois.
Les états répondirent que les partisans de Luther étaient si
nombreux que l'eiécuUon de l'édit de WormE allumerait une
guerre civile. Les princes laïques dressèrent ensuite nn long mé-
moire de leurs sujets de plainte et de leurs prétentions contre la
cour de Rome et contre Us eccléni as tiques ; ils réduisirent sj
I SIciduu, I. 3. Mdunct,, 1, a, ep, 65.
Is réduisirent Mme-
LUT St
r iKire i cm! rbeh , suitiuels ils donntrent pour cela h tîlre 3i j
CwfKm prauainlno ; ils enïojferent ce mémoire au pape , avec peth ]
(eslatton qu'ih ne voutaienl ni ne |iouVïieal plus tulérerce-i (;rien,
K qu'ils ètaieni résolus d'employer les moyens les pi js propres fe
ti réprimer.
Les princes se plaignaient des uies qui se payaient pour \eé
riltppnses et pour les absolutions, de l'argent qui se lirait des ii>>
dulgences , de l'Évocation des procès ù Rome , de l'exemption Aét
eect^i^stiqncs dans les causes criminelles , e
Tous ces griefs se réduisaient i ti^is principatii , savoir : qae i
les erclésiasiiques réduisaient les peuples en servitude , qu'ils léf I
' dépouillaient de leurs biens, et qu'ils s'appropriaient la juridic- I
F flon des magistmls laïques*.
I La ditie fit aussi un rtglemeni pour calmer les esprits et pour ]
H^-Sfifendre d' imprimer ou d'enseigner uucunu doctrine nouvelle.
Les Luthériens et les calboliques interprétèrent ce décret clia>
mn ï lear avantage , et prétendirent n'enseigner que la doctrini 1
mtea Pères de l'Église ; ainsi ce décret ne fit qu'allumer le feu de 1^ ]
K'Ascorde *,
Adrien VI reconnaissait la nécesiîlË de réformer beaucoup d'à- |
I bus , et pïtaÎBsait déterminé i travailler ï cette réforme; aialtit J
I Bourut avant que d'avoir pu l'eiécuter.
Jules de Médicjs lui succéda sous le nom
LîWpe enToja i la diète de Nuremberg un nt
E Borie de rëforaialiOD pour l'Allemagne ; mais o
mit subsister les abus les plus dangereux, ei
I nit point les vœux de la diète précédente *.
Cependant le légat engagea F'erdinand , frère de l'empereur, at.l
[plusieurs uutres princes à approuver son décret de réforme. La 1
^blicalion de ce règlement offensa tous les princes et tous Ih J
|t£ques qui n'avaient pas voulu j consentir dans la diète ; le m^- I
enlement augmenta par les lettres impérieuses que Charlef- 1
il écrivit 1 la diète , et les étals de l'empire s'élant assembla 1
1 Spire, sur la lïn du mois dejuinlSSS, on délibéra , par ordrt I
de l'empereur, sur des lettres de ce prince , par lesquelles il len |
dicUnil qu'il allait passer en Italie pour s'y faire couronner ^ J
■ Fasdeulus rerum eipetendarum, I. 1, p> 353,
1 Ibid. Stvidaii., 1, 1, p, iO,
■An, ISIt,
52 LUT
pour pT^ndre avec le pape des mesures pour la conTor^iion d'un
concile : en allendanl , il roulait qu'on observât l'édil de Worms
et défendait de traiter davantage des matières de religion dans la
diËle.
I.a plupart des villes répondirent que si par le passfi on n'avait
pu observer les décrets de Worms , il élail enrore plus dangereux
de le tenter alors , puisque les controverses étaient plus animées
que jamais : on fit donc un décret qui pnrlaît , en substanre , que
comme il était nécessaire , pour remettre l'ordre dans les alTaîres
de la religion et pour maintenir la liberté , de tenir un concile lé-
gitime en Allemagne ou d'en procurer un qui fût universel , et de
l'assembler avant le tenne d'une année , on enverrait des ambas-
sadeurs i l'empereur, pour le prier de regarder avec compassion
l'étal tumultueux et misérable de l'empire , et de retourner au
plulAt en Allemagne , pour Taire assembler le concile ; qu'en at-
tendant l'un ou l'autre des conciles , les princes et les états de
leurs provinces eussent ï se conduire dans leurs gouvernemens ,
sur le Tait de h religion, de manière qu'ils pussent eu rendre bon
comptée Dieu et !i l'empereur.
L'empereur et le pape, après s'être brouillés et raccommodi'-s
plntieurs fois, rétablirent enfin la paîi , que des inlérêls tempo-
rels avaient troublée.
Un des articles du traité fait entre l'empereur et le pape Tut
que si les Luthériens persistaient dans leur révolte, le pape em-
ploierait pour les réduire les armes spirituelles, et Charles>Quini,
avec Ferdinand, les armes temporelles ) que, de plus, le pape en-
gagerait les princes chrétiens ï se joindre à l'empereur.
Charles-Quint convoqua les états d'Allemagne à Spire , l'an
lKi9. Après bien des contestations, on fit un décret qui portait
qne ceui qui avaient observé l'édit de Worms eussent i cooti-
nuer ï le faire et eussent le pouvoir à'j contraindre leurs peu-
ples jusqu'à la tenue d'un concile ; qu'ï l'égard de ceui qui avaient
changé de doctrine et qui ne pouvaient l'abandonner sans crainte
de quelque sédition , ils s'en tiendraient ï ce qui était fait , sans
rien innover davantage jusqu'au même temps; que la messe ne
serait point abolie , et que dans les lieux même ob la nouvelle
réforme avait été établie on n'empêcherait point de la célébrer;
que les prédicateurs s'abstiendraient de proposer de nouveaux
dogmes ou des dogmes qui fussent peu fondés sur l'f.criture; mais
qu'ils prêcheraient l'bvangile selon l'interpréta lion approuvée par
LUT
* l*Ëg]ise , sins toucher loi chos«s qai étaieni en dispute , jusquli 1
I Is déierminalion Aa concïli?.
L'électeur de Saxe , celui de Brandebourg , les ducs de Liine-
I k>Drg, te landgrave de Hesse et le prince d'Anhall , arec i[ua<
e des principales villes d'Allemagne, d^larèrent qu'un
cail déroger au décret de la diète prMdenle, qui avait a
cordé ï chacun la liberté de religion jusqu'ï I» lenue d'un co
Vcile , et prélendirenl iiae ce décret ajant élé fait du consentement I
e pouvait aussi être changé que d'un l'-onseniemeot \
I général ; qu'aibsi ils protestaient contre le décret de celle diète.
l'Os rendirent publique leur protestation ei l'appel qu'ils tirent dt I
Ite décret ï l'enipereor et au concile général futur, ou ï i
Wjétte national , el c'est de lï que le nom de ProMIant Tut dnnné k ]
X qui faisaient profession âe la religion luthérien
Au milieu de ces succès fulher n'était pas sans chagrin. Cat-t
tad , chassé d'Allemagne par Luther, s'était retiré en ~ '
Zuingle et (Kculampade aYaient pris sa défense : leur docirîM
t s'était établie en Suisse , et elle avait passé en Allemagne,
V die faisaii des progrès assez rapides. Cette doctrine était absotH'
T nenl contraire aui dogmes de Luther ; i) la combattit a
I portement , el vil les partisans de la rÉtonne se partager entre Inî |
les Sacracnentaires. On tlcha, mais inutilement, de réconcl-
T ces rérormaieurs ; il n'y eut jamais entre eux qu'un'
politique : les Sacrameotaires el les Lulhérrens se déchiraient ,
[ «t ces réformaienrs , qui se préieodaienl les juges absolus des
, irouvaieni dans l'Ëcriture sainle des dogmes dia-
ralement opposés. Voilii ce que H. Basnage appelle un oa-
re de lumière.
'mpereur, après s'être fait couronner i Bologne ( en 1330) ,
^ en Allemagne, et intima une dièie S Angsbourg.
L'électeur de Saie présenta ii la diète la profession de foi des
Proiesians : elle consistait en deu» parties ; l'une conii-nait le
dogmr , ei elle étiit en grande partie confnrme i la foi c.iiholique;
" niait la nécessité de la coiifessiou , élublissail que l'E-
e n'élail «impusee que d'élus, atirihuait aux seules disposi-
iR des Bdéles les eiïcis des sacremens et niait la nécessité des
m DM œatre&
le salut.
S4 LCT
La seconde partie éuU beaucoup pliu coalraire ï la doctrÎM
de l'Église : on j exigeait l'abolition des meMes basses et «tes
vœux monastiquei , le rélablisienienl de la communion suus les
deux espëcei; elle déclarait que la iradiliou n'était puiut une
règle de foi , et que toute la puissance ecclésiastique no consis-
tait qu'ï prêcher et 1 administrer les sacreuens.
Les tliéologiens catholiques et les théologiens protestans ne pu-
rent convenir sur ces articles , et la diète se sépara.
Après le départ des Prutesians, l'empereur fît un éditpar le-
quel il défendait de clianger aucune chose dans la mes^e et dans
l'adminisiratioD des sacremens ei de détruire les images.
Les Protestans s'aperçurent que l'empereur avait résolu de les
souneilre par la forces des armes ; ils prirent leurs mesures pour
lui résister : le landgrave de liesse convoqua les princes protes-
tans k Smalcade , où ils firent une ligue contre l'empereur ; ils
écrivirent ensuite i tous les princes chrétiens, pour leur f;iire
counattre le* moiils qui les avaient déterminés k embrasser la ré-
forme, en attendant qu'un concile prononçil sur les matières de
religion qui Iroublaienl l'Allemagne.
Luther, qui jusqu'alors avait cru que la réforme ne devait s'é-
tablir que par la persuabion et qu'elle ne détail se défendre que
par la patience , autorisa la ligue de Sniiilcade '.
« Il comparait le pape ï un loup enragé, contre lequel toutle
• monde s'arme au preniier signal , sans attendre l'ordre du ma-
■ gisttal; que si, renfermé dans une enceinte, le magistral ledé-
■ livre, on peut continuera poursuivre cette bêle féroce et aLU-
• quer impunément ceux qui auront empérJié qu'on s'en délit ; si
• ou est tué dans celle attaque avant que d'avoir donné k la béte
■ le coup mortel , il n'j a qu'un teut sujet de se repentir, c'est de
> ne lui avoir pas enfoncé le couteau dans le sein. Vuilii eemnic
> il faut traiter le pape : tous ceux qui le défendent doivent aussi
■ filre traités comme les soIiiaU d'un chef de brigands , fussent-ilï
> des rois et des césars*. •
Les Protestans traitèrent donc le décret de l'empereur a\ec
mépris, et l'un se vit ft la teille d'une guerre également d^ingi
reuse aux deux pariis cl funeste ï l'Allemagne.
L'empereur, menacé d'une guerre procbuine avec les littc.
I
Y
I ftivu Mipriiic» protestaos on Iraïté: ce ttaïlé pomit qu'il j
lurait une paix géa^rale entre l'empereur el lous les Ëiats de
■celfsiastlqiiea que laïques, jusqu'ï la cODVucation
j d'un coDcile gëDéral , libre el chrf lien ; que personne , pour cause
I ée religion , ne pourrait faire la guerre i un autre: qu'il ; aurait
J «olre tous upe amitiâ sincère et une concorde cbrétienne ; que ai,
I iuts un an , le concile ne s'assemblait pas, les états d'Allemagne
■'asseubleraicm pour régler les afTaires de la religion, et que
Tempereur suapendruit tous les procès intentés pour canse de re-
ligion , par sou Gscal ou par d'autres, contre l'clectenr de Saie el
GOQlre ses alliés, jusqu'à la tenue d'un coucile ou l'assenitilâe des
états.
Lorsque Charles-Quint eoi cbasa'- les Turcs de l'Autriche , il
1 pape la tenue d'un concile qui
agne. Le pape consentit i lue"
|>asEa en Italie pour demander a
pût remédier aux maux de l'Allci
quer un concile ; mais il voulait que les Prutestans proinisseni de
s'y soumettre , et que les princes calUoliques s'engageassent il
prendre la défende de l'Ë)[lisc contre ceux qui reFuseraïent de t'y
soumeitre.
Les princes protnians refusërcDi ces conditions. QémentVII
inourul , et Paul 111 , qui lut succéda , résolut d'aesembW un coii'
cîle â llantoue ; mais les Protestans déclarèrent qu'ils ne se suuc
metiraieat point i un concile tenu en Italie; ils voulaient d'ail-
Jeura que les docteurs eussent voix délibératire dans le
Le concile, qui avait été regardé comme le seul mojea de
réunir les Protestans !t l'Ëglise, devenait donc impraticable.
Le landgrave de liesse n'oublia rien pour réconcilier les hé-}
ihériens atec les Zuingtlens, qui, malgré le besoin de
pour se Muleuir Contre les armes des princes catholiques , i
nient de s'attaquer.
Ce ftitdans ce temps que le landgrave, profitant de aoncr<3ilii
du» le parti protestant, obtint la permission d'avoir ii la fois
deux femmes : cet acte de condescendance de la part des théolo-
giens protestans l'attacha irrétoirablement à leurs intérêts et le
rendit ennemi irréconciliable de l'Ëgliso catholique , qui n'aurait
jamais toléré sa polygamie.
Quelque importantes que lussent les aOairea de la religion,
elltt a' uci'u paient pas seules le pape et les princes catholiques.
L'empereur et le roi de France avaient desdesseins sur l'iuilie.
et le pape on les PTulealus n'éwieul pas inutiles pottr ces çroieW.
*(
56 LUT
François 1" envoya des ambassadpurs & rQssembliîe de Smalcade,
pour engager les Prolestans ï agir de concert avec lui , relative-
ment an lieu où le concile devait n'asBeiubier.
D'ailleurs Cbarles-Quinl , qui vojail que Ifi pape ne voulait l'en-
gager dans la guerre contre leiî Prote^tans que pour l'emp^oljer
de s'emparer de HiUn , disait que pour justifier cette guerre il
fallait convoquer un concile , afin de faire voir qu'il n'avait pria
les armes qu'après avoir tenté tous les autres moyens.
Le pape convoqua donc le concile i Hantoue ; mais le duc de
Mantoue refusa sa ville , et le concile fut enfin indiqué à Trente ,
de l'aveu de Charles-Quint et de François I".
L'empire éiaii menacé d'une guerre prochaine de la part des
Turcs, et l'empereur demandait <lu secours nux princes p rotes-
tans, qui refusuienl coDSlammeiil d'en donner î moins qu'on ne
leur donnAl des assurances d'entretenir la paix de religion et
qu'ils ne seraient point obligés d'obéir au concile de Trente : rien
ne fut capable de les faire changer de résolution , et l'empereur
renouvela tous les traités faits avec les Proiestans jusqu'il la diète
prochaine , qu'il indiqua pour le mois de janvier suivant, & Ratis-
bonne , en IStë.
Pendant que le concile s'assemblait , l'électeur palatin intro-
duisit chez lui la communion du calice , les prières publiques en
langue vulgaire , le mariage des prêtres et les autres points de la
réforme.
Ce fui celte même année que Luther mourut, i Isleb, oii il
était allé pour ti'riniuer les dilTérens qui s'étaient élevés entre les
comtes de Munsfeld.
Dw Luthératiiimedepui» la mort de Lullifr jusqu'à la pair religieute.
L'empereur avait convoqué un colloque ï Ralisbonne pour es-
sayer de terminer, par la voie des conférences, les dispiilea de
religion qui troublaient rAllemagne. lorsqu'il arriva It Ratis-
bonne , le colloque était déjà rompu : il s'en plaignit amèrement,
el voulut que chacun proposât ce qu'il savait de plus propre t
pacifier l'Allemagne. Les Protestans demandèrent un conrile na-
tional , mais les ambassadeurs de Mavence el de Trêves approu-
vèrent te concile de Trente et prièrent l'empereur de le protéger.
L'empereur proCla de celte disposition et ao prépara !i faire la
guerre aux Prolpslans : Il se li(;uN avec le pape , qui lui fournit
»
LUT ST
, de l'argent et lui permit àe lever ta moitié <lcs revenus de l'ËgllM >
'd'Espagne. Cbarles-QuinI faisait pourtant publier qu'il ne faisait
poipi la guerre pour cause de religion ; maïs l'électeur de Saxe
ei le landgrave de Hesse publièrent un manifeste pour faire voir
que cette guerre éuit une guerre de religion, et que l'emperear
VaTait ni i «e plaindre d'eui, ni aucune juste pr^lenli ou contre eux.
Le& Prolesians se préparèrent promptemenl ï la guerre et mi-
rent sur pied une armée qui ne put empêcher Charles-Quint de
soumettre la haute Allemagne : l'année suivante , les Protestant '
furent défaits , el l'électeur de Saie fut fait prisonnier. Le land- ,
grave de Hesse pensa alors S faire la paix; il vint trouver l'ei
pereur et fut arrêté contre la parole expresse que l'empereur lui I
avait donnée.
L'empereur leva alors de grosses sommes sur toute l'Allemagne
pour se dédommager, disait-il , des frais de la guerre , qu'il n'a-
Tiii entreprise que pour le bien de l'Allemagne.
Le parti protestant paraissait abattu ; il j avait cependant encore
des filles qui résistaient i l'empereur, et les peuples cunaer- à
«aient tout leur attachement i ta réforme; Charles- (Juin t laî-
même avait accordé ï quelques villes li liberté de conserver la
religion luihËrienne , et Uautîce, duc de Saxe, avait traité avec
bonté Hélanchtnn el les théologiens de Wittemberg ; il les avait
même exhortés i contiuner leurs travaux.
L'empereur marquait on grand dësîr de terminer les différend
de religion qui troublaient l'Allemagne; il tint une diète en 13
dans laquelle il exigea qu'on se soumit au concile de Trente ; m
le pape avait transféré le concileâ Bologne, et cette translation,.]
qui n'svail point été approuvée par les Pères , avait arrêté tontâf a
te* opérations du concile. L'emperetir demanda donc que lo pape f
fit continuer le concileï Trente, et, voyant qu'il serait difficile de 1
l'obtenir, il chercha d'autres moyens de pacifier l'Allemagne.
On remit i l'empereur le soin de choisir les personnes les plu I
propres k composer un formulaire qui pût convenir i tous les pai>' |
lis: ces ibéologiens composèrent un formulaire de religion qui
fut ensuite examiné et con'igé successivement par les Protestant
M par les catholiques, auxquels Ferdinand le communiquai! pour
tToir leuripprobation.
Ce formulaire contenait les objets que l'on devait croire en at-
tendant que le concile général eût toul-îi-rail décidé : ee formiii
Uire fut appelé l'Mrrim,
I
58 LUT
VMerIm rie Charlos-QuinI déplut aux ProtesUnict aux caiho-
llques : les Etats proteslans refusèrenl, pour ia plupart, dt' le
recevoir ou le retureniavec tant de restrictloos qu'ils l'anéuiiiis-
silenl.
L'empereur trouva bien plus de difllcullâ daoB la basse Alle-
magne : la plupart des villes de iiaxe refujërent de le recevoir, et
la ville de Magdehourg le rejeta d'une manière si méprisante ,
qu'elle fut mise au ban de l'empire el soutint une longue guerre
qui entretint dans la basse Allemagne un fea qui , trois ans apiËs,
consuma les Irophées de Charles-Quint.
Malgré le danger qu'on courait en écrivant contre Vlitlerim, on
Vit paraître une foule d'ouvrages conire ce formulaire , de la purt
des calholiques et de la pari des Protestana.
CRpeadani Charles-Quini n'abandonnait pas le projet de faire
recevoir Vhiterim : pour y réussir, il employa les menaces. Ici
caresses ; il força beaucoup de villes et d'Ëlats k le recevoir, mais
il révolta tous les esprits,
Le concile était rétabli ï Trente ; CharleE-Quinl crut qu'il
pourrait rétablir le calme; il eniploja tout pour obtenir que les
Protestans pussent être écoulés dans le concile ; mais les Protefr-
tans et tes éiéques catholiques ne purent jamais convenir sur la
manière dont les Protestans seraient admis dans l'assemblée et
sur le caractère qu'ils y prendraient.
Tandis que la politique de Charlea-Quîot croyait faire servir al-
lemalivement le pape et les Protestans k ses vues el i ses iniêrètt,
loua les esprits ne soulevèrent contre lui, Henri 11 profita de cea
disposilions et l)l un traité avec Maurice de Saxe el avec les Pro-
leilana ; il entra en Lorraine, prit Toul , Ueti et Verdun , tandis
que Maurice de Saxe , a la Léte des Protestans , rendait la liberté
à l'Allemagne.
Charles-Quint sentit qu'il ne pouvait résister ï tous cea enne-
mis ; il Gl sa paix avec les Proteslans ; il remit en liberté le duc
de Saxe et le landgrave de liesse. Par ce traité de pail , conclu b
Passaw I on convint que l'empereur ni aucun autre prince ne pour-
rait forcer la cunscience ni la volonté de p>*rsonne sur la religion,
de quelque manière que ce fût. Alors on vil toutes les villes pro-
testantes rappeler les docteurs de la confession d'Augsbourg; ou
leur rendit leurs églises, leurs écoles et l'exercice libre de leur
religion , jusqu'ï ce que , dans la diète prochaine , OD trouvât Un
no^cD d'éteindre pour jamais la source de ces divisions.
LUT fit
EdGd, trois ans après, on ûi ï Augaboarg la paix, que l'on ap-
pelila patl religiease, ei l'on ea mil les aniilcs eniru le» lait
perpétuelles de l'eaipire.
Les principux articles sont : que les Proiestans jouiront de la
liberté de conscience , et que ni l'un dÎ l'uuire parti ne pourra
U6pr d'aucooe violence sons prétexte de religion ; que les bien)
erclésiasiiquee dont les Protestans s'étaient salïis leur demeure-
raient , sans qu'on pDl les tirer en procès pour cela devant It
rb.inibrt de Spire; que les évfques n'auraient aucune juridiclion
tnr ceux de la religion protestante , mais qu'ils se guuverneraient
eui-niémes i-omme ils le trouveraient i pnipw ; qu'aucun prince
De pourrait attirera s» religion les iujets d'un autre, mais qu'il
serait permis aux sujets d'un prince qui ue serait pas de la ώuie
religion qu'eui de vendre leur bien et de sortir des terres de sa
domination; que ces articles subsisteraient jusqu'il ce qu'un se
fAt accordé sur la religion par des moyens légitiuies.
ElAi Lath^roniime dfpuii la paix religieuse jutqu'à la paix dt
■ Wetipbaliii.
Ij) dernière ligne des Proieslaus avait été l'écueil de la puis-
sance de Charles-Quint ; le roi de France, qui s'était joint aux
Protestans, arait pris les trois évécbés. L'empereur, après avoir
Tait sa paix avec les Protestans , mît sur pied une nombreuse
niée et assiégea Metz : cette entreprise fui le terme de ses prospé- i
rites , il fut obligé de lever le siège et résidut de finir ses joun I
dans la retraite. Il résigna l'empire h Ferdinand, son frère,
mit Philippe, son fils, sur le trAne d'Espagne.
I^e goUTemement dur de ce prince , la dureté et l'imprudence
de ses ministres, les progrès cachés di: la religion protestante et
rétablissement de l'Inquisition , soulevèrent les Pap-Bas contre
Philippe , et tirent de ces contrées le tbéSire d'une guerre longue
et cruelle qui détacha p'iur toujours la Hollande de la monarchie
espagnole et y établit le eaWinisine.
La paiireligiensen'étouB'a point les dissensions de rAllcmague;
paix ne fui pas plus i6t conclue, qu'on se plaignit de part et
'e des diverses infractions qu'on accusait le parti contraire
ir fniins ; cl il n'y avait point de juge qui pAt prononcer sur
ftïufractiont : les deux partisse récusaient récipruqucuient.
S Proiesliuii n'Ataicot pas plus unis cuire eux ; ils B'él.iieut
«0
LUT
n Luilier ; la principale différence qu! le*
partagés entre Zuingle i
divi»a d'abord regardait la présence réelle , que Luther reconaais-
■aîtei queZuingle niait: le landgrave de Hesse aviit fait inutile-
ment tout ce qu*ll avait pu pour accorder ces différends ; plusieurs
d'entre les LutLériena ajoutèrent i la confesBiciii d'Augsbeurg
un écrit appelé Formulaire ie concorde , par lequel ils condam-
naient la doctrine des Zuiagliens; ils soutinrent même que ces
derniers n'avaient aucun droit ï la liberté de conscience accordée
k ceux de la conlessioa d'Âugsbourg , parce qu'ils avaient aban-
donné cette confessiou.
Les princes luthériens atjissaienl, ï la vérité, avec plus de mo-
dération; mais ils ne recevaient les princes xuingliens dans leurs
assemblées que comme par grJce , voulant bien qu'ils jouissent
des privilèges qui , ï proprement parler, ne leur appartenaient
point : on en vint enfin jusqu'i cbusser, de pan et d'autre , les
théologiens qui n'étaient pas du seniimenldes princes.
Malgré ces divisions , la religion protestante faisait du progrès
en Allemagne: lesévéquead'Halberstadt et deHagdebourg l'avant
embrassée avaient conservé leurs évécbés, au lieu que l'électeur
de Cologne, qui avait voulu faire la même chose, avait perdu le
sieu et la dignité d'électeur, que l'empereur lui avait Atée de sa
seule autorité, sans consulter les autres électeurs : il se fit alors
une union entre les princes calvinistes «l quelques-uns des In-
tliériens , puur s'opposer aux catholiques qui voulaient le^ acca-
bler; mais cette union ne produisit aucun effet, parce que l'é-
lecleur de Saxe, niécout4!Ut de leur conduite et irrité par ses
lliûologiens aussi bien que par les catholiques , se persuada que
les Calvinistes ne cherchaient qu'a opprimer également les Luthé-
riens et les catholiques.
Les caiboliques , de leur c&té , firent une ligue à WurUbourg ,
(|U'ils appelèrent la Ugae eatkuliqite , pour l'opposer ï celle des
l'rotesians , qne l'on appelait VVnian ^vangiii^ue. Maiimilien de
Bavière , aticleo ennemi de l'électeur palatin , en Tut le clief.
1^1 empereurs Ferdinand I", Maiimilien II et Rodolphe 11
(Vulenl toléré les Pnileatans pour de grandes sommes qu'ils en
■vaienl tirées; ils leur avaient accordé des pi-iviléges, que Ha-
lliiai voulut en vain leur ôter : après les avoir obligés de se rf-
Vùltar et après avoir été \-aincu , il avait été contraint de confir-
VMt dv nouveau les pritilégea que Rudolphe II avait accurdés aut
Udtémlena , et de leur laisser l'Académie de Prague , un tribunal
LUT
te ville, eila liberté de bâtir des iem)ilet
ei
(de judiciture en o
lies juges délégués pour la conserTdion de leur* privilèges.
Le nombre des ProKsiansuugnieniaillous les jours: la maisoii I
l'Autriche el ses alliés résolurent de s'opposer a leur accroisse'
ncni, et, pour j réussir, lireiii élire roi de Bobéme Ferdinand II.
Ce prince avaU beaucoup de zèle pour la religion catholique ; ce*
pendant il promit sol enuelle ment qu'il ne loucberaii point aux
privilèges accordés ptr ses prédécesseurs aux Bobëmlens , ei qu'il
De se mêlerait point de l'administration du royaume pendant la
vie de Uaihiai
Peu de terops après , les Proieslans voulurent bltir des templea
sur les terres des calholiques : ceui-ci s') opposèrent. Les Pro- '
lesiaos prirent les armes , eicitérenl une sédition , jetèrent pu
les fenêtres trois magistrats de Prague : sur-le-cliamp toute la
Bohême Tut en armes, et les Proteslans demandèrent du secoun
i leurs frères.
Hathjas étant mort, Ferdinand voulut inutilement prendre l'ad- i
miDisiralioD de la Bohème ; les Bohémiens refusère
connaître pour leur roi ; ils le dét^Urèreni déchu de toua les droiu I
qu'il pourrait avoir sur U Bohème, puisqu'il f avait envoyé dei [
troupes du TÎvaut de Mailiia». Ou élut en sa place l'électeur pati-> 1
tin, qui accepta la couronoe, mais qui l'abandonna bienlfil , eiquC '
ne put même conserver ses anciens Etals. Les troupes de Ferdi-
nand ne furent pas moins heureuites contre le duc de Bniuswick ,
chef (lu même parti.
Tout plia doue sous l'autorité impériale, et l'empereur donna
au édit, en 1629, qui portait que tous les biens ecclésiastiqua !
dont les Prolestans s'étaient emparés depuis le traité de Passant™
iCraient restitués aux catholiques.
A la faveur de ces succès , l'empereur crut pouvoir s'emparef 1
de lu mer Baltique ; Walslein entra en Poméraoic , déclara U
):ueTTe au duc , sous prétcKle qu'il avait bu ï la santé de t'empe-
reur avec de la bière.
Gustave- Adolphe , roi de Suède , vit combien il était nécessaire
de s*opposer au projet de l'empereur, et après quel(|ues ncgdcia-
lûioi tentées inutilement et rejelées par l'empereur avec œéprïi,
« prince déclara la guerre îi l'empereur et entra en Poméranie.
La France , ïe^ Provinces- Unies , l'Angleterre , l'Espagne, en
■ mol toute l'Europe prit pan ï cette guerre , qui dura trente
■tel qui linit par une paii générale , dans laquelle les princei
I
61 LUT
et les Ëuts , tant Luthériens que Zuinglieus ou
linreot le libre eiercice de leur le ligiun , du ci
nime de Tempereur, des élecieurs, prioces et t^iuis des deui reli-
gions ; il Tul de plus réglé que , daoB les assemblées urdiniiires et
duu la chambre impériale , le oonbre des chets de l'une et de
l'iutre religion serait égal.
Toute l'Europe garantit l'eiécntion dece traité entre les princes
ptotealans etles princes catLoliques d'Allemagoe.
Le nonce Fabiana Chigi i'j opposa de tout son pouvoir , ni le
pape lanocenl X , par une bulle , déclara ces traités nul», Tïins ,
réprouTil-s, Trivoles, imatides, iniques, injustes, condamnés, sans
force, et que personne n'était tenu de les observer, encore qu'ils
l\issent foriiCés par un serment.
On n'eut pas plus d'égard i la bulle d'Innocent qu'à ta pr^ies-
l^itïon de son nonce. Vuv'i l'Iiîstuire de Suède pur PulTendorf;
l'histoire du traité de Wesipbalie, par le P. Bougeant.
Du LuthéranUmeen Suiàe.
La .Suéde était catholique lorsque Luther parut : deui Suédois,
qui avaient étudié sous lui k Wiltemberg , portèrent sa doctrine
en Suède ; on était alors au larl de la révolution qui enleva la
Suède au roi de Danemarck , et qui plaça sur le irâne Gustave
Wasa: on ne s'aperçut pas du progrès du Luthéranisme.
Gustave , placé sur le trûae de Suéde dont il veuaït de chasser
le beau-frère de l'empereur, avait i craindre l'autorité du pape,
dévoué ï Charles-Quinl , et le crédit du clergé , toujours favora-
ble k Cbristiern , malgré sa tjrannie: d'ailleurs ; Gustave voulait
changer le gouvernement de la Suède, et régner en monarque ab-
solu dans un pajs où le clergé s'était maintenu dans ses droits
au milieu du despotisme et de la tyrannie de Christiern , et qui
Turmait, pour ainsi dire, un monument toujours subsistant de la
liberté des peuples et des bornes imposées ï l'autorité rojale.
Cuitave résolut donc d'anéantir en Suède la puissance du pape et
l'autorité du clergé. Luther avait produit ce doublecCTet dans une
partie de l'Allemagne par ses déclamations contre le clergé :
Gustave ravorisa le Luthéranisme , et donna secrètement ordre au
chevalier Ajidersou de prot^er Pétri et les autres Luthériens ,
et d'en attirer des nnivcrslli'S d'Allemagne. Voil» la vraie causa
du changement de la religion eu Suède : c'est manquer d'équité
indiilgi
le Icdil l'auleur à'
6«
LVÎT
[onde discememeni que de raltrilmet
gt Suède par les officiers de Lfion X,
I itrégé de l'hisloire ecclésiastique '.
ObiU elles autres Luihériens, assurés de la protection du chutr ]
r, travaillèrem ardemment i l'élablisscmenl du Lulliéranisn
riposaîent tous les jours avec le zèle e( l'emporlemeiii propre '
^Muleverles peuples contre l'Égli.se.
Lu plupart de ces nouveaux docteurs avaient l'avantage de U
■cîeDce et de l'Aloquence sur le clergé, ei méiue ceruia air de rë-
gnlBrîté que duaneul lei premières Ferveurs d'une nouvelle re-
ligion : ils étaient écoutés avec plaisir par le peuplei loujoun
avide de nouveautés, et qui les adopte sans examen lorEqu'ellei
ne demaudeDl point de sacrifice et qu'elles nelendeul qu'il abail-
»er se* supérieurs. Une apparence de Taveur qui se répandait im-
perceptiblement sur les prédicateurs luthériens attirail l'atteii'-
lion de la cour et de la première noblesse , qui ue voyait encore
que des prélats attaqué*-
Peudaot que ces docteurs prêcliaieni publiquement le Luihérv ,
nisme, Gustave, desoncùlé, cbercbait avecalTeclalioa différem
, prttei^tes pour ruiner la puissance temporelle des évéques et dv
1 clergé ; il attaqua d'abord les ecclésiastiques du second ordre, et
api^ eux les évéquet, llrenditsuccessivement plusieurs déclara-
\ (ÎODS coutre les curéâ et contre les évé4|ues , en Taveur du peupl^. |
s objets puremenl temporels , tels que la déclarKtion q^ ■
péfend aui évéques de s'appruprier les biens et la succession àefM
ecléaiastiques de leurs dlocësesi ce prince taisait succéder adrot 1
«déclaration» l'une à l'autre , et elles ne paraissaient '
■'i proportion du progrès que faisait le Luthéranisme.
E Le clergé prévit les projets de Gustave, sans pouvoir les arré-
: rbabileté de ce prince prévenait toutes leurs démarches et
lUE tenn efforts inutiles. Il dépouilla luccessivemenl le>
tquM de leur pouvoir et de leurs biens ; il |irotestait cependant
■*il était irès-attacbé 1 la religion catliolique : mais lorsqu'il vit i
e U plus grande partie des Suédois avaient changé de religioD^ '
9 te déclara enfin iui-niéme Luthérien, et nomma t l'arcbeTéchi 1
V fUpsal Laurent Pétri , auquel il fit épouser une demoiselle dp I
■et pareoles. Le roi se Gteusuite couronner par ce prébt, et bien- I
64 LUT
tAi U Suède deTÏDt presque toule luthérienne : le roi , les séna-
teurs, les éréques et loute la noblesse firent profession publique
de celle doctrine. Mais comme h plupart des ecclésiastiques du
second ordre elles curés de la campagcie n'avaient pris ce panique
pir contrainte ou faiblesse, on voyait, dans plusieurs Enlises dn
royaume, un mélange biiarrederérémonies catholiques etde priè-
res luthériennes ; des prêtres et des curés mariés disaient encore
la messe en plusieurs endroits suivant le rituel et la liturgie ro-
maine; on adminislrait le sacrement de baptême avec les prières
elleiexorcismes, comme dans r£g1ise catholique; onenlerrailles
noria avec les même«prièresqu"otieroploiepour demandera Dieu
le eoulagement des 3mes des Rdèles , quoique la doctrine du pur-
giloire rôt condamnée par les Luthériens.
I.e roi voulut éublir un culle uniforme dans son royaume ; il
convoqua une assemblée géiiér.<le de tout le clergé de Suéde, en
forme de concile. Le cliancelier présida l'assemblée, au nom du
roi : les éiêques, les docteurs et les pasieurs des principales égli-
ses composèrent ce concile luthérien. Ils prirent la confession
rt'Augsbourg pourrègle de foi; ils renoncèrent solennellemeni à
t'oliéissance qu'ils devaient au chef de l'Église; ils ordonnèrent
qu'on abolirait entièrement te culte de l'Ëglise romaine ; ils dé-
fendirent la prière pour les morts; ils empruntèrent des églises
luthériennes d'Allemagne la manière d'administrer le baptême
el fa cène ; ils déclarèrent le mariage des prêtres l^ilitiie ; ils
proscrivirent le célibat et le» vœui ; ils approuvèrent de nouveau
l'ordonnance qui les avait dépouillés de leurs privilèges et de la
plus grande partie de leurs biens . et les ecclésiastiques qui Grent
ces rï'glemeDs étaient presque les mêmes qui, un an auparavant ,
avaient fait paraître tant de zèle pour la défense de la religion.
Ils eurent cependant beaucoup de peine â abolir la pratique et
la discipline de t'Ëglise romaine dans l'administration des sacre-
meos ; on entendait sur cela des plaintes dans tout le royaume ; en
sorte que Gustave craignit les effet du mécontentement des peu-
ples, et ordonna aux pasteurs et aui ministres luthériens d'user
de condescendance pour ceux qui demandaient avec opiniâtreté
s cérémonies , el de u'Ëtahlir les nouvelles qu'anlant
il des dispositions favorables dans lespeuples '.
•. n.iii
I, IliiL
Lik-ï. Suce., Rêvoliil
isde
ï
Du LuIMranUme. en Donemorck.
tts Danois , aprte avoir rhassé Chrisiiern 11 , élurent pour roi I
,^deric, duc de Holstein. Chrisiiern revint en Danemarck, où il |
Jfal bit prisonnier p»r Frideric, et renlermé ï Calleobourg.
Fricferic enlpoursucnesseurson lîls Chrisiiern lll.quiirauvadd I
grandes oppasitions au commencemeot de son règne, ft cause qns I
Chrisuilphe, comte d'Oldenbourg, et la ville de Lubeck , voulaient *
rétablir Chrisiiern II dinsson royaume; mais quoique plus!
provinces se fussent déji rendues , il surmonta tfius ces obsta-
cles par le secours de Gasinve , roi de Suède, et se rendit maî-
tre de Copenbagne en IS3G ; el parce que les évèques lui aratenl
été fort contraires , ils lurent exclu» de l'accommodement général
et déposés de leurs charges- Le roi se fit couronner par un mi-
niïtrp protestant que Luther lui avait envoyé. Ce nouvel apôtre
voulut faire le pape en Daoeniarcb: au lieu de sept éiéquea qui
éuieni dans le royaume, il ordonna sept iniendans pour remplir i
l'avenir la fonction desévéques , et pour faire exécuter les régie-
concernaient l'ordre ecclésiastique ; on Ut la même
ebose dans le royaume de Nonvégn. Tel l'ut l'établissement du
i^thérauisme en Dancmarct.
Du Luth^ranurat en Pologne, en Hongrie el en Trarifylt'anie.
Dés l'ao 1520, un Luthérien avait p;jssé ï Dantzick pour y éta-
blir le Luthéranisme : il n'exerça d'ahord son apostolat qu'avec 1
précaution , et nVuseignait que dans les maisons particulières.
L'année suivante , un religieux de l'ordre de saint François prS-
cha beaucoup plus ouveriemenl contre l'Ëglise romaine , et per-
suada beaucoupdemonde.Ces nouveaux prosélytes chassèrent les
catholiques des charges el des places qu'ils occupaient, et rem-
plirent la ville de troubles. Les ratliullques .dépouillée de leuni
emplois, portèrent leurs plaintes i Sigîsmond I", qui vint h Dant-
tick, chassa les magistrats intrus, punit sévère ment les séditieux,
el 6ia aux Ëvangéliques oit t.ulhérieim la liberté de s'assembler. .
Cependant les Luthériens répandaient secrètemoni leur doO'
triue dans la Pologne; iU y faisaient des prosélytes, et ils n'alten-
daient qu'un temps favorable pour éclater- '
Ce temps arriva sous Sigismood-Auguste, RUdeSigismond I":
> PaSfntlair, liilrod. A l'iiisi, univers-, I. 3, c, 3.
6G LUT
ce prince, arec des qnatilés hrillADtes , était Taible , voluptueux ,
uns uraclère , et deviul roUemenl épris de RadzeTÏll ; il vuulut
l'épouser et la déclarer reine ; il eut beaoÏD du consente m eut de«
palatins et de celui du sénat ; il eut des égards et des condeBcen-
daoces pour la noblesse.
Parmi les seigneurs et les palatins , plusieurs avaient adopté
les opinions de l.uilier ; î s firent proression publique de la re-
forme ; elle s'ÉLublii i Danixick , dans la Lîvunie el dans les do-
maines de plusieurs palatins,
Bientôt la Pologne devint un asile pour tous ceux qui profes-
saient les sentimens des prétendus réformateurs : Blaiidrat , Liîlie
Socio, Otin, Centilis, et beaucoup d'autres qui avaient renouvelé
l'Arianiame, se réfugiÈrent en Pologne. Ces nouveaux Tenus atli-
lèrent bientôt l'aitenlion et formËreul un parti qui alarma égale'»
menl lea catholiques et les Protestans.
La Pologne était remplie de toutes les secles qui déchiraient
le christianisme , qui se faisaient toutes une guerre cruelle , mais
qui ae réunissaient contre les raiholiques et qui formaient un
parti assea, puissant puur forcer les calliolîques ï leur accorder k
tous la liberté de conscience; el sous plusieurs rois, en vertu des
Pacta eonvetita . il était permis aux Polonais d'être llussiles. Lu-
thériens, Saoramentaires, Calvioistes, Anabaptistes, Ariens, Pinc-
loniens, Unitaires, Auti-Triniuires , Triihéites et Suciniens : lel
fut l'effet que la réforme produisît en Pologne.
Les Sociniens ont été bannis; les autres sectaires jouissent de
la tolérance ',
Le Luthéranisme s'introduisit aussi en Hongrie , à l'occasion
des guerres de Ferdinand el de Jean de Sépus,qui se disputaieut
ce rojaume ; il s'j établit principalement lorsque Lazare Simenda ;
étant venu avec ses troupeii prit plusieurs villes, dans lesquelles
il mit des ministres luthériens, et dont il chassa les catholiques ;
ils s'unirent quelquefois aux Turcs , qui les soutinrent contre les
empereurs, et ils, ont obtenu le libre exercice de la confession
d'Augabourg.
Dans la Transylvanie, le Luthéranisme el la religion catholique
furent alternativement la religion dominante : celle-ci j fut presque
abolie, sous (Gabriel Uattori, et die n'a commencé à s'j établir
que depuis que l'empereur Lùopold s'en est rendu le maître.
■ HisL du Socinienisme, première partie.
LUT
^ Le Lmliéraiiisme s'fliblit ïussieoCourlando, obil s'
n fait la religion natinnale.
Ou LuihéraHlimt gn France tt dan» la a\
l'Europe.
La facullé de diâologie rondamna les erreurs de Luther, pres-
qu'ù leur uaiisance. Cetic censure suiide, équiuble et savante,
n'arrêta pas la curioEité: on voulut connaître les seotimens d'un
bonue qui avait partage l'Allemagne en deui fuclions , et qui
luUuil coDire les papes et contre la puissance impériale. Un lut
sesuuvra^'es, et il eut des approbateurs, car il <!sl impossible qu'un
boinme qui allaque dps abus ne trouve pas des approbateurs.
Quelijues ecclésiastiques, altacbési l'évi^que de Meaiu , avaient
adopta quelques-unes des opinions de Lutber ; ils en firent part ft
quelques penunnes simples et ignorantes , mais eapables de t'é*
duuller et de communiquer leur eDtbousiasnie : tel fut Jean le
Clerc, cardeur de laine à Meuui , qui liit établi niinisire du petit
canvenlicule qui avait adopté les opinions luthériennes, Cet '
homme, d'un caractâre violent, prêcha bleui ât publiquement, et
publia que le pape était rAntechrisi : ou arrêta Jean le Clerc, il
Tul marqué et banni du royaume ; il se retira à Metz , oli , devenu
furieux , il entra dans l«s églises et brisa les images ; on lui lit
Kn procès, et il fui brûlé comme un sucrilége.
l«s théulogiens qui avaient instruit le Clerc sortirent de Heaiii,
quelques-uns devinrent minisirea chez les réformés.
Vn t;enlilbomme d'Artois prit une voie plus sûre pour répandre |
(erreurs de Luther, il traduisit «es ouvrages. Les erreurs lulbi-
uines se répandaient donc principalement parmi les personnes j
li lisaient , et les Luibériena lurent d'abord traités avec beau-
coup de ménagement , sous François 1"'. Ce prince, ami des let-
tres cl protecteur des gens de lettres, usa d'abord de beaucoup
d'indulgence envers ceua qui suivaient les opinions de Luther ;
s eo lin le clergé, eUrayèdu progrés de ces opinions en t'ranca,
roi des édils irès-sévères contre ceux qui seraient coo- ]
e Luthéranisme , el tandis que Krançois 1" défendaii
estant d'Allemagne contre CLaileS'Quist , il faisait brûler en |
le les sectateurs de Lutber.
• La rigueur des cliâtimens n'arrêta pas le progrès de l'en
" ciples de Luther et de Zuingle se répandirent en Fronce : j
Uvin adopta leurs principes et forma une secte nouvelle , qui j
I
I
(.8 LUT
t-lotilTi le luili^ranismc en France. Vayes Van, Calvims»:.
l.e Liilhiïranigme lit de« progrès bien plus rapides elbien plus
(étendus dans les Pajs-Bas , où il ; avail une inquisilion , plus
d'abus et beaucoup moins de lumières qu'en France; on Si mou-
rir un {;rand nombre de Lulhériens ; ces rigueurs el l'inquisilion
causèrent la révolution qui enleva les Provioces-Unies i l'EIapa-
gne. Les sectaleurs de Zuingle el de Calvin pénétrèrent dans les
Pays-Bas, comme les Luthériens , el y devinrent la secte doml-
nanie. Voy^rarl. Hou.ande.
En Angleterre , Henri Vlll écrivit contre Luther, et traita ri-
goureusement ceux qui adoptaient les erreurs de ce réformateur
et celles des Sucra m en la ires : il disputait contre eui, et les Taisait
brAler lorsqu'il neleâconrerlissaitpas.
Edouard VI les lulëra et même \fs favorisa ; la reine Marie, qui
succéda 1 Edouard, tes fit briller; Elisabeth, qui succéda ï Marie,
persécuta les catholiques, et établit dans son royaume la religion
prolestante , qui avait déjï gagné toute l'ËcAsse. Voi/a l'art. A.-c-
L'ilatie, l'Espagne el le Portugal ne Inrcnt point ï l'nbri des
erreurs de Luther ; mais les Luthériens n'y lirent jamais un parti
considérable.
Dussiième iMologiqHe de Lulher.
C'est lenom que je donne ï tacoUection des erreurs de Luther.
Ce théologien attaqua d'abord l'abus des indulgences, et en-
suite les indulgences m 6m es. Pour les combattre, il esamiua la na-
ture et l'étendue du pouvoir que l'Église a par rapport à la ré-
mission des péchés ; il prétendit que lepoavuirde délier n'était
pijînt différent de e^tui d" lier, fondé sur les paroles mêmes de Jé-
suS'Chrisl: Ce que voia dfliertî 'tri d^lié; pouvoir qui ne pouvait,
selon Luther, s'étendre qu'A imposer au\ lldéles des liens par les
canons, i les absoudre des peines qu'ils ont encourues m les vio-
lant , ou à le'i en dispenser, el non pas ï les .nbsoudre de tons les
péchés qu'ils ont commis ; car lorsqu'un homme péehe, ce n'esl
pas l'Ëglise qui le lie on qui le rend coupnble , c'est la justice
Oe l Luther coQclut que Dieu seul remet les péchés , et que
les ministres des sacremeus ne faisaïeni qut déclarer qu'ils étaient
Luifaer no conclut pas de là que l'absolution el la confessioD
LUT 8
iniilites : il voulait eoi\iet\fr la confession . comme u
DjeD pfopre i exciter e
mission des péchés est attacliée *.
Si l'absolution sacrameatelle ne justifie pas , quel est donc le
principe de notre justification?
Il u-Duve dans l'Ëcrilure que c'était pur Jésus-Cbrïst que tous
Im hommes avaient été rachetés , et de plus que c'était par la fui
eaJésus-Cbrist que Dousétions sauvés ; il conclut deUquee'é-
tait par U foi que les mérites de Jésus-Christ nous étaient ap-
pli()ué3.
Mais quelle est cette foi parlaquelle les mérites deJésus-Chriet
nous soDi appliqués? Cen'est p»a seulement la persuasion ou la
croyance desmérites de la religion, ou, comme il le dit lui-même,
la foi infuse, parce qu'elle peut subsister avec le pécbé mortel.
1^ foi qui nous justiiie est un acte par lequel nous croyons que
JésDS-Christ est mort pour noDs.
Luther conçoit donc la satisfaction elles mérites delamort de
Jésus-Qirist comme un trésor immense de grâce ei de justice ,
préparé pourlousle:s hommes en général, et dont les fidèles déter-
minent l'application en formant un acte de foi , par lequel chaque
fidèle dit : le crois que Jésus-Clirist est mort pour moi.
Voili le principe fondamental , ou plutût toute la docti
I.uilier sirr la justification.
Comme la saiisfaciion seule de Jésus-Chrîsi est le principe jus*
(ifiant , el qu'il nous est appliqué p.ir l'acte de foi par lequel le
fidèle dit :Jecroisque Jésus-Christ est mort pour moi, il esldaîr
que les actions DU les oeuvres de charité, de pénitence , etc., sont
innliles pour la justification des chrétiens. Luther croit pourtant
que lorsque, par cet acte de foi, le fidèle s'est appliqué réellement
les méritas de Jésus-Christ , il fait de bonnes teuvres ; mais il
n'est pas moins évident que, dans son .système, ces bonnesœuvres
sont absolument inutiles pour nous rendre agréables & Dieu et
pour mériter! ses jeux, quoiqu'elles soient faites a vrt la grSce.
Je dis que voilà le vrai système de Luther, tel qu'il l'enseigne
eipressément '.
De lï Luther concluait que chaque Qdéte devait croire ferme*
meotqn'il était sauvé, el que l'homme ne pouvait faire de n
■ Op. Luth., t. t., Concl. de induljenlils, fol. SI.
' Luth, op., t, 1, Diiput. de fJde, deJuitiCe,, de operib,
70 LUT
Taises actions lorsqu'il avait él^ juslilié par la foi. Ces conséquen-
ces entralnÈrenl Luiher dans mille absurdili!« , et dans mille con-
tradictions que M. BosEuet a relevées admirablement '.
Voili le vrai système , la Traie doctrine de Luther ; dans aea
disputes ou dans ses commentaires , il a adouci ses principes sur
rinulilitédes bonnes leuTres ; c'est une contradiction , et tout ce
que H. Basnage a dit à ce sujet ne prouve rien de plus *.
De ces principes Luther conclut que les sacremena ne produi-
saient ni la grâce ni la justification , et qu'ils n'étaient que des si-
gnes destinés à excit«r notre foi et i nous faire produire cet scie
par lequel leOdéledit : Je eroii que Jétut-Ckr'itt eit tnoTl pour moi.
Ce fut encore par une suite de ces principes que Luther re-
trancha du nombre des sacremens tous ceux qu'il ne jugea pas
propres à exciter la foi: il ne conserva que le baptême et l' eu-
charistie.
Ces principes de Luther sur la justification n'étaient point con-
traires au seutimenlde Luther surles forces morales de l'homme,
qu'il CTO jait nécessité dans toutes ses actions. Luther fondait cette
impuissance de l'homme sur la corruption de sa nature el sur la
certilnde de la prescience divine, qui serait anéantie ai l'homme
était libre.
De cette impuissance de l'homme Luther conclut que Dieu
faisait tout dans l'homme ; que le péché était son ouvrage aussi
bien que la vertu ; que les préceptes de Dieu étaient impossibles
aux justes lorsqu'ils ne les accomplissaient pas, et que les aeuU
prédestinés avaient la grâce.
Luther attaqua déplus tout ce qu'il put attaquer dansles dog-
mes et dans la discipline de l'élise catholique : il combattait le
dogme de la transsubstantiation, l'infaillibilité de l'Ëglise, l'anlo-
riié du pape; il renouvela les erreurs de Wiclef et de Jean Hua
sur la nature del'^lise, surles vœui, sur la prière pour les morts.
Toutes ces erreurs sont exposées dans la bulle de Léon X et
dans les arides condamnés par la Sorbonne,
Nous avons réfuté les en'eurs de Luther sur la hiérarchie, dans
l'article d'Aérius ; sur les vœux et sur le célibat , dans l'article
Vigilance ; ses erreurs sur l'Ëglise , dans l'article Donalistes ; ses
erreurs sur la transsubstanliation , dansl'arlicle Bérenger; Tussm
I Hisl. dn Variât*, l> t-
> RisL des ^liseï réformées,
LUT
71
delà çpinmunion sous les dcui espaces, dans l'a riicle Hussiica; *
son erreur sur le pape, ft l'arlirle Grecs. II nous reste h parler de
soD seDtimeDl sur la justiGcaiioa, sur les indulgences, sur les sa-
eremeos.
De lajuilifieaUm.
n n'j a peut-être poïatde matière sut laquelle ou ait plus Écrit
depuis Luther - dous avons expose comment Lutber fut conduit à
son sentiment sur U îustificiiion ; nous nous Gontenierans de rap-
porter ici ce que M. Bosauet eu dit dans son eiposi lion de la doc-
trine de rË(;lîsecatbolîque.
• rfous croyons, premitremeiit, que nos péchés nous sont re-
• mis gratuilemenl par la miséricorde divine : ce sont les propres
» termes du concile de Trente , qui ajoute que nous sommes dits
• justifiés gratuitement, parce qu'aucune de ces choses qui précë-
■ deDtlajusiificatiaa, soit la Foi, soit les œuvres, nepeuvent mé-
t» ijter cette grSee. (Cne. Trid., un. 6, e. 9, e. 2.)
^F ■ Comme l'Ëcriture nous explique la rémission des péchés,
^Kj UntAt eu ditaot que Dieu les couvre , laoïôt en disant qu'il les
H^ 6le et qu'il W eÔace parla grâce du Saint-Esprit qui dous Tiit
^^p BOUveUes créature» ; nous crojons qu'il faut joindre ensemble
^^â ces eipressîons, ponr former l'idée parfuite de la justification
^ » do pécbeur. C'est pourquoi nous croyons que nos péché», non-
> senleineut sont couverts, mais qu'ils sont entièrement effacés
■ par le sangde Jésus-Christ , et par ta grâce qui noua régénère;
> ce qui . loin d'obscurcir ou de diminuer l'idée qu'on doit avoir
■ du méritede ce sang , l'augmente au contraire et la relève.
»» Ainsi la justice de Jésu»-Christ est aon-sculement imputée,
nais actuellement communiquée à ses tiiléles par l'opéralioa
du Saint-Esprit , en sorte que nou-seulemenl ils sont éptu'ës ,
suis faits justes , par sa grlce.
• Si la justice qui est en nous n'était justice qu'aux jeax des
bommes, ce ne serait pas l'ouvrage du Saint-Esprit : elle est
donc justice même devant Dieu, puisque c'est Dieu qui la fait
• en nous en répandant la charité dans nos cœurs.
> Toutefois , il n'eit que trop certain que la chair convoite
• contre l'esprit, et l'esprit contre la chair, et que nous manquons
> tous en beaucoup rie choses; ainsi , quoique noire justice soit
'table par l'infu^ionde la charité, elle n'est point justice par-
;, i cause du combat de la convoitise ; si bien que le gémii-
n LUT
. semeni conliniiel d'ane tmù re]ieolanir de ses fautes Tait le
> devoir le plus nécessaire de lij'ustkecliréiieQiie , ce qui uoug
> oblige de confesser bumblemeiit, avec saini Augustin, que noire
. juslice en cette vie consiste plutûi dans la rémission des péclics
• que dan$ la perfection des vertus.
> Sur le oif-rile des œuvres, l'Ëglise catholique enseigne que la
I vie éternelle doit Être proposée aux eufans de Dieu , et comme
> une grSce qui leur est miséricordieusement promise par le
> moyen de Noire Seigneur Jésus-Christ , et comme une récom-
■ pense qui en fidèlement rendue & leurs bannes œuvres et i< leurs
. mérites, en vertu de celle promesse ; te sont les propres termes
I du concile de Trente. (Sess. 6, c. 6.)
• Hais, de peur que l'orgueil humain ne soit flatté par ropinioti
• du mérite présomptueux, ce même concile enseigne que tout le
■ prix et la valeur des œuvres chrétiennes protient de la grïce
• sanctifiante qui nous est donnée gmluitemenl au nom de Jésus-
K Christ, et que c'est un effet de l'influence continuelle de ce di-
K vin cher sur ses membres.
• Véritablement , les préceptes, les promesses, les menaces et
r les reproches de l'Ëvangile font assez voir qu'il faut que nous
•■ opérioDsnotre salut par le mouvement de nos volontés , avec la
" grâce de Dieu qui nous aide ; mais c'est im premier principe
- que le libre arbitre ne peul rien faire qui conduise ï la félicité
• éternelle qu'autant qu'il est mû et élevé par le Sainl-EspriL
" Ainsi , l'Ëglise sachant que ce divin Esprit lait en nous,
" par sa grice , IDUl ce que nous faisons de bien, elle doit croire
:' que les bonnes œuvres des fidèles soni trës-agréibles ù Dieu
' elde grande considéralton devant lui, et c'esi jusiemeut qu'elle
• se sert du mot de mérite, avec toute l'antiquité chrétienne,
- principalement pour signifier la valeur, le prix et la dignité de
• ces œuvres que nous faisons par la grïce. Hais comme taule leur
■> sainteté vient de Dieu qui les lait en nous, la même lïgtiscareçu
- dans le concile de Trente , comme doctrine de foi catholique.
» celte parole de saint Augustin , que Dieu couronne ses dons en
• couronnanl le mérite de ses serviteure..
• Nous prions ceux qui aiment la vérité de vouloir bien lire un
• peu au long les paroles de ce concile , afin qu'ils se désabusent
' une fois des mauvaises impressions qu'on leur donne de notre
" doctrine. ■■ Encart que noui myoas , disent les Pércs de ce con-
çue, gtir In tainlei Scrituret vilimennasl Us bonnet iriivrei que
M
I
LUT ,j
Jêtia-Chritl nout promet lui- m f me qu'un verre d'eau donn^ à un
pauvre ne tera pa» privé de ta récomprtue, et que fApilre témoi-
gne qu'un moment de peine légère, loufférle en ee monde, produira
un poidt éternel de gloire ; loutefoit à Dieu neplaite que le chrétien
le fie et te glurifle en lui-mime et non en Notre-Selgneur, dont la
bonté fit li grande enveri toiu le» homme», qu'il veut que le* dont
qa'il leur fait, Kient leurt méritei ! {S«ss. 6, c. 16 ; lesa. 14, c, 8.)
Det inàulgeaen.
II «i ceriain , 1 • qn'i! y a des peines qne les jtute» expient
après cplle rie.
S* Que le* fidèles prient pour que ces peines soient reniices ,
el que Dieu écoute leurs prij^res; que les anniOnes , les morljfica-
lîons îles Tivant, sont utiles au souUgeraeol des iioes qui sont
dans le pui^tnire.
3* llestceriainque les justes de tous les siëcles font avec l'Ë-
glise TÎsttile uQP société unie par les liens d'une chariiè parfaite,
et dont Jésus-Oirisl est le clier; qu'il ; a dans celle société un
trésor infini de mérites capables de salisfaire la justice divine.
i' Ces moites peu lent obtenir, pour ceux auxquels ils sont ap-
pliqués , le reUchemenl des peines qu'ils sont obligés de pijcr
dans t'aotre vie. C'est uu point qu'il n'est pas possible de contes-
fer : on en trouve la preuve dans la peine que saint Paul remit il
l'inccstuetu de Coruulie ; dans l'usage de l'ancienne Église, dans
laquelle on priait les Gdèles d'accorder aux chrétiens des indul-
gences qui pussent les aider auprès de Dieu.
b' Toute la question des indulgences se réduit donc ï savoir SÎ
trËglise a le pouvoir d'appliquer ces mérites pour exempter les
l^èles des peines qu'ils ont encourues et qu'ils seraient obligés
■4» subir dans le purgatoire.
6" L'Ëglise a le pouvoir d'absoudre des péchés ; tout ce qu'elle
ddie sur la terre, est délié dans le ciel; elle a donc le pouvoir
d'employer (ont ce qui peut délier les peines de l'autre vie ; et
comme l'application des mérites de Jésus-Cbrist et des justes est
nn inojen de remettre les peines du purijutuire , il est clair que
l'Église a le pouvoir d'accorder des indulgcaces.
On peut voir dans tous les auteurs qui ont traité des indulgen-
ras que l'Église a dans tous les temps accordé des indulgences.
Vê concile do Trente ne projiose autre chose i croire sur les in-
74 LUT
Julgeocès, sinon que la piiUsunce de les accorder a été donnée k
l'Église par J feus-Christ , el que l'usage en esi salutaire ; à quoi
ce concile ^oute qu'il doit £tre retenu avei; modération , loute-
foii, de peur que la dÎMiipliDe ecclésiastique ne soit énervée par
une excessive facilité. (Conc. Trïd. ci>nlin. sess. 2S, De indalg.)
Les erreuTB de Luther sur les sacremens ont e
objets : la nature des sacrcmens, leur sombre cl li
De la nature iet lacreraent.
Sur laoalure dessacremens, Luther et tous ceui
cenfetston d'Augsbourg préiendeni que l'eBîcaciié des s
dépend deinfoidecelui qui les re^it; qu'il n'ont été instîloégqae
poar nourrir la toi, et qu'ils ne donnent ]>oini h griice k ceux qui
n'j mettent point d'obstacle.
Cette erreur de Lutlier est une snîie de spï principes sur la
juatiflcatton ; car si l'homme n'est jastilié que parée qu'il croît que
les mérites de Jésus-Christ lui sont appliqués , les sacremens ne
sont que des signes destinés k eiciler notre foi , et ne produisent
par eux-mêmes ni la grice ni la jastiBcatiou.
Ce qui sinctifie l'homme étant un don du Saint-Esprit , n'esl-il
pas possible que Dieu ait fait une lui de n'arcordm- celte gHIce,
ce don du Saint-Esprit, qu'a ceui sur lesquels on opi'rcrail les
sipes qu'on appelle sacremens , pourvu que ceux auxquels od
appliquerait ces signes ne fussent pas dans certaines dispositions
contraires au doo du Saint-Esprit f Cette supposition n'a rien qui
déroge \ la puissance on h h sagesse de Dieu.
Dans celte supposition , il est certain que ce serait ï l'applica-
tion du signe que la grâce sanctifiante serait altaeht^ , et que jiar
conséquent ce signe produirait par lui-même la grïce sanctifiante.
Laissons aux écoles h eiaoïiner s'ils la produisent pbjsiquemcj il
ou moralement ; il est certain que , dans la supposition que nous
avons faite , la grJlce serait donnée toutes les fois que le signe
serait appliqué; que par conséquent la grâce sanctitiante serait
attachée i ce signe , comme TelTel ti sa cause , au moins occa-
sionelle.
Il ne faut pas croire que l'Église enseigne pour cela que les dis-
positions sont inutiles dans la réception des sacremens ; elle pré-
leod seulement que les dispositions sont des conditions néces-
tCT
"
t
■ recevoir h grâce , el qu'elle o'est p:i« aiiaclifc i
coDiliiions : c'est uiasi que, pour toïr, c'esl une coixiition néces-
saire d'avoir des jeui; mais quoiqu'on ïit des jeui , ou ne Toit
poisl daas les ténèbres : il faut de U lumière , qui eil li vtûa
cause qui nous fait voir.
On n'entend rien autre chose lorsqu'on dit que les sacremeu '
produisait U gr&ce u opère operalv , ei non pas ex optrt op*-
Celle docuine esl la doctrine de l'aniiquilé chrétienne, qui a
toujours aliribué aux Mcreniens une Truie ellicice, une Teriu
produclrice de la suocliticalioD : il faudrait o'aToir jamais lu les
Pères pour le contester.
Les catholiques croient que deux des sacremens produisent
dans rime une manjue iaelTaçable qu'on DOmme earaclëre : esl-il
impossible que Dieu ait établi une loi pur laquelle, un sacrenent
étant couréré t un homme, il produii dans l'àiue de cet homme
une eenaine disposition fiie et pcrmaneote? C'est ce que toute
l'antiquilè suppose que le bapiëine, la conlirmuion et l'ordre
produisent.
Les dispniM das théologiens sur In nature de ce caractère n'en
rendenipas reii«te«ic«doDleuie, comme Fra Puulo lUcbederinsî-
nuer : j'aimerau autant qu'oD mit en doute l'eiisieDce d'un phé-
nomëse reooniui par tout te monde purce que les physiciens ne
s'accordent pu sur b mtiùËre de l'eipliquer. Celte tnéibode,
pour le dire en passant , esl presque toujours employée par Fra
Paolo ; non qu'il n'en sentit la Taiblease et l'iDJusIice, uni» il sa-
Tait qu'elle plairait à tous les lecteurs superSciels.
Du nombre det lanrtmetu.
\t sacremens : le
La conresrion d'Augebourg nereconnatt que tr
Lapl^me , la cène et h pénitence.
L'ËgUse catholique recoanaissaît sept saeremens lorsque Lit-
ilier parut : toutes les Ei;lises schiEmatiques béparées del'Ëglise
romaine, depuis les Aiiens jusqu'il nos Jours, ont conservé le
même nombre de sacremens ; nous l'avons fait voir dans les articles
Eutychiens, Nesloriens, Grecs, Arméniens, lacobites , Cophie»,
Abvisins. La doctrine de l'Église sur les sacreioens n'a donc pas
(■!(■ introduite par le» papes , comme les ennemis de l'église
prétendent.
Dit miitUire àes lacreinen».
Luther et tous les rf rormés ont jiréleodu que tous lus fidèles
étaient ministres des saci^mens. Nous n'entrerons point dans
l'eiamen de tous les sophismes qu'ils font pour établir ce senli-
ment ; nous de ma microns seulement s'il est impossible que Dieu
n'ait attaché la gr&ce aux signes qui fout la partie visible du sa-
crement qu'autant que ces signes seront appliqués par un certain
ordre d'hommes et dans certaines circonstances f Si cela n'est pas
impossible , ce n'est pas une absurdité dans la doctrine de l'Ë-
glise calboliqne que tous les fidèles ne soient pas les ministres des
sacremens : l'Eglise catholique appnie son sentiment, par rapport
aux ministres des sacremens , sur toute l'antiquité ecclésiastique.
Luther a prétendu , non-seulement que tout fidèle était ministre
légitime de tous les sacremens , mais encore que les sacremens
administrés en boufTonoant et par dérision n'étaient pas moins de
vrais sacremens que ceux qui s'administrent sérieusement dans
les temples : c'est encore une conséquence qui suit du principe
de Luther sur la justiticalion , et qui est une absurdité.
I>e signe ou la partie seasitile du sacrement ne produit la grSce
que parce que Dieu a fait une loi de l'attacher à ce signe institué
par JésoB-Christ ; ce signe ne produit donc la grlce qu'autant
qu'il est le signe institué par Jésus-Clirisl pour produire la grâce
dans l'Ëglise clirélienne ; il faut donc que ce sacrement soit eu
elTet administré dans des circonstances ofi il sait censé un rit ou
un sacrement de l'Ëglise chrétienne.
Du sacrifice de la mtue.
L'abulilion de la messe fut un des premiers objets de Luther:
nous ne parlerous point ici des cliangemeos qu'il fit dangla messe;
nous ne parlerons que de l'abolition des messes prlrées , qu'il
condamna en supposant que les catholiques leur attribuaient la
ïeriu de remettre les péchés sans qu'il lût nécessaire d'j appor-
ter ni la foi , ni aucuu bou niauvcmeiil. Nous ne croyons pas pou-
voir mieux réfuter cette erreur qu'en exposant la foi de l'ËIglise
cttbolique sur ce sujet : nous tirerons cette espositiou de U. Bos-
Les~puissanles du Fils de
, noLfs crujuns avec rat-
■ Etant convaincu que les paroles ti
• Dieu opèrent tout ce qu'elles éuonci
LUT ^ TT
» Eon qu'elles eurent leur effet dans h cène aussiiâi qu'elles Turent
,, ei par une suite Déoessaîre nous reeon naissons U'
■ présence réelle du corps avintli manduc
> Ces ctiosee étant supposées , le sacrifice qui! nous reconoai»-
■ sans dans l'eucharistie n'a plus aucune difticnlté particulière.
t Nous avons remarqué deux actions dans ce mystère, qui ne
> Uiiscnl pas d'être distinctes, quoique l'une se rapporte ï l'autre:
> la première est la consêuraLion , par laquelle le pain et le vin
> sout chaiigùs au corps et au sang , et la seconde est U mandu-
> cation , par laquelle on j participe.
• Dans la coosécration , le corps el le sang sont mystérieuse'
■ ment sépari^s , parce que Jésus-Chrïst a dit séparément : Ceci eU
mon corpt, ctci ttt mon sang ; ce qui euferme une vive et eOi-
nee représentation de la mort qu'il a soulTerie.
> Ainsi le Fils de Dieu esi mis sur la sainte table en vertu de
^. ces paroles , revêtu de sigues qui représeuient sa mort ; c'est ce
■ qu'opère la consécration , et cette action religieuse porte avec
il la reconnaissance de la souveraineté de Dieu , en tant que
^ Jésus-Qirist présent y renouvelle et perpétue en quelque sorte
a, la mémoire de son obéissance jusqu'à la mort de la croix , si
W* bien que rien ne lui manque pour être un véritable sacrifice.
« peut douter que cette action , comme distincte de la
• manducalion, ne soit d'elle-même agréable i Dieu et ne l'oblige
is regarder d'un a:il plus propice , parce qu'elle lui remet J
> devant les yeui son Fils même , sous les signeà de cette mort |
t par laquelle il a été apaisé.
• Tous les chrétieus eonlesseront que la seule présence de Jd* 1
• sut-CLrist est une manière d'intéresser très-puissanic devant I
■ Dieu , pour tout le geore humaio , selon ce que l'apûtre dit ,
• que Jésus-Christ se présente et panlt pour nous devant la Tacs
• de Dieu : ainsi nous croyons que Jésus-Christ (irésent sur Ut
• sainte table, en cette Bgnie de mort, intercède pour nous et
• représente con lin uelle ment i son Père la mort qu'il a soulTerta |
• pour son Ëglise.
• C*esl en ce sens que nous disons que Jésus-Christ s'oiïre k
• Dieu pour nous dans l'eucharistie; c'est en celte manière que
r nous pensons que celte ablation fait que Dieu nous devient plus .
> propice , et c'est pourquoi nous l'appelons propitiatoire.
• Lorsque n
3 eonsidéroDS ce qu'opère Jésus^brist dans ca I
us, pur la fui, présent actuelli}- J
< le ¥
78 , LUT
■ meot Ror la tu'mit table, avec ce» slgiiM de mort . nous nons
• unÎMODS b lui en cei eut ; nous le préseniuos A Dieu comne
B notre unique victime et notre unique propitiaieiir par sod sang,
> prolestaol que nous n'avons rien â oITrirà Dieu que iésus-Cbrist
• et le mérite infini <le sa mort. Nous consicronj toutes nos prières
• par celte divine oITraiide ; en présentant Jésus-Clirist t Dieu ,
• nous apprenons en môme temps ï nous oiTrir â h majesté diiine,
■ en lui et par lui, comme des hosties vivantes.
> Tel est le sacriSce des chrétiens, influiment dilTércot de
• celui qui se pratiquait dans U toi ; tacrîlicc spirituel et digne de
• la nouvelle alliance , ob la victime présente n'eit aperçue que
• par la loi , oti le glaive est la parole qui séparo mjitiquement
• le corpi et le sang , oh ce sang , par conséquent , n'est répandu
• qu'en nijrstère, otI Is mort n'intervient que par représentation;
" sacrifice néanmoins trës-véri table en ce que Jésus-Christ y est
• véritablement contenu et présenté b Dieu sous cette figure de
• mort ; nais sacrifice de commémoration qui , bien loin de nous
• détacher, comme on nous l'objecte, du sacrifice de la croix, nous
> j attache par toutes ses circonstances, puisque non-seulement
• il s'y rapporte tout entier, maisqu'eneret il n'esieinesnbsiste
■ que par ce rapport , et qu'il en tire sa vertu.
• C'est la doctrine expresse de l'Église catholique dans le con-
• cite de Trente , qui enseigne que ce sacrifice n'est institué qu'a-
■ Sn de représenter celui qui a été une fait accampH en la croix;
• d'en faire âarer la mtiMirt Juigu'i ta fin des ^ieiet , et de nou*
• en appliquer ta vertu salulaire peur la r^Tmltstan dei p/eMs que
B nouê eommeltont tout letiaiiti. Ainsi, loindecroîrequ'il manque
I quelque chose au sacrifice de la croix , l'Eglise , au contraire ,
• le croit si parfaitement et si pleinement sufllsant, que tout ce
» qui se fait ensuite n'est plus établi que pour eu célébrer la mé-
• moire et pour en appliquer la vertu.
• Par-li cette même t^lise reconnaît que tout le mérite de la
> rédemption du genre humain est attaché k la mort du Fils de
• Dieu ; et on doit :>voir compris , par toutes les choses qui ont
» étéeiposécs, que, lorsque nous disons ï Dieu, dons la célébra-
• lion des divins mystères, Noiti vovt prétentoni cette hoêltetainle,
■ nous ne prétendons point , par cette oblatioo , faire ou présen-
> 1er k Dieu un nouveau paiement du prix de notre salut, mais
■ employer auprès de lui les mérites de Jésus-Christ présent et le
■ prix infini qu'il a payé une fois pour nousen la croix.
LUT
1> Uesueura de la religion prétendue réformâe ne croicni point J
offenwr Jésus-Cliriïl ea ruffraol i Dieu oomme préMnt h leor I
foi : ei s'ils crof aient qu'il fût présent en elTel , quelle rApu> I
i > goimce Riitaièai-ils ï l'oOrir comme élant efieciivemeat prêtent T
• Ainsi, toute la dispois devrait de bonne foi élre réduite i 11
> seule pràience. > Uouuet , ExpotiHan dt ta doctrine ealholiqu» ,
an. U,
Cette présence réelle est reconnue par les Luihtrieni , et nous
l'avons prouvée contre les Sacraoïeoiaircs , à l'art, BIÏriiioeii.
Luther, en atiolÎMani les messes privéei , conaerva U messe et
n'y Cl que peu de ohangement. L'abolition de lamecsefutlelk'uit
d'une conférence de Luther avec le Diable, qui le cooTalnquit dt
la nécessité de l'abolir : oelte conTérenca as (roun dus l'aunag* j
de Luther atir la messe privée, 1
Itéffeneni générale$ nr la réform» établit par ÙMther. l
Lorsque Luther itiaqua les indulgences , il s'était introduit de |
grands ibus dans l'Église i il était nécessaire de les réfonneri I
c'est une vérité reconnue par les catholiques les plus zélés. Uût
l'Ëglise catholique n'enseigtiait point d'erreurs, et sa morale était
pure : on a déOé cent fois les Protesians de citer un dogme au un
point de discipline contraire aui vérités enseignées dans les pre-
miers BJMles ou opposé k la pureté de la morale évangéliquc.
On pouvait donc se garantir des abus et distinguer la morale
de l'Lvangite de la corruption du siècle , laquelle , il faut l'a-
vouer, avait étrangement ioTetlé lou.i les ordres de l'Ëglise , qui
!ndaut ne fut jamais destituée d'exemples éclataus de vertu I
de sainteté. I
Une intinité de personnes , plus savantes que Lutber et d'une
piété émîuenle , souhailaîeut la réforme des abus et la demaO'
datent ; mais elles croyaient que c'était !i l'Église mâme i procu-
rer celle réioruie , et que la corruption même du plus grand
nombre des membrea de l'Église n'auiorisait aucun particulier k
faire celte réforme.
Il n'j avait donc aucune raison de se séparer de l'Église lorsque
Lulher !<'«» sépara, ha réfonne que Luther établit consistait !i dé-
truire toute la hiérarchie ecclésiastique, i ouvrir les cloîtres cl k
lîceucier les moines ; il enseigna des dogmes qui, de l'aveu de ses
fMUMnrs miCDcs, démûsuenl le« piincipes de la morale el s»-
de 1
^V ««uei
M«(pei
ir U prédesli-
Le droit qu'il donnait ï chaque chrËlleo d'interpréter l'Ëcri-
Utra et de juger l'Ëglite fut, sinon la cause , au moins l'occa-
gion de cette Foute de sectes fanatiques et insensées qui désolèrent
l'Alleniagne et qui renouïelÈreni les principes de Wiclef , si con-
inifes i la religion et kl» tranquillité des États. Veyei l'article
A.1ABkl>TISrES.
Luther entreprit celle réforme sans autorité, sans mission, suit
ordinaire , soit extraordiiiiiire ; il n'avait pas plus de droit qui)
les Anabaptistes 1 qu'il ri:ru1ail en leur demandant d'ob ils
avaient reçu leur mission ; il n'aTait mis dans sa réforme , ni la
charité, ni la douceur, ni même h fermeté qui curaclérisent un
homme envoyé deDicu pour réformer t'Ëglise; son emportement,
sa dureté , sa présomption, révoltaient tous ses disciples ; il avait
violé sesTffiui, et il s'était marié scandaleusement; il avait auto-
risé ta polygamie dans le landgrave de Hesse ; ses écrits n'ont ni
dignité , ni décence , ils ne respirent ni la cliaritë , ni l'amour de
la vertu ; il s'abandonne avec complaisance aux plus indécentes
Ce ne sont point îd des déclamaiiuns : ceux qui ont lu tes ou-
vrages de Luther et l'histoire de sa réforme , même dans les Pro-
teslans, ne m'en dédiront pas, el j'en atteste les PratesUins
modérés, les lettres de Lutlier, ses serinons, ses ouvrages, Mé-
lanchton et Erasme.
Il s'est élevé parmi les Luthériens beaucoup de disputes; du
temps de Luther, el après sa mort, les théologiens luthériens
dressèrent plusieurs formules pour I3cber de se réunir, mais inu-
tilement. Indépendamment de ces divisions , il s'éleva des chefs
de sectes qui ajoutèrcul ou retranchèrent au\ principes de Luther,
ou qui tes modifièrent : tels furent les Crypto-Calvinistes, lesSj-
nergistes, les Flsvianisles , les Osiandrisles, les Indifférens, les
Stancaristes, les Hajoristes, les Autlnomlens, les Syncrétistes ,
les Ullléuaires , les Origénistes , des fanatiques et des Piétisles.
Nous allons en donner une notion.
Det sectes qui se sml ^Icvift» parmi les Luthérieai.
1° Le Crypto-Calvinisme ou Calvinisme caché : Mélanchton en
fut la pi'euiiëre source ; changeant , timide, trop philuM>plie d'ail-
, <lit II
LIT
ir lulhérien , et raisant trop de c:
81
^ Titimainrs , la correspondance qu'il entreiiol itcc Buoer cl [)ulliii~
ger le disposa Irop avantageusement en teur faveur : ses disciples,
dont il eut un Ir^-grand nombre, adoplèrenl ses sentimens, el
h vilte de n'itiemberg Tat remplie de gens qui , sans vouloir
prendre le nom de diiîciples de Culvin , prolessaieni et ensei-
gnaient ouvertement sa doctrine.
La même chose eut lieu i Leipsick el daos tout l'élecior.it do
Saxe pendant que les Ëtals de la brandie Erncstine ou atnée con-
servèrent la doctrine de Luther.
Enfin Auguste, électeur de Suxe , persuadé par plusieurs dis-
ciples (le Mélancliiun qui trouvaietit que leurs compagnons allaii:nt
trop loin , mit en œuvre des moyens très- efficaces pour détruire
le Calvinisme; ces moyens furent d'emprisonner et de déposer
ceux qui renseignaient et qui le favorisaient : quelques-uns furent
fort long-temps en priMin , d'autres y moururent ; mais le plus
grand nombre sortit el de prison et du pays.
C'est U. Wakb, docteur luthérien , qui nous apprend comment '
les premiers réformateurs traitaient ceux qui ne pensaient pu i
On n'en nsa pas autrement d'abord en France envers les pre- <
s Luthériens, quoiqu'il attaquassent la religion callioliqua *
Il que l'bomme pouvait contribuer ei
: Mélanchton peut encore passerpour
contraire aux principes de Luther*.
ir dans laquelle Malhias Flavius , sur-
oinié llljricus , tomba d'abord par précipitation el sans mau-
e intention , et dans laquelle il persévéra par entêtement : il .
HÏt que le pécbé originel était la substance même de l'honinie.
ledoclrine, tout insoutenable qu'elle est, trouva dessectaieurs;
e par les comtes du Uansfeld '.
\* Les Osiandrisitis, disciples d'Adrien Osiander ; il se signala
li les Luthériens par une opinion nouvelle sur la justiiicatioa :
il ne voulait pas, comme les autres Prolestsns, qu'elle se fit par i
l'imputatioti de la justice de Jésus-Christ, mais par l'iu
* Bibl. gcrm., I. i», art. fl.
ï' Les Sjnergisti
idque chose â sa I
initeur de celle doctrine ,
L 3* Le Flavianisme,
«I LUT
de la JUSIÎC6 ïub»l*i)tieile de Dieu avec nos imts; il se fondaii
sur coa paroles Koofeiii répéiéei en Isaïe el en Jéréiuie : Le Sei-
çiuur eitvaire JMliix.
Selon Osiaoder, de raCme que nous tivong par la lit subaUs-
lîdle de Dieu, et que nous aimons par l'amour esseniiel qu'il a
pour lui-même, aussi nous sommet; justes par Injustice essentielle
qui nous est communiquée ; k quoi il fallait ajouter la substance
du Verbe incarna, qui était en nous par la foi, par la parole et
par les sacrement.
Dès le temps qu'on dressa la confession d'Augsbourg, il avilt
Tait les derniers elTorti pour làire embrasser cette doctrine par
tout le parti, et il la soutint atec une audace extrême ï la hce
de Luther.
Dans l'assemblée de Smiica de, on fut étonné de sa lémérité;
mais comme on craj^tnail de faire éclater de nouvelles divisioDS
dans le parti, oji il teuail uu rang considérable par son savoir, on
le toléra.
Il avait un talent tout particulier pour di*erlir Luther; tl fai-
saii le pltiuDi I table el j disait de bons mots souvent très-pro-
fanes. Calvin dit que toutes les fois qu'il trouvait le vin bon, il
faisait l'éloge du vin , en lai appliquant cetl« parole que Dten
disait de lui-même : Je »uit etlni ;ulfH<«, to» mm qui wn;
ou ces autres mots : Voici U Fili du Dieu vimitl.
Il ne fut pas plus lût en Prusse, qu'il mit en feu rUaiversit^de
K(eaîgsberg par sa nouvelle doctrine sur la justification; il par-
tagea bieniAt toute U province '.
ït Les Indilférens, c'esl-Ii-dire les Luthériens qui voulaient
qu'on conservait les pratiques de l'Ëglise romnine.
La dispute sut ces pratiques fut poussée avec beaucoup d'ai-
greur : Hélanchton, soutenu des académies de Leipsick et de Wit-
lemberg, ob il était tout- puissant, ne voulait pas qu'on retran-
cbiit les cérémonies de l'Ëglise romaine ; il ne croyait pas qae,
pour un surplia, pour quelques féiei on pour l'ordre des leçons,
il fallût se séparer de la communion.
On lui &t un crime de cette disposition i la paix, et on décida,
dans le parti luthérien, que les choses absolument indifTéretites
seraient absolument retranchées, parce que l'usage qu'on en fai-
> Hiat. des variaL I. 8, art. ià. Seckendorf, Hial. du Lulli, Slock-
miin, Bibl gcrninu,, loc cil.
tvr
sait était coolrure i la tiberié de l'ÉgUscct reoTermait, Jigait-oD,
iiue espèce de profession i)e pspitiue '.
G' Les SUucarîstes, disciples <te Fr9ini;ois Stsncar, ni i Uaa-
iDUe e( prolesHur tutbérien dans l'Académiv de Rojamort, en
Prusse, Tan 1551.
Osiandcr aiait smimd qne l'homiM éuît justifié par U justice
essentielle de Dieu; Suocar, ta combattant Osiander, soutint au
contraire que Jéâus-Christ n'était notre oiédiateur qu'en tant
qu'homme *,
7* Les Uujoristei, disciple* de George lljjor, professeur dans
l'Académie de Wiliemberg, en 1536.
UélaocliIOD aiait abiadonaé les principes de Lutber sur le li-
bre arbitre ; il ïTaîl accordé quelque force i U natui'e bumaine et
arail enseigné qu'elle cotkcourait daas l'ouvrage de la conversioD,
mËnw dans no infidËle.
Major avait poussé ce principe plus loin que Mélanchton et
avait eipliqué comment l'homjue inSdéle coDCUurail k l'ouvrage
de sa conversion. Il faut, pour qu'un inbiiële sf couvei'tiise, qu'il
prête l'oreille ï U parole de Dieu; il faut qu'il la comprenne et
qu'il la reçoive: jusque-lï tout est l'ouvrage delà volonté; mais
lorsque Vliomme a reconnu la vérité de la religion, il demaude
les lumières du Sainl-EIsprit et il les obtient. Uujor renouvelait
en partie les erreurs des Semi-Pélagicns et prétendait que les
(Fuvrn élaieiu nécessaires pour être sauvé, ce qui est coutraire
à la doctrine de Luther, qui convient bien que les bounes œuvres
MMtt nécexiaires camoie preuves ou plutôt comme effet de la uun-
Waiun, mais noi pas comme moyens °.
■^ 8* Les Antinomieos, c'est-ï-dire opposes ï U loi. Voye* l'arti-
f «le Agmcola.
9* Les SjTBcré^tes, c'est-t-dire Pacilicateurs, dont Toiin tV
il s'était élevé une foule de sectes parmi les nouveaui réforma-
teurs : pour des hommes qui prétendaient 6tre dirigés par des lu-
mières exlraordiuaires, celte division était le plus graud des em-
iMrras et une difficulté accablante que les catholiques leur
af[|Kuiient. On cberclia donc i réunir touLus ces branches delà
84 LUT
Informe, Dlaîs itiiitilenieni ; chaque sec le regarda les Pacîfica-
leurï comme des Lommes qui trïbissiieni la térité et qui la &a-
crilJaieni lAchement t l'Hiiioiir de la tranquillité. Toutes les sectes
réformées se baîssaienl et se damoaleot les une» les autres,
comme elles Laissaient et damnaient les catholiques.
George Galixte fui ua des plus lélés promoteurs du Syncré-
tisme, ei il Tut attaqué par ses ennemis atcc un emportement ev
lO- Le Ilubérianisme, ou la docirioe de Iluber.
Huber était originaire de Berne et professeur en tliéologie i
Wittembcrg, ïers Tan 1S92.
Lutber avait enseigné que Dieu déterminait les bomme.s au mal
comme au bien , ainsi Dieu seul prédestinait l'homme au salul ou
i la damnation, el tandis qu'il produisait la justice dans un petit
nombre de fidèles, il dëlerminail les autres au crime et ù l'impé-
lluber ne put s'accommoder de ces principes; il les troura
contraires à l'idée de la justice, de la bonié et de la miséricorde
divine, 11 trouvait dans l'Ëcriture que Dieu veut le salul de tous
les hommes ; que comme tous les hommes sont morts en Adam,
lous ont été vivifiés en Jésus-Cbrist. Uuber pril ces passages
dans ta plus grande étendue qu'on pouvait leur donner el en-
seigna, non-seulement que Dieu voulait le salut de lous les
hommes , mais encore que Jésus-Christ les avait en elTet tous
racheté», el qu'il n'y en avait point pour lesquels Jé5us-Chrisl
n'eût satisfait réellement el de laii; eu sorte que les hommes
n'étaient damnés que parce qu'ils lumbaienl de cet étal de jus-
lice dans le péché par leur propre volonté et en abusant de leur
liberté,
Ilnbcr fut chassé de l'Université, pour avoir enseigné celle doc-
11" Us Origénistes, qui parurent sur la fin du dernier siècle.
H. Pélersen et sa femme publièrent que Dieu leur avait révélé quA
les damnés et les démons mêmes seront un jour amenés par la
grandeur et la longue durée de leurs peines !i rentrer dans le de-
voir el ï se repentir sincèrement, it demander et i rerevoir grlce
de Dieu, tout cela en vertu de la morl el satisfaction de Jésiu-
' Bibl. i;<'rm. Stoclimati, loc. cil,
n;t
L
6iJ
tliri»! ', ce qui disllogue te scnlimeni des OrigL-nislcs luiltijrleuig
'àe celui des Sociniens sur eel objel '.
IS" Les Uilléaaires, qui renouvelèreal l'erreur des ancicas mUfl
[paires. Yogeicel article.
13- Les Piéiiates, secte de décais luiliérieDs, (]ui prétead
le le LutUériinisme a besoin d'uue Douvellc réforme : ils s«
liaient illaniipës ; ils ont renouTelë les erreurs des Hillénjirei
'et plusieurs autres.
M, Spéner, patteur ï Francforl, est l'auLeur de celte secte.
Dans le leiups qu'il demeurait â Francrort-sur-le-MeiD, eu 1670,
ily établit un collège de piétù dans sa uialson, d'oii il le Irans-
porla dans une Ëglise.
Toutes sortes de gens, liouinies, remnies, étaient admis i cette
assemblée : U Spéner raisail un discours édifiant sur quelque
passage de l'Ëcrilure, après quoi il permetlait aux liommes qui
étaient présens de dire leur sentiment sur le sujet qu'il avait
traité.
Quelques anuées après (1075), U. Spéiier lit imprimi
pr^race il la léte du recueil dps sentions de Jean Arnold ; daiM
préface, il parla forlement de la décadence de la piété dam
„ Ise lulbérienne ; il prétendit même qu'on ne pouvait
théologien si l'on n'était exempt de péclic.
U. Sfiéoer paisa, en 1686, h Leipsick, et alors se Turmalccot- ]
'lége des amateurs de la Bible, qui établirent des assemblées par-
[Ijculières destinées it expliquer certains livres de l'Ëcriture sainte
la manière la plus propre i inspirer de la piété i, leurs audi-
lears. La faculté de théologie approuva d'aburd ces assemblées ;
maisbientût le bruit se répandit que ceux qui parlaient dans ces
assemblées se servaient d'expressions suspectes, et on les désigna,
~ bien que leurs partisans, par le nom de Piél'Mei, Ou en parla
dans les chaires; la faculté de théologie désapprouva ces assen
elles cessèrent.
H. Cbajus, proiesseur en théologie i Giessen, furma des v
'kemblées, ï l'imitation de M. Spéner.
En 1690, H. Mayer, homme vif et plein de zèle, proposa no
formalairc d'union contre les Aoti-Scripturaires, les faux phi-
losophes, les théologiens relâchés, etc.
H. Uorbiuscl plusieurs autres refusèrent de souscrire ce for- |
■dans
kemb!
ês LUT
maliîre, lurtout parce qu'on le proposait ï l'Insu du magisirit :
sur Mi enlrefiiles, il recommaDda le IWra de H. Poirei sur l'é-
iluctiion des enfaos, intitulé la hradence dr.t fuilei, livre daus le-
quel on prétendait qu'il y avait des principes Tort dangereux ; on
souleva le peuple contre Horbius et contre les Piétisles, et Uor-
biusTut obligé de sortir de Hambourg.
Cependant le Piétisme se répandait en Allemagne, et, ï mesure
qu'il s'étendait, les points de contesta lï on se multipliaient; maïs
il paraît qu'il javaitdu malentendu dans toutes ces rontrovenes.
II paraît certain que le fanatisme s'introduisît dans les assem-
blées des Piéiistes, qui Turent composées d'hommes, de Teiumes
de tous élnts.de tout âge, parmilcsquela il y avait des tempéra-
IX, mélancoliques, qui produisirent des fanatiques et
Les Piétistes en général toléraient dans
les dîlTÉrens partis, pourvu qu'on eût de la cbarilé et que l'on TOI
bienfaisant : ils cstimBÏtnl beaucoup plus les fruits de la Toi (se-
lon la doctrine de Lutlier], tels que la justice, la tetupérante, la
bienfaisance, que la foi même.
Les points fondamentaux du Piétisme étaient : 1° que la parole
de Dieu ne saurait être bien entendue sans l'illumination du
Saint-Esprit, et que le Saint-Esprit n'babitanl pas dans l'ime d'un
méchant homme, il s'ensuit qu'aucun méchant ou impie n'est ca-
pable d'apercevoir la lumière divine, quand même il posséderait
toutes les langues cl toutes les sciences.
3° Qu'en ne saurait regarder comme indiQérentes certaines
choses que le monde regarde sur ce pied : telles sont la danse,
les jeux de cartes, les couversationa badines, etc.
On a beaucoup écrit en Allemagne pour et contre celte secte.
Yove^la Bibliothiqueffrmanique, t. 26, nil.ii;eiStockmaa,Ltii-
con ha^retium, au mot PisTisTf.
14° Les Ubiquiles ou Ubiquitaircs, Luthériens qui croient
qu'en conséquence de l'union hfpostatique de l'huuianilé avec la
divinité, le corps de Jésus^^hrisl se trouve partout oit la divinité
se trouve.
Les Sacrameniaires et les Luthériens ne pouvaient s'accorder
sur la présence de Jésus-Christ dans l'cudiarislie : lesSacrtmeu-
taires niaient la préseuce réelle de Jésus-Christ dans l'eucbarislir,
parce qu'il était impossible qu'un même corps IVit duns plusieurs
licui i la fois.
MAC 8Î
ffajlré et qnelqup!: autres I,ulli£riens répondirent que rtiuma-
BÏié de J^us-<^hrigl étant unie au Verbe, son corjis était partout
[ avec It divinité.
HéUnchlon opposait lui Ubiquités deuldiflicull^a insoluble*:
r Tune, que cette doctrine coorondait les deux natures de Jâsus-
Cbrist, le faisant immense, nou-seuleraent selon la divinité, mais
' encore selon son humanité et même selon sus corps ; l'autre,
_u'elle détruisait le mystère de l'cucliarislie, à qui ou ôlail ce
qu*il avait de particulier, si Jésus-CLriil, comme homme, n'j
' filait présent que de la m£me maoifire dont il l'est dans le bois
> ou dans les pierres.
Nous passons sons silence d'autres sectes obscures : on peut
voir, dans un ouvrage do M. Walch, l'histoire plus étendue de
ces dilTérenles soctes formées dans le suin du Luthéranisme, at
toutes produites par quelqu'un des principes de ce réformateur.
llnefautpaï oublier qu'indépendamment de ces petites seclei.la
rérorme de Luther produisit t'Arianisme et l'Anabaplisme, comme
Ou peut le voir dans ces articles.
MACÉDOrill'S, évoque de Cunstaniioople, qui nia la divinité
du Saint-EspriL
Après la mort d'Aleiandre, évéque de Consiantinople, les dé-
' feijseurs de la consubstauti alité du Verbe élurent pour successeur
[ Paul, et les Ariens élurent Macèdnnius.
Conslaoce cliasja ces deux cont-urrens et pla^a EusËbe de Ni-
[ oomédie sur le siéf e de Coostanlinople.
EuiËbe Ëlani mort, Paul et Hacédonius furent rappelés, chacun
' par leurs partisans, et bicotût on vil dans Cunstanlinuple des in-
' Uigues, du Iruuble et des séditions.
Constance envoja Hermogène ï Constanlinople pour chasser
Paul : le peuple l'j opposa, prit les armes, mit lo feu au palais,
traîna llermogéoe dans les rues et l'assomma. L'empereur se ren-
, dit il Consiantinople, chassa Paul et priva la ville de la moitié du
I blé que l'on distribuait aux babiuna ; il ne fît mourir personne,
1 parce que le peuple alla au devant de lui pleurant et demandant
1 pardou.
L'empereur , qui attribuait une partie du désordre i Macédo-
t BÎus, ne voulut point conllrmer son élection, et lui permit seule-
88 MAC
meai de tenir ses asseuililées dans son église propre. Les autres
^lïsesdemeurirenl apparemment aoiis la conduite des pri'lres du
parti de Psul , qui revint i ConslaDl'mople peu de temps après le
départ de Constance, qui envoya ordre au préfet du prétoire de le
chasser et de mettre Macédonius i sa place.
Philippe, préfet du prétoire, fil enlever Paul, et parut dans son
char, ayant i, c&té de lui Macédonius, qu'il conduisait !i ëou église.
Ce même peuple, qui avait demandé pardon i Constance, cou-
rut h l'église pour s'en emparer de force ; les Ariens el les catho-
liques voulaient s'en chasser réciproquement ; le trouble eilacon-
fosion devinrent eiirémes: les soldats crurent que lu peuple se
soulevait, ils chargèrent le peuple ; on s« battit , et plus de trois
mille personnesfurenlluées ï coups d'épée, ou étoufli^es '.
Après cet horrible carnage , Macédonius monta sur le irâne
épiscopal , s'empara bientél de toutes les églises , et persécuta
cniellemenl les Novaliens eties catholiques.
La persécution unit tellement les calûoliques et les Novatiens,
qu'ils étaient disposés il mourir les uns pour les autres : la persé-
cution n'a guère manqué t réunir les partis les plus ennemis con-
tre le parti persécuteur.
Les Novatiens furent principalement l'objet du zèle de Macé-
dnnius; il apprit qu'ils étaient en grand nombre dans la Paphla-
gonie ; il obtint de l'empereur quatre régimens , qu'il j envoya
pour les obliger k embrasser l'Arianisme. Les Notalieos, infor-
més du projet de HacédoDÎus , prirent les armes , vinrent au de-
vant des quatre régimens , se battirent avec fureur , défirent les
quatre régimens et tuèrent presque tous les soldats.
Quelque temps après ie malheur arrivé dans la Paphlagonie,
Macédonius voulut transporter le corps de Constantin hors de
l'église des Apôtres , parce qu'elle tombait en ruines : une partie
du peuple consentait i cette translation ; l'autre soutenait que
c'était une impiété, et rcg^irdail celte translation comme un ou-
trage fait ï Constantin. Les catholiques se joignirent à ce parti ,
et il devint considérable.
Macédonius n'ignorait pas ces oppositions, mais il ne croyait
pas qu'un évcque dûty avoir égard , et il fit transporter le corps
de Constantin dans l'église de Snini-Acace : tout le peuple accou-
* Soiotn. , I. A, c 11. Socral. , B. a, c. 38. Socralc dit «voir apprit
ce 6tt U'un paysan qui s'élail trouvé i celte oITairc.
isîtCl ; le concours des deux partis pri>duiiii enire les a
I prils une espèce de clioc, ils s'échauÉ^rct
r-le-champ la nef de l'i'glUe ei la galerie furent remplies dvl
r#ing cl de carnage.
Consunce , qni était alors en Occideni , sentît combien mM
rfcomme ducaraclère de Uacédouius était dangereux sur te siég* I
Wàe Conslaotinople ; ille fit déposer, quoique Macédoutus persécn- '
~ Ullcs catholiques, que Constance voulait dètru'
Macédonius, déposé par Constance , conçut une haine violents I
contre les Ariens que Constance protégeait , et contre les catholi-r
ques quiaraîent pris parti contre lui : pour se venger, itrecouiiut I
la dÎTinilé du Verbe qne tes Ariens niaient , et ni» la divinité du
Saint-Esprit que les cattiollques reconnaissaient auïsi bien que
ta diTinilédu Verbe.
Ainsi, avec des mœurs irréprocbables, Macédnnius était un am-
bitieux, un t^rau qui voulait tout subjuguer ; un orgueilleux qui ,
pour soutenir une première démarche dans les plu» petites chosea,
■Drail sacrifié l'empire ; un barbare qui persécutait de saDg-froid
tOQt ce qui ne pensait pas comme lui ou qui osait lui résister
nfin un présomptueux qui , pour saiisrairi
passion pour la célérité , fit une hérésie et nia la divinité
' Saint-Esprit.
Voici les rondemeos de son opinion :
Les principes des Ariens combattent également la divinité
k Terbe et la divinité du Saint-Esprit ; mais on ne voit pas qu'
lient eombatlu rormellenienl la divinité du Saint-E^pril.
HacédooluB, au contraire, trouva les principes des Ariens sans
I fbrce contre la divinité de Jésus-Cbrist , et s'en servit pourpvou-
ÏTer que le Saint-Esprit n'était qu'une rréalure.
L'Église avait condamné formellement les hérétiques qui avaient
■Usqué la divinité de Jésus-Christ. L'Écriture lui donne si clai-
rement les litres et tes attributs du vrai Dieu , que les difficultés
que les Ariens entassaient pour prouver que Jésu»-Christ était
nue créature avaient paru sans force il Hacédonius; il rejeta le
terme de consubatanliti , mais il reconnut toujours la divinité de
Jésus-Christ.
Il ne crut pas voir la divinité du Saint-Esprit exprimée aussi
l^dairement dans l'Ëcriture ; il crut qu'elle lui donnait les caracté-
s qui constituent la créature.
it Macédunius, n'est nulle part opptW
in> ^^
MAC
Dieu ; t'Écriiare n'oblige ni de croire en taî , ni do Te prier; le
rere et le Fils sont seuls l'objet de notre culte et de notre es-
pérance : quand Jésus-Christ enseigne aux liommea eu quoi con-
siste Il vie éternelle ei quels sont les mujeDS d']i arriver , il dit
leulement que c'est de conoallre son Père, et lésus-Chrisl son
Fils.
Lorsque l'Ëcriture parle du Saint-Esprit , elle nous le repré-
sente comme sulwrdoniié an PÈre el au Fils ; c'est par eui qu'il
existe , c'est par eui qu'il est instruit , c'est par leur autorité et
parleur inspiration qu'il parle *.
U est le cunsolaieur des chrétiens, il prie pour eux * : ces fonc-
tions peuvent-elles convenir ï la divinité ?
Enfin , on ne conçoit pas ce que ce serait que celte iroislëme
personne dans la substance divine ; car, ou le Saint-Esprit serait
engendré , ou il ne le serait pas : s'il n'est pas engendré , en quoi
dillSre-t-il du Pfere ? et s'il est engendré , en quoi dilT^re-l-il du
Fils T Dira-t-on qu'il est engendré seulement par le File ? alors on
admet un Dieu grand-père et un Dieu petit-fils.
Telle est la doctrine de Macédonius sur le Saint-Esprit: il nela
publia que lorsqu'il fui déposé , et peu de temps avant que de
mourir.
11 eut des sectateurs , qu'on nomma Macédoniens ou Pneuma-
tomaqueSj c'est-à-dire ennemis du Saint-Esprit ; on les appelait
quelquefois Marathoniens, â cause de Maralhooe, éréque de Nieo~
médie, sans lequel on prétend que celte secte aurait été bienlât
éteinte ïConstaniinuple. Uaralhouela soutenait par ses soins, par
son argent, par ses discours pathétiques et asseï polis , et par un
extérieur composé , propre t s'attirer l'estime du peuple '.
Ces deux dernières qualités se trouvaient aussi dans plusieurs
des principaux de cette secte, tels qu'Eluse, Eustache, etc. Leurs
mœurs étaient réglées, leur abord grave , leur vie austère , leurs
exercices assez semblables ï ceux des moines , et l'on remarqua
que le parti des Macédoniens était suivi par une partie considé-
nble du peuple de Constantin opie et des environs, par divers mo-
naslëres , et par les personnes les plus irréprochables dans les
mœurs; ils avaient des partisans dans plusieurs villes ; ils rurmé-
■ Joan. 16. Paul. aci. Cor, 1, e. 3.
'' Ad Rom, 8.
* Sotom., 1, i, e. 17.
I
L
MAC
reat plnsîears uonislères remplh d'an graocl nombre d'homaui 1
et Je filles'.
Les Uicéiloniens élaienl priacipalemeDl répandus dans [t
Thrace , dans rilelle&poDt et dang la Bithjnie '.
Aprts la mort de Julien , JoTÎen qui lui succéda , et qui était 1
dans la foi de Nicée , voulut la rétablir : il rappela les exilés ; ce- j
pendiini , comme il aimait mieux agir par douceur que par auto-
rité, il Inissail une grande liberté à tout te monde pour la religion ;
tous les cbefs de lecte s'inuginèreDt pouvoir l'engnger dam leur
Les Hacédonicns formèrent les premiers ce projet, et préseutfr-
renl une requête pour obtenir que toutes les églises leur AumU
doDoées; mais Joiieu rejeta leur requête.
Daos la suite, les Macédoniens se réunirent aux catholiques,
parce qu'ils éiaîenl persécutés par les Ariens; ils signeront Icijm-
bole de Nicée , se séparèrent ensuite, et furent condamnés pur le
coucile deConsianlinople.
Tbéodose aiaii appelé ï ce concile les évéques macédoniens,
dans l'espérance de les réunir a ritglîse ; mais ils persévéréreitti
dans leur erreur, quoi que l'on pût faire pour les détrouipCTïT
L'empereur employa, nais inulilemcnt , tous les moyens propnril
il les engager 1 se réunir avec les catholiques , et les cbassa de '
Constintinople ; il leur défendit de s'asiieoibler, el conQsqui 1
l'épargne les maisons oL Us s'assemblaient.
Lcserreurs des Macédoniens sur le Siiint-Esprit ont été renoD'
Telées par les Sociniens et adoptées par Clarté , Wisltion , etc.
Rous allons prouver contre eui la divinité du Saint-Esprit,
tela dMniU dtt Sainl-Eipril, contre In 3laci'<ioment,Ui Soe^-_2
nient, Clarke, WUlhon eî le» Anti-Triailaires.
Noua Ktpposons id ce qni est reconnu par les Macédoniens, ïtà
SocinieH, Clarhe , Wisllion et les Anti-TrinitAires, c'
l'Ecriture sainte nous dit qu'il j a un Père , un Fils et o
Esprit : Dons allons prouver qne le Saint-Esprit est une persoDO^
• Saint Paul dit que le Saint-Esprit lui a communiqué la coA-1
Greg. N»., Orat. &i. Soiom.,
Socrat,, L >, c. IS 1 1. 5, c. 8.
i. RuHn. I
n
MAC
n
I
I
I
naissance des mystères , et il ajoute que cet esprit li
parce qu'il sonde toutes choses , mËme les prorondeurs de Di
c'esl^-dire qu'il cuopalt les choses les plus caciices qui sont en
Dieu.
Pour prouver que le Saint-Esprit a ces connaissances , saint
Paul emploie ce raisonnement : car, qui ttt-ct d«i iiommet qui ia~
ehe lei ehottt de l'homme, sinon JViprit de l'Iumme qui est rn lui ?
dt mime nul ne cannait let choies de Dieu, linan i'eiprit de Dieu ' .
C'est-à-dire, comme il n'j a que l'esprit de l'homme qui puisse
coonatlre ses pensées , de même il n'y a que l'esprit de Dieu ou
Dieu marne qui [misse connaître les secrets de Dieu.
Ce raisonnement de saint Paul prouve que l'esprit de Dieu est
Dieu lui-même , comme l'esprit d'un homme est cet homme
même; par conséquent , puisque le mol Dieu sigoîlic ici l'ËIre
suprême, l'esprit de Dieu est aussi l'Être suprême.
On objecte que saint Paul dit que l'esprit sonde, qu'il cherche
les choses profondes de Dieu, et que cette manière de connaître
ne peut convenir qu'à un être qui connaît les secrets de Dieu
parce qu'ils lui sont communiqués, ce qui ne peut convenir qu'à
une créature.
Pour répondre ï celle difficulté, il suffit deremarqucr : 1° que
le même apfllre s'est servi du même mot pour désigner la con-
naissance immédiate que Dieu a des pensées des jjummes , et que
sainl Paul désigne pourtant Ik une eonnaissance parfaite *.
3" Saint Paul prouve que le Saint-Esprit sonde les choses pro-
fondes de Dieu, parce qu'il les connaît comme un homme connatl
ses propres pensées, c'esi^^-dire, immédiatement et par lui-même;
de sortequesi l'on peut dire que l'esprit de Dieu est un être dis-
tinct de Dieu parce qu'il sonde les choses profondes de Dieu , on
pourrait aussi dire que l'esprit de l'homme est distinct de cet
homme parce qu'il connaît ses propres pensées.
Enân, la conception du Sauveur dans le sein de la sainte Viciée
est une preuve incontestable de la divinité du Saint-Esprit.
L'Ange dit à la sainte Vierge que son Fils serait appelé le Fils
du Trèa-Iiaut et le Fils de Dieu , c'est-ii-dire le Fils de l'être qui
existe par lui-même , et l'ange en donne cette raison : • le Sainl-
> Esprit, dit-il, surviendra en vous, et la puissance du Très-ltant
<PrimeCor.,c.î, T, 10, 11,
MAC
I» voua couvrira deson ambre; c'est pourquoi le saint curant qtû
B Dallradevous, sera appelé le Fils de Dieu '. >
n paraît , par ces parûtes , que Jésus est \k Fils de Dieu, parca
qnll a été eugenriré par ropéraiioii du Saint-Esprit.
Uais si le Saint-tîsprit n'est pas le Dieu suprême , s'il est un
tire distingué de l'Être suprême , il s'ensuivra que Jêsus-Ctirist
l'est le Fils de Dieu que comme les aiilres bommes, puisque Dieu
hî-mème ne l'a pis engendré iuimédiatement ; et le fils d'un ange
du premier ordre, s'il } en avait un, ne serait pas plus le Fils de
Dieu que le Gis d'un artisan ou d'un bomme stupjde.
Dieu est le Père de Jésus-Christ d'une manière loule particu-
lière ; c'est pourquoi Jésus-Ctirîat est appelé le Fils unique de
Dieu est son Père , parce qu'il l'a engendré ImmSd
lui-même, sans l'entremise d'aucun être distinct de lui ; mais Jé-
uu-Christ est le Fils de Dieu , parce qu'il est engendré par la
L Slint-Esprit ; d'ob il suit que le Suint- Esprit n'est pus un étredi»-
I tioct de Dieu , mais qu'il est Dieu lui-même, ou l'être qui existe
I pir lui-même.
L'Écriture, dans cent autres endroits, nous parle du Sainl-Ei'
V prit comme du vrai Dieu ; nous trouvons dans Isaïe que c'etL
u qui inspire les prophètes , et saint Paul nous dit que c'est le
I Slint-Espril qui a inspiré les proplièles '.
Lorsqu'Ananie trompe les apâtres , saint Pierre lui reprocbe
Kqa'il meut au Saint-Esprit, et, pour lui Taire sentir la grandeur de
ItOD pécbé , il lui dit qu'il n'a pas meuli aux hommes , mais 1
înl Paul parle des dons du Saint Esprit, il dit qu'il y >
Hifférenies grâces du Saint-Esprit , mais que c'est le même Diea
' opère en tous et qui lesdistribue '.
O'estdoncà tort que M. Clarke assure que l'Écriture ne donne
pis le nom de Dieu au Saint-Esprit.
Hais quand il serait vrai que l'Ëcrilure ne donne pasauSaint'
_ £i|irïl tu nom de Dieu , un tbéologien tel que H. Clarke pourrait-
n Aire de cette omission un motir pour douter de la divinité du
I
1 Luc 1 , T. 35.
* Jtaûe d, Ad. ultim., i
' AcI. S, V. 3.
* Primas Cor. 13, v, 4.
i
I
94 MAC
SaiDl-E«pr'ri, tandis qu'il est évident et qu'il rcconnatt luï-ménifl
que l'Écrilureattrtbueau Saint-Esprit des opératloDK qui n'appar-
tieDoent qu'ï Dieu T
Mais, dit H. Cbrlie, le iSaln (-Esprit est représenté dans l'É-
crilnre comme subordonné an Père eiau Fils, comme leur en-
TOjé.
le répond* que les passages dans lesquels le Saint-Espril est
représenta comme enïojé du Père et du Fils ne prouvi^ut point
qu'il floit inrérieur an Père et au Fils; ce sont des passages desti-
nés ï nous faire connaître les opérations du Saint-Esprit.
Ainsi, jitr exemple , Dieu voulant éclairer les apâtrcs , en ré-
pandant sur eui, le jour delà PenlecAte, les dons du Saint-Esprit,
l'Ëcriture représente cet esprit d'une manière allégorique, soua
l'idée d'im messager que Dieu euToic pour l' instruction des hom-
mes ; et comme l'eDusion des dons dn&iintEsprit ne devait se faire
qu'après l'ascension de Jésus-Chrisl , l'Ëcriture nous dit que ié-
sua-Christ devait monter su ciel pour envoyer ce messager.
Tout cela n'est qu'une simple métaphore, familière aux Orien-
taux, pourdire que Dieu répandait actuellement sur les Uommes
les dons et les grâces qui procèdent du Saint-Espril, ou qu'il
communique par son Sainl-Esprit.
On trouve dans l'Écrilure quantité de ligures qui ne sont pas
moins liardies que celle-là : elle dit que l'I^tre suprême descendit
pourvoir ee qui était arrivé; qu'il descendit sur le mont Sinal ;
qu'il descendit pour délivrer son peuple '.
On voit par-lS que, quand le Saint-Esprit est comparé i. un
messager que Dieu ou Jésus-Christ envoie , cela veut dire sim-
plemenique Dieu ou Jésus-Christ répand les dons du Saint-Espril.
Lorsque l'Ecriture parle de la descente du Saint-Esprit sur la
personne de Jésus-Chrisl sous une forme corporelle , cela veut
dire que, quand on vît celte apparition , les dons et les grices
du Saini-Espril furenl actuellemenl communiqués ï Jésus-Christ.
Lorsque le Saint-Esprit descendit sur les apAlres sous la fi-
gure de langues de feu, cela veut dire qu'ils reçurent les dons du
Saint-Espiit t mesure que ces langues se posèrent sur leurs têtes;
c'est ainsi que ces métaphores deviennent aisées , et il n'en est
aucune qui prouve que le Saint-Esprit est inférieur S Dieu.
(juand il serait vrai qu'il j en aurait de difliciles à expliquer ,
Ûencs. IB, V, U. Etod, 18, 19, etc.
■ MAC M I
^^dqoes passage* obscun ponnaiest^t fanner , dan* n «prit '
'nisonnable, une dilUi-'ulLiï L'oiiire l«« paEKi)(ei de l'Il^riiure qui
doitDfnt au Saint-Espril le nom cl Us iltiibuti du vrai Dieuf
Comment se peut-il que des hommes qui se piquent den'oliéir
qo'a la laitoo se détermineot toujours en faveur des difficultés
qui naÎB&eot de notre igoorance sur la miuiière dont une chuse
est, coDlre une preuie évidente qui rétablît !
Qu'on ne nous reprocha pus de donner un si
passages de l'Écriture que nous avons ciliïs ; U. Clarke n'a pu
combattre te sens, et les PËres, avant ou apr{» Uac^osius, leur
ont donné leseos que nous leur donnuai,
L'Ëcrilure n'explique point la manière duaile Sa iut-Ksprit pro-
cède du Père et du FiU ; nais nous savons qu'il ne procède pas
du Père, et de la même manière dont le Fils e&l eugeudré par le
Père.
Personne n'est autorité à dire que U génération du Fils soit la
seule manière dont le Père el le Fils puissent produire
conséquent l'ignorance dans laquelle nous sommes liur U dilTô- \
KDce qu'il j a «utre la géu^ation du Fils et la procession du
SaÎDl-Esprii n'est pas une dilUcullé qu'on puisse nous opposer.
11 n'est pas iiossible de descendre dans toutes les cliicanes que
les Sociniens ont formées sur les passages que nous avons cités ,
et les raison» enieus que nous avons juints suffisent (wur les tiifu-
' ter. Ceux qui suuhaitcronl d'entrer dans ces détails les trouve-
■XOul dans les (béulogieus caïUoliques et prolestans.
Kous dirons seulement que U. le Clerc reconnaît que ces pas-
Bnges ne peuvent s'expliquer que tiès-diflicilenient , selon l'ttjpo-
Fflèse sociuienne , et qu'il n'} conuaissaii point de réponse, car il
^''ea of^se auctuie aux conséquences que les ualboliques en ti-
'est ce qu'il ne manque jamais de Elire lorsqu'il «'agit
ledéfendreles Sociiiiens.
I ie ne prétends pas, par cette remarque, rendre H. le Clerc
•en ; je voudrais seulement inspirer i ceux qui attaquent les
m peu plus de modestie el de réserve , en leur mettant
•slnjeui un le Clerc embarrassé et sans réplique, surdes ma-
is oh ils tranchent en matires.
Nous u'eiaminerons point ici les dirticultés par lesquelles OD J
'frétend prouver qu'il répugne qu'il y ail en Dieu une persunni
divine d'istïnguËe du Père ; uous les avons etaniincca i, l'artidA ]
Atrri-TnuiTAUUts,
96
MAN
MANES, s'appelail ordlnaireim'iil Cubricus ; il naquit en Pereé,
en £40 ; une femme de Ciésiphooie Tort ricbu l'acheta , lorsqu'il
n'éialt encore igé que de sepi ani; ; elle le Ot instruire avec beau-
coup de soin, et lui Ui-'^a loue ses biens en mourant.
Cubricus , possesseur d'une grande foriuue , allu loger proche
le palais, ei prit le nom de Hanès.
Manës trouva dans les eiïets de sa bienfaitriee les livres d'un
nommé Scjthien ; il les lut, et vit que le spectacle des biens ei des
nuuz dont la terre est le théâtre avait porté ScjiUien ï supposer
que le monde est l'ouvrage de deux principes opposés , dont l'un
est essentiellement bon et l'autre essentiellement mauvais , mais
qui sont ions deux éternels et indépendans. Manès adopta les
principes de Scjihieu, traduisit ses livres, j lit quelques cbange-
mens, et donna le système de Scjtbien comme son ouvrage. Nous
n'exposerons point ici ce sjslème , parce que nous l'eiposons i
l'art. U«!<iCFiËisHii ; nous dirons seulement que le bon et le mau*
vais principe sont la lumière et les ténèbres. Manès eut d'abord
peu de disciples.
Trois de ses disciples, nommés Thomai , Buddatei Hermai, al-
lèrent prêcher sa doctrine dans les villes et dans les bourgs de la
province dans laquelle Manès n'était retiré après avoir quitté la
capitale: hieoiAt, formant de plus grands desseins, il envoja Tbo-
mas et Buddas en Egypte et dans l'Iode, et retint auprèsde lui
Ilermas,
Pendant la mission de Thomas et de Buddas, le iila de Sapor,
roi de Perse , tomba dangereusement malade.
Manès, qui était savanldans la médecine, fut a p|>elé ou alla lui-
même se proposer pour traiter ce prince : on le lui confia.
Les remèdes et les soins de Manès furent inutiles; le lilsda roi
mourut, et l'on St arrêter Manès '.
' Nous tenons originuircmcol l'bisloire de Manidit^ ou Manès d'une
pièce ancicnue qui a jiour lilrc: Acia dispululionis Arcbelai, epitcopi
Metopnlemis, et MaueliFilla^r«ùu^cllie.
C'est sous cctiirequc celle pièce a élè publiée par M. Zaeagni, U-
bllotliècDire du Vatican. Voyei Monumcuta ecclesix gTKcœ et latloB,
Rotar, 1698.
M. de Vaiois a Inséré presque toute cette dispute dang ses nolei nir
Socrate ; elle se trouve dans le 3' tome de Dom Cellier sur les anteoit
ecclésiastiques î dans Kabricius, lome ï.
C'est sur cetl'econrércQCcU'Arclielaus que saint ftpiphan
M
I
M AN DTl
il était encore en prison , lorsque ses dens disciple!: , Tliomti |
et fiudilu , Tinrent lui rendre compte de leur mission. ElTra^és
de l'état ob ils IrouTèrent leur matire, ils le conjurèrent de pen-
(er au péril oii il élait. Uaoëa les écouta sans agitation, calnia
leurs inqniétudes , leur 6t eoTisager leur crainte comme une fai-
blesse , raninia lenr courage , écliauBii leur imagination , se leva ,
K mit en prière , et leur inspira une soumission aTeut;Ie i ses
ordres ei un courage k ré|ireuve des périls.
Tbonias et Bu Jdas , en rendant compte de leur mission à Mi-
nes , lai apprireol qu'ils n'avaient point rencontré de plus redou-
tables ennemis que les chrétiens. Manèa sentit la nécessité de se
les concilier, et forma le projet d'allier ses principes avec le
christianisme : il envoja ses disciples acheter les livres des chré-
tiens , et , pendant sa prison , il ajouta aux livres sacrés ou eu re-
trancha tout ce qui £-tait favorable ou contraire W ses principes '.
en STl, Socrale en 130, Héracllen sur la On du vi* tiède : elle est
ciiee dans une ancicnoe chaîne grcci]ue sur saint Jeao. Voget Zasa-
pù, l>[xr., p. 11. Fabr., ibid.
M. de Beaiuobre reconnaît que ces acies sont anciens: mais il croit
que celte andennelÉ ne prouve pas leur aulhonlicité et ne lève pas les
«iilUcul tés qu'il fait cnnlie celle pièce.
Après avoir lu fort attenlÎTemcni les raisons de H. de Deauaobre,je
o'ai pasélé de son avis, elj'al suivi lia aciesde la dispute de Caicari
je doimeiai dans une note quelques preuves de l'insuOisance des rai-
( sur lesquelles M. de Beausobre rejette, comme supposée, l'bisttdre
de la dignité de Cucar.
* Cet article est un des grands moyens de M, de Beausobre pour
i pmuter la fausseté des actes de la dispute de Cascar : nous allons eu-
• M. de Beausobre dit que saint Ëpiphane assure que Manès avait
[ eu les livres des chrétiens avanl iréire mis en prison, ce qui prouve la
husselé deffabloire de la conférence de Cascar.
M. de Beausobre se trompe: saint f.piphanc n'esl point contraireBUX
.•êtes de la dispute de Cascar ; oe Père assure positivement qoe les db-
iples de Hanis altèrent acheter les livres des chrétiens, et qu'ils re-
inrent vers leur maître, qu'ils trouvèrent eo prison ; qu'ils lui re-
mirent les livres des ctirttlens, et qac ce fui dans sa prison que cet
héràiarque ajnsla les livres des chrétiens avec son système.
M. de Beansobre die linnc saint Épi|)bane au moins peu ciadcmi
ptrïsqu'il lui fait dire cipressément, mot pour dk
11>
I
»a UAN
Manès lut dans les hne& sacrés qu'un bon arbre ne peut pro-
duire (le iii^uvai» fruils, u) un iiiauvaii ui'bie de bons huili : îl
crut pouvoir, sur ve passage, établir U nécessité de recoun^lire
qntldil. Faufila pages», d'S, de sniut Ëpipfaanc, dcl'édilion du
P. PMtn.
1* H. de BestiMibre attaqac l'anlhentldlé des actes de la dispute de
CaKar, par le Umalgnage de saint ËiHpbane.
M. de tleau.sobrc avaît-H donc oaMié qu'il regardait raini Ëpiph.niie
comme un auteur crMule, tam cntictuo el «ans discrmetnenl? E-X-ce
avec de pareilles aubtrilés qu'an attaque l'aullientkili d'un tcril ? au
le oaCme bommc est-U un auteur grare, ou ua I6iuuia uns autorité,
adoD qu'il eairavatable «i conlraire aux opiaioDideM. de Benusobre ?
8* U< de Beausobre prouve qu'en eflel Manès aiail lu les livra dcf
cbrttien) avant sa prïHiii , parce que la prison de Manès bit trop cnurte
pour qu'il pût s'Instruire dans les livres di-s dirËtiens iissu pour écrire
les lettres qu'il a lïcriies, el pour se itèrendri! aussi gavammeut qu'il le
fait, mtme dauï, la dispute de Cascar.
Hais, )• M. de Beausobre ntr peut déterminer précisément la durée
de la prisa» de Mautoi 1* , le progrès <|ue Manès M dans la Mieiice
des livres saints dépendait du degré de pénémllcni et de i^gacité
d'esprit «le Manès, el de son ardeur pour s'iosiruire : or, M. de
Beauiobre soutient que Hanès avait beaucoup de conuaîssanres aC'
qui»^s, beaucoup d'esprit naturel, une grande habitude de rBiwuner,
beaucoup de fiénie et une prodigieuse ardeur pour le célébriiéi atec
ces dispwilkMw, cM'ilinipaUible que Uani» oit acquis les conuaissauces
qu'il aviût t Cascar, el qu'il les ail acqinsts pendant six mois au œoinf
que sa prison dura, adoo U. de Beausobre?
ËnGn si , ilans la dispute de Casc^ir, Manès parall trt^ instruit pour
n'avoir étudie que six mois les Uires des dkrétieus, comment M. de
Beausobre prélcud-il, daui un autre endroit, que les actes de la confia
rencc de Cascar sont fuui , parce que Slanès y est représenté conume
accablé par les raisons d'Aidiélails, sans y faire aucune réponse, quoi-
qu'il j en vit de bounes ù faire, et que, scloo M. de Beausidire, il soit
impossible qu'un hoiunK comme Uauis soit resté court dans toute cette
dispute, comme le portent Isa icles delà conlércuce de Cascar P
Ceui qui voudront s'assurer par eui-m£ines de la vérité de ce que
j'avance u'ont qu'ft comparer le cbopilre ^ du 1" livre, page 70, orec
le diapitre S du memi: livre, page I.OS, tum. 1, de l'Hisloire de Mani-
cbée, où ces coutradidious se trouveut mot pour raoL
i' M. de Beausobre , pour prouver que Maiiâs caunaisseit les livres
des chrétiens avant sa prison, cite d'UerbciDt. qui dit que Hauès était
prêtre parmi li;» ckrClien» de la province d'Abuai.
I
MAN
éanti If inonde un linn cl un maiiTxfs principp poiirprndiiî
birnset les inaui '.
Il trouTa dans rËerllure qne Satae Quille prince dpB léQ^lfM
et renaernî de Diea ; il cnit pouvoir faire de Satan son princh
mairaisanl.
EoSn, Manèi vit dans l'Éringile que lésus-Cbrîst promeiuîtfl
k ses apdires de leur enToyer le ParaeUI , qu'il leur appreDdnf{-l
toutes les mérités ; il ïojait que ce Pararlel n't5lait point encoffl
arrivé du lemps de saini Paul , puisque cel apAtre dit lui-mSine :
Kous ne conDaissoDs qu'imparraitenieot ; mais quand la perieutioD
sera venue, tout re qui est imparfait sera aboli.
Hanès crut que les c^hr6tieIl5 aitcndaient encore le Paraelet ; il
ae douta pas qu'en preaaol cette qualité il ne leur Rt recevoir
U doctrine.
e parait encore en dé^ut k
n orieninui, sur l'auloTité
il aussi ancien que
La critique de M. de Beaosobre
Igard; Car peut-on proférer les aiii
quel» d'Kerbelot tapportp ce fait. A
Ktes de la dispou de Catcar?
0'lI<Tbelot, une page aiant qu'il dise que Mines était prêtre
le) ebrétk>n« de la proTÎnee d'Ahiiai. dit que cri imposteur ajfant en-
tendu dire au chrétieoi que Jésus-Christ avait promis d'envojer Bpré*
lui son Paraelet, voulut penuodcr au peuple Iguoranl de la Pcne qu'il
était ce PsTScIi^t ; oequi, assurément, ne pourrait se dire de Mauésù
eet bérésiarque avait été prêtre parmi les clirétieus avant de publier
Il C4t donc clair que d'Herbelot, dans cet article, n'a f^it que ra-
Mosser ce que différons auteura orlcnlaui avaient dil de Man^s, et que
fUerbelot lul-méue, dans l'article Mmiis, suppose qu'il n'était point
prêtre avant de publier mu hérésie.
Noui ne poussons pas plus loin nos remarques sur cet objet ; mais
Huscrojons devoir avertir que l'Histoire de Manicbée, jKirMi deDeau-
■obre, laquelle ne peut Stre l'ouvrage que d'un Lomme de beaucoup
d'écrit et de savoir, et qui peut élre utile & beaucoup d'égards, con-
tient cependant dos Inexactitudes pour le» citations, pour la critique et
pour la logique: que les Pères y sont censurés souvent aicc hauteur
El presque loujaun InjustetnenL II faut que M. de Oeausobrc n'ait pas
■entt ce que tout lecteur équitable doit, selon moi, sentir en lisant sou
livre, c'est que l'auteur était entraîné par l'amour du paradoxe cl p
le désir de II célébrité, deux ennemis iriécoiid 11 abtes de l'équité et
h lo^qae.
i Maitb., 7, V. 18. Episl. ManeU ad Marcell,
"m
100 MAN
Tel fut en gros le projeL que Hauès rornia [)our roiablissemeat
de sa set^ie *.
Pendant que ManËs arrangeait ainsi son projet, il apprit que
Super avait résolu de te Taire mourir; il gagna ses t'ardes, s'é-
chippBi et passa sur les terres de l'empire romain.
Hanës s'uinoni;a comme un nouvel apQtre eDTO^é pour réror-
mer 1* religion et pour purger la terre de ses erreurs,
U écrivit en cette qualité à Marcul , homme distingué par sa
piété et considérable par son crédit et par sa fortune.
Marcel communiqua la lettre de Manès ï Archélaïis, évéque de
Cascar, et, de concert avec l'évêque, il pria Manès de se rendre i.
Ciscar pour y expliquer ses sentiments : Maoës aiTiva tt Cascar,
chez Uarcel, iiui lui proposa une capférence avec Arcliélaiia. On
prit pour juges de la dispute les hommes les plus éclairés et les
moins susceptibles de partialité dans leur jugement ; ces jugts
furent Manipe , savant grammairien et habile orateur ; Egialée ,
très-babile médecin: Claude et Cléubnle , frères, et tous deux
rh^teiu^ habiles.
La maison de Uarcel fut ouverte i tout le monde, elUanlchée
commença la dispute.
Je suis, dit— il, disciple du Christ, apûlre de Jésus, leParaclet
promis par lui; les apAtres n'ont connu qu'imparfaitement la vé-
rité , el saint Paul assure que quand la perfeelîon sera venue tout
ce qui est imparfait sera aboli : delï Uanès concluait que les chré~
tieni attendaient encore un prophète pour perfectionner leur re-
ligion-, et il prétendait être ce prophète.
Les Juifs, cnnijnuait-il , enseignent que le bien et le mal vien-
nent de la même cause; Us n'admettent qu'un seul principe de
toutes choses; ils ne mettent aucune différence entre la lumière
* H. de BcBusobre a prétendu prouver la fansselé des actes de Cas-
car, parce qu'il en impossible que Manès ait pris le titre de Paracict, et
H prouve cette impossibilité, parce qucMunès n'a pu se dire en même
temps pnraclet el apètre. [ Hiat. de Manich., I. 1, c 9, p. 103. }
Hais, 1* il est certain que les Manichéens croyaient que Man^ était
le Paroclel, et M. Basnage se sert de ce Tatl pour prouver, contre M. de
Meaui, que les Manichéens sont dilTèrcns des Albigeois. (Basuage,
UlsL des êgU rérormèen. )
S< Comme Jésus-Chrisl devait envoyer IcParaclct, on ne voit pas que
le Utrc d'apûire soit incompniiLle avec celui de Poracict, car ManicUéo
ci que par rapport à «a mi^on.
M AN 101
et les ténèbres; ils confomleni le Diea soHveraiiit'meni bon avec
le principe du mal ; nulle erreur n'est ni plus d^raisuanable , ui
[ plus injurieuse & Dieu.
' JésuS'Cbrist a fait connaître aux hommes que le Dieu suprême
et bienfaisant ne régnait pas seul daus le monde, que le prince
des ténèbres eierçail sur les hommes un empire Ijrannique, qu'il
les portait sans cesse vers le mal , qu'il allumaii en eux mille pus-
sions dangereuses , leur suttgérait tous les crimes. Jésus-Cbrisi a
révélé aux hommes les récompenses destinées à cêu^c qui virent
sous l'empire du Dieu suprême ei bienfaisant, et tes supplices ré-
servés aux mécbans qui vivent sous l'empire au démon ; enfin ,
il leur a fait connaître toute l'étendue de la bonté de l'Ëlrc su-
I Cependant les ebréticns sont encore dans des erreurs dange-
' Kuscs sur b bonté de l'Être suprême, ils croient qu'il est le
principe de tout , qu'il avait créé Satan , et qu'il peut faire du
mal aux hommes : ces fausses idées sur la boaié de l'Être «u-
préme l'oirensent , pervertissent la morale et empêchent les
hommes de suivre les préceptes et les conseils de l'Evangile.
Pour dissiper ces erreurs , il faut éclairer les hummes sur l'o-
rigine du monde et sur la nature des deux principes qui ont con-
couru dans sa production ; il faut leur apprendre que, te bien et
le mal ne pouvant avoir une cause commune , il faut nécessaire-
ment suppDserdans le monde un bon et un mauvais principe.
Ce n'était pas seulement sur la raison que Hanés appujailson
' sentiment sur le lion et sur le mauvais principe; il prétendait en
I trouver la preuve dans l'Écriture même, il irouvaitsun sentiment
I dans ce que saint ieau dit eu parlant du Diable, que, comme la
I i^ril^ n'eu point en lui , toute* tes foii yu'il menf , H parle de ton
I propre fondt, parce qu'il ett menteur au*ii bien que ton pire ■ .
Quel est le père dn Diable , disait Manës? ce n'est pas Dieu , car
il n'est pas menteur ; qui est-ce donc ?
n'j a qoo deux moyen» d'être père de quelqu'un : la voie de
I b génération ou la créatiou.
Si Dieu est le père du Diable par la voie de la génération , le
Siible sera consnbslanliet a Dieu: celle euiiséqueuce est impie.
Si Dieu est le père du Diable par la voie de la création, Ulen
\_ fsl UD menteur , ce qui est un autre LUspbèue.
i.hk.
I
103 MAN
Il Taul donc que le Diable soii Dis ou crêaiurn de quelque Stre
méchiDt qui n'est poiol Dieu ; il y a donc uu autre principe créa-
tetur que Dieu.
ArcheiaQa allaqui la qualité d'flpftlre de Jésus-Chrisl que pre-
nait Hanès ; il demanda sur quelles preures il fondait sa mission ,
quels miracles on queli prodiges il aTail faits , et MunËs n'en pou-
Par ce moyen , ArchélaHs dépouillait Hanfes de son autorité , et
rédubait sa docihae i un sjstàme ordinaire , dont il sapait les
fondemens : il prouva , contre Hanès , qu'il était impossible de
supposer dcui êtres Éternels et nécessaires dont l'un est bon et
l'autre mautais, puisque deux êtres qui existent par ta nécessité
de leur nature ne peuvent avoir des aitribuis difTéreng, ni faire
deoi êtres ditTérens ; ou si ce sont deux êtres ditTérens , ils sont
bornés et n'eiisLent plus par leur nature , ils ne sont plus éleroels
et indépe&dans.
Si le* objeta que l'on regarde comme mauvais sont l'onvrage
d'an principe essentiellement mniraisanl , pourquoi ne trouve-t-on
point dans la nalUre de mal pur et sans mélange de bien T Choi-
sisses dans les objets qui nous ont fiil imaginer un principe mal-
faisant et coéternel au Dieu snpr6me , vous n'en irouverei aucun
qui n'ait quelque qualité bienfaisanie , quelque propriété utile.
Le démon, que l'on voudrait faire regarder comme un principe
coéternel î l'Être suprême, est, dans son origine, une créature in-
nocente , qui s'e«l dépravée par l'abus qu'elle a fait de sa liberté.
Tele sont en général les principes qu'Archélads oppose i Ha-
nèa. Tout le monde sentit la force de ces raisons, et personne De
fut ni ébranlé ni ébloui par les sopfaismes de son adversaire.
A^^bélaaB garantit le peuple de la sédueliun en l'éclairant. Quels
ravages un bommc tel que Uanés n'eftt-il pas faits dans le diocèse
de Cascar, si Archélails n'eQt été qu'uu honnête homme sans ta-
lent ou qu'un grand seigneur sans lumière?
Manès , désespérant de faire des prosélytes dans la province de
Cascar, repassa en Perse , 0(1 des soldats de Sapor l'arrèlêrcnl cl
le firent mourir, vera la fin du troisième siècle.
Telle fut la Un de Hiin^s, oti , trois siècles après, Mahomet,
bnaiique, ignorant, aans lumière et sans vue, se lit respecter
comme un prophète! et fil recevoir t la moitié de l'Asie, comme
une doctrine inspirée, un mélange absurde de judaïsme et do
chtisiiuûsiue.
MAN
109 ^^M
Ittta, éo illlant 1a doctrine des Magês avec le christianisme ,
déplaisait égalemenl aui Persans , aux cbrétiens et aux Romains :
toutes les sociétés religieuses dont il était eaviroimè se soulevè-
rent contre lui , et il Tut opprimé.
Hais lorsque Mahomet allia le christianisme et le judaïsme,
l'Arabie elles provinces de l'Orient étaient remplies de Juifs, de
Nesiorienl et d'EutJchiens, de Monolliéliles et d'autres héréti-
ques eillés ou bannis , qui vivaient paisiblement sous la prolec-
lioB des Arabes, mais qui conservaient contre les empereurs ro-
mains et contre les catholiques une haine implacable , et qui ,
pour se venger, favorisËrent le fanatisme de Mahomet, secondè-
rent ses efforts, et lui suggérèrent peut-être le projet d'être pro-
phète et conquéniDl : tout empire leur paraissait préférable i ce-
lui des catholiques.
D'ailleurs , Hanès âlait un philosophe qui voulait établir ses
dogmes par la voip du raisonnement et de la persuasion ; Maho-
met, au contraire, èlaîl^Du fanatique ignorant, et le fanatique
sans lumières vonrt au supplice ou au\ armes.
Les disciples de Manès firent pourtant quelques prosélytes ; on
les rechercha , et ils turent traités avec beaucoup de ripeur : ils
se multiplièrent cependant, et sii siècles après Manès, dans dei
temps de ténèbres et d'ignorance , nous voyons les Manichéens se
multiplier prodigieusement et fonder un )%tat qui fit trembler
l'eiupire de Conslanlinople, 11 est intéressant de connaître les
différentes formes que prit cette secte, sei progrès et ses eOets
dans l'Orient et dans l'Occident.
MANICHÉENS, disciple» dn Manès ou sectateurs de sa doc-
trine : les principaux disciples de Manès furent Uermas , Buddas
et Thomas , qui allèrent en Egypte , en Syrie , dans l'Orient et
dans l'Inde , porter la doctrine de leur maître ; ils essuyèrent d'a-
bord bien des disgr&ces , cl lirent peu de prosélytes. Nous aliéna
d'abord eiposer leurs principes et leur commencement ; nous ex-
\aa ensuite leur progrès.
_«MBrai
-Dfi.
Les premiers sectateurs de U.inès composèrent divers ouvrai
pouT défendra leurs semimens , et comme Manès avait prit
yualilé d'ap4tre de Jésiu>Cbrist, on rapprocha autant qu'on
104 M AN
put les principes philosophiques de Hanès des dogmes du chris-
lianistno ; on adoui;it donc beaucoup le système de MunËs , cl
l'on Gt i beaucoup d'égards disparaître, au moins en apparence ,
l'opposition du Manicliéisme el du christianisme.
D'autres disciples de Manès, lelsqu'Arisiocrile, prétendaient
qu'au fond toutes les religions, païenne, judaïque, chréiieaoe, eic-,
convenaient dans le principe et dans les dugmes , ei qu'elles ne
différaient que dans quelques cérémonies : partout, disait-il , un
Dieu suprême el des dieux subalternes , ici , sous le nom de
ditui, U , sous le nom d'auges ; partout des temples , des sacri-
fices, des prières, àes tilTrandes, des récompenses et des peines
dansl'auire vie; partout des démons el un chef des démons , prin-
cipal auteur des crimes el chargé de les punir '.
Le sjstëme philosophique de Manès et son sentiment sur l'o-
rigine de l'âme aTaii d'ailleurs beaucoup de rapport avec la
philosophie de Pfthagore et de Platon , ei même avec les prin-
cipes des Stoïciens : ii croyait que le bon pritictpe n'était que la
lumière , et le mauvais principe les ténèbres , et celte lumière ré-
pandue dans la matière ténébreuse afiriiait tout ce qui vivait.
Ou voit aisément que les principes ilu Uanicbéisme sur la na-
ture el sur l'origine de l'àme pouvaient conduire i. des maiïmes
austères et W une pureté de mœurs que l'on pouvait regarder
comme la perrection de la morale chrétienne, ou mener k un
quiélisiiic qui laissait agir toutes tes passions eu liberté.
Ainsi, les esprits simples ou superficiels , qui ne s'attachent
qu'aux mots et qui ne jugent que sur les premières apparences ;
les chrétiens entêtés de la philosophie pythagoricienne , plutooi-
clenne et stoïcienne; les hommes d'un caractère dur, austère,
rigide uu chagrin , ou d'un lempérameni voluptueux , trouvaient
dans le Hanichêisme des principes aatisfalsans.
Les premiers disciples de Uanès ne tardèrent donc pas ï faire
des prosélytes, et ils étaient usseï nombreux en Afrique sur la
fin du troisième siècle.
Comme les empereurs romains haïssaient beaucoup les Perses
el qu'ils regardaient le Manichéisme comme une religion venue
de Perse , ils persécutèrent par haine nationale les Manichéens ,
avant que le ehrisiianisme HU la religion des empereurs, el par
■ Formula receptionjs Muuichx'Dnim , apud Cottclerium in Pclribus
Dposlolicis,
MAN
105
zèle pour lu religion ; ainsi les ManicbéeDS TureDl persi^cutùs pres-
que sans relSche : ils ne pouvaient donc Former dans lous cet
lemps qu'une se(^le en quelquiï sorie secrtte, qui dut tomber dans
le fanatisme, et des principes gÉnéraui du ManicbéiAine tirer
mille dogmes particuliers, absurdes , et une Toule de pratiques et
de labiés insensées.
De ce que les Manichéens étaient une secte persécutée , ils prô-
naient beaucoup de précautions pour n'admettre parmi eux quo
des bommes sûrs ; ainsi ils avaient un lumps d'épreuves , et il j
avuil chez eux des caiécuhmènes , des auditeurs et des élus.
Les auditeurs vivaient l peu prés uomme les autres hommfs;
pour les élus. Ils avaient un genre de vie tout dilTérent et une
morale trés-singuIiére formée sur les principes rundameoiaux du
Uauidiéisme.
AinM , cumme dans ce système le monde était l'elTet de l'irrup-
lion que le mauvais principe avait faite dans l'empire de lu lu-
mière, et qu'ils croyaient que le principe bienfaisant n'était que la
lumière céleste, ils disaient que la partie de Dieu abanduanée
aux ténèbres était répandue dans tuuB les corps du oiel et de It. '
terre , et qu'elle y était esclaie et souillée ; que quelques-unes
de ces parcelles de lumière ne seraient jamais délivrées de cet
esclavage et demeureraient altacliées pour rëlenûlé 1 on globe de
ténèbres , et seraient étcrBcllenient avec les esprits ténébrent.
Ces portionsde lumière céleste ou du bon principe, répandues
dans toute la nature et renfermées dans divers organes, formaient
les animaui , les plantes , les arbres , et généralement tout ce qui
Lorsqu'une des portions de la lumière céleste , et qui était uns
porlion de la divinité, lors, dis-je, que cette portion de la lu-
mière était unie A un corps pur lu voie de la génération , elle était
liée !i la matière be-aucoup plus étroitement qu'auparavant; ainsi
le mariage ne faisait que perpétuer la captivité des ilmes , et ils
concluaient que le mariage était un état imparfait et criminel.
Il y avait des Manichéens qui croyaient que les arbres et les
plantes avaient , aussi bien que les animaux , des perceptions ;
qu'ils voyaient , qu'ils entendaient , et qu'ils étaient capables de
plaisir et de douleur , de sorte qu'on ne pouvait cueillir un fruit ,
couper on légume , tailler uu arbre, sans que l'arbre ou la plante
ressentit dr la douleur, et ils prélcndaient que le lait qui sort
comme une larme de la ligue qu« l'on arrnclie eu était une preuve
lOG MAN
sensiltle; «'mi pourquoi ils ne loulatmi pas qu'on .-irrncbli la
moindre hfrbe , pas ni^me \et opines, ei quoique Tagricultitre
■oit l'art le pins innocent, ils le condnmnaieiil o^annKiiiK, pirre
qn'on ne pouvait l'eiercer ïangcommptlretineinBnLtédeinearlrM,
Il temble qu'avec de pareils prineipes les Manichéem deviieot
■noorir de Taiin : ils trouvèrent le moyen d'élnder celte e(msé-
qnence. Ils h persuadèrent qne des hommes nssi saints qu'eux
deTïient avoir le privilège de livre du crime des aglres , en pro'
testant cependant de leur innocence : ainsi , lorsqn'tm apportait
du pain 1 un Uanichéen élu , il so retirait no peu à l'écart , fai-
HÎt les plus terribles imprécations contre ceux (]ui Ini apportaient
du pain , puis , s'ïdreasant au pain , il disait en soupirant : • Ce
■ n'est pas moi qui vous ai moissonné , qui vous ai moulu ; je ne
> vous ai puint pélrî , je ne vous ai point miâ dans le four : ainsi
• je suis innocent de tous les maux que vous avn soulTerls; je
> souhaite ardemment que ceux qui tous les ont bits les éprou'
• vent eux-mêmes, >
AprËs cette pieuse préparation , l'élu mangeait avec plaîstri
digérait sans «crupide , et se consolait par l'espérance qu'il mil
que ceui qui lui procureraient i manger en seraient punis rîgou-
Un mélange bizarre de sensualité , de superstition e( de dureté
conduisit les élus des Manichéens 1 ces conséquences, qui paraî-
tront extravagantes ou même impossibles h tel homme qui en a
peui-éire plus d'une de cette espèce k se reprocher.
Parmi les chefs des Manichéens , il j en avait qui regardaient la
nécessité de se nourrir sous un aspect plus consolant ; ils croyaient
qa'un élu en mangeant délivrait les pins petites parties de ta di-
viniié attachées il la matière qu'il mangeait , et que de son esto-
mac elles s'envolaient dans te ciel et se réunissaient k leur source:
ainsi c'était un acte de religion et une œuvre dp piété sublime
lorsqu'un élu mangeait avec excès ; il se regardait , non comoM
le sauveur d'un homme, mais de Dieu',
Il est aisé de voir que les principes fondamentaux conduisaient
i des conséquences absolument dllférentes et même opposées ,
selon les caractères et les circonstances : il y a de l'appareuLe que
l'on imputa aux Manichéens beaucoup de oes conséquenc«s qu'ils
k
•FnuMBt point lir^es ei
meure de» Lurreurs el
i U. — Dit fragriê ti iê i'extinelim dtt Mnichdetu.
Dapuis DiodéticD iwqii'i Ai>a«t>se, tes empereurs romaias
SreM tous lesn effort» pMir iélmire les Uanichéene: JU furent
liannis , KtAi» , àéfomi\éi de kuit biens , conditaoés b périr par
ililTéreas supplices : on renouvela souvent ces lois , et on lu eié'
enta rigoureuses) eut petidiM pr^s de deux siècles {depuis 38S
juMpt'en 491).
Od eui plus d'indulgence pour eiii sous Anisiase , dont la
mère était HanicliÉeone , el ils enseignèrent leur doctrine avec
plus de liberté ; Us en furent privés sou5 Justin et sooa ita suc'
Sous le réyne de Consianl, |>eÙt'6Js d'Héraclius , une femme
nommée CnlliDice, el HaDicbéenne nrlée, avait deui enfans
iju'ellc éleva daos ms senliaiens : ces enfans se nommaient Paul
M Jeui ; auMttAt ((u'iLs Turent en état de prêcher le Hftaichéisnie,
ella les enioja e> Aiminie , où ils firent des disciples qui regar-
dèrent Paid comme l'autre i{ui leur avait fait connatLre la vériléi
ils (irirenl le nom de cet apdlrc el s'appelèrenl Paulicieus <vers le
UMli«ii d" septième siècle).
K i*Uil eui pour successeur Constantin, (|ui se DODUnail S^vain.
^ Ce Sylvain entreprit de réformer le Huichéisme et d'ajuster le
qstime des deux principes 1 l'Écriture sainte; en sorte que la
doctrine de Sylvain paraissait toute puisée dans l'Écrtiure , telle
que les calltoliques la reçoivent, el il ne voulait point reconnaître
d'autre rè^e de foi. Il affecbit de se servir des termes de l'Ecri-
ture: il parbil comme les oclhodoies lorsqu'il parlailducorps et du
sangdeiéaus-Clirist, desamort, rlesonbaptime, desasépulture,
de la résurrection des morts : cesseciaires supposaient, comme
les or^odoies , un Dieu suprême , mais ils disaient qu'il n'avait
en ce monde aucun empire , puisque tout j allait mal ; ils en at-
tribuaient le gouvernement ï un antre principe , dont l'empire ne
s'étendait point au deli de ce monde et lloiruit avec le monde.
Ils avaient une aversion particulière pour les images et pour la
rt el Mir la résurrection de Jésua-Chrigt , qu'ils ne cro]rnient
108 M AN
poini réclli^. Ils rfproehaicni aux catholiques de ilonner daii!> les
erreur! du pieanisaie et d'Iionorer les saints comme des divinilés,
ce qui était contraire !i l'Écriture. Ils prétendaient que c'était pour
cicher aux laïques celle contradiction entre le culte de l'Ëgljie
catholique et l'Iî^criture que les praires défendaient la lecture de
l'Écriture sainte.
Par ces calomnies , les Manichéens séduisaient beaucoup de
inonde , et leur secte ne s'oBrail aux esprits simples que comme
nue société de chrétiens qui fuisaient prol'ession d'une perfection
ettraordinalre.
Sylvain enseigna sa dortrine pendant près de vingt'Sept ans et
se lit beaucoup de sectateurs. L'empereur Constantin , successeur
de Constance , inlormé des progrès de Sylvain , chargea un oRÎ-
cier, nommé Simon , d'aller saisir Sjlvain et de le faire mourir.
Trois ans après la mort de Sylvain , Simon , qui l'aTalt Tait la-
pider, quitta secrètement Constantinople, alla trouver les disciples
deSjWaia, les assembla et devint leur chef; il prit le nom de Tite
et pervertit beaucoup de monde vers ta &n du septième siècle.
Simon et un nommé Justus eurent une contestation sur le sens
d'un passage de l'Ëcriture; Justus consulta l'évêquede Cologne.
Justinien U , successeur de Constantin , informé par l'évèque de
Cologne qu'il y avait des Hinichéens, envoya des ordres pour
faire mourir tous ceux qui ne voudraient pas se convertir.
Un Arménien , nommé Paul, s'écliappa et emmena avec lui
deux Sis , les instruisit , en mil un ù la tête des Hanicliéens et lui
donna le nom de Timoibée ; après la mort de Timoihée , Zacharie
et Joseph se disputèrent la qualité de chef des Manichéens et
furmèreni deux partis : on se battit, et les Sarrasins, ayant Tait
une irruption dans ces contrées, massacrèrent presque tout le
parti de Zachnrie. Joseph , plus adroit, trouva le moyen de plaire
aux Sarrasins et de se retirer à Épisp.nris , où son arrivée causa
une grande joie.
Un magistrat zélé pour lu religion força Joseph â sortir d'Lpis-
paris ; il se retira il Antiocbc , oii il fit une grande quantité de
prosélytes.
Après la mort de Joseph, les Pauliciens se divisèrent encore
en deux partis : l'un avait pnur chef Sorgius , homme adroit et né
avec tous les talcns propres it séduire.
1,'auire parti était aitactié ï Buanes. Après beaucoup de con-
Veslalions, les deux partis en vinrent aux mains et se seraient dé-
M
■ M AN I
Hni'its, si Tbéûiiùle lie li'' eùl r^coociliés en leLir rsppelanl qu'iU
éUîent frères, et en leur faisant sentir que leurs divisious les per-
L'impératrice Tliéoiiora ayant pris les rênes du gouvernement
pendant la minariiil> de Miehel , en 841 , rétablit le culte det
images et crut devoir employer toute son iiulorilé pour détruire
les Minicliéens ; elle envoya dans tout l'empire ordre de découvrir
les Manichéens et de faire mourir tous ceux qui ne se converti-
raient pas : plus de cent mille bomines périrent par ditTérenles es-
B.pècesde supplice».
Un nommé Carbéaa, attaché i celte secte , ayant appris que
Mit) père avait été crucifié pour n'avoir point voulu renoncer il ses
), M sauva avec quatre mille honiines chez, les Sarrasins,
t.â'nnit i eux et ravagea les terres de l'empire.
Les Pauliciens se bàiirenl ensuite plusieurs places fortes , où
\B les Manichéens que la crainte des supplices avait tenus ca-
s se réfugièrent, et formèrent une puissance formidable par
t nombre ft par leurliaine implacable contre les empereur» ef
centre les catholiques : on les rit plusieursfois, unis aux SarrasiBi
ou seuls , ravager les terres de l'empire , tailler en pièces les arr
méei romaines. Une bataille malheureuse, dans laquelle Chrlso-
cbir leur chef fut tué , anéantit celte nouvelle puissance que le)
supplices avaient créée et qui avait fait trembler l'empire df '
Constaulinople '.
t Qu'il me soit permisde Gxerun moment l'attention deiDon le^- |
Mteor sur les évènemens que je viens de mettre sous ses yeux.
W Hanès enseigne librement sa doctrine il Cascar el à Diodoride;
LArchélaOs le combat avec les armes de la raison et de la religion;
^U dissipe ses sopbîsnies, il fait voir la vérité du christianisDW
ans son jour, et Hanès est regardé par toute la prorince comme
un imposteur; personne n'est, ni ébranlé par ses raisons, ni
értianITÉ par son lanaiismc.
Manës désespéré passe en Perse ; Sapor le fait mourir, et lei
__disciples de Manès font des prosélytes,
Dioclétien est informé qu'il y a dans l'empire romain des dii-
Hinès ; il condamne au feu les chefs de celte secte, M
s llanichéens gi
lulli plient.
MAN
Pendnni plus de bÏi cenls ans les eiils , les buonisseniens , la
supplices soni employés inuiileinent coalre cetie secie : sous ta
minorilé de Michd , les Mauichâeiis sont répandus dans luul l'em-
pire; h piélë de Tbéudora veut détruire celte secte; elle la
frappe , son xèle immole plus de uenl mille Haaichéens absiinés ,
et du ung de ces malheureux elle toU sortir une puissiinue enne-
miedeUreli^on ei de l'empire, qui fut long-lenips funeste ïl'uu
et il l'lutre , et qui hlla les conquêtes des Sarrasins , l'agrandîs-
seraenl du Mahométisme et la ruine de l'empire.
Si Marcel, dans la maisou duquel se tint la conférence entre
HanÈset ArchélaOs, eût dit âDioclélien: Opposez aux Manichéer.8
des hommes tels qu'Archélaûs, ils arrêteront le progrès du HanU
chéisme, comme cet évêque aétonfTédanE sa prorince cette secte
Daissaute ; le feu de la persécution que vous allumez contre eux
1^ sortir des cendres de ces sectaires une puissance formidable
il vos successeurs. Dioclétien eût regardé Marcel comme nn in-
sensé, et ses courtisans taraient soutenu qu'il voulait avilir l'au-
torité souveraine.
Si lorsque Théodora donnait ses ordres pour faire mourir tous
le* Manichéens , un sage , perçant dans l'avenir, eût dit i l'impé-
ratrice : Princesse, le principe du ;tèle qui vous anime est louable,
mais les mo;fens que vous employez seront funestes à l'Église et i
l'empire; ce sage eût été regardé comme un mauvais sujet cl
comme un ennemi de la religion ; après la révolte de Carbéss, il
n'est pas sur qu'on ne la lui eùl pas imputée, et qu'il n'cDl pas été
condamné comme un Manichéen et puni comme l'auteur des
maux qui alDigèrent l'empire.
Après la défaite de l'armée de Chrisochir, les dÉbris de la secte
des Haaichéens se dispersèrent du cûlé de l'Orient, se firent quel-
ques éiablissemens dans la Itulgarie, et, vers le dixième siècle, se
répandirent dans l'Italie ; ils eurent des éiablissemens considé-
rables dans la Lombardîe , d'où ils envoyèrent des prédicateurs
qui pervertirent beaucoup de monde.
[ Manichéens avaient fait des changemens dans
leur doctrine : le sjstémi
jours bien développé; ma
séquences si "'
des deux principes n'j était p
I ils en avaient conservé toutes les con-
, sur l'eucharistie, sur la sainte Vierge
Beaucoup de ceni qui emhrassèrent ces erreurs étaient des
ihuusiastes, que la prétendue sublimité de la morale muuîchéeniie
M
■ MAN 111
tnit sMuits : tels furent quelques chanoines d'Orléans, qot
étaieiil en grande réputation de piélé.
Le roi Robert en étant inrormé lit assembler un concile ; on
examina les erreurs des nouruaux Manicliéens ; les évéqoes firent
^^ d'inutiles efllirts pour les détromper ^ < Prêchez, répond irent-ili
^E^^ui Évéques , prÉcbez votre doctrine ani homoies grossiers et
^Hï^hamels; pour noua, nous n'abandonnerons point les sentimeu
^^Ei4]ui: rtlspril saint a gravés lui-même dans nos cœurs ; il nona
^Vtttarde que vous nousenvojiezau supplice; nous voyons dans les
^V ■ cieui Jésus-Christ qui noua tend les bras pour nous conduira
^Ê > en triomphe dans la cour câlesie. •
Le roi Robert les condamna au feu , et ils se précipitèrent dans
les (lammes avec de grands transports de joie , an 1022.
Les Maaichéens firent beaucoup plue de progrËs dans le Lan-
guedoc et dans la Provence : on assemhla plusieurs conciles
couire les Manichéens et on brûla beaucoup de ces sectaires , mais
sans éteindre la secte; ils pénétrèrent même en Allemagne, et
passèrent en Angleterre; partout iU firent des prosélytes, maïs-
partout on les combattit et on les réTuta,
Le Manichéisme , perpétué i travers tous ces obstacles , dégé-
néra insensiblement et produisit, duns le douzième siècle et dans
le treizième, cette multitude de sectes qui faisaient profession de
réformer la religion et l'Ëglise : tels furent les Albigeois, les Pè> .,
IroLrusîens, les Henriciens , tes disciples de Tanchelin , les Po-
pelicains, les Cathares '.
MANICHÉISUE, système de Uanès, qui cunsiïUit ï concilier <
avec les dogmes du christianisme le sentiment qui suppose qoa
le monde et les phénomènes de la nature ont pour causes deux
principes étemels et nécessaires , dont l'un est esscnliellenent
bon et l'autre essentiellement maniais.
Nous allons développer les principes de ce système , et en faire
irl'absurdilé, et et
eM. Bayle.àlV
Maoès, ■ fait une foule de difScuUés c
tre la bonté de Dieu ,
n du système de
la Providence ei
les difficullés de M. Bayle
f ' Toyct, tnr tes Manlehèrns dttalie et des Ganles, Acta coneH.
^HMDeneniif, Spidleic.. t. 3: Lohe, Conc, I. St Vignicr, BibliMlL
Mil., »' pari., an lOâï, p. 87!- Kegiiiw ccnlr, Valdensf, r. 6. 1. 4|
itibliot. PP., part. 3, p. 750| Conc Turou. 3, c. 3. Couc Tolos.)
■nllIS, can, BiDoMMci, Uist. iks tariollans., L il.
114 MAN
etaeniirlles de loul ce qu'on voycûL dans le moDde , on les crut
éti'rneU, nécesBiires et iuQnU.
L'espèce i'édutauiage pur lequel t'espril liumain s'élail élevé
jusqu'ï deux priacipei généraux de tout disparut alors, M l'Iiy-
pothèse des deux principes commenta i te généraliser el k seprû-
winler 1 l'espril sous une lurme E^stémalique.
Il y a du bien et du mal dans le monde ; ces deux elTets suppo-
sait nécessairenieal deux causes, l'une bonne ei l'uutru mau-
vaise ; ces deux causes ou principes éternels , nécessaires et inQ-
nîs, produisent tout le bien et tout le mal qu'ils peuvent pro-
duire.
Comme ceux qui avaient imaginé ces deux principes n'avaient
envisagé dans la nature que les pbéDomènes qui avaientdu rap-
port avec le bunlieur des hommes, ils trouvér^t dans l'hypolliëse
des deux principes , un système complet de la nature ; l'imagina-
(ion ae représenta ces deux principes comme deux monarques qui
se disputaient l'empire de la nature pour y faire régner le bon-
lieur a. le* plaisirs ou pour en faire un sùjour de trouble et d'hor-
reur ; on imagina des armées de génies sans cesse en guerre , et
l'on crol avait trouvé la cause de tous les phénooiènee : telle éiail
la philosophie d'une partie de l'Orient et de la Perse, d'où elle se
répandit ensuite cliez difTérens peuples , oii elle prit mille li^ruies
diSérenies'.
Dans beaucoup de nations, l'eepril n'alla pas plus loin; la curio-
n;é , plus active cbex d'suiree bonijues , chercha 1 se Toroier imo
idée plus distincte el une notion jilus précise de ces deux prin-
litiveiuent tous lea biens et tous les
La lumière est le premier des biens , elle embellit la
elle lait croître les moissons , elle inaril les fruits i s:
l'homme ne pourrait ni distinguer les Iruits qui le n
éviter les précipices dont la terre est aemée.
On ne savait point alors que le rayon de lumière qui féconde
les campagnes, élevait dans l'ulmospbère des sels et des soufres,
et produisait les vents qui forment les «rages et les tempêtes; on
jugea qu« la lumière était un principe bienfaisant et la source de
tous les biens.
■ Woir., Manictaeism. untc Manich. A
, DiblioL oriesL, L 1,
M
I MAIV IIS
CélaîâDlaucoDtrnirelcs (ênËbres qui apportaient les temp^^tes,
les orages et U désolation ; c'éuit des abttncs profonds ei obscurj
de in terre que sortaient les vapeurs mortelles, les lorrena de
soufre et de feu qui ravageaient les campagnes ; c'était dans le
ceutre de la terre que résidaient ces puissances redout;ib!es qui
en ébranlaient les fondemens : on ne douta pas que les ténèbrea ,
ou la matière ténébreuse et obscure , ne fussent le principe mal-
faisant et la source de tous les maui.
On ne concevait alors l'âme que comme le principe du mouve-
meni du corps humain , ei l'esprit comme une force motrice :
comme la lumière était essentiellement active , on regarda la lu-
mière comme imesprit, et comme ta matière ténébreuse étailaussî
eu mouTemeni , on supposa qu'elle était sensible et intelligente ,
et q^p les dénions ténébreux él^iietit des esprits matériels.
Comme le ciel est la source de la lumière, un conçut le principe
bienfaisant comme une lumière éternelle, pure, spirituelle et heu-
reuse, qui, pour communiquer son bonheur, avait produit d'an-
tres intelligences, et s'était formé dans les cieui une cour d'êtres
heureux et bienfaisans comme lui.
Pour le principe malfaisant, il habitait au centre de la nuit, et
n'était qu'un esprit ténâireutet matériel. Agité sans cesse etiana
r^le, il avait produit des esprits ténébreux comme lui , inquiets ,
WlbuJens, liur lesquels il régnait.
I pourquoi ces esprits étaient-ils en guerre 7 pourquoi i
ilsmèlés ensemble? Leur natureétanl essentiellement diS
ne deïsûent-ils pas rester éiernellemeat séparés?
1 une question que la curiosité humaine ne pouvait man-
quer de faire , et voici comment on la résolut.
Le boa et le mauvais principe étant indépendans l'un de l'au-
tre occupnient l'immensité de l'espace sans se connaître, et par
conséquent sans faire d'efforts l'nn vers l'antre ; chacun était dans
l'espace qu'il occupait, comme s'il eéi existé seul dans la nature,
faisant ce que son essence le déterminait i (aire , et ne délirant
rien de plus.
Le séjour du principe ténébreux était r«mplt d'esprits qui M
mouvaient essentiellement , parce qu'il n'j a que le bonheur qoi
soit tranquille ; cl les mouvemens des esprits ténébreux , sem-
blables i l'agitation des hommes malheureux , n'avaietit ni des-
sein ni règle . la confusion, le trouble, le désordre et la discorde
refînaient donc dans son empire. Les esprits ténébreux (\ireot en
H
rifa
116 M AN
guerre, se llvrÈrtnl des bslailles ; les vaincus fujaiei
. les Ti
queurs, et camiiie l'enipire de la lumière et celui des ténèbres
M louchaient, les vaincus, en TuyanL les vainqueurs, francliirent
les limiies de l'enipire des lènèbres , et passËrent dans l'esiiacc
umilneui 0(1 régnaillebon principe '.
La production du monde clail l'elTet de cette irruption du prin-
cipe tl^oébreux dans le séjour de la lumière; et pour expliquer
comment cette irruption avait produit les dilTérens êtres que la
monde renferme , l' imagina lion forgea des Lypoihèses , des ajslè-
mes. On il compiéplus desoixantiMlix sectes de Manichéens, qui,
réunis djos la croyance de deux principes, l'un bon el l'autre
mauvais , se divisaient el se contredisaient sur la nature de ces
êtres et sur la inaaièi'e dont le munde était sorli du conflit de ceï
deux principes *.
Les uns prétendaient que le bon principe n'ayant ni foudii's
pour arrêter le mauvais principe, ni eaux pour l'inonder , ui fer
pour forger des armes, avait jeté quelques rayons de lumière aux
génies ténébreux, qui s'étaienl occupes i les saisir, !i les fixer, et
qui par ce moyen n'avaient pas pénÉtréplusavant dans son empire '.
D'autres pensaient que le principe bieoraisaot, après l'irruption
du prindpe matériel , jugea qu'il pouvait mettre de l'ordre dîna
la matière, et qu'il avait lire tous les corps organisés de ce prin-
cipe matériel ; c'élait le système de f'jthagore, qui l'avait trouvé
dans l'Orient, ou Manès le prit aussi.
511.-
De Vu,
lianes avait pris dans les écrits de Scythien le système des deux
prineipes, il l'avait enseigné, et s'^tail iVil des disciples. Les dis-
ciples qu'il envoya pour répandre sa doctrine lui rapportèrent
qu'ils avaient trouvé dans les cbrêtiens des cuneiuis redoutables ;
Ûanès crut qu'il fallait les gagner et concilier le Cliristiaoîsme
avec le sysième des deux principes: il prétendit trouver dansl'Ë-
crilure tnéuic les deux principes auxquels , ^elon lui , bi raison
avait conduit les philosophes.
■ Théudoret, Hxrel. Kab. l.
SpiciltTg. PP., sxc 2, p. 39.
>Th(adoret,ibid.
•Ibid.
8. Frngmciil. Basilid. apud Grabbe,
M
L-fci
I jiinaU <fe celle des rlëmons.
MAX 111^1
dt,=aii-il , nous piirle de la créaiion de riiojnme tvM
>, Satan p
tAu&sil&l que l'Ijernaie est placé dans le ParadJ
■Dr II scène, tient tenter l'homnie, et le Eéduil.
Cet esprit malfaisant fait tans cesse la guerre au Dieu suprême'
«t l'Écrilure donne aux damons le ûlre de puissances , de prineï>'
plutés , d'empereurs du monde; ainsi l'Ëcrilunt suppose un pria-
dpeinalfaisant, opposé sans cesse 3U principe btenfaisiint: il eit
dinsle mal ce tiue Dieu esl dans le bien.
Le Diable étant méchant de sa nature, il n'esl pas possible, di-
Mil Haoès. que Dieu l'ail créé.
En vain répundait-on qne le démon avait étécréé innocent, juste
1^ bon, et qu'il était devenu médiant en abusant de m liberté.
Hanës répliquait que le dém<in était représeii'é dans rËcrilurit
tomme un méchant, incorrigible, et essentiDllemenl malfaisant:
R prétendait que si Dieu avuit créé te démon bon et libre, il u'au-
Pnit point perdu sa liberté par son pé;:lié , et qui^ sou inclinatiOD
L'MturvIlc l'aurait ramené au bien , s'il avait été bon dani son ori-
iFlinG; il prétendait qu'il répugnait à la perfection de Dieu decréer
I in esprit qui devait être la cause de tous les maux de l'univen,
I perdre le genre humain et s'emparer de l'empire du monde.
Mants oe supposai! pas que le mauvais principe ou le démon
tat égal au Dieu bienfaisant; il supposait, au contraire, que Dieit^
K^'ljtnl aperçu l'irnipiion du mauvais principe dans son empire i
ïjftlit envojié l'esprit vivant , qui avait dompté les démons et leH
it eocbaluéfi dans les airs ou relé^-ués dans la terre, ob il nft
t laissait de puissance et de liberté qu'autant qu'il le jugeait
■^propos pour ses desseins.
y Ce fut en usant de celte puissance que tes démons formèrent
t et la femme. Nous n'entrerons pas dans le délait des
Kplicalions que les Manichéens donnent deEphénamènrs, et de
les Juifs, et de celle des chrétiens; ces explications sont
loi ument arbitraires, et presque toujours absurdes et ridicules.
F Tous convenaient que l'Ame d'Adam et celles de tous les hom-
M étaient des portions de lu lumière céleste, qui , ens'unissant
Ircorps, oubliaient leur origine, et qui erraient de corps en corps.
* Pour les délivrer , la divine Providence se servit d'abord d«
' Finistère des bons anges, qui enseignèrent aux palriarcbes les v6>
riléssa1utaireb;ce>ix-ci les enseignér<-nl i leurs desccndans , et,
(lour empêcher que cotte lumi^e ne s'éteignit euliËreinent , Dieu
118 MAN
ne cessa point de susciter , daoK lous les i^mps et pami toutes
tes natioDE , des sages el des prophètes , jusqu'il ce qu'il aîi en-
Toyé son Fils.
Jésus-Cbrisla f)it connaître aui botomeE leurTérilsbleorigine,
les causes de la captivité de Vime , ei les mojeus de lui rendre
sa première dignité.
Après avoir opéré une inSnilé de miracles pour confirmer sa
dtictrine, il leur montra dans sa crucilixion mystique comment
ils doivent mortifier sans cesse leur chair et leurs passions ; il
leur a fait voir eucore , par sa résurrection mystique et par son
ascension , que la mort ne détruit point l'homme , qu'elle ne i&~
truit que sa prison , et qu'elle rend aux Smes purifiées la liberté
de retourner dans leur |iairie céleste. Voilï lefondement de toutes
les austérités et de la morale des Manichéens.
Comme il n'est pas possible que toutes les Imes acquièrent une
parbiie pureté dans le cours d'une vie mortelle, les Manichéens
admettaient la transmigration des âmes ; mais ils disaient que cel-
les qui ne sont pas purifiées par un certain nombre de révolu-
tions sont livrées «u démons de l'air ponr eu être tourmentées
et pour être domptées ; qu'après celte rude pénitence elles sont
renvojées dans d'autres corps , comme dans une nouvelle école ,
jusqu'à ce qu'ayant acquis le degré de purification suftisanle,
elles traversent la région de la matière el passent dans la lune ;
lorsqu'elle en est remplie , ce qui arrive quand toute sastirface est
illuuiaée, die les décharge entre les bras du soleil, qui les remet
k son tour duns le lieu que les Manicbéeos appellent la colotme
de gloire.
I.e Saint-Epprit, qui est dans l'air, assiste continuel lemenl les
tmes et répand sur elles ses précieuses inltuences ; le soleil.qui
est composé d'un feu pur et purifiant , facilite leur asceusiou au
ciel , et en délaclu les parties matérielles qui les appesantissenL
Lorsque toutes les tmes el toutes les parties de la subsUmce cé-
leste auront éié séparées de la matière, alors arrivera la consom-
mation du siècle; le feu malfaisant sortira des cavernes où le Créa-
teur l'a renfermé; l'ange qui soutient la terre dans sa situation et
dans sQu équilibre la laissera tomber dans les flauimes et jettera
ensuite celte masse inutile hors de l'enceitite du monde, dans ce
Iteu que l'Ecriture appelle les ténèbres extérieures : c'cst-lï que
les dûmous seruiil relégués pour jamais.
JjCs Ames les plus paresseuses, c'est-à-dire celles qui n'auront
M
MAN
is acheTé leur puriScfttioo toi's<|tie e
« catastrophe
pas acheT* leur punncstioo ioi's<|tie eetie caïasiropne amverï,
auront pour peine de l^ur négligi^iiue la charge de tenir les dé-
tnoBS resserrés dans leura prisons, afin d'empêcher qti'iii n'allen*
lent pli
le royaume de 0
Les Mantchéeos rejewimit l'anoien Tesumei
pose que le Dieu supréDW produit les bi«M el
dans le rnoode'.
I Tesumeot, parce qn'il sup-
'-'- - Mm maux qu'on Tolt
! m.
' La prineip*t 4a MaaicMitmt te
I abtunlti.
LesUanichéens, elaprf^ eux M, Italie, prèle nd en l qu'en par-
tant des pfat^aoDièDes que duus uQVe la nature la raison arrive 1
deux principes éternels et nécessaires doot l'un est essentielle-
ment bon et l'autre esseulielleinent mauvais.
Pour juger si leur senLiment esi une hypothèse philosophique,
supposons pour un moment que nous ignorons notre origine et
celle du monde, et u'admettoua de certain que notre existence ;
appujés sur ce phéDomène, le plus inconteslahle pour nous, lï-
cbons de nous élever jusqu'ï la cause primitive qui nous a donnj
l'être.
m^ Pour peu que je rëOécbisse sur moi, je m'aperçois que je na
i» point donné l'esUtence cl que je l'ai reçue.
« quelle est la cause ii laquelle je dois l'existence f Ta l-eU« i
Fngoe eUe-inéme, en sorte qu'il n'y ait dans ta nalu
IB chaîne de causes «t d'eJeis, en sorte qu'il n'y ait rien qui i
it été produit?
Cette supposition est impossible; c
Ire que la collection des causes est s
raison, ce qui est absurde. Mon existence et celle detouslesétreg
quejevuis supposent donc nécessairement un éire éternel, incrééi
qui existe nécessaî rente ni et par lut-mêuie.
Je réOéchis sur cet être, la source de l'eiislence de (ous les
êtres, et je trouve qu'il est éternel, infiniment ïnlelligent, lout-
puissanl ; en un mot, qu'il a par sa nature toutes les perfections.
Puisque cet être, en vertu de la nécessité de sou existence, ■
toutes le» perfections, je conclus qu'un être n^essaire et esi;eo-
liellement mauvais est une absurdité, parce qu'il est impossible
que deux élres qui ont la même raison d'exibler soient cependant
'An;;, cent. Hinîcb. Théodorcl, H^i
. Kab. ,
, 1. Canféreuce
ISO MAN
d'une naiiire dill'ù renie, puisriue celle différence n'a n rail point de
raiïan sunisinte; il n'j u dunu iju'iin être i^lern^l, nécessaire, ia-
dépendaiit, qui est la cause priiniiive df lous les èires distioguéi
de lui.
Je parcours les cieux, et je trouve qu'ils ont été formés avec
înlelligcnce et avec dessein par la niéiDe puissance qui les fait
exister ; je Irojve que la puissance infinie qui leur a dunné l'cii»-
lence a pu seule les former, en ri>gler les mouïPmens et y Taire
régner cet équilibre sans lequel la nature entière ne sérail qu'un
chaos affreux ; je conclus encore que le monde est l'ouirage de
riotelligence créatrice et que c'est le comble de l'.ibsurdité de
supposer qu'il est l'eflet du conflit de deux principes ennemis qui
ont une puissance égale, el dont l'une veut l'ordre et l'autre le
désordre.
Si je descends sur la terre, je trouve que depuis l'insecte jus-
qu'à rboDime tout ; a été formé avec dessein par la puissance
créalrice ; que lous les phénomènes j sont liés ; je ne peux donc
m'etnpécber de regarder la terre comme l'ouvrage du crëaUiir de
l'univers, el le Manicbéisme, qui en attribue la production ï deux
principes ennemis, comme unenbsurdilé.
Sur celle terre oti je trouve si évidemment le dessein el la
main de l'intelligence créatrice, je vois des êtres sensibles ; ili
tendent tous vers le bonheur, el la nature a placé ces créatures
au milieudelout cequi esl nécessaire pour les rendre heureuses ;
ces créatures sensibles sonl donc, aussi bien que la terre, l'oii-
iraged'un être bienfaisant ptnon pas de deux principes opposés,
dont l'un est bonei l'autre mauvais.
I,es animaux, que la uature semble destiner an bonheur, éprou-
vent cependant du mal : j'en recherche l'origine, el je trouve que
les maux sonl des suites ou des effets des lois établies dans la na-
ture pour le bien général ; c*esl ainsi que la foudre qui tue un
animal est l'effet du vent qui accumule les soufres répandus dans
l'atmosphère, et sanslequei l'air serait meurtrier pour tnul ce qui
respire. N'esl-il pas évident qu'un être mnlfîiisanl n'aurait point
établi dans la nature des lois qui, tendant au bien général, en-
iTiituent de petits inconvénlens ' ?
' Vayei Derliara, Thfologie physique; Nieuwentit, Wmnnslralionde
Dieu par lea merveilles de la nature ; Examen du fatalisme, t. 3, arL 3,
OÙ cet dilCculléi ;ont traîli^s dans un grand délai).
M
r
e peuveni jui-
MAN
Parmi les êtres qui liabitenlla terre, l'hom nu
jel particulier des complaisanr.esitermleur delà oiture : aurune
erËatiire sur U Urre n'a pluitde resBouroes que lui puur le bon-
beiir ; il éprouve cependanl des niii)lieur!>, nuis ils viennent pres-
que Lous de l'abus qu'il fait des Tacullés qu'il a ri>çues de la na-
ture ei qui étaient destinées ï le rendre heureux. Une disposiiioi
nainrelle porte tous les hommes à s'aimer, à se secourir, et ot
n'est qu'en étuulTaDtce germe de bienveillance qu'un liotnme fait '
le malheur d'un autre homme. L'Iiomme n'est donc pas l'ouvrage
de deux principes apposés, et t'inlelligence qui l'a orée est une
inlelligeaee bienraiMote.
AinEi U. Itayle n'a ïah qu'un sophisme pitoyable lorsqu'il ■
prétendu que te Uanicbéisme eipllquait plus heureusement les
phénomènes de la nature que le Théisme, puisque eeg phénonift-
nés sont démonirés impossibles dons la supposition des deux prin-
cipes des Manichéens.
Le Hanicbéisme oe peut donc être regardé que ci
ipolbèse, et les maux que l'on voit dans le monde n
tider cette erreur.
Les dilTicultës de Hanës contre l'ancien Testament avaieni étA
proposées par Cerdon, par Uarciou, par Saturnin ; nous y avoH 1
répiindu dans ces uriicles. Le silence de l'Ecriture sur la crèaiioR J
du démon ne peut autoriser k le regarder comme incréé ; il n'était
fas nécessaire que l'Écriture nous dit qu'un esprit impuissant M
Kédiant que Dieu a relégué dans les enfers est une créature. Le
.taille de la doctrine de Uanés a été réfnlé par les principes qu'on
établis dans l'article Uatëbulistes, oii l'on prodVe la spiriiu»-
l'ime. Vegei sur cela i'Ej'amen du falatiinte, 1. 2, oii l'on
que l'âme est immatérielle, qu'elle est une substance et
s une portion de l'Ame uuiverselle.
F* jlV. — De» iifJicuMtit SI. Bnt/li'eii favrurdti tlaHkWittne tt
contre la tionii ir. biea.
eserait aussi fastiiiieux et plus inutile que decopterict 1
LsffsililGcultésquise réduisent à des principes simples et presq
Plous renrvrmés d^ns la note D de l'article MAïticnÉens,
DifUeuUét de M. Bagle liréet, de lapermhtion du mal.
I*s idées les plus sûres et les plus claires de l'ordre nous (
K ^enncnt qu'un être qui esislo par lui-même, qui est nécessiifv 1
125 MAN
pt éiemcl, doit Être unique, inHni, toul-puîssint et doné de tou-
lea sortes de pprCectious : lïnsi, en coDSullanl ces idées, on ne
trouie rieo di? plus tLsurde que Tfa^pothèse des dvax princ^ipes
èternelf, nécesstireset jndépendinsl'yndel'aiilre ; voîlJ ce qu'on
appelle des ruison^ i prïuri; elles nou^cundiiiseiit nécess3iremi?nt
h Njeur ceue bjpolhëse et k n'^dmeltre qu'un principe unique
de loules cbows.
S'il ne rallait que celi pour II boulé d'un système, le proeès
■erail Tidé 1 la confusiDn de Zoroastre et de tous ses secUleurs.
Hais il n'j a point de système qui, pour ïlre bon. n'iil besoin de
ces deux cboses : l'une, que les idées en soient distinctes; l'autre,
qu'il puisse donner raison des expériences ; il faut donc voir si les
phénoméDes de la nature se peuvent expliquer pur rhvpntb^se
d'uH seul principe. Si nous jetons les yeui snr la terre, nous
UOH vans qu'elle ne peut soHir des mains d'un élre bon el inlel-
ligenl : les montagnes et les rocliers la défigurent ; la mer el les
lacs es eouvreat la plus grande partie; elle est inhabitable dans
la lOM torride et dans les lones glaciales; les lonoerres, les tem-
pêtes, les volcans la ravagent souvent.
Les animaux sonl sans cesse en guerre et se d^lmlseni; leur
Vie n'est qu'uue longue chaîne de maux et de douleurs, qui ne se
terminent que par h mort.
L'bonmie est méchant et malheureux ; chacun le cnmiiitt par ce
qui se pisse au dedans de lui et par le commerça qu'il est obligé
d'aioir a»ec son prochain : if snfflt de »i»re cinq ou six ans pouf
èlrs eonvaincD de ces deux articles; ceux qui TÏTenl beaucoup
co&naissent eèia encore plus clairement; les vojages sont des le-
çons perpétuelles h-dcssos, fis font voir partonl les monumens
du mallieur et de kt méchaneeié de l'homme, partout des prisuna
et des hûpilaux, parloul des gibets el des mendians : vous *ovez
ici lei débris d'une ville llorisaanle, ailleurs vous u'un puuvex pas
inéuie trouver les ruines. L'histoire n'est, â proprement parliT,
que le recueil des raines et des infortunes du genre humain.
Hais remarquons que ces deux maux, l'un mural, l'anlre phj-
»que, n'occupent pas toute l'histoire ni toute l'eipérlencedes par-
ticuliers ; on trouve partout et du bien moral et du bien physique,
quelques exemples de vertu, quelques exemples de bonheur, el
c'est ce qui fait la difficulté en faveur des Uauîcbéens, qui seuls
rendent raison des biens et des maux.
Si rhomme eei l'outragt d'un seul principe sotiTvrflineiiient
HAN
puissant, peul-il être exposé 31
lit
; maladÙMi ,
lucbagrinlf ]
)tm, SI
m TmiJ, ïu diuud, i h Taini, il la soif, i la douleur
[leui-il aToir laot de mauvaises iaclîaatioDs > jieut-
liol de erimpsî La souveraine sainleté peul-flle produi.
créature criminelle f U souvenine boulé peut-elle produi
eréuturemalheureusef la souveraine bonté, joiniea une puiasaoet 1
infinie, ne conible-t-elle pas de bien son ouvrage et s'éloignertr
t-«!Ie pas loul ce qui pourrait l'oirenser ou le chagriner î
I rËpondrail-«n que les malheurs de l'homme sont di
nites de l'abus qu'il fait de sa liberté , la louie-science de Uiwf 1
9 dû prévoir cet abus, et sa bonté devait t'empécher; et quan^ '
"'leo n'auraitpas prévu celabus que l'bomme fait de » libei^ '
a dû juger que do moins il était possible; puis donc qu'ai
l-vn'll arrivât il se croyait obligé de renoncera sa bonté patrmdif I
^ur rendre tous tes ejifaiis trés-misërables, il aurait dëlermioé I
Tliomme an bien moral, comme il l'a déterminé au bien phjaîr
Îue ; il n'aurait laissé dans l'Ame de l'homiBe auciuie force p«ur
écarter des luis auxquelles le bonheur est attaché.
Si une liante aussi bornés que celle des pères exige aéoessaira-
nent qu'ils préviennent, autant qu'il leur est possible, leuiiuiH^
' jge que leurs «ofans pouiraient laire des biens qu'ils leoi 1
onnenl , ii plus forte raison une bonté infinie et loutc-puii
préviendra-t-elle let mauvais eJfets de ses présens : au lieu ijf 1
donner le franc arbitre, elle veillera tut^ours elficaccnienl pi
empêcher qu'elles a' en abusent.
La Mfflaitiiiàe U. Bayle »onl Set tophimei.
IjCS difficultés deU. fia^'te contre la bonté de Bien reoferment
quatre espèces de maui incompatibles, spImi oe critique, av«c U
Jwnté, la sagesse, ta sainteté, la puissance infloie de bieu : ces
■MOI idM les prétendus désordres que l'on voit dans les phéno-
■èncs de la natnre, l'étal des animaui. les muni physiques aas>
^uels l'homme esisnjet, tels que la faim, hi soif, et entia les crimes
Aes hommes.
U. Bayle prétend que, puisqu'il se trouve sur la terre desltua,
des montagnes, puisqu'il se forme dans l'atmosphère des orages,
U faut que le monde nesoil pas l'ouïrage d'un principe bienfaisant.
ie ne vais dans cette dil'Qculté qu'un sophisme indigne du pf
nince philosophe.
l'Le iQmivaiieiUeirarraDgemealdela matière n'est en soi
124 MAN
boo, ni maurais ; il n'y aurail de désordre dans la produclion des
montagnes, des orages, dus leuipfies, cic.,qu'iiutuni que ces pLé-
nomèneB scraieui contraires au bul que Dieu s'est proposé dans
la création du monde phjsique.
H. Bajte connali-il ce bul! a-t-il parcouru l'immensilë de la
nature , détailla toutes ses partie», aperçu leur liaison, leurs rap-
ports, démêlé le résultai des lois qui entraînent avec elles ces dé-
sordres que l'on regarde comme contraires t la bonlÉ deDieuî
Eu ne considcranile ii>onde que du cAté du physique, puisque
tout est lié dans le physique, il Taul le considérer comme uue ma-
chine : or, la perfection d'une machine consiste en ce qu'on peut
dériver d'une raison générale, savoir, de la vue pour laquelle elle
a été faite, les raisons qui marquent pourquoi chacuue de ses pur-
lies est précisément telle qu'elle est el non pas autrement, et
pourquoi ces parties ont été arrangées el liées préciséuienl de
celte façon el non pas autrement.
H est certain que In niacitioe sera parfaiie <;i toutes ses parties
sans exception et leur ordre nu leur arrangement sont précisé-
ment tels qu'ils doivent être pour que la niacliîne suit parfaitement
et exactement propre iiU vuequ'on se propose en la fabriquant.
H. Bajle, ne conouissant pas lu lin que Dieu s'est proposée
dans la création du monde, ignorjnt la destination de celle grande
machine , y trouvant des lois générales qui tendent au bien el à
l'ordre et qui le produisent, a-t-il pu combattre la bonté el la
■agesse de Dieu par quelques désordres particuliers qui font or-
dre dans If tout , cl qui ne ehuquejit que parce qu'on ne voit pas
toute la nature!
M. Leibnilx appliquait au sujet dont il s'agit l'aiiome de droit ,
iHeivile ett njij totd legs infprclit judicare ; il disait que nous de-
vions juger des oiivra^es de Dieu aussi sagement que Socrale ju-
^it de ceux d'Iléradile , en UisanI ; Ce qite j'en ai entendu me
pluil, je eruiê que Urette ni me plairait pat maiui tije Cenleitdaii.
2* Il faut n'avoir jamais porté sur la nature un œil philoso-
phique pour regarder les lacs , les volcans , etc., comme des dé-
sordres contraires!! la buiilé de Dieu ; caril est bien prouvé pour
tout physicien que ces prétendus désordres produisent de grands
avantages aux animaux qui labitenl la lerre, el qu'ils n'entrat-
nent que peu de maux. L'orage et le tonnerre , par exeDijiie, ren-
dent l'air sa'uttiire & uiul ce qui respire ; sans le mouvement que
oei origcs produisent dans l'ulinospkËre , l'uir que les animaux
â
MAJN 1
respirent serail mortel pour ilas régions entières, et l'orage na J
bit périr qu'înBiiiment peu rl'animaui '.
La dilliculté que M. Bavle lire di^ l'état an animaux est plu }
spécieuse el n'est pas plus «ulidi^ : l'élal des animaux nnus eMi
inconnu pour eu fiiire un principe contre une vérité démonlr
telle que runiié et la bonté de Dieu. D'ailleurs, on exagère leura 1
maux, et lorsqu'on examine leur condi iim. on trouve qu'ils n
plus de bienii que de maux. Cliezeui li> bonheur dépend uniqus-
inent des wuiiniens qu'ils ôprouTeni , et ils sont beureui s'ils
ont plus de sensations agréables que de sensations douloureuses ;
el il partit que telle est leur condition, comme on le voit dans
tous les auteurs qui ont éeril sur l'histoire des animaux.
, Le niai pLjsi que que l'homme éprouve écliauOe bleu autrement
M- Bajie : SI rbuinine , dit-il , est l'ouvrage d'un principe Rouve-
niuenienl bon el lnul-puiasant , peui-il être eijiOBé aux maladies,
i, la doultfuf , au froid, au chaud, il la Tuiiu, il la suil, au c'
grinî
Quoi donc ! parce que l'Iiomme a fiuid , parce qu'il a trop !
cbaud, parce qu'il a soif, on se croira autorisé i nier la boDl ]
'Ëlre suprême ! on méconnailra sii «agesse, on attaquera U
HÎsience.que l'on reconuatt rependanl comme une vérité fondi
les principes les plus clairs et les plus incontestables de la ]
Est-il vrai , d'ailleurs , que le sort de l'honime soil aussi aflU- '
,jeint qu'un le prétend?
Le besoin de maogeresileplus pressant des besoins de l'homme,
té de le saiisbire. Tout ce qui peut se digérer nour-
it l'hoinme , et le besoin qui JsEaisonne le repas le plus Irugal
délicieux que les mets les plus recherchfe.
L'bomme peut lacilemeul se garantir de la rigueur des saiso:
Lorsqu'il est sans douleur , il a hetuin, pour être heureux,
varier ses perceptions , et le specuicle de Id nature oQre a sa cu-
RDsité un fonds inépuisable d'aniuiîcmenis et de plaisirs. Il y a
donc dans la nature un fonds de bonheur sullisant pour tous les
homme», ouvert â tous, facile ï lous, lorsqu'on se renferme daus
les bornes de la uature.
120 AUN
U eal vrai que , inalgré ces précautions , Im hommes feront tn-
jeis â des ninhilics ei anx icoidcns de la ri^en&e ; mais ces in-
firmités ne sont pis bsiippoNables , et. D*enipéi:heiil pas que la
vie ne soi! un état heureux , niËne pour le vieilUrd infirme , ptas-
qu'il ne li quîU« qu'l regret.
Dans ce que nous venons de dire pour justifier la bonté de
Dieu , DOUE D'»oas considéré rtiomme que comme un être capa-
ble de sensstioDS agréables ou douloureuses et «tleDdnnt son
bonbeur ou son malheur des objets qui agissent sur ses organes ;
nais il a pour être heureux bien d'autres ressources.
La nature ne fait point croître les bonirnes sur 11 i^nv comme
les champignons ou Comme les urbres ; elle unit les pHes et les
«hImis par les liens d'une tendresse mutaelle : les soins qtie le
père donne 1 réducatJun de son iils procurent des plaisirs in G nf-
ment plus saLisTaisaus que les sensations, l.a tendresse et II l¥-
coBoaissance rendent les pères cbers i leurs rnliins ; ils sont do-
ciles il leur volonté, ils soulagent leurs maux, ils soutiennent
leur vieillesse , ils ofTreiH aui pères un spectacle satisfaisant , ils
las oonsulent des malheurs de la vieillesse.
Une inclisalion naturelle porte tous les hommes t s'aimer, i se
aecourir : un malbeureux qu'on sonlage procure un plaisir déli-
Qeax, elles soins qu'on donne au soulagement d'un malheareua
lui loDl éprouver un senllment de reconnaissance cl un retour
vnv son bienfaiteur qui répand dans son Ime un plaisir qui
adoucit ses maui.
EInGn, l'homme s'aime, et l'amoar tpi'il * pour lui-même ne se
liome psB 1 se procurer des sensations vives el agréables , il fant
^ue l'boranie soit content de lai-méme ; pour être bemvnx, il
faul qu'il puisse s'approuver , et jamais l'homme ne sent pins tï-
vewent le plaisir que procure l'approbation de soi-même que
lorsqu'il mérite l'approbaiion des autres hommes , lorsqu'il a
procuré le bonbeur des autres, lorsqu'il a rempli ses devmra,
lorsqu'il n'a rendu personne malheureux. VoilS aulanl de res-
sources que la nature a mises dans l'homme rontre les malheurs
airtaobés i sa condition ; elles sont dans le cœurde lous les hommes,
et ne sont ignorées que des barbares qui oni étouffé U voix de la
(Ju'on juge présentement si l'bumme est l'ouvrage d'un être
mallaisanl , et si ce n'est pas avec raison qu'un ancien a dit que
o'est ï tort que l'homme se plaint de sou sort.
l
UAN m
Passons «n mal non), ^ fait II grMdeitJlBoullé de H. ftayla^
veux dire les Tices et les crimes des hiwimes.
Sans doute les hommes sont Biécbam , et l'on ne peat jinttd»
nec des couleurs trop lone« leun péchés et leurs 4é!iordn« ,
parce Bpie le msl n'est jamais ou presque jamais DéceGsairc i ie«r
bonbeur ; mais gardoos-none d'imputer ces désordres k l'Être
suprême, ou de penser qu'ils doivent rendre sa bonté douteose.
Ces désordres , ces crimes sont l'effet de l'atius que l'homme fait
de sa liberté, et il n'^st point contraire i la bonté de l'Etre sd-
prême de créer un bomme libre qui puisse se porter au bien par
choix , el qui ait poanani le pouvoir de ne porter au mal. Le seiir
timeu de notre liberté, qui ne peui exister que d«ns 1m «Ires
libres , ce seotimeiit, éis-je , nous fnit trouver un grand plaisir
4*BS la pratiqve ^ la vertu M produit les remords qui nous nf-
pell^nt ï notre deroir - la liberté n'est donc pas un présent fiità
rtiORiDie par un être malrûgaoi, puisqu'elle Ico^ it nous rendre
aeilieurs el plus heiireni.
Il ne fout pas, au reste . ref;nrder la terre comme
crime et sans vertu ; nous ferons voir plus bas coretien M. ItajM j
est outré ï cet égard, el plusieurs auteurs ont prouvé que (ebiet) [
tant nalurri qae morri , l'emporte dans le monde sur le
lecteur peut consulter sur cd» Sherlot, Trailif de la Pi
th. 1; Lejbmlz, Utai*de theodicéi- . etc.
Nous venons d'eiposor la ULilure et l'origine des n
nous olîre le spectacle de la nature ; nous avons vo qs'ac
«•uses qui produisenl ces maux n'est l'ouvrlgc d'un
el «lairaisant ; que dans l'intiitaiiea primitiTe el dans l'ii^ 1
Maliou de l'auteur de la naliire tout tend au bien, que {jar eci» T
le sysICrne des deui principcii n'explique point les pbè-
DMure, et que tout ce que H. Bayle dit si
l'Maut qui sous allligenl sont plus les déclamations d'un sophisM J
les doutes d'un philosophe.
Examett d'une iiulance de M. Bayle.
M.Bayle prétend quels souveraine paÎESflnce,jointe Anne bonté
doit combler de biens son ouvrage M éloigner de lui toNl
qui pimrrail r-tffeDserou le chagriner; que la snuveraine bonté
devait ôterà l'homme te pouvoir d'abuser de ses facultés, el que
Di«a . en laissant à l'homme ce pouvoir, n'aime pas plus ses créa-
tures qu'un pËrequilaisseraileatrelesmainsdeson fils une é^
^B 4lernele
^■«niiou (
B.éqt.»t
^^■ftemënes
^m «,«»'
^■bËnie,'
^^r*>qui p
128 MAN
dont il saurait qu'il se percera. L'élat des saints qui sont irrévoca-
blenient atuchéa à la vertu n'esl-i! pus un élal «ligne de la sa-
geue et de la sainleUï de Dieu f
D'ailleurs , il est certain que Dieu pouvait , sans blesser la li-
berté de rhomme, le Taire persévérer infailliblement dans l'in-
Docence et dans ta vertu; rien u'empécbait donc que Dieu ne
prévint l'abus que rbotnine fait de ses facultés el qu'il ne fit ré-
gner dans tuule la nature l'ordre et le boobeur ; cependant il j
a des désordres , des maui , des mèchans, des pécheurs ; il faut
donc qu'une cause différente de l'Être suprême ait eu part à la
production du monde et que cette cause soit malfaisante.
Toutes les diUicullés que M. Gajle a répétées en mille maniè-
res dans son Dictionnaire et dans ses Képonses aui questions
d'un provincial ee réduisent à ces principes c[ue nous allons
11 «fit clair que toute la force de celle instance porte sur ce qu'd
est impossible qu'un Mre souverainement bon , souverainement
uïnl et souverainement puissant . permette qu'il y ait du mal dans
le monde, parce qu'il est de l'essence delà souveraine bonté
d'empêcher toute espèce de mal.
. Pour sentir le faux de ce raisonnement , tâchons de nous lormer
une idée juste de la souveraine bonté.
La bonté de l'Etre suprême dont nous parlons ici , c'est sa
bienveillance.
La bienveillance d'un être est d'autant plus grande qu'il a
moins besoin de faire le bien qu'il fait ; ainsi , comme l'f]tre su-
prême se snrGl pleinement ï lui-même , il est , si je peux m'ei-
primer ainsi , infiuimeut éloigné d'avoir besoin pour soo bonheur
de créer d'autres êtres et de leur faire du bien ; sa bienveillance
i l'égard des créatures est donc inflnie , quel que soit le bien qu'il
leur fait : voilà en quel sens la bonté de Dieu est infinie, et non
pas en ce sens qu'elle dnit faire i) oeite ci-éalure tout le bien poa-
siblu; caria bonté infinie en ce sens est impossible , puisqu'alors
il faudrait que l'Etre suprême donoit ù toutes ses créatures tous
les degrés de perfection possibles, ce qui pst .-ibaurde, car il n'y a
point de dernier d^rù de perfeclioD dans la créature.
L'idée de la souveraine bonté n'eiîge donc pas que Dieu fasse
k «es créitlures tout le bien possible. Pour qu'il conserve pleine-
ment lu qualité d'élre souveraineuienl bienfaisant, il sullit qu'il
nWUe tes créatures dana un éltil où elles itiéTérenl l'uiiKlencu au
MAN I n
B^anl , el dans lequel il soit meilleur d'èlre que de u'clre ]iniii(
du lout; il n'esl pus néi-essuire que cet Hal soîl l'éUil lu pljs
Leureui possible.
Créer riiuoime avec le désir du boubeur, le mettre au milieu
de iDuies les ressources propreii U procurer le bonheur , lui don-
Der toutes les facultés oëcessaire» pour fuîre un bon usage de ces
ressources, c'est certainement laire ï rbuiiitue un grand bien.
Faire dépendre le bonlieur de certaines lois que l'homme peut
observer , mais dont il peut s'écarter et hors desquelles il reo-
contre le déplaisir et la douleur , ii'empéche pas que l'existence
ne soit encore un grand bienfait , digne de la souveraine bonté et
de la reconnaissance de l'humme,
1^ qualité d'être souverainement bon n'exigeait donc pas que
Dieu prévint l'abus que l'homme pouvait faire de ses facultés : la
souïeraintï bonté rend Dieu impuissant pour làirc le ual , el la
laisse absolument libre sur l'existence de ses créatures et sur le*
degrés de perfection et de bonheur qu'il leur accorde.
L'idée de la souveraine boulé n'exige donc point que Dieu pré-
vienne tuus les Diaux qui suut des suites de l'imperfection de ti
créature ou de l'abus qu'elle lait de ses facultés ; car alors Dieu
aurait été obli^â de lui donner un certain degré de perfection
plutôt qu'un autre, ce qui n'est cepeadant point renicnné dans
l'idée de la souveraine bonté.
Si Dieu ne s'était proposé, dans la créatien du monde , que de
Ire rbomme heureux , ii quelque prix et de quelque mi-
soit, il aurait sans doute éi:arlé de lui tous les mal-
fteur«, et il t'aurait dépouillé du pouvoir d'abuser de ses facultés.
Hais est-il contraire i la bonté de Dieu de vouloir que l' ho mms
rOt heureux , mais qu'il ue le lût qu'a certaines conditions et en
tuivani certaines luis qu'il «vuiit en son pouvoir d'observer ou do
A^lerl'
K Dieu voyait dans sa toute-puissance une infinité de mondes pos-
Ppiblesi parmi ces lugndes, ne pimvait-il pas ; eu avoir un oji le<
^bonheur des créatures ne filt point la fin principale et dans le-
qud il n'entril que secondairement r N'est-il pas possible qu'une
des lois de im monde ail été que Dieu n'accorderait le bonheur
qu'au bon usage que l'huinrue fenit de ses facultés , et que Dteu
e prévtui point l'ubus que les créatures pourraient faire de leurs
LjbeutiésïDieu ne pouvait-il pas, sans violer les lois de sa bonté,
Itvictrce muude, et lacrt^turcserait-cUueudi'uitdeseplaindraï
l'idé«
130 MAN
En aerordaDt k M. Bajle oe qu'il > si souvent répété et qu'il
n's jamais proiivé , en lui accordant , dis-je, que ïlieu n'a pu se
dëleritiinerii créer le monde que pour faire des oréBlures lieureu-
Bes , eU-il bwn sér que sa Bag^^^ ^ ^ sainteté ne lui pre&cri-
visscnl point des lois dans la distribution du bonheur? I.a bonti-
de Dieu n'est-f41e qu'une espèce d'instincl qui le porte II faire du
bien, sans règle et aveuglément?
La conduite de Dieu , si je puis m'exptiquer ainiri, ne doit-elle
pu porter le caraelère des attributs de l'Être suprËme , le carac-
tère de SB sagesse et de son intelligence ? Or, un monde dans le-
quel Dieu n'e&l rendu beureni que des automates, ou dans lequel
il aurait obéi à tous les caprices et k toutes les bizarreries de la
créature, eAt-it été bien ecnfomie à l'idée de la sagesse et de la
grandeur de l'Être suprême? La bonté de Dieu ne doit-elle pas
agir conforménieot aux lois de sa sagesse, et rendre obaquc être
beureui selon qu'il est plus ou moins parfailfNe fallail-il pas
pour cela que la créature fût libre? Ce plan du inonde esl-ii con-
traire ï l'idée de la souveraine bonté?
Enfin , je demande i M. Bayle s'il connaît assez h nBlore de
l'homme pour prouver que Dieu ne l'a pas créé dans l'état le plus
propre 1 le rendre heureux? Je lui demande s'il connaît asset les
dessrâns de Dieu pour prononcer que le monde n'a pm une Un et
n'aura pas un dénoùment qui nous fera voirla bonté deDien dans
les maui même qui iicca«ioDent nos murmures? La permission
du mal est alors un mystère et non pas une contradiction avec la
bonté souveraine de Dieu , et l'on ne peut dire qu'en vertu de sn
aouveraïae bonté , Dieu devait prévenir tous les maux et éiabtrr
u» ordre de choses dans lequel l'homme n'efil pu devenir mal-
heureux.
La sain(«té est , ans» bien que la bonté , nne source de diffi--
cuUés en faveur du Manichéisme.
Dten n'est-il pas infiniment saiol, dil^n? Sa sainteté ne lui
donne-l-elle pas nue souveraine aversion pour le mal! Ne faut-îl
pia qu'il ail manqué de puissance pour l'empêcher ou 4e sa-
gesse pour clioieir les moireos propres il le prévenir?
Pour répondre à cette difficulté , il ne faut que se former des
idées justes de la sainteté de Dieu , de sa sagesse et de sa puta-
in sainteté de Dieu n'est qu'une volonté constante de ne rien
iaire qui soit indigne de lui : or, il n'est point indigne de Dieu de
MAn
fSf
créer des hommes qui peuvent abusera lewKttpné; raree pou-
fûir est dans l'essence tle la créalofe même, el il n'est point îou
digne lie Dieu de créer l'homme avec son eswnce, ou il faut (tir«
qu'A est indiijne de Dieu de créer des êtres bornés.
En TÙo prétendrait-on, avec H. Bayle , que la sainteté de Dieit
devail au moins prévenir l'abus que rhooime fait de sa Kberté;
car la sainteté n'éUnt en Dieu que la volonté constante de ne rien
faire q«i soït indigne de hiî , il faudrait qu'il Fnt indigne de Dieu
di.- an pas prévenir la cbute de l'homme , et c'eel ce qu'on ne peut
dire : il n'est point iodlgne de Dieu de demeurer immobile lors-
que la créature pèche; il exprime, par son iiumobilité, qu'il n'a
pus besoin des hommages de l'homme ; il exprime , par ce moyen,
le jugement qu'il porte de lui-même ; c'eet qu'il eai indépendual
de a» créature.
La pennission du mal n'est donc pas contraire ï It sainteté da
Dieu, et toutes les comparaisons de M. Bajle, (elles que celle d'une
mère qui mène sa Glle au bal et la laisse séduire, pouvant la ga-
rantir de la séduction , sont des sopliismes qui tirent loule leur
îotce d'un faux eut de question que U. Bajle otTre s»nti cesse il
son lecteur snr L'origine du mal. La mère n'a aucune raison pour
ne pas empêcher la séduction de sa hllo ; il n'en est pas ainsi de
Dieu par rapport au péché de l'IioniToe.
L'idée de la bonté humaine n'est pas l'idée d'une bonté pure;
elle est toujours jointe ï l'Idée de la justice; le devoir entre tou-
jours un peu dans sa composition si je peui m'exprimer ainsi ;
c'«t nne espèce de commerce el une observation de celle loi gé-
nérale qui veni que nous basions pour les autres ce que nous vou-
drions qu'ils fissent pour nous si nous étions dans les circon-
stances où ils sont. Le bonheur de la société dê|K'ud de l'ubservatioD
de cette loi ; la société est plus ou moins heureuse selon qne
celle loi est plus négligée ou mieux observée; chaque membre
de la société est donc tenu , par justice , de ne point faire aux
autres ce qn'il ne voudrait pas qu'on lui (It s'il était placé dans
iet mêmes circonstances.
Cette idée de la bonté humaine n'èsl pas applicable k la bonté
de Dlea, qui, pour Aire heureux , n'a besoin uî de Teiistence, ni
de Tbommage de sa créature.
Ces principes (ont voir que, par tes lois de sa bonté. Dieu n'é-
lail point tenu de créer l'homme dans l'éial des bien b eurent, ou
de doimei aux bowuies dus grices erUcaces puur les ùire persévé-
132 MAN
rer inraîllJblement itans h Tenu. On voit mâmo , par ces pr'mrU
pes, que l>ieu peut, sans violer les lois de sa bonlé, punir l'honinie
qui viole les lois que Dieu a Éiablies , el lui accorder un temps
d'épreuve pendant lequel il pardonne au pécheur pénitent, et
■près loquet l'homme devient incorrigible et DJea un juge sévère
et inileiible.
Da différent auleari qui on/ répondu aux difficulldi de M. Bayle.
M. Bnyle s'était proposé d'f^tablirun pyrrhonisme universel; il
prélendit que les sentimens les plus absurdes étaient appiijés sur
des principes capables d'Imposer ï la raison la plus éclairée, et
que les rlofiimes les plus cerinins étaient exposés à des difficultés
instirmontubles et conduisaient à des conséquences absurdes:
conséqiiemmenl il ce projet , il prélendit qu'une secte aussi ridi-
cule que celle des Manichéens pourrait faire des dillicullés
qu'aucun philosophe ou théologien, de quelque secte qu'il fût, ne
pourrait résoudre.
I^ Dictionnaire de H. Bayle eut tant de vogue, ses dilEcuIlés
contre la bonté de Dieu firent tant de bruit, que les hommes célè-
bres OH lélés pour la vérilé s'empressèrent de répondre : il n'est
peut-être pas inutile défaire connaître les principes qu'ils oppo-
sèrent ï M. Bavle.
S ]. — Principal de M. le Clerc contre les dlfflcallA de M. Bayle.
Comme H. Davle, dan; sesdinicullés contre la bonté de Dieu ,
insistait beaucoup sur la longue durée du mal moral et physique
dans celte vie et sur leur éternité dans l'autre, M. le Clerc, dé-
guisé sous le nom de Théodore Parrhase, fît paraltresur la scène
un Origénisle qui prétendit que tes biens et les maun de cette vie
n'étaienique des m uj en s destinés il élever l' homme â la pcrrection
el il un bonheur éternel '■
H, Bayle reconnut que l'Origénisle, en Taisant succwler une
éternelle béatitude aux tourmensque soufTriront les damnés. avait
levé la plus accablante des dilScultés du Manichéisme; nuis qu'il
n'avait cependant pas réfuté les Hanichéens, qui répliquaient qu'il '
était contraire 1 sa bonté de conduire ses créatures au bonheur '
par les souffrances et par les peines. Voilà à quoi se réduisit 1»
* PsrrhDiiann, L 1, p. 109.
ipute de H. Ba^Ie et dp M. le Clerc , pour reEseniiel , qui w.
Mjé iaas une foule d'incidens et même de persounalitCa
qnïlîrent absolumeni disparaître l'étit de la question <•
$11. — R/poniiededamGaudiit,cbaTlreHX,au^difflculUtiey.Boste.
En1704,uncharlreux de Paris, nommé dom Aleiandre Gan-
din, donna un ouvrage intitulé : la Dislinrlîiin ft la natare du bien
et du mal, rà l'on combat l'erreur de* Manichéen) , lei lentimens de
Montagne et de Charron, el ceux de M. Baijle.
M. Bajle prélendit que cel auteur awit très-bien prouvé que
le système des denx principes e»l faux et absarde en lui-même ,
et surtout dans les déoits oii les Haninliéens descendaient ; mail
que ce n'était pas h ieréfutrr, lui, H. Bayle, puisqu'il reconnaia-
uit ces vériiés, et prétendait seulement que l'hypothèse des Uani-
chéens, quelque absurde qu'elle soit, atlaqmiit iedogmede l'unité
, ie Dieu par des objections que b raison ne pouvait résoudre : il
le lit point d'autre réponse 3i l'ouvrage du chartreui el la dispute
fta'alla pas plus loin *.
$111. — Principe* de M. Kingnur l'origine du tuai.
M, King prétendit que Dieu n'avait piiint créé le monde pour
oire , mais pour exercer sa puissance et pour communiquer
iiilé; qu'étant aouveraiuement bon , rien n'avait pu être pour
n molirde créer le monde ; qu'aucun objet extérieur n'étant
par rapport à lui , c'était son choix qui l'avait rendu bon : il
Qeiic l'opinion de ceux qui prétendent que Dieu a choisi certai-
nes choses parce qu'elles sont bonnes , et soutient que la bonté
des choses dépend au contraire uniquement du choix que Dieu en
bit; il croit que si Dieu avait été déterminé ii agir par in bonté
^ des choses même. Dieu serait un agent entièrement nécessité daiu
n'était donc assnjétï par aucune raiso
lllulôl qu'un autre, et celui qu'il n choisi e
lé choisi.
Cette indifférence de Dieu , par rapport a
* najic, art. Origine. Rép. aux qnest. d'un pr
^Oerv, B)b1. cb., L S, elc.
■ BisL des ouvrages àta <avnns, août 1705, a:
. k choisir ui
t bon parce qi
; ear, posé ui
e poÎDlvoulc
PI 84 MAN
de lui , n'a lien que dans ses premières Ôleclio;
rots que Dieu veuille quelque chose, ilnepeuipasDc
la même cbose.
De plus, comme Dieu est bon , en touUqI l'existeuce du monile
il Slussi voulu par-lï mSnie l'avantage de cbaquc particulier, Diais
autan) qu'il s'esi pu accorder avec le dessein el les moyensque Dieu
avait choisis pour eiercer sa puissance.
Il n'éuii donc pas eontnire ï la boulé de Dieu de créer un
monde oii il y :i du mal , si ce mal était esseotieilemenl lié avec
le inojeii qu'il a choisi pour exercer sa puissance : or, M. King
[irëUad que u>us les maux physiques sont attachés aux lois que
Dieu a établies pour SKercer sa puissance ; et la créature n'a point
Iï se plaindre, car Dieu n'était point obligé de créer un inonde
sans malheurs, puisque ce monde n'était pas meilleur, par rap-
porta Dieu, qu'un monde lel que le nÛIre.
Le ma] moral est une suite de la liberté de l'homme , mal que
Dieu n'était point obligé de prévenir, puisque, par rapport i Dieu,
il n'est pas meilleur de prévenir cet abus que de le permettre.
D'ailleurs, Dieu n'aurait pu prévenir cet abus qu'en dépouillant
l'homme de sa liberté, ee qni aurait Tait du monde entier une pure
machine; etU. Kin g prétend qu'un monde oJi tout eOt été né-
cessaire et machinal n'eût pas été aussi propre i exercer la
puissance el les attributs de Dieu qn'un monde oh l'homme est
I libre..
Eniin , Dieu ajant choisi pour exercer sa puissance un monde
oh il j avait des créatures libres, il n'a pas dû changer sonpiqf
parce qu'elles devaient abuser de leur liberté, comme il n'a pas OQ
changer les lois qu'il a établies pour le pbjsique parce que ces
lois entraînaient aprèselles des désordres.
Dieu pouvait, il csl vrai , prévenir l'abus que l'homme l'ail de
sa liberté ; mais il ne l'aurait prévenu qu'en faisant intervenir sa
toute- puissance pour déterminer infailliblement l'homme au
bien ; mais alors il se serait écarté du plan qu'il s'était formé de
ne conduire à la vertu les créatures libres que |iar la voie des
peines el des récompenses.
H, King reconnaît que l'abus constant et optoiMre queThomme
aura lait de sa liberté conduira les pécheurs incorrigibles h di'S
p»inesélernelles;el.poar lesconcilieruvec la bonté de Dieu, il les
diminue autant qu'il est possible et les met sur le compte de la
créature ; il croit qu'ellei seront des suites naturelles de l'obstina-
I
MAN Ufi '
tioD des pi^cheurs ( il croit que les ilamofE fieront auiiot de fi
doi scaiiront vivemeni leur mIsËre, taa.h qui ï'applaudiroDljuitf-
tonl de leur cooduile el i^ui aimcrout mieux éire ce qu'ils seront
ie ne point être du tout; ils aimeroui leuriïlat, loui ntalhâu—
qu'ilsera, comme les gens es colère, les iunoureux, les sm-
biUeux, les curienx, seplaîscDldacs les clioees raéiue qui oe lost
qu'accroître leur misère.
Cel Étal sera une suite naturelle de la perversité des péchevrs ;
les impies auront Itllement accoutumé leur esprit i de f^ux ji^e-
mens , qu'ÎU n'eu feront plus dësorniais d'autres, passant p«npé-
tueUemeuI d'une erreur i une autre ; ils ne pourront s'einpicher
de désirer perpétuellement des djuses dont ils ae pourront jouù,
' iDtld prîfaliun les jettera dans des déuspuirs îiuviaGevables,
que l'expérience les rende Januïs plus sagee pour l'aveMr,
que, par leur propre faute, iUauront enliËrement corron^
snleudement et l'auront rendu incapable de ju){er mïim-
M, Itayle , pour réfuter U. Kiog , emploie ses propres prind-
: il recoauall avec lui que Dieu, trouvant au dedans de luj-
le une gloire et une iËlicitâ inlioies, n'a pu créer le aon^
r sa gloire ; de là M. Bajie eoncluique Dieu étaalbou, il »■-
dû, dans la cr^tiun du munde , donner loot i la lioHi, et
pffaipéctier , à quelque prix que ce fût, toute espace de mtd de
'introduire dans le monde.
Tout étant également )iud par rapport i Dieu , il n'a point été
:, par l'amour de lui-même ou de sa gluire , ti dioisir un
inde plulAt qu'un autre, i cboisirpour gourerner ce monde une
pluiAt qu'une autre: toutes étant égaWment bonnes par rap-
rt ï lai , il devait clioîsir celles qui étaient les plui profteec k
procurer le bien des créatures, et cbanger même toutes ces lois
à mesure que le bien de U créature le demanderait : car il n'éwit
pas ueilleur , p;ir rappoK t Dieu , de suivre le jtlan qu'il anit
cboisi qu'un autre *-
Bajle est toujours ici daus le mémo sophisme; il pné-
que le monde n'étant point nécessaire t la gloire de Diaa,
dû consulter que sa bonté ; mais Dieu n'a-t-il donc d'attri-
) De origine mali, auclore Guillelmo Kîni; ; Lond,, 1701, tn-8*,
ip. i, sectS. Appcnd., Dcli-g divin.
) Réponxs aux qucstimu d'uuprovlnnali L 3, & 7&.
i
I
136 M.\N
buU que la boulé ? N'esi-il pas uge el immuable, et ces altribuis
seront-ili snns inHuence daus les décrels et daus la conduite de
Dieu UDdm que sa bonté seule agira V La bonté de Dieu est-elle
une bienriisauce d'insliact, uveugle, sans lumière , sans sagesse ,
qui tende au bien de la créature saus auRun égard aux autres
attributs de l'Être suprême? Voilii ce que M. Bajfle suppose dans
sa réponse à U. King.
Je ne pjHe point des questions qui entrërent incidemment dans
Dette coDleslatiou, qui sont mutes Intéressantes, et que l'on trou-
vera dans l'ouvrage de U, Kiug , dans la Réponse aui questions
d'un provincial , et dans les remarques que M. Bernard a laites
sur la réponse de U. Bayle '.
Parmi ces questions incidentes , il y en a une qui a pour
objet le mal moral. M. King prétend qu'il y a plusde bien moral
a Jamais pu
; qu'ils sont nés
leurs enn Demis ;
que tout le bieo
rtu. Celui qui fait
e H. King, roumît un
:r qu'il est lui-même tel qu'il dé-
minait les hommes un A un, peut-
I seul dans cent mille qui put se
l perQdes ,
dans le monde que de mal , et même si
croire la doctrine de Hubbes, que tous les h(
des loups et des tigres les uus pour lesaulr
euDeoiis des autres, et que les autres sont
qu'ils sont naturellement liiiix e
qu'ils font n'est que par crainte
on semblable portrait des
assez juste sujet de soupçonner qi
peint les autres ; m
âtre n'en trouver
reconnaître à l'e pa
Ceui-lï mémo qui avancent cette calomnie , si on en venait à
toucber ï leur caractère , se donneraient-bien de la peine pour
éloigner de dessus eui les soupçons , et diraient qu'ils parlent
du peuple el du gros du genre bumaiu, mais non pas d'eux-mê-
mes ; et il est ceruio qu'ils ne se conduisent pas sur ce pied-là
envers leurs paréos et envers ceux avec qui ils sont en relation ;
•'ils le faisaivut , [leu de gens voudraient les avouer. Observex
quelques-uns de ceux qui déclament si fort contre les trahitona ,
les injustices , les fourberies et la cruauté des bommes , el vous
les Terrez cultiver soigneusement des amitiés , et s'acquitter des
différens devoirs auxquels ilssont obligés envers leurs amis, leurs
familles et leur pays ; Iraviiiller, souiTrir, lia^ariler même leur vie
pour y être liUélts , lorsqu'il n'y a aucun motif de crainte qui les
> Républ, des lettres, ins, janvier, p, S7.
I
MAN I s;
-j porte ei qu'ils pouTraieni négliger ces devoirs b»ua danger n
inconTénient pour eux-mêmes.
Cela vient , direz-vous , de la coutume et de IVducaiion : su]h
posons que cela soil ; il faut donc que te genre liumain u'ail pu
leUemeut dégénéré et renoncé au bien , que la plus grande pai^ J
lie des hommes n'exerce encore la bienfaisaiic
pas lellemeDl bannie, qu'elle ne soil ap|iutéc et soutenue, louén •
et pratiquée, pat un consentement géaérd et par les suCTnigea
du public , el le <riee est encore honteux.
EirectiTemenl , ï peine trouve-l-on un seul homme , ï moins
qu'il ne toit pressé par la nécessité ou provoqué jtar des injures.
z barbare et qi
cetsible 1 la [litié, et qui ne g<jûte du plai
autres; qui ne soit disposé i lëniuigi
l'affectioq.a ses amis , ft ses voisins,
diligeut a s'acquitter des de
prores&ioD de respecter la vf
Erant qu'on le taxe d'être vie
Id'eumïner pendant <in jour
toes, peut-être s'en trouvera-
-, ■
«RI
r.
pour être ioac-
du bien aux
de lu bienveillance et de
ï ses pareus, et qui ne soit
civils eiivtirs tous ; qui ue Tasse
et qui ne regarde comme un af~
Si l'on veut se donner la peine
cLiuns et celles de quelques au-
une ou deux de blâuialiles, tan-
et bon nés.
, qu'on parle d'un seul grand '
te. ; qn'on le publie hîeu di-
plus long-temps la mémoire |
de mille bonnet et généreuses actions , qui ne font point de
lit dans le monde et nevienaent point il la connaissance du pa-
Uic, mais qui demeurent ensevelies dans le silence et dans l'ott-
bli , et cela même prouve que les pvcui&res sont beaucoup plus
nres que les demiéres , qui sans cela n'exciteraient pas tant de
•nrprise, d'horreur et d'élounement.
Il faut observer, en troisième lieu, que bien descboses qui sont
innocentes paraissent criminelles à ceu\ qui ignorent les vues
de celui qui agit et les circonstances oiiil se trouve : il est cer-
tain que nous ne pouvons juger de ce qu'il y a de bon ou de mau-
vais dans une aciiou sur de simples ajipareuces, mais par les in-
tentions de l'ime et par le point de vue sous lequel celui qui agit
> Il faut remarquer,
trime comme un niei
«antage etquel't
envissge les choses.
"a quatrième lieu,
e Tont par ij
Muvciii mime cIIm paiscui |)oui tim vertus ■
Pan! persécuia l'Église, et lui-miîme a
ignorance, el que c'éiaii pour ce a qu'il ai
combicudecboses decelteniilurcneBefoal-ellcïpasluuE Icsjauri
par ceux qui professent des religions dUKrentes ! ce tant , je l'a-
voae , des pécbés , mais des péchés d'igooraoce , qui doiveol i
peine ftre comptés parmi les maui uorJUK, parce qu'ils ai
procèdent pus d'uoe mauvaise disposition et d'une volonlà cor'
rompue.
Tout bomme qui use de vio'ence o
pour U ïeriu, par haine contre le vice
de Dieu , fait mal , sans cootredit ; m
boouéte et bon l'eicusent beaucoup. Celle cousidératioo seule
EulBt pour diminuer le nombre des niikbans, et celte eicuse ne se
borne pas â ce qui regarde la religion : les préjugés de parti doi-
vent être pesés , ces préjugés qui engageai souvent les botomes i
employer le fer et le feu contre ceux qu'ils regardent Tomme ies
ennemis publics et comme des traîtres i la patrie ; il a'j i pas
d'erreur plus fatale »u genre humain et qui ait eafanté plus et de
plus grands crimes, et cependant elle vieut d'une Ime remplie de
droiture. La méprise consiste en ce qu'ils oubLont qu'on doit dé-
fendre l'Ëtat par des Toiesjusles et légitimes, et non aux dôpens
itre un antre , par amoai
ou par zèle pour la gloire
s l'ignorance e
de l'humanité.
En cinquième lie
comme méchans b
Le commerce le pli
fournitau malin un
e seule
u , les préjugés et les soupçons font regarder
ien des gens qui ne le sont réellement point,
is innocent cotre un Loume et une femme
sujet de les soupçonner et de tes calomuiei :
qui accompagne ordinairement une
action criminelle , on déclare coupable du fait m£me la personne
EOupgonnée; une seule mauvaise action aulfit pour d^onorer
tome la vie un bomme el pour comprendre toutes ses aaions dans
une même sentence. Si un seul membre d'utie société tombe dans
n présume d'abord que les autres ne valent pu
i:umbien il j a de gens qui pas-
sent, fiurde pareils titres, pour IrÈs-mécbuns, qui sont irËs-diETé-
rens de cequ'on les croit. Les confesseurs et les juges, lorsqu'ri
s'agit de cas criminels , savent parfaitement combien peu de vi-
rlté il ; a dans les bruits ordinaires et combien peu de Fond il j
ai. y faire.
Sixiémeruent , nous devons dislinguer, cl ta loi même le fait,
entre les actions qui vleuueot d'une malice prémédilAe et oullet
quelque faute,
mieui. U est presque incroyable <
I MA.N 138
itnqudles ^elqoe violente fusion oh qudquc iiMtdK dau
l'esprit porieM.
Lorsque l'olT^nseur rat provoqué et qu'uD traasport subit de la
piissLua le met comme hors de lu) , il esti'enÛD quee^i diminue
bien 11 faute. Oe sont li des cbuscs qui suoi purLiienienl cuo-
nues de notre Irès-équi table juge, <{ui uod» jugera nû&éricor-
dicuseineot et non i la rigueur, el c'est siins doute pour oei ru-
sons qu'il nous a défeadu de juger avant le lamps : nous ne «oyosB
que l'ëcorce des choses, el il est Irès-pi'ssible que ce que r>ow
regardons comme le plus grand crime nous partiltiiiit devoir âtM
mis au nombre des moindres si nous étions instruits de toiU ce qui
y a du rapport et si noua avions Égard ii tout.
Bien des vertus et bien des vices résident dans l'ime el sont
invisibles aui jeui des bommes; ainsi c'eiît parier k l'aventure
que de prononcer sur le nombre des unes et des avtres , el pré-
tendre inférer de Ik la nécessité d'un mauvais principe ; c'est mé-
riter d'être regardé comme un juge téméraire et coupable de prè-
cipita^OD) c'est usurper les droits du juge su|)iiëme.
Elnfin , la conservation et l'accrois s etn eut du genre hiiroùn etf
une preuve bien sûre qu'il j a plue de bien que de mal dans le
monde. Toutes les ituione vicieuses , en elïei , tendent k !•
destruction du genre buniain , du moins tl son d^uvtiulage M
ù sa diiiiinulion , au Ueu qu'il faut nécessaireiuenl le concoun
d'un grand aombrc et même d'un nombre infini de boa
actions pour la conservation de chaque individu ; si doue
nombre des mauvaises actions surpassait celui des bonnes,
genre bumain devrait finir. C'est ce dont on voit une preuve bien
ïensible dws iespajtoti les viceit se multiplient; ie nombre des
bommes j diminue IOqs lesjours , et ils se dépeuplent peu à peu;
si la vertu s'j rétablit, les faabilans y reviennent i u suite : c'est là
uue marque que le genre buiiiuïn ne pourrait subsister si jamais le
vice était dominant, puisqu'il faut le concours de plusieurs bonnes
ai'tions pour réparer les dommages causée par une seule mauvaist
uetion. Il ne faut qu'un crime pour Ater la vie 11 un bomme «u ï
|iluaieurs ; mais combien d'actes de bonté et d'Iiumanité doiveal
concourir pour élever et conserver chaque particulier?
De tout ce qu'on vient de dire, je me tlatie, dit U. King , qu'il
parait qu'il y a plus de bien que de mal parmi les hommes, et que
le mouJe peut dire l'ouvrage d'un Dieu bon malgré l'argument
qu'on loude sur la suppotilion que le niai l'emporte lur le bien ;
140 HAN
et toDt cda cependant n'est pas nécessiire, puisqu'il peut; avoir
dii mille fois plus de bien que de mai dans tout l'univers, quand
mAioe il n'j aurait absolument aucun bien sur cette terre que
nous habilous. Klle m trop peu de cbose pour avoir quelque pro-
portiiiD avec le sjsième entier, ei nous ne pouvons que porter un
jugement iinporfail du tout sur cette partie. Elle peut être l'hJt-
pital ou la prison de l'univers ; el peul-oa juger de la bonté et de
la pureté de l'air d'uu climat sur la vue d'un fa6pital où il n'y a
que des malades? ou de la sagesse d'un gouvernement sur la vue
d'une maison destinée pour des personnes aliénées et où il n'y a
qoedesToust ou de la vertu d'une nation sur la vue d'une prison
oli il n'y a que des mall'aitears ? non que je croie que la terre soil
efliKtivement telle , mais je dis qu'on peut le suppitser , el touie
supposition qui montre couimeni la cliose peut être renverse l'ar-
gunent du Manichéen, fondé sur l'impossibilité qu'il j a d'en
rendre raison.
Ea atiendiuil, je regarde la terre comme un séjour rempli de
douceurs , oii l'on peut vivre avec plaisir et joie , et être heureux.
J'avoue, avec la plus vive reconnaissance pour Dieu, que j'ai
passé ma vb de cette manière , el je suis persuadé que mes pa-
rens, mes amis et mes domestiques en ont fait autant; et je ue
crois pas qu'il y ail du mal dans la vie qui ne soil irés-suppor-
uble , Burl«ui pour ceux qui ont des espérances d'un bonheur à
Tenir'.
{ IV. — DUpvle de M. Jaquetot et lie M. Bayle ntr l'origine du mal.
U. Jaquelol, pour répond»' .lux diltieullés de M. Bayle, pose
pour principe foudamcuuil que Dieu a eu dessein de former une
créature intelligente el libre pour en être connu et adoré; si elle
n'était pas libre et intelligente, ce ne serait qu'une machine qui
agirait par ressorts , et qui pur conséquent ne pourrai! contribuer
k 11 gloire de Dieu.
On doit concevoir, dit-il , que Dieu ayant voulu se faire con-
nattre par ses ouvrages est demeuré comme caché derrière ses
• Ce morceau de M. Krn|{ etl tiré des nolci de M. Law sur M. King,
dan! la traduction angliiK de l'auvrafe de cet acrbevéque ; quoiqu'il
Mit DU peu long, j'ai cru qu'il étuit à pmpus de n'en rîeu retrancher.
yey«i le cuntiuuateur di: Bajlis ail. KiMi>
I MA.\ 1
ouvrages , t peu près comme ce peintre qui se leiiail cacliii der- '
riëre $e£ lableaui pojr entendre lesjugemeDS qu'on en ferait;
aiijBJ l«s hommes oiil éié. créés libres dans celle tus , afin de ju-
ger de la grandeur de Dieu par la mngoilicence de ses leuvreii.
On ne peut pas accuser Dieu d'èlre l'auteur ia mal pour avoir
crM un êlre libre qui a abusé du liieafaîl de Dieu el qui s'est
porlé au mal par l'etTel de sa libf né : eelte liberlË de rhotniue
rend le. moDde digne de Dieu, el il inanquerait quelque chose h
la perfeeiion de l'unÏTers si Dieu n'en atait poinl créé de tel :
voilà , selon U, Jaquelot , l'arme ilonl on doii se servir pour re-
pousser loiilcs les attaques des ennemis de la l'roTidence.
Un être intelligent et libre esi le plus excellent el le plus pur-
fait des êtres que la puissance de Dieu , tout iutinie qu'elle est ,
pouvait Tunner.
La liberté de l'homme une fois établie , la permission du mal
n'a plus rien de contraire â la bouté de Dieu ; les inconvéniens
qui naissent de cette liberté De peuvent coati'ebalaneer les raisons
tirées de la sagesse , de la puissance et de la gloire de Oieu.
L'exemple des bienheureux n'csl pas une dilliculté, comme
U. Bajie le pense : les bienlieureux sunt daus un eut de récom-
pense, et les hommes sur la terre sont dans un état d'épreiive '•
H. Bajle répondit i U. Jaquelot que l'étal des bienheureux
éiautunêt*lderi.Wnipen5e, il ^Uiii plus parfait cl par conséquent
plus digne de la sagesse de Dieu que l'èui d'épreuve dans lequel .
il avait créé l'homme.
H^nfin , H, Bayle lui opposa sou gruod argument , c'estqueDieu ^
pouvait conserver inlUillibleinenl et librement l'homme dans le
bien ».
s deuxs'alla-
'Ui le premier
état de la question , et se jetëreui dans des reproches personnels
qui n'intéressent personne '.
La mort de M. 6 a jle termina la querelle, mais on ne le crut pu
> Conformité de 1» foi et di: la raison.
* Rép. aux quesl. d'un protincial, t. 3.
a de la lliéolo^ic de si. BajK'.
g T. — Hép/HUe de M. de la Flacelle auir diffieultit de M. Bayle.
U, Bajie, dans U>ute celle dispute, s'était appujé sur ce prin-
cipe , c'est que Dieu n'a pu créer le monde pour «a gluire, ei qu'il
n'a, été déterminé il le créer que par m bonli. Dieu, nnimé par ce
motif Beol, devait, eeloa U. Ra^le, rapporter toui au bouheur des
créatures, et par coBséqueut ue produire que du bien dans le
monde ; rien ne devait le détourner de cel objet, M. Bayle , en-
fumé dans cet état de question comme dans un fort impénétrable,
bravail tous tes ennemis et faisait retomber sur eux tous les traits
qu'on lui lançait,
U. de la Placette s'aperçut du sopliïsme de H. Bajie ; il aban-
donna tous les incidens dont on avait embarrassé la question ; il
attaqua le principe de M, Bajie : il fit voir que ce critique n'avait
point prouvé et ne pouvait prouver que Dieu n'avait pu oréor le
monde que pour rendre ses créatures beureuses.
S'il ; a , dil-il , quelque cbose d'impénétrable , ce sont les êt»-
seios de Dieu ; la raison en est que ces desseins dépendent prin-
cipalement de sa libre et absolue volonté : il fait ce qu'il veut, et
par conséquent il prend telle résolution qu'il lui platt; contment
donc pourrions-nous le deviner? qui aurait pu, par exemple,
Eoupçonner celui de l'incaniation , s'il ne s'en était jamais ex-
pliqué t
Si Dieu a pu ne pas se proposer tmiquement pour 6n àt rendre
ses créatures heureuses , looles les diflicultés de H. Bajle s'éva-
nouissent ; il n'est contraire ni i U sagesse , ni i la bonté , d'a-
voir pcmris h mal. U.àeh Placette n'alla pas piusloin et n'iniu
pas ceux qui avaient entrepris de déterminer la lin que Dieu s'était
proposée dans la création du monde. Tons les adversaires de
U. Btyle, en osant le faire, s'étaient jetés dans des abîmes ob
ce critique les avait oombatlus avec de grands avantages '.
H. Bayle mourut dans le temps que H. de la Placette comnWD-
çut à faire imprimer son ouvrage.
H. de la Placette s'était contenté de ruiner le fondement des
objections de U. Bayle et de faire voir que les conséquences qu'il
lirait de la permission du nul contre la bonté de Dien étaient ap-
puyées sur des principes qui n'étaient point prouvés : il n'en fal-
* Réponse k deux objeclions de M. Bayle, par de 1d Placette;
in-lî, 1707.
Iiît pas davantage pour remplir l'objet qn'll s'Hait proposé, s«-
Toir, de faire voir que H. Bajie n'opposait poial à la religion Uea
difficaltés insolubles.
S VI. — Bypoîhèie de M. Lettntix paur expliqiitr f origine du mal,
M. Leibniu cral qne, pour dissiper toutes les inquiétudes d»
l'esprit humain sur les difficultés de H. Bajte , il fallait concilier
plus positivement la permission ifn mat a«et la bonté de Dieu.
Tout«8 les mélhodesqu'an avait swTÏes poor remplir cet objet
lui parurentinsufBsantesetcondnireâdesco&séqaencesâcbeuses:
il prit une autre voie pour justltler la Providence.
Il crut que tout ce qui arrive dans le inonde étant une suite du
vhoii que Bieu a fïit du monde actuel , il fallait s'élever ï ce
premier instant o4i Dieu Torma le décret de produire le monde.
Une inRaité de mondes possibles étaient présens ï l'imelli-
gence divine , et sa puissance pouvait égiileiuenl les produire
tous; puis donc qu'il a créé le monde actuel, il faut qu'il ait
Dieu n'a dcrnc pn créer le monde présent sans le préférer k tous
les autres ; or, il est coDtrddictoire que Dieu ayant donné l'être
à un de ces monde» n'ait pas préféré le plus couronne i ses at-
tributs , le plus digne de lui , le meilleur, un monde dont la créa-
lion ait le but le plus grand , le plus excellent que cet être tout
pariait ait pu se proposer.
Nous ne pouvons décider absolument quel a été ce but du créa*
leur, car nous sommes trop borués [lour connaître toute sa na-
ture; cependant , comme nous savons que sa bonté l'a porté ï
donner l'existence aux créatures et que l'objel de sa bonté ne peut
être que les créatures intelligentes, nous pouvons dire , en rai-
sonnant sur les lumières qu'il nous a données pour le connaître,
qu'il s'est proposé de créer te plus grand nombre de créatures in-
telligentes , et de leur donner le plus de connaissances , le plus
de bonheur, le plus de beauté que l'univers en pouvait admettre,
^^let conduisant ï cet lieureui état de la manière U plus couve-
^^Bbtet leur nature et la plus conforme ï l'ordre.
^^'&r la bonté de Dieu ne peut jamais aller contre les lois da
^^Tôrdre , qui font les règles invariables de sa conduite , et la bonté
se trouve réuuie eu cevi avec la sagesse; c'est que le plus grand
bonheur des créaturei intelligente* cOiisÎBUtnl dans la connaissance
iH«irit«D<ei>t fPlf-iresupréroo. pour sVn Carre mieuncoii-
. M pOBT los porter t Tidorer, a'esl proposé de leur tnaai-
EM d'iTÎns atlrîbiits , el par conséqurot de choisir un monde
e« il; pùl I* plus dr caraclSre d'une souveraine sagesse el d'une
|i«ÙM«i-( iiiHaie dins toute son adninisiration , el en particulier
Im rJmsps matérielles ; le plus de variété aiec le plus graud
', le iciraio , le temps , le lieu , les miem ménagés ; le plus
d'effets (iroduits par les lois les plus simples.
|jt monde actuel , pour ëm le meilleur des mondes possibles,
doit iire celui qui répond le plus exaclemenl i ce but magnifique
créateur, en aorte que toutes ses parties , sans eicepiion , avec
tous leurs changemens et leurs arrangt^nicns , conspirent avec la
plus grande eiaolitude fe 1» tuë générale.
Piiisqu» ce monde est un tout, les parties en sont tellement
liées qu'aucune partie D'en saurait être retrancliée sans que tout
le reste ne soit cliangé aussi.
Le meilleur monde renfermait donc les lois actuelles du moa-
vemeAl, les lois de l'uaion de l'Ame et du corps établies par l'au-
de la nature , l'imper foc tion des créatures actuelles , et les
lois selon lesquelles Dieu leur répartit les grâces qu'il leur ac-
corde ; le mal métaphysique, le mal moral et le mal physique
trïieni donc dans le plan du meilleur monde.
Cependant on ne saurait dire que Dieu uït voulu le péché, mais
en qu'il a voulu le monde oli le péché trouve lieu.
Ainsi Dieu a seulement permis le péi:lié: sa volonté â cet égard
car une permission n est
légation d'une puissance
)n dont il s'agit, et per-
. liéeï d'autres, sans se
oit en notre pouvoir de
i rend ce
que permissive , pour ainsi dire
autre chose qu'une sut^pension ou une i
mise eu œuvre, empêcherait l'actii
e , c'est admettre une cbosc qui es
la proposer directement et quoiqu'il s
roJiipêcher.
faut pas condur
moodfrfi plus parfait que tous les autres mondes ; C!
point les péchés , mais toutes les perfections innombrables de ce
monde auxquelles le péché se trouve joint , el qui sans le péché
haut degré de perfection ; ce nom ces perlectioDi
<iui élèvent ce monde-ci au-dessns de tous les mondes possibles ;
donc pas le plus parfait parce que le péché j
trouve lieu , mais le nioude le plus parfait est celui otj le péché a
conséquent Dieu n'a pus voulu le mal en lui-même; il
I
MAN
MSI
I
x'a pràlesiind personne au pitihé el au mallieiir. I! » voulu a
Bonde où le péi'hi^ se Irouvaîl. Tels son! les principes que '
H. Leibnilz établit àam sa Théodio^e.
L'ordre, rbanuonie, les vertus nui sseni des désordres Joui on
M »erl pour obscurcir le dogme de h ProTÎdcnce. Laurent Vallu
a fait un dialogue dans lequel il Teint que SeiLus , fiU de Tarquin-
le-Superbe, va consulter Apollon, il Delphes, sur sa destinée.
Apollon lui prédit qu'il violera Lucrèce ; Seitus se plaint de It
prëdiciion ; Apollon répond que ce n'est pas su faute , qu'il n'ett
qae devin , que Jupiter 3 tout réglé , el que c'est i Inï qu'il faut
le plaindre.
Lh Ua\t le dialogue, où l'on voit que Valla sauve la prescience Je
Dieu aux dépensde sa bonté; mais ce n'est pas 11 comme H. Leib—
nitz l'eniend ; il a coniinué selon son système la fiction de Valla.
Seitus va ï Dodone se plaindre !t Jupiter du crime auquel il
Mt destiné; Jupiter lui répond qu'il n'a qu'à ne point aller ï
Rome; mais Se\lus déclare neltemcnt qu'il ne peut renoncer ï
l'espérance d'être roi , el s'en va.
Après son dépari, le grand-prèlre Théodore demande i Jupiter
pourquoi il n'a pas donné une autra volonté à Sextus. Jupiter en-
voie Ttiéodore ï Athènes consulter Minerve; elle lui montre le
palais des Dcsiiaées,o(i sont les lablcani de tous les univers pos'
libles , depuis le pire jusqu'au meilleur. Tliéudore voit daos le
meilleur le crime de Sextus , d'uii natt la liberté de Home , un
gouvernement fécond en vertus, un empire utile ï une grande
partie du genre humain. I
Ces avantages qui naissent du crime de Sextus librement vi-
cieux ne sont rien eu comparaison du loial de ce monde , si nuui
pouvions le connaître dans toute son étendue '-
{ VII. — Répante du P. Ualebraache auj: difflculléi de U. Bayle.
Le V. Boubours, dans sa Vie de saint François Xavier, raconte
qu'un bonzefît au saint des dlflicultés sur l'origine du mal. Iji
. P. BouLours expose ces difGcultés, et dit que le saint réduisît le
LfcOBU lu silence par d'excellentes raisons dont il ne rapporte au-
■ Essais de TbéodictV, parL 3, n, iOSctsuîv. On Ironvcces mPmes
principes dans un pclil écril qui est a la lin lies Essois du Thémlk-ée,
sous ce lilrc : Causa Dei ossoila pcr ju<tiiiam,
14a MAN
Un des amis du P. Malebranche, embarrassé par Tobjeclion du
bonze, à laquelle il ne voyait point de réponse, pria le P. Maie-
branche de le tirer d*embarras, et le P. Malebranche donna Tob-
jectionetla réponse dans ses Conversations chrétiennes ^
G>mme le P. Malebranche remarqua que ces difficultés avaient
fait une impression assez forte sur plusieurs esprits, il entreprit
de justifier la Providence et de faire voir que Dieu est infiniment
saget infiniment juste, infiniment bon, et quUl fait aux hommes
tout le bien quMl peut leur faire *.
Lorsque le Dictionnaire de M. Bayle parut, les difficultés contre
la bonté de Dieu firent beaucoup de bruit, et le P. Malebranche
ne fit qu'appliquer à ces difficultés les principes qu*il avait établis
dans ses Conversations chrétiennes et dans son Traité de la nature
et de la grâce.
Dieu étant un être souverainement parfait, il aime Tordre, il
aime les choses à proportion qu'elles sont aimables ; il s'aime par
conséquent lui-même et s'aime d'un amour infini.
Dieu n'a donc pu, dans la création du monde, se proposer pour
fin principale que sa gloire.
Le monde et toutes les créatures étant finis, il n'y aurait entre
toutes les créatures possibles et la gloire de Dieu aucun rapport ;
il ne se serait donc jamais déterminé à créer le monde, s'il n'y
avait eu un moyen de donuer en quelque sorte à ce monde un mé-
rite infini, et ce moyen est l'incarnation du Verbe, qui donne aux
hommages de la créature un prix infini.
L'incarnation est donc l'objet que Dieu s'est proposé dans la
création du monde.
Le péché de l'homme n'étant point contraire à l'incarnation, la
sagesse de Dieu n'exigeait point qu'il ftt une loi particulière pour
prévenir le péché de l'homme ; et tout ce qu'on peut conclure,
mais aussi ce qu'on doit nécessairement conclure delà permission
du péché d'Adam, c'est que le premier et le principal dessein de
Dieu n'était pas son ouvrage tel qu'il était dans sa première in-
stitution, mais que Dieu en avait en vue un autre plus parfait et
digne de sa sagesse et de ses attributs.
Ainsi la foi dénoue la difficulté, et Tobjection se tourne en
preuve de la vérité de la religion ; car la religion chrétienne sup-
A Réflexion sur la prémot. physique, p. 925,
' Traité de la nature et de la grftce.
I
MAN
H7
pose r in «I ruai ion du Verhe; elle nous apprend que Jésu^-Cbrist
et son %lise eslle premier et le principal dessein de Dieu.
Comme Dieu est infinimenl sage et coaime la sagesse veut que
chaque Sire agisse conformémeut ï sa nature, Dieu doîl exprimer
dans sa conduite le jugement iiu'il porte de lui-même ; il ne doit
donc pas agir pir des volooliSs particulières, mais par des volontés
générales, parce que Dieu, agigsanlpardes volontés particulières,
agirait comme t'U n'avait pas prévu les suites de son action et
comme si son bonheur et sa gloire dépendaient d'un petit événe-
ment particulier.
La bonté de Dieu n'eiîgeaîl donc pas qu'il prévint tous lea
mallieiirs des créatures, puisque ces malbeurssont des suites des
lois générales que sa sagesse a établies et que la bonté de DicQ
n'eiigeait rien qui fAt contraire ï sa sagesse.
Dieu n*a pas seulement établi des lois générales pour la distri-
bation des mouvemeos, il a dO suivre des lois généralei dans la
distribution des grSees et des secours qu'il destinait aux honimM.
La sagesse ei la bonté de Dieu n'exigeaient donc point qu'il pré-
tIqI tous les désordres de l'homme et toutes les suites de son p^
I dié, soit dans cette vio, soit dans l'autre.
■ Pour rendre tous les hommes iimocens et veriueui, il aurtft |
^ûiHu que Dieu, dans la distribution des grices, ioterroniplt I
lois générales et suivit des lois particulières ; il fallait qu'il agft
d'une manière iodipe de lui et contraire i ses ailribuls.
De ces principes le P. Malebranche conclut que Dieu fait i ses
créatures tout le bien qu'il peut leur Taire, non absolument, mais
agissant selon ce qu'il est, selon la Traie et invariable justice;
qu'il veut sincèrement le salut de tous les hommes et de t'eurant
même qui eit dans le sein de sa mère * ,
Lea principes du P, Halebrnnche sur les lois générales de la
Ulure et de la grke ont été attaqués par U . Aruaud et par l'an*
leur de la Prémoiîon pbjsique *,
* ContersaL chrétienne) i Traite de In nature et de la grïce ; Rè-
flalan sur la prémotton pb)'sique. Abr^é du traité de la nature et de
1* grlce, L a des Réponses ï H. Arnaud.
■Béflex. pbiloa. et Ihéol. sur le traité de [a nature et de la grâce,
, B wl, iB-lï. De l'aclion de Dieu sur tes créatures , etc. , in-d", ou six
L fn-13.
.a question de l'oiiginc du mal a été traitée dans une InGnlté d'on<
ngcti dons lesquels on ne lait qu'appliquer les dljlércni prlncipei
148 MÂR
MARC était disciple de Valeutin : il fit dans le système de son
maître quelques changemens peu considérables et peu imporlans.
Ce que saint Irénée nous dit de ces changemens ne s*accorde
pas avec ce que Pbilastrius et Théodoret nous en ont laissé ;
peut-être Philastrius et Théodoret nous ont-ils donné le senti-
ment de quelque disciple de Marc pour le sentiment de Marc
même.
Le sentiment que saint Irénée attribue k Marc paraît fondé sur
les principes de la cabale, qui suppose des vertus attachées aux
mots ; et, selon Pbilastrius et Théodoret, la doctrine de Marc pa-
raissait fondée sur cette espèce de théologie arithmétique dont on
était fort entêté dans le second et dans le troisième siècle : il est
du moins certain qu*il y avait des Yalcnliniens qui, diaprés les
principes de la cabale, supposaient trente Ëons, et d'autres qui
n'en supposaient que vingt-quatre et qui fondaient leur sentiment
sur ce qu'il y avait dans les nombres une vertu particulière qui
dirigeait la fécondité des Ëons.
L'exposition des principes de ces deux sortes de Yalentiniens
peut servir à l'histoire des égaremens de l'esprit humain.
Valenlin supposait dans le monde un esprit éternel et infini
qui avait produit la pensée ; celle-ci avait produit un esprit ; alors
l'esprit et la pensée avaient produit d'autres êtres ; en sorte que,
pour la production de ses Ëons, Valenlin faisait toujours concou-
rir plusieurs Ëons, et ce concours était ce qu'on appelait le ma-
riage des Éons.
Marc , considérant que le premier principe n'était ni mâle ni
femelle et qu'il était seul avant la production des Ëons, jugea
qu'il était capable de produire par lui-même tous les êtres, et
abandonna cette longue suite de mariages des Ëons que Yalentin
avait imaginés. Il jugea que l'Être suprême étant seul, n'avait
produit d'autres êtres que par l'expression de sa volonté ; c'est
ainsi que la Genèse nous représente Dieu créant le monde ; il dit :
que nous avons exposés. Voyez le recueil des sermons pour la fonda-
tion de M. Boy le; Cosmologia sacra, par M. Grew, 1. 6. Ce sixième
livre contient d^excellentes choses sur les fins de la Providence, sur la
loi naturelle, etc. ; mais il serait trop long d*exposer ces principes dans
un ouvrage où je me propose principalement de faire connaître les bons
ouvrages que l'on doit consulter: on doit mettre dans cette classe
l'ouvrage de M. le vicomte d'Alais sur Torigine du mal*
B>><
l'Que 1^ luioière se Tasse, et ta lumiËre se fait. Ci
uoS€ei ea prononçant, pour ainsi dire, certains mots que 1'
tuftime anit produit des èlres distingués de lui.
Ces niOlE D'étaieut point des sons vagues et dont la signiiication
ftt arbitraire; car alors il n'aurait pas produit un être plutCll
qu'un autre ; les mots que l'Etre suprême prononça pour créer
des êtres hors de lui exprimaient donc ces êtres, et la prononcia-
tion de ces mois ayail la force de lea produire.
Ainsi l'Ëire suprême, a;f ani loulu produire un être semblable k
Jiti, avait prononça le mol qui exprime l'essence de cet être, el
ce mol eal arch/, c'est-â-dire principe.
Comme les mots avaient une force productrice et que les mots
étjiieol composi^de lettres, les lettres de l'alplmbet renrermaieiit
■nsM une force productrice et essentiellement productrice ; eulin,
comme tous les mots n'étaient formés que par les conibinaisons
des lettres de l'alphabel, Marc concluait que les v ingt- quatre le i-
de l'alphabet renrermaieni toutes les forces, toutes les qualh J
H toutes les vertus possibles, et c'était pour cela que Jêsu»>
si avait dit qu'il était Valpha cl l'oméga. ,
Puisque les leltrcs avaient chacune une force productrice, VZ~M
[ire suprême avait produit immédiatement autant d'êtres qu'il avaïlj
de lettres. Marc prétendait que, selon h Genèse, Diei
avait prononcé quatre mois qui renfermaieul trente leltrcs, aprtaf
quoi il était, pour ainsi dire, rentré dans le repos dont il n'élaît
sorti que pour produire des êtres distingués de lui- De Iti Marc
concluait qu'il y avait trente Ëons produits immédiatement par
l'Être suprême et auiiquels rel être avait abandon
Voilii, selon taînl Irênée, quel élait le sentiment du Valeniini
lire.
iupposait que
Selon Philaslrius et Théodiiret, Marc faisait aus
les ÈoBt immédiatement de l'Ëlre suprême, mais il
l'£tre suprême n'en avait produit que vingt-quatre, paici
nombre était le plus parfait : voici, ce me semble, comment Marc
ou quelqu'un de ses disciples Tut conduit ù ce sen^ment.
Valeotin avait imaginé les Ëons pour expliquer les phénom^ I
nés; il les availmultipliés selon que les phénomènes l'cxiiteaienl :.'
tes disciples avaient usé de la même Ii1>errê, les uns admettaienl f
trente Ëons, les antres huit et d'autres un nombre indéGoi.
Mais enfin, comme le nombre des phénomènes élailencnul linli j
13*
160 MAlt
il fallait s'arrêter k un oeruin nombre d'Ëons, et Ton ne voyait
pas pourquoi la puissance des Éods n*étant point épuisée *par la
production des phénomènes, leur fécondité s*était arrêtée tout k
coup et s'était renfermée, pour ainsi dire, dans les limites du
monde.
Marc jugea que ce nombre plaisait auxÉons, ou qu*il était plus
propre à produire dans la nature Tordre et Tharmonie, ou enfin
que les Ëons étaient déterminés par leur nature à ce nombre de
productions, et il crut qu*il y atait dans les nombres une perfec-
tion qui déterminait et réglait la fécondité des Ëons ou qui limi-
tait leur puissance.
D*après ces idées, on jugea qu*il fallait déterminer le nombre
des Ëons, non par le besoin qu*on en avait pour expliquer les phé-
nomènes, mais par cette idée de vertu ou de perfection qu^on avait
imaginée attachée aux nçmbres, et Ton avait imaginé plus ou
moins d'Éons, selon qu*on avait cru qu*un nombre était plus ou
moins parfait qu'un autre.
On voit, par les fragmens d'Héracléon que M. Grabe a extraits
d'Origène, que celte espèce de théologie arithmétique avait été
adoptée par les Yalentiniens, et ce fut d'après ces principes que
Marc borna le nombre des Ëons à vingt-quatre. Voici comment il
fut déterminé à n'en, admettre que ce nombre.
Chez les Grecs, c'étaient les lettres de l'alphabet qui expri-
maient les nombres ; ainsi l'expression de tous les nombres possi-
bles éuit renfermée dans les lettres de l'alphabet grec : Marc en
conclut que ce nombre était le plus parfait des nombres et que
c'était pour cela que Jésus-Christ avait dit qu'il était aîpha et
oméga ; ce qui supposait que ce nombre renfermait toutes les per-
fections et toutes les vertus possibles. Marc ne douta donc plus
qu'il n'eût démontré que le nombre des Ëons qui produisaient tout
dans le monde était de vingt-quatre * .
Marc n'avait pas seulement cru découvrir qu'il y avait vingt-
quatre Éons qui gouvernaient le monde ; il avait encore cru décou-
vrir dans les nombres une force capable de déterminer la puis-
sance des Ëons et d'opérer par leur moyen tous les prodiges
possibles ; il ne fallait pour cela que découvrir les nombres à la
vertu desquels les Ëons ne pouvaient résister. Il porta tous les
efforts de son esprit vers cet objet, et, n'ayant pu trouver^dans les
* Philaslr., De hser., c. Ii2. Théodoret, Hxr. Fab., 1. 1, c 9.
■ MAA I5t 1
nombres les Tertus qu'il y avait supposées, il êut l'an d'opérer
quelques plifnouièaes singuliers qu'il Qt passer pour tlea miracles.
11 Iroiiva, par eiLemple, le secret de cLanger aui )'eui des spec-
Uleurs le <ln qui sert an sacrifice de b meGae en sang : il avait
deux vues, un plus grand et un plus petit, il mettait le vin de
tiné 11 la célébration du sacriGce dans le petit rase et raisait ui
priftre; uo insiiot aprâi, In liqueur bouillounait dans le grand ^
^Tase, et l'on y voyait du sang au lieu de viu.
Ce fase n'était apparemment que ce qu*ou appelle communé-
ment la fontaine des noces de Cana ; c'est un vase dans lequel on
verse de l'eau ; l'eau versée fait monter du viu que l'on a mis au-
paravant dans M vase et dont 11 se remplit.
Comme Marc ne faisait pas connaître le mécanisme de son granj ]
vase, ou crojait qu'en effet l'tau s'y changeait eu sang, et Ton \
regarda ce changement comme un miracle.
Marc, ayant trouvé le secret de persuader qu'il changeait le vUj
en sang, prétendait qu'il avait la plénitude du sacerdoce et qu'Ai
en possédait seul le caractère.
tLes femmes les plus illustres, les plus riches et les pins belles,
•dmiraîenl la puissance de Harc : il leur dit qu'il avait le pou-
TDÎr de leur communiquer le don des miracles, elles voulurent
essayer : Marc leur fit verser du vin du petit vase dans le grand et
prondnçail pendant cette transfusion la pritre suivante : Que la
grict de Vituqaieit avant toute» ekvtn cl qu'on nepeut ni eoneevoir
ni erpliqair pfrfeelioitne en iwui l'humme iHlMeur ; qu'elle avi/-
mtnUiaeûBnaiiianceen jelanl legrainileKmettceiar labenne terre.
A peine Marc avait prononcé ces paroles , que la liqueur qnî
était dans le calice bouillonnait , el le sang contait et remplissait
le vase. La prosélyte, étonnée, croyait avoir fait un miracle;
elle était transportée de joie, elle s*agilait , se troublait, s'écluuf-
fahjusqu'ï la l\ireur, croyait être remplie du Saint-Esprit, et
prophétisait.
Marc , proGtanl de ces dernières impressions , disait b sa prn-
sâyte que la source de la grlce était en lui , et qu'il la commu-
niquait dans toute sa plénitude ï celles i qui il voulait la com-
mnoiquer ; on ne doutait pas du pouvoir de Marc , et il avait lu
, liberté de choisir les moyens qu'il croyait propres à la commu-
■ EpiplL,llaEr, SB,
152^ MAR
Toutes les femmes riches, belles et illustres, s'attachèrent à
Marc , et sa secte fit des progrès étonnans dans TAsie et le long
du RIiône où elle était encore fort considérable du temps de saint
Irénée et de saint Épiphane ; c'est apparemment pour cela que saint
Iréuée a traité Thérésie des Valentiniens avec tant d'étendue *.
Pour préparer les femmes k la réception du Saint-Esprit , Marc
leur faisait prendre des potions propres à inspirer aux femmes
des dispositions favorables k ses passions *.
Les disciples de Marc perpétuèrent sa doctrine par le moyen
des prestiges et par la licence de leur morale et de leurs mœurs :
ils enseignaient que tout était permis aux disciples de Marc , et
persuadèrent qu'avec certaines invocations ils pouvaient se rendre
invisibles et impalpables. Ce dernier prestige paratt avoir été en-
seigné pour calmer les craintes de quelques femmes qu'un reste
de pudeur empêchait de se livrer sans discrétion aux Marcosiens.
Saint Irénée nous a conservé une prière qu'ils faisaient au silence
avant que de s'abandonner à la débauche, et ils étaient persuadés
qu'après cette prière le silence et la sagesse étendaient sur eux
un voile impénétrable ^.
Marc n'était point prêtre , et , voulant s'ingérer dans les fonc^
tions du sacerdoce , il inventa le moyen de faire croire qu'il chan-
geait le vin en sang. Le dogme de la transsubstantiation était
donc établi alors dans toute l'Église , et faisait partie de sa doc-
trine et de son culte; car si l'on n'avait pas cru que, par les pa-
roles de la consécration , le vin devenait le sang de Jésus-Christ ,
le Valentinien Marc , pour prouver qu'il avait l'excellence du sa-
cerdoce, n'aurait pas cherché le moyen de changer le vin en sang.
Si Ton avait cru que reucharistie n'était qu'un symbole , Marc
n'aurait point cherché à faire croire qu'il était prêtre parce qu'il
changeait ces symboles en d'autres corps ; il se serait servi de ce
secret pour prouver qu'il avait le don des miracles, et non pas
pour prouver qu'il avait l'excellence du sacerdoce.
Marc le Valentinien est différent du Marc dont les erreurs occa-
sionèrent en Espagne la secte des Priscilianistes : saint Jérême les
a confondus'*.
^ Epipb., îbid.; Iracn., ibid.
3 Irsn., ibid.
> Irxn, ibid.
^ Corn. ad. Isa!., àk. Pagi, ad an. 881.
MAR
153 1
Vujei, sur le svitcmo i|ue Marc imagina , les articles Cabale,
BaSILIUE, PtRe»S.'
MARCOSIENS, disciples de Marc.
MAItClON fut d'abord un clir^tien zl'K- ; une TalLIesie daDB ]
laquelle il tomba le Bt eieommuaieT. Marcion, chassé de l'Ë- |
glise, s'attacba ù Cerdon , apprit de lui le sjsième des deux prin-
cipes, qu'il allia avec quelques dogmes du cbrielianisme el aveo
les idées de la philosophie p^ihagoricienne , plalonicieatic M
Pvihagore, Platon et les Stoïciens avaient reconnudans l'homme
un mélange de force et de faiblesse , de grandeur et de bassesse ,
de misère et de bonbcur, qui les avait déterminés k supposer que
l'âme humaine tirait son origiue d'une intelligence sage et bien-
faisante; maïs que cette Smc , dégradée de sa diguilé naturelle
on entraînée par la loi du destin, s'unissait k lu matière et restait
enchaînée dans des organes grossiers et terrestres.
_ Ofl avait de la peine i concevoir comment ces âmes avaient pu
uc dégrader, ou ce que ce pouvait être que ce destin qui les unis*
'Wtiila matière : on n'imaginait pas aisément comment une simple '
force motrice avait pu produire des organes qui enveloppaient les
5mes , comme les Sloiciens l'enselgnuient , ni comment on pouvait
supposer que l'Intelligence suprême, connaissant la dignité de
l'âme, avait pu former les organes dans lesquels elle était enve-
loppée.
Les cbrétiens.qul supposaient que l'Intelligence suprême avait '
créé l'homme heureux et innocent , et que l'homme f tait devenu
coupable el s'était avili par sa propre faute , ne satisfaisaient pai
la raison sur ces dlfQcultés; car, 1' on ne voyait pas comment
l'Imelligence suprême avait pu unir une substance spirituelle ï un
corps terrestre.
2* Il paraissait absurde de dire que cette InicUigeace étant în-
fmiment sage et touie - puissante n'eitt pas prévu el emptehé la
chuie de l'homme et ne J'edl pas conservé dans l'état d'Innocence
_ dans lequel il avait été L-réé , et dans lequel elle voulait qu'il per-
' érérât.
■ HarciOD cml que Cerdon fournissait des réponses beaucoup
4 satisfaisantes ù ces grandes difQcullés.
L conlr. Marcion. Irxn., I. 1, c. il. Ma's
I, DisscrI, PratT. Bd
164 MAR
Ordoii supposait que rintelligence suprême à laquelle Tâme
devait son existence était diflérente du Dieu créateur qui avait
formé le monde et le corps de Thomme : il crut pouvoir concilier
avec œ systèmes les principes de Pythagore et les dogmes fon~
damentaui du christianisme.
11 supposa que Thomme était Toutrage de deux principes oppo-
sés ; que son âme était Une émanation deTétre bienfaisant, et son
eorps Touvrage d*un principe malfaisant : voici comment, d*après
ces idées , il forma son système.
11 y a deux principes étemels et nécessaire^ : un essentielle-
ment bon et Tautre essentiellement mauvais ; le principe essen-
tiellement bon, pour communiquer son bonheur, a fait sortir de son
sein une multitude d*esprits ou dHntelligences éclairées et heu-
reuses; le mauvais principe, pour troubler leur bonheur, a créé
la matière, produit les élémens et façonné des organes dans les-
quels il a enchaîné les âmes qui sortaient du sein de rintelligence
bienfaisante : il les a, par ce moyen, assujéties à mille maux ; mais
comme il n*a pu détruire Tactivité que les &mes ont reçue de rin-
telligence bienfaisante , ni leur former des organes et des corps
inaltérables , il a tÂché de les fixer sous son empire en leur don-
nant des lois ; il leur a proposé des récompenses , il les a mena-
cées des plus grands maux, afin de les tenir attachées à la terre et
de les empêcher de se réunir à rintelligence bienfaisante*.
L*histoire même de Moïse ne permet pas d*en douter ; toutes les
lois des Juifs , les chàtimens qu*ils craignent , les récompenses
qtt*ils espèrent tendent k les stlacher à la terre et à faire oublier
aux hommes leur origine et leur destination.
Pour dissiper Tillusiou dans laquelle le principe créateur du
monde tenait les hommes , rintelligence bienfaisante avait revêtu
Jésus-Christ des apparences deThumanité, et Tavait envoyé sur
la terre pour apprendre aux hommes que leur tme vient du ciel »
et qu'elle ne peut être heureuse qu*en se réunissant à son prin-
cipe.
Ciomme l*Être créateur n*avait pu dépouiller Hme de Tactivité
qu*elle avait reçue de rintelligence bienfaisante , les hommes de-
▼aient et pouvaient s*occuper à combattre tous les penchans qui les
attachent à la terre. Marclon condamna donc tous les plabir^qui
* Inro., ibld. Massttet, ibld. Tert. eontr. Marclon. Or!genian«i t S|
p. 93.
MAR
IG£
n'étaient pas purement spiriiueU ; il lit de la continence un devoir
essentiel ei indispeasablc i le mariage étail un criuc.et il i]aii>
naît le buplêoie plusieurs fois '.
Uarciuii prétendait prouver la vérité de son sjgitine pnries prin-
cipes miaie du cbristiaiiisme , et hire voir que le créulcur iviït
tous les ciiraclëres du mauvais principe.
Il p ré tMidait faire vuir une opposition essentiel la onire l'ancien
ei le nouveau Teslameat, prouver que ces ditrârcnces «iippMii(!nt
ipr^n elTcl l'ancien et le nouveau Teklamenl avaient deux principes
dirréreos, doDll'uD étail esseoliellement bon ul l'autre easeatielle-
CoLle doctrine étail la seule vraie, selon llarcion; et il ajonii,
relrancha , cbangeu dans le nouveau Teslameat tout ce (|ui pa-
raissait combattre son lijpoihèse des deui principes *,
Uareion enseignait sa doctrine avec beaucoup de chaleur cl de
véliéineace ; il se fit beaucoup de disciples : celle opposition qiM
Marciou prétendait trouver entre le Dieu de l'ancien Testament
et celui du nouveau séduitit beaucoup de inonde. Il jouisMit
d'une grande considération ; ses disciples crojraieni que lui
seul connaissait la vérité , et n'avaient que du ni(''pris pour Ions
ceui qui n'admiraieni pas Marcion et qui ne pensaient pas
comme lui : il semble qu'il ail porté et établi sa ducirîne dans ,
la Perse *.
Les disciples de Marcion avaient un grand mépris pour la vie
ei une grande aversion pour le Dieu créateur. Ttiéoduret a connu
un Uarcionile Igé de quatre-vingt-dix ans qui était pénétré de
b plus vive douleur toutes les fois que le besoin de se nourrir
l'obligeait t oser des productions du Dieu créateur : lu nécessité
de manger des fruits que ce créateur faisait naître était une bu-
miliatiun it laquelle le Marcionile noaagén:ilre n'avait pu s'ac-
Les Marciaoîles étaient tellement pénétrés de la digoilé de
leur ime, i[u'its couraieut au marljrc cl recherchai en I la mort
VTett adversùs Uarc & 19. Ep, lIa>T., iS.VoMïus, Dist. debaplismOi '
' Les rallions de Marcion lïtaient déduites fort au long dans un litrQ
luli les Contndicliiins.
ITen.lr«n. Epipb., ibid, Aurclius, nol. inTeri,
«Justin. Apol, Kplpli., iliid.
156 MâR
comme It fin de leur avilissement , et le commencement de leur
gloire et de leur liberté *.
Les catholiques, qui attaquaient les Marcionites dans leurs prin-
cipes mêmes, et qui, comme on le voit dans Tertullien, leur prou-
vaient que dans leur propre système le mal et le bien étaient im-
possibles ; les catholiques, dis-je, en combattant les Marcionites ,
les obligèrent de varier et d'admettre tantôt un, tantôt deux, tan-
tôt trois principes. Appelle n*en admettait qu*un seul ; Potitus et
Basiliscus en admettaient trois, le bon, le juste et le méchant.
Marcion avait concilié son système avec les principes des Va-
lentiniens sur la production des, esprits ou des Éons , et il avait
adopté quelques principes de la magie; du moins son système n*y
était pas opposé *.
Il eutbeaucoup de disciples, parmi lesquels plusieurs furent cé-
lèbres : tels furent Appelle, Potitus, Basiliscus, Prépon, Pithon ,
Blastus et Théodotion '.
Réfutation de» principes de Marcion et des difficultés de M, Bayle
contre les réponses de Tertullien à Marcion.
Les difficultés des Marcionites se réduisent à trois chefs : 1«
Timpossibilité quMl y ait du mal sous un seul principe ; 2* ils pré-
tendaient que le Dieu de Tancien Testament était mauvais ; 3» ils
soutenaient que Jésus-Christ était venu pour détruire Touvrage
du Dieu de Tancien Testament , ce qui suppose nécessairement
que Tancien et le nouveau Testament sont Touvrage de deux prin-
cipes opposés.
M. Bayle a beaucoup fait valoir la première difficulté de Mar-
cion, et n*a pas craint de dire que les Pères Tout mal résolue.
^ Théodore!, Hsret. Fab., 1. 2, c« 24* Eusèb., 1. 5, c 15 ; 1. A, c. 16.
Eusèbe cite l'exemple d*un Marcionlte qui avait été attaché vif à un
poteau avec des clous et brûlé Vit, Jurieu a contesté ces faits sans au-
cune raison : il a cru, à son ordinaire, suppléer aux preuves par Tem-
portcment et par les injures. Maimbourg, Bayle, ont très-bien relevé
ses bévues. Voyez Maimbourg, Hist. du Calvin., l.*i, p. 83. HisL du
pontif. de S. Grég., 1. 4. Ferrand, Rép. à Tapologie de Jurieu. Bayle,
art. Mabcion, note E.
> Greg. Naz., or. A in Pentecost Ittigius, De hxr., c.7. Tert, loc. cit.
> Eusèb., 1. 5, c. 13, Tbéodoret, Haeret, Fab., 1, 1, c 25. Epiph.,
Hier. 44. Aug., c. 33f
ir ce Père ruine
I MAR
F 11 faut que H. Bajie n'ait pas luTcrluUien , c:
sbsoluuteDt le principe TondanienUl de Harcion.
Voua reconnaissez , avec lout le monde , diL-il 1 Harcion, et il
faut nécessairement feconouUrR un èlro éiernel , sans commenco-
ment et sans bornes dans su durée , dans sa puii^sanee el dans ses
perreclions ; c'est donc une conlradiclion que d'en suppoacf deux
qui se contredisent sans cesse et qui détruisent sans cesse leur ou-
Tfage.
Le monde, que l'on attribue au mauvais principe, renferme des
traits débouté aussi incompatibles avec la naiuredu mauvais prin-
cipe que les niaux qu'on ; observe sont contraires ï la nature du
bon principe.
L'ancien Testament même , que les Harcioniles regardaient
comme l'onvrage du mauvais principe , était plein de ces traits de
bonté. le ne veux pas la mort du péchenr, dit Dieu; est-ce que je
souhaite que le pécbeur meure î ne souhaité-je pas qu'il vive eta
qu'il se convertisse ?.Le principe bienfaisant ne rejette-t-il pas lui- .
mCme les impies dans le nouveau Testament? Pourquoi ce priit- 1
cipe i-i-il tardé si long-temps à secourir le genre humain, s'il est '
Traï qu'il soîl bon et tout-puissant , el qu'un principe essentielle-
ment bon et tout-puissant produise nécessairement tout le bien
qu'il peut produire?
Ainsi, dans les principes mêmedea Uarcionites, le Dieu bon ne
fait pas tout le bien qu'il peut faire , et il punit queliiuefois les J
crimes : or, tous les maux que le Dieu créateur fait dans l'ancien M
Testament sont des cbfttîmens de cette espèce. M
_ Hais si le principe bienfaisant est tout-puiasant et maître absolu '
bêla nature, pourquoi, disait Marc ion, a-t-il permis que l'homme
^béchit! n'est-il pas ignorjut s'il ne l'a pas prévu, ou méclianl si,
Payant pt^vu, il ne l'a pas empêché?
L'élre bienfaisant, répond TeriuUien, a pu vouloir que l'homme
loi rendu un hommage libre, et qu'il méritït librement les récom-
penses qu'il destinait à la vertu. Il a créé l'homme dans une par-
bite liberté : ce plan n'avait rien que de conforme ï la bonté de
L Dieu, et ce plan une fois arrêté, Dieu ■ prévu la chute de l'homme, .
l'K n'a pas dû dépouiller l'homme de sa liberté pour prévenir si
!■ «faute. !
W U. Bavic a prétendu que \es Marcioniies n'avaient pas su faire
MiKicrIa principale machine delcurKjstème. • On ne voit pas, dil-
k» il, qu'ils [loussasscnt les difOcultês sur l'origine du mal ; car il i
I U. >• ]
iS4 MAR
lembU que » dès qu*oii leur répondait que le mul était venu du
mauvais usage du franc arbitre de Tbomme, ils ne savaient plus
que répliquer, ou que s*ils faisaient quelque résistance sur la
permission de ce pernicieux usage , ils se payaient de la pre*
mière réponse, quelque faible qu'elle fût.
» Origène, ayant répondu qu'une créature intelligente qui n'eût
pas joui du libre arbitre aurait été immuable et immortelle
comme Dieu, ferme la boucbe au Marcionite, car celui-ci ne ré-
plique rien.
f 11 était pourtant bien facile de réfuter cette réponse : il ne fal-
lait que demander à Origène si les bienheureux du paradis sont
égaux à Dieu dans les attributs de l'immutabilité et de l'immor-
talité ; il eût répondu sans doute que non ; par conséquent,
lui aurait-on répliqué , une créature ne devient point Dieu dès
qu'elle est déterminée au bien et privée de ce que vous appelez
le franc arbitre ; vous ne satisfaites donc point à l'objection, car
on vous demandait pourquoi Dieu , ayant prévu que la créature
pécherait si elle était abandonnée à sa bonne foi , ne l'a point
tournée du côté du bien comme il y tourne continuellement
les âmes des bienheureux dans le paradis.
• Vous répondez d'une manière qui fait connaître que vous pré-
tendez qu'on vous demande pourquoi Dieu n'a pas donné à la
créature uu être aussi immuable , aussi indépendant qu'il l'est
lui-même. Jamais ou n'a prétendu vous faire cette demande.
> Saint Basile a fait une autre réponse qui a le même défaut :
Dieu , dit-il , n'a point voulu que nous l'aimassions par force,
et nous-mêmes nous ne croyons pas que nos valets soient affec-
tionnés à notre service pendant que nous les tenons à la chaîne ,
mais seulement lorsqu'ils obéissent de bon gré.
> Pour convaincre saint Basile que cette pensée estlrès-fausse,
il ne faut que le faire souvenir de l'état du paradis : Dieu y est
aimé, Dieu y est servi parfaitement bien, et cependant les bien-
heureux n'y jouissent pas du franc arbitre ; ils n'ont pas le fu-
neste privilège de pouvoir pécher *. >
Pous sentir l'injustice , et j'ose dire la faiblesse des diflicultéf»
de M. Bayle, il ne faut que réfléchir sur l'état de la question qui
partageait les catholiques et les Marcionites.
Les Marcionites prétendaient qu'il répugnait à la nature de
< Bayle, art, Mâbcioii, note F,
MAR
[ Dieu de produire une ci-é:ilur(! capuble de
I Ortgène répond que riiomme n'était point essentiel leme ni ïin-
Inunble puisqu'il n'était point Dieu, que pir conséquent ilnerè-
■. h sa nature d'î-ire capable de pécher, ni a la bonté de
u de le créer «acbani qu'il abuserait de sa liberté.
Voili le fond de la question; le Uardonite, dans les dialogues
d'Origène , j va aussi bien que H . Bajie , et Adamance 1 bien
résolu la dilQcuItâ ; car si l'homme n'est p»s Immuable par sa na-
ture , Dieu a pu , saut injustice et sans mécbanceté , le créer ca-
pable de pécher et sachant même qu'il pécherait : la justke et U
bonté n'exigent pas qu'on donne !t un être toutes les perfeclions
possibles , ni même toutes celles dont il est susceptible, ou qu'on
Lk garJUlisse de tous les malheurs; mais qu'il n'en soudl-e pas qui
, ou des suites de sa nature , ou des elTels de sa propre
Idipravation.
~ ' ileUarcionite auratt-îl répliquée Adamance que , pour
Itoe impeccable, il n'est pas nécessaire d'être immuable par sa na-
■larc , puisque les bienheureux sont impec<rahles et ne sont point
'ttmoables.
Adamance lui aurait répondu que l'exemple des bienheunot
I prouie bieu que Dieu peui faire des créatures impeccables
11 pas qu'il n'en peut faire de capables de pécher,
[iloule la question.
La réponse de saint Basile n'est pas mïem attaquée par
~ ijle. Saint Basile soutient qu'il n'est point indigne de DirU
Ffc vouloir que les hommes se portent librement à lui, ni par con-
lé<]ueni d'établir un ordre de choses dans lequel l'homme fut
Ubre.et dans lequel Dieu préîlt que l'homme pécherait; l'exemple
des bienheureux prouve tout au plus, comme je l'ai dit, que Dieu
aorail pu produire des créatures déterminées intariablemenl S la
vertu, et non pas qu'il ne peut les créer libres.
• Mais, dit M. Bajle, c'est par un cflet de la grâce que les »*
■ (ans de Dieu , dans l'état de voyageurs , je veux dire dans 0(
• iDonde, aiment leur père céleste et produi.^enl de bonnes ceuvrei.
• La grlce de Dieu réduit-elle les iidËles i la condiilou d'un es-
• cIiTC qui n'obéit que par force î empéche-i-elle qu'ils n'aiment
• Dieu Tolon taire ment et qu'ils ne lui obéissent d'une Franche el
mé lincire tolonté? Si on eût fait celte question ï saint Basile el
|v aux autres Pères qui réfutaient les Marcioniles, n'enssent-ila
> pas été obligés de répondre négïtivemenl f Hais quelle est la
enheumt^^^H
maW^^^H
éuSS^^^I
aouée oar [
^
160
HAR
> consé<{ueDce naturelle et immédiate d*ane pareille réponse?
» N'est-ce pas de dire que , sans offenser la liberté de la créature,
» Dieu peut la tourner infailliblement du côté du bien? Le péché
» n*est donc pas Tenu de ce que le créateur n'aurait pu le prévenir
» sans ruiner la liberté de la créature; il faut donc chercher une
» autre cause.
• On ne peut comprendre , ni que les Pères de FËglise n'aient
» pas vu la faiblesse de ce qu'ils répondaient , ni que leurs ad-
» versaires ne les en aient pas avertis. Je sais bien que ces matières
> n'avaient pas encore passé par toutes les discussions que l'on a
> vues au seizième et au dix-septième siècle; mais il est sûr{que la
» primitive Église a connu distinctement l'accord de la liberté
» humaine avec la grâce du Saint-Esprit. Les sectes chrétiennes
» les plus rigides reconnaissent aujourd'hui que les décrets de
» Dieu n'ont point imposé au premier homme la nécessité de pé-
» cher, et que la grâce la plus efiicace n'ôte point la liberté à
» l'homme ; on avoue donc que le décret de conserver le genre
» humain constamment et invariablement dans l'innocence , quel-
» que absolu qu'il eût été , aurait permis à tous les hommes de
» remplir librement tous leurs devoirs ^. >
C'est toujours le même vice qui règne dans les difficultés de
M. Bayle : il prouve bien que Dieu pouvait conserver l'homme
librement et infailliblement dans l'innocence ; mais il ne prouve
pas qu'il répugne à la bonté de Dieu d'établir un ordre de choses
dans lequel il n'accordât point à l'homme de ces secours qui le
font persévérer infailliblement et librement dans le bien , et c'est
là ce qui était en question entre les Marcionites et les catholiques:
ces difficultés si formidables que M. Bayle aurait fournies aux
Marcionites ne sont donc que des sophismes qui n'auraient pas
embarrassé les Pères.
Les Marcionites prétendaient que l'ancien Testament nous re-
présente le Créateur comme un être malfaisant, parce qu'il punit
les Israélites , parce qu'il leur commande de faire la guerre aux
nations voisines et de détruire des nations entières.
Mais, dans la supposition que Dieu ait voulu que l'homme fût
libre, était-il contraire à sa bonté qu'il puntt le crime? N'est-il
pas possible que tout ce qui est arrivé au peuple juif, et les
guerres qu'il a faites, aient entré dans le plan que l'intelligence
' Bayle, ibid.» note G.
I MÂT IBI
goprémc a formé ? Oui peut Mïoir si les guerres des Juifs ne len-
(leoi pis i h ûa que Dieu s'est proposée?
EqIîii , je dis qu'il n'y a point d'nppoiiitioa enta' l'ancien et le
nouveau Testament : les luis de l'aucien Testament sont aemm-
woilées au cnraclËre des Juifs et aux circonsiaocea daas le»-
quelles la terre se trouvait alors. La loi judaïque n'était que
t'oiubre et la iignre de la religion cliréiienne ; ce n'est poiut une
contradiction d'anéantir la loi ll){urntivc , lorsque les temps mar-
quas par la Providence pour la naissance du christianienie sont
arrivés.
La nature de cet ouvrage ne permet pas d'entrer dans le dii~
tail des contrariétés que les Marcionilea prétendaient trouver
entre l'ancien et le nouveau Testament. Je remarquerai seulement
que la plupart des diBcullés répnndues dans les ouvrages mo-
dernes contre la religion ne sont que dijs répétitions de ces diffi-
cultés qui ont été pleinement résolues par les Pères , et qui sont i
irès^bien expliquées dans les commentateurs anciens et i
dcroes, et entre autres dans Tertullienconire Marcion, 1. 4 et S, |
U>VSBOTll£E , disciple de Simon , fut un des sept hérétiques 1
qui corrompirent les premiers U pureté de la foi ; il niait la PriK ]
YÏdeace et la résurrection des moris. ( TItéodorel, nmret. Fab,,
1, 1, c. 1; CemIU. apott., 1. 6, c, G; Eiiieb., Biil.ecelei„l. i»
c22.)
L MATÉRIALISTES ou Matériels. C'est le nom que Tertullien
pilonnait i ceux qui croyaient que l'âme soi'taït du sein de la fat-
s'était jeté dans c
h bonté de Dieu les malheurs et I
que li's désordres pbysiques. Voi/fis cet article.
L'Iiabitude dans laquelle sont presque tous les hommes de
n'admettre que ce qu'ils peuvent imaginer dispose en faveur de
celte erreur; on prétend mêmerappnyer xurlea suffrages d'faommes
respectables par leurs lumières et par leur attachement pour la
religion . qui , craignant de donner des bornes i la puissance di-
vine, ont cru qu'on ne devait point assurer que Dieu ne pouvait
élever la matière jusqu'i la faculté de penser ; tels sont Loke,
..Fabricius, etc. *.
a religionis asie-
162 iMAT
11 n'en a pas fallu davantage pour ériger le Matérialisme en
opinion , et c*est sous ce masque de scepticisme qu*il s^offire com-
manément aujourd'hui.
Je dis communément , car il y a des Matérialistes qui sont al-
lés beaucoup plus loin que Loke et Fabricius , et qui ont pré-
tendu que la doctrine de Timmatérialité , de la simplicité et
de rindivisibilité de la substance qui pense est un véritable
athéisme, uniquement propre à fournir des appuis au Spino-
sisme ^.
Nous allons opposer à ces Matérialistes deux choses : 1* que
le Matérialisme n*est pas un sentiment probable ; 2* que Tim-
matérialité de Tâme est une vérité démontrée.
i I*— L« MatérialiMie tCett pas un êentiment probable.
LoriMiue nous apercevons une chose immédiatement où que
nous voyons un objet qui est lié nécessairement avec cette Chose f
nous avons certitude qu'elle est : ainsi , j'aperçois immédiate*
ment le rapport qui est entre deux fois deux et quatre , et j'ai
certitude que deux fois deux font quatre.
De même , je vois un homme couché , les yeux fermés et sans
mouvement , mais je vois qu'il respire , et je suis sûr qu'il vit ^
parce que la respiration est liée nécessairement avec la vie.
Si je voyais cet homme couché, sans mouvement et sans respi-
ration , le visage p&le et défiguré, je serais porté à croire que cet
homme est mort, mais je n'en aurais point de certitude, parce
que la respiration de cet homme pourrait être insensible et pour-
tant suffisante pour le faire vivre , et que la pâleur ou la maigreur
n'est pas liée nécessairement avec la mort. Je serais donc porté à
croire que cet homme est mort , mais je n'en serais pas sûr , et
non jugement sur la mort de cet homme ne serait que probable,
e'e8t-4-dire que je verrais quelque chose qui pourrait être l'effet
de la mort , mais qui pourrait aussi venir d'une autre cause , et
qui, par conséquent , ne me rend pas certain de sa mort; elle
n'est que probable.
Ainsi , la probabilité tient le milieu entre la certitude, où nous
^ Traité sur la nature humaine , dans lequel on essaie d'introduire la
«étkode de raisonner par expérience dans les mjeu de morale^ t, i,
part. 4> secU 5.
i
MAT ISS
■'nmiadcnn lieu de douter d'une chose, n l'ignorance absolue,
dins lai|aelle nous n'avons aucunt' raiBan de la croire.
Vne cljose esl donc desliluée de tuule probabilité lorsque nous
b'ivohs aucune raison de la croire.
Les raisons de croire une chose se tirent de la nature m^me
it cette chose, de nos eipéricncea, de nos observations, ouen-
Sn de l'opinion el du témoignage des autres hommes, et cel
hommes sont, dans la question présente, les philosophes ou lei
Pères de TEglise , dont les Matérialistes se font un appui , et
par lesiiuels ils prétendent pronrer qu'avant le quilriËme siècle on
avait point dans l'Église d'idée nette de la spiritualité de rime.
On ne trouve rien dani la nature ùu dam Vettence de ta matière
qui aatOTite à juger qu'elle peut peiuer.
!• Nous ne voyons point dans l'essence de la matière qu'eltfl
doive penser, ni dans la nature de la pensée qu'elle doive être
matérielle; car il serait aussi évident que la matière pense qu'il
^a■t évident que deux et deni font quatre ; il serait aussi éTidenl
^'un tronc d'arbre, qu'un morceau de marbre pense, qu'il eil
i^ident qu'il est étendu el solide, absurdité qu'aucun HatérialisM
■'■ jusqu'ici osé avancer.
S* Nous ne voyons point dans la nature do la matière qu'elle
puisse penser, car pour cela il Taudrait que nous connussions
ibns la matière quelque attribut ou quelque propriété qui eût de
l'inalogîe itcc la pensée ; ce qui n'est pas.
is connaissons clairement dans la matière se ré-
t et ï la ligure : or, nous ne vojons dans Ig
is la iigure aucune analogie avec la pensée ; c«r
Rangent point la nature ou l'essence
jmnie nous ne voyons point d'analogie entre
'6 de la matière , nous n'en pouTons voir entre
la pensée et la matière en mouvement , ou G);urée d'une certaine
manière. La pensée est une alTection intérieure de l'être pensant;
le mouTement ou la figure ne changent rien dans les affectloos in-
térieures de la matière ; ainsi l'on ne voit entre le mouvement de
b matière et la pensée aucune analogie.
De bonne Toi, quelle analogie voil-on entre la figure carrée os
ronde que l'oa donne à un bloc de marbre et le sentiment inlé*
lieor de ptaisir ou de douleur dont l'ime est afTeciée?
Tout
duil au
mouvement oi
la figure et le
de la matière
b pensée et Is
:
164 MAT
Le jugement par lequel je prononce qu*un globe d'un pied est
différent d*nn cube de deux pieds est-il un carré , un cube , un
mouvement prompt ou lent?
Il est donc certain que nous ne voyons dans la matière aucune
propriété, aucun attribut qui ait quelque analogie ou quelque rap-
port avec la pensée; ainsi nous ne voyons, dans la nature ou dans
Tessence de la matière , aucune raison qui nous autorise à croire
qu'elle peut penser.
Mais, dit-on, la découverte de Tattraction ne peut-elle pas
faire soupçonner qu'il peut y avoir dans la matière quelque pro-
priété inconnue, telle que la faculté de sentir?
Je réponds à ceux qui font cette difficulté :
1* Que Newton n*a jamais regardé Tatlraction comme une pro-
priété de la matière, mais comme une loi générale de la nature,
par laquelle Dieu avait établi qu'un corps s'approcherait d'un
autre corps.
2* Les Newtoniens, qui ont regardé l'attraction comme une
propriété de la matière, n'ont jusqu'ici pu en donner aucune idée.
3"* Des philosophes qui font profession de ne croire que ce qu'ils
voient clairement et qui prétendent n'admettre comme vrai que ce
qui est fondé sur des faits certains , tombent dans une contradic-
tion manifeste lorsqu'ils admettent dans la matière une propriété
dont ils n'ont aucune idée, et qui, selon Newton même, n'est
pas nécessaire pour expliquer les phénomènes.
^o Je dis que l'attraction , regardée comme propriété essentielle
de la matière, est une absurdité; car cette attraction est une force
motrice inhérente et essentielle à la matière, en sorte qu'elle se
trouverait dans une masse de matière qui serait seule daus l'uni-
vers; ou elle est une force motrice qui se produit ou qui naît
dans la matière par la présence d'uD autre corps.
L'attraction n'est point une force motrice essentielle à la ma-
tière, de manière qu'elle se trouve nécessairement dans un corps
qui serait seul dans l'univers ; car toute force motrice tendant vers
un lieu déterminé, ce corps au milieu du vide Newtonien devrait
tendre vers un lieu plutôt que vers un autre, ce qui est absurde ,
puisque l'attraction, considérée comme propriété essentielle de
la matière, ne tend pas plutôt vers un lieu que vers un autre ; c'est
donc dire une absurdité que d'avancer que l'attraction est une
propriété essentielle de la matière.
On ne peut dire non plus que l'attraction soit une force motrice
MAT ■ 105
qui naisse dans la maliùre, ii la présence d'un aniro corps; car
deui corps qu'on inel en présence, elquineseluucLent point, n'é-
prouvent iDcun changement et ne peuTt^nl par conséquent ac-
quérir par leur priJsetice une fnrce motrice qu'ils n'avaietil pus.
L'allraciion n'esi dooc, ni un altrîbut essentiel de la matière,
iii même une proprii^lé qu'elle puisse acquérir : c'est , comme
NeivtoD le pensait , une loi générale par laquelle Dieu a établi
que (leuicorpsiendraientl'un vers l'autre; l'allraction n'est donc
que le mouvement d'un corps ou sa lendnnce vers un lieu , el
celle tendance n'a pas plus d'analogie arec la pensée que tout
Que l'on juge prtisenlement si l'attraction que Newton a décou-
Terltt peut faire soupçonner que la matière pourrait devenir ca-
pable de seoiir, et si ceux qui le prétendent n'ont pas fondé celle
assertion sur un mol qu'ils n'entendaient pas , et sur une pro-
priété chimérique de la matière 1
Ainsi nous ne trouvons dans la nature ou dans l'essence de la
matière aucune raison de juger qu'elle peut penser.
^2■ Nulle expirienet ne nniu autorite h crvire que la maliire
' puisse penter.
Les observations et les expériences sur lesquelles on appuîelu
sentiment qui suppose que la matière peut penser se réduisent ï
deux cbef^i : 1° les prodigieuses dilTérences que produisent dans
l'borome les diFféreos États du corps; 2° les observations qui ont
appris que les Gbres des chairs contiennent un principe de mouve-
^^iwnl qui n'est point distingué de la libre même.
^K, Hais les dlITérenccs que produisent dans les opérations do
^^'Ime les dilTéreos états du corps prouvent bien que l'Jme esL
Unie au corps, et non pas qu'elle soit corporelle, puisque ces
cbangemens de l'Ame, arrivés par les changemens qu'éprouve le
corps, s'expliquent dans le senlîmenl qui suppose l' immatérialité
de rime, el que le Matérialisme est encore sur cet objet moins sa-
tisfaisant que le sentiment qni suppose l'Ame immatérielle.
Je conçois ces changemens dans les opérations de l'Ame , lors-
que je suppose que l'âme forme elle-même ses idées, par le mojen
ou ï l'occasion des impressions qu'elle reçoit.
Hais les changemens que l'Âme éprouve sont impossibles si la
KpenséeestuDepropriélé esseolielle de la matière ; car aloralouiea
166 * MAT
mes pensées doivent naître du fond même de la matière , et les
changemens qui environnent la portion de matière qui est mon
âme ne changeant point cette portion de matière , Tordre de ses
idées ne doit point changer.
De quelque manière que j*arrange les portions de matière qui
environnent la molécule qui pense dans mon cerveau , elle sera
toujours intrinsèquement ce qu'elle était , et ses affections inté-
rieures, ses pensées , ne doivent point éprouver de changement ,
si elle pense essentiellement.
I^s Matérialistes diront peut-être que la matière ne pense pas
essentiellement, mais qu'elle acquiert cette faculté par Torganisa-
tion du corps humain. Mais alors cette organisation n'est néces-
saire pour que la matière devienne pensante, que parce qu'elle
transmet au siège de l'âme les impressions des corps étrangers ^
ou les coups que nos organes en reçoivent; et, dans ce cas, il faut
nécessairement supposer que la pensée n'est qu'un coup que la
matière reçoit, c'est-à-dire que la matière devient pensante lors-
qu'elle reçoit un coup : ainsi le forgeron qui frappe le fét fait à
chaque coup une infinité d'êtres pensans. Ce n'est point ici une
conséquence tirée pour rendre le Matérialisme ridicule ; c'est le
fond même du système , tel queUobbes l'a conçu et défendu.
Mais peut-on supposer qu'un coup porté sur une portion de
matière en fasse un être pensant ?
Un coup porté à la matière ne fait que la pousser vers un cer-
tain c6té ; or, la matière ne peut devenir pensante, parce qu*elle
tend ou parce qu'elle est poussée vers un certain côté ; du moins
les Matérialistes ne nieront pas qu'il ne peuvent le concevoir; d'aîl-^
leurs , je leur demande quel est ce côté vers lequel il faut que la
matière soit poussée pour penser ? si elle cessera de penser, lors-
qu'elle sera mue en sens contraire ? N'est-il pas absurde que la
matière, mue ou poussée vers un certain côté, devienne pensante f
Quel est le philosophe, ou du Matérialiste qui admet dans la
matière une qualité et une propriété qu'il ne peut concevoir et
qu'il n'y peut supposer sans être conduit à des absurdités, ou dd
défenseur de l'immatérialité de l'âme , qui refuse de reconnaîtra
dans la matière cette même propriété ?
2o L'irritabilité qu'on a découverte dans les fibres des animaux
est un principe purement mécanique , une disposition organique
qui produit dans les fibres des vibrations : or, cette disposition
méeânique de la fibre n'a aucune analogie avec la pensée ; une
m^-
MAT IdT
poini une vibration , gî cela éuii , un coop d'archet
ou la main qui pince la corde du luth produirait une inflnilé de
pi-riâées dans ces cordes, ou plutAïune infinité d'êlres pentans.
ilae les Matérialistes seraienicliarm^g d'avoir de pareilles con-
séquences à reproclieraui dl^fenseurs de l'itnmal'^rLaliléde l'Ame 1
La maiémlité de l'ime est donc destituée de toute pro habilita
du cfitii de l'e\périeuce et de l'observation.
r ^ ifl ttntimtnt it» pMotopket qui ont eru l'ilmt corporttle nt forme
^K pal uni prvùebililt! tu faneur du Malérialltme.
^~ Lorsqu'il 3*agit de faits que nous ne pouvons voir, le lémoi-
gnage des autres hommes est h source de la probabililâ , ei
oiéme de la cerLiludc. Lorsqu'il s'sgil de limples opinions , leur
sentiment produit une aorte de probabilité , parce que rien n'é-
tant sans raison, s'ils ont entendu ce qu'ils disaient, ilsont étâ dé-
tenuinës !i leur sentiment par quelque raison apparente,
Uais il n'est pas moins certain que la probabilité qui natt dfl
leur sentiment dépend dt U force de la raison qui a déterminé
leur jugement : eiaminons dune les raisons sur lesquelles les phi-
losophe» matérialistes ont appuyé leur sentiment,
riusieurs philosophes ont dit que l'ànie était matérielle ou cnr-
poi'cllc; mais ils n'ont été portés ï ce sentiment que parce qu'ils
ne pouvaient imaginer ni une substance incorporelle et immaté-
rielle, ni comment elle pourrait agir sur le corps : or, l'impossibi-
lité d'imaginer une chose n'est pas une raison de la croire impos-
sible, puisque, dans leur Eeutinieni même, ou ne peut imaginer
ni concevoir comment lii matière peut penser; et c'est pour cela
que les uns regardaient le corps dijns lequel rèiidait la faculté do
penser comme un petit corjis citrèmcment délié; les autres
croient que c'était le sang , d'autres le cu;ur,elc. *.
K Ces philosophes se rapprochaient autant qu'ils le pouvaient dâ
natatérialilé de Vktae , lorsqu'ils n'etaminaient que la pensée ,
p>i(qil'ilr regardaient l'âme comme un corps de la deroiére suli-
liliid 1 ainsi la raison les élevait i l'immatérialité de l'ïme, et l'i-
inagination les retenait dans le Hatérialisnio : leur suffrage ne fait
iIoDo eu aucune fai;on une probabilité en faveur du Matérialisme.
I Voyei les iliETércnlcs ojiiii
s dc) pliil<
n Claîron, De legihui; donsI'Uura. du Fatal.,
168 MAT
J*08e assurer que je ne serai contredit sur ce point par aucun de
ceux qui , dans la lecture des anciens , se sont appliqués à suivre
la marche de l'esprit humain dans la recherche de la vérité.
M. Loke, plus circonspect que les anciens, a prétendu que l'é-
tendue et la pensée étant deux attributs de la substance, Dieu
pouvait communiquer la faculté de penser à la même substance à
laquelle il avait communiqué retendue.
Mais , i*" ce raisonnement de M. Loke ne vaut pas mieux que
celui-ci : on peut , dans un bloc de marbre, former un cube ou un
globe ; donc le même morceau de marbre peut être à la fois rond
et carré. Sophisme pitoyable , et qui ne peut rendre intelligible
la possibilité de Tunion de la pensée et de Tétendue dans une
même substance.
2* 11 est certain que les principes de M. Loke sur la possibilité
de Tunion de la pensée avec la matière sont absolument contra-
dictoires avec ses principes sur la spiritualité de Dieu. Or, un
homme qui se contredit ne prouve rien en faveur des sentimens
contradictoires qu*il embrasse ; le sentiment de M« Loke ne fait
donc point une probabilité en faveur du matérialisme.
Enfin, si la matérialité de Tâme a eu ses partisans , son imma-
térialité a eu ses défenseurs ; donc le suffrage forme une probabi-
lité opposée à la probabilité que produit , en faveur du matéria-
lisme, Tautorité des philosophes matérialistes.
Dans ce conflit de probabilités, il faut comparer les autorités
opposées, et, si elles sont égales, la probabilité que Ton prétend
tirer de ces autorités est nulle ; si elles sont inégales, on retran-
che la plus petite de la plus grande , et c'est Texcès de la plus
grande sur la plus petite qui détermine la probabilité.
Comparons donc Tautorité des philosophes partisans de Tim-
matérialité de T&me avec Tautorité des philosophes maté-
rialistes.
Je trouve, chez les anciens, Platon, Aristote, Parménide, etc.;
parmi les modernes, Bacon, Gassendi, Descartes, Leibnitz, Wolf,
Clarke , Ëuler , etc. , qui tous ont cru Timmatérialité de râme,^t
qui ne Tont enseignée qu'après avoir beaucoup médité cette vé-
rité, et après avoir bien pesé toutes les difficultés qui la combat-
tent. Que Ton compare avec ces suffrages ceux des philosophes
matérialistes, et que Ton prononce en faveur de qui la probabi-
lité doit rester.
Nous abandonnons ce calcul à l'équité du lecteur ; nous ferons
MAT le» ]
lealeineDl deux inflexions sot ce cunflU d'opinions des Hat£ria>
listes et des pariisana de l'inimatérialité.
1* Les phdosoplies qui ont cru l'Jme matérielle D'onlTait que
céder au penchant qui porio les hommes îi imaginer tout, et ï li
paresse qui empêche ta rai&on de s'élever au-dessus des sens. II»
n'avaient pas besoin de raison pour supposer l'ïme matérielle; lia
n'ont pas eu besoin d'examiner.
i' Au contraire, les philosophes qui ont cru l'ime immatérieila
ont vaincu ces obstacles pour éleicr leur esprit jusqu'il l'idée
d'une substance simple et immatérielle.
11 y a donc beaucoup d'apparence qu'ils ont eu de forlearalsonB '
pour adopter ce sentiment, et qu'ils n'y ont 6l6 Torcés que pur l'é-
vidence ; or, quund l'évidence n'est pas entière, l'imagination el
la paresse triomphent des elTorts de la raison; du moins, on ne peut
contester qne les philosophes qui ont enseigné l'immatérialité de
rimcn'aienteu besoin, dans l'etumen de cette matière, de faire
beaucoup plus d'efforts d'esprit et plus d'usage de leur raison
que les philosophes matérialistes. I.a présomption est donc e
Taveur des premiers; et un homme qui, sur cette question, se cor
duinùt par voie d'autorité , ne pourrait plus , sans absurdité, s
dëiermintr eu faveur du Malériallsme.
Le* Pères ont coinballa le Malérlalitme.
Les philosophes qui avaient recherché la nature de l'âme l'a- j
valent envisagée sous des rapports tout diflërens ; les un;, comme i
Anaximandre, Anaiiméne , Leuoipe , avaient porté leur attention
sur les effets de l'âme dans le corps humain , et ces observations
liireol la base de leur systËme sur la nature de l'Ame ; ils ne la
crurent qu'une espère de force motrice, etjugËrent qu'elle était un
Lorsque des opérations deTàme sur son corps ils passaient aux
opérations purement intellectuelles, ils découvrirent qu'elles sup-
jxjsuienl un principe simple , immatériel , et ils firent de l'âme un
corps le plus subtil qu'ils purent, et le plus approchant de la si
plicilé. Démocrite même ne put s'empêcher de dire que la Tacuiié ,
de penser résidait dans un atome , et que cet atome était indivi-
sible cl si m pi e-
' Les Pythagoriciens, au contraire , qui reconnaissaient dans la '
t Voyet l'Eituneo du fatalisme, I, 1, seconde époque.
ITO MAT
iMimr0aiie intelligence suprême et immatérielle» avaient envisagé
Tâme dans ses opérations parement intellectuelles , et ils avaient
pensé que c'était par ces opérations qu'il fallait juger de la nature
deTàme ; et comme ces opérations supposent évidemment un prin-
cipe simple , ils avaient jugé que Tàme était une substance simple
et immatérielle.
Mais comme cette substance était unie à un corps , et qu'on ne
pouvait méconnaître son inQuence dans les dilTérens mouvemens
du corps humain, on lui donna un petit corps, le plus subtil qu'on
put, et le plus approchant de la simplicité de Tàme : ce petit corps,
que rimagination ne se représentait pas distinctement , était le
corps essentiel de Tàme » lequel était indivisible , et dont elle ne
se séparait jamais.
Ce petit corps uni à Tâme était pour l'imagination une espèce
de point d'appui qui l'empêchait de tomber dans le matérialisme ,
et de se révolter contre la simplicité de l'âme, que la pure raison
admettait.
Mais comme ce petit corps était inséparable de l'âme, et qu'on
n'imaginait pas comment ce petit corps si subtil pouvait produire
le mouvement du corps humain , on enveloppa ce petit corps es-
sentiel de l'âme , on Tenveloppa , dis-je , d'une espèce de corps
aérien, plus subtil que les corps grossiers, et qui servait de moyen
de communication entre le corps essentiel de l'âme et les organes
grossiers du corps humain.
Voilà l'espèce d'échelle par laquelle les Platoniciens faisaient
descendre l'âme jusqu'au corps : on en trouve la preuve dans le
commentaire d'Hiéroclès sur les vers d'or , et dans ce que dit
Virgile sur l'étatdes âmes criminelles aux enfers, c Quelques-unes
> de ces âmes, dit-il , sont suspendues et exposées aux vents , et
> les crimes des autres sont nettoyés sous un vaste gouffre, ou sont
» purgés par le feu , jusqu'à ce que le temps ait emporté toutes
» les taches qui s'y étaient mises , et qu'on ne leur ait laissé que
» le pur sens aérien et que le simple sens spirituel *. »
Les Pères, qui voyaient que cette doctrine n'était point contraire
à l'immatérialité de l'âme ni aux dogmes du christianisme, l'a-
doplèrent par condescendance pour ceux qu'ils voulaient conver-
tir , et ce sentiment s'établit parmi quelques chrétiens. On crut
que les âmes, après la mort, avaient des corps, mais on supposait
* Enéide, 1, 6, v. 7S5, etc.
I MAT I7[
' ^'elles ëtaieol di?s suhsiancps inimaiérielles placées dans ces
corps et unies indissolu blême ni tt eux.
Comine les anges ont souceni apparu lut hommes avec ua
corps humain, il ; eut des Pères qui , conséqucmnienl aiii prin-
cipes de !■ philosophie pythagoricienne , crurent qu'ils nraient
aussi des corps iMens '.
Les Pères ont dune pu dire que l'âme était corporelle, el n'éira
pas Haiérii listes.
D'ailleurs , ils dispuulenl quelquefois contre des philoBoplie»
qui cro^raîenl que l'Âme bumaîne éliiil une (lorlion de l'ime uni-
verselle, nne ombre, une certaine venu ou qualité occulte, et non
pas une subslïiice. Les Pères, pour exp[imer que l'âme était une
substneee el non pas une portion de l'ime universelle, disaieut
que Viiae humaine éiait nn corps , c'est-à-dire une substance dis-
tincte , qui avait une existence qui lui était propre et séparée de
toulautreétre, comme un corps l'est d'un autre corps *.
IHniln, il est ceriaia que les Pères on donné le nom de corps k
loulcequ'ils croyaient composé, quoiqu'il Tùl immatériel, etqii'ilt
admirentdans l'anie difTérentes Tacullés qu'ils regardaient cumnie
ses parties : ils ont dune pu dire que l'ime élail uu corps ; que Dieu,
qui éuit exempt de toute composition , était seul incorportl :
ils ont pu dire toutes ces choses, et ne pas vouloirdire pour cela
que l'unie fût eu effet un corps matériel '.
Appliquons cet principes aux Pérès dont tes Matérialistes récllt-
ment le suffrage.
■ Saint Iràiée n'ett point favorable au tenliment qui luppoie
^ta que la matière- peut peiner.
^^t>D prétend que saint Irénée a cru que l'Ame était corporelle ,
^tarce qu'il a dit que l'àme était un souHIe , qu'elle n'était incor-
porelle que par comparaison avec les corps urossiers , et qu'elle
ressenblaii à un corps humain.
Cette conséquence est absolument contraire h l'esprit de saint
Irénée; ce Père, dans l'endroit cité, combat la Métempsycose et
prétend prouver par la parabole du Laxare que les Smes après la
mort n'ont pas besoin de s'unir aux corps pour subsister, parcA
■ Cudnorlb. System, iulelk'clual,, secl, 3, c. 5,
I* Au|^, Dehxrrs., e. H6.
^Crrgor. Moral., I, >, c. 3. Damuicen.,!, 9, c. 1.
172 MAT
qu^elles ont une figare humaine et qu*elles ne sont incorporelles
que par comparaison aux corps grossiers ^
Les partisans de la Métempsycose prétendaient que Tâme hu-
maine ne pouvait subsister sans être unie à un corps, parce qu'elle
était un souffle qui se dissipait s'il n*était retenu dans des organes.
Saint Irénée répond à cette difficulté que T&me, après la mort,
a une existence réelle et solide, si je peux parler ainsi, parce
qu*elle a une figure humaine, et qu'après la mort elle n'est incor-
porelle que par rapport aux corps grossiers ; ce qui suppose seu-
lement que saint Irénée croyait que les âmes étaient unies à un
corps subtil dont elles ne se séparaient point après la mort, ré-
ponse qui n'est rien moins que favorable au Matérialisme.
Le passage même de saint Irénée fait voir que ce Père recon-
naissait des substances immatérielles, et dit que l'&me n'est in-
corporelle que par rapport aux corps grossiers, ce qui suppose
qu'elle est corporelle par rapport à d'autres substances qui ne
sont point unies à des corps. Saint Irénée n'est donc point favora-
ble au Matérialisme.
Origine n'a point douté de l'immatérialité de l'âme.
Origène réfute expressément ceux qui croyaient que Dieu était
corporel : il dit que Dieu u'est ni un corps, ni dans un corps ;
qu'il est une substance simple, intelligente, exempte de toute
composition, qui, sous quelque rapport qu'on l'envisage, est une
substance simple ; il n'est qu'une âme et la source de toutes les
intelligences.
« Si Dieu, dit-il, était un corps, comme tout corps est com-
9 posé de matière, il faudrait aussi dire que Dieu est matériel, et,
» la matière étant essentiellement corruptible, il faudrait encore
» dire que Dieu est corruptible *. >
Peut-on croire qu'un homme tel qu'Origène, qui conduit le
Matérialisme jusqu'à ces conséquences, puisse être incertain sur
l'immatérialité de l'Être suprême?
Il appuie sur ces principes l'immatérialité de l'âme : c Si quel-
» ques-uns assurent que notre homme intérieur qui a été fait à
» l'image de Dieu est corporel, ils doivent, conséquemment à
» cette idée, faire de Dieu lui-même un être corporeli et ils doi-
* Iraen«, c 7.
' L. i, De principiis, c i, t, i, p. 5i| edit BenedicU
I
MAT
Il lui donner une Bytiu' lium:ii[ii', ce qu'un ne p<?ul t:i'»
■ ÎDipiélù '.
• S'il ; en a qui croient que l'Aine eil un corpn, <iit-il aitleun,. i
F »je voudrais qu'ils me montrassent d'oii viendrait i ce corps Û J
> fiGulcë de penser, de se reEBOuvenir ei celle de coniempler lot |
• choses il ~
Esl-on inceruin de la spîrilualilé de Vime ei de son îininatA-* 1
rialilé lorsqu'on élablît de pareils principes?
Qu'oppose H. lluel h ces pussïges pour prouTer qu'Origèno
ti'aiïit point de sentiment arrêté sur l'immaiérialilé de Dieu ei
gurcelle de l'âme?
Un pasisage de la prérace de son livre ((es Principes, daas le-
quel passage Orîgène dit qu'il faut examiner si Dieu est corporel,
ou s'il a quelque forme, ou s'il est d'une nature dilTérenle de celle
des autres corps ; s'il en est de même du Sainl-Espril ei de toules
les natures raisonoableB '.
Dans ce même endroit, Origènc dit qu'il va traiter tous ces su-
jets d'une manière dîlTérente de celle dont il en parle dans ses au-
tres ouvrages dans lesquels il n'a point irjîlé cette matière ï fond
ei exprès. Ce passage ne veiil pas dire qu'il ne sait il quoi s'en te-
nir sur ces objets, puisque, dans le livre même des Principes, il
établit formellement l'immatérialité de Dieu et celle de l'ûme.
Comment U, Huei a-l-il pu conclure de ce passage que l'Ëglise
n'avait rien délini sur l'immatériulité de l'Urne, au siècle d'Ori-
Bène *î
Origène dit, il est vrai, dans son livre des Principes, que la na-
ture de Dieu seul, c'est-a-dire du Père, du Tils et du Saint-Es-
prit, a cela de propre, «qu'elle est sans aucune substance malé-
• rielle et sans société d'aucun autre corps qui lui soit uni ". ■
I Hais du moins Orîgène suppose que les âmes sont unies ï un
corps, dont elles sont pourlnnl distinguées; il ne dit pas qu'dk'S
•oient matérielles ; comment aurail-il dit que l'âme est corporelle
BU matérielle, lui qui ne reconnaît pour substances ïm ma léri elles
que celles qui ne peuvent être dissoutes ou brûlées et qui assure
;î
L
' Origcn., Boni. 1 in Gènes., c. i.
* L. De prittcip., ibid,
n,, lib. Deprincip,, p. ilO.
' Oiigenian., I. S, quxsl. De anima, n* 13, p. 90.
>L. Deprincip., c 0.
174 MAT
que rame des hommes ne peut êire réduiia en cendres non plus
que les substances des anges et des trônes * ?
Pour terminer ce qui regarde Origène» nous avertirons que
Fauteur de la Philosophie du bon sens a travaillé sur quelque ct-
tateur infidèle ; car Origène, dans le lieu même qu*il cite, soutient
précisément le contraire du sentiment qu*il attribue à cet auteur ;
c*e8t ce qui aurait été évident pour tout lecteur, si M. d*Argens
avait cité le passage en entier *.
TeriuUien n'eil point fat)orable au Matérialisme,
Terlullien avait prouvé, contre Hermogène, que la matière n*é-
tait point incrcée ; il fit ensuite un ouvrage pour prouver que
r&me n*est point tirée de la matière, comme Hermogène le pré-
tendait, mais qu'elle venait immédiatement de Dieu, puisque TÉ-
criture nous dit expressément que c'était Dieu qui avait inspiré
à rhomme un souffle de vie '•
Enfin Tertullien, pour réfuter pleinement ceux qui prétendaient
que Tâme sortait du sein de la matière et qu'elle n'en était qu'une
portion, entreprit d'examiner les difTérentes opinions des philo-
sophes qui étaient contraires k ce que la religion nous apprend
sur la nature de l'&me : c'est l'objet de son livre de l'Ame.
Il dit que beaucoup de philosophes ont cru que l'âme était cor-
porelle ; que les uns l'ont fait sortir du corps visible, les autres
du feu, du sang, etc.; que les Stoïciens approchent plus du senti-
ment des chrétiens en ce qu'ils regardent l'âme comme un esprit,
parce que l'esprit est une espèce de souffle.
Tertullien dit que les Stoïciens croyaient que ce souffle était un
corps et que les Platoniciens croyaient, au contraire, que l'âme
était incorporelle, 1* parce que tout corps était animé ou inanimé,
et que l'on ne pouvait dire que l'âme fût un corps animé, ni qu^elle
fût un corps inanimé, et voici, selon Tertullien, la preuve que les
Platoniciens en donnaient :
« Si l'âme était un corps animé, elle recevrait son mouvement
» d'un corps étranger et ne serait plus une âme ; si elle était un
» corps inanimé, elle serait mue par un principe intérieur, ce
» qui ne peut convenir à l'âme puisqu'alors ce ne serait point
* L. cont. Celsum.
a In Joban., t S, p. Siik, edit Hnetii.
* Pe censu animae. Ce livre est perdu.
■ die qui
MAT ]
I le corps, mais elle-nifiuc qui soraii n
• d'un lieu i un autre comme le corps '. >
Voilà, selon Teriullkn, le raisanaernent des PlalonicieDi pour '
prouver que l'âme D'est poiol un corps.
Cet auteur, qui avait prouvé contre Hermogène que l'ïme ve-
nait de Dieu, parce que la Genëie nous disait que Dieu l'avail
produite eu souMant sur Tbomme, cropil que le sentiment des
Plalunidens ne s'accordait point avec l'explicalLOD qu'il avait
donuée de l'origine de l'ime. Il attaque le raisonnement des Pla-
toniciens el prétend qu'on ne peut pas dire que l'âme est un corpl
■oimé OU nn corps iDanimé, puisque c'est ou ta présence de
l'ime qui faïl un corps animé, ou son absence qui le JaitiDanimé,
ei que l'ime ne peut élre l'elTet qu'elle produit; qu'ainsi on ne
peut dire ni que l'ime soit un corps animé, ni qu'elle soit tin
corps inanimé; que le nom à'tme eipi'ime sa substauce et la na-
ture de sa substance, et qu'on ne peut la rapporter ni k la cImh
des corps animés, ni i la classe des corps inanimés ; qu'ainsi le
dilemme des Platoniciens porte aljsolumenl k fani.
A IVgard de ce que les PUioniciens disent que l'ime ne peal
^£lre mue ni extérieurement, ni intérieuroment, Tertullien pré-
tend que l'ime peut élre mue in téri eu renient, comme cela arrive
is l'inspi l'a lion ; que l'Ime est mue intérieurement, puisqn'rile
' produit les mouTcraens du corps : qu'ainsi, si la mobilité était
l'esMiice du corps, les Platoniciens ne pourraient nier que l'ii
ne suit un corps.
Voilà, selon Tertullien, ce que lu raison peut apprendre am
Platouiciens ; mais l'Écriture, selon cet auteur, nous donne lur
l'ime beaucoup plus de lumière : elle nous Hpprend que les Ame*
séparées des corps sont renfermées dans des prisons et qu'elles
eouffrenl, ce qui est impassible, dit Tertullien, si elles ne sont
rien, comme Platon le prétend ; car, dit-il, elles ne sont rien, ai
elles ne sont pas un corps; car ce qui est incorporel n'est suscc]^
tible d'aucune des affections auxquelles l'Ëcrilure nous apprend i
que lee Ames sont sujettes.
11 est donc certain que Tertullien a cru que l'âme avaitou était
DO corps; mais 1" il n'a point dilqu'elle lût ni un corps tiré de 11
matière brute, comme Tliiilts, Euipédocl es, eic-;uidu feu, comme
rclile ; Dt uiéue de l'étlier, comme le? Sioit-ïens : l'ime n'était J
' Lib. DcRuiniL
176 MAT
donc point, selon TertuUien, un corps matériel, puisque Téther
était le dernier degré de subtilité possible dans la matière.
2* Tertullien soutientque la division des corps en corps animés et
en corps inanimés est défectueuse et qu*on ne peut dire de Tâme
qu'elle soit ni un corps animé, ni un corps inanimé; ce qui serait
absurde s*il avait enseigné que Tâme était un corps ou une por-
tion de matière; car, si Tâme est une portion de matière ou un
corps, il faut nécessairement qu'elle soit un corps animé ou un
corps inanimé : car la matière est ou brute et inanimée, ou vi-
vante, organisée et animée.
3* Tertullien soutient positivement qu'il y a un milieu entre le
corps animé et le corps inanimé, c'est-à-dire la caupe qui anime
le corps, laquelle n'est ni un corps animé, ni un corps inanimé,
et cette cause est l'âme : ainsi, selon Tertullien, l'âme est un
principe dont la propriété est d'animer un corps et qui n'est point
un corps ; l'âme, selon Tertullien, est donc distinguée de la ma-
tière.
4* Tertullien dit que l'âme est ainsi appelée à cause de sa sub-
stance, et il nie cependant que l'âme soit le feu ou l'élber ; il sup-
pose donc que l'âme est une substance immatérielle.
5" Tertullien combat ici le sentiment des Platoniciens qui pré-
tendaient que l'âme était une certaine vertu, une espèce d'abstrac-
tion dont on ne pouvait se faire aucune idée et qui n'était rien,
selon Tertullien ; il ne dit donc que l'âme est un corps que pour
exprimer qu'elle est une substance, et c'est pour cela qu'il dit
que l'âme est un corps, mais un corps de son genre. C'est ainsi
que, lorsqu'il raisonne contre Hermogène qui prétendait que la
matière n'était ni corporelle, ni incorporelle, parce qu'elle était
douée de mouvement et que le mouvement était incorporel, Ter-
tullien lui dit que le mouvement n'est qu'une relation extérieure
du corps, et qu'il n'est rien de substantiel parce qu'il n'est point
corporel *.
C* Tertullien dit qu'il est vrai que l'âme est un corps, en ce
sens qu'elle a les dimensions que les philosophes attribuent aux
corps et qu'elle est figurée ; mais il est certain qu'on peut croire
l'âme immatérielle et la supposer étendue : ce sentiment est sou-
tenu par des théologiens et par des philosophes très-orthodoxes.
7* Tertullien, dans le livre de l'âme, réfute le sentiment qui dis-
* Adversùs Hermogcn,, c. 36.
MAT
177
tingue l'esprit Je l'ùtne cl soulienl qu'il c^t absunle de Kiippoi^er
dam Vâme deux subsLiDi-cs ; que le nom d'esprit n'csi qu'un
nom donné il une fojicliun de l'Ame et non pas un être qui suit
joint i elle, puisqu't^Ue est simple et indïmible.
L'i^me e«t une, dit-il, maïs eîk a de& ronciions variées et mul-
tipUèei; liusi, lorsque Tertullien dit que l'itne cbi un corps, il
Cil visible qu'il n'entend rien autre chose, sinon que l'Ame est
nne eub&tapce spirituelle et immatérielle, mais étendue '.
8* Tertullien, dans ce même livre de l'Ame, dit qu'il a démon-
iré contre HermogËne que l'Sme Tenait de Pieu et non pas de la
mslière et qu'il a prouvé qu'elle est libre, immortelle, corporelle,
figurée, simple *.
Il est donc certain que Tertullien d'u pas donné à l'ime un
corps matériel, mais un corps spirituel, c'esl^-iUre une étendue
spirituelle, telle que beaucoup de philosophes et de ihéologieiia
l'attribuent ï Dieu : ces théologiens et ces philosophes ne sunt
taxés de Matérialisme par personne.
TertulUet), qui avait beaucoup d'imagination , regardait les
êtres inéteitd us des Platoniciens comme des chimères, etcroyail
que loul ce qui existait était étendu et corporel , parre qu'il
avait de l'étendae et que nous connaissons les corps par l'éten-
due ; mais il ne croyait pas que tout ce qui éuh étendu lût ma-
tériel, puisqu'il admet des substances simples et des substance*
iadîvîsibles.
Tertol lien n'était donc point Maiériuliste, et je ne conçois pu 1
commentées commentateurs et des s-ivans distingués n'ont point I
bécité ï mettre cet auteur au rang des Matérialistes.
L'idée que nous venons de donner du sentimentade Tertalliea
su la nature de l'ùmeléve, ce me semble, les dilDcultés que l'on
tire des endroits o(i ce Père dit que Dieu est un corps : nous n€
liiisons ici que suivre l'explication de saint Augustin. • Tertul-
> lien, dit ce Père, soutient que l'âme est un corps ligure et quB i
• Dieu est un corps, mais qu'il n'est pas figuré. Tertullien n'a ■
• pendant pas été regardé pour cela comme un hérétique ; car
■ ■ pu croire qu'il disait que Dieu était un corps, parce qu'il n'est
> pis néant, parcu qu'il n'est pas le vide, ni aucune qualité du
• corps ou de l'Ame, mais parce qu'il est tout entier partout, r
■Deat
i, c 13, 13, 14.
17« MAT
» plit tous les lieux sans èire partagé et reste immuable dans sa
> nature et dans sa substance ^. »
Si Tertullien n*a pas été regardé comme un hérétique parce
qu'il a dit que Dieu ou Tâme était on corps, ce n*est pas que
rÉglise fût incertaine sur Timmatérialité de Dieu ou sur celle de
Tàme, c'est parce qu*on croyait que Tertullien, en disant que Dieu
était un corps, n*avait point voulu dire qu'il fût de la matière»
mais seulement qu'il était une substance ou un être existant en
lui-même.
Gomment donc l'auteur de la Philosophie du bon sens a-t-il pu
conclure du passage de saint Augustin qu'on n'était point héréti-
que du temps de Tertullien en soutenant que Dieu était matériel f
Quelle idée faudra-t-il que nous prenions de son esprit, s'il n'a
fait en cela qu'une faute de logique ? Pourquoi, en citant le pas-
sage de saint Augustin, cet auteur a-t-il supprimé la raison que
saint Augustin donne, pour laquelle Tertullien n'a point été re-
gardé comme un hérétique lorsqu'il fit Dieu corporel ? Si l'auteur
est de bonne foi, sa philosophie n'est pas la philosophie du bon
SftlS.
Saint Hilaire croyait Vimmatérialité deVâme.
Personne n'a enseigné plus clairement et plus formellement l'im-
matérialité de l'âme que saint Hilaire ; ce n'est point chez ce Père
une opinion, c'est un principe auquel il revient toutes les fois
qu'il parle de l'âme.
Lorsqu'il explique ces paroles du psaume 118 : Ce sontvot mainê.
Seigneur, qui m'ont formé, il décrit la (brmation de l'homme et il
dit que les élémens de tous les autres êtres ont été produits tels
qu'ils sont dans l'instant même auquel Dieu a voulu qu'ils existas-
sent ; qu'on ne voit dans leur formation ni commencement, ni pro-
grès, ni perfectionnement ; qu'un seul acte de sa volonté divine
les a faits ce qu'ils sont ; mais qu'il n'en est pas ainsi de l'homme.
Il fallait, selon saint Hilaire, pour le former que Dieu untt deux
natures opposées, et cette union demandait deux opérations diffé-
rentes.*
Dieu a dit d'abord : Formons l'homme à notre image et à notre
ressemblance; ensuite il a pris de la poussière et il a formé
l'homme.
^ Aug., Dclucr., c. 86,
MAT I7>|
Dans la première opéraùon, Dieu a proiluii la onture inténeiiK
deriiomine; c'est «on àme, et elle D'upuînt été produite en riçoii-
ntol une nature étrangère. Tout ce que \e conseil de la di* itiiié a
produit dans cot instant i^taîl incorporel, puisqu'elle produisait
un èlre à l'image de Dieu : c'est dam la substance rai<«nnable et
incorporelle que réside notre ressemblance arec la divioiié.
Quelle dilTérence entre celle première production de la divinité
et la seconde? Dieu prend de la punssîère, et il forme ainsi
l'homme; en bçimnant la terre et 1* matière, il n'a pria nulle part
it la première production ; il l'a faite, il l'a créée ; pour le corpa,
il ne lu fait pas, Une 1c crée pas; il leformeet en prend la matière
dans la masse de la terre*.
Si ce Père parle de l'immensité divine , et de la présence de
Dieu dans tous les lieux , il dit que l'Être suprême eu. tout en-
tier partout, comme Time unie ï un corps est dans toutes tes par-
tie* du corps. L'âme, quoique répandue dans toutes les parties du
corps humain et présente i tontes ses parties , n'est pas pour i
dirisible comme le corps : les membres pourris, coupés ou para-
lytiques, n'allèrent point rinlégritéde l'ime *.
Dieu n'est , selon ce Père, ni corporel, ni uni ï nn corps , et cb I
n'est point en formant le corps de l'homme que Dieu l'a fait 1 a
ressemblance , mais en lui donnnni une ime. C'est pour cela que ]
ta Genèse ne décrit ta formation du corps humain que long-iempa
après nous avoir dit que Dieu avait fait l'homme h son image:
c'est par cette ressemblance de l'âme avec la nature divine
qu'elle est raisonnable, qu'elle est incorporelle et éternelle. Elle
n'arien de terrestre, rien de corporel. C'est loujourssur ces prin-
cipes que saÎDl 1 1 liai re parle de l'Ame'.
lin l'ère qui s'est expliqué si expressément et si clairement sur
l'immatérialité de l'âme ne pouvait être mis au nombre des Ua-
lèrialisles qu'en opposant 1 ces pussages d'autres endroits de ce
Père, contraires ï l'immatérialité de l'ime ; il Tallait tirer des ou-
irageB de ce Père des doutes raisonnes , ou des difficultés consi-
dérables contre l'immatérialité de l'Ame.
Cependant M. Uuet, pour prouver que saint Hilaire cro^pait
matérielle, ne nous cite qu'un passage de ce père i dans lo-
.m
Hllar.iaps. 118. Litte
■lbid..tiller. le.n'S.
• la psal, tlO,
.10,1
ISO MAT
quel il dit qu*il n'y a rien qui ne soit corporel dans sa substance
et dans sa création , et que les âmes unies à leurs corps , ou dé-
gagées de ce corps, ont une substance corporelle, conforme à leur
nature ^
Si M. Huet et ceux qui Tont copié avaient lu avec attention tout
le passage de saint Uilaire , ils auraient vu que le mot corporel
n*a point ici un sens favorable au Matérialisme.
Saint Hilaire examine , dans ce passage , les difficultés de quel-
ques hommes grossiers qui semblaient douter de la résurrection
parce qu'ils ne concevaient pas comment on pourrait se nourrir
dans le ciel.
Saint Hilaire leur dit d*abord que les promesses de Dieu doi-
vent dissiper toutes leurs inquiétudes à cet égard. 11 tâche en-
suite de lear faire comprendre comment ils pourraient vivre dans
le ciel : pour cela , il leur dit qu'il n'y a rien qui ne soit corporel
dans sa substance et dans sa création ; ce qui veut dire que Dieu
n'a rien créé sans donner h ses créatures une existence solide, et
toutes les qualités nécessaires pour qu'elles aient la durée qu'il
leur aura promise.
Cette explication est conforme au but que saint Hilaire se pro-
posait , et le mot corporel , corporeum , a quelquefois ce sens dans
saint Hilaire même, qui dit que tout ce qui est composé a eu un
commencement par lequel il est corporiiié, afin qu'il subsiste ; et
c'est dans ce sens qu'il faut entendre ce que ce Père dit dans le
même passage sur le âmes^qui, séparées du corps, ont cependant
une substance corporelle, conforme à leur nature.
Si saint Hilaire avait voulu dire , dans ce passage , qu'il n'y a
rien qui soit matériel , voici à quoi se réduirait sa réponse : Vous
êtes inquiets comment vous vivrez après la résurrection , vous
avez tort, car il u'y arien qui ne soit matériel*
Pour que saint Uilaire abandonnât dans cette occasion ses prin-
cipes sur l'immatérialité de l'âme , il fallait que le Matérialisme
répondu aux difficultés qu'il se proposait d'éclaircir et qu'il ne
fût pas possible de répondre autrement. Or, il est certain que le
Matérialisme de l'amené résout point ces difficultés, et qu'au con-
traire il les fortifie. Si l'âme est matérielle, on doit être beaucoup
plus embarrassé de vivre dans le ciel que si elle e&t immatérielle
comme les anges.
* In Matlbsum, p. 632,
MAT t
Saint Ambroiie erot/ail l'âme immalérielle , et Von ne trouve d
e Ffre rien i/ai favorite le matérialiame,
> Saint Ambroise eilpique U création de l'homine comme sainf 1
^^V La TÎe de Tbomme a commencé, dit-il , lorstjDe Dieu a eouIM |
^^■nir lui ; cette lie finit par h séparaiioQ de l'Sme et du corps;,
^^rmîs le soutnc qu'il reçoit de Dieu n'est point détruit lorsqu'il fS
^^' sépare do coqia. Comprenons par-lï combien ce ijiie Dieu a î»\t
immédiatement dans l'Iiomme est dilTéreni de ce qu'il a Tormé et 1
figuré; c'est pour cela que rt^riltire dît que Dieu a Tait l'hommoi I
ison image, ei qu'elle raconte ensuite qu'il prit delà poussière tH
qu'il forma l'homme.
Ce qui n'a point été formé d<! lu poussîirc n'ost ni terre ni dii-
litre , c'rst une substance incorporelle , admirable, immatérielle ;
E n'est ni dans le corps , ni dans la matière , mais dans l'Ame t%
annable qu'il faut chercher la ressemblance de l'homme a
^u ; l'âme n'est doue point une ïile mûtiire , elle n'est rien
k eorporel < .
Tesl par ledogmedel'inmiatirialitéderi'lnieqLi'il élève l'hommi
il le console des nalhenrs de la vie, qu'il lesoutient contre li
ffcorreurs de la mort : toute la morale de ce Père porte sur l'imm:
^ttrialilé de l'âme *.
Sur quel fondement soupçonne-t-on ce Pérc d'être Haiéri»]
^Ibtef Sur un passage dans lequel ce Père dît qu'il n'y
mpl de composition matérielle que la Trinité '•
- En prenant cepassage ainsi détaché de tout ce qui le précède ec'
ut ce qui le suit , il s'ensuiTrait tout su plus que saint Am-
« croyait que tous les esprits créés sont unis â un petit corps
ilib sont insé|)arable4. Saint Anibroisc s'est eipliqné trop claî-
ur l'immatérialité de l'Ame pour donner un antre sei
le passage.
aint Ambroise, dansce passage, ne ditrien de ce qu'oi
Ce Père, en parlant des sacrifices, dit qu'ils si
)t ï rappela
* Pi. 118. Sern. 10, n. 15, p. lOSli n. 16, 18, H«amcron, I
Pc. 7, n. 10, AO.
1 De Noe cl arcA, r. 95, p. 143. De bono mortis, r. 9, n. 38.
■ De Abmbam, I. S, c, a, n. W, p. 338,
II. l»S
183 MAT
rhomme à Dieu , et à lui faire connaître que Dieu , quoique au-
dessus du monde, en a pourtant arrangé les parties.
Du spectacle de la nature, où il trouve les traces ou plutôt le
oaractère de la Providence , il passe aux différentes parties du
monde et de la terre : il fait voir que c'est Dieu qui a disposé les
différentes parties de la terre ; il passe ensuite au corps humain ,
et dit que c'est Dieu qui a mis entre tous ses membres Tharmonie
qu*on y admire.
Pour Tâme, elle a aussi ses divisions , et oes divisions sont ses
différentes fonctions ; car Tftme , selon ce Père , est indivisible ;
plus légère que les oiseaux, ses vertus relèvent au-dessus des cieux,
et Dieu ne Ta point divisée en parties comme les autres êtres ,
parce qu elle est unie à la Trinité , qui , seule indivisible, a tout
divisé.
C'est pour cela que les philosophes avaient cru que la substance
supérieure du monde , qu'ils appellent l'éther , n'est point com-
posée des élémens qui forment les autres corps ; mais qu'il est une
lumière pure, qui n'a rien de l'impureté de la terre, de l'humidité
de l'eau, du nébuleux de l'air ou de l'éclat du feu ; c'est , selon
eux, une cinquième nature qui , infiniment plus rapide et plus lé-
gère que les autres parties de la nature , est comme l'âme du
monde , parce que les autres parties sont mêlées à des porps
étrangers et grossiers.
Mais pour nous , continue saint Ambroise , nous croyons qu'il
n*y a rien d'exempt de composition matérielle que la substance
de la Trinité, qui est d'une nature simple et sans mélange, quoi-
que quelques-uns croient que cette cinquième essence est cette lu-
mière que David appelle le vêtement du Seigneur.
Il est évident que samt Ambroise confirme ici l'immatérialité
de l'âme , puisqu'il dit qu'elle est indivisible et unie à la sainte
Trinité , qui est simple ; qu'ainsi ce Père n'a pu , deux lignes au-
dessus, dire que l'âme est matérielle, à moins qu'on ne le suppose
siupide ou insensé.
11 n'est pas moins clair que, dans ce texte , saint Ambroise n'a
pour objet que de combattre le système de l'âme universelle , que
les philosophes supposaient répandue dans le monde comme un
cinquième élément ; par conséquent , il ne s'agissait point, dans
cet endroit , de l'âme humaine, mais d'une des parties du monde,
que les philosophes regardaient comme un esprit ; et saint Am-
broise leur dit qu^il ne reconnaît point pour gouverner le monde
MAT
f i'uvlre uaiurij &itii|ile que Dieu , e\ que iou.« leséttimens [|ui Mh!
B Venl i eulrelenir l'iiariiionie de U nature ^nnt curpurels , ce (lOt |
l'a aucun Npport i Vime.
Voila le »eas naiuret du passage de «aiui Auibroise, lequel vnm I
BtiinUableiueDl n'a pas élc lu en entier par ceux t\u\ oni
Pce Père élail Mut^rialisle.
LeasiËcles postérieurs aux Pères doDl nous venons d''
VV MDlimenl ne fournissent rien doni les Malérialisles
itoriser, ou Ce sont des passages détachés , qui peuvent e'ei plis I
:t par ce que nous (TOUS diisur les diOereniifcaique l'on ai
I lacliés aux inuls carpi, ctrpiirtl.
%\\.— L'immatériaUlé de l'àme est une vérité iimentTft.
Le» philosophes qui prétendent que la matière peut acquérir )•' j
ultë de peoser supposent , comme Lote, qoe Dieu peut cootn
Kiniquer à U miliire l'uctivilé qui produit la pensive, ou
lolibes , que U faculté de penser n'est qu'une certaine fucuW
e de recevoir dai sensitions.
Dans l'une et dini l'autre supposition , U malifire sera n£ce«t|
B^ireineut le sujet de la pensée ; ainsi , pour rcluier ces deux hj» |
Ifoilièses, il sufQtde faire voir que la matière uepeul être lesujat g
I jela pensée.
Lorsque nous rénéchissons sur Dous-mèDieE , nous voyons qu
ft toutes les Impressions des objets eilérieurs sur nos organes i
Kpprochenl vers le cerveau , et se réunissent dans le princi|)
ni, en sorte i|ue c'est ce principe qui aperçoit les couleui^ 1
ns, les ligurtu et la dureté des corps : car le principe pensant 1
Oipare ces impressions, el il ne pourrait les comparer s'il n'^
it pas le même principe qui aperi;oit les couleurs et les sons.
- Si ce principe était composé de parties, les perceptions qu'il
lient distribuées i ses parties , et aucune d'elles Dtt 1
il toutes les impressions que font les corps extérieurs sur la
nine dss partie* du prindpe pensant ne pourrait doM 1
p comparer. La faculté que l'âme a déjuger suppose donc qu'etif'j
It point do parties et qu'elle est simple.
I Plaçons , par exemple , sur uo corps composé di! quairfi
, ridAe d'un corclc; cnmmc co corps n'«xistn qnr par sl's pH>ffl
; peut aussi apercevoir que par elles; li> corps coiMfl
d de quatre parties ne ponrnit donc apercevoir m
] 84 MEL
que parce que chacune de ses parties apercevrait un quart de
cercle ; or, un corps qui a quatre parties dont chacune aperce-
vrait un quart de cercle ne peut apercevoir un cercle , puisque
ridée du cercle renferme quatre quarts de cercle, et que dans le
corps composé de quatre parties il n*y en a aucune qui aper-
çoive les quatre quarts du cercle.
La simplicité de Tâme est donc appuyée sur ses opérations
mêmes, et ses opérations sont impossibles si Tàme est composée
de parties et matérielle.
Les philosophes qui attribuent k la matière la faculté de pen-
ser supposent donc que Tâme est composée et qu*elle ne Test pas:
le Matérialisme est donc absurde , et Timmatérialité de Tâme est
démontrée.
L*impossibilité de concevoir comment un principe simple agit
sur le corps et lui est uni n*est pas plus une difficulté contre
rimmatérialité de Tâme que Timpossibilité de concevoir com.
ment nous pensons n*est une raison de douter de Texistence de
notre pensée.
Le Matérialiste n*a donc aucune raison de douter de rimmaté-
rialité de Tâme ; ainsi , ce scepticisme , dont les prétendus dis-
ciples de Loke se parent , n*aboutit qu*à tenir Tesprit incertain,
entre une absurdité et une vérité démontrée ; et si Ton construi.
sait des tables de probabilité pour y ranger nos connaissances,
le Matérialisme n*y trouverait point de place; il ne répondrait pas
même au plus faible degré de probabilité , et rimmatérialité de
Fâme serait placée à côté des vérités les plus certaines. On n'en-
tend donc pas Tétat de la question lorsqu'on prétend que la ma-
térialité ou rimmatérialité de TÂme est une opinion dont la pro-
babilité plus ou moins grande dépend des découvertes que Ton
fera dans la connaissance des propriétés de la matière ; car, non-
seulement nous ne connaissons rien qui puisse autoriser cette con-
jecture, ce qui suffit pour rendre le doute du Matérialisme dérai-
sonnable , mais encore nous voyons qu'en effet la matière ne
peut être le sujet de la pensée, ce qui fait du Matérialisme un
sentiment absurde.
MELGHISËDÉGIENS. On donna ce nom aux Théodotiens, qui
niaient la divinité de Jésus-Christ et qui prétendaient qu'il était
inférieur à Melchisédec : Théodote le banquier est l'auteur de
cette hérésie.
Théodote de Bysance avait renié Jésus-Christ, et, pour dimi-
MEL
Duer t'énormilé de EOn «posliisîe, il av^Il prélcndu qu'il n
reiiii> qu*uii liomme , parce que JËsus-Chrisi n'était qu'un tiomnie.
Tbéodote le banquier adopta son sentiinent et préleodit que
Uelcbisédec élaîl d'une nature plus excellente que Jiîtus-Ctirist.
Lcï erreurs sont ordinsirenieut i leur uaisMucc fort simptci et
appuyées sur peu d'argumens : lursqu'utie erreur devient l'oj^ ■
oioTi d'une secte , se» partisans font elTort pour \a défeadro ; Im
esprits envisagent tout sous )a face qui favorise leur seiiliuienlj ■
laîaissent cec6ië; on en bit de nouvelles preuves, et les plni'l
miftcea vroisemblnnces se changent eu principes.
Ainsi , Thi^odote le banquier voilant qu'où appliquait t Jcsufr*1
Qirisi ces paroles d'un psaume : Vous élet priire trloa l'ordre 4t *
MeleliiUdee , crul voir dausce lexle une raison péreniptolre contre
la divinité de Jésus-Christ , et tout reffurt de son esprit se tourna
du e6lé des preuves qui pouvaient établir que Uelcbisédec était
L supérieur ï Jésus-CliriEt,
Ce point devint le principe fondameuial du sentiment de TlidO* I
■dote le banquier et de ses disciples. On recliercUa tous lesendrutUa
■4c l'Écniure qui parlaient de tielcliisédec. On trouva que Mofwl
■ le représentait comme le prêtre du Très-lbul; qu'il avait bdM I
l'Abraham; que saint Paul assurait qucMelcbisédecctait sans për^ 1
is mère , sans généalogie, sans commencement de jours et M
de vie, sacrificateur pour toujours.
Ttiéudote et ses disciples conclurent de h que Melcliisé
n'était point un bomme comme les autres hommes ; qu'il ù'
'rieur i Jésui-Chrisl, qui avait commencé et qui était mo
, que MelchisiMec ^tail le premier pontife du sacerdoce éter-
nel par lequel nous avions accès auprès de Dieu , et qu'il devait
itre l'objet du culte des hommes. Les disciples de Tbéodote ûreut
donc leurs oblations et leurs prières au nom de Melchisédec, qu'il»
egardaienl comme le vrai médiateur entre Dieu et les hommes,
It qui devait nous bénir comme il avait béni Abraham '.
iliérax , sur la 6n du troisième siècle , adopta en partie l'erreur
le Tbéodole, et prétendit que Melcbisâdec était le Saint-Esprit.
Saint Jérôme rérula un ouvrage composé de son temps pour i
l^rouverque Uulchisédec éUiit un ange,
Sur la Gn du dernier siècle , un anonyme Ht revii re en parti
■l'erreur «le 1 héodolc sur Melchisédec.
■ Rpipb., Ilirr. 35.
lê« MEL
Saint Pâttl dit que le premier homme était terrestre et né de la
terre , et que le second homme était céleste et né du ciel *.
De ce passage , cet auteur conclut qu*il y a des hommes ter-
totres et des hommes célestes , et que , comme saint Paul dit
t[ue Melchisédec a été fait semblable à Jésus-Christ , il faut bien
que Melchisédec soit aussi un homme céleste ; ce qui explique
très-heureusement , selon cet auteur, ce que TÉcriture nous ap-
prend , que trois mages vinrent adorer Jésus-Christ. Comme TE-
briture ne nous apprend rien sur ces mages , Tauteur anonyme a
cru que ces trois mages étaient trois hommes célestes , et que ces
hommes étaient Melchisédec , Énoc et Ëlie *,
Enfin , dans notre siècle , des savans distingués ont prétendu
que Melchisédec était Jésus-Christ lui-même '.
L*hérésie des anciens Melchisédéciens est absolument contraire
à TÉcriture, et même au texte de saint Paul, sur lequel on Tappuyait.
1* Moïse ne nous dit rien de Melchisédec qui nous eu donne
une autre idée que celle d*un roi voisin , qui prend part â la vic-
toire qu*on venait de remporter , et qui s*en réjouit parce qu*elle
lui était avantageuse.
Si saint Paul n*avait pas tiré de Taction de Melchisédec des
conséquences mystiques et qu*il n*eût pas vu dans ce roi un type
du Messie , on n*aurait vu dans Melchisédec qu*un souverain qui
réunissait le sacerdoce et la royauté, comme cela était alors fort
ordinaire ; c*est pour cette raison que les Juifs , qui ne reçoivent
point Tépîtreaux Hébreux, s'accordent presque tous à reconnaître
Melchisédec pour un roi de Chanaan; quelques-uns même ont sou-
tenu qu*il était bâtard , tandis que d*autres ont soutenu qu'il était
le même que Sem *.
2' Le passage du psaume 110 qui dît que Jésus-Christ est
prêtre selon Tordre de Melchisédec prouve que le sacerdoce de
lésus-Christ était d'un ordre différent du sacerdoce des Juifs , et
que le sacerdoce de Melchisédec était la figure ou le symbole de
Jésus-Christ, et c'est ainsi que saint Paul l'explique.
Saint Paul se propose de détacher les Juifs du sacerdoce de la
loi , dont ils étaient excessivement enlélés ; pour cet effet , il dit
* Primx Cor, 15, v. àh*
2 Pctavius, Dogm. Iheol., I. 3. De opif. sex dierum,
' Cunéus, Républ. des Hébreux, t. 1, 1. 3, c« 3.
^ Josephus, De bcUo judaîco, U 7, c 18.
MEL
[ qu'il y a 110 Mcerdoce £U|iérieur i celui des Juifs, et il lt> iirounî
I ftTce qiie Udcliis<)ifec, qui l'eierfait, bénit Abraham et djiaa le
I 4é|>ouilles qn'il avait remporiéei lur les roii vaincus, et ani
ft exercé tur lui et sur toute sa postérité uue vraie tupëriurilé ; d'o
13 coQulut que Jésus-Christ étant appelé par Dntiil praire selM 1
I l'ordre de Melchiséder , le «acerduce de Jésus-Christ était supd* 1
prieur au sacerdoce de la loi.
Il est visible que t'est li l'unique but que saint Paul se proposa^ I
lit iiue, pour établir ce aeatîment, il n'était poiui ndccMaire ds 1
^Ufe âe Helcbisédec hd être supérieur ï Jésus-Christ.
ainsi qu'il Taul expliquer ces paroles iJe saint Paul, qvl J
f (bot toute la dilRcuIté du leutimeot dus MelcblsAdécîeDS et <te |
I qui ont prétendu que Helohisédec était le Saint-Esprit, u
e on Jésus-Chrisl uiémi^.
fiaint P«il dit , 1 ■ que Melcbiséjluc éluit suas pbre , sans uèl
^«1 sans généalogie.
Cet apAlre, ayant dessein de montrer que le sacerdoi-e de Jés
~ " it plus excellent que celui d'Aaron , le prouve par le '
i-iet du psaume HO, où il est dit que le Kessic serait sacritlc
' n l'ordre de Helcbisédec. Il TaU voir que l'on deniaudaît,
I ta loi , que le sacriQcateur fût non-Muleinent de la tribu de L
«re de la famille d'Aaron ; outre cela , il Fallait qu'il
l' Bé d'une femme israétile , qui , en se mariant ù un sac
, mais qu'elle fût ï'
se vie, il n'était pas p
A pourquoi les :
énéalogies , sans quoi 3
il de la ramillc d'Aaron.
II ne fkllait pas qu'elle eût été mariée
nr si elle avait été veuve ou de mnuva'
mil lu MtrriHcileur de l'épouser; c'e!
« gardaient soigneusement leurs g
Il exclus da sacerdoce,
f Bami Paul dit que Melcliisédee ftit «ans pËre sa cri G ca leur, s
e qui efti les qualités que la loi exigeait dans la femme d'
triBcateur et sans généalogie sai'erdutale.
Comme Notre-Si^ignpur n'était point de race sacerdotale, t
irsinifs ponvaient dire qu'à cause de cela il ne pouvait âlreii-
criBcateur, lainl Paul fait voir qu'il l'était néanmoins , conforma'!- '
ment â la préilirtion du psaume IIU, selon l'ordre de Melcliisé^ |
dcc dans lequel il n'y avait point de semblable lui.
Mais , dit-on , l'&riture assure que Uelcliisédec n
mcncemeni de jours , niBudetie.
Ceci n'eiprimc encore que in dUTérences vnVK ^ ioxKtii
18S MEN
de la loi et le sacerdoce de Melcbisédec : les lévites servaient au
temple depuis trente ans jusqu*à soixante; on peut dire que ces
gens-là avaient une fin et an commencement de vie ministérielle ,
s*il est permis de parler ainsi. Outre cela , les souverains sacri-
ficateurs avaient un commencement et une fin de vie par rapport
aux fonctions du sacerdoce suprême , qu*ils ne commençaient h
exercer qu'après la mort de leurs prédécesseurs et qu'ils ces-
saient aussi d'exercer en mourant. Il n'en avait pas été de même
de Melcbisédec , qui n'avait point eu de bornes marquées dans
les fonctions de son sacerdoce, et qui n'avait eu, ni prédéces-
seurs ni successeurs , de sorte qu'on pouvait dire qu'il n'avait
eu ni commencement ni fin de sa vie sacerdotale.
Lorsque saint Paul dit que Melcbisédec étant semblable au fils
de Dieu , il demeura sacrificateur pour toujours , il veut dire que,
comme le Fils de Dieu n'a eu ni prédécesseurs, ni successeurs
dans son sacerdoce, il en a été de même de Melcbisédec, qui
fut sacrificateur aussi long-temps que l'état de son règne le per-
mit; car les mots à perpétuité y toujours, se prennent souvent
dans ce sens par les écrivains sacrés *.
M EN ANDRE était Samaritain , d'un village appelé Gapartaije :
il fut disciple de Simon le Magicien , fit de grands progrès dans
la magie, et forma une secte nouvelle après la mort de sou
inaitre.
Simon avait prêché qu'il était la grande vertu de Dieu , qu'il
était le Tout-Puissant ; Ménandre prit un titre plus modeste et
moins embarrassant, il dit qu'il était l'envoyé de Dieu.
• Il reconnaissait, comme Simon , un être éternel et nécessaire,
qui était la source de l'existence ; mais il enseignait que la ma-
jesté de l'Être suprême était cachée et inconnue à tout le monde,
et qu'on ne savait de cet être rien autre chose, sinon qu'il était
la source de l'existence et la force par laquelle tout était.
Une multitude de génies sortis de l'Être suprême avaient, se-
lon Ménandre , formé le monde et les hommes.
Les anges créateurs du monde, par impuissance ou par méchan-
ceté , enfermaient l'âme humaine dans des organes où elle éprou-
vait une alternative continuelle do biens et de maux : tous les maux
avaient leur source dans la fragilité des organes , et ne finissaient
que par le plus grand des maux , par la mort.
* Exod. 21, i. 6. Jérém. 5, f. 22.
F M ES (89
Des génies bienfiiisans , toiicliiVs ilii luallieur des liomme^ ,
avaieni placiS sur la lerre des ressources conire eci nialliciirs ; ■
mais les hommes ignoraienl ces ressources, et Ménandre assurait
qu'il élail envoyé par les gùùîet bisnraisaos pour découvrir aux
hummes ces ressources el leur apprendre le nojcD de Iriompher
des anges tr^leurg.
Ce mojeQ èlail te secret de rendre les organes de l'homme inal-
t^raljles, el ceseeretcoiisistiiL dans une esp&cede bain magique
que Ménundfe Taisail prendre àses disciples, qu'on appelait la vraie
résurrection, piircc que ceux qui le r "
Hénandre eut des disciples h Anliochc , et il y avait encore, du
temps de saint Justin , des Hénandriens qui De doutaient pas
qu'ils ne fussent immortels. Les liommcs aiment si passionné-
ment la vie, ils loient si peu le degré précis de leur ddcadence,
qu'il n'est ni fort dîRicilede les convaincre qu'on peut les rendre
immortels sur la terre, ni même impossible de leur persuader,
jusqu'au moment de la morl, qu'ils ont rei;u le privilège d«
rimmortalilé ' .
Ainsi , tous les siècles ont eu , sous d'autres noms , des Mé-
nandriens qui prétendaient se garantir de la mort , Iuat6i par le J
mojen de la religion , Ianl6l par les secrets de l'alchin '
les cbimètesde la cabale. Au coinnieDcemcnlde uotresiècle, uQ
Anglais prétendit que si l'homme mourait , ce n'éuit que par coa-
lume; qu'il pourrait, s'il voulait , vivre ici-ba.; sans craindre la
mon , et être iraustéré dans le ciel comme autrefois Énoc et Slie.
L'homme, dit H. Afgil , a été fait pour vivre; Dieu n'a fait la
mort qu'après que l'bomme se l'est attirée par le péché; Jésus.
Cbrisl e&l venu réparer les maui que le pécbé a causés dans le
monde et procurer auï hommes l'immortalité spirituelle et cor-
irelle ; ils rec;oivent le gage de l'immortalité corpoi'cMe en re-
, le baptême , et si les cbrétïens meurent , c'est qu'ils man-
de foi '.
UESSALIEINS , secte de fanatiques. Voici rotigîue de leurs er-
urs el de leurs extravagances.
L'Ëvaugile enseigne que pour être parfait il faut r
' Inrn,. 1. 3, c. ïl, Terl., De pra?script„ c S. Euscb,, I, 3, c. 30,
Jusiilia Apol. i. Ane.1 De bnr., c 3.
' Républ. des lettre») I70D, novenibre, arL S, p. 5M,
190 MES
à soi-même I Tendre ses biens, les donner aux pauvres et se dé-
tacher de toat.
Un nommé Sabas, animé d*un désir ardent d*arriver à la per-
fection évangélique , prit tous ces passages à la lettre , se fit eu-
nuque , vendit ses biens, et en distribua le prix aux pauvres.
Jésus-Christ dit à ses disciples : Ne travaillez point pour la nour-
riture qui périt , mais pour celle qui demeure dans la vie éter-
nelle *.
Sabas conclut de ce passage que le travail était un crime , et se
fit une loi de demeurer dans la plus rigoureuse oisiveté : il donna
JBon bien aux pauvres, parce que TËvangile ordonne de renoncer
hux richesses , et il ne travaillait point pour se nourrir, parce que
rÉvangile défend de travailler pour une nourriture qui périt.
Appuyé sur plusieurs autres passages de TÉcriture , toujours
pris à la lettre, Sabas avait jugé que nous étions environnés de
démons et que tous nos péchés venaient des suggestions de ces
teprits pervers : il croyait qu'à la naissance de chaque homme
un démon s'emparait de lui , Tentralnait dans les vices et lui fai-
sait commettre tous les péchés dans lesquels il tombait.
Par le premier acte de renoncement à soi-même que Sabas pra-
tiqua , il y a bien de Tapparence qu'il était sujet à de fortes ten-
tations de la chair , et TËcriture nous apprend que le démon de
l'impureté se chasse par la prière. Sabas crut que c'était le seul
moyen de triompher des tentations et de se conserver sans péché.
Les sacremens effaçaient bien les péchés , selon Sabas , mais ils
n'en détruisaient pas la cause , et Sabas les regardait comme des
pratiques indifférentes : un sacrement était, selon lui , comme le
rasoir qui coupe la barbe et laisse la racine.
Lorsque , par la prière , l'homme s'était délivré du démon qui
l'obsédait , il ne contenait plus de cause de péché ; le Saint Esprit
descendait dans Tâme purifiée.
L'Écriture nous représente le démon comme un lion affamé
qui tourne sans cesse autour de nous : Sabas se croyait sans cesse
investi par ces esprits; on le voyait, au milieu de la prière , s'agi-
ter violemment , s'élancer en l'air et croire sauter par dessus une
armée de démons ; on le voyait se battre contre eux , faire tous les
>mouvemensd'un honune qui tire de l'arc ; il croyait décocher des
bêches contre les démons.
* Jeau 6, y, Î7.
I MU. lUI \
W L'îinaiiinalioiult! Sahas nV'lait pas tranquille [icndiiiil
meit ; il crnjNit voir réellement lous les Tïnlûmes qu'elle
fr^il , et t»! doutait (las que ses tisioDj ne Tuisienl des rérëlaliou :
iUccruiproplièle.ilatLiniraiteiiliuliite la inutiitudc, il écliaula
lei iiDagioviions faibles > il iospiri tet sentimens , et l'on vil una
Tnule d'bainmcs et de femuies vendre leurs biens, mener une vis
oisive ei tagabûnde , prier saas cesse et coucher péle-méle dani
les rues.
Cos in:>llipureus croyaient l'atmosphère remplie de dÉmons, e4
t douUieiii pas qu'ils ne les respinsscni aveu l'air ; pour s*ej|
ils ie tnoucliaienl et crachaient sans cesie ; tantA|
I les voyait luuer contre les démons et leur décocher des ttè*
K, tanlùi ils tombaient en extase , Taisaient des prophéties ei
myaietit voir la Trinité.
e se séparèrent point de la commiiiiion des callioliqupH ,
p'ils regardaient comme de pauvres gens , igiioraiia el grossiers , J
' cliercbaient slupidemeol dans les sacremens des forces contnf J
■llai|uea du détnon. '\
EliCS Uess.tliens avaietil fait du progrès h f^esse; ils en furent ■
tséspar Flovïen, év£que d'Anlioclie, et se retirèrent dan^t I4 f
laphiliu; ils y furent condamnés par nu concile, el pissèrenf ]
t Arménie, où Us infeciârent de leurs erreurs plusieurs n
LLélorius, évéque de Mélîtâne , les fit brûler dans ces mon:
; ceux (^i échap|>èrent aai ilainmes se retirèrent chex 1
e évéque d'Arménie , qui en eut pitié et les traiti avec
MIU.ËNA1RES. Ou donne ce nom i ceux i\oi ont cm
Jteus-Christ régnernit lur la tt^rre avec ses saints dans une noii
Jérusalem, pendant mille ans avant le jour du jugement :
Il Ibndement de celle opinion.
[ Les prophètes avaient promis aun Juifs que Dieu les rassembla^
e toutes les nations , et que, lorsqu'il aurait exercé sei
atm (ur tous leurs ennemis ils jouiriient sur la terre d'u« 1
Eilieur parfsil : Dieu annooca par Isaie qu'il créerait i'
, nne terre nouvelle.
ITout ce qui a Ml-, auparavant , dit Dieu par la bouche d'Isaie J
Vflfscera de la mémoire sans qu'il revienne dans respnt;v
is réjouirez , et vous serei éti'rn elle ment pénétrés de joie d
lesclioîes que je vais créer, parce que je n'en v»is rendre Jér(i>
192 MIL
salem une ville d*allégresse et son peuple un peuple de joie. Je
prendrai mes délices dans Jérusalem ; je trouverai ma joie dans
mon peuple ; on n*y entendra plus de voix lamentables ni de tristes
cris : ils bâtiront des maisons et ils les habiteront ; ils planteront
des vignes et ils en mangeront les fruits : il ne leur arrivera point
de bâtir des maisons et qu'un autre les habite , ni de planter des
vignes et qu*un autre en mange le fruit ; car la vie de mon peuple
égalera celle des grands arbres , et les ouvrages de leurs maisons
seront de grande durée ^.
Mes élus ne travailleront point en vain , et ils n'engendreront
point d*enfans qui leur causent de la peine , parce qu'ils seront
la race bénie du Seigneur et que leurs petits-enfans le seront
comme eux ; le loup et l'agneau iront pattre ensemble , le lion et
le bœuf mangeront la paille , et la poussière sera la nourriture du
serpent ; ils ne nuiront point et ne tueront point sur toute ma
montagne sainte, dit le Seigneur*.
Ezéchiel ne fait point des promesses moins magnifiques. Je vais
ouvrir vos tombeaux , dit Dieu , et je ferai sortir mou peuple des
sépulcres , et je vous rendrai la vie et vous rétablirai dans votre
pays ; alors vous connaîtrez que je suis le Seigneur. Je rassemble-
rai les Israélites , en les tirant de toutes les nations parmi les-
quelles ils ont été dispersés ; je serai sanctifié entre eux à la vue
de toutes les nations; ils habiteront dans la terre que j'ai donnée
à mou serviteur Jacob , ils y habiteront sans crainte , y bâtiront
des maisons , y planteront des vignes et y demeureront en assu-
rance, lorsque j'exercerai mes jugemens contre ceux qui étaient
autour d'eux et qui les ont maltraités , et l'on connaîtra alors
que c'est moi qui suis le Seigneur et le Dieu de leurs pères '.
Les Juifs qui reconnurent que Jésus-Christ était le Messie
ne perdirent point de vue ces promesses magnifiques , et il y en
eut qui crurent qu'elles auraient leur effet au second avènement
de Jésus-Christ.
Ces hommes , moitié juifs , moitié chrétiens , crurent qu'après
la venue de l'Antéchrist et la ruine de toutes les nations qui le
suivront , il se fera une première résurrection qui ne sera que
« Epiph., Hsr. 80. Theod., Hist. ecclés., I. i&, c ii. Aug., De hsor.,
c. 57. Photlns, Bibliol. Coq., 53.
* Isais, c 55, i. i7«
> Ëzéchid, c 87, i. 12, 25, 26,
MIL
^^L four \fs jusicfi , mais que ceuv qui se (rouroront ulurs sur II *
^^^'lerre , bons ei méchans, seront conservés en vie : les bons , pour
^^Bfibéir aux jastM ressuscites, comuie â leurs princes; les méclians
^^K^ur être vaincus par les justes et pour leur être uESujétis ; que
^^^.J£bu s -Christ descendra alors du ciel dans sa gloire ; qu'ensuite la
Tille <le Jènisalem sera rebSiîe de nouveau , augmentée et embo-
lie, et que l'on rebâtira le temple. Les Uilléuaires marrgnaieiil 1
même précisément l'endroit ofi l'un et l'autre seraient rebfllis et '
§ l'étendue qu'on leur donnerait ; ils disaient que les murailles de
leur Jérusalem seraient btties par les nations étrangères , coit-
.duites parleurs rois; que tout ce qui jetait désert, et principa-
lement le temple, serait revêtu de cj^prés, de pins et de cèdres;
qne les portes de la ville seraient toujours ouvertes; que run y
apporterait jour et nuit toutes sortes de richesses. Ils appli-
quaient ï cette Jérusalem ce qui est dit dans le il' chapitre de
l'Apocalypse, et au temple (ont ce qui est écrit dans Ëiéchiel :
c'est Ib qu'ils disaient que Jësus-Cbrist régnerait mille ans sur la
terre d'un régne corporel, et que, durant ces mille ans, lesHïuls,
les patriarches et les prophMes virraienl avec lui dans un con-
tenlemenlparrait; c'est là qu'ils espéraient que Jésus-Clirisl ren- ■
drait ï se* saints le centuple de tout ce qu'ils avaient quittAJ
pour lui : quelques-uus prélendaieul que les saints passeraient ojH
temps dans les fesiius, et que même dans le boire et dans l^j
manger ila iraient beaucoup au delii des bornes d'une juste mo-
dération et se porteraient à des excès incroyables ; ils disaienique
ce serait dans ce règne que Jésus-Clirist boirait le vin nouveau
dont il avait parlé dans la cène ; ils préteodaient encore qu'il ;
S'ait des mariages, au moins pour ceux qui se seraient trouT^^
ma ï la venue de Jésus-Christ; qu'il y naîtrait deseofaus;qu4l
Iles les nations obéiraient 1 Israël : que toutes les créatures sw^
Tuaient aux justes avec une entière promptitude; qu'il j aurait '
néanmoins des guerres , des triomphes , des victorieux , des vaio'
eus, i qui l'on ferait souffrir la mort. Ils se promettaient, dans
celle nouvelle Jérusalem , une abondance inépuisable d'or , d'ar-
gent, d'animaux , de toutes sortes de biens et généralement tout
ce que les chrétiens semblables aux Juifs, et qui ne cbercheiit
que la volupté du corps , peuvent s'imaginer cl désirer ; ils ajou-
taient ï cela qu'on serait circoncis , qu'il j aurait un sabbat per-
pétuel , que l'on immolerait des victimes, et que tous les homniea .
Tiendraient adorer Dieu ï Jérusalem, les uns tous les samcdia^'tl
n. 17 1
1 94 MIL
les autres ions les mois , les plus éloignés une fois Fan ; qne Ton
observerail toute la loi , et qu'au lieu de changer les Juifs en chré-
tiens , les chrétiens deviendraient des Juifs. C'est pourquoi saint
Jérôme appelle souvent Topioion des Millénaires une tradition et
une fahle judaïque , et les chrétiens qui la croyaient des chrétiens
judaîsans et des demi-Juifs.
ils contaient des merveilles de la fertilité de la terre, laquelle,
selon eux, produirait toutes choses dans tous les pays, et qu'ainsi
on n'aurait plus besoin de trafiquer ; ils disaient qu'après que le
règne de mille ans serait passé, le diable assemblerait les peuples
de Scythie, marqués dans l'Écriture sous le nom de Gog et de
Magog, lesquels, avec d'autres nations infidèles retenues jusqu'a-
lors dans les extrémités de la terre, viendraient, à la sollicitation
du démon, attaquer les saints dans la Judée ; mais que Dieu les
arrêterait et les tuerait par une pluie de feu, ensuite de quoi les
méchans ressusciteraient ; qu'ainsi ce règne de mille ans serait
suivi de la résurrection générale et éternelle et du jugement, et
qu'alors s'accomplirait la parole du Sauveur, qu'il n'y aura plus
de mariage, mais que nous serons égaux aux anges, parce que
nous serons les enfans de la résurrection.
11 paraît que Cérinthe donna de la vogue à cette opinion qui
flatte trop Timagination pour n'avoir pas de partisans : on crut la
voir dans l'Apocalypse de saint Jean qui dit que les justes règne-»
rout pendant mille ans sur la terre avec Jésus-Christ. On crut que
cet apôtre n'avait fait qu'expliquer ce qu'Ézéchiel avait prédit :
plusieurs chrétiens retranchèrent de ce règne temporel la volupté
que les chrétiens grossiers faisaient entrer dans le bonheur des
saints ; c'est ainsi que Papias expliquait le vingtième chapitre de
l'Apocalypse.
Cette opinion, dépouillée des idées grossières dont les chrétiens
charnels l'avaient chargée, fut adoptée par plusieurs Pères : tels
furent saint Justin, saint Irénée, etc.
Le grand nombre des auteurs ecclésiastiques et des martyrs qui
ont suivi l'opinion des Millénaires a fait que saint Jérôme n'a pas
osé la condamner absolument ; il aime mieux réserver toutes ces
choses au jugement de Dieu et permettre à chacun de suivre son sen-
timent ; ce qui n'empêche pas qu'il ne la rejette comme une faus-
seté contraire à l'Ecriture, comme un conte aussi dangereux que
ridicule, et qui devient un précipice à ceux qui y ajoutent foi.
Saint PhiUsUre la qualifie même d'hérésie. Les Orientaux, en écri-
Vant cniilro S9Ju( Cjrillf, (rail(.'nl (k I'uIjIus i-l di^ M'wn
m d'ApolliDaIre ; ei S/ini Cyrillf, en luur rËpundiPl, dil'cltre
^'il ne t'arrête ea nuciine manîâre à ce qu'a crj Apollinaire. La
^s grande partie des I*ëre3 oui coinbaitu cette erreur, gui u'uvait
fin* de partions connus du temps de uiiat Jér6me et de uini
AuguElia. Yofit TilIeoioDi, t. i, an. HilUnames, p. 300.
Ce tentiment e'eit renouvelé parmi les PiéiiAtcsd'AlleniagDe*.
MONOTIIÉUTES , bér6li<|ues qui ne reconuaiMaienI qu'uM
■nie volonté et nne «eule opération en Jësus-Ctirist .
Cotte erreur Tut une suite du Neatorianisme et de l'Eutjelii»- 3
llritine : nou» alluns eiaminer son origine, ses principes, sei pr»< J
De l'i/rlgiae tt iit principe* du Monotlullisme,
Nesloriua, pour ne pas conrunilre dans Jésus-Ciirist la naïur» J
AÏTiiie et la naiure humaine, avait bouleou qu'elles étaient tell» ]
it distinguées qu'elles formaient deu.\ personnes.
Eutjiohes, au contraire, pour défendre l'uniié de personne cA'
~feas-(^riat, aTsit tellement uni la nature divine et la n:
paiae qu'il les avait confondues.
' L'Egliae a^ait défini contre Ne^torins qu'il n'j avait qu'une
le en Jésus-Cbrist, et contre Eutjclies qu'il } stait deux
ptures; cependant il y araît encori' des Nesloriens et des F "
: les Eutjchiens prétendaient qu'on ne puuiait coodai
Entfches sans rcaouveler le Nestoriaoisme et sans admettre di
'' jtersonnes en Jésus-<lhrist ; letî NetUiricns, au conlrairf, i
oaient iju'on ne pouvait cundamner Neslorius sans tomber daui II
SabcUianismo et mm coufoudre, couime Euijches, la n
vinM et l» nature liumainc, cl sans en faire une seule substance.
Toute l'activiié de l'esprit se porta sur ce point capitil, dontM
seinlilait devoir réunir Ions les partis ; on chefcba hgt 1
loyt^ns d'npliquer comment en effet ces deni natures coiiiposaieM J
ine seule personne, quoiqu'elles fussent très-distinguées
^ On erul résoudre celle difSculté en supposant que la na
'Uine était r^elleoi cul distinguée delà nature divine, mais qu'elH
li était tellement unie, qu'elli- n'avait point d'aclion propre
fe Verbe élait lu seul principe .iclif dans jcâus-Clii'iM ; que ^
' Stocluuan, Lcxicoii,
196 MON
voioDlé humaine était absolument passive comme un instrument
entre les mains de Tartiste.
Voilà en quoi consiste le Monothélisme, qui, comme on voit,
D*est point dans son origine une branche de TEutychianisme
plutôt qu*une branche du Neslorianisme » mais qui cependant
s*accorde mieux avec TEutychianisme ; c*est pour cela qu'il a
été adopté par les Eutychiens, mais il ne faut pas le confondre
avec TEutychianisme ^,
Le Monothélisme a donc pour base le dogme de Tunité person-
* En effet, les Monothélites rejetaient Terreur des Eutychiens ; ils ne
niaient point qu*il n*y eût deux natures en Jésus-Christ, et en qudque
sorte deux volontés, savoir : la volonté divine et la volonté humaine;
mais ils enseignaient que la volonté humaine de Jésus-Christ n*était
que comme un organe ou comme un instrument dont la volonté di-
vine se servait; en sorte que la volonté humaine de Jésus-Christ ne
voulait, ne faisait rien d'elle-même, et n*agissait que selon que la vo-
lonté divine la mouvait et la poussait ; comme quand un homme tient
à sa main un marteau, et qu*il frappe avec ce marteau, on n*attribue
pas proprement le coup au marteau, mais à la main qui a remué et
fait agir le marteau.
Il y a néanmoins cette différence que Thomme et le marteau qui
frappent ne sont pas une seule et même personne.
Les Monothélites disaient aussi qu*il n'y avait qu*une seule volonté
personnelle et une seule opération en Jésus-Christ, parce qu'il n'y avait
que la nature divine qui, comme maîtresse, voulait et opérait, mais
que la nature et la volonté humaine n'agirait point proprement, et
n*était considérée que comme purement passive, en sorte qu^elle ne
voulait point d*elle-méme, et quelle ne voulait que ce que la volonté
divine lui faisait vouloir; c*est pour cela qu*ils disaient qu*il n*y avait
qu*une seule énergie en Jésus-Christ. ( Voyez les lettres de Cyms, de
Sergius et d'Honorius, dans les actes du sixième concile général , act.
iif 13. Colloquium Pyrrhi cum Maximo, apud Baron, t 8, p. 681.)
C'est ainsi que Suarcz de Lugo et beaucoup d'autres théologiens ont
conçu le Monothélisme, et ce sentiment me semble beaucoup mieux
fondé que celui des théologiens qui regardent le Monothélisme conune
une branche de l'Eutychianisme. ( Voyez ^ sur ce dernier sentiment ,
Pétau, Dogmat théol, t. 5, 1. 8, c A.)
Ils prouvent bien que le Monothélisme conduit à l'Eutychianisme,
et que c'est par ces conséquences qu'on Ta combattu ; mais les mono-
thélites niaient ces conséquences, et ne croyaient pas que leur senti«
ment y condubtt.
»MON
jMlle <l0 Jésiia-CLri&i que ri^^lisc avait iléiini comte Neslorius st |
Éfmpossibililé de couccvoir plusjimn actions ou (irincîpus t
vus ob il o'y a qn'uQe seule persiiune. Celle erreur se niiluïi
nîsoDnement :
Il ac peuiy avoir dans uae teule pitrsODne qu'un seul priactpe
qui vciil, ijui se dé terni i ne ; car la personne ëUnl un individu qui
existe en lui-même, qui contient un principe d'action, qui a une
volonlë, une inielligence distinguée de h volonté et de l'iniellï-
gence de tout autre principe, il est clair, disent les MonolfaéUles,
qu'on ne peut supposer plusieurs intelligences et plusieurs volon-
tés distinguées sans supposer plusieurs personnes : or, l'Ëglisedé-
B finit qu'il n'y a en Jésu^brisL qu'une personne , il n'y a doue en
^n»<!hr!st qu'un seul principe d'action, une seule volonté, une
JMule intelligence ; la nature divine et la nature liumaine sont
4onc tellement unies en Jésus-Cbrist qu'il n'y a point deux ac-
tions, àenx volonté;^, car alors il y aurait deux principes agi»-
Mns et denx personnes. J
Les catlioliquËS répondaient aux Honotliéliles : 1* qu'il y avait 1
^^ es Dieu trois personnes et une seulevolonlc, parce qu'il n'y STlit 1
^^Ldu'une seule nature ; que par conséquent c'était de l'unité de m* I
^^Bsre qu'il fallait conclure l'unité de volonté, et non pas de l'uuitt 1
^^f 4e 1> [lersonne. I
En effet, si l'unité de la personne emportait avec elle l'unité da J
Il volonté, la multiplicité de personnes emporterait au contrai» "l
ta multiplicité de volontés, et il faudrait reconnaître en Dieu traif i]
volontés; ce quîestfaux. I
2" 11 est essentiel à la nature liuniainc d'être capable de TO|b> J
loir, d'agir, de sentir, de connaître, d'avoir conscience de sot 1
csbience ; s'il n'y avait en Jésns-Cbrist qu'un seul principe ijvS '
sentit, qui connût, qui voulilt el qui eùl conscience de sou exis-
tence et de ses actions, l'fime liumaine serait anéantie et confondue
dtns la nature divine, avec laquelle elle ne ferait qu'une guIj-
■tanoe, on il faudrait que la nature humaine fût seule et que par
^^BBODséqueni le Verbe ne se fût pas incarné. lictlcmothélisme, qui
^^Hwsuppose qu'une seule volonté dans Jésus-Clirisl, letombe doua 1
^^H^s rEulycbiauïsme ou oie l'incarnation '- I
^^^B Ainsi, quoiqu'il n'y ait en Jéaus-Cbrisl qu'une seule personne I
^^H^ui agisse, il y u cepeudant plusieurs opérations, et le» deux nalu- I
^^B ' AcL conc; J
108 MON
res qui composent sa personne et qui concourent à une aetioa
ont chacune leurs opérations, et c*est pour cela qu*on les appelle
théandriques ou divinement humaines.
Les actions théandriques ne sont donc pas une seule opération ;
ce sont deux opérations. Tune divine et Tautre humaine, qui
concourent à un même effet; ainsi, quand Jésus-Christ faisait des
miracles par son attouchement, Thumanité touchait le corps, et la
divinité guérissait.
Voilà la vraie notion des actions théandriques : on peut dire
cependant, dans un sens plus général, que toutes les actions et
tous les mouvemens de Thumanité de Jésus-Christ étaient théan-
driques, c*est-à-dire des actions divinement humaines, tant parce
que c*étaient les actions d*un Dieu qui reçoivent une dignité infi-
nie de la personne du Verbe qui les opérait par son humanité,
que parce que Thumanité de Jésus-Christ n'opérait rien seule et
séparément ; elle était toujours gouvernée et régie par l'impres-
sion du Verbe à qui elle servait d'instrument.
Si rhumanité de Jésus-Christ voulait quelque chose , le Verbe
voulait qu*elle Ta voulût, et la poussait à la vouloir selon le dé-
cret de la sagesse : de même donc que Ton doit toujours concevoir
Phumanité de Jésus-Christ comme jointe à sa divinité et comme
ne faisant qu'une même personne avec elle , on doit toujours con-
cevoir aussi toutes les opérations de l'humanité comme jointes à
des opérations de la divinité, et ne faisant par cette union qu'un
seul et même opérant, si je peux parler de la sorte.
Ainsi ces opérations sont adorables en la manière que l'huma-
nité de Jésus-Christ est adorable; c'est-k-dire que, comme on adore
par une même adoration le Verbe fait chair, on adore aussi, par
la même adoration, le Verbe opérant par sa double nature divine
et faumaiue^.
Duprogrès du Monothélhme,
Nous avons vu que le Monothélisme était appuyé sur ce principe
spécieux , c'est qu^on ne peut supposer deux opérations où il u*y
a qu'un principe agissant; que par conséquent il n'y a qu'une opé-
ration en Jésus-Christ, puisqu'il n'y a qu'une personne.
^Mcole, sur le Symbole, troisième instruction. Voyez Damasccm,
Deduabusin Christo voluntalibus. Vasques, vol. 5, t. 1, disp. 73, c !•
Combefis, Uist* hxres. Monot. Pétau, Dogui. Uiéol., t 5, L 8.
P MON r-j9
Or r^rutailMUdumealue principe, et on leréfuliit surioutpar
les conn^iieacM f lusses aui<| nulles il conduiMÎt.
Mai» hi Hoiiothéliles niaieai ces conséquences, el prétendaient
que si l'on reconnaissait deux voluniéa on iupposersii deiin prin-
cipes d'action eldeu% personnes, comme Nestoriusl'anît enseigné.
de UonothAlisme et le sentiment des uuiholiiiues durent donc
s'offrir d'iibord comuicdeux opinions tliéulogiqucs ' dans cet dtat
delà dispute, cliacuD faisait laloir son opinion par lescoiis^uen-
ces avaougeuses qu'il en tirait , et les Uonoiliélitea préten-
diiii^nl , d'une manièrti assez spécieuse , que leur opinion était
propre i procurer U réunion des Nealorieus el dts Euijcliîens k
VÈgVne.
Ka effet , le Uonotliélisme qui supposait que la nature humuinrt
cLaii tellement unie à In nature divine qu'elle lui était subordon-
née dans lonies ses actions el qu'elle n'agissait point par elln-
uiéme , mAts par U volonté divine , paraissait lever les difflcultés \
des N'esiorieos et des Euijcliiens, puisqu'il supposait dans Jésus* !
Clirist doux natures trëi-distinctes et un seul principe d'action ,
ou un seul étreigissant. En un mot , les Neslorlens ne pouvaient
reprocher au Uunotbélite de confondre les deux natures, puis-
qu'il les supposait distinctes et suburdunnées ; d'un autre cAté ,
tvB Eut t chien s ne pouvaient reprocher au Monothéiile de ■luppuser |
avei-NeslunusdeuïperiUnne9ilan& Jésus-Clirisl, puisqu'il nesup- 1
punit eu lui qu'un seul priucipe agissant, ou une seule aciîun,
Voib , ce me senible , le cété favorable sous lequel les MunO-' I
iliélîies oITrdieut leur seiiiiincut, et ce fut sous celte t:itM qu'll4-
racliaa l'envisagea : comme ce prince suubaiiail réunir les partis
qui avaient décbiré l'^-gliie el terminer des querelles qui uvateut
dé|ieu|dé l'empite, il marqua beaucoup de gndt (lour le UonothA- '
iisuic et voulut qu'où l'enseignât'.
Cjrus, patriarche d'Alexandrie, assembla unconcile, dans le-
quel il lit déddor qu'il n'y avait qu'une seule volonté en Jésus-
Chriit.
Sophron«, évéquede Dama* , et ensuite de Jérusalem, o'envî-
«aj^eapasle MouotliéMsuie sous cette face ; il ne crut voir dans
celte nouvelle décision de Cjrui qu'un Euljcbianisaïc dégnisé; il
a le jugeiuci
uriied'Mo»
jâHutint qu'il y avait deux volonti^'s et deux opérulions en Jésus-
300 MON
Christ , selon les deux natures qui sont en lui ; qu*on ne pouvait
soutenir que la nature humaine n*avait point d^action sans la dé-
pouiller de son essence , sans Tanéantir et sans la confondre avec
la nature divine^.
Gyrus etSophrone écrivirent pour intéresser, chacun en faveur
de leur sentiment , le plus de monde quUls pourraient , et il se
forma deux nouveaux partis dans TÉglise.
Sergius , patriarche de Gonstantinople , assembla un concile
dans lequel on définit qu*il y avait dans Jésus-Christ deux natures
et une seule volonté *•
Cyrus et Sergius écrivirent au pape Honorius qui, prévoyant les
suites de cette contestation , leur conseilla de ne point se servir
des termes d*une seule volonté ou d'une seule opération , comme
aussi de ne point dire qu'il y a deux volontés ^.
L'empereur Héraclius , autorisé par les conciles que Cyrus et
Sergius avaient assemblés , fit dresser un acte de la décision de
ces conciles, dans lequel il exposait la doctrine des Monothélites,
et qui fut à cause décela appelé Ectèse *.
L'Ëctèse fut reçue par beaucoup de monde dans l'Orient ; mais
elle fut constamment rejetée et condamnée par les papes et par les
évéques de la Bysacène, de la Numidie, de la Mauritanie et de
toute l'Afrique, qui s'assemblèrent et anathématisèrent le Mono-
thélisme.
Héraclius n'avait pas prévu ce soulèvement ; il en craignit les
suites, retira son Ectèse, et déclara que cet édit était l'ouvrage de
Sergius ^.
Cyrus de Jérusalem et Sergius de Constantinople étaient morts ;
mais ils avaient été remplacés par Pierre et par Pyrrhus , deux
Monothélites zélés ; ainsi le Monothélisme se soutenait dans l'O-
rient.
Héraclius ne survécut pas long-temps à son Ectèse , et il eut
pour successeur Constantin , son fils , qui ne régna que quatre
mois; il fut empoisonné par l'impératrice Martine, sa belle-mère,
qui voulait mettre sur le trône Héracléon, son propre fils : le sénat
* Conc. 6, act. il. Baron, ad an. 6Sà.
2 Ibid.
* Conc. 6, acL il. Baron, ad an 634*
* Le mot Ectcsis signifie exposition.
^ Thcophitnc, c 30.
t
MO.^
' dévouvi'il le vrtJLiede riin)iérairice, et lui lit couper la Unique ;onr
coupa le nez i son Gis , el le sénat élut Cooslunt , lils de ConitaR- ]
liu el petit-fils d'Ilérscliu:
Pjrrhus fui snupçoiiiié d'aïoir pariicij'é 4 la conjuraiion de I
Marline; il s'enfuit en Afrique, et l'on <ïlut à sa pUce Piiul, qui
élail encore ud Honolhélite, mais doux el modéré.
CoDâiant voulut soutenir l'Eclèsc ou l'eapoiition de foi de son
aïeul; innis il reçut des députés des conciles d'Afrique, qui lesup-
. pliaient de ne pas permettre qu'on introduisit aucune nouveauté
LdiuRl'Ëglise'.
% Les évéques d'Afrique n'élaiem plus sous la domination de l'enn
Ppereur, les Sarrasins s'étaient emparés de celle province , el ni»-
Aaçaieni sans cesse l'empire de nouvelles invasions.
Le patriarche sentit combien il serait dangereux pour l'empe-
reur d'aliéner l'esprit de ses sujets et de troubler l'empire en les
obligeant de souscrire i l'Ectf^se ; il engagea Consiam ï publier
e formule de foi qui put maintenir la paix dans l'Ëglise : celte J
n été célèbre sous le nom de Type.
f L'empereur déclarjîi, dans ce Type, que, pour conserver dau |
'ïglise la paii et l'union, il commandail ï tous les évéques, prfi
ss, docteurs , de garder le silence sur ta volonié de Jésus-Cbrin
le poînl disputer, ni pour, ni contre, pour savoir si eu Je
il d'j avait qu'une volonté ou s'il j en avait deux *.
Âusiilût que le Type fut connu en Occident , Martin !•■ tii
sembler un concile, composé de ccnlcinq évéques, qui, après a
eiamiaé et discuté l'aOkire du Honotliélisme, condamnërenl (
erreur, l'Eclèse d'Uéraclius et le Type de Conslanlinople '.
Le jugement du concile assemblé par le pape Martin I", ïrriu I
Constant : cel empereur le regarda comme un allentat i son auto- i
rite; il exilaMartinenCbersunése, et Ql élire en sa place Eugjme
Pi ue consentit pas ouvertement à l'erreur des Monuthélîtea; mai
I apoctisiaires furent contraints de se réunir aui Monoiiiélitei,
i diangèrenl de langage et dirent qu'il y avait en Jésua-Cliritt \
e el deux natures.
Tandis que Consiaut luiiaii ainsi contre l'inllexible fermelé dea |
pes et des évéques, les Sarrasins pénétraient de toutes paris ]
'C
I. eâs.
I. uo.
20Î MON
dans Tempire ; et l*empereur, qui n^avait point de forces capables
de résister , était obligé de demander et d*acheter la paix : il
mourut , laissant TÉglise divisée , et Tempire partagé en factions
et attaqué par un nombre infini d'ennemis.
De l'extinction du Monothélitme,
Constantin , fils de Constant , réprima les ennemis de Tempire
et travailla à rétablir la paix et Tunion dans TÉglise. 11 n*y avait
plus aucune communion entre TÉglise de Constant! nople et celle
de Rome. Pour faire cesser ce schisme, Constantin fit convoquer
le sixième concile général , qui est le troisième de Constantino-
pie ; on en fit Touverture la treizième année de Tempire de Con-
suntin, Tan 680.
Les Monothélites y défendirent Tivement leur sentiment, et ils
furent réfutés solidement. Macaire , évéque d*Antioche , défendit
le Monotbélisme avec toutes les ressources de Tesprit et de Té-
rudition, mais cependant pas toujours avec assez de bonne foi : il
protesta qu'il se laisserait plutôt mettre en pièces que de recon-
naître deux volontés ou deux opérations naturelles en Jésus-Christ.
Il justifiait sa résistance par une foule de passages des Pères, qu*on
examina , et que Ton trouva pour la plus grande partie tronqués
et altérés : ainsi la fermeté, ou plutôt Topiniâtreté inflexible, n*est
pas toujours Teflet de la conviction et une preuve de bonne foi
et de sincérité dans les hérétiques.
Le concile, après avoir éclairci toutes les difQcultés des Mono-
thélites , proposa une définition de foi , qui fut lue et approuvée
de tout le monde.
Dans cette définition du sixième concile général , on reçoit les
définitions des cinq premiers conciles généraux : on déclare qu*il y
a dans Jésus-Christ deux volontés et deux opérations , et que ces
deux volontés se trouvent en une seule personne, sans division ,
sans mélange et sans changement ; que ces deux volontés ne sont
point contraires, mais que la volonté humaine suit la volonté di-
vine, et qu'elle lui est entièrement soumise: on défend d'enseigner
le contraire, sous peine de déposition pour les évêqueset pour les
clercs, et d'excommunication pour les laïques. La définition du
concile fut unanime , et Macaire s'y opposa seul * .
'On condamna, dans le concile, Sergîus, Pyrrhus, Paul et le pape
Houorlus, comme Mouothélilcs, ou comme fauteurs du Mouothélisme :
■ MON 3oa ]
^'l.'enip«reur, anssItAl apri» le concili;, lionnaun ôdiicoaire In ^
' noiiuUièliiea ; il pronfln«,'a peine de ilépoïitiun , ou plulQt de
jiiirliilioo contre les clercs cl conlre les moines; celle de proactîp-
lioii et de privatiou d'emplois contio les persunoes conslituùea ei
cli:irgesou en dîgniiiïs, ei celte île banuissenieol de toutes les v!IIm
coritrt! les particuliers.
Jiistinieo , qui succéda i Constantin , couQrma les lois de son
père contre les Uonutlii'>lites; ajanl été cliasié par L£once, et rû-
labli pur TrÉbellius , il voulut se venger des Labitans de CheniH
nËse , qui l'avaient mallraité pendant son exil cliex eux : il en Qt
passer la plus grande partie au lil de l'épèe ; mais quelques-uns
des oranicrs, s'étaiil réfugiés dans le pajg des CLaiari, engagèrent
ces peuples jk les venger, s'unirent ï eux , formèrent une armée ,
attaquèrent les troupes itc Justinieu, les délirent, et proclamè-
rent Pliilippicus empereur.
Pliillppicus marcha Ii Constantinople , où ilne trouva point de
résiïl.Lnce ; il envoya de lit, contre Jnslinien, un de ses généraux,
qui Ml Justiiiien prisonnier, et qui envoja sa tête ï Pliilippicus •. ^
l'liili|i|iicus n'eut pas plus tâl pris possession du IrAne, qu'é-
pouMut hautement lu cause des MoDolhélites, il couvuqua un ,
coonle d'évéques, tous Monothéliies dans le co^ur, et par c
séqiieni Ir^-disposôs ù révoquer le jugement du sixième coQ<
L'empereur fut dctei'miué i ce parti par un moini
qui, s'il eu faut croire Cédrénus , lui avait prédit
parriendrailï l'empire, et qui lui promettait i
heureux
Uonotliélite ,
utrefuis qu'il
'égnelungel
julait abolir l'autorité et le jugement du sixième
ce ilemirr point a été hitn disputé par le* défenseurs de (' infaillibilité
Ou pa|HS Celle diuussion n'est pai de mon sujet ; on la trouvera trailËe
dan» le P. Alexandre, disserl, S in siBCulum 7 i dans ConibeQs, UÎMo-
rio monollu^lillca ; dans Bellarmrn, De summo pontiGce, I. i . c 11
àata Grctter, De tummo ponlilice, lîb. i , capiL 11 ; daus Onuphre
in Uonor.; dans Scholus, lu cud. 30 Dlhllntli. Pbolii. dans Baron;
doni Binioi, in nolfs in vllam et epist. Houorli, pape, hi seilum conci-
llum œcuraenicum t în vilam Agalhoni», pops ; iu vllam Leonis ; daiit
l'élau, Dogm. th., L 5, I. 1, c 19, SI; dans Dupiu, DiM., I. Gj daui
une disacrtatioD sur le Monathâismc, par M. l'abbé Corgne. Les Pro-
ictlans ont Irailé le même sujet. Charnier, t. 1. Forbesiu!, t. t , 1. S.
Spanhcim, liilrod. ad Ili-I. siicrom, I. !. Bnsnoge, HisL de l'Église.
' L'an 71 L
504 MON
concile, et éublir le Monothélisme : le crédule empereur exclu
donc de nouveaux troubles dans TÉglise et dans Tempire , pour
abolir le sixième concile.
La prédiction du moine ne fut pas justifiée par Tévènement ;
Philippicus laissa ravager les terres de Tempire , pendant qu'il
s'occupait des disputes de la religion ; il devint odieux aux peu-
ples ; on lui creva les yeux, et l'on donna Tempireà Anastase, qui
n'en jouit pas long-temps ; il fut détrôné par Théodose, qui le fut
lui-même par Léon , qu'Anastase avait fait général de toutes les
troupes de Tempire.
Ce Léon est Léon Isaurien , qui voulut abolir les images , et fut
chef des Iconoclastes : voyez cet article. La dispute du culte des
images fit oublier le Monothélisme , qui eut cependant encore
quelques partisans , qui se sont réunis ou confondus avec les Eu-
tychiens.
MONTAN, était du village d'Ardaban, dans la Phrygie : peu de
temps après sa conversion , il forma le projet de devenir le chef
du christianisme.
Il remarqua que Jésus-Christ , dans TÉcriture , avait promis
aux chrétiens de leur envoyer le Saint-Esprit ; il fonda sur cette
promesse le système de son élévation , et prétendit être le pro-
phète promis par Jésus-Christ * .
Il est aisé, se disait Montan, de faire voir que Dieu n'a point
voulu manifester tout d'un coup les desseins de sa providence
sur le genre humain ; il ne dispense que par degrés et avec une
sorte d'économie les vérités et les préceptes qui doivent l'élever
à la perfection : il a donné d'abord des lois simples aux Israélites ;
il les a fait observer par le moyen des peines et des récom-
penses temporelles ; il semble que Dieu traita alors le genre hu-
main comme on traite un enfant que l'on fait obéir en le mena-
çant du fouet ou en lui promettant des dragées : il envoya ensuite
des prophètes, qui élevèrent l'esprit des Israélites.
Lorsque les prophètes eurent, pour ainsi dire , fortifié l'enfance
des Israélites , et les eurent comme élevés jusqu'^ la jeunesse ,
Jésus-Christ découvrit aux hommes les principes de la religion ,
mais par degrés et toujours avec une espèce d'économie, dont la
Providence semble s'être fait une loi dans la dispensation des vé-
rités révélées ; Jésus-Christ disait souvent à ses disciples qu'il
< Eu9èb., l 5, c, 16,
MON :
kvraitcncore des choses importantes ^ cur dire, mais qu'ils i
■'ttrent pas encore en étal de lEscnlendre.
A|ir£s les avoir ainsi pri!-parés, il leur promit de leur tayoytft 1
■te Saial-Espril, et il monta au ciel.
' Les apûtre* et leurs successeurs ont répandu la doctrine de Ji'
nu-Chri&t, et l'ont même développée; ils ont, par ce moyen , con-
hit l'Ëglise au degré de Inmi^re qui deraît éclairer les liommn |
^ pour que Jésus-ChrUt envojlt le paraclei , et pour que le I
it-Esprit apprit aux hommes les grandes rérili^ qui étaieo
fréservées pour la maCuriiéde l'Église.
< J'anuoncerai que celle époque est venue , se disait Montan, et ]
Je dirai que je suis lepropLèle choisi par leSaint-Esprilpour :
Mnceraux bommes ces vérités fortes qu'ils n'étaient pas en ^
d'entendre dans la jeunesse de l'Eglise; je feindrai des extases; ]
j*anuoncerai une morale plus austère que celle qu'on pratique ;
_ je dirai que je suis entre les mains de Dieu comme un insirumeat M
it il tire dea sons quand il le veut et ('omm<; il le veut ; par i**]
M qualité de prophète révoltera moins l'amour-propre f
; je ne serai point tenu de justîHer ma doctrine parle J
lojren du raisonnement et par la voie de la dispute ; je ne senl I
u même obligé de pratiquer la morale que j'enseignerai ; tonfc J
"ai mes oracles , et j'aurai dans l'Église une autorité bu* I
Tel est le plan de conduite que l'ambitieux Montan se formt 1
tt qu'il entreprit d'exécuter. Il parut agile par des monvc
oaniordinalres ; plusieurs deceuiqui l'écou talent le prirent pour ■
n possédé ou pour un insensé; d'autres le crurent véri ta blcmei4<1
Ipîré : les uns l'excitaient a prophétiser, tandis que d'autres loi W
lATeDdaîent de parler.
s premiers prétendaient que l'enthousiasme de Honiau a'i-
ttit qu'une fureur qui lui Ûlait la liberté de la raison, ce qui ae
se trouvait dans aucun véritable prophète de l'ancien et du noo»
veau leslament; du moins ce sentiment était conforme ^ fk _
crojance des Pères : les autres, au contraire, souteuaient que la ,
repbétie venait d'une violence spiriiuelle qu'ils appelaient une
« démence; c'était le sentiment de TerluHien *.
. Montan prétendait qu'il n'était inspira que pour enseigner une
< Bpipli,, Hcr. 96.
■ ^uéb., I. S, c. 17; Alliaii., or. &. Tt'vl., De Mori(%amia.
200 MON
morale plus pure et plus parfaile que celle qu'on enseignait et
que Ton pratiquait. On ne refusait point dans TÉglise le pardon
aux grands crimes et aux pécheurs publics^ lorsqu'ils avaient fait
pénitence; Montan enseigna qu'il fallait leur refuser pour toujours
la communion et que l'Église n'avait pas le pouvoir de les absou-
dre. On observait le carême et différens jeûnes dans l'Église;
Montan prescrivit trois carêmes, des jeûnes extraordinaires et
deux semaines de xéropbagie, pendant lesquelles il fallait non-
seulement s'abstenir de viandes, mais encore de tout ce qui avait
du jus. L'Église n'avait jamais condamné les secondes noces;
liontun les regarda comme des adultères : l'Église n'avait jamais
regardé comme un crime de fuir la persécution ; Montan défendit
de fuir ou de prendre des mesures pour se dérober aux recherches
des persécuteurs^.
Les hommes portent au fond de leur cœur un certain sentiment
de respect pour l'austérité des mœurs ; ils ont je ne sais quel plai-
sir à obéir à un prophète ; le merveilleux de la prophétie platt à
l'imagination, et l'imagination, dans les ignorans, prend aisé-
ment des convulsions ou des contorsions pour des extases surna-
turelles ; ainsi il n'est pas étonnant qu'on se soit partagé sur Mon-
tan et qu il ait eu d'abord des sectateurs.
Deux femmes, connues sous le nom dePriscille et de Maximille,
quittèrent leurs maris pour suivre Montan; bientôt elles prophé-
tisèrent comme lui, et l'on vit en peu de temps une multitude de
prophètes montinistes de l'un et de l'autre sexe ^.
Après beaucoup de ménagemens et un long examen, les évéques
d'Asie déclarèrent les nouvelles prophéties fausses, profanes et
impies, les condamnèrent et privèrent de la communion ceux qui
en étaient auteurs.
Les Montanistes, ainsi séparés de la communion de l'Église,
firent une société nouvelle qui était principalement gouvernée
par ceux qui se disaient prophètes : Montan en fut le chef et s'as-
socia dans cette charge Priscille et Maximille.
Les Montanistes pervertirent entièrement l'Église de Thiatire :
la religion catholique y fut éteinte pendant cent douze ans. Les
Montanistes remplirent presque toute la Phrygie, se répandi-
rent dans la Galatie, s'établirent à Constantinople, pénétrèrent
* Tert. dePudicilia, De monogam., Dejejunio,
s Eusèb.. L 5. c. S.
> Eusèb., l. 5, c. d.
H MON
^' jusque ilaoï rArri<|ue pi afduUirenl Trrliillico, (lui s
pouruni d'en ïla lin, mais, à ce qu'il paraît, sans cundamneF
leun erreurs.
Les MonLunisiea s'uccordaienl tous ti recoiinallre qui? le Sninl-
Es|iril »ï»il inspiré Iw apSires ; m»i» iU distinguaient le Saint-
tlspril du parai'Itfi ei disaienl que le paraclet avait inspira Hoit-
lan et ifiU dit par su boucbe des clioses beaucoup plus
«iwllentes que celles que Ji^sua-CliriM avait enseignées dnns l'B-'
HYMgile.
^^^'Celte dîMinction du parailcl et du Saim-Eipril conduisit un
^^■heiplp de Montan, nciuimé Ei'liinrs, ti rélléchir sur 1rs person—
^^■lide 11 Trinité elï reclierilierleiu' dilTârence, et flchinc) lumb*
^^^bts te SabcHianisnie.
^^BC«s d«ux branches se divisèrent ensuile en dilTiïrenles petite*
^MVriélés qui ne différaient que par quelque praiiquf ridicule quâ .
^*ttacun des prophètes prflendaii lui «voir été rtvilée ; ces sect» ^
eurem le sort de toutes les sociétés fondées sur l'enthousiasme Si
séparées de l'unité de l'Ëgliàe : un en découvrit l'iuiposlure, c
lurent odieuses, devinrent ridicules et s'éteignirent. Telles Turr
les sectes des Tascodurgïtes, des Ai^cadurpitcs, des l'u
chites, des ÂrlOlyriles. Les Monlanistcs fuiviil i-undainUcS daitf'f
un concile d'iliûraplcs avec Thi'udoie II' ciirrojeur '. _
Montan luissa un livre de prupliélics ; rriscllle et HaLimUl* J
bissèrent aa»i quelques sentences par éeiil.
HiliSade elApollone écrivirent contre les Muulanîstcs ;
nous reste do leurs ouvrages que quelques fragniens *.
Il était aisé de ruiner toute la doclrine de Uontan.
1° On nu vojait rien dans Uontan qui fût au-dessus des tuttr^ ]
ordinaires des imposteurs ; les convulsions et les etlases no d<-
inandaieol que de l'eiercice et de l'adresse ; elles sont quelque-
fois l'etTei du tempérament; avec une imagination vive et un c»<
prit hihte.^n peut se croire inspiré et le persuader aux aulroli
l'histoire Toumil mille eieuiple^ de ces ioipostureg.
2* Il CEI faux qu'il doive toujours y avoir des proplièlcs dani
l'Ëgliie, ou qu'ils soient nécessaires pour le développement des
vérités du curistiani^mc, puisque Jétius-Christ a prontis k toit
Kitlite de l'iMliltr toujours dt sun esprit.
* Itll^T», Di-aerl. de lucres, ixe. 3, sect. !, c
'■ Etatb., lliïl. GccICï., 1. 5, e, 48.
23.
208 MON
3« Les prophètes annonçaient les oracles divins de cette sorte :
Le Seigneur a dit ; dans Montan, au contraire, c'est Dieu qui parle
immédiatement, en sorte quUl semble que Moutan soit Dieu lui-
même.
4* Montan et ses premiers disciples menaient une vie absolu-
ment contraire à leur doctrine.
5* Ils prétendaient prouver la véàté de leurs prophéties par
Tautorité des Martyrs, et les catholiques leur prouvaient que
Thémison qu'ils regardaient comme martyr s'était tiré do prison
en donnant de l'argent, qu'un autre, nommé Alexandre, n'a pas
été condamné comme chrétien, mais pour ses vols, et qu'aucun
d'eux n'a été persécuté parles Païens ou par les Juifs pour la re-
ligion * .
6* Montan 6tait à l'Église le pouvoir de remettre tous les pé-
chés, ce qui était contraire aux promesses de Jésus-Christ et ^ la
croyance universelle de l'Église ; car, quand il serait vrai qu'on a
quelquefois refusé l'absolution à ceux qui étaient tombés dans
l'idolâtrie ou aux homicides, ce n'était pas qu'on doutât du pou-
voir de l'Église ; c'était par un principe de sévérité dont l'Église
permettait d'user et qui n'était pas même en usage partout *.
7» Montan condamnait les secondes noces et les regardait
comme des adultères; ce qui était contraire à la doctrine expresse
de saint Paul et à Tusage de l'Église.
8* C'est une absurdité de défendre indistinctement à tous les
chrétiens de fuir la persécution ; plusieurs grands saints avaient
fui pour ne pas tomber entré les mains des persécuteurs.
9* Montan n'avait aucune autorité pour prescrire des jeûnes ex-
traordinaires ; il n'appartient qu'aux premiers pasteurs de faire de
semblables lois : ce fut là le motif pour lequel on condamna Mon-
tan à cet égard, et non pas parce que l'Église ne croyait pas qu'elle
ne pût imposer la loi du jeûne : il est certain que ce serait anéan-
tir toute autorité législative parmi les chrétiens que de refuser à
l'Église cette autorité. ^
D'ailleurs la pratique du jeûne et du carême remonte aux pre-
1 Eusèb., Hist ecclés., 1. 5, c 18.
' Sirroond., Hist, pœnit., c i ; Albaspiueus, 1. 2 observ., c il, 15,
17; Morin, 1. 9 De pœnit., c 20, soutiennent qu'on n*a jamais refUsé
l'absolution aux grands crimes, même publics, lorsque les coupables se
soumettaient à la pénitence dans les grandes ^Uses,
MOS ïOftt
■ lQiei'3 temps lie ri^tjlise; riiii u'cst duiiu plu^ iNJuaii; que le r
tocbe qae les l'rol«>UTLs Tout aux MtlioUque& du renouveler
~ :e des HuiiU niâtes en faisaut une lui de rol>6ervBlioD du c
La doctrine même de Monlan prouve que le canïme était étabt»
temps de cet liéré^iarque : ModUi) u'auraii pas prescrit trois I
le une plus graude perfeclion, s'il n'avait trauT^t 1
carême Établi; comme il n'auruit point condamné les &ccondeSi I
ail trouva quelques auteurs ecclésiastiques qui, es [
imbattaDl les Guosiîques, avaient paru désapprouver les secou-
uoees ; de même il u'auraït pas fait une loi de reruser l'absolu*
lion aux grands péchés, s'il n'avait trouvé dans l'histoire quelques
faits par lesquels il paraissait qu'où avait refusé dans quelques
circonstances de réconcilier ceux qui étaient tombés dans l'iiloU-
Irie : l'esprit humain ne fait jamais de sauts dans la suite du se»
erreurs, ni daus la découverte des vérités soit pratiques, soit apA-
culaiites.
MOSCOVITES, Russes ou Roxol*;is, étaient sans arts, sam '
sciences et plongés dans le Paganisme le plus grossier, sous j^J
règne de Rurik qui commeoga l'an 16% Les guerres et les liaîsi
de ces peuples avec les empereurs grecs j firent eonnatlre la r&tS
ligîon chrélicDDe et vers la lin du dixième siècle, Wolodirn' '
Uraiid-duc des Moscovites, se fil baptiser et épousa la i
'~ Bpereurs Basile et Constantin.
Les annales russes rapportent <)ueWolodimir, avant sa convef*!
était adorateur zélé des idoles dont la principale se uommailq
Perum : après son baptême, il la fît jeter dans la rivière.
Le pairiarcbe de Consianiinople envoya eu Russie un mctroptH
lî[e qui baptisa les douze Gis de Walodîmir, et, daus un sctit^
jour, vingt mille Russes.
Wolodimir fonda des églises et des ëcole.t; il parcourut ensuite
■es Etats avec le métropolite pour engager les peuples h embras-
ser le christianisme : plusieurs provinces se convertirent cl d'au-
persistèrent opiniâtrement dans l'idolAtrie.
Depuis ce temps, la Hoscovie a toujours conserva snns inter-
itiou la religion chrétienne grecque. Les grauds-ducsont plu-
lois tenté de se réunir k l'ttglise romaine : ce projet se r»'
la en 1717, lorsque leoar Pierre-le-Grand vint eu Frauca
■ÎHÎs il fui sans elTet, L'occusiou de ce projet, le inémoi.
itcurs de Sorbonne el la réponse des évéïincs do Hosc
18*
210 MOS
trouveul dans l« loiue 3 de TAualyse des ouvrages de M. Bour-
sier, imprimés en 1753, et dans le tome 2 de la Description de
Fempire de Russie, imprimée en 1757.
Le christianisme ayant fait de grands progrès depuis Wolodi-
mlr> le nombre des archevêques s*est augmenté jusqu'à sept.
Quoique les Moscovites aient reçu la religion des Grecs, ils ont
fait quelques changemens dans le gouvernement ecclésiastique et
même dans la doctrine.
Du gouvernement ecclésiastique des Moscovites,
Les Moscovites reçurent des Grecs la religion chrétienne : le
patriarche de Gonstantinople établit un métropoUiain à Novogo-
rod , et dans les autres villes des évéques et des prêtres * .
Le métropolitain de Moscovie fut déclaré patriarche de toute
la Russie , en 1588, par le patriarche de Gonstantinople, et de-
puis ce temps il y a eu des patriarches en Russie qui ont été re*
connus parles patriarches d'Alexandrie, d'Anliocheet de Jérusa-
lem , et qui ont joui des mêmes honneurs qu'eux ; mais il fallait
qu'ils eussent le suffrage de ces patriarches et qu'ils fussent con-
firmés par celui de Gonstantinople.
Un patriarche de Russie , nommé Nicon , représenta au czar
Alexis Michaêlewitz qu'il était inutile d'élire dorénavant un mé-
tropolitain avec les suffrages des patriarches orientaux , et d'en
faire venir la confirmation : le czar approuva le dessein de Nicon »
qui écrivit au patriarche de Gonstantinople qu'il avait été élevé à
sa dignité par le Saint-Esprit , et qu'il ne convenait pas qu'un pa-
triarche dépendit de l'autre ; il changea en même temps de titre »
ei au lieu que ses prédécesseurs s'étaient appelés très-sanctifiés ,
il prit le titre de très-saint.
Nicon augmenta le nombre des archevêques et des évéques, et
fonda quatre grands couvens , pour lesquels il eut l'adresse d'a-
masser des biens immenses , et qui lui servirent à entretenir ses
quatre métropolitains, douze archevêques, douze évéques, ei
quantité d'autres ecclésiastiques qu'il créa.
Nicon , après ces établîssemens, changea les lois ecclésiastiques
en les tournant ^ son avantage , sous prétexte que les anciennes
traductions étaient remplies de fautes , ce qui occasiona dos dis-
putes et des schismes dans l'Église de Russie.
1 Description de Tempire de Russie, par le baron de Stralembei-g ,
L 2, c, 9. Religion des Moscovites, c. i.
MOS
IAprËi STuir téîotmé lui, luis de l'Église , ^ico1J préU'Julil
•fance avec le czar dans le sénat et donuer sa voix pour rad(iiini»«l
tntioD de l'Ëiat, surlout dans les affaires de justice et lorsi|ii'S|IJ
rf^agisfiait (le Taire de nouielles lois, aaus prétexte que le palrlarekfl 1
nilarel avait joui de ces mèmesdrùilselaTaUcu uaees|iËce iTut- f
ipeclioo (jénénte sur l'Ëlat.
' 11 représenU ensuite nu cuir qu'il ne lui courenail pas de di^do^ I
Kr la guerre ï ses loisiiis ni de Tuirc la paix avec eux sans cuiE= I
Niller son patriarche , dont le devoir était d'avoir soin du sah^' j
du prince et de toute la nation , qui devait rendre compte à Dlek T
de touiea les Smes dr l'Ëtat , et qui était mlmK capable d'assi.
V czar par ses saints conseils; mais on découvrit dans la suite
>tir de cette deruière représentai! ou était qu'il avait
es considéra bli^s du roi de Pologne pour Licber de tr
sr l'État par son autorité , et d'un autre cAté pour satisfaire
ftnbllion et son orgueil.
:et les sénateurs répondirent i Mctmquc si le patriarche I
niant avait été consulté |>our les afTaires lempnretles , on ne IVj
]t pas Hh \ cause de sa dignité ecclésiastique , mais parce q
tait père et tuteur du «ar ; i(u'il avait été auparavant lui-n '
'uletir, employé dans l'ambussade de Pologne et mieux v
m lea antres sénateurs dans les affaires étrangères ; que dq;
hlUret OD n'avait jamais consulté les patriarches sur les a~ ~
imporelles; qu'aucun de ses prédécesseurs ne l'avait cti|^
tafimepareillcnouveaulé ne pouvait tendre qu'i la raine de l'ËI
ne voulut rien reliclier du ses prétentions ;
la plusieu» sénateurs , noua mille inirigues , cicita le peupfs
^révolte. La disette, devenue générale dans la Russie, Ta
n desseins; le peuple, luéconlent depuis long-temps et ai
le misère, se souleva, et le fitu de h rébellion nu lut éteint q
If le ung des Huscovîtes.
Lepeupleétait rentré dans le devoir, mais le patrîarclie u*él
"a rMuil : il iw voulut rewmcer il aucune de ses prétentions ,
n'osait employer contre lui la violence et la force ; le pei
était déjt disposé il la révolte , et le factieux Nîcon avait si
4aiii«MtDléréiiun grand nombre de sénateurs niéeoutcns,
^■h r«ptoBger l'I^at dans d
r Alexis résolut de terminer c<
désordres.
diffère
t par un synM
nt : on fit venir de Grèce , aux dépens de l'Etat , (rois p
îriarcbett , vingt-n'jil aretievéfines et cent dix UUlreN |irdats , :
212 MOS
quels ou joignit cent cinquante ecclésiastiques de Russie (en 1667).
Le synode, ayant reçu et examiné les plaintes du czar, ordonna :
1* Que Nicon serait dégradé de sa dignité et renrermé dans un
couvent, où il vivrait au pain et à Teau pour le reste de ses jours;
2« Que le patriarche de Russie serait élu , non pas séparément
par les archevêques, les évéques et le clergé, mais, conjointement
avec eux, par le czar et le sénat , et qu'au cas qu*il manquât à son
devoir, soit en se rendant coupable de quelque vice grossier ou
autrement, il serait jugé et puni par le czar et le sénat, selon qu'il
le mériterait ;
3* Que le patriarche de Gonstantinople ne serait pas regardé
comme le seul chef de TÉglise grecque ; qu'on ne lui tiendrait
pas compte des revenus des décimes de Russie , et qu'il serait
libre au czar de lui en accorder autant qu'il le jugerait à propos;
4* Que désormais il ne serait permis à persoune de vendre , de
donner, ni de léguer ses biens aux couvens ou à d'autres ecclé-
siastiques;
5« Que le patriarche ne créerait point de nouveaux évéques ni
ne ferait aucune nouvelle fondation sans le consentement du czar
et du sénat.
Les décrets du synode n'arrêtèrent point les projets ambitieux
des patriarches , et le czar Pierre>le-Grand éteignit cette dignité ;
il substitua au patriarche , pour le gouvernement ecclésiastique ,
un synode toujours subsistant, fondé sur de bons règlemens, et
muni d'instructions sufiisantes pour tous les cas qui pourraient
arriver.
Ce synode ou collège ecclésiastique est composé d'un président,
dignité que le czar s'est réservée pour lui-même ; d'un vice-prési-
dent , qui est un archevêque ; de six conseillers , évéques ; de six
archimandrites , en qualité d'assesseurs.
Lorsque quelque place de président ou de conseiller vaque, le
synode et le sénat nomment deux personnes, et le czar choisit et
confirme celui qui lui platt. H y a aussi dans ce synode quelques
membres temporels , comme un procureur général , un premier
secrétaire et quelques secrétaires en second.
Lorsqu'il s'agit d'affaires d'importance , il faut les porter de-
vant le czar , dans le sénat , où , en pareil cas , le synode se rend
en corps et siège au-dessous des sénateurs. Le synode a aussi
sous sa direction son bureau de justice , sa chambre des finances
et un bureau d'instruction sur les écoles et sur l'imprimerie.
ILe clerijij de Ruseii
KrchevéïJLie cl quelque
Lesarcbimaudrilea
Ipiil pri:|iosés.
tMcF
qn,
t tenl élevéctchti tn UotcovUet.
Il s'est déladié de l'Ëglise de Russie une certaine secio qidf 1
lelle Sterawersî , ou les anciens fiilèlts , el qui donne ai
tHs Russes le nom do iloscolcbiki, c*eat-â-d!rE liériMIquei : cpltS j
lecie ne s'etl séparée loul-à-rsil que dsus le seiziëine siècle, sot»
le patriarche Nicoii , mais elle a existé long-temps auparavant.
La plupart de ces seciairei ne «avent ni lire ni écrire, cl ce sont
presque lousdeaimurgenifieides paysans d'une grandesimplicilé:'
ils n'ont point d'églises publiques, et ils lienricul leurs iissembiéM '
dans des maisons particulières,
La différenceentrei^ux et les autres Russes, quant ï lu crorance^. J
consiste dans les articles suivans :
!• Ils prétendent que c'est une grande faute de dire tj
aUtluia, et ils no le disent que deux fois.
S* Qu'il faut apporter sept pains à la messe au lieu de t
3* Que la croix qu'un imprime sur le pain di> la messe doit ûtiS' 1
I carrée, parce que la Iravei'se qui a soutoiil ']
ilre-Seigneur i la cruin a été de cette figui'e.
4' Qu'en faisant le signe de ta croix , il ne fiiul pas joindre le
premien doigts, comme font les autres Uusses, muisqu'i
it joindre le doigt annulaire et le doigt auriculaire au )iDuee, p«
eilrimilés , sans courber le doigt index ni le doîgt du milÎM
les trois premiers représentant la Trinité cl les deux derniers J ~
siis-Cbiist selon ses deux natures , comme Dieu el liomme.
5' Que les livres imprimi.^ depuis le patriarcLe Nicon no
pas Être re<;us , maïs qu'il faut suivre les andeus et regarder
comme l'Anieubrist.
Sur quoi il faut remarquer que ks livres composés depuis lo
' irdie Nicon ne changent rien dans la doctrine, mais expli-
quent seulement queliiues mois obscurs.
fi* Comme Ips prêtres russes bniveul de l'cau^de-vie , ils
croient Incapables de baptiser, de confesser, de communier.
'egardenl pas le gouvernement temporel comm
ien , cl Ai prêlcndeul que tout doit Être par
mmu entre fi-Êrv».
a t.
^V&ir
^■pttriai
214 MOS
8* lU soutiennent qu*il est permis de s'ôter la vie pour l'amour
de Jésus-Christ, et qu*on parvient par-là à un degré plus émi-
nent de béatitude.
Ils croient tous ces articles très- nécessaires pour le salut, et
lorsqu'ils sont recherchés pour leur croyance ou qu'on veut les
forcer à suivre la religion russe , il arrive souvent qu'ils s'assem-
blent par familles de quatre ou cinq cents dans leurs maisons ou
dans des granges, oti ils se brûlent vivans, comme cela arriva dans
le temps que M. le baron de Stralemberg était en Sibérie , oU
plusieurs centaines de Sterawersi se brûlèrent volontairement.
Les Sterawersi regardent les autres Russes , et généralement
toas ceux qui ne sont pas de leur sentiment , comme des impurs
et comme des païens : ils fuient leur conversation et ne mangent ni
06 boivent avec eux dans les mêmes vases. Lorsque quelque étran-
ger est entré dans leur maison , ils lavent l'endroit où il s'est as-
sis; les plus zélés balayent même l'appartement lorsqu'il est sorti.
Ils prétendent autoriser toutes leurs pratiques par des livres de
saint Cyrille, qui sont manifestement supposés, mais dont on ne
peut détacher ces seclaiies superstitieux , d'autant plus opiniâtres
qu'ils se piquent d'une plus grande régularité et qu'ils sont plus
ignorans encore que les autres Russes.
Pierre-le-Grand crut qu'en les éclairant on les convertirait plus
sûrement que par les rigueurs , qui avaient déjà coûté à l'État plu-
sieurs milliers de sujets ; il ordonna qu'on les tolérât , pourvu
qu'ils n'entreprissent point de communiquer leurs sentimens, et il
enjoignit aux évéques et aux prêtres de tâcher de les ramener à la
vraie doctrine par des sermons édifians et par une vie exemplaire.
Des religions tolérées en Moscovie.
Pierre-le-Crand établit une pleine liberté de conscience dans
ses Ëtats ; ainsi toutes les religions chrétiennes , le Mahométisme
et même le Paganisme, sont tolérés.
La religion luthérienne est, après la grecque, la plus étendue;
car, sans parler des provinces conquises , comme la Livonie , l'Es-
thonie et une partie de la Finlande ou la Carélie , il y a deux
églises luthériennes à Pétersbourg , deux à Moscou et une à Bel-
logorod , sans compter les assemblées particulières , dont il y en
I une elles chaque général étranger, qui ont tous des ministres
attache^ à leurs hôlcis.
MIS
Tilte de Tobolsk . ci im «erci
l'uv que |iuur rËducïtJuri de li
el écoles lulhèi'ienneï de Itv
Héiiénl demeuraol i Moscou,
m leur église piibiii|nc daiis la
libre de leur reli){ioti , iddI pour
> enfaDs. La direi^linii des église»
i est confiée ï un sui'iiileiidani
i deux autres lurbileiidana âia-
bliE , l'un en Lîvooie , el l'autre dans IT^lliome.
I«a calvinistes el les catholiques romains ont aussi du églises
publiques h Pétersbaurg et & Moscou, mais il eil d^rcndu i cm
derniers d'attirer indin'éremmeDt daus le pavs touiei sortes de if
tigieux.
Les A.nnémeDSODt une église publique et nnévfajuei Astractin.
Les UalioiDËtansrontuDirentitTnc de la Russie; ils ont partout,
dans les ailles et villages oti ils demeurent , leurs assemblée» et
leurs écoles publiques ; ils vont en toute liberté aui lieux consU'
très i leur dëvotioa, comme ils Teratenl k la Mecque, I Hé-
dine, tte. On leur permet la polygamie et tout autre usage de
leur religion.
Les Païens sont trois fois plus nombreux en Russie que les
Haliométaoft , mais ils diQËreni considérabl émeut enlre eux quant
au culte et aux cérémonies de religioo.
Ces Païens , malgré leur ignorance , sont naturellement boni.
On ne «oit cliez eux aucun libertinage, ni vol, ni parjure, ni ivro-
gnerie, ni aucun vice grossier : il est très-rare de trouver pirml
eux aucun bomme qu'on puisse en accuser. Ou voit parmi ei
actions de probité , de désinléressemeiit el d'iiumanilé que noua |
admirerions dans les philosophes anciens: on se trompe dona I
lorsqu'on prétend que les hommes sortent des mains de la naluK
ctufIs el avares *.
a donné il certains liéréliques
es a ainsi appelés, parce qu'il»
prétendent que la mntii pli cation des hommes est m'«es$air« cl
odionnâe ; ils se sont confondus avec les Anabaptistes.
UUKTZEIt ou HcTiSTas ( Thomas), prêtre, né i Zuikur, ville
^ la Miwiie, province de l'Allemagne, en Saxe. Vi^h l'article
^^^iumisTEs, dont il fut le chef.
^KmUSCULIIS (Ajidré), était Uthérien et professeur en théologie
• Description de l'empire rus^en , i. 3, c. fl. Vai/fc aussi la religion
le ei moderne des Mnscuiiln, petit in-13| avec des lifcuret de
ard ; la Itelntion de* trois nmlinsiadra, el le Vo^nttc d'OléaritM,
216 NAZ
à Francfort sur TOder; il prétendit qae Jésus-Clirîsi n*avaît été
médiateur qu^en qualité d^homme, et que la nature divine était
morte , comme la nature humaine , lors du cruciOement de Jésus-
Christ. 11 enseignait que Jésus-Christ n'était point eiïectivement
monté au ciel , mais qu'il avait laissé son corps dans la nue qui
Tenvironnait : on ne voit pas qu'il ait formé de secte.
11 avait imaginé ces erreurs pour combattre Staular, qui pré-
tendait que Jésus-Christ n^avait été médiateur qu'en qualité
d'homme, et non pas en qualité d'homme-Dieu. Musculus, pour
le contredire , prétendit que la divinité avait souffert et qu'elle
était morte ^.
N
NAZARÉENS. Ce nom, qui a d^abord été celui dos chrétiens,
est devenu ensuite celui d*une secte particulière de Juifs , qui
voulaient qu'on observât la loi de Moïse, et cependant qui hono-
raient Jésus-Christ comme homme juste et saint, né d'une vierge
selon quelques-uns d'eux , et selon d'autres de Joseph.
Moïse avait donné une loi aux Juifs , et prouvé sa mission par
des miracles; Jésus avait annoncé une loi nouvelle, et prouvait
aussi sa mission par des miracles : les Nazaréens conclurent qu'il
fallait obéir à Moïse et à Jésus-Christ , observer la loi et croire
en Jésus-Christ.
Ils eurent le sort ordinaire des conciliateurs ; ils furent ex-
communiés par les Juifs et par les chrétiens , qui voulaient exclu-
sivement être dans la vraie religion.
Les Nazaréens , au contraire , persuadés que la vérité ne pou-
vait se contredire, assuraient que les Juifs et les chrétiens alté-
raient également la doctrine de Moïse et celle de Jésus-Christ.
A l'égard de la doctrine de Moïse , disaient-ils , il est clair
qu'elle a été corrompue, et que les écrits qu'on nous donne comme
venant de Moïse n'ont pu être composés par lui. Croira-t-ou en
effet qu'Adam , sortant des mains de Dieu, se soit laissé séduire
par une fausseté aussi grossière que celle que raconte la Genèse ?
Croira-t-on un livre qui fait de Noé un i\Togne, d'Abraham et
de Jacob des concubinaires et des impudiques ?
^Hospin., Hist. sacram., part. 28, p. /i93, en 1511 ; PratéoK, iiu
Muscolus,
NAZ
aiT
~ loiltipen dam ment de ces ftiisseté*, disaient les Nai^fL-eiis. Iva
livres altribiii^s il MoTse ont des caniclères évident de supposilion,
et qui ne permcllrnl pM de duuler qu'ils n'aicni été écrits après
Moite. Od lit dans ces lïvrrs que Holse mouml , qu'on l'ensevelit
proche l'Logor , et que personne n'a trouvé Min tombeau jiisqu'fi
ce jour; n'est-il pas évident, disaient les Nazaréens, queHoIso
n'a pu écrire ces choses?
Cinq cents ans après Moïse , on mit la loi dans le temple ; elle
y est restée cinq cents ans , et elle a péri par les Oamroea lors-
que Nabuchodonosor a détruit le temple ; cependant on l'a écrite
de nouveau : nous n'avons donc pas eneclircment les écrit) da
Muise ; il faut donc sur sa doctrine s'en tenir à ce qui est certain
par les faits , c'est qu'il a Tait des miracles et qu'il a donné uno
loi ; que par conséquent celte loi n'est pas mauvaise , comme li's
chrétiens le prétendent '.
Nous ne connaissons pas mieux la doctrine de Jésus-Christ ,
K^tuienl les Nazaréens ; car nous la connaissons p^r les apôtres,
fck Jéaus-Cbrisl leur a reproché souvent qu'iU ne l'entendaient
Dans l'impossibilité de trouver la vérité dans les eiplicaiionB 1
des chrétiens et dans celles des Juifs , quel parti prendre?
Celui de n'admettre que ce qui est inconlealable et avoué par "1
lesdeni partis , savoir : que Hoise était envoyé de Dieu, et que It 1
donnéeestbonne;que Jésus-Christ est FilsdeDi
Pourfalrescntir la raiblessc des dilTicullés qu'on oppose É Tau tbeu- l
ticitéduPcnlaieuquF, nous remarquerons que le Pcnlaleuquerearcrnw I
trois sortes de choses par rapport au lemps: des Tails arrivés avant
Moïse, ûm faits arrivés pcadanl sa vie, et enfin des laits arrivés après si
A l'égard desdeuiprcmièrcsesptcesdefaili, il cit bien prouvé qu'ils
ont été écrits par Moïse 1 et i l'égard dp «eu» qui ont pu lieu après sa
mort, n'e«-llpaspossibleqn'll les ait écrit* parun esprit de prophétie?
Hcfse u'a-t-il pas prédit beaucoup de choses aui Juifs?
Quand il serait vrai qu'on eOt ajoiilé au Pcntaleuque l'bistoire de la
mort de MoIie, n'cM-il pas égatemeul injuste et déraisonnnble d'en
conclure que le Pcnialeuque a élè corrompu î Jugera^t-on que l'Iliade
—B'ert pat l'ouvrage d'Homère parce qu'il se scm glis^ dans ce poime
rangé re
F Tous les commentateurs de l'I^cri
itr*«oln
^S dinicult^'S.
218 NAZ
qu'il faut le croire » se faire baptiser et observer sa morale , être
juste, bienfaisant, sobre , chaste, équitable *.
Les Nazaréens furent rejelés et condamnés par tous les cliréiiens;
ce qui prouve que, duns ce temps-là, non-seulement TLglise croyait
la divinité de Jésus-Gbrist, mais encore qu^elle regardait ce dogme
comme un article fondamental de la religion , et M. le Clerc en
convient *.
Cest par ces actes de séparation qu'il faut juger si TÉgllse a
regardé un dogme comme fondamental , et non pas par quelques
eipressions échappées aux Pères , et dont ils ne pouvaient prévoir
Tabus.
Cest donc sans aucun fondement et contre toute vraisemblance
que Toland se sert de Texemple des Nazaréens pour prouver que
la doctrine chrétienne n'était pas h sa source ce qu'elle est à pré-
sent , prétendant que les Juifs qui avaient ouï TËvangile de la
propre bouche du Seigneur n'avaient reconnu en lui qu'un sim-
ple homme , ou tout au plus un homme divin , le plus grand de
tous les prophètes ^.
M. Mosheim a écrit contre le Nazari^cn de Toland, et, pour le
réfuter plus sûrement, il sape le fondement de sa diflicullé; il
soutient que les Nazaréens sont une secte du quatrième siècle.
Les Juifs, selon Mosheim, voyant la prospérité des chrétiens
depuis la conversion des empereurs , commencèrent à croire que
Jésus-Christ était le Messie : il avait délivré de l'oppression des
Païens ceux qui avaient embrassé TËvangile ; il renversait de
toutes parts les idoles , et ces succès , joints à l'abaissement dans
lequel se trouvait la nation juive , persuadèrent à quelques Juifs
que Jésus était efiectivement le Christ; mais ces sectaires ne re-
çurent le christianisme qu'à demi ; ils gardèrent leurs cérémonies
et ne reconnurent ni la préexistence , ni la divinité du Seigneur :
voilà, selon M. Mosheim, l'origine des Nazaréens.
La principale raison qui a déterminé M. Mosheim à s'éloigner
du sentiment de saint Ëpiphane et de saint Jérôme sur Tancien-
t Ex HomiL Clem 2 et 3. Êpiph. Aug. Hier, in Isaiam, c. 1. Théo-
duret, Heret. Fab.» 1. 3, c. 1, art« 2.
3 HisL ecdes.
> Toland, dans le livre intitulé le Nazaréen, ou le Christianisme
judaïque, païen et mahométan , etc., dans lequel on explique le plan
orij^nnal du christianisme par rîiisto'u-c des Nazaréens,
rouve ni Hsns m
li dans EtiSL'be'.
is maniiue une grnnile
c ((ui sufGl pour qii'oi
!NAZ
aetë (Im Nuaréeni, c'rsl qu'on ne Ips
ai dans Tertullien , ni dans Origâne ,
M. (le BesuBobre a répondu , i* qu'il
quantité des ouvrages de ces Pères ,
puisse pas assurer qu'ils n'uni poinl parlé des NaxuriVns. I
lippe I dont U. Hosheioi oppose l« silence ■ ne parle ni des I
Dites, ni des CériniLiens ; en conclura-i-on qu'ils n'exifl:
poiui de son temps F
S" Pour savoir ai les Ptres qui ont pr^ci^di^ uinl Ëpiplinne
tainl Jérûme n'ont point parli- des Nazaréens , il ne faut pat k
lenient examiner s'ils les ont nommés ou non , mais s'ils ont n
porté leur doctrine, s'ils ont parlé d'une secte qui proressait Isa
dogme de» Nazartiens; et c'est ce qu'on ne peut révoquer m]
doute.
Saint Justin insinue qu'il y avait mènje de son temps ileu
^JM du chrétiens-juifs, entre lesquels il met une grunde diffij
B""»' ■
^^ «Origine dit: quand vona coniidèreroz liien quelle e
> des JuiCk lourhant le Sauveur ; qne tes uns le croient
> Joseph et de Marie, et que les autres, qui le croient !i la vérité
> fils de Msrie et du Saini-Elsprii , n'ont point de sentimens or-
■ thodoiet sur sa divinité ; quand, dis-je, vous ferez réflexion
( Ik-dessus , vous comprendrez comment un aveugle dit il Jiïsui : J
> Fils de David , ajez pitié de mi
11 ne parait donc pas que M. Moshein ait été autorisé à a'écar- ^
ler du sentiment de saint Ëpipbans et de saint Jérôme si
ctenneiA des Nasaréens . et cela n'était pas nécessaire pour réruter
ToliDd , comme nous l'avons fait voir : les théologiens anglais ont
écrit contre Toland et l'ont irès-bien réfuté '.
Tout le monde sait que les Nazaréens avaient leur Évangile
écrit en hébreu vulgaire , qui est appelé tanlût l'Ëvangite dus
douze ap6ires , taniât l'Ëvangilc des Hébreux , lantùl l'Évangile
mIod saint Matthieu. On a besueoup disputé.
■a disciplina
1. (, c 0.
■ ■ Drnusobrp, Disietl. sur If! NnziirÉen!, h la 4i
Eucrrc des Russitei.
'Thomas Maugel, Hemirquc) sur le Naiar
n. Paterson, Auti- I
220 NES
temps , pour savoir si cet Évangile élail roriginal de saint Mat-
thieu et si le nôtre n*en était qu'une copie ^«
NESTORIANISME , hérésie de Nestorius qui niait Tunion
bjposta tique da Verbe avec la nature humaine et supposait deux
personnes en Jésu8-:Ghrist.
La religion chrétienne a pour base la divinité de Jésus-Christ
ou Tunion du Verbe avec la nature humaine.
Celte union est un mystère » et la curiosité humaine s'est pré-
cipitée dans mille erreurs lorsqu'elle en a voulu sonder la pro-
fondeur.
Ainsi on vit Paul de Samosate soutenir que le Verbe uni à la
nature humaine n'était point une personne ; les Manichéens
imaginer que le Verbe n'avait point pris un corps humain ;
Âpelle croire que Jésus-Christ avait apporté son corps du ciel ;
les Ariens prétendre que le Verbe, uni à la nature humaine , n'é-
tait point consubsiantiel à son Père.
Enfin , Apollinaire avait pensé que le Verbe était consubstan-
tiel à son Père; mais il avait enseigné qu'il n'avait pris qu'un
corps humain seulement , en sorte que la personne de Jésus-
Christ n'était que le Verbe uni à un corps humain.
L'Église avait triomphé de toutes ces erreurs ; elle enseignait
que le Verbe était une personne divine, consubstantielle au Père,
qui s'était non-seulement unie à un corps humain , mais encore
à une àme humaine.
La nature divine et la nature humaine étaient donc tellement
réunies en Jésus-Christ , qu'il prenait tous les attributs de la di-
vinité et qu'il s'attribuait toutes les propriétés de l'humanité;
ainsi le Verbe était uni à l'humanité dans Jésus-Christ, de manière
que rhomme et le Verbe ne faisaient qu'une personne : ce dogme
était généralement reçu dans l'Église.
Mais, en combattant Apollinaire, quelques auteurs avaient
avancé des principes contraires à cette union.
Apollinaire, comme nous l'avons déjà remarqué, prétendait
que le Verbe ne s'éuit uni qu'à un corps humain et que Jésus-
Christ n'avait point d'âme humaine , parce que le Verbe lui en
tenait lieu et en faisait toutes les fonctions dans la personne de
Jésus-Christ.
* Dup., Dissert prélim., 1. il, c. il, art 3, p. 23. Simon, Hist crit,
^n nouveau Testament, c. 7, p. 7i. Beausobre, loc dt. Le acre, HisU
is., art. 73, 103. Ittigius, De haeres.
tNES 221 I
Théodore de Hopsuesie, pour combatlre Apollinaire, nvait cher- 1
ebé dans l'Ëcrilure loul ce qui pouvait établir que Jéaoi-Clirist ]
nsil une ime humaiae distinguée du Verbe.
En réunissant toutes les actions et timies les aOcctioas qaa
l'Écriture attribuait i Jésus-Clirisl, il avait cru en trouver qui i
supposaient qu'il y avait dans Jésus-Cbrist une Inie liumaine, et \
que \'ime humaine était seule le principe de ces actions et de i
ces aOeciioDS : telles sout , entre autres, la naissance et les souf- ,
francM de Jésus-Cbrisl.
De là , Théodore de Mopsuesle avait conclu que IcsuS'Chriït
irait, non-seulement ime Sine humaine, mais encore que cette
Ame était distiogui^ et séparée du Verbe , qui l'iaslruisait et la
dirigeait; en sorte que le Verbe Labitait dans l'iiouime comme
dans un temple et n'était pas uni autrement h l'âme humaine.
Cependant Théodore du Uopsuesio reconnaissait que celte union
était indissoluble , et que le Verbe uni 1 t'ânie humaine ne faisil^ J
qu'un tout; en sorte que l'on ne devait pas dire qu'il y eût deu^ I
fils de Dieu ou deux Jésus-Christs. Ê
Le zèle dont on était animé contre l'hérésie d'Apollinaire j Ikl
■tpuUtioo de Tliéodore de Mopsueste, illustre dans l'Orient para
s (t'épiscopat consacrés à combattre les hérétiques, uftfl
mirent pas alors d'examiner scrupuleusement les principes dM
Uévéque, ou d'en prévenir les conséquences, et ses disciple» 1
irent ce qu'il avait écrit contre Apollinaire comme une doo- |
e pure et exempte d'erreur. I
i Théodore de Uopsuesle avait donc jeté dans l'Église desprinci-
M diamâtralcment opposés au dogme de l'union hjpostatique du
bcavec la nature humaine; et ces principes, pour former une
velle hérésie, n'attendaient, pour ainsi dire, qu'un disciple de
Tliéodore de Mopsueste qui les développât et qui en tirAt des con-
(équences opposées aux couséquences que l'Égli^ lirait de l'union
bvpostalique ; car ce sont ordinairement ces conséquences qui
rapprochent en qui^lque sorte les principes et qui les mettent as-
E près les uns des autres pour en rendre la contradiction pal-
Nestorius fut ce disciple, et voici comment Nestor
i conséquences qui di'truisaient le dogme de l'u
is fut conduit
lion hypost»-
LÉglis.
le l'hominc et le Verbe ne faisaient qu'une per- J
933 NES
sonne : en conséquence de celle union, on pouvail non-seulement
dire que Jésus-Christ était homme et Dieu» mais encore qu*il était
un Dieu-homme et un homme-Dieu ; ces expressions étaient les
plus propres à exprimer Tunion hyposla tique du Verbe ayec la
nature humaine, et c*était un langage généralement établi dans
1 Église.
Par une suite de cet usage, on disait que la sainte Vierge était
mère de Dieu : cette manière de parler n*avail rien que de con-
forme à la foi de T Église sur Tincarnaiion ; elle est même une
conséquence naturelle et nécessaire de Tunion hyposla tique de la
nature humaine avec le Verbe.
Mais cette manière de s'exprimer est choquante lorsqu'on la
considère indépendamment du dogme de Tunion hypostatique et
que Ton n'est pas bien convaincu de la vérité de ce dogme. Un
Dieu qui souffre et qui meurif voilà une doctrine qui paraft ab-
surde toutes les fois que Ton considère ce dogme indépendamment
de Tuniou hypostatique : on craint de retomber dans les absurdi-
tés que les chrétiens reprochent aux idolâtres et aux païens.
C'est sous cette face que ces manières de parler devaient s'offrir
à un disciple de Théodure de Mopsueste, et ce fut en effet sous
cette face que Neslorius les envisagea ; il crut que ces expressions
contenaient des erreurs dangereuses.
Lorsqu'il fut élevé sur le siège de Constantlnople, il combattit
ce langage et l'union hypostatique qui en était le fondement ; sa
doctrine n'est que le développement des principes de Tliéodore
de Mopsueste dont il fit un corps de doctrine qu'il faut bien en-
tendre pour le réfuter solidement.
Principes du Nestorianisme»
On ne peut, disait Neslorius, admettre entre la nature humaine
et la nature divine d'union qui rende la divinité sujette aux pas-
sions et aux faiblesses de l'humanité, et c'est ce qu'il faudrait re-
connaître si le Verbe était uni à la nature humaine de manière
qu'il n'y eût en Jésus-Christ qu'une personne : il faudrait recon-
natlre en Jésus-Christ un Dieu né, un Dieu qui devlont grand, qui
s'instruit.
J'avoue, disait Neslorius, qu'il ne faut pas séparer le Verbe du
Christ, le fils de l'homme de la personne divine : nous n'avons
pas deux Christs, deux Fils, un premier, un second ; cependant
■
^Flv Atvi ntUirei qui forment ce FiU sonl Irès-dislingui.^s cl us |
^m fuufeal jaiuaU se lonroiidrc.
^^ L'Ëcriture disûngue expressi^ment ce qui contient au Fils et M '
^^Upi convient au Verbe ; lorsque siinl Paul parle de J^sus-Clirist, '
^^H dit : Dieu a envoyé ton Filt, fait d'une femme ; lorsque le niinB '
^^^btAtre dit que naui avoiu été réconcilié» à Dieuparla morlile tt% '
^^Rlh, il ne dit piis par la morl du Verbe.
^^ C'est donc parler d'une manière peu conforme & l'Écriture que
de dire que Marie est mire de Dieu. D'ailieurg ce langage csl un
obsiade ïla coniarsiondcsPatens; aomnient conibnlire les dieux
du Paganisme, en admettant un Dieu qui meurt, qui est né, <ioi a
nulTerl? Pourrait-on, en tenant ce langage, rëfuler les Ariens qui
•ouliennenl que le Verbe est une cri^alurc 7
L'union ou l'aisocialiou de la nature divine avec la nature liu-
naioe n'a point cbangé la nature divine : la nature divii
unie k la nature humaine comme un homme qui veut en rplUTer
un autre s'unit k lui ;ellc eslresifc ce qu'elle était; elle n'a an» .
cun attribut dilTérent de ceux qu'elle avait avant son union ; ella '
n'est donc plus susceptible d'aucune nouvelle di'-nomjnalion,
mènie apris ioii union avec la nature liumaine, et c'est une ab-
surdité d'aiiiibuer au Verbe ce qui convient il la nature liu-
niaine.
■ L'Iionunc auquel le Verbe s'est uni est donc un temple dans le
^1 il habite ; il le dirige, il le conduii, il l'anime et ne l'ai
^'nn avec lui '. voiU la seule union possible entre la nature di^ I
Tine et la nolure humaine.
Nesiorius niait donc l'uaînn litposlilique, etsnppoMil enelTel I
dein personnes en JËsus-Christ ; ainsi le Nealorianianie n'est pas
une lugomadiie ou une dispute de mois, comme l'ont pena^ quel-
ques savans, iraisemblablrmenl parce qu'ils liaient prévenus
contre saint Cyrille ou parce qu'ils ont jugé de la dnelrine de Nes-
iorius par quelques aveux équivoques qu'il faisait, et parce qu'ils '
n'ont pisanea exaniinA les priiicïiie» de cet ^véque '.
> Ladoir, Ilist. jCtUiop. Gntilus. Dasnage, Amiiil-, I. 3, La Croie,
HIst. du chriiT. des Inrlcs. Eritrellens sur ilivrrt sujeli, etc., part, 1.
SuIIf* Knljdiiinlsni. nnlp Kul^chrm. Dupln, Dlbllor. des anieun du
(pHtritmcsIËrlc.
ÏU but remarquer que M. Dupln se rerraela sur cet artiole, sur ln)uc1 ,
^élaitca elTel lmm|<«. M. Uajlc n'avall pan nwi ^ludlË colle inatli^ne ^
■r jttKT t* ^I- Uupiu t'cUil d'abord ceuijKirlf en hIslorUn ûMk,
524 NES
II me parait claîr, par les serinons de Nestorius et par ses ré-
ponses aux anathèmes de saint Cyrille, qu*il D*admettait qu*une
union morale entre le Verbe et la nature humaine.
Mais, dit-on, Nestorius ne reconnaissait-il pas qu*il n*y avait
qu^un Christ, qu*un Fils? Le nom de Christ marque une personne ;
s'il avait admis deui personnes dans Jésus-Christ, il aurait donc
admis deux personnes dans une seule, ce qui est impossible.
Je réponds que les mots de C/^m/ et de Saw^r n'étaient, selon
Nestorius, que des noms qui marquaient une seule et même œu-
vre , savoir, le salut et la rédemption du genre humain ; œuvre &
laquelle deux personnes avaient concouru, selon Nestorius» Tune
comme agent principal, qui était la personne du Fils de Dieu,
du Verbe éternel, et Tautre comme agent subordonné et comme
instrument, savoir, la personne humaine, Jésus fils de Marie. Il
disait que ces deux personnes avaient été unies par une seule et
même aciion, de sorte que toutes deux ensemble ne faisaient
qu'un Jésus-Christ ; il ne mettait entre les deux personnes, la di-
vine et rhumaine, que la même union ou la même association que
nous voyons entre un homme qui fait une œuvre et Tinstru-
ment dont il se sert pour la faire ; en sorte que Fhomme et son
instrument joints ensemble peuvent être appelés d'un nom com-
mun.
Par exemple, on peut appeler Thomme qui tue et Tépée avec
laquelle il tue du nom de tuant, parce qu'il y a une subordination
entre Thorome et son épée, une union, une association, telle
qu'elle doit être entre un agent principal et son instrument ; et,
par la force de son association, on peut donner le nom de tuant
tant à rhomme qu'à l'épée et à tous les deux pris ensemble, puis-
que l'un et l'autre concourent à une même œuvre.
Mais quand vous considérez l'homme et l'épée hors de cette as-
sociation et du concours à une même œuvre, chacun a ses attri-
buts à part ; de sorte que nous ne pouvons pas dire ni que
l'homme soit d'acier, qu'il soit pointu, qui sont les attributs de
Tépée; ni que l'épée soit vivante et raisonnable, qui senties attri-
buts de l'homme ; parce que, quelque association qu'il y ait entre
rhomme et l'épée, l'homme et l'épée ne sont pourtant pas une
seule personne.
11 en était de même de Jésus-Christ, selon Nestorius : on disait
également du Verbe et de l'homme auquel il était uni tout ce qui
avait rapport à l'œuvre à laquelle ils concouraient, c'est-à-dire le
^E:s 335 \
lluldes hommes ; mais torsriu'ou les considérait hots de cet ob-
I et i pari de leur concours au salut du gpare huuiatD, ils u'a-
it plus rien (lui les unit ; on ne (louvaii pas dire du Verbe es
(ppartenail à riioainie, nî de l'iiomme ce qui apparienait au
c'est pour cela que, selon Nealorius, on ne poniait nag
"e que Marie ^taîi mère de Dieu , ce qui suppose lividemment
e Nestorius considérait alors le Verbe el l'homme comme deus
nonnes ; car s'il n'eût supposé dans Jésus-Christ qu'une seule
«rsonoe, il est évident qu'il uuraii attribué ï cette personne tout
» qui convient i chacune des deux natures : c'est ainsi que nous,
i considérons l'humme comme une personne composée d'un
l'une ime, disons que l'homme marchei qu'il a un corps,
i*ilaun esprit, etc.
,• Keslorius oiiiil donc en elTet l'union hjposiaiiqnc du Verbe
alure humaine et supposait deux personnes en Jésut- i
lli'fulaiwn du Nrstorianitme.
]| est certain que le Verbe s'est uni i la nature humaine.
1" L'union du Verbe avec la nature humaine n'est pas un s
icoursde la divinité et del'liumanitépour lesalut du genre |
^ I, tel que le concours de deui causes absolument séparées
Itdonl l'cITet tend i produire le même eDet ; car l'Ëcriture nous
itque le Verhe a été Tait chair et que le fils de Uarin est Dieu,
\f qui serait absurde si l'union du Verhe et de l'humanité n'était ,
' m simple concours des deux natures, comme il est absurde do 'i
qu'un homme qui se sert d'un levier pour soulever un poids [
n devenu un levier.
> S° Cette union n'est pas une simple union de conscntemci:
Risées, de désirs et d'inclinations : car, comme ou ne peut pas i
' « que je produise les acliona d'un homme parce qu'elles s
Hoformcs t mes inclinations, de même on ne pourrait pas diM '
e Dieu a produit les actions de Jésus-Ctirisi, qu'il a répandu *
ton sang, si dans Jésus-Clinsl Dieu n'était mil 11 l'humanité qw
fW la conformité des actions deTbomme avec la nature de Diei
3* L'union du Verhe avec lu nature humaine n'est pas une sinh' i
pie habitation de la divinité dans l'humanité, ni une simple inlIuenM I
ponr la gouverner. Un pilote est uni de celte manière avec ii
ntvire, et c'est ainsi que Dieu habile dans ses saints; cependant J
ti« NES
un ue ikin pm cpie le pilule soit fait le navire, ni que Dieu soit fiùl
mi sailli.
Smi h^M B^ivrait donc pas pu dire que le Verbe i été bk
obùr» si Tiuiion du Verbe avec la nature humaine n*éiait qm
ùm^ habitation de la divinité daus Thumanité ou une simple
Ittcuce du Verbe pour la gouverner.
4* L'union du Verbe avec Thumanité n*est pas une unioe éTm^
formation» telle qu^esi Tunion de Tàme et du corps ; car U 4li«ii>
ftité n'est pas la forme de Thumanité, et rhumanilé n*est pats
venue la matière de la divinité.
tt* Par Tunion du Verbe avec Thumanité le Verbe n Hè
chair» ce qui ne peut s'entendre qu'en quelqu'un de eesscKS : mm
que le Verbe a été réellement converti en chair, ce q« cm alb-
surde ; ou dans un sens de ressemblance, savoir, que le ¥ciAeaîi
pris quelque oonformilé ^ certains égards avec la chair, ee qeicM
absuitlo , car en quoi le Verbe est-il devenu semblable h b ckair?
ou enfin dans ce troisième sens qui est que le Verbe a eu h
soi persounellement la chair, ce qui est confirmé par le passage
m^me qui porte que le Verbe, après s'être fait chair, a habile
parmi les hommes et qu'ils ont contemplé sa gloire.
6* Celte nnioB est telle que les propriétés, les droits, les ae>
lions, les sonlfranoes et telles choses semblables qui ne pevreel
appartenir qu*à une seule nature, sont atlriboées à b persomw
dénommée par Taniie nature, ce qui ne peut se dire en aocme
manière, à moins que les deux natures D*apparttenneBl également
à une seule et même personne : tels sont ces passages où il est
dit : Un Dieu a racheté mm ÈgVue par son $anç ; Dieu u'apaimi ^pâr-
§né 9im propre FlU, mais 1/ l'a mis à mort * .
S'il y a dans Jésus-Christ deux personnes qui soient également
associées ensemble par une même onction et sous-ordonnées Tune
à l'autre pour la rédemption du genre humain, otf ne peut dire
que l'une soit l'autre, comme saint Jean dit que la parole n été
Âite chair : on ne saurait attribuer â Tune ce qui n*appartieot qu'à
Tautre, lorsqu'on les considère hors de l'homme et indépendam-
ment de la fin à laquelle elles concourent.
Ainsi, dans le sentiment de Nestorius, on ne pourrait dire que
le Fils de Dieu est mort, ni qu'il est né ou qu'il a été fait de
femme, ni qu'il ait été touché de la main et vu des yeux. Ainsi,
' Act 2. Ep. ad nom« 6.
MES Sâ7
par exemple, lorsque Pierre avec son épée tue Pai|l, on peut bien
dire que Tépée i tué Paul, comme on dit que Pierre a tué Paul ;
mais on ne peut pas dire que, hors de Tégard de cet effet com-
mun, rhomme a été fait épée, Thomme a été forgé de la main
d*un artisan, parce que ces sortes d*expressions n^ont lieu que
dans Tunion de plusieurs natures en unité de personne, c*est-à-
dire lorsqu'une nature s'est tellement unie à l'autre qu'elles ne
forment qu'une nature individuelle ou un suppôt doué d'intelli-
gence, divisé de tout autre et incommunicable.
Mais Jésus-Christ réunissant deux natures, comment ea^-il pos-
sible qu'il n'y ait en lui qu'une personne ?
Pour résoudre cette difficulté, il faut se rappeler ce que c^est
qu'une personne.
Une personne est une nature individuelle ou un suppôt doué
d'intelligence, complet, divisé de tout autre et incommunicable ù
tout autre. i
Ainsi chaque homme en particulier est une personne qui a ses
actions, ses droits, ses qualités, ses souffrances, ses mouvemens et
Ses seotimens, qui lui appartiennent d'une manière si particulière
qu'ils ne peuvent pas être k un autre.
De même un ange est une personne, parce que c'est une na*
ture inlelligeote, complète, el qui se termine eu soi-même, divi-
sée de toute autre cl incapable de se communiquer.
11 n*en serait pas ainsi du corps et de l'âme de l'homme si avant
leur union ils existaient séparés; car étant faits pour être unis
ensemble, afin que de leur union il résulte ce que nous appe-
lons l'homme, le corps humain sans Tame ne peut remplir toutes
les fonctions auxquelles il est destiné, ni l'âme, avant son union
avec le corps, faire toutes les opérations pour lesquelles elle a été
créée : ainsi ràiiie liumaine séparée du corps ne serait point une
personne ; il faut qu'elle soit unie à un corps, et c'est l'union de
l'âme et du corps qui produit la personne. Deux natures on deux
substances peuvent donc ne faire qu'une personne lorsque leur
nature est telle qu'elles ne peuvent remplir les fonctions auxquelles
elles sont destinées qu'autant qu'elles sont unies; parce qu'alors
elles ne sont point une nature individuelle, douée d'intelligence et
complète, divisée de toute autre et incommunicable.
11 est aisé, d'après ces notions, de concevoir comment la nature
humaine et la naturedivinenesont en Jésus-Christ qu'une personne;
car la nature humaine de Jcsuiî-Chrisl n'ajfaot pas été formée en verto
2âS NÉS
des lois de la nature, mais par un principe surnaturel, sa pre*
mière et originaire destination a été d'être jointe à une autre;
d*où il suit qu'elle ne se termine pas en elle-même, qu'elle n'est
point complète comme le sont les autres créatures humaines qui
viennent par les lois ordinaires de la nature, parce qu'elles n'ont
pas cette destination qu'on vient de marquer dans celle de Jésus-
Christ.
La nature humaine de Jésus-Christ ne pouvant par elle-même
remplir les fonctions auxquelles elle est destinée et ne pouvant
les remplir que par son union avec le Verbe, il est clair qu'avant
cette union elle n'est point une personne, et qu'après cette union
le Verbe et la nature humaine ne sont qu'une personne, parce
qu'elles ne sont qu'une seule nature individuelle ou un suppôt
doué d'intelligence, complet, divisé de tout autre et incommuni-
cable.
L'erreur de Nestorius, qui ne supposait qu'une union morale
entre la nature divine et la nature humaine, détruit toute l'éco-
nomie de la religion chrétienne ; car alors il est clair que Jésus-
Christ, nutre médiateur et notre rédempteur, n'est qu'un simple
homme, ce qui renverse le fondement de la religion chrétienne,
comme je l'ai fait voir dans l'article Ariens, en prouvant que le
dogme de la divinité du Verbe est un dogme fondamental.
Le dogme de l'union hyposlatique n'est pas une spéculation
inutile comme on le prétend ; il sert à nous donner l'exemple de
toutes les vertus, à nous instruire avec autorité et à prévenir une
infinité d'abus dans lesquels les hommes seraient tombés s'ils
n'avaient eu pour modèle et pour médiateur entre Dieu et eux
qu'un simple homme : c'est ainsi que tous les Pères ont envisagé
le dogme de l'incarnation ou de l'union hypostatique ; mais ce
n'est pas ici le lieu de traiter cette matière ^.
NESTORIUS, évêque de Constantinople, auteur de l'hérésie
qui porte son nom, fut condamné et déposé dans le concile
d'Éphèse.
Il éuit né en Syrie ; il s'y destina à la prédication : c*était le
chemin des dignités, et il avait tous les talens nécessaires pour
y réussir. Son extérieur était modeste et son visage pâle et exté-
nué; il fut généralement applaudi et se fit adorer du peuple.
* Aug., De doctrin. christ., 1. 1, c. il, 12, 13, Greg., Moral., L 6,
C 8; !• 7, c a, Nicole, Symbole, loslr, 8,
iNKS j„,j
Après la mort de Sisinnius. rÉnIiae de Constariinople
visa sur le choix de sod successeur , i^l Tli<^odose-le-Jeune, poitvl
prévenir les dissensions. spp«lii Nesiorius sur te sîù^e de Consiao'l
tinople.
La dignité ï laquelle Neslorius l\it élevé échaulTa son léle ; il
Udi* de l'inspirer à Théodose, el, dans son premier seriuon, il lui
dit : Donnei-moi la terre purgée d'hérétiques, el je vous donnerai
le ciel : secondei-moi pour eiierminer les hérésies, ei je vous
promets un secours elGcacc contre les Perses *.
k peine I^estoriiis était établi sur le siège de ConsianiiDoplpj , 1
qu'il chassa les Ariens de ta capitale, arma le peuple contre eui, ]
abattit leurs églises et obtint de l'empereur des édlts rigoureu *
pour achever de les eïlerminer '.
Nestorîus, par son télé et p^r ses lalens, se concilia la faTeav |
du prince, le respect des courtisans cl l'amour du peuple ; il ré|» *
L'blit même dans tous les esprits la mémoire de saint Chrjsostnaie
Kque Théophile d'Anlioclie, oncle de saint Cjrille d'Alexandrie,
■ irait rendu odieux et qu'il avait Tait exiler.
Après avoir établi son crédit et gagné la coiiGance par un xèl«
finmoitéré auquel le peuple applaudit presque toujours, Kesturin» |
r'Mcrut ru étal d'enseigner la doctriue qu'il avait reçue de Tbé
e de Uopsueslu et de donner une nouielle furuie au christi
me.
Nous avonsremarqué, dans l'ariicleNESTOKiANisiiE.que le dogi
on hyposlatique était gënëralenienl reçu dans l'Ëglise
leoce de cette union, on pouvait non-seulement dir<
lérat-CbrisI était homme et Dieu , mais encore qu'il était I
bomme-Dteu et un Dieu-homme; ce tangage était généralemei
éUbli dans l'Ëglise.
Par une suite de cet asage, on disait que la sainte Vierge étaitil
^•tère de Jésus-Christ, mérc de Dieu,
Nntorius attaqua d'abord ces expressions ; il prêcha que \t |
uTerbe s'éuii incarné, mais qu'il n'était point sorti du sein de Ift J
Vierge, parce qu*il subsistait de toute éternité.
!■« peuple Tut scandalisé de cette doctrine, entendit le pitriv-tj
»: indignation et l'interrompit au milieu de ion discoun^fl
bientôt il murmura, se plaignit, s'échaulTa et euiio se souleva ci ~
* Socrat., I. 7, c, ÎB.
SSO NES
ire Nestoriits, qui se servit de son crédit pour faire arrêter, em-
prisonner et fouetter les principaux des méconteos * .
L*innoTilion de Nestorius fit du bruit dans tout FOrient ; on en-
voya ses écrits en Egypte : les moines agitèrent entre eux la ques-
tion que Nestorius avait élevée ; ils consultèrent saint Cyrille, et
le patriarche d* Alexandrie leur écrivit qu*il aurait souhaité qu*on
i^tgîtât pas ces questions et que cependant il croyait que Nesto-
rins était dans Terreur *.
Nestorius engagea Photins k répondre à cette lettre ; il fit
courir le bruit que saint Cyrille gouvernait mal son Église et qu*il
affectait une domination tyrannîqne *.
Saint Cyrille répondit à Nestorius que ce n*était pas sa lettre qui
jetait le trouble dans TËglise, mais les cahiers qui s'étaient ré-
ptiidus sous le nom de Nestorius ; que ces cahiers avaient causé
UB tel scMidale que quelques personnes ne voulaient plus appe-
ler Jésus-Christ Dieu, niais Torgane et Tinstroment de la divi-
nité ; que tout TOrient était en tumulte sur ce sujet ; que Nesto-
rius pouvait apaiser ces troubles en s*expliquant et en retranchant
ce qu'on lui attribuait ; qu'il ne devait pas refuser la qualité de
nére de Dieu à la Vierge; que par ce moyen il rétablirait la paix
dans r£glise.
Nestorius répondit à saint Cyrille qu il avait manqué envers lui
i la charité fraternelle; que cependant il voulait bien lui donner
des marques d*union el de paix ; mais il ne s'explique ni sur sa
docinne ni sur les moyens que snint Cyrille lui proposait pour
rétablir la paix.
Saint Cyrille , dans une seconde lettre , exposa sa doctrine sur
l'union hypontatique, prévint tous les abus qu'on pouvait en faire,
et fit voir que cette doctrine était fondée sur le concile de Nicée :
il finissait en exhortant Nestorius à la paix.
Nestorius accusa saint Cyrille de mal entendre le concile de
Nicée et de donner dans plusieurs erreurs, et prétendit qu'au-
cun concile n'ayant employé les termes de mère de Dieu , on pou-
vait les supprimer.
Saint Cyrille craignit que ces sophismes n'en imposassent aux
fidèles de Constantinople : il leur écrivit pour leur faire voir que
* Act. conc Ephes.
s Cyrillus, Episl. ad Cœleslin.
» Conc Ephes., priro. part., c, 12, CyriJU, Ep. ad Nestor, sccunda«
NES
9SI
I ,Ile»iui'iu« cl aCB parus^iii» illvisaipiii Jùtm-
^^■onncïi il leur conseilla de répondre à ceU)
roubicr rt^liee et de ne pas obéir ù leur évfque , il l«ur con-
■^illa , dls-jc , de riîpuniire que c'élail cel âv^ue uéino qui cau-
'' ' I Irauble el du scandale , parue qu'il enseÎHDaii dei cLoses
loules.
Celle opposiiloD des deui patrJari'hes alluma le fcii de U dit- I
Eicorde ; il m forma dcui parus dans CunElanlinople même, el cei '
V'deux punis u'oublièient rien pour rendre leur duutrlae odieuse,
inemis de Nesiorius l'accusaient de nier iiiijiredeinenl la
f Avinité de Jésus-Cbrist , qu'il appelait seuletuenl porle-Dîeu et
Lflu'il réduirait t la condition il'uu simple humme.
L«s partisans de Nestorius , au contraire , reprocliaient i saint
ECjrille qu'il arilissail la dirinlié el qu'il l'abaissait ï toutes )m
EteUnnilét buinaiiies ; ils lui appliquaient tontes les railleries des
fPiletis, qui inauilaient aux chrÉiiens sur leur Dieu crucifié.
UienlÛI les deui pairiardiea in forniâreni toute l'Ëglise de letirk _
^«onteslBltons.
Acace de Boeréc et Jean d'Antiochc approuvËrcnl la doctHm
da Gainl Cyrille et condamnËrcnt Neitorius ; mais ils étaient d'avis
^'il ne falUit pas relever avec tant de chaleur de» cipressions
peu exactes , et prièrent saint CjriUe d'apaiser celle querelle par
, ,Hn silenc«.
Le paiwCÉIestin, auquel saint Cyrille etNcstorius aviientécritt _
itMtnbla un concile qui approuvais doctrine de saint Cyrille II
[condamna celle de Keaiorius : le concile ordonnait que si NeslAc I
u , dii jours après h signiflcatiou du jugement du concile , Dfrl
ait pas la nouvelle duclri ne qu'il ivail inlrodulle,elqi'H 1
kB'*pprouv3t pas celle de l'Église de Rome, de l'Égliie d'Alexan— 1
p drie et de tunles les Églises caiholiques , il serait déposé et priva
de la eoratnunion del'É^liseï le coocils déclarait encore que ceui
qui s'éiaieni séparés de Kestorius depuis qu'il euseignait celle
doctrine n'étaient point excommuniés >.
^ Saint Cyrille assembla aussi un concile en Egypte : on y résolut
fexécutioD du jugement prononcé par les éviquei d'Occident
'Mntre Nestorius, el l'on députa quatre évéques pour le lui sigai-
'fler. Saint Cyrille ajouta une prulession de fui . qu'il voulait i|ne
Nealotius loiuoriTll , ainsi que douxe anatlièmea , dans lesquels It
' Ce CDUcilc K liot en ^30, au muit d'aoDt.
232 NES
doctrine de Nestorins et toutes les faces sons lesquelles on pou-
vait la proposer étaient condamnées *.
Nestorius ne répondit aux députés d'Alexandrie que par douze
anathèmes qu'il opposa k ceux de saint Cyrille.
Avant toutes ces procédures , Nestorius avait obtenu de Théo-
dose que Tou convoquerait un concile général à Ephèse , et les
évèquess'y assemblèrent en 43i .
Saint Cyrille s'y rendit avec cinquante évèques d'Afrique et
Nestorius avec dix *.
Jean d'Antioche ne fit pas autant de diligence , soit que son re-
tardement fût causé parla difficulté des chemins, soit qu'il en es-
pérât quelques bons effets; cependant il envoya deux députés pour
assurer les évèques assemblés à Éphèse qu'il arriverait inces-
samment, mais que les évèques qui l'accompagnaient et lui-même
ne trouveraient pas mauvais que le concile fût commencé sans
eux *.
Saint Cyrille et les évèques d'Egypte et d'Asie s'assemblèrent
donc le 22 juin , quoique les légats du saint Siège ne fussent pas
encore arrivés *,
Nestorius fut appelé au concile et refusa de s'y trouver , pré-
tendant que le concile ne devait point commencer avant l'arrivée
des Orientaux.
Les évèques n'eurentpoinl d'égard aux raisons de Nestorius : on
examina ses erreurs ; elles avaient été mises dans un grand jour
par saint Cyrille ; elles furent condamnées unanimement et
Nestorius fut déposé.
Le concile envoya des députés à Jean d'Antioche pour le prier
de ne point communiquer avec Nestorius qu'on avait déposé.
Jean d'Antioche arriva à Éphèse vingt jours après la déposition
de Nestorius, et forma avec ses évèques un nouveau concile : on
y accusa Meonon d'avoir fermé la porte aux évèques, et Saint Cy-
rille d'avoir, dans ses douze anathèmes , renouvelé l'erreur d'A«
pollioaire. Sur cette accusation , on prononça sentence de dépo-
sition contre Mennon et contre saint Cyrille.
Les légats du pape étant arrivés dans ces entrefaites, ils se joi-
* Ce concile tai tenu en 430, au mois de novembre.
> Socrat, 1. 7, c 83, Relat ad imper., S part Conc. Ephes., act i.
* Socr., ib., c. 36. Evagr., 1. i, c 3. Nicéph., l &, c 3&«Conc. Ephes.
* Act. conc. Ephes., CoUect. de Lupus.
NES
[ gnirent i saiot Cyrille, corame leur inslmelion le pormil ; on leur
DiinuiiiqQa ce qu'on avait Tait contru NcgtariUB , et Us l'approu-
renl. L« concile t'cnvit ensuite à l'empereur que les légats ite
iTËglise de Rome avaient assuré que tout l'Occiiienl s'accordait
ux aur l> ductriiie , el qu'ils arnieal coadaoïi
||.âoclriDe et la personne de Nesloriiia. Ou cassa ensultele juge- ]
rat de déposiiiou porté contre salut Cyrille et
la Jean d'Antioclie et ses adbérens.
Le jour même de celle citation , Jean d'AntiocLe lit arOclier na ]
I placard par lequel on déclarait Cyrille et Henuon déposés poar
h uuse d'hérésie, et les autres évéqucs pour les avoir fivoriié*.
Le lendemain , le concile d'Eplièse lit citer Jean d'Anlioclifl
pODi la troisièmefois ; on condamna les erreurs d'Arius, d'Apolli-
Daire, de Pelage, de Célestius ; ensuite on déclara que Jean d'An-
tîocbe et son parti étaient sépurés de la communion de l'Ë
■ La conduite du concile d'Éjilit^i? a été hlilmèe par
^derc, la Croie, etc., mais iD;uï[fmcnt.
1* Jean d'Antioche n'élaïl accam|isgné que de quarante érfques, et
le était en jtgie en commcnraiit h eismiiicr l'atTairc de Ncsto-
ta atant son arrivée.
» 1* Jeand'Antioclie, aprèssonarrivée, pouvait seraircrendreeomple
Itce qui l'était passé dans le concile , i-t le désapprouver ou l'approu-
'. Les légats du pape Céleslin, quoiqu'ils fussent arrivés après le
it prononcé contre Nealorius , ne te séparèrent point de saint
rrille: on leur conmiuoiqua ce qu'on avait bit contre Nestoriug, et
le joignirent au concile.
F S* Jean d'Anlîocbc ne put rcproolier aucune erreur au concile d'Ë-
it par conséquent son sdiisnic n'avait pour rondement que l'o-
d'une simple formaliLé. Il cât donc clair qu'il n'avait pas une
le raison de rompre l'unité, et que le concile d'Ëpliésc ne poutaîl m
»' de le condamner,
«n d*Antioche n'était pas eu droit de citer saint Cyrille ï son.- J
et il est certain qu'il condamna ce palriurcbe pour des erreu
dans lesquelles il n'élail point tumljé. puisqu'il avait condamné , av
tout le concile, l'errenr d'Apollinaire, celle d'Arius, etc.
Si dajis toute cette alTaire il j a eu nu peu trop de vlvadlé, il Ai
l'imputer ï Nestorius même; c'est lui qui a te premier traité ses ai
lerwirc* avec rigueur, qui a cmploj'C li' premier les paroles injurieum
el outrageantes , comme un le voit par la lettre qu'il Ht écrire par Phd
tlu) : il employa le premier des moyens Tiolens; ce Tut lai qui fit in
30"
U4 NES
Les éfèqaeê d*Ëgypte et ceux d*Orient , apràs B*étre lancé pltt-
sieurs ezcommunieaiioot, envoyèrent chacun de leur côté des dé»
pûtes à rempereur. Les courtisans prirent parti dans cette affaire ,
oeoi-ei pour Cyrille, ceux*U pour Nestorius : les uns étaient d V
TÎs que Tempereur déclarât que ce qui avait été fait de part et
d'autre était légitime ; les autres disaient qu'il fallait déclarer tout
nul et fkire venir des évèques désintéressés pour examiner tout
ce qui s'était passé à Éphèse.
Théodose flotta quelque temps entre ces deux partis » et prit
enfin celui d'approuver la déposition de Nestorius et celle de saint
Cyrille , persuadé qu'en ce qui regardait la foi ils étaient tous
d'accord, puisqu'ils recevaient tous le concile de Nicée.
Le jugement de Théodose ne rétablit pas la paix ; les partisans
de Nestorius et les défenseurs du concile passèrent de la discus«>
sien aux insultes et des insultes aux armes , et Ton vit bientôt
une guerre sanglante prête à éclater entre les deux partis. '
Théodose, qui était d'un caractère doux, faible et pacifique, fut
également irrité contre Nestorius et contre saint Cyrille : il vil
alors que ce qu'il avait pris dans Nestorius pour du zèle et pour de
la fermeté n'était que l'effet d'une humeur violente et superbe ;
il passa de l'estime et du respect au mépris et à l'aversion: Qu'on
ne parle plus de Nestorius, disait-il ; c'est assez qu'il ait fait voir
une fois ce qu'il était *.
Nestorius devint donc odieux à toute la cour; son nom seul exci*
tait l'indignation des courtisans , et l'on traitait de séditieux tous
venir dans cette afCidre Pautorité impériale i il est donc la vraie cause
de la vivacité qu^on mit dans cette affaire, supposé qu*on y en ait
trop mte.
Ce D*e8f pas que je ne croie que la patience, Tindulgence et la dou-
ceur ne soient préférables à la rigueur ; Tcsprit de TÊglisc est un esprit
de douceur et de charité ; la séTérité ne doit être employée qu^aprîs
avoir épuisé toutes les ressources de la douceur et de la charité indul-
gente; mais cependant TÉglise est quelquefois obligée de scanner de
sévérité, et Ton ne doit pas croire légèrement que les premiers pasteurs
n^ont pas employé toutes les voles de la douceur avant d*en venir ù la
rigueur. Sommes-nous sors que nous les blSmorions, si nous connais-
rions le détail de tout co qu^iis ont fait pour nV'trc pas obligés d'user
de cette sévérité?
A Conc, t 4, P« C6d.
NES
sas
ceux qui osaient agir pour lui ; il en Tm informiï, cidem»n>la h si
reLirârdaDsIemoaastèreoiiil éuiiaTiint ilepsscr «urle litige do
ConsUiitinople ; il en abiinila permîiuion el panit aussitôt , avec
une fiertÉ sloTque, qui Del'abandoQna jamais.
Pour saint Cyrille, il Tut arrêté ei gardé soipeusemeDt, et l'etn-
percur, persuadé que ce patriarche avait été déposé par toiil ta
coDcile, était sur le point de le bannir.
Le concile écrivit i l'empereur , lit Toir que CjHlle et Heunon
n'allient poiui été condamnés par le concile, mais par trente évé-
quel qui l'aTaîent jugé sans Turmes , sans preuves , et par le seul
déiir de venger Keitorius.
Ces leltrn , soutenues îles pressantes soUiciutions do l'abM i
Dalniaue, quîéuit tout-puissaui auprès de l'impi^rulrice , sii9]ien- '
dirent l'exécution des ordres donnés contre saiul Cyrille. Pour
Ncsiorius , l'ompercur n'en voulut plus enieiidre parler, ei fît or>
donner Uaiûuinli sa place.
Les évQqucB d'Ëgypie et d'Orient étaîeut cPpi'udani toujours
assemblés k Ëpliise, et IrréMnciliablef .
Tliiktdose leur écrivit qu'il avait ThiL tout ce qu'il avait pu
par »e« nlïicicrg, et par lui-même, pour réunir les espriU, crnyant
que c'était une impiété de voir l'Ëglise dans le trouble cl de nu '
pas faire ion possible pour rétablir la paix ; il ajoutait que, ne
l'ayant pu faire, il était résolu de terminer le roucile ; que ai néan-
moins les évf ques aviiienl un désir Mncére do la paix, il était prêt
à recevoir I» ouverlures qu'ils voudraieni lui proposer, sinon
qu'ils n'avaient qu'A se retirer promplement; qu'il acconlslt de
minie lUi Orientaux le pouvoir de se retirer chscun dans leurs
diocèses , et que tant qu'il vivrait il no les coudamnerail point ,
parce qu'ils n'ont été convaincus de rien en sa présent*, pei-sonua
n'ayant voulu entrer eu conréreucc avec eua sur les points con-
testés: il linissail en protestant qu'il n'était point cuusednscliisme
et que Dieu savait bien qui en était coopable '.
On peut juger par celle leltre, dit U. de Tillemoni. que Ttiéo-
dose était eni^ore moins saiisfalt des évéques du concile qofl des
OrienlDux ; mais que, ne voyant du tous cAtés que des ténèbres, il
le voulait point juger, et qu'il préférait néanmoins ceux du eon-
ne ayant plus de leur cAté les marques de la cumniti
toCulrlicr, p. M. Tillpmuiil, I, ir<, |<. A^iS.
286 NES
Voilà quelle fut la fia da concile d'Éphèse, que TÉglise a tou-
jours reçu sans difficulté comme un concile œcuménique , nonob-
stant Topposition que les Orientaux y firent pendant quelque
temps, et sans aucun fondement.
Les Orientaux ne virent qu'avec une peine extrême que l'em-
pereur renvoyait dans son Église saint Cyrille qu'ils avaient dé-
posé : Jean d'Ântioche assembla un concile composé des évèques
qui l'avaient accompagné à Épkèseet des évèques d'Orient. On y
confirma la sentence de déposition portée contre saint Cyrille ;
ensuite le concile écrivit à Théodose que les évèques , les ecclé-
siastiques et les peuples du comté d'Orient s'étaient unis pour sou-
tenir la foi de Nicée jusqu'à la mort , et qu'ils abhorraient tous,
à cause de cela , les anathématismes de saint Cyrille, qu'ils soute-
naient être contraires à ce concile ; c'est pourquoi il prie l'em-
pereur de les faire condamner de tout le monde *.
C'est ainsi que le schisme commencé à Éphèse continuait dans
l'Église , ceux du concile d'Orient n'ayant point de communion
avec ceux qui ne se séparaient pas de saint Cyrille '.
Cette rupture ne pouvait se faire et s'entretenir sans beaucoup
d'aigreur de part et d'autre, et les peuples participèrent à l'ani-
mosité de leurs évèques ; on ne voyait de tous côtés que querelles ,
qu'aigreur, qu'anathème, sans que les évèques et les peuples pus-
sent souvent dire de quoi il s'agissait et pourquoi des chrétiens
se déchiraient si cruellement les uns les autres ; les personnes les
plus proches se trouvaient les plus ennemies ; on satisfaisait à ses
intérêts particuliers sous prétexte d'être zélé pour l'Église, et le
désordre était si grand qu'on n'osait seulement passer d'une ville
à l'autre, ce qui exposait la sainteté de l'Église à la raillerie et
aux insultes des Païens, des Juifs et des hérétiques ^.
Quoique Théodose témoignât assez d'égalité entre les Orien-
taux et leurs adversaires , les défenseurs du concile d'Éphèse
étaient cependant , sans comparaison , les plus forts , et par leur
union avec tout l'Occident, et parce que l'empereur même et toute
la cour étaient dans leur communion.
Les Orientaux les accusaient d'avoir mal usé de ce pouvoir et
de s'en être servis pour faire toutes sortes de violences ; mais ces
* Appendix conc Balus., p. 7&i.
9Conc,t A, p. 663.
i Ibid.
isr I
<l poinl Taira
■ tirs
^■'■ortes (l'a causai ion s tagiies tt yéiiéoL's
^■d'impression, el peut-ûirc que les citlioliques ne fuissi
^H^Boin<ii'e& reproctirs aux Oiieniaiix , d'.v ayant apparemment rien
^n^ plus vÉriiable que ce (lue dil Ibas d'EMc&se, que, dans cetia
^HmoluBian , chacun suivait sa voie et les d^irsdeson ciBur '.
^^E C'est donc manquer d'équilé que déjuger les catholiques sur
^^Bb témoiguage des MestorieDa seuls, comme Tait H. delà Croie *.
^^p Théodose attribua aux dÏTÏsioDS de l'Église ses mauvais succë*
^^ en Afrique ; il n'oublia rien pourrËtablir la paix ; il jugea qu'elle
dépendait de la réconcilia lion de Jean d'Antioche el de saiut Cy~
rille : il employa donc tous ecs soins et toute son autorité pour
procurer celte réconciliation ; il écrivit i tous ceux qui avaient du
»«tédh sur leur esprit , et surtout à saint Siméon Sijliie el &
Acace».
Après mille diOiculIés, milledélicaiesses, mille précautians pour •
h religion, pour l'honnenr et pour la vanité , la paix Tut c
entre Jean d'Anlioche et saint CjTÎIIe.
La plupart desOrlcnian\iaiiiércnt Jean d'An liocUe ; mai
toriuï conserva toujours des partisans zélés , qui nun-seuiemea
oe voulurent pas être compris dans la paix de Jean d'Aotiocha^
lis qui se séparèrent de sa communion parce qu'il ci
[||tuit avec saint Cjrillc.
On vil donc dans l'Orient même une nouvelle division !
[qnes de Cilicie et de l'I^uplraiésienne se séparèrent cle Jean d*An-
' ' ; ce palriarcLe voulut employer l'aulorilé pour les réduire
ne fit qu'augmenter le mal ; l'empereur défendit aux év^ues
venir en cour et ordonna de chasser ions ceux qui ne
pas il Jean d'Anliuclic.
Nestorius, du fond de son monastère, excitait (ouïes a
liions , et réglait tous les niouveiuens de sa faction : ni I
des un», ni l'exil des autres, ni sa dc-positioo, approuTée pU'l
itec les Églises patriarcales , n'ébranlèrent la fermeté de Ne»- J
et, pour ainsi dire accablé sous I
IM montrait encore ferme el intrépide: l'empereur, qui fut infunn^ |
de ses intrigues, le relégua dans la Thébaïde 0(1 il moi
L'empereur traita avec la nèuie rigueur les défenseurs deNefl
' Conc, 1. i, p, eee.
* Hénelions sur lu Mahométlsmc, p. 9.
* Appenil, Conc, I, 3, p. losti.
3S8 NIC
torim ; il confisqua les biens des principaux et les relégua à Pétra,
dans TArabie ; il fit ensuite des édits pour condamner au feu les
écrits de Nestortus, et pour obliger ceux qui en avaient des
exemplaires à les Grêler : il défendait aux Nestoriens de s*assem-
bler et confisquait les ¥iens de ceux qui permettaient ces assem-
blées dans l«urs«aisom ou qui embrassaient le parti deNestorius.
L'autorité de Tbéodose ne vint pas à bout des Nestoriens ; il
les fit plier sans les convaincre : une grande quantité de Nesto-
riens passèrent en Perse et en Arabie ; beaucoup cédèrent au
temps et conser?èfent, pour ainsi dire , le feu de la division ca-
ché sous les cendres du Nestorianisme , sans prendre le titre de
Nestoriens et sans oser faire rerifre une secte qui n^eut plus que
des sectateurs dispersés dans Tempire romain , où les lois de
Tempereur avaient noté d'infamie et proscrit les Nestoriens.
Mais cette bérétîe paesa de Fempire romain en Perse , oti elle
fit des progrèa rapides ; de là , elle se répandit aux extrémités de
FAsie, où elle est encore aujourd'hui professée par les (Aaldéens
ou Nestoriens de Syrie. Vfy^x Tarticle Cbaluéens.
NIGOLAITES. Céuit des hérétiques qui soutenaient qu*on de-
vait manger des viandes offertes aux idoles et se prostituer * .
Saint Irénée , saint Ëpiphane , Tertollien, saint Jérôme, croient
que Nicolas , diacre, avait en effet enseigné ces erreurs*.
Saint Clément d'Alexandrie et d'autres croient que les NicolaTtes
avaient abusé d'un discours et d'une action de Nicolas : ils disent
que ce diacre ayant une belle femme et que les apôtres lui ayant
reproché qu'il en était jaloux , il la fit venir au milieu de l'assem-
blée et lui permit de se marier. Saint Clément ajoute qu'il avait
avancé qu'il fallait user de la chair, et que cette maxime avait
donné lieu de croire qu'il permettait toutes sortes de plaisirs ,
mais qu'il ne voulait dire rien autre chose sinon qu'il fallait mor-
tifier sa chair *•
Le sentiment qui h\i le diacre Nicolas auteur des erreurs des
Nicolaîtes est moins fondé que celui de saint Clément : en effet,
Nicolas était né Gentil et avait embrassé le ludaTsme ; il avait en-
« Apocalyps., c S. & Irèn. et S. Clém. ne leur attribuent point
d'autres erreurs. Voyez Irén., I. i, c 27; Oém. Alex. Strom., 1. 8.
s Inen.» ibid. Epiph., Her. 35. Hacron. ad Heliodor.i ep. !• Tcrt.«
De prapscript.
* Clém. Alex., ibid. Théodore!.
I ^uE
niîie reçu U fui de JiWus-Christ; il âiait meute un ilr» p\at u
et des plus Tervens clirÉiîviis ; il fui cboisi par l'Ëglise de Ji^rusx
leiu, entre ceux qu'on Jugeait èlre pleins du Saint-Esprit, pour
être l'un des sept preiniera diicres ; esi-il vraisemblable qu'aree
- CES qualités Niiola» sotl lombii daoe l'erreur des NicobiïieB 1
I II <r a plus (le Truiseiublaiice daus le setiiimenl de quelques ltÎ>
s qui croient que les Nicolaîtes , comme beaucoup d'oulm
.iquei, out voulu descendre d'un bomme »p()gloIiqii«, el ont
Jndëieiir senLimem mr uoe expression de Nicolas, qui disait
F qv'il Tallait abuser de Ii chair : ce moi , dans l'original , eei équi-
■'Toque et sïguîtie mépriser ou user d'une inaniâre blimoble *.
Un voluptueux proitta de l'i^uiToque pour se livrer au plaisir
rupule , el prétendit suivre la doctrine de Mcubs.
r. Les Nicolaïie.', étant des voluptueux d'un esprit Tulble et super-
, illiaieut la crojauce des démons avec les dogmes du
dstianlsnie , et, pour ne pua irrite* le» démons, ils mangeaient
Il viandes offertes aux idoles.
^Cei Nicalaltcs vivaient du temps des apûtres; dansh suit«, «t
m Saturnin et Carpocrate, cette secte adopta les opinions dea
iBlii;oes sur l'origine du monde. Voyet le mot Cnostiques *.
I des iialeurs qui croient que la secte des Nii'olaïles o
^nt existé ; œ^iia ce sentiment est contnire i toute l'antiquité \
n'est pas fond^.
kXci comoieniJiteurs de l'apocalypse ont traité de riiéréùe da
nicolallei : on voit , par les annales de Pltliou , que vers te miliei
b tepliéme siËcle il y avuit des NJculaïLes ; mais on ne dit point
l^les étaient précisément les erreurs des Nicoliiîtes ; on pour-
\ bien avoir donoé ce nom aux clercs qui cunservaiant leun
, ce qui était Turl commun dans ce siècle*.
rIiOKT était d'Ëphése ou de Smyrne:il enseigna que Jésu>>
■rist n'était pas différent du Père; qu'il n'y avait qu'une seule
e en Dieu , qui prenait tantôt le nom de l'ère , taulAt ce-
^ de FiU , qui s'était incarné , qui était né de la Viurge el avait
offert SI
, l'an 210.
'Oém. Al«., ibid. Le Clerc, llist. ecclés, Itligius, De liiires.,
•CCI. t> C S.
■Itvn., I, ), e. S7. Aug., De hsT. Pbilastr,, De barcs., c, B3,
Epipli.. HKr. 75.
'CoocGuI'Ir', 1. 1, p. 330.
240 NOV
Ayant été cité derant les prêtres, il désavoua d*abord ses éf-
reors : il ne changea cependant pas d'a?is , et, ayant trouvé le
moyen de faire adopter ses erreurs par une douzaine de personnes,
il les professa hautement et se fit chef de secte ; il prit le nom de
Moïse et donna le nom d*Aaron à son frère. Ses sectateurs s'ap-
pelèrent Noétiens : leurs erreurs étaient les mêmes que celles de
Praxée et de Sabellius ^.
NOVATIEN, avait été philosophe avant d*étre chrétien ; il fut
ordonné prêtre de Rome : il avait beaucoup d*esprit et de sa-
voir.
Après la mort de Fabien , évêque de Rome , on élut Corneille ,
prêtre de TÉglise de Rome et recommandable par sa piété et par
sa capacité.
La persécution que TÉglise avait soufferte sous Tempereur Dèce
avait fait beaucoup de martyrs , mais elle avait aussi fait des apos-
tats. Plusieurs chrétiens n'eurent pas le courage de résister à la
persécution : les uns sacrifiaient aux idoles ou mangeaient dans le
temple des choses sacrifiées , et on les appelait Sacri flans ; les
autres ne sacrifiaient pas , mais offraient publiquement de Ten-
cens, et on les appelait Encensans ; enfin il y en avait qui , par
leurs amis ou par d'autres moyens , obtenaient du magistrat un
certificat ou un billet qui les dispensait de sacrifier, sans que pour
cela on pût les regarder comme chrétiens ; et, parce que ces cer-
tificats s'appelaieut en latin IWelH , on appelait ces chrétiens Li-
bellatiques.
Lorsque la paix fut rendue à rÊglise , sous l'empereur Gallus,
la plupart de ces chrétiens faibles demandèrent à être reçus à la
paix et à la communion.
Mais on ne les y admettait qu'après qu'ils avaient passé par les
différens degrés de pénitence établis dans l'Église, et le pape Cor-
neille se conforma sur cela à la distipline de l'Église.
Novatien , par haine contre Corneille ou par dureté de carac-
tère , car il était Stoïcien et d'une mauvaise santé ; Novatien ,
dis-je, prétendit qu'on ne devait jamais accorder la communion à
ceux qui étaient tombés dans Tidolâtrie , et se sépara de Cor-
neille >•
Parmi les chrétiens qui avaient souQert constamment pour la
* Epiph., Haïr. 57, Aug., Haer. Al.
s Euseb.! msU, L 6, c 35. Socr., 1, h, c. i3. Epiph., Hser. 59.
NOV 241
foi de Jésus-Cbrist , beaucoup embrassèrent le seutîment de No-
vatien , et il se forma un parti.
No?at, prêtre de Carthage, qui était venu à Rome pour cabaler
contre saint Cyprien , se joignit à Novatien et lui conseilla de se
faire ordonner évéque de Rome.
Novatien se rendit à son avis , envoya deux hommes de sa cabale
vers trois évéques simples et grossiers qui demeuraient dans un
petit canton d'Italie , et les fit venir à Rome sous prétexte d'apai-
ser les troubles qui s'y étaient élevés.
Lorsqu'ils furent arrivés , Novatien les enferma dans une cham-
bre , les enivra et se fit ordonner évéque.
Le pape Corneille, dans un concile de soixante évéques, fit
condamner Novatien et le chassa de TËglise *.
Novatien alors se fit chef d'une secte qui a porté son nom et
qui prétendit qu'on ne devait point admettre à la communion
ceux qui étaient tombés dans le crime d'idolâtrie. Novatien et ses
premiers disciples n'étendirent pas plus loin la sévérité de leur
discipline; dans la suite, ils exclurent pour toujours ceux qui
avaient commis des péchés pour lesquels on était mis en péni-
tence ; tels étaient l'adultère , la fornication : ils condamnèrent
ensuite les secondes noces ^.
La sévérité de Novatien à l'égard de ceux qui étaient tombés
dans l'idolâtrie était en usage ; ainsi il ne faut pas s'étonner de ce
qu'il trouva des partisans, même parmi les évéques; mais presque
tout Tabandonnèrent. 11 y avait encore des Novatiens en Afrique
du temps de saint Léon^ et en Occident jusqu'au huitième
•iècle *.
Les Novatiens prirent le nom de Cathares, c'est-à-dire Purs : ils
avûent un grand mépris pour les catholiques , et lorsque quel-
ques-uns d'eux embrassaient leur sentiment, ils les rebapti-
saient ^
Novatien ne faisait que renouveler l'erreur des Montanistes.
foife* Fart. Momtan.
t Euseb., ibid.
> Êpipb., ibid. Théod., Hxret. Fab., 1. 3, c. 5.
* Cypr., ep. 73 ad Jubaianum. Ambr., 1. i, De pœn., c. 6. Dyon»
Alei.,ep. adDyon. Rom., apud. Euseb., 1. 7, c. 7.
A Photius, Cod., 182.
H. 21
U7 OECO
O
OEGOLAMPADEy naquit à Weissemberg, dans la Franconie,
Tau 1482, 11 apprit assez bien le grec et Thébreu ; il se fit moine
lia sainte Brigitte, dans le monastère de Saint-Laurent, près
d*Aiig8boiirg ; mais il ne persé?éra pas longtemps dans sa Toca-
tion ; il quitta son monastère pour se rendre à Bâle , où il fut fait
euré. La prétendue réforme commençait à éclater : OEcolampade
en adopta les principes et préféra le sentiment de Zuingle à celui
de Luther sur TeucharisUe.
11 publia un traité intitulé : De Texposition naturelle de ces pa-
roles du Seigneur, Ceci e$t mon corps. Les Luthériens lui répon-
dirent par un livre intitulé : Syngramma, c*est-à-dire, écrit com-
mun. OEcolampade en publia un second intitulé : Aniiiyngrammë
et d'autres contre le libre arbitre , Tinvocation des saints , etc.
Imitant Texemple de Luther, OEcolampade se maria , quoique
prêtre , à une jeune fille dont la beauté Tavait touché ; voici com-
ment Érasme le raille sur ce mariage : « OEcolampade, dit-il, vient
> d*épouser une assez belle fille; apparemnient que c'est ainsi
B qu'il veut mortifier sa chair. On a beau dire que le Lulhéra-
B nisme est une chose tragique , pour moi je suis persuadé que
» rien n'est plus comique ; car le dénoûment de la pièce est tou*
» jours quelque mariage, et tout finit en se mariant, comme dans
> les comédies ^. >
Ërasme avait beaucoup aimé OEcolampade avant qu'il eût em-
brassé la réforme : il se plaignit que depuis que cet ami avait
adopté la réforme il ne le connaissait plus , et qu'au lieu de U
candeur dont il faisait profession tant qu'il agissait par lui-même,
il n'y trouvait plus que dissimulation et artifice lorsqu'il fut entré
dans les intérêts d'un parti*.
Chauffepied et les pauégyrisles d'OEcolampade n'ont point parlé
de ce jugement d'Ërasme ; nous croyons devoir le remarquer, afin
que l'on apprécie les éloges qu'il donne à la plupart des réforma-
teurs , dont la vie privée est trop peu intéressante pour remplir
des volumes.
*Ep.Erasm., I. 8,cp. 41.
« Ep, Erasm., 1. 18 , cp, 23 j 1. 19, cp. 123 1 1, 30, ep, 47,
OPIl
Il bcaiicoiip 'le p»rt ti U réforn
MS
lie Suiue :
OEtinlamitnde i
■ournl Si Itùle en 13:il >.
OPHITÏS, broDclie (tes Gnosiiqucs qui croyaient quels s«-
|Mie sV.tnit raRDifcstée aux hummes sous h ligure d'un serpent,
ise de cela, rendaient un culie k cei anima).
Les Gnostiques admeltsîent une foule de génies qui predni-
.□iit dans le inonda ; ila honoraient parmi ees génies oeol
rajeieni avoir rendu an genre humain les services les pim
BIportans : on Toit combien ce principe dut produire dedîfisiona i
^rmi les Cnostiqucs, et ce Tut oe principe qui produisit !«■ i
I ^bilcR : on irouie dini la Genèse qiip ce iitx un serpeni qui 6t '
Mnalire ï rbamme l'arbre de lu science du bien et du mal , al
j^'après qu'Adam et Eve en earenl niang^ leurs yeun s'ouvrireal
"s couDurent le bien et le mal.
f liCS Gflostiques , qui prétendaient s'élever au-dessus des autres
inn>eK par leurs lumières , regardaient donc le génie ou la pni»-
V qni avait appris aux hommes ù manger du Truit de l'arbrA ^
f fc science du bien et du mal comme la puissance qui avait rendu 4
n humain le service le plus signalé , et ils l'honoraiert i
s la ligure qu'il avait prise pour instruire les bommes. Hs ti-
nt nn sei^etil cnrernié dans une cage , et lorsque le temps Je
c h mémnire du senice rendu au genre humain par l>
t qui SOUS la Torme d'un serpent a\ait faîl connsim i
irbre de sdence éliiit venu, ils ouvraient la porte delà cagedt
it et l'appelaienl : le xerpenl venait , montait sur la table ott :
liaient Iet]iains, et s'entortillait autour de ces pains. Voilï ca
Jl'ilt prenaient pour leur eucharistie et pour un sacrifice parfait,
[ A pris l'adora ti'm du serpent, ils oFFi^ienl par lui, disaient-ils,
c hymne de louange au Père céleste et Unissaient ainsi leurf
litières *.
Origène nousa conservé leur prière : c'était un jargon inintelli-
gible, ï peu près comme les discours des alchimistes. On voît
cependant par celte prière qu'ils supposaient le monde soumis ï
difTéreDieis puissances ; qu'ils crojaient que ces puissances avaient
léparé leur monde des autres et s'y étaient pour ainsi dire enfoo-
p < Spond. Annal., an. 1536, n. 16, capite de viia CEcotampad. Bo»- I
«M, Hîsl. des Variai., I. 3; Hiit delà rcrormc de Sulssf, 1.1.
> Origcn,, 1. 6. cont. Ccli., p. 191 et 3Qà: I. 7, p, 3S8; Pbilaslr.,
e. 1. llpipb., Hier. 30. Damascen., c. 37, De bar.
244 OSM
cées et qu*il fallait que rame, pour retourner au ciel, flécblt ces
puissances ou les trompât et passât incognito d*un monde à
Tautre.
Cette espèce de Gnostiques qui honoraient le serpent comme
le symbole de la puissance qui avhit éclairé les hommes était en-
nemie de Jésus-Christ, qui n^était venu sur la terre que pour écra-
ser la tête du serpent, détruire son empire et replonger les hom-
mes dans rignorance. En conséquence de cette idée, ils ne
recevaient parmi eux aucun disciple qui n*eût renié Jésus-Christ.
Us avaient un chef nommé Euphrate.
ORfilBÂRIENS, secte qui niait le mystère de la Trinité, la ré-
surrection, le jugement dernier, les sacremens : ils croyaient que
Jésus-Christ n^était qu*un simple homme et qu*il n'avait pas souf-
fert *.
Les Orbibariens parurent vers Tan 1198 : c'étaient des vaga-
bonds auxquels, selon les apparences, on donna le nom d'OrMàa-
riens, tiré du mot latin Oriis, parce qu'ils couraient le monde
sans avoir aucune demeure fixe. Ils paraissent sortir de la secte
des Yaudois : cette secte fut proscrite et anathématisée par Inno-
cent III.
OHËBITESf branche de Hussites, qui, après la mort de Zisca,
se mirent sous la conduite de Bédricus, bohémien : ils s'appelaient
Orébites, parce qu'ils s'étaient retirés sur une montagne à la-
quelle ils donnaient le nom d'Oreb. Voyez l'art. Hussites.
ORIGËNE, dit l'Impur, était Égyptien de nation : vers l'an
290, il enseigna que le mariage était de l'invention du démon ;
qu'il était permis de suivre tout ce que la passion pouvait suggé-
rer de plus infâme, afin que l'on empêchât la génération par telle
voie que l'on pourrait inventer, même par les plus exécrables.
Origène l'Impur eut des sectateurs qui furent rejetés avec hor-
reur par toutes les Églises ; ils se perpétuèrent cependant jusqu'au
cinquième siècle *.
OSl\NDRISME, doctrine d'Osiander, disciple de Luther.
Voyez l'article des sectes sorties du Luthéranisme.
OSMA (Pierre d'). Voyez Pierbe d'Osma.
* D'Aiigentré, Collect. Jud., 1. 1. Eymeric, Director., part. 2, qusst.
iA. Spond.ad an. 1192. Dup., n. 20.
> Epiph.» Haer. 68. Baron, ad an. 256.
p
^ ■DiriPim
PACIFICATEURS, nom que l'on dunua ù ceux qui adhéraient
h l'HénolicoD de Zenon, Yoyfi MuNOTHïLtrES. Les Antbaptisles
prirent lussi ce nom, prétemlant que leur dociriue èublirait sur
la terre une paix étcnieile.
fALàUlTES, Itrs mêmes que ks HcsicaBles. Voj/es rel ar-
PARFAITS, nom que prenaient la plupart des Lérétiqucs qui
prétendaient rérunner l'Ëglise ou pratiquer quelques Vdrtiis ex-
PASSAClEiNS : ce mol signifie tout suint et a été pris p»r dif-
Cérens fanatiques qui prétendaient ï une sainteté singu- '
tPASSALOItYNCHITES; c'est ainsi que l'on appelle ceriaini |
rétiques descendus des Monianistes qui croyaient que pour et»
nvé il était nécessaire de garder perpétuellement le silence ;
Il lensient continuellement leur doigi sur la bouillie.
[■ PASSIONISTES, nom donné i ceux qui prétendaient que Dien i
i Përe OTiit souRert. Voyet Prakkas.
P'PATRIPESSIEKS, les mêmea que les Passionistes.
l. PAUL, dit l'Arménien, chef des Manichéens connus SOUS la J
m de Psuliciens. Vouez l'article MintCH^ENs.
I^PAULDE: SAHOSATE rut aln» nommé parce qu'il était de la ^
Hle de Samosate, sur l'Eupbrate, dans la Syrie eiipbraiésiennp,
■s la Mésopotamie ; il fut ê*èque d'Antiocbe vers l'an 262.
t Zéuobie régnait alors en SjrJe, et sa cour rassemblait tous les
:s célèbres par leurs lalens et par leurs lumières ; elle y ap-
pela Paul de Samosate, admira son éloquence, et voulut s'enlro-
nir avec lui de la religion chrétienne.
Celle princesse savait les langues et l'bisioire; elle préPéraït U
religion juive à toutes les religions ; elle ne pouvait croire Im
mystères de la religion cbréiienne : pour faire tomber cette ré* J
pugoance, Paul ticba de réduire les myslËres ï des notions si
pies et intelligibles. Il dit i Zénnbie que les trois personnes dft 1
la Trinité n'étaient point trois dieu», mais trois attribut» se
quels la divinité s'éiail manifesiée aux hommes; que Jésus Cbrïsl j
n'était point un Dieu, mais un homme auquel la sagesse a'étai} I
346 PAU
communiquée ezlraordînairement et qu*clle n*avait jamais aban-
donué *,
Paul de Samosate ne regarda d'abord ce changement dans la
doctrine de l^Église que comme une condescendance propre à
faire tomber les pr^ugés de Zénobie contre la religion chrétienne,
et il crut qu*il pourrait concilier avec cette explication le langage
et les expressions de TËglise sur le mystère de la Trinité et sur
la divinité de Jésus-Christ : il avait d'ailleurs compté que cette
condescendance demeurerait secrète ; mais elle fut connue, et les
fidèles s'en plaignirent.
L'évèque d*Antioche ne s'occupa plus qu'à justifier le change-
ment qu'il avait fait dans la doctrine de l'Ëglise : il crut qu'en
effet Jésus-Christ n'était point Dieu et qu'il n'y avait en Dieu
qu'une personne.
Les erreurs de Paul alarmèrent le zèle des évèques; ils s^as-
semblèrent à Ântioche, et Paul leur protesta qu'il n'avait point
enseigné les erreurs qu'on lui imputait ; on le crut,'et les évèques
se retirèrent; mais Paul persévéra en effet dans son erreur, elle
se répandit, et les évoques s'assemblèrent de nouveau k Ântioche :
Paul fut convaincu de nier la divinité de Jésus-Christ ; le concile
aussitôt le déposa et l'excommunia d'une voix unanime.
Paul de Samosate, protégé par Zénobie, ne quitta pourtant
point son église ; mais, Aurélien ayant détruit la puissance de cette
princesse, les catholiques se plaignirent à cet empereur de la vio-
lence de Paul de Samosate, et il ordonna que la maison épisco-
pale appartiendrait à celui auquel les évèques de Rome adresse-
raient leurs lettres, jugeant que celui qui ne se soumettait pas à
la sentence de ceux de sa religion ne devait plus avoir rien de
commun avec eux '.
Aurélien ne prit point d'autre part à la dispute de Paul et des
catholiques : il accorda aux catholiques la protection que les lois
doivent ù tout citoyen pour chasser de sa maison un homme qui
l'occupe malgré lui, et à toute assemblée ou k toute société pour
en chasser un homme qui lui déplaît et qui n'observe pas ses lois;
mais il ne punit point Paul de Samosate , il le laissa jouir tran-
quillement des avantages de la société civile, et les catholiques
ne demandèrent pas qu'il en fût privé : Paul de Samosate ne fut
* Rpiph., Hsres. 65. Hlllar., De synod.. p. 196.
3 Théodoret, Hçret, Fab., l 9, c. 8.
I PEL 34T
ipe le chef d'une secte obscure dont on ne voïaii pax los moin-
dres reâies au milieu du dnquiëine siècle et que la plupart n«
BOUDaisMient pas même de oom ; tandis que l'Arianistne, dont un
Gt une ilTaire d'Éiai, remplissait, dans le BiMe suWanl, l'empire
de troubles et de désordres.
Saint Lucien, si célèbre dans l'Orient par sa sainteté, par son
érudition et par son murij're, resta long-temps attaché k Paul da
Samosaie et se sépara même de trois successeurs de Paul de Sa-
M. de Tillemcmt, qui croit qu'on ne doit pas justifier l'attaclie-
nicnl de saint Lucien pour Paul de Sauiosate, dit qu'on peut l'ei-
cu»er. ■ Suint Lucien, dit-il, était du même pajsque Paul deSa-
• mosate ; il pouvait avoir encore avec lui d'autres liaisons, avoir
• même été élevé par lui au sacerdoce; ainsi il ne sera point
• étonnant qu'il ne se soit pas aisément convaincu des feules et
> des erreurs d'un homme qu'il honorait comme son père el
• comme son érSque, et qui couvrait ai bien ses erreurs qu'on eut
■ de ta peine kl'en convaincre : que s'il y en a qui censurent trop
durement les Taules que le respect et l'amitié font faire, au lien
^^^^'en
^K«tan
n Tout peut-être une ploa
mes et capables de te
condamné Paul de Sarno*
les en informer, et il Ait
donc alors bien dUtinct«'
croyait pas que l'oi
la compasslou,
oubliant qu'ils sont liu
ime les autres', i
le concile d'Antiocho, après avo
sale, écrivit i toutes les églises pou
généralement approuvé, On prolessa:
ment la divinité de Jésus-Christ, et
pût Taire dans ce dogme le moindre changement,
Ix sentiment de Paul de Samusale n'étjiit point dilTérent de ce-
lui deThéodato :il le prouvait par les mêmes raisons; on le r6-
Tutait par les mêmes principes.
PELAGE, moine anglais qui enseigna, an commencement dn
cinquième siècle, l'erreur qu'on noiumo île son nom le Pétagli-
nisnie.
Du eauiea qui ont donné naisMnef à l'erreur de Pelage.
Eli*fc.glise, presque ïsi
|[ biiaiiqucs qui avaic
avait été troublée par une Toula |
lilangc inon&trui'ui des dognx
S48 PEL
du chrislianisme, des principes de la cabale et des rêveries des
Goostiques.
Des schismatiques, tels que les Montanistes, les Novatiens, ra-
valent déchirée.
Des hérétiques, tels que Noët, Sabellius, Paul de Samosate,
Ârius, avaient combattu la Trinité, la divinité de Jésus-Christ.
D^autres, tels que Marcion, G«rdon« Manès, avaient attaqué la
bonté et Tunité de Dieu, supposé dans le monde des êtres mal-
faisans etindépendans de TËtre suprême, et prétendu queThomme
était méchant et pécheur par sa nature ou porté au mal par des
puissances auxquelles il ne pouvait résister.
Dans le môme temps, les différentes sectes de philosophes
avaient attaqué le christianisme dans ses dogmes et dans sa mo-
rale ; ils opposaient aux chrétiens les principes sur lesquels pres-
que toutes les écoles avaient établi le dogme d*une destinée inévi-
table et d*un enchaînement étemel et immuable de causes qui
produisaient et les phénomènes de la nature, et toutes les déter-
minations des hommes.
Le peuple même était rempli de Tidée d'une fortune aveugle qui
conduisait toutes choses. Les Grecs peignaient Timothée en-
dormi et enveloppé d*un filet dans lequel les villes et les armées
allaient se prendre pendant son sommeil. On portait l'image de la
fortune sur les étendards militaires; toutes les nations lui avaient
élevé des temples et Thonoraient comme la divinité qui décidait
du sort des nations et du bonheur des hommes.
Telles sont les erreurs que les Pères eurent à combattre pen-
dant les quatre premiers siècles et dont FÉglise avait triomphé.
On n'avait disputé ni sur le péché originel ni sur la nécessité
de la grâce, et les écrivains qui avaient défendu le dogme de la
liberté contre les Marcionites, les Manichéens, les Stoïciens, etc.,
ne s'étaient occupés qu'à combattre les systèmes des philosophes
que les hérétiques adoptaient et à prouver la liberté de l'homme
par des principes admis par leurs adversaires mêmes et indépen-
dans de la révélation.
En un mot, ils avaient presque toujours traité la question de la
liberté comme on la traiterait aujourd'hui contre Hobbes, contre
GoHins. La nécessité de la grâce ou la manière dont elle agit n'a-
vait été de nulle considération dans toutes ces contestations, et
les chrétiens qui défendaient la liberté contre ces ennemis pré-
tendaient et devaient trouver dans l'homme même des ressources
pour résister ï
prèle n il !ii<
PEL 249
au crime vers lequel leurs adversaires
'Dlnlni! nécessaire ment, Sainl Aii(;ustiii
dit lui-même qu'il ne hut poial jiirler de la gvïce ï ccui qui ne
sont pas clirélieus '.
Les Pèr«E qui avaient parlé Je la liberlA, daas leurs discours on
dans leui'S homélies, pour détruire cette idi^e de la Torlune et du
dMtin qui éluit répaudue dans le peuple, ou puur combattre le*
Uarcîonites, les Manichéens, etc., n'araieni point parlé de la
grAce ; ils avaient tiré leurs preuves de l'Iiisloire, du spectacle de
la nature, de la raison méuieet de l'expérience.
Mais lorsque Ici Pères aTaïenl !i faire sentir aux chrétieni tout
ce qu'ils devaient i laLontt^et ïlaniisérlcordede Dieu; lorsqu'ils
se proposaient de réprimer l'orgueil ou U vanité ; lorsqu'ils vou»
laicnt faire sentir ù l'homuie sa dépendance et lui Taire connaître
toute la puissance de Dieu, ou enfin lorsqu'ils avaient à prouver
aui infidèles les avantages de la religion chrétienne et ta nèces-
siiédo l'embrasser, alors ils enseignaient que l'homme nais-ait
coupable et qu'il De pouvait parlui-méme se réconcilier avec Dieu
ni mériter la félicité qu'il destioaiiaux fidèles.
Ils considéraient alors l'homme destiné I une fia surnaturelle k
laquelle il ne pouvait parvenir que par des avions d'un mérite
surnaturel. La liberté de l'homme, ses forces et ses ressources
pour les verlusnalurelles, ne pouvaient jamais l'élever jusqu't des
actions d'an ordre surnaturel ; elles laissaient doncPhomine dans
une impuissance absolue par rapport au salut ; elles étaient donc
de nulle considération, et les Pères, sans se contredire, ont alors
représenté l'homme comme une créature livrée dès sa naissance
au crime, attachée par un poids invincible au désordre, et dans
uue impuissance absolue pour le bien.
Si le temps ne nous avait conservé des ouvrages des Pères
que les passages dans les<iuels ils établissent la liberté de l'homine,
nous n'aurions aucune raison de juger qu'ils ont cru que l'homme,
p^iur être juste , vertueux et chrétien , eût besoin du secours do
la grlce ; et si tous les ouvrages des Pères avaient péri , excepté
les endroit! où ils parlent de la nécessité de la grâce, nous ne
pourrions pas juger qu'ils aient cru que l'homme est libre ; nous
serions au contraire autorisés i penser qu'ils ont regardé l'homme
comme t'esclave du péché.
■ Aug., Du iiau cl grol., c. es.
2S0 PEL
Les dililérMites manières dont les Pères avaient parlé de la
grâce ci de la liberté devaient donc faire nier la liberté ou la
nécessité de la grâce , pour peu qu'on eût d'intérêt d'exagérer les
forces de Thomme ou de les diminuer ; car l'intérêt ou le désir
<pie nous avons d'établir «ne chose anéantit, pour ainsi dire, à
nos yeux tout ce qui lui est contraire, et ne laisse subsister pour
BOUS que ce qui lui est favorable, parce qu'il fixe notre attentioa
sur CCS objets.
C'est ainsi que Pelage fut conduit â l'erreur qui porte son nom*
Vers la fin du quatrième siècle et au commencement du cin«
quième , une infinité de monde allait visiter les lieux saints ; ces
pèlerinages firent connaître en Occident les ouvrages des Pères
grecs.
Ces Pères avaient combattu les Manichéens , la fatalité des phi*
losophes , le destin et la fortune du peuple.
Rufin , qui avait été long-temps en Orient , était plein de œi
ouvrages : il en traduisit une grande partie , et se concilia par ces
traductions , par ses connaissances et par sa conduite , beaueoup
de considération.
Ce fut dans ce temps que Pelage sortit d'Angleterre pour al-
ler visiter les lieux saints; il se rendit à Rome, et y fit connais-
sance et se lia d'amitié avec Rufin ; il lut beaucoup les Pères
grecs , surtout Origène.
Pelage était né avec un esprit ardent et impétueux; il ne voyait
rien entre l'excès et le défaut , et croyait qu'on était toujours au-
dessous du devoir lorsqu'on n'était pas au plus haut degré de la
vertu : il avait donné tout son bien aux pauvres , et faisait pro-
fession d'une grande austérité de mœurs.
Dans des caractères de cette espèce , le zèle du salut du pro-
chain est ordinairement joint au désir d'amener tout le monde à
son sentiment et â sa manière de vivre et de penser. Pelage
exhortait et pressait vivement tout le monde de se dévouer à la
haute perfection qu'il professait *.
Mais on répondait souvent à Pelage qu'il n'était pas donné à
tout le monde de l'imiter , et l'on s'excusait sur la corruption ei
sur la faiblesse de la nature humaine.
Pelage chercha dans l'Écriture et dans les Pères tout ce qui
pouvait ôter ces excuses aux pécheurs ; son attention se fixa
^ Aug., De peccat. merit., 1, 2, c, 16.
iBreHemont sur lous ks eiidroils dans lesquels Irs IVres (lûfcti-
deut k liberté de l'Immine conlre les purtisaiis Je lu niiuliiû , ou
reprocheal aux cbréliens leur allacliciueDl aa vice , leur lenteur
dans la earrlèro de tu venu.
Tout ce qui prouvait lu corruption de l'Iiomme ou le besoin de
la grAce lui clail écbappc', il crut donc ne suivre que la duclrîno
des Pérès en enseignaai que l'homme pouvait, par ses propres
forces, l'élever au plus haut dv^rÉ de perreclion, et qu'où ne
pouvuil rejeter sur la corruption de la nalure l' attache menl aui
biens de la terre el l'iDdifTéreDCe pour la vertu ' .
De Pflage et de »ft disciplei depui» la naistaiice de ton erreur
jutqu'au lempt ok Jvtitn devint le chef des l'itaçieni.
h
lous venons de voir le premier pas que Pi'Iage fit vers l'er-
'. Couime il ; avait i Rome beaucoup de personnes iosiruites
p«r Rulin, qui élaîeni dans ces setitimens, el connue Pelure avnit
beaucoup d'adresse el était très-excrcë dans l'art de la dispute,
il se fil beaucoup de disciples â Rome *.
Cependant beaucoup de personnes furent cJioquéea de celle
doctrine : on trouva que Pelage ilullait trop rar^ueil liumain ;
que l'ËcriUire nous purUit bien différemment de l'Iionime; qu'elle
nous apprenait qu'il u'j avait point d'hoDinie juijl«; que la nature
humaine Était corrompue ; que depuis le péché du preoiin
homme nous ne pouvons faire aucune bonne Oiuvresans la grlce;
que c'cUil ainsi que les Pérès nous parlaient de l'homme.
Home ayant été prise par les Gutbs, Pelage en sortit et passa
en Afrique *vec Céleslius , le plus babile de ses seclaleure'.
Pelage ne s'arrêta pas long'Iemps en Afrique; il y laissa Cé-
leMÏus el passa en Orient.
Céleslius se fixa b Cartliage, oii il enseignait les senliuiens de
son maître.
Paulin, diacre de l'Ëgliae de Carihaee, cita Célestius devant
un concile assemblé à Carthage, el l'accusa de Miulcnir : 1- qu'A-
ilnm avait été créé moricl, et qu'il serait mnrt , sciil qu'il e(ti
pévbè ou non ; 3° que le péché d'Adam n'avait fait de mal ipi'it
< Ane-, De nul. et ttaU; De lib. arliitr.
^Aug. L-p, y», (. 2, l'Uil. llcneilict.
959 PEL
loi et non à tout le genre humain ; 3« que la loi conduisait au
royaume céleste aussi bien que i*Ëvangile ; 4* qu'avant Tavène-
ment de Jésus-Ciirist les hommes ont élé sans péché ; 5* que les
enfans nouveau - nés sont dans le même état où Adam était avant
sa chute ; 6* que tout le genre humain ne meurt point par la mort
et par la prévarication d'Adam , comme tout le genre humain ne
ressuscite point par la résurrection de Jésus-Ghrisl; 7» que Thomme
naît sans péché , et qu'il peut aisément obéir aux commandemens
de Dieu, s'il le veut.
Le concile de Carthage condamna la doctrine deCélestîus, qui
fut obligé de quitter l'Afrique , et qui repassa en Sicile où il s'oc-
cupa à défendre ses erreurs *.
Pelage f qui était à Jérusalem , publia différens écrits oh il ex-
pliquait ses sentimens *.
Il avouait que , quoiqu'aucun homme , excepté Jésus-Christ ,
n'eût été sans péché , il ne s'ensuivait pas que cela fût impossi-
ble. 11 assurait qu'il ne disputait pas du fait, mais de la possiBi-
lité , et qu'il reconnaissait que ce n'était que par la grâce ou avec
le secours de Dieu que l'homme pouvait être sans péché.
Cette doctrine déplut à beaucoup de monde à Jérusalem. Jean,
évéque de cette ville , convoqua une assemblée à laquelle il ap-
pela trois prêtres latins , Avitus, Vital et Orose : ce dernier était
alors h Bethléem avec saint Jérôme. Comme il s'était trouvé en
Afrique dans le temps de la condamnation de Célestius, il raconta
à rassemblée ce qui s'était fait à Carthage contre Célestius , et il
lut une lettre de saint Augustin contre les erreurs de Célestius.
Pelage déclara qu'il croyait que l'homme sans grâce ne pouvait
être sans péché ; mais que cela ne lui était pas impossible avec
le secours de la grâce. Le concile renvoya le jugement de Pelage
au pape Innocent et lui imposa silence '.
On tint la même année un concile en Palestine , où quatorze
évêques se trouvèrent *,
Héros et Lazare donnèrent à Euloge , archevêque de Césarée ,
une accusation par écrit contre Pelage : cette accusation contenait
« Aug., De peccat. origin., c S, 3, &, ep. 80. Conc Carth., ep. ad
Jun., cp. 88, intcr. Aug., De gestis Pulestin. Prosp. conlr, TerL
> Aug., Degrat. christ., c 37. Oros. Apo)., p. G62.
* Oros.Apol. *
A An Âi5,
pluiiieiirs priiposiiiiiiH, iluns le»qudles P<^l.ige scitililaii
ni^cessiid de b grûce, dire qu'un enfiDl peui éire sauvé sans l« I
bapiéme . ei soul«nir que riiooimp |ieui vivre iiaiis it^ciu^,
l'ilt^e comparut dans le concile , reconnut h nécessité Je la 1
grjce, dit qu'il avait soutenu que Tbommc pouvait être sans pé-
cbé ; mai» il assura qu'il avait dit que cela n'était possible que j
par in grice : ii nia i|u'il l'ûl jamais dit que les cnRiDs pouvaient
£lre sauvés sans le bapUme.
I.c concile approuva les réponses de Pf Uge , et le déclara dîgn« |
de la communion de l'Ë^IIse cniliolique *. f
Avant que li-s actes de ce concile fussent publiés , Pelage écrl- I
'ses amis que ses sentimens avaicni Ëià approuvés , et 1
leilrc publique.
10 doutait pas que Ti-laga n'eût trompé les TËrcs, el j
'il tie nitt intérieurement la nécessité de la g r3 ce.
Pour se justifier. Pelage composa un ouvrage sur le libre ai
Dans cet ouvrage , ii reconnaissait différentes sortes d«
nécessaires il l'bouune pour faire le bien ; mais il donnait
I de grSce , ou â ce que nous appelons les dons naturels ,
teb que l'etislcnce, le libre arbitre, t'inleJligcuce ; ou aux se-
eitérieurs , tels que la loi qui nous dirige , la révélatioK ^
us iDSlruil, l'exemple qui nous anime el nous soati'
innaissait même qu'il ; avait des grâces intérieures, i
CTojaît que ces grJces u't^uieni que des lumières qui éclaira icntlj
renleodement ei qui n'étaient pas même ab&olument nécessain
pour pratiquer l'Ëvangile avec plus de faciliié *.
Les évéques d'Afrique, assemblés ï Cartilage, furent iofurmétf^ ,1
parles lettres de Uéros et de Lazare, de la doctrine de Pelage ni
du progrès qu'elle faisait en Urient : le concile fit lire ce qui avait,!
élâ fait contre Céleslius environ cinq ans auparavant , condamnt 1
de nouveau Pelage et Cùlesiius et prononi;a analtième coniw 1
|l tfiut bomme qui couiballrait la grico marquée par les prières I
Ades saints , en prétendant que la nature est assex forte par elltr- 1
^néme pour surmonter les pécliés et observer les lois de
■ et qui nie queTenfaot soit tiré de la |>erdiiion par lo bapiéuMl
* de Jésus-Cbrisi. •
Les évéques écrivirent au pape Innocent pour l'iiifurjucr Je ce |
tebt
tE
354 PtXi
qu*iU aTsient fait contre Péltge et contre Célestias , afin qaMl 8*a-
ntt à eut pour condamner Terreur de Pelage ^
Le concile profincial de Namidie, assemblé à Milève, et
composé de soixante et un éféques , condamna aussi Terreor de
Pelage et écrivit an pape comme le concile de Garihage.
Innocent !«' approuva le jugement deséTêqœs d*Afriqne, et
condamna Pelage et Gélestius *.
Pelage et Gélestius sentirent bien qu*il8 étaient perdus si celte
condamnation subsistait ; Pelage écrivit donc an pape , et Géles-
tius se rendit à Rome pour faire lever rexcommunication portée
contre Pelage et contre lui.
Innocent était mort lorsque Gélestius arriva à Rome , et Zozime
occupait le siège de saint Pierre.
Gélestius lui présenta une requête qui contenait Texposition de
sa foi ; il s*étendit beaucoup sur tous les articles du symbole »
depuis la Trinité et Tunité de Dieu ju8qu*à la résurrection des
morts f sur quoi personne ne Taccusait de se tromper ; puis , ve«
nant aux articles en dispute , qn*il traitait de questions problé*
matiques et qui n'étaient point matière de foi , il protestait ne
rien tenir que ce qu*il avait puisé dans les sources des apôtres et
des prophètes , et néanmoins il déclarait qu*il se soumettait au
jugement du pape et qo*il voulait corriger les choses dans les^
quelles Zozime jugerait qu*il s'était trompé.
On ne sait point comment il s'exprimait sur la grâce, sur le
péché originel. 11 confessa qu'il fallait baptiser les enfans pour la
rémission des péchés , et néanmoins il soutenait que la transmis-
sion du péché par la naissance était contraire à la foi et faisait
injure au créateur ^.
Le pape Zozime assembla des évéqoes et des prêtres , examina
tout ce qu'on avait fait contre Gélestius et condamna ses senti •
mens, en approuvant la résolution dans laquelle il était de se
corriger ; car, dit M. de Tillemont , « on peut avoir le cœur catho-
» liquc , en ayant des seulim^ns contraires à la vérité , pourvu
» qu'on ne les soutienne pas comme des choses assurées et qu^on
» soit dans la disposition de les condamner , lorsqu'on en con-
» naîtra la fausseté *, »
* Ep. 96, 94, 95.
2 Ep. 91, 93.
' Au^., De grat. christ, c. 50, 33. De peccat merit., c, 5, 0, S3t
* TiUcmont, Hist. ecclés., t, 13, p. 720.
p PEL
llMime pleine d'équiié , de sagesse el de charité, doni l'ob-
serva lion empL'ulie rail bien des idïui, mais que l'ignoruiice et
l'envie de dominer ou de faire (oriune s'etTorceruni toiiji
de Taire regarder comme l'effet d'une indifférent'
nelle.
L'indulgence sage et ebr^lieone de Zaïme ne l'empêcha pai
d'examiner avec soin les «enlimens de G^lsElius; il lui Qt toutes
les questions qui pouvaient réi:1airer sur su sincérité , et eoliD il
lui deoiBoda s'il condamnait les erreurs que le public lui repro-
chait ; Célesiius lui répondit qu'il les condamnait selon le inti-
ment du pape Innocent.
La soumission apparente de Cëlestius , le fruit que l'itglise
pouvait retirer de ses talens , la charité que l'on doit ù l'erreur,
engagèrent Ziizïue à ne pas le condamner; maïs il ne leva pas
reicommunicalion portée contre lui.
Il écrivit aui évéqiies d'Afrique ; non , disaiL-il , qu'il ne sût
bien ce qu'il devait faire , mais pour faire i tous ses frères l'hoit-
neur de délibérer avec eux sur la manière dont il fallait traiter
un homme qui avait d'abord été accusé devant eux : il leur repn><
chait d'avoir agi dans celte aSaire avec trop de pri^cipitation , et
déclarait que si avant deux mois on ne venait h Rome agir contre
Céleatius , il le regarderait comme catholique , après les déclan-
lioDS si manifestes et ai précises qu'il avait données '.
Pélai^e, dans su lettre au pape Zoxinie , reconnaissait le péché
originel et la nécessité de la grâce plus claii-enient que Célestius;
le pape en informa aussi les évéques d'Afrique.
Aurèle , évéque de Cartbage , ujiant reçu les lettres de Zoiime,
convoqua les évéques des provinces les plus voisines, écrivit à
Zozime pour qu'il suspendit non jugement ; l'année luivante , les
évéques s'assemblèrent su nombre de 214, et firent contre les Pé-
lagiens huit canons*.
t Mercator, Commonït., c. 1.
* Us condamnèrent dans ces canoiit :
1° Qnicon que dira qu'Adam a été créé mortel, el que sa mnri n'a
point été la peine do pédié, mois une loi de la nature.
>* Ceux qui nient qu'on doit bapliser Ica enfiini, ou qui, convenant
qu'on doit les baptiser, soultrnnent néanmoins qu'ils naissent sans
peclié originel.
3* Ceux qui disent que lu grflcc qui ju«lifie l'Iiomme par J^BUB-Cliriat
fla(re-Sei|tneur n'a pas d'autre ellel que de remetlrc le» pécliét <xmr
25G PEL
Les Pères d*Afnque informèrent le pape et Tempereur de ce qui
t^éuit passé dans le concile universel d*Âfrique.
Zoùme approuva les décrets du concile et reconnut que Pelage
€l Gélestius lai en avaient imposé : il les excommunia , condamna
leur doctrine et adressa cette condamnation à tous les évéqucs du
monde , qui Tapprouvèrent * .
L*empereur Honoré, ayant appris que les évèques d* Afrique
avaient condamné le Pélagianisme, ordonna qu'on traiterait les Pé-
lagiens comme des hérétiques, et que Pâage, enseignant des
erreurs condamnées par FEglise et qui troublaient la tranquillité
publique, serait chassé de Rome avec Gélestius.
L*empereur ordonna de plus de publier partout que tout le
monde serait reçu à déférer aux magistrats ceux qu*on accuserait
de suivre la même doctrine , et que ceux qui seraient trouvés
coupables seraient exilés. Pelage fut chassé de Jérusalem , et
Ton n'a su ni quand ni où il mourut.
Des Pélagiens , depuis que Julien d'Éclane fut leur chef jusqu'à
leur extinction.
L'empereur avait porté une loi qui obligeait tous les évèques à
signer la condamnation de Pelage, et c'est la première fois qu'on
mis , et qu'elle n'est pas donnée pour secourir l'homme aûn qu'il ne
pèche plus.
à* Ceux qui disent que la grâce ne nous aide qu'eu nous faisant
connaître noire devoir, et non pas en nous donnant le pouvoir d'ac-
complir les commandemcns par les forces du libre arbitre, sans le se-
cours de la grâce.
d" Ceux qui disent que la grâce ne nous est donnée que pour faire
le bien avec plus de faiùlilë, parce qu^on peut absolument accomplir les
commaudemens par les forces du libre arbitre et sans le secours de
la grûcc.
6" Ceux qui disent que ce n^est que par humilité que nous sommes
obligés de dire que nous sommes pécheurs,
7^ Ceux qui disent que chacun n'est pas obligé de dire, pardonnez-
nous nos péchés, pour soi-même, mais pour les autres qui sont péclieurs.
8* Que les saints ne sont obliges de dire les mêmes paroles que par
humilité. Aug., Ep. A7. Conc, t 7, p. 1021.
, ^ Aug., De peccat origin., c. 3. Aug. ad Bonit, c &, Ep. &7.
Mcrcalor Gommonit., c. 1.
- . »
PEL
lia cmpeKurs demauder une signature |
ioiirale aux ii^
i-ll |>«raH que Zoiimc n'atieadaii |>aa h lui àe l'empereur pour
Aligerlesévùttuesà souscrire !k lu condamna lion de PéUgc.
Dix-buil évèques d'Ilalie, ï la tèle desquels lïlail Julien , évo-
que d'Ëeluue, dans la Campanie, reFiuërent de signer la leiire da
Zuzïine, crojanine pouvoir condamner en conscience des p«rsrju-
ues absentes, donl ils n'avaient poi ni entendu Jeg jusUHcatianE,
et qui ataient condamné par leurs écrits les L-rrcurs qu'on leur
impulail ; ils déclarèrent donc qu'iU demeureraient dans unu
exacte Deuiraliié sur la condamnalion de l'élage.
Julien et ses adhérens Turenl déposés , et ce fut alors que cet
évâque devint le chef des Pélagieus : il demanda desjuge» eccld-
siastiques il l'empercui' , écrivit aux églises d'Orient , et défendit
p» ses écrits les senlimensde Pelage '.
^mSoqs ce nouveau cber, le Pélagîanisme prit une autre Tonne.
Hi Les Pélagiens avaient prétendu que le dogme du péché originel
f^UÎt cnotraire i la justice et i li sainteté de Dieu ; iU avaient dit
que si la concupiscence était un mal et un eOet du péché , en un
■nul, que si les enfans naissaient tous dans le péché , eoniuie leurt |
adversaires le prétendaient , il faudrait dire que te mariage , qui
est l'efTet et qui devient la source de ce pécbé , est un mal et u
désordre.
Saint Augustin avait répondu à cette difUculté dans le premier 1
livre du mariage et delà coucupiscence.
lulien Int ce livre , et prétendit que les principes de saint i
g nstin conduisaient au Manichéisme : il entreprit de faire voirq
dans les principes des calhalii|ue5 aussi hien que dans le systimo
des Uanicbéens, le mariuge était mauvais ; que l'homme, dans le
sjslème du péché originel , naissait détenniné au mal comme
dans le système de lianes; que si l'eufant naissait criminel et di-
gne de l'enfer pour un péché qu'il n'aurait pas été le maître d'é-
. viur, il fallait que le Dieu des catholiques fût aussi mécliaut que
'■ mauvais prinûpe des Manichéens *.
pCes dinicultés, maniées par un homme tel que lulien , séduî~
*lent beaucoup demimde; mais les savans écrits de saint Augus-
i \ue. in Jnlian.,
' leifigt., ). 1, c. IS,
* Auji-inJulian.
■. i. Merc
25g PEL
tio, la vigilance et le lèle du pape Gélestinet de saint Léon, ané-
tèrent le progrès des erreurs de Julien.
Ce chef des Pélagiens parcourut tout TOrient sans pouToir dé-
tacher personne du jugement et du sentiment des conciles d'A-
firique : il fut condanmé ivec Nestorius dans le concile d*Éphèse ;
il se retira dans le monastère de Lerins, passa ensuite en Sicile,
et y mourut obseur et misérable ^.
Quelques autres disciples de Pelage étaient passés en Angle-
terre et y avaient enseigné ses erreurs avec succès. Les évéques
des Gaules y envoyèrent saint Germain, évéqued*Auxerre, et saint
Loup, évêque detroyes, qui détrompèrent ceux que les Pélagiens
avaient séduits *.
Pourquoi le PélagianUme s'éteignit sans troubler VÉtat.
Telle fut la fin du Pélagianisme, erreur des plus spécieuses , et
enseignée pardes hommes du premier ordre; telle fut, dis-je, la fin
du Pélagianisme ; tandis que deux vieillards avares , deux clercs
ambitieux , une femme vindicative et riche , avaient formé à Car-
thage le schisme des Donatistes, qui ne s*éteignil qu'au bout d'un
siècle, et qui désola TAfrique entière.
Si la principale utilité de Thistoire consiste à nous faire con-
naître les causes des évènemens , il n'est peut-être pas inutile de
rapprocher les effets et la durée du schisme des Donatistes de
Texlinciion subite du Pélagianisme.
Lorsque Lucille forma le complot qui donna naissance au schisme
des Donatistes, le christianisme commençait à jouir de la paix et
du calme; les Chrétiens étaient pleins de zèle et tranquilles; tout
était donc prêt à s'animer; toutes les âmes étaient, pour ainsi dire,
à quiconque voudrait les intéresser : un parti naissant devait donc
se grossir subitement, s'échaulTer et devenir fanatique ; ainsi Lu-
cille, pour produire en Afrique un schisme dangereux , n'eut be-
soin que de sa fortune et de sa vengeance.
Le Pélagianisme parut dans des circonstances bien différentes.
Lorsque Pelage enseigna ses erreurs, l'Italie était ravagée par
IcsGoths : Rome, assiégée plusieurs fois par Alaric, ne s'était sau-
* Non», Hist. Pelag., I. 2, p. 17L
« Prosper. Chronic. Tillemont, 1.15. HisU litlér. de France, t. 2,
p. 258, 259.
ré» ^ pHhgfl que par des contributinns immense* , ei )a |iuls-
wnce d'Aliirk, toujours supérieure i celle de l'enipeteur en llïlio,
filsail craindre à Rome de nouTenux malheurs ; lus persnnnesleg
plus considérables en étaient sorlies, et les esprits y étaient dans
la (Consternation et dans l'abaltemeni.
Le schisme desDonaiiBtes n'était pas encore éteint entijremenl;
il avait en quelque sorte consumé tout le fanatisme des espriu, et
le suuveair des Tureurs des Donatistes inspirait de la craînle et de
la précaution contre tout te qui pouvait faire naître un nouveau
Ainsi Célcstius ne trouva point dans les esprits la chaleur et le
goiU de la nouveauté , si utile el mSme si nécessaire pour Taire
embrasser avec ardeur et pour faire soutenir avec force une opi-
nion naissante el apportée par un étranger.
Pelage, qui était passé en Orient, ne pouvaiis'y faire entendre
i|ue par un truchement, el ne pouvait par conséquent répandre ses
erreurs (acilemeut , ni donner h son parti de l'éclat et de la cé-
lébrité.
Saint Augustin, qui depuis lonp-lemps était la gloire et roracle \
(le l'Afrique, comballil le Pélagîanisme avec une force, un zèle et j
une supériorité auxquels l'adresse et l'habileté de Pelage, de Ce- ]
lesLîus el de Julien ne purent résister. Le Pélagianisme fut c
damné par les compiles d'Alrique , et le jugement des conciles IHiC i
approuvé par le pape Zoiime et par toute l'Église. 1
l.e crédit de saint Augustin auprès de l'empereur, et b cralulB '
de voir dans l'empire de nouvelles divisions, firent traiter les Pé-
lagiena comme les autres hérétiques , cl élouflïrenl le Pétagia-
nistue dans l'Occident.
Lorsque Julien et les autres évéques attachés au Pêlagiinîsnie
passèrent en Orient, ils ; trouvèrent presque tous les esprits par-
tagés entre les catholiques el les Ariens , el vivement animés les
uns contre les autres.
Le Nestorianiiine commençait aussi alors k faire du bruit ; ainsi
Julien trouva tous les esprits occupés, livrés!) un parti, et pleins
d'un intérAt qui ne leur permettait pas û'ea prendre au Pélagiu-
oïsme asseï pour le soutenir contre l'Ëglise latine et contre lei
Mb de* empereurs.
Heurs , un parti ne devient séditieux ()ue par te nio
■; la duclrinc de Pelade n'était pas propret échuuCIiT
I èletaii la liberté de l'iioratne et oîail ta conuv^
260 PEL
nelle, mais c*était pour Tobliger à une grande austérité ; il faisait
dépendre deThomme seul sa vertu et son salut, mais c'étaitpourlui
reprocher plus amèrement ses défauts et ses péchés et pour lui
6ter toute excuse s'il ne se corrigeait point : or, le peuple aime
mieux un dogme qui Texcuse et qui Thumilie qu'un système qui
flatte sa vanité , mais qui le rend inexcusable dans ses vices et
dans ses défauts. Pour mettre le peuple dans les intérêts du Pé-
lagianisme , il fallait, en exagérant les forces de Thomme , dimi-
nuer ses obligations ; et Pelage s'était proposé tout le con-
traire.
Le Pélagianisme tel que Pelage le proposait , et dans les cir-
constances où il a paru, ne pouvait donc former un parti ou une
secte , et ne devait rester que comme une opinion ou comme un
système , se conserver parmi les personnes qui raisonnaient , s'y
discuter, se rapprocher du dogme de l'Église sur la nécessité de
la grâce* et donner naissance au Semi-Pélagianisme.
PÉLAGIANISME, hérésie de Pelage.
Pelage avait, par ses exhortations, porté plusieurs personnes à
abandonner les espérances du siècle et ù se consacrer à Dieu ; il
était embrasé du zèle pour le salut du prochain , et traitait avec
beaucoup de mépris et de dureté ceux qui ne faisaient que de fai-
bles eflbrls vers la perfection et qui prétendaient s'excuser sur la
faiblesse de lu nature humaine ; il s'emportait contre eux, et, pour
leur ôter toute excuse, il releva beaucoup les forces de la nature,
et soutint que l'homme pouvait pratiquer la vertu et s'élever au
plus haut degré de perfection.
Ce n'est point sur la corruption de la nature , disait-il , qu'il
faut rejeter nos péchés et notre tiédeur ; la nature humaine est
sortie pure des mains du créateur et exempte de corruption : nous
prenons pour une corruption attachée à la nature les habitudes
vicieuses que nous contractons, et nous tombons dans une injus-
tice que les Païens ont évitée : c'est à tort , dit un Païen éclairé ,
que le genre humain se plaint de sa nature ^ .
On fut choqué de cette doctrine ; on trouva que Pelage flattait
trop l'orgueil humain ; que l'Écriture nousparlaitde l'homme bien
diiréremment; qu'elle nous apprenait qu'il n'y avait point d'homme
juste, que la nature humaine était corrompue , que depuis le pé-
chô du premier homme nous ne pouvions faire aucune bonue ac-
' Aug.,Ioc cit.. Do peccaU mirit.
PEL asffl
, et que c'Élaii ainsi que les Pères aTiiieut parl^ i
I.adispule se trouvait par-li réJuiie à trois point» : on coniea-
lait 11 Pelage qu'il Tût possible que rboaime vËcùl sans péché ; on
lui loutenail que la nalure était corrompue depuis Adam, et qu'il
ne pouvait faire de bonnes actions sans la grâce.
Ainsi, pour défendre son seniimeni , Pelage Tul obligâde prou-
ver que l'bomme pouvait titre sans pëclit^ , que sa nature n'âtaii
point corrompue, el quela grâce n'était pas nécessaire pour Ëritrr
le péché ou pour pratiquer la vertu.
Enlio Pelage, Torcé de reconnaître la nécessité de la grilcc, pré-
tendit que cette grjce n'était que notre existence , le libre arbi-
tre, la prédicaiioa de l'Ëvangile, les bons exemples, les miracles.
Votli les quatre priiidpes qui formèrent le Pélagianisme et
qui conduisirent ï beaucoup de questions incidentes qui ne fu-
rcLii point des parties csseattelles du Pélagianisme , el sur les-
quelles l'Ëglisc n'a point prononcé. Voyons coumeat ces points
furent défendus par les Pélagiens cl combattus par les cailioli'
r
^^^Les bommes qui prétendent excuser leurs péchés sur lu faiblesse
^tie la nature sont injustes : rien n'est ni plus clairement ni plus
<s , dans l'Écriture , que l'obligation
' Soyeï parfaits , dit Jésus-Chrisi , comme votre
si parfait. Quel est , dit David , celui qui habitera
Blans vos tentes , o Seigneur ? Celui qui oiarclio sans tiehe , et
|ui suit la justice. Faites tout sans murmure , dit saint Paul, et
nns hésiter, afin que vous soyez irrépréhensibles et simples ,
comme des eoraus de Dieu , purs et sans péché. >
Cette obligation estprescriie dans mille autres enilroiis de l't-
critutc ; si noua no pouvons pas la remplir, celui qui nous l'a pres-
crite necrinnaïssailiKis la faiblesse humaine, ou, s'il la connaissait,
Bett injuste et barbare de nous punir; Dieu, dans ce sentiment,
W^ JLOg., loc. cit., De pLCcaU mcril,
PUEMIÈRE ERREUR DE PELAGE,
L'homme ptful vivre n
I pécM.
•les bommes qi
% la nature si
souvent proscrit ai
d'être parfaits.
• Père céleste e;
ses PEL
ne nous amrtît pas donné des lois pour noas sauTer, mais pour
aToir des coupables à punir *.
Pour réduire la question à des termes plus précis , disaient les
Pélagiens , il faut demander à ceux qui prétendent que Thomme
ne peut pas vivre sans péché :
i* Ce que c*est que le péché en général; si c*est une chose qu*OR
puisse éviter, ou non. Si on ne le peut pas éviter, il n*y a point
de mal à le commettre ; et ni la raison ni la justice ne permettent
d*appeler péché ce qui ne peut en aucune manière s'éviter ; et si
Fhomme peut éviter le péché, il peut donc être toute sa vie sans
péché.
2* n faut leur demander si Thomme doit être sans péché ; ils
répondront sans doute qu'il le doit , mais s'il le doit , il le peut ,
et s'il ne le peut pas , il ne le doit pas. Si l'homme ne doit pas
être sans péché , il doit être pécheur ; et ce ne sera plus sa faute ,
si l'on suppose qu'il est nécessairement tel.
3* Si l'homme ne peut être sans péché , c'est , ou par la néces-
sité, ou par le choix libre de sa volonté qu'il pèche; si c'est par la
nécessité de sa nature , il n'est plus coupable, il ne pèche pas ; si
c'est par le choix libre de sa volonté , il peut donc éviter le péché
pendant toute sa vie ^.
Les catholiques combattaient cette erreur par l'autorité de l'É-
criture , qui nous apprend , en mille endroits , qu'il n'y a point
d'homme sans péché ; que quiconque ose dire qu'il est sans péché
se trompe et se séduit lui-même ^.
Ils joignaient à Tautorité do l'Écriture le sentiment unanime
des Pères , qui reconnaissaient tous que l'homme ne peut vivre
sans commettre quelque péché *.
Ce n'est pas qu'il y ait quelque péché auquel l'homme soit dé-
terminé par sa nature ou par une puissance invincible : il n'en est
aucun qu'il ne puisse éviter en particulier; mais, pour les éviter
tous sans exception, il faut une continuité d'attention dont
l'homme n'est pas capable.
*• Pelag., Ep. ad Demctriad. apud. Hyeron., t à, p. iO.
3 DefioiUones Cœleslii. Garnier, Appendlc 6. De scripUs pro haeresl
Pelag., c. 3, p. 384.
* Proverb. 24. Joan. i^ i. i,
* Origen. in Ep. ad Rom. Cydrian., etc. Voyei Vossius, Hlst. Pela-
gian. Norls. Garuier.
■ FEL K
L'Iiomme , cbllgé cte tendre i une pi^Llc-ilion i|u'il ne p«ul a
teindre , fait vers aelle perreclion des clîorts i{ti'lt n'auratl )ii
falu ; il acquicrL des vertus qu'il n'auraii pnint lerjulseï ; il Avii
des piïelics qu'il n'aurait point vviite : )a lui qui oblige riiouin
à U perrei^tiun est donc iiiie loi |>leine de sagesse.
Les Tatikes i)ui 6ch>p|)«Di i ta rigiUnce de t'Lumrue ne «oui point
des crimes irréiuissiblcH : les eathoUquus , qui soutiennent que
rbummene peut vivre s;ins péché, ne TmiL donc point de Dieu un
être iojusu' «1 btrbare , qui oblige l'iiuiniue h des t^liuses îBipoft-
sibles pour avoir deauuupables k punir.
La doctrine des catholiques ronlrc Pélat^e, surriiuposgibîlilé
dans laquelle rbomme est d'éviter tous les pécbés peuJaui m viei
était la duciiine de louiu l'Enlisé, et le sentiment de Pelage sur
E'inipossibiliiii lui condamné dans les conciles tenus eu Orient,
quelque bieo disposé qu'on (Ut pour la personne de Péluge diDS
et<s «Hemblâet. Pelage lui-même Tui obligé de lu condamner; elle
le fut ensuite par le concile de Hiiéve, et celte condatnnKliou fut
approuvée par le pape et par toutes les Églises.
SECONDE EltREra DE PELAGE.
^11 n'y a pcînt de péeiU ariginel.
Les ealboliques prouvaient le péché originel par l'I^crilure, par
la Iraditian, el enlin par l'expérience.
Pelage, pour soutenir son scniimeui. contre les catboliqoei,
prétendit qu'ils Interprétaient inul l'Écriture ; il réclaroii l'aulorUé
de la tradition , attaqua le dogme du péché originel , el préten-
dit qu'il éiail alisurde el injurie u:t ï Dieu.
Les Sociniens ont renouvelé les erreurs des Pélagiens sur le <
péché originel , el les ennemis de la religion tournent conlr
{oligioD même toutes leg difficultés des Pélagiens et des Sociniens.
est îniporlani de traiter celle qucsiion,
eme» ijul itabUnenl te dogme du pécM orifflwl.
' ttofse nous apprend qu'Adam a péclié et qn'it a été chnssé du
idis. David reconnaît qu'il a été formé dans l'iniquité et que .
« l'ji conçu dans le pét^tié.
' lob déclare qwe personne n*e9t exempt de souillure , non pas 9
e Teorant d'un jour '.
iGenc». PMlm. SO, t- ^, 'ob., c ij, v. h.
U4 PEL
Saint Paul enseigne que le pécbé esl eiilré par un seul homme
dans le monde, el la mort par le péché, et qu*ainsi la mon est
passée dans tous les hommes. Tous ayant péché dans un seul , il
répète que c*est par le péché d*un seul que tous les hommes sont
tombés dans la damnation , que nous naissons enfans de colère ^.
Nous avons dans nous-mêmes des preuves de la corruption ori-
ginelle de la nature humaine : Dieu avait fait Thomme immortel ;
il avait éclairé son esprit et créé son cœur droit ; nous naissons
an contraire ensevelis dans les ténèbres , portés au mal ; nous
sommes afQigés par mille infirmités qui nous conduisent enfin à
la mort.
Nous avons donc des preuves de fait que nous sommes cou-
pables et punis à cause du péché d*Adam.
Depuis saint Ignace jusqu^à saint Jérôme, qui disputait contre
Pelage , tous les Pères ont enseigné le dogme du péché originel *.
Les cérémonies de FÉglise, le baptême, les exorcismes, étaient
des preuves que la croyance du péché originel était aussi ancienne
que rËglise, et cette croyance était si distincte dansTÉglise,
que Julien reprochait à saint Augustin qu'il se servait contre lui
du consentement des artisans et du peuple ^.
Enfin , encore aujourd'hui toutes les communions séparées de-
puis mille , onze et douze cents ans , reconnaissent le dogme du
péché originel *.
Réfitlaiion des rèpomeê 'des Pélagiens et des Sociniens aux preuves
que l'on vient d'apporter.
1* Les Pélagiens et les Sociniens ont prétendu que les passages
qui portent que nous avons péché dans Adam ne signifient rien
autre chose sinon qu*Adam a donne h tout le genre humain Texem-
ple du péché , que tous les hommes Tout imité , et que c*est en
ce sens que tous les hommes pèchent dans Adam.
Mais il est clair, par le passage tiré de saint Paul , 1 • que tous
les hommes meurent en Adam , et que cette mort est une suite
* Ad Rom. 5. Ad Ephes. 2.
^On trouve tous ces; passages dans Vossius. Hist Pelag., part i.
Thés. 6.
» Aug., I. 2. Op. impcrf., c 181 ; I. 5, c. 131.
^ Pcrpët. de la foi, t. 3, à la fin.
^u
M ilu [irpnLk'r liomme; i- i|uct ioii<: lo« lioinmes eoni ci
paMes de ce péclu' , ei qa'il est aussi éipndii que l'empire de la 1
luori ; que les enrins qui meurenl ilans le sein de leur mère si
i'ou]ial)lcs de ce péclié , quoiqu'ils nViuil encore Tait aucune ■■
l'iim , et que pur coQ«isiuent le péciià originel n'est pas une h
talion du péciié d'Adïm ; 3' il est clair, par rÉ>:riture , que ne
naisaons enrans de colère , odieux aux jeux de Dieu , et que par 1
conséquent le péché d'origine n'eat pas une simple privation de» I
avantages attachés i, l'élat d'innocence , tels que l'immortalité, '
l'empire sur nos sens, otc, comme les Socinien^t le prétendent,
muis que le péclié origiuci est un péché qui aDTecte l'âme da
riiomme etquî le rend odieuxï Dieu.
3" Les PéUgiens et les Sociniens opposent i ces preuves un
passage du Deuiéronome , qui dit que les enf^ns ne mourront |
point pour leurs pères , ni les pères pour les enfans.
Mais il s'agit ici d'une loi qui regarde des enrane nés ; c'est une j
loi que Dieu prescrit II des hommes qui doivent juger d'autres I
hommes : quel rapport une pareille loi a-t-elle avec les passage» |
qui prouvent le péché originel?
3' Julien opposait k saint Augustin uti passage de saint PanI,
qui dit que nous comparaîtrons tous devant le tribunal de Jésu»^ I
Christ pour Stre jugés selon ce que cliucnn aun fait de bien ou dft 1
mal ; d'oii il concluait que les eufaos qui n'avaient fait ni bien ni
mal ne compara liraient pas, et qu'ils n'étaient par conséquent
point coupables et ne seraient point punis.
De lli naqairent toutes les questions sur le sort des enfans , sur
le genre de peine qu'ils devaient souffrir^ questions inutiles pour
le fond des conleslalions qui partageaient les catholiques et \tt ,
Pélagicns, sur lesquelles saint Augustin n'osait rien allinner, et j
sur lesquelles l'Eglise ne prononça point.
Haiï Julien ne prouvait rien par ce passage de eainl Paul ,
est clair que saint Paul n'exclut point les enfans, et quand il les
exclurait, il s'ensuivrait tout au plus qu'ils ne soûl coupables
d'aucun [léciié actuel, et non pas qu'ils ne sont point coupables du
péché originel.
4" Les Pélagiens cl les Sociniens prélendenl que le baptême
n'est puinl donné pour remettre un pécbé, mais pour associer
■me h l'I^glise chrétienne et lui donner droit bu bonheur <
destine â ceux qui vivent di
1,M catholiques répondaient qi
. rCc-r
•I In tr
diiion n
S66 PEL
apprennent que le biptème est donné pour la rémission des pé*
ehés et pour régénérer Thomme.
5* Les Pélflgiens et les Sociniens opposent Tautorité des Pères*
Mais i i<* il est certain que Pelage et Julien n*ont jamais opposé
à saint Augustin que quelques passages de saint Chrysostome, de
saint Basile et de Théodore de Mopsueste , et que saint Augnstin
fit voir que les Pélagiens n*en pouvaient rien conclure en faveur
de leur sentiment *•
D^ailleurs , ce que nous avons dit sur Torigine de Terreur de
Pelage , par rapport aux différentes méthodes que les Pères em-
ployaient, selon les différens objets qu'ils se proposaient, peut
servir à répondre aux passages dans lesquels ils paraîtront attaquer
le péché originel, et à tout ce que M. Wilby a recueilli pour sou-
tenir qu'avant saint Augustin les Pères avaient témoigné du pen-
chant à la doctrine des Pélagiens*.
Difficultés des Pélagiens et des Sociniens contre le dogme du péché
originel.
Tout ce qu'on peut dire contre le péché originel, Pelage et Gé-
lestius Font dit dans leurs disputes contrôles catholiques. On peut
les réduire à ce qui suit :
Une créature qui n'existe point ne saurait être complice d'une
action mauvaise, et il est injuste de la punir comme coupable de
cette action. L'enfant qui naît six mille ans après Adam n'a pu
ni consentir à son péché ni réclamer contre sa prévarication :
comment Dieu si juste , si bon , si miséricordieux, qui pardonne
h ceux qui implorent sa miséricorde les péchés qu'ils ont commis
librement , imputerait-il un péché qu'on n'a pu éviter et auquel
on n'a aucune part ^ ?
* Voyez, sur cela. Remarques sur la BiblîoU de M. Dupin. în-8« ; à
Paris, 1692, t 1. On y prouve que saint Justin, saint Irénée, Terlul-
lîen, Origc-ne, se sont très-ci airemenl expliqués sur le péché originel.
Voyez aussi la tradition de l'Église sur le péché originel ; à Paris, 1 692,
tn 12.
2 Witby, De Imputatione divinû peccati Adami posteris ejus unîver-
8Î8; in-8«; Lond., 1711.
» Pelag. apnd. Aug., De nat et grat., c. 9, 30, 1. 3. De peccat.
merit., c. 2, 3. In Ep. ad Rom., inter opéra Hycron., et dans TAp-
pendix que le Clerc a ajouté à l'édition de saint Aug., par les PP,
béiiédifititts.
i'KL 267
U ne Taul p»s croire élu-ler lu Torce de ces diniciiliés en n^pon-
dani ijue le p^clié originel s'e&t iianstnis â la poiiérilé d'Adam :
nous ne recevons de nos pères que le corps , ei le corps n'est pat
susceptible de péché; c'est dans l'ime que r*aide le péché, et
l'âme sort pure ei inooceute des innins de Dieu '.
Enfin , quand il seTiit vrai que i'iine deviendrait souillée par
son union avec le corps que nous recevons de nos pares , ceili
souillure ou cette enrruption ne serait point un péché , puisque 11
corruption du i-orps et l'uniott de l'Ame au corps «ci-nicnl pro-
duites pur des causes indépendantes de l'earani et qui ont pré-
céda son existence.
Mponte.
il est certain que ce qui n'existe que d'aujourd'hui n'a pu sa
déterminer ni consentir ï un crime commis il ; a six millt: ans.
U:iis les catholiques ne pn^tendcnt pas que l'enflnt ait com-
mis le crime d'Adam ou qu'il y ait consenti ; iU disent que de-
puis le péché d'Adam tous tes hommes naissent privés da Ir
grâce, déchus des privilèges de l'élai d'innocence; que letir eSr
prit est environné de ténèbres et leur volonté déréglée, et qui) .
cet état de l'hoaime est la suite du pécbé d'Adam.
Les catholiques ne disent pas que Dieu haïsse l'enfaDl , et qu'î) |
le punisse pour avoir commis le péché d'Adam , ou parce qu'i{ ,
est coupalile d'un désordre dans lequel il soit tombé Jibremcnlj i
ils disent que le péché d'Adam causa dans ses facultés un désor* 1
dre qui se communiqua i ses enfans , aussi bien que son péché | J
et qui se transmit i tous les hommes qui naissent par la voie da '
Il génération cl qui n'en sont point garantis par une grâce spér
ciale : toutes les dirGcultés des Pélagiens et des Sociniens portent
donc 1 faux et n'attaquent point le dogme du péché originel , ie|
que r Église l'enseigne.
Uais , dira-t-ou , comment le désordre causé dans les faeultéii
d'Adam et le péché ont -ils pu se transmettre ù ses enfans f
L'f^riture , qui nous apprend si clairement le péché du premier
homme , et que son péché s'est communiqué i sa postérité , nq i
nous explique point comment ce désordre et ce péché se sonf i
communiqués i ses enfaus et ensuite A toute sa poiiérilé.
' Apuil Aug.,De nat, et grat.,c. bit.
268 PEL
Nous ne pouvons donc expliquer clairement comment se fait la
propagation du péché originel ; mais nous ne voyons point qu^elle
soit impossible , et par conséquent le Pélagien et le Socinien ne
peuvent sans absurdité nier le péché originel ; car il est absurde
de nier une chose enseignée clairement dans l'Écriture , dans la
tradition et par TÉglise universelle , lorsqu'on ne démontre pas
que cette chose est impossible.
Mais , disent les Sociniens , n'est-il pas évident que Dieu ne
peut punir que ce qui est volontaire ?
Dieu hait essentiellement le désordre , et le péché originel ne
laisse pas d'être un désordre, quoiqu'il soit l'effet d'un péché que
l'enfant n'a pu ni vouloir ni prévenir. Le péché originel déplaît
donc à Dieu , quoiqu'il soit nécessaire, et la créature dans laquelle
il se trouve lui est odieuse ; mais il ne la hait point et ne la punit
point comme une créature qui s'est mise volontairement dans le
désordre : les monstres dans l'ordre physique ne déplaisent-ils
pas à Dieu ?
Mais enfin, pourquoi a-t-il enveloppé toute sa race dans sa
chute? Pourquoi Dieu a-t-il permis cette fatale catastrophe?
Pourquoi a-t-il remis entre les mains du premier homme le sort
de sa postérité ?
Je réponds, 1° que l'ignorance dans laquelle Dieu nous laisse
à cet égard ne nous autorise point à nier un dogme enseigné
dans l'Écriture , dans la tradition et par l'Église universelle :
avouons plutôt , avec M. Leibnitz , que nous ne connaissons pas
assez , ni la nature du fruit défendu , ni son action , ni ses effets ,
pour juger du détail de cette affaire ^
2* Si nous voyions eu son entier le plan de la Providence, re-
lativement au genre humain , ces plaintes , ces questions témé-
raires nous paraîtraient déraisonnables , pleines d'ingratitude et
injurieuses au Rédempteur , qui a fait une abondante compensa-
tion pour tous les dommages qui résultent du péché d'Adam , en
satisfaisant non-seulement pour le péché originel , mais encore
pour les péchés actuels de tout le monde.
Si nous nous' plaignons de notre état présent , c'est parce que
nous en sentons tous les inconvéniens et que nous n'en connais-
sons pas les avantages. Les anges apostats sont tombés sans res-
source ; mais nos premiers parens ont été relevés de leur chute :
* Essais de Uiéodicée, première partie, $ 142,
(e ij'cbl |)uiiil p.ir uoti'c Taute rjiic nous iiuiis Irouvoi
prfcipici!, mais nous avons un R^JeiijjiUur qui nous
sa mon et par sa grâce.
La doctrine du péclié originel , telle qu'elle esl enseignée para
l'Église catbolique, ne Taîl donc Dieu ni auteur du péM ni ii^V
jusU , et luules les dinicuil^ des l'éljgiens , des Sociniens , dtit.l
Arminiens et de Wiiby n'ont de force que contre l'imputation!
au sens de Lulbor et de CnKin. "m
Les ililGcutléK sur lu permission du pfcliË d'Adnm appartieiU'V
nent du Mnnicbéismc. Yagr: ccl article et celui de Marciox.
Dm diff^rentei tamiim d'expliquer le péché OTigihtl.
Le dagme du péctié originel est d'un cùté si importani dans h
Kli^iun , el de l'autre si difficile ï comprendre et à persuader,
que l'on a dans tuui^ les temps fait beaucoup d'elTorls pour eipli-
qucrsi nature el h manière dont il se communiquait.
1* On supposa que les ftmes avaient pécliâ duna une vie anlû-
lieure ï leur union avec le corps humain : celte opinion, ima-
gint^e par les Platoniciens , attritiuée ï Origène et aduplée par tta
Cobalisles, a£l^sui^ie par queli^ucï niodemcs, tels que Kusli
Cbînville el Ilcari Munis '.
C« seotimenl qui , pris comme opinion phîlosopLique, n'est
leviintt Imaginaiion , a &.IÈ condamna par rflgtisa el a'»-
ique poîul le dogme du pécLé originel , puisque ce p6cbé est
' . aux liommes par Adam.
I a tuppnsi} que loutcs les imes ctaienl renfermées dans
II qiio par coosi'-qupnl elles avaient participé ï son pL^liù,
I Ca sentiment, duul s^tïul Augustin n'était pas fort éloigm^', a
A adnptf pur un grand noml)re Ae lliéologiens de ta confession
I^Augtbourg ; cr, au commencement de noire siMe, U. Wolllin en
n principe piiur eipliqucr lu propagation du péchd orit^i-
Bl par iRiputcilion , dil-il, que tous les hommes y parlici-
' HujI, Disc sur la t*riI6. Clanvillc, Luji oricntoUs. Henri Mor.,
y S. Oper. Ptii>., p. S6S. In Uercavx Cabbatijlicai cipo^lione Viy-
thoiorltc driilBuiilmit, de tinlinœ immorlalitalc. AuIopsjcIiomBchia
tDiilra Cl» qui animas posl discessum b. car|>are dormirc u>muiaruiit,
Rcnm appiiidice de snlms prxctiïstrnliD. Tous ces ouiraEe* M troutcut
I Jbms le l'ecuell des pommes plillosopliiqnct ilc Morus. in<6°, Il Cam-
kViitii», 'juelqncs-uM uni élé traduit) en franijab,
2 3"
970 PËL
pent ; mais \% dépravation leur est communiquée par la propaga-
tion , et cette propagation suppose que les âmes viennent les unes
des autres.
Avant If. Wolflin , Nicolaï avait enseigné qu*en admettant la
création immédiate des âmes , il n*est pas possible d'expliquer le
péché originel ^.
Ce sentiment , qui a été condamné par TËglise , est absurde ;
car Tâme étant une substance simple , indivisible , immatérielle ,
il est impossible qu^aucune âme sorte d*une autre par voie d'é-
manation.
D'ailleurs , ce sentiment n'expliquerait point le péché originel ,
puisque les âmes renfermées dans Tâme d'Adam n'auraient point
eu l'exercice de leurs facultés , et enfin parce qu'Adam ayant ob-
tenu le pardon de son péché , tous ses enfans auraient dâ l'obte-
nir , si les âmes humaines avaient été renfermées dans celle du
premier homme de manière qu'elles eussent participé à ses dé-
terminations.
3<* On a reconnu que les âmes n'ont point existé avant cette vie,
qu'elles ont été créées immédiatement par Dieu, et qu'elles ne
sont pas des émanations de l'âme d'Adam.
Mais, parmi ceux qui reconnaissent que les âmes existent par
voie d'émanation , les uns croient que toutes les âmes ont été
créées et qu'elles ont été unies à des corps renfermés dans le corps
d'Adam. Les autres pensent, conformément au jugement de l'É-
glise , que les âmes des hommes sont créées lorsque le corps hu-
main est formé dans le sein de la mère.
Le système de la génération des animaux par des animalcules
formés dans le premier animal et qui ne font que se développer
ne pouvait manquer de faire adopter le premier sentiment. M Leib-
nilz crut qu'il pouvait expliquer la propagation du péché origi-
nel; il fut suivi par Rasiels, qui l'expliqua avec plus de détails
que M. Leibnitz *•
Il suppose que les corps de tous les hommes qui devaient ex^s-
ter ont été formés dans Adam , cl que Dieu avait uni h ces petits
corps des âmes humaines , parce qu'il n'y a pas de raison de dif-
férer plus long-temps l'union de l'âme et du corps , et que ce pe-
^ Clii*i3lophori Wolflini dissert., in-» à Tubingc.
' Essais de théodicéc, première partie, $ 90, Traité de l'esprit hu-
main, par M. Rassiels du Vigicr» chez Jombert, 4716, in-12.
PEL
^ lit corps ¥ivaiil aussi bien dans li- premier instant do sa formalioa \
m'uprès sa naÏEsance, on ne peut lesuppoeer prive d'une Ame*
]l udoiel donc, dans les pelilâ corps humains renfermés dau
ts Âmes huDiaJDes.
, Les petiU corps uniii k ces Ames éuieni unis aux corps det
"s en tiraient leur nourriture ; autrement il^ se seraieql
uéchés.
H j ajaii donc une communication entre Adam et !e nombre
~ li de personnes qu'il contenait , A peu près semblable A celle
m enfant a avec sa mère aussîlAt qu'elle l'a re^u dana sot
; et comme les mouvemeos de la mère se communiquent aux
l'raTans , ceui d'Adam se sout communiqués i tous ceux qui de-
Rp^ient naître de lui.
Suivant ce système, quand Dieu défundit ï Adam de manger dt|
bail de l'arbre de la science du bien et du mal, les impressioni .
u cerveau se communiquèrent aux cerveaux de ses eorans,
|i eurent par conséquent les m£mis iilées ; et lorsqu'Adam
é de manger du rriiit, et qn'il y consentit, ses enfans jci
[«Blireol d'autant pins Tncilement que la mollesse de li-ura llbref I
les avait fait moins conserver le souvenir du précepte , et ([ue Ij 1
cours de leurs esprits animaux était favorisé par le cours des es- ]
prils animaux d'Adam.
Leur péché ftil ù peu prés pareil i celui d'une pcfîunoe qui I
t^'Ëveille en sursaut, ou i celui des enfans qui sont eu nourrice, 1
jg*^! pourquoi , dit H. Rasiels, quoiqu'ils soient véritablement 1
^aas de colère , ils ne sont pis l'objet d'une si grande culére , f
MHsque Dieu so contente de les priver de sa gloire , sans les cott^ ]
jhmner aux chAtimeDs des pécbeurs.
W Celte lijpotli£:se est absolument desiituéo de fondement du cbti .
0» la raison , et le système de la génération des animaux par dm
aoimalcules préexistans et formés dès la crËation du monde , qot 1
lui sert de base , n'a plus guèie de vraisemblance ni de
taieirrs.
D'ailleurs, il n'explique point la communication du péché d'A-
D 1 ses descendana , puisque ces 3mes n'avaUnl point l'usage |
K<;^ U raison lorsqu'Adam péclia , et qu'elles ne pouvaient don-
iseniemeal libre : l'eiplicalion des Uahomctans , tuulç J
idiculc qu'elle est, parallrail plus raisiTuDablc '.
Il AImiuHi qu'il Hii imisi^ "
■^ hnmuwlf. I
Î72 PEL
Enfin f ce sentiment est contraire aux décisions de TÉglise.
4* 11 est donc certain que Tàme des enfans d*Adam n*a été
créée que quand il s*est formé dans le sein d'Eve un corps hu-
main, et, pour expliquer la transmission du péché originel, il faut
expliquer comment le péché d*Adam se communique aux &mes
que Dieu crée pour les unir à des corps humains par voie de
génération.
Les théologiens se sont encore partagés sur celte explication.
1* beaucoup de théologiens ont prétendu que le péché origi-
nel n'est que le péché d'Adam imputé à tous ses descendans.
Les théologiens supposent que , comme Dieu , quand il établit
par lequel tout le genre humain s^obligea de reconnaître Dieu pour son
souverain mattre, et que c*est de ce pacte dont il est parlé dans TAlco-
ran, au chapitre intitulé Aaraf ; voici ce qu*ou dit du péché originel :
c Lorsque Dieu tira des reins d'Adam toute sa postérité, il adressa à
» tous les hommes ces paroles : Ne suisje pas votre Dieu ? et ils lui
» répondirent : Oui. » Cet auteur veut que tous les hommes aient été
effectivement assemblés, sous la figure de fourmis douées d^intelligence,
dans la vallée de Dahier, aux Indes ; après celte convocation généralci
Dieu (lit, dans le même chapitre :
« Nous avons pris des témoins, afin que les hommes ne disent pas au
» jour du jugement : Nous ne savons rien de ce pacte, et qu'ils ne disent
• pas, pour excuser leur impiété : Nos pères ont idolâtré avant nous;
» nous avons été leurs imitateurs aussi bien que leurs descendans;
» nous perdrez-vous. Seigneur, pour ce que des fols et des ignorans ont
» commis contre vous? » (D'Herbclol, au mol Adam , Bibliot orient.,
p. àL )
Les Mahomélans croient en outre que nous recevons de notre pre-
mier père un principe de corruption, qu^ils appellent la graine du cœur,
Famour-proprc et la concupiscence qui nous portent au péché : c'est
le péché d'origiuc, que les Muhométans reconnaissent élre venu d^A-
dam, notre premier père, cl ils disent qu'il est le principe de tous les
autres péchés.
Mahomet se vantait d'en avoir été délivré par Tango Gabriel, qui lui
arracha du cœur cette semence noire, et quo par ce moyeu il clail im-
peccable.
Selon d'autres Mahométans , le péché originel vient de ce que le
Diable manie les enfans jqgqu'à ce qu'il les ait fait crier. Selon les Ma-
hométans, Jésus-Christ et la sainte Vierge furent garantis de Pattouche-
racnt du Diable, et n'out point eu de péché originel. (D'Hcrbelot, Bibliot,
orient., au mot MÉniAM, p. 593.}
PEI-
373
Abraliaiii k' père des crojuns, avait \.i\t un parla im^r. su postù-
thé ; (le même quund il donna la justice nrigiiielle h Adum cl au
gepre humain , ootrc premier père s'ougagca , on son Dom el en
celui de ses descendins , de la cooserfcr pour lui ai pour eux ,
en observant le précepte qu'il atait rei;>i ; au lieu que , Taute da
l'observer , il la perdrait autant pour lui que pour eux , et les
rendrait sujets aux mêmes peiues , m transgression étant deve-
nue celle de cliacuD ,en lui comme cause, etdiins les autres comme
lu suite du pacte contracté par eux : qu'ainsi la mOme transe'es-
ston , qui était en lui un péché actuel , Htit duns les autres la
péché originel par l'imputatioD qui leur en est faite, et que c'est
ainsi que tout le monde a péché en lui lorsqu'il a péché.
Ce sentiment fut suuienu avec beaucoup de Torce par Catliarin,
dans le condlc de Trente, et il a été adopté pnr presque tous les
Proleslans.
Huis ce sentiment parait contraire A tout ce que l'Écriture et 11
tradition nous apprennent du péché originel, ^t ne s'accorde pas
bien avec les idées de la justice et de la bonté do Dieu ; car pour
imputer un crime il faut un consentement formel ; un consente*
ment présumé oesurBlpas, et les théologiens qui adoptent lesen-
limeut de l'imputation ne reconnaissent point d'ai
mentdansles enrans d'Adam.
Ce pacte peut avoir lieu lorsqu'il est question de faire du b
mai» non pas lorsqu'il s'egit de punir positivement.
La EU|ipusilion du pacte fait entre Dieu et Adam , laquelle sert
de base ù ce sentiment, est une supposition chimérique , dont Ca-
iharin n'a donoéaucune preuve.
S' lly ■ des théologiens qui croient que, depuis le péché d' A-
I corps a été corrompu , el que l'àme, sortant pure dos
ins de Dieu et s'uolssant i un corps corrompu , contracte la
corruption , comme une liqueur pure se corrompt dans un vase
loTecié : ce sentiment , indiqué par saint Augustin, a été suivi par
Cr^oire deltimini, Cnbrie1, etc.
Pour expliquer couiuieni le |>éehé da premier homme a cur-
rompu sou corps, Grégoirt' rie Rîminl suppose que le serpent, en
conversant avec Eve , dii'îtji'n contre oUe son baleine , et que son
souille COQ la gt eus iiilecla le uurps d'I^ve. t^ve communiqua sa cou-
lagion ï Adam , et tous deux la commualquërent à leurs enfans ,
nous voyons des maladie» bérédilaircs dans certains pjys g
ftdan» vertdiuus rumilk';..
274 PEL
Mais quand il serait vrai que le souffle du serpent ait porté dans
le corps d*Ève un principe de corruption , quel rapport cette con*
ruption a-t-elle avec le péché, qui est une affection de l'Âme ? Une
substance immatérielle peut-elle se corrompre en contractant la
corruption du corps , comme une liqueur pure se corrompt dans
un vase infect Y
3» Il ya des théologiens qui, pour expliquer la transmission du
péché originel , supposent que Dieu avait formé le plan de faire
nattre tous les hommes d*un seul par voie de génération, etqu*il
a établi une loi par laquelle il devait unir une âme à un corps hu-
main toutes les fois que, par la voie de la génération , il se for*
merait un corps humain.
Dieu , selon ces mêmes théologiens , s'était foit une loi d*unir
au corps humain né d*Adam une âme semblable à celle du pre-
mier homme.
Adam, par son péché, perdit la gr&ce originelle; ainsi, lorsqu*il
engendra un fils, Dieu unit à son corps une âme privée de la jus-
tice originelle et des dons de Tétat d'innocence.
Estius remarque que ce sentiment , indiqué par saint Cyrille el
adopté par saint Anselme, n'explique point la transmission du pé-
ché originel, parce qu'il ne la fait consister que dans la privation
de la justice originelle , ce qui ne suffit pas pour expliquer le pé-
ché originel , qui est un désordre ; car il serait possible , selon
Estius, qu'une âme fût privée de la justice originelle et qu'elle
ne fût cependant pas coupable ou déréglée ' .
Ce théologien croit donc qu'il faut supposer que l'âme privée de
la justice originelle est unie à un corps corrompu, qui commu-
nique le péché à l'âme qui lui est unie.
Mais le corps est-il capable de pécher? Peut-il souiller l'âme 1
Voilà ce que ni Scot, ni Estius, ni aucun des théologiens qui sui-
vent ce sentiment ^ n'ont pu faire concevoir.
Le P. Malebranche et M. Nicole ont tâché de l'expliquer.
Adam, selon leP. Malebranclie, fut créé dans l'ordre; et comme
l'ordre veut que Dieu n'agisse que pour lui, Adam reçut en nais-
sant un penchant qui le portait à Dieu , et une lumière qui lui
faisait connaître que Dieu seul pouvait le rendre heureux.
Cependant, comme Adam avait un corps qui n'était pas inalté-
' Cyrill., De incarnat* Anielm.> De concept. Virginia, c, 5. De Uh»
arbltr., c 22. Estius. in L 2, Sent. Distinct di, s. 1.
■ PKL 275
Mbie, Cl qu'il détail ^c norirr'tr, il TiilLll qu'il TùL averti du le-
soin iIl' tiiciDger et qu'il pùl disliugucr \f^ altmens propres ù le j
nourrir : il fullïil donc que les alîmena propres i entretenir i'har- f
monic dans le corps d'Adam fissent naître dans ton ftme dei sen-
lïmens agréables , et que ceui qui lui étaient nuisibles excita»- '
sent des sensations désagréables.
Mais ces plaisirs et ces mouvemens ne pouiaient le rendre es-
cbte ni malheureux comme nous , parce qu'étant innocent , il
fiait iDHttre absolu desmouvemensqui s'exciialentdanssDneorps.
L'ordre demande que le corps Goit soumis à l'Ame ; Adam ar-
rêtait done à son gré les mouvement qui s'excitaient dans son
corps; en sorte que les impressions sensibles ne l'e m péc liaient
pas d'aimer uniquement Dieu, et ne le portaient point ï regarder
le corps comme la cause on comuie l'objet dont il devait atten-
dre sou bonheur.
Après qu'Adum eut péclië , il perdit d'un cGté l'empire qu'il
avait sur ses sens, et de l'autre la justice originelle : les impres-
sions des objets extérieurs produisirent en lui des impressions {
qu'il ne Tut pas le matlre d'arrêter, et qui le portèrent malgré lui
vers les objets qui excitaient en lui des senlimens agréables.
I)leu avait résolu de Taire naître tous les hommes d'Adam , eL
d'unir une ïme bumuioeau corps humain qu'Adam engendrerait;
niuiï Dieu , selon le P. Malebranche , ne devait accorder i celte .
Sme la justice originelle qu'autant qu'Adam persévérerait dans
Ainïi Adam et Eve. après leur péclié, 1" avaient perdu l'empire
qu'ils avaient sur leurs sens , et les corps excitaient en eux
plaisirs qui les portaient vers lesobjetssensibles;â*Dieu unissait '
aux corps qu'ils engendraient , une Sme privée de la justice ori-
ginelle.
Dieu , selon le P. Malebranche , avait établi ane loi par la-
quelle il devait j avoir un commerce continuel entre le cerveau .
de la mère et le cerveau de reniant formé dans son sein ; en aorte
que tous les sentiinens qui s'excitent dans la mère devaient s'exci-
I 1er dans l'enfant.
^^ L'JiDie humaine que Dieu unit au corps humain qui se forma
pEÉns le tein d'tve après son péché éprouvait donc toutes les
' M)pre«sions ipi'Ëvc recevait Aea objets sensibles ; et comme elle
était privée de la juitice originelle, elle éiaii portée vers les corps,
elle In llmail comme la lourcc de son bonhear : elle était donc
276 PEL
dans le désordre , ou plutôt sa volonté éUiit déréglée ; le désordre
de sa Yolonlé n'était point libre; mais il n'était pas moins un dé-
sordre qui déplaisait à Dieu *.
Cette explication porte cerlaincment rcinprcinlc du g^nîc de
Malebranche; mais elle est appuyée sur un fondement bien faible,
je veux dire la communication entre le cerveau de la mère et le
cerveau de Penfant : cette communication n*est point prouvée; ces
taches que les enfans tiennent de leurs mères, et que le P. Male-
branche a prises pour les images des objets que les mères ont dé-
sirés ardemment pendant leur grossesse , ne sont que les suites
d'un sang extravasé par un mouvement trop violent, qui peut bien
être occasioné par une impression vive que fait sur les organes
un objet sensible , et qui se communique au sang de Tenfant,
parce qu'il y a en effet une communication entre les vaisseaux san-
guins de la mère et ceux de l'enfant ; mais ce sang extravasé ne
suppose pas que le cerveau de l'enfant ait reçu les mêmes impres-
sions que le cerveau de la mère ; rien ne conduit à cette supposi-
tion '.
Voici l'explication de M. Nicole.
« L'expérience fait voir que les inclinations des pères se com-
> rauniquent aux enfans , et que leur âme venant h ôlre jointe à la
p matière qu'ils tirent de leurs parens , elle conçoit des affections
» semblables à cellesdc ràmcde ceux dont ils tirent la naissance;
» ce qui ne pourrait éirc si le corps n'avait certaines disposi-
9 tions et si Tûmc des enfans n'y participait en concevant des in-
> clinations pareilles à celles de leurs pères et de leurs mères,
» qui avaient les mômes dispositions du corps.
» Cela supposé, il faut convenir qu'Adam, en péchant, se pré-
» cipita avec une telle impétuosité dans l'amour des créatures
» qu'il ne changea pas seulement son âme , mais qu'il troubla l'é-
» conomie de son corps , qu'il y imprima les vestiges de ses pas-
» sions, et que cette impression fut inûniment plus forte et plus
» profonde que celles qui se font par les péchés que les hommes
> commettent présentement.
V Adam devint donc par-là incapable d'engendrer des enfans
* Maleb., Rcch. de la vérité, 1. 1, c. 5; l. 2, part 1, c 7, Éclaire 8.
Conv. chr., Entr. 4.
2 Voyci Dissert, physiq. sur la force de rimagination des femmes
enceintes, 1737, in-8. Lettre sur l'imagination des visionnaires.
PEL 31T
li euascni Iti corpi; aulremc-nl dlspost^ qu<- le tien ; Je snrle
b queles Smcs ÉunijoinieB, au moment qu'elles sont créées, k -
k<e«scorps corrompus, elles cou iraelent des indinnlions con-
f furtnes aux Iriices el aux vestiges lm|iriinés ilans ces corps , M
si qu'elles contnc-teot l'amour drfminaoi des clôtures,
^ ce qui les rend ennemies de Dieu.
■ Uiis pourquoi les Ames , qui s
Il tonlraciunt- elles certaines incli
¥ dispositions de la matière?
> Un peut, pour expliquer cela , supposer que Dieu , en fur-
liant rC'Lre de l'homme par l'union d'une ïme spirituelle avee ,
me matière corporelle , et Tonlnnt que les hommes liraisent
• leur origine d'un seul , avait élablices deux lois, qu'il jugea nâ-
it ccssaircs pour un être de eelle nature ;
■ La premiËre , qne le corps des enrans semît semblable i ce-
■ lui des pares , et aui-ait â peu pr^s les mêmes impressions, k
moins que quelque cause ùlrangire ne les altérât;
• 1^ seconde , que rSnic unie au corps aurait certaines inclina- |
lions lors(|iie son corps aurait certaines înipressions.
• Ces deux lois étaient nécessaires pour la pro|>agaiîon du genre I
io , et elles n'eussent apporté aucun préjudice aux liora- j
■^ea si Adam, eu conservant son innocence, eût conserré son i
~ ms l'étal auquel Dieu i'av^lt Turmé ; mais l'ayant altéra J
B'etcorrompupBrsonpéelu^, Il justice souveraine de Dieu, înGnE-^ I
it élevée au-dessus delà nature, n'a pas jugé qu'elle dAtpodiË \
tels changer les luis établies avant le péclié ; et, ces lois subsîi-
I tant, Adam a cunimutiîquë ï ses enfans un corps corrompu.
■ Mais comment duit-on concevoir cet amour dominant delà
ITcréBiureque l'âme contracte lorsqu'elle est jointe i des corpi
_ ■ ■ neul d'Adam?
i> On doit le concevoir comme ou conçoit la grSce justifiant^ 1
u tes enrans baptisés; c'cst-â-dire que, comme l'âme des eo^ J
Jhns, par la grficc qu'elle reçoit.esl habituellement tournée vert 1
"' J'aime de la manière que les justes aiineui Dii'u dù^ J
r>Dt le sommeil, de même l'âme des enrans, parcelle inclinalioit j
ju'elle CDiilracte, devient liabituellcmeut tournée vers la crdti' I
[lare comme sa fin dernière , et l'aime comme les mécliaiuf 1
it le monde pendant qu'ils dorment ; enf il ne faut pas s'imftt I
■^nerque nos inclinations périssent par le sommeil; elles chiiv 1
Bgeul seulement il'éutl, m c^ înclioailons guOisent pour rendra J
11. 2A
It8 PEL
» les ans justes, quand elles sont bonnes, et les autres méclians ,
» quand elles sont man? aises * . »
M. Nicole ne Regarde cette explication que comme ce que Ton
peut dire de plus probable.
Ce que nous venons de dire sur les diflerentes explications du
péché originel est en quelque sorte Thistoire de Tesprit humain
par rapporta cet objet; nouspouYons en conclure: i* que la doctrine
de rÉglise sur le péché originel n*est point FouTrage de Tesprit
humain , puisque les difTérens états par lesquels il a passé n*ont
fait que varier les explications de ce dogme , et n'en ont point at-
taqué Texistence , ou ne Tout attaqué que par T impossibilité de
Texpliquer , ce qui me paraît supposer nécessairement que ce
dogme n^est point un dogme imaginé par les hommes.
â* Cette histoire peut servir à nous faire connaître à pea près
les progrès de la raison humaine depuis Origène jusqu'à Male-
branche et Nicole.
TROISIÈME ERREUR DE PELAGE.
Sur la nécemté de la grâce.
Pour rendre inexcusables les pécheurs qui n'obéissaient pas à
Timpétuosité de son zèle, Pelage prétendait trouver dansThomme
même toutes les ressources nécessaires pour arriver au plus haut
degré de perfection, et combattait tous les dogmes qui paraissaient
établir la corruption originelle de Thomme, ou donner des bornes
à ses Torces naturelles pour le bien et ne point faire dépendre en-
tièrement de lui son salut et sa vertu ; il nia donc, non-seulement
le péché originel , mais encore la nécessité de la grâce.
La liberté de Phomme était la base sur laquelle il établissait
ce dernier sentiment.
Dieu , disaient les Pélagiens , n'a point voulu que l'homme fût
porté nécessairement au vice ou à la vertu ; il l'a créé avec la li-
berté de se porter à l'un ou à l'autre : c'est une vérité générale-
ment reconnue, et que l'Ëglise a constamment enseignée, contre
les Marcionites,les Manichéens, et contre les philosophes païens.
Il est donc certain que l'homme naît avec la liberté d'être vertueux
ou vicieux, et qu'il devient l'un et l'autre par choix: l'homme a
donc une vraie puissance de faire le bien ou le mal, et il est li-
bre à ces deux égards.
* Nicole, luslr. sur le Symbole, seconde iostr., scct. A, c 2,
PKL m ]
Lu liberLùUe bîre une ubote su|)piiïeiiiii.*ui^suirpmi!iilKiréunioa l
s ei Je luuies les coiidiiiuns nécessaires poof I
I faire celle cbose, cl l'on n'esl puint libre i> l'égard d'un elTtt iqn-
I les les toi» qu'il manque une des uauses ou des conditiuns nalurelt I
BjJtPienl requises pour produire ccl cITel.
Ainsi, pour avoir la lilterié de voir les objcls, il bui non-seu)4> I
Hil ivoir la Tiicuhâ de voir saine et entiËre, mais citioru il tn^y \
le l'oltjetsoU éclairé et daas une cerlaine distance; ci, quelque) (
s yaux que l'on eùl, on n'aunît point la liberlË de voir cef '
ts si l'on éiaii dans les tf^nëbrcs ou si l'objet éuil ï une cjia? '
9 Irop gninde : puit donc que l'iioaime natl avec la llberlâ
e fiire le bien ou le mal, il reçoit de la nature et riïunil en luj
f tomes les conditioas cl toutes les causes naturellement requises et
saires pour le bien ou pour le mal.
Li grtce ne lui est donc pas nécessaire, ou, si l'bomme a besoiq
s extraordinaire et difTérent des qualités qu'il reçojt
il natt SI
e Tatulilé inévitable, il e:
d« la nal
liixirté.
Ou se souleva contre ce senlimCDl de Pelage, et un lui oppos^
rauloriiê del'lilcriture qui nous enseigne que personne ne pei^t
aller ï Dieu si Jésus-Cbrisl ne l'aiiire ) que nous n'avons rien qua
nous n'ajons rei;u, El que nous ne devons pas nous gloriOec
l'umnie s'il y avait quelque cboae que nous n'eussions pas reçu ;
que c'est la grlSce qui nous sauve par la foi; que cela ne vient pi;
de nous, puisque c'est le don de Dieu ; que nous ne sommes paq
capables de former aucune bonne peosée de nous-inâmes, mais
que c'est Dieu qui nuus en rend capables '.
A l'autorilé de l'Ëcrilure les catboliques joiguaîeiit le lèinai->
geage des Pères, car il ne Tant pas croire que les Pèrea qui ont
précédé Pelage aient ilé Pélagiens. Sainl Augustin lit fuir que la
doclrine de l'élise sur la nécessité de la grïce était clairement
enseignée par lea Pères des luatre premiers siècles, et que ces
saints docteurs n'avaient Taii que transmettre ce qu'ils avaient ap-
pris, ei cneeigner b leurs enlans ce qu'ils avaient Tei:u de leurs
Il Jnban. e, V. iA- Ail Epbe*. 3, y. 6. Secandw ad Cor,, e. 3, y, s,
■ 1« 1 et 1 cont. iul. L. i ad Douit, C 8. De boua perwv, c, i, S, IB.
280 PEL
« Mais quand on ne voudrail pas en croire saint Augustin^ lé-
» moin si irréprochable en cette occasion, sans avoir besoin de
9 discuter les passages particuliers qu*il a produits, personne ne
> niera ce fait public que les Pélagiens trouyèrent toute TÊglise
> en possession de demander dans toutes ses prières la grâce de
> Dieu comme un secours nécessaire, non-seulement pour bien
» croire, mais encore pour bien prier ; ce qui étant supposé
» comme constant et incontestable, il n'y aurait rien de plus in*
> juste que de soutenir après cela que la foi de TËglise ne fût
» point parfaite sur la grâce *, »
La nécessité de la grâce était crue si généralement que Pelage,
en l'attaquant, souleva tous les fidèles et fut obligé de le recon*
naître dans le concile de Palestioe.
Enfin les conciles assemblés contre Pelage et les sonyerains
pontifes ont constamment reconnu la nécessité de la grâce pour
toutes les œuvres du salut *.
La nécessité de la grâce n'était point contraire à la liberté :
lorsqu'on disait que la grâce était nécessaire, on ne niait pas que
l'homme n'eût naturellement le pouvoir de faire le bien ou le
mal ; mais on prétendait qu'avec ce pouvoir on ne pouvait jamais
aller â Jésus-Christ ; qu'avec ce pouvoir on pouvait faire le mal,
mais qu'on ne pouvait jamais aller à Jésus-Christ sans la grâce :
ce dogme de la nécessité de la grâce pour les œuvres du salut
n'était point contraire à la liberté de l'homme pour les choses
d'un ordre naturel; ainsi la nécessité de la grâce n'était point op-
posée à la liberté qu'on avait défendue contre les Manichéens.
En distinguant soigneusement ces deux objets, on explique
tous les passages dans lesquels les Pères paraissent ne pas suppo-
ser la nécessité de la grâce, et l'on fait voir qu'ils n'élaient point
favorables au Pélagianisme.
QUATRIÈME ERREUR DE PELAGE.
Sur la nature de la grâce, dont il reconnut la nécessité.
Pelage, voyant que ses seniimens révoltaient les fidèles et qu'il
* Bossuct, premier avcrlissemcnl sur les Lcllres de Jur., arl, 3à*
* Conc Carthag. 1, Conc. 52. Conc Milcv. in Ep. ad Innoc Cari.
8, Voyez, sur ce détail, l'art. Pelage j Vossius, Noris, Garnier, HisU
peJagJanac hxrcsis.
PEL
aftt
e pouvnil cuîilesler l'aullipndli'; ilos paswgps proJuils |iar les
Mliqiles, lAclia de les expliquer «I prûleiulil qu'il ne niait point 1
I Décesiîlêdo 1agr:^ce lollc que l'iCc ri ture renseignais
Eneiïet, digaitCiïlagc.il rjulillnelaulbominequi agildUli»- ]
a choses ; le pouToir, lo vouloir ei l'action,
)n est l'elTet de nuire volonlé ; c'esl noire délerminatinB ]
'gui la produit.
i c'esl de Dieu icul que nous tenons le pouvoir; c'es'
iii seul quo tiens tenons l'existence, noire volonté et toutes
'hcullés ; c'est de lui que nous tenons le pouvoir que nous 31
; il ne nous doîl ni l'oiialence ni |
le grjtce, ei Dieu esl la cause pi
us enseigne la nécessité est la grftce 1
is Tait aller & Ji^us-Christ et sans '
ï lui ; or celle grïce n'est ni l'e
'it penser et de vouloir le bien
k ces TacuItL^s ; elles sont donc ui
ci pale de nos actions et de nos
La grice dont l'Écriture n
du Rôdempleur, celle qui no
L quelle nous ne pouvons aile
li la conservation.
' Pelage Tut donc obligé de reconnaître une grâce diOércnle èm J
^bre arbitre et de l'existence : comme celte gr9ce nous Taisah j
bannaltre Jésus-Christ et nous conduisait il lui, il prétendit qo,» 1
la ^ce nécessaire pour se sauver âisil la prédication do l'I^vanà
~ !, les miracles que Jésus-Christ avail opérés, les exemples qu^ i
it donnés, etc.
Les catholiques prouvèrent que cette grilce était une aciiot
Vleu sur l'entendement et sur la volonté ; ils prouvèrent ï Pélags: j
en nous le vouloir et le faire ; que la grice de Je-
^us-Qiriit se répand dans nos coeurs, etc. *.
Félnge, pressé par ces raisons, reconnut la nécessité d'une
grlce Intérieure ; mais il prétendit qu'elle n'était nécessaire qua
pour agir plus facilement.
Il M accablé par tous les passages qui disent que nous ne
pouvons rien Taire sans Jésus-Clirisl, etc.
Les Pélagiens, qui n'avaient nli^ le péché originel cl la nécessité
_ de la grïce que pour Tiiire dépendre de l'homme même sou salut,
le pouvant méconnaître ni le péché originel, ni la nécessité d'une
fpâce intérieure qui éclaire l'entendement et qui louche la to-
< PHag., I. a De tib. arbltr., cité par saint Aug., De graU cbrist.
fc A. De gestis Palefitln. I
* Aug., Dcgrgl.clir.
lonté; les Pélagieos^ dis-je, pour faire toujoun dépendre de
rhomme même son salut, prétendirent que cette gr&ee intérieure
8*accordait aux mérites des hommes : ils conservaient par ce
BK>yen le point fondamental de leur système *.
Cette erreur sur la grâce fut condamnée par le concile de la
Palestine et par PéUge même, mais de mauvaise foi, conune saint
Augustin le prouve *.
La foi de TÉglise sur la gratuité de la grâce n*a jamais v^irié :
cependant elle ne fut pas définie expressément dans les conciles
d^Afrique, soit qu*on n^ait pas voulu s^étendre sur cette question
sur laquelle quelques personnes marquaient de Fembarras, soit
parce que de la gratuité de la grâce on était allé jusqu*att dogme
de la prédestination qu*il n*était pas à propos de toucher '.
On n*a défini rien de plus sur la grâce dans les conciles contre
les Pélagiens : on ne trouve pas qu'on ait traité ni la manière
dont cette gr&ce opère, ni son efficacité.
Toutes ces questions furent des suites nécessaires des réflexions
qu'on fit sur les écrits de saint Augustin contre les Pélagiens et
sur la prédestination *,
Pour s*en convaincre il ne faut que se rappeler Torigine et le
développement du Pélagianisme, le principe d*où Pelage partit
et les questions qui entraient essentiellement dans le plan do sa
défense : il est clair que la manière dont la grâce opère était ab-
solument étrangère à ce plan, et, dans le fond, les conciles qui ont
condamné les Pélagiens n'ont porté sur cet objet aucun jugement.
L'histoire du Pélagianisme et de ses dogmes a été bien traitée
par Vossius, par le P. Garnier, par le cardinal Noris et par Ussé-
rius dans ses Antiquités de TÉglise britannique.
PÉRÉENS ou PiàRATiQL'ES. Voyez ëuphrate.
PIIOTIN, originaire de Galatio, fut d'abord disciple de Marcel
d'Ancyre.
Marcel, évéque d'Ancyre, avait assisté au concile de Nicée et y
avait combattu les erreurs des Ariens : il écrivit depuis contre
Asture et contre les autres évêqucs du parti d'Arius un livre in-
* Aug. cont. Jul., L 4, e. 3 et 8. Ep. ad Vital de graL chr., c. S2,
23. Ep. 106, c. 18.
> Ibid. Garnier, Uist Pelag., disscrL j!, p. 171.
' Garnier, ibid., dissert. 7,
* Ibid., p. 302.
36>
P tllulé : Dt la toumitiian it Jé$ut-Chfitt. il unnça dans ce 1
des proposjrione favorables au Sabellianisme : il fut accusi
cette hértsie par les Eusébïens et condamné par le concili
ConsMiiiiDuple, tCDU par les Arien* l'an 3116 ; eusuile il fut exilé I
el obligé de se réiugier en Occideni dans li? niiuie tvinps que i
saint Alhanasefut obligé de sortir d'Alex^indrïe ; te piipe Jules la
reçut i U communion et prononça en sa faveur une sentence d'ab-
solution dans le concile de Home.
Pholia > qui avait été disciple de Marcel et qui avait cru voir
dans ses ouvrages les sentiniens de Sibellius, le» »\ùl adoptés «t
les professa ; il soutint que le Verbe n'était qu'un attribut et '
nia son union byposiatiqne avec la nature humaine '.
A peine avait-il commencé de découvrir sun erreur , qu'elle
fui condamnée par les évé<)ues d'Orient dans un concile qui sellât
â Aniiocbe en 3iii, el par les évéqucs d'Occident en 3iG.
Deux ans aprÈs, ces derniers s'assemblèrent pour le déposer et
n'en purent venir i boni à cause de l'opposiiioa du peuple.
Uurcel eut recours h l'empereur et lui demanda une l'onrérence.;
Basile d'Antiuclie fut nommé pour disputer cimire lui : Pliotin fut .
confondu dans la dispute el ensuite exilé. Il .tïait répandu son
erreur dans riUjrie , mais il eut peu de sectateurs ; le parti aricn
étoutTa cette Itérésie.
PflOTlUS, patriarche de Conslanlinople , fut l'auteur A
echiame entre l'Ëglise de Consiantinuple el l'ËgUse romaiae.
Uicliel m s'était eoseveli dans les plaisirs et avait abundosni I
le gouvernement de l'empire i bardas, son oncle. Bardas, auast
voluptueux et plus puissant que Micliel , épousa sa nicce*.
Ignace , putriarclie de Constantinnpie , cnndujuna haulenieiit l>
conduite de Hardis et ne voulut point rudiueiire il la cornivumon
le jour de r Epiphanie.
[tardas , pour se venger, gagna des témoins qui accusèreni
Ignace d'avoir fait mourir Métliodiu» , son préiléccsseur : U as-
sembla un concile , fit déposer Ignace etplaca Pluitius sur le siège
de Cou Blantinuple.
ius était riche et d'une nuissance illustre ; il avait cultivé
, enibrassé toutes les sciences el s'était rendu rocuuunan-
BEpipli,, Hxr. 71. Vincrtit l.jriu. Comnxir
■fc Soi., I. à. c. U.
, r, îlB. Socrnl., I. ),
284 PHO
dable par sa sagesse , par sa prudence et par sa deiLtérilé dans le
maniement des afiaires.
Cependant la déposition d*Ignace et Télection de Photios ne
furent pas approuvées de tout le monde ; le peuple se partagea
entre Ignace et le nouveau patriarche , et Ton vit bientôt éclater
une sédition * .
Pour calmer le peuple, Tempereur pria le pape Nicolas !<'
d'envoyer des légats à Constant! nople , pour que Ton juge&t entre
Photius et Ignace. Lorsque les légats furent arrivés , Tempereur
et Photius les séduisirent ; on altéra les lettres du pape et Ton
convoqua un concile. Plus de soixante-dix faux témoins déposè-
rent quignace n*avait pas été canoniquement ordonné; qu*il était
intrus par la puissance séculière dans TËglise de Constantinople,
qu'il gouvernait tyranniquement.
Un seul évéque demanda qu'on examinât la vérité des témoi-
gnages^ et parut en douter. Hfutblàmé^ maltraité et chassé : per-
sonne n'osa plus parler en faveur d'Ignace , et il fut déposé parle
concile.
Comment M. Basnage prétend-il après cela qu'on ne doit pas
crier si haut contre la déposition d'Ignace et que les évoques ju-
gèrent comme ils le devaient '?
Le pape découvrit la prévarication de ses légats et les faussetés
de Photius ; il assembla un concile et condamna Photius '.
Photius, de son côté , assembla un concile dans lequel de faux
témoins accusèrent Nicolas de difTérens crimes : on chassa du
concile tous ceux qui voulurent examiner la vérité des témoigna-
ges et l'on excommunia le pape Nicolas. Dans quelle corruption
ne fallait-il pas que la cour de Constantinople fût tombée pour
que Photius osât risquer de pareilles impostures !
Photius avait trop d'nmbiiion et trop de génie pour s'en tenir
h l'excommunication porlée contre le pape; il forma le projet de
se faire reconnaître patriarche universel , et de séparer toute l'É-
glise de la communion de TÉgliso de Rome, dont le patriarche
était un obstacle invincible ù ses prétentions, et qui avait joui
jusqu'alors incontestablement de la primalie universelle.
11 n*y avait aucune diflcrence entre la foi de l'Église de Con-
* Nicetas, Vita Ignal. Baron ad an. 860.
•^ Basnage, HisU de l'Église, 1. 6, c. 6, p. 328, t. 1.
* Epibl. Nicol., 1, /i, 7. 10, 13, Anablas lu Nicol., 1.
l'HO
2SS
sianlino|iIe cl CL'lle cle l'i'fjlise nimaine; mais qiioiqne l'h'ljjUse
grecque reconnut, comine IT'glisu latine, que le Suinl-Esprit
procède du PËre cl du FiU, clic avait conserré le sjmbote de
CoD&iiatinople , dan» kquel it n'est pas ctprîmù que le Saint-
Etpril procj^de ilu Fils.
Celte addition ne s'était point Wxiv pnr l'auiorilâ d'un conrile ;
elle s'6iait introduite înseniiblemcnt et avait £tË adoptée par
toutes les Ë(;lises du rit mmain.
L'Église erecqur et T^îse latine dilTéraicni enroro sur quel-
ques points de discipline : tel fiait , dans l'Ëglise laline , l'u-
sage lie jeûner le saineili , de pcrineiirc l'usage du lait et celui du
frouiage en carâme , d'obliger tous les prflres au cËlïbat , etc.
Pliolius rrul , i la faTcur de ces diiTérens objets , pouvoir ro-
présenier l'Ëglîse romaino comme une ËglJse engagée dans de*
erreurs et dans des désurdrcH qu'on ne pouvait tolérer : il écrivit
des lettres h toutes les Églises d'Orient; il les fit passer dam
l'Occident, et convoqua un conrile qui se sépara de la commu:-
nion du pape et de celle de son Église <.
Tout sauiblait concourir au succj^ des desseins de Photius ; 1
il était iDUt-puissant auprès de l'empereur , il était savant , élo-
quent , et les révolutions auiquclles l'Occident avait été sujet de-
puis plusieurs siècles y avaient tenu le clergé dans l'ignorance ,
si favorable et si nécessaire au progrès des nouveautés et des er-
ie pape avait d'ailleurs des ennemis irës-puissans en Occident;
tels étaient Louis, empereur d'Occident; l^ouis, roi de France;
Lotliaire, roi de Lorraine; des arobevéqocset desévèques*.
Photius se trompait ; les évéques et les ibéologîcns de l'Église
latine réruiérent ses accusations, et personne ne se sépara du
pape en Occident.
~ En Orient , l'vmpereur Micliul avait Tait assassiner Bardas , et
fait iMé lui-itiËute par Dasile-lo-llacùdunicn , que Hictiel avait
1â César cl qui s'ùlalt emparé du l'eiiipiru,
■ PLotius eut le courage de lui reproclier son crime , et lui refusa
^«omBunion. Basile Gt enfermer Pliotius dans un mouastiire,
I Ignace, écrivit au pape, lit conviHiner un concile qui
I. in «Il N1coI.,I. Hicilapud Baron.
* ftiKlnalil. Aniiat. Berlin, llinemar. De divorliu Lolliaril et Tli
S- Burou ad au. <i92. .Itenlin. Aunal., ï.
SS6 PUO
déposa PUolius et rétablit Ignace sur le siège de Cunstaptii)Qp)e \»
Ce conpile est le huitième général qui rendit la paix à TÉgliie
et rétablit la communion entre les Grecs et les Latins. Nicolas I*^
était mort, et ce fut sous Adrien II que ce concile se tint *.
Photitts ne perdit point Tespérance de remonter sur le siège
de Gonstantinople ; du fond de son monastère , il tendit des pièges
à la vanité de Basile ; il le flatta, reprit insensiblement du crédit
et de la faveur à la cour, obtint un logement dans le palais , et
après la mort d'Ignace remonta sur le siège de Gonstantinople.
L'empereur s'employa pour ménager son raccommodement avec
l'Ëglise de Rome, il repriêsenta au pape que le rétablissement de
Pliotius était nécessaire au bien de la paix et pour la réunion des
esprits; l'empereur ajoutait qu'Ignace avait lui-même souhaité
qu'on le rétablit : on rapportait un écrit fait en son nom , paf
lequel il le demandait au pape.
Basile, dont les forces commençaient à se rétablir en Italie |
insinuait au pape qu'il délivrerait les côtes de la Campanie des
incursions des Sarrasins et qu'il rendrait à l'Église de Rome la
Bulgarie , qu'Ignace même avait refusée au pape.
Jean Vlll répondit à l'empereur que le patriarche Ignace ,
d'heureuse mémoire, étant mort, il consentait, à cause de la
nécessité présente et pour le bien de la paix, que Photius fût re-
connu patriarche de Gonstantinople , après qu'il aurait fait satis-
faction et demandé pardon devant un synode '.
Lorsque la lettre et les légats du pape furent arrivés à Çgn-
stantinople, Photius fit assembler un concile : on y lut les lettres
de Jean VUi à l'empereur et à Photius ; mais elles avaient été
falsifiées et l'on y avait retranché ce qui regardait la personne
d'Ignace , le pardon que l'on enjoignait à Photius , et la cundaqn-
nation du concile qu'il avait assemblé et qu'il appelait le hui-
tième.
Le concile assemblé par Photius le reconnut pour légitime
patriarche , et condamna le huitième concile qui avait condanmé
Photius *.
* Baron ad. an. 8A7. Gonc 8. Dupin , Hist. du neuvième siècle, e. 9.
Natal. Alex, in saec. 9, dissert, à»
^ EpisL Joan., 199.
* EpisL Joan., 199.
* Baron ad an. 879. Natal. Alex, insasc* 9, disserL 4. PanopU cmitr,
Schism. graec., ssec, 9, c« 3, p. 165.
I
PIR
2ftT
[,e piipe ipprii que la paii éiail rétablie , ei il en fi^lidm IVi
pHPur et l'hntiui ; m»U lorsqu'il copniit & quelles (^undilinns la
paix ''Uii réiablie, il condamna tout ce que les légats avaient hit.
Marin et Adrien, ses successeurs, coDHrmèreot son jugemenl
conire Phollus '.
Basile mourui alors, et Léon VI, snn Gla , lui suecéds.
1/on avait un cousin que l'on priiendail que Pliolins avait des-
sein d'élever !i l'empire : on le dit k Léon , il le crut , et Rassit
Phntius dasièee ite Constanlinople . sur leqnel il pinça sonlVÈre,
Pliolins se retira dans un monaslpre , Où ri Qiill trnnquillement
sea jonrs; sa retraite rfublil la communion entre l'Ëglise dé
Home et l'Ëg^lise de Conslanlinople *.
yiieiquKS auteur* ont voulu jnsiiller Pliolîus, mai» sans rai-
son : on ne peut nier que l'e ^rand homme n'ait mis dans tOulB
sa conduite, par rapport 3u patriarcat, une mauvaise Toi , une
imposture insigne ',
PlEfinE DE BRUTS tétait un simple laïque, qui enseignait
qu'il ne fallait point donner le baptême aux f nfans , et qu'il l'tait
inutile i tousceui qui ne pouiaient pas faire un acte de foi en la
recevant. 1" Il condamnait l'usagedes églises, des temples, des
antels, et les fïisail aljatlre. 2* H condamnait le culte des croix,
et les Faisait briser. 3- Il croyait la messe inutile , et en défendait
la ctMébraLîon, 4* II enseignait que les aumônes et les prières
étaient inutiles aux morts , et défendait de chanter les louanges de
Dieu.
I.a France avait été infectée , un siècle auparavant, deseneurs
des Uanichéens; on en avait brillé beaucoup dans diS£reaies pro-
vinces : l'extrême ri{{ueur avec laquelle on les avait traités tes
rendit plus circonspects; mais elle augmenta leur haine contre '
le clergé, qui avait excité contre eui le zèle des princes. Le dé-
tic du se venger du clergé devint l'ubjei principal de ces fanaii-
■ D.-iron. Panopl., loc. cîL
> Ziiiiar. Baron ad an SBO. Curopalal. Dup., îbid.
> Tout ce qui regarde Pholins se trouve dauiles LcUrri de NicoliisI"
« d'Adrien IL Vecni, I. 3, De proceMÎaue ^ril. 9. Nieelat, ViUs
Ignallri dauii Scbntiis, Pnpf. sur In BibIJOI. de PIidIJU»! dans LC4
AHaliiu, De sjnudo Phatïanl ; dam Fleur;; dans k» Hiivolutiani de
Conilnnlinople, |iar M. de Buri)(n]', t. S.
Phntius 0 fiiil un t^rand nombre d'cicclleus miiTa([PS, sur icsqucli H '
faiil roniultrr lo n)tiU')lli»q<ie de Kubricius, (. 0, e, 38, p. SeO.
288 PIE
ques ; ils furent donc porios à aitaqucr tout ce qui conciliait de la
considération, da respect et de Tautorilé au clergé; ils attaquèrent
Tefficacité des sacremens , les cérénionies de PÉglise , la diffé-
rence que Tordre met entre les simples laïques et le clergé, et en-
lin Tautorité des pasteurs du premier ordre.
Occupés de ces objets , ils abandonnèrent insensiblement les
dogmes du Manichéisme , qu'il était trop dangereux de défendre ,
et attaquèrent les sacremens , le clergé , les cérémonies , etc.
Les désordres et Tignorance du clergé étaient extrêmes : tout
était vénal dans la plupart des Klglises , même les sacremens
étaient souvent administrés par des simoniaques et par des concu-
binaires publics ; le peuple , gouverné par de tels pasteurs , était
enseveli dans une profonde ignorance et disposé à se révolter con-
tre ses pasteurs ; ainsi tout homme quf avait une imagination
vive pouvait devenir chef de secte en prêchant contre le dergé,
contre les cérémonies de TËglise et contre les sacremens.
Comme il y avait beaucoup de ces sectaires répandus dans le
Languedoc et dans le Dauphiué , ils y produisirent, dans le dou-
zième siècle , une foule de petites sectes qui se répandirent dans*
les différentes provinces de France , et qui prirent différentes
formes , selon le caprice du chef de la secte ; c'est ainsi que Tan-
cheliu , Pierre de Bruys , Henri , Arnaud de Bresse , s'élevèrent
et formèrent leurs sectes.
Pierre de Bruys parcourait les provinces, saccageant les égli-
ses, abattant les croii , détruisant les autels; on ne voyait en
Provence que chrétiens rebaptisés , qu'églises profanées. Pierre
de Bruys fut bientôt chassé de celle province , passa en Langue-
doc où il fut arrêté et brûlé vif *.
Les Proteslans font ordinairement de Pierre de Bruys un saint
réformateur et un de leurs patriarches , dont Dieu s'est servi pour
perpétuer la vérité ^.
Ce sentiment n'est fondé sur aucun monument de ces temps.
Comment les Proteslans, qui condamnent les Anabaptistes, peu-
vent-ils élever si haut l'autorité de Pierre de Bruys , qui n'est en
effet qu'un Anabaptiste? A quelle exlrémité est-on réduit lors-
qu'on est obligé de chercher dans de pareils hommes le fil de la
tradition des Ë<^liscs protestantes?
« D*ArgcntixS Co]lcc\, Jud., 1, 1, p. 13. Dupin, douzi^me siùdo, t 6.
* Basnage, Uist des lîgl. rrforui., I. 4, h. Pùriode, c. G, p. 134,
PtE 280
On a réfuté les erreurs de Pierre de Bruys sur les prières pour
les morts , à Tarticle Vigilance ; ses erreurs sur le culte de la
croix , à Tarticle Iconoclastes ; ses erreurs sur la nécessité de la
sainteté du ministre des sacremens , à Tarticle Rebaptisans ; ses
erreurs sur la présence réelle^ à Tarticle Bérenger.
Pierre de Bruys eut parmi ses disciples un nommé Henri.
Voffêz Henri de Brvts.
C'est sans preuve que M. Basnage a prétendu que les disciples
de Pierre de Bmys formèrent une secte étendue ^.
PIERRE D'OSMÂ , professeur de théologie à Salamanque, dans
un traité de la confession , enseigna : 1« que les péchés mortels,
quant à la eonlpe et à la peine de Tautre vie , sont effacés par la
contrition du cceur, sans ordre aux clefs de TËglise ;
2* Que la confession des péchés en particulier, et quant à l'es-
pèce , n*est point de droit divin , mais seulement fondée sur un
statut de TEglise universelle ;
3* Qu*on ne doit point se confesser des mauvaises pensées qui
sont effacées par Taversion qu'on en a, sans rapport à la confession;
4» Que la confession doit se faire des péchés secrets et non
de ceux qui sont connus;
5* Qu'il ne faut pas donner l'absolution aux pénitens avant
qu'ils aient accompli la satisfaction qui leur a été enjointe ;
6* Que le pape ne pouvait remettre les peines du purgatoire ;
7» Que l'Église de la ville de Rome pouvait errer dans ses dé-
cisions ;
S^ Que le pape ne peut dispenser des décrets de l'Église uni-
verselle ;
9* Que le sacrement de pénitence , quant à la grâce qu'il pro-
duit, est un sacrement de la loi de nature , nullement établi dans
l'ancien et dans le nouveau Testament.
Alphonse Carillo, archevêque de Tolède, qui avait assemblé les
plus savans théologiens de son diocèse , condanma ces proposi-
tions comme hérétiques , erronées , scandaleuses , malsonnantes,
et le livre de l'auteur fut brûlé avec sa chaire. Sixte IV conGrma
ce jugement en 1479. On ne voit point que Pierre d'Osma ait fait
secte*.
> Basnage, HisL des ÉgL réf., t. 4, A. Période, c. 6, p. 4Â6.
' Bannes, in secundam secunds quaest. prima, art. 40, p. 121. Col-
lect conc. Hard., t. 9, p. 1408. D'ArgcnliA Col. jud., t. 4,
II. 25
3HH Hl^
qups; ilsfiirenl ilonr |)i)rl>-s :'i ;itlii(|iier tn»! ce 4111 coBciluiiiltti
GOnsidi^raiîoa, durrs|>pcl et <lc raiiioriti- au r\et\-é; ihtUiquhM
IVDiuarili; iIm ucrcaiens , li-i <-éréniUiiiN à« l'ËgliK , U d'iSt
rPiirr rjiic l'urilrc mel fulri- li's »iiii|il('M l»ïi|ui;s el le tlcrgc, cl ei-
IJii l'unliiriiô îles ]iïsi«urs du premier ordrp.
Ocuuiùs de ces obji'ls , iU abandonnèrent îuseosibleineoi Is
dogrors du Manicliéismc , qu'il Otaii trop dangereux de déTeodrc ,
et attaquèrent le* ucrcmens, le clergé, les cércrooiiies, eU.
I.CS désordres et l'ignorance du clerj^é étaieat eiirémei : tori
(■tait Téaal djng la plujuiri des h^lises, même les ucreneoi
étaient soQTCnt adniinislivs (lar des siinoniai)nes et par de* cône»-
binaires publics ; le peuple , gouverné par de tels pasteun , AÙt
enseveli dans une profonde ignorance et disposé Ji se révolter cMt-
Iro ses pasteurs; ainsi tout liomnie «iii' avait une imagiailiia
viTe pouvait devenir cbef de seute en précbant contre le dergt,
cnnire les cérémonies de l'Ëglise et contre les sacremens.
Cumoïc il y avait beaucoup de ces sectaires répandus dans U
Languedoc et dans le Daupbiiié , ils \ produisirent, dan* le do»*
xièuie siècle , une Toule de petites sectes qui se répandirent daw
les différentes provinces de France , et qui prirent dilTémUi
furmes , selon le caprice du chef du la secte ; c'est ainsi que Ta**
elielin , l'icrre de Bruys , Henri , Arnaud de Bresse , l'élerèfeni
et Tu nnérenl leurs sectes.
rierre de Brii)'s par(»iuruil les provinces, saccageant les à^
SCS, abattant les croix , détruisant les autels; on no vojail ea
l'roveaee que chrétiens rebaptisés, qu'tfllsies profanées. Picfre
de Itrnjrs fut bientôt chassé de cette province, passa en Langne-
doc ob il l'ut arrêté et brfllé vit <.
I^s IVoleslans font ordinairement de Pierre de Bruys ua saîM
réfunnateur et un île leurs [iniriardies , dont Bieu s'est serti pov
|H-r|>éluer la vérité '.
Ce sentiment n'est fondé sur aucun monument de ces
Couiniont les Prolesians, qui condamnent les Auabaptules,
venl-iU élever si haut l'umoriié de Pierre de Brujs , qat '
effet qu'un Anahaptisu^f A quelle extrémité est-on ""'
t obligé de chercher duns dapar^è^mi
. des tgliscs proteàtanlosT
iraditii
' D'Areenirû. r.o'lcrl. JuiJ„J,
' Itusuiigi', Hisl. du* * ' "*""
PRA 291
» torîié de Josus-Christ , après un examen particulier et avec
> connaissance de cause , nous ne pouvons croire que nos adver-
> saires puissent envisager tant de biens sans en regretter la perte
> et sans avoir quelque honte d*une réformation qui a retranché
9 une pratique si salutaire et si sainte. >
PÉTROBRUSIENS, disciples de Pierre de Bruys.
PIÉTISTES. Voyez Tarticle des seclesqui se sont formées parmi
les Luthériens.
PRAXÉE était Phrygien ; il avait été Montaniste , aussi bien
que Théodote deBysance : il vint d*Asie à Rome , et quitta la sectjQ
de Montan. 11 avait été mis en prison pour la foi et s*était acquis
de la considération dans TËgUse , sous le pontificat de Victor.
Dans le même temps , Théodote de Bysance , qui n'avait point
résisté à la persécution , dit , pour excuser sa faute, qu'en reniant
Jésus-Christ il n*avait renié qu*un homme.
Artémon et les hérétiques connus sous le nom d'Aloges avaient
adopté ce sentiment et soutenaient que Jésus-Christ n'était point
Dieu.
Celte doctrine avait été condamnée par TÉglise ; ainsi TÉglise
enseignait , contre Marcion , Cerdon , Cérinthe , etc., qu'il n'y
avait qu'un seul principe de tout ce qui est; et contre Théodote,
que Jésus-Christ était Dieu. Praxée réunit ces idées et conclut que
Jésus-Christ n'était point distingué du Père, puîsqu'alors il fau-
drait reconnatlre deux principes ou accorder à Théodote que Je-
sus-Qirist n'était point Dieu; ajoutez à cela que Dieu dit lui-même :
Je suis Dieu , et hors de moi il n'y en a point d'autres ; le Père et
moi nous sommes un ; celui qui me voit , voit aussi mon Père ; je
suis dans le Père, et le Père est en moi.
Voilà , ce me semble , l'origine de Terreur de Praxée : elle
n*est point née des disputes sur la distinction des personnes , qui
n'ont point eu lieu alors , et dont on ne trouve aucune trace dans
Tertullieu , quoi qu'en dise M. le Clerc *.
Praxée croyait que son sentiment était le seul moyen de se ga-
rantir des systèmes qui admettaient plusieurs principes et d'éta-
blir l'unité de Dieu ; c*est pour cela qu'on appelait ses disciples
les Monarchiques.
De ce qu'il n'y avait qu'une seule personne dans la divinité, il
saivait que c'était le Père qui s'était incarné, qui avait souffert, etc. ,
^ Le Clerc, Hist. eccles. ad an. 186.
393 PRA
et c'est pour cela que les disciples de Praxée furent appelés Patrt-
passieos.
TertuUien a réfuté Terreur de Praxée avec beaucoup de force et
de solidité. 11 oppose à cette hérésie la doctriue de TËglise uni-
verselle , selon laquelle , dit-il , nous croyons tellement on seol
Dieu , que nous reconnaissons en même temps que ce Diea a on
Fils qui est son Verbe, qui est sorti de lui, par lequel toutes
choses ont été créées et sans lequel rien n*a été fait ; que ce Yeri>e
a été envoyé par le Père dans le sein de la Vierge; qu*il est né
d'elle, homme et Dieu tout ensemble , Fils de Thomme et Fils de
Dieu ; qu'il a été surnommé Jésus-Christ , qu'il a souffert , qo*il
est mort et a été enseveli : voilà , ajoute-t-il , la règle de l'Ëglîse
et de la loi , depuis le commencement du christianisme ^*
M. le Clerc paraît douter que Praxée ait confondu les personnes
de la Trinité ; il croit que Praxée n'a pas nié que le Père fût dis-
tingué du Fils , et qu'il soutenait que cette distinction n'en fai-
sait pas deux substances , et que c'est cette dernière distinction
que TertuUien a soutenue contre Praxée.
Cette imputation est injuste : TertuUien, dans tout son ouvrage,
soutient également et l'unité de la substance divine , et la distinc-
tion des personnes diviues.
Dans les chapitres 3 et 4 , TertuUien dit que la trinité des per-
sonnes ne préjudicie en rien à l'unité de la nature et à la monar-
chie que Praxée prétendait défendre: c'est la détruire, dit-il,
que d'admettre un autre Dieu que le créateur : pour moi qui re*
connais que le Fils est d'une même substance que le Père, qu'il
ne fait rien sans sa volonté , et qu'il a reçu de lui sa toute-puis-
sance , que fais-je autre chose , sinon de défendre dans le Fils la
monarchie que le Père lui a donnée ? Il en est de même du Saint-
Espriu
Dans le chapitre 7 TertuUien dit à Praxée : Souvenez-vous tou-
jours de la règle que j'ai établie , que le Père , le Fils et le Saint-
Esprit sont inséparables. Quand je dis que le Père est autre que
le Fils et le Saint-Esprit , je le dis par nécessité , non pour mar-
quer diversité , mais ordre ; non division , mais distinction ; il est
autre en personne , non en substance.
Il n'est pas possible d'exprimer plus clairement l'unité de sub-
stance et la distinction des personnes : si TertuUien avait ensei-
* Tert. conl. Praxean, c, 2.
PRA 29S 1
Mé que les irois personnes de la Trinité âtaieni trois substances , J
l ne pouvait dire qu'il n'y avait point de divisioii entre elles; I
a plusieurs substances sont divisOes parce qu'elles ei>istenl n6- I
sairement Tune hors de raulrc, I
, Si Teriullien avait cru que les trois personnes fussent trois suh- I
lltnce« dilTérentes , il y aurait eu entre ces trois personnes , non- I
Mtement ordre et distinction , mais encore diversité ; il eût été 1
[:l que le Përe et le Fils Tussent la même substance , eomme il I
e soutient contre Praiée ; ce qui Teraît une contradiction dans I
jElleTertullieune pouvait tomber. Cen'estpasqueleshommea I
Rie puissent se contredire; mais ce n'est que dans des conad- I
nences éloignées , et jamais quand le oui et le non se loucbent I
linsi dire , comme cela serait arrivf si Terlullien avait parié I
e M. le Clerc le fait parler. I
' M. le Clerc prétend que ces distinctions que Tertultien met
enlre les personnes de la Trinité sont des distinctions qui ne
peuveot convenir qu'A trois substances, parce que si elles ne sup-
pos<?ot pas que les personnes sont trois substances , elles établis-
sent seulement que les trois personnes ne sont que trois modes
ou trois relations dilTérentes, ce que Praxée ne niait pas. J
1' le demande i M. le Clerc sur quoi il prétend que Praxée re- I
connaissait une distinction , même modale, entre les personnel' I
le la Trinité? Tout l'ouvrage de Terlullien suppose que Pratéa I
Jtit toute dtstioctiun entre les personnes de la Trinité. I
f«* Tertnllien, dans l'endroit sur lequel M. le Clerc fuit cetta 1
Hlexîon , dit qu'il fera voir comment le Père, le Fils et le Saint- I
Esprit Tout nombre sans division , ce qui serait absurde s'il avait I
cru que ces trois personnes sont trois substances. I
3* Je ne vois rien dans Terlullien qui suppose que la distinc- 1
lion qu'il admet enlre les personnes de la Trinité puisse étro 1
regardée comme une distinction modale; les modes n'agissent!
point , n'ont point d'action propre , n'envoient point une autre M
modiGcalion , ce que Tertnllien reconnaît cependant dans les per- H
sonnes de la Trinité. M. le Clerc ne pouvait coadure que la dis-
tinclioQ admise par Tertnllien était une distinction qui suppose
que les trois personnes sont trois substances, qu'autant qu'il se-
rait certain qu'il ne peut y avoir que deui sortes de distinctions :
t modale ou celle qui se trouve entre des modificaiionsd'unesub- J
ince , et la substantielle ou celle qui se trouve entre des sub- ■
inces ; mais c'est ce qu'il ne prouve pas. I
Eipri'
Le res^ des difficultés de M. le Clerc contre TertulUen n'j»!
qnVn abus des comparaisons que Tortullien emploie pour expli-
quer la manière dont les trois personnes de la Trinité subsistent
dans la substance divine; comparaisons que Tertullien ne donne
que comme des images propres à faire entendre sa pensée y et
dont il prévient Tabus en rappelant sans cesse son lecteur à Tu-
pité de substance.
Ce serait encore abuser des mots que de prétendre que Tertal-
lien a soutenu contre Praxée que les trois personnes sont troi*
substances parce qu*il se sert quelquefois du mot de substance
pour signifier la personne subsistante , ce qui est ordinaire aox
anciens avant le concile de Nicée , et même après ce concile.
M. le Clerc n*aurait pas ainsi jugé Tertullien s*il eût suivi les
maximes qu*il établit pour juger du sens d'un auteur. Voyez Tar-
ticle Critica,
PRÉDESTINATIÂNISME. Cette erreur renfermait plusieurs
cbefs : l" quUl ne fallait pas joindre le travail de Tobéissance de
rhomme à la gr&ce de Dieu; 2' que depuis le péché du premier
homme le libre arbitre est entièrement éteint ; 3 ' que Jésus-Christ
nVst pas mort pour tous ; 4' que la prescience de Dieu force les
hommes et damne par violence , et que ceux qui sont damnés le
sont par la volonté de Dieu ; 5 que de toute éternité les uns sont
destinés à la mort et les autres à la vie.
Les Pélagiens , forcés de reconnaître le péché originel et la né-
cessité d'une grâce intérieure qui éclairait Tesprit et qui ^u>
cliait le cœur de Thomme pour qu'il pût faire une action bonne
pour le salut, avaient prétendu que ce.tte grâce dépendait de
l'homme et s'accordait à ses mérites : ils prétendaient que Dieu
serait injuste s'il préférait un homme à l'autre sans qu'il y eût de
dilTérence dans leurs mérites, et prétendaient que cette diflerence
ne pouvait s'accorder avec la bonté et la sagesse de Dieu . ni avec
ce que l'Lcriture nous apprend de sa volonté générale de sauver
les hommes.
Saint Augustin combattit ces principes par tous les passages de
l'Écriture qui prouvent que l'homme ne peut se discorner lui-
même ; que Dieu n'est point injuste en ne donnant point sa grâce
aux hommes , parce qu'ils sont tous dans la masse de perdition ;
que Dieu n'ayant aucun besoin d'eux, étant tout-puissant, indé-
pendant, il faisait grâce h qui il voulait , sans que celui à qui il
ne la faisait pas eût droit de s'en plaindre ; que celte volonté
PRE 295
vague de donner la grâce généralement h tous les hommes , en
sorte qu'il n'y eût ni choix, nî préférence, déiruisail toutes les idées
que l*Écriture nous donne de la Providence par rapport 4u salut ;
, que rien n*arrivait que par la volonté de Dieu, qui avait prévu et
déterminé tout; que la volonté de sauver les hommes ne devait
pas s'entendre de tous les hommes sans exception ; qu'il fallait
être fidèlement attaché à la toute-puissance divine , à son indé-
pendance , et enfin qu'il fallait croire que sa volonté n'était point
déterminée par l'homme ^.
11 confirma et fortifia tous ces principes, dans son livre De la
correction et de la grâce ^ De la prédestination et du don de la
persévérance.
Dans une dispute^ les argumens font perdre de vue les princi-
pes, et deviennent eux-mêmes des principes, parce que c'est sur
ces argumens qu'on dispute.
Ainsi, l'indépendance de Dieu dans ses déterminations, sa toute-
puissance, son empire absolu sur toutes ses créatures, furent les
principaux objets dont on s'occupa.
On crut trouver dans ces principes fondamentaux une pierre
de touche par le moyen de laquelle on pouvait juger toutes les
contestations relatives à la grâce , au libre arbitre et au salut des
hommes, et l'on rejeta comme des erreurs tout ce qui n'y parais-
sait pas copforme.
En regardant comme un dogme fondamental et prenant à la lettre
la corroption de l'homme , ce que l'Écriture nous dit qu'il n'a
rien qu'il n'ait reçu ni dont il puisse se glorifier, et qu'il dépend
en tout de Dieu, la liberté de l'homme parait une erreur.
En supposant que rien que ce que Dieu veut n'arrive , il est
aisé de conclure qu'il ne veut pas le salut des damnés, et qu'il
veut leur damnation.
En reconnaissant que Dieu prévoit tout, qu'il arrange tout,
comment supposer dans Thomme la liberté? Cette liberté ne se-
rait-elle pas un vrai pouvoir de déranj^er les décrets de la Provi-
dence, et par conséquent contraire au dogme de la louie-puis-
sance et de la Providence ?
Saint Augustin avait soutenu également et la loute-puissnnce
et la liberté ; il avait enseigné que les passages qui parlent de la
volonté de sauver tous les hommes pouvaient s'expliquer de tous
' Kpist. ad Si\(., ad Vitalem,
206 PRE
les hommes sans excepiion, et qu'il ne s*oppo8ait point k ces ex-
plications, pourvu qu*elles n'intéressassent ni la toute-poissanoe
de Dieu , ni la gratuité de la grùce ; mais il n'avait point expliqué
comment ces dogmes s'alliaient; il s'était écrié, avec saint Paul ;
0 allitudo!
Les dogmes de la liberté et de la prédestination sont donc entre
deux abtmes^ et pour peu qu'on ait intérêt de défendre en parti-
culier ou la liberté, ou la prédestination, on tombe dans les
abtmes qui bordent, pour ainsi dire, cette matière.
Ainsi , il n'est pas étonnant qu'il y ait eu des Prédestinatiens
dès le cinquième siècle , mais en trop petit nombre pour former
une secte.
Nous n'examinerons point précisément quand cette hérésie a
commencé; nous remarquerons seulement qu'elle n'est point ima-
ginaire, et qu'elle a été condamnée dans les conciles d'Arles et de
Lyon, sur la fin du cinquième siècle *.
Elle fut renouvelée par Gotescalc, moine de l'abbaye d'Orbais,
dans le diocèse de Soissons : il avait beaucoup lu les ouvrages de
saint Augustin , et il était entraîné par un penchant secret rers
les questions abstraites. 11 examina, d'après les principes de saint
Augustin dont il était plein, le mystère de la prédestination et de
la grâce : uniquement occupé de la toute-puissance de Dieu sur
ses créatures , il renouvela le Prédestinatianisme. 11 enseigna,
i" que Dieu, avant de créer le monde et de toute éternité, avait
prédestiné à la vie éternelle ceux qu'il avait voulu, et les autres à
la mort éternelle : ce décret faisait une double prédestination ,
l'une h la vie, l'autre à la mort; 2° comme ceux qui sont prédes-
tinés h la mort ne peuvent être sauvés, ceux que Dieu a prédes-
tinés à la vie ne peuvent jamais périr; 3* Dieu ne veut pas que
tous les hommes soient sauvés, mais seulement les élus; 4* Jé-
sus-Christ n'est pas mort pour le salut de tous les hommes, mais
uniquement pour ceux qui doivent être sauvés ; 5« depuis la
chute du premier homme , nous ne sommes plus libres pour faire
le bien, mais seulement pour faire le mal.
Gotescalc prêchait cette doctrine aux peuples, et avait jeté
beaucoup de monde dans le désespoir : il fut condamné dans le
concile de Mayence , auquel Raban présidait ; il fut ensuite
* Noris, Hisr. Pclag., 1. 3, c 15. Pagi, ad an. &70, Le Prédestina-
tianisme, par le P. Duchesne, iu-&<*, 172&.
. ÉDïOjÉ ilans le diocèse de Reims , oii il avait reçu t'onllna-
Raban , en rnivo^aol Gotcscalc h Ilincmiir, lui l'cmit sur sei
erreurs et lui envoja la décision du concile : llincmar EonToqua
un (ODCile tt Cariai, dans lequel Goiescalc Tut coodaniné, déposa
et envoyé en prison.
Goiescalc ne laÎMu pas de se défendre, elllincmar écrivit conlre
lui : OD crul voir dans les écrits de Hincmar des choses répré-
liensibles. tlulramne , moine de Corbie , et Prudence , cvèijue da
Troyes, aliaquèrenl les écrits de Hincmar, qui opposa Aoiaurî,
diacre de Trêves, et Jean ScoL Ërigène.
Prudence, évéqne de Troyes, cnH trouver le Pélagianiïme dans
les à-'rils de Scot ; l'Ëgliae de Lyon chargea le diacre Flore d'é-
crire contre cel auteur. Amolon écrivit en même temps une lettre
i Colescalc, par laquelle il paraît qu'il le croyait coupable; il
réfute plusieurs propositions qu'il avait avancées, et blikjne sa
conduite : il ne pouvait souDrir qu'on enseignït qn'un certain ^
nombre de personnes eùl été prédestiné de toute éternité aux
peines étemelle», de manière que ces personnes ne pussent jamaiï
ni se repentir ni se sauver. Celle doctrine est ëvidemmeni celle
d'AmoloD, et U. Basnagc n'a fait que des sopliismes pour prou-
ver que cet archevêque pensait au fond comme Culescalc '.
Les divisions qui s'élevèrent en France à l'occasioD de ce
moine ne prouvent donc point que l'Église de France fût parta-
gée sur sa doctrine : on défendait sa personne, et l'on condam-
nait ses erreurs '.
On a beaucoup disputé sur la réalité de rbérésie des Prédesti-
natiens et sur les senlimens de Cotesealc *.
' Raban, ep. synod. ad Hincmar, t. B. Conc. Mabil. Annal. Bcne-
dicL, L S,adan.S39.
'Korisiloc. cit. Vossiui, Hisl. PeliE,'- 1. parl. h, epist. IQS, IQH,
169. 17i. ISS.
■Natal. Alei. in sxc. 5.
' Noris, VoBslus, Pagl, loc cit.: Sirmond, Prxdeslinatu* de novîlio
opère qui inseribitur Przdeitinalus, auclore F. Piclnardo, Pataiini,
in-4", pensent qu'il y neudctPréclestinatienk Uuérlus prétend lecon-
iraire. Britanoicarum, cccics. antiquiu JansËnlus, De bœr Pelai;.,
I. 8. Porbèsins, I, S, c, S9. pensent comme Usiérius; il ne parait pas
que leurs raiwns puissent Lalancer celles du sentiment opposé : elle*
prouvaient tout au plus, ce me semble, que le* Prédesiinatleos n'étaieiii
298 PRE
II me semble qu'il importe peu de savoir s*il y Avait en effet
des Prédestinatiens , ou si Ton donnait ce nom aux disciples de
saint Augustin ; mais il est certain que TÉglise a condamné les
erreurs qu*on attribue aux Prédestinatiens, et qu*il faut croire
que le libre arbitre n*a point été atteint dans Thomme par le
péché ; que Jésus-Christ est mort pour d'autres que pour les pré-
destinés ; que la prescience de Dieu ne nécessite personne, et qoe
ceux qui sont damnés ne le sont point par la volonté de Dîeo.
Saint Augustin a enseigné ces vérités, et n*a point youla qn*OB
les séparât du dogme de la toute -puissance de Dieu sur (e cœur
de rhomme, de la gratuité et de la nécessité de la grâce, de la
corruption de la nature humaine, et de la certitude de la prédesti-
nation. Il faut donc condamner également le Pélagianisme, le
Semi-Pélagianisme et le Prédestinatianisme. L'accord de toutes
ces vérités est un mystère : chacune de ces vérités étant constante,
il est impossible qu'il y ait entre elles de l'opposition , et par
conséquent il est certain qu'elles s'accordent, quoique nous igno-
rions le comment.
Il ne faut pas plus douter de ces vérités , dont nous ne com-
prenons pas l'accord , que de la vérité de notre création , quoi-
que nous ne comprenions pas comment quelque chose peut être
créé, et quoiqu'il soit démontré que nous le sommes en effet.
PRESBYTERIENS. C'est ainsi qu'on appelle les Réformés qui
n'ont pas voulu se conformer â la liturgie de l'Église anglicane.
L'Église d'Angleterre, en recevant la réformation, n'adopta aue
certains changemens dans les dogmes , et conserva la hiérarchie,
avec une partie des cérémonies qui étaient en usage sous Henri VIIL
La réformation ne fut proprement établie en Angleterre que
sous le règne d'Elisabeth : ce fut alors que diverses constitutions
synodales , confirmées par des actes de parlement , établirent le
service divin et public de la mauière que l'Église anglicane le
pratique encore aujourd'hui.
Cependant plusieurs Anglais qui avaient été fugitifs sous If arit
retournèrent en Angleterre : ils avaient suivi la réforme de Zuin-
gle et de Calvin ; ils prétendirent que la réformation de l'Ëglise
anglicane était imparfaite et infectée d'un reste de Paganisme :
ils ne pouvaient souffrir que les prêtres chantassent l'office en
pas asscx nombreux pour faire une secte. ( Voyet mist littér, de Lyon*
pupin, Natal. Alex., Hist, de l'Égl. gallicane, t 6.)
PRE 299
surplis, et surtout ils combattaient la hiorarcliie et Tautorité des
évéqucs, prétendant que tous les prêtres ou ministres avaient
une autorité égale, et que TËglise devait être gouvernée par des
consistoires ou presbytères composés de ministres et de quel-
ques anciens laïques* On les appela à cause de cela Presbyté-
riens, et ceux qui suivaient la liturgie anglicane et qui reconnais-
saient la hiérarchie se nommèrent Épiscopaux.
Les Presbytériens furent long-temps dans Toppression et
traités comme une secte schismatique; ils sont encore regardés
comme tels par les Ëpiscopaux. Voyez^ h Tarticle Angleterre, les
sectes que la réforme y produisit : nous avons réfuté Terreur des
Presbytériens à Tarticle VigIlamce.
Les Presbytériens ou Puritains s^élaient séparés de TËglise an-
glicane parce qu*elle conservait une partie des cérémonies de
PËglise romaine, quMls regardaient comme superstitieuses et
contraires à la pureté du culte que Jésus-Christ est venu établir^
lequel est un culte tout spirituel.
Les Puritains avaient donc simplifié le culte extérieur; mais ils
en avaient conservé un, et quelques cérémonies.
Hubert Brown, ministre d'Angleterre, trouva que les Puritains
donnaient encore trop aux sens, dans le culte qu'ils rendaient à
Dieu, et que pour Tlionorer véritablement en esprit il fallait re-
trancher toute prière vocale, même Toraison dominicale; il ne
voulut donc se trouver dans aucune église où Ton récitait des
prières* Il eut des disciples qui formèrent une secte, qu'ils regar-
daient comme la pure Église.
Les Brounistes s^assemblaient cependant, et ils prêchaient dans
leurs assemblées : tout le monde avait droit de prêcher chez les
Brounistes, et ils n'exigeaient point de vocation, comme les Cal-
vinistes et les Puritains.
Les Anglicans, les Presbytériens et les Catholiques furent éga-
lement ennemis des Brounistes : ils furent punis sévèrement; ils
se déchaînèrent contre l'Église anglicane , et prêchèrent contre
elle tout ce que les Protestans et les Calvinistes avaient dit contre
TLglise catholique; enfin ils eurent des martyrs, et formèrent une
secte en Angleterre. Brown en fut le chef, et prit le titre de pa-
triarche de r£glisc réformée ^.
' Boss, Des religions du monde : la profane séparation des Brou-
pbtc».
300 PRI
Le cbangemenl que les prétendus Réformés firent dans le culte,
et que les Puritains ont adopté, u*avaitpour principe que leur haine
contre le clergé etTamour de la nouveauté : une partie des Réfor-
mateurs a conservé beaucoup de cérémonies de TEglise romaine, et
les Calvinistes sont unis de communion avec ces Réformés. Ces cé-
rémonies n*étaient donc point une raison de se séparer de l'Église
romaine, et les Réformateurs n'avaient pas une autorité saffi^mte
pour entreprendre de faire les changemens qu'ils ont faits.
Nous les avons réfutés à Tarticle Vigilance, dont ils ont
renouvelé les erreurs : on peut voir la défense du culte extérieur,
par Brueys.
Les théologiens de TÉglise anglicane ont combattu les principes
des Puritains depuis leur séparation jusqu'à présent. Voyez VHist,
ecelés. de la Grande-Bretagne , par Collier; on en trouve un fort
bon extrait dans la Biblioi, anglaise, t. 1, pag. 181 ; VHUtoire
dei PuritaiMt par Daniel Neal^ 1736, 3 vol. in-S% en anglais.
PRÉTENDUS RÉFORMÉS. Voyez Réformation.
PRISGILIEIN. Chef d'une secte qui se forma en Espagne, vers
la fin du quatrième siècle : cette secte alliait les erreurs des Gnos-
tiques et celles des Manichéens.
Ces erreurs furent apportées en Espagne par un nommé Marc,
et adoptées par Priscilien.
Priscilien était un homme considérable par sa fortune et par
sa naissance ; il était doué d'un beau naturel et d'une grande fa-
cilité de parler ; il était capable de souffrir la faim , de veiller ;
il vivait de peu; il était désintéressé, mais ardent, inquiet,
animé par une curiosité vive. H n'est pas surprenant qu'avec de
pareilles dispositions Priscilien soit tombé dans les erreurs de
Marc et soft devenu chef de secte.
Son extérieur humble , son visage composé , son éloquence ,
séduisirent beaucoup de monde : il donna son nom à ses disciples,
qui se répandirent rapidement dans une grande partie de l'Es-
pagne et furent soutenus par plusieurs évèques.
Les Priscilianistes formèrent donc un parti considérable : Hygin,
évêque de Cordoue , et Idace , évéque de Mérida, s'opposèrent à
leur progrès, les poursuivirent avec beaucoup de vivacité , les irri-
tèrent et les multiplièrent: Hygin, qui le premier leur avait déclaré
la guerre, adopta enfin leurs sentimcns et les reçut à sa communion.
Après plusieurs disputes, les évéques d'Espagne et d'Aqui-
taine tinrent un concile à Saragosse : les Priscilianistes n'osé-
PRl
[ rent s'ei[>oser au jugeucni du concUu et Turcot condamné
lustanliuseï Salvien , deux Évéque» priscilUnUies, foin da
re au jugement du concile, ordooDèrealPriscilienëvèqn
[ de Laliile,
X évéqnes opposts aux Pris cil iaoUies , animés par un m
nseil, dîl Su Ipice Sévère , s'adressèrent aux juges sûculieitl
Kpour Taire chasser les Prise ilianistes des villes. Par mille sollîot- T
f laliuns houleuses ils oblinreot de l'eDipercur Grstiep ud rescnt' J
R qui ordonnait que tes hérétiques seraient chassés , Don-seulejnent I
" les et des villes, mais de tous les pays'.
Les Priscilianistes, épouvanlés par cel édit, n'usèrent se dfrj
V feodre en justice ; ceux qui prenaient le titre d'évêques eédërent 1
l^'eux-mêmes ; les autres se dispersèrent.
lustaDtius, Salvien et Priscilien allèrent 1 Rome et â Hîlan,
13 pouvoir obtenir de voir ni le pape Damase, ni saint Ambroise. '
Rejeiés par les deux évéques qui avaient la plus grande auto-
Mtë dans l'Ëglise, ils tournèrent tous leurs efTorls du c6lé de
"ralîen, el, à force de sollicitations et de prèsens, ils gagnèreut
lllCédODius , maître des offices , et obtinrent un rescril qui caa-
nil celui qu'ldace avail obtenu contre eux , et ordoonait de k
rétablir dans leurs Églises *.
Les Priscilianistes revinrent en Espagne , gagnèrent le procofl
sul Volventius, et rentrèrent dans leurs sièges sans opposilioi
Ils étaient trop aigris contre leurs ennemis pour se cnutenier 4
leur rétablissement; ils poursuivirent Itace comme periurbateM
des églises et le firent condamner rigoureusement.
Itace s'enfuit dans les Gaules, gagna le préfet Grégoi
ordonna qu'un lui amenil les auteurs du trouble , et en inrormi
l'empereur aSo de prévenir les sollicitations. Muis tout était *
ntl î la cour, et les Priscilianistes, au moyen d'une grandtil
e qu'ils donnèrent ï Macédooius , obtinrent que l'emperen^H
B^til la connaissance de cette affaire au préfel des Gaules el qu'ellÎB
l'fftt renvoyée au vicaire d'F^pagne '.
. Uacédonius envoya des ofliciers pour prendre Itace , qui élaîtl
rsïTrèves, el le conduire en Espagne; mais il leur échappi I
l'M resta secrèlemenl h Trêves jusqu'il la révolte du Maxime.
* Sutpicc Sdvire, I, 2.
1 Ibid.
Uhid,
302 PRl
Lorsque Tusurpaleur Maxime fut arrivé à Trêves, Itace lat
présenta un mémoire contre les Priscilianistes : Itace ne pouvait
manquer d'intéresser Maxime en sa faveur et de Tanimer contre
les Priscilianistes , qui devaient être dévoués à un prince qui les
protégeait et ennemis de Fusurpaleur, au moins jusqu*à ce quUls
Teusseut gagné.
Maxime fit conduire à Bordeaux tous ceux qu'on crut infectél
des erreurs de Priscilien , pour y être jugés dans un concile.
Instantius et Priscilien y furent amenés : on fit parler Insttn-
Uus le premier , et comme il se défendit mal il fut déclaré in-
digne de Tépiscopat.
Priscilien ne voulut point répondre devant les évêques ; il ap-
pela à Fempereur, et Ton eut la faiblesse de le souffrir ; au lieu
qu'ils devaient , dit Sulpice Sévère , le condamner par contumace,
ou, s'ils lui étaient suspects avec quelque fondement, réserrer ce
jugement à d'autres évêques , et non pas laisser à l'empereur ce
jugement : voilà tout ce que nous savons du concile de Bordeaux.
On mena donc à Trêves , devant Maxime , tous ceux qui étaient
enveloppés dans cette accusation.
Les évêques llaccet Idace les suivirent comme accusateurs , et
au préjudice de la religion , que ces évêques rendaient odieuse
aux Païens ; car on ne doutait pas que ces deux évêques n'agis-
sent plutôt par passion que par zèle de la justice.
Saint Martin était alors à Trêves pour solliciter la gr&ce de
quelques malheureux ; il employa toute sa charité, sa prudence
et son éloquence pour engager Itace à se désister d'une accusation
3ui déshonorait l'épiscopat. 11 conjura Maxime d'épargner le sang
es coupables : il lui représenta que c'était bien assez qu'étant
déclarés hérétiques par le jugement des évêques on les chassât des
églises , et qu'il était sans exemple qu'une cause ecclésiastique
hU soumise à un juge séculier.
Itace, pour prévenir les effets du zèle de saint Martin , l'ac-
cusa d'hérésie : ce moyen , qui lui avait réussi contre plusieurs
ennemis , fut sans succès contre saint Martin. Le jugement des
Priscilianistes fut différé tant qu'il fut à Trêves , et lorsqu'il par-
tit , Maxime lui promit qu'il ne répandrait point le sang des ac-
cusés.
Mais pendant l'absence de sâiut Martin, Maxime céda enfin aux
conseils et aux sollicitations des évêques Magnus et Rufus : ce
dernier fut déposé depuis pour cause d*bércsie.
PRI 303
I/einpereur auittd dune les scnlimcns de douceur que saint
Martin lui avait inspirés, et commit la cause des Prisciliuuistes à
Êvodius , préfet du prétoire.
Ëvodius était juste , mais ardent et sévère ; il examina deux fois
Priscilien, et le convainquit par sa propre confession d*avoir
étudié des doctrines honteuses , d^avoir tenu des assemblées noo«
turnes avec des femmes corrompues , de s*êire mis nu pour prier.
Ëvodius fit son rapport à Maxime , qui condamna à mojrt Prisci-
lien et ses complices.
itace se retira alors , et Pempereur commit à sa place pour ac-
cusateur un avocat du fisc. A sa poursuite, Priscilien fut condamné
h mort, et avec lui deux clercs et deux laïques ; on continua les
procédures et Ton fit encore mourir quelques Priscilianistes.
La mort de Priscilien ne fit qu*étendre son hérésie et affermir
•ses sectateurs, qui Thonoraient déjà comme un saint; ils lui ren-
dirent le culte qu*on rendait aux martyrs, et leur plus grand ser-
ment était de jurer par lui.
Le supplice de Priscilien et de ses sectateurs rendit Itace et
Idace odieux : on vit Timpression que leur conduite fit sur les
esprits par le panégyrique de Théodose , que Pacatus prononça &
Rome , Tan 389 , en présence même de Théodose, et un an après
la mort de Maxime. « On vit , dit cet orateur, oui , on vit de cette
» aouvelle espèce de délateurs , évêques de nom , soldats et bour-
> féaux en effet , qui , non contens d*avoir dépouillé ces pauvres
» malheureux des biens de leurs ancêtres , cherchaient encore des
> prétextes pour répandre leur sang , et qui ôtaient la vie à des
» personnes qu'ils rendaient coupables comme ils les avaient déjà
9 rendues pauvres : mais bien plus, après avoir assisté à ces JQ-
» gemens criminels , après s'être repu les yeux de leurs tpurmens
> et les oreilles de leurs cris , après avoir manié les armes des
» licteurs et trempé leurs mains dans le sang des suppliciés , il^
» allaient avec leurs mains toutes sanglantes offrir le sacrifice. »
L'autorité de la justice , l'apparence du bien public et la pro-
tection de l'empereur empêchèrent d'abord qu'on ne traitât ceux
qui avaient poursuivi les Priscilianistes avec toute la sévérité que
méritaient des évéqucs qui avaient procuré la mort à tant de per-
sonnes, quoique criminelles ; cependant saint Âmbroise et plu-
sieurs autres évêques se séparèrent de leur communion. Saint
Martin refusa d'abord de communiquer avec eux ; mais il s'y dé-
termina ensuite pour sauver la vie à quelques Priscilianistes.
304 PRO
Après la mort de Maxime, luce et Idace forent prifés de la
communion de TÉglise ; Itace fut excommunié et envoyé en exU»
où il mourut.
Itace n*avait ni la sainteté ni la gravité d*un évéqae ; il était
hardi jusqu^à Timpudence, grand parleur, fastueux , et traitait de
Priscilianistes tous ceux qu*il voyait jeûner et s*appliquer à la lec-
ture; cepjendant Itace avait des partisans en France : sa condam-
nation y fit du bruit , et il se forma en sa faveur un parti consi->
dérable.
De leur c6té , les Priscilianistes , devenus plus fanatiques par
la persécution , honorèrent comme des martyrs tous les Prisci-
lianistes que Ton avait exécutés , et leur erreur se répandit sur-
tout en Galice; presque tout le peuple de cette province en était
infecté; un évéque priscilianiste , nommé Sympose, ordonna
même plusieurs évéques.
Saint Ambroise écrivit aux évéques d^Espagne pour demander
que les Priscilianistes fussent reçus à la paix , pourvu qu'ils con-
damnassent ce quMls avaient fait de mal. On tint un concile à To-
lède, et Ton fit un décret pour recevoir les Priscilianistes à la paix*.
L'indulgence et la sagesse du concile de Tolède ne furent pas
capables d'étouffer entièrement l'hérésie des Priscilianistes, et,
quelques années après ce concile (tenu en 400) , Orose se plai-
gnait à saint Augustin que les Barbares qui étaient entrés en Es-
pagne y faisaient moins de ravage que ces faux docteurs ; diverses
personnes quittaient même le pays à cause de cette confusion*.
Quelques années après , l'empereur Honoré ordonna (l'an 407)
que les Manichéens, les Cataphryges et les Priscilianistes seraient
privés de tous les droits civils ; que leurs biens seraient donnés à
leurs plus proches paréos ; qu'ils ne pourraient rien recevoir des
autres , rien donner, rien acheter ; que même leurs esclaves pour-
raient les dénoncer et les quitter pour se donner à l'Ëglise , et
Théodose-le-Jeune renouvela cette loi '.
Malgré tous ces efforts , il y avait encore beaucoup de Prisci-
lianistes dans le sixième siècle, et l'on assembla un concile
contre eux à Prague K
* Ambr., ép. 5Î.
2 Solpice Sévère, loc dt.
s Cod. Théod., 16, tit. 5, 1. 40, p. 160 ; L 48, p. 168.
* Collect, conc
PTO 30
TROCLIENS, branclse de Monianisies attacha ù Proclus.
■'ÔDi n'avait rien changé dans la doctrine àe Moulan. Proclni 1
I Voulut répandre sa doctrine i Rome , ei fui convaincu d'erreur '
PRODIAMTES , auiremcDl nEnxioTiTES , disciples d'Hermiai
§reyfz cet aniclc.
PTOLOMÊE, disciple et coniomporain de Valenlin, reconnais- '
isonmatlre unéire souverainement pariait, parquitool
lais il n'adopla pas le sentiment de Valentin sur l'oi '
Pgîne du monde et sur la loi judaïque.
Pour expliquer l'origine du mal et trouver, dans le sjslënw j
' quisupposepourprincipedetouies chosesun étresouTeraînefflent
parfait, une raison suflisante de l'existence du monde et du md |
qn'oQ yTojait, Valenlin faisiil sortir der£)tre suprême de:
ligences moins parfaites ei dont les productions successivement j
dÉcroissantes avaient enlin produit des êtres malfaisans qui avaient 1
1 formé le monde, encîti^' des guerres et produit les maux qui nous
Uffligent.
JésusXbrisl assurait que tout avait iié fait par lui; ainsi le
Kitiment qui attribuait la création du monde ù des principes op-
Mes b JOsus-Cbrist était Faux; l'opposition qu'on prétendait
hinver entre l'ancien et le nouveau Testament , et qui servait ds I
sentiment, disparaissait aussitôt qu'on jetait t
lentif sur la lui de Moïse et sur les changemens que Jésus-Cbriit.J
it bits.
l'LeDécalogue, qui est la base de la loi judaïque, porte évi^
~ flimeni le caractère d'un être sage et bienfaisant; il contient II
'^borale la plus pure et la mieux accommodée au bonbeu
hommes. I^ loi de l'Evangile a perfectionné celte loi.
Les lois particulières qui semblent déroger h celte bonté dll 1
^^ l^islateur, telles que la loi du talion ou la loi qui autorise b j
^^E^engeance, sont des lois qui étaient nécessaires pour le temps,
^^BjBt Jésus-Christ , en les abolissant , n'a point établi une toi con-
^^■^ire aux desseins du créateur, puisqu'il défend rhomicide dani 1
^^Ble Décalogue.
^^V A l'égard de la loi du divorce que Jésus-Christ a abolie
^^BVett point une loi du Dieu créateur, mais un simple règlement do ]
^^f police établi par Moïse, comme lésus-Cbrist lui-même l'assure.
Quant aux lois cérémonielles et fugitives , Jésus-Christ , i, pro- I
■ Eufcb., HisI, eccle*., I.
\ li.
9ÙÙ pue
premeni parler, ne les a pas détruites , car il en a coMerwé V
prit, et n*a rejeté , pour ainsi dire, que Técorce. Jésus-CbrUt ,
en détruisant les sacrifices de Tancienne loi , n'a pas dit qu'il nç
fallait point offrir de sacrifice à Dieu ; il a dit qu'an lieu d'anioMUx
on d'encens , il fallait lui oiïrir des sentimens et des sacrifices
spirituels : il en est ainsi des autres lois.
De ces principes, Ptolomée concluait que la loi judaîqne et la
loi évangélique avaient pour principe un Dieu bienfaisant ^t non
pas deux dieux opposés , et que le monde n'était point Tonvrage de
VÊtre suprême ; car il n'y aurait point eu de mal , selon Ptolomée.
Le créateur était donc un Dieu bienfaisant placé au centre di|
monde qu'il avait créé , et dans lequel il produisait tout le biim
possible ; mais il y avait dans ce même monde un principe injuste
^t mécbant^ qui était uni h la matière et qui produisait le
mal.
C'était pour arrêter les effets de sa mécbanceté que )e Diei^
créateur avait envoyé son Fils.
Ainsi Ptolomée admettait quatre principes ou Êons, au lien de
cette suite infinie que Yalentin supposait dans le monde*
Mais comment ce principe malfaisant que Ptolémée supposait
et qui n'existait point par lui-même , comment, dis-je, cet être
pouvait-il exister, si tous les êtres tiraient leur origine d'un être
^uverainement parfait?
C'est une difficulté dont Ptolomée prétendait avoir la solution
dans une certaine tradition qu'il n'explique pas * .
PUCCIâNISTES, sectateurs du sentiment de Puccius, quj pré-
tendait que Jésus-Cbrist, par sa mort, avait satisfait pour tous les
bommes, de manière que tous ceux qui avaient une connaissance
naturelle de Dieu seraient sauvés, quoiqu'ils n'aient aucune con-
naissance de Jésus-Christ. Il soutint ce sentiment dans un livre
qu'il dédia au pape Clément Vlll l'an 1592, dont voici le titre :
De Chrifti Servaloris efficacUate in omnibus et singulishominibus,
quateniiit homines $unt, tusertio catliolica , œquitatt divinœ et hn-
manœ consentanea, universœ scripturœ S. et PP. consensu spirilu
discretionis probata , adversité scholas asseretiles quidem sttffi-
cientiam Servatoris Christi, sed negantes ejus salutarem ef/kaciam
* Pbilastr., De b»r„ c. 89. Aug., De ba:r., c 13. Tertul. adversùs
Valenlîn., c. A. Épiph., lixr., SS.Irxn., U 1, ci, 6. Crabe, Spicilcg.,
saec. 2, p. 68.
QUA 307
in iinguUêf ad S. potUificem Clementem VIIL Gûfiduç.^ 1^Q2»
i»-8»*.
Rbétorius, dans le quatrième siècle, avait pensé à peu près de
même, et Zuingle, dans le quinzième.
Cette erreur peut être une erreur du cœur ; elle est contraire
aux paroles de Jésus-Christ même, qui dit que personne ne va à
son Père que par lui, et que celui qui ne croira pas sera con-
damné *.
Puccius a été réfuté par Osiander, par Lysérus et par d'autres
théologiens allemands, cités par Stockman^.
PURITAINS. Voyez Presbytériens.
PYRRHUS. Voyez Momotuélites.
QUADR13ACRAUENTAUX, disciples de Vélanchtoq, ainsi
appelés parce qu'ils n'admettent que quatre sacremens : le bap-
tême, la cène, la pénitence et l'ordre.
QUAKERS ; ce mot en anglais signifie Trembleurs : c'est le
pom d'unesecte d'enthousiastes qui tremblent de tous leurs mem-
bres lorsqu'ils croient sentir l'inspiration du Saint-Esprit. L'o-
rigine, le progrès, les mœurs, les dogmes de cette secte singulière
méritent une place dans l'histoire des égaremens de l'esprit h|i-
maio.
De l'origine det Quakers.
Vers le milieu du dix-septième siècle, George Fox, cordonnier
dans le comté de I^icester, employait à lire l'Écriture sainte
tout le temps qu'il ne donnait pas au travail ; quoiqu'il sût 5
peine lire, il avait beaucoup de mémoire , et il apprit l'Écriture
presque entière : il était né sérieux et même atrabilaire ; il qe
voyait qu'avec peine ses camarades se délasser de leur travail par
des amusemens qu'il ne goûtait pas et qu'il condamnait avec ai-
greur. Il devint odieux à ses camarades , ils le chassèrent de leur
société, et il se livra à la solitude et à la méditation.
* Stockman Lexic. in nov. Puccianist
' Joan., iàt V. 6. Marc, 16, v. 16.
3 Loc cit.
808 QUA
Les vices et la dissipation des hommes, le compte qu*ils devaient
rendre à Dieu des jours passés dans le désordre et dans Toublî
de leurs devoirs, Tappareil du jugement dernier, étaient Tobjet de
ses méditations : effrayé par ces terribles images, il demanda à
Dieu le moyen de se garantir de la corruption générale ; il crut
entendre une voix qui lui ordonnait de fuir les hommes et de vi-
vre dans la retraite.
Fox, dès ce commencement, rompit tout commerce avec les
hommes ; sa mélancolie augmenta ; il se vit environné de diables
qui le tentaient : il pria, il médita, Il jeûna, et crut encore enten-
dre une voix du ciel et sentir une lumière qui dissipait ses crain-
tes et fortifiait son Âme. Fox ne douta plus alors que le cid ne
veillât sur lui d*une manière particulière ; il eut des visions, des
ravissemens, des extases, et crut que le ciel lui révélait tout ce
qu'il voulait connaître : il demanda de connaître le véritable es-
prit du christianisme et prétendit que Dieu lui avait révélé tout
ce qu'il fallait croire et faire pour être sauvé, et qu'il lui avait or-
donné de l'enseigner aux hommes.
Fox renonça donc à son métier, s'érigea en apôtre, en prophète,
et publia la réforme qu'il prétendait que Dieu lui avait inspiré de
faire dans les dogmes et dans le culte des chrétiens, dont 11 disait
que toutes les Églises avaient altéré la pureté.
Jésus-Christ, disait Fox, a aboli la religion judaïque; au culte
extérieur et cérémonie! des Juifs il a substitué un culte spirituel
et intérieur ; aux sacrifices des taureaux et des boucs il a substi-
tué le sacrifice des passions et la pratique des vertus : c'est par
la pénitence, par la charité, par la justice, par la bienfaisance,
par la mortification, que Jésus-Christ nous a appris à honorer
Dieu. Celui-là seul est donc vraiment chrétien qui dompte ses pas-
sions, qui ne se permet aucune médisance, aucune injustice, qui ne
volt point un malheureux sans souffrir, qui partage sa fortune
avec les pauvres, qui pardonne les injures, qui aime tous les hom-
mes comme ses frères et qui est prêt à donner sa vie plutôt que
d'offenser Dieu.
Sur ces principes, jugez, disait Fox, jugez toutes les sociétés
qui se disent chrétiennes, et voyez s'il y en a qui méritent ce
nom.
Partout ces prétendus chrétiens ont un culte extérieur, des sa-
cremens, des cérémonies, des liturgies, des rites par lesquels ils
prétendent plaire à Dieu et dont ils attendent leur salut. On
I QITA 30»!
ditsse de toutes tes sociétés chr6tiennps ceux qui n'obserTeu \
point ces riies, el l'on y reçoit, souvent même on rospecie, le» "
méiiisans, les voluptueux, lea vindicBiifs , les méchaps. Les
rhrétiens les plus fidèles au culte extérieur remplissent la so-
ciale civile et l'É^^lise de dirisions, de brigandages et de partis
qui se liaCssent et qni se disputent avec fureur une dignité, un grade,
un hommage, une préférence ; aucune des sociéiés chrétiennes n«
rend donc ï Dieu un culte pur et légitime ; toutes, sans en excep- |
ter les Églises réformées, sont retombées duns le judaiin
n'est-ce pas en eOet être Juit el avoir eu quelque aorte réuibli II I
circoncision que de faire dépendre la justice et le salut du I
b:ipiéme et des sacKmens? Les ministres de l'Ëglise sont eu
mes dans ces erreurs, et ilss'y eolretienncnt pour conserver lenrsl
revenus et leurs dignités : la corruption a donc tellement pénétré I
dans tontes les sociétés chrétiennes qu'il j a moins d'inconvéniens J
à j tolérer tous les vices et tous les désordres qu'il entreprendrai ■
Kde les réformer : qne reste- l-il donc i faire & ceux qui veulent sftl
liuon de se séparer de taules les Églises cbrétienne9,fl
!r Dieu par la pratique de toutes les vertus dont Ji^
f Christ esi venu nous donner l'exemple, et de former une soc
Mligieusequî n'admette que des hommes sobres, pa tiens, mortî'"'
FAés, indulgens, modestes, charitables, prêts i sacrifier leur re- |
1, leurfortune et leur vie, plul6t que de participera la corrup- I
ion générale? VoiU la Traie Église que Jésus-Christ est
^•établir, et hors de laquelle il n'j a point de salut,
Fox prêchait cette doctrine dans les places publiques, dans lei 1
s, dans les maisons particulières, dans les lemples ; il pieu- I
Wt, gémissait sur l'aveuglenienL des hommes : il émut, il toucbi,
I persuada, il se Gt des disciples.
Encouragé par ces premiers succès, i1 voulut faire des mlr^
; il prétendit en avoir fait : ses disciples les publièrent et en J
it une preuve de la vérité de leur doctrine: mais ils abandon- I
reot bientSl cette preuve et prétendirent que Fox n'annonçait M
' fu une nouvelle religion, mais rappelant seulement les hommes '
i la pratique de l'Évangile, il n'était pas nécessaire qu'il fil des
miracles,
Insensiblement le nombre des disciples de Fox augmenta, el il
iS une sociéié religieuse qui n'avait ni culte extérieur, i ' "
_ie, ni ministres, ni prières.
C'était en méditant profondément que Fox avail été éclairt
3tO gUA
luoùères du eiel, qu*il avait eu des visions, des exUses : voilà te
modèle sur lequel il forma les assemblées religieuses de sa sado^
Lorsque ses disciples étaient assemblés, chacun rentrait profoailé-
ment en lui-même et observait attentivement les opérations da
Saint-Esprit sur son âme : le Quaker dont l*imaginaiioQ était (%
plus vive sentait le premier. Finspiration, rompait tout à coup la
silence, exhortait toute rassemblée à se rendre attsnti?e à ee qua
le Saint-Esprit lui inspirait, et parlait sur le renopeemeoi k soi«
même, sur la nécessité de faire pénitence, d'être sobre, juste,
bienfaisant; bientôt topte rassemblée se sentait émue, 8*écluiuf<«
fait, tremblait ; rinspiration devenait générale, et c'éuii k qui
parlerait le plus haut et le plus long-temps.
Les Quakers ne doutaient donc pas qu'ils ne fussea instmils
extraordinairement par le Saint-Esprit ; ils se regardaient commo
ses temples; ils croyaient sentir sa présence ; ils sortaient de lenra
assemblées graves, recueillis, silencieux ; ils dédaignaient lelaste^
les honneurs, les richesses. Un Quaker ne voyait dans un Qua-
ker qu'un temple du Saint-Esprit : toutes les distinctions de la
société civile disparaissaient à ses yeux, et les Quakers se regar*
daient comme une famille que le Saint-Esprit éclairait et dirt«
geait.
Les Quakers, persuadés que Dieu seul mérite nos hommages,
notre respect, notre admiration, tutoyaient tout le monde, ne sa^
luaient personne, et refusaient aux magistrats et même aux rois
toute espèce d'hommage.
Mais ils auraient partagé leur fortune et sacrifié leur repos pour
l'homme auquel ils refusaient le salut ou qu'ils tutoyaient.
Ils ne faisaient jamais de serment parce que Jésus-Christ l'avait
défendu, et ils ne voulaient point payer la dîme, parce que c'était
un crime de contribuer à l'entretien des ministres d'une Ëglise
corrompue \ mais ils n'empêchaient point de lever la dtme, parce
qu'ils croyaient qu'un chrétien ne doit jamais opposer la force |
la force, ou plaider pour des intérêts temporels. Comme les Quakers
regardaient toutes leurs idées comme des inspirations du Saint-Es-
prit, ils regardaient toutes les maximes de leur secte comme des de-
voirs essentiels, et ils auraient plutôt sacrifié leurs biens, )eur li-
berté, leur vie, que de saluer un homme, de faire un serment ou
de payer la dlme.
Comme tous les Quakers se croyaient inspirés » il n'y en e^
aucun qui ne se regardât comme un apôtre destiné par la Pjrovi-
f (JIA :lll
4^n^t>^ i^clairprunL'p:irliiMlu niunile ; rAnj-ti'lcm^sc trouva liicn-
lôl remplie d'une mulliliide incrojaWe de Prédicnns, qoi troii^ I
ïtrcnl partout îles iuiagininiuiis tlves ot des esprils lilblos qu'ils 1
Ei^dulsireot ; partuut on tÎI îles oiagîMniU, des théologiens, dra \
laboureurs, dee soldats, des personues de qualité, des femmei,
des lilles , s'unir lui Quakers, aller dans les places publiques ,
dans les temples, trembler, prophétiser, prêcher contre l'Ëglisk
anglicane , troubler le service des églises , insulter les
d6cl:iiuer aveu emporleinent contre la curruplian <
états.
Tout le clergé et la plus grande partie du peuple
contre cette secte nouvelle , el les magistrats cmplofèreni leuf '
autorité pour réprimer l'audace des Quakers : on les battit ,
le* emprisonna, on les dépouilla de leurs biens, et l'on uv Gl que 1
donner de l'éclata la secleel multiplieriez Quakers.
Quoique chaque Quaker se crût inspiré, fox était cependani i
respeeié eomme le cher de U secle et comme le restaurateur i
du cliri^tiaDismc : Il envoja des lettres pastorales dans touB [
les endroits ob tes Quakers avaient fait des prosél;rtes; il écri-
vit !i tous les souTerains du monde , au roi de France , ï l'em--
(icreur, au sultan, etc., pour leur dire de la part de Dieu i
qu'ils eussent & embrasser sa doctrine : des hommes , des Temmes,
des lilli's , passèrent daos tous les pays du monde , pour y porter 1
les li>ttres de Fot et pour y prêcher sa doctrine , mais sans succèt. (
Croniwel régnait alors en Angleterre; il voulut voir Fo\; il j
en prit une idée avantageuEe et conçut de l'estioïc pour sa secte ; \
mais il donna un édit par lequel il défendait aui Quakers de s'as-
ce;nliler publiquement, ei ordonuait aux ma gi si rais d'empêcher i
qu'on ne les insultAi. i
Cromwel ne Tut obéi ni par les Quakers ni par leurs ennemis; ,
i-la conlinuirunt à s'assembler, et l'on continua de les traiter
piureusemenl, mais uns alTaiblir leur zélé et sans arrêter leun i
tu sorte que, dix ans après les premièrea prédictions de >
1 ( en IG&O ), les Quakers tinrent dans le comté de Bedrurt . i
■ assemblée ou un a;node général , où se trouvèrent des dé- \
jÎÊii» de toutes les parties de l'Angleterre.
' es Quakers furent traités avec beaucoup plus de rigueur après I
k mort du CroRinel , loraque les Anglais eurent rappelé Char-
liât II : le* ennenris des Quiik«rs Im peignircui comme di^s enne-
niisdi-ri^^lse, dd'filnti't'lu roi; un ilOfendit leurs assemblées,
3iS QUA
'et le parlement ordonna qu'ils prêteraient germent de fidèle ta
roi , sous peine de bannissement de TAngleterre. Les Quakers ne
cessèrent point de s*assembier et refusèrent constamment de pré*
ter les sermens qu'on exigeait d'eux : les ennemis des Quakers ,
autorisés par les lois , exercèrent sur eux des rigueurs incroya-
bles ; les Quakers n'opposèrent à leurs ennemis qu'une patience
et une opiniâtreté invincible, et Ton ne put ni les empêcher de
s'assembler, ni en obtenir qu'ils prêtassent serment de fidélité
au roi.
Fox était un fanatique ignorant et atrabilaire , qui n'ayait d'a-
bord séduit que la populace plus ignorante que lui ; mais comme
il y a dans la plupart des hommes un germe de fanatisme , Fox
s'était fait des disciples dans les différons États; le Quakérisme
se trouva insensiblement uni avec de l'esprit et même de l'énidi-
tion. Les Quakers alors se conduisirent avec plus de circonspec-
tion : on ne les vit plus enseigner dans les places publiques, prê-
cher dans les cabarets, entrer dans les églises comme des fororâés,
insulter les ministres et troubler le service divin.
Enfin des hommes savans , tels que Guillaume Penn, George
Keit et Robert Barclay , entrèrent dans la secte des Quakers, et le
Quakérisme prit alors une nouvelle forme. Fox vivait encore et se
donnait beaucoup de mouvement, mais Penn et Barclay devinrent
en effet les chefs de la secte.
Du Quakérisme, depuis que Penn et Barclay V eurent embrassé *•
Le fanatisme propre à faire embrasser le Quakérisme se trouva
dans Penn et dans Barclay uni k beaucoup d'érudition , à un es-
prit méthodique , à des vues élevées : le fanatisme employa tons
ces avantages en faveur du Quakérisme , et il prit une forme nou-
velle.
Les Quakers avaient écrit pour défendre leur secte ; mais leurs
ouvrages étaient écrits avec emportement et amertume, remplis
d'injures et même de blasphèmes ; ils voulaient que tout se sou-
mit à leur sentiment. Penn et Barclay ne prétendaient assujétir
personne et ne réclamaient que les droits de la conscience et de
la liberté , droits inviolables selon eux en Angleterre K
* George Keit, excellent philosophe et bon théologien, abandonna la
secte des Quakers ; c'est pourquoi nous ne parlerons plus de lui.
> Défenses des anciennes et justes libertés du peuple, etc.
Ql!A 318
lU représentèrent les Quakers l'omme une âociétf qui n'aspi-
lil qu'à rétablir le cliristiunisme primiiirel ï Turmer de tous lea
kommes ane famille religieuse, et qui ne voulait ni dominer dana
'Eut, ni assujélir personnel penser coinme elle.
Barcliij publia un caléchisme ou profession de foi qui atait potu
tête les principes fondameniaux du ProiesianliBoie '.
Enfin Barcla; composa ses tbèses lliéologiques ; et le Quské-
JUDc, qui n'était dans son origine qu'un amas d'extravagances et
de vi&îoiis, devint un systËme de religion el de théologie, capa-
Ue d'en imposer aux perscinnes éclairées , et trè« -embarrassant
pour les théologiens proies tans.
Penn et Barclaj' ne servirent pas le Quakérisme seulement par
nin écrits, ils passèrent en Hollande et en Allemagne pour j
»ire des prosélytes. Ce fui vers ce temps {1681 ) que Charles 11
bnna ft Peni^t i ses héritiers en propriété cette province de
'Amérique qui est ù l'ouesi de la rivière delà Warc, nomméei
jduiia le temps qu'elle appartenait aux Hollandais, les nouveaux
ijs-Bas : celle concession se lit en considération dus services
'in avait rendus, el de diverses sommes que
lui devait encore lorsqu'il mourut. Le roi changea le
pays , el l'appela l'ensjlvanie pour faire honneur k
M- Penn et ï ses héritiers , qu'il en déclara seuls propriétaires et
gouverneurs,
Penn pusa en Amérique pour donner des lois ï sou nouvel
4Ul : les consiiiu lions fondamentales sont en vingt-quatre articles,
4oul voici le premier. ■ Au nom de Dieu , le ptre des lumières et
des esprits , l'auteur el l'objet de toute connaissance divine , de
toute fui et de toui culte , je déclare et établis pour moi el les
miens, comme première loi fondameniale du gouvernement de
ce pays, que toute personne qui y demeure ou qui viendra s'y
élablir jouira d'une pleine liberté de servir Dieu de la ma-
nière qu'elle croit en conscience lui être la plus agré-able; el
tant que cette personne ne changera pas sa liberté chrétienne
en licence , el qu'elle n'en usera pas au préjudice des iiutres
en tenant, par exemple, des discours sales et profanes, en pal
lant aveu mépris de Dieu, de Jésus-Cbrisl , de l'Fllcrilui
• Caléchisme ou confctàon de foi, dressée el npprouvée
Uec générale des patriarches cl des spijtrcs, sous I
•U»-Christ lui-m(me.
îJll QUA
» SAinte ou dô la religion , ou en commetlant quelque mal moral ,
f ou en faisant quelque injure aux autres , elle sera protégée par
» le magistrat civil et maintenue dans la jouissance de sa susdite
» liberté chrétienne. »
Un grand nombre de Quakers passèrent en PensyWanîe pour
se soustraire aux rigueurs que Ton exerçait sur eux en Angle-
terre, jusqu*à la mort de Charles IL
liC duc d^Torck , qui lui succéda sous le nom de Jacques II «
était fort attaché à TÉglise romaine , et forma le projet de réta-
blir la religion catholique en Angleterre; pour cet effet, il per-
mit Texercice libre de toutes les religions ; il marqua même une
estime particulière pour les Quakers. Penn jouissait auprès de lui
de la plus haute faveur : Penn profila de son crédit pour rendre
service surtout aux Quakers et pour leur ouvrir la porte des di*
gnités et des charges ; il obtint un édit qui cassaiKelui qui pre-
scrivait la prestation du serment à ceux qui aspiraient aux
charges.
Le roi ne dissimula point son attachement à la religion catho-
lique y et Ton ne douta pas que la dispense du serment de fidélité
n^eût pour objet le rétablissement des catholiques dans les char-
ges et dans les dignités. Les évêques s*en plaignirent ; le roi ne
répondit à leurs plaintes qu'en les destituant ou en les faisant en-
fermer : le peuple ne douta plus que le roi ne voulût rétablir la
religion romaine. Toutes les sectes de TAngletcrre furent effrayées
de ce projet, et les Quakers même, qui craignaient encore plus
les catholiques que les Anglicans : tout se souleva contre Jac-
ques II; Guillaume , prince d'Orange, monta sur le trône, que
Jacques abandonna à son arrivée en Angleterre.
Sous Guillaume III , le parlement fit une loi pour accorder le
libre exercice de toutes les religions , excepté la catholique et la
socinienne; depuis ce temps, les Quakers jouissent en Angle-
terre de la tolérance , et vivent sous la protection des lois
H de rÉtat; cependant, comme la loi du serment est toujours
en vigueur en Angleterre, et que les Quakers refusent con-
stamment de prêter aucun serment, ils sont exposés à être
inquiétés et maltraités par les magistrats ou par les collecteurs
des dîmes, dont les malversations sont assez ordinairement im-
punies.
giA
Sgiléme (Mologique dét Qaakeri.
La souTcraine T^liciié dû riiainmo coDsUla dant lu \niu «4(1
uinsance de Diau et de Ji^us-CliriEl '.
no oe connaît le l'Ère, eIuod le Fils et celui auiiuel IsJ
tiU l'a réTËlé.
La rétélalian du Fils est dans l'eipril el par l'esprit *.
Ainsi , le témoignage du l'eaprii est le setd oujen d'acquériil
I h vraie eonoaiEsani^e de Dieu : c'est par ce mojen que Diou l'eit |
I feii coonalire aux patriarches , aux proplièles , aux ap6lresÉ
Ces révélations de Dieu par l'esprit , sait qu'elles se fassent pif i
les voies extérieures, par des apparitions, par dos songoe, on I
I '^r des ma ni restai ions el par des illuminations inlérieures , st
[ïobjel lorinel de notre Toi,
Ces révËlitions iutârieures ne peuvent jamais élro opposées lu. j
imoignage cilérieur de rÉcriliire ni i la saine et droite ri
ir cette révélation divine ou celte illunii Dation intérieure i
ftideWs et claire par elle-roème , et renleudeoienl y scquie»
ii Décessai rem col qu'aux premiers principes de la n'
B peut donc soumettre les révélations intérieures du Saiot-E
irit > l'examen de la raison.
' C'wt de ees saintes rùvélations de l'Esprit de Dieu aux s;
WnmBt que sent procédées les burilures de vérité , leequelloi
BfOnlicnneni premièrement un récit lidèle des actiuns du paupt
!■ Dieu en plusieurs siècles, comme aussi plusieurs écotioniÎ4l
wrLiculitres de la Provïdenre qui les accompagnaient i seuondfl
nent, un récit prophétique de plusieurs choses, dont quelque
nncssonl passées et les autres sout encore ï venir; en iruisiËnifi^
lieu, uuample el plein récit des principaux dogmes de lu doclrinf J
du Cbrist , précbée et représentée en plusieurs excellentes décl^ 1
niions, exhortations el scnleaces, lesquelles nnt élé dites tt J
ëcrilet par le mouvcmenl de l'esprit de Ûieu en divers temps, ^- J
qoelqnes Eglises et â Ieuri> pasteurs , sdou diverses occasiuifc J
I .^tenmoini, parce qu'elles ne soni que ladédiratiuudclasourcfl, J
n pas la source elle-même, elles ne doivenl pa* être e:
ne le principal rondement de toute vérité et cuniialssanqi, J
|i comme la râglo preniiére de la fui el des misurs.
tJo»n.,17, 8.
iMatUi., Il, I». !7,
316 QUA
Néanmoins » puisqu'elles donnent un véritable et fidèle témoi-
gnage de leur première origine, elles sont et peuvent être esti-
mées comme une règle seconde et subordonnée à l'esprit , duquel
elles tirent Texcellence et la certitude qu'elles ont.
Car, comme nous ne connaissons leur certitude que par le seul
témoignage intérieur de Tesprit, elles-mêmes témoignent aussi
que Tesprit est ce guide par lequel les saints sont menés en toute
vérité; c'est pourquoi , selon les Écritures , l'esprit est le premier
et le principal conducteur ; et puisque nous ne recevons et ne
croyons les Écritures que parce qu'elles sont procédées de l'es-
prit , par conséquent aussi l'esprit est plus originairement et prin-
cipalement la règle.
Toute la postérité d'Adam est tombée et privée de cette lu-
mière intérieure du Saint-Esprit.
Dieu , par son infinie charité , a donné son fils unique , afin que
quiconque croit en lui soit sauvé ; ce fils illumine tout homme ve-
nant au monde ; il enseigne toute justice , tempérance et piété , et
cette lumière éclaire les cœurs de tous ; car la rédemption n'est
pas moins universelle que le péché originel.
U y a donc dans tous les hommes une lumière évangélique et
une grâce salutaire.
Nous ne sommes donc justifiés ni par nos œuvres produites par
notre volonté , ni même par les bonnes œuvres considérées en
elles-mêmes ; c'est par Jésus-Christ.
Le corps de péché et de la mort est ôté dans ceux en qui cette
sainte et immaculée conception est produite entièrement, et leurs
cœurs deviennent unis et assujétis à la vérité , tellement qu'ils
n'obéissent à aucunes suggestions ni tentations du démon, et sont
délivrés du péché actuel et de la transgression de la loi de Dieu ,
et à cet égard ils sont parfaits : cette perfection admet pourtant
toujours un accroissement, et la possibilité de pécher demeure
en quelque manière , lorsque l'entendement n'est pas très-soi-
gneusement attentif à Dieu.
Bien que ce don de Dieu, ou cette grâce intérieure, soit suffisante
pour opérer le salut , toutefois elle peut devenir et devient la
condamnation de ceux qui résistent ; de plus, après qu'elle a opéré
quelque chose dans leurs cœurs pour les purifier et sanctifier, ils
peuvent pourtant en déchoir par désobéissance ; néanmoins on
peut acquérir un tel accroissement et une telle fermeté dans la vérité
en cette vie, qu'on n'en peut déchoir totalement par apostasie.
QUA
SI par ce don el par celle lumière de Dieu que louU^a
e dans le^ cbosea spirituelles esl reçue cl rËté- ~
pnr lui, comme il esl naaireslâ et reçu au fonj^
, que chaque vrai ministre de l'Ëvangile esl ordonné , 1
I préparé et assiste en l'œuvre du ministère ; et c'ei
inletparson attraction qu'il fautquecha*
r que évaDgélisie et pasteur chrétien soit mené et commandé daai J
Mil travail et dans son ministère de l'ii^vangile , quant an lîi
' quant aux personnes ï qui, el quant au temps qu'il doit s<
I 4e plus , ceux qui ont celle autorité peuvent et doivent prêcher 1
VËvangile , bien qu'ils n'aient point de commission liumaîue el
qu'ils soient sans littérature ; comme , d'un autre c
manquent de l'autorité de ce don divin , quoique savans et auto- I
lises parles commissions des Églises el des hommes, ne doivent
I être estimés que comme des imposteurs et des trompeurs, et nou
Vfis comme de vrais ministres de l'Ëvangile.
■ Tout véritable culte et tout service agréable ^ Dieu estolTerL
Ipsr son esprit , qui meut iuléricuremenl , qui n'est limité ni par
Bleslieui, ni parles temps, nipar les personnes; car, quoique nous
W devions le servir toujours, en ce que nous devons être en crainte
■.devant lui, néanmoins quanta la signification extérieure dans nos
^prières, dans nos louanges ou dans nos prédications, nous ne la
W devons pas Taire oji cl quand nous voulons , mais lï oti et quand ■
y noua y sommes menés par le mouvement et tes inspirations s»- |
■'crêtes de son esprit dans nos cœurs, lesquelles prières Diett
■ etauce et accepte, ne manquant jamais de nous y mouvoir quand
B>'ïl est expédient, de quoi lui seul est le juge le plus propre. Tout
V luire culte donc, soit louanges , prières ou prédications , que
H'iliomme rend de sa propre volonté et h son loisir, qu'il peut com-
H mencer et finir ï son plaisir , soit que les formes en soient pres-
Veriles, comme les liturgies, etc., soiiles prières sur-le-champ con-
B^es parla forceetparla Tacullé naturelle de l'entendement, toutes
HBe sont que des superstitions et une idoifltrie abominable devant
VBicn, que l'on doit rejeter el renier, el dont il nous faut séparer.
B Comme il n'y a qu'un Dieu et une fui , aussi il n'j a qu'un bap-
B lême, non celui par lequel les ordures du corps sont ôlées , mais
B Taltestalion d'une bonne conscience devant Dieu, parla résurrec-
m lion de Jésus- Christ, elce bapléme-làest quelquechose depuret
■ de spirituel ; savoir, le baptême d'esprit et de teu , p.ir lequel
■ pu II s sommes ensevelis avec lui , afin qu'étnnt lavés et puisés do
318 QUA
nos péchés t nous clieniliiions en nouveauté de vie , doquel le
baptême de Jean était la figure , qui fut pour un temps , et nop
pas commandé pour toujours. Quant au baptême des enfans, c'est
une pure tradition humaine , dont on ne trouve ni précepte » ni
pratique dans toute rÉcrilure.
La communion du corps et du sang de Christ est iotériimre
et spirituelle ; c*f st la participation de la chair et du sang de
Jésus-Christ , par laquelle Thomme intérieur se nourrit chaque
jour dans les cœurs de ceux en qui Jésus-Christ habite , de quoi
la fraction du pain par Jésus-Christ avec ses disciples était la figure,
dont se servaient quelquefois dans TÉglise, à cause des faiblfs»
ceux qui en avaient reçu la substance, s'abstenant aussi des
choses étouffées et du sang , se lavant les pieds les uns ;iux
autres^ et oignant les malades d'huile, toutes lesquelles choses ne
sont pas commandées avec moins d'autorité et de solennité que
les premières ; mais , puisqu'elles n'ont été que des ombres de
meilleures choses , elles cessent pour ceux qui en ont obtenu la
substance.
Puisque Dieu s'est approprié la domination et le pouvoir de la
conscience, comme cclui-lâ seul qui la peut bien instruire et gou-
verner, il n'est donc permis à personne, quelle que soit son au-
torité ou supériorité dans le gouvernement de ce monde , de
forcer les consciences des autres ; c'est pourquoi tous les meur-
tres, les bannissemens , les proscriptions , les emprisonnemens et
toutes les autres choses de cette nature, dont les hommes son talDigés
pour le seul exercice de leurs consciences, ou pour leur différente
opinion dans le culte , procèdent de l'esprit deCaînle meurtrier
et sont contraires à la vérité , pourvu que personne ne nuis^ à
son prochain , ni en sa vie , ni en ses biens , sous prétexte de
consciences , et ne commette rien de pernicieux ou d'incompati-
ble avec la société et avec le commerce ; auquel cas il y a une loi
pour le défaillant, et la justice doit être rendue à chacun, sans ac-
ception de personnes.
Puisque toute religion tend principalement à retirer l'homme
de l'esprit et de la vaine conversation de ce siècle « à l'in-
troduire dans la communion intérieure avec Dieu , devant lequel ,
SI nous sommes toujours en crainte , nous sommes estimés heu •
reiix , il faut donc que ceux qui s'approchent de cette crainte
rejettent et abandonnent toutes ces vaines habitudes et coutumes,
soit en paroles , soit en actions , telles que sont celles de tirer le
QUA 319
chapean à m bomme, ou sd découvrir la tète , de plier le jarret,
et telles autres inflexions de corps dans les salutations, avec tou-
tes ces folles et superstitieuses formalités qui les accompagnent «
toutes lesquelles choses Tbomme a inventées dans son état de cor-
ruption, pour entretenir sa vanité dans Torgueil et la vaine pompe
de ce siècle ; comme aussi les jeux inutiles, les récréations frivo-
les, les divertissemens, les jeux de cartes, ce qui n*a été inventé
que pour consumer inutilement le temps précieux et divertir Time
du témoin de Dieu dans le cœur, et du vif sentiment de sa crainte
et de Tesprît évangélique , duquel les chrétiens doivent être
nourris» et qui mène à la société et k la crainte sincère de
Dieu.
De ce principe, Barclay conclut;
i* Qu*il n*est pas permis de donner aux hommes des titres flat-
teurs, comme votre sainteté, votre majesté, votre éminence, votre
excellence, votre grandeur, votre seigneurie, etc., ni de se servir
de ces discours flatteurs appelés communément complimens.
Lss titres ne font point partie de Tobéissance due aux magis-
trats ou aux empereurs : nous ne trouvons point que , dans VÉ-
criture, aucun de ces litres aient été donnés aux rois, aux princes
et aux nobles: ceux auxquels on donne ces titres n*ont souvent
rien qui leur réponde , et nulle autorité ne peut obliger un chré-
tien k mentir.
2* Qu*il n*estpas permis aux chrétiens de se mettre à genoux,
ou de se prosterner eux-mêmes devant aucun homme, ou de cour-
ber le corps, ou de découvrir la tète devant eux.
3* Qu*il n*est pas permis à un chrétien d*user de superfluité
dans ses vètemens, comme n*étant d*aucun usage, si ce n*est
pour Fornementet pour la vanité.
4« Qu'il n*est pas permis de prendre part aux jeux, aux passe -
temps, aux divertissemens, ou, entre autres choses, aux comédies,
parmi les chrétiens, sous prétexte de récréations , lesquelles ne
s'accordent pas avec le silence chrétien, la gravité et la sobrié^ ;
car le rire, le divertissement, le jeu, la moquerie, la raillerie, le
▼ain babil, etc., ne sont ni d'une liberté chrétienne^ ni d'une gallé
innocente.
5" Qu'il n'est pas permis aux chrétiens de jurer sous YÉ-
vangile, non pns seulement pour quelque utilité et dans leurs
discours ordinaires , ce qui était aussi défendu sous la loi mosaî-
(}ue ; mais même en jugement devant le magistrat.
320 QUA
G* Qu*il n*e8t pas permis aux chrétiens de résister an mal , o«
de faire la guerre, ou de combattre daus aucun cas.
Premièrement, parce que Jésus-Christ nous commande d*aimer
nos ennemis.
Secondement , parce que saint Paul dit que les annei de
notre guerre ne sont point chamelles , mais spiritndles. S
En troisième lieu, parce que Jacques témoigne qae les combats
et les querelles viennent des convoitises ; mais ceux qui sont vé-
ritablement chrétiens ont crucifié la chair avec ses affections el
ses convoitises ; par conséquent , ils ne peuvent pas s*j abandon-
ner en faisant la guerre.
En quatrième lieu, parce que les prophètes Isaîeet Ifichéeont
prophétisé, en termes exprès, que dans la montagne de la maison
de rËtemel Christ jugera les nations, et alors ils forgeront leurs
épées en socs de charrues.
En cinquième lieu , parce que Jésus-Christ dît que son règne
n*est point de ce monde , et que pour cette raison ses serviteurs
ne combattent point; par conséquent ceux qui combattent ne sont
ni ses disciples ni ses serviteurs. Joan,^ 18 , 36.
En sixième lieu , parce que Tapôtre exhorte les chréUens à
ne se point défendre, et k ne se point venger eux-mêmes en rendant
le mal pour le mal ; mais à donner lieu à la colère , parce que la
vengeance appartient au'jSeigneur: ne sois point surmonté par le
mal , mais surmonte le mal par le bien ; si ton ennemi a faim ,
donne-lui à manger ; s*il a soif, donne-lui à boire. Rom,^ 12, 19.
En septième lieu , parce que Christ appelle ses en fans k porter
sa croix, et non à crucifier ou à tuer les autres : il les appelle
à la patience , et non à la vengeance ; à la vérité et k la sim-
plicité, et non aux frauduleux stratagèmes de la guerre.
Telle est Tidée que Barclay donne de la théologie et de la mo-
rale des Quakers, dans son apologie, quMI termine par un paral-
lèle des Quakers et des autres chrétiens.
Si donner et recevoir des titres de flatterie , desquels on ne se
sert point à cause des vertus inhérentes aux personnes, mais qui
sont pour la plupart employés par des hommes impies à Tégard
de ceux qui leur ressemblent ; si s'incliner, faire la révérence
et ramper jusqu'à terre Tun devant Tautre; si s'appeler à
tout moment Tun l'autre le très-humble serviteur, et cela le plus
fréquemment, sans aucun dessein de réel service ; si c*est Ik l'hon-
m QUA 33i
'Vienr qui vient de Dieu , ei non pas l'Iionneur qui TÎenl d'en has,
.ilors i la vérité on pourra dire de nos adversaires qu'ils soni Mb-
les, cl que nous sommes condamiiés comme des orgueilleux et des
opinlitres en refusant toules ces choses. Hais si , avec Mardo-
chée, refuse rde s'incliner devant l'orgueilleux Aman, et avec Eli-
sée refuser dedunner des titres flatteurs aux hommes, depeurque
uous ne sojons réprimandés par noire Créateur ; et si, suivant
l'exemple de Pierre etravisde l'ange, s'incliner seulementdevant
Dieu, et non pas devant nos compagnons de service ; enUn, si n'ap-
peler personne seigneur, ni maître, hormis dans quelques re>
lations particulières, selon le commandement de Jdsus-Chriil;
si toutes ces choses-lt, dis-je, ne sont pas k blâmer, donc nous ne
sommes point blâmables d'en agir ainsi.
Si être vain, extravagant dans ses babits, se farder le visage,
se friser les cbeveux, se couvrir d'or et d'argent, de pierre»
précieuses, de rubans et de dentelles, d'babillemens immo-
destes , si tout cela, dis-je, est d'une vie cbrélieaae, humble,
douce et mortifiée ; alors , à la vérité , nos adversaires sont de
bons chrétiens, et nous sommes des oi^ueilleux, des singuliers et
des fantasques, en nous conlenlant de ce que le nécessaire et la
commodité demandent, et en condamnant comme superflu tout le
Si courir lesmaîsons de jeu, les bals, les spectacles ; si jouer
aux canes et aux dés, danser, chanter et user des insirumens do
musique: si fréquenter les places de ihéAtres et les comédies,
mentir, contrefaire ou supposer et dissimuler, si cela est faire
toutes choses A la gloire de Dieu, et passer notre vie id dans
la crainte; si cela, dis-je, est user de ce monde comme si
nous n'en usons point , et ne pas noQS conformer nous-mêmes
Il nos convoitises ; alors nos adversaires sont de bons cbrélîons,
Diodestes, moriiKés, qui renoncent â eux-mêmes, et nous som-
mesjustemeni blâmables en les condamnant, mai& non pas autre-
Si la profanation du saint nom de Dieu , si exiger le serment
l'un de l'autre i chaque occasion , si appeler Dieu h témoin dans
des choses de telle nature qu'aucun roi de la terre ne s'; croi-
rait honorablement appelé, sont des devoirs d'un homme chré-
tien, j'avouerai que nos adversaires sont d'excellens chrétiens,
et que nous manquons ï noire devoir ; mais si le contraire
est Tériiable, il faut de néceuilé que notre obéissance i Dieu,
«22 ^ QUA
telle que uous la comprenons , daus celte cbose-là| lui mU
agréable.
Si Dous ?epger nous-mèroes, ou rendre injure pour injuiti
mal pour mal ; si combattre pour des choses périssables ; aller I
la guerre contre des hommes que nous n*avons jamais yus « arec
qui nous n*aYons jamais eu aucune contestation ni qaerellt,
étant de plus tout-à-fait ignorans des causes de la guerrct et oe
sachant absolument, au milieu des intrigues et des resseoUmem
des souverains, de quel côté est le droit ou le tort, et néanmoins ai
furieux que de détruire et de saccager tout, afin que ce culte ou on
autre soit reçu ou aboli ; si faire ces choses et beaucoup pluadt
cette nature est accomplir la loi de Christ , alors à la vérité pof
adversaires sont de véritables chrétiens , et nous ne sommes qii9
de misérables hérétiques, qui, souflrant même d*étre poursuivis,
pris , emprisonnés , bannis , battus et maltraités sans aucune ré-
sistance y mettons notre confiance seulement en Dieu , afin qo*il
nous défende et nous copduiseenson royaume par le chemin de
la croix.
L*apologie de Barclay, qui est sans contredit le meilleur ou-
vrage qu'on ait fait en faveur des Quakers, a été attaquée par di-
vers écrits : i** par Jean Brown, théologien presbytérien d'Ecosse,
dans un ouvrage intitulé : le Quakérisme, le vrai chemin du Page-
nisme; S* par Nicolas Arnold, professeur en théologie à Frane-
ker, en Frise, Exercitation contre les thèses ihéologiques de Bar-
clay; 3*" par Jean-George Bajer, théologien luthérien, docteur et
professeur à léna, dans un ouvrage intitulé : V Origine de la véri-
table et salutaire connaissance de Dieu; 4** par Loltusius, dans sou
Anti-Barclay Allemand ; 5* par L. Ant. Reiser, dans son Anti-Bar^
clayuSf etc.
QUART0DÉC1MANS ou Quatuordécimaiis; c'est ainsi qu*oii
appela ceux qui prétendaient qu'il fallait célébrer la Pàque le
14 delà luQe de mars.
Une partie des fidèles croyait qu'il fallait finir le jeûne de la
Pàque le 14 de la lune, quelque jour de la semaine qu'il arrivât,
et y faire la fête de la résurrection du Sauveur, et c'est ce que
saint Jean, saint Philippe, apôtres, saint Polycarpe, saint Méll-
ton et d'autres grands hommes, avaient pratiqué dans l'Asie mi-
neure : aussi toute cette province s'y attachait particulière-
ment.
D'autres fidèles soutenaient qu*on ne pouvait finir le jeûne et
OUA 323
solenniser la résurrection que le dimanche^ et cette pratique qui
Ta eoGn emporté était aussi fondée sur la tradition des apôtres,
c'est-à-dire de saint Pierre et de saint Paul : co n*est pas que les
apôtres eussent fait aucune loi sur ce sujet, dit Socrate, ni que
Ton pût en rapporter aucun écrit ; mais leur exemple était une
M très-puissante pour leurs disciples.
La différente pratique qu*on sai?ait sur cela dura long-temps
sans troubler la paix de TÉglise.
Lorsque Victor tenait le siège de saint Pierre, cette affaire fut
agitée atec beaucoup plus de chaleur qu'elle n'a?ait été aupara-
vant.
L'Asie mineure observait, comme on l'a dit, le i4 de la lune ;
mais elle était seule dans celte pratique avec quelques églises
des environs. Tout le reste de l'Église, dit Eusèbe, aTait attaché
au dimanche la solennité de la résurrection.
11 se tint divers conciles sur ce sujet, et, s'il en faut juger par
celui qui se tint à Ëphèse, ce fut Victor qui écrivit aux princi-
paux évéques pour les prier d'assembler ceux de leur province :
ces conciles s^accordaient tous à ne célébrer la résurrection que le
dimanche.
Polycrate, évèque d'Ëphèse, s'opposa à cette résolution univer-
selle : c'était un des plus considérables évéques qui fussent alors
dans l'Ëglise, chef de tous ceux de l'Asie.
Victor lui écrivit pour le prier d'assembler les évéques de sa pro-
vince, en le menaçant môme de le séparer de sa communion s'il ne
serendaitau sentiment des autres. Poljcralc assembla efTectivement
tes confrères en grand nombre dans la ville d'Éplièse : il furenttous
de son sentiment et conclurent qu'il ne fallait pas changer la tra-
dition qu'ils avaient reçue de leurs saints prédécesseurs.
Victor condamna l'opposition des Asiatiques à tout le reste de
l'Ëglise; il menaça même de les excommunier, et, selon plusieurs
auteurs, il les excommunia en effet; cependant les Asiatiques de-
meurèrent dans leur pratique, qu'ils quittèrent plus lard , il est
vrai, mais qui fut suivie par les Églises de Syrie et de Mésopotamie.
Constantin, en devenant maître de TOrient en 323, apprit avec
douleur cette diversité d'usages sur la fête de Pâque qui vérita-
blement ne rompait pas la communion, mais troublait néanmoins
la joie de cette grande solennité et était une tache dans la beauté
de rËgli&e ; c'est pourquoi il chargea le grand Osius de travail-
ler i apaiser ce trouble dans la Syrie. Oslus n'en put venir à bout,
324 OUE
pMplusqu«derhérésied*Arius; il fallut rassembler le concile de
Nicée pour Tune et pour Tautre dispute : ce fut Ik où cette ques-
tion fut enfin terminée; car le concile ordonna que toute TEglise
célébrerait la fête de Pàque en un mémo jour, stti?ant la coutume
de Rome, de TÉgypte et de la plupait des autres pays.
Toute rÉglise se trouva uniforme par cette définition, ctr les
Syriens y obéirent, et le concile d*Antioche, confirmant celui de
Nicée, déposa par son premier canon et excommunia les laïques
qui câébraient la pàque en particulier a?ec les Juifs. Toute VÉ-
glise s*élant donc réunie dans la pratique de faire la PÂque le di-
manche, s*il y eut quelques particuliers qui refusèrent de se sou-
mettre k cette autorité suprême, ils furent traités d^béréliques
sous le nom de Quartodécimans, c'est-à-dire observateurs do 14
de la lune, auquel ils voulaient qu'on fit la pâque. G*est pourquoi
saint Épipbane et Tbéodoret mettent les Quartodécimans au nom-
bre des hérétiques, et le septième canon du premier concile de
Gonstantinople les compte entre ceux que Ton recevait par Tab-
juration et par Tonction. Voyez TWlemoni, t. 3, p. 102 et suiv.
QUESNEL (Pasquier), quatrième chef des Jansénistes. Nous
dirons ici quelque chose de sa personne, du plus important de ses
ouvrages et des moyens principaux employés par le parti pour
faire triompher sa cause.
Notice sur Questieh
Cet écrivain turbulent naquit à Paris de parens honnêtes le 14
juillet 1634. Après avoir fait son cours de théologie en Sorbonne
avec distinction, il entra en 1657 dans la congrégation de TOra-
toire. Son goût le porta d*abord à Tétude de rÉcriture sainte et
des Pères; mais il s'appliqua aussi de très-bonne heure à compo-
ser des livres de piété. Les premiers essais de sa plume lui conci-
lièrent Tcstime et la confiance de ses supérieurs qui le placèrent
à la tête de leur institution de Paris , quoiqu'il n'eût encore
que vingt -huit ans, et l'on croit que ce fut pour l'usage des élè-
ves confiés à ses soins dans cet établissement qu'il entreprit son
trop fameux livre des Réflexions morales.
Cependant les fonctions de cet oratorien et l'ouvrage dont nous
parlons n'absorbaient pas tout son temps; en 1075, il publia une
nouvelle édition des œuvres de saiiU L6on-le-Grand avec des dis-
sertations, des notes, ctc , dans lesquelles il ne respectait guère
I
les pr^'rogaliïM ui l'aulDrilii iln aainl Sîi'ge '. Un irpïail ilei^etté
tiiture DF poavaii manquer <\'iiT^ censure i tlome, En eflet, la
i;on({régalio[Klel'In(/f-j:l*|iro^crivil, le 22 juin IGTO, par un <l<^crel
(|ui fut amdic \b 17 juillt^t suitant. Irrillï de i-e( éliront, Qucïnp)
s'en vengea dans un écrit par un lorrenl d'injures eonlre la sacrâe
congrégation, contre le pape tui-méme et contre le décret, qui,
■elon lui, n'éLaitpiif un décret, moii un Meile di/famaloirt
traire à ia loi de bUu tt aux bonaes mirurt, pUin de fhttnetét «t'I
timpoiituret. C'est là que Quesiiel nous apprend qu'un cardinal
n'ett qu'un pritre ou un cletc habillé de rauge, comme ai
inquiïitenr n'est i ses jeux qu'tin pelil moine. Il raudrait rap-
porter ici toat ce pétulant commentaire pour montrer jusqa'ï quel
eicès d'emportement Quesnel fut entratni^ par Bon amour-propre
trop iWernent blessé *.
Difficilement un homme de ce caractËre, qui se signalait Ini-
mèroe comme un partisan juré de la nouvelle doctrine, pouvait-"
compter sur une tranquillité parfaite et demeurer long-temps a
repos sous les yeui de Louis -le- Grand et dans le diocèse ('
II. dellarlaj. En eOel, ce prélat, instruit d'une manière trop coa
tiincante et de l'inHexible opposition de Quesnel ï la bulte à'A
Jnandre VII et de son dévouement entier au parti jansénîen, I
Urdi pas i lui donner de l'inquiétude ; dès l'an 16Kt, i
(et de quitter la capitale.
Quesnel se retira d'abord ï Orléans ; mais il ne séjourna pis
long-temps dans celte ville. L'assemblée générale de l'Oratoire,
tenue ï Paris en septembre lft78, avait dressé un formulaire par
lequel les membres de la congrégation devaient s'engager à
n'enseigner ni le Jansénisme, ni quelques opinions nouvelles en
phïloaopbie, opinions dont on se défiait alors, parce qu'on ne les
■vail point encore bien discutées. En 1681, par suite d'un statut
■ LeP, Lupni, dont le témoignage ne Tut point sunpcct nui yeux dl
parti, assnre, dans son litre des Appellalions, dédié Si Innocent Xi, qi
Quesnel s'eiprime !iur l'autorité du pa|w, dans son Saint Léon, t
l'avaient dit Calvin, deBnmlnÏB, et d'autres di^tructeurs de la primante
des - . -
ip d'ineiaetilude» et d'infiiltlilés.
'On trouve cette piixe <l
primé A UruMllei, 1701. ' 'ijn pag. J33 (
asc QUE
nouveau et péremptoire, il fallut ou signer ce formulaire ou quit-
ter la congrégation. Quesnel, plus attaché sans doute aux soi-di-
sant disciples de saint Augustin qu*aux scntimens de Descaurles,
préféra ce dernier parti à celui de Tobéissance; mais, en se reti-
rant, il se réserva le droit d'exhaler sa bile contre le formulaire
dont il s'agit. « 11 y a dans cet écrit (ce sont ses propres expree-
» sions) des puérilités, des choses contraires à la bonne théologie,
» des asservissemens indignes d'une compagnie de personneti li-
» bres et d'hounétes gens, des pièges tendus exprès à la simplicité
9 Hk Tinnocence des particuliers, et des points même contraires à
» la piété et aux bonnes mœurs *. » H tient encore ce langage dans
une autre production. « Or, le fait de Janséuius, qui est renfermé
» dans le statut et dans la formule, ne peut être souacrii
» purement et simplement sans que Ton autorise par cette sou-
9 scription Thérésie monstrueuse à laquelle ce fait a donné nais-
9 sance de nos jours;... hérésie... source d'une infinité d'au-
» très... (et) qui tend à renverser les F^tats les mieux affermis en
9 favorisant la révolte... Pourrait-on souscrire un fait dont te
V fausseté est connue, ou dont la vérité est au moitu fart don-
9 teuse, etc. ' ? » 11 faut se ressouvenir qu'il y avait long-temps
déjà qu'Innocent X et Alexandre VU avaient condamné par des
bulles reçues dans toute TÉ^lise les cinq fameuses propositions,
comme étant la doctrine de Tévêque d'Ypres et comme extraites
de son livre intitulé Augustinus,
Quesnel, ayant quitté rOratoire, ne se crut pas en sûreté en
France ; il se sauva dans les Pays-Bas, où s'étant réuni, k Bruxel-
les , au patriarche des Jansénistes , le célèbre Antoine Arnaud ,
il commença dès lors h jouer un rôle. La ville que nous venons
de nommer devint comme la place d'armes du parti. De là, Quea-
nel soulevait ses ex-confrèrcs flamands contre le formulaire et le
statut dont nous avons parlé; de là, il semait des troubles dans
jes universités de Douai et de Louvain ; de là , il révoltait les
prêtres de Flandre contre leurs évéques, le clergé batavc contre
le souverain pontife , préparant ainsi , quoique encore d'un peu
loin , les voies au schisme déplorable qui aflligea dans la suite
l'Église d'Utrecht. Sa plume, aussi féconde qu'infatigable,
remplissait les Pays-Bas et les provinces VQisines d*écrits per*
* Causa Quesnel 1., p. li,
Mbid., p. 10.
^QV^■.
ïieux ; elle éteiiduil au luin de iiomlireuaes cDrrcsjionili
Ee rfpanilait encore sur les producliuui de quelques TrérM,
Dr II» limer et In tiietlre en étal de tuirtejuunvec avantage.
Une adiTÎté si grande eu elle-mCme cl si séiieuse dan» les ré-
iuliuis ne pouvait laî&ser loni^-leiiips Qiifsnel derrière la toile,
ni manquer de lui attirer tût ou lard quelque uauvuiee allaïre.
Ed elTet , en 1690, sur un ordre ou seuleiucnl un avis du gouver-
Tieur des Pays-Bas, il lui Tallut suriir , aveu Arnaud , de loum
lise» il la domination du roi d'Espagne. En consé-
mx laleureux cliainpious du Jansénisme se mirent
^1 aller de retraite en retraite. Fort inquiets ; et après avoir erré
iel'|uc temps , snns pouvoir ou sans oser se Quer nulle part , ili
Irireiit enDn le parti de rcnlrei furtiveinent dans Bruxulleset de
"^ cacher de nouveau avec tout le soin possible.
.' Ce fut là qu'Arnaud mourut, le 8 auùt 16*11, âgé de près de ,
t les bras de Quesnel , qu'il avait , dii-on , désigna
cesse ur dans la gestion des afTalres du parti*.
'f Personne D'fiail plus en état de remplacer un cher si célèbre.
e sauté que rien ne semblait capable d'altérer, écrivant \
«facilement, avec unciian et élégance; actir, vigilant, pleia
1 fermeté , mais assez souple pour agir eu sens ditTéreu, ^
l l'exigence -, prorond en spéeulalions, fécond en i
tarées , habile i observer, • tous les ressorts qu'on peut mettre
h en nonvemenl, Quesnelles faisait agir en digne chef de parti.
|iSoutenir le courage des élus persécutés , leur conserver les an-
frciensamis et protecteurs, ou leur en faire de nouveaui ; rendre
■ ueuires les persounes puissantes qu'il ne pouvait se concilier,
> entretenir sourdement des correspondances purtuul , dans le»
* Quesnel montra dans cette occasion le peu de cas qu'il faisait dea
ttlflcs les plus Eacréet : il administra au mourant les derniers secourt
Il la religion, rettréme-onclionet le saint Viatique, sans avoir reçu au-
m poutoir de l'Ordinaire. Ce fut pcui-élre ce rsll irréguller qui en>
9 disciples ï enseigner dans la suite que l'Ordinalian confËn!
^la tbis tous les pouioirs, u'eit-n-dire les pouvoti-sd'ordreel de juHi-
lurqao les Conslimtionnelsontjngf commode dercnofb 1
l^er de nos jours.
Quesnel ne s'en tînt pas là : il se lit dans son appartement , de m
■e autorité et malgré le rifus de permission qui lui était venu d<
[', un oratoire domestique où il célébrait la moue quand bon lu
L Iwiblall.
^
328 QUE
» cloilrcs t dans le clergé , dans les parlemens , dans plusieurs
» cours de TEurope ; voilà quelles étaient ses occupations conli-
» nuelles. 11 eut la gloire de traiter par ambassadeur avec Rome.
» Hennebel y alla , chargé des affaires des Jansénistes ; il y fi«
» gura quelque temps , il y parut d'égal à égal avec les envoyés
» des têtes couronnées ; mais les charités ( qui Tavaient mis en
» état de représenter ainsi ) venant à baisser, son train baissa de
B même. Hennebel revint de Rome dans les Pays-Bas en vrai pè*
» lerin mendiant. Quesnel en fut au désespoir; mais, réduitlui-
» même à vivre d*aumônes , comment eût-il pu fournir au luxe
» de ses députés ? »
Un événement d*un antre genre vint encore troubler son repos
et jeter la consternation dans le cœur de ses partisans. Le 3 mai
1703, Quesnel fut arrêté dans Bruxelles etconduit, d*un quartier
appelé le Refuge de Forest , dans les prisons de Tarchevêché de
Malines. Il y avait environ un an qu*il avait été déféré à Rome, et
que ses amis , inquiets sur son sort, le sollicitaient & quitter en-
tièrement Bruxelles. Un accident si fâcheux faisait trop de tort aux
affaires du parti pour qu'on ne se hâtât pas d'y chercher un re-
mède. Quesnel l'indiqua lui-même, selon toute apparence. N'ayant
ni encre « ni plume, il arracha le plomb de ses croisées pour
écrire furtivement à quelques-uns de ses affidés et leur désigner
la position précise de l'endroit où il se trouvait détenu. Il n'en
fallut pas davantage : deux ou trois hommes dévoués essayèrent
avec succès de percer la muraille de la prison , et, le 1 3 septem-
bre 1703, ce nouveau Paul, comme on l'appela dans quelques
écrits , fut rendu aux vœux et aux embrassemens de ses chers
disciples.
L'évasion de Quesnel ne le mit pas à l'abri des poursuites de
la justice ecclésiastique. Ses papiers avaient été saisis avec sa per-
sonne , et n'avaient pu échapper de même ; ils déposaient griève-
ment contre lui. D'ailleurs , au lieu de montrer du repentir et de
chercher à réparer par une conduite plus sage et plus orthodoxe,
depuis sa délivrance , les torts et les excès de sa conduite anté-
rieure, il semblait avoir au contraire redoublé d'ardeur pour
soutenir le Jansénisme. 11 fut donc cité canoniquement devant
l'oflicialité de l'archevêché de Malines, et, quoique absent, il fut
convaincu de plusieurs griefs qui réclamaient la vindicte. En
conséquence, l'archevêque de Malines prononça contre lui une
sentence par laquelle il le déclarait excommunié, ordonnait aux
fidèles i
QUE 329
'ùviier comme tel , ei lui inipasaÎL à lui-même des pé- ,
tiitencex tuédicinalei. Celle sentence est datée du 10 DOveia~ i
bre 1701.
Qiiesnel s'en moqii) , ei , n'fugié en Hollande, il se relira dam
Amslerdum . dont il fit un puîni de riiuniun et comme un nouveau
boulevard pour le parti. Ce fui de lii qu'il lança des brochures
contre t'archevéque son juge ; qu'il écrivît une foule de mémoires
contre la bulle l'maenilui; qu'ii fatigua par des réclamations sans
lin les assemblées do clergé de France , le roi , les msgistrals ,
et qu'il exhala contre une société recommandalile le venin da
celte liaine implacable dont ses disciples prouvèrent bientôt qu'ils
avaient largement hérité. Chose déplorable ei qu'on ne saurait
irop répéter comme une des plus utiles leçons que l'histoire doive
il la postérité; ce fut celle baiue étrange qui fit de Quesnel un
partisan de la nouveauté et un rebelle à l'aulorilË de l'Ëglise;
c'est du nioini ce qu'il déclara lui-même â son neveu Pinson,
aprts lui avoir recommandé de s'attacher ii l'Ëglise <lans les con- |
tcsUtioDS du temps.
Ainsi, quinze siècles auparavant, un des plus célèbres apologis- I
tes de la religion ■ avait abandonné di^jï l'Église, irrité , dit ui
l'^re , des procédés de quelques prêtres de la capitale du monda i
chrétien.
Enfin, aprèsavoir soutenu son rQle trés-opiniitrément, el avoir 1
leillesse i former dans Amsterdam quelques égliaea' I
léDisles , Quesnel mourut dans celte ville le S décembre1719, T
de quatre-vingt cinq ans cinq mois el quelques jours. Il avait
déclaré dans sa profession de foi : < qu'il voulait mourir comme
> Il avait toujours vécu, dans le sein del'ËgUse catholique; qu'il
> croyait toutes les viViiés qu'elle enseigne ; qu'il condamnait
• toutes les erreurs qu'elle condamne ; qu'il recounaissiit le sou-
■ veraîn pontife pourle premier vicaire de Ji^us-Chrisl, et le siège
•■ apostolique pour le centre de l'unité. > Il n'est pas bcsoind'étre
grand théologien pour voir combien une telle déclaration était in-
EulfisaDte, suspecte, el se conciliait aisément avec tout
l'iiuicur avait fait, diict écrit de mauvais pendant sa vie*.
■ Terlulllen, qui d'abord embrassa l'hérésie de Monlan, el, s'en élant |
Cmuilc d^Qlé,selit hérésiarque.
* Voyti sur Quesnel Causa Qucsnclllana cléjli cit^; le Dlclionnalrq
*S livres jansénistes; Laliteaa, llisti de la coiistilul. Unigenllus; FcN
ïfi"
ISO QUE
De tout let ouvrages émanés de sa plume prodigieosement fl-
coade , Dons ne parleroos ici que de son Nouveau Testament ,
parce que c*est celle de toutes ses productions qui a fait le ptvs d6
brait dans TÉglise.
Uée kUiorique dei réflexims morales , w Nouveau TnkmmU
doQuetnel,
Ce livre , intitulé d'abord : Abrégé de la morale de VÉwaugUe^
ou Pensées chrétiennes sur le teste des quatre évançélistes , ptral
poar la première fois en 1671. Ce n'était encore qu'un fort petit
volume in-12 , qui contenait seulement la traduction des quatre
Évangiles, avec de très -courtes réOexions sur chaque verset. Fé-
lix de Vialard , évéque de Gbâlons-sur -Marne , Tadopla pour aoii
diocèse, par un mandement du mois de novembre de la naésM
année , mais après y avoir fait mettre un grand nombre de ear-
tons : aussi n'y trouve-t-on que cinq des 101 propositions con-
damnées, savoir : la xii% laxiir, la xxx% la lxu* et la lxv*. Cette
édition fut la seule qu'approuva le prélat que nous venons de
nommer. Cependant , quoique ce livre eût bien changé de nature
dans la suite, soit pour la doctrine pernicieuse qui y fut insérée
depuis , soit à cause des augmentations considérables qu'il reçut
successivement, le nom et le mandement du même évéque ne lais-
sèrent pas de reparaître , sans sa participation , à la télé des édi-
tions nombreuses qui en furent faites pendant très-long -temps.
Huit ans après, c'est-à-dire en 1679 , Quesnel publia les antres
parties de son Nouveau Testament , avec des réflexions encore
très-courtes. Ce nouveau travail, que Félix de Vialard ne connut
pas S se réduisait aussi h un seul volume in-12. Il parut en 1687
une édition de tout Touvrage augmentée d'un volume. On y trouve
déjà cinquante-trois des propositions condamnées. Mais ce fut en
1693 que Fauteur le domiaavec tous les accroissemeus et toute la
perfection qu'il avait eu dessein d y mettre. Celte production gros-
sie de moitié forma alors quatre forts volumes in-S**, qu'on appela,
1er, Dict hist.; d*Avrigny, Mém. chron. et dogmat.; Tourncly, Pne-
lect. theol. de grat, Paris, 1755; Mém. pour servir à rhisi: ecdés.
pendant le dix-huitième siècle, etc.
' Il connut bien moins encore les additions et les erreurs introduites
dam les éditions qui se firent après le premier essai de Quesnel, puis-
que ce prélat mourut en 1080, de raveumômcdes auteurs des Hexapl».
âamte langage iny&tfrîeux(luparr>,/M;ua/ri!pranit/'i'^r»'.Nouj
ne parlerons pns <!e loulcs les C-dilIuns puslûricures , lesquelles
se DiulIijiMërent i riofini, Isdi ce livre eui ci'abord d« vogue, ùuat
élevé jusqu'aux nues par les Jansénistes , el préseniaut d'ailleurs
en lui même un air de pièlé Irès-capable d'en iinpoeer el d'y con-
cilier des partisans. Le cardinal de Nuailles approuva l'édition de
1693, après j avoir faïl Taire quelques légères corrcciions el quel-
quesadoncissemensï IVgard dVïpressions qu'il Ironvailirop dures.
Son mandemenl, qui est du S3 juin de la même année, melles Ré-
flerion» moralet au rang des liires les plus précieu;! et lei plui
instruclir». Enfin, ce prélat ajaul été transféré sur le siège archié-
piscopal de Paris, de l'évéché de ChAliins-snr-Hame , ob il avait
succédé II Félix de Vialurd , eul une grande pari fi l'édition de
1 690, qui parut lous ce litre ; te Nimreau TrttamenI tm françait ,
arec dei réflexion* moralet sur chaque venel , etc. Cette édition i
avait élé revue encore par ordre du cardinal ; mais les révitieurs ^ i
soupçonuéseui-mémesde Jansénisme, n'y avaient pas Tait, ibi
oupprès.lescorrectionsnéuessaires. Aussi esi-re de cette iném* 1
édition, ainsi que des éditions de 1693 etde 169i, que Tureiil i
extraites les 101 propusilions condamnées, comme on peulto j
voir i la mar(>e de la bulle, oli les éditions sont citées.
Il suit de eu que nous avons dit que Quesnel employa vingt-
deux ansiidévelopper niSt polir son livre, autant de temps que le
célébreévéque d'Ypres avait consacré A préparer sud fameux Att-
giulitiM. On observe encore d'autres lapporls de ressemblance
eiitie ees deux auteurs : un y remarque , par exemple, même zèle
pour leur production respective, même dessein ï peu prés dans
leur entreprise, même système <.\v. doctrine; maiscequi met entre
eux une énorme diiïéreni'e, c'est que Janeénius mourut soumis «
du moins extérieurement, ï l'EKlîse et danssi
lieu que Quesnel iiuilla la vie acKiblé tins censures
mes de la même puissance.
Il résulte aussi de ce qui a été dit que les partisans de Ques- 1
ncl ont avani'é sans fundcmeiit que les Réflexi/tm morale» avaient j
joui, dans l'Ëglise, d'une sorte d'approbation tacite pendant "
pace de M ans, ï daier de 1 671, oli elles commencéreullivt
; jour, jusqu'en 1711, oli elles furent dénoncées solennellement an j
' royci la clé du langage mystérieux des Jansénistes : Gansa Qucs- J
332 QUE
saint Siège. La vérité est , 1** qu*il faut retrancher de tout ce
temps les 22 ans employés par rautcurà développer et à retou-
cher son élucubration ; puisque, deTavcu même de ses disciples, la
première édition qui enfui faite, celle de 1671, n^olTraity en quel-
que manière, que le dessein et la forme de Touvrage, eu égard à ce
qu'il devint dans la suite , et que la seconde, c'est-à-dire rédition
de 1G87, moins volumineuse de moitié que les suivantes, ne con-
tenait pas , k un très-grand nombre près, toutes les propositions
condamnées *. Ce ne fut qu'en 1693 que les Réflexions moraUt se
montrèrent complètes, étendues, achevées, et qu'elles présentè-
rent le système du faiseur avec toutes ses preuves , ses dévelop-
pemcns et dans tout son jour. On ne pouvait donc dater que de
cette époque l'approbation prétendue dont on voulait les décorer.
Or, 2o il s'en faut bien qu'elles eussent réuni dès lors tous les
suQVages. En 1694, un docteur de Sorbonne *, casuiste célèbre
que l'on consultait de toutes les provinces du royaume , en releva
199 propositions , qu'il nota comme dignes de censure, et les
donna au public dans un Extrait critique , oii il en montrait le
mauvais sens. En 1697, si l'on en croit du Vaucel et Willart,
deux hommes distingués dans le parti , i) paraissait contre le même
livre , des plaintes , des accusations , des mouvemens assez graves,
suivant ce dernier , pour devoir engager Quesnel à remettre sa
production sur le métier et à en retrancher tout ce qui pouvait
exciter ces murmures de la part des religieux, des demi-savans ,
auprès des esprits prévenus, et troubler le repos des consciences '.
Un lang:)ge de cette nature n'annonce guère une approbation gé-
nérale. D'autres monumens nous offrent encore des preuves non
moins convaincantes ; nous ne citerons ici que le mandement de
l'archevêque de Lyon, en date du li avril 1714, où ce prélat s'ex-
prime ainsi : < Depuis que ce livre si captieux a paru dans l'Ë-
» glise , on n'a pas cessé d'exhorter les fidèles à se tenir sur leurs
» gardes et , suivant l'avertissement du Sauveur du monde , à
< Nous avons observé qu'on n'y en remarquait que cinquante-trois.
> Le docteur Fromageau.
' Quamobrem vidcretur necessarium, utoperi dcnuô manusadmove-
retur... tollendum e\ illo idoroncquod rdigiosorum, aut sciolorum, aut
praeoccupatorum qucrelis, aut conscientiae anxietali locum uUum prc-
bcre possit, etc.
(Lettre de Willart à Quesnel en date du 12 avril 1697.)
QUE
T la prudence du «erpeDl, en fermant les o
^Ki imiter la prudence du «erpeat, en fermant les oreilles pmir ne
H^.poini entendre la voix de cet enchanteur si habile dans l'art de
^EsÉduire.» ei en Aijant les raOiaemenB si dangereux en maiiirc
^B^ide foi dont uet ouvrage est rempli, i
' I,es Jansénistes ont encore prétendu ranger le grand évéquc de
Heaui parmi les approbateurs des Rëflexiant moraln. Nous ne
croj'ons pas devoir nous arrêter iui à réfuter celte fausse préten-
tion , d'autant plus qu'elle a été pleinement détruite par plusieurs
d'entre eux. i Je ne sais rien de nouveau , écrivait Willarlî Ques- '
> nel , le 30 janvier de l'année 1700, touchant lu teuUsement
■ qu'excitent les quatre grand» frire* , si ce n'est que H. du Per<
> ron (Bossuel) ■ leur est aussi contraire. • L'abbé Couet adressa,
dans une lettre anonyme , ces reproches au m/me illualrr prélat '.
• On connaît bien des personnes i qui vous avez dit que les cinq
> propositions de Jansénius se trouvent dans le livre du PCra
> Quesael... et vous n'avez pas oublié, monseigneur, que demie'
> remenl vous avex avoué ù un arclievgque de l'assemblée que
• ce livre renfermait ouverleinenl le pur Jansénisme. ■ Âpr&s des
aveux si formels de la part d'bommes fort considérés dans le
parti , on nous dispensera de rapporter des témoignages emprun-
tés d'autorités plus respectables et dignes de la plus gi aude con-
iiance *.
Encore moins exigera-t-on de noua que nous parlions ici avec
quelque étendue de la Juitiflcaiion det It/flexioiu moTalet. Ce
n'est pas d'aujourd'hui que l'on sait â quoi s'en tenir touchaul
cet écrit. La complaisance l'enfanta : Boasuet le composa ponr '
défendre le cardinal de Noailles . son ami , du soupçon de Jansé'
nisme qui se répandait sur son compte ^, et des inveciivea conte-
I Causa Quesnell., p. 3Ï5.
' Vogei LaTileau, Hïtl, de la constiL tlnigenltus, liv. 1, Toumely,
PnclecL theol. de gral., édlt. de 1755, etc., etc.
• Le cardinal de Noaillfs itant monté surle siège de Parli, les Ques-
nrlliites le prîÈrcnl de renouveler pour son nouveau diocSse l'appro-
bation qu'il avait donnée déjA aux Réflexions morales pour le diacÏM
deChïloni; mail il s'en défendit d'abord, di^claranl qui! de tout tôtct
on tut leprochail d'avoir approurc Vrrreur en approunaal (« liere ;
qu'il voulait le faire examiner, et qu'il était résolu de l'abandonner st
l'auteur n'j faisait lc« changcmens qu'on aurait jugés nécessaires. La-
lilcau, Hitl, dclaïou9lit.Unie., I, j, p, 00, iH-â". A Aiignon. Eu effet
8S4 QUE
nues dans un libelle injurieux lout récemment mis aa Jour pir
les Jansénistes *. Mais jamais ce {;rand prélat ne goûU réelle*
ment la production de Tex-oratorien , où , sans compter les dé-
fauts de doctrioe *, il trouvait que VimaginatUm de VmUettr mmit
irop mit du iien, et que les réflexions ne sortaient pas nmtureUêmmU
du texte sacré, Bossuet donna ii sou ouvrage le titre d*Af^fteir-
mrnt , supposant qu'il servirait comme de préface à rédition des
Réflexions morales de 1699 ; mais il se réserva qu*OD fertil dans
cette nouvelle édition des changemens importans et mullipliés
que lui-même indiqua. Quesnel en avoue plusieurs, qa*il rapporte
et qu'il combat pour la plupart * ; d'autres témoins, plus détin-
téressés et plus dignes de foi , en portent le nombre au delà de
cent ; on en voit même qui le déterminent à cent TÎngi. Quoi
qu*il en soit , averti que Quesnel ne voulait point enteodre par-
ler des changemens exigés , Bossuet commença à revenir de To-
pinion avantageuse qu'il avait eue jusqu'à ce moment de sa borne
foi et du fonds qu'on pouvait faire sur ses protestations : Ji /M
l'examen eut lieu, mais sans beaucoup de succès. Quesnel noos apprcad
lui-même que les amendemcns proposés par Tévèque de Meaux ne
furent point faits. Avertissement placé à la tête de la Justification, p. xi|
t. 3A, édit des Œuvres de Bossuet , in-S" , Liège.
*■ Ce libelle était le fameux Problème ecclésiastique , où Ton rneUait
en opposition Louis- Antoine de Noailles, archevêque de Paris, avec
Louis-Antoine de Noailles, évêque et comte de Ghâlons, et Ton deman-
dait auquel, de Parchevêque ou de Tévêque, il fallait 8*en tenir sur la
doctrine (ee prélat ayant approuvé comme évêque les Réflexions mo-
rales, et condamné comme archevêque l'Exposition de la fbi catholi-
que touchant la grâce et la prédestination, ouvrage de Baroos, oerett
de Tabbé de Saint>Cyràn, qu*on disait renfermer la même doctrine que
le livre des Réflexions ) 1 Le Problème est attribué par d'Aguesscaii à
D. Thierri de Viaixnes, bénédiclin de Saint- Vannes, Janséniste des plus
outrés, dit le même chancelier.
> Dans le J SA de la Justification , où il s'agit de l'état de pure sa-
ture, Bossuet s'exprime ainsi : « On avouera même avec franchise
» qu'il yen a (des propositions) qu'on s'étonne qui aient échappé dans
» tes éditions précédentes ; par exemple celle où il est porté que ta
f grâce d'Adam était due à la nature saine et entière. Mais M. de Paris
» s*étant si clairement expliqué ailleurs qu'on ne peut le soupçonner
» d*avoir favorisé cet excès , cotte remarque restera pour preuve dei
» paroles qui se dérobent aux yeux les plus attentif}. •
> Dans sa production intitulée : Vains efforts.
gLb;
doiii, ri'|iiiiiilil-il, •]*> tel auitur ait/iuvrt i
ue manifeUt pat '. Dès lors. Il n'iiisaiia |iiii
, â supprimi
> nQoand M. Boesuct composa cft tarit (lii Ju&liUcallon), dit \'6\^
■ qoedc Soissoni dan» sa cinquièioe instniclioii paslorale, n* il 3, >•
• chnrili! lui fiiisail juger fatorableaiciil d'un litre dont II n'atoil
■ cncon.' p^i^rË tout l'arriOce. • Et quoi de plus capable du le ninursT
sur lu s«nl1mcni de l'eit-ontorini que 1c langage que tenait en eB ,
trni|B-IA ce notalïtir, <laus «es lettres oslensibleii? Nous en rlleroiM i
deux : l'une adreute a son pm) Willart sous la daledu l"BTriU89Bj ,
raiilii! eiTojâe au cardinal de Noailles le 17 mars de la même ann#e.
Dans la |ircmièTe, QuesncI |MiTle ainsi : i J'ai rf^ avec un prof
» respect el arec une parfaite reconnaissance ce ([Ue mon digne p»»» ^
> leur (le cardinal) a eu la bonté de tous dire pour mol. C'est t
■ bien de l'inclinalion et <lc la conliance que Je me repose sur lui. et '
> qu« je me tiens assuré de sa pereévéranle bonti! pour les qualra pu-
• pilles (le* quatre volumes in-8° des Rédeiions morales) qu'il a ■<
m daigne prendre è sa protection. Il csl vrai que je me dëOe de ce IbéOr i
t logien qui s'est talsl de ce* quatre cnfane. • Ce tliéologlen, dont j
Qucsnel se défie, n'ùtnit-ce point Itossuet lui-mt^me? on ne nous en
rien. Dans l'autre lettret notre auteur marque encore plui rorieoent |
sa soBmissioa, ou plu lut sa souplesse. ■ Manseignenr, ^oufliei, :
■ \au> plaît, que je tne jetlctt vos pieds, pour voua demander voira j
• sainte cl paternelle bénédiction, et en m^Die temps la permisaioa da [
1 tous rqMscntcT, comme t mon pire et à mou juge, avec le plna
■ grand respect, ce qu'il me semble que je ne pourrais dissimuler A
> loire Grandeur sans manquer à mon devoir dans nne oceatloa qui
■ ue me saarait être indUTiTcnte. Grtcei Dieu, la pari qne j'y si (au
■ NouTeau Testament avec des réllctlons morales), n'vit pas ce qui me
■ tient plus à cœur. Comme je suis tris-capable de me tromper et da
• Taire des fautes, je ue rougirais pas de \ti reconnaître, de les lak
> elTaccr, de le« rétracter pnbliqueinenl moi-metne. • Causa (}uesndU
p. hi'i. Huis il changes bien de ton, écrivant à rccur ouvert, le la
oiril 1G09, au infime Willart: • Je laisse Tulrc le bon abbé dom An-
I liiine de Saint-Bernard (l« cardinal de Noalllea); car, comment bira
> pour l'empêcher? je suis bien aise de n'être point coMullé, Ce qnl
> sera bien icru aioué ; s'ii j a quelque chose qu'on ne puisse np-
r pmuter, on en sera quitte pour dire qu'on n'y a point eu rie part,
t Pvurfiu qu'on ne touche pat aux euilrinlt noUi , ttla ira iitu ;
> je sais qu'il (l'arclieveque de Paris) avait dit II de^ gca* qa'll svou»'
I rail BOUS le nom de sa première abbaje ( l'eifcbe de Cbolons ) lea
• quatre ft^res, et il k' devrai! Talir pour rt'puuiirr Yiniolenct du toit' ^
• irc^havi .• insb JQ tob bien qui' saigne lUi an, ■ Ibîd., |>. A1A>
836 QLK
écrit , el il 8*éleva contre Je livre des Réflexions avec plus de
force qa*il ne Taviit encore fait jusqne-là. On sait comment il
8*en expliqua dans la suite auprès du premier président le Pel-
letier et auprès de madame de Maintenon , deux persouiages dont
le témoignage mérite une grande confiance^. Enfin^ il est constant
que récrit dont nous parlons ne parut point pendant la tie de
Tauteur : ce fut le Janséniste le Brun qui , en ayant obtenu com-
munication de la main du secrétaire du prélat , en tira copie, con-
tre sa parole donnée, et le fit imprimer à Touroay, après la ré-
duction de cette ville. Il n*est pas moins certain que ce fut entre
les mains de cet éditeur infidèle que VÀvertiisement fat traTCsti
en Jasiification *•
On ne s*étonnera donc pas que Bossuet, entraîné par Tamitié
qu'il avait pour le cardinal approbateur , trompé par les protes-
tations de soumission que faisait Thypocrite fugitif des Pays-Bas,
et comptant que les nombreux cartons qu*il demandait seraient
apposés à Tédition de 1699, se fût attaché à expliquer des en-
^ Le premier assurait quMl avait souvent ouT dire à M. de Meaux
t que les Réflexions du P. Quesnel étaient pernicieuses ; qu*elles ren-
• fermaient clairement les erreurs de Jansénius, et que les personnes
» qui faisaient profession de piété ne devaient point les lire. » InstmcL
pastor. de MM. de Luçon et de la Rochelle, du ik mai i7il. Foye<
Montagne, sous le nom de Tournely; PrxlecL theol. de grat, t i,
p. S7i, édiL de 1755, où ce texte est rapporté en latin.
t Madame de Maintenon déclara dans la suite à M. le duc de Bonr-
» gognc, devenu dauphin, que Bossuet lui avait dit d elU'méme pfic-
» sieurs fois que le Nouveau Testament du P, Quesnel était telUment
» infecté de Jansénisme qu'il n*était pas susceptible de correction, •
Hist. de Fènélon, par M. L.-F. de Bausset, 8* édit., t. 8, p. 83 et suif.
Ainsi pensa Tillustre prélat des Réflexions morales, voyant que Tautenr
se refusait aux amendemcns qu'il lui avait fait proposer, et après avoir
travaillé à expliquer des propositions qu'il laissait, mais dont Texpli-
ration supposait les corrections demandées préalablement.
> Voyez, dans la 5* lettre past. de Tévéquc de Soissons, n* iiS, la
lettre de M. Tabbé de Saint-André au même prélat, en date du h no-
vembre 1724. Cette pièce curieuse renferme une partie des Oiits que
nous avons avancés touchant la Justification, Ko^ez encore, à ce sujet,
Montagne, dans le traité que nous venons de citer; Lafiteau, I. 1;
Mémoires chron. et dogm., sous Tannée 1708, 13 juillet ; Mémoires
pour servir ^ Thist, cccléSt pendant le dix-huitième siècle.
QIE 337
ii encore loucher, encore caplïeui, mais susccpiiblcs d'un
orLhoiIoxe el conrorme aux saintes règles. A|irès ces cent
vingt ' ameodenieni supposés Taiis, ellauld'cxplicationsdonDées,
le prÉlut DO se Irouvaii-il pas en droit de dire que , • s'il se reo-
> contre quelque part (dans les lléflexlons morales) de l'obseu-
• rilê ou même quelques défiiuts , le plus souvent dans l'eipres-
t sion , comme nue suite inséparable de riiumaniié, nous osons
> bien assurer, et ces remarques le font assez voir, que notre il-
■ lustre archev^ue les a reclierchés avec plus de sincérité que
> les plus rigoureux censeurs '? • lleureux Quesuel , s'il eût
adopté dans son cœur et dans son livre les correclioas exigées par
Sossuet : Que de troubles n'eùl-il pas épargnés et il l'Église et
i lui-même? Mais c'est le propre de l'hérétique de tout promettre
quand il espère ou qu'il se sent vivement pressé , et de manquer
de parole lorsqu'il faut en venir i l'exécution.
Enfio , quand on n'en aurait pas une Toule d'autres preuves , la
m Jnilificaiioii sulTirait seule pour démontrer invincible ment l'op-^
K position entière des seniîmeas de Bossuet aux erreurs du JaDS '
ConDAH:«ATio:< du Souneeu Tettament de Quemel.
Les soupçons, les plaintes, les murmures el , pour nous si
1^ l'expression du Janséniste Willart, le soulèvement qu'excita
I m ouvrage , depuis surtout que l'auteur l'eut complété et qu'if
Éf eut mis la dernière main, éveillèrent la soUîcituita des premiers
S:steur« dn l'Ëglise de France. Nous avons déjà rapporté ce que
Bail i cet égard l'archevêque de Ljon dans son mandement de
? )71i ; nous pourrions citer encore en preuve les archevêques de
I Tienne et de Narbonne , les évéques d'Amiens , de Uarseille , de
f Valence, de Béliers, de Lisieux, etc., qui rendirent ï la mâme
l époque !i peu près le même témoignage. On sait de deux amis de
[ Quesncl * avec quelle force révëque deCliartres s'élevait, en 1699,
* Voye: Lettres iustruct. imprimées par ordre de Mi l'évèque de
e, 3< étUL, 1715. t. S, p. 53, &A et 55.
1 Juilific. des Hencx. moral, p. SQ, CdiL déjï cilèe.
►LeNoirclWlIInrt, dans leurs Icllrcs i cet Butcurj le premier,
le du I novembre 1699 ; le «cond, sous le Î3 janvitr 1700, te
■r ne parle que de l'Iiorrcur de l'éitque <le Cli
[ quatre frère», c'cjt-4-dire contre le livre des Raiedous raorolca,
II.
29
1
ass QUE
contre la méiiM production , dans une visite qo^îl faintt aloft àê
•on diocèae » et avec quel soin il 6taH ce livre pemicieiix dci
raaim des religieuses soumises à sa juridiction. Un dea préitfs
appelaos * se flattait, en 1714, d'avoir commencé déHà m I61l6,à
ééioumer de la lecture ée$ Réflexions morales les fld^eê ccmfiéÊ à
$€ê ioinê. Nous avons encore ^ Fordonnance que révéqoe d*Apt
[Mbiia le 15 octobre 1703, dans laquelle il défendait le livre de
Quesnel à tous ses diocésains , sous peine d'excomnuiDÎcatMMi ,
encourue par ce seul fait. Le jugement qu'il prononça dans celte
ordonnance contre Touvrage de Tex-oratorien , après Tav^ir
bit mûrement examiner et Tavoir lu et relu lui-même avec soin «
mérite d*avoir place ici. • Nous avons trouvé , dit ce sage prtiat ,
» que, outre que le texte de ce Nouveau Testament était preaqiM
» le nnéme qae celui de Mons , condamné par les papes et par
» plusieurs évoques , et dont nous avons nous-mème depuis long»
» temps interdit Tasage à nos diocésains , Tauteur, par ses pro-
» positions téiftéraires , erronées , exprimées en termes caplievx ,
» équivoques , étudiés et concertés avec soin , favorise et foaieBte
» le Jansénisme. » Les évéques de Gap , de Nevers, et Tardievé-
que de Besançon ', ûrent aussi eutendre leur voix pastorale dans
leurs diocèses contre le même livre : le premieren i704 , les deux
autres en 1707.
Jusque-là, Rome avait gardé le silence. Cependant, sî Ton en
croit un auteur du parti *, le Nouveau Testament de Quesnel y
avait été déféré à Tinquisition peu de temps après qu*il eut été
achevé, c'est-à-dire en 1693 ou Tannée suivante; mais il n'était
émané de ce tribunal aucun jugement. Quesnel , à qui Ton avait
demandé des éclaircissemens , suivant le même historien , avait-
il empêché par ses ruses ordinaires , ses protestations feintes de
respect et de soumission, par de grandes et de belles promesses,
qu'on n'eut alors traité sa production avec rigueur? Quoi qu'il en
* D'Hervau, archevêque de Tours.
* Dans un érrit publié par un théologien, en 1765, sous ce titre ; le
P. Quesnel séditieux et hérétique dans ses Réflexions sur le nouveau
Testament, etc.
* François-Joseph de Grammont, dont on peut Toir le mandement
dans le recueil qu'il donna en 1707, sous cet intitulé: StaMa
décréta tjfnodalia Insuniinœ dicscesUf etc.
* tiiei, du livre des Héflexione morale», par Lonail,
01 K
foil, CItiiiieiiL Xi, Tiiliguâ (li'« (iluiiiU'n el ijt'i rTimcii
L ^nul de louUs pans, rumpit enlin le silence. Il tuuii
Wjitlciatiu'n l'ouvriige dont nous noua occupons ; etvojaniqueM
Lies consutteurs, suii kscardiniiux cliargi'n de ce soin ,
1 |ui<Mit d'uHt voix unanime quo ce livre éUtii pernlcieui ,
I d'erreurs lite-gravea , de propDsUiuns qui seuuieat l'héré«îe||
jn'il fulUit en caiitéquenfio l'Ûlcr des inuins dri tiilèlea el le fraptl
F per d'anDiliËtne , il ks condumna au feu, le lil jiiillei 1708, pi
un décret spéi'ial dunié eu fiti'nie de btel, l,i raison que le pipf| 1
apporu de cf jugement éluil que ce livre présentait le texte u
41 aounegu Trilament vielé it'mie oiamire eondamuable ei
conforme à une outre veriion franfaiie proterile par Cté*
I wutti IX le 20 avrii l6(iS, dilfUranl en beaucoup dendroitt de la
^ Wgaie, qui eti approuvée dan* l'Église par l'utage de lanl de
lUcIti, et laquelle tout let pditei doivent tenir pour authentique.
M njouUil que ce même livre eonieuail en outre an note» et de» ré-
/lexiiia» qui à la vérité avaient une apparence de piété, maii qui
eiméuiêaient artifiaicuietneni à l'éteindre, et offraient une doctrine
^^ « iti propoiiiioM léiitieuttt , timérairei, pemicieuseï , trtoniei, ^
^^L iéià eondamnéet et tentant manifettement l'hérétle janténienna S
^H ht clause qui condamnait au Teu tous les ciemplsiret du livre m
^^Ê rex-uratorien pirui en Franco contraire ï noit usagM, dit d
^^B liisiorien,ce qui empêcha que ce brerne Tut reçu dunslerojaume*
^^K Deux années après, les èvéqueg de Luçod el île U iti>cbelle *
^^B publièrent une Ordonnance et inilnielion patlorale. portant con-
^^P damaaiion des Réflexima morale*. Ils avaienl concerté ensemble
• cette ordonnance, et s'en étaient occupés pendsut l'espace de
deux ou trois ans. Ils la divisèrent en deui parties : dans la pre-
mière, ils démonlrèrenl que les cinq propositions étaient claire-
rlDent contenues dans Vkuguitin de Janséaius , et renouvelées
toutes dans le livre de Quesnel. Dans la seconde , ils firent voir
que ces deux novateurs s'écartaient réellement de la doctrine du
faiotdocleur d'Ilippone. Cet ouvrage, qui était assex vutuinineui,
Ibmiail une espace de traité de lu ^râce, el fut loué II Home jur
]» saint Père lui-même *. L'année suivante, 171 1 , l'évêquc de
I Monlofcne, Pndect. theiri. degrat., t. l,p. SST. édit, citée.
' Laliiiiiu, Hlst. de la conslir. Upig.. I. 1. p. B7. édîL déj4 rilée.
' Jean-Pmifols deValderic de Lescare et EUentie de Chamnour.
' IliiL de la coidUl tlnlf., I. 1, p. lOt et 107. Nous ne parleront
840 QUE
Gtp fil un mandement à peu près semblable ^. Le roi réfoqni
aussi, le il novembre de la même année, le privil^e qa*ii mii
accordé pour Timpression des Réflexions morales, et le même ymè
un arrêt dn conseil les supprima.
Enfin Clément XI , excité par sa propre sollicitude , par lei
plaintes réitérées de personnes zélées pour la foi orthodoxe, sur-
tout par les lettres et les prières d'un grand nombre d*é?èqnes de
France, et par les instances souvent répétées de Louis-le-Grand ,
qui suppliait sa Sainteté de remédier incessamment au besoîa
pressant des âmes par Tautorité d*uu jugement apostolique *,
consentit à porter une constitution. On peut voir dans Lafiteau
les précautions qu*on prit en France , de concert avec le pape ,
pour que cette bulle ne renfermât aucune clause contraire aux
libertés de TÊglise gallicane ni aux usages reçus dans le
royaume.
Voilà donc le Tiouveau Testament avec des reflétons moralet
livré à un troisième examen, dans la capitale du monde chrétien ;
mais pour y procéder d*une manière capable de fermer la bouche
à la malignité , et atin de ne laisser aucun prétexte à Tindocilité
ni à Texigence scrupuleuse , Clément XI appela à ce travail pé-
nible « les plus habiles théologiens de Rome , tirés de toutes les
» écoles les plus fameuses et de tous les corps religieux qui font
» une étude particulière de la théologie. On comptait parmi les
» examinateurs deux Dominicains, deux Cordeliers, un Augustin,
» un Jésuite , un Bénédictin , un Barnabile et un prêtre de la
» congrégation de la mission ^. p Par un choix si sage , le pape
prouvait hautemen t, et qu'il ne s'était pas laissé circonvenir, et
qu'il agissait avec toute la franchise et toute la droiture conve-
nable dans une affaire de cette importance, et combien il était
éloigné de vouloir toucher, en quoi que ce fût, soit à la doctrine
du saint Docteur de la grâce, soit aux sentimens respectables de
pas des démêlés qu*occasiona cette ordonnance entre ces prélats et le
cardinal de Noailies.
* Montagne, dans le traité cité, p. 868 du tome i*M Dict des livres
jansénistes, t. àt p. 65.
> Voyez le préambule de la bulle Unigenitus. Voyez aussi Lafiteau,
1. 1, p. iiO et suiv., etc.
' Lettre écrite de Rome à Fénélon, en date du 16 septembre 1718.
UisU de Fénélon déjà citée, t. 8, pag. 898 et suir.
I TAoge Je l'école , soh niÈtue aui opioioDK pariiculièrcs loléréet J
Il l'Ëglise.
^Les théologiens choisis Turent pour rus chacun en particulier' 1
^4*exeinplaim latins (M rranç^isdu livre de rcx-oraIurieai.Quoi-!j
pe nommés en février171î, il paraît qn'ils ne commencèrent |
s confërenues que le 1" juin suivant. Ils eurent donc toutJ
t temps nécessaire pour étudier préalable mt'nt l'esprit de l'oo-B
nge de QiiesQcl>pouren sonder !i fond la doctrine, pour i
I cinquante-cinq proportions soumises & leur examen t
ftsnienl été fidélemenl exlrailes, quel élail le Trai sens de dutj
' elles étaient courormes à la foi orthodoxe ou si elles s'
écarlaient, et jusqu'à quel point, l-es conférences se tinrent d
présence de deux commissaires lires du collège des cardinaux *[*■
elles durèrent chacune quatre i cinq heures, et le travail ne Tat f
achevé qu'à la disL-scpiième conrérence.
Apris cet examen préliminaire déjà très- 1 u min en x, Clémeni XF I
1 fil l'aire un second en sa présence. l.D se iruuvérent, Doiiii''-l
Mlemeul les ihëotngiens dont nous venons de parler, Dcurcar^''j
Coaui de lu congrégalioD du saint-omce, tous les consullenrtj
1res du même tribunal, arec le commise.iîre, qui est t
n Dominicain , mais encore le général du même ordre et n
nndnonibredeprélals'.li se linlviugt-lrois congrégations, d
le desquelles on commentait par examiner si la proposilioB J
K-Illïne dont il s'agissait était fidélemenl traduite en Trançais; i
ft.Mile quels en étaient le sens et la qualité. Les cent cinquants- I
r tànq propositions, prises dans lesédilions de 1U93, lG9i cl 11 '
du Nouveau Teilament de Quesnel, furent disculées su
menl ttl avec une atlention extraordinaire ; il n'y en ei
pas une qui ne coOiat au pape quatre ou cinq heures d'étude p
intcur» réc^ns nient ce Tail ; iDaîs il nous paraît plus sage M I
rapporter A un écrivain conlemporain , qni fut employé par ht I
(ouvcroemcnl français auprfs de Clémcnl XI , \k\x d'années après I'^âI
'iKmcnl dont nous parlons, cl qui en donna l'histoire, après svoT"
Mirné II Rome , oA il fut ù portée de prendre les Infannations k
les et <le s'en entretenir ovec le souverain poulilb luj-in(
et ïeriiain esl Lslilcau. Voytz son IIi^loire, p. 13D, édit. ïitée.
' Ces comnlasalres furent les cardinaux Ferrari et Fabroni : mCmi
Idire écrite de Rome ï Féneton.
' Ibid.
T.\'
lit QLE
Ucalière ^ : aussi, son appHcaiion soutenue, la griada
qu*il montra dans cette affaire épineuse et le traTaîl
qu*il fil à cet égard, étonnèrent beaucoup tous ceux qui ea hami
les témoins oculaires. Un auteur tout récent, mais très-oppoaé à
la bulle émanée de la main de ce grand pontife, assure, diaprés ka
archives de Rome qu*il dit avoir compulsées dans le
qu'elles étaient ^ Paris, pendant la persécution de Pie Yll,
Clément XI, après avoir recueilli les opinions des coi
le vote spécial de cinq ou six cardinaux, faisait le plus aoaf— I
un extrait de ces opinions auxquelles il ajoutait qoelquefoMi ém
développemens et des remarques , puis une noie abrégée potUM
le vote des mêmes cardinaux, et terminait le tout par unjugt— I
q«*il exprimait d*ordinaire en ces termes : Nés diJUmuê ^. 0« «•
pouvait donc exiger plus d'application de la part du
pontife, plus de zèle dans la recherche de la vérité, plus àm
oautions afin de parvenir a une définition digne du ekrâf visiblo de
TÉglise, digne du saint Siège» digne enfin du respeel et de lu
soumission des vrais fidèles répandus sur toute la terre \
Cependant, avant de signer sa constitution, le pape ne négli-
gea rien pour obtenir les lumières célestes de Tesprit de ^érhé.
Dans ce pieux dessein, il alla très-souvent célébrer les divins m ja*
* Même lettre adressée de Rome à Fénélon.
> Vérité de l*histoire ecclés. rétablie par des monumens authentiques,
pages 50, 51 et 53.
*Les théologiens orthodoxes qui montrent le plus d^éloignement
penr ce q«*on appeUc les opinions ultramontaines enseignent tous
qu'indépendamment de la question toachant la foilHhiHté ou l*infhilti-
bUUé du pape, on doit se soumettre, au moins provisoiiement, aux js»
gemcns dogmatiques émanés du chef visilile de TÊglise pariant est «••
thedrà, jusqu'à ce qu'on ait le temps de savoir que ces jugemeos ont
été adoptés par la plus grande partie des évoques en communion avec
le saint Siège ; circonstance qui ayant lieu , disent les mêmes théolo-
giens, ftiit de ces jugemens des dénnitions de l'Église universelle, les
Nnd, par conséquent, irréformables, absolument obligatoires, et cela
q«aiid mèaK des évêques auraient réclamé, pourvu que leur nombns
■oit beaucoup moindre que celui des évêques qui auraient adhéré,
soit positivement, soit d'une manière tacite.
Ce n'est pas ici le lieu de nous étendre sur ce point , et nous ne fti-
ions celte remarque que pour mettre nos lecteurs ù portée de voir que
nous n'avons rien dit, dans la phrase qui la précède, dont les tbéolo-
gicns qui soutieuucnt celte opinion aient lieu de se plaindre.
' QVE Ht
Iferet sur le lombeuu Jes *ainls ojifilies PiWM «I l'»ul ; il prescrU
vil des prières publiques dans Hoinp et j urjunna URe procession
soleoitelle à laquelle il assista lut-m^ine.
Au reste, nous ae lonimes entrés dans ce long détail, qaî ras-
ture autant qu'il édifie, que pour faire triompher la droiture do
Clément XI dans celte grande affaire contre tes calomnies des en-
nemis de ce nge pontire, contre les aopliismes des déiraclt^n
de la TÉrité, et pour tâcher de rsiraeiier i de meilleurs seniimeni
les Ames simples et droites qui ont eu leinalbeur de se laisser pré-
venir par des opinions aussi pernicieuses qu'elles suni mal (ow
àées.
EnHn CléBieat XI signa la constitution le 8 septembre 1113, el
elle fut alTichée dans Rome le même jour. Dans le préambule, qui
commence par ces mots : Va'rgeHilHt Dei Filial, ayant parl.^ <i'a-
bord de l'avertissemeui donné par le Fils de Dieu ï son Église,
« 4% nous tenir en garde contre les faux prophètes qui Tieonenl
revêtus de la peau îles brebis ; (pur odj il désigne prin-
'4Ï|MleineDt. .. ces miitlres de mvnsonges, ces séducteurs pleins
..artifices, qui ne Tunt éclater dans leurs discours les apparen*
^Ws de Uplas solide piété qutt pour Insinuer impercepliblemenl
dogmes dangereui et que pour introduire sous les dehors
)k b sainteté des sectes qui conduisent les hommes â leur perte ;
• sâiuisani «ec d'auLint plus de facilité ceux qui ne se défient
■ pas de leurs pernicieuses entreprises, que, comme des loups qui
• dépouillent leur pe;iu pour se couvrir de la peau des brebis,
• ilas'enveloppeni, pourainsi parler, desmaximesde la loi divine,
B des préceptes des saintes Ëcrituj'es dont ils interprètent mali-
>■ cieusemeni les expressions, et de celles mêmes du nouveatt
■ Testiimtftit qu'ils ont l'iidresse de corrompre en diverse* mauië'
• res pour perJre les autres et pour se perdre eut-mémes : vrais
• Sis de l'ancien père du mensonge, ils ont appris, par son eiem-
> pie et par ses enseigoemens, qu'il n'est point de voie pins sâre
> ni plus prompte pour tromper les 3mes et pour leur insinuer 1»
eurs les plus criminelles que de couvrir ces erreurs
l'autorité de la parole de Dieu. ■
Le Saint-Père continue ensuite de celle maniêro : « Pénétrés
divines instructions , aossit&t que nous eâmes appris ,
dans la profonde amertume de notre cceur, qu'un ceriaiii livre,
imprimé autrefois en langue française et divisé en plusieurs to-
mes, auus ce Litre : U -Vi'Kt'Mii Tnlamtnt en fran^iii, tfee (tei
K
844 QUE
réflexioni moralei $ur chaque verset, etc,; h ParUf 1699. Antre*
ment encore : Abrégé de la morale de V Évangile, dea Aeiet du
apâlres , des ÉpUres de saint Paul, des ÉpUres canoniptea et 4e
V Apocalypse, ou Pensées chrétiennes sur le texte de ces Livres
sacrés, etc.; à Paris, 1693 et 1694 ; que ce li^re, quoique noat
Teussions déjà condamné * , parce qu'en effet les Tentés ealbo-
liques y sont confondues avec plusieurs dogmes faux et dange-
reux, passait dans Topinion de beaucoup de personnes pour mi
livre exempt de toutes sortes d'erreurs ; qu'on le mettait partoat
entre les mains des fidèles, et qu'il se répandait de tous cfttés
par les soins affectés de certains esprits remuans qui font de
continuelles tentatives en faveur des nouveautés ; qu'on Taviit
même traduit en latin, afin que la contagion de ses raaumet
pernicieuses passât, s'il était possible, de nation en nation et de
royaume en royaume; nous fûmes saisis d'une très-yive douleur
de voir le troupeau du Seigneur, qui est commis à nos soins, en-
traîné dans la voie de perdition par des insinuations si sédni*
santés et si trompeuses : ainsi donc, également excités par notre
sollicitude pastorale, par les plaintes réitérées des personnes
qui ont un vrai zèle pour la foi orthodoxe, surtout par les let-
tres et les prières d'un grand nombre de nos vénérables frèree les
évéques de France, nous avons pris la résolution d'arrêter par
quelque remède plus efficace le cours d'un mal qui croissait ton-
jours et qui pourrait avec le temps produire les plus funestes
effets.
» Après avoir donné toute notre application à découvrir la cause
d'un mal si pressant et après avoir fait sur ce sujet de mûres et
de sérieuses réflexions, nous avons enfin reconnu très-dbtinc-
tement que le progrès dangereux qu'il a fait et qui s'augmente
tous les jours vient principalement de ce que le venin de ce li-
vre est très-caché, semblable à un abcès dont la pourriture ne
peut sortir qu'après qu'on y a fait des incisions. En effet, k la
première ouverture du livre, le lecteur se sent agréablement at-
tiré par de certaines apparences de piété. Le style de cet ou-
vrage est plus doux et plus coulant que l'huile ; mais les expres-
sions en sont comme des traits prêts à partir d'un arc qui n'est
tendu que pour blesser imperceptiblement ceux qui ont le coeur
droit* Tant de motifs nous ont donné lieu de croire que nous ne
< Par son bref du 13 juillet 1708.
QUE
2iS
il
■F»
^■^ï M,
1 pouvions rien faire de plus à propos ni de plus saluLairo, aprts
• avoir jusqu'ï présent marqué en gfnéril la doctrine aniGcicuM
. de ce livrp, que d'en découvrir les erreurs en dflsil cl que
> deiK meure plus clairement et plus distin(^temcnt devant les
• yeux de tous les fidèles par un extraii de plusieurs proposîiioni
> conienues dans l'outrage, ob nous leur ferons voir l'ivraie dan-
• gercuse séparée du bon grain qui lu couTrait. Par ce moyen,
> nous dévoilerons et noua mettrons au grand jour, non-eeulemrnt
■ quelques-unes de ces erreurs, mais nous en exposerons un griud
• nombre des plus pernicieuses. Boit qu'elles aient été condam-
>> nées, soit qu'elles aient été inventées depuis peu. •
Eosaiie, après avoir marqué la confiance qu'il met en Dieu et
l'espérance qu'il a de si bien faire connaître la vériié , et de la si
bien faire sentir que tout le monde sera forcé d'en suivre les lu-
mières. Clément XI revient aux sollicitations des évèques fran-
çais , qui lui avaient témoigné que , par le mojen d'une cunelilu-
tion , il ferait une cbose irës-ulîle et très- né cessa ire pour l'intérêt
de la foi catholique , pour le repos des consciences, et qu'il met-
trait fin aui diverses conlcstations élevées principalement en
France, etc. Après avoir parlé de nouveau des instances faites par
Louis XIT, dont il loue le zèle pour la conservation de la foi et
l'extirpation des bérésies, il fait mention des soins qu'il s'est
donnés dans cette importante affiiire. • D'abord, dit-il, nous
> avons fait examiner par plusieurs docteurs eu ibéologie, en
■ présence de deux de nos vénérables frères , cardinaux de la
> saime Église romaine , un grand nomlire de propositions ex-
• traites avec fidélité et respectivement des différentes éditions
■ dudit livre , tant françaises que latines , dont nous avons parla
> ci-dessus ; nous avons ensuite été présenti cet examen; noua
appelé plusieurs autres cardinaux pour avoir leurs avis,
!t, après avoir confronté pendant tout le temps et avec toute
'aitentioQ nécessaire chacune det propotHioni avec le texte d» l
Une, nous avons ordonné qu'elles fussent examinées et discu-
i tâes irès-soî(jneusement dans plusieurs congrégations qui se
> sont tenues ï cet eâTel. >
A la suite du préambule que nous avons cm devoir transcrira
ici presque en entier parce que plusieurs faits que nous avons ci- |
devant avancés s'y trouvent conlirmés , parce qu'on y découvre
les motifs pressans qui engagèrent Clément XI h donner sa ci
aiiluIioD : qu'on y voit avec eatisfaclion la réponse îi unu foule J
340 QLE
d*objeclions qui fureat failes dans le temps, el qu*oo MMWfdie
eucore de nos jours contre cette bulle; enfin, ptree qii*«B y
aperçoit , comme d'un coup d*œil général, soit le dioger da poi-
son que renferme le livre de Quesnel , soit rariifice doBt Tavlev
s'est servi pour faire couler d'une manière aussi agréable qve sé-
duisante ce poison dans les coeurs , le saint - père rapporte iOl
propositions extraites du même livre, et il les condamne «
» étant respeaivement fausses, captieuses, malaonnaiitee»
» pables de blesser les oreilles pieuses ; scandaleuiei,
» cieuses, téméraires, iujurieuses à T Église et à sa
» outrageantes, non-seulement pour elle, mais pour les pait-
9 sances séculières ; séditieuses , impies , blasphématoiree , iiis-
» pectes d'bérésie , sentant Tbérésie , favorables aux héréli^MS ,
» aux hérésies et au schisme ; erronées , approchantea de rbéri-
» sie et souvent condamnées; enfin, comme hérétiques eteoauae
> renouvelant diverses hérésies , principalement celles qui soot
» contenues dans les fameuses propositions de Jansénius , prises
» dans le sens auquel elles ont été condamnées. »
Le saint-père défend en conséquence à tous les fidèles de pen-
ser, d'enseigner ou de parler sur lesdites propositions autrement
qu'il n'est porté dans sa constitution , et il veut que « quiconque
» enseignerait, soutiendrait ou mettrait au jour ces propositions,
9 OU quelques-unes d'entre elles , soit conjointement, soit sépt-
» rément, ou qui en traiterait même par manière de dispute, en
» public ou en particulier, si ce n'est peut-être pour les corn-
» battre , encoure ip»o facto, et sans qu'il soit besoin d'autre dé-
» claration , les censures ecclésiastiques et les autres peines por-
» tées par le droit contre ceux qui font de semblables choses. »
11 déclare, en outre, qu'il ne prétend « nullement approuver ce
» qui est contenu dans le reste du même livre, d'autant plus,
» ajoute-t^ii, que, dans le cours de l'examen que nous en avons
» fait , nous y avons remarqué plusieurs autres propositions qui
B ont beaucoup de ressemblance et d'affinité avec celles que nous
» venons de condamner, et qui sont toutes remplies des mêmes
» erreurs : de plus , nous y en avons trouvé beaucoup d^autres
» qui sont propres à entretenir la désobéissance et la rébellion ,
» qu'elles veulent insinuer insensiblement sous le faux nom de
» patience chrétienue, par l'idée chimérique qu'elles donnent
» aux lecteurs d'une persécution qui règne aujourd'hui; mais
» nous avons cru qu'il serait inutile de rendre cette consiitslien
>- plus longue pur un <li'-tall panicultpr Hé ces propositions. •
Venant de luile à la traduction adoptée par Quesnel , Cl|i-
mcDi Xi continue ainsi : • n&u, ce qiti en pins intulérable dam
<• cet ouvrage, nous ; avons vu le leite du nonveau TcRlamenl'
• altéré d'une manière qui ne peut être trop condamnée, et con-
> fonne on beauroup d'endroits ft une traduction dite de Huni'
• qnî a At^ cenaurée depuis long-temp-i ; il y est dilTl^reot, et s'é-
I lotipie en diverses façons de ta version Vulgate qui eu en uftage
> dans rf.glisB depuis tant de siècles , el qui doit #lre regardée
• comme aiiiheniique par toutes les personnes orthodoxes ', et
• l'on a porté la mauvaise Toi jusqu'au point de détourner le seni
■ naturel du leite pour j substituer un sens étranger et souvent
• dangereux.
• Pour toutes ces raisons, en vertu de l'autorité apostolique,
• mini défendons de nouveau , par ces présentes , el condamnons
> ilerechef leilit livre, sous quelque titra et en quelque Inngue
- qu'il ail été imprimé, de quelque édition et en quelque version
> qa'ît ail paru ou qu'il puisse paraître dnns la suite (ce qu'ï Dieu
f ne pliise) ; nous le condamnons comme étant irés-capable de sé> '
k»'<inir« la imn limplfi par de* parole» pltinn de dnaeeur el p
^êttMiiédtetiM», ainsi que a'eiprîme l'apAlre, c'est-ii-dîre
« tel apparenees d'une instruction remplie de piélé. Condami
■ {Mreillemeot tous les autres livres ou libelles, soit manuscrits,
• Mtt imprimés , ou (ce qu'ï Dieu ne plaise) qui pourraient s'ini' 3
> primer i)*m la auiie pour la défense dudit livre ; nous défen- J
■ dons ï Ions les tldélm de les lire, de les copier, de les retenir 1
• M d'en faire usage , sous peine d'eicommnnieation , qni sert T
• meonnift ■p*'' forlu pur les con
Les lot propositions condamnées par la bulle peuvent se ri^
dyirek certains chefs qui regartlent la grâce, la cbnrilé, l'iïglise,
le* «icammunica lions, l'admi ni si ration du sacrement de pénitence,
la leeture des livres saints , etc. Noos n'en donnerons pas ici l'a^
nalysa , nous r<^rV3nt d'en parler ci-après avec quelque étendue.
Accfpiallim de la balle l'nigenilus.
F.e pape ajnni publié sa consli
suite pour la Frani^c et chargea 5i
348 QUE
Aussitôt que Louis XIV Verni reçue , charmé de n^y lemiFcpMr
aucune clause contraire à nos maximes ou à nos libertés, il se hiia
de chercher la manière qui conviendrait le mieux pour la faireae-
cepter dans ses États.
Entre plusieurs moyens canoniques qu*il soumît ^ son eximen ,
celui qui lui parut devoir être préféré comme étant le plus expé-
ditif et le plus propre à ménager parmi les premiers pasteon une
uniformité de conduite bien désirable en tout temps « mais sortovt
dans les circonstances cH tiques où Ton se voyait , ce fut de réunir
à cet effet les prélats qui se trouvaient déjà dans la capitale pour
les affaires de leurs diocèses ou pour leurs intérêts paniculios.
On avait Fexpérience d'une mesure toute semblable : c*était ainsi
que Ton avait accepté, soixante ans auparavant , la bulle d^Iaao-
cent X contre le livre et les cinq propositions de iansénios; et
Clément XI proposait Tacceptation faite alors pour modèle de Tac-
ceptation qu'il attendait de la part du clergé de France en faveur
de sa constitution. L'assemblée fut donc résolue.
Elle s'ouvrit le jour désigné , qui était le 16 octobre i7i3. Une
s'y trouva d'abord que vingt-neuf prélats ; mais le nombre s'en
augmenta beaucoup dans la suite; en sorte que, quand il fut
question d'entendre la lecture du rapport et de délibérer sur le
fond de l'acceptation , on ) compta quarante-neuf voix réellement
présentes. Cette assemblée fut aussi Tune des plus imposantes
qu'on eût encore vues : outre que tous les membres qui la com-
posaient étaient revêtus du caractère auguste que donne la pléni-
tude du sacerdoce , elle avait h sa tête deux cardinaux , à la suite
desquels venaient neuf archevêques. Nous ne parlerons pas des
lumières qui brillèrent avec éclat au milieu de ces successeurs
des ap6tres ; le savant rapport qui fut fait en fournit une preuve
sans réplique , et l'instruction pastorale qui fut adoptée par U
très-grande majorité des prélats en transmettra aux siècles à ^enir
un monument k jamais digne d'éloges.
Le cardinal de Noailles fut nommé président *, et il rem-
< Ce prélat avait, comme Ton sait, approuvé les Réflexions morales;
et quoique sollicité depuis long-temps par le roi, par d*aulres person-
nes illustres, même par quelques-uns de ses collègues dans l'épiscopat,
il n*avait pu se résoudre à proscrire enfin ce pernicieux livre qu'après
qu*il eut appris, ou que le pape avait lancé sa bulle, ou que cette bulle
était déjà entre les mains du monarque : encore , dans son mandement
QUK Si
l uriice jusqu'ï h ileniière st^aiicc ioili
ce qui pouvait rendre celle «ssemblée si
de caudumnslion, oiaîl-il usé de beaucoup de iDénagemenl, D'aitribusDl |
aucune erreur porticiitière â cet ouvrage de lén^brel. Un délai tl e
cessiTcmcnl prolongé, joint h une conduite qui ne a'ftait pas monlrte.
toujours Bssti encmpte d'éqniior|ue, avait inapiré de la défiance t '
Louis XIV et A plusieurs prêiali. Oïl savait, de plus, qu'il s'éli
donné b de œallieurcasci préventions , s'imagïnanl qu'on ne pounufc-, J
Tait avec lanl de chaleur i'teuvre de rei-oratorieD que parce qu'il I'b- |
fsil approuvée, el que loul ce qu'on faisait, soit conlrc les parlin
de cet hérétique, Bail cooire leurs écrils séditieux, D'amil pour b
ultérieur que de l'iiumilier lui-même cl que de lui dire sentir ii^a
eontre'Coups, On conclut de laque, pour le détourner de prendiv f
quelque parti singulier el contraire ï la paix de l'Eglise, il fallait lit- '
cher de le (lÉclilr b Torcc d'égards et de bons procédés.
DotH ec dessein, on le mil A la létedel'osKiDbiée, quoique cet hai»< 1
neur apimrtlul de droii ii un autre prélat , revêtu de la même dignité. J
et doyen des cardinaux de France, ù M. d'Estréet, qui voulut bien, J
céder cl uc pnrallre pas aui séances. On lui laissa le dioît des me
bres qui devaient composer la commission, sauf que le roi lui Gt ci
naître qu'il déùroil que M. île Bisiy, évéquedeMeaui.rcitdu nombr* '
des coLUiuissaires, On touUrii que, pour compléter son choii, il appelât,, (
conire la rigle re^ue, un prélat qui n'était pas présent. L'auemblés i
voulut bien aecéUer encore à sa demande en unanl id séaaces à l'aiw j
cbetéchi^, tandis que la coutume les oToit Tuées dans le coi
Gronds-Augosiias, usage auquel on eQI souhaité ne pas déroger daut |
la circonstance.
La commission porta les égards plus loin encore^ Quand elle eut !
nrrClé sa résolution de proposer le projet de joindre ï la bulle une ,
instruction pastorale commune A tous les évéques de France, soit réu-
ni), Mil répandus dans les diocèses, alin qu'auimés d'un même lèla ^
contre l'erreur, ils parlassent tous aussi i cet f^ard le même lai^agg
nuprtsde leurs ouailles, et qu'aucun d'eux ne prêtai le flanc aux traitt '
cmpoiiouné) de l'ennemi, qui déjà s'agitait avec fureur, le cardinal da J
Noaîlletrut prié de se charger de compoKr cette iuilruction, et, a
raisons qu'il allégua pour s'en excuser, le cardinal de Rohan lui fit
oITre du lui prêter son nom et de signer ii sa place: L'instruction pasti>-
rale étant rédigée, on lui en lil part : il trouva que le style n'en était
pas asseï lulerncl : on le supplia de te rectifier lui-mCime et d'y mettre
toute l'aucliou qu'il tondrait ; il désira la Taire examiner par les théo-
logiens auxquels il avait coutume de donner sa conHaticc; o
laisMi la plus grande nicllllé : il ; Gl des cliangcmci» et des correcliona |
II.
30
350 QVK
lennelle et lui concilier la vénération et le respect ne ftit omis ^.
Le roi tonlut aussi que les prélats fussent tous trôs assurés
à MU gré, on tel adopta sans réserre ; il demanda que des copies de
crtte Instmelion fassent distriboéfs à tons les membres de rassemblée i
ces copies forent remises : il souhaita qu'on prit Pavis de théologtan
choisis dans toutes les différentes écoles ; on Tassura qn*on araft prèfCBtt
Mm intention sur ce point et qu'on réitérerait en sa présence s*ll le
dérirait.
Il eût été difficile de porter plus loin la complaisance et les égards t
cependant le cardinal ne se laissa pas fléchir.
(Tétait un prélat qui réunissait à de grandes rertos des qualités hi«
flnrmeffC prédenses; mais, il faut en confenir aussi, ind)n de piè»eiH
tkms contre les adversaires des Réflexions morales, qu'il regardait
comme ses ennemis personnels, il croyait qu'on loi tendait despiégei^
quand on lui parlait de s'élever contre le livre de Quesnel : entridné
par des conseillers perfides qui favorbaient la nouvelle doctrine, s«nh
vent il devint l'espérance, l'appui et même l'instrument des Jansénistes^
quoique néanmoins il ne partageât pas leurs erreurs ni ne voniftt jfr*
mais se mettre à leur léte : enfin , la conduite qu'il tint, depub ifa*H
avait eu fa maladresse d'approuver le livre futal, conduite pleine d'in-
conséquences et de contradictions , de faiblesses, de défiances et d'en*
létemens à contre-temps, influa beaucoup, sans contredit, sur les maot
déplorables qui long-temps affligèrent l'Église gallicane et la France.
* Le cardinal de Noailles ayant proposé qu'on retranchât de l'as-
semblée plusieurs sotennités importantes, que la piété et une prévoyance
sage avaient Introduites de temps immémorial dans ces réunions
célèbres, les évêques sentirent que les novateurs, toujours prêts à saisir
les plus légers prétextes, ne manqueraient pas de chercher dans ee
retranchement un moyen spécieux pour infirmer l'antorilé de i'i
blée et même pour ranéanrir, s'ils le pouvaient ; ils firent, en
quence, des représentations au roi, et Louis XIV gagna, en cette
bien , l'assentiment du cardinal : en sorte que le 21 octolire il y eat
messe du Saint-Esprit, communion générale, et que les prélats assis*
térent aux séances en habit de cérémonie. Ils prêtèrent aussi, le aBèase
jour, le serment accoutumé, dont nous croyons devoir rapporter Ici la
formule.
« Nous jurons et promettons de n'opiner, ni de donner avis, qn'H
> ne soit selon nos consciences, à l'honneur de Dieu , bien et conserva*
> tion de son Église, sans nous laisser aller à la faveur, & l'importnnitét
» à la crainte, à l'intérêt particnlier, ni aux autres passions humaines ,
V que nous ne révélerons, ni directement, ni indirectement , pour quel*
» que cause ou coîi^îdéralion, ni pour qncique personne que ce soitt
qu'il ne prétenJnit géuer eu ïutune fa^on Icc délib^raiions ni |
cumnianiler les voles particuliers : cV'Sl ce que rccuiiiiut eipreft- j
sânrnl le prûsident lui-même , Eoit par l'aveu posilif qu'il eii Si j
dp vive voix ' , suit plus énergiquemeoi encore par la conduil^
qu'il liât Oans l'assemblée i toutes les occusioiis décisives.
Les coniDiissaires désignés pour traeadler a>u vw\itM qu'ili ei- J
llmetaieal lt$ plui eanvenablei pour C aceepiat'm» de la bulle* s'
cupèreul , dès le 21 oclobre , & préparer leur rapporl. Ils s'.
semblaieiil presque tous les juiirs, et le cardinal de Noaillw I
utsisla irj^-frêquemcneDi !i leurs coiirérciices. Cependant leur tra-
vail ne fut prêt à être communiqué ï l'assemblée qu'après environ I
trois mois d'une application constante et laborieuse , preuve dob I
de rembarras o(i ils s'étaient trouvés i concilier la bulle avec la
vérités catLuliqucs et i en éclaircir les obscurités, comme le prj- ]
tendent les écrivains opposans , mais de la maturité avec laquelle I
ruieni procédé dans une affaire si sérieuse et du zélequ'ilf 1
liraient pour la cause de la foi.
pQ s'est étonné de la longueur du temps que ces commissa
iplojërent i composer leur rapport i mais l'élonnemenl cessera 1
sans doute si l'on considère qu'il s'agissait d'examiner la bulle
pour en pénétrerle sens, de vérifier si les 101 propositions co»- I
damnées se trouvaient de même dans les éditions relatées daus la ]
jugement apostolique; de laire k chacune de ces prnpusitiou 1
prise séparément l'application des notes qui y convenaient ta I
elles-mêmes et d'après la coDslitution ; d'i^ludier en conséque
k fond le volumineux ouvrage de l'ex-uratorien ; d'en bien sa
l'esprit, le sens; de lire une foule de mémoires, de brochures I
etde manoscriis adressés de 4ilférentes sourees aux prélats conlte j
la bulle, et d'y répondre d'une manière victorieuse. Quelque* i
proposiiiuns condaumées présentaient , si nous osons nous uxprt- |
■ les opinions parliculières elles diîtibérallons et résolutlogs prises en
1 la compagnie, ilnuu en tant qu'il sera permis par icclle. • Voyet
Collection des prucés-Tcrbnui des assemblées générales du clergé de {
France, tome A.'asKoibléeilc 1713-!A-
'LafltcBU, Hlst.de laronstil., 1. 1, p. )4e,édil. dtéejMém. pour
ecTT. Il l'hist. ecclés. pour le dii-liuUii^mc sitcle, tom. 1, p. 91, a* édil,
' Ces prtiais Furent le cardinal de Holian, cbeT de la commission; ds
Dcioiii et DrsmarMs, archevêques de Bordeaux et d'Aucb i Bnitlard
de Sillerr, do Blwy et de Derlliicr, évCque» de Boissons, de Mcaus d
-II' HloU
■Bfp'
Zi% QUE
mer aînsii une physionomie apparente d*onhodoxîe, il Cillait ci
montrer le Tenin ; d*autres avaient été prises presque mot pour
mot dans quelques écrits des Pères , il était nécessaire de déroîler
Tabus que Fauteur avait fait de ces textes , Fopposilion de sa dœ-
trine avec la doctrine des docteurs de TËglise. Enfin» les eomoris-
saires furent obligés de recourir aux vraies sources, à rËcritare
sainte et à la tradition , pour y puiser les vérités de la foi qii*ib
devaient opposer aux erreurs quUls avaient à combattre. 11 est ailé
de juger, d'après cet exposé, combien un travail de cette naune
devait être long , pénible, et demander de grandes recherches*.
Le 15 janvier rassemblée reçut dans son sein vingt-un prélats,
appelés de différens diocèses pour délibérer avec elle. Le cardi-
nal de Rohan commença le même jour la lecture du rapport de la
commission , qui occupa six séances consécutives, c Rapport dont
» la solidité, aussi bien que la netteté et la précision , est-il dit,
» dans le procès -verbal , ont découvert et mis en évidence les
» erreurs et le venin des propositions condamnées , et d*on livre
» qui , sous les apparences de la piété et de la vérité, est capable
> de corrompre les cœurs : par le même rapport, il a été prouvé
» clairement qu'il n'y a aucune des propositions condamnées qui
» ne méritât au moins quelques-unes des qualifications portées
» dans la constitution , et qu'il n'y avait aussi aucune des qualifi-
» cations qui ne dût être appliquée à quelques-unes des propo-
» si tiens ^. »
Les commissaires remarquèrent encore que comme la bulle ne
contenait que la foi de TËglise catholique, de même la forme dans
laquelle elle était conçue ne renfermait rien non plus qui fût con-
traire à nos libertés ; que ce n'était pas un simple bref du pape,
ni un décret émané du tribunal de l'inquisition , mais une pièce
revêtue de toutes les clauses et de toutes les formalités requises
pour en faire une constitution apostolique; que loin que le saint
père l'eût donnée de son propre mouvement , il y déclarait au con-
traire qu'il l'avait accordée aux pressantes sollicitations de plu-
sieurs évêques de France et aux instances réitérées du roi ; en-
fin, que le livre n'avait pas été condamné d'une manière vague et
^ Voyez rinslniction pastorale du cardinal de Bissy, i7SS , p. S5.
Ce prélat avait été du nombre des commissaires, etc.
> Gollect. des procès-verbaux des assemblées générales du clergé de
France, t. 6, p. 1256 et suiv.
giiK
:|J3
ilniiun sigraiiJ nombre
fï qu'il avait eus de le
i u dé lei'iui née, puisque le pu)ie
de pnipoeilioua pour moiilrp
ilélrir',
L'assemblée fui Irèa-sati^raile du rapport. On yjoignilla lecture
de la bulle dont on avait distribué depuis long-temps des exem-
plaires i tous les prélats, et le cardinal de Koban anDonçji en-
suite l'avis de la commission.
Cet avis, qui renfermait sept anictes, était que ■ l'assemblée
p déclarât :
• 1 * Qu'elle a reconnu avec one ettrénie joie , dans la consti-
> Inlion de notre saint père le pape , la doctrine de l'Ëglise.
• 2' Qu'elle accepte avec soumission et respecUa constitution
• VnigmilM Dei Filivt, en date du 8 septembre 1713, qui cod-
■ damne le livre intitulé : le Nouetau Ttttameni , anee det ré-
• tlezUmt mùraUt êur eltaque venet, etc.. et les cent une propo-
■ sitious qui en lonl extraites.
> 3* Qu'elle condamne ce même livre et les cent ime propos!-
t tioDS qui en sont tirées , de la manière et avec les mêmes qua-
■ liGcitioDs que le pape les a condamnées.
■ i° Qu'il sera fait et arrêté par l'assemblée, avant sa séparation,
^^mi modèle d'instruction pastorale, que tous les évéques qui la
iBCOmposenireront publier dans leurs diocèses arcclaconslîlution
1 traduite en français , afin qu'étant tous unis ii la chaire de saint
> Pierre, c'est^-dire au centre de l'unité, par l'unirormilé des
• mêmes sentimens et des mêmes expressions, on puisse non-
> seulement étouITer les erreurs qui viennent d'être condamnées,
• mais encore prévenir les nouvelles disputes et prémunir contre
■ les mauvaises interprétations des personnes malintentionnées ,
• dont OD a déjï vu les elîeis par des écrits qu'elles ont répandus
fcd>aE le publie depuis le commencement de l'assemblée.
• S* Qu'elle écrira A tous messeigneurs les archevêques et évS-
qoee absens qui sont sous ta domination du roi , et qu'elle leur
merra la constitution, un extrait de la présente délibération
• de l'assemblée et un exemplaire de rinalruetiou pastorale ;
> qu'elle les exhortera 1 vouloir bien s'y conformer et !i défendre
p il tous les fidèles de leurs diocèses de lire , retenir ou débï-
■ 1er le livre des Mftexlon* morala eitous les écrits faits pourn
idéreoie , sous les peines portées par la constitution ; et après
'Bit
' Bisi. de la cauliL Uulg., 1. 1, p. ISl.
9 qae la constitution aura été publiée» la faire enregittrer an
» de leurs officialités pour y avoir recours et pour éu% procédé
» par les voies de droit contre les contrev^ans. »
Dans les articles saivans , la commission vote une leUM éê ve-
merctmeot au pape, pour le « sèle qu*il a montré dai|n k
9 damnation d*un ouvrage d^autant plus dangereux qtt*OB y
» des expressions de rËcrilure et des SS. Pères pour maloriier lu
» erreurs qu*il renferme. » Elle vote de remercier aussi W ii de
la protection qu*il accorde à TËglise , et de son zèle nwntil à
extirper les erreurs. Elle est d^avis qu*on supplie Sa Mi^jealé de
donner ses lettres patentes pour renregistrement et la piiblioâlîea
de la bulle dans tout le royaume et pour supprimer, aoua lea pei-
nes accoutumées , le livre des Réflexiom vMralet , ainsi qae ims
les écrits faits pour la défense de ce livre *.
Ce fut le 22 janvier que le cardinal de Rohanlenninaln kelrn
du rapport et qu*il en donna les conclusions. 11 semhbil <|«*il ne
s*agissait plus que de délibérer sur Pavis des commiaaairce , el b
chose ne paraissait pas très-difficile , le rapport ayant répandu nn
jour si lumineux sur tout ce qui devait occuper en ee monaenl
rassemblée. Hais il s*était formé dans son sein un parti d^oppo-
sition , k la tète duquel s'était mis le cardinal de NoaiUes.
Les prélats engagés dans ce parti cherchaient le noyen d'é*
viter d'accepter purement et simplement la bulle . Ils oonaenlnienl
bien k proscrire les Réflexions morales , mais non pas comme In
saint Siège Tavait fait ^, prétendant non-seulemeni expliquer sa
i Voyez la coUcetion précitée, t. 6, p. 1357 et 1359.
s Dans une protestation qu'ils firent le 12 janvier. Us disaient i
c Nous sommet irès-èloignés de vouloir favoriser le livre des Réfleaiens»
> ni Tauteur; nous reconnaissons que ce livre doit être été des Tatirti
> des fidèles ; nous sommes résolus de le condamner et de le dèfiandrc
» dans nos diocèses. >
Cependant, soit qu'ils ne fussent pas toujours d'accord avec eux-
mêmes, ou qu'ils pensassent que dans le fond Touvrage de Quesnel,
quoique ambigu , quoique inexact et dangereux dans les expressions,
était néanmoins susceptible d*un sens partout orthodoxe, moyennant
quelques interprétations (hvorables, ils avaient résolu, dans unede lears
réunions particulières chez le président, « de n^acquiescer à l'instme-
» tron et ù Taccoptotion de rassemblée, qu*& deux conditions : la pre-
» uiièrc, que dans rinslruction pastorale on n*attribuerait aucune
» erreur, ni au livre, ni aux pro|M)&itions condamnées comme ejBtrmitcs
QDK
ui
eonslilulion , mail la modifier et eu limiter le mds. Dini celle
vue , ils saisireni avec empressemeDi roccssion de l'inslruction
pastorale dont il était parlé <laDs la condusion du rapport, pour
t^cber de Taire surseoir & l'acceptation , eapi^raut de parvenir du
moins à établir entre cette acceplalion et rinstruciion projetée
une relation lrës-caractéri»^e , laquelle restreignit eirecliiemeot
la bulle, (Ùi comme un aveu laïcité de l'obscurité qu'on ne pou-
vait s' empecherd'j reconnaître et servit amlieniiquement de preuve
qu'on ne pouvait l'accepter qu'upri^i l'avoir dûment expliquée. lU
ouvrirent doue l'avis et ils opinèrent tous , • qu'on devait alten-
> dre de délibérer «ur le Tuad de l'acceptation que l'insiructioa
> pastorale Tût en élut d'être lue et approuvée par rassemblée. >
Mais cet avi», adopté par ueur membres seulement ', Tut rejeté:
l'isieudilée arrêta qu'on cummencerail avant louteschoses par dé-
libérer sur l'acceptation , et renvoya la décision au lendemain.
Le jour suivant, 33 janvier, on recueillit les sulTrages. Les pré-
lats opposaus • prièrent l'assemblée de trouver bon qu'ils réser-
> vassenl ï opiner sur l'avis proposé par messeigueurs les coifr-
I^BÙssaires après que l'inslruaigu pïstocali; aura été lue dans
P^id u lliTt I la seconde, que l'acccplalion ferait viMblemenl rcilrlctlve
^cnrUe-méme, et relative ï celle niËme itnLructinn. •
Le cardinal de NaaiUci insista ptusieun Tois sur ces deui points. Il
y trouvait, en tSet, un eupédieut facile pour se mettra an large, et sa
dtHlvrer du reproche Klcbeux d'avoir approuvé une production digne
lies qualiGcaliont Us plus Tortes. Mais la bulle tlevenait ioulile dans
cri le b}polhé»e, n'ajant plus qu'un objet imsKinaire et supposé : tes
anciennes dispulel sur tt droit et U fnit eutsenl reparu de nouveau,
au grand samdule des fidèles; un ouviage réellemenil empoiscuné et
uieurlrier tM resté entre les mains des Ames pieuses, auiquelles 11
u'eilt pas été difficile de faire illusion sur la suppresaiou qui en aurait
été dite : o[i eOL (bumî aux ennemis de l'élise de iiouieltei aruMa
pour combatlre son iaCiillibililé dans les jugeœens qu'elle porte sur la
tens des livres, el le droit qu'elle 3 d'autoriser les uns et d'interdire
l'usage lies uulre»; euliu, le mal eill empiré de jour en jour, au lieit
de diminuer ni de ditparaStre enliéicroent.
* l^s prélats qui opioi-rent ainsi Turent d'Hcrvau, archevêque de
Tours; de Bèlbuue, de CIcrmont, de Noailles, Saaneii, de Latigle,.
Ucsmuréts et Drcnillet, «lequel de Verdun, de Laan, de Cbalans-iur>
Maille, de Séiiet. de Bouline, de Saint-Mulu el de Biivoune, que suiiil
11- tartiiuul de IVosiaii;^ arcbcvinue dv Paris.
356 QUE
» rassemblée. » Tous les autres prélals , au nombre de quarante,
y compris les membres de la commission, votèrent raccepUtioDi
et rassemblée changea en résolution Tavis des commissaires, dont
elle adopta les sept articles dans les mêmes termes et sons h
même forme que cet avis avait été conçu *. Ainsi, la constitution
Vttigenitus fut acceptée suivant sa teneur, dans toute sa force, sans
modification et sans restriction : il suffit de lire le procès-Terlial
rédigé sous les yeux de l'assemblée et signé de tous les acceptans
pour se convaincre de la vérité de ce fait, et par conséquent de la
fausseté des bruits contraires qui furent répandus dans le temps,
et que quelques écrivains modernes se plaisent à renouveler en-
core de nos jours ^.
En conséquence de la délibération prise par rassemblée, le
cardinal de Noailles, qui présidait toujours, pria le cardinal de
Rohan et les autres commissaires de vouloir bien se charger de
rédiger et l'instruction pastorale qui venait d*étre résolue, et les
lettres qui devaient être envoyées, soit au saint père, soit aux
évêques absens.
Le cardinal de Rohan avait prévu qu*il pourrait bien être chargé
* Voyez la Collection des procès-verbaux, L 6, p. 1260.
« L^assemblée délibéra... pendant trois séances sur Taoceptation de
> la constitution : nosseigneurs les prélats opinèrent avec une éru-
> dition qui prouve aisément que chacun avait travaillé avec la même
9 attention que s*il eût été seul chargé de cette importante affaire. •
Lettre de MM. les agens généraux du clergé de France à nosseîgneun
les prélats du royaume, en leur adressant le recueil des délibérations
de rassemblée de 1713 et 1714. Ibtd., pièces justificatives, p. 454*
3 II est vrai que quelques prélats, en très-petit nombre, avancèrent
dans la suite quMls avaient accepté relativement ; mais ils déclarèrent
en même temps qu'en acceptant de la sorte, loin de prétendre restrein-
dre la bulle , la modifier et en resserrer en aucune manière le sens, ils
n'avaient voulu que Texpliquer par le moyen de Tinslruction pasto-
rale; instruction que rassemblée n'avait elle-même résolue que dans
le dessein de « procurer une sincère exécution de la bulle, d'en fad-
> liter aux fidèles Tintelligence, et de les prémunir contre les mauvaises
> interprétations par lesquelles des gens malintentionnés tâchaient d'en
> obscurcir le vrai sens, » dans une foule de libelles qu'on n'avait cessé
de répandre depuis le commencement de l'assemblée. Voyez Hist. de
laconstit., 1. i, p. 163, et la lettre de l'assemblée aux évêques du
royaume. CoUcct. pièces justifie, pag. 449 et 450.
OUK 357
de Iravaillerà l'iiislpuclion pastorale; il enavail prt^pai'i; d'aToncB
les maLËriaui '. Nous avons dèjï parlé des égards pleins de défé-
rence qu'il eut !i ce snjet pour le cardinal deNiiaiitcs : il Taudrait
ajouter beaucoup encore à ce que nous avons dit, si l'on ue vou-
lait rien omettre en ee poînl ; mais le cardinal de Noailles avait
arrêté son plan de résistance, et, p<iur le malheur de l'Ëglise da
France, il y tint ferme jusque vers la Du de sa carrière, jus-
qu'en 1738, oti, écoulant enfin la voix de sa conscii'nce,
il y ramena le calme, en acceptant la constitution purenieut CI sim-
plement et en révoquant de cœur el d'esprit, comme il le dît lui-
même, tout ce qui avait été publié en son nom de contraire à cetts
acceptation sincère '.
Le 1" Février, l'instrudion pastorale étant prête, le cardinal
de Rohan la lut ï l'assemblée. Déjï ce monument du zèle el de
l'érudition des commissaires était connu de tous les prélats, ainsi
que nous l'avons dit : aussi la discussion n'en fut-elle ni longue
ni embarrassée. Les évéques qui avaient accepté la bulle lémoi-
gnèrent au chef de la commission et !i ses dignes collaborateun
• qu'on ne pouvait rien ajouter ï la vérité , à l'exactitude cl â la
^* tolidité de l'inslruciion pastorale; qu'ils ; avaient reconnu ,
B» chacun en particulier, la foi et la tradition de leurs Églises , et
Bt l'union qui avait toujours ^té si recommandable aux évéques de
- 1. France avec la chaire de saint Pierre et avec le souverain pon-
> lifequi la reniplit aujourd'hui si dignement; qu'on j avait pré-
> muni les Gdèles contre les mauvaises interprétations des per- I
■ sonnes malintentionnées , et qu'on y avait emplojfé des moyena
• IrËs-uliles pour empêcher les nouvelles disputes et pour con-
• server la liberté des sentimcns enseignés dans les dilTêrenles
• écoles catholiques '. •
Le cardinal de Noailles n'en jugea pas de même. 0"tii<l"6 )^
théologiens qu'il avait consultés s'en Tussent montrés conlens et
qu'ils lui eussent dît qu'il pouvait en conscience l'adopter, !k
peine eut-on lu celte pièce si digne d'éloges ut si propre ii lever
■ Voyet la lellre précitée des agem généraux, ibi J.
1 Voget » lellreà Benoît XIII, en date (lu 19 juillet lT38,elsoD
■oanclement du 11 octobre de la mfme année. Les Janséiiislcs se sont
étciés roricnieni contre ces monumrns de la soiiniÏ!»ion du cardinal,
malien vain, l'autlieoticilé et la sincérité en sont dcmonlrés.
' Collect. des procès- verbaux, etc. , eudroil cité.
Sâ8 QLE
tous les scrupules, qu'il déclara, avant d'ouvrir la déUbératMHl.à
ce sujet , que les prélats qui n'avaient pas été de Tavis ciiBmiii
touchant Tacceptatioa delà bulle, et lui, ne pouvaient opiiMr sv
rinstruction pastorale ; qu'ils se croyaient obligés de prendre «i
au Ire parti , celui de recourir au pape pour lui proposer Inirs dif-
ficultés et leurs peines , pour le supplier de leur donner an «Miyti
de calmer sûrement les consciences alarmées, de soutenir UlilMKlé
des écoles catholiques et de conserver la paix dans leois Églisss.
Il vauia cet expédient, qu'ils avaient désiré d*abord , dîsaiûl, et
toujours cru le meilleur S comme plus régulier, plus canonique,
plus respectueux envers le pape, plus conforme il la pratique dtt
évêqnes, des conciles; plus sûr enfin , plui utiU pour l'Édite ^
au bien de laquelle le concert entre le chef et les memkreê esf Imh
jours nécessaire. « Nous ne sommes point âifférens sur le i^etrmê,
> ajoute-t'il , n*ayant pas moins de zèle que tous , messieurs ,
» contre les erreurs que nous croyons que le pape a condamnées ^<
» Nous le ferons paraître en toute occasion , autant que nous le
9 devons : en un mot , nous n'aurons jamais , dans la suite de
> celle affaire, d'autre intention que de conserver la vérité, Vwité
» el la paix^. »
Ce discours , auquel on ne s'atlendait pas et qui sentait for
rembarras , la défaite et le défaut de franchise , étonna toute l'as-
semblée , aussi bien les prélats qui rejetaient la bulle et l'instruc-
tion que ceux qui avaient accepté l'une et se disposaient 4 voter
l'adoption de l'autre. Parmi les premiers, d'Hervau, archevêque
de Tours , voulut parler, sans doute pour réclamer contre une
partie des choses singulière ^ qu'il venait d'entendre; mais le car-
dinal lui imposa silence en lui disant très-expressément que
tout était dit pour lui et pour ceux du même parti, L'évéque de
Laon fit plus ; ayant mûrement réfléchi sur ce qu'il avait oui de la
bouche du cardinal , surtout concernant l'unanimité de doctrine
* Il avait donc oublié que, peu de temps auparavant , ses partisans
se trouvant réunis chez lui, il avait combattu fortement ce moyen,
disant qu'il était inutile; que le pape n'accorderait jamais les expli-
cations qu'ils avaient projeté de lui demander, et qu'il y aurait de la
mauvaise foi à lui en faire la proposition.
3 Bien entendu que ces erreurs, au moins la plupart, étaient, selon
lui, étrangères au livre des Réflexions morales, puisqu'il s'était si sou*
vent opposé ù ce qu'on y en fit rapplicalion,
^ Collection précitée.
p»nni tous les membrfs ilc rassembli'e, il en conclul (ju'il n'j
avaïi donc pas de raisons l6gitiniM de se sé|jarer de la luiijoriié ; '
et réiraclsDl, te 10 révrier, cinq Jonrs après la clôture de l'as-
semblét! , la signature qu'il avait donni^c d'abnrd il l'appui de It
déclaration du cardinal di'Noailtes, Il se réunit aux prélats accep-
lans , en signant le procès-verbal de la tn^me manière qu'eux l'ji'
valent signé.
Quant aux autres évéqiies, ■ il leur parut surprfnam i[u'on
■ pûl rejeter une linlle dogmatique sans intéresser In siib-
" siance de la toi (et tout e» sunienani qu'on avait la même doe-
• irine que ceux qui avaient reçu cette bulle}..... Ils ne pouvaient
■ non plusconcetoîr comment , sppôs avoir refusé le parti de de- ,
■anderdes explications un pnpe , après avoir soutenu que celle'
KVftne était inutile et pleine de mauvaise Ibî , après avoir dissiiadA
• IM Bilhérens de recourir a cet eipAtlienl, H. le cardinal do
^ Koaille« avait pu se résoudre it leur avis comme au parii le plus' '
a^rtf^iller, te plus canonique cl le meilleur. Hais ce qui frappa *■
t(*le plus , c'éWil l'érecLion d'un noureau corps dans ré|iisciipal ,
« semblait reconnaître un second cbeFet auquel un se son- i
^iketlaîl. Cette nouveauté ranima la vigueur des cvéques les plui
miftRés. Ils interpellèrent sur cela H. le cardinal de Rob»n, qu'ila
■s Staienl i leur ttle, ei lui demandèrent publiquement qu'on ' i
■ fefçilt les opposans ù se soumeltre citant ce qui s'éla'rt /
I passé de semblable dans l'assemblée de I GS3, i
• nocent X xTaii été reçue '. • Hab le cardinsl de Roban Qi Unt'l
par sonéloquencetouchanie, ses manières douces et pleines i
ménité, que tout se termina avec calme, etquchi proposition
évéqucs , dont le 7èle avait peine à se contenir, n'eut pas de su
Cependant, les quuranle prélats qui avaient accepté la bulle
approuvèrent l'instruction pastorale , et ils déclarèrent tous qu'ils J
la Teraienl publier dans leurs diocèses respeciifii.
L'assemblée termina ses séances le Sfévrier 1714. Onlutdan^ i
la dernière les lettres écrites au Saint-Père et aux Éréque
sens , ainsi que le procès-verbal et lus acics qui en Taisaienl putiei «j
Noua regrettons que les bornes de cet ouvrage i
permettent pa* de douner ici le sommaire de ces lettres. On y rC- I
marque pmoDI ce csriclère de droiture et de francbise , si dign#'|
dM prélits qui s'étsient dpnné ta
i
l de |iei
s et de fatigues, noQ-*'^
I ojrr: Ili*!. de In corutil. l
360 QUE
Mulement pour chercher la vérité et la présenter dans toni son
jour, mais encore pour ramener à l*unanimité ceux de leurs col-
lègues qui 8*en étaient malheureusement écartés , et qui persistè-
rent dans leur refus de se réunir *. Nous croyons devoir rapporter
du moins le discours que le cardinal de Roban prononça 4 ce
sujet dans la dernière séance. « Messieurs , dit ce prélat , avant
de vous rendre compte des ouvrages dont vous nous aves chaigés,
je ne puis me dispenser de vous témoigner, au nom de mcssd-
gneurs les commissaires, combien nous sommes sensibles à toutes
les marques de bonté dont vous avez bien voulu honorer nos
travaux ; ils sont trop récompensés : quelque flatteuse cependant
que soit Tapprobation que vous leur avez donnée , j*ose dire
que nous aspirions à quelque chose de plus. La droiture et b
pureté de nos intentions, notre amour pour la vérité, Tappli-
cation avec laquelle nous Tavons cherchée ; Thonneur de Té-
piscopat que nous avons toujours eu en vue, aussi bien que le res^
pect dû au saint Siège ; Tattention que nous avons apportée à
ne blesser aucune des écoles catholiques ; en un mot , les justes
tempéramens que nous vous avons proposés et qui sont les plus
propres pour rassurer les consciences qui ont pu être alarmées, et
cela en suivant exactement les règles et les usages de TÉglise
et Texemple de nos prédécesseurs, tout semblait nous pro-
mettre une unanimité toujours désirable et plus nécessaire que
jamais dans une occasion si importante. Quelle douleur pour nous!
Ce n'est pas seulement au nom de messeigneurs les commissaires
que je parle , j'ose parler au nom de toute rassemblée , qui ne
m*en dédira pas , et des sentimens de laquelle je crois pouvoir
répondre. Quelle douleur pour nous de n'avoir pu parvenir 4
cette unanimité ! Dieu Ta permis , il saura en tirer sa gloire ^. »
Les lettres au souverain pontife et aux évêques absens furent
approuvées , et les prélats acceptans signèrent le procès-verbal de
rassemblée '.
« On trouve ces lettres si intéressantes parmi les pièces justificatives
de rassemblée, collcct. tant de fois citée, p. 445 et suiv.
* Collect. des procès-verbaux, etc.
* Les signataires furent: le cardinal deRohan, évéque et prince de
Strasbourg ; de Gesvres, archevêque de Bourges; de Mailly, archevêque
de Reims; de Bezons, archevêque de Bordeaux; d'Aubigué, archevê-
que de Rouen ; Du Luc, archevêque d'Aix ; de Beauveau, archevêque
de Toulouse; Pcsmarêls, arcbc\ê(tue d'Auch; Loménie dcBrîcnne,
I
La bulle ayanl H& jcceplée ii Paris, de h mïiiiire qi»! m
ODS L'iconli'e , il s'agissait de ta fjjre a<'cppitr eiisuîie dans
pruviaces.
Déjà elle j était connue depuis plusieurs mois , au moins i
Évéqups, qui ea avaient reçu presque tous des exemplaires , pres-
que aussitôt qu'elle était entrée en France. Ils avaient eu loul k ,
temps d'en approrondirla doctrine , de consulter la foi et les tra- i
diiioDS de leurs Enlises, et de rurmer leur résolution : aussi, plui
de soixante &'ea étaient expliqués déjï très-expressément dau
des lettres paKiculières adressées !i quelques-uns de leurs col-
lègues réunis â Pariï, et ils n'attendaient plus que le résultat de |
l'assemblée pour publier la constitution , dans laquelle, disaient- '
ils, ils avaient reconnu la loi de l'I^lisc catholique.
Des dispositions si Tavorables étant parvenues aux oreilles de
Louis XV, ce prince, toujours animé d'un xéle éclairé pour le
bien delà religion, voulut s'en assurer pleinement, et quand il en
eut acquis toute la certitude qu'il désirait, il les regarda dés lors,
sinon coDime une acceptation prononcée dans toutes les formes et
suivant toutes les règles , du moins comme une décision résolue ,
et comme une preuve indubitable que la bulle n'éprouverait au-
évéquc de Coulances ; Ancvlin, évéque de Tulle i Bruslsrd de Sillery,
étCque de Solssons; d'Arcougfj , évéque de Vannes; Huct, ancien
f-véfiuc d'Avranchcs ' ; de Bissj, éiéque de Meaui; Bnciiurl, ét'^que
de Clermouli de la Luzerne ■ évéque do Caliors; du Rutubou, évéque
de Viviers; de Clermont-Tonacrre, éiéque de Langrrs; de Berlhirr,
premier évéque de Bioist de Crlllon, évéque de Vence; de Ctiarigny,
étéque lie Trojes; Fleuriau, évéque d'Orléansj de Cojlua, évéque
d'Auieire; de Camillj, évtquedeToul; de Bargedé, évéque du 14e-
fci'i; PonceUétéque d'Angers; Sabalhier, évéque d'Auiieiu: deGraun-
monl , évéqae d'Arétbuse et snlTrogaal de Besançon ; de Rochetionne,
évéque de NojDn; de Hérinville, évéque de Chartres; Turgol, évéque
de Séei ; Le NormanI, évéque d'Ëvreui ; d'Hatlencaurl, évéque d'Au-
lun; Le Pileur, étéque de Saintcsi de Sanzay, éiéque de Rennes; de
Crcvj, évéque du Mans; d'Hennin, dvéqucd'Alais; de Suînl-Aignan ,
évC'que de Beauiais ; de Grillon, éiéque de Sainl-Pons ; de Malezieui,
étéque de Lavaur; Pbélypeaui, évéque de Rlei.
Nous avons donné ci-deisas tes noms des prélats appcsoni.
■ Ce.i
pciii.i
1 la '
863 QUE
cnne contradiction de la part de la très-grande majorilé des pré-
lats de son royaume. Ce fut même cette considération particvÙèfe
qui rengagea à persister à vouloir se servir d'une clause impéra-
li?e dans les lettres patentes qu'il donna aussitôt qu'il ent reçn
le procès-verbal de l'assemblée , persuadé qu'il ne blessait pes en
cela les droits des évèques , puisqu'ils avaient déjà jugé, et qne,
loin de prévenir ou de gêner le moins du monde leur décision , il
ne faisait, au contraire, que la reconnaître, que la suivre, et qn^en
presser l'exécution, aussi urgente qu'elle paraissait devoir être
avantageuse. Telle fut en substancesa réponse aux représentations
que l'archevêque de Bordeaux crut devoir lui faire dans le temps,
sur la clause enjoignons , employée à l'égard des juges de la loi »
dans les lettres patentes.
Cet acte de l'autorité royale qui prescrivait l'enregistrement et
la publication delà bulle avait été rédigé le 14 février 1714, dans
le conseil , et avec l'avis des principaux magistrats du parlemeni
de Paris. Dès le lendemain, cette cour l'enregistra avec In consti-
tution, et tous les autres parlemens du royaume firent ensuite de
inéme.
Nous ne croyons pas devoir nous arrêter à rapporter ici , encore
moins à y discuter les réserves insérées dans plusieurs arrêts d'en-
registrement. Il est certain que ces réserves , dont les Quesnellis-
tes ont tant cherché à se prévaloir, n'étant , ou que des clauses
d'usage, ou que des refus d'approuver des décrets qui n*avaient
pas été reçus en France, ou enfin que des précautions pour pré-
venir des abus qui ne trouvaient aucun fondement solide dans la
bulle , elles n'en restreignaient pas réellement le sens. C'est ce
que disait le cardinal de Bissy, dans une instruction pastorale pu-
bliée en 1722 ; instruction qui fut hautement approuvée par
Louis XV, et vengée par un arrêt de son conseil contre deux li-
belles virulens, dont le contenu ne présentait, selon le monarque,
qu*un tisiu hideux de calomnies et de mensonges, çue des déclama^
lions injurieuses, non-seulement à l'auteur , mais au saint Siège et
à l'ordre épiscopal *. Après avoir parlé du mandement desqua-
^ Cet arrêt est daté du 23 mai 1733. Une des grandes plaintes des
Jaiiséûistes, dans leurs libelles contre Tinstruction pastorale du cardi-
nal de Bissy, était que ce prélat avait osé assurer que le parlement
n'avait pas apposé , dans Tucte d'enregistrement , des limitations ni des
restrictions vrdit-s et proprement dites du sens de la bulle. Voyez Mon*
lague. De gralia, t, 1, p. 454 et seq.
QUK 303
ranle et de l'um'edislieiucnt du pailfiiient ili! P;iria , ce cïnJinal
s'eiprimail ainsi dans son iDstructioD pastorale ; <> Que conclure
• de tout cela, i moint de vouloir tf tromper ou Irornper let an-
• Ires , sinon qu'on doit regarder ce que l'assemblée de 1714 u
1 rail la première en recevant la bulle, et le parlement eiiiuile en
> l'enregislrant , nan comme une retlrictioii mise ï la censure
■ de la proposition XCI ', mais comme une sage préouiion prise
I afin d'emp£cher qu'on n'«n abusii par une mterprélation eon-
• traire II »û» vrai lea», pour pouvoir dire qu'on donne alleinte ï
> la Gdâlilé qu'on doil auprince el i la pairie. ■ Or, si la réserve
emplojfée par les magiElnU louchanl la censure de h p^posiiion
précitée nereatreïguailpas vérilablement celte censure, combien
moins les autres réserves , exprimées le plus souvent en lennef
généraux et asses vagues, ponvaient-elles être considérées comme
de véritables restrictions du sens de la bulle ? Au surplus , res-
trictives ou non restrictives , ces réserves n'ont point empêché
l'Ëglise universelle d'iidopter le jugement du saint Siège comme
son jugement propre, ni le clergé et le roi de France de le re-
garder du même a'il et comme loi de i'Elot '. Hais c'en est déjà
trop sur un objet qui n'uU're plus aucun intérêt i nos rechercbe».
La teuie choM qu'il importe à tout Ddële de connaître, c'est si U
coiistîtulioD UnigenilM a élé acceptée de toute l'Eglise , et par
Gouséqueni si l'on «t obligé de s'j soumettre de cmur et d'esprit,
dans le sens qu'elle présente naturellement elsausaucune restric-
tion ; question sérieuse , sur laquelle l'histoire ne lais&e aucun
doute raisonnable, comme on va bientôt le voir.
Les évéques répandus dans les provinces du royaume ne lardË-
tenl pis k fournir k Louis XV une preuve convaincante qu'on ne
l'avHitpoint trompé louchant leurssentimenssincèresâl'éganldp la
bulle . Plus de aoiianie-dîx se hltèrent de s'unir il l'assemblée,
DU en adoptant son Instruction tout entière, parti que prit un Irèt-
gnnd nombre *, ou en se servant leiiuellement du ditposilif '
■ Nous nous propowns de relater ct-aprèt cette proposiliOQ qtd
Irailc de* eintmmunicationi injustes.
'^Vofit! le ptocèA-vcrhal de l'assemblée générale du clergéde Francs
de 17SG, t. 7, p. AIG cl soiv. de lu CMecL aouvenl cilâe.
* Louis XV auore, dans «a déclaration du A noùl 1710, que l'iiH |
KrucUun paalorale de l'astemblée de 1714 avait été aiUyptée juir plu* 1
lie ctMt cvitfue* de France. Itecueil dc6 nnéts etc., L, 4i p> AM. Vonet i
364 QLE
qu*elle-mème avdit arréié, el où éuient renfermés Uius les lermes
qui formaient la loi.
Ainsi, la conslitution se trouva acceptée d*une manière uoifonne,
sans modification ni réserve, dans plus de cent dix diocèses , pen
de temps après la clôture de rassemblée. Nous ne parlerons pas
ici de quelques nouvelles acceptations qui eurent lieu rannéesvi*
▼ante, ni de celles qui se firent encore dans la suite. Cen était
assez, sans doute, pour effectuer une majorité Traiment déci-
sive *.
Quant aux évéques opposans , six seulement se joignirent aux
huit de rassemblée , et ne publièrent pas non plus la bulle : ce
furent les évéques de Pamiers , de Mirepoix , de Montpellier,
d*Arras, de Tréguier et d*Angouiéme ; deux ou trois autres, c'est-
à-dire les évéques de Metz, de Sisteron et pendant quelque temps
seulement Tarchevéque d*Embrun , restreignirent en effet la cons-
titution, ou parurent la restreindre, en la publiant. Au reste, tous
les ^prélats qui rejetaient le jugement de Rome , soit ceux qui
avaient assisté à rassemblée de 1714, soit même, si Ton en croit
quelques auteurs , ceux dont nous venons de désigner les sièges ,
ne laissèrent pas de proscrire solennellement le livre des JR^/T^xû^iu
moraleSf excepté, parmi les premiers, Soanen, évéque de Senez
qui Favait d'abord proscrit , mais qui , se repentant bientôt de
cet acte de déférence envers le saint Siège, ne tarda pas à Texpier
par une conduite diamétralement opposée ; et, parmi les seconds,
de la Broue, évéque de Mirepoix, qui crut devoir laisser subsister
cet arbre de mort au milieu de ses diocésains.
On pouvait donc regarder dès lors la bulle Unigenittu comme
acceptée canon iquement , selon sa forme et teneur , par le corps
aussi la lettre adressée au roi par rassemblée de 1730 ; procès-verbal ,
tome 7, page 1076, coUect citée.
*■ Les Jansénistes n*en conviendront pas , eux qui soutiennent que
la vérité peut se trouver exclusivement dans le petit nombre. Mais leur
manière de penser à cet égard ne saurait se concilier, ni avec les ora-
cles des prophètes, qui nous peignent TÉglise comme une montagne
élevée qu'aperçoivent toutes les nations, et vers laquelle elles se portent
de tous les coins de la terre , etc. , ni avec les promesses de Jésns-
Christ, qui déclare que les portes de Penfer, c'est-à-dire Terreur, le
schisme, etc. , ne prévaudront jamais contre elle, ni avec Pidéc que
nous en donne le grand apôtre, quand il l'appelle la colonne et Coftpui
de la vérilêt clc,. etc.
t
QUE ses
^tscopal de rbglibc de Frnnre '. En efl'el, le nombre' des |)riM:iis
qui la traversaient à celte Opoiiuo, établissant ime miobridf ïi
faible, il Do pouvait prusciuer sous aucun point de vue rere-
vable une o|)pcisilioQ It^^iiimi-'ment susjieni^ive : ou ne dut ilune
le cousidérer que tous le triste rapport Aoi obstacles Tunestes qu'il
appariait i la paix de l'Ëgliseet de VièXal. Mais si celte Tériiâest
incanteslabli! pour te leoips dont nous parlons , c'esl-1-diru dhi
l'année 1714, combion n'acquit- ullc pas encore de force ï me-
sure que le nombre des dissidena diminua el que la buHo gagna
plus d'auiorité en France t En 17 JO, on ne comptait plus dans ce
riiyuumc que quatre ou cinq évfques qui s'Écartassent encore de
On s'éiounera peul-^ire que nouenc joignions pas iciï l'icccp-
tatiundcs évoques de France les acai-pliilions que firent , soit la
Stirbanne , par son décret du S mars 171 i ', soillcs autres facul-
tés du ibéologie établies dans le royaume , lesquelles suivirent
toutes de prËs cet exemple. Mais si l'on considî^rc que les prfr-
1res .quelque grande que puisse élrc leur scieitccdans ce qui coii'
rcrne la religion, et de quelque puids que soil leur avis dans les
inaiiëres qui regardent lu fui, n'ont cependant rei;u aucune auto-
rité de la part de nnlre divin législateur pour juger i cet égard ,
puisque, suivant rË<:riturc et la tradiliou, ce sont ]i.>s éréques
qui ont été établis par le Saint-Esprit pour gouverner t'Égliu de
Aieu, el que c'est ï eux seuls qu'il a été dit, dans la personne
ilesapûtres; Àlln, tme'gttfi... Celui ijai pou» icmile.m'^etnUe...
\'eici que je tuin avec l'aui juiqu'A la comommation du tiicle,
P-'atr^-iiite jusqu'l la fin du inonde, etc. , on sera forcé de con-
'Procès-fcrltal de l'assemblée du clei^é de France, del730, CoUecL,
% p. 1071.
* Voyc: la lettre adressée au roi par rassemblée de 173D, endroit
int beaucoup élevés contre ce décret, duns
leurs biiloirei, diucrlatinns, brochures de loute csjiècc : la Sorboniie
plIe-méme le méconnut iieodant quelque temps i mais, apréi douie
Dni eniiron d'un sommeil viiement agité, ce corps, si respectable
d'ailleurs, adliéra de nouveau i la bulle, et rmonnul, lurde trét-
•jraeti praicei, la rfrilé el In Minrérilc de cp même dôrrel. Uonlngne,
lie gialia, 1. 1, p. itO et 9ei[. Vo'jei aussi ce que disait !k cet égard
le dnjTfn de la Faculté de lliéolugic de Purii, dans l'asseroblée du
clercs lu 30 juillet 1791, ColIccUon, I, 7, ii. 1060.
31*
366 QUE
Tenir que c^est à k conduite des évêques y et à eHe seule» qie
nous devons faire attention par rapport à ce qui noua occupe ,
où il s'agit d*une constitution dont l'objet intéresse vériubleoieet
la foi*.
Au reste , les évèques français ne cessèrent de nUfier leur
adhésion à la bulle , soit en condamnant des productions dont les
auteurs s'élevaient avec audace contre le Jugement du saint Siège «
soit en demandant avec instance la tenue de conciles provinôant
contre ceux de leurs collègues qui montraient, par leurs écrils ei
leur conduite, le plus d'opposition à Tunanimité, soit en déaoft-
çant au roi les principes pervers, les artifices odieux, les
^ Les partisans du livre de Quesnel ne conviendront pas
avec nous de ces deux chefs. Les uns traitent la bulle Unîgeailua da
décret insignifiant, qui ne peut être regardé comme loi de disdpliiic^
ni comme règle de fol ; d^autres, et ils sont eu grand nombre, rangest
parmi les juges de la foi, non-seulement les pasteurs du second ordre
et les clercs inférieurs, mais encore les empereurs, les rois, les maps-
trats, les simples fidèles, sans distinction de rang ni de sexe. Les pre-
miers ont donc bien oublié ce que disait leur patriarche, quand fl
s^écriait que la constitution frappait d'un seul coup cent une vérité* ^
dont plusieurs étaient essentielles à la religion, 8* mém., averL, p. i3«
D^ailleurs, Clément XI y avait proscrit cent une propositions, comme
respectivement fausses,... impies, blasphématoires, suspectes dliè-
résie, sentant Thérésie..., hérétiques, etc.; donc sa bulle était un
jugement dogmatique, et concernait réellement la foi. Quant aux
seconds, il n'est personne qui ne s'aperçoive, au premier coup
d*œil, que leur système ne tend rien moins qu'à renverser la reli-
gion , en bouleversant la constitution que Jésus-Christ a donnée à
son Église, en y détruisant toute hiérarchie, toute autorité prépon-
dérante, tout ordre, toute subordination relative à la croyance. Ce
bystème est contraire à l'Écriture : « Est-ce que tous sont apôtres ?
B est-ce que tous sont prophètes? est-ce que tous sont docteurs?» écri-
vait saint Paul aux Corinthiens, épit. i , c 13, etc., etc. Il est con-
traire à la tradition, dont on peut voir les monumens dans les saints
Pères : il est contraire à la pratique de l'Église, dont le corps des pro-
miers pasteurs, soit assemblé dans les conciles, soit dispensé dam les
diocèces, a dit anathème à une foule d'hérésies naissantes, et cela sans
avoir consulté préalablement ni les ecclésiastiques inférieurs ni les
laïques. Au reste, il est aisé de remonter à la source de cette doctrine
désastreuse : De Domiuis, Richer, Calvin, Luther, Marcile de Pa-
doue, etc., en avaient posé les fondemens avant les Jansénistes.
Ql!K
307
net crimiDelks emplovil-eB pr le parti pour pervertir les iiiii>s
ei les entraîner duas la séductlgn , eic. Oa n'a qu'à parcourir les
actes (l'une Tutite d'asseiulilées du clergé de France , dans l'ou-
vrage que DDUS avunii ïoiiTeot ciié , i commencer depuis 1715
jusqu'i l'époque oli les troubles ne se firent plus guère Benlir ,
pour s'assurer du zèle que montrèrent coDeiamment nos premiers
pasteurs 'j. extirper l'erreur. Et quelle lutte u'eurcot-ils point b
soutenir penii an I long-iemps contre les parleiiiens, qui suppri-
muieot leurs nandemeus, se mêlaient de la doctrine, exilaient
les prélats, etc., etc., etc. 1
Mais c'en est assexpour ce qui regarde ta France.
Puisque c'était 11 qu'étaient nés les trouliIes, et que presqas
tous lesévèques de ce vaste royaume t'étaient levés avec lesiînl
Siège pour étoufler l'erreur, il suflisail donc , pour acliever d'y
porter les derniers coups, que les évéqaes des autres régions ap>
prouvasseuL par leur silence (toujours expressif quand il s'agit
de la fui , des règles des nia'urs ou de la discipline générale) ce
qu'iU savaient que le cbef de rÉjçliBe et leurs collègues résidant
sur les lieux agités avaient fuit d'une maiiiËre si publique cl »
t «tien Pelle pour terrasser l'hydre <,
^ 'Ce raisonnement, que nous imorrians appuyer sur l'aulorité d«
ftres, lur ce qui s'e^t souvent praliquÉ Jau» l'Église, et sur le scuti-
ment unnnûne des théolnfiiens orl1iodox(4 qui demandent, pour cofr-
dsmiicr infailliblrment l'irrcur, quelque chose de plusqu'unedélini-
tion du souverain iiontife parlant rs calhedrii, a encore son rondement
sur les promessn que lé^us-ChrisI a failei à son épouse. Ceci est al*
manireslG que les Quesiielli^^tes el leurs clirfs n'ont pu s'empèclier da
le recounaltre, au moins dans un temps. Écoulons leur palriarcbe,
parUnt du Pélngianisme dans sa tradition del'^llse romaine, 3< pan.,
(, iSO : I Le reslf des Églises du monde, dit-Il, n'ajaut point prit
e part A ces con lests lions, cl s'étant contentiirs de Toir entrer en
te les Arricains et In Gaulob, et d'attendre que le saint SKge ju-
)( leur dilTCrrnil : leur liltHre, ^Maitd it n'ji aurait rien de plat,
U tenir iiai ifwi coniailerHOil g/«trai , l(^el,}oitil an Jngtmait
^ laint SUge , forme u«« déeiilon qu'il n'at pas permit de ne paÉ. 1
■■•■riiTA ■ Scoiitons encore un rie «es fidèles disciples : • Dèt que l'&i I
niflise gilticine, on qnclquc autre Ëgllse, a accepté une iléd>ïmi dé J
> Rome, et ipie In imlmi Éjllus ne réclamenl point, maii demearvnt ■
■ dam U tiUiice, celle décision devient infaillible, comme H c'était cHlA
L)i d'un coDCik' général , boit qu'elle regarde un iwîntde docirini'.
368 QUE
Cependant , malgré la suffisance de leur silence approbatîf ,
les évoques étrangers au fover du mal ne s*en tinrent pas tous à
celte mesure. Soit qu*ils craignissent que le venin de rerreurne
se fût insinué déjà furtivement au milieu de leurs ouailles, on
qu^ils voulussent Tempécherd'y pénétrer de quelque manlèreqne
ce fût, dans la suite ; soitqu*ils eussent seulement en vue d*édaîrer
de plus en plus les fidèles confiés à leurs soins , en leur détail-
lant ce qu'il n*est pas permis de penser, de croire , encore moins
de soutenir sur beaucoup de chefs , un grand nombre crurent de-
voir publier la bulle Unigenitus , ou en autoriser la publication
dans leurs diocèses. Nous pouvons citer en preuve TEspagne, le
Portugal , TÉtat de Gènes , plusieurs Églises d'Allemagne , les
Pays-Bas, etc. Tous les autres, sans exception, reçurent la oon-
slituiion avec respect, y reconnurent la foi de rÉglise, j adbéiè-
rent purement et simplement , et pas un évéque en commnnioA
avec le saint Siège ne fit entendre nulle part, hors de Francei la
moindre réclamation à ce sujet. '
Qu'on ne dise point que ceci est une allégation dépourvue de
fondement. 11 y a près de cent ans qu'on a reçu en France des té-
moignages authentiques qui alleslent avec énergie ce que nous
venons d'écrire, du moins pour tous les évéques de l'Europe, sans
presque d'exception ^ Nous désirerions que les bornes de cemé-
B qu^elle ait pour objet une règle de morale.» Lot à un archevêque, p. 17.
L'abbé de Saiiit-Cyran , cet ami inllmc de Jansénius et son apôtre
sélé en France, s'était expliqué déjà sur ce point avec beaucoup de
force, dans son fameux Petrus Aurelius^ part. 1, pag. 98 et 137.
Enfin, Qucsnel était si convaincu de celte vérité, qu'il s'écriait, dans
son .septième mémoire, avertissement, page 93 : « Les faiseurs de mé-
> moires nous assurent qu'elle (la bulle Unig.) a été reçue partout :
» maiss*imagineiit-ils qu'on les en croira sur leur parole? on leur en
» a déjà demandé les preuves, on les attend ; et, pour leur épargner
» une partie de la peine, on les dispense du soin d'en faire venir les
B aticslalions de l'Asie cl de l'Amérique. Pourvu qu'ils nous en don-
» nent de toutes les Églises de l'Europe, on les quittera du reste. •
Aln.s', selon l'exprosslou d'un propliète, notre salut nous vient de nos
ennemis mêmes, saluiem ex inimicis tiosivis. Mais bientùl les Jansé-
nistes prouvèrent la vérité de cette maxime sacrée : l'iniquité s'est
démentie elle-même, mniiita est iuiquUas sibi; car ils ne lardèrent pas
Ajknir un langage bien différent de celui que nous venons de rapporter.
i Voyez Témoignage de l'Église universelle en faveur de la bulle
f QUE 309
muire nous pei'>iii:^s«ut ilu rapiiTirier ici ces monuineiis [iri'vieus
lie rndhésion explicite pi de la foi de presque tous les premier»
pasieurs- On ; trouT«rail une preuve complète de leur xèle k reje-
iiT le IWre des Réflexion» meraln ei les cent une proposiiîoits ex-
traites de ce livre , de leur unaDiinitë à recoonattre dans la huile
uneloi îrrérorroable ile l'élise universelle , de le jr accord parrait
i la regarder comme un jugemeoi dogmaiique, auquel loul Siltla
doîl uue soumission enlicre d'esprit et de cœur. Plusieurs de ces
évéques râruUient d'une manière aussi victorieuse que pleine
d'énergie, dans leurs aiiestationg d'acceptation, les calomnies par
lesquelles les partisans de l'erreur accusaient , soît la bulle d'être
ubscure , incapable d'éclairer l'esprit ou comme prescrivant dci
vûrilés sacri^s , soit les prélats étrangers de l'aTuir reçue sans
eiamen, uniquement conduits par l'opinion de l'inraillibililé du
pape *. Mais le fait devint en peu d'annéessi public; il s'antioui,'a ,
Uuigcnilus ; Montagne, De gratia .1. 1 • p. SOS et sequent. ; Inslnict,
pnsl. du cardiual de Bissy, t7a3 ; second averllsicmcnt de Mïf l'i^véquc
de Scâssous, etc. Les pièces originales rureul déposées daus la bibllo-
Ihi'que du roi.
■ Ou peut voir sur le premier clief d'accusation ce que le sacri> col-
lège des cardinaux écriviiil, te 16 novembre 1716, au cardinal de NooiU
les : I Le sens de la bulle est clair ; plie est une censure cipresse des
• erreurs anciennes ou nouvelles; bien loin do combattrcaucune vérité,
I elle ne donne aucune atteinte aux senUmens qu'il est permis de sou-
• tenir,,. Ce n'est que par la plus atroce eaJomnie que des enl^ns de
■ perdition ont pu répandre que la bulle aOtiiblil tes points capitaux
t de la religion et les plus louables pratiques de la dUcipttne, etc. ■
Quant au second chi'f d'accusation , nous ne rapporterons que ces pa-
roles eairaiies de la k-IIre de l'arcbcvèque de Corcyre A l'évéque de
Nîoie^, en date du 13 décembre 1731 : • C'est une udic?usc calomnie
• que nous font ces novateurs, lorsqu'ils osent avancer qu'excepté lu
' rlerge de France, les évéques des autres Ëglîscs n'out pas même lu
• la constitution, et que si quelques-uns l'ont lue, ils ne l'onl point exa-
• mince avec eailtntioH qu'il fallail, parce que, croyant pour la plupart
' que le pape est infaillible, ils ne se donnent pas même la peine de
> lire ses décrets,,. II n'y a que l'Ivresse de l'Iniquité et du mensonge
• qui puisse vomir de telles accusations. A'dhj arona lu la «onititu-
• lion . tl HUHi rai-on* eiamtnie avec tain,.. Nous avons reconnu ipie
• ceUe bulle est établie sur la fcmielé inébranlable de la foi, qu'elle
■ brille de l'éclul que lui donne le témoidnagc de la doctrine apustoli-
• que,,. Nous réprouvDus Jauséuiusvt Qucwwl; uoos ddteitoai kura
370 QUE
si nous osons le dire ainsi, avec des caraclères si évident, que kl
^uesnellisles, d^abord si hardis à défier fièrenient leurs «dTenaîrei
d'en fournir la preuve , ne tardèrent pas k se voir obligés de Ti-
vouer, de s*en plaindre même y'et de recourir à des raisoaaMMK
recueillis chez les hérétiques anciens , raisonnemeiis mille fois
anéantis , et qui tendaient à renverser , soit les promesses fini»
par Jésus-Christ à son Église, soit une règle de foi reooime de
tous les siècles, la seule même qui soit indistinctement k le portée
de tous les fidèles. < Tout le monde, s*écriaient-ils dans une mvl-
> titude de productions plus ou moins lugubres, toui le wumiê m
» range ai^ourd'huiducâtéde la bulle,.. Dieu, par un terrible ju-
» gement, a permb que Gément XI ait donné sa constitotioii , et
> que les évéques, en punition de leur peu de zèle pour les inlé-
» rets de Dieu, niaient pas eu, les uns assez de lumière, et les au*
■ très assez de courage pour la rejeter... Les Mçueê éÊrangert
» l'ont reçue ^ , Le nombre des acceptons est si grand , qu*il y a
> lieu de trembler et de craindre , à la vue de la séiuùiUm çM'
» raie qui s*opère aujourd'hui *, Jamais le danger de la sédacUon
» ne fut plus grand pour les fidèles., danger du c6té des sédne-
» teurs, parce qu'ils sont en grand nombre... Si Ton jetteles yeux
» sur les pays que TËglise occupe , comme Tltalie , TÂllemagne ,
» la Pulogne, FEspagne , le Portugal, la France et quelques Ëtats
» voisins, il s^élève de toute part des vœux pour la bulle ^ três-pen
» contre. Le parti des opposans , des hommes fidèles k suivre la
> doctrine enseignée et crue avant la fatale bulle, se trouve réduàl
» à une poignée '. > Les évéques de Senez et de Montpellier ne
firent pas retentir des lamentations moins déplorables; mais ils se
rejetaient sur l'avènement très-prochain du prophète Êlie qui doit
rétablir toute chose , et ils s'appuyaient sur les allégations par
lesquelles les Donatistes cherchaient autrefois à miner la visibi*
lité et Tindéfectibilité de l'Église.
On nous dispensera de faire ici des réflexions sur ces gémis-
«
» sectateurs... Nous acceptons la constitution Unigenitus avec la pins
■ grande vénération qu'il nous est possible. Anathème à ceux qui sont
t d*un sentiment contraire. •
^ Entret.^ur la Gonstit., pag. hh*
' Pratique pour les amis de la vérité, pag. 8.
* Entret du prêtre Busèbe et de Tavocat Théophile, pag. 58 ; Entret.
d*nn jésuite avec une dame, pag. iOL Voyez encore Réflexions soc*
cinctes sur la constiL , etc.
I QUE 371
lemens ei cps plaipies : l'aveu lormel (]ii'on y irouTe faii le
triomphe de la bulle. Quant aux moyens emplojés par les princi-
paux rliefs du parti el par une foule de leurs adliérens pour ilayer
leur résislanee ï la voix connue de l'Ëglise onlière, on s'aperçoit
asse» qu'il n'j atait que le désespoir de voir leur cause entière*
ment perdue qui eût pu les engager i, recourir ï des armes sî
(évidemment mauvaises. El combien ne falbli-il pas que ce déses-
poir rdi grand pour inspirer ï l'évCquc dcRenet celle proposition
krange : • Notre appel (de la bulle L'iiigenilut au futur concile)
• ïubsiste el est légitime, quand il serait frai que l'Église au-
• rait parlé dans le jugement rendu sur les cent une proposi-
• lions * ! > Et celte autre non moins rËvnlianie, ob, après avoir
Énoncé qu'il parlait de eantlilaiioni rfru« *■( approuvée* par toute
VÈsUie et de jugemeKt rendus par 1m emcitei généraux San* la
farmê ta plut eanoniii\ie, tur dei livres, des ferit» et de» pmpoii-
lluns dei auteuri, il s'écriait : » C'est de tous ces jugeniens dont,
> en suivant l'esprit de l'Ëglise, on a souvent appelé, et dont on
• peut appeler'. ° I.e principe d'oii découle une doctrine si af-
freuse el les coDséqaencea qui s'en déduisent tout naturellement
sautent aux jeux et ne demandent de nous aucune réfutation. En
cITct, si l'Ëglise n'a pas reçu de son divin fondaieur le pouvoir do
juger infaillibleaieHt t)u sens des livres, des ècrit£, des proposî-
lions, comment a-t-clle osé tant de fuis dire anatbèuie ï des héré-
siarques, i des hérétiques, ù des novateurs, ï cause de la doctrins
renfermée dans leurs ténébreuses ëlucuhrotians? Pourquoidéfend-
elte à ses enlans, sous peine d'excommunication, de lire ces li-
vres et CCS écrits pernicieux? Quel droit a-t-elle de déclarer que
la doctrine revSiue de telles ou telles expressions est orthodoxe
ou hétërodoie? Et alors quel sens donnera -t-on i ces paroles di-
vines: Alleî, eiueigae:,.. Quivom feoale m'écoule, et quSvau* mé-
prise me méprite.-. S'il n'écoule pot l'Éfflite, qu'il mil pour iii>iii
comme unpaXenet un publicain... Les porte* de F en ferne prévau-
dront pas contre elle fSaml Paul aurait-il eu raison d'appeler aussi
l'Ëglise (a evlonne el l'appui de la vérité? Uais laissons li ces sys-
tèmes qui contredisent t'berîture et la pratique constante des
si^les chrétiens; ils tombent d'eux-mêmes et décèlent l'esprit
hérclique, ou il n'en fut jamais.
t Mon
iibrégé o(i Toi
n pour juger M, de Seivt, jing. 3,
incompC'icnce du ci
cit'Hin
872 QUE
La bulle se trouva donc acceptée par le corps des premiers pas-
teurs dans tous les pays connus de la religion fort peu de temps
après qu^elle eut été envoyée à toutes les Églises pariicolièrn.
En effet» la France, où les troubles s*étaient élevés, Tavait reçue
d*une manière solennelle ^ et presque unanime ; TEurope avait
fourni des témoignages authentiques de Tacceptation du collège
des cardinaux et de celle des patriarches, des primats, des métro-
politains et des évéques de leurs provinces ; le reste du monde ca-
tholique s*était tenu dans une attitude silencieuse et tranquille,
laquelle désignait un consentement tacite, également favorable à la
constitution et accablant pour Terreur ; plusieurs conciles avaient
publié des décrets également forts et énergiques *, et nulle part,
hors des limites où le mal avait pris naissance, on n*avait entendu
le moindre murmure émané de la bouche d*aucun évèque en
communion avec le saint Siège '. Un concert si parfait entre les
* Quand nous parlons ainsi, nous rapportons un fait incontestable;
mais nous sommes très-éloignés de Youloir insinuer par-lft qu^il soit
nécessaire que Tacceptation du corps épiscopal, même des lieux où
Terreur a fait entendre ses premiers accens, soit solennelle, pour que
les bulles portées par les papes contre cette erreur puissent devenir
des jugeroens deTÉglise universelle. Nous connaissons les plaintes que
Clément XI fit avec justice , au sujet de quelques expressions un peu
fortes échappées sur cet objet à Tassemblée du clergé de France de
1705, et les explit^tions que le sainlpère demanda aux prélats qui
avaient assisté à celte assemblée ; et nous disons volontiers avec le
savant évêquede Meaux : Quocumque modo fiai ut Ecclesia comentiat,
transacta plané res est ; neque enim fieri potest unquanif ut EceUiia
Spiritu vetHialis instructa, non repugnet errori, Defens. déclarât
deri gallic., 1. 8, c. 2.
' Nous parlons du concile nombreux tenu à Rome en 1735, par
Benoit XIII; du concile d* Avignon célébré, la même année, par les
prélats de la province ; du concile d'Embrun , où Soanen, évéque de
Senez, et Tun des chefs des appelans , fut solennellement déposé en
1727. Voyez les actes de ces deux derniers, ainsi que les mémoires
pour servir à Thistoirc ecclésiastique pendant le dix-huitième siècle, et
Montagne, souvent cité, t. i, pag. 3i^2, 390, 400.
* «Les évéques étrangers rendent le même témoignage, sansqu^il
» soit possible aux opposans, dont on connaît le zèle pour accroître et
» fortifier leur parti, de trouver hors du royaume un seul suffrage en
» leur faveur. » De Vintimille, arch. de Paris, Instnict past. du 27
septembre 1729 ; vie de M. de la Salle, liv. 4» chap. I, art. 2, à la fin.
premiers p&slcurs et leur clief annonçait sans doitic la voix
l'auturîté sacrée que ii^us-Clirisl a chargée Je l'enseipemeiil, et |
à lai)uelle il a conlié le puuvuîr dn lermiacr en nouveraioe toi
les cODiesiations qui s'élèvent parmi les fidèles louchant la doo- '
Irine. Ce Tul donc avec raison qu'on donni dès lors t la tiiill* |
rnigenitiii les titres de jugement a>cuuiénique', de jugement de •
nî^IjUseunirerselle', de jugement dogmatique ', de jugement dé- ,
finitifet irrcformable '. La cause fut donc entièrement finie.
CependunilesQuesnellistesne la regardèrenipas comme terminée:
ils cuntinuèrent écrier hautement, et contre la constitution consi-
dérée dius sa doctrine et dans sa Forme, et contre la manière dont
elle aTuit été acceptée, soit en France, soit dans les paya étrangers.
Noos n'entrerons pas ici dans la discussion de leurs sophismes ",
nous contentant de dire avec une assemblée nombreuse de pré-
lats que, " dès que le vrai fidèle voit le corps des pasteurs uni au
> chef fermier une décision qui intéresse la Toi ; dés qu'il roit ce
• corps respectable, qui parle au nom de Dieu et qui est assisté
* Rapport de t'Cvéquc (le Miiies i l'assemblée géuérale du clergé de
France de 1730.
* Lettre delà même assemblée au roi. Voi/e: le procès- verbal,
Collecl, t. 7.
■ I lin reconnaissant, eommc nom l'aroiu foujoun retonnu, que
■ la constitution Uniitenilus est un jugement ilogmatïqne de l'Egliu
> uniiKrielk, ou, ee qui retient au même , un jugement irréfomutbla
• de cette même Ëglise, en matière de doctrine, nous déclaron<, avec
> le conieniln poolire Benoit XIV, que les rèrraclaircs h ce décrel sont
■ indignes de pailiciper aat sacremcns , et qu'on doit les leur refuser ,
■ même publiquement, comme aux pécheurs publics. • Eiposllion sur
les droits de la puissanc« spirituelle, extraite du procés-ierbal de l'a»*
semblée du clergé de France de 17S5. Vogei De l'aulorilé des deut
puissances, i. 1, pag. ifii et suiv. , Ut%t , 1701 , où ce passage est
' CoQcilium cberodunense , capui !, De constîlulionlbuc aposto-
licis. Voyct aussi les autorité» citées ci-dessus, pag. 308, note 1".
> On peut consulter sur cet objet les averlissemens de H. Languet,
■rcîievéquc de Seus ; rinilmcl. pastorale que M. de Tencin, archeièque
d'Embrun, publia en t7!0, tvr tu jugemena définitifê de l'Égtùe nui-
itrsclle, et lur ta lignatare du formutaiFe .* la lettre dont nous allons
fournir un texte inléres>anl i le 1" ïolumc du Traité de la grâce, de
Montagne ; De l'aulorilé dci deux puissances, que nous venons de citer,
il. 33
374 QUE
> d*eii haut, exiger la soumission et prescrire Tobèissanoey il ne
• balance point; on a beau lui dire : une partie de ces pasteurs
» n*a pas prononcé par voie de jugement ; les autres ne sont pas
» unanimes dans le motif de leur décision ; c*est rinfaillibilité
» du pape qui a déterminé ceux-ci ; Texamen de ceux-là n*a pas
> été suffisant ou il n*a pas été juridique ; il est à craindre que
» leur décision, par Tobscurilé des propositions qu*ils censoreDi,
» ne donne lieu de confondre la vérité avec Terreur ; tous ces dis-
» cours n^ébranlent pas sa foi et n'affaiblissent point la confiance
» qu*il a dans les promesses de Jésus-Christ. Il Toit Tunité dam
» le corps des pasteurs, et le point qui les réunit est celui qui fixe
» sa croyance ; il sait que c*est à cette unité qu*il est dit : C«tei
» qui wms /coûte m'écoute, etc.; il ne lui en faut pas darantage ; il
» n*examine point comment le jugement a été formé, ni les difié-
» rens motifs sur lesquels les pasteurs ont pu appuyer leur déd-
» sion ; il lui sufdt qu'ils aient parlé pour qu'il règle sa foi sur
» leurs enseignemens ; il ne s'alarme point des périls qu*on Teut
» lui faire envisager ; il sait que celui qui a promis son assistance
> aux premiers pasteurs saura les garantir et lui avec eux, et que
» la simplicité de sa soumission fera toujours sa sûreté comme la
» promesse de Jésus-Christ fait la leur. De quelque manière^ disait
» Bossuet ^, que r Église donne son consentement, l'affaire eêt tout-
» à' fait terminée; car il ne peut Jamais arriver que V Église, gou»
» vemée par l'esprit de vérité, ne s'oppose pas à V erreur. Dieu,
» dit-il ailleurs ^, sait tellement se saisir des coeurs, que la mine
» doctrine prévaut toujours dans la communion visible etperpétueUe
» des successeurs des apôtres '.
* Defens. déclarât cleri gallic., 1. 8, c. S.
s Deuxième instruction pastorale sur les promesses de Jésus-Christ ft
son Église, pag. 76 et suiv.
* Lettre des cardinaux, archevêques et évêques assemblés extraordl-
nairement à Paris par les ordres du roi pour donner à S. M. leur
avis et Jugement sur un écrit imprimé qui a pour titre : Consultation
de BfM. les avocats du parlement de Paris au sujet du jugement rendu
I Embrun contre M. Tévêque de Scnez, page 9, édition in-4*. Cette
assemblée se tint en mai 1728 ; il s'y trouva trois cardinaux, cinq ar-
chevêques, dix-huit évêques et cinq ecclésiastiques nommés à des
évèchés. Les constitutionnels, dignes émules des Jansénistes, ont re«
nouvelé la plupart de ces objections futiles contre les bulles de
Pie VI,
Pffyie des er
QUE 8:
■i ecmlatuuéti rfffni les lt^/le.rioiit moTaU».
Il serait Irop long el peat-étre inulile d'entrer ici dans le détail
des nombreuses altéralions que l'auleur de ce livre pernicieui; a'j
est permises dans la version du leite sacré : on a ratnpld plus
de trots cent soixante passages ait il s'est élnigné de la V jlgate ,
dans les Actes des apûtres , les Éplires canoniques et l'Apoca-
lypse '. D'ailleurs , il suflil rie consull«r le dispoEiiiF de la bulle
t'njfenifui pour voir en général â quoi l'on doil s'en tenir sur cet
Mais si l'on vetit savoir dans quel esprit notre eX'Oralorien ■
bili ses Réfle^iùnt, et par conséquent quel sens il convient de
donner ï ses expressions quand elles paraissent ambiguës cl lais-
ser entrevoir quelque doute sur ses vrais sentimens, il est néces-
saire de se ressouvenir que , comme Jansénius n'avait entrepris
Kon rameui Aagaitin que pour lier plus étroitement le Ejstème de
BiiiDs, le mettre sous un jour nouveau el plus séduisant*, de
même Qiiesnel n'eut pas un autre dessein dans ses Réflexion» m»-
ralti que de Taire revivre les erreurs de ces deux novateurs dans
les points les plus essentiels et que d'en infecter les Gdèles da
toutes les conditions , s'elTorçanl de mettre ces mêmes erreurs h i
la portée di's plus sîinplps , el de les leur présenter sous les de-
hors hjpocrites de la piété en apparence la plus sincère elln plut
louchanie. C'est ce que démontrent clairement, eoii l'alTectioii
constante qu'il eut pour l'éïffqtie d'Ypres et te chancelier de l'U-
niversité de Louvain , l'engagemeni qu'il svait pria de consacrer
à leur défense ses talens et ses veilles, l'admiration qu'il témoi-
gna dans une foule d'occasions pour leurs œuvres connues, l6
EËle qu'il ne cessa de faire paraître pour leur doctrine * -, soit en-
core la guerre qu'il soutint jusqu'au bout de sa carrière pour dé-
fendre le parti contre les puissances et contre les tliéologicns or-
tbodoxes, écrivant continuellement , encourageant la plume des
siens, révisant les productions de plusieurs, cnlretcnaui, comme
nous l'avons dit plus baut , des correspondances soutenues dans
les cours souveraines, duns les mtisons religieuses, auprès de»
< t'ojif: le p. Qucsnel séditieux cl hËrétiquc dans ses Iléfleiioai «ir
le nouveau Tralamcnl, pag !&! cl suiv.
* Voyei l'article iuaimvi.
^ Cuuiu (JuesQcU,, pag, 107 cttcq-
876 QUE
parlemens, etc.; soit, enGn, les aveux réitérés de ses propres
disciples *» les reproches que lui fait Clément XI dans sa coDsiita-
tioD , et la doctrine plus ou moins équivoque, disons mieux, plus
ou moins ouvertement janeénienne , qu*il enseigna dans ses Ré-
flexions morales et dans presque tous ses autres nombreux écrîu.
Mais, plus habile dansTart du déguisement que ceux qa*U avait
choisis pour ses maîtres , Quesnel sut aussi mieux s*envelopper.
11 faut, pour nous servir de Texpression du souverain pontife,
percer Tabcès et en presser fortement le hideux dépôt, si Ton
veut en faire sortir tout le poison. Jamais novateur ne fut peut-
être plus adroit à manier Tarlifice , à gazer plus subtilement ce
que sa doctrine contenait d'odieux et de révoltant, à donner k ses
erreurs un air plus spécieux de lumière et de vérité. Son style
était plein d*une douceur, d'une onction , d'une éloquence et de
charmes qui entraînaient. Souvent le fiel coula de sa plume , paré
des mêmes couleurs qui ornent le vrai zèle; et les maximes
fausses, erronées, séditieuses , se glissaient presque impercepti-
blement au milieu de maximes saines , lumineuses , enseignant la
perfection. On ne s'étonnera donc pas si le livre des Réflexûms
morales^ composé avec tant d'art et d'ailleurs vanté et colporté
partout avec un zèle incroyable, eut long-temps beaucoup de
vogue , ni s'il séduisit un grand nombre de fidèles des deux sexes.
Ce qui surprendrait davantage , si l'un ne savait pas que l'héré-
sie ne connaît point de frein , c'est la hardiesse avec laquelle
Quesnel osa enchérir sur ses maîtres dans la carrière de l'erreur.
Prévoyant en effet que son livre favori , et même, peut-être, que
sa personne n*échapperait pas aux anathèmes de l'Église , puis-
qu'il renouvelait ouvertement, dans cette œuvre de ténèbres,
une doctrine déjà plusieurs fois condamnée par le saint Siège et
les premiers pasteurs, il chercha dans le Richérisme^ un abri
* L*auteur du IV* gémissement de Port-Royal s'exprime ainsi : c Les
» cent une propositions condamnées renferment justement toutes les
» vérités différentes que les disciples de saint Augustin ont toujours
B soutenues depuis soixante-dix ans. » Or, on sait que ces vérités dif-^
férentes n'étaient que le Bayanisme rajeuni dans VAugustintu de Té-
véque d'Ypres. On peut cousulter encore sur ce point le Catéchisme
historique et dogmatique sur les contestations qui divisent maintenant
TËglise, t 3, pag. 169 et suivantes, où Ton prouve que les mêmes pro-
positions sont comme un précis de la doctrine de Port-Royal, etc.
' Edmond Richer, syndic de la Faculté de théologie de Paris, au
QUE
contre lea Toudrea de celle puissiQCe redouuble , réduisant n
pratique, dans les RdflrxlDn» nwralet, le projet inaensé qu's-
Tiieut TormË les pnrlisans de Jans^niiis pendant que la discussion
de l'afTaire des cinq propasiLÏons se faisait !i Rome , de ressuaei-
ler en France l'Iiérésie de Richer, si leur parti avait le dessous
dans la capiule du monde chrétien '. Mais c'en est assex pour
montrer quel esprit anima la plume de Quesnel,
On peut réduire tout son système ii trois principes capitaux
dont la simple eaposition Tera déjh connaître le venin.
Le premier : il n'j a que dcui amours d'oii procèdent exclus!-
it du dlt-septifme siècle, enseigna, dans un pelil Irnllé
De la pnissiince ecclésiaslique cl civile que ■ chaque conmiDnaulé a
t droit ima]tdîat<:nient el essenliellcmcnt de w gouverner etle-méme :
> (que) c'esl A pile, el non à aucun particulier, que la puùsance et
> la juridiction a été donn^. (El que) ni le lemp;, ni les lieai,ni la
K dignilé des pcrsoimes ne peuvent prescrire contre ce droit Tonde dans
1 In loi diviae et naturelle, i RtcLer reconnut dans la suite que ce iy§-
Kme < élnll contra ire A In doctrine catlioUquc, ciposiîc lidèlenienl par
• les saints l^res, faui, hËrélique, impie, cl pris des fcrîUempolon-
■ nés de Luther el <lc Calvin. ■ Mém. cbron. et dogm., t. 1, p«g. 178,
ia-ii, année 1611; Fellcr, DicUon. hLil., au mol Ricuia. Deux con-
ciles protinclaui assemblés en France , l'un b Paris , le 13 mars 1711 ,
l'autre A Aii , le Si mai de la même année, proscrivirent celte ranesle
doctrine ; Rome en Dl ensuite autant; mail elle ne Tut pas détruîle ;
les Jansénislet en prolttérenl , el la transmirent tout entière t nm rA*
volutîonnaiies. Il parait que Marcile de Padoue, recteur de l'UnlvenlIë
de Paris an commencement du qualoriième sii'de, en tal riovenicnr,
et que c'est dans son livre intitulé dérisoiremeni Di-rensor pacii que
tous In hérétiques qui vinrent après lui puisèrent leur système do
révolte contre les deui pui tances.
< C'est ce que nous apprend une lettre qne Sainte-Beuve, encore al-
larhé BU parti , écrivait A Salul-Amour, alors A Rome, pour la délense
des cinq propositions de Jansénins, ■ Si le Jansénisme est condamné,
• disail le célèbre casuiste dans cette lettre, ce sera une des choses 1rs
• plus désavanlageuses au saint Siège , el qui diminuera dans la plu-
> pan des csprils le respect et la soumissiou qu'ils ont toujours |;ardéa
> pour Rome, et qui fera Incliner beiucuup d'antres dans les senlimens
> ilesIUchérisl''!i,.. faites, s'il vous plaît, rèfluiinn sur cela, et souvenei-
K nus que je vous ai mandé, il j a lung-liimps, i/ite de celle déciiion
iijiendra U mmKtlUiMal du Hichcrisme en France, t FcUer, en-
ait Cilé.
•7S QUE
Tement toutes les Yolontéset toutes les aelions de rbonimê: IV
mour céleste, qui estU charité proprement dite , laquelle nppoiii
tout à Dieu , et que Dieu récompense; et Tamour terrestre, qaVMi
nomme cupidité vicieuse , qui rapporte tout à la créature ooiuse
à la fin dernière , et ne produit par conséquent que du nal. Fcbl
de milieu » ni quant à Thabitude , ni quant à Tacte, entre ces éemi
amours.
Le deuxième : depuis la chute de notre premier père , notre
volonté est entraînée nécessairement et d'une manière inviaeiMe,
quoique sans violence, au bien ou au mal, par le plaisir indâi-
béré qui domine, c'est-à-dire qui se trouve, dans la circon-
stance , supérieur en degré au plaisir opposé : en sorte que bms
faisons nécessairement le bien quand le plaisir céleste est en ikmu
le plus fort; le mal, quand la concupiscence y demeure supé-
rieure en degré au plaisir céleste. Si ces deux plaisirs , auxqueb
on donne aussi le nom de délectation , se font également sentir,
c'est-è-dire s'ils sont égaux en degré, notre volonté demeure alors
dans une sorte de torpeur ou équilibre , ne pouvant se déterminer
ni au bien , ni au mal ^.
Enfin , le troisième principe capital est que FÉglise a Tautorité
de prononcer des excommunications pour Texercer par les premiers
pasteurs, maisdti coMcntement au moins prémmé de tout le corps *.
^ Quesnd répète souvent ce principe dans ses mémoires et ses apo-
logies, ne cessant d'y redire d'après Jansénius, et dans le même sens
que cet évèque, ce proverbe de saint Augustin : Quod enim ampUàs
nos détectai^ secundùm id operemur ncccsst est , que ces deux nova-
teurs n'entendaient pas. En effet, le saint docteur y parle d'une déleo-
tatjon délibérée^ qui fait que l'on suit le choix que l'on a fait délibé-
rément, tandis que ce choix est plus agréable que le parti contraire ;
prise dans ce sens, cette maxime n'offre rien qui étonne. Au reste, si
notre auteur n'avance pas en toutes lettres son deuxième principe «
dans ses Réflexions morales, il Ty reconnaît du moins par les consé-
quences, ainsi que nous le verrons bientôt .
' La proposition xc est ainsi conçue dans les Réflexions morales ;
c C'est rÉglise qui en a l'autorité (de l'excommunication), pour l'exercer
■ par les premiers pasteurs , du consentement au moins présumé de
B tout le corps. » Voyez le U i«% saint Matth., cbap 18, v. 17,édit.
de 1694. Dans Texemplaire latin, l'expression parait encore plus forte :
Ejjus infligendi aueioritas in Ecdesiâ est, pcr primarios pastores de
consensu sallem pi'trsumpto corporis totius, .
QUE 37»
TiU enipruiilâ les deui premiers de Baïua et de Jan-
sûnius; il puîsa le U-ui&ième dans Edmond Iticher,
i. De SDO premier ptiucipe capital , tjuesnul tire les conclnsiona
suivantes :
1> Que< lagrAce d'Adam eaïune suite de la créaiion , et était
due II la nature saine Bl eniiËre; • qu' < die ne produisait que dei
nériles humains ■ «et que* Dieu n'atDige jamais des inuocens; ■
mais que • les alQictioDS servent toujours , ou ï punir le pf dié,
ou à purilier le péclieur '. ■ ]i suit de lï que l'élévulion du pre-
mier Lomme 1 la vue intuitive, les moyens pour arriver ï celte
Un sdidîme , c'est-à-dire la grâce , les vertus , les mérites, et que
mtUne l'eiemplloQ delà mortel des autres maui de cette vie, d'ô-
laieiU pas des dons gratuite surajoutés i h nature humaine en-
core sans péclié , ni par cousiSquent des grliccs propremeiit dîtes.
Aiusi , l'état de pure nature et celui de nature entière étaient im-
possibles , et il iaut les reléguer parmi les cliimëres qu'a créée*
l'icDaginalion creuse des scolastîques modernes. Tels Forent les
systèmes de Bahis , qui rejetait le mot grâce, et de Jansénius qui
admettait cette expression , mais dans ud sens impropre , dans te
méiue sens oh l'on dit que la vue , l'ouïe , etc. , sont des grâces.
On voit aussi ce que notre novateur pensait de l'immaculée con-
ception de la mtre de Dieu : Baîus s'expliqua clairement sur ce
point; Quesnel se contenta d'ëtalilir le principe , mais ses parti- |
sans surent Irès-bien en tirer la conséquence.
£* A l'égard de la charité , ' c'est elle seule qui parle ï Diei
c'est elle seule que Dieu entend -, il ne couronne et ne récompensa^
qu'elle, parce qu'elle seule honore Dieu et fait uUrëtieDnemeiit.i
les actions chrétiennes par rapport i Dieu et t Jésus-Christ. (Jui* ,
conque donc court par un antre mouvement et un autre motir»
i:aui'l en vain, Tout manque ù un pécheur quand l'espérance lui
manque; > mais > il n'j a point d'espérance en Dieu oîi il n'y a
point de cbaHté. > De lï , • il n'y a ni Dieu, ni religion où cetto '
vertu théologale u'esl pas, • et • dès qu'elle ne règne plus dans [
le cmur, il est nécessaire que la cupidité charnelle y règne et cor-
rompe toutes les actions; > car • la cupidité ou la diarité rendent» ,
seules • l'usage des sens bon on mauvais • : aussi • l'ubéissanca ,
à la loi qui ne coule pas de la charité, comme de sa source
* Propoti lions »
I, condamnfiea dans la bulle l'iii
380 QVE ,
elle qu*hypocrisie ou fausse justice. Sans cette belle vertu » que
peut-OD être autre chose, • en efTet, < que ténèbres , qu^égare-
ment et que pécbé? Nul péchésansFaniour de nous-mêmes, comme
nulle bonne œuvre sans amour de Dieu ; » mais nul amour de
Dieu réel sans la cbariié proprement dite ; « et c*esten Tamqn*on
crie à Dieu , » mon père , « si ce n'est point Fesprit de charité
qui crie. » De là cette consolante doctrine : « la prière des im-
pies , » c'est-k-dire de tous ceux qui n'ont pas la charité el qui
ne prient pas par le motif de cette vertu , « est un nouveau péché,
et ce que Dieu leur accorde , un nouveau jugement sur eux *. »
* Voyett dans la bulle Unigenitus, les propositions xlv, xlti, xltiii
XLVIII, XLIX, L, Lni, LIV, LV, LVI, LVII, LVIII, LIX.
Dans une espèce d'instruction envoyée par Port-Royal aux affidés ,
on lit ces paroles remarquables : a Ils diront aux indévots, et à ceux
• qui sont dans le libertinage, ou qui y sont portés... que ces pratiqneB
• des moines et ces mortifications sont gênantes et ne servent de rien ;
• que si nous sommes en grùce, c'est la grâce et non pas les œuvres
B qui fait le mérile (si mérite il y a), et si nous n'y sommes, les bonnes
B ouvres sont non-seulement inutiles, mais sont autant de péchés
• mortels,
bQuc si le concile de Trente témoigne le contraire, il n'est pas cano-
B nique, et n'était composé que de moines violens, ou quelque autre
» réponse. »
Cet écrit hérétique Ait trouvé chez un curé du diocèse de Montpel-
lier, grand appelant, initié dans tous les mystères, et très-zélé pour le
parli. Il Pavait copié de sa propre main sous ce titre : Lettres circu"
laires à MM. les disciples de saint Augustin, Le préambule qui ré-
pondait au titre finissait par ces mots : Vos irés-humbles et tré9^
affectionnés en Jésus^Christ ^ les prêtres de Port-Royal ^ disciples de
saint Augustin, Cette misérable produclion ayant élé remise entre les
mains de M. de Charancy, évoque de Montpellier, après la n:ort de
Donnery (c'était le nom du curé dont il s'agit), le prélat en fit con-
fronter l'écriture, la déposa chez un notaire, alin que les curieux en
fissent eux-mêmes la conTrontalion avec deux pièces authentiques, et
il la publia ensuite avec un mandement exprès , daté du 24 septembre
1740 Qucsnel avait envoyé un écrit tout somblable, à ce qu'il parait,
à une religieuse du diocèse de Rouen, avec une lettre datée de 1699.
Cette religieuse ayant changé de sentiment, elle remit cet écrit à son
archevêque, M. d'Aubigné, en 1719. De là il passa entre les mains
du régent, qui chargea l'évêque de Sisteron de l'examiner. Vo^z le
mandement précité, pag, 5 et suiv. ; Lafîteau , liv, 5, pag. 87, tom. S,
En consénuence , » la preiiiièrc grlce que Dieu accorde au pé-
cheur c'est le pardon de ses pécliés; msis hors de l'Ëglïse point
de grlce '- • Ainsi , • les P;jTfns, les Juifs, les hérétiijues et
> autres semblables, ne reçoivent nulle influeoce de Jésus-Clirist:
> d'oit vous conclurez fort bien que leur volonté est dénuée da
• tout secours et sans nulle grïce suOisaole. Il j a plus, celui
• qui sert Dieu, même en vue de la récompense éternelle, s'il est
n destitué de la charité , il n'est pas fiaas péché toutes les fois
> qu'il agit, même en Yue de la béatitude *. "
3° Cependant la loi est quelque chose de bon quand elle opère
par ta cbarilé, sans laquelle , disent d'autres, elle n'est plus
qu'une foi humaine^. <> Point de criées que par elle, > dit Ques-
nel , - elle est la première et la source de toutes lea autres. Elle
juslitie > même < quand elle opire ; mais elle n'op&re > réellement
• que par la charité*. > Sans cette union, ni elle, □' '
ses que les ortliodoies appellent iin-liu, ne tirent
de la cupidité. Aussi ne craïnt-on pas de s'écrier : « Quelle bonté
de Dieu d'avoir ainsi abrégé la voie du salut en renlermant tout
dans la Toi et dans la prière, comme dans leur germe et leur se-
mence; mais ce n'est pas une fui sans amour et sans confiance' ! >
i' Quand il la crainte de l'enfer, • elle n'est point surnaturelle *
si elle seule anime le repentir ; plus ce repentir i>st violent, plus
il conduit au désespoir. ■ D'ailleurs , • elle n'arrête que la maïni
et, le cœur est liiré au pécbé, tant que l'amour de la justice ( la
in-j'i Dict. des liiTCs jansénistes, lom. 1, pag. SBS; ÉdiL d'Anvcn,
1732. — Dans son testament spirituel, art. \, qu'on tronve â 11
■Dite de sa lie imprimée i Lausanne, Arnaud prie pour la conveisioa
de ceux qui ont répandu sur le compte den prêtres de Poit-Rojal
celte ItUre eirculaire qu'il dit être pleine de fourbes, iCtrreari «I
tChcréiiei. Mais, dans le même tesrament, art. iv et ivii, il traite Je
Jansénbme de faïKâme : en sorte que si , comme on ne peut guère en
douter, la circulaire était un fantûmc ii la manitrc du Jansénisme , ce
Cmtâme de circulaire était bien réel.
* Prop. xxiiu, Eiii.
* Décret du ^ décembre 1 1390, par lequel Aleiandre VIII condamna
Bnte-nne propoii lions, dont nous rcnons de rapporter la t'etlaxiii't
' Ibid., prop. HT.
* Prop. uni, uvii. 11,
* Dtcret précité, prop. \iv.
38S QUE
charité ) ne le conduit poinu > Donc » < qui ne s'abslieni da mal
que par la crainte du châtiment , le commet dans son cœur ei est
d^jk coupable devant Dieu. » De Ik < vient qu'un baptisé «i en-
core sous la loi , » comme un Jaif, < s'il n'accomplit poÎRiU loi «
ou s'il l'accomplit par la seule crainte. » En effet , c sous la aa-
lédiction de la loi on ne feit Jamais le bien , parce qa*oii pèehe,
ou en faisant le mal , ou en ne l'évitant que par la crûnte ; «aiuti,
« Moïse et les prophètes, les prêtres et les docteurs de U loi loni
morts sans donner d'enfans à Dieu , n'ayant (ait que des eadavtet
par la crainte. » Donc, « qui vent approcher de Dieu» ne dml ni
Tenir à lui avec des passions brutales , ni se conduire par wbl iw§^
tinct naturel ou par la crainte , comme les bétes, mais par la foi
et par l'amour comme les enfans. La crainte servile ne se repré-
sente Dieu que comme un matUre dur, impérieux , injuste , intrai-
table * . » « L'attriUon qui est conçue par la crainte de Teaier el
» des peines, sans amour de Dieu pour lui-même , n'est pea ui boa
» mouvement , ni un mouvement surnaturel *. >
5* Quesnel suit parfaitement son principe , quand il nous parle
de l'Église. U l'appelle le < Christ entier, qui a pour chef le Yeii^e
incarné et pour membres tous les saints. » Elle est « l'assemblée
des enfans de Dieu , demeurant dans son sein , adoptés en Jésus-
Christ , subsistant en sa personne , rachetés de son ^ang , Tivaol
de son esprit, agissant par sa grâce et attendant la paix du siècle
à venir. Son unité est admirable : c'est un seul homme composé
de plusieurs membres dont Jésus-Christ est la tête , la vie, la sub-
sistance et la personne.. . Un seul Christ, composé de plusieurs
saints, dont il est le sacrificateur. » Toutes les grâces se trouvent, et
uniquement^ dans l'Église ; mais les pécheurs en sont exclus : elle
est donc invisible , et les évêques , les prêtres , les antres ecclé-
siastiques n*en sont les ministres véritables que tandis qu'Os sont
eux-mêmes des saints. Les Jansénistes n'admettent pas cette der-
nière conséquence dans toute son étendue ; mais elle n'en suit pas
moins des principes de notre dogmatiste. Aussi , « qui ne mène
pas une vie digne d'un enfant de Dieu ou d'un membre de Jésus-
Christ, cesse d* avoir intérieurement Dieu pour père et Jésus-Christ
pour chef. Le peuple juif était la figure du peuple élu dont Jésus-
Christ est le chef. » L'excommunication la plus terrible est de
* Prop. Lx, Lxi, ixn, lxiii, lxiv, ixv, lxvi, lxvu.
* Décret d'Alexandre VIII, prop. xv.
I
k'étr« poinl do ce pmp\u ex. de n'avoir point de pan & Jésus-
Christ. ■ On l'en relrincbe aua&i bien en ne vivant pis selon l'Ë-
vapgile qu'en ne croyant pat selon l'Ëvangilc '. •
Cependaui, tout iumibl« qu'elle esi , t l'E^lige • est néanmoins
• calbolique, comprenant , el tous les angi?« du oiel ei tous les tha,
et ks justes de II terre el de tous les aièdes. Rien » même > <le
si spacieux . puisque tous les élus et les justes de tous les siËcles
l> uuinpoBenI, ■ Ceci nous Tait comprendre que , • c'est une cun-
duilc pleine de sagesse , de lumière el de charité , de donner aux
â:na) le lemps de |>orier arec humilité et de sentir l'état du péché;
de demander l'esprit de pénitence el de cootrîtioD , et de com-
mencer au moins i salisraire ï la juslice de Dieu arant que de les
réconcilier ; • car, • on ne sait ce que c'est que le péché el !■ vraio
pénitence, quind on tcuI être rélabli d'abord dans la possca-
sion des biens dont le péché nous a dépouillés et qn'on ne vent
point porter la confiisioD de cette sépiralion ; > de manière que
le quaioniènie degré de la conversion du pécheur est qu'étant
réconcilié, il a droit d'assister au sacrifice de l'Église *. •
fi* (juaud on a perdu l'amour de Dieu, il ne reste plus duns le
pécheur que • le pécbé et ses funeBies suites, une orgiieilli
pauvreté el une indigence paresseuse, c'esl-ï-dire une impuis-
sance générale nu travail, i la priëre et !l tout bien : il n'est plus
libre que pour le mal ; sa volonté n'a de lumière que pour s'éga-
rer, d'ardeur que pour se précipiter, de force que pour se blesser f
capable de tout mal, impuissante h tout bien : il n'aime iju'h sa
condamnation. Toute connaissance de Dieu, même
raémedans les philosophes païens, ne produit qu'orgueil, que va-
nité, qu'opposition ï Dieu même, au lieu des seniimeos d'adora-
tion, de recounnissance et d'amour : le pécheur n'est rîea qa'jm-
pareté, rien qu'indignité >, jusqu'à ce qu'il soit guéri par lagrOce
de Jésua-CLrist '.
T* Enfin, il est aisé de conclure du premier principe de Ques-
nel et des conséquences qu'on a vu qu'il en déduisait que les ver-
tusdes philosophas étaient des vices ; que les (ouvres des infidèles,
des hérétiques et des schismatiques sont des péchés; qu'il faut
en dire de même des actions des iidëles et des justes faites sans
* Prop, LUItl, HMI, IWV, WlTtl, 1
> Trop. LMiI, tuti, I.1XKVII, nwvi
* Prop. I, uxviii, tnn, xi, xit, «
384 QUE
rinflaence de la charilé actuelle; et que c*est on de?mr ûidi8|iea-
sable de rapporter tout k Dieu par le motif de cette verta, la seule
qui puisse être décorée du nom de vertu.
II. Nous avons démiOatré dans un autre article que les etsq pro-
positions de Jansénius ont une liaison intime avec le priodpe de
la délectation relativement victorieuse, et qu'elles déconleoi de là
comme de leur source naturelle *• Quesnel admettant le même
principe capital, ainsi que nous Tavons dit, il était nécessaire qo*il
en déduisit aussi les mêmes conséquences, et que toute sa doctrine
sur la grâce de Tétat actuel tendit à renouveler k cet égard les héré-
sies de Jansénius. Voilà pourquoi il anéantit dans Thomme pécheur,
dans rinfidèle et quiconque n*a pas la grâce, toute liberté dans
Tordre moral, toute force naturelle pour opérer quelque bieo que
ce soit dans le même ordre, et jusqu*aux lumières de la loi natu-
relle, comme on vient de le voir, exagérant k outrance U nécessité
de la gr&ce et voulant que sans elle on ne puisse rien faire qui
soit digne de louange. G*est dans la même vue qu'il exige la grâce
efficace pour pouvoir opérer toute bonne action, quoiqu'il ne mé-
connaisse pas la petite grâce jansénienne qui ne met en nous que
des velléités, des désirs, des efforts impuissans, bien différente de
la grâce suffisante proprement dite qu'il rejette. Le même dessein
l'engage â dogmatiser encore qu'on ne résiste jamais à la grâce
intérieure ; qu'on ne peut même y résister ; qu'elle fait tout en
nous; qu'elle n'est pas donnée h tous; que Dieu ne veut sincère-
ment le salut que des élus, et que Jésus-Christ n'a offert sa mort
pour le salut éternel que des seuls prédestinés. Au reste, pour
bien comprendre tout ce système, il faut se rappeler ici que la dé-
lectation céleste n'est autre chose que le secours que Dieu nous
donne pour faire le bien, ou la grâce intérieure * ; que cette grâce
est elle-même l'amour de Dieu (c'est-â-dire la charité), ou l'inspi-
ration de cet amour '•
*■ Voyez l'arlicle JiNsiiiius.
> Delectatio viclrix, qus Aug^usUno'esf e/pcax adjutarium, relatlva
est : tune enim est victrix, quando alteram superat : quôd si contingat
alteram ardentiorem esse, in solis inefficacibus desîderiis heereblt ani-
mus, nec efficaciter unquam volet quod volendum est. Jans. in Aug.,
]. 8, De grat. Christ., c. 2.
* « La grûce créée n'élant autre chose que Tamour de Dieu, il s'en-
• suit que la force de cette grûce consiste dans la force et l'ardeur du
f saint amour qui nous fait proférer Dieu ù tous les objets de nos pas*
p
QUE 38S
Venons au ilL>lai].
l'SeloD noire coTaieur, d'aprËs JnnEéDius, son mulire, il o'y
point de grice suflJEanie propremeni dite ' ; iiiaig U grice inlé-
ricure, néceasaîre pourpouvuir opérer quelque bien , est toujours
eCticace , ei od ne peut sans elle faire aucune bonne
d'oU il suit que lesJusLeE qui lombent , malgré les efforts qu'ils
fani pour obscrrer les commapdemens divins, n'oni que la petite
grâce qui ne leur suMt pas dans la circonstance, et que ces eonimin-
denitns sacrés leur sont impossibles, parcequ'ils n'ont pus la grllce
qui les leur renilraiL possibles : première propasiiionde Jansénius*.
" La grice de Jésus-Clirist, principe fffleace de toute lorle de
• bien, rit aécenaire pimr toute bonne action ttgraiiàt a\i^&^\e, h-
• cile ou difficile , pour la commencer, la cootinuer ei l'acheter,
■ Sam elle non-teulementonnefailTiett.maiton ne peut rienfaire.
■ Quand Dieu n'amollit pas le ca:ur par l'onction intérieure de ta
• grâce, les exhortations et lesgrices extérieures ne terveal qu'à
• l'adoucir davantage Envaiovuuscommandei(Seigneur), si voua
■ ne donucz vous-même ceque TOUS commandez. Crdcewmvrainr,
> uns laquelle on ne peut jamais conresser Jésus-Christ , et avec
• laquelle on ne te renie jamaii. La grîce est donc cette voii du
> Père, qui enseigne intérieurement les hommes et les fait venir
• i. Jésus-Christ. Quiconque ne vient pas 1 lui , après avoir en-
> tendu la voix extérieure du Fils (dans la lecture de l'Évangile,
• dans les prëdicatious chrétiennes , etc.), n' et f point enuignt
• parle Pire. La semence de la parole que la main de Dieu arrose
• porté loujoaiÊ un (ruit, La grâce de Dieu n'est autre chose que
• ta volenUloule-pHittante : c'est l'idée que Dieu nous en donne
> lui-même dans toutes ses Écritures. La vraie idée de la grâce est
> que Dieu veut quenousluî obéissions, «fiJenloM ; il commande,
> eitoul xefait; il parle en mntlTe, et ttml ni laamit. Dieu éclaire
> l'ilme et la guérit aussi bien que le corps, par ea tente iioUmii ,*
> il commande, et il ett obfi ^. >
I lions. I Inslil, et instmcL clirélicone, dédiée & la reine des Deiix-
Sidlra, IV* part,, Delà grlcG, secl. 1**, rhap. ], S H. Ce livre, qu'on
appelle vultcaircmenl Catéchisme de Naples , est infecté de Jansénisme,
CI est Irte-dangereui, Voyes aussi Montagne, L 3, pag. 113.
< [lincclarel, car Auguslinus omnem omnindgTBtiam pure sulBcieiw 1
taur<-rir, etc., I. i. De gral, chriit,, c. 10.
Yoyti l'article JiHiini us.
880 QUE
2" G*esi la grâce qui opère en nous, et sans nous, tontle bien*
< Oui, Seigneur, tout est possible à celui à qui tous rendei tout
» possible, en le faisant en lui. Nous n*appartenons à la nouvelle
9 alliance qu'autant que nous avons part à cette nouvelle grêoe,
» qui opère en nauê ce que Dieu commande. Quand Dieu accompa-
> gne son commandement et sa parole extérieure de ronction de
» son Ksprît, et delà force intérieure de sa grâce, elle opère dëm
» le cœur Vobéinance qu'elle demande *• » On peut donc dire arec
Quesnel, ou avec un de ses fidèles disciples , que « la grâce n^est
» autre chose que le consentement de la volonté , en tant qu*il
» vient de Dieu qui Topère dans la volonté *. » Et les prêtres de
Port-Royal n'ont pas extravagué quand ils ont avancé , dans
leur Lettre circulaire aux disciples de saint Augustin, < que le plus
9 criminel orgueil est de croire que nous ayons aucune part smx
» actions de piété que Dieu fait en nous, et que nous puissiom amr
» aucun mérite. Que la plus grande gloire et la plus grande Terta
» de rhomme est de se tenir tellement dépendant de la grâce
» qu'elle fasse tout en nous et sans nous...; qu'il n'y a point de grâce
» qui ne soit efficace et victorieuse ; qu'elle est efficace sans ov-
» cune coopération de notre part ; que quand on a reçu une fois
» cette grâce , c'est une marque de prédcstinatiou et un grand
» sujet de joie , etc. » Quesnel était dans les mêmes principes ,
puisqu'il avait adopté cette instruction ou lettre circulaire, et que
d'ailleurs il anéantit assez clairement en nous la coopération â la
grâce et les mérites. C'est ce qu'il inculque dans un grand nom-
bre de ses propositions , où il prêche la grâce qui fait tout , la
grâce nécessitante, et encore dans celle-ci : « La foi, l'usage, l'ac-
» croissement et la récompense de la foi, tout est un don de votre
» pure libéralité '.
Donc , dans l'état présent, qui est Vétat de nature tombée, on ne
résiste jamais à la grâce intérieure ; II* proposition de Jansénius.
3« Quesnel va nous enseigner encore ce dogme jansénien très-
expressément.
« Quelque éloigné que soit du salut un pécheur obstiné, quand
* Prop. IV, VIII, XV.
' Défense des théologiens... contre l'ordonnance de M. Tévêqne de
Chartres, etc. Quelques auteurs attribuent ce libelle à Quesnel , d'au*
très à Fouilloux, son élève.
■ Prop, Ï.X1X.
QLK 3»? 1
Jùsus-Clmsl se (ail Vùirïlui parla lumière salutaire Jeu grJcfl^ t
{ il faut qu'il se reiiili! , qu'il accoure , qu'il s'humilie , cl qu*3
adore son Sauveur. Il ii'j a poinl de charmes qui oe cèdeat k
ceux lie la gtite, parée qjieritajieréthle au ToHt-Puisiant ',•
i" Au reste, docile ï cet avisde la lellre circulaire : • Quoiqu j
■ la grlceimpose ï la voIonltSun^nA^ctiiM d'agir afUécidenU,i\a9 I
1 faut pas nÊamuoins se servir jamais du nom de nécessité, disaql 1
p que la grSce nécessite laTulonté. Au lieu de ces termes (il faut |
jl dire) , que la grflce ticlorîeuse emporte doucement la volonti *
unteantrainle et lani violence; > noire ei-orntoriea s'abstient
ligDeusement de lâcher le terme fatal ; mais il ne laisse [
le sens , dogmatisaot assez ourcrlement qu'on ne peui pu i
lister k la grSce iniérieure. '
La compassion do Dieu »ur nos péchés, c'est son amour poui
le pécheur j cet amour, U source de la grice; celte grâce, uiteopé-
raiion de ta main loHle-puUsanteàe Dieu que rien ne peut ni
j cher ni relarder. La grice de Jésus-Cbrisi est uae grïce
If fine, comnie créée pour être digne du Fils de Dieu, farie, piii^
^ unte, tattvfraine, \iuiittc\ble ; comme étant l'opération de la t^
loulé loule-pu Usante , une suite et uiie im'ttalUin de topérattu
»de Dieu incarnant et reuascilant tanFili. L'accord de l'opà
jl tionlouie-puissaote de Gitm dani It cœur de l'homme , avec le
bre conieaUmeui de na volonté, uous esl montré d'abord dt
l'ineanaUon, comme dans la source et le modèle de toute* la
autre» opérationt de miséricorde et de grice, lautet auui ; raiii*-
te» et autti dépendanUt de Dieu que cette opération originale.
Dieu , dans la foi d'Abraham , ù laquelle l&i promesses étaient
attachées, noiu a donné lui-mime l'idée qu'il veut que naut atout
de l'opération loule-puiisaïUe de m 0rdc«dans nos cœurs, m la
figurantpar celle qui tire Ifâ créaturet du néant et qui douue lé
vie aux moTii. L'idée juste qu'a le cenlenier de la toule-pui^ J
tance de Dieu et de Jésus^hrist sur les corps , pour les guérir J
par le ifui fHouremeiil de ta voloi>té,e*t l'imase de celle qu'ai
.acoir de la toule-puissatue de la grâce, pour guérir fft dwfKfsl
la cupidité *, •
l. Or, puisque Dieu Tout que nousajons la mène idée de l'opéra-
"w loute-pttiuante de ta grâce dam uot caurt, que de l'opératitt
' Prop. iiv, xm.
> Prugi. 1, w, iiii, uiil, tliv.
888 QUE
gvi tire les créature» du néant , et qui reauêcite les morts , conuM
ni les créatures ni les morts ne peuvent résister à cette dernière
opération, il s'ensuit que non-seulement nous ne poaTons pis ré-
sister k la grâce intérieure , mais encore que Dieu lui-mèma
ordonne de croire qu'il nous est impossible d'y résister : en
séquence, celui qui croit que la volonté de l'homme peui résister m
oMr à la grâce intérieure prévenante , nécessaire pour chaque 9o-
tien en particulier^ même pour le commencement de la foi ^ erre Té*
ritablement dans la foi, est un semi-Pélagien , est hérétique; tf
proposition condamnée dans Jansénius. Quesnel appuie celte héré*
sie , dans sa xix* proposition , où il dit : que « la grâce de IKes
» n'est autre chose que sa volonté toute-puissante, (à laquelle par
» conséquent il n'est pas possible de résister ; et que) c'est l'idée
» que Dieu nous en donne lui-même dans toutes ses Ëcritures. »
Ajoutons encore que la volonté de l'homme est nécessitée par
la grâce sans laquelle on ne peut rien faire , ainsi que par laconcn-
piscence , en l'absence de cette même grâce , et conséquemment
que, pour mériter et démériter dans l'état de nature tombée , H n'est
pas nécessaire que l'homme ait une liberté exempte de nécessité;
mais il suffit qu'il ait une liberté exempte de coaction ou de con»
trainte; m* proposition extraite de VÀugustinus de l'évéque d'Y*
près. En effet, selon Quesnel, l'homme qui n'a plus la grâce, sans
laquelle on ne peut rien , n'est libre que pour le mal, ne fait que le
mal, et il le fait nécessairement ; tout ceci est assez clairement
exprimé dans ce que nous avons vu jusqu'ici de la doctrine de ce
novateur : cependant il pèche , puisqu'on lui donne le nom de pé-
cheur ; il démérite donc, quoique nécessité. D'un autre côté,
l'homme sous l'empire de la grâce, nécessaire pour toute bonne ac^
tion, ne peut pas résistera cette grâce, ainsi qu'on vient de le voir
avec beaucoup d'étendue ; il suit de là qu'il opère le bien néces-
sairement ; qu'il y est donc aussi nécessité : il mérite néanmoins ,
puisqu'il sera récompensé dans la vie future , s'il meurt dans la
grâce: donc pour mériter et démériter, etc.
5' Il y a plus , « c'est une différence essentielle de la grâce
9 d'Adam , et de l'état d'innocence d'avec la grâce chrétienne ,
9 que chacun aurait reçu la première en sa propre personne ; au
» lieu qu'on ne reçoit celle-ci qu'en la personne de Jésus-Christ
» ressuscité^ â qui nous sommes unis. La grâce d'Adam, le sancti-
• fiant en lui-même , lui était proportionnée (car il pou-
» vait y résister ) : la grâce chrétienne, nous sanctifiant en Je"
QUK 38ft
■ uu-CtirM , est toiile-puissaiile el iligoe du Fils de Dieu '. a
Ouire son dogme Tavurï de la grâce nécessîUiiie , QucsucI ne
semble-t-il poinl insinuer ici l'impulabilité âet mérite» de J/tuf-
Chritif En eiïel, celte hérésie calvinienne s'usocîe Irès-bien atec
le système jaosénïen, tel quereoseigne aoVtt auteur. Car, puisque
U grlco fail tout et qu'on tic peut y résister, il s'ensuit au Tond ,
comme leditla circulaire, que c'est la grâce qui opère tout [e mé-
rite ; que nous n'en avons nous-mêmes aucun , et que, puisqu'il
eu Taul pour être sauvé , ce sont donc ceux de Jésus-Cbrist seuls
qui nous lanetilieDl , et que conséquemmeni ils nous sont pure-
ment imputés. CequeQuesnel dit de l'unité de l'Ëglise; • C'est...
• un seul homme composëde plusieurs membres dont Jésus-Christ
I est la léie, la vie, U mbtUiante et ta perêonite. . . un seul Christ ,
• composé de plusieurs saints dont il est le aanctiflcaleur, • pa-
• nltcoolirmer cette idée.
6" Uais voici du bien eiiraordinaire : i LepreraïercRet de la
• grâce (du baptême) est de nous f^iire mourir au péché ; eu
■ sorte que l'esprit, le casur, let tent n'aient non plut de vie panr
• le pfctte qm (eux d'un mort pour let choiet du niOHds *. > Vorlt
une inamissibilité de la justice conférée par le baptême , que CaU
vinn'auraitsansdoutepas dés.iTouée. Cependant elle n'est qu'une
conséquence du système ; car puisqu'on ue peut résister i la grice
iiiiérieure, comme on l'a vu ci-dessusi tandis que celte gr3ce do-
mine ou opère en nous, elle doit donc nous rendre morts au péché,
3us)i nécessairement que la mort naturelle rend un cadavre mort |
aux choses du monde. C'est pour cela que les Port- Royalistes
flnncnt qu'elle est un^ntar^utf de pr/dcilination d.ins ceux qui Tanf
■Me fait reçue.
7* Quanti la distribution des grkeg, Jansénius .ivaitosé dire:
■ H est clair que l'ancien Teslamenl était comme une grande Co<
■ nédie '. • QuesncI renouvelle ce blasphème, non eu propres
termes, mais d'une manière non moins ÏDJurieute II ia sagMse, Il
II bonté eti Injustice de Dieu, puisqu'il ne craint pas de s'écrier,
M l'adreisaut au Tout-Puissaoi lui-même: >■ (,>uelle difTéri'uce,
' L. 3, De pal., c 6. Il enseigne, dons le chap. S dumfine livre,
que I 11 grAce était capilalemeut contraire il la Du de la loi et i riii<
■ tentiou de Dieu. >
rfb
890 QUE
9 6 mon Dieu , entre l'alliance judaïque el Talliance durélieDBa !
» Uune et Taulre a pour condition le renoncement au péché et
» Taccomplissementde votre loi : mais là voustexigezân p^ktwr^
» enle laissant dans son impuissance ; ici vous lui donnes ce que
9 vous lui commandez , en le purifiant par votre grâce...» Qoel
avantage y a-t-il pour Thomme dans une alliance ak Dieu le laisu
» à sa propre faiblesse en lui imposant la loi? Mais quel bonliear
» n*y a-t-il point d^entrer dans une alliance où Dieu nous donne ee
» qu*il demande de nous ^ ? » Dieu commandait doncTimpossible
à son peuple choisi , et il le punissait même dans rétemité , pour
n^avoir pas fait ce que ce peuple n'avait pas eu le pouvoir de faire.
A plus forte raison Dieu en agissait-il avec la même rigueur en-
vers les hommes qui vivaient dans Vétal de nature : excepté néan-
moins, soit sous la loi, soit sousTétat de nature, un petit nombre
de patriarches et de justes privilégiés, mais bien rares» et aux-
quels on pourrait appliquer, si nous osons le dire, ce vers d*nn
ancien : Apparent rari nantes in gurgUe vaste, La raison de cette
conduite est , selon les Jansénistes assemblés dans le prétendu
concile de Pistoie, qu'ayant promis le Messie , d'abord après la
chute d'Adam pour consoler le genre humain par l'espérance du
salut que Jésus-Christ apporterait un jour sur la terre. Dieu avait
néanmoins voulu que l'homme passât, avant la plénitude des temps,
par différens états : et l*" par l'état de nature , où abandimné ù
lui-même^ il apprit^ par ses propres lumières, à se défier de so»
aveugle raison et de ses écarts, à désirer le secours d'une lumière
supérieure : 2*' par la loi, laquelle, si elle n'a pas guéri son cœur,
a fait en sorte qu'il connût ses maux et que convaincu^ sans grâce,
de sa profonde faiblesse, il désirât la grâce du Médiateur *. On a
vu déjà que Quesnel enseigne ailleurs que la foi est la première
grâce et la source de toutes les autres; qu'il n'y en a que par
elle, point hors de l'Église, et que TÉgllse n'étant composée que
des élus et des justes, il n'y a des grâces que pour ce petit trou-
peau chéri. Si cette conclusion parait forte, elle n'en découle pas
moins du système de notre novateur sur la définition de l'Église
et de plusieurs de ses propositions très-clairement exprimées.
* Prop. VI, VII.
3 Bulle, Auctorcm fidei, de condiu bom. in statu natune... sub legc.
Il n*cst pas nécessaire d'observer qu'il y a là des propositions qui favo-
risent le semi-Pélogianisme, ainsi que Ta jugé Pie YI, dans cette bulle.
■I'
QUE SOI
8° Eiiiia Quesnel noua apprend que Dieu ne veul k sului qua
de ceux qu'il sauve en eSel pur le secours de sa ijrAce irr^iisll-
ble, el ilreaoutctleloutsrhéréiiede U v' propos i lion cond.
dana Janséntug, eu afQrmanl que Jésus^trist n'esl mort pour
le aalut éternel que des seuh prédesiim^s.
• Quand Dieu veut sauver rime, ta (ouf Umpt, eu féal litit,
• Cindubilable «fftt luil le imuloir d'un Dieu. Quand Dieu veul sau-
■ ver une Ime el qu'il la touche de ta miiu inlÉrieure de sa
■ grfti:B , nulle volonté humaine ne fui rdi'Me. Tous ceux que Dieu
t veul sauver pur Jésus-Cbriat le tant iafaitliùtemeni. Les soubaiu
• de Jésus ont toujouri \tur e.ffei : il porte la paix jusqu'au lood
• des cœurs , qaand il la leur ddsire. Àsaujéiissenient volonlaire ,
> médicinal el divin de Jésus'CLrisl..,. de se livrer 1 la mort ,
• aflttdit dtftitireT pour jamait , par loniang , taainéi, e'ttl-à-4ire
les ilu*, de la main de l'ange exterminateur. Combien faul'il
• tvuir renoncé aux choses de la terre et i soi-même pour avoir
'h cooGance de s'approprier, pour ainsi dire, iésus-Clirist,son
mort el let mytUret , comme Ttit saint Paul en disant:
n m'a aln^ et t'est livripour mn ' I ■ Ces propositions n'ont
pas besoin de comuieotaire.
m. Le trobiëme principe c^ipital de Quesnel renferme tout le
Ricliérîsme, concernant la puissance spirituelle de l'Ëglise. En ef-'
fet, si l'autorité requise pour l'excommunication aji|iartlent aa
corps entier dans cette sociëlé sainte, et que les premiers pasteur*
ne puissent on user que du contenl^nient au MViiil ytiiumt ie teili
ce coTpi, c'est évidemment parce que toute l'autorité pour gou~
verner réside ioimédisiemenl dans ce même corps : d'uti il suit .
1' que le sourcrain pontife et les évéques n'en sont, k cet égard,
que les envoyés; 2° que le premier n'est que le cbeT niiiisfifriirl
de l'Église, et que les seconds u'cd sont de même que les pas-
teurs minittérlfli; 3* que ce qu'ils fuut sous ces rapports , soil
eu matière de ducuine , soîl en lait do législstiDO , soit k l'égard
des censures , n'est valide qu'auunt que le corps entier de l'Ë-
glise est censé le (aire par eux , ou du mains qu'autant qu'il j
consent librement ou est présumé j consentir de celte manière.
Or, selon eux, les Jansénistes appariienneni au corps de 1'^
glise ; ils en sont mi^me la portion principale el ta plus saine. On
inrralt dire da [Jus qu'Ùs In forment exclusivement tout en-
r I Prop. tu, \m, va, sut, uni, xxuii.
392 QUE
tière, puisqu^eax seuls enseignent la pare doctrine , en sont ki
défenseurs , et que tous ceux qui ne pensent pas comme en ne
sont que des Pélagiens et des semi-Pélagiens , ainsi qae les carM-
térise la lettre circulaire.
D*oii il suit que tout ce que les souverains pontifes ont fait
contre les Jansénistes , par leurs bulles , leurs brefs » leurs cen-
sures y et les évèques , par lenrs adhésions aux jugemens dn saint-
Siège, par leurs mandemens et leurs excommunications, ont été
jusqu*ici des entreprises injustes, nulles, des persécutions atroces,
des dominations inspirées par une ambition démesurée , par on
fantôme de puissance, etc., etc.
Passons aux conséquences que notre dogmatiste tire de cet
abtme d*erreurs.
1** Quant k la doctrine :
Les fidèles étant tous juges de la foi , ils peuvent donc, ilsdoi-
Tent même aller la puiser jusque dans les sources, par consé-
quent dans rÉcriture sainte. Donc , < il est utile et nécessaire en
» tout temps , en tous lieux et à toutes sortes de personnes , d*en
* étudier et d'en connaître Tesprit , la piéié et les mystères. ( La
» lecture des Livres sacrés;, entre les mains même d'un bomme
» d'affaires et de finances, marque qu'elle est pour tout le monde.
» L'obscurité sainte de la parole de Dieu n'est pas aux laïcs uoe
» raison pour se dispenser de la lire ; » parce que , comme juges
en matière de doctrine et conduits par la grâce , ils doivent comp-
ter sur l'assistance céleste. « Le dimanche, qui a succédé au sab-
» bat , doit être sanctifié par des lectures de piété et surtout des
» saintes Écritures. C'est le lait du chrétien , et que Dieu même ,
» qui connaît son œuvre , lui a donné. Il est dangereux de l'en
9 vouloir sevrer. C'est une illusion de s'imaginer que la connais-
» sance des mystères de la religion ne doive pas être communiquée
ji à ce sexe par la lecture des Livres saints , après cet exemple de
» la confiance avec laquelle Jésus se manifeste à cette femme (la
» Samaritaine). Ce n'est pas de la simplicité des femmes, mais de
» la science orgueilleuse des hommes , qu'est venu l'abus des
» Écritures et que sont nées les hérésies ^ C'est la fermer aux
*■ c Les femmes et les filles sont fort propres à recevoir et même à
f donner créance à cette doctrine ( à la doctrine hérétique des Jansé-
f nlstes). C'est pourquoi MM. les disciples s'iusinucroul aupr6s d'elles
• par telle sorte de voie et surtout par une dévotion extraordinaire,
yUK 303
I- clirélîens ( U bouche ili' Ji'SUsClirisI) que de leur arraclier
' des mains ce livre siîai, ou de le leur lenir fermé en leur
■ 6UDl Je mojen de l'entendre, Ed ioierdire la lecture aux chré~
• tiens , c'est interdire l'usage de la lumière aux enfans de
■ lumière et leur Taire souSrir tine espËce d'eicommunica-
> lion (en les privant de leur digaiié essentielle de jitges de
> la foi). Lui ravir (au simple peuple) celle consulation d'unir
• sa Toii ï celle de toute l'Éijli'e, c'est un usage contraire ï I*
• pratique apostolique et au dess^ein de Dieu ; • parce que le
simple fidèle est prêtre, qu'il consacre i la messe : d'ab il but
conclure, et de quelques autres documcns sur la péniteure, etc.,
que le sacrement de l'ordre ne donne pas de pouvoirs spi^iaux ,
DU que du moins ces pouvoirs ne sont pas attachés exclusÎTement
k l'Ordre, lequel ne fait , en quelque sorte, que désigner ceux
qui doivent présider aux assemblt^ss cbréliennes , ceux qui sent
députés pour certaines fonelious ' .
2* Touchant la prédication acliielle , l'ignorance et la vieillesse
del'Ëglise:
• Les vérités sont devenues comme une langue étrangère ï la
t plupart des cbréiîens , et la manière de les prêcher est comme
■ un langage inconnu , tant elle est éloignée de la simpliciiâ de*
• apôtres et au-dessus de la portée des fidèles. Et on ne fait |
■ réflexion que ce déchet est une des marques les plus sensibles 1
m» àt 11 vieillesse de l'Église et de la colère de Dieu sur ses i
M Ans *. >
3' Il ne faut pas craindre une excommunication injuste, mait j
T> supporter avec patience , espérant d'en être guéri d'fn bnut.
Avis aui Janséoïsles , qui en prirent aussi acte pour marcher sur
les censures au moyen des appels aux parlemens et au futur
concile.
■ parce qu'elles aiment le cliongemcut e\ la lanïtè, cl sont fort cnpnbln
■ d'attirer pluiieura personnes à leur» scntîmens. > Lcllle circulaire.
Conduite i tenir artrUttimpIa. Si Arnaud cl un ou deux autres Jonsè-
nUlesoiit protesté contre l'aulbenlldlé de cet borrible écrit, c'est qu'il
y est dit que * si par malbeur les susdites instrucliong tombaient entre
■ les moins ennemies, tous les disciples te dèsa loueront débouche, ou
• mèroe parécHi, s'il «t expédient, pour le bien de celle union. •
Ibîd., pour leur cooduile particulière.
- Prop. xtv.
B94 QUE
« La crainte même d'une excommunication injuste ne nous doit
» jamais empêcher de faire notre devoir.... On oe sort jamab â«
» TÉglise , lors même qu*il semble qu'on en soit bamû par la
» méchanceté des hommes, quand on est attaché à Dieu » àîéswr
» Christ et à TÉglise même par la charité. C'est imiter aeiat Faol
» que de souffrir en paix l'excommunication et rtnathème in?
» juste plutôt que de trahir la vérité ( jansénienne), loin de s'é-
> lever contre l'autorité ou de rompre l'unité. Jésos guérit qnd-
» quefois les blessures que la précipitation dei première petUwn
» fait sans son ordre; il rétablit ce qu'ils retranchent par nn lèb
» inconsidéré*. »
4*" Sur la persécution qu'éprouvent les Jansénistes de le paît
de l'Église et de la puissance temporelle.
« Rien ne donne une plus mauvaise opinion de l'Église à tes
» ennemis que d'y voir dominer sur la foi de* fdèUê et if eMtretù'
9 nir des divisions pour des choses qui ne blessent m la faim ks
» mosurs, ( Mais ) Dieu permet que toiUes les puUsastcei soient
» contraires aux prédicateurs de la vérité , afin que sa victoire ne
» puisse être attribuée qu'à sa grâce. Il n'arrive que trop sou-
» vent que les membres le plus saintement et le plus étroitement wiii
» à f Église sont regardés et traités comme indignes d'y être , ou
9 comm§ en étant déjà séparés. Mais le juste vit de la foi de Dieu
9 et non pas de l'opinion des hommes. Celui (l'état) d'être perse-
9 cuté et de souffrir comme un hérétique, un méchant, un
» impie, est ordinairement la dernière épreuve et la plus méri-
9 toire, comme celle qui donne plus de conformité à Jésus Christ.
» L'entêtement, la prévention, l'obstination à ne vouloir ni rie»
9 examiner, ni reconnaître qu'on s'est trompé, changent tous les
» jours en odeur de mort, à l'égard de bien des gens, ce que
» Dieu a mis dans son Église pour y être une odeur de vie, comme
» les bons livres, les inslruclions, les saints exemples, etc. (des
9 Quesnelli^tes). Temps déplorable où on croit honorer Dieu ei
9 persécuUnt la vérité et ses disciples. Ce temps est venu... Être
9 regardé et traité par ceux qui en sont les pasteurs (de la rdi-
* Prop. xci, xcii, xcin. Saint Pîe V, Grégoire XIII, Urbain VIII,
Innocent X, Alexandre VII, Clément XI, papes ; de Préciplano, arche-
vêque de Ma'ines, et presque tous les autres éîêques en communion
avec le saint Siège, étaient ces pasteurs inconsidérés ^ etc., dont parie
Ici le modeste et respectueux sectaire.
■ gimi] comme un impie, indigne de tout inimmcrce avec Dii.>u,
» comme on membre pourri, c.ipaWe de tout toirompre ilans la
■ socii^lt: des saints; c'est pour les persoiines pieuses une mort
• plus terrible que celle du corps. En vain on se Datte de la pu-
> reté de ses intentions el d'un zèle de relîgïoo, en poursuivant
• dei gtntiebien i feuelïsaog, si on est, ou aveuglé par sa pro-
> pre passion, on emporté par celle des autres, faule de uoiilpir
• bien examiner > (par l'esprit privé de Luiber ; car, après les dé-
cisions de l'Ëglise, par quel esprit peut-on examiner la doctrine,
dans le dessein de fouler aux pieds ses définitions dogmatiques,
ai ce n'est par l'esprit que précbuil l'hérésiarque allemand?],' Oa
> croit souvent sscrïiier à Dieu un impie, et oa sacrifie au diable
• un sertiteur de Dieu <. >
0' Uaxiuie admirable sur les sermens que l'Ëglise a souvent exi-
gés pour s'assurer de la foi de ses ministres, et en particulier sur
le serment prescrit parle Toraïuiaire d'Aleiandre VU,
< Rien u'cst plus contraire ï l'esprit de Dieu et li In doctrine
> de Jësus-Chrisl que de rendre communs les sermens dans l'Ë-
■ glise, parce que c'est multiplier les occasions des parjures,
■ dresser des pièges uix faibles et aux ignorans et faire quelque-
' (oisserTirlcnomei lavéritèdeUieuaui desseins des méchana*.
6° Enfin voici uneautre maxime très-commode !i l'égard des dis-
penses de toute sorte de lois divines, qu'on peut se donuer d'au-
torité privée.
• L'homtue peut se dispenser pour sa consenatioD d'une loî
> que Dieu a faite pour son utilité \ > En eltét, puisque tout
> fidèle participe immédiatement et euentîeliement A la puissanca
spirituelle et qu'il a droit de juger eu matière de doctrine, pour-
quoi ne lerait-ît pus aussi docteur compétent pour interpréter la
loi de Dieu, et s'en dispenser lui-même dans un cas aussi urgent
que celui dont il s'agît, daas l'espérance que Jésus-Christ le dis-
pense lui-mâme? Quesnel en agit de la sorte i l'égard d'une loi
de l'Eglise très-importante. Comme an l'accusait de s'être lait ua
oratoire dans sa demeure et d'j avoir célébré la sainte messe de
sa propre autorité, il répondit qu'il crevait que Noire-Seigneur
Jéiug-Chritt Vatatl ditpenté immédialrmait et par lui-même de l'ob-
• Prop. Il
' Prop. cj
I, !tcvii, Il
896 QUE
iirvance de celle loi par la nécesHlé oU il élaU de eamêerver m fie
et sa liberté^.
Exposé succina des vérités opposées aux erreurs condamnées dtas
les Réflexions morales.
I. Le principe des deux amours exclusifs, si somrtDl ptoserit
par le saint Siège avec Tapplaudissement de toute rfiglite, est
£aux en lui-même, absurde dans les conséquences qui en décou-
lent, et il ouvre la porte à une foule d*erreur8 criantes.
Nous disons /"aux en lui même, parce qu*il j a en effet des affec-
tions intermédiaires, lesquelles, sans justifier rbomme ni le hin
mériter pour le ciel par elles seules, ne le rendent néanmoins pat
coupable et ne se rattachent par les motifs qui j président ou par
rimpulsion qu'elles reçoivent, ni à la charité, ou amour avriMte-
rel de Dieu pour lui-même, ni à la cupidité, ou amour déré§lé do
la créature. Tels sont, dans Tordre surnaturel, Tamour dicté par
Tespérance chrétienne et la reconnaissance envers Dieu pour les
grâces reçues de sa miséricorde, vertus qui découlent de la cha-
rité proprement dite, sans toutefois l'exclure, et qui peuvent se ren-
contrer dans un fidèle privé de la grâce sanctifiante, encore sans
amour de bienveillance pour Dieu. Tel est, dans Tordre moral,
ce penchant invincible pour le bonheur, inséré par la Providence
divine dans notre cœur, lequel porte Thomme à des recherches,
à des démarches, à des mesures que la droite raison ne désap-
prouve pas toujours ; même à Tamour du bien, à Testime de la
vertu, à la pratique de quelques devoirs. La loi naturelle inspire
à un époux de la tendresse pour son épouse, à un père de Taffec-
tion pour son enfant, à celui-ci un juste retour pour Tauteur de
ses jours, à Thomme de Tamour pour son semblable et mille autres
sentimcns bons et louables en eux-mêmes dont cependant la cha-
rité n'est pas toujours et souvent ne saurait être la cause ou le
mobile, puisque cette vertu suppose la foi que n'ont pas tous ceux
qui sont susceptibles de se conduire d'après ces sentimens hon-
nêtes. « L'image de Dieu n'est pas tellement dégradée dans Tâme
» de Thomme par la souillure des passions terrestres, dit saint
V Augustin, qu'on n'y en reconnaisse plus comme les derniers
» traits : d'oii Ton peut conclure que, dans Timpiélé même de sa
* Enlrct. du docteur, au sujet des âOaires présentes par rapport à la
religion, t, 3, p. 221,
.uqu-il
QUI-:
' >ie, riiORimc observe cnCDm en i|uelqties poin
c pense quelquefois bien '. > Le m^inc père avoue qu'il y "
amour humain licite et un autre qui ne l'esl pas ; il ilii que le pre-
mier est tellement permis que , si on ne l'a pas, on est juste-
ment repris *. ' Il n'est personne, selon saint JérAme, qui n'ait en
1 soi les germes de la sagesse, de la justice et dea autres lerioa
. (morales). Delà rient que plusieurs, sans le secours de la foi et
> de rËvangile de Jésus-Christ, se comportent sagement et sani
> reproclie en quelques points..., ayant au fond île leur cœur les
> principes des vertus '■ > Le saint docteur de la grice tient 1 peu
près le même langage sur le m#ine sujet *, et saiol CLrynostome
n'enseigue pas une autre doctrine ^ Le principe des deui amours
excltisifs est donc (anx en lui-aUme.
Il est encore abiurde daailei eonêéquencenqui en dAsialenl. Car,
si toutes les volontés et toutes les actions de l'homme qui u'iSma-
nenl pas de la charité strictcrocnt dite ou de l'impolsion de cette
tertu procèdent nécessairement de la cupidité vicieuse, il «'ensuit
que tout homme qui n'a pas l'amour surnaiurel de Dieu pour lui-
mâme, ou qui n'agit pas sous l'influence de cet amour, pîche né-
cessairement dans tout ce qu'il fait, quoi qu'il fasse et quelque soit
le rooiif qui le porte !t agir. Si donc un infidèle vole au secours de
sou prochain prêt ï périr, parce qu'il voit en lui son semblable, il
pèche ; si la compassion l'engage à donner du pain & celui
faim, i revêtir celui qui est nu, t réchauffer celui qui mei
froid, ï fournir des remèdes à celui qui manque de toute ressource |
dans la maladie, il pèche encore : s'il modire son emportement,
< Verumlamen quin non usquè ndeâ in animA humanï Imngo Dei
Icrrenarum affecluum labe detrila est, ut nuila in ea telul liiieamenla
etlrema remanseriut, uodè merilit dicî possit ctiam in ip«a impiciate
vitzsux facerestlqua legis Tel sapere. De splril. et litl-, c. >8.
) Serm SiH, c 4 et S. Ed. Miur.
' Perspicuum est... ncc qucmquam non halierc in ic scmina snplen*
lis cl juiiiliz , Tcliquarumque tirlutum : undè mulii abH|ne Qde et
F-Tangelio Chrisli, vel rapleutcr Taciunt aliqu», ici tauctè... babentet
in seprindpia lirlulum. In cap. ),epul. adGnIai.
' Llb. I, De peccal. meril. et rcmiss., c. S3, n° 31.
' ludidit Déni nalurx uostra- quemdam amorem , nt aller atlerum
diliKamuc Invicem ; omnc cnim animal dilieit «ui simile, et borna suum
I. Vides quM ad virluU'm scmina habemus a nnlurt. Hom.
t. ad Epbes.
Il, 34
;J08 QIK
aiin de ii'oiïenscr personne dans le délire de la colère ; s'il s'abs-
tient de tout excès à table par aoiour de la tempérance ; s'il dé-
tourne les yeux de dessus un objet séduisant, ulio de ne point
s'exposer à manquer à la fidélité qu il doit à son épouse, ilpèckede
même : s'il est fils soumis, époux tendre, ami bon et préreyiaDi,
plein d*amour pour sa patrie, zélé pour le bien public» etc., ces
vertus sont pour lui des vices, et tous les actes qu'il en Hait tout
autant de péchés. Cependant si cet infidèle n'agissait pas ainsi, ou
s'il faisait tout le contraire, il pécherait très-certainemenL D'où
il faut conclure : l^" qu'il pèche nécessairement dans toutes ses -
volontés et ses actions; 2« que Tinûdélilé négative, si elle a lien
chez lui, loin de Texcuser du défaut de charilé, est efle-mème on
péché damnable, assez volontaire dans le péché originel dojQielle
est la suite, péché qu'Adam a commis avec une pleine connaissance
et une entière liberté; 3** que lu loi naturelle, qui commande le
bien sans obliger de le faire par l'influence de la charité, vertu
qui n'est pas de sa compétence, est mauvaise et ne peut venir que
de la cupidité ou que du mauvais Principe ; 4** que Dieu n'a mis
ce malheureux dans riuûdélité et ne l'y luisse sans secours surna-
turel (puisque hors de Tt^glise point de gnkcs, dit Quesnel) que
pour le perdre à jamais. La plume loinbe des mains à la vue de
tant d'absurdités, de blasphèmes, d'erreurs et d'hérésies.
Nous disons d^erreurs et dliéréiics^ auxquelles le principe des
deux amours exclusifs ouvre une large porte. Car, outre ce qu'on
vient de voir, puisqu'il n'y a qu'un amour légitime et que tout le
bien que nous faisons ne peut venir que de 15, il n'y a non plus,
à parler très-strictement, qu'une seule vertu, et tout ce que l'Écri-
ture et la tradition nous recommandent comme tel, s'il n'est in-
fiuencé par la charité, seul amour légitime, est vicieux et ne vîeut
que de la cupidité. Ainsi il faut rejeter l'ancien Testament, qui
exhorte les païens à faire du bien ; le nouveau, qui prescrit d'au-
tres vertus que la charité ; les conciles, qui parlent comme l'Écri-
ture ; les Pères, qui n'en sont que les interprètes ; tous les doc-
leurs orthodoxes , dont le langage se rapproche trop du
Pélagianisme et du Semi-Pélagianisme. 11 faut croire aussi que
les dispositions par lesquelles l'infidèle arrive à la connaissance et
à l'amour surnaturel du souverain bien, les démarches que fait
le pécheur pour en venir aimer à Dieu pour lui-môme, les prières, les
macérations, les aumônes auxquelles il s'adonne avant que d'avoir
tachante, sont toutes autant de juVIiés, nicmc morlels; si l'on on
yiK
:i9iï
crml lariffulaire dfj'j laiit ilcTiiis ciiée. Abrégeons: ai le (irind[ie
que nous einminona esl vrai, tp Jaasénlstne IVsl aussi àam Ha
plit^ grande pariie ; ei, dans cette bjpollièse révolunte, l'abbâ rlo
Saiut-Cynm esl demeuré au-dessous delà vérité quand lia dîiqno
l'Église n'était plus, depuis cinq an six enU ont, qu'une adiilltrp,
tl qu'il bllail en bllir une autre, suivant b nWélalion qu'il en
avait reçue de Dieu : il eût dû dire que jamais elle n'avait été. 0
poriettlum ad aWma* terras deporlaadum !
Le principe des deui amours eiclusirs est donc ftuï eu lui-
juéme, absurde dans les conséquences qui en déconlent, et il ou-
vre la porte â une foule d'erreurs criantes; par couséquenl tout
le sjsténie jansénien, quant ï ce qui se trouve fondé sur ce prin-
cipe détestable, [tombe et n'a plus d'appui. Concluons de Ih qu'il
r^ut reconnaître, soit dans l'ordre surnaturel, soil dans l'ordre
naturel, plus d'an amour légitime.
Quant aux conséquences que QuesncI déduit de son principe
ruineux, saus entreprendre de le ri!'ruier ici, ui même de te sui-
vre dans tous ses excès, nous y apposerons seulement les vérités
suivantes :
1° Touchant l'état d'innocence.
Il faut reconbattre qu'avant sa déplorable ebute, Adam avait
été sanctifié et destiné i posséder Dieu dans le ciel, orné de la
foi, de l'espérence, de la cliarilé, aidé de la grSce avec laquelle il
pouvait persétéref, et avait en elTet pereéviré quelque temps;
qn'il avait été élibli maître des mouvemcns de son cœur, doué de ^
l'immortalilé, exemple des misères de cette vie ; mais par un effet
de la HbéraliU^ de Dieu qui ne lui devait ces dons admirables, t
comme appartenant II l'essence de la nnture humaine, ai comrne
en étant le eomplémeot nécessaire, ni comme une suite de la créa-
tion, ni comme exigés de la justice, de la sagesse, de la bonté du
Créateur.
Ainsi l'étui dépura nature, que la plupart des théologiens or-
thodoxes admettent, non comme ai/ant réellement exUté, mais
comme potable, ne doit pas être taxé de rêverie, d'imagination
ori'uae, de chimère intolérable, encore moins FétBl de nature en-
litre qui e(lt eu sur celni-lï quelque avantage pour l'Iiomine.
La grfiec d'Adam était surnaliiretle dans son principe, dans sa
nature, dans ses fins ; les mérites qui s'ensuivaient étaient dona
de même espèce et non point des mérites humains, c'esl-îi-dire de«
mérites oalurels.
400 QUE
11 est vrai que, supposé son élévation à la béatitude, tant que le
premier homme fui sans péché, il était de la sagesse de Dieu de
lui donner les moyens nécessaires pour pouvoir arriver à cette fin su.
blime; et Thomme^ne s*en étant point encore rendu indigoe par la
désobéissance, y avait une sorte de droit, mais non en consé-
quence de sa création, ni en vertu de Texigence de sa nature.
L'homme innocent n'éprouvant au dedans de lui-même aaciuie
révolte, il lui était bien plus facile de persévérer qu*à Thomme
déchu et justifié de nouveau, puisque celui-ci est en butte à une
concupiscence malheureuse qui ne cesse de combattre en lai con-
tre la raison ; la grâce nécessaire dans le premier état pouvait
donc être moins forte que celle qui est requise dans le second ;
mais, dans Tun et dans l'autre, le mérite pour la gloire présuppose
toujours la grâce proprement dite.
La sainte Vierge étant née d'Adam, comme le reste des hom-
mes, elle devait par-là même contracter la souillure du péché ori-
ginel, et en ressentir les suites déplorables comme les autres en-
fans de ce père prévaricateur : nous convenons néanmoins qu'iZ
est pieux , conforme au culte ecclésiastique, à la foi catholique^ à
VÉcriture et à la raison, de croire que cette auguste mère de
Dieu a été conçue sans péché, quoique nous ne regardions pas
l'immaculée conception comme un dogme qui ait le caractère d'ar-
ticle de foi dont la profession soit nécessaire au salut.
« La mort est pénale dans les plus justes : elle a été dans la
9 sainte Vierge la dette du péché qu'elle aurait contracté, si Dieu,
> par un privilège spécial, n'avait suspendu en sa faveur la mali-
> gne influence de la génération... Les afflictions (qu'elle) a souf-
> fertes n'ont pas été la peine de ses péchés actuels, puisque la
» foi de l'Église nous apprend qu'elle n'en a commis aucun. Dieu
» ?'^':ge les pécheurs; mais les souffrances ne sont pas toujours
• de sa part la peine des péchés actuels. 11 afflige quelquefois les
» justes pour manifester sa gloire^ perfectionner leurs vertus, aug-
9 menter leurs mérites. >
2* Sur la charité.
Elle est ou habituelle ou actuelle,
La première est la grâce sanctifiante, qui rend celui qui la pos-
sède ami de Dieu, son enfant adoptif, membre vivant de Jésus-
Christ, son cohéritier pour le royaume céleste. La foi, l'es^xirancc
et la charité sont constamment les compagnes de cette grâce. Elle
est nécessaire pour opérer des œuvres dignes des récompenses
■ UHF. loi
éLeruelle!!, quuîqii'elle ne soit p;i3 la seule condilîon rC(|iiise pour
mériler ainsi jiar les bonnes luuvrcs. C'est un don que la misùfi-
corde accorde par les mérites de J^os-Chriet ; te péciieur ne peut '
II' méritée rigoureusenieut, c'cst-k-dïte de coadigno, cooinie par< .
leuites iliËoIogiens; mais impropre me ut, de congruo, en s'ydîs-
piisanl avec le secours de la grûee par des œuvres surnatureltea :
lujusie, au contraire, peut en mériter de condigiia l'augmenta-
tiun. Ce don précieui eat inLérenl dans l'ime, d'oti le péclié m
tel seul le bannit.
La cliarité acluetle est cette vertu théologale par laquelle oa
uime Dieu par dessus tout pour lui-mfime, et l'on s'aime e
prochain comme soi-mâme pour Dieu. Elle peut eue plus oi| i
moins ÎDlense; mais il est de la nature de cette venu de préférer |
Dieu i toutes choses : c'est donc ï tort que Jtnsénius et ses pai:-
tisjins la subdiïiseut en une charité qui aime Dieu par dessus li
cl une autre qui ne s'élëfe pas jusque-lï. Elle surpasse toutes Ici I
autres en excellence, au rapport de l'apâlre et parce qu'elle noua 1
unit i Dieu d'une manière plus intime et plus parfaite ; mai
ne peot dire sans erreur qu'elle soil la seule vertu : l'Écriture el I
U tradition nous en montrent d'autres encore qui parlent à Dieu ^
el qui l'hoDorenl, que Dieu écoute et qu'il récompense ; la foi et
l'espérance, par exemple, sont distinguées de la charité i elle!
viennent de la grlce, sont boDues en elles-mêmes, nécessaires
daus les adultes pour parvenir i la justification, quoique non en-
core méritoires pour le ciel, el ne se perdent point avec la cha-
rité ; mais seulement la première par l'iaQdélilé, la seconde par
le désespoir cl la présomption. — Quand le pécheur manque d'es-
pérance, la foi lui demeure encore ; il peut avoir d'autres vertu» J
morales; tout ne lui manque donc pas. Ij crainte servilereconnatlf
la justicedu Tout-Puissant; la fui, sa véracité; l'espérance, sa mi- F
«éricorde, sa puissance, sa fidélité dans ses promesses ; l'observi- I
n de quelques préceptes, son domaine suprême, etc.; il y a doue
is sortir absolument de la religion, un état oti la charité ne i
e, ou ce qui revienlau même, l'homme qui a perdu celtA I
^euse reriu et la gHice sanctifiante n'est pas par cela seul ui
ne.llpriemèmeuiilementis'ildemandeleseecourssurnaturelsdonl 1
a besoin pour sortir de cet étal déplorable, s'il prie a<rec le du-'J
Hjein, le désir de s'iincnder, de rentrer en grAce avec Dieu :
f doute que s'il prie avec orgueil ou présomption, avec l'alTcclioit'.fl
t Kluellc au péché, dans la disposition de le commettre encore,
3-1'
402 QUE
aacun désir de le quitter, de faire la paix avec Dieu, 8i prière est
mauvaise et elle est un nouveau péché.
La première gr&ce que le pécheur reçoit n'est point le pardon
de ses péchés ou la grâce qui le réconcilie ; il faut que la foi lui
ouvre les yeux sur le malheur dans lequel le péché mortel Ta
plongé, que la crainte lui fasse sentir le danger de sa positioo,
que Tespérance relève son courage, que la confession rfaumilie,
que la douleur le dispose à être justifié dans le sacrement de péni-
tence ; toutes ces dispositions viennent de la grâce, et elles précè-
dent d'ordinaire, ou du moins souvent, le pardon, la justification :
nous disons d'ordinaire ou du moins êouvent, parce que si le re-
pentir est rendu parfait par la charité, comme il arrive quelque-
fois, il réconcilie avant la réception du sacrement de pénitence,
quoique non indépendamment de la volonté de le recevoir : repen-
tir encore qui ne vient pas dans le pécheur sans la grâce qui
éclaire son esprit, touche son cœur, Taide à gémir librement, pré-
pare donc le pécheur à la contrition parfaite.
Puisqu'il y a entre les deux amours exclusifs des affections
bonnes, des vertus même, dans l'ordre surnaturel et dans Tor-
dre naturel , tout ce qui n'émane pas de la charité et tout ce qui
ne se fait pas dans l'état de grâce ne procède pas de la cupidité
vicieuse et n'est pas péché ; il est donc faux que la charité ou la
cupidité rendent exclusivement l'usage des sens bon ou mauvais;
que l'obéissance à la loi qui ne découle pas de la charité comme
de sa source ne produise qu'hypocrisie ou fausse jjiistice ; que la
prière qui n'est pas animée par cette vertu soit vaine; qu'on coure
en vain quand on court par un autre mouvement , etc., etc. — On
ne peut trop recommander aux fidèles de rapporter leurs actions
à Dieu par le motif de la charité , puisqu'il est le plus parfait de
tous; mais puisqu'il y a d'autres motifs qui honorent Dieu et qui
lui plaisent, quoique moins excollens en eux-mêmes, et que le
premier commandement , considéré comme aFfirmatif, n'oblige
pas h tous les instans, on n'est pas tenu de rapporter à Dieu tou-
tes ses actions par le motif du pur amour, c'est-à-dire de la cha-
rité. On doit produire de temps en temps, souvent même, des ac-
tions de charité sans marchander avec Dieu , si nous osons parler
ainsi , et sans examiner si le commandement oblige maintenant
ou non ; mais le propliètc-roi nous apprend clairement qu'on peut
aimer la loi du Seigneur , et s'attacher â l'observer à cause des
grandes récompenses que Dieu a promises â ceux qui y seraient
QUE
■103
: IneUnavi tùrmtumod fUrirnàaijutlIfteallotietliia» in (eUr-
mm , prnpUr retribulionein ' ; et le saint concile de Trente aua-
lliéinalise celui fci dit qug l'homme jMfi lié pteht quand il fait da
bonnes oeuvres dans lit rue de la rt'compejue éiernelle*. — 11 eslds
toute fausseté ({u'il n'y ait point de grâce hors de l'Église. Qu'est-
ce t[vn amène tous les jours dans le «eia de cette tendre mère tant
lie schismaiiqueE , d'hérétiques , de juifs el d'inSdèles qui ; vien'
nent b notre grande consolation , si ce n'est la grSce dont ils écou-
lent et suivent librement les luiniires, les mouTemens saJuiaïresT
Dire qu'ils font, par les forces de la nature et du libre arbitre,
tout ce qni précède et ménage leur entri^e duna le sein de l'Église,
cl qu'ils y entrent même sans grâce, n'esl'Ce pas tomber dans
un égarement plus grand que les scmi-Pélagiens condamnés par
l'Ëglisc pour avoir soutenu opiniitrément que le conimcncemenl
du la foi ne vient pas de la gricef
3" A l'égard de la foi.
Elle est un don de Dieu , le commencement du salut de rbommc,
le fondement et la racine de toute justification; mais elle neauf-
lit pas seule pour jusllller le pécbeur. C'est elle qui prête ani ac-
tions chrétiennes les motifs qui les sur naturalisent, el par-lï elle
contribue à les rendre méritoires pour le Ciel. Elle est vive quand
elle optre les œuvres, morte quand elle n'opëre rien ; formée quand
elle est accompagnée de la grâce sancilliaule , informe quund elle
en est isolée ; mais, dans tous les cas , elle est toujours uu don de
Dieu , une venu surnaturelle , et non une foi humaine ou naïu-
On ne peut pis dira dans un sens rigoureux qu'elle est la pre-
mière grSce : la foivient par l'ouïe, /Idej<r.idN^i(u, dit saint Paul;
or, c'est une grilee que d'en entendre parler, d'en connaître l'ob-
jet, d'en apercevoir la nécessité; c'en est une que d'être toucha j
des vérités qu'elle ense.igne , de les aimer , d'; acquiescer libre-
ment ; d'nilleurs les doutes el tes craintes que ressentent les hé-
rétiques, les juifs, les infidèles sur la bonté de leur religion , les
désirs qui leur viennent d'examiner s'ils sont Traiment dans la
voie qui conduit ï Dieu , elc.préc^rleut la fol el sont des grfireg.
S'il n'j avait de grlces que par la foi , on pourrait donc arriver
à cette vertu saiii grAce, et les dispositions qui y amènent ne cou- ,
' Pul. US.
> ScH. G, Dejualif.,cau. 31.
404 QUE
leraient pas de celle source divine , mais elles viendraient des lu-
mières naturelles et des forces du libre arbitre de Tbomme ; er-
reur condamnée depuis long-temps par TËglise dans les semi«
Pélagiens. Si la foi était aussi la source de toutes les grâces, tous
ceux qui n*ont pas la foi ne pourraient Tavoir, et par conséquent
aucun d'eux ne se convertirait, ce que Texpérience démontre faux ;
ou ne se convertirait que par des moyens naturels , ce que la foi
elle-même ne permet pas qu'on admette. 11 s'ensuivrait aussi de
là que les infidèles, les juifs, les hérétiques mêmes, n'ont point
de grâces , et que Dieu les laisse donc sans aucun moyen sa£Qsant
de salut : ce qui est formellement contraire à l'Écriture et à l'en-
seignement universel de toutes les écoles catholiques.
11 est vrai que la foi opère par la charité quand elle est accom-
pagnée de l'observation exacte de la loi de Dieu , selon cet oracle
de notre souveraiu législateur : « Si quelqu'un m'aime , il mettra
9 ma parole en pratique ; et mon père l'aimera, et nous viendrons
, > à lui , et nous établirons en lui notre demeure *. > Mais elle opère
aussi par elle-même , indépendamment de la charité , en soumet-
tant l'intelligence à Dieu considéré comme vérité suprême ; elle
opère par la crainte en inspirant une salutaire terreur de la justice
divine ; elle opère par l'espérance en élevant l'âme jusqu'à la con-
fiance en lu miséricorde de Dieu et en ses promesses ; enfin , elle
opère par toutes les vertus chrétiennes auxquelles elle fournit, si
nous osons nous exprimer ainsi , les motifs surnaturels qui en
sont comme les alimens intérieurs et un des principes qui rendent
ces vertus méritoires pour l'éternité. — Pour être sauvé, il faut
croire, espérer, aimer et tout au moins avoir la volonté sincère
d'observer toute la loi de Dieu : ceci s'entend des adultes qui se
convertissent à la mort, comme le bon larron ; car ceux qui en ont
le temps doivent mettre la main à l'œuvre pour Taccomplissement
réel des préceptes divins : quant aux enfans qui meurent après le
baptême, rien ne leur manque pour arriver de suite à la gloire, et
la justification qu'ils ont re«;ue dans ce sacrement leur suffît, y
ayant été ornés de l'habitude de la foi, de Pespérance, de la cha-
rité, et décorés de la grâce sanctifiante. — Dire que tout est ren-
fermé pour le salut dans la foi sans les œuvres, c'est prêcher le
^ Si quis diligit me, sermoncm roeura servabit , et pater meus diliget
cum, et ad eum veniemus, et mansioncm apud eum faciemus. Joan.,
14. 23.
i
QUE 40&
I tout pur, suii qu'on caiende par la fui h Tjusse con-
fiance de Cahin, soitqii'oo prétende que les œuvres DU le dôsir el
la volonté sincère d'obsener lei cooniaiidemeus ne soienl pas né<
cessatres aux adultes pour £ire sauvés. Y ajouter seulement la
prière, c'est adoucir cette liirésie : dire que tout le» autre» moyeiu
detalultonl renftrmit dan* la (ai, commedauileuT germe eidoai leur
temenee , maitqueee H'««lpa«URe foiians amour et tant confiance,
c'est insinuer qu'il n'y a puint de grâces pour ceux qui n'ont pas
la Toi ; que les dispositions qui mènent !i cette vertu ne sont pas
des moyens de salut ui par conséquent des erdi'i», el que la ïbi,
sans la charité et sans U confiance, n'est pas une vraie foi, vais
une croyance purement humaine et naturelle, ce qui est erroné.
— On ne peut mériter le ciel sans la foi ; mais ou peut, sans ce se-
cours, faire quelques œuvres bonnes moraleoeut et avoir quel-
ques vertus naturelles : la loi naturelle est écrite dans tous Ica
cœurs, et elle parle ù tous plus ou moins clairement, ainsi que la
conscience; il ne faut donc pas dire que toutes les vertus des plii-
losoplies païens étaient des vices, nï que toutes les œuvres des in-
fidèles sont des pécliës, doctrine pernicieuse que le saint Si^e a
souvent proscrite et toujours avec l'applaudissement de toute l'I^ i
glise.
i' Par rapport à la crainte de l'enfer.
Elle peut être considérée en elle-même ou dans le sujet qui en
est pénétré. Sous le premier rapport, elle est fondée sur la foi^
et elle tend !i nous inspirer des mesures pour éviter des peines
réelles et justement redoutables : elle est donc bonne, utile, el
ne vient point de la cupidité, mais de la grice célesle : aussi t'Ë-
criture en fait-elle souvent l'éloge '. Le roi prophète la demaik* ■
dait il Dieu *; les apôtres la recommandaient aux fidèles ', et saint {
Paul la portait dans son propre cœur '. D'ailleurs, dunsquel»
dessein les prophètes, Jéius-Cbrist el scsenvoyésaousparlent-ils
Uini , dans lei saintes Lettres , de la sévérité des jugeniens de
Dieu et de l'excès des lourmens qui accablent en cnlerlesréprou-
vés, si ce n'est pour nous engager 1 redouter saintement cei
'IniUum saplentix, timor Domiul. Eccll., I, 16; Psal., 110, 10 1
,1,77.
*Ps. 118,
•2. Cor., 7, Il PhJUpp., 1. 13.
"l.Cor,,0, Î7.
406 QUE
jets si terribles, à nons détacher du péché, à le fuir et à dure pé-
nitence de ceux ((ue nous avons eu le malheur de commettre f
Que cette crainte, reçue docilement d*en haut et dirigée aTec le
secours de la gr&ce vers les fins qui y sont propres, opère ces
heureux effets, peut-on en douter, pour peu qn*on ait in les Lî-
Tres saints, les TÎes des héros de la religion, et qa*on connaisse
les ressorts qui meuvent le cœur de Thomme ? Noos nous éonteiH
terons de citer ici David, que la pensée des jugemens de Dîeo fai-
sait trembler * ; Susanne, qui, pour ne point donner la mort à
son âme, ni se souiller d*un crime énorme devant Dieo, résista
courageusement aux sollicitations impudentes de deux inttraes
vieillards, juges dans Israël * ; Ëléazar^ qui ne voulut pas feindre
une odieuse apostasie, parce que, disait-il, quoiqn*il pftt, dans le
temps présent, échapper aux supplices des hommes, il ne Itti était
pas possible d'éviter, ni dans cette vie, ni dans Tautre, la main
redoutable du Tout-Puissant' ; Manassès, que la vue des fers et
de la dure captivité qu*il endurait à Babylone pour ses prévarica-
tions multipliées rappela au vrai Dieu, le lui fit craindre et ren-
gagea à crier vers lui miséricorde avec instance et d*une manière
si efficace *. Que de pécheurs la crainte n*a-t-elle pas ramenés
au devoir, détournés du vice, excités à faire pénitence ! Que d'â-
mes chancelantes elle a soutenues dans la pratique laborieuse de
la vertu, empêchées de succomber â des tentations séduisantes,
éloignées des occasions prochaines ! — 11 est vrai que la crainte
servile ne justifie pas seule ni par elle-même le pécheur; mais elle
bannit le péché ", elle rend docile à la voix de Dieu, elle porte à
rechercher ce qui lui platt, à préparer le cœur et à sanctifier
Tâme en sa présence, à garder ses préceptes, k faire pénitence, à
espérer en sa miséricorde <^. Le concile de Trente la range parmi
les dispositions à la justification ^ ; il déclare que Tattrition, qui
se conçoit communément par la considération de la laideur du
péché ou parla crainte du châtiment et des peines, si elle exclut
la volonté de pécher et est jointe à Tespérance, non-seulem^t
* Ps. 118, 120.
2Dan., 13, 22et23.
* 2. Mac, 6, 26.
* Parai, 85, 12 et 13.
6 EcclK, 1, 27.
•Ibid.,2, 18, 19, 20, 21, 22, 23.
^ Sess. 6, c 6.
40T
De rciid pas riiODime bjrpocrile cL plus pi^clicur , mais fsl un
duii de Dieu , un uioiiv«menl du Suini-risprii qui n'Iiabili! jhis
encore dans l'imc, mais seulement l'excile, et II l'aide duquel
mourdiiieol le pëDitent se prépure la voie à la justice et CKl dis-
posé à recevoir la grJcc de Dieu dans le «acreineni de péniteoce K
Eiiljii il délioit <]ue crue luême coDiriiion, qusnd elle est accota-
pagni't' <I'uu propos siacèri: de nii'uer une meilleure vie, esl une
douleur vraie, utile, et qu'elle prépare k la grlcc*.
Il Vil donc faux que la crainle servile conduise d'elle- même au
désespoir, qu'elle D'arr£te que la main, qu'elle u'eicluepafil'af-
fecliUD actuelle au péché, que celui qui ne s'abslienl du criiac
ijue par l'impulsiou de celte crainte salutaire pèche daos son
cojur et soit coupable par-lj même devant Dieu. Saint Augusiiu,
pour ne parler que de ce Père, que les Jansénistes ont continuel- '
lemeiil dans la bouche, an bout de leur plume, et dont Ils font
gloire de se dire les disciples, saint Augustin lient un tout autre '
hmgagc ', et il termine ce qu'il dit touchant la crainle de l'cnlcr
par en fccooualire la bonté, l'uliliié : Bonus eal, et itte tiiaur nii- i
(iï «(.
Huis pourquoi Qucsnel, ù l'exemple de ses maîtres, et ses dis-
ciples après lui, rejcllenl-ils si opiniAlrénienl la craintcservîleî
La raisun en est claire : c'est qu'ils tiennent îi leur maxime capi-
tale, que toutes les mlontés et les actions de l'homme étnaoeul
exclusiveroeni de la cJiaxiié pmprement dite ou de la cupidité vi-
cieuse, niaiime qu'ils ont le plus grand inlérSl de soutenir, pui^
que sans elle tout leur sjislËinc tombe eu ruine, n'ajMil plus
d'appui : or, la crainte servije ne vicut pas de la charité ; il faut
donc, selon eux, qu'elle toit uuo production de la cupidité, par
conséquent qu'elle soit maniais el qu'elle ne puisse rien cnliui-
it'r que du niai, C'est par une suite de cette maiime détestable
qu'un nous dit qu'un htplM ni encore tnut (a loi, camaeaajuif,
a'U ii'aecompUt poini ta loiou «'il l'aceniiiplU par la neule crainte,
docirinc dont l'alisurililé saute aux yeux. — Suivant saint Augus-
lin, l'amour et la crainte se Iroiivenl dans l'uu et dans l'autre
Tesiuiiient ; cependant la crainte prévalait dans l'ancien et l'amuur
|irëiaui dans le nouveau '. tinel ni le caitialiqve, dit ailleurs ce
* Sm. 14, r. i.
'\m.. rail. :..
* Eiiarral, in ptal. iS7, ii" 7 el 3,
* Lib, de MO'il), ccgIcï. , c, 18
408 QUE
Père, qui due ce que lei Pélagiens publient que nouê dtiMii, ^ti^
dûM Vaneien Testament VEspritSaint n'aidait point à faire le
bien * ? Saint Thomas enseigne que la loi ancienne ne suffistit pas
pour sauTer les hommes, mais quMls avaient un autre secours que
Dieu leur donnait avec la loi. C*était la foi dans Je médiateur, par
le moyen de laquelle les anciens Pères ont été justifiés, eomme
nous le sommes. Dieu donc ne manquait point alors aux hom-
mes, et il leur donnait des moyens de salut *. Moïse et les prophè-
tes, les prêtres et les docteurs de la loi n*ont donc pas fait seule-
ment des esclaves de la crainte des peines temporelles. — La
crainte purement servile venant de la grâce et de la foi, il est ab-
surde et impie de soutenir qu'elle représente Dieu comme imsmI-
tre dur, impérieux, injuste, intraitable, et puisqu^étaot jointe à
Tespérance et à la volonté sincère de changer de vie, elle dispose
le pécheur à recevoir la grâce dans le sacrement de pénitence,
comme renseigne le concile de Trente, le pécheur peut donc s*ap-
procher de Dieu et crier miséricorde avec celte sainte crainte.
Nous ne parlons pas ici de la crainte que les théologiens appel-
lent servilement servile, en suite de laquelle le pécheur ne s*abs-
tient que de Taction du péché, y conservant une attache actuelle
et la volonté de le commettre, si Dieu ne le punissait pas. On voit
assez qu*une disposition semblable est mauvaise; mais elle ne vient
pas de la crainte, non plus que le désespoir : celle-là est le fmil
d*une affection désordonnée ; celui-ci est reffct d*une lâche pa-
resse.
5» Quant à TÉglise.
Considérée en général et précision faite de ses divers états, elle
peut être définie : la société des saints qui servent Dieu sous un
même chef, qui est Jésus-Christ. Désignée de cette manière, elle
comprend^ sous le nom d*Église triomphante, la sainte Vierge, les
anges et les élus qui régnent avec Jésus-Christ dans le ciel ; sous
le nom d*Ég1ise militante, tous les fidèles répandus sur la terre,
soit les justes, qui ont une sainteté qu*on appelle commencée,
soit les pécheurs que le baptême a consacrés à Dieu et dont la
profession de chrétien est en elle-même sainte; enfin, sous le nom
d*Ég1ise souffrante, les âmes justes, qui, au sortir de cette vie mor-
telle, se sont trouvées encore redevables à la justice divine et
< Lib. 8, ad Bonif., c. 4.
3S.Ch., Quest.98, art. 20.
I
QUE 409
«cLÈvenl de s'ucquiiler dans ve lieu de peines que la foi nous dé-
signe sous le nom de purgatoire.
Uy a dans T^gliae, envisagûe aous ces itois rapports, une com-
iDUnion réelle. Les saints iijlercèdenl dans te ciel auprès de Dien
pour leurs TrËres qui combattent sur la terre ■ nous les henoroni
comme étant les amis de Dieu, et nous les invoquons utilement
dans celle vallée de larmes, afin qu'ils nous obtiennent des grSces
et des Taveurs auprès de Dieu par Jésus-Christ. Leurs mérites sur<
abondans nous sont appliqués, et aussi par manière de sulTrlge
un prières, aui ïuies du purgatoire, au moyeu des indulgences.
Nous aidons encore celles-ei par le saint sacrifice de la messe et
par les œuvres méritoires que nous faisons en leur FaTeur. Il
existe do plus un saint commerce de suffrages, de bonnes oeuvres
et de mérites entre les Justes qui viveniau milien des combats, et
leurs prières ne sont pas inutiles pour les pécheurs. Tous lei
membres de l'Ëglise militame sont unis entre eux et h cette Eglise
par U communion dont l'objet est tout ce qui constitue le eorpa
de celte même Elglise.
Les théologiens catholiques déGnisseot t'Ëglise militante : la
loeiélé de tout Uf /Idilei ri'imU par la profcusiuit d'aite même foi,
la panidiinrioa aux miiat» sacrement, la ëoumintian aux patleun
UgUiniu, prineipaltment an pontife romain. Nous trouvons dans
le sjmbole de Constantinople, qui ne l'ut qn'une e:iiension de ce-
lui de Nicée, quatre caractères essentiels qui distinguent l'élise
de Jésus-Christ de toutes les sociétés ou sectes qui y sont étran-
gères ; Vnem, tanetam, catholicamet apeitalieam Eccletiam.
L'Ëglise militante est une dans la foi, l'usage des sacremens, la
soumission aux pasteurs. Elle est to'inle dans son auteur, Jésus-
Christ , fondement unique et source de toute notre sainteté ; dans
ses premiers prédicateurs, les apôtres ; dans les miracles éclatana
qui en ont annoncé la vérité et la sainteté ; dans ses Bns, sa doc-
trine, son culte, ses sacremens , son ministère; dans une
pnrtie de ses membres, dont Dieu a manifesté la sainteté par
des prodiges; dont un grand nombre travaillent encore sans re-
Uche i se sanctifier, et dont, selon la promesse de son divin fon-
dateur, quclques-unssesanctiSeront dans la suite, et ainsi jusqu'ï
la consommation des siècles; eutin, elle est saiole, parce qu'il
n'y a ai sainiPté ni salut ailleurs que dans l'Ëglise. Elle est ca-
iholiqne, pareo qu'elle est répandue partout par son culte, etc.,
builoui |iir ses ^fansi et qu'elle dnii parcourirtonie la terre »vant
410 QLE
la fin dunoude; parce que sa foi a toujours 6ié, est eoicore, et
sera coustammeiit la même , saus alléraiiou ni changemeDt ;
parce que tous ceux qui seront sauvés, dans tout le monde , et
dans tous les temps, lui aurout appartenu. Eofiu, elle esiëp^iê*
lique, parce quelle remouie aux apôtres, soit dans son ètaMisAe-
ment, soit dans la doctrine qu'elle professe, soit par rapport à
la mission des pasteurs , laquelle n'a souffert aucune inierraption
4iepuis les apôtres jusqu'à nous , et sera toujours la ménae, quoi-
quVUe puisse être coaimuniquée diversement. Nous devons ajou-
ter que rÉglise militante est itidéfeciiOle , ne pouvant ni cesser
d'être, ni succomber sous les efforts de ses ennemis , jusqu'il la
fin des siècles; infaillible, étant inaccessible à l'erreur, soit dans
la fui , soit pour les règles des mœurs , soit quant à la discipline
générale, suivant les promesses solennelles de Jésus-Christ :
« Voici que je suis avec vous , tous les jours , jusqu'à la lin des
» siècles *. Les portes de l'enfer ne prévaudront point contre
9 elle *. 9 Saint Paul la nomme aussi la colonne et l'appui ferme
de la vérité ^. Enfin, l'Église militante est essentiellement pisilfle :
la constitution qu'elle a reçue de Jésus-Christ , l'Ëcriture et la
tradition en font fui.
On peut la considérer sous deux rapports, c'est-à-dire quant à
ce qu'elle a d'extérieur ; et c'est ce qu'on appelle le corps de l'É-
glise : quant à ce qu'elle a de caché, ou quant à son intérieur; et
c'est ce qu'on nouune son &me. « L'àme de l'Ëglise consiste dans
» la croyance des vérités évangéliques, dans l'espérance des biens
» éternels , dans l'amour de toutes les vertus , dans l'esprit de
I» diarité , dans la possession de la grâce habituelle. Le corps de
» l'Église consiste dans la profession extérieure des doctrines
» révélées» dans la participution aux sacremens, et dans la dé-
» pendance des pasteurs légitimes dont le pape est le chef *. •
On peut appartenir à Tlilglise diversement : on peut lui appar-
tenir quant au corps et à l'ùme tout à la fois^ et d'une manière
parfaite ou imparfaite; quant au corps seulement, ou seulement
quant à l'&me. Celui qui, ayant reçu le baptême , professe la foi
ea entier, participe actuellement aux sacremens, au culte publiC|
« Mattb., 28, 20.
Mbif)., 16,48.
» I. ïim., », 15.
* RéaU du Jan«,
I
QtK -iri
esl BOafltîs aiiï pasteuM Ii^gitiioes, possèJf iidi'riftiMniertt la tir,
l'Mpérince, U chirilA cl la gricc sancliliuiile , ccliii-lh fiSl du
irnrps ei d« l'Ame de l'Ëglisf d'une maiiifrre pins on moins pnr-
rjîtF, el il a nn droÏL ré«t lu eid. Celui ()iii rf-imit loates cei
1 hnsM, excppié néanmoins la rharïté fl la gdce h^iblinHIe , ep^
parlieiit aussi sn corps et II l'ime de l'Ëgtise ; mois ï l'tine très-
itiiparfaiienient : c'csi uu pécheur. Celui qui n'a qne l'extérieitr'
n'a pparlrent qu'au corps de l'^glis»; e'esl un hérétique oc culih
Enfin, celui qui désire le baptême ou qui a re^u i-e sacremeni)
jnais a ét« injustement reiranclié dn corps de l'Ëglise, s'il a tes
vurius tliÊolotSales «t la charité habituelle , il appartient à l'Ame
de l'Ëglise, et il est par-Ifi même duns la voie du salut. Ceties.-
danl les trois premiers, le juste, le pécheur et l'hérélique secret,
$oni dan« l'Ëglise effeclivemenl, du nombre de ses membres réels^
quoique l'hérélique caché et le pécheur n'en soient que des inenH
bres morts , dignes de l'enfer , el les derniers , c'esUfi-dire celui
qui déaire le bapli^me el celui qui a été injustement excummuniéf
ne sont dans l'Église qoe à'afftetion , n'en sont poînl membres^
ne sont pas dan; son sein ; mais ils apparlieunent !i l'église par
des liens inlérïenrs, la Toi, l'espérance, etc., qui formeitl l'âme
de l'Kglise, ainsi que nuns l'aions dit.
Il Tant conclure de lii que les hérétiques publics, les aposbitSi
les schismHliqoes el les excommuniés ne sont pas dans l'Ëttli^ef
ni SCS membres, ni dans sa communion, quoiqu'ils soient del'B'
glise, en cesensqu'ajaiii élé baptisés, ilssoni devenus par-lk Ut'
snji^ts, sont soumis b ses lois, assujétis h tes jngemens. On Ûdll |
eoni-lnre encore de la même doctrine que les catéchumènes ne
sont pas non plus des membres de l'f^lise , maïs qu'ils peQ'
veni appartenir i son Ame, ainsi que ceux qici , étant nés dans le
schisme ou l'hérésie , u'onl Hiil aucun acte criminel de révolte itt
contre l'unité, ni contre la roi. Il est clair que les enfaos baptisés
des hérétiques, et qui n'ont pas encore oITensé Dieu gri&*ement(
sont aussi de l'Ame de l'ËglIse, pleins de vie devant Uiea.
Trois Meus extérieurs sonl donc absolument nécessaires pouf
être du corps de l'Ëglise : la profes.'^îon de la foi , la participatluH
aui sacremens ut la soumission aux pasteurs légitimes. M suOil
de rompre un de ces liens pour ne plus être uni au corps de
l'Eglise ; mais quiconque les réunît tous les trois est un membre
véritable, réel, de l'Eglise.
Uuesuel raisonne bl«i tfilTércmioeitl, Pouf peu qu'on veuille le
41Î QUE
suivre avec attention dans tout ce qu'il nous prêche touchan
FÉglise , on s'apercevra sans peine que , marchant avec hardiesse
sur les traces des Montanistes , des Novatiens , des Donatistes , de
Pelage, de Wiclef, de Jean Hus, de Luther et de Calvin, les sor^
passant même presque tous, il exclut du sein de FÉglise les ré-
prouvés, les pécheurs, même les imparfaits, sapant ainsi jusque
dans ses fondemens la constitution divine de FÉglise , pnisqu^il
lui 6te par-lk toute sa visibilité. H n'attaque pas avec moins d'au-
dace cette constitution sainte , quand il fait dépendre les actes
d'autorité qui émanent des premiers pasteurs du contentemetU
au moins présumé de tout le corps de l'Église; et la validité des
fonctions sacrées, de la sainteté des ministres de la religion : insi-
nuant par cette doctrine Fhérésie désastreuse des Donatistes, des
Apostoliques, des Yaudois, des Albigeois, des Widéfites, des
Hussites et des Anabaptistes, qui enseignèrent que les sacremens
administrés par un ministre , ou hérétique, ou schismatique, on
même seulement en péché mortel , étaient réellement et pleine-
ment nuls. En effet, suivant notre infatigable dogmatlste, un chré-
tien, quel qu'il soit, se retranche de V Église aussi bien en ne vi-
vant pas selon l'Évangile qu'en ne croyant pas selon VÉvangile,
Cependant, point de grâce hors de l'Église ; le pécheur , sans la
grâce du Libérateur, [n'est libre que pour le mal; sa volonté n^a,
dans ce cas , de lumière que pour s'égarer, d'ardeur que pour se
précipiter, de force que pour se blesser ; capable de tout mal, m-
puissante à tout bien * : donc Févéque , ou le prêtre qui a péché
grièvement, ne peut ni recevoir la grâce, puisqu'il est hors de
l'Église, où il n'y a point de grâce; ni en devenir la cause instru-
mentale, puisque, étant lui-même sans la grâce et pécheur, il n'est
libre que pour le mal, et que sa volonté est impuissante à tout
bien, etc.
Quesnel ne respecte pas davantage la discipline de l'Église, inter-
disant au pécheur le droit d'assister au divin sacrifice , et prescri-
vant aux confesseurs des règles d'une sévérité désespérante. Règles,
au reste, qui supposent que l'absolution n'est qu'une déclaration
simple, quoique authentique ; que le sacrement de pénitence
n'efface pas réellement les péchés commis après le baptême , et
que les prêtres n'ont qu'un pouvoir extérieur et inefficace, sem-
blable à celui que les prêtres de la loi de Moïse exerçaient à l'é-
^ Prop, xxvxi, xxu, xxxviu^ xxxix et lxxvui.
QUE 113
gard de la lèpre , quand ils jugeaïeni légalemcut si cette uiJludie
éuii guérie ou noij,
Enfîu, pour meilre le comble h ses excès toucliani t'olijel qui
nous occupe, ce misérable insiuue que l'I^lise est tombée dans
une sorte de déi'ré|)itude si grande, qu'elle a perdu la méiuoire et
rinielligeDce, pour ne rien dire de plus odieux; puisque, selon lui,
• les mérités sont devcuues comme une langue étrangère à la
> plupart des chrétiens ' : • blaspLëme que JanEéuiua avait (téj!l
écrit avant Quesnel, avanuanl, dans son AuBUilin, que la doctrine
de la grâce était tombée dam l'oubli depuis la murl du célèbre i
(locicur d'Hippone ; que les Scoiastiques la dénaturaient, et qu'on
ne la proressait plus que dans des prières dont on ne pénétrait
pas le seus. Blaspbème encore que proférait Jean du Verger de
llauranne, abbé de SalDl-Cjran, grand ami de l'évéque d'Ypres,
quand il disait k saint Vincent de Paul : • Oui, je vous le confease,
- t Dieu m'a donné et me donne de grandes lumières. It m'a fait
> connaître qu'il n'j a plus d'Église. . . Non, il n'j a plus d'Ëglise : I
• Dieu m'a fait connaître que, depuis cinq ou six cents ans
■ n'y avait plus d'Ëgliae. Avant cela , l'Église était comme
■ grand fleuve qui avait ses eaux claires ; mais il préseat ce qui
1 nous semble l'Ëglise n'est plus que de la bourbe... 11 est vra
> que Jésus-Christ a ëdiRé son Ëglise sur la pierre ; mais il j a
> temps d'édilier et temps de détruire. Elle était son épouse ;
I mais c'est maintenant une adultère et une prostituée : c'est '
t pourquoi il l'a répudiée , et il veut qu'on lut en fufrdilKe KU |
• attire, qui lui sera iidële *i >
Mais s'il en est ainsi , (i Us véritii tant devenue» comme une ]
langue éirangêre il ta ptuparl det chrétien», que faut-il penser i
des promesses si formelles de Jésus-Christ 1 Ob est la vraie pro- '
fessiou de h foi catholique î Où en truuve-t-on renseignement
légitime? Oii faudra-t-il aller cbercher l'épouse cbérie du Fils' de
Dieu incarné? Sans doute dans les petites Églises jansénistes que
Quesnel forma sur ses vieux jours dans la ville d'Amsterdam!
dans l'Ëglise scbiswalique d'Utrevht dont il prépara de loin la
révolte ! ou bien encore dans ces réunions sacrilèges qui reten-
tirent de blasphèmes contre h balle VniqettHiu, et od l'on at-
'Fdier, Dieu liist., ou mol Veiiceii DEllitnAHss, tt dans d'ai
•uleuTs,
4i4 QtJE
tend que le peuple ait répondu amen, après la eofta^ration èû
prêtre, pour croire (si toutefois on le croit en effet) qaelésus-
Christ est réellement présent dans rEucharistie ! nous disons,
ti loutefbiM on le erMi en effet; car nous ne manquons pis de
li?res de prières, composés par des auteurs célèbres dans le parti ,
où le dogme catholique de la présence réelle est au aKnns plës
qu'oublié *. La proposition de Qoesnel : « Les vérités soM dev»^
» nues , etc. * » suppose que rËglîse peut tomber presque tout
entière dans rignorance des vérités dont elle est la dépositaire,
la gardienne, et qu'elle peut par conséquent errer, contre la pro-
messe de son divin fondateur, qui a déclaré qu'il est ateo elle ,
tous les jours, jusqu'à la fin du monde, et que les portes de Pefi*
fer ne prévaudront point contre elle ; cette proposition est donc
erronée , et il faut ch>ire que l'Église enseignera toofoilrs Is
vraie doctrine, et qu'elle subsistera, malgré les persécotioiis, jos-
qu'à la consommation des siècles. Ainsi, la vieillesse préleiidae
de l'Église est un délire , une rêverie , ou plutêt un véritable
blasphème. Est-ce que son divin époux, qui la soutient et la
vivifie, vieillit lui-même, ou la laisserait tomber de vétusté?
H est essentiel à l'Église d'avoir des justes dans son sein. Quoi-
que les pécheurs n'y soient pas nécessaires comme pécheurs , il
est néanmoins « constant par la foi qu'elle ne sera jamais sans le
» mélange de bons et de roéchans. 11 faut reconnaître de plus que
• les méchans sont réellement de l'Église, qu'ils en sont des
• membres réels, et qu'ils en font véritablement partie... (non) à
«titre de pécheurs... (mais) parce qu'ils ont la foi habituelle,
» qu'ils professent les vérités révélées, et qu'ils se conforment au
• culte public sous l'autorité et la dépendance des pasteurs légt-
» times '. 9
f Dans les Heures de Port-Royal, etc., le fidèle dit, k l'élévation de la
sainte hostie, qu^il adore Jésus-Christ au jugement général et à la droite
du Père éterheL Dans les Heures chré tiennes ou Paradis de Vàme, etc.,
on ne regarde non plus le Fils de Dltu, avant et après la consécration,
que comme assis à la droite du Père ou mourant sur la croix. Dans les
Heure» dédiées à la noblesse, etc., on reconnaît que le Sauveur est pré-
sent dans cette Église, sans doute selon cette parole divine : Oà deux ou
trois se seront assemblés en mon nom. Je serai au milieu d'eux, Matth.,
48, 20.
« VoyezAdi ci-dessus, pag. M*
* Héal. du Juus.
^ QLË -fia
Il y 3 des grices aciuelles liors île l'Église r CurHellle en est
une preuve; saint Paul uue autre; l'Plunuqu? (le lu reine ds
Candace, une troisième, et tous eeuï (|ui viennent se réunir lou«
les JDura ï la nation itinle, au peuple acquit, comme parle saint
Pierre ', en fournissent de coniinuds monumens. D'ailleurs, c'est
par le baptême qu'on est fait enfant de l'Églige, et qu'un en de-
vient membre ; or, le baplîme e&t certainement une grâce. Il ; a
aussi tlesgr&ceshabituelteï hors du corps de l'Ëglise : un homme
qui en a i^té injustement retranché peut avoir la grlci^ sanuii-
riinle ; un catéchumène peut èlre justifié avant que «l'avoir reçu
le premier sacrement *,
Quant il 1 ' iil m inisl ration dn sacrement de pénitence, on voit
assez pourquoi Quesnel veut qu'on </ use d'une rigiilitési elTrajanie,
t'uisque, suivant ses principes, on le relraiiehe de VÊqtite en ni
virant pas lelun l'Évangile, et que tior» d'elle il n'y a pûlnl di
grâce, il est clair que le chréiien qui est tombA dans un péchd
mortel 3 cessé pur-la tiiSine d'éire membre de l'Égliseique dès
lors il n'a plus de droit auï sacremens, ni i l'assistance au sacri-
fire redoutable, etc., et qu'il n'y a pins pour lui de mojen de
salut; par conséquent qu'il faut lui dimner le temps déporter
arec huffljli/^ (ce qu'il ne peut sans le secours de la grSce) el de
tentlr U patdt ilti pM\/, de ieitiavûrr (ce qui lui est encore
impossible) l'etprU de p/nllriice el de eentiUien, el de commencrt
au tHùins à Mlufaire à lajaslkede Dien' (par des œuvres qui ce- .
pendant seront des péciiés), attendant qu'une grAce extraordi-
naire, miraculeuse, descendue on ne sait par quel canal, rienne
répandre dans le cœur de ce misérable cet uuiour parfait qui si-
gnale les enfai^s de Dieu , niais que l'on reconnaîtra i tels
signes qu'un pourra, attendant, disons-nous, toutes ces cho-
ses, avant que de déclarer par la vertu inefficace de l'ubsolutioo
ï ce fils retrouvé qu'il e:>l à présent digne d'asuister ï la suinte
messe, de s'asseoir avec tes fidèles k la table sacrée, et, s'il esleu-
clésiastique, d'exercer les foDctioiis de son ministère, etc. 11 se-
rait plus simple et beaucoup plus c^^nforme aux priuci|ies de no-
tre docte novateur, d» dire tout uniment au péclieur qui sa
présente nu tribunal de la réconciliation ; ' Vous fites un malbeu-
* ï. Ep. ï, (I
isditci-dcvani, png. i03.
416 QUE
» reux l le crime que vous avez commis tous a poussé hors de TÉ-
» glise, précipité sous le poids intolérable de la loi comme m
• J^if^'f iî n*y s plus pour vous de grâce, de guérison, de telui, à
» moins d'un miracle inespéré ! Vos prières, vos macértlionSyT os
» aumônes, toutes vos œuvres pieuses seront désormais de nou-
> veaux péchés, même mortels : il ne vous reste donc point d^'au-
> tre parti que celui de vivre au gré de la cupidité, laquelle sera
• probablement à jamais votre unique guide. • Un tel discours
pourrait engager peut-être un pécheur à s'aller pendre de déses-
poir, mais ce qui doit surtout empêcher un confesseur, bon jansé-
niste, de parler de la sorte, c'est qu'il compromettrait la sainte
doctrine, et c'est ce qu'il faut éviter à quelque prix que ce soit *.
11 ne nous appartient pas, et ce n'est pas ici le lieu de rappe-
ler aux dispensateurs des mystères de Dieu ce qu'ils doivent faire
et éviter pour lier et délier avec sagesse les consciences dans le
saint tribunal : saint Charles Borromée a tracé sur cet important
objet des règles également éloignées d'un relâchement perni-
cieux et d'une rigueur funeste, et le clergé de France les a jugées
si prudentes et si conformes à la saine morale qu'il les a fait im-
primer et répandre dans les diocèses pour servir de guide aux
confesseurs. Opposons donc la foi de l'Ëglise, qui est assez con-
nue, et ses règles sages aux dogmes farouches et aux principes
désespérans de l'auteur des Réflexions morales.
6*> Enfin, concernant le pécheur.
Le premier homme ayant prévariqué dans le Paradis terrestre
* Prop. Lxni.
' « Si la prudence nous oblige d^avoir égard à la disposition des es-
• prits aveclesqueU nous avons à traiter, c^est principalement avec ceux
• qui sont suspects d'avoir des sentimens conlraires aux nôtres qu'il
• faut apporter toute sorte de précaution. C'est pourquoi les unis se
• serviront de toute la discrétion possible..., et prendront garde de mé-
• nager de telle sorte le zèle qu'ils ne nuisent pas à la doctrine de 5. Au-
» gustin, prétendant de l'avancer à contre-temps.. • Ils ne feroftt point
» de difficulté de désavouer la doctrine et de dire qu'ils ne sont point
• jansénistes... Ils ne diront point ouvertement leur opinion, mais Us la
» donneront sous des termes qui la feront paraître presque la même
• que l'opposition commune, aGn de n'effaroucher pas d'abord les es-
» prils, les amenant peu à peu, etc. » (Lettres circulaires à MM, les
• disciples de S. Augustin.) c Comme il faut se gouverner avec les sus-
» pcct?. »
QUE
417
en loangeaDl du fruii ijoiil Dieu lui avaii défendu de niuugcr
désobéissance criminelle fut pour lui uue source fiiconde An m
res déplorables. Dépouillé sur-le-champ de la juslice doui
grdt-e l'avait orné, (terenu un olijet de colère ei d'indigaBlion aux '
veux du Tout-Puissaoi, assujéii ï U mori, suivant la menai'f
viue qui lui eu atait été /aile, tombé sous la puissance du démon
el fait son esclave, il se vit lout-ï-coup bien tristement changé,
soit du cAtéde l'ime, soit du c6lé du corps,
il y a plus, la prévarication du premier homme ne Tut pas pré-
judiciable Il lui seul. Comme chef du genre humain elle représeo-
tant tout entier, il avait aussi été établi dépositaire du sort de tou
ceux qui naîtraient de lui dans la buite des siècles par la voie or-
dinaire. Sa fidélité ou sonin&déliié 1 garder le précepiedont nous
venons de parler était décisive ou pour conserver et faire couler
sur toute sa postérité, par son canal, les faveurs admirables dont
il était en possession, ou pour en tarir en lui-ménie la source : il
sobélt, et sa désobéissance, qui réunit tous les caractères d'un»
! révolte, perdit aussi tous ses descendans, les souilla tous,.
« changea tous.
Quand nous disons tous, on s'attend bien que nous ne compre-
nspas dans ce nombre le Sauveur, qui, quoique eut'ant d'Adam,
aison de la nature humaine qu'il possède, n'a ni contracté, ni dû
itracler la souillure du péché de noire premier père, puisque,
. TOé dans le sein d'une Vierge par l'opération du Saint-Esprit^
mS, n'a pas été conçu comme nous. Nous exceptons encore, aln4, 1
l'aToDs dit ci-devant, son auguste mère, louchant !■-•,■
'qaelle, quatid il s'agit du péché originel, il Faut observer iM' T
P institutions que des souverains pontifes ont données à ce sujetv '
La transmission du péché du premier homme il ses descendani
Ft W4 un mjstère impénétrable i la raison humaine ; mais la foi nou»
^iappreod qu'elle a lieu, et ce péché, qui est en nous aussitôt que
paoDs sommes, noua est propre, nous fait naître pécheurs, enfana
[J^de colère, esclaves du démon, indignes du ciel, sujets à l'igno-
:, i la concupiscence, ï la mort et à tant d'autres misères, qui
int les effets, la solde, la punition.
Cependant, tout en reconnaissant combien la transgression do
Kwtre premier père nous a été funeste, il faut prendre garde d'en
rexagérer à l'excès les terribles suites.
Ce péché désastreux a véritablement affaibli la liberté naturel)^
I de l'homme pour la bien moral ; mui» il ne l'a pas détruite : il t ]
418 QUE
jeté Id coupaMe dans les ténèbres épaisses d*une igûoranfce fîi-
cheusc ; mais il n'a pas éteint en lui toutes les lumières de la fo{
que la main du Créateur y avait comme gravée : il a répandt datts
son cœur cette concupiscence laboriease, qui est la source de
tous les péchés actuels ; mais il n*a pas banni de ce cœur toute'
affection louable : il a changé Thomme tout entier, en le précipi-
tant dans un état malheureux, eu égard à ce qu*il était aufHrtataét,
et même d*une manière absolue, en le souillant aux yetEX de son
Créateur, etc.; mais il n*a pas efficé totalement en lui rimage de
Dieu : en sorte quCf quoique profondément blessée par le pédié
originel, la nature humaine n*en a pas été maltraiiée ni eorfctti-
pue au point de ne plus rien conserver de sa bonté prittiitiTe, et
il faut recomiattre que, sauf le péché aveô lequel nous entnAis
dans cette vallée de larmes, Dieu eût pu créer l'homme àéi le «Mi-
mencement tel qu'il nait aujourd'hui *.
C'est même en vertu des précieux restes dont nous parlons qoè
rhomme peut encore , dans Tétat présent, et sans le secours
de la grâce de son divin Réparateur, connaître qfnelques vérités
naturelles, avoir quelques senti mens légitimes, faire quelques ac-
tions moralement bonnes, résister d'une manière irrépréhensible^
quelques tentations légères ; mais non pas remplir tous les devoiré
qu'impose la loi naturelle, ni triomplier de tentations très-graves.
Cependant, s'il arrive en effet que l'homme agisse réellemeirt
ainsi, il faut bien se garder de conclure de là que le peu de bien
qu'il fait de cette sorte dépasse le moins du monde les limites
de Tordre naturel, ni qu'il opère aucun mérite pour le ciel on dans
l'ordre du salut. Car, quoi qu'il fasse, il ne peut avec les seules res«
sources qu'il trouve dans sa nature ni mériter la première grâce
actuelle, ni faire le moindre bien surnaturel, ni sortir du miséra-
ble état du péché, ni se disposer à la grâce sanctifiante, ni, à plus
forte raison, mériter la vie éternelle : soutenir le contraire, ce se-
rait entreprendre de ressusciter le Pélagianisme que FËglise a
foudroyé depuis long-temps.
L'homme étant donc tombé, comme nous l'avons dit, et ne trou*
vaut en lui-même ni force pour se relever, ni ressource pour sa-
^ C'est la doctrine qui résulte de la condamnation de cette proposi-
tion de Balus : Deu$ non pofutsset ab initia talem creare hominem^
quaiiê nune nascitur. Bulle ex omnibus afflietionibus ; prop. inter dam-
nalas lv.
Qliù -119
lisfïireiiU juslkc divine, pi nio^en pour se jualilicr licvanl Dieu,
il Tulhit, ou qu'il péril niisérablenieiit i jdoiais, uu qu(r le Toul-
Puissant lui pardonnât d'une manîËre absolue, ou qu'il lui prêlJt
un secours surnaturel pour le tirer de l'iibloie prorond daus lequel
le péché l'avait précipité.
En effet. Dieu eut pitié du genre humaiD, Il promit k Adam, et
dans sa personne il luule sa postérité, un libérateur, promesse
i)u'i| réitéra souvent ï Irarers les siècles pour en renouveler la foi
indispensable. Or, U temps marqué pour l'exécution de ce grand
dessein étant venu, le Verbe éleroel s'incarna, et, s'étanl cliargé
dcspécbés de ions les hommes, il mourut sur la croix pour les ex*
pier. luéritaDi à louslescoupubles, par l'elTusioD de sou précieux
sang, les grâces nécessaires pour réparer aboodummenl leur maj-
lieur, c'est -A -dire pour être récouciliés avec Dieu et sauvés.
C'est doDCBTec raison que le Filsde Dieu failbomme est appelé
Jèiai-Chriii, ^luaa lie Diru gui Ûte hs jiéthdt du monde, Bçneau
immolait VerigiM du mande. Il est le Sauveur promis ; il s'ett
immolé pour efTacer les péchés des bommes, et sou sacriflce ado-
rable commença, dès la chule d'Adam, i produire ses salutaires
effets. Le Verbe incarné mort pour nous est donc le rondement
de toute noire espérance, de toute notre jusiLScation, de loui oo-
ires:dui. La rédemption qu'il a opérée sur la croix a été surabon-
dante ; les Pères de l'Ëglise, appuyés sur l'Ëcrilure sainte, sou- '
tiennent qu'elle a été, non-seulement entière et coinpiéte, mais
qu'elle nous a rendu de plus grands avantages queceni dont nous
étions déchus par te péché originel : de lï l'Eglise s'écrie elle-
inâine, en parlant de ce péché : Félix eulpa, qua lalem ac fanfup
vieruil habere Redeaiplerem !
Depuis la publicalion Jel'ËTangile, la justification, c'est-â-dire
la IrantlMiun de t'élat dain lequel l'Iwmme naU enfant du premier
Admit, i l'iUat de grâce el d'enfant adoplif de Dieu par le teconi
Adam Jiiui-Chri$l, noire Saui'eur, w stpeal faire sans Veau delà
regilnéralioa, ou laiu le désir d'en (Ire lavé, dil le saint concile de
Trente'; mais les mérites du Sauveur sont appliqués si libérale-
nirni Si l'homme daus le sacrement de bspléme, et le péché }r est
lelleineiii eOiicé, qu'il ne reste plus rien dans celui qui l'a reçu
avec tous ees elTels qui puisse l'empêcher d'être admis de suite
'(■ ~i*'jaur immortel de la gloire, s'il mourait dans cet 1
r >Sess.<i
420 QUE
i«ttx état : ainsi, tout ce qui est réellement péché et toute dette
contractée par le péché lui est miséricordieusement remis par h
vertu du sacrement dont nous parlons.
II ne faut donc pas dire avec quelques hérétiques du seizième
siècle que le péché originel n'est autre chose que la concupis-
cence même, ce penchant fâcheux ^tit nous enttfAne au amI, pour
parler comme Biélancthon ; ni, avec Baîus, Jansénius et leurs
partisans, qu'il consiste formellement dans la concupiscence ha-
bituelle dominante. 11 s'ensuivrait de ces systèmes ou que ce pé-
ché ne serait pas réellement et entièrement effacé par la grâce de
Jésus-Christ qui nous est communiquée dans le baptême, et qu'il
ne se trouverait que comme rasé, non imputé dans celui qui possé-
derait cette grâce précieuse, double erreur condanmée parle con-
cile de Trente *, ou qu'il serait imputé de nouveau au chrétien
tombé dans quelque péché mortel et qu'il revivrait alors en lui,
autre erreur qui semble avoir donné lieu à cette proposition aussi
fausse que ridicule : a L'homme doit faire pénitence pendant toute
» sa vie du péché originel *. » Sans doute la concupiscence est
un défaut, un vice, une source féconde de tentations dangereuses,
par conséquent un vrai mal ; mais outre qu'on ne peut la regar-
der comme un véritable péché par elle-même, comment formerait-
elle l'essence du péché originel, puisqu'elle y est postérieure et
qu'elle n'en est réellement que la suite, l'effet, la punition?
Indépendamment de ce péché , qui ne nous a été volontaire
qu'en Adam ,et qui n'est péché en nous que parce que notre pre-
mier père l'a commis très-volontairement , nous en commettons
nous-mêmes d'autres pendant que nous avons, en cette vie, l'u-
sage de notre raison et de noire liberté. Ces transgressions libres
et volontaires de la loi de Dieu naturelle et positive se nomment
péchés actuels. Ils sont véniels ou mortels, suivant qu'ils sont lé-
gers ou graves en eux-mêmes , ou dans les circonstances qui les
accompagnent. Mais tous offensent Dieu, quoique inégalement,
et méritent de sa part des punitions proportionnées : ceux-là en
méritent de passagères; ceux-ci d'étemelles.
Les premiers, quel qu'en soit le nombre, n'éteignent pas la cha-
rité dans l'àme du juste; mais ils la refroidissent, disposent,
conduisent même au péché mortel, soit en diminuant dans le cou-
* Sess. 5, De peccat. orig., can. 6.
' Prop XIX, int, damnât, ab Alexandre VIIJ, die 7 decemb, 16D0.
p
OUK
421
pible lu crainlc du mal , et l'iiubi tuant k le commettre avec Taci-
liié, soil en engageant Dieu i ne pas donner des secours siimatU'
rcls, ni aussi muIlipiii'S. nt aussi grands qu'il l'eût fait d'ailleurs,
ï un ami qui montre si peu de docilité, de reconnaissance, d'é-
loignement i lui déplaire. Cependant la faiblesse de l'homme est
si grande, les tentatioas qui le poussent au mat «onlsi Tréquenles,
si variées et si fortes , que l'homme le plus juste ne peut passer
toute sa vie sans tomber dans quelque Toute légire, ï moins d'un
privilège spécial de Dieu , privilège que l'Église reconnaît avoir
6té donné il la sainte Vierge '.
Quoique tous les péchés mortels ne soient pas égaux, non plus
que ceux dont nous venons déparier, il est néanmoins conslaot
qu'il n'en Tiiut qu'un seul pour l'aire déchoir le pécheurde l'élatde
grSce, le rendre ennemi de Dieu, esclavedu démon, sujet i l'enfer.
Il n'entre pas dans notre plan de parler ici des différentes sortes
de péchés mortels qui se commettent ; des ravages qu'opèrent
ces funestes ti'angressions dans l'esprit et le ceur du prévarica-
teur, ni des chMimens temporels ou spirituels qui souvent en
sont la suite pendant cette vie périssable; on peut cousuller, sur
f^s divers objets, l'Écriture, les Péres, les théologiens orthodoxes
et une foule de bons livres ascétiques.
Hais dans quelque aveuglement d'esprit et dans quelque endur-
cissement de ccenr que soit tombé un pécheur, ï force de mu' '
plier ses péchés et d'en commettre d'énormes, s'il est iiifldële, |
destitué même de tout secours surnaturel de la part de Dieu i
(supposition que nous sommes bien éloignés d'admettre), il con-
serve encore d^ns sa raison, qui n'est pas totalement obscurcie,
des lumières qui l'éclairent ; dans sa conscience, dont te langage
se fait quelquefois entendre, un dictamea qu'il ne tient qu't lui
d'écouter ; dans la loi naturelle, qui crie au fond de son cœur, no
stimulant qui le presse au bien ; dans sa liberté, qui n'est pas
entiéremeni anéantie , des forces avec lesquelles il peut choisir
entre le hien et le mal moral, et se déterminer au premier, quand
les ohstacles qui s'y opposent ne sont pas dlHicïles â vaincre;
éviter le second, quand les tentations qui j portent ne sont que
IrJs-légÈres et peu séduisante* : il conserve donc encore ces pré-
cieux restes dont nous parlions plus liaul *, et comme ces dcr- j
t
3. e, Dcjusiir., I
1. S3.
422 QL^K
niers traits dans lesquels Dieu reconnaît encore i esquisse impar-
faite de son image.
Quesnel a donc grand tort de dire de ce pécheur que « sa vo-
» lonté n*a de lumière que pour s^égarer , d'ardeur que pour se
» précipiter, de force que pour se blesser ; capable de tout mal ,
» impuissante à tout bien ;... ( qu'il) n*est libre que pour le mal;...
» (n*est) que ténèbres, qu'égaremeut et que péché ;... (que ) toute
» connaissance de Dieu , même naturelle,... ne produit (en lui)
» qu'orgueil, que yanité, qu'opposition à Dieu même, au lieu des
» sentimens d'adoration, de reconnaissance et d'amour;... (qu'O
> n'y a dans ce pécheur) rien qu'impureté, rien qu'indignité; •
qu'enfin il ne peut rien aimer qu'à sa condamnation ^ ; par con-
secouent , que toutes ses œuvres sont des péchés , et toutes set
Tertus des vices. Cette doctrine découle naturellement de It
maxime erronée des deux amours exclusifs ; elle renferme des
dogmes chers au parti ; mais la foi catholique condamne ces
dogmes prétendus, et l'Église anathématise tous ceux qui les
soutiennent.
Jje même novateur erre encore d'une manière plus insoutenable,
si nous pouvons le dire ainsi , quand il applique presque toutes
ces propositions, et d'autres encore du même genre, au fidèle de-
venu prévaricateur , et quand il s'écrie d'un ton dogmatique :
« Que reste-l-il à une âme qui a perdu Dieu et sa grâce, sinon le
> péché et ses suites, une orgueilleuse pauvreté et une indigence
> paresseuse, c'est-à-dire une impuissance générale au travail , k
M la prière et à tout bien ' ? > En effet, pour nous arrêter à ce
dernier texte , Quesnel y prévarique , soit qu'il entende y parler
delà grâce actuelle, ainsi qu'il l'assure dans ses mémoires justifi-
catifs; soit qu'il y ait en vue la grâce habituelle ou sanctifiante,
comme l'insinuent ses expressions prises dans leur sens naturel.
Car, considéré sous le premier point de vue, c'est-à-<{ire privé
de toute grâce actuelle ( hypothèse vraiment inadmissible ) , le
fidèle pécheur ne serait pas , dans l'ordre de la nature, de pire
condition que l'infidèle dont nous parlions tout à l'heure ; il pour-
rait donc au moins tout ce que celui-ci peut encore ; il n'éprou-
verait donc pas une impuissance générale au travail ^ à tout bien.
Nous disons, il pourrait donc au moins , à cause des lumières
* Prop. xxxviir, \xxix, xl, xli, xlii.
' Prop, I,
(JIE
4li
KêBacoup plus étendues qu'il a, ut des voHus auqiiiiies qu'il cuu-
scrve, el qui peuienl élre, en lui pins numbri'UEi'S, plus sulJde-
nipni établies, toutes naturelles qu'un les supjiose dans la pniseuté
lijpotbèie. Or, personne n'ignore que l'habitude du bien en'
rend h pratique plus aisée-
Cou sidéré sous le second rapport, c'esl-ï-dire hors de l'éial àé
grâce, le Sdële pëcbeur conserve encore, outre les avantages pré-
cieux dont nous Tenons de parler, la fol, qui lui montre des res-
sources à son malbenr dans la prière, le JcQne, Tauniùne, 1<|
sacrement de Pénilence, etc. ; l'espérance, qui lui peint dans celui
qu'il a BU l'ingratitude d'offenser un père tendre qui Taltend, Tirt-
viie a revenir à lui, lui offre un gi^néreux pardon, lui tend des br*j
miséricordieux ; des vertus rbréliennes acquises, qui forûlt'Ol dairf
sou cœur, aidé de la grâce, comme un besoin toujours reAaîssnnf
de faire le bien. L'Église soUiciie sa conversion auprès du Perd
des Hiiséricordes ; quelques Smes justes adressent peiit-éire dans
le secret lies vffiux au ciel en su faveur; il voit autour de lui ié
bans exemples ; il entend des instructions touchautes ; il éprouvé
peut-être des revers, deî peines intérieures; la grSee excite dtf
temps en temps dans sa conscience du salutaires remords; toiA
ces moyens, réunis aux illustrations et pieux muuvemens que Id
&ini-ÉpriI opère en lui, peuvent le ramener. Il conserve de p\aà
les caractères spirituels qu'impriment dans l'âme certains sacrfl-
mens qu'il a re^us : il est donc encore chrétien, confirmé, prêtre, i
évéque ; obligé conséqnemmenl à une multitude de devoirs qu'il \
ne peut remplir couime il Tant sans le secours de la grâce célesto , <
secours donc qui est toujours prêt, ou qu'il peut toujours deinait-
der et obtenir, parce que Dieu ne commande pas l'impossible.
Il faut conclure de li que le lidùle pécheur a constamment an
moins la grfice de la prière, et, par une suite nécessaire, le pou-
voir au moins médiat de Taire de bonnes œuvres dans l'ordre sur-
naturel ; de croire, craindre , espérer, se repentir, aimer, ete.f
comme il faut pour se disposer ï la justification; enfin d'observer
les commandemens de Uien. Il est vrai que les œuvres qui se font
diiits le déplorable état du pécbé sont mortes, en ce sens qu'elles
ne donnitnl ancan droit au ciel, et qu'elles n'j seront jamirs eou-
ronnées; mais elles ne laissent pas d'être très-utiles, nécessaires
inflme au pécheur : car, outre qu'il accomplit la loi divine, ei
upérant cellet qui Ini sont commandées, il peut aussi par se
prières, ses jeûnes, ses aiiraùncs, etc.,. toucher le cœur de Dieu
424 QUE
auirer les regards de sa miséricorde, obtenir de nouveaux secours
surnaturels, mériter improprement (de congruo) le pardon de
ses péchés et la grice sanctifiante. Rien n*est tant recommandé an
pécheur, dans les livres saints, que les bonnes œuvres dont nous
parlons : le fidèle tombé n*est donc pas dans Timpossibilité de les
faire; elles ne lui sont donc pas inutiles; bien moins sonl-dles
des péchés , comme le prétend Quesnel ; même des pédiés mor-
tels, ainsi que le décident les auteurs impies de la circulaire. Le
concile de Trente a défini le contraire en opposition & la doctrine
des hérésiarques du seizième siècle. « Si quelqu*un dit que toutes
» les œuvres qui se font avant la justification, de quelque minière
9 qu'elles soient faites , sont de véritables péchés , ou qu'elles
» méritent la haine de Dieu , ou que plus un homme s'efforce de
» se disposer à la grâce, plus il pèche grièvement : qu'il soit ana-
» thème * . • S'élever fièrement au-dessus de cette définition si pé*
remptoire , en alléguant, avec les auteurs hétérodoxes que nous
venons de citer, que le concile de Trente n'est pat canonique ^ et
qu'U n* était composé que de moines violens * , ou, avec d'autres du
même parti, en assimilant ce saint concile aux brigandages odieux
de Tyr et d'Épbèse ', c'est , ^ notre avis , se montrer digne émule
de ce serpent perfide qui dit autrefois à notre première mère,
pour l'engager à manger du fruit défendu : « Non, vous ne mourrez
» point, car Dieu sait qu'en quelque jour que vous en aurez mangé,
» vos yeux s'ouvriront ; et vous serez comme des dieux, sachant
» le bien et le mal *, »
Le sacrement de pénitence est comme une seconde planche que
la miséricorde divine tend au fidèle pécheur, pour le tirer du
naufrage qu'il en fait, en se laissant tomber dans le péché mortel,
* Sess. 6, De jostiC, can. 6.
> Voyez ce qne nous avons rapporté dans une note, p. 880 et suiv.
* Telle était la manière dont en parlait auprès de nous, au commen-
cement de notre triste révolution, un religieux distingué par le rang
qu*i] occupait dans son ordre. Il se disait Janséniste, et nous eûmes très-
certainement la preuve qu'il Tétait en effet autant de cœur que d'es-
prit, et que, s'il admettait tous les principes du système pour former
sa croyance, il n*était pas moins docile à régler sa conduite d'après
toutes les conséquences qui se déduisent du même système : c'était un
homme sans foi et sans mœurs, cependant très-sévère à l'égard de ceux
qui lui étaient soumis et surtout grand partisan de la révolution,
* Genès., S, à, 5.
■ QUE 42i i
apr&s son baplétne. Il pcul encore Hre jiistiriù par la ci
parfaite jolnie au vœu de recourir au wicrement de pcnitenca.
Noua renvoyons nos lecteurs, louchant ces objets, aux lliéulogiens' '
orLliodoxes , i beaucoup de bons livres qui en traitent pertinemi J
uieot, eL surtout au concile œcuménique que nous v
Ce concile définit, entre plusieurs autres dogmes catholiques qui.
□ni rapport à celte matière , que l'absolution sacramentelle est no
acte judiciaire, et non un ministère vide et ineOicace<iiiKtuin),
par lequel le prêtre prononce et déclare purement que les péchés '
sont remis; et que, lors même qu'ils seraient en état de péché
mortel, les prêtres ne laisseraient pas de conserver la puissance
de lier et de délier. Il «Tait déjï défini, en parlant d'une manière
plus générale , que le même péché n'empécbait pas qu'u:
menl ne fût valîdemeni confectionné et administré ; pounu que
la ministre coupable obserrSt d'ailleurs tout ce qui est essentiel t
ta coareclioD et ï l'administration de ce sacrement ' .
II. Le principe des deoi délectations relativement victorieuses,
il que noua l'aToas rapporté ci-devant ', et tel que l'adiuirent
L2«isénius et Qnesnel, est non-seulemenl démenti par le sens in-
IVllme, contraire 1 l'expérience , opposé i la raison, injurieux 1
|Jisus- Christ ; il est de plus béréiique et la source de plusieurs
'^irésies.
Nous disons, démtnli par le tent inlime. Soit, en elTet, que nous
Eçédions ï une tentation , et que nous fassions le mal auquel elle
ft|WUs porte, soit que noua y résistions , et que nous opérions le
iniraire , nous entendons presque toujours une voix qui
dedans de nous que nous sommes maîtres de choisir ei
et le mal qui se présente ; que nous pouvons prendra 1
e parti que celui que nous prenons, accomplir ou «'
(a précepte, ei, par conséquent, que nous ne sommes point n6-
^ ni déterminés invinciblement par la grlce ou la con-
lence, d'après le degré de prépondérance de l'une ou de
!. Nous disons presque toujours, afin d'exclure ces premiers
nvemens subits qui échappent avant la réflexion, el ces tccèj |
errililes qui entraînent , eoiporleiil et précipitent ai
B délibérer, et qui conséquemmeat ne sont pas libres. Et si
< Scss. H, De pœniL sacram
' r.ijclcf.pugcsl^, 377i'
I. 9, 10. Sess. 7, Dc!
lei... InJ
4ac QLE
<|uoi seraient donc fondés celte joie donce que noas reneiftoM
quand nous avons remporlé la victoire et fait le bien ; celte tris-
tesse secrète, ce remorîds pénible qui suivent de si près notre dé-
faite, le mal que nous ayons commis, si cen*e8t sur la persoaaioa
invincible que nous avons que nous pouvions prendre une antre
détermination et que nous sommes libres ou maîtres de notre
choix ? Or, ce sentiment intérieur que nous avons , même lialgré
nous, de notre liberté , c*est la voix du sens intime, de ce témmii
irrécusable que Fauteur de la nature a placé lui-même an-dedanS
de nous, pour nous avertir infailliblement de ce qui 8*y paese.
Nous disons contraire à V expérience» 11 est constant que Bons
agissons quelquefois par raison contre notre répugnance ; que la
crainte de Fenfer nous retient , et nous empêche de commettre
des fautes auxquelles nous nous sentons beaucoup d'attraits. Or,
depuis quand la raison est-elle formellement un vrai plaisir f
Depuis quand h crainte en est-elle de même un antref En tout
cas, si ce sont là des plaisirs formels, ils ne sont pas, k coup sûr,
très-pesans ; ils doivent donc, suivant le système, laisser souvent^
pour ne pas dire toujours, en Pair le bassin de la balance jansé-
nienne dans lequel ils se trouvent , tant ces plaisirs sont légers,
en comparaison de la concupiscence bien autrement lourde , qni
ne déloge jamais du bassin opposé. Aussi , les bons Jansénistes
ne comptent-ils pour rien la raison en cette matière» et ils regar-
dent la crainte servile comme un mal réel. Suivant eux , e*est la
gr&ce ou délectation céleste qui fait tout le bien, empêche tout
le mal ; la crainte n'arrête que la fnain , et n'empêche pas que le
cœur ne soit livré au péché.
Nous disons opposé à (a raiêon. Elle nous dit en eflet que nons
ne sommes libres qu'autant que nous sommes véritablement maî-
tres de notre choix ; que notre détermination est réellement eu
notre pouvoir et que nous ne suivons pas irrésistiblement un agent
qui ne dépend point de nous : que si donc la concupiscence dé-
termine invinciblement notre volonté au mal , c'est à elle de ré-
pondre de tout le mal que nous faisons d'après l'impulsion de la
nécessité qu'elle nous impose ; que si au contraire la grâce em-
porte nécessairement notre volonté au bien qui sort de nos mains ,
tout le mérite de ce bien retourne aussi à la grâce , et que nous
n'en avons nous-mêmes aucun; qu'en conséquence , quoiqu'il
nous arrive ou que nous fassions , nous ne sommes ni dignes de
ni réprôliensibles; que, dans celle hypothèse ruvolUmU',
OtE
4H .
les préceptes soni vériublemeiit injustes , les coûseiJs eniière-
ment di^plncés , les ricnmpenscs dépourvues de toute espèce de
litre, Ui Denaces pleines de ridicule, les cliAliniens des actes
émanés de U ijrannie , et qu'enBn , si notre cœur va el tient nê^
eessairemeni pour le bien el le mal moral , ensuite if un peu plus
ou d'un peu moins de plaisir indélibéré, comme uiie balance
qu'un peu plus ou un peu moins de poids k'it nicessairement bais^
ser ou mouler, suivant les lois pb]rsl(|ues de l'équilibre , ainsi
que le veut le patriarche Jansénius , le bien et le mal , le vice et la
venu sont de vraies cbimërcs , le ciel est nne pure illusion , Tcnfet
une lerreuT vaine, la religion une fade inieniion de la soltlse,
bien loin d'flre l'oufragc dv Dieu dont la bonté , la justice et It
sagesse entrenl essentiellement dans l'idée que nous avons de lui.
Nous disons injurieux à Mut-Cltrlsl. En effet , ce n'est pas h
volonté qui lutte dans le combiit , suivant le système , c'est le Fils
de Dieti qui se trouve aux prises avec le démon , sa grflee .ivcc 11
concupisecnce : la volunlé de l'Itomme est léiooin oistr de ce qui
se passe ; elle marclie seulement en esclave î ta suite du victo-
rieux. Les armes des combaitins sont les m£mes, c'esl-ï-dire le
plaisir; la condition n'est pas dlITéreole depnrt et d'autre , puis-
que la décision n'est que la suite du pins ou du moins de plaisit
que cbacun fournit. Or, une telle eompar,iisim n'esl-ellc pas in-
jurieuse i Jésus -Cbrist et ne renferDie-t-ellc pas un vml blas-
phème f
Nous ajoutons hérétique, parce qu'il est de la foi que le libre
arbitre n'est point perdu ni éieîut depuis le ptehé d'Adam ; qoe
l'homme , suus la motion de la grUce , peut douner ou refuser sua
consentement ' , el qu'enlln , pour mériter ou dfimérlter dans
\'H>1 de nuture tombée , il ne suffît pas que la volonté ne soit
point forcée, comme l'ont prétendu BnTus et Jansénius, mais il
faut de plus qu'elle soit eiemple de toute néeessllé , non-seule-
ment immuable et absolue , mais même relative, en sorte que U
volonté puisse aeluellemenl surmonter la déleeiallon prépondé-
rante, et que le volontaire, s'il est nécessaire, n'est pas libre
il'une liberté qui suffise pour le mérite et le démérite de la vie
près
Enfin
s soutenons que le principe des deus A
ht
Conclt. Trid,, seiS. fl, Dejuslir., can. 5 t
Vi'l/c: ci-Jcssus, paj, 15 etbuiv.
428 QUE
relativemeDt yictorieuses est la source de pluiiatrê hérMtê, Car il
suil de là qae la grâce eiBcace donne seule un vrai pouvoir de
faire le bien et de résister à la concupiscence ; que les justes n^ont
pas toujours le secours surnaturel nécessaire pour pouToir ob-
server les commandemens , puisqu^il leur arrive de les violer; que
quelques préceptes leur sont donc impossibles» quoiqu'ils veuillent
les accomplir et qu'ils fassent à cet effet des efforts selon lesfor>
ces présentes qu'ils ont ; qu'il suffit pour mériter ou démériter
d'avoir une liberté exempte de violence ou de contrainte ; qu'on
ne résiste jamais à la grâce intérieure ; que telle est l'idée que
Dieu veut que nous ayons de cette grâce et qu'il nous en donne
lui-même dans les saintes Lettres ; qu'on ne peut pas pins y ré-
sister que les créatures purent résister au Gréiateur , quand U les
tira du néant, ou qu'un mort pouvait résister à la volonté toule-
puissante de Jésus-Christ , lorsqu'il lui commandait de sortir du
tombeau ; que quiconque a une autre idée de la grâce intérieure
erre véritablement dans la foi et est formellement hérétique ;
que Dieu sauve infailliblement tous ceux qu^ii veut sauver ; que
par conséquent ceux qui se perdent n'ont aucune part à cette vo-
lonté de Dieu , et que Jésus-Christ n'a point prié, n'est point
mort pour leur salut éternel , mais pour celui des seuls élus , etc.
Or, qui ne voit que toutes ces erreurs sont autant de conséquen-
ces qui découlent de la maxime que nous combattons ? Qui n'y
reconnaît aussi les dogmes hérétiques contenus dans les dnq
propositions de Jansénius , et sommairement toute la doctrine de
Quesnel sur la grâce et la prédestination * ?
Le principe des deux délectations relativement victorieuses est
donc démenti par le sens intime , contraire à l'expérience , op*
posé à la raison , injurieux au Sauveur du monde , hérétique en
lui-même et la source de plusieurs hérésies.
Comme notre plan nous engage à tracer ici quelques vérités en
opposition à ce ramas d'erreurs et d'hérésies , il nous parait utile
de donner préalablement une idée succincte de la grâce dont nous
avons à parler , et d'en indiquer au moins les divisions dont la
connaissance est nécessaire pour entendre ce que nous avons à
en dire.
Or, par le mot grâces nous entendons un don surnaturel et gra-
' Voyez ce que nous avons dit ci-dessus, page 215 et suivantes, et
■iepuis la page 384 jusqu'à la page 391 inclusivement.
Iliil accorili tte Dieu à rhûinine pour le cenilaire au salât tlerneli
soit que ce don lui ail été confÉrë avanl ta chuU par la seule li-
béralité du Créateur, conime renseigne saini Thomu, ou bien
encore en vue des mériies de Jésus-Christ considéré comme chef
du genre bnniain , ainsi que le veulent les Scolistes, soit que ce
don soil accordé k l'iiomine drpufi la chule par la miséricorde di-
TÏne, en vue des mérites de la passion et de la mort de n
vin Rédempteur , comme le reconnaissent tous les callioliques ,
fondés sur l'ÉeriluTe et la tradiiiua.
On conçoit Facilemeni ce que signifie le mot dvn , pris dans un
sens Tague et général. Il n'en est pas de même qunnd il s<
joint au mot urnalurel : aussi les théologiens l'expliquent-ils di-
Tersemenl. Pour nous , qui n'envisageons ici la grlce que comme
donnée ù l'homme innocent ou déchu de la justice originelle,
nous désignons par ces mots, don turnalurel, un secours ou un
don qui est d'un ordre supérieur i la nature humaine , qu'elle
n'exige pas par sa constitution , qui ne lui est point dû , ni comme
uu complément nécessaire , ni comme une suite de sa création ,
et qui tend parlui-mèmcii diriger l'homme vers h vision in lu itivp.
Par don graluit , nous voulons dire que Dieu ne devait point sa
grice ï l'homme ; qu'il eût pu ne la lui jamais donner , et que s'il
la lui a accordée ei promise , ce n'a été que par un pur effet do sa
libéralité ou de sa miséricorde , pouvant , sans blesser en aucune
inière sa bonté, sa sagesse et sa justice, créer l'homme dans
i, ei l'j laisser, comme aussi
1 chute; et que parconséquen
it ï la grice , ni comme i un secours dû ï sa
nature, ni comme i un complément qu'elle eiigeail, ni même
eu vertu de ses dispositions, de ses eHoris ou de ses mérites
nalarelt.
On voit donc que la cause elUciente de la grice, c'est Dieu qui
veut le salut de l'homme ; que la cause qui l'a méritée , c'est, de-
puis le péché d'Adam , Jésus-Chrisi qui a souffert et qui est
mort pour nous ; que le sujet qui la reçoit c'est l'Iiomme , que la
fin pour laquelle elle est donnée c'est la vie étemelle.
La grlce est sumalurellc dans son principe , dans sa nature ,
rjiins ses mojens . daus sa Dn cl dans sca effets, l-e bien que nous
laisons au mojen de ce secours divin est surnaturel aussi dans son
principe, dans la manière dont nous le laisons et dans la lin t la-
quelle il tend.
après
jamais ei
480 QIE'
Considérée par rapport à Téiat présent , c*est-Si-dire comïM
Conférée à rhonime déchu , la çr&ce est , ou extérieure , agtssaéi
sur les sens , comme la publication de la loi , les leçons de dùWS
adorable législateur, la prédication de TÊvangile, tés diîracfcl,
hê exemples édifians, etc.; ou intérieure ^ faisant impression tfaM
Tâme : soit qu'elle y demeure comme une qualité inliéréntft, la-
quelle nous rend agréables à Dieu, etc.: et on Tappèlle griice
habituelle ou sanctifiante , dont nous avons parlé aineurt ' ; soft
qu*elle agisse d*une manière passagère et souvent momentanée,
en nous éclairant, excitant, fortifiant, etc., et c*e»t lagrAce ac-
tuelle ^ laquelle se divise en grâce de T entendement, ou lamîèré
intérieure on subite , que Dieu présente à Fesprit pour Inî mtii^
trer la vérité qu*il faut croire et le bien qu*il faut pfttiquef dans
Tordre du salut , et en grâce de la volonté, laquelle consiste daû
une notion indélîbérée du côté de Thorome, par laquerfe Diea
excite sa volonté et la porte vers le bien que lui propose Fénten-
dement éclairé et conduit par la grâce qui lui est propre , donnant
en même temps â la volonté le pouvoir de faire le bien dont il
8*agit«
Ces deux grâces qui sont données par manière d'acte ou d'In-
spiration et de motion instantanée , comme nous l'avons dit , con'«
courent toujours ensemble dans l'état présent , en sorte que quand
Dieu donne â la volonté le mouvement indélibéré, surnaturel et
immédiat qui l'excite à faire quelque bien surnaturel avec le pou-
voir de l'opérer, il donne en même temps à l'esprit la lumière né-
cessaire pour connaître et représenter ce même bien.
Cette double gr^ce de l'esprit et de la volonté se subdivise
l«en gritce prévenante, opérante, excitante, qu'on peut considé-
rer comme étant la même, mais agissant diversement, soit en pré-
venant notre entendement, lui montrant une vérité â croire, un
bien à faire , auxquels il ne pensait ni n'eût pu penser d'une ma-
nière relative au salut sans ce secours, stitt en prévenant notre
volonté qui était comme endormie, lui donnant le pouvoir qu'elle
n'avait pas de croire la vérité et de pratiquer le bien que lui pré-
sente l'entendement éclairé et conduit, comme nous venons de le
dire, et mouvant la même volonté, afin que nous croyions et que
nous fassions librement et d'une manière utile au salut la vérité
et le bien surnaturel dont il s'agit ; 2- en grâce coopérante, sub^
* Voifcz ce que nous en avons dit ci-dcvaut, pag. ÂOO et suiv.
431
téqiieale et adjuvante ou cancomitanle, qui exprii
surniilurel de Ilieu avec nous, pour qiii> nous enrrpprpnions, que
nous vxëculions el que nous cunduisiuns librement 'i une heureuse
lin la boDoeicuTredontlagrlce prëcédenle uous araildéjireudui
I l4 grtce Bduelle vpiranle se diviie eo grSce efficace el fo
> grire tuffUtiiU. I,a jirciuiËre est t^elle qui opère cerlaineueD(
• et infaillible ment le consentement de la volonté ï laquelle, par
■ consËquciil, riiomoie ne râeiste jamais, qnoiqu'il ail un pou-
■ voir Irès-rËel de lui résister. La seconde est celle qui donne )
• b ToloDté assez de force pour faire le bien, mais il laquelle
• l'boiumeréeisteel qu'il reudine/}!cace par sa résigUncemËDe'.»
• Eiifia, l'on disiiague deui sortes de grùces, la prdr; propre-
> ment dUe ou timplemenl àileel la grâce pour grâce. 1a prenÛËre
• nous esl donnée en vue des in</riles de Jë»us -Christ, saus que
» noua l'ayons aucunement mérilée, même par le moyen d'une
• grâce prériklente; la «econde nous esl accordée comme récom-
• pense des mérites acquis par le bon usage de la griice ; telle es
• ta vie éternelle * >, qui est en même temps une récompense et
une grice : une récuiupensc, parce qu'eJle est donnée aux mérites;
une grlce, parce que res mérites découlent de la grïce. et que la
récompense les siirpiisse, selon ces paroles de l'apûlre : Non ainf
eoadigair ptuioaes Imjut temporii ad fuiaram gloriam, fwv reve^
labitar in nobit*. C'est pourquoi ^l^g1ise a condamné celte pro-
position de Baius : • Les bonnes œuvres des justes ne recevront
■ pas, au jour du jugement dernier, une récompense plus grande
■ qu'elles n'eu mériteul d'elles-niémes suivant le juste jugemeuC
iieBieu '. ..
P^Bergier, Dicl. de lliéologic, au mot GntLB.
^ Conf. (l'AnEeri sur la grâce, t. 1, pag. lA,
)0 Rom., B, IB.
VProp. iiT.InbuIMMioniiiJh» egKetioKltat.nctatil de» bulles.
H est vrai que celte propo>>lîon>e trouvi! condamnable i d'antres li-
ts encore : l'autrur y slippnsc qu'une lionne aclinn mérile la lie éter-
nelle deianalure,lndépendanmiimt de la grJce d'adopllun, par lascula
couTonuiié qu'elle a avec la loi divine, el parce qu'elle est un acte à'a-
bélsiancpï celle même loi. pourvu néanmoins quccclleobflissaneesoll
une i>ioriacllon delocbarité, vcrlu i|ui, selon luj, t'allie très- bien a tec
k]>éi'Iié nioilel. ain» queco péché aiee le mérile ilmii non; purlons.
Kriyri, Ibid'-ni, les prop. il, ui, xiii, xv, xvi, wiii.
432 QUE
Toujours attentif à ses grands principes fondamentaux dont
nous avons démontré la fausseté, Quesnel se fit des idées erronées
sur la grâce. A Texemple du chancelier de TUniversilé de Loufaîa
et de Tévéque d*Ypres» il la méconnut pour Tétat d*innocence,
ou plutôt, tout en en retenant le nom avec ce dernier, il en dé-
natura comme lui tellement la chose, ou si Ton Teut Tessence,
qu*il parut la détruire et la rejeter entièrement : prétendant que,
dans cet heureux état, la grâce était une tuUe de la eréatUm ; qa^tik
était due à la nature Maine et entière^ et qu'elle ne produieait fue
des méritée humains ^. Gomme si dès là que Thomme était sorti
innocent des mains de son divin auteur, il avait eu, par sa consti-
tution même ou par Texigence de sA nature, droit d*étre destiné
à la vision intuitive, ou que le Tout-Puissant n*eût pu, sans bles-
ser sa sagesse, sa bonté, sa justice, lui donner une destination in-
férieure à celle-là. Nous avons opposé plus haut des vérités à ces
erreurs*.
Quant à la grâce actuelle intérieure de Tétat présent, poor rac-
corder à son système désespérant, tantôt notre dogmatiste la con-
fond avec la volonté toute-puisêante de DieUf à laquelle on ne peut
point résister *, nous inculquant par-là combien cette grâce, d*ail-
leurs si nécessaire, et sans laquelle, dit-il, non-seulement on ne
fait rien, mais on ne peut rien faire ^, est néanmoins rare. Tantôt
il la définit : « Cette charité lumineuse que le Saint-Esprit répand
» dans le cœur de ses élus et de tous les vrais enfans de Dieu ' >,
ou rinspiration de ce divin amour. D*où il faudrait conclure que
les pensées pieuses et les mouvemens salutaires qui ne sont pas
formellement la charité, ou qui n*émanent pas de cette excellente
source, ne viennent pas de la grâce ; que la foi, la crainte, Tespé-
^nce, etc., qui disposent le pécheur à recevoir la justification
dans les sacremens de Baptême et de Pénitence, sont des fruits in-
formes de la cupidité ; que la charité est la seule vertu chrétienne ;
que la grâce actuelle intérieure, sans laquelle on ne peut rien faire
d*utile dans Tordre du salut, n'est donnée qu'aux justes et aux
* Prop. xxxiv et xxxv.
* Voyez ce que nous avons dit louchant Tétat d'innocence, pag, 399
et suivantes.
* Prop. XI et beaucoup d'autres sur la grûcc,
* Proi>. ir.
* (Cinquième mémoirr, nrcrliss., p. vu/.
1"
I
yi K
-ina I
préJeïiÎDi^s ; que l'observa lion îles coiiimandcnii.-iis est pnili
mi^al iiDpossiblc â tous les aulres iioinoues, qutiiL'uumuins|)i!cliciir, j
SL'Ion rM-oralorlen, en les TÎolari, et i[ue loua les moyens sulB- '
$3D8 pour pouvoir travailler, de quelque manière que ce Boii, i
ù leur salul, leur in3n(|ueiit, etc.
Nous réduisons ce que nous avons b opposer aux erreurs da 1
QuesncI & ces chefs : lu ni'cvt;siié de h grSce, le pouvoir quQ J
■s d'j résister, la dislriLiutinr
ficaliou qu'elle opère et I
luoi
e Dieu
acquie;
n fail, la jiisli-
l avec ce divi» 1
i ' Nécessité île la grAce.
Prodigue sans réserveenvers la nature innocente, puisque, s
vaut lui, la grâce lui était duc, Quesnel se montre excessiremeM 1
avare enrers la nature tombée, dogmatisant que le p^cliei
ni lumière, ni force, ni liberté pour le bien moral; iju'ilne (rouVa'l
de ressources en luî-méine que pour le mal, et qu'il e&t telleinent-l
dt^;;radé, fkié, corrompu, qu'il ne lui reste rien de l'image rfa^l
Dieu, pas même cesdernicrs traits que saini AugUâtin reconnaltl]
encore avec l'Ëglise duns l'homme déchu. Nous avons relevé Ci
_nc<!s-dans ce que nous avons dit ci-dessus concernant le p6- 1
lui qu'en dise le même novateur, d'après Ilalus et JanséniuSt j
aaltres, l'clévatioQ de l'homme à la vision intuitive e
Iriiable grùce, et elle eu suppose nécessairement d'autres. Auk
!• premier homme en fut-it comblé, et s'il ne larda pas !i perd^
h justice originelle dans laquelle il avait été libéralement établi)
'Pages IIB, in cl suivanlcn. Ajouloniici ([ue, quoique le ptebcur I
Mserveiin pouvoir réel eltrès-véritahlc de faire quelque bien uaturdl
irordremoralsanslagrUccdcnDltcadarableRédi-mpteur, paroequBfl
|h libre arbitre ii'ctl pas entièrement perdu niéleintcn lui, parce qt
le encore quelques lumières et quelques alTïCtians légitimes, (t
ju'il n'eil pas libre seulement pour le mal : cependant comme qncl-J
s lliéolngieni ont soutenu, sans en élre rrpiia par l'Eglite, que e<
irnese réduit point & l'acte, b moins qu'il ne soit atit ou d'uni
1 naturel mérité par lésus-Cliriii ou de fa Eiacesumaturrlte, 11]
qu'on peot dire, sans biciser la foi, queTbomme n'opèN pas ei
:l le bien moral, et que même il ne le pcnt d'un pouv^ qui se ri
N Alise tracte, tans le secours de Jésus-CLrisi, pourvu qii'i
L foinl l'ctsenee de ce secours dans la charité proprvme.it ili
T' l^ralion de cet amour surnaturel.
II.
31
434 QUE
il esl hors de doote qu*il y persévéra quelque temps «fcc le wt-
cours de la grâce, el qu'il eût pu de même y penéTércr jinquli
la fin de son pèlerinage sur la terre. Mais quelle grâce reçstpil
pour cela et quelle grâce lui fallait-il en effet ? Questioa sur la-
quelle les théologiens orthodoxes ne s'accordent pas. Les uns pté-
tendent que la grâce sanctitiante lui suffisait; d'autres vevient
qu'on y ajoute la grâce de l'entendement; quelques-uns yjoigMat
de plus celle de la volonté. Ces théologiens varient m consé-
quence dans la différence qu'ils assignent entre la grâce de Téiat
d'innocence et la grâce de l'état de nature tombée et réparée. On
peut choisir entre ces diverses opinions sans craindre de blesser
la foi, pourvu que, rejetant les erreurs de Luther, Calvin, Jansé-
nius et Quesnel, on ne fasse pas consister avec eux la différeoce
de la grâce de sanié d'avec la grâce médicinale^ en ce que rboBne
innocent pouvait résister â celle-là, s'il le voulait, au lieu que
Thomme déchu ne peut résister à celle-ci ; système anatbéinatisé
dans sa seconde partie par le concile de Trente *• Il est certain
que rhomme innocent étant éclairé, maître des roouvemens de
son cœur, pleinement libre, sain dans tout son être, il n^avait pas
besoin d'un secours surnaturel aussi grand que l'homme^déchu
dont Iclibre arbitre est aflaibli, Tesprit plongé dans l'ignorance,
la volonté pleine de langueur, le cœur en butte aux révoltes con-
tinuelles de la concupiscence, et qui se voit encore environné au
dehors de tentations, de pièges et de dangers sans nombre : la
grâce du premier état pouvait donc être moins forte que celle du
second.
Or, si l'homme sans péché et sans infirmités naturelles avait
besoin de la grâce pour connaître les vérités surnaturelles, pour
opérer le bien d'une manière utile à son salut et pour persévérer
jusqu'à son entrée dans le séjour immortel de la gloire, combien,
à plus forte raison, l'homme déchu de la justice originelle et tel
que nous l'avons décrit a-t-il besoin de la grâce pour les mêmes
fins?
Il faut donc confesser que des grâces extérieures et intérieures
sont nécessaires dans l'état présent : les premières pour montrer
aux hommes Dieu selon qu'il veut en être connu, ce qu*il a dai-
gné faire en leur faveur, le culte qu'il exige d'eux, les moyens de
salut qu'il leur présente, les préceptes qu*il leur impose, les gran*
* Sc55, 0, De jusli:'., cou, 4,
OUK 43$
des récompenses qu'il iieâlini> ù leur Ëdéliiû persiivi^i'anl^, les l'hl-
timeos redoutables (|ui scruieni le juste salaire de leurs triiis-
gressions graves non expiées, etc. ; les seconde!;, pour guérir leur
entendement, leur ralonié, réparer leur libre arbitre, les prévenir
elles aider en loulcequi est ulileauulut.
Cependint, quoique nëcessairee, selon le cours ordinaire de la
ProTidence divine, les gr-^ces extérieures dont nous parlons na '
poumiieDi seules et sans la grûce intérieure amener l'inCdËlc A
rassenliment surnaturel tel que l'exige la foi cbrétienne, nHe Gdèla
k pratiquer aucun bien d'une manière posiiitement utile uu salut.
Ke concluons pas néaiuDoins de ce principe que ces grâce» s&>
raient inutiles, si elles se Irouvaient en effet isolées de l'opéralion
intérieure du Sainl-EIsprlt. Parmi les lumières qu'elles répandent,
il j en a de spéculation et de pratique qui sont si âvidemment
conformes ï lu droite raison que l'homme peut les admettre tout
naiurellemanl, en faire de même la règle de ses jugemeni et quel-
quflfuis de ses actions, comme d'un supplément à ses connaissan-
ces ei il ses lumiéresnaiurelles, et par conséquent en tirer quelque
utilité naturellement bonne. Ainsi les bérétîques croient d'uns
fui Lumaiae beaucoup de vérités révélées : ces vérités ornent leur
esprit de connaissances, et qui oserait dire que ces connaissan-
ces D'influent point sur leurs aciious? Quesnel pense bien autre-
ment. ■ Quand Dieu n'amollit paslecoiur par l'onction intérieure
■ deiagrïce, les eiliortaiions et les grâces extérieures ne servent,
' dit-il, qu't l'endurcir davantage. >• Comme si les lumières pu-
res que contient la parole de Dieu, par exemple, se cbangeaient
d'elles-mêmes en ténèbres et en malice, quand elles arrivent seu-
lesï l'esprit etau cœurdel'liomme. Celte proposition, examinée
dans le sens da système de ce novateur, présente encore un autre
venin dont la démonstration et le développement allongeraient
inutilement cet article aux jeux des lecteurs qui auront saisi l'en-
semble de ce dangereux système.
Si l'on veut approfondir davantage ce qui concerne la nécessité
de lu gr&ce actuelle intérieure, il faut reconnaître que nous avons
besoin de ce divin secours pour tout ce que nous faisons d'utile
dans l'ordre du salut, non pas pour l'opérer avec plus de facilité,
ni seulement pour le continuer après l'avoir commencé de nous-
mêmes, ainsi que le soutenaient les Pélagiens et les semi-Péla-
giens. mais pour pouvoir réellement l'opérer, lu (commencer, le
fléaircr, même y penser comme il faut : en sorte que cette grtce
k
430 QUE
nous provient, nous excile, nous aide, concourt consUmment avec
nous, el que nous agissons après elle, avec elle, par son secours,
jamais seuls.
Concluons delà : 1» que c*est de cette céleste soorce que nom
tiennent les bonnes pensées, les pieuses affections, les siii{ts dé-
sirs qui nous portent au bien utile au salut ; 2* qo*elle opère
plusieurs choses en nous sans nous, c^est-à-dire sans que nous y
ayons part comme agens libres, telles que la lumière subite qui
nous montre le bien à faire, la motion indélibérée qui nous y in-
cline, le pouvoir de Topérer, la force de vaincre les obstacles qui
s*y opposent *; 3* qu'on peut dire que nous devons tout à cette
grâce ; car la nature humaine, malgré ce qui lui reste encore de
lumières, d'affections, de forces, de liberté pour le bien moral,
est, quand il s'agit de ce qui conduit au salut ou de ce qui y est
positivement utile, réduite h une impuissance entière, absolue,
même physique * ; 4* que la grâée dont nous parlons fait tout en
nous, mais non pas tout sans nous, comme nous le dirons bientôt.
Mais autant la grâce actuelle intérieure est nécessaire pour faire
le bien et éviter le mal d'une manière utile dans l'ordre du salut,
autant la grâce sanctiGante est indispensable pour opérer des œu-
vres méritoires des récompenses éternelles ; c'est ce que nous an-
nonce notre divin niattre dans ces paroles évangéliques : « Gomme
» la branche ne peut d'elle-même porter de fruit qu'elle ne de-
9 meure unie à la vigne , ainsi vous n'en pouvez point porter que
» vous ne demeuriez unis à moi '. » Pie V, Grégoire Xlll et Ur-
bain VI 11 ont proscrit la doctrine contraire. 11 faut reconnaître
encore que sans uu secours spécial de Dieu l'homme justifié ne
*■ MuUa Deus facit in hominc bona, qus non facit homo : nulla verè
facit homo bona, qux non Deus pracstat ut faciat homo. Concil. Arau-
sic. ir,cap. xx. 11 faut observer que ce concile, dont l'Église a reçu les
dérmitions, n*ayant en vue que les erreurs des Pélagieos et des demi-
Pélngicns, ne parle dans ses canons ou cbapitrcs que du bien qui ap-
partient à l'ordre du salut, ainsi qu'on le verra dans la citation sui-
vante.
3 Si quis por nalurx vigorem bonum aliquid, quodadualutem perfinct
vitœœicrnœ, cogitarcutexpcdit, aut eligere, sive salutari, id estevan-
gelicx pra;dicationi consentire posse confirmât, absque illuminalione et
Inspiratione Spiritûs sancti... hxretico fallitur spiritu. Idem conc,
cap. vu.
* Joan. 15, 4,
peut pvrsûvérer jusqu'à la Ga dauslajusiiie qu'ilarc;ue, et qu'il
le ficut avec ce divin secoure '. EiiGn, il esL de foi que le itiL^ms
ne pful Inviter tout p£ché vfiiicl [u'iiduiil tout le cours de sa vie, I
muins d'un privilège parlicullcc de Dieu '.
2- Gratuité de la grùic.
Li grùce nous est accordée gratuitement en ce qu'elle u'esl pas
due ï noire nature, il nosdispusitiaiis, niânosciruri»a0lurels;cUL-e
que hieu n'a aucun égard ï ces dîsposilioas oi i ces elt'uris,
quand il nous la donne j en ce qu'il l'accorde en presciudant du
liieu que l'on fera svec ce secours ; en ce iiu'il ne la doit pas en
rigueur an bon usage que l'on a fait d'une grâce précédente.
Cependant • l'on ne prétend pns qu'une grJce ne soit jamais U
■ récompense <Iu bon usage que l'Iiomme a Taii d'une grtce pré-
> rédeutc; l'Ëvangile nous enseigue que Dieu récompense noire |
■ Gdélilé i proGter de ses dons. Le pi-ro de Tamille dii au bon ser-
• viteur : Parce que vaut aeet élé fldile en pen de choiti, je vaut
• (H eauflerai de iilui grandes.... Ou deniiero beaucoup à celui qui
• a deih, et if tera dam Vabnudauct. Maitli., c. 2S, y. SI, iO,
• Saint Augustin reconnaît que la griice mérite d'être augmenide.
• Epiil. 186 ad Paulin., r. 3, n- 10. Lorsque les Pébgiens posè-
C rent pour maximeque Dieu aide le bon propol de chacun : Cela
Kcrrail MMique, ri-pondit le saint docteur, i'ilt avouaient que
meetien prop^ifil «n cffrldela grâce. L.i, centra duairp. Peleg.,
» c 6, n° 13. Lorsqu'ils ajoultirent que bleu ne réfute point lu
BfrtfM i celui qui fait re qu'il pcni, ec Vbte observa de même
»que cela est vrai si l'on entend que Dieu ne refuse pas une se-
le grlce h celui qi>i a bien usé des forces qu'une première
£rSce lui adonnées; mais que cela est faux si l'on veut parler
le celui qui fait ce qu'il peut ^tt les forces naturelles de son
e arbitre. Il établit enlin pour principe que Dieu n'aban-
fdunne point l'homme, i moins que celui-ci ne l'abandonne lui-
•"ni^nie le premier ; el le concile de Trente a confirma cette doc-
; sess. 6, De Jusiif., cap. 13. 11 ne faut pas en conclure
F que Dieu doit donc , par justice , une seconde grlce elDcace ï
' ' qui a bien usé d'une première grlce. Dès qu'une fois
f l'bomme aurait commencé ii correspondre 1 la grlce, il a'en-
,» suivrait une comiciion et une suite de grâces eflicaces qui con-
i, Dl-jusUC, I
4S9 QUE
» duiraient infailliblement un juste ^ la persérértnce finale : or»
» celle-ci est un don de Dieu, qui ne peut être mérité en rigueir,
» un don spécial et de pure miséricorde , comme renseigne le
» môme concile, après saint Augustin, ibid., et can, 22. Âinii»
» lorsque nous disons que par la fidélité à la grâce rhomme nié«
» rite d*autres grâces, il n*est pas question d*un mérite rigoweox»
» ou de condignité, mais d*un mérite de congruité, fondé sur la
» bonté de Dieu , et non sur sa justice ^. >
3* Force de la grâce, résistance et coopération â la grâce.
Suivant Jansénius, on ne résiste jamais à la grâce intérieure
dans Tétat présent : c'est la doctrine de sa deuxième proposition
condamnée. Quesnel enchérit encore sur Thérésie de son maître :
il prétend qu'on ne peut même pas résister â la même grâce,
ainsi que nous Tavons fait voir ci-devant, en rapportant en détail
ses erreurs touchant le sujet que nous examinons *• C'est diaprés
ces principes hérétiques que ces novateurs refusent de reconnaî-
tre la grâce suffisante, entendue dans le sens des orthodoxes, et
qu'ils soutiennent que la grâce intérieure est toujours efficace, en
ce qu'elle opère constamment tout l'effet que Dieu veut qu'elle
produise , eu égard aux circonstances où il la donne , et parce
qu'elle opère cet effet nécessairement ; en sorte qu'elle entraîne
invinciblement la volonté de l'homme , ou à faire en effet le bien,
ou seulement à y tendre par des velléités faibles, des désirs inef-
ficaces , des efforts impuissans , suivant qu'elle est plus forte on
plus faible en degré que la concupiscence actuellement sentie.
11 suit de là que les Jansénistes reconnaissent deux sortes de
grâces intérieures efficaces ; une grande et forte , qu'ils nomment
grâce relativement victorieuse , parce qu'elle l'emporte en degré
sur la concupiscence actuelle . et qu'elle la vainc, tout comme un
poids plus fort vainc et enlève un poids plus faible dans une même
balance ; et une petite grâce , ainsi que l'appelle son fondateur,
laquelle est en même temps vaincue et triomphante : vaincue par
la concupiscence , qui l'accable des degrés qu'elle a de plus;
triomphante de la volonté, à laquelle elle inspire nécessairement
quelques légères velléités, etc.
Pour dégliiser l'héréticité de leur dogme touchant la nature et
la manière d'opérer de ces deux grâces prétendues, quelques Jan-
^ Bergier, Dict de théol., au mot Gracf.
* Voyez p. 385 et suivantes.
W QUE 48»
SJoUleï ont ilanné à la première le nom de grlce efface par elle
mfiae, eipreision connue duns les 6i:u1es catholiques, et à U sa<
conile le nom de grâce laffitaale. Ils oni prétendu que celle-ci
coDrérail un pouvoir dégagé, suHï^Dt, wniplet, ajoutant ëpïlLtta
sur épiiLète pour le faire valoir. M«U il ne faut pas se laisser sur-
prendre 4 cetle apparence d'orliiodoiie ; le pouvoir qu'iU allri-
bucnl h celle prétendue grice est un pouvoir slmplemenl absolu,
non un pouvoir reUtir au beHoia présent. 11 sulIirHit, selon eux,
en lui-même, suivant la volonté antécédente de Dieu, et précision
faile de la concupiscence qui se Taîl teotir pour opérer le bien
auquel la petite grice tend ; mais cet obstacle le rencontrant , ce
même pouvoir se ironve insudUant, trop laible, incapable de
mouvoir la volonté i vouloir eflicacemenl le bien , et il ne lui in-
spire que des vellÉités, desdésirs, deseUbrts iuipuissans : velléités
néanmoins, désirs et ellbrls qui sont tout ce que Dieu veut, dans
la circonstance d'une volonté coniséquenlt ou eflicace. Les Jansé~
oipies se Jouent de la raison quand ils soutiennent qu'aidé de
ce secoura imaginaire l'homme pouraii faire le bien , s'il le vou-
lait;i'j( it voulait pleitumeni, forteme.nl, comme s'eiprimeun de
leurs fameux corjpbées ; puisqu'ils sont obligés de convenir en
même temps que l'homme ne peut vouloir de celte manière, dans
rhypulhise, ou que, s'ils osent affirnier qu'il te peut, ils enten-
dent , et sont forcés par leur ajslème d'eotendre , que c'est d'un
pouvoir actuellement lié , empêché par la supériorité de force de
la concupiscence.
Il est assez clair par-l!i que l'idée que nous donnent de leur
petite grïee tes soi-disant disciplet dt taint Auj/utlin ne peut se
concilier avec aucune opinion ortbuduxe sur la nature de lu grûce
suHisante, et que la sulUsance qu'ils lui attribuent est une sulB-
san ce gratuite, unesuDisance vaine et chimérique. 11 ne Faut ce-
pendant pas s'étonner que les Jansénistes aient eu recours ï une
crinceplion si ridicule et au fond si contraire II l'idée que la re-
ligion nous inspire de la bonté de Dieu : cette conception, toute
déraisonnable qu'elle est, se lie esseniiellemenl k leur sjslënie;
ils en ont besoin pour défendre les propositions hérétiques de
leur maître , et elle leur est d'un grand secours pour damner
commodément une (lartie des Ddéles, en conséquence du péché
de notre premier père. En effet, suivant ces dogroatisti». Dieu
hait tellement te péché originel dans ces fidèles, quoiqu'il le leur
Ml remis par le baptême, qu'il les réprouve itégalivemeHl, i cause
440 QUE
de ce misérable péché ; cl qu'en conséquence il ne leur donne,
pour les conduire au sqlut , que des petites grâces, des grâces îb-
suflisanies, dont ils abusent nécessairement, et dont néanmoins
la justice les rend responsables pour leur perte éternelle. Mais
comment concilier celle doctrine désespérante avec le dogne dé-
fini par le concile de Trente , ((uand il a décidé , après saint Paul,
qu*ii ne reste aucun sujet de condamnation dans ceux qni ont été
régénérés en Jésus-Christ , et que Dieu n*y voit pins aucun sojei
de haine * ? Point d'embarras en ceci pour ces messieurs : le
concile que nous réclamons n'est pas canonique, et n'éiait cowtposé
que de moines violens '. Ainsi un abîme en appelle un autre.
Nous ne croyons pas devoir insister ici sur ce que nous avons
déjà fait voir asseï clairement; savoir que la grâce întérienre
janséniennc est vraiment une grâce nécessitante : non qu^elle im-
pose une nécessité absolue, comme on peut le voir par la manière
dont elle opère; mais une nécessité relative, et cependant réelle,
inévitable, invincible. S'il restait encore quelque scrupule k cet
égard , il sudirait, pour le lever entièrement, de se rappeler que
la grâce dont nous parlons ' n'est autre chose que la délectation
céleste imlélibérée, selon Jansénius lui-même '; qu'elle se dis-
pute l'empire sur la volonté de Thomme avec la concupiscence,
à proportion des degrés de forces qu'elle a en opposition aux
degrés de forces de la concupiscence; que dans ce conflit elle
opère toujours, et nécessairement, tout ce dont elle est capable,
tout ce que Dieu veut qu'elle opère dans la circonstance ; que la
volonté est invinciblement enlraluéc par celui de ces deux attraits
qui a le plus de degrés de forces, et que, comme l'assure l'évèque
d'Ypres, il est aussi impossible que l'homme, sous l'influence de la
délectation dominante, veuille et opère le contraire de ce qu'elle
lui inspire, qu'il est impossible à un aveugle devoir , à un sourd
d'entendre , à celui qui a les jambes cassées de marcher comme il
faut , à l'oiseau de voler sans ailes, yuesnel soutient la même er-
reur en d'autres termes.
I^ foi catholique tient un hir.g.ige bien opposé à ces dogmes
janscniens. Elle enseigne: l'qu'à la vérité il y a des grâces cfli-
* Sess. 5, can. 6.
' Cirriilairc. Voyez (lisLaut, p. 380,
•"• Dckclallo viclrix, quœ Auffusiinu est cfficax adjuiarium.., L. 8,
Dograt. ChriM., c 2.
OIB
eacus [lar lesquelles Dieu sail iriomplier c
manière iiiraillible de la réaiElaucc ilta volonléa humaines, cl leur
(luiiner le vouloir et le faire; mais sans imposer en même lemjis ù
k'iir libre arbitre aucune aécesallé; 2> qu'il y a aussi d'autres
gn'iccs auxquelles on riSsisle, en lea privaal de i'elTel pour lequel
Dieu les donne, et dont elles sont capables, eu é|;.ird a
stances dans lesquelles elles sont données ; 3* que , quand n
faisons le bien auquel la grDcu nous porte et
pOrotis vérilablement , d'une manière libre el active ï la grlce;
1> que nous avoQS consUoiment le pouvoir relatif de refuser
notre cunsentemeni i la motion de la grùce, si nous le vouluiis,
quelque eflicace que soil celte grlïce ; 5* que pour mériler ou
démériter, dans l'élat présent, il faut une liberté exemple, nan-
seulemenl de viulence et de contrainte , mais encore de loui« né-
cessité, soil immuable, soil absolue , suit même relative. La fui
catholique enseiBue encore d'autres dogmes donl nous aurons
occasion de parler dans ta suiie.
Dn recoanaissanl la grAce elUcacc, nous reconnaissoDS en mâme
temps la toute-puissance de Dieu sur la volonté de l'homme, dont
il est plus maître , dit saint Augustin , que l'homme lui-méue.
Muis en i|uoi consiste l'efficacité de la griceT • On peut soutenir,
I comme les Thmaltlei , que l'eDicacitâ de la grâce doit se tirer
• dv la toute-puissance de Dieu , cl de l'empire que sa majesté
• suprâme a sur les volontés des hommes; ou, comme les Àugiii-
• linitnt , qu'elle prend sa source djus la forco d'une déleotation
• victorieuse aliialuc, qui emporte par sa nature le consentenieiit
> de la volonté; ou, comme les Caiigruislet , que l'ellicacité de la
> grioe vient de la combinaison avantageuse de toutes lescircon-
■ stances dans lesquelles elle est accordée ; ou, etihu , comme les
> ditâplei de MoUna, que cette ellicacité rienl du conscnlemeul
> de la volonté. Toutes ces opinions sont permises dans les écoles;
' mais on doit rejeter le sentiment de Jansénius sur la nature de
• l'edlcacilé de U grâce. Celte efficacité vient, selon lui , de l'im-
" pression d'une délectation cëlesle iadélibérfe qui l'emporte en
■ degrés de force sur les degrés de la concupiscence, qui est la
• source de tous les péchés '. i Quelque seuliment qu'on adopte,
si l'on s'arrête i l'un des deux premiers, il faut toujours rejeter
toute nécessité qu'imposerait la grAce, l'impeccabiliié dont nous
> De la Uraiigc, Itéulild du Jauséui^me.
44S QUE
parle Qaesnel , au sujet de la grâce du baptême *, et celle qa*kh
blissent les auteurs de la circulaire , quand ils nous assurai
« Qu'il n*y a point de grâce qui ne soit efficace et ffietofieiut;
• qu'elle est efDcace sans aucune coopération de noire ptit ( pares
> que , comme ils le disent un peu plus haut, elle fiM tmU em notÊi
» et sans nout ) ; que quand on a reçu une fois cette griee, e'sst
» une marque de prédestination et un grand sujet de joie *. > Oe
toit que ce texte sf court renferme trois hérésies formelles : la prs»
mière, en excluant l'existence de la gr&ce suffisante propreneot
dite ; la deuxième , en détruisant toute coopération de la pari da
libre arbitre ; la troisième, en attribuant ï l'homme qui a la grios
une impeccabilité que la foi rejette , même dans rhomme justi-
fié '. On peut en ajouter trois autres encore : car, dire que la
présence de la grâce intérieure eêt une marque de prédesHnëtkm
à la gloire , ce que suppose ce texte , puisqu'on amaonce plus
haut « que Dieu n'est pas mort pour les réprouvés ; que Diea ne
> leur donne aucune grâce, parce qu'il sait bien qu'ils en abose-
> ront ^ ; > c'est dire équiyalemment que Jésus-Christ n'est nort
pour le salut que des seuls prédestinés; qu'on peut afoir une cer-
titude de sa persévérance finale sans aucune révélation de la pari
de Dieu, et que la grâce intérieure n'est accordée qu'aux seuls
élus. Et combien d*autres dogmes sont encore blessés par ce peu
de lignes!
Au reste, a ce n'est pas â l'idée de la toute-puissance seule
» qu'il faut rapporter l'idée de la grâce, en la prenant du c6téde
» Dieu ; il faut encore faire attention à la bonté, â la sagesse et à
> la providence de l'Être suprême.
» La coopération du libre arbitre à la grâce que la foi enseigne
» suppose que la volonté coopère de telle manière à la grâce, qu'elle
» peut ne pas agir ; qu'elle peut se porter actuellement à l'action
> contraire à celle à laquelle la grâce l'excite ; en un mot, qu'elle
» peut priver et qu'elle prive souvent la grâce de l'effet que Dieu
• veut qu'elle ait dans le moment qu'elle est donnée '. »
Ainsi , quoique la grâce nous aide à accepter les lumières snr-
^ Prop. XLiii. Voyet-hf p. 889.
3 Conduite à tenir avec Us indévois,
* Concil. Trid., scss. 6, De justif., can. 23.
^ Circulaire, loco citato.
* RéaL du Jansénisme.
luiurcDcs qu'elle mel dm
UUI':
44^
!^CDlir il 11
luolian saluUii'C Tcrs le bje
D qu'elle imprime daus nol
re volcnlC
à faire enfin lout ce que m
us faisons d'uiile daos Tord
e du ulut
celte iccepuiion , ce couse
nlemenl et colle action ne t
itntpaslel
lemenl l'ieuTre de U grJce qii'iU ne soient nullement «i
vrage de noire clioii: de miniâre que notre libre srbitreu'eslen-
etulné par aucune nûcestité; qu'il n)(it Tériiablentenl, quoique
avec les forces que la grAce lui communique , el qu'il n'est It ni
comme uu eut do raison, ni comme un simple témoin, ni comme
un agent poremeot passif '.
tin raisonnant ainsi , nous ne blessons pas les ilroils de la grâce
de Jfsus-C.jirîsi , puur relever les forces de la liberté naturelle de
l'Iiommo dédtu , et nous sommes très-éloigné de prétendre que le
libre arbitre ait pn*sentcmeni en nous autant de fnciliiâ pour le
bien que pour le mal, ou qu'il puisse également opérer l'un ei
raulre. Mous savons que soutenir une doctrine si |teruicieuse , ce
ser»il rcconnartre un Équilibre qui n'cxisl» dans le premier homme
qu'aïaut son pécbé ; que ce serait errer dans la foi avec les Péla-
gieus et Itw Beui-Pélagieos , nous montrer injustes cl ingrats en-
vers Dolie ditin Libérateur, fronder mémo les déHnilions de l'É-
glise , qui a décidé que le libre arbiii'e de l'bomme ■ été iiwl'mi et
alfiùbll par la prévariculion du chef du genre humain *. Loin ds |
pareils excès , nous avouons bumblemeul le besuin indtspensibla >
quo nous avons d'être prévenus par la ijrâcc intérieure pour tout i
ce qui est utile dans l'ordre surnaturel ; que, non -seulement doi
ne luisons rien , maïs encore que nous ne pouvons rieu liiru de i
genre sans qu'elle agisse constamment en nous, nvec nous, comme
cause première et principale '; qu'elle nous est donniie gratuite-
inem et qu'il faut lui attribuer toute la gloire du bien que nous
faiaons avec son divin secours. C'est ainsi que nous croyons con-
fesser noire juste dépendance envers la niisâricur<le divine, ce que .
nous tenons de ta griice du Sauveur, et la reconnaissance éler-
■ 1 Coniultu sur ceci lu cnocile de Trenie, scn» 6| cou. 4*
^L ■ Cuucil. Anusk, n, capil. B, tS et 13.
^p- *(juoi)cieoiinbonB aflutui, Dcus in ncAit atque nobiKun, at op^
Knur, opetatur. Idcni coiicdium, rap. H. NuHu veiil facil liamn boui,
quK non Dens praiist nt faclDI liumo. Ibid-, cap, 10. Debolur morcet
île hoiM (ipiTibui, si Uaal ; led S'al-a, qua: non dcbelur, praocillt ut
liuiit. lUd., r»p, IH,
444 QUE
nelle que nous devons à Dieu pour le bienfait inestînitble de bo-
tre rédemption.
4* Distribution de la grâce.
Cette question est liée avec deux autres. Dieu tent-il sîocère-
ment le salut de tous les hommes? Jésus-Christ est-il mort et a-l-0
offert le prix de son sang pour la rédemption et le salai de toes?
11 8*éleva en différens temps des erreurs opposées sur ces desx
points de doctrine.
Pelage soutint, au commencement du v* siècle, que Dieo vent
également, indifféremmeni et sanê prédilection pour éiainni, le sa-
lut de tous les hommes; et il le faisait dépendre entièrement de h
volonté de chacun , prétendant qu^avec les seules forces de la na-
ture rhomme peut s*élever à la perfection la plus étninenle; que
la grftce est due au mérite naturel ; qu'elle aide le libre arbitre da
chrétien à faire le bien seulement avec plus de facilité ; que le sa-
lut est une affaire de pure justice du côté de Dieu. 11 rejetait toute
grâce actuelle intérieure*, etc.
Les semi-Pélagiens, qui se montrèrent peu de temps après, ad-
mirent en Dieu la même volonté générale pour le salut de tous
les hommes indistinctement. Ils reconnurent néanmoins la néces-
sité de la grâce actuelle intérieure; mais ils en rejetèrent la gra-
tuité, dogmatisant qu'elle est due aux bonnes dispositions présen-
tes on prévues, aux pieux désirs, aux efforts naturels; dispositions
qui, disaient-ils, la précèdent constamment; en sorte que, selon
eux, rhomme fait toujours la première avance, qu'il prévient la
grâce et n'en est jamais prévenu.
Nous avons répandu dans ce mémoire plusieurs vérités catho-
liques contraires à ces erreurs.
Ces hérétiques excluaient tous la prédestination entendue dans
le sens catholique , et Ton voit assez ce qu'ils pensaient touchant
^ Pluquet et d'autres théologiens croient que Pébge reconnut enfin
une grâce actuelle, intérieure du moins, selon Tournely, celle de Tcd-
tcndement; mais il paraît qu'ils se trompent, et que les textes spécieux
qu'ils apportent en preuve peuvent très-bien s^entendre des seules res-
sources de la nature que rh^résiarque appelait grâces et de la combi-
naison de ces ressources avec les grâces extérieures qu'il admettait.
Saint Augustin ne dit rien qui ne puisse s^expliquer de la sorte, et
il dit des choses qui favorisent, établissent ce même sentiment* Voyct
Bergier, Dict, de théol., au mol PéLACB.
i
oui:
, h disiriliui
l'applicaiion îles Truils de la r<
Les Prédeslinalicns du v siècle, ceux du i\*, et les Iil^i
ques du xvi' ïnventËrenl des dogmes bieo opposés ; dogmes fa-
rouches Gl barbares dont tes Jansénistes se rapprochËreai, eux
qui semblent s'èlre Tail une loi de (ermer les entrailles de la misË-
ricorde divine sur les bommes, el de jeter dans leur cœur la ter-
reur, rabattement et le di-sespoir. En eOet, malgré toutes les
subtilités qu'ils employèrent pour déguiser leur doctrine , malgré
les équÎToques , les dËiaurs , l'apparence d'orthodoxie dont ils
surent envelopper leur langage , il résulte en dernière analysa
de ce qu'ils enseignèrent que , tous les lioiuuies se trouvant
précipités iliiis la niasse de perdition par le péché originel, Dieu
résolut , en tue des mérites du Rédempteur , de retirer de ce
profuud abîme un Tort petit nombre : les uns , seulement pour les
justifier pauagirement ; les autres , en outre , pour les glorifier ù
jamais dans le ciel , et qu'il abandonna tout le reste ï sou malheu-
reux sort, sans espérance , sans moyeu de salut '. Si donc l'on eu
croit ces nouveaux Prédestinaliens , Dieu veut seulement d'une
volonté aincÈrect proprement dite, quant au salut éternel , celui
1 Nous n'ignorons pas les objections qu'on pourrait nous làire ici, '
Il caltrai que JausAituset k) disciples avouaieul que Dieu veulsiocé-
remenl lesalui de tous les bommes; mais ils supposaient en mCme temps
la non-existence du péché originel, ou sa nou-prétiiion. ou, s'ils suppo-
saienl ces deux choses. Ils réduisaient la TOloDtéLle Dieu dont nous parlons
Aune telléité stérile qui ne conrèreau<:unegrllce,ou à une volonté méla-
phnriqnc et de signe, figurée par le com ma» de mi^nt Imposéà tous de faire
tout ce qui «t nécessaire au salut, et pur la dérense intimée de même
de ne rien Taire de tout ce qui ; csl contraire, sans fournir aucun
moyen il cet égnrd, ou enlin i la disposition d'accorder ù l'bommc dé-
chu les grïces qu'il eDt données è l'homme innocent, gr&ces dont Jan-
sciiius cl tous ses partisans reconnaissaient l'insulfisance pour l'iïtat
présent. Ils disaient de même que Jésus-Christ nt mort pour le salut
de tous les hommes ; niait en ce sens qu'il est mort pour m
tous lu pays, de toutes les nattons, de tons les étals, de b)us les sexes |
et de tous les tgcs; qu'il a fourui un prix sulEmil pour le salutdc tous,
qu'il asouO'prt pnur la cause commune ù tous et pour mériter k d'au-
tres qu'à ceux qui seront sauvés (du moins parmi les fidèles) des grâ-
ces passagircs, etc. Mais Ions cis détours el d'autres que nous ne
rapporterons pas ne déiruironl jnmtil) ce que nous venoni d'avancer.
II.
38
446 QUE
des élus , et Jésus-Christ n'est mort pour le silui étema que de
ceux-là ^. Telle est, à la bien prendre, la doctrine contenue dias
la 5« proposition condamnée dans V Augustin de Tévéqued'Ypres.
C'est aussi ce qu'enseigna Quesnel dans son livre des Ré/I^noiu
moralcê , comme on peut le voir en examinant de près ses propo-
sitions XII, XIII, XXX, XXXI, XXXII, xxxiii, que nous avons rapportées
tout au long *. Pour esquiver le coup porté d'avance à sa doc-
Urine par la condanmation antérieure de celle de son maître , il se
vit contraint d'altérer le sens de la proposition de iansénius, de
détourner celui de la bulle d'Innocent X, et de supposer que ce
pape avait proscrit une erreur étrangère au Jansénisme. C'est ce
qu'il fit dans son 3* Mémoire pour servir à V examen de la Cimtli-
iution, etc., où il dit qu'Innocent a condamné comme hérétique
la proposition de l'évéque d'Ypres, entendue dans le sens « pte
> Jésus-Christ soit mort seulement pour le salut des prédestimés;
» et non pas que Jésus - Christ soit mort pour le salui des seuls
> prédestinés ^. » 11 trouvait ce dernier sens très-orthodoxe , et as-
surait que les conciles et les Pères ont enseigné la proposition
ainsi entendue comme une vérilé de foi ^. On ne doit donc pas s'é-
tonner s'il concentra la grâce dans ri^(;li&e exclusivement ; s'il ne
composa celle-ci que des élus et des justes de tous les temps , de
tous les lieux ; s'il reconnut que la foi est la première de toutes les
grâces et qu'il n'y en a que par elle, enûn s'il établit sur cet
objet une différence révoltante entre l'ancien et le nouveau Testa-
ment ^ : ces dogmes janséniens se tiennent tous comme par la
main , et ils se lient étroitement aux grands principes du sys-
tème.
*■ Remarquei que le mot salut est équivoque dans la bouche des Jan-
sénibtcs quand ils remploient sans y joindre l'épithètc élerneL Souvent
ils entendent par cette expression une justification passagère, un état
de grâce momentané. Ainsi quand ils disent, avec les orthodoxes, que
Dieu veut le salut des fidèles justifiés^ ils avouent seulement par-!à que
Dieu veut que tout les fidèles qui sont justifies soient instantanément
justifiés^ à moins quUls ne parlent des élus, auxquels ils restreignent
exclusivement la volonté de Dieu pour le salut des hommes.
3 Page 801.
' Page 22, deuxième édition.
A Ibid., page 23.
* Prop. XXIX, Lxxii avec les six suivantes, xxvi cl xxvii, vi et Tii«
Fc^x-ies pages 361 et les quatre suivantes» 8b&.
yiiE
44Ï
Comme ces diflTt'retis eiiiicinis Je la dmiriiie caiIjolitjHe ont
parlé braucoup ï tort ei ii irarers de h prédesiiuation cl de h ré-
priibaiiuu, il nous parali nécessaire de leur opposer, avant
it'aller plus loin , quelques- un es des lËrilés doul tous les théolo-
giens orihodoies coiiriimnent sur ces objets.
Or, ces vérités sont ;
Touchant ïa prêdeiiinalion , 1*qu"ilyaen Dieu, de toute i^l«r>
nilé , un décret de prédesiinaiion , e'est-ï-dire nnn Tolonté éter-
nelle , absolue et efliciiri: de donner te royaume des cieuT ï tous
ceux qui y parvienneut en elTet ; 2* qu'en les prédeslinaot pur M
puri! bonté il ta gloire. Dieu leur a destiné aussi les niojens et les
grïces par lesquels il les y conduit iurailliblement; 3* que cepen-
dant le décret du la prédestination n'impose, ni par lui-même , fll i
par les moyens dont Dieu se sert pour reiéonter , aucune nécet- 1
site aux élus de pratiquer te bien , leur laissant la liberté requiw
pour le icérite et le démérite ; 4 ' que la prédesli nation i la griet
est absolument graiaile, qu'elle ne prend sa source que dans la
miséricorde de Dieu , et qu'elle est aniérieure II la prévision de
(DUl mérite naturel ; S" que la prédestination h h gloire n'est pai
m plus sur h prévision des mêmes mérites, (.''est-k-dïn
« mérites liumains , ou acquis par les seules forces du libre ar-
Kirc; 6° rpieTeotrée dans le royaume descieux,qui est le lernte
'a la prédetlinilion , est lellemeni une grice, qu'elle est en même
n salaire , une couronne de justice , une récompense des
^nnes œuvres Faites par le secours de la grâce; 7* enfin , que
e rérélation expresse personne ne peut être assuré qu'il
[ÎM du nombre des élus. Tomes ces vérités sont , on formellemeot
mienues dans les Livres saints , ou décidées par r^ylise contre
MPélagiens, les semi-Pélagie ns , les Proleslans, etc.
Quant 1 la réprobation , nous dirons seulement ici, 1* que le
BilAcrel par lequel Dieu veut exclure du bonheur éternel el con-
lU feu (lei'enrer un certain nombre d'hommes n'impose
li en sont l'objet aucune nécessité de pécher, ne les ex-
hit pas de toute grice actuelle intérieure, n'empêche pas que
1 donne â tous de sudisantes pour les conduire au saint ,
VUs n'y résistaient pas, ni même que plusieurs ne reçoivent le don
^ 3e la foi et de la justification : d'ob il suit que personne n'est ré-
ruvê que par sa faute libre el volontaire. Nous dirons encore,
que la réprobation positive, ou le décret de condamner une
T 'lue au leu de l'enfer, suppose néuessairomeot la prescience par
448 QUE
laquelle Dieu prévoit que cette âme péchera , qu^elle perse? èren
dans son péché et qu^elle y mourra ; parce que Dieu ne peat dam-
ner une ftme sans qu*elle Tait mérité : conséquemment » pour De
parler ici que de Thomme , la réprobation des Païens suppose la
prévision du péché originel non eOacé en eux , et celle des péchés
actuels qu*ils commettront et dans Timpénitence desquels ils
mourront ; celle des fidèles baptisés ne suppose que la prévisioa
de leurs péchés actuels et de leur impénitence finale.
11 y a encore sur ces deux points de doctrine quelques autres
vérités que nous croyons pouvoir passer sous silence. Ceux qui
voudront étudier cette double matière à fond pourront coosulter
les théologiens catholiques : ils y trouveront, en outre, les preuves
que nous avons supprimées dans le dessein unique d*étre courts.
Nous n^avons fait qu^abréger ici , et même quelquefois que copier
M. Bergier , ainsi qu*on peut s*en convaincre en lisant » dans son
Dictionnaire de théologie, les deux articles où il traite des objets
dont nous venons de parler.
Les hérétiques anciens et modernes, les sopbbtes de nos jours
et les libertins ont fait sur ces mystères des raisonnemens k perte
de vue, souvent insignifians. Les premiers ont été vigoureusement
combattus de leur temps ; et si les derniers voulaient se donner
la peine de lire avec attention nos savans controversistes et les
apologistes de la religion, ils y trouveraient de quoi se désabuser,
et des motifs d'adorer des décrets qu'il n'est pas donné à Thomme
de pénétrer, bien moins encore d'entreprendre de soumettre à
son jugement. Nous dirons seulement ici qu'un vrai fidèle, se con-
tentant de croire humblement ce que l'Église enseigne à cet égard,
s'efforcera, par la prière, par ses bonnes œuvres continuelles et
par la fuite constante du mal, d'opérer son salut avec crainte et
tremblement, sans néanmoins perdre de vue la confiance filiale ;
assuré, s'il est juste, que Dieu ne l'abandonnera pas le premier;
s'il est pécheur, qu'il peut rentrer en grâce avec Dieu, et se con-
fiant qu'étant rendu à son amitié, le Seigneur achèvera par sa
grâce ce qu'il aura commencé par elle. Cette doctrine consolante
est conforme à l'enseignement de l'Écriture sainte et des conciles.
J^ foi catholique vient encore à notre secours. Elle nous oblige
de croire, !• que, même après la chute d'Adam, Dieu veut sincè-
rement le salut éternel d'autres hommes que de ceux qui sont
prédestinés ; 2» que Jésus-Christ est mort, et qu'il a oflert k son
Père céleste le prix de son sang , pour le salut étemel d*autres
yilK 44»
encore que pour celui des l'Ius, leur luériunt des grjces relalivO'
iiieiil sulGsanteï : grftces ({ui lour sont, ou réellemeDl donnces, ou ]
tout au moins oITer tes, eiuvec lesquelles ils pourraient ae sut
s'ils d'; r^siauiient pas libreinunl, snns nécessité cl p»r leur !
faute; 3° que riiomme justifié peut, aidé d'un secours spËcitl de |
Dieu, persévérer dans h justice qu'il a reçue; d'oii le grand Bos-
Euet conclut, et de quelques autres défiDitions de l'Ëglise, • qu'il' ,
> faut recoiinattre la volunlé île sauver tous les homain JnUifi^t,
• comme expressément définie pur l'Iilglise catholique ' ; • 4°
que, dans l'urgence d'un précepte, tous les justes revivent de
Dieu une grSce vnïiiicnt suOisante, «vec laquelle ib peuveni rela-
tivement, ou vaincre sur-le'Champ la concupisceace qui se fait
sentir, surmonter b tentation qui se présente et accomplir le
cummandemcni, ou du moins obtenir, par le moyen de la prièrCi
on secours plus abondual qui leur rendrait tout cela possible:
n est donc aussi de fui que Dieu D'abandonae pas le juste lanl
il n'en est pas le premier abandonné; que ■ ceux qui tombent,
e tombent que par leur faute, pour n'avoir pas employé toutes
E^les forces de la volonté qui leur sont données; cl que ceux
% qui persévèrent, en ont l'obligatinn particulière !t Dieu
« Icomme l'enseigne saint Paul, Philip. 2, 13), epàre en n
I vouhif et le {aire lelon qu'il lui plati *, ■ EoBn, • il n'y a biw4
■ assurément aucun des fidèles qui ne doive croire avec uiwl
■ ferme foi que Dieu le veut sauver, et que Jésus Christ a vMi^l
I sang pour sou salut. C'est b foi eipressémenl déter*a
> minée par la constilulion d'Innocent X '; ■ et les fidtles i '
tients'unir ï la volonté très-spéciale qui regarde les élus, puS
■ l'espérance d'être compris dans ce bienbeureui nombre '. • V
L'Écriture sainte et la tradition vont encore plus loin que letj
léfinitions expresses de l'Église. Il faudrait rapporter une mullî-
iude de lexiessacrés, dans lesquels le Soinl-Espritnous représente
me un Crtoicurboo, qui aime les ouvrages sortis de ses
jmme un père tendre, qui chérit ses eofans dociles, et
pand ù pleines mains sur eux ses bienfaits; qui avertit cet
it ingrats, les invite ù rentrer dans le devoir, leur offre un p>^•-|
' Juïtif. des réflex. m
'Ihid., p,7l.
' Ibid., p, 73.
>lLid.,p. 40,
a, p. 40, t. !» i édit. de Li*ge, 1758.
450 QUE
don complet, s*il8 refiennent stncèreroent à lui et font pénhenGe;
qui punit à regret, a pitié de tous, répand ses miséricordes sur
tous ses ouvrages. Mais pourrioDs-nous taire ces paroles si conso-
lantes de saint-Paul, où, après avoir recommandé très-instam-
ment à son disciple Timothée qu*on prie Dieu et qu*on le remercie
pour tous les hommes, il dit: « G* est une bonne chose, et ceUest
> agréable aux yeux de Dieu notre Sauveur, qui veut qae tons
> les hommes se sauvent et qu'ils parviennent à la connaissance
> de la vérité. Car il n*y a qu'un seul Dieu, et qu*an seul mé-
> diateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme , qui
» s'est donné lui-même pour être le prix du rachat de tous les
» hommes * . > < Nous espérons en Dieu qui est vivant, ajoute- t-il plus
» loin, et qui est le Sauveur de tous les hommes, principalement
» des fidèles *. » Jésus-Christ déclare lui-même qu'il est venu,
non pour perdre les âme$ , mais pour les sauver '; pour chercher et
sauver ce qui avait péri ^; or, tous les hommes avaient péri par le
péché d'Adam. Nous passons bien d'autres textes du nouveau
Testament, qui établissent les mêmes vérités.
Il est vrai que ceux qui < nous peignent Dieu comme un sultan,
» un despote, un matire redoutable ^, » s'efforcent de tordre le
sens de ces textes, afin de désespérer les hommes, leur montrant
dans celui qui les a créés un cœur étroit, dur, fermé presque à
tous. Mais les Pères des quatre premiers siècles enseignent une
doctrine si contraire, qu'ils sont obligés de les abandonner et
d*en parler avec peu de respect ^ ; comme si saint Augustin^ qui
les a suivis, et les autres Pères venus après, qui ont reconnu ce
grand docteur pour leur guide et leur maître, avaient inventé une
doctrine nouvelle, inconnue jusque-là dans TËglise.
De cette nuée de témoignages, que les bornes de cet article ne
nous permettent pas de rapporter, on conclut, dans toutes les
écoles catholiques, que Dieu veut sincèrement le salut de tous les
hommes, même après le péché originel ; qu'il accorde à tous, ou
du moins qu'il offre à tous des grâces vraiment et relativement
* I. Tîm. 1, 2, 8, 4, 5, 6.
s Ibid., h, 10.
* Luc, 9, 56.
* Ibid., 19, 10.
5 Expressions de M. Bergier, dans son Dict. de Ihéol., au mot Salut,
^ C'est du moins ce que fait Jansénius à l'égard des Pères grccs^
QUE
451
sulfisantn pour pouvoir opérer le ealiil ; riue Jéaus-ChrÏEl cM mort
et qu'il aolTprt lepri^t de son sang pour le s:ilut de loua, H pour
mériter pour tous, les mnjens surnnlureU ioM nous parlons,
Concluons Jonc que Dieu teui, 1' d'une volonlé de prMleetlM
le salut dos élus ; S° d'une Tulonté tpieiale celui des jnstes et dea
lidëles ; 3* et gincËrement celui de tous les hoDimes sans eicep- i
tion, mais d'une volonté antécideMe et coniitiannelle, c'esl-è'dlre
précision faite du bon et du mauvais usage qu'ils feront de la
gr:ke, et cependant sous condition qu'ils; correspondront Ilbre-
;t qu'ils observeront les comniandccnens : car, comme dit
it Augustin, • Dieu veut que tous les liouimes soient taures et
» (jn'ils parviennent i la connaissance de la vérité; non pas néan-
^ 'e telle sorte qu'il leur Qte le libre arbitre , sur le boB
if ou tuauvais usage duquel ils sont jugés IrËa-justement *. >
1 Gincluons encore que Jésus-Chriaia souOerl, qu'il est
'Vil a ofTert le prix de Bon sang aussi pour le salut de loii
Egalement; savoir, ]iarpr/dJl^rfran pour les élus, d'une miniërA 1
ÛAale pour les justes et les fidèles, tineiremfnt |>our ti
Iiommes uns exception; cl qu'il a mérité, aux premiers les
ineffables qui les ronduisonl â lu gloire infailliblement, n
sans blesser eu eux la liberté ; aux seconds, les grices spSclaleî
ir sont accordées, comme la foi, le baptême, lu justiili
_M des grSces suffisantes avec lesquelles ils peuvent rclutiri
■^une manière médiate ou immédiate, éviter le péché, lorsqu'il!
^Mit tentés de le commettre, s'en relever, quand ils j sont lombéif
, ï tous les autres, sans exception des infidèles, des moyei4
naturels, avec lesquels ils pourraient, au moins médiatement^n
^rvenir H ta foi, el, de grâce en griice, au salut.
Concluons, en dernier lieu, que Dieu distribue ses dons s
taires selon la volonté qui est en lui, ou efficace, ou *}i/i\ale, o
tiiuirf, dans le sens que nous venons d'exposer, par eonséqueiîtl
d'une Oiçon inégale; mais de manière qu'aucun adulte ne sepent*!!
f uns que ce nesoit de sa faute libre el volontaire r en sorte que^ f
— 4îl saint Thomas, • si un sauvage élevé dans les bois et ai
i* des brutes, suivait la lumière de la raison natnrelle dans l'api I
■ petit du bien et la fuite du mal, il faut admettre comme une chos* J
> très-certaine que Dieu lui révélerait, ou par une insplratioi
> intérieure, les choses qu'il est indispensable de croire, ou plT
• L. DcspiriL ellHlerA, c. 33.
462 QUK
» quelque prédicateur de la foi qu*il lui enverrait comme il en-
» Toya Pierre à Corneille ^ < Ne craignons pas d*ajouter encore que
Dieu n*abandonne entièrement ni les aveugles , ni les endurcis, et
qu'il a pourvu sufGsamment , quantum ex se f«/, à TappUcation du
remède nécessaire au salut, même à Tégard de tous les enfans qui
meurent sans avoir reçu le baptême. Ensuite écrions-nous avec
TertuUien : non, il n*y a point de si bon père ! Tampattrnemo!
G*estdonc mal parler de Dieu que de dire qu'il laissa sans aucun
moyen de salut les hommes qui vécurent dans Véiat de nature ,
et même ceux qui vécurent ensuite sous la loi^ à Texception d*nn
très-petit nombre d'élus. U est vrai que la loi naturelle ne suffi-
sait pas aux premiers pour pouvoir opérer le bien surnaturel ;
que la loi de Moïse ne donnait pas par elle-même la force de Tac-
complir : Nil per se virium dabal ; que depuis la chute d*Adam,
la grâce de Jésus- Christ a toujours été nécessaire pour le salut et
pour toutes les œuvres qui y conduisent de loin ou de près; que
ce divin secours fut distribué avec une sorte d'épargne, si Ton
ose dire ainsi, dans l'un et l'autre état, en comparaison de ce que
Dieu fait h cet égard dans la nouvelle alliance, où la grâce est
populaire, abondante, et trouve des canaux multipliés par oii elle
se répand largement sur les fidèles qui viennent y puiser ; eu
sorte qu'on ne peut assez répéter que TËvangile est par excel-
lence la loi de grâce ; mais il faut reconnaître aussi que Dieu ne
commanda jamais l'impossible, et qu'en conséquence il vint con-
stamment au secours de la faiblesse humaine ; de manière que
l'homme a toujours eu, par la grâce du Rédempteur, un pouvoir,
ou prochain, ou au moins éloigné, et vraiment relatif, d'obéir au
commandement urgent de résister à la concupiscence, et qu'il a
dû dire, chaque fois qu'il a péché : C'est ma faute, oui, ma faute
libre et volonlaire. Les limites qui nous sont prescrites ne nous
permeitent pas de nous étendre davantage sur ces objets. Nous
ne répéterons pas non plus ici ce que nous avons opposé déjà
plus haut aux assertions de Qucsncl , dans lesquelles ce nova-
leur avance que la foi est la première grâce, qu'il n'y en a point
si cen'estpar elle, point hors de l'Église, etc. *.
* Quest. A, De vcritate, art. U, ad. I, t 12, p. 962, coL 3, E. Le
saint docteur suppose dans ce texte le secours de la grâce et la coopéra-
tion à ce divin secours.
2 Voy, les observât. que nous y avons faites, p. 403, 404, 410 etsuiv.
I
guK
4dS I
LiGcation îles adullps.
On cnteod ici, par le mol juiliflcalha, ccl heureux chungpinent
qui s'opère ï l'égard de l'homme et dans sou intérieur , quand ,
de l'éLat misérable du péthé, oti il était ennemi de Dieu, esclave
dj démon, indigne de possi^der Dieu dans le ciel, ou même digne,
par le péché mortel actuel, des Tcux éternels de l'enfer, il passe k
l'état Torluné de la grAce, ofi il est enfant adoptîf de Dieu, ment- .
bre vivant de Jésus-Chrisi, son cohéritier du royaume céleste.
Sans faire ici mention des liéréliques anciens qui s'égarèrent
étrangement sur ce point important, et parmi lesqueU on compte
surtout les PéUgiens, les Semi-Pélagiens, lesl'rédeslinatiens, eic;
dans ces derniers temps , les chefs de la prétendue réforme, vou-
lant, fi quelque prix que ce fût, ravir aux sacremens de la nouvelle
alliance la vertu salutaire que Jésus-Christ i a attachée, de <vn te-
nir ta grâce qu'ils lignlUent, el de la conférer à ceux qui n'y met-
lent pat d'obttacle , brouillèrent tout dans la doctrine de h justi-
Baîus, cherchant des moyens pour ramener !i l'uiiité catholique
les sectateurs de ces hérésiarques, se rapprocha d'eux en quelques
points, s'en écarta eu d'autres, innova dans un grand nombre ,
sur la même matière. I
Nous ne parlerons point de son apologiste. 1
Uuant â Quesnel , on volt assez eu quoi II imite Luther et CaU I
tId, puisqu'il anéantit, ii leur exemple, les dispositions que l'a-
dulte doit apporter il la jnsIiQcalion , expulsant, comme Doug
l'avons montré, le pécheur du seiu de l'Ëglise, le dépouillant de
loule grïce , le réduisant i. une impuissance générale de tout bien ,
taxant de péché sa prière cl même toutes les autres œuires qu'il
fait , tant que la charité ne règne pas dans son cœur ; prétendtDt
de plus que la loi n'opère que par cette même charité; que tout
ce qui n'en découle pas comme de source émane de la cupidité
et est vicieux; que la crainte servile n'arrête que la main ; que
Dieu guérit l'Ame par sa seule volonté , el que la première grâce
que reçoit le pécheur, c'est le pardon de ses péchés , etc. Ce n
^teur semble aussi tendre la main aux auteurs de la réfonoe,,
it ï la justice impntative, et admettre, ï la manière do Calvû
e sorte A'inamiuibililé de la grAre rei;iie dans le baplémi
^ la doctrine qu'on recueille dans un grand nombre de ses proposi* I
on damnées spécialement dans les propositions i, xxv, xxUiX
XXVIll, XXXVI, XIIVII, XLIII, XLV, XLVJI, Ll, LIX, LM, LSXtlII.
4&4 QUE
L'Église a foudroyé ces diiïérentes errears, à mesure qn^dlesse
sont élevées avec quelque éclat.Mais le concile de Trente, portant,
pour ainsi parler, jusque dans la profondeur du mystère qui nous
occupe, le flambeau sacré de la révélation, y a répands un ri grand
jour qu'il semble en avoir écarté à jamais les funestes téoèlirips de
rbérésie. Il fout lire avec une attention docile Texposition lumi-
neuse qu'il nous a laissée ^ de la doctrine catholique touduml
la justification, soit celle que le pécheur reçoit dans le baptême ,
soit celle qu'il recouvre dans le sacrement de pénitence, après
qu'il a en le malheur de déchoir de la première par le péché mor-
td. Quoique nous ayons souvent puisé dans cette source si pore^
pour étayer les vérités que nous avons énoncées jusqu'ici , nous
regrettons quiB les bornes de cet article ne nous permettent pas de
rassembler, dans un tableau fidèle et resserré, tous les traits de ce
monument précieux de la foi des siècles chrétiens. Nos lecteurs
verraient avec satisfaction sans doute qu'interrogeant la parole
de Dieu écrite et celle qui nous est parvenue débouche en bouche
par une tradition aussi sûre qu'elle est constante, ce grand concile
nous met sous les yeux tout ce que nous devons croire concer-
nant la justification du pécheur, et que, battant en ruine les faux
dogmes inventés par l'enfer pour pervertir les âmes, il ferme ds-
vaut nous les voies scabreuses de Terreur et du mensonge, dans
lesquelles nous ne trouverions que des déserts arides et qu'une
mort certaine. C'est ainsi que Ton voit tomber successivement
sous ses anathèmes foudroyans le Pélagianisme et le semi-Péla-
gianisme ancien et moderne, le vieux Prédestinatianisme et le ré-
cent , toutes les innovations des hérésiarques Luther et Calvin :
disons-le encore, il dissipe d'avance une grande partie des rê-
veries de Baîus, et condamne déjkla plupart des excès auxquels
Quesnel se livra long-temps après.
Nous renvoyons donc nos lecteurs à ce saint concile. Cependant,
afin de ne pas nous écarter entièrement de notre but, nous dirons
ici d'après celte autorité irréfragable: !• qu'il faut reconnaître,
dans les adultes qui parviennent à la justification par la voie or-
dinaire , une obligation étroite , et une nécessité réelle de s'y
disposer, quoiqu'étant pécheurs, c'est-à-dire souillés de la tache
du péché mortel, ils ne puissent la mériter en rigueur. 2" Qu'ils
s'y disposent véritablement, lorsque prévenus , excités et aidés
*■ Surtout dans sa session sixième et dans la quatonième.
yen
pir II grâce que Jiisus-Clirisi nous a mt^ritéepar ses Mullrances et
la mort qu'il » endurée suris croix pour nou», ils ï'ipprochent
de Dieu librement, crojani, d'une fui ferme et véritable , les vé-
ril<^s révélées et les promesse» venues d'ea liaut, priDcipalemeot
cepoint-ci, que l'impie etljutiiflé de Iiieu par la grâce, parla
rédemption acquiu par Jénu-Ctir'iU ; qu'ensuite se reconnaissant
pi!'cbeurs, et pissant de la craintede la justice divine, qui d'abord
ùié utile pour les ébranler , jusqu'à la considération de 1* ni-
itianlque Dieu
puis, commentant
séricarde de Dieu, iU l'élèveot i i'espéi
leur sera propice pour l'amour de Jésus-Chi
il aimer Dieu comme source de Louie justice , iU se tournent
ire leurs propres pécltés, les haïssent, s'eo repentent, prennent la
résotulino sincère de recevoir le baptême ( si déji ils ne l'oit
re^u ), de mener une vie nouvelle, d'observer les cooimandemeDi
de Dieu : ceux qui «ont tombés , après avoir été justifiés p»r ie
bapti^iiie, doivent ajouter d'autres dispositions encore, qu'il Tiut
lire dans le concile. 3° Que celle préparation, vraie opération de
lu gràeo avec coopération libre de la part de l'homme, est bonne,
utile , et ne doit point être regardée comme un nouveau çdiàié.
4° Quel'bomroe est jusiiCé, nua-seulemeot par l'imputa^oa de
la justice de iésue-Cbrist, et par la simple réoiission des péchés,
inuis par Uffrâee et la charité que leSainl-Esprii répand dans son
cu:ur; qu'ainsi la justice est vëritablemeat intérieureei inhéieute
â l'ùme. 5° Que la grâce de la jusiid cation n'est pas accordée seu-
lement i ceux qui sont prédestinés il la vie éternelle. 6" Qu'elle
n'est donc pas une marque iolaillible de prédestina lion A la gloire.
1- Que cette même grâce peut ^ perdre. 8' Qu'on la perd en etTet
par tout péclié nioriel qu'on commet, quel que aoii cepédié, dte
là qu'il est réellement mortel, 9° Mais qu'on peut la recouvrer :
celle reçue doDsIebaptëine, parle sacrement de pénitence; celle
acquise, par ce dernier sacrement, eu en réitérant la réception pour
cire de nouveau justifie. 1 0° EuUn, que les sacremens de la nou-
velle alliance cmitiennent la grAce qu'ils signittent, et qu'ils la
confèrent toujours à tousceuxqui les reçoivent aveclescoudJtioDS
Koua renvoyons, pour le surplus que nous omettons ici, ï ce que
nous avons écrit jusqu'il présent pour couiredire les dogmes lié-
lérudoiesdeguesnel, On peut lire depuis la page 3^ de ce
Ou vuit donc que la doctrine de nolie ei-oratoneu lend direC'
45B QUE
tement à fenner au pécheur fidèle le retour ait grftee ^ pnitqa^O
détruit, en les trayestUsant en autant dépêchés, les dispositions
qu*îl faut apporter à la seconde justification. Cest sans doute
dans la même Tue quMl met tant d^entrayes à la réception du sa-
crement de pénitence, en approuvant, dans ses propontions
LxxxYii, LxxxYHi ct Lxxxix» dcs éprcuTCs également ûbitnires et
ridicules, une discipline entièrement opposée à celle qui est aaio-
risée dans TÉglise, des privations funestes au pécheur non encore
réconcilié, contraires h ses devoirs religieux et dénuées de tout
fondement légitime *. Mais c*est surtout quand , de concert avec
les auteurs impies de la circulaire , il nous assure que nous ne
pouvons faire aucun bien sans une grâce irrésistible, et qui opère
tout en nous , sans nous, c*est alors , disons-nous , qu*îl porte les
coups qui achèvent de tuer Tespérance dans le cœur du fidèle
tombé et près de mourir.
Supposons, en effet, qu*un de ses partisans, profondément imbu
des principes condamnés dans les Réflexions morales, arrive à sa
dtrnière heure, après s*étre laissé entraîner pendant bien des an-
nées au torrent impétueux de ses passions , persuadé qu*il ne
pouvait y résister sans un secours à la Quesnel, et se confiant que
tôt ou tard ce secours commode viendrait le délivrer de la servi-
tude, où, selon le système, le péché est inévitable, la pratique du
bien impossible. Quelle sera sa détresse à l'heure de la mort ,
lorsque, portant, comme malgré lui, un regard douloureux sur le
passé, il verra dans un grand jour Tétat déplorable de son âme,
et que, considérant que la grâce sur laquelle il avait si vainement
compté, n'étant point encore venue , malgré son attente , il est
comme assuré qu'elle n'arrivera pas, puisqu'il ne lui reste presque
plus de temps? Ne se croira-t-il pas alors sans ressource, et même
frappé de la réprobation négative , à cause du péché du premier
homme*? En vain on lui représentera l'humble recours à la prière,
le p^ravt amoureux qui fléchit le cœur du Seigneur envers le roi
prophète, et l'absolution du ministre delà pénitence, comme au-
tant de moyens d'obtenir miséricorde: raisonnant conformément
à ses principes, il répondra, s'il en a encore la force, que la grâce,
qui opère dans le cœur la prière, le repentir et l'amour, sans que
* Voyez-les p. 383. Cest une conduite pteine de sagesse, etCf et ce
que nous en avons dit, ii 15 et 416.
« Voyez ce que nous avons rapports sur ce sujet, p. 4^0»
:a{K)îr daDs le cœur d
le liberliD qui joui»;
QIE
le cœur sVn m<Mo, lui manque ; cl son ilcfnîer mot sera ilouc ce> |
lui-ci : JeuHit perdu.
Noua ne croyons pas devuir nous arrêter à prouver que les di»-
cipifs de QuesQcl ne dégénérèrent guère dans In sullc de la sÉvé- j
lîU désespi^ante de leur maître. On se ressouvient encore de l'ex* ^
bénie rigorisme qu'ils exerçaient dans le sacré tribunal ;
Vègles omrées qu'on retrouve dans un grand nombre de leurs li- ]
ts , surtout quant a ce qui concerne les dispositions qu'il faut
iporier ï lu réception de l'alisolution et i lu participation des
lÎDis mystères, nous en offrent des monumens qui ne sont que
op répandue. Ce n'est pas , au reste , qu'ils aient excédé en tout
^ la même manière ; car en élabliss^anl leur gritce qui fait exclusi-
>Veinenl tout , et en soutenant que la première qui soit accordée
pécheur est le pardon de ses pécliés, s'ils jetaient par-lii le dé»- I
inel réduit i son dernier momeu
ontrer, ils mettaient aussi fort !i k
de la santé et qui ne clierchajt qn*' 1
jselqnei spécieux prétextes pour s'autoriser A croupir d«ns se* 1
^ordres. < En eflet , pouvait-il se dire ù lui-même par un raî-
Monement aussi juste dans le système que pernicieux dans II
Térilé , ou Dieu veut me donner sa grice, ou il ne le Teut pas :
t'il le veut, elle viendra lût ou tard me transplanter dn la voie
large dans la voie étroite, ob je serai pardonné, converti, jut
tiGé sans aucune démarche préalable de nia part ; s'il ne le veut J
t* pas, tous les efforts que je ferais de mon c6té seraient inutile»^
• et tout autant de péchés plus capables d'éloiper Dieu
» que de me rapprocher de lui ; le seul parti qui me reste eltfl
duiic de m'endormir tranquillement dans le sein de la volupté, ,
tans me soucier d'un aveuir qui, soit bon, suit mauvais , m'est]
également inévitable, >
(!• Du mérite.
Il surfit de s'être formé une idée juste de la délectation rclati
Tem en t victorieuse élublie par Jausénius pour prévoir d'avanc<
les partisans de ce système absurde n'ont pu laisser intacte la ,
atholique touchant le mérite des œuvres. Mais une chose | '
diflicileï croire, si on n'en avait pas des preuves ceruines, c
>^'iis regardèrent le renversement de la saine croyance su]
essentiel ï la religion, comme un moyen nécet
niie pour abaisser les religieux et leur ûtcr la confiance des peu
pics. Ernulons un momenl ceui qui gouvernaient le parti.
39
458 QUE
» n*aTODS que trop reconnu , écrivaient aux unis les auteurs de la
» lettre circulaire à MM. les disciples de saint Augiulin , nous nV
» vons que trop reconnu que la doctrine des mérites , comme elle
» est maintenant entendue et pratiquée dans TËglise , est le plus
» grand appui des moines et le principal fondement de leur sub*
» sistance. Car tandis que Ton croit que Dieu donne des gr&œs
» suffisantes à tous les hommes pour se sau?er et qu'elles sont
» rendues efficaces par notre coopération , ceux qui auront soin
9 de leur salut s'empresseront à connaître les volontés de Diev
» sur eux pour y correspondre, et s'adresseront aux moines qu'îb
» croient être les seuls dépositaires des secrets de Dieu. Dé plus,
9 ils s'adonneront à faire quantité d'aumônes, au moyen des-
9 quelles les moines ont pris le premier rang. // imparte beaucoup
9 que les vrais disciples de saint Augustin iernissenl celte doctrine
9 qui gène les esprits , sous prétexte de conserver leur liberté.
» Qu'ils parlenten général d'une grâce charmante et victorieuse,
9 qui ne laisse point à la volonté des prédestinés la peine d'y cor-
9 respondre, et que tous les soins que nous prenons de servir Dieu
» par nos bonnes œuvres sont inutiles. Qu'il ne faut que laisser
9 faire la grâce , et qu'aussi bien nous ne saurions résister à tel-
> les aimables violences, etc. ^»
Nous avons di'^jà remarqué que Quesnel avait envoyé une in-
struction de celte espèce à une religieuse de Rouen, avec une
lettre écrite de sa propre main. Quelque horrible que paraisse
celle production , d'après les cuurts extraits que nous en avons
donnés, notamment d'après ce dernier, elle ne renferme néan-
moins , suivant les auteurs , que le résultat des lumières que Dieu
leur avait communiquées, après des prières continuelles ; et, suivant
la vérité, elle ne contient rien qui ne soit digne du système, rien
qui ne s'en déduise naturellement, rien qui inspire des idées exa-
gérées de la secte , de ses projets , de son savoir-faire ; en un
mot, <t rien dont le parti ne soit convaincu; » comme le prouve
M. de Cbarancy, évoque de Montpellier, dans son mandement
du 24 septembre 1740, à la suite duquel il fit imprimer cette dé-
testable circulaire.
Mais quand même les Jansénistes seraient parvenus à nous en-
lever cet écrit rempli d'erreurs et d'hérésies, à force de le renier,
ainsi que quelques-uns l'ont fait, en conséquence de ce qui y est
i
Second moyen d'ubai5«er les moines.
■ QUE 4SS
oT^annë , àbs Ion qu'il est conGUnt que la grâce qu'ils adiiieltent
pour poutvir opérer le bien est efBcace ï leur fagon , c'esl-i-dire
irrésistible, imposant à celui qui la reçoit uue ni^cessiié relative,
inévitable, invincible, il demeure démontré par-lâ mâmeque,
sous l'inOuence de celle grice prëlendue , Tbomnie n'a pas la Vi-
heHé uécessaire pour pouvoir mériter , et qu'eu conséquence il ue '
mérite nullement par ses bonnes n-uvres, Quesnel détruit encoro
Duverteoienl le mérite dans sa proposition ixa, où, s'adressent i
Dieu, il lui dit : • la foi, l'usage, l'accroissement et la récoro-
> pense de la foi , tout est un don de votre pure libéra-
. lité. .
Enlin , les Jansénistes sont obligés de convenir avec les Trotes-
lans que le juste pèche au moins vénJellement dans toutes ses ac-
tions les plus saintes, tandis que la concupiscence n'est pas entiè-
rement anéantie dnns son cœur. En eRet, de même que quand il
transgresse un précepte, entraîné invinciblement au mal parla d^
leclatiou terrestre plus forte en degrés que la délectation céleste,
celle-ci ne laisse pas d'opérer en lui des velléités, des désirs et
«leseETorts, qui, quoique inefficaces, n'en sont [.as moins bons et
louables, puisqu'ils tendent an bien et que c'est la grâce qui lea
produit dans la vdionlé ; de même aussi quand le juste fait le bien ,
la concupiscence , quoique vaincue parla grâce, ne laisse pasd'o»
pi'rer dans sa volonté des monvemcns vers le mal , lesquels étant
mauvais dans la fin ù laquelle ils tendent et dans la source d'ob
ils émanent, ils doivent nécessairement ternir la bonne u^uvreen
; imprimant le sceau hideux de h cupidité. La raison enesiquecea
mouvemens sout libres, suivant le système, puisqu'ils sont dans
la volonté conformes i) l'inclination qui j est imprimée par la con-
cupiscence. De lii ces propositions si franches de Balus : • La con~
> copiscence ou la loi des membres, et ses mauvaisdésirsquelei
> bommes sentent malgré eui, sont une vraie désobéissance il la
« loi. Tant qu'il reste encore quelque chose de U coneupiscenoa
■ de la cbair dans celui qui aime, il n'accomplît pas le précepte:
IV Voui aimertt te Seigneur retre iHeu de lovl voire eirur '. •
'' Tous les ihéolugiens orthodoxes reconnaissent deiut sortes de
iigirile : un mérite proprement dit et de justice, qu'ils appellent
bérite de condignité, merilum de tomtiQna; et un autre milite
■B,
cneil
460 QUE
qui ii*opère pas le même droit et auquel ils donnent le nom de mé-
rite de coDgruité, meritum de congrue»
Ih fondent communément le premier sur Tordre snrnatarel éta»
bli de Dieu , en vertu duquel les bonnes œuvres faites dans la
justice, en vue de Dieu et par le secours de sa grAce adiMlle, oat
une valeur proportionnée à la récompense que Dieu s*est formel-
lement engagé d'y donner, et acquièrent au juste, à ces deux titres,
mi droit réel à la récompense promise. Us appuient le second sur
la confiance en la bonté de Dieu et sur la convenance qu^il y a
qu*il vienne au devant de celui qui fait des efforts avec sa grâce ,
sans néanmoins que Dieu y soit obligé par aucun engagemenl de
justice.
Les théologiens établissent sur des preuves solides Vexisience
et la distinction de ces deux espèces de mérite ; ils en fournissent
des exemples caractéristiques, quMls puisent dansTÊcritore sainte»
et ils répondent d'une manière satisfaisante à toutes les objections
des novateurs sur ces différens points de doctrine. Noos n*entre-
rons pas ici dans ces détails ; mais nous ne pouvons nous dispen-
ser d'observer que quand les auteurs orthodoxes emploient en cette
matière le mot justice , ils ne font que répéter ce que saint Paul a
dit lui-même ^ ; et qu'ils entendent ce mot dans un sens étendu,
non dans un sens strictement rigoureux , convenant tous que la
justice commutative ne peut avoir lieu entre Dieu et les bommes.
Dieu a bien voulu établir un ordre pour le salut de ceux-ci ; on en
conclut qu'il se doit à lui-même de suivre cet ordre : il a daigné
faire avec eux un pacte par lequel il s'est libéralement obligé à
les récompenser, moyennant certaines conditions de leur part ; si
donc ces conditions sont ponctuellement remplies , il est de la fi-
délité de Dieu de dégager sa parole, et les hommes ont droit de
lui en demander l'exécution , suivant saint Augustin.
Mais ce droit dont nous parlons, tout droit de justice qu'il est
dans le sens que nous venons d'expliquer, n'est pas néanmoins un
droit strictement rigoureux : il ne naît pas du fond des œuvres
considérées en elles-mêmes et dans leur valeur intrinsèque ; c'est
Dieu qui l'a lui-même fondé et qui Ta donné à l'homme par un
trait de sa libéralité envers celle créature chérie.
En effet. Dieu pouvait dans le principe, et sans blesser ni ses
attributs sacrés ni l'exigence de la nature humaine, destiner
1 S Tim., A, 8.
(JLK
Jiil
riiommc!) une Au purement naturelle, eviger de lui un B^fvica |
el lui doTioer des moyens prupurlumn^sii celle Gn, le rècompcnspr 1
de même ou le laisser siiii« ri^comppnse , el le punir d'une mn-
nière sévère s'il avait lj hardiesse de Inosgresser ses devoirs.
L'EioLume élant déchu par sa diisobâÏEsance irts grïËve du droit k
la vision inluiiive dont Dieu lui avait libéralemeDl fait pari, Diea i
pouvait le livrer h son malheureux sort, ne point lui donner di
bérateur, ne lui accorder aucune grftue. L'homme naissant soi
du péché, euuemi de Dieu , esclave du démon, n'a aucun dm
ce que Dieu jeile sur lui un regard de pitié , ï ce qu'il vienne i |
son secours et le délivre. S'il retombe, après avoir élé niis^riwr-- |
dieusement jusliGé dans le bapléine , le péché mortel le dépouïUft
de nouveau de son droit ï la béatitude et i tous les utojeus né-
cessaires pour le recouvrer. H est vrai que Jôsus^ChriBI a niérîlfr
1 Ions les hommes , par les souOrances et la mort qu'il a endur<^es
pour tous , les i;rïces el les secours dont ils ont besoin pour pou-
voir opérer leur salul; mais, outre que cette sainte rédempliou a
été un eFTet de h pure miséricorde de Dieu , l'application qui en
e&l faite par la premÏËre grïcc a lieu on faveur d'un indigne. Di-
sons donc, avec le deuxième concile d'Orange, dont l'^liseareçu
toutes les décisions : • la récompense est due aux bonnes œuvres,
I si elles se font ;mais la grice qui n'est pas due les précède afin
> qu'elles se fassent * ; > el avec le cnncilc de Trente , apr&s siint
Augustin et Innocent I : t la bonté de Dieu envers les buniiues est
• si grande , qu'il veul bien que ses propres dons deviennent leurs
• mérites*. • Nous espérons que nous éclaircirons davantage ceci
en parlant de l'objet du mériie.
Il suii de ce que nous avons dit plus hnut que lo juste seul peut i
mériter condignemenl. C'est ce que le Sauveur fuisuit entendre à
ses apâlres quand il leur dirait : > comme la branche ne petit j
• d'elle-même porter de fruit, qu'elle ne demeure unie i la vi-
■ giie , ainsi vous n'en pouvcï point porter qne vous no demen-
• riex unis !t moi'. • Et pour pa.^er sous silence heiiuuoup d'aii-
tres preuves que fiiurnissenl sur ce point l'Écriture elles l'ùret,
telle est la doctrine établie par la condamnation qu'a faite là
s.iiut Sié);e de plusieurs propositions de Butun, d.ins I
' Ca,,. xuu.
468 QUE
quelles ce Dovatenr enseignait des dogmes diamétralement eoi-
traires^.
Mais le mérite ne peut s*acquérir qa*en cette yie : il exige que
Faction soit moralement bonne, faite avec le secours de la grâce
âetuelle, rapportée à Dieu, opérée avec liberté, exempte par con-
séquent, non-seulement de contrainte, mais encore, comme nous
Fafons déjà plusieurs fois observé, de toute nécessité, soit im-
muable ou simple, soit même relative. Le mérite de condignilé
suppose encore, ainsi que nous Tavons remarqué, une promesse
formelle de la part de Dieu.
Or, que Tbomme juste mérite véritablement, quand il opère le
bien avec toutes les conditions requises, c*est un dogme catholi-
que fondé sur les Livres saints, la tradition et les définitions ex-
presses de rËglise. Le concile de Trente, après avoir rapporté
plusieurs textes de saint Paul qui établissent cette vérité conso-
lante, en conclut qn*il faut proposer aux justes qui persévèrent
jusqu'à la fin de leur carrière dans la pratique constante du bien,
et qui espèrent en Dieu, la vie éternelle, soit comme nne grâce
miséricordieusement promise aux enfaos d'adoption, en considé-
ration de Jésus-Christ, soit comme une récompense qui doit être
fidèlement rendue à leurs bonnes œuvres et à leurs mérites, en
conséquence de la promesse de Dieu. < Car, dit ce saint concile,
» c'est là cette couronne de justice que Tapôtre disait lui être ré-
» servée après le terme de son combat et de sa course, et devoir
9 lui être rendue par le juste juge; non pas à lui seulement, mais
» à tous ceux qui aiment son avènement *. »
La raison que le concile donne de cette doctrine doit être re-
marquée. « Jésus-Christ répandant continuellement sa vertu dans
» ceux qui sont justifiés, comme le chef dans ses membres, et le
» tronc de la vigne dans ses pampres ; et cette vertu précédant,
» accompagnant et suivant toujours leurs bonnes œuvres, qui, sans
9 elle, ne pourraient aucunement être agréables à Dieu, ni mérî-
» toires : il faut croire, après cela, qu'il ne manque plus rien à
» ceux qui sont justifiés pour être estimés avoir, par ces œuvres
» faites en Dieu, pleinement satisfait à la loi divine, selon l'état
» de la vie présente , et avoir véritablement mérité la vie éter-
* Voyet les ^Top, ii, xi, xii, xiii, xv, xviir, etc. BuWe Ex omnibus
afflicf,
"Dcjuslif., cap. 16.
in lemps, ponrTnlonieroîs qu'ils mi
ele même concile dit
1 par le mojrea des
iDii justifié!!, et fïits
neUf , pOnr l'obtenir en »
■ renl dans la gi-Sce '. ■
Nou» ne pontonç passer bous silence ce qn
iiîlleurs de l'aui^uienlalion de la justificatioi
iKinnes œuvres. ■ Les hommcK Étant doue a
• domestiques et amif de Dieu, s'avancent d
• renouvellenl, comme dit l'apôlre, de jour en jour; c'est^-difft
• qu'en mortifiaut les membres de leur chair, et les faisant servir
> â b piéiê et à la justice, pour mener une vie sainte, dans l'ob-
• servutioo des commandemens de Dieu et de l'Ëglise, ils croîs-
• Mnl parles bonnes œuvres, atec la coopération de la Toi, dans
j cette même justice qu'ils ont re^ue par ta grâce de Jésus-Chrîsl,
S M sont ainsi de plusen plusjusiîSês, etc *. •
'* A l'égard de la persévérance, le concile de Trente déclare que
ce doa précieax • ne peut venir d'ailleurs que de celui quî a la
puissance d'affermir celui qui est debout, afin qu'il demeure par-
sévéramnent debout, et de relever celui qui tombe. Que per-
sonne ne se promette (donc) lî-dessus rien de certain d'une cer-
titude absolue, quoique tuns doivent mettre et établir une
espérance très-ferme dans le secours de Dieu. Cur, ï moins qu'ils
ne manquent eux-mêmes h sa grâce, Dieu achèvera te bon ou-
trage comme il l'a commencé, opérant le vouloir et l'effet. Mais
cependant il faut que ceux qui se croient debout prennent garda
de tomber, et qu'ils opèrent leur salut avec crainte et trembla
ment, d;)n5 les travau;i, les veilles, les anmAues, les pri&rcg,
les offrandes, les jeûnes et la chasteté. Car , sachant que leur
renaissance ne les met ps encore dans la possession de In
gloire, mais seulement dans l'espérance d'y parvenir, i's doi-
vent craindre pour te combat qui leur reste i soutenir contre la
chair, le monde et le démon; dans lequel ils ne peuvent être
ïictorieui, s'ils ne se conforment, avec l'aidede la grâce, i celle
maxime de l'apôtre : Ce n'etî point à la ehair que nuui lomiM*
Tfltvalilf», pour que nom vMina leton la chair; car »i uohi vive:
la chair, vaut mourrrv, maitti votti merUlfei par l'rtpril le.
rt de la chair, voiu vitrez ' . -
ne tes ennemis de la fui orthodoxe se plaignaient que li i
t DejuKlif., cap. 16.
* Ihid., cap. 10,
*lbi(),, cap. 13.
464 QUE
doclriae catholique mellait la justice de Thomme à la pbee de
celle de Dieu ; qu'elle anéantissait les mérites de Jésûs^Ghrisi» ea
établissant ceux du juste, et qu'elle ressuscitait le PélagtaBÎsBe
proscrit depuis long-temps par FÉglise, le concile de Trente»
après avoir montré Tinfluence vivifiante que le Sauveur répaad
continuellement dans Thomme justifié; influeuce qu'il appuie de
plus sur ces paroles de J ésus -Christ : Si quelqu'un Ml de Veau
que je lui donnerai, il n'aura jamais soif, maiseUe deviendrmen Ud
une source d'eau quijaillil jusqu'à la vie éternelle; il ajoute, pour
réfuter ces plaintes dénuées de fondement : c Ainsi, on n'établit
» pas notre propre justice comme nous étant propre de oous-mè-
9 mes, et on ne méconnaît ni on ne rejette la justice de Dieu ;
c car cette justice, qui est dite nôtre, parce que nous aommes jus-
» tifiés par elle, en tant qu'elle est inhérente en nous, est dle-
9 même la justice de Dieu, parce qu'il la répand en nous par le
» mérite de Jésus -Christ * . »
Le concile de Trente reconnaît donc que tout notre mérite sur-
naturel est appuyé sur le mérite du Sauveur, et que c'est de là, et
de la grâce qui nous est accordée en considération de ce divin
mérite, que nos bonnes œuvres empruntent toute leur valeur.
« Personne, dit saint Paul, ne peut poser un autre fondement que
» celui qui a été mis, lequel est Jésus-Christ *. » 11 ne faut pas
cependant conclure de là « que les bonnes œuvres de l'homme jus-
» tifié sont tellement les dons de Dieu qu'elles ne soient point
» aussi les bons mérites du même homme justifié. » Il était ré-
servé à Quesnel et aux auteurs de la circulaire de renouveler cette
erreur proscrite par le concile de Trente sous peine d'anathème '.
Car, quoique nos bonnes œuvres soient à Dieu, en ce que nous
les lui devons déjà, quand nous ne faisons qu'accomplir ses com-
roandemeus, et parce que nous opérons toutes ces œuvres avec le
secours de la grâce qu'il nous donne, cependant elles sont aussi
à nous, puisqu'en les faisant nous coopérons à la grâce librement,
de notre propre choix, et sans y êlre en aucune manière nécessi-
tés. 11 en est de même de nos mérites : ils sont à Dieu, comme à
Fauteur bénévole de l'ordre méritoire, des promesses qu'il nous a
faites, des grâces qu'il nous accorde; mais ces mêmes mérites sont
^Dejustif., cap. 16.
*iCor.,3, H.
'Dejusti(l,can. 32.
uussi en mi-ine lenips fi nous, puisque nous accoiiiplissoiisicL'IlL'-
mcnt ilo Dolr^ côltel avec liberté, quoi{]ue loiijoors !> t'niileilela
grlce, les coDiliiions du paclo que Dieu a daigné cODiracter avec
noua. ToDt ceci doit nous porter i admirer la brinlédeOieu, «qui
t est si grande enrers les liommes, dît le oiâtne concile, qu'il veut
■ bien que ses propres dons deviennent leurs mi^rites * ; • cl il
est très-vrai qu'il couronne les dons de sa miséricorde, quand il
nicompenie nos bonnes otuires.
Quant au mérite proprement dit, le concile, que nousneDout las-
sons pas de copier sur unemaliÈre si dclicate et si impurtunle, dcli-
nit ' que les justes doivent, pour leurs bonnes uiuvres ftiln en
• Dieu*, attendre et espérer de lui, par sa miiéricorde,eipar lenié-
> ritede Jésus -Cb ri st, la récompense éternelle, s'ilspersévércni Jus-
> qn*klaBn!i bienfairect ï garder les commandemensde Dieu. *•
> Il anaihématise celui qui dit < que l'homme justi Hé ne mérite
* De justif., cap. 16.
' Mais que veut dire le concile de Trente par Ira <ruvrc3 faUa en
Dieu 7 Une action bonne, libre, opérée dans la grice Minclilianic et par
le tecoarsde la gr&ce actuelle rnppartte A Dieu par un motif surnatu-
rel, c'ett-t-dirc pniié dam ta rd, quel que soll eemolir, nemtritct-ellc
pas conifijiienwn( la vie élenicllc ? Il y a des ihéologleiuqui diseutque
oui ; d'autres touliennenl que non, et ou en lOÎI qui pi-Ëtendent que
cette actioa ne mérite qu'une récompense accidentelle, non pas la tue
intuitive. 'On ne lauraît douter, esl-it dîtcrOment dans le raincui
■ Curps dtdiiclrine de 17Î0, arL it, de la nécessité de la cliarilé,
• vertu tliéoloftale, pourfaire desacles mériloireidu talnl. • Que tatil-i\
doue pour qu'une bonne (cuvre mérite condiDncaunt tout ce qitv le
concile de Trente assure à ce mérite ? Il est néresiairc, iliscnt les plut
niscaiis, que la bonne œuvre soit inspirée ou commandée par In cha<
rite Dctuclle et opérée par le motif de celle vertu. Hou* ne décidrruni
rien ici sur ce point, >i ce n'est qu'un ami de Dieu, qui luiolTre, d{s te
matin, lesactloisen particulier, dans la vue de lui pta'rc et qui réitère
de temps en temps cette offrande, thésaurise abondamment par-IdniéiuG
pour le cleL
Remarquons en pauani qu'il y a loin entre exiger qu'une action soit
Taîie par le motifet l'influcnre de la charité pour ta rendre digne du
mérite de eondignili, et étirer qu'une action émane de la même vertu
pour qu'elle ne toit pas mauvaise : il n*jp|>»rlicut qu'aux Janséniitei
de soutenir cette deruiére atscrllon qnctuus les tliOologienscullioliiiuct
rejettent unaniiuemenl.
1 Dejustir.,can. ÏU.
466 QUE
• p&ê vériMlement^ par les bonnes œuvres q!i*0 h\l tree lese-
9 cours de la grâce, et par le mérite de Jésus-Christ, dont H ert
» un membre vivant, Faugmentation de la grftce, la via éleraellet
» et rentrée dans cette même vie, pourvu toutefois qa*îl meure
9 en grâce, et même aussi augmentation de gloire^. >
Tous les théologiens orthodoxes reconnaissent dans ce demief
canon du concile de Trente ce qu*ils entendent désigner par mé-
rite de condignitéf ou de jtulice , et les biens surnaturels qui soaC
les objets de ce mérite. Ils concluent de là que le juste peut mé-
riter condignement Faugmentation de la grâce sanctifiante , qn
n*est pas égale dans tous les justes , la vie étemeUe , et dM ae-
croissemens de gloire pour le ciel.
Quant au mérite improprement dit, ou de eangruité^ les mêmes
théologiens établissent, sur d'excellentes preuves, que lliomme
étant prévenu, excité, aidé par la grâce actuelle, et y correspon-
dant avec fidélité, peut en mériter de nouvelles , de plus grandes,
même le don de la foi , la grâce sanctifiante , et emuite la grâce
spéciale de la persévérance finale. Ils soutiennent que le juste
peut mériter de même, c'est-â-dire d'un mérite de cougruiié ( car
nous ne parlons maintenant que de cette espèce de mérite), pour
soi et pour d'autres, des grâces actuelles , et des biens terrestres ,
même pour d'autres, la première grâce actuelle.
Nous avons déjà fait voir que le pécheur ne peut rien mériter
cimdi^n^ffi^ft/ , puisque le mérite de justice suppose et exige Félat
de grâce. Mais s'il fait un acte de contrition parfaite, il obtient
infailliblement la justification, à cause de la promesse de Dieu.
On ne peut mériter surnaturel! cment sans le secours de la
grâce actuelle. Ainsi, la première grâce actuelle est un don de la
pure libéralité de Dieu : personne ne peut la mériter , en aucune
manière, pour soi ; l'Église l'a décidé contre les Pélagiens et les
semi-Pélagiens. Mais on ne peut pas dire que les grâces que Dieu
veut bien accorder, par miséricorde , et à la vue du bon usage
qu*on a fait de la première grâce actuelle , ou d'autres grâces
subséquentes de même nature, soient aussi des dons de pure li-
béralité; puisque la correspondance à une grâce dispose l'homae
à en recevoir une autre, l'en rend moins indigne, s'il est pécheur,
plus digne , s'il est juste , et est un effort de sa part , quoiqu'il
fasse cet effort avec l'aide de la grâce.
' DejustiC, can. 32,
QUE J07
Il fiiuJi'ali voir de Lravers pour nous uucuaer de déroger ici
aux ED^riies du Suuveur, puisque duus confessons que toules Id
grâces que Dieu uous uccorde, et nos luÉriles niéuieB. vienneal du
cette source silutaire ; nims ne dérogeons pas dsTsntïge i U
buniÉ de Dieu, puisque nous fuudons sur k confiance en cette
boDté ineffable le loérite de eongruilé; que nous reconnaissoni
que DOS mérites naturels ne deuiandeui aucune considéraliou ,
n'en mëriteul aucune , n'en obtiennent même point dans l'ordre
du salut , et que Dieu ne nous duit en rigueur, c'est-ii-dire en
conséquence d'aucun mérite de jialice ou de con<Sigttit^, de nom
piiri, ni la foi, ni la justification , ni le grand don de la persévé-
nnce iiuale, ni même la grâce actuelle suQisaote ou efficace.
Nous ne mettons donc pas aolrt con/iance ni noire gloire en neuë-
raénKs , mai» dtini U Seigneur, de qui nous tenons tout ; et noua
disons Toloiiiiera, après le deuxième concile d'Orange, que nous
n'avons de notre propre fonds , par rapport à l'ordre turaalurel,
que l'erreur et le pécbè ', et, après le cuncile de Trente, qu'il
est en notre pouvoir de rendre nos voies mauvaises ; mais que
nous ne pouvons ni croire, ni espérer, ni aimer, ni nous repentir
comme il faut pour nous disposer à la jusiiUcaiion , sans l'inspi-
raiiou prévenante et le secours du Sainl^li^prit'; en un mot que
nous ne pouvons rien de salutaire sans Jésus- Christ.
Enfin, le concile que nous venons ^e citer frappe d'anathème
celui qui dirait • que la justice qui a été rer;ue n'est pas con-
■ servée, et même aussi augmentée devant Dieu par les bonnea
• otuvres; 'Comme aussi qui dirait • qu'en quelque bonne tenvre
I «([(le ce soit, le juste pèche an moins véoiellcment ; ou , ce qui
^n><Mtplus intolérable, qu'il pèche mortellement; et qu'eji conté-
^^y^nence, il mérite les peines étemelles ; et que la seule raison
> pour laquelle il n'est pus damné , c'est parce que Dieu ne lui
' impute pas ces oeuvres ï damnation *. • Tout let la'mt que «out
prcnaiti de tenir Dieu par net bannet œuvrri ne tant donc pas
ittulilet ; et les propositions de Baius, que nous avons rapportées,
['— *if«i aauipar terre.
11. Dire, en parlant de l'eiconimiinicalion : ■ C'est l'Église
li en a l'autorité . pour l'exercer par les premiers pasteurs,
Z
:
LO habet de t
■ Ibid., con, i4cl3S.
?t poicatiim. Cap. i
4fi8 QUï
» du consentement au moins présumé de tout le corps» 9 ainsi <pe
8*cxprime Quesnel dans sa proposition xc, qui est son trasièaie
principe capital , c'est diviser TÉglise entre les pasteurs du pre-
mier ordre , le clergé inférieur ei les autres fidèles , comme es
deux parties; établir dans la seconde le corps de TËglise; loi
attribuer la propriété immédiate et proprement dite de la juri-
diction spirituelle ; reconnaître que les premiers pasteurs n*en
ont que Tusage» ne Texercent qu*au nom de ce même corps, ne
peuvent rien, en fait de gouvernement, que de sou consentement
au moins présumé, par conséquent qu'ils n'en sont que les instro-
mens, les ministres, les exécuteurs et les mandataires.
Quesnel appuie , dans son septième mémoire , rinterprétatios
que nous donnons ici à sa proposition que nous venons de rap-
porter. « Cette proposition générale , dit-il dans ce mémoire , qMe
» les clés ont été données à l'Église, qui renferme la quatre-vingt-
9 dixième des cent une condamnées , est d*une considération
» d'autant plus grande, que, d'une part, elle est la source de toute
9 Téconomie du corps mystique de Jésus-Christ, le titre primitif
9 do son ministère, le fondement de toute la juridiction de TË-
» glisc, la racine de Tunité sacerdotale , la règle de la conduite des
9 pasteurs, la base de la discipline, la sûreté de la concorde et de
» la paix , le fondement des libertés de TËglise gallicane et de
» toutes les autres Églises particulières ; et que, d'un autre cûié,
9 les Halteurs de la cour romaine depuis trois cents ans s'effor-
»cent de détruire cette doctrine évangélique et apostolique, pour
rendre le gouvernement purement et entièrement monarchique
9 et arbitraire, etc.*. > Voilà doue la propriété des clés ou du pou-
voir de juridiction donnée à toute l'Église, et la proposition qui
énonce celle propriété sous ce rapport contient une doctrine éoetn-
gélique et apostolique.
Mais, quoique propriéuirede la puissance ecclésiastique, TÉ-
glise, ou, comme nous l'avons dit d'abord, le corps de l'Église,
ne peut l'exercer immédiatement. Pourquoi? C'est, dit Quesnel,
que « l'Église n'a point les clés quanta Vtisage, parce qu'elle n'est
» pas un suppôt propre à en avoir l'administration : actiones sunt
» supposilorum ; c'est pourquoi il est nécessaire çuV/l^ commette
» des minisires potir les exercer «. » Les premiers pasteurs ne sont
2 Jl>itl., p, 7*,
y LU-:
I
donc t[iie les commit Jf l'Église quani au yuuïerneiiieiil ; eL puis.
que l'Église exerce l'autorilË par eui, ainsi que lu porle lu pvo-
posilion ic, ils ne soni donc que ses inslrumens , ms eiéciileurs
et ses mandataires ; ils agissent donc en son nom, etc. Il est i rai
que notre savant dognialisle reconnaît que les premiers pasteurs
■ont d'institution divine ; mais cet aveu ne déroge en rien li son
iptème : il s'ensuit seulement que Jfsus-Christ a voulu qu'il
j eût des ministres pour manier l'autorité spirituelle ; qu'il a
choisi les premiers, a établi qu'ils se multiplieraient el se suc-
céderaient par l'ordination ; qu'ils seraient les commit, les subor-
donnés de tous les corps de l'Église, et qu'ainsi ils seraient en
même temps et ses propres ministres , et ceux de l'élise, dam
toute la lurce de l'expression.
11 faut conclure de h que les évéques sont tous, sans exceptîoi
d'aucun , les pastears ininhtiruU de l'Égliso. QuesncI ne di^-
Touera pas cette conclusion , lui qui pose en principe que <
i ministres de Jésus-Christ et de son Église le pape
doute est le premier en rang , premier en dignité, en anioril
juridiction, comme cliefminitléricl de tout le collège épii
pal *. > Autre propoiiiiion équivoque, et qui, strictement prli
wmble signifier que ce n'est pas assez que le pontire romain i
h eemmi» du corps de l'Église , mais qu'il faut de plus qu'il
encore eommiu'wn de I» part de laiit le eôUége ëpiicopal ; en aorte'
^'il sn trouTerait, dans ce cas, douMcmenl minift^riet, et que ce
serait avec grande raison qu'il prendrait , comme il le Tait sou-
l'humble titre àeieri-Ueur iet lerviieuri; mais au lieu d'a-
[JtHiter de Dieu , ainsi qu'il le fait communément , il devrait dire
l'tgliie, se reconnaissant îngénnment pour le tercileur 4et
ttniUuii de l'Êglue, c'est-il-dire pour le serviteur des évéques,
nt eux-mêmes les serviteurs du corps de l'Église.
i n'emp^clie pas que l'évéque de Rome n'ait • autorité
liction sur chacun de tous les évfqucs du monde chrétien,
pour vriller à la camenalion de la ditctpHne générale.
j.»pour cela que le pape , comme le supnlme pontire, est étubll
chi'f et supérieur de tous les évéques eu particulier, et en ni
IrH'bon uni , chef visible et m'm'ulériel de tous les fidèles
cher général Je tous les chefs particuliers des Églises*. »|
' De juïiir., p. in.
470 QUE
On voit dans ce texte pour quelle cause le corps de FÈglise ei le
collège épiscopal commettent le pontife romain. C*esl pour xffSùxà
à la conservation de la discipline générale : il faut donc qu'il s*eQ
tienne là. On y Toit aussi quelle autorité il a sur les fidèles : il est
leur chefcomme chef général de tous les chefs parliculiers des Églises.
Au reste, Quesnel tient si fort à sa propositioa^M:, qu^il Tassi-
mile à celle-ci : « G*est TÉglise qui a le droit et le pouvoir d*of-
9 frir à Dieu le sacrifice du corps et du sang de Jésus-Ghristy pottr
9 Vexercer par ses ministres, du consentement au moins présumé
9 de tout le corps ^ » Et il Tcut qu'on ne puisse trouver à redire
à celte nouvelle proposition » ou du moins la condamner , sans
donner un grand scandale aux enfans et aux ennemis- de l'Égliu :
9 Ce serait, ajoute- t-il, donner un démenti aux saints Pères et
9 aux docteurs qui ont eu le plus de lumières pour expliquer la
» sacrée liturgie et pour en développer les mystères *. »
Or, si Ton rapproche le système de ce novateur de celui d*Ed-
mond Richer , il est difficile d'apercevoir entre Tun et Tautre
quelque différence essentielle.
En effet , parmi les propositions hétérodoxes qu'on découvre
dans le livre De la police ecclésiastique du syndic de la Faculté de
théologie de Paris, on y trouve clairement les suivantes: « G^est
9 Jésus-Christ qui a fondé son flglise : il a donné plutéty plus tm-
9 médiatemeni, et plus essenliellemenl à toute l'Église, qu'à Pierre
9 et qu'aux autres apôlres , les clés ou la juridiction. — Toute la
» juridiction ecclésiastique convient en premier lieu , proprement
9 et essentiellement à V Église; mais au pontife romain et aux autres
» évéques comme à des instrumens, k des ministres^ et seulem.ent
» quant à l'exécution, » De là Rtclier conclut « que le pape est
» un chef symbolique, ministériel , accidentel, non essentiel,,..
9 avec lequel TÉglise peut faire divorce ; parce que ce chef sgm-
9 Mique ou figuratif peut être ou n'être point pour un temps sans
9 la perte de rÉglise '. » Quoique Quesnel s'explique d'une ma-
nière moins franche , plus enveloppée, et qu'il ne dise mot de ce
A De juitit, ibid., p. 83, 83.
aibid.
* t.ChristU8 suam fUndavit Eccleâam ; priùs, immediatids et essen^
f tialiUs claves seu jurisdictionem toti dédit Ecclcsiœ, qnàm Peiro et
9 fl/ti* aposiolis, — Tola jurisdictio ecclesiastica, primario, proprié et
9 essenlialitcr Ecdcsiiv convenit; romano autcm pontifici atque allif
QUE 471
divorce s! commode du corps 6e l'iïglise avec son clef visible,
cependant , puisqu'il reconnaît àans tous les (iremiers pasicurs îles
eommitdt l'ÊglUe, il suppose par-Ii même que le souverain |>on-
tire et ses collègues dans l'épiscopal reçoivent leur nulorilé de ce
qu'il appelle le corps de l'Eglise , par consi^queat que ce même
corps peul la révoquer, se sÉparer d'eux, en commettre d'autres à
Toute cette doctrine découle naturelletnenl de ces principes que
le Rjndic avait posés dans son petit traité Dr la paiisance rerlt'jia-
tfique et pMigne : « Chaque communauté a droit immédiatement
■ ei essenllellement de se gouverner elle-même; c'est i elle, et
I ■ non i aucun particulier, que la puissance et la juridicliuD a été
I 1 donnée Ni le temps, ni les lieux, ni h dignité des persoa-
> Des ne peuvent prescrire contre ce droit fondé dans la loi divine
I a et naturelle. ■
F radier n'iuveola pas ce système désastreux, ainsi que nous
i Tnvons déjà remarqué ' . Aërius j avait posé quelques foadeiDens,
t dans le quatrième siècle, en prêchant une égaillé parfaite entre
I les éïéqueg et les simples prélres. Plusieurs hérétiques, qui vin-
rent ensuite, tels quelesVaudois, tes Albigeois, les Lollards, etc.,
I eDcbérirenl sur cet hérésiarque. Mais Marsile de Padoue, rec-
leur de l'Universilé de Paris , au commencement du quaiarzième
1* ■ siècle, fut ' le premier qui, sans désavouer expressément la
I » puissance ecclésiastique, entreprit de la ruiner par un système
I ■ qui l'enlevait des mains des premiers pasteurs. Il enseignai
I ^t dans son livre inUtulé: Defgnfor pacit..., qu'en tout genre de
[ » goufememeni la souveraineté appanenaii i la nation ; que le
1 ■ peuple chrétien avait seul la juridiction ecclésiastique en pro-
■ prMé: que par conséquent il avait seul le droit de faire des
> lois, de les modifier, de les interpréter , d'en dispenser , d'en
I I punir l'infraction, d'instituer ses chefs, pour exercer la souve-
k ■ raineté eu son nom, de les juger et de les déposer, même le
I Y epiicopts InitrummtalUrr, minUterialiler, et quoad txeeutianrm
} I taulAm, liout facullas videndi oculo compclil. — Papa est caput Ec-
'- » da\m, tgmbiiHmm, minhleriak, accidentariitm, no» mentiatt, vl-
> ■ ^blle sab Oiristo capile prindpali et nscnliali , eum qno [wlest
■ Eccicsia facere dirorlUini, qui» lioc ca"!!! lymbotieum svu fiffura-
■ a (('oumpoteslotkiscelBbcsseudlcmpassincEcGlcsixinieritu.i Voyci
I De l'autorité îles dcm ptiisHUces, l. S, pag. 8. Li^ge, 1701.
' l'as- >7e.
472 QUE
» souverain poulife ; que le peuple avait confié U joiidictioa
» spirituelle au magistrat politique, s*il était fidèle ; qoe les p<»-
» tifes la recevaient du magistrat ; mais que si le magistraii était
» infidèle, le peuple la conférait immédiatement aux pontifies
» mêmes; que ceux-ci ne Texerçaient jamais qu^avec subordinatioa
9 à regard du prince ou du peuple, et qu^ils n*aTaient, par leur
» institution, que le pouvoir de Tordre, avec une simple aniorité
M de direction et de conseil , sans aucun droit de juridiction dans
» le gouvernement ecclésiastique, telle que serait Fautorité d*un
» médecin ou d*im jurisconsulte sur les objets de sa profession^. »
Henri VllI profita de ce monstrueux système pour s*arroger la
puissance spirituelle en Angleterre. Les Protestans s*en emparè-
rent : les uns, pour renverser le sacerdoce , d*autres pour en con-
server une apparence extérieure. « Mais jamais cette erreur n*a
» fait plus de progrès que dans le dix-huitième siècle, où des com-
» pilateurs et des brochuraires de toutes les natious ont entassé des
» volumes, pour faire de la hiérarchie un chaos politique et une
9 véritable anarchie '. »
C'est à ceux qui écrivent Thistoire de nous peindre les maux
incalculables que ce pernicieux système a causés en Europe dans
ce prétendu siècle des lumières; soit dans la religion, où tout a
été brouillé dans ce qu'on appelle la jurisprudence canonique,
pour ne rien dire de plus ici ; soit daus la société civile, où les
principes qui faisaient la sûreté des souverains et le bonheur des
peuples ont éprouvé une si funeste altération. Cest aux tètes cou-
ronnées, dépositaires de l'autorité de Dieu pour le maintien de
Tordre civil, à voir s'il leur est utile et à leurs sujets de laisser
circuler, dans les livres et dans la bouche des soi-disant philoso-
pbes, des Richéristes et autres, une doctrine dont les dogmes ré-
duits en pratique, font couler le sang des monarques sur des écha-
fauds, répandent Tesprit de révolte dansJes nations, y produisent
une anarchie dévastatrice, pire, peut-être, que le triste état de
sauvage.
Pour nous, obligés de nous renfermer dans des bornes étroites,
et d'abréger désormais ce mémoire déjà excessivement long, nous
nous contenterons de montrer brièvement que leRichérisme adopté
par Quesnel et ses adhérens, est quant à ce qui concerne l'autorité
* Feller, Dicl. hist., ail mot Marsilb, etc.
« Ibid,
QLE
413 I
lions de l'Ëglisc, â h praii<]ue cunsUnie des sîèdi's cbréliens, et
qu'il lend fi renverser l'unii6, lu lui, lu discipline géodrale, eu uu
mot, à bouleverser t'iiil urdre duns le cur|JS mjslique do Jésua-
Oirisi.
KnelTetiSinoug ouvrons rhviingile, nous y IIsodg ces paroles de
notre divin Maître ; • Toute puissance m'a été dnnnfu dans le ciel
■ el sur la terre'. Je vous envoie comme mou Père m'a envoyé...
■ ' * Recevez le Saint-Esprit, Ceux dont voua remettrez les pécliâs,
^k'a'leurs péchés leur siinl remis; et ceux dont voua retiendrez les
^^i> péchés, leur* péchés leur aoiii retenus'. Allez donc, enarignex
^V> toutes les nations, kapiisez-lcs au nom du PCre, et du Fils, et
^^ * du Saint-Esprit, leur apprenant â observer loules les choses ifue
^1 '^ je voua ai prescrites. Etvoicique jesuisavec vous tous lesjoun
^*"* jusqu'il la consoifimation des siècles *. Celui qui croira, et qui
'i recevra le baptême, sera sauvé ; mais celui qui ne croira pas
■ sera condamné *. Celui qui vous reçoit, me reçoit; et celui qui
■ me reçoit, reçoit celui qui m'a envoyé '.Je tous le dis en vérité:
* tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié d.ms le ciel; et
■ tout ce que vous aurez délié sur lu terre sera ûussi délié dans
•» paroles divines désignent évidemment une puissance ou
Uitorilé instituée par Jésus-Uirist [lour conduire les hommes au ,
"ut; pour leur enseigner la doctrine chrétienne, et veiller i b
semllon de ce dépôt sacré; pour administrer les sacremeas'l
rodence, j disposer les sujets, en éloigner les Indignes ^i
^nr régler le culte extérieur, maintenir la sainteté des niceun,
tarriger les indociles par des peines salutaires ; pour lier les con»-
^ences par des lois spirituelles, les délier par l'absolution des
' tchéset par de justes dispenses ; eu un mol, pour gouverner 11
u peuple do Dieu dans tout ce qui touche immédiatemcnl
e puissance est tpiriliielle, le royaume dtt 1
e suiut
Il e
11 que c
• Matlli-, 36, 18.
iJoann., SU, SI, !ï, 33.
•illalUi., S8. 11), 20.
*Marc., 18, Ifi.
'Mallh., 10, iO.
•Ibid., 18, IB.
' I Ne douDci poinluuz diicn.< c
qui cslHiinl. i Mallh-, T, 6.
471 QUE
Jésus-Cbrlst n'élant pas de ce moade, ainsi qu'il le déclan^
même dans l'Lïangile ' . En conséquence, elle ne s'élend point m
les choses de la terre, pour les régirdans l'ordre lemporel oamil,
il l'égard duquel elle recoDoalt uoe autre puissance aassï établie
de Dieu, qni lient de lui touie son lulorïté, qui ne dépend que de
lui, et envers laquelle elle commande elle-même la soumission la
plus entière: flciUilr qita: lutil Cœsaris, Ca^iari*,
Mais loute spirituelle qu'elle est, parce qu'elle a pour dbjel de
conduire les Lonnoes dans l'ordre du sidut, la puissance insti-
tuée par Jésus-Christ pour gouverner son lilgiise est njanmoint
viilbie et extérieure dans ceux qui en sont revêtus, dans les objets
qu'elle embrasse, dans la manÎËre dont elle doit être exercée :
ceux qui ont celte autorité sont des hommes ; les sujets qu'elle
gouverne sont aussi des hommes ; or, les hommes ne peuvent
être gouvernés par des hommes d'une manière invisible, puremcial
mentile. D'ailleurs, enseigner, juger si telle doctrineest conforme
ou contraire â la révélaiioa, etc-, sont des fonctions extérieures.
Elle est tauveriÙM, en ce qu'elle ne dépend d'aucune autre
puissance de ce monde, dans toutes qui la concerne uniquement,
et qu'elle a reçu de Dieu le droit de s'étendre indistinctement, et
sans exception, sur tous les hommes qui habitent la terre, pour
leur annoncer U doctrine chrétienne, les régénérer par les eaux
salutaires du baptême, et ensuite les gouverner, dans l'ordre d*
la religion, coinuie ses eiifans et ses sujets: Eiinlet il miiubrin
univenum, prtrdicale Emugelium omni creatura '. Personne donc,
quelle que soit son ;iuiorilé dans le monde , ne peut légitimement
lui fermer la bouche, nt l'empêcher de pénétrer partout; parce que
n que lui adonn
que la durée des temps et les li
s de la terre. Aussi, en vain
la sjinagogue s'arnia-t-elle de fouets et de verges, au commence-
ment de la prédication de l'I^vaugile, pour intimider les hérauts
du Fils de Dieu, et les détourner de parler un sou nom ; en vain
les empereurs païens lâchèrent- ils contre eux deséditsde mort, et
Grent-ils dresser sur toute la surface de l'empire routiin des éc\f%~
fauds ofi l'on torturait d'une manière inhumaine et barbare les
prcmien chrétiens: la parole de LIieu ne liit point liéc^parce
< Joan.,18, U6.
iMaIth.,S3, SI.
'Uurc, 10, IS.
QUE 4TS
qu'elle ne saiiMiti'êlfe', L'empire persécuteur lomba bientôt,
non sous les eiïurls du dirist'mnisnie, qui s'élevail Iriomplianl
(jamais il ne prêcha l'iDsoumission, bienmoins encore la révolte);
mais sous la main de celui devaui qui les natîons ne sont rien*,
et qui s'arme , quani) il le veut, de £3 toute- puissance pour venger
rianocence opprimée. Malheur donc il quiconque reruse de rece-
voir la puissance établie par Jésus-Cbrist, de se rendre i na pré-
dication, de se soumettre à son auiorilé légitime : ru grand jour
des vengeances, du moins, il sera traité plus sévËremcnl que les
criminels habitans de Sodome et de Gomorriie, qn'un feu miracu-
' leusemcnt envoyé du ciel fit autrerois périr avec leur pays, i
causedeleurs infamies révoltantes: c'est la menace de l'Ëvangile*,
Mais, quoique souveraine auprès des hommes, celte même puis-
sance est tuinîitfrielle, si on la considère 1 l'égard de Jésus-Christ,
de qui elle lient son inilitutiau, sa mission, sa Torce, son pouvoir,
et au nom de qui elle précbe, elle baptise, elle gouverne : len-
ijuàm Dm etherlntire per nn» '; minkléiklle, ï l'égard de la ré-
vélation, oti elle ne pent ni changer, ni ajouter, ni diminuer ; mais
dont elle doit conset^er précieuiemeni le dépAt, en faire part aux
vivans, le transmettre aux générations futures tel qu'elle l'a retn,
en défendre l'iniégiilé avec lesmoyensqui lui sont confiés, contre
ceux de ses sujets qlii oseni porter sur ce dép6t divin une mala
audacieuse et sacrilège ; juger cxelusivemenl, cl terminer en sou-
veraine, toutes les questions el toutes les disputes qui s'élèvent
sur cette malière parmi ses entans, et préserver eeui-ci de l'er-
reuret do l'hérésie; mïnitléritUe i l'égard des sa cremens, dont
elle ne peut ni changer l'essence, ni multiplier ou réduire le nom-
bre;mais la doctrine qui les concerne, l'administration, mËme
publique, de ces moyens de s^tlut, les jugemens ï porter, les
règlesïélablir louchant les dispositions aveclesqnelles ils doivent
éire administrés et re(;us, l'appareil des cérémonies propres !i y
concilier la vénération, ï en faire connaître la nature, les effets,
etc. ; enlîn, les plaintes qui s'élèvent pour reFbs des sacremens,
sont uniquement de sa compétence '' ; miniil/rltlle à l'égard des
< 2 Tim., S, 0.
' Is,, 40, 47.
> Uatllt., tn, l'i, ta.
»!Cor., 5, SO.
' Voyet F.ipoiition lur In droits de la puissance spiriinclle de l'as-
_ emlléi' fi'ijérate du clirBiJ deFrance de 1766, avec la. Rfcûwas.'àtm I
482 QUE
migieien S qaîfole aa secours des Églises naisfanles*» quijngftle
premier dus le concile de Jérusalem et qui formel» dédsion ', eie.
Les Lirres saints nous montrent donc une vraie primauté d*hon-
neuret de juridiction fondée par Jésus- Christ dans aoo Église, et
donnée par lui htmédiatement à saint Pierre. D*où il suit, et de ee
que nous af ons prouTé précédemment , diaprés la nénae autorité,
louchant la puissance spirituelle conférée de la même manière aux
autres apôtres, que le système h&ti par Ifarsile de Padoae , renou-
▼elé par Edmond Richer et transplanté dans le Jansénisme par no-
tre ex-oratorien , est formellement contraire à rÉcriture sainte.
Il n*est pas moins opposé à la tradition.
Mais nous ne finirions point si nous entreprenions d'interroger
iei les monumens nombreux qu*elle nous présente depuis Péta*
blissement du christianisme jusqu*à nos jours. C*est pourquoi
nous croyons devoir renvoyer nos lecteurs sur ce sujet aux sour-
ces mêmes ^, et nous contenter de dire, en général, que. si Fom
consulte sans prévention les Pères , les conciles , Thisloire ecclé-
siastique et la pratique constante des siècles chrétiens, on ne
pourra s*empécher de reconnaître qu*on a toujours cru dans l'É-
glise, 1* que saint Pierre avait été placé immMUUemeni par
Jésus-Christ à la tète du collège apostolique et du nouveau peu-
ple de Dieu, en qualité de chef visible , revêtu d'une autorité su-
périeure; 2" qu'il revit, qu'il préside et gouverne avec la pléni-
tude de la puissance spirituelle dans les évéques de Rome ses
successeurs ; 3" que tout fidèle est obligé de lui obéir comme au
père commun de tous les membres du corps mystique du Verbe
incarné; 4" qu'il est le centre de l'unité , hors de laquelle il n'y
a que schisme et que perdition ; 5° que les autres apôtres étaient
aussi les ministres de Jésus-Christ et ses envoyés inmédials;
6' que les évéques en communion avec celui de Rome leur suC'
cMenifeiq}x'iU sont établis par le Saint-Esprit, selon l'expression
* Act, 8, i9, etc.
> Ibid., 9, SS.
Mbid., 15,7et8eq.
* On peut consulter aussi : De l'aulorlté des deux puissances, de
M. TabbéPey, 2* édil.; Liège, 1791 , les Confércuccs ecclésiastiques
sur la hiérarchie, par M. de la Blandinière ; les Droits de Tépiscopat
sur le second ordre pour toutes les fonctions du ministère ecclésiastique;
Tounicly, dans ses Irai 16$ Dcordine et De Ecclesin^ et beaucoup d*au«
très controver^istcs orthodoxes et quelques caoonistcs ezactSt
QUE 483
de saint Paul , pour gouvenu-r l'Église de DUu ' ; 7° que leur au-
lorilé spiritneUe, soumise aux uïnls cauiins et 5uburijoiiiit.'c ï
l'aulorité du successeur dp saint Pierre, reoioule pir l'échelle de
h missioit canonique jusqu'uui apAlres, de h h JÉEus-Climt ;
8' qu'elle ne vient ni du peuple, ni des mnBistrals,
Tain temporel , et qu'elle n'en dépend nullement ; 9" que le pnn-
life romain et tous les autres éifques unis de commu
forment TËglise eitieisnaute , dont les lois spirituelles obligent
tous les cbrétiens, ei dont tes Jugeoiens eu matière de fui ei de
mœurs, soit qu'elle les prononce étant assemblée en concile ou
dispersée dans toutes les parties du monde , soit que rnuiorité ci-
vile y intervienne ou o'j intervienne pus pour les appuyer, sont
irrélormables, infaillibles, et lient tous ceux qui sont entrés dana
le sein de t'Ëglîse parle baptême, etc.
I.a nécessité d'abréger cet article nous oblige d'omettre encore
beaucoup de choses, même concernant l'autoriié du souverain
pontife dans toute l'Ëglise , ob il a droit de faire entendre la voix
dû siège apostolique pour corriger les abus, enseigner la doctrine
que l'Église romaine, mère et maîtresse de toutes les autrat
Églises particulières, a re^uc du prince des apbtres; punir Ie> no-
vateurs et les indociles, etc., etc., etc. Nous ne parlerons pas no»1
plus de l'autorité de chaque évéque dans son diocèse , où il est 1*
chef de son clergé et du peuple , cbargé de patire et de gouver-
ner et les pasteurs subalternes, et le troupeau cooUé t sa sollici-
tude, comme devant en rendre â Dieu un compte exact*. Il a'j
a qu'il consulter les monumens des premiers siècles pour te COD-
Taincre que, dès le berceau de l'Ëj^lise, les prêtres étaient tou-
mis en tout à leur cvêque , et que les successeurs des apAtres ne
manquaient pas de leur représenter toute l'étendue de leur juste
dépendance b leur égard.
Hais ce que nous ne pouvons entièrement taire , parce qu'il
nous parait que nous y trouvons une preuve courte, concluante,
et même décisive, contre le système que nous avons en vue, c'est
que si quelquefois un empereur, un roi ou des magistrats civils
s'avisèrent de mettre la main ï l'encensoir, en se mêlant de déci-
der sur ta doctrine ou d'intervertir ta discipline établie par l'É-
glise, sortant ainsi des bornes de leurs pouvoirs et des devoîra
4
oîra ^^A
484 QUE
qu*iinpose aux souverains temporels leur quaBté d'évèquet exté-
rieurs, c*est-à-4ire de protecteurs de TÉglise et de ses canmiSy on
De mauqua guère d'euteudre s'élever bientôt dans le corps épi»-
copal des toîx pleines de force et de courage pour rédaina en
sa faveur Tautorité qu*il ne tient que de Dieu seul, c Nevons in-
» gères point dans les affaires ecclésiastiques , écrivait le célèbre
» Osius à Tempereur Constance ; ne prétendez point nous donner
» des ordres en ces matières , apprenez-les plutôt de nuos. Dien
» vous a donné Tempire , et nous a confié TÉglise : comme celui
» qui entreprend sur votre puissance contrevient k Tordre de Dieu,
» ainsi craignez de vous charger d*un grand crime si vous tires à
» vous ce qui nous regarde , etc. * . • Il faudrait rapporter encoie
une multitude d'autres réclamations du même genre, non moins
vénérables par leur antiquité que par la sainteté éminente des évo-
ques qui les firent et par le rang élevé que plusieurs tinrent dans
rÉglise. 11 faudrait citer celles que le clergé de France ne cessa
de faire retentir à Toreille de nos rois dans des temps difficiles,
surtout depuis que les parlemens , entraînés par les suggestions
astucieuses des partisans de Quesnel, commencèrent à porter de
violentes atteintes à Tautoriié épiscopale. Vexpotition sur les
droits de la puissance ecclésiastique , émanée de rassemblée géné-
rale du clergé de France de 1765 (pour ne citer ici que ce beau
monument), offrira aux siècles à venir une preuve éclatante du
zèle avec lequel TÉglise gallicane sut s'armer de vigueur quand
elle s'y vit obligée , et qu'elle se montra constamment digne de
la considération particulière dont elle jouissait dans l'Ëglise uni>
verselle.
Nous passons sous silence un grand nombre d'hommages que
rendirent, en différons temps, h l'autorité indépendante des pon-
tifes, des empereurs et des rois dignes de porter le nom de chré-
tiens, d'illustres magistrats, de savans jurisconsultes , même des
philosophes et d'autres hommes, dans la bouche desquels la vé-
rité s'étonna, si nous osons nous exprimer ainsi, de trouver quel-
quefois de vigoureux défenseurs '. Mais les définitions de l'Ëglise
sont d'un tout autre poids.
« Fleury, Hist/ccclés. , 1. 13, n» 22, an 355.
' On peut voir dans Feller, au mot Dominis, deux passages intéres-
sans sur cet objet : Fun, du fumeux comte de Mirabeau, est tiré de sa
Monarchie prussienne ; l'autre est extrait du Discours sur la rdîgîon
. Ea 13i7, lean XXII condamna comme hérétiques cinq pro-
positions aaxqulli^s il avait ri^duli quelques-un^s des crreiira
contenues dans le D^ftntenr de la poix; et (^omme liËrési arques
Mai'sile de Pa Joue, auteur principal de ce livre , et Jean de Jan-
duD, son collaborateur. I^ bulle, dutée du 13 octobre, • Tut pu-
■ bliée dans tous les ropumes catholiques, et surtout i Paris • ,
dit l'abbé Pej, dans son traité De VauloTiti ies deus puissimen '.
Marsileenseignaii.dMisquelquea-unesdecespropuaitionseiiraiies
par le souverain ponlife Jean, que les apôtres étaient tous égaui,
aucun d'entre eux o'apnt été établi cW de l'ÉgliEe ni ficaire
de Jésus-Christ; que l'empereur avait le droit d'instituer, de des-
tituer et de punir le pape; que tous les prêtres , soii ceux qui
n'ont que l'ordre de prêtrise, soit les évêques , les archevêques ,
même le souverain pontife, sout, par l'instilulion de Jésus-Christ,
égaux en aulorilé et en juridiction ; que ce que l'un a de plus que
l'autre en ce point lui vient de ta concession de l'empereur , qui
peut reprendre ce qu'il a donné ; enfin que le pape , ni même
toute l'Église assemblée , ne peuveul punir un pécheur par des
peines coactives, quelques crimes qu'il ailcommis, si l'empereur .
ne leur en accorde le droite
Prés de cent ans après l'affaire de Marsile de Padoue , le con-
cile du Constance condamna comme respectiTemenl hérétiques ,
erronés, scandaleux, offensirs des oreilles pieuses, téméraires, etc.,
quarante-cinq articles deWiclol', dont quelques-uns nnl une
liaison irès-grande avec notre objet; tels sont ceux-ci: ■ Si le
• pape est mauvais et réprouvé, et par conséquent membre du
nationale, de l'inforluné abbé Fauchet. Le léle de ces auteurs pour la |
rtrolution esl eonnu i c'est ce qui nous porterai! il leur appliquer le
deux vers plaianns qui terminent l'épigrammedcBoilcaunir lamanitrt 1
dt réciter du poète Sanlmil.
*T.9,[l. lOS, édlLdelTgi.
3 ConcU. wnon. aono 1SS3, in prxfat.; l'abbé Pey, t 3, p. 4781 I
Fleurjr, 1. 93, n* 39. Eu restreignant la ^gniacntion de rrxprcsaioo, '
printi coacliiia, A ca que déiigneraicnt les mots pdaet canoniqvet, OC I
dernier aurait pu ic dispenser de taire une observation qui ne paraît
ni nécessaire ni Irès-rcspectueuse. Il t-sl ccrInJn que Marsile n'ûlall
pat seulement A l'Ëglise le tor contentieux de ses tribunaux, mai> en-
corde droit qu'ont eicrcé Ici apôtres de prononcer des censures, d'é-
tablir des irrégulariUs, de déposer les mauvais ministres de la religion.
> diable, il n'a point d'nalra pouvoir sur lei MUee qat «^itf
> lai a ÉIË donné pir l'einiKreur. Depuis Urbain VI, aVicun ne doit
> £lre regardé DÎ reçu comme pape; mait an doit i>iiT0 d iait«-
■ niére de* Grecs, telan sei prupre* lois. Le prùlat qui eicomuianifl
• un clerc qtàa appelé au roi ou à l'assembUedu rei/aumese mi,
> par cela même, caitpable de trahison enreri le roi et U ronaumt.
• Ceux qui cessent de prêcher ou d'entendre la parole de Dieu i
> eaiite de l'excommunicaiio» des hommes sont eiconin unies, N
• seront reganlÉs comme des traîtres envers Jésus-Cbrist au jaor
■ à» ia^eiaeD\. Lt peuple peut corriger à ton gré set mattret.ltrt-
t qu'iU tombent dans quelque faute. Le pape n'est point ie ijcaire
> prochain et immédiat de Jésus-Christ. Il n'est pas de oécessilé
> de salut de croire que l'I^glise de Rome a la aouierai-
t Deté sur les autres Ëgjises, etc. ', • Ces propositions n'ont p*s
besoin de comonentaires.
Jean Ilusavait adopté une grande partie des erreurs de Wiclef,
Epéclalem eut loue haot l'autorité dusouverainponiire et désastres
ëTéques. Nous ne rapporterons de lui que les propositions lut-
vanies: • La dignité papale doit son origine auxempereurarumiius.
• L'obéissance ecclésiastique est une obéissance inventée paries
■ praires, sans l'autorité eipresse de l'Écriture. AGn de s'élever le
• clergé f'asgujétit le peuple laique , .... et il prépare U voie il
■ l'Antedirist, par le moyen des censures , etc.
• Il n'y a pas étincelle d'apparence qu'il lâille que l'Égtiie mi-
> litanie ait un seul chef qui la régisse dans le spirituel, et qui
■ converse toujoursavec elle, Jésut-Cbrist gouvememit mieux son
> Ëglisepar ses vrais discipks, qui sont répandus dans le monde,
> que par de telles monstrueuses têtes ( les papes et lesévéquei ),
t etc. *. ' On sait que leau Uus et si^s propositions furent cou'
damnés dans le mémeconcik de Constance.
Parmi les nombreux articles que Léuu X proscrivit en 13S0,
coiuuie tirés de la doctrine de Luther , ou en voit plusieurs qui
tendaient i enleier au cbef visible de l'Église toute sa priinauié
de droit divin, au corps épisco pal lepouvoir de déûnïr lesarttcles
de foi, d'établir des lois pour régler les mœurs, de prescrire âtt
pratiques de bonnes teuvres. 11 j était dit, au sujet des conciles -
•Prop. B, 9, IS, 13, 17, S7, 41- Apud Uarduin., t. 8, col 39»
'Prop. 0,19,19, 17, ÏB. Ap. Uurd.U)., col. ilO ei
QUE 487
< Dm Toifl nous eitourerle pour éoerver l'autorilé des conciles
. et eonlreilîre librement leurs sciPK, pour juger leurs décrets,
• et professer avec conliance tout ce qui nous parall vrai , suit
> qu'ilaitiléapproufé uu rejeté par quelque concîlequece soit '-•
LéoD X condamna ces quarinte-un ou Lrente^inq articles (sui-
Tsnt fédilion de la bulle), comme respectivement hérétiques on
scandaleux, ou Taux, ou DUensifs des oreilles pieuses, ou capables
de séduire les Ames simples, eiopposésii la vérité catholique.
LecéI(brecOnciledeSens,leDuaP3risenlS38, contre les hé-
résies de Luther, range Marsile de Padoue parmi les novateur*
qui jusque-là avaient attaqué l'auioriié de l'Église flu( inariU-
menl et avec plat i'artitUe ; et après avoir rapporté quelques-unes
de ses principales erreurs sous ce rapport, il le rérute ainsi:
• Mais la fureur barbare de cet Mrélique en iiWre est réprimée
> par r.-iutoriié des Lettres sacrées, oii l'on trouve la preuve évï-
• dente que la puissance ecclésiastique ne dépend point drs prin-
» ces, mais qu'elle est fondée sur le droit divin, lequel accorde
■ àl'Ëglisele pouvoir défaire des lois pour le salut des Edëles, et
■ de punir les rebelles par de légitimes eeusures; puissance dont
» tes mêmes I.eUres relèvent clairement, non-seulement la supé-
• riorité, mais même la dignité, fort air-dessus de la puissance
. séculière, quelle que soit celle-ci *. •
Nous ne parlerons pas du concile de Trente, qui est entre lea
mains de tout le monde. On peut voir, dans le cliapilre IV* de la
vingt- troisième session, comment il s'élève contre ceux qui osent {
avancer que les prêtres de la nouvelle alliance n'ont qu'une .
puissance précaire, bornée au temps, et qu'ils peuvent redeve-
nir biques; contre celui qui nflirmerait que tous lea chrétiens,
sans distinction, sont prêtres, ou qu'ils ont entre eux une égale
puissance spirituelle. Il déclare que les évéques succèdent au^
t C(!l urtide est te vioglifmc dans le Grand bullalre romain; le vingt
quatrième, suivant lel'. Uanlouîn, quiea a réuni plusieurscu un seul
dans la eotiie qu'il a donnée de la bulle Exturge, Doiniru, de Léon X,
Acla condliorum, etc., t, 9, col. 1891 el suiv.
' AciD Euniiliorum, etc., du P, Hardouin, L 9, col. 1910, Ëdil. dii
Louvre. Pic VI, dans vm bretàu 10 mars 17B1, adressé autévfquc
de l'Assemblée nationale au sujet de la constitution civile du clergé de ,
France, s'apimlc de l'autoiîté de ce concile pour établir l'hêriliciti du J
principe fandamcntal sur lequel fiait basée cette prétendue contlilo- 1
lion civile.
488 QUE
apôtres ; qu*il8 ont été éublis, comme le dit saÎDt Paol, pont goo-
verner TÉglise de Dieu; quMls sont supérieurs aux prêtres, con-
férant la conBrmation, ordonnant les ministres de TËglise, et
remplissant beaucoup d*autres fonctions, que ceux d*UD ordre in-
férieur n*ont pas le pouvoir d*exercer, etc., etc. Il définit de cette
sorte: < Si que1qu*un dit, que dans TËglise catholique il n*y a pM
» une hiérarchie instituée par Tordonnance de Dieu, laquelle est
» composée d'éTéques, de prêtres et de ministres , quHl soit ana-
» thème ^.» 11 anathématise aussi, dans le canon suivant, cehd
qui dirait que les ordres que confèrent lesévéques, sans le con-
sentement ou rintenrention du peuple, ou de la puissance sécu-
lière , sont nuls.
Au commencement du dix-septième siècle, c*est-^-dire en i612,
deux conciles provinciaux assemblés, l'un à Âix, Tautre à Paris,
condamnèrent le livre De la puissance ecclésiastique , de Richer,
comme contenant, suivant la sentence de ce dernier, des proposi-
tions, des expositions et des allégations fausses, erronées, scanda-
leusesetschismatiques, et, dans le sens qu'elles présentent, hérétiques.
Si nous consultons les actes des assemblées générales du clergé
de France, nous y rencontrons, parmi une foule de mouumens qui
concernent Tautorité épiscopaje, deux condamnations trop préci-
ses pour ne pas trouver place ici.
La première, qui fut faite en 1700, eut pour objet les deux
propositions suivantes : « Il n*y avait pas de diflérence, dans les
> premiers temps de TÉglisc, entre les évéques et les prêtres,
» comme il résulte du chapitre vingtième des Actes des apôtres.
» — Ce n*a été que par un usage, qui s*est dans la suite intro-
» doit, que Ton a distingué les prêtres de Tévêque, en établissant
» l'un d'entre eux au-dessus d'eux avec ce nom d'évêque.»— «-«Ces
» deux propositions, dit la censure, où l'on fait marcher de niveau
1 les prêtres avec les évêques, et oîi l'on ne reconnaît entre eux
» qu'une diflérence qui se réduit presque au seul nom, sont faus-
> ses, téméraires, scandaleuses , erronées, schismatiques ; elles
» renouvellent l'hérésie d'Aênus, confondent la hiérarchie ecclé-
• siastique instituée par l'ordonnance divine, sont évidemment
• contraires à la tradition apostolique et aux décrets du saint
> concile de Trente <. »
* Acta conciliorum, can. 6.
3 Collect., t. 6, coL 507 et 506.
QUK
La deuiième censure fui puriéeeo ITlli, conireunliTreintiiulû:
Duténmgnasedela vérité dam l'Égliit. L'auteur de celle pi'oduc-
tiun vénéneuse, toulca prurcssini hauiemenL le dogme de tu visi-
bilité coustante de l'Ëgiise de Jésus-Christ , y portait néannioiiis
atteinte, en admelUni des temps d'obacurcissemeat eide Duages,
si ténébreux, qu'ï peine tiouviit-un recotinalire alors l'Ë^glise , el
alléguant ()u'il suiOsail, dans ces circonstances déplorables, qu'elle
fiU connue de ceux qui auraient un ca'ur droit, sitople et dégagé
des passions terrestres. 11 semblait respecter aussi la cliaire iû
dotale, b laqnelletous les fidèles, sans exception, soni
soiimettreimaisilenleTailenméme tempsï ceux qui seuls ont le
droit de s'y asseoir et d'} pcononcerdes oracles divins, en qualité
d'ambassadeurs de Jésus-Chrisi, l'autorité spirituelle souveraine
pour la transférer dans l'assemblée du peuple; dogmalisani que les
évéques ne devaient être regardés queconime \t&déUQuéi tt tei in-
Iefpr^ifidece/[ei(Mir)n6/A';queloule la chaîne deleurminîstère se
réduisait !i déclarer i'avii de l'Église particuUire ï laquellechac
d'eux présidait, et dont il était eiixogé, ajouUil-îl, comme le Péie
éternel a envojë son PiU unique. Il enseignait de plus que les dë-
linitions portées en matière de foi, dans les conciles généraux, par
les premiers pasteurs, n'acquéraient la vigueur desjugemens de
l'Église qu'autant qu'elles étaient approuvées du peuple fidèle.
Enlin,il admelUiit l'unité simple el indivisible de l'épiscopat;
mais il la réduisait quelquefois â un petit nombre d'évfques,
même réparés du cbel, dont néanmoius la diaïre est la tourci de
l'uailé mcerdolale, ainsi quele dit saint Cjprien '.
D'après celte légère analyse de la doctrine du livre Du lémci-
gnage , analyse que nous avons lirée du préambule de la censure
de l'assemblée générale du clei^é de France de 1719, on voit
clairement que l'auteur de cette production ténébreuse Toulaîl, ï
quelque prix que ce fùl, sauver les Ité/lexioits moralet. Comme cet
ouvrage avait contre lui l'enseignement des siècles passés, le
jugement du saint Siège, l'adbésion solennelle de presque tous
les évéques de France ï ce jugement, et qu'on s'attendait que
bientôt on aurait encore des preuves certaines de l'adhésion des
Ëglises étrangères, il était hieu nécessaire que, pour se soutenir,
le parti cberchlit k changer les idées remues, à transformer la
règle de la Toi, ï prêcher des teni|is d'obscurcissement, h rendre
I De uuitate Kcclniii;.
490 QtlE
invisible, si te nVst aux ypiix des jusies, l'Église tmuigUÉta;
ï ]j toaceiiirer loui enii'-re dans une quîouioe de préUu nn
pape, mail i 11 léle de quelques rebelles ; ï fiter i tons les ètt-
ques l'auioriié de juges ordmairMde ta toi, pour ea décorer, on y
UBDcier du aïoius, les simples fidèles , Epécialeraeat les magis-
trats ; en un mol, il était indispensable au pirli jtuisénien, ilc re-
cueillir les rêveries oubliées des Dooulistes, et de reDouteler les
erreurs que Riiber avait puisées cbez les l'roiestana, oeui-ô
chez les Huaiites, les Wicli^files, etc.
Hais l'assemblée que nous avons nomniâe prononça que eeiu
doctrine Du lémoignage, etc. , • était séditieuse, lëmérBire, «canili-
■ leuie , ëierEÎre de l'ordre institué par Notre^eigaeur lisat-
> Cfarist pour le gouvernement de son Église, injurieuse *u saint
> Siège apostolique et aux évêques , lïusee , erronée, ichismali-
■ que et liérétique, et qu'elle devait être rejetëe par tooc les
< lidèles <. •
Le livre intitulé : Principe» lur Veuenee, la dUlirtelUm et k»
limilcë de» deux puitianee» tpiriiuellt et temporelle, ob l'ontoriea
Laborde < soumettait tellement le minislËre ecclèsiasliqae k h
> puissance séculière, qu'il attribuait & celle-ci le droit de coo-
> naître et de juger en matière de gouveruemeni eslériear et sen-
■ sible de l'iiigliEe, > Tut proscrit par Hsnolt XIV, dans nu bref
du 4 mars 1T5S, adressé au primat, aux arcbevéqucs et évAqaes de
Pologne, avec les notes de captieux, faux, impie et MrtKifue. Ca
conséquence, ce pape défendit, sous les peines les pliu gnrtt,
la lecture de cet ouvrage pernicieui •.
Personne ne doute que la CantliiutUm civile du clergé 4e France
n'ait été basée entièrement sur l'erreur qui atU'ibue au peuple
et au prince temporel la puissance ecclËsiHBtîque; donc, en con-
damnant cette eanititution prétendue eJi'II«, Pie VI en renretsa
aussi le fondement.
Mais ce fut surtout dans sa bulle du 28 août 1794, dirigée centre
t Deunilnlc Ecclesia?, pièces juslif,,col. 504, SOS Cl S08. Il Ikutlîre
en entier le préambule lumlneui (jui précËde celte censure. Koui ne
IMUToits trop recommander encore la lecture du jugement que porta,
le i mai t7i8, l'assemblée dite des un, sur la canaullation deMM. Ut
avccatide Parii,aunijel du jugenual rcndvà Emtrunconlrt M.t'i-
vique de Sente.
' roïcilebrcfdcPicVI, dulOmar» 1791, déjd cité.
gui!: 41)1
le synode janséniste de Pistoie, <|ue le Ricliérîanie reçut de Irëa-
rudcs coups de la nain de cei illustre pontife. Quoique parmi les
qujtre-vingt-cinq priipositions proscrites dans cette bulle , avec
des qualifications adaptées ï chacune prise séparément , on ea
trouve un grand nombre qui coneernenl l'objet qui nous occupe,
nous n'en rapporteroDS néanmoins que quelques-unes , que nous
traduirons littéralement, renvavant, pour le reste, i la source
■ 11. La proposition qui établit que la puiaianct a /U donnée
1 de i>ieu ù l'Égime, pour itre eoiamuniquéi aux pMleurt, qui lont
■ te» ministres pour le laht des imtt;
I Entendue dans ce sens, que c'est de la cominuoaulé des fidMes
■ que dérive sur les pasteurs la puissance du ministère et du gou-
> Tcruement ecclésiastique ,
■ llérétique.
• 111. De plus, celle qui établit que le pontife Tomain eit un
• cAf/'mtuifl^rieJ;
• Expliquée dans ce sens que le pontife romain re<;oiTe, non de
> Jésus-Cbrist, dans la personne du liienheureni Pierre, mais de
■ l'Église , la puissance du ministère dont il jouit dans toute l'Ë- '
p gtise, comme vrai successeur de Pierre, vrai vicaire de Jésus-
■ Christ et clief de toute l'Église ,
• UÉré^que,
■ IV. La proposition qui affirme que ce sérail enabuterqiie
■ de transporter l'autorité de l'Église au delà des limites de la dee-
> trineet des mceurs, et que de l'éiendre aujt choses extérieures, et
■ que d'exiger par force ce qui dépend delà persuasion et duarur;
■ comme aussi qu'il appartient 6i«n moins i celle Mime (Lglise)
> d'exiger par force la soumission à set décreli ;
» En tant que, par ces mots indéfinis ; de l'étendre aux choset
• extérieurei, ( celte proposition) note comme un abus de l'sulo-
■ rite de l'Ëglise l'usage de cette puissance reçue de Dieu que
• les apùtres ont eut-mémes exercée, en établissant et en réglant
> la discipline eitérleure ,
• Hérétique.
• Dans la partie oti (cette même proposition) insinue que
> l'Bglise n'a pas l'autorité d'exiger la soumission ises décrets
■ autrL'inent que par des moyens qni dépendent de la persuasion;
• En tant qu'elle prétend que l'l^i;1ise n'a pas le pouvoir qu'elle
■ lient lie Difn , non-seulement de diriger par da conseils et par
492 QUE
9éei9êieidepêniuuUmf tMif encore i'^réûmner pmt ééiUk^ét
m réprimer et de contraindre la rebellée pmr mt iwgemmi extérkv
• et perdei peines $alutaire$t
» Diaprés le bref Ad assiduoi , de Benotl XIV, 1755, idressé
» ao primat» aux arche? èques et é? èquet du ropune de Potogne.
» Induisante à un sjrstème condamné déjà comme hérétiqie.
» X. De même , la doctrine où Ton dit que les cnréi » et les
» autres prêtres assemblés en synode» sont juges de la foi afcc
» Téf èque ; et où Ton donne à entendre en même temps que le
» jugement dans les causes delà foi leur appartient en conaéqoence
» d*un droit propre, et même reçu par Tordination,
» Fausse, téméraire, subversif e de Tordre hiérarchiqoe, dimi-
» nuant la fermeté des définitions et des jugemens dogmatiques
» de rËglise, au moins erronée.
» LIX. La doctrine du synode, qui affirme qu^U appartient eri-
9 Çinëirement à la seule piûssauce souveraine dans f ardre drii,
» d'apposer au contrat du mariage des empêchemens dirimans, le-
» quel droit ori(finaire est dit encore être Joint essentieiiemeni attt
» le droit de dispenser, ajoutant que, supposé le consentement et le
9 connivence des princes, l'Église avait pu établir justement des
» empêchemens qui dirimassent le contrat même du mariage;
» Comme si i'Êglise n'avait pas pu toujours et ne pouvait pis
» encore établir, de son propre droit, des empêchemens au ma-
9 riage des chrétiens , qui oon-seulement empêchent leur ma-
9 riage, mais même le rendent nul quant au Hen, lesquels empê-
9 cliemens lient les chrétiens, même dans les pays des infidèles,
» et dont elle peut les dispenser,
» Ëfersive des canons 3, 4, 9, 12 de la sess. 24 du concile de
» Trente, hérétique ^. »
* Voyez la coastiL Auctorem fidei, p. il, 12, 14, 82. Celte bulle,
adressée à tous les fidèles, fut envoyée à toutes les Églises particuliè-
res. « L*adliésion des évéques à cette décision du saint Siège, dît le so-
f vant cardinal Gerdil, ne saurait être un problème. Un grand nombre
f ont manifesté leur approbation par des lettres expresses, et le reste
f 11*0 point réclamé. > Mém. pour servir à Thist. ecclésiast. pendant le
dii-huitièine siècle, t 3, p. 269, 2* édit. L*auteor de cet ouvrage in-
téressant nous apprend néanmoins que deux évêques de Toscane ne se
montrèrent pas favorables à cette bulle si instructive et si lumineuse, et
que révêque de Noli fut peut-être le seul prélat catholique qui eût Ait
éclater publiquement son opposition.
Nous omettons beaucoup d'autres proposilii
(laos la bulle même.
Le troisième principe capital de Quesnel, oU ci
deux a su concentrer avec tant d'art le Itîchérif
est donc diamélralenient opposé h l'Écriture sainte, ï la iradili
aux définitions émanée!; de l'Ëglise, el même il la pratique con-
stante des siècles chrétiens '.
Eu eoleTanl des mains des pontifes, qui forment, ainsi que
nous Tarons dit , l'Église enseignante ', t'aulorilf^ spirituelle
souveraine que Jésus-Christ leur a confiée directement et immi-
dialement dans la personne des apQlres , et la transférant au
peuple, aux magistrat!', aux princes temporels, en un mot A tout
les membres du corps m;fstique, comme si celte tnfme puissance
avait été donnée primitiveiaetit ei Drifrinaimnïnl il tous les fidèles,
«on pai, il est vrai, pour l'eitrcrr par eiu-mfmei, mai» par la
premieri paileurt, qui toni Imrt cominii, r( 7111 doivent agir de
leur contentement au maint pr^tumd, il est clair que ce principe
hérétique ouvre une large porte ï la révolte contre la puissance spi-
rituelle légitime; qu'il fomente leschismeel l'hérésie; qu'il mine, -^
par conséquent , l'unité catholique jusque dans ses plus solides
fondemens; qu'il lend ^ renverser la hiérarchie sainte établie de
Dieu même, k détruire toute subordination , toute harmonie
dans l'Ëglise ; qu'il fournil ï tous les novateurs accrédités des
moyens de se soutenir et de coniinner tranquillement !i propager
leurs dogmes an ticliré tiens, malgré les anathëmes les plus justes
et les plus canoniques ; et qu'enSn il autorise à se relever el b
renaître rornme de leurs cendres toutes les erreurs proscrites
depuis les temps apostoliques jusqu'à nos jours. Toutes ces con-
séquences se déduisent facilement du principe, el elles trou-
' Nous ne prétendons point dire pai^U qu'on n'ait pus tu quelque-
fois les deux puissances cm|icé1cr l'une sur l'autre : nous savons trop
bien qu'elles n'ont pas toujours été d'accord sur les limites de leurs
ilroilt respeclih; maii ce que nous avançons avoir été généralement
ri'ïoiinu dans tous les siècles chrétiens, c'est que la puiu
pour Ic^ Kouveniement de l'Ëg1i»e, appartient dans le droit et dans In 1
pratique A l'Église enseignante.
' Nous olHcrverons encore ici que, pour être membre de l'I
sciKoante, il ne suffit pas t un tvéquc de se
le saint Siège ; il faut de plus qu'il y soit réellement et que le chef de |
ri^4|li<e le reconnaisse comme tel,
II.
4M QUE
venL leur démoniuaiion dans les termes méniK qui l'^oiiccnt.
Car, quelle est U nooTcauliï hétérodoxe, iniique ou récente, qui
avouera junais avoir été frappée par l'organe ou du canteiite-
ment réel on présumé de tous les raiholiquea; du moius, de tous
ceui qui ae disaient ou croyaieul l'être? Wîclef, leaa llus, Lutfier
et CaUîn eurent-iU besoin d'une autre base ponr appnjer leur
résistance opiniïtre, èlajer leurs dogmes monslrueul ? N'est-ce
pas SOT le même fondement que le Jansénisme se maintîeDt, qucnque
condamné suceessiTement par vingt pupes au muinii , et par timt le
corps des évéques , presque sans exception? La lutte également
funeste et peu édiSauEe que les parlemens soutinrent, dans le
siècle dernier , contre l'auturïté sucrée des éréques , ne trouvi-i-
elle pas dans ce détestable foyer toute la bardîesse et toute l'in-
soumission qui la sigaalËrent t Doit-on ctiercher une autre eause
kces innovations étranges, qui furent introduites dans! 'enseigne-
ment et le gouvernement ecclësiasiiqae, soit en Allemagne, sait
dans une partie considérable de l'Italie , sur la un du mime siè-
cle?Et celte jurisprudence canonique, qui eniahii<«ait naguère,
dans un pajs asseï connu , presque tous les droits de l'épiscopat ,
le Ricbérismu n'en èlait-ii pas comme l'âme et U lumière ? EÛfin,
sans parler de cette secte éplièmëre , que les d<^ux puissances de
concert renversËrenl dans le lambeau , moyennant ijuelques dé-
marches de la part de ses partisans pour obtenir leur rentrée
dans le sacré bercail , sfcte toute ricjiérjsle , n'cit-ce point de ce
tysiéme absurde, ou plulûi du fond de cette fange bourbeuse, que
s'est élevé ce pbilosophisme incrédule qui plane aujourd'hui au-
dessus de loua les principes , de toutes les croyance» , de tons )ea
cultes , bravant égnlement le ciel et la terre . et menaçant de dé-
truire jusqu'aux liens étroits qui unissent les hommes entre eux
et qui (arment du genre humain comme une seule famille? Car,
quoi de pini aisé a franchir , pour l'ambitieux , l'indocile « le li-
bertin, que l'espace chimérique qu'on lui met devant les yeiii ,
enIrelesdrorWpriBitdTiqu'ita.laî dit-on, et les rfroi/s itamMlaU
qu'on lui refuse? Les Jansénistes, les Consiiluiionnels , pour ne
citer qu'eux , ont-ils respecté cette Taible barrière î
Concluons donc , 1 • que le gouvernement de l'ËglJse , dua ce
qui concerne la doctrine, l'admïnistr^ilion des sneremens et la
discipline, appartient de droit divin il Rpist'opal ; 2° que ee gou-
vernement spirituel est une mouarchie tempérée par l'aristocratie;
3* que le souverain poniife y a la principale autorité en tout ,
QUE 49S
comme chef des premiers pasteurs et de loui lé troupeau; ^ que,
dans les jitgemens dogm3iL(|ueâ que le ptjie prononce, les autm
éTé(|ues jugent 3Tec lui, en adhérunl iiseBJugemensd'unemuniirfl
positive ou Ucit«; S* que l'adliésiou de la plupart des éTéques t la
décision de leur cher forme lo jugement du corps enseîpant,
c'est-i-dire In décisioD intailliblc et irréformable de l'Ëgliae, i la-
quelle tout lidèle doilse soumettre, lors même que d'autres évCques,
en plus petit nombre , résisteraient encore ; 6" que les premiers
pasteurs sont les seols juges né* et eràinaîTeg de la foi ; 7< que la
juridiction des pasteurs du second ordre peut être limitée par
l'auioriié des premiers , el que les simples prêtres n'ont de juri-
diction que par eux ; S que la qualité de protectrices de l'Eglise
et de ses tanona ne donne pas aux puissances temporelles le droit
de juger les jugemens doctrinaux de l'Eglise, ni d'eu déterminer
la naiure et les effets ; 8° eutin , que « les lois de l'Ëglise ue peu-
■ Tent recevoir des qualîlicationB que de l'auioriié même qui IM
> a prononcées. Ces qualifications apparlienuenl D in loi uiêtne
■ elles déterminent le genre de soumission qui lui estdue, et c'est
» h ri^gliae seule k eu fixer le caractère et l'éienJue
faut uietlre des bornes ï cet article. Jetons donc un coup d'œil
rapide sur les conséquences que nous avons auneiées au troi"
siëme principe capital de notre dogmatiste,
1* Touchatit la lecture de l'Ecriture saîute.
Ici Queinel ne se dément point. Instruit que la pluplrt iet
Ëgli ses sont dans l'usage de «uivre, ï l'égard des livres défenduS;
les régies tracées par ordre du concile de Trente et approuvées
par Pie IV, il brave la quatrième, qui réserve nui évoques
iuquiaiteurs te droit de permettre aux fidèles la lecture des Livres
' ExposilioD sur tes droits de la puissance spirituelle, déjt citée. Que
dire doue de cette proposition, avancée par l'auteur d'une disterlation
Tolumioeuse contre la bulle Unigeiiitus où celle cooililutlon eti d^
durée comme n'étant ni loi de l'élise, ni loi de l'Ëtat : ■ La mémo
> aulariti, qui donne A la pui^isauce temporelle le droit de confirmer
» laàéatUdogmatiqtui dcrËglite, lui impose l'obllgalion iCexamiiur,
> avant qoe d'accorder celle confirmation, ri le dècrtl tn lai-mfme etl
> nacepliiWtit devenir an jugement de l'E'jliie anicernlle,
» te fait, il tn a acquit te carae 1ère ? t 1 p., pag. ISA el 1S5, Voilï
queU étaient les principes que 1» Quesnel listes suggéra ient aui ma^na*
trais et aux parlemens, et tels étaient les fondcmeiis sur lesquels ccui-ef
bâtissaient leur jurisprudence prëtciiduc canonique.
*
oiia ^^J
I
49G QUE
EiinU ir:iiluiu en langue vulgaire, cl, s'élerant au-dessus de ceui
qui ODl droit de fiire des lois, il annoace ï Uul l'uniTerE que
ceux lecture ai pour tout le monde ,' qu'elle esl Htile, iDëme nAft-
wireeu toutiemps, eu tous lieui, ïloutes sortes de persounei;
que l'obscurité sainte de la parole de Dieu n'est pat aux laiqan
une riisDD pour se ûisptntrr de la lire ; que le dimanche toit ëire
sancti&é par cette lecture ; que c'est le 'ail que Dieu a donna au
chrétien, et qu'il est danijereuxde l'en priver, etc., etc., etc. '.
Hais si la lecture des saintes Lettres est si néeruaire en laut
temps , en loui lieux el à toulfs sorira de personnes, pourquoi le*
évangélisles n'écrivirent-ils pas aussitôt que les apôtres commen-
cèrent ï prêcher l'Ëvangilc? Comment j avait-il, du temps de
saint Iréttée , éréque de Lyon , des nations entières qui, n'ajant
pas les Livres sacrés et par conséquent ne les lisant pas, conser-
vaient néanmoins le dépAt de la Toi et ne laissaient pas de vîire
chrétiennement*? Le grand apQire se trompait-il donc quand il
disait que la foi vient par l' ouïe '? Et lesSdèlesqui nesaTenipas
lire el qui ne peuvenl pas se pourvoir de lecteurs ne saDciilieal
donc pas le dimanche , quoiqu'ils remplissent d'ailleurs ce que
l'iïgliseeïige»
Si U lecture dont nous parlons est utile i) toutes sortes de per-
sonnes, d'oii sont dune venus tant d'abus qu'on en a faits pour élayer
l'erreur, autoriser des vices, opérer des superstitions 7 Avouer
ces abus , qui ont été sans nombre , n'est-ce pas avouer que la
lecture de l'Ëcrilure sainte n'est pas Utile indilTérenuneDI i tout
le monde, et que les supérieurs ecclésiastiques qui se réserrent
le droit de la permettre eu langues vulgaires agissent avec sa-
gesse , loin d'être dans l'illusion et de laire souffrir i leurs subor-
donnés une espèce d'excommunication!
Convenons que la lecture de l'Ëcrîture sainte n'est pas néces-
aux laïques ; qu'elle peut être utile à ceux qui ont d'eicel-
< dispositions , et qu'elle deviendrait un poison entre les
■9 certains esprits de travers et présomptueux , qui veu-
lent tout savoir , tout comprendre , tout interpréter d'après leurs
propres lumières , et qui se scandalisent aisément. L'Ëcriture est
' Vbyei ses propositioni rapportées ci-dessus, 1
' L, B, AJversùs UjLrcs., c &, 11° 2-
^Rom., 10, 17,
3g3etsuiv.: ^^^
nne de ces cLosessaiu!
cliiens ',
3« Mais que prétend
avec Uni de iè\e i|ue
15 que Jésus-Cbrist défcnd de donner aux
réfornialeurquand il nous préiUe
• ravir (au sinipie peuple] qftte consola.
inir sa voii 2i celle île louie l'Ëglise , c'est un nsagg
e à la pratique apostolique et au dessein de Dieu*! •
Ce qui enflamme ici sa sulliciiude , esl-ce le désir seul de voir
s'établir partout h pieuse coutume que le peuple unisse sa voix
il celle du clergé pour chanter les louanges de Dieu dans li^s of-
fices publics? Non assurément : le chant en commun est un moyen
ractérisiiques , et la proposition est générale. Or, ou connaît le
penchant vif qu'avaient les Jansénistes pour la célébration des
olîiceE eu langue vulgaire. N'osant introduire ouveriemenl et par-
tout cet usage que l'Ëglise repousse pour de bonnes raisons, ila
y suppléaient du moins , mettant dans les mains des fidèles
missels, l'ordinaire entier de la messe, etc., traduits en leurs |
langues; et ils ordonnaient aux prêtres du parti de réciter le ci
non tout haut , aux peuples de suivre en tout le célébrant. I4 ]
raison en est que le simple Gdèlc célèbre la mes
nislre sacré. C'est ce que Quesnel nous apprend lui-même ; œaia {
ù son ordinaire , c'esl-Ji-dire en s'exprimani d'une manière ob-
scure et tortueuse, ■ C'est, dii-il dans son Vil' mémoire, rÉgliie
I qui a le droit et le pouvoir d'offrir ï Dieu le sacriGce du corps
> et du sang de Jésus-Clirist, pour l' exercer par ses ministres, du
• consentement au moins présumé de tout le corps. > Assertion
qu'il tient pour si orthodoxe et si conforme aux senlimens des
Pères et des docteurs tes plus éclairés sur ce qui regarde la li-
turgie , qu'il ne peut s'imaginer que personne au monde ose y
trouver ï redire ou la condanmer; et il nous la donne comme
toute semblable ï son 111' principe capital , pour le mettre ï coti-
vert des atteintes qu'j a portées la bulle Vnigfnitui. Quesnd
convient dune qu'il faut raisonner du pouvuîr d'immoler la vic-
time sainte, comme H a raisonné lui-même, dans son 11I< principe |
capital , du pouvoir de gouverner le corps mystique de Jésus- |
CUrist, Or, dans ecprincipo que nous avons examiné un peu plus
haut , Quesnel attribue la propriété immédlalt el jirlmUive dt'a '
498 QUE
clés à TÉglise entière ; il veut que les premiers pasteurs ne floieot
à cet égard que les commis, les délégués, les ÏDstruinens de FË-
glise entière , et qu^iis n^exerceut la juridiction qu*ea son nom
et que de son consentement au moins présumé. Donc « il en est
de même du sacrifice adorable : c*est TÉgUse entière qui t aussi
primitivement , originairement , immédiatement eidireetemeni reça
le droit et le pouvoir de Toffrir ; et les prêtres ne sont encore en
ce point que les commis , les délégués , les instrumens de TÊglise
entière. Donc, chaque fidèle participe au sacerdoce, Texerce par
le célébrant , ratifie de droit son offrande , en influence la validité
par son consentement réel ou présumé , et contribuerait à Tillè-
gitimer sMI refusait d*y consentir. Donc , un prêtre dégradé ca-
noniquement ( au nom de toute V Église) cesserait d*élre prêtre,
et un évéquc déposé de même ne serait plus évêque; en sorte que
ni Tun ni Tautre ne pourraient célébrer yalidement, etc. *, puis-
que le consentement même présumé de tout le corps de F^lise
leur manque dans ce cas. Qui ne voit qu*une doctrine si absurde
et si contraire à la foi catholique tend évidemment à détruire
Tordre , à méconnaître le caractère spirituel et indélébile qu*il
imprime da as Tâme, à réduire ce sacrement précieux de la nou-
velle alliance à un rit établi tout simplement pour désigner les
ministres de la parole et des sacremeus , à dire que les chrétiens
ont tous la puissance d'administrer tous les sacremens et de prê-
cher, etc.? Autant d'erreurs frappées d'anathème par le saint
concile de Trente'.
On voit donc dans quel esprit notre dogmatiseur parle de Tu-
nion de la voix du peuple à celle de toute TÉglise. Le synode de
Pistoie ayant aussi dit « que ce serait agir contre la pratique
» apostolique et les desseins de Dieu que de ne préparer pas au
» peuple des moyens plus faciles d*unir sa voix à la voix de toute
» rËglise , » Pie VI ne put s'empêcher de voir dans* cette propo-
sition ambiguë une tendance couverte à introduire Tusage de la
langue vulgaire dans les prières liturgiques ^ et il la censura dans
sa bulle i4u^/or^m fidei, comme « fausse", téméraire, perturbatrice
* « C'est à TÉglise de corriger et de retrancher les prêtres, et alors
> ils ne sont plus prêtres, » Extrait de la 93* lettre de Tabbé deS^nt-
Cyran. Il enseignait aussi dans son Petrus Âurclius qu*un évêque qui
se démut de son évêcké nVsl plus reconnu dansTÉglise pour évêque»
^ Scss. 23, can. 1, 3, 4. Scss, 7, can. 9, 10.
OtJE
49» ^^M
> do l'ordre prescnipoorh célèbraliou des salais mystères, source
> ouverte 1 quantité de maux '. •
3° Nous ne croyons pus devoir relever ce que Quesnel avance
encore contre les prédicateurs de son temps. II est aisé devoir
(ju'il on veut 1 l'Ëglise enseignante et qu'il cherche ï lui imputer
la tolérance d'abus ciiimérïques , afin de la dénigrer dans l'eS'
prit des fidèles. C'est dans la même tue qu'il lui attribue une
vieillesse plus que ridicule el une ignorance grossière des vérités
chrétiennes *. Tout est bon dans les mains de cet ennemi cruel
de l'épouse de Jésus-Chrisi , pourvu qu'il puisse en faire nsago
pour percer le sein de celle qui fut sa oiëre , tant qu'il ne se dé-
clara pas ouvertement contre .elle. Ici , il conspire avec d'autres
pour tâcher de persuader que le Fils de Dieu a fait divorce aied
l'Rglise universelle pour épouser la petite Église jansénienne.
Aussi, est-ce un dogme tr^-accrédité dans le parti • qu'il s'esl
• répandu 4ins ces derniers siècles un obscurcissement général
• sur des vérités de la plus haute importance , lesquelles eoncer-
• nent la religion , sont la btise de la toï , et ta doclrlne moralfl
• (le Jésus-Clirisl, • Quel dommage que Pie VI ait eu la mala-
dresse de condamner comme hérétique cette précieuse maxime ^ I
C'cit UQ nouveau coup porté aux cent une propositions extraites
des Mltriim» moraUt , ï toute la doctrine janséuienne , m£me k
la petite Église , qui n'usera peui-étre plus se vanter de posséder
exclusivement le trésor des vérités saintes et de les professer seule *
explicitement. Uais que disons-nousT Le coup est paré d'à-"
4° Car , placé !i la tf te de la faction révoltée , il but ou quo 1
Quesnel recule cl se soumette hujublement , ou qu'il s'attende 11 i
voir tomber sur sa tête les foudres de l'Église. Trop fier pour vou-
loir plier, il ne lui reste d'autre parti k prendre que celui de cher-
cher le niojen de s'aguerrir lui-même et d'aguerrir ses cbers élui
contre des armes si justement redoutées. Sun grand courage lui "
en découvre bientfit un qui est digne de lui el des siens , fort
cnmmode pour débarrasser eflicacement de toute crainle impor-
tune ù cet égard, très-capable d'inspirer de la hardiesse contrfl
Prop. Lin.
Voyrzia prop.
cv, p. 39U, cl les oliiit^rviit
.■s, p. ilBclBui
tlullc Au,l. fide
prop. 1.
• persécul'iDu des inéchans. I
• éï6ques s'armer contre noi
■ Uals si ces léniéraires en ne
> c'est évicleminenl parce que m
■ leur indolence; parce q
l'autorité imposanle des premiers pasteurs, et surtout grandaHU
accrùdilé par l'eiemplu qu'i'ii auji donné le célèbre patfiardM
de U secle. Or, ce moyen si edicace et admirable aient expédjlif,
c'«t de méprisera la luis ei les censures ei ccui qui les pronao-
cenl. Entendons raisonner Quesnel lui-même auprès de ses bons
conQdeos; mais ressouvenons-nous que s'il parle ici dant le sens
de ses maximes el de ses principes justement développés, Jl le
fait aussi avec une candeur et une franchise dont on ctierdierait
en vain des exemples dans tous ceui desesécrîisquîont Tulejour.
<> N'en doutons pas , mes aniis , noua allons être eu bulte 1 b
nie semble voir déjà le pape el la
i de leurs plus terribles censures.
ienneiit jusqu'i nous eicommpnier,
nootronsan lèlequi condamne
chercbons à dessiller les jeoi
■ dis peuples, el que nous annonçons à tout l'uniTers des véritéi
( antiques, que la malice des docteurs a enroules, que l'ignorance
> des évéques a laissé tomber dans l'oubli, et que le saint apJ)tte
> Jansënius a tirées enBn du milieu des léucbres épaisses qui
> courraient naguère luuie l'ËglJse. Or, des excommunicaiions
• de celle nature sont k coup sur trèt-injuttet ; elles ne peurertt
• donc nous emyicher de faire notre ineir. Les touffrir en paix,
> pluldl que d'abaadonnei' ou àe trahir les vértUt précieuses dont
LS el les nôtres sommes les seuls prédicateurs, e'eU imiter le
> pieui dÉTOuement de taint faut, (|ui eût consenti i se voir bn-
i> lliématiser pour le salut de ses frères. Aussi , ces plaies que
• s'eObrceront de nous iaîre ces pasteurs ineemidérét , qui jugent
• en aveugles et lam vouloir rien ej:aminer, ue seront qu'ippi-
:s et qu'eitérieures ; Jésus en eiupécbera l'elfet réel, du
au moins il le guérira aussitûi que nous l'aurons ressenti.
> Uais que dis-jeï Non, on ne tort jamais de l'Églite, Ion mime
• qu'il temble qu'on en soit banni par la miclianceU det hùmmn ,
If attaché à Dieu , à Jétui-Chriat , et ù t'Églite «uVifi*
tpar la charité, comme nous le sommes. Prenons act« de ce
■ qu'enseignait publiquement un sage dont 1* doctrine ne fut pas
• en tout inutile au courageux évèque d'Vpres. Je vous parle de
• l'illu Ire Widef , contre lequel se ruèrent vainement des b\i-
■ que» anglais assemblés à Londres ', Jean XXIll avec son sj-
'£a 1413,
QVF. 501
( noOe romain *, et le sèrtiu coucilc de Cunsiance : sa ducirine a
I Franchi plus de Irois siècles, non sans produire de grands èiè-
> nemeDS, et dods Eommesdans lu position d'en tirer de précieux
• avantages. Si cet humtne, i jamais digne d'éloges , est allé par
• l'ois un peu trop loin ( ce que je n'examinerai pas ici ) , assurê-
• ment ce n'est pas touchant l'objet qui nous occupe. Or, Wiclef
• voulait qu'un prélat ne lan^îL point une excommunication , ft
> moins qu'il ne fût bien certain d'avance que le sujet qu'il
> se proposait de Trapper était déji eicommunié de Dieu. Il
> disait que ceux qui abandonnent la prédication de la parole
> divine, ou qui cessent de l'entendre par la crainte d'une ei
• communication , étaient eux-mêmes excommuniés. Il accusait
> de haute trahison ( remarquons bien ceci] un prélat qui serait
> assez téméraire pour anatliémaiiser un clerc qui aurait inter-
t jeté appel auprès du roi et de l'assemblée de la Dation. Il ras-
■ surait ses disciples contre les censures du pape et des évéques,
> en traitant leurs excommunications de censures de l'Ante-
• christ. Mais voici une maxime qui, pour n'avoir pas, ce temlile,
• un rapport bien direct â ce que nous traitons, n'en a pas moins
> d'importance pour nous, à cause de la vérité lumineuse qu'elle
I renferme, et parce que, il ce que je prévois, nous serons dam
a peu forcés d'en Taire U3.ige pour soutenir nos 5mes dévoles.
• Écoutei-donc cette précieuse maxime, que je vais vous rapporter
• mot i mot : Il eil permis à un d'iacTf, dit notre admirable docteur,
• ou d un pr^ir« de prtckrr la parole de DUu *ant avoir rteouri
• à t'aulorilé du siiçe apostolique ou d'un iviqite calMiquê *.
• Maxime qu'on peut étendre sans doute aux autres fonctions da
> sucré ministère. Je me réjouis , mes cbers frères , de ne vous
■ avoir pas enseigné jusqu'ici une autre doctrine. Hé I n'est-ce
• pas dans ce trésor si riclie que les réformateurs du siècle der*
■ nier, avec lesquels nous avons des rapports multipliés et Irès-
■ étroits, quoique nous ajons soin de le nier dans nos écrits et
• dans DOS discours publics; n'est-ce pas, dis-je, dans ces dogmes
• lumineux du vaillant athlète anglais, que Jean llus , son cher
> JérOme de Prague , Luther cl Calvin , pour n'en pas nommer
> beaucoup d'autres très-renommés dans l'histoire, puisèrent cette
< En Ulî.
'Prop. li, 11, 13, U, 30, inler dimiMil. " (oncil.ZowiXwl, apud
Harduluum, t 8, coU 300.
\
50S QUE
fermeté noble avec laquelle ils s'élevèrent ai fort «n-deasitt daa
foudres du Vatican et de celte assemblée de seolastiques qi^oa
nomme concile de Trente? Imitons rbéroTsme de nos générem
prédécesseurs. Il est vrai que la borde des théologioia et des
canonistesy qui tiennent encore à la doctrine de TËgliae catho-
lique, enseignent des maximes bien différentes de celles qne je
viens de vous exposer. Ils disent, par exemple, avec im andea
pontife de Rome, que celui qui est sous la main du pasteur doit
craindre d*en être lié, même injustement * ; qu*nne exQommmii-
cation, pour être injuste, n*est pas toujours nulle, ni sau pro- .
duire son effet; qu*il faut donc la redouter, s^en foire absoiidre
quand on Ta encourue, abandonner, plut6t que de s*en lûaser
frapper, un devoir seulement apparent, dispensable, pré-
tendu, etc. Ils osent m*accuser en particulier de n'avoir parlé
sur cette matière, comme je Tai fait dans mes saintes BéfioAtm
moraUêf que pour me soulever et soulever ensuite effrontément
ceux qui me suivent contre Tautorité du pontife romain et de
ses collègues les évéques. Mais que nous importe tout cela?
Noire parti est déjà nombreux : Us ne eoMentiront Jtmuiis aux
excommunications précipitées des méchans ; et par ce moyen il
sera impossible qu*aucun homme nous sépare du saint bercail.
Au surplus, il ne faut pas perdre de vue les grandes vérités que
le bienheureux abbé de Sainl-Gyran, Tami intime de notre fon-
dateur, révéla autrefois à Vincent de Paule, concernant VA-
glise *, Appuyés sur ces vérilés incontestables, comme sur un
fondement solide , nous travaillons de concert à régénérer le
corps mystique de Jésus-Christ ; ou, s* il se montre irréformable,
à préparer au libérateur des justes une autre épouse qui sera
plus digne de lui, et qui lui restera fidèle à jamais. »
5 ' Après ce que nous venons de dire , et tout ce qu*on a vu
jusqu'ici touchant notre ex-oralorien , iî nous paraît inutile d'al-
longer ce mémoire , en cherchant à développer le mauvais sens
que présentent ses propositions xciv , xcvi , xcvii , xcviii , xca ,
c *. Quiconque les lira sans prévention ne pourra s'empêcher
d'être surpris de l'insolence avec laquelle Quesnel s'élève con»
tre le souverain pontife , les évéques de France et Louis-Ie-
* Saint Grég.-le-Grand, homil. 16 in Evang.
^ Foyex son discours impie, p. 413 de ce volume.
• VoyexAeSf p. 394 et sulv.
yUK 503
Granii , qu'il accuse de dominer nur la foi dei fidêlf* ; d'eutreifiiir
des dipîûon* pour des cboietqiii nebleueat ni la foi ni te» mœurt;
d'éire coairaim aux pr/dkaiean de ta vérilé ; de pei-séculer
Ui membrr» te ptae Miulemeiit et le plat éirmtemtni unis à l'£-
glîie; de se montrer enlclds, prévenue, obïiiaês; de dianper m
mUar de mort les boni liura, let îmtrvcliinu , les laial» ti
pies, etc., etc. Les Junséuiates einltenl singulièrement ces pené-
cutions piéteudues. k les entendre , les prisons étaient remplies
de leurs suinls confesseurs; les terres èirungéres se IrouvaienL
surchargées par la multitude presque inlinie des exilés ; les cen-
sures tombuicnl suc leurs télés comme quand il grêle bien fort ;
des spoltatious injustes réduisaîenl ï l'extrémité de n
victimes. Il est ficbeux, au plutûl fort heureux, que le& disciples
de Jansénius se montrent ù cet égard ausdi peu véridiques que
quand ils parlent hieloire, discipline, etc., en preuve de leur
doctrine. On peut consulter, sur li persécution dont il s'agit ici,
les Mémoire» pour «ervir à i'hittoire eecUtiatliqiie pendant la
dix-huilUme Mifcle, etc. ^
Uais si les mojens de répression employés par les puissances
pour ramener les Jansénisles i l'unité; pour les engager & se
soumettre à des aulorilés établies de Dieu ; pour les empêcher
d'infecter les lidéles de leurs dogmes liËrétiques , et de semer
partout des maximes qui tendaient i renverser et l'autel et le
trûne , étaient des actes de tyrannie et de vraies persécutions , il
faut l'avouer , le glaive dont le Toul-Pulssani a ceini le côté des
rois, el les armes spirituelles qu'il a placées entre les mains des
pontifes, sont inutiles et ne peuvent avoir aucun nsagc. C'est dono
ï tort que les législateurs font des lois pour euipécher les dés-
ordres, el qu'ils cbargent les magistrats de l'exécution de ces loU.
L'élise devrait aussi laisser les novateurs dogmatiser à leur aisu,
et bien se garder de les troubler dans leurs courses apostoliques,
soil en les menaçant, soil en les frappant de ses censures. Il est'
vrai qu'il rteulurait de cette tolérance singulière des troubles, des
révolutions, des schismes, des hérésies, une foule de maux incon-
cevables; il faudrait même retrancher des Livres saints beaucoup
de telles que le Saint-Esprit } a mis pour apprendre aux supi-
rieurs ce qu'ils doivent i ceni qui leur sont soumis el la manière
(le les gouverner. Mais qu'importe? Les nouveaux diielples de
mini AugHtiin le veulent : il faut bien croire qu'ils ont raison,
puisqu'ils forment i eus seuls la VRiie figlîse, et que la sociéiâ'
504
Qit:
CHlIiolique ii'esl plus qu'une adullère , qui ne connatt, ni cdni
qui fut mirerais son époux , ni les vérités saintes donl elle mît
reçu J'abonJ de lui le sacré dépûi.
6* Cependunt de tous les genres de persécution exercés contra
les malheureux enlans de Junsâuius, le plus aUvce sans doute et
celui qui fait Terser un lorreot de larmes au bon père Quemel ,
c'est la signature du rormuUire d'Alexandre Vil. Lepieoi fugiiif
voit dans celle signalurc an serment ; el, qui pis est, un sermeot
qui condamne cinq propositions du grand patriarche, comme
élaui hérétiques, comme eonienues dans son livre, cooime rtn-
ferroani le sens de ce cher ouvrage el de l'auteur. Quelle misèrtï
Il fauL donc, ou abjurer loul de bon le Jansénisme, pour erobni-
ser la foi orthodoxe, ou refuser le fatal serment el s'ei poser 11
passer pour rebelle et hérétique. Mais, ce qui scbève de jeter
l'amertume et la désolation dans le coeur paternel du tendre chef,
c'est qu'il voil de plus presque tous ses disciples , naguère si
généreux délenseurs de la morale sévère , ennemis si dérUrés
des moindres équivoques, descendre lout^-cotip de la liauleur
lie leurs sublimes principes, pour se traîner dans le relichenieDi
le plus étonnant et le plus contradictoire , volant à un serment,
au moTen d'équivoques pires mille fois que celles qu'ils avaient
combattues , se rendant scandaleuse meni parjures aux jeui de
tout l'univers, par nne feinte Ucbe dont on ne trouve d'exemple
dans rbistoire que de la part d'hommes scélérats ou impies. En
faut'il davantage pour exriter le zËle inllammable du vigoureux
Queenel ; animer sa plume toujours éloquente, quand elle est em-
plo)ïe ï déclamer contre le pape et les évêques, et pour l'engager
à crier contre la multitude des sermeos en usage dans l'ËgliseT
Il eiL vrai qu'il n'y a que celui du formulaire qui le désole et loi
échauffe la bile ; mais, afin de déguiser !i son ordinaire ses seoii-
mens el sa doctrine , il esi nécessaire de généraliser ses plaïnles.
Ceci ce qui l'engage â dire tout nettement, dans sa proposiiioa
cent une, que . rien n'est plus contraire \ l'esprîl de Dieu et i
• la doctrine de Jésus-Christ que de rendre commuus les sermem
■ dans l'L^lise; parce que c'est multiplier les occasions des par-
> jures, dresser des pièges aux faibles et aux ignorans, et faire
■ quelquefois servir le nom et la vérité de Dieu mx desseins de»
• mt'clians. • Ainsi, suivant notre auteur si lumineux et si véri-
diqiie, l'Ëglise s'est touveni trompée; elle a tendu bien an
pièges A ses enfans el jiresqiie toujours mécminu l'cspril de Dioa
QV¥.
Pl h doctrine de Jùâus-Clirïst ; puis(|u'il lui est
rens temps, d'exiger i\e.» sermens, pour séparer
ciles lies partisans du scliîsme et de l'erreur; qui
il Trâqueniment demandû ï ceui qu'elli
r.05
iv.i, en dillï--
I ouailles do-
s conciles en
minisireg, cliarger des fonclioDS pastorales, élever auï dignités;
et que inainlenant eneore un prSlre n'arrire pas à l'épiscopat
sans s'èire astreint par la foi du serment 1 garder l'uuiié que le
Fils de Dieu a établie dans sou corps mystique.
7° Ce qui néanmoins étonne beaucoup dans U manière de voir
de Quesnel , touchant la conduite de la plupart de ses adhi^rens,
au sujet de la signature du formulaire d'Alexandre VU , c'est
qu'il parait ; oublier entièrement une maxime qui aurait t\ii le
consoler et même le rendre tout au moins ÎDdiiïérent sur l'objet
de sa grande douleur. En elTet , si ■ l'iiomme peut se dispenser,
• pour sa conservation , d'une loi que Dieu a faite pour son uti-
■ lilé <, • pourquoi les Jansénistes n'auraient-ils pas fait i tort
it commandé par la bulle du pape AleïandrA-^
îxigé par tous les évêques orthodoxes di^ France ?.
IIS!^
juraicni en préunt ce serment , puisqu'ils prenaient le
Dieu à témoin qu'ils abjuraient sincèrement une Jocirine comme
hérétique , comme contenue dans le gros volume de Jansénius,
comme renfermant le sens de ce livre et de t'aulenr, Inndis qu'ils
rrojaient cette même doctrine fort orthodoxe, ou qu'ils la regar-
daient comme étrangère an lifre et !i l'auteur de cette production:
soit. Mais laloidenepas jurer en »ain ne vient-elle pas de Dieafi
N'est-elle pas aussi pour l'utilité de l'homme? Car quels avantage! '
la société n'en recueille-t-cUc point? Les Jansénistes pouvaient
donc se dispenser de cette loi poor leur conserration. Car, que
serait devenu le<fr parti dans les pays où l'on exigeait U signa-
ture du formulaire * D'ailleurs le refus de le signer n'éiait-il pas
m molifpour les supérieurs de les dépouiller de leurs liénéficeB^
Kdelcur interdire leurs fonctions, de les empêcher de parvenir an
«cerdoce, aux degrés, aui dignités? Or, ces bénéfices, ces fonc-
, n'étaicnt-ils pas nécessaires ï la subsistance de l« i
bloparl d'entre eux, et aussi pour le maintien de 1» bienlipi
Mcir? Le parjure leur était donc permis, et maître Quesnel a grantï I
fttori d'en déplorer le crime, qui u" était, suivant sa commode pro^l
losilion , qu'un fantôme cl qu'une vraie cliimèrc.
Mt QUI
A» fond» il en tM de Toir <iiie It proposîlioa 4e «Mv
Um mr ki dupeimes, qa*0B peat s'aeomrd^ d*«itorilé privée ,
owrre la porte à tous les crimes imaginables , à tom les désordres
psssibles» otqu'eUe contient Texcès mêsM du rtlftobanieal*.
Moffem employée par le» Quesnellisieê, peur piire îri9m§ker
leur cause.
Ce mémoire étant devenu déjà trop prolixe , mmu i
pas ici' dans le détail de ces moyens. Pour peu q^*OÊk ail étudié
rhistoire de cette secte, on a dû se convaincre qu'elle fbmaîl un
parti décidé, unecabale digne de succéder à la Fronde, une eqpèee
d'ordre qui avait ses constitutions , ses cbe& , ses fin—ces , ses
oommunautés religieuses , ses séminaires , ses collèges , %t uu es-
prit de sèle on ne peut pas plus caractérisé. Tous les moyens
employés par les errans qui avaient précédé le Jansénisme lui de-
vinrent propres : altérations dans les faits historiques , déguise-
■ens dans la doctrine , mensonges , calomnies , invectives contre
les autorités les plus respectables, haine cruelle contre ceux qui
' les combattaient, flatteries pour corrompre, impostures, paijuresy
tout ce qui pou^it mener au but était bon , permis, saôé. Nous
ne parlerons pas des faux miracles , des prophéties feintes , des
oonfulsions scandaleuses, descrucifiemens qui étaient Técueilde
la pudeur: tous n*admircnl pas universellement ces moyens odieux.
On peut consulter sur ces divers objets plusieurs des ouvrages
que nous avons cités dans le cours de cet article, et une multitude
d'autres monumens historiques.
QUIÉTISME. Ce mot exprime Tétat de repos ou d'impassibi-
lité auquel une espèce de mystiques contemplatifs pensent arriver,
en s*uoissaut à Dieu par la méditation ou par Toraison mentale.
Nous nous unissons en quelque sorte aux objets par la pensée,
et un objet qui absorbe toute notre attention semble s'identifier
avec nous.
* On peut consulter, sur les cent une propositions condamnées par la
bulle Unigenitus, les Anti-Exaples du P. Paul (de Lyon), capucin ; la
Nouvelle défense de la consUt'ution de N. S. P. lé pape, portant con-
damnation du Nouveau Testament du Père Qucsnel, de Claude le Pel-
letier ; un ouvrage anonyme intitulé : Les cent une propositions extrai-
tes du livre des Réflexions morales sur le Nouveau Testament, qualifiées
en détail ; les Enirotiens. du docteur au sujet des affaires présentes par
rapport à la religion, etc., elc«
On a donc regarda la nii'Hlituiion ou la conicraplalion d
fedluns divines comiue un moyen de s'unir à l>ieu : on )
forcé de se détaulier de tous les objets , pour m I'lvi
traction â la contemplation dn perfeclions diviops- On a imaginé do
uiélliodes, el l'on acm que l'ime pouvait coDiem pi erl'Mseii ce divine
funH disiraclion, els'unir A elle iDlimemem; qu'une vue ai parfaite
de l'essence divine éuii jointe ï l'amour le plus ardenl;quele« fa-
cultés de l'ime étaient absorbées pur son uuion avec Dieu, qu'elle
ne recevait plus aucune impression des objets terrestres : cet état
de l'âme est ce qu'on appelle quiétude , ou le Qniéiisme.
On conçoit aisément tous les excès oti l'esprit humain peut se
porter en pariant deces principes, et que le Quiétisme peut pres-
dre mille formes dilTéretites , selon le caractère et les idées de
ceuï qui en adoptent les principes : les Gnostiques, les Carpocra-
liens, tes Vatenilniens , les Hésicasies, les Béguards , leslllumi'
nés , Holinos , Halaval , Guillot , madame Gu^on, H. de Féntion ,
sont des Quîélistes; mais leur Qniéiisme est bien dilTérenU
Molinos est un des ^us célèbres : c'était un préire espagnol ,
qui s'établit il Rome vers la Sn du dix-septième siMe. Il enaeigaft 1
le Qiiiétisme dans son livre inlilulé : la Conduite tpiriluetle, d'oH \
l'on lira soiianie-huit propositions quifurent condamnée! o
béréliques el scandaleuses. Holi nos se rétracta, et fut condamné à "
une prison perpétuelle. Molinos avait cependant joui ï Rome d'uM
réputation éclatante de sainteté, et il a eu des apologistes, aussi
bien que le Quiétisme. Madame Cujon eut aussi beaucoup de ce-
iébrilé; H.deFénélonladéfetiitil. Voftci, sur les Quiélisies, rela-
tion du Quiéiisme ; recueil des diflérenles pièces concemiuil ta
Quiétisme ; l'instruclioD de H. Bossuet sur les états d'oraison;
l'histoire abrégée du Quiéiisme , qui esi i la léle du siiième vo>- I
lume des œuvres de H, Bossuet.
Toute cette querelle fut terminée par un jugement du saint Siège,
auquel M. de Fénélon se soumit avec une simplicité qui prouvait
également la pureté de ses Inleutions , la candeur desoD œur et
rélévaiiondosonftme.
I"
REBAPTISAA'S ; c'est le nom que l'on donnait & ceux qui pré- |
tendaientqu'iirallailTebapliâer les héréiiquet: cette erreur fuld'i-
508 RËB
bord soutenue.parÂgrippin, ensuite par saint Gyprîeii,ei adoptée
dans le quatrième siècle par les Donaiîstes.
L*an 255 » on commença à disputer en Afrique sur le baptême
des hérétiques.
LesNoYatiens rebaptisaient tous ceux qui ptss»eûtdaBt leur
parti. Un nommé Magnus, croyant qu*il ne fallait avoir rien de
commun avec les hérétiques, ou craignant qtt*on ne parût suivre
I^ovatien en rebaptisant comme lui, demanda à saint Gyprien s*il
Mait rebaptiser ceux qui quittaient le parti de NoTaticD et ren-
traient dans rËglise ^
Saint Gyprien répondit que , puisqu'il fallait rebaptiser tous
ceux qui avaient été baptisés par des hérétiques ou schismati-
ques, les Novatiens n'en devaient pas être exceptés ; U se fondait
sur ces principes :
1« Ceux qui sortent hors de TËglise doivent être considérés
comme des païens, et , par conséquent, tout-à-lait incapables de
faire les fonctions de ministres de Jésus-Christ.
2* L'Église étant unique et renfermée dans une seule commu-
nion, il fallait qu'elle fût du côté de Novatien ou de celui de Cor-
neille.
3° Novatien ne pouvait pas donner le nom d'Église à son parti,
parce qu'il était destitué de la succession des évéques, ayant été
ordonné hors de l'Église.
4* Les hérétiques et les schismatiques étant destitués du Saint-
Esprit, ils ne pouvaient pas le conférer a ceux qu'ils baptisaient ,
non plus que le pardon des péchés , qu'on ne pouvait accorder
sans avoir le Saint-Esprit: qu'on ne peut se sauver hors de la vraie
l^lise ; que par conséquent on n'avait point de vrai baptême hors
de TÉglise, et que Novatien ne pouvait regarder son parti comme
la vraie Église, ou qu'il fallait dire que Corneille, le seul légitime
successeur de Fabien , Corneille , qui avait remporté la couronne
du martyre , était hors de l'Église ; enfin il prouve, par l'exemple
des tribus schismatiques d'Israël, que Dieu hait les schismatiques;
qu'ainsi , ni les schismatiques, ni les hérétiques n'ont le Saint-
Esprit.
Saint Cyprien dit , dans cette lettre, tout ce qu'on peut dire en
faveur de son sentiment; cependant elle ne leva pas toutes les dif-
ficultés des évéques de Numidie. Dix-huit évéques de cette pro-
* Cypr,, cp. 69. éOiU de Dodvcl,
ï
REB 509
ïîiice écrivirent de nouveau ù suiat Cjprien , <|i[i convofiiia uo
concile dans lequel ou déclara que personne no jniuvail êlie bap-
tisé horsUerÉelise.
Malgré la décision du coucilc d'Afrique , beaucoup d'év&|im
préféraienl la coutume ancienne au sentiment de Cyprien, quî
convoqua un nouveau eoncile, oti les évêques de Numidie et d'A-
frique se trouvèrent : ce liccond concile conlirma la décision du
premier concile de Cai'lhage sur la nullité du baptême des héréti-
ques. Le concile infumia le pape Etienne de re qu'il avait jugé ;
mais le souverain ponlile condamna le jugement des Pérès da
CnrtLage.
La lettre de saint Etienne est perdua; mais on voll, par celle dflf
saint Cj'prien, que ce pape insislail beaucoup sur la tradition et
sur la pratique universelle de l'Église, dans laquelle il ne faut rien
innover,
SaintCyprien , pour se soutenir contre l'autorité du siège de
Honte , convoqua un IroïsiÉme concile, composé de quatre-vingt-
sept évéques africains, numides et maures : on y conBmia lejuge-
ment des deui conciles précédent sur la nullité du baptême des
liérétiqaes. Saint Cjprien écrivit k Firmilien , sur lu contestatiim
qui s'était élevée entre le pape et l'Ëglise d'Afrique , et Firmilien
approuva le sentiment de saint Cyprien.
On mil de part et d'autre beaucoup de vivacité et de chaleur
dans cette dispute. Saint liltienne menaça d'oicommunior les Re-
baptisans; mais il n'y eut point d'eicommunicatiun portée, du
moins aucon de ceux qui l'ont prétcudu n'ont jusqu'ici donné au-
cune preuve convaincante de leur sentiment ; car il y a bien de la
didérence entre l'excomntunication et le refusquelepape Etienne
Ht de communiquer avec les députés d'Afrique , ou une menace
de se séparer de saint Cyprien ; et ce sont cependant les deux
preuves qu'on apporte pour établir que saint Etienne excommu-
'a uint Cyprien*.
Lepape Etienne mourut, etSixte, son successeur, ne pous» pas
'.^us loin la contestation de la validité du baptûmo des hérétiques,
qui fui décidée conformément au jugement du pape Etienne
I Valois, le P. Alex. Sclielsirale. Le» Proleslans, aussi bien
que li^ callinliques, se soûl partagés sur ce point, mais ^ n>^ semble,
]nr quelque raison de [varti plutélque par des raisons tirées de l'his-
i
sto
REB
àuM un coDcHeplénier, ?iou» u'eiamineroiu |ioint si cecûncile
est l« coDCile il« Nioécou celuid'Ârles; celle queslion n'ett d'au-
cune imiiorUinue, puisque par l'uu et par l'auLre concile il esic«r-
tain que le bapLème des b^rétiqus est ralide.
SamiCjprien n'appujail son opiaion que sur âeê parniogiunes :
ilpTétendailquel'hMlique n'apnlm leSaint-Espril, □■ la grtce,
il De pouvait la duuaer ; mais il ett certain que le bapiOme ne li-
rantB(inefli«icil6que de rinsiiiuiioo deMu»<:iirist, la foi du mi-
nistre ne peut empêcher l'elTel du baptême, pas plus que l'étal i«
pécbé dans lequel il se Irouverail en donnant le bapiëuie.
Ce qu'il disait que persoDne ne pouvant se s.iut^r liurs de U
vraie Église, il ue pouvait jatoir de baplAmediei les hérétique»,
est encore un paralogisme; car, comme on ne sort de U mit
Église que par l'hérésie , c'esi-à-dire par U révolte k l'autorité de
U vraie Église , dans les Bodélés cbréiiennes il n'y a d'iiécéliqim
que ceux qui participent ï cet esprit de révolte; ceux qui n'y
parlicipeni pas appartiennent il la vraie Ëylise : tels sout les eo-
laus et les adultes qui sont dans une ignorance inviuciblc de la
révolte de la société dans laquelle ils vivent.
Enfin, le pape Etienne opposait i suiol Cjprien tine iradilioA
uaiversclle et immémoriale , et saint Cjprien reconnail , dans M
lettre i Quintus, la vérité de celte tradition ; il ne remonte pas lui-
même au deh d'Âgrippin , son prédécesseur.
Uais , dira-t-on , comment donc l'usage de rebaptiser tes itéré-
liques s'éuit-il éublif Le voici :
Il l'élail élevé dans l'Église des hérétiques qui avaient alléié la
Turme du baptême, tels que les Valentiuiens, les Basilidiens, «c.
Le baptême de ces hérétiques êlait nul , et on rebaptisait ceux
qui se couverliisaienl lursqu'ils avaient été baptisés par ces hé-
rétiques, ce qui u'eti point du tout favomble au seniimeDi de
sainl Cyprien '.
l^es Diinalistes adoptèrent Ee sentiment , et sainl Augustin l'a
irês-bien réfuté dans sud livre du baptême.
t »'oj(eî, dans sainl Ifénéc, L 1, cl8, les différentes formuliï de ces
hérétiques ; les uns baptisaiiml au nom du Père de loutn chmea, ^
êlait icronnu i d' la vérité, qui élnlt la mère de lauleschoirs; de M-
■us, deHXDdu pour recbder le» vertus i d'aMi^ w srrvaient dt noms
bîiarrei cl pruprcs ï élonucr l'iuiagiualiou : ils baptUoienl au iiom de
llaayma , de Cucubasie, de Diarbada, etc. Les Mardoailes bapllaainil
uu nom du Juste, du Buu cl du Méïhaiit.
REF SU
RËPOHMÂTION ; c'est le nom que donnèrent à leor schisme
ouïes les secies qui se séparèrent de l'Ëglise romaine dans le
commencpiueni du Beiiième sitcle.
L'histoire ecclésiastique ne fournit poinl d'événement plus in-
téressant ; loul éuil tranquille dans l'Europe ; loules les Églises
étaient unies par h même foi , par les mêmes sacremens , toutes
éuienl soumises au souverain pontife et le regardaient comme le
clief de l'Eglise.
Léon X, qui occupait alors le siège de Rome , envoya des in-
diligences en Allemag;ne , en Suisse ; un inlérêl sordide en abuse ;
Luther s'élève contre cet abus et attaque ensuite les indulgence!
mêmes, le pape et l'Église ; la moitié de l'Allemagoe s'arme pour
Luther el se sépare de l'Ëglise romaine; le Danemarck, 1* Suède,
une partie de U Hongrie et de la Potope sont enlralnêt dans le
schisme. VajwirariicleLnTiiEB.
Dans le même temps, Zuingle, curé en Suisse, prêche contre
les indulgences , attaque presque tous les dogmes de l'Ëglise ro-
maine, abolit toutes les l'érémonies et détache de l'I^glisc ratbo-
lique la plus grande partie de la Suisse. Voyes l'arl. ZutitCLCi
Luiher et Zuingle appellent Rélurme le changement qu'ils font
dans les dogmes el dans le culte , et prennent la qualité de Réfor-
maieurs. Ils inspirent leur fanatisme el Tonnent des disciples qui
vont porter leurs erreurs dans toute l'Europe ; Ils les enseignent
en Angleterre, el l'Église anglicane en adopte une partie; ils trou-
blenl les Pajs-Bas , occasiunent la Turmalion de la république des
Pruvlnces-Unies , et font de la religion de Calvin la religion do-
minante de ces provinces ; ils pénètrent en France, se multiplient
et }' obtiennent des temples el l'exercice libre de leur religion
pendant plus d'un siècle. Vogci les articles Ahglicuk {Ègliie),
lloLMNnB , Calvinistes.
Du sein de la Béfomie de Luther, de Zuingle et de Calvin,
naquirent mille sectes difTércnlrs , aussi opposées entre elle*
qu'elles étaient ennemies de l'Eglise rumaine ; tels furent les
Anabaptistes, qui si! divisèrent en treixe ou qnalnriie sectes
(tfoifeî l'article Asabsmistes); tes Sacra mentaires, qui se dîvisetit
en neuf diiféren tes branches; les Cunressîonisies , partagés en
vingt-quatre aectes ; les Extravagans , qui avaient des lenlinienft
opposés il lu confession d'Ausbuurg el qui se divisèrent en tix
séries {l'osn l'anicle LirninieiLi!Tit£niE9S}; leslialvinistee, qui
e divisèrent en tiomariilet et en Arminici»! en Suitrn-LapsiirH
512 BEF
et en Infra-Lapsalres, en Puritains, el en Anglicttis (voffez ces
articles.) Enfin SerYet, Okin, les Sociniens, les nouveaux Ariens.
L'histoire de toutes ces sectes est , à proprement parler, lliis-
toire de la Réforme , et presque Tbisloire de Tespril humain pen«
dant ces siècles.
Nous avons exposé dans chacun 'de ces articles leon principes»
et nous les avons réfutés ; nous avons réservé pour, cet article Texa-
men de leurs principes communs.
Toutes les société chrétiennes qui ont pris le titre d^Ëglises
Réformées se sont séparées de TÉglise romaine. Le fondement
de cette séparation est : 1« que TÉglise romaine était tombée
dans des erreurs qui ne permettaient pas de rester dans sa com-
munion ; 2* qne TËcriture était la seule règle de notre foi ; 3* que
tout fidèle était juge du sens de TÉcriture et avait droit de juger
de ce qui appartient à la foi \ de se séparer de la société qui est
tombée dans Terreur et de s*attacher à une autre, ou d*en former
une nouvelle dans laquelle il rétablisse la foi et le culte dans sa
pureté.
Nous allons faire voir, l** que les erreurs que les prétendus Ré-
formés reprochent à TÉglise romaine n*ont pu autoriser leur sépa-
ration ; 2« que TÉcriture n'est pas la seule règle de la foi ; 3* que
ce n*est point aux simples fidèles , mais aux évéques , successeurs
des apôtres , qu*il appartient de juger des controverses de la re*
Ijgion.
§ I. — Les erreurs que les prétendus Réformés reprochent à
V Église romaine n'ont pu autoriser leur séparation.
Les Réformés prétendent justifier leur schisme par ce raison-
nement.
On ne peut demeurer uni à une secte qui oblige à faire profes-
sion de diverses erreurs fondamentales et à pratiquer un culte
sacrilège et idolâtre comme Tadoratlon de Thostie , etc.
Or, rËglise romaine oblige à faire profession de diverses er-
reurs fondamentales et à pratiquer un culte sacrilège et idolâtre.
On ne peut donc pas demeurer dans sa communion , et tous
ceux qui sont persuadés de la fausseté de ses dogmes et de Tim-
piété de son culte sont obligés de s'en séparer.
Nous avons fait voir que TËglise romaine u*est tombée dans au-
cune erreur, Voyei les difl'éreos articles Lutheb, Calvin , Zvik-
REK
., et tes Proiesians les plus iklairés ont é
513
erreur fundameiitale '.
eiamiuer le sophisme des Proleslans,
é plutôt
ruconnalire qu'elle i
Nous allons présc:
indépendamment de celle discussion.
Il y 3 une sÉparation simple et oégaLivi
danii la négation de certains attes de coumuiûon que dans des
uctions positives contre la société dont on se sépare-
Il ; a une autre séparalioa qu'on peut appeler positive, qui en-
fenne l'érection d'une société séparée , rétablisse ment d'un nou-
veau miuislère, et la condamnation positive de la première société
à laqurlle on était uni.
Les prétendus Réformés ne se sont pas contentés de la pre-
mière séparation , qui consiste à ne point communiquer avec l'fc-
glise romaine dans les choses qu'ils prétendaient être mauvaises
et défendues parla loi de Dieu;ils ont formé une nouvelle société,
iitic nouvelle l^.glise ; ils ont établi de nouveiai pasteurs , ils ont
usurpé le ministère ecclésiastique , ils ont prononcé anallième
contre l'Ëglise romaine, Us ont dégradé et cbsssé ses pas-
La séparation dos Proteslans est donc un schisme inexcusable;
car l'usurpation du ministère est criminelle par ellii-métne et ne
peut être justifiée par h prétendue idoldtrie de la société dont on
se sépare. '
Celui qui dirait , par exemple , qu'il est permis de calomnier I
toute société qui oblige à l'hérésie et ï un culte idolAire ; qu'il est
permis d'en tuer les pasteurs en trahison et d'emplojer pour les
exterminer toutes sortes de moyens, avancerait sans doute nne
proposiiiuu impie et hérétique , parce que les crimes des autres do
donnent jamais droit d'en commettre soi-même , et qu'ainsi , en-
core qu'une l^tlisc fUt^ hérétique, il ne serait pas plus permis
delà calomnier et d'employer la trahison pour en Taire mourir les
pasteurs.
Ainsi, quand même l'Ëglise romaine serait hérétique et ido-
lâtre, co qui est une supposition impossible, les Kérormés n'au-
raient pas eu droit d'établir un nouveau ministère ai d'usorper
celui qui était établi , parce que ces actions sont défendues par
elles-mêmes, l'usurpation de la puissance pastorale sans mission
'Tillolson, Scttn., t S, serm., 11, p. 71. Cliilii^ort, dans l'ou-
vrage intitulé : Lit religion prolcstunlo cat une voie tOre.
614 BEF
éunl tOQjoiirs criniseUe et ne pouYiDtéM CMiAa fm
cirooiisUnce étrangère.
Car c'ett une usurpattoo criminelk que de s^altriiMMr m doa
de Dieu que Ton ne peut recevoir que de lui aenl : leDe eatk
paiflsanoe pastorale , à moins qu'on me soil auvé de Tefoir rtçw
et qu'on ne puisse le prouver aux autres.
Or, Dieu n'a point révélé que dans le tenps de la mmfdÊê loi,
après le premier établissement de l'ËgUse » il eonummîqnerait
encore en qudques cas extraordinaires sa puiamnoe penlorais
par one autre voie que par la succession.
Par conséquent, personne ne peut s'assurer de l'avoir reçoe
hors de cette succession légitime ; tous cenx qui se la sontattri-
imée sont notoirement usurpateurs ^.
Pour se omvaincre pleinement de cette vérité, il ne Cnil qne
se rappeler l'état dans lequel ont été les Réfomés» aekna les hj^
potlièses même des ministres ; car on ne peut ae les reptéaenter
autrement que comme des hérétiques convertis. Ib avaicBl été
adorateurs de l'hostie , ils avaient invoqué les saints et révéré
leurs reliques ; ils avaient ensuite cessé de pratiquer ce culte, ils
étaient donc devenus orthodoxe^ , selon eux, par changement de
sentiment « et c'est ce qu'on appelle des hérétiques convertis.
Tout hérétique perd, par l*hérésie dont il fsit profession, la
droit d'exercer légitimement les fonctions des ordres qu'il a re»
eus, quoiqu'il conserve le droit d'exercer valideoMnt ces ordres ;
il faut, pour recouvrer l'exercice légitime de son autorité, ae ré*
concilier à l'Église.
Mais à quelle Eglise les prétendus Réformés se sontrils réoon*
ciliés? ils ont tenu une conduite bien différente ; ils ont com«
mencé par assembler des Églises sans autorité , sans dépendance
de personne , sans se mettre en peine s'il y avait ou s'il n'y avait
pas une Église vériuble à laquelle ils fussent obligés de s'u-
nir *,
Les Réformateurs n'ont donc pu avoir qu'une miasion extraor-
dinaire, et c'est la prétention de Bèze, de Calvin, etc.
Mais une vocation extraordinaire a besoin d'être prouvée par
des miracles, et les Réformateurs n'en ont point lait; tous les
* Préjugés légitimes, p. 185, elc
* Foy«» les professions de foi des synodes de Gap, de la RocMle t
MM. de VaUenbourg, dans leur traité de la mission des Preleitans»
cnlboliqiiea qui ont Iraîié les controverses ont mis ces pointa
dans le plus grind jour *.
Li!S prétendus Rêrurméa onl donc érigé une Kglise sans auto-
rilc , el par co^SI^llcnt ils snni scbismatiques, puisqu'ils se sont
si'-par£s ili! la société qui était en possession du ministère, et de
laquelle ils n'ont point reçu de mission.
su-
■La Iraitilion eil , t
de m
u qae VÉcriiute , la Tèijle
e(o\.
Les théologiens appellent tradition nne doclrii
vive voix, ou consignée dans les écrits de ceux qai étaient char-
gés de la transmettre.
JéiUB-ChrisI a enseigné la doctrine de vive voix, et c^est ainsi
que les apures l'ont publiée. Jésus-Clirist ne leur ordonna point
d'écrire ce qu'il leur enseignait , mais d'aller le prêcher ani na-
tions et de l'enseigner. Ce ne fut que long-temps après l'établit-
semcnt du christianisme et pour des circonstances particuliéFes
que les apôtres écrivirent; tous n'écrivirent pas, el ceux qui onl
éci'ii n'ont pas écrit 1 toutes les Ëglises.
Les écrits des apùtres aux Eglises parltcutières ne contiennent
pas tout ce qu'ils auraient pu écrire , ni tout ce que Jésus-Christ
leur avait enseigné, ou que le Saint Esprit leur avait inspiré. On
ne peut donc douter que beaucoup d'tglises particulières n'aient
été pendant plusieurs année» sans aucun écrit des apâlres el sani
Écriture sainte ; il ; avait donc , dès l'institution du christ innisme,
un corps auquel Jésus-Christ avait confié le dépAt de sa doctriDB
el qu'il avait chargé de l'enseigner.
Ce corps l'avait reçue el la Iriinsmetlail par la voie de la tradi-
tion ; c'était en vertu de l'iostilution même de Jésus-Christ que
ce corp-< était chargé d'enseigner la doctrine qu'il avait reçue.
Ce corps a t-il perdu le droit d'enseigner, depuis que les énn-
gélisles et le» apAlres onl écrite Jésus-Christ a-t-il marqué cett«
époque pour la Gn du ministère apostolique? Les successeurs dei
apùtres uat-ils oublié la doctrine qu'on leur avait confiée T
Mais s'il n'j a plus de corps charge du dépût de la doctrine,
par quelle vme savons-nous donc qu'il n'jr a que quatre Evangiles,
que l'Erangile contient la doctrine de Jésus-Cbrist ? Comment
■Prétendus rtiforméfconreinci» Jcsclilioir-, 1, 3, (
516 BEF
a-t-on distlnpié les Trais Évangiles de cette foule de faux Ëfaa«
giles composés par les hérétiques des premiers sièdest Commeat
aurait-on pu connaître les altérations faites à rÉcriUirey s'il n*j
eût pas eu un corps subsistant et enseignant, qui avait reça et qoi
conserrait par tradition ce que Jésus-Christ et les apôtres avaient
enseigné ? Saint Paul ordonne aux Theasalonidens de demeurer
fermes et de conserver les traditions qu'ils ont iq[>pri8e8» soit par
ses paroles, soit par ses écrits *.
Ce même apôtre ordonne à Timotbée d'ériter les nonveautés
profanes des paroles et toute doctrine qui porte foussement
le nom de science : il veut qu'il se propose pour modèle les
saintes instructions qu'il a entendues de sa bouche toochant la
foi. Les Corinthiens ont mérité d'être loués parce qu'ils conser-
vaient les traditions et les règles qu'ils avaient reçues de lui *.
Saint Paul regarde donc comme un dépôt sacré et comme une
règle la doctrine qu'il a enseignée à Timotbée et aux Corin-
thiens : or, il n'a pas enseigné à Timotbée seulement par écrit,
mais encore de vive voii ; il y a donc une tradition ou une doc-
trine qui se transmet de vive voix , et que l'on doit conserver
comme la doctrine contenue dans l'Écriture sainte.
Ce fut par le moyen de la tradition que l'Église confondit les
hérétiques des premiers siècles, les Valentiniens, les Gnostiques,
les Marcionites, etc. '.
Tous les conciles ont combattu les erreurs par la tradition : ces
faits sont hors de doute; ils peuvent être ignorés; mais ils ne
peuvent être contestés par ceux qui ont quelque connaissance de
l'histoire ecclésiastique.
Par ce que nous venons de dire, il est clair que Daillé n'a com-
battu la doctrine de l'Église catholique sur la tradition qu'en
partant d'un faux état de question, puisqu'il suppose que l'on ne
connaît la tradition que par les ouvrages des Pères *,
Il en faut penser autant de tout ce que les Prolestans ont dît
pour prouver que la tradition est obscure et incertaine. La tradi-
< Sccunda ad Thessal., c. 3, ^. 15.
> Prima ad Cor., c. 11, i, 2.
* Iraen. advei^sùs Gnost., I. 3, c. 2.
* RÎTcr, Tractalus de PP. autoritate ; Goncva», 1660. Traîlé de rem-
ploi des Ptres pour le jugement des différends en la religioo, par Jean
Paillé ; Genève, 1732,
lion, prise comme l'insiruclion du corps visible chargé du d6p0l
de lii loi, ne peut jamais ^ire incerlaïae ; son încerlilude entraî-
nerait celle du cliriBlianisme.
S m. — U n'appartient qu'aux premier» faiteuri, ioecetmtrs itt
apâlra, de juçer dei eontrovertet de la foi , et non pat aux tim-
plei fidilei.
Jfsus-Cbrist t conBd ï ses apAtres h prédîcaiion de sa doctrine;
il leur a promis d'âtre avec eux jusqu'h la coosanimatioii des
siècles ; c'est i eux qu'il a dit : Enseignez les uations ; celui qui
TOUS écoule, m'écoute.
Il est clair que ces promesses regardent non- seulement les
apAtres, mais encore leurs successeurs, qui sont établis d^posU
laires de la doctrine de Jésus*Chrisl et cliargés de l'enseigner
jusqu'à la consommation des siËcles. C'est ainsi que toute l'élite
a entendu les promesses faites aui apùtres, et les Proiestans ont
été forcés de reconnaître dans cette promesse la perpétuité et
rindéreclibiliié de l'Ëglise '.
Par rétablissement même de l'élise et par la nature du mi-
nistère que Jésus-Cbrist confia aux apAtres et ii leurs successeurs,
il est clair qu'ils sont seuls juges de la doctrine. Le ministère de
l'inslruction n'est point difTêrent du ministère qui prononce sur
les différends de religion : comment auraient-ils l'autorité aulli-
ganle pour enseigner la doctrine de Jésus-Christ jusqu'ï la con-
sommation des siècles , s'ils n'avaient pas l'autorité de \a%tt et
s'ils pouvaient se tromper dans leurs jugemens? Les confessions
que nous avons citées dans une note supposent ce que nuus a
tons ici.
La doctrine de l'Ëglise romaine sur rinraillibililédesjugemens
des premiers pasteurs est la doctrine de toute l'antiquité : t'bia-
toire ecclé^astique entière sert de preuve il cette vérité , que li
1 ConfcsBio augustana, art 5 , 7 , 8 , £1. Confessio snionica. De Ei
desia.Synlagmacbnressionum Fïdd, qusindivenisregnisotnaUoniha»
fncrunt cdila:; Genève, 1354, în-4*, P< 68, 09, 70. Conressin Virlcm-
bcrg.. De ordinci ibid., p. 410. De Ecclesia, p. 133. Conressra boLe-
mica, arlBt ibid., p. lS7;arl. 9, p. 18S, ISD; on Ij, p. 191}. Cni>-
fcssio anceutineiisis, c. 13. De alGrio i-t dtnidt. minlslr., p.
Confcsi. Udtet., c. 17, p. SI, 35. Confcss. gallir., p. 3, art
Çnnfe»s. niiglicnnii, p. 90.
II. 4t
51$ BEF
ProCesUM om reconmie du» presqo* lomtes les cùwJmtkmÈ ipK
MM» avons citées. t
Ce n*est donc point an simple fidète à juger des controverses de
la foi.
Si le simple fidèle jugeait des controyerses de h foi, ce m
pearrait être que par la voie de rin^iraiion , <m per kt voie
d*examen.
Le premier moyen a été abandonné par les Protestans el n*a
pas iMsoin d*étre réfaté : c'est ce principe qui a produit les Âna-
iNiptisteSy les Qaakers, les Prophètes des Cévennes, etc.
La voie de Texamen, qnoiqne moins choquante, n'esl pas plus
sûre.
Les sociétés chrétiennes séparées de FÉglise . romaine préten*
dent que TÉcriture contient tont ce qu*il fant croire pour être
sauvé» et qu'elle est claire sur tons ces sujets ; d*où ils concluent
qu'elle suffit pour conserver le dépôt de la foi.
Mais, premièrement, je demande à qui il appartient de^ déter-
miner quels articles il est nécessaire de croire pour être sauvé, et
si ce n'ebt pas à ceux que Jésus-Christ a chargés d'annoncer sa
doctrine, à qui il a dit : Qui vous écoute , m'écoute ?
Je demande, en second lieu, si, lorsqu'il s'élève quelque con-
testation sur le sens de l'Écriture, le jugement de cette contesta-
tion n'appartient pas essentiellement au corps que Jésus-Christ a
chargé d'enseigner, et avec lequel il a promis d'être jusqu'à la
consommation des siècles?
Juger du sens de TÉcriture , c'est déterminer quelles idées
Jésus-Christ a attachées aux paroles qui expriment sa doctrine.
Ceux auxquels il a ordonné d'enseigner et avec lesquels il a pro-
mis d'être peuvent seuls déterminer infailliblement quelles idées
i! attachait à ces mois ; eux seuls sont donc juges infaillibles du
sens de l'Écriture.
Ainsi , sans examiner si l'Écriture est claire dans les choses
nécessaires au salut , je dis que, par la nature même de l'Église
et par l'institution de Jésus- Christ , les premiers pasteurs sont
juges du sens de l'Écriture el des controverses qui s'élèvent sur
ce sens.
Troisièmement, sans disputer sur la clarté de l'Écriture et
sans examiner si elle contient tout ce qu'il faut croire pour être
sauvé , je dis que , lorsque le corps des pasteurs déclare qu'un
dogme appartient à la foi p on doit le croire avec la même ccrti*
ir lu pone i
,T la réforma ■
se déchirent I
il les cbeb I
tilde avec laquelle on croit c[ue le nouveau Tcstameot
doctrine de iésus-Clirisl. Tout ce iju'un tlirail puui' attaquei' la
jugemenl de ce corps , par rapport au dogme , attaquerait égale-
ment h vériié et l'authenticité de l'Écriture, que dous connais-
euns pir le mojttu de ce corps , comuie nous l'avons fait voir ci-
dessus, SU. ,
Quùirièmemeni, la voie de l'examen, que l'on veut subsliluer
ï l'autorité de l'Église , csi dangereuse pour les liommes les plus
éclairé* , impraticable pour les simple» ; elle ne peut dooc ëtra
lu voie que Dieu a choisie pour garantir les chrétiens de l'erreur;
car Jésus-Christ est venu pour tous les bommes ; il veut que touâ
conoaiEseni la vérité et qu'ils soient sauvés.
Ciuquiéoieuient , attribuer aux simples lidèles le droit de juger
des controverses qui s'élèvent sur la Toi, c'est o\ ' '
toutes les erreurs, détruire l'unité de l'Église et
discipline.
Pour s'en couvaiocre, qu'on jette un coup d'ceil
!i sa naissance; on j voit une intinité de setles q
et qui enseignent les dogmes les plus absurdes ; o
de la réforme gémir de la licence de leurs proséljtes : écoutoidl
leurs plaintes.
Capiton, ministre de Siriisbourg, écrivait confîdeinment ï Fa-
rel qu'ils ont beaucoup uui aux Ames par la précipitation *vec la-
quelle on s'était séparé du pape. • La multitude , dit-il , a secont
> entièrement le joug ils ont bien la hardiesse de vous dire S
■ Je suis assez instruit de l'Évangile, je sais lire par moi-mèinai
■ je n'ai pas besuin de vous *. •
« Nos gens , dit Bèie , sont emportés par tout vent de doctrine,
1 tantôt d'un cfilé, lantûi d'un autre : peut-être qu'on pourrait
■ savoir quelle créance ils ont aujourd'hui sur la religion ; mail
» 00 ne saurait s'assurer de celle qu'ils auront demain. En quel
■ point de la religion ces Églises qui ont déclaré la guerre au
> pape sonl'elles d'accord ensemble ? Si vous prenei ta peine de
> parcourir tous les articles , depuis le premier jusqu'au dernier,
1 vous n'en trouveret aucun qui ne soit reconau par quelques-i
> comme de foi et rejeté par les autres comme impie ~
• Cap,, ep. ad Parei , iuter op. Calvin., p, i, (dit, de Genève. Pr^f
|agé* légitimes, p. 87.
' UiK, ep. prima. Préjugéi légit.. p. 7U.
530 &EF
f IV. » RépanH^ aux difficultés que Van fiU m finetur de lu
voie d^exurneun
« Ou les catholiques romains , disent les Protestons , suppo-
sent que rÉglise daus laquelle ils sont nés est in&illible , ei le
supposent sans examen ; ou ils oi\|^ examiné avec sain les fi»-
demens de Tautorité qu*ils attribuent à PÉgliae.
B On ne peut pas dire qu*ils aient attribué à TÉglise une au-
torité infaillible , telle qu^ils la lui attribuent , sans saToir pour-
quoi : autremmit , il faudrait approuver Tattadiemeni da
Mahoméun à TÂlcoran.
» 11 faut donc examiner : or, cet examen est aussi embarrassant
que la méthode des Protestans; si Ton en doute, il ne fiiutque
Yoir ce qui est nécessaire pour cet examen ; il faut remarquer
que ceux qui font cet examen doivent être considérés comme
dégagés de toutes les sociétés chrétiennes et exempts de toutes
sortes de préjugés ; car il ne leur faut supposer que les lumières
du bon sens.
» La première chose qu*ils doivent examiner dans cette pro-
position, l'Église est infaillible ^ qu'on prétend qu*ils reçoi-
vent comme véritable , c'est qu'ils doivent savoir ce que c'est
que cette Église en laquelle on dit que réside rinfailHbilité :
si Ton entend par-là tous les chrétiens qui forment les diflTérens
corps des Églises chrétiennes , en sorte que, lorsque ces chré-
tiens disent d'un commun accord qu'une chose est véritable ,
on se doive rendre à leur autorité? S'il sufBt que le plus grand
nombre déclare un sentiment véritable pour l'embrasser , et si
cela est , si un petit nombre de suffrages de plus ou de moins
sufBt pour autoriser ou pour déclarer fausse une opinion? S'il
ne faut consulter que les sentimens d'aujourd'hui, ou depuis
les apôtres , pour connaître la vérité de ce sentiment : qui sont
ceux en qui réside l'infaillibilité ; si un petit nombre d'évéques
assemblés et de la part des autres sont infaillibles ?
» En second lieu, il faut savoir en quoi consiste proprement
cette infaillibilité de l'Église : est-ce en ce qu'elle est toujours
inspirée ou en ce qu'elle ne nous dit que des choses sur les-
quelles elle ne peut se iromper? 11 faudra encore savoir si cette
infaillibilité s'étend à tout.
» En troisième lieu , il faut savoir d'où cette Église chrétieuie
tire son infaillibilité? On n*en peut pas croire les docteurs qui
IIEP
fi en donner d'autres preuves que la docl
121
:, parce qu'il s'agît de savoirs! cette doctrine e;
> e'esi ce qui esi en question. On ne peut pas dire non plus qu'il
> faut joindre rbcrîturc à l'Ëgliae , toutes les dilBcuUfB que l'on
■ Tient de faire n'en subsistent pas moins ; il faudrait comparer la
. créance de celle Église de siècle en siècle avec ce que dit l'ii-
> criture , et voir si ces deui principes s'accordent ; car on oe
> peut croire ici personne '. >
Je réponds que ce n'est ni par voie d'eiamen , ni sans raison ,
que le catholique croif l'Église infaillible, mais par voie d'iu-
struciion.
Le simple fidèle a connu pr le moyen de l'instruction la divi-
nité du cbrislianisme; il a appris que Jésus-Clirist a conSé ïse«
apOlres ei k leurs successeurs la prédication de sa doctrine ; il
sait par la voie de l'instruction que Jésus-Christ a promi
apùlreset â leurs successeurs d'être avec eux jusqu'à la consoin-'
niation des siècles ; il sait par conséquent que les successeurs des
ap&tres enseigneront jusqu'à la consommation des siècles la vé'
rite, et qne ce qu'ils enseigneront comme apparlcnaiiti h foi ap>
partieut en elTet à la foi. '
Pour âlresûr qu'il doit penser ainsi sur des dogmes déânis par
t'Kglise , le siinplu Udéle n'a pas besoin d'entrer dans la dii
aion de toutes les questions que propose M. le Clerc.
La solution de toutes ces questions est renfermée dans Tins
tion que rei;oit le simple fidèle : celte instruction est doncéquio J
Talenle à U voie d'eiamen , puisqu'elle met le simple fidèle en état T
de répoudre aux dilliculiés par lesquelles on prétend rendre sa
cruynncc douteuse.
Ce n'est point sur la parole des premiers pasieurs que le siin- I
pie lidéle se soumet !> leur autorité, c'est sur les raisons qu'ils I
donnent de leurdocirine, sur des preuves de fait dont tout Udèlo I
peut s'assurer, sur des faits â la portée de tout le monde, attesta J
par tous les monumens et aussi certains qne les premiers princi-
pes de la raison ; en un mol, sur les mêmes preuves qu'on em-t
pluyaii pour convaincre l'hérétique et l'inlidèle , l'ignorant et le I
savant; sur des faits dont l'Iiomnie qui n'est ni stupide n'
sensé, peut s'assurer comme le philosophe, et sur lesquels onj
peut avoir une certitude qui exclut toute crainte d'erreur; et, pour I
■ Défeiiae des scnUmcos des Ihùulusiuus de Hollande, p. as.
i besoin que
53 î RIC
meitre ïl. \e Clerc sani réplutue sur ci
de ma irailé sur l'incrédulité.
Aillai , rË|{lisc ne conduit poim les lidéles par le inovea «l'une
obéissance aveugle el d'ioslinct , mais par la voie de l'initructioit
et de la lumière ; c'est par cette voie qu'elle conduit lu fidèle j«f-
qu'ï l'uutoritii itibillible de l'Ëgtise. Le tidi^le élevé i cetu «é-
rilé n'a plus besoin d'eiaminer et de discuter; il cruil, un*
crainte de se lrDll^pe^, toal ce que lui propose un corps de pas-
teurs chargés par Jésus-Christ même d'enseigner, dont la mis&ioa
el l'autorité est attestée par dea Taits hors de toute dirGcullé.
L'Église catholique ruumii donc aux simples fidèles un motea
facile, sOr, infaillible, pour ne tomber dans aucune erreur con-
iraireï la foi ou A la pureté du culte. Peut on dire ta même chou
de la voie d'examen?
Les Protestans ont proposé sous mille laces différenles lea dif-
ficultés que nous venons d' examine!' : les principes généraux qna
nous venons d'établir peuvent résoudre toutes cet difficultés, lu
moins celles qui méritent quelque aiieniîoa. Noos avons d'escel-
less ouvrages de controverse qui sont entrés doDs ces détails : tds
sont l'Histoire des variations, 1. 15; h Conférence de M. Boisuet
avec M Ciauile; les Préjugés légitimes, c. U, tS, 16. 17, IS;
les-Préteudus Réformés convaincus de schisme, 1. 1; RéUeiions
sur les dilTérends de religion, par H. Pèlisson; les Chimères de
Jurieuparleméine, el ses fiépooses à M. Leiboitzi les deux Voies
opposées en matière de religion, par U. Papiu.
RfJOUIS , secte d'Auabaplistes qui riaieut toujours. Vage» les
dilTérenles sectes des AiiABinisTKS.
RlîMONTRANS. V«((« Armimems.
AETflOHIUS. Philaalre rapporte que Rethurius enseignait que
les hommes ue >e trompaient jamais et qu'ils avaient tous raisun ;
qu'aucun d'eux ne serait condamné pour ses seniimeos, parce
qu'ils avaient tous pensé ce qu'ils devaient penser '.
KICIIER ( Edmond } vit le juur ï Chuurce , dans le diocèse d«
Langres, en 1560.
Nous ne dirons rien ici de si vie, qui fut long-ieiupsas&es ora-
geuse, ni de la plupart de ses écrits. Le plus fami'ux de tous,
parce qu'il lit beaucoup de bruit dans le temps el qu'il a cwHé
de ifraiidsmaux, surtout eu France, où il a serô de base ï tt
Philaslr. Aug., Dchxrcs,
RIC
heareoM révolaiion dont ce beau royaume ressent encore les per-
nicietii effets , est le pelil Irailé qu'il iniiiula : De la puittanea
ecrlésiaitique el poliliqae. On dit queRlcherln coniposn pour l'in-
struclion pnrliculitre d'un premier président du parlement de Pa-
ris, qui le lui avait demandé, et pour s'uppos^r à une thèse ob
l'on soutenait rinfaillibilité du pape et sa supériorité au-dessat
du concile général. Richer prétendait donner dans ce traité les
niiiximes que suivait l'Ëglise de Frani^e; mais il s'en faut bien
qu'il s'en tint \i. Nous avons rapporté plus haut ' les principes
foi II] amen ta m de son sysiËmecI quelques-unes de ses propositions
répréliensibles. Nous avons prouvé aussi ((ne le P. Quesnel a res-
suscité ce même système dans son livre des Bépexionx moraUt,
et nous avons démontré que ce système est opposé 1 l'Kctiture
sainte, il la tradition, aui déGnilions de l'Kglîse, etc.
Richer donna en 1620 une déclaration de ses aenlimens, pro-
testant qu'il n'avait point prétendu attaquer la puissance légitime
du souverain pontire, ni s'écarter en rien de la foi catholique;
mais le pape n'ayant point été satisfait de cette déclaration, Ri-
cher en donna une seconde, etse rétracta mfme. Des auteurs pré-
tendent que ce dernier acte lui avait été extorqué, qu'il ne (\lt pli
sincère, et qu'en même temps que Richer l'accordait par l'ordre
du ministre, il écrivait dans son testament qu'il persistait dans lei
sentimens qu'il avait énoncés dans son traité. Quand tout cela se-
rait vrai, il ne ï' ensuivrait rien autre chose, si ce n'est que l'I^
glise 3 eu dans la personne de ce docteur un ennemi opiniâtre
comme tant d'autres.
Consultez, dans ce volume, les notes qui se trouvent au bas dei
pages 376 et 3T7. U faut lire aussi tout ce que nous avons dit du
troisième principe capitslde Quesnel, depuisla page4t)7 jusqu'à la
page 40S du même volume.
< Quoique nous ajonsdonné en français ces principes fondamenlauii ■
nous croyons devoir In rapporter Ici dans la langue dont s'est serti .
l'auteur, et d'après Tourne!; (Traité I)e ordine, p. 7), i>our I:
faction de nos lecteurs: Omniscommunitasicusocictai perreela, clian
cl vïIjk , jus habet ut libi leges impoual, se ipsamgubemet; «luodqi ~
deni jus in prima euâ orlftiuc ad ipsammct socictntem pcrlinct, el ,
quidem modo magis proprlo, aingulari cl immcdïuto, quïm ad ulium j
quemlibet privalum : cùm in ipso jure divlno ac naturali ruiidamenlum
liabcal. advenu* quod nec aooorum Iraclu, nec Incoruni privilegtîi,
nec diguitate personanmi pnncTibi uaquon poiest.
524 SAB
ROSGEUN, dere de Compiègne, enseigoait là philosophie su
la fin du onzième siècle (1092). Il avança que les trois personnes
divines étaient trois choses comme trois anges, parce qa*aatre-
ment on pourrait dire que le Père et le Saint-Esprit se sont in-
carnés ; le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne faisaient eeptmàut
qu*on Dieu, parce qu'ils avaient le même poaYoir et la BuésM vo-
lonté; mais il croyait qu*on pourrait les appeler trois Dieu, si
Tnsage n'était pas contraire à cette manière de s'exprimer.
C'est l'erreur des Trithéistes ; elle fut condamnée dans on con-
cile tenu à Compiègne en 1092.
Roscelin abjura son erreur ; mais peu de temps après il dit
qu'il n'avait abjuré son opinion que parce qu'il arait appréhendé
d'être assommé par le peuple ignorant.
Saint Anselme le réfuta dans un traité intitulé : De^lm fêi^ de le
trinttéet de VineamatUm» Toute la réfutation de saint Anselme
porte sur ce principe si simple et si vrai : c'est qa'ii ne faut pas
raisonner contre ce que la foi nous enseigne, contre ce que l'É-
glise croit, et que l'on ne doit pas rejeter ce que Tonne peut pas
comprendre ; mais qu'il faut avouer qu'il y a plusieurs chc«es
qui sont au-dessus de notre inlelligence *•
RUNGAIRES, secte qui avait adopté les erreurs des Patarins
et qui soutenait que Ton ne commettait point de péché mortel
par la partie inférieure du corps : sur ce principe, ils s'abandon-
naient à toutes sortes de dérèglemens '•
RUPITÂNS, nom donné aux Donatistes, parce que, pour répan-
dre leur doctrine, ils traversaient les rochers qui s'expriment en
latin par rupes, «
RL'SSIENS ou Russes. Voyex Moscovites.
RUSTAUX, nom donné à une secte d'Anabaptistes, formée de
gens rustiques et de bandits sortis de la campagne, qui, sous pré-
texte de religion, exciuient la sédition dans les villes.
SÂBELLIUS, embrassa l'erreur de Praxée et de Noet ; il ne
mettait point d'autre différence entreles personnes de la Trinité que
A Anselm., I. 2, ep. d5. Yvo Camotensis, ep. 27. Abadard, epi 21,
ad episcop. Paris, D'Argentré, GoUect Jud. t. 3, p. i« Natal. Alex.»
SKC il et 12.
s Dup., 13* si^e, p. iOO.
SAB
celle qui esL entre les dill'éi'eiites opùrutiona d'uno
l.orsiju'ilconsidérail Dieu comme raisantdestlécrets Jans son cnn-
aeilélsmelelrésolvaiil d'iippelcr les hommes ausalut, il Icregar-
duit comme Père ; lorsque ce même Dieu Jescendai
daus le sein de la Vierge, qu'il soutTrait ei mourait s
l'appela il Fils; enSn, lorsqu'il considérait Dieucommedéployani
Eon efficace dans l'âme des pécheurs. Il l'appelait Sniot-Esprit '.
Selon celle bjpoihëse, il n'y avait aucune distinction
persDones divines : les titres de PËre, de Fils et de Sainl-Esprit
n'étaient que des dénomiDaLions empruntées des actions diffé-
rentes que Dieu araii produites pour le salut des liommes.
Sabellius ne faisait que renouveler l'hérL^sie de Praaée et de
Noet et s'appuyait sur les mêmes raisons : vegei leurs articles. Il
forma an parti qui subsista quelque temps; saint Ëpipliane dit
que les Sabelliens étaient répandus en assez grand nombre dans la
Mésopotamie et autour de Rome. Le concile de Constant iaople,
en rejetant leur baptême, fait voir qu'ils avaient un corps da
communion en 38i. Saint Augustin a cru que celte secte éluil
toul-i-fait anéantie au commencement du cinquième siècle *.
L'erreur de Sabellius a été renouvelée par Pliotin dans le qua<
Iriéme siècle et par lesAniitrinitaires; nous truitous dans ce der-
nier article des principes du Sabellianïsmc.
Denis d'Alexandrie combattit avec beaucoup de zèle et de succès
l'erreur deSabellius; maison trouva que, pourmettrc une dilTérenea
plus sensible entre les personnes de la Trinité, il mettait de U
difTérence entre la nature du Père et du Fils ; car il voulait faire
entendre la distinction du Père et du Fils par la distinction qui
est entre la vigne et leri);neron, entre le vaisseau eilecharpentier.
Aussitôt que Denis d'Aleiandrie fut informé des conséquences
qu'on tirait de ses comparaisons, il s'eipliqua sur la divinité
de Jésus-Christ et déclara qu'il était de même nature que son
Père : il soutint qu'il n'avait jamais dit qu'il y eùL eu un temps uù
Dieu n'était pas Père: que le Fils avait rc;u l'être du Père; mais,
comme il est impossible qu'il n'; ait pas une splendeur lorsqu'il
y a de la lumière, il est impossible que le Fils qui est la splen-
deur du PËre ne soit pas éternel ; enGn Denis d'Alexandrie se plaï-
■Tliéolor., Ilrret., Fab.,
H»r., G3.
' AugusI-i lie lizr., c, 4.
3,C
. 7. Eiiiph-,
âas SAB
giiîl de ce que BCâenncniU a'iiTaienl pas cooBulté un grand nom-
Lie de ses leiires où lls'éuit eiidiquénïlteoieni, au lieu qu'iUne
sVuieDi atiucliés qu'ï celles uii il rèfuUii SabellÎQS ei qn'ils
avaieot ironquéeg eu divers endroits.
Nous n'examiacroos point ici si Denis il'AleundrJe aiait donmi
lieu aax accusations formées coolre lui ; Dons ferons seulentent
quelques remarqnes sur le bruit qui s'éleia S celte occasioii.
1° Sabellius niait que le Père el le Fils fussent dtstiognét, M
les cailioliquM souieuaieni contre lui que le P6re pl le Fik
étaient de« êtres distingués : les catholiques, par la nature de li
question, étaient donc partes k admettre entre les personnes di-
tinea h plus grande distinction possible; puis donc que les com-
paraisons de Denis d'Alexandrie qui, prises li la lettre, sapposeU
que Jésus-Christ est d'une nature différente de celle du Père, ont
été regardées comme des erreurs, parée qu'elles étaient contraires
ù la coDSubslaDiialité du Verbe, il fallait que ce dogme fùl dod-
seulement enseigné distinctement dans i'bgiise, mais encore qu'il
fDlregardé comme un dogme fondamenlal de la r<rligiun chrétienne.
S* 11 est clair que les catholiques soutenaient que le Père, le
, n'étaient ni des noms dilTéreus donnés)
e des dilTérens effets qu'elle produisait, ni
trois substances, ni Iroiséiresd'une nature dilTérentc. Lacrofane*
de l'Ëglise sur la Trinité était donc alors telle qu'elle est au-
jourd'hui, et c'est dans Jurîeu une ignorance grossière d'accuser
l'Eglise catholique d'avoir varié sur ce dogme.
3 L'exemple de Denis d'Alexandrie fait voir qu'il ne Tant pas
juger qu'un Père n'a pas cru la consubslantiabililé du Terbe,
parce qu'on Iroutc dans ce Père des comparaisons qui , ëtaoi
pressées et prises à la rigueur , conduisent â des conséqueooea
opposées It ce dogme.
Sandius, qui veut trouver l 'Aria nisme dans tous les Pères qiû
oat précédé le concile de Nicée, prétend que Uenis d'Alexandrîa
n'a jamais (ait l'apologie de sa doctrine contre SabeUiuB , ni
donné les explications dans lesquelles il reconnaît la consubsUA-
tiaUté du Verbe, parce qii'Eusèbe ni saint Jérôme n'en oU
jamais parlé, et que Denis d'Alexandrie était mort avani qu»
Denis, auquel elle est iidressèe , fût élevé sur le siège de Rome *.
Mais Sandius se trompe, 1" quand il s'appaie sur le sileBC«<^t
' Sandius, De scripu Ecelcs., p. i2. Ncucieus, tlisU, I. i, p^M
SA[ 527
sèbeft ileBaintJérAiiie;nrruD etl'aulre parlent des quatre lirres
qaeDeiii«iicompoRëssurleSabel1iiinismi?,etqu*iidilsn'enauraieni
paspiHé.l'abrégéque saint ÂllinnaG('fiiidesesré|>oniiessu(!ii pour
convaincre loul homme raisonnable qu'il y avait UBeapoiogie',
S' Il esicerlaiij que DenisélaitéTSquetle Rume lorsque Denis
d'Alexandrie Et son apologie ; l'erreur de Sandius vient de ce
qu'il a suivi Eusèbe, qui donne onze ans à l'épiscopal de Xisie,
prédôcesseur de Denis , au lieu que Xisle u'a élé que dein ans
évi^ue de Home , el que par conséquent Denis a monté sur le
siège de Rome neuf ans plutûl que ne le dit Eusèbe.
D'ailleurs, Eusèbe lui-même assure que Denis d'Aleiandrie
déilis ses livres sur le Sabellianisme i Denis, éféque de Rome *.
SABDATAIRES, seule d'Anaba plis tes, qui, comme les Juift,
observaient le Sabbat.
SA(:C0I>]|0RE:S, c'est-^dire Ponraiacs , brancbe de Tatia.
nisles qui a'babillaieut d'un sac pour marquer mieux leur renon-
ccmeal aux biens de ce monde. ( Coiifi: Theod., I. 7. 0 el 11 ;
liûiil., ep. ad Amiihiloelium, can. il.)
SACRAUKNTAIHËS: c'est ainsi qu'on appela tes CalTJDisles
cl les Zuingliens qui niaient lu présence réelle.
SAGARKL. Voyet Seùjlm.i.
SAliNT-SlilOiN (Claude-Henri, comte de), né h Paria en ITGO,
eui pour proresseur l'encyclopédisie d'Alembert. Mililaîre, agio-
leur, publiciste, sa tiefull'url orageuse etpresquemisérablever* i
sa lin. Hest niorlli Pans le 19 mai 182S. Son gj-siëmc philoso>
pliiqoe avait été exposé par lui dès 1807, dans un ouvrage inti-
tulé : ItUrodaclion ûax travaux icieniipquet du dii-neuviéme lii-
ett, et pins tard dans quelques pamphlets qui appelèrent les pour-
Mlilcs du ministère public.
Nous allons essayer de donner une idée de ses doctrines dans
l'article suivant. Quant i l'histoire de la secle qui a pris son nom,
elle est renfermée loul entière dans les quairc années qui ont
suivi la révolution de juillet, de 1830 ï 1834, el si dans ce court
intervalle ellea Tait quelque bruit el a paru devoir vivre el sedéve-
lopper, elle est aujourd'hui si complètement oubliée, qu'il esi dou-
teux que ses anciens ad ep le s, même les plus fervens, se rappellent
' Eusi''be, Hisl. eeclé!..
f, 83. Allinu, De sfntnl.,
Mbld.
!fi, nieron. Deicripl. Eccica.,
1^28 SAl
de Int noir appartenu, sans la honte seetèle qu^ils en Aproofeit.
SÂINT-SIMONISME. Deeax figures étranges et horribles et
notre première réYolation, Marat et Babeuf, se présentent d*dle*-
mémes à l^esprit , lorsqu*à la suite d^un bouleversement sodal,
00 entend parler d'inégalité, de loi agraire et de ktmhemr «saunai.
Sous quelque forme que ces vieilles idées se présoitent, qodqae
douceur qu^affectent ceux qui les prêchent» les hommes de soi»
que Tesprit de parti n^aveugle pas» voient très bien où on pié-
tend les mener, et ils détournent la tète avec dégoût.
i/inégalité entre les divers membres d*une société fait à la ibis
la force des individus et de Tétre collectif appelé nation. Celte
inégalité produit Tambition , les passions, les vices, les vertes,
en un mot Taction sociale. G*est une loi que la Providence, qui
fait bien tout ce qu*elle fait , applique à tons les êtres sortis de
ses mains dans Tordre physique et moraU Youloir Tabolir par h
prédication amène toujours, non point à la détruire, ce qui est
impossible, mais à en changer momentanément les conditions, au
prix des souffrances et du sang du plus grand nombre. GeUe
prélendue réparation d*une injustice est une injustice plos
grande, voilà tout. Quand donc les hommes cesseront-ils de se
révolter contre le gouvernement de la Providence, et de se mettre
sans façon à la place de Dieu ?
Un an après la catastrophe de juillet , dont la France n*a retiré
d*aulre avantage que de payer plus cher un gouvernement moins
bon que celui qu*elle avait auparavant , il parut se former, princi-
palement dans les officines du journalisme parisien , une secte
politico-religieuse dont les adeptes prirent des noms et des vè-
temens bizarres propres à attirer Tatteotion d'un public oisif, tou-
jours avide de nouveautés. J*ai dit, i7 parti/ te former ^ car réelle-
ment cette secte prélendue n'était rien qu'un fantôme qui devait
s'évanouir et s'est en effet évanoui au premier soufile.
Ceux qui la formèrent avaient pour but de se faire remarquer
et d'attirer l'attention publique sur leurs talens dans toutes les
bronches de l'économie politique , qu'ils estimaient modestement
h très-haut prix. Ils } réussireut d'abord; mais, semblable à ces
parades jouées en plein vent, dont on est las bien avant d'en avoir
vu la fin, le Saint-Sinionisme se hâta de quitter son masque et tout
fut dit. Les habiles de la secte eurent les profits de la représen-
tation, et les sols furent ruinés. La farce se termina, comme cela
devait être , devant la police correctionnelle. On en pensera ce
SAI
qu'on voudra ; mais , en pareil cas , j'aimerais m
Lre des sots que des liablles.
On scnl bien qu'après un sembUblr hisiarique je ne puis pren-
dre au si^ricuxles docirines religieuses delà secte, les seules qui
reoirent dans le cadre de cet ouvrage. Il Taut bien dire cependant
ce que ces messieurs pensaient du chtistianîstne et ce qu'ils pr£-
lendnient y substituer.
Seinn eux , le christianisme a fait son temps. Bnn pour les
temps qui nous ont précédés , excellent même , il ne vaut rien
pour le nûtre. K( pourquoi cela? C'est que te christianisme est
une religion toute spirituelle dont le but était la mortification de
la chair, et que s'il a été bon pour nos pères de sacrifier la chair
h l'espril, il nous sem plus utile et surtout plus commode et plus
douï de silisrairo k la Tois l'esprit ei la cbair. L'ne^ouvelle reli-
gion est donc aujourd'hui nécessain
la chair et nous lasse jouir des bien:
pariicnnent & la nature humaine ausi
les biens de l'ordre spirilael. Uais ci
vie purement animale réhabilitero
1ère, et personne ne niera qu'il n
eflel, le cliristiauisme parle de réfaabilili
e les mojens dans la péni
une religion qui rékobilïle
de l'ordre sensible qui np-
bien et an même titre que
les jouissances de la
es la chair ! Lï est le m;s-
fort obscur. Lorsque, en
m pour l'homme, il
ei les privation
but dans la résurrection en un corps glorieux, immortel, impas-
sible ; cela est beau , noble et conséquent. Le Saint-Simoaisme est
la contre-partie exacte de ces grandes idées. La religion qu'il
révèle au monde n'a rien de surnaturel, disent ses adeptes ; tous
les devoirs qu'elle impose , tous les biens qu'elle promet appar-
tiennent ï la vie terrestre. Pourquoi jeter les jeux an deli? Nous
ne savons et ne pouvons savoir ce qni y est. D'ailleurs , ajoutent-
ils , ; L'iU-il un autre monde , les restrictions que le chrislianisme
met au droit naturel de jouir sont arbitraires , injuste», Ijranni-
ques, et un ne saurait être compromis en refusant de s'y astrein-
dre. Telle est la théologie sainl-simonienne.
Comment ces idées antisociales ont-cties pu avoir, je ne dirai
pas un jour, mais une heure de succès? Par la Hutlerie, cette
ilalterie le plus détestable des crimes dont les sophistes se ren-
dent coupables en persuadant ou tâchant de persuader les classes
pauvres el malheureuses de la société qu'ils veulent leur bon-
heur et qu'ils ont dans les mains de quoi le faire. Laissez-vuus
conduire par nous , disent>ib, et toulei les institutions sociales
11. 4i
680 SAT
auront pour bal ramélioration morale , sociale et pb^iiqne de h
classe malheureuse et tyrannisée à laquelle tous ap{>arteiiei.Aidei-
Dous à monter, et Jloutes les distinctions , tous les prÎTiléges de
naissance seront abolis , et alors vient la phrase sacramentelle :
A chacun selon sa capacité ; à chaque capacité selon ses œaTrcs.
Ce langage est beau sans doute, ou le parait da moins; mais Yoyei
le dessous des cartes : aussitôt que les sophistes régnent , ils
prennent les titres pour eux, Tor, l'argent elles places, et lainent
la misère au peuple. Du reste, c'est une sorte d^applicaiion de leur
système ; ils ont eu la capacité de tromper, et c'est mie capacitétoot
comme une autre. 11 y a bientôt quinze ans qu'on nous le fait voir.
Si quelque lecteur trouvait que je n'ai pas parlé assez sérieuse-
ment dans un sujet qui touche à des intérêts si graves , je dints
pour ma défense que j'ai fait grâce encore aux Saint-Sîmoniens en
ne disant rien de leur fameuse femme libre.
SANGUINAIRES, secle d'Anabaptistes qui ne cherchaient qu'à
répandre le sang de ceux qui ne pensaient pas comme eux.
SATURNIN était d'Antioche et disciple de Ménandre dont il
adopta les sentimens et dont il paraît avoir fait un système des-
tiné à expliquer la production du monde, celle de l'homme, et les
grands évènemens qui s'étaient passés sur la terre et que conte-
naient les livres de Moïse. C'étaient là les objets qu'on se propo-
sait alors d'expliquer, et ce sont en effet les plus intéressans pour
la curiosité humaine ^.
Pour expliquer ces faits, Saturnin supposait, comme Ménandre,
un être inconnu aux hommes; cet être avait fait les anges, les ar-
changes elles autres natures spirituelles et célestes.
Sept de ces anges s'étaient soustraits à la puissance du Père de
toutes choses, avaient créé le monde et tout ce qu'il contient sans
que Dieu le Père en eût aucune connaissance.
Dieu descendit pour voir leur ouvrage et parut sous une forme
visible; les anges voulurent la saisir, mais elle s'évanouit ; alors
ils tinrent conseil et dirent : Faisons des êtres sur le modèle de la
figure de Dieu; ils façonnèrent un corps semblable à l'image sous
laquelle la Divinité s'était offerte à eux.
Mais l'homme façonné par les anges ne pouvait que ramper sur
la terre comme un ver. Dieu fut touché de compassion pour son
image et envoya une étincelle de vie qui l'anima ; l'homme alors
* Iren., 1« i» c. 30, n« 5 ; 1« 3, c 17» iO. MassuettDîf, in Iren«» Ct 48.
SAT S31
se drCissa sur ses pieds, inanlia, parla, raisonna, ci les anges Ta-
cannèrent d'autres Louidies. Il est bien chir que, dur
ment, l'Ame d^peada il des organes duns lesquels elle i
et que ses ronclions, ses qualités, Eesviees et ses vertus, étaient
des suites de la conforoialiuii des ui^anes auxquels elle ëlsit unie.
Par ce mojen, Sulurnin expliquait lieureusement, k ue qu'il
crojait, les désordres pliysiques et moraux, sans préjudice do la
toute- puissance du Dieu supri^me.
Ces anges créateurs du inonde en avaient partagé l'empire et y
avaient établi aes lois,
Un des sept anges créateurs avait déclaré b guerre aux six an-
tres, et c'était le démon ou Satan qui avait aussi donné des lois et
Tait paraître des prophètes.
Pour délivrer de la tyrannie des anges el des démons les âmes
humaines, l'Être suprême avait envoyé son Fils dont la puissance
devait détruire l'empire du Dieu des Juifs et sauver les hommes.
Ce Fils n'avait point été soumis ï l'empire des anges et n'avait
point été enchaîné dans des organes matériels : il n'avait eu un
{.-«rps qu'en apparence, n'était né, n'avait soulTert el n'était mort
qu'eu apparence. Saturnin crojaii par ce moyen couper la dilH-
cullé qu'on tiraitdessouOVances de Je au s -Christ contre sa divinité.
Dans ces principes, l'homme était un être iorortuné, l'esclav»
des anges, livré par eux au crime et plongé dans le malheur. La
vie était donc un présent funeste, et le plaisir qui portait les hom-
mes i faire natire un autre homme était un plaisir barbare qui»
l'on devait s'interdire.
Cette loi de continence était un des points fondamentaux de
riiérésie de Saturnin ; pour l'observer plus sûrement, ses disciples
s'abstenaient de manger de la viande et de tout ce qui pouvait
porter k l'amour des femmes.
Saturnin eut des écoles et des disciples en Syrie ; la mort était,
selon eux, le retour de TSme a Dieu d'où elle était venue '.
Abulpharage, dans son Disiuire des dynasties, parle de Satur-
nin qu'il nomme Saturin : il lui attribue d'avoir dit que c'est le
diabk- qui a lait dans l'homme et dans les femmes les différences
des sexes, et que i^'esl pour cela que les hommes regardent la nu-
dité comme une chose honteuse.
•Ira;n.,l, 1, c. Sï. Terl,, Deantmi, c, 23. Pliilasl., De Lier, c. 31.
Epiph., Has. ]3.Théad,,l. 1, c, S. Aug., Oebxr., c 3.
5$3 SEC
Ménindre reconnaUisait un Être étttmd et infiiûp et
à des paîssances invisibles Tempire da moode : il aviit préleodH
être l'envoyé de ces puissances et donner rimmortaUté pir le
moyen d*une espèce de baptême magique.
Saturnin, son disciplet conserva le fond de son sjslèBe et sV-
força de le condlier avec la religion chrétienne et reconnot que
Jésus-Christ était le Fils de Dieu, qu*il avtit été envoyé par soa
Père pour le salut des hommes ; nuùs il niait qa*il eût pris «b
corps et qu*il eût souffert.
Je vois dans le changement que Saturnin fait an s^itème de Mé-
nindre:
1* Qu*il était attaché à ce système, et qu*il Ta eonserwé antast
qu*il lui a été possible ; que par conséquent il n*j a fidt que les
changemens qu*il ne pouvait s*empécher de faire, et qii*ainsi il n*a
pu s*empécher de reconnaître que Jésus-Christ était Fila de Dieu
et envoyé pafson Père pour le salut des hommes.
2» Je vois que Saturnin, pour concilier avec la divinité de Jé-
sufr^brist Tétatl de souffrance dans lequel il était sur la terre,'
ne lui a attribué qu*un corps fantastique; que par conséquent Sa-
turnin avait de la répugnance à reconnaître que Jésos-Chrbt était
en effet Fils de Dieu, et qu'il n'en a fait un dogme de son système
que parce qu'il lui était impossible de le nier.
3* Les preuves que les chrétiens donnaient de la divinité de Jé-
sus-Christ étaient des faits que Saturnin était en état de vérifier,
puisqu'il était dans le temps et sur les lieux où ces faits 8*étaient
passés et qu'il est certain que Saturnin a examiné ces faits ; on
peut sur cela s'en rapporter à l'amour-propre. Un homme eotété
d'un système, comme on voit que Saturnin l'était, n*admet d*é«
tranger à son système que ce qu*il ne peut nier sans une absur-
dité manifeste.
Nous avons donc dans Saturnin un témoin irréprochable de la
vérité des faite qui prouvent la divinité de Jésus-Christ, et le re-
proche qu'on fait ordinairement aux défenseurs de la religion de
n*apporter pour témoins que des chrétiens n*a pas lien contre Sa*
turnin.
SECUNDIN, philosophe d'Afrique, qui parut vers Tan 405 et
défendit les erreurs de Manès.
SECUNDUS, disciple de Yalentin, changea quelque chose dans
le nombre et dans le système de la génération des Éons ; mais les
changemens dans ces sortes de systèmes sont si arbitraires et tleo-
s si Trivolcb i[>i'il
SKf.
neui 11 des conjeclures si minces et ï des r;
est inutile de suivre ceadùuils <.
SEtiAKEL DU Sagahel (George) lilaii un hoiiime du bas peupli>,
Kina cantuiasaDces el sans lettres, qui, n'aj-jut pu être reçu duris
l'ordre de saint Fninïola.se lit Taire un iiabit semblable à celuiduQt
ou babille les ap6ires dans les tableaux; il vendit une petite maison
qui Taisait toute u Tortune , en distribua l'argent , non aux pau*
vres , mais i. une troupe de bandits et de rainéans.
11 se proposa de vivre comme saint François et d'imiter J^sus-
Cbrisl.
Pour porterencore plus luin que saint François la ressemblance
avec JùsuS'Cbrist, il se fit circoncire, se lit emmaillolter. Tut mil
dans un berceau el voulut être allaité par une femme.
La canaille s'attroupa autour de ce ctierdlgne d'elle, et forma
une société d'hommes qui prirent le nom d'Apostoliques.
Cétaientdes m en di ans vagabonds qui priHendaienlque tout était I
commun , et même les femmes : ils disaient que Dicn le l'Ère avait |
gouverné le monde avec sévérité et justice ; que la grii^e
sagesse avaient caractérisé le règne de J ésus- Christ ; mais que |
le règne de Jésua-Cbrïst était passé et qu'il avait été suivi de ce-
lui du Saint-Esprit , qui est un règne d'amour et de charité ; sum ]
ce rè^e, la charité est la seule loi , maïs une loi qui oblige iu> I
dispensablement et qui n'admet point d'exception
Ainsi , selon Segarel , on ne pouvait refuser rien de ce qu'oq I
demandait par charité : à ce seul mot , les sectateurs de Scgare[ J
donnaient tout ce qu'ils avaient , même lears femmes.
Segarel fît beaucoup de disciples ; l'inquisilion le Ut arrêter^ j
el il fut brûlé ; mais sa secte ne finît pas avec lui ; Dulcin , s
disciple, se mit t la léte des Apostoliques. Voyei cet article*.
SËLEUCUS, philosophe de Galalie, qui adopta les erret
d'IIermoRènc. Il croyait que la maliére était éternelle et ÎDcréc« 1
comme Dieu , el que les anges formaient l'âme avec du feu cl de |
l'esprit; c'est le fond du système de Pylliagore : nous avons rér
' ' deux erreurs k l'article llEiiioctNE el ï l'arlicle UatA- ]
^> Epijih.. Hirr, 33, Philnslr., Hœr. ÙO.
« Natal. Alei. insitc t3, U. D'Ai-BCUtré, Collccl. Jud.,
Jtalnald, ad an. 1308, n. Q.
> l'hilasir., Uzr. S4-
5S4 SEM
SEMI-ARIENS ; c^est le nom que Ton doimt à eeax qui dtâûeiC
que Jésus-Christ n*éuit pas consubsUntid, mâb qui reemnai»-
nient quMl était d*une nature semblable.
SEMI-PÉLAGIÂNISM E ; le mot seul fait entaidre qœ e*étail
on adoucissement du Pélagianisme ; Toici rorigine de cette er>
reor :
Les Pélagiens, forcés successif ement de reconnaître le pédé
originel et la nécessité d'une grâce intérieure, mais voalant ton-
jours faire dépendre de Thomme son salut et sâ Tertn » afaîent
prétendu que cette grâce devait se donner aux mérites.
Saint Augustin avait combattu cette dernière ressource dans fct
ouvrages contre les Pélagiens ; mais cependant le concile d'Afri-
que n'avait prononcé rien expressément sur cet objet» soit que
saint Augustin , qui fut Tâme de ce concile , trouvât que b ma-
tière n'était pas encore édaircie et craignit de fiiire aaltre de
nouvelles difficultés capables de retarder la condamnttioii des Pé-
lagiens et de leur fournir un nouvel incident sur lequel il y au-
rait encore à disputer et qui est en eflTet enveloppé de ténèbres;
soit enÛo que les Pélagiens eux-mêmes aient reconnu une grâce
indépendante de mis mérites et n'aient différé sur ce point des
catholiques qu'en ce qu'ils ont cru que cette grâce consistait dans
les dons naturels.
Cette espèce d'omission, quelle qu'en soit la cause, put faire
croire que l'Église B*avait défini contre les Pélagiens que le péché
originel , l'impossibilité de vivre sans péché et la nécessité d'une
grâce intérieure ; et qu'elle avait laissé indécise la question de la
gratuité de la grâce, comme elle avait laissé indécises différentes
questions qui s'étaient élevées entre les Pélagiens et les catho-
liques dans le cours de leurs disputes : le dogme de la gratuité
de la grâce put donc ne paraître qu'une question probléma-
Uque.
Saint Augustin avait cependant traité cette question dans ses
livres sur la grâce et sur le libre arbitre, dans son livre sur U
corruption et sur la grâce , et dans sa lettre à Sixte.
Il avait prouvé la gratuité de la grâce par les passages de l'E-
criture qui disent que nous n'avons rien que nous n'ayons reçu,
que ce n'est pas nous qui discernons : l'exemple de Jaceb et
d'Ësafi servait do base à son sentiment.
Pour répondre aux difficultés des Pélagiens contre ces prin.
cipes , et pour justifier la justice de Dieu , il avait eu recours à la
SEM 53fi
companïson du potier, qui fait de la même nasse des Tûses d'hon-
neur et des vases d'ignominie.
EnGn, il ataït prétendu que si l'homme éiaii l'arbitre de son
^alut , on poru-iil des atteintes au dogme de la loute-puissance de
Dieu sur le cœur de l'homme. Dieu ayant fait tout ce qu'il a
voulu dans le cîet et sur la terre, comment faire dépendre de
l'homme son salut? Il fullall donc reconnaître une prédestination
indépendante de l'homme , sans que celui qui n'était pat prédea-
liné cùl droit de se plaindre. Dieu, selon saint Augualln , en
couronnant nos mérites couronne ses dons : ceux qui seront
damnés le seront ou pour le péché originel , ou pour leurs propres
S'ils sont des vases de perdition, ils ne doivent pas se plaindre,
parce qu'ils sont tirés de la n:iasse déperdition, comme ceux qui,
tirés de celte même masse, deviennent des vases de miséricorde,
ne doivent point s'enorgueillir.
Hais pourquoi Dieu délivre-t-il l'un plul&t que l'antre?
Saint Augustin répond i cette difficulté , que c'est un mjsière,
et qu'il n'; a point d'injustice en Dieu ; que ses jugemens sont'
ïmpénétrubles , mais pleins de sagesse et d'équité.
tt par grïce qu'il délivre,
i pas, et c'est par jasiico
En effet , disait saint Augustin
il ne doit rien ï ceux qu'il ne <
qu'ils sont condamnés.
Que ceui qui prétendent que Dieu, par ce choîi , est aeeep^ |
fmr de personnes , nous disent quel est le mérite de l'a
d'un inSdéle ou d'un méchant qui est baptisé, tandis que le Bbl
d'un père homme de bien et d'une mère vertueuse périt avant
qu'on puisse lui administrer te baptême. Il faut donc s'écrier
atcc l'apAire : 0 profondeur des jugemens de Dieu , etc.
Que diront les défenseurs du mérite de l'homme , i l'eiempld
de Jacob et d'Ësiii , que Dieu avait choisis avant qu'ils eussent
fait rien de bien et de mal? diront-ils que c'est le bien ou le mal
que Dieu avait prévu qu'ils fcmieni? *
Hais alors saint Paul avait tort de dire , sur cet exemple même,
que la dilTérence de leur sort n'est l'ouvrage ni de leurs eObus,
ni de Ipur volonté, mais de la miséricorde de Dieu *.
il éiahlil les mentes principes dans sa lettre k Vital : il paraît
d'abord j anéantir le libre arbitre; il le compare tu libre arbitre dei i
' EpisL ad SliU
586 SEM
démoDS, il enseigne qu*il ne faut pas croire que DieuTeuiUe
ver tous les hommes, et donne différentes explications pour fiire
Toir que cette volonté de Dieu n'embrasse pas tous les hommes.
li enseigne que c*esl Dieu qui prépare la volonté et qui la fait
voulante , qui la change par sa toute-puissante Tolonté : si oeU
n*était pas ainsi, pourquoi remercierait-on Dieu?
Les ouvrages de saint Augustin parurent détruire Is liberté et
désespérans pour les hommes : des moines du mont Adromet en
conclurent que , tout dépendant de Dieu , on ne pouvait repren-
dre ceux qui n'observaient pas la règle.
Saint Augustin, pour détromper ces moines, leur écrivit le
livre De la correction et de la gr&ce ; il y confirme ces principes
sur la prédestination, sur la nécessité de la gr&ce prévenante et
gratuite , sur la faiblesse de Thomme ; il dit que Dieu a prédes-
tiné les hommes au salut de toute éternité, sans aucune prévi-
sion de leurs bonnes œuvres et sans avoir aucun motif que sa grâce
et sa miséricorde.
La célébrité que saint Augustin s'était acquise dans l'affaire
des Pélagiens répandit ses ouvrages ; mais beaucoup de person-
sonnes considérables par leurs lumières et par leur piété fu-
rent choquées de la doctrine de saint Augustin , et crurent que
ce Père faisait dépendre le sort des hommes après cette vie d'un
décret absolu de Dieu, porté de toute éternité. Cette doctrine
parut dure et contraire surtout à la doctrine des Pères grecs, qui ,
ayant eu à disputer contre les Manichéens , les Marcionites et les
philosophes fatalistes , paraissaient plus opposés à ce décret de
sauver les hommes antécédemment à toute prévision de leurs mé-
rites.
Gassien, qui avait passé sa vie en Orient , oii il avait beaucoup
lu les Pères grecs, et surtout saint Ghrysostôme, fut choqué de
ce décret absolu ; il communiqua ses difficultés , et l'on examina
ce décret absolu. On crut que saint Augustin , dans ses derniers
écrits contre les Pélagiens , était allé au delà de ce que l'Ëglise
avait décidé, puisqu'elle n'avait pas décidé la gratuité de la gr&ce :
on regarda le sentiment de saint Augustin comme une opinion
problématique.
. On reconnut donc contre les Pélagiens le péché origiuel et la
nécessité d'une grâce intérieure; mais on regarda comme une
question la cause pour laquelle cette grâce s'accordait aux uns et
se refusait aux autres.
On fiorta donc les yeai sur ce rcJoiii^bU mjsière; nii cnvii^ii-
gea rinimaniiii plongée dans les ténèbres ei coupable , el l'oa
chercha puurquoi parmi les liomtnes t^uelquca-unsaviiieul la grlco,
UdJU qu'une întiniié d'autres no l'avaient pas.
Saiot Augusiin, uniquement necapii da soin d'Établir la gra-
tuité de la grïce, d'abaisser le libre arbitre orgueilleux el do
faire dépendre l'hamine de Dieu , crojail ne pouroir trouver cclta
raison dans l'homme ei la supposait dans h rolonié de Dieu.
Mais il restait dans celte décision un cAlé obscur ; car pourquoi
Dieu veut-il donner ta grSce h l'un ptutdt qu'A l'autre î
Vouloir, c'est choisir, c'est préférer : loule préfère
possible entre des objets absolument f fiaui : les hommes plongés ;
dans la masse de perdition et avant qu'ils aient fuit quelque aciiin •
persoDuelle sont absolument éyaui. Dieu ne peut donc en pré-
férer UD i l'autre par un décret antérieur !i leur mérite person-
nel, et celte préférence ne serait point dilTércnle de la fatalilii
aveugle ou du hasard.
Dieu veut que tous les hommes soient sauvés :
cela serait-il vrai si Dieu , par un décret éternel el absolu , a
choisi quelques hommes pour être sauvés, sans aucun égard !i
leurs mérites , et s'il avait laissé tous les autres dans la
perdition T 11 faut donc reconnaître que la prédeslî nation et la vo-
cation i la gràee se Tonl en vuedes mérites de l'homme.
1,'Ëcriiure nous apprend que Jésus-Christ est mort pour tous
les hommes ; que comme tous les hommes sont uorls eu Adam ■
tous aussi sont vivifiés en Jésus-Christ.
On ne peut dire que saini Paul ail entendu par-lï qu'une partie
du genre humain pouvait recevoir le salut par Jésus-Cbrisl ; car.
alinqueson opposition de Jésus-Christ t Adam soil juste, il faut
nécessairement que , comme tous les hommes ont reçu un (irlu-
cipe de corruption et de mort en Adam , ils trouvent en Jésus-
Clirist un principe de résurrection el de vie qu'ils peuveut se pré-
parer 1 recevoir ; car le libre arbitre n'étant pis éteint dans
l'homme , il peut au moins connaître la vérité de la religion , dé-
sirer la sagesse et se disposer ù la recevoir par ce dernier mou-
vement , qui serait cependant stérile et insullisanl si la grice ne
s'y joignait pas.
Lorsqu'on pressait les »emi-Pélagiens par l'épTlre de saint Paul
iu\ tlouiains, ils avouaient qu'ils ne découvraient rien qui les
biiiisfil iur plusieurs endroits de cette épitrc, mais ils Giojr;ii«Dl
538 SEM
que le plus sûr éuit de se taîre sur ces olijets qn^U eti iaposâ*
ble à Tesprit humain de pénétrer; ils soutenaient que le senti-
ment de saint Augustin anèin|issait les eiliortiUons des prédica-
teurs et Tédification publique ; que quand il serait Trai , il m
fallait pas le publier, parce qu*il éUit dangereux de prêcher une
doctrine que le peuple ne comprenait pas, et qa^l n'y tTsit au-
cun péril à s*en taire * .
L*on n*aTait point défini contre les Pélagiens la gratuité de la
grAce; le sentiment des semt- Pélagiens fut donc une espèce de
problème sur lequel on se partagea sans rompre, ou sans se sé-
parer de communion , et le semi-PélagianiSUie fut adopté perdes
hommes célèbres par leurs lumières autant que par leur piété:
tels furent Pauste , Gennade, Cassien, etc.
11 y STait dVilIeurs des personnes qui, sans prendre parti sur la
gratuité de la grâce, étaient choquées du démt absolu que saint
Augustin semblait admettre *.
Saint Augustin, dans son livre De la prédestination et dans ce-
lui Du don de la persévérance, justifia son sentiment sur la gra-
tuité de la gr&ce et sur la prédestination : il fit voir qu'elle était
clairement enseignée dans rÉcriture; qu'elle n'était point injuste
puisque Dieu ne devait ni la gn\cc de la vocation , ni le don de
la persévérance; que les hommes naissant pécheurs et privés de
la grâce, il ne pouvait jamais y avoir de proportion entre leurs ac-
tions et la grâce , qui est un don surnaturel ; que la grâce et la fie
étemelle étaient souvent accordées à des enfans qui n'avaient au-
cun mérite; qu'il y en avait d'autres enlevés de cette vie pendant
qu'ils étaient justes pour prévenir leur chute ; que par conséquent
ce n'étaient ni les mérites des hommes, ni la prescience de l'u-
sage qu'ils devaient faire de la grâce qui déterminaient Dieu à
accorder la grâce aux uns plutôt qu*aux autres ; que la raison de
la préférence que Dieu donnait à un homme sur un autre était un
mystère; qu'on pouvait en chercher les raisons et qu'il les adop-
terait , pourvu qu elles ne fussent contraires ni â la gratuité de
la grâce, ni à la toute- puissance de Dieu.
Saint Augustin ne prétendait donc pas que , pour défendre la
gratuité de la grâce et de la prédestination , il fût indispensable
de supposer que Dieu , par un décret absolu et sans aucune rai-
* Prosper, ep. ad Aug, Uilar.f ep. ad Aug.
sjbid.
SKM 539
irréli!' de loute éieniitù de damner les uns ei de sau-
es ; la prËdeilmalion , selon siiïm Augu£iin , pouvait
r pour principe ni un décret absolu de Dieu , ni lei
mérites des hommes, mais une raîsûn absolument dilTérente; car
qui peut dire qu'il connaît tons les desseins de Dieu?
Il j a dune un milieu entre le décret absolu qui avait révolté les
semi-Péh);iens et le sentiment qui attribuait la prédestination
ani mérites des hommes; mais les hommes de parti ne voient ja-
mais de milieu entre leur senlimenl el celui de leurs adversaires :
le semi-Pélagianisnie continua donc A faire du pro|;rès.
Les disputes furent vives el longues entre les semi-Pélagicns el
les disciples de saint Augustin : les papesCélesiin, Gélase, Hors-
inisdas , défendirent la doctrine de saint Augustin ; mais le semî-
Pélagianismc dominait encore duns les Gaules , et la doctrine de
saint Augustin j était comb>itlue par beaucoup de monde.
Césaire, voyant que ce parti était trop puissant pour être abattu
par les disciples de saint Augustin, eut recours au pope Félix IV,
qui lui envoya des extraits des ouvrages de saint Augustin.
Césaire ne tarda pas i en faire usage : le palrico Libère faisait
!t Orange la dédicace d'une église ; Césaire, qui était ami de Li-
bère et qui avait un grand crédit sur sou esprit depuis qu'il
l'avait guéri d'une maladie , alla i la cérémonie de cette dédi-
cace. Douze autres et èques qui étaient aussi a celte cérémonie,
ayanl parlé des matières de la grice , s'assemblèrent et approu-
vèrent les articles qui avaient été envoyés ï Césaire par le pape
Félii : c'est cette assemblée qu'on nomme le second concile d'O-
range ; il était composé de douze évéqucs, el buil laïques y assis.
tèrent.
Ce concile publia vingl-cinq canons , qui forment une des ploi
belles décisions que l'bglise ait faites.
On décide dans ces canons le dogme ilu péclié originel, la né-
cessité , la gratuité de la grïce prévenante pour le salut ; ou j
condamne toute les finesses et tous les subterfuges des semi-Pé-
lagiens ; on répond aux reprocbes qu'ils faisaient aux culholiqucs
de détruire le libre arbitre, d'introduire le destin.
Le concile déclare que tous ceux qui sont baptisés peuvent et
doivent, s'ils venlent, travailler i leur salut; que Dieu n'a pré-
destiné personne ï la damnation , el on dit anathème 11 ceux qui
sont dansceite opinion, sans que ce sentiment puisse préjudicier
i la doctrine de eeuï qui enseignent que c'est Dieu qui nous in-
540 SET
spire par sa gr&ce le commencement de li foi el de ramonr, qii
est auieardc notre conTersion.
Lorsque le concile fut fini, saint Césaire en envoya le résout
tu pape Félix IV; mats Félix éUnt mort avanl qu*il eût reça 1rs
lettres du concile d*Orange, Bonîface 11, qui lui saccdda» approvfa
ces onons. On trouve sa lettre à la suite do concile p ou à la léle
de plusieurs manuscrits.
Césaire mourut vers la fin du dixième siècle , et le semi-Péh-
gisiiismo diminua insensiblement.
Le scmi-Pélagianisroe était surtout puissant parce qo*i] s*était
attaché un grand nombre de personnes qui n'approuvaient pas le
décret absolu ; lorsque FËglise eut condamné ce sentiment , tonte
ceue portion abandonna le parti semi-Pélagien , qu'elle ne regar-
dait que comme un parti opposé au décret absolu et qui défendait
la liberté contre les défenseurs de la fotalité*.
SETllIENS. Les Seihiens étaient une secte de Gnostiques ,
ainsi appelés parce qu*ils honoraient particulièrement Seth, qn*ils
croyaient être Jésus-Christ lui-même.
Us reconnaissaient, comme tous les Gnostiques, un être su-
prême , immortel , bienheureux ; mais ils crurent voir dans le
monde des irrégularités et des imperfections qui ne pouvaient ,
selon eux, avoir pour principe un seul être sage et tout-puissant;
ils aitribuèrenl la production du monde à des génies.
Ce que riiistoire nous apprend des différens états par lesqnels
le inonde et le genre humain ont passé leur parut supposer que
ces puissances se disputaient l'empire du monde, les uns voulant as-
sujélirles hommes, et les autres voulant les délivrer. Ces combats
leur parurent difficiles à expliquer dans le sentiment qui supposait
que le monde était gouverné par un seul Être tout-puissant.
li paraissait que les puissances qui gouvernaient le monde fai-
saient de leur mieux; qu'elles se batuient Uniût à force ouverte,
Unt6l qu'elles usaient de finesse; pour expliquer tous ces phéno-
mènes, ils imaginèrent une foule de puissances propres à produira
« 11 faut lire, sur Phistoire du semiPélagianisme, les ép. t2S et SS6
de saint Augustin; saint Prosper contra collât.; Carment., De ingrat.;
les ouvrages de Fauste ; les Conférences de Cassien , Gennade ; TUIe-
monl, Uist. écoles., t. 43. 44. «G; Noris. Ilist, Péîag., I. 2, c ih et
sulv.; Va«iuf, Hist. Pélag., I. 6, p. 525; Usserîu». AnUquIt., «. 14;
Ilist iiU dç rrance, U S et 9,
I
i ces efSeis. Voici cooiment il-i im^gin:
lait bit.
Ils concevaient l'Ëlrc siiprtoc comn
Lail le Père de tout , el ils l'appelaieni
Ce iiremier Ijomine aiait produit i
bomme el le Gis de l'iiomme.
Le SaÏTil-Esprii qui se promenait e
G unelumière infinie :c'é-
Ic premier Loaime.
a lils qui était le secood
I fils .
'abîme, élail, i
premier liomme et si
Clirist.
Ce Clirist iUh sorti de :
éle?â ; mais une autre puiss:
élail descendue , cette puisu
sée sur les eaui , elle y avai
ainâi dire ï elle-même, elle
son si^-jour éternel elle a
son corps lorsqu'elle et
préni,
Il première femme de laquelle le
valent eu un lils qu'ils appelaient le
il mère par le cbté droit, el s'était
ace était sortie par le calé gaudic e(
nceéiail la sagesse; elle s'était abai^ {
: pria un corps; mais, revenue pou '
s'élail relevée, el en tournant ven |
lit formé le del , cl enfin avait quille
1 parvenue au séjour de l'Être su- '
a sagesse était féconde : elle avai( produit un Qls , et ce
avait produit six autres puissances.
[as Setliiens attribuaient à ces puissances les propriétés néccs- j
saires pour produire les eOets qu'un observait dans le monde :
ils supposaient entre cce puissances des querelles, des guerres,
el prétendaient eiplJquer par ce moyen tout ce qu'on racontât 1
des états par lesquels le monde avait passé ; ils prétendaient qofl ]
le Dieu des arméei, qu'ils appelaient Jaldabaoïh, enorgueilli i
l'ait dit : Je suis le Dieu suprême , aucun être u'etl 1
plus grand q
Sa mère a
mier bomme
baoth irrilé a
dit : Faisoi
il blAmé son orgueil el lui avait dit que le pro-
ie Fils de l'boinme étaient au-dessus de lui. Jalda-
it, pour se venger, appelé les honuDes,
riiomme il noire image; aussilAl l'homme
raitéti J
formé , et Jaldaliaoïb lai avait inspiré un sounie de v
avait ensuite formé une femme, avec laquelle les anges avaient 1
eu commcrL'o , et de ce commerce étaient nés
JaMabaotb donna des lois au\ hommes, et leur détendit do j
manger d'un certain fruit.
La mère de Jaldabaotb , pour punir l'orgueil de son Gis , de^
n serpent qui persuada il Ëvo de mander dit
K{ruil défendu, f.ve, après s'être lai^^é séduire, persuada Adam,.
11.
-16
r
542 SET
Le crétteur des hommes , irrité de leur désobéissance , les
diassa du paradis.
Adam et Eve , chargés de la malédictiou du créateur, nVoreot
point d*enfans ; le serpent descendit du ciel sur la terre , soumit
les anges et en produisit six autres, qui furent ennemis des hom-
mes parce que c'était peureux que le serpent a^ail quitté le ciel.
La sagesse, pour adoucir le sort des hommes, les avait éclairés
d^Une lemière surnaturelle ; ils avaient par ce moyen trouvé de la
ilourrîture,- et ils avaient eu des enfans, Caîn et Abel.
Caîo, séduit parle serpent, tua Abel; mais enfin, avec le secours
de la sagesse, Adam et Eve eurent Seth et Norca , d*où sont sor-
tis tous les hommes.
Les serpens portaient les hommes à toutes sortes de crimes ,
tandis que la sagesse empêchait que la lumière ne s'éteignît parmi
les hommes.
Le créateur, irrité de plus en plus contre les hommes , couvrit
la terre d*un déluge qui devait anéantir le genre humain ; mais
la sagesse avait sauvé Noé dans Tarche, et Noé avait repeuplé la
terre.
Le créateur, ne pouvant anéantir les hommes, voulut faire avec
eux un pacte, et choisit Abraham pour cela. Moïse, descendant
d*Abraham , avait , en vertu de ce pacte , délivré les Hébreux
d^Égypte , et leur avait donné une loi ; il avait ensuite choisi sept
prophètes , mais la sagesse leur avait fait prononcer des prophé-
ties qui annonçaient Jésus-Christ.
La sagesse, par cet artiGce, avait fait en sorte que le Dieu créa-
teur , sans savoir ce qu'il faisait , fit naître deux hommes , Tun
d'Elisabeth et l'autre de la vierge Marie.
La sagesse était bien fatiguée des soins qu'elle donnait aux
hommes , elle s'en plaignit, et sa mère fit descendre le Christ dans
Jésns , afin qu'il la secourût.
Aussitôt qu'il fut descendu , Jésus naquit de la Vierge par l'o-
pération de Dieu, et Jésus fut le plus sage, le plus pur et le plus
juste de tous les hommes ; beaucoup de ses disciples ne savaient
pas d'abord que le Christ fût descendu en lui. 11 fit des miracles
et prêcha qu'il était le fils du premier homme; les Juifs le cruci-
fièrent , et alors le Christ quitta Jésus et s'envola vers la sagesse
lorsque le supplice commença.
Le Christ ressuscita Jésus, qui, après la résurrection, avait eu
yu corps glorieux et ne fut pas reconnu par les disciples : il
SEV
ttirc teâ ùmcs de)
S43 ^^M
bienheureux sans ^^^|
monta ensuite aucjt.'l uu
que le créateur le s.nrhe.
|j)rsque Te^prii de lumière qui est chei les hommes ser^
r£uni dans le ciel, il formera un Ëon immoriel, et ce sera la fin du
monile.
Quelques-uns parmi les Sethieus croyaient que la sagesse s'é-
lail manilestée aux honimes sous la Sgure d'un serpent : c'ett ap-
paremmenl pour cela qu'on les appeU Opliitcs par dérision,
comme s'ils adoraient un serpent. H j eut des Opliitesdiflérensdes
Seltiiens , puisque les Opliites reoiaical Jésus-Cbrisl. Voyet
OruirES '.
SÉVÈRE vécut un peu après Talien et fut le chef de la secia
des Sôvérieus.
L'origine du bien et du mal était alors la graode difficulté qu'oa
s'efTorcalt d'ècUirer : Sévère crut que le bien et le mal qu'oa
voyait dans le monde supposaient qu'il éluil soumis k des princi-
pes opposés, dont les uns étaient bons et les autres mécliins,et
subordonui^s cependant ï un Être suprême qui résidait au plus
baut des cîeui.
Comme le bien et le mal sont mêlés presque partout, Sévèra
s'imagina qu'il s'était fait entre les bons et les mauvais principei)
une espèce de contnit ou de transaction par laquelle ils avaient
mis surb terre une égale quantité de biens et de maui.
L'homme, qui est un mélange de qualités estimables et vicieux
ses, de raison et de passions, avait été formé par les bons ei pu
les mauTaîs esprits. '
D'après ces vues générales , rien n'était plus intéressant pour
l'homme que de bien distinguer ce qu'il avait reçu des puissaocei
bienfaisantes et ce que les puissances malfaisantes avaient mis en
lui.
L'bomme avait , scion Sévère , deux propriétés principales et
esseniielles, qui faisaient eu quelque sorte tout l'homme; il était
raisonnable et sensible : sa sensibilité était le principe de loulea
ses passions, et ses passions causaient tous ses malheurs ; Is rai-
son, au contraire, lui procurait toujours des plaisirs tranquilles
et purs. Sérère jugea que l'homme arait reçu la raison des puis-
sances bienfaisantes, ut la sensibilité des puissances malfaisantefl.
■Irzn,, L 1, c. 14, Ëpipb,, Uxr. ai. Ter., De prxscripl.> c. i.%
Philastr., De hxr., c. 3. Âug , Oc byr., c. 79. Damaic., Hier. :9.
644 SIM
De ces principes généraux il conclut que le siège de U nidon
est TobYrage des êtres bienfaisans , et que le siège des passions
est la production des puissances malfaisantes; sinn» seloD Sévère,
le corps humain, depuis la tète jusqu*aii nombril, était l'ouTrage
du bon principe, et le reste du corps était TouTrage du mâevaû.
I^e bon et le mauvais principe, après avoir ainsi fomérhomme
de déluL parties si contraires, avaient mis sur la terre tout ce q«
pouvait entretenir la vie de Thomme : Fètre bienfaisant avait
pbcè autour de lui des alimens propres à entretenir rorganisation
du corps sans exciter les passions; et Tètre malfaisant, au con-
traire, avait mis autour de lui tout ce qui pouvait éteindre la rai*
son et allumer les passions. '
Lorsqu^on étudie Thisloire des malheurs qui ont a£Digè les hom-
mes, ou voit qu*ils ont presque tous leur source dans Tivresse on
dans Tamour ; Sévère conclut de là que le vin et les femmes étaient
deux productions du mauvais principe. ,
L*eau, qui conservait Thomme calme et qui n^altérait point sa
raison, était un principe bienfaisant.
Les Encratiles ou Talianisles, qui trouvèrent les principes de
Sévère favorables à leur senlimcnt, s*atUchèreut à lui et prirent
le nom de Sévériens *.
SÉVÉRIENS, disciples de Sévère dont nous venons de parler.
11 y a eu aussi des Sévériens, ainsi nommés parce qu'ils étaient
attachés à Sévère, chef des Âcépliales.
SILENCIEUX : c*est ainsi que Ton nommait ceux qui ne ren-
daient point d'autre culte que le silence.
SIMON , surnommé le Magicien , était du bourg Gitton, dans
le pays de Samarie; il fut disciple du magicien Dosithée, qui
prétendait être le Messie prédit par les prophètes. Le disciple fil
des efforts extraordinaires pour surpasser son mattre dans Part
des prestiges et il réussit : on prétend qu*il passait impunément au
milieu des flammes , qu*il traversait les airs comme les oiseaux ,
qu'il se métamorphosait et paraissait sous mille formes diffé-
rentes; sa parole ouvrait les portes, changeait les pierres en
pain et produisait des arbres *.
Que ces prestiges fussent des effets du commerce que Simon
* Eu eb., HisU ecdcs., 1. 4, c 29* Épiph., Ilsr. 44.
* Nicéphore, I. 3. Hist. ecdes., c S7. Glem. Reoognit., L 3. M. Bas-
na^ nie ces faits, mais il ne donne aucune raison de son sentiment.
SIM
!C les damons ou Joa tours (t'adrc:
t presque luut le iicu^ile do
m
, il esl Cl
sur lui toalc rjlteiiliuo du peuple el lit rentrer Diisitliée dans
la cbsse des bommes ordiiiuires ; ou l'appeliiil U graude venu
Tandis que Simon fiaii dans su gluiro, s^iÎLil Pliilippe prèelia
l'Ëvangile à Samarie ; il j Qt des mirades qui déironipèreol les
Samaritains ; on recunnot les prestiges de Siuion, et il lui ubun-
dunné par beaucoup de monde. Simon fut étonné lui-même de la
imissance des prédicileurs de rËviinj-ile; mais il ue les regarda
([ue comme des magiciena d'un ordre supérieur . et le liaptémr ,
les prières et les jeûnes comme une espèce d'iuitiuliun aui mys-
tères du cLrislianisme, qui n'i-'taii, selon lui, qu'une espèce de
mngie. Il se Gt baptiser , il prijii, il jeûnait, el ne quittait point
saint Philippe, dans l'espérance de lui ari-acber $0[i secret.
Ixirsques les apùtres surent que l'I'^vangile avait été re(U !i Sa-
marie, ils; envoyèrent saint Jean et saiui Pierre pour confir-
mer les QdËles ; ils leur imposèrent les mains, el te Saint-Esprit
descendit sur fu\ visiblement , ce qui paraissait par le don de
prnpbétie, pur le don des langues, etc.
Simon, éionné de plus on plus de b puissance des apAlres,
voulut acheier de eaiiil Pierre son secret ; car il u'avait pas da
dun des miracles une autre idée. Saint Pierre eut horreur dç
celte proposition, et lui Si une vive réprimande; Simon, qui,
redoutait lu puissance de saint Pierre, se retira confus, et de-
manda â saint Pierre qu'il prilt pour lui '.
De l'argent que saint Pierre refusa, Simon en acheta une
, courtisane nommée IlélËne, qui apparemment devait servir i ses
' opérations magiques el â ses plaisirs *.
Simon, accompagné d'Hélène, se relira dans les provinces oti
l'un n'avait pas encore annoncé l'Ëvangile cl coniballil la doc-
trine des apAires sur l'origine du monde et sur la Providence,
l'eut-on. ilisail Simon, supposer que l'Être suprême ait produit
immédiatement le monde ? S'il avait formé lui-même l'homme ,
lui aurait-il prescrit des lois nii'il savait qu'il n'observerait pasï
ou s'il a voulu qu'Ad.im observai ses pr6ceples, quelle est dom
la puîssnncc de ce créateur, qui n'u pu prévenir la cbuiedc
I
tAcl. I
ïirt.,
r.to.
de ^i
546 SIM
rhomme ? Non, ce créateurn'est point VÊtre tout-puissvit et
Terainemenl parfait et bon, c*est un être ennemi des hoaiines, qui
ne leur a donné des lois que pour avoir des coupables à punir K
Voici le système que Simon substituait à la doctrine des
tpôtres, et comment il croyait prévenir les difficultés qu*on poo-
vaitJui opposer.
La pbilosopbie platonicienne était alors fort en vogue en
Orient : ce u*était point, à proprement parler, le système de
Platdti, qui n*en avait peut-^tre point eu , c*élait le fond du sen-
timent qui reconnaît dans le monde un Esprit éternel et infini
par lequel tout existe.
Les Platoniciens ne croyaient pas que cet esprit eût produit im-
médiatement le monde que nous habitons; ils imaginaient entre
rÉire suprême et les productions de la terre une longue chaîne
d*esprits ou de génies, par le moyen desquels ils expliquaient
tous les phénomènes : comme ces génies n*avaient pas une puis-
sance infinie, on avait cru pouvoir résister à leurs efforts par des
secrets ou par des enchantemens , et la magie sYtait incorporée
avec ce système, qui, comme on le voit, était absolument arbi-
traire dans les détails ; ce fut ce système que Simon adopta, et
qu'il tâcha de rendre sensible au peuple.
11 supposait une intelligence suprême, dont la fécondité avait
produit une infinité d'autres puissances avecdes propriétés différen-
tes à Tinfini. Simon se donna parmi ces puissances la place la plus
distinguée, et bâtit sur cette supposition tout son système théo-
logique destiné à expliquer au peuple la naissance du péché dans
le monde, Torigine du mal, le rétablissement de Tordre et la ré-
demption des hommes. Simon ne niait donc pas ces dogmes; mais
il prétendait que les apôtres les expliquaient mal, et voici quel
était son système, dont le fond a servi de canevas à plusieurs des
hérétiques des trois premiers siècles; ainsi Ton croyait alors le
péché originel, et Ton attendait un rédempteur.
Du système de Simon,
Je suis, disait Simon, la parole de Dieu, je suis la beauté de
Dieu, je suis le Paraclct, je suis le Tout- Puissant, je suis tout
ce qui est en Dieu.
• Fragmens des ouvrages do Simon, rapportés par Grabe, Spicilcg.
PP., pag. 308.
L
SIM 54 I
J'ai, par ma toiilc-puUsanoe, proiluit îles iotelligeaces dauûes
de liilTérentes propriêlés; je leuraidnnnû différents degrés de
puissance. Lorsque je ruratui le dessein de ruirelemamle, la pre-
niière de c<^ inielligencea pénétra mon dessein ei voulut préve-
nir lua TotoDté ; elle descendit et produisit les anges el les autres
puissances spirituelles , auxquellt'a elle ne donna aucune con-
naissance de l'Etre luut-puissant auquel elle devait l'existence.
Ces anges elces puis-ances, pour maniresler leur pouvoir, pro-
duisirent le monde; el pour se faire regarder comme des dieux
suprËtnes, et qui n'avaient point été produits, retinreat leur mère
parmi eux, lui firent mille outrages, et, pour l'euipêcUer de re-
tourner vers sou père, l'enfermèrent dans le corps d'une femme ; .
en sorte que de siècle en siècle elle avait passé dans le corps de
plusieurs femmes, comme d'un vaisseau dans l'autre. Elle avait .
été la belle llélèue qui avait causé la guerre de Troie, el, pas-
sant de corp« en corps, elle avait été réduite !i cette infamie, qua
d'èlre exposée dans un lieu de débauche.
J'ai voulu retirer Iléléue de la servitude et de l'Iiumiliation, je
l'ai cliercliée comme ua pasteur cherche une brebis égarée ; j'ai
parcouru les mondes, je l'ai iruuvée, el je veui lui rendre sa
première splendeur. C'était ainsi que Simon prétendait justiSer U
licence de s'associer dans sa mission une courtisane. U. de Deau-
siibre prétend que l'histoire d'Hélftne est une allégorie qui dési-
gne l'inii' ; ce sentiment et plusieurs autres qu'il adopte ne m'ont
pas paru suflisiimmcnl prouvés; ou j voit un homme d'esprit qui
combat par d'ingénieuses conjectures des témoignages positifs.
Eu parcourant les mondes formés par les auges, disait Simon,
j'ai vu que chaque monde était gouverné par une puissance prln-
cipule; j'ai vu ces puissances ambitieuses et rivales se disputer
l'empire de l'univers ; j'ai vu qu'etiHS everçaient tour â tour un
empire lyranuiquesur l'homme, en lui prescrivant mille pratiques
fatigantes et insensées ; j'ai eu pitié du genre bumain, j'ai résolu
de rompre ses chaînes et de le rendre libre en l'éclairant : pour
l'éclairer, j'ai pris une figure humaine, et j'ai paru un hommo
entre les hommes, sans éire cepenilanl un homme.
Je viens leur apprendre qw les diUérenies religions sont l'ou-
vrage des anges, qui, pour tenir les hommes sous leur euipirc,
ont iusp'ré des pfjphAie*, et persuadé qu'il y avait des ai^tinrs
bonnes el mauvaises, les<|ueUeB seraient punies ou r*con"persé>'ï.
hommes, intimidés /ar leurs menaces ou ïûJuitï i>ar leurs
548 SIM
promesses, se sont refasés aux plaisirs oa défooés à la mortifi-
cation. Je viens les éclairer et leur apprendre qu'il D*y a point
d*action bonne ou mauvaise par elle-même; que c'est par ma
grâce et non par leurs mérites que les hommes sont sauvés, et
que pour Tétre il suffit de croire en moi et à Hélène : c*est pour-
quoi je ne veux pas que mes disciples répandent lear sang pour
soutenir ma doctrine.
Lorsque le temps que ma miséricorde a destiné à éclairer les
hommes sera fini , je détruirai le monde, et il n*y aura de salut
que pour mes disciples: leur âme, dégagée des chaînes da
corps, jouira de la liberté des purs esprits ; tous ceux qui
auront rejeté . ma doctrine resteront sous la tyrannie des
anges *.
Telle est la doctrine que Simon enseignait : un prestige dont il
s*appuyait subjuguait Timagination de ses auditeurs ; ils voulaient
devenir ses disciples et demandaient le baptême; le feu descen-
dait sur les eaux , et Simon baptisait *.
Par ces artifices, Simon avait séduit un grand nombre de dis-
ciples, et s^élait fait adorer comme le vrai Dieu.
Simon connaissait retendue delà crédulité; il savait que les
contradictions les plus choquantes disparaissaient aux yeux des
hommes séduits par le merveilleux , et que, tant que le charme
dure, rimagination concilie les idées les plus inalliables. 11 sou-
tenait donc qu*il était tout-puissant , quoiqu^il fût sujet & toutes
les infirmités de la nature humaine; il disait qu'il était la grande
vertu de Dieu , quoiqu'il détruisît toute la morale et qu'il ne put
délivrer ses adorateurs d'aucun de leurs maux.
Les disciples de Simon perpétuèrent Tillusion par les prestiges
qui Tavaicnt produite , et le peuple , qui ne retourne jamais sur ses
pas pour examiner une doctrine qui ne le gène pas, adorait Simon
et croyait ses prêtres. Saint Justin remarque que vers l'an 150
presque touslesSamaritains, cl même un petit nombre d'autres en
divers pîtys, reconnaissaient encore Simon pour le plus grand des
dieux. Il avait encore des adorateurs vers le milieu du troisième
siècle, comme on le voit par un ancien auteur qui écrivait contre
saint Cyprien.
Simon composa plusieurs discours contre la foi de Jésus Christ,
* Ira'U., l. d, c 20, édlL Grab., édil Mabsuet, c. 23.
* (-ypr., De baptism.
SIM iVi
il les iaLiiula les CoiilraïUuiiaiis. M. Crabe nous cD a iluuaé quel-
ques fragmens *.
ParitiL les disciples de Simon, quelques-uns voulurent tj'ire uno
seclt! à part : lel fut Uéuanilre qui cliangea quelque chuse ï h
ductrine de son mallre et lil une nouvelle secie appelËe la secle
des Sléoiindrieiis. Voijei l'an, de Mésindee.
Dt la ilalue élevée à Simon et de ta ditpule arec taini Pierre.
Saint Justin el d'autres PËrcs assurent que l'on éleva dans Runie^
une slalue ù Simon: ils ne sont point d'accord sur lu temps.
Saint Iréni^'eet suint Cyrille de Jérusalem disent qu'elle fut élevée
par ordre de l'empereur Claude, et par conséquent après la mort
de Simon. Saint Augustin, aueoniraire, dit que celle statue fut
érigiie ï la persujsion de Simon *.
Des critiques célèbres ont cru qu'on avait pris une statue du
dieu Semon Sangiit pour une statue de Simon ; voici le fonde-
ment Je leur conjecture ;
Ou sait que les Romains, ii l'imitation des Sabins, ador.iieiil
un Sema Saaeut qu'ils disaient âlre leur Hercule ; on a même
trouvé dans ces derniers temps une statue dans l'ile du Tibre, oli y
saint Jusiiu dit qu'était celle de Simon ; cette statue porte cetts |
inscription, assez approchante de celle que nipporle saint Justin:
Seiaoni Sanca (ou Sanffe) Deo fldio lacrum. Scx. Pompelut Sp. £.. \
Col. Muttiaaut qHinqueanalît Decurh Didrniqtii doMim dedH.
Cette stitue, trouvée sous le pontificat de Grégoire XIII,
iSli, dans le lieu uiêine ob saint Justin dît qu'on avait élevé une
statue i Simon-le-Magicien , a donrié lieu de croire que saint
Justin avait confondu Sfmon avec Simon , surtout parce que le>
graveurs mettaient assez souvent un I pour un E ; on trouve niËme
même que ce SOmon est quelqui^fois appelé Saoelut ans&i bica ,
que Sancui , de sorte que l'Inscription pouvait être telle que 1% i
rapporte saint Justin, et n'avoir rien de commun avec Simon-le-
Magicien. On ne trouve dans les auleurs païens rïpn qni ait rap-
port Il cet événement , ce qui ne serait guère possible s'il était
vrai; d'ailleurs, les Juifs étaient odieux ù Claude, et le sénat J
■ Dionis., Du divin, iiominibus, c. G, p. 50&. CoidIîI, aposlol., 1. (
•■ 8, 16. Grab.. Spidlcg. PP., p, 305.
I Justin, Ai>olos. 1, c û4.
550 sm
pfnécuUil les magiciens et les itaît chaftés de Roue *.
Eafio, il est certain qu*on n*accordait Tapothéose qa*«az en-
pereurs , et encore après leur mort : comment aurait-on fait de
SimoD-le-Magicieo ua Dieu pendant sa vie?
M. de TiUemont soutient que saint Justin, ayant cité œ fiûl daas
son apologie adressée au sénat, aurait été convaiBca de faosselé
sur4e-champ s'il n*eùt pas été vrai. Cependant saint Justin , dît
M. de TiUemont, cite encore ce fait dans la seconde apologie, et
même dans son dialogue contre Tripbon, et le cite comme an fait
qui n*ayait pas besoin d*être prouvé ; par conséquent, dit M. de
TiUemont , les païens qui étaient k portée de convaincre saut
Justin de faux n*ont point regardé comme une chose douteuse
que Ton eût érigé une sutue k Simon : il cite encore , pour ap-
puyer son sentiment, M. Fleury, etc.
On peut répondre k M. de TiUemont :
1* Que les apologies de saint Justin n'étaient pas dea ouvrages
que le sénat eût entrepris de réfuter ; ainsi son silence ne prouve
rien en faveur de saint Justin ;
2* Ce fait était trop peu important pour en faire un sujet de
controverse ;
3* Si ce fait avait eu un aussi grand degré de notoriété qu*on
le prétend , pourquoi les Pères sont-ils si opposés entre eux sur
le temps auquel cette statue fut érigée, et pourquoi les uns disent-
ils que ce fut du vivant de Simon , les autres après sa mort? Si
Pacte par lequel le sénat et Tempereur avaient érigé une statue
à Simon eût été si connu, n'y aurait-on pas vu exactement si ce fut
sous Néron ou sous Claude que la statue fut élevée?
Il parait quec*est sans beaucoup de fondement que M. de TIU
lemont s'appuie sur l'autorité de M. Fleury : c'est en faisant l'ana-
lyse de l'apologie de saint Justin que M. de Fleury rapporte le
fait de la statue de Simon, il ne le garantit point, il ne l'examine
point; enfin le PèrePétau, Ciaconius, M. de Valois, Rigault»
Blondel, etc., reconnaissent que saint Justin s'est trompé *•
Plusieurs auteurs du cinquième siècle ont rapporté que Simon
s'étant fait élever en l'air par deux démons dans un cbariotde feu
« TaciU, Annal., 1. 2, r. 7.
> Petavius, in Epiph. Hcn. Valesius, ad Euseb., 1. 3, c. 13. Desid.
Heraldus, in Amob. et Tert. Rigalt., in Tert. Blonde, DeSybilia, c. 2«
Vandale, Dissert de orac. Ittigius, Dis. de baeres., sect. i, c i.
fc
soc
Tbt pr6cîpit6 par l'etTet des priËrt» de saint Pierre ei de saint
Piiut, Fl qu'il mourut de sa chute.
Mais eu fuit csl apocryphe ;CKr,indëp«D<litmmi'DI de lu difliciillé
de le concilier avec lu chronologie, il est certain que la chute de
Simon , i lu priËre de saint Pierre , était un Tait trop impniltint
pour avoir été ignoré des cliréiiens et pour n'avoir pas M cm-
pliiyii par les apologistes des premiers siècles; cependant saint
Jii&iin, saint IrËnëe, Tertullîen , n'en parlent point, eux qui ont
SISCIDOIS : ils avaient les mêmes sentîmcns qne les Vaudoii,
si ce n'est qu'ils avaient plus de respei;t pour le sacrement de
i'Kiicii-Jrislie *.
SOCIMAMSIIE, doctrine des Sociniens , dont Lélie et Fausie
Socin «ont regardas comme les auteurs, et qui a su source dans
les principes de la Rérurme.
•( de ion pmgrês jusii»'ii la mort de
Lnllier avait ntUquâ l'auturité de l'Ëglise, de la tradition et i
des l'en'9 ; l'filcriluTe était , selon ce iliéologien , la seule r^gle de
nuire fol , et chaque particulier était l'inlerprèle de l'Écriture. 1
Le clirétien , abacidonnê h lui-même dans rïnlerpréiatiun do \
l'Écriture, n'eut pour guide que ses [«opres cunnaiisancra , et
cliuque prétendu rérornié ne découvrait dans l'Ëcriture que ca \
■ Les auteurs qui rapportent la chule de Simon ont pcal-étre appll- '
que A cet imposteur ce quL- Suf-lone rapporte d'un homme qui, sans i
NeriM, sejnaen l'air el se lirina en lombaiiL Celle coojccluru d'Ittl-
f-!u9iiVslpasde<;i:née de vraisemblance: nneancrcnnc tradition por-
tait rini-Simnn voUtioii Ironve, EousNfron, qu'nn lionime prètindit
aiiiir leseercl Je loleriil ftiiiHoul 'impie de jiiser une cet homme
i\3\t Simon. Rien n'est tlcrdlniiire que di's rappruchemcns de celte e»-
Un préienla iPanI IV des medslllei qui porlnlent ri'un cSlè Néron et
de l'autre iiiinl Pierre, arec celle I^ende : PelrusGalIlIvus. Il y a des
|ier«omufl qui ont cm que citle loèilaillc avait été frupp4e en mémoire
(le la victoiredc saint Pierre surSiniou; iln'e-t pas nt'ccstnirc de faire
[tes itnriian* mr ridle preuce. Veyei sur cela DJVid de la noqoe,
iJlLictt. lie ie„i '>ic r»lmifiani.' , p. 013,
> Dupin, InisiinH dfiete.
r,i2 SOC #W
qui était confurme aux opinions et aux idées qu'il avait reçues ot
aux principes qu*il s'était faits lui-même ; et comme preiiqae lot-
tes les hérésies n'étaient que de fausses interprélatioos de r£-
criture , presque toutes les hérésies reparurent dans un siècle ok
le fanatisme et la licence avaient répandu presque dans toole
TEurope les principes de la Réforme.
On vit donc sortir du sein de la Réforme des sectes qni atta-
quèrent les dogmes que Luther avait respectés : le dogme de la
trinité, la divinité de Jésus-Christ, refTicacité des sacremens, la
nécessité du baptême. Voyez k Tarticle Lcthee les sectes sor-
ties du Luthéranisme , les articles Anabaptistbs , Aeiess mo-
DEnNES.
hiais ces sectes , nées presque toutes du fanatisme et de Vigoo-
rance , étaient divisées entre elles et remplissaient rAllemagne
de divisions et de troubles.
Pendant que rAllemagne était déchirée par ces factions , les
principes de la Réforme, portés dans les pays où le feu du fana-
tisme n'échauffait pas les esprits, germaient pour ainsi dire pai-
siblement et acquéraient de la consistance dans des sociétés qui
se piquaient de raisonner.
Quarante personnes des plus distinguées par leur rang, parleurs
emplois et pnr leurs litres, établirent en 1346 à Vicence , ville
de rÉtat vénitien , une espèce d'académie pour y conférer en-
semble sur les matières de religion et particulièrement sur celles
qui faisaient alors le plus de bruit.
L'espèce de confusion qui couvrait alors presque toute TEo-
ropc , les abus grossiers et choquans qui avaient pénétré dans
tous les Ëtats, des superstitions et des croyances ridicules ou dan-
gereuses qui s'étaient répandues, flrent juger iii cette société que
la religion avait besoin d'être réformée, et que, l'Écriture conte-
nant de l'aveu de tout le monde la pure parole de Dieu , le moyen
le plus sûr pour dégager la religion des fausses opinions était
de n'admettre que ce qui était enseigné dans l'Écriture.
Comme celle société se piquait de littérature et de philosophie,
elle expliqua, selon les règles de critique qu'elle s'était faites et
conformément à ses principes philosophiques , la doctrine de Vf.
criture , et n'admit comme révélé que ce qu'elle y voyait claire-
ment enseigné , c'est-à-dire ce que la raison concevait.
Diaprés cette méthode , ils réduisirent le christianisme aux ar
ticles suivans.
11 y.
SOC ii:3
I tri;s-li»ut , qoi a criiO toutes diosea pat la puis-
sance de son Verbe, et qui gouverne tout par ce Verbe. ^
Le Verbe est son Fils , cl ce Fils est Jésus de Naiaretb , fils de
Marie , liamme vi'-ril:ibte , maie un Lomoie supL'rieur -lUi autres
bomiiies, ajant Él^ engeudré d'une vierge et par ropéralian du
Suint Esprit.
Ce Fils est celui que Dieu a promis aux anciens palnarclies , et
qu'il donne aux boniuies ; c'est ce Fils qui a annonc<^ l'Ëvaugile et
qui a munUË aux bommes le cbemin du ciel en mortifiant sa chair
ei en vivant dans la piél^. Ce FiUest mort par l'ordre de bod Père, ■
pour nous procurer la n^missian de nos pfcbés; il csl ressuscild
par la puissance du l'ère , et il est glorieux dans le ciel.
Ceux qui sont soumis i Jésus de Nazareth sont justifiés de la
part de liieu , cl ceux qui ont de la piété eu lui reçoivenl l'im-
mortalité qu'ils ont perdue dans Adam. Jésus-Cbrist seul est le
Seigueur et le cbefdu peuple qui lui est soumis ; il est le juge des
vivans et des morts; il reviendra vers les hommes i la consom-
ma (î ou des siècles.
Voift les points auxquels la société de Vicence n^duîsit la reli-
gioti chrétienne. La Triuité, la ron substantiel lié du Verbe, la dî-
viiiilé de Jésus- Chris t , etc., n'étaient, selon cetie société, que
des opinions prises duos la philosophie des Grecs, cl non pas dei
do^uies révélés.
Les assemblées de Vicence ne purent se Taire assez secrëtemeat
pour que le ministère n'en fût pas iostruîl ; il en fit arréier quel-
ques-unsqu'on fil mourir; les au très s'échappèrent, telsTurent Lélie
Sociu, Deruard Okiii, Païuta, Gentilis, etc., qui se retirèrent en
Turquie , en Suisse , en Allemagne,
Les chefs de la prétendue Réforme n'étaient pas moins ennemis
des nouveaux Ariens que les catholiques, et Calvin avait fait brft-
Icr Servel; ainsi les exilés de Viceuce ne purenl enseigner libre-
ment leurs sentimens dans les lieux oii le magistrat obéissait aux
Réfonnaleurs. Ils se retirèrent duuc enfin en Pologne , o il les
nouveaux Ariens professaient librement leurs sentimens sous !■
pruleclion de plusieurs seigneurs polonais qu'ils avaient séduï II.
Ces nouveaux Ariens avaient en Pologne des églises,;! es écoles,
et assemblaient des sjnodes ob ils Greul des di'-crets contre ceux '
qui soutenaient le dogme de laTrinilé.
Lélie Socin quïdu la Suisse et se réfugia parmi
Ariens; il jr porta legoAl des lettres, les principes de In crilique,
tl. 47
554 SOC
Tétade des langues et Tan de la dispute ; il éciÎTit contre Calviii,
il fit des commentaires sur TËcriture sainte, et apprit aux Anti-
trinilaires à expliquer dans un sens figuré ou allégorique les pas-
sages que les Réformés leur opposaient pour les obliger à re-
connaître h Trinité et la divinité de Jésus-Christ. 11 aurait sans
doute rendu de plus grands services au nouvel Arianisme ; mais il
mourut le 16 mars 1562 à Zurich , laissant son bien et ses écrits
à Faoste Socin son neveu.
Du Sœinianisme depuU que Fautte Socin en fkt le chef.
La réputation de Lélie Socin , les lettres qu^il écrivait à sa fa-
mille , firent naître de bonne heure dans Fauste Socin le goût des
disputes de religion et le désir de s*y distinguer : il s^appliqua avec
beaucoup d^ardeur à la théologie, et à T&ge de tingt ans il cmt
être en état de s'ériger en maître et de faire un nouveau système
de religion. Son zèle , qui n*avait pas encore sa maturité , rem-
porta si loin , que, non content de dogmatiser avec ses parens et
avec ses amis , il voulut le faire dans hs assemblées où son esprit
et sa naissance lui donnaient accès. L*lnquisition en fut informée;
elle poursuivit tous les membres de la famille de Socin , en arrêta
quelques-uns , et les autres se sauvèrent où ils purent.
Fauste Socin fut de ce nombre : âgé d*environ vingt-trois an<,
il vint à Lyon ; ce fut \h qu'il apprit la mort de son oncle qui lui
avait légué ses papiers. Fauste Socin alla à Zurich pour y recueil-
lir la succession et surtout les écrits de son oncle , et revint en
Italie avec ce funeste trésor. Son nom , sa noblesse et son esprit
lui donnèrent bientôt entrée à la cour de François, gmnd-duc de
Florence : il plut à ce prince, et se fixa auprès de lui. La galan-
terie, les plaisirs de la cour, l'ambition, l'occupèrent tout entier
pendant douze ans ; après ce temps , le goût des controverses de
religion reprit insensiblement le dessus sur les plaisirs et sur le
désir de faire fortune. Fauste Socin quitta la cour , renonça à ses
emplois, et forma le projet de parcourir l'Europe pour y enseigner
la doctrine de son oncle et la sienne.
Après quelques courses, il arriva en 1574 à Bâle et y de-
meura trois aus, uniquement occupé des matières de religion et
de controverses, qu'il étudiait surtout dans les écrits de son on-
de , dont il adopta tous les sentimens ; il voulut les enseigner, et
se rendit odieux aux Luthériens, aux Calvinistes et à tous les Vf(h
soc 555
lesians. Sociil , tehulà ym li's ciinlruflii'liiiiis qu'il <''prr>iiv3, |)39S4
en Transylvanie, et ciiUii se rondii en Pulogne vers l'an 1570.
Les Aniiir'iQiuires ou Im noumiii Ariens avaieni Tait de
grands progrès en Pulugne, et ils y avaient TiinJé beaucoup d'É-
glises et d'Écoles ; ils y jouissaient d'une entière liberté.
îlais Ulules ces Iliglises n'étaient pis unifarnies dans leur
créaoce. Lorsque FausteSocin arriva en Pologne, elles furm ai eut
en quelque sorte des sociétés difTérentes, et l'on eu compte jus-
qu'à trente-deux qui n'avaienl presque de commun que de ue pas
regarder Jésus-Cljrist comme le vrai Dieu.
Kauste Soein voulut s'altaclier i une de ces Ëglises , mais le>
ininislresqui la gouvernaient le rerusërenl, parce qu'ils appri-
rent qu'il avait beaucoup de seniimens contraires ï ceux qu'ils
profess«iettt. Fauste Socin ne voulut alors s'associer i Rucune dei
tglises de Pologne , et afTecta d'être l'ami de toutes pour les ame-
ner A ses idte ; il leur disait qu'k la vérité Luther et Calvin avaient
rendu de grands services ï I» religion , et qu'ils s'y étaient ii
bien pris puur renverser le temple de l'Antéchrist de Rome si
pour dissiper les erreurs qu'il enseignait ; néanmoins qu'il fallait ■
looïenir que ni eux , ni ceux qui s'étalent bornés i leur système, iç
n'avaient encore rieii fait pour rebâtir le vrai leinple de Dieu s
les ruines de celui de Runie, el pour rendre au grand Dieu le vl
culte qui lui est dû.
Pour y parvenir , disait Sucln , il faut établir comme la base i«
la vraie religion qu'il n'y a qu'un seul Dieu ; que Jésus-Chrisl
n'est Fils de Dieu que par adoption el par les prérogatives qofl
Dieu lui a accordées : qu'il n'était qu'un homme, qui, pur les doni
dont le Ciel l'a prévenu , était notre médiateur , notre pooiib^
notre préire; qu'il ne Tallait adorer qu'un seul Dieu , sans di-
sUnction depersoanes; ne point s'embarrasser, pouretpliquerw
que c'claii que le Verbe , de la manière dont il procédait du Père
•vaut les si^cles et de quelle manière il s'était fait homme ; qu'il
ibilail regarder comme des Tables Torgéfis dans l'imagination des
hommes la présence réelle de l'humanitâ et de la divinité de Jésus-
Chrisl dans l'eue ha risii e , l'efficacité du baptême pour elTacer 1^1
péché originel , etc.
Ce plan de religion plut infiniment & des hnmmes qui ne t'A- ^
taieni écartés de la croyauce des Églises réformées que parce '
qu'ils ne voulaient recounalire comme enseigné dans l'Ecriture
<jue ce qu'ils compreaaieni. Les Unitaires, qui faisaient le parti
M
Ô56 SOC
dominant parmi les ennemis de la divinité de Jésus Christ, Tagré-
gèrent k leurs Églises et suivirent ses opinions; plusieurs autres
Églises les imitèrent , et Socin devint le chef de toutes ces Églises.
Ce nouveau chef , par ses instructions et par ses disputes ,
répandit de Téclat sur toutes les Églises, et alarma les Protestaos
et les Calvinistes. Cinquante ministres protestaos s^assemhlèrent
et appelèrent les ministres princzowiens pour prendre avec eux
des moyens de réunion ; mais ceux qui avaient déjà pris parti
pour Fauste Socin les conduisirent au synode ; et les prétendus
Réformés, effrayés de se voir en tête un adversaire comme Socio,
abandonnèrent pour la plus grande partie le synode , sous pré-
texte qu'il ne leur était pas permis d'avoir des conférences ni
aucune société avec des personnes qui suivaient les erreurs des
Ébionites, dés Samosatiens, des Ariens, etc. , de tous ceux qui
ont autrefois été excommuniés par FÉglise.
Volanus, Némojonius, Paléologue et quelques autres moins
scrupuleux ou plus hardis attaquèrent Socin personnellement ,
et publièrent des thèses qui furent soutenues dans le collège de
Posnanie : Fauste Socin s'y trouva.
Les prétendus Réformés voulurent y soutenir la divinité de
Jésus-Christ , mais à la faveur de la tradition des anciens Pères
et des conciles. Fauste Socin opposa à ces preuves tout ce que
les Protestans ont opposé aux catholiques sur la tradition et sur
l'Église pour justifier leur schisme. « Les Pères et les conciles
9 peuvent se tromper, disait Socin, ils se sont même trompés
» quelquefois; il n'y a point de juge parmi les hommes qui ait
» une autorité infaillible et souveraine pour décider les matières
9 de foi ; il n'appartient qu'à l'Écriture de désigner les objets de
» notre créance : c'est donc en vain que vous me citez l'autorité
» des hommes pour m'assurer du point le plus important de la
» religion, savoir la divinité de Jésus-Christ. »
Les Réformés sentirent que pour arrêter les progrès de Socin
il fallait avoir recours ù d'autres moyens que la controverse : ils
l'accusèrent d'avoir inséré dans ses ouvrages des maximes sédi-
tieuses. La patience , le courage et l'adresse de Socin triomphè-
rent de ses ennemis. Malgré les malheurs qu'il essuya , il avait
un grand nombre de disciples parmi les personnes de qualité, et
enGn il obtint la malheureuse satisfaction qu'il avait tant désirée :
toutes les Églises de Pologne et de Lithuanie , si différentes en
pratique, en morale et en dogmes, et qui ne convenaient que dans
soc
la Haie ôpiaion de ne vouloir pas cruire que Jésus-Clirist !in le
grtiud Dieu , consubsianiiel au Pbre élernel , se réuoireut , ei ne
fornitreni qu'une seule Ëglise, qui pfil el qui porte encorL' au-
jourd'bui le nom d'tglise sociuienne.
Socin ne Jouitpas tranquilleiiieni de lu gloire î laquelle il avait
aspiré avec lant d'ardeur; les catholiques et les Prole^lans lui
causèrent des vhagrins , el il mourut dans le village de Luclaviu
oli il s'était retiré, pour se dérober aux poursuites de ses ennemis.
Socîn mourut en 1004, Agé de Uo ans; on mil sur sou tombeau
celte épliaplie :
D luiu de mourir ou de s'allaiblir par la
morl de son cher, s'augmenta beaucoup, et devint considérable par
le grand nombre des personnes de qualité et de savans qui en
adoplèreut les principes ; les Socîn iens furent eu état d'obicnit
duus les diètes la liberté de conscience.
I«s caiho^ques n'avaient cédé qu'il la oéccssilé des temps en
accurdanlaux sectaires la liberté de conscience; lorsque les temps
de trouble fureni passés, iU résolurent de cUasser tes Sociniens.
Les calboliques s'uuirent donc aux Proleatans contre les Soci-
niens, el la diète résolut l'extinction des derniers. Par le décret
qui y fiit fail, on les obligea , ou d'abjurer leurs liéréïies , ou de
prendre parti parmi les communions tolérées dans le royaume ,
et ce décret fut exécuté rigoureusement.
Une partie des Sociniens entra dans l'Église catholique , beau-
coup s'unircni aux ProlesUnft ; mais le plus grand nombre se
relira en Tranitylvanie, en Hongrie, dans la Prusse ducale , dans
la Moravie, dans la Silésie , dans la Marche de Itrandebourg , eu
Angleterre, eu UoUaDde : ce Tut ainsi que la Pologne se déliiia
le cette secte, après l'avoir soulfeneplus de cent ans.
I^s Sociniens Irouvèmnl des eunemls puîssaiia dans tous les
triais où iU ce relïrj^reut ; non-seulement ils n'y firent point d'{-
lablissemcnt , mais la puliisance ecelctïa clique el la puissaucc
siSculière s'unirent conire eux , el partoul ils furent condamnf<
658 SOC
par les lois de TËglise et de TËtat. Mais les loi^ qui oat proscrit
les Sociniens n*ont pas réfuté leurs principes : ces principes se
sont conservés en secret dans les États qui ont proscrit le Soci-
nianisme , et beaucoup de Réformés en Angleterre, et surtout en
Hollande, ont passé des principes de la Réforme à ceux du Soci-
nianisme. \oyez les articles Abiens modernes, Aehuueics.
Système théologique des Socfniens.
L*Écriture sainte, et surtout le nouveau Testament /est, selon
Socin , un livre divin pour tout homme raisonnable : ce livre
nous apprend que Dieu, après avoir créé Thomme , lui a donné
des lois , que Thomme les a transgressées , que le péché s*est
répandu sur la terre, que la religion s^est corrompue, que Thomme
est devenu ennemi de Dieu, que Dieu a envoyé Jésus-Christ pour
réconcilier les hommes avec lui et pour leur apprendre ce qu*ils
devaient faire et croire pour être sauvés. II n*est pas possible de
douter que Jésus-Christ ne soit celui que Dieu a envoyé pour
accomplir Tœuvre de la réconciliation des hommes , et pour leur
enseigner ce qu'ils doivent croire et pratiquer.
11 n'est pas moins certain que le nouveau Testament contient
la doctrine de Jésus-Christ ; c'est donc dans ce livre divin qu'il
fau' chercher ce que Thomme doit croire et pratique^ pour être
sauvé.
Comme il n'y a point de juge ou d'interprète infaillible du sens
de l'Écriture, il faut lâcher de le découvrir par les règles de la
critique et par la lumière de la raison. Socin et ses disciples
s'occupèrent donc â chercher dans l'Écriture le système de reli-
gion que Jésus-Christ était venu enseigner aux hommes; et c'est
ce qui a produit tous ces commentaires sur l'Écriture , qui for-
ment presque toute la bibliotlièque des Frères Polonais.
Socin et ses disciples, prétendant ne suivre dans Tinterpréla-
tion du nouveau Testament que les règles de la critique et les
principes de la raison, expliquèrent d'une manière intelligible à
la raison tout le nouveau Testament , et prirent dans un sens
métaphorique tout ce que la raison ne concevait pas; par ce
moyeu , ils retranchèrent du christianisme tous les mystères , et
réduisirent à de simples métaphores ces vérités sublimes que la
raison ne peut comprendre.
D'après ce principe , ils enseignèrent qu'il n'y a qu'un seul
soc 559
Dieu, créateur du inonde : le Père, le Fils et le Saint Esprit ne
sont point des personnes divines, mais des allributs de Dieu.
Ainsi les Sociniens renouvelèrent Terreur de Sabellius, de Praxée :
nous les avons réfutés à ces articles, et à Tarticle Antitrisitaires.
Dieu créa Adam et lui donna des lois ; Adam les transgressa;
Adam, pécheur, tomba dans l'ignorance et dans le désordre; sa
postérité Pimita, et la terre fut couverte de ténèbres et de pé-
cheurs. Les Sociniens ne recgnnalssaient donc point de péché
originel : nous avons réfuté cette erreur à Tarticle Pélagiens.
Dieu, touché du malheur des hommes, a envoyé son Fils sur
la terre : ce Fils est un homme ainsi nommé parce que Dieu
Ta comblé de grâce; ainsi les Sociniens renouvelèrent l'erreur de
Théodote de Bysance : nous Tavons réfutée à cet article, et aux
articles Ariens, Nestorids.
Jésus-Christ, inspiré par Dieu même, enseigna aux hommes ce
qu'ils devaient croire et pratiquer pour honorer Dieu; il leur
apprit qu'il y avait une autre vie, où leur fidélité à pratiquer
ce qu'il annoncerait serait récompensée , et leur résistance
punie.
Dieu avait voulu que ces peines ou ces récompenses fussent le
prix de la vertu ou le châtiment du désordre; il n'avait point
choisi parmi les hommes un certain nombre pour être heureux ,
et abandonné le reste à un penchant vicieux, qui devait les con-
duire à la damnation ; tous sont libres; Jésus-Christ leur adonné
à tous l'exemple de la vertu ; ils ont tous reçu de Dieu la lu-
mière de la raison; ils ne naissent point corrompus, tous peu-
vent pratiquer la vertu ; il n'y a point de prédestination ni
d'autre grâce que ces instructions et ces dons naturels que
l'homme reçoit de Dieu.
Les Sociniens renouvelèrent donc l'erreur des Pélagiens sur
le péché originel, sur la nature et sur la nécessité de la grâce et
sur la prédestination : nous avons réfuté toutes ces erreurs à
l'article Pélagianisme.
Nous n'entrerons pas dans un plus grand détail sur les autres
erreurs des Sociniens; elles sont des conséquences de celles
que nous venons d'exposer, et se réfutent par les mêmes prin-
cipes.
Toutes ces erreurs ont pour cause générale ce principe fon-
damental que Socin emprunta en partie de la Réforme : c'est
que le nouveau Testament contient seul la doctrine de Jésus»
560 STA
Christ , mais que c'est aux hommes à Tioterpréter suivant les
principes de la raisou et seloQ les règles de la critique.
Nous avons fait voir la fausseté de ce principe, en faisant
Toir contre Lulher cl contre les Réformés qu'il y a un corps de
pasteurs chargé d'enseigner les vérités que Jésus- Girist a révé-
lées aux hommes. Voyez, ii l'article Lctber, ce que Ton dit
pour prouver l'autorité de la tradition, et à l'article Réfcbse, ce
qu'on dit pour prouver que l'Église* seule est juge infaillible des
controverses de la fui , et qu'il est absurde d'attribuer ce droit
au simple Gdèle. Ce principe bien établi, le Socinianisme s'éva-
nouit, et ne devient plus qu'un système imaginaire , puisqu'il
porte sur une supposition absolument fausse.
STADINGHS ; fanatiques du diocèse de Brème , qui faisairat
profession de suivre les erreurs des Manichéens ; voici Torigioe,
le progrès et la fin 4e cette secte :
Le jour de Pâques , une dame de qualité , femme d'un homme
de guerre , fit son offrande à son curé ; le curé trouva son
offrande trop modique, il s'en plaignit et résolut de s'en ven-
ger.
Après l'office , la femme se présenta pour recevoir la commu-
nion , et le curé , au lieu de lui donner la communion avec l'hos-
tie, mil dans la bouche de cette dame la pièce de monnaie que la
dame lui avait donnée pour offrande. Le recueillement et la
frayeur dont cette dame était pénétrée ne lui permirent pas de
s'apercevoir qu'au lieu de l'hoslie on lui mettait dans la bouche
une pièce de monnaie, et elle la garda quelque temps sans s'en
apercevoir ; mais , lorsqu'elle voulut avaler l'hoslie , elle fut dans
le plus terrible tourment en trouvant dans sa bouche une pièce
de monnaie au lieu de Thoslie; elle crut qu'elle s'était présentée
indignement à la sainte table , et que le cliangement de l'hostie
en la pièce de monnaie clait la punition de son crime ; elle fut
pénétrée de la plus vive douleur, et l'agitation de son âme chan-
gea ses traits et altéra sa physionomie ; son mari s'en aperçut,
il voulut en savoir la ciiusc , et demanda qu'on punît le prêtre ;
on refusa de le faire , il éclata , ses amis en furent informés , et,
par leur conseil , il lua le prêtre qu'on ne voulait pas punir.
Au^silôt il fut exconnnuiiié , et n'en fut pas effrayé.
Les Manichéens et les Albigeois n'avaient point été détruits par
les croisades, par les rigueurs de l'Inquisition : ils s'étaient ré-
pandus dans l^llemagne, et y semaient sccrclemcnl leurs erreurs ;
STA
ÔGt
ils prulilèrenl des Jisposiiiuns ilans lesquelles ils vireni l'Imiiime
àe guerre excommuDié et ses amis pour leur persuader que le>
mioîsires de l'Ëgliae n'avaienl poïul le pouToir d'e:
Od les âcuuU favorablemëiil ; ils persuadèreal que les n
étaieDt, uon-seulciiieot denDuvuJs minisli'es , mais encore qu'ils
ëuieut les niinisires d'une mauvaise religion , qai avait pour pria-
cipe un Être ennemi des bouimes , qui ne mMlait ni leurs liom-
mages ni leur amour; qu'ils les devaient !i l'Être qui avait rendu
riiomme sensible au plaisir et qui lui permeiiaîi d'en jouir.
Les Siadinghs adoptèrent donc le dogme des deux principes
des Manicbéens, et rendirent un culte t Lucifer ou au démon
dans leurs assemblées, où la débancbe la plus infime fut pour eux
un exercice de piété.
La secte des Sladinghs se grossit insensiblement; onleurenroja
des missionnaires ; les Stadingbs les insultèrent et les firent mou-
rir. De ces crimes , ils pasiièreni ù la persuasion qu'ils feraient
une action agréable ï4.ncifer ou au bon principe en faisait mou*
rir tous les ministres du christianisme. Us coururent la campa-
gne, pillèrent les églises et massacrèrent les prêtres : on avait
brillé les Manicbéena , parce qu'on crujail qu'il fallait brûler lei •
hérétiques; les Hanicliéens ou les Stadinghs . ~_,
prêtres, parce qu'ils croyaient qu'où devait détruire les enueniiiî' \
du Dieu bîenraisant.
Leur progrès cITraja les catholiques; le pape Grégoire IX fit 4
prêcher une croisade contre les Studinghs , et il accorda aux ci
ses la même indulgence qu'on gagnait dans la croisade pour Ift J
terre sainte. On vit en Fiiae une multitude de croisés qui a
Talent de Cueldre , de Hollande et de Flandre , et à la tête de»-' ]
quels se mirent l'érèqus de Brème, le ducde Bnbanl, le comte
de Kullande.
Les Sladinghs, instruits dans la discipline militaire par an '
homme de guerre qui atait donné naissance à la secte ,
reni â l'armée des croisés , lui livrèrent bataille , se battirent en
bravi» gens , et lurent totalement défaits : plus de six mille Sta-
dinghs resièrett sur la place, et la secte fut éteinte'.
Ainsi, il y a dans tous les peuples ignorans une disposition
prochaine au faoaiismc qui u'atteud que l'occasion d'éclater; et
• D'Argenlré, Collect. jud., t. 1,
1d txc 13 i Duplu, treiiièmeiMcIc, c
I. 4 330, p. 139; NaUt, Alex.)
663 STE
oette occasion se trouve presque tot^joan dans Uê Imiuk oii I4
clergé est iguorant.
STilNCARlSTES, secte de Lutbénens : voyea; rartide des sec-
tes qui sont sorties du Luthéranisme.
STERGORANISTE ; c'est celui qui croit que le eorpt cnckarit-
tique de Jésus-Christ est sujet ii la digestion et à ae» sailes •
comme les autres aliment-
Vers le milieu du neuvième siècle, les Saxons n'étaient pas
encore bien instruits des vérités de la rdigion chrétienne, et Pas>
chase fit pour eux un traité du corps et du sang de Notre-Sei-
gneur. 11 y établissait le dogme de la présence rédie , et U di-
sait que nous recevions dans l'eucharistie la même chair et le
même corps qui était né de la Vierge.
Quoique Paschase n*eût suivi dans ce livre que la doctrine de
rÉglise , et qu*avant lui tous les catholiques eussent cm que le
corps et le sang de Jésus-Christ étaient vraiment présens dans
reucharistie, et que le pain et le vin étaient changés au corps et
au sang de Jésus-Christ, on n'avait pas coutume de dire si for-
mellement que le corps de Jésus-Christ dans reucharistie était
le même que celui qui était ué de la Vierge *.
Ces expressions de Paschase déplurent; on les attaqua, il les
défendit ; celte dispute ût du bruit, les hommes les plus célèbres
y prirent pari, et se partagèrent entre Paschase et ses adversaires.
Les adversaires de Paschase reconnaissaient aussi bien que lui
la présence réelle de Jésus-Christ dans rEucharistie, ils ne con-
damnaient que sa manière de s'exprimer ; tous reconnaissaient
donc que Jésus-Christ était réellement présent dans l'eucha-
ristie.
Il y a dans tous les hommes qui raisonnent un principe de cu-
riosité toujours actif, que les querelles des hommes célèbres di-
rigent toujours vers les objets dont ils s'occupent: tous les esprits
furent donc portés vers le dogme de la présence réelle de J^us-
Ghrist dans reucharistie.
De là naquirent une foule de questions sur les conséquences de
ce dogme : on demanda entre autres choses si quelque partie de
l'eucharistie était sujette à être rejetée comme les autres alimens.
Quelques-uns pensèrent que les espèces du pain et du vin qui
subsistent même après la consécration étaient sujettes aux diffé-
< MablUon, Prxf. in 4 sa^c BencdicU, part. S, c i, p. 4.
STK
rpns cliangf^mcns que les alîmcns (prouvent i d'aulms , au i
traire , crurent qu'il élail indécent de Biipposer que quelque choee
(le ce qui spparieuait h l'eucharistiH passJt par les dilTéreos étali
auxquels les alimcus ordinaires sont sojeK, et donnëreni A c<
qui soutenaient le contraire le nom odieux de Slercoratiisl
mais injustement , puisque personne ne crojrail que le corps de
léaus-Cliristfill digéré : on ne peut ciier aucun auteur qui l'ait
suuteuu , et tous les monumens de l'histoire eeclésiailique sap-
posenl le contraire '.
f.es Greci ont aussi £té traités par quelque! Lniins comme des
Siercoraoisles : voici ce qui a occasioné un pareil reproche. Les '
Grecs prétendaient qu'on ne devait point célébrer la messe dsu I
le c:irème, excepté le samedi et le dimanche, qui sont deux jour»J
pendant lesquels les Grecs ne jeûnent jamais ; ils prétendent même ]
que c'est une pratique oonlraire h la tradition des apôtres de dire. |
la luesse les jours de jeûne.
I« cardinal llumbcrl crut que les Grecs condamnaîenl la cou-
lunie de célébrer la messe les jours de jcùue parce que l'euclia-
ri.^lie rompait le jefine; il leur reprocha dépenser que notre corpi.J
se umirrit du corps de Jésus-Christ , et les appela du nom odieas.l
de Siercuranisies; mais il se trompait: les Grecs dérendaient Ift. I
céli'>bralion de la messe les jours de jeûne parte qu'ils les regu^ I
duieiii comme des jours de douleur el de tristesse pendant les- 1
quels on ne devait point célébrer un mjstèredc joie tel que Veu-^
cli:irisli(! *.
Il paraît donc certain que le Slerceranisme est une er
imaginaire, comme le reconnuli U. Busnage, maïs non pas une 1
hérésie , et qu'on l'a faussement imputée à ceux qui ont nié la I
présence réelle , comme il le prétend '.
Les auteurs du neuvième siècle , qu'où a taxés injuslemenl de \
Stereoranisme , aussi bien que les Grecs , reconuaissaienl la pré- |
sence réelle; el quand leurs écrits n'eu fourniraient pas des preu~
ïeâ incontestables , il est certain qu'on ne pourrait , sans absur- 1
dite, réfuter un liommc qui oicnit U présence réelle, en
reprochant <iu'il suppose que le corps de JésuS'Chriat se digère et
1 Allix, PrxF, de la Irad. de Ratramnc. Doileau, Pref. sur le mima
sntmr. Malii>lon, ioc. clt, part. !, c. 1, i, 5.
■Habinon, ibid,
* Batnage, llist. ie l'Ëglise. t. î, 1. 0, c. 6, p. Gld.
5C4 TAN
A i*égard de la question qpke Ton forme sur le loK des eiqpèeei
eucharistiques lorsqu'elles sont dans restomac , les uns ont ima-
giné qu'elles étaient anéanties, les antres ont cru qu'elles te
changeaient en la substance de la chair qui doit ressusciter oa
Jour : ce sentiment fut assez commun dans le neuTième siède et
dans les suivans ; depuis ce temps , les théologiens n*ont poiit
douté que les espèces eucharistiques ne poissent se corrompre
et élrc changées.
Peut-être faudrait-il résoudre ces questions par ces mots d'oa
ouvrage anonyme publié par dom Luc d*Acheri : Il n'y a que Diea
qui sache ce qui arrive à Teucharistie lorsque nous l'avons reçue.
{Spieileg., /. 12, p. 41.)
SYNCRËTISTES, secte de Luthériens : voyez cet article.
S YNERGISTES , autre secte de Luthériens : twyez cet artide.
TACITURNES, secte d* Anabaptistes ; voyez cet article; voyez
aussi Silencieux. •
TANCTIELIN ou Takchelme était un laïque qui s'érigea en
prédicant au commencement du douzième siècle, et qui publia
diiTérenles erreurs.
Les incursions des barbares et les guerres avaient anéanti les scien-
ces dans l'Occident et corrompu les mœurs; le désordre et Tigno-
rancc régnaient encore dans le onzième et dans le douzième siècle ;
oTi ne voyait parmi les laïques que meurtres, que pillages, que ra-
pines, que violences ; le clergé se ressentait de la corruption gé-
nérale ; les évêques, les abbés et les clercs allaient à la guerre ;
Tusnre et la simonie étaient communes , Tabsolution était vénale,
le concubinage des clercs était public et presque passé en cou-
tume; les bénéûces étaient devenus héréditaires; quelquefois
on vendait les évêchés du vivant des évéques , d'autres fois les
seigneurs les léguaient à leurs femmes par testament ; beaucoup
d'évéques disaient qu'ils n'avaient besoin ni de bons ecclésiasti-
ques, ni de canons, parce qu'ils avaient tout cela dans leur bourse.
Ces désordres étaient portés à un plus grand excès dans la
Flandre qu'ailleurs *.
* IIi9t«JiUéraire de France, !• 7, p. 5, etc.
Ce fui dans celte [trll^inc(' [|iie Tanclicli
qui commençaient il se répandre en France depuis près d'u:
cle conire li'pspe, conlre les sacremens cl contre les ivéques.
Il prêcha qu'il fiillait compter jiour lieu le pape , les cv^|ues et
lout le dergé ; que les églises étaient des lieux de prostilutinn et
les sacremens des profanalions; que le sacrement de l'aulet nV-loil
d'aucune utilité pour le salut; que la venu des sacrcmena dépen-
dait (le la sainteté des ministres ; et enlin il défendit de p*)cr la
dîme.
Le peuple, sans instruction et sans mœurs, rp<;ut aTidemenI la
doctrine de Tanchelîn, et le regarda comme un ajiùlre envoyé du
ciel pour nTormer l'Ëglise. Ses disciples prirent les armes et l'nc-
coni 1 13 gnai en t lorsqu'il allait préclier; on portail devant lui un
étendard et une épée; c'était avec cet appareil qu'il prêchait , et
le peuple l'écoutait comme un oracle.
Lorsqu'il eut porté le peuple il' ce point d'illusion , il précba
qu'il iHait Dieu et i^gal ï Jésus-Ctirist ; il disait que Jésus-Christ
n'avait été Dieu que parce qu'il oyait reçu le Saint-Esprit, et Tan-
clielin prétendait qu'il avait reçu aussi bien que Jésns-Cbrist 1m
plénitude du &iint-Ksprit ; que pur conséquent il n'était point in-
férieur fi Jésus-Christ.
I,e peuple le crut , et Tanchelîn fut honoré comme un homme
Tancbelin était voluptueux : il profita de l'illusloQ de SM disci-
ples pour jouir des plusbelles Tenimes de sa secte, et les maris et
Us pères , témoins avec le public des plaisirs de Tanchelin , ren-
d.iicnt grâce au ciel des faveurs que l'homme divin nccordait A
leurs femmes ou li leurs lilles.
Taucliclin avait commencé sa mission en prâchunt contre le dé-
sordre des mœurs: l'austérité de sa morale, son extérieur mortifié,
son averMon pour les plaisirs, son xële contre les dérèglemens du
clergé, avaient gagné les peuples; et il la finit en faisant canonise;
par ce même peuple des déï^ordrrs plus monstrueux que ceux
contre lesquels il s'était élevé , et il Ht canoniser ses désordres
sans qne le peuple-s'aperçfii de celte contradiction.
Tanchi'lin , ï la lél« de ses teiiateurs , rempllssiit de troubles
et de meurtres loui les lieux oii l'on ne recevait pas sa doctrine.
Tn pri'lre lui cassa la léte lorsqu'il s'embarquait; ses disciples
se répiiodirent alors du cûté de l'olo^jne et d'Ulrechl; quelques-
uns furent briilésparlepetrple, cl les autres paraissent s'élrccon-
566 TAT
fondus tvec les divers hérétiques qui atUqittieiit les Sâcremens,
ics cérémonies de T Église et le clergé *.
TASCxVDRUGlTËS ; c'était une branche de Moulanistes qui ,
pour marque de tristesse , mettaient les doigts sur le na
durant la prière : c*esl ce que signifie le nom qa*ils prenaient ; ib
mettaient encore leurs doigts dans leur bouche, pour recommander
le silence: cette secte fut peti nombreuse; on en trouTail quelques-
uns dans la Galatie *.
Ils se nommaient aussi Passalorinchites , Patalotinchites , As-
codrupiles , etc«
TATIEN, était Syrien de naissance; ilfut d*abord élevé dans les
sciences des Grecs et dans la religion des Païens. Il* voyagea beau-
coup, il trouva partout la religion païenne absurde, et les philoso-
phes flottans entre une infinité d'opinions et de systèmes contra-
dictoires.
Lorsqu'il était dans cette perplexité , les livres des chrétiens
lui tombèrent entre les mains ; il fut frappé de leur beauté : « Je
» fus persuadé , dit- il , par la lecture de ces livres, à cause que
» les paroles en sont simples, que les auleurs en paraissent sin-
» cères et éloignés de toute affectation, que les choses qu'ils disent
> se comprennent aisément, que Ton y trouve beaucoup de pré-
> dictions accomplies , que les préceptes qu'ils donnent sont ad-
» mirables, et qu'ils établissent un monarque unique de toutes
B choses... et que cette doctrine nous délivre d'un grand nom-
> bre de maîtres et de tyrans auxquels nous étions assujétis '. »
C'était donc en quelque sorte par lassitude et non pas par une
conviction forte que Tatien avait embrassé le christianisme ; il
restait encore au fond de son esprit des idées platoniciennes. Pour
déranger son orthodoxie , il ne lui fallait que rencontrer dans le
christianisme des obscurités : c'est en effet ce qui lui arriva,
comme on Je voit par son livre des problèmes ou des questions
qu'il composa pour montrer l'obscurité de l'Écriture et la dif-
ficulté d'en comprendre divers passages.
Tatien alors , aussi peu content de la doctrine des chrétiens
que de celle des philosophes, choisit dansles dogmes des différentes
* D'Argenti-é, Coliect. jud., L j, p. 11.
^Damascen., De ha>r. Hieron., Comment, in ep. ad Galat Pkilas-
trius. De hier., c. 7G.
» Tôt., Oral, ad Giœcos, c. 46,
Tr.R
sectt^ Iniit c^qiii lui p:iriil lU'upro ï l'cluirev la raboii
lure de l'Clre suprùme , SDi' l'origine du uionde, sur l'bisloire des
Juii's, sur le clirisliaDi&me.
11 imaginail , comme Valeniin , des puissances invisibles , des
principautés el d'autres fables semblables : il ailuietlail avec Har-
cion deux dilîérens dieux, dont le créateur était le second ; t'est
pourquoi il prétendait <\ae quand le Cri'aleur avait dit : Que la
tamiirt tait faite, c'ëUil moins un commandemenl qu'il faisait
qu'une prière qu'il adressait au Dieu suprême qui était au-dessus
de lui. II attribuait l'ancien Testament i deux dieux diOërens, et
rejetait quelques-unes des épUres de saint Paul.
Il condamnait l'jEage du mariage autant que l'adultère , sp-
pujé sur nn passage de saint l'aul dans son éplire aux Galal«s, qui
dii ; Celui qui sème dans [a cliair moissonnera la corrupiion de
la rliaif *.
Il avait beaucoup d'aversloa pour ceux qui mangeaient de 11
chair des animaux el qui buvaient du vin, fondé sur ce que la loi
défend aux Nuzaréeus d'en boire, et sur ce que le prophète Amoa
fait un crime aux Juifs de ce qn'Us eu avaient fait boire aux Na-
zaréens consacrés â Dieu : c'est pour cela que l'on appela Elncra-
listes et Hjdrupiirastus ses sectateurs, parce qu'ils n'offraient que
de l'eau dans la célébration de l'eucharisiie ',
Tatien forma sa secte du temps de Marc-Aurèle, vers l'an 172 :
elle se répandit particulièrement î Anliocbe, dans la Cilit^îe, ea
Pisidie, dans beaucoupdu provinces de l'Asie, jusqu'à Rome, dans
les Gaules, dans l'Aquitaine et en Espagne.
Taiien avait composé beaucoup d'ouvrages dont il ne noui
reste presque rien.
Ses disciples s'appelèrent Tatianisles, Eocntistes, Continens,
Sévériensi Apotactiques, Saccophores.
TERRIE ; c'est un de ces prétendus Apostoliques qui s'élè*
vèrent en France dans le dnu^ième siècle ; il se tint loug-Iemps
cacbé dans une grotte li Corbigny, au diocèse de Nevera, oU il l\it
enfin pris et brûlé. Deux vieilles femmes, disciples de Tcrrie,
souffrireul le même supplice. Terrie avait donné il l'une le nom de
l'f.glise et â l'autre celui de sainte Uarie, afin que lorsque ses
sectateurs étaient iulerrogés ils pussent jurer par sainte Marie
â68 THE
qu*ils n'avaient point d'autre foi que celle de la sainte
Eglise *.
TllEOBUTE ou Tuébute. Après la mort de saint Jacques, sur-
nommé le juste, Siméon, fils de Cléophas, fut élu éTéqae de Jéni-
salem ; Théobute,qui aspirait k cette dignité, se sépara de TËglise
chrétieime, et, pour se former une secte, réunit les sentiment des
différentes sectes des Juifs : c*est tout ce que nous savons de ses
erreurs.
Voilà donc un disciple des apûlres même qui se sépare de TÉ-
glise de Jérusalem, que le désir de la vengeance éclaire et anime
contre les apôtres, qui connaissait à fond la religion chrétienne,
qui aurait dévoilé Timposture des apôtres , s'ils en avaient été
coupables, qui aurait triomphé avec éclat des premiers chrétiens
qui l'avaient refusé pour évéque, et dont la secte aurait anéanti
la religion chrétienne : cependant la religion chrétienne s^ctablit
à Jérusalem, se répand par toute la terre, et il ne nous reste de
Théobute que le souvenir de son ambition et de son apostasie,
qui forme un monument incontestable de la vérité du christia-
nisme et de celle des miracles sur lesquels les chrétiens fondaient
la divinité de leur religion.
Si la religion chrétienne eût été fausse, elle ne pouvait résis-
ter aux attaques de celle espèce d'ennemis qu'autant que la puis-
sance temporelle leur aurait imposé silence, et aurait empêché
qu'ils ne découvrissent Timposlure des chrétiens.
Mais celte autorité temporelle persécutait les chrétiens, pro-
tégeait et encourageait leurs ennemis.
Il n'y a que deux moyens d'expliquer le progrès de la religion
chrétienne et l'extinction totale des sectes qui se séparèrent
d'elle et qui Tattaquèrent à sa naissance : ces moyens sont, ou
l'impossibilité d'obscurcir l'évidence des faits sur lesquels elle
s'appuyait, ou une attention continuelle de la puissance séculière
à empêcher tous ceux qui se séparaient de l'Église et des apôtres
d'en révéler la fausseté : or, s'il y a quelque chose de certain, c'est
que la puissance séculière employait contre les chrétiens toute sa
vigilance et toutes ses forces.
Ainsi, si la religion cliréti(!nnc était fausse , ses progrès et l'ex-
tinction de la secte de Théohute et de plusieurs autres sectes qui
l'ont attaquée à sa naissance seraient non-seulement un effet sans
' Dupin, Hjst, des coulr. du douzième siècle, c, 6.
cause, uiaîs un Tait arrivé malgrË le concours de toutes tes es
qui devaient nécessaire ineni l'einiiC-olier.
Tlll^ODOTE, béréii<|uc associé [lur les auteurs ecclésiastiques
à Cléobule, ut cLerdu secte du leoips des apùlrcs. Voffr^ ii l'ar-
iLcIe Clëodvle les cuaséquences (|u'on peut tirer de l'eiiiiictioa
de ces sectes en faveur du cbrisiianisme.
On confond mal i propos ce Tliéodule avec Tliéudote do Bj*
TtlÉODOTE {.E VtLE^TiNiEN n'est connu que par ses é);1ogucs
que le pËrc Combtfii nmis a données sur le manuscrit de la bililio-
llièque des pères dominicains de la rue Saiut'lloooré : ces éylo-
guei ne vontieiiuent qu'uue application de l'Ëcrilure au sjstëm» 1
de ValentiD. Tliéodoie prétend ; prouver les dilféjeng points d»'
la doctrine de Valenlin par quelques passages de l'Écriture : cet
ouvrage a été conimeuté par le père CombéËs, et se trouve dans
la bibliulliËque grecque de Fabricius, lum. S, p. 13S.
TIIËOUOTE DE BïEANCG, surnommé le Curro_veor , du uo i- de
sa profession, prétendit que Jésus-Cbrisi n'était qu'un Lu:Lme :
il se lit des disciples qu'où nomma Tbéodotiens.
Ce n'est point ici une erreur de l'esprit ; c'est une liérésJe daf
laquelle l'amour' propre de Tliéodote se jeta comme dans un asil
pour éviter les reproches qu'il s'était attirés par sun apostasie.
Pendant la persécution qui s'éleva sous Harc-Aurëte, Théodola > 1
fut arrêté avec beaucoup de chrétiens, qui confessèrent Jésufr->j
Christ et remportèrent la couronne du martjre. Théodoie r
nonca ï Jcsus-Clirist ; les fidèles lui firent tous les reproches que •
méritait son crime et que le zèle inspirait dans ces temps de fer- 1
Pour se dérober à l'indiguation des lîdèles de Bjsance,
dote se retira b Home ; mais il y Tut reconnu, et fut regardé avec -'
|] erreur.
TLéodote représenta d'abord que Jésus-Cbrist mime traitait ^
ateu moins de rigueur ceux qui l'oOcnsaient, puisqu'il avait d
claré qu'il pardonnait ce qu'on dirait contre lui ; et enSu que s(
crime n'était pas aussi grand qu'on le prétendait, puisqu'on r
niant Jésus-Ctirist , il n'avait renié qu'un homme n£ d'une viciée,
ti la vérité par l'opération du Suiut-Esprit, mais sans aucune ]
'Théodorct, Elairel. Fab., I. ï, pnf. Euseb., Hist. ccclcs-,
û 22. Notes d'L'iMr. lur r*p. de toint Ifioacc an Tiallieni.
570 THE
antre prérogative qae celle d*ane vie plus sainte et d^nne verta
plus émioeote *.
Cette doctrine souleva tout le monde , et Théodote fat excom-
munié par le pape Yictor : Théodote trouva cependant des dis-
ciples qui prétendaient que la doctrine de leur maître avait été
enseignée par les apôtres jusqu^au pontificat de Zépbjrin» qm
avait corrompu la doctrine de TÉglise en faisant un dogme de
la divinité de Jésus-Christ.
Les catholiques réfutaient ces difficultés par le témoignage de
rËcriture, par les Jiymnes et par les cantiques que les chrétiens
avaient composés dès le commencement de TÉglise, par les écrits
des auteurs ecclésiastiques qui avaient précédé Victor , tels que
saint Justin, Miltiade, saint Irénée, Clément d* Alexandrie, Mélî-
ton , qui avaient tous enseigné et défendu la divinité de Jésus-
Christ, enfin par Texcommunication même que Yictor avait pro-
noncée contre Théodote *.
Pour se défendre contre Tévidence de ces raisons, les Théodo-
tiens retranchèrent de TÉcriture tout ce qui était contraire à leur
doctrine, c Ils ont corrompu sans pudeur les saintes Écritures, dit
» un auteur qui écrivait contre eux, ils ont aboli la règle de Tan-
» cienne foi ,... et il est aisé à ceux qui en voudront prendre la peine
» de voir si je dis la vérité : il ne faut que conférer ensemble les
» exemplaires et Ton verra bientôt la différence , car ceux d*As-
» clépiade ne s*accordent pas avec ceux de Théodote, et il est fort
» aisé d*en trouver des copies parce que leurs disciples ont un
» grand soin de transcrire les corrections ou plutôt les cornip-
» tiens de leur maître; les copies d'Hermophile sont encore diCTé-
» rentes des autres, et celles d'Apollone ne s*accordent pas même
» entre elles, y ayant bien de la différence entre les premières et
» les dernières. Il est bien difficile qu*ils ne s^aperçoivent eux-
» mêmes combien celle témérité est criminelle ; car en corrom-
9 pant ainsi les Écritures ils font voir, ou qu*ils n'ont point de foi ,
» s'ils ne croyaient pas que le Saint-Esprit les a dictées, ou qu'ils
» se croyaient eux-mêmes plus habiles que le Saint-Esprit : et ils
» ne peuvent pas nier que ces changemens ne viennent d'eux ,
» puisque les exemplaires où ils se trouvent sont écrits de leurs
* Auctor Apprend, ad Tcrt., De praescrip., c. ultime. Épiph., Hacr.»
64. Théodoret, HxreL, fab., 1. 2, c 5.
> Théodoret, Haeret,, fab., 1. 2, c 2. Euseb., HisU ecdes., I. 4, c 28.
THE
■ propres niains, et qu'ils ne les sauraient nionir^r dans ai
• eiempliiire plus ancien qu'eux , pour dire qu'ils les ont puisée
> de ceux donl ils avaient d'abord reçu les preuilËres iosirucLions
• du cliristianisnie. Quelques-uns d'entre eux n'nnt pas même
> voulu prendre la peine de corrompre les Écritures ; mais ils ont
• rejeté tout d'un coup et la loi et les prophètes, sous prétexte
■ que la grâce de l'Ëvantjile leur sufGt '. •
Les Tiii^odoliens joignirent ï ces înSdélilés toutes tes subtilités
d'une logique coatentieuse et minutieuse. ■ Ils ne connaissent
• pas Jésus-Clirist , dit l'auleur que j'ai cité, d'autant qu'ils ne
• cherclient pus ce qu on lit dans la parole de Dieu , mais qu'ils
• examinent curieusement par quelle ligure du syllogisme ils sou-
• tiendraient leur liérè&ie; quand on leur propose quelque endroit
> de l'Ëcriture, ils regardent s'il fait un iirjjument cunjuoclir ou
■ disjonclif*. » .
Les Tbéodoliens appujaient leur sentiment sur tous les passa-
ges de l'Écriture dans lesquels Jésus- Christ parle comme un
homme, et supprimaient tous ceux qui établissent sa divinité.
Un des prmcipaui disciples de Tbéodole de Rjsance Tut Théo-
doie le Banquier , qui , pour établir plus incontestablement qua
Jésus-Christ n'était en effet qu'un liomme , prélendit qu'il éUÎI . 1
iurérieur a Uelcbîsédec et forma la secte des Hcichisédécien»,
Asclépiade et les autres dont il est parlé dans le fragment qua
noua avons rapporté ne firent point de secte.
Il est certain , par ce qu'on vient de dire, qu'il y a eu sur !■
lïu du second siècle un Tliéudote qui renia lésus-Chrlst , qui
encourut l'imlignation de tous les fidèles, qui fut eitcommuait^ ,
parce qu'il pri^tendait n'avoir renié qu'un homme né de la
Vierge et doué d'une sainteté et d'uno vertu éminenle.
1° Pur le motif qui porta Théodotc â nier la divinité de Jésus-
Clirist, il est évident que cet hérétique n'accorda i Jésus-Christ
que les qualités qu'il ne pouvait lui refuser; il était donc incon-
leslable que Jèsus-ChrÎBt était né d'une Vierge, par l'opémlion
du Saint-FiSpril , et qu'il était d'une sainteté éminente ; car Théo-
doie avait un grand intérêt h refuser ces prérogatives S Jésus-
Christ, cl il avait beaucoup de lumière^ et peu de délicatesse
sur les moyens de défendre son sentiment, puisqu'il corrompait
572 TUE
TËcrilure pour comballre avec plus de vraisemblance la difîailé
de Jésus-Christ. Les fails et les miracles qui prouvaient qire Jésos-
Cbrist était né d'une Vierge, par Topération du Saint-Esprit,
étaient donc incontestables, et Taveu de Tbéodote est à cet égard
beaucoup plus fort que le témoignage des auteurs païens ; j*ose
dire que le pyrrhonisme le plus scrupuleux n^eu peut exiger de
plus sûr.
2* L*excommunicatton de Tbéodote prouve iocontestablemeot
que la divinité de Jésus-Christ était un dogme fondamental de U
religion cbrétienne très-expressément enseigné dans TËglise; qui
faisait la base de la religion chrétienne, puisqu*il entrait dans les
cantiques et dans les hymnes composés presque à la naissance du
christianisme , et qu'il avait été enseigné par les apôtres ; car il
est impossible que des gens grossiers et ignora us , tels que les
premiers prédicateurs du christianisme , se soient élevés tout à
coup à la croyance de la divinité du Verbe , et qu*ils s*y soient
élevés par les seules lumières de la raison ; c'est une vérité qui ne
sera contestée par aucun de ceux qui ont réfléchi sur la marche
de l'esprit humain et qui en connaissent tant soit peu l'histoire.
Quelle esl donc la lémcrllé de ceux qui souliennent que la di-
vinité du Verbe est un dogme platonicien introduit dans le chris-
tianisme par les Platoniciens ! Les épitres de saint Paul, où la
divinité du Verbe est si clairement enseignée, sout-elles l'ouvrage
d'un Platonicien?
3** l>es Théodotiens avaient corrompu rÉcriture; la doctrine de
l'Écriture sur la divinité de Jésus-Christ était donc alors si claire
que la subtilité de la logique ne pouvait l'obscurcir.
4* 11 était aisé de découvrir l'imposture des Théodotiens en
comparant leurs exemplaires de l'Ëcriture avec le canon de VÉ-
glise ; les catholiques avaient donc conserve l'Écriture pure et
sans altération.
5' On oppose aux Théodotiens tous les auteurs ecclésiastiques
qui ont précédé le pape Victor ; on ne doutait donc pas alors que
ces Pères n'eussent enseigné la divinité de Jésus-Christ , et l'on
était vraisemblablement alors aussi en état de juger du sens des
Pères que l'auteur du Platonisme dévoilé, Sandus , Jurieu,
Wisthon, etc.
C« On voit des ThéodutitMis qui , pressés par les prophéties ,
nient leur autorité; les prophéiits qui annoncent le Messie et qui
établissent sa divinité étaient donc claires alors cl facilement ap~
plicabtes à Ji'sua-Clirial , pijjsqu'un les corrompi o
lorsqu'on alUquc lediviniiË de Jésus-Clirisl. Tuus les Juiisel les
liilidËles, dans ces lenps , avaient dune assez de lumii-res pour
coDDaUre la vénié de la religion cbrélienne.
7<> CoDinie Tbéodule enseignait celte doctrine dans on temps
de persécution, il n'est pas étonnant qne, malBrë l'éridcnce de
la doctrine csibolique sur la divinité de Jésus-Chtisi, il se soit
fuit des disciples ; mais il paraît impossible qu'il ne se soit pus at>
Uiché tous les chrétiens , si la divinité de Jésus-Cbrist n'était pas
un dogme ÏDCDulesluble dans l' Église : dix chrétiens qui auraient
résisté il la doctrine de Théodote seraient , en faveur des fuils qui
éiahlissenl la divinité de Jésus-Christ , un témoignage infiniment
plus sûr que celui de dix mille Théodoliens contre ce Hiit. Or, il
est ceriaîn que Tbéudoie ne perveriil que peu de disciples et que
sa secte s'éteignit, tandis que les chrétiens se m ulli plièrent à
l'inGni, même au milieu des persécutions; quelle est doue la pli-
losophie, la critique ou l'équité de ceux qui prétendent que lu di-
vinité de icsus-Cbrisl n'était pas enseignée claircuienl pendant les
trois premiers siècles de l'ËgliseF
TURLUPINS, fanatiques débauchés du quatiirzième siècle, qui
joiguirenl sut erreurs des Béguards les inramies des cyniques ;
ils lui'ent excommuniés par Grégoire XI; les princes chrétiens In
punirent sévèrement ; on en lit brûler un ùâict. graud n
cette sévérité ut l'Iioi-rcur qu'excitait leur infamie, anéanlireut '
bieu lût celte secte '.
VALDO. Yeyn-. VAtinois.
VALÉSIENS. VojffiEisLouES.
VALEMIK , hérétique qui parut vers le milieu du sccoud siè-
cle. 11 forma une lecie considérable, et les Pères ont beaucoup
écrit contre lui et contre ses erreurs.
Ce qui nous reste de son système a paru si obscur fi quelques
critiques qu'ils n'ont point hésité ï regarder Valenlin et ses dis-
ciples comme des insensés, cl ses erreurs comme un asieniblagu
d'extravagances qui ne mvritalcnl p:i3 d'élre
Ls iixri'sium, BiTiiaid de Luticnbourg, CnRuin,
574 VAL
Ces critiques ne préteudeut pas , je croU » que les erreurs da
Valeiitiulens aient élé des absurditèi palpables et des oontradic-
tions manifestes. L*esprit humain n*est pas capable d'admettre de
pareilles contradictions; il n*ya point d*homme qui puisse croire
que deux et deux font cinq , parce que l*esprit humaio ne peut pas
croire qu^une chose est et n*est pas en même temps.
Les erreurs des Valentiniens n*étaient donc que des erreurs
•ppu3fées sur des principes faux, mais spécieux , ou des consé-
quences mal déduites des principes vrais.
L^étendue de la secte de Yalentin , le soin avec lequel les Pères
ont réfuté ses erreurs, supposent que ses principes étaient ana-
logues aux idées de ce siècle ; j*ai donc pensé que Texamen da
système de Yalentin pouvait servir ^ faire connaître Tétat de l'es-
prit humain dans ce siècle , les principes philosophiques qui do-
minaient dans ce siècle , Tart avec lequel Yalentin les a concilies
avec le christianisme, et la philosophie des Pères, dont on parle
aujourd'hui si légèrement et souvent mal ^ propos.
Je crois même qu'indépendamment de ces considérations, le
système de Yalentin peut former un objet intéressant pour ceux
qui aiment Tbistoire de Tesprit humain.
On voit, par ce que nous venons de dire, que le système de
Yalentin était un système philosophique et tbéologique , ou son
système philosophique appliqué à la religion chrétienne : exami-
nons ces deux objets.
Des principes philosophiques de Yalentin,
Les Cbaldéens reconnaissaient un Être suprême, qui était le
principe de tout; cet Être suprême avait, selon eux, produit des
génies qui en avaient produit d'autres moins parfaits qu'eux ; ces
génies, dont la puissance avait toujours été en décroissant, avaient
enfin produit le monde et le gouvernaient. Leur philosophie s'é-
tait répandue chez presque tous les peuples qui cultivaient les
sciences. Pylbagore avait adopté beaucoup de leurs idées , et Pla-
ton les avait exposées avec tous les charmes de l'imagination; il
avait, pour ainsi dire, animé tous les attributs de l'Être suprême,
il les avait personnifiés.
La philosophie de Pythagore , celle de Platon , et le système
des émanations , s'étaient fort répandus dans l'Orient; on en trans-
porta les principes dans le christianisme , comme on peut le voir
VAL .1
par un graiiJ nombre d'h^r^ies du premier et Ju second sîëc
on ne cimnaissait poinl d'iulrc pliilosopliie dans l'Orieat, i^i sur- I
toul ï Alexandrie , OJi Vglemin avait émdié *.
Talentin avait M satisfait de ces principes, et ilenlrepril de les
transporter dans 11 religion chrétieeue ; mais il suivit uoemélbode
bien dlfTérenle de celle des Cnosliques et des autres Itérétiques *.
Le spectacle des mallieurs qui alîligenl les bomines, leurs vices,
leurs crimes, la barbarie des puissans envers les Faibles, avaient
fait sur Talentiii des Impressions profondes , el il ne pouvait croire ,
que des hommes aussi médians fussent l'ouvrage d'un Dieu juste, 1
suint et bienfaisant. Il crut que les crimes des hommes avaient 1
leurs causes dans les passlous , el que les passions naissent de )■
matière; il supposa qu'il j avait dans la luatière des parties de <
différentes espèces et des parties irrégulières qui ne pouvaient
s'ajuster avec les autres. Valeniin crut que Dieu avait riïuui les'
parties régulières et qu'il en avait formé des corps réguliers ; mais
les parties irrfguliËrea que Dieu avait négligées étant restées
iiiéli'«s avec les productions organisées et régulières causaient
des désordres diins le monde ; Valeniin croyait par ce niojen con-
cilier la Providence avec les désordrettijui régnent sur la terre ■.
Mais tout existnnt pur l'Être suprême , comment avait-il pro-
duit une matiËre indocile i ses lois T Comment cette matière pou-
vait-elle être la production d'un esprit iaBoimenl bon?
Cette difficulté détermina Valentln k abandonner son premier <
sentiment, ou à joindre ï ses premières idées les principes da
système des Platoniciens.
Ou supposait , dans ce système , que tout était sorti du sein
même de r£tre suprême par voie d'émanation, c'est-i-dire comme
la lumière sort du soleil pour se répandre dans toute la nature ,
un , en suivant une autre comparaison prise chez les Indiens,
comme les lils de l'araignée sorlentde son corps.
La production du monde corporel est une des grandes diflicul-
lés de ce système ; car, tout venant de l'Intelligence suprême par
voie d'émanation , comment en éiait-îl sorti autre chose que des
Il la matière pouvuit-elle exister f
lira
t Vah:iil., Diswri. apud Crab, Dis erl. pp. ssr, !, p. 35.
57 r» VAL
Pour expliquer, dans ce système, b production du monde cor-
porel, on rechercha tout ce qu*un esprit pouTsût produire ; on fit
dans rhomme même toutes les observations qui pouvaient ialre
connaître les productions dont un esprit est capable.
On remarqua que notre esprit connaissait qu^il formait Iks
idées un des images des objets : cet images étaient des étrcs
réels , produits par Tesprit , et distingués de lui , puisqu'il les
considérait comme des tableaux placés hors de lui. On crot, par
ce moyen , expliquer comment TÊtrc suprême avait produit des
esprits.
Nous n'avons pas seulement des idées , nous sentons eu nous-
mêmes des passions qui nous transportent, dei désirs violens qoi
nous agitent ; ces désirs, ces passions ne nous éclairent point et ne
représentent rien ; ce sont donc , à proprement parler , des forces
motrices qui sortent du fond de notre iHme : comme Tâme après ces
agitations rentre dans le calme, on crut que ces désirs ou ces forces
motrices en sortaient , et Ton crut concevoir par-là qu*un esprit
pouvait produire des forces motrices ou des esprits moteurs et
agités sans cesse.
Nous ne sommes pas toujours agités par les passions ou jouis-
sans d'un calme serein ; nous éprouvons des états de langueur, de
tristesse, des sentimens de haine ou de crainte, qui obscurcissent
nos idées et semblent nous ôter toute action : ces affections qui
sortaient encore du fond de notre âme parurent avoir avec la
matière brute et insensible une analogie complète , et Ton crut
pouvoir faire sortir d'un principe spirituel des esprits et de Ja
matière.
Mais , comme rintelligence suprême n'éuit point sujette aux
passions humaines, il n'était pas possible de faire sortir le monde
immédiatement de cette intelligence, et Ton imagina une longue
chnîno d'esprits, dont le nombre était, comme on le voit, absolument
arbitraire.
Voilù» ce me semble, la suite des idées qui conduisirent Tesprit
des philosophes au système des émanations que Valentin adopta :
voyons comment il en appliqua les principes au christianisme.
Application des principes de Valentin à la religion chrétienne.
La religion chrétienne nous apprend que la première produc-
ion de TÈire supré me est son Fils ; que c'est p:ir ce Fils que tout
VAI-
a été créé , qn'il jr a un Saiat-Espril, une sageue et une inEuité
d'esprils de dilTérens ordres.
Voilii le pPL-mier objet que Valeolio envisagea dans la Ttligioo
clirêiienDe ; il ne commeuça donc pas l'cxpliiraiion de l'origino du
monde comme Moïse nous la Ai-cv'il , mais piir la prodnclJon dll.j
Verbe, de la sagesse et des esprits inrërieurs;!! fit ensuiia soriîf 1
des premières productions le monde corporel ei les esprits hu- ■[
mains ; enfin il expliqua comment ces esprits sont ensevelis dan
les ténèbres, commenlils s'unissent ï un corps, etcomnei
tous les esprits purs il s'est lormë un Suuveur qui a dâlirré II
hommes des ténèbres et les ii rendus capables de s'élever ju^
qu'aux esprits purs et de jouir de leur bonheur : toiei loutea ai
L'Etre suprême est un esprit infini, toul-puissani , exislint p
lui-même; lui seul est piir conséquent éternel, car tout ce q
n'existe pas par lui-même a une cause et a commencé-
Avant l'époque oii tout a enmoiencé , l'f.lre suprême existait
seul : il se contemplait dans le silence et dans le r^pos, il etistail
seul avec sa pensée; il n'y avait, selon les Plaloiiielens, ri
phose d'essentiel â un esprit, el ils pensaient que nous-
lorsque nous nous examinions, nous ne trouvions en doui
plus que notre substance et notre ppotiée.
Après une inlinité de siècles, l'Être suprême sortit pour ii
a repos ; il voulut communiquer l'existence il d'uuin
^ttifes.
: vague de communiquer l'existence n'aurait rien
^dult si la pensée ne l'avait dirigé et ne lui eU fixé pour i
:n objet et tracé un plan : il fallut donc que l'Etre supcén
{OnfiAt pour ainsi dire son désir ï sa pensée , afin qu'elle |
*viger l'exécution ; et c'est ce que Valenlin exprimait d'ur
*' % figurée en disant qne l'Être suprême ou le Bi/tot avait
K tomber ce désir dans le sein de la pensée.
Li pensée avait donc formé le plan du monde: ce plan est Ij
f XHtnde intelligible qne les Platoniciens imaginaient en Dieu.
l.'f.iTÈ suprême , trop grand pour exécuter lui-même son
[ Beîn, avait produit un esprit , et l'avait produit par sa seule p<
I tée ; car un esprit qui pense produit une image distinguée de li
I el cette image est une substance dans le système des V '
,e elle parait l'avoir été dans le teniimenl de quelqui
P'Ptatoniciens.
i9
578 VAL
L*espnt produit par la pensée (Hait une intelligeiice capable
de comprendre son dessein, et douée d^un jugement infaillible
pour en suivre Texécution.
Ainsi, selon Yalentin, Tesprlt et la Térilc étaient sortis du sein
de la pensée; c* était en quelque sorte le fruit da mariage de
rÉtre suprême avec la pensée.
Uesprit, ou le fils unique, connut qu^il était destiné à produire
des êtres capables de glorifier TÊtre suprême , et vit quUl fallait
que ces êtres fussent capables de penser et eussent la vie : c*esl
ce que Valentin exprimait encore d'une manière figurée, en disant
que le mariage de Tesprit et de la vérité avait produit la vie et la
raison.
La raison et la vie étant produites, Tesprit créateur connut qu^il
pouvait former des hommes , et avec les honfmes composer une
société d'êtres pensans capables de glorifier TÊtre suprême; et
c'est ce que Valentin exprimait en disant que du mariage de la
raison et de la vie étaient sortis l'homme et TËglise.
Voilà les huit Ëons ou les huit premiers principes de tout, selon
Valentin; il prétendait les trouver dans le commencement de
l'Évangile de saint Jean.
Tous ces Éons connaissaient Dieu ; mais la connaissance qu'ils
en avaient était bien inférieure à celle qu'en avait l'esprit ou le fils
unique.
La sagesse, qui était le d(Tnier dos Éons , vit avec peine la
prérogative du fils unique ou de l'esprit; elle s'efforça déformer
une idée qui représentât l'Èire suprême; mais l'idée qu'elle s'en
forma n'était qu'une image cunfuse. Ainsi, tandis que les produc-
tions des autres Éons étaient des substances spirituelles et intel-
ligentes, l'effort que la sagesse fit pour former l'idée de TÊlre
suprême ne produisit qu'une substance spirituelle , informe , et
d'une nature absolument différente des autres esprits.
IjSl sagesse, étonnée des ténèbres dans lesquelles elle s'était en-
sevelie , sentit son erreur et sa témérité ; elle voulut dissiper la
nuit dont elle était environnée ; elle fit des efforts , et ces efforts
produisirent dans la substance informe des forces ; elle sentit
qu'elle ne pouvait dissiper ses ténèbres, et qu'elle devait atten-
dre de Dieu seul la force nécessaire pour recouvrer la lumière.
L'Être suprême fut touché de son repentir: pour la rétablir dans
sa première splendeur et pour prévenir ce désordre dans les au-
tres Éons , l'esprit tu le fils unique produisit le Christ, c'est-à-
VAf. S7»
dire une inlpUigence qtii Éclairai! les Éodr, qui leur apprîl nirils
nu |iouTaieat connaître l'Kire suprême, et uu Siiiul-Esiiril qui
leur Ql sentir tout le prix de leur élnl et tout tx qu'ils devaipot i
rfitre suprême ; il leur apprit i le louer el II le rcuiercicr.
Les Éoos, par ce mojcD , Turent QxÉs dam leur i^tal , et foroiè-
renl une société d'esprits qui étaient parrailem eut dans l'ordre.
Ces esprits connurent leurs perfections ; et comme la connais-
sance d'un esprit produit une iinuge distinguée de cet esprit, les
Ëons , eu connaissant leurs perfections réciproques , produisi-
rent un esprit qui était l'iuiai^e de leurs perfections el qui les réu-
nissait toutes.
Cet esprit était donc le chef naturel des Ëons ; ils connurent
qu'étant leur chef, il falluitdes ministres pour eiécutcr ses ordres:
ils en produisirent, et ces minisires sont les anges.
Cependant l'esprit que la fi.iBesse avait produit restait easeTclî
dans les ténèbres ; le lils unique ou l'intelligence , après avoir
éclairé les Êons, donna h cet esprit iufornie la faculté de connaî-
tre: il ne l'eut pas plus tôt reçue, qu'il aperçut son bîenraiteur 1
mais le fils unique ou l'iuielligence se relira, et laissa cet esprit,
ou la GUe de la sagesse, avec un désir violenido le connaître; mais
son essence ne le lui permettait pas. Elle lit, pour se le représenter,
les plus grands eOorls, en sentît l'inutilité et fut accablée da
tristesse.
Un esprit ue fait point d'efTorl sans produire quelque cbose bon
de lui; ainsi de l'agitation de cet esprit (ou de l'Entjme) se pro-
duisit la tristesse : elle sentît ensuite que ses efforts l'aTiient
affaiblie ; elle craignit de mourir, et produisit la crainte, l'inquié-
tude, l'angoisse. D'autres fois elle se rappelait la beauté de l'iDielU-
gence qui l'afait douée de la faculté de counalLre , celle image la
réjouissait , et sa joie produisait la lumière; enfin elle retombait
dans la tristesse.
Toutes ces productions sont des subsLinces spiriluelles, mais
qui n'ont point la faculté du connaître: ce sont des mouveniens
ou des forc«s motrices, qui se resserrent ou qui se dilatent.
Pour faire cesser les efforts et la angoisses de la fille de la
■agessc, rintelligence envuja lu Sauveur vers Àchamoi : le Saa-
veur l'édaira et la délivra de ses passions ; Acliumot délivrée de
ses passions commenta it rire, el son rire fut la lumière.
Dans le moment oii Arhamol ftil délivrée de ses passions, elle
produisît un iitv surnulurcl qui fut le fruit de la lumière dont
58J VAL
elle avait été 6clair;'e el de h joîe qu'elle en avait ressentie.
L'&me qu*elle produisit fut donc un &ine sensible et intelligente.
Toutes les passions produites par Achamoi étaient encore con-
fondues et formaient le chaos, le Christ les réunit et Tonna la ma-
tière, il sépara la lumière des autres passions» et la terre parut.
Ce nouveau monde corporel fut dont composé de deox parties,
dont Tune renfermait la lumière et Tautre la terre.
Dans la région de la lumière éuit Tàme €[tx*Aehamûi aiaît
produite et qu'elle avait douée de la sensibilité et de la faculté
de connaître.
La première affection de cette âme fut le sentiment de son exi-
stence; avant d'avoir rien connu, elle sentit qu'elle existaiu
Comme toutes les affections de l'àme produisent hors de l'âme
des êtres semblables à ces affections, l'âme qui habitait dans la
région de la lumière produisait une âme qui n'était que sensible.
Achamot unit à cette âme sensible une âme spirituelle, et de la
réunion de ces deux êtres il se forma un être sensible et intel-
ligent.
Les sentimens de joie, de tristesse, etc., ne sont, dans les prin-
cipes de Valentin, que des efforts ou des forces motrices; ainsi
une âme sensible est douée d'une force motrice: l'âme sensible et
Tâme spirituelle réunies forment donc un être capable , non-seu-
lement de connaître et de sentir, mais encore de mettre en mou-
vement la matière , d*agir sur elle et d'en recevoir les împres-
sions.
11 connut les différentes manières dont il pouvait agir sur la
matière et dont la matière pouvait réagir sur lui ; il forma donc
des corps organisés , il y logea les âmes sensibles et spirituelles ,
et produisit sur la terre les plantes , les animaux, les hommes.
Cet esprit est le créateur, selon Valentin, et non pas l'Être su-
prême, qui , étant un esprit exempt de toute passion , ne peut
agir sur la matière el la façonner.
L'esprit qui habitait dans la région lumineuse , et le créateur
qui occupait la région de la terre étaient composés d'une partie
spirituelle; ils ne connaissaient pas l'Être suprême, ils ne voyaient
rien au-dessus d'eux : ainsi le Démiurge voulut être regardé dans
les cieux comme le seul Dieu, et le créateur fit la même chose
sur la terre.
Les hommes sur la terre vivaient donc dans une ignorance pro-
fonde de l'Être supromo; le Sauveur est descendu pour les éclairer:
VAL
t lorsque Im lioninies Rpirilaeb se seront perrectioonés par b do«
trlnit qu'il a efiseignée, U 6n île toutes cboses sera, ilisaien
lentiniens; alors, lous les esprits nyant re^'u leur perrection, AcfttfÇ^
îlUf, leur mère, pnssero de la région moyenne dans le Plérome, et
lera raarii^e au Sauveur forni^' pv les Ëoas et leur chef : toilà
^époun el l'épouse dont l'Ëcrilure nous parle.
Les hommes spirituels , dépouillés de leur âme cl deve.
prïls purs, entreront aussi dans le Plérome, et seront lesépoiis
des Anges qui environnent le Sauveur.
L'auteur du monde passera dans la région moyenne oti était s-
; il j sera suivi des ûmes des justes qui n'auront poïal
Clé élevés au rang des esprits purs, et qui conserveront lear i
lililé ; ils ue passeront poiut la moyenne région : '— *
'-d^nimal n'eutrcra dans le Plérome.
Alors le feu, qui eil cacbé dans le monde, paraîtra, s'allumera,
EODsumera toute la matière, et se consumera uvec elle, jusqu'à
■■'anéantir.
Dans le système de Valcntln, l'Être suprême élail un par espril
■^ni se EOnieoiplait, et qui trouvait son bonheur dans la coanais-
tince de ses perfections : c'était It le modèle que tous les esprits
devaient imiter, tous devnient tendre i. cette perleci ion sans;
prétendre ; mais ils en approchaient autant qu'il élâît passible ï'^
■ne créature lorsqu'ils s'étaient délivrés de toutes les passîoni
Dans le système de Valentiii , ces passions étaient des pui
Unres aveugles et des substances étrangèns i l'ùme; il blld
que rbomuie veillM sans cesse pour les diasser de si
«r ce moyen l'bomme devenait un pur esprit, e'est-il-dire u
intelligence qui n'avait que des idées el point de sentiment ;
tait alors que i'Sme devenait un séjour digne du Pérc céleste ',
' Vatenlin baptisait uu nom du Ptre de toutes cboses qui était
'fnetmuu de la vérité , mère de toutes choses , de Jésus-Cbrîst
jnii était descendu pour radicter les vertus. Ce sont vraisembb-
wmenl ces manières d'adininîMrcr le baplén
^^Biissance i la coutume do rebapiioer et â l'erreur des 1
Iran,, 1. 1, c. S. Tert advcrsùs VuleuL Epiphi Mussuct, édil. <
^Iraiii, Dissert., art. 1. Clein. Ale^. Strom., I. 9, p. AOO. Pln)iitt„
^éodorcl, I. i. Ho'rrt. Fah., c, 7. Aug., Du bn'r , c. 3t. DamascciLfl
■Oc UiT-, c. 37.
682 VAL
Il est inutile de s^arréter à réfuter ces erreun » qai portent
toutes sur une fausse idée de la toute^puissance de l'Être Miprtee.
Tout le système valentioien se dissipe lorsqu'on fait aUemiooqoe
rÉtre suprême existant par lui-même doit aToir une puissanoe
infinie, et n*a besoin qued*un acte de sa volonté pour laireexis*
ter des esprits et des corps, et qu*il peut imprimer à la matièie
tous les mouvemens possibles.
Les Pères ont réfuté solidement ces erreurs» et fait voir l'abas
que les Valentiniens faisaient des saintes Écritures en faveur de
leur sentiment. 11 n'est pas possible de copier ici tout ce qu'ils
ont dit ; mais nous ne pouvons nous dispenser de faire quelques
remarques sur leurs ouvrages contre les Valentiniens. 1* Us j
font voir une métaphysique profonde et une grande force de rai-
sonnement. 2* ils prouvent que toute l'Église chrétienne pro-
fessait la croyance qu'ils défendent, et qui est la même que celle
d'aujourd'hui. 3" 11 est évident que ces Pères n'étaient pas des
Platoniciens, et que les Chrétiens n'avaient point emprunté leurs
dogmes de ces philosophes ; car, je le répète, c'est, si je peux
m'exprimer ainsi, par la masse de la doctrine de TËglise qu'il faut
juger de celle des Pères, et non pas par quelques passages dé-
tachés de leur place et dépouillés des explications que les Pères
eux-mêmes ont données de leur sentiment ^.
On ne sait quelle était l'origine de Valentin ni précisément quand
il enseigna son erreur ; il paraît qu'il fut célèbre vers le milieu du
second siècle *.
Il eut beaucoup de disciples ; les plus célèbres furent Ptolomée,
Secundus, liéracléon, Marc, Colarbasse, Bassus, Florin, Blastus,
qui répandirent sa doctrine, et formèrent des sectes souvent éten-
dues, et qui étaient fort nombreuses dans les Gaules du temps
de saint Irénéc, qui nous a donné le plus de lumières sur cette
secte ^.
Voyez à l'article Marc, les changemens qu'on fit dans ce
système.
1 TerU Inen. Clem. Alex. Epiph., ibid.
2 Voyez, sur cela, Pearson, Vind.; Ignat., part, 2, c 7; Dodwel ;
Illîg., De hxres...; Grabbc, Spicilrg,
5 Thomasius a prétendu que la secte des VaK>iUiiiiens a div si nom-
hvQWfXi qu'elle avait presque fait équilibre avec TÉglise catholique ; mais
c'est un sentiment destitué de preuves dans Thomasius et coutraire ù
lou.s 1rs moDuniciis de riiis!oiro ccclcsiasliquc.
mi qui tomba prMque il ses pieds lui fit
faÎTe de prorondes réOei ions sur h (rt^Wné de \» vie Iminaiueel
surle néant des biens de 1d lerre. )1 voulu! y renoncer pour ne
l'occuper quedcsonsalui, eidistribua tous ses bieasaux pauvres;
il toulul iuspirer aux autres le dùtachemenl du monde «t le dé-
pouiUement des richesses; Il exhorta, prêcha, el, i Turce de pt&-
clier le désiotéresaemenL, il se persuada que la pauvreté évan-
n ne pouvail
■e cbrélien, i
^ periuelUit
^Valdo.el
I appelait lei
D lan((ue vul-
g^lique , sans U(|uelle i
de rien posséder.
Plusieurs personnes suivirent l'exemple de Pier
formËreni , vers l'an 1136, une secte de gens qu'o
pauvres de Lyon, !i cause de la pauvreté dont ils faisi
siuo. Vaido leur expliquait le nouveau Ti^^ument ri
gaire, etdtiviut l'urdclede ce petit truupeau.
Le xèle de ses disciples s'échauOii bientôt, et ils ni
tèrent pas de pratiquer la pauvreté , ils la prècbëre
gËrent en ii[iâtre8. quoiqu'ils ne Tussent que de simples laïques
sans missinu. L'Ëglise de Ljon, sans coudaniner leurs natib «1
leurièli!, voulut les retifernter dans de justes bornes ; mais VaIdo
et seiii disciples avaient une trop haute idi-e d'eni-mémes pour
déférer aux avis de l'Lglise de Ljoo. Ils ptiHendirenl que tous
les chrétiens devaient savoir l'Écriture , que tous étaient prêtres
et que tous Ëtaient obligés d'instruire le procbaîn. Fondés sur
ces principes qui renversaient le gouvernement de toute l'église,
les Vaudois continuèrent i prScher et ï se dicbatncr contre le
der}{é. Si l'Église leur imposait silence, ils répondaient ce que
les apAtres avaient répuodu au sénat des Juifs , lorsqu'il leur dé-
fendait de préi-her U réaurrcctiun de Jésus^riïl : Faut-il oMir
à Dieu OH aut: hommfs .'
Les Vaudois savaient l'Écriture, Ils avalent un extérieur uior-
tiSé, leur» nceurs étaient austères, et chaque prosélyte devenait
un docteur.
D'un autre cAté la plus gronde partie du clergé, sans lumièr«
et sans mwurs, n'iippnsaîi niinmunétnrnt aux Vaudois qui- son
nuliirité. U-f, Vaudois lireul des progrès rapiiiea, «t, apré» avoir
cniplojétoiu les luénagenens (Msiiblcs, la pape lèse:
el les condamna iivrc tmis Ic^ nuircn hérétique'.
alors U France.
I
is4 VAU
Lm foudres de l'ÉgUso imli-rent les Yau lois ; ils ;itt>qiitre(it
l'aitioril^ qui Ifs condumnail.
Fuudts sur h in^eeESiit du ri.'noui:i?r b loule possession pour
être TTuiuienl dirâtien, Yaldn et i«s disuiples prétt'ndircDI qtie
l'Rglise romnine nviiil cessii d'Être lu vraie Eglise ilepuis qu'rilr
avait des possessions et des hiens temporels; que ni le pape, ui
les érèqaes, ni les atibês, ni les clercs, De devaient posséder nt
biens-funda, nidÎBnilésleinporcIlcs, ni 6ifh, ni droits rfguliens ;
que les papes, qui avaient approuva ou eiciiL^ I» princes pour
birc la guerre, éluienl de viiis homicides, et par i'onM><|ucnl sau
auturiiâ dans l'Ëjjlise.
De lii les Vaudois concluntvtil qu'eux seuls étaient !• rrart
E|;listt, puisqu'eui seuls pratiquaient et eiiscïguaicut la pauTnilf
évangélique.
Après s'être ainsi Établis comme la seule vraie t.^\\s<: , ils prt-
icndireal que les QdËles étaieul égaun , que tous étaii-nl prfires,
que tous avaient le druit d'iustruirc, que les prêtres et les ét^nrs
it pas celui de les eu empfieJier. Ils prouvaient toutes cei
prétentions pur quelques passages de Ttcriture : tel est le passage
' it Matthieu , dans lequel Jésus-Christ dit ï ses disciple*
qu'ils Eont tous frères ; celui Je saint Pierre qui dit aux Sdètet:
Ileudei-vous mutuel lui u en t service, ctiacuu selon le don qu*il a
reçu, comme étant de fidolcs dispcusiteurB^esdifrérenteaBrlce*
de Dieu ; le passage de suint Marc uti Jésus-Christ défend k ses
disciples d'empècber un homme de chasser les démons au nom de
J^su^Iirist, quoique cet horniue ne suivit pus ses upûlm '.
Les Vaudois prétendirent donc former une %lise nouvelle qui
était la vraie Ëg"^ ^^ Jiisus-Clirisi , qui , par cons/'quent, kttil
seule le pouvoir d'excommunier et de d:iuiner r par ce mojen , Rs <
calmèrent les consciences alarmées par les foudres Aç l'ËgliM.
ViiUT dctuclier plus enii^ucemeol les Gdf^Ies de l'Rglise , iU cob-
damnferent toutes ses cÉrémoities : b loi du jeune, hnikemUtle
la eoofussion , les prières 'pour les maris , le culte des mIbISj et
en un mot tout ce qui pouvait concilier anx pasleurt légitimes le i
respect et rattachement des peuples; enfin, pour cnlnilenir les
peuples dnus l'igDurance, ils condamnèrent les éludes ci les aca-
mme des écoles Je vauilé.
Tel fut le |dnn de religion i]ue les V:iiiJuis îmai^intienl a
, sa. IVim. l'elrl, c. !i, i. m.
L
YALï iBô
diTendi'o contre les anaili^mcs ilo l'Ëglise cl pour se Tuire dc^s
(irosËlytes.
Ils ne fondaient celle prétendue rérorme, ni sut h irailiiion ,
ni sur l'ïutorilë des conciles , ni sur les Écrits des Pères , mais
sur quelques passages de l'IUcrilure mal inlcrpriHés; ainsi Valdii
et ses disciples ne forinèrenl point une chaîne de tradition qui
remontât jusqu'à Claude de Turin.
Les Vauduis renourelèreni : l* les erreurs de Vigilance sur les
cérémonies de l'Ëglisc , sur le culte des saints el des reliques , et
sur la bîérarcliie de iTglise ; 3° les erreurs des Donalislcs sur la
nullité des sacremens conférés par de mauvais minislres el sur
la nature de l'Église ; 3" les erreurs des (conoelasles ; i- ils ajou-
tèrenl il ces erreurs que l'Eglise ne peut posséder des biens tem-
porels.
Nous avons réfuté ces erreurs dans les articles des dilTévens
hérétiques qui tes ont avancées , et l'erreur qui est partiuuli(:rc
aux Vaudois ne mérite pas une réfulation sérieuse.
Les Vaudois n'appuyaient leurs erreurs que sur quelques pas-
sages de l'Ëcriturti pris i la bltrc. Plusieurs hérétiques , avant
eux, avaient déjii suivi celte méthode; maïs ces hérétiques avaient
fait peu de progrès dans les premiers siècles de l'Église, parce
que les Sdèles et les ministres de l'I^glise étaient éclairés dans ces
siècles. Mais, au commcncemeut du deuxième siècle, les peuples
et les eccliisiastiques étaient ignorans , et le sophisme le plus gros-
sier était , pour la plupart des ecclésiastiques , une difficulté In-
soluble , et pour le peuple une raison évidente.
Il y avait cependant des hommes respeclables par leurs lumières
et par la régularité de leurs mœurs; mais ils étaient rares, et ils
ne purent empêcher que les Vaudois ne séduisissent beaucoup di!
inonde.
Comme la doctrine des Vaudois favorisait les prétentions des
seigneurs , el tendait ï remettre eoire leurs mains les possessions
des églises, les Vaudois furent protégés par les seigneurs che»
lesquels ils s'étaient réfugiés après avoir M chaaéi de Ljon.
Ces seigneurs, sans adopter leurs erreurs, étaient bien sises de les
Opposer au clergé, qui condamnait les seigneurs qui avaient dé-
pouillé les églises.
I.«s Vaudois , chassés du territoire de Lyon , trouvèrent donc
des protecteurs, et se firent un grand nombre de prosélytes.
Valdo se retira avec quelques disciples dans les Pays-Bas, d'uSi
586 VAU
il répandil sa seclc dans la Picardie et dans diflérente» prorineei
de la France.
Les Vaudois n^élaient pas les seuls hérétiques qui troablassnt
la religion et TÉtat; les Albigeois ou les Manichéens » les Publi-
Gains ou Popélicains , les Henriciena , etc. » avaient formé de
grandes secles en France.
Louis Vil fit venir des missionnaires pour les convertir; mais
ils prêchèrent sans succès contre les erreurs des Vaudob. Phi-
lippe-Auguste , son fils , eut recours à rautorité ; il fit raser plss
de trois cents maisons de gentilshommes, oii ils s*assemblaient, et
entra ensuite dans le Berry où ces hérétiques commettaient
d'horribles cruautés. Plus de sept mille furent passés au fil de
Tépée ; beaucoup d'autres périrent par les flammes , et, de ceux
qui purent échapper, les uns qu'on nomma dans la suite Tnrla-
pins allèrent dans le pays vallon , les autres en Bohème ; les
sectateurs de Valdo se répandirent dans le Languedoc et dans le
Dauphiné.
Les Vaudois qui s'étaient jetés en Languedoc et en Provence
furent détruits par ces terribles croisades que l'on employa contre
les Albigeois et contre les hérétiques qui s'étaient si prodigieuse-
ment multipliés dans les provinces méridionales de la France.
Ceux qui se sauvèrent dans le Dauphiné, se voyant inquiétés par
l'archevêque d'Embrun , se retirèrent à Val-Louise et dans les
autres vallées où les inquisiteurs les suivirent. Tous ces eflbrts
n'aboutirent qu'à rendre les Vaudois plus dissimulés; enfin, fati-
gués des poursuites de l'inquisition , ils se joignirent aux débris
des Albigeois ; ils se retirèrent dans la Gaule cisalpine et entre les
Alpes , où ils trouvèrent une asile parmi des peuples qui étaient
infectés des hérésies du neuvième et du dixième siècle.
Alphonse, roi d'Arajçon, fils de BiTcnger IV, comte de Barce-
lone et marquis de Provence , ayant chassé de ses États tous les
sectaires qui ne se converlirent pas, les sectaires provençaux se
retirèrent aussi dans les vallées.
Ils n'étaient pas poursuivis avec moins de vivacité en Bohême
et dans toute l'Allemagne , d'où ils se sauvèrent aussi dans les
vallées , où se rendaient tous l«s jours d'autres hérétiques chassés
de Lombardie et d'Italie; ainsi ces différens bannissemens for-
mèrent dans les vallées de Piémont un peuple d'hérétiques qui
adoptèrent la religion des Vaudois.
Le pape rxhorlii le r<»i de France , le duc de vSavoie, le gouver-
VAU 687
neroent do Dauphiné et le conseil delphinal à travailler à les en-
gager à renoncer à leurs erreurs, et même à les y forcer. Les
exhortations du pape eurent leur effet , on envoya des troupes dans
les vallées.
Quelques années après, Louis XII, passant en Italie, se trouva
peu éloigné d'une retraite de ces hérétiques appelée Yalputes; il
les fit attaquer, et il y eut un carnage horrible. Louis Xll crut
avoir anéanti Thérésie , et donna son nom à la retraite où il avait
fait périr un si prodigieux nombre d'hérétiques : celte retraite se
nomma Val-Louise.
Les Vaudois se retirèrent dans Tintérieur des vallées , et dans
ces retraites bravèrent la politique des légats, le zèle des mission-
naires , les rigueurs de Tinquisition et la puissance des princes
catholiques.
On vit des armées entières consumées dans ces affreuses re-
traites des Vaudois, et enfin on fut obligé de leur accorder dans
ces vallées le libre exercice de leur religion sous Philippe Vil ,
duc de Savoie , vers la fin du quinzième siècle (i48S).
Les Vaudois, se croyant indomptables, et non contens du libre
exercice de leur religion , envoyèrent des prédicateurs dans les
cantons catholiques. Pour réprimer leur témérité , le duc de Sa-
voie envoya à la tête de cinq cents hommes un ofEcier qui entra
subitement dans les vallées des Vaudois, où il mit tout à (eu et à
sang. Les Vaudois prirent les armes, surprirent les Piémontais et
les tuèrent presque tous; on cessa de leur faire la guerre.
Vers le milieu du seizième siècle, OEcolampade et Hucer écri-
virent aux Vaudois pour les engager à se réunir aux Églises
réformées, et malgré la différence de leur croyauce Tunion se
fit. Le formulaire de foi portait :
i* Que le service de Dieu ne pourrait être fait qu*en esprit et
en vérité ;
2" Que ceux qui sont et seront sauvés ont été élus de Dieu
avant la création du monde;
3* Que quiconque établit le libre arbitre nie la prédestina-
tion et la grâce de Dieu ;
A" Que Ton ne peut appeler bonnes œuvres que celles qui sont
commandées de Dieu , et qu'on ne peut appeler mauvaises que
celles qu'il d« fend ;
5* Qu'on peut jurer par le nom de Dieu, pourvu que celui qui
jure ne prenne point le nom de Dieu en vain ;
o
588 VAU
G"" Que la confession auriculaîre n^est {M>lnt commandée de
Dieu, et que quand on a péché publiquement on doit confesser si
faute publiquement ;
7* Qiril n*y a point de jours arrêtés pour le jeûne du chrétien ;
8<> Que le mariage est permis à toutes sortes de personnes, de
quelque qualité et condition qu'elles soient;
9" Que celui qui n*a pas le don de continence est obligé de se
marier ;
10* Que les ministres de la parole de Dieu peuvent posséder
quelque chose en particulier pour nourrir leur famille ;
11° Qu'il n> a que deux signes sacramentaux , le baptême cl
Teucbaristie.
Les Vaudois ayant reçu ces articles avec quelques autres de
peu de conséquence, et se croyant plus forts par cette union arec
les Protestans d'Allemagne et les Réformés de France, résolurent
de professer cette nouvelle croyance : ils chassèrent des vallées
dont ils étaient les maîtres tous les curés et les autres prêtres ;
ils s'emparèrent des églises et en firent leurs prêches.
La guerre de François !•' contre le duc de Savoie favorisait
leurs entreprises ; mais aussitôt que ces deux princes eurent fait
la paix, Paul 111 fit dire au duc de Savoie et au parlement de
Turin que les ennemis qu'ils avaient dans les vallôes étaient beau-
coup plus à craindre que les Français, et qu'il f;illait pour le bien
do rtj?lisp et de l'État travailler à les exlerroîner.
Sa sainteté ayant envoyé , peu de temps après , une bulle qui
enjoignait aux juges de ce parlement de punir rigoureusement
tous ceux qui leur seraient livrés par les inquisiteurs, ils exécu-
tèrent cet ordre, suivant en cela l'exemple des parlemens de
France: on vit brûler tant de Vaudois dans la ville de Turin, qu'on
eût dit que son parlement voulait se distinguer des autres par
celte manière do procéder.
Los Vaudois se maintinrent cependant dans les vallées, et le
duc de Savoie, trop faible pour les détruire, eut recours à Fran-
çois !•', qui envoya des troupes en Piémont pour cette expédition;
ces troupes arrêtèrent un nombre prodigieux de Vaudois qui
furent brûles.
François î*' mourut : Henri II laissa les Vaudois en paix, et ils
en jouirent jusqu'à la paix qui termina la guerre d'Espagne et de
la France, et qui rétablit le duc de Savoie dans ses États.
Le pape fit faire au duc de Savoie des reproches sur son peu
i
VAU :.8fl
lie zèle contre les Yaudois, l'i ce prince envoj'ii contre eux des
Iroupes ; mais ils firent une résistance qui détermina le ilue }| t«ar
accorder encore une rois la piix dont ils jouirent ju«qu'eo 1S70 ,
êpo(|ue 0(1 le duc Emmanuel entra dans une ligue oÂensiTe avec
plusieurs princes de l'Europe contre les Protesta ns. Dèsqu'elleTuI
signée, il défendit aux VaudoU des'assembler,à moins que !e gou-
vernement n'assistit à leurs assemblées.
Ils étaient traités bien plus sévèrement en France , et ils se
retirèrent dans les terres neuves , d'oii ils furent bienlûl chassés
par le zèle des missionnaires , aidés et soutenus p»r les gouver-
neurs des provinces.
Ces expéditions et les guerres du duc de Savoie avaient dépeu-
plé ses Ëtais ; il était dans l'impuissance de réduire les Barbela
ou Yaudois ; il prît le pavlî de les tnlérer, maïs ï condition qu'ils
n'auraient point de temples et qu'ils ne pourraient Taire venir de
ministres étrangers.
Cramn el demanda pour eux une tolérance plus étendue, et leur
envoja de l'argent, avec lequel ils acIietèrcnL désarmes, et la
guerre recomnieni;a entre le duc de Savoie et les Vaudois ; les
Tallées furent encore inondées du sang des catholiques et des
Vaudois ; les cinlons suisses proposèrent enCn leur médiation ,
et les Vaudois obtinrent encore la tolérance civile.
Les Vaudois ne purent se contenter de cette tolérance : ils chas-
sèrent les missionnaires , et l'on apprit qu'ils avaient des intelli-
gences avec les ennemis du duc de Savoie.
Amédée prit donc la résolution de cltasser les Vaudois de ses
Étais; Louis XIV seconda ses projets et eovoja des troupes en
Piémont contre les Vaudois; le duc de Savoie donna alors un
édit par lequel il faisait â tous ses sujets hérétiques des vallées
défense de continuer l'exercice de leur religion.
Les Vaudois ne voulurent point obéir, et la guerre recommença
avec beaucoup de vivacité ; mais enfin, après bien des fatigues et
beaucoup de sang répandu, les Vaudois on Barbets se soumirent,
et les Français se retirèrent.
Quelques années après, le duc de Savoie s'étani uni ï la ligue
d'Augibourg révoqua ses édits contre les Barbets, rappela les
fugitifs et leur accorda le libre exercice de leur religion ; depuis
ce temps, les Barbets se sont rétablis cl ont été irès-uiiles au duc
de Savoie contre la Frani-e '.
' Rïst. di-5 Albigeois cl des Vaudois, par le P. BenoU. D'Argenirvi
.190 VIG
UniQUISTES oa Ubiquitaires , Luthériens qui croyaient qu^en
conséquence de Tunion hypostatique de Thumanité avec la divi-
nité, le corps de Jésus-Christ se trouve partout où la divinité se
trouve.
Les Sacramentaires et les Luthériens ne pouvaient s*accorder
sur la présence de Jésus^Christ dans Feucharistie : les Sacramen-
taires niaient la présence réelle de Jésus-Christ dans Teucharistie,
parce qu*il était impossible qu^un même corps fût dans plusieurs
lieux ^ la fois ; Cluslré et quelques autres répondirent que cela
était faux, que Thumanilé de Jésus-Christ étant unie au Verbe, son
corps était partout avec le Verbe.
Mélancthon opposait aux Ubiquistes que cette doctrine con-
fondait les deux natures de Jésus-Cbrist, le faisant immense selon
son humanité et même selon son corps, et qu*elle détruisait le
mystère de Teucharistie , à qui on ôtait ce qu'il avait de particu-
lier, si Jésus-Christ , comme homme , n*y était présent que de la
manière dont il est dans le bois ou dans la pierre.
VIGILANCE, prêtre et curé d'une paroisse de Barcelone, au
commencement du cinquième siècle ou sur la fin du quatrième,
comme le pensent les savans auteurs de Thistoire littéraire de
France, enseigna différentes erreurs.
Les ouvrages dans lesquels il les enseignait ne sont point par-
venus jusqu'à nous ; c'est par saint Jérôme que nous connaissons
ses erreurs, et voici ce que saint Jérôme en dit :
« On a vu dans le monde des monstres de diflerentes espèces :
» Isaîe parle des centaures, des sirènes et d'autres semblables:
» Job fait une description mystérieuse du Léviathan et de BéJié-
» moth : les poètes content les fables de Cerbère , du sanglier de
» la forêt d'Erymanthe , de la Chimère et de l'hydre à plusieurs
» têtes ; Virgile rapporte l'histoiit^ de Cacus ; l'Espagne a produit
» Gérion qui avait trois corps ; la France seule en avait été
» exempte, et on n'y avait jamais vu que des hommes courageux
» et éloquens , quand Vigilance, ou plutôt Dormitancey a pnru
» tout d'un coup , combattant avec un esprit impur contre l'es-
» prit de Dieu; il soutient qu'on ne doit point honorer les sépul-
» cres des martyrs , ni chanter alleUm qu'aux fêtes de Pâques ;
» il condamne les veilles, il appelle le célibat une hérésie et dit
» que la virginité est la source de l'impureté *. »
CoUect. jud„ 1. 1. Reginauld, Dupin, Fleury, deThou. Hisl. de France,
< Hieron. conlr. Vig^ilant. Lettre à Ripaire,
Vigiliiiiceuireulnillelu^l rfpv'n; L-'^talt «..„,........ .,... .......
l on irail et qui ne raisonnait pas; il préréraii un I>od mot k o
bonne Riisoii; il visait Ii la célébrité; il voulut écrire, il allaqaa
tous les ol>jel3 dans lesquels il reuurqiia des faveE qui fournis-
saicnt il la plaisaalerle.
> L!sl-il nécessaire, disall-ll, que tous respeciioi ou mè-me que
( TOUS adoriez je ne sais quoi que vous porici dans un petit vaseî
■ Pourquoi baiser et adorer de la poussière, une vile cendre en-
> velopiiée de linge qui étant impure souille ccui qui en ap-
■ pruehnnt et qui ressemble aux sépulcres blanchis des PhaTisiuns,
• qui n'élaipnl que poussière el que corruption au dedans? Il faut
• donc quc' les âmes des niurljrrs aiment encore lenrs cendres;
• apparemment qu'elles sont auprès d'elles el routent îi l'etilour,
• de peur que s'il venait quelque pécheur elles ne pussent pat
• cnlt-'ndre ses prières étant absentes.
• Nous TO^onaque les coutumes des idolïlres se sont presque
» introduites dans l'Ëglise sous prélente de religion. On j allume
■ de grands cierges en ploiu midi, on j baise, on j adore un pen
> de poussière ; c'est rendre , sans doute , un grand service aux
> marljrs que de vouloir éclairer avec de méchans eiei^es ceux
> que l'Agneau assis sur son trône éclaire avec toute l'éclat de
• Pendant que nous vivous,'nous pouvons prier les uns pour les
• autres; mais après noire mort les prières que l'un fuit pour
> l'autre ne sont pas écoulées; les martyrs mêmes demandent sans
' l'obtenir que Jéaus-Christ venge leur sang,
• Comment peut-on concevoir qu'un peu de poussière produise
" tous les prodiges qu'on raconte , el quel serait l'objet de ces mi-
I racles qui se Tont au milieu des iidËlcs ? Les miracles ne peuvent
■ servir qu'l éclairer les iniidèlcs; je tous demande que vous
■ m'expliquiez i:onimenl il se peut Taire qu'un pou de poussière
• ait Unt de vertu.
• Si tout le monde se renferme dans des cloitres , par <pii les
■ églises seront-elles desservies?"
Vigilance attaquait ensulto le célibat et les vœui comme des
sources de di^sordres *.
On peut donc réduire îi trois chefs les e
6U2 ^iG
attaquait» i» le culte des saints» 2« celui des reliques» 3* le céli-
bat «.
Les ProtesUiDs ont adopté toutes ces erreurs ; nous allons les
examiner.
$ 1. — Du culte des saints»
Le culte des saints a deux parties, Thonneur qu^on leur rend
et rinvocation.
Le culte des saints éuit généralement établi dans TÉglise lors-
que Vigilance Tattaqua par des plaisanteries et par le reproche
d'idolâtrie.
Les Protestaus ont combattu ce culte par les mêmes raisons et
ont prétendu qu*il était inconnu aux premiers siècles.
11 n'est ni possible d'entrer dans le détail des différentes difficul-
tés que les Prolestans ont entassées contre le QjUte des saints, ni
nécessaire d'examiner ces difficultés en particulier, pour mettre le
lecteur en étal de prononcer sur leurs sophismes : il suffit de donner
une idée précise de la doctrine de TÉglise sur le culte des saints.
i"" L'Église catholique suppose que les saints connaissent nos
besoins et qu'ils peuvent intercéder pour nous, c'est un point de
doctrine fondé sur l'ancien et sur le nouveau Testament : Jacob
prie l'ange qui l'a protégé de protéger ses enfans; il invoque
Abraham et Isaac *.
Dieu dit lui-même dans Jérémie que quand Moïse et Samuel
intercéderaient pour le peuple, il ne les écouterait pas ^.
Saint Pierre promet aux fidèles de prier pour eux après sa
mort *,
* M. le Clerc, Bibliot univers., an. 1689, p. 169, accuse saint Jé-
rôme de mauvaise foi contre Vigilance qu'il regarde comme un habile
homme ; mais on ne voit point sur quoi il fonde sou opinion. M. Bas-
nage, HisU ecclés., t. 2, L 19, c 7, prétend la même chose, mais sans
le prouver.
^f. Barbeyrac, qui n'a été que Técho de M. le Clerc contre les Pè-
res, a renouvelé ces accusations et a voulu les prouver par des passages
qui établissent le contraire ; Barbeyrac, Préf, de Puffend. Rép, & D,
Cellier.
> Genès., ^8.
* Jercm., c. 15.
* Ep. 2, c. 1.
YIG 593
En un mot, l'ancien et le nouveau Testament supposent évi-
demment que les saints connaissent nos besoins, qu'ils s'intéres-
sent pour nous ; Kemnitius et la confession de Virtemberg recon-
naissent que les saints prient pour TÉglise.
Vigilance dit que, pendant que nous vivons, nous pouvons prier
les uns pour les autres. Saint Jérôme répond : Si les apôtres et
les martyrs , encore revêtus d'un corps et dans l'obligation de
prendre soin de leur propre salut, peuvent prier pour les hommes,
à plus forte raison ils peuvent le faire après avoir remporté la vic-
toire et avoir été couronnés. Moïse qui seul obligea Dieu à par-
donner à six cent mille combattans, et saint Etienne le premier
des martyrs qui imita si parfaitement Jésus-Christ et qui demanda
pardon pour ses bourreaux, auront-ils moins de pouvoir étant
avec le Sauveur qu'ils n'en avaient en ce monde? Saint Paul, qui
assure que Dieu lui a accordé la vie de deux cent soixante-seize
personnes qui naviguaient avec lui , fermera la bouche quand il
sera dans le ciel, et il n'osera pas dire un mot pour ceux qui ont
reçu l'Évangile par toute la terre ^?
Dans ce passage saint Jérôme répond à ce que Vigilance avait
dit sur l'invocation des saints, que leurs prières n'étaient point
écoutées, et saint Jérôme fait voir par plusieurs exemples que
leurs prières sont écoutées.
Comment donc M. de Basnage a-t-il pu dire que saint Jérôme
n'a pas cru que l'invocation des saints fût légitime '?
Saint Jérôme suppose que la tradition de l'Église est unanime
et constante sur le culte des saints, et Vigilance ne s'est point
fondé sur la tradition pour attaquer ce culte ; ce qui prouve qu'en
eflet la tradition n'était pas favorable à Vigilance, comme M. Bas-
nage l'a prétendu, fondé sur des conjectures contraires à toute
l'antiquité ecclésiastique et aux principes de la logique et de la
critique.
En effet, au commencement du troisième siècle, Origène parle
expressément de l'invocation des saints ^.
Eusèbc de Césarée, qui a passé une partie de sa vie dans le troi-
sième siècle, et qui certainement n'était ni ignorant ni supersti-
tieux, Eusèbe, dis- je , assure que Ton visitait les tombeaux
* Hicron. conlr. Vigilant.
2 Basnage, Hist ccclcs., t. 2, 1. 19, c. 7«
^ ExborU ad martyr, Hom., In Ezcch.
60*
594 VIG
des martyrs, et que les fidèles leur adressaient leurs prières ^
Saint Hilaire, saint Ambroîse, saint Ephrem, saint Basile, saint
Grégoire de Nysse» etc. , sont tous unanimes sur le culte des samts,
et rËglise grecque est parfaitement d^accord sur ce point arec
rÉglise latine^.
2* Les catholiques inToquent les saints et ne les adorent pas.
0 tête insensée! dit saint Jér6me, qui tous a dit qu*on adore les
martyrs?
3" Les catholiques ne prient point les saints comme ayant un
pouvoir indépendant de Dieu , mais comme des médiateurs et
comme des intercesseurs puissans auprès de Dieu ; ils reconnais-
sent que les mérites des saints sont des mérites acquis par la
grâce de Dieu ; ils ne rendent donc pas un culte idolâtre aux
saints, et le culte qu*ils leur rendent n*est pas d*une nature
semblable au culte qu'ils rendent à Dieu : il est faux que ce culte
soit de même espèce, et qu*il ne difl<ère que du plus au moins,
comme le prétendent les théologiens'.
Le culte que les catholiques rendent aux saints n*est donc pas
un crime, et les théologiens de Saumur reconnaissaient que ce
culte ne serait point condamnable s'il différait essentiellement du
culte qu'on rend à Dieu.
Ce double culte est évidemment marqué dans toute Tantiquilé
quoi qu'en dise M. Basnage, ou il faut qu'il fasse de tous les chré-
tiens des trois premiers siècles autant d'idolâtres, puisqu'ils ont
rendu un culte aux martyrs *,
C'est donc à tort que les apologistes delà confession d'Âugsbourg
disent que les docteurs anciens, avant saint Grégoire-le-Grand, ne
parlent point de l'invocation des saints, et Ton trouve dans saint
Grégoire de Nazianze une oraison sur saint Cyprien qui fait
voir que le culte des saints était établi avant le quatrième
siècle.
Calvin n'était détourné d'admettre l'invocation des saints que
parce qu'il ne concevait pas comment les prières peuvent leur être
^ HiU, c. i8, in Malth. Ambr., t. 2, p. 200. Ephrem., De monsà et
scrm. insanct. qui def. Basil., orat. 20., de 40. mart.Greg. Nyss., Or.
in Theod. Ptrpét. de la foi, L 5, p. AOl.
2 Hicron. contr. Vigilant.
* Thcs., De cullu et invoc.
* Dasnajç., Hisl. ccclés., l. 2, I. iO, c. 10.
VIG 696
connues : c^est aussi le fondement de la répugnance de Vossius
pour ce culte*.
Grotius répond que cela est cependant fort aisé à comprendre.
« Les prophètes, tandis qu'ils étaient sur la terre, dit-il, out
» connu ce qui se passait dans les lieux où ils n'étaient pas.
» Elisée connaît tout ce que fait Giési , quoiqu'absent ; Ézéchiel
» au milieu de la Chaldée voit tout ce qui se passe dans Jérusa-
» lem; les anges sont présens à uos assemblées, et s'emploient
» pour rendre nos prières agréables à Dieu : c'est ainsi que, non-
» seulement les chrétiens, mais aussi les juifs, l'ont cru dans tous
» les temps. Après ces exemples, un lecteur non prévenu doit
» croire qu'il est bien plus raisonnable d'admettre dans les mar-
» tyrs une connaissance des prières que nous leur adressons que
» non pas de la leur ôter'.»
Ce que nous venons de dire met le lecteur en état de juger si
c'est avec quelque fondement que Calvin , Chamier , Hospinien ,
Daillé,Vossius, Basnage, Lenfant, Barbey rac,etc., ont annoncé que
le culte des saints est une bêtise , une rage , un blasphème une
idolâtrie^.
Si le culte des saints est une idolâtrie, les païens, Julien l'A-
postat, Vigilance, ont donc mieux connu ce culte que les Pères
des quatrième et cinquième siècles qui l'ont défendu ; et tandis que
ces Pères combattaient avec tant de zèle et tant de succès les No-
vatiens, les Ariens, les Manichéens, les Donatistes, les Pélagiens,
ils étaient les promoteurs et les prédicateurs de l'idolâtrie, et con-
tribuaient de toutes leurs forces à éteindre la religion et la piété.
§ II. — Du culte des reliques.
Le culte des reliques est un sentiment naturel que la religion
autorise : Moïse emporta les os de Joseph lorsqu'il sortit de l'E-
gypte.
Le respect de Josias pour les corps des prophètes , les miracles
opérés par les os d'Elisée et par les habits de saint Paul justi-
* Grotius, annot ad consult, Cassand.
' GroL, Voturo pro pace.
3 Calvin., Inslit., 1. 2, c. 20. Chamier, 1. 20, c 1. Hospin, HisU
sacr., 2 part. Daillé, advcrsùs Latio., dereliq. cuUu. Vossius, Deidol.
Lenfant, Préservatif. Basnage, Hbt. ecclés.» t. 2, 1. 19, c. 10. Borbey-
rac, Rép. au P. Cellier
596 ^IG
fient le respect des chrétiens !pour les reliques des saints ^
Les chrétiens qui accompagnèrent saint Ignace dans le lieu de
son niart)Te recueillirent avec grand soin ce qui resta de ses os,
les mirent dans une châsse , gardaient ce dépôt comme un trésor
inestimable , el tous les ans s^assemblaient le jour de son mar-
tyre pour se réjouir au Seigneur de la gloire de ce saint *.
Les fidèles de Smyrne ne négligèrent rien pour recueillir les
reliques de saint Poly carpe ^.
L'Église de Lyon a toujours les reliques des saints en grande
vénération *.
Ce respect était généralement établi dans TÉglise lorsque Vi-
gilance osa Taltaquer; c'est un fait prouvé par saint Jérôme.
• Nous commettons donc des sacrilèges , dit-il à Vigilance, quand
» nous entrons dans TËglise des apôtres ; Constantin en commit
» un en rapportant les saintes reliques d'André , de Luc et de
» Tiraotbée à Constantinople , où les démons rugissent auprès
» d'elles, et où ces esprits dont Vigilance est possédé avouent
» qu'ils sentent reffel de leur présence ; l'empereur Arcade est
0 un impie, qui a transféré en Thrace les os du bienheureux Sa-
» muel long-temps après sa mort; tous les évéques qui ont porté
> dans un vase d'or une chose si abjecte et des cendres répandues
» dans de la soie sont non - seulement des impies , mais encore
» des insensés ; c'a été une folie aux peuples de toutes les Églises
» de venir au devant de ces reliques avec autant de joie que s'ils
» eussent vu un prophète vivant , et en si grand nombre que la
» foule en augmente depuis la Palestine jusqu'à la Macédoine,
» chantant d'une commune voix les louanges de Dieu ^. >
C'est dune dans Barbeyrac une ignorance grossière de l'histoire
ecclésiastique d'assurer que le culte des reliques commençait à
s'établir au temps de saint Jérôme.
r Le respect des fidèles pour les reliques a été général depuis Vi-
gilance, dont l'erreur ne lit point de progrès ; et le culte des reli-
ques depuis Vigilance n'a été attaqué que par les Pélrobusiens,
les Vaudois et les prétendus Réformés , qui en ont fait un des fon-
* Reg., I. A, c 13, Ecclcsiasl., c. A8, acL 19.
2 Ruinurt, Acla mnrl} rum. .
Mbid., p. 33.
* Ruinart, Acla martyrum, p. C7.
^ Ilieron. cont. Vigi'.
VIG
ô'JTl
ilemens de leur schisme , pr^tcDiluil que l'Égli^ catholique re
(lail aux reliques uu culte idolâtre.
Mais il est certain que jumais l'iUglise calbolique n'a renilii a
reliques un culie qui se boroùt a ces reliques et qui eût aucun j
rapport ï l'idolàirie. comme M. de Umax l'a Tuit voir daiia son ]
Ëtposilion de la foi.
Le culte des reliques u'iilail donc pas un molir sufQsant pour
se séparer de l'Église catholique, el H. Tillolson a élO olilit!'' d« j
recODDaiire que les Proiestans n'ont pas dû se Ecparer de l'Ëijliss |
catholique parce qu'elle était idollire , mais parce qu'il Élail trÈft- I
diflicilc de n'y Éire pas iitolùlre ' .
Il ; a sans doute des abus dans le culte que l'un rend au
liques.et il ; eu avait p«ui-élre plus avant la Rt^roriue qu'jujour-
- d'iiui; mais l'ÉgliEe ne les approuvait pas , elle les condamnait.
Mais quelques abus introduits parmi les Cdèles sont-ils un mq-
lif sudisant pour rompre l'uniiéY appariieni-il ti des parlicuUom.J
de se séparer de l'^i^Iise parce qu'elle n'eiupêclie pas ces abusf'l
que devieudrait lu police de l'Église si des lioinnies sans ai
fini se croyaicDl en droit d'j établir la Réforme?
Les difUcullcs de M. Busnage contre le culte des reliques por-
tent toujours sur cette fausse supposition , savoir , que les c»tb»>
liques honorent les saints el leurs reliques d'uu culte semblable |
!t celui qu'ils rendeut i Dieu. On peut voir sur les reliques les sor i
vans et judicieux auteurs que nous citons eu nuie *.
§ 111.
■ Ou etflibat.
D'anciens lit-r^tiques regardaient tous les objeii qui procurent
du plaisir comme des bienfaits de l'Ëlrc suprême, et la loi qui
défendait d'en user comme l'ouirage d'un être malfaisant , qui
Totdait contrarier Dieu et rendre les homnies caalheursux ; ainùi .
ils faisaient en quelque sorte un devoir de religion de se procura I
►
un plaisir défendu; chexe
ax la fornicalio
a était un.
0 action vei^l
ttwuse et la continence un
e imbécillité ou
nne impiété». \
1 Vigilance regardait au c
on traire la furni'
L^alion con
luieuncrjiue, <
1 TLIiolson, Serm. sur cm
paroles de saint
Paul : Ils
seront sauvé», j
mais comme par le fcu.
ïpBpcbn>cA«asaiicl.,l,
, 5, Mabiiion, Vriff. act. SS,
, ricurî, Dis-
coursSsorrbisloirecéclÉs.
* Les Anlilacles.
598 VIG
et le célibat comme un élat qui rendait ce crime inéviuble.
Lutber, au commencement de la Réforme, prêcha un sermoo
où il s'exprimait ainsi : « Gomme il n*est pas en mon pouToir de
» n*étre point homme , il n'est pas non pins en mt puissance de
» yiYre sans femme , et cela m'est plus nécessaire que de manger,
» de boire et de satisfaire aux nécessités du corps... Si les fem-
» mes sont opiniâtres , il est à propos que le mari leur dise : si
» TOUS ne le voulez pas , une autre le voudra ; si la maîtresse ne
» veut pas venir, la servante viendra *. »
Zuingle, Bèxe, etc., suivirent l'exemple de Luther: ce qui fit
dire k Érasme que la Réforme n*était qu*une comédie continuelle,
puisque le mariage en était toujours le dénoûment.
Les nouveaux Réformés n*ont pu justifier les expressions de
Lutber. Basnage et les autres Protestans conviennent quelles ne
sont pas trop dignes d'uu patriarche ; mais ils ont défendu ses
principes sur la loi du célibat. Us ont prétendu que cette loi était
injuste, qu'il était impossible de l'observer, qu'elle était incon-
nue à la primitive Église , qu'elle avait causé des désordres infi-
nis, et que c'était pour remédier à ces désordres que les Réfor-
mateurs avaient attaqué la loi du célibat : tels sont les principes
de Chamier, de Kemnilius, des théologiens de Sedan et de Sau-
mur, de Jurieu , de Basnage , de FiCnfant.
Barbeyrac, qui, dans la préface de sa traduction dePuffendorf
et dans sa réponse à dom Cellier, a copié tout ce qu'il a pu trouver
dans le Clerc contre les Pères, a renouvelé toutes ces difTicultcs,
et il a même prétendu que le célibat est contraire au bien de la
société humaine en général et à celui des sociétés particulières ;
c'est par ce côté que la loi du célibat principalement a été atta-
quée dans notre siècle. Pour juger de ces difÛcultés , examinons :
!<* ce que l'Église primitive a pensé du célibat ou de la continence;
â° si elle a pu obliger ses ministres à l'observer ; 3*" si le célibat
de l'Église romaine est nuisible à la société civile.
PREMIÈRE QUESTION.
Sur ce que V Église primitive a pensé du célibat et de la continence,
L'Ecriture nous représente la continence volontaire comme un
état de sainteté particulière ; il ne faut, pour s'en convaincre, que
* Serm. Luther.
VIG 599
jeter les yeux sur le chapitre 7 de la première épître de saint
Paul aux Corinthiens. U serait inutile, pour le prouver, de citer
les théologiens catholiques; les théologiens protestans le recon-
naissent. Grolius et Forbesius avouent que TÉvangile et saint
Paul préfèrent la continence -au mariage i
11 ne faut qu*ouvrir les Pères des premiers siècles pour se con*
Taincre que le célibat et la virginité furent très-communs dans les
trois premiers siècles du christianisme.
M.Dodwel reconnaît que, depuis les conseils de saint Paul,
Testune de la virginité s^était généralement répandue , et que,
dès le temps de saint Clément, la virginité était en honneur *.
On ne tarda pas à s*obliger par des vœux à garder la conti-
nence, et ces vœuxsont presque aussi anciens que le christianisme :
on le voit par saint Justin, Athénagore, saint Clément d'Alexan-
drie, TertuUien, Origène ^.
Il est inutile d'examiner ce qu'on a pensé de la continence da«i
les siècles suivans ; tout le monde sait qu'au temps de saint An-
toine les déserts d'Egypte et de Syrie étaient remplis de religieux
qui faisaient profession de vivre dans le célibat : depuis ce temps,
la vie monastique s'est conservée en Orient *. •
La vie monastique n'est donc pas un abus introduit par l'Église
romaine ; elle a commencé presque avec le christianisme ^.
SECONDE QUESTION.
VÉglUe a-t-elle imposé à êfê ministres la loi du célibat, et cette
loi est-elle injuste?
Le célibat n'est point une condition nécessaire et de droit divin
pour recevoir le sacerdoce.
Cependant, de tous les apôtres nous ne connaissons que saint
Pierre qui ait eu une femme, et si les autres en ont eu, il faut
^ Grolius in cap, 7 primœ ad Corint. Forbesius, 1. 1. Theol. moral, ,
1. 1, c« 12, p. IW.
3 Dodwel, Dissert« 2 sur la chronologie des papes» dans les ouvrages
posthumes de Pearson,
^ Justin, Apol. Alhcnagore Légat, Pro ChrisL Clem, Alex», 1. 8.
Strom. Terl. A|M)1., c. 9. Origcn. conl. Cels.
* Ptrpét. de la foi, t 5, p. 200,
^Mabillon, Prof, in primum Si'culum b<?ncdict| n, 5t etc.
coo ^IG
qu ils aient renoncé à Tusage du mariage, puisque dans tliistolre
il n'est fait aucune mention de leurs enfans: TopinioD, du temps
de Tertullien et de saint Jérôme, était que saint Pierre seul anît
été marié ^ .
Les auteurs, il est vrai, paraissent partagés sur le mariage de i
saint Paul ; mais tout le monde couTient que, lorsqu*il écrifit
s^n épi ire aux Corinthiens, il faisait profession de TÎvre dans la
continence, puisqu'il le dit lui-même*.
].e concile de Nicée suppose cet usage établi dans rÉgUse,
puisqu'on y défend aux prêtres d'avoir d'autres femmes que leurs
sœurs, leurs mères, ou des personnes qui les mettent hors d'état
de soupçon : ce qui suppose que les prêtres n'avaient point de
femmes ; car on ne peut pas dire que sous le nom de sœur le
concile ait compris la femme ^.
Saint Épiphane parle du célibat des prêtres comme d'un usage
généralement établi et observé dans tous les lieux où l'on observait
emctemcnt les canons de l'Église. Il reconnaît pourtant que le
contraire se pratique en quelques lieux ; mais il dit que cette ex-
ception n*est pas fondée sur l'autorité des canons, ne se tolère que
par condescendance pour la faiblesse, et ne s'est introduite que
par négligence.
Le célibat est ordonné dans les canons des apôtres, et l'on sait
que la discipline contenue dans cette collection a été observée
par les Orientaux pendant les trois premiers siècles de l'Église *.
Celte pratique n'est pas moins générale dans l'Église latine:
on le voit parle trente-troisième canon du concile d'Eliberi, qui
défend aux prêtres et aux diacres , sous peine de déposition, de
vivre avec leurs femmes.
Sur la fm du quatrième siècle, le second concile de Carthage
établit la même loi *•
11 est vrai que dans le temps de la persécution l'Église latine ne
* Tcrt,, Demonoi^am. Hieron. conL Joviniam.
2TerL, ibid., c. 3; Epiph., Haer. 58; Hieron. ,• ep. 22; Aug., De
Grat., et lib. arb., c à; Theodorct, in Puul., disent que saint Paul a
été marié. Clém. Alex., 1. 3 ; Strom., c. 30 ; Eusèbe et saint Méthode
le nient.
2 Couc. nie, can. A.
* Can. 27.
s Can. 2.
VÎG 601
fît point de lois pour punir les clercs qui n'observaient pas la loi
de la continence, et qu'il y avait des prêtres qui s'étaient mariés,
ou qui, ayant été ordonnés marié», continuaientà user du mariage;
les uns parce qu'ils le croyaient permis, les autres parce qu'ils
prétendaient que le mariage était aussi bien permis aux prêtres du
christianisme qu'à ceux de Tancienne loi.
Le papeSirice ayant été informé de ces désordres, lorsque la per-
sécution cessa, pardonna aux premiers, à condition qu'ils n'avan-
ceraient pas dans les ordres, et qu'ils ne feraient la fonction de ceux
qu'ils avaient reçus qu'en observant la loi de continence : il déposa
les seconds, et défendit d'ordonner des gens mariés, et à ceux qui
étaient ordonnés de se marier.
11 est évident que le pape Sirice ne faisait que remettre en vi-
gueurune loi déjh établie et reconnue dans TÉglise.
Au commencement du cinquième siècle. Innocent! confirma le
décret de Sirice * . ^"
Au milieu du sixième, Justin fit une loi pour confirmer, dit-il,
les saints canons qui défendaient aux prêtres de se marier *,
Par ce que nous venons de dire, il est certain, 1° que l'on a tou-
jours eu dans l'Ëglisc une vénération singulière pour la vertu de
continence : 2** que cette vertu n'est pas au-dessus des forces de
riiomme, aidé du secours de la grâce : 3° que l'Ëglise ancienne l'a
prescrite h ses ministres.
La loi du célibat imposée aux prêtres et aux diacres par iepape
Sirice, et ensuite aux sous-diacres par saint Léon, n'est donc point
injuste, à moins qu'on ne prétende que l'Église n'a point le droit
de faire des lois, et d'exiger de ses ministres certaines vertus, ou
certaines qualités, selon qu'elle les juge nécessaires au temps et
aux circonstances.
C'est donc de la part des premiers Réformateurs une révolte
inexcusable d'avoir violé les vœux de continence qu'ils avaient
faits et d'avoir condamné la pratique de l'Église.
f^ réclamation de Paphnuce contre la loi du célibat , dans le
concile de Nicée , est un fait trop douteux pour autoriser un sim-
ple fidèle à se révolter contre une loi généralement obsenée dans
l'Église ; il n'est rapporté, ce fait, que par Socrate et par Sozo-
mène» Eusèbe n'en parle point, et M. Bayle le croit faux. Au
* Innocent, cp. 3.
3 L. 5, cap., De episcopisct dericis, collect. 4, 1. 1.
TI. 51
r>02 VIG
reste , ce fait , aussi bien que differens canons cités pM les Pro-
testaiis , prouve que la loi du célibat n*a pas toujours obligé dans
rÉglise , mais non pas que TÉglise n'a pu la porter.
C*est principalement sur les désordres du clergé que les Ré-
formateurs ont appuyé leur infraction de la loi du célibat.
Il est certain que ces désordres étaient très-grands , quoiqu'ils
aient été excessivement exagérés par les Protestans , et surtout
par Jurieu , qui , dans sa défense de la Réforme , entasse sans
choix t sans discernement , sans critique et sans pudeur, une
foule de fables et de calomnies absurdes.
Mais ces désordus du clergé venaient du désordre général que
les incursions des barbares avaient porté dans TEurope. Le clergé,
plongé dans la plus profonde ignorance , incapable de s'occuper
de ses devoirs et d'étudier, fut entraîné par le torrent du désor-
dre général et devint vicieux par les mêmes causes qui avaient
rendu tous les peuples de l'Europe vicieux, ignorans et féroces.
L'Église gémissait sur ces désordres , et elle seule avait droit
de prescrire les lois propres à les réprimer *.
L'usage de TÉglise grecque n'autorisait point la liberté des
Réformateurs ; celle Église permet le mariage des prêtres ; mais
comme il s'agit d'un point de discipline^ chacun peut et doit sui-
vre l'usage de l'Église dans laquelle il se trouve.
TROISIÈME PARTIE.
La loi du célibat est-elle contraire au bonheur des Étals ?
La population esl liée très-étroitement avec la puissance et le
* Voyez^ sur cette question, Sylvius, t. A, supplem., quscst. 53.
Juenin, De impcd. matrini.
Fcrrand, Réponse à Tapologie de Jurieu.
Lettres sur differens sujets de controverse, par M. l'abbé de Corde-
moy, lettres S et k,
Hist. des conciles généraux ; on trouve à la fin un excellent traité du
célibat
Cellier, Apologie pour la morale des PP.
Hisl. du divorce de Henri Vlll, 3 vol. in-12, 1688, chez Boudot ;
on trouve à la fin de boimos dissertations sur le célibat.
Dom Gervaisna aussi traité cette matière dans une dissertation qu'il
a mise à la fin de la vie ilcsaifit Cypricn.
Il y a des théolo{,ncns qui prétendent que le célibat est de droit divin.
VIG 608
bonheur d'un État , el le célibat est^ dit-on , contraire à la po-
pulation ; les législateurs les plus sages en ont fait un crime; tout
le monde sait comment il était puni à Sparte.
On s'appuie sur ce principe pour condamner la doctrine de TË-
glise sur le célibat. « Le mariage, dit'-on, est honnête etnéces-
» saire dans toutes les sociétés civiles ; on sait que touâ les sages
» législateurs ont employé les expédions les plus nécessaires pour
» y engager les citoyens ; cela étant supposé , un peuple composé
9 de chrétiens , tous persuadés qu'il y a dans la continence un de-
» gré de sainteté qui rend les hommes plus agréables à Dieu que
» Tétat du mariage » les chrétiens ne se marieraient point ; car
» toutes les exhortations des écrivains sacrée tendent à imposer
» l'obligation indispensable de se perfectionner et de se rendre
» plus agréable à Dieu ^ . »
On a retourné le fond de ces difficultés de cent manières , et
Ton est allé jusqu'à prédire, d'après ces principes, que les Pro-
testans subjugueraient les États catholiques : faisons quelques ré-
flexions sur ces difficultés.
1** L'Église catholique enseigne que la continence est un état
plus parfait que celui du mariage , mais elle enseigne aussi que la
continence est un don particulier , que tout le monde n'est pas
appelé à cet état , que cet état , si respectable en lui-même , est
très-dangereux pour le salut lorsqu'on n'y est pas bien appelé ;
elle impose des épreuves à ceux qui veulent s'y consacrer ; elle
enseigne que le mariage est un état saint et auquel le grand nom-
bre des hommes est appelé. Ainsi la doctrine de l'Église catholique
ne porte pas tous les chrétiens au célibat , et la persuasion de
l'excellence de la continence n'empêchera pas le mariage dans les
États catholiques.
â» Un homme qui se marie produit plus d'un homme: ainsi,
suivant les lois de la nature , les hommes doivent se multiplier
assez pour ne pouvoir subsister dans le même lieu et pour être
forcés de former de nouveaux établîssemens.
Les émigrations , qui ne sont que la surabondance des sujets ,
ne sont pas contraires au bonheur de l'État ; elles sont même né-
cessaires ^ mais elles sont perdues pour l'État.
Voyez Sylvius, loc ciL, mais ce n'est qu'une opinion et qui parait sans
fondement.
> Barbeyrac, Traité de la morale des Pères, c 8, page iiS, etc.
604 WIC
La loi du célibat ne serait donc point contraire au bonheur d*aB
Ëtat , quand on supposerait que le célibat absorbe celte soraboo*
dance : elle ne peut être nuisible dans un État oit Ton sait encou-
rager et favoriser la population ; il est même certain que le céli-
bat , qui absorbe cette surabondance de sujets qui se trouve dans
un État bien gouverné, est beaucoup plus utile que Tusaged^en-
voyer des colonies, puisque ces colonies sont perdues pour Ytr
tatdont elles sortent , et que le célibat de TÉglise catholique coa-
serve à TËtat les citoyens qu*elle perdrait par Tenvoi des colonies.
Ce n*est donc point sur le célibat de TÉglise romaine qu^il fau-
drait rejeter la dépopulation des États catholiques s*ils étaient dé-
peuplés; leur dépopulation aurait d*autres causes. Un autev
qu*on ne peut soupçonner de manquer de zèle pour le bonheur de
rÉtat, TAmi des hommes, a prouvé cette vérité pour tout lecteur
équitable.
Le célibat, qui était d'abord défendu à Sparte et à Rome, y
fut toléré dans la suite. On sait d'ailleurs que les Gymuosophistes
chez les Indiens, les Ilyérophanles chez les Athéniens, une par-
tie des disciples de Pythagore, vivaient dans le célibat *.
T^ célibat n'est donc contraire ni à la puissance des États ni
au bonheur des particuliers.
AVALFRÈDE, homme obscur et ignorant, qui soutenait qae
Tàme mourait avec le corps : il parut vers la fia du dixième
siècle. Durand, abbé de Castres, le réfuta sans réplique, et son
erreur n'eut point de suite *.
WICLEF, ou plutôt Jean de Wiclif, naquit à Wiclif dans la
province d'York, vers Tan 1329 ; il étudia au collège de la reine
à Oxford, et fit de grands progrès dans l'étude de la philosophie
et de la théologie.
En 1361, l'archevêque de Cautorbéry fit h Oxford une fondation
pour l'étude de la logique et du droit; il devait y avoir un gar-
dien et onze écoliers, trois moines de l'Église de Christ à Cau-
torbéry, les huit autres du clergé séculier.
Le fondateur donna lui-même la place de gardien à un moine
qu'il déplaça peu de temps après pour faire Wiclef gardien.
Après la mort du fondateur, Simon Lengham, son successeur ,
^ Hist, critiq. du célibat, Acad. des inscript, 1713.
^D'Acheri, Spicileg., t 7, p, 341. Mabillon, Pr»f,in s«C, $• Bepe-
dlct , 5, 3. Hist. liit. de France, U 5, p. 11, 12,
e docteur el
WIC
rendit aux moines les places qu'ils a
appela, et le pape conQrnia l'eupulsio
que Len(;!iam uviilt ru'il.
Deux ausapi'Jis, Wiclefdevint proftisiieur en théologie; il ri
pllt celle fiiuciion avec beaucoup de dUiincIion, et fil daua 1« ]
cours de fréquentes déclamations cou Ire les noiaes; il jeu
proclia même des erreurs capitales.
Wiclef n'était pas daus des dispositions plus favorables pour
la Mur de Rome, soit que mécontentement vint de la perte de
son procès, soit qu'il fût causé par les démêlés des papes avec
l'Angleterre, suit enfin qu'il fût produit par la lecture de cette
foule d'ouvrages qui avaient attaqué successivement l'ËgUee de
ïtome I leU que les écrits de Uarsille de Padoue et de Jean
d'Olive; Wictef attaqua la cour de Rome dans ses leçons de théo-
logie, dans ses serinons el dans ses écrit»; il réunit tout ve qu'oA
avait dii contre sa puissance et contre ses richesses; il attaqua J
sou auiortlé dans les choses purement spirituelles; il prétenâïfrj
trouver dans sa doctrine des erreurs fond a Bien laies. ^
Le clergé d'Angleterre avait toujours pris le parti des papei
contre les rois et contre le parlement , il avait retenu le peuple
dans la fidélité au saint Siège. Wiclef entreprit de ruiner le crédit
du clergé en attaquant ses prétentions et tout ce qui pouvait lui
concilier le respect et la confiance des peuples
Les démêlés vifs et fréqucr
gleterre, depuis Jean Sans-Terre, av:
contre cette cour ; on ne se rappelait q
r'eicommunieation et la déposition di
mise aux pieds du légat et remise par
roi, la cession de l'Angleterre au pape
rujauma. par le pape ; enfin les Angh '
de Rome et de l'AO' 1
t indisposé les espriti 1
ec beaucoup de peint
prince, sa couronne
ministre sur la tète da
le tribut imposé sur et
royaieoiavec chagrin Ic^
bénéfices donnés par le pape aux étrangers. Comme dans c<
mêlés leclcrgé avait ordiuairemenlprisle parti de In cour de Rome, ^
il a'étaitatlirélahaine d'une partie du peuple, qui d'ailleursregai^
dait avec envîe les richesses que les ecclésiastiques possédaient.
Wiclef trouva donc dans les esprits des dispositions favorables
au désir qu'il avait de soulever l'Angleterre contre 1 Ë|;lise do
pRome.
' Il fut secondé dans celle entreprise par les I.ollards qui s'é- J
l hit des partisaits en .Vngleterre : il se lit des dlciples el |
a de l'inquiétude au eleryê.
606 WIC
Oo envoya au pape Grégoire XI plusieurs propositions deYTv-
clef qui renouvelaient les erreurs de Marsille de Padooe, de Jeu
de Gand , etc.
Le pape ordonna k Tarchevèque de Gantorbéry et à Tévé^te
de Londres de faire emprisonner Wiclef , s*il était vrai qu*il eâl
enseigné une doctrine si détestable ^.
Edouard mourut dansées entrefaites, et Richard II lui succéda;
Tarchevèque de Gantorbéry et Tévéque de Londres exécutèreit
leur commission , ils citèrent devant eux Wiclef, et il comparut:
il était accompagné du duc de Lancastre et du lord Piercy. Ceta*
ci voulurent que Wiclef répondit assis, les évèques voulaieal
quUl fût debout ; on se dît de part et d^autre des paroles asset
vives , et Ton se sépara sans avoir rien fait sur rafTaire de Widel,
qui, à la faveur de cette puissante protection, continua à ensei-
gner sa doctrine et fit des prosélytes qui la répandirent ^ mais k
clergé le condamna et le força de quitter sa cure.
La ()isgr&ce de Wiclef ne fît qu'augmenter sa haine contre le
pape et contre le clergé. 11 composa divers ouvrages pour insi-
nuer ses sentimens et les communiquer dans toute TAnglelerre.
Dans ce temps , Urbain VI et Clément Vil se disputaient le
siège de Rome. L'Europe était partagée entre ces deux pontifes,
Urbain était reconnu par l'Angleterre et Clément par la France.
Urbain VI fit prêcher en Angleterre une croisade contre la France,
et accorda aux croisés les mêmes indulgences que Ton avait ac-
cordées pour les guerres de la terre-sainte.
Wiclef saisit cette occasion pour soulever les esprits contre
Tautorité du pape et composa contre cette croisade un ouvrage
plein d'emportement et de force. « 11 est honteux, dil-il, quela
» croix de Jésus-Ghrist, qui est un monument de paix, de miséri-
» corde et de charité , serve d'étendard et de signal pour tous les
» chrétiens pour Tamour de deux faux prêtres, qui sont manifeste-
» ment des Antechrists, afin de les conserver dans la grandeur mon-
» daine en opprimant la chrétienté plus que les Juifs n'opprimè-
> rent Jésus-Christ lui-même et ses apôtres... Pourquoi est-ce que
» Torgueilleux prêtre de Rome ne veut pas accorder à tous les
» hommes indulgence plénière à condition qu'ils vivent en paix
» et on charité, pendant qu'il la leur accorde pour se battre vi
» pour se détruire * ? »
^ Conc Brilanniae, t. 3, p. i23 et passlm.
^ Dans le livre intitulé : J'Eipliciilion du grand arrêt de malédiction.
.DYIenvojB en Angleterre une moni lion [tour ciierWlcIcf I
is il fut aiiaqué d'une paraJjsie el uiourui peu Je leuipa (
n 1384, le S» décembre.
DocMne d« Wielef.
llViclef avait beaucoup de seciateurB; le clergé, |>our arrâler
8 progriiâ de &es erreurs , renouvela les cundaïunHtioas portées
e sa docirine, et l'Huiversiié d'OxTonj , après avoir examioé
les livres de ce théologien , en lira deux cent soiiantu^ix-huit
propositions qu'elle jugea dignes de censure , et ([d'elle envojl
ù l'arclierèque de Cantorljér; '
Ces Cl
e la doï
de Wiclet et le
ut , celui de reo-
plan de rëfuraation qu'il avait furinë, s'il est
plan : car je vois bien dans ces proposilioas n:
dreTËgUse romaine eileclergAutlieuXi d'ut
dîgnalioD publique et d'anÉautlr leur autorité; mais je n'y Tob
poinl de système, point de corps suivi dedoelrine.puinldeforme i
de gouvernement qu'il ait votilu sul>sUtuer au gouveroeoeni de
l'i^liso romaine, L'anarcbie, le désordre, te ruoatisine des Ana-
baptistes, meparaisseni les conséquences les plus naturelles de ti
doctrine de Widef. La voici telle qu'on peut lavoir duns l'extrait
que rUuiveraiié d'OiTord lit do ses dilTérena ouvrages, duniJa
plus grande partie est inconnue.
Il attaqua du» set, dialogues le pape , les ordres religieut , les
richesses du clei^é, les sacrewens, les prières pour les morts.
Il dit que le pape est simoniaquu , bérétique , qu'il n'a poîul
d'urdre dans l'Église de Dieu, mais dans lu société des déuions ;
que, depuis la dotationde l'Église, tous les papes sont les précur-
seurs de l'Aiilticbrist et les vicaires du iléiuon; que les papes el
cardinauisoni institués, non par Jésus-CLrist, mais parlediable;
qu'il faut ronseiller au lidéles de ne point demander d'indut-
gences au pape , parce que h bonté de Dieu n'est pas renfermée
dans l'enceinte des murs de Rome ou d'Avignon ; que ni le pap«
ni aucune puissance sur la terre n'a le pouvoir de nous eu^écher ,
de pi'oGier des moyeus de salui que Jésus Cbrist a établis ; que le i
p.ipe et sesciillégues sont des Pharisiens el dfs Scribra, qui pri^ {
lendeiil avoir droit do fermer la porte du ete] où ils u'enlreroul
point el oli ils ne veulent pag permettre d'entre
> Dausia coilrclïon (1eseondlc»d'Angloierrc
U08 WIC
I^s év£que« n'ont qu'une puissance imagiosire ; un simple
préirc , dam les mieurs suiii K-gl^ , a plus de puissance spîri-
tuetlK que les prélats ùliisparlcs Cflrdinaui et nommas parle pape.
11 (luiine aux urdri^s religieui le rom (te secte. Il se décbatoe
surtout contre les quntre ordres mendiuns ; ces ordres sont fondés,
selon lui , sur l'hypocrisie: les Sarrasins qui rejettent l'Éviiigile
souI coupables devant Dieu, mais moins que ces quatre sectes ; le
musulmanismu et I» vie des cardinaux conduisent, par Aes routes
diiïtbentes, mail également sûres , k l'earer. Si les fidèlea sont
obligés d'honorer le corps de l'I^glise leur sainte mËre, il n'en «M
point qui ne doive travailler !i la purger de ces sectes , qui sont
quatre humeurs mortelles dont son corps est ïurecté.
La confession est une pratique iuslituiie par Innocent III , et
rien n'est plus inutile; ilsudil dese repentir: il condamne l'usage
ducliTéuicdansradmiuistnilioii du baptême; il attaque le doitow
de U transsubstantiation.
Le livre du sermon duSeigneur surla montagne contient quatre
parties :li il prétend que les apôtres ayant travaillé deleursmaîiu
pour vivre, et n'ayant pris sur les aumùnes que le simple néces-
saire, il est clair que les clercs qui entrent dans l'ctal ecclésiasti-
que avec une iuleutiuu différente sont simomaques.
Les seigneurs temporels sont en droit de dépouiller tous Im
eui:lë£iastiques de leurs possessions ; ils n'ont pas besoin , poar
user de ce droit , d'un déerei du pape ; c'est Tavoriser l'béréue
que do ne pas s'élever contre les possessions de l'Eglise : quoique
les ancêtres des fidèles se soient dÉjiouillés de la propriété de cai
biens , leurs desceudans en corrigeant leurs erreurs recOovnnt
tous leurs droits, et ce titre est bien plus légitime que le droit «ta
conquâie. Tous les dons que l'un fait au clergé devraient étnt dei
aumônes libres et non pas des importions forcées; le peupla M
obligé ou couEuience de refuser U dlme am mauvais toinistRf [
et l'un ne doit point u-aindre les censures <]ue l'on enoonn pow
avoir rempli ce devoir.
Widef prétend que pnur nommer légitimement aux bénélicat
il faut rétablir les élections par le sort : c'est Jésus-Cbrist seul
qui ordunue quand il veut et comme il veut ; un homme i qtti si
conscience rend lémoignage qu'il renrplit la loi de Jésus-Chrût
est sûr d'être ordonné prêtre par Jésus-Christ.
Le livre de la siinouic n'est qn'ime répélilion de tout ce (ju'U 1
dit contre lei religieux. ' '
tWlC GD9 '
ans le livre De la perTeciioii des Éiais , il prétend qu'il ne de-
vrait y avoir dans l'Ëglhc que deux orilres, le diai:onat et lik
prêtrise ou le sacerdoce; les autres ordres sont des insiilutionn
znonsirueuses.
Dans le livre intitulÉ De l'ordre ehrit'm, W attaque le dogme
de la présence rÉelle et renouvelle l'erreur des BArengaricns. Il
assure que les cnfans morts sans ba|)tênie sont sauvés ; il répète
ce qu'il a dit sur les moines ei sur les ordres ; il re(;arde comme
un coDcubmage le mariage contraclé pur des personnes qui ne
peuvent avoir des enrans ; il nie que î'eitrâme'OncliOD soit un
bacremeoi. Il prétend que l'homme \e plus saint est celui qui a
le plus de pouvoir dans l'I^glise et la seule autorité légitime.
Il avance que pour avoir un droit légitime de posséder quel-
que chose sur la terre il faut être juste, et qu'un homme per-
dait son droit il ses possessions lors<iu'll commettait un péclié
mortel.
Il est étonnant que Wiclef, qui n'avançait celte maiimc que
pour autoriser left fidèles à dépouiller le clergé de ses richesses,
n'ait pas vu qu'elle établissait le clergé mahre absolu de tous les
biens temporels, puisqu'il n'appartient en effet qu'il l'Rglise de
ju(;er si un homme est coupable d'un péché mortel ; car abandon-
ner ce jugement auï particuliers, comme Wicler le faisait , c'était
ouvrir la porte i tous les vols et i toutes les guerres. Les tireurs
desllussites et des Anabaptistes, qui désolèrent l'Allemagne aprËS
>Viclef , sont les eflets de celte doctrine.
Wiclef soutient dans le même ouvrage que l
sairemcnt.
Le Trialogue contient quatre livres, qui
liiioa de tout ce qui a été dit
clergé ; il y condamne la coni
et répèle tout ce qu'il a dît s
CommunicationsderËglise.
L'ouvrage intitulé Dialagaei roule tout entier sur la meta-
phjsique abstraite : il est destiné i combattra la crojanco de la
présence réelle par des diflicullés tirées de la nature même de l'é-
tendue, parce qu'il est impossible que les accidenseucliaristiqiiei
subsistent sans sujet, parce que deux corps ne peuvent exister
dans le même espace, parce que Dieu nu peut produire en mémo
temps un corps dans deux dilTérens endroits.
Il j renonvelle les erreun d'Abaelard sur le^ buraes de b
t arrive néces-
e sont que In répé-
ion s temporel les du
'cratioD des églises, les cérémonies,
ir la nullité des censures et des ex-
610 \V1C
puissance divine ; il prétend que Dieu ne pouvait £ûre (pie ee ff
a fait.
Dans le traité de TÂrt du sophiste » Wiclef porte de neuri
coups aux possessions temporelles de l*Église et s*élève i
ridée primitive du droit des hommes sur la terre ; tout a|
nant à Dieu , lui seul peut donner à Thomme un droit ex<
quelque chose , et Dieu ne donne ce droit qu*aux justes et^
qui ont lagr&ce. La qualité d'héritier, les titres, lesco
les donations» n'établirent donc jamais un droit légitime en&T<
du pécheur ; il est usurpateur tant qu'il est privé de la justice
bituelle et de la gr&ce.
Un père qui meurt dans la justice ne donne pas à son Ibli
droit de lui succéder, s'il ne lui mérite pas la grâce néccsM
pour vivre saintement : les hommes n'ont donc point sur la ton
d'autres droits ni d'autre loi que la charité.
Ainsi un mattre qui ne traite pas son domestique comne il
voudrait être traité s'il était à sa place pèche contre la cbaiil^i
perd la gr&ce ; il est déchu de tous ses droits et dépouillé detoiM
autorité légitime sur son serviteur. 11 en faut dire autant desroii,
des papes et des évéques , selon Wiclef, lorsqu'ils commeuat
un péché mortel.
La pauvreté étant la première loi du christianisme, personii
ne doit avoir de procès pour les bieus temporels , il ne doit s*o^
cuper que du ciel ; il ne peut donc sans péché s*occuper i ju^ff
des affaires profanes. Ainsi, lorsque les barbares ravagent •
pay^, il est plus conforme à TËvangile de supporter ces malheois
que de repousser la force par la iorce.
Dieu , selon Wiclef, n'approuve point que les catholiques aieit
de domination civile ou religieuse; et la colère, quelque légèit
qu'elle soit, lorsqu'elle n'a pas pour objet la gloire de Dieu, dfr
vient un péché mortel ; il attaque ensuite la prière pour les morts.
Le livre du Domaine civil contient trois livres : les docteun
d'Oxford n'ont extrait que quelques propositions contre les moinei
et deux propositions dont on ne voit pas le sens.
Tout ce que nous venons d'exposer des principes de Wiclef, il
le répète dans son traité du Diable, dans son livre de la Doclnae
de l'empire, dans son livre Du ciel, dans celui De la confession.
Voilà la doctrine de Wiclef telle qu'elle est exposée dans la col-
lection des conciles d'Angleterre, donnée par les Anglais mêmes
depuis quelques années ; on ne trouve rien dans les uonumeos
B WIC fîll
^t^oilllt par les Adileurs de ces conciles qui suppose qu'où ait
imputé à WiclefJes Benliniims qu'il u'iivailpas, ou que l'cxlnil
(le se& lirres ait él£ infidèle.
C'est donc sans aucun foudeuieut que le docteur Burnei dit
qu'on ne suit au vrai si les sentiraens qu'on lui allribue élaieut
vériublement de lui : <> puisque nous a'eo savons rien, dit-it,
* que par ses ennemis , qui ont écrit avec une passion i rendre
■ douteui lont ce qu'ils ont avancé '. i
Les sectateurs de Wiclef, qui étaient en grand nombre et aussi
ennemis du clei^é que le clergé l'était de Wiclef; les sectateurs
de Wiclel , dis-JL', n'auraient pas manqué de relever les infidélités
des extraits , et leur silence esl une apprubaiiuQ Tornielle de la li-
délitédeceseitraits.
Dm fffelt de la ioeirine de Wiclef.
I,es ouvrages de Wiclef contenaient donc des principes aasorlis
aux dilTérens caractères, proportionnés aux dilTérentes sortes d'es-
prit, et favorables t l'indisposition assez générale en Anglclerro
contre le pape , contre le clergé , contre les moines ■. on conçoit
donc qu'il se fil des disciples,
f.e clergé n'oublia rien pour étoulTer celte secte naisstste; il
analliémaiisa les Wielé6les et les Lollarde qui se confondirent en
quelque sorte, il obtint contre eni des éditsrigoureui, et l'on
brilla les WicléBies et les Lollards *.
Cependant ta doctrine de Wiclef faisait du progrès, et la
chambre des communes pn^'aenU . en iWi, une adresse an roi .
pour le prier de s'emparer des revenus du clergé ; mais le roi n'y
consentit pas. La chambre des communes présenta une nouvelle
adresse en 1410; mais le roi la rejeta et défendit b la chambre
des communes de se mêler des affaires du clergé; la chambre
des communes demanda ensuite qu'on révoquAi ou qu'on adou'
cil l'édii qui condamnait les LoUards et leS Wiclefltes : cela même
fut refusé, cl pendant la tenue du parlement te roi fit brûler un
Lollard.
Henri V ne traita pas les LoUards avec moins de rigueur ; mais
• Bumct, Hhl. delà Hérnrmed'AuKl.J. I.p. 50.
' Abn^gé lies acte» un Bymcr. A la ïuite de l'HisU ilc M. àc ttapin-
Tltoiru;, I. S, p. 110, rrfinc.nrilan., US,
lis . zn
il m'ftàiffùn M MUA MOïc wi c*4lc éet WieléAui qw tl A
progrès Mwtvti, mai* (onshUnUa. ^u b rbambr«4K
UDva. n prffara loni powle tchboïc <le Ilenri Vllt.
Les IÎ1TCS Je Widtf fanal ponâ «a AUemagii* : Jmm II
adopta nae panie de ses tmms, el «'en wttîi pu«tr Mnletct
praple* voMte le dcrg ^.
I^inqa'an «il ab«ita l* «me des ll«f«ilcs, on n'aBcaalil |
dans bs esprits la dor.trînc de Widef , M r*Ut dttdriac pnim
m difûrevies tectrs d'AïubafiiKics q«i iWsol«r«nt TAILom^
Ionise Lulber eut doaw le sipul de b révolte oootni l'Ë^ïa
l'ffTJ Tari. Axiununs.
.Nous aT«ns rêfui^ Im errenn def Widèfilej tnr U priM*
r^lk, ï l'anii-le HfiEMia el BlutsiuaiEss ; s«s err«ur« lur
pri»« pour les morU, sur k» crt^monus d« l'Eglise, sur Ici
i-mnenl de l'urdie et sur la sQp'b'ioiil^des «Tê()ues, nav alid
Aitn 5, Yicii.iï(X : son vtTPiu uir la l<Mit^pui$s30c« de Dim , i
l'atticte AiiïLard : son sentiment inf leï iudnlgences, k Talâll
l.iTBER ; MD MDlimeal stu U coiifeEsîun , i l'antele Osju.
A r^gunJ de SUD opinion sur les poMessioiu tnaporvlto Ji
dergr , elle n'a de londemenl que l'aliui igue le clergé
fjire des biens temporels iju'il pouède ; et am dUtertalina
prouienit que le clergé peal pv«s^der légiiiinemenl d^ ti
lempordt ne pennadenît ft poMBse «melndani otAItll
ZLI 1 61 1
1 après avoir fait son conr^ de [liéolûgîe, il fui curtf
ECtaris, en IKoC, et ensuite dans un gros bourg nommé
|otre-Dain«-des-Heriniies : c'était un lieu de dérotioD fort tk-
, olx les pèlerins Teaaiem en foule et faisaient beaucoup
FoQrandea.
' Zuiogle y découvrit d'étranges abus , et vit que le peuple était
rreurs grossières sur l'eOicaciié des pèlerinages et sur
pe foule d'autres pratiques : il attaqua ces abus dans ses
UlructioDS et dans ses discours.
. Tandis que Zuingle s'occupait li corriger ces abus, Léon X
' * lail publier en Allemagne des indulgences par les dominicains,
' se par Bernardin Samson , cordelier. Zuingle s*éleva
autre l'abus que le cordelier Samson faisait des indulgences , et
i fut approuvé par l'évéque de Constance , qui était mécontent
» ce que le cordelier Samson était entré dans soo diocèse sans sa
1 et n'avait point fait vidimer ses bulles k Con-
Zuingle fui alors nommé prédicateur de Zurich, et il peignit si
Vivement les abus et même les excès du cordelier, que le consul
de Zurich lit fermer les portes au porteur d'indulgences. Tous cea
abus étaient fondés sur des traditions incertaines, souvent sur des
lubies ; Zuingle , pour couper la racine des abus, attaqua toutes
les traditions, et prétendit qu'il fallait n'admettre comme vrai et
comme appartenant il la religion cbrétienne que ce qui était
enseigné furmellemcnl dans l'Écriture ; qu'il fallait rejeter comme
une invention bumaine tout ce qui ne pouvait se prouver par l'É-
Le magistral de Laus.inne crut voir dans ta doctrine de Zuingle
un moyen sûr pour faire tomber tous les abus, et une voie facile
pour déterminer les points 'sur lesquels on devait obéir au pape
et ï la puissance ecclésiastique. On adressa donc h tous les curés,
prédicateui^ et autres bénéficiera chargés du soin des imes un
édii du conseil, par lequel il leur était ordonné de ne prêcher que
ce qu'ils pouvaient prouver par la parole de Dieu, et de passer
sous silence les doctrines et les ordonnances humaines.
Les livres de Luther contre les indulgences, contre l'Ëglise ro-
maine, étaient passés en Suisse et on les y avait lus avidement.
Zuingle, de son côté, avait communiqué ses sentimens i beaucoup
de personnes : on vit donc tout ^ coup une foule de prédicateurs
quiatlaquèreut, non les abus, m^is les inâulgencesmêmcs, le culte
^
L
614 . ZOI
des MiBU. tw vœuimonantiquM, te célibat de* prttnt, \t <
U meue, etc.
L'évéqoe de Constance, qui avait approuvé Zoîngle lonqnl
n'avait attaqué que Us abus, donna un mandement eoDti* It
viiteurs Pt envoya des dépulës aux autres cantons pour M J
lire de la licence des novateurs.
Les canloos assemblés 1 Luceme firent un décret, le 37 mm
Itiîi, pour défendre aux ecclésiastiques la prédication de la
velle doctrine.
Zuingle ne di^fén point aux ordres des cantons, il continua stt
déclama lions : les catholiques de Zuricb combauireot les réfop
mateurs, et le peuple était partagé entre Zuingle et les minisin
catholiques.
Par le principe fondamental de la réfonne de Zuingle, u-au
les disputes de religion devaient se décider par rÊcritnre seule
CCS disputes devenaient donc de simplet faits ; et pour les décida
il ne fal lait qu'ouvrir l'Ecriture et voir, de deux proposition* €if
posées, laquelle était contenue dans l'ancien ou dans le
Testament. Le magistrat était donc jnge compétent des dîspuV
de religion, cl le conseil de Zurich ordonna aux mioiarM i
églises de sa juridiction de se rendre ) Zurich, et supplia l'év
que de Constance d'y venir ou d'y envoyer se* théologien».
t«s ministres obéirent au conseil , et l'évéquc de Gtoatai»
envoya Jean Fsber, son grand-vicaire, avec ses ibéolngiens,
Zurich.
Zuingle présenta sa doctrine coatenue en soixaole-sepi ariidec
niai^ Faber, qui vit que le conseil voulait s'établir juge de la
irine, réfuta d'entrer en conférence devant le conseil asse
pour juger; prétendit qu'il n'appartenait qu'A l'Ëglise de juga
des controverses delà religion, et offrit de répondre par écrit
articles de Zuingle ; qu'au reste, indépendamment de sa répons*
il fullaii attendre le concilcqa'on devait assembler.
Sur le refus que Faber lit de se soumeitre au jugement dn coo
seil de Zurich sur les points de doctrine ou de discipline alla
qués par Zuingle, le conseil Qt publier un édit par lequel il défeft
dnit d'enseigner autre chose que ce qui était co
récriture.
En conséquence de ce décret, Grégoire Lut! se mîiit prfehe
contre les cérémonies de l'I-^glise romaine ei contre le faste
clcrgi^. L'admiiiistr:itrur des terri'» des ehcvalier» da Saini^M
Zfl 615
ile-Jérnulem s'en plaignit, et le megistrit condamna Luii ï la
prison et i l'exil.
Zuingle censura viTemcnt en chaire la conduite du sénat : le
prand conseil tsssa cette sentence, et ordonna que désormais les
aiïaires de religion seraient portées devant lui ; bient<Vi l.uti fbt
promu!) une autre cure.
Carlostad, diassé de Saie par Luther, se retira en Suisse et j
apporta ses erreurs sur l'eucharisUe ; il enseigna que te corps de
Jësus-Chcist n'j était point réellement.
Zuiiiglc saisit avidement une opinion si favorable au dessein
qu'il avait d'abolir la messe.
Carlusiad arait appuyé cette opinion sur ce qu'il est impossible
qu'un corps soit en plusieurs lieui k la fois. Luther iTait opposé
!i cette difBculié l'autorité de l'Ëcriiure, qui dit eipressémentque
les symboles eucharistiques sont le corps de lésus-Chrisi : eev/s
raison était péremptoire contre Zuingle qui établissait sa ré-
Ibmie sur ce principe rondamenul , savoir ; qu'on ne doit rien
«nseigner que ce qui est contenu dans l'Écriture.
Cet argument tourmentait Zuingle nuit et)our,il jr cliercbalt une
Cependant il prêchait avec sa véhémence ordinaire contre l'K-
gliso romaine; son parti devenait U parti dominant; les esprits
e'écbault^reni, on brisa les images , cl comme le trouble augmen-
tait dans la ville, les magistrats ordonnèrent des conférences sur
les matières controversées. Après plusieurs conférences , les ma-
gistrats abolirent auccessivem«ii la messe et toutes tes cérémo-
uies de l'Église romaine ; ils ouvrirent les cloîtres, les moines
rompirent leurs vœux , les curés se marièrent, et Zuingle lui'
même épousa une riche veuve. Voili le premier effet que produiiit
dans le cantonde Zurich la réforme de Zuingle.
II étaitfort occupé de la difliculié de concilier le sentiment de
Ciirlostud sur l'eucharistie avec les paroles de Jésus-Christ, qui
dit eipressément: Ceci ett mon eorpt. 11 eut un songe dans lequel
il croyait disputer avec le secrétaire de Zurich , qui le pressait
vivement sur les paroles de l'institution : il vil paraître toi
coup im fantûme blanc ou noir, qui lut ditces mots : • LHcbe, qu«
> ne répoitds-tu ce qui est écrit dans l'Eiode , Yagneaa cil U
* pdque, pour dire qu'il en est le signe. >
Cette réponse du faulAme fut un triomphe, et Zuingle n'eut plus
de difficulté sur l'eucharistie; il enseigna qu'elle n'était que
fite
ZUI
Ugure du corps ei du sang de Jésus-Cbrisl ; il ironi'i dans Vtùn
tare d'autre» exemples ob le mot «d s'employait ponr le mol ■
gnîGe : tout lui parut alors facile dans le sentiment de Cariostad
L'explication de Zuingle , favorable aux sens et ï l'imigiBi
lion , fut adoptée par beaucoup de Réformés ; ils voulaient M
abolir la messe, et le dogme de la prteence réelle rormait m
barras sur cet article , l'eiplicaUon de Zuingle le levait ; OEel
lampade. Capiton , Bucer l'adoptfereut ; elle se répandit eo A
njagne,en Pologne, en Suisse, en France, dans les P^js-Ba
et forma la secte des Sacrameotaires.
Lulber, qui, aussi bien que Zuingle, avait établi l'Ëcriia
comm^'unique rËgle de la foi, traita les Sacrnment.'âres
des hérétiques, et l'on vit entre les Sacra m en ta ires et les Lutk
riens la mâme opposition qui était entre toutes c«s sectes ei
glise romaine : aucun iotérât n'a jamais pu les réunir, et II
Luthériens ne persécutaient pas les Sacra mentaires aivc mi
fureur que les catholiques.
La réforme introduite en Suisse par Zuingle se répandit; ph
sieurs réfonnaleurs secondèrent ses elforis à Beme, i BJle,
Constance, etc.
riusieurs cantons restèrent constamment attachés h la rel
catholique , et condamnèrent la prétendue réforme des a
cantons; ils leurs écrivirent pour leur représenter que la réfon
de la religion n'appartenait ni au peuple, ni k un pays partie
lier, mais 1 l'Ëglige, à un concile général. Les prétendu réfa
mes n'eurent aucun égard aux représentations des caibolîqna
on employa de part et d'autre des expressions dures, et la gatt
fut sur le point d'éclater plus d'une fois entre les catholiques
lesProlesians; enfui les cantons de Zurich et de Berne dëfendîrf
de transporter des vivres dans les cinq cantons catholiques, et T
arma de part et d'autre.
Zuingle fit tous ses cfFurispour éieiudre le feu qu'il avait allmi
il n'était pas brave, et il fuUait qu'en qualité de premier pasU
de Zurich, il alllt II l'armée ; il sentait qu'il ne pouvait s'
penser, et il ne doutait pas qu'il n'j périt, Une comité qui pai
alors le confirma dans la persuasion qu'il serait lue ; il s'«n pb
gnit d'une manière lamentable, et publiait qne la comète a
çait ea mort et de grands malheurs sur Zurich ; malgré les plai
tes de Zuingle, la guerre fut résolue; Zuingle accompagna Tl
ZL'I 6lT
Les catholiques aitaquérent les Zuriquois un veotlreili, 1 1 uc-
tobre 1S31,ï Cappcl, et lesdéSrent: Zuingle fntlué.
Après la bataille de Cappel, les catholiques et les Zurii|iiois
firent Is paix i condition que cliacun conserrerail sa n'Ilgion.
Nous sTons rêrutè la doctrine de Zuingle sur le célibat ï l'ar-
ticle V[ctLA.icE ; son sentiment sur l'eucharistie, à l'article Ht-
SENCEH ; Bon erreur sur la messe, à l'article Luthéianishb ; son
erreur sur ie culte des saints, ï l'article Vigilance ; son erreur
sur les indulgences, à l'article LgTiiiRAnrsHE.
11 faut appliquer il la réforme que Zuingle établit en Suissa
ce que nous avons dit de la réforme de Luther et de la Rérorma
en général.
Nous avons peu de chose it dire sur les talens de Zningle et
sur ses ouvrages; il n'était ni savant, ni grand théologien, ni bon
philosophe, ni eicelleni littérateur; il avait l'esprit ]usie et borné;
il exposait avec assez d'ordre ses pensées, mais il pensait peu
profondément si on en juge par ses ouvrages.
Toute la doctrine de Zuingle est renfermée dans soixante-sept
, articles, comme nous l'avons déjï dit : il a (ait un ouvrage pour
justifier et pour prouver ces articles; cet ouvrage ne contient
que les raisons employées par tous les réformateurs.
Zuingle, un peu avant sa mort, lit une confession de foi qu'il
adressa à François 1"; b, en expliquant l'article de la '
nellc, il dit à ce prince qu'il doit espérer de voir l'assemblée de
tout CQ qu'il } a eu d'hommes saints, courageux et vertueux dëx
le commencement du monde. Lï vous verrez, dit-il, les deux
Âdan, le Racheté et le Rédempteur, vous verrez un Abel, un
Enoch... TOUS y verrez un Hercule, un Thésée, un Socrate, Aris-
tide, Antigonus, etc.
Les ouvrages de Zuingle ont été recueillis en cinq volumes
in-folio '.
4
«
'On peut, avec ces ouvrages, voir Cossuel, Hisl. des var ;SpowL 1
ad, BII.1517 1 HiiL du la Hérorme, par lu Uuchiit ; Su|i|)lémeul du Hajit, |
art. ZvDiau.
I ET UEHniEIt VOI.tME.
I
Extrait du catalogue.
KIDLIÛTHÈQUE CHRÉTIENNE DU XIX' SIÈCLE, i l'usage du
cki^é et <lea geae du monde. Foriuat grand io-lS, papier su-
piTlin, saliaé. Prix de chaque volaaet brocbâ : 3 fr. GO c.
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liiïieilÉïûle, unclioiiricsMLoitreiipiriluclk'sclleTrailÉderamoiir
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de Liien et ses Lettres sur la religion ; nourclk édition , rangée dam
un meilleur ordre, et pri'cédée d'un discoure préliminaire, par M. de
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Oraitoos TanUtrei de Dostuet, Fléchier, HaitilloD, Masrarath Dourda-
louc et Lame, p râpées d'éludés historiques sur ces orateurs, par
A.Nt'Ileueiit; d'éludés lillËrairesturroriitODfuDËbre, parLahorpe,
et de notices biog ta p biques, par DussaulL 3 vol.
La Divinili de Jètos-Cbrist anuoucée par les prnpliéles, déntootrée |Kir
iMévnngélisles, prouvée par l'acEoin plissement des prédiclions de
Jésus-Christ, el reconnue par les plus grauds phitosoplu» de l'uni-
versi ouvrage suivi de l'iiisloirc d'une ame et de celle des conver-
sions les plus célèbres ; par M. de Genoude. 3 vol.
La Vie de Jéius-Chrisl au poiiilde vue de la science, par Jean Hulin,
docteur de la Faculté de théologie de Tublngue; traduite de l'alle-
maud, par F, NellemenI, pour faire suite A la Raison du clirisiia-
nisme. 1 vol.
Médita I ions gur l'Éiangile, par Dossuel, ornées d'une nupilifiue
graiure sur acier. 1 vol.
Didîtranaire des hérésies, ou Mémoires pour servir i l'bislnirc dés
éfaremens de l'esprit liuniain par rapport A la religion chrétienne ;
par Pluqnet; ouvrage coulinué jusqu'à nos jouti par V, de Pvr-
Todik 3 lal.
Délfvie du cfarisliantsaH- par les Pires des premier* siècles de l'Ëglise
cnalre les philosophes, les pDiens et les juifs, Iroduclioa» publiées pav'
M. de Genoude. 1 vol.
Le Chemin du sanctuaire montré ï ceux qui aspirent au sacerdoce, ou
Manud des ecclésiastiques, traduit de l'italien du R. P. Foresli da
Carpi, de ta compagnie deJésis, par un directeur de Séminaire ;
DUTrage approuvé par la eongr^allon de riodci. 1 vol.
Klévalkins k T)\ea,oafnt;eiuiti de l'ordinaire de 1> uiaie mate H pt^
cftlé d'une noUce sur Doasuet , por M. V. de Peirodil. ( wL
Discours lur les rapports tiilre la sciente el la religion iihélfe, pn>-
noncÉ9 i Borne par Nicolas Wiseman , fïtquc de UélipolamM, doc-
Mr en IMologie, principnl du Collège anglais el profeneur dt
l^ivcrailidcRome; publiés par M. de Genoude. 4* édition, fern*
el corriKéc pur l'auleur, avec plsocbcs. t Tol-
Nouvelle eiposilion du dogme catholique, par M. de Genoude, ïuitie
de la Dortrino de l'Église caliioliqucpar Bossuet, de la RSgle g«ti£nile
de II voie catholique par Véron, des Maiimes de TEglise sur le uhil
de»bonimesparM.réï*qucd'HcrtQopolis. 1 toU
Les ConrrasioM de saint AugusUnAurêle, évoque d'Hippone, letle li-
Lin et frantais, iradurlion de M. LioncedcSapotla.NouTellcéililfoB,
iCTuc el corrîgÉe. 1 •"•
RuIlln,Trail<.^da Éludes, ouvrage précédé d'une notice sur i'alitnu.
par H. CoDgttet.chauDincdelacalliédralcdeSouMHis. I nri.
NOUVELLES MORALFS, par Soaic.lrudui tes par madame Luuise
Colel. 1 joli voL in-18,cai'tiinn('. W«.
PLUS DE CRAMMAIHES, Ban'me usuel et populaire Je la lan-
gue Trïticaisc, i l'aide duquel les cnfjiis, les dusses ourribres,
les gens du monde ei les étrangers peuvent réellement acqué-
rir seuls, sans ennui, sans raliguB el en peu de lempi le véri-
lable usage de la langue parU'e el de la langue écrite ; premier
ouvrage de ce genre, par Bescherelle a tni>, membre deplusieun
sociétés savantes, auteur Je la Grammaire aalionaU. Un vol.
in-13, deuxième édition revue, cartouni^e. 2 b.
Le Plui de grammairei n'est vraiment qu'une Irfrs bonne grammaire
de M. Bescberêlle.
Noui reconimaiiUuns rel ouvrage H loutn les personnes qui Tcnleat
opprendre ou se pcrTectionner sur la lungue française.
Elles tronveronl dans ce livre des raisounemens claiiSt ■<<Bplt(( pv-
sltib. Des dictées très-étendues développent les r^lcs timmmatiealn M
les gravent dans les mémoires hi plus ingrates Celte grammaireM
tenninte par uji excellent trailé de pronaiidation , ce qui la rend sut-
iDul prtcieuse aux étrangers.
Nota. La librairie calhelique rmffrme un nombre CQUtidirsUt
àet meilleuri livra iepiiU, TtWH tl l>rKhii.
^^^^^^^^^^^^^1
^^^^VI^^^^B^^^E^^^^^^m
mwmm cmenve du xiv mm, \
* fc\»iSt su CLIBOi u DM c»f *p «««IM, 1
U np|. à 3 (r. SO c, formAI f^ratui in-JK, p:ip x-r îëuis «gJ
«■Il Choix lin
ç Trtl.U' .!.
MU Tr..i>.
IMtruBi"' !..
nii^ dans r
iWcJ'undU,
I.«i-V r',-
liW ^rdu,'iii':t de Sala, con-
KlurlioTi .^ U tin dOvnto.
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