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DICTIONNAIRE
DES LOCUTIONS POPULAIRES
DU BOX PAYS DE
RENNES-EN-BRETAGNE
pi^ii§ii&^l
H. COULABIX
Dictionnaire
DES LOCUTIONS POPULAIRES
DU BOX PAYS DK
RENNES-EN-BRETAGNE
Rf:\\\'i:s
HYACIN'THH CAILLIHRH, LIBRAIRIZ-liDITEUR
2, l'LACl- DU PALAIS, 2
?c
,
•a \fon aimable et excellent ami
Monsieur C
Je vais me parjurer, mon excellent ami,
et vous en êtes la cause !
J'avais juré que le TDir ne verrait jamais
le jour, et depuis vingt ans vous insistez
pour qu'il soit public. — Avez-vous songé
à la lourde part de responsabilité qui vous
incombe dans le gros péché que vous me
faites commettre ?
tJîlea jacta est ! Je me rends à vos désirs,
cher complice. Advienne que pourra !
Votre antique ami,
H. C.
'li^ennes, Mars iS()i.
« // V i; une lougiie liste de
tenues populniies qui n'est pns à dédai-
gner, comme elle pourrait le paraiire
d'al'ord. Combien de personnes distinguées,
qui ne sont jamais sorties de la Cour ou du
grand monde, et qui, se trouvant quelque-
fois obligées de descendre dans de certains
détails avec des gens du peuple, ne compren-
nent rien éi ce qu'ils disent ! »
(Zacharii; Chasthi.ain, i7)0.)
^t^
L VOUS iinpoilc peu, ii\'sl-cc pas, cher
lecteur, de savoir qui je suis, il'oi'i je
viens, et pourquoi j'ai fait iiiipriiiier
ce petit livre ?
Il est cependant d'usai^e de s'expliquer
sur ces différents points, cl il v a plusieurs
manières de le faire. La plus « di^liit^^^uée »
— VIII —
est, à coup sur, de se faire présenter par
un préfacier connu, dont la compétence et
la notoriété servent de passe-port, de sauf-
conduit, d'introduction, de reconimandalion.
J'aurais pu demander ce service à un ami
« lùen posé » qui, par politesse, n'aurait
pas osé me refuser ; nmis, au fond, il
m'aurait envoyé à tous les diables, jugeant
que mon modeste travail ne valait pas la
corvée que je lui imp>osais Et il eût
eu raison. J'ai donc pris le parti que je
crois le plus sage : celui de me présenter
tout seul. De cette façon je n'aurai pas de
reproches à me faire, puisque je naurai
compromis que nioi-niéme.
Oui je suis ? D'où je viens ? Je vais
vous le dire, cher lecteur.
Je suis un vieux rennais Vers la
fin de i8)o (j'avais alors vingt ans), je
fus admis à l'emploi de sccréiairc dans les
bureaux de VElat-major de la zj'"' Divi-
sion militaire^ à Rennes.
Le ,chef d'Etat -major de la Division, le
colonel Carvalho, portugais d'origine, —
inais qui s'était donné corps et âme à Li
France, — me témoigna beaucoup de bien-
veillance ; et, sur sa proposition, le géné-
ral baron de 'Bigarré me nomnui aux
fonctions de greffier prés le i" conseil de
guerre de la 'Division, fonctions que j'ai
occupées pendant trente-cinq années consécu-
tives.
Au colonel Carvalho succéda bientôt le
colonel Lechartier de la Varignière qui,
plus tard, commanda le département de la
Manche.
Enfin, e)i 1S42, le colonel de Tessîères
vint à son tour occuper les fonctions de
chei d' Etat-major.
Comme ses prédécesseurs, cet ojjicier supérieur
m'accorda toute sa confiance, m'accueillit avec
la même bouté, et je comptai au nombre de mes
meilleurs jours ceux que j'ai passés dans Vinti-
iiiilé lie la famille si bonne cl si patriarcale de
cet excellent homme, (i)
J'ai tenu à rappeler ici les noms de mes
(généreux bienfaiteurs aujourd'hui disparus.
Ma reconnaissance pour eux ne s'éteindra
(ju'avec le dernier battement de mon caur.
Et maintenant que nous avo)is fait connais-
sance, cher lecteur, je vous dirai comment
et par qui me fut suggérée l'idée de former
ce petit recueil.
Madame de Tessières était fille de M. Noël,
l'auteur des classiques qu'ont tant feuilletés les
étudiants de mon temps. C'était non seulement
une personne des plus distinguées par son érudi-
(i) M. de Tessières est mort à Paris le 14 novcmhre iSj6. Son
fils, jeune clbriUant officier d'cirtilleric, a été lue dans la guerre
fratricide de la Commune. Madame de Tessières elle-même
n'échappa que par miracle aux halles des comr,iunards. Elle est
morte à Paris le iç novembre iSjS.
iion, mais, à ioutcs ses chaiiiiaiilcs qualités elle
en joignait une qui, nialhcurcnsement, devient
plus rare de jour en jour : elle était excellente
ménagère et savait, au besoin, mettre (comme on
dit) la main à la pâte.
Elle se trouva donc obligée, à cause nénie de
ce précieux don, et pour les besoins de sa maison,
de (( descendre dans de certains détails avec des
f( gens du. peuple. » Elle jut frappée d'entendre
une foule de mots quelle ne comprenait point,
ou dont le sens était complètement détourné.
A l'automne qui suivit son arrivée à %ennes,
Madame de Tessières voulut faire des confitures
de groseilles. Le jardinier auquel elle s'adressa
lui apporta une énorme pannerée de groseilles à
maquereau . — « Que m' apportez-vous là, mon
« brave homme? » //// dit madame de Tessières.
<( fe vous ai demandé des groseilles à grappes
<( pour faire des confitures, et vous m'apporte~
(( des groseilles à maquereau...^) Eh! nuidame,
répliqua le jardinier, « que ne dema)hiie~-vous
« des castillcs ? »
Madame de Tessières, comme toutes les Tari-
— XII —
siennes sans doute, ignorait ce que c'était que
(les castilles.
Le soir, elle me raconta sa petite mésaventure.
Je lui citai, à cette occasion, plusieurs locutions
rennaises quelle entendait povr la première fois.
Elle en inscrivit sur un petit cahier une cin-
quantaine environ.
En iSjo le colonel fut admis à la retraite et
nous quitta avec sa famille, au grand déplaisir
de la société rennaise qui ne l'a pas encore
oublié.
En partant, madame de Tessiéres me laissa
son petit recueil que je me promis d'augmenter.
Après un long sommeil je me suis remis à
l'œuvre, petit à petit, par boutades, occupant
ainsi une partie des loisirs de ma retraite, et
sans avoir jamais eu la pensée, (on me croira
sans peine), que mon travail me vaudrait un
fauteuil, ou viéme un simple tabouret, dans une
Académie quelconque.
— XIII
// me reste à m'expliqucr sur un point. —
^Pourquoi me suis-je décidé « sur le tard » à
faire imprimer le Dictionnaire des locutions
populaires du bon pays de Rennes-en-Breta-
gne, alors que j'avais bien juré que mon manus-
crit resterait éternellement enfoui au fond de
mon tiroir ?
Il y a vingt-cinq ans environ, j'eus le bonheur
de lier connaissance avec un homme aimable et
charmant, M. C , qui fut amené, par les
hasards de la vie de fonctionnaire, à fixer sa
résidence à 'î^ennes. Nous ne tardâmes pas à
devenir bons amis, — très bons amis même, —
et nous allions souvent, avec nos familles, faire
de longues pronwnades dans la campagne des
environs de Raines.
Comme l'avait fait jadis Madame de Tessiè-
res, M. C prit un vif intérêt à entendre
parler nos paysans, et, >uiturellenu'nt, je lui
communiquai mon recueil qui grossissait de jour
en jour. C'est alors que M. C m'engagea
vivement à le publier. Je lui déclarai fonnelle-
ineut que jamais, au grand jamais^ le 'DIC ne
ferait « gémir les presses ». (C est sous ce nom
cfe Die, abréviation de Dictionnaire, que, dans
nos causeries familières, nous désignions mon
recueil manuscrit).
Mon ami insistait Je tenais bon. — //
insista pendant plus de vingt ans et pendant
plus de vingt ans je tins bon
Enfin fai cédé !
Cher lecteur, que votre critique soit légère à
un débutant de quatre-vingts ans !
H. COULABIN,
Officier d'adminiitialion
de la Justice mililaire en retraite.
ABRÉVIATIONS
Abr.
Abréviation.
Ac.\D.
Dictionnaire de l'Acidémie
Adj.
Adjectif.
Adv.
Adverbe.
Adv. pron.
Adverbe pronominal.
B. Lu.
Bas. Lu.
j Basse latinité.
Besch.
Dictionnaire de Bescherelle
Bkant.
Brantôme.
C-à-d.
C'est-à-dire.
Cf.
Conférez.
Ch.
Chap.
1 Chapitre.
Cliron. des D.
de Norm.
Chronique des Ducs de No
D.
Demande.
Des 2 g.
Des deux genres.
Dict. pop.
Dicton populaire.
Duc.
Ducange.
Ex.
Exemple.
Etym.
Etymologic.
Excl.
Exclamation.
Fam .
Familier.
Eig.
Au figuré.
Garg.
Gargantua.
Interj.
Interjection.
La Font.
La Fontaine.
Liv.
Livre.
Loc.
Locution.
Loc. adv.
Locution adverbiale.
Loc. pop.
Locution populaire.
Mém.
Mémoires.
Mont. Montaigne.
yi S". Même signification.
NoRM. Normandie.
Pamt. Pantagruel.
Part. Participe.
PI. ou plur. Pluriel.
Pop. Populaire.
Pr. Pronom.
Piép. Préposition.
Pron. Prononcez.
Pr. pers. Pronom personnel.
Pr. poss. Pronom possessif.
Qqf. duelquefois.
Clqn ou qn. Q.uelqu'un.
dqs. duelques.
R. Réponse.
Rab. Rabelais.*
Rom. Roman.
S. Substantit.
S. et adj. Substantif et adjectif.
S. f. Substantif féminin.
S. f. pi. Substantif féminin pluriel.
S. m. Substantif masculin.
S. m. pi. Substantif masculin pluriel
Syn. Synonyme.
Trév. Dictionnaire de Trévoux.
V. Verbe.
V. a. Verbe actif.
V. n. Verbe neutre.
V. pr. Verbe pronominal.
Vieux fr. Vieux français.
Voy. ou V. Voyez.
DICTIONNAIRE
DES
LOCXJTIOISrS l'OPXJL .AUTRES
DU BOX PAYS DE
RENNES-EN-BRETAGNE
J^
Abècher, v. a. dont les auteurs et les grammai-
riens ont fait ahccqmr, donner la becquée. Nous avons
conservé, nous, le mot primitif, et nous disons :
l'oiseau ahcche ses petits, leur porte la hcchcc.
SARTHE : ahcchcr, m. sg. — trév. : cilhéchcr. m. sg. —
BESCH. : abecquer se dit aujourd'hui plus communé-
ment que abècher et abéchir.
Abégauder, v. a. vient de bégaiid. — Ex. : Il la
trompait en Yahègaudaiit, en lui contant des sornettes.
Voy. hcgaiid.
Abîmer, v. a., gâter, salir, détériorer. — Ex. : Un
meuble a été ahiuié dans un déménagement. On alniiie
bien ses effets en voyage. Prenez garde, Adolphe,
vous allez ahivicr ma robe. On dit aussi : je me suis
àbimé, (sali).
SARTHE : ahimer, m. sg. — nokm. : abiiner, m. sg. ;
S'ahimer, se blesser. — acad. : abimer. Fig. et par
exag., gâter, endommager beaucoup.
Abominer, v. a., tenir à une personne ou sur
une personne des propos abominables. — Ex. : Il lui
faisait bon accueil et V abominait par derrière (vieux).
NORM. : abominer, détester, diffamer. — besch. : abo-
miner, avoir en horreur (Vieilli).
Abriver, (s'), v. pr., se lancer, se jeter sur quel-
qu'un. Ex. : Son chien s'est abrivé sur moi. — Voy.
ebriver.
Ce mot se retrouve dans le vieux français : abriver,
abriever, ameuter, exciter, courir sur. — B. lat :
abreviare. — Ex. duc. Adonc s'abrivérent contre lui.
— On trouve avec un sens différent : trév. : abriver,
arriver ; (n'est plus en usage). — besch. abriver, abor-
der (vieux mot).
Aburoter, v. a., élever un enfant au biberon.
Ex. : Nourrissez-vous votre enfant ? — Non, j'ai été
obligée de Vabnroier.
Acaniller, (s'), v. pr. se dorloter, se rendre fri-
leux, aimer le coin du feu. Ex. : Il s'acanille ; aussi
s'enrhume-t-il au moindre troid.
Ce mot a quelque rapport avec le français s'acagnarder,
mener une vie de fainéant, norm. : s'acagnarder, deve-
nir paresseux. — centre : s'acagnardir, rester au coin
de son feu.
Accourser, v. a., achalander. Ex. : Cette mai-
son de commerce, cette boutique est bien accoursêe,
~ 3 ~
cl une bonne clientèle. Probablement du latin accur-
siis, concours, affluence.
TRHV. : nccoiirs, vieux mot^ affluence d'advenants ;
accnrsus. — n'ORM. accourser, achalander. accouvsè, en
cours de bonne vente. — Vieux Fr. acoursé, achalandé,
accrédité, chez qui il y a accours ou affluence de clients. —
DUC. ; accoursier, acconrsin, chalan.
Achaîson, s., dégoût. Avoir achaison, avoir dégoût
d'un mets ou d'une chose. Syn. de danger. (Voy. ce
mot).
Achaisonnoux, se, adj., dégoûté.
TRÉv. : achaisonner, vexer. — nap. landais : ochai-
sonner, vexer, inquiéter ; n'est plus français.
Achetoires, s. f. pi., pièces d'argent : £.v. .■
Sans achetoires on ne va pas au marché.
Achocre, adj., grosse injure qui se traduit par
entêté, bouché, stupide. Ex. : Le maître d'école de
Chateaubriand l'appelait tête d'achocre. (Mém. d'Ou-
tre-Tombe). On dit aussi : tête de mât. — Ce mot
ne viendrait-il pas de achores, teigne ?
NORM. achocre, s. m., homme brutal, violent, grossier,
difficile à vivre, hargneux, obstiné. Dans la Manche,
maladroit.
Aciboter, v. n., se dit du blé qui ne débourse
pas, dont l'épi ne sort pas de son étui, de son enve-
loppe.
Acoquiner, (s'), v. pr., contracter une habitude,
se dit surtout d'une mauvaise habitude. Ex. : Depuis
— 4 —
quelque temps cet ouvrier, autrefois si rangé, s'lico-
qtiine au cabaret. (Ce mot est français).
ACAD. : S'acoqtiiner, va. sg., fam.
Acouer, v. a., attacher par la queue. Acouer les
chevaux pour les conduire à la foire. Vient de coue,
queue.
BESCH. : acouer, m. sg., fort usité à Paris et dans la
plupart des provinces. Fig. dans Mont., lier, attacher.
Voy. Coue.
Acquît, s. m. Faire de Tacquil, locution très em-
ployée, surtout chez nos ménagères. Telle étoffe n'a
pas fait d'acquit, elle était de mauvaise qualité.
Ex. : Prenez ceci, dira une marchande, cela vous
fera de Tacquit. (Voy. Avange).
A c't'lieure, pour à cette heure. Se prononce
astejir ou astoiire. Cette locution, emplo);ée fréquem-
ment dans la conversation, est l'équivalent de :
à présent, maintenant, après cela. On dit aussi à
c'i'hour' ci. Ex. : Telle besogne est finie, eh ben,
à c't'hour' ci j'allons commencer telle autre... Si
j'étais asture forcé de choisir, (Mont., liv. 3, chap. 19).
Voy. Asttire.
SARTHE : à c't'heure, m. sg. — centre. : a c't' heure,
m. sg. — NORM. : aclitcur, achteu, asteur, asteu, m.
sg. — Vieux Fr. : asleure, asture.
Adelaizi, e, adj., touche -à- tout, désœuvré.
Ex. : Voyez comme il est adelaizi, il a gâté toute ma
besogne.
— s —
NORM. : adelaisi, inoccupé, oisif, qui a dé leisis. —
Vieux Fr. : Le^, loisir, duc. : Voy. Lonlé\i.
Adens, adv., se mettre adeiis, se mettre sur le
ventre, la face contre terre. Nos paysans ont la mau-
vaise habitude de se coucher et de dormir adens après
le repas. Mettre un vase adens, le renverser le pied
en haut. C'est un mot excellent, dit Littré, et qu'il
est dommage de voir perdre.
Adeuter, (s'), v. pr., se pencher, se courber.
SARTHE : adenter, adcnlé, m. sg. — norm. : adens,
adv., sur les dents. Ex. : Tomber adens, mettre un pot
adens ; adenter, renverser un vase en mettant son em-
bouchure en bas. — Vieux Fr. : adans, aden^, prosterné,
le visage contre terre. Adenter. \° Appuyer son visage
contre quelque chose, renverser quelqu'un le visage
contre terre. 2° Mettre l'embouchure d'un vase en bas et
le fond en haut. (duc).
Adfors, adj,, étonné, surpris désagréablement.
Ex. : J'ai été témoin de ce triste événement et j'en
suis encore tout adfors.
Adioter, v. n., devenir fou, idiot. Ex. : Que
dis-tu ? que fais-tu ? vas-tu adioter ? (Quand on
reproche à quelqu'un de dire ou de faire une chose
déraisonnable.)
Admesé, Admeshui, adv., désormais, mainte-
nant, à présent. Ex. : Puisque tel ouvrage est ter-
miné, adiiiesé j'allons en commencer un autre. Voy.
Déniaisé, TDemaishui, McsJiui.
Adouzainer, v. a., mettre par douzaine le linge
— 6 —
revenu du blanchissage. Ex. : Une bonne ménagère
adoii:(aiiie ses nappes, ses serviettes, ses bas, pour les
faire servir au tour et rang (chacun à son tour).
Adsa, adv., à ce soir, dans la soirée. Ex. : Je ne
le verrai pas c'matin, mais adsa. Le beau parleur dit
adsoir. « J'arrivay arsoir de Marans. » (Henri IV à
Mme Je la Roche-Guyon).
Adsi !, va-t-en, hors d'ici ; ne s'emploie guère
qu'envers le chien ou le chat dont la présence im-
portune. Ce mot est habituellement accompagné d'un
coup de pied donné à la pauvre bête. — Ex. : Adsi,
Picard, s'écriait un mendiant ; tourne ton dos vers le
mien, tes jambes me blessent. (Voy. le mot Ticard).
Affalasé, e, adj., essouflé. Ex. : Je suis venu en
courant, j'en suis encore tout affalasé. Cet adjectif,
plus employé au masculin qu'au féminin, semble
avoir pour étymologie le mot Fale, jabot des oiseaux.
Afifété, e, adj., Goule affétée., palais usé, difficile,
qui ne trouve aucun mets de son goût. Vient de
afféterie.
C'est un sens un peu différent de celui du français
affèté, qui signifie trop recherché. Ex. : Je laisse aux
doucereux ce langage ajfété. (Boileau). — norm.: ajffé-
ter, 1° assaisonner, 2° disposer avec soin, embellir.
Affiler, V. a., lancer, jeter. Ex. : Il a affilé son
chien sur le mien. Voy. Enfiler.
Afifourée, s. f., mesure agricole ou un repus.
- 7 -
Un tiers de jour de terre, ou 25 ares, i afources
valent un hectare.
Affourrer, v. a., àim'muùf d'Affouirager, donner
le fourrage aux bestiaux.
TRÉv. : affourrer et affourrager, m. sg. — norm. : affoiir-
rée, ration de fourrage donnée aux bestiaux, affourrer,
raffoiirrer, donner Yaffourrée. — Vieux Fr. : affourrer,
affourrer, m. sg. — bas. lat. fora gare, (duc.)
AflFronter, v. a., tromper, voler, manquer à ses
promesses. Ex. : J'ai cru acheter une bonne étoffe,
et j'ai été affrontée.
Affronteur, affrontoux, s. m., homtne de
mauvaise foi.
SARTHE. : affronter, m. sg. — acad. : affronter, trom-
per. Ce sens vieillit. — norm. : affronter, deshonorer,
séduire (une fille), affronteux, séducteur.
Afifûtiaux, s. m. pi., ustensiles, outils. Ex. : Il
est arrivé avec tous ses aff'ùtiaux. Vient du verbe
affûter.
SARTHE. : affûtianx, m. sg. — acad. : affûtiau, baga-
telle, brimborion. Pop. — norm. : affution, ornement,
bagatelle.
Afilée, s. f., laps de temps non interrompu, tout
d'une traite. Ex. : Je les ai vu causer ensemble une
heure d'afilee pour le moins. Quinze jours d'afilée. A
Saint-Malo, on dit d'afile. — On voit que les mots afiJée,
et affiler ci-dessus ont des significations différentes.
SARTHE. : Tout d'une afilce, m. sg. — norm. : D'affilée,
en file, à la suite les uns des autres.
Agis, s. m. pi. C'est le treizième de la douzaine,
le 5 pour cent ou le 10 pour cent que le vendeur de
certaines marchandises donne à l'acheteur. Ainsi pour
les noix et les autres fruits. Ex. : Combien le cent ?
Combien la douzaine ? — C'est tant. — Vous me
donnerez don' rs'agis ? (Ce mot ne viendrait-il pas
du latin aiigcrc ?) A Saint-Malo on dit les agais.
Agliacer, v. a., rendie paresseux. Peu usité.
Agonir, v. a., injurier, agoni}- de sottises, d'in-
jures.
Agoniser, v. a., injurier. — Ex. : Au sortir de
l'église, elle m'a agoiiiié de sottises. Agonir, par abré-
viation.
XORM. : agoniser, agonir de sottises, injurier. — sar-
THH : agoniser, m. sg. — besch. : agonir qqn. d'injures.
Pop. — Employé par Ricard, Rétif (77' Contempo-
raine, i785\
Aguigner, v. a., agacer, provoquer. Ex. ; C'est
une fille qui agnigne les garçons fConies d'Eutrapel).
Montaigne a dit : « Ils se guignaient Vun ei l'autre. »
BESCH. : aguigner, avertir en faisant signe des yeux.
(Contes d'Eutrapcl).
Ahan, s. m., douleur de côté avec respiration in-
complète qui se produit lorsqu'on travaille ou qu'on
court aussitôt après le repas. Ex. : Il faut que je
m'arrête, j'ai le ahaii. On voit que ce mot a une si-
gnification autre que celle qu'on trouve dans nos dic-
tionnaires. — Voy. Lahan.
- 9 -
TRÉv. ahan, peine qui fatigue le corps et fait quelque-
fois perdre l'haleine. — norm. : uhan, effort qui essouffle
— chNTRi; : ahaniicr, être essoufflé, gémir.
Ahoper, v. a., appeler quelqu'un de loin. — Je
t'ai ahppé, et tu ne m'as pas oii'i. — C'est l'exclania-
tion J^op', dont nous avons fait un verbe.
Alangouré, ée, adj.; du vieux verbe ahvigoiuir ou
alanç^ourer ; languissant, chétif, qui ne profite point.
— Ex. : Cet enfant a souffert, il est alangouré. —
Vient d'alauguir. — Dans Rabelais, alaugonri.
TRÉV. : cdangoiiri, affaibli par une grande maladie ou
affliction, langiiidus. — busch. : almigoiirir, vieux mot,
rendre languissant. S'alniigoiirir, nhingcMiri, languissant,
(vieilli). On dit aussi éhingoiiré, cnlangourc, et alangouré.
Alatri, e, adj., se dit d'un 50/ fraichenient labouré,
battu par une grande pluie. — Ex. : Ce carré, cette
plate-bande ont été alatris par la pluie d'orage.
Alfessier, s. m., un mauvais ouvrier, un pas
grand'chose dont aucun patron ne se soucie. — Voy.
H al fessier.
NORM. : Halefessier, gredln, liomme de la pire espèce,
mauvais sujet, de mauvaise mine.
Ali, s. m., pain ou gâteau non levé, ou pain
azyme.
Vieux Fr. : alii, compacte, serré, d'où pâle alixc, qui
n'est point levée, ce qui la ren 1 compacte, (duc.)
Alobé, e, adj., hébété (Fougères).
Alouette-bandée, s. f., Nous donnons ce nom
au jeu de Colin-Maillard. Quand la personne bandée
va se heurter à un obstacle, on l'en avertit en criant :
a Casse-pot ! ». Ce jeu est fort goûté des garçons,
qui, pour désigner la jeune fille « attrapée », sont
obligés de recourir à de petites privautés qui n'ont
rien de déplaisant, et que le jeu autorise. — Ex. : A
quoi jouons-nous, mesdemoiselles ? A l'alouette ban-
dée. — Voy. L'alouette.
Aloyée, s. f., vache stérile ou vache bréhaigne.—
De a privatif et Loye, taureau. — Voy. loye.
Amain, d'amain, adj., commode à la iTiain,
sous la main. — Montaigne a dit : o Ce me serait
honte de servir ayant la liberté si à main » ; et
ailleurs : « J'avais ce langage si prêt et si aviain. »
NORM. : à main, loc. adj. commode (Awyot). à main,
adv., commodément.
Ame en peine. — Dicton populaire. Q.uand on
heurte en marchant une' pierre qui vous fait trébu-
cher, c'est qu'une âme en peine vous demande des
prières. Un pater ou un ave peut la délivrer des
flammes du purgatoire.
Ameiller, v. n., se dit lorsque certains symptô-
mes se manifestent chez les vaches sur le point de
faire leur veau. Ex.: Je crais, ma, que « Belle Etaile »
va b'entôt vêler, car elle ameille.
Amenusir, v, a., pron. ain'nusir, amincir, dimi-
nuer de grosseur une cheville, un manche d'outil.
C'est une corruption de verbe amenuiser.
TRÉv. ; awcH((/'5cr, rendre plus menu, miiiuere. — acad. :
amenuiser, rendre plus menu. — xorm. ; amenussier,
amincir, amoindrir. — Vieux Fr. : amenuisir, (Roman
de la. Rose).
Amesser, v. a., C'est, pour la femme qui vient
d'avoir un enfant, assister à la" messe de relevailles.
— Ex. : Ce ne fut que six semaines après ses cou-
ches que Mnie X... put être amcssèe. — J'ai entendu ce
verbe de la bouche d'une gentille Rennaise qui nous
l'a apporté de Josselin (Morbihan).
Vieux Fr. : amessement , messe de relevailles, fête de
relevailles. lias lai. : Admissatio, cœremonia admissio-
nis mulierum post nuptias vel partum. (duc.)
Amiauler, v. a., faire sa cour à quelqu'un, cher-
cher à séduire ou à tromper par de belles paroles. —
Ex. : Tiens-toi sur tes gardes, i! cherche à t'amiaider.
— Ce verbe, qui semble une corruption d'emmieller,
tire peut-être son origine des miaulements intéressés
des chattes.
NORM. : amiaider, amadouer, circonvenir. — Vieux Fr. :
amiaiûement, ameiaidement, amiablement, avec douceur,
amicaliter. (duc.) — (Ceci donne une autre étymolo-
gie de amiauler).
Amoi, d'amoi, locution qui s'emploie avec la
négative : Il n'a pas d'amoi, c.-à-d. il n'a pas cou-
tume de faire cela. — Comme d'amoi, comme d'ha-
bitude. (Vient sans doute de mos, coutume). Voy.
Mos (d'à).
— Il —
Amoulageur, s. m., piqueur de meules.
Amouracher (s') v. pr., s'éprendre d'amour.
— Ne s'emploie qu'en mauvaise part. — Ex. : Cette
fille s'est amourachée d'un ivrogne. — C'est le vieux
mot s'énaiiioiirer, mais il est moins poétique, on doit
en convenir.
ACAD. : amouracher, engager dans de folles amours.
S'amouracher. Tous deux fam.
Amulonner ou Emmulonner, v. a., mettre
en iitulon.
KOKM. ainuloniu'r, emmulonner , disposer le foin en petites
meules. — Vieux Fr. : amulonner, mettre en meules,
annilgare (duc).
Amuse-bègaud, s. m., spectacle ou objet qui
n'a d'autre mérite que celui d'appeler l'attention des
simples. Le mot, d'ailleurs, l'indique suffisamment.
— Voy. Bègaiid.
Ancien, ne, adj., âgé, ée, vieux mot toujours
très usité, surtout chez nos pa3'sans.
Femme je suis pauvrette et ancienne.
(Villon. 15« siècle).
SARTHE. : ancien, m. sg. — centre : Hancicn (h aspiré),
personne âgée.
Anet ou Anuit, adv., aujourd'hui, ce soir. —
£.Y.: Puisqu'il est venu anet, il ne reviendra pas
demain. — Vous n'en finissez : ce sera-t-)' pour anet
ou pour demain ?
- 13 —
SARTHE : anmiit, m. sg. — norm. : anmii, enhui,
aujourd'hui. — trév. : anniiit, aujourd'hui. Vieux mot
venant de l'ancien usage des allemands et des gaulois
qui comptaient par nuits et non par jours. Les paysans
disent encore aiinit pour aujourd'hui. — besch. : anuit
pour à la nuit. Est dit aussi pour aujourd'hui dans qqs.
parties de la France. — Vieux Fr. : anuit, ennuit, cette
nuit, aujourd'hui, (duc.)
Anicas, s. m., — Vov. Haiiicas.
Anille, s. f., Déquille, — Vieux mot frcinçais très
usité à Rennes. — Ex. : Depuis son accident, il ne
marche plus qu'avec des anilles.
TRÉV. : anille, annille. On appelait ainsi autrefois une
potence d'estropiés des jambes ou de vieilles. — besch.:
anille, béquille, potence. — xorm. : anille, béquille.
— Vieux Fr. : aniçote, béquille (duc).
Anoche, Voy. Hanoche.
Anoulière, s. f., vache qui n"a point produit de
l'année.
NORM. : anoulière, vache qu'on n'a pas fait saillir, ou
qui n'a pas conçu, et qui continue à donner du lait.
Anouyère, adj. f. — Galette anouycrc, lourde,
épaisse.
Antanne, adj. f. — C'est le vieux mot aniaii fé-
minisé. — Se rapporte à l'année précédant celle qui
court ; du latin aiite aiiiiinii. — Nos paysans font de
l'avoine dans le champ où on avait fait de la pau-
melle aiilainie (l'année précédente). — « Sais-tu,
Mathurin, que tu me dois deux termes? » — » Oui,
— 14 —
nout' maître, répond le meunier, mais est-ce ma
faute ? L'étang tarit oiianne, l'étang tarit antanne. »
(Jeu de mots. Voy. Otianne).
ACAD. : anian, s. m. l'année qui précède celle qui court.
Vieux mot qui ne s'emploie plus guère que dans l'expres-
sion : neiges d'antan. — Vieux Fr. : antan anten, ci-de-
vant, autrefois. — norm. : antenais, poulain d'au moins
un an. — anléiwis, antanois, agneau d'un an.
Anuit, Voy. Amt .
NORM. : anhui, ani, anieiit, enhiii. — centre : En
hui, annidt.
Ao, interject. ; s'emploie dans le sens interrogatif
de hein. — Ex. : Jeanne ! — Ao ? ■ — ■ V'n'oiis quante
ma ? — 7(7». — Ce colloque se traduit ainsi : Jeanne !
— Hein ? — Venez-vous avec moi ? — Oui.
Apetissée, s. f., du v. a. apctisser, terme de tri-
coteuse. — Ex. ; J'ai commencé les apctissèes, — les
mailles qui diminuent le tricot, par opposition à celles
qui l'augmentent.
SARTHE : apetissée, m. sg.
Apotichonner, v. a., élever au biberon un en-
fant que la mère ne peut allaiter. — Ex. : « Nour-
rissez-vous votre garçaille ? » — « Non, je l'apoti-
chounc. » — Vient de potiche, petit pot.
Apparaissance, s. f. — C'est le subst. apparence
allongé.
NORM. : apparaissance, m. sg. — centre : apparaissance,
m. sg., — Vieux Fr. : apparaissance.
— iS —
Après, prép. — Etre aùrès qqn., le taquiner, le
poursuivre : — Ex. : « Faites donc finir votre gars,
mère Legras, il est toujours après moi. »
ACAD. ; après qn. m. sg.
Arâsj adj., des 2 g., plat, sans aspérité. — Dési-
gne une femme de haute taille, sans grâce et sans
tournure. On dit d'une femme aux hanches peu sail-
lantes et dépourvue de poitrine : « Elle est toute
d'un ards, toute d'une venue ; quelle perche ! quelle
gaule 1 » — Dans nos casernes, l'homme flî'(/5 s'appelle
planche à pain.
Arbelaise, s. f., côte de porc. — Sans doute
une corruption de Lard de laie ; aussi devrait-on dire
arddaise.
Arée, ou Harée. s. f. averse, grain de pluie. —
Voilà encore une arée qui chauffe (un nuage qui va
crever). — Les arées se succèdent dans les chaleurs
d'orage.
NORM. : Harée, averse, pluie d'orage.
Argenté, ée, adj., qui a de l'argent. — « Il n'a
pas de biens au solda (soleil) ; mais c'est un gars
bien argenté. »
TRÉv. : argenicu.x, se dit des gens qui ont de l'argent
mignon, pecuniosus. Peu en usage, si ce n'est parmi le
petit peuple. — besch. : argenteux, pop. et inusité. —
NORM. : argenté, aigentii, ergentc, ergentu, riche, qui
possède beaucoup d'argent comptant.
Armelle, s. f., lame de couteau, petit couteau.
- i6 —
— C'est avec une mauvaise anndh qu'il s'est coupé
le doigt. — Dérive à\inne. — C'est aussi le petit
couteau cuslache que Rabel'.is nomme un gouet.
XORM. : aniiL'!h\ altitnclli\ lame de couteau. — besch.:
aluinellc , vieux mot, partie trancliante des couteaux,
rasoirs, etc. Du latin hiiiella. — Vieux Fr. : alanelle .
aletneille. tout instrument en fer qui est tranchant, ale-
inella, alimella, aliimella. (duc).
Armena, s. m., almanach.
NORM. : annéna, aniiana, crinéna, ermana, alména.
SARTHE : aniicna. — CENTRE : armena.
Arocher, v. a., lancer des pierres, des roches,
comme on dit dans nos villages. — Ex. : « Je te
défends d'arochL'r mon chien ». ^ S' arocher, se lapider.
NOR.M. : arracher, rucher, lancer (des pierres.) — Vieux
Fr. : ruer, lancer, précipiter.
Aroler, v. a., lancer méchamment un objet à
qqn, se précipiter brusquement sur qqn. — Ex.: lisse
sont aroh's l'un sur l'autre (se sont pris corps à corps).
— Vient peut être de ruer (se), ou de rouler (?)
Arolée, s. f. , vient d'aroler, mais avec une signi-
fication différente. — Ex. : Il a fait ses dix lieues
d'arolèe, c. à d, tout d'une traite, sans se reposer.
Arrivoir, s. m., petite anse pratiquée au bord
d'une rivière ou d'une pièce d'eau, et que partout
ailleurs on nomme abreuvoir ou lavoir. — Nos bes-
tiaux sont menés à l'arrivoir, et c'est aussi à Varri-
voir que nos ménagères lavent le linge de la ferme.
— 17 — •
Arsouille, s. m. Ce mot s'applique au fainéant,
au pochard, au propre-à-rien, au voyou ; le mot
arsouille résume toutes ces épithètes. — On ne dit
guère d'une femme qu'elle est arsouille. — S'arsouiller
V. pr., se vautrer, se pocnarder.
NORM. : Arsouille, débauché, vaurien, prob. pour gar-
souille. Arsouille signifie aussi femme très-malpropre. —
SARTHE : Arsouille. — centre : Arsouille, terme de mé-
pris, argot des villes, aussi parisien que rennais. — Ex.:
« C'étaient des arsouilles qui tiraient la savate. » (th.
Gautier).
Assemblée, s. f. , réunion populaire annuelle
dans un lieu déterminé, fête de village qu'on appelle
pardon en Basse-Bretagne et ailleurs. Nous avons à
Rennes huit assemblées : (i)
La première et la plus importante est celle de
Veiin ; elle a eu lieu le lundi de Pâques. C'est le
Longchantps rennais ; mais comme le Longchamps pa-
risien, il tend à perdre sa vogue. Nos belles dames
ne dédaignaient pas, il y a peu d'années, de s'y ren-
dre en équipage, d'y étaler leurs toilettes printaniè-
res, et de se mêler à la foule. Aujourd'hui elles
s'abstiennent.
La seconde assemWe se tient à Saint-Hèlier, le
dimanche de la Qiiasimodo.
(i). Le Maire de Rennes, par un arrêté du mois de
juin 1878, a institué une seconde assemblée à Saint-Hélier ;
elle a lieu le jour de la fête de ce saint (16 juillet), ou le
dimanche qui suit cette fête.
La troisième, au village de Chanlepie, le 7 juillet.
On l'appelle Vassembîêe de drigue-drogue. J'ignore
pourquoi.
La quatrième, au village de Saint-Laurent, le 10
août. On y boit les premiers cidres de la récolte, fa-
briqués avec des pommes primes dites de Saint-Lau-
rent.
La cinquième, au village de Saint-Grégoire, à la
fête de ce saint, le 3 septembre.
La sixième à Chdtilhn pendant les trois dimanches
qui suivent Vassenihlée de Saint-Grégoire. On pourrait
l'appeler la Fête des Noix, à cause de la grande consom-
mation qui s'en fait. Le troisième dimanche on y
mange les premières châtaignes grillées.
La septième se tient à la Babelouse, sur le terri-
toire de Saint-] acqttes-de-la-Lande, à la Saint-Luc, le
18 octobre, (i)
La huitième est celle de Cesson, qui a lieu aux
buttes de Pince-Poche, non loin du bourg, à la Saint-
Martin, le 11 novembre. C'est en même temps la
foire aux poulains et pouliches et aux porcs.
Hélas ! on ne danse plus aujourd'hui dans ces
réunions populaires, mais le diable n'y perd rien. On
y boit à ventre déboutonné^ en mangeant, sur l'herbe
(i) Au moment où j'écris cette page (Mai 1877), le
Conseil municipal de Rennes autorise une nouvelle assem-
blée annuelle, dite de Saint-Cyr qui se tiendra dans le quar-
tier de ce nom^ à la fête du saint qui a lieu le 16 juin.
— 19 -
ou sous h tente, du lard et de la saucisse, et on s'en
revient, . comme on dit, vent dessus, vent dedans,
c. à. d. rond comme une balle — « Allez-vous à Vezin?
J'espère que vous m'apporterez une part d'assem-
blée. » v- La part d'assemblée, c'est un mirliton, une
bague, une croix, enfin un souvenir.
KORM. : assemhlèe, fête de village. — sarthe : m. sg.
Asseyas, s. m., chaises, sièges : — « Assiétous
don', v'ià d's'asseyas. » (Chàteauneuf).
Assiettée, s. f. ; c'est le contenu de l'assiette. —
Une assiettée de soupe, de fruits.
BESCH. : assiettée, m. sg,
Assotîr, V. a., assommer. — Des brigands l'ont
assoii sur la grand'route. — N'approche pas, ou
j'fassotis ! — Vrayement cest homme m'assotist.
(Me Pathelin).
XORM. : assouir, assommer, étourdir.
Assoulaîger : i° C'est la réunion des trois mots :
à se soulager. — 2° En un seul mot assoulaiger (s'), v.
pr., signifie se mettre au soleil : « Il est à s'assou-
laiger au soleil. »
Asticoter, v. a., agacer, provoquer, vieux mot
que j'ai cru devoir conserver ici comme étant toujours
très employé, surtout par nos écoliers. — « Pourquoi
le frappes-tu ?» — « Parce qu'il est toujours à ni'asti-
coter, »
ACAD. : asticoter, m. sg./im. — sarthe, centre : asti-
coter, m. sg. — NORM. : asticoter, asticher, astiquer,
m. sg.
iV.sture, adv. — C'est la réunion des trois mots :
à cette heure. — maintenant, à présent. — « Vous
v'ià r'venu d'ia messe, eh ! ben, asinre, v's allez
manger o nous » — Dans le discours il est sou-
vent accompagné de l'adverbe ci : — Asture-ci, il
faut aller ici, faire cela. — « Cette interjection qui
sert asture aux Italiens. » (Montaigne). — Voir
A c't'hcurc.
A-ta-tan, exclamation fort employée par les
femmes du peuple lorsqu'elles veulent empêcher leurs
enfants de faire une sottise ou une chose défendue.
C'est la menace d'une correction : — « A-ta-tan !
j'te vois ben ! » — C'est l'exclamation Attends ! répé-
tée.
Attaquer, v. n., employé par les écoliers dans
ce sens : lutter de mérite, de savoir, d'application
dans une composition. — J'ai attaqué avec mes
camarades Victor et Lucien ; j'ai été le premier.
Attelle, s. f. , pron. dlêh'. — Morceau de gros
bois fendu. — « Mettre une attelle dans le feu. —
« Av'ous vu la femme de Jacques ? Elle est sèche
comme une attelle ». — Vient de haita, morceau de
bois servant à emmancher une lance. — Vov. Ha-
telle.
— 21 —
NORM. : atelle, i° éclat de bois, de astula ; 2° bâton ;
3° bûche. Hâtelle, bûche, arbre coupé et fendu, bâton.
— Vieux fr. : hastellc, bûche, pieu, morceau de bois
long, astellc, bâton de pique, astella.
Attraper, v. n., être battu, être frappe. — « Gare
à toi, tu vas allrapcr, si je me fâche. »
Attrapoux, s. m., attrapeur, trompeur, enjô-
leur. — Défiez-vous de ce gars-là, c'est un atlrapoiix
de monde.
Aubiche, s. f., adresse. — Ce garçon n'a point
d'aiihiche. (Saint-Malo).
NORM. ; ahicbe, habileté, intelligence.
Aujoler, v. a., opération de labourage qui consiste
à regarnir la racine du blé.
Auue, s. f. , mesure de longueur avant le système
métrique. Employé dans ce sens : — Vous payez ces
ruits bon marché ; mais vous ne les choisirez pas,
vous les prendrez à Vanne (comme ils viendront à la
main).
Aurive ou Orive, adj. f. — On désigne par ce
mot tout ce qui est prime ou primeur : pommes,
poires aiirives. — Semence aurive. — Le sol même
est aurive ou aurif.
Avange, s. m. — On prononce souvent avanche.
— D'un usage de longue durée, d'un bon usage. —
J'ai été contente de cette robe ; l'étoffe en était
excellente, elle m'a fait de Tavange ; elle est d'un bon
avaiigc.
On trouve dans Rabelais le verbe avauger, pour
avancer, suffire : — « Avec ycelles nous n'avangerons
que trop à manger nos munitions. » (Garg. Ch. 22).
— « Il fouettait les paiges pour les avanger d'aller. »
(Pant., chap. 16).
NORM. : Avanger, v. n., procurer avantage, donner pro-
fit, fournir avantageusement : les légumes avangeront.
— Vieux fr. : avanger, avangicr, avancer, arriver.
Avas OU Avais, s. m. pi., gros bétail, bêtes à
cornes. — « Us\ivas étaient chers à la faire de
Rennes. » — Ce mot ne se dit que des bœufs et des
vaches, et pourtant semble venir d'oves, brebis.
Aveillon, s. m., plante parasite qui croît dans
les blés. Nos paysans lui ont donné le nom d' aveillon,
à cause de sa ressemblance avec Vaveine (l'avoine).
Avènement, s. m., vision, apparition, événe-
ment surnaturel ou prophétique qui annonce la fin
prochaine d'un membre delà famille. — « Nous étions
rassemblés au chevet du malade, lorsqu'un grand
chien noir, posant ses pattes sur le clanche, ouvrit la
porte, allongea son museau sanglant et disparut...
C'était V avènement de notre père.... Il mourait à
minuit. » — Le chant d'une fresaie perchée sur une
maison est quelquefois un avènement et l'annonce
d'un grand malheur dans cette maison.
Avenir, v. n., remplace le verbe seoir dans ce
— 23 —
sens : — Cet habit vous avicnl bien. — Ce ruban
avient à 'votre teint, — Cela n'avient qu'à vous,
c. à. d., vous seul pouvez dire ou faire cela. — Il
vous avient bien de me faire des reproches.
NORM. : avenir, réussir, convenir. — centre : avenir,
convenir à, revenir à. — Vieux fr. : avenir, convenir,
être avenant. (Duc.)
Avieuter, v. a., injurier, syn. d'agonir, agoni-
ser. (Voy. ces mots, usités dans les cantons de Saint-
Méen, Plélan et environs).
Avu, prép., au lieu de, comparé à. — Cette bonne
est bien intelligente avu cette madame X... — Quelle
femme vaillante avu s'n'homme, qui est un feignant,
un ivrogne !
Baba (aller à), — locution enfantine qui signifie
aller à la promenade. Une mère dira à son bébé :
« Si tu n'es pas sage, tu n'iras pas à baba, tu resteras
à la maison. » Ce mot vient-il du gâteau baba, ou de
bébé, ou encore d'un petit théâtre, ou du lieu où se
rassemblaient les enfants et leurs bonnes ? Je l'ignore,
mais je me souviens qu'on l'employait dès ma plus
tendre enfance.
— 24 —
Babine, s. f., lèvre. Bien que ce mot soit fran-
çais, je lui ai donné place ici, parce qu'il est très-
populaire, et qu'on dit souvent : « Nous y avons
mangé du fameux fricot, on s'en lèche encore les
babines. » — « Tu as mangé du lohon (cerise) ; on le
voit à tes hahines. » — « Il joue des babines comme
un lapin. »
Babine cochée, lèvre tendue. On dit aussi babin
coché.
NORM. SARTH. : babille, m. sg.
Bacouanne, s. f., commère, qui jase à tort et à
travers, et, par cela même, redoutée de ses voisins. —
Fuyez-la, c'est une bacoiianne.
Badier, s. m., cerisier sauvage non greffé, ou
merisier.
Badie, s. f., fruit du badier. Il y a des badies
ronges et des badies naires. Celles-ci sont plus esti-
mées, plus douces. — « C't'année j'aurons des badies
au Sacre (à la Fête-Dieu). »
Badiolet, s. m., espèce de confiture faite avec des
badies, et que nos paysans mangent pendant l'hiver
et le carême. Cette confiture remplace chez nous le
raisiné des contrées vinicoles. Ce sont, tout simple-
ment, des merises cuites dans une pesle d'arain, après
avoir été débarrassées préalablement de leurs noyaux.
Il n'y entre ni sucre, ni aucun autre ingrédient. Le
— 25 —
badiolet est plus connu sous le nom de Johon (V. ce
mot). — -Badioti à S'-Malo.
Bagout, s. m., grossier mensonge, bavardage. —
Pour m'inspirer de l'intérêt, de la pitié, il me contait
un tas de bagouts, croyant que j'y ajoutais foi.
Bagoule ou Bat-goule, s., a deux significa-
tions différentes : — 1° C'est le flâneur, qui, bouche
béante, s'amuse à regarder les mouches voler. Le
hagoule est ordinairement paresseux. — 2° C'est aussi
le bavard, le bat-dc-îa-goide qui cause de tout et sur
tout à tort et à travers : « As-tu b'entot fini ? mon
Dieu, quel bcigoide ! ». Cf. débagmder, injurier.
BESCH. : bagout, bavardage. On disait anciennement
liagoulcr pour bavarder. — sarth. : liagoul, m. sg. —
NORM. : hagotil (l muette), intempérance de langue.
Bagoider, bavarder. Ba goutter, bavard. — Vieux Fr. :
bagouler, parler beaucoup, babiller, dire des sottises. —
CENTRE : bagou, bagout, bavardage, Bagouler, bavarder.
Bagoulant , bavard.
Baguette, s. f., Châtaignes cuites à l'eau avec
leur pelure. Cuites ainsi, elles ont peut-être plus de
saveur, parce qu'elles ne sont pas saturées d'eau. Il
en est de ce fruit comme des pommes de terre à
l'étuvée.
Bâiller, v. a., donner. Vieux français. Toujours
très usité chez nous.
ACAD. : hàiltcr, terme de pratique, donner, livrer. Il
vieillit. — NORM. : baillir, donner.
26
Bairies, s. f. pi., libations. Du verbe hairc (boire).
C'est l'acte de l'intrépide buveur qui absorbe, sans
compter et sans se soucier du mélange, toutes sortes
de boissons. — L'ivrogne n'en finissait point avec ses
bairies.
Baiser ou Bézer, v. a., causer préjudice à
autrui, soit dans ses intérêts, soit dans sa personne ;
battre, tromper. — Le gars Pierre se croyait le plus
fort ; mais il a été b'en baisé : Jean lui a donné une
fameuse raclée. — « J'ai été baisè, >■> dira Paul, « j'ai
cru ajeter un bon jeval,et l'on m'a vendu une rosse.»
— « Laisse-moi tranquille, ou je vas te baiser »,
dit aussi le gamin de Rennes. On le voit, le vrai
sens du mot baiser est ici complètement détourné.
Baissière, s. f., ce qui reste de boisson au fond
du tonneau. — Vient de baisser. — Ce qui reste de
baissière ne sera pas perdu ; les domestiques le boi-
ront.
NORM. : bassière, résidu d'une futaille de cidre, conte-
nant la lie. — Vieux Fr. : Imssière, lie du vin. (duc.)
Bajeul, s. m.; — pi. bajeiix. — Espèce de gâteau
en forme d'é;uelle, fait de farine de froment sans
levure, que des marchands spéciaux nous apportent
le samedi, jour de marché. — V. navette.
Balai, s. m., petit toit ou abri, espèce d'auvent
qu'on voyait jadis au-dessus des portes d'entrée des
habitations ou des magasins. Dans les villes, la cor-
— 27 —
niche a remplacé le balai. — Ici le mot Imlai est
souvent synonyme de toit : — Les couvreurs sont
sur le balai ou bala' (en supprimant l'i.)
CENTRE. : balai, halel, petit hangar rustique. — Vieux
Fr. ; balef,i° espèce de portique, 2° galerie, boutique de
marchand ou d'artisan. — Batctuui : « /;; halcto sito anlc
quamdam cameram. » (uuc.)
Baliures, s. f. pi., pour balayures, ordures ramas-
sées avec le balai. Il est à remarquer que dans le
Berry on dit, comme ici, baliures.
TRÉv. : halayeures. — NORM., sarthe : baliures.
Ballîère, s. f., petite couette ou paillasse sur
laquelle les femmes du peuple couchent leurs enlants ;
dans cette literie, la balle ou cosson d'avoine rem-
place avantageusement la plume ou la paille, parce
que, étant souvent mouillée, elle peut être renou-
velée à peu de frais. On voit fréquemment les ballières
mises à sécher à la porte des habitations des petits
ménages. — On nomme ballier le lieu de la ferme
où on loge les pailles provenant du battage.
SARTHE : ballière, m. sg.
Ballotte, s. f., pelote faite d'une fleur jaune
printanière vulgairement appelée cocu (coucou). Les
branches fourchues de cette fleur, mises à cheval sur
un fil noué par les deu.K bouts, font la ballotte ou
pelote, qui tient lieu de ce jouet des enfants appelé
tecque (voy. ce mot.) — Nous irons dimanche aux
— 28 —
buttes de Couasmcs cueillir des cocus pour faire des
ballottes. — Etym. : ballotte, petite balle.
Baunard, s. m., enfant pleureur, pleurnicheur.
Banuer, v. n., pleurer sans cause, pleurnicher.
— V'ià une garçaillc b'en ennuyeuse, toujours ça
banne. »
Bannoux, ouse, adj., enfant maussade qui
banne.
NORM. : haiiùii, enfant pleureur, haiionner, pleurer.
Bannies, s. f. pi., publications de mariage qui
ont lieu pendant trois dimanches consécutifs dans les
paroisses auxquelles appartiennent les futurs conjoints.
Moyennant finance, on s'affranchit de deux publica-
tions.
Bannir, v. a., publier les promesses de mariage
à l'église. L'autorité ecclésiastique, nonobstant le
Concordat, a cru devoir conserver ce droit de publi-
cation. — Elle bannit aussi les tonsurés avant leur
admission dans les ordres sacrés.
Bannie signifiait autrefois ban, publication en général. —
TRÉv. : bannir, en qqs. coutumes signifie publier. On
dit en plusieurs lieux qu'une personne a été Imnnie,
qu.md on a fait, à l'église, la publication de son mariage.
— XORM. : bannir qn, faire publier son mariage religieux
au piônc.
Barassîaux, s. m. pi., vieux meubles, vieux
objets mobiliers, désignés sous le nom de barassiatix,
- 29 -
sans doute parce qu'ils encombrent et embarrassent
la maison.. — Son propriétaire, dur et avare, fit
saisir et vendre tous ses harasslaux. — A Fougères
on dit niarabls ; à S'-Malo, bn'iigds. (Voy. Anicas.)
Baron,'s. m., titre donné par ironie à l'homme
qui est marié, sans enfants». — « Je suis baron ! »
(Hédé et autres lieux.)
Vieux Fr. : Iku-oii, i° m.iri ; 2" sot, hébété, m.iri dont la
femme est infidèle.
Bas (à). Tomber à bas, c'est tomber à terre. — Il
est à bas, va le relever. — Get entant est toujours
à bas.
ACAD. : à bas, par terre, jeter à bas.
Bas (Vent du). C'est le vent d'ouest. — Il va
pleuvoir, le vent vient du bas.
Bas-cul, s. m. et f., homme ou femme de petite
taille, qui a le derrière sur les talons. — Dans Rab.
bacul, croupière.
NORM. : bas-cul (Saint-Lô), m. sg.
Basse-houre, s. f., heure basse, heure avancée.
— C'était un gars sans conduite, qui se ramassait
(rentrait) souvent de basse-houre. — « D'où viens-tu,
Jean-Marie, tu es b'en basse-houre (tu rentres bien
tard) ?» — V. haute-heure.
Vieux Fr. : heure basse, le soir. Hora bassa : « circa horam
noiiain bassain. » (uuc.)
— 30 —
Bassinet (Cracher au), s. m., donner à regret
son argent. On dit ailleurs cracher au bassin. — Le
bassinet est la pièce creuse de l'ancien fusil à pierre.
ACAD., BESCH. : Craclicf au bassin, m. sg. (Rab.)
Bassouillard, de, s., a deux significations : la
première s'applique à la personne qui n'a pas la pro-
nonciation nette, qui bégaie, qui a la langue épaisse ;
— la seconde à la personne qui parle à tort et à
travers, qui fait des contes à dormir debout. — Tu
n'es qu'un bassouillard.
Bassouiller, v. n., syn. de bredouiller.
Batterie, s. f., pour battage. — La batterie des
blés. — La semaine prochaine, mes gars, nous com-
mencerons la batterie.
SARTH. : hattcrie, m. sg. — nor.m. : hatterie, aire de
grange, surface où on bat les céréales. — centre : liatte-
riC; lieu où l'on bat : temps où l'on bat.
Baudir, v. a., éclabousser qqn. en marchant dans
le ruisseau, dans une flaque d'eau. — « Oh ! le mala-
droit, il m'a envoyé une jilée. (y . ce mot), il m'a
tout baiidi. »
Bêchée, s. f., pour becquée. — A Genève on dit
encore comme nous : l'oiseau porte la bêchée. — V.
Abécher.
BESCH. : becquée. On disait autrefois bêchée. — trév. :
bêchée ou becquée ; on dit becquée à Paris. — Vieux fr. : bé-
chier, becqueter, dans le roman de Renart. (duc.)
— 31 —
Bêcherons, s. m. pi., gros clous qu'on voit au
bout des souliers des paysans. Vient sans doute de
bêche, parce que ces gros clous ménagent la chaussure
dans le travail du bêchage. — a Faites-ma de bons
solers, et,- surtout, mettez-y des bêcherons. » — On
appelle aussi ces clous des dents de vache. (V. ce
mot).
Béda, s. m. et f., personne qui commet une
bévue, une méprise, une légère erreur. C'est sans
doute le mot bêle adouci. — Pauvre bêda, pauvre
niais.
Bédaille, s. f., erreur, faute légère. — « Ah !
mon ami, en agissant ainsi, tu as fait une bêdaiUe. »
BêdaiUe vient sans doute de Bêda.
Bedelle, s. f. C'est la femme du bedeau, qui
partage, avec son mari, le service de l'église. C'est
elle qui orne de fleurs les autels, blanchit le linge des
Messieurs prêtres., serre les chaises et au besoin
sonne les baptêmes. Dans les villages, la bedelle est
une personne de haute importance, et même aussi
dans les villes. — Les linges avant servi au saint sa-
crifice de la messe sont blanchis par une veuve, ou
mieux par une fille vierge, s'il est possible.
BESCH. : bédel, vieux mot pour hèdcau. — B. hif : hcdel-
lus, bedeau (duc.)
Bedouau, s. m. C'est le nom que nos paysans
donnent au blaireau, (et aussi en Anjou). C'est aussi
— 32 —
un gros ventre; k Le père Legras portait encore assez
bien son bedouau . »
Bedouffle, s. f., cloche, ampoule. Les piqûres
d'orties produisent des heâoitjfles.
Bedoufâer, v. n., subir les effets d'une hedoujfle.
— Il a le visage, le corps bedotifflé.
Bedouiner, v. n., cheminer doucement, à pas
lents et pesants, sans se presser. — N'est guère em-
ployé qu'au participe présent: nj'allions doucettement
(doucement) tout en bcdoitinant. »
Bégaud, s. m.etf., simple, crédule, flâneur, niais,
gobe-mouches ; bêgaiid résume toute ces épithètes. —
« Tu crois ça, toi, mon pauv' bégatid ?» — « Depuis
le temps que je t'attends, pardi ! tu es un fameux
bcgaïul ! ». — Se trouve dans Rabelais. — Aimise-
hégaiid, s. m., objet qui ne vaut pas la peine qu'on
s'y arrête.
BESCH. : béoaiid, (pop.) nia.is. Bégandcr, uiaiser, s'amuser.
SAKTHE, bégaud, m. sg. — norm. : bégaud, nigaud,
lambin, sot. Bégaiider, lambiner, niaiser, balbutier.
Bégauder, v. n., flâner. — « Va vite, et reviens
vite, et ne t'amuse pas à bègaudcr comme à ton
ordinaire.»
Bégot, s. m., morceau de bois dans lequel est
fixé le giioict (chandelier), quand il n'est pas lui-
piême fiché dans Iç mur de la cheminée. Souverit
— 35 —
gtienet et bégot sont synonymes. (V. Gnciiet).
N'ORM. : hêgaut, chandelier de bois avec bobèche de fer
blanc à ressort.
Beille^ s. f., ventre. Se dit surtout d'une per-
sonne ventrue. — « Mais voyez donc X...., quelle
beille il a. n
Beilloux, adj. m., ventru. Ne s'emploie guère
qu'au masculin.
XORM. : beille, m. sg. — sarthe : bcille.
Bel-©t-b'en (bel-et-bien), loc. adv. employée
dans le sens de en quantité, beaucoup. — «I aura-t-il
des badies cette année ?» — « Pas bel-et-b'eii, (c. à.
d. peu). » — « En revange (revanche), j'aurons des
paires (poires) ; il y en a bel-et-Fen (beaucoup). »
Beluette, s. f., pour binette, étincelle. — Quand
le bois est gélif, il lance des beJuettes. — Une beluette
suffit pour causer un incendie.
NOR.M. : beluette. — sarthe : beluette.
Beluetter, v. n., éblouir. — Une personne qu
a un éblouissement, ou dont la vue se trouble tout
à coup, ne manque jamais de dire : « les yeux me
beliietteiit. »
Ber, s. m., abrégé de berceau. — Le ber du p'tit
gars. — C'est, en terme de marine, la charpente sur
laquelle repose un navire pour sa mise à l'eau. — Se
trouve dans Rabelais ber s.
— 34 —
« Car, sous l'enfant gisant au bers
Fourre-^ à l'endroit et envers
Dormir jours ouvriers et dimanches, n
Guillaume Crétin. C1517).
BESCH. : hers, berceau ; vieux mot très usité encore dans
les campagnes. — sarth., norm. : hers, m. sg.
Bérauder, v. n., délirer, divaguer. — Le malade,
enfiévré, a béraiidê toute la nuit. — V. Dêhèraiider.
Berdasse, Berdassier, s. — La femme peut
être berdasse et le mari berdassier, s'ils se querellent
entre eux pour des riens, des vétilles.
Berdasser, v. n., radoter, revenir sur des riens,
sur des propos ou des actes insignifiants. — « Vas-
tu cor berdasser ? ça en vaut-v la peine ? »
Berdasseries, s. f. pi., radotage. — N'a pas
de singulier.
Berdiner, v. n., dire ou faire des riens ; est à
peu près s\n. de berdasser. — « Tu berdines, mon
pauvre homme. »
Berdinier, s. m., l'homme qui berdine. Peu
employé au féminin ; pour la femme, c'est une ber-
dasse. — Ailleurs berdin.
CENTRE : berdin, niais. Berdinerie, niaiserie. Berdiner,
hredi, berdi, étourdi, pétulant. Berdin, touche-à-tout.
Bergintins, s. m. pi., seins, que Ricard et Ga-
varni ont appelé gentiment nenets.
— 35 —
NORM. : berge, estomac des oiseaux. — centre : bergin-
geons, seins.
Berjon, s. m., sol irrégulier dans sa surface.
Champ hcrjon, sillon herjoii, qui est de longueur va-
riable.
Berlauderies, s. f. pi., propos insignifiants,
conversation puérile. — « Il nous disait un tas de ber-
hmderies.i-) — C'est à peu près syn. de herdasseries. —
Ce mot ne viendrait-il pas de pellaiiderie, employé par
Rabelais, et qui signifie rognure de peaux, c.-à-d.
chose sans valeur ?
CENTRE. : berlaud, niais, musard. Berlauder.
Berlette ou Brelette, s. f. , petite cloche,
sonnette. — « Le curiau (choriste), répondant la
messe, agitait à tour de bras sa herlelte.yy — « Ma
pauvre église », me disait un recteur, « n'a, pour
appeler mes paroissiens à l'office, qu'une pauvre her-
lette fêlée », et il quêtait pour avoir une cloche
comme celle du curé voisin, dont il enviait le bon-
heur.
NORM. : berliuguette, petite sonnette.
Berling'Otj s. m., petit colimaçon de mer, dont
le vrai nom est bigorneau. — • Brigot à Saint-Malo.
Berlinguin, s. m. C'est le nom donné par le
peuple au cimetière de Rennes. J'aimerais connaître
l'origine de ce mot. Nous appelons aussi notre cime-
tière Gros-MaJon,àu nom d'une ferme près de laquelle
— 36 -
il est situé, au nord de la ville. — « Le pauvre diable
ne tardera pas à aller au Berlinguin, ou à Gros-
Malon . »
Depuis quelques années il a été ouvert à l'Est de
Rennes, sur le territoire de la paroisse de Saint-
Hélier, un nouveau cimetière que, dans le langage
populaire, on appelle Roc-Mignon, du nom d'un
cabaret voisin.
Berluscot, s. m. Biens propres d'une personne.
■ — Elle a mangé tout son berluscot.
Bernasses ou Bernaches, s. f. pi., mamelles
pendantes. — Ce mot viendrait-il de bernache, oiseau
aquatique à ventre noir ? — « Elle avait :
« de grand' bcniass' tout' iiair' du bout ;
jamais d'ma femm' ne s'rai jaloux. »
(Refrain d'une chanson populaire)
Berouée, s. f., bourrasque, coup de vent, et,
par extension, action violente. — Une berouée a ren-
versé les meules de paille, versé les blés. — «Jeanne
a reçu une fière berouée de la bourgeoise (une forte
réprimande). » — On dit d'une personne qui rejette
par la bouche le liquide qui n'a pu passer : elle a fait
la berouée.
Dans un sens un peu différent. : besch. : brouée, pluie
subite et de courte durée. — Prendre une hrouée de feu :
se réchauffer pendant un instant devant un bon feu. —
NORM. : berouée, hérouasse, brouée, bruhie, brouillard plu-
vieux.
— 37 —
Berouet, s. m., pour hroiiet, bouillon. — « Dans
la soupe de not' ménagère, le pain nage dans le
berouei. »
Berouette, s. t., pour brouette.
Berouetter, v, a., traîner qqn. dans une brouette.
N'ORM. : berouette, hérouetlcr. — sarthe : hérouette. —
DUC. : lirocia, herocaia, lierotata.
Bersiller ou Bésiller, v. n., cligner de l'œil,
loucher. — Syn. de biucler. — Semble dériver de
besicles (?)
Béruchot ou Béruchet, s. m. C'est le nom
que nos paysans donnent au roitelet, le plus petit de
nos oiseaux.
Bestial, s. m. — Comme dans le Berry, nous
disons bestial pour bétail, bêtes à cornes. — Se dit
aussi de l'homme grossier, brutal : — « C'est un
bestial. »
NORM. : bestial, s. m. — centre : beslhni , s. m.
Bételer, v. n., tourner, en parlant du lait ou de
la crème. — C'est l'orage qui fait bételer le lait et
tourner la crème. — La fleur d'aubépine a la pro-
priété de faire bételer le lait ; gardez-vous d'en intro-
duire dans la cuisine.
SARTHE : bételer, m. sg. Lait béteté.
Bêtifier, v. a., rendre bète, idiot. — « Cet en-
tant n'est pas intelligent ; cela n'a rien d'étonnant,
- 38-
son père l'a bêtifié par sa sévérité et ses mauvais trai-
tements. »
Bette, s. f., abrégé de betterave. Bette, d'après
l'Académie, est syn. de poirée, que nous appelons
porêe.
SARTHE : hette, m. sg.
Bette, ad), m. et f. , en ribote, légèrement pris de
boisson. — « On ne peut pas dire qu'il fût soûl, il
n'était que hette. » — « Il sent la hette, » il sent le
vin. — « Par ma fy, commère, je ne peux entrer en
hette. (Rab.) », — P. Lacroix, (bibliophile Jacob)
traduit hette par buvette. Ce mot ne viendrait-il pas
de boisson, ou buvette ne viendrait-il pas plutôt de
bette ? mais je m'aperçois que je veux faire de l'éru-
dition, je m'arrête — Voy. Boitte.
BESCH. : bette, contraction du mot buvette (?) Entrer en
bette (Rab.), se mettre en train de boire. V. Boitte.
Bétun, s. m., pour Petun, tabac. En Basse-Bre-
tagne on emploie encore le mot vrai petun ; nous
avons à tort changé It p en h. — La culture du bé-
tun, très prospère, il y a quelques années dans l'arron-
dissement de Saint-Malo l'est moins aujourd'hui.
Bétuuée, s. f. , prise de bétun.
Bétuner, v. a., action de priser.
Bétunoux, — ouse. adj., priseur. Aujourd'hui
on voit moins de bétunoux, mais plus de fumeux
(fumeurs).
— 39 -
Beurrage, s. m. — Mettre des vaches laitières à
heurrage ou au premier lassé. Le propriétaire fournit la
hête à un petit fermier moyennant une rétribution
mensuelle en argent. C'est un contrat impropre-
ment app£lé cheptel, passé entre deux individus. Il y
a cinquante ans, les domestiques des villes achetaient
des vaches sur leurs économies et les mettaient à
beurrage. Je crois que cela ne se fait plus guère au-
jourd'hui. Les cuisinières et les femmes de chambre
préfèrent à ce mode de placement les dépôts aux
Caisses d'épargne et les rentes sur l'Etat. .
Beurrouse, adj. f., vache beurrouse, dont le lait,
par sa quahté, donne beaucoup de crème, et partant
beaucoup de beurre. — « Votre vache, mère Fan-
chon, semble vous donner b'en du lait » — « Oui,
mais elle n'est pas beurrouse. » — La bonne nourri-
ture rendra souvent une vache beurrouse.
Beuyer. V. Buyer.
Bibitte, s. f., petite bête. — Nom sous lequel on
désigne, en parlant aux enfants, les insectes et géné-
ralement toutes les bètes de très petite taille. « Prends
garde, la bibitie va te mordre ou te piquer. » Les
sangsues sont aussi des bibittes, dont j'avais grande
frayeur dans mon enfance.
Big'ne, s. m., pâtre, gardeur de vaches. — « C'est
le bigne qui .m'a trahie (dénoncée à la justice !) »
s'écriait une malheureuse fille de Châteaugiron con-
— 40 —
vaincue d'infanticide. — Je dois ce mot, que je ne
connaissais pas, à mon ami le D"" Delacour, présent à
l'enquête judiciaire.
Bigue, s. f. — Faire la bigite se dit du bonnet ou
chapeau déformé, qui fait la pointe par-devant, au
lieu de conserver sa forme arrondie. Terme de cha-
pellerie.
Bincler, v. n., loucher ou être atteint de myopie.
Bider dans Montaigne. — V. BersUler.
ACAD. : higle, louche. Bigler, loucher. — besch. : licier
s'est dit pour bigler. — xokm. : hicle, hiclesse, bigle,
biglesse, louche. Bider, regarder du coin de l'œil.
Bique, s. f. , chèvre. — Biquette, s. f., petite chè-
vre. — Peau de hiqite, vêtement fait de peau de chè-
vre, fort en usage dans nos campagnes et surtout
dans les arrondissements de Fougères et de Vitré.
Nos chasseurs sont aussi pourvus de peaux de bique
pour leurs excursions. — « Le temps est mauvais ; il
neige, prends ta peau de bique ».
TRÈv. : bique, chèvre, dans qqs. parties de la France ;
inconnu à Paris. — acad. : bique, chèvre. Fam. —
XORM. : biquette. — sarthe : bique, biquette.
Biri, s. m., pour biquet, petit d'une chèvre. —
(c Notre chèvre a mis bas deux biris. »
Bisquer, v, n. Faire bisquer, '.aquiner, agacer.
— Saint-Simon a dit : « Le Roi nous réserve cette
bisque pour nous faire sentir qu'il est le maître. » —
— 41 —
Bisquer est toujours très usité chez nous, et on en-
tend souvent les enfants se taquiner en se disant les
uns aux autres :
« Tu bisques, tu rages,
Tu manges du fromage. »
ACAD. : hisijiier, avoir du dépit, de l'humeur. Pop. —
s.\RTHK, NOR.M. CE.N'TRE : hisqucv, m. sg.
Bissachée, s. f., vient de bissac (sac à deux
bouts), comme pochée vient de poche, ventrée, de
ventre ; contenu du bissac.
Bitter, v. a, toucher, se permettre des attouche-
ments. — « Vous m'bilti':^, car je l'sens b'en. » —
« Ne m'bittei pas, ou je l'dis à la bourgeoise. »
NORM. : Hier, abiter, toucher.
Bitton, s. m., petit d'une chèvre. — Syn. de
biquet. — « La chèvre a lait deux bitloiis. »
Bittonner, v. a., se dit de la chèvre qui met bas
ses bit tons.
Blanc, s. m., abr. de bianchissage. Nos ménagères
et même les maîtresses de logis disent : « le linge est
au liane, n'est pas revenu du blanc ; une nappe a été
perdue au blanc. »
Blancs, s. m. pi. Les blancs, c'est ainsi qu'on
appelait, sous le gouvernement de la Restauration,
les personnes appartenant au parti royaliste, c'est-à-
dire les partisans du drapeau blanc. — Les blancs ou
— 42 —
les chouans, c'étaient les mêmes hommes, ennemis
jurés des bleus.
Blaterie, s. f., blé, orge, seigle sont en général
appelés blaterie (terme générique). — « L'année sera
bonne, j'aurons delà blaterie. » — Puisque blatier est
français, le mot blaterie pourrait l'être également. —
« As-tu qualité, villotin, » disait un paj-san à un
chasseur qui foulait ses semailles, « as-tu qualité pour
venir pigaler ma blaterie et hacher mon blé na ? Mon-
ter-là ma ta procule (Montre-la moi ta procuration). »
V. Pigaler, villotin, blé na.
Blêche, adj. m. et f., traître, méchant, qui pince
en dessous. — Blèche désignait autrefois un homme
sans fermeté. Il a chez nous une signification plus
accentuée. « Tu es un blèche, tu m'as fait mal. »
Blêcher, v. a., blesser, (dont il semble dériver) ;
porter un mauvais coup. — Se dit aussi pour trom-
per : — « Il a cru qu'il réussirait dans son entreprise,
mais il a été blêché.
BESCH. : Mèche, adj, et s , mou, timide, sur lequel on ne
peut compter. Fam. : hléchir, devenir blèche.
Blé na, s. m., blé noir, sarrasin. — Perrine de
Blé na, surnom donné parfois aux femmes qui font
la galette de blé noir.
Bleus, s. m. pi. — Troupes républicaines qui,
après la Révolution de 1792, firent la guerre aux
chouans (les blancs). Suivant Littré, les biens étaient
— 43 —
« des gens de guerre sans commission et sans aveu,
une troupe de pillards. » Le savant académicien
aurait pu ajouter que les blancs pillaient tout autant,
sinon plus.
Blossè, s. f., prunelle ou petite prune sauvage,
fruit de l'épine noire. Quand les gelées ont achevé
sa maturité, quelques personnes en font un kirsch qui
rivalise avec le kirsch de la Forêt Noire. — ■ Blosse se
dit des prunelles des yeux noirs. « La fillette avait
deux hlosses dont elle jouait à merveille ».
NORM. : blosse, heloche, prunelle, prune sauvage.
Blotter, v. a., garnir les couvertures d'un lit.
Border un enfant dans son dodo.
Blutiau, iaux, s. m., petit tas de blé noir
dans les champs. Le blé noir coupé, on le met en
hhiliaux, et quand la paille est javelée, on peut le
battre. — Dans les communes à l'ouest de Rennes,
le mot hltiliau semble devoir être remplacé par le
mot picot ; des picots de blé noir.
Bobanne, s. f., fille ou femme simple et naïve.
On dit aussi cohanne. — « Pauvre hohmne, vous
cro}-ez cela ? »
BEscH. : boban, vieux mot qui signifie orgueil, vanité,
luxe, d'où bobaucier, adj., et bobnudef, v. — sarthe :
bobaii, bobanne, simple et naïf.
Bobau, aux, s. m., jouet d'enfant. — « Voyez
— 44 —
cet enfant, comme il est sage, il s'amuse tout seul
avec ses hohaux. »
Bober, v. n., dormir, s'assoupir. — o J'ai beau
faire, je hobe malgré moi. » — « Le bonhomme
n'était pas endormi, mais il hobaiï », (il était som-
nolent, dans un demi sommeil).
Bobillou, s. des 2 g., tatillon, vétillard. Syn. de
herdinier.
Bobillonner, v. n., se dit des paroles et actions
du bobiUoii. — « Bobillonne\ donc tout à votre aise,
vous m'ennuyez. »
SARTHE : Bobillon, bobilloime, m. sg. — korm. : Bobillon
minutieux, méticuleux. — centre : bobluche, têtu.
Bœufs, s. m. p!., fruit rouge de l'églantier. Quand
il a atteint sa maturité, il contient une poussière,
qui, appliquée sur la peau, cause une assez forte
démangeaison. Ce fruit doit peut-être son nom à sa
couleur sang de bœut. — N'a pas de singulier. — II
doit à la propriété de sa poussière un nom moins
propre, quoique plus populaire encore, celui de
gratte-cul. Les savants donnent à l'églantier et à son
fruit le nom de cynorhodon (rose de chien) ; mais le
peuple sait mieux dire... où cela le démange. —
« Que devient la rose églantine quand elle a perdu
ses ieuilles ?» — « Elle devient graite-ciil. »
Boguille, s. f., chassie des 3-eux. — Il y avait
dans un village une pauvre fille qu'on appelait /<?««?/£-
— 45 —
Bogiiille, parce qu'elle avait toujours les yeux chas-
sieux et bordés de rouge. Les mauvais garçons pré-
tendaient qu'elle se les faisait lécher par un coq.
Boguiiloux, — ouse, adj., qui a de la boguille.
NORM. : bogues, les p;;upières, les yeux ; boguexe, chassie,
bogiieyeux, — eiise.
Boidro, s. m., point de côté, douleur causée par
une course ou un travail de corps aussitôt après le
repas. — « Je suis forcé de m'arrêter, j'ai le hoidro. »
Boîuer, v. n., bouder, faire la moue. — « Quel
mauvais caractère a cet enfant ! Il reste des heures
entières à boîner dans un coin. » On dit aussi hoîiioiix,
enfant boudeur.
Boisson (Pris de), locution appliquée à une
personne en état d'ivresse. — « Tous les lundis il est
régulièrement pris de boisson. » — Perdu de boisson,
c'est l'ivresse complète.
Boissonner, v. n., boire outre mesure. — « C'est
un mauvais ouvrier qui aime à boissonner, ou à se
boissonner >y .
NORM. : se boissonner, s'enivrer, boissonnier . — besch. :
Etre pris de boisson, fam.
Boisu, — ue, adj., pour boiseiix. — Les carottes, les
navets deviennent boisiis à l'arrière-saison, c.-à-d.
qu'ils ont perdu leur jus, leur qualité, qu'ils sont
devenus filandreux.
- 46 -
TRÉv. : boiseux, terme de jardinier, s'applique aux
plantes. — bescii. : hoiseux, presque inusité.
Boitte (Papier), s. m., papier grossier, sans
colle, à l'usage des écoliers, pour étancher l'encre
fraîche de leurs cahiers. On dit ailleurs : papier-hoit.
Le papier-hoit à l'usagé des écoliers au commence-
ment de ce siècle, était fabriqué de pâte grossière.
Le papier de soie l'a remplacé sous le nom de papier
buvard.
Boitte, adj., ivre. (v. bette). — Vient de /'owo«. —
On pourrait dire que ce mot peut venir de boiter
parce que l'homme boitte, ou ivre, ne marche qu'en
trébuchant.
NORM. : boite, ivre. — Vieux Fr. : Estre en boite, être
ivre. 'Bcvriotus. estre emboictè (duc).
Bolée, s. f., contenance du bol. — L'étudiant,
entrant dans un café, dira : « Garçon, une chope. »
Le paysan, l'ouvrier dira à la bourgeoise : « Une
bolée » (L'ô est long).
SARTH. : bolée, m. sg.
Bon-Dieu (Poires du), petit fruit rouge de
l'aubépine ou épine blanche. Les enfants aiment beau-
coup les poires du bo>i-Dieu ; ils en mangent même
beaucoup, quoique ce fruit soit fade et sans saveur.
Bon-Dieu (Porter le), porter le viatique à un
moribond : « Le pauvre diable est bien malade, on
lui a porté le bon-Dieu. » — C'est aussi le Saint-
— 47 -
Sacrement porté dans les solennités religieuses :
« C'est Monseigneur l'Evêque qui a porté lui-même
le bon-Dieu à la procession du Sacre. » (V. Sacre).
— On dit aussi : exposer le hoii-dicii.
Bontif, adj., bon, mais simple, crédule. — « Il
était si bontif ! »
Bontivement, adv., pour bonnement. — Il a
fait cela sans mauvaiseté, bo}itivei}ie)it.
NORM. : boiiiif, bonasse, débonnaire. Bontivement.
Bosser (se), v. pr., se courber, se voûter. —
« On remarque que le père X... se bosse, depuis
quelque temps ; dam, y s'veillassit. Il cherche sa
tombe, le pauvre vieux.»
NORM. : bosser, paraître volumineux, faire saillie comme
une bosse. Bochcr.
Botter (se), v. pr. Lorsque la neige ou une boue
épaisse s'est attachée à votre chaussure de façon à
gêner votre marche, vous pouvez dire : Je suis botté,
ou je me suis botté. — Une des rues de Rennes, voi-
sine de la rivière la Vilaine, porte le nom de Pré-Botté,
probablement parce que les terrains qui bordaient
autrefois ce quartier étaient très boueux.
SARTHE. : se botter, m. sg. — .\cad. : se botter, m. sg.
Fig. et Fam. — norm. : botter, v. n., m. sg.
Boucan, s. m., verte semonce, vifs reproches. —
« Je suis rentrée tard, madame m"a donné un boucan. n
— Recevoir un boucan.
- 48 -
Boucanner, v. n., gronder. — « Vous êtes in-
supportahle, toujours vous houcamn\. »
BESCH. : boucan, bruit, vacarme. Pop. boucaner, faire du
vacarme. Pop. — norm. : boucan, tapage; Boucaner, être
de mauvaise humeur, gronder sans m^esure ni raison. —
CENTRE. : boucan, bruit, noise, querelle, désordre.
Boucard, s. m., instrument aratoire à deux
dents, dont se servent les laboureurs et les jardiniers
pour préparer la terre à recevoir les semailles. On
l'emploie lorsque la terre, durcie par le temps, rend
difficile l'usage de la bêche. C'est avec lui aussi
qu'on fait les guérets.
Boucarder, v. n., faire usage du boucard.
Bouchon (En), frippé. — « Sa robe, ses vête-
ments sont toujours en bouchon ; c'est une personne
sans soin. »
Bouchonner, v. a., fripper, froisser. — «Pre-
nez garde, Monsieur, vous allez bouchonner mon
fichu. »
ACAD. : bouchonner le linge, le mettre en bouchon, le
chiffonner. — sarthe. : m. sg., mettre une robe en
bouchon. — Vieux Fr. : bouchon, bouchot, botte ou fagot
de chanvre (duc.)
Boudet, — ette, s., gentil, mignon. Expression
affectueuse employée à Saint-Malo et sur presque
tout le littoral d'Ille-et-Vilaine, en parlant à de tout
petits enfants. — « Viens, mon boudet, que jeot'em-
brasse. » — « Viens te promener, ma boudette. »
- 49 —
Bouener, v. n. — Perdre son temps à des occu-
pations insignifiantes.
Boueneries, s. f. pi., travaux insignifiants,
sans importance. — a A défaut de travaux sérieux,
dont le pauvre garçon était d'ailleurs incapable, on
l'occupait à un tas de boueneries. »
Bouëdre, v. n. C'est l'infinitif du verbe bouillir.
— Mettre de l'eau à bouëdre. — Elle boitct. — Je
boue (je transpire, j'étouffe de chaleur).
NORM. : boudre. — Vieux Fr.: houdre (duc.)
BoufiPaîUe, s. f., se dit de tout ce qui se mange.
« Il y avait force boiiffaille au repas de noce de notre
fermier. »
Bouffer, v. n., manger, manger goulûment. —
« Voyez donc comme il bouffe, d
BESCH. : bouffer, manger avec avidité. Pop. — norm. :
bouffer, manger vite et avec appétit, se hâter. Boujjard,
gourmand. — centre : bouffer, bouffigner.
Bouffe, adj., bouffi. — « Avez-vous remarqué
« M. F..., comme il est changé. A le voir, on le
croirait engraissé, lîiais il n'est que bouffe. »
BESCH, : Bouffe, s. f., s'est dit autrefois pour enflure,
bouffissure ; gonflement des joues ; orgueil.
Bouffre, petit juron fort à la mode, accepté
même au presbytère. — On devine son origine ; c'est
un juron adouci au moyen d'une substitution de
lettres.
— )0 —
NORM. : hoiifre, ni. sg.
Bougon, S. m., grondeur. — a Monsieur et
Madame sont deux bougons. » — Donner ou rece-
voir un bougon, une semonce. — 'Bougon est aussi un
ternie de tricoteuse ; maille échappée d'un tricot. —
« J'ai fait un bougon. »
Bougonner, v. n., gronder à tout propos, pour
des riens. — a Je quitterai cette. maison où on ne fait
que bougonner ».
a Dansez, les petites folles,
Tout en rond ;
Les bouquins dans les écoles
Bougonneront. »
SARTHE : bougon, bougonner, m. sg. — besch. : bougon-
ner, gronder entre ses dents ; réprimander. Fam. Bou-
gon, qui bougonne. Pop.
Bouillon (Boire un), c'est perdre tout ou
partie de sa fortune dans une entreprise malheureuse.
Cet argot de la bourse ou du tripot doit être d'im-
portation parisienne. Il est aujourd'hui très usité chez
nos industriels et nos entrepreneurs.
ACAD. : Boire un bouillon, faire une fausse spéculation,
une perte considérable.
Bouillon, S. m., boue, crotte. — S'embouillonner
se crotter, et par extension, mouiller le bas de ses
vêtements dans la rosée. Pour ne pas confondre ce
bouillon-là avec le pot-au-feu, nos paysannes vous
inviteront à prendre un bouillon de soupe. — On
— SI —
trouve bouillon pour pluie dans Désaugiers et dans
d'Hantel. — Nous disons : a Les pies ont mangé le
bouillon », quand le sol est gelé et qu'on ne se crotte
plus.
NORM. f bouillon, boue liquide. 'Boiiillonnière, ornière,
passage rempli de boue liquide.
Bouillounîers, s. m. pi, répurgateurs, paysans
qui ont passé des marchés avec la ville pour balayer
les rues et enlever le bouillon. — Défense est faite
aux habitants de déposer des ordures sur la voie
publique après le passage des houillonniers. — A
Paris, boueurs.
Bouillonnoux, — ouse, adj., crotté, couvert
de boue. « Il est bouillonnoux jusqu'à l'échiné ».
Bouler, v. a., chasser, rouler avec le pied,
comme une boule. — Est français, mais dans un
autre sens.
NORM. : bouler ; i° v. n., rouler comme une boule au
moment d'une chute ; 2o v. a., jeter bas, rouler par
terre. — Vieux Fr. : bouler, rouler comme une boule
en tombant.
Boulevari et Hourvari, s. m., bruit, tapage.
Mots français pop., et très usités.
NORM. : boulevari et houlevari, tumulte, désordre. —
CENTRE. : boulevari, m. sg.
BouligOt, s. m., gros et court, en forme de
boule. S'applique également aux personnes et aux
choses. — a Connaissez -vous M"ie X..., ce petit
— 52 —
« bouUgot, ce petit potiron prétentieux, qui roule
a plutôt qu'elle ne marche ? ». — Les ménagères
recommandent à leur casseur de bois de leur prépa-
rer des hûidigots pour mettre dans le foyer.
NORM. : houlicol, morceau de bois gros et court.
Boulotter, v. a., pelotonner, faire sa boule,
amasser. — Dans un autre sens, marcher lente-
ment, d'une jambe sur l'autre, en parlant des per-
sonnes obèses. — De boulot, gros.
Bourdaine, s. f., arbrisseau qu'on voit dans
toutes nos haies. Je lui ai donné place à cause de ce
dicton populaire : « Il a trouvé un cchdier de bour-
daine », ce qui veut dire : Il a mis dans sa course,
dans sa mission, plus de temps qu'il n'en fallait rai-
sonnablement. Il s'est amusé, il a bégmidé, bref il a
bourde en route.
ACAD. : bourdaine et hourgrne.
Bourder, v. n., être arrêté dans son chemin
par un obstacle. Le charretier embourbé, l'avocat qui
perd le fil de son discours, bourdent en chemin. —
Les chevaux bourdent.
BESCH. : bourder. sign. autrefois rester court en chaire.
NORM. : bourder, border, être arrêté par un obstacle. —
CENTRE : bourdache, broussailles.
Bourdin, s. m., reste de pain ou de viande
laissé sur son assiette par une personne rassasiée. Si
la personne s'est servie elle-même, on dit qu'elle a eu
— 53 —
les yeux plus grands que le ventre. C'est une bien
mauvaise habitude que celle de laisser des bourdins ;
on me disait : enfant, c'est perdre le bien du Bon
Dieu. — Encore un mot dérivé de bounier, s'ar-
rêter.
Bourgeois, oise, s. Nos paysans qualifient ainsi
le métayer et sa femme. Les ouvriers, les domesti-
ques diront : « Le bourgeois n'est pas le maître,
« c'est la bourgeoise qui commande. » — Le proprié-
taire de la ferme a seul le titre de maître.
NORM. : horgeois, maître, patron, propriétaire.
Bourre-gueux, s. m. pi. — L'ouvrier, le peuple
des faubourgs donnent ce nom aux haricots, sans
doute parce qu'ils peuvent, à peu de frais, se nourrir,
de ce légume. — On les appelle aussi des prélimi-
naires... (sous-entendu de paix), jeux de mots dont
le sens est facile à comprendre. — Enfin on dit aussi
gonjle-gueux. — « Je n'aime pas les haricots », disait
un jour l'acteur Brunet, a je n'en m.T'-crais qu'un,
j'ai un poids (pois) sur l'estomac. »
CENTRE : bourre-coquin, barre-gueule.
Bourrier, s. m., vieux mot français, toujours
neuf chez nous. A tout moment on peut entendre
dire : j'ai un beurrier dans l'œil, balayer les beurriers,
les jeter dans la rue, chercher dans les bourricrs un
objet égaré ou perdu, etc. — Il a des beurriers dans
ses flûtes (sa réputation n'est pas sans tache). — Le
— 54 —
quart aux bourricis, seau dans lequel les bonnes
mettent les balayures en attendant le passage des
répurgateurs ou bouiUonniers. — En parlant d'une
personne avec laquelle on est brouillé, nous disons :
a Je n'irai pas fouler ses bourriers (elle ne me verra
pas chez elle). »
Et le vanneur my-nud — Le bled deçà delà —
Le tourne et le revire et d'une plume épaisse
Sépare les bourriers du sein de la déesse.
Cl. Marot.
Et cependant tu vas dardant
Dessus moi ton courroux ardent.
Qui ne suis qu'un beurrier qui vole.
Mat. Régnier.
TRÉv. : bourriers, pailles et ordures mêlées avec le blé.
— BESCH. : beurrier, mélange de paille et de blé battu.
— NORM. : bourriers, débris de paille, balayures, sarclu-
res. — sar~;he : m. sg. qu'à Rennes. — centre : m.
Boursoule, s. 1'., brouette. On dit quelquefois
bouttcsoule. « Il traîne la boursoule aux ateliers de cha-
Boursouler, v. a., traîner ou pousser la bour-
soule, la brouette.
Bousée, s. f., fiente de bœuf ou de vache, (du
verbe bouser.) — Se dit, par extension, d'une selle
abondante : — « Quelle bousée ! »
Bouser, v. n. Le substantif bouse est français ;
— 55 —
pourquoi le verbe bouser et l'adjectif bousoux ne le
sont-ils pas ? C'est assurément une lacune regretta-
ble dans notre langue... Voyez avec quelle poésie,
avec quelle élégance ces mots sont employés par nos
paysans. — « Ah ! Bertranne ; lui disait un jour son
amoureux, ne sachant comment exprimer la vivacité
de ses sentiments, « si j'v's' embrassas aussi dus que
a j'v's' aimas, j'v' feras bouser comme une vaciie. »
— Les filles de basse-cour sont appelées des tourne-
bouses, des talons-bousoHx, des culs-bousoux. — a La
damnée vache naire me bonsit dans le pâ (poil). »
Chans. pop.
— « Car sa barbe est presque toute einboitsce. » (Rab.)
NORM. : boiiscc, fiente du gros bétail. Bouser, ficnter.
Bousin, s. m., bousine ou vessie emmanchée au
bout d'un long bâton, et dans laquelle les paysans
mettent une lumière, lorsqu'ils reviennent la nuit
d'une fête ou d'une noce. Ainsi, chez nous, les ves-
sies sont souvent des lanternes. — « Le petit Pierre
était tout fier et tout heureux de porter le bousin en
revenant de la noce de not' cousine Fanchette. »
Bousine, s. f., vessie. Avec des bousines on fait
des lanternes (des bonsins), des blagues à tabac et des
vèzes. (V. Vèie).
« Et d'un bon coup d'épée, il lui a crevé la bousine ».
— « Si v'cyez ses deux paitrines (seins), c'est comme
de vra's bousines. »
— « Se rigoulant ensemble au son de la belle bousine. »
(Rab.)
- S6 -
— « As-tu ouï le rossignolet
Tant joliet, qui gringottait
Là-haut sur une épine ?
Oui, dit-il, j'ai bien ouï
J'en ai pris ma boiisine
Et m'en suis réjoui. « (Vieux Noël)
Bouteillée, s. f., Nos paysans donnent ce nom
à toutes les potions, loochs, remèdes de toutes sortes
contenus dans des fioles délivrées par les pharma-
ciens. — « Le médecin m'a déjà fait baire je n'sais
a comb'en de boiiteiîlées ; ça ne m'a r'en fait. » —
Bouteillée, le contenu d'une bouteille.
Bouter, v. a., mettre, ficher. Vieux mot toujours
neuf dans nos villages. — Les enfants disent : « bou-
tons-ci, houtons-là, boutte ton nez là. » — Ou en-
core :
Mettez, boutei, fichez
Dans mon tonton ton nez.
— a Boute ton dat par la fente de mon cotillon,
0 j'ai le ventre dus comme une roche. » — « Boute
« la nape... » (Rab. Pant. ch. 3). — Se bouter, v.
pr., se mettre, s'installer. — « Qiiand il va-t-à la
« messe, il se boute au lutrin, d
BESCH. : bouter, mettre, vieux mot conservé dans le
midi. — TRÉv. : verbe très vieux et très mauvais, mais
qui se dit encore par les paysans et par le peuple. —
NORM. : bouter, pousser, heurter. Boutre, placer, poser.
— CENTRK : bouter, mettre, jeter. — Vieux Fr. : bouter,
pousser, heurter, botarc, boutare. duc.
Brache, s. 1., pour drèche, marc de l'orge mou-
— 57 —
lue qui a servi à la fabrication de la bière, et dont les
jardiniers des environs de Rennes nourrissent les deux
ou trois vaches qu'ils possèdent.
Braguigner, quelquefois Barguigner, v. n.,
marchander, liarder sur un marché. ■ — « C'est bon
marché ; n'allez pas braguigner. » — Hé ! hé ! dit le
patron de la nauf au marchand, c'est trop icy bargui-
gne' ». (Rab. Moutons de Panurge). — Braguignoux,
celui qui braguigne.
ACAD. : harguigner, hésiter dans un marché. — Vieux
Fr. : hergiiigner, marchander, disputer sur le prix. Bar-
caniare, barganniare, harguinare. duc.
Braies. V. Brayes.
Brayandière, s. f., femme occupée à teillcr le
lin ou le chanvre avec une braie ou maque.
Brancheter, V. Ebrosser.
Brandouille, s. f., balançoire, escarpolette.
Brandilloirc est le mot propre.
Brandouiller, v. pr., se balancer, pour se bran-
iUller.
BESCH. : brandilloire, cordes ou branches où on s'assied
pour se hraiidiller, Fam. — centre : hrandilloire et hran-
cilloire, balançoire. Se hrandillcr, se branciJlcr, se hran-
doiiiicr.
Brangé, adj. m. mouillé, trempé. Se dit surtout
dos enfants au maillot mouillés dans leurs langes. —
« Il faut changer l'enfant, il est brangé. » — N'a pas
de féminin.
- 58 -
Brannée, s. f., de bra7i, son ou partie grossière
du blé moulu. La brannée est le repas des chevaux,
des vaches ou des bœufs, dans lequel il entre du son.
— « Allons, Jeanne, préparez la Zrrt^Hf't' des vaches. »
Brannoux. — Cul-brannoux, épithète dont -on
gratifie les tisserands et les femmes malpropres. —
Dans Rabelais, on trouve souvent l'exclamation brmi
pour
ACAD. : bran de son. — norm. : hranéc, bran délayé
dans le lait caillé, ou l'eau pour la nourriture des veaux
et porcs.
Brassière, s. f. — Nos paysannes appellent ainsi
les fausses-manches dont elles se servent pour pré-
server les manches de leurs robes lorsqu'elles se
livrent aux gros ouvrages de la ferme. — « Tais-ta,
Jeanne, ou tu vas gober sur ta brassière (tu vas être
battue).»
ACAD. : brassière, sorte de camisole. — sarthe : bras-
sière, petite camisole d'enfant.
Brau, s. m., piquant de l'épine ou de tout
arbre ou arbuste épineux. — «Je me suis piqué avec
un bran. — Un bran m'est entré dans le pied. ». —
Plur. : bran.x ou brots ?
Brayes, s. f. pi., pron. brécs, culottes courtes en
usage avant que la mode introduisit le pantalon
moderne, ou la hanne. Ce mot est encore en usage
dans nos campagnes ; mais, comme les brayes, il
disparaît ou plutôt il est devenu hors d'usage. Cepen-
— 59 —
dant on dit toujours : « il n'en sortira pas les brayes
nettes », pour dire qu'une personne ne se tirera pas
sans dommage d'un mauvais pas ou d'une mauvaise
affaire.
ACAD. : braies se dit pour culotte, caleçon, mais il a
vieilli. — BESCH. : hraies, ancienne culotte, caleçon.
Expression prov. : sortir les braies nettes. — trév. :
braies, caleçon, haut de chausses. — Vieux Fr. : braie,
brais, haut de chausses : braia, bracœ, bragœ (duc.)
Brécot, s. m. Par-dessus le hrccot, locution qui
veut dire par-dessus le marché, en plus de la chose
vendue. — « Je paierai tant..., mais vous ajouterez
ceci ou cela par-dessus le brécot. »
Brégitiné, adj. — Qui a les indulgences de
Sainte Brigitte. — « Je tiens beaucoup à mon cha-
pelet », disait ma mère « car il est bn'gitUié. »
Bréhaigne, adj. f. Vache bréhaigue ou stérile. —
V. aloycc.
ACAD. : brébaigiie, se dit des femelles d'animaux qui
sont stériles. — Vieux Fr. : braljnigne et brehaigve,
braiia, se dit principalement d'une jument ou d'un autre
animal femelle qui est stérile, brchaine, impuissant,
incapable des actes du mariage (duc.)
Bréjons ou courts-sillons, s. m. pi., terme
d'agricuhure. On appelle bréjons les sillons situés à
l'angle ou à la pointe du champ, et qui ne per-
mettent que difficilement au conducteur de l'attelage
de tourner la charrue. Il y a quelquefois obligation
de labourer les brcions à la pelle ou au boucard.
— 6o —
Brelette. — Voy, berlette.
Breslé, adj. — Dans le canton de Bain, on dit
que le sol est brcslé, pour mouille.
Briançon ou Beriançon, s. m., petite fortune
propre de chaque héritier.
Briançonner, v. a, vendre de première main
des marchandises que le rc^raltier vend ensuite de
seconde main. Nos jardiniers viennent de grand
matin hriançonncr sur la place des Lices.
Briauçonnoux, s. m., marchand qui vend de
première main ses denrées, fruits, légumes, etc., aux
regrattières qui les revendent en détail. Le briançon,
c'est la marchandise elle-même. On dit aussi : —
beriançon,< bcriançonner , heriançonnoiix .
Brimbaler, v. a., dissiper follement sa fortune.
— C'est un mauvais sujet qui a brimbale tout son
patrimoine. — Le briinbaleur est le noceur, le
mange-tout.
Dans le sens propre briinlmler signifie agiter secouer.
Brimbaler ^qa., se jouer de lui en le faisant courir de
côté et d'autre s.ins nécessité. — trév. : brimbaler,
branler en deçà et en delà. — norm.: bri^nlaler, traîner
çà et là (trimballer). — centre : brimbaler, chan-
celer.
Brin, s. m., exprime une petite quantité : —
a Donnez m'en encore un bri)i, un [)'tit brin. » —
« Vous n'en aurez brin en tout (c.-à-d. rien). »
— 6i —
ACAD. : m. sg., fam. — « Ne t'attends pas que je t'aide
un seul hiitt. (La Font.) — sarthe : un brin, m. sg.—
NORM. : brin, adv., pas, point du tout.
Brîndzîngue, s. — « Jacques est bon travailleur ;
malheurçusement il est soiffhir, et souvent dans les
brhidiingties (dans les vignes du seigneur). »
SARTHE, NORM. : brindiiiigiie, m. sg.
Brîngâs, s. m. pi., syn. malouin de anicas,
barassiaux.
Broc, s. m., fourche à deux dents et à long
manche dont se servent nos paysans pour arracher
des meules le foin ou la paille destinés au repas des
bestiaux.
Brocher, v. a. et n., tricoter. On appelle brochons
les aiguilles à tricoter, brocheuses les tricoteuses. Vitré
est le pays par excellence des brocheuses. Le tricot au
métier fera disparaître la brocheuse, comme la
filature mécanique a tué la fileuse à la main.
NORM. : broche, aiguille à tricoter. — centre. : broche,
aiguille à tricoter. 'Brocher, tricoter.
Brodelu, adj., animal qui a les os saillants.
Se dit surtout des bêtes à cornes. — « Votre vache
est b'en brodeluc, mon brave homme, b
Brondir, v. n., pour bruire. Bruit que certains
métiers, certains objets font dans leurs mouvements
de rotation ; ainsi, la toupie d'Allemagne, le jeu du
diable.
— 62 —
NORM. : hronhron, rouet, hiondir, faire bruire une pierre
qu'on lance avec la fronde.
Bronner, v. n., se dit d'un enfant qui tette sa
langue ou son pouce. — « Quelle mauvaise habitude
il a vot' petit, toujours il broiine. » — Vient de
biberon ?
Broquette, s. f., petit clou à tête. Souvent
employé dans ce dicton local appliqué à un homme
qui a dissipé son bien : Il a mangé tout, la hroquette
et les p'tits clous.
ACAD. : hroquettf, clou de tapissier. — C'est dans ce
sens que le mot paraît être employé dans le dicton
ci-dessus.
Brosilles, s. f., petits morceaux de bois de
chauffage. — Le fendeur de bois emporte souvent
les brosilles ; les bonnes ménagères les conservent
pour allumer leur feu, faire la galette, à défaut de
fagot ou de menu bois. Les ouvriers en bois ne se
chauffent guère qu'avec des brosilles. (Voy. gro-
billes).
NORM. : brotiUon, broutille. — centre. : hresilles, brc-
tilles et brondilles, menus morceaux de bois.
Brou, s. m., herre.
NORM. : brou, brout, gui ; jeune pousse.
Brousse, s. t., diminutif de broussailles. — Cou-
per les brousses (les haies). — M. X..., retiré dans
ses terres, était devenu un loup de brousse, c.-à-d.;
- 63 -
sauvage et fuyant le bruit de la ville. — a Le lièvre
gîtait dans la brousse.»
NORM. : bronches, brousses, broussailles, ronces. — Vieux
Fr. : broisse, brosse, brousse, brossa, brossia (duc.)
Bruman, s. m., gendre, mari de la fille, par
rapport au père et à la mère de cette fille. — Etym.:
du français bru et de l'anglais manu ; homme de la
bru.
Le hanneton s'appelle aussi bruiuan dans l'arron-
dissement de Saint-Malo, tenant sans doute son nom
populaire du verbe bruire et du bruit qu'il fait dans
son vol.
NORM. : bruman, nouveau marié. — Vieux Fr.: bruman,
gendre (duc.)
Bubu, S. m., expression enfantine, petit mal,
petite douleur. — Bébé s'est blessé le doigt ; Petite
maman souffle sur le buhu, et l'enfant fait la risette.
— On dit aussi bobo, qu'on trouve dans nos diction-
naires ; mais buhu est plus usité chez nous.
Bûcher (Se), se battre, s'entailler la peau.
— Jacques et Vincent se sont bûches et se sont
émorchés (V. ce mot).
BESCH. : Se bûcher, pop., se battre. — centre : bûcher,
fig., rouer de coups.
Bue, S. f., pour huirc.
BESCH. : baye se disait autrefois pour buire. — NORM. :
buie, bie, cruche. — Vieux Fr. : buhe, buire, cruche,
d'où buheticr, buhelcrius (duc).
-64 -
Buée, s. f., s'emploie aussi pour buire ; mais la
buée est surtout le contenu de la bue. A Rennes, les
porteurs d'eau ont des bties ou vases en métal (fer
battu) d'une contenance d'environ 15 litres. La buée
se vend aujourd'hui 10 centimes, portée chez l'habi-
tant. On peut s'abonner pour une buée par jour, à
raison de 2 fr. 50 par mois.
Nos municipaux renouvellent en ce moment les
efforts tentés, il y a près d'un siècle, par leurs devan-
ciers, pour doter la ville d'une distribution d'eau
potable. Puissent leurs efforts ne pas être infruc-
tueux ! (t)
On dit encore mener la buée, sécher la btcée laver
la buée, pour faire la lessive. — Le linge est à la
buée. — Vieux, mais très-usité.
ACAD. : buée, lessive, vieux. — trév. : buée, vieux mot
qui signifiait autrefois lessive et dont on se sert encore
dans les provinces. — sarthe : Faire la buée, la lessive.
— NORM, : buée, lessive.
Buffer, V. a., souffler, éteindre. — Bu-ffer la
chandelle (Bruc, Redon).
TRÉV. : bnffe, s. f., vieux mot qui signifie soufflet. Se
(i). Ils y sont enfin parvenus; Rennes reçoit les eaux de
deux rivières : la Minette et la Loisance, situées non loin de
Fougères. Leur arrivée fut inaugurée le 14 Juillet 1882. Les
réservoirs sont au Galet à 2 kilomètres sur la route de Fou-
gères. Rennes est, depuis cette époque, abondamment pour-
vue d'eau très pure, sortant de rochers granitiques, et n'a
rien à envier aux villes les mieux dotées.
-65 -
trouve dans les psaumes de Marot. — Vieux Fr.: biiffcr,
enfler les joues (duc.)
Buhans, s, m., brouillards. « Nous voici dans
les hiibans de Noël. » On assure qu'ils nourissent le
bouton du "pommier. (N'a pas de singulier.)
Buse ou Busse, s. f., tonneau de la contenance
d'une barrique et demie, un peu plus, un peu moins.
— 0 J'n'ai p'us de barrique, j'n'ai p'us qu'une buse
d'une barrique et demie, si vous n'ia trouvez pas
trop grande ?» — « Pourquoi donc ne me marierais-
je pas », répondait une jeune paysanne à qui l'on fai-
sait des observations sur sa petite taille, « est-ce qu'une
barrique n'a pas la bonde aussi grande qu'une
buse ? » Elle voulait dire que la femme aussi ne se
mesure pas à la taille, qu'une petite en vaut bien
une grande.
BECH. : busse, autrefois espèce de futaille. Busse ou
hussard, ancienne mesure de capacité. — trév.: hussard,
vieux mot français, vaisseau à mettre du vin. —
SARTHE. : husse, tonneau. — norm. : busse, petit ton-
neau. — (duc.) bas. ht. bu^a, dolium,en vieux français
bous.
Buyer ou Beuyer, v. n., pour bruire, et aussi
pour braire. — La toupie biiyc en tournant. L'enfant
buye en pleurant. Le hanneton buye en volant. — A
Saint-Malo on dit que la toupie vionne. — « Jeanne
se tournait, se virait et mettait tant d'ardeur à la
danse, que son cotillon en buyait. »
66 -
Cabosse, s. f., caboche, coup, chute qui produit
une bosse, une enflure. Se dit aussi en parlant des
choses. — « Par votre maladresse, toute mon argen-
terie est cabossée. » — « Un bon saut vaut mieux
qu'une mauvaise cabosse. » (Proverbe rennais).
Cabosser, v. a., pour bosstier. On le trouve dans
Rabelais (Prologue du Liv. III).
BKScu. : cabosse, fam., meurtrissure, bosse. Cabosser,
faire une contusion, surtout à la tête. Familier et tout-
à-fait pop., surtout dans l'Ouest. — norm. : cabochcr,
ècabochcr, bosseler. — cf.xtrf. : cabosse, tête, et par
extention, grosseur, protubérance. Cabosser, bossuer.
Cache-cutté. (Jouer à), jouer à cache-cache.
Nos enfants disent, en réunissant les verbes syno-
nymes cacher et cutter : Jouons à cachc-cutlé. —
Rabelais dit : à la cutte-cache. (Voy. ciiller, culte').
Vieux Fr.: cucbc, cache, lieu secret, enta. Cutcr, cacher.
(duc.)
Cachemuter, v. n., chuchoter. — Je vous ai
bien vus cacbeiuuter ensemble.
-67-
Cachemuterie, s. f., pour cachotcnc, propos
mystcrieux, tonus à voix basse. — « Entre ces deux
péronnelles, ce sont des cacheiiiutcries à n'en plus
finir. » — Plus usité au pluriel.
Cachemutier, ière, adj., qui cachomuto, qui
fait des cachemuteries, pour caclmicr, cachot ibe.
Cachignard, arde, s., querelleur, taquin,
mauvais coucheur. « C'était un cachignarJ insup-
portable. »
Cachigner, v. a., agacer, quereller. — o D'ail-
leurs, tu aimes à cachigiwr. » — Rabelais a employé
le mot cachiiiucr, qu'on traduit par rire avec excès.
Cafoin, s. m., café mal tenu, mal fréquenté. —
« C'est surtout dans les cafoins qu'on rencontrait
l'avocat X...., d — Se dit aussi du café mal préparé:
a Ce n'est pas du café, c'est du cafoin. »
NORM. : ciifouht, m. sg.
Cageot ou Cajot, s. m., petit calebasson d'osier
ou de bourdaine dans lequel nos jardiniers mettent
leur fruits, leurs fraises et autres marchandises d'un
petit volume. — Une cageotéc est le contenu du
cageot. — L'homme qui s'occupe des afl;iires du
ménage est un cageot, pris, dans cette acception,
pour coUn-taiiipoit .
BE<;rH. : cageot, petite cage.
Cagibiti,' s. m. — Nous appelons de co nom
— 68 —
italianisé un réduit, un petit grenier, un poulailler. —
Ces pauvres gens sont relégués dans une espèce de
cagibili exposé à tous les vents. — C'est le mot cage
allongé.
Cailles ou Caillibottes, s. f. pi., espèce de
fromage au lait cuit, puis divisé par carrés dans la
forme d'un damier.
Dans les ménages riches, le clair de cailles est rem-
placé par de la crème sucrée. Les cailles sont, avec
les tiiaingaiix. (Voy. ce mot), un dessert très recher-
ché par les Rennais, surtout en été.
Dans mon enfance (1815), les ouvriers, les enfants
du peuple et les écoliers en faisaient un copieux
déjeuner pour deux liards ou un sol. Aujourd'hui
(1877), c'est un plat de luxe, une friandise. Les
marchandes en donnent encore pour cinq ou dix
centimes, mais en si petite quantité qu'elle ne suffi-
rait pas à rassasier un enfant.
Le clair de cailles est une boisson rafraîchissante,
et tient lieu parfois d'un léger purgatif.
Le peuple donne aussi le nom de caillibottes à la
boule de neige, fleur de l'obier (Vihurnum opiûus)
à cause de la blancheur et de la forme arrondie de
cette fleur.
ACAD. : caillehotle, masse de lait caillé. — NORM. :
cailles, cailleboltcs, grumeaux de lait caillù.
Caire, v, a., prononcez qtiaire, pour cuire, —
-69-
« Quand on crait caire, le four chcei », c.-à-d., on
croit le succès d'une affaire assuré, et tout est perdu.
Calard, s. m., (du verbe caler), qni refuse d'ac-
cepter un défi, qui met les pouces. — Voir caler.
Calebasse (Vendre la), révéler un secret. —
« Il avait promis le secret, et il a vendu la calebasse. »
Locution très-usitée.
CENTRE : Faire la calebasse, révéler un secret.
Calebasson, s. m., grand panier fait d'osier et
surtout de bois de bourdaine, dans lequel nos
paysans et nos jardiniers apportent au marché leurs
légumes et leurs denrées. — Dérivé de calebasse.
Calebassonnée, s. f., contenu du calebasson. —
Càlebassoiiuèe de chou.\, de pois, de pommes de
terre, etc.
Caler, v. n., mettre les pouces, refuser le combat.
Ce mot est surtout très usité chez les écoliers : « Tu
cales, tu es un calard. r> — Vient peut-être du terme
de marine : caler un mât, une voile. — Se trouve
dans Montaigne : « Cette superbe vertu eust-elle calé
au plus fort de sa montre. » (Liv. 3, ch. 12.
On trouve dans quelques auteurs caner, faire la cane,
manquer de courage : o Rien qu'à me voir il canera.
(E. Zola).»
Nous disons aussi : bien calé, bien nippé, bien vêtu.
— On trouve dans Rabelais calaer, qu'on traduit par
bel air, bon air.
— 70 —
BESCH. : caler, céder, mettre les pouces. Pop. et presque
trivial. Caleur, euse, poltron, qui met les pouces. Canev,
faire la cane, m, sg. — acad. : caler, pop. m. sg. —
NORM. : caler, refuser un défi. Calard, poltron.
BESCH. : Homme cale, qui a de l'aisance. — Objet calé,
agréable à la vue.
Calistrade, s. f., (chercher la) se dit du pique-
assiette qui se présente dans les maisons à l'heure des
repas : « Il va chercher la calistrade. »
Campagnole, s. f., espèce de souris des champs,
moins grosse que le rat, mais plus grosse que le mu-
lot. Nous l'appelons aussi lirûii. La caiiipagnole ou le
//;■();; sont très friands des fruits en espalier de nos
jardins. Son museau et sa queue sont plus allongés
que ceux du mulot.
ACAD. : campagnol, s. m.
Campane, s. f., espèce de cloche en fer blanc
qu'on met au col des chevaux et des mulets pacageant
dans les bois, afin de les rallier plus facilement.
« L'ennemi meit toutes les cauipanes des mulets dans
« les coffres ».
Vieux Fr. : campane, cloche, campana hannalis. Campa-
nier, clocher, duc. — centre : campaine, clochette au
cou des moutons.
Canapé, s. m. Vers 1N30, les ouvriers donnaient
le sobriquet de canapés aux étudiants et aux jeunes
gens de la ville (Rennes), qui, alors portaient tous
des cannes à êpée. De là vient, je crois, l'épithète de
canapé, ou peut-être aussi du meuble qu'on ne trouve
— 71 —
que dans les salons riches. On ne s'en sert plus au-
jourd'hui, et je ne lui donne place ici que pour mé-
moire.
Canette, s. f., petite bille de marbre ou de pierre,
jeu d'entants, qui se joue à di^-dog, au petit pot ou
pionard. — Dig-do^, lancer adroitement sa canette
avec le pouce, de façon à atteindre celle de son ad-
versaire.
Ce n'est que depuis peu d'années que le mot
canette comme mesure de la capacité, a été introduit
chez nous.
ACAD. : canette, jeu de billes. — sarthe, n'orm., cen-
tre, m. sg.
Capot, s. m., espèce de cape ou capuchon dont
les femmes du peuple se couvrent la tête et les épau-
les pour garantir leurs coifïes dans le temps de neige
ou de pluie. On l'appelle aussi therésienne. Ce vête-
ment, fait d'étoffe d'indienne ou de camelot tend à
disparaître. Nos paysannes lui préfèrent aujourd'hui
le parapluie, quoiqu'il soit à mon avis, moins
commode. — La ihèrcsienne donne aux Lorientaises
un petit air mystique qui leur sied à ravir.
Caquoux s. m., terme de mépris dont les paysans
et surtout leurs femmes gratifient les cordiers. Est-ce
parce que leur profession a quelque cliose de fémi-
nin ? Est-ce parce qu'ils étaient appelés à filer jadis
la corde des pendus ? choisis ô lecteur.
- 72 —
Carabin, s. m., blé noir ou sarrasin.
Carapouce, s. m., espèce de casquette en cuir,
que portaient dans mon enfance les enfants du peu-
ple (1815). Aujourd'hui (1877), l'ouvrier, devenu
muscadin, fait porter à ses enfants des chapeaux gar-
nis de plumes... et pourquoi pas ? Notre pauvre
petit carapouce, qui empruntait son nom et sa forme
à une carapace, n'est plus connu depuis longtemps.
XORM. : carapon, sorte de coifl'ure d'homme en peau de
loutre, de chat, etc., dont on peut rabattre les bords.
GuERNESEY : carapousse. Bas bret. carapousscn.
Carquois, s. m., petit grenier ou réduit, ménagé
dans un coin de l'habitation, une soupente sous les
toits, dans un angle du palier, partout enfin où l'ar-
chitecte a pu utiliser une place vide. — Le carquois
tient lieu de fruitier, ou renferme ordinairement,
comme le cagihiti, tous les barassiaux du ménage.
Carreau, s. m., blé noir.
Carrelis, s. m., clôture en planches clouées sur
poteaux, qui sépare les propriétés, comme les murs
ou les haies. Des règlements et les usages locaux ont
fixé le mode de construction de cette clôture et les
signes de non mitoyenneté. — Le mot carrelis n'est
pas encore admis par l'Académie ; espérons que cela
ne tardera pas.
Carroué, s. m., morceau ou pièce de forme
carrée. — Dans nos campagnes, lorsqu'on tue un
— 75 -
porc, le paysan envoie par sa ménagère à ses parents,
et amis, des saucisses et du boudin ; mais aux gros
bonnets de l'endroit, aux personnages conséquents,
le curé, le maire, cela ne suffit pas ; on les gratifie
en outre d'un carrouè de lard.
Cartelle, s. f., un quartier, une parcelle, un
morceau, une tranche. Une cartdle de pomme, de
poire, de melon.
On donne aussi cette qualification aux enfants
consanguins et utérins, frères et sœurs demis, comme
nous disons, et aussi aux jumeaux.
CENTRE : carqiiille, cartille, parcelle.
Oarvanne, s. f., charogne, corps d'un animal en
en pu tré l'action. Les règlements de police défendent
de noyer les animaux dans les rivières et d'y jeter
leurs corps. Malgré ces sages prescriptions, quand
vous vous promènerez sur les bords fleuris de notre
Vilaine, il vous arrivera souvent de voir flotter des
canaiities sur ses eaux argentées. Alors, prenez votre
mouchoir.... et pressez le pas.
KORM. : carne, m. sg.
Casse, s. f., mets composé de lard, de fromage
de cochon, de fraises et de pieds de veau, le tout
cuit au four dans une grande bassine en cuivre
étamé. Le contenant et le contenu portent le même
nom. La casse est un plat très recherché des Rennais.
C'est surtout le déjeuner du dimanche. Il a le mérite
— 74 —
d'être tout préparé, et il arrive que, pour en obtenir
des lardiers, il faut souvent faire queue à leur porte.
— « Que mangerons-nous demain ? — De la
casse. » — Poichcl à Dol et à Pontorson et dans
presque toutes les communes du littoral d'Ille-et-
Vilaine" — Lichecassc, l'écheur de plats. (Rah.)
\ORM. et CENTRE : ciisse, lèche-frite.
Casser, v. a., employé dans ces divers sens : —
Casser du bois, fendre du bois. — Casser une pièce
de monnaie, l'entamer, en faire de la monnaie. —
Casser sa pipe, mourir. — Casser sa robe, son habit, —
pour : déchirer sa robe, son habit.
Casseur, s. m. — On dit chez nous : Casseur de
bois, l'homme qui le fend. Chaque ménage a son
casseur, qui souvent aussi met le vin en bouteilles, et
le boit quand il le peut. — « C'est un casseur », un
tapageur.
Castille, s. f., groseille à grappes, ainsi nommée
sans doute parce qu'elle est d'origine castillane. Il y
a des caslilles blanches et des castiUes rouges. Si vous
voulez faire de la gelée ou du sirop, n'oubliez pas de
demander des caslilles à nos jardiniers ; si vous leur
demandez des groseilles, il vous apporteront des
groseilles à maquereau.
C'est au mot castille qu'on doit ce recueil, comme
on l'a raconté dans notre « Introduction ».
On trouve ce mot dans les œuvres poissardes de
— /) —
Vadé et l'Ecluse : — «J'avons des raisins de corian-
dre, des mâches-pains, des caslilles en magnicre de
conserve. » — (Le déjeuner de La Râpée).
En Normandie, on l'appelle quelquefois gadelk et
l'arbrisseau gadeUier.
Castillier, s. m., arbrisseau qui produit hcasiiUe,
ou groseille à grappes.
s.^RTHE : castille. — norm. : castiUc, gade, grade,
gadelle, gradelle.
Cati, adv. de lieu employé par nos iilles de
basse-cour pour appeler les porcs. Ces intelligents
animaux répondent à cati-cati, comme les poules à
petit-petit.
CatioUe, s. f., coiffure des paysannes des envi-
rons de Rennes.. L'usage de la catiolk s'étend assez
loin à l'ouest et au nord de la ville. A Châteaugiron
on trouve la poiipette, dont la forme est, selon moi,
plus élégante. Ces deux coiflures tendent à disparaître
pour faire place à un petit bonnet qu'on a baptisé, je
ne sais poutquoi, du nom de polka. Ce changement
a eu lieu vers 18G5, et bientôt la coiffure nationale
aura tout-à-fait disparu.
Les enfants donnent le nom de catioUe à la fleur
de la digitale, qui, par sa forme, se rapproche un
peu de la coiffure des femmes. Cette fleur est appelée
11UUU dans quelques communes.
Caunet, ette, adj., friand, friande. — c La jeune
- 76 -
malade aime-t-elle le laitage, les bouillies ? — Ah,
comme ça, répond la mère, elle n'en est pas bien
caimette, »
Causer, v. n. Causer de, faire causer de, employés
pour parler en mauvaise part de quelqu'un : — « Je
Sais que vous avez causé de moi (jasé sur mon
compte). » — « On dit que cette jeune fille /at7 tazii^r
d'elle. » — Autre acception : Pierre et Marie causent
ensemble (se font la cour).
BnscH. : causer de, parler avec malignité de qqn.
Cème, s. f., mousse du lait au sortir du pis de la
vache. Nos paysannes ont grand soin de couronner
de chue leurs pots de lait pour faire mousser leur mar-
chandise. Ne vous y laissez pas prendre, la chue n'est
pas de la crème.
>JORM. : cerne, saiine, première crème qui se forme sur le
lait. Bas lat. Sagimen, graisse ?
Cenâs, s. m. grenier. — V. Senàs.
Censément, adv., vieux, mais très usité, signifie :
par supposition. — « Il est censément le maître du
logis. » Il correspond à soi-disant, presque.
NORM. : censément, adv., quasi, presque, à peu près,
pour ainsi dire. « 11 y a censément une douzaine d'œufs.»
— CENTRE : censément, en apparence, etc.
Cerise, s. m., confitures de cerises. Le villotin,
le beau parleur préfère l'emploi de ce mot à ceux de
badioki et de hhon, seuls usités dans nos fermes.
— 11 —
ChafFourée, s. f., grande quantité. Rabelais
aurait pu dire que Gargamelle mangeait une (haffoii-
rée de tripes, et le capitaine Tripet une cbaffourée de
soupe. — Employé dans un autre sens par Montai-
gne ; « -L'idée de leur amendement chaffoiirce (conlu-
se. » (Liv. 3, chap. 2).
Chaffourer, v. a., chasser, pourchasser. Se dit
surtout des chats qu'on chajjoitrc de dessous les lits.
— De chat-founé on a Lût chaffourer.
On trouve dans Rabelais, mais avec signification
difTérentc le verbe chauffburer : « Gargantua ratissait
le papier et chauffourait le parchemin. »
BESCii. : chafourer, anc, défigurer, barbouiller, gritlou-
ncr.
Chagourin, s. m. C'est le nom donné aux bû-
cherons dans le canton de Janzé.
Chambarder, v. a., terme de bas étage, syno-
nyme de casser, briser, renverser, mettre au pillage.
— a Ces mauvais garnements, avant de se retirer,
chambardèrent tout dans la maison. »
Chamberlâs ou Chamberlîns (prononciation
douteuse), s. dos t genres. C'est ainsi qu'on appelle
les époux mariés civilement, avant le mariage reli-
gieux. Au sortir de la mairie, le gars et la fille sont
chamberhi's.
Chamillard, s. m., cidre chaud mêlé d'eau-de-
vie. Ce mélange et le mot qui l'exprime sont dus à
-78 -
quelque buveur raffiné. Ce n'est que vers 180 i qu'ils
ont été introduits chez nous.
Champagne, s. m. On appelle ainsi, dans le
canton de Châteauneuf, un champ de grande étendue,
en plaine, sans clôture et sans plantations.
NORM. : campagne, pays découvert. — centre : Cham-
pagne, contrées plates. — Vieux Fr. : champaigne, cham-
paine, plaine, campania, campestris locus planus, (duc).
Champ-noble, s. m. On désignait et on désigne
encore par cette appellation aristocratique, une pièce
de terre entourée des haies qui en dépendent. On la
trouve dans de vieux titres, mais on ne l'emploie
pas officiellement.
Chapelle (Faire) — se dit en parlant des femmes,
qui, pour se chauflfer, relèvent leurs jupons par-de-
vant. — « Madame B... prenait plaisir à faire cha-
pelle. » C'est peut être un marin qui a appliqué à
l'acte en question un terme de son métier. — On
dit ixussx faire courtine.
SARTHE : Faire courtine, m. sg.
Charpelouse, s. f., chenille, et surtout la che-
nille velue. — Une charpelouse qui tombe sur votre
col laisse sur la peau un venin qui cause une cuisson
de quelques heures de durée.
NOKM. : carpeleuse, chapeleuse, chenille. Clialle-pelciise
(chatte poilue ?). — anglais : Caterpillar. — etym. :
raro pilosa '!
— 79 —
Charruer, v. a., prononcez chenucr, labourer
avec la charrue.
BESCH. : charmer, s'est dit pour mener la charrue. —
CENTRB : charruer, m. sg.
Charte, s. f., charrette.
Chârtier, s. m., conducteur de la charte. — Dans
le Berry, on dit aussi chdrle et chdrtier. Je fais ici
cette remarque, qu'un grand nombre de mots sont
communs à nous et aux Berrichons ; je laisse aux
savants le soin d'en expliquer la cause.
s.\RTHE : ch.irte, m. sg.
Châsse, s. f., employé pour bière, cercueil. —
0 La cJmse en bois de chêne était intérieurement
garnie de plomb. »
CENTRE : châsse, m sg.
Chatonner, v. n., se dit des enfants qui grimpent
aux arbres en s'aidant des mains et des genoux, à
l'imitation des chats. — Il est aussi employé par les
chasseurs pour indiquer l'action d'un chien qui flai-
rant le gibier, modifie son allure pour mieux l'appro-
cher.
BESCH. : chatonner s'est dit autrefois pour aller à quatre
pattes.
Chaud, et Chaud-de-boire (pron. hairc), loc.
adj. malheureusemeni trop usitée, et qui exprime un
commencement d'ivresse. — « J'ai rencontré Vincent
- 8o —
ce matin, il était déjà bien chaud. » D. Le Président :
« Le témoin était-il ivre ?» — R. « Il n'était pas
ce qu'on appelle saoul, mais il était chaud-de-baire . »
— Un archevêque de Rennes s'est servi lui-même
de cette locution dans un de ses mandements sur
l'ivrognerie.
Chauffé, s. m., lait cuit que nos fermières mettent
dans le lait riboltc (baratté), pour le rendre plus épais.
« Apportez-moi une meyenne de lait ribotté, et n'épar-
gnez pas le chauffé. » (Voy. Meyenne).
Chaumine, s. f., petite chaumière (diminutif).
ACAD. : chaumine, m. sg. — Ce mot se trouve dans La
Fontaine.
Chausse, s. f. , bas. Une paire de chausses, pour
une paire de bas.
SARTHE : chausses, m. sg.: « Pouille tes chausses. » —
CKXTRE : chausses, m. sg. — norm. : cauche, m. sg.
Chausse-noire (pron. nairé), s. des 2 genres,
homme ou femme chargé d'une demande en mariage.
— « Le père Louazel était de la noce ; ce n'est pas
étonnant, puisqu'il avait été chausse-naire ! »
Chauvir, v. n., sourire. — « Il n'a pas répondu,
mais il a chauvi. » — S'emploie quelquefois en mau-
vaise part. Sourire narquois : — « Il ne dit rien, il
chauvit. »
SARTiiE : chauvir, m. sg.
Chemin-messier, s. m., sentier à travers
champs, qui mène du village à l'église par le plus
court chemin. — (V. wessier).
Cheminiau, Cheminou, s. m. — Les habitants
de nos faubourgs, les paysans de la banlieue de
Rennes désignent sous les noms de cheuiiidaux ou
chcminaux les hommes employés aux chemins de fer.
On les voit d'un assez mauvais œil, parce que, à tort
sans doute, ils passent pour maraudeurs et pillards :
— Si des pommes de terre, des artichauts ont été
volés dans un champ, ce ne peut être que par des
chcuiiuiaux.
NORM. : cheminot, terrassier travaillant à l'établissement
des rout'.-s. Le mot indique souvent un ouvrier nomade.
Pris généralement en mauvaise part. — sarthe : Les
chcminaux du chemin de fer.
Chêne-four ché (ou fourchu). — Faire le
chàu'-fomrhi' et un amusement auquel se livrent les
enfants de nos campagnes. Il consiste à se tenir la
tète en bas et les pieds en l'air, et à conserver cette
position le plus longtemps possible. — « Jouons au
(héue-fourchc . >•> — Rab. : chène-foiirchii .
Chenu, ue, adj. — Ne s'emploie guère qu'avec la
négative : « Votre cidre n'est pas cbetw, mon brave
homme », c.-à-d., il ne vaut rien.
Cherchoux, adj. m., pour chercheur. S'emploie
surtout comme synonyme de mendiant. — <( C'était
un chcrchoitx de pain, » un vagabond.
0
— 82 —
Chérel (Faire). — Locution toute Rennaise, qui
doit son origine à un agent de police du nom de
Chérel. Cet agent, la terreur des gamins et des enfants
sous la Restauration, tombait comme une bombe sur
les joueurs, et confisquait les enjeux, à son profit,
bien entendu. Nous appelions ces exécutions : Faire
Chérel. Les vieux Rennais seuls s'en souviennent.
Chi'rcl, cela se comprend, était fort impopulaire,
comme ses supérieurs, les commissaires de police de
cette époque. Ils avaient eu l'honneur d'une chanson,
dont le refrain était :
A bas Chérel,
Et Levilain, Thomas, Courteil.
Je rappelle cette locution faire Chérel, parce qu'elle
est restée populaire longtemps après la chute du Gou-
vernement de la Restauration.
Cherîn, s. m., pommier sauvage, ou non greffé.
« Pommes de cher in. »
Cherine, adj. Personne cherine, d'une constitu-
tion maladive. — Cette locution a été recueillie par
le docteur Del... dans une visite faite par lui à la
Chapelle-des-Fougeretz.
Chevir (se ou s'en) — v. pron., vieux mot très-
usité. Venir à bout, mener à bonne fin, se débarras-
ser des iinportunités d'une personne. — « Voilà une
rude besogne, je m'en chcvirai b'en tout d'mérae. »
— « Rappelez donc vot' gars, mère Jeanne, je ne
peux m'en chevi. »
NORM. : cbevir, v. n., m. sg. Se chérir, s'aider, jouir de.
— CENTRE : chevir, être maître de. On écrivait autrefois
chefvir. V. Mont., etc. — Vieux Fr. : chevir, cheviare,
I- traiter, composer, transiger ; 2- se tirer d'embarras :
a ne say comment m'en cheviray ». Rom. de Renart ;
3' se défaire de qq. chose ; 4- se rendre maître de qn.
Chiatique, adj. m. et f., syn de cacochyme, ché-
tif, malingre, s'applique surtout aux enfants alangou-
rés. — « Quel pauvre petit chiatique !» — Ce mot
viendrait-il de sciatique ?
CENTRE : chaitis, chcti, clictif.
Chidoler, v. a., dorloter, gâter. — « Plus encore
que sa mère, sa grand'mère l'a toujours cbidolée.v
Chiée, s. f., mot grossier souvent employé par
nos paysans et même par leurs femmes et leurs filles.
— Un fâcheux événement, une simple contrariété
leur donne la chiée, c'est-à-dire, la foire, la venette.
(Voy. ce mot).
Chie-la-pa, (la poix), s. m., ctf., avare, pingre.
On se demande lequel est le plus chic-la-pd, du mari
ou de la femme. — « Ne demandez rien à cet har-
pagon. C'est un chie-h-pa, s'il en fut. »
Chie-en-hannes, s. m. ; on appelle ainsi les
garçons malpropres, et, pris au figuré, les hommes
ineptes, les mauvais ouvriers ; enfin, c'est un terme
de mépris employé à l'égard d'une personne pour
laquelle on n'a point d'estime. Il ne s'applique point
aux femmes, parce qu'elles ne portent point de
- 84 -
bannes. — A St-Malo on dit chie-en-brayes ; c'est la
même chose, hayes et hannes étant synonymes.
CENTRE : chie-en-irayes, homme aux allures lentes et
endormies.
Chiffer, v. a, abrégé de chiffonner, ■ — « Ah !
monsieur, voyez dans quel état est ma toilette, vous
l'avez toute chiffée » . — On dit aussi se chiffer. —
« C'est dans la foule que je me suis chiffée ».
Chinchée, s. f., prise de tabac en poudre : —
a Allons, compère, une petite chinchée ».
Chincher, v. a., priser du tabac en poudre.
Chinchoire, s. f., tabatière en forme de poire
qui ne laisse échapper le tabac que par un étroit gou-
lot. La chinchoire est en buis et le plus souvent en
terre cuite. Elle est en usage chez les gens du peuple,
qui, en raison de leur profession, ne sauraient plon-
ger leurs doigts dans une tabatière à charnières. Ils
versent le tabac sur leur main gauche dans un creux
adroitement pratiqué entre le pouce et le poignet, et
aspirent, sans l'avoir altéré, le savoureux bclitn.
(Voy. hetiui).
CENTRE : Un chiiichin, une petite quantité.
Chinchon, s. m., petit nom que les petites ma-
mans donnent à leurs bébés chéris : — « Viens, mon
petit chinchon, que je te bise. » — « Le petit Paul
était le chinchon, (le bénoni) de sa mère. »
— ô) —
Chiute, s. f., bande de terrain entre la haie et la
terre labourée : syn. de Forricre, (V. ce mot) qui est
plus usité chez nous.
besch! : chaintre, dans qqs cantons, portion de terrain
qu'on laisse aux extrémités des champs pour servir
d'égoût aux eaux pluviales, et dont on reporte de temps
en temps la terre sur le champ d'où elle a été entraînée.
— Vieux Fr. : chaintre, chainglc, cinetada, terre entou-
rée d'une haie (duc). — korm. : chiinlrc, s. m., sentier.
Ghiottes, s. f. pi., petit réduit en forme de gué-
rite, édifié le plus souvent derrière la maison, ou en
bas du jardin de la ferme. Son nom indique suffi-
samment sa destination. Les Anglais, plus réservés
que nous dans leur langage, les nomment %vate>-"
doset.
Chique, s. f., morceau de pain, par extension de
la chique de tabac (?). — « Quelle chique ! en vien-
drez-vous à bout ! »
Chiquer, v. a. et n., manger. — Il est à remarquer
que chique et chiquer sont picards dans la même accep-
tion.
BESCH. : chiquer, manger, boire, pop. : chiqitet s., petite
portion : Un chiquet de vin. fam. : chiquet à chiqiiet,
peu à peu. — acad. : chiquet, petit morceau. —
BERRY : Une chique de pain. — nou.m. : chique, morceau.
Chiquer, manger avec appétit.
Chiqueter, v. a., terme de maçon et de terras-
sier. Enduire ou crépir les murs d'une maison.
ChloflF. Voy. Schloff.
Chommer, (se) v. pron., se mettre, se tenir
debout. L'o est bref, et souvent se prononce ou. —
« Le pauvre homme est si malade, qu'il ne peut
même plus se choumer. » — « V'ià une garçaille qui
se choiuiic déjà. » — « Cbomous-va ci faites vot'e beso-
gne. » — Il est employé aussi comme verbe actif :
« Chonnncr une poutre contre un mur. » — On voit
que chez nous ce verbe exprime le mouvement,
tandis qu'ailleurs le verbe chômer (d long) a une
signification contraire (cesser, s'arrêter).
Chommette, s. f. . du verbe se chonnner (se tenir
debout), petite machine dans laquelle les mères
mettent leurs enfants pendant qu'elles vaquent aux
affaires de leur ménage.
La forme des chommettes est très variée. Les unes
sont en osier, semblables à un entonnoir renversé ;
ce sont les plus communes. On y introduit l'enfant
par le goulot ; il pousse la machine en essayant ses
premiers pas. D'autres affectent la forme d'un petit
manège ; une perche allant du plancher au plafond
tourne dans ses pivots, et permet au mioche placé dans
la choinuictte de tourner lui-même soit à droite, soit à
gauche. — La première est locomobile, la seconde
est fixe et semble offrir à la mère plus de sécurité. —
« Le gars crie dans son bers, mets-le dans la chom-
metk. »
Chopeau, adj. des 2 g., ébaubi, étourdi par un
accident, une mauvaise nouvelle. — «La nouvelle de
-87-
cet événement l'a rendu tou^ chapeau. •» (Montfort).
Choper, v. n., sommeiller. — « Après le repas, le
bonhomme chopaît dans son fauteuil, et s'en trouvait
bien ». •
Chopiner, v, n., boire des chopines. Chopiner
est français, mais surtout breton ; car c'est surtout
chez nous qu'on sait le mettre en pratique.
BESCH. : chopiner, boire fréquemment. Vieux et Pop. —
V. La Font.
Choques, s. î. pi., socques, grosse chaussure dont
l'empeigne est de cuir et les semelles de bois. — Si
le temps est mauvais, on prend ses choques. — On
appelle noix de choques, à cause de leur forme, une
grosse espèce de ce fruit, qui, en botanique, doit por-
ter un autre nom.
Chouâmé, ée, adj. Pomme ou poire chouâmèe,
dont le cœur est gâté, ou blette, ou seulement
flétrie.
Chouan, s. m., pour chat-huant, hibou. —
« C'était un pauvre pâtiras ; on était après lui comme
la pie après le chouan. » Cela veut dire qu'on le
taquinait sans cesse.
ACAD. : chouan, p. cli;it-liuant. — Vieux fr. : chouen,
cahuan. Bas lat. : cauana, canunniis (duc).
Chouan, s. m., vase en terre, en forme de casse-
role, usité surtout à St-Malo.
Choirer, v. n. (voyez Primer').
Chuchu, s. m., relief, reste de mets, — « Cet
enfant a la fâcheuse habitude de laisser des chuchus
sur son assiette. » — « Au dîner nous mangerons
les chuchus du déjeuner ».
Chupé, ée, adj. se dit d'une denrée ou de toute
chose solide qui dépasse le vase qui la contient. Quand
la mesure est plus que comble, elle est chiipêe. — « Il
mangeait des écuellées de soupe toutes haut c/;/(p(?V5. »
(A St-Malo huuiées).
Chupé, ée, se dit aussi pour huppé, èe. Une poule
chuppèc (qui porte aigrette). — Se dit aussi des per-
sonnes fîères, portant plume et dont la toilette est
luxueuse : « Voyez donc M"''« *** comme elle est
chupée ! »
Chupeau (a), exclamation, cri poussé par les
paysans à la vue des loups. Il y a cinquante ans à.
peine, ces carnassiers voyageaient encore en troupe
dans nos campagnes, et enlevaient les chiens et le
menu bétail, même à la porte des fermes. Le cri « à
chupeau ! » ne manquait pas de les mettre en fuite.
Chupiron, s. m., équivalent de cône, sommet,
objet terminé en pointe ; ainsi les barges de paille ou
de foin, les moches de beurre.
Clair de cailles s. m. (Voy : pelit lait, cailles).
Cliques-Claques, locution populaire : — a Je
-89 -
lui ai dit son fait ; il a pris ses cliques et ses claques (il
est parti), et n'a pas demandé son reste. » — On por-
tait vers 1830, une double chaussure appelée claques.
Clochette, s. f. Les enfants nomment clochettes
les fleurs des campanules, de la digitale, sans doute à
cause de leur forme, qui, en effet, est celle d'une
petite cloche ou sonnette. Ils appellent aussi clochettes
pour la même raison, les jacinthes bleues dont quel-
ques prairies sont émaillées. — « Allons aux buttes de
Coësmes, cueillir des clochettes. »
ACAD. : clochette, nom vulgaire de plusieurs plantes dont
la corolle a la forme d'une cloche.
Clochi-Clochette, serment solennel, engage-
ment moral que les enfants du peuple contractent
entre eux dans leurs marchés, dans leurs échanges.
— « Tu me le promets, eh bien, faisons clochi-clo-
chette. » Les contractants entrelaçant leurs petits
doigts d'une main, l'un des deux prononce avec le
plus grand sérieux ces mots sacramenrels : « Clochi-
clochette, si tu te dédis, tu iras dans Tenfer et moi
dans le paradis. » Ce serment, je l'ai prêté bien des
fois dans mon enfance, et je me serais cru perdu si
je l'avais violé.
Que d'hommes mûrs font aujourd'hui clochi-clo-
chette sans y attacher d'importance !
Clopin, s. m., gros crachat. (Voy. copias). —
Les écoliers rirai élevés se lançaient des chpins.
- 90 —
Clôt-cul, s. m,, le dernier oiseau d'une nichée.
(V. Echsc).
NORM. : Clot-ciil, m. sg.
Coapiau, s. m., corruption de copeau. — Les
ouvriers en bois, charpentiers, fendeurs de bois, bû-
clrerons, s'approprient les coapiaux, et c'est avec ces
coapiaiix que leurs femmes cuisent la galette.
NORM. : coipcau, coipel, coipet. — duc : coipdlus, coipel.
Cobanue, s. f., nom donné à la femme simple,
naïve et d'une intelligence bornée : — ■ « Tu crois ça,
ta, pauvre cohanne ? » (Voy. bohaiitie).
Cocard, ou, si l'on veut Coquard, s, m., œuf.
— La femme : « Je ne trouve pas mon compte :
j'avions sept coquards, j'en ai mangé deux, ta deux,
et l'enfant un ; que sont devenus les deux autres ? »
— R. u Tu te trompes, femme, compte su' tes dats
(doigts). J'en ai mangé deux, ta deux, l'enfant un et
ma deux, v'ià-t'y pas les sept ? » Et la ménagère fut
convaincue.
Les enfants appellent aussi cocards la renoncule
des prés, sans doute à cause de la couleur de sa fleur,
qui est jaune d'œuf.
On désigne aussi sous le nom de coquard un vieux
coq.
BESCH. : coquard, terme dont on se sert avec les enfants
pour désigner un œuf à la coque. — Cocard, vieux
coq.
— 91 —
Cocaux, s. m. pi. On appelle ainsi les souliers
des petits enfants. C'est surtout à Pâques qu'on leur
achète des cocaux neufs. — Malheur à qui n'a pas un
vêtement neuf, le jour de Pâques, ne fût-ce qu'une
paire de cocaux ; les pies lui font caca sur la tête.
Coché, ée, adj., entaille, fendu. Babinc (lèvre)
cochée, bec de lièvre.
BEScn. : cocher, faire une entaille, une coche.
Coconnier, s, m., marchand d'œufs, se dit sur-
tout des marchands qui parcourent les campagnes
pourvus d'une hotte clissée, destinée à recevoir les
œufs qu'ils achètent dans les fermes. La profession
de coconnier tend à disparaître par suite de l'aisance
dont jouissent aujourd'hui nos paysans, et de la facilité
qui leur est donnée de venir eux-mêmes vendre à la
ville leurs produits de toute nature.
On appelle pipe de coconnier les petites pipes en terre
en usage chez les hommes de cette profession.
Plaisante aventure d'un coconnier. — Les hommes
de mon temps (et mieux encordes dames) ne voyaient
point, sans lui porter envie, le noble marquis L des
N***. Quoique m.irié à la plus jolie personne de
Rennes, qu'il avait enlevée, ce gentleman n'en était
pas moins resté le plus aimable des vauriens. Beau
joueur, fr.mc buveur, généreux et d'humeur joviale,
il était d'une grande popularité dans le canton de H...
qu'il habitait une partie de l'année.
Dans un de ses fréquents voyages à Rennes, il
— 92 —
rencontra un jour un vieux coco)inier chargé de sa
hotte bien garnie. — « Ah ! te voilà, père Durand ;
« tu parais bien fatigué, mon vieux, et pourtant tu
« as encore un bon bout de chemin à faire... Il me
« vient une idée... monte en croupe derrière moi, et
« tu arriveras plus dispos chez ta femme. » — « Oh !
« Monsieur le marquis, y pensez-vous, je n'oserais
« jamais... et puis mes œufs ? — « J'en réponds,
« vieux cocon ; ma jument est douce, nous chemine-
« rons tout tranquillement et nous arriverons sans
o accident, je te le promets. Ton refus me désoblige-
« rait, enteuds-tu ? Monte, te dis-je, sans plus de
« façons. » Il fallut se rendre, ef voilà le père Durand
et le marquis s'acheminant vers la ville.
Tout alla bien jusqu'à l'entrée de la rue St-Malo ;
mais ici le marquis pique sa bête 'et lui fait prendre
le trot. Ce fut alors, pour les habitants de ce faubourg
un spectacle des plus réjouissants. Les œufs cassés
tombaient en cascade dans le ruisseau, inondant le
dos du bonhomme et la croupe de la jument. On
n'oublia de longtemps cette plaisante aventure.
Il va sans dire que le marquis paya généreusement
le plaisir qu'il s'était donné.
Il mourut hydropique, ce qu'il ne pouvait com-
prendre, disait-il plaisan:ment, n'ayant de sa vie bu
une goutte d'eau.
NOR.M. : coconnier, va. sg.
Cocus, S. m. pi. Fleur de cocus, nom donné par
- 93 -
le peuple à la fleur jaune, à grappes, qui fleurit au
printemps (Primiila elaticn- des botanistes). C'est avec
cette fleur, qui doit peut-être son nom à sa couleur,
que les enfants font des ballottes (Voy. Ballotte). —
0 Mon p'tk papa, allons cueillir des cocus dans les
champs pour faire des ballottes ».
Cœur. Tenir en cœur y être rancunier. — o Jeanne
était une brave femme ; elle avait la tète près du
bonnet ; mais elle ne tenait pas en cœur. »
Cœuru, ue, adj., exprime une bonne ou une
mauvaise santé. Plus usité avec la négative. —
a Comment ça va-t-i, papa Durand ? o — « Pas
trop b'en ; depis quéque temps, je n'sais pas cœuru. »
— Pour le paysan, le cœur est le siège de toutes les
maladies. — Il dira en savourant un bon piot : a V'ià
du cidre cœuru (qui donne au cœur) ».
NORM. : cœuru, qui a du cœur. — Cidre cœuru.
Cofir, V. a., occire, tuer, écraser, éreinter. — « Une
voiture lui a passé sur le corps ; le pauvre homme
est coji. n — S'emploie aussi en parlant des choses,
mais comme adjectif : — « Son chapeau était coJi ».
SARTHE : cofir, écraser. — NOR>r. : co/ir, déformer, écr.i-
ser, bossuer.
CogeT, V. a., forcer, contraindre. — «La serrure a
été cogée ». — « On ne me cogéra pas à faire cela, si je
ne le veux ». — C'est le mot latin cogère.
KORM, : coger, entraîner, pousser, inciter.
— 94 —
Cogne, adj,, se dit d'une personne qui a le cou
de travers, penché sur une épaule : — « Vous le
reconnaîtrez facilement dans la foule : il est cô^ne. »
Cohue, s. f. On désigne sous ce nom le lieu
affecté à l'enfouissement des animaux morts. On
appelait encore ainsi, dans mon enfance, le petit che-
min situé derrière le Thabor, faisant suite à la ruelle
de la Palestine. On y encavait les chevaux, les chiens,
et les comédiens. On disait qu'une comédienne y
avait été inhumée avant la Révolution !!...
ACAD. : cûbiie, anciennement assemblée, halle, marché.
Cohué, s. m. Le cohiié est le paysan fin, madré,
rusé, et un p'til brin mauvais sujet : « Oh ! le mau-
vais sujet ! Oh ! le mauvais cohué qu'tu fais ! »
Cohuel ou Cohué, s. m., garçon mauvais sujet,
bavard, habitué de la cohue.
Cohuéler, v. n., cancanner, calomnier, ou tout
au moins médire de son prochain. — Le verbe
cohuch'r, s'applique aux deux sexes. — « Sa femme
passait une partie de son temps à cohucler avec ses
voisins ».
Coincer, v. a., syn. de battre, meurtrir, acculer
son adversaire dans un com. — ■ « Prends garde, j'te
vas coincer. » — « Il m'a provoqué ; mais je l'ai
coincé d'importance. »
Colînette, s. f. , grande collerette ou fraise qui
— 95 —
était fort à la mode aux XV>; et XYI^^ siècks. —
a Ma fraise empesée me pique les oreilles », dit
Girot dans le Pré-aux-Clercs. — Les massiers ou
bedeaux de notre métropole portent encore, dans les
grandes cérémonies, ces immenses fraises que nous
appelons colinettes.
BESCH. : coliiietle, bonnet que mettaient autrefois les
femmes en déshabillé.
Commandous, s. m. pi., pour maîtres ; du ver-
be commander. — Un domestique, qui aura reçu des
ordres coutradictoires dira : — « Il }• a b'en trop de
commandons par ié (ici), n
Comme tout, loc. adv., souvent employée à la
ville comme à la campagne, et qui répond à beaucoup,
grandement, qui, en un mot, est un superlatif. Ex. :
a J'ai bien dîné, j'avais faim comme tout. » — « J'ai
mal à la tête comme tout ». — « Ce que vous dites est
bête comme tout. »
Commercer (Se), v. pron. — « Dans cette mai-
son, on se commerce de tout, on y trouve de tout, il
n'v a point de non ».
Commérer, v. n., flâner, passer son temps avec
les commères. — « Je le plains, le pauvre homme ;
sa femme commère à longues journées et néglige son
ménage et ses enfants. »
BESCH. : commérer, fréquenter des commères ; agir ou
parler en commère.
-96-
Commode, adj. m. et f. Employé avec la néga-
tive, il signifie que la personne dont on parle n'est
pas d'humeur facile : — « Vous êtes un brave
homme, père Gaudiche, et votre femme aussi ; mais
v'n'êtes pas commodes l'un et l'autre. »
ACAD. : coiiunodc, d'un bon commerce. Pas coiniiiode,
sévère, exigeant, hautain.
Conduite, s. f. On dit à Rennes en parlant d'une
personne décédée : « on lui a fait, ou elle a eu une
ccnduite », lorsqu'elle a été accompagnée au cimetière
par tous les prêtres de la paroisse, avec chantres,
porte-croix, etc. C'est un honneur qui se paye et
peut d'ailleurs se payer très cher, car il n'est réservé
qu'au.x riches. Les pauvres diables ne sauraient y
prétendre. — - Un seul prêtre accompagnait le bon-
homme C..., à sa dernière demeure, « il n'avait pas
de conduite. » Aujourd'hui, comme jadis, car rien
n'est changé,
« Il en coûte à qui vous réclame,
« Médecins du corps et de l'âme ».
Cônette, s. f., temme flâneuse, qu'un rien dé-
tourne de sa besogne. « Julie est une bonne fille ;
mais quelle côiictte » !
Cônetter, v. n., flâner, s'arrêter en chemin. —
Ce verbe est moins usité que le substantif cônette.
CÔnille, s. f., pour corneille. — « Accourez, pies
et cou nies, venez tous chanter pour li. » (Vieille
chanson).
— 97 —
Consortaige, s. m. On désigne par ce nom,
dans le canton de Maure, un domaine partagé entre
plusieurs. (Vient de consorts).
Copail, s. m., ventre ou estomac. — «Cette fa-
mille aimait la mangeaille et ne songeait qu'à se
fourrer dans le copail. » — Ailleurs copct.
Copias, s. m. gros crachat. Une plus longue dé-
finition me semble superflue.
Copier ou Copir, v. n., cracher, expectorer. —
« Noutr' homme a un gros rhume, mais il com-
mence à copier, et ça va mieux. » — Nos ouvriers,
pour mieux teni' leux outils, copient dans leux mains.
Copie, s. f. Les paysans (et même le peuple de
nos villes,) appellent copies les exploits ou sommations
par huissier, o On dit qu'il n'a pas payé son terme, et
que son propriétaire lui a envoyé une copie. » — La
copie est une contrainte.
Coq-borgne, s. m., brutal qui frappe à tort et à
travers, comme un cog borgne. (Prononcez Co borgne).
Coq-su-d's œufs, locution populaire, équiva-
lant au proverbe : « Ça n'y fera non plus qu'un cau-
tère sur une jambe de bois. » — Exprime le doute
ou l'incrédulité sur l'efficacité d'un retnède, d'un trai-
tement.
Coques-de-saint-Laurent, s. f., petites clo-
ches ou h,\Lviûh-s produites sur la peau par la piqûre
d'un insecte invisible à l'œil nu, et dont j'ignore le
nom scientifique. C'est surtout à l'époque des mois-
sons que les paysans sont affligés de ces piqûres, qui
rappellent, mais de loin, le supplice du saint dont
elles portent ce nom.
Coquiner, Syn. de dcdiner (Voy. ce mot).
Corbelet, s. m., pièce de bois ou de pierre qui
soutient le manteau des cheminées dans les habitations
des campagnes. — (Terme de métier chez le char-
pentier ou le tailleur de pierres).
CENTRE. : corbelet, tablette de cheminée.
Core, adv., abrégé de encore par la suppression
de la première syllabe eti. — « Vas-tu core m'en-
nuyer ?» — « Te sens-tu coi-e malade ? — En Lor-
raine, cet adverbe est core plus abrégé ; la première
et la troisième syllabe sont supprimées : il ne reste
plus que CD. — « Vit-i ce ? — Fit co — Donne-le
mé (ou baille-le mé), si vit co. », jeu d'enfants qui
consiste à se passer vivement de main en main un
papier allumé. Celui dans la main duquel il s'éteint
donne un gage, et subit une pénitence.
XORM. : core.
Cornet, s. m,, partie supérieure de l'écritoire en
cuir, dans laquelle les écoliers de mon temps mettaient
leurs plumes. — Rabelais l'appelait galiniard, du
latin caJaiiius. — La partie inférieure contenait l'en-
- 99 -
cre. Il y a vingt ans pour le moins que cette espèce
d'écritoii'e a disparu. C'est donc pour mémoire seule-
ment que je Ta" '"appelée ici. Un cornet coûtait alors
six sous.
Cornière^ s. f., coin. — « Vous le trouverez
dans la corniîre du champ. » — Un mouchoir à qua-
tre coniiîirs. — Le mot est français avec une signifi-
cation différente.
CUN'TRE ; coniicrc, corne, coin. — Vieux Fr. : Coruii'ic,
coin et extrémité de quelque chose. Coincria, Conietiim.
La conticre de la maison. Corncria prati. (duc).
Corporaille, s. f., tripe, tripaille. — Les maî-
tres mangent les membres, les domestiques la corpo-
raille.
Cessons, s. m. pi., enveloppe du grain d'avoine,
de froment, ou de seigle. — Vient de cosse. — Les
cassons, mêlés au fumier, sont étendus comme engrais
dans les prairies. — Les cassons d'avoine servent à
faire des halVùres pour les petits enfants. (Voy. Bal-
lière). — A St-Malo, les cossoits sont des gapas : La
marée des gapas, à l'équinoxe d'automne. — Dans
quelques cantons, on les appelle gralnuix.
Cotine, s, f., nom donné à la noix dans le canton
de Maure.
Cotiuier, s. m., noyer, arbre qui produit la
cotine.
Cotir. v. a., briser, fêler. — « Le verre est brisé.
— 100 —
je l'ai entendu coiir.v — a Ce vase n'est peut-être pas
tout-à-fait brisé, mais il est coti. » — « CoUr une
noix. » — On dira par extension « Cet homme est
coti, B c.-à-d., qu'il est bien malade, qu'il n'a pas
longtemps à vivre. — Se dit aussi pour claquer : Un
charretier fait coiir son fouet.
ACAD., BESCH. : cotir, 1- V. a., meurtrir, aplatir, écraser.
Il est pop. et ne se dit qu'en parlant d^ fruits. Coti,
poire cofie. 2- v. n. Il se dit en Bretagne dans le sens
d'éclater psr l'effet de la chaleur. — cextre : cotir,
froisser, meurtrir, affaiblir. — norm. : Se cotir, se
pourrir (le bois). — Vieux Fr. : cclir, cogner, battre.
« coti ta teste au mur. » (Dt;c).
Cotissoire, s. f., nom donné par les enfants à
la fleur de la digitale qu'ils font cotir par la compres-
sion de l'air, en pressant avec l'index et le pouce de
chaque main les deux extrémités de celte fleur.
Cotry, s. m., nom donné par l'ouvrier maçon au
compagnon qui travaille vis-à-\às de lui à la construc-
tion d'un mur ou de tout autre ouvrage. — « J'avais
pour cotry le père Cachet. »
Couanne, s. f., crottin, fiente de cheval. — ail
allait sur les routes ramassant les conannes. » — C'est
avec la couanne qu'on nettoie les carafes et tous les
vases en verre ou en cristal.
Vieux Fr. : ccnav.e, fiente, escrémert. (dcc).
Coucher en retour, locution très-usitée dans
les pauvres ménages et les ménages pauvres. C'est
— lOI —
coucher dans un lit qui n'a pas été refait. — Les
femmes paresseuses font coucher leurs maris en retour
souvent pendant des semaines entières.
s.\RTHE : coucher en retour, m. sg.
Coudre, e, adj., se dit du linge, qui, sans être
encore sec n'est plus dégouttant. Le mot cru est plus
usité. (Voy. Cru).
Coue, s. f., pour queue. — Les chats auxquels on
ne coupe pas le bout de la couc ne vivent pas (préjugé
populaire). — Pour exprimer la certitude que la per-
sonne attendue viendra : « La coue de not' chat est
b'en venue. » — Coue se rapproche plus du Luin
cauda que le français queue.
NORM., SARTHE, CENTRE : COUC, m. Sg. — BESCH. : COUC
OU quoue, vieux mot venu de cauda, d'où quenc. Couette,
petite queue.
Couée, s. f. Les femmes du peuple, et particuliè-
rement les paysannes, apportent souvent des denrées
dans leurs tabliers relevés par les coins ; elles appellent
cela une couée. — Une mère à sa fille : « Va cher-
cher une couèe de choux, de navets, pour la chèvre. »
— Le tablier, dans ce cas, tient lieu de panier, et sa
contenance est assez bornée. — S'emploie aussi pour
exprimer une certaine quantité. — « Nous avons
cette année une bonne couèe de perdrix. »
Couette, s. f., lit de plumes. Vieux mot d'après
nos grammairiens. Pourquoi a-t-il vieilli, tandis que
le mot paillasse (lit de pétille) est resté neuf ? Conser-
vons donc la couette chez nous. — Montaigne l'a em-
ploj'é pour couverture : « et n'ont guère d'autre
couverte que d'une coile, et e' . bien sale. »
SARTiin : couette, m. ^g. — acad. : concile, m. sg, vieux.
BESCH. : couette, m. sg. Ce mot vieillit. — centre :
coiu'te, coille, lit de plumes. — Vieux Fr. : couette, coite,
conte, conste, conyte, bas lat. Cotlum, couette de paille, de
plume, etc (duc).
Couettes, s. f. pi., cordons ou lacets avec les-
quels nos paysans attachent leurs souliers sur le cou-
de-pied. Le nom de couettes s'applique surtout aux
lacets en filet de laine des souliers des femmes. Les
couettes en cuir des souliers d'hommes sont générale-
ment appelés ligneux ou coulisses. — On dit quelque-
fois couelter pour attacher ses couettes.
Couillé-de-Saint-Pierre, s. m. C'est l'outil
dont se servent les paysans pour aiguiser leurs faux
et leurs faucilles.
Couiner ou Couigner, v. n., imitatif du bruit
agaçant produit par les ferrures rouillées des portes
ou des fenêtres, ou encore par les chaussures neuves
dans un temps sec. — On met de l'huile aux gonds
des portes pour les empêcher de couigner. — « Il n'a
pas payé ses souliers : ils couigiieiit. » (Dicton popu-
laire).
NOK.vr. : coniucr, pleurer en criant. — centre : couiner,
grogner.
— 103 -
Coulvasser, v. n., plaisanter ironiquement,
cherclier à en faire accroire à quelqu'un. — « Il aimait
à coulvasser ».
Çoulvassier, s. m., farceur, mauvais plaisant.
Le substantif est plus usité que le verbe. — « Tu crais
que j'te crais, ta ? mauvais coiilvassicr ! ». — On
trouve dans Rabelais le mot talvassicr, que P. Lacroix
traduit par fanfaron.
Coup. — Faire les cent coups, locution très usitée.
Il en est de même de l'action. — « Ivrogne, querel-
leur, il bat sa femme et fait les cent coups dans la
maison ». — Et pour donner plus de force au récit, on
dit superlativement : a l\ ah\t les cent-clix-)icuf coups. »
— Etre aux cent coups, se dit à la ville et à la cam-
pagne d'une personne perplexe ou engagée dans une
mauvaise affaire. — Ex. : a On assure que la situa-
tion financière de X.., est compromise. Ses créan-
ciers sont aux cent coups. »
A-tout-coup., autre locution adverbiale qui revient
sans cesse dans la conversation chez nos paysans : —
« A tout coup, nout' mét'e, vous me crairez s'ous
v'icz (vous me croirez si vous voulez). » — « A tout
coup, c'est de d'mème (c'est ainsi). » — u A tout coup,
je ne peux pas vous le vendre à ce prix. »
Coupelle, s. f., sommet ou cime d'un arbre.
C'est le substantif coupean (cime d'une montagne),
féminisé par nos paysans et appliqué aux arbres. Le
mot cruche, qui a le même sens, est beaucoup plus
— 104 —
usité. Coupelle est français, avec une signification toute
différente.
XORM. : coiipeau, copeau, coiipet, cime, sommet. —
Vieux Fr. : coupcl, copa, sommet d'un arbre : « remonta
oudit arbre jusques au coupel d'icellui. » — Copa, coupct ,
sommet d'une montagne.
Couplée, s. f., réunion de langes ou de vieux
linges envoyés au blanchissage. Les mémoires tenus
en partie double par nos bonnes ménagères se termi-
nent invariablement ainsi : « Une couplée de guenilles » ;
les guenilles servant au gros nettoyage des effets mo-
biliers ou des parquets.
"SARTHH. : coupla', m. sg. Encouplerle linge. — norm. :
coiiplcc, linges attachés par couple ou en plus grand
nombre.
Courée, s. f., poumon des animaux de bouche-
rie. Avec la coiircc an veau, on fitit un bouillon préfé-
rable à tout autre, pour la guérison des rhumes, des
catarrhes, bronchites et affections de poitrine. — Oh !
le bouillon de courée !
s.\RTHi: : coiin'c, m. sg. — korm. : courèc, ensemble des
gros viscères. — \'ieux Fr. : corèe ou courée, intestins,
entrailles, boyaux, corala, œ, (duc).
Couroux-de-pochée, s. m., garçon meunier
qui a pour mission d'aller prendre dans les fermes les
sacs de blé qu'il apporte au moulin. — Jean-Farine
était un couroux-de-pochée actif et inteUigent, Les
chiens ennemis des couroux-de-pochée, annoncent leur
— 10) —
arrivée par leurs aboiements et rentrent dans leurs
niches.
Cours (Rivière au). La rivière est au cours lors-
qu'on la met à sec dans un bief ou bie^, c'est-à-dire,
entre deux écluses, pour certaines réparations recon-
nues nécessaires. — La Vilaine est tous les ans au
cours dans le bief de Saint-Hélier au moulin du Comte,
et cela dans la saison des chaleurs, au grand préju-
dice de la santé publique.
Cousin du Sacre. Voy. Sacre.
Cousser, v. a., courir, poursuivre. — « Coussc-
le, mon chien », terme de chasseur.
Coûtaige, s. m., du verbe coûter, coût, dépense,
entretien onéreux. — « Vous parlez d'augmenter
votre personnel, de faire tels changements, de pren-
dre telles dispositions ; y pensez-vous ? Ce ne sera
pas un petit coûtaige ! -n — Les gens de la ville disent
coùtage. — On dit aussi coûtageux ; mais ce mot est
moins usité.
NORM. : cot'ifage, dépense, frais, coi'itageiix. — centre :
coiitange, coùtuncc, prix. — Vieux fr. : couslage, constance,
coslage, de costcngia, constatigium, costangium. (duc).
Coutisse, S. f., mèche de fouet ; cordons ou
lanières de cuir, avec lesquels nos paj'sans attachent
leurs souliers, et qu'on appelle aussi ligneux (V. ce
mot). — « Son coutiau, percé au bout du manche,
— io6 —
était attaché par une coulisse ». — Au paj'S de Dol,
courgée.
Coutume, s. f. C'est le bureau de l'octroi. Ce
mot a vieilli.
Coutumier, s. m., employé de la couliintc. C'est
aujourd'hui le receveur du bureau de l'octroi.
NORM. : coiilcumc, taxe municipale. Coutcumier .
Couturier, s. m., tailleur de campagne. — « Les
cotdiirurs nous viennent lundi : tenez vos hannes
prêtes, les gars. » — Les couluricrs travaillent à la
journée, et, comme les couturières, vont de ferme
en ferme, et souvent fort loin de leur demeure.
BESCH. : couturier, qui fait métier de coudre, acad. :
m. sg. vieux. — Jusqu'au 16* siècle, les tailleurs s'appe-
laient couluricrs.
Couvent, s, m. Les femmes du peuple donnent
ce nom à leurs chaufferettes. Ces chaufferettes sont
des vases en terre, qui, la nuit, servent à un autre
usage. — Elles grillent leur pain ou cuisent leur
poisson au feu de leur couvent, alimenté de la braise
du foyer. — « Prenez donc garde, mère Saumonnet,
votre hareng brûle. « — « Y a pas d'dangcr, j'ai
l'œil dessus » — A Paris, les couvents se nornment
des gueux.
Couyaux, s. m. pi., S3'n. de chevrons, pièces de
bois qui supportent la toiture d'un bâtiment, et dont
les bouts se dirigent à l'extérieur.
— 107 —
BESCH. : coyau, pièce de charpente de la toiture. —
— CEKTRi£ : cosaii, m. sç;-
Couyé, Coyé, s. m., terme de mépris sous
lequel les mauvais gàs des villes désignent nos cam-
pagnard». — a Coyé de r'but, qui fait la galette avec
le c... » — Dans quelques localités, le mot coyc n'est
pas pris en mauvaise part : il est employé par le
paysan lui-même pour désigner l'homme de peine
employé aux travaux grossiers de la ferme ou des
champs.
NORM. : collier, villageois grossier.
Grand ou Ercrand, adj., las, fatigué.
Ce mot viendrait-il de l'allemand knvik, malade, souf-
frant ? Erkranteii, tomber malade.
Crâne, adj., m. et f., employé dans le sens de
bien ou mal portant. — « Je ne suis pas crdne au-
jourd'hui ; j'étais plus crdnc hier, n — N'est employé
que par des malades ou des convalescents. Se dit
aussi dans le sens de brave, fier, o Tu n'étais pas
crduc au feu. »
A CAD. : Faire le crâne.
Crasse, s. f., figure, visage. Ne s'emploie guère
que dans cette expression ; sauter à la crosse. — « Les
deux commères se prirent de bec et bientôt se saiilù-
reut à la crasse. », expression énergique et vraie, nos
faubouriennes prenant, en général, peu de souci de
la propreté de leur visage.
— io8 —
Faire une crasse a qn., user envers lui d'un mauvais
procédé ; lui foire une impolitesse, une vilenie. — « En
ne m'invitant pas à sa noce, mon cousin m'a fait une
crasse, que je n'oublierai point. »
Crémé, adj., pour crémeux. — Dans les temps
chauds, le lait est moins créiiie. — Nous disons aussi :
Le lait ne crème pas.
EEscii. : Lnil cn'iitc ou cvcmcux.
Créon, s. m., pour crayon. Nos écoliers disent
encore crcoji, comme au temps de Montaigne.
DKSCii. : cri'on, orthogr.nplie vicieuse pour crayon. —
NOR.M. : cri'on, crioii, mais n'en déplaise à Besch, elle
n'est pas si vicieuse qu'il le prétend, les premiers crayons
devaient être faits de craie d'où créons.
Crevaison, pron. qnervason. « Faire sa crevaison »■
— vilaine locution qui veut dire passer de vie à trépas,
mais qui n'est employée que par les gens les plus
grossiers de la ville ou des champs.
XORM., cr.NTRE : crevaison, m. sg.
Crin-Crin, s., m., c'est le nom populaire du
violon. « Pour un beau bal c'était un beau bal. Auguste
qui est musicien, avait apporté son crin-crin et Adol-
phe son galoiihet, (flageolet). »
Croc, s, m., trognon de poire ou de pomme. Ne
se dit qu'en parlant de ces deux fruits. Ainsi, on ne
dit pas un croc de chou, comme on dit un trognon
de chou ; mais nos gamins disent : « Donne-moi le
— 109 —
croc à moi qui t'ai prêté mon couteau. » (Sous-en-
tendu : pour peler la pomme ou la poire). — Devrait
peut-être s'écrire comme il se prononce croque.
Croc. — De croc cl de hanche, adv., expression
très usitée, pour exprimer la mauvaise tournure que
prend une affaire, les obstacles que rencontrent une
entreprise. — « Cela ne va pas tout seul, ça ne va que
de croc et de hanche », d'une façon boiteuse.
Crochetée, s. f., branclic de l'arbre ou rameau
garni de ses fruits et détaché du tronc. « Une crochetée
de cerises, de pommes ou"de poires ». — « Cueillez
quelques crochetées ; le fruit conservera plus longtemps
sa fraîcheur que s'il était tout-à-fait détaché de sa
branche n. — Dans le nord du département en dit
trochée.
Croissant, s. m., petite excroissance de peau,
ou filet de l'épiderme, qui se produit à la partie supé-
rieure des ongles, et plus particulièrement au pouce
et à l'index. — Coupez avec précaution les croissants
et gardez-vous de les déchirer : un panaris pourrait
être la conséquence de votre imprudence, — La
science l'appelle lunule ; l'Académie, envie.
Croix-de-Dieu, s. f., petit alphabet. — Dans
mon enfance, (je suis né en 1810), nous apprenions
à lire dans un petit alphabet qu'on appelait croix-de-
Dieu. Il devait son titre ^ une croix grecque qui pré-
cédait la lettre A, devenue ainsi la seconde lettre de
l'alphabet, car nous disions : Croix-de-Dicu, A, B,
C... — Je me souviens d'avoir été sévèrement puni,
pour avoir, par négligence, perdu ma Croix-dc-
'Dien .
Cet alphabet semble, comme son nom l'indique,
avoir été mis en usage dans toutes les écoles du
Royaume, et cela à une époque assez reculée, par
l'autorité ecclésiastique. Molière et La Fontaine l'ont
employé. — Voyez la comédie « Monsieur de Pour-
ceaugnac », acte 1, scène VII : « C'est un homme
qui sait sa médecine à fond, comme je sais ma croix
de par Dieu... » (Molière). — a Je n'ai jamais
appris que mu croix de par Dieu. » (Les Devineresses.
La Font.)
Cropet, s. m., petite crotte. On s'abstiendra, par
politesse, de prononcer ce n:ot dans la conversa-
tion.
NORM. : crcpii, excrément d'enfant.
Grouille, s. f., (masculin à Rennes) verrou d'une
porte. Ce mot semble emprunté au bas-breton kou-
roiil ou l'rotil.
Grouiller, v. a., fermer une porte au verrou. —
a Avant de vous mettre au lit, ayez soin de crouiller
les portes ». (V. dècroviUer, encroniïïer).
NORM. : cronilh'l, verrou. Crouiller. — Sarthh: crouiller.
— CENTRE : cronillel, cmuillou.x, verrou. — Vieux Fr. :
croil, verrou, corale. (uuc.)
Croulevé, adj., se dit du pain saisi au four, dont
la croûte est détachée de la mie. De croûte-lcvce on a
fait croulevé. — Le mot français est gtbichè. — Crou-
levé se dit aussi des enduits mal foits, qui, au dégel,
se détachent des murs.
Rab. : — Car il y ha plus de fruict que par aduen-
ture ne pensent ung taz de gros taluassiers tout crous-
teleue^. ». (Prologue du livre II). Rabelais l'emploie
ici pour galeux, couverts de pustules dont la peau se
soulève par écailles.
Croustin, s. m., vieux chapeau démodé ou qui
a perdu sa fraîcheur. — « Comment ! Madame ose-
rait porter ce croustin .' » — « La pauvre dame, jadis
si coquette dans l'opulence, est coiffée d'un croustin
qu'on ne ramasserait pas dans la rue. » — On pend
un vieux croustin dans les pois et dans les arbres frui-
tiers, pour en éloigner les oiseaux. — Ce mot sem-
ble venir de croustille, sorte d'agrément qu'on mettait
anciennement aux coiffures des femmes.
CrozîUe, s. f., coquille de poisson de mer que
nous appelons ricardeau. Nous donnons le même nom
à la petite coquille de mollusque ou coque, qu'on pêche
en abondance dans la baie du Mont-Saint-Michel. Jadis
les pèlerins ornaient leurs caperons ou pèlerines
de croiilles, comme en témoignent les vieilles gravures.
— On l'appelle aussi coquille de Saint-Jacques. On
sait que ce pèlerin fut péché vivant au fond de la
mer, les habits couverts de coquillages. — Rennes
possède, rue de Nantes, :22, une auberge ou petit
hôtel qui porte encore son vieux nom « la Croiille ».
— Au numéro 5 de la rue de Fougères existait une
antique maison ayant une croi^ille sculptée sur sa
façade ; elle a été abattue pour cause d'alignemem.
Le propriétaire actuel, M. Jobbé-Duval, en a cons-
truit une autre dans le style moyen âge et fort
coquette, où il a voulu perpétuer le nom primitif, en
fiiisant graver au-dessus de la porte d'entrée cette
inscription en langue bretonne ; « TY NEVEZ
CROGUEN ». (la nouvelle croiiUe).
Cru, ue,adj., humide. — « Cet appartement esicru
et rnalsain ». — Le linge que rapporte la blanchisseuse
es,x.crii, lorsqu'il n'est pas parfaitement sec. — Le mot
cru. n'est pas seulement de notre crû : il est employé,"
avec la même signification, dans d'autres provinces
et même en Lorraine.
Cruche, s. f., cime ou tète des arbres. V. Ecni-
chcter.
CENTRE : encnicber, placer dans un endroit élevé.
Crue, S. f., terme de tricoteuse ; maille du tricot
lorsque l'ouvrière l'augmente, soit en longueur, soit
en largeur. — La crue (on dit aussi recrue) se dit par
opposition aux apelisse'es qui tendent à diminuer le
tricot.
SAirniE : crue. m. sg.
Gruyère, s. f., terrain bas et humide. — « Cette
cniycre serait propre à la culture de l'osier, mais
pourrait être améliorée par un drainage ».
O'ti-ci, C'ti-là, pron. dcm., pour celui-ci, cdiii-
là. — « C'ti-ci est bon ; mais c'ti-là est mauvais ».
CENTRE, NORM. : c'ti-ci, c'Ii-Ià, m. sg.
Gul"branoux, s. m., épithète qu'on donnait
autrefois en signe de mépris aux tisserands de Rennes ;
cette profession, comme celle des tailleurs étant peu
prisée des autres ouvriers, et surtout des labou-
reurs.
Cul-terroux, s. des 2 genres. On désigne par ce
joli petit nom une personne qui a de la terre et des
propriétés au soleil. — «Jeanne serait à coup sûr une
bonne ménagère ; mais on lui préférera Marie-Anne,
parce que celle-ci est un cul-terroiix ».
NORM. : cti-tcrycHX, cii-tcnviix, m. sg. — Fille riche.
Curaude, s. f. On appelle de ce nom le dernier
tour de charrue pour Hùre le sillon. Le premier se
nomme h parraie. (V. ce mot.)
Curîau, s. m., choriste ou enfant de chœur,
qui répond les messes de nos prêtres, et qui reliche
à l'occasion le vin blanc contenu dans les burettes et
destiné au sacrifice. Au pluriel curiaux. — Ce mot
vient-il du latin curio, prêtre de la curie romaine ? ou
de curia, lieu où les Romains traitaient les affaires de
— 114 —
religion ? je penche à croire qu'il vient tout simple-
ment de curieux ou de ciirinl. Je demanderai à mon
curé ce qu'il en pense.
Dans les Côtes-du-Nord, on l'appelle vioignot, petit
moine. (V. ce mot).
NORM. : ctireau, enfant de chœur ; (petit curé). — duc :
Le mot bas lat. choralis signifie : i* chantre, clerc, prêtre
chantant au chœur ; 2' lin vieux franc. : corial, curinl,
ciireaii, plur. cuvcaux, enfants Je chœur : « les petits
enfants, c.-à-d. les petits curcaulx. » — C'est peut être
dans ces mots du vieux français qu'il faut chercher la
véritable étymologie du mot rennais curiuii.
Cutol, S. m., pour couteau. C'est le mot cullel,
employé au IX"^ siècle, légèrement modifié.
Cutter (Se), v. pron., se cacher. — «Je m'étais
si bien cutté, qu'on n'a pu me trouver ». Voy. Cache-
cnttè.
Cutte, exclani., du verbe cutter. Au jeu de cachc-
cuttè, quand les joueurs sont cachés, l'un d'eux crie
à celui qui doit les aller chercher (et qui s'appelle
le chat) : cutte ! — La jeune mère jouant avec son
enfant, et lui cachant le visage sur son sein, lui dit
aussi : « Cutte ! cutte I »
NORM. : cul, giit, m. sg. — sarthe : Fiiire cutte au jeu
de cache-cache.
Cyndard, s, m., cygne sauvage, qui, dans les
hivers rigoureux, s'abat quelquefois sur nos étangs.
115
Dabon, s. m., piccc grossièrement placée sur un
vêtement usé ou troué. — « Son paletot, comme son
pantalon, n'était que pièces et dahons. »
Dabonner, v. a., mettre pièce sur pièce pour
raccommoder un vêtement usé. Il est synonyme de
rapetasser. — Une femme avare ou sans amour-pro-
pre daboniic ses bardes d'une façon ridicule. Voy.
HaldaboH.
Dagre, adj., hargneux, d'un caractère aigre,
difficile. — a Comme vous êtes dagre ! » (\'itré,
Fougères).
Daguer, v, a., dénicher, trouver un objet caché.
— « Au lieu d'aller à l'école, il aimait mieux faire
l'école buissonnière, et Ji/^wr les nids des oiseaux. » —
« J'ai cru cet objet perdu, il n'était qu'égaré, j'ai fini
par le dagticr. » — Usité surtout à St-Malo.
Dalle, s. f., pierre creusée, placée à l'intérieur de
la cuisine, et dans laquelle on jette les eaux ménagè-
res. C'est l'évier, — « De mon lit je voyais le jour
— ii6 —
par lepertu's de la dalle, per pertustim daldalihus, »
comme disait la servante de mon curé, qui lui avait
donné dos leçons de latin.
NORM. : dalle, évier, canal pour l'écoulement des eaux
ménagères.
D'amain, adv. Voy. Amain. Nos paysans disent
plus volontiers « cet outil est d'amain (il est à ma
main). » — On ne dit pas : « C'est mon d'amain »,
mais : a c'est mon amain n, c.-à-d. je suis commo-
dément placé pour faire tel travail.
D'anet, adv. de temps. C'est le mot anct ; mais
d'anet ne s'emploie qu'avec la négation. Ainsi on dit :
« Il viendra ou ne viendra pas anet. » ; mais on ne
dira pas : « Il viendra d'anet. » — « Il ne viendra
pas d'anet », nous ne le verrons pas de la journée.
Danger. — Avoir danger, avoir dégoût, répu-
gnance d'une chose sale ou quelquefois d'un mets.
— « La vue d'une plaie me fait danger. » — Il y a
des personnes qui ne peuvent manger ni oignons, ni
poireaux, cela leur fait danger. ■ — Ce mot n'est em-
ployé, dit Littré, que dans quelques provinces, et il
cite la Bretagne.
D'annuit. Voir d'anet. On dit l'un et l'autre.
Darée, s. f., corruption de mare, flaque d'eau,
pissée d'un enfant, o Voyez quelle darée le petit a
fait sur le tablier de sa nourrice ! » — On dit aussi
mdrrée. (V. ce mot).
- 117 —
SARTHE : datée, m. 3g.
Dat, s. m., doigt. — o J'ai grand mal à un
dat ».
La première fai qu'o le j'coiicliis
Ové ses cinq dats su' la goule al' ni'bailliî
(Vieille chanson rennaise).
NORM. : di-it, doigt.
Dat, s. m., urine. (Mot employé en Normandie,
où on dit aussi daler pour uriner. — Vieux norm. :
estaty urine d'un malade). — Je dois la connaissance
de mot à mon ami le docteur D...., qui l'entend
souvent prononcer par les paysannes des environs de
Rennes auxquelles il est appelé à donner des soins.
— On juge de l'état sanitaire d'une personne à la
seule inspection de son dat. — Dat, datée doivent
avoir la même origine.
Vieux Fr. : duti', pissat, uriue.
Dayée (pron. dcyée), s. f., quantité de bouillie qui
peut tenir sur le doigt. Chez nous, les femmes du
peuple donnent la bouillie à leurs enfants sur l'index,
d'où est venu dayci\ (Voir Rayc^),
Dayot (pron. deillot), s. m., linge ou doigt de
gant qui enveloppe un doigt blessé. — Si vous vous
coupez le doigt, mettez un dayot pour préserver la
blessure du contact de l'air.
SARTHE : deyol, m. sg. — nor.m. : duilot, daillot
(Il mouillées), doigtier, enveloppe d'un doigt m.ilade.
Diillol.
Débérauder (Se), v. pron., se distraire. —
« Noutr' homme est allé au bourg pour se débérau-
der un p'tit. » — Ailleurs déheller. — On dit aussi d'un
malade qui a le délire : Il débéraude, mais mieux : il
héraude.
Débit, s. m., bruit, tapage. — « D'où vient ce
débit ?» — « Taisez-vous, enflmts, pas tant de
débit ». — u Mon Dieu ! quel débit pour un rien ! »
— On dit aussi mener du débit. — Personne d'un
grand débit, qui a le verbe haut, et la gaîté bruyante :
— (( Il la mettait en débit », en train, en gaîté.
Debord, s. m., diarrhée. — « Comment ça va,
père Fourel ?» — « Ça va trop bien, j'ai l'debord. »
— Debord, qui passe au-delà du bord. — On le
trouve dans les auteurs avec un sens dififérent :
Ni l'ébranler des vents impétueux.
Ni h débord de ce dieu tortueux
Q.ui tant de fois t'a couvert de son onde
(Du Bellay).
ACAD. : déhord, débordement. Il est vieux et ne se disait
qu'en parlant des humeurs : déhord de bile, débord
d'humeurs.
Débotter (Se), v. pron., c'est enlever la grosse
boue ou la neige qui s'attache à la chaussure. Voy.
se botter.
Débouliner, v. n., corruption du verbe ébouler.
Déboulinade, s. f., éboulement, écroulement.
— 119 —
— a Cette maison est tombée comme un château de
cartes : quelle dèbouliiiadc ! »
NORM. : débouler, partir, décamper. — centre : débou-
ler, détaler, quitter la place.
Débrider, v. n., manger avec avidité. — « Mais
voyez donc ce garçon, comme il débride ! » — C'est
presque le mot bribcr de Rabelais : « Si me voulez
mettre en œuvre, dit Panurge, ce sera basme de
me veoir briber. » (Pantagruel, chap. IX).
ACAD. : débrider, se dit fig. et fam. de certaines choses
qu'on fait avec précipitation. — besch. : débrider, man-
ger précipitamment et abondamment.
Décamper, v. n., lever le camp, déguerpir, se
sauver. — « L'a3-ant prise sur le fait, je lui ordonnai
de dccatnper au plus vite. »
ACAD. : décamper, se retirer précipitamment, s'enfuir à
la hâte. — Voir La Font.
Décarêmer (Se), v. pron. C'est le premier repas
gras après le carême. On se décarème le dimanche de
Pâques au matin.
SARTHE : m. sg. — BESCH. : se décarcmer, se dédomma-
ger de l'abstinence prescrite par le carême en mangeant
de la viande. — nor.vi. : se dèquèrêmcr .
Déclancher, v. a., révéler, dénoncer. — « Je
vais tout dcclaiicber à Madame ». — Un accusé, un
témoin, pressés de faire des aveux, finissent par tout
décJaticJier, en disant toute la vérité.
— liO —
D'écrasé, s. f., très usité dans le sens de en
grande quantité, à tout casser, V. Ecrase.
Décrouiller, v. a., ôter la crouille (ou verrou)
d'une porte.
Déculer, v, a., expulser, faire sortir violemment
une personne. Syn. àt faire décamper. — Par oppo-
sition à acculer.
NORM. : décider, v. n. lever le siège, s'en aller.
Dedans. Etre dedans, c'est un commencement
d'ivresse. — a II n'était pas ce qu'on peut dire saoïd,
mais il était dedans. » — Etre chaud de baire, être
dedans sont synonymes. — a Le père Denis, devenu
vieux, n'avait plus la tête solide : dès qu'il avait bu
cinq à six pots, il était dedans. » Son compagnon de
bouteille, moins solide, disait qu'il ne pouvait sucer
une pomme sans être dedans.
Mettre dedans s'emploie dans le sens de tromper :
« J'ai cru acheter un bon cheval, j'ai été mis dedans
par mon vendeur. »
BESCH. : Etre dedans, pop., être pris de vin.
BESCH. : Mettre qn dedans, l'abuser, le tromper.
Défalner ou Défêner, v. a., rendre à quelqu'un
la chance qui l'a fui. — « Je n'ai encore rien vendu
aujourd'hui », dira un marchand à un acheteur,
« je vous vends à bon marché, vous allez peut-être
me dèfaîner. » — Un joueur a une longue déveine,
la chance lui revient, il est dé/aîné. — Voir Faîner.
— 121 —
Dèfouir, v, a., antonyme de enfouir. — « Il
faudra cette semaine dèfouir nos pataches (patates,
pommes de terre) ». — S. Briac, Plerguer et envi-
rons.
SARTHE, NORM. : défoiiif, m. sg. — BESCH. : dèfouir, m.
sg. vieux et inusité. — Vieux Fr. : — Deffoitiv (Roman
de Renan), (duc).
Défoutrailler, v. a., presque grossier, mais si
usité, si populaire, que j'ai dû lui donner l'hospita-
lité. Il signifie brouiller, détruire une besogne mal
faite, et, par extension, remettre à sa place par de
vertes paroles, une personne qui vous a offensé. —
0 Je l'ai joliment défoiiiraiJU ».
Défunter, v. n,, mourir, trépasser. Du substantif
défunt, nous avons fait défunter. — « Comment va
le malade ? — Il est, ou il a défunte cette nait. d
Dégêner (Se), v. pron., se débarrasser de tout
ce qui gêne ; aller au cabinet. — « Où est-il, votre
homme, mère Fanchon ? — Il est au bout du
jardin à s'dcgéner, j'crais b'en. » — Un autre dira :
« à servir son maître ».
BESCH. : Se dêgéner, être dégéné, ne pas se gêner.
Dégobillure, s. f., évacuation provenant de
vomissements. Vient du verbe di'gobilltr. Se dit sur-
tout des déjections du chien et du chat. — Le mot
n'est guère plus propre que la chose. — Nos ivro-
gnes (car-nous en avons, Dieu merci! ) appellent cela
« un renard ». Piquer un renard (vomir).
Dègoter, v. a., pour débouter. — « l'crayait
m'teni, mais il a été b'en dcç^oté ».
BESCH. : Dcgûter, chasser d'un poste, l'emporter. Fam.
et badin., dégotcr, l'emporter sur. (Voltaire) — norm. :
dègolter, supplanter ; désappointer.
Dégraiser, v. a., blesser, offenser involontaire-
ment une personne. — « Peste, comme vous êtes
susceptible et facile à dégraiser .' » — « En vous disant
cela, je ne croyais pas vous dégraiser ». — Semble
venir de disgracier.
Dàgramatiser, v. a. C'est le verbe dégrader
considérablement allongé. — Les terrasses de nos
escaliers sont toutes dégramatisées par les branches des
fagots logés dans les mansardes. Pour obvier à cet
inconvénient, les propriétaires exigent que les fagots
soient sciés par le milieu ; mais on peut voir que les
locataires, en général, tiennent peu de compte de ces
prescriptions.
Déhanner (Se), v. pron., ôter ses culottes, ou
plutôt ses hanncs, son pantalon. — Employé comme
verbe actif, au figuré, dans le sens de mettre à nu,
dire publiquement à quelqu'un ce qu'on pense de sa
personne, de sa conduite, lui infliger une correction
morale. — « Ah 1 je vous réponds qu'il a été bien
dêhaiiné. » — Ah ! comme le procureur général les
a bien déhannés devant la cour. Quelle fessée ! »
- 123 —
Déheuder, v. a., action d'enlever les heuâes ou
entraves mises aux pieds des animaux. Voy. heiides.
Déjouer (Se), v. pron., se hâter, se dépêcher
pour achever un ouvrage pressé. — a Déjouez-vous,
ou mieux : Defous les gars, ilest basse houre (tard), et
la plée (pluie) va chéer (choir, tomber). »
Déjun, s. m., abrégé de déjeuner. — Léger repas
de nos paysans avant de commencer leur journée. —
Il est souvent accompagné de l'adjectif petit. — Petit
déjun, en attendant le déjun, qui est le repas solide du
matin.
Déléché, ée, adj., pimpant, propret dans sa mise,
— K Comme te voilà déléchée aujourd'hui !» — Le
chat se lèche pour faire sa toilette ; de là, sans doute,
délécher. Les peintres disent qu'un tableau fait avec
soin est léché.
NORM. : se délécher, se lécher les lèvres avec plaisir.
Demaisé ou Demaishui, adv., désormais, à
présent. Voy. adiiiesé, adnteshui.
Démarcher, v. n., se dit des enfonts qui com-
mencent à marcher, ou plutôt qui essaient leurs pre-
miers pas. — • a Votre petit commence à démarcher ;
dans un mois, il marchera. »
Se démarcher, v. pron., exprime une démarche,
une allure prétentieuse, affectée. — « Voyez donc cet
important personnage, comme Use démarche. » — On
le trouve dans Rabelais.
— 124 —
BESCH. : démarcher, commencer à marcher, inusité. —
CENTRE : démarcher, commencer à marcher. — norm. :
Se démarcher, marcher d'une façon prétentieuse.
Dématiner (Se), v. pron., se lever de grand
matin. Il est quelquefois verbe actif : « J'ai été déma-
liiié par le chant du coq, par le bruit des voitures ou
des tambours. »
Démêler, v. a., battre la pâte, pétrir. — Dc'iiic-
1er la galette, c'est battre la pâte, la préparer pour la
cuisson.
NORM. : démêler, mélanger en détrempant, en délayant.
Demeurance, s. f., pour demeure. Vieux mot
français encore en usage chez nous, comme dans le
Berry. — Partie de la ferme servant à l'habitation.
Au sud se trouve la demeurance, au nord les autres
bâtiments ou communs.
Vieux Fr. : Demourance. (duc).
Demion, s. m., nom donné par les femmes du
peuple à une mesure, d'une contenance non détermi-
née d'eau-de-vie ou de café. — « Elle aimait b'en à
boire son deuiion, la pauv' défunte. » — « On voit
que la femme Pichet a bu son demion, qu'elle est
grise. »
BEScn. : mion, nom qu'on donnait dans qqs pays à uns
petite mesure de vin . — norm. : demion, moitié d'une
chopine. — duc : demionus viiti (12 pintes). Demion
(15° siècle), demi-setier.
— 125 —
Dempée, Dempez, adv. de lieu, de mesure ;
depuis, à partir de: « Dc'/H/v't' le bourgdiqucàla ville
(jusqu'à la ville) i' y a cinq bons quarts de lieue. » —
« On ne l'a pas revu dempée son départ pour l'armée. »
— 0 Je les ai laissés dempée là, et m'en revins. »
On dir également dempée ou depe'e.
Dénâcher, v. a., détacher, délier de leurs ndches
les bœufs et vaches attachés dans les écuries ou les
étables. V. ndche. » — Une vache s'est dèiidchée, et en
a blessé plusieurs autres. «
Dents de vache, s. f. pi., gros clous qui garnis-
sent l'extrémité delà semelle des souliers de nos pay-
sans. Ils sont, en effet, assez semblables aux dents des
vaches. Dans quelques communes on les appelle bécbe-
rons. (Voy. ce mot).
Denuit, s. m. On appelle deiniit tout ce qui cons-
titue la toilette des dames pendant la nuit, manteau,
camisole, bonnet, etc. — « Je suis allée passer deux
jours chez Madame X... ; je n'avais emporté que mon
denuit ».
SARTHE : De nuit, m. sg.
Dépassé, ée, adj. Se dit d'une personne qui
dépasse la mesure ordinaire, soit dans la joie, soit
dans la tristesse : — a Ml'*^ G. ne peut contenu- sa
joie de son prochain mariage : elle en est dépassée. »
Depée. V. Dempée. »
— 126 —
Dépioter ou Dépiauter, (de pian, peau), v. a.,
écorcher, enlever la peau. La cuisinière dépiote le liè-
vre. Le chasseur déploie le renard.
NORM. : dépiaiitrer , dèpiaucer. — centre : dépiauter.
Dépletter, v. n., débiter de mauvais propos,
médire de qqn, parler longuement. — « Si vous
aviez entendu B..., parler de son voisin comme
il déplettail sur son compte I »
Dépocher (Se), v. pron.. C'est tomber à
l'improviste dans une maison où l'on vient demander
l'hospitalité. — « Comment trouvez-vous cette famille,
qui vient se dépocher chez nous, sans s'inquiéter si on
peut la recevoir ! » — Dèpochcr est français pour
tirer d'une poche ; mais il est très énergique dans le
sens que nous lui donnons à la ville et à la campa-
gne. On trouve dans Rabelais déposcher, ôter de sa
poche.
Dépoisonner, v. a., employé au propre et au
figuré. — « Le pays a été dèpoisonné de ce mauvais
sujet.» — 0 Mon jardin a été dêpoisoimé des mauvaises
herbes dont il était rempli. »
Déquesser, v. a., déchirer, mettre en pièces. —
« Dans la gabarre, tous ses effets ont été déqticssés. »
— « Q.uoique riche, Lucas ne portait que des vête-
ments déquessês. » — Voy. Equesser.
Dèrâcler, v. a., dénicher, farfouiller, trouver des
vieilleries depuis longtemps mises au rebut. — « Où
— 127 —
diable avez-vous clèrddd cela ? qu'en voulez-vous
faire ?» — Syn : dèratuchonner.
Dérader, v. n., dégringoler, partir. Emprunté au
terme de marine dérader, sortir de la rade. Plus usité
à St-Malo qu'à Rennes.
Déranger (Se), v. pron. Ce n'est pas précisé-
ment s'enivrer, mais c'est boire un peu plus que de
raison. — « Vincent est un bon ouvrier ; mais il se
dérange quelquefois. »
ACAD. : Se déranger, mener une conduite déréglée.
Dèratuchonner, v. a., syn. de dérader.
Déris, s. ni., crue extraordinaire des eaux, débor-
dement des rivières. — Vous souvenez-vous du
déiis de la Vilaine en 1877 ? Le chemin de halage
fut inondé depuis Cesson jusqu'au moulin du Comte,
et les prairies de la Prévalage et de Sainte-Foix furent
complètement submergées. Le faubourg de Brest en
souffrit particulièrement.
NORM. : dcri, en dérive, de n'viis. Déris, ce que laissent
les eaux débordées. — centre : déribc, drihe, dérive,
débordement, inondation ; l'eau sort des rives.
Derouine, s. f., boutique de remouleur ambu-
lant. « Un chien traînait sa derouine. »
Derre, s. m., et prép., abrégé de derrière. Se dit
en parlant des personnes et des choses. — Une mère
à son enfant : « Si tu ne finis pas, je vas te lever le
(krre (te donner le fouet sur le denùère). » — « Il est
(/d'77<; la maison. » — « Je cheminions derre lu. n
Le peuple dit, en parlant d'un industriel qui s'est
ruiné dans une entreprise hasardeuse ou d'un simple
particulier qui a mal géré sa fortune : « c'est sa faute,
il a voulu péter plus haut que le derre. »
Dérubler, v. n., dégringoler. (St-Malo et le
littoral de la Rance).
Descors (pron. Vs), excl. Dans les jeux de
course des enfants, à cache-cache, aux barres, à gros-
jean, à la tape-coupée, le joueur qui se sent fatigué
s'écrie descors ! c'est-à-dire, réclame un répit qui lui
permet de prendre haleine et de se reposer.
Desenherqueler, v. a., mot barbare recueilli à
Vern, près de Rennes ; et qui signifie briser, démon-
ter. — Ex. : « Ma charte est désenherqueUe, réenher-
quelei-la ma don. » (Ma charrette est démontée ;
remontez-la moi donc).
NORM. : dcherneiguer, déhaniacher. Henieis, harnais.
Détouiller, v. a., débrouiller. Detouilîer un échc-
veau, sa chevelure. (Dinan) — Dètoiiillouère, s. f.,
peigne à démêler. (Dinan)
Détourber, V. a., \touv détourner. — «Lesouvriers,
sont très pressés, il ne faut pas les détourber, » les
déranger de leur ouvrage. — « Comment voulez-
vous qu'il finisse ? Vous le dètourhei sans cesse. » —
— 129 —
Montaigne a dit : « La licence des jugements est un
grand détoiirbier . (Liv. 2, cli. 26). « L'avare n'a pas
de plus grand détourhicr que lui-même. » — D.'.ns
une lettre à Catherine de Médicis, Ramus se plaint
que les auditeurs qui assistent à ses cours sont inces-
samment « troublés et dêtourbls par les cris des cro-
cheteurs et des lavandières ».
Paix est trésor qu'on ne doit trop louer :
Je hé guerre ; point ne la doy priser ;
Destourhé m'a longtemp soit tort ou droit.
De veoir France que mon cueur amer doit.
(Charles d'Orléans.)
NORM. : détotirher, déranger, troubler, gétier. Détonrbier,
dètourhement, dérangement. — Vieux Fr. : deslonrber,
détourner, empêcher, troubler. Distubare, detiirharc.
detourher chez les Picards, (duc).
Deuil, pron. dciil, s. m., employé chez nos
paysans pour peine, chagrin. — « Son homme, ses
entants lui font b'en du deid ; La pauv'e femme a
eu b'en du deul dans sa vie. »
BRACHET : deuil, anc. deul. — norm. : denl, deu, cha-
grin.
Devallée, s. f., chemin très-accidenté, ravin,
revers d'une montagne. — « Je l'ai vu se sauver, il
allait comme le diable dans une devalUe ( il courait à
toutes jambes, à perdre haleine). »
Devaller, v. a., descendre ou simplement suivre
9
— I30 —
son chemin. — On l'a vu devaUer la grand'route il
n'y a qu'un moment. » (Est français).
ACAD. ET BESCH. : dévaler, dévalUr, vieux et pop. —
BESCH. : dèvallèe, descente, vieux et inus. — norm. :
dévalée {Tpron. d'valée), dévaler. — centre : dévaler, déva-
ler. — Vieux Fr. : dévaler, descendre (Chron. des D. de
Norm.)
Devantière, s. f., tablier, vêtement des femmes
du peuple. Quelques-unes sont avec piécette, ou
pièce de même étoffe que la devantière qui garnit la
poitrine depuis la gorge jusqu'à la ceinture, ou seu-
lement jusqu'aux seins. Nos femmes de chambre et
les bonnes d'enfants portent une devantière en calicot
blanc, sans piécette, lorsqu'elles servent à table.
Le devantier, d'où vient devantière, était une tuni-
que d'amazone. — Dans Rabelais, devauteau.
Montaigne l'a aussi féminisé dans cette phrase :
0 ceux qui parmi les jeux refusent les opinions sérieu-
ses font comme celui qui craint d'adorer la statue
d'un saint, si elle est sans devantière. » (Liv. 3, ch. 5.)
On trouve dans un manuscrit normand du 16«
siècle : devantel, devanteatdx.
ACAD. ET BESCH. : devaittier : tablier de femme du peu-
ple. Devantière, sorte de jupe. — norm. : devanteaii,
devantiau, devantel. — centre : devantier ou devantière,
tablier. — Vieux Fr. : devantail, devantel, devantier,
tablier.
Dévarinade, s. f., partie de plaisir, partie fine.
— « Nous finies dimanche une dévarinade com-
plète ».
Dans quelques localités à St-Malo par exemple, ce
mot a une autre signification, il exprime une débâcle
une déconfiture. — « La maison X,.. est en pleine
dévarînade. »
Dévelimer, v. a., assainir, éclaircir. Se dit sur-
tout en* parlant d'un temps humide ou pluvieux. —
a II gèle ; tant mieux, cela va dcveJhiicr le temps. »
Dévélir, v. n., dépérir, fondre, maigrir. —
« Cette personne dcvélit sans cause connue ; c'est
mauvais signe, »
Devinaille, s. f., énigme, jeu de mots. De devi-
ner. — Vieux français, mais toujours très usité. —
Les enfants disent : « Devine, devinaille, qui pond
sur la paille ? ». ■ — Les mêm.es propos suivants, pro-
noncés rapidement, sont autant de devinailles : Beurre
a-t-il os ? Rat a-t-il aile ? — • T). Habit s'cotid-t-i', grain
s'moiid-t-i' ? R. Habit s'coiid ; grain s'moiid. — Latte
olée fait trou. — Porc tua, sel n'y mit, ver s'y mit, son
lard gâta.
NORM. : dcvinade, énigme, devinaille. — centre : devi-
nouer, énigme. Devinouère, devinette.
Devinée, s. f., pensée bizarre, saugrenue, action
contre le bon sens. — « Comment ! vous croyez
cela, vous avez fait ceci ; quelle devinée, oh ! la belle
devinée ! »
Dévirer, v. a., dévider, dévisser, détourner dans
un temps opposé à celui dans lequel l'objet avait été
tourné.
Dévotion, s. f., fantaisie, volonté, caprice. —
« Je ferai cela, c'est ma dévotion, c'est mon idée. ».
— a A votre dévotion, vous direz votre chapelet »,
c.-à-d. faites ce qui vous plaira, agissez à votre
guise.
Diable. « Lr diable hat sa fcnnnc et marie sa fille. »
disent nos paysans quand il fait en même temps de la
pluie et du soleil.
Dig-dog (ou digue-dogue). Jouer à dig-dog, jeu
des petits garçons de Rennes. Il consiste à pousser
adroitement, avec le ponce, dans un petit trou prati-
qué en terre et qu'on nomme le pot, soit des billes
ou canettes, soit des boutons ou encore des noyaux
de pêche ou d'abricot qui forment l'enjeu. Le joueur
doit, pour gagner, lancer en deux coups l'objet dans
le pot. Le premier coup se nomme dig ; le second
dog.
Digoiser (Se), v. pron. ; il ne faut pas le con-
fondre avec le verbe dègoiser ou se dègoiser. — Se
digoiser veut dire : prendre son temps, ses aises, pour
faire une besogne ou une course. — « Voyez comme
cette fille se digoise, on voit qu'elle n'est pas pressée. »
Dimaine, s. m. Nos paysans disent toujours
diiiiaiiie pour dimanche. — « Tu voudrais ça tout de
suite, eh b'en, tu repasseras diniaiiie. » — Nos an-
cêtres disaient didcmane.
Vieux Fr. : dhnainc, dimoingc, duc.
Dimanche-crêpier, s. m. C'est le premier
dimanche de carême, que l'Eglise appelle Quadragé-
sime. Il est ainsi nommé, parce que les bons bour-
geois de Rennes font des crêpes ce jour-là. C'est la
queue des fêtes du carnaval. Le dimanche gras est le
dimanche qui précède le carême.
SARTHE : âhnnnche-crèpier, m. sg.
Dinaille, s. f., pom- dinette, petit repas des enfants
entre eux. — a Nous ferons la dinaille dans les
champs. »
Dîot) s. et ad]"., abrégé de idiot, dont il est un
diminutif. Le diot n'est pas précisément un idiot,
mais une personne simple, crédule, facile à tromper.
— « On t'a dit cela, et tu le crois ? es-tu diote, ma
pauvre enfant ! »
Dioter, v. a., ahurir, étourdir, hébêter. Le verbe
est moins usité que le substantif diot.
NORM. : diot, diotise, bêtise, simplicité.
Dîque, prép., pour jusque. — « Cette année, il a
gelé diqu'à Pâques. » — « Cela ne viendra pas diqti'à
nous. » — « J'irai le conduire dique là. » — « Le
voyez-vous dique là-lin ? (Le voyez- vous jusque là-
bas, bien loin ?)
— 134 —
Dodiner, v. a., pour dodeliner ; balancement,
mouvement nerveux de la tête.
Et le troupeau sacré des errantes Tyades
Alloycnt criant, hurlant, dodinant et crollant
Remy Belleau. (16^ S.)
BESCH. : dodiner. !• bercer ; 2- fam. caresser, réchauffer.
Se d-, se dorloter, norm. : dodiner de la tête ; qqf. dor-
loter. — CENTRE : dodiner, remuer doucement, bercer.
Dolet, ette, adj., triste, souffreteux. — « Qu'a
donc votre entant, bonne femme, il est xout failli ? ».
— J'n'en sais r'en ; depés queuques jours il est tout
dolet ; je le conduirai demain au médecin. » — Ce
mot semble avoir une origine latine, dolor.
Vieux Fr. : dolerous, souffrant, infirme. : (duc.)
Dommage. Beau douunage ! exclamation ; affir-
mation d'un ùit, équivalant à certainement, pourquoi
pas, en doutez-vous ? — « Irez-vous à la fête ? —
Beau dommage ! »
Donaison, s. f., donation. Le mari et la femme
se sont fait donaisoii.
Donnée, s. f., extrême bon marché d'une chose.
Se dit surtout en parlant des denrées alimentaires. —
« Le beurre, les légumes étaient aujourd'hui à la don-
née. » — « Prenez ceci, ma p'tite bonne, c'est une
donnée, c'est pour rien. »
Douanne, s. f, surnom donné à une femme
simple, crédule. A peu près syn. de hohanne.
- 135 —
Douannîot, s. m., homme simple, peu intelli-
gent, colin-tampon. La femme accepte volontiers l'épi-
thète de douanne ; mais l'homme se regimbe au sur-
nom de douanniot.
Douget, ette, adj., douillet, sensible au moindre
mal. — x( Voyez comme il est
Dougettement, adv., doucement. — o Allez -y,
mais dougettement. »
CENTRE : dogue, dognot, dengiiet, dougnet, donillet, déli-
cat. — NORM. : douitlard, douloureux, sensible à la
douleur.
Draillée, s. f,, fouaillée, fessée. — Semble venir
de draille, cordage à l'usage des marins. On sait qu'il
y a peu de temps encore, on infligeait aux gens de
mer coupables d'une faute grave, la peine du fouet,
instrument de supplice fait de corde et appelé garcette.
De draille à draillce il n'y a que l'épaisseur d'une
corde. — « Cette marâtre est, pour ses enfants, moins
chiche de drailléeslque de pain. » — « Pour une draillée
le cul n'en chet point. » (Prov.).
Drapeau, pron. drapiau, s. m., se dit de tous les
langes à l'usage des petits enfants. — « La pauvre
femme n'avait pas même un drapiau pour son
enfant. »
BESCH. : drapeaux, langes. — norm. : drapet, drapel,
drapeau, drapiau, linge. — centre : drapeau, drapiau,
lange. — duc. : drapcllus, drapel, drappel, drappaille,
drapeau, chiffon, morceau de linge ou de drap,
- 136-
Drenne, s. f., redite, radotage. — Ne vous
arrive-t-il pas quelque fois de fredonner un air qui
vous poursuit sans cesse ? vous chantez alors toujours
la même drciine.
Drenner, v. a., c'est revenir sans cesse sur le
même sujtt. — « Vous nous l'avez dit cent fois,
vous dreiiin^ toujours le même air, vous radotez, »
SARTHE : draine, s. m., m. sg. drainer. — norm. :
drainer, parler lentement (de traîner). Draisner, parler
beaucoup et inconsidérément.
Dresser, v. a., repasser le linge.
Dresseuse, s. f., repasseuse, femme qui repasse
le linge.
ACAD. : dresser du linge, le repasser.
Dressoir, s. m., étagère sur laquelle les pa3-sans
mettent la vaisselle, les plats, assiettes et autres or-
ceux. (V. Orccul).
ACAD. : dressoir, m. sg. — centre : dressoir, m. sg. —
NORM. : dressaix, drécheux, dressoiter, étagère. — duc. :
dressorinui, drcssaderiuni, drcssatoriinn.
Dret, adj., droit. — « V'ià de bon cidre, c'est
drel au goût. »
Drettement, adv., justement. — « Allons est-
ce ainsi que la chose s'est passée ?» — « Drette-
ment ».
BESCH. : droiteinent, équitablement. — norm. : dreit,
adv., droit. Dreitemeiif, directement. — centre : drète-
meiit, drcttiinciit, précisément.
- 137 -
Drue, s. f., Jouer A la drue, c'est le jeu du bou-
chon. La drue, comme le bouchon, est en liège ou
en bois. Dans quelques localités on l'appelle dnigouère
dans d'autres pitan ou galoche.
Les joueurs disent bitle en drue lorsque le palet du
joueur ou l'une des pièces de monnaie touche au
bouchon renversé ; — tout à la drue, lorsque l'enjeu
est plus rapproché du bouchon que du palet du
joueur ; — tout à la galoche, lorsque l'enjeu touche
le bouchon renversé ; dans ce cas, le coup est nul,
et la galoche relevée est surchargée d'un enjeu par
chaque joueur.
Drue vient de druger.
Druger, v. n., jouer, s'amuser (normand). —
« Assez drugè, je suis lassé. » — « Je ne drugerai
pluso ta. » — « Quand le chat n'est pas là, la souris
druge. »
NORM. : druger, agiter, remuer, troubler ; s'amuser bru-
yamment.
Dur, adv., fort. Se brûler dur, frapper dur. Le
paysan prononce duss.
NORM. ET CENTRE : dur, m. sg.
£3
Ebarziller, v. a., briser en éclats. — « Un coup
donné dans cette glace Ta toute c'bariiUée. »
£baubé, ée, adj. Nous disons élmuhé \->our ébaiibi.
« Cette nouvelle l'a tellement surpris qu'il en est resté
tout cbaiihê. »
Ebezillé, ée, adj. A peu près syn. de ébaubê.-
Si vos 3'eux expriment l'égarement, la surprise que
vous cause un événement inattendu, on dira que
vous êtes ébe^iUê. — Ce mot s'emploie aussi dans le
sens de blessé, écorché, écrasé : « Je m'sais êbe:^iUé un
dat ». (Je me suis blessé, écorché un doigt).
Eblusser (S'), v. pron., se développer, grandir,
prospérer. — « Eh bien, père Simon, comment va
la p'tite fitmille ! — Mais ça s'ébhisse tout douce-
ment. »
Eboguer, v. a., ôter de la bogue. — On êbogue
les châtaignes, comme on ccliaUe des noix, comme
— 139 —
on ecosse des pois. Les deux premiers mots devraient
être français...., puisqu'ils sont rennais.
Eboudiner, v. a., éventrer, faire sortir les
boyaux. (Norm).
Ebrai, s. m., cri. — « Il a jeté son éhrai. » (Saint-
Malo). '
NORM. : chrai, cri aigu et fort. S'cbraire, s'éhrayer, pousser
des cris aigus et forts.
Ebriver (S'), v. pron., se précipiter, s'élancer.
— « Son chien s'est chrîvé sur moi. » Voy. Ahriver.
Ebrosser, v. a., ou hrancheter, affranchir une
branche d'arbre de ses feuilles.
BESCH. : ébroHsser, effeuiller un arbre. — norm. :
ébrousser, m. sg.
Ecabouir, v. a., écraser, aplatir. — Un couvreur
est tombé du toit ; on l'a relevé tout ècahoui. — Ra-
belais a dit escarhouilh'r, (bouleverser). On trouve
aussi dans Pantagruel, cette phrase : « De mode
elle lui cobbit toute la tête (c.-à-d. lui écrasa).
Le bibliophile Lacroix traduit ce verbe cobbir par
briser, nos verbes ecabouir, égacher, sont plus expres-
sifs, plus énergiques, et rendent mieux l'idée d'une
tête aplatie, en marmelade.
NORM, : ccacher, écraser.
Ecale, adj. m. et f. Se dit d'une personne chê-
— 140 —
tive, maladive, impropre au travail. — « On ne peut
rien tirer de cet écale. »
Echalle, s. f., brou des noix, pour écaîe.
Echaller, v. a., pour écakr, ôter le brou des
noix. Dans Rab. chalhr : « qui là auprès challoyent
des noix ». (Garg. chap. 25).
ACAD. : écale, ècalcr. — sarthe : echalle, echaller. —
CENTRE : échale, écaler, échaler.
Echassé, ée, adj., terme de couturière. — Une
boutonnière est échassée quand elle est déchirée ; un
vêtement déchiré près de la couture est èchassé.
Echaubouiller (S'), v. pron., se mettre en nage,
en sueur par une course ou un ouvrage pénible. —
a Tu vas courir en plein soleil, mon enfant, comme
te voilà èchaiihouiUè. » — Ce mot semble avoir la
même origine que e'chaubouhire, petite rougeur de la
peau pendant les chaleurs. — On trouve dans Rab.
eschaiibouillure (ampoule) ; couillon eschaubouilU (Pant.
ch. 28).
NORM. : S' echaubouiller, s'exténuer de chaleur et de fati-
gue. Etym. bouillir de chaleur.
Echauderie, s. f., ce mot a pris naissance dans
une cuisine. — « Fanchon vous allez faire telle
chose. — Oui, madame, quand j'aurai fini mon
echauderie. » Elle veut dire : de laver ma vaisselle.
ACAD. ; échauder, laver à l'eau très chaude.
— 141 —
Echiver, v. a., kSiner sur l'ctofte dans la confec-
tion d'un habit, d'une robe, d'un vêtement quelcon-
que. — Echivé est sj'nonyme de étriqué.
Eclosé, s. m. C'est le dernier éclos d'une couvée.
Il suit péniblement ses aînés dans les pàtis ou
dans les mares. Dans le Maine on l'appelle êlocu.
dans la Mayenne, le hoisé ou le hoiseau. — Par exten-
sion, on appelle aussi èdosé le dernier né des enfants.
— Vo}'. Chs-cid.
NORM. : cclocu, culot, dernier oiseau d'une couvée.
Ecoquailler (S'), v. pron., chanter à tue-tête,
à gorge déployée comme fait le coq. — « Jeanne était
gaie comme pinson ; à peine avait-elle les yeux ou-
verts qu'on l'entendait s' ecoquailler en se mettant à la
besogne. »
Ecoquer, v. a., pour écosser, extraire de leur
cosse les fèves ou les pois. — Ecoquer, c'est aussi
fêler ou briser les bords d'un verre, d'une tasse,
enlever une esquille d'un meuble plaqué. — « Cette
bonne est si peu soigneuse, que nous n'aurons plus
bientôt que des assiettes écoquées. »
Ecot. Paille d'e'cot, grosse paille qui reste sur le
sol après l'épi coupé et qui sert de litière. En Norm.
Eteau .
Ecrase, s. f. , grande quantité, abondance. —
« Avez-vous des pommes cette année ? — Il y
— 142 —
en a une écrase, ou : « Nous en avons, mais moins
que l'année dernière, ce n'est pas une écrase. » —
Ce mot équivaut à celte locution populaire, emplo-
yée aujourd'hui, à tout casser, à bois rompre » ; cela
veut dire que les arbres ploient sous le poids de leurs
fruits.
NORM. : écrase, abondance excessive. A crase, à tout
rompre.
Ecrucheter, v. a., écrêter, couper la tête des
arbres, et particulièrement des chênes, des ormeaux,
pour les empêcher de s'étendre en hauteur, et en
faire ainsi des arbres d'émonde, ou, comme le disait
un mien ami, des pères à fngots. On dit de ces arbres
qu'ils sont déshonorés. — Le mot français est ététer.
— « I a d's'épéceillards dans la hâe, faut-y l's'écrti-
cheter ou b'en les dérincer ? (Traduction : « Il y a des
épicéas dans la haie, faut-il leur couper la tête, ou
les déraciner ?» — Voy. Cruche.
Ecumette, s. f., pour écumoire, instrument de
cuisine.
Efifalasé, ée, adj., essoufflé. — « J'ai couru de
toutes mes forces, et vous me voyez tout effalasé. »
— Voy. AffaJasê.
EfiPeuiller les choux, dicton populaire. On
dit d'un garçon qui a épousé une fille cadette alors
qu'il aurait pu épouser l'aînée, qu'il a effeuillé les
choux. D'où vient ce dicton ? Il est vrai que l'espèce
— 145 -
de choux destinée à hi nourriture des bestiaux s'effeuille
en commençant par le bas de la plante ; mais d'un
autre côté, ces feuilles sont les premières venues, par-
tant les aînées. Les savants, sur cette grave question,
peurent se donner carrière.
Egaçe, s. f., laps de temps de courte durée. —
« Je l'ai attendu une ègace. » — « Après avoir
attendu une ègace, j'ai dû décamper ».
Egâcher, v. a., écraser, réduire en marmelade,
« Le fruit pressé dans les corbeilles est arrivé tout
ègâchè à sa destination. »
Eg'ailler, v. a., étendre, disperser, diviser, répar-
tir. — Egailler du linge dans le séchoir ; des fruits
dans le fruitier ou sur le plancher ; des sommes
d'argent entre des co-partageants. etc. — « Egaillons,
les gars, voici les bleus », disaient les chouans (1794).
— Racine : egail, expression du droit féodal, pour
désigner l'opération par laquelle les vassaux répartis-
saient entre eux le paiement de la rente qui était
toujours due solidairement par eux au seigneur. Delà
égailler, évailhr pour étendre.
Egailleur, s. m. ; c'est la personne qui a pour
mission d'égailler. — Nos paysans appellent égailloux
les répartiteurs, les citoyens désignés par l'autorité pour
coopérer à la fixation et à la répartition des impôts
dans la commune.
— 144 —
N'ORM. : égailler, éparpiller, développer. — sarthe :
égailler.
Egaloches, s. f. pL, échasses composées de deux
bâtons, au bas desquels sont fixés, à 30 ou 40 centi-
mètres du bout, des espèces d'étriers en cuir ou en
bois. Les enfants du peuple s'amusent ainsi à imiter,
mais de très loin, les habitants des Landes.
Egosiller, v. a., égorger, couper le col. — A la
campagne on n'est jamais embarrassé pour recevoir
un ami : on égosille un poulet ou un canard, s'il le
faut. — « A force de crier, il s'est égosillé, » c'est-
à-dire : il s'est fatigué, irrité, déchiré le gosier. —
« L'évêque de Beauvais à la bataille de Bouvines,
amena de sa main plusieurs des ennemis à raison et
les donnait au premier gentilhomme qu'il trouvait à
égosiller ou prendre prisonnier. » (Mont.)
BEscH. : égosiller, égorger, tuer. Peu usité dans ce seus.
— .A.CAD. et BESCH. : s'égosiller en criant.
Egoussant, ante, adj. — Pas cgoiissant, iï un cii-
ractère difficile, point commode. — « La bourgeoise
est b'en avenante, mais l'bourgeois n'^st^^s égoiissant. »
• — Ne s'emploie qu'avec la négative. — Rab. esgous-
st'r (tirer de la gousse).
Egrainiaux, s. m. pi., fruits qui tombent d'eux-
mêmes et naturellement de l'arbre après maturité. Se
dit surtout des châtaignes, des noix, mais particuliè-
rement des châtaignes, qui, comme égraitiiaux, sont
- 145 —
d'autant plus recherchées qu'elles son. mûres les pre-
mières.
Egrémiller, v. a., réduire en miettes, égrener.
— Voy. GréwiUes.
CENTRE : egrémiller, m. sg. — norm. : grciiiir, écraser.
Egrugeoir, s. m., confesseur, débrouilleur des
cas de conscience ; instrument à dent de fer pour
extraire la graine du lin avant le rouissage, d'où
vient la signification sus énoncée.
Elige, s. f., produit delà vente du petit marchand
au détail. Sa recette est son e'iige ou ses éliges. Le plu-
riel est plus usité que le singulier. — Nos paysans
emploient aussi le mot éliges dans le sens d'écono-
mies : « L'année a été b'en dure ; j'n'avons pas pu
faire d'éliges. »
Eliger, v. a., amasser, récolter. Le petit mar-
chand, le regrattier élige peu ou point selon que la
vente est bonne ou mauvaise. — « Je n'ai encore
rien éligé aujourd'hui. » — Eliger de la besogne, tailler
de la besogne. — Eliger, faire des économies.
Elocher, v. a., purger la terre des loches, limas
ou limaces. C'est de grand matin ou le soir à la
tombée de la nuit, qu'il faut éîochcr son jardin.
s.\RTHE : élocher, m. sg.
Elosser ou Elocer, v. a., détacher, en l'arra-
chant, une branche d'un arbre ou d'une plante. —
10
— 146 —
oCe chêne a été classé par la foudre.» — Pour boutu-
rer avec succès certaines plantes, il faut les élosser et
non les couper. — Semble venir de èlocher, ébranler,
vieux mot.
BESCH. : clocher, secouer un arbre, une plante, comme
si on voulait l'arracher. — norm. : élosser, ébranler,
secouer, clocher. — Lâcher, secouer un arbre pour faire
tomber les fruits.
Emballes (Faire ses), c'est faire des embarras,
des fanfaronnades. — « Mais voyez donc ce person-
nage, comme il fait des emballes ! » — On dit d'un
hâbleur que c'est un faiseur d'emballés.
Embarrassée, adj. f., se dit, sur les confins
nord-ouest du départeinent d'Ille-et- Vilaine, en par-
lant d'une femme enceinte. Il va sans dire que cet
adjectif pris dans ce sens n'est pas des deux genres.
Embas, s. m., rez-de-chaussée. — « Sa chaumière
se composait d'un eiiibas et d'un grenier, » — « J'ha-
bitais l'eiiibas, et mon oncle le premier étage. » —
Embas se dit surtout des habitations des faubourgs ou
des maisons de village.
BESCH. : emhciSj mot inus. que plusieurs auteurs du 17°
siècle employaient pour en bas. Perrault : descendre en
emhiis.
Embesogner, v. a., occuper, donner de la beso-
gne, du travail. — a II trouvait le moyen à' enibesogner
les ouvriers pendant la mauvaise saison. » — Montai-
gne a dit : « Les choses présentes m' emhesogneut assez. »
— 147 —
— Dans Rabelais : eynhesoigncr . — Toujours très usité
chez nous.
BESCH. : emhcsogiier, ni. sg. — acad. : embesogiic, occupé.
Fam. ; le verbe inusité. — Vieux Fr. : emhesoingney,
mettre en besogne, faire travailler, (duc).
Embonnir (S'), v. pron., s'amender, se boni-
fier, devenir meilleur. — Le cidre en vidange aigrit,
loin de s'emhonnir.
Embouillonner (S'), v. pron., se crotter, se
mettre dans la boue. — « Je me suis eiiiboidUoiiné
dans la rote (dans le sentier). » — Emboiiillarder,
enduire, barbouiller de boue, (peu usité).
Embouson, s. m., faiseur d'embarras. — « Quel
enihûusoii vous faites ! »
Emeiller, v. a., et s'émeiller, v. pron.,
étonner ; s'étonner. — « Un rien l'émeillc », l'embar-
rasse. — « J'en suis tout éineillc, » émerveillé. —
Anciennement s'csmaycr.
Mais, je vous prie, mon sauf-conduict ayons
Et de cela plus ne nous csmayons.
Cl. Marot.
Ne sait que faire moult s'esmaie
A donc Issengrins (le loup) fort s'esmaie.
Le Roman de Renart.
NORM. : émeillé, adj., (orne), qui est en émoi, inquiet.
CENTRE : s'émeier, s'éméjer être en peine, avoir de l'in-
quiétude.
— 148 —
Emrcessé, ée, adj., qui a entendu la messe. Se
dit surtout d'une femme qui a fait ses relevailles ;
« elle revient cimnessée. »
BESCH. : eiiimessc, qui a entendu la messe.
Emmi, prcp., parmi, mêlé à... — « Il y a cette
année beaucoup d'ivraie et de mauvaises plantes
eiiimi le froment. » — (Vieux). — o Jeter ses richesses
emmy la rivière. » (Mont. liv. i, ch. 38).
BESCH. : cmmi, et en mi, dans les anciens auteurs [in
medio). S'est dit pour au milieu. N'est plus usité que
parmi le peuple dans cette locution emmi la place. —
NORM. : emmi, m. sg. — Vieux Fr. : .i moitié, à demi,
parmi, entre, (duc). — centre : emmi, pron. an-mi,
m. sg.
Emmulonner, v. a., mettre en mulon la paille,
le foin, etc. — Voy. Miilon, amulonner.
Emorcher, v. a., battre, hacher, couper malpro-
prement. — « Son gars, en revenant delà foire, a été
attaqué par des bandits qui l'ont émorché. » — « Ceci
n'est pas coupé net, c'est èmorchè. » — Semble
venir de amorce.
NORM. : cmochcr, broyer, écraser.
Emouvillant, ante, adj., remuant, vif, pétulant.
— « V'ki une garçaille ben portante, car elle est b'en
éniouviUaute ».
Empaffer (S') v. pron., s'endormir. — o En
vous attendant, je me suis empaffé. » — « Il est
— 149 —
empafé, ne le réveillons pas. » — « Après son repas,
il s'cmpaffc. »
Empan, s. m , espace compris entre l'extrémité du
pouce et celle du médium dans leur plus graiid écart.
Cete ancienne mesure française encore en usage dans
le peuple, était de 9 pouces 2 lignes ; elle est au-
jourd'hui de 6 pouces (ou de 16 h. 20 centimètres
approximativement.)
TRÉv. : empan, distance ou mesure de longueur, qui se
fait par l'extension de la main, depuis le pouce étendu
d'un côté jusqu'à l'extrémité du petit doigt opposé. Un
empan fait trois quarts de pied. Deux empans font un
pied et demi. — besch. : empan, l'espace compris entre
l'extrémité du pouce et celle du petit doigt dans leur
plus grand écart. — acad. : empan., m. sg. — centre :
empane, s. f. , m. sg.
Empas, s. m., pour empois, colle d'amidon. Nos
paysans disent d'une étoffe qui n'a pas encore été
portée, qui est dans son neuf et n'a pas perdu son
lustre, qu'elle est dans Veiupas du marchand.
Empietter, v. a., c'est embrasser la personne à
qui on vient d'offrir une fleur ou un bouquet. —
« Permettez-moi, mademoiselle, de l'eiiipiettcr. » —
S'emploie à la ville et aux champs.
Empommer (S'), v. pron. — Se dit des vaches
qui s'étouffent en avalant une pomme entière qui
leur reste dans le gosier.
NORM. : S'emponnner, m. sg.
— 150 —
Encaler, v. a., enjamber, passer la jambe par-
dessus un obstacle. — On encale une barrière, un
échalier.
Encôner, v. a., donner des coups de corne, —
« Nout' vache, en coquinant d'ia tête, a encôné nout'
berbis (brebis). »
Enconteur, adv., auprès, à la rencontre. Semble
venir de l'expression anglaise encoitnter telle qu'elle
se prononce en anglais où la terminaison er se pro-
nonce eiir. On trouvera à la suite du mot ergancer
un exemple d'application de l'adv. encontreur.
ACAD. : A rencontre, contre. — centre : A l'encontre,
à la rencontre.
Encrouiller, v. a., enfermer, percher, accro-
cher, suspendre volontairement ou accidentellement,
mais le plus souvent dans ce dernier cas. — « Mon
volant est encrouilîê dans le lilas. » — a J'ai encrouilU
l'enfant dans la maison pour l'empêcher de sortir. »
— Vient de crouiUe, verrou.
Enfertassé, ée, adj., affairé, embarrassé, qui va,
vient et se donne beaucoup de mouvement, souvent
pour peu de besogne. — a Voyez cette pauvre fille,
comme elle est enfertassée ! » On trouve dans Mon-
taigne infrasquer, de l'italien infrascare. (Liv. 2.
chap. 12).
Enfilée, s. f., longue distance. — a Dites-moi,
brave homme, suis-je encore loin du village de... ?
- 151 —
— Dam ! vous avez encore une bonne enfilée,
comme qui dirait une bonne lieue (pron. Uyeue) ».
Voy. afilce.
Enfiler, v. a., employé pour jeter, lancer. —
« Un méchant enfant m'a cnfiU une pierre à la tête. »
— « Enple, enfile » (jette jette). — Employé auss^
comme verbe pron. S'enfiler, se jeter sur. « Comme
il passait, le chien de la ferme s'est enfiU sur lui ».
V. Affiler.
Enfroiduré, ée, pron. enferduré), adj., qui
éprouve le frisson, qui grelotte, qui est tout transi.
Il est aussi synonyme d'enfiévré. — « Je ne me sens
pas b'en, je sais tout enferduré. »
NORM. : enfroiduré, refroidi, frileux, qui grelotte.
Engueuser, v. a., tromper. — Engueusoux,
adj. m., trompeur. — « Ne v's y fiez pas, c'est un
engueusoux de monde (qui trompe les gens). »
BHSCH. : engueuser, tromper, séduire. — noRiM. ; engi-
gnier, tromper. Engueuser, duper.
Enheuder, v. a., mettre des entraves aux pieds
des animaux, pour gêner leur marche et les empêcher
de passer sur la propriété du voisin. Voy. heudes.
BESCH. : enheuder, entraver les animaux. — norm. :
enheudé, fixé par des heudes, liens pour empêtrer (Valo-
gnes.J S'enheuder, s'embarrasser, s'empêtrer.
Entendre haut, locution très-populaire qui est
synonyme de être sourd. On dit poliment, en parlant
— 152 —
d'une personne affligée de cette infirmité, qu'elle
entend haut.
NORM, : entendre haut, m. sg. — besch. : entendre dur,
clair.
Enton, s. m., (de cute), jeune pommier greffé. —
.« Son champ était planté de jeunes entons de la plus
belle venue » .
Entreprendre, v. a., est souvent employé dans
le sens de : poursuivre ou être poursuivi en justice.
— « Il a été pris chassant sans permis, on dit qu'il va
être entrepris ».
Envasir, v. n., engraisser, prendre du corps.
Peu usité.
Epais, adj. ou adv. exprime une très grande
quantité, ou, avec la négative, une très-petite. —
« On n'a jamais vu aussi épais de fruits que cette
année. » — « Les bons maris ne sont pas épais. » —
Epais, adj., signifie lourd, pesant, au physique ou
au moral. « Epais de corps, léger d'esprit. »
Epancer, v. n., choisir le bon sentier, le bon
chemin pour éviter la boue : — « Ah ! mon enfant,
comme te voilà fait ! tu n'as donc pas épancè ! »
Epaule rennaise. Voici une locution bien
locale, que nous devons sans doute à une spirituelle
étrangère. Elle exprime le dédain, le mépris. La
femme, qui dans le monde, vous fait Vépaule rennaise,
— 153 —
ne vous tourne pas précisément le dos, mais autant
vaut. C'est à peine si vous la voyez de profil, elle se
tient de façon à ne pas vous voir et à ne pas être vue
en face. — « Madame X... avait pour voisine Ma-
dame Z... au bal du préfet, on a remarqué qu'elles
se sont fait tout le temps l'épaule rennaise. »
Epénîller, v. a., faire de la. pénilk. (V. ce mot),
faire de la peluche, carder de la laine.
Epénillé, ée, part, passé de épéniUer, mais plus
usité que le verbe. Une robe, un vêtement sont épé-
nillés, quand ils sont en loques, frangés. — S'ap-
plique à la personne elle-même : « La pauvre fille
est tout èpcnilUc, » c'est-à-dire, en guenilles.
Epiauter, v. a., terme dont se servent égale-
ment les bouchers et les cuisinières ; dépouiller un
animal de sa peau, écorcher. V. Dépioter, dépiauter.
NORM. : epiauter, cpiaiitrer, m. sg.
Epigocher, v. a., arracher, gratter avec les
ongles les petites croûtes d'un bouton, au fur et à
mesure qu'elles reviennent. — S'èpigoclier. — a Com-
ment voulez-vous que ce bobo guérisse ? l'enfant
s'épigochexovi']0\.\xs ».
Epille, s. f., épingle. — a Ces nous, le maître
se banne par dessus la tête et se boutonne o d^s'èpiîîes, »
c.-à-d., la femme est maîtresse au logis.
Epléter, v. a., (Jpièter dans quelques localités),
— 1)4 —
c'est aller vite en besogne. — « Jeanne est une
fameuse travaillante ; et comme elle épUte... comme
elle en abat ! (de l'ouvrage). »
NORM. : épléter, v. n., expédier vite un travail. — cen-
tre : épléter, abonder, avancer, être avantageux. C'est
éplétant, se dit d'un ouvrage que l'on fait vite ou d'une
chose qui foisonne. — Vieux Fr. : esphiter, marcher, se
hâter, travailler, réussir. Explettum, corvée (duc).
Epocanté, ée, adj., infirme, impotent. — « Com-
ment employer ce pauvre diable ? Il est tout épocanté. »
— C'est une variante d'hypothéqué : « il est mal hy-
pothéqué. »
Epuceter, v. a., pour èpucer ; chercher, tuer ses
puces ou celles des autres. — « La bonne femme èpii-
cetait à longues journées son chat et son chien. »
\ORM. : cpucher, m. sg. — centre : Epuceter, m. sg.
Equerbiton, s. des 2 genres, enfant chétif, ma-
lingre. — Il y a des femmes qui, pour apitoyer les
passants, se tiennent aux portes des églises avec leurs
équerhitons.
Equesser, v. a., déchirer, écorcher, mettre en
lambeaux. — « Le petit vaurien rentrait toujours avec
une veste équessée. » — « Equesser la grenouille », jeu
populaire. Deux jouteurs se faisant face tiennent par
le milieu un solide bâton. Les autres jouteurs, divisés
en deux bandes, tirent chacun de son côté celui qui
tient le bâton. Le parti qui cède du terrain est le
parti vaincu. — Dans la nomenclature des jeux aux-
— 155 —
quels se livrait Gargantua enfant, on trouve : « escor-
cher le regnard », ce qui doit êire le même jeu que
celui que je viens d'expliquer. — Voy. Déqiiesser.
Ercrand, adj., fatigué. — Voy. Grand .
Ergancer, v. n., se livrer à un travail forcé. —
Viendrait-il du latin ergastiihiiii, prison ou maison de
travail forcé où les esclaves étaient renfermés pour y
subir une peine, ou encore du grec ergon, ouvrage ?
— Un ouvrier des environs de Dol avait reçu l'ordre
de rejoindre ses camarades pour leur donner un coup
de main dans un travail auquel ils étaient employés
auprès d'un certain hangar. Contrarié de se voir
ainsi forcé de faire une besogne qui n'était pas de son
goût, il disait : « Faut aller falloir que j'augions
ergancer o l'sautres à l'enconteur du hangar. »
(Voy, Eiiconteur).
Erhumer (S'), v. pron. ; ce n'est pas tousser,
mais (comment dirai-je ?) toussoter pour se débarras-
ser des mucosités qui tapissent les parois de la gorge.
— On s'erhume quelquefois pour avertir de sa pré-
sence une personne qu'on ne veut pas surprendre, ou
pour l'engager à se tenir sur ses gardes en mettant
fin à des propos compromettants. — « Je m'crhtmai;
il me comprit et se tut. »
Erocher, v. a., c'est extraire du blé, de l'avoine,
etc., le gravier ou le sable. Cette opération se fait
avec la main ou avec le van. — Si vous voulez man-
- 156-
ger de bonne galette, faites en sorte que le blé noir
soit bien frotté et surtout bien éroché. (Voy. Frotter).
Erusser, v. a., arracher les feuilles d'une branche
en faisant glisser la main le long de cette branche.
Semble venir du vieux mot erracher, arracher. —
Erusser signifie aussi gratter. « Ces draps ne vous érus-
seront pas la peau, la toile en est fine ; » ou glisser :
« Cette anguille vous crusse de la main. » — Il est
employé aussi comme verbe neutre : erusser ou glisser
sur la terre grasse, faire une glissade involontaire.
SARTHE, CENTRE, êrusscr, m. sg. — NORM. : erusser
effeuiller une branche à pleine main.
Espérer, v. a. et n., souvent employé pour
attendre. — Vous demandez à une femme de cham-
bre si Madame est visible, elle vous répondra : « Je
vais m'en assurer : Si Monsieur veut bien espérer ».
NORM. : espérer, m. sg. — besch. : espérer, empIo3'é
quelquefois dans le sens d'attendre (M°" de Sévigné). —
CENTRE : espérer, attendre.
Esquintant, ante, adj., du verbe esquinter.
Esquinter, v. a., écliiner, fatiguer, briser. — « Il
s'esquinte tous les jours à la chasse, et il esquinte aussi
ses chiens et ses chevaux.» — Se dit aussi par exten-
sion d'un objet quelconque : « Mon chapeau, ma voi-
ture sont esquintés » (râpés, fatigués, usés).
NORM. : esquaiiiter, tuer, mettre en pièces. S'csijuahilcr,
se fatiguer, s'exténuer. — centre : esqtiinler, battre à
outrance, assommer, éreinter.
— IS7 —
Essarder, v.' a., terme de blanchisseuse. Il est
français dans le sens de nettoyer un lieu humide.
Nous lui donnons plus d'extension. Chez nous il
signifie éponger, tordre le linge, de façon à en
extraire la première eau. La repasseuse essarde le
linge, de façon à ne lui laisser qu'un peu d'humidité
avant de Is passer au fer chaud. — « Février remplit
les fossés, Mars les essarde (Proverbe).
SARTHE : essarder le linge. — besch. : essarder, éponger
le pont d'un navire.
Esséver, v. a., dessécher, éponger, épuiser. —
« Cette prairie basse est un ancien étang essévé. » —
« L'eau du puits est mauvaise ; il a sans doute besoin
d'être essévé et nettoyé. » — Vient du vieux mot éve
eau.
Estance, s. f., point de tricot, ou le tricot lui-
même.
Estouma, s. m. Estomac, mais nos paysans
appellent aussi estmmia, par pudeur sans doute, les
seins, la gorge des femmes. — « Il chercha à me
mettre la main dans Vesloiima, mais j'ie r'poussis. »
— « V'ià une fille qu'a un bel a/OHWrt. »
Esvertein, s. m., épileptique atteint du mal de
St-Avcrtin ; de là èvertUier. (Voy. ce mot).
Vieux Fr. : esvertin, vertige, épilepsie. Adversatiis
(duc).
- 158 -
Etanchet, s. m., pièce d'eau de peu d'étendue,
qui est plus qu'un vivier, mais qui n'est pas un étang.
— « Les femmes allaient laver à l'ètanchet du Bois-
Hamon » (Dol).
CENTRE : étanchat, petit étang. — Vieux Fr. : estanche,
vivier, réservoir à poisson : « estanches ou carpières à
garder et nourrir poissons. » Estanchia (duc).
Etaupîner, v. n. et a., faire la chasse aux taupes,
étendre la taupinière sur le sol. Ce verbe est surtout
employé dans les baux ruraux : o Le preneur aura
soin d'écheniller, d'élaiipiner. etc. » — « Etaupiner
une prairie. »
BESCH. : élaupiner, étendre la terre soulevée par les tau-
pes. Etaiipinier, taupinier. Etaupinage. — norm. : etau-
piner, détruire les taupinières.
Etoupas, s. m., brèche ou passage pratiqué dans
un talus, dans une haie : — a V'ià un étoupas ;
passons-y. d
Etréper, v. a., pour écobuer, couper les bruyè-
res, tondre la lande.
BESCH. : étreper, extirper, arracher (les mauvaises her-
bes)'. Elrépage. — Vieux Fr. : estréper, déraciner, dé-
truire, ravager, stirparc. Estrepamentum, estrépement,
dégât, ravage, (duc). — trév. : estréper, ce mot, qui est
hors d'usage, s'est dit autrefois pour extirper.
Etulé, ée, adj., c'est évidemment l'adjectif f7/o/t;,
chétif, mince, qui pousse en hauteur sans prendre du
corps. — « Voyez cette grande personne dépourvue
— 159 —
de hanches, cette perche, comme elle est étuUe. » —
S'applique aussi aux arbres, aux plantes : s'ils sont
étiilcs, il faut les rabattre, c'est-à-dire, couper la
tige.
Eustache, s. m., petit couteau. — « Prète-moi
ton eustache. d
ACAD., BESCH. : eustiuhe, sorte de couteau grossier. —
NORM. : ustache.
Evailler, v. a., étendre. Evailler le linge, c'est le
mettre à sécher : Evailler le blé sur l'aire, le fumier
sur les terres. V. égailler.
SARTHE : égailler le linge.
Eve, s. f., vieux mot français, si usité dans nos
campagnes que j'ai dû lui donner place dans ce
recueil. — « Jeanne, allez chercher une rangeottée
d'à'e (un seau d'eau). » — « Jeanne, mettez de Vive
à chauffer. » — « Il chet de V'eve (Il pleut). » — Eve
se trouve dans le dictionnaire de l'Académie et dans
celui de Larousse ; mais Littré l'a oublié. On le
rencontre dans un poème du XII*^ siècle. (Le cou-
ronnement de Looys) : « Passer par force les èves de
Gironde ».
DUC. : ève, cuve, eive, eiua. — trèv. : he ou aive, aqita,
d'où évier, aivier.
Evertein, eine, adj., vif, vive, {cvertoui).
Evertiner (S'), v. pron., se donner de l'air, se
refroidir par des allées et venues dans l'appartement,
— i6o —
ou en se découvrant dans le lit. — « N'allez pas vous
èveiiiner, surtout lorsque vous êtes enrhumé. »
Eveux, éveuse, adj. (de ève). Eveiix, sans fé-
minin, se trouve, comme îve, dans les dictionnaires
de l'Académie et de Larousse, avec cette définition :
marécageux, humide. — Chez nous, il est synonyme
de aqiimx. — « Cette pomme, cette poire, ces fruits
sont éveux, » sans saveur.
BESCH. : éveux. Terrain évciix, rempli de terre marneuse,
qui devient boueux quand il est mouillé.
Faguine, s. f., bourrée, fascine ou petit fagot de
genêt ou d'ajonc, dont les paysans se servent pour
chauffer le four (St-Briac).
BESCH. : faguette, petit fagot, dans quelques provinces.
Failli, ie, adj., amaigri, chétif. — « Avez-vous
remarqué M..., comme il est failli. » — « Qu'avez-
vous donc comme çà ? » demandait un jour mon
jardinier à mon ami C..., « v'êtes b'en failli », et
sur sa réponse qu'il souffrait d'une gastralgie, c'est-à-
dire d'une maladie de l'estomac, « Ah ! je sais ce
— i6i —
que c'est, » répliqua le brave homme, « mon biau-
père en est mort l'année dernière. » Voyant qu'il
avait été un peu naïf, il se hâta d'ajouter : « mais
il avait langui b'en longtemps, par exemple ! » —
Cet adjectif se trouve dans Rabelais. On le rencontre
aussi dans ces vers de Villon (XV^ siècle) :
Pauvre de sens et de savoir,
Triste, failly, plus noir que meure.
DUC. : failli, homme s.ius cœur ni honneur : « Jehan
de Bourgeauville dist au suppliant qu'il batroit bien un
si _/h;7// et si foireux chevalier comme il estoit, et ledit
exposant respondi qu'il n'estoit ne failli ne foireux. » —
Faillitns, falsiis, faillitiis, infidelis, prodilus, etc.
Faimvalle, s. f., faim excessive, appétit qu'on
ne peut satisfaire, en terme de médecine boiiliiiiie. —
« Quel mangeur ! il a la faimvalle. » — Ce mot,
très usité dans le peuple, est emprunté à la maladie
des chevaux qui sont aussi atteints de la faÎDivalle .
Faiuatiou, s. f., guignon, malchance. — « A
tout coup, r'en n'me réussit ; la grêle a perdu mes
récoltes, j'ai ma femme au let (lit), deux autres bêtes
malades ; c'est une faiiiation. »
Fainé, ée (ou mieux Fêné, ce), adj., c'est une per-
sonne qui n'a pas de chance, à qui rien ne réussit. —
Se dit aussi des choses : « Cette maison est fainée,
tous les marchands s'y ruinent. »
Fainer ou Fêner, v. a., porter malchance à
11
— l62 —
quelqu'un, lui jeter un mauvais sort, l'empêcher par
des vœux, ou même par sa présence ou son inter-
vention, de réussir dans ses entreprises. Un joueur
superstitieux vous dira ; « Je gagnais avant que vous
lussiez près de moi ; maintenant je perds, vous avez
le mauvais œil, vous me faine:(. »
DUC. : fesne, lat. Fasciniim, charme, ensorcellement. —
Enfaxcigner, lat. fasciuare, ensorceler.
Faiséance, s. f. La faiscance des blés et autres
céréales comprend le labourage, le transport des
engrais, la main d'œuvre ; en un mot, tout ce qui
constitue l'ensemencement d'une quantité de terre
déterminée. Les notaires emploient ce mot dans leurs
inventaires. Ainsi on dit : « semence tt faiséance. »
Faiserie, s. f., syn. de Jaiséaiice. Se dit surtout
dans rarrondissemcnt de Rennes. — « Voilà un biau
temps pour la faiserie des blés ! »
BESCH. : /aisance, corvées et redevance d'un fermier en
sus du prix du bail. — Vieux Fr. : faisance, fesance,
l'action et le moment de faire qq. chose, (duc).
Fait, s. m., bien, avoir. — « C'est une fille qui
avait du fait, mais son homme le lui a mangé. » —
« Il y a du fait dans cette maison. » — Se dit
surtout de la fortune mobilière, linge, meubles,
etc.
CENTRE : fait, m. sg. — norm. : fait, avoir, affaires,
effets. — iJESCiï. '■fait, bien, fortune, capital. Fam. —
Se trouve dans Brantôme et dans Molière.
- i65 -
Faix-mort (A-), locution populaire appliquée à
une personne qui fait une chute grave. « Il est tombé,
ou elle est tombée à faix-mort, » comme une masse.
Fale ou Falle, s. f., poitrine de la femme. V.
affalasè, ejjahtsé.
BESCH.*: fait', jabot des oiseaux. Fam. « La /ï/c pleine
d'un wourmand. » Pop. — trèv. : ftile, mot normand
pour dire jabot. — norm. : fale, jabot des oiseaux, appli-
qué à l'homme par plaisanterie.
Fameux, euse, adj., fort, vigoureux. — « Y'ià un
faineiix gars, » — Se dit aussi d'une personne bien
ou mal portante : « Je ne suis pas funiciix aujour-
d'hui » ; dans ce sens il s'emploie surtout avec la
négative.
BESCH. : Fameux, excellent, admirable. Fam. — nor.v. :
fameux, grand et fort.
Fanerie, s. f., pour fenaison, époque Je la coupe
des foins. Alors les œufs sont chers au marché des
Lices ; les paysans les gardent pour les faucheurs et
les fiineurs, tel est l'usage.
Faraud, aude, adj., freluquet, cossu, pimpant,
habillé de neuf. — « Fichtre, Thomas, comme te
v'\^ faraud contre ton habitude ! vas-tu fiancer ? n
CENTRE -.faraud, m. sg. — UESCii. -.faraud, m. sg. Fam.
— ACAD, ; faraud, homme du commun qui porte de
beaux habits et qui est fier. Fam.
Fauter, v. n., commettre une faute. — « Tu
— 164 —
as faute mon lionime, ça n'sc passera pas comme
ça. »
NOKM., CEN'TKU -.faiiler, m. sg.
Favas, s. m. pi., pampres desséchés des fèves ou
des pois à rames. On les utilise pour litière dans
les étables.
NORM. : favat, tige sèche des fèves. — centke : favnsse,
favèe, tubercule de la gesse tubéreuse.
Femellier, s. m., paysan de mauvaises mœurs,
débauché, coureur de femmes. — « Le fils du maire
était un femellier très mal famé dans la commune ».
xouM., CENTRE : fiuiieUicr, coureur de femmes.
Fêner. Voir Faiiier.
Ferluches, s. f. , terme de menuisier, ruban de
bois varlope. — « Sa famille ne se chauffait que de
fevluclh's ; c'était feu de paille ».
BEScn. : fiiificluches, origin.iiremcnt flammèches d'un
feu de feuilles, de l'italien yiï;;yîi/«^rt. — norm. : ferlu-
ches, rubans de bois raboté ; objet de peu de valeur, d'où
le mol janferluches. — Vieux Fr. : faiifeUiche, fanfelue,
objet de peu de valeur, bagatelle. Famfahica, famjoluca,
(duc).
Fesiller, v. n. Ce verbe manque à notre langue.
Il exprime d'une façon imitative le bruit du beurre
ou de la graisse dans la poêle, du •"er rouge plongé
dans l'eau ou appliqué sur la peau.
Fétice, adj. Pain fêtice, pain compact. — Ce
- i65 -
terme n'est usité, je crois, que dans la fabrication du
pain. Cependant je l'ai entendu appliquer à la toile.
— « Cette toile est serrée, bien travaillée, elle est
fctice. » — a Je l'ai fait faire tout faiclis » (le drap)
M« Pathelin).
DUC. : Pain/i'/;;;, pain bis. Paiiis Icnmliis.
Fieu, s. m., fils. — « Aimes-tu la galette o
l's œufs, mon Jîi'u Francin ?» — On trouve ce mot
dans P. L. Courier.
Filandière, s. f., femme dont la profession est
de filer à la main soit du lin, soit du chanvre ou en-
core de la penille. La filandière est en même temps
préposée à la garde du troupeau au pâturage.
Filoi, pron. filouâ, lieu où nos paysans passent
leurs veillées à la lueur d'une chandelle de résine.
C'est le plus souvent dans l'établc. Les filles y filent
leurs quenouilles, (d'où filoini), les garçons tressent
leurs chapeaux de paille, ou font d'autres petits tra-
vaux. — Il arrive parfois qu'un coup de vent éteint
la faible lumière, et alors... C'est pourquoi le curé
prêche contre ces réunions.
Filoiser, v. n., aller passer sa veillée au Jihi. —
« J'avons une fille qui aime b'en àfiloiser. »
Fini, part, passé du verbe finir, est souvent em-
ployé pour signifier parfiiit, délicieux : « C'est Jiiii
bon. » — On dit aussi : o c'est un fripon /«/. »
— i66 —
BESCii. : fini, m. sg.
FlambrOD, s. m., syn. de Jiinwras. (Voy. ce
mot).
CENTRE : fainhcron, morceau de charbon mal cuit, qui
donne encore de la flamme. — Parcelle de substance
enflammée : un flamheron de paille.
Flan d'œufs, s. m. Nos cuisinières appellent
flati cVœitfs ce qu'ailleurs on appelle des œufs au lait.
Dans les dîners intimes on vous sert encore un flan
d'œiifs dans un plat ; dans les galas, on le sert dans
les petits pots à crème.
Flancher, v. n., faiblir, reculer, mettre les pou-
ces devant son adversaire. Je crois que ce mot est
nouvellement importé chez nous. Je ne l'ai entendu
qu'à la ville. Nos gamins disent caler. (Voy. ce mot).
Flanquette. A la botine flanquette (pour fran-
quette), sans façon, sans cérémonie. — « Venez donc
dîner avec nous, à la honne flanquette, à la fortune
du pot ; pas de fiiçons, pas de cérémonie, disait le
bonhomme J..., les cérémonies sont pour les mes-
sieurs prêtres, et les fitçons pour les tailleurs »,
Flatter sur, v. n., dénoncer qqn, rapporter
sur qqn. — Ce verbe est à l'usage des domestiques
et des écoliers. La femme de chambre flatte sur la
cuisinière, la cuisinière sur le cocher, l'écolier sur ses
petits camarades, etc.
Flatterie, s. f., rapport vrai ou faux, fait contre
— 167 —
un subordonné à son supcrieur, dans le but de le
faire chasser, punir ou réprimander. — « Vous avez
été dire à Madame que j'étais sortie hier soir, vous
aimez les flatteries, n
Flatteur, euse, adj., du vevhc Jlat ter. C'est celui
ou celle qui dénonce les fautes ou les peccadilles de
ses camarltdes. Dans mon enfance, au sortir de l'école,
nous poursuivions le flatteur en lui criant aux oreilles :
a Flatte-cul, flatte-cul, quai' pochons pendus an cul. »
— Lii flatteur croit par ses flatteries, flatter celui qui
les reçoit. Tel est le sens de ces mots populaires.
Flauper, v. a., battre, donner des coups. —
« Simon flaupait sa femme de temps en temps pour
s'entretenir la main. » — Vient de fléau, instrument
à battre le blé.
Flaupée, s. f., du verbe flauper, syn. de raclée,
volée, danse, etc. — 0 Le gars à la Simonne a reçu
une fameuse flaupée ».
Flemme, s. f. Ai'oir la flemme, être abattu, non-
chalant, mou, disposé à la paresse. — « Je ne me
sens pas disposé au travail aujourd'hui, j'ai la fletn-
)ne. n Semble venir defleg)ne.
CENTRE : flâne, tiniiditc, m.inque d'énergie, de coumge.
Flémc, adj., abattu, sans énergie.
Flimpée, s. f., se dit d'une toilette fripée et de
mauvais goût. C'est sans doute par corruption de
fripée, dont ce mot est l'équivalent.
— i68 —
Foireyoux (pron. faircyou.x), s. des "2 genres. Ce
sont les gens qui vont à la foire ou qui en reviennent.
— « A la fiiire de Cesson il y a souvent plus de fai-
rcyou.x que de bêtes (plus de marchands, ou plus de
flâneurs, que de bétail). »
Forrière ou Follière, s. f., bande de terre in-
culte autour d'un champ. Aujourd'hui la forricre est
à peu près supprimée ; nos paysans labourent jusqu'à
la haie.
BESCH. : forirrc, terre qui forme la ceinture des champs
dans quelques parties de la Bretagne ; ailleurs cheintre.
— NORM. : forièrc, m. sg. — Vieux Fr. : foricrc, p.îture;
forcria, foraria (duc).
Fouaillée, s. f., fessée, correction sur les fesses.
— a Bast ! pour nnc fouaillée, le cul n'en chet pas »,
(proverbe), c.-à-d., on se relève d'une chute, d'une
mauvaise affaire.
Fouailleur, s. m. Le fouailleur est un homme
de mauvaises mœurs, coureur d'aventures galantes ;
c'est l'homme qui suit les femmes, — a Le bon-
homme K..., était un vieux fana iUeîir. »
nr.scii. : joiiaillcr un cheval. Fam. l'ouaiUer des enfants
indociles. Pop. et Fam. — A signifié fréquenter des
femmes de mauvaise vie. — norm., sartiil : fouaillée,
correction donnée avec le fouet. — centre : jouailleur,
coureur d'aventures galantes.
Fouée, s. f., feu flambant fait d'une bourrée ou
de quelques copeaux, et qui ne doit durer qu'un ins-
tant. — « Femme, fais-nous une fouée pour nous
— 169 —
réchalcr (réchauffer). » — Ce mot est français, mais
dans une acception différente dont il semble tirer
son origine : « sorte de chasse qui se fait la nuit à la
clarté du feu. » — Il exprime encore chez nous une
grande quantité. — « Q.uclle foiu'e m'apportez-vous
là ? »
BEScil. : yiiHfV, s'est dit pour feu, foyer. Se dit du feu
qu'on allume dans un four pour le chaufi'er. — norm. :
fonce, feu clair alimenté par des fouaillcs, menues bran-
ches. — (duc) /o«t-«, fagot, ho\irr^iC, foaginm.
Fouillard, s. m., branche, rameau détaché de
l'arbre. Se dit surtout d'une branche garnie de ses
Iruits. — « Je vous apporte des /oîn7/a7(fi- de cerises. »
— Le pàtoux (pâtre) émouche ses vaches o dos
fouiUards. — Il y a sur la route de Fougères, à l'en-
trée de la forêt de Rennes, le village de Fouillard ;
c'est le rendez-vous des chasseurs.
Fouine, s. f., nom donné à la belette dans nos
campagnes, et aussi au fruit du hêtre.
CENTRE : foiiiiH', S. f . , fruit du liêtrc. Fouincau, foui-
m'(ïM, hêtre. — Vieux fr. : Fayitc, f fouine, animal,
faiiia ; 2' faine, fruit du hctte, fagiiui, (duc).
Foultitude, s. f., multitude. — Très usité.
Founigoter, v. n., farfouiller, mettre son nez
où l'on n'a que faire. — « Sentez vos dats (doigts) à
cVheure, ça v's'apprendra ;\ foiiu{i;oU'r dans mes
affaires ».
NORM. : fouiner, Jouinetev, fureter.
— 170 —
Founiller, v. a. et n., est à peu près synonyme
àc fûiinigoter. Vient sans doute de fouillis, désordre.
Dans une autre acception : remuer les cendres du
foyer, pour cuire dans la braise soit des châtaignes,
soit des pommes, qui, étant foitnilUes, ont une saveur
toute particulière.
Founilloux, ouse, adj., qui lounille.
Fouteau, pron. foiitiau, nom donné au hêtre.
BESCH., ACAD. : fûiitcciu, uii des iioms vulgaires du hêtre.
— NORM. •.fouteau, foutiau ; hêtre \ fouiehiic, lieu pLinté
de hêtres ; f outille, fruit du hêtre. — centre -.fouteau,
foutiau, hêtre.
Foutimasser, v. n., c'est ne faire rien qui vaille
c'est gâcher son ouvrage. — « Vous feriez mieux de
laisser cela, plutôt que de foulhuasser comme vous le
faites. »
Foutimassier, ière, s., mauvais ouvrier.
NORM. : foutimasser, foutiner, perdre son temps à des
riens. — centre : foutimasser, tourmenter qqn au
moral. Foulimasserie, tracasserie, taquinerie.
Foutreau, s. m., jeu de cartes très-aimé des
enfants il y a un demi-siècle. Le perdant recevait dans
la main, avec un mouchoir tordu, autant de coups
qu'il lui restait de cartes non placées, et plus encore
s'il ne répondait pas à cette question : Coinbien de
cartes ?
hç. foutreau, comme la drogue, semble abandonné
— lyi —
déjà depuis longtemps. C'est assurément un jeu fort
ancien ; il doit sans doute son nom à un verbe encore
plus ancien et toujours par trop populaire.
Fraîche, s. f., breuvage composé de réglisse
noire dissoute dans l'eau ; boisson que se font les
enfants en allant à la promenade. Avec un liard ou
deux de réglisse, nous nous faisions un demi-litre de
fraîche. Dieu que c'était bon !... c'était rafraîchissant,
et cela ne nous portait pas ^ la tète.
Framba, s. m., fumier. — Nos paysans achètent
\q franiba provenant des écuries de l'artillerie. L'adju-
dicataire le leur vend vingt francs le tombereau.
C'est, on le voit, une marchandise assez chère.
« Je happis mes chausses et m'couchis dans l'ta
(étable)
« Les pieds à la porte, la tète nu framba. »
(Vieille chanson).
Frambayer, v. n., de /ra/w/w /c'est étendre avec
la fourche le fumier sur les terres. — On dit o fram-
Vayer o les deux civières, » pour exprimer la prodi-
galité d'une personne qui brûle sa chandelle par les
deux bouts, ou qui beurre sa galette sur les deux
côtés.
NOR.M. : framheyer, nettoyer les étables, les débarrasser
de fumier, du framba.
Frasil, s. m., braise de four, poussier de charbon.
— IJZ —
C'est avec du frasil que les femmes du peuple chauffent
leurs couvents ou chaufferettes.
CENTRE : frasil, fraisil. — acad. : fmisil, cendre de
charbon de terre dans une forge.
Frégon, S. m,, plante épineuse dont on fait les
bagnins. (Voy. ce mot.) — C'est le ruscus aculeatns des
botanistes.
BESCH. : fragcn, petit houx. — duc. : Fn'gon, petit
hoax, fraijon chez les normands.
Frigousse, s. f., syn. de fricassée. — « Si vous
voulez manger de la bonne frigousse, il faut aller
dîner à l'auberge du Pont de Pacé. » — C'est aussi
un terme de troupier, dans la même acception.
NORM. : frigousse, viande en ragoût.
Frime, s. f., syn. de brume ; petite pluie fine qui
n'est pas encore le brouillard de M. Vendôme. — Vient
évidemment de frimas. — ■ « La frii)ie nourrit l'orage,
ou bien elle la mange », proverbe qui signifie que,
lorsque par un temps sec on voit la frime s'élever,
c'est généralement signe de pluie, tandis que, si elle se
lève par un temps humide, c'est signe que le temps
va se mettre au beau. — Pour exprimer qu'une pro-
position n'est pas sérieuse nous disons : « c'est de la
frime ».
BESCH. : frime, semblant que l'on fait de quelque chose.
S'est dit pour neige, frimas. — norm. : Bon pour la
frime, pour l'apparence, Freime.
Frimousse, s, f., figure, visage. — « Voyez c'te
frimousse ; quand on porte une frimousse comme ça,
on ne la montre pas en public. »
BESCH. •.frimousse, figure, face. Se prend en mauvaise
part. — NORM. : frimousse, grosse figure. — centre :
frimousse, figure, face. En mauvaise part.
Fristic, s. m., repas, collation, petit souper.
Nous nous réunissions tous les dimanches, et faisions
ensemble de petits /m//c5 dont j'ai gardé le souve-
nir. — Ce mot, qui n'est autre que le fri'ihstïick des
allemands, est encore un triste souvenir du séjour des
Prussiens chez nous en 1814-15.
Fromage de cochon, s. m. Nous appelons
ainsi une sorte de pâté fait de lard et du sang de
l'animal. Nous sommes très friands de ce mets, qui
est réellement très bon quand il est bien fait. (Voy.
Casse). Dans mon enfance, pour di.\ centimes, deux
sous, un ouvrier faisait un repas copieux d'une forte
tranche àt fromage de cochon. Ce mets de luxe lui est
presque interdit aujourd'hui, du moins pour le même
prix.
Frotter, v. a. Nos paysans emploient ce verbe
dans le sens de nettoj'er, lorsqu'il s'agit du blé noir
qu'on //'o/Zt; avec les pieds dans un boisseau, pour en
détacher le poussier. Dans quelques cantons on le
frotte en l'agitant dans une poche ou bissac.
Frusques, s. f. pi., nippes^ guenilles, vieux
— 174 —
effets. — « Il a quitte ma maison en emportant tou-
tes ses frusques. » — Frusque a sans doute précédé
frusquin, qui est resté dans la langue.
BESCH. : friisquin, ce qu'un homme a d'argent et de
nippes. — ACAD. : fnisijuiii, m. sg. Pop.
Fuie, s. f,, colombier, bâtiment de forme ronde
que l'on voit encore près des châteaux et des gentil-
hommières, et dans lequel les maîtres élevaient de
nombreux pigeons, qui pouvaient impunément rava-
ger le champ du paysan. En tuer un, c'était s'exposer
à aller ramer sur les galères du Roy.
ACAD. : fuie, espèce de petit colombier. — centre -.fuie,
grand colombier. Vieux Fr. : fuie, colombier, fuga.
(duc.)
Fumeras, s. m., charbon ou tison fumant. Un
fumeras, laissé par négligence de la cuisinière sous
une grillade, lui donnera goût de fumée.
ACAD. : fumeron, m. sg.
Fune, s. f. , (du latin /;/h/5), corde, nâche pour
attacher les bestiaux dans l'étable. — De fune, on a
fait le verbe funer. — Funer les vaches ou les nâcher.
(V. ce mot). — Le mot fune, cordage, est aussi em-
ployé dans la marine.
Futé, ée, adj. Cet adjectif a deux significations
bien différentes, et même tout-à-fait opposées : \° futé
se dit d'un individu fin, madré, rusé : « C'est un
gars h'tw juté sans en avoir l'air », — 2° Dans l'au-
- 175 —
tre acception, plus usitée, il exprime une chose, un
ouvrage manqué, gâché, perdu par son auteur. Dans
ce cas, il est participe passé du verbe ci-après ////tv. —
Une personne à qui rien ne réussit, dira aussi : « Je
suis futée ».
Futer, V. a., gâcher, manquer, perdre un ouvrage
par maladresse ou ignorance du métier. — « Ce compa-
gnon est un mauvais ouvrier ; on ne peut rien lui
confier qu'il ne le fn!e. » — Il se dit aussi de l'ouvrier
lui-même, découragé par son impuissance à bien
faire : « Que voulez-vous, patron, je suis fti lé. n
a-
Gabelle, s. f. Dans nos campagnes, on appelle
gabelles les girouettes placées sur les toits pour indi-
quer la direction des vents. — Je crois avoir lu quel-
que part qu'aux seigneurs seuls ou aux percepteurs
de l'impôt appartenait le droit d'avoir au sommet de
leurs demeures ce signe de leur puissance ou de leurs
fonctions. Aujourd'hui, il n'est si petit vilain qui
n'ait sa gabelle sous forme de pie, de chasseur tirant
la bête, ou encore, l'image de la profession qu'exerce
le propriétaire de l'immeuble,
— 176 —
Gabelou, ou Gablou, s. m., surnom donné
aux douaniers par les habitants du littoral de la Man-
che. Il est pris en mauvaise part. — C'est un dérivé
de gabelle.
ACAD. : gnheh-tir, employé de la gabelle. On disait autre-
fois gahclcn. Pop. Ce mot se dit encore vulgairement, et
par dénigrement, des employés des contributions indi-
rectes. — BESCH. : gnh'loii, commis de la gabelle ; se
prend en mauvaise part. Employé surtout dans le midi
pour les douaniers, les employés de l'octroi, et ceux des
contributions indirectes. — centre : gabelou, i- em-
ployé des contributions indirectes ; 2* terme d'injure.
Gâche, s. f., galette de blé noir ; pain mal cuit,
dont la pâte a été mal travaillée. — Ce mot s'applique
aussi à une personne malade et hors d'état de tra-
vailler. — « Le pauvre homme est à la gâche. »
Gâchouet, s. m., petit rouable en bois avec
lequel on étend la pâte sur la tuile à galettes. Vient
de gâche.
NORM. : gâche, x* pain grossier, gâché ; 2- sorte de
galette. — Gàchard, sale, malpropre.
Gaderobe, s. m. D'après Littré, c'est un tablier,
mais chez nous, c'est un jupon en toile, ou cotillon.
Nos femmes de la campagne teignent ce vêtement en
le laissant séjourner dans une mare où l'on jette de la
sciure de bois de chêne ou de châtaignier. C'est une
teinture assez solide ; mais, depuis que le luxe s'est
introduit chez nos paysans, leurs femmes et leurs
filles ne connaissent plus le gaderobe. Elles portent
— 177 —
des robes en drap ; la toile n'est plus employée que
pour le premier vêtement. — A deux kilomètres de
Rennes, sur la route de Lorient, existe un cabaret
qui porte encore le nom de Gaderobe-brùlc.
Nos paysans ont aussi leur argot. Ainsi, ils appel-
lent ioiit-à-Ventonr le gaderohe ou cotillon ; tape-devant,
le tablier ' parsiiict, le fichu ; foinre-dcboiit, les bas ;
rigohts, les sabots.
BESCH. : gardt'iohc, tablier qu'on met sur la robe pour
la garantir.
Graffée, s. f., syn. de lippée, bouchée, morceau
de pain. — a II est réduit à mendier h\ gaffée. »
Gaffer, v. n., manger gloutonnement ; mendier
h gaffe'e. — Semble venir de gaffe pris dans l'acception
de fourchette.
NORM. : gcijféf, morsure de chien. Gajfer, eu parl.uit d'un
chien, saisir brutalement et mordre ; manger avide-
ment.
Galaffe, adj. des "1 genres ; gourmand, glouton.
CENTRE : galaffre, gourmand.
Galène, s. m. Nous disons galène pour galerne,
vent du N.-O. ; terre ou maison exposée au nord-
ouest. — On trouve dans de vieux contrats : tel
champ borné à l'orient par..., au midi par..., à. galène
par..., etc. — a Le vent de galène est bonhomme ; il
n'a jamais fait perdre la journée d'un homme. »
(Proverbe populaire).
12
- 178 -
Galicelie, s. f., veste en toile que portaient nos
paysans il y a peu d'années encore, car la galicelle a
fait place à la veste de drap. — « J'ava's un' bell' gali-
celle cousue de fil bianc. » (Vieille chanson).
Galichon, s. m., petite galette. C'est, le plus
souvent, la dernière de la cuisson, réservée pour la
pâtée de Minette ou pour les poules, parce qu'elle
contient les graviers restés au fond du cuveau qui
contenait la pcâte.
NORM. : galichon, m. sg.
Galoche, s. f., bouchon en liège ou en bois,
avec lequel on joue au bouchon. Nos paysans donnent
aussi à ce jeu le nom de drue ou pitau. Le diman-
che, avant et après vêpres, ils jouent aux quilles, au
palet, à la galoche. — On dit : « tout à la galo-
che » quand, lorsqu'elle est tombée, toutes les pièces
de monnaie qui étaient dessus sont plus près du
bouchon que de la pièce du joueur qui l'a renversé.
N'ORM. ; galoche ou galiiie, m. sg.
Galoches, s. f. pi., gros sabots de paysan. —
M Voyez cette vieille édentée avec son menton de
galoche, » (en parlant d'une bonne femme édentée dont
le menton est relevé comrne le bout d'une galoche).
ACAD. ; galoche, sorte de chaussure. — besch. : galoche,
chaussure en cuir dont le dessous est en bois.
Galon, s. m., croûte qui survient à la suite d'une
- 179 —
plaie cicatrisée. — Il est prudent de laisser tomber
d'eux-même les galons.
Galonné, ée, adj., de galon. — « Il avait le visage
tout galonné. » — a La tète de cet entant est toute
galonnée » (toute radieuse).
CENTRE : galon, s. m., escarre, croûte qui se forme sur
les plaies eu voie de cicatrisation. — norm. : gale ou
galon, m. sg.
Galop, S. m., réprimande. — « Le patron va me
donner un galop. » — Synonymes : Poil, savon,
suif, perruque. (V. ces mots).
AC.\D. : galop, m. sg. Fig. et pop. — norm., centre :
galop, m. sg.
Gamaches, s. f. pi., guêtres en cuir ou en toile.
Depuis que le pantalon a supplanté la culotte, les
gamaches ne se voient plus guère qu'aux jambes des
chasseurs.
NORM. : gamaches, ni. sg. — besch. : gainache, sorte de
bottine ou bas de laine ou de toile cirée qu'on mettait
par dessus les autres pour les garantir de l'eau. — Vieux
Fr. : gamache, sorte de chaussure, gamacha (duc.)
Gandilleux, euse, (pron. oux, ouse), adj.,
délicat, épineux ; question qui demande de la ré-
flexion. — « Que pensez-vous de cette affaire ? »
— « Eh ! je la trouve gandillousc. » — « C'est un
sujet gandilloiix. »
Gapas, s. m. pi., enveloppes du grain de froment,
d'avoine ou d'orge. Ce mot est malouin ; à Rennes,
- l8o —
nous les appelons cossons. (Voy. ce mot). En Nor-
mandie pesas.
NORM. : gtipas, balle d'avoine. — centre. : gi)pier, tas
de balle d'avoine.
Gapi, adj. Bois gnpi, vermoulu, qui tombe en
poussière. « Ce meuble est gapi. » — On dira d'un
homme encore vert : « Il n'est pas encore gapi, mal-
gré son âge. »
Garatas, s. m., grenier ou plutôt greniers, car
garatas ne se dit guère qu'au pluriel. — Les chats se
plaisent surtout dans les charbonniers et les garatas.
— C'est une corruption de galetas.
Garçaille, s. m. et f. , petit enfant, petit mar-
mot. — Les pauvres sont riches en garçailles.
NORM. : garsaillc, bande d'enfants. — sarthe: garçailtc,
petit enfant.
Garce, s. f., jeune fîlle, jeune personne. Ce mot,
qui n'est plus employé qu'en mauvaise part et en
mauvais lieux, n'est, chez nos voisins de Fougères et
de Vitré, que le féminin de gan, garçon. C'est ce
motif qui lui a fait donner place ici. Espérons qu'il
sera bientôt hors d'usage, mais on dit encore aujour-
d'hui : a Je viens de voir la garce une telle sortir
de la messe ou descendre la rue. » — Rabelais :
« ou bien allaient voir les garces d'entour. »
(Garg. I, 3).
Garcette, s. f., diminutif de garce, petite fille :
— i8i —
— « Oh ! la jolie petite garcctte que vous avez
là ! »
BESCH. : garce, fille, dans plusieurs provinces. Garcctte,
id. — NOBM, : garce, garsc, fille. Garcctte, petite fille.
— SARTHE : garcctte. petite fille. Garce est pris en mau-
vaise part. — CENTRE : garce, garse, jeune fille. Souvent
injuri^eux.
Garçonnière, adj. f., fille qui recherche les gar-
çons.
ACAD. : garçonnière, m. sg. Très fam. — norm., cen-
tre : garçonnière, m. sg.
Gare, adj. m. et f., se dit des animaux, et sur-
tout des vaches, dont la robe est de couleur rouge et
blanche. — « La blanche, la naire, la châtaigne et la
gare. » — Gdre, bigarré. — Du temps de Rabelais,
on appelait garrot le taureau pie. — « J'ai à grandes
fatigues et difficultés chassé un tas de vilaines,
immundes et pesti lentes bestes noires, guarres, fau-
ves... » (Rab. Pant. ch. 2).
NORM. : gare, adj. Se dit des couleurs qui tranchent
l'une sur l'autre. Gareau, qui a le pehge gare, centre :
gare, gareau, gariau, gariclie, gariolé, de couleur bario-
lée, bigarrée.
Gars, s. m., garçon. « C'est un bon gars. » —
« Allons, les gars, à la besogne. » — Avec l'élision
de ;• et l'accent circonflexe sur a, ga's devient une
injure : « C'est un mauvais o"(fi- dont il faut se défier. »
Gâter, v. n. et a., employé pour répandre. —
— l82 —
« Le pot gdte.f> — « Prenez donc garde, vous gâlci sur
la nappe. » — Gâlcr de l'eau, uriner.
SARTiin et NORM. ; gûliT, ni. sg. Gùlcr de l'eau.
Gaudes, s. f. pi., gaudrioles, propos joyeu.x. —
« Je t'en prie, père Jean, dis-nous donc encore des
gaudes ; ça nous amuse. » — Du verbe se gaiidir,
g a II d ère.
NOR.M. : gauâences, récits divertissants.
Gauler, v. a., abattre avec une ^««/c, une perche,
certains fruits : les noix, les châtaignes, les pommes.
— « Je paierai vos pommes tant, mais à condition
qu'elles seront cueillies et non gaulées. » — « Je
vas te gauler, si tu ne fais pas ce que je te dis. » —
Employé avec cette dernière acception dans une
épitaphe satirique du cardinal Mazarin. (Mars 1601) :
« Ci gît que la goutte foula,
Depuis les pieds jusqu'aux épaules.
Non Jules qui conquit les Gaules,
Mais le Jules qui les gaula. »
ACAu., SARTHE : gauler, abattre avec la gaule.
Gaurer, v. a., affranchir, castrer. — « Son ma-
tou avait été gaurè. »
Gaureur, s. m., (prononcez g aur ou x)\\omvnt qui
fait profession de gaurer les chevaux, les porcs, les
taureaux et les chats s'il le faut.
- i83 -
N'OUM. : giuirer, se pavaner.
Gausser (Se), v. pron., se moquer. — « Tu te
gausses de ma, je le vais b'en. »
ACAD. : Se gausser, m. sg. Pop. — besch. : gausser, v.
a.., et se gausser, m. sg. cf. Regnard et Voltaire. —
CENTRE : gausse, mensonge innocent, conte, raillerie. Se
prononce quelquefois gosse.
Geignard, arde, adj., qui se plaint sans cesse.
— Du verbe geindre.
BESCH. : geigncux, m. sg. Fam. — xorm. : gcigncux,
geniard, m. sg.
Genotte, s. f., racine bulbeuse qu'on nomme
aussi raiponce et qu'on mange en salade.
Géraud, syn. de tiretaine, étoffe de laine (Côtes-
du-Nord).
Gerbière, s. f. Suivant quelques auteurs, c'est
une charrette destinée à transporter les gerbes au
grenier (nous l'appelons fourragère) ; selon d'autres,
c'est le grenier lui-même. Chez nous, la gerbière est
la fenêtre par laquelle on loge les fourrages et les
céréales, et aussi les fagots.
Ghuérienne, s. f., résidu qui reste ou qui
s'amasse au fond du van.
Giffle, s. f., soufHet. Terme d'écolier. — « Il
m'ennuyait, je lui ai donné une giffle. »
Giffler, v. a., souffleter. — « Finissez, Mon-
sieur, ou je vous giffle. »
— 184 —
ACAD. : gijli', pop. gijler. — bescii. : gijlc et giJJcr, pop.
— NORM. : giffe, g'ffle,giffer, g'ffler, giffclcr. — ckntrf. :
gigliT, giffe, g'ffle.
Gillée, s. f., jet d'eau. (Voir au J.)
NOUM. : giiihr, gilcr, chiler ; guilée, giléc,chiUe. — fUi-r,
filoirc, petite seringue de sureau. — centre : Jih-r,
V. II., jaillir.
Giries, s. f. pi., du vieux mot giîeries, simagrées,
mensonges, pratiques ridicules des faux dévots. « Cou-
dre dans ses vêtements des médailles bénites pour
éloigner l'esprit malin, pratiquer avec ostentation, ce
autant de i;^iriL's. » — X. Aubryet a écrit : « Ce mot est
le dernier terme de mépris de l'honmie grossier qui
veut flétrir une chose délicate, » et il ajoute : « Une
jeune fdle pleure sur la toinbe de sa mère ; est-ce
que ces gin'es-\a font revenir les morts ? » Non assu-
rément, mais il ne faut pas confondre le vrai et le
faux, et le mot t^^irics trouve souvent sa juste appli-
cation.
BESCII. : girie, plainte hypocrite, jérémiade ridicule. —
SARTiiE : giries, grimaces, simagrées. — norm. : girie,
farce, fausseté, supercherie ; grimaces, doléances ridi-
cules.
Glandra, pron. Vunidra, s. m., gland de chêne.
Nos paysans se rapprochent, sans s'en douter, de
l'italien ghiaiida. — « L'abondance àcs gin tnJras nous
promet une bonne récolte cette année. » Nos paysans
croient qu'une « bonne année de glands » est une
année d'abondance pour toutes les céréales.
- i85 -
CENTRE : glnnd, f;liuidir, prononcez liand, hiiukr.
Glène, s. f., fagot de chcne qu'on brûle dans
nos mcn.iges pour faire un feu flambant, à défaut de
pommes de pin. Les boulangers chauffent leurs fours
avec des fflàies. — Le cent de (^lêncs à 2 harts vaut
aujourd'hui 45 à 50 francs, (l!^"") ; les petites ('/iw^
2i à 25 fr. — On dit fondre ses glèiics pour manger
son bien ; il serait plus juste de dire brûler ses
glèiies.
Glènet, s. m,, petit morceau de bois taillé d'une
certaine façon et fendu, avec lequel les blanchisseu-
ses fixent le linge mouillé mis à sécher sur des cor-
des. Ce mot semble venir de glène ; car c'est dans
les glènes qu'on trouve le bois dont les glénels sont
fabriqués. — A Paris, pince-linge. Le glc'nel se vend
i fr. 10 le cent. (1877).
Gnîaf, s. m., savetier ou cordonnier en vieux,
comme on dit aujourd'hui. Gniaf ne se dit qu'en
mauvaise part et d'un mauvais cordonnier. On pro-
nonce souvent jiiaj.
Bi:scH. : giiitif, savetier, m.iuv.nis cordonnier. Fio;. et
pop. : gâcheur, ninl.iJroit. — centre : giuif, s.ivcticr,
mauv.-iis cordonnier.
Gnian-guian, s. et adj., locution employée à
l'égard d'une personne lente ou nonchalante dans ses
actions, et aussi d.ms son p.-.rler. — a Que vous êtes
guiim-gn'uin , ma pauvre fille, vous n'en Hnircz point
aujourd'hui. »
— i86 -
NORM.j SARTHE, CENTRF. : giliail-glliilll, m. Sg. —
BESCii. : gnian-gnian, qui bredouille.
Gobé, ée, part passe du v. gohcr ; attrapé, puni
d'une erreur, d'une iaute légère. — « Ah ! tu
cro3'ais cela ? te voilà b'en gobé. «
Gober, v. a., gagner, attraper, battre. — « Ma-
dame est allée au bal ; elle y a o'o/v'un gros rhume. »
— Une mère à son enfant : « finis, ou tu vas gohcr
(être battuj. »
Goberin, nom propre. Ce fut un homme à qui
son désintéressement et sa pauvreté valurent, comme
à Saint-Ladre, la canonisation. Il est en grande véné-
ration dans ce pays-ci. Lorsque, dans un partage, le
plus malin veut s'attribuer la part du lion : « Et
moi, » dira le pauvre dépouillé, « que me restera-t-
il ? Je serai donc saint-gohcrin ? » (Abrégé de
gobe-rien.')
ACAU. : golk'r, prendre qqn lorsqu'il s'y attend le moins.
Gobîllon, s. m., petite quantité, petite portion. —
« Donnez-m'en fort peu, un gobilloii. »
Gobin, s. m. syn. de gobillon, petite quantité, le
contraire de lopin. — En français le gobin est un
bossu.
Gogue, interjection ; réponse négative à une
proposition déplaisante. — « Voulez-vous me prêter
ceci, me faire cela ? » — « Gagne ». — Ce mot a
— 187 —
le mérite d'être plus énergique et plus bref que ceux-
ci : « J't'en casse, j't'en fricasse, tu r'passeras de-
main. » Gogtie dit tout cela, et plus encore : c'est le
mot de Canibronne, c'est le bran de Rabelais.
DESCii. : gogtu's, se disait pour plaisanteries, joyeusetés.
Gon, *s. m. Nos paysans nomment ainsi le cha-
rançon, l'insecte qui mange les blés.
BESCii. : gon, nom vulgaire du cli.irançon.
Gorgeyer, v. n. Ce mot à l'usage des nourrices,
exprime le bruit de gorge que fait l'enfant en tétant.
Ce bruit indique que l'enfant boit, partant que la
nourrice est bonne. — « L'entendez-vous ^^oro-wr ? »
Gorin, s. m., pour goret, petit cochon,
NORM. : gorin, goret. Gcve, truie. — centre : gorin,
ni. sg. — Vieux Fr. : gorin, gorron, gorreau, porcinns,
petit cochon de lait (duc).
Gosiller, v. n., chanter du gosier. — «Jaiouïle
rossignol gosiller dans les bois. » C'est le bégaiement
des petits oiseau.x.
Gosse, s. f.. mensonge. — « Quelle gosse nous
contez-vous là ? »
Gosser, v. n., mentir. — « On sait que vous
aimez \ gosser. n — Semble une corruption de ^^/cutr.
— On trouve dans Montaigne, liv. 2, cliap. 10, le
mot gosseur ; mais il a une autre signification : « Il
était bon citoyen, d'une nature débonnaire, comme
sont volontiers les hommes gras et gosseiirs.
CENTRE : gosse, m. sg. gausse. — norm. : gosser, s'amu-
ser, jouer, plaisanter. — besch. : gosse, bas et pop.,
raillerie, mensonge fait pour plaisanter. Gosser, railler,
mentir. Gausse, gausser.
Gouamelle, s. f., est un mot tout féminin, par
lequel on désigne une femme fainéante et bavarde,
une commère de la pire espèce.
Goulayant, adj., qui plaît au goût. (Prononcez
goiih'yant). — « C'est parfait, c'est d'ia lèche, c'est
goulayant. » — Un paysan, dégustant du cidre et
le trouvant excellent, exprimait ainsi sa satisfac-
tion : « C'est goulayant, c'est justificatif et territorial.»
— Il n'avait rien trouvé de mieux ; c'était pour lui
le nec plus ultra de l'éloge,
NORM. : gouleyant, appétissant.
Goule-chaude, c'est l'homme ou la femme qui
a un commencement d'ivresse. — « Il n'était pas ce
qu'on appelle saoul, mais on veyait b'cn qu'il avait
la goulc-chdudc ».
Goulichonner, v. n., s'embrasser. — « De
temps en temps ygonlichoinnîs. » (Vieux refrain).
NORM. : goulichonner, baiser sur la bouche.
Goulipias, s. m., syn. de gouliafre, goulu, gour-
mand. — « Saint Goulipias qui mangeait la bouillie
à Not'e Seigneur. »
— i89 —
CENTRE : gonlipaii, m. sg.
Gourd, adj.; engourdi par le froid. — « Je
sais gourd, j'ai les duts goiinls, je n' me les sens pas. »
— « Celui qui a des crevasses aux doigts, ou qui les
agonrcls. » (Mont. liv. 2 chap. 12). C'est l'opposé
de dcgoitrd (dégourdi).
ACAD. : gourd, m sg. — sarthe, centre : gourd, m.
sg. — NORM. : gourd, lent, apathique, endormi. — V.
Lafontainc.
GourÎD, s. m., poche^ gousset. — « Je l'avais
mise dans mon goiirin ».
Gouriner, v. a., voler, détrousser. — Degourin.
— « On m'a gourinê ma montre, ma toupie, etc. »
Gouspin, s. m., petit gamin, petit mauvais
sujet.
Gousson, s. m., petite pièce de toile placée à la
partie supérieure de la manche des chemises, et qui
la rattache au corps. En ville, cela s'appelle un
gousset. Du temps de Rabelais, c'était un cousson :
« La chemise de Gargantua était faite de NOO aunes
de toile, et en outre 100 aunes pour les coussons en
sorte de carreaux, lesquels sont mis sous les aisselles.»
— Emprunté sans doute au mot gousset, partie de
l'armure sous les aisselles.
Goussonner, v. n., se donner le bras. Ce mot
trouvé par nos paysans, vient de gousson, qui, comme
on vient de le dire, est une petite pièce de toile pla-
— 190 —
ccc sous les aisselles, — Il n'est guère d'usage,
dans nos campagnes, de donner le bras aux femmes ;
cependant on y i^oiissomic quelquefois.
Goûté, ée, adj., exprimant qu'un mets, un fruit,
est savoureux et agréable au goût, — « Comment
trouvez-vous cette pêche, cette poire? — Je la trouve
très-goiUi'e. »
Grain. Pierre de o^rain, nom donné communé-
ment à la pierre de granit qui est en eflbt, compo-
sée de grains.
Graissage, s. m. Ce mot a dans nos campagnes,
une autre signification que l'action de graisser,
comme en français ; il se dit de tout ce qui se man-
ge avec le pain, comme beurre, lard, lohon, etc.. —
« Pierre, maçon, et Jean, couvreur, chargés de tra-
vaux loin du village, conviennent de porter, celui-là
le pain, celui-ci le graissage. »
cuN'TUE : grciisstigc, beurre, graisse, huile, employés
pour la préparation des mets.
Grandet, ette, adj., qui est déjà grand, qui sort
de l'enfance,
CENTRE : graiulcl, un peu grand, grandelet.
Grêle, s. f. corbeille ou panier clisse, de forme
oblongue, dont se servent particulièrement les blan-
chisseuses pour reporter leur linge à leurs pratiques.
On dit une grclêe de linge pour exprimer le contenu
— 191 —
de la giélc. Los vanniers fabriquent des gicles de tou-
tes dimensions pour les envois de beurre, de i^ibier,
etc. — Il est une autre sorte de grêle : c'est un grand
tamis fait d'une peau percée de petits trous et entou-
rée d'un cercle de bois. Il sert aux agriculteurs, aux
marchandes de galettes, pour le nettoyage des blés :
d'autres encore sont en fil de fer et à l'usage des jar-
diniers pour tamiser les terreaux. — Le mot grêle
semble venir de l'écossais creel. Pourquoi n'est-il pas
français ?
Grêlée, s. f., c'est le contenu de la grêle.
CENTRC : gicle, graile, crible.
Grêlé, ée, adj., marqué de la petite vérole. .
ACAi). : griU, m. sg. — busch. : grclc, m. sg. Fig. et
F.im. — SARTiiE : grclc, m. sg.
Grenailles, s. f. pi., miettes de pain restées sur
la table après le repas. Une ménagère économe les
recueille avec soin pour la nourriture des poules. —
Exprime aussi une très petite quantité. Semble venir
Aq grumeau ou du latin^rrt?/Hw »/;7//, grain de mil.
KORM. : gicmir, écmser. — centre : greiiiilics, miettes,
grumeaux. Grcmillcr, cmictter, réduire en miettes.
Grettes, s. f. pi., poussier provenant de l'écorcc
du chanvre ou du lin, lorsqu'il subit les opérations du
broyage et du scrançage.
NORM. : gretle, chènevotte.
- 192 -
Grichu, ue, adj., grinclicux, revùche. — « Avcz-
YOLis connu la nicre Lépinc ? c'était une bonne femme
b'cn _i,'r/f/;H(,' et b'en difficile à vivre. En a-t-elle fait
roucher à s'n'homme ! lui a-t-elle rendu la vie dure ! »
— Corruption de griècbe.
NOKM. : griche, grimace de mécontentement. Gricher,
grichet, grincement de dents pour exprimer la moque-
rie. Grichcii.x, grondeur. Grichir, pleurer. Grichu, de
mauvaise humeur. — centre : gricer, se dit d'un enfant
maussade, qui crie légèrement. Griçoux, griçouse. —
BEScn. : grinche, pop.
Grigne. Chercher gi'ii^nc, quereller, chercher
querelle. — « Allez-vous encore me chercher i;i'igiie ? »
Semble venir de gricche, comme le mot grichu ; —
ou peut-être du terme de chapellerie grigne, défaut
dans le feutre employé.
NORiM. : griguci-, grincer. Grignr, mâchoire ; moue, gri-
mace témoignant la mauvaise humeur : Faire la grigne.
Gri^iicr, faire la moue, pleurnicher. Grignard, enfant
grignon. — centre : grigncr, avoir la mine maussade.
Grigner des dents, les montrer par humeur ou par me-
nace. Grignon, grignoux, maussade, rechigné.
Grimacher, v. n., bougonner, gronder. Plus
usité à St-Malo qu'à Rennes.
ANGLAIS : grini, rcfrogné, chagrin. — alle.mand : grim,
colère, grimmig, courroucé.
Grippe (Etre de la), aimer à gripper, à ma-
rauder chez le voisin : — « Les fru'ts, les légumes,
tout lui est bon ; il est de la grippe. »
Il existe encore à Rennes quelques maisons d'une rue
- 195 -
qui portait ce nom ; située en dehors de la Porte
Blanche, à l'entrée du faubourg de La Guerche, elle
aboutissait au Champ de Mars ; elle a dû liiire place
à l'avenue de la Gare. Peut-être suis-je aujourd'hui
le seul Rennais en position de faire connaître l'ori-
gine de son vilain nom. La voici, telle que me l'ont
racontée des vieillards dont les souvenirs étaient et
devaient être très vivaces à l'époque de ma naissance
(1810).
Lors de l'incendie de notre ville en 1720, les mal-
heureuses victimes du désastre transportèrent dans
un terrain désigné, au-deli des fossés, vis-à-vis Ker-
gus, les épaves qu'elles purent soustraire aux flammes.
Bien que ces épaves eussent été placées sous la garde
de la milice, lorsque plus tard chacun voulut repren-
dre son bien, il s'en suivit un tel désordre et de
telles voleries, que le peuple donna le nom de Rue de
la Grippe à la voie qui s'éleva sur ce peint. — Je me
souviens d'y avoir vu une échoppe entièrement
tapissée d'assignats.
BESCH. : grip, terme de f.iuconnerie. Oise.iiix qui vivent
degrip.de vol et de rapine. Giippir. — nohm. : grippe,
extorsion, voleric, r.ipinc. — Vieux Fr. : gilp^s, ra-
pines, injustices.
Grippi, S. m. Les mamans, les bonnes d'enlant
désignent sous ce nom Satan le diable, pour efl"ra-
yer leurs marmots. — « Si tu es méchant, Grippi
t'emportera. » — Si vous avez une image de Saint-
Michel, il doit avoir sous ses pieds un portrait fort
13
— 194 —
ressemblant de Grippi, dont l'archange eût pu, s'il
eût voulu, débarrasser le genre humain. Savez- vous
pourquoi il ne l'a point f.iit ? Je l'ignore, pour ma
part.
Grobilles, s. f. pi., menus morceaux de bois.
Syn. de brosillcs.
CENTRE : grobille, menue tranche de bois, bûchette.
Groë s. f., glace, glaçons. — « Il a glacé, j'ai vu
de la groë ce matin. » — V. gucrouer.
NORM. : groc, grog, aspérités que présente la boue dur-
cie parla gelée. — Groiie, gelée, glace. L,mg& groué.
Groï, e, adj., terme culinaire ; croquant, rissolé.
— « La couenne de lard bien groïi est une friandise ;
mais il faut avoir de bonnes dents pour la croquer. »
Grolet, s. m., râle des mourants. — « Le pau-
vre homme est à l'agonie ; il a le grolet. »
CENTRE : Groiler, grailer, râler. Grais, râle. — Ces mots
paraissent avoir quelque rapport avec les suivants. —
NORM. : groUe, corneille, corbeau. Groiler, tousser,
expectorer, remuer. — centre : ^ro/Ze, corbeau commun.
— Vieux Fr. : grailc, la corneille noire. — Groillcr, le
cri de la corneille.
Gros (Le). Nous autres Rennais, nous appelons
ainsi notre horloge publique. — « Midi va sonner au
gros. » — Nous disons : o Le gros est décoché »,
1° lorsque le gros marteau signale un grand incen-
die ; 2° lorsque l'administration municipale sort en
corps pour assistera une cérémonie officielle ; 3° enfin,
— 195 —
lorsque nonobstant les lettres de convocation, il
rappelle à nos édiles la séance du soir. Dans ce der-
nier cas, le peuple dit : « Le gros est décoché, le
Maire va changer de chemise. » — Horloge était
encore masculin au XYI^ siècle ; accompagné de
l'adjectif fTOi", il est toujours masculin chez nous.
Gros-Malon, s. m., nom donné par le peuple
au cimetière de notre ville de Rennes, parce qu'il est
situé sur les anciennes dépendances d'une ferme qui
porte ce nom. Voy. Bcrliugidii.
Grossier, ière, adj. ; pour le paysan, cet adjec-
tif est synonyme de gras, gros, replet. — « M'est
avis, nout' maîtresse, » disait une fermière à sa pro-
priétaire, » (ou encore : savez-vous b'en, la bour-
geoise), que v's'ètes cor plus grùiissicre c't'année que
l'année dernière (que vous avez pris de l'embon-
point) ?» Puis, voyant le mauvais efîet produit par son
observation, elle s'empressa d'ajouter : « Oui dame !
mais si v's'ètes gronssicrc de corps, v's'ètes b'en lé-
gère d'esprit. » Elle croyait faire un compliment, la
brave femme.
S.\RTHE, NOR.M., CENTRE : grOSS'lCr, m. Sg.
Grout. Droit de grout, conféré à certains seigneurs
du moyen âge. Il consistait dans l'obligation, pour
les vassaux, de battre les mares et les étangs pour
empêcher que le repos de la châtelaine ne fût trou-
— 196 —
blc par les coassements des grenouilles. Le mol et
la chose remontent sans doute fort loin.
Groux, s. m. pi., bouillie de farine de blé noir,
à l'eau, que nos paysans mangent dans le lait riboté
ou au beurre. Dans l'arrondissement de Saint-Malo
on les appelle des peux. — « J'allons donc cor man-
ger des peux anet, » disait un fils à sa mère, « des
peux le lundi, des peux le mardi, des peux tout' la
semaine, j'en sais saoul à la fin. » — « Eh b'en, »
répliqua la bonne femme impatientée, « mange de
la m...; ton père en mange b'en. » (Historique).
Gruau-bouilli, (pron. gucriau). Etre à son
gruau-houilli, c'est être à son ménage, à ses coches,
comme on dit encore. — Une mère réprimandant sa
fille sur son défaut d'ordre lui dira : « Tu verras ; tu
changeras quand tu seras à ton gueriau-houilli. » —
Nos cuisinières ne sont point économes du bien de
leurs maîtres ; mais quand elles sont à leur gueriau-
houilli, elles y regardent de plus près.
Guèche, s. f., morceau de pain, — «Donnez-moi
une guèche, » c'est-à-dire, un morceau de votre pain.
— Ce mot était très usité dans mon enfance, mais il
a vieilli.
Guenée, s. f. ; on désigne par ce mot des mar-
chandises gâtées ou de mauvaise qualité. — « Que
me proposez-vous ? que me donnez-vous là ? Je n'en
veux point ; c'est de la guenée. »
— 197 —
NORM. : giieiietk, femme de mauvaise vie. Giicnippe,
femme déguenillée. Ces mots, ainsi que gKcttille, parais-
sent avoir quelques rapports d'origine avec guciicc.
Guèner (Se), v. prou., se mouiller, se ciotter,
dans la rosée, dans la boue. — « Il pleuvait, je me
sviis guéiià jusqu'aux genoux. » — «Comme te voilà
guèiièc ! »
SARTHE : guèiit-, èc, mouillé, crotté. — norm. : scgiicder,
se gticiicr, m. sg. Gucnc.
Guenet, s. m., chandelier ou porte-résine sous
forme de pincette, que nos paysans fixent au mur
intérieur de la cheminée. — En Normandie, on
nomme pétoche la chandelle de résine, et on peut
entendre la femme dire à son mari : « Mets la péto-
che dans \t giu'ih't. » Voy. Bégot.
Guerdindelle. (Porter à la), jeu des enfants.
II consiste à faire asseoir sur un bâton ou sur les
mains entrelacées l'enfant qu'on veut porter, et l'on
chante :
A la gucnUiuieUe,
Portons la chandelle ;
La chandelle est morte.
Faut la rallumer.
A Saint-Malo, ce jeu s'appelle gaine-et-gaine.
Guerdi, adv. ou adj. de quantité ; en abondance,
à foison, chargé. — « Avez-vous des pommes cette
année? — Oui, nos pommiers en ont guerdi. » Ou
bien : « Nos pommiers en sont gncnlis.n --«Je suis
— 198 —
allé faire visite à Madame X..., et j'en suis sortie
gucrdie de puces. »
Guérissous, ouse, adj. et subst., empirique,
charlatan, qui tait profession de guérir. Chaque
paroisse dans les campagnes, chaque quartier dans
nos villes possède son giicrissoiix en dépit des lois.
EHSCH. : giiérissenr, empirique, charlatan. — sarthe :
guérisseur, m. sg. — norm. : gucrisscux, médecin de
village sans diplôme.
Guernazelle, s. f., nous appelons ainsi les té-
tards avant leur transformation en grenouilles, et
aussi les grenouilles elles-mêmes. — J'aime à enten-
dre le soir les premiers coassements des giiernaiellcs ;
c'est la venue des beaux jours.
SARTIIE : gucnmicllc, m. sg.
Guerouas, s. m , gravier, cailloutage.
Guerouaselle, s. f., groseille à maquereau. —
Etrangers ! gardez-vous de confondre les castilles
avec les groseilles que nos jardiniers nomment giie-
rouaselles, et quelquefois guerna:[elks. — Voy. Cas-
tille.
Guerouer, V. n., glacer. — a II ^ gueroiié cqxxq
nuit, les arbres fruitiers vont en souffrir. » — Voy.
Groë.
Guerzillon, s, m., pour grillon, insecte. —
Gardez-vous de chasser ou de détruire le gvcr:^iïïon
— 199 —
qui, par son cri-cri, égaie votre foyer dans les lon-
gues soirées d'hiver. Il vous importunera peut-être
parfois ; mais c'est un ami dont la présence porte
bonheur, dit-on. Le chant du ffuev^Ulon dans la prée
est aussi, pour moi, plein de charmes. — Les puristes
prononcent gi-i'iiUoii.
Gueuser, v. n., se complaire dans la misère.
(Voy. Misêrer). Il aime mieux gticuser que tra-
vailler.
ACAD. : gueiiscr, mendier. — besch. : giicuscr, v. n. et
V. a., mendier. — Se trouve dans Voltaire et dans
Molière.
Gueuziue, s. f,, blague à tabac faite d'une vessie
de porc ou de tout autre animal. — Mon ami J...,
est un intrépide fumeur ; sa pipe et sa ^ncniiiic sont
ses meilleurs compagnes.
Guibettes, s. f. pL, petites mouches, qui dans la
belle saison, tournent sur place à quelque distance
du sol. Les paysans les appellent vicrieinies. Leur
apparition promet de beaux jours. Les moustiques
sont aussi des guibettes. — « J'ai été piqué par une
guihctte. ■>•>
NORM. : guibct, moucheron. En roman vibe^. — Bibet
moucheron.
Guibolles, s. f. pi. Ce sont les jambes. — Jouer
des guibolles, remuer ses guilvVes, marcher vite.
NORM. : Guibolles, quihoUcs, jambes longues, mal con-
formées.
Guilledou ou Guilledrou (Courir le), c'est
courir ou lumter les mauvais lieux. Ce mot est, croit-
on chez nous, une corruption de guiîledo ou giitldo,
château que possédait Gilles de Bretagne, et dont
on voit encore les ruines sur la rive droite de l'Ar-
guenon, commune de Créhen (Côtes du Nord). La
jeunesse débauchée de la noblesse s'y donnait rendez-
vous. Malheur à la femme qui en franchissait le seuil ;
elle était à tout jamais déshonorée. — Cette expres-
sion, courir le guilledou, admise dans notre langue,
est toujours très usitée.
ACAD. : Courir le guilledou, m. sg., pop. — sarthe. m.
sg. — NORM. : Courir le guidrou, le guilledou.
Guillet, s. m., jeu des petits garçons. Le guillet
est un petit morceau de bois rond, amenuisé des
deux bouts, de la grosseur du pouce et long de 12 à
15 centimètres, placé en travers sur un petit trou
pratiqué en terre. Un joueur le lance aussi loin que
possible, avec un bâton de 50 à 60 centimètres.
L'autre joueur cherche à l'attraper ; s'il n'y parvient
pas, il le jette vers le bâton que le premier joueur a
mis sur le trou ; s'il manque encore le but, le pre-
mier place le guillel dans le trou, une pointe en l'air,
frappe cette pointe de son bâton, et, s'il est adroit,
le reçoit une, deux ou trois fois sur ce même bâton,
ceci s'ap-pdlc pirlipipel. — Puis, de l'endroit du sol
— 201 —
OÙ tombe le guiUct il compte le nombre de longueurs
de son bâton au trou ou pot pratiqué en terre. S'il a
été assez adroit pour foire pirlipipet, c'est avec le
gtiiUet qu'il compte les longueurs. — • La partie se
joue d'ordinaire en cent points. Le bâton sus-décrit
se nomme raclette,. — « Co (coup) de la raclette, co du
bout, co de tout ! » Par ces mots, le joueur qui tient la
raclette se réserve d'en user comme il l'entendra pour
empêcher son adversaire de faire arriver le guillct sur
le pot.
HC
Hague, s. f., averse, giboulée ; syn. de arec ou
barée.
Haguin, s. m., petit balai ou bouchon dont se
servent les cuisinières et les femmes de chambre,
pour laver la vaisselle et les pots. Cet outil de ménage
est fait d'une plante que les botanistes nomment
fragon (iitscus aculeatus), connu aussi sous les noms
de houx frelon, brusque, bui:, piquant, myrte épineux.
— Les fabricants de baguiiis les apportent à la ville le
samedi, et les vendent aujourd'hui 25 à 30 centimes.
Dans mon enfance on les vendait un sou ou six
— 202 —
liards. — J'entends encore ce cri du marchand :
o Archands de haguins /» — Ou dit en parlant d'un
homme vicieux, coureur : « Il est du haguin. »
NORM. : Hagiietics, petites branches coupées.
Haîche, s. f., barrière à claire-voie pour fermer
rentrée des avenues, des champs et des prés. — « Le
pâtou a négligé de fermer la hakhe, et les vaches ont
passé dans le champ de blé. » — On trouve /;fljw dans
un manuscrit normand de 1553.
Vieux Fr. : haise, haseaii, hasel, hc:ie, porte faite de
branches entrelacées, pour la clôture des cours et vergers.
Haiter, v. n., plaire, convenir. — « Cette fille me
haîk, elle est à mon gré. Ce vêtement me haite, il est
de mon goût. » — C'est un vieux mot, mais toujours
très usité dans nos campagnes. — J'ai trouvé dans
un vieux noël le mot déhaitcr, déplaire. L'archange
Gabriel annonçant à la Vierge sa grossesse, dit :
La noble besogne Joseph pas n'entend,
A peu qu'il n'en gronde pas n'est content,
Mais l'ange céleste lui dit en dormant :
Q.u'il ne s'en déhaite, car Dieu est l'enfant.
(Imprimé à Angers en 1801.)
NORM. : Haiter, plaire, réjouir. Dèhailcr, chagriner.
Déhail, chagrin. — Vieux Fr. : Haiter, plaire, réjouir.
(Chron des D. de Norm. Chanson de Roland. — (duc.)
HaldabOD, s. m., mauvais ouvrier. Se dit sur-
tout des mauvais tailleurs. Halkdahon. — Voy. Dahou.
— 205 -
Hâler, v. a., mettre le linge à sécher. — «Il est
prutlent de ramasser le linge avant la pluie : il n'est
pas sec, mais il est hdlé. »
Halfessier, s. m., mauvais ouvrier. Terme de
mcpris. — \'. alfessicr.
Haligandier, syn. de Herqudier. — V. ce mot.
Hampionner, v. n., a la même signification que
haiichiicr, clocher, huiler. — Plus usité dans le canton
de Hédé.
Hanchéier, v. n., être déhanché, boiteux. —
« Ils étaient trois frères, c'est-y celui qui hauchèiait ? »
Hanicas, s. m. pi., se dit de tous les vieux objets
mobiliers, vieilles guenilles, vieilles ferrailles, vieux
meubles. — o Elle avait la manie de conserver un tas
de hauicas. » — Ne s'emploie qu'au pluriel. — A
Saint-Malo, briitgâs. — Vov. Barassiaux.
Hannard, s. m., petit garçon qui porte ses pre-
mières culottes. — Voy. haiincs.
NORM. : baniwt, petit g.Trçon.
Hannequiner, v. a., iiarcelcr. tourmenter. —
« Ce n'est pas en banitcquiiicnt les ouvriers qu'on ob-
tient de bonne besogne. » — « Le bonhomme haiiue-
qiiinait de son mieux ; mais ses forces trahissaient son
courage. »
NORM. : haiineijiiiiKr, tr.iv.iillcr .ivcc peine, lentement.
— 204 —
sans entrain. Hanncqnin, s. m., petit enfant turbulent :
petit enfant mal bâti.
Hanuer (Se), v. pron., mettre ses culottes, son
pantalon. — « Dans cette maison, le maître se
hanne par dessus la tête, et s'boutonne o d's'épilles ; »
cela veut dire que la femme porte les culottes. J'ai
déjà eu l'occasion de citer cet exemple au mot
Epille.
Hannes, s. f. pi., culottes, pantalon. — « L'éclat
(pron. l'écliat) de ses beaux yeux a mis ITcu dans
mes bannes. » — Ce mot n'est employé qu'au plu-
riel. — Un chie-cn-hannes est un honune dont on fait
peu de cas. — (Voy. ce mot).
KORM. : bannes, m. sg.
Hanoche, s. f., bois, rondin de chêne, qu'on
appelle aussi âme, bois pelard, que vendent les
tanneurs après l'avoir dépouillé de son écorce. Les
hanoches sont fort recherchées par nos ménagères ;
elles remplacent avantageusement le fagot. — A
Paris, on les appelle viennises.
BESCH. : hanoche, fagot fait avec des branches de 3 .à 4
centimètres de diamètre. — norm. : hanoche, bois ra-
boteux.
Hant, s. m., amoureux, qui recherche une fille
en mariage. — « On dit, fermière, que vous mariez
votre fille ? — La marier ! Elle n'a seulement pas
de hant. » — De hunier, fréquenter.
— 20) —
NORM. : biinl, frcquentaiion. — duc. : hante, frcqucn-
tation, commerce.
Hante, s. f., terme de dusse ; fiente des ani-
maux, du gibier poursuivi par les chasseurs.' — On
voit par la haute que le chevreuil a passé par là, qu'il
hMitc cette partie du bois.
Happé, s. f., du verbe happer, ne se dit que dans
ce sens : « Comment, il ne vous a donné que cela ?
voilà une belle happe! », c'est-à-dire, une chose
sans valeur, et qui n'est pas digne de la personne
qui la reçoit, ou qui n'est pas en rapport avec le ser-
vice rendu.
NORM. : hapl>e, capture, prise.
Happer, v. a., est employé dans le sens de
donner un coup de collier, un coup de mnin pour un
travail pénible, mais qui ne doit durer qu'un instant.
— o Happc:^ ! encore un coup ! c'est fait, d — Pris
aussi dans le sens de lutter : o s'eittre-happer corps à
corps. »
Haquenassier, s. m., homme qui ne sait rien
faire en temps utile, opportun.
NORM. : haqucnailler , marcher lentement.
Haquetonner, v. n., corruption de a'iioniier,
bégayer, n'avoir pas la prononciation nette. Dans la
Sarthe, quêloimer.
NOR.vf. : haquetonner, m. sg.
— 206 —
Harassoire, s. 1., poiilt; en tôle percée de trous,
dans laquelle on cuit les châtaignes, comme on peut
le voir encore dans nos carrefours. Quelques-unes
sont en terre de poterie, mais aussi de peu de durée.
— « Et semblo3-td'unepaelle à fricasscrchastaignes. »
— (Pant. liv. i, ch. 52).
Harasser, v. a., c'est griller les châtaignes dans
une harassoire. — « Les voulez-vous harassées ou
bouillies ? »
Harassée, s. f., c'est le contenu de la harassoire
après la cuisson. Manger une harassée de châtaignes
en buvant du cidre doux est pour nos paysans le
plus heureux passe-temps.
NORM. : bavasse, grand panier à claire-voie. Harassoire,
poL-le ponr griller les châtaignes. Harasser les châtaignes.
Une harassée de châtaignes. — centre : harasse, sorte
de grande caisse à claire-voie, de grand panier d'embal-
lage. — BESCH. : harasse, sorte de cage à claire-voie
pour emballer le verre.
Harder, v. a., troquer, échanger, une chose
pour une autre : Harder son cheval borgne contre un
aveugle, perdre au change. — On trouve dans Mon-
taigne harde, substantif, (liv. 3, chap. 5) ; le verbe est
seul usité chez nous.
NORM. : Ijarder, m. sg.
Hardi, adv. de quantité, beaucoup. — « En
avait-y bel et ben ? — Oui, il en avait hardi. »
— 207 —
Harée, s. {., averse, giboulée. — « Encore une
barcc qui chauffe, » disent nos paysans, lorsqu'un
nuage apparaît dans un chaud nivon de soleil. —
Dans Rab., housce, ondée, averse. — Voy. Arée.
xoKM. : J.hinv, averse, pluie d'omgc.
Hari coter, v. n., travail auquel se livre le
haricotier.
Haricotier, s. m., voiturier ou propriétaire d'un
petit charroi, travaillant à la tâche ou à la journée.
Se dit aussi d'un petit fermier gagnant sa vie avec
peine. — Est français, mais dans un autre sens.
Hatelle, s. f., morceau de bois fendu, — Voy.
Atldk.
Hâte-ta, excl., se prononce hatla ; composé des
deux mots hdtc-loi ; dépèche-toi, viens vite — « Hâte-
ta par lé ! », accours vite par ici.
Haut. Entendre haut, c'est être sourd, autrement
dit oiic-diis, avoir l'oreille paresseuse.
Haute-houre, s. f.,de grand matin, heure mati-
nale, par opposition à basse-houre. — « Allons, les
gars, faudra être de hautc-hoitre demain, j'aurons d'ia
besogne. »
Haut-le-mont, loc. a^v., monter le chemin,
l'avenue, le champ.
Haut-le-val, loc. adv., descendre, par opposi-
— 208 —
tioii à haiil-lc-iiiont. — Scarron a dit : « couranl à
iJioiit ou bien à vul. »
Haut-mal (Tomber du), cire atteint d'épi-
lepsie.
BECH.-NORM. : Haiit-iiial, m. sg.
Hautouroux, se, adj., matinal (de haule-honrc).
— « Dam ! les gars, foudra être hautouroux demain,
j'aurons de l'ouvraige. »
Vieux Fr. : Haiitc-cure, Haiitc-oiire, Haiitc-vcsprc. duc.
Havet, s. m., petit broc, ou fourche en fer à deux
dents avec laquelle on retire les viandes de la mar-
mite. — « Ses diables étaient tous caparassonnez de
peaulx de loups, de cornes de beufz et de grands
hauvcl:^ de cuisine.» (Rab. Pantag., chap. 3.)
BESCH. : Havct, m. sg. — norm. : Havcf, ustensile de
cuisine en fer, ayant par un bout la forme d'un croc, et
par l'autre celle d'une fourche. — Vieux Fr. : Havct,
croc, crochet, Havetus. duc.
Hébéterie, s. f. . syn. de ennui, désagrément. —
« Je croyais avoir terminé cet ouvrage ; il va falloir
recommencer ; quelle hcbâerie! »
N'OR.M. : Héhélcr, importuner, ennuyer.
Hec, S. m., ustensile de cuisine dans nos fermes.
C'est une espèce de claie de 30 à 35 centimètres de
côté, sur laquelle la cuisinière étend les galettes de
blé noir après la cuisson.
— 209 —
Herbolées, s. f. pi. On désigne par ce terme
générique toutes les plantes pharmaceutiques ou mé-
dicinales simples. — « Q.ue v's'a-t-y dit le médecin ?
— Ah ! y m'a dit d'baii"e sus d's'hcrbûUcs. »
Vieux Fr. : Herbelir, potion médicinale, f.iite de jus
d'herbes, duc.
Hérie, s. f.. par abréviation d'héritage. On pro-
nonce Ihiric. — i( Il a fait une bonne htirù', qui l'a
remis dans ses affltires. »
Herquelier, s, m., ouvrier sans profession dé-
terminée, manœuvre. — Se dit souvent en mau-
vaise part. — « C'était un pauvre bctqiielier. » — Ce
mot ne viendrait-il pas de hère (pauvre hère ?) —
« Douze chasseurs, douze pêcheurs et douze oiseliers
font trente-six hcrqudieys. » (Dicton populaire).
Hersée, s. f., bataille.
Herser (Se), ou s'entre-herser, v. pron.,
se battre, se prendre au.\ cheveux. L'origme de ce
mot n'est pas douteux. Il est emprunté à l'instru-
ment aratoire, la herse, dont on connaît l'action sur
les terres labourées.
Heudes, s. f. pi., entraves de chaînes ou de cor-
des, qu'on met aux jambes des animaux pour les
empêcher de franchir les clôtures. Voy. etibciuicr,
débciidcr.
•NOR.vi. : //('(«/f, bricole pour retenir un animal, entraves.
Hignette, s. f., serpe ou serpette de jardinier.
On dit aussi hii^noclh'.
Hinche, s. f., répugnc-ince, dégoût ; plus encore,
la haine (Vern.)
Hober, v. a., ébranler, secouer (un arbre). Vov.
Obc'-.
Hobée, s. f. Voy. Obèe.
Hollander, v. a., déplacer, expatrier, transpor-
ter au loin. — « On fera bien de hollander ce garçon-
là qui ne fera rien de bon s'il reste au pays.» — « La
mère Michel, pour se débarrasser de son chat, avait
beau le hollander, il revenait toujours au logis. » — Il
est évident que ce verbe a été créé pour exprimer le
goût des voyages, qui est dominant chez le peuple
hollandais. Il trouve souvent son application dans la
conversation.
Hoquelle, s. f., c'est le mets connu aujourd'hui
sous le nom de financière, pâté chaud, vol-au-vent.
Le vol-au-vent est la croûte en pâtisserie de la ho-
quelle.
Horloge (Le gros), s, m., ne se dit que de
l'horloge de la ville. Les autres horloges reprennent,
ou plutôt conservent le genre féminin. Voy. Gros.
Hors-venu. De ces deu.\ mots on a fait un
substantif. Le hors-venu est un étranger (venu du
dehors), ou une personne qui vous arrive dans un
moment inopportun. — Il est toujours pris en mau-
vaise part.
Houle, s. f., vase en terre, de la forme d'une
citrouille, ou d'un potiron, dans lequel on /ait le
pot-au-feu. — a Verser du pot dans la Ixtik, et de la
Ijoule dans le pot, d proverbe populaire qui équivaut
à ceux-ci : Faire un trou pour en boucher un auire ;
— Découvrir Saint-Pierre pour couvrir Saint-Paul ;
— Brûler la chandelle par les deux bouts.
BESCH. : boule, espèce de ni.-irniiie ou de vaisse.iu destine
à chauffer les liquides. Du latin clla. — trèv. : houle,
t. de quincailler, marmite ou vaisseau à mettre sur le
feu.
Houlon, S. m., mesure à l'usage des buveurs,
de la contenance d'un demi-litre. — « Je te paie un
boulon, » sous-entendu de cidre ; en parlant de la
bière, on dit chope ou bock.
Housè, ée, adj., presque toujours acccompagné
de l'adverbe mal. — Se dit des personnes mal vêtues
ou négligées dans leur toilette. C'est un vieux mot
mais nous avons altéré la signification que lui donnent
les auteurs. — a Connue te voilà bouse ! que tu es
mal bousè ! » — Villon a dit, dans une autre accep-
tion : a Bottez, /;o//m". comme pescheurs d'oystres
(huitres^. »
AC.\D. : bo:isé, botte, et par extension, crotté. — nor.m. :
Mal housé, mal habillé.
Houstal. Vov. Oustal.
Huchée, s. f., distance qui peut se mesurer par
la portée de la voix, comme l'indique le verbe hiicher,
d'où vient ce substantif. — Cependant on dit, par
extension : Il y a une fameuse hiichée de tel village à
tel autre, c.-à-d., une assez longue distance.
Hucher, v. a., appeler à haute voix, à tue-tête,
les personnes éloignées, les ouvriers dans les
champs.
« Et hiicbc du latin p'us haut que tous nos prêt'es. »
(Vieille chanson).
Hucher en paume, c'est mettre ses mains
devant sa bouche, de façon à en faire un porte-voix,
et non siffler avec les doigts, comme l'a dit le Bi-
bliophile Jacob. (Je lui demande humblement pardon
de cette rectification.)
Le buchet, selon Nicot, est le cornet qui sert à
appeler ou hucher les chiens.
« Ils m'ont mis en faction
D'vant la citadelle ;
Ceux qui n'savaient pas mon nom
M'app'laicnt sentinelle ;
I n'passait ni chien ni chat,
Qiie je n'hitchis : qui va là ? »
(Aventures d'un conscrit. Vieille chanson).
ACAD. et BESCH. : hi/chcr, appeler à haute voix ou en
sifflant. Vieux mot, qui n'est plus guère usité qu'à la
chasse. — trèv. : hucher, vieux mot qui signifiait autre-
fois appeler. N'est plus en usage que dans les provinces
— 213 —
et un peu à la chasse. — norm. : bûcher, appeler à
une grande distance. Hachée, huqncc, cri que l'on fait en
bûchant. Huchce, huqncc, bupct, jupct, jupce, distance
que peut franchir le cri d'une personne qui huche. —
CENTRE : hucher, appeler, crier. — Se trouve dans
Rab. — DUC. : hucher, hucciarc. Hucha, proclamatio.
Hunes, s. f., pi., douleurs rhumatismales, ou
rhumatismes aigus ; la goutte. Il y a peu d'années
encore, on avait recours dans nos campagnes, pour
la guérison de ces maux, à des empiriques ou gué-
rissoux, qui pratiquaient des incisions aux articula-
tions des membres malades, et souvent ils les estro-
piaient.
Huppe, s. f., A la ville, comme aux champs, on
donne cette épitliète aux femmes malpropres ou
négligées dans leurs personnes, parce qu'on prétend
que l'oiseau de ce nom (que nous appelons pitpiit :
« ou me munir de langues de puputs. » (Pantag.
ch. 25), bâtit son nid avec sa propre fiente. —
« Vous connaissez Madame X..., quelle huppe ! »
Husset, s. m. C'est l'huis ou la partie inférieure
de la porte d'entrée de la ferme. La partie supérieure
reste habituellement fermée, surtout la nuit. Uhussct
protège les habitants contre les visites importunes
des animaux de basse-cour souvent assez audacieux
pour franchir l'obstacle.
A Saint-Malo, Vhitsset se nomme conini ; dans le
Maine, haisiau.
214
lan, adv., pour oui. — Mada-ian, ma foi oui ;
plus souvent Ma-ja-ian.
lé, adv., de lieu, pour ici. — a Jean est-y venu
par ic ? » — « I n'viendra pas iè anet. »
Innocent, te, adj. idiot, privé de raison. Dans
nos campagnes on a grand soin des innocents. C'est
la chance de la maison, dit-on.
NORM. : innocent, idiot, fou iiiofFensif.
Itout, adv., aussi, de même, avec. Montaigne
disait atout.
BESCH. : itou, mot employé par les paysans ; de même,
aussi. V. Molière. — norm. : itoiil, êtoiit, m. sg. —
CENTRE : iloii, aussij pareillement. De item } On dit
aussi élou, de etiam ?
- 21 5
Jacques-dale, s. m., surnom donné en mau-
vaise part aux maris qui empiètent sur les droits de
leurs femmes, qui s'occupent de l'intérieur du mé-
nage. — « Voyez ce Jacques-dak qui mène les poules
pisser ! » — Aux XlVe et XV^' siècles on les appelait
Jacques-Bonhomme, par dérision et par allusion aux
guerres de la Jacquerie.
JallO) s. f., engelure. — « J'ai cet hiver, des jalles
aux pieds et aux mains, »
Jambette, s. f., petit couteau. — Enfant, je
possédais une jamhetle dont le manche avait la forme
d'une botte.
ACAD. et BESCH. : jamhcitc, petit couteau dont la lame
se replie dans le manche.
Jan, S. in. ou Janique, s. t., ajonc épineux à
fleurs jaunes qui fleurit en toute saison dans nos
haies, ce qui fait dire aux paysans que « c't'i l'a qui
serait fouetté pendant la floraison du jan, aurait les
fesses lassées. » — Coupé tous les cinq ou six ans,
— 2l6 —
on en fait d'excellentes bourrées pour chauffer les
fours.
Jâoais ou Jânaye, s. t., terre laissée en jachère
ou à repos, dans laquelle on a semé du jan. On pro-
nonce jtiJids. — On met les vaches à pâturer dans
les jiimis.
Jânier, s. m. syn. de jatiaye, champ dans lequel
on a semé de l'ajonc.
N'ORNE. : jaii, ajonc ou genêt épineux. Janiiihe, champ
planté de jan.
Jarreteler (Se), v. pron., mettre ses jarretières.
Nous disons jarteîer. — « Elle était toujours mal jarre-
telée, et on lui disait : Tu perds tas bas. Bastienne ».
(Allusion à la sainte qui n'avait pas besoin de jarre-
tières, sainte dont les bas se tiennent).
Jarretiaux, s. m. pi., pour jarretières. Ne se
dit qu'au pluriel, mes jarretiaux. Par élision jar-
tiaii.x.
Javelé, ée, part, passé de j air 1er. Ce mot a chez
nous deux significations différentes. Ce n'est pas seu-
lement le blé mis en javelles, c'est le fait de le laisser
séjourner sur le sol pendant cinq à six jours, dans le
but de mûrir un peu la paille, de laisser sécher les
parasites, de façon à faciliter l'opération du battage,
ou de la batterie, comme nous disons. Ainsi, on ne
battrait que très difficilement le blé noir, dont la
paille est grasse ; il faut qu'elle soit javelèe. — Ce
mot s'applique également aux fruits qu'il faut cueillir
avant complète maturité. Certaines espèces de poires
et de pommes ne sont bonnes que javelccs. Le cidre
ne peut être fabrique que lorsque les pommes sont
javelces.
Javeron, s. m., jeune garçon domestique.
Jean. Faire la Saint-Jean, c'est nettoyer à fond
toute la maison. Après cette opéralion^ on se mire
dans les meubles ; tout est « net comme torcliette ; »
mais elle n'a lieu qu'une fois l'an, à la Saint-Jean,
d'où lui vient son nom. Il faut observer que c'est
l'époque où les cuisinières, les femmes de chambre
changent de maîtres, et que ce jour-là ces demoi-
selles cireraient volontiers les semelles de vos sou-
liers. Gare le lendemain !
Jeun (A), locution qui revient souvent chez
nous. — L'homme à jeun est celui qui n'est pas ivre.
S'il est ivre, il a cessé d'être â jeun. — Le président :
« Témoin, l'accusé était-il ivre ?» — Réponse : « Il
n'était pas à jeun, » ce qui veut dire qu'il avait un
commencement d'ivresse.
Jeune-homme, s. m., quelquefois synonj'me
de célibataire. — « Vous avez connu Le Gonec, s'était-
il marié ? — Non, il est mort jeune-homme à 75
ans. »
Jilée, s. f., jet d'eau. — Marcher dans le ruisseau,
dans une mare, éclabousser la personne qui marche
— 2l8 —
à vos côtés, c'est lui lancer une jilce. — « Ah ! le
maladroit ! il m'a lancé une jilêe ! » — Est usité à
la ville et à la campagne. — Jet est l'origine indiquée
de ce mot. (V. Gillcr).
Jiler, V. a. et n., action de lancer une jilce. —
De jaillir.
Jiloire, s. f. Les enfants appellent jiloire une
petite seringue dont ils se servent comme de jouet
pour jih'r de l'eau à leurs petits camarades.
Jinjin, s. m. C'est Jean-Jean appliqué au civil ;
c'est le niais, le foutriquet, le vétillard. — Gavarni a
créé le verbe ginginer, faire une œillade ; c'est une
autre signification.
Jobelin, s. m., niais, crédule. Ce mot, employé
par Rabelais, est très usité chez nos paysans. —
« Voyez don' ce Johlin bridé, qui mène les poules
pisser. » — Voy. Jacqiies-Dale.
BESCH. : Johi'liii, Johelot, sot, nigaud, niais. Vieux et
inus. Joherie, moquerie. Vieux. — trév. : Jobeliti, sot,
manière de cocu. N'est usité que dans !e style burlesque
et satirique. — norm. ; Johclct, sot, méprisable.
Jober, v. n., attendre longtemps la personne qui
vous a mis au piquet. C'est faire le pied de grue. —
« Il V a une heure que vous me faites jober. » — Le
substantif yoZ'rtn/ a peut-être ce verbe pour origine.
CENTRE : Jober, jouer, s'amuser, plaisanter. Se dit sU'r-
tout des jeux enfantins.
— 219 —
Joe, s. m., perchoir ou juchoir, d'où ce mot
dérive ; réduit ou lieu réservé aux poules de la basse-
cour. — S'applique, par extension à une personne
obligée de monter pour gagner son lit. — « Allons, -
enfants, à joc I » (allez vous coucher). — Aller à joc
comme les poules, c'est se coucher de bonne heure.
— Semble emprunté au terme de meunier à joc, qui
veut dire arrêter le moulin. — On trouve jocqtieter
dans Rabelais. (Pantag. ch. 22.)
Joliment, adv., beaucoup, passablement. — « Y
avait-il beaucoup de monde à cette cérémonie ? —
Mais oui, joh'iiicut. »
AC.\D. : Joliment, ni. sg. fam.
Jonchée, s. f. Nous appelons de ce nom un fro-
mage au lait, qui, après avoir été pris ou cailU par la
caillette, est mis à égoutter sur une espèce de claie
en paille serrée qui est la jonchée proprement dite.
Les fermiers apportent d'ordinaire à leurs proprié-
taires, à l'époque du Grand-Sacre (Fête-Dieu), une
jonchée, soit comme cadeau, soit à titre de redevance.
Le contenu et le contenant, ornés de fleurs, sont
servis sur la table. C'est un dessert national chez les
Rennais.
Jopîtrer, v. a., jouer, folâtrer. — « Les gars et les
filles s'en allaient jopîlrant par les chemins. » — Ce
mot vient-il de ;V« ou de joue qu'on prononce /ot; .'* je
pencherais pour cette dernière étymologie ; car, en
— 220 —
jopltrant, on s'embrasse assez souvent. — On dit
aussi joupitrer.
Jorée, adj. 1, se dit des eaux croupies, corrom-
pues. — N'a pas de masculin.
Joteriaux, s. m. pi., glandes ou tumeurs qui se
produisent au cou ou à la gorge. (Oreillons). Se dit
aussi des humeurs froides ou écrouelles. — « Il ou elle
a. les joteriaiix. » — N'a pas de singulier. — DansRab.
atiripeaiilx : « Nous n'estudions jamais de pour des
auripcaidx. » (Garg. ch. 30). — Nos paysans gué-
rissent leurs enfants des jotcriaux en les obligeant à
se frotter les mâchoires à l'auge des cochons ; c'est
un remède souverain !...
Jotte (Soupe de), potage épais, soupe de limou-
sin. — On appelle aussi de ce nom la soupe de poti-
ron ou de citrouille.
CENTRE : /()//(•, joue, grosse joue.
Joue sous l'œil (Avoir la), locution qui
s'applique aux visages piquants, agaçants, aux jeunes
filles jolies : — « Vous connaissez M"^ ? —
Oui, c'est un beau brin de fille ; elle a la jonc sous
l'œil. »
Jubler, V. n., jouer, s'amuser. — « Enfant, il ne
pensait qu'à juhki- avec ses petits camarades. » (Amanlis
et communes voisines). — Semble venir du latin ;»-
hilare.
Labri, s. m., espèce de chien à poil ras. C'est le
chien du berger, du boucher, et aussi le chien de
garde. On croit que cette espèce nous vient de la
Brie, dont elle porte le nom.
Lahan, s. m., mal des reins, lombago. — « On
dit qu'à veilli' on moullit, » disait un vieillard atteint
d'un labaii, a je dis ma qu'on raidit, je n'peu plus
m'player. » Traduction : On dit qu'à vieillir on
mollit ; je dis, moi, qu'on raidit ; je ne peux plus
me ployer. Voy. AJian.
Lait, Petit-lait ou Lait-mâri, s. m. Nous
appelons pelil-lait, le lait dont on a extrait la partie
solide ; ainsi le clair de caille. On l'emploie comme
boisson rafraîchissante, ou encore pour hâter et faci-
liter les vomissements — Oserai-je dire que Littré
s'est trompé en appelant petit-lait le lait baratté ou
lait de beurre ?
Laiteron, onne, s., poulain non encore sevré.
NOR.M. : Lailcroii, m. sg.
Là-lain, adv., composé des deux adverbes là et
loin. — « Il est là-Jain », à une certaine distance
là-bas.
SARTiiE : Là loin, ni. sg. — norm : Là-long, là-mont.
Lalouette-bandée, s. f., jeu des enfants (colin-
mailiard), auquel de grandes personnes aiment sou-
vent à prendre part. Voy. Ahuette^bandèe.
Lampée, s. f., grande gorgée. — Boire à grandes
hiDipèes, à longs traits.
ACAD. : Lampée, grand verre de vin. Pop.
Languirie, s. f. Du verbe languir nos paysans
ont fait langiiirie, souffrance prolongée, maladie de
langueur. • — « Pauvre femme ! le bon Dieu ferait
mieux de la prendre ; quelle languirie ! »
CENTRE : Langiiition, langueur.
Lanlairs, s. m. pi., balivernes, calembredaines,
contes à dormir debout. — « Quels lanlairs nous
racontez-vous là ? »
NORM. ; Lanlaire n'est usité que dans la locution : Va
/(■faire' lanlaire. (Va te faire fiche).
Lardier, ière, s., marchand, marchande de lard ;
— de leur vrai nom charcutier, charcutière.
Le, pr. pers. f., pour elle, mais seulement à la fin
d'une phrase. On ne dit pas : le viendra, mais : vien-
— 223
dra-t-eUc le ? — Il en est de même du pronom mas-
culin ///.
Léchard, arde, adj., personne qui aime la
lèche et les lècheries. — Rab. : gourmand ; chez
nous, friand.
Lèche, s. f., friandise. — « Goûtez ceci, c'est de
la Kche. » — Au pluriel, UxJjen'cs.
Lècherie, s. f., friandise ; plus usité au pluriel.
— al! aime les Ikherics. »
Lèchoux, ouse, s. et adj., personne qui aime à
lécher. — « C'est un léchoiix, ou un lèche-plat. » — « Les
avocats sont des lèche-plats, les procureurs sont des
voleurs. » (Dicton populaire). — En ville on dit
lécheiir, lecheuse. — « Chère Madame, si votre bonne
n'a aucun vice rimant en eiise, croyez-moi, gardez-
la. .)
BESCH. : li'chc, tranche mince de qq. chose qui se ni.m-
ge. Lècljcrie, vieux mot signifiant friandise et qqfois dé-
bauche. Lécljeiir, avide, gourmand. Fam. — nor.m. :
lècheries, liclieries, liqneries, friandises. Licl:eiir, Icchcur.
— CENTRE : lèche, lècheur, Uchcux, lèchoiii, gourmand.
Lècherie, lèchouinerie, gourmandise. On dit aussi Ucher,
' licherie, lichens, lichcur, féni. lichoiise, lichourie. —
Vieux Fr. : lècherie, gourmandise, débauche, libertinage,
d'où lecheor, lecheonr, lecheiir et lecheresse, — Lccalor
(duc).
Lecturier, ière, adj., qui aime la lecture.
Leute, s. f. , œuf du pou qui s'attache aux chc-
— 224 —
veux des entants. Ce mot est français, mais, héks !
il est surtout breton. — On dit du cidre qui perle
dans les verres : « V'ià d'fameux piot, il a des lentes
dans le yw (poil), » comparaison qui n'est ni vraie,
ni propre.
Lentoux, ouse, ad]., qui a des lentes dinslc pa
dans le poil, c'est-à-dire dans les cheveux.
ACAD. : lente, m. sg. — sarthe : lente, m. sg. — cen-
tre : tende, m. sg. — Vieux Fr. : Uns, lentes, œufs de
pou. V. Rom.iu de Reiiart (duc).
Lenteux, euse, adj., douteux, louche, peu
croyable.
Lessis ou Lessix, s. m., eau de lessive, terme
de blanchisseuse. C'est l'eau saturée de cendres qui a
servi ou doit servir au blanchissage du linge. A
Rennes, le lessis sert à la lessive ; la lessive comprend
toute l'opération du blanchissage.
sarthe : lessis, eau de lessive. — centre : lesse, lessif,
lessis, m. sg.
Lever, v. a., souvent employé dans nos campa-
gnes pour attraper, tromper, voler, frapper. — « Jac-
ques a été b'en la'é à la faire (foire) ; on lui a vendu un
mauvais jeval (cheval), et on lui a volé sa montre par
dessus Tmarché. » — Vous entendrez souvent une
femme du peuple dire à sa fille : — « J'vas tlcver le
c..., si tu ne fais pas ceci, ou si tu fais cela », c.-à-d.,
qu'elle va être battue.
— 225 —
Lézarder, v. n., se mettre, se chauffer au soleil,
prendre un bain de soleil à la façon des lézards. —
Qui n'éprouve un vrai plaisir à li'iardcr par un beau
raj^on de soleil d'hiver ou de printemps ?
Liandra ou Glandra, s. m., gland du chêne.
Voy. glandra. — Les porcs nourris de liandra ont la
chair plus ferme et plus délicate.
Liberier, s. m., qui aime les livres, la lecture. —
Ce dérivé du latin liber n'est pourtant usité que dans
nos campagnes.
Liberier, s. m., grand pressoir à vis.
Liborionner, v. n., lire, aimer la lecture. — Le
paysan aime mieux voir labourer que liborionner. —
Ce verbe est pris en mauvaise part ; car celui qui
liborîonne néglige parfois les travaux de la ferme.
Ligneux, s. m. pi., cordons de cuir pour atta-
cher les souliers :
J'avas une paire de solers tout rigants neuts,
Qiie j'attachâs sus le dessus o des ligneux.
(Vieille chanson).
ACAD. : Lignent, fil enduit de poix dont se servent les
cordonniers. — norm. : Ligneii, ligneul, fil poissé à
l'usage des cordonniers. — centre : Lignou, lignoul,
ligneul des cordonniers.
Limas, s. m., limaçon à coquille. Les enfants
chantent :
15
— 226 —
Limas, limas, montre-moi tes cônes,
Tu verras ton grand'père et ta grand'mère sur la pierre cbaudc.
D'autres disent :
Limas, limas, montre-moi tes cônes,
Ton père et ta mère sont morts sur la pierre jaune.
SARTHE : Luinas, m. sg. — xorm. : Limache, limace. —
CENTRE : Limas, limace. — acad. : Limas ou limace
(sans coquille). — besch. : Limas ou limaçon.
Limousine, s. f., manteau en grosse laine à
l'usage des voituriers, des postillons et des charretiers.
A-t-il été importé de l'ancienne province dont il con-
serve le nom ?
.\CAD. : Liincusiiic, manteau de poil de chèvre ou de
grosse laine que portent les rouliers, et dont on se sert
aussi dans les campagnes. — centre : Limousine, m. sg.
— NORM. : Limonscine, m. sg.
Linge, ad]., qui possède beaucoup de linge. —
« Le ménage de M'"'^ B était bien linge. » —
« Maison bien liiigée. »
Lippauder, v. n., manger malproprement. De
lippe, lèvre.
Lippaud ou Lippaudier,adj., qui Uppaïuie, qui
mange malproprement.
Lirette, s. f., jeune fille coquette dont la mise
et les allures appellent l'attentioia des galants. — «J'ai
congédié ma femme de chambre, qui était une lirctle. »
La lascive Galathée était une franche liretlc.
__ 227
Lirou, s. m., Urot, d'apros les naturalistes. Chez
nous c'est le campagnol, rongeur un peu plus gros
que le mulot, et moins gros que le rat. Très friand
des fruits de nos jardins, il porte la dévastation dans
les treilles et les espaliers.
-•VCAD. : liron ou Icrot, espèce de loir gris. — besch. :
liron, vieux nom du loir. — centre : lire, s. m. toute
espèce de gros rat ; Icrot, loir ; Lit. glis, gliris. — Liron j
lérot.
Livard, arde, adj., gros, obèse. — « Je suis
encore leste, quoique livard. »
Locart, s., nom donné à une pomme qui, en
qualité, le dispute à la reinette. Elle est surtout ex-
cellente cuite au four.
s.\RTHE : Pommes de locart.
Lochu, ue, adj., enfant bien nourri, gras comme
une loche.
Logeable, adj., à l'usage des buveurs. Se dit,
suiv^ant l'intonation qu'on y met, d'une boisson par-
faite ou seulement médiocre. — « Comment trou-
vez-vous ce cidre ? — Il est logeable, mais
— Et celui-ci ? — Ah ! parfait ! plus logeable
que l'autre. » — Un vieux curé de village dînait
chez son évêque. — « Curé, que dites-vous de ce
vin ? — Bonus z'iiiiis, Monseigneur. — Et cet
autre ? — Ah ! bonum vinuiii ! — Pourquoi ce
barbarisme dans le premier cas ? — A bon vin bon
— 22« —
latin, Monseigneur ; à mauvais vin mauvais latin. »
Lohon, s. m., confiture faite de merises (cerises
sauvages), qui tient lieu de beurre à nos paysans en
hiver et en carême. Comme pour toutes choses, son
prix est plus élevé qu'autrefois. 11 vaut aujourd'hui
(!0 centimes le demi-kilogramme. — On l'appelle
aussi badiokt, cerise (Voy. ces mots) ; mais son véri-
table nom est Johon.
Loir, s. m. Le taureau ou taurin est souvent
appelé de ce nom. Voy. taurin.
Londaîn, s. m., quantité de foin couchée sur le
pré par un coup de faulx.
ACAD. : andain, l'étendue de pré qu'un faucheur peut
faucher à chaque pas qu'il avance.
Lonlézi (A son), adv., à loisir, à son aise, à ses
heures. — « Jacques n'est pas un paresseux, mais il
travaille à son }onlc~i. »
Vieux Fr. : ll'i, loisir. — Voy. addaiii.
LiOpe, S. f. ; de lopin nous avons fait lope, mor-
ceau.Se dit d'un morceau de pain. — « Le bonhomme
allait de ferme en terme cherchant salopc.o — Happe-
hpc, mendiant, parasite. — Dans Rab. lopincr.
Losse, s. f., cuiller à potage, pour louche.
Un bon coup d'iosse par la tête, Dam' oui, Dam' vcre,
r me dit cor grand merci, Dam' vère, Dam* oui.
(Vieille chanson).
— 229 —
Louchard, arde, adj., pour louche. — « Ces deux
époux se regardent toujours de travers : le mari est
Joiichard, et la femme hncharde. »
Loulou, s. m., petit nom sous lequel les femnies
du peuple désignent l'insecte ovipare qui habite la
chevelure de leurs enfants. Nous voyons souvent
les mamans assises au seuil de leurs portes, tenant
sur leurs genoux la tète d'un petit garçon ou d'une
petite fille déjà grandettc. Q.ue font-elles ainsi avec
les ongles de leurs pouces ? Elles tuent des louloux.
— Encore bien des mères ne se donnent pas cette
peine !
SARTHE : loulou, m. Sg. — N'ORM. ; loii, loulou, pou
Loup-de-brousse, s. des 2 g., homme ou femme
misanthrope, peu sociable. — «Jadis homme du mon-
de, il est devenu lotip-de-broiisse. » — Mot usité à la
ville et à la campagne.
Loye, s. m., nom donné au taureau dans quel-
ques cantons, d'où aîoyc'e. (Voy. ce mot).
Lu, pr. pers. m. pour lui. — « J'irai o le, mais
y re\\enàra\ qualité lu. » (J'irai avec elle, mais je re-
viendrai avec lui). Voy. le.
1^
Ma, prou, personnel, pour moi. — « Viens-tu
quanti' ma ? — Ncnni, j'n'irai pas o ta. »
Ma-da, ou Ma-fa, (ma foi) exclamation tou-
jours suivie de oui ou de non. On dit indifférem-
ment : — « Voulez-vous ceci ? — Ma-fa, ou ma-da
ian (oui) ; ma-fa, ou via-da noua (non). » — Tar
ma-da, par ma-fa, reviennent souvent dans les con-
versations entre paysans ; cela donne plus d'énergie
au discours. — « Creyous qu'il l'épousera ? —
Par ma-fa fii'en crais ren. » — Ironiquement, et
avec accompagnement d'un léger haussement d'é-
paule, Ma-da ian (ma foi oui) exprime aussi l'incré-
dulité. — Dans le Qucxcy on à\i pci-mo-fè.
Macagne, adj. m. et f., (terre ou sol) lourd,
compacte, difficile à labourer. — Nos terres de
Rennes, loin d'être légères, sont macagues.
Vieux Fr.: macaignc : « sage est ceste genz c macaignc »
Chronique des ducs de Norni.indie (duc).
Mâcher, v. a., briser, couper, hacher, battre.
Va est bref. — « Au lieu de couper proprement cet
arbre, vous l'avez iiiachc.y> — «V..., qui s'est trouvé
mêlé dans la rixe, a été iiiack' (couvert de blessures
et de contusions). » — On trouve machcttre dans
Montaigne.
Vieux Fr. : mâcher, mater. Macheiive, meurtrissure,
contusion. Bas lat. : macatiira (duc).
Macre, s. f., châtaigne d'eau qu'on trouve en
grande quantité dans nos étangs. Les habitants de
Vitré font une grande consommation de ce farineux
sans saveur ; j'ai remarqué que les rues de cette ville
étaient quelquefois jonchées de la bogue anguleuse et
piquante de la iiiacir. A l'époque de la cueillette, il
serait désagréable d'y marcher pieds-nuds.
ACAD. : macre ou maclc, m. sg.
Mâgars ou Moigars, s. m., garçon vigoureux,
bien bâti, qui se signale dans les exercices du corps. —
a A la lutte, comme au travail, c'est un mdgars. » —
Ce mot paraît avoir eu primitivement la signification
de mauvais gars ; on voit qu'il est employé dans un
sens tout-à-fait différent. Voir Moné-gars.
Mai ou Main (Faire), embrasser, donner un
baiser. — Mot employé par les mamans et les petits
enfants. — « Faites uiaiii à petite maman, vous serez
bien gentille. ».
Maillard, s. m., canard ou mâle delà cane. .
— 252 —
Maillettes, s. i. pi., clous qui garnissent les
semelles des souliers des paysans. Celles qui se trou-
vent au bout du soulier, et qui sont d'une forme
toute particulière, se nomment bêcherons ou denls-de-
vachc. Voy. ces mots.
Il a dans ses poucheitcs des pièces de tras sous,
Sous ses solers des clious et de grousses maillettes.
(Vieille chanson).
Maingaux, s. f. pi., crème fouettée avec un
mélange de blancs d'oeufs et de gomme adragante.
C'est un entremets tout Rennais. Les riches comme
les pauvres en sont très friands ; seulement les riches
les mangent purs et sucrés, et comme friandise. La
petite ouvrière les mangera mélangés de lait, comme
principal et comme dessert. — Le dessous des main-
gaiix se nomme lait pesé.
Maisonnée, s. f., maison, tout le personnel de
la maison. — a Comment ça va-t-il ? Et toute
la iiiaisonnèc ? » — « Ben me le guarde, si cume tel
félon de ma inaisnêe ad faite traïsun. » (Chanson de
Rolandj. — Gustave Merlet a traduit maisnée par
ligmge. — « Levez estait et sa maismée. » (Roman
de Renart.
ACAD. : iiiaisoiiiiée, m. sg. — Pop.
Maîsonnier, s. m., ouvrier, journalier, habi-
tant une subite ou petite maison isolée. — o II possé-
dait deux ou trois bicoques occupées par des tnaisoii-
— 233 —
niers et leurs pauvres familles. » — N'a pas de fémi-
nin. — Dans Rab., viansioiinier.
Maître, esse, s. On qualifie encore ainsi dans
notre province le propriétaire du sol, de la ferme.
Le paysan dira notit' maître, noiil' ntailresse. Le fer-
mier, le métayer est qualifié de bourgeois par ses do-
mestiques et ses ouvriers. — « Le bourgeois a ordonné
ceci ; la bourgeoise veut qu'on fasse cela. » — «Je vas
servir mon maître, » disait un jour devant moi un
paysan farceur, il allait au cabinet (ou mieux
aux chiottes, pour nous servir de son langage.)
Dans nos villes, le maître et le bourgeois c'est tout
un.
Malement, adv., assez mal, pauvrement, médio-
crement. — « On dit qu'il réussit maJeuieut dans son
entreprise ».
BESCH. : malement s'est dit pour malheureusement
(Scarron). — norm. : maternent, méchamment. —
CENTRE : malement, mal, malicieusement, méchamment,
k tort, etc. — Vieux Fr. : maternent, malicieusement, à
mauvais dessein (duc).
Mangeaille, s. f., tout ce qui se mange. Syn.
de bouffaille. — Voy. ce mot.
ACAD. : mangeante, ce qu'on donne à manger aux ani-
maux domestiques, aux oiseaux. Fam., ce que mangent
les hommes. — besch. : mangeailte se disait autrefois
de la nourriture des hommes (Brantôme).
Mangeoux, ouse, adj., se dit de la personne
— 234 —
qui a de In prcférence pour tel ou tel mets. — « Jacques
est un >natigeoux de lard, sa femme mangeousc de
bouillie. » — Vous entendez nos poissonnières crier
dans les rues : — « Maiigeonx de maqueriau.K (ma-
quercau.x) !» — Ce cri n'a rien d'harmonieux. —
On dit aussi d'un homme doué d'un grand appétit :
a C'est un grand »iaugeoux ».
Maqueriau, s. m., maquereau, poisson. —
Comme on désigne par ce mot des hommes
exerçant un commerce honteux, nos pudiques
poissonnières ont préféré en altérer la pronon-
ciation : « Maugeoiix de niaqiieriaux ! », tel est le
cri adopté par elles pour la vente de ce poisson. —
On appelle aussi maqueriaiix les taches que produit
aux cuisses des bonnes femmes l'abus des chauffe-
rettes. Je suppose que ces taches ont quelque ressem-
blance avec la couleur marbrée du poisson ; mais la
vérité est que je n'en ai jamais vu.
XORM. : maqucriati, macriau, m. sg.
Marabis, s. m. pi., S3'n. de harassiaux, vieux
meubles. (Fougères). Voy. har.issianx.
Marchander (Se), v. pron. souvent employé
dans le sens de commercer. — « Il allait de foire en
foire, et se marchandait de toutes sortes de denrées. »
Vieux Fr. : viarchaiider, commercer, conclure un mar-
ché. Marchandari (duc).
Marcou, s. m., matou, chat. Nous avons con-
— 23) —
serve le mot primitif, car »iaioii n'est qu'une corrup-
tion de marcou. — « Est-il coupé (châtré) vot' viar-
coii, la mère Michelle ? »
XORM. : mavcou, marcaiit, m, sg. '
Marée, s. f., c'est une flaque d'eau, moins qu'une
mare. — « Ah ! mon Dieu ! le p'tit a fait une mârcL'
sur ma robe. — Le chat a fait une vntrèe sous le
lit. — La pluie venue du dehors a foit une wa/rV dans
ma chambre. — On vo\ ait la luârcc courir. » — L'«
est long.
XORM. : Miiire, m. sg. Faire une iiiârét', pour uriner.
Marg'anne, s. f., poudrette ou engrais lait de
matières fécales et de tan mélangés. Cet engrais est
très puissant.
Margannier, ière, s., homme ou femme em-
ployés dans la fabrication de la luargaimc. — Un
warganniev contemplant sa besogne et la trouvant
bien faite, à point, disait : « Ce sera fameux ! j'aurai
bien sûr un morceau de pain à manger là-dedans. » Il
voulait dire qu'il trouverait bon prix de sa marchan-
dise. — Cette industrie a disparu depuis l'introduc-
tion du guano et la ùbrication en grand du noir
animal.
Margoulette, s. f., mot familier, syn. de figure,
bouche. — « Finis, tais-toi, ou je te donne sur la wor-
<'oiûcttc. »
-256 -
xoRM. : Margouleltc, petite bouche, bouche de femme
ou d'enfant. — centre : Margoidelte, mâchoire ; dér.
de goule.
Maringotte, s. f., voiture à un cheval, couverte
d'une toile, avec laquelle les marchands forains par-
courent les foires et les marchés. — a M. G..., aujour-
d'hui millionnaire, a commencé les affaires dans une
maringotte. »
NORM. : Maringotte, espèce de carriole couverte.
Marir, (se), v. pron., se fâcher, se mettre en co-
lère. — « Je vas me niâri et tu vas gober » (!'?' ne se
prononce pas.) — Employé par Montaigne. —
Marrir dans Rabelais. — On appelle lait-mdri le lait
tourné ; le clair de ce lait, ou petit-lait, est une bois-
son rafraîchissante.
ACAD. : Marri, fâché (vieux). — Vieux Fr. : a rr»»:, faire
de la peine, maltraiter, se chagriner, s'affliger, se marrir.
Marrire, (duc).
La dame de ces biens, quittant d'un œil marri
Sa fortune ainsi répandue...
La Fokt.ain'e.
Marjolaine, s. 1., épithète injurieuse donnée par
nos paysans aux femmes dont on a à se plaindre sans
cause déterminée. On traitera également de wary'o/fln/^
la personne qui aura commis une faute grave, ou
celle qui ne sera coupable que d'une simple peccadille.
Marnis, s. m., pron. mdnis, fumier, engrais ;
vient de marne. Sorte de terre grasse qu'on trouve
— 237 —
sur quelques points de nos grèves. — « La pluie
d'avril vaut du iiiarnis. » (Proverbe).
Maronner, v. n., murmurer, syn. de rogiioniwr
(V. ce mot). — « Depuis deux jours Gugusse fait la
noce ; c'est le patron qui Diaronitf. «
ACAD. : Maronner, murmurer sourdement. — besch. :
Maronner, murmurer^ se plaindre. Pop.
Marotte, s. f. C'était jadis le sceptre de Momus ;
c'est, pour nos paysans, un court bâton dont l'extré-
mité inférieure est terminée par un nœud ou renfle-
ment ; c'est une arme dangereuse, sorte de casse-
tête que les Bas-Bretons nomment pcn-has (tète de
bâton).
Marotter, v. n., terme de jardinier. Les choux
sont marottes quand leurs racines sont entourées de
loupes ou bourrelets qui les arrêtent dans leur déve-
loppement. — « Voilà un carré de choux perdu ; il est
marotte. »
Maroute, s. f., camomille sauvage.
BESCH. : Maroute, nom vulgaire de la camomille puante.
— CENTRE : Maroute, waioute, camomille fétide des
champs.
Marteaux, s. m. pi., prononcez martiaux ; grê-
lons, ainsi nommés, parce que, en tombant, ils
frappent et brisent, dans les villes les vitres, dans les
campagnes les arbres fruitiers. — Vers 1810, il tomba
- 238 -
à Rennes une pluie de Diarteaux, si abondante, que
le sol en fut couvert de 30 à 40 centimètres.
Massacrement, adv. d'une grande énergie, appli-
qué à des faits qui dépassent la mesure. — « La fille est
argentée, (est riche), mais elle est »/«55rtcr^wej/Maide. n
Mastoc, adj , se dit en parlant des personnes et
des choses lourdes, grossières, mal bâties, inachevées.
— a Je voudrais un ouvrage plus fini, moins mastoc».
— « Cet homme est sans intelligence, quel inasioc ! »
— A Loudéac (Côtes-du-Xord) on dit stoc.
M'attends b'en, locution adverbiale qui se tra-
duit par : Je in'alltiids bien, j'espère. — « M'attends
Feu que vous ferez ou ne ferez pas ceci ou cela, b
— a M'attends h' en que oui, m'attends l'en que non. »
— Cette locution revient souvent dans la conversa-
tion des paysans. — Un petit garçon de la paroisse
dej... fit un jour de ce mot une plaisante applica-
tion. Le vicaire interrogeait l'enfant sur le mystère
de la Trinité. Demande : « Le père est-il Dieu ? —
Rép. : Oui. — Le fils est-il Dieu ? — M'attends Fen
qu'i n'sera Dieu que quand son père s'ra défunt. » —
Le pauvre enfant ne fut pas jugé digne de taire cette
année-là sa première communion ; son ignorance
était trop grande.
Mauvaiseté, s. h, méchanceté. L'abbé Régnier
dans sa '2-^ élégie a employé le mot manvaitié :
— 239 —
Tu prétends finement par cette niaiivaitic
Lui donner plus d'amour, à moi plus d'amitié,
Une autre édition des œuvres de ce poète porte
maiivaistiè (161 1).
BESCH. : Mauvaisetié, mauvaistic, méchanceté. Vieux mot
qui n'est plus usité. — norm. : Maiivaisdè, m. sg. —
cEN'TRii : Mitiivaiseté, maui'aistic, m. sg.
Mé ou Mée, s. f., grand bahut ou coffre qui a
une double destination ; c'est le pétrin où on bou-
lange la pâte, et dans lequel les fermières serrent leurs
pots de lait, en attendant qu'ils puissent être barattés.
xoR.M. : Met, pétrin, huche. — s.\rthe : Mée, coffre où
on met le p.iin. — Vieux Fr. : Mais, espèce de coffre où
tombe la farine, à mesure que le blé est broyé. Fariiw-
siidii. (duc).
Mèche, (il y a), ou (il n'y apas), locution très
usitée, qui indique qu'on peut taire, ou qu'on ne
peut pas faire telle ou telle chose souhaitée. — Em-
ployée le plus souvent avec la négative. — Une cui-
sinière écrivait à son bon ami : « Je voudrais bien
aller te voir, mon chéri, mais il n'y a pas mèche (j'en
suis empêchée). »
ACAD. : Il n'y a pas inkhc, fig. et pop. — besch. : Il n'y
a pas vièche, locution triviale. — centre : Il n'y a pas
mèche, va. sg. — norm. : Mèebe, point, aucun.
Mêle, (En) adv. et prép., ensemble, parmi. —
Locution très-usitée. — « Le bon et le mauvais grain
se trouvent en iiiéle. » — « Il s'est perdu en mêle la
foule. »
— 240 —
Mêle ou Mesle, s. m., \° fruit du meslier ou
néllier. Su trouve dans Rab. — 2° merle, noerméle>
novDieJe, onitele.
Mêlier ou Meslier, s. m., néflier, arbre qui
produit la nèfle ou iiiesJi'.
NOKM. : Mêle, 1° ncflc ; 2" merle ; mêlier, néflier. —
SARTHE : Mesle, ncflc. — centre : Mêle, anc. mesle,
nèfle. — Vieux Fr. : Mêle, mesle, nèfle, tiielata, mella :
« les neffles appellées ou pais laonnois mesles. (duc). »
Mêleïard, s. m., du verbe méhur ou mêler ; terme
d'agriculteur ; mélange de foin, de paille, ou d'autres
plantes fourragères pour la nourriture des bestiaux. —
Les vaches, les chevaux sont friands de mck'iard. —
Semer dans le même champ deux espèces de céréales,
c'est aussi faire du mêleïard.
Mêleïer, v. a., mélanger ; corruption du verbe
mêler.
Mêli-mêla, ou mêli-mêlo, embrouillement,
confusion, désordre dans l'exécution de certains tra-
vaux. — « Quel mêli-mêla avez-vous fait là ! »
ACAD. : Mêli-mêlo, s. m., fani., mélange confus et désor-
donné.
Même, s. f., petit nom que les enfants donnent à
leurs grand 'mères. — Mente, comme si l'on disait
mère-mère, deux fois mère, est un mot charmant,
et, selon moi, plein de poésie, comme celui de pépè
— 241 —
donné au grand'père. On ne les entend plus guère
prononcer que dans la chaumière du paysan.
Mensougier, ère, adj., menteur, menteuse.
ACAD. : Mensonger, faux, trompeur. — norm. : Menson-
ger, menteur, menleux.
Meuterie, s. f., petit mensonge. — C'est une
menterie ou mentrie. — Au XYI^^ siècle, on disait la
mensonge.
ACAD. : Menterie, discours par lequel on donne pour
vrai ce qu'on sait être faux. Plus fam. que mensonge, et
s'applique à des choses moins graves.
Mentoux, ouse, s. et ad., pour menteur, men-
teuse.
NORM. : Menfetix, m. sg.
Menu, ue, adj., fin, en poudre. — Nous disons
du sel victw, pour sel blanc ou sel de table.
Mercredis, (Rabattre ses quatre), froncer le
sourcil, prendre un air fâché, boudeur. — « Le
voyez-vous, sur une simple observation, rabattre ses
quatre mercredis .' » (Voy. Rabattre).
Mérienne, s. f. Faire viêrienne, c'est faire la
sieste. Nos paysans, dans la saison des chaleurs, font
mérienne au milieu du jour. C'est un abrégé de méri-
dienne. — Nous appelons aussi mcrieniies ces essaims
de petits moucherons qui voltigent en rond à quel-
que distance du sol, le matin ou le soir d'un beau
10
— 242 —
jour. Leur apparition est une promesse de beau temps
pour le lendemain. (Vov. Guihctics.)
Mériennée, s. f. C'est le moment où les tra-
vailleurs font méricniic,
NORM. : méricnnc, mcriane, méridienne. Faire tiicrieniie,
faire la sieste. — centre : mayicniie, marieniice, s. f. , le
sommeil d'après la soupe, d'après la dinée, le sommeil
du milieu du jour, contraction de mcyidienne. — Vieux
Fr. : meriene, méridienne, le sommeil d'après dîner.
ineridiana. (duc).
Méselin, ine, adj., mince, fluet. Se dit surtout
des enfants. — «Voici un poupon inèseUn ; mais il est
mouvillant, » et dans de meilleures conditions de vita-
lité qu'un gros poupard.
Dans le vieux français méseU méxel, signifiait lépreux.
Mc-ellits (Ducj.
Meshui, adv., aujourd'hui, désormais, mainte-
tenant. Il est plus usité précédé de la syllabe ad,
adineshid. On dit aussi adniesè. CVoy. ces mots). —
Montaigne a dit : a Je ne suis incshuy que trop rassis...
Ce livre en a assez, il n'y a iiicshiiy plus que dire. »
— Rabelais : «... marie-toy... des btiy au soir.
(Pant. ch. 26). » — On trouve aussi ce mot dans
François de Sales, La Boétie, etc., et dans la farce de
Me Pathelin : « Ne me babilles meshiiy de ton bec et
me paye. » — « Mcsiniy despêche ly braillart ». (P.
Gringoire).
NORM. : nicshni, m. sg.
— 243 —
Messîal, Messier, adj., chemin, sentier à tra-
vers champs qui conduit à l'église. Le second est
plus usité que le premier. Voy. cheniin vicssier.
Métive, s. f". On dit faire la iiictivc, c'est-à-dirè,
faire les vendanges, la récolte des céréales. — On
ne dit pas tnétiver comme on dit \cndanger.
Métivier, s. m., ouvrier journalier loué ou gagé
seulement pour le temps de la mélive ou les vendan-
ges. Il est ordinairement payé en nature. — Se
trouve dans Rabelais.
CENTRE : métive (dans l'ouest), moisson. — Vieux Fr. :
mestive, le temps de la moisson, mativa. Mcstiver,
moissonner. Mestivicr, moissonneur (duc).
Mettre à bas, locution très usitée pour expri-
mer une interruption dans un travail. — « Mes en-
fants, nous allons iiicltre à bas ; nous recommencerons
demain. »
Meyenne, ou Mayenne, s. f., vase en terre,
de forme oblongue, dans lequel les fermiers mettent
le lait, la crème ou le beurre. Ce vase est d'une con-
tenance indéterminée. On dit quelquefois une wcyeii-
iiéc de lait, pour le contenu de la incycitiic.
Mezelle, adj., pron, m\elU. Dans le canton de
Hédé on donne ce qualificatif injurieux au jeune
garçon que son air efféminé et chétif fait soupçonner
d'impuissance. — « Je ne lui donnerais pas ma fille.
— 244 —
je Ferais m\clk » — M\elle se dit aussi des juments,
des vaches stériles.
Miaux, s. m. pi., restes de pain, de galette, laissés
par une personne qui n'a pas mesuré son appé-
tit, et qui a eu, comme on dit, les yeux plus grands
que le ventre. Ce mot, très populaire, semble venir
de motiêe, pâtée des chiens, les niianx étant destinés
aux poules et autres animaux de basse-cour.
Mîcamo, s. m., café mélangé de lait et d'eau-
de-vie. Ce mot fut prononcé vers 1820, dans un
prône, par l'abbé Percevaux, curé de Saint-Etienne
de Rennes, et fit fortune, car il est toujours populaire.
L'abbé Percevaux infligeait un blâme énergique à ces
femmes du peuple qui passent de longues heures
dans les cafés à boire leur micamo ; (il est vrai qu'elles
en sont très friandes). Ce jour-là le mot fut admis
dans le vocabulaire rennais, et on dit toujours dans
les cafoins de la ville : le micamo de M. Percamcx.
Cet excellent curé me devra peut-être d'avoir trans-
mis son nom à la postérité... la plus reculée ("!!...)
Miche de Poligné, s. f., petit pain de seigle
qui est fabriqué dans la commune de Poligné, d'où
lui vient son nom. Il est apporté à Rennes le sa-
medi.
Mier, v. a., abrégé de e/H/t'/to, réduire en miettes.
— Mier son pain ou sa galette dans son lait, c'est le
couper ou le briser par petits morceaux. — Esmier,
— 245 —
dans Montaigne : « Comme la terre se rend fertile,
plus elle est csmiée, profondément remuée. » (L. 3,
ch. 13).
Miette, s. f. Le peuple dit une jiiiette, et même
une petite miette pour exprimer une petite ou une
très-petite quantité.
ACAD. : Une miette, m. sg. — norm. : miet, iniot, peu,
petite quantité. Miette, point du tout, aucunement. —
Vieux Fr. : mie, point (duc).
Milaine, s. f., tissu de fil et de laine. — « Elle
portait un cotillon de milaine. » (Mi-laine).
Millaud, aude, s., mendiant, mendiante ; va-
gabond. — « Ces gens, autrefois dans l'aisance, sont
devenus, par leur inconduite, de véritables miUauds.y>
— Ce mot, comme tant d'autres, se rencontre dans
Rabelais. En relisant, pour la vingtième fois son
Pantagruel, je trouve au chap. 5i : « Epistemon,
frère Jan et Panurge voyans cette fascheuse catastro-
phe, commencèrent au couvert de leurs serviettes
crier : myault, myaiilt, myault, faignans... »
Minette, s. f. Les écoliers de mon temps appelaient
minette le martinet à lanières de cuir avec lequel les
maîtres les corrigeaient en appliquant ses coups dans
la main ouverte et tendue du patient. C'est avec cet
instrument qu'on fessait et refessait les petits garçons.
Les frères de la doctrine chrétienne, que nous appe-
lions les frères casse-bras, par allusion aux manches
— 246 —
pendantes de leur robe, firent, dit-on, un luxueux
emploi de la miucllc, jusqu'au jour où elle leur fut
interdite. Aujourd'hui le mot et h chose sont incon-
nus : ce n'est donc que pour mémoire que j'ai con-
servé le premier sans avoir oublié l'autre.
Miochée, s. f., pâtée du chat, du chien, et, par
extension ragoût mal préparé. — « Quelle miochée,
Jeanne, nous donnez-vous là ? »
Mîon, s. m., abrégé et synonyme de mioche,
moutard, petit garçon. — Se dit surtout en mau-
vaise part : méchant viion. — On peut dire aussi qu'il
est un abrégé de mignon, mais il est peu usité dans
ce sens.
BESCii. : mion, petit garçon. Contr. de mignon.
Mirette, s. {., petit miroir. « La fillette n'avait,
pour réfléchir sa charmante image, et ajuster sa mo-
deste parure, qu'un fragment de miroir, une mirette. -a
— « Qiie souhaites-tu, mon enfant pour tes étren-
ncs ? — Une mirette me ferait grand plaisir. »
Mirodures, s. f. pi., enjolivements, festons, or-
nements d'un ouvrage. Le verbe miroder est français,
pourquoi le substantif mirodures ne l'est-il pas ? Il
est tout aussi usité ici que dans le Maine. — On
m'assure qu'il est français, mais vieux.
xoRM. : Se iniivier, s'ajuster avec .soin, se mirer souvent
avec complaisance. — besch. : miiaiider s'est dit pour
regarder avec attention, admirer. Miraudc, mircdc.
— 247 —
Misérer, v. n. du subst. iiiiscrc. — « Il pouvait
vivre honorablement en travaillant ; il préfère niisc-
rer et foire niiscrcr avec lui sa famille. »
Mitan, s. m., milieu. — « C'est un adroit tireur,
il est arrivé dret (droit) dans le mitan. »
SARTHE, NORM. : iiiilau, m. sg. — CENTRE : mitan,
moitié, milieu. — besch. : initan, se disait pour milieu
et se dit encore dans certaines provinces. — Vieux Fr. :
mitan, moitié (duc).
Mité, ée, adj., partie, du verbe uiiter.
Miter, v. a., vient de mite, insecte. — Pour dire :
cette fourrure, ce vêtement sont mangés des mites,
nous disons : ils sont mites. — Encore un mot qui
devrait être francisé.
BESCH. : mite, adj. comm., rongé des mites.
Miton, s. m., pain bouilli à l'eau ou panade.
Vient de mitoniter. — a J'adore le miton, lorsqu'il est
bien beurré. »
NORM. : miton, morceau de mie. Mitonnce, panade. —
centre : milonnadc, soupe mitonnée, panade.
Moche, s. f. On désigne sous ce nom : lo les
pains de beurre de forme arrondie, quel que soit
leur poids ; 2° l'ognon disposé en forme de grappes
longues de 40 à 50 centimètres. La tnoche d'ognon
est aussi désignée sous le nom de liassc'e, parce qu'ils
sont liés les uns à la suite des autres.
Mocher, v. a., action de préparer les moches.
— 248 —
Mochè, ée, adj., grasset, grassette, grassouillet,
grassouillette. — Ne se dit que des enfants au maillot.
— «Cet enHint est iiiéselin ; mais voyez comme il est
moche. 1)
Mochon, s, m., amas, monceau d'une chose
susceptible d'être mise en tas, ainsi : un mochon de
blé, de paille, et, par extension, un groupe de per-
sonnes. — a Dispersez-vous, ou j'tape dans Vmo-
cJjoii. »
Mochonner, v. a., mettre les choses en mochon.
Moeller, v. n., terme d'horticulteur. On dit
d'une plante dont l'humidité a fait mollir la racine
ou l'ognon, qu'elle a vioelle.
Moignot, s, m., enfant de choeur. — Petit
moine. — Moignot est plus usité sur la lisière ouest
du département d'Ille-et- Vilaine ; à Rennes et aux
environs, nous disons ciiriau. (V. ce mot).
Moine, s. m., petit fer placé à la partie supé-
rieure de la toupie (jeu d'enfant). L'autre fer placé à
la partie inférieure s'appelle Nonne. (Voy. ce mot).
Enfants nous prisions beaucoup les toupies dont les
moines et les nonnes étaient à vis, dès lors plus soli-
dement fixés. On se demande si l'inventeur de ces
deux mots n'aurait pas eu une pensée quelque peu
rabelaisienne, le moine étant dessus et la nonne....?
Moque, s. m., visage laid d'une personne qui
— 249 —
fait la moue. « Voyez donc ce moque ! — Quel
moque ! » — Bouche grosse, lèvres épaisses : « vilain
vwqtie ! »
Moque, s. f., bol contenant un demi-litre, ou
chopine. L'importation de ce mot est assez récente ;
je ne l'entendais point prononcer dans mon enfance.
Un ouvrier, un postillon, entrant dans un cabaret,
s'écriait : « La bourgeoise, une cbopiiic ! » On dit
aujourd'hui : « Une vioqiie ! » ou encore : « Une
bolée ! » je crois que moque est normand.
BESCH. : moque, gobelet de fer blanc. — xorm. : moque,
tasse sans anse servant à boire.
Morelle, s. f., nom donné à la corueiUe que nous
appelons aussi coiiille par corruption.
Nous disons aussi morelle pour marelle, jeu des
enfants. L'enfant étant à cloche-pied, pousse du pied
O
A
le petit palet a dans le compartiment i , puis successi-
vement dans les autres; s'il arrive au 6^ et fait sortir
son palet sans qu'il se soit arrêté sur une raie, il
gagne la partie. Je suis pour le proverbe : « Toupie
vaut marelle. »
Mort (à), locution populaire qui exprime la
satiété, le iiec plus ultra d'une chose. — « Je m'en
suis donné à viort à la noce de ma cousine. »
NORM. : A mort, en gr.iiide abondance. — centre :
A mort, beaucoup, considérablement.
Morver, v. n. se moucher. — morve et morveux
(nous disons morvoux) sont français ; mais morver a
cessé de l'être. — Gargantua enfant « se mourvail
dedans sa soupe.»
BESCH. : morver, avoir de la morve. — centre : mor-
voux, oiise.
Mos (D'à), adv., de coutume. — « D'à mos, il
allait tous les jeudis à la ville. » Voy. Aiiioi (d').
Motte, s. f. , tan foulé auquel on donne la forme
de briques rondes ou carrées. Ces mottes, qui brûlent
avec une grande facilité et sans odeur, sont très pré-
cieuses dans nos ménages rennais pour allumer le
feu et alimenter les chaufferettes des dames. Les
tanneurs les vendent aujourd'hui i fr. 20 le cent
(1878). — a Madame, nous n'avons plus de mottes.
— Eh bien, Justine, il faut en acheter. »
ACAD. : motte à brûler.
Moucet, s. m., corruption de morceau. — C'est
un diminutif : « Un p'tit moucet de pain, s'il vous
plaît. » — Le gros morceau est une lope. (Voy. Lope.)
NORM. : monceau, mouciaii, mouchiaii, moucet, mouchet.
— CENTRE : monceau, mouciau, monceau, tas.
— 251 —
Moucher, v. n., se dit des vaches qui fuient
affolées pour se soustraire aux piqûres des taons et
des mouches dans la saison des chaleurs ; aussi ne les
conduit-on aux pâturages qu'au grand matin ou au
coucher du soleil. — Nos paysans s'appliquent sou-
vent à e.ux-mêmes le verbe moucher, synonyme de
déguerpir, regagner au plus vite sa demeure : « Allons,
les gars, il se fait tard, monchoiis ! »
CENTRE : tnouchcr m. sg.
Moué-gars, s. m. Cette expression a deux signi-
fications tout-à-fait opposées. Dans quelques cantons,
le nioiiê-gars est un mauvais garçon. Dans d'autres,
c'est un gars vigoureux et un solide travailleur ; on
dit aussi : c'est un vmgars. (V. ce mot).
Mouroir (Etre au), c'est être à l'article de la
mort. Vieux mot que Boiste trouve très énergique. Il
est très usité dans le peuple. — « Vous connaissez
Madame X.... ? Eh bien, elle est ai< mouvoir. Il est
vrai qu'elle est ancienne (âgée).»
BESCH. : mouroir, s'est dit pour lit de mort. Arriver au
moitroir.
Moustachu, ue, adj., homme ou femme qui porte
d'épaisses moustaches. — « Ma tante Madelon était
moustachue comme un sapeur. Nous l'appelions tan-
tinc barbue. »
Mouton, s. m., petit ver qui naît et vit dans les
fruits, et notamment dans les cerises. Quant à moi,
— 252 —
je cesse d'en manger quand les luontcnis y ont fait
leur apparition.
CENTRE : mouton, m. sg.
Mouvette (Avoir la), se dit d'une personne
qui ne tient pas en place, ou qui a la bosse des
voyages : « elle a la inouvclte. »
NORM. : inoHvctie, petite fille remuante.
Mouvillant, ante, adj., sémillant, frétillant. —
« Voyez cette petite lille, comme elle est moiivillantc. »
(Voy. EwouviUaut). — On dit aussi : iiioiiviîlon, nioti-
villonne.
Mucre, adj. m. et f., humide, moite, — Le
linge rapporté du blanchissage est souvent miicre; il
doit être miicrc avant le repassage. — Les murs
salpêtres et les pièces basses sont imicres. Ce mot est
aussi normand.
NORM. : iilucrc, remucre, m. sg. Mucreur, humidité.
Mucrir, devenir humide. — besch. : inucre ou iiiuche
se disait pour moisi. — trév. : mucre, vieux terme.
Mulette, s. f., sang cuit des animaux de bou-
cherie. Dans mon enfance, les bouchères vendaient
la mulette le dimanche inatin à la porte de la halle.
Pour un liard ou deux, l'enfant ou le pauvre s'en
régalait d'un énorme lopin. On ne connaît plus
aujourd'hui la iinilettc, sans doute parce que les bou-
chers tirent meilleur profit du sang des animaux, par
suite du renchérissement de toutes choses.
— 253 —
BESCH. : mnletle, gésier des animaux de proie ; estomac
du veau.
Mulon, s. m., petite meule de foin ou de paille.
— La meule est formée de plusieurs muions, comme
le mtilon est lui-même formé de plusieurs vciUoches
(V. ce mot).
norm". : mulon, m. sg. — besch. : inulcii, grand tas de
foin.
Murette, s. f., petit mur, ou mur de peu d'élé-
vation ; (i métré à i"''5o) ; comme par exemple, les
parapets des ponts, les talus en pierres sèches. —
« L'auvergnat V...., devenu fort riche, avait débuté
en étalant sa marchandise sur les miircttes des ponts.»
Musoir, s. m., (de muser), terrasse, balcon, ou
toute autre partie de l'habitation d'où on peut voir
les passants ou les fêtes publiques. — « QjLiel beau
musoir, vous avez madame ! » disait-on à une dame
dont les fenêtres donnaient sur la place de la Mairie.
Musser (Se), v. pron., se cacher, se blottir dans
un coin ; comme le rat dans son trou. Vieux mot,
mais toujours jeune chez nous. Employé comme
verbe actif par Montaigne : « Il iaut musser ma
faiblesse », par F. de Sales, etc. — Rabelais : « mais
ils se mnssarcnt contre terre comme taulpes (Pant.
chap. 5). » — « et soy mticer en quelque petit
trou de taulpe. (Pant., chap. 12).» — C'est le verbe
mucher, souvent employé au XV^ siècle : « Lors s'est
muchei en une haie.» (Le Roman de Renart).
— 254 —
ACAD. : Se inusicr, m. sg. Vieux. — centre : miisser,
V. n. passer à travers, par un trou, comme un rat, se
glisser {mus). Se viusser, se cacher, se fourrer dans un
trou. — NORM. : musse, loge ou lieu couvert dans la
basse-cour, où se réfugient les lapins, les oies, les ca-
nards, etc. ; chenil ; — Vieux Fr. : muce, miiche,
musse, cache, inussia : « Plurima hoiia vwhilia in qiiâ-
dam inussia, musse gallice, existentia. » Musser, cacher.
(duc).
Mussot, s. m., trou. — La taupe reste dans son
viiissot au milieu du jour, et n'en sort que le soir et
le matin.
Mus-en-pot., adv., en fraude, en cachette.
Nous disons mns-t-en-pot. — Tenir un débit clandes-
tin, vendre à la ntus-t-en-pot. — Mus, musser, mussot,
ont pour racine le mot latin mus, rat, qui vit caché
dans ses garennes. Mus-l-m-pot, cacher, soustraire les
pots à la vigilance des employés de la régie (que le
peuple a baptisés du nom de rats-de-cave), a la
mêiTie origine.
3sr
Nâchard, adj., goguenard, mauvais plaisant,
sournois, — « Défiez-vous du nâchard, c'est un hlèdK. »
(Vo)'. ce mot).
— 255 —
Nâcharder, v. a., taquiner, goguenarder. —
« Je n'aime pas qu'on me nâchardc. »
Nâche, s. t., corde ou licou, avec lequel on
attache les bêtes à cornes dans les étables. — La
ndcbe est abandonnée à l'acheteur de la bête. — « A
la ndcbe, » c'est-à-dire, à ta place, est une injonction
que les vaches comprennent fort bien.
Nâcher, v. a., action d'attacher la bête à la place
qu'elle occupe dans l'étable. — On dit d'une femme
mal mariée, qu'elle est )nal ndchêc.
Nan-ni. C'est la particule négative non. Cette
expression est très usitée encore dans nos campagnes.
Est-ce .issez, dites-moi, n'y suis-je point encore ?
Nenni (La Fontaine),
Retenez bien surtout cet heureux mot,
Ce doux nenni qui plait tant à Marot.
(G. Bernard).
Un doux nanny, avec un doux sourire.
(Marot).
« Et quoy^ seigneur colonel, pensez-vous que je sois
ce Montluc qui va tous les jours mourant par les rues ?
Nany, nany. (Biaise de Montluc).
ACAD. : nenni, fam. — norm. : neiiiiin. — centre :
nanni.
Napiau, s. m., lange sale qui a servi aux petits
enfants. — » La pauvre femme est assez occupée à
laver les napiaux de ses garçailles. » — Les napiaux
se nomment aussi des drapiaux. — Des vieilles nappes
on fitit des napianx.
— 256 —
Narrées, s. 1". pi., propos absurdes, contes à
dormir debout, récits mensongers. — « Quelles
iiarnh's nous débitez-vous là ? » — De narrer, raconter,
mais pris en mauvaise part.
Nâs, s. f., chiffon de toile mouillé mis au bout
d'une perche, avec lequel les boulangers balaient les
cendres et la braise du four avant d'enfourner le
pain. — Par extension, l'épithète de nâs s'applique
aux femmes sales dans leur ménage ou dans leur
tenue. — « Cette fille est une nâs. »
Navette, ou Semelle, s. f., espèce de gâteau
ou craquelin fabriqué par certains boulangers des
environs de Rennes, qui le vendent le vendredi et
le samedi. On les appelle semelles, parce qu'ils en ont
la forme. Leur prix est de 10 centimes. (Voy. Ba-
jciil).
Nénet ou Nénai, s. m., sein. Se trouve dans
plusieurs auteurs, A. Ricard, Gavarni, etc. : « Petite
maman s'est fait des nénais avec du coton. » (Enfants
terribles).
SARTHE, NORM. : iicncf, m. sg.
Net, s. f.. pour nuit. — « Quelle heure était-il?
— Je ne sais pas au juste, mais il faisait net. »
Net comme torchette. (pron. nette), locution
populaire, pour exprimer un nettoyage complet, une
— 2)7 —
exquise propreté ; « Ce ménage, cette batterie de
cuisine, tout cela est uct coiiniiL' torchcllc. »
Niaf, s. m., qualification injurieuse donnée aux
savetiers et aux mauvais cordonniers. — Les Pari-
siens disent «•///(// ; ils se rapprochent plus que nous
de l'étymologie, si, comme le prétend P. Borel, elle
vient du grec gnafô (cnapljto), racler ou ratisser du
vieux cuir. (Voy. gniaf),
Nicher (Se), v. pron., se marier, faire son nid.
— « Le jeune K..., qui était sans fortune, s'est bien
niché en épousant la fille du banquier L...; mais
Mlle M... s'est bien mal nichée en épousant son
cousin. »
Nijon, adj., se dit d'un ouvrage d'une exécution
délicate et difficile. — « Vous faites-là. Mademoi-
selle, un ouvrage de patience ; c'est bien )iijO}t. » —
Se dit aussi pour mignon : « Q.ue cet enfant est
nijon ! »
SARTHE : nijon, ni. sg.
Wijot, s. m., fruitier où l'on met les pommes, les
poires, en attendant leur parfaite maturité. — Mettre
les fruits à nijot. — Vient évidemment de nid, parce
que le nijot est, autant que possible, caché pour être
soustrait au pillage des enfants. — Gare le nijot et la
nijotlèe si les garçailles peuvent le découvrir ! — On
appelle aussi nijot l'endroit où la poule a l'habitude
de pondre son œuf.
17
— 258 —
Nijottée, s. f., tous les fruits déposes dans le
iiijot.
Nijotter, v. a., mettre des fruits à nijol. On ne
met à nijotter que les fruits susceptibles d'être conser-
vés jusqu'à l'arrière-saison.
Nilloux, ouse, adj., frileux. — « C'est un
Jiilloiix. «
Noble (Champ-). Voy. champ.
Noc, s. m., tronc d'arbre creusé pour faciliter
récoulement des eaux.
BESCH. : noc, gouttière ; tuyau en bois pour l'écoule-
ment des eaux. — xorm. : noc, no, canal en bois pour
l'écoulement des eaux. — Vieux Fr. : no, auge de
moulin. Noc, gouttière, nocciis. Nocq, baquet, cuvier.
Noces, s. f. pi., bouillie de farine d'avoine cuite
à l'eau. Le gruau, sur lequel on verse de l'eau tiède,
est pressé dans un sas ou tamis, et la farine liquide
reçue dans un bassin. C'est cette farine cuite qui fait
les noces, bouillie très délicate, recommandée aux
convalescents et aux personnes malades de la poi-
trine. Les marchandes de noces sont en même temps
marchandes de galettes de blé noir, de cailles et
quelques-unes de maingaux. (Voy. ces mots).
Dans mon enfance, les marchandes envoyaient un
petit garçon parcourir les rues de leur quartier, en
criant : « Aux noces ! chez la mère X... ; allons vite
aux noces, toutes chaudes et vite ! » Il était payé de sa
- 259 -
peine d'une ccuellce de itoccs, et avait en outre la
cuillère à lécher. — Dans la rue d'Antrain, un petit
drôle, auquel peut-être on avait lait la leçon, modi-
fiait ainsi son cri : u Aux noces ! dans le derrière à
Mani'selle J...., etc. » ; la marchande demeurait au
fond d'une cour (souvenir de mon enfance). — Au-
jourd'hui et depuis longtemps déjà, les acheteurs se
rendent chez la faiseuse. — A Saint-Malo, les noces
s'appellent gigoiidaines.
Noces (Retour de), fête, repas donné aux jeunes
époux par les personnes qui ont été invitées à leur
noce. Dans la classe riche, le retour de noces est
donné individuellement ; dans la classe ouvrière, on
se cotise pour faire les frais de la fête.
Noçoux, s. m. ; fém. tioçousc, gens de la noce.
Nœud d'échiné, s. m., vertèbre de l'épine
dorsale.
Noms. — On pourrait faire, sur les noms patro-
nymiques de notre pays et sur leur origine, une
étude qui ne manquerait pas d'intérêt ; mais je ne
m'en sens pas la force. Ceux de nos plus anciennes
familles nobles étaient des plus comiïiuns ; je crois
inutile d'en donner ici des exemples.
En Basse-Bretagne, le k barré qui se prononce ker
et qui signifie ville, lieu, forme la première syllabe de
certains noms, (Kermarec, Kerjégu, Kerisouet), tandis
— 26o —
qu'en Normandie la syllabe correspondante, ville, se
trouve placée à la fin du nom.
Nona, adv., non, par opposition à sia, oui. —
0 V'iez-vous veni' quante ma ? — Noua ou nauni. »
(On emploie l'un ou l'autre).
Vieux Fr. : nouai, nanal, iieiml, non, non pas.
Nonne, s. f., petit fer placé au bas de la toupie
(jeu d'enlant) et sur lequel elle tournoie. (Voy.
moine).
Nonnerie, s. f. Le peuple rennais donne encore
ce nom au marché au blé, parce que la halle où il se
tient est construite non loin d'un couvent de nanties
(ursulines), et sur l'emplacement d'une église (Eglise
de Toussaints), qui, à l'époque de la Révolution, fut
détruite par un incendie. Le couvent fut supprimé à
cette époque, et ses derniers vestiges viennent de
tomber sous la pioche des démolisseurs pour faire
place à des constructions neuves (1877). — a Le
blé vaut tant à la nonnerie. »
Marteville, dans son Histoire de Rennes (2^ vol. p.
203), prétend que c'est par corruption que le peuple
appelle ce marché a la nonerie » ; son vrai nom
serait « Vannonerie, (annonariœ,) » nom que les Ro-
mains donnaient aux provinces qui leur fournissaient
du blé.
Nosille ou Nousille, s. f., noisette Cnous
disons nosetle). — « Jeunes filles et garçons allaient
— 26l —
cueillir la iwsilh' dans les bois b . — Noisille dans Rab.
Pant. ch. 61.
SARTHE, NORM. : IWlIsilk. — CENTRE : HOUSillc, iwi-
siïle.
Nosoux, ouse, adj., timide, qui n'ose pas. —
« Vot'e petit gas est nosoux, sa petite sœur n'est pas
si nosouse ».
Nouassu, ue, adj., noueux. — Le bois de
chauflfage nouassu est préférable au bois franc. —
Une planche nouassue est défectueuse.
CENTRE : nouasseiix, 7iouassoux, adj. se dit du bois qui
offre des protubérances, des loups, des nœuds extérieurs,
des nouasses.
Nouées (Sources). Voy. Sources.
Nourri, s. m., abrégé de nourriture, appliqué
aux racines, aux plantes fourragères et à toute den-
rée servant à l'alimentation des animaux et particu-
lièrement des bestiaux. — « Si la sécheresse se pro-
longe, le beurre sera cher ; car nos vaches manquent
de nourri. »
CENTRE : nourri, herbage ou fourrage, m. sg.
Nunu, ue, adj., appliqué aux personnes minu-
tieuses, pointilleuses, vétilleuses, qui veulent la per-
fection en toutes choses. — « Ah ! rna chère, si tu
savais comme madame est nunue et dithcile à servir ! »
— Nunu se dit aussi d'une personne peu intelligente
— 202 —
et lente dans les choses du ménage. — Dans quelques
communes on appelle aussi ininu la fleur de la
digitale. (Voy. catiolle).
NOR.M. : niiniis, bagatelles, frivolités, niaiseries.
O, prép., avec ; fréquemment employée par les
écrivains des XV^ et XVI^ siècles, et toujours usitée
chez nos paysans : — « O l'advis et oppinion des
cy-devant nommez que on mectrait de par M^s de la
ville un troncq iermant à ciel et claveure... (Rennes,
21 oct. 1523). — Oies avis et opinions des d. présents
ont été choisiz pour assister aux estaz... ("18 sept.
1524). » (Extrait des Procès-verbaux de la munici-
palité de Rennes).
Aujourd'hui, nos paysans disent : a II a o qua
(avec quoi). — Je suis revenu o lu (avec lui). — Il
s'en fut 0 tout (il emporta tout avec lui) ».
O, prononcé an ou aou, répond à oui. — Voici un
exemple de l'emploi de ce mot dans ses deux signifi-
cations : « Perrine ! — 0 (oui). — V'n'ous quante
ma ? (\\niez-vous avec moi ?) — Nanni (non),
j'n'irai point o vous (avec vous). »
— 263 —
NORM. : 0, avec. — Vieux Fr. : 0, avec. — O, oui :
« ne disent 0 ne non » (duc).
Ober ou Hober, v. a., remuer, ébranler ; se-
couer un arbre pour en faire tomber les fruits. —
« Ces pommes n'ont point été ohées, mais seines,
cueillies à la main. » — On ne ohe, on ne gaule que
les fruits, qui ne sont pas destinés à être mis au frui-
tier. — « Toutes ses dents obent, comme les touches
d'une épinette. » — Ce mot semble venir du latin
oiire. — « Ma commère du haut bout, je ohe du
c... pour vous (je me lève pour trinquer à votre
santé), » (Les poissardes de Rennes).
Obée, s. f., (ou hobée), résultat produit ou à pro-
duire par l'action de ohcr. — Aller à la ohêe. — Les
poires, les pommes, meurtries dans leur chute, pro-
viennent d'une obêe.
Offignoux, ouse, adj., personne à qui tout ré-
pugne, qui a danger de tout. (Voy. danger). —
Offignoux est surtout usité à Saint-Malo et aux envi-
rons. — « Les plus offignoux sont les plus crasseux. »
(Dicton pop.). — Ailleurs orfignoiix. — Voy. Ren-
fignonx.
Ogu, ue, adj., aisé, riche ; avec la négative, pau-
vre, misérable. — « J'ai connu X.., dans l'aisance ;
mais aujourd'hui il n'est pas ogu ; tant s'en faut. »
— Plus usité dans le second cas.
Oïe ou Oye, s. f., infirmités, misères. — «Olle
— 264 —
(elle) a mille oïcs, la pauvre femme.» Cette expression
est surtout employée dans le canton de Pleine-Fou-
gères (Arr. de St-Malo).
Oquelle ou Hoquelle, s. t. ; les cuisinières
appelaient autrefois de ce nom ce que les modernes
appellent financière ou pâté chaud. Oquelle, fort usité
il y a 50 ans, a vieilli. — Il existait à Rennes, au
commencement du siècle, un pâtissier-traiteur nommé
G , qui avait la spécialité des meilleures hoqiielles.
Il s'était fait une véritable réputation avec ces excel-
lents petits pâtés, et il y avait toujours foule chez lui
à l'heure où les hoqitelles sortaient du four.
Orage. Goût d'orage, goût particulier que prend
le beurre par un temps orageux. — a Votre beurre
ne vaut rien, ma brave femme, il a goût d'orage. »
— « C'est la faute du temps, répond la pa3'sanne. »
Orbe, adj., privé de soleil. — Se dit principale-
ment d'une pièce de terre, d'un verger, d'un jardin
aspectés au nord, ou trop couverts de grands arbres,
et dans lesquels ne pénètrent que rarement les rayons
du soleil.
Orbière, s. f. , ombre. — a Cette plante de-
mande du soleil et vous l'avez mise à Vorhihe. »
TRÈv. : orbe s'est dit autrefois pour obscur, caché. —
DUC. : orbns, obsciirus, ieiiebrosus. Orha iabenia, cabaret
borgne. — Orbus liens, cul-de-sac. Vieux Fr. : orbe :
(( orbe et oscure est la meslée. » — Orbemeut, obscuré-
ment.
— 265 —
Orceul, au pluriel Orceux, s. m., nom générique
donné à tous les vases, à tous les récipients employés
dans le ménage, pots, plats, assiettes, etc. — « Si cette
servante continue, il ne restera bientôt plus un orceul
dans la maison. » — Semble venir du latin urceus,
vase, marmite.
Vielix Fr. : orccl, orceaii, vase, pot. Orcellns, orceohis,
urceus, urceolus.
Orde, adj., sale, en désordre. — a Qiielle maison
orde, mal tenue ! » — C'est un diminutif d'ordure,
mais il est peu usité.
CENTRE : orde, m. sg. S'est écrit horde. — acad. : ord,
orde, vilain, sale. Il est vieux. — besch. : ord, orde,
vilain, sale. Vieux et inus. Se trouve dans Ronsard. —
TRÈv. -.ord, sale, puaut. Il est vieux. — norm. : orde-
ment, salement. — duc. : ordtis, deforiiiis, sordidus. —
Ordura, ordure. — Ord, sale, vilain, puant.
Orée, s. f., coin, cornière. Ce vieux mot, qu'on
trouve dans les œuvres de Bernardin de Saint-Pierre
et de Chateaubriand, est toujours très usité dans ce
pays-ci : L'orée du champ, du bois. — Par extension,
il est synonyme de morceau : Une orée de veau, de
lard, etc.
ACAD. : orée,\e bord, la lisière d'un bois. Il est vieux.
— NORM. : orée, orière, entrée, bord, lisière. — Vieux
Fr. : orée, oreille, orière, ouraiUe,hoTd, lisière (à'unhois).
Oreria, aureria. Lat. or a.
Orgeul, s. m., pour orgelet, petite tumeur qui
survient au bord de l'œil. — J'avais souvent des
orgeiih étant jeune.
— 266 —
Orine, s. f., abrégé de origine. S'emploie surtout
en parlant des animaux de race. — « Ce veau, ce poulet
sont de bonne orine. d — S'appliquant à l'homme, il
se prend en mauvaise part : « Il n'est pas étonnant
que son gars lui ressemble ; il est de son 07ine. »
TRÙv. : orim, vieux mot, pour origine. (Chron. de
Bertrand Duguesclin). — norm. : orine, origne, sorte,
espèce, origine. — centre : Mettre en orine, — origne,
fournir les éléments d'une chose, — Vieux Fr. : oriiic,
ourinc. (duc).
Orive, adj. m. et f., plante, fruit précoce. Voy.
Anrive.
Oua, particule négative, équivalant à un non éner-
gique. — « Croyez-vous que C... épouse sa cou-
« sine ? — Otia ! personne n'y croit. » — C'est le
ouais de Molière, mais avec une autre signification,
ouais exprimant seulement l'étonnement : « ouais f
« voyez-vous cela ? »
Ouanne. On désigne par ce mot l'année courante ;
antannc désigne l'année précédente. (Voy. antanue.)
Oudaner, v. n., perdre son temps.
Oué-dus, adj. m. et f., sourd. — «Il ou elle est
oué-dus.i^ — Composé des deux mots ouir, entendre,
et dus, dur, qui entend dur, qui a l'ouie dure. —
« Huchez plus haut, il est oué-dus. » — On dit aussi
ouc-gouttc.
Ouère, s. m., peigne à démêler (Bécherel).
— 267 —
Oustal, ou Houstal, s. m., maison, demeu-
rance. — « Quand j'arrivis à Voiistal, je le vis ense-
veli. » (Vieille chanson). — Ce mot a vieilli, et
bientôt on ne l'entendra plus chez nous. — Ottstal
semble une corruption du vieux mot oust (camp). —
Dans quelques localités on disait oiisteau, dans d'autres
oiistel. ^— a Que boyrons-nous par ces déserts ? Car
Julian Auguste et tout son otist y moururent de soif.»
(Rab.) — Dans le Roman de la Rose on trouve
le verbe hostchr pour loger. — De ce mot houstal,
hostekr, sont venus ceux-ci : hôtelier, hôtellerie, qui
déjà ont vieilli ; puis hôte, hôtel.
Sire Cueno, j'ai vielle
Devant vous en votre osté.
Traduction :
Sire comte, j'ai joué de la vielle
Devant vous, en votre hôtel,
(Colin Muset, XIII" S.).
Quand je vieng à mon hosié.
(Le même).
J'ai trouvé dans un Noél ancien le mot hosteati, qui
n'est autre que houstal :
Je trouvai Marie alors, nau^ nau,
A genoux devant la crèche,
Et l'asnon et le bœuf que l'enfant bêche,
Joseph avec un peu de mèche
Eclairait parmi Vhosicaii, nau, nau.
On voit que le poète a dit hosteau pour les besoins
— 268 —
• de la rime terminant en eau ; dans les autres couplets
du Noël : mortel, mortcau ; — messie, nwssian ; —
paternel, paterneau.
Dans le récit d'une fête populaire à Lodève, en
1885, j'ai trouvé cette phrase : « Je participais
« au bonheur de ceux qui m'entouraient ; j'avais
« oublié où j'étais pour me croire près de moiin ous-
« /(//. » — Ce mot, devenu ici hors d'usage, est
donc encore conservé dans le midi.
Ovale, s. f., auge servant aux chevaux.
Pachu, ue, s., paysan grossier, lourdaud, ou
inintelligent. Se dit en mauvaise part. — « C'est
\\npac]}u.r> — Rarement employé au féminin.
Paiche ou Pêche, s. m., moineau, — Ailleurs
pierrot. — Du latin passer, nous avons fait paiche ;
nous disons paiche de balai, « sicut passer solitarius in
teclo » (Ps. loi), et nous appelons paiche de haie le
friquet ou moineau des champs. — Ainsi en pro-
nonçant paisse, on a le mot latin a peine altéré.
BESCH. : paisse, ancien nom du moineau coiiimun. —
— 269 —
TRÈv. : paisse ou passe, vieux mot, passereau, moineau,
passer. — sarthe : paisse, m. sg. — duc, : passa. —
Paisse, passe (an'jou).
Pail S. m., poil, cheveu. C'est seulement la
voyelle 0 changée en a. — Se prendre au pail. —
Pail de pourcel, soie de porc. — Pail rouge. — Le
plus souvent, on ne prononce pas /; « La damnée
vache iiaire me hoiisit dans le pa » (vieille chanson).
— Du cidre qui perle dans les verres on dit « qu'il
a des lentes dans le pa. » — Se sacquer au pa, ou (/;(
pail se tirer aux cheveux. — (On prononce indis-
tinctement pa, pail ou pck).
Pain à chant, s. m., pain à cacheter des lettres.
L'hostie est faite de pain à chaut, ou pain azyme.
BESCH. : Pain à chauler.
Palis, s. m., sorte de pelle à l'usage des carriers,
sablonniers, etc. — Ne pas confondre le palis avec la
pelle des jardiniers. — (On prononce paJi).
Panne, s. f., grande cuve en terre ou en bois,
qui sert aux blanchisseuses pour foire la lessive. —
Mettre le linge en pauiie.
BESCH. : Panne, cuvier de bois pour lessiver les toiles
neuves (Anjou). — (duc). Panna, grand chaudron.
Papier-boit, s. m., papier brouillard ou papier
gris ; ainsi appelé, parce qu'il hoit l'encre. 11 y a
trente ans, ce papier était fabriqué avec les plus
grossiers chifïons, et de la même pâte que le carton
brut. Rennes en possédait une fabrique sur la rivière
de rille, rive droite, à 60 mètres environ de l'abreu-
voir situé à l'entrée du canal. — Aujourd'hui, le
papier-hoit n'existe plus. Il a été remplacé par le
papier de soie, et un autre papier sans colle dont
sont faits les buvards. (Voy. Boitte).
Parachier, s. m., bourrelier. — Usité dans les
Côtes-du-Nord.
Parafe, s. f., premier tour de la charrue pour
faire le sillon. Le dernier tour se nomme curaude.
(V. ce mot).
Parbatte, s. f., le dernier jour de la vendange,
la fin de travaux qui exigent plusieurs jours ou plu-
sieurs semaines. — « C'est demain que nous ferons
\a parhattc.i) — A Saint-Malo on dit nicolaiîles. — A
Hédé, barhatte .
Parche, s. f. Parcheux, adj. — La parche est
l'enveloppe ou la cosse des pois, des fèves, ou encore
le fil par lequel sont retenues les deux parties de l'en-
veloppe. — Les pois sont parcheux lorsque la cosse
dure et sèche rend la mastication difficile ou pénible.
— Les paysans mangent en même temps le grain et
la cosse des pois ronds et des pois de rame. — Parche
doit être une abréviation de parchemin.
Parer, v. a., nettoyer, ratisser, enlever les mau-
vaises herbes des allées des jardins, opération qui se
— 271 —
fait avec la paroire, ou petite pelle en fer. — « Voilà
des allées bien parées. »
Paré, part, passé du verbe parer, est souveut em-
ployé avec l'auxiliaire être dans ce sens ; Je suis
paré, c'est-à-dire je suis hors de danger; — il esl paré,
il est sorti d'un mauvais pas.
NORM. : Etre paré, être à l'abri d'un danger redouté.
Par exemple, excl. qui exprime l'étonnement,
l'incrédulité, le refus d'obtempérer à une demande.
Ainsi : — « On vient de m'apprendre le mariage de
M. J... avec M"e K.... Par exemple ! cela n'est pas
croyable. » — « Vous voulez faire cela ? Par exemple !
vous n'en ferez rien. »
Parfinir, v. a. parfaire, parachever un ouvrage, y
mettre la dernière main.
NORM. : Parfinir, m. sg. — besch. : A la paifiii, s'est
dit pour enfin.
Parpied, s. m., empreinte du pied de la bête sur
le sol. — « Voilà le parpied du cerf. » — Ternie de
chasse.
Parrainage, s. m. De parrain nous avons fait
parrainage, comme de commère commérage , de com-
père, compérage. — «Je suis déjà le parrain de dix
enfants, j'en ai assez du parrainage. »
BESCH. : Parrainage, qualité, rapports de parrain, de
marraine.
— 272 —
Passée, s. f., veine, bonne ou mauvaisse pusse.
Passer en dommage, se dit des bestiaux qui
passent dans la propriété du voisin et v causent du
dommage. — « Ses vaches sont passées en dommage
dans mon champ ; ça va lui coûter chaud. »
SARTHE : Etre en lioiinnage, m. sg.
Pataud, aude, nom donné par les Chouans aux
Républicains à l'époque de la Révolution (la grande).
L'épithètc de chouan s'applique encore aux partisans
de la royauté ; mais aujourd'hui les patauds sont
appelés radicaux. RadicaiUe exprime d'une façon plus
énergique encore le mépris des Royalistes pour les
Républicains (1878).
Bien que le nom de pataud soit rayé depuis plus
de cinquante ans du vocabulaire politique, j'ai cru
devoir lui donner place dans ce recueil, en souvenir
des refrains ci-après que j'ai entendus dans mon
enfance :
Tandis que la gucrr' durera,
L'chahut d'pataud d'bonhomme,
Taudis que la guerr' durera,
L'chahut d'pataud d'bonhomme
Nous nourrira.
Autre
Le général Bobril, il crie à haute voix
A haut, à haut, à haut !
Vous crèverez dans vos villes,
Mauvais patauds,
— 273 —
Tout comme des chenilles,
Les pattes en haut.
Les femmes des républicains étaient des patauJes,
non moins méprisables que leurs maris aux yeux de
leurs ennemis.
Pâtou, s. m., pâtre, au féminin pdtoure, enfant
qui garde les troupeaux dans les pâturages. — M.
J,..., avocat, employa dans une plaidoirie le mot
pdtoiiresse, ce qui provoqua l'hilarité de l'auditoire.
« Eh pourquoi, s'écria-t--il, ne dirait-on pas
pdtotircsse, l'on dit bien pdtoii. » — Si encore il
avait employé le mot pdtoiireUe, qu'on dit quelque-
fois !
TRÉv. : Piistour, pastoure, (vieux moi), berger, bergère,
pasteur, pastor. — sarthe : pnlour. — norm. : Pastoii,
pàtoiir, berger. — centre : Pàtour, petit pâtre, ancien-
nement pastouy.
Paud, Paut ou Pault, s. m., court bâton,
dont la partie inférieure porte un gros nœud ou ma-
rotte. (V. ce mot). Espèce de casse-tête, arme terri-
ble que le paysan bas-breton nomme peu-bas, bâton
à tête. — Paud rend assez bien le bruit sourd que
produit le coup de ce bâton ; c'est de l'harmonie
imitative !...
CENTRE : Pau, pieu, pour pal. — trév. : En plusieurs
endroits les campagnards disent pau pour pal et pieu :
palus, paxillns.
Paumée, s. f., ce que peuvent contenir les deux
18
— 274 —
mains rapprochées. Certains fruits, les châtaignes, les
pois, etc., se mesurent à h paîiince quand il s'agit de
faire des parts égales entre co-partageants. — A
défaut de balances, le partage se fait à la paumée.
Pauniche ou Poniche, s. f., taloche, mau-
vais coup. — « N'allez point vous mêler de leur
querelle, vous pourriez bien gober (attraper) pauni-
che. »
Pavée, s. f., espèce de glaïeul plat et coupant
qui croît sur les bords de nos fossés et de nos étangs.
BESCH. : Pavée, nom vulgaire de la digitale pourprée.
Pêcher, v. n., marcher dans l'eau, dans la boue.
— « Le chemin est mauvais ; passez par le champ,
si vous ne voulez pas pêcher. » — Pécher dans le
bouillon (dans la boue), se crotter.
Pêches-mares, s. m. pi., gros souliers, gros
sabots, avec lesquels on peut quasiment braver les
bas chemins. — « Faites-ma de bons pèches-mares o
des dents de vache et de grousses maillettes. »
Pecque, s. f., bec des petits oiseaux. — A peine
sortis de la coquille, que déjcà ils ouvrent la pecque.
Pècre, adj., acide, aigre, sûr. — « Ce fruit est
pècre. Les groseilles à grappes sont pècres. — Une
personne qui a la voix criarde, perçante, a la voix
pècre.
— 275 —
Peignée, s. f. Se donner une peignée, se prendre
aux cheveux.
BESCH. : Peignée, m. sg. Peigner, se peigner. — centre :
Peignée, pignée, volée de coups.
Peillot, s. m., guenille, vieux chiffon. — On le
dit, par extension, de la crème ou peau qui se forme
sur le lait bouilli. — « Surtout, la petite mère, mettez-
y du peillot (sous-entendu : dans mon calé.) » — Nos
couturières ont très peu d'estime pour les repasseu-
ses ; elles les appellent hrûk-pc'dJot .
Peillotoux, ouse, s. Les pciUotoux sont des
gens déguenilléb et mal vêtus : « Aux noces de notre
fermier, nous dansâmes comme des pciUotoux. » —
Les marchands de chiffons, de vieux habits, les
marchandes d'os, de peaux de lièvre ou de lapin ^
sont aussi des peillotoux.
Allons, jeunes filles.
Vendez vos guenilles,
Et vous, beaux garçons.
Vos vieux pantalons
A la mèr' Goujon.
(Anciens cris de Rennes).
Le peillotoux se livrait autrefois dans les campagnes
à un commerce plus lucratif. Moyennant un fichu faux
teint, ou un bijou sans valeur, la jeune fille lui
abandonnait sa plus belle parure, sa chevelure. De-
puis longtemps nos paysannes se sont affinées, et ne
— 276 —
livrent leurs chignons qu'à beaux deniers comptants.
(1889).
Vieux Fr. : Pcilk, morceau, chiffon de papier (duc).
Peineler, v. n., avoir de la peine à faire ses
affaires, tirer le diable par la queue.
Peinelier, s. m., de peineler. Le peinelier n'est
pas seulement l'homme de peine, mais un homme
qui vit misérablement, et dont le salaire suffit à peine
pour nourrir sa famille. — « C'est un pauvre peine-
lier. »
Pêlette, s. f., petit poêlon en terre ou en métal.
C'est dans une pêlette qu'on fait la bouillie des enfants.
— Nos paysans donnent le nom de pêlette, ou queue
de pêlette au têtard de grenouille, dont la forme est,
en effet, assez semblable à celle d'un petit poêlon.
BESCH. : poHette, petite poêle.
Pelisse, s. f., partie mince du morceau de veau
appelé le bout gras ou le gîte à la noix. — Pelisse
vient sans doute de peau, parce que cette partie du
morceau est très peu charnue et tant soit peu filan-
dreuse.
Pelisse, s. f., bande de gazon prise dans les
forrières des champs ou sur les revers des fossés, pour
talusser, consolider un ouvrage en terre. La pelisse,
qui vient sans doute de peler (le gazon), convient
mieux que le mortier pour ces sortes de travaux.
— 277 —
Pelotin, s. m., pluie fine. Plus usité à Fougères
qu'à Rennes.
Penacher, v. n., manger malproprement.
Penacheux, ou mieux Penachoux, ouse,
adj., qui mange malproprement. — « Le vilain !
voyez sa. goùle, voyez ses mains, comme elles sont
penachoiises, (c.-à-d., gluantes, poisseuses) ! »
Pendrillée, s. f., de peiuiilli'r, choses qui retom-
bent en grappes, en chapelets. Des pcudriUc'cs de {ruits,
de saucisses, etc.
On voyait aux côtés de cette demoiselle
Pendiller une large et profonde escarcelle.
(Ronsard.)
Penette, femme bigote, très utile à l'église à la-
quelle elle consacre tout son temps, souvent au détri-
ment de son ménage. Le plus souvent c'est une reli-
gieuse du tiers-ordre, ou bonne sœur en plein vent.
Comme son nom semble l'indiquer, personne ne se
donne plus de peine que la penette pour son propre
salut et pour celui de son prochain ; elle en remon-
tre à son curé. Elle a le don d'ubiquité ; on la ren-
contre partout ; elle sait tout, et son pieux zèle en
fait le meilleur reporter du presbytère.
Le mot penette n'a point de masculin, quoique bon
nombre d'hommes soient dignes de le porter, Mo-
lière les a baptisés d'un autre nom.
Je connais des prêtres qui n'aiment pas les penettes.
— 278 —
— Dans la Sarthe on les appelle biquettes. — Dans
l'an-ondissement de Fougères, penette est synonyme
de plaisanterie.
Pénille, s. f., laine effilochée et cardée provenant
de vieux habits — Cette laine, filée et tissée à
nouveau, est employée dans la confection de vête-
ments grossiers. Nos paysannes portent encore des
tabliers, des cotillons de pcnilh. Cependant le bon
marché des étoffes, joint au prix élevé de la main
d'œuvre, a rendu moins fréquents l'usage et l'emploi
de la pèiiUlc.
CENTRE : pêiiillcs, mauv.iises bardes, guenilles.
Pentecôte, s. f., petite fleur de couleurs variées,
de forme pyramidale, qui croît en abondance dans
nos prairies. Elle fait son apparition dès le mois de
mai. Son nom botanique est orchis.
SARTHE : peutccôtc, m. sg. — centre : pcnlecoute, sorte
d'orchis.
Pépé, s. m. ; c'est ce petit nom que les en-
fants de mon temps donnaient à leurs grands-pères,
comme nous appelions mêiiics nos grand'mamans.
Aujourd'hui ils disent petit pcre (pour le père) ;
grand' père (pour l'aïeul).
Péroine, s. f., femme bavarde, commère.
Perreyoux, s. m., nom donné aux ouvriers
- 279 — .
employés dans les perrières ou carrières, à l'extrac-
tion de la pierre, du sable, etc.
Perrière, s. f., carrière de pierres, de sable ou
d'ardoises. D'après le savant Littré, en Anjou on
nomme perrières les carrières d'ardoises ; chez nous
ce nom -s'applique à toutes les carrières sans distinc-
tion.
Nous avons ici plusieurs perrières : 1° Le peuple
nomme encore perrière le Bourg-l'Evêque ou Fau-
bourg de Brest, qui a dû être une ancienne carrière,
comme semble l'indiquer la déclivité du sol. —
2° Les perrières de Coësmes, carrière de pavé, sur le
territoire de Cesson. — 3° La perrière de Pince-Poche
au sud de ce même village. — Nous avions encore
les perrières de Beaumont, carrières de sable, sur l'em-
placement desquelles on vient de construire une
splendide forteresse, destinée à renfermer des
femmes pécheresses. (1878).
BESCH, : perrière, (vieux mot), carrière. — sarthe : per-
rière, m. sg. — CENTRE : perrière, carrière de pjerres. —
Vieux Fr. : perrière, carrière, petraria (duc).
Perrot, s. m., diminutif de perroquet. — M™'-
R avait un perrot fort ennuyeux pour son voisi-
nage, bien qu'il sût son credo sur le bout du doigt.
— Nous appelons aussi perrot, sans doute à cause de
sa belle couleur verte, une petite cigale qu'on trouve
dans nos blés. — Ne^ de perrot, nez incliné vers la
bouche : « Il a un nez de perrot. »
BEScn. : pevrot se dit pour perroquet.
Perruque, s. f., employé au figuré pour répri-
mande, semonce. — « Il a reçu de son patron une
perruque bien méritée. — Perruque, dans ce sens, est
syn. de poil, savon, galop, suif.
BESCH. : perruque, m. sg.
Pertroubler, v. a., troubler. — Dans son Panta-
gruel, ch. X. Liv. VIII, Rabelais a dit : o car
homme vertueux au monde n'est qui naturellement
et par raison plus ne soit en son sens perturbé. »
BESCH. : pcrtrouhler , Se pertroubler , inusités. — Vieux
Fr. : pertroubler, troubler (duc).
Pesche, s. m., passereau. (V. Paîche).
Pesé (Lait), lait baratté, ou lait de beurre, passé
ou égûutté dans un tamis ; ce qui reste de la partie
solide, mélangé avec du lait doux ou des viaiiigaux
(Voy. ce mot) est nommé lait pesé par nos cuisi-
nières.
Pessard, s. m., nom donné à une plante verte,
grimpante, qui croît abondamment dans nos haies. Les
enfants s'amusent à en jeter malicieusement sur les
habits des passants, auxquels elle s'attache fortement,
d'où lui vient son nom de pessard, de poisser, qui
poisse. — Grattcrou ou Glateron dans Rab. (Pantag.
ch. XVI.)
Pesser, v. m. Ce verbe a deux significations
— 28l —
bien différentes. Dans l'une, il est dit pour poisser,
coller: — « La glu pesse aux dais (doigts). » — « Ces
deux objets sont pessés l'un contre l'autre ». — Se dit
aussi pour geler, glacer. » Le froid est vif, il va pcsscr
cette nuit, W pesse déjà. » — Dans sa seconde acception,
il signifie tirer ou pousser fortement, employer la
force pour faire un ouvrage, en un mot, donner un
coup de collier, un bon coup d'épaule. « Haie a ta,
tire à ta, pesse. . . et à haut ! »
NORM. : peisscr, poisser.
Pétasse, s. f., Petassier, ière, homme ou
femme qui s'attache à des riens ; minutieux. —
Est à peu près synonyme de herdassc, herdassicr.
Petasser, v. n., s'attacher à des minuties, à des
choses insignifiantes. — a Ah ! ma pauvre femme, te
voilà encore qui pétasses. »
SARTHE. : pelasse, pctasson. — centre : petasser, petassier.
Petit-fait, locution très usitée, qui s'applique
surtout à la femme peu capable de tenir sa maison,
son ménage. — « M™^ L.... est une bonne personne ;
elle aime son mari, ses enfants ; mais c'est un petit-
fait. »
Petit-Jean, s. m. Nos paysans donnent ce nom
aux fiirfadets, aux gnomes, aux esprits malins qui ont
des accointances avec le diable. Il est imprudent de
se brouiller avec Petit-Jean, ou de douter de sa puis-
sance. Une femme, (et cela s'est vu !...) barattera des
— 282 —
heures entières sans pouvoir obtenir de beurre. Un
charretier trouvera, en se levant, les crins de ses
chevaux tellement brouillés qu'il lui sera impossible
de les démêler C'est Petit- Jean qui sera rendu
responsable de ces méfaits. — Petit-Jean prendra,
au contraire, sous sa protection les faibles qui l'au-
ront imploré.
Petit-peta, jeu d'enfants. Dans quelques petits
jeux, le joueur pris en défout donne un gage. Lors-
qu'il s'agit de le retirer, il subit une pénitence parfois
assez douce. La tête appuyée sur les genoux d'une
dame, une main ouverte derrière le dos, il reçoit de
petits coups accompagnés de cette question : « Petit-
peta, qui embrassera là ? » Quand il a répondu
« moi », il va embrasser la personne ou l'objet dési-
gnés, et rentre en possession de son gage et de sa
liberté.
Pétoire, s. f., petit tube en bois de su (sureau),
que fabriquent les petits garçons. Ce tube, long de
20 à 25 centimètres, est bouché à l'une de ses extré-
mités par un petit tampon de filasse ; chassé par
l'autre bout avec une baguette en bois, ce tampon,
par suite de la compression de l'air à l'intérieur du
tube, est lancé comme une balle à une assez grande
hauteur. L'explosion que produit ce petit canon a
valu à l'instrument le nom de pétoire. C'était, dans
mon enfance, un jeu fort à la mode.
— 283 —
Petonton, s. m., et f., homme ou femme qui
ne s'occupe que de vétilles, qui tracasse pour des
riens. — Est à peu près synonyme de petassier.
Petron-minette et Petron-Jacquet. — On
emploie l'une ou l'autre de ces expressions pour
désigner une personne matinale : pdron-ininette comme
les chats*, petron- Jacquet comme les jardiniers. —
a Fanchon est une vaillante ménagère ; elle se lève
dès le petron-minette. «
Je crois connaître l'étymologie de cette locution,
petron-J acquêt. De tous les travailleurs, le jardinier est
sans contredit le plus matineux. Dès 3 heures du matin
en été, 5 heures en hiver, il apporte ses légumes au mar-
ché. Ce marché se tenait, avant la construction des
halles des Lices, sur la place du Champ-Jacquet et dans
les rues adjacentes ; de là petron-Jacquet, goule de Champ-
Jacquet, dictons encore en usage dans le monde des
regrattières et des petits marchands. On se lève dans
ce monde-là dès le petron-Jacquet . — Les uns disent
pétro ; d'autres pêtron.
II se pourrait aussi que cette locution nous vînt de
Normandie, où l'écureuil est appelé Jacquet ; car je
trouve dans Littré qu'on l'emploie également chez
nos voisins ; seulement ils disent patron-Jacquet, et
non petron.
SARTHE : Patron minette. — norm. : Pairon-Jacqiiet. —
CENTRE : Se lever à patron- Jacquet.
Peuton, s. m., gros ver blanc qui se transforme
— 284 —
en hanneton. (La Guerche). — A Rennes, c'est le
turc. (V. ce mot).
Peux, s. m. pi. Les Malouins nomment peux la
bouillie de gruau que nous appelons groux. (V. ce
mot). — Le mot peux trouve son étymologie dans le
petit bruit que produit la bouillie lorsqu'elle est en
ébullition. C'est un mot imitatif, une onomatopée
(comme disent les savants).
Phalle, Voy. Faïe.
Phips, s. m., mélange de liqueurs. Ce mot, d'ori-
gine récente, a dû être importé chez nous par un
étranger.
Piacher, v. a., mâcher, manger du bout des
dents. — « Privé d'appétit, le pauvre malade piachait
les aliments sans pouvoir avaler. » (Voy. Piacher).
Piafferie, s. f., denrée, étoffe, marchandise de
mauvaise qualité ou d'un mauvais usage. — o Cela
semblait bon, mais ce n'était que du clinquant, de la
piafferie. » — « Madame n'aime que le beau, et n'a-
chète point de piafferie. »
Picard, s. m. Les gueux donnent ce nom aux
poux qui les piquent. — « Adsi, picard, » disait un
vieux mendiant en faisant le tour de gueux, « tourne
ton dos vers le mien, tes jambes me blessent. » —
Le « tour de gueux » est un certain mouvement du
corps qui a pour effet de déplacer l'insecte importun.
— 28s —
Pichet, s. m,, cruche à bec, en terre commune,
dans laquelle les gens du peuple mettent leur piot.
(Voy. ce mot.) — « Dites, vaisin, si j' vidions cor
un aut'c pichet ?» — a Allons, beuvons, et pée (et
puis) nous z'n'allons. »
BESCH. : Pichet, sorte de broc. — trév. : Pichet, picher,
piché. — SARTHE : Pichet. — norm. -.pichet, servant de
bouteiOe à cidre. — centre : Pichet, petit broc de terre,
pot à eau. — (duc). Picarium, picherius, picher, pichier,
vase à mettre les liqueurs ; mesure.
Picot, s. m., plantoir des jardiniers. — Avec le
plantoir, on plante des choux, des betteraves, le colza,
le tabac, etc.; mais avec le picot, on pique les pois,
les salades.
Piécette, s. f., pièce d'étoffe qui se trouve à la
partie supérieure du tablier des femmes, et qui
garnit la poitrine.
Pie-courte (Danser la), c'est sauter à pieds-
joints, accroupi sur ses jarrets. Ce mouvement rap-
pelle celui que font les pies qui sautillent. —
M. Duhamel, de l'Institut, quoique très âgé, aimait
encore cet exercice qui entretient la souplesse des
membres. Dans ses voyages à Rennes, j'ai quelque-
fois dansé la pie-courte avec lui.
Pied-de-banc, s. m., grand pied plat. — Le
docteur R.., quoique de petite taille, a des pieds-de-
banc longs d'une coudée. — Les troupiers donnent
le nom de pied de banc au chevron qui orne la man-
che d'un soldat rengagé.
Pigaler, v. a., piétiner, fouler avec les pieds. —
« Cet animal a pigalè les plates-bandes de mon
jardin. » (Voy. un exemple cité au mot Blaterie),
Piger, V. a., pincer, attraper. Ce mot, assez
moderne, n'est guère employé qu'à la ville, dans les
cafés et autres lieux fréquentés par les étudiants.
Etre pigé au jeu, c'est perdre. — Un écolier dira :
« Je vas IQ piger (te corriger, te battre). » — Ce mot
est français dans un autre sens, qui, du reste, se
rapproche un peu de celui qu'on lui donne ici (terme
du jeu de bouchon : piger, mesurer quel est le palet
le plus près du bouchon). — On sait que le mot
pigeon s'emploie pour désigner la dupe d'un fripon.
CENTRE : piger, m. sg. — xorm. : piger, battre, rosser.
Piglé, ée, adj., ayant un visage taché de rous-
seurs. — « Elle serait jolie, si elle n'était piglèe. »
(Voy. Piverté.)
Pignard, adj., au iém.,pignette, au p\ur. pignoux ;
enfants pleureurs, pleurnicheurs. On dit aussi
pignoche.
Pigner, v. n., pleurer, pleurnicher. — «Quelen-
fLtnt désagréable pour pigner toujours !» — Se dit
aussi d'une personne maladive, d'une santé délicate,
qui se plaint : « Elle n'est pas précisément malade,
— 287 —
mais elle pignc toujours. » — « Q.ui pignc vit ».
(Proverbe).
KORM. : pigiicr, crier eu pleurant, se lamenter bruyam-
ment.
Pile, S. f., synonyme de volée, brûlée, raclée,
flaupée, tripotée, etc.... — « Il a reçu une pile soi-
gnée. »*
CENTRE : pile, m. sg.
Piler, v. n., marcher sur, piétiner. — « Prenez
0 donc garde. Monsieur, vous pih'i sur ma robe. »
— Madame T.... fut reconnue comme Rennaise,
pour s'être servie de cette locution dans un salon
de Paris, (i) — Nos petits enfants, dansant en rond
sur la pelouse, chantent :
Passe par ici et moi par là,
L'herbe piléc reviendra.
Pilons, pilons, pilons l'herbe,
L'herbe pilée reviendra.
BESCH. : SARTHE : pil*r, m. sg. — n'orm. : piler, mar-
cher, mettre le pied sur... — centre : piler, tasser,
fouler, presser.
Pile-miche, s. m., grand mangeur.
Piler du poivre, locution pop., être gêné dans sa
marche, par sa chaussure, à la suite d'une longue
(i) On reconnaît encore une Rennaise par ces locutions
toutes locales : — « Une pierre de sucre. » — « Quelle heure
est-il ? — «Le quart moins de midi. »
î88
course, ou pour toute autre cause. — « Il est temps
d'arriver, mon ami, vous pilc^ du poivre. »
Pincé, ée, adj., fat; serré dans ses habits, dans
son corset ; prétentieux dans sa mise, dans sa
démarche. — « Il se donne un air pincé qui ne lui va
guère. » — Voy. sucrée.
ACAD. : pincé, qui a un .air d'iifféterie.
Pinçon, s. m. On appelle ainsi à Vitré l'onglée
ou l'engourdissement des doigts par le froid. — Vient
de pincer ; le froid piquant vous pince. — A Rennes
on appelle aussi pinçon le fait de se pincer un doigt, ce
qui laisse un bleu sans entamer la chair ; mais dans
ce sens il est français.
SARTHE : Plnçonnce, m. sg.
Pineau, s. m., pièce de monnaie de la plus mi-
nime valeur, le denier, le liard, aujourd'hui le cen-
time. — « Il était sage, pourvu qu'il n'eût pas un
pineau dans sa poche. »
Rabelais donnait ce nom au bon vin blanc de Chi-
BEScn. : pineau, misin petit et noir dont on fait le
meilleur vin de Bourgogne.
Pinter, v. n. Du substantif /)/«/<' nos buveurs ont
fait le verbe pinter. — « Le bonhomme aimait 'a pinter
avec ses amis, » c. à. d. à vider les pintes.
ACAD. : Pinter, faire débauche de vin. Pop. — centre :
Pintcnr, buveur.
— 289 —
Pionne, s. f. corvée, prestation en nature. —
C'est en rechignant que le paysan s'en va à la
pionne.
Piot, s. m. C'était du temps de Rabelais « la
« purée septembrale. » C'est encore chez nous le
cidre. -^ « Ah ! mon ami, quel bon piol ! » — Ce
mot restera éternellement jeune c'est-à-dire tant
que les Rennais boiront du cidre.
ACAD. : Piot, vin. Pop. <i C'est un homme qui aime le
piot. » — BESCH. : Piot, vin. Aimer lepiot. Vieux et pop.
Se trouve dans Regnard. — trév. : Piot, terme bur-
lesque qui signifie le vin. — norm. : Piot, cidre. Pioter,
boire à l'excès.
Pipée, s. f. C'est le contenu d'une pipe. Nos
paysans disent : fumer une p'pcc, deux pipccs. Je
trouve qu'ils ont eu raison de créer ce mot, et qu'ils
sont plus rationnels que l'habitant des villes qui dit :
fumer une pipe, puisque ce n'est pas le contenant,
mais bien le contenu qui est fumé. — « Camarade,
donne-moi une pipée de tabac. » — « Avez-vous
connu le père Jean, qui était toujours en quête d'une
pipée ? »
Piper, V. n., quelquefois employé ^owr fumer.
Pipoux, s. m., fumeur. Se dit en mauvaise part
d'un homme qui a toujours la pipe à la bouche.
Piqueron, s. m., dard, aiguillon, épine. — « J'ai
un piqueron dans le doigt. » — Les abeilles, les
19
— 290 —
guêpes, quand elles vous piquent, laissent leur
piqucnvi dans la plaie.
Pirlipipet, s. m., expression usitée dans le jeu du
giiillct. (Voy. ce mot). Faire/i/V/^^/^Jt'/, c'est faire sauter
en Tair le giiilkt et le recevoir plusieurs fois sur la
raclette ou baguette avant qu'il ne retombe à terre.
(Nous disons raclette pour raquette.) — On donne
aussi quelquefois au giiilkt lui-même le nom de pirli-
pipet ou de pirli.
N'ORM. : pii'U, jeu des enfants.
Piroton, s. m., petite oie. Une couvée de
piratons. — En Saintonge on dit piron. — Par exten-
sion, nous appelons piratons une bande de petits
enfants. — Il e.xiste une espèce d'oiseau du nom de
pirot.
BESCH. : piron, jeune oie^ oison. — sarthe : pirottc,
petite oie. — norm. : pirot, petit de l'oie, oison. Pirolle,
oie femelle. — centre : piron, oison, quelquefois l'oie.
Pirvire. Cuire un morceau de viande à la
pirvire, c'est le faire cuire suspendu devant le feu par
une ficelle, qui, en tournant, fait office de tourne-
broche. — On appelle aussi pirvire un toton, sorte
de bouton plat, en bois, traversé par une cheville ser-
vant de pivot sur lequel on le fait tourner avec une
grande rapidité.
Pirvire, ée, adj., vif, colère, écervelé, qui tourne,
— 291 —
va et vient, s'évertuant pour ne rien faire de bien.
C'est le supcrblalif de l'irc. (Voy. ce mot).
Pisse-pourceau, s. m., lambin, lent à la
besogne. (Liquide qui ne tombe que goutte à goutte).
— Ce mot est très-imitatif.
Pitau, s. m. C'est le jeu du bouchon, que nous
appelons aussi la drue, la galoche. (V. ces mots).
Piverté, ée, adj., visagepmT/t', tachéde rousseurs.
Est syn.depiglc. (V. ce mot). Piverté vient évidemment
de pivert ; le plumage de cet oiseau est en effet mou-
cheté comme la peau du visage chez quelques indi-
vidus.
Placard, s. m. Nous appelons ainsi les billets ou
invitations à un enterrement. — « La mortalité a été
grande cet hiver ; en rentrant chez soi, on était à
peu près sûr d'y trouver un placard. »
Place, s. f., plancher, sol de l'appartement. —
xVu saut du lit on met le pied dans la place. — On
balaie la place.
CEXTRE : XORM. : place, m. sg.
Placher, Piacher, v. a., mâcher avec peine,
tourner avec la langue les morceaux sans pouvoir les
avaler. C'est le verbe français pignocher. — Placher
châtaigne, c'est dire à une personne ce qu'on a sur le
cœur, lui adresser de vifs reproches. «Je vais lui
placher châtaigne. » (Dicton pop.)
— 292 —
Placis, s. m., petite place. — Devant une église
c'est le parvis. Nous avons à Rennes le placis Saint-
Germain, h placis Saint-Sauveur, de Toussaints, de
TronjoUy, etc.
Placré, ée, adj., ressemblant; d'une ressemblance
parfaite. — « Cet enfant, c'est son père tout placrè.t)
— « Vra3'ment, c'estes vous tout poché. » (Maître
Patlielin).
Plaisant, adj., employé à l'égard d'une per-
sonne avenante, aimable. — « Voilà une jeune fille
bien plaisante. » — « Cette habitation est plaisante. »
NORM. : plaisant, agréable, qui plaît, avenant. — centre :
plaisant, m. sg. (Voir Rabelais).
Plante (Avoir), avoir pied dans l'eau. — «Ne
vous baignez pas au Cabinet-Vert (l'une des baignades
de Rennes) ; car vous n'y ave\ pas plante, ou : // n'y
a pas plante. »
Plée, s. f., pluie. — ti La plée va cor cher anet ».
(il va encore pleuvoir aujourd'hui).
CENTRE : plciie, pluie.
Plein (tout), beaucoup, grande quantité. Cette
locution est employée à la ville comme à la cam-
pagne. — « Il y avait tout plein de monde hier à la
procession du Sacre. » On trouve cette expression
dans Montaigne.
ACAD. : Tout plein, beaucoup. Très fam.
— 293 —
Pluche, s. f., laine cardée et filée, provenant de
vieux habits. — Syn. dt penille. (Voy. ce mot).
Plumas, s. m., ailes coupées des oies, avec les-
quelles les ménagères balaient les cendres du foyer.
Cet ustensile remplace, dans les petits ménages, le
balai ou le plumeau. 11 est souvent emporté sous les
meubles par le chat ou par le chien, qui y trouvent
encore quelque chose à roucher : — « Et fuyaient
à la roupte reguardans derrière soy, comme ung
chien qui emporte un plumail. » — (Rab. Gargan-
tua, ch. 35^. — C'est surtout avec les ailes droites
des oies qu'on fait les plumas, parce qu'elles sont plus
cfamain. (V. ce mot.) — o Où va-t-elle ainsi trahier
SQS plumas ? » terme de mépris à l'égard d'une femme
affichant un luxe de toilette qui n'est pas en rapport
avec sa position sociale, ou qui, par exemple, portera
des plumes à son chapeau.
SARTHE : plumas, m. sg. — xorm. : pleiunas, plumas,
petit balai de plumes. — centre : plcumas, pleumat,
pleitmasseau, plumeau consistant en une aile d'oie ou
autre volaille.
Pocard, s. m. C'est le nom que les écoliers
donnent au pâté ou tache d'encre, qui s'appelle aussi
pochoii. — On reconnaît les mauvais écoliers aux
nombreux pocards dont leurs cahiers sont couverts.
XORM. : pochard, pochet, pâté, goutte d'encre sur un
papier.
Poche, s. f., petit cidre fait avec la lie restée au
— 294 —
fond des tonneaux. — Dans mon enfance, les pauvres
gens payaient cette boisson deux liards le litre ou un
sou le pot. On pouvait alors se griser à bon marché
(heureux temps !), cav h\ poche ne laissait pas que
d'être très capiteuse. — Aux environs de Saint-Malo
on dit poiiclic.
Poche, s. f., faux pli des habits. — Se dit par
extension des rides de la peau du visage et des mains.
— « Bonhomme, bonhomme, à qui la face po-
chonne ! » (Cri des enfants).
Pochon, s. m., petit sac en papier ou en toile,
— « Il serrait son argent dans un pochon. n
Pochonnée, s. f., contenu du pochon. — Une
pochoiim'e de bonbons, de raisins, de farine, de mon-
naie, etc.
Pochonner, v. a., garder quelque chose dans
ses poches. — Il est des fruits qui gagnent à être
pochonnès ; tels sont les cormes, les olives, qui attei-
gnent plus vite leur maturité. — Le verbe pochonner
es* aussi emploj-é dans un autre sens, avoir des plis,
des rides ; il dérive alors dt poche. (Voy. poche).
Pocre, s. f., grosse main. S'emploie surtout au
pluriel. « Quelles pocres il a ! » — Dans le monde
élégant (!) on dit d'une personne pourvue àt pocres,
qu'elle a des ahalis canailles,
Poganne, adj. m. et f. C'est une personne peu
— 295 -
propre ou peu soigneuse, espèce de colin-tampon,
dans tout ce qui tient aux choses' de la cuisine.
Vers 1814, Rennes possédait un faisoux (fabricant)
de galettes du nom deNelleau, et surnommé Poganne,
qui est resté légendaire. Ce surnom lui avait été
donné sans doute parce que sa profession est tou-
jours exercée par des femmes. Il ne s'en fâchait pas
d'ailleurs, et répondait volontiers au nom de Poganiie.
Son échoppe, située sur l'emplacement d'une maison
qu'il fit bâtir plus tard rue Beaurepaire ou Motte-
Fablet, et qui porte le n° 6, était, à l'heure de midi,
le rendez-vous des étudiants et des ouvriers des deux
sexes, qui s'y régalaient à peu de frais. Un petit
journal ayant pour titre Le Foyer, (i) qui parut à
Rennes en 1837 et qui s'éteignit en 1842, consacra à
Poganneun article fort élogieux. « Pogaime, y est-il dit,
à ses autres qualités ajoutait celle d'un bon patriote.
Lorsque les Prussiens occupèrent Rennes en 18 14 et
181 5, il leur refusa toujours sa porte et sa marchan-
dise. » Cet article avait pour épigraphe les deux vers
suivants, parodie de deux vers de la Satire III de
Boilcau :
(i) Le Foyer, journal-programme du théâtre, était rédigé
par un groupe de jeunes étudiants des Facuhés de Rennes.
C'est dans ce petit journal, qui eut souvent maille à partir
tant avec la municipalité qu'avec les directeurs et artistes des
troupes dramatiques et lyriques, qu'un poète ùe vingt ans,
devenu célèbre, publia ses premiers vers, qui n'ont, — je
me hâte de le dire, — aucun rapport avec ceux qui lui ont
valu plus tard un des quarante fauteuils de l'Académie fran-
çaise. — J'ai nommé I.econte de Lisle.
— 296 —
« Pogaune c'est tout dire, et dans le monde entier
a Jamais oncques ne fut un meilleur galetier. »
Poganner, v. a., syn. de tamponner, travailler
malproprement tout ce qui se manipule avec les
mains. — « C'est mal fait, c'est poganne. » — « Ne
poganiie^ pas ma marchandise. »
Pogannier, ière, adj., qm poganne.
Pogassier, ière, adj. Ces trois mots poganne,
pogannicr, pogassier, sont à peu près synonymes ;
cependant le dernier n'a pas tout-à-tait la même
signification : il s'applique à la personne qui farfouille
et prend à pleines mains et brutalement les choses
ou les objets fragiles et délicats : « Vas-tu b'entôt
fini', vilain pogassier, j'vas l'dire à la bourgeoise
sens tes dats à c't'houre-ci (à présent). »
Poignart, s. m., jeune plant d'arbre fruitier,
dont le pied, vers son milieu, a la grosseur du poi-
gnet, peut être saisi avec la main fermée. Se dit par-
ticulièrement du jeune pommier propre à recevoir la
greffe. — Les baux ruraux contiennent presque tou-
jours cette clause : « Les pommiers morts seront
remplacés par des entons /wo-Hrt;/5, que le preneur
greffera et garantira pris. »
Poigne, s. f., abréviation de poignet. Ce mot est
toujours accompagné des adjectifs bon, solide. —
« C'est un gars qui nous donnera un fameux coup
— 297 -
de main, car il a une bonne poigne. » — Prononcez
pogue, comme dans poignet.
ACAD. : poigiic, mot pop., la force du poignet. — norm. :
pogiie, main, étreinte de la main, la force du poignet.
poignie, poignée.
Poil, S. m., réprimande. — Voy. ses synonymes :
galop, perruque, savon, suif.
Poires du Bon-Dieu, s. f. pi., nom donné
par le peuple au fruit rouge de l'aubépine ou épine
blanche.
Pois de raies, s. m. pi. On appelle ainsi les
haricots verts, pour les distinguer des haricots rames,
et parce qu'ils sont piqués en raies.
Polka, s. f, — Les femmes des environs de Rennes
ont donné ce nom au bonnet qui, depuis quelques
années, a remplacé la catioUe qu'elles portaient de
temps immémorial. — Pourquoi ont-elles emprunté
ce nom à l'espèce de danse introduite dans nos salons
il y a une trentaine d'années ?Je l'ignore absolument.
Toute recherche pour le savoir serait, je crois, infruc-
tueuse. (Voy. CatioJk.)
Ponace, s. f., derrière de la poule, par où elle
pond son œuf. — Nos gamins disent, par extension :
« Je vas te soulever la ponace. » (Je vas te donner
du pied au derrière).
Ponée, s. f., couvée, et, par extension, grand
— 298 —
nombre d'enfants. — a Plus les pauvres gens tirent
dur (plus ils sont misérables), plus ils ont de ponée. »
— On comprend que ce mot vient de pondre.
CENTRE : poncr, ponncr, pounev, pondre.
Poniche, s. f. , taloche, horion, mauvais coup-
(V. Pauniche).
Poquette s. f. , étui de forme ronde, dans lequel
les femmes renferment leurs aiguilles et leurs épin-
gles. Il nous vient sans doute de l'anglais pocket,
poche. Dans quelques communes de l'arrondissement
de Saint-Malo, la poqiuite est une èpilloiière, (de épilles
épingles). — Au siècle dernier, on donnait encore ce
nom à une petite viole à l'usage des maîtres à danser.
(C'est la pochette.)
Portail, s. m., grande porte extérieure s'ouvrant
à deux battants ; ainsi : la porte cochcre. Au plur.
les portails.
SARTHE : portail, m. sg. — norm. : portai, portail,
grande porte, porte charretière, porte cochère. —
CENTRE : portai, portau, m. sg.
Possaud, aude, s., personne qui mange iTialpro-
prement, qui répand sur ses habits, qui prend avec ses
doigts dans son assiette. — « Voyez ce petit possaud
mal élevé qui mourvc dans son écuelle. »
Possauder, v. n., faire des saletés en mangeant.
Possauderies, s. f. pi., saletés, incongruités
— 299 —
filites par les possaiids à table ou ailleurs. — Ne s'em-
ploie guère qu'au pluriel.
Pot"eau, s. m. ; des trois mois pot-à-Veau, nous
avons fait pot-eau ; les gens du peuple prononcent
pot-iau. — Le pot-eau est une cruche en terre de forme
allongée. — « Encore un pot-eau de cassé ! »
Pouceyer, v. a., presser avec le pouce. Se dit
surtout de la pression exercée sur certains fruits,
pêches, pommes, poires, pour s'assurer de leur
maturité. — Les marchandes défendent aux acheteurs
de poueeyer leurs marchandises, elles ont raison ; car,
outre la trace que laisse le pouce de sa pression, le
fruit est bientôt gâté à l'endroit de cette meurtrissure.
Poue, s. f. , peur. — « Ah ! que vous m'avez
fait poue ! » — « Je ne suis pas mort de ma der-
nière poue. »
N'ayes point paour, mon varlet,
Moi qui suis ton père Raulet.
(Farce de maistre Mimin, 16" s.)
II sue de paour qu'il a.
(Le même).
NORM. : Poiw, poc, peux, peur. Forme ancienne, pour,
paour (pavor).
Poué, S. m., pou. — Rabelais nomme les poux
éparviers de Montagu ; nous les appelons aussi picards.
(Voy. ce mot). — « Va, fainéant, vaurien^ si tu
continues, les pouès te mangeront. »
— 300 —
Pouerre ou Pouherre, s. m., petit cochon. —
Dans quelques localités on nomme aussi poiicrre la
herse à dents de bois dont se servent les agriculteurs.
Pouerre est aussi du genre masculin dans cette der-
nière signification.
Pouherser, v. a., qu'il ne faut pas confondre
avec J.k'rscr. (V. ce mot). Après un labeur profond
avec la charrue, on emploie la herse pour prendre
en travers les sillons et rejeter les terres dans les
raies ; cela s'appelle /'o«^«-5^r. Après cette opération,
on passe le rouleau, et le sol est dès lors en état de
recevoir la semence.
Pouillard, s. m., jeune perdreau qui n'a pas
encore toutes ses plumes. Terme de chasseur.
NORM. : pouillard, m. sg.
Pouillement, s. m., vêtement. C'est particuliè-
ment la veste du paysan, la brassière de sa femme, ou
vêtement à manches,
Pouiller, v. a. — Se pouiller, se vêtir, endosser
le vêtement à manches. — Pouiller sa veste, son
corsage.
SARTHE, NORM. : poiiilkr, m. sg.
Pouillerie, s. f., chose ou objet de mauvaise
qualité ou de qualité inférieure. Se dit surtout des
denrées, des étoffes de rebut. — « C'est de la pouille-
rie, »
— 301 -
BF.SCH. : pcuillcrie, grande malpropreté, extrême pau-
vreté. — NORM. : poiiilleiic, action de vaurien. — cen-
tre : poiiillcrie, misère profonde, Foiiilloii, s. m.
taudis.
Poulette, s. f. ampoule, cloche (cloque) qui sur-
vient aux pieds ou aux mains à la suite d'une longue
marche^ ou d'un travail forcé.
SARTHE, NORM., CENTRE : pOllIfttc, m. Sg.
Poupette, s. f., coiffure des paysannes dans le
canton de Chàteaugiron (lUe-et- Vilaine). Les pou-
pettcs, comme les catiolles, tendent à faire place à la
polka, (V. ce tnot). Cela est regrettable ; car cette
coiffure est assez gracieuse, étant généralement bien
portée par les femmes de ce pays.
Pouponner, v. n., prendre soin dus poupons. —
Telles bonnes n'aiment pas servir dans les ménages
où il ftut poKponiier ; telles autres, au contraire,
aiment à pouponner, et s'attachent avec une ten-
dresse toute maternelle aux petits enfants dont elles
ont pris soin.
Pourcel, s. m., (plur. :/w/;7rw/(.v,) porc, cochon.
— Au I2« siècle, on écrivait /Jora-/, porciaux.
NORM. : pourchiau, m. sg.
Pourcousser, v. a., pourchasser. — alWtpour-
coussait à travers champs sans pouvoir l'atteindre. »
NORM, : pourcacher, m. sg.
— 302 —
Pourfiche, s. f., instrument de fer en forme de
spatule, pour enlever l'écorce du chanvre ou du lin,
avant de lui faire subir l'opération du slan. (V. ce
mot).
Pourfire, v. a., terme de maçon, de terrassier ;
enduire les murs de terre ou de plâtre. (Norm.)
Pourginée, s. f. , poussinée, grand nombre
d'enfants. — « On rencontre souvent mon ami B...
au Thabor, suivi de toute sa pourginc'e. » — On dit
aussi quelquefois, mais plus rarement hourginêe.
Vieux Fr. : ponrgine, race, progéniture. Progeiiics
(duc).
Pouroux, ouse, adj., peureux, euse. — (Voy.
ponc.)
NOR.M. : pourciix. m. sg.
Pourpris, s. m., terrain ou verger attenant à la
ferme ou à la maison de campagne.
BESCH. : pourpris, enceinte, enclos, demeure. (V. La
Font). Vieux mot. — trév. : pourpris, vieux mot qui
signifi.iit enclos, enceinte, clôture de quelque lieu sei-
gneurial, château, maison noble, église. Conscptum.
Dans le pays de Caux on appelle encore manoir et
pourpris l'enceinte des maisons à la campagne qui appar-
tient à l'ainé par préciput. Le pourpris d'un camp, etc.
— Vieux Fr. : pourprinse, pourpris, pourprissure, enclos,
enceinte, lieu fermé de murs ou de haies, porprisum. —
l'orprcheudcre, pourprendre, environner, entourer, —
(duc).
— 303 —
Pourrir, v. n., pour aboutir. Se dit d'un mal
blanc arrivant à maturité.
Pousser, v. a., donner à ses enfants une éduca-
tion tendant à les élever à une position supérieure à
celle des parents. — «Notre jardinier s'est imposé des
privations pour pousser ses garçons ; il en a fait des
prêtres*. » — On dit ironiquement d'un jeune homme
qui a renoncé à poursuivre au séminaire ses études
ecclésiastiques : « Il a poussé contre l'Eglise. »
Poussiéreux, euse, — Poussiéroux, ouse,
couvert de poussière.
CENTRE, NORM. : poussiéreiix, m. sg. — BESCH. : poussié-
reux, m. sg. — Poudreux est préférable.
Pouteriaux, s. m. pi., soliveaux d'une maison.
Poutrelles, petites poutres.
Prangère ou Prangière, s. f. On donne ce
nom à la sieste ou repos des laboureurs après le
pranditiiii.
Vieux Fr. : Prangière, l'heure du dîner.
Prêcher, v. n., souvent employé dans nos cam-
pagnes, pour parler, causer agréablement. — a C'est
un homme qui a d'I'esprit et o^xA prêche b'en. »
NORM. : Pn'chicr, prcchi, parler sentencieusement, ou
simp. parler.
Préchouaire, s. m., chaire à prêcher.
Prée, s. f., féminin Aq pré. Nos tabellions l'em-
— 304 —
ploient encore quelquefois dans leurs actes : o Le
champ de devant borné au nord par la prèc de la Pie,
à l'est..,. »
« Je vous rens grâce, ô déitez sacrées
« Des monts, des eau.x, des forests et àts prccs. »
(Philippe Desportes. 1546).
« Il dort au bruit de l'eau qui court parmi les prèes. »
(Ronsard.)
« Mais errant par les bois, par les monts, par les pvccs. »
(Ronsard.)
Prévalaye (La). — Ce petit castel, célèbre par ses
pâturages (i), et illustré par le séjour qu'y fit
Henry IV au mois de mai 1598, doit sans doute son
nom à la réunion des deux mots Prée, Vallée. Il est
en effet situé dans la vallée de la Vilaine, à 3 kilom.
à l'ouest de Rennes. Déjà, en cet endroit, la Vilaine
n'est plus « vilaine ». C'est un charmant petit fleuve
encadré de délicieuses prairies dans une grande partie
de son cours.
Dans une promenade que je fis un jour sur ses
bords avec mon vieil ami E...., celui-ci s'indignait
contre les géographes qui avaient baptisé d'un aussi
vilain nom notre belle Vilaine, et il improvisa le
quatrain suivant que j'ai retenu et que je suis heu-
(i) Notre beurre de La Prévalaye jouit d'une réputation
égale, sinon supérieure, au beurre d'Isigny.
— 305 —
reux de reproduire ici, bien que la prosodie ait un
peu à souffrir :
Vilaine, dites-vous ? cpithète menteuse.
Tes eaux sont argentées, tes rives sont ombreuses,
Ton nom est trop modeste, et je tiens pour certain
Q.ue s'il y a vilain, ce n'est que ton parrain.
SARTHE : CENTRE : Prée, m. sg. — norm. : Piei, s. m.
pré.
Prénoms, Il en est des prénoms comme
des chiffons des dames : c'est aff'aire de mode. Jadis
on ne trouvait dans les maisons aristocratiques que
des Raoul, des Raymond, des Godefroy, etc. Plus tard
le bas peuple s'appropria ces prénoms, dès lors ils
furent abandonnés par la noblesse et la haute bour-
geoisie, qui sont revenues aux noms les plus simples
du calendrier. C'est aujourd'hui dans « la haute classe »
qu'on rencontre les Jean, les Jacques et les Pierre ;
c'est dans la chaumière ou dans l'atelier qu'on trouve
les autres.
Deux prénoms sont souvent réunis de façon à
n'en former qu'un seul : Jean-Marie, Marie-Jeanne,
Marie-Anne (Marianne), Jean-Louis, etc.
Nous donnons ci-après quelques noms de baptême
des plus populaires, à la suite du nom du saint
auquel ils sont empruntés. La différence entre eux
est telle parfois que les étrangers ne pourraient s'y
reconnaître.
20
— 3o6 —
Anne, Nanon, Ninette, Ninon, Nancy ou Nannecy.
Antoine, Tony.
Berthe, Bétrannc ou Bcriranne.
Etiennette, Tiennette, Toinon.
François, Francin, Francis, Francisque, Chinaud,
pron. Chinao (environs de St-Malo).
Françoise, Fanchette, Fanchon, Fancbonne, Francine,
Franchonne, Cbonne, Chonnette (environs
de St-Malo).
Gilles, Gillette, Gilonne.
Guillaume, Yaume, Yanmé, Yaumi. — Mêtau. —
au féminin : Métine, Guillemette.
Hélène, Léno.
Jacques, Jacqiiot, au féminin : Jacqueline, Jacquetle.
Jean, Jeannot.
Jeanne, Jeannette, Jeanneton.
JoACHiM, Hoche.
Joseph, Joson.
Julie, Juliotte, Jiilion.
Julien, Jnliot.
Louis, Louisic.
Louise, Louison.
Marguerite, Marguîle, Margot, Gothon.
Marie, Manette, Manon, Marion.
Marie-Louise, Marlise,
Mathurin, Mathau, Matlin, Thurin.
Mathurine, Thurine, Thiiriche.
Michel, Michet, Michaud, Michon.
Perrine, Peluche, Perrette, Perrolte, Pépce, (Tler-
guerj, (environs de St-Malo).
— ,0/ —
Pierre, Pelot, Pipi, Pierrot.
Reine, Reinette.
Renée, Noton, Renoite.
Sébastien, Sébastienne, Bastien, Basticnnc.
Suzanne, SuÂ^ette, Stt~oii.
Yves, Yvon, Yvonic. — Yvonne, Yvonnette.
Bon nombre de ces prénoms populaires, encore
très communs dans mon enfonce, tendent à dispa-
raître.
Presse, s. f., battant d'une porte. — Une paire
de presses, les deux battants d'une armoire. — En
anglais : press, armoire.
NORM. : presse, sorte d'armoire basse.
Présumablement, adv. — Ce mot nous vient
de nos voisins de Normandie ; il pourrait être adopté
par l'Académie, et personne ne s'en plaindrait.
BESCH. : présumablement, m. sg. — Peu usité.
Prime, adj., m. et f., se dit des fruits, légumes,
produits de la terre qui végètent et mûrissent au
commencement de la saison : — Pommes de terre
primes. — Se dit aussi du sol. — Ce jardin est prime,
parce qu'il produit des primeurs.
ACAD. : prime, vieux mot qui signifiait premier. —
BESCH, : prime, syn. de précoce.
Procule, s. f., procuration. — « Je li ai envayé
— 3o8 —
ma prociûc pour toucher m'n hcrie (mon hcri-
tage).
NORM. : proculteux, procureur, proloculor. Procure, pro-
curation. Vieux Fr. : procuUerres, procureur. Procurator.
(duc).
Pruneau, s. m., nom que les marins bretons
donnent à leur chique de tabac, à cause de sa forme
et de sa couleur. — « A mon tour, camarade, passe-
moi le pruneau. »
Pruner, v. n., se dit d'une femme qui commence
une grossesse. — « A la nature de ses indispositions,
on devine que la petite voisine /)r»;;t' ». — Dans quel-
ques localités on dit cboircr.
Prussien, s. m., synonyme de derrière. Ce
mot s'emploie surtout depuis 1814, alors que les Prus-
siens occupaient notre ville de Rennes. On dit encore
aujourd'hui tomber sur son prussien. — La triste
guerre de 1870 a encore ajouté à notre antipathie
pour la race allemande, qui d'ailleurs nous le rend
bien. (i).
Puissant, ante, adj., bon, gros, gras, doué d'une
(i). O Déranger ! poète de génie et de bon sens, quand
donc les nations qui se disent chrétiennes pourront elles répé-
ter de concert ton sublime refrain :
Peuples, formez une sainte alliance,
Et donnez-vous la main.
— 309 —
forte corpulence. — La Fontaine l'a employé avec
cette acception dans la fable Le loup et le chien.
ACAD. : puissant, qui a beaucoup d'embonpoint. Fam.
— TRÉv. : puissant, m. sg.
Pungeau, s. m., vase en fer blanc servant à pui-
ser de-l'eau, comme son nom l'indique ; puii^er, pui-
ser. Le pungeau semble aujourd'hui remplacé par les
petits seaux ronds en zinc, dont se servent les Ré-
beccas de nos jours. Peut-être ont-elles tort, car le
pungeau, de forme aplatie comme les arrosoirs des
jardiniers, me semble plus commode à porter. — On
appelle pungeottèe le contenu du pungeau.
Punger, v, a., plonger, puiser. — « Allez pun-
ger de l'eau à la fontaine. »
Puron, s. m., bouton sur la peau et au visage.
— « Les filles n'aimaient point à l'embrassser, par-
ce qu'il avait la face couverte de puions. »
CENTRE : puron, petit bouton purulent.
Q
Qua, pron. conj., quoi. Prononcez ca, — « O
qua, » avec quoi. — « Un p:tit qua, » un peu. —
— 3IO —
a II a de qiia, » il possède quelque chose, une cer-
taine aisance. — a II a de qua faire, » il peut se
sulfirc.
NORM. : quai, m. sg.
Quant, prép., avec. Prononcez qiiante. — « Elle
a décampé quant lu » (Elle est partie avec lui). —
(Norm.) — « Ils font dîner les valets à la table des
maîtres, quant et quant eus. » (Mont.).
Et les forets .1 vu plantes menues
Q.ui quanl cl lui sont vieilles devenues.
(Mellin de Saiut-Gel.iis).
liESCH. : Quant et nous, avec nous. — trév. : quant
s'est dit autrefois et se dit encore en Normandie pour
avec : quant et moi. — norm. : quand et, avec. — CEX-
TRF. : quand et, avec.
Quart moins. — Nous disons à tort : « Il est
le quart moins de midi, » pour : a. il est midi moins
un quart. »
Quem, s. m. Les écoliers de mon teinps disaient
d'un camarade fier ou faisant l'important. « Il fait son
queni. »
Quémander, v. a., mendier, solliciter. — Un
homme dans l'aisance, riche quelquefois, ne dédai-
gnera point de quémander places et faveurs, soit pour
les siens, soit pour lui-même. Le substantif quéman-
deur est peu usité, bien qu'il puisse s'appliquer à bon
nombre de gens.
— 311 -
ACAD., CENTRE : quémander, m. sg. — BESCH. : quéman-
der, quémandeur . Ont vieilli. — trév. : quémcnder . —
— N'ORM. : quémander, commander. Qucmand, quéman-
deur, mendiant.
Quenaille, pron. qu'nailk, s. f., petit enfant. —
« Où allous promener vot' qu'iiaille ? «
SARTHE : quenaille, m. sg. — norm. : quenaille, canaille.
Quenaillon, bambin, petit enfant.
Quéner, v. n., prê'cher, parler. (Vern.)
Queniot, s. m., petit enfant, s'emploie surtout
au pluriel. — « Ne dirait-on pas maman Gigogne
avec tous ses queniots ? » — On appelle quenotles les
dents des enfants. Queniot vient-il de quenottes, ou
quenotte de queniot ?
BESH. : quenotte, dent de petit enfant. Très fam.
Quenot, s. m., mesure de grain ou d'avoine.
Quérée, s. f., viande gâtée ou de mauvaise qua-
lité. — « Ma cuisinière sait choisir les morceaux et
n'achète point de quérée. » — On appelle aussi de ce
vilain nom une femme de mauvaise vie.
Quéri (En-), terme de couvreur. Couverture
d'ardoise en plan vertical.
Quet, ette, adj., chiche, avare. — Ouquet, ette,
est le superlatif de quet. — Cette expression très usi-
tée vient-elle de quêter, quémander, ou du bas-bre-
ton quet, pas, point ? je laisse aux érudits le soin
d'en décider.
— 3^2 —
Quet-quet (Etre en) ; cette expression très
usitée, surtout dans nos villages, s'applique aux per-
sonnes qui manifestent une joie bruyante, expansive,
que rien n'explique. — On dit d'une fille qui agui-
gne les garçons : « Te voilà bien en qitet-quet,
Jeanne, aujourd'hui ! ». — On dit, avec la même
signification : être en débit. (V. ce mot).
Quette, s. f., cuisse. Les chiens lèvent la qtiette
près des bornes.
Quetterons ou Quétrons, s. m. pi., cerises
ou merises tant soit peu desséchées au four, ou tom-
bées de l'arbre. Dans mon enfance, nous achetions
pour un ou deux liards de quetterons, que nous appe-
lions aussi quéquettes. La cerise ainsi desséchée a un
goût très fin. On en servait quelquefois sur la table
des riches. Hélas ! depuis longtemps déjà les quette-
rons ont disparu. Je le regrette pour les enfants.
Queue-de-pêlette, s. f. C'est le nom que, dans
nos campagnes, on donne au têtard avant sa trans-
formation en grenouille. Il est à remarquer qu'il a
en effet la forme d'un petit poêlon. — Rabelais la
nomme gyrine. — J'aime à voir, par un beau temps,
la queue-de-pi'lette frétiller dans nos ruisseaux.
Quinqueuaise, s. f., petite faucille à scier le
blé.
Quo ! exclamation. Le gamin de Rennes l'emploie
dans quelques jeux, par exemple au jeu du guilkt.
— 315 —
— Il dit : « Qiio de la raclette ! » — Oiio du bout !
— Oito de tout ! » C'est une faculté, un droit, que
le joueur se réserve, ' de lancer ou de recevoir le
guiïïet comme il l'entend. — (Voyez le mot Guillct ;
j'y ai écrit : « co de la raclette, co du bout, co de
tout », supposant que co était employé pour coup :
mon lecteur choisira entre les deux orthographes co
ou qiio.)
K,
Rabattre ses quatre mercredis, loc. popul.,
froncer les sourcils, exprimer par cette contraction
du visage sa colère ou sa mauvaise humeur. —
a Quand mon grand père rabattait ses quatre mercre-
dis, il fallait s'observer et se taire. » — Mais pour-
quoi quatre mercredis, puisque nous n'avons que deux
sourcils ? — C'est sans doute qu'on rabat en même
temps les cils de la paupière supérieure. (Voy. mer-
credis).
Rabine, s. f., avenue. — « Il aimait à se prome-
ner dans sa raline. »
BEScii. : iiihine, nom donné dans le Morbihan aux ave-
— 314 —
nues en arbres de futaie. — Vieux Fr. : rahiue, espèce
de bois qu'on n'a pas coutume d'émonder. (duc).
Râcau (En), se dit des chattes en chaleur. —
« Elle est en nicau, vot'e chatte, mère Michelle. » —
Ce mot semble emprunté au latin racha, iou, ou
racarrc, crier comme les tigres.
Raccorder (Se), v. pron., se réconcilier. —
« Brouillés depuis longtemps, les deux frères se sont
raccordés. »
Râche, s. f., gourme, éruption qui survient à la
tête et au visage des petits enfants. — « Tous les
enfants de M'"^ ont eu la rdche. o — D'après un
préjugé populaire, il faut se garder de provoquer
la guérison de la rdchc ; elle doit disparaître natu-
rellement.
Râchoux, ouse, adj., qui a la rdche. « Enfant
rdchoiix. » — Se dit encore d'un objet rugueux au tou-
cher, et encore d'une personne hargneuse et d'un
abord désagréable.
BESCH. : râche, maladie cruptive de la tête. Inus. —
CEXTRE : niche, gale, teigne. — Vieux Fr. : rachc, gale,
teigne, (duc).
Raclée, s. 1., grêle de coups. Syn. de brûlée,
tlaupée, volée.
.\c.\D. : raclée, m. sg. Pop. — centre : raclée, m. sg.
Raclette, s. f., petit bâton aplati à l'un des bouts
— Jl) —
et dont se servent les eniants dans les jeux du giiillct
ou de la tixqiie au bois (la balle) ; c'est aussi la ra-
quette du volant.
Rafale, adj., qui a essuyé les rafales de l'adver-
sité. On reconnaît le rafale à sa tenue de Robert-
Macayre, chapeau effondré, habit graisseux, pantalon
multicolore ; ses bottes éculées reniflent l'eau du
ruisseau. — Lynol et Ricard ont francisé ce mot de-
venu populaire.
NORM. : rafale m. sg. — besch. : rafale, m. sg. Ex-
pression vulgaire, mais .assez usitée.
Rafouin, s. m., odeur qui s'échappe des langes
des enfants au maillot. — « Ne me parlez pas des
mères dont les enfants sentent le rafouin. » — Ce
mot s'applique aussi à l'odeur nauséabonde et carac-
téristique que portent avec elles les personnes mal-
propres. On dit aussi d'une habitation tenue malpro-
prement et peu aérée, qu'elle sent le rcnjernié, qu'elle
sent le rafouin.
Ragaler, v. n., farfouiller, mettre du désordre
dans ses recherches. — « ^'ous ragah'i sans jamais
rien trouver. » — « Les rats et les souris ragalent
dans ma chambre. »
Ragosse, s. f., arbre rabougri. — Souche ou
racine d'un arbre. — Par extension, une personne
grosse, courte et mal faite. — C'est le mot ragot
féminisé.
- 3i6-
Raitiée, s. f., (Prononcez rèciéé). C'est l'après-
midi dans les longs jours de l'année. C'est aussi la
collation ou léger repas que prennent nos laboureurs
sur le lieu de leurs travaux. — Vers deux heures, on
leur porte la raitiêe. — « Que ferons-nous cette
raitièc ? » — — Nous devrions peut-être dire reciée
ou rcssiiT, mais Rabelais lui-même l'orthographie
différemment.
Raitionner, v. n., prendre la raitiêe, la colla-
tion. Rabelais a dit : « puis entrarent en propos
de rcciiicr en propre lieu (Gargantua, liv. 1, ch. 5) ».
— « Vous dictes qu'il n'est desieusner que d'escho-
liers, disner que d'advocatz, rcssiner que de vigne-
rons. » (Pant. liv. i, ch. iG).
Ramasser (Se), v. pron., rentrer chez soi. —
« Sa femme lui faisait des scènes, parce qu'il se ramassait
basse-houre (tard). » — S'emploie aussi comme ver-
be actif. Ramasser son linge, sa récolte, pour serrer,
rentrer, etc.
Ramberge ou Lamberge, s. f., herbe verte
qui croît abondamment dans nos champs après la
récolte du blé noir. Elle est nuisible aux vaches ;
aussi ne les fiùt-on guère pâturer dans les champs où
elle se trouve.
BESCH. : ramhcrge, nom vulgaire de la mercuriale an-
nuelle.
— 317 —
Ramener, v. n., cracher. — « Il niDiàie facile-
ment ; son rhume pourrit. »
Randonnée, s. f., flux de paroles inutiles, gros-
sières ou grondeuses. — « En avez-vous assez dit !
quelle randonnée ! » — C'est le mot français signi-
fiant marche de longue haleine, appliqué à la lan-
aue — « Vous me chantez toujours la même ran-
donnée. »
NORM. : randon, randoiinagc, discours sans fin, rab.îchage
fastidieux. Randomcr, rabâcher. — Vieux Fr. : randn-
uèe, discours, harangue. Randonnée, impétuosité. —
(duc).
Rang (En), se dit des vaches devenues laitières
après avoir vêlé.
Rangeau, s. m., seau en bois de châtaignier
fort en usage chez nous. Je l'écris rangcau parce qu'il
sert à puiser de l'eau, et pour rester fidèle à son éty-
mologie. Le marchand écrirait certainement ranjot.
Le rangeai! et la seille, c'est tout un.
Rangeautée, s. f. C'est le contenu du ran^eau.
— « Va, Jeanne, quérir une rangeautée d'ève, (un
seau d'eau. »
Rangeautier, s. m., fabricant et marchand de
rangeaiix.
Rapiboter (Se), v. pron., à l'usage des écoliers,
regagner en tout ou en partie ce qu'on a perdu au
- 3i8 -
jeu. — (( J'avais perdu mes canettes, mais je me
suis ropibolé. »
Rapide, adj. Nos paysans ont pour cet adjectif
une prédilection toute particulière ; aussi l'emploient-
ils fréquemment. Ils diront d'un ouvrier laborieux,
qu'il est rapide à la besogne. — Un bon cheval est ra-
pide. Cela ne veut pas dire que le cheval marche
rapidement, mais bien qu'il est vigoureux, solide,
dur à la fatigue, et susceptible de donner au besoin
un bon coup de coUier. — Rapide aussi le cidre fort
et capiteux.
Raquette, s. i., jeu d'enfants, formé de deux
morceaux d'ardoise taillés en ovale. L'un de ces
morceaux est placé entre le médius et l'index, l'autre
entre l'index -et le pouce. En les faisant frapper l'un
contre l'autre par un mouvement du poignet, le
joueur de cet instrument primitif, mais peu harmo-
nieux, cherche à imiter les castagnettes espagnoles.
— Ce jouet devient rare.
Ratine, s. f., petite dent d'enfant ; mot enfantin,
mais aussi très usité chez les petites mamans : « Que
n'avé donc à pleurer comme ça, mon mignon ?
N'avé-t-i mal à ses ratines ? »
Ravouillade, s. f., soupe, ragoût ou mets quel-
conque mal préparés, sans saveur, et dans lesquels on
a allongé le bouillon ou la sauce au moyen d'une
addition d'eau trop considérable.
— 319 —
Ravouiller, v. a., allonger la sauce ou le bouillon
en y ajoutant de l'eau. Nos cuisinières connaissent
tous les temps de ce verbe, que trop souvent elles
mettent en pratique.
Rayée, s. f. ; c'est le subst. rayon devenu fémi-
nin chez nous. — C'est une embellie, de courte du-
rée. — r a Une rayée de soula, (un rayon de soleil). »
— Littré a cité dans son dictionnaire cette phrase
empruntée à Emile Souvestre : o Elle avait aperçu
une rayée de poussière oubliée par le plumeau sur un
de mes cartons. » (Souvenirs). J'en demande pardon
à ces illustres auteurs : on ne dit point chez nous
une rayée de poussière, mais une dayée de poussière.
La tenue d'une maison laisse à désirer si vous pou-
vez écrire avec le doigt sur la poussière des meubles,
si, avec les doigts, vous constatez qu'ils n'ont pas été
époussetés. De là le mot dayée employée par nos mé-
nagères. Peut-être l'erreur que je signale est-elle le
tait d'un premier compositeur, qui aura changé le (/
en r ?
CENTRE : rayée, érayée de soulè. — norm. : rayée, rièe,
rayon de soleil qui se fait jour entre les nuages, en
temps couvert.
Rebourser, v. a., corruption de rebrousser, pren-
dre à rebours, revenir sur ses pas. — Montaigne disait
reboucher. (Liv. 2, ch. 12). — Se dit aussi d'une per-
sonne de mauvaise humeur, inabordable: — « du'a-t-
i' donc, le bourgeois ? Il est bien reboursé, ce matin.
— 320 —
C'est une bourrée d'épines. I' s'est levé le derre le
premier, on le vait b'en. » — Au contraire : « En v'ià
un brave homme qui ne rebrousse jamais le monde ! »
Rebouter, v. a., pour renouer, action de re-
mettre une fracture, un membre démis.
Reboutoux, s. m., celui qui fait profession de
redouter, profession que ces empiriques exerçaient
adis ouvertement dans les villes et dans les campa-
aines ; mais aujourd'hui ils opèrent clandestinement,
iravant les poursuites dont ils sont quelquefois l'ob-
et pour exercice illégal de la chirurgie.
CENTRE, NORM. : reboiileur, m. sg. — besch. : reboitieur,
rcnoucur.
Recette, s. f., nom donné par nos cuisinières à
la soupe laite avec la graisse et les jus provenant des
viandes servies dans le courant de la semaine. Dans
les ménages économes, si le bouillon vient à man-
quer, on lait une soupe de recette, qui est bien préfé-
rable à la ravouillade.
Réchaler (Se), v. pron., se réchauffer. — A sa
rentrée, le travailleur aime à se réchaler à une bonne
louée bien flambante.
xoRM. : rccaiiffei-, rcchaiilVer.
Récopir ou Récaupir (Se), v. pron., revenir
à la santé après une longue maladie. — « Voyez
le père Cachet, on le croyait perdu, eh bien ! il se
rccopit. » — « Me voilà recopi. »
— 521 —
Recru, ue, adj., rassasié, repu ; mot picard,
plus usité sur la frontière nord du département que
dans l'arrondissement de Rennes.
ACAD. : recru, harassé, las.
Recteur, s. m., qualification que prennent à tort
nos desservants et nos curés de campagne.
Redarer (Se), v. pron., se pavaner, faire le
beau, l'important. — « Voyez ce personnage, comme
sa démarche est fiére, comme il se redare ! »
Réenherqueler, v. a., remonter, réparer, re-
mettre en état. Se dit surtout d'une voiture brisée.
(Voy. Dcsevhcrquclcr .)
Regardant, aute, adj. Du part, présent du
verbe regarder nous avons fait un adjectif. L'homme
regardant est un intéressé, souvent avare. — « En
voilà un propriétaire regardant, qui ne jette point ses
crozilles, et qui n'attache pas ses chiens avec des sau-
cisses ! »
ACAD. : regardant, m. sg. — Fam.
Regible, adj., se dit d'une perche de bois faisant
ressort.
Regord, s. m., douve, ruisseau où se déversent
les eaux d'une rivière ou d'un étang. — C'est sur-
tout dans les regards qu'on pêche l'anguille. — Vient
de regorger, déborder.
« Qu'il se vont en plain ^ort lavant. »
21
G. Murlct, le savant traducteur du Roman de la
Rose, a ainsi interprété ce vers : « qu'ils s'en vont
en plein gouffre. » De gort n'aurions-nous pas fait
regoitl ?
Vieux Fr. : regort, lieu entouré d'eau, petit détroit,
golfe. — RIgojii, rigiiliis, rivits, regiis, rigus, riguoks,
ni. sg., d'où rigole, (duc).
Regoustin, ine, adj., guilleret, réjoui, de bonne
luinicur. — « Comme te voilà legoustine aujour-
d'hui ! »
Regrettant, part. prés, du verbe regretter, dont
nous taisons fréquement un adjectif. — « Je suis
bien regrettant d'avoir fait ceci. » — « Madame est
regrettante d'avoir acheté cela, n — Regardant est fran-
çiis : pourquoi regrettant ne le serait-il pas ?
Regrommer (Se), v. pron., se pavaner, se ren-
gorger. — <.< Voyez donc cette parvenue, cette femme
de rien, comme elle se regronnne avec ses plumas, ses
falbalas. »
Reintier, s. m. En parlant d'un homme qui a
les reins forts et souples, on dit : il a un bon rein-
tier.
Rejeter, v. n., se dit d'une ruche qui essaime
une seconde fois dans l'année (Dinan).
Rejiet, s. m., deuxième essaim de la même
ruche.
— 323 —
Réjouie, s. f. , feu llambant de bois sec, de ru-
bans, de copeaux; feu de paille qui ne dure qu'un ins-
tant, mais qui suffit à vous réchauffer. — Mot abrégé
de réjouissance, car la réjouie vous est souvent très
agréable. — Ce feu clair et pétillant s'appelle aussi
réjouie de mariée.
Relent, te, adj., humide. Syn. de cru. (V. cru).
Linge relent.
ACAD. : retint, mauvais goût que contracte une viande
renfermée dans un lieu humide. — trév. : rctent,
mauvaise odeur provenant d'un air ou de quelques
corps humides corrompus pour avoir été renferniés
longtemps. — Vieux Fr. : relent, humide, mou. (duc).
Relicher, v. a.. C'est un peu plus que licher
(nous disons licher pour lécher) ; c'est licher deux fois,
tant le licheur y trouve de plaisir. — « Que que tu
rcliches donc là, mon petit frère ? — C'est ma
mo've. (ma morve). — - Ah le vilain ! »
CENTRE : relicljer, lécher. — norm. : retictjer, rellijiii'r,
chercher l'occasion de faire bombance. Relictjciir, gour-
mand, parasite.
Remener, (prononcez r' mener), v. a., remettre à
sa place, riposter, rembarrer. — « Et Monsieur qui a
voulu aussi me gronder ! je l'ai joliment r'menê. » —
Il signifie aussi reconduire, accompagner quelqu'un à
son logis : « Permettez, mademoiselle, que je vous
r'mène. »
Remet, s. m., saindoux ou graisse de porc. —
— 324 —
Une bonne ménagère peut faire d'excellente soupe de
remet.
Vieux Fr. : renies, rémai:;^, saindoux, graisse de porc.
« Causa vetidendi cepum, onctum, renias et alias pingue-
dines, sur la saisine de vendre sief, oint, rimes, et autres
presses. » (duc).
Remoidre, v. pron., se rétracter, revenir sur un
marché, une convention verbale ; demander un prix
plus élevé que celui auquel on avait d'abord consenti.
Mot usité surtout dans les environs de Dol.
Remuceler, v. a., pelotonner du fil, de la laine.
(Dinan).
Remué-de-germain, s. m. C'est le cousin
issu de germain. — Mot toujours très usité dans
rille-ct-Vilaine.
Renard (Faire le), faire l'école buisonnière.
— c< Mauvais écolier qui fait le renard. » Emprunté
au verbe reiiarder, que nous employons dans le sens
de reculer, se soustraire à un engagement, à un de-
voir. — « Ah ! tu renardes ! ».
R'en-en-tout, loc. adverbiale, rien en tout, moins
que rien. — S'applique aux personnes et aux choses.
— « Cela ne vaut r'en en tout, » c'est détestable.
— Dans l'ouest du département, on dit berme-en-
tout.
Rendre, v. n.. suppurer. — « La plaie a beau-
— 325 —
coup rendu. » — « Ce furoncle est en voie de guéri-
son : il rend.
ACAD. : rendre, m. sg.
Renfignoux, ouse, adj., difficile sur le manger.
V. ojjigiioiix.
Rehfle, s. m., courbature avec fièvre résultant
d'un refroidissement. — Mot très usité à la ville et à la
campagne.
Renoncis, s. m., abrégé de renonciation . Mettre
son renoncis à une chose, à une entreprise, c'est y re-
noncer, comme le mot l'indique. — « Depuis long-
temps il recherchait la fille en mariage, mais il a dû
mettre son renoncis. » — Je proposerais volontiers à
l'Acadénne de le substituer à ses synonymes, comme
étant plus bref et plus doux à l'oreille.
Repue, s. f. Ce mot a deux significations : i''
c'est la mesure du travail que peut faire un homme
entre deux repas ; 2° comme mesure agraire, c'est un
tiers de jour de terre. Il est masculin dans ce dernier
cas, et devrait peut-être s'écrire repus.
Respir, s. m. abrégé de respiration, syn. de
souffle, haleine. — « Pas un mot, et retiens ton res-
pir ! »
Retenue, s. f. maison de maître ou maison de
campagne. Qu'elle soit, 01: non, attenante à la ferme,
— 3-6 —
c'est loujours la relciiue. Ce mot est si usité, qu'on
l'emploie dans les actes notariés.
Retirer à, v. n., pour ressembler à. Ainsi, nous
disons : « La fille à Dangeau retire à son père comme
deux gouttes d'eau. » — « Notre vie, disait Pitago-
ras, relire à la grande et populeuse assemblée des
jeux olympiques. » (Montaigne).
BESCH. : retirer i) , s'est dit .autrefois pour ressembler à.
CENTRE : retirer à, m. sg. — Voir aussi Rab.
Retissure, s. f., raccomodage d'un tissu troué.
Retouiller, v. a. ; c'est l'obligation, où se trou-
vent quelquefois les marchands de denrées, de rem-
porter chez eux les marchandises non vendues. Quel-
ques-uns louent des caves, des celliers où'ûs retoirillent
leurs légumes, leurs fruits, qu'ils remettent le lende-
main sur le marché.
Retour (Coucher en), c'est coucher dans un
lit qui n'a pas été fait. — « Cette femme paresseuse
faisait coiiciier son mari en retour quelquefois deux ou
trois jours. » (Voy. coucher.)
Réveillonner, v. n., faire réveillon (repas de
nuit). Ce verbe est aussi usité à Rennes que le sub-
stantif réveillon, et devrait être français cominc lui.
— « Nous réveillonnerous après la messe de mi-
nuit. »
CENTRE, NOR.M. : réveillon lier , m. sg.
— 327 —
Rhabiller, v. a., raccomoder, rapiécer ses nippes.
— « Le vieux notaire T..., rhahilliut lui-même ses
culottes et ses chausses, et se moquait du qu'en dira-
t-on. » — Rhabiller la cotte à Jeanne, c'est réparer tant
bien que mal une bévue, un propos maladroitement
échappé.
sa'rthe : rhabiller, m. sg. — eescii. : rhabiller une
affaire. Fam.
RiauX) s. m. pi., résidus de la friture de la graisse
de porc.
(Devrai: peut-être 3'écrirc rilhiiix, comme rillettes.)
Ribot, S. m., bâton terminé par une rondelle,
avec lequel on bat le lait dans la baratte.
Ribottée, s. t., tout le lait contenu dans la ba-
ratte.
Ribotter, v. a., action de battre le lait dans la
baratte, pour obtenir le beurre. Nous appelons lait
rihotté le lait qui a été baiatté et que partout ailleurs
on nomme lait de beurre.
Ric-et-rac, loc. adv. Nous avons changé ric-à-
rac en ric-et-rac. — « Nos conditions ne seront point
modifiées, et notre marché sera exécuté ric-et-rac. »
Richonner, v. n., se dit d'un sourire narquois,
qui exprime le dédain, l'incrédulité. — Il est bles-
sant, presque injurieux de richonner au nez de la per-
— 32» —
îionnc qui vous pcule. — « Je lui donnais les
plus snges conseils ; baissant la tête, il richonnait. »
Rigant, adj., reluisant ; objet de toilette qui est
encore dans l'empas du marchand, c'est-à-dire, dans
tout son lustre. — N'a pas de féminin. — « Des
solers (souliers) tout rigant neufs. » — Au mot
ligneux, j'ai cité deux vers d'une vieille chanson où
se retrouve cette expression qui équivaut à celle dont
s'est servi David Copperfield : « Il portait un habit
tout battant neuf. »
Rigolo, adj., joyeux, plaisant. Ce mot, qui est
un dérivé de rigoler semble nous être venu de Paris ;
mais depuis quelques années il a pris racine chez
nous, et j'ai cru devoir lui donner place dans ce
recueil. — Rigoler remonte évidemment à rigouller,,
employé par Rabelais : « et frère Jean de rigoul-
ler. » (Liv. I, ch. 39).
BESCH. : rigolage, rigoler, rigolenr, se disait pour raille-
rie, etc. — TRÈv. : rigoler, pop. — norm. : rigolage, ri-
goler, rigoleur. — Vieux Fr. : rigoler, plaisanter, railler.
Rigolage, rigolement (duc.)
Riole (En), Cela veut dire pris de vin, pop.
« en ribotte », en joie, en gaîté. — « Quoique père
de famille, il se mettait en riolh au moins trois jours
par semaine. » — Ce mot ne viendrait-il pas de ri-
goler ?
BESCii. ; riole, s'est dit d'une partie de plaisir, d'une
— 329 —
petite débauche. Etre eu riole, avoir un peu trop bu.
Pop.
Riries, s. f. pi., plaisanteries, propos joyeux. «Je
n'vous crais point, mon bon Monsieur ; tout c'que
vous m'dites là, c'est des riries. » — « Ce que
j'avance est vrai ; ce ne sont pas des riries. » —
Etym. : ris, rire.
KORM. : ririe, éclats de rire successifs de plusieurs per-
sonnes.
Ris, s. m., racines des arbres. — Les ris des chê-
nes, des ormeaux, s'étendent à de longues distances
autour du tronc. — Les bons jardiniers se gardent
bien de couper les m en labourant au pied des arbres
fruitiers. — C'est presque le vieux mot rai:^. —
Pour abattre un arbre on commence par couper les
ris.
Robin, s. m., abrégé de robinet. Se trouve dans
la chanson du comte de Bonneval :
Si je meurs, que l'on m'enterre
Dans la cave où est le vin,
Les pieds contre la muraille
Et la tête sous le rohin.
Roche, s. f., pierre, caillou. — « Ils m'ont
assailli à coups de roches (lapidé). ^) — « L'enfant a
été blessé par une roc])e. » — Une paysanne de la ban-
lieue de Rennes disait à un médecin qui avait été
appelé près d'elle : « Bittez vot' dat par la tente de
— 330 —
mon cotillon ; j'ai l'vont'e dus comme une roche. »
(Touchez avec votre doigt, par la fente de mon
cotillon ; j'ai le ventre dur comme une pierre).
— Voy. A rocher, rocher.
Roc-Mignon. (\'oyez Rocque-Mignoiim).
Rocquet, s. m., chemin escarpé, montueux. —
« Le \o}ez-vous, montant le rocquet ? »
Rocquer, v. a., i", monter, gravir un chemin
escarpé : — 2° couvrir, saillir.
Rocque-Mignonne. — Je dis à l'article Ber-
liiigiiiii (\'ov. ce mot) qu'il existe à l'Est de Rennes,
sur le territoire de la paroisse St-Hélier, un cimetière
de création récente qui, dans le langage populaire,
porte la dénomination #e Roc-Miguoii, du nom d'un
cabaret voisin. N'ayant jamais pu découvrir pourquoi
l'ancien cimetière de Rennes s'appelle BerVniguin, j'ai
voulu savoir pourquoi le nouveau porte le nom de
Roc-Mignon, et, cette fois, j'ai été plus heureux dans
mon enquête.
D'abord j'ai reconnu qu'il ne faut point écrire
Roc-Mignon, mais bien Rocquc-Mignonte, du verbe
rocquer, pris dans sa seconde acception (^'oy. ce mot).
Ensuite j'ai appris qu'à une époque qui n'est pas
encore bien éloignée certain cabaretier de l'endroit
s'était acquis une réputation de a vert galant » que
l'on disait très méritée, et qui justifiait bien le
surnom de Rocque-Mignonne que les paysans du voi-
— 351 —
sinage lui avaient donne. On disait alors : a Allons
boire une bolée r/jt'^ Roû]iif-Migiioiiiie. » Quand le
bonhomme disparut, c'est le cabaret qui hérita dé la
sigiiorisc, et l'on prit l'habitude de dire : « Arrêtons-
nous à Rocque-Mignonnc . »
En 1884 et années suivantes, lorsque la munici-
palité de. Rennes eût décidé la création du cimetière
de l'Est, les travaux de terrassement, de construction
des murs d'enceinte et d'appropriation des terrains,
amenèrent sur ce point un grand nombre d'ouvriers
terrassiers, maçons, tailleurs de pierres, etc., qui, cà
cause de leur éloignement de leur domicile et de la
proximité du cabaret, prirent leur repas à Rocqite-
Migiioiiiic. Pendant plus de deux ans que durèrent
les travaux, le chantier et l'auberge ne furent plus
désignés que par le même nom, et quand le cime-
tière fut enfin achevé (septembre 1887), il se trouva
définitivement baptisé de ce sobriquet aussi ridicule
qu'inconvenant.
Rognonner, v. n., murmurer entre ses dents,
gronder, bougonner. — « Vous rognoiiiiei, je crois ? »
— Au XVI'-' siècle, on disait roiignoimcr , mais dans
le sens de critiquer, blâmer.
Peut-être aJviendra-t-il qu'un babouin d'envieux
Roiiguoniiera nos vers. Tais-toi, sot, ou fais mieux.
(Etienne Pasquier).
ACAD. : rogiioiiner, m. sg. Pop. — trév. : rognonner,
bas et pop.
— 332 —
Rollet, s. m., barreau d'échelle de forme ronde.
— On dit aussi roUon.
Rollet, s. m., rouleau. Se dit surtout des rou-
leaux de pièces de monnaie de billon. — Un ou
plusieurs roUcts de vingt sous. — On dit aussi
rollon.
« Pour vous mieulx asseurer du faict,
« Il vous convient faire un roullet. »
(Farce du Cuvier).
Roquille, s. f., ancienne mesure de vin. Nous
appliquons ce mot en général à toute boisson, et nous
disons d'une personne qui, sans être ivrogne, aime
à boire sec et souvent, qu'elle « aime sa petite
i-oqtiiîle. »
Roquiller, v. n., aimer la roquiUe, aimer à si-
roter.
ACAD. : roquille, petite mesure de vin. A vieilli.
Rote, s. f., cheinin étroit et sinueux, sentier. —
« Quittez le bas chemin, entrez dans le champ, et
prenez la rote, si vous ne voulez pas vous embouillon-
ner. » — Ce serait le mot latin rota, roue, chemin
tournant, ornière, dont le sens a été détourné, puis-
que la rote est ici le sentier où l'on peut marcher plus
commodément sans se crotter. — « Bala}-er la rote
au chat, » c'est faire le ménage à la h.îte.'
NORM. : rote, m. sg. — sarthe : roie, m. sg. Balayer
la rote au chat. — trèv. : rote, vieux mot, route. —
— 333 —
BRACHET : route vient de r;(^/ii. — duc. -.iota, vin, iter
publiciim. Riipta, via in silvis.
Rôt-tout-chaud. Ces trois mots réunis forment
un substantif masculin. Le rât-tout-chaïul, alors même
qu'il est froid, est toujours du rôt-tùut-chaud. Ce sont
des poires ou des pommes cuites au four. C'est un
dessert pour les gens riches, et un mets principal
pour la classe pauvre et les ouvriers. — Dès les pre-
miers jours de l'automne, on entendait autrefois ce
cri tout Rennais chanté par les marchandes : « Qui
veut du rot-tout -clmud ? poires cuites sans sucre. »
On ne l'entend presque plus aujourd'hui.
Rouâche, adj, m. et f., revêche. « Ah ! Dieu,
que vous êtes rouâche anet (aujourd'hui) ! »
Roualle, s. f. , rouelle, tranches coupées en rond.
— « Une roualle de veau. »
Roucher, v. a., ronger. « Il aimait à roucher les
petits os. »
SAKTHE : roucher, m. sg.
Roucheries, s. f. pi., légères douleurs d'en-
trailles, petites coliques préliminaires
Rouchets, s. f. pi., petits os tendres. — Les
rouchets sont la part du chien. (Voy. roucher).
Rouelle, s. f., petite roue d'une voiture.
CENTRE : rouelle, m. sg. — besch. : rouelle s'est dit
- 334 -
pour petite roue. — norm. : rouelle, roue de charrue,
de brouette, rolella.
Rousiner, v. n. Ce n'est pas tout-à-fait pleuvoir ;
mais c'est le brouillard de Monsieur de Vendôme,
trois quarts de pluie. Si vous avez vu brûler de la
chandelle de résine (que le peuple prononce roiisine),
vous avez pu remarquer qu'elle projette autour de la
flamme une poussière qui ressemble singulièrement à
une pluie fine. Je ne vois pas d'autre origine à notre
mot rousiner. — En Normandie, phuviner.
NOR.M. : Rousiiic, résine. — centre : Roiisée, rosée.
Ronsineux, abondant en rosée, pluvieux. Roiisine, chan-
delle de résine.
Rousté, ée, adj., taché de rousseurs. Syn. de
/'/V/(', pivcrlc. (\'oy. ces mots). — « Jeanne est une
jolie fille ; c'est dommage qu'elle soit roiistèe. »
Roustée, s. f., rossée, volée, dégelée, grêle de
coups, et tous leurs synonymes.
Routoutou, s. m. Les enfants du peuple appellent
de ce nom le mirliton. Les petits garçons, les étu-
diants eux-mêmes, jouent du roiitoiitofl en revenant
des assemblées.
Royaumer, v. n., faire la noce, faire bombance,
en un mot, s'amuser comme un roi. Ce mot n'est
guère usité que dans les casernes et les faubourgs.
Rué, s. m., ruisseau ; d'autres disent nisset.
— 335 —
BiiscH. : Rii, ruisseau. — norm. : Riisset, nissiaii, ru,
lieu, ruisseau. — Vieux Fr. : Ru, riu, ruau (duc).
Runge, s. f., gorge.
NOKM. : Ruugc-r, ruminer. Rnugc, action de ruminer.
Russe, s. f., plante parasite à fleurs jaunes, assez
semblables à celles du colza ou du navet. Nom bota-
nique : Biassica vigra.
Sa, s. m., soir. — « Je reviendrai ad sa, ce soir,
vers le soir.
« J'étais plein hier au sa ;
J'I'serai ventiers bougre cor.
J'étais plein hier au sa,
J'I'serai ventiers cor ad sa. »
(Chanson populaire).
Sabot-Cassé, s. m., nom donné par le peuple
Rennais à la communauté de St-Cyr, située sur la
rive drcite de l'Ille. Celte communauté reçoit les
jeunes filles que les parents y mettent en punition de
leurs péchés, et pour les soustraire à de nouveaux
dangers. Le nom vulgaire du Cypripède, ou sabot de
- 336 -
Vénus, a été donné sans doute, sauf une légère va-
riante, au salutaire refuge. — Dans mon enfance, on
appelait encore Sabot-Cassé le couvent du Bon-Pas-
teur, transformé depuis en caserne, et qui avait été
fondé au commencement du XVII1>; siècle pour ser-
vir d'asile aux filles repenties.
Sac. — > Donner son sac à un domestique, à un
employé, c'est le congédier ou le mettre à la porte.
— Sac est aussi un terme d'agriculture. Ce sont les
couches de paille entre lesquelles on étend les
pommes pilées pour les soumettre à l'action du pres-
soir. Le jus étant extrait, on coupe le sac (ou marc)
par tranches pour le donner aux bestiaux.
AC.\D. : Donner à quelqu'un son sac et ses quilles, le
congédier. — besch. : Donner à quelqu'un son saf, le
congédier brusquement.
Sacquer, v. a., arracher, tirer vivement à soi. —
« Il lui a sacqué son bâton avant qu'il pût en faire
usage. » — a Sacque mon pied », juron normand. —
Etym. : Saccader ? — « Il sacquoit de l'épée à deux
mains. » (Garg. ch. 23). — « Les vieux, de leurs
fourreaux voulaient sacquer les lames. » (P. Harel.
1881).
BESCH. : Sacquer, mettre un corps en mouvement par
secousses. — trév. : Sacher, vieux verbe, tirer : Sacher
son épée. — norm. : Sacquer, saquer, tirer, amener vers
soi. De saquée, de saquet, brusquement. Saqucsonner,
tirer pas saccades. — Vieux Fr. : Sacquer (chronique de
Flandre) ; sachier son épée (Rom. de Rou). Sacher,
sachir, tirer, mettre dehors. Saccare (duc).
- 337 —
Sacre, s. m., procession qui se fait à la Fête-
Dieu. Nous avons à Rennes le Grand-Sacre et le
Petit-Sacre. Cette deuxième procession a lieu le
dimanche de l'Octave. A part l'absence des autorités
constituées et des troupes de la garnison, elle l'em-
portait quelquefois sur la première par le luxe des
reposoirs. Sous la Restauration, chaque paroisse,
chaque église avait en outre son sacre particulier. Le
clergé y renonça après 1830, et le sacre de chaque
paroisse ne se célèbre plus qu'à l'intérieur des églises.
Le Grand-Sacre appelle à Rennes un grand nombre
de parents et d'étrangers, que nous nommons cou-
sins, cousines du sacre. — Rabelais a employé le mot
scure (Pantag. ch. 22).
SARTHE : Sacre, m. sg. — besch. : trév. : Sacre, s'est
dit en plusieurs endroits de la procession qui se faisait le
jour du Saint-Sacrement : Le sacre d'Angers. — duc. :
Sacre, sacrum, la Fête du Saint-Sacrement.
Safre, adj., sec, desséchant. Se dit surtout d'un
vent piquant et froid qui hâle la terre. — Safre en
français signifie glouton. Le vent safre est glouton
aussi, puisqu'il prive le sol de sa fécondante humi-
dité. — On emploie aussi ce mot pour indiquer que
le pain est sec et sans saveur. — « Quel pain safre ! »
— Safre, revêche, en parlant des personnes.
BESCH. : Safre, 1° goulu, glouton ; 2° dans les vieux
auteurs vif, folâtre, enjoué. — trév. : Safre, 1° gour-
mand ; 20 (Vieux mot) mignon, agréable; 3» rusé.
Saint-Frusquin, s. m., avoir, patrimoine, for-
22
- 35S -
tune. — Ne se dit que dans cette acception : « Il a
mangé ou dissipé son Sa'mt-Fnisquin. » (Voy. Frus-
ques).
Saint-Jean (Faire la). La Saint-Jean est chez
nous Tcpoque des déménagements. Pour les per-
sonnes qui changent de demeure, il y a obligation de
nettoyer les meubles pour les placer dans l'apparte-
ment dont on prend possession. Il en est qui ne
procèdent à cette opération qu'au prochain déména-
gement ; mais il en est d'autres qui, dans le courant
de l'année, font un nettoyage complet de leur mobi-
lier. Cela s'appelle fahr la Saint-Jean. On fait la
Saint-Jean surtout au retour de la campagne, aux
grandes lêtes et lorsqu'on attend des étrangers. — La
Saint-Jean est de tous les jours dans les maisons bien
tenues. (Voir Jean).
Salopette, s. f., pantalon de toile ou de coton
dont se vêtent les ouvriers économes, pour protéger,
pendant la durée de leur travail, le pantalon avec
lequel ils viennent à l'atelier.
Sans (De), sans lui, sans elle, sans cela. Les
paysans s'expriment souvent ainsi : « J'ai été le cher-
cher ; mais je m'en suis revenu de sans. »
NOKM. : Etre de sans, m. sg.
Sapé, ée, adj., sec, revêche. — « Vous prenez,
ma chère, un ton sapé qui ne me convient pas. n
- 539 —
— « Madame n'est pas moins sapêv avec ses domes-
tiques. »
Saperlotte, intcrj., petit juron. — a Scipcrlotle, je
vous défends de faire cela ! » — Equivaut à sapristi.
Sarde, s. f., abrégé de sardine. — « La sardine
fraîche, *Ia saide ! », cri des poissonnières de Rennes,
lorsqu'elles promènent leur marchandise par les rues
et les faubourgs.
Sartiaux, s. m., ou Sartières, s. f.. terres
incultes.
Saugnard ou Saugnoux, s., homme ou femme
qui manque de franchise, d'un caractère dissimulé,
qui ne vous regarde point en face. — « Défiez-vous,
c'est un (ou une) saugnard. » — Le féminin saiigiiardc
ou saiigiioiise est peu usité.
Saut-de-vesne (Faire la), jeu des enfants.
Ils se mettent la tête en bas, les jambes en l'air, et
retombent sur le dos. On dit faire la, et non faire /('
saiit-de-vesne (faire le saut de li vesiie).
Schloff (Aller à), aller dormir. Mot introduit
chez nous par les Prussiens en 1815, et qui vient de
l'allemand schlajen. — « Allons à schloff, allons
dormir. »
Sea, s. f., soif. Prononcez sa. — « A boire, j'ai
sea. » C'est le mot espagnol.
Sec, s. m. Les blanchisseuses appellent le sec tout
— 340 —
le terrain où elles étendent le linge à sécher. Abré-
viation de séchoir.
Seille, s. f., seau en bois. Du latin situla. Quoi-
que vieux français, ce mot est si usité chez nous que
j'ai cru devoir le conserver ici. On le trouve dans le
couplet suivant d'une chanson qui a pour titre : « Le
malheureux lycccn y>, et pour père M. H...., élève du
Lycée de Rennes sous le premier Empire :
Le déjeuner arrive enfin ;
Mais ce n'est qu'un morceau de pain.
Si, pendant ce repas splendide,
La soif homicide
Kend la gorge aride,
La sàllc b. l'eau n'est pas loin ;
V'ià c'que c'est qu'd'ct' lycéen.
On trouve ce mot dans Toppfer :... « A droite,
c'est la fontaine On s'y dit douceurs au mur-
mure de la seille qui s'emplit. »
Seillée, s. f., le contenu de la seille, — Une
seillèe d'eau.
SARTHE : CENTRE : NORM. : Sàlk, m. Sg. — BESCH. :
Seille, anciennement vase, seau de bois, — Vieux Fr. :
Seille, seau, baquet, selha (duc).
Semoux, s. m., celui qui sème le grain. — Le
vent est un grand semoux, car il emporte les graines
au loin.
Senâs, Cenâs, s. m., grenier au foin. — «A
— 541 —
défaut de lit, nous couchâmes dans le sends, et nous
nous y trouvâmes bien. » — Prononcez s' uns.
N'ORM. : Cenas, chettas, grenier, chambre placée à l'étage
supérieur. 5/Hn/, grenier.
Sente, s. f., odeur, parfum. — Agrégé de 5<';;/«/r.
— « V'ià une fleur qu'a bonne sente. » — Un jardi-
nier à la maîtresse du logis : « V'n'êtes pas comme
nout'e femme, vous la bourgeoise, v'avez toujou's
bonne sente. »
Sépiller, v. a., piller, houspiller. On se'piJle une
personne en la maltraitant, en lui déchirant ses ha-
bits. On sépille un jardin en pillant les fruits ou les
récoltes ; on sépille un arbre en brisant les ra-
meaux.
Sercillonner, v. a., couper en sciant, hacher.
Un couteau, une serpe mal aiguisés ne coupent point
net, ils serciUounent .
Serpidâs, s. m. et f., terme de mépris employé
à l'égard d'une personne de grande taille, sans tour-
nure et mal tenue. — « Qlù voudrait épouser cette
serpidâs ? »
Serrer, v. a., souvent employé pour cueillir.
Serrer des fruits. « Les pommes ne sont pas encore
serrées. »
SARTHE, XORM., CENTRE : scrrcr, cueillir, amasser, ré-
colter.
Serreuse de chaise?, s. f., femme préposée à
— 342 — .
la perception des droits de chaises dans nos églises.
A Rennes cet emploi n'est dévolu qu'aux femmes.
Serroux d'impôts, s. m. Nos paysans
nomment ainsi le percepteur des contributions. —
Serveuse, serroux viennent de serrer^ cueillir.
Seule, s. f. Nous disons la seule pour le seuil de
la porte.
Sauner, v. a., ramasser, serrer, s'emparer vive-
ment et adroitement d'une chose. — « A la foire de...
un voleur lui a seuuè sa bourse.» — Au jeu de la tou-
pie, le gamin de Rennes dit : « Seune ton vis » (vis,
abrégé de vispin, petite toupie).
Si, s. m., défaut, vice, tare. S'applique également à
riiomme, au cheval ou au chien. — o On les prend
à la mine, mais ils ont des si. » — Le mari est
jaloux, son cheval bronche, son chien n'a pas de
ne;^ : autant de si.
Sia, adv., oui. — En bas breton, ia. — On dit
aussi sia en Bourgogne. — « Jeanne, vous ne m'ai-
mez point ? — Sia. — Eh ben, marions-nous. —
Ah dame ! noua. »
Sieudre, v. a., suivre. On dit aussi sieuter. —
M C'est une fille qu'il faut toujours sieudre. » — a Je
conduis l'ung, l'autre je sicux. » (Jean Molinet, lô'^ s.)
NOR.M. : siciivir, m. sg.
Signorise, s. f., sobriquet, épithète injurieuse
— 343 —
ou blessante. Ce mot est surtout à l'usage des enfants
du peuple. — « Monsieur ! faites donc finir Zidor
qui me dit des signoriscs. »
Les paroisses ou communes ont aussi leurs signori-
scs, dont l'échange entre elles donne lieu à des rixes
sanglantes. Voici quelques exemples de celles qu'elles
échangeaient au commencement de ce siècle et qu'elles
se donnent encore quelquefois aujourd'hui :
Les poulains d'Argentré,
Les viaux de Bais,
Les oies de Bécherel,
Les pelots de Betton,
Les viaux ou poulains de Domalain,
Les huguenots d'Ercé,
Les caquaires de Feins,
Les sorciers de Fougères,
Les luhauts de Gahard,
Les glorieux (vaniteux) de Gévezé,
Les grignotoux de Janzé,
Les pobiers de Lassy,
Les loups de Mézières,
Les chouans, les bossus, les coqs blancs, de Vitré.
Ces surnoms qu'échangeaient les gars, surtout à
l'époque du tirage au sort, donnaient lieu à des rixes,
et parfois à de véritables combats de commune à
commune. La gendarmerie, et surtout la création des
tribunaux correctionnels, en réprimant ces rixes, les
a rendues plus rares.
— 344 —
D'autres signorises s'appliquent aux filles de diver-
ses localités. Ainsi, vous ne serez point dans leurs
bonnes grâces, si vous rappelez aux filles de Vezin,
qu'elles sont lassées dès le matin. Il y a encore cer-
taines plaisanteries traditionnelles qu'il n'est pas tou-
jours bon de rappeler aux filles de Melesse ou à
celles de Betton
Slan, Senan ou Sran, s. m., seran, instrument
à pointes d'acier très serrées servant à peigner le
chanvre et le lin. On dit que les vieilles filles et les
vieux gars vont au paradis charrayés sur un slau.
Slancer ou Senancer, v. a., action de se servir
du shiii. — On dit aussi seranccr.
Soler, s. m., soulier. — « J'ava's une paire de
solcrs tout rigants neufs. » (Vieille chanson).
Vieux Fr. : Soler, solier, solasius, sola (duc).
Sonnoux, s. m., sonneur. Le sonuoux de cloches,
le joueur de vèze (haut-bois). Se dit aussi du joueur
de violon. — « Il y avait quatre sonnoux à la noce
de la fille de Monsieur le Maire. »
NORM. : Sûiiiieux, m. sg.
Sorine, s. t., petit cidre ou piquette que fabrique
le paysan pour sa consommation particulière. Elle
est tirée du marc de pommes dont on a extrait le
meilleur jus.
Souater, v. n., c'est le fait, pour deux agricul-
— 345 —
teurs ou métayers, de se prêter réciproquement leurs
attelages pour le labourage de leurs terres. — On
dit, par extension, que deux voisins ne soiiateiit pas
ensemble lorsqu'ils sont en mauvaise intelligence. —
«Je ne souakrai jamais avec Matlin » (il ne sera
jamais mon ami).
NORM. : Soitiitcr, m. sg. — Vieux Fr. : Souage, aide,
secours, soulagement, solatium. Souaiiimc, siiatumc,
agrément, soulagement (duc).
Souba, s. m., blé ou seigle qu'on bat à la main
pour conserver la paille intacte.
Souille, s. f., taie d'oreiller.
CENTRE : Soiiillt', m. sg.
Soulever, V. a., soustraire adroitement, voler. —
« On lui a soiilar son argent. »
CENTRE : NORM. : Soiilever, m. sg.
Soupe de recette. Voy. Recelte.
Sourceiller, v. a., terme d'agriculture. C'est
couper l'orge en herbe avant l'épiage. Nous disons
ceiller le blé, pour scier.
Sources. On dit ici, et peut-être ailleurs que les
sources sont nouées, lorsque, taries par une séche-
resse prolongée, elles recommencent à sourdre. — Ce
sont les pluies de la Toussaint qui nouent les sources.
Sourcier, s. m., homme qui fait profession de
chercher, de découvrir des sources. — Il y a encore
— 346 —
aujourd'hui en Ille-et-Vilaine plusieurs sourciers qui
opèrent avec le secours de la baguette de coudrier,
laquelle, paraît-il, s'incline vers la terre à l'endroit
précis où se trouve une source cachée.
Soutées, s. f. pi., quantité de sous amassés petit
à petit. — Un mendiant, un petit marchand par-
viennent à grand'peine à récolter quelques soutées. —
Les soutées qu'on dépense dans un ménage finissent
par faire des francs.
Su ou Sulz, s. m., abrégé de sureau. — La fleur
de su a des propriétés pharmaceutiques : elle provoque
la transpiration. — C'est avec le bois de su que les
petits garçons font des pétoires (Voy. ce mot).
NORM. : Seu, sue, chue. — centre : Su, sué, suis, suyau.
Vieux Fr. : Seu, seur (duc).
Subite, s. ., petite chaumière, habitation pau-
vre. — « Jacques habitait, avec sa femme et ses gar-
çailles, une subite au milieu de la forêt. »
Subler, v. n., siffler, soit avec la bouche, soit
avec un sifflet. — « Vas-tu te taire, suble-en-c. ? tu
nous casses la tête à la fin. »
Sublet, s. m., sifflet. Le sifflet à l'usage des
chasseurs est un suhJet.
« Q.ui doukement fait chanter son sulld.-a
(Marot).
SARTRE : Suhler, m. sg. — centre : SuhJer, suhlel. —
NORM. : Sùhler, suffler, sùbkf, sùfflef, — Vieux Fr. :
— 347 -
Siller, sithlcr, {sihnlair]. Sihlct, (sihiilm) : Latin, sihilare
(duc).
SU"bout, adv., debout, sur ses jambes. — « Le
bonhomme a été b'en malade, mais le v'ià recopi, il
est sn-hoiit à c't'heure. »
XORM. : Suhout, sus-bout, debout. — Vieux Fr.: sur-bout,
debout, sur les pieds (duc).
Sucrée, s. f., sj-n. de viijaurcc. — « Mais voyez
donc comme elle fait sa sucrée, sa pincée, depuis
qu'elle a épousé un homme de plume. »
ACAD. : Faire la sucrée. Un air sucré. — besch. : sucré, ée,
m. sg. Fig. et Fam.
Suif, S. m., syn. de galop, réprimande, etc. —
Donner ou recevoir un suif (expression très usitée,
surtout dans la bureaucratie).
Surets, s. m. pi, se dit du plant de pommiers non
greffés. — Vient de sur (aigre, acide), parce que le
fruit de ces sauvageons est aigrelet.
Suretière, s. f., pépinière de surets.
ACAD. : suret, aJj., un peu acide. — xorm. : suret,
jeune poir.mier.
Surette, s. t., oseille.
NOR.vf. : surelle, m. se:.
3^8 -
Ta, pron. pcrs., toi. — « D'où vicns-tu, ta ?
— Ma, je viens du bourg, et ta ? — Ma, j'y
vas. » — Le Bailli : « T'a-t-i tapée, t'a-t-i battue ? »
— La fille : a Nenny, Monsieur, je ne m'en plains pas.
Si j' m'en plaignais, j'aurais grand tort. » — Le
gars : « Si j'ai j'té du bois dans ta cour, c'était pour
me marier o ta ; si tu no vieux pas, rends-ma mes
fagots. » — Dans leurs facéties, nos paysans racon-
tent ainsi ce que disent les grenouilles dans leur
chant du soir, La première demande : o Qui est-ce
qui a cassé le pot ?» — Et toutes répondent en
chœur : « Ce n'est ni ta ni ma, ni ta ni ma, ni ta ni
ma, etc. »
Tabut, s. m., tintouin, tracas. — «Son gars lui
donne b'en du tabut. »
BESCH. : tabust et tabut s'est dit pour querelle, contesta-
tion. Tabuler et iabuster, i- inquiéter, quereller, 2" faire
du tapage. » (Mont.) tabut. — nor.m. : tabut, bruit,
vacarme, tapage. — Vieux Fr. : tabut, querelle, débat,
contestation : « Je vous prie qu'il n'y ait point de
noise ne de tabust. » — Tabut, toute espèce de bruit un
Deu fort, — Tabusler, {tabussare),ia.nt beaucoup de bruit
— 349 -
en frappant à coups redoublés sur quelque chose. Tahii-
ter, crier fort haut en se querellant, disputer avec cha-
leur. — Tabuslellus, tintement, (duc).
Tafifée, s. f,, bouquet de bois formant îlot au mi-
lieu d'une prairie, d'une lande, d'un marais ou d'un
étang.
Tagiienau, s. m., frelon ou taon. — Ne bra-
vez pas la piqûre du tagueiicau ; on dit aux enfants
qu'il n'en faut que sept pour tuer un cheval.
Tailler, s. m., métier servant à la fabrication
de la toile. Souvenez-vous qu'on prononce taiJe pour
toile, d'où tailier.
Talusser, v, a., terme d'agronomie pour taluler,
faire ou relever les talus. C'est une besogne qui se
fait pendant l'hiver. Le mot talusser que nous em-
ployons semble plus rationnel que taliiter, adopté par
l'Académie, puisque le subsantif talus, dont il dérive,
est terminé par s et non par t. — Rabelais a dit :
« tàluyoieut parapects. » (Prologue du liv. 3).
ACAD. : tahiti-r. — besch. : taluler, taliidcr ne se dij
plus. — Vient du latin tnlm: ; pied.
Talvassier, s. m., mauvais plaisant. Voy.
Coulvassicr.
Vieux Fr. : talvassier, soldat armé du bouclier appelé
Talvas, ialvacins. De là iaillcvacicr, fourrageur, soldat
pillard.
Tamponner, v. a., travailler, cuisiner malpro-
- 350 —
premcnt avec ses mains, salir. — « Voyez ma mar-
chandise, mais ne la tamponne^ pas. »
Tantine, s. f., tante ; qqfois, la femme du ton-
Ion (de l'oncle).
Bonjour, taiitin' Perrine,
Comment vous portez-vous ?
Vous me faites la mine,
Dites-moi, qu'avez-vous ?
Dans mon beau château.
Ma taittiuc, ma tantine.
Dans mon beau château.
Ma tantine, tirez l'eau.
(Rondes populaires et enfantines).
s.\RTHE, CENTRE : tantine, m. sg.
Tantinet (Un), adv., tant soit peu, un rien. —
a J'en veux bien encore, mais un tantinet. »
-VCAD. : tantinet, m. sg.
Tantouiller, v. a., agiter un objet dans l'eau,
soit pour laver cet objet, soit seulement pour le
mouiller. — On iantonillc le linge dans la rivière ; on
se tan touille soi-même dans le bain.
SARTHE : tantouiller, m. sg. — besch. : touiller, mêler,
agiter une liqueur. Pop. — xorm. : tantouiller, tatouiller,
éclabousser, salir, barbouiller.
Tapante (Faire son), faire son bon apôtre.
— 5)1 —
Tape-coupée, s. f., jeu des enfants. Un joueur
en poursuit un autre ; si un troisième parvient à
passer entre les deux, c'est après celui-ci que doit
courir le poursuivant, et ainsi de suite, jusqu'à ce
qu'il puisse atteindre le dernier qui a coupé.
Tapée, s. f., grande quantité. — «Nous aurons
cette année une tapée de pommes à bois rompre. » —
Ne s'emploie guère qu'en parlant des choses.
CENTRE : tapce, m. sg. — acad. : tapée, m. sg. Pop.
Taper, v. a., souvent employé pour frapper,
battre. — « Tais-toi, Jeanne, ou je tape. » — « On
tape à la porte. »
ACAD. : laper, frapper. Fam.
Tapette, s. f., c'est la raquette avec laquelle on
lance le volant ou la balle dans le jeu de la tecqite au
bois. (Voy. Tecqite). — « Veux-tu, Toto, me prê-
ter ta tapette ? »
Tapisser, v. a., employé par extension pour
médire de quelqu'un. — « L'autre jour, dans le
salon de M™«^ X..., Mm^^ Y... a joliment tapissé son
amie, M™s Z... »
Tât, s. m., étable. — « Les vaches sont rentrées
dans Vtdt. » — On prétend que les personnes mena-
cées de phtisie se trouveraient bien de coucher dans
Vtat.
Taumer, s. m., nom donné au crapaud dans le
— 552 —
canton de Dinan et dans quelques communes de
rille-ct-Vilaine, limitrophes des Côtes-du-Nord.
Taupin vaut Morette, proverbe rennais ; l'un
vaut l'autre. — Se dit de deux vauriens, de deux
choses également mauvaises. — Je crois que c'est le
proverbe suivant travesti : Toupie vaut mareUe. (Voir
Morcïïe).
Taurin, s. m., taureau. — Chez nous, ce sont
les filles de basse -cour qui conduisent le plus sou-
vent la vache au taurin. — Neptune était surnom-
mé Taurkn, parce qu'on lui sacrifiait un taureau.
Tecque, s. f., balle ; jeu des enfants. — La tec-
que au bois ou à la raquette. — La tecque au pot. —
Pour ce jeu qui, de mon temps, était fort à la mode,
on fait en terre autant de petits trous qu'il y a de
joueurs. L'un d'eux, éloigné de cinq à six pas, roule
la tecque vers les trous ou pots. Si elle entre dans
celui de Jacques, par exemple, il se hâte de la serrer,
et la jette aux petits camarades qui se sont éloignés à
toutes jambes. Celui qui est atteint est pilorié (nous
disions pilorise). Le dos tourné, les bras en croix, on
lui lance la balle. Il a la faculté d'exclure une ou
deux parties de sa personne, et si le pihrisaut touche
la partie réservée, il est pilorise à son tour.
NORM. : tcqiie, balle. Jouer à la tàjue. — Vieux Fr. :
ti'ccii, le jeu de mail, la boule qu'on frappe avec le mail.
Tégot, s. m., vase en terre ou en faïence ; par
— ))) —
exemple : une écuelle, une cruche. — « Donne
ton tcgot que je le remplisse. »
Latin : testa ou tcsliun, vase de terre cuite ; d'où tel.
Téguer, v. n., soupirer, respirer bruyamment.
« Tu tîgiies, Jeanne, as-tu du deu'l (chagrin) ? »
Tenant, adv., toujours. Usité surtout dans le
canton de Maure. — « Cela va-t-il mieux ? —
Mon Dieu non, je souffre tenant. »
Tendre, adj. Pas tendre, dur, sévère. — « Ma
mère était une brave femme, mais pas tendre. »
Tenviolle, s. f., galette ou petit pain cuit à la
bouche du four,
Terchausser, v. a., mettre à gauche la chaus-
sure du pied droit, et réciproquement. Cette erreur
est, pour les esprits faibles, d'une haute gravité :
c'est l'annonce d'un malheur dans la journée. — On
dit aussi trkhausser.
CENTRE : trèchausscr et terchausser, m. sg.
Termée, s. f., espèce de cage de bourdaine ou
d'osier servant de piège pour prendre les oiseaux. La
termée est posée sur le sol, levée d'un côté comme
un trébuchet. L'oiseau s'y introduit pour manger le
grain qu'on y a jeté ; s'il vient à se percher sur de
petites gaules habilement disposées, la termée re-
tombe, et l'oiseau est prisonnier. — On dit aussi
tremée.
— 354 —
Terroux, ouse, adj., pour terrien, terrienne; qui
possède de la terre. On appelle ciil-teiroux une fille
qui apporte en dot une ou plusieurs propriétés terri-
toriales. (Vov. Cul-terroux .) — Terroux se dit aussi
pour crotté. — « Je suis tout terroux. »
Tertous, pr., tous ensemble, tous tant que vous
êtes. On dit aussi tretoiis. — Cette locution n'est pas
employée seulement dans nos campagnes ; elle est
aussi en usage dans d'autres provinces. On la trouve
dans Montaigne sous la forme très-tout.
« ...Et des crottes au derre, mangez-les tertous,
« Jamais de ma femme ne serai jaloux.
(Vieille chanson)
Dans la farce scolaire Maistre Mimin (17^ siècle) :
(c Hé ! mon Dieu que vous êtes fine !
« Vous passez ireslous vos voysins. «
SARTHE : tertous. — centre : tretous, tertous. — nor.m. :
tertous, tretous, tertouts, trctoutes.
Tessier. Voy. Texier.
Tet, s. m., étable. Vieux mot toujours très usité.
— « Je happis mes chausses, et m'sauvis dansl^t*/. »
fVieille chanson^. — « Allez au tect ; assez avez
brouté. » (Cl. Marot).
BESCH. : tect, vieux mot qui signifiait toit. Se dit en-
core pour étable dans quelques départements. — trèv. :
tect (prononcez té), toict ; nom donné aux étables dans
quelques provinces, comme en Berry. — sarthe : Toit
— 35 5 —
i porc. — NORM. : teit. — centre : lêt, (prononcez le
t final).
Teutée, s. f., galette de blé noir ou pain grillé
dans du cidre chaud. Nos paysans sont très friands
des tentées, qui sont d'autant meilleures que le cidre
est plus doux. Quel régal pour les commères ! A
Paimpont et environs, la tentée s'appelle bidouillée.
Texier ou Tessier, s. m., tisserand qui a la
spécialité de tisser et de carder de la pénille prove-
nant des vieux habits. (Voy. Pénille). Texier est devenu
un nom patronymique très commun dans ce pays-ci.
BESCH. : tistre, v. a, tisser, usité seulement au part,
passé tissu. On disait d'abord fixtrc (iexere.) — trèv. :
tixier s'est dit autrefois pour tisserand. — centre :
tessier, texier, tisserand. — Vieux Fr. : tixier Qixator),
tisson (tisserins). — Tixerand pour tisserand, tisserandus.
Tixtre ou tistre. (duc").
Teux, teute, adj., boiteux, boiteuse, tort, torte.
Thérésienne, s. f., espèce de capuchon ou ca-
pot dont les femmes du peuple et les paysannes se
couvrent la tète et les épaules pour se préserver de la
pluie. Depuis quelques années, l'usage du parapluie
est devenu si fréquent, même dans les campagnes,
que la thérésienne est presque abandonnée aujourd'hui.
Cependant elle est toujours fort en usage chez les
femmes des environs de Lorient.
NORM. : tlicrèse, espèce de bonnet en crêpe de soie
noire, coiffure de deuif.
- 356 -
Tient-main. s. m,, garde-fou. — Le lient-main
est, chez nos paysans, la barre d'appui placée sur les
côtes, ou même d'un seul côté d'un pont, lequel est
généralement formé d'une planche, d'une poutre, ou
simplement d'un tronc d'arbre quelquefois à peine
dégrossi, et dont les extrémités reposent sur les deux
rives opposées d'un ruisseau. — Quand le bon-
liomme et la bonne femme ***, de Chantepie, reve-
naient du marché de Rennes après de copieuses
libations, le tient-main leur était d'un grand secours
pour éviter un bain dans le ruisseau de Blosne qu'ils
étaient obhgés de franchir sur une planche pour
regagner leur village.
Tillon, onne, adj., dur, sévère, difficile. Ne
s'emploie qu'avec la négative. « Si le patron n'est
pas tiUon, sa femme n'est pas liUonne non plus. »
Tirant, ante, adj., se dit en parlant d'un che-
min ou d'une route escarpée, difficile. — o Les pluies
du mois dernier ont rendu les chemins tirants, »
c'est-à-dire que les chevaux sont obligés de tirer plus
iort pour en sortir.
Tire-jus, s. m. Nos petits faubouriens désignent
par ce mot imagé leur mouchoir de poche quand
ils en usent ; car, le plus souvent, ils se « mouchent
du pied, » comme les poules, c'est-à-dire jamais.
Tirer, v. a., traire. On tire les vaches deux fois
par jour.
— 357 —
Dans le vieux français le mot traire signifiait tirer,
traîner.
Tirer dur, locution très employée. — Un pau-
vre diable aux prises avec une maladie grave tire dur,
s'il n'en meurt. — « X..., négociant n'est pas très
bien dans ses affaires ; on assure qu'il tire dur. » Cela
équivaut à dire qu'il tire le diable par la queue. —
(Voyez le mot Ponée. J'ai cité à cet article un exem-
ple de la locution tirer dur.)
Tirette, s. f., petit tiroir pratiqué dans les tables
longues sur lesquelles nos paysans prennent leurs
repas. Ce tiroir est fermé par une petite porte à cou-
lisse. C'est dans la tirette qu'on serre le beurre, le
lohon, et aussi les peignes, les brosses à souliers,
etc. — Nos dames appellent tirettes les cordons avec
lesquels elles relèvent leurs robes à queue (1864).
CENTRE : tirette, tiroir.
Tocson, s. m., enfant ou garçon à grosse tête,
têtu et d'une faible intelligence. — « C'est un tocson
qui ne comprend rien.))
Toc-toc, s. m., sobriquet que le peuple, et sur-
tout les débitants de boissons donnaient et donnent
encore parfois aux employés de la régie (Contribu-
tions indirectes), parce que, dans leurs visites, ceux-ci
frappaient de leur bâton ou du doigt les futailles,
pour s'assurer si elles étaient pleines ou vides.
Tollir, v. a., enlever, arracher. — « Mon voisin
-3)8-
voulait toUir mon droit de passage, mais je l'en ai
empêché. » — C'est le verbe latin toUere, à peine
altéré.
CENTRE : toile, s. {., ce qu'on enlève avec une fourche
d'un monceau de foin bien tassé : une toile de foin. —
NORM. : tollir, enlever. — duc. : tôlier, (vieux fr.) de
lollire pour loltere.
Tonton, s. m., oncle. — « Il a perdu son père,
il a hérité de son tonton Jacques ; en v'ià un qu'est
h'ureux !» — « J'entends le pas d'un jeval (che-
val); c'est tonton ». — Nous disons aussi tonton pour
tolon, jeu d'enfants : « Il va, vient et tourne comme
un tonton. » — « Vous êtes chien (vous êtes ma-
lin), mon tonton le prêtre, » disait un gars à son
oncle le curé. — Tonton se dit aussi pour derrière.
Enlants, nous chantions :
Bisez tonton, vous aurez d'ia galette,
Bisez tonton, vous aurez du bonbon.
s.\RTHE : CENTRE : ctc, tonton, oncle.
Torchonnée, s. f. Voilà un mot bien rennais.
On devine que c'est un dérivé de torchon. Dans mon
enfance, l'ouvrier emportait à la campagne le dîner
de la famille enveloppé dans un torchon ; c'était la
torchonnée. Assis sous les ormeaux, à l'orée de la prée
ou sous la tonnelle du cabaret, on dévorait à belles
dents le veau froid et la salade, puis on rentrait au
logis à la clarté des étoiles. Aujourd'hui, on se sert
— 359 —
du panier, et bientôt le mot torchoniie'e aura disparu
de notre langage populaire.
Tortir, v. a., abrégé de tortiller, tordre. « Cet
instrument est torti. »
CENTRE : Torire, m. sg. — Vieux Fr. : Tortir, tordre,
recourber.
Tosser (Se), v. pr., se frapper la tête contre un
corps dur. Se cogner, se donner une cabosse (bosse) à
la tête. — « Je me suis tossé contre la porte. » — Par
extension, se griser, peut-être parce que l'homme
gris se tosse souvent dans ses chûtes. On dit dans ce
cas : « il est tossé, » (il est gris, il est pris de vin).
Touaille, s. f., nappe. — « Chez l'oncle Fran-
cin on aimait la bonne chère, et la touaille était mise
à toute heure. » — Ce mot viendrait-il de l'anglais
toivel, serviette, essuie-mains ?
ACAD. : BESCH. : Touaille, linge pendu sur un rouleau
auprès du lieu où on se lave les mains, et qui sert à les
essuyer. — besch. : Touailloii, s'est dit pour serviette.
— NORM. : Touaille, serviette, linge de table. Touaillon,
essuie-mains, torchon. — Vieux Fr. : Touaille, touaillon,
nappe, serviette, essuie-mains; foacula. Toaillia, étoffe
de soie, parement d'autel (duc).
Touaneau, (pron. toiianiau),. s. m., (féminin :
touanelle). Terme injurieux qui s'applique au colin-
tampon, à la mauvaise ménagère, aux flâneurs et
aux paresseux.
Touine, s. f. Ce mot a deux significations bien
— 3^0 —
distinctes : i" un gros morceau de pain : a Jacques,
tout en cheminant, dévorait une ioiiine qui pesait
bien une livre. » — 2° une chiuchoire (V. ce mot),
ou tabatière de grès, en forme de poire, à l'usage
des gens du peuple.
Toupie vaut morelle, prov., signifiant que le
jeu de la toupie vaut celui de la morelle (ou marelle).
\'oy. Taiipin vmit niorelte.
Tourne-bouse, s. f., signorise donnée par les
gars aux filles de basse-cour. Voy. Bouse.
Tournette, s, f., petite pelle en fer, avec la-
quelle on retourne la galette de blé noir sur la tuile.
N'ORM. : Tournette, désigne le même ustensile.
Toussaint (Faire la), c'est préparer les terres
et faire les semailles, travaux qui s'exécutent dans les
environs de la fête de la Toussaint. — « Nos voisins
sont en retard ; nous sommes à la mi-novembre, et
ils n'ont pas encore /in7 la Toussaint ».
Tout-aller (A), locution adverbiale exprimant
qu'une chose, un objet est d'un usage particulier, se
met « tous les jours. » — « Jeanne n'avait que
deux cotillons, l'un à tout-aller, l'autre pour le di-
manche, quand elle s'habillait. » — Chez nous, s'ha-
biller, c'est se parer, se faire beau, se mettre en
grande toilette.
Tout-au-long, adv. de temps, toujours, sans
- 36i -
cesse. — a Tout-au-loiig, Jacques battait sa femme »
(à longues journées).
Tout-au-tout (Pain), pain de qualité infé-
rieure, partaiit moins cher que le pain blanc. — Nos
ouvriers se nourrissent de pain tout-au-tout .
Tout comme, Tout de même, locutions po-
pulaires qui reviennent souvent dans la conversation.
— « Vous aurez beau dire, la mère Concaré est
tout comme une brave femme, » — « Il avait refusé,
mais il est venu tout de iiu'mc. » — « \"là tout de même
un b'en fameux temps ! »
N'ORM. : CENTRE : Toiit dc même. — centre : Tout
comme.
Toute, V. n., abrégé de tousser. — « Le cher
homme ne faisait que toute. » — Ne se dit qu'à l'in-
finitit.
NORM. : loutre, m. sg.
ToutOD, S. m., pas d'un cheval.
Tout-plein, locution adverbiale, beaucoup, en
grande quantité, en abondance. — « J'aime tout-plein
Mathurine. » — « Nous aurons tout-plein de pommes
cette année. » (Vo\\ plein.)
Touzer, v. a., tondre, couper les cheveux. —
« Les femmes de ce pays se faisaient autrefois toif^er
pour vendre leurs cheveux. » — « Voilà un garçon
mal tou::^é, « mal peigné, qui a les cheveux en désor-
— 362 —
drc. — Le jour de la Saint-Sylvestre on touie les
vaches entre les cônes pour les empêcher de moucher
dans l'année. (Voy. moucher).
NORM. : Tousser, — Vieux Fr. : Toiiser, ioiiier (duc).
Tracer, v. a. et n., traverser, passer à travers.
— « Avez-vous vu un tel ? — Oui, je l'ai vu
Iracer la grand 'route et prendre le chemin vicinal. »
— a Tracei par le champ, vous abrégerez votre che-
min. » — « courant et trassaut nuict et jour. »
(Jean Moiinct, 16^ s.).
XOKM. : Tracer, m. sg.
Trait, s. m. On nommait trait, avant la Révolu-
tion, une portion de territoire sur laquelle le
clergé et la noblesse avaient droit de dîme. La pa-
roisse était divisée en traits. — a On a dimé hier sur
le trait de Place, demain on dîmera sans doute sur le
trait de la Rossignolicre. » Ce mot semble avoir dis-
paru, et la génération actuelle ne le connaît pas.
Traître, v. a. — (On dit aussi teiirtre). Action
de tisser la toile ou la pénille ; est souvent employé
pour tordre, carder : on teut les harts pour lier les
fagots.
Transport, s. m., vestibule, couloir, corridor.
Passage allant d'une pièce de l'appartement à une
autre, ou conduisant à l'escalier. Le dessous de l'es-
calier fait suite au transport. — « Mes enfants,
— 363 —
allez jouer dans le transport. » — « Où avez-vous
mis tel objet ? — Il est dans le transport. »
Travoué, s. m., dévidoir. — Le fil passe du
fuseau sur le travoué.
BESCH. : Travouil ou iravoiiî, dévidoir. Travouiller. —
NORM. : Travouil, dévidoir. — centre : Travoir, tra-
VQiicr, travoué (dans l'Est), travouil (dans l'Ouest), ins-
trument qui sert à mettre Je fil enéchcvcau. Travouiller.
Trée, s. f., truie, femelle du porc. — « Notre
trée a fait six petits cochons. » — Nos paysannes,
dans leurs colères, se lancent souvent l'épithète de
trée. — On dit d'une personne maladroite, incapa-
ble : « Elle s'y entend comme une trce à ramer des
choux. »
Treizain, s. m., nombre de treize, treizième. —
On dit grammaticalement, le treizième ; nous disons :
« vous me donnerez le trciiain par-dessus le marché. »
— Voy. ^gis.
Trémar, s. m., blé semé en mars et récolté en
juillet.
Trémée ou Tremenne, s. t., piège à oiseaux,
— V. Icnucc.
Trempage, s. m., soupe, bouillon ; l'un ou
l'autre, ou l'un et l'autre. Le trempage, c'est la soupe
maigre ou grasse, de pain ou de galette; c'est aussi le
bouillon seulement, alors que le pensionnaire fournit
son pain. — Dix, vingt ouvriers sont employés dans
— 564 —
une construction ; ils se nourrissent à leurs frais,
mais on leur donne le trempage.
Trente-et-un (Se mettre sur son), c'est
mettre ses plus beaux habits. — « On voit, Francine,
que tu es de la noce ; te v'ià sur ton trcnie-et-iin. n
Tressaut, s. m., soubressaut, saut subit causé
par une surprise, un choc, un bruit inattendu. —
« Sous l'impression de ce mauvais rêve, je me suis
réveillé en tressaut. » — A été employé par Toppfer.
Sainte-Beuve, son biographe, dit à propos de cette
expression : « Mot excellent, de vieille souche, et
que lrcssaiUe))ieiit ne supplée pas. »
Tressauter, v. n., sauter, tressaillir. — Est
moins employé que le substantif tressaut. »
BESCH. : tressauter s'est dit pour tressaillir. — s.\rthe :
tressauter, tersanter, tressaut, tcrsaiit. — centre : tres-
sauter, ter sauter.
Treuler, v. a., traîner après soi ou avec soi, et
surtout malgré soi. C'est le verbe irôler modifié. —
« Je l'ai treulé toute la journée par la ville. » —
<f Elle treule o le (avec elle) une pourginée de gar-
çailles. » (Voy. Pourginée.)
Triau, s. m., (prononcez tériau), pis de la va-
che ou de la chèvre. — En français trayon.
Vieux Fr : Triant, mamelle ou mamelon.
Trifouiller, v. a., farfouiller, mettre en désor-
dre, déranger.
- 36)- -
NOKM. : Irifouiller, m. sg.
Triquemarder, v. a., troquer, cchanger. — Se
dit surtout en parlant dos personnes qui ont la ma-
nie d'échanger leurs effets ou les objets sur la posses-
sion desquels elles sont b.'asées. — Les enfants aiment
à IriqûeinarJcr.
Trompe, s. t. Nous donnons ce nom au sabot,
espè'ce de toupie sans moine et sans nonne. (Voy. ces
mots). Jouet d'enfant qu'on fait pirouetter en le
fouettant avec une peau d'anguille. Dans mon
enfance, nous aimions beaucoup ce jeu, qui semble
abandonné aujourd'hui.
Troncer, v. a., couper, étêter, faire un tronçon.
— c( Dans une rixe, son lâche adversaire lui tronça
le nez avec les dents. » — « Un fermier a eu le poi-
gnet Ironcé par une machine à battre. »
Vieux Fr. : troncer, tronçonner, (Jroncire.)
Troufignon, s. m., anus, rectum. — « Il a mal
au troufignon. »
NOR.M. : troii-fignon. — centre : troii-fignon {Etym.,
trou-finion (final).
Tructier, v. a. et n., mendier. Vieux mot tou-
jours très usité dans nos villages.
Truchoux, ouse, adj., trucheur, trucheuse,
qui truchc, qui mendie.
— 366 —
ACAD. : tnichcr, mendier par fainéantise. Tnicher, pop.
et vieux. — norm. : tnicher, v. a., écornifler, se faire
donner de l'argent, un diner, etc., en usant de trucs.
Tnicheiix.
Tuace, s. f., peau desséchée d'un insecte ; trace
de poux, de puces.
Tuer (Se), v. pron., locution très usitée dans
nos campagnes, s'appliquant au cidre qui, au lieu de
conserver sa limpidité et sa couleur primitives, prend
une teinte noirâtre au sortir du tonneau. C'est une
cause de dépréciation de cette boisson.
NORM. : 5c tuer, en parlant du cidre, m. sg.
TufFeau, s. m., croûte qui survient à la tète des
petits enfants. Les femmes du peuple se gardent bien
de chercher à faire tomber cette croûte. Elles pré-
tendent que c'est une éruption d'où dépend la santé
du marmot. Les médecins luttent en vain contre ce
préjugé.
Tuile, s. f., plaque en fer ou en fonte, de forme
ronde, sur laquelle on fait cuire la galette de blé
noir. — Anciennement cet ustensile de ménage était
en terre cuite, de là le nom de tuile qu'il porte
encore aujourd'hui.
NORM. : tuile, tieulle, poêle très-plate, dans laquelle on
fait cuire les crêpes appelées galettes.
Turne, s. f., taudis, masure, habitation en ruine
ou malsaine ; — ou encore une maison mal famée.
- 367 -
— « Je quitte Madame à la Saint-Jean, » disait une
bonne ; « qui voudrait rester dans cette tiirnc-hï ? »
CENTRE : turuc, m. sg. — norm. : turne, tune, tenue,
cabane, petite et chétive maison.
XJ
Urcer, v. n., brûler. Ne se dit guère que du
lait qui est resté trop longtemps sur le feu, et qui a
pris goût de pot. Le participe passé tircê est plus usité
que l'infinitif. — « Perrottte, voilà encore du lait
une ! y> — Ce mot vient-il de iirere, brûler, ou,
comme orceiil, de urceus, vase ? — Il est très usité.
V
Vache de chêne, s. 1. Nous appelons ainsi le
hanneton, dont le mâle a la tête ornée de petites cor-
nes. — La grande quantité de vaches de chêne au mois
de mai promet une année abondante.
- 368 —
Vagabond, s. m. (pron. vacabomî) ; cette ex-
pression n'a pas chez nos paysans un sens injurieux
ou délictueux. Le vacahond est l'ouvrier, le journa-
lier qui n'a pas de profession déterminée. — « Que
fait votre fiancé ? demandait-on à une fille qui ve-
nait annoncer son mariage. — Il fait un petit peu
de tout, répondit-elle ; il habille de la filasse, il
fait des fligots, . . . , il est vacahond. » — Il est vrai que
le plus souvent, le vacahond mène la vie du vagabond
proprement dit.
CENTRE : NORM. : vacaboiici, forme ancienne du mot
vagabond.
Valiseau, s. m., coupelle servant à mettre les
marchandises dans les balances.
Vanné, ée, part, passé du verbe vanner; essoufflé,
fatigué, harassé. — «Arrêtons-nous, je n'en puis
plus, je suis vanne. » — « Ses chevaux sont vannes. »
Vanner, v. a. — «Tu m'as vanne en me faisant
faire cette course insensée. » — S'emploie le plus
souvent sous la forme pronominale : Se vanner^ se
fatiguer.
Vas ou Vaie, s. f., voie, chemin. Ne s'emploie
guère que dans les expressions analogues aux sui-
vantes : — « Rangeons (rangez-vous) de ma vas,
que je passe. » — « Il est toujours dans ma vas.i> —
Dans quelques localités on dit vaic, Vo de voie étant
seulement chaneré en a.
— 369 —
NORM. : voie, veie, voie. Vieux Fr. : vce, voie, chemin
(duc).
Vau-l'eau, loc adv., cri ou chant de nos pâtres
conduisant leurs troupeaux à l'abreuvoir: « Vau-l'eau,
vaii-Vcau, vau-l'eau. »
ACAD. : A van l'eau, suivant le courant de l'eau.
Veilloche. s. f., petit tas de foin. — C'est avec
plusieurs vcillocbes qu'on forme les muions (V.
muloii).
SARTHH : vcillûchc, m. sg. — • korm. : vieillotte, vieiiil-
lolte, vciiillotte, vcilhite, villotte.
Venelle, s. f., ruelle du lit. — «J'aime à dormir
tourné vers la venelle. » — Le mari occupe le devant
du lit, la femme la venelle.
ACAD. : venelle, petite ruç. Vieux. N'est plus guère usité
que dans la phrase popul., enfiler la venelle, prendre la
fuite (La Font) — norm. : venelle (pron. v'netle), ruelle
du lit, passage entre deux maisons. — Vieux Fr. :
venelle, ruelle, passage étroit, ruelle du lit, venella (duc).
Venette, s. f., peur, émotion. — « Ah ! j'ai eu
une fameuse venelle ! » — On trouve ce mot dans
de Leuven et Dhautel. Il est très usité chez nous.
ACAD. : venette n'est usité que dans les phrases popu-
laires : avoir la venette, donner la venette. — norm. :
venette, diarrhée.
Vent du bas, vent d'ouest. Vent du haut,
vent d'est.
Ventiers, adv., peut-être. Il est presque toujours
24
— 370 —
suivi Je /'/('». — a Quand viendr'ous nous va ? —
Dimanche prochain, vent'urs b'eii. » — « J'irons
venliers l'en aux noces de Jeannette. » — Il a quel-
quefois la signification de l'adverbe volontiers, dont
il semble l'abrégé.
SARTiiE : venliers ou venqiiiers, m. sg.
Verdée, s. f., encore un synomTne de raclée,
volée, roustée, pile, flaupée, etc.
NORM. : vcrdèc, fessée. Vcrdcr, fustiger, battre, frapper.
Verder, v. n., aller et venir, se donner beau-
coup de mouvement pour peu de besogne. —
« Voyez cette fille qui depuis le matin vcnle dans la
maison. Qu'a-t-elle fait ?» — Ce verbe est très
usité.
ctNTKi: : vcrdcr, vagabonder, courir.
Vère, àdv. Employé pour oui dans un grand
nombre de localités et presque aux portes de la ville.
C'est le vcrc des Latins.
Q.uand je vas chez mes commères,
Dam'oui, dam'î't'«,
Je le fais veui' m'y queri, (chercher)
Dam'îv/T, dam'oui.
(Vieille chanson populaire).
NOR.M. : vcire, assurément, oui, vraiment.
"Vérette, s. m., svn. de variole. — Nous disons:
- 371 -
a Le pauvre garçon a la petite vcrclte, » ou la petite
vi'roh', ou même simplement : la verctte.
Véretté, ée, adj., personne dont le visage porte
les traces de la vêretle. — « Cette jeune fille était jolie
avant d'être vérettée comme vous la voyez. »
BESCH. : vèreite, syn. de vérolette. — korm. : vairetle,
verctte, ni. sg.
Verge, s. f. Ce mot a deux significations diffé-
rentes : 1° Dé à coudre des tailleurs et des tailleuses
de la campagne. Il diffère de celui dont se servent
nos dames et nos couturières de la ville, en ce qu'il
n'est point fermé à son extrémité. — 2° Bâton
flexible ou partie du fléau qui frappe le grain sur
l'aire. Le fléau a son manche et sa verge; celle-ci est
en bois de houx.
KORM. : verge, dé k coudre s.ins fond, employé par les
tailleurs.
Vergée, s. f. Nos paysans appellent ainsi le par-
cours des batteurs sur l'aire lorsqu'ils battent le blé.
La première vergée, la plus rude pour les travailleurs,
est suivie de deux autres. — On comprend que vergée
vient de verge. On dit rompre une vergée. Mais
bientôt, grâce aux batteuses à vapeur, les mots
fléau, verge, vergée seront rayés de notre langue, et
déjà on n'entend plus que dans quelques petites
fermes le bruit cadencé des fléaux, qui jadis charmait
nos oreilles. Il est remplacé par l'affreux ronflement
des machines, qui n'a rien de poétique.
— 372 —
Vergeter, v. n., se dit d'un objet quelconque
qui plie, qui fouette, qui, par sa flexibilité, se détend
comme un ressort. — Une baguette, une gaule
vcr^etteitt.
Vergner, v. n., tourner.
Verrée, s. f. (pron. varrêc), le contenu du
verre : « Allons bonhomme, encore une vanéc. »
CENTRE : verrée, m. sg. — acad. : verrcc, peu usité. —
BESCii. : verrée, presque inus.
Vert, s. m., nom donné à la boursette. à cause
de sa couleur verte. — « Aimez-vous la salade de
vert ? » Son seul mérite est de venir dans une saison
où il n'y en a pas d'autre. — Mcuhe est son vrai
nom .
Vesprée ou Vêprée, s. f., l'après-midi, le soir,
temps compris entre le diner des paysans et le cou-
cher du soleil. — « Que ferons-nous cette vesprèe ? d
— Trop souvent nos paysans passent au cabaret leur
vesprée du dimanche. — On trouve dans nos dic-
tionnaires le mot vèpre masculin : le vcpre, le soir,
vespera .
Un chapelet Vy donnay
Fait à la lesprce ;
Il le prit ; bon gré l'en say,
Puis m'a appelée.
(J. Froissard).
— 373 -
Mignonne, allons voir si la rose,
dui ce matin avait desclose
Sa robe de pourpre au soleil,
A point perdu, cette vesprce,
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vôtre pareil.
(Ronsard).
BESCH.: vepre, vespre, la fin du jour, le soir (Montaigne),
vcspréc s'est dit pour soirée, la fin du jour. — norm. :
véprèe, veillée, réunion du soir. — centre : véprée,
vesprée, veillée, soirée. — Vieux Fr. : vespre, soir.
Vesprèe, veillée, assemblée du soir (duc).
Vesne, s. f., vesse. — Un des personnages de
Rabelais, un des plaideurs devant Pantagruel, se
nomme Hiimcvesne. —
Vesner, v. n., vesser. — Entendu entre deux
écoliers : « Ah ! mâtin, tu as vesné. — Non, je n'ai
pas vesné. — Tu vesnes donc ? — Non, je ne vesne
pas. — Pourquoi mentir ? nous sommes seuls, et je
suis sûr de moi, — Je ne mens pas, et je le prouve.
Quand tu m'as dit : tu as vesné, je vesnais encore, et
quand tu as ajouté : tu vesnes donc, j'avais fini. » —
« La faulse vieille vesnoyt et vessoyt puant comme
cent diables. » (Pantagruel, ch. 1 5).
KORM. : vèiic, véner, vêneitx.
Vettes, s, f. pi., propos légers, récits grivois,
anecdotes gauloises. — Le vieux notaire T.., chez
lequel j'allais passer mes vacances, aimait à nous
- 374 -
dire des vclles et nous prenions plaisir à les enten-
dre. — Vient sans doute de vêtilk.
Veuvier, s. m., veuf. — a La veuve B. se
remarie ; elle épouse un veuvier. » — On dit rare-
ment vcuvicre.
NORM. : veuvcr, devenir veuf.
Vèze, s. f. On nomme ainsi le biniou des Bas-
Bretons. Ce nom vient sans doute de ce que l'instru-
ment est pourvu d'une vessie gonflée par le joueur.
— J'ai eu la bonne fortune d'entendre en 1858, au
pardon de Bannalec, l'aveugle Mathurin, le premier
joueur de véie du pays.
BEScii. : vè:^e, s'est dit d'une sorte de cornemuse.
Veneur. — CENTRE : vt\e, cornemuse.
Viage, s. m., douaire, rente viagère, voyagère,
comme disent nos bonnes gens. — « Son avoir con-
sistait en un viage que lui avaient constitué ses anciens
maîtres. »
HESCH. : linge, usufruit d.ms les anciennes coutumes.
— Vieux Fr. : l'inge, rente ou pension viagère, viagium.
Vice (Il n'y a pas), loc. adv. très usitée et qui
équivaut à : c'est tout un, l'un vaut l'autre, il n'y a
pas de choix. — « Voulez-vous ceci, voulez-vous
cela ? — Comme vous voudrez, il n'y a pas vice. »
Videlle, s. f., pour vivelle, reprise, terme de
couturière ou de ravaudeuse. Le second :• de vivelk
se trouve remplacé par un d.
— 375 —
Videller, v. a., faire des reprises à des bas, à
tics tricots, etc. Nous avons créé ce verbe qui devrait
être français (du moins viveller) au mcnie titre que
repriser, tricoter.
BEScn. : vidcllc, reprise.
Viette, s. f., cliemin étroit, petit sentier. — De
via. -=- Usité surtout dans le canton de Pleine-
Fougères.
N'ORM. : vielle, m. sg.
Vieuzir, v. n., pour vieillir. — « Hélas ! mes
enfants je suis bien vieux ! — Ne vous plaignez
pas, papa ; ne vicii:{it pas qui veut. »
NORM. : vieiiillir, m. sg.
Villotin, s. m, — Fém. : Villotine. — Épi-
thète injurieuse, terme de mépris employé par nos
paysans à l'égard des habitants des villes. Si un
villotin égaré se trouve dans l'obligation de deman-
der son chemin, qu'il y prenne garde, il risque fort
d'être trompé. Il faut dire que le villotin n'a pas tou-
jours pour le paysan les égards qui lui sont dus.
(Voy. Couye).
Dans Cl. Marot on trouve le mot Vilotière :
Quand les petites vUoticrcs
Trouvent quelque hardy amant
Vinette, s. f., oseille. — Qu'elle soit sauvage ou
cultivée, pour nous l'oseille est toujours de la vinette.
- 376 -
lîF.scii. : vinette, nom vulgaire de l'oseille. — norm. :
vinetlc, oseille.
Vioche ou Vioge, adj. m. et f., bien ou mal
portant, suivant qu'il est employé avec ou sans la
négative. — a Je n'étais pas vioche la semaine der-
nière ; me v'ià recopi et tout vioche à c't'heure-ci. »
— Ce mot semble dérivé de vie, vila.
NORM. : vioge, adj., vif, pétulant, irritable.
Viré, ée, adj., très souvent employé à la ville et
aux champs pour vit", emporté, colère. — « Le
patron est un brave homme, mais il est bien viré
par la tête. » (II a la tête près du bonnet). — Se dit
aussi pour fou, toqué. — Vire a un superlatif pirvirc
(V. ce mot) ; mais il est peu usité.
Vispin, s. m., toupie de petite dimension. —
« Mes petits amis ont de grosses toupies, et je n'ai,
moi, qu'un vispin. « — « Seune ton vispin. » (V.
Scnnci).
Vivrement, adv., synonyme énergique de par-
faitement, excessivement, — « Que dites-vous de ce
cid'e (cidre), de ce jeval ? — Sans mentir, c'est
vivrement bon. vivrement beau. »
Voir, V. n. Les écoliers de mon temps employaient
souvent ce verbe pour provoquer un camarade à un
pugilat. « Veux-tu voir ? », c'est-à-dire : « veux-tu
accepter le combat ?» — Nous avions un autre
genre de provocation presque toujours suivi d'effet.
— 377 —
Le provocateur se mettait une paille sur l'épaule, et
défiait son adversaire de l'abattre. Refuser eût été
une lâcheté. La paille tombait et le combat s'enga-
geait.
Vouiller, v. a., lancer sur. — « Il a vouiUc son
chien sur moi. » — Ce verbe est aussi à l'usage des
blanchisseuses : Vouiller la lessive, jeter le lessis sur
le linge empilé dans une cuve ou panne pendant un
certain laps de temps déterminé. (Voy. Lessis).
Voyette, s. t., sentier, chemin. Diminutif de
voie. (,Voy. Victte).
Vieux Fr. : voyetif, petite voie, sentier (duc).
Zaguer, v. n., employé par les écoliers dans le
jeu de billes ou canettes. Il équivaut au verbe queuter
dont se servent les joueurs de billard. Le joueur doit
lancer la canette avec le pouce, la main restant immo-
bile. S'il allonge le poignet pour atteindre plus
sûrement la bille visée, il lague, et le coup est dé-
claré nul.
- 37« -
Zog, s. m., épithète injurieuse donnée par les
écoliers à ceux de leurs camarades qui paraissent sim-
ples ou peu intelligents. — Nous appelions :^og le
petit D..., qui devint capitaine. De moins :^(^5 que
lui ne surent pas se créer une situation aussi hono-
rable.
Zuner, v. n., loucher. — Nous appelions luiiet
le louche ou louchard. — Zuner se dit aussi de l'ac-
tion de tirer, viser le but, parce que le tireur cligne
de Tœil.
Achève d'inipriincr
le quinze Juillet mil huit cent quatre-vingt-onze
par
Lemercier & Alliot
â NIORT
pour
Hyacinthe Cailliére, Editeur
d RENNES
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PC Coulabin, H.
2957 Dictionnaire des
B7C6 locutions populaires
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