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Full text of "Dictionnaire des ordres religieux, ou, Histoire des ordres monastiques, religieux et militaires, et les congrégations séculières de l'un et de l'autre sexe, qui ont été établies jusqu'à présent"

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PUEMIÈPiE 


ENCYCLOPEDIE 

THÉOLOGIQUE, 

ou  PREMIÈRE 

SÉRIB  DE  DICTIONNAIRES  SUR  TOUTES  LES  PARTIES  DE  Là  SCIENCE  RELIGIEUSE, 

orraANT  en  fkançais,  et  par  ordhe  alphabétiçob, 

LA  PLUS  CLAIRE,  LA  PLUS  FACILE,  LA  PLUS  COMMODE,  LA  PLUS  VARIÉE 
ET  LA  PLUS  COMPLÈTE  DES  THÉOLOGIES: 

CES  DICTIONNAIRES  SONT,  POUR  LA  PREMIÈRE  SÉRIE,  CEUX  : 

D'ÉCRITUnE  SAINTE,  —  DE  PHILOLOGIE  SACRÉE,  —  DE  LITURGIE,  —  DE  DROIT  CANON,  — 

DES  HÉRÉSIES,  DES  SCHISMES,  DES  LIVRES  JANSÉNISTES,  DES  rROPOSITIONS  ET  DES  LIVRES  CONDAMNÉS, 

—  DES  CONCILES,  —  DES  CÉRÉMONIES   ET  DES  RITES,  — 

DES  CAS   DE    CONSCIENCE,  —  DES    ORDRES    RELIGIEUX  (lIOMMES    ET    FEMMES),    —    DES    DIVERSES  RELIGIONS,  — 

DE  GÉOGRAPHIE  SACRÉE  ET  ECCLÉSIASTIQUE, — DE  THÉOLOGIE  DOGMATIQUE,  CANONIQUE, 

LITURGIQUE    ET    POLÉMIQUE, —  DE  THÉOLOGIE  MORALE  ET  MYSTIQUE, 

—  DE  JURISPRUDENCE  CIVILE-ECCLÉSIASTIQUE, 

—   DES   PASSIONS,    DES    VERTUS   ET  DES   VICES,    —    d'hAGIOGRAPHIE,  —  DES  PÈLERINAGES  RELIGIEUX,  — 

d'astronomie,  de  physique  ET  DE  MÉTÉOROLOGIE  RELIGIEUSES, — 

d'iconographie  chrétienne,  —  DE  CHIMIE  ET  DE   MINÉRALOGIE  RELIGIEUSES,  —  DE  DIPLOMATIQUE  CHRÉTIENNE,    - 

DES  SCIENCES  OCCULTES,  —  DE  GÉOLOGIE  ET  DE  CHRONOLOGIE  CHRÉTIENNES: 

Publication  sans  laquelle  on  ne  saurait  parler,  lire  et  écrire  ulilement,  n'importe  dans  quelle  situation  de  la  vie: 

PUBLIÉE 

PAR  M.  L'ABBÉ  MÏGNE, 

ÉDITEDB  DE  LA  BIBLIO'E'HÈQIJE  UNIVEBSSLLE  DO   CLEBGÉ, 

ou 
DES  C0VR9   C-OJSÏtEIBâirr.   CIU-QL'E  mSAÎirJlE  DE   LA  SCIENCE   ECCLÉSIASTIQUE. 

PRIX  :  6  FR.   LE  VOL.  POUR    LE  SOUSCRIPTEUR  A  LA  COLLECTION  ENTIÈRE,  OU  A   50   VOLUMES  CHOISIS  DANS  LES  TROIS 

Encyclopédies;  7  fr.,  8  fr.  et  même  9  fr.  pour  le  souscripteurs  tel  ou  tel  dictionnaire  particulier. 

52  VOLUMES,  PRIX:  312  FRATO. 


TOME  VIBîGT  ET  Ul^IEME. 

I  I  I  I  9  ta  Tggi 

DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  RELIGIEUX. 

TOME  DEUXIÈME. 

h-  VOL.  PRIX  :  32  francs. 


S'IMPRIME  ET  SE  VEND  CHEZ  J.-P.  MIGNE,  EDITEUR, 

AUX  ATELIERS  CATHOLIQUES,  RUE  D'AMROISE,  20,  AU   PETIT-MONTROUGE, 

AUTREFOIS  BARRIÈRE   d'eNFER   DE   PARIS  ,  MAINTENANT  DANS   PARIS. 

18G3 

"Ooiversit^i* 

BIBLIOTHECA 
Oftaviensis 


AVIS    IMPOIITANT. 


rubiicalions,  iurciU  imprlmi's  ou   lrr.|.  noir  ou  Irop  blanc.  Mais ,  depuis  ces  lcmpseloii,'ius   les  mécaniques  ont 


sons 
un 


el  (l'en  conférer  une  irosièmc  avec  la  seconde,  sans  avoir  préparii  en  rien  le  nianuscnl  de  I  aulpur. 

Dans  les  ■itelicrs  Ciillioluiui's  la  dillVrcnce  ist  presque  incommensurable.  Au  inoven  de  corre<-tcurs  b'anchis  si 
le  harnais  eî  dont  le  coup  d'ui!  hpo^'iapliique  csi  sans  pilié  pour  les  f.ailos,  on  commence  par  préparer  la  copie  û 


bout  à  l'autre  sans  en  cxcepIcT  iiii  seul  mot.  On  lit  ensuite  en  première  épreuve  avec  la  copie  aiuM  pr,  parée.  On  lit 
eu  seconde  de  la  même  manière,  mais  en  col  alionnanl  avec  la  premièie.  On  fait  la  mime  cliose  en  tierce,  eu  coll.i- 
lionnanl  a\cc  la  seconde.  On  auil  île  même  en  (|uarie,  en  collationnant  avec  la  tierce.  Un  renouvelle  la  même  opé- 
ration en  nuinle,  en  collaii'miianl  auc  la  quarte,  (es  coHalionnements  ont  pour  but  devoir  si  aucime  des  fautes 
sicnalées  au  bureau  par  MM.  les  correcleuis,  sur  la  luarfje  des  épreuves,  na  échappé  h  MM.  les  corrigeiirs  sur  le 
marbre  et  le  mêlai.  Après  ces  cinq  lectures  cnlièr?s  contrôlées  l'une  par  l'autre,  cL  en  dihnrs  .le  la  préparait!  n 
ri-dessus  mentionnée. vient  une  révision,  ci  souvent  il  en  vient  deux  ou  trois;  puis  l'on  didie.  le  clicliat;e  opéré,  par 
r.inséuuent  la  pure;6  du  lexle  se  trouvant  immobilisée,  on  fait,  avec  la  copie,  une  nouvelle  lecture  d'un  bout  de  l'é'- 
preuvft  h  l'autre,  on  se  livre  U  une  nouvelle  révision  ,  et  le  tirage  n'.i  rive  qu'après  ces  innombraliles  précaulions. 

.\ussi  y  a  t  il  îi  Houlroui.'e  des  correcteurs  de  toutes  les  nalious  et  eu  (iliis  {;rand  nombre  que  dans  vinfrl-iinq 
imprimerie;  de  Paris  réunies  !  Aussi  encore,  la  correction  y  coùtc-1-elle  autan:  que  la  composition,  lundis  qu'ai  leurs 
elle  ne  coille  que  le  dixième  !  Aus-i  entin,  bien  que  l'assertion  puisse  paraître  téméraire,  Texactilude  obieniie  par 
tant  de  frais  et  de  soins,  fait-elle  que  la  plupart  des  Ivlilions  des  AUHiers  Cnllwli(fues  .aissenl  bien  loin  derrière  elles 
celles  même  des  célèbres  liéiuMictius  Mabillcn  et  Moutlaucon  et  des  célèbres  Jésuites  Petau  et  Sirmond.  (.lue  l'on 
compare,  en  elfel,  n'inq>i:rle  i)uelles  leuilies  de  leurs  éditions  avec  celles  des  nôtres  qui  leur  correspondent,  en  grec 
comme  en  latin,  on  se  coiuaincra  que  l'invraiseiublable  est  une  réalité. 

D  ailleurs,  ces  savants  émiiienls,  plus  préoccupés  du  sens  des  Icxles  que  de  la  partie  typographique  et  n'élant 
point  correcteurs  île  prc^fcssioii,  lisaient,  non  ce  que  portaient  les  épreuves,  mais  ce  qui  devait  s'y  trouver,  leur 
haute  intelligence  suppléant  aux  faoles  de  l'édiliiui.  De  plus  les  llénéciiclins,  comme  les  Jés'iiles,  opéraient  presque 
toujours  sur  des  nianuscrits,  cause  pi'rpétueib'  île  l.i  iiiiilli|ilicité  des  fautes,  pemlanl  que  les  McliCis  Calliotiqucs, 
dont  le  pn  pre  est  surtout  de  ressusiitir  la  'Iraililien,  n'opèrent  le  plus  souvent  que  sur  di  s   imprimés. 

Le  11.  P.  Ile  liucli,  .lésuite  iloll.nidisle  de  liruxelles,  nous  écrivait,  il  y  a  quilque  Unips,  n'avoir  pu  trouver  en 
d:ii-liuit  mois  d'étuilc,  H;/c  .scii/c /"!((<;  dans  noire  Pulrologie  Inliiie.  M.  Denzinger,  professeur  de  lliéo'.ogieà  ILni- 
versité  de  Wur/bmirg,  et  M.  lieissuuiin.  Vicaire  dénéralde  la  même  ville,  nous  mandaient,  .à  la  date  du  10  juillet, 
n'avoir  pu  égalemcnl  surprendre  loïc  .si'ii/c  fiiiitc,  soit  dans  le  latin  soji  dans  le  grec  de  noue  double  l'ulroUifjie.  Kiifin, 
le  savant  |l'.  l'itra,  Béii'dictin  de  Solcsiee,  cl  M.  lionetty,  directeur  i]i's  Annules  (te  phi^OiOiihic  cliri'licmie,  mis  au 
ilêti  de  nous  couviiniirc  il'une  seule  erreur  lypojjraphique,  ont  été  lorcés  d'avouer  que  nous  n'avions  pas  trop 
prêsiimê  de  nolie  pirfaite  correction.  Dans  le  C  erge  se  irnuvcnt  de  bons  latinistes  et  de  bons  lie  lénises.  el.  ce  qui 
est  plus  rare,  des  houimes  1res  positifs  et  tiès-praliqucs,  eh  bien  !  nous  leur  piometlons  une  primo  de  2S  centimes 
nar    ch  que  fjute  qu'ils  découvriront  dans  n'importe  lequel  ilo  i  os  volumes,  siirtoul  d  ins  les  grecs. 

M  algré  ce  qui  précède,  l'Editeur  des  Cviwscuwplcls.  sentant  de  plus  en  plus  l'iuiportance  el  même  la  nécessité 
d  une  correction  parfaite  pour  qu'uu  ouvrage  soit  veritabl-ment  utile  et  estimable,  se  livre  depuis  plus  d'un  an,  el 
est  résolu  de  se  livrer  jusqu'il  latin  il  une  opér.ilion  longue,  pénible  et  coûteuse,  savoir,  la  révision  entière  et 
universelle  de  ses  innomlirables  c!ii  hés.  Ainsi  cbaciin  de  ses  volumes,  au  fur  et  ."i  mesure  qu'il  les  remet  sous  presse, 
est  corrigé  mot  pour  mol  d  un  bout  à  l'autie.  yiiaïaiite  hommes  y  sont  ou  y  seront  occupés  pend.int  10  ans,  et  une 
somme  qui  n.^  saurait  ètie  moindre  d  un  iIimui  million  de  francs  esl  consacrée  à  cet  ini|iorlant  contrôle.  Pe  cette 
minière,  les  Publications  des  Atiiicrs  Ciilltulujuci,  qui  déj.'i  .se  distinguaient  entre  toutes  par  la  supériorité  de  leur 
correclion,  n'auront  de  rivales,  Sous  ce  rapport,  dans  aucun  temps  ni  dans  aucun  p.iys;  car  quel  est  l'éditeur  qui 
poiirraii  et  voudrait  .se  livrer  Al'UliS  (01  I'  ii  des  travaux  si  gigantesques  el  d'un  |  rix  si  exorbilant'?  Il  laut 
«cites  èire  bien  nénétré  d'une  vocalion  divine  ;i  cet  effet,  pour  ne  reculer  ni  devant  la  peine  ni  devant  la  dépense, 
Mirlnut  1  irsque  rr.urope  savante  proclaine  que  jamais  volumes  n'ont  été  édités  avec  tant  d'exactitude  que  ceux  de 
Il  liiblwVièqnc  universelle  du  Clcryé.  Le  présent  volume  est  du  noiubre  de  ceux  révisés,  et  tous  ceux  qui  le  seront 
a  l'avenir  porterons  cette  note.  ICn  conséquence,  iiour  juger  les  productions  des  Ateliers  Cutholiques  sons  le  rapfiorl 
de  la  correclion,  il  ne  laiidia  prendre  que  ceux  qui  porteront  en  lèle  lavis  ici  tracé.  Nous  ne  reconnaissons  qui  celle 
édition  cl  celles  qui  suivront  sur  nos  planclies  de  ruélal  ainsi  eocigées.  On  croyait  autrefois  que  la  stéréotvpio 
immobilisait  les  fautes,  attendu  qu'un  cliché  de  nelal  n'est  point  é. astique;  pas  du  loiil,  il  iulroduit  la  perfection, 
car  on  a  trouvé  le  moyen  de  le  corriger  jasqu'à  exttintion  de  fautes.  1. 'Hébreu  a  été  revu  par  M.  Dracii,  le  Gret 
par  des  îlrers,  le  I.atin  et  le  l'rancais  par  les  premiers  correcteurs  de  la  eapilale  en  ces  langues. 

Nous  avons  la  consolalion  de  pouvoir  linir  tel  mis  par  les  réflexions  suivanies  :  Knfin,  noire  exemple  a  fini  pat 
ébranler  les  gran  les  publications  en  Italie,  en  Allemagne,  en  Belgique  el  en  l'rance,  par  les  C.inous  grecs  de  Uome, 
le  Ceriiil  de  Naples,  le  .S'iifiil  Thomas  de  l'arme,  V Ijiaftinpédie  relifiieuse  de  Munich,  le  recueil  des  (li'clardlivns  ite 
rites  de  llruxillcs,  les  tlullnndistes ,  le  Snurez  et  le  sjmiléqe  de  Paris,  .lusqu'ii,  on  n'avait  su  réimprimer  que  Tes 
o  ivraiics  de  courte  haleine.  L^s  in-4°,  où  s'engloutissent  les  in-folio,  f.iisaienl  peur,  el  on  n'osait  y  loi  cher,  par 
crainte  de  se  nover  dans  ces  abîmes  sans  fond  et  sans  rives;  mais  on  a  Uni  par  se  risquer  ,à  nous  imiler.  liien  [ilus, 
•ou»  nuire  impulsion,  d'aulres  Kditeiirs  se  préparent  an  llniluire  universel,  aux  Déeiswns  de  loiiles  les  f.ongrêgations, 
a  une  ltioipa])hie  et  ii  une  //is/oirc  générale,  etc.,  etc.  Maihenreusement,  la  [iliipart  des  éditions  déjà  faites  ou  qui  su 
fout,  soni  sans  jiitor.lé,  parre  qu'elles  sont  sans  cxarliliide  ;  la  correction  semble  en  avoir  été  lailc  par  des  aveugles, 
«o't  qu'on  n'en  ail  p«s  senti  la  gravité,  soit  qu'on  ait  reculé  ilevanl  les  Irais;  mais  paliencel  nno  reproduction 
cnrrcrle  surgira  bienlùt,  n«  (ùl-ce  qu'il  la  lumière  des  écoles  qui  se  sont  faites  ou  qui  se  feront  encore. 


DICÏIONNAIRE 


DKS 


ORDRES  RELIGIEUX 


ou 

HISTOIRE 

DES  ORDRES  MONASTIQIES,  RELIGIEUX  ET  MILITAIRES 

ET  DES  CONGRÉGATIONS  SÉCULIÈRES  DE  LUN  ET  DE  L'AUTRE  SEXE,  QUI  ONT 

ÉTÉ  ÉTABLIES  JUSQU'A   PRÉSENT; 

CONTENANT : 

LEUR    ORIGINE,    LEUR    FONDiTlON,    LEURS    PROGRÈS, 

LES    ÉVÉNEMENTS     LES    PLUS    CONSIDÉRABLES    QUI     LEUR     SONT     ARRIVÉS, 

LA    DÉCADENCE    DES    UNS    ET    LEUR    SUPPRESSION, 

l'agrandissement    des    autres     par    le    moi  en    des    différentes     RÉFORMES    QUI    T   ONT 

ÉTÉ     INTRODUITES, 

LES    VIES    DB    LEURS    FONDATEURS    ET    DE    LEURS    RÉFORMATEURS, 

AVEC    DES    FIGURES    QUI     REPRÉSENTENT    LES    DIFFÉRENTS     HABILLEMENTS     DE    CES 

ORDRES   ET   DE    CES   CONGRÉGATIONS, 

RELIGIEUX     rÉMTENT     DU     IIEBS     OnoRE     DE     SAINT  FRA^Ç01S,     DE     LA     CCMMII>'ACt£     DE     PICMIS. 

MISE  PAR  ORDRE  ALPHABÉTIQUE 

CORRIGÉE    ET    AUGMENTÉE    d'UNE    INTRODl'CTION  ,    li'uvE    NOTICE    SUR    l'aUTEUR, 

d'v\  gkand  nomure  d'auticles  ou  rAUTiF.s  d'articles,  et  d'un  SUPPLÉMENT  OU  l'on  TROUVE  l'histoir!;  res 

CutiGRÉGATIlNS    OMISE*    PAR    IIÉLÏIlT, 

ET    L'HISTOIRE    DES    SOCIÉTÉS    RELIGIEUSES 

ÉTABLIES  DEPUIS  QUE  CET  AUTEUR  A  PUBLIÉ  SON  OUVRAGE, 
PAR   MAaiE-LÉANDRE   BADICHE, 

VICAIRE  DE  'ilNTE-MAUGlEBlIE  A  PARIS,   LICE>CIÉ  EN  TlIKnL'lGIK,   M~M;mE  DE  LA  SOCIÉTÉ  ASIAnQUE,  DE  l'|>STITOI  HlSIOlllQBE, 
DE  l'aCADÉMIi;  IMIÉIIIALE  ET  RO\ALF,  d'auk/./.o,   LTG. 

Et  pas*  M.  l'abbé  TOCKOîr, 

ANCIEN    CL'BÉ    D'aNTIBES,    CHANOINE    nONORAlRE    DE    mtJlS,    ETC.; 

PUBLIÉE  PAR  M.   L'ABBÉ  MIGNE, 

.DITEOR     DB     LA     BIBLIOTHÈQUE     U  NI  VEnSELLE    DU    CLERGÉ, 

OU  DES  COURS  COMPLETS   SIR    CHAOUE   DRANCHE  DE    LA    SCIENCE  ECCLÉSIASTIQUE. 


TOMK   DEUXIEME. 


4   VOL.,  PRIX  :    32  FRANCS. 

S'IMPRIME  ET  SE  VEND  CHEZ  J.-P.  MIGNE,  EDITEUR, 

AUX  ATELIERS  CATHOLIQUES,  RUE  D'AMBOISE,  20,  AU  PETIT-MONTROUGE, 

AUTREFOIS  CARRIÈRE  d'eNFER  DE  PARIS,  MAINTENANT  DANS  PARIS. 


Paris.  —  Imprimerie  J.-P.  Mir.NE. 


-mt 


DICTIONNAIRE 


DES 


ORDRES  RELIGIEUX 


D 


DALMAÏIE  (  Congrégation  de).    Voyez 

AUGUSTl.NS. 

UALMATIE  (Religieux  pémtents  de  la 

CONGRÉGATION  De).    VoI/CZ  SiClLE. 

DAMKS  PAUVRES.  Voyez  Clarisses. 
DANNEBllOCH.   Voyez  Eléphant. 

DÉCHAUSSÉS  (Frères  Mineurs   de  l'É- 
troite Observance  en  Espagne,  dits). 
Des  Frères  Mineurs  de  l'Etroite  Observance 

en  l'.'spagne  ,   appelés  \es  Décliaussés ,  et 

dans  leur  origine  les  Frères  du  Gapuce  ou 

du  Sainl-Evangile. 

Enlie  les  disciples  de  Jean  de  la  Piiebla, 
!e  bienheureux  Jean  de  Guadaloupe  fui  un 
des  plus  zélés,  non-seulemenl  pour  uiaiiite- 
nir  l'Etroite  Observance  qu'il  avait  établie, 
mais  encore  pour  l'étendre  d;ins  les  autres 
provinces,  souhaitant  avoir  pour  cet  effet 
quelque  élabiissemeiil  au  royaume  de  Gre- 
nade, afin  do  l'introduire  cliez  les  Pères  do 
l'Observance  de  la  province  de  SainlJac- 
ques;  et,  pour  mi.  ux  réussir  dans  son  des- 
sein, il  en  obtint  la  pe^mis^ion  de  François 
Sainson,  général  de  l'ordre.  Il  ne  se  contenta 
pas  des  austérités  que  le  bienheureux  Jean 
de  la  Puebla  avait  introduites,  il  eu  ajuuta 
encore  de  nouvelles,  et  fil  quelque  change- 
ment dans  l'habit  :  car,  outre  qu'il  en  prit 
un  fort  étroit  et  rapiécé  ,  il  accommoda  le 
caprice  à  la  façon  de  celui  que  saint  Fran- 
çois avait  porté,  lui  donnant  une  forme  car- 
rée, et  le  rendant  pointu,  ce  qui  fit  donner 
aux  religieux  de  sa  réforme  le  nom  de  Frè- 
res du  Capuce  ;  il  quitta  les  socques  ou  san- 
dales pour  marcher  nu-pieds  ,  sans  avoir 
rien  aux  pieds,  ce  qui  les  fil  aussi  appeler 
les  Frères  Déchaussés  ;  el  comme  les  pre- 
miers couvents  de  cette  réforme  furent  éri- 
gés en  custodie  sons  le  nom  de  la  Custodie 
du  Saint-Evangile,  on  leur  donna  encore  le 
nom  de  Frère»  du,  Saint-Evangile  ;  mais  ils 
quittèrent  ceux  du  Capuce  el  du  Saint-lwan- 
gile  lorsque  le  pape  Léon  X.  eut  réuni  toutes 
les  différentes  réformes  de  l'ordre  de  Siiinl- 
François  sous  le  nom  d'Observance  cl  de 
Réformés,  et  conservèrent  celui  de  Dé(  haus- 
sés, pour  se  distinguer  des  religieux  de  1  E- 
troiie  Observance  d'Italie,  qui  avaient  piis 
celui  de  Réformés. 

Jean  de  Guadaloupe,  ayant  pris  un  habit 
tel  que  nous  avons  marqué,  alla  à  Rome 
pour  remontrer  au  pape  Alexandre  VI  les 
abus  qui  s'éiaient  glissés  dans  l'ordre  et 
dans  l'Observance  contre  la  pureté  de  la  rè- 
gle; et,  ayant  renonié  entre  les  mains  de  ce 
Dictionnaire  des  Ordres  religieux.  II. 


pontife  à  tous  les  privilèges  el  à  toutes  les 
dispenses  (|ui  av;neiil  donné  lieu  au  relâ- 
chement, il  en  obtint  une  bulle  le  2'i  sep- 
tembre 1400,  par  lai|iicllï  Sa  Sainlelé  lui 
donnait  permission  de  bâtir  un  touveiit  au 
royaume  de  Gri  nado,  cl  de  piendre  avec  lui 
six  religieux  de  l'Oliservance  ,  de  quclqiin 
province  qu'ils  fussent  ,  auxquels  le  pape 
accordait  la  permission  de  le  suivre  ,  même 
contre  la  volonté  de  leurs  supérieurs,  poMr\  u 
qu'ils  la  leur  eussent  demandée,  les  incitant 
sous  l'obéissance  du  général  île  l'ordre,  el 
les  exemptant  de  la  juridiction  des  Obser- 
vants, qui  n'avaient  pour  lors,  comme  nous 
avons  dit  ailleurs,  que  des  >if aires  géné- 
raux, le  général  étant  Conventuel. 

Jean  de  Guadaloupe  étant  rclonrné  en  Es- 
pagne présenta  son  bref  à  l'arcliuv.  do  Gre- 
nade cl  au  prieur  de  Nolrc-Damo  de  (juada- 
luupe  ,  que  le  pape  avait  nommé  pour  le 
faire  e\écuter.  IMusieurs  religieux  zélés  eu 
ayant  eu  connaissance  se  joignirent  à  ce  ré- 
formateur, qui  leur  donna  nn  habit  pareil  à 
celui  qu'il  portail,  en  envoya  qnclquc--uiis 
dans  un  ermitage  prorlie  Oropeza,  et  d'au- 
tres eu  un  autre  eimilage  proche  Placenza, 
en  attendant  qu'il  pliit  à  Dieu  leur  procurer 
quelques  pauvres  couvents. 

Comme  dans  le  même  teujps  plusieurs  re- 
ligieux quittaient  l'oidre  sous  divers  prétex- 
tes ,  el  que  qupl(|ucs-uns  même  prenaient 
des  habits  d'ermites  ,  avec  permission  de- 
Rome,  lesPèrcs  de  l'Obscrvanct^  <iui  voynient 
avec  peine  leurs  lueilleurs  sujets  passer  dans 
la  réforme  de  Jean  de  Guadaloupe  ,  voulant 
se  servir  du  prétexte  de  ces  abus  pour  eu 
empêcher  le  progrès  ,  oblinreni  du  même 
Alexandre  Vl  un  bref  qui  révoquait  tous 
ceux  qu'il  pouvait  avoir  accordés,  de  quel- 
que nature  qu'ils  fussent ,  pour  pcrmelire 
aux  religieux  de  vivre  hors  de  l'ordre.  Eu 
vertu  de  ce  bref ,  les  Pères  de  l'Observance 
intiuiétèrent  Jean  de  Guadaloupe  el  ses  com- 
pagnons pour  les  obliger  de  retourner  à  leur 
obéissance  el  de  rentrer  dans  les  couvents 
de  l'Observance  ;  mais  le  saint  réformateur 
fit  un  second  voyage  à  Home,  cl  obtint  uif 
aulre  bref,  du  i6  juillet  l'i'JO,  par  leipiel  ce 
pontife  déclarait  que  son  inleulion  n'avait 
point  été  de  comprendre  dans  celui  qu'il 
avait  accorde  aux  Observants,  Jean  de  Gua- 
daloupe ni  ses  compagnons.  Cette  lenlalivu 
des  Observants  contre  ces  saints  religieux. 
bien  loin  de  leur  être  préjudiciable,  1  ui'  lut 
avantageuse  :  car  non -seulement  le  pape 
confirma  son  premier   bref  du  25  scptcm- 


H 


DICTIONNAIRE  OES  ORDRES  UEI-ÎCIEUX. 


12 


hro  I'i0('i,  niai<  il  nrronla  onrore  à  Jc.iii  tlo 
(iiiiidalxiip  '  hi  piTiiiissIoii  (le  recevoir  dans 
sa  reforme  Ions  le>  relifjieiix  qui  se  présen- 
liraienl  a  lui  pour  y  eiilrer,  defeiiilanl  sous 
«le  prosses  p  im  s  à  qui  qvjo  co  fùl  de  les  in- 
quiéter cil  aucune  l.inci.  Oulrc  co  bref,  il 
<'l)iinl  aussi  ,  av.inl  que  de  partir  de  Home, 
du  profureur  cl  du  c<tiiiaMssairc  ,  du  Père 
l'"ran  ois  Samson  ,  pcneral  ,  auquel  le  bref 
du  pape  le  souincltail  lui  et  les  siens,  un  am- 
ple pouvoir  de  rei  cvoir  toutes  les  maisons 
qui  lui  scraicii!  oITertes.  Les  Pures  de  l'Oh- 
■•ervancc,  ayant  ou  communication  de  ces 
brefs  et  de  ces  permissions  n'inquiélèreiil 
plus  les  réformés,  sur  lesquels  ils  n'avaient 
plus  aucune  aulorilé  ni  juridicliou. 

Jean  de  Tiuadaloiipe  jouissant  de  la  paix 
vl  de  l.i  tranquillité,  et  ne  songeant  plus  qu'à 
se  jinicurer  un  couvent  pour  y  jeter  les  fun- 
deuicnts  de  sa  réforme,  Dieu  suscita  un  gen- 
lillioniiiie  de  Tiuxillo  (jui  lui  en  offrit  un 
proche  celte  ville.  Ce  zélé  refirmaleur  en 
prit  possession  l'an  loOO  ,  et  le  dédia  à  la 
s  linte  Vieigc  sous  Ir  noai  de  Noire-Damc- 
de-l-umiére.  Ce  fut  là  qu'il  dressa  ses  pre- 
mières coiislilulions,  et  où,  après  avoir  ob- 
tenu trois  ou  quatre  autres  petits  couvents, 
il  se  forma  une  custodie,  à  I  iqucllc  on  donna 
le  nom  du  Siiinl-l'Jvongile,  el  qui  fut  depuis 
érigée  en  province  sous  le  titre  de  Sainl-Ga- 
br:el. 

De  si  lieureuv  coinmeiiccinents  cncoura- 
pircnt  le  1ère  Jean  de  (juadaloupe  à  éten- 
dre sa  réforme  jusqu'en  Portugal,  où  il  alla 
à  cet  efîel ,  el  y  liâiil  quelques  couvents, 
dont  le  premier  lui  fut  donné  par  le  duc  de 
Itragincc,  près  de  la  \illc  de  Viliusa.  L'é- 
glise de  ce  premier  ctalilissemenl,  qui  fut 
dediec  eu  l'Iionneur  de  Notre-Dame-do - 
4'iiiè,  donna  d.iiis  la  suite  le  nom  à  une 
[irovince  de  la  inéui!'  réforme;  le  second 
couvent  qu'il  obtint  en  ce  royaume  fut  pro- 
(  lie  la  ville  de  (iliaves  ;  le  troisième  procbc 
It.ircclos,  et  un  ermitage  dans  un  village 
uiimmé  Mérida. 

Li;-  l'ères  de  l'Observance,  voyant  les  pro- 
pr.-s  do  cette  réforme,  que  le»  plus  zélés 
d'entre  eux  emhrassaieni  pour  y  travailler  à 
la  perfeclioii  en  observant  la  règle  avec  plus 
de  rigueur  dans  sa  pureté,  voulurent  l'em- 
pérlier ,  cl  loi  inèrcnl  leurs  plaintes  au  T. 
M.irli.il  liourlier,  Trançais  de  nation  et  vi- 
e  lire  général  de  l'Ouservancc  de  la  Famille 
Dllraiiiunlainc,  qui  à  leurs  solliciia  ions  as- 
sembla un  rbapiire  général  en  (bastille  l'an 
l.'iOJ,  où  il  fut  ordonne  que  dans  toutes  le-i 
provinces  d'Kspagne  on  assignerait  certains 
couvents  à  ceux  qui  voudraient  uliscrvii  la 
règle  a*ec  plus  de  rigueur  el  embrasser  les 
iiièuies  pratiques  et  les  mêmes  .lustérilcs 
<iue  Ion  Krèiesilu  Saiul-liN  angile,  à  condi- 
tion qu'ils  siéraient  toujours  sous  l'obéiii- 
saiicc  des  provinciaux  de  l'Observance, 
'l'i  Ile  fiil  la  résolution  du  clia|iilre  général, 
par  l.iquellc  ou  prétendait  arréier  le  progrès 
de  1.1  réforme  de  Jean  A<  Ijiiadaloupe,  cl  eui- 
péclier  que  les  re  igicux  des  provinces  de 
i'Ubservance  en  sortissent  pour  y  embrasser 
celle  réforme.    .Mais   re  des'.ein    ne  réussit 


pas  :  ce  qui  lit  prendre  na\  ObscrvtTnts  d'au- 
tres moyens  pour  la  déiruire.  Pour  cet  elïel 
ils  curent  recours  aux  rois  catlioliques  Ter- 
dinand  cl  Isabelle,  qui  étaient  afTcelioiinés  à 
l'Observ.ince,  à  laqu.  Ile  ils  avaient  fait  bâ  ir 
un  coavcnl  à  'l'oiède  et  accordé  plusieurs 
privilèges.  Ils  leur  rem  mirèrent  la  division 
que  la  réforme  du  Saint-Evangile  caus.iit 
dans  les  différenlcs  provini  es,  cl  les  priè- 
rent d'interposer  leur  aulorilé  pour  faire  re- 
venir les  réformes  sous  l'obéissance  des  Ob- 
servants, qui  leur  promet'aicnl  toute  assis- 
tance, leur  oITranl  des  couients  de  récoUec- 
tion  pour  y  vivre  si  ausièremcnt  qu'ils  vou- 
draient. Ces  princes,  se  laissant  persuader 
par  dos  raisons  si  justes  en  apparence,  en 
écrivirent  au  pape  Alexandre  ^"l,  qui  à  leur 
prière  accorda  un  bref,  la  même  année  1502, 
par  lequel  il  révoquait  ceux  qu'il  avait  don- 
nés en  faveur  de  Jean  de  Guadaloupe  el  de 
sa  reforme,  el  les  remellail  sous  l'oliéissanco 
des  Observants.  Ce  bref  leur  fut  signifie,  et 
ils  furent  chassés  par  forée  des  couvents 
qu'ils  avaient  en  Casiille,  d'où  ils  se  retirè- 
rent dans  ceux  de  Portugal. 

Jean  de  Gu.idaloupe,  surpris  de-  ce  chan- 
gement, entreprit  un  troisième  voyage  à 
Kome,  où  il  représenta  au  pape  l'injustice 
de  la  persécution  qu'on  leur  avait  suscitée,  el 
ce  pontife  donna  un  nouveau  bref  par  lequel 
il  déclarait  que  celui  qu'il  avait  accordé  à  la 
sollicitation  des  rois  catholi(|ue$  était  seule- 
ment contre  ceux  ijui  étaient  sortis  de  l'or- 
dre pour  vivre  à  leur  volonté  et  avec  scan- 
dale, cl  non  pas  contre  le  P.  Jean  de  Gua- 
daloupe el  les  autres  de  la  custodie  du  Sainl- 
livangile,  qu'il  regardait  comme  vériiables 
religieux  de  Saint-François  et  observateurs 
de  sa  règle  sous  l'obéissance  du  général,  el 
confirma  les  deux  premiers  brefs  qu'il  avait 
accordés  en  leur  faveur.  Jean  de  Guadaloupe, 
muni  de  ce  bref,  arriva  en  Portugal,  où  il 
trouva  ses  religieux  sans  couvent,  aussi 
bien  qu'en  Casiille,  el  disper^és  dans  des 
montagnes  el  dans  des  sulitudes,  eu  atten- 
dant qu'il  plût  à  Dieu  de  dissiper  cet  orage. 
11  publia  son  bref,  mais  il  lrou>a  tant  d'up- 
posi'ions  de  la  part  dci  Observants,  que  iion- 
seuleinenl  il  ne  put  réussir,  mais  que  même 
il  fut  obligé  de  se  retirer  dans  une  solitude, 
n'ayanl  pu  avoir  une  retraite  dans  leurs 
couvents. 

Après  la  mort  du  pape  Pie  III,  qui  ne  gou- 
verna l'Ivglis;'  (|ue  viiigl-.sepl  jours,  et  qui 
a\ail  succède  a  Alexamlre  \  1,  liilles  Del- 
phiuo,  qui  avait  été  élu  général  en  1500, 
ayaiil  soilicilé  le  pajie  Jules  II  de  réunir  eu- 
svmlde  lis  Couvent  lels  et  les  Obseivants,  et 
ce  ].outilc  ayant  f.iil  assembler  le  cliapilie 
généralissime  à  Home  l'an  l.'jQt),  eoniiini 
nous  .ivo.is  dit  ailleurs,  Jean  de  Ciuadaloupo 
se  résolut  d'j  aller  avec  le  P.  Pierre  Melgaro 
el  q  lelques  auiics  de  ses  religieux,  afia  «l'y 
faire  lever  les  oppositions  qui  s'étaient  trou- 
vées dans  l'exèculion  de  son  bref;  mais,  ac- 
cablé (le  vieillesse,  il  mourut  en  cliemin.  Ses 
compagnons  étant  arrives  à  Home,  le  géné- 
ral leur  donna  pour  custode  el  supérieur  à 
la  pl.ice  de  leur  iéformatcur,le  même  rieno 


13 


DEC 


nr:c 


il 


de  iMelgaro,  qui  n'oublia  rien  pour  m.iin- 
lenir  \u  réforaie ,  noiiobstanl  les  Iravrrscs 
que  les  Observants,  appuyés  par  les  puis- 
sances, leur  suscitaient,  mais  sans  aucun  elTei: 
comme  nous    le  dirons  en  parlant  des 


car, 


Frères  Mineurs   de   l'Observance ,  le   pape, 
voyant  que   l'union  qui  avait  été   projetée 
n'avait  pu  se  faire,  et  ayant  ordonné  que  les 
«lilïérenles    réformes   de    l'ordre  de   Saint- 
François,  quelque  nom   qu'elles   eussent, 
se  incliraient   dans    un  coriain   temps  sous 
l'obé  ssance  des  Conventuels  ou  des  Obser- 
vants, les  Frôns  du    Capuce  ou   du  Saint- 
Evangile  se  mirent  derechef  sous    l'obéis- 
sance des  Conventuels,  dont  le  général  lès 
prit  sous  sa   protection,   et  leur    confirma 
Pierre  de  Melgaro  pour  leur  custode,  au!o- 
risa  leur  congrégation  sous  le  nom  liu  Ca- 
puce ou  du  Saint-Evangile,    leur  permit   de 
vivre  selon  leur  manière,  cl  de  pratiquer  à 
la  lettre  la  règle  de  Saint-François,  et  con- 
firma toutes  les  grâces  que  ses  préJcccsseurs 
leiiravaient  accordées.  Le  cardinal  prolecteur 
ratifia  ce  que  le  général  avait  fait,  el  ces  ré- 
formés  obtinrent  un  bref  du  pape,  au  mois 
de  juillet  de  la   même  année  1505,  qui  leur 
permettait  de  bâtir  de  nouveaux  couvents 
unis  en  custodie  sous  l'obéissance  du  gé- 
néral. 

Ces  religieux  étant  retournés  en  Espagne, 
et  y  .lyant  trouvé  leur  couvent  de  Truxillo 
el  de  Salva-Léon  ruinés,  se  retirèrent  dans 
quelques  autres  qu'ils  avaient  en  ce  royau- 
me; mais  ces  couvents  n'étant  pas  suflisants 
pour  contenir  tous  ceux  qui  se  joignaient  à 
eux  pour  embrasser  la  réforme,  ils  en  bâ- 
tirent d'autres  qui  furent  unis  à  la  custodie 
du  Saint-Evangile  ,  avec  l'agrément  du  pro- 
vincial de  la  province  de  Saint-Jacques,  qu'ils 
trouvèrent  favorable  à  leurs  desseins.  Mais 
ils  ne  jouirent  pas  longtemps  du  fruit  de  leurs 
travaux,  car  les  Observants,  envieux  de 
leurs  progrès,  eurent  encore  recours  aux 
rois  d'Espagne  et  de  Portugal,  etolitinrent  à 
leur  sollicitation  un  bref  du  pape  qi:i  ordon- 
nait aux  Frères  du  Capuee  ou  du  Saint- 
Evangile  de  retourner  sous  l'obéissance  des 
(.•bservants,  ou  de  sortir  des  royaumes  d'Ks- 
pagnc  et  de  Portugal. 

Ces  s  linls  religieux  aimèrent  mieux  aban- 
donner leur  couvent  que  do  retourner  sous 
l'obéissance  des  Observants,  et  se  retirèrent 
dans  des  solitudes  et  des  déserts  où  ils  ne 
vécurent  que  d'herbes  el  de  racines,  jusqu'à 
ce  que  ce  nouvel  orage  eût  été  apaisé.  A 
cet  elïet  ils  envoyèrent  à  Rome  le  P.  Ange 
de  V.illadolid  pour  représenti  r  à  Sa  Sainteté 
le  fâcheux  état  où  ils  étaient  réduits,  et  les 
injustes  motifs  des  persécutions  qu'on  leur 
avait  suscitées  au  sujet  de  la  réforme,  qu'ils 
n'avaient  embrassée  que  de  son  consente- 
ment el  de  celui  d'Alexandre  VI,  son  prédé- 
cesseur. Jules  11,  touché  de  leurs  misères, 
révofjua  son  dernier  bref  par  un  aulre  du  10 
mars  1508,  où,  rapportant  tous  les  privilèges 
que  lui  et  son  prédécesseur  avaient  accordés 
au  P.  Jean  de  Guadaloupe  et  au  P.  Pierre 
de  Melgaro ,  non-seulement  il  les  con- 
firma   de     nouveau  ,    mais     il    les    aug- 


menta, érigeant  leur  custodie  du  Saint-Evan- 
gile en  province,  leur  donnant  pouvoir  d'é- 
lire un  provincial  ;  et  en  attendant  l'élection, 
il  confirma  Pierre  de  Melgaro  dans  son  of- 
fice de  custode,  révoquant  tous  les  brefs  qui 
pouvaient  avoir  été  accordés  contraires  à  ci; 
dernier. 

Le  P.  Ange  de  Valladoli  J  élanl  retourné  en  - 
Espagne,  on  rendit  aussitôt  à    ces   réformés 
tous  les  couvents  qu'ils  avaient  en  ce  royau- 
me, fil  ils  en  bâtircni  de   nouveaux   en  Por- 
tugal, où  ils  liment  leur    premier  chapitre, 
dans  lequel  ils  élurent  pour  provincial   le  P. 
Pierre  de  Melgaro  ;  ce  qui   aig:it   tellement 
l'esprit  des  Observants  d'Espagne,  qu'ayant 
formé  opposition   à   l'érection  de  cette  pro- 
vince, ils  obtinrent  des    lettres   du  roi   d'Es- 
pagne en  leur  faveur   adressées  au   roi     de 
Portugal,  qu'il  priait  de  protéger  les  Obser- 
vants. Le  roi  de  Portugal,  ayant  fait  venir  les 
uns  el  les  autres  en  sa    présence,   et  après 
avoir  écoulé    leurs   raisons ,  les  fit  conve- 
nr  que  tous  les  couvents  que  les   Pères   du 
Saint-Evangile  avaient  en  Portugal  seraient 
érigés  en  custodie,  sujette   seulement   au  vi- 
caire général  de  l'Observance  de  la   Famille 
Ullramonlaine  ;  que    ceux  de   C;islil!e  ren- 
draient obéissance  an  provincial  de  la   pro- 
vince de  Saint-Jacques,  aussi   de    l'Obsor» 
vance,  et  que  les  réformés  quilteraienl  leurs 
capuces  pointus  pour  en  porter  à  l'avenir  do 
ronds,  afin  de  se  conformer  eu    quelque  fa- 
çon  aux  Pères  de  lObservance  :  ce  qui    fut 
accordé  et  aussitôt  exécuté.  Le   P.  Pierre  de 
Melgaro  renonça  au  titre   de  provincial,  et 
demeura  custode  comme  il  était  auparavant 
de  la  custodie  de  la   Pitié,  el  le  P.Ange  do 
Valladolidalla  en  Casiille,  où  il  fut  cus'.odo 
de  la  custodie    du    Saint-Evangile    do    ce 
royaume. 

Les  réformés  de  Casiille,  ayant  appris  ce 
qui  s'était  passé  eu  Portugal,  n'approuvè- 
rent point  les  résolutions  que  l'on  avait  pri- 
ses dans  la  conférence  qui  s'y  était  lenua  : 
c'est  pourquoi,  ne  pouvant  se  résoudre  à 
quitter  le  capuce  pointu  et  à  se  soumettre 
à  l'obéissance  du  provincial  do  la  piovincu 
de  Saint-Jacques,  ils  eurent  recours  au  gé- 
néral Renaud  de  Catignola,  auquel  ils  s'é- 
taient soumis  dans  le  chapitre  généralissime 
de  l'an  1506,  le  priant  de  leur  accorder  sa 
protection,  et  de  ne  pas  permettre  qu'ils 
fussent  soustraits  de  son  obéissance.  Le  gé- 
néral les  écouta  favorablemeni,  et  remit  la 
décision  de  celle  affaire  à  la  congrégalio.i 
générale  qui  dévalise  tenir  à  Valladolid  au 
mois  d'avril  de  l'an  1509,  où  il  fut  ordonné 
que  les  Pères  du  Capuce  auraient  terme  de 
six  semaines, pendant  lequel  temps  ils  seraient,' 
tenu  s  de  déclarer  de  nouveau  sous  quelle  obéis- 
sance ils  voulaient  vivre,  ou  sous  celle  du 
général  de  l'ordre,  ou  sous  celle  du  vicaire 
général  de  l'Observance  ;  et  qu'en  cas  qu'ils 
choisissent  celle  du  général,  il  leur  sérail 
libre  de  retourner  dans  les  couvents  qu'ils 
avaient  auparavant  occupés  par  autorité 
apostolique. 

Il  y  eut  par  ce  moyen  division   entre  les 
réformés  d'Espagne  et  ceux  de    Portugal  ; 


15 


WCTIONNAIRK  DES  ORDRES  RELIGIEUX. 


16 


car  roux-ci  reconnurent  le  viciiiro  L'ônèral 
tli«  l'Observance  pour  Inir  siipèiiciir,  ^ui- 
vanl  l'arcoril  i\u'\\s  a\airni  fail  on  |ircseiiie 
du  roi  do  PorUigal,  cl  crus  d'Espagne  re- 
conniirenl  le  général,  comme  ils  iivaiml 
fail  jusqu'alors.  Mais  on  ne  s^rda  pis  les 
conditions  qu'on  leur  avait  promises  dans  la 
congrép.ilion  générale;  car  on  ne  leur  voulut 
pas  rendre  leurs  couvents  ;  cl  loul  ce  que  put 
faire  le  grné.al  de  son  aulorilé  lut  de  leur 
ionncr  iroispauvrescouvcnlsilansl'F.slrama- 
tlnre,  où  ils  ruieni  même  si  inquiétés  «luo, 
ilans  la  crainte  <iu'oii  ne  les  en  ciiassât,  le 
P.  Argede  Valladolid  fiil  obligé  d'aller  à 
Rome  pour  s'en  assurer  la  possession,  il  se 
^rou^a  pour  cet  elTcl  au  chapitre  général  de 
l'an  lolO.d.ins  lequel  on  élut  pour  général 
Pliili|ipi'  Ragnacavallo,  auquel  il  fit  si  bien 
i-onnaiire  la  ju.>lico  de  sa  eause  et  la  mau- 
vaise intention  de  ^es  advers. lires,  qu'il  l'en- 
gagea à  leur  confirmer  les  trois  couvents 
que  S(  n  prédécesseur  leur  av;iil  donnes;  ce 
que  fit  pareillement  son  successeur,  le  P. 
Hernardin  de  Pralo,  l'an  lol2,  qui  y  ajoula 
même  trois  autres  couvents,  qu'il  érigea, 
avec  Us  tro.s  premiers,  en  cuslodie,  sous  le 
litre  du  Sainl-lvvangile  ;  ce  qui  fut  ratifié  et 
approuvé  par  le  pape  Léon  X,  qui  avait  suc- 
cédé à  Jules  II. 

Ce  pontife  ayant  convoqué  à  Uomc  un 
cliapilrc  généralissime,  l'an  1517,  comme 
nous  avons  dit  ailleurs,  d  ordonné  que  dans 
ce  chapitre  il  n'y  aurait  que  les  réformés 
qui  )  auraient  voix  jiour  élire  un  mini-trc 
gênerai  de  tout  l'ordre  de  .Sainl-François, 
comprenant  sous  le  nom  de  réformés  les 
Observants,  Amédéisles  ,  Coletans,  Clare- 
nins,du  Sainl-livaiigile  ou  du  Capuce,  et 
Déchaussés,  qui  de>aienl  à  l'avenir  quitter 
tous  ces  noms  pour  prendre  celui  de  Frères 
Mineurs  de  la  régulière  Observance,  les 
l'iércs  du  Cipucc  ou  du  Saint-Hvangile  fu- 
rent par  ce  moyen  incorporés  dans  l'Obs  r- 
van(  e,  pr  niit  le  nom  de  Reformés,  cl  quit- 
tèrent celui  de  Frères  du  Capuce  ou  du 
Saini-Fvangile,  sans  préjudice  pourtant  à 
leur  réforme  partieulicre,  dans  laquelle  ils 
continuèrent.  Leur  cuslodie  fut  ensuite  éri- 
gée en  prounce  sous  le  nom  de  Saint-(îa- 
bricl,  aus'-i  bien  que  celle  de  la  Pitié,  (jui  re- 
liiit  toujours  son  nom.  Celle  des  Anges,  dont 
Jean  de  la  l'uebla  avait  été  fondateur,  fut 
aussi  érigée  i  n  piovince,  et  ces  provinces  en 
ont  produit  (dusieurs  autres,  tant  eu  F-spa- 
gne  qu'en  Portugal,  cl  dans  les  Indes,  où  ils 
uni  (iresenlenient  dou/c  provinces,  dont  les 
l'P.  François  des  Anges  et  Martin  de  Valence 
sont  les  fondateurs.  Ces  saints  religieux 
étant  passés  dans  ce  pays  en  l.')21,  en  vertu 
il  un  bref  de  Léon  X,  et  ayant  mené  avec 
eux  neuf  prêtres  et  deux  frères  laïques, 
lou»  religieux  de  la  province  de  Sainl-tla- 
Iriel,  non-scuU  inenl  ils  s'y  établirent,  mais 
encore  ils  y  (irent  de  si  grandes  conversions, 
quiis  furent  obligés  de.  multiplier  leurs  cou- 
vents à  proportion  qu'ils  suumeUaienl  de 
pays  à  la  loi  de  I  l>angile.  Le  P.  Jean  de 
/uiiiarraga  fut  premier  archevêque  de  Mexi- 
que, cl  un  grand  nombre  de  religieux  ont  re- 


çu en  ces  qunrticrs-lA  la  couionne  du  mar- 
tyre. Le  P.  F'raneois  des  Anges  fut  dans  la 
suite  général  de  l'ordre  de  Saint-François, 
cl  le  pajie  Cléineiil  VII  l'cleva  à  la  dignité  de 
cardinal.  Les  religieux  de  cette  réforme  onl 
toujours  observé  la  règle  de  Saint-François 
dans  sa  pureté,  a  l'édification  de  toute  l'Ks- 
pagne,  où  ils  sont  connus  sous  le  nom  de 
1). 'Chaussés,  à  cause  que  dans  le  commence- 
ment de  leur  orgine  ils  ailaieiil  nu-pieds, 
sans  socques  ni  sandales.  Mais  [iréscntemenl 
ils  portent  des  socques  ;  il  n'y  a  que  ceux  du 
la  provincede  la  Pitié  en  Portugal,  qui  dans  :a 
maison  sonltoujours  nu-pieds,  ne  porl.intdes 
socques  que  quand  ils  sorient.  Ilesidiinciledo 
rapporter  leurs  observances,  puisque  presque 
toutes  les  provinces  ont  des  constitutions 
particulières;  mais  elles  conviennent  toutes 
dans  l'exacte  pauvreté  dont  elles  font  pro- 
fession et  dans  le  renoncement  cl  toutes  les 
grâr'cs  cl  privilèges  qui  pourraient  donner 
atteinte  à  l'Etroite  Observance. CrêgoireXV 
I)erniit  à  ces  religieux  d'Espagne  d'avoir  un 
procureurg'înéral  encour  deUome;  mais  Ur- 
bainVlll  révoqua  cette  permission.  Quanta 
l'Iiabilleinent.ilest  d'étoffes  rudes  et  gr  ssiè- 
res.etnediffèredeceluideïC  'sarins.que  nous 
avons  donné  à  l'article  Césakins,  qu'en  ce 
que  le  capuce  est  un  peu  plus  pointu;  c'est 
pounjuoi  nous  n'en  donnons  point  d'es- 
tampe particulière. 

Francise.  Conzag.,  De  Orig.  Scraph.  tic- 
liij.  Luc  \Vading,.4»nfl/.  Minorum.  Oominic. 
de  tjubernatis,  Ori».  5cra/;/(ij.  Darezzo  Ra- 
rezzi,  Cont^nuaiion  de  la  Chronique  des  frè- 
res Mineurs,  .\lariaii.  ab  Orscell  r.  Francise. 
Uedivivi,  sivv  Citron.  Oliserv.  Slrictioris. 
Juan  de  santa  .Maria,  C'/troiiic.  de  la  Provin- 
cia  de  San  Joscpli  de  lus  Descalzos  de  ta  or- 
den  de  los  Menurts.  Antonio  Panes,  Chro- 
nicii  delà  Provinc.  de  San  Juan  liaittisla  dé 
ri'li''iosos  Menores  Descalzos  de  la  Regular. 
Oùscrvanlia.  Andr.  de  Guadaloupe,  liislor. 
de  In  Provinc.  de  los  Angelos.  Charles  Ra(ii- 
ne,  H  si.  gdncrale  de  l'origine  et  propres  des 
Frères  Hlmeurs,  Rccolels,  liéform''*  ou  Dv- 
cltausse's. 

DElXAN  (Saint-).  Voyez  Irlande. 

DENIN.  Voyez  Nivhi.LE. 

DE.MS  EN    FRANCE  (Ancienne  conuriga- 
Tio.N   DE   Saint-). 

Si  l'on  a  donné  le  titre  de  chefs  d'ordres  cl 
de  congrégations  aux  abbayes  doni  nous  ve- 
nons de  parler  dans  quelques  articles,  l'on 
ne  peut  sans  injustice  refuser  le  m<MiH' tiire 
à  celle  de  Saint-Denis  en  France,  puisiiue, 
ouirc  qu'elle  est  l<i  plus  célèbre  du  royaume, 
et  même  de  l'Europe,  elle  a  non-seulement 
été  chef  d'une  véritable  congrégation  ,  (jui  a 
été  érigée  sur  la  fin  du  seizième  siècle  ;  mais 
elle  a  encore  eu  de  tout  temps  un  grand 
nombre  de  monastères  et  d'églises  de  sa  dé- 
pendance. Quoiqu'on  attribue  la  fondation 
de  cette  illustre  abbaye  au  roi  Dagoberl  l", 
il  y  avait  déjà  néanmoins  un  alihé  cl  des  re- 
ligieux dans  celle  église  do  Saint-Denis  avant 
que  ce  prince  eût  tait  jeter  les  foiidenients 
des  nouveaux  édifices,  cocame  il  parait   par 


17 


DEN 


DEN 


18 


une  cliarle  datée  d(!  la  quarante-troisième 
année  du  règne  de  Clolaire  11,  c'est-à-dire 
l'an  627,  d'une  donation  faite  par  une  dame 
nommée  Théodetrudc,  auquel  temps  Dodon 
cil  était  abbé.  Cependant,  quoique  Dagobert 
n'en  ait  pas  été  le  premier  fond.ilcur,  nul 
autre  que  lui  n'a  mieux  mérité  ce  litre  ,  par 
les  grands  biens  dont  il  a  enrichi  cette  ab- 
baye. L'on  ne  peut  dire  certainement  m 
quelle  année  elle  fui  fondée  pour  la  première 
fois,  ni  en  quel  temps  Dagobert  entreprit  de 
rebâtir  avec  une  mapinificence  royale  l'église 
de  Cl- monastère,  où  il  employa  un  grand 
nombre  de  colonnes  de  mai  bre  cl  d'autres  or- 
nements de  même  mitière.  Elle  était  même, 
selon  quelques  historiens,  tout-  pavée  de 
marbre,  et  brillait  au  dedans  de  l'éclat  de  ri- 
clies  tapisseries ,  toute  rehaussée  d'or  ,  de 
pi-rles  et  de  pierres  précieuses.  Au  milieu 
rie  toutes  ces  richesses  ,  il  fil  construire  sur 
la  sépulture  de  saint  Denis, apôlre  des  Gau- 
les, dont  le  corps  se  conserve  dans  celte 
église  avec  ceux  de  ses  compagnons  Rusti- 
que et  Eleulhère,  un  magnifi(iue  tombeau  , 
dont  il  donna  la  conduite  à  saint  Eloi, 
Comme  son  dessein  était  d'établir  la  psalmo- 
die continuelle  dans  cette  éi^lise,  à  l'exem- 
ple des  abbayes  de  Saint-Maurice  d'Agaune 
cl  de  Sainl-Martin  de  Tours,  il  fit  faire  des 
bâtiments  suffisants  pour  loger  les  religieux 
qui  devaient  vaquer  à  ce  saint  exercice, 
auxquels  il  fit  de  grands  biens;  et  tant 
qu'il  vécut,  il  ne  laissa  échapper  aucune  oc- 
casion de  favoriser  ce  monastère  et  de  le 
combler  de  nouveaux  bienfaits.  Enfin  ,  ce 
p  incc  étant  !i;ort  l'an  638  ,  dix  ans  ou  en- 
viron après  la  fondation  de  cette  abbaye  , 
autant  qu'on  peut  le  conjecturer,  il  voulut  y 
être  enterré  :  ce  (lUi  servit  d'exemple  à  nos 
rois,  qui  ont  toujours  depuis  élu  leur  sé- 
pulture dans  ce  lieu,  à  la  réserve  de  quel- 
ques-uns, qui  ont  été  enterrés  en  quelques 
aulres  lieux.  Clovis  II,  fils  de  Dagobert ,  re- 
gardant l'abbaye  de  Saint-Denis  comme  l'ou- 
vrage de  la  piété  et  de  la  magnificence  de 
son  père,  ne  m::nqua  pss  de  lui  donner  sa 
pro:ci'tion,  cl  confirma  toutes  les  dunaliuns 
que  ce  prince  y  avait  faites.  Il  lui  procura 
aussi  rallranchisscinenl  de  la  juridiction  de 
l'évéque  de  Paris  ,  par  le  privilège  d'exemp- 
tion ()u'il  demanda  à  saint  Landry  ,  et  qu'il 
fit  confirmer,  l'an  6  3,  dans  un  synode  ou  as- 
semblée de  plusieurs  évolues  et  des  grands 
du  royaume.  Gliarderic  en  étanlablié  en  evi, 
lit  bâtir  sur  son  propre  fonds  le  monastère  de 
Toussainval  dans  le  Chainbli.  Il  en  fit  dédier 
l'église  sous  les  noms  de  saint  Denis  et  de 
saint  Marcel  ,  et  y  mil  des  religieux  de  Saint- 
Denis,  qui  furent  comme  le  premier  essaim 
qui  sortit  de  cette  maison.  Le  roi  Jhierri  1  "^ 
aiilo'  isa  ce  nouvel  établissement,  et  lui  donna 
même  avec  beaucoup  de  privilèges  la  terre 
de  Noisi,  pour  l'entretien  des  religieux  ;  mais 
ce  monastère  n'est  plus  connu,  et  le  P.  doni 
Félibien  dans  l'Histoire  de  l'abbaye  de  Saint- 
Denis,  dont  nous  avons  tiré  la  plus  grande 
partie,  de  ce  que  nousdirons  dans  cet  article, 
croit  que  c'est  peut-être  l'abbaye  du  Val 
Ijfcs  Poutoise,  possédée  par  les  Feuillants. 


La  psalmodie  continuelle  qui  avait  été 
établie  dans  celte  église  par  le  roi  Dagobert 
avait  été  interrompue;  mais,  l'an  723, 
Thierri  II  ordonna  qu'elle  serait  rétablie;  et, 
pour  y  engager  les  religieux,  il  confirma 
leurs  anciens  privilèges  accordés  par  les 
évéqu's  de  Paris  et  les  rois  ses  prédéces- 
seurs. Une  chose  digne  de  remarque  qui  se 
trouve  dans  les  lettres  que  ce  prince  en  lit  ex- 
pédier, c'est  que  l'on  y  lit  que  saini  Denis  et 
ses  deux  compagnons,  saint  Rustique  et 
saint  Eleulhère,  furent  les  premiers  apôtres 
des  Gaules  et  qu'ils  vinrent  à  Paris  par  or- 
dre du  pape  saint  Clément,  pour  y  prêcher 
l'Evangile.  Déjà  les  biens  de  ce  monastère 
avaient  été  usurpés  en  partie,  lorsque  Ful- 
rad  en  fut  abbé  l'an  750.  Un  de  ses  premiers 
soins  fut  de  les  recouvrer:  ce  qu'il  fit  aisé- 
ment avec  le  crédit  de  Pcpin,  qui  n'était  en- 
core que  maire  du  palais,  mais  qui  avait  déjà 
la  souveraine  autorité,  et  qui,  é:anl  parvenu 
à  la  couronne,  protégea  cette  abbaye  comme 
auparavant:  il  honora  même  l'abbé  Fulrad 
de  la  dignité  de  maître  de  sa  chapelle. 

En  cette  qualité,  cet  abbé  fut  obligé  de 
suivre  le  roi  en  Italie  lorsqu'il  y  porta  la 
guerre  pour  remettre  le  pape  Etienne  III  en 
possession  des  terres  de  l'Eglise,  dont  A!- 
lophe,  roi  des  Lombards,  s'était  emparé.  Ce 
pontife,  qui  était  venu  en  France  implorer 
le  secours  du  roi,  avail  sacré  de  nouveau  ce 
pr  nce  et  ses  deux  fils  Charles  et  Carloman 
dans  l'abbaye  de  Saint-Denis,  où  il  avail  sé- 
journé quelque  temps;  et,  comme  il  avait 
besoin  du  crédit  de  l'abbé  Fulrad  auprès  de 
ce  prince,  il  lui  accorda  beauco:ip  de  privi- 
lèges. Entre  aulres,  il  lui  donna  permission 
et  à  ses  successeurs  de  fonder  aulant  de  mo- 
nastères qu'il  leur  plairait,  sous  la  protec- 
tion du  saint-siége.  Il  accorda  de  plus  à  cet 
abbédene  pouvoir  être  fait  évêque  contre 
son  gré  et  sans  la  volonté  du  roi  Pépin,  d'u- 
ser de  certaines  chaussures,  et  de  parer  son 
cheval  d'un  ornement  particulier  qui  ne  con- 
venait, selon  les  apparences,  qu'aux  grands 
seigneurs  ou  à  quelques  cérémonies.  Celte 
grâce  fut  accordée  par  ce  pontife  au  seul 
Fulrad,  à  la  prière  du  roi.  Il  ordonna  même 
qu'après  la  mort  de  cet  abbé,  ces  ornements 
seraient  mis  avec  son  corps  dans  le  tom- 
beau. Il  lui  donna  encore  le  pouvoir  d'élire 
un  évêque  qui  fît  les  fonctions  épiscopales 
dans  ce  monastère  et  dans  les  autres  qui  en 
dépendaient,  et  beaucoup  d'autres  grâces, 
qu'on  peut  liredans  l'iiistoiredeeetteabbayc. 

Il  y  avait  de  ces  sortes  d'évêques  à  Saint- 
Martin  de  Tours  et  en  d'autres  célèbres  mo- 
nastères. M.  l'abbé  Fleury  dit,  à  la  vérité 
{ Hist.  ecclés.  t.  IX,  liv.  xLiv  !,  que  ce  u'é- 
taieul  point  des  évêques  titulaires,  comme 
si  ces  monastères  et  ceux  de  leur  dépen- 
dance eussent  été  des  diocèses;  mais  qu'ils 
étaient  de  ceux  qui  avaient  été  ordonnés 
sans  aucun  titre,  ou  qui,  après  l'avoir  quitté, 
se  retiraient  dans  ces  monastères  et  y  fai- 
saient les  fonctions,  comme  en  des  lieux 
exempts  de  la  juridiction  des  ordinaires. 
Quelquefois  c'étaient  des  chorévêques,  qui 
avaient  leur  siège  fixe  daus  les  monastères, 


J9 


DICTIONNAinE  PF.S  OKnurS  RELU;iKUX. 


50 


v)ii  l'abbé,  qii-  otail  on  iiu'nie  Irnips  é>êqiio 
de  son  monasièrc;  ol  d'aulrcs  fois  t'ilaii'iil 
lie  simples  prélrcs.  à  qui  on  donnai!  le  litre 
dYvéqucs  parce  qu'ils  avaient  mission  pour 
[Tâcher  l'Eviinfiilc  on  rcrlain  teniloire. 

l'cpin,  ayant  voulu  rendre  la  liosi!i(|uc  de 
Saint-Denis  plus  aupusio,  avait  fait  coniincn- 
«er  un  iiouviau  bâlinienl  dont  la  tonslruc- 
lion  fut  inlorrmnpuo  par  sa  mort,  qui  ar- 
riva l'an  708;  mais  Charlemasnc,  son  fils, 
l'avant  f.iil  contiiuicr,  il  fut  arliové  l'an  775. 
Ce  prime  vint  à  Sainl-Dtnis  et  fit  faire  la  cé- 
roinonic  de  la  déilicacc  avec  toulc  la  |  onipc 
imaginable.  Le  inoiiaslc^re  se  scnlit  aussi  de 
SCS  libcraltts,  rar  il  lui  fit  don  de  sos  mé- 
tairies de  Luzarebes  avec  l'cplise  du  lien, 
bàlie  sous  rinvocali..n  de  saint  Corne  et  de 
saint  Damicn,  et  d'une  autre  mclairie  située 
à  Mo'si,  au  dioeèse  de  Meaux.  L'année  pré- 
cédenlo,  il  avait  confirmé  la  donation  (|U0 
Éon  père  y  avait  faite  des  terres  de  Favcroles 
et  de  Nortm,  avec  une  partie  de  la  forél  Ivc- 
linc,  des  rcrfs  et  dos  (  bcvreuils  qui  y  étaient, 
ilont  les  cuirs  devaient  servir  pour  couvrir 
les  livres  des  religieux,  et  la  cbair  pour  la 
fi'iurriture  dos  malades  :  d'où  le  V.  Mabillon 
lire  une  conséquence,  qu'en  ce  temps-là  l'abs- 
tinence de  la  viande  (tait  en  usage  dans 
celte  abbaye. 

Un  différend  que  l'abbé  Fulrad  ont  avec 
l'évéquc  de  Paris  au  sujet  d'un  n.onastèro 
Làii  au  village  de  Plaisir  près  de  Sainl-Cier- 
i)iain-en-Laje  fournit  un  exemple  d'une 
épreuve  qui  se  faisait  dans  ce  lemp«-là  ijour 
juger  des  \  rocès.  L'cvéque  aPéguait  que  ce 
ijumastèrc  avait  été  donné  à  son  Kgliso;  Ful- 
rad soutenait  que  c'était  un  ('on  fait  à  son 
abba3e.  Los  juges,  ne  sachant  lequel  des  deux 
avait  droit,  eurent  recours  à  l'épreuve  qu'on 
appel.iit  le  jugement  de  Dieu  ddnnt  la  croijr. 
Deux  homme*,  dont  l'un  soutenait  les  ilroits 
de  l'Kglisc  de  Paris,  l'autre  ceux  de  l'abbayo 
de  Saint-Denis,  allèrent  dans  la  chapelle  du 
roi,  cl,  pendant  qu'un  prêtre  récitait  des 
prières,  ils  commencèrent  tous  deux  on 
même  temps  à  étendre  les  bras  en  forme  de 
croix.  Celui  do  Saint-Denis  étant  demeuré 
ferme  dans  cet  état,  cl  l'autre  ayant  chancelé 
un  peu,  il  n'en  f.illut  pas  <lavantage  pour 
faire  perdre  le  procès  à  l'évêque,  qui  avoua 
lui-même  que  Dieu  s'était  déclaré  on  f.ivour 
de  l'abbaye  de  Saint-Denis.  Sur  quoi  le  roi, 
assisté  des  comtes  ol  d>  s  autres  ofin  iers  de 
justice,  prononr.i  en  fa\curdo  l'abbé  Fulrad, 
qu'il  maintint  en  possession  du  monastère 
de  Plaisir,  par  un  arrêt  du  28  juillet  771. 
.Mais  (■<  tlo  soric  d'épreuve  fut  interdite  quel- 
ques années  après  par   Louis  le  Débonnaire. 

L'iibbé  Fulrad,  p.ir  son  testament  fiil  à 
Ilérlslal,  se]!  ans  a\ant  sa  mort,  donna  à 
son  abbavo  lous  les  biens  qui  lui  étaient 
oibus  on  héritage,  dont  (luelques-uiis  étaient 
situés  on  Alsace  ol  en  Urisgan,  avec,  ceux 
qu'il  avait  OUI  par  préscnis,  soit  de  nos  rois, 
»oil  de  s  8  p.irents  ou  de  quelques-uns  de 
ut»  ami»,  et  les  terres  (|u'il  avait  acquises  à 
litre  d'échange  ouaulrement.il   assujettit  à 


II)  Voy.,  à  la  lin  JutoI.,  i,"»  |  cl  2. 


la  mémi'  a!  baye  tous  les  mon.isières  qu'il 
avait  fondés  ou  rebâtis  au  diocèse  de  Metz  et 
ailleurs,  counne  ceux  de  Saione,  de  Sainl- 
llippolyle  ou  Sainl-Uisl,  de  Sainl-Cueu|ilias, 
d'.Vrberting,  d'.Ulalogne.  sans  eompter  ceux 
de  Lebraha  <  t  de  Saint-Alexauilr.',  qu'il  y 
avait  déj^'i  soun.i<.  Outre  ces  iiunastèics  et 
ceux  dont  nous  avons  ci-devant  par  é,  il  y 
avait  cnrore  celui  de  Saint-Michel,  qui  osl 
présentement  une  fameuse  abbaye  proche 
\'erdun,  qui  était  aussi  de  sa  dépendance. 

Quant  au  testament  de  l'abbé  Fulrad,  il 
faut  remarquer  que  les  abbés  réguliers  n'a- 
vaient pas  plus  (le  pouvoir  que  les  autres 
religieux  de  donner  par  testament  à  leurs 
parents  ou  à  d'autres,  et  que,  s'il  se  trouve 
plusieurs  testaments  de  celte  nature  en  fa- 
vcurdes  monaslèros,  c'est  qu'ils  ne  faisaient 
que  confirmer  les  donations  qu'ils  y  avaient 
faites  avant  que  d'y  faire  profession,  ou 
celles  qui  avaient  été  faites  en  leur  considé- 
ration depuis  qu'i's  av.Ticnt  rmbrassé  l'étal 
religieux,  ne  pouvant  point  disposer  de  leurs 
propres,  puisqu'ils  n'en  avaient  point,  et  ne 
pouvant  pas  non  plus  d'ailleurs  disposer  dos 
biens  du  monastère,  dont  ils  n'avaient  que 
l'économat.  Nous  donnons  ici  rhabillement 
des  religieux  qui  étaient  à  Saint-Denis  du 
temps  de  l'abbé  Fulrad  (1),  que  nous  avons 
lire  sur  les  figures  que  le  P.  Mabillon  en 
a  données  dans  le  dcuxiènie  tome  de  ses  .\n. 
nales  lîénédictincs. 

Fulrad  étant  mort  l'an  78V,  Mnginaire,  l'un 
de  ses  disei|des,  lui  succéda.  Il  obtint,  entre 
autres  iirivilégcs  du  jiape  Adrien  I  ".  l'an  78(i, 
la  confirmation  de  celui  qui  avait  été  accor- 
dé à  Fulrad  par  Liiennc  lli,  d'avoir  un 
évoque  à  Saint-Denis  pour  y  faire,  selon  les 
besoins,  les  fonctions  épiscopales,  et  tl.ins 
les  autres  monastères  qui  en  dépendaient. 
Il  l'ut  envoyé  en  ambassade  on  Italie,  et  à  son 
retour  il  obtint  d'Offa.  roi  des  Merciens  en 
Angiclorro,  la  confirmation  des  biens  situés 
au  port  do  Landowic,  qui  avaient  été  donnés 
par  quelques-uns  de  ses  sujets  à  l'abbaye  de 
Saint-Denis,  à  laquelle  ce  prince  donna  aussi 
ce  qui  lui  appartenait  au  même  lieu,  en  or, 
en  argent  cl  autres  revenus,  et  ratifia  on 
môme  temps  le  don  ((ue  le  duc  llerlwal  ava  l 
au>si  fait  à  celte  abbaye  d'une  autre  part. 
Ce  ne  lut  pas  le  seul  endroit  hors  du  royaume 
où  ce  monastère  avait  des  birns.  Cbarle- 
magne  lui  on  donn.i  aussi  dans  la  \'altelino; 
elle  en  eut  dans  la  suite  en  Allemagne,  en 
Fspagne  et  en  d'autres  provinces.  Outre  les 
monastères  de  sa  dépendance  qu'elle  avait  en 
France,  elle  en  avait  encore  dans  les  pays 
étrangers,  comme  en  Angleterre  el  en  Es- 
pagne. 

Knire  les  donations  qui  fuient  faites  à  celle 
abbaye  sous  le  gouvernement  de  l'abbé  Far- 
dulfe,  successeur  de  M.iginaire .on  romar(|uo 
que  le  comte  Tlieiidald  ,  qui  fut  ac<  usé  de 
crime  de  lèse-majesté  ,  .iprès  s'être  jiiglifié 
parla  voie  du  jugement  de  Dieu  devant  la 
croix,  donna  une  partie  de  ses  biens  à  ce  mo- 
nastère et  plusieurs  familles  de  serfs  ou  d'os- 


il 


DEN 


DEN 


52 


claves.  Ces  serfs  étaient  destinés  à  la  culture 
de  la  terre,  et  faisaient  l'une  di  s  principales 
richesses  de  ce  temps-là.  Dagobcrt  1",  dans 
la  10'  année  de  son  règne  ,  qui  élaii  l'an  631 
de  Jésus-Christ,  ordonna  que  les  r nfants  des 
serfs  de  celte  abbaye  ,  soit  qu'ils  fussent  nés 
de  légitime  mariageou  non,  appartiendraii-nt 
au  monastère,  sous  peine  d'amende  ou  de 
punition  corporelle  contreles  contrevenants. 
Comme  ils  étaient  en  grand  nombre,  ils  vou- 
lurent se  révolter  et  secouer  le  joug  de  la 
servitude,  sous  le  gouvernement  d'Eudes  fie 
Deuil,  qui  obtint  un  bref  du  pape  Adrien  IV, 
adressé  aux  évêques  de  France,  pour  con- 
traindre parles  voies  canoniques  les  serfsde 
cefe  abbaye  à  rendre  les  services  auxquels 
ils  étaient  obligés;  et  environ  cent  ans  après, 
Clémenl  IV,  l'an  12CG,  donna  pouvoir  aux 
abbés  de  Saint-Di  nis  de  conférer  la  tonsure 
cléricale  aux  serfs  de  celle  abbaye,  après 
qu'ils  auraient  été  affranchis  ,  du  consente- 
ment de  la  communauté. 

Il  y  avait  au-si  dans  celle  abbaye  des  pau- 
vres malriculiers,  ainsi  appelés  parce  qu'ils 
étaient  inscrits  dans  la  matricu'e  ou  catalo- 
gue de  l'église.  Ils  avaient  souvent  pirl  aux 
largesses  des  bienfaiteurs.  Ils  faisaient  les 
plus  gros  ouvrages  de  la  sacristie,  comme  de 
tendre  les  tapisseries,  garder  les  portes,  em- 
pêcher le  tumulte  du  peuple,  tenir  l'église 
propre,  et  veiller  à  la  garde  des  saintes  re- 
liques. La  plupart  étaient  des  personnes  (|ui, 
eu  reeonnaissance  de  ce  qu'ils  avaient  été 
guéris  par  l'assistance  des  saints  martyrs, 
consacraient  le  reste  de  leurs  jours  au  ser- 
vice de  l'abbaye,  portant  l'hahit  monastique 
et  la  tonsure  comme  les  moines. 

Quoique  cette  abbaye  dût  selon  les  appa- 
rences servir  de  modèle  aux  maisons  reli- 
gieuses qui  étaient  de  sa  juridiction,  elle  eut 
cependant  besoin  elle-même  d'être  réformée 
sur  la  On  du  septième  siècle.  Le  relâchement 
s'y  était  introduit  insensibleraenl,  ilavailaug- 
mente  de  jour  en  jour,  on  n'y  reconnaissait 
plus  ni  régularité  ni  discipline  :  les  religieux 
avaient  même  quille  l'habit  monastique  et 
s'étaient  transformés  en  chanoines  pour  vi- 
vieavec  plus  de  licence.  Hilduin,  qui  ou 
était  abbé  en  815,  ayant  tâché  inuiilemenl 
de  les  faire  rentrer  dans  leur  devoir,  eut 
recours  à  lauloiilé  de  l'empereur  Louis  le 
Débonnaire,  qui  l'an  828  y  envoya  deux 
saints  abbés,  Benoît  d'Anianc  et  Arnonl  de 
Noirmouticrs;  mais  leurs  remontrances  ne 
servirent  qu'à  irriter  davantage  es  préten- 
dus chanoines,  qui  envoyèrent  d.ms  un  pe- 
tit monastère  de  leur  dépendance  ceux  de  la 
communauléqui  n'avaient  pas  encore  qui;ié 
l'habit  monaslique.  Les  évêques  asscnililés 
l'an  829  dans  le  concile  de  Paris  résolurent 
d'employer  Icuraulorilé  jîour  rétablir  la  dis- 
cipline régulière  dans  celle  abiiaye,  mais  les 
troubles  excités  l'année  suivante  furent  un 
obstacle  aux  ordonnances  (lui  furent  faites 
pour  cela  dans  le  concile.  Hilduin,  songeant 
toujours  aux  moyens  de  réussir  dans  son 
dessein,  gagna  en  831  Hincmar,  l'un  de  ces 
piélendus  chanoines,  qui  fut  le  premier  à 
s'offrir  de  prendre  l'habit  monastique  cl  à 


suivre  les  autres  prati()nes  du  cloître  ;  quoi- 
qu'il ne  fût  pas  du  nombre  de  ceux  ')ui  les 
avaient  abandonnées,  ayant  toujours  poito 
l'habit  de  chanoine  depuis  son  eulréeen  re- 
ligion. Us  travaillèrent  ensemble  si  elTirace- 
ment  pour  la  réforme  de  ce  monastère,  qu'é- 
tant aidés  par  les  archevêques  de  Sens  et  do 
Reims,  et  appuyés  de  l'autorité  t'ereuipcrcur, 
la  discipline  monastique  fut  enfin  par  leur 
moyen  rétablie  àSainl-Donis.  Hincmar  en  l'ut 
tiré  quelques  années  après  pour  être  élevé  à 
la  dignité  d'archevêque  de  Reims. 

Hilduin,  pour  affermir  la  règle  monastiqus 
qu'il  avait  rétablie  dans  ce  monastère  avec 
tant  de  peine,  voyant  qu'une  des  principales 
causes  de  sa  décadence  venait  de  ce  que  lis 
abbés  ne  fournissaient  pas  aux  religieux  les 
choses  nécessaires  à  la  subsistance,  partagea 
les  biens  de  l'abbaye  et  en  assigna  une  par- 
tie pour  l'entretien  et  la  nourriture  des  reli- 
gieux. Le  grand  nombre  de  terres  cl  de  mai- 
sons, qui  sont  marquées  dans  l'acte  de  ce 
partage,  font  connaître  qu'elle  était  dès  lors, 
comme  elle  est  encore  aujourd'hui ,  la  plus 
riche  du  royaume.  Chaque  terre  et  chaque 
ferme  avait  sa  destinalion  parliculière.  Le 
revenu  de  quelques-unes  devait  être  employé 
pour  vêtir  les  religieux  ;  celui  des  autres,  ou 
pour  assister  les  malades  ,  ou  pour  la  nour- 
riture de  la  communauté  ,  ou  pour  les  réjia- 
rations, ou  pour  lesdépenscs  extraordinaires, 
tant  de  l'église  que  du  monastère.  11  y  eu 
avait  que  l'abbé  cédait  entièrement  aux  reli- 
gieux, d'autres  sur  lesquelles  il  donnait  sim- 
plement à  prendre  en  espèces  certaine  (juan- 
tilé  de  blé,  de  vin,  de  fruits,  de  légumes,  do 
miel,  de  volaille,  de  puissou  et  autres  sem- 
blables choses. 

Le  P.  Mabillon  rapporte  dans  sa  Diploma- 
tique la  charle  de  ce  partage  ,  par  laiiuelle 
il  paraît  que  l'abbé  Hilduin  ordonna  que  l'on 
donnerait  tous  les  ans  aux  religieux  ,  tant 
pour  eux  que  pour  les  hôtes  qui  mangeaient 
au  réfectoire,  deux  mille  cent  muids  de  blé 
fi-onicnt,  neuf  cents  muids  de  seigle  pour  ses 
domcsliqucs,  deux  mille  cinq  cents  muids  de, 
vin  pour  les  relij;ieux  ,  outre  la  bière  pour 
les  serviteurs  ;  trois  cents  muids  de  légumes, 
Ircnle-cinq  muids  de  graisse,  trente-cinq  ses- 
terces de  beurre,  delà  volaille,  du  bois  et 
autres  choses  dont  il  est  inutile  de  faire  ici 
le  détail.  Il  y  eut  un  aulre  partage  qui  fui 
fait  par  l'abbé  Louis  en  862,  et  confirmé  par 
le  roi  Cliarles  le  Chauve.  Il  paraît  par  ce 
partage  que  l'alibé  était  obligé  de  fournir 
treize  cents  muids  de  seigle  pour  les  servi- 
teurs, et  que  pour  en  deun  urer  quille,  aussi 
bien  que  des  trois  cents  muids  de  légumes  , 
de  vingt  muids  de  graisse  sur  les  trente-ciiKi 
qu'il  donnait,  de  deux  cents  muids  de  sel, 
outre  uu  muid  que  l'on  recevait  aux  salines, 
de  cinquante  muids  de  savon  et  autres  den- 
rées, de  cent  masses  de  fer  pour  les  taux,  de 
centaulres  masses  de  fer  pour  les  fourclies 
et  autres  choses  qui  étaient  nécessaires  pour 
les  ouvriers,  il  avait  abandonné  aux  reli- 
gieux quelques  terres  et  seigneuries  ,  mais 
qu'il  était  toujours  obligé  de  fournir  deii^ 
mil;e  c  ni  muids  de  blé  froment  pour  faire 


81 


niCTIONNAJIlE  DF.S  ORPRES  RELICIF.UX. 


ii 


liiir  p.Tîn,  ri  qu'il  conscnlail  que  pour  lotir 
liuivsdn  ils  JDiiir.iifnl  ,  romino  ils  fais.iii'iil 
(li'puis  lonplcnips.  de  rorl.iinps  vignes,  à  con- 
ililion  (|iio  si  ollos  rpii(l;iicnt  nioitis  de  deux 
iiiillo  cinq  cents  inuids,  r.ibbo  sor.iil  tenu  (io 
suppléer  au  reste.  Mni-;  il  ne  f.iut  pas  croire 
i;uc  le  muid  de  vin  fût  aussi  praïul  en  ce 
temps  1,1  qu'il  l'est  nujuurirhui  ,  non  plus 
que  le  muid  de  blé;  car  par  les  statuts  qu'Ad- 
iiilard,  abbé  de  Corbie,  fit  pour  son  monas- 
tère, l'an  822  (1),  il  pnraîl  que  le  muid  de 
vin  n'élail  que  de  seize  seliers  et  chaque  sc- 
tier  (le  six  tasses  ,  par  conséquent  l'hémine 
qui  coiitenail  demi-selier  était  de  trois  tasses. 
A  l'éçrard  du  muid  de  blé,  l'on  n'en  dev.  it 
faire  que  trente  pains.  Ces  statuts  ne  mar- 
i|iieiil  pdinl  combien  chaque  pain  pesait  ; 
mais  par  la  leHreque  Théodemare,  abbé  du 
Mont-l'.assin,  écrivit  à  l'empereur  Cliarlc- 
inaRiie  ,  lorsqu'il  lui  envoya  l'hémine  et  le 
poiils  du  pain,  il  est  constant  que  chaque 
pain  pesait  quatre  livres  et  servait  h  quaire 
relipietix  :  d'où  il  s'ensuit  que  le  muid  de  blé 
ne  devait  pas  peser  plus  de  s  x  vingts  livres, 
■  I  qu'.iinsi  il  élail  bien  moins  qu'un  seîier  de 
l'aris,  (|iii  en  pèse  deux  cent  quarante. 

(^es  pariages  l'ont  connaître  qu'après  cette 
réf'irme  les  religieux  de  Saint-Denis  gar- 
(laiint  l'.il  siini  nce  de  la  chair  prescrite  par 
la  règle  de  Saint-lfenuîl  ;  toutefois  ,  avec  les 
fldoui  issements  que  le  concile  d'Aix-la-Cha- 
pelle y  avait  afipoités ,  juiisiiu'ils  usaient 
d'Iii.ile  de  graisse  dans  leurs  mets  ordinaires 
au  diTaiit  d'huile  d'olive,  et  qu'ils  pouvaient 
m.inger  de  la  volaille  à  certaines  félcs  de 
l'année. 

Quelques  années  avant  ce  partage,  l'abbé 
T.ouis  ayant  éié  pris  par  les  Normands  ,  les 
religieux  ddnnèient  [lour  sa  rançon  six  cent 
<|uatrc-\  ingis  livres  d'or  et  trois  mille  deux 
cent  einquai-telivrrs  d'argent,  qui  re\ienncnt 
à  [dus  de  six  cent  mille  livrer  de  notre  mon- 
naie, sans  complir  plusieurs  vassaux  et  leurs 
enfants  qu'on  fut  aussi  obligé  de  leur  livrer. 
Ces  barbares  s'emparèrent,  pour  la  première 
fois,  de  cette  abbaye  l'an  81)5;  et,  comme  il 
n'y  avait  rien  (ini  s"t)pi)Osàt  à  eux,  i!s  la  dé- 
p'iuillrrent  entièreiiienl  de  tous  les  dons  pré- 
cieux (]iie  nns  rois  y  avaient  faits,  ayant  été 
pendant  Irois  semaines  maîircs  de  te  mona- 
sière ,  d'où  les  religieux,  en  se  retirant, 
avaient  emporté  benreusemenl  avec  eux  les 
saillies  reliques.  C.liarlis  le  Clianve,  ayant 
pris,  l'an  H'il ,  l'adminislralion  de  cette  ab- 
baye, ajcèsla  mort  de  l'abbé  Loui'i,  qui  était 
Ron  cliaiieelier  et  son   parent  ,    (it  gloire  de 

Îorter  le  nom  et  la  (lu.ililé  d'abhé  de  Saint- 
>enis,  et  lit  faire  aiilotir  du  monaslèrt!  une 
enceinte  de  buis  et  de  pierres  en  ni;iniére  de 
fortilicalion  ,  pour  enipérber  <|ue  les  Nor- 
mands ne  vinssent  la  |iilleriine  seconde  fois; 
mais  les  religieux  ni'  crurent  pas  ces  fortili- 
r.iliuns  assez  fortes  pour  leur  résister,  puis- 
que .  dan»  le  temps  que  ces  inlidéles  assié- 
geaient Paris,  l'an  8K7,ces  religieux  se  réfu- 
gièrent à  Keirns  avec  les  corps  de  !■  urs  saints 
patrons   et   pliisieuis   autres   reliques.  L'an 


012,  le  monastèrede  Saint-Denis  .«se  voyait  en- 
core à  la  veille d'étreen  proieaux  Normand», 
si  le  roi  Charles  le  Simple  n'eût  pris  le  parti  de 
s'.iccoromoder  avec  Itollon,  leur  duc,  qui  se 
fit  baptisera  Hnuen,  comme  nous  avons  déjà 
dit  ailleurs.  Robert,  comte  de  Paris,  qui  élait 
pour  los  ablié  de  Saint-Denis  et  qui  lui  roi 
de  France  dans  la  suite,  le  tint  sur  les  fonts 
de  Iraplôme  et  lui  donna  son  nom.  Avant  It 
comie  Hubert,  le  roi  Eudes  en  avait  aussi  été 
abbé;  lingues  le  Grand,  (ils  de  Robert,  le  fut 
après  lui  ;  et  enfin  Hugues  Ca[iel,  qui  par  un 
motif  de  conscience  rendit  à  ce  monastère 
ses  abbés  réguliers  ,  étant  persuadé  que  la 
cause  dn  relâchement  des  religieux  ne  ve- 
nait que  de  ce  qu'ils  n  avaient  que  des  laï- 
ques pour  abbés.  Ce  prince,  après  avoir  re- 
mis en  règle  cette  abbaye,  jugea  nécessaire 
d'\  rétablir  le  bon  ordre.  Il  en  fit  parler  à 
siinl  Mayeul,  qu'il  croyait  plus  cajiable  que 
personne  d'une  tel'e  entreprise.  Ce  saint 
avait  quit'é  la  charge  d'abbé  de  Cluny  et  vi- 
vait fort  retiré,  ne  pensant  plus  qu'à  se  pré- 
parer à  la  mort.  Il  crut  néanmoins  devoir 
faire  un  eiïort  pour  satisfaire  son  prince  : 
c'est  pourquoi  il  se  mit  en  chemin;  miis 
étant  tombé  malade  à  Souvigny,  il  y  mourut. 
Ainsi  ce  fui  l'abbé  Odilon,  qui  lui  avait  suc- 
cédé dans  le  gouvernement  do  l'ordre  de 
Cluny,  qui  fut  chargé  de  celle  commission  , 
qui,  quoique  difficile,  fol  exécutée  avec  tout 
le  succès  que  l'on  pouvait  attendre  de  son 
zè>. 

L'ancienne  discipline  y  était  encore  fort 
r«l,";chée  lorsque  Suger,  en  étant  abbé, 
entreprit  l'an  1123  de  réformer  les  abus  qui 
s'y  étaient  glissés,  et  aux(]uels  il  n'avait  pas 
peu  contribué  lui-même  :  car,  n'étant  que 
simple  religieux  de  Saint-Denis  ,  il  avait 
gagné  ies  bimnes  grâces  du  roi  Louis  '\'I  et 
s'était  abandonné  à  sa  propre  fortune,  se 
iais-anl  introduire  bien  avant  dans  les  af- 
faires du  siècle.  Il  suivait  ce  prince  partout, 
même  à  l'armée,  et  vivait  pïuUM  en  courtisan 
(ju'en  religieux.  Apiès  qu'il  eutélé  fait  abbe. 
il  continua  de  vivre  comme  auparavant,  et 
même  avec  plus  de  pompe  et  do  magnificence; 
l'on  a  mémo  cru  que  saint  Bernard  l'a  voulu 
marquerlorsqu'il  se  plainidans  son  Apologie, 
d'un  abbé  ([ui  avaitpour  l'ordinaire  soixante 
clievaux  à  sa  suite.  Ce  saint  l'en  reprit  avec 
une  liberté  dire  tienne,  et  Suger,  louché  de 
ses  remontrances,  renonça  à  sa  vanité  passée, 
travailla  à  se  corriger  lui-même  et  à  réfor- 
mer les  abus  qui  s'étaient  glissés  dans  son 
monastère,  (Ommcnçanl  par  retrancher  tout 
ce  qui  ressentait  en  sa  personne  la  pompe 
cl  les  manières  du  siècle.  Il  eût  bien  souhaité 
(juillrr  entièrement  la  cour;  mais  le  roi,  qui 
avait  besoin  de  ses  conseils,  n'y  put  jamais 
consentir.  Obligé  de  rester  malgré  lui  d.ins 
le  miiiislère,  il  parut  à  la  cour  a»ec  une 
modestie  qui  édiliait  toute  la  France.  De, 
celle  manière  il  persuada  aisément  la  re- 
forme à  ses  religieux.  La  ferveur  et  l'exar- 
liluile  avec  laquelle  ils  s'acquillaienl  de 
tous    leurs    devoirs   les   mirent    bienlôl   en 


(I)  M.cliil!<iii,   Ainiiil.  Iiiiiiiticl.,  tiiiii.  II,  |Mg.    iGG  cl 


25 


DEN 


DEN 


2C 


grande  réputation;   et  celte  renommée  fut 
suivie  d'une  si  grande  prospérilé,  qu'il  srm- 
b'ail   que  toutes  sortes    de    biens    vinssent 
fondre  en  abondance  sur  ce  monastère  :  il  ne 
fut  jamais  plus  florissant  que  sons   le   gou- 
vernement de  l'abbé  Su;;er,  qui  en   soutint 
tous  les  inléréis  avec  une  fermeté  tout  à  fait 
noble.  Il  lui  fit  restituer  le  prieuré  d'Argcn- 
leuil,  qui  lui  avait  appartenu  originairement. 
Il   rentra  dans    plusieurs  biens  qui  avaient 
été  aliénés.  Il  rédima  de  la  vexation  diffé- 
rentes terres  opprimées  depuis  longtemps  ; 
et  l'on  compte  vingt-deux  terres  et  seigneu- 
ries qui  furent  beaucoup  augmentées  par  les 
soins  de  cet  abbé.  Pour  conserver  les  droits 
de  son  abbaye,  et  non  par  ostentation,  comme 
quelques-uns  l'ont  avancé  mal  à  propos,  il 
fil  faire  une  (basse  aux  cerfs  dans  la   forêt 
Iveline,  oîi  il  passa  une  semaine  entière  sous 
des  tentes,  avec  Amauri  de  Montfort,  Simon 
de  Neauphle,  Evrardde  Villepreux,  plusieurs 
autres  seigneurs  de  ses  amis  el  quantité  de 
vassaux.  Le  gibier  fut  porté  à  Saint-Denis  : 
on  le  servit  aux  ref  gieux  convalescents   et 
aux  étrangers,  qui  mangeaient  au  logis  des 
Hôtes,  et   le  reste  fut  distribué  aux  soldats 
de  la  ville.  Il  fonda  aussi  le  priiuré  d'Essone, 
où  il  mit  une  communauté  de  religieux;  et 
celui  de  Chaumonl  en  Vexin  fut  à  sa  consi- 
dération soumis  à  l'abbaye  de  Sainl-Ueiiis. 
Le  crédit  qu'il  avait  en  France  augmenta 
encore  davantage  lorsque  le  roi  Louis  Vil, 
étant  prêt  de   partir  pour  la  croisade  l'an 
1147,  le    nomma  pour  régent  du  roy  iunie 
pendant  son  absence.  Ce  prince  avait  résolu 
avec  le  pape  Eugène  111  de  réformer  l'abbaji! 
de  Sainte-Geneviève;  mais,  n'en  ayant  pas 
eu  le  temps  ,  l'exécution   en  fut  réservée  à 
Suger,  qui  s'en  acquitia  de  la  manière  que 
nous   le   rapporterons  en    parlant  de   celte 
abbaye.  Le  roi  étant  de  retour,  cet  abbé  l'ut 
iliar^é  d'une   nouvelle  commission    par  le 
(lape  :   c'était  de  mettre  des   moines   dans 
l'église  de  Saint-Corneille  de   Compiègne  , 
desservie  alors  par  des  cbanoines  d'une  vio 
peu  réglée  :  ce  qu'il  exécuta  en  y  établissant 
une  communauté  de  religieux  tirés  de  Saint- 
Denis.  Enfin  ,  après  avoir  rendu   de  grands 
services    à  l'État ,    qui  lui   firent  donner  le 
tiire  de  Père  de  la  pairie,  et  avoir  gouverné 
son  abbaye  pendant  vingt-neuf  ans,  il  mou- 
rut l'an   llol.   Il   n'est   pas  le  seul  abbé  de 
Saint- Denis  qui  ait  été  régent  du  royaume. 
L'abbé  Matthieu    de  Vendôme    le   fut  aussi 
lorsque  saint  Louis  alla  pour  la  seconde  lois 
en  Orient    l'an  12G9.   Ce  piinre  étant   mort 
dans  ce  voyage,   son    lils  l'bilippe  III  ,  qui 
l'avait  accompagné,  non-seulement  continua 
la  régence  à   l'atibé  Matthieu  ,  mais  le  fit  à 
son  retour  son  ministre  d'Etat. 

Quoique  Suger  eût  assez  de  crédit  pour 
obtenir  du  pajie  Eugène  III  d'user  d'orne- 
iiicnls  poniificaux  ,  cependant,  soit  par  mo- 
destie, ou  pour  quelque  autre  raison,  il  ne 
s'en  scrvil  pas  :  ce  ne  fut  que  l'abbé 
Cuiliaume  II  qui  l'an  1176  obtint  cet  hon- 
neur du  pape  Alexandre  111.  Du  temps 
d'Eudes  II ,  qui  succéda  immédiatemenl  à 
ëuger,  l'abbaye  de  Saint-Denis  acquit  plu- 


sieurs églises  el  prieurés ,  entre  antres  le 
prieuré  de  Fornalos,  qui  lui  fut  donné  l'an 
115G  par  le  roi  dePortugal  Alphonse  VII,  cl 
sous  le  gouvernement  d'Henri  V.  On  lui  sou- 
mit enrore  le  prieuré  de  Grand-Puits.  Le 
P.  Félibicn  rapporte  un  pouiilé  de  ceit(î 
abbaye  ,  tiré  d'un  ancien  cartulaire  de  l'an 
l'jll  ,  où  il  y  a  dix-huit  prieurés  et  environ 
quatre-vingts  cures  à  la  nomination  de 
l'abbé  ,  sans  les  canonicats  et  les  petits  bé- 
néfices ;  et  il  paraît  par  ce  même  pouiilé  que 
dès  ce  lemps-là  cette  abbaye  avait  déjà 
perdu  plusieurs  monastères  de  sa  dépen- 
dance ;  comme  ceux  de  Tousseiival ,  de  Plai- 
sir, celui  de  Saint-Michel,  changé  depuis  en 
abbaye,  et  plusieurs  autres,  dont  il  est  fait 
mention  dans  I  Histoire  de  Saint-Denis,  quoi- 
qu'ils ne  se  trouvent  point  dans  ce  pouiilé. 
Ces  monastères  ,  qui  étaient  de  sa  dépen- 
dance, et  dont  les  prieurs  étaient  obligés  de 
se  trouver  aux  chapitres  généraux  qui  se 
tenaient  dans  celte  abbaye,  n'étaient  (juu 
trop  suffisants  pour  lui  faire  donner  le  nom 
de  chef  d'ordre  el  de  congrégation  ;  mai*  elle 
a  mérité  ce  titre  avec  pus  de  fondement  par 
ce  que  nous  allons  dire. 

Dès  l'an  lo80,  quelques  monastères  de  né- 
nédiclins,  pour  satisfaire  au  décret  du  concile 
de  Trente  qui  obligeait  les  monastères  im- 
médiatement soumis  au  saint  siège  de  s'unir 
en  congrégation  ,  s'ils  n'aimaient  mieux  se 
résoudre  à  la  visite  de  l'ordinaire,  s'élanl  as- 
sociés ensemble  sous  le  lilrede  Congrégation 
des  Exempts,  les  religieux  de  Saint-Denis, 
qui  n'avaient  point  encore  obéi  sur  ce  point 
an  ciincile  de  Trente  ,  et  se  voyaient  pressés 
d'enlrer  en  congrégation,  aimèrent  mieux, 
sans  s'assujettir  à  une  autre  congrégation, 
chercher  <'ux-;nêmes  à  en  composer  une  dont 
leur  monastère  pût  être  le  chef,  et  faire  en 
sorte  par  ce  moyen  de  ne  changer  à  leurs 
usages  (quelque  abusifs  qu'ils  fussent)  que 
ce  qu'ils  voudraient.  La  chose  conclue  ,  la 
coMiinunauté  députa  plusieurs  religieux  pour 
aller  solliciter  divers  monastères  de  s'unir  à 
celui  de  Saint-Denis  pour  faire  un  même 
corps  de  congrégation.  Ils  en  trouvèrent 
jusqu'à  neuf,  (lui  furent  ceux  de  Saint-Pierre 
de  Corbie  ,  de  Saint-Magloire  de  Paris  ,  de 
Saint-Père  de  Chartres,  de  Bonneval  ,  de 
Couiombs,de  Josaphat,deNeauplile-le-Vieux, 
de  Saint-Lomer  de  Hlois,  et  de  Monstieren- 
der.  On  dressa  des  statuts  ,  qui  ,  n'étant  la 
plupart  que  des  règles  ou  maximes  assez 
généralement  reçues  dans  les  cloîtres  ,  s  ins 
déroger  aux  coutumes  de  chaque  monastère, 
furent  aisément  admis  par  les  procureurs 
de  toutes  ces  abbayes  ,  assemblés  à  Paris  b; 
G  mars  1607  au  prieuré  de  Saint-Lazare,  au 
faubourg  de  Saint-Uenis  ,  où  se  conclut  le 
traité  d'association. 

On  en  poursuivit  ensuite  les  lettres  païen-, 
tes  ,  et  le  roi  Henri  IV  les  accorda  dans  le 
même  mois.  Elles  furent  enregistrées  et  ho- 
mologuées au  parlement  le  5  septembre  de 
la  môme  année,  nonobstant  l'opiiosition  de 
l'abbé  de  Saint-Corneille  de  Compiègne,  dont 
les  religieux  domaud.iicnt  d'être  associés  à 
la  même  congrégation,  à  laquelle  ils  fureni 


DICTIONN.MUE  DF.S  ORDUES  HEMCIEUX. 


28 


aussi  ngr^-gt'-s.  I.n  mur  Ironvn  soulonienl  à 
pro()04  il'a»;imer  le  temps  des  clinpilrrs 
f;iMiéraux;  cl ,  au  lieu  que  les  slaliits  n'en 
melaieiil  ijuc  de  six  en  six  ans ,  elle  liéler- 
inina  qu'ils  se  lieiidrai  ni  tous  les  quatre 
an*,  l.e  premier  rh.ipiire  général  avail  été 
indiqué  à  Saint-Denis  le  28  juillet  ;  mais 
quelque  inciilenl  survenu  obligea  de  le  dif- 
férer jusqu'au  -il  orlobre  suivant ,  cimmie  il 
parait  par  les  actes  rapitulaires  de  cette 
année-là.  Nicolas  Hcsselin,  qui  était  prieur 
de  Saint-Denis,  fut  élu  général  de  la  nouvelle 
congrégation.  Le  pajïC  l'aul  V  la  confirma 
Tan  l(îl4  sous  le  litre  de  Con<jré(j(ilion  de 
Saint-Denif,  cl  donna  à  tous  les  monastères 
immédiatement  soumis  au  sainl-siége  la  li- 
herlc  de  s'y  associer,  dans  l'espérance  de 
rélahlir  par  ce  moyen  la  discipline  mona- 
stique en  France. 

L'année  précédente  le  général  Nicolas 
He&sclin  élanl  mort,  Denis  de  Uubenlel  fut 
élu  en  sa  place.  Il  remplit  aussi  celle  de 
grand  prieur  de  celle  ablia>e,  et  mourut  en 
lli20.  a|irès  s'être  dén)is  (juelque  tmips  avant 
SI  mort  du  grand  prieure  entre  les  mains 
de  Firmin  l'ingré.  tlonime  par  sa  mort  la 
congrégation  de  Saint-Denis  se  vit  sans  gé- 
néral, et  que  dans  le  même  temps  Claude 
Louvet,  prieur  de  Corbie,  qui  en  était  viciire 
général,  vint  à  mourir,  aussi  bien  que  le 
syndic  nommé  Fran(;i>is  WasI,  religieux  et 
ehanibrier  de  Sainl-Magloire,  Firmin  l'ingié 
convoqua  l'année  suivan:e  le  cliapitre  géné- 
ral dans  l'abbaye  de  Siinl-C.orneille  de- Com- 
piègne  ,  où  l'on  (il  de  nou\eau\  (ifficiers. 
Mais  celle  coiigrcg.iiinn  ne  subsista  pas 
longtemps.  Le  mon.isiérc  de  Sainl-M.igloiri-, 
qui  était  un  de  ses  membres,  fut  dimné  aux 
l'ères  de  l'Oratoire  l'an  l(i-28.  LUo  en  perdit 
encore  d'autres  dans  la  suite,  et  les  IJéné- 
diciins  réformes  de  a  congrégation  de  Sainl- 
Maur  entrèrent  dans  l'abbaye  du  Saint-Ueiiis, 
chef  de  cette  cnmpagnie,  l'an  ICJ^J.  ll.s  eu- 
rent aus-i  d.ins  la  suite  celle  de  Sainl-Cor- 
neille  de  Coinj  ii'gne,  de  .Monsiiérender,  de 
Saint-Père  de  l^lianres  et  iiuelques  autres. 

Nous  avons  vu  ci-dev  aiit  <|ui;  dans  le  nom- 
1  re  des  aWiés  régulii'rs,  cette  abbaye  a  pu 
compter  des  régents  du  loyaiiiiie,  des  i  baii- 
Ct'Ii'TS  et  des  ininislre;,  d'I-^lat.  LorM|u'elle  a 
clé  entre  les  mains  des  laniues,  clic  a  eu  des 
rois  mêmes  pour  abbés;  cl,  avaiil  (lil'elle  fùl 
lOMibee  en  commende,  [iliLsieurs  de  eesalibes 
régulirrs  ont  clé  élevés  à  la  di^-nile  (l'evé- 
qiie,  d'arclievé'iue  et  de  c.irdaial.  Le  pre- 
mier abbé  romineiidaiaire  fui  le  e.inliiial 
Louis  de  Itourbon,  l'an  l.')2S.  Le  litre  d'abbe 
fut  supprime,  *  t  la  iiiense  .ibbatiale  unie  a  la 
iiiaiMin  royale  de  Sa'iil-Louis  à  S.iint-t^jr 
tan  IG'Jl,  comme  nous  a>ons  dit  en  jiatlant 
de  cette  maison  d.ins  l'arliclc  l>vii. 

Sus  abties ,  qu(ii<|uu  réguliers,  avaient 
séance  au  parlement  de  i'aris,  et  avaient 
erand  nombre  d'ollii  ii  rs  religieux  el  lai()ues. 
Lorsque  l'ablié  de  S.iinl-Denis  allait  en  cam- 
p.igiie ,  il  était  ordinairement  aceiimpauné 
d'un  cbambellan  et  d'un  maréchal,  dont  les 
ullices  éiaicnt  (  iigés  en  (iefs,  conime  il  pa- 
rait par  des  actes  des  aunées  llb'J  et  I2.il. 


Ces  offices  et  ces  fii  fs  ont  été  depuis  réunis 
au  domaine  de  l'abbaye,  aussi  bii  n  que  l'of- 
fiee  de  boutillier  de  l'abbé,  qui  était  pareil- 
lement un  oKice  érigé  en  fiel  et  possédé  par 
un  séculier  dumeslique  de  ce  même  abbé, 
qui  avail  toute  juridiition  spirituelle  et  tem- 
porelle dans  la  ville  de  Saint-Denis  ;  et  plu- 
sieurs de  nos  rois  lui  avaient  attribué  la  ton- 
naissance  et  la  punition  de  tous  les  criminels 
qui  seraient  pris  dans  le  château  et  la  vil  e 
de  Saint-Denis,  et  dans  toute  l'étendue  de 
leur  juridiction,  soit  qu'ils  fussent  usuriers, 
faux  monnayeurs  el  même  criminels  de  lèse- 
majesté.  A  certaines  fêtes  de  l'année  on 
chante  dans  l'église  de  cette  abbaye  la  messe 
tout  entière  en  langue  grecque,  el  en  d'au- 
tris  seulement  l'Epî  re  el  l'Évangile.  File  a 
aussi  toujours  conservé  jusqu'à  présent  la 
communion  sous  les  deux  espèces  à  la 
messe  solennelle  des  dimanches  el  des  prin- 
cipales fêles  de  l'année,  oii  les  religieux  non 
encore  prêtres  communient  de  celle  sorte, 
non  par  un  privilège  spécial,  comme  plu- 
sieurs se  l'imaginent  (selon  ce  que  dit  le 
I*.  Félibien),  mais  par  un  usage  non  inter- 
rompu dans  cette  église  aussi  bien  que  dans 
celle  de  Cluny. 

A(>rès  toutes  les  iiertes  que  cette  abbayo 
a  faites,  il  est  éloniianl  qu'elle  soit  encore 
aujourd'hui  la  plus  riche  el  la  plus  lloris- 
saiile  du  royaume,  tant  parla  beauté  de  son 
trésor,  qui  est  d'un  jirix  ineslimabb-,  (|iie 
par  ses  revenus,  qui,(iuoique  Irès-gr.mds,  le 
seraient  encore  davantage  sans  les  disgrâces 
(|u'elle  a  éprouvées  en  dilTérents  tuicips  , 
dont  les  principales  ont  éié  celles  du  pillage 
qu'elle  souffrit  en  141 1 ,  pendant  la  guerre 
civile  qui  fut  causée  par  les  dilTerends  qu  il 
y  eut  au  commencement  du  xv  siècle  enlre 
les  ducs  d'Orléans  et  de  Uourgogno  :  ce<iui 
ayant  donné  occasion  aux  Anglais  de  re- 
tourner en  France,  dont  ils  avaient  été 
chassés,  eilc  fut  encore  pillée  en  1419  par 
ces  peuples  fiers  et  barbai  es.  Ils  s'en  ren- 
dirent maîtres  de  nouveau  en  1435,  après 
que  la  ville  de  Saint-I)en  s,  iju'ils  assié- 
geaient, leur  eut  é;é  rendue  par  capiti. la- 
lion.  Les  calvini>tes  n'eurent  |<as  plus  de 
rcspccl  pour  ce  inonaslèri' :  car,  en  l(i2 
étant  entrés  dans  la  même  ville  de  Saiiil- 
Denis,  où  ils  prolanèreiit  plusieurs  égli-cs, 
ils  endomm.igèreni  la  pluf<arl  de  ses  bâli- 
iiients,  prirent  presi|ue  tous  les  ornements 
d'église,  dépouillèrent  les  châsses  des  siiints 
de  l'or,  de  l'argent  et  des  pierreries  d.pni 
elles  elaieiit  (ouvertes,  empoi  tèreiit  el  dis- 
persèrent les  livres  de  sa  riche  bibliollièiiue, 
qui  était  remplie  de  quantité  d'anciens  ma- 
nuscrits ;  et  ils  n  en  seraient  pas  restés  là  si 
le  prince  de  Coiule,  l'un  de  leurs  cliels,  qui 
aiiiiait  cette  alihave  parce  qu'il  y  .ivail  clé 
eleve,  n'eût  aircle  leur  fureur  en  fais.iiit  pu- 
nir u  edoii/aine  des  pi  incipaux  auteurs  i!o 
cet  attentat.  Mais  (c  ne  fui  pas  là  ladeii-.ièn; 
(le  ses  di.'-gràccs  ;  c.ir  (sans  parler  de  cello 
(ju'ellc  nijut  de  la  ligue  en  I.'jO  i  par  l'inso. 
leiice  des  soldats,  (|iii  ,  non  cuntenis  dy 
avoir  commis  plusieiirs  indignités,  derobe- 
rei.l  jusqu'au   plouib  de  l'église)  le  duc  de 


23 


t)lJ 


DU 


50t 


Nemours,  qui  manquait  d'argent  pour  défen- 
dre Paris,  résolu  d'en  faire  aux  dépens  du 
trésor  de  celte  abbaye,  qui  était  gardé  chez 
les  religieux  de  Sainte-Croix  de  la  Breion- 
nerie,  en  tira,  par  un  arrêt  du  conseil  d'Eiat 
rendu  le  28  mai  1590,  un  rubis  estimé  vingt 
mille  écus  et  un  crucifix  d'or  pesant  plus  do 
dix-neuf  marcs,  que  l'abbé  Suger  y  avait 
mis.  11  n'y  eut  pas  jusqu'au  prévôt  des  mar- 
chands, conjointement  avec  les  échevins  de 
P.iris,qui,  voulant  en  enlever  toute  l'argen- 
terie, firent  rompre  les  serrures,  et  empor- 
tèrent six  lampes  d'argent ,  dont  la  plus 
grosse,  qui  venait  d'Espagne,  pesait  plus  de 
quatre-vingt-treize  marcs  ,  quatre  ligures 
d'anges  et  un  bénitier  d'argent,  le  tout  pe- 
sant deux  cent  quinze  marcs.  Mais  présen- 
tement celle  fameuse  abbaye  s'est  remise  de 
toutes  ces  pertes  aver.  lanl  d'avantage,  qu'il 
serait  difficile  de  les  croire,  si  l'histoire  ne 
nous  en  assurait.      * 

Voyez  Doublet  et  le  P.  Félibien  ,  Histoire 
de  l'abbaye  de  Saint- Denit;  Sainte-Marthe, 
Gall.  Christ.;  Mabillon  ,  Annal.  Benedict., 
etc. 

DÉVIDOIR  (Chevaliers  du).  Foyez  Crois- 
sant. 

DIJON  ET  DE  LANGRES  (Hospita- 
lières de). 
Des  Hospitalières  de  Dijon  et  de  Latigres, 
avec  la  vie  de  M.  Joly,  prêtre,  docteur  en 
ihéoloqif^  et  chanoine  de  l'éylise  de  Saint- 
Etienne  de  DijOfii  leur  fondnteur. 
M.  Joly,  instituteur  des  Hospilalières  de 
Dijon  et  de  L;jngies,  naquit  à  Dijon  le  22 
septembre  de  l'an  164-4,  et  eut  pour  père 
Jaci)ues  Joly,  secrétaire  du  parlement  de 
Bourgogne.  Le  nom  de  Bénigne  lui  fut  donné 
sur  les  fonts  de  baptême,  et  il  eut  toute  sa 
vie  un  grand  soin  d'honorer  ce  saint  martyr 
et  apôtre  de  Dijon,  par  nmitation  de  ses 
vertus.  Ses  parents,  qui  par  un  principe  de 
piété  et  de  devoir  s'étaient  appliqués  à  éle- 
ver tous  leurs  enfants,  dont  le  nombre  était 
assez  grand,  dans  Us  pratiques  de  la  vérila- 
b!e  dévotion,  rimarquèrent  dans  le  jeune 
Bénigne  de  si  heureuses  dispositions  pour  la 
vertu,  qu'ils  redoublèrent  leurs  soins  pour 
l'y  former  de  bonne  heure;  mais  surtout  à 
celle  du  la  charité  envers  les  pauvres,  dont 
sa  mère  lui  donnait  l'exemple  en  allant  de 
maison  en  maison  chercher  les  pauvres  les 
plus  abandonnés,  auxquels  elle  doiiniiit  elle- 
même  tous  les  secours  dont  ils  avaient  he- 
so  n ,  jusqu'à  exposer  sa  propre  vie  pour 
conserver  la  leur,  comme  il  parut  assez  en 
16o2,  que  la  ville  de  Dijon  fut  afiligée  d'une 
Gèvre  pourpreuse  qui  emporta  plus  de  qua- 
tre mille  personnes.  Car  cette  charitable 
dame  s'employa  avec  tant  de  charité  et  de 
zèle  pour  le  service  des  pauvres  qui  étaient 
attaqués  de  cette  maladie,  et  avec  si  peu  de 
ménagement  pour  sa  sauté,  qu'elle  en  lut 
elle-même  attaquée  et  en  mourut  le  2  octobre 
de  la  même  année.  Pour  accoutumer  de 
bonne  heure  ses  enf.uils  à  faire  l'aumône 
aux  pauvres,  «lie  leur  donnait  souvint  de 
inm  Ja  faire  eux-mêmes  ;  et  jajnais  elle  n'a- 


vait plus  de  plaisir  que  quand,  après  avoir 
fait  leurs  petites  libéralité*,  ils  retournaient 
à  elle  pour  avoir  de  quoi  en  faire  d'autres. 
Le  petit  Bénigne  sur  tous  les  autres  se  si- 
gnala si  bien  dans  ces  pratiques  de  charité, 
que,  dès  l'âge  de  cinq  à  six  ans,  ayant  un 
jour  rencontré  dans  les  rues  quelques  pau- 
vres qui  languissaient  de  faim,  et  n'ayant 
rien  à  leur  donner,  il  les  pressa  si  vivement 
de  découdre  tous  les  rubans  qui  ornaient 
une  robe  neuve  que  sa  mère  lui  venait  de 
faire  faire  à  la  mnde  de  ce  temps-là,  que  la 
nécessité  jointe  à  ses  sullicitalions  les  ayant 
obligés  de  le  faire,  ils  curent  de  quoi  ache- 
ter du  pain  en  abondance  :  ce  qui  parut  à  sa 
mère  une  action  si  héroïcine  de  charité,  que, 
bien  loin  de  lui  en  faire  des  reproches,  elle 
augmenta  pour  lui  sa  tendresse,  louant  et 
bénissant  Dieu  de  lui  avoir  donné  un  enfant 
qui  donnait  de  si  belles  espérances. 

Après  la  mort  di*  celle  dame  le  jeune  Bé- 
nigne fut  envoyé  à  Beaune  par  son  père, 
qui  confia  son  éJucation  aux  Pères  de  l'Ora- 
toire, il  Ct  des  progrès  dans  les  lettres,  qui 
surprirent  ses  maîtres,  et  il  avança  si  bien 
(Jans  la  piété,  qu'on  jugea  dés  lors  qu'il  se 
consacrerait  au  service  de  l'Eglise.  On  ne 
voyait  point  en  lui  ces  empressements  si  or- 
dinaires aux  jeunes  gens  pour  le  jeu  et  le 
ilivertissement.  11  avait  une  grande  solidité 
d'esprit, beaucoup  de  discernemenl,  une  gran- 
deur d'âme  qui  n'était  pas  commune,  et  son 
inclination  était  d'obliger  ses  compagnons 
et  leur  faire  plaisir  autant  que  son  atiachc- 
ment  à  son  devoir  le  lui   pouvait  permettre. 

Il  employa  six  années  à  faire  ses  huma- 
nilés;  mais  son  père  étant  mort  au  mois  do 
mai  de  l'année  1659,  son  frère  aîné,  qui  so 
trouva  chargé  de  la  famille,  le  fit  revenir  à 
Dijon.  Un  an  après  il  l'envoya  à  Rennes,  où 
il  le  mil  en  pension  chez  les  Pères  Jésuites, 
sous  lesquels  il  fit  sa  rhétorique  et  com- 
mença sa  première  année  de  philosophie; 
mais  quelques-uns  de  ses  amis  lui  ayant 
conseillé  d'aller  à  Paris  et  d'y  recommencer 
sa  philosophie  pour  se  mettre  eu  état  de 
prendre  les  grades,  il  les  crut,  et  son  frère 
y  ayant  donné  les  mains,  il  se  rendit  à  Paris 
au  commencement  du  mois  de  septembre  de 
l'année  1662.  Après  avoir  fait  ses  cours  do 
philosophie  et  de  théologie,  il  fut  reçu  ba- 
chelier en  1667,  et  reçut  le  bonnet  de  doc- 
teur en  1672,  après  avoir  été  ordonné  prêtre 
la  même  année  à  l'âge  de  vingt-sept  ans. 

Il  avait  été  pourvu  d'un  canonicat  dès  l'âge 
de  quatorze  ans  dans  l'église  abbatiale  de 
Saint-Etienne  de  Dijon  ;  mais  ses  études 
l'ayant  empêché  légitimement  de  satisfaire 
aux  devoirs  d'un  chanoine,  elles  ne  furent 
pas  plutôt  finies,  qu'il  songea  de  retourner 
dans  sa  patrie  pour  remplir  ses  obligations. 
A  peine  fut-il  arrivé  à  Dijon,  que  Dieu 
éprouva  sa  patience  par  une  maladie  de  trois 
mois,  pendant  laquelle  il  résolut  de  se  dé- 
faire de  son  canonicat  afin  d'avoir  la  litierlé 
d'aller  de  village  en  village  pour  instruire 
les  paysans  et  passer  toute  sa  vie  dans  une 
mission  continuelle;  mais  le  P.  Charles 
Gauterol,  provincial  des  Pères  de  la  Doctrine 


SI  DICTIONNAIKE  OFS 

Chrélit-nno,  qui  nv.iil  6lé  son  direrlcnr  pcn- 
il.iiil  ((ii'il  cl.iil  à  l'aris  cl  «niïs  l'avi*  duquel 
il  n'cniroi  rciiail  rien,  prï-vnynnl  le  fruit  ([u'il 
immail  f  lirc  à  Dijon  sa  |ialrie,  rrniprrha 
«rcxcctilcr  cp  ilpsscin,  et  lui  conseilla  iln  ilc- 
inrurcr  ilans  i'i-lal  où  Dieu  l'avail  mis. 

M.  Jol\  sui\il  ilonc  cet  avis,  rt,  à  peine 
rui-il  ri't'ouTié  ses  forces,  qu'il  se  rendit  si 
assiilu  h  toutes  les  heures  de  l'office  divin 
de  l'église  de  Saint-Klienne,  qu'il  en  préféra 
l'assistance  à  loules  les  œuvres  de  piété 
auxquelles  il  se  sentait  pnrié  de  hii-niêine  et 
auxquelli's  d'autres  personnes  voul  lient  l'en- 
çaiier.  M.  Fiol,  poir  lors  abbé  de  relie  collé- 
piale.qni  ét.iilautrefois  un  célèbre  monastère 
de  r.irdr.'  de  S;iin!-.\ugusliM,(on(;ul  lanl  d'es- 
time de  sa  vertu,  que,  sans  avoir  égard  à  son 
ap',  qui  n'était  encore  que  de  vingt-neuf  ans, 
il  riioi'ora  de  la  qualité  de  son  grand  \icairc 
pour  liiules  1rs  di'|iciidnnfes  do  l'abbaye,  et  il 
fit  la  visite  de  toute»  les  églis  s  qui  étaient  de 
sa  jiiridiclion,  avec  le  succès  qu'on  en  pou- 
vail  espérer. 

N'ayanl  pu  exécuter  le  dessein  qu'il  avait 
forme  d'aller  dans  les  missions  pour  instruire 
lis  pauvres  de  la  campagne,  il  trouva  les 
iniiyens  de  se  dédonunager  d'une  si  sainte 
ouirefjfise  sans  sortir  de  Dijon.  Il  y  avait 
dans  celle  \ille  quaniilé  de  pauvres  inen- 
di  mis  élrvés  dans  l'oisiveté  et  dans  une;  pi- 
l(iy:ible  ignorance,  qui  ne  se  Irom  aient  dans 
les  églises  que  pour  interrompre  par  li'urs 
impiirlunilés  la  dévotion  de  c:  ux  dont  iU 
iinploraiiiil  la  charité.  Pour  cmpéclior  cet 
abus  et  [irucurrr  en  même  li  iiips  aux  pau- 
vns  les  se(ours  spiriluds  et  leinpoiels  dont 
ils  avaient  besoin,  il  fil  publier  par  toutes 
les  paroisses  de  l)ijon  que  l'on  ferait  une 
lionne  aumône  à  tous  les  pauvres  de  quel- 
(]ui-  fige  (ju'ils  fussent,  qui  se  trouveraient 
les  fêles  et  le  s  diinanelies  aux  caleihisnies  et 
aux  exhortations  qu'il  ferait  dans  la  chapelle 
de  Saint-^  incent,  el  celle  libéralité  étant  se- 
romlée  par  celle  de  plusieurs  personnes  cha- 
ritables, attira  un  si  gran<l  nonilire  de  pau- 
vres, qu<!  la  chapelle  se  lrou\atr()p  petite 
dans  la  suiie. 

('e  ne  furent  pas  seulement  les  pauvres 
qui  \inrcnt  écouler  ses  insiructions,  il  y  eut 
aussi  un  praml  nombre  de  personnes  de  tout 
sexe  et  de  toutes  sortes  d'élats  qui  s'y  trou- 
vèrent. I,es  I  ersoniirs  les  plus  accomniodées 
de  la  villocrureul  qu'elles  devaient  profiter  de 
l'ocrasinn  pour  faire  mieux  instruire  leurs 
domesliques  qu'elles  ne  l'auraii'nt  pu  faire 
«liez  elles.  Il  y  rui  même  des   ecelesi.isliqiies 


d'un  mérite  et  d'une  piélé  dislinguce  (|Ui, 
animés  par  son  exemple,  s'offiiteiii  de  par- 
tager avec  lui  le  iravail.  Plusieurs  prelals 
que  le»  aff.iires  de  leurs  églis(-s  oMigèrent 
de  passer  à  Dijon,  ayant  oui  parler  iivanln- 
geusemenl  <i;i  grand  fi  iiil  que  pr<iilui>aienl 
ces  inilruclions,  voulurent  lilen  eux-mêmes 
en  être  Ir»  lemoiM'.,  el  entre  le»  autres  M.  le 
llou\  de  la  Henliére,  archevêque  de  Nar- 
h"nne,  qui  j»-  laisail  un  plaisir  particulier 
de  Tenir  en  relie  chapelle  pour  y  aulmiser 
par  sa  presenrc  i  es  exhorl.ilions. 
Lo  zèle  ({ue  .M.  Joly  avait  puur  le  service 


ORDRES  RflI-ICIEUX:  52 

de  l'Fglisc  lui  fil  aussi  entreprendre  de 
donner  de  pareilles  insiructions  aux  clercs 
qu'on  élevait  dans  le  séminaire  do  la  Made- 
leine, où  il  vint  faire  sa  demeure  à  la  prière 
du  supérieur;  ce  qui  n'empêchait  pas  que, 
noniibstanl  l'éloignemenl  de  l'église  de  Saint- 
Istieune  el  ses  grandes  occupations,  il  n'as- 
sistât à  matines  et  aux  autres  offices,  aux- 
quels il  se  rendait  exactement  dans  les  temps 
même  les  plus  fâcheux,  aussi  bien  qu'aux 
assemblées  capilulaires  et  aux  autres  obli- 
gations de  son  bénéfice;  mais  toutes  ces  fa- 
ligues  jointes  aux  grandes  austérités  qu'il 
pratiqu.iit  épuisèrent  tellement  ses  forces, 
qu'il  tomba  dangereusement  malade  et  fut 
obligé  d'interrompre  ses  offices  de  chari'é 
cl  de  retourner  à  sa  mai>>on  can"niale, 
après  i]u'on  rut  employé  l'aulorilé  de  sou 
directeur  pour  l'y  faire  conseniir.  A  peine 
eut-il  recouvré  sa  sauté,  (ju'il  recommença 
avec  plus  de  ferveur  ses  insiructions  dans  la 
chapelle  de  Saiiit-Viueeul,  où,  comme  elles 
attiraient  un  grand  iiumbre  de  pauvres,  il 
crut  que  pour  les  y  engager  davantage  il 
était  à  propos  d'y  établir  une  confrérie  dont 
îi's  bons  r.'glemenls  les  pussent  soutenir 
dans  les  senlimcnts  de  piele  qu'il  leur  inspi- 
rait, el  leur  faire  supporter  avec  patience 
l'ctat  de  pauvreté  où  Dieu  les  avait  mis. 
Slais  plusieurs  personnes  riches  el  de  piélé, 
ayant  voulu  être  de  celle  confrérie,  elle  s'est 
trouvée  dans  la  suite  composée  des  plus 
considérables  de  !a  viil  •,  sans  (jue  pour  cela 
elle  ail  pi  relu  le  nom  de  confrérie  des  pau- 
vres, puisejuc  c'csl  à  eux  ([ue  loul  ce  que 
l'on  y  lail  de  bon  se  rapporte. 

Ile  sailli  homme  ne  se  conienla  pas  seule- 
ment d'exhorlrr  les  pceheurs  à  la  pénitence 
et  à  ch.inger  de  vie,  il  voulut  encore  leur 
nier  les  occasions  du  péché;  c'est  ce  qui  lui 
fi!  en.irepieiulre  l'établissement  de  la  com- 
munauté du  IJon-Pasleur,  qui  non-seulemenl 
sert  de  refuge  et  d'asile  aux  filles  débauchées 
qui  ont  dessein  de  (jiiilter  leur  vie  déréglée, 
mais  encore  de  retraite  et  de  lieu  de  correc- 
tion à  celles  que  leurs  parenis,  pour  prévenir 
le  déshonneur  de  leur  famille,  jugent  à  pro- 
pos d'y  renfermer,  el  à  celles  qui  sont  con- 
damnées à  y  être  renfermées  pour  punllioii 
de  leur  vie  scandaleuse,  comme  il  est  porlé 
par  les  lettres  paleiiles  que  le  roi  donna  l'an 
ll'>87  pour  l'élablissemeul  de  celle  conimu- 
naulé.  Il  établit  aussi  une  soeiéié  qu'on 
nomme  la  Chambre  de  la  Divine  Providence, 
eu  faveur  des  pauvres  servantes  (jui  se  Irou- 
veiil  sans  condilinn.  Sa  charité  n'él.ait  pas 
moins  grande  pour  les  pauvres  malades, 
qu'il  >isit.iilel  cmisolail  par  ses  exhort  i- 
lions,  par  les  aumi'ines  qu'il  leur  faisait,  el 
les  .services  i)u'il  leur  rendait,  avec  lant  du 
douceur  cl  dassiduilé,  ((ue  l'évèiuede  Laii- 
gres  lui  conna  la  direciion  spirituelle  du 
grand  h^ipital  de  Dijon,  ce  qui  donna  lieu  à 
réi.'iblissement  des  Filles  llospila  ières,  dont 
il  a  élé  rinsiilnleur,  de  la  manière  suivante, 
il  y  ,'ivail  dans  la  ville  de  Dijnn  un  biNpilal 
fort  ancien,  sous  le  nmn  du  Sainl-Fspril, 
(|ui  elail  desservi  parles  religieuses  de  l'oritro 
du  Sdiiil-Iisiirit  de  Moutpcllicr    sous  la  di- 


55  DU 

reclion  d'un  commandeur  et  de  quelques 
autres  religieux  du  même  ordre.  Mais  cet 
hôpital  ne  s'étant  pas  trouvé  sufflsanl  pour 
le  nombre  des  pauvres  malades  ou  autres 
qui  avaient  besoin  d'assistance,  on  y  joignit 
dans  la  suile  du  temps  l'hôpital  de  Notre- 
Dame  de  l;t  Charité,  qui,  pir  la  quantité  des 
pauvres  qui  y  ont  été  reçus,  est  devenu  l'hô- 
piial  général.  Ces  deux  hôpitaux  furent  assiz 
Itinglemps  administrés  par  les  religieuses  de 
loidre  du  Saint-Esprit.  Mais  cette  union 
ayant  change  l'état  des  choses,  et  les  ma- 
gistrats qui  en  avaient  l'inspcclion  s'étant 
aperçus  qu'il  y  avait  quelque  chose  dans 
l'administration  qui  n'était  pas  favorable  au 
public,  s'y  opposèrent  pendant  plusieurs 
années,  jusqu'à  ce  que,  voyant  toutes  leurs 
remontrances  et  leurs  oppositions  ne  servir 
à  rien,  ils  jugèrent  que  le  moyen  le  plus 
convenable  pciur  remédier  aux  abus  était  de 
renvoyer  les  religieuses  à  l'ancien  hôpital 
du  Saint-Esprit  pour  y  prendre  soin  des  pau- 
vres qu'on  y  recevait,  et  de  confier  ceux  de 
l'hôpiial  de  Notre-Dame  de  Charité  à  des 
filles  qui  dépendraient,  pour  le  tempon  1,  des 
administrateurs,  et,  pour  le  spirituel,  des 
supérieurs  ecclésiastiques  qu'il  plairait  à 
l'évéque  de  Langres  de  leur  donner.  Cette 
résolution  prise,  on  l'exécuta,  nonobstant 
les  oppositions  qu'on  y  fit,  et  qui  furent  le- 
vées trois  ans  après  par  un  arrêt  du  conseil 
d'Etal  du  22  septembre  168S.  L'évéque  de 
Langres,  informé  du  bon  ordre  qu'un  gar- 
dait dans  cette  maison  depuis  qu'il  en  avait 
confié  l.i  Conduite  spirituelle  à  M.  Joly , 
donn;i  volontiers  son  consentement  à  l'éta- 
blissement d'une  nouvelle  conimunaulé  de 
filles  séculières  pour  le  service  des  pauvres, 
auquel  elles  seraient  attachées  par  «tes  vœux 
sous  l'obéissance  d'une  supérieure  autant  ilc 
temps  qu'elles  demcureraientdans  cet  hôpital. 

La  nouvelle  de  cet  établissement  ne  se  fut 
pas  plutôt  répandue  ,  que  l'on  fut  surpris 
de  voir  a  Dijon  une  troupe  de  filles  pieuses 
qui  y  \enaieiit  des  provinces  même  les  plus 
éloignées  pour  s'y  consacrer  au  service  des 
pauvres.  Il  en  vint  de  Paris,  de  Champagne  et 
de  Flandre,  qui,  s'étant  unies  à  celles  de  la 
ville,  lurent  logées  dans  une  maison  qui  leur 
avait  été  préparée,  en  attendant  qu'on  les  fît 
entrer  dans  l'hôpital  de  Notre-Dame  de  la 
Charité,  où  après  quelques  muis  elles  pri- 
rent enfin  la  place  des  religieuses  du  Saint- 
Esprit  ,  et  y  demeurèrent  en  habit  séculier 
jusqu'à  ce  que,  du  consentement  de  l'évéque 
de  Langres,  .M.  Joly  donna  l'habit  de  novice 
à  quinze  d'entre  elles  le  6  janvier  1C85.  Cet 
iiabillemeni  est  semblable  à  celui  des  filles 
de  Sainte-Agnès  d'Arras  et  de  la  Sainte-Fa- 
mille de  Douai,  doni  quelques-unes  vinrent 
à  Dijon  pour  instruire  ces  nouvelles  Hospi- 
talières des  observances  légulières.  Trois 
ans  après,  c'est-à-dire  en  1G88,  le  roi  accor- 
da ses  lettres  patentes  pour  l'établissement 
de  ces  filles  en  corps  de  communauté  sécu- 
lière, et  en  1G89  elles  furent  enregistrées  au 
parlement  le  23  mars. 

Quoique  M.  Joly  eût  été  établi  supérieur 
le  cet  hôpital  pour  le  spirituel  par  l'autorité 


DU 


51 


de  révêqne,  son  humilité  néanmoins  l'empê- 
cha d'en  accepter  et  la  qualité,  et  les  fonc- 
Ijiins  ;  il  pria  un  autre  ecclésiastique  de  ses 
amis  d'un  mérite  distingué  el  d'une  grande 
pieté  lie  vouloir  bien  s'en  charger.  M.iis,  s'y 
étant  trouvé  des  difficnliés,  ou  conseilla  a 
ces  bonnes  filles  lîe  chuisir  clles-tnêines  nii 
supérieur  sous  le  bon  plaisir  de  l'évéque  de 
Langres.  Elles  suivirent  ce  consi-il  comme  lo 
miiyen  le  plus  sûr  pour  en  avoir  un  qui  leur 
fût  convenable  ;  et,  s'étant  assemblées  pour 
cet  effet,  elles  élurent  AL  July,  dont  elles 
avaient  déjà  expérimenté  le  zèle.  Lorsque  ce 
saint  prêtre  en  fut  averti,  il  témoigna  beau- 
coup de  répugnance  pour  cet  emploi;  mais 
il  se  soumit  enfin  aux  ordres  de  la  Provi- 
dence en  acceptjint  la  conduite  de  ces  Hospi- 
talières, dont  la  fidélité  à  remplir  tous  leurs 
devoirs  l'encouragea  à  leur  dresser  des  rè- 
glements, afin  qu'il  y  eût  entre  elles  une 
uniformité  d'actions  et  de  pratiques. 

11  passa  plusieurs  années  à  cet  ouvrage  , 
auquel  il  s'était  disposé  par  le  jeûne  et  la 
prière,  afin  d'implorer  le  secours  et  les  lu- 
mières du  ciel;  el,  après  avoir  consulté  les 
personnes  les  plus  éclairées  dans  ces  matiè- 
res, il  les  fit  pratiquer  pendant  quelques  .in- 
nées, afin  que,  l'expérience  lui  en  ayant  f  it 
connaître  les  défauts  et  les  inconvénients,  i( 
pût  les  reloucher,  coume  il  fil  elîeclivemcut 
en  y  retranchant  plusieurs  choses  superllues 
ou  difficiles  à  observer,  et  y  en  ajoutant  d'au, 
très  qui  lui  semblèrent  plus  conformes  à  l'es- 
prit de  cel  institut  et  plus  proportionnées  à  la 
faiblesse  de  ces  filles  ,  auxquelles  il  les  fit 
observer  jusqu'à  la  veille  de  sa  dern  ère  m.i- 
ladie,  que,  lui  paraissant  sans  défiut,  il  prit 
la  résolution  de  les  faire  approuver  el  les 
présenta  pour  cel  effet  à  l'évéque  de  Lan- 
gres, qui  les  fit  examiner  par  sou  conseil  et 
par  des  personnes  spirituelles  expérimentées 
en  ces  sortes  d'afl'aires,  et  les  iut  aussi  avec 
beaucoup  d'attention.  Mais  M.  Joly  n'eut  pas 
la  consolation  de  les  voir  approuvés  de  son 
vivant,  ne  l'ayant  éié  que  quelques  jours 
après  sa  mort,  qui  fut  causée  par  une  esi  èce 
de  maladie  contagieuse  qui  suivit  immédia- 
tement la  disette  des  grains  dont  la  Franco 
fut  allligée  en  1G93  et  ItiO'f.  Car  ce  saint  hom- 
me s'employa  au  secours  spirituel  et  tem- 
porel de  ceux  qui  en  étaient  attaqués  avec 
tant  d'ardeur  el  si  peu  de  ménagement  pour 
sa  santé,  qui  n'était  pas  encore  bien  rétablie 
d'une  maladie  qu'il  avait  eue,  qu'il  ne  put 
résister  à  la  malignité  de  ce  mal,  dont  il  re- 
garda les  premières  attaques  comme  un  aver- 
tissement qu'il  devait  achever  son  sacrifice  ; 
c'est  pourquoi  il  s'y  prépara  par  une  con- 
fession générale,  et  reçut  le  saint  viati(|ue 
dans  des  transports  d'humilité,  de  reconnais, 
sance  et  d'amour,  qui  tirèrent  les  larmes  des 
yeux  de  tous  les  assistants.  Enfin,  après 
avoir  soulTerl  pendant  dix  jours  des  douleurs 
excessives  sans  qu'il  lui  échappât  aucuni; 
plainte,  sentant  approcher  le  moment  auquel 
il  devait  quitter  le  monde  pour  aller  jouir  de 
la  présence  de  son  Créateur  el  de  son  souve- 
rain bien,  il  demanda  l'extrôurie-onction , 
répondit  lui-même  à  toutes  les  prières  mai- 


DICTIONNAIRE  DES  OUDRES  RELIGIEUX. 


5S 

oiiécs  dans  le  UilucI  pour  la  reconimaiiJa- 
liui)  ilo  ràini>.  et  mourut  sur  les  neuf  heures 
du  soir  le  It  .so|itcinbro  Ui9i,  étant  âgé  de 
cinquante  ans.  l'eu  de  iouis  avant  sa  mala- 
ilie,  a\ant  donné  son  pro|  re  lit  à  des  pau- 
?ns,  il  cul  la  consolation  do  mourir  sur  un 
lit  d'emprunt  après  avoir  prodigué  sa  vie 
pour  le  soulagement  des  misérables  :  aussi 
les  pauvres  le  regardant  comme  leur  père  , 
le  liire  lui  en  e.-l  resté  après  sa  morl.  11  y 
eul  conlcstation  entre  les  chanoines  de  Saint- 
Kiicnne  el  les  filles  Hospitalières  à  qui  aurait 
son  corp<,  sur  une  clause  de  son  leslameiil  ; 
niais  il  fol  adjugé  aux  Hospitalières  eommc 
étant  leur  fondateur.  Il  fut  enterré  dans  le 
cimetière  de  l'iiôpit.il,  el  son  cœur  fut  donné 
aux  chanoines  de  Sainl-ttienne. 

Uuuze  jours  après  si  mort,  le  22  seplcm- 
brc,    l'évéque    de   Langres  appruuva   avec 
éloge  les  règlements  qu'il  avait  faits  pour  les 
Hospitalières,  auxquels  il  ajouta   quelques 
moilificationsqui  étaient  plutôt  des  marques 
de  l'exaclitude  avec  laquelle  il  les  avait  l^us 
que  des  corrections  qu'il  j  eût  faites.  Ces 
liiles  élant  demeurées   en  habit   de  novices 
l'es,  ace  de  près   de  douze  ans,  firent  Uuii 
premiers  vœux  le  23  février  IG'.tO,  dix-huit 
mois  après  la  mort  de  M.  Joly,  qu'elles  re- 
connaissent iiour  leur  seul  cl  véritable  insti- 
tuteur, dont   elles   imitent  encore  à  prcscnl 
la  charile   pour  les   pauvres  mal  idts,  aux- 
quels  elles   donnent   toutes  les    assistances 
dont  ils  ont  besoin  :  ce   quelles   font   avec 
lant  dédilicalioii,  que  la  bonne  odeur  de  leur 
pieté  et  de  leur  charité  a  donné  lieu  à  réta- 
blissement de  leur  inslilul  dans  trois  autres 
maisons,  dont  il  y  en  a  une  à  Langres.  (Quoi- 
que l'écriva  n  de  la  Vie  do  M.  Joly  donne  à 
CCS  Hospilalières  le  litre  de  religieuses,  elles 
ne  font  pas   néanmoins  de    vœux  solennels. 
Elles  foui  cinq   an^  de   noviiial,   après  les- 
quels elles  loiit  seulenicnl  trois  vœux  simples 
de  chasteté,  d'oliéissancc  et  de  charité  envers 
les   malades.   l£lles  sont  sous  la  conduite  de 
l'évéque  pour  le  spir.lucl,  et  des  adminislra- 
leurs  de   leurs   liôpilaux   pour  le  Icmiiorcl. 
Les  supérieures  sont  élues  tous  les    six  ans. 
L<ur   lialiillemcnt ,  qui  e>l   i.uir   cl    tel   que 
nous  l'avons  fait  graver  (I  ),  csl,  comme  nous 
l'avons  dcjà  dit,  seiiiblahle  à  celui  des  lilbs 
de  Sainle-Agnè>  d'Arras,  el  de  la  ^ainle- 
Famille  de  Uouai,  dont  l'institut  est  d'élever 
de  petites   filles  irpheliiies  el  abandonnées  , 
jusqu'à  ce  (jucllcs  soient  en  âge  d'être  ma- 
riées ou  d'entrer  en  service,  liiles  font  aussi 
(rois  vti'ui   simples,  el   ont  eu  |iour  fonda- 
Irice  maileinuiselle  Jeanne  Riscot,  née  à  Ar- 
ras  l'an  MiOl,  cl  (|ui  mourut  le  27  juin  IGG'», 
ûgee  de  (i^l  ans. 

Le  l'ère  ISeaugendrc  Bénédictin  ,  Fie  <le 
M.  July,  imprimée  ù  Paris  l'an  1700,  cl  M>- 
muires  ciimyés  par  cet  fillrt  llufjiitalicrci , 
ci  par  tes  filles  de  la  Société  de  Sainte-A(jncs 
d'Arra>. 

DIMIiSSI'S  ou  MODKSTKS 
((i«M;iiK(iAi'iON  des]. 
Vc  ta  coiujreijUiiun  ilcf  luttes  el    Veuves  l'p- 
(I)  Val/,,  i  \à  lin  du  v<'|.,  u*  3 


5G 

pelées  Dimesscs  ou  Moîcsles  dans  l'Etat 
Yénitien. 

La  congrégation  des  Filles  el  Veuves   ap- 
pelées   Dimesses   ou    Modislts  ,   dans    l'Etal 
Vénitien,  a  eu  pour  fondatrice  Dejanara  Val- 
niarana,  fille  d'Aluise   Valmarana  el  d'Isa- 
belle Nogarole  de  ^  érone.  Elle  naquit  à  Vi- 
cencc  l'an  loW.  litanl  en  âge  d'être  mariée, 
elle  épousa  Agrippa  Pristrato  .  jnri^consulie 
de  la  même   ville,  dont  elle  cul  un  fils.  La 
mort  de  celui-ci,  suivie  quelque  temps  après 
de  celle  d  ■  son  mari,  qui  mourut  en  1<J73,  la 
déliant  de  lout  ce  qui  pouvait  l'attacher  au 
monde,  elle   jirll  l'habil  du  Tiers-Ordre  de 
Saint-François   d'Assise   et    se    relira   avec 
quatre  pauvres  femmes  dans  une  maison  qui 
lui  appartenait,  où  elles  vécurent  ensemble 
dans  la  pratique  de  toutes   les  vertus  chré- 
tiennes   sous    la    conduite    du  P.    Antoine 
Pagani,  religieux   de  l'ordre  de  Saint-Fran- 
çois de  l'Observance.  A  son  exemple,  Angéle 
Valn;arana,  sa   cousine,    se    voyant   au-si 
veuve,  achela  une  maison  joignant  celle  de 
Dejanara  Valmarana,  où  elle  alla  demeurer 
avec  quelques  fcannes  dévotes,  cl  y  pratiqua 
lout  ce  que  sa  piété  lui  inspirait  de  plus  par- 
fail,  jusqu'à  ce  que  le  P.  Pagani  eut  dressé 
par  ecril  des  règlements  communs  pour  ces 
deux    maisons,    qui    furent   approuvés    par 
l'évéque  de  Vicence  el  par  le  caidinal  Au- 
gustin Valierio,  evéque  de  Vérone  el  visiteur 
ap'is  olique  dans  le  diocèse  de  \'icence  l'an 
iùSk.  (^)ueliiues   autres    maisims   du    même 
inslilul  ayant  été  fondées  en  d'autres  lieux, 
Lejanara  Valmarana    les  gouverna  en  qua- 
lité 1  e  supérieure  générale  pendant  vingt- 
quatre  ans,  jusqu'à  ce  que,  pleine  de  mérites 
el  de   vertus  ,   Dieu   la  relira  de  ce    inonde 
pour  lui  faire  part  de  sa  gloire,  le  3  février 
de  l'an   l(iO."{,  étant  âgée  de   cinquante-trois 
ans.  Elle  fut  enterrée  à  Vicence  dans  l'église 
•.'0  Notre-Dame-la-Nouvc,  cl   mise  dans  lu 
sépulture  commune  des  Dimesscs. 

I>"on  ne  roçiil  dans  Cille  coiijjrégalion  que 
des  filles  el  des  veuves  libres  de  tous  enga- 
gements, qui  ne  soient  point  obligées  à  la 
tutelle  de  leurs  enf.inls,  ou  dont  les  enfants 
pourraient  avoir  besoin  pour  leurs  établis- 
sements. Filles  sont  éproutées  pendant  Iru.s 
ans  avani  ()ue  d'être  reçues,  el  après  leur 
réception,  elles  oni  encore  deux  autres  an- 
nées d'épreuve,  pendant  lesquelles  on  peut 
les  renvoyer.  H  ne  doit  pas  y  avoir  plus  do 
huit  ou  neuf  Dimesscs  dans  une  même 
maison,  non  comprises  les  servantes,  et  il 
doit  y  avoir  toujours  deux  maisuns  voisines 
l'une  de  l'autre,  afin  (|ue  I  ou  puisse  plus 
commoilément  avoir  des  vieilles  pour  accom- 
pagner les  jeunes  lorsqu'elles  sorleiil.  Ions 
le-,  ans  ces  deux  musons,  ou  quatre  au 
plus,  élisent  ensciiilil  •  une  supérieure,  âgée 
au  mollis  (le  trente  ans,  el  qui  do  t  en  atoir 
pas>é  ciii'i  da.is  la  congréga'ion.  Fllc>  élisent 
aussi  di  u\  iijulanles  ou  majeures  pour  cli.i- 
i|iie  iiiai'-on,  ({ui  doivent  avoir  demeuré  au 
iiioins  trois  ans  dans  la  congrégalion  el  i|ii'oil 
ai'pellc  aussi   consullrices.  Il   leur    est  dé- 


3? 


niv 


DIV 


"8 


fendu  de  laisser  ontror  les  hommes  dans  leurs 
maisons.  Leurs  obliiï'tions  principales  sonl 
d'enseigner  le  catéchisme  aux  personnes  de 
leur  sexe,  d'assister  aux  sermons  et  aux' 
dévolions  particulières  des  églises,  de  fré- 
quenter souvent  les  sacrements,  de  visiter 
et  d'assister  corporellement  les  pauvres 
femmes  dans  les  hôpitaux.  Klles  ne  s'obligent 
par  .'lucun  vœu  envers  la  congrégation,  et 
elles  en  peuvent  sortir  quand  bon  leur  sem- 
ble, même  pour  se  marier.  Comme  elles  font 
une  profession  particulière  d'humilité,  elles 
ne  se  donnent  point  les  unes  aux  autres  le 
titre  de  Signora  ou  Madame,  mais  seulement 
celui  de  Madonna  ou  Dame.  Leur  habille- 
ment tel  qu'on  le  peut  voir  dans  la  figure 
que  nous  avons  fait  graver  (1),  doit  êlre  de 
laine  noire  ou  brune,  à  leur  volonté.  Celui 
des  s.  rvanles  est  plus  court,  et  elles  portent 
un  voile  blanc,  au  lieu  que  les  Dimesscs, 
lorsqu'elles  sortent,  ont  une  grande  cape  ou 
manie  de  taffetas  noir.  Il  ;  a  des  maisons  de 
cet  institut  à  Vicence,  où  il  a  pris  nais- 
sance; à  Venise,  à  Padoue,  à  Udine  et  en 
d'autres  lieux  de  l'Etat  Vénitien. 

Philippe  Bonanni,  Catuhg.  Ord.  religios. 
par.  Il,  pag.  1C6,  et  Mémoires  envoyés  de 
Venise  en  1711. 

DISCIPLINES  (Chevaiiers  des  ).  Voyez 
Dragon  renversk. 

DIVI.NE  PROVIDENCE  ET  DE  SAINT-BER- 
NAKD  (Congrégation  de  la). 

Des  religieuses  Bernardines  Réformées  di-s 
eongrégnlions  de  la  Divine  Providence  et 
de  Saint-Bernard  en  France  et  en  Savoie, 
avec  la  vie  de  la  vénérable  Mère  Loiiise- 
Dlanche-Tliércse  de  Ballon,  leur  fondatrice. 

(>  n'était  pas  seulement  dans  les  mo- 
nastères d'hommes  de  l'ordre  de  Cîteaux 
que  le  relâchementet  le  dérèglement  s'étaient 
introduits  ;  une  pareille  licence  régnait  aussi 
dans  la  plupart  des  monastères  de  filles  du 
même  ordre.  Mais,  comme  Dieu  avait  suscité 
de  saints  religieux  pour  faire  revivre  le  pre- 
mier esprit  de  CIleaux  dans  plusieurs  mo- 
nastères et(tablir  dans  d'autres  des  obser- 
vances moins  austères  que  les  premières, 
afin  que  ceux  qui  vivaient  dans  le  dérègle- 
ment, attirés  par  leur  douceur  et  par  leur 
facilité,  eussent  moins  de  peine  à  embrasser 
une  vie  uniforme  et  réglée,  il  suscita  pareil- 
lement de  saintes  filles  pour  remettre  dans 
les  observances  résîuliires  celles  qui  s'en 
étaient  écartées,  qui  embrassèrent  toutes  les 
austérités  de  l'ordre.  Les  autres,  effrayées 
de  cette  grande  austérité,  se  contentèrent 
d'embrasser  des  observances  qui,  remplies 
de  sagesse  et  de  modération,  les  mettaient  à 
couvertdu  dérèglement  et  du  relâchement  qui 
s'étaient  introduits  dans  plusieurs  mona- 
stères, et  leur  prescrivaient  un  genre  de  vie 
qui  les  rendait  des  sujets  d'édification  à  tout 
le  monde.  Les  religieuses  Bernardines  Ré- 
formées des  congrégations  de  France  et  de 
Savoie  furent  du  nombre  de  ces  dernières,  et 


eurent  pour   iiislilu'rice  la   vénérable  Mère 
de  Ballon. 

Elle  était  fille  de  Charles-Emmanuel  de 
Ballon,  gentilhomme  de  la  chambre  du  duc 
de  Savoie  Charles-Emmanuel  l",  et  qui  fut 
dans  la  suite  ambassadeur  de  ce  prince  en 
France  et  en  Espagne.  Elle  vint  au  monde 
l'an  1591  dans  le  château  de  Vanchi,  séjour 
ordinaire  de  ses  parents,  comme  le  pins 
agréable  et  le  plus  commode  de  leur  do- 
maine, étant  situé  au  milieu  de  la  baronie 
de  Ballon,  à  cinq  lieues  de  Genève,  et  autant 
d'Annecy.  Elle  reçut  le  nom  de  Louise  an 
baptême,  celui  de  Blanche  lui  fut  donné  à  lu 
confirmation,  et  elle  prit  elle-même  celui  «le 
Thérèse,  qu'elle  ajouta  aux  deux  autres 
quand  elle  commença  sa  réforme. 

A  l'âge  de  sept  ans  ses  parents  la  mirent 
d;ins  l'abbaye  de  Sainte-Catherine  de  l'ordre 
de  CIteaux.dont  l'abbesse  était  leur  parente. 
Suivant  la  pratique  de  ce  monastère,  elle  y 
reçut  l'habit  à  cet  âge,  et  fut  admise  au  no- 
viciat. Elle  fit  un  si  grand  progrès  dans  la 
vertu,  et  devint  en  peu  de  temps  si  éclairée 
dans  les  choses  spirituelles,  que  sa  mère,  se 
prévalant  de  la  liberté  que  les  novices  et  les 
professes  de  ce  monastère  avaient  d'en  sor- 
tir pour  aller  voir  leurs  parents,  la  faisait 
venir  souvent  à  Vanchi  pour  l'entendre  par- 
ler de  sujets  de  piété,  et  pour  recevoir  d'elle 
des  avis  sur  ce  qui  regardait  son  propre 
salut.  Comme  les  visites  qu'elle  rendait  à  ses 
parents  ne  venaient  ni  de  légèreté,  ni  d'oisi- 
veté, que  ce  n'était  ni  par  ennui  de  la  soli- 
tude, ni  par  recherche  des  divertissements 
qu'elle  pouvait  trouver  au  dehors  qu'elle 
venait  à  Vanchi,  mais  seulement  par  conde- 
scendance et  même  par  obéissance  à  la  vo- 
lonté de  son  abbesse  et  de  ses  parents,  il  n'y 
avait  point  de  temps  plus  saintement  em- 
ployé que  celui  qu'elle  passait  chez  eux, 
étant  dans  le  monde  comme  si  elle  n'y  était 
pas.  Ayant  atteint  l'âge  de  seize  ans,  et  le 
temps  étant  arrivé  qu'elle  devait  s'engager 
plus  étroitement  par  la  profession  religieuse, 
ses  parents  souhaitèrent  que  ce  fût  dans 
leur  château  même  qu'elle  fil  ce  grand  sa- 
crifice. Ils  n'eurent  pas  de  peine  a  obtenir 
cette  consolation  des  supérieurs  de  l'ordre  : 
car,  comme  en  ce  trmps-là  on  ne  gardait 
point  de  clôture  dans  le  monastère  de  Sainle- 
Caiheiine,  non  plus  que  dans  les  autres,  is 
ne  se  rendaient  pas  difficiles  à  permettre 
que  les  novices  allassent  faire  leur  profes- 
sion chez  leurs  parents  quand  ils  le  deinan- 
d.iient.  Le  ^i^  mars  1607  ayant  été  destiné  pour 
le  jour  de  celte  cérémonie,  dom  Nicolas  de 
Rhides,  abbé  régulier  de  Thamiers  et  vicaire 
général  de  celui  de  Cîteaux,  s'y  trouva  pour 
recevoir  les  vœux  de  celte  nouvelle  épouse 
de  Jésus-Christ,  qui  eut  la  consolation  do 
les  prononcer  en  présence  d'une  de  srs 
sœurs,  novice  du  monastère  de  Bonlieu,  du 
môme  ordre  ,  qui  s'était  aussi  rendue  au 
château  de  son  père  pour  le  même  sujet, 
avec  une  autre  novice  du  même  monastère. 

La  sœur  Louise  de  Ballon  n'eut  pas  plutôt 


(1)  Voï.,àla  fin  du  vol.,  n*  4. 


S9 

f.iil  sa  profession,  qu'cUn  voulut  se  rrndrc  à 
son  nionaslère,  comme  au  séjour  où  elle 
vcnail  'le  s'all;iclier  plus  élroilomcnt.  Ce  fui 
en  vain  que  ses  pnrcnls  la  so  lirilirent  de 
rcsIiT  quelque  leuips  aver  eux  :  insensible  à 
leui»  lartnes  il  inexorable  à  leurs  prières, 
plie  leur  déclara  que  c'éiail  inuliletncuC  (ju'ils 
Ijeb.iieiil  de  l'alteiidrir  p  ir  les  unes  el  de  la 
floibir  par  les  autres;  qu'elle  était  résolue 
de  s'aller  eii'^crmer  dans  son  monastère, 
pour  )  jouir  de  la  con\crsalioM  de  sou  divin 
époux  et  pour  satisfaire  à  son  devoir.  Quoi- 
que la  cldlure  n'y  fût  pas  observée,  comme 
nous  avons  dit,  c'était  néanmoins  la  coutume 
qui'  chaque  religieuse  l'iibservail  la  pre- 
ii;ière  ;:nnee  de  sa  profession  a»ec  lanl 
dexarlitudc,  qu'elle  ne  sorMit  pas  une  seule 
fois,  non  pas  même  pour  ()rcn'lre  l'air  à  la 
campa<;ne  autour  du  monasière,  comme  fai- 
saient les  autres  professes  quand  elles  le 
voulaient,  outre  que  la  nouvelle  professe 
était  oi  lijiée  d'assister  au  clmur  si  fidèle- 
ment à  toutes  les  heures  canoniales  pendant 
cette  année,  que  la  maladi.'  même  ne  sufli- 
sait  pas  pour  s'en  esruser,  car  si  elle  toni- 
lait  malade  dans  cette  même  année,  il  fallait 
qu'elle  la  recommençât  après  comme  si  elle 
ueùl  rien  fait,  et  on  ne  la  tenait  quitte  de 
celle  obligation  qu'après  avoir  assisté  régu- 
lièrement au  chœur  pendant  toute  une  année 
s.ns  interruption.  Mais  la  mère  de  Kallon 
ujoula  encore  quel(|ue  chose  de  plU'*  ;  car 
elle  fut  pend.ini  ce  tcrnps-là  si  recueillie  et 
si  lelirée  dans  sa  chambre,  qu'on  ne  la 
\oyait  qu'au  clupur  el  au  réfectoire. 

Ce  fui  dans  une  retraite  qu'elle  fit  sous  l<i 
conduite  de  >aiMl  François  de  S.. les,  son 
piuche  parent,  que  l)ieu  lui  inspira  les  pre- 
miers désirs  d'une  réiormo,  qu'elle  eut  le 
Lonbcur  de  voir  accomplir  quelques  années 
après,  lotsque  ce  saint  preiai  fut  prié  par 
l'abbé  de  (liteaux  de  réformer  le  monasière 
de  Saiute-t^  ttierine,  qui  était  de  smi  dioi  èse. 
Nous  avons  déjà  dii  (|u'on  ne  gardait  aucune 
clôture  dans  ce  monastère,  ce  (|ui  fai'<ail  (|uc 
l'eiitri'e  était  au  ani  permise  aux  séculiers 
que  la  sort  c  en  était  libre  aux  religieuses. 
Les  visites  fréquentes  cl  le  séjour  (ju'elles 
allaient  faire  chez  leurs  par<-nls  et  leurs 
aniis  les  faisai- ni  rentrer  dans  l'espril  du 
monde  avec  tant  d'excès,  qu'elles  re\enaienl 
presque  toutes  sécolièrcs  à  leur  iiionastérc. 
L'ameublement  de  leurs  chambres  était  loul 
mondain.  t>  eiaii  une  émulation  entre  elles  à 
qui  aurait  Min  app.irtemenl  plus  riclicment 
paie.  Les  étolTes  les  plos  fines  et  les  plus 
apparentes  elaienl  celles  qu'elles  recher- 
cbaienl  pour  s'habiller,  quel(|ues-uiu-s  y 
ajouiaieni  des  parures  et  des  ajuslemenls 
qui  donnaienl  lieud'  croire  qu'elles  avaient 
liiinte  (le  laisser  sur  elles  les  moindres  mar- 
ques de  leur  éiat.  Les  séculiers  avaient  mén)e 
I'  ur  demeure  dans  l'enceinie  du  monastère  ; 
c.ir,  outre  les  servantes  que  cli.ique  religieuse 
avait,  il  y  aviiil  aus%i  îles  valeis  qui  y  de- 
rin  uraieiit,  tant  pour  la  culture  ilcs  terres 
que  pour  la  garde  des  troupeaux  qoi  appar- 
ti-naicnt  a  di;;,  religieuse-,  parliculiCre>,  en 
(cirle  que  cette  maisun  ress>  lublail  en  qucl- 


niCTtONNAir.E  DES  OHPUES  REI.ICIElîX.  40 

que  façon  à  une  ferme  p'uîi'il  qu'à  un  mo- 
nastère, ce  qui  fut  un  des  principaux  moiifs 
qui  engagèrent  celles  qui  commencèrent  la 
réforme  dont  nous  allons  pirler. 

Tel  était  l'état  de  cette  abbaye  lorsque  s.ii;it 
François  de  Sales  fut  prié,  l'an  l(i08,  par 
r.ibbé  de  Citeaux,  dom  Niiolas  iiourherai, 
d'employer  son  autorité  et  ses  soins  pour  la 
réformer.  Mais  ceux  qu'il  appoila  fur  ni 
inutiles,  de  manière  qu'il  ava:l  per  u  toulc 
espérance  d'y  réussir,  croyant  même  qu'il 
serait  inutile  d'y  travailler;  mais  Uieu,  qui 
est  admirable  dans  ses  saints,  voulant  con- 
soler son  serviteur  el  mettre  fin  à  l'accom- 
plissement des  désirs  de  la  mère  de  liallon, 
lui  en  fit  naître  l'occasion  quelques  années 
après;  car  cinq  religieuses  de  ce  inonas  ère, 
unies  ensemble,  ayant  formé  le  dessein  de 
commencer  une  nouvelle  réforme  dans    un 


autre  lieu,  prévoyant  que  les  aul.es  reli- 
gieuses ne  voudraient  jamais  consentir  à  la 
clôture,  en  parlèrent  à  saint  Françoi-.  de 
Sales,  qui,  bénissant  le  l'ère  des  miséri- 
cordes des  grâi  es  qu'il  faisait  à  ces  saintes 
filles,  les  fortifia  dans  leurs  résolutions.  Il  lit 
de  nouveaux  effoits  pour  obliger  les  autres 
religieuses  de  ce  monastère  a  recevoir  la 
clôture  et  embrasser  la  réforme;  mais, 
voyant  que  c'était  inulilement,  il  couseniit 
que  ces  cinq  religieuses  commençassent  la 
réforme  hors  le  monastère.  Llles  en  obtin- 
rent les  permissions  nécessaires  de  l'abbé  de 
Citeaux,  à  la  recommandation  du  prince 
1  humas  lie  Savoie  et  de  l'abbe  de  Th.imiers. 
M.  de  Leaz,  frère  de  la  mère  de  Dallon,  alla 
lui-même  ù  Cilc.iux  pour  ee  sujet;  et  lîu- 
inilli,  petite  ville  de  Savoie,  fui  le  lieu  ori 
elles  jetèrent  les  premiers  l'ondeuieuts  de  leur 
réforme  l'an  11122. 

Ces  cinq  religieuses  furent  les  Mères  IJer- 
n.irdede  \  ignol.  Louise-lilanclie-Thérèse  de 
li-TlIon,  Lmmanuelle  de  Monlhoux  ,.  l'érone 
de  Uocliette,  el  Gasparde  de  Ballon,  propre 
sœur  de  la  .Mère  de  Ballon,  et  la  troisième  de 
ses  mêmes  sœurs  qui  avait  embrassé  l'orilri; 
de  Citeaux.  Ce  fut  le  8  septembre,  fête  de  la 
Nativité  de  Notre-Dame,  qu'elles  prirent  pos- 
session de  leur  chapelle,  el  le  21  du  même 
mois  qu'elles  y  prirent  l'habit  de  la  réforme. 
à  la  réserve  de  la  .Mère  Gasparde  de  Ballon, 
qui  n'était  pas  encore  sortie  de  l'abbaye  de 
Sain  e-Calherine  par  les  oppositions  des  reli- 
gieuses el  de  ses  parents. 

Llles  commencèrent  dès  lors  à  dire  l'office 
au  chuui ,  mais  sans  le  chanter  ,  à  cause  de 
leur  petit  nombre.  Klles  gardaient  un  clroil 
sileuie,  à  Icxc 'plion  de  deux  heures  p.ir 
jour,  l'une  après  le  dner,  l'autre  après  lo 
souper.  Llles  disaient  tout  haut  leurs  coul- 
pes  au  réfectoire,  balayaient  la  maison,  la- 
vaient la  vaisselle,  faisaient  la  cuisine,  ser- 
vaient tour  à  tour  au  relecl.dre,  el  le  plaisir 
qu'elles  prenaient  d.ins  ces  bas  exerciees 
était  si  granit,  qu'il  y  av.iit  une  sainte  émula- 
tion entre  elles  pour  être  la  première  à  les 
exercer  et  la  dernière  a  les  quitter. 

Llle*  lurent  visitées  peu  de  temps  après  p.ir 
saint  l'r, niçois  de  Sales,  iiui  leur  avait  permis 
de  conserver  le  saint   tacrcmcut  daus  leur 


i\ 


DIV 


DIV 


43 


cliapelle.  11  vit  leur  nouvelle  maison  el  la 
trouva  suffisante  pour  une  communauté  : 
mais  le  pressentiment  qu'il  avait  de  ce  que 
leur  p.iuvrelé  leur  ferait  souffrir  le  porta  par 
un  esprit  de  charité  à  les  encourager  et  à  h's 
exhorter  à  la  patience,  et  à  se  tenir  en  garde 
con(re  l'ennemi  de  leur  salut,  leur  représen- 
tant souvent  que  Dieu,  qui  par  sa  provi- 
dence a  soin  des  plus  petits  animaux  .  n'a- 
bandonne jamais  ses  serviteurs  qui  ont  con- 
fiance en  lui,  leur  apportant  pour  exempi;» 
dom  Jean  de  la  Barrière,  fondateur  des  Feuil- 
lants ,  qui  pendant  quelques  années  ne  se 
nourrit  que  de  Heurs  de  grnét  et  d'hrr'ies 
sauvages,  et  ne  ce  servait  point  la  nuit  d'au- 
tre lumière  que  de  celle  de  la  lampe  (|ui 
brûlait  devant  le  saint  sacrement.  Jusque-I  i 
elles  avaient  obéi  à  la  Mère  de  ^  ijjiinj  , 
conmie  l.i  plus  ancienne;  mais  celle  Ai  ère 
ayant  proposé  au  saint  prélat  1  éleclion  d'une 
supérieure,  tous  les  suffrages  se  trouvèrent 
p^)ur  la  Mère  Louise- Blanche-Thérèse  d;; 
Kallon,  qui,  considérant  avec  ses  religieuses 
les  ofa  igalions  singulières  qu'elles  avaient  à 
la  divine  providence,  proposa  à  saint  Fra  ;- 
çois  di'  Sales,  qui  élait  de  retour  à  Annecy, 
d'agréer  qu'elles  prissent  le  nom  de  Filles  de 
la  Divine  Providence.  La  réponse  qu'il  fit  à 
la  lettre  qu'elle  lui  écrivit  au  nom  de  i-a  pe- 
tite CDinmunauié  fut  qu'elles  devaient  encore 
altendre  un  an,  pour  voir  si  elles  se  ren- 
draient dignes  d'un  nom  si  beau  el  si  glo- 
rieux. Elles  obirent  à  ses  ordres,  et  l'an 
étant  expiré,  elles  prirent  ce  nom,  (lui  leur 
fut  confirmé  par  M.  Jean-François  de  Sales, 
frère  el  succes-eur  de  saint  François  de  Sa- 
les, d  lus  l'approbation  qu'il  fil  de  huis  con- 
stilu'iuns;  mais  le  peuple  les  a  toujours 
appelées  les  religieuses  llernardiiies  llé- 
Ibrinées. 

La  Mère  Gasparde  de  lîalion  ,  après  avoir 
surmon  é  touies  les  difticultés  iiui  s  op  lo- 
saienl  à  sa  smlis  de  l'.ibhajo  de  Sainte-Ca- 
therine, tant  (ie  li  part  des  re  igieuses  que 
de  ^es  parents  ,  arriva  enfla  au  mois  de  no- 
vcni'jre  à  l'«umilli.  Ainsi  les  cin(i  religieuses 
qui  avaieiit  projeté  la  réforme  se  trouvèrent 
pour  lors  réunies.  Quoique  leur  pauvreté  fût 
grande,  elle  leur  taisait  néanmoins  si  peu 
de  peine,  et  el-les  cherchaient  si  peu  les 
lu  >3ens  de  s'en  délivrer  ,  qu'elles  continuè- 
rent d'un  commun  accord  de  ne  s'en  plaiu- 
drejamais  à  personne.  Mais  la  divine  provi- 
dence, dont  elles  avaient  pris  le  no;»,  ne  les 
abandonna  pas  :  elles  se  tiouvèrent  môme 
en  état  d(;  faire  des  charités,  el  elles  donnè- 
rent retraite  à  quatre  religieuses  de  l'abbaje 
des  Hayes  proche  Grenoble,  qui  dans  le  des- 
sein d'une  même  réforme  avaient  qiiitiéceUe 
abbaye,  où  l'on  ne  gardait  aucune  toinie  de 
règle,  où  la  clôture  n'élait  point  en  usage,  et 
où  les  religieuses,  qui  vivaient  à  la  façon  des 
séculières,  en  avaient  presque  pris  l'hab.lle- 
iiient. 

Ces  quatre  religieuses  furent  la  Mère  de 
Paquier,  coadjulrice  de  l'abbaye  des  Hayes  : 
les  Mères  de  Ponçonas  et  de  IJuissorond,  et 
la  sœur  de  Monlenard,  encore  no\ice.  Elles 
sollicitaient  depuis  un  au  un  établissement 

LlLTiON.N.ill'.fi  DKS  (Jtiai.ES  UELIGIEUX. 


dans  Grenoble  :  elles  y  avaient  même  loué 
une  maison,  et,  à  la  sollicitation  du  vicomte 
de  Pa(iuier,  père  de  la  Mère  de  Paquier, et  de 
leurs  amis,  elles  avaient  obtenu  verbalement 
le  consentement  de  l'évéque  de  Grenoble. 
Mais  plusieurs  difficultés  qui  se  rencontrè- 
rent dans  cet  élablissemeui  en  ayant  empê- 
ché l'exécution,  el  ayant  appris  pendant  te 
temps-là  que  cinq  religieuses  de  l'abbaye  de 
Sainte-Catherine  en  étaient  sorties  pour  al- 
ler à  Kumilli  jeter  les  fondements  d'une  nou- 
velle réfornic,  elles  résolurent  de  se  joindre 
à  elles.  Le  vicomle  de  Paquier  alla  lui-même 
Irouver  saint  François  de  Sales  pour  lui  corn- 
muniquer  le  dessein  des  religieuses  de  l'ab- 
b  lye  des  Hayes,  cl  ce  prélat  porta  celles  do 
Kumilli  à  les  recevoir. 

Ces  (jiiatre  religieuses  de  l'abbaye  des 
Hayes  arrivèrent  donc  à  lUintilii  le  premier 
janvier  1(523.  Elles  reconnurent  pour  supé- 
rici^re  la  Mère  Louise  de  Ballon,  (lui,  peu  da 
jours  après  ,  ayant  fait  la  distribution  des 
emplois  de  sou  monasli're,  donna  la  charge 
de  maîtresse  des  novices  à  la  Mère  Ponçonas. 
Quelques  espciis  malintentionnés  leur  ayant 
persuadé  que  l'abbé  de  Cileaux  dans  le  cha- 
pitre général  de  cet  ordre  avait  résolu  de 
supprimer  leur  réforme,  elles  en  furent  fort 
alarmées.  îilles  redoublèrLMit  leurs  vœux  et 
leurs  prières,  el  reconnurent  bien;ôt  après 
que  ce  n'éiait  qu'une  fausse  alarme  iju'osi 
leur  avait  donnée,  puisqu'elles  reçurent  uno 
lettre  de  cet  abbé  dans  iaquelle,  bien  loin  de 
désappiouver  leur  entreprise  ,  il  les  o.lior- 
lait  au  con'raire  fortement  à  la  continuer; 
Ci  (]ui  les  dôlerntiua  à  tenir  le  premier  cha- 
pitre de  leur  congrégation  pour  la  réception 
des  novices.  11  y  en  avait  déjà  cinq  qui  se 
présentaient;  mais  ell.s  ne  ponvaieul  leur 
donner  l'iiabit  sans  la  pcrmissiiiU  de  l'abbà 
de  Thamiers,  qui  s'y  opposa,  sur  ce  que  la 
mai;,on  où  elles  demeuraient  ne  leur  appar- 
tenait pas,  el  qu'elles  n'avaient  aucun  re- 
venu lixe.  .Mais  l'abbé  de  Cheseri  ,  on  le  do 
la  Mère  de  Siallon,  ayant  eu  recours  à  l'au- 
torité du  prince  Thomas  de  Savoie,  l'aliltiî 
de  Thamiers  ne  put  résster  aux  ordies  de  co 
prince,  el  couscnlil  que  l'on  donnât  l'habi: 
aux  novices.  Cependant  ces  religieuses 
ayant  aetiCle  i.ne  maison  à  Humilli,  elLs  y 
allèrent  demeurer  le  2i  mai  102's. 

La  même  année  tous  les  obstacles  qui  s'é- 
taient trouvés  jusqu'alors  à  l'établissement 
de  ces  religieu  es  à  Grenoble  ayant  été  levés, 
la  Mère  de  Ballon  y  alla  accoui(iagnée  des 
rel  gieuses  de  Dauphiné,  qui  s'étaient  mises 
sous  sa  conduite  et  l'avaient  reconnue  pour 
supérieure  à  Kumilli.  Elles  arrivèrenl  dans 
C(^tle  ville  le  22  noveujbre  lG2'i'.  La  Mère  du 
Ballon  fut  encore  recoiiiioe  supérieure  de  ce 
nouveau  moiiasière,  où  l'on  dressa  les  con- 
stitutions de  celte  reforme,  qui  furent  cou- 
formes  aux  avis  qu'eu  avaii  donnés  saint 
François  de  Sales,  qui  étaient  que,  sans  eui- 
brasser  les  grandes  au-teriiés  de  l'ordre  de 
Cileaux,  ce-  (ilies  devaient  s  attacher  uni- 
quement à  l'essentiel  de  la  règle  et  des  vu'ux, 
s'appliquaut  de  loules  leurs  firces  à  li  inoi- 
liiicaliou  de  l'esprit,  au  leeneiliement  inlè- 

n.  2 


n  DICTIO.N.NMUK  I)i.S 

rimir  et  ik  l'union  avoi  Dieu.  Cfs  conslilu- 
lioiis  élnient  néanmoins  pou  confDrmcs  aux 
u$a;;cs  comniunK  do  Clleaux.  C'ot.iil  propre- 
iMcnl  un  Iraiie  ou  conduile  spiriluclle  con- 
venable à  louics  séries  de  personnes,  et, 
pour  les  usa:cs  parliculiers,  ils  élnient  enliè- 
remont  conformes  à  ceux  des  religieuses  de 
1.1  \  isilalir>n  inslituées  par  le  nir-rne  saint,  à 
la  réserve  de  la  couleur  de  l'habit,  ds  con- 
sliiutions  ptirlaiinl  qu'elles  se  serviraient  du 
bréviaire  romain,  qu'elles  diraient  matines 
le  soir,  afin  d'avoir  la  nialinée  plus  libre 
pour  employer  une  heure  entière  a  l'orai- 
son niciilale;  qu'elles  se  roueberaicnt  à  dix 
heures,  se  lèveraient  ù  c  nq.  Elles  devaient 
;iller  sept  fois  le  jour  au  chœur  pour  y  dire 
l'oflice  divin. Ellcsdevaienl  l'aire  l'aprùs-dinée 
une  demi-heure  de  lerturc  spiriluelle,  une 
autre  demi-heure  d'oraison  inent.ile,  et  l'cxa- 
incn  de  conscience  deux  fois  le  jour.  L'u- 
sajîe  de  la  viande  leur  fut  permis  trois  fois 
la  semaine  ;  elles  portaient  du  linge  et  se 
sert  aient  de  matelas  et  de  tours  de  lit.  Quant 
à  l'habillement,  elles  se  conforment  pour  la 
couleur  à  l'ordre  de  Citeaux  ,  et  pour  la 
forme  à  celui  des  religieuses  de  la  ^'isitation, 
excep  6  le  bandeau,  (|ui  est  blanc  (1).  Pour 
ce  qui  regarde  les  autres  us.iges  ,  ils  sont 
aussi  conlormes  à  ceux  des  religieuses  de  la 
\°isitalion.  La  sous -prieure  était  nommée 
sœur  assistante  ,  la  maîtresse  des  novices 
sœur  directrice.  Les  religieuses  ne  s'appel- 
lent que  sœurs,  et  elle»  ne  chantent  point  de 
mcssi-s  hautes.  Eli.  s  travaillèrent  ensuite 
à  se  soustraire  de  la  juridiction  des  Pères  de 
l'ordre,  qui  s'y  opposé. ent,  mais  en  vain, 
car  ces  religieuses  ohlinrent  un  bref  du  pape 
Urbain  \  III,  1  an  1028,  qui  les  exemptait  de 
la  juridiction  des  Pères  de  t]iteau\  ,  et  les 
mettait  sous  celle  Jcs  ordinaires  des  lieux  où 
elles  s'établiraient. 

La  Mère  de  Hallon  ayant  séjourné  à  Gre- 
noble jusqu'au  mois  de  décembre  H'flo,  re- 
tourn.i  en  son  premier  inonastèreiic  Kumilli, 
d'où  ((uclque  teni|is  après  elle  fut  obligée  de 
sortir  pour  aller  faire  un  nouvel  élaldisse- 
Mient  a  Matirienne.  l'illc  en  fil  encore  un 
quatrième  a  l-aKoche,  petite  ville  de  Savoie, 
el  un  cini|uième  à  Seyssel.  Ivllc  repassa  en 
(•ranre  en  1G3I,  pour  y  f.iire  deux  ;iutres 
-étaldisseuu'nts,  l'un  à  \  lenne  en  Dauphliie  , 
et  l'autre  à  Lyon,  qui  lurent  suivis  peu  de 
temps  après  de  ceux  de  Toulon  et  de  .Marseille. 

Ce  fut  la  même  année  lli31  que  les  rons  i- 
tuliuns  furent  imprimées  à  Pans  pour  la 
premièic  fois,  a\ec  toutes  les  ap|  robntions 
uéecssaires,  à  l'exception  de  celle  de  Uome, 
que  cet  religieuses  u'obiinrciit  que  l'an  IG.'i^. 
La  .Mère  de  Ponronas  étant  venue  a  Paris 
c-n  Itj  i'*  pour  y  l.iire  un  nouvel  ctablissemenl, 
tit  impiimer  pour  la  seconde  (ois  ces  consli- 
lulious,  ce  ipii  Inl  l.i  source  de  bcau(  oup  de 
troubles  el  de  ilivisions  dans  celle  eongrega- 
lioM  ;  car,  soit  i|u'il  y  eut  déjà  eu  i|uel(|ue 
bruit  entre  la  .Mère  de  llallon  cl  la  Mère  de 
Ponronas,  soil  que  cette  dernière  fil  quelque 
l'baiigeioent  dans  ces  cun>liiiiiions,    aliii   de 


ORDUES  UELIGIlilLX.  (1 

s  '  donner  le  lilre  d'iiistilutricc  d'une  nou- 
velle rélornie,  il  est  certain  qu'à  peine  relie 
seconde  impression  fut  achevée,  que  la  di- 
vision cornmi>nça  à  éclater.  En  elTei.la  Mèrct 
de  Hallon,  voulant  souienir  sa  qualité  de 
ref  irni.itriLe,  fjcbée  du  changeineiit  cjuc  la 
Mère  de  Ponçonas  av.iil  fait  dan.;  ces  consti- 
tutions, en  fil  imprimer  d'autres  à  Aix  qui 
étaient  confornres  à  celles  de  la  première 
impression,  à  la  réserve  de  quelques  petits 
rhang<'inents  qu'elle  crut  avoir  droit  de  faire, 
(•omme  inslitulricc  :  ee  qui  fut  si  --ensible  à 
la  .Mère  Poiiç mas,  tant  par  l'alTrom  qu'elle 
eut  recevoir  en  cela  (juc  par  le  chagrin 
qu'elle  eut  de  se  voir  cotitrarier  daos  se* 
desseins,  qti'el'c  engagea  les  religieuses  du 
nionaslère  de  Paris  à  se  révolter  confie  leur 
Mère  et  fondatrice,  et  à  la  pcrsèculer.  Elle 
réussit  selon  sou  désir  :  car  elles  commencè- 
rent par  solliciter  la  suppression  des  consti- 
tutions de  la  Mère  de  Hallon, qu'elles  accusè- 
rent di'  vouloir  usur()cr  l'autoriié  de  géné- 
rale et  d'en  prendre  le  nom.  (  C'est  néan- 
moins à  quoi  cette  l'on  lalriee  ne  songea  ja- 
m.iis,  comme  elle  'e  proiesle  dans  s  s  écrits, 
qui  lUl  été  imprimés  à  Lyon  en  l'ICQ.  )  Non 
contentes  de  cela,  sachant  ((u'ellc  et  lit  dans 
son  monastère  de  Toulon  occupte  à  y  établir 
sa  réforme ,  elles  envoyèrent  un  homme 
cx[)rès  à  l'évèquc  de  Marseille  pour  lui  don- 
ner avis  de  prendre  bien  garde  à  la  Mère  de 
Halloii,  qui  élait  allée  fonder  un  couvent 
dans  sou  diocèse;  que  c'était  un  esfjrit  léger, 
inquie',  ambitieux,  (jui  voulait  toujours  ré- 
gner et  dominer;  qu'elle  n'était  allée  en  Pro- 
venci'  (jue  pour  y  fiire  la  générale  de  sa 
congrégation,  et  ((u'il  y  allait  île  sou  honneur 
de  ne  pas  soulTrir  que  celtiî  élran.;ère  s'é  a- 
blit  dans  son  di  icèse,  si  elle  ne  voulait  pas 
renoncer  à  ses  con-ililution-.  .M.is  la  .'\lere 
de  ISallon,  soit  qu'elle  reçût  sur  cela  quelque 
avis  de  l'évéque,  soit  que  d'autres  personnes 
lui  en  p.nrlassenl,  ne  voulut  jani;iis  consoniir 
à  cech  in.;ement,qui  ne  pouvait  pas  manquer 
d'in'ruduire  le  schisme  dans  ses  inon.istèies. 
Celle  l'remifre  démarche  n'ayant  pas  eu  le 
suciés  'iu'ou  en  ailendail,  on  porta  la  com- 
munauté di'  Kumilli,  dont  elle  était  eue  ire 
supérieure,  à  la  déposer,  el  à  en  élire  une 
autre  en  sa  place,  alin  que  n'ayant  plus 
d'autorité,  elle  ne  pût  s'opposer  au  change- 
meut.  Cette  entreprise  leur  ayant  réussi  , 
elle  supporta  celle  niortiricalion  avec  sou- 
mission à  la  volonté  de  Dieu.  .Mais  les  reli- 
gieuses du  nouveau  mona-tèrc  de  iM.irseille 
ie|),irèrent  l'outrage  (|u'on  lui  f.iisait  en  la 
«iioisissaut  pour  leur  supérieure.  Son  élec- 
t.on  ayant  éé  sue  dans  la  ville,  ehacun  s'eui- 
press.i  de  lui  en  témoigner  su  joie  ;  persouno 
ne  le  fil  avec  plus  de  mar(|ues  de  satisfaction 
et  d'estime  que  le.  FillesCongrégèes  de  Sam- 
tc-l'rsuie,  qui  formaient  une  comuiiiniutc 
fori  iiooibreiise  ;  car,  non  contentes  de  lui 
en  f.iire  les  cunijd.meuts  onl  inaires  dans  d.^ 
pareilles  reiirontres,  elles  lui  en  doniièreiil 
des  maripies  plu-,  sensibles  eu  se  souinoltaot 
à  sa  cou  luite  et  ca  euibiassaul  sa  réformi-  , 


llj  Ky  ,  a  la  (lu  du  vul.,  li' 


-Hf 


qui  p.ir  ce  moyen  eul  un  soconJ  :iinn.i  Urc 
très-roiisi'lérahle  dans  celle  même  vile. 
Mais,  pendant  que  la  Mère  de  IJallon  élait 
dans  ceiic  iioui  elle  maison  pour  recevoir 
ces  Ursulines  à  sa  congrégalion  et  les  former 
à  la  vie  rel  gieuse,  elle  y  eut  un  sujet  d'exer- 
cer sa  (lalieiice.  Celles  qui  s'étaiint  déi  l.irécs 
les  adversaires  de  ses  coustilulioiis  ,  étant 
averties  (ju'c  lie  élait  sortie  de  son  premier 
monastère,  employé  eut  le  crédit  de  quel- 
(jues  prélats  auprès  des  supérieurs  de  ce  mo- 
nastère  pour  y  l'aire  recevoir  les  coustilu- 
lions  de  la  Mèie  Puueonas,  qui  avaient  été 
iiiipiimées  à  Paris,  cl  obliger  les  religieuses 
de  ce  monaslèie  de  brûler  celles  de  la  Mère 
de  Ballon.  L'autoriié  de  ces  supérieurs  rem- 
porta sur  la  justice  e!  li  reconnaissance: 
ainsi  ecs  religieuses  timides  cl  ingrat'S,  se 
laiss  ml  persuader,  brûlèrent  les  conslilu- 
lions  de  leur  Mère,  qui,  l'ayant  su,  supporta 
cet  affront  avec  tant  de  vertu  et  de  modéra- 
lion,  qu'elle  n'en  lit  pas  paraître  le  moindre 
resseniimenl;  au  coniraire,  après  avoir  éta- 
bli l'observance  régulière  dans  le  second  ujo- 
nasière,  elle  retourna  dans  le  pre.')iier  pour 
y  acbever  le  Icmps  de  sa  supériorité.  Les 
religieuses  quillèrenl  quelque  temps  après 
celle  maison  poar  aller  demeiirer  il. .us  une 
autre  plus  grande  qu'elles  aciietèrent,  et  la 
-Mère  de  Ballon  sortit  de  Marseille  l'an  Kid. 
Elle  eul  encore  le  déplaisir  eu  sortant  de 
voir  que  ces  religieuses  (ju'eUe  quiitait,  et 
pour  ([ui  elle  avait  pris  tant  de  peine,  la 
laissèieul  partir  comme  une  personne  indif- 
Icren  e  et  inconnue,  sans  aucun  lémoignage 
de  reconnaissance  et  sans  lui  rien  présenter 
pour  sou  voyage.  Le  supérieur  même  lui  dit 
que  s'.l  voulait  suivre  l'avis  de  quelques- 
unes,  il  visiicrail  ses  bardes,  parce  qu'on 
l'accusait  d'emporter  trois  luilîc  cens  de  la 
maison.  Eile  alla  de  iMarseiUe  à  Cavailion 
pour  y  voir  un  nouveau  monastère  de  sa  ré- 
forme, qui  venait  d'y  èlie  fonde  par  les  reli- 
gieuses du  monastère  de  seyssel.  Elle  y  fut 
il'aliord  supérieure;  mais  elle  se  démit  quel- 
que Icmps  après  de  cet  cniiloi  et  retourni 
en  S.ivoie.  Six  ans  après,  dans  uu  voyage 
qu'elle  lit  eu  Pi'ovence,  en  passant  par  i-la- 
vailluu,  elle  fui  de  nouveau  élue  pouf  supé- 
rieure. Le  temps  de  sa  supériorité  élanl 
expiré,  elle  fui  eneo  e  rappelée  en  Savoie 
par  l'evcque  lie  Genève.  Elle  y  lit  encore  plu- 
sieurs fondations,  el  étant  au  monastère  de 
Seyssel,  elle  y  mourut  le  li  décembre  IGGS, 
dans  sa  soi\aule-dis.-scptièiiie  année. 

Quant  à  la  iMère  de  l'onçoiias,  après  avoir 
établi  ce  nioiiastère  de  Paris  dont  nous  avons 
parié  ci-dessus,  elle  retourna  à  GrenoUle, 
où  elle  et  lit  supérieure,  el  d'où  elle  sortit 
encore  une  autre  fois  sur  la  fin  de  l'uimee 
1(J37  p|our  aller  à  Aix,  où  elle  était  appelée 
pour  faire  un  autre  établissement  ;  elle  de- 
meura toujours  dans  ce  monastère  jusqu'à 
sa  morl,  (jui  arriva  le  7  lévrier  1657.  Les 
mémoires  qui  m'ont  élé  commuiiiqués  por- 
tent que  le»  supérieures  des  autres  maisons 
de  Bernardines  Réformées  qui  sont  en  Pro- 
vence lui  demandèrent  avec  Inslance  sus  rè- 
gleaienls,  l'asturanl  qu'elles  \oiilaieiit  vivre 


DOC 


■iC 


avec  elle  dans  une  union  parfaite  el  unecii> 
tière  confor.iiité  de  ses  saintes  pratiques  ; 
que  les  évèques  de  Marseille  et  de  Grasse 
lui  lémoignèrent  d'une  manière  parliculièro 
la  vénération  dont  ils  étaient  prévenus  pour 
elle,  cl  le  désir  qu'ils  avaient  que  les  monas- 
tères de  leurs  diocèses  eussent  communica- 
tion avec  elle  et  vécussent  sous  les  mêmes 
observances.  Mais  s'il  y  en  eul  quelques-uns 
en  Provence  qui  suivirent,  ses  règlements,  il 
y  en  eut  d'iulres  aussi  qui  ne  quillèrenl 
point  ceu\  de  la  Mère  de  Ballon,  qu'ils  re- 
connurent toujours  pour  fondatrice  de  l.i 
réforme.  Comme  en  cflel  celle  qualité  lui 
ap.iarlienl  plutôt  qu'à  la  Mère  de  Ponçonas, 
cl  ce  n'est  même  qu'à  la  suliieitalion  des  re- 
ligieuses du  monastère  de  Marseille  au  de- 
là du  port  que  la  vie  de  cette  réformatrice 
a  élè  écrite  et  donnée  au  public  en  16'Jo. 
Ces  mêmes  mémoires  ajoutent  que  le  moiias- 
lère  de  Lyon  qu'elle  avait  fondé  tians  le 
temps  du  dé  oéle  qu'elle  eul  avec  la  Mère  do 
Poiiç  mas  au  sujet  des  coisliluli  tns  ,  recul 
dan,  la  suile  du  temps  celle»  do  celle  der- 
nière, et  oblinlun  bref  de  Bome  qui  rexem[i- 
lait  de  la  dépendance  du  monastère  de  llu- 
luilli  et  l'unissait  à  celui  de  Grenoble  :  ainsi 
la  division  qui  est  survenue  entre  ces  reli- 
gieuses Bernardines  Héformées  en  a  formé 
deux  congrégations  dilTérenle-,  dont  l'une 
porle  le  nom  de  li  Divine  Providence,  (jui 
est  celle  de  Savoie,  qui  compn  nd  quelques 
maisons  en  France  qui  en  dépendent,  et  l'au- 
tre est  som  le  lilrc  de  Saint-Beriiaril,  qui  no 
sorl  point  de  France. 

Mémoires  communiqués  p'ir  les  reliijicusa 
Bernardines  du  Sang -Précieux.  Jean  Grossi, 
Vie  de  la  àlère  de  Ballon  ;  vl  celle  d"  la  Mère 
de  Ponçonas  par  un  aaire  auteur. 

DOCÏBlNxMRES.  Voyez  Doctriniî  Chré- 
tienne. 

Nota.  Quoique  Hélyol  n'ait  point  em- 
ployé les  mots  Doct:iiuires,  I  isilandines. 
Trappistes,  elc.,elqu"on  ne  soit  pas  tenu  par 
coujéquenl  à  les  en  plojer,  je  crois  qu'il 
vaut  mieiix,  vu  leur  po|ii!lari;é,  les  indiquer 
à  leur  rang,  sauf  a  faire  le  renvoi  né- 
cessaiic.  B-i)-E. 

DIX  VERTUS.  Voijez  Anxongi4Diîs. 

DOCTIUNE    CHRÉTIENNE    en    Fkanci? 

(  PRÈrilES   DE   LA  ). 

Des  prêtres  de  la  Doctrine  Chrétienne  en 
France,  avec  la  vie  du  vénérable  Père  César 
de  Bus,  leur  fondateur. 
La  congrégation  des  Prèires  de  la  Doctri- 
ne Chrétienne  en  France  a  d'aliord  élé  éta- 
blie ou  qualité  do  congrégation  sécul  èic, 
elle  devint  dans  la  bui  e  léLçulière  par  l'u- 
n.ou  qu'elle  Gt  avec  celle  des  Somasjues, 
donl  nous  parlerons  à  cet  article  ;  mais,  après 
avoir  demeuré  dans  cet  état  légulier  pendant 
près  de  quarante  ans,  elle  est  retournée 
dans  son  premier  état  par  autorité  du  saint- 
siège,  comme  nous  le  dirons  dans  la  suile. 
Ainsi  l'union  qu'elle  fil  avec  les  Souiasques 
cl  l'état  régulier  où  elle  est  demeuré.!  pen- 
dant un  temps  considérable  nous  obligent  do 


BUTIONNAIUE  DES  OmmKS  UELIGIEUX.                                             *; 
n  nutlr.-  nu  n...nl.r.  .!ts  congrépalions   n"*  *'.';"'  *'\  "  "'^  '^''^''•'  C'IraSnor  ais.nicnl  à  1-. 
.„.,  suivi  la  nglo  .!c  N,int-.VMR..Mn,.  '''ap^Vs Vrois  ans  de  séjour  m  cC'e  ville,  il 
I.c  l.ionlicurou\  Osar  il'  Lus.   lonuiiour  ,.^,^,^^^3  à  Cavaillon,  où  ;i  peine  ful-il  ai- 
de clic  consi^-^'alion  •  na  inil  a  <>'»Y''  .  "r""  rive,  que  son  père  monriil,  il  p.u  .le  L  mps 
^iHc  episcopale.l.i  rouilc  \  enai-biu.  le  ,iw-  ,,^^  ^^^^  ,|^.  ^^^.^  f^^^^^^,    ,|yj  ^  .,;,  ci,a„oi!u. 
irier  d6  .'an  lo»V.  !?oii  père,  Jcnn-l.apiiMe  ^j^  ^^^^^    Comme  cclu.-ci  laissa  par  sa  mort 
.•eBus,  ctsn  nurc  Anm-  de  la  Marc,  el.m-iu  ,,           béncfic<  s  à  simple   loiisure,  Ccs;ir 
leiommandables  par  leur  piele  cl  par  leur  j^  ,.„^  ^'en   chargea   selon   la   cou  unie   ou 
..oblesse;  surloul  J.a.i  ha.lisle   qui  (e.>.ceM-  ^^,^^   ^^^^^^    j,.^|-^^^   j^,   ^^    len-ps-là,    sans 
,lail  «lune  fin.ille  i  lastre  de  L6nu;  "a"s  '^  '^^.^^^  pu    dessein   de  s'engaiior   dans    l'eial 
Milan..is,  laquelle  c.mple  au  noml.re  de  ses  pp^,ésias,i,,„e,    pcnsanl    an   con  r.ire   à    se. 
.ncfir.  s  sainte   Iran.oise   """jarnc    cuie  ^^_.^^.^.^.  ^^^  ^,j^^^          ^^.^  „^^^  ,^  ^j^,,  ,,„ 
donl   nons   aurons   sujel  de    p.irlcr  dans  la  ^^^^     ^  ^^^^.^  ^^  ^,^,  ^^^^    ^^^  ^  ^^^^  ,p  j^,, relier 
tuile  romme  fou.!  .tr.ce  des  OblUcs  qui  poi-  i„,e,,sii,,e„,pn,  des  emplois  séculiers  el  faire 
itnl   son   non;.  Dieu    qui  deslinaii    César  dt  ,.^^5^^,,  ^„   ,„i  pi„,.ii„aiion    .,n'il   avait  eue 
Rus  à  de   pran.!es  il'<>>fs  !«  prev^l  '^.«•*   ^'  dans  son  jeune  â-c  pour  les  fonclioas  el  les 
plus  un  'r.-  J.-u.esse.  Des  lors  il  s  appliqua,!  ^i,,.,^,^^^.^    eeclés.asliq  .es.  Il  snsc.'a    aussi 
à  l'oraison.  uK-rlifiail  sa  chair  pai  .k^  an-  ^^^^  personnes  peu  consideral.les  aux  yeux 
^tinen<es  ,  ].-uuail   des  caremc-s   f/'  le'»   t  ^^^  i,J,„.,,es,  mais  Irès-considerées  de  sa  di- 
(ous  l.'s  vendredi,  de  I  année,  e    61,  ,     r.iu  ^._^^  „,njcsl.>,   pour  travailler  à  sa  convcr- 
lors.p.  .1  irou<;-.it  occasion  .  e  faire   1"       '"'  sj,,,,  .  y^,,^  fm\,„e  ,,„„„«  veuve  de  la  cam- 
aux   p,u.  res,  se   irnanl  <e  son    djr»  '' ^  ^t  l'autre  un  simple  clerc  .^c  Cavail- 

p.,ur  le  l'".^'l"'''V^*'^"''  7)''^"  •,.,''  ,,•'         ion  qui  servait  de  sacristain  d.us  une  église 
^urloul    SI    jaloux  de  la  PWrtc,  q.i  il    fuj..  l      ^^  ^^^^^   ^.„^    .^.^^^^  ,ç,    ^^^^^  j.j^,^,  j^p,,^^, 

v.>mmo  un  gr-ind  mal  U-iit  <e  qui  elail  idpd-  .^  ramener  celle  l.r,  bis  égarée  au  bercail, 

lie  dj  duanicr  que. que  allé. nie-.  j-^^  cessaient  dolTrir  à   Di.-u  leurs  vœux  el 

Après   ses   éludes,   il    s'entretint   encore  |,urs  prièits  p.)ur  .juil  amollîi  la  dureté  du 

quelque  temps  dans  ces  saintes  dispositions,  cœur  de  Cos.ir  .le  l!us. 

Son  (i.  (upal.on   la    plus   agré-iMc  était   de  Insensible  à  l.iules  leurs  rci.onlranc.  s,  il 

parer  Ifs  aultls,  el,  élaul  cniré  dans  la  coin-  en   fai-ail  peu  de  cas  el  s'en  moquait  ;  mais, 

p;.pnie  des  l'énilenU-Noirs,  il  prit  le  soin  de  un   jour   .p/iis  lui    préseiili'i  eut   la   \  ii'  des 

lailiapel'.c  où  les  confrères  s'assemblaient,  Saints,  il  ouvrit  ce   livie   par  complaisance, 

iili.i   lie    pouvoir    renibcllir    el   l'orner.   Son  cl,  en  ajani  lu  <)ui'l<iiic  <  liose,  il  lui  si  tou- 

lUMiiur  douce,  cimplaisanie  cl  agréable,  le  d,^  en    lisant   l.s  actions   dessiin'.s,  où  il 

fais.iil  aiioer  et  r.'Specler  de  lout  le  momie  ;  uou\a   la  condanin.ili  m  de  ses   débauilics, 

on  liait    ravi    de   lavoir  dans  la    conve.sa-  qu'il    résolut  de  changer  de  vie  el  de  quiUor 

li.iii,  où  sa  modcslie  relenail  l>s  plus  licen-  cnlièremeul  le  désordic.  Il  eut  encue  lieau- 

li-.'ux,   q.:i   en   sa    présence    n'osaient  i^en  <  oup  à  comballre  .•.vaut   .(ue   de   rtinporlcr 

f.iire  ni  (lire  qui  tût  lioi  s  de  propos.  A  râ.:c  la\icloire   sur   ses   passions  ;  ma  s  enfin   il 

lie  div-hiiii  an-,  s'élaut  engagé  dans  le  paiti  i,io;opli.i  ;  il  fi!  une  confession   générale  el 

des  armes  à  l'exemple  de  deux  de  ses   frè-  s'exerça  dans   l.s   prali.jues   d'hu.i.ilité,  de 

irs,  qui  avai.nld.-s  emplois  considérables,  moilfi  alion,   cl  de  m  sericorde  e.ners  les 

l'uti  dans  l'armée  du  pai.e,  l'auire  d.iis  cille  ailliués,  v  is:tanl  souvent  le-  inalailes  de  l'Iiô- 

iiu  roi,  il  servit  comme  v.)lontaire  dans  les  pHaJ^  |,  s  assislant  spiriluellcmcnt  el  corpo- 

irouj  es  .lu  comte  de  Tende,  lieutenant  |ioiir      nllemenl,  el  faisant  de   grandes    aumônes 

le  roi  en  Provence,  qui,  par  ordre  de  Sa  Ma-      ^px  pauvres. 

joslé,  levait  q. niques  compagnies  deciva-  Comme  ses  voyages  et  ses  di\  ei  liseuienls 

leric  el  d'infanlerie  pour  s'o;  poser  aux  lié-      hii  avaient   fait   oublier  ce  qu'il   a.ait  appris 

réii.iui  s  ;  el  ce  fut  par  une  espèce  de  mira-      j^   |  ,;;„   dans    ses   classes,   sachant    que    la 

«le  ipie  César  de  Itus,  nonobstant  la   licence      science   lui  était    nécessaire   pour   rendre  à 

de  la   guerre,  sut  oiiserver  la  inéme  inno-      dic^  j^s  services  .(u'i;  atlen.lail  de  so.i  zèle, 

eemc  el  la  même   mo'Ieslic  qu'il  avait  g. ir-      ^  ^^,  ,emit   a  >x    dudes,  .1   réussit   si    bien, 

décs  dan^  la  maison  de  ses  parents.  qu'en   peu  de  leiups  il  fut  capable  de  l.i  pbi- 

1,'edil  de  pacifi.ation  lui  ayant  fait  n dire      lo>opi  ie.  Il  y  étudia   quel  |ues    mois  et   y  fit 

bas  li's  armes,  il  r.'iourna  chez  lui,  où  pour      di'  gr.in.ls   progris,  a[irès    quoi  il  se  donna 

éviter  l'oisivelé  il  s'appli.lua  à  la  P'iés  e  et  à      entieremei-.l  au    serv.ce  du   pr.cliain.   S  11 

la  piinliirc;  mais,  ne  trouvant  pas  es  oc-      évé.iue,  persuadé  .le  sa  verlu  et  .le  sa  capa- 

i:upalion>  dignes  de   son  c.uir.ige,  il  en  all.i      cité,  1.-  |  ououl  d'un  c.inonical  .le  sa  rallie- 

rlierclnr  de  plus  nibles  .1  IS.ii  ile.iux.  où  son      drale.   D'abord    il    gagna   --ix    pers  .unes   du 

frère   Alexandre   «le   lins   él.iil   arrivé    pour      chapitre,  avec  lesquelles  il  .s'.isseiiibait  tous 

coii'inander   un   vai-seaii  de  l'année   uav.ile      les  dimaii.hes  dms  la  .  h.ip.'lle   de    l'évéquc 

qui    se   disposait    pour    le   siège  de  La    Uo-      pour  Naquer  .1  plusieurs  exercices  spiril.iels. 

.helle.  I.a   nialailie   .jui  lui    survint  l'einpé-      Après  avoir  reçu  la   préirise  el   dit  sa  pre- 

<:lia  d'exécuter  son  d.'ssein,  el,  après  ((ue  sa      inièie  in.-sse,  il  s'appliqua  à  la  prédication, 

s.inté   fut   it'lalilje,  il    alla  à  Paris.  Mais  ce      aux  confessions  el  à  tous  les  autr.-s  exerci- 

voya;;c  lui  fui  f.iial  :  car  la  lrè<)uent.iliiiii  de      ces  qui    peuvent  servir  à  sauver  les   âmes. 

quciiiuei  libertins   lui   fil    p^rdr.-  le  trésor      On  ne  peut  assez  admirer  l'assi  liiil.',  la  pa- 

qii  il  a»ai'  conservé  jusque  là  avec  latil  de      lienc ',   la  ferveur  c:  1 1  génerosilé  avec  P.'»- 


49 


DOC 


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59 


quelles  il  s'acquillait  ilc  tous  ces  miiiislères. 
Uieii  n'étail  capable  de  le  rebuter;  Il  passait 
quelquefois  les  jours  entiers  et  une  partie 
lie  la  nuit  dans  les  liopilaux  à  consoler  les 
malades,  snns  que  ni  la  pourriture  de  leurs 
plaies  ni  la  puanteur  et  l'infection  de  leurs 
corps  reiiipôthasscnt  de  s'.i;iprocher  d'eus 
et  de  recevoir  leurs  derniers  soujjirs. 

Sa  charité,  toujours  .ictivo  pour  la  gloire 
de  Dieu,  le  porta  à  travailler  à  la  réfornic 
des  religieuses  Bénédidines  de  Cavaillon, 
qui  vivaient  sans  clôture,  sans  régularité 
et  avec  beaucoup  de  licence.  Il  en  fil  les 
preniiérf  s  propositions  à  la  .Mère  Catlierine 
de  la  Croix,  que  l'on  reconnaît  pour  la  ré- 
formatrice de  ce  monastère.  lille  avait  des- 
sein d'entrer  chez  les  religieuses  de  Saintc- 
("Jaire  d'Avignon,  où  l'observance  régulière 
était  mieux  gardée;  mais  il  lui  per  uada  de 
prendre  l'habit  chez  les  Bénédictines  de  Ca- 
vaillon, et  d'y  faire  profession  selon  la  ri- 
gueur de  la  règle  de  Saint-Benoît.  Elle  eut 
en  peu  de  temps  des  compagnes  qui  suivirent 
son  exemple  :  les  anciennes  religieuses  qui 
s'étaient  le  plus  o|)posées  à  la  clôture,  tou- 
chées de  l'Esprit  divin,  embrassèrent  aussi 
la  réforme,  et  (elle  maison  s'est  toujours 
maintenue  depuis  ce  temps-là  dans  une 
grande  régularité. 

La  lecture  qu'il  fit  du  Catéchisme  du  Con- 
cile de  Tr.  nie  lui  fit  concevoir  le  dessein  d'é- 
tablir une  congrégation  de  prélres  et  de 
clerrs  dont  la  funclion  fût  d'enseigner  )a 
doctrine  thrélicnne.  Ce  Caléchisme  du  Con- 
cile de  Tri'nte  étant  divisé  en  quatre  par- 
ties, qui  sont  le  Symbole,  l'Oraison  domi- 
nicale, le  Décalogue  et  les  SacreuiL-nts,  le 
l'ère  de  Bus  réduisit  ces  (juatre  parties  à 
trois  diiïérentes  instruclion-j,  qu'il  appelait, 
pelile,  r)ioyenue  et  grande  dxtrine.  Cinij 
ou  sis  jeunes  i  cclésiasliques  de  famille  se 
joignirent  à  lui,  et,  après  les  a^oir  instruits 
de  la  manière  de  faire  la  pelile  doctrine,  il 
les  envoyait  dans  les  carrefours  de  la  ville 
et  à  la  campagne,  pour  catéchiser  tous  ceux 
qu'ils  rencontreraient,  l'our  lui  il  enseignait 
dans  les  églises,  et  en  particulier  dans  lus 
maisons,  la  moyenne  doetrinc,  et  ensuite  la 
grande,  afin  d'attirer  les  savants  qui  se  glo- 
rifient dans  la  science,  et  ignorent  celle  du 
salut.  Celle  façon  d'enseigner  la  doctrine 
chrétienne  étant  nouvelle,  souffrit  au  com- 
mencement de  la  conlraJiclion,  et  ou  s'en 
moqua  d'abord;  mais  elle  fui  à  la  fin  ap- 
prouvée de  tout  le  monde.. 

i>ieu  envoya,  peu  de  temps  après,  au  Père 
de  Bus  des  compagnons,  afin  qu'ils  s'employas- 
sent â  ce  saint  exercice.  Michel  PincUi,  cha- 
noine de  l'église  de  Saint- Agricole  d'A- 
vignon; Jean-Baptiste  Komillon,  chanoine 
de  l'église  collégiale  de  l'isle;  Jacq;ies  Iho- 
mas  et  tJabriel  Michel,  furent  les  premiers 
cjui  vinrent  se  joindre  au  nouveau  corps 
que  le  Père  de  Bus  formait.  11  les  assom- 
bli  tous  à  risle  dans  le  comté  Veuaissin, 
l'an  159-2,  le  29  septembre,  fête  de  l'ar- 
change saint  Michel.  Le  sujet  de  leur  as- 
semblée fut  pour  délibérer  dos  moyens  (ju'il 
fallait  prendre  pour  établir  l'eicrcicc  de  la 


Doctrine  Chrélienne  dans  le  co  nié  Venais- 
sin.  Ils  conclurent  (]u'il  fallait  joier  Ict 
premiers  fondements  de  cet  institut  dans 
Avignon,  comme  dans  la  ville  capitale,  et 
demander  au  pape  permission  d'établir  cet 
exircice  de  la  Doctrine  Chrétienne  d;ms 
l'église  de  Sainte-Praxèile,  oii  il  n'y  avait 
]ioint  encorcdc  religieuses.  Ils  cnvayèrent 
à  Uome  pour  ccl  elTet ,  et  le  paie  Clé- 
ment V'IH,  qui  gouvernait  pour  lors  i'Eg'ise, 
répondit  à  leur  supplique  que  le  nouvel  ar- 
chevêque d'Ay  gnon  qui  venait  d'être  nommé 
par  Si  Saintclé  et  qui  était  Marie  Taurii- 
fius,  satisferait  à  leur  demande  lorsqu'il 
serait  arrivé  à  Avignon. 

Ce  prêtai  y  étant  venu  l'an  liiOS,  envoya 
quérir  le  P.  de  Bus,  et,  apréi  avoir  con- 
féré avec  lui  de  l'éLiblissement  de  la  Doctrine 
Chrélienne,  il  lui  donna  permision  de  l'en- 
seigner dans  l'église  de  Sainte-Praxède.  C'est 
ainsi  que  fut  érigée  celle  congrégation,  qui 
fut  confirmée  quatre  ans  après  ,  l'an  lo'JT, 
par  le  même  pape  Clément  Vlil.  Le  P.  de 
Bus  entra  le  21  si-plembre  de  la  même  an- 
née 1593  dans  Sainte-Praxèile,  et  commença 
dès  le  lendemiin  ses  inslruclions  il  y  ensei- 
gna premièrement  la  petite  doctrine  ,  et  le 
dimanche  su  vanl  la  grande.  Celte  manière 
d'enseigner  fut  reçue  avec  apj)laudisscment, 
cl  l'exemple  de  l'archevêque  d'Avignon  atti- 
rait beaucoup  de  personnes  à  ces  instruc- 
tions familières.  Dans  le  commencement, 
c  lie  congrégation  ne  fut  composée  que  de 
douze  personnes,  savoir,  de  quaire  prêtres, 
de  quaire  clercs  et  de  quiitre  coadjuleurs  ;  et 
le  P.  (le  Bus  fut  élu  supérieur  de  celle 
nouvelle  congrégation.  Ils  qu  lièrent  peu  de 
lemps  après  la  maison  de  Sainte-Praxèd.! 
pour  aller  à  Sainl-Jean-le-Vieux,  et  les  re- 
ligieuses de  S:iint-D()miiii(|ue,  qui  y  demeu- 
raient, laissèrent  aux  Pères  Doctrinaires  la 
maison  de  Saint-Jean,  qu'ils  ont  toujours 
con^eivée  depnis. 

Le  P.  de  Bus  ayant  proposé  à  ses  con- 
frères dans  la  suite  de  se  lier  par  un  vœu 
siiMjilo  d'obéiss:ince,  pour  attacher  en  quel- 
que façon  ceux  qui  entreraient  dans  la  con- 
grégation, le  Père  Komillon  ne  fui  pas  de  cet 
avis,  prétondant  que  le  lien  de  la  charité 
sullisait.  Le  P.  de  Bus  persistant  à  vou- 
loir que  l'on  fît  ce  vœu  d'obéissance,  le  P. 
Uomillon,  avec  quelques  autres  qu'il  avait 
atùrés  de  son  côé,  quitta  le  fondateur  cl 
fit  un  corps  à  part  qui  depuis  fut  uni  à  ce- 
lui de  l'Oratoire  de  France  ,  perdant  le  nom 
de  la  Doctrine  Chrétienne,  qui  est  demeuré 
par  un  bref  do  Paul  V  à  ceux  qui  sont  des- 
cendus du  P.  César  de  Bus,  et  qui  ont  fiit 
avec  lui  le  vœu  d'obéissance;  et  lui-même 
déclara  par  un  ac:e  public  que  tous  les  biens 
do  ses  maisons  devaient  appartenir  à  ceux 
qui  avaient  fait  vœu  avec  lui.  Celte  sépara- 
tion lui  fut  sensible;  néanmoins  il  la  soulïrit 
avec  beaucoup  de  résigunlion  aux  ordres  de 
la  divine  providence.  11  fii  pour  la  conduite 
de  sa  congrégation  quelques  règ!e:r.ents 
qu'il  gardait  evactement,  étant  le  premier  à 
Ions  les  exercices.  11  avait  beaucoup  de  dou- 
ceur pour  les  autres  et  beaucoup   de  sévc- 


Pt 


OlCTIONNAini;  Dl  s  OnDISF-ii  riLLlCIEUX. 


5? 


rilé  pour  lui-même,  nioi  lifi.ml  son  corps  par 
dos  ieûnps  cl  des  anslérilùs  continuels. 

Dieu,  voulant  encore  éprouver  sa  patien- 
ce, permit  qu'il  fût  privé  de  la  vue  à  l'âge  de 
quaranlc-ncuf  ans.  Il  souffrit  cette  afiliclion 
a\rc  une  (ons'nnre  .tdmiralile;  il  refusa  mù- 
mc  tous  les  remèdes  que  l'on  voolul  appli- 
quer sur  ses  yeux  ,  él.int  très-contenl  de 
l'élat  où  Dieu  l'avait  riduil.  11  lui  en  ren- 
<!ait  continu  l'emenl  des  actions  de  grâces, 
.se  réjouissant  d'être  délivré  (à  ce  qu'il  di- 
sait) (l<<  deux  de  ses  plus  grands  ennemis, 
qui  l'avaient  si  souvent  engagé  dans  le  pc- 
clié,  qui  étaient  si's  deux  veux.  Ce  qui  lui 
pouvait  faire  de  la  peine  «fans  cet  état ,  c'é- 
tait d'être  privé  de  la  consoialinn  de  ])ouvoir 
célébrer  la  sainte  messe,  ce  qu'il  lâchait  de 
récompenser  en  communiant  tous  les  jours. 
Cetie  affliction  ne  l'cmiiécliail  pas  de  va  - 
quer  continuellement  aux  exercices  de  la 
DoctrineChrélicnne.  11  n'y  eut  (jue  les  grands 
maux  qui  le  rendirent  comme  un  homme  de 
douleur,  à  l'iuiilation  de  son  divin  Maître,  et 
qui  arrivèrent  dix-huit  mois  a^ant  si  mort, 
qui  furent  capables  d'interrompre  ses  exer- 
cices, lùilin,  après  avoir  élé  éprouvé  parles 
suulfrances  pendant  plusieurs  années  ,  il 
mourut  le  15  avril  de  l'an  1607,  étant  âgé  de 
63  ans.  On  l'enterra  dans  léi^lise  de  Saint- 
lean-le-A'ieux  en  présence  d'une  infinité  de 
monde,  qui  l'honorait  comme  un  saint.  Les 
miracles  qui  se  tirent  à  son  tombeau  obligè- 
rent les  D.iclrinaiies  ,  quatorze  mois  après 
sa  mon,  de  le  lever  de  terre,  avec  la  permis- 
sion de  l'archevêque  d'Avignon  ,  pour  le 
transporter  dans  la  sacristie,  re  qui  se  fit 
avec  l(eauciiU|i  de  solennité;  et  son  corps  fut 
trouvé  tout  entier  et  sans  aucune  corrup- 
li<in.  On  l'a  mis  depuis  dans  une  chapelle  , 
où  il  est  exposé  à  la  véné  aliim  des  fidèles; 
re  qui  a  sans  dculi"  obligé  M.  du  Saussny  à 
insérer  son  nom  dans  le  martyrologe  des 
s.iints  de  France. 

Avant  que  de  n  cevoir  l'extrême-onrlion, 
le  V.  de  llus  voulut  ôlrc  déchargé  de  la 
supériorité,  el  fil  de  fortes  instances  aux 
l'èrcs  pour  s'assembler,  afin  de  procéder  A 
l'éleciiun  d'un  nouveau  sujiérieur,  ce  (|u'ils 
ne  firent  qu'avec  peine,  el  le  sort  tomba  sur 
le  P.  Sisoine  ,  qui  fut  élu  supérieur  en  la 
pl.icc  du  saint  fondateur.  .Mais  il  ne  se  passa 
rien  de  considérable  de  son  temps  dans  la 
congrégation.  Le  I'.  Vigier  lui  ayant  suc- 
cède, cl  la  congrég.ition  ayant  déj.i  trois 
maisons,  une  à  Avignon,  une  â  Toulouse,  el 
l'aulr  '  à  Itrite  dan',  le  Limousin  ,  il  obtint 
dis  lettres  patc-nles  du  roi  le  2!)  septembre 
If'ilO,  qui  en  permitlairnl  rLlablissemiiU  en 

•rance,  lesi|ui-ll<'sli'llres  furent  vérifiées  aux 

'arb'iniirs  de  llm  ileaux,  de  Toulouse,  d'Aix 

■l  de  Greiwihlc. 

Le  I'.  \  it;ii!r  ,  pnur  affermir  davantage 
la  congrégation  cl  niga^'or  ceux  qui  y  cn- 
Inraicnl  par  des  vieux  solennels,  conclut  le 
dessein  de  la  f.iire  ériger  en  vraie  religion  : 
'•I  le  iiiniiiiuniqu.i  au\    l'ère»   l)oclrinairc>, 

lui,  iiprès  plusieurs  délibérations  ,  reolu- 
reul  ileiiilirasser  l'éial  régulier,  el  à  i  et  elTel 
|'«>bèrcal  dans  toutes  leurs  maisons  des  pro- 


curations spéciales  au  P.  Vigier,  l'au  1614, 
pour  demander  cet  étal  au  saint-siége,  soil 
p;ir  union,  soit  par  une  nouvelle  éreciiun  ,' 
ou  par  telle  autre  voie  qu'il  plairait  au  pape. 

En  1G15,  Sa  Sainteté  ayant  fait  dire  au 
P.  Vigier  qu'il  convint  avec  quelque  con- 
grégation régulière  déjà  établie,  il  eut  sur 
cela quelquesconfércncesaveclcs  PèrcsBar- 
nabites  ;  on  donna  une  seconde  procuration 
à  ce  Père  par  abond.ince  de  pouvoir,  faisant 
mention  de  celle  de  161'*  el  la  confirmant  de 
nouveau,  s'il  était  besoin  de  cette  confirma- 
lion  pour  s'unir  avec  les  llarnabiles.  Le 
1*.  Vigier  n'ay;int  pu  néanmoins  s'acror- 
der  avec  eux,  traita  l'an  1616  avec  les  Pères 
Somasques  en  vertu  des  procurations  de 
1611.,  qui  sul>sistaient  toujours.  Le  pape 
Paul  V,  par  un  bref  de  la  même  année  1616, 
confirma  ce  traité  ,  qui  avait  été  apiirouvé 
par  la  congrégilion  des  Réguliers,  el  unit  la 
congrégation  des  Pères  de  la  Doctrine  Chré- 
tienneaveceelle  desPèresSomasques,  réglant 
le  noviciat  du  P.  Vigier  par  dispense  à  qua- 
tre mois  sculemi  ni. 

Il  était  entre  autres  choses  stipulé  par  ce 
traité  que  les  Pères  de  France  garderaient 
toujours  leur  iiislilul  d'enseigner  la  doctrine 
chrétienne  ,  el  reconnaîtraient  [lOur  leur 
fondateur  le  P.  César  do  l!us;  qu'ils  s'appel- 
leraient en  France  les  Pères  de  la  Doctrine 
Chrétienne  de  la  congrégation  des  Somas- 
ques; qu'ils  vivraient  sous  l'obéissance  du 
supérieur  général  des  Somasiiucs,  qui  les 
visiterait,  ou  par  lui  ,  ou  par  d'autres  une 
lois  tous  les  trois  ans.  Le  P.  Vigier,  après  ce 
traité,  fut  reçu  au  noviciat  en  la  maison  do 
Suinl-Blaise  des  Pères  Somasques  à  Home. 
Le  bref  d'union  fut  reçu  dans  un  chapitre 
général  de  cet  ordre  qui  se  tint  la  mémo  an- 
née, el  le  P.  \  igier  étant  de  retour  à  Avi- 
giio".  le  2o  juillet,  fit  sa  prof  ssion  entre  les 
mains  du  P.  îîoiicl,  S miasque,  député  à  cet 
elTel  [lar  lo  P.  Itoscoli,  pour  lors  général  dy 
cet  o.-dre.  Le  P.  \  igier  étant  profès,  le  Iraiié 
qu'il  avait  fail  avec  les  Siimasques  ,  et  qui 
avait  été  autorisé  par  le  bref  de  1610,  lui 
ratifié  premiérenienl  à  Avignoii  ,  ensuit-  à 
Toulouse  et  à  lîrive  ,  par  tous  les  Pères  el 
les  Frères  de  la  congrég;ilioii  delà  Doilrine 
Chrétienne;  et,  en  vertu  du  bref  du  pape 
Paul  V,  après  être  entrés  au  novicial ,  ils 
firent  tous  profession  au  bout  de  l'an  entre 
les  mains  du  P.  Vigier,  i)ui  av.iil  le  litre  de 
provincial ,  ou  en  celles  d'autres  supérieurs 
qu'il  avait  députés.  Les  Pères  de  la  maison 
de  ToiiIounc  (ireiil  d'abord  difficullé  de  re- 
cevoir la  ceinture  de  novice;  mais  ils  firent 
rannccde  protialion  comme  les  autres, après 
laquelle  ils  (ircnl  aussi  |>rofessioii  solennelle. 
Le  roi  accorda  des  lettres  patentes  en  IHIT, 
par  lesquelles  il  conlirinail  leur  union  avec 
l(  s  Soiiias(|ues,  cl  les  recevait  comme  reli- 
gieux en  France,  et  ces  lettres  firent  véri- 
fiées en  quatre  diffèrenls  parleinenls.  Les 
Doctrinaires  firent  ensuite  plusieurs  établis- 
sements, et  ils  furent  reçus  à  Paris  en  16-z5, 
du  consentement  do  Jean-François  de  Gon- 
dy,  pour  lors  arrlievêque,  qui,  après  avoir 
pris   commuiiicaliou  du  bref  cl   des  lettre» 


53 


DOC 


DOC 


53^ 


pali-nlcs  (lu  roi,  les  reçut  comme  rclipiiux 
Dans  son  diocèse  el  leur  permil  de  s'établir 
dans  leur  maison  de  Saint-Charles,  au  fau- 
bourg Saint-Marcel,  dans  laquelle  depuis  i's 
reçurent  plusieurs  novices  à  la  professiin 
relijjii'use. 

Les  Doctrinaires  ne  furent  jamais  bien 
d'accord  avec  les  Somasques;  ceux-ci  ayant 
voulu  contraindre  les  Doctrinaires  de  rece- 
voir leurs  nouvelles  constitutions  ,  qui 
avaient  été  approuvées  par  le  sain'.-siégc  on 
1026,  le  chapitre  provincial  dos  Doctrinaires 
qui  se  tint  à  Gimont  l'an  1()27  refusa  de  les 
accepter  :  il  résolut  qu'on  observerait  tou- 
jours les  anciennes,  quoiqu'elles  ne  fussent 
pas  approuvées  par  le  pape,  et  en're  autres 
rèjj;leiiionls  qui  y  furent  faits,  il  fut  ordonné 
que  l'on  ferait  un  vœu  particulier  d'ensei- 
gner la  doctrine  chrélienn".  Mais  le  chapi- 
tre général  des  Somasques  tenu  l'an  1G28 
refusa  la  permissiDn  que  les  Doctrinaires 
avaient  demandée  du  faire  imprimer  du  nou- 
veau les  constitutii>i)S  anciennes  ,  au  nom 
de  la  province  de  France  ,  et  leur  défendit 
de  faire  aucun  vœu  d'enseigner  la  doctrine 
chrétienne.  Il  n'y  eut  guère  de  chapitre  en 
France  où  il  ne  survînt  quelques  contesta- 
tions touchant  celte  union  entre  les  Doctri- 
naires et  les  Somasques  ,  ce  qui  fit  prendre 
la  résolution  aux  Doctrinaires  de  s'en  sépa- 
rer entièrement  ;  et  le  P.  Vigier,  qui  le  pre- 
mier avait  foricment  solliiiié  l'union  avec 
les  Somasques  ,  fut  aussi  le  premier  à  de- 
mander la  séparation.  Et  il  se  forma  trois 
partis  parmi  les  Doctrinaires  :  les  uns  ne 
voulaient  point  de  séparation,  les  autres  la 
deman  laient,  mais  prétendaient  toujours  vi- 
vre dans  l'état  régulier,  comme  clercs,  sous 
la  règle  deSaint-Augustin  ;  etilyenavaitd'au- 
Irt'squi,  prétendant  qu'il  y  avait  plusieurs 
causesdenuiliiédansTacteduniou, voulaient 
que  la  congrégation  ne  fût  point  sortie  de 
l'état  séculier  où  elle  avait  d'abord  été,  et 
que  par  conséquent  les  vœux  qu'ils  avaient 
faits  dans  la  congrégation  de  la  Doctrine 
Chrétienne  ne  les  engageaient  à  rien.  De  ce 
nombre  était  un  gentilhomme  de  Bretagne 
allié  aux  meilleures  maisons  de  la  province  , 
qui ,  étant  entré  parmi  les  Doctrinaires  en 
163C,  et  y  ayant  fait  un  an  de  noviciat  dans 
la  maison  de  Saint-Charles  à  Paris,  avait  en- 
suite fait  profession  solennelle  entre  les 
mains  du  P.  Vigier  comme  député  du  pro- 
vincial. L'an  1140,  ce  gentilhomme,  dégoûté 
de  son  état ,  sortit  de  la  congrégation  el  se 
m;iria  en  lC'i3  avec  une  demoiselle  de  I5ie- 
tagne.  La  cause  fut  portée  au  parlement  de 
Paris  en  16U,  el  il  y  eut  en  I6i5  un  célèbre 
arrêt  rendu  entre  les  parents  de  ce  gentil- 
homme breton  ,  appelant  comme  d'abus  de 
son  prétendu  mariage  ;  ce  religieux  qui  s'é- 
tait marié,  intimé;  les  religieux  clercs  do  la 
Doctrine  Chrétienne,  ordre  de  Saint-Augus- 
tin (c'est  ainsi  que  porle  l'arrêt),  défendeurs, 
et  entre  les  mémos  religieux  de  la  Doctrine 
Chrétienne  demandeurs  en  requête  par  eux 
présentée  à  la  tour,  pour  être  reçus  parties 
intervenantes  auxdites  appellations  avec  les 
parents  de  ce  religieux  marié,  pour  soutenir 


qu'il  était  leur  religieux  profès  (  l  qu'il  leur 
devait  être  rendu  :  le  même  religieux  défen- 
deur d'autre  part,  cl  encore  le  même,  appe- 
lant comme  d'abus  du  bref  portant  érection 
de  la  congrégation  de  la  Doctrine  Chrétienne 
en  religion,  et  son  union  avec  les  Somas- 
ques, etc.;  cl  encore  entre  les  Pères  clercs 
el  frères  de  la  congrégation  de  la  Doctrine 
Chrélienne  des  maisons  do  Paris  ,  deman- 
deurs en  requête  par  eux  présentée  à  'a  cour, 
tendante  à  lin  d'être  reçus  parties  interve- 
nantes auxdites  appellations  et  demander 
qu'il  leur  fût  donné  acte  de  ce  qu'ils  désa- 
vouaient la  poursuite  laite  au  nom  de  toute 
la  congrégation  par  le  provincial  de  cet  or- 
dre, de  l'enregistrement  des  lettres  patentes 
obtenues  au  nom  de  leur  ordre,  en  ce  qu'el- 
les portaient  confirmation  de  l'union  el  dé- 
pendance des  Pères  Somasques  d'Italie;  et, 
faisant  droit  sur  le  tout,  ordonner  qu'ils  se 
pourvoiraient  par-devant  N.  S.  V.  le  pape 
pour  obtenir  un  bref,  pour  vivre  suivant  la 
règle  des  Clercs  de  Saint-Auguslin  ,  de  la- 
quelle ils  faisaient  profession  ,  sous  un  gé- 
néral français,  et  pour  avoir  des  commis- 
saires en  France  pour  l'exécution  dudit  bref. 
Et  encore  Gabriel  de  Tregouin,  Claude  Bou- 
cairan  ,  François  Vuidot  et  Laurent  Lespe- 
rièrcs,  ci-devant  religieux  de  ladite  congré- 
gation des  Pères  et  clercs  de  la  Doctrine 
Chrétienne,  demandeurs  en  requête  tendante 
à  fin  d'êlre  reçus  parties  intervenantes  el 
opposantes  à  l'eiitérinement  des  lettres  pa- 
tentes du  roi  portant  établissement  de  la 
maison  de  la  Doctrine  Chrétienne  à  Paris,  et 
à  faire  exercice  de  religion  en  France,  en 
vertu  du  bref  de  l'union  avec  les  Somas- 
ques, etc.  Après  plusieurs  audiences,  la  cour 
déclara  le  mariage  de  ce  gentilhomme  bre- 
ton non  valablement  contracté  ,  ordonna 
qu'il  rentrerait  dans  le  monastère  des  reli- 
gieux de  la  Doctrine  Chrélienne  pour  y  vi- 
vre suivant  la  règle,  et,  faisant  droit  sur  les 
conclusions  du  procureur-général  du  roi, 
qu'il  sérail  incessamment  procélé  à  la  véri- 
fication des  lettres  obtenues  par  les  Doctri- 
naires, si  faire  se  devait,  el  cependant  leur 
fil  défense  d'admettre  aucun  à  profession  el 
d'envoyer  leurs  religieux  hors  le  royaume, 
ni  de  recevoir  en  leurs  maisons  des  supé- 
rieurs étrangers  sans  permiss^ionda  roi. 

Peu  avant  cet  arrêl,  qui  est  du  18  mai 
1G'|.5,  l'archevêque  de  Paris,  Jean-François' 
de  Gondy,  avait  déjà  ordonné  dès  le  10  du 
même  mois  que  les  Doctrinaires  se  pourvoi- 
raient à  Rome  dans  un  an,  et  li'ur  avait  fait 
défense  d'ailo'.ellre  aucun,  ni  au  noviciat 
ni  à  la  profession.  Après  l'arrêt  rendu,  le 
roi,  par  un  arrêl  du  conseil  du  22  mai  Kî'iG, 
leur  donna  des  commissaires  qui  furent  les 
archeiêques  de  Toulouse  et  d'Arli's,  le  chan- 
celier de  l'université  de  Paris,  le  curé  de 
Saint-Nicolas-du-Ghardonet,  le  grand  péni- 
lencier  de  Notre-Dame,  el  le  sieur  du  Val, 
docteur  di'  Sorbonne,  pour  aviser  aux 
moyens  propres  et  convenables  pour  termi- 
ner leurs  dilïéreads.  (>es  commissaires,  après 
avoir  vu  les  actes  capilulaires  des  maisons 
de    Paris,   de    Toi'Iouse,   de  Narbonne,   do 


'"•                               nicTioNNAïur:  [>f.s  ouduks  heligiel'X.  ur, 

^  illpfr.mrho,  de  I1rivi\  (11- H  ■■■iiirnirr,  (le  Lrc-  le  passé  Cl  pour  l'avonir;  cl,  voyant  qu'on 
i"uro,  (IcNcr.ir,  de  Ttnlcl.  de  riililhir,  nK'iiic  avait  formé  oiiposilion  h  rcnretjisïremeril  de 
rciui   du    cliapitrc    provinrial    nsscmldc    à  ces  Icllrcs,  sur  ce  que  les  opposants  |iruten-' 
Tiiiiloiise  II-  (i  si>]  iPtiilirc  Ifi'i'l.  par  Icsquris  daieiil  nu  contraire  que  le  bref  ne  lui  don- 
l>'s  l'iVes  Doct' iti.iins  ,!v  liciil  résolu  de  de-  nait  le  litre  de  régulière  que  pour  le  passé  et 
i!i  iiidcr  cl  propiir.T  (lar  l!)uics  les  voies  lé-  non  pour  l'avenir,  ce  général,  sur  sa  sini- 
piliuici  cl  raisonnables  leur  sépar.ilion  d'à-  pie  supplii|ue,  els'élant  adressé  5  laDalerie, 
vcc   les   Soinasqiips  ;   après   avoir  aussi   vu  au  lieu  d'avoir  rerours  à  la  congrégation  des 
'.'ordonnance   de   l'arclicvéque   de  Paris     cl  cardinaux  qui  avait  été  commise  par  le  Pape 
l'arrël  du  parlemenl  dont  nou's  avons  parlé  pour  connaître  des  différends  de  celte  con- 
«  i-des'ii's,  cl  <  n  avoir  fait  le  rapport  au  roi,  grégalion,  obtint  une  bulle  le  27janvier  ICIil 
Sa  Majesie  élanl   en    son    consi  il    révoqua  qui  déclarait  la  congrégation  de  la  Doctrine 
kkiIcs  les  ledres   laieiilcs  qu'il  avait   ci-d.?-  Chrétienne  rcfruliére  tant  pour  le  passé  que 
»ant  aecoidce-  pour  roiiion  des  Doctrinaires  pour  l'avenir.  KUc  fui  examinée  à  Paris  par 
.nec   les   Son)as(ines.  comme   l'aile  a^ ce  i.'cs  ordre  di'  rarcl;evéi;ue  le  17  avril  de  la  nié- 
é  rangers  sans  permission  de  Sa  Majesté  ;  me  année   dans  une  assemblée  de  docteurs 
leur  litdéfiMise  de  rcconnaîire  le  général  des  q:ii  J  i  déclarèrcnl  nulle;  et  le  pape,  sur  l'a- 
Somasques   ni  recevoir  aucun  supérieur  de  vis  de  la  congrégalion  des   cardinaux  qu'il 
sa  iiarl,  roniniuniqucr  ni  avoir  aucune  par-  avail  commise,  déclara  par  nn  nouveau  br.( 
licipalion    avec  eux;   cl  ordonna    qu'ils    ve  du  .3!)  août  1652  que  celle  l)iil'e   du  27  jan- 
pourvojraicnt   vers  le  pape  pour   obtenir  la  vicr  ICol  était  nulle,  comme  élanl  contraire 
décision  de  leur  appel  et  îles  autres  différends  à  son  piécédenl  bref  de  1i'i'i7  et  ayant  élé  ob- 
conccrnant   la    \aliilité  de  l'érection   de  leur  lenue    par  fr^iude  ;  dcclaranl  que  son  inteii- 
congrégalion  on  religi(»n,  et  des  professions  tio'i   était  de  réiablir  la  congrégation  de  la 
ijui  avaient  été  faites;  leur  enjoignant  de  vi-  Dnrlrine  Chrétienne  en  son  premier  état  se- 
vré chacun  sous  lobéissanec  des  supérieurs  entier,   conformément  à  son  institution ,   cl 
de   (tiaque    maison,  selon  leurs    i.nciennes  d'obliger   à   y   demeurer   pudant  leur  vie, 
constitutions  :  et,  s'il  arrivait  quelques  diffi-  comme  véritables  religieux  et    sous  l'obéis- 
(  uHés   extraordinaires,  d'avoir  recours  aux  s  ince  des  ordinaires,  ceux   qui  avaient  lail 
évéques   dans   les    diocèses    desquels    leurs  profession   peidant  l'union  .n ce  les  Sonias- 
maisons  sont  élablies,   pour  recevoir  d'eux  (|ues;et  déclara  séculiers  tous   ceux  qui  y 
par  provision    les    rè[;lcmciits  qui  leur   se-  ealrcraienl  à    l'avenir,   cassant  et  annulant 
raient   nécessaires;   leur  permit  l'a  semblée  en   conséquence   toutes  li'S  professions   qui 
cl  lenue  de  leur  chapitre  |irovincial  ass'gné  avaient  été  faites  dans  celle  congrégation  de- 
a  N'ai  bonne  au  mois   de  septembre,  pour   y  puis  l'c\[)édilion  du  bref  du  HO  juillet  IfiW, 
élire   un    pro\iiicial   et  des    supérieurs   qui  et  l<iules  les  choses  (lui  avaient  été  faites  de- 
exerceraient   leurs  charges    par   |)rovision  ,  puis  contre  sa  forme  cl  teneur, 
jusqu'à  ce  que  Sa  Saint  lé  y  i  ût  pourvu,  à  11  y  eut  de  nouvelles  contestations  sur  ce 
la  charge  que   l'archevêque  de  Narbonne  et  dernier  bref.  Il  y  avail  des  Pérès  dans  la  con- 
l'évéque  d'Alel  y  jjrésidcraient  :  et  Sa  Majesté  grégalion  qui  ne  pouvaient  la  voir  réduite  à 
leur  (jélendil  de  recevoir  au  noviciat  ni  à  la  l'éli'.l  séculier  pour  ravenir.  et  d'autres  qui 
profession,  ni  même  d'envoyer  aucun   aux  'le  pouvaient  soulliir  iiu'clle  lui  déclarée  ré- 
ordres sacrés   pour  être  promu  sous  le  titre  gulièie  pour  le  passé.  Ainsi,  il  fallut  encore 
de  pauvreté.  retourner  à   Home,  dont  l'on  n'obtint  autre 
Les    Docirinaires   s'élanl  donc  pour\us  à  cho<e  par  un  bref  de  Hi3V  que  ce  qui  av.iii 
Uonie,  le  pape  Innocent  X,  après  av  ir  pris  été  déclaré  par  le  bref  précédent  do  1052,  que 
lavis   d'une   coiigiegation  tif  cardinaux   et  le  papo  voulait  que  l'on  cvéculàl. 
de   prélats   qu'il  avait  aussi  commis  pour  l,i  Kn  tli57,  les  l'ères  de    la    Doetrine    Chré- 
«onnaissanee  de   celle  affaire,  cassa  par  nn  tienne   eurent   encore   recours  à    Home,  en 
bref  du  ;tO  juillet    ll)'i7  le  bref  d'union   des  (Onscqiicnee  d'un  arrêt  de  renvoi  du  parle- 
Doctrinaires  a\  ec  les  Somasques,  soumit  les  ment  île  Paris  de  Hi5.'J  ■  ur  renrcgislreincnl 
Docirinaires  aux  ordinaiiss  des  lieux  OÙ  sont  des  lettres  patentes  qu'ils   avaient  obtenues 
^iluees  leurs  maisons,  cl  réiab'it  la   con;;ré-  pour  le  bref  de  lGi7.  Le  pape  .Mexandre  \ll 
galion  de  la  Doctrine  Chrélienne  en  son  pre-  députa    le   cardinal     lirimaldi  ,   arclicvéquo 
micr   et  II,   Ici    qu'il  avail  élé   établi   par  le  d'Aix.  pour  présider  au  chapitre  général  de 
pipe   Clément  Vlli ,   leipiel  était  |iuremenl  toute  la  congrégalion  à  Avignon,  et  conlirma 
hcculier;  el,  pourai  commoiler  les  parties  sur  le  bref  de  liiV7.  Ce  chapitre  général  fut  cclé- 
leurs  différends,  Sa  Saintclc  valida   l'union  bré  ;  toutes  les  contestations  y  furent  réglées 
pour  le    |.assé  et  les  professions  (|ui  avaient  el  assoupies  ,  et  les  brels  des  années   l!i'i7  , 
elé  fai.es   pendant   ce  lemps-l.i  ,  cl  obligea  1052  cl  Id.j'*  y  furent  de  nouveau  reçus  dans 
ceux  qui  les  avaient  faites  ci-devant  de   per-  toute  leur  lenenr.  Ils  s'adressèrent  encore  au 
sevércT  loule  leur  \ie  dans  la  congrég.ilion ,  pape  pour  ralTermisscmcnt  de  leur  ctmgrc- 
»ans  poiMoir  en  soriir  deux-mé  ncs  ni  élre  galion,  d  Sa   Sainteté,  fiar  «n  bref  de  l'an 
icinoyés  (lar  les  supérieurs.  105!>,  conlirmalif  de  celui  de  10V7,  pour  l'exe 
Le   P.  Hercule   Ilaiidilret  ,   qui   prcniil  le  culion    duquel    l'archevêque   de    Paris    était 
littede  général  de   l.i  eongrégati   n.  surprit  conimiss.ijro  apostolique,  leur  donna  permis- 
Ueg  lejir.s  patentes  du  roi  sur  le  lirel  il'lnno-  sion  de  faire  faire  après  une  année  de  novi- 
cenl  X  ,  prCiendanl  qu'il  duiiiiail  le  lilr.' cl  la  ciat   les   ir(ns    vœux    simples  de  cbastelé,  de 
quililé  de  religion  a  leur  congregalion  pour  pauvreté  et  d'obéissance,  cl  un  quatrième  do 


57  DOC 

perpétuelle  stabililc,  dispensables  seulement 
par  le  souverain  ponlife,  ou  par  le  chapitre, 
ou  par  le  diffiniloirc  général  de  la  congré- 
gation. 

Voilà  comme  la  congrégation  des  Pères  de 
la  Doctrine  Chrétienne  .  de  séculière  est  de- 
Tcnue  régulière,  et,  de  régulière,  séculière. 
Elle  est  présentement  divisée  en  trois  pro- 
vinces ,  savoir  :  d'Avignon ,  de  Paris  et  de 
Toulouse.  La  première  a  sept  maisons  et  dis 
collèges;  la  province  de  Paris  a  quatre  mai- 
sons, dont  doux  à  Paris  et  trois  collèges,  et 
celle  de  Toulouse  a  quatre  maisons  et  treize 
collèges.  Ces  Pères  sont  habillés  comme  les 
prêtres  séculiers  et  ont  seulement  un  petit 
rollet  large  de  deux  doigts;  ils  ont  pour 
urmes  une  croix  avec  la  lance  ,  l'éponge  et 
des  I'oubIs  (1). 

Voyez  les  PP.  deDeauvais  etdu  Mas,  Viedu 
P.  César  de  Bus.  (1.  de  Trégouin,  Recueil  des 
nidlités  survenues  dati s  V institution  prétendue 
régulière  de  la  Doctrine  Chrétienne  en  France. 
Constitut.  Clericor.  Congreg.  Doctrinœ  Chri- 
stianœ,  Mémoires,  Factums ,  Arrêts  et  pièces 
concernant  cette  congrégation. 

La  vie  du  P.  César  de  Bus  est  peu  connue 
en  France,  et  il  serait  à  propos  qu'on  en 
donnât  une  nouvelle  édition,  ou  plutôt  qu'on 
en  publiât  une  suç  un  plan  nouveau,  suivie 
d'un  précis  historique  sur  sa  congrégation, 
qui  a  probablement  disparu  pour  toujours 
dans  ce  pays.  On  ignore  presque  générale- 
ment que  lors  du  voyage  que  fil  à  Uome  le 
P.  Jeaume,  général,  voyage  dont  nous  allons 
parler,  on  lui  fit  la  proposition  ou  la  pro- 
messe de  canoniser  (  et  même  sans  frais  de 
procès,  dit-on)  le  pieux  fondateur  de  son  in- 
stitut. Il  y  a  eu  peu  de  congrégations  qui 
aient  subi  autant  de  révolutions  et  éprouvé 
autant  de  guerres  intestines  que  la  société 
de  la  Doctrine  Chrétienne.  Aux  renseigne- 
ments si  riches  que  la  sagacité  du  P.  Hélyot 
a  recueillis  et  consignés  ci-dessus,  nous  en 
joindrons  ici  quelques  autres  sur  cette  con- 
grégation, contre  laquelle  était  répandue  et 
ri  sle  encore  une  prévention  presque  géné- 
rale, qui  l'ace  use  de  jansénisme.  Nous  justi- 
fierons ce  sou|)Çon;  nous  ferons  voir  qu'il 
«lemanile  cependant  des  exceptions  plus  nom- 
breuses que  nous  ne  l'avions  cru  nous-mê- 
nie,  soit  sur  le  fait  du  jansénisme,  soit  sur 
l'adhésion  à  la  constitution  civile  du  clergé, 
à  l'époque  de  la  révolution  française.  Aux 
deux  maisons  que  compte  à  Paris  le  P.  Hé- 
lyol,  il  faut  en  ajouter  une  troisième,  colle 
de  liercy,  qu'habitait  un  Doctrinaire  fameux, 
dont  nous  parlerons  dans  cet  article. 

Il  y  avait  en  effet  trois  provinces  de  Doc- 
trinaires en  France  ,  comme  le  dit  Hélyot, 
celles  d'Avignon,  de  Toulouse  et  de  Paris. 
Chaque  province  élisait  tous  les  trois  ans  ses 
supérieurs,  et  le  général  était  élu  tous  les  six 
ans  par  les  trois  provinces  réunies.  Ce  su- 
périeur général  avait  un  conseil  ou  défini- 

(I)  Voi/.,  à  la  lin  du  vnl.,  n"  G. 

("2)  Une  note  niannscriie,  jointe  à  rexemplaire 
que  nous  possédons  dil  que  le  P.  Vatetle,  Oociri- 
nnire,  fort  vené  iluns  la  langue  lutine,  est  celui  i/iii  a 
niif  en  cet  iiwme  celle  première  édition  des  comiitu- 


DOC- 


KS 


loiro  composé  de  six  officiers,  deux  de  cha- 
que province,  lesquels,  avec  le  général  lui- 
même,  trois  provinciaux,  six  députés,  et  le 
supérieur  de  la  maison  où  l'on  s'assemblait, 
composaient  le  chapitre  général,  q:ii  se  te- 
nait ordinairement  dans  la  maison  de  Saint- 
Charles,  faubourg  Saint-Marceau,  à  Paris. 

En  1733,  au  chapitre  général  tenu  à  Paris, 
0!i  revit  les  constitutions,  qui,  l'année  sui- 
vante, furent  traduites  en  latin  par  le  P.  Va- 
lette (2)  et  publiées.  Après  un  chapitre  et  d"S 
observations    préliaiinaircs ,   elles    forment 
deux  parties  ,  dont   l'une,   composée  de   33 
chapitres,  traite  du   régime  de  la  congréga- 
tion ;  l'autre  contient  quinze  chapitres  con- 
sacrés à  traiter  de  la  vie  spirituelle.  Nous 
venons   de  dire   comment   la    congrégation 
était  gouvernée.  Ajoutons  :  Les  bénéficiers 
ne  piiuvaient  jouir  de  leurs    bénéfices  quo 
conformément  aux  dispositions  de   la  con. 
grégation  ,  qui  voulait  avant  tout  que  les 
bénéfices   fussent  unis  au  corps.    Deux   pa- 
rents au  premier  ou  second  degré  ne  pou- 
vaient, dans  les  élections,  se  donner   leurs 
vuix.  Si  trois  parents  à  ce  degré  s'y  trou- 
vaient, le  plus  jeune  ne  votait  pas  du  tout. 
Pour  être  élu   général,  il    fallait  avoir  au 
moins  kO  ans  d'âge  et  vingt  années   de   pro- 
fession ;  il  fallait  en  outre  avoir  rempli  pen- 
dant six  ans  un  emploi   important  d.ns   la 
congrégation.  Les   provinciaux  et   recteurs 
(supérieurs  de  maison)  faisaient  serment  da 
bien  conduire  leur  adftiinislralion.  Le  chapi- 
tre provincial  se  tenait  tous  les  trois  ans,  au 
mois  de  septembre  ou  octobre.  11  y  a  un 
chapitre  fort  sagement  conçu  concernant  la 
garde  des  archives.  Pour  être  admis  au  no- 
viciat, il  fallait  avoir  fait  sa  rhétorique,  n'a- 
voir pas  l'ait  vœu  d'entrer  en  religion,  n'avoir 
aucun  défaut  canonique   qui  empêchât  la 
promotion  aux  ordres.  On  ne  recevait  pas 
dans  l'institut  sans  une  dispense  du  provin- 
cial   ceux   qui    avaient  plus  de    kQ  ans  ou 
moins  de  lo;  ni  sans  une   permission  spé- 
ciale  du    général  ceux    qui   avaient   porté, 
même  pour  peu  de  temps  ,  l'habit  d'un  autre 
institut.  Avant  d'entrer,  le  prétendant  devait 
postuler  un  ou  deux  mois.  Les  frères  con- 
vcr3  devaient  postuler  pendant  six  mois,  et 
ne  prenaient  l'habit  qu'après  un  an  de  sé- 
jour dans  la  maison.  On  n'en  recevait  point 
qui  ne  possédât  ou  ne   fût  apte  à  apprendre 
Un  métier  utile  à  la  maison,  et,  autant  quo 
possible,  qui  ne  sût  lire  et  écrire.  Le  convers 
ne  pouvait  recevoir  la  tonsure  sans  une  au- 
torisation du  chapitre  général.  On  voulut  dé- 
sormais, sauf  exception  en  faveur  des  sujets 
de  riche  espérance,  que  chacun  fournît  un 
titre  patrimonial  aux  ordres.  La  congiéga- 
lion    encourageait   ses   membres  à   publier 
leurs  compositions  ,  mais   après  examen  du 
deux  réviseurs  et  avec  permission  du  géné- 
ral. L'enseigneaientde  ladoctrine  chrétienne, 
premier  but  de  la  cougrégalion,  y  était  aussi 

lions  de  sa  congrégali  n.  Cel.i  ne  peut  s'entendre,  du 
moins,  que  des  consiiiutions  revues  en  1735,  puisc|uo 
nous  voyons  cl-dcsSus  les  conslilulions  latines  citées 
par  le  1'".  Hélyot. 


ry                                  llu;TIll^^.\IK^.  des  im-.orrs  uf.mcif.i  \.                               lU) 

J'oicrcice  nréfTo   cl  on  le  fai«ail  ni.'medans  m.mchcs  et  fèics,  les  matines  de  Noël  et  des 

es  disses    F nlre' 1rs  règles  i-oiir  rins'ruc-  iL-riobrcs,  auxquelles  tous   1rs  clercs  étaient 

lion  il  re.iu.alion  des  é.oliers  .lan'^  les  col  -  Imus  dassisler  en  surplis.  Les  clercs  qui  né- 

Irces    ond.il  dis  incuer  celles  (|ui   presrri-  laient   point   dans  les  ordres   sacres   étaient 

vent" de  donner  des  suiels   religieux  et  nio-  exhorics  à  réciter  tous  les  jours,  et  surtout 

raux  pour  inaliéres  de  thèmes,  de  former  les  les   dimanches  cl  fêles,  le  bréviaire  romain  ; 

iêuncs  cens  à  la  dévotion  à  la  sainte  Vierge,  les  laïques  étaient  obliges  à  dire  chaque  jour 

(te  les   f  lire  se  confesser  lous  les   mois,  etc.  ou  l'office  de  la  sainte  \  lerge,  ou  le  chapelet. 

On  idmellal  aussi  des  pensionnaires  adultes,  Les  prêtres  de\  aient  tous  les  jours  célébrer, 

niai'sdes  mesures  étaient  prescrites  p>ur  ne  et   les  au'res    entendre  la  messe.   La  table 

les  laisser  pas  induencer  l'esprit  ou  les  per-  était  de  forme  oblonguc  et  tous  mangeaient 

sonnes  de  la  romnuinaule.  Des  mesures  non  du  même  côté,  comme  dans  les  communautés 

moins  sa-'es  reuardaienl  aussi  ceux  qui   de-  régulières.  On  servait  à  chacun  séparément 

\ aient  être  employés  à  la  préd  cation  ou  auv  sa  portion.  On  ne  faisait   pas  abslinentc  de 

missions.  La  soutane  des  clercs  était  cousue  viande;  r.n  permettait  dirficilcmcnl  de  man- 

à  la  haute  ur  de  deux  pieds,  et  le  reste  se  hou-  ger  en  ville.  Le  jour  anniversaire  de  la  mort 

tcnnail  jusqu'en  haut.  Le  manteau   était  ite  de  César  de  Bus  se  faisait  la  rénovation   des 

même  lim"uenr.  .\  dater  de   1733  l'habit  des  vteux.  Les  clercs  et  les  frères  drvaient  com- 

convi  rs  devint  une  lunicelle  et  un  manteau  munier  lous  les  dimanches  et  fêtes,  à  moins 

de  drap  noir  descendant   un  peu  au-dessous  que  le  confesseur  n'en  jugeât  autrement.  Hors 

du  genou,  mais  il    pou^ait   être  p'us   court  le  temps  de  Pâques  et  deux  semaines  avant 

pour  les  voyages.  Comme  la  plupart  des  usa-  r.\vcnl  et  le  Carcmc,on  faisait  abstinence  de 

ges  monastiques  ne   sont  plus  connus  que  viande  le  mercredi  et  jeûne  le  vendredi;  on 

par  une  Iradiliin  qui  saiTa^blit   de  plus  en  jeûnait  aussi  la  \eille  de  la  mort  du  vénér,> 

plus  .   nous    affecterons    d'en    consigner  iei  hle  César  de  lîns,  si  elle  ne  tombait  pas  dans 

quelques-uns  de  la  Doctrine  Chrétienne.  Les  l'oeiave  de  Tàquos.  et  trois  fois  la  semaine 

lettres  adressées  au  général  portaient  pour  pendant    l'Avent.    Les    exercices   religieux 

suscriplion  :  A  mon  très-révérend  l'ère  [Admo-  étaient  lous,  en  un  mot,  marqués  au  coin  do 

(liim  iccroido   l'alri  meo);  :\u\   sniiérieurs  l'esprit  de  prudence   cl  de  sagesse  ;  l'esprit 

majeurs  :  A  inan  léiérend  Pire;  ù  un   con-  jaiiséiiist  ■  n'y  par.iît  en  rien. 

fière  prêtre  :  .tu  révérend  Père Lcrivant  Néanmoins,  à  l'époque  où  les  constitutions 

à  un  simple  clerc  ou  â  un  frère  laïque,  ils  furent  de  nouveau  publiées,  le  jansénisme 
disaient  :  Mon  cher,  o'u  Ircs-liouuré  confrère,  dominait  une  grande  partie  de  la  congréga- 
ou  frère,  scion  l.i  personne.  On  se  disait  fils  lion.  Son  histoire  serait  mal  connue  si  nous 
e"  Jésus-Christ  en  Unissant  une  leliic  adres-  n'en  donnions  iei  des  preuves  frappantes  par 
sée  au  supérieur  pro;)re,  et  sculcmcnl  seivi-  des  détails  curieux  et  intéressants.  L'esprit 
rciir  en  écrivant  à  un  nuire.  Ainsi  les  termes  de  nouveauté  dominait  surtout  ilans  les  pru- 
de con/';  èr«  rn  Jésus-Christ  ou  de  scrvilcur  vinces  de  Toulouse  et  de  Paris.  Gràc  à  Dieu, 
terminaient  les  lettres  écrites  entre  simples  la  province  d'Avignon  était  moins  infectée. 
Doctrinaires,  selon  qu'elles  sadressaicnl  aux  cl  devait  sans  doute  cet  état  inei  |.  iir  à  des 
prêtn-s  ou  à  d'autres,  l'.n  tête  de  chaque  let-  suj^^'ts  italiens  quelle  renfermait  dans  son 
tic  él  lient  ces  mois  :  limediclus  Hens;  le  gé-  sein,  el  qui  faisaient  partager  leurs  bons  sen- 
néral  seul  inellail  :  l'ax  Chrisli.  On  portait  le  timenls  à  leurs  confrères, 
bonne  t  carré  à  tous  les  everciccs,  etc.  La  pu-  Le  chapitre  général  se  tenait  o'dinaire-- 
nition  des  fautes  se  faisait  à  peu  prèscouime  ment  dans  la  maison  de  Saint-Charles,  à  Pa- 
ilaiis  les  nionasièros.  Aux  liois  vœux  de  ris.  Un  chapitre  devait  se  tenir  en  17'i,'? ,  el 
auvreté,    de   chasteté  et    d'obéissance,  les  l'autorité,  comme   tous    les    h  mimes  judi- 


l 


loclrinairet  ajoutaient  le  vœu  de   stabilité,  cieux,  craignant  que  le  jansénisme  n'inlluàl 

lies  vœux  étaient  Siinjdes,  el,  comme  l'a  dit  trop  mallieureuseinent  sur  les  opérations  de 

Ilelvot,  l'é'at   delà   congiégnlion  était  sim-  la  congrégation  s'il  se   tenait   au    lieu    ordi- 

l'Ieincnt  séculier,  l^lle  prit  la  mesure  de  lier  n.iire  ,   le   fit   transférera  Ueaucaire.  Le   I'. 

iiinsi   ses  membres   par  des   engagements,  Jeaumc,  général,  obtint,  d'accord  avec  le  dé- 

pan  e  que  l'ingrate  défection  de  ceux  (jui,  finiluire,  un  bref  du  pape,  cl  le  chapitre  qui 

après  avoir  été  nourris  par    elle,  usant    de  devait  se  tenir  au  mois  île  septembre  l"'i3  fnl 

leur  litierlé,  l<i  .piiltaienl,  lui  faisait  souffrir  remis  au  mois  do  mai  17'iSt,  non  sans  la  mé- 

Irop  de  perles  et  d'inconvénients...  /s.r  miil-  dialion  de  la  cour  de  France,  qui   intervint 

tnrum  quos  (durarrrnt  inçiratn  drfrctione  mu'-  par  le  crédit  de  Boyer,  ancien  évéque  de  Mi- 

tiim  lidrimenli  pnticlinlur...  (élément  \  avait  repoix, que  réclamèreiil  les  Doctrinaires  bien 

riéel.iré  que  la  dispense  de  ce  viru  de  slabi-  pensants.  On  fit  venir  le  P,  \alenlin,  proeu- 

lilé   rciilerniait  aussi   celle  des  trois   auires  reur  général  en  cour  de  Kome,  (|ui  s'eiiten- 

«(TMix,  Les  Doctrinaires  se  levaient  à  quatre  dit  avec  le  nonce,  le    cardinal   de    Tenein  el 

lieures,  faisaient  leur  lit  et  leur  cliambi  e,  et  lîoyer,  pour  éloigner  du  clia|)itre  il  des  eni- 

,i  la  seconde  «loche  se  rendaient  à  re>ercice  plois  les  hommes  opposés  aux  décisions  du 

lie  l'oraison.  Il  la()uelle  lis  vaquaiint  une  de-  ll''glise,   el   pour    soustraire   l'assemlilee    à 

mi- heure.    Le  soir   avant  le,  soujer  ,  ils  ré-  riiilluence  qu'elle  eût  subie  à  Paris.  Il  y  cul 

pétaient  le  même  exercice  [lendant  le  même  donc  des  Icllres  de  carliet  <>\|iediées  à  ce  su- 

••np.ice  de  temps.  Les  confrères  engagé-,  dans  jet,  La  première,  du  17j.in\ier  17ii'i-,  portail  : 

les  ordres  ►acres  récil.iienl    l'ofliee  rom.iin,  n....  Informés  que  le  chapitre  général  de  vo- 

m  larti'tulier,  si  ce   n'tot  les   vêpres  des  di-  ire  congrégation  doit  dtre   lenu  au  mois  de 


Cl 


DUC 


DOC 


f52 


mai  prochain,  nous  vous  faisons  coUe  litire 
pour  vous  dire  que  noire  intention  esl  qu'il 
ne  soil  pas  assemblé  à  Paris;  cl  nous  vous 
ppruieKoiis  seulement  de  le  tenir  dans  quel- 
qu'un" des  maisons  de  votre  ordre  des  pro- 
vinces d'Avignon  ou  de  Toulouse.  Noire  in- 
tention est  aussi  qu'il  ne  soit  élu  ou  nommé 
aux  charges  de  supérieurs  et  autres  de  voire 
congrégation,  que  des  religieux  qui  aient 
donné  des  preuves  suffisantes  de  leur  sou- 
mission aux  décisions  de  i'iîglise  et  aux.  bul- 
les apostoliques,  et  qui  justilient  de  leur  si- 
gnature du  formulaire  ;  et  nous  vous  man- 
dons et  ordonnons  de  tenir  la  miin  à  l'exé- 
cution de  ce  que  nous  jugeons  à  propos  de 
vous  prescrire  à  ce  sujei.  Si  n'y  faites  faute, 
car  tel  est  notre  plaisir.  » 

Une  seconde  lettre  fut  adressée  au  P.  J  eau  me, 
général,  en  ces  tormos  :  «  Cher  et  bien-amé, 
le  chapitre  général  de  votre  ordre  devant  se 
tenir,  à  la  fin  de  ce  mois,  dans  la  ville  de 
Beaucaire ,  noire  intention  est  que  tous  les 
religieux  vocaux  qui  doivent  y  assister  dé- 
clarent avant  les  élcclions  leur  soumission 
aux  bulles  apostoliques  et  au  formulaire,  et 
que  ceux  qui  n'auront  pas  fait  ladite  soumis- 
sion ne  puissent  être  élus  dans  aucune  charge 
et  dignité  de  l'ordre.  Si  n'y  faites  faute  ,  etc. 
Donné  à  Versailles  le  deuxième  jour  du  mois 
de  mai  17V1.  »  Le  môme  jour,  lettre  à  M.  l'ar- 
chevêque d'Arles,  nommé  commissaire  royal 
au  chapitre,  cl  conçue  en  ces  termes  :  «  Mon- 
sieur l'archevêque  d'Arles,  Ayant  donné  mes 
ordres  pour  que  le  cliaiiitre  général  de  la 
Doctrine  Chréiienne  se  tienne  dans  la  ville 
de  Bancaire,  et  étant  informé  qu'il  doil  s'y 
ouvrir  incessamment,  mon  intention  est  que 
vous  y  assistiez  de  ma  part  en  qualité  de 
commissaire,  et  que  vous  déclariez  que  tous 
ceux  qui  ne  sont  pas  soumis  aux  bulles  apo- 
stoliques et  au  formulaire  ne  pourront  élro 
élus  dans  aucune  charge  et  dignité  de  l'ordre. 
Mon  intention  est  au  surplus  que  ceux  qui 
composeront  ledit  chapitre  général  aient  à 
se  conformer  sans  aucune  difficulté  à  ce  que 
vous  leur  ordonnerez  de  ma  part.  Sur  ce  je 
prie  Dieu  qu'il  vous  ail,  Monsieur  l'arche-. 
véque  d'Arles ,  en  sa  sainte  garde.  A  Ver- 
sailles, elc.  »M.  de  Saint-Florentin,  ministre, 
écrivait  on  outre  au  P.  Jeaume:  «Mon  révé- 
rend Père,  Je  vous  adresse  les  ordres  du  roi 
pour  la  tenue  de  votre  chapitre  général. 
Vous  ne  manquerez  pas  de  vous  y  confor- 
mer. S.  M.  a  chargé  M.  l'archevêque  d'Arles 
d'y  assister  en  qualité  de  son  commissaire. 
Votre  premier  soin  en  arrivant  à  Beaucaire 
sera  de  voir  ce  prélat  et  de  vous  concerter 
avec  lui,  tant  pour  l'ouverture  que  sur  les 
autres  opérations  à  faire  pendant  la  tenue 
de  voire  chapitre.  Je  suis ,  etc.  » 

Il  est  évident  que  des  mesures  de  cette 
sorte,  prises  par  l'autorité  civile  ,  ne  lais- 
saient guère  de  liberlé  aux  opérations  du 
chapitre,  et  elles  ne  peuvent  se  justifier  ici 
que  par  le  concours  qui  régnait  dans  ces  me- 
sures entre  l'autorité  civile  i,t  l'autorité  ec- 
clésiastique ,  dont  celle-là  ne  f.iisait  que 
iiiainlenir  lis  prescriptions.  Ce  n'est  qu'en 
procédant  ainsi  que  le  prince  peut  ae  uion- 


(rer  l'évé(iue  du  dehors  :  il  doit  si*  borner  à 
âlre  le  bras  droit  et  agissant  de  l'c'v/'que  dt 
dedans,  de  l'autorité  des  chefs  des  diocèses 
et  surtout  du  souverain  pontife.  Ces  mesures 
rigoureuses  monireni  aussi  à  quel  point  en 
étnil  venue  une  congrégation  contre  laquelle 
il  fallait  les  prendre.  Nous  avons  affecté  d'en 
parler  avec  une  certaine  étendue  ,  et  nous 
aurons  encore  à  venir  sur  des  faits  analo- 
gues, par  exemple  en  parlant  de  VOrnioire  , 
et  nous  voulons  par  là  donner  une  idée  de 
l'esprit  qui  s'était  glissé  dans  un  grand  nom- 
bre de  congrégations  religieuses  au  demi  t 
siècle. 

A  Beauca  re  d'antres  mesures  furent  prises 
en  outre  au  chapitre  général.  Nous  dirons  , 
par  exemple,  que  le  P.  LafTont,  recteur  de 
Moissac  ,  l'un  des  capitulaires  ,  eut  ordre  de 
se  retirer  sans  délai  en  sa  maison  de  Moissar. 
Il  en  demanda  la  raison  ;  le  serrélaire  de  M. 
Boyer  la  lui  donna  et  disait  dans  sa  réponse: 
«  Ceux  d'entre  vos  confrères  qui  gémis- 
sent de  voir  que  votre  congrégation  ne  se 
distingue  presque  plus  aujourd'hui  (jne  par 
son  opposition  aux  décisions  du  chef  et  liu 
corps  des  premiers  pasteurs,  ont  pris  les  me- 
sures les  plus  efficaces  pour  empêcher  que  le 
gouvernement  n'en  fût  confié  à  des  persoi.nes 
portées  à  entretenir   parmi    vous   un  esprit 

d'indépendance  et  de  rébellion U.  Héliot, 

secrétaire  de  M.  l'ancien  évoque  de  Mire- 
poix.  A  Paris,  ce  1"  juin  I7'ii.  »  Pareil  ordre 
donné  au  P.  Delfour,  définitcur  de  la  pro- 
vince de  Toulouse  ,  secrétaire  de  la  congré- 
gation et  du  chapitre  général  ,  pour  qu'il  se 
retirât  à  Gimon  ;  pareil  ordre  au  P.  Préjean, 
député  de  la  province  de  Paris,  pour  qu'il  se 
retirât  à  la  maison  de  Noyers,  en  Bourgogne. 

Dans  l'indiction  du  chapitre  ,  les  récalci- 
trants avaient  vu  ,  sinon  avec  surprise  ,  du 
moins  avec  peine  ,  qu'un  vicaire  général  se 
trouvât  compris  au  nombre  des  vocaux.  C'é- 
tait le  député  d'une  province  italienne  dont 
nous  allons  parler.  La  plupart  des  maisons 
des  provinces  de  Paris  et  de  Toulouse  signè- 
rent des  actes  d'opposition  et  de  protestation, 
dont  elles  chargèrent  leurs  députés  au  cha- 
pitre général.  Ces  protestations  étaient  contre 
l'admission  au  chapitre  du  vicaire  général  de 
Rome  en  qualité  de  vocal,  et  contre  l'admis- 
s'on  de  la  bulle  Unigenitus.  Elles  portaient 
trenle-six  signatures  de  la  province  de  Paris, 
1,1  moins  nombreuse  des  trois;  cinquante  et 
wne  de  la  province  de  Toulouse  ,  prêtres, 
sous-.liacres  et  clercs;  cinq  même  de  la  pro- 
vince d'Avignon.  La  cour  avait  f  urni  la 
somme  de  mille  écus  pour  les  frais  du  cha- 
pitre, qui  s'ouvrit  le  30  mai.  On  lut  le  brel 
(lu  pape  qui  avait  prorogé  le  chapitre  ,  et  à 
l'occasion  de  celte  pièce  le  P.  de  la  Molhe, 
provincial  d'Avignon,  présenta  une  requête 
(qui  fut  a  imise ,  et  ce  nous  semble  avec  rai- 
son) tendante  à  ce  qu'il  fût  statué  que  le  gé- 
néral et  son  définitoire  ne  pourraient  sollici- 
ter aucun  bref  sans  la  p.irticipation  des  trois 
provinces.  Dans  le  discours  de  Mgr  d'Arles, 
commissaire,  on  doit  remarquer  ces  paroles  : 
«  Hélas!  mes  Pères,  \ous  le  savez  encore 
mieux  que  moi,  et  je  me  fliUle  que  vous  en 


07,  im.iKiNNAmK  ni:s  ouiir>Es  rvEi-iciEix  ci 

pemissfz  aulanl  que  inoi-mi'inc:  liol.is!  il  ne  nvcc  les  Doctrinaires  il-  Trancc.  Colle  union 

reste  jilus  dans  votre  lonprcgalion  que  qnci-  lut ,  à  ce  qu'il  para'l  ,  efTiuluéc  ,  et  c'cbi  en 

qucs  étin(el!c<  de  ce  feu  primitif,  seul  capa-  conséquence  de  ce  résultat  que  sera  venu  an 

ble  lie  11  perpé'uer.  »  chapitre  général  le  foiidi^  de  pouvoiis  du  vi- 

L.s  Pères  de  la  province  d'Avijfnon  ,   bcr-  caire  général  de  la  province   de   Home;   ce 

ceau  de  l'institut,  et  rons  rvanl  mieux  iiuc  (lui    lerait    compter   dans    la    cony;ré5;a'.ion 

les  autiC'^   les  sentiments   de   soumission   à  quatre  provinces  au  lieu  de  trois.   On    les  y 

rivalise  cl  les  étincelles  de  ce  feu  priinllif.  fi-  c  •inptail  en  ciïet  ,    cl  même  o  i  eùl  dû  peul- 

rcil  tout  leur  possible  pour  (jue  le  résultat  être  en  compter  cin(],  puisqu'il  y  avait  aussi 

du  cliapitre  fut  <à  lavanlajie  de  leur  congre-  une  province  de  la  Doctrine  Chrétienne  d'ita- 

gaiion,  et  ils  y  réussirent,   l'ool  se  pas-a  as-  le  au  royaume  deNaples;  unis  nous  nepou- 

sez  Iranquilicmcnl  ,  bien  qu'on  y  eùl  laissé  vous  dire  si  ces  mesures  furcnl    reconnues 

quc'<|ues-uns  des  opposants  pour  la  canoni-  par  toute  la  con;;régalion.   Nous  allons    eu 

cité  des  élections.    Les  Pères  qui  ne  voulu-  outre  en  nommer  bientôt  une  autre, 
renl  pas  sisner  et   se  soumettre   furent  dé-  Les  Doctrinaires   n'acitirilaienl  la  voilure 

ilarés  inhabiles  à  posséder  les  charges.   La  pour  les  voyages  ((u'aux  prèlres  seuemenl  ; 

procurati   11  du  P.  l'eilloni.  vicaire  çénéial  de  il  est  vrais  tnlilahle    (|;ie   l'on   aura   inodilié 

la  pro\ince  romaine,  du  10  m  li  \'Vy ,  au  P.  cel  usage  dans  les  derniers  temps.  Ces  Pères 

de  la  .Mothe,  prov  iiici<.l  d"Avi:;non,  pour  agir  dirigoaicnl  aussi  ,  c. mime   les  Oraloriens  et 

en  son  nom  dans  le  chapitre,  celle  procura-  suit  lulles Jésuites, des  eongrégalions  d'iiom- 

lion,  disons-nous,  fut  [ncscnice  cl  admise  à  mes,  si  propres  à  maintenir  tes  habitudes  el 

la  plur;ililé  (les  \ui\,  après  une  longue  dis-  le  goût  de  la  piété. 

cussion.  A  la  placi-  liu  P.  Jeaume  ,  dont  le  Celle  contagion  du  jansénisme  qui  avait 
temps  était  csp  ré,  on  élut  pour  général  le  fail  tant  de  raviiges  dans  la  socijté  de  la 
P.  Mazenc,  supérieur  du  séminaire  de  Tar-  Doctrine  Chrélienne  ,  n'y  dominait  plus  sur 
lies,  ()rovince  do  Toulouse  ,  iiommo  lecoin-  la  lin,  et.  dans  sa  visite  au  collège  d  •  La  Flè- 
iiiandable  par  se- bons  senlime.its  el  son  op-  clie  ,  le  général  ,  ayant  culendu  un  ancien 
position  au  jansèiiiMiii',  el  qui  jouissait  d'une  parler  d.ins  le  sens  de  l'opposition  à  la  bulle, 
pension  de  VOO  li\rcs  sur  lévèchè  de  Corn-  le  reprit  fortement  de  lenir  ainsi  devant  les 
miiige.  Le  1'.  Miileti  fut  luiminè  assistant  de  jeunes  gens  un  langage  conforme  à  dos  scn- 
ia  province  d'A>igiion  ;  le  P.  Valellc  fut  conli-  limeiits  qui  n'élaiciit  pas  ceu\  de  la  corpo- 
iiué  assistant  île  la  province  de  Toulouse,  et  ration.  Néaumoiiis  il  y  eut  jiisiiu'au  dernier 
le  P.  Morean,  recteur  de  la  maison  de  Saint-  moment  des  jansénistes  déclarés  ;  nous  eu  ci- 
Cbarles.  assislani  de  la  province  de  Paris.  leroas  un  exemple  l'raiipiiit. 
Le  P.  \'aleiilin  fut  continué  dans  sa  place  La  destruction  des  Jésuites  avait  porté  un 
de  procureur  général  en  cour  de  Uome  ;  le  coup  funesle  aux  Dortiinaires  coiiiine  au\ 
1*.  \au\eray,  procureur  général  en  France,  autres  congrégations  ense;gnantes,  non-seu- 
et  le  1'.  Itacol  s,  secrèlaire  général.  Tous  ces  leinent  sous  le  rapport  ibrclieu,  puisiiue 
honiiiH'S  étaient  aciuellement  soumis  à  la  toute  i'Eglise  s'en  r.  ssen;it,  mais  sous  le  riji- 
liuile,  cl  plusieurs  avaient  toujours  montré  port  de  l'intérêt  d'e\i>lenrc  et  île  force  mo- 
de hons  seiitimrnts.  Dans  le  chapitre  on  raie.  Us  voulurent  prendre  el  prirent  eu 
porta  plusieurs  decrels  pour  remédier  aux  cflel  plusieurs  des  collèges  abamloniics  par 
dangers  du  temps.  Leurs  dispositions  gêné-  la  célèbre  compagnie,  et  la  disette  ile  bous 
rail  s  étaient  de  s'assurer,  avant  les  chapi-  sujets  et  même  de  suj.'ls  (luelcomiues  aurait 
très,  les  nominations  aux  emplois,  remis-  dû  leur  faire  envisager  celic  nouvelle  lâche 
sinn  des  voix  ,  elc. ,  des  sentiments  de  sou-  avec  clTroi.  Ils  curent  l'honneur  d'être  char- 
mission  au  foMiiiil  lire  d'Alexandre  Vil  el  à  gés  du  faueux  collège  de  La  Flèche.  Nous 
la  bulle.  Le  chapitre  fut  clos  par  un  discours  n'avons  rien  à  dire  contre  leur  administra- 
<|ue  prononça  rarche\êque  d'Arles,  .M.  Ci-  lion  dans  celte  maison,  ni  sur  leur  eiiseigne- 
(.aull  de  liellefoiil.  ment.  Ils  auront  lâché  sans  doute  de  se  tenir 

Aux  chapitres  généraux  qui  élurent  suc-  au  niveau  de  leurs  illustres  devanciers.    Les 

ressiyeiiiint  les  prédécesseurs  du  P.  ^^l/cnc,  supérieurs  mirent  à   la  tête  du  collège  le  I*. 

c'esl-a-dire   le    P.  (Jriffon,  qui   fut  maintenu  Corbin  ,  liouime  d'un  grand  mèiile  ,  qui   lut 

pendant   douze   ans;   le  P.  Chaus-ac  ,    le  P.  enstiile  nommé  précepteur  du   dernier  dau- 

llacrarére  el  le  P.  Jeaume.  tous  soumis  aux  pliin  cl  niourul  à  Meudon.    Le  P.  Corbin   fut 

décisions  de  l'Lglisc,  il  y  a\ail  eu  aussi  des  remplacé,  en  qualité  de  principal  à  Li  Flè- 

oragcs    qui  ,    sans  être   aussi    \ii. lents  qu'à  die,  par  Noèl-tiabriel-Liice  Viliar.  qui  prêta 

iJeaucairc  ,  étaient   bien    luin   d(r   l'ediliaiite  le  serment  à  la  constitution  civile  du  clergé, 

union  qui  doit  régner  dans  de  telles  assem-  fui  sacré  à  P.iris,  le  li  mai  IT'.II,  pour  l'esê- 

l-lées.  Dans  quelque^  maisons  la  soumission  ché  de  la  Majenne,  donl  le  siège  laclice  était 

a  la  bulle  ne  trouvait  aucune  résistance;  en  à  Laval  ;  fut   conventionnel  ,  déclara   Louis 

p'usieurs  autres  il  y  eut  des  interdits  nom-  \\\   coupable   et   \  ota  sa   détention;   devint 

II;  eux   lancés  par  des   êvêques.    Des  supê-  membre  ilu  corps  législilif,   renonça   à  su» 

nciirs  (.u   professeurs   lurent  éloignés  ,    des  évêrhe  ,  abdiqua  se.s  fondions  el  mourut    le 

tidlege-,  de  jeunes  gens  évacués,  etc.  -iu  août  IK2().  C'est  ,    croyons-nous  ,  le   >eul 

Deux  nns  avant  le  (hapiire  de  lîeaucairc,  évêque  de  celle  sorte  qu'ail  donne  la  congre.- 

le    P.  Jeaume,  général  .  se   rendit  à  Komc  gali  m  de  la  Doctrine  Chrétienne,  .|ui  se  se- 

pour  travailler  à  la  béalilicaliou  de  César  de  rail  volonlieis  passée  d'une  soinblablo   dis- 

Uu»  cl   a   runioii   des  Doctrinaires  italiens  liucliou. 


cri 


O'JG 


DOC 


fiG 


L'onJonnaiice  <ie   Louis    XV  (1708)  et  la 
crc.ilioii  (le  la  coininissioii  pour  les  réniilicîs 
produisirent,  comme  oii  s.iil,  un  elTcl  alTreuf 
sur  toutes  les  coiigrég.iliiins  religieuses;  la 
Doctrine  Ciiréiienne  fui  une  de  celles  qui  en 
furent  le  plus  largement  aiteinies.  Comme 
un  givind  nombre  d'instituts  ,  elle  réédita  et 
refondit   ses  constitutions.    Oelte  opération 
fondamentale  se  fil  ;iu  chapitre  général  qui 
eut  lieu  à  Paiis  en  1782,  et  elles   furent   pu- 
M'ées  l'iinnée  suivante.  N^ius   ne  répéterons 
point   ce   que   ir  us    avons  dit   ci-ilessus  en 
l'analyse  des  règles,  qui  i  estèrent  les  mêmes 
au  fond;   mais  nous  ferons  connaître  ici  les 
principales  modifications  qu'elles  subirent  cl 
(jiii  peignent  bien  l'cspiit  de  l'époijue  et  de  la 
ntaliieureusc   congrégation.   Les  frères  con- 
vcrs  ne  sont  plus  obligés  à  la  recitation  de 
l'o  fice  de  la  sainte  Vierge  ou  du  cbapclet  ; 
il  reste  un  chapitre  consacré  à  traiter  de  la 
vertu  d'obéissance  ;  ci'ux  qui  traitaient  de  la 
chasteté  et  de  la  pauvreté  ont  disparu.   On 
ne  fait  plus  de  vœux,  jias  même  celui  de  slu- 
bitito.  Dans  le  chapitre  de  1776,  tenu  à  Paris, 
il  f.t  déi  idé  qu'on  en  demanderait  l'abolition 
à  Pie  \  11,  qui  l'accorda  en  elîct  par  un  bref 
du  IV  mars  1783.  Après  deux  années  de  no- 
viciat, passées  à   la   maison    même  du   «o- 
vii'iat   ou  dans  une  autre  de  l'instiiut,   celui 
qu'on  jugeait  propre  à  c  re  admis   prenait, 
chaque   année ,    l'engagement  de  ne   point 
abandonner    la    charge    qu'on    lui  confiait, 
avant  les   grandes    vacances   suivantes ,    et 
sans  en  prévenir  la  congrégation  ;  et  s'il  ve- 
nait à  sortir  avec  ces  forniaJiiés,  il  était  tou- 
jours regardé  conin:e  membre   de  l'institut, 
^qui  lui  iniliiiuait  même  une  maison  connue 
maison  d'aliilia  ion,  sM  le  désirait,  et  lui  ac- 
cordait certains  privilèges  ,  comme   le  droit 
de  voler,  de  rentrer  un  jour;  mais  il  fallait 
pour  cela  que  le  confrère  sorti  renouvelât  sa 
demande  tous  les  ans.  Les  bénéfices  ne  sont 
plus  unis  nécessairement  à  la  congrég  ilion  ; 
les  membres  peuvent  en  jouir  sans  cela.  Par 
lettres  patentes  du  28  juin  1778,  Louis  X\"5 
<lèclarail  les  menibrcs  de  la  congrégation  de 
1,1  Doctr  ne  Chrétienne  propies  à   recueillir 
les  successions,  etc.,  et  aux  antres  bénelices 
des  cflels  civils.  Il    paraît  (lu'oulre   les    pro- 
vinces (|ue  nous  avons  ci-i  es>us   indiquées, 
la  con^^régation  avait  sur   la   fin  créé  ceLe 
diie  de  La  l'ièchi',  car  nous  la  trouvons  dé- 
signée  avec   les  autres  dans   les    nouvelles 
constitutions. 

La  Doctrine  Chrétienne  avait,  dans  les 
derniers  temps,  accepté  la  direction  des  col- 
lèges de  Hourges  et  de  Moulins.  Klle  possé- 
dait au''Si  le  collège  d'Avallnn,  où  elle  comp- 
tait au  noaibrc  de  se^  membres  Koyer-Co,- 
lard ,  publicisle  ou  politique  fort  renommé 
dius  ces  derniers  temps,  et  qui  a  été  fort  nui- 
sible à  la  monarchie  des  Bourbons.  C'est  de 
IVoyer-Collard,  qui  fut  réellement,  non  ec- 
clésiastique,  mais  nienibie  de  la  congréga- 
tion des  Doctrinaires  ,  qu'est  venue  celte 
nuance  de  parti  polit. que  qu'on  appelait  des 
/>(Mrr«M(u'res,saas.savoir  ni  pourquoi  ni  à  quoi; 
car  on  nommait,  sans  aucun  bon  sens,  des 
Doctrinaires  certains  hommes  que  l'aïuour- 


propre,  la  modéraiion  naturelle,  le  dépit  ou 
l'impuissance  ,  retenaicul  dans  une  sorte  de 
réserve  constitutionnelle. 

Nous  devons  citer  ici  l'exemple  fameux  de 
l'esprit  janséniste  maintenu  dans  la  congré- 
gation, que  nous  avons  promis  ,  c'est  celui 
du  P.  Rlinard,  l'un  des  oracles  du  parti  et  de 
l'Eglise  constitutionnelle.  Né  à  Paris  en  172i, 
Louis-Guillaume  .Minard,  après  sa  philoso- 
phie, entra  au  noviciat  de  la  Doctrine  Chré- 
tienne, qui  comptait  alors  des  jansénistes  zé- 
lés, tels  (lue  le  P.  Jard,  le  P.  de  Saint-Clenis, 
le  P.  de  Convenance  ,  etc.,  et  donna  ardem- 
ment lui-même  dans  leurs  opinions.  Quoique 
interdit  par  M.  de  Juigué,  il  fut  sur  les  rangs 
de  ceux  que  ses  confrères  voulaient  choisir 
pour  leur  général  en  177S.  Il  vécut  retiré 
dans  la  maison  du  Petit-Bercy,  au  faubourg 
Saint-Antoine,  où,  toujours  interdit,  il  con- 
tinua de  diriger  un  grand  nombre  de  ses  ad- 
hérents. 11  embrassa  avec  chaleur  le  parti 
de  la  constitution  civile  du  clergé  et  fut  le 
premier  curé  constitutionnel  de  Bercy,  qui 
n'était  pas  alors  paroisse,  mais  qui  l'est  de- 
venu depuis.  Etant  aussi  une  des  colonnes 
de  la  nouvelle  Eglise  de  Paris  ,  il  se  trouva 
encore  au  nombre  des  candidats  entre  les- 
quels on  devait  choisir  un  successeur  à  l'évc- 
que  Gobel.  Minard  mourut  le  22  avril  I7'.)8. 
Il  n'a  laissé  cjue  deux  volumes,  l'un  intitulé: 
Avis  aux  ndèles ,  1795;  l'autre,  Supplé- 
ment, etc.  11  y  prêche  un  jansénisnio  pres(iue 
aussi  cru  que  celui  du  P.  (ierberon  dans  son 
Miroir  de  la  Pieté ,  et  engage  à  se  confesser 
aux  préties  jansénistes,  quoique  interdits. 

Tous  les  Doctrinaires  n'avaient  pas,  comme 
nous  l'avions  cru  ,  prêté  le  serment  civique, 
et  il  parait  que  le  jansénisme  ne  dominait 
plus  dans  leur  corps,  où  il  avait  seulement 
laissé  les  traces  et  les  effets  de  son  action 
corrosive.  A  côté  du  P.  Minard  nous  avons  à 
n  immer  le  1'.  llioulx.quia  vécu  dans  le 
même  temps  que  lui.  Prédicateur  célèbre  à 
Paris,  le  P.  îvaoulx.  Doctrinaire,  vivait  à  la 
maison  de  Saint-Charles  ,  dans  celte  ville. 
Les  Pères  de  !a  congrégation  étaient  restés 
dans  celle  maison  et  ne  la  quittèrent  qu'au 
mois  d'août  1792,  quand  on  (il  la  recherche 
des  prêtres  (lui  avaient  rel'u>é  leur  adhésiork 
à  la  constitution  civile  du  clergé  ;  le  P. 
llaoulx  était  de  ce  nombre  ;  il  se  cacha  chez 
deux  pcr.'iOiines  ,  et  faisait  nue  course  pour 
resercice  du  saint  ministère,  quand  il  fut 
reconnu  cl  trahi  par  un  habitant  de  l'ile 
Saint-Louis.  Dénoncé, arrêté,  incarcéré,  puis 
interrogé  et  absous,  il  était  readu  à  la  li- 
b  rté,  ()uand  son  dènoncialeur,  irrité  de  cet 
acquilleinent  ,  imagina  d'aller  débiter  dce 
blasphèmes  contre  Jésus-Christ  et  la  religion 
en  présence  du  P.  Kaoulx,  qui  allait  sortir  de 
la  salle,  mais  qui  crut  roecasion  toute  natu- 
relle de  def^endre  la  vérité,  en  parlant  el 
prêchant  là  sans  crainte.  H  fut  arrêté  de 
nouveau  et  conduit  à  Saint-Lazare,  où  tant 
d'eeclesiasli(ines  étaient  renfermés,  il  fut 
condamné  à  mort;  mais  Dieu  lui  réservait 
une  épreuve  terrible:  il  reconnut  dans  la 
charrette  qui  le  conduisait  à  la  mort  sou 
propre  frère,  qn',  la  veille,   avait  été  cou- 


f.7 

dniniic  dans  une  .iiitrc  iliainliri'.  I  ous  ileu\ 
furcnl  «'xoiu'é'  à  la  harriôre  du  rrâiu-,  où 
poririMil  lanl  ti-i  \irlimos.  l'nis  pir  les  liins 
do  la  naluro  ri  de  r.imilié  pcndaut  la  vie,  i'i 
tnorte  (jnuiiitc  non  sunl  divifi. 

Le  dcriiierucncral  des  Doctrinaires,  loi',  de 
Il.innefous,  homme  esliinable  el  i|iii  n'avait 
emlirassé  ni  les  erreurs  du  j  insénisme,  ni 
celles  de  la  révolution,  mourut  en  ISO.i,  dans 
r.t.ildissemenl  de  I  alibé  Sicard,  à  Paris. 

^ous  ne  connaissons  plus  aujourd  hui 
qu'un  membre  de  la  congregaiiin  delà  Uoc- 
Irine  Clirclienne ,  r'c>l  y\.  l'abbé  Souquelde 
la  l'our,  cuié  de  Saint- Tliouias  d  Aquiii,  à 
l'aris,  (jui  a  peut  être  survécu  à  tous  ses  con- 
frère s,  cl  qui  est  comme  le  leslaniMil  laissé 
par  cette  corporation  savante,  pour  nous 
donner  une  idée  ilc  ses  richesses  littéraires. 
On  en  jugera  par  ce  que  nous  allons  dii  e  des 
lra\aux  de  M.  l'abbe  de  la  l'our.  Ce  p:é  re 
lab  iricux  élail  entré  foi  l  jeune  ilans  l.i  con- 
grégation delà  Doctiiiie  Chrétienne.  (] ni  l'a- 
vait eniplojé  a  renseignement  au  collège  de 
La  l  lèche!  Il  y  résidait  et  était  déjà  nrélre, 
qu;ind  la  révolution  vint  l'arracher  à  sa  so- 
ciété el  sa  vie  paisible.  Il  n'embrassa  puinl 
les  erreurs  du  temps  et  ne  quitta  point  sis 
habituiles  studieuses.  Son  attrait  parliculiiT 
l'a  porté  vers  les  poètes  latins,  et  il  a  publié 
les  traduet  oii<  suivantes  :  1°  La  Christiwte 
de  N'ida  ;  2"  l'Enfantement  delà  Vicrije,  àc 
Siinnazard  ;  3"  /  /;'H/'niH  Jc'sus,  poémo  du  l'. 
5eva,  jésuite  ;  '»"  Saint  IJ  ijdctntlie,  piéme  de 
(îuillaunieleHIanc.évêque  nomme  de  (jr,ls^e, 
mais  qui  ne  prit  |)0'.nl  |iossessioii.  .M.  de  la 
Tour  pub;i,i  ce  poémc  en  l'honneur  de  s.iint 
]|)acinlhe,  par  adulation  pour  .M.  Quélen, 
arclieTécjue  de  l'aris,  (jui  s'a|)pelait  Hy.i  in- 
Ihi!.  li'i  latdieii.  C'est  la  première  iraduciiou 
de  ce  poète  qui  ail  été  publiée;  M.  de  la 
'l'our  la  fil  éianl  encore  à  La  Mèche.  C"  L'E- 
lablit.iement  du  cliristianismc  nit  Japon,  poé- 
nie,  p  tr  . 'million  Franck,  écolier  du  collège 
de-  Jésuites,  à  Liège,  el  élève  de  Fellcr.  7' 
Les  Silc(S,  de  ."^lace.  8"  Lu  guerre  dr  Tripoli, 
poème,  jiar  Cjzdosa,  Portugais.  Ccl  ou\  rage 
est  peu  ciiiinu  en  France.  M.  de  II  Tour  l'cii- 
leiidil  vanier  cl  le  chercha  aussitôt  à  la  Iti- 
hl.othèqueilu  roi,  où  il  ne  le  trouva  |  oint,  cl 
Il  le  lit  venir  de  Li>!)iiniie  ,  pour  lelraduiie*. 
1)'  l'u(  les  t  tins  :  l'c^I  le  nom  (]ue  .M.  de  la 
Jour  donne  à  un  recueil  de  traduit  uns  de 
pornics  moins  volumineux,  el  ijui  sont  au 
nombre  de  six  ou  sept  :  6'ra{ms-/''(i//.icius, 
Acincsien,  Castor,  Les  Tiavnux  d'Hercule, 
Anani/nic,  Curncliiit  Scvcrus  :  \ii  Iraducliun 
de  ce  dernier  a   été  (aile    par  .M.    l'abbé  de 

L grand  «icaireà  Kourges,  que 

M.  Ile  l.i  lour  a  préparé  à  sa  première  com- 
iiiiinion.  Nous  ne  coiin.iiisous  pas  de  traduc- 
teur qui  ail  plus  ni  même  auiant  publié  en  ce 
i;enr.-,  que  ,M.  l'at^be  de  la  Tour.  O,  loge- 
iiaire  a  juurd  hui,  il  se  soiiviciil  qu'il  a  jadis 
passé  d.!,  nuits  à  ces  éludes  di.  ries,  et  quo:- 
i|ue  plue  a  la  létc  d  une  paroisse  el  arri\é 
an  d.  la  de  l'iige  du  repos  .  il  ne  les  quitte 
jamais. iv.int minuit. Ohl  qui  rendra  .1  l'Lglisc 
le*  congregaliolis  religieuses,  lesquelles  lour- 
iiisiaivul  de  tels    liommes  1  Au  tome  second 


ncTioNNAiiiE  id.s  ouimES  rhligielx. 


de  son  Histoire  des  Ordres  reli(iicux,M.  lieii- 
rioii,  p.irlanl  de  la  /^rK/ri/icr/i/t'/i'fnnc.diiiini) 
ipielques  liioiièri  s  sur  rétabli-sement  en  It.v 
lio  que  nous  avons  mentionné  ci-dessus,  el 
dit  ([u'iis  avaient,  j  inle  aux  Irois  frai  ça;- 
ses,  one  pro\  inee  de  Home,  foriiiéo  dans  le 
d(  rnier  siècle  de  huit  mai-ons  que  la  congré- 
gation avail  en  Iialic,  el  de  >ei  t  antres  qui 
lui  furent  données  par  Hiuoil  XIII.  Ces  mai- 
sons étaient  des  collèges  ,  sciiiinuires  on  pa- 
roisses. Nous  ignorons  toujours  ce  qu'elail 
celle  province  de  Naples.  dont  n  ais  avons 
parlé,  elsi  ces  m.iisons  elaicni  celles  de  Doc- 
trinair:'S  italiens  qui  s'él.ienl,  nous  a  l-oii 
dil,  unies  à  celles  de  Fr.mce,  el  possédaient 
le  corps  de  César  de  lins. 

La  maison  de  S. linl  Charles  à  P. iris  èlail 
située  à  l'eslrémilé  supérieure  de  l.i  rue  des 
Fossés-Saint-Victor,  et  eiail  habitée  par  le. 
général,  18  ou  2d  prêtres  environ,  el  un  eer- 
lai.i  noinb  e  de  novici's  ,  qui  payaient  50;) 
livres  pour  l'année  de  ])robation.  Ci  s  con- 
ditions et  le  nombre  des  Pères  avaient  sans 
douleèté  modifiés  vers  la  lindu  dernier  siècle. 
On  remarque  comme  une  chose  singulière 
que  dans  la  chapelle  d(>  la  Doctrine  Chré- 
licnne,  il  y  avait  tous  les  ans  sermon  et  sa- 
lu(  en  l'honneur  du  bon  Larron.  En  1705, 
M.  .Miron,  docteur  en  théologie,  d(!  la  mai- 
son de  Navarre,  légua  sa  bibiiothèque  aux 
l'ères  de  la  Doctrine  (^hrétieniio.  à  condition 
(ju'elle  serait  publique,  lille  était  composée 
do  plus  de  •20,000  volumes,  parmi  lesquels 
il  y  avait  des  éditions  rares  el  le>  maiiusi-rits 
du  savant  abbé  Le  Heuf,  auteur  de  l'Histoire 
du  Diocèse  de  Paris.  I/étahlissen'.ciit  de  lîei  ey 
avait  ii'abord  été  faiià  .Vnloni  auxviB'  siède. 
AL  de  (îondi,  qui  avait  allire  les  Doctrinaires 
dans  son  dio.èse,  esimiiiit  ces  Pères  el  se 
riîlirail  iiuebiuelois  (  liez  eux;  l'auire  e(a- 
blissemeiit,  à  Puis,  était  à  S.iiiit-Juli  ii-des- 
.Ménctriers.  Le  célèbre  Flècliier,  evèqiie  de 
iNîmes  ,  était  meîiibrc  de  la  coiigregalion  de 
la  D.>clrii.e  Chrétienne. 

l\nurcll(s  ccclesinstfjues,  passim.  Tablenn 
historique  et  pillresijue  de  l'aris.  .  par  J.-l!. 
De  Saint-\ictor.  8  vol.  iu-S.  Etat  on  table 'U 
de  la  tille  de  l'aris  ;  par...  iii-.'^.  Constiiuiio- 
nes  Conf/reijationis  Doctiinœ  Christi,  173'j  ; 
exdem  i'iH.Ï.  Histoire  des  Ordres,  p-.ir  M.  Hen- 
rion,  2  vol.  iii-12.  —  Description  de  Paris; 
parPiganiol  de  la  Force.  —  licnsri /ncments 
fournis  par  M.  l'abbé  delà  Tour  ;  —  notes 
prises  passim,  etc.  It  d-k. 

DOCTHINE  CHUEriE.NNt;,  kn  Itu.ie 

(CoNGIliiGaTION    DK    L\}. 

L'uniiin  qu'il  y  a  eu  en  re  les  So:nasqiies 
cl  les  Pères  de  l.i  Docirine  (^hrélienue  en 
France  nous  a  obligé  de  parier  de  ces  drr- 
niers  avant  h  s  Pères  de  la  Doctrine  Clire- 
liennc  en  Italie,  dont  l'institution  est  plus 
ancienne  cl  i|ue  l'on  peut  mettre  au  noinliic 
des  réguliers,  quoiqu'ils  ue  fassent  pas  de 
vonix  solennels;  mais  la  slabililè  à  l.iquelle 
ils  s'engagenl  dans  celle  congrégation  le,  y 
lie  de  telle  manière,  «juc  le  p  ipc  Url:ain  \  |  1 
a  ordonne  que  ceux   iiul  en  sortiraient    ic- 


r.'j 


poc 


ooc 


70 


relient  traités  comme  apostats  etencourraienl 
les  mêmes  peines  que  celles  qui  sont  portées 
par  sa  constitution  du  20  seplemhre  1G27 
contre  les  fugitifs  et  apostats  des  ordres  ré- 
guliers. Quoique  nous  les  rangions  sous  la 
règle  de  Saint-Augustin,  ils  ne  la  suivent  pas 
néanmoins;  mais  nous  ne  parlons  d'eux  ici 
qu'à  cause  que  nous  avons  |>arlé  dansl'aili- 
cle  précédent  de  la  congrégation  qui  porte 
le  même  nom  en  France,  et  qui  a  véritable- 
ment suivi  la  règle  de  Saint-Augustin  pen- 
dant un  temps  assez  considérable. 

Celte  congrégation  des  Pères  de  la  Doctrine 
Chrétienne  en  Italie  commença  d'abord  par 
une  espèce  de  confrérie,  dans  laquelle  quel- 
ques prêtres  et  laïques  entrèrent  sous  le  pon- 
tificat de  Pie  IV,  et  qui  s'unirent  ensemble 
pour  enseigner  le  catéchisme  aux  cnfan'.s  el 
aux  ignorants,  noii-seulemenl  les  jours  ou- 
vrables dans  les  maisons  particulières,  mais 
encore  les  fclci  et  dimanches,  aGn  que  les 
gens  de  métier  qui  ne  pouvaient  quitter  leur 
travail  les  autres  jours  pussent,  les  fêtes, 
proliterde  leurs  instructions.  Le  premier  à 
qui  Dieu  insjiira  une  si  sainto  œuvre  fut  un 
gentilhomme  milanais  nommé  Marc  de  Sailis 
Cus mi ,  qui ,  ayant  abandonné  ses  biens  et 
sa  patrie,  vint  à  Rome  l'an  15G0  el  s'asso- 
cia un  nombre  de  personnes  charitabhs 
pour  travailler  avec  lui  à  ces  sortes  d'ins- 
iru(  lions. 

L'église  de  Saint-Apollinaire  à  Rome  fut 
le  lieu  où  ils  commencèrent  d'enseigner  pu- 
bliquement la  doctrine  chrétienne,  et  un  des 
premiers  ouvriers  qui  s'employa  à  ce  saint 
exercice  fnl  le  célèbre  César  Baroiiius,  qiù 
lu!  depuis  cardinal.  Cette  confrérie  s'augmen- 
lant  de  jour  en  jour,  le  pape  Pie  V  accorda 
l'an  15G7  i!es  indulgences  à  ceux  qui  y  en- 
treraient, el  l'année  suivarite  le  cardinal  Sa- 
vi'lli  nomma  pour  supérieur  de  toutes  les 
érolos  de  Kome  le  I'.  Henry  Pétra  de  Plai- 
sance ,  l'un  des  premiers  compagnons  de 
sa. rit  Philippe  de  Néry.  Ceux  qui  s'enga- 
geaient à  celte  œuvre  charitable  se  divisa. ent 
p.ir  bandes  pour  aller  f.iiic  les  mêmes  (onc- 
tions dans  les  villages  qui  sont  aux  environs 
de  Kome.  (Jui'!ques-uns  abandonnèrent  en- 
suite leurs  propres  maisons  pour  aller  de- 
nii'urcr  ensc.i^blc  dans  une  maison  ,  vers  le 
Poiit-Sixte,  sous  la  conduite  du  P.  Mare  Cu- 
sani,  qui  l'an  1586  fut  ordonné  prêtre  en 
vertu  d'un  bref  du  pape  Sixte  V  et  à  la  per- 
suasion du  P.  Henri  PéUa.  qui  lui  commanda 
d'obéir. 

Le  p  ;pe  Pie  V,  voyant  le  grand  fruit  que 
ces  personnes  charitables  faisaient,  et  vou- 
lant faire  oliserver  le  décret  du  concile  de 
Trente  touchant  ces  soi  les  d'instructions,  or- 
donna par  une  bulle  du  0  octobre  1571  que 
dans  tous  les  diocèses,  les  curés  de  chaque 
p;iroisse  établiraient  de  pareilles  confréries 
de  la  Doctrine  Chrétienne,  et  accorda  beau- 
coup d'indulperces  à  ceux  qui  y  entreraient, 
(jregoire  XIII  augmenta  encore  ces  indul- 
gences el  donna  aux  Pères  de  la  Doctrine 
Chré.ieniie  l'église  de  Sain;e-Agathe  à  Home, 
au  delà  du  1  ibre,  où  la  confrérie  fut  aussi 
Iranslérée.  Comme  les  uns  cl  les  autres  n'a- 


vaient qu'un  même  esp  it  et  ne  (enda.eni 
qu'à  l'instraclion  de  la  jeunesse  el  des  igno- 
rants, el  qu'ils  faisaient  d'abord  leurs  assem- 
blées en  commun,  ils  jugèrent  à  propos  d'é- 
lireenlreeux  quelques  personnes  tjuieussenl 
noii-seulemenl  l'intendance  des  écoles,  mai? 
encore  le  soin  de  maintenir  l'union  cl  la  p.iix 
entre  eux.  C'e-t  pourquoi  ils  en  choisirenl 
quatre,  auxquels  ils  donnèrent  le  nom  de 
déliniteurs,  dont  il  y  en  eut  deux  qui  furent 
choisis  entre  les  Père^,  el  deux  entre  les  con- 
fières. 

Les  écoles  se  mullipli  int  aussi  bien  que  le 
nombre  des  ouvriers,  ils  demandèrent  un 
protecteur  au  pape  Clément  VllI,  (jiii  leur 
donna  le  cardinal. Alex;in  Ire  de  Médicis,  qui 
fut  ensuite  pape  sous  le  nom  de  Léon  XI  ;  et 
peu  de  temps  après  le  P.  Marc  Cusani,  fon- 
dateur du  cette  soc  été,  mourut  le  17  se|i- 
tembre  1595.  Les  dériniteurs  gouvernèrent  la 
congrégation  et  la  confrérie  pendant  un 
temps  assez  considérable,  el  ils  faisaient 
leurs  assemblées  dans  l'oratoire  de  l'église 
Saint-Jérôine-de-la-Charilé;  mais  les  Pèics 
de  la  Doctrine  Chrétienne  et  les  confrères,  so 
voyant  en  grand  nombre,  élurent  chacun  un 
chef  pour  leur  corps.  Les  Pères  donnèrent  à 
leur  chef  le  titre  de  prévôt,  el  les  confrères  à 
leur  chef  celui  de  iirésident,  et  ils  élureiu 
aussi  d'autres  olûciers  auxquel."  ils  donnè- 
rent différentes  qualités,  comme  de  conseil- 
lers, visileuis,  etc.  C  ■  qui  se  fit  l'.ui  1590  du 
consenlemeut  du  ca  dinal  Delmonte,  p  lur 
lors  vice-prolecteur  en  l'absence  du  carainal 
Médicis,  qui  était  légal  en  France. 

Le  pape,  afin  d'exciter  les  uns  et  les  au- 
tres à  se  comporter  avec  encore  plus  de  zèle 
dans  les  fonctions  de  l'mslitut  qu'ils  avaient 
embrassé,  et  voyant  que  l'église  de  Sainte- 
Agathe,  (,ui  avait  été  accordée  aux  Pères  de 
la  Doctrine  Chrclienue,  était  trop  [;elite  pour 
y  faire  leurs  fonctions  et  pour  assembler 
leurs  confrères,  leur  donna  encore  celle  de 
Sainl-Martin-du-.Monl-de-Piété,  au  quartier 
de  la  liegola,  oà  ils  ont  toujours  tenu  depuis 
ce  temps-là  leurs  assemblées  généra;cs  et 
particulières;  et  le  pape  supprima  le  litre  de 
paroisse,  que  celte  église  avait,  afin  (ju'eJle 
fût  plus  libre.  Ce  pontife,  souhaitant  de  plus 
que  l'.nstruction  de  la  doc'riiie  fût  partout 
uniforme,  donna  ordre  au  Père  liellarmin  de 
la  Compagnie  de  Jésus,  qui  fut  ensuite  cardi- 
nal, de  composer  un  petit  catéchisme  que  l'on 
devait  enseigner  dans  toutes  les  écoles. 

Léon  XI  ayant  succédé  à  Clément  VII [, 
Antoine  Cisoni,  qui  était  pour  lors  président 
de  la  confraternité  et  qui  fut  ensuite  évéque 
d'Oppidi),  el  le  prévôt  des  Pères  de  la  Doc- 
trine Chrélicane,  allèrent  trouver  ce  nou- 
ve;iu  pontife  pour  le  prier  de  leur  accorder 
un  protecteur,  mais  il  leur  déclara  qu'il  vou- 
lait être  lui-même  leur  prolecteur,  ce  qui  ne 
dura  pas  longtemps,  puisque  ce  pontife  mou- 
rut vingl-sept  jours  après  son  élection.  Les 
Pères  el  les  confrères  se  rassemblèrent  après 
sa  mort  pour  faire  élection  d'un  iiuire  pro- 
Iccleur,  el  choisirenl  le  cardinal  Uorghé^e, 
alors  vicaire  de  Kome,  qui,  ayant  été  lait 
pape  quelques  jours  après  sous  le   nom  do 


71                                             DICTIONNAlRi:  DKS  OUDRES  UKUGIELX.  72 

Paul  V,  cl  ilfsimiil  favorisor  cetio  confrator-  prôseiice  du  généra!,  ou,  en  .-on  absenco.  du 
nile  .  i'érigci  on  archicoiifraleniili;  dans  vicc-prcvôl,  ou  au  moins  do  dciis  dcCmi- 
l'ég'.i'so  doSaiiil-Picrro,  voiilanl  que  les  éuli-  leurs;  touies  les  soinaincs  dans  chaque  niai- 
ses de  SiUiilc-Auallie  cl  de  Sainl-M  irlin-du-  son  il  y  aune  aulre  ongrégalion  eu  prc- 
Mont-dc-l  ioto  resl.issonl  loujours  aux  l'éres  scncc  ilu  rccleur. 

de  la  Docttino  Chrétenno  cl  aui  confrères,  Dans  la   congrégalion   générale,   lous  les 

cl  qu'à  ra\cnirlis  «ardiiiaux  vicaires  fus-  recteurs    des    maison;    doivent    s'y  Irouvor 

Boni  leurs  |iro'ecleurs.  Il  accorda  encore  à  avec  un  député  de  chaque  maison,  lorsqu'on 

celle    archiconlValornie    la    p^rniissiou    de  doil  faire  élection  d'un   général  ;  cl,  lorsque 

pouvoir  agréger  lellcs  autres  confralernilcs  l'on  n'en  doit  point  faire,  la  congrégation  csl 

dans  le  monde  qu'ils  voiidraeiil.el,  par  grâce  seulemeni  composée  des  officiers   généraux. 

spéciale,  de   pouvoir  délivrer  lous   les    ans  qui    élisent   les    sulialt  mes  :  le    recteur    de 

di'ux  prisonniers    pour  crines,   voulant  ce  Uome  envoie  les  fêtes  l'I  dinaiiches  les  Irèrcs 

plus  qu'un  paiivie  confrère  <le  c  tic  arclii-  dans  les  écoles  pour  enseigner  le  catéchisme, 

i-onfralcinile   lui   l  lUjours    du    nombre   des  qui  est  la  première  lin  de  cet  ins;itut. 

douze  pauvres  auxquels  Sa  Sainteté  lave  Ks  Toutes  choses  sont  communes  dans  la  con- 

pii'ds  le  jeudi  saint.  grégal  on,  personne  n  ayant  rien  en  propre, 

I.cs  papes  Urb. lin  Vin,  Innocent  X  cl  Cl.--  elles   chambres   ne  doivent   point  fermer  à 

ment  X.  oui  encae  ai  cordé  beaucoup  d'in-  clef.  Lorsque  quelqu'un  doit  élre[)romu  aux 

dulgcmes  à  ces  conficres,  et  Innocent  \i,  or  1res  sacrés,   les  supérieurs  obtiennent  un 

an  commenccmenl  de  son  pontiiicai,  lit  pa-  bref  du  pape  pour  faire  recevoir  sous  le  titre 

raltre  son  zèle  pour  l'avancemi-nl  ilc  colin-  de  la  congrégation  ceux  (|ui  en   se  il  jugés 

slilul,   le  regardant   comme  Ircs-nécessaire  capables.  Aliu  que  la  vie  commune  puisse  se 

pour  m:iu;enir  et  étendre  la  loi  calholi(|ue.  malnlenir  dans  celte  congrégation,  ele  pos- 

l'our  ce  sujet  il   renouvela  les  élections  de  sède  des  rentes  et  des  fonds  pour  l'entretien 

douze  députes  de  la  même  con^regUion  et  des  frères  :  c'est  pourquii   ils    ne  reçoivent 

arcli:conlraterni;é    :    savoir  ,     six    gentils-  aucun  élablissemcnl  (|u'il   n'y  ail  en  même 

liomnies  et  six   cccicsiasliques  d'une   virlu  temps  des  fonds  sufllsants  pour  le    pouvoir 

cl  d'une  piété  exemplaires,  auxquels  il  donna  entretenir,  afin  qu'iU  ne  soient  poinl  délour- 

pour  président  M.  Ange  de  la   Noce,  aichc-  nés   des  lonrli()ns   de  leur   inslilul,   qui  est 

\éqne  de  ilo-sane.  Il  lit  réimprimer  les  con-  d'ensciuner  11  doctrine  chreli'iine  ;    ce  qui 

sliiulions  et  les  statuts  de  celle  .irchiconfra-  pourrait  arriver  s'ils   élai.nl  obligés  d'aller 

lernilé  qui  avaient  été  aulrifois  dressés  par  mendier  les  choses  nécessaires  à  la  vie.  Le 

les  cardinaux  Baronius,  Taurugi  et  lU'llar-  Ion  Is    nécessaire   pour  conini  mic 'r  un  éla- 

niin,  par  ordre  de  Clément  \'lll  :    il   voulut  blisscmenl  doil  être  au  moins  suffisant  pour 

que   la  congrégalion  se   tint    tous  les   huit  entretenir  sis    personnes.   Liiniformilé  d  •- 

jours,  et  accorda  de   nouvelles  indulgences  vaut  élre  dans  toutes  leurs    maisons,   elles 

et  de  nouveaux  privilèges  aux  confréies.  doivent   être   partout,  aussi  bien  que  leurs 

Quoisiiie  les  l'ères  de   la  Doctrine   Chré-  églis  'S,  de  même  structure  et  de  mêiuc  gran- 

tienne  fa^senl  une  «ongrégalion    réparée  de  ileur,  autant  que  laire  se  peut. 

(.elle  ari  h  confraiernilé,  et  iju'ils  aient  neuf  Ils  ne  disent  point  l'ofiice  en  cumn.un,  si 

ma  sons   en   différentes    provinces,  ils   sont  ce   n'est   aux  fêles  principales  de  l'année  et 

loujouis  neanuioins  unis  en>emlile  en  ce  (jui  des  |)atroiis  de  leurs  é,;lises  ;  les  autres  jours, 

r.  g.irdc  rin>lruclion  de  la  jeunesse  et  jouis-  ceux  qui  sont  jirêtres  récitent  en  jiartiiiilier 

sont  des  mêmes  grâces  et  des  mêmes  priijlé-  l'oflice   du    brévia're   roni   in;   ceux    qui   ne 

ges.  Le  1  èi  e  Jean-liaptisleSéralini  d'Or*  icte,  sont  pas  dans  les  orilrcs  sacrés  cl  les  Liï(|ues 

elanl  gênerai  de  celle  congrégalion,  dressa  sonl   seu!c:uenl   exhor  es  à  réciter  le  pelil 

l'an  loO^J  des  consiliulions  pour  y  ma  nlenir  t»  (îcc  de  la   \  ierge,   cl  ceux  qui   ne  savent 

l'olservance  régulière.  Ivllcs  furent  approu-  |)oinl  lire   doivent  dire  le  chapelet,    ils  oc.l 

vers    par  le  cardinal  vicaire,  par  ordre  du  deux  heures  d'oraison  par  jour,  lune  le  ma- 

p.ipc   (îrêgoire   Xlll,  et  impr  mécs  à  Uom;î  lin  cl  l'autre   le  soir;  ils  prennent  la  disci- 

l'an  lljlli.   Klles   sonl  divisées  en  deux  par-  pline    lous    les   mercredis    e.    vendredis    de 

lies  :  la  première,  qui  contient  ii  chapitres,  l'année,  el  encore  lous  les  lundis  de  I  AvenI 

regar  e  les  ofliriers  el  supérieur^  de  la  t;on-  el  du  Carême,  cl  tous  les  jours  de  la  semaine 

giegaliun,    cl   iraile  de  leurs  élections;    la  sainte;  ils  jeûnent   icndanl  l'Avent  el  lous 

seconde,  de  4'»  chapitres,  Iraiic  des   obser-  les  vi  ndredis  de  l'année,  l'nefois  la  semaine 

vanccs  el  regarde  la   congrégalion   en  par-  ils  reconnaissent  leurs  laulcs  devant  le  rec- 

liculier.  leur,  ils  font  lous  les  jours   une  confércn;o 

Les  (ilfiriers   généraux  el  supérieurs  iini  de  cas  de  conscience,  el  il  y  a  un  maiire  q    i 

gouv.'inent   toute    la  congrégalion    souille  enseigne    la    manière    d'enseigner    le    caie- 

prevôl  gêner. il,  qui  en  est  le  (hef;levu«;-  cliismc.  Ils  ne  peuvent  écrire  ni  recevoir  aii- 

ptevol,  trois  difinilours,  un  chancelier,  deux  cune  lettre  sans  l'avoir  montrée  auparavant 

visiteurs  cl  un  ci)m(iotiste.  Les   suliallcnics  au  supérieur,  qui    ne  leur  doil  jamais   nci- 

sonl  :  los   recteurs  des  maisons,  sacristains,  mettre  de  parler  ni  d'écrire   à  aucune  iel- 

iiifiiiniors,  maîtres  des  novices,  deposila  res,  gieusc,  el  ils  ne  peuvent  sortir  sans  sa  per- 

tomniuiinrs  ,    provcdiU'urs    el    dépensiers,  mission   cl   sans  un  compagnon  qu'il    leur 

'lous  les  an»  l'on  lient  la  congrégation  gène-  doit  donner. 

raie;    tous  les  mois  il  s'en   lient  aussi    une  OuanI  à  l'habillemenl  ,  I,  s  prêtres  et    les 

l'atlKuliére   dans   la  maison  do    llouie,    en  ilercs  porli  ni  l'hatal  ecclésiastique  avec  un 


-.-  DOC 

petit  ra')al  largo  d'un  doi;;l  autour  du  col- 
iet  (1),  et  les  clorcs  ne  peuvont  porter  le 
lionnei  tarré  que  lorsqu'ils  sont  dans  Ifis  or- 
dres sacrés,  les  laïqui^s  ont  un  habit  plus 
(  (iurt  et  portent  dans  la  maison  une  calotte 
au  lieu  de  bonnet  e.irré. 

11  leur  était  ;iu  refois  permis  de  sorlir  de  la 
congrcgaliuu  (inam!  bon  leurscniblail.  Aprè-s 
l'annco  de   m.vic  al ,  le  général,  à  (]ui  il  ap- 
partient de  recevoir  avec  sesdèfiniteurs  ceux 
(jui  se  présentciil  pour  entrer  dans  la  con- 
f;régation  ,   demandait  à    celui  qui   voulait 
s'engager  s'il  avait  connaissance  des  cousli- 
tulions,  de  leur  manière  de  vivre,  de  leurs 
observances,  des  fatigues  qu'il  fallait  sup- 
porter,  et  s'il  avait  dis   forces  sufûsanics 
pour  cela  ;  qu'il  lui  était  permis  de   sortir, 
mais  que  s'il  voulait  rester  il  fallait  qu'il  ob- 
servât  la  vie  commune  et  enseignât  la  doc- 
trine chélicnne   avec  un   ferme   propos  de 
persévérer  toute  sa  vie  dans  la  congrégation, 
et  (ju'après  cette  résolution  il  ne  lui  serait 
plus  permis  d'en  sortir.  Si  le  novice  consen- 
tait à  rester,  le  général  l'i-verlissail  que  passé 
cin<i   ans  il   aurait   voix    active  el   passive 
dans  le  chapitre  et  même  plus  tôt  s'il  se  com- 
portait bien  ,  s'il  vivait  régulièrement  el  s'il 
ilonnait  des  marques  d'une  plus  grande  sta- 
bilité, comme  si  voloîilaircmcnt  il  jurait  et 
faisait  vœu  de  cette  stabilité  et  de   vouloir 
persévérer  dans  citle  congrégation.  Voilà  de 
quelle  manière  se    faisait  leur  engagement; 
cependant  il   y  avait  des  raisons  peur  les- 
quelles on  pouvait  les  renvoyer  après  s'être 
engagés   à  la  congrégation  ,  qui  sont  mar- 
quées dans  le  chapiire  septième  des  consti- 
tutions. Si  ceux  qui  étaient  sortis  de  la  con- 
grégation ,  soit  qu'ils  eussent  été  renvoyés  , 
ou   qu'ils  fussent   sortis   volontairement  ,  y 
rentraient,   ils  devaient  recommencer  l'an- 
née de  noviciat  ;  mais  l'an  1C09  il  fut  ordonné 
dans  leur  chapitre  général  qu'après  l'année 
de  noviciat  l'on  ferait  vœu  de  demeurer  dans 
ia  congrégation.  Le  pape  Grégoire  XV,  par 
un  bref  de  l'an  1021,  réserva  aux  souverains 
pontifes  le  pouvoir  de  dispenser  de  ce  vœ'.: , 
el  Urbain  VllI,  comme  nous   avons  dit,  or- 
donna que  ceux  qui  sortiraient  de  la  congré- 
gation seraient  traités  comme  apostats  el  en- 
courraient les  mêmes  peincsque  les  apostats 
et  les   fugitifs  des  ordres  religieux,  confor- 
mément au  concile  de  Trente  et  à  la  cons'i- 
tution  de  ce  pape  du  20  septembre  1027.  Le 
pape  Clément   Vlll ,   dès   l'an    1596,  avait 
exemple  de  la  juridiction  des    curés,   tant 
pour  les  sacrements  que  pour  la  sépulture, 
les  IVres  de  cette  congrégation,  et  les  avait 
mis  sous  celle  du   cardinal   vicaire.  Us  ont 
pourarmes  trois  montagnes  surmontées  d'une 
croix  ,  avec   la  lance,  l'éponge  et  des  fouels 
(jiii  ijondent  de  chaque  côté  do  la  croix. 

Mémoires  envoyés  de  Home  en  1707.  Car!. 
I5artlio!.  Piazza  ,  Eusetolor/.  Rom.  I.  V,  c. 
■il,  et  t.  VI,  c.  19.  L'on  peut  consulter  aussi 
les  Conslilutions  de  celte  congiégalion,  celles 
de  l'archiconfraternité,  le  ISullaire  romain, 
et  ['hilipp.  Uonanni,  CaUdorj.  uni.  reli<]., 
part,  !ii. 

(1)  Voij.,  à  la  lin  du  vol.,  n°  7. 

L':r.THjN.\Ai!i!i  uku  0;sna!:s  r.ELiT.KLv. 


IKt.M 


74 


Le  P.  Hé'jot  ne  dit  point  assez  clairemcnl 
quelle  a  été  l'origine  réelle  de  la  congréga- 
tiondela  Doctrine  Chrétienne,  en  Italie, et  na 
fait  point  assez  voir  quand  et  comment  elle 
a  été  séparée  de  l'archiconfraterniié  du  même 
nom  el  qui  a  eu.iu^si  les  méoics  fondateurs. 
Nous  avons  entendu  dire  qui'  celle  sociélé 
s'était  réunie  ,  au  dernier  siècle  ,  à  la  con- 
gié:;ation  des  Doctrinaires  de  Fra;ice  et  avait 
embrassé  ses  règles,  et  que  c'était  pour 
cela  qu'elle  s'éiail  procuré  le  corps  de  César 
de  Bus. 

Il  est  vraisemblable,  sinon  certain,  qu'elle 
formait  celte  piovinco  de  Rome  qui  députa 
un  vicaire  général  ,  en  1744,  au  chapitre  gé- 
néral de  France  ,  tenu  par  les  Doctrinaires  à 
Beaucaire  ,  et  dont  nous  avons  parié  dans 
l'article  additionnel  précédent ,  et  qu'elle 
était  composée  des  maisons  dont  les  Doctri- 
naires formèrent  leur  province  italienne.  U 
paraîtrait  en  outre  qu'elle  avait  aussi  une 
province  au  royaume  de  Naples.  Voir  ce  que 
nous  avons  dil  sur  cette  union  aux  Doctri- 
naires français. 

Les  Doctrinaires  italiens  avaient  autrefois 
dans  la  ville  de  Rome  les  maisons  de  Sainle- 
Agathe  in  Transleiere,  Sainte-Marie  a  Toire 
di  buon  Viaggio,  cl  Sainte-Marie  in  Monli- 
celli.  Aujourd'hui  leur  supé.  leur  général  est 
le  R.  P.  Pierre-Sylvestre  Glanda  ,  appelé  vi- 
caire général.  Le  R.  P.  Victor  Bevilacqua 
Valklti  est  leur  procureur  général. 

B-D-E. 

DOGE,  A  Venise.  Voyez  Ciiaisse. 
DOMINICAINES.. 

De  l'origine  (lu  second  ordre  de  SatnC-Domt- 
nique,  ou  des  religieuses  Dominicaines  ,  ap- 
pelées en  quUiues  lieux  Prêchercsses. 
Si  l'on  avait  égard  au  temps  del'instilution 
des  premières  religieuses  de  l'ordre  de  Saint- 
Dominique,  elles  devraient  tenir  le  premier 
rang  entre  les  trois  ordres  qui  portent  le 
nom  de  ce  saint  ,  puisqu'il  avait  déjà  fondé 
des  religieuses  à  Prouille  quelques  années 
avant  que  d'avoir  institué  sou  ordre  i  our  les 
hommes  ,  mais  il  est  ju-le  que  les  filles  don- 
nent la  préséance  à  leur  Père  saint  Domini- 
que, qui  ,  dans  le  temps  qu'il  travaillait 
pour  la  conversion  des  Albig  ois,  fut  si 
louché  de  voir  que  quebjucs  genilshommes 
de  Guyenne,  conliaints  par  la  nécessité  et 
n'ayant  pas  de  quoi  nourrir  et  entretenir 
leurs  filles  ,  les  vendaient  ou  les  donnaient  à 
élever  aux  hérétiques,  qui  les  pervertis- 
saient, qu'il  prit  la  résolution  de  fonder  et  de 
bâtir  un  lieu  oîi  ces  pauvres  demoiselles 
pourraient  être  élevées  et  entretenues  de 
tout  ce  qui  serait  nécessaire  pour  leur  sub- 
sistance. Il  con)muniqua  son  dessein  à  Ber- 
n-rird,  archevêque  de  Narbonne,  et  à  Foul- 
ques, êvêque  de  Tou  ouse  ,  qui  non-seule- 
ment l'approuvèrent,  mais  y  voulurent  con- 
tribuer par  leurs  libéralités  ;  el  saint  Domi- 
nique ,  ayanl  encore  reçu  quelques  aumônes 
de  plus  eurs  peisonnesde  piété  ,  jeta  les  fon- 
dements du  monastère  de  l'rouille  entre  Car- 
cassonne  et   Toulouse,  à  un  cpiart  de  lieue 


IL 


niCTîON.NAIRE  DES  ORD'.ŒS  RELIGIEUX. 


75 

àè  Fanjaux.  I!  fui  bali  en  ppii  do  Icinps  l'an 
120G,  cl  rauiK'L"  sjnaiil'  larchcvéquc  de 
Narbonnc  donna  à  ce  miiiiaslCre  l'église  de 
S.iiiit-Marl  n  de  Limoux  avec  tous  les  droits 
cl  dîmes  qui  lui  apparlenaicut  dans  ce  bourg 
el  dans  celui  de  'l'ax. 

11  j  eul  d'abord  onze  denioi  elles  qui  se 
consacrèrcnl  à  Diea  dans  relie  maison  le 
jour  de  saint  Jean  1  livanticlislc,  dont  il  y  on 
avait  nei.f  hérétiques  albigeoibcs  qui  avaient 
é!c  converties  par  les  miracles  de  saint  Do- 
inini(iuc,  savoir  :  Aladaicic.  Ilaymonde,  l'.is- 
s.irine  ,  IJcrciigôre  ,  lUchardc  ,  I3arbcjrane  , 
Jordanne  ,  riuiilenicite  de  l.aupuis,  r>.i)'- 
cionde  Clarette  el  Ciantienne  ,  qui  rcrurenl 
les  premières  l'iiabil  des  mains  de  saint  Do- 
minique ,  el  les  deux  autres  se  nommaient 
SIessjne  cl  Gui!  emelle  de  Fanjatix.  Leur 
liabii  dans  ce  temps-là  ciuisislail  en  une  robe 
blanche,  une  chape  t.innce  et  un  voile 
noir(l).  Ce  saint  fondateur  les  obligeai  tra- 
vailler à  certaines  heures  du  jour  pour  fuir 
l'oisiveté,  principalement  à  (Her  de  la  laine 
cl  du  lin  p  lur  faire  leurs  h  ibits  cl  le  linge 
qui  leur  claii  né  essaire.  11  leur  prescrivit 
aussi  quelques  règlements  pour  leur  con- 
duite ,  el  leur  donna  pour  supérieure  Guille- 
mellc  de  Fanjaux  ,  quoiqu'elle  eût  reçu  l'ha- 
bit la  dernière.  Elle  gouverna  jusqu'en  l'an 
1225  celle  communauté  ,  qui  s'augmenta  si 
notablement  dans  la  suite,  ()u'il  n'y  a  jamais 
eu  moins  de  cent  religieuses  dans  ce  nio- 
iiaslère,  où  l'on  ne  recevait  autrefois  que  des 
Ci  les  nobles.  La  supérieure  est  prcsenlc- 
inenl  à  la  nomination  du  roi;  el  la  iircmière 
qui  fut  nommée  fut  Jeanne  d'Amboi?c  ,  à  la- 
quelle succéda  Madeleine  do  Bourbon,  à  qui 
diMi\  autres  piincesses  de  la  môme  famille 
roy  lie  ont  oussi  succédé  dans  la  suile.  11  est 
jorti  de  ce  monastère  des  religieuses  pour 
en  fonder  (li\  ou  donzeaulres  ,  tint  en  France 
qu'en  Hsp  igne  ,  et  il  porte  pour  armes  de 
gueules  au  ihevron  d'or,  au  chef  d'azur  se- 
mé de  fleurs  de  lisd'or,  l'écu  surmonté  d'une 
croix  pommelée,  cl  environné  d'une  paltnc 
cl  d'un  lis. 

Depu's  que  le  monastère  de  l'rouillc  fut 
fondé,  jusqu'en  l'an  1218,  saint  Dominique 
ne  lit  point  de  nouveaux  établissements  pour 
lies  filles  ,  et  pcut-élro  qu'il  n'aur.iit  point 
songé  à  en  faire  ,  si ,  étant  à  Uome  oceuito  à 
I.!  iioiiveilec(,)'i!>lruclioii  (liicuuvcnl  de  Sainl- 
biH  e  ,  que  le  pape  Honoi  lus  III  lui  avait 
donné  pour  ses  religieux  ,  il  n'eût  pas  reçu 
commission  de  ce  |ionlifi'  do  rassembler  en 
un  seul  monastèie  plusieurs  religieuses  (jui 
éiaienl  dispersées  à  Uonie  dans  plusieurs  pe- 
tites couimunaulés,  où  elles  ne  vivaient  pas 
avec  assez  de  régul.iri  é.  Sainl  l)omini(iue 
exécuta  d'abord  les  ordics  du  pape;  mais, 
voyant  que  ses  discours  é'.aieni  inutiles  et 
qu'il  ne  poiivail  réussir,  s'il  n'était  seiondé 
de  l'aulorilédu  sainl-pèrc,  puisqu  il  ne  Irou- 
\a:t  pas  seubnicnl  de  l'opposilion  de  la  part 
dis  rcligKuse.*,  uiais  encore  de  leurs  parents 
Pi  de  leurs  amis,  elquc  le  peuple  criait  hau- 
Icincnl  contre  l'ordre  que  le  souverain  j.on- 

<I)   ''ny-,  il  11  fi.l  'lu  Ml!.,  Il"--  :'  g|  9. 


tife  avait  donné  de  renfermer  Ci  s  roligieusi  » 
dans  un  même  monastère,  il  le  fut  trouver 
pour  le  prier  do  commeltro  des  personnes 
d'autorité  pour  le  seconder.  En  (  ITcl,  le  pape 
donna  cette  commission  à  Irois  cardinaux  , 
qui  furent  Ilugolin  ,  évéque  d'Ostie,  litienno 
de  Fosse-Neuve  ,  du  litre  des  Douze-Apô- 
tres, el  Nieolas,  évéque  de  Fraseali. 

Les  plus  opiniâtres  étaient  les  religieuses 
de  Sainte-Marie  au  delà  du  Tibre  ,  el  entre 
autres  r.iisons  qu'elles  donnaient  pour  n.^ 
point  se  soumettre  aux  ordres  du  pape,  elles 
disaient  qu'elles  ne  pouvaient  se  résoudre  à 
abandonner  une  image  miraculeuse  de  la 
sainte  \'ierge  qui  était  dans  leur  église,  el 
que  l'on  prétend  avoir  été  peinic  par  saint 
Luc,  laquelle  élail  en  grande  vénération 
parmi  le  peu[jle.  Mais  le  pape  leva  cette  dif- 
ficulté en  leur  permetianl  delà  Irauspovter 
dans  le  lieu  où  l'on  voulait  les  mettre.  On  vil 
tout  d'un  (  oup  un  changement  merveilleux 
dans  ces  religieuses,  que  l'on  attribua  aux 
prières  de  saiiii  Dominique,  lillesse  soumirei.t 
au  joug  de  l'obéissance ,  embrassèrent  la 
clôiure,  s'engagèrent  à  ne  plus  sortirde  leur 
monastère,  el  de  n'y  faire  entrer  personne. 
Dès  ce  mon)eiit  saint  Dominique  se  chargea 
de  leur  conduite,  el  leur  [ir  scri\  il  des  rè- 
glements pour  mainte  nir  l'observance  rcju- 
iière.  Le  pape  ,  a>anl  appris  ce  que  ce  saint 
fondateur  avait  lait,  voulut  que  le  couvent 
de  Saint- ."^ixle,  qu'il  avait  accorde  aux  reli- 
gieux ,  (ût  donné  aux  religieuses;  il  trans- 
féra les  reli;;ieux  à  Sainte-Sabine,  el  leur 
donna  la  u  oilié  de  son  propre  palais  pour 
leur  demeure.  Le  bàlimenl  du  couvent  do 
Saint-Sixte  fut  achevé  l'an  1219,  el  loules 
les  religieuses  qui  étaient  dispersées  dans 
lîome  y  furent  renfermées  le  21  février  do 
celle  année. 

Autant  que  ces  religicusi  s  avaient  mal 
éJiJié  par  leur  conduite  peu  religieuse,  au- 
tant devinrent-elles  des  esenifdes  de  vertu 
par  leur  modestie,  leur  retenue,  leurs  austé- 
rités ,  leurs  moilifiialions  cl  leur  grande 
piuvreté,  à  laquelle  elles  s'engagèrent  vo- 
lontairement. Celait  une  règle  parmi  elles, 
(|ue,  le  quatrième  jour  après  qu'uiie  fille  était 
reçu-j  dans  ce  monastère  ,  elle  était  obligée 
de  r;'i  oncer  à  tous  les  biens  qu'elle  possé- 
dait el  qu'elle  pouvait  prélcmlre.  La  première 
qui  reçut  l'haliit  de  l'ordr.'  de  Sainl-Domini- 
<iue  tel  ([uc  les  religieux  le  portèrent  après 
la  vision  du  bienheureux  llenaud  ,  fut  la 
bienheureuse  Cécile  Humaine,  de  la  famille 
des  Césarini,  qui  élail  supérieure  de  ce  mo- 
nastère, el  qui,  l'an  1223,  en  sortit  parordn; 
du  papo  (îrégoire  IX  pour  aller  faire  un  nou- 
vel établissement  à  Hologne,  où  elle  mourut 
sainlcmcnl,  l'an  1280,  âgée  de  89  ans.  Ain  si, 
si  les  leligieuses  do  Uome  n'ont  pas  été  fon- 
dées avant  celles  do  l'rouillc  ,  elles  ont  e\i 
l'avantage  de  rece\oir  les  premières  l'habil 
do  l'ordre,  que  celles  de  Prouille  n'ont  icçu 
qu'après  el  es. 

Ce  monastère  do  Saint -Si  vie  élant  mal  si- 
tué, et  les  rclij^ieuscs  y  étant  toujours  ma- 


-7  DUM 

Ifides  à  cause  du  mauvais  air,  elles  furent 
iransfciées  ,  par  ordre  du  pape  Pie  V,  au 
mont  Magnanopoli,  qui  fait  une  partie  du 
Quirinal,  où,  l'an  IGll,  sous  le  pontificat 
d'Urbain  Vlll,  elles  ont  fait  faire  une  magni- 
Dque  église  et  un  beau  monastère  ,  oîi  l'on 
ne  reçoit  que  des  filles  de  la  première  no- 
blesse de  Home,  qui  apportent  avec  elles  de 
grosses  pensions  outre  leur  dot  ;  et  j'en  ;ii 
vu,  du  temps  que  j'étais  à  Rome,  qni  avaient 
plus  de  deux,  mille  écus  romains  de  pension, 
c'est-à-dire  plus  de  sept  mille  livres  de  notre 
monnaie,  et  d'autres  qui  avaient  cinq  cents 
écus  :  ainsi  il  ne  faut  pas  s'étonner  si  ce 
monastère  est  un  des  plus  riches  de  Rome. 

Les  religii'uses  de  cet  ordre  se  sont  fort 
multipliées  en  Italie ,  où  elles  ont  plus  de 
cent  trente  maisons.  Elh  s  en  ont  aussi  en- 
viron quarante-cinq  en  France,  cinquante 
en  Espagne,  quinze  en  Portugal ,  quarante 
en  Allemagne  ,  où  les  hérétiques  en  ont  dé- 
truit un  plus  grand  nombre.  Elles  en  ont 
aussi  en  Pologne,  en  Russie  et  dans  plusieurs 
autres  lieux,  et  mémo  dans  les  Indes.  L;i 
plupart  de  ces  monastères  sont  soumis  aux 
supérieurs  de  l'ordre  ;  mais  il  y  en  a  plu- 
sieurs qui  dépendent  des  ordinaires  des  lieux 
où  ils  sont  situés.  Parmi  le  nombre  de  ces 
monastères  ,  il  y  en  a  aussi  du  tiers  ordre 
de  Saint-Dominique.  Les  religieuses  de  cet 
ordre,  tant  du  second  que  du  troisième,  sont 
habillées  de  blanc  quani  à  la  robe  eî  au  sca- 
pulaire,  mais  le  manteau  est  noir.  Celles  du 
tiers  ordre  ne  devraient  point  porter  de 
voile  noir,  cependant  elles  en  portent  en 
plusiurs  endroits,  comme  à  Metz,  à  Toul,cic. 
Les  rrligieuses  du  second  ordre,  conformé- 
ment à  leurs  constitutions,  ne  doivent  man- 
ger de  la  viande  que  dans  les  maladies.  Outre 
les  jeûnes  prescrits  par  l'Eglise,  elles  doivent 
jeûner  tous  les  vendredis  ,  depuis  Pâques 
jusqu'à  la  fêle  de  l'Exaltation  de  la  sainte 
croix,  et  tous  les  jours,  depuis  cette  fête  jus- 
qu'à Pâques.  Elles  ne  doivent  avoir  que  des 
chemises  de  serge,  ne  doivent  dormir  que 
sur  des  paillasses.  Mais  il  y  a  plusieurs  mo- 
nastères qui  se  sont  relâchés  de  ces  austéri- 
tés. Outre  le  grand  ofûce,  elles  doivent  en- 
core réciter  au  chœur  le  petit  olGce  de  la 
Virrgc. 

fuyez  Ci.»  Michiclc  Pio ,  Prorjen.  di  S. 
Vomenic;  Vincent  Mar.  Font.,  Monument. 
Dominic;  Jean  de  Uéchac  ,  Y iz  de  S.  Dum. 
et  de  ses  eomp. 

Outre  le  monastère  de  Prouille,don!  nous 
avons  parlé,  il  y  a  encore  en  France  plu- 
sieurs célèbres  monastères  de  cet  ordre,  où 
Ton  ne  recevait  autrefois  que  des  filles  no- 
bles ,  comme  ceux  de  Poissy,  d'Aiv  et  de 
Monllleury.  Le  inonaslère  de  Poissy  l'ut  fondé 
par  Constance,  fcnsme  du  roi  Robert.  E  le  y 
mit  d'abord  dos  religieux  de  Saint-Augus;in; 
mais  Philippe  le  Re', ayant  lait  refaire  l'église, 
augmenta  le  mona?tèrect  y  mit  des  religieu- 
ses de  l'ordre  de  Saint-Dominique. 


DOM 


Ï8 


Charles  II,  roi  de  Sicile  et  de  Napics,  et 
comte  de  Provence  ,  fut  fondateur  de  celui 
d'Aix.  D'abord  il  fit  bâtir  le  monastère,  sous 
le  titre  de  No(rc-Dame  de  Nazareth,  dans  le 
territoire  d'Aix,  au  lieu  nommé  la  Durancc, 
et  y  donna  des  fonds  suffisants  pour  l'entre- 
tien de  cent  religieuses  ,  qui  devaient  étro 
toutes  d'extraction  noble.  Béatrix  ,  la  plus 
jeune  de  ses  filles,  y  prit  l'habii,  et  depuis 
il  l'en  lira  pour  la  marier  (1).  Ce  monastère 
a  été  transféré  dans  la  suite  dans  la  ville 
d'Aix  et  a  pris  le  nom  de  Saint-Carthélemy. 
Les  religieuses,  étant  tombées  dans  le  relâ- 
chement, n'abandonnèrent  pas  seulement 
les  observances  régulières  ,  mais  quittèrent 
encore  leur  habit  religieux  pour  se  confor- 
mer entièrement  aux  dîmes  du  monde ,  à 
l'imitation  de  tant  de  collèges  de  chanoines- 
ses  séculières  ;  it  peut-être  qu'elles  auraient 
pris  encore  ce  litre  et  renoncé  aux  vœux 
solennels,  à  l'excmpl.e  des  chanoinesses,  si 
l'on  n'y  avait  remédié  en  introduisant  la  ré- 
forme dans  ce  monastère  sur  la  fin  du  der- 
nier siècle.  Comme  il  y  en  eut  jJusicurs  qui 
ne  voulurent  pas  s'y  soumet're  ,  on  sépara 
le  monastère  en  deux,  afin  que  les  réformées 
ne  pussent  point  avoir  de  communication 
avec  celles  qui  voulaient  persister  dans  la 
relâchement  ,  et  on  appela  le  quartier  de 
celles-ci  le  Vicariat,  à  cause  que  celle  à  qui 
elles  obéissaient  n'avait  que  le  titre  de  vi- 
caire ,  comme  dépendante  de  la  prieure  des 
réformées.  On  leur  défend. t  de  recevoir  des 
novices,  et  on  les  laissa  vivre  dans  leur  an- 
cienne observance ,  en  conservant  toujours 
leur  habillement  séculier,  qu'elles  ont  néan- 
moins un  peu  changé  de  temps  en  temps,  se- 
lon que  les  modes  du  monde  ,  auxquelles 
elles  se  conforment ,  ont  changé;  et  il  était 
l'an  1708  tel  qu'il  est  représenté  dans  la  fi- 
gure que  nous  avons  fuit  graver  d'une  de  ces 
religieuses  non  réformées  [2],  Cet  habit  est 
blanc  entièrement  :  elles  ont  une  espèce  do 
scapulaire  qui  pourrait  passer  pour  un  ta- 
blier, ne  se  mettant  que  par  devant  ;  et  der- 
rière leur  coi.lure  ,  elles  mettent  un  petit 
morceau  de  gaze  i.oire  en  guise  de  voile, 
mais  qui  néanmoins  ne  couvre  que  leur  bon- 
net et  leur  coiOure,  et  descend  jusqu'au  mi- 
lieu du  dos. 

Les  religieuses  de  Montfleury  furent  fon- 
dées par  Humbert  II,  dauphin  de  Viennois, 
Tan  lii'i2.  Ce  |)rince,  ayant  f.iil  vœu  d'assu- 
rer un  fonds  à  perpétuité  pour  l'entretien  do 
trois  cenis  rel  gieuses,  commença,  pour  sa- 
tisfaire a  cette  obligation  ,  par  la  fo::dation 
d'un  monastère  de  religieuses  de  l'ordre  de 
Saint-Dominique  auquel  il  destina  son  châ- 
teau ei  sa  terre  de  Aiontlîeury,  éloignes  de 
drenoble  de  deux  lieues  (3).  Le  nombre  de 
ces  religieuses  devait  être  d'abord  de  (luatre- 
vingts,  outre  six  religieux  pour  leur  admi- 
nistrer les  sacrements.  Deux  ans  après,  il 
r.iuginenla  de  quarante,  et  eu  13'i-8  il  le  ré- 
duisit à  soixante-dix.    Ces   religieuses  ont 


(I)  Oes  Noulys,  Hist.  des  rois  de  Sicile  et  de  Nn-         (51  Mi'moires  pour  l'histoire  du  Dauphin^,  p.  17! 
pics,  liv.  Mil,  I,"  (j.  ^^  i-^i 

(•iîj  Voij.,'A  la  lin  (lu  vol..  Il"  10. 


n 


DICllONNAir.F.  DF.S  ORDUF.S  RF.I.IGIF.UX. 


toujours  fait  p.iraître  une  gramic  rôçcnlariCé 
de  mœurs  cl  «le  conduile .  accompagnée  d'une 
lionnéU'  lih.ilé.  niljnl  pas  oblitîécs  aux  lois 
éiroilis  de  la  ( loiure,  comme  dans  les  autres 
moiiaslùics.  On  voit  1»  s  noms  des  plus  con- 
sidérables f,i milles  de  la  province  parmi 
ceux  des  filles  dont  le  inonaslère  de  Moiil- 
llcury  a  clé  rcmiili  depuis  ïon  instiuilion. 
Clciiicnl  VI  approuva  ci  Ue  foiidalio:i,  cl  ac- 
(orda  aux  religieuses  de  celle  maison  tous 
les  privilèges  donl  jouissaient  celles  de 
Prouille,  qui  entre  antres  avaient  obtenu  de 
Grégoire  S.  celui  d'élire  entre  e  Us  leurs 
prieures  à  perpeluilé,  et  avant  r.c  fiontife, 
Alcsandre  IN  liur  a\ail  permis  de  posséder 
les  biens  qui  leur  écberraieiit  des  successions 
de  leurs  pères  et  n;ères,  el  tout  ce  qui  pro- 
viendrait de  la  libéraliié  do  leurs  parcnls. 
Ces  religieuses  sont  distinguées  des  autres 
pour  Ih  ibillcmenl,  en  ce  que  riiivcr  elles 
porlenl  une  robe  noire  ouverte  par  devant 
sur  leur  babil  blanc;  celle  robe  noire  ne 
descend  que  jusqu'à  lui-jainbe,  et  est  dou- 
blée d'hermine,  et  elles  ont  sur  le  front  une 
pointe  noire  comme  les  neuves  en  portaient 
auircfois  (I). 

L'ordre  de  Saint-Dominique  a,  comme  tous 
les  ancii  ns  corps  religieux,  subi  sa  pan  des 
épreuves  a:i  cnées  par  le  dix-liuilièmc  siècle. 
Il  avait  coiiliiiué  de  servir  et  d'édifier  !'£- 
g  isc;  il  avait  vu  aussi  en  plusieurs  contiées 
quelques-uns  de  ses  établissements  disj  a- 
railre.  La  pcrsérulion  la  plus  sensible  que 
rciureiit  les  relii^ii'uscs  l.'ominiiaiiies  lut 
peiil-élre  (elle  que  leur  li'.  éprou»  er  le  trop 
fanieux  llicii  ,  évèque  de  l'istoie ,  en 
Toscane.  Dans  les  mémoires  de  ce  prélat,  on 
voil  que  des  désordres  régi'.aicnl  dans  les 
couvents  de  Sainle-Calhcriue  cl  de  Sainte- 
Lucie  de  l'istoie  .  el  que  l;s  deux  èvèques 
qui  lavaient  précédé  sur  le  siège  de  celle 
ville  a\  aient  essayé,  presque  sans  succès, 
d'y  appiirler  remède.  Ces  deux  èvèques 
étaient  Alamanui  el  Ippoliii  ;  tous  deux 
avaient  demandé  à  Uomc  que  les  Domini- 
caines dis  monastères  donl  il  est  ici  question 
fusî^enl  soustraites  à  la  direction  des  Domi- 
nicains, el  soumises  à  leur  entière  juridic- 
tion. lp|)olili  re(;ut  en  jainier  1777  uneld- 
Ir.'  ilu  pape  qui  noii-seuleineiil  refusait 
formelleuMul  tout  ce  que  le  prélat  lui  avait 
demande,  ni.is<Miro:e  l'accaljl.iit  de  repro- 
ches et  le  ré(irimandail  aigrement  de  ce  qu'il 
avail  osé  rappeler  à  la  mémoire  une  affaire 
que  Sa  Sainteté  croyait  entièrement  oubliée 
depuis  la  mort  de  l'èxèque  Alain.inni.  dn 
lrou»ail  surioul  fort  mauvais  dans  celle  Ici- 
Ire  quippolili  eùl  conlribué  de  tetti-  m;i- 
nèie  à  re\é:uti(in  du  plan  du  graud-due 
/,éo|)olil,  lequel  pi  in  élail  de  priver  lous  les 
e.Hnenlsde  femmes  de  la  direclion  spiri- 
luellc  dei  lèguliers;  "plan,  y  était-il  dit, 
a  oppose  aux  saints  canons,  et  nui^ilib-  à 
«  I  Kglise,  à  la  religion  cl  à  la  ré[iula'.ion  des 
•  orilrcs  monastiques.  ■>  Ippoliii  eut  seule- 
iiieiil  la  permission  de  Iransiércr  les  dissi- 
d.n!e»    (c'est  à-dire  les  opposées  à  son   en- 


51 

(ri  prise  ),  du  lonvcnl  de  ?ainlc-Cat!ieriue 
de  l'iitoio  à  celui  de  Saint-Clément  de  Prato, 
alors  dirigé  par  les  Dominicains,  el  où  elles 
furent  ri<;ues,  disent  les  Mémuires  de  Ricci, 
comme  en  triomphe.  Sous  l'administration 
de  l'évéque  Ricci,  vil  instrument  el  peut-être 
en  partie  instigateur  des  mesures  odieuses 
pr'ses  par  le  grand-duc  Léopold  contre  la 
liberté  de  l'Eglise,  l'affaire  des  liominicaincs 
prit  une  nouvelle  activité.  S'il  fdlail  ru 
croire  ce  prélat,  il  y  aurait  eu  chez  les  reli- 
gieuses des  monaslères  que  nous  avons 
nommés ,  cl  cela  depuis  des  siècles,  des 
sraudiiles  affreux,  fomentés  el  amenés  par 
les  Dominicains,  sous  le  rapport  de  la  foi  et 
des  mœurs.  Des  révélations  avaient  été  fai- 
tes par  quelques  religieuses,  et  il  parait  que 
les  accusations  avaient  quelques  fondemcnls. 
Mais  il  faut  savoir  que  nous  n'avons  pour 
renseignements  que  les  l\li;moires  de  l'évé- 
que Ricci ,  puisés  dans  les  arch  ves  de  sa 
famille  et  publiés  en  1820  par  le  sieur  De 
Potier,  si  connu  par  son  opposition  à  l'Eglise 
catholique,  el  aujourd'hui  si  complélement 
oublié,  nonobslant  la  fraten.ilé  qui  s'élail 
établie  entre  lui  et  le  parti  Lamennaisien, 
après  la  révolutioa  de  1S30.  Un  grand  pré- 
jugé contre  ce  qu'il  est  dit  de  fort  sur  les 
Dominicaines  el  les  Dominieains  dans  ces 
AJémoj'e.<  plus  ou  moins  véridiqucs  ,  c'est 
qu'on  y  viil  que  les  Dominicains  ,  les  Jé- 
suites, la  cour  de  Home  et  le  pape,  claienl 
opposes  aux  entreprises  di'  Ricci,  et  favori- 
saient les  religieuses.  Tant  de  personnes  de 
ce  poids  n'auraient  guère  soutenu  des  fem- 
mes coupables  au  point  que  prétendent 
monseigneur  rèvéquejansénisle  et  monsieur 
l'éditeur  athée  et  révolutionnaire.  Nous 
croyons  savoir  que  le  monastère  de  Dijon, 
en  France,  avail  été  supprimé  avant  la  rèto- 
lulion. 

Lors  dis  innovations  amenées  par  celle 
révolution,  si  funeste  à  l'Eglise  et  surluul  à 
l'étal  religieux  ,  les  Dominicaines  ,  comme 
lous  les  ordres  de  femmes  ,  montrèrent  un 
grand  exemple  de  fidélité.  Nous  cileions  en- 
tre autres  le  monasière  des  Dominicaines  de 
Calais.  Il  y  avait  alors  dans  ce  monasière  une 
religieuse  fori  rem  .rquable,  donl  M.  l'abbé 
Tiron  parle  dans  son  Histoire  abrégée  des  or- 
dres religieux.  Cette  religieuse  élail  madame 
lîrey,  donl  le  véritable  nom  élail  liès-proba- 
blemenl,  Dortpcii  UVi^er.  Son  grand-père  était 
mort  sur  l'échafaud  en  17'^(),  pour  l'honora- 
l.le  c  .use  du  piétendaul  Edouard  Stuatt. 
Cette  re  igicusc  cl  les  autres  Douiinicaincs 
expulsées  s'él  ienl  toutes  retirées  ù  Calais. 
Elles  rendirent  de  grands  srrvices  aux  émi- 
erés  par  l'in'ieriuédiaire  de  l'une  d'elles,  qui 
ei;i  t  une  française  noininée  Daiicl.  Les  lel- 
lie>  qu'elle  rerevail  pour  les  familles  mal- 
li  ureuses  élaie  l  adressées  à  la  sœur  Grey  ; 
iii.iis  c'était  la  siL'iir  Dancl  qui  les  recevait 
el  allait  les  prendre  des  mains  des  commis- 
sionnaires obligeants.  Ces  lettres  élaienl  ap- 
pui lees  dans  une  vessie  attachée  à  la  paiiio 
bous  mar  ne  du  bàti;iicat.  Hw  jour  la  ruse 


(1)  ('"y.,  itl.i  riiulii  v  l.,ii'  11. 


81 


r)i)M 


fut  découverte,  les  religieuses  coinpromisos 
(-1  accusées.  Une  rivalité  édifiante  s'établit 
entre  les  sœurs  Grey  et  Danel,  à  qui  prou- 
verait le  mieux  sa  culpabilité  et  l'innocence 
de  sa  compagne.  La  l\îère  Grey  fut  poursui- 
vie et  condamnée;  mais  comme  elle  avait 
atteint  l'âge  de  soixante-quinze  ans,  au  lipu 
de  la  conduire  à  l'ccliafaud,  on  l'euvova  à 
lîledeMé. 

Il  e>t  surprenant  qm^  le  P.  Héljol  n'ait  pas 
dit  un  mot  du  monastère  des  Doininiiaiues 
de  Paris  ,  qui  méritait  pourtant  quelque 
mention,  et  était  situé  presque  à  la  porte  de 
son  propre  monastère.  Nous  alloin  réparer 
cette  omission,  d'autant  phu  que  ce  couvent 
es'  le  seul  adjoird'liui  à  Paris,  et  le  plus  re- 
in irqoabie  du  peiil  nombre  des  couvents 
lie  cet  ordre  i|ii  se  voient  aujourd'liui  en 
France. 

Los  religieuses  d.minicaines  avaient  au- 
trefois deu\  monastères  à  Paris,  l'un  situé 
dans  la  rue  qui  porte  encore  aujiurd'Iiui  le 
nom  des  Filies-Saint-Tliomas,  ou  plutôt  rue 
Nouve-Saint-Augu:  lin,  en  face  d'  la  rue  Vi- 
vienne.  Celte  partie  de  la  rue  Neuvc-Saint- 
Augustin  prit  dtpiis  le  nom  de  rue  dos 
Filles-Saint-Tiiomas.  Ces  religieuses  de- 
vaient leur  établissement  à  Par  s  à  Anne  de 
Caumont,  femmi;  de  François  d'Orléans  de 
Longueville ,  comie  de  Longueville  et  de 
Saiiil-Paul,  et  duc  de  Froi:sae.  Celte  dame, 
ayant  obtenu  du  cardinal  Barberin  ,  légat 
d'Urbain  Vlll,  par  une  bulle  datée  du  5  oc- 
tobre 1623,  la  permission  de  fondera  Paris 
un  monastère  de  religieuses  de  l'ordre  des 
Frères  Prêcheurs  réformés,  sous  l'invocation 
de  sainte  Catherine  de  Sienne,  fil  venir  de  Tou- 
louse la  MèreWarguerile  de  Jésus,  dont  la  vie 
se  trouve  dans  l'ouvrage  intitulé  V Année  Do- 
minicaine, et  six  autres  religieuses  du  même 
ordre.  Arrivées  à  l\uis,  le  27  novembre  1626, 
elles  furent,  le2mnrs  suivant,  avec  la  permis- 
sion de  l'archevêque  dj  Paris,  installées  dans 
l'hôtel  du  Bon-Air,  i  ue  Neuve-Sainle-Genc- 
vièvc,faubourgSl-Marceau,et  y  restèrent  jus- 
qu'en 1632.  Alors  elles  allèrenl  se  loger  rue 
Vieille-du-Temple,  a;i  Marais;  et  enfin,  le  7 
mars  lG't2  (Le  Hœuf,  Labane,  La  Caille,  Piga- 
niol,diseiitl632), elles  s'établirent  dans  la  rue. 
Ncuve-S  iinl-AugusIin,  où  elles  sont  demeu- 
rées jusqu'il  la  suppression.  Le  7  mars  é'ant 
lu  jour  de  la  fêle  de  saint  Thomas  d'A(iuiti, 
les  religieuses  dominicaines  prirent  ce  nom 
illustre  pour  leur  maison.  Une  partie  des  re- 
ligieuses de  la  ma  son  du  faubourg  Saint- 
Marceau  ,  alors  trop  nombreuse  à  Saint- 
Thomas,  s'établit  au  Marais,  rue  d'Orléans. 
Le  0  mars  1627,  la  Mère  -Marguerite,  prieure, 
accoitipagna  la  petite  colonie  qu'où  taisait 
sortir  d  i  premier  établissement,  et  en  lt;36, 
elle  les  conduisit  dans  la  rue  Plâlrière,  où 
elles  restèrent  jusqu'à  la  fin  de  la  même  an- 
née. De  là  elles  allèrent  rue  Matignon,  où 
elles  demeurèrent  jusqu'en  164-1.  Alors  elles 
allèrenl  s'établir  rue  Charonne,  dans  la  mai- 
son qu'elles  occupent  encore  par  leurs  suc- 
cesseurs, et  qu'elles  durent  à  la  générosité 
de  mademoiselle  Ituzé  d'Effiat,  fille  du  maré- 
chal (le  ce  nom  ,  (lui  donna  tout  son  bien  ù 


IU)M  Si 

ccl'e  maison  ,  et  s'y  fit  religieuse,  en  1636, 
dans  la  maison  de  Saint-Thomas. 

La  première  pierre  du  bâliment  fut  posée 
le  3  août  1639,  et  on  donna  au  monastère  le 
nom  de  la  Croix,  sous  lequel  il  est  encore 
connu  aujourd'hui.  Les  religieuses  y  entrè- 
rent le  16  janvier  164-1.  Cette  date  s'accorde 
avec  celle  que  nous  avons  donnée  pour  épo- 
que de  l'entrée  des  religieuses  au  couvent  de 
Saint  Thomas  ,  d'après  M.  de  Saint-Victor; 
mais  nous  croyons  devoir  ajouter  ici  que 
les  Mémoires  qui  nous  sont  fournis  par 
les  religieuses  dominicaines  elles-n)êmes 
portent  que  leurs  Mères  ,  en  arrivant  de 
Toulouse  ,  logèrent  d'abord  à  l'abbaye  do 
Jouarre,  d'où  elli'S  passèrent  dans  leur  mo- 
nastère de  la  rue  Vivienne,  le  6  mars  1627, 
et  y  chantèrent  les  premières  vêpres  de 
saint  Thomas  d'Aquin  ;  que  ce  fut  de  cette 
maison  que  sortit  la  Mère  Marguerite  pour 
la  seconde  fondation  ,  conduisant  d'abord  la 
nouvelle  cdonic  rue  Vieille-du-Temple  ,  et 
de  là  rue  Plàtrière  dans  l'hôtel  de  madame 
de  Castille,  où  mademoiselle  d'Effiat  fit  pro- 
fession. 

Le  monastère  de  la  Croix  avait  une  vaste 
clôture,  qui  lui  a  été  enlevée  par  la  révolu- 
tion et  le  gouvernement  de  Louis-Philippe, 
car  une  partie  de  son  enclos  n'a  été  définiti- 
vement aliénée  que  depuis  la  révolution  de 
juillet  1830;  mais  il  n'était  point  entièrement 
bâii,  et  forme  un  carré  non  fermé.  L'église 
est  prise  sur  le  rez-de-chaussée  ,  du  côlé 
nord  ,  et  sur  la  partie  du  cloître  qui  y  est 
jointe. 

Quand  les  Frères  des  Ecoles  chrétiennes 
vinrent  s'établir  à  Paris,  conduits  par  M.  De 
la  Salle,  le  monastère  de  la  Croix,  alors  dans 
laisance,  subvint  à  leurs  besoins  par  des  se- 
cours généreux  et  abondants. 

Vers  l'année  1731  ou  1732,  le  roi  envoya 
aux  religieuses  de  la  Croix  une  Icllre  de  ca- 
chet qui  leur  défendait  de  recevoir  des  sujeSs 
cl  de  faire  faire  profession  aux  novices.  Cette 
interdiction  dura  jusqu'au  mois  de  juin  1730; 
Il  nous  a  paru,  par  la  lettre  de  l'archevêque 
de  Paris,  qui  annonce  à  la  prieure  la  ces- 
sation lie  cette  défense,  que  le  j  mséuisme  ou 
le  défaut  de  régularité  avaient  pu  donner 
Oicasion  à  celte  rigueur. 

En  1782,  la  communauté  obtint  de  Pie  VI 
des  indulgences  en  faveur  de  la  dévotion  au 
sacrwé  cœur  de  Jésus,  établie  dans  son  église. 
En  1790,  il  fut  signifié  à  la  communauté,  par 
l'assemblée  nationale,  d'envoyer  à  la  mon- 
naie toute  l'argenterie,  et  même  les  vases 
sacrés  dont  on  pouvait  se  passer,  pour  être 
fondus,  et  pour  qu'elles  se  rendissent  ainsi 
utiles  à  la  patrie.  La  communauté  déclara, 
en  envoyant  l'argenterie,  qu'elle  n'avait  do 
vases  sacré-^  que  ceux  qui  étaient  nécessai- 
res. La  même  année,  la  municipalité  de  Pa- 
ris fil  faire  une  visite  dans  le  monastère,  in- 
terroger toutes  les  religieuses  séparément, 
et  demander  L'ur  volonté  sur  leur  séjour 
personnel  dans  la  maison  ,  et  enfin  faire  l'é' 
lection  d'une  prieure.  Toutes  déclarèrent 
qu'elles  nommaient  et  voulaient  la  prieure 
en  charge,  révérende  Mère  Suinlc-'îhé.oja 


83 


D'.CTIONNMRE  PE- 


Chardin.  Le  procùs-vcrbal  de  la  v  sHe  minu- 
lieuso  qu'on  fii  alors,  (Sl  loiil  .1  la  louanj^e 
de  la  ruiniiiiiiiauié. 

En  no-i  ,  la  cominunaulé  oui  ordre  d'éva- 
cuer le  nioiiaslère  pour  le  20  aoiil,  el  défense 
en  iii(?me  leuips  de  former  corpTiilion,  dans 
aucune  tnaisun,  an  nombre  de  pins  de  huit. 
La  Mère  prieure  laissa  auxjeunes  religieuses 
qui  avaient  leur  famille,  le  >  ii(ii\dc  s'y  rclirer 
ou  de  re>ler  avec  qmlques-unes  d'elles  ,  el 
de  se  résoudre  à  une  rigoureuse  pauvrclé. 
Plusieurs  furent  forcées  par  Irurs  parents  à 
se  retirer  chez  eux  ;  une  des  anciennes  fut 
demandée  |our  faire  un>'  éduotion  particu- 
lière; les  autres  s'aliandonnèrcnl  à  la  con- 
iluiie  de  la  Mère  prieure,  à  qui  elles  avaient 
voué  obéissance. 

Elles  se  divisèrent  en  trois  groupes  :  la 
Mère  prieure  et  sept  de  ses  filles  allèrcnl  de- 
meurer rue  de  la  Cerisaie;  la  Mère  sous- 
prieure  alla,  avec  sept  autres,  den. curer  rue 
de  la  Hoquette;  la  majeure  partie  des  sœurs 
converses  se  retira  dans  une  maison  de  la 
rue  de  Cliaronne,  où  il  y  avait  un  four  el  un 
j  irdin.  Là  elles  cuUivèrent  la  terre  el  conli- 
iiuèrenl  leur  (onimerce  do  bonbons  jusqu'en 
l'année  181'.),  époque  à  la(itielle  elles  se  réu- 
nirent à  leurs  anciennes  îilèrcs.  Malf;rc  leur 
séparation  ,  les  reli},'ieuses  restèrent  toutes 
sous  l'obéissance  de  la  Mère  prieure  ,  qui 
condail  son  auloiiié  à  une  des  anciennes 
dans  les  maisons  (ju'elie  n'Iiabilail  pas  ,  el 
recevant  en  audi'nce  celles  qui  voulaient 
lui  parler.  Lors  de  la  séparation,  il  y  avait 
>ingl-cinq  religieuses  de  chœur  cl  treize  con- 
verses; quelques-unes  de  celles-ci  vivaient 
encore  quand  nous  fûmes  nommé  confes- 
seur extraordinaire  de  celte  conimuu.iulé, 
en  1831. 

La  firieure  cl  celles  (lui  s'élaicnl  réunies 
à  elle  Crent  un  petit  commerce  de  Heurs, 
éventails,  jarretières  et  autres  petits  ouvra- 
[ivs  <le  celle  sorte  ,  (jui  leur  permetta  ent  de 
suivre  leur  règle  el  de  faire  même  des  éco- 
nomies pour  les  ten)p5  où  elles  pourraient 
se  réunir. 

Dès  l'année  1807,  elles  fu  eut  reconnues 
par  l'empereur  Napoléon  ,  qui  leur  pro- 
■ncllail  l'ancien  couvent  de  Saint- Tlionias, 
rue  Viviennc.  Par  la  protection  de  M.  Poi  la- 
lis,  ministre  des  cultes  ,  qui  s'intéressait  à 
elles,  elles  élaienl  sur  le  i)oiiil  tl'en  prendre 
po>^sessiiin  lors(iue  la  mort  dt;  ce  (irolecleur 
vint  relarder  leur  bonheur.  Les  choses 
reslérenl  en  suspens  jusi]u'i  11  IHUi. 

Leur  mon.islére  de  la  Ooiv  n'av.iil  point 
été  vendu  par  la  nation;  un  décret  de  l'I^ni- 
pereur  ra\ail  concède  an\  (illes  de  la  Clia- 
rilé  de  Saint-Vincenl-dc-Paul.  pnur  leur  ser 
vir  de  noviciat  el  de  niaison-mère.  (irâcc 
à  Dieu,  celte  maison  ne  |iul  lonvenir  à  ces 
snin'es  filles  ,  (|u'on  élabl  t  rue  du  Hac,  au 
lieu  où  elles  sont  arluellemenl ,  et  l'injuslc 
spolialion  de  la  maison  de  la  Crois  iiu  lut 
point  consommé»'.  Eu  IHIil,  MM.  le  comte 
ilo  Wilmanzy  tt  le  mari|iils  de  (ïrnshois, 
pair»  de  France,  oblinrenl  de  Louis  X\  III  la 
concession  du  monastère  de  la  Croix  à  ses 
?,ncienucs  relitjicu.ses.   Cette  cunccstion  fut 


Or.DUES  UELIGIEUX.  S4 

f/iile  par  une  ordonnance  d.itée  du  2G  septem- 
bre. La  sénalorerie  mit  aussilol  0;  posiiion  à 
la  ciincessiiin  des  terrains  ou  marais  qui  lui 
avaient  élé  concédés,  el  il  ne  resta  aux  reli- 
gieuses (|ue  le  jardin,  d'un  arpent  d'élendue, 
qu'elles  possclenl  actuellement.  l'iles  ne 
purent  entrer  en  jouissance'  qu'à  la  fin  du 
bail  <!e  M.  lUehard  Lenoir,  (lui  avait  loué 
les  bâtiments.  Ce  bail  ne  devait  expirer  que 
le  .'îl  décembre  18i4-. 

Dès  l'année  181i,  lors  des  espérances  si 
belles  et  malheureusement  si  trompeuses 
que  donna  la  llestauration,  les  Dominicaines 
pensèrent  à  vivre  taules  ensemble;  mais  leurs 
bails  respectifs  ne  finissaient  qu'en  181C,  et 
chaque  maison  était  trop  petite  pour  les  con- 
tenir toutes. Un  autre  obstacle  venait  de  leur 
pamreté,  qui  ne  leur  permettait  pas  d  ■  payer 
un  aumônier.  Le  P.  .NLmteinard,  ancien  Mi- 
nime, directeur  d'un  ur.md  nombre  d'entre 
elle*,  trouva  moyen  de  lever  ce;te  diinenllé 
de  la  manière  édifiante  que  nous  allons  dire: 
madame  de  Alazard  ét.iil  une  ancienne  reli- 
gieuse de  Montniarlre  qui  vivait  retirée  dans 
le  Marais,  à  Paris,  avec  une  sœur  converse 
qui  l'avait  suivie  à  la  sortie  de  son  abbaye. 
Elle  avait  un  oratoire  particulier,  où  à  l'épo- 
que dont  nous  parlons  neuf  ecclésiastiques 
ou  religieux  disaient  la  messe.  Le  P.  ftlon- 
Icinard  en  était  un,  el  il  se  concerta  avec 
madame  do  Alazard,  qui  entra  dans  ses  vues, 
el  l'un  des  ccclésiasiiijues  de  sa  maison, 
M.  l'abbé  Leclerc,  se  dévoua  gratuitement  à 
l'ceuvre  des  Dominicaines,  dont  il  fut  l'aumô- 
nier dès  1811-,  dans  la  maison  de  celles  qui 
habitaient  alors  la  rue  Saint-Denis,  les  sui- 
vit dans  leurs  diverses  liabitalions  cl  desser- 
vit la  communauté  pendant  trente  ans.  Nous 
avons  eu  le  bonheur  de  nous  lier  avec  ce 
s.'iinl  e(  clésiastiquc,  ancien  professeur,  qui, 
non  content  d'être  gratuilemenl  au  service 
de  II  communauté  des  Dominicaines,  lui  a 
même  fait  jiarl  de  ses  bienfaits. 

Les  religieuses  prirent  d'abord  une  maison 
à  loyer,  rue  des  Arnandiers-Popinc.iurl,  y 
cnlrèrent  au  mois  de  juillet  1810  el  y  repri- 
rent l'h.ibit  religieux  le  i  août  de  celle  an- 
née; jusqu'alois  elles  avaient  gardé  l'habit 
séculier.  Elles  et  lient  au  nombre  de  12  clin- 
ristes  el  de 'nonverses.  Les  aulies  conveiscs 
de  la  rue  dcCharonne  ne  s'y  réunirent,  ainsi 
(jue  nous  l'avons  dit,  (ju'en  l'année  1819. 

Nous  dirons  ici  que  les  Dominicaines  de  la 
Croi\  offrirent  aux  religieuses  <le  leur  ordre, 
(pii  n'avaient  pas  eu  comme  elles  le  bonheur 
de  recouvrer  leurs  maisons,  de  veuir  se 
réunir  à  elles,  (^inq  se  rendirent  à  ceJle  in- 
vilalion  ;  l'une  était  madame  de  la  i'rade,  du 
couvent  de  Saint-Etienne;  Ir.  deuxième,  du 
couvent  de  Dinan;  la  Iroisième,  madame  le 
Normand  de  \  illei  s,  de  l'ancienne  maison  do 
Poissy,  cl  qui  exerça  depuis  la  (hargc  de 
prieure,  pendant  onze  ans  ;  lu  <)ualrièinu 
était  une  religieuse  de  la  maison  de  Uo/ny  , 
(lu  fccuiid  ordre,  en  IJrie;  la  cinquième  était 
du  couvent  de  Monlpellier.  Nous  voyons  avec 
surprise  que  celte  liste  ne  contient  aucune 
religieuse  de  l'ancienne  maison  de  Saint- 
Thomas. 


e.j 


DOJÎ 


no\i 


8ii 


De  la  riu'  dos  Aninndicrs,  lis  Domiiiirainrs 
aîlèrciil  demeurer  rue  de  MoïKreuil,  n°  37, 
au  faubour::  S.iinl-Anloiiie,  dans  un  Incal 
plus  vaijle.  Mesdames  de  Grosbois  et  de  Wil- 
innnzy  lurent  très-utiles  par  leurs  dons  cha- 
ritables au  rétablissement  de  l'intérieur  de 
la  maison  de  la  rue  Ch  ronno  ;  mais  un  tiers 
des  bâtiments  avait  été  ahattu,  par  suite  de 
vétusté. 

La  pauvreté  de  la  maison  n'a  point  encore 
permis  d'y  rétablir  la  clôture  rigoureuse, 
que  les  religieuses  gardent  néanmoins  au- 
tant que  possible.  Nous  avons  donné  ces  dé- 
tails sur  cette  maison  des  Dftminicaines, 
pirce  qu'ils  feront  voir  par  analogie  ce  qui 
fut  fait  dans  les  autres  mon  isièrcs  à  cette 
époque,  et  aussi  parce  qu'ils  sont  édiOants  et 
intéressants  pour  cet  ordre  célèbre  et  pour 
les  lecteurs. 

Depuis  la  mort  de  M.  Lcclerc  ,  les  Pères 
de  la  maison  de  Piepus  l'ont  à  La  Crois  les 
foncliiins  d'aumônier.  Les  religieuses  ne  se 
lèvent  pas  actuellement  à  minuit  pour  ma- 
tines, mais  elles  font  promettre  à  toutes 
celles  qui  font  profession  de  ne  pas  mettre 
d'obs'acle  au  rétablissement  de  ce  point  de 
la  règle,  quand  on  pourra  le  rétablir.  Lors- 
qu'elles habitaient  la  rue  de  Monlieuil,  la 
prieure  et  M.  l'abbé  Leclerc,  sans  tenir  (b.i- 
pilre  et  sans  consulter  l'autorité,  se  déter- 
minèrent à  faire  prendre  aux  religieuses  le 
bréviaire  de  Paris.  Cette  mesure  singulière 
fut  prise  pendant  le  carême.  Peu  de  temps 
après  l'archevêque  de  Paris,  M.  de  Quélen, 
vint  voir  la  maison.  La  prieure  lui  dit  qu'elle 
avait  pris  le  bréviaire  du  diocèse.  L'arche- 
vc.|ue  témoigna  sa  surprise  et  son  mécon- 
tentement. «  Je  n'ai  qu'une  maison  de  Domi- 
nicaines dans  mon  diocèse,  dit-il,  je  désire 
qu'elle  garde  son  rite  et  que  son  bréviaire  n'y 
soit  pas  supprimé.»  La  prieure  fit  reprendre 
lo  bréviaire  de  l'ordre,  la  veille  de  s'iint 
Dominique,  au  mois  d'août  suivant  ;  ainsi 
le  bréviaire  de  Paris  ne  fut  récité  que  pon- 
dant quelques  mois.  Ceci  se  passa  en  18:24- 
ou  1825.  Les  religieuses  ne  rentrèrent  dans 
la  maison  de  la  Croix  qu'au  mois  d'octobre 
1823.  Lorsque  nous  étions  confesseur  extra- 
ordinaire de  cette  maison,  alors  peu  nom- 
breuse, nous  fîmes,  de  la  part  d'un  supérieur 
ccelésiaslique,  la  triste  commission  de  pro- 
poser la  récitation  de  l'office  de  la  sainte 
Vierge  au  lieu  du  bréviaire  de  l'ordre.  Nous 
vîmes  avec  plaisir  et  édification  la  mère 
prieure  rejeter  avec  empressement  notre  pro- 
position et  tenir  à  son  bréviaire,  qu'elle  avait 
pourtant  abandonné,  comme  nous  venons  de 
le  dire,  (juelques  années  auparavant.  Les  re- 
ligieuses ont  eu  la  consolation  de  voir  les 
Dominicains  rétablis  venir  plusieurs  fois  of- 
ficier dans  leur  nsonastère.  Elles  ont  eu  suc- 
cessivement deux  religieuses,  venues  d'un 
monastère  de  Suisse,  pour  gouverner  la  mai- 
son en  qualité  de  prieures. 

Il  reste  peu  de  maisons  de  cet  ordre  en 
France.  La  célèbre  maison  de  Prouille  est 
tout  à  fait  détruite.  Colle  de  Poissy,  non 
moins  illustre,  sert  aujourd'hui  de  prison 
centrale  :  ce  célèbre  inonaslèie  avait  gardé 


jtisqii',1  la  fin  une  partie  de  son  ancienne 
sijlendeur.  Les  religieuses  y  étaient  nom- 
breuses ;  dix  religieux  Dominicains  la  dcs- 
ser\aient;  la  prieure  était  perpétuelle;  la 
dernière  fut  madame  de  Quélen,  de  la  famille 
de  l'archevêque  de  Paris  du  même  nom. 

Les  religieuses  Dominicaines  appellent  re- 
ligieuses du  second  ordre  celles  qui  ne  sont 
p;is  réformées  comme  elle*,  mais  en  réalité 
elles  sont  toutes  du  second  ordre  de  Saint- 
Domin'que,  hors  rc'Ies  (|iîi,  réellement  s  ii- 
vant  la  troisième  règle,  sont  du  tiers  ordre 
et  appelées  Catberioelles  en  quelques  lieux. 

La  maison  de  Mauriac,  diocèse  de  Saint- 
Flour,  a  été  détruite  au  mois  de  mai  1847. 
L'esprit  de  l'ordre  ne  régnait  pas  autant  qu'il 
eût  fallu  dans  ce  monastère,  et  peut-être 
pourrions-nous  ajouter  que  l'autorité  ecclé- 
siastique n'a  pas  pris  les  moyens  de  l'y  ré- 
tablir. D'autres  religieuses  occupcsil  la  mai- 
son. 

Uesic  donc  encore  la  maison  de  I^angeac, 
qui  est  connue  par  la  célébrité  que  lui  donne 
la  vénérable  mère  Agnès,  amie  de  M.  Olier, 
et  qui  est,  dit-on,  actuellement  très-pauvre. 
Cefe  ci  est,  comme  celle  de  Paris,  du  grand 
oi'dre  do  Saint-Dominique.  Le  tiers  ordre 
compte  les  maisons  de  L'ingres,  d'où  est 
sortie  celle  de  Bar-le-Duc  et  de  Châlons- 
snr-Saôiic. 

L'ordre  de  Saint-Domini()ue  possède  au- 
jourd'hui des  monastères  de  femmes  dans  la 
plujarl  des  pays  catholiques  en  Europe;  il 
y  en  a  aussi  en  Aniériciuc  et  même,  croyons- 
niius,  en  Asie  et  en  quelques  pays  prote- 
stants. Il  y  a,  dans  les  Etats  soumis  à  l'em- 
pereur d'Autriche,  huit  maisons,  contenant 
cent  cinquante  religieuses.  La  njaison  de 
Rome  est  sous  la  direction  immédiate  des 
Dominicains,  comme  l'étaient  autrefois  celle 
de  Poissy  cl  autres.  Dans  la  plupart  des  au- 
tres pays,  les  Dominicaines  sont,  comme  à 
Paris,  sous  la  juridiction  de  l'ordinaire. 

Mémoires  de  Scipiun  Ricci,  tom.  I".  — 
Tiihleau  historique  et  pittoresque  de  Paris, 
])ar  M.  de  Saint-V'ic!or.  —  Mémoires  manu~ 
scrits,  fournis  p-ir  la  révérends  Mère  Saint- 
liernarJ,- Dominicaine  de  Paris,  etc.,  etc. 

B— D-E. 

DOMINICAINS  (Ordre  des). 
De  l'Ordre  des  Frères  Prêcheurs  oti  Domiiii- 
Cdins  appelés  en  France  Jacobins,  avec  la 
vie  de  saint  Dominiqui',  leur  fondateur. 

§  I".  Inslitulion  de  l'ordre, 

Guillaume  de  PuysLaurcns,  dans  son  His- 
toire des  Albigeois,  parlant  de  l'ordre  des 
Frères  Prêcheurs  iondé  par  saint  Domi- 
nique, dit  que  l'établissement  de  cet  ordre 
est  une  ];reuvc  manifeste  t>j  ce  qu'a  dit  l'apô- 
tre saint  Paul,  qu'il  fallait  qu'il  y  eût  des 
liérésies  [1  Cvr.xi,  19).  i  n  efl'et,  s'écrie  un 
auteur  moderne  dans  une  histoire  qu'il  nous 
a  donnée  aussi  de  ces  mêmes  Albigeois,  que 
de  saints,  que  de  martyrs,  que  de  docteurs, 
que  de  lumières  de  l'ordre  de  Saint-Domi- 
nique qui  li'auraieut  peut-être  jamais  éclairé 
l'Eglise  sans  les  erreurs  de  ces  hérétiques  1 


87 

S.iini  Do  I. inique  iiaquil  l'an  1170  a  Cilalmi'- 
la  ou  Cnlriroga,  biiiirp  du  <iiocc>c  d'Osnia 
il.ins  la  >'ieiili'-i:aslil!c.  Son  père  se  nominail 
Félix  (îuzman  de  l'ancienne  el  noble  laiiiille 
lies  tîuziiian  ,  qui  lient  encore  un  ran  ^  con- 
ïidérable  en  l';s|iai:ne;  et  sa  mère,  Jeanne 
d  Aza,  laquelle,  élant  j^rosse  île  saint  Uonii- 
niijuc,  eut  un  songn  injsicrieux  où  elle  s'iina- 
};ina  nicltre  au  m  nde  un  pclil  chien  qui 
d'un  llanibeau  allunjé  qu'il  lenailà  sa  a;neule 
eclairail  tout  le  mon.ie  :  présage  évident  de 
fe  qui  est  arrivé  dans  la  suite,  lorsque  par 
l'ardeur  de  son  zèle  et  le  feu  de  sa  cliariié 
ii  a  éclairé  un  nombre  infini  d'hérétiques 
qu'.l  a  lires  îles  ténèbres  de  l'erreur  pour 
leur  faire  cunnailrc  les  lumières  de  la  vé- 
rité. 

On  lui  donna  au  baptême  le  nom  de  Domi- 
nique, à  cause  de  la  dévotion  que  sa  mère 
portait  à  saint  Dominique  de  Silos,  qui  lui 
apparut  un  jour  qu'elle  priait  à  son  tombeau 
dans  un  monastère  proche  de  Calaroge,  et 
lui  prédit  ce  que  Dieu  devait  faire  par  le 
iDOjen  de  son  fils.  Ce  fut  ce  motif  qui  porla 
ses  parents  à  chercher  de  b  )nnc  heure  les 
moyens  les  plus  propres  pour  lui  procurer 
une  cducalion  qui  le  rendit  di^^ne  de  devenir 
le  minislrc  des  desseins  de  Dieu.  Do.nini  juc 
répondit  aux  internions  cl  aux  soins  de  ses 
parents.  A  peine  commcnça-l-il  à  parler  qu'il 
demandait  d'aller  dans  les  églises  pour  y 
prier  Dieu,  et  qu'il  se  levait  secrètement  la 
nuit  pour  dunn  r  à  cette  sainte  occupation 
le  temps  qu'il  otait  à  son  repos.  A  l'âge  de 
six  ans  on  le  mit  sous  la  conduite  d'un  de 
ses  oncles  arcliiprèlre  de  l'église  de  Gumyel 
d'Vssan,  pour  y  apprendre  les  lettres  lui- 
maiiit  s.  Le  temps  qui  lui  restait  de  ses  éludes 
n'était  point  employé  à  des  amusements  in- 
utiles; l'assislance  aux  dinns  offices,  le  chanl 
de  1  lîglise,  les  exercices  de  dcvoiiori,  la  dé- 
cor.ition  des  autels,  satisfaisaient  sa  piélé  et 
lui  tenaient  heu  de  divertissement. 

Ayant  p.issé  sept  années  dans  l'élude  des 
lettres  humaines  et  dans  ces  sortes  d'occu- 
pations, on  le  relira  de  la  maison  de  son  on- 
cle pour  l'envoyer  à  l'alencia,  ville  episco- 
pale  du  royaume  de  Léon,  où  il  y  avait  |)otir 
lors  une  universilé  qui  l'ut  IransTéréc  dans 
la  suite,  l'an  1217,  par  le  roi  l'erdinand  III 
dans  la  ville  de  Salamanquc.  Il  y  emiiloya 
six  ans  à  l'élude  de  la  philosophie  cl  de  la 
néologie,  joignant  toujours  à  l'élude  l'orai- 
son el  la  prière.  Il  jeûnait  dès  lors  Irès-I'ré- 
quemmcnl,  dormail  peu,  et  ne  se  reposait 
soun  lit  que  sur  le  plancher  de  sa  chambre. 
11  faisa  l  paraître  un  amour  tout  p.irlii  ulier 
j>our  la  relraile.  Il  ne  sortait  que  iiour  aller 
aux  églises  cl  aux  écoles  publiques.  Il  était 
le  père  des  orphelins,  le  protecteur  des  veu- 
ves, le  refugi!  des  pauvres,  pour  le  snulage- 
incnt  desquels,  ilans  une  cruelli-  famine 
qui  désola  iMule  l'Kspagne  ,  il  Tendit  Ions 
SCS  livres  et  ses  meubles;  il  même  dans  une 
autre  rcnconlie  il  >e  vouliil  vendre  lui- 
inéme,  s'élant  oITi-rl  pour  éir.'  la  rançaa  d'un 
jeune  homme  (jui  avait  été  pris  par  les 
Maur.'S. 

Ail  charité  ne  .^c  borna  jias  à  soulager  son 


DICIION.V.UUE  ni-.S  OUIMirS  RKLIGIiaJX. 


88 


prochain  dans  les  nécessités  du  corps,  il  vou- 
hil  lui  procurer  des  biens  spirituels,  cl  le 
zèli'  qu'il  avait  pour  le  salut  de  ses  frères 
lui  fit  enireprenilrc  de  rudes  pénitences  pour 
la  conversion  de  ceux  qui  étaieni  endurcis 
dans  leur  péché.  Toujours  prêt  à  donner  sa 
vie  pour  empêcher  que  Dieu  ne  fût  offensé, 
il  sentait  au  dedans  de  lui-même  une  si  forle 
douleur  des  péchés  d'nuirui,  qu'il  les  pleurait 
amèrement,  comme  s'ils  avaient  été  les  siens 
propres.  Ce  fut  ce  zèle  du  salut  du  prochain 
qui  le  fit  résoudre  à  travailler  à  la  conver- 
sion des  pécheurs  par  ses  discours  ;  il  com- 
mença jiourWors  à  faire  paraître  les  grands 
talents  que  Dieu  lui  avait  donnés.  Il  les  em- 
I  loya  avec  lant  de  succès,  que  les  [ireniiers 
fruits  ([u'il  en  relira  furent  la  convcrsi  in 
d'un  seigneur  nommé  Conrard  qui  avr.il  été 
compagnon  de  ses  éludes,  et  qui,  s'élant  fiit 
dans  la  suile  religieux  de  l'ordre  de  Cileaux, 
fut  élevé  à  la  dignité  de  cirdinal.  Ses  dis- 
cours épouvantaient  les  péc/ieurs,  conver- 
lîssaienl  les  hérétiques,  servaient  de  guides 
aux  péiiiteuls,  et  de  confolalion  auxaliligés. 
De  si  saints  exercices  et  tant  d'exemples  de 
vertu  augmenlèrenl  la  réputation  do  D.)mi- 
nique,  qui.  n'ayant  pas  encore  vingl-quatro 
ans,  était  déjà  consulté  comme  le  directeur  le 
plus  expérimenté  sur  les  affaires  du  salut. 
Dom  Dièguc  de  Azebez,  évoque  d'Osma, 
voulant  reformer  les  chanoines  de  sou  Egli- 
se, el  leur  faire  embrasser  la  vie  régulière 
sous  la  règle  deSainl-Auguslin,  jela  les  yeux 
sur  Dominique  pour  le  faire  entrer  dans  sou 
chapitre,  le  regardant  comme  celui  qui  se- 
rait le  plus  cajjable  de  soutenir  par  sou 
exemple  l'établissement  de  la  réforme  qu'il 
projct.iil.  11  lui  en  fil  la  proposition  ,  el  Do- 
nùni(|ue,  ne  doutant  point  que  Dieu  ne  lui 
parlai  par  la  bouche  de  son  évêque,  quitta 
l'alencia  pour  venir  prendre  l'habit  de  cha- 
noine et  faire  professinn  de  la  vie  religieuse 
dan-,  l'Eglise  d'Osm.i.  Quoiqu'il  n'y  changeai 
(jue  son  extérieur,  Il  ne  laissa  pas  de  paraître 
un  honmie  tout  nouveau  parla  ferveur  avec 
laquelle  il  se  porla  à  la  perfection  de  sou 
éiul  ;  el,  croyant  que  jusque-là  il  n'avait  en- 
core rien  l'ait  jiour  son  salul,  il  augmenta 
ses  jeûues,  ses  veilles,  ses  pénilences  et  se^ 
mortifications.  Les  chanoines  d'Osnia,  sur- 
jiris  et  édifiés  de  ses  vertus,  croyaient  voir 
leur  cathédrale  changée  en  un  désrrl  sem- 
blable à  ceux  de  la  Tliéb.iïde  el  de  ri''gypte, 
tanl  élail  grande  l'Iiumililé,  la  moriificalion, 
l'abstinence  et  la  retraite  de  Dominique  ; 
aussi  faisait-il  son  élude  particulière  des 
Conférences  de  Cassien,  uGn  d'imiter  ces  an- 
ciens Pères  des  déserts. 

Son  évéque,  qui  connaissait  son  talent,  ne 
voulut  pas  renfermer  dans  son  Eglise  le  tré- 
sor <iu'il  possédait;  il  lui  permit  d'aller  por- 
ter la  parole  de  Dieu  au\  naliuns,  el  de  prê- 
cher la  i>énilence  aux  pécheurs.  Aussilùt  il 
|),ircnui  ut  iiliisieurs  provinces,  travaillant  à 
détruire  en  même  temps  les  vices  et  les  er- 
reurs dont  les  maliométans  et  les  hérétiques 
les  avaienl  infeitêes.  I.a  première  conver- 
sion qu'il  fil,  el  la  plus  eclalanle,  fui  celle  de 
Kcinier,  qui,  ayant  renyucé  ù  l'hérésie  doul 


89                                 ni)M  l)O.M                                ?0 

il  éinil  i'aulcur,  fut  employé  bioiilôl  après  sioiis,   afin   de    prêcher   encore  mieux    par 

par  le  \)!X\)c  innocent  111  contre  d'autros  hé-  leur  exemple  que  par  leurs  discours,  ils  de- 

rétiques   (]ui  avaient   autant   (!e    noms   dif-  vinrent  respectables  par  leur  nouveau  genre 

férents  qu  ils  occupaient  de  différentes  pro-  de  vie,  nu  lieu  qu'on  les  avait  méprisés  dans 

vinces,  et  qui  entra  depuis  dans  l'ordre  des  leurs  richesses.  L'évêquc  d'Osma,  qui  avait 

Frères  Prêcheurs.  donné  ce  consi  il,  l'avait   mis  le  [ircmier  en 

Quelque  temps  aptes,  Dominique  fut  or-  pratique  avec  Di:minique.  11  avait  clé  établi 

donné  prêtre  par  l'évèque  d'Osm.i,  qui  le  lit  chef  de  la  mission,  dont  le  nombre  des  ou- 

sous-prieur  de  soncliipi  re,  qui  était  la  pre-  vriers  s'était  augmonlj  par  l'arrivée  de  l'abbé 

niière  dignité  après  la  f.ienne,  puisque,  après  de  Cîicaux  et  de  douze  a!  Lés  de  son  ordre  ; 

avoir  embrassé  la  régularité  qu'il  avait  pre-  mais    ces    religieux    étant   retournés    dans 

scrite  aux  autreS;  il  en  était  devenu  prieur,  leurs  monastères  quelque  temps  après,  aussi 

Ce  prélat  ayant  encore  scrupule  de  retenir  bien  que  l'évêque  d'Osma  dans  son  diocèse, 

Dominique,  dont  la  vocation  était  d'instruire  où  il  mourut  dans  le  temps  qu'il  se  disposait 

et  de  convenir  les  peuples,   l'envoya  derc-  à    retourner  dans  le  Languedoc,    le    légat 

chef  pour  remplir  le  ministère  de  prédicateur  Haoul   ayant   aussi  quitté  cette  province,  et 

évangélique.  11  parcourut  plusieurs  provin-  Pierre  de  Gastclnau  ayant  été  assassiné  par 

ces,  la  Galice,  la  Caslille    et    l'Aragon,   où  les  émissaires  de  Raymond ,  comte  de  Tou- 

il  fil    plusieurs    conversions,  jusqu'en    l'an  louse,  Dominique  se  trouva  seul   cbaru'é  de 

120i,  qu'Alphonse,  roi  de  Caslille,  ayant  en-  tout  le  poids  de  la   mission.  Bien  loin  de  se 

A  oyé  l'évéquedOsma  ambassadeur  en  France  laisser  intimider  à  la  vue  des  fali^'ues ,  des 

pour  y  négocier  le  mariage  de  son  fils  Fer-  tourments  et  des  périls  dont  elle  était  accom- 

dlnand,  qui  fut  son  successeur,  avec  la  prin-  pagnée,  il  se  sentit  animé  plus  que  jamais  à 

cesse  de  Lusignan,  fille  de  Hugues,  comte  de  poursuivre  son  entreprise.  Un  renfort  de  sept 

la  Marche,  ce  prélat  prit  Dominique  en  sa  ou   huit  ouvriers  qu'il  reçut    redoubla  son 

compagnie.  courage,  et  il  les  distribua  dans  les  endroits 

Ils  passèrent  parle  Languedoc,  où  ils  fu-  qui  avaient  plus  de  besoin  de  secours.  Le 

reil  léînoins  des   ravages  que  faisaient   les  nombre  se  multiplia   encore   dans  la  suite; 

hérétiques  albigeois.  Ils  ne  purent  entendre  mais,  comme  il  diminuait  aussi    par  inter- 

Je  récit  qu'on  leur  (il  des  erreurs  et  des  abo-  valle,  parce  que  la  plupart  ne  se  joignaient 

minalions  qu'on  leur  attribuait  sans  en  être  à  lui  que  pour  un  temps,  que  souy.'nl  après 

vivement  touchés.  L'évèque   cependant  re-  le  terme  de  quelque  mission  limitée,  ils  s'en 

tourna  en  Espagne  pour  rendre  compte  au  retournaient  à   leurs  premiers   emplois,  et 

roi    Alphonse   de  sa   négociation  ;   mais    ce  que   plusieurs    même  ne  faisaient   point  de 

prince,   l'ayant  renvoyé  en  France  avec  un  scrupule    de    l'abandonner    dans    ses     plus 

magnifique  équipage  pour  amener  la  prin-  grands  besoins,  il  songea  à  i  xécuter  la  réso- 

cesse  promise  au  prince   Ferdinand,  il   prit  lulion  qu'il  avait  déjà   formée  avant  la  mort 

derechef  Dominique  avec  lui,  et,  étant  arri-  du    l'évèque    d'Osma  et   celle   de  Pierre   de 

vésau  château  de  Gace,  lieu  de  la  résidence  Caslclnau,  louchant  l'inslilution  d'un  ordre 

du  comte  de  la  Marche,  ils  trouvèrent  toute  religieux  qui   eût  pour  fin  la  prédication  de 

la  cour  en  pleurs  pour  la  mort  de  cette  prin-  l'Evangile,  la  conversion  des  héréliques,  la 

cesse,  qui    venait   d'expirer,   et  assistèrent  défense  de  la   loi  et  la  propagation   du  chri- 

cux-mômes  à  ses  funérailles.  Frappés  de  cet  slianisme.  Il  assembla  peu  à  peu  des  per- 

objel  qui  leur  dmnait  une  si  vive  idée  de  la  sonnes    touchées   de   l'Esprit  de   Dieu,    qui 

fragilité  et  de  l'inconstance  des  choses  de  la  étaient  animées  du  même  zèle  do  sa  gloire 

terre,  ils  résolurent  do  ne  plus  retourner  en  et  du  salul  des  âmes.  Les  premiers  furent 

leur  pays.  Us  y  renvoyèrent  leur   équipage,  Guillaume  du  Clairet,  et  Dominique  surnom- 

et,  ayant  pris  le  chemin  de  Uome,  ils  oblin-  mé  l'Espagnol,  à  cause  qu'il  était  natif  d'Es- 

renl  permission  du  pape  Innocent  lll  de  de-  pagne.  Cette  compagnie  s'augmenta  juscju'au 

meurer  dans  le  Languedoc  pour  y  travailler  nombre  de  seize,  dont  il  y  avait  huit  Fran- 

à  la  conversion  des  Albigeois  ;  mais  le  saint  cals ,  six  Espagnols,  un  Anglais  et  nn  Por- 

pontife  limita  le  séjour  de  Diègue  dans  cette  l'ugais.  Les  Français  étaient   Guillaume  du 

province  à  deux  ans,  après    lesquels  il   lui  Clairet  ,  dont  nous   venons  de   parler,    qui 

ordonnait  de  retourner  dans  son  Eglise.  quitta  l'ordre  dans  la  suite  pour  entrer  dans 

"   Avec  ce  pouvoir  i!s  revinrent   en   France  celuide  Gîlcaux  ;  53ertrand  de  Cariga,  Etienne 

pour  liavailler  à  leur  nouvelle  mission.  Us  de   Metz,   Odier   de   Bretagne,   Riatlhieu  de 

y  trouvèrent  les  légats  du  p:ipe,  qui,  rebutés  Paris,  Jean  de  Navarre,  et  deu<   fièresda 

du  peu  de  profil  qu'ils   faisaient  parmi   ces  Toulouse,  Pierre  et  Thomas  de  Sjllj'.n,  qui, 

héréliques,  étaient  sur  le  point  de  s'en  retour-  non-seulemcnl   se  donnèrent   eux-mêmes  à 

ner  et  de  secouer  la  poussière  de  leurs  sou-  saint  Dominique,  mais  encore  leur  maison 

liers,  selon  le  conseil  de  l'Evangile.   M,uis  le  située  à  Toulouse    proche   la  porte  de  Nar- 

sai  ni  évêqiie  d'Osma  les  arrêta  en  leur  per-  bonne,   où  saint  Dominique  et  ses  cofripa- 

suadanl   qu'ils  feraient  plus  de   fruil  si ,  en  gnons  firent  leur  première   demeure.  Entre 

luittanl  leurs  grands  équipages,  et  le  faste  les  Espagnols  était  Dominique  l'Espagnol  et 

'in'ils  avaient   cru   nécessaire  pour  relever  le  trère  de   notre  saint   Icndaleur ,  nommé 

leur  dignité,  ils  embrassaient  la  vie  aposto-  Menez  de  Guzman. 

lique.CcquiréussitelTcctiveoicnt;  car,  ayant  Ayant  ainsi  léuni  celte  sainte  troupe  l'aii 

ijuillé  leur  train  et  leur  équipage,  et  mar-  12Io,  il  résolut,  pour  assurer  les  londemcnls 

chanl  sans  argent,  sans   valais,  sans  provi-  deson  institut, d'en  aller  diuuinderla  tculir- 


91                                             PICTIONNMUF.  DKS  ORDIIES  lUXIGIKL'X.  nS 

inalioii   A   n.imo,    où    le   pnpp    Iminccnl   111  pas  do  ronliniior  son  voviipo  à  Rome,  où  il 
de».iil   faire   louviTture  du  coiiciU-  {;oiu'r;il  lui  (■coiili' du  iioiivc.iu  potilifft   plus  UM   qu'il 
de  Lalr.ui.  H  so  ml  à  la  tomp.i|;iiio  de  Toul-  lU'  l'aurail  espéré;  il  obliiil  dès  le  22  d(crm- 
((ues,  o»t'(iu.'  de  Touioiiso,  l'un  des  approba-  lire  de  la  nièiiie  année  une  bulle  (lui  appron- 
Icurs  de  î-ou  d.ss(in,    nui  aiiail  au  coneile.  \ail  et  confirmait  son   institut   sous   le  titre, 
r.  JiMU  de  Navarre  fut  son  (Oinpa;;rion  in  d(!  l'ordre  des  Frères  Prêcli'iirs. Comme  fon- 
ce  vojaije,  cl   il  laissa   pour  gou>cner  sa  dateur  il  voulut  y  être  le  premier  aprépé,  ce 
petite    communauté     lieriraml    de    Cari;:i.  (|ui  ne  se  pouvait  faire  sans  une  rénovation 
Comme  ce  concile   venait  d'ordonner  qu'i.n  de  ses  vcrux  qu'il  avait  faits  auticfois  entre 
travaillerait  pluîot  à  la  réforme  des  ordres  les  mains  di  l'évèciue  d'(">sina,  et    une  non- 
déjà  établis  qu'à  leur  mulli(diealion,  le  pape  velle  profession.  Il  la  réitéra  et    s'obliïrea  de 
ne  voulut  pas  a^  prou\er  c  lui  de  saint  Uo-  nouveau  de  vivre  selon  les  slituis   particu- 
iiiini(|ne  ,    i\\t\    \enait   d'être    nouvellement  liers  qu'il  avait  choisis  avec  ses  frères  pour 
institué,   »iuoi<]ne  l'évé(]ue  de  'J'oulouse  el  être  à  l'avenir  les  conslitulions  de  son  ordre, 
plusieurs  prélats  eussent  parlé  en  sa  faveur.  l'.e  fut  entre  les  mains   du  pape  qu'il  11;  celle 
Il  fut  lui-même  rebuté  plusieurs  fois  par  ce  profession  solennelle,  el  Sa  Sainteté  l'établit 
pontife;  mais  une   »isiun  semblable  à   celle  supérieur  et  maître  général   de  stn   nouvel 
qu'il  avait  déjà  eue  lorsque  saint  François,  odre.    lui  donnant  pouvoir   de    recevoir  à 
dés  l'an  l-O'.t,  lui  avait  diiuandé  la  confirma-  l'habit  et  à  la  profession  ses  eompapinons, 
tion  de  son  ordre,  le  déierniina  à  accorder  à  el  d'instituer  l'S  supérieurs  et  les  ollieiers. 
llominiqucre  qu'il  demandail.  Il  le  lit  venir,  Ktanl  retourné  à  Toulouse,    il  eut  la  con- 
aj'prouva  seulement  de  vive  voix  son  insti-  solalion  d'y  voir  déjà  le  premier  couvent  de 
lut,  el  promit  de  lui  donner  celte  coiilirma-  son  ordre  achevé  jiar  la  diliiîcncc  de  ses  frè- 
lion  par  une  bulle  lorsque,  de  concert  avec  res    cl    plus  encore    par   les   libéralités  de 
ses   compagnons,    il  aurait   choisi   une  des  I  évéque   de    Toulouse   et  de  Simon .  comte 
règles  déjà  approu\ées  par  l'Fi;lise,  cl  qu'il  de   .MontforI,    Il   y   établit    aussilôl  l'écono- 
aurail   \u  le»  constitutions  et  les  statuts  de  mie  et  la  di<cipliiie,  et  reçut  avec  les  solcn- 
!-on  institut.  nilés   prescrites   les  vœux,  de  ses  religieux, 
Il  retourna  en  Languedoc,  où  il  assembla  dont    le    nombre    s'était    niiirmenlé     pen- 
ses frères  dans  le  monastère  des  ri'ligieu-es  danl  son  absence,  h'habit  do-it  il  se  revêtit 
de  l'rouille,  (ju'il  avait  établies  ;   et,  s'étant  fut  celui   des  chanoines    réguliers,   td   qu'il 
mis  tous  en  prières  :iiin  que  Dieu  leur  insjii-  l'avait  porté  jusqu'à  ce   temps-là,   el    iju'il 
ràt  le  choix  d'une  règle,  ils   furent  d'avis  d(!  l'avait  reçu  des  mains  de  lévèque  d'Ilsma, 
prendre  celle  de  saint  .\uguslin,  à  laiiuellc  c'e-t-à-dire,  une  soutane  noire  et  un  roche! 
ils  ajoutèient  des  statuts  et  des  consti  lu  lions  par-dessus,  comme  il  parait  parles  anciennes 
l'ont  l'usage  était  en   pratique  dans  un  an-  peialures  où  ce  saint  et  ses  premiers  d.sci- 
(icnor  re.  Oue'ques  auteurs  veulent  (]ue  ce  pies  sont  représentés  de  celle  manière  (1), 
seit  l'ordre  des  IJiarlreux,  mais  le  1!.  Ihiui-  selon  ce  que  dit  Michel  Pio,  hi>torien  de  cet 
bi'i  l,  dans  un  manusci  il  ijui  est  encore  con-  oiiire.    H  envoya  ensuite  de  ses  religieux  en 
serve  à  Toulouse,    au  rapport  du  l'ère  .lean  dilîerents  eiulroits  pour  y  travailler  au  salut 
de  Kcchac,  historien  de  l'ordre  des  Domiui-  des  âmes  par  la  prédication,  qui  faisait  l'cs- 
cains,   dit  que  saint  Doniinique  les  lira  des  sei;tiel  de  son  institut.  Le  Père  Matthieu  de 
<  onstiluliuns  de  l'ordre  de  l'remontré.    Les  Paris   el   Manez  de  Cuzman,  frère  de   noire 
principaux   articles   ordonnaient   le  silence  saint,    furent  destinés  pour  Paris.  Il  en  eii- 
perpéiucl ,  n'y   a^ant  aucun  temps  où  il  fu!  voya   d'autres  en    lispagiie,    il   en   laissa  à 
permis  de  parler  ensemble  sans  la  permi--  Toulouse,   el  se  réserva  pour  lui  la  ville  de 
sioii  du  supérieur;  les   jeûnes  presque  con-  Home  (2). 

tinuids,    au   moins   depuis  le   1 '»■  septembre  Comme  son  dessein,  après  avoir  séjourné 

jusciu'à  Pâques;  l'abstinence  de  la  viande  en  quelque    temps  en  llalic,   était  de  passer  en 

tout  temps,   excepté  d..ns  les  grandes  mal..-  .Vfriquc  pour  y  annoncer  la  parole  de  Dieu 

dies;   l'usaijc  de  la  laine  au  lieu  de  linge;  aux  infidèles,  et  que  pendant  son  absence  il 

une  pauvreté  rigoureuse  et  plusieurs  autres  ne   pouvait  pas  gouverner  son  ordre,   il  en 

austérités.  (Juelquts-uns  ajoulenl,  le  renoii-  donna  le  soin  à  .>ialtiiieu  de  Paris,  qui,  selon 

fement  aux  renies  et   à  toutes  possessions;  les  historiens  de  cet  ordre,  eut  le  litre  d'abbé 

iiiaiii   ce   renoncement  ne   fut  ordonné  (iui>  général,  ajant  été  le  seul  ijui   ait  eu    celle 

d.ini  le  premier  chapitre  uéiiéral,  l'an  1220.  (lualilé,   qu'il  ne   garda   pas  longtcniis,  car 

Les  résidutions  ainsi  prises  sur  le  genre  saint  Doininiiiue  ne  passa  poinl  en  .Miiqne, 

de  vie,  saint  Dnminiiine  pirtii  pour  ret'  ur-  cl   gouverna  toujours   ^on   ordre.    Maltliieu 

lier  à  llome  alin  d'en  obtenir  la  coiilirmation  de    Paris   n'exerça   aucune   juriilielion    ()ue 

du  saint-siège,    pendant  «(ue  dans   'l'uuloiisc  dans    la    province  de    France,   dont    il   lut 

on  jeltcr.iil    les   fondements  de  la    première  provincial.  Ce  fui  lui  (jui,  avec  son  comp.i- 

maison  de  l'ordre.    Il  ajijiril   en   chemin   la  gnon,   lit  la  fonlalion   du  couvent  de  Paris 

mort   du   pape  Innocent  ill ,   arri»ée  le   17  l'an  121S,  un  an  après  leur  arrivée  en  celle 

juillet  1211),  à    l'érouse,  et  qu'llonoiius  III  ville,  où  ils  logèrent  d'abord  dans  une  inai- 

liii  avait  succédé.  Ouoiqu'il  prévît  les  difli-  son  qu'ils  louèrent  auprès  de  l'evéché;  mais, 

cultes  que  les  alTaires  du  nouveau  pontific.it  en  ayant  obtenu  une  autre  dans  la  rueSainl- 

dcvaicnt  apporter  à  sesd.sseins,  il  ne  laissa  Jacques,  on  les  appela  dès  lors   Jacobins, 

(i)  Voy.,  il  l.i  lin  du  vol.,  ii"  12.  {i)  Vil.  de  gl.  llmim.  illun.  dcijl.  Ord.  de  S.  Dem. 


93 


DOll 


DOM 


9; 


nom  qu'ils  onl  rcloiui  jusqu'à  piéscnl  par 
toute  la  France. 

Qi!clqi)c  temps  après  que  saint  Domini- 
que eut  ainsi  dispersé  ses  disciples,  il  quiila 
Toulouse  pour  aller  en  Italie,  et  elioisil  pour 
compagnon  le  bienheureux  Etienne  de  Meiz. 
11  prit  sa  roule  par  Paris,  et  de  là  par  la  Lor- 
raine, pour  aller  à  Venise  par  les  frontières 
d'Allemagne.  En  passant  à  Metz  il  y  bâtit 
in  couvent  de  son  ordre,  dont  il  donna  la 
conduite  à  ^on  comp.ignon  le  bienheureux 
Etienne,  qui  fut  peupléen  peu  de  temps  d'un 
grand  nombre  de  religieux  à  qui  il  donna 
lui-même  l'habit  pendant  le  séjour  qu'il  fit 
en  celte  ville.  Il  prit  sis  de  ces  religieux, 
qu'il  mena  avec  lui  en  lia  ie.  II  fonda  encore 
un  autre  couvent  à  Venise,  où  ayant  encore 
laissé  quelques-uns  de  ses  compagnons,  il 
s'en  alla  à  Kome  pour  essayer  d'y  mettre  le 
centre  de  son  ordre,  qui  de  là  pourrait  plus 
facilement  s'étendre  dans  les  autres  villes 
jusqu'aux  extrémités  du  monde. 

Le  pape  Honorius  111  lui  donna  d'abord 
l'église  de  Saint-Sixte  et  ses  dépendances 
pour  en  faire  un  couvent;  mais  à  quelque 
temps  de  là  ayant  fait  donner  cette  maison 
aux  religieuses  deson  ordre,  comme  nous  l'a- 
vons dit  à  !  article  Dominicaines,  il  obtint  du 
même  pape  l'église  de  Sainte-Sabine  avec  une 
partie  de  son  propre  palais,  pour  servir  de 
demeure  à  ses  religieux,  qui  se  trouvaient 
déjà  en  grand  nombre.  Ce  fut  dans  ce  mo- 
nastère que  l'an  1219  il  quitta  son  habit  et 
celui  de  ses  frères,  qui  avaient  été  jusque-là 
des  chanoines  réguliers,  pour  prendre  celui 
que  l'on  prétend  que  la  sainte  V'ierge  montra 
au  bienheureux  Renaud  d'Orléans,  qui  con- 
sistait en  une  robe  blanche,  un  scapulaire 
de  même  couleur,  auquel  était  attaché  le 
chaperon  de  la  même  façon  que  le  portent 
encore  aujourd'hui  les  Chartreux,  les  reli- 
gieux de  Saint-Dominique  de  Portugal  et 
ceux  de  laCongrégation  du  Saint-Sacrement 
en  France;  dont  nous  parlerons  aussi  dans 
la  suite.  Ils  prirent  aussi  la  chape  et  le  cha- 
peron noir  aboutissant  en  pointe  comme 
celui  des  Chartreux  (1). 

M  avait  envoyé  l'année  précédente  de  nou- 
\  eaux  missionnaires  à  Bologne  qui  y  avaient 
fondé  un  couvent,  l'église  de  Noire-Dame  do 
la  Mascarella  leur  ayant  été  accordée  pour 
ce  sujet.  Mais  cette  même  année  1219  ils  en 
obtinrent  un  second  dans  la  même  ville,  qui 
est  devenu  si  rccommandable  dans  la  suite 
des  temps,  qu'il  est  l'un  des  plus  beaux  et 
des  plus  fameux  d'Italie,  tant  par  la  magni- 
ficence de  ses  bâtiments,  de  ses  cloîtres  et 
par  le  nombre  des  religieux,  qui  est  ordi- 
nairement de  cent  cinquante,  que  pour  l'a- 
vantage qu'il  a  de  posséder  les  sacrées  reli- 
ques de  ce  saint  fondateur,  qui  tint  deux 
chapitres  généraux  dans  ce  couvent  en  1220 
et  1221.  Dans  le  premier  on  fit  plusieurs 
règlements  pour  maintenir  dans  l'ordre  la 
discipline  régulièreet  la  pauvreté,  à  laquelle 
ils  s'engagèrent  en  renonçant  dans  ce  chapi- 
tre ù  toutes  les  rentes  et  possessions.  Ce  qui 


port)  Fniul  l)(imi:ii(iue  à  ce  renoncowenî 
furent  les  effets  admirables  de  la  divine  pro- 
vidence, dont  il  avait  vu  les  preuves  dans 
le  chapitre  général  de  l'ordre  des  Frères 
Mineurs  que  saint  François  avait  tenu  l'an- 
née précédente  à  Assise,  où  se  trouvèrent 
plus  de  cinq  mille  religieux  qui  ne  manquè- 
rent de  rien,  quoiqu'ils  ne  posséd  isseni  au- 
cun revenu  :  ce  qui  toucha  si  vivement  saint 
Dominique,  qui  s'était  trouvé  pour  lors  à 
Assise  pour  admirer  ces  hommes  aposlo'i- 
ques,  qu'il  rôsoliit  de  faire  embr:isser  la 
même  pauvreté  à  ses  religieux,  et  que,  au 
rapport  de  saint  Antonin,  il  donna  en  mou- 
rant sa  malédiction  à  ceux  qui  introdui- 
raient dans  son  ordre  les  rentes  et  les  pos- 
sessions. 

J'avoue  que  la  plupart  des  historiens  de 
l'ordre  de  Sainl-Dominiquf»  soutiennent  que 
leur  fondateur  ne  se  trouva  point  à  co 
chapitre  des  religieux  de  l'ordre  de  Saint- 
François,  sur  ce  qu'ils  prétendent  que  saint 
Dominique  était  pour  lors  en  Espagne;  et  à 
cause  que  ce  fait  est  rapporté  par  Wadding 
et  quelques  autres  historiens  de  l'ordre  des 
Mineurs,  le  P.  llechac,  Dominicain,  par  une 
fade  raillerie  ,  dit  que  c'est  une  tradition 
grise;  mais,  sans  examiner  si  elle  est  grise 
ou  blanche  et  noire,  il  est  certain  qu'aucun 
des  écrivains  de  l'ordre  Je  Saint-Dnuiiniquo 
ne  s'accorde  sur  le  temps  que  demeura  ce 
saint  en  Espagne  ,  ni  dans  quelle  année  il  y 
fut  et  qu'il  en  revint,  le  nombre  de  ceux 
qui  la  mettent  en  1218  étant  plus  grand  que 
de  ceux  qui  prétendent  que  ce  fut  l'an  12li). 
Quoi  qu'il  en  soit ,  c'est  une  question  peu 
importante  de  savoir  si  ce  fut  à  l'exemple  de 
saint  François,  ou  de  son  propre  mouvement 
que  saint  Dominique  rer.onça  à  toutes  les 
rentes  et  les  posses  ions  dans  le  premier 
chapitre   général  qu'il    tint   à  Hologno  l'an 

1220.  L'année  suivante  1221  il  y  tint  encore 
un  second  chapitre  général  ,  où  l'on  divisa 
l'ordre,  qui  avait  déjà  soixante  couvents,  en 
huit  provinces,  qui  furent  celles  d'Espagne, 
de  Toulouse,  de  France,  de  Lombardie,  de 
Rome,  de  Provence,  d'Allemagne  e(  d'Angle- 
terre, et  on  élut  pour  chaque  province  un 
provincial.  Le  chapitre  étant  fini  ,  saint 
Dominique  envoya  des  religieux  en  Ecosse, 
en  Irlande  et  dans  les  pays  du  Nord  jus- 
qu'en Norvvége ,  et  s  us  le  pôle,  et  dans  le 
Levant,  jusque  dans  la  Palestine.  II  alla 
ensuite  à  I\lanloue,  à  Ferrare,  à  Venise, 
d'où  il  retourna  à  Bologne,  où,  après  avoir 
travaillé  si  utilement  pour  le  bien  de  l'Eglise 
et  pour  rétablissement  de  son  ordre  ,  il 
termina  heureusement  ses  jours  dans  son 
second  cou\cnt,  qu'on  appelait  pour  lors 
Saint-Nicolas  des  Vignes,  et  rendit  son  âme 
à    son  créaleiir  le  sixième  jour  d'août  l'an 

1221.  Le  cardinal  Hugolin,  légat  du  saint- 
s  ége ,  fit  la  cérémonie  de  sa  sépulture  ,  ac- 
compagné du  patria.'che  d'Aquilée  ;  et  ce 
cardinal  ayant  été  depuis  p.Tpe  sous  le  nom 
de  Giégoire  IX  le  cationisa  le  13  juillel 
123i. 


(1)  Yoy.,  à  la  fin  du  vol.,  n"  I",  1 1  cl  15. 


95                                          DICTIONNAIRE  DES  ORDUES  RELIGIEUX.  % 

Voij.  Ili'rnnndo  ilo  Cnsliulio,  Junn  l.oiicz,  il.ms  lo  gouvorncmonl  de  l'ordre  ,  nyanl  cli' 

ri  AiilOTi.  (le  Rcmi'sel.  Uisl.  ilc  San  Domingo,  élu  dans  le  rliapiire  général  qui  se  linl  aussi 

t]  dtsuordtnde  Prrdcn(toris.\-\iAo\.Q..\hcci\s,  à  i'aris    l'an  12.')".  11  rédiiioa    par  écrit   les 

Hitt.  de  San  Domingi  ».  Ihom.  Malucnda  ,  ronstilulious  ;  il  leur  donna  une   meilleure 

AnvaL    ord.  l'rœd.  Li-and.  Aiberl.  de  Y  iris  f.inne,  et  les  divisa  en  deux  parlies.  Dans  le 

illiistrib.  ord.  PrwdAiio.  Michel  Pio,  Vit.  de  premirr  chapitre  général  qu'il  lint,  il  fit  re- 

r//i  Ifuomini  iHuslri  di  S.  Domenico.  et  llist.  cevoir  une  ordonnance  qui  portait  qu'il  serait 

deHn  nobil.  proyeii.  de  S.  Domcnicn.  .\nlon.  permis  au\  p^•néraux  de  se  démettre  de  leur 

Senen*.  r/iroHi'c. /•'/'.  I'r,rdicaloruw.  et  Vif.  office  quand  bon  leur  semblerait  ,  el   qu'on 

.S.";.  PP.  ord.  Piad.  Viiiccnl.  Maria  Fontana,  serait  tenu  d'accepter  leur  di'inission  :   c'est 

Monum^iiln  Diminic  nu,  Thentnim  Domini-  pourquoi,  profilant  de  cette  ordonnance,    il 

cnnitm,tt  Cunsiittuion.,  déclaration,  et  crdi-  renonça  au  pénéralat  dans  un  autre  <  hapiire 

nation.  Capilidorum  Gener.l.  ord.  Pnrdicat.  qu'il  lint  l'année  suivante.  On  lui  donna  pour 

Serapli.  Kazzi,  Vil.  de  primi  sancli  et   biai  successeur  Jean  de  Waldisusen    en  Wesl- 

del  ord.  di  Predic.  el  Istoria  de  (jli  lluomini  phalic.sous  le  gouvernement  duquel  l'ordre 

illun.'ri  dcl  ord.  de  Prédicat.  Je  m  de  Uechac,  lit  de  nouveaux  procurés,  ayant  fomlé  Irenle- 

Yies  de  saint  Dominique  el  de  sis  premiers  quatre   couvents.  Il  y  eiU  cinquanlc-qualrc 

compagn.  J:\cob  Vcrviit,  MonumenlaConren-  étab'isseniciits    sous  le   çrénéralal  du    bieii- 

lus    Tulosavi  ord.    Prœdicnl.   Jean-llaptist'î  heureux  llumbeil,  cent  vinjrl-rini]  sous  celui 

reullel  el  Th   mas  S:)ué|:es  ,    Année  Domi-  du  bienheureux  Jean  de  \'erreil ,  et  (e  nom- 

«/fdi'n..  Sllves'r.  Maruli.Mar.  Ocfan.  f/i /«.'f.  bre  des  couvents    s'est  tellement    multiplié 

(//•   R  ligion.  l'ieto  Grecenz  ,  Presidio   Ho-  sous    les   autres  géncr.iux  ,  que  l'ordre   esl 

«K/HO.  l'auolo  .Morigia  .   Ilst.  dcU'origin.  di  présrnlcmenl  divisé  en  quarante-cinq  pro- 

luttele  Iteligiuni.ci  Hi'rmant.  Hist.  des  Ordr.  vinces  ,  dont  il  y  en  a  une  sou'i  le  lilre   de 

rclit/ieur,   /om.  11.  Giry  el  lîaillel,  Vies  des  Sainlc-Goix    des    lnde>   occidenlales  .    une 

saints,  4  août.  sous  celui  de  Saint-Jaccjucs  de  .Mexique  dans 

l'Amérique,  une  de  Saint-Jean-Iiaptisle   du 

lU.  Du  grand  progri's  de  l'ordre  des  l'rèrrs  p^-rou  ,    une    de  Sainl-Vinccul    de    Cliiapa 

Prêcheurs,  et  des  dignités  cl  offices  alla-  jans  l'Amérique,  une  de  Sainl-Ar.loniM  du 

che's  à  cet  ordre.  nouveau  royaume  de  Grenade,  une  de  Nak- 

Après    la   mort  de  saint   Dominique,  les  sivan  dans  l'.Vrménie ,  une  de  Sa  nle-Calhe- 

religieux    de  son    ordre    s'asseiiiblèrent    à  fine,  martyre   de  Quito,  dans  l'Amérique; 

I'aris   l'an  l-i-22  dans   un  chapitre  général,  une  de   Saint-Laurent  de  Chili  au  royaume 

|our  lui  donner  un  successeur,  cl  élurent  le  d-  Chili,   aussi  dans    l'Amérique;   une  du 

liienhenreux   Jourdain    de    Saxe,  quoiqu'il  Saint  -  Rosaire   des    Philippines    aux   Indes 

n'y  eût  pas   plus  de  deux  ans  et  trois  iiiois  orientales,  une  de  Saint-Hippolyle,  martyr 

(|u"il   fùl  dans  cet  ordre;  mais  son   insigne  d'Oxaca  ,  dans  l'.Vmérique  ,   <'l  une  des  îles 

piélé  el  son  grand  mérite,  qui  l'avaient  déjà  Canaries;  ce  qui  fait  voir  combien  cet  ordre 

éloé  à  la  charge  de  provincialde  Lombar-  s'est  répandu   dans   toutes    les    parties    du 

de,  le  firent  encore  choisir  de  tous  les  frères  monde.  Oulre  ces  quarante-cinq  pro\inces, 

piinr  les  gouverner  en  (lualilc  de  général.  Il  il  y  a  encore  douze  congrégations  ou  rél'.ir- 

envoya  après  son  élection  des  religieux  en  mcsparliculièresgouvernéespar  des  vicaires 

Allcni.igue  ,  où    ils   fondèrent    de  nouveau  généraui:,  desquelles  nous  parlerons  dans  la 

quatre  couvents.  Il  en  envoya  d'aulres  dans  suite. 

)a  terre  sainte  ,  où  ils  fondèrent  en  peu  de  Je  crois  bien  que  les  religieux  de  cet  ordre 

temps  ciii'i  ;iulris  couvents;  et,  le  nombre  ont  aussi  passé  eu  l'iilliiopie  dès  l'an  l-2iJ3  el 

s'augnieniant   du  jour  en   jour,    on  érigea  qu'ils  y  ont   travaillé  à   la    conversion    des 

peuples  de  ce  pays-là,  comme  quelques  au- 


-  "-r, —     j j ?      -  —     r»-  — 

quatre  nouvelles  provinces  dans  le  chapitre 
général  qni  fut  tenu  à  l'a:is  l'an  1228  : 
savoir,  les  provinces  de  (irèce,  de  Pologne, 


leurs  du  méaieordrele  prétendent,  alléguant 
pour  cet  cITet  une  huile  du  pajie  Innoccnl  IV 

de  Danemark,  el  l'e  lerre  sainie.  Il  défendit  adressée  aux  religieux  qui  étaient  en  Kil.io- 

Irès-éiroilemeiit  à  tons  les  religieux  deman-  pie   et  en  d'autres  l'ays.  .Mais  ce  que  dit   le 

grr  de  la    viande,  ni  lien    de  cuit  avec  la  1'.  Louis    dTrreti  dans  l'Histoire  de  l'ordre 

viande,  même  dans  les  m.iladies,  sans  pcr-  de  Saint-Doujinique  eu  Ltliiopie  ()u'il  a  roni- 

mission    de    leurs   supérieurs;    mais    celle  posée    en    espagnol  cl  r.ubliee    l'an    tOII, 

grande  rigueur  a  clé  modelée  dans  la  sullc  n'est    pas  souienable.    Il    prétend   (|ue    ces 

dans   le    chapitre    qui  se  tint  au.-si  à    Paris  religieux  y  onl  plusieurs  couvents,  dont  les 

l'an  12.'lfi.  Il  déclara  la  résolution  qu  il  avait  principaux  sont  ceux  de  Plurimanos  et  d'AI- 

prise  de  passer  en  lerre  sainte,  lîii  elTel  ,   il  leluya  ;  que  dans  le  premier  il  y  a  toujours 

s'embarqua  pour  ce  voyage;  mais,  à  la  \ue  neuf  mille  religieux  el   p'us  de   trois   mille 

du  pori  d  .Vcre,  comme  le  vaisseau  <  tail  près  ouvriers  el  serviteurs,  cl  dans  celui   d'Alle- 

d'y  entrer,  une  grande  lempéle  s'éleva  qui  luya  sept  mille  religieux  ;  (jne  le  couvent  de 

le  fil  submerger,  d  le  bienheureux  lourd, lin  Plurim.inos  a  (lualre  lieues  de  circuit;  ((u'il 

avec  ses   coiiip  ignons  y    péril   après   avoir  coiilient  (inatre-vingts  dortoirs,  que  chaqu.-. 

irouverné  l'ordre  prnd.'int  quinze  ans.  Ce  fui  dortoir  a   une  grande  cour,  un    cloîire,  une 

lui  (|ui  poursuivit  la  canonis.ition  de   s.iint  bililiolhôiiue,  une  sacristie  el  une  égli-(?  par- 

Ifoiiiiniq lie,  dont  il  transféra  les    |  rccieuses  ticulière,  où  tous  les  religieux  de  c.!  dortoir 

rcliqneti  dans  un  tombeau  de  m.irhre.  disi'Ut  l'ollicedivin  pend'aiit  la  semaine  ;  mais 

t;  ,inl  Raymond  de  Pe^iuafurl  lui   succéda  que  lous  les  dorloirs  .'■ont   disposés  de  telle 


■''  DU  M 

sorte,  qu'un  des  bouts  répoiul  de  plain-iiieil 
à  la  grande  église  où  tous  les  religieux  se 
trouvent  le  dimanche  pour  cliaiitor  l'office  eu 
commun,  cl  que  l'autre  bout  répond  au  ré- 
fectoire, qui  a  deux  milles  de  longueur, c'est- 
à-dire  une  lieue,  où  tous  les  religieux  m;in- 
gcnt  ensemble  tous  les  jours;  que  dans  re 
réfectoire  il  y  a  un  serviteur  pour  trois  tables, 
au  bout  desquelles  il  y  a  un  passoir  qui  ré- 
pond cà  lacuisioc,  qui  est  aus>i  commune 
pour  tous  les  religieux  ;  et  qu'il  y  a  un  grand 
et  vaste  cloître  proche  la  grande  église,  qui 
sert  à  faire  les  processions  ;  que  le  sacristain 
de  la  grande  église  donne  le  .signal  pour  aller 
à  l'ollice,  cl  qu'en  même  temps  les  sacristains 
des  églises  partiiulières  de  chaiiue  dortoir 
sonnent  aussi ,  afin  que  les  religieux  se 
rendent  dans  leurs  églises. 

Nous  croirions  ennuyer  le  lecteur  si  nous 
voulions  rapporter  toulcs  les  fables  que  le 
P.  d'Urreta  débile  louchant  ce  couvent, 
son  fondateur  saint  Thècle-Aymnnol  ,  S. 
Thécle-Avarel,  sainte  îmate,  sainte  Claire, 
cl  autres  saints  de  son  ordre,  à  ce  qu'il  pré- 
tend, et  louchant  les  couvents  d'Alleluya  et 
de  Heningali.  Nous  en  avons  suflisammcnt 
parlé  dans  la  préface  qui  est  à  la  tète  du 
premier  volume  de  celte  Hisioire;  de  telles 
fables  ne  méritent  pas  d'être  réfutées,  mais 
nous  feruns  seulement  remarquer  que  ce 
Thèeie-Aymanot  que  les  religi 'ux  de  l'ord.e 
de  Saint-Dominique  s'attribuent,  et  dont  ils 
mettent  la  mort  l'an  13Gj,  vivait  l'an  G20, 
c'est-à-dire  près  de  cinq  cent  cinquante  ans 
avant  la  naissance  de  leur  fondateur.  C'est 
ce  même  Thècle-Aymanot  qui  fut  le  restau- 
rateur de  la  vie  monasiique  en  Ethiopie, 
suivant  le  ténioignago  de  M.  Ludolplie,  Irès- 
V(  rsé  diins  l'hisloire  de  ce  pays;  et  le  cou- 
vent de  l'Iuriraanos  est  sans  doute  celui  de 
Dcbra  Libanos,qui  fut  transiéré  à  iiagendra, 
comme  nous  avons  dit  ailleurs. 

Le  P.  Séraphim  llazzi,  qui  avant  le  P. 
Louis  d'Urreta  avait  donné  les  Vies  de  ce 
Thècle-Aymanol  et  de  quelques  autres  saints 
dlilhiopie,  avoue  que  ce  qu'il  en  dit  n'est 
que  sur  le  rapport  de  deux  Ethiopiens  eu 
Abyssins,  qui  se  disaient  de  l'ordre  de  Sji'it- 
Dominique,  et  qui  lurent  reçus  en  celle 
qualité  l'an  lol3  dans  le  couvent  de  cet  or- 
dre à  Pise,  d'où  ils  allèrent  à  lîome,  où  l'un 
d'eux,  ayant  demeuré  près  de  trois  ans,  et 
ayant  appris  la  langue  italienne,  laissa  par 
écrit  la  des  ripiion  de  ce  prétendu  couvent 
de  Plurimanos  et  de  celui  de  l'Allcluja,  avec 
les  vies  de  quelques  saints  de  l'urdre  de 
Saint-Dominique  qui  sont  morts  en  Ethio- 
pie, comme  des  saints  Thècle-Aymanol, 
fondateur  de  ce  beau  et  spacieux  monastère 
de  Plurimanos;  Thècle-Avarct ,  Philippe, 
André,  Samuel,  et  des  s  linles  Imate,  Claire, 
et(iuelques  autres.  Aliciiel  Pio  dit  aussi  la 
même  chose,  et  le  P.  Louis  d'Urreta  recon- 
naît que  l'an  1515  il  y  en  eut  huit  qui  furent 
reçus  dans  le  couvent  de  Valence,  cl  qui  vi- 
iiaieut  de  Rome.  Apparemment  que  de  ce 
nombre  était  cet  Abyssin  qui  avait  laissé  à 


DOM 


ns 


Home  la  description  du  cotivciil  de  Plurima- 
nos, et  qui  avait  composé  les  Vies  do  ces 
saints  d'Êlhiopie,  dont  il  laissa  aussi  des 
mémoires  en  Espagne  qui  ont  servi  au  P. 
Louis  d'Urreta  à  com[ioser  son  Histoire. 
Ainsi  il  y  a  lieu  de  s'étonner  de  ce  que  sur 
la  bonne  foi  de  quel  [ues  Abyssins  in(()nnus, 
sans  crédit  cl  sans  autoiité,  les  PP.  Hazzi, 
d'Urreia,  Pio  el  les  autres  historiens  de  cet 
ordre  aient  débité  de  telles  fables. 

Mais  quoique  nous  n'accordions  pas  à 
l'ordre  de  Saint-Domi  lique  Thècle-Ayma- 
not, Thècle-Avaret,  et  les  autres  saints  d'E- 
thiopie dont  parlent  Ie5  historiens  do  cet  or- 
dre, ce  ne  Se-ra  lui  rien  diminuer  de  lagloiie 
qu'il  a  acquise  d'avoir  donné  un  nombre  in- 
tini  de  martyrs,  de  saints  ponlifes,  de  con- 
fesseurs et  de  saintes  vierges.  Outre  les 
grands  personnnges  que  leur  science,  leiii 
mérite  tt  leur  vertu  ont  élevés  aux  premiè- 
res dignités  de  l'Eglise,  on  y  compte  trois 
papes,  qui  sont  Innocent  V,  Benoît  iX.  cl 
saint  Pie  V,  canonisé  l'an  1712  par  le  pape 
Clément  XI;  plus  de  soixante  cardinaux, 
plusieurs  patriarches,  près  de  cent  cinquante 
archevêques,  et  environ  huit  cents  évêques, 
oulre  les  maîtres  du  sacré  palais,  dont  l'of- 
fice a  toujours  été  exercé  |)ar  un  religieux 
de  cet  ordre,  depuis  que  saint  Domiiiii|ue  en 
fut  revêtu  le  premier  par  le  pape  Ùono- 
rius  m  l'an  1218. 

Ce  qui  donna  lieu  à  l'éreclion  de  cet  of- 
fice fut  que  saint  Dominique,  ayant  obtenu 
du  pape  Honorius  le  couvent  de  Sainle-S.!- 
bine  avec  une  parte  du  palais  de  ce  pontife 
pour  servir  de  demeure  à  ses  religieux  (1), 
comme  nous  avons  dit  dans  le  paragraphe 
précédent,  il  fut  sensiblement  touché  de  ce 
que,  I  endant  que  les  cardinaux  et  les  minis- 
tres de  la  cour  étaient  avec  le  pape,  leurs 
domestiques  s'amusaient  à  jouer  cl  à  perdre 
leurleiMps;  c'est  pourquoi  il  conseilla  au 
pape  de  préposer  quelqu'un  pour  leur  faire 
des  instructions.  Le  pape  approuva  ce  con- 
seil et  chargea  saint  Dominique  de  cet  em- 
ploi. Ce  saint  leur  expliqua  les  Epîlres  d  ; 
saint  Paul;  et  ses  instructions  eurent  un 
succès  si  heureux,  que  le  pape  voulut  qi;e 
l'on  continuât  à  l'avenir  ces  instructions,  et 
que  cet  emploi  fût  donné  à  un  religieux  de 
l'ordre  de  Saint-Dominiquo,  qui  prendr.iit 
la  qualité  de  maître  du  sacré  palais,  ce  qui  a 
é!é  pratiqué  jusqu'à  présent;  mais  le  maître 
du  sacré  palais  ne  fait  plus  ces  instructions 
aux  domestiques  des  cardinaux,  il  ne  Is 
fait  qu'aux  domestiques  du  pape,  qu'il  est 
obligé  d'instruire  dans  les  choses  de  la  foi, 
le  carême,  l'avenl  et  les  fêtes  principales  ; 
ou  bien  il  le  fait  faire  par  ses  compagnons. 

Les  papes  ont  dans  la  suite  accordé  beau- 
coup d  honneurs  et  de  prééminences  aux 
maîtres  du  sacré  palais.  Eugène  IV,  ayant 
pourvu  de  cet  ofiice  Jean  de  Turrecremata, 
(lui  fut  ensuite  cardinal,  ordonna  par  une 
bulle  de  l'an  143(î  que  les  maîtres  du  sacré 
palais  auraient  place  dans  la  chapelle  da 
pope  immédiatement  après  le  doyen  des  au- 


(1)  Vinceiil  Mar.   Fonlana,   Syil.'.bus    'ilajhi.  S.  Pulmii. 


iiicTioNNMP.::  uF.s  (iriniiF.s  iiLLir.n.LX. 


09 

Citeur»  do  Uulo,  que  lui  seul  cxamiiiornil  les 
scrm  lis  que  l'on  diM.iil  faire  dans  rclto  clia- 
|>clle;  qiii>  personne  n'y  pourr.iit  prêcher,  à 
moins  qu'il  n'i'ùt  èlé  nommé  par  le  maîlic 
du  sarre  palais;  qu'au  cas  qu  il  fût  obligé 
de  s'aliseulcr  de  Uonu-,  il  pourrait  avec  la 
perniissiou  du  pape  suhslituerqui  Ique  autre 
à  sa  ilace,  qui  jouiiail  des  mcMiies  honneurs, 
elquc  personne  ne  pourrai!  èlrc  reeu  dins 
iloine  docleur  en  tliéologii"  sans  sa  permis- 
sion. r,ali\le  III  eonfiiiiia  l'an  li'JO  non-seu- 
leincnl  h-  droil  <iue  le  pipe  Eugène  avait 
aceordé  au  niailrc  du  sacré  palais  de  nom- 
mer eeu\  (]iii  devaient  pièclicr  dans  la  cha- 
pelle du  pape,  mais  il  lui  accorda  encore  ic- 
lui  de  reprendre  puhliqucnient  ces  prédica- 
teurs, même  en  présence  du  pape,  s'il  y 
avait  quehiue  chose  de  répréhcusihle  dans 
leurs  discours. 

Léon  \  oniuniia  (juc  l'un  ne  pourrait  rien 
iniprinier  dans  la  vilh'  de  Home  ni  dans  son 
district  sans  lapprobaiion  et  la    permission 
du   cardinal    vicaire  et  du  maître  du   sacré 
[ïal  lis,  ce  qui   lut  conlirmé  l'an  1G20  par  le 
pape  l'aul  V,  et  l'an  102  j  Urbain  \  111  défen- 
dit à  tous  c  us  qui  auraient  composé   dans 
riîtal  ecclé-iasiiquc  queliiues  ouvrages  sur 
quoique  matière  que  ce  pût  èlre,  de  les  faire 
inipriuier   en    pays  étranger   sans  la  même 
perinis>ion.  Mais  iirésenleinenl  le  maître  du 
sacré    palais   ou   ses   compagnons    donnent 
seuls  la  prrmission  d'imprimer  les  livres.  H 
est  juge  dans  llonii;  de  tous  les  imprimeurs, 
libraires  et  graveurs,    pour  ce  (jui   regarde 
l'impression,  la  vente,  l'achat,  l'entrée  et  la 
sortie  des  livres  et  des  cslam])es.  Il  est  con- 
sullcur-né  des  congrég.itions  du   Saint-Of- 
licc  cl  des  Uiies.  Il  assiste  aussi  comme  pré- 
lat à  celle  de  l'Indix  et  à  celle  qui  se  tiiiit 
chez  le  cadin  il  vicaire  pour  le  concours  des 
curés  do  Koiiie.    H  nomme  des   compagnons 
qui  sont  aussi    religieux   de  son  ordre,  qui 
signent   les    permissions   pour   l'impression 
des  livres,  1 1  (ont  la  visite  chez  les  libraires, 
cl  il  a  le  litre   de   réverendissime,    que  les 
cnidinaux    mêmes    lui    dunnenl.    Le    pape 
i'ie  V  Ion. la  pour  son  entrelien  un  canouicnt 
dans  la  liasilii|ue  de  Saiiil-l'ierre,   avec  le 
litre  de  théologal,  par  une  bul.c  de  l'an  l'iTO, 
cl  il  en    pourvut    l'homas  .Meiirique,   pour 
lors  inaitic  du  sacré  palais;,  mais  après   la 
mort  d-    Mcnri(|ue,  Sixte  \ ,  par  une   autre 
liulh-  de   l'an   loSli,  révoqua  ce. le  de  l'ie  \ , 
voulant  que  celle  prébende  lût  possédée  par 
lin  eccle.Mas  ique;  ci  p.ir  la  même   bulle  il 
donna  au  maître   du   sacré  palais    une  pen- 
sion de  trois  cents  éciis  romains   sur   l'ab- 
baje  de  Sainte-.Maiîe   de  'l'errclo  de  l'ordre 
de  Saînt-li.isile,  au  royaume  de  Naples,  (|ue 
te   caidiiial    liusticucci    possélail   en   com- 
mcndc  ;   voulant  (|ue  cette  [leiLsion,  dont  les 
maîtres  du   s.icré  |ialais   ont   toujours  joui, 
fui   exc.'iipte  de  toutes   charges   et    iinposi- 
li  iiis,   sous  qne'que  prétexte  que  ce  lût.  Lo 
pape  lui  entretieiii  aussi  un  carrosse. 

Nous  avons  d  l  ci-dctaiit  ()ue  le  pape  ICu- 
gènc  IV  a^ ail  ordoiiiié  l'an  l'iJiqiic  le  mai- 
l.<'  du  sacré  p.ilais  aurait  place  dans  la  elia- 
(lellc  ii.'ipa:c  inimédialeiucnl  afrès  le  doyen 


iOO 


des  nudileiirs  de  Ilole  ;  mais  l'an  lG5a  Alexan- 
dre N  11  o  donn.i  qu'il  aurait  séance,  tant 
dans  la  ch.ipelle  du  pape  (jue  dans  les  céré- 
monies, après  les  auditeurs  de  Uotc,  el  (lu'il 
aurait  le  pas  devant  tous  les  clercs  de  la 
chambre  apostolique,  qui  sont  comme  les 
conseillers  du  conseil  des  finances  du  pape; 
et,  afin  que  l'on  voie  l'anUnite  que  le  maître 
du  sacré  palais  exerce  dans  Home,  nous  rap- 
porterons ici  l'ordonnance  <)ue  chaque  maî- 
tre du  sacré  palais  publi.?  lorscju'ii  est  nou- 
vellement pourvu  de  cet  office. 

Ordonnnnce  du  mailrc  du  sacre  piiluis.  — 
I.  L'expérience  ayant  fait  connaître  la  gran- 
deur du  préjudice  et  du  danger  que  cau-e 
la  Lecture  des  livres  défendus,  à  la  pureté  de 
la  foi  et  aux  bonnes  iiucurs,  non  sans  of- 
fenser la  divine  majesté,  el  au  détrimenl  de 
l'àme  ;  par  ordre  exprès  el  commission  de 
notre  lrès-sa:iit  père  le  p.i[)c  M.  le  frère  N., 
m.iilre  du  sacré  palais,  juge  ordinaire,  etc., 
commande  el  défend  par  la  présente  ordon- 
nance, sous  peine  de  la  perte  des  livris.  do 
trois  cents  écus  d'amende  et  autre  peine 
corporelle,  à  imposer  à  s  i  volonté  (outre  h  s 
ceii-uris  el  peines  contenues  dans  les  saints 
canons,  l'Index  dci  livres  défendus,  la  buUe 
7/1  Cicna  Domini  ,  el  autres  consliluiions 
apostolii|ues),  que  personne  n'ait  la  har- 
diesse de  porter  dans  Home  el  hors  de  llnme, 
de  retenir,  acheter,  vendre,  donner  el  prê- 
ter aucun  li\rc  défendu  et  suspi'ct,  sous 
queltiue  lilre  que  ce  soit,  sans  si  permission 
expresse  et  par  éerit.  Kl,  au  cas  (jue  qucl- 
([u'un  porte  a  un  libraire  un  livre  défendu, 
Sa  Ué>êrcndissimc  l'aterni'é  oidonnc  que  le 
libraire  le  retiendra  en  présence  d  un  autre 
libraire  son  voisin  et  de  deux  lénioiiis,  cl 
que  dans  le  terme  de  huit  jours  il  le  portera 
à  Sa  Uévèrendissime  l'aternilé  ou  à  ses  com- 
pagnons, ce  qui  s'entend  aussi  des  mêmes 
libraires,  en  quelque  autre  manière  que  ce 
puisse  être,  sous  la  mêii:e  peine. 

H.  De  plus,  par  la  présente  ordonnance. 
Sa  llevéret'.dissimc  Patcrni:é  révoque  toutes 
les  permissions  qui  ont  clé  ci-dcvanl  don- 
nées \>iif  les  maities  du  sacré  palais,  lant  de 
vive  voix  que  par  écrit,  en  qu'  Ique  manière 
que  ic  soil,  déclarant  que  ceux  ijui  vou- 
ilraienl  s'en  servir  encourront  les  mômes 
peines  quç  ceux  qui  rcticnnei'.t  des  livres 
delendus  sans  permission. 

lil.  Que  toutes  sortes  de  livres,  histoires, 
oraisons,  almaiiachs,  images,  ou  ligures  el 
quelque  autre  chose  îm|,rimée ,  si  pelile 
quelle  puisse  êlre,  que  l'on  appirlera  à 
llome,  seront  consignés  à  la  douane  ou  pré- 
sentés à  Sa  Uévèrendissime  l'aternilé  ou  à 
ses  compagnons  pour  en  avoir  la  permis- 
sion, el  que  les  dialogues  des  liires  qui 
sorlironl  de  llome  seront  fiits  avec  lidelile, 
en  tnellanl  le  tiire  de  chaque  livre,  le  nom 
de  l'auteur,  le  lieu  et  1'. innée  de  l'impres- 
s  on,  el  (|ni  en  a  été  1  imprimeur,  sous  peine 
de  confiscation  des  livres,  et  de  cin<|uanto 
ecus  d'amende,  plus  ou  moins,  selon  la  ([ua- 
lilé  des  livres  el  du  di'lin(|u.inl. 

IN'.  (Ju'aiicun  ciiailat.iii  n'j  l  la  li.irdissc 
de  iiorUT  cl  vende   à  Home   aucune  chose 


roilas 

BlBLIOTHECA 

i^iifirti'i* 


101 


noM 


noM 


1{)-2 


avec  rccelli's,  si  aupaiMvanl  il  n'a  inontié 
lesdites  recclles  à  Sa  Révéïciidissline  Pator- 
nilé  ou  à  ses  compagnons,  qui  les  approu- 
veront ou  les  feront  approuver  par  d'autres, 
sous  peine  de  confiscation  de  tout  ce  qu'il 
aura  à  vendre,  et  de  vingt-cinq  écus  d'a- 
mende. 

V.  Que  les  courriers  et  postillons  qui  se- 
ront charges  de  livres,  si  pelils  qu'ils  soient, 
cl  pour  (ou(e  sorte  de  personnes  de  quoique 
état,  qualité,  condition  et  prééminence  qu'el- 
les puissent  cire,  .'oit  dedans  ou  hors  de 
Home,  soient  tenus  de  les  montrer  iiremiè- 
reuient  au  maître  du  sarré  palais  ou  à  ses 
cotnpapinons,  ou  de  les  laisser  à  la  douane, 
sous  peine  de  cinquante  écus  d'anundc  et  (ie 
trois  traits  de  corde  (1). 

VI.  Qu'aucun  douanier  de  Rome,  soit  de 
terre,  soit  de  rivière,  ne  soit  assez  hardi 
pour  délivrer  les  livres  qui  sont  consignera 
la  douane  sans  ladite  pertniss  on,  (e  qui 
doit  être  aussi  observé  par  les  commis  des 
portes  sous  les  mêmes  peint'S. 

VII.  Qu'aucun  batelier,  marinier,  voilu- 
rier,  courrier  et  roulier,  ne  rende  aux  1  brui- 
res  et  autres  personnes  les  livres  dont  ils 
auront  été  chargés,  avant  que  d'avoir  dé- 
claré à  la  douane  ce  qu'ils  portent,  sous 
peine  de  cinquante  écus  d'amende  ;  s'il  se 
irouve  que  l'on  ait  délivré  quelque  chose 
qui  concerne  l'orfice  du  maître  du  sacré  pa- 
lais, et  autres  cinquante  icus  d'amende  et 
confiscation  de  la  marchandise  pour  celui 
qui  l'aura  reçue. 

VIII.  Que  personne  ne  puisse  venJie  par 
la  ville,  livrets,  histoires,  oraisons,  alma- 
naehs,  lettres,  iinaj^cs  ou  figures,  ou  quel- 
que autre  chose  imiu-imée,  si  pelile  qu'elle 
soit,  même  de  la  niusique,  ou  les  exposer  en 
vente  sur  les  bouli(iues  ou  dans  li's  places 
publiques,  ou  dans  (juclque  autre  lieu  de  la 
ville,  s'il  n'est  libraire  de  profession,  ou  s'il 
n'a  permission  du  maître  du  sacré  palais  ou 
de  ses  compagnons.  Déclarant  que  les  re- 
lieurs et  papetiers  sont  compris  sous  le  nom 
de  libraire,  et  pour  ce  sujet  ils  ne  pourront 
vendre  aucun  livre,  soit  vieux  ou  nouveau, 
cl  l<  s  relieurs  rel:er  aucun  livre  imprimé, 
s'ils  n'en  ont  permission,  et  s'ils  n'ont  fait 
le  serment  ordinaire  et  la  profession  de  foi, 
conf  irii;émcnt  au  décret  de  l'Index  des  livres 
dél'indus  ;  cl  personne  ne  pourra  ouvrir 
boutique  d'imprimeur  et  de  libraire,  ou  exer- 
cer celle  profession,  s'il  n'est  approuvé  et 
r;çu,  et  s'il  n'a  des  patentes  signées  de  Sa 
Révéreudissime  Paternité  ou  de  ses  compa- 
gnons, sous  peine  de  confiscation  des  livres 
et  de  cinquante  écus  d'amende ,  plus  om 
moins,  selon  la  qualité  des  livres  cl  du  dé- 
linquant, lis(iuellcs  patentes  doivent  être 
renouvelées  à  chaque  changement  de  maî- 
tre du  sacré  palais. 

IX.  Que  les  héritiers  et  exécuteurs  lesla- 
meiilaires  des  liijraires  décédés,  ceux  qui 
voudront  vendre  leurs  propres  livres,  et  au- 
tre;, ne  puissent  vendre  aucun  livre  de 
quelque  sorte  et  en  tel  nombre  que  ce  puisse 


être,  les  montrer,  les  estimer,  ou  en  traiter 
avec  d'autres  pour  les  vendre,  ou  en  dispo- 
ser en  quelque  autre  manière,  s'ils  n'en  ont 
obtenu  auparavant  la  permission  du  maître 
du  sacré  palais  ou  de  ses  compagnons,  sous 
peine  de  confiscation  des  livres  et  de  203 
crus  d'amende. 

X.  Que  les  ju  fs,  regratiers,  et  aulres  ar- 
tisans ne  puissent  vendre,  emprunter  et 
prendre  en  nantissement  aucune  espèce  do 
livres,  tels  qu'ils  puissent  être,  sans  la  per- 
mission du  maître  du  sacré  palais  ou  de  ses 
compagnons  ;  et  s'ils  en  ont  à  présent,  qu'ils 
aient,  dans  le  terme  de  huit  jours,  ta  en  don- 
ner un  catalogue  fidèle,  sous  peine  de  con- 
fiscation desdils  livres,  de  cinquante  éius 
d'amende,  et  autre  peine,  môme  corporelle, 
à  la  volonté  de  Sa  Révéreudissime  Palcrnilé. 
Que  s'il  arrive  que  dans  l'encan  des  juifs  et 
de  la  déposilairerie  de  la  chambre,  l'on  y 
vende  des  livres,  Sa  Révéreudissime  Pater- 
nité ordonne  que  ceux  qui  les  vendront, 
après  en  avoir  obtenu  la  permission,  eu 
donneront  avis  à  la  communauté  des  librai- 
res, afin  qu'ils  puissent  se  trouver  à  ladite 
vente,  Sa  Rivérendissime  l'aternilé  ordon- 
nant Irès-expressément  que  hors  de  l'encan 
l'on  ne  puisse  vendre  aucun  livie  mis  eu 
séquestre  ou  en  nantissement,  sans  une 
nouvelle  permission,  sous  la  même  peine 
ci-di'ssus  imposée. 

XI.  Que  tous  les  libraires  et  vendeurs  de 
livres  aient,  dans  le  terme  de  trente  jours,  à 
donner  au  maître  du  sacré  palais  ou  à  ses 
compagnons  un  inventaire  fidèle  par  ordre 
alphabétique  de  tous  les  livres,  lant  vieux 
que  nouveaux,  qu'ils  ont,  en  y  marquant  le 
nom  de  l'auteur,  le  titre,  l'imprimeur,  l'an- 
née et  le  lieu  de  l'impression,  et  le  nombre 
des  volumes  de  chaque  sorte,  lequel  inven- 
taire soit  signé  de  leur  main,  et  qu'ils  en 
reiiennent  un  doub'e  de  leur  côté;  et  que 
dans  ledit  terme  chaque  libraire  ait  à  se 
présenter  en  personne  pour  se  faire  écrire 
sur  le  livre  que  l'on  retiendra  pour  cet  elTel 
dans  l'office  du  maître  du  sacré  palais,  où 
siront  marqués  tous  les  noms  des  librains 
et  vendeurs  de  livres  qui  auront  la  permis- 
sion d'exercer  ce'lc  profession.  Passé  ce 
temps,  l'on  procédera  contre  ceux  qui  ne  se 
seront  pas  présentés,  comme  vendant  sans 
permission ,  et  ils  encourront  les  peines 
portées  dans  l'article  Vlll. 

XII.  Pareillement,  Sa  Révérendissime  Pa- 
ternité ordonne  aux  graveurs,  imprimeurs 
et  marchands  d'estampes  en  taille  douce  ou 
en  bois,  de  se  présenter  dans  le  même  tempa 
et  de  donner  un  catalogue  de  toutes  les  es- 
tampes qu'ils  ont  dans  leurs  boutiques,  avec 
le  nom  de  l'auteur,  de  l'imprimeur  cl  du  lieu 
où  elles  ont  été  imprimées,  et  de  se  faire 
écrire  dans  le  même  livre,  sous  les  mêmes 
peines. 

XIII.  Qu'aucun  médailliste,  fondeur,  gra- 
veur de  cache's,  tant  en  acier  qu'en  fer, 
bronze  ou  autre  matière,  ne  soit  as-^ez  hardi 
de  graver,  fondre  et  jeter  en  moule  aucune 


(  )  Esiiècc  d'estrapade. 


'.(.5 


MCTIONNAiUE  I)i:S  ORDllES  RIILIGIKLX. 


lui 


fleure,  soit  saciéc  ou  prof.inc,  ai  t-c  des  Icl- 
Iros  ou  sans  lettres  s'il  n'i'n  a  la  permission 
du  mai:ro  du  sairé  palais  ou  Je  ses  compa- 
gnons, ce  qui  se  do  l  entendre  aussi  de  tous 
rcHX  qui  (oi)l  des  coins,  poinrous  cl  autres 
iuslrunicnls  pour  frapper  et  marquer  Icsdiles 
figures  ou  lettres,  sous  peine  de  deux  cents 
écus  d'amende,  de  trois  traits  de  corde,  île 
suspeusion  de  l'exercice  de  sa  proT'Ssion.  <  1 
autres  peines  arbitraires,  ^clon  la  faute  du 
coupald-î;  c-l  quo  dans  le  terme  d'un  mois  ils 
se  présentent  tous  devant  le  mailredu  sacré 
palais  ou  ses  compagnons,  avec  la  liste  des 
ligures  et  lettres  qui  s;inl  gravées  dans  leurs 
coins,  afin  que  l'on  mette  au  lias  la  permis- 
sion do  pouvoir  s'en  servir  dans  leur  profes- 
sion. 

Xl\'.  Que  tous  les  libraires  aient  à  porter 
an  maître  du  sacré  palais  un  exemplaire 
relié  ou  broché  de  tous  les  livres  nouvelle- 
ment imprimés  ou  réimprimés  qui  \icndronl 
dans  Uonie,  de  manière  qu'on  les  puisse  lire 
.'lisément,  afin  qu'ayant  été  examinés  et  ap- 
prouvés pour  bons,  on  les  puisse  rendre  aus- 
sitôt au  libraire  qui  les  aura  donnés,  et  qu'il 
puisse  retirer  les  autres  de  la  même  sorte 
(|ui  resleiout  peu  lant  ce  temps- là  à  11 
douane,  el  qui  ne  pourront  élic  déli»rés 
qu'avec  la  permission  de  Sa  Uévérendissitnc 
i'aternité  ou  de  ses  compagnon'*,  déclarant 
que  tous  les  ordres  qui  seront  donnés  par 
son  conip.ignDU,  en  pareil  cas,  aux  garrons 
des  libraires  en  l'absence  de  leurs  maîtres, 
obligiTonl  les  maitrcs  coiiin)c  s'ils  leur 
avaient  été  sii;nifiés  à  eux-mêmes. 

X\'.  Que,  dans  le  même  terme  d'un  mois, 
tous  les  imprimeurs  aient  à  se  présenter 
aussi  en  personne  pour  se  faire  inscrire 
dans  le  même  livre  des  libraires  cl  graveurs, 
et  (lu'aucun  ne  puisse  de  nouveau  ouvrir 
une  im|irimerie,  s'il  n'a  fait  auparavjint  le 
même  si.'rmcnt  que  les  libraires,  sous  les 
mêmes  peines. 

X\'l.  Qu'aucun  imprimeur  public  ou  par- 
ticulier n'ai  la  témérité  d'imprimer  ou  réim- 
primer aucun  livre,  manuscrit,  ou  quelque 
au  rc  diose,  si  p>  tili;  qu'elle  soit,  sans  la 
permission  par  écril  de  Sa  Uévérendissime 
i'aternité  ou  de  ses  compagnons,  ni  qu'il  soil 
as.-ez  hardi  de  changer,  ajouter  ou  diminuer 
une  seule  parole,  ni  de  mettre  que  l'impres- 
sion soil  faite  en  un  autre  lieu  qu'à  Home. 
Sa  Uévérendissime  I'aternité  veut  que  l'iin- 
presslon  soil  conforme  à  la  copie  (jui  lui 
aura  été  donnée  signée,  cl  qu'il  ne  rende 
point  publi(|ue  l'impression  jusqu'à  ce  que 
le  mailre  du  sacré  palais  ou  ses  compagnons 
ail  collalionné  ladite  impri'ssion  sur  la  copie 
signée  do  l'ui  d'eux,  laquelle  copie  restera 
toujours  dans  l'ofliie  du  sacré  pilais,  el  dol 
cire  signée  de  la  propre  main  de  1  .uitcur, 
avec  la  permission  de  débiter  le  livre.  El  en 
cas  que  ce  qui  aura  été  signé  par  le  miitre 
du  sacré  palais  et  qui  aura  été  donné  â  l'im- 
primeur ne  lût  pas  imprimé ,  limpriimiir 
<de»ra.  a\anl  de  rendre  la  copie  à  l'auteur. 
la  ri'domior  au  m.iitre  du  sacré  (lalais,  ;iliii 
d'cITacrr  la  permission  qu'il  avait  donnée, 
Ce  peur  4':c  qiiaml  on  le  voudra  imprimer 


on  n'iijoulc  quel;iic  diosc,  et  afin  qu'il 
puisse  cire  es.'iniir.é  de  nouveau  avec  une 
nouvel'e  approbation,  souc  peine  de  confis- 
cation des  exemjilaires  cl  de  cinquanle  écus 
d'or  d'amende. 

X\'I1.  Que  10!!S  I  s  imprimeurs,  lihraircs, 
graveurs,  marchanls  de  livres  ou  d'estam- 
pes, douaniers,  médaillisles,  courriers,  pos- 
lillons,  gardes  el  portiers  dos  portes  de  la 
ville,  afin  qu  ils  ne  j  uisscnl  ignorer  ce  qoi 
est  co:ilenu  dans  la  présenie  ord.mnance  et 
qu'ils  obéissent  |,onclucllemenl  à  ce  qui  leur 
esl  commandé,  aient  à  affii  hcr  dans  leu.s 
bout  qiies,  imprimeries,  douanes  el  autres 
lieux  où  ils  exercent  leurs  ofiiccs  publique- 
ment, une  c  ipie  de  la  présente  ordoiinaiicc, 
sous  peine  de  cinq  écus  d'amende  pour  cha- 
que fois  qu'ils  seront  trouvés  sans  ladite 
ordonnance;  et  de  plus  les  libraires  sont 
obligés  sous  la  même  peine  d'avoir  VJndcx 
des    ivres  défendus. 

XVIII.  Toutes  lesquelles  choses  sont  or- 
données et  commandées  sous  lesdites  amen- 
des, applicTbles  partie  en  œuvres  pieuses, 
partie  aux  dénonciateurs,  qui  ne  seront  poinl 
nommés.  Sa  HévérendissiiriC  Paternité  se 
réservant  de  diminuer  ou  d'augmenter  les- 
dites piines,  el  de  les  éiend  e  n)diiie  jnsi)u'à 
punition  corporelle,  suspension  el  privation 
de  la  profession,  et  de  bannissement,  selon 
la  qualité  du  crime  et  des  personne»,  les- 
iiuelles  peines  seront  encore  augmentées  à 
l'égard  de  ceux  qui  feionl  récidive,  et  l'on 
procéilera  contre  les  tr.insgressi.-urs  avec  la 
dernière  rigueur. 

Voulant  que  la  présente  ordonnance,  qui 
sera  affichée  et  publiée  à  Rome  aux  lieux 
accoutumés,  oblige  un  chacun  comme  si  e  le 
lui  avait  élé  signifiée  personnellement.  Don- 
né au  palais  apostolique,  etc. 

11  y  a  eu  plusieurs  Français  q'ii  ont  élé 
pourvus  de  cri  office.  Le  premier  fut  Hugm  s 
Seguin  de  ISilloni  en  Auvergne,  qui  le  fut 
par  Martin  IV  l'an  1281.  Le  pape  Nicolas  IV, 
l'an  1288,  le  fil  cardinal,  el  il  fut  ensuite  ar- 
chevêque de  Lyon,  (iuillaunic  de  Bayonno 
succéda  à  Hugues  Séguin  dans  col  office, 
qu'il  exerça  sous  le  pontificat  de  Nicolas  IV 
et  sous  celui  de  Clément  V,  qui  le  fit  aussi 
cardinal  l'an  1312.  Guil'aume  'ïavant  de 
Laou  l'exerça  sous  le  pontificat  du  même 
Clément  \  ;  il  lui  archevêque  de  Vienne,  en- 
suite archevêque  de  fou  ouse.  Uaimonil  Re- 
quin de  Toulouse  fui  pourvu  de  col  office 
par  le  pape  Jean  XXII;  il  fut  ensuite  évêquc 
de  Nimes  cl  patriarche  de  Jérusalem.  Jean 
de  Lemoy,  confisseur  de  Philippe  IV,  roi 
de  France,  fut  aussi  pourvu  de  cet  office  par 
le  même  Jean  XXII,  I  an  132Î;  mais  il  mou- 
rut la  inêmi"  année,  et  cul  pour  successeur 
Durand  de  Saint-l'orlicn,  qui  fut  êvêqiicdu 
l'uy  et  de  .Me.iux.  Jean  XXII  conféra  encore 
cet  office  à  Dominique  (irenier  de  l'ouionse, 
qui  fut  ensuite  ê>  ê(|ue  de  P.im  ers.  Le  même 
pape  pourvut  encore  <le  col  office  lierre  do 
Pireto,  que  ilonoit  \ll  fil  d.ins  11  suite  cvê- 
qiie  de  Mirepoix.  Uaymoiil  Durand  l'exerça 
sous  le  ponliliral  du  même  pape.  Jean  Mor- 
laud  fui  uiailrc  du  sacré  palais  sous  le  pou- 


1(5 


mu 


noM 


100 


lificat  de  C'6monl  VI;  il  fu(  ensnito  général 
de  son  ordre,  et  mourut  cardinal  l'an  1358. 
Guillaume  Sudre,  son  successeur,  exerça 
aussi  col  office  sous  le  poniitiiat  du  morne 
Clémcnl  VI.  Urbain  V  le  fil  cardinal  l'an 
13G3,  cl  évéque  de  Marseille  l'an  1369.  Ni- 
colas de  Saint-Saturnin  de  Clermont  fut  le 
dernier  Français  qui  exerça  cet  office,  dont 
il  fut  pourvu  par  le  pape  Grégoire  XI  l'an 
1370,  el  il  mourut  l'an  1382.  Oulre  ces  car- 
dinaux dont  nous  venons  de  parler,  qui  ont 
été  maîtres  du  sacré  palais,  il  y  a  eu  encore 
les  cardinaux  Annibaldi,  Slalius  de  Datis, 
de  Gaseneuve,  de  Turrecremala,  de  Badia, 
Galamini,  Michel  Mazarin,  archevêque d'Aix; 
Capisucci  el  Ferrari,  qui  ont  aussi  exercé  cet 
office. 

Un  office  qui  est  encore  exercé  par  un  re- 
ligieux de  cel  ordre  en  plusieurs  provinces, 
et  qui  lui  donne  beaucoup  d'autorité,  est  ce- 
lui d'inquisiteur.  Cet  emploi  élail  demeuré 
attaché  a  l'épiscopat  jusqu'à  1 1  (in  du  dou- 
zième siècle;  mais,  comme  tnut  élail  en 
trouble  dans  l'Eglise,  où  les  hérésies  se  mul- 
tipliaient ;  que  les  hérétiques  devenaient  trop 
puissants,  et  que  les  discours  des  prédica- 
teurs et  des  missionnaires  qu'on  envoyait 
pour  les  cnnverlir  étaient  inutiles,  le  pape 
Innocent  111  établit  (selon  quelques-uns)  un 
nouveau  tribunal  qui  regardait  les  matières 
de  la  foi,  pour  punir  sévèrement  les  héréti- 
ques, el  qui  fut  appelé  l'Office  de  rin(|nisi- 
lion;  el  comme  les  hérétiques  albigeois  fai- 
saient de  grands  désordres  dans  le  Langue- 
doc ,  le  pape  nomma  pour  inquisiteur  saint 
Dominique,  qui  y  travaillait  pour  lors  à  la 
conversion  de  ces  hérétiques.  Mais  les  his- 
toriens de  son  ordre  ne  sont  point  d'accord 
louchant  l'année  que  ce  trii)unal  fut  établi; 
plusieurs  auteurs  prétendent  que  saint  Do- 
minique n'exerça  point  cet  emploi,  et  que  ce 
ne  fut  que  l'an  1:232  que  le  pape  Grégoire  IX. 
attribua  le  tribunal  de  l'inquisiiion  de  Tou- 
louse aux  religieux  de  son  ordre,  qui  est  le 
premier  qui  ail  été  établi. 

Quoi  qu'il  en  soit,  l'inquisition  passa  en 
Pologne,  en  Italie  et  en  plusieurs  autres 
provinces,  où  les  Dominicains  exercèrent 
l'olfice  d'inquisiteurs.  Mais  ces  offices  étant 
passés  en  d'autres  mains  dans  la  plupart  de 
ces  provinces,  ils  ne  leur  sont  restés  qu'en 
quelques  lieux  d'Italie  ,  où  ils  l'exercent 
avec  autorité  dans  trente-deux  tribunaux, 
en  autant  de  villes,  aussi  bien  que  dans  celle 
d'Avignon  et  de  Cologne,  mais  seulemenl  en 
qualiié  d'inquisiteurs  provinciaux,  etcommc 
délégués  des  cardinaux  qui  composenl  la 
congrégation  du  Samt-Oflice  à  Komc,  el  qui 
sont  inquisiteurs  généraux.  Autrefois  le  gé- 
néral de  l'ordre  de  Saint-Dominique  nom- 
m.iit  ces  inquisiteurs  ;  mais  présentement 
ils  sont  institués  j)ar  le  pape  ou  par  la  con- 
grégation du  Saint-Office.  Celle  congréga- 
tion, par  un  privilège  accoidé  à  l'ordre  l'c 
S;iint-Domini(|uc,  se  tient  au  couvent  de  la 
Minerve,  tous  les  mercredis,  dans  l'apparte- 
tnent  du  général  de  cet  ordre,  qui  y  a  sisic 
avec  le  maître  du  sacré  palais  cl  le  t  oiuniis- 
saire  du  Saint-Office,  quiesi  aussi  religieux 

DiCTio:«NA!r.E  d:.s  Oudues  r:;f.ii::if.ix.  11. 


du  même  ordre  ,  et  qui  fait  sa  demeure  or- 
dinaire dans  le  palais  du  Saint-Office.  Le 
secrétaire  de  la  congrégation  de  Vlndex  des 
livres  défendus  ,  composée  de  plusieurs  car- 
dinaux ,  est  toujours  aussi  de  l'ordre  de 
Saint-Dominique. 

Il  y  a  encore  à  présent  deux  inquisitions 
en  France,  l'une  à  Toulouse  et  l'autre  à 
Carcassonne,  mais  sans  autorité.  Les  Domi- 
nicains ne  laissent  pas  toujours  de  se  faire 
pourvoir  par  le  roi  des  offices  d'inquisiteurs. 
Ils  ont  même  quelques  appointements,  mais 
ce  sont  des  titres  seulement  sans  aucune 
fonction.  L'inquisition  de  Toulouse  est  la 
première  qui  ait  été  établie,  comme  nous 
avons  dit  ci-dessus.  I>es  inquisiteurs,  après 
avoir  perdu  leur  autorité,  et  que  ce  tribunal 
fut  tombé  en  décadence,  ont  néanmoins  re- 
tenu assez  longtemps  le  droit  qui  leuravait 
été  donné  à  leur  établissement,  qui  était  de 
se  faire  apporter  tous  les  ans  le  scrutin  de 
l'élection  des  capitouls  de  Toulouse  pour 
l'examiner  el  pour  vnir  si  parmi  ceux  qui 
avaient  été  élus  il  n'y  en  avait  point  quel- 
ques-uns suspects  d'hérésie  ;  mais  ce  droit 
leur  fut  ôté  vers  l'.m  IC'+C  par  un  arrêt  du 
conseil,  et  fut  attribué  à  l'archevêque  de 
Toulouse  Charles  de  Monchal  et  à  ses  suc- 
cesseurs. 

Je  ne  m'arrêterai  point  à  parler  de  toutes 
les  personnes  illustres  de  cet  ordre,  puisque 
Michel  l'io,  Léandre  Albert  cl  plusieurs 
historiens  du  même  ordre  nous  en  ont  donné 
des  volumes  entiers.  Personne  n'ignore  que 
saint  Thomas  d'Aquin,  saint  Anlonin,  samt 
Vincent  FerriiT,  Albert  le  Grand,  Vincent 
de  Beauvais,  Louis  de  Grenade,  ont  été  des 
plus  beaux  ornements  de  cel  ordre,  (jui  jus- 
qu'à présent  a  eu  soixante  généraux  qui 
sont  à  vie,  et  que  leur  grand  mérite  et  leur 
capacité  ont  élevés  à  cette  dignité.  Cependant 
il  y  en  a  eu  deux  qui  ont  été  déposés  par 
autorité  du  sainl-siego,  savoir,  Munio  de  Za- 
morra  par  le  pape  Nicolas  IV,  l'an  1292,  et 
M;irtial  Auribcl,  Provençal,  par  le  pape 
Pie  II,  l'an  li62.  L'on  ne  sait  point  les  rai- 
sons que  ces  souverains  pon  ifes  curent  de 
déposer  ces  généraux,  qui  étaient  d'uno 
éminente  vertu.  On  leur  rendit  néanmoins 
jus  ice  dans  la  suite.  Munio  de  Zamorra, 
après  avoir  refusé  l'évêché  de  Guudix,  fut 
contraint  par  le  pj'.pe  Céleslin  V  d'accepter 
celui  de  Palencia,  el  Atari ial  de  Provence  lut 
élu  une  seconde  fuis  général  dans  le  chapitre 
qui  s.c  tint  à  Novarre  l'an  l'iGo. 

Le  siliisnie  qui  partagea  l'Eglise  en  1378, 
après  la  mort  du  pajio  Grégoire  XI,  el  qui 
dura  quarante  ans,  divisa  aussi  cel  ordre. 
On  vit  dans  le  chapitre  général  tenu  à  Bo- 
logne en  1380  deux  généraux.  Les  provinces 
qui  reconnurent  pour  pape  Urbain  VI  élu- 
rent le  bienheureux  llaymond  de  Capoue 
pour  général,  et  déposèrent  Elie  deToulouse, 
qui  gouvernait  actuellement  l'ordre,  à  qui 
les  provinces  de  France,  d'Espagne,  d'Ara- 
gon, de  Provence,  de  Sicile  et  de  delà  la 
Phare,  qui  reconnaissaient  pour  pape  GI6- 
ment  Vil,  prêtèrent  toujours  obéissance. 
Celles  (lui  élui-ent  le  bicniituroux  Raymond 


107  DICIIONNUUF.  [>ES 

de  Capouc  furent  les  provinces  d'Ilalie,  d'.M- 
leuiagne,  de  Hongrie,  dAnglelerre,  de  Po- 
logne, de  (îri^ce.  de  Dalnialie.  de  la  lerre 
gainle,  de  Bohômc  el  de  Saxe.  Aprè'i  la  mort 
tic  ces  pcner.iux,  cliaquc  parli  en  c^isail  un, 
ce  qui  dura  jusqu'en  l'an  l'il8,  que  le  pape 
Martin  V  réunil  loul  l'ordre  sous  le  P.  Léo- 

»  nard  de  Florenee,  qui  avait  élé  élu  par  les 
provinces  d'Ilalie  el  hs  auîres  du  niènic 
parti,  ayant  donné  lévochéde  Calane  à  Jean 

»  de  Popjiio,  qui  él.iil  reconnu  par  les  Fran- 
çais, par  Us  autres  provinces  qui  leur 
éta  ent  unes,  cl  niénic  pur  saint  N'incent 
Ferner.  Ce  fut  sous  le  ^énéralal  du  P.  Bar- 
thélémy Texier,  qui  succéda  au  P.  Léonard, 
que  l'ordre  commença  à  posséder  des  rentes 
cl  des  biens  immeubles,  par  un  privilép;e  du 
même  Martin  V.  Les  généraux  funt  présen- 
tement leur  séjour  ordinaire  à  Home  dans  e 
couvent  de  la  .Minerve,  qui  est  double,  l'un 
pour  les  religieux  de  la  province  de  Rome, 
el  l'autre  pour  les  étrangers  qui  !>e  trouvent 
à  Kome  chargés  des  aff.iires  de  leurs  provin- 
ces. C'est  dans  ce  lieu  qu'est  rapparleincnt 
du  i;cnéral,qui  est  fort  spacieux.  Il  y  a  dans 
ce  couvent  une  riche  bihlidthùqne  qui  a  élé 
rendue  publique  l'.in  1700  par  la  magnifi- 
cence cl  la  libéralité  du  cardinal  Casanalle, 
qui  pour  l'augaienter  a  donné  la  sienne, 
composée  de  cinquante  mille  volumes  sans 
les  manuscrits,  avec  un  f.)nds  de  quatre 
mille  CCU9  romains  de  revenu  ,  voulant 
qu'une  partie  de  ce  revi  nu  s'employât  tous 
les  ans  à  l'achat  dis  livres  nouveaux,  et 
l'autre  partie  à  l'entretien  de  deux  Pères  lii- 
blio;hecaires  et  d  •  deux  convers  pour  le  .ser- 
vice de  la  bibliothèque,  de  deux  lecteurs  (jui 
doivent  euMci^^ner  la  doctrine  de  saint  Tho- 
mas, et  de  six  théolo;^i.ns  de  différentes  na- 
tions et  du  même  ordre,  pour  s'ojiposer  par 
leurs  écrits  aux  nouveautés  des  dogmes  qui 
pourraient  naître  au  préjudice  de  l'unilé  el 
de  la  vérité  de  la  loi  de  l'Eglise  calholinuc; 
il  a  fait  encore  d'autres  fondations  qui  ren- 
dront sa  mémoire  inimorlelle.  Outre  ce  cou- 
vent de  la  Minerve  et  celui  de  Sainte-Sabine, 
ils  en  ont  encore  un  sons  le  nom  de  Saint- 
Niiolas  de  Perfetti,  et  deux  monastères  de 
filles;  mais  il  n'y  a  point  de  villes  où  ils  en 
aient  davantage  qu'a  Naples,  puisqu'on  y 
conipti'  >  ingl-liuit  couveiits  de  cet  ordre,  sa- 
voir, di\.-liuit  d'hommes  et  dix  de  filles. 

Nous  avons  parle  dans  le  §  précédent  de 
rhabillcmenl  de  ces  religieux.  Les  frères 
laniues  sont  distingués  des  prêtres  en  ce 
qu'ils  portent  i.n  scapul.iirc  et  un  capuic 
no  rs,  cl  (lue  les  prêtres  ont  un  scapulairo 
blanc,  ne  meltant  I.'  capiiihoii  noir  pir-des- 
sus  la  cliape  qie  lorsqu'ils  sortent  ou  <iirils 
sont  en  habit  de  chœur.  Les  rtîligicux  d'Es- 
pagne cl  de  Portugal  avaient  toujours  porté 
des  chap  s  prises,  ju'-quc  sous  le  gêneralal 
du  P.  .Martial  Auribe  le,  qui,  ayant  été  élu 
l'an  liH.'i,  les  obligea  de  prendre  des  chapes 
noires.  Les  armes  de  l'ordre  sont  chape  d'ar- 
gent el  de  sable  à  un  lis  tige,  cl  une  palme 
d'or  passée  en  sautoir,  lirochanl  sur  le  loul. 
Cl  une  étoile  d'or  en  chef,  l'argent  clrirgé 
d'un  livic,  sur  leqacl  est  un  chien  posant  sa 


onDBES  IIF.LIGIEUX. 


<«8 


patte  sur  un  monde,  el  tenant  à  sa  gueule  un 
flambeau  allumé;  Féru  timbré  d  une  cou- 
ronne ducale,  ayant  pour  cimier  une  tiare, 
une  mitre,  un  chapeau  de  cardinal,  une 
I  rosse  el  une  croix  patriarcale.  Favin  pré- 
lendque  ci't  ordre  portail  anciennement  pour 
armes,  gironé  d'argent  et  de  sable  à  une 
croix  lleiirdelisêe,  partie  de  l'un  en  l'autre, 
à  la  bordure  cumponée  de  huit  pièces  aussi 
d'argent,  el  de  sable  à  huit  étoiles  de  l'un 
en  l'aulre,  el  huit  besans  de  même.  Cet  or- 
dre illustre  a  présentement  pour  chef  le  ré- 
vérend P.  Antonin  Cloche,  Français,  qui  fut 
élu  l'an  1088,  du  consentement  unanime  de 
tous  les  vocaux,  pour  ses  excellentes  quali- 
tés, dans  le  chapitre  général  qui  se  tint  à 
Home  après  la  mort  du  K.  P.  de  Monroy. 

Nous  avons  dit  dans  le  §  précédent  que 
l'on  nomme  en  France  ces  religieux  Jaco- 
bins à  cause  que  leur  première  maison  à 
Paris  est  située  dans  la  rue  Saint-Jacques. 
-M.  Hermant,  ruré  de  .Maltot,  dit  qu'on  les 
appela  aussi  en  Italie  Jacobites,  parce  qu'ils 
imitaient  la  vie  apostolique,  et  que  quelques 
auteurs  les  appellent  les  Prédicateurs  de 
Saint-Jacques  ;  mais  M.  Hermaut  ne  nomme 
point  ces  auteurs.  Cependant  s'il  éiail  vrai 
qu'ils  eussent  eu  le  nom  de  Jacobites  à 
cause  qu  ils  imitaient  la  vie  apostolique,  ou 
celui  de  Prédicateurs  de  Sainl-Jacques, 
pourquoi  leur  a'irail-on  donné  piiilôl  le  nom 
de  Prédicateurs  de  Saint-Jacques  ou  de  Ja- 
cobites, que  celui  de  quelque  autre  apôtre? 
Jls  peuvent  néanmoins  a\oir  élé  appelés  à 
Paris  Jacobiles;  car  j'ai  des  épilres  canoni- 
ques écrites  à  la  main  l'an  1503  par  un  pro- 
fesseur en  théologie  de  l'université  de  Paris, 
qui  les  appelle  ainsi  ;  mais  il  y  a  de  l'appa- 
rence qu'il  ne  le  faisait  que  par  dérision,  et 
pour  se  venger  d'en  avoir  é;é  niallrai:c  dans 
une  dispute  qu'il  avait  eue  sans  doute  avec 
eux  au  sujet  de  l'iinniai  uléc  conceplim  de 
la  sainte  \ierge,  comme  il  paraît  par  ce  qui 
est  à  la  lin  de  ce  manuscrit:  lùjo  Peints  lii- 
cliardi  annos  ogens  k'i,  in  aima  Iheologorum 
Fiuulinle  l'arisiensi  prufessor  indignu<,  ncc 
non  in  licclesia  Trecensi  cnnonictis,  has  epi- 
s/o,'(.'<  manu  mea  propria  de<crip,^i,  aujiliunte 
Domino  iV.  J.  C-  et  iinmaculdi.a  ejui  Maire 
Maria  umni  laude  diijnissima,  nnno  salutis 
lo  i.  l'cria  .'l  posl  Invocavil.  Kodein  anno 
fralres  Jacubit  r  swpe  cxpugnM-crunl  me,  sed 
liuts  Dco  el  concrptioni  Mariœ  intemeratœ  : 
non  potuerttnl  milii.  l'arcal  ri$  Alissimus. 

Voyez  les  auteurs  cités  d:ins  le  §  précé- 
dent, el,  pour  lei  provinces  jiarticulières  de 
cet  ordre  :  Louis  de  L'rrela,  llist  de  la  s  i- 
qnida  orden  de  Predicadores  en  Eliopi'U  An- 
lonio  de  Keniasal,  llist.  de  la  l'rovin:ia  de 
Siinlo-V incnte  df  Cliijipn  y  liitiilcm(da.  Au- 
gust.  d'Avil.i,  IJisl.  de  la  Prorinria  de  S. 
Jaijn.  Dom  (ionzalès,  Hist.  de  la  Provincin 
del  It  isario  de  Filipinas  Japon  y  China. 

Fn  parl.int  des  missions  auxquelles,  en 
diverses  lonlrees,  les  Dominicains  s'em- 
p'oienl  avec  zèle  el  avec  fruit,  le  P.  Ilélyot 
n'a  point  mentionné  leur  opposition  aux  Jê- 
suite>dans  l'alTaire  des  rits  chinois,  proscrits 
par  le  cardinal  de  Tournuu,  envoyé  dans  les 


m 


ÏTOM 


DOM 


110 


missions  d'Orient  pour  informorde  celle  im- 
portanle  affaire,  el  condamnés  ensuite  par 
le  sainl-siégp.  On  sait  que  les  Jésuites,  qui 
connaissaient  mieux  que  personne,  il  est 
vrai,  ce  qu'il  pourrait  y  avoir  de  supersti- 
tieux dans  ces  cérémonies,  ne  monlrèrent 
pas  une  obéissance  aussi  ponctnelle  et  aussi 
prompte  qu'il  le  fallait,  et  on  les  en  a  géné- 
ralement blâmés.  Néanmoins,  il  faut  bien 
rabattre  des  blâmes  qu'on  leur  a  donnés, 
quand  on  voit  les  mesures  de  prudence  pro- 
visoire que  Home  prescrivit  aux  mission- 
naires qui  la  consultaient  après  la  suppres- 
sion de  la  Compagnie  de  Jésus.  Les  Douiini- 
cains  ont  vu  aussi  quelques-uns  des  leurs 
donner  dans  le  jansénisme,  et  le  fameux 
P.  Lambert,  mort  dans  les  commencements 
du  dix-neuvième  siècle,  a  poussé  son  affe- 
ction àcelte  erreur  jusqu'à  un  fanatisme  ri- 
dicule. Ils  ont  eu  des  membres  de  leur  ordre 
qui  ont  embrassé  les  erreurs  de  la  constitu- 
tion ciwle  du  clergé,  mais  en  même  temps 
ils  ont  eu  également  des  religieux  qui  ont 
donné  l'exemple  de  la  soumission  à  l'Eglise 
et  d'une  Hik-lité  héroïque  aux  bons  princi- 
pes. Cet  ordre  respectable  continue  aujour- 
d  hui  ses  bonnes  œuvres  dans  les  missions 
lointaines  ;  nous  en  donnerons  pour  exem- 
ple celles  de  l'Amérique  du  Nord,  auxquelles 
nous  nous -bornerons,  sans  parler  de  ses 
établissements  dans  tes  missions  d'Orient  et 
ailleurs  actuellement  en  activité.  Le  premier 
évéque  de  New-York  a  été  le  P.  Hichard- 
Luc  Concanen,  assistant  général  do  l'ordre 
des  Frères  Prêcheurs  ;  et  c'est  d'une  lettre  du 
P.  E.  D.  Fcnwii'k,  son  confière,  que  nous 
lirons  ces  détails  sur  rétablissement  des  Do- 
minicciins  aux  Etats-Unis.  Le  P.  Fcnwick 
avait  d'abord  conduit  les  catholiques  de 
Mataoumen  dans  l'Etat  du  Maryland.  Il  alla 
depuis  se  fixer  dans  le  Kcntucky  dès  les 
premières  années  du  dix-neuvième  siècle  , 
car  il  était  déjà  depuis  (jnelque  temps  à  Pis- 
catawey  en  août  ISOo.  Il  était  venu  d'Angle- 
terre s'établir  en  ces  contrées,  adressant,  en 
partant,  aux  catholiques  et  à  la  noblesse  de 
la  Grande-Bretagne  une  circulaire  pour  se 
procurer  leur  iniérét  et  leurs  secours.  Né 
dans  le  Marjland,  Fcnwick  était  allé  se 
taire  D.iminicain  à  Bornhem,  en  Flandre, 
dans  le  dessein  d'établir  plus  lard  un  sémi- 
naire de  religieux  de  son  ordre  dans  sa  pa- 
trie, et  d'y  propager  la  religion  parce  moyen 
puissant.  Les  révolutions  arrivées  en  lùs- 
riipe  retardèrent  longtemps  l'ccèculio:!  de 
son  projet,  pour  lequel  il  fut  autorisé  par 
ses  supérieurs  de  Rome  et  d'Angleterre  ;  cl 
iM.Carri)l,  évèque  de  lîallimore  (siège  qui  ne 
lut  que  plus  tard  érigé  en  archevêché),  lui 
promit  la  plus  ferme  assistance.  Sa  circu- 
laire lui  procura  une  somme  importante,  cl 
il  arriva  au  Maryland  vers  le  milieu  du  mois 
de  mai,  accompagné  du  P.  Antoine  Angier. 
L'évêque  de  Ballimnre  lui  conseilla  de  lixer 
son  élalilissemeul  dans  la  province  éloignée 
duKenlucky,  où  les  catholiques  le  désiraient, 
cl  il  y  projetait  réreciion  d'un  collège.  11  ne 
trouva  dans  le  Kcntucky  que  l'abbé  Badin, 
prêtre  séculier,  qui  les  reçut  à  bras  ouverts, 


et  qui  dans  les  commencements  éprouva 
quelques  peines  causées  par  le  peu  de  fer- 
meté des  Dominicains  pour  le  soutien  de  la 
morale  dans  l'exercice  du  saint  ministère. 
Le  P.  Fenwick  s'établit  enfin  dans  le  comté 
de  Washington  ,  près  de  Spring-Field,  et 
acheta  une  propriété  de  230  rubi  d'étendue, 
contenant  déjà  une  maison  assez  bien  bâtie, 
etc.,  et  cela  du  produit  de  ses  biens  pater- 
nels, dont  il  retira  5000  piastres.  Ce  trait 
lui  mériiail  la  reconnaissance  de  ses  compa- 
triotes, de  toute  la  religion  même  et  snrtnut 
des  Dominicains,  dans  l'histoire  desquels  il 
méritait  au  moins  cette  mention.  Il  ét.iit  ac- 
compagné, quand  il  commença  enfin  cette 
fondation, des  PP.  M'",  Thomas  VVilson,  An- 
toine Angier,  Kaimond  Tuile,  qui  ont  donc 
été  les  premiers  missionnaires  Dominicains 
de  cette  contrée,  alors  exploitée  par  les  hé- 
rétiques, comptant  déjà  neuf  ou  dix  impri- 
meries à  leur  service,  et  qui  trenle-cinq  ans 
auparavant  n'était  qu'une  forêt  inculte,  ha- 
bitée seulement  par  les  sauvages,  vivant  do 
chasse  et  de  pêche.  Le  P.  Fenwick  fut  de- 
[luis  élevé  à  l'épiscopat. 

L'ordre  possédait  à  Home,  au  dernier  siè- 
cle, les  maisons  suivantes  :  1°  Sainte-Marie 
de  la  Minerve,  2'  Sainte-Sabine,  3°  Saint- 
Sixte  le  Vieux,  k'  Saint-Clément,  S"  Saint- 
Nicolas  du' PerfeCti,  (,"  Notre-Dame  du  Ro- 
saire au  Monte-Mario,  7°  Saint-Cyr  et  Sainte- 
Julitte,  8°  la  Pénilencerie  de  Sainte-Marie- 
Maji  ure.  La  maison  de  la  Minerve  est  en- 
core aujourd'hui  le  chef-lieu  de  l'ordre  et  la 
résidence  du  généra'. 

L'institut  possédait  autrefois  à  Paris  trois 
maisons,  celle  de  Saint-Jacques,  rue  Saint- 
Jaci^ues,  d'où  leur  e>t  venu,  comme  on  sait, 
le  nom  de  Jacubins,  qui  était  la  première 
maison  de  l'ordre  en  France,  et  le  col  égede 
cet  insliiu!.  On  y  compt.iit,  il  y  a  un  siècle, 
quatre-vingts  religieux.  Il  n'y  avait  pas  de 
noviciat,  il  se  faisait  en  province.  La  l)iblio- 
thèquc  de  cette  maison  était  de  quinze  à 
seize  mille  volumes.  C'était  beaucoup,  mais 
peu  néanmoins  comjiarativemenl  aux  biblio- 
thèques des  deux  autres  maisons  dont  nous 
allons  parler,  et  qui  n'avaient  pas  un  si  haut 
rang  dans  la  nomenclature  des  monasl<^res 
de  l'ordre  ;  celle  bib'iotlièque  contenait  plu- 
sieurs manuscrits  d'ouvrages  de  piété,  lé- 
gués par  saint  Louis  à  ces  religieux,  qu'il  ai- 
miil  beaucoup.  L'église  du  couvent,  qui 
depuis  longtemps  menaçait  ruine,  avait  été 
abandonnée  par  les  religieux  avant  la  Révo- 
lution, et  l'oliice  divin  se  célébrait  dans  la 
salle  des  exercice-,  connue  sous  le  nom 
(VEcolcs  de  Saint-Thomas.  On  remarquait 
d.ins  CCS  écoles,  situées  à  côté  de  l'église  et 
bâties  an  seizième  siècle,  aux  frais  du  P. 
Jean  Binet,  une  chaire  revêtue  de  marbre, 
dans  laquelle  était,  dit-on,  renfermée  celle 
qui  avait  servi  à  saint  Thomas  d'Aquin.  Ce- 
pendant la  vieille  église,  vaste  <  t  partagée 
en  deux  dans  toule  sa  longueur,  comme 
celle  des  Dominicains  de  Toulouse,  a  sub- 
sis'é  encore  après  la  Révolution  et  a  servi  de 
magasin.  On  voit  encore  les  restes  de  ce 
m  jnastèrc  dans  la  rue  des  Grès. 


lit 


DICTIONNAIHE  DES  ORDRES  RFLICIEUX. 


112 


I.o  rouvonl  des  D:)ininic.iins  de  In  rue 
Sainl-H  norc  élail  situé  cnlrc  l'église  Saint- 
Itoili  el  la  place  ^'endoiiic.  C'est  dans  la 
salle  de  la  biblioilièque  de  celte  maison  que 
se  réunit  Cite  horde  d'élrcs  pâles  par  le  gé- 
uie  du  niil  el  des  pasvinns  humiliantes,  qui 
prirent  ou  reçurint  du  lieu  de  leurs  séances 
cl  garderont  dans  l'hisioire  le  ni»ni  hideux 
do  Jacobins.  L'ejjlise  des  religieux,  les  bâti- 
ments fort  simplis  el  les  j.irdins,  qui  occu- 
paient prcs<iue  tout  l'espace  qui  est  mire  la 
rucSainl-Honoré  et  la  rue  Neuve-desPelils- 
Cbamps  ,  ont  di>p  iru,  et  l'on  a  transporté 
sur  ce  vaste  terrain  le  marché  qui  s'y  voit 
acluellement.  Celle  n  aison,  où  les  éludes 
étairnt  cultivées,  possédait  un  cabinet  d'his- 
toire naturelle  lrès-curieu\ ,  fornic  p.ir  les 
soins  du  l*.  I.abnt,  connu  par  ses  relations 
d'Afrique  el  d'Amérique,  l'eu  de  couvents  de 
l'ordre  avaieni,  croyons-nous,  une  liiblio- 
théquc  aussi  nombreuse,  car  on  y  compl.'iit 
environ  lrenle-dcu\  mille  volua.cs,  le  dou- 
ble de  celle  du  célèbre  couvent  de  la  rue 
Saint-Jacques.  Celle  riche  bibliolhèquc  pos- 
sédait des  éditions  rarc<  et  des  manuscrits 
précieux.  On  y  conservait  soi<!neusement 
une  chaise  qui  avait  servi,  disa^lon,  à  saiul 
Thomas  d'Aquin.  11  y  avait  un  noviciat  dans 
cette  maison,  et  les  aspirants  payaient  deux 
cents  livres  pour  leno\iciat  el  deux  cents 
livres  pour  rhabillemenl.  Elle  renfermait  il 
y  a  un  siècle  soixante  \)rélres  el  cent  novi- 
ces. Celte  maison  faisaii  partie  de  la  congré- 
gation Occilaine,  dont  nous  parlerons  en 
traitant  des  réformes  dans  l'ordre  des  Frè- 
res Prcclieurs  (Voyez  Lombardie);  mais  celte 
congré;;al:on  fui  éri.'ée  en  province  sous 
l'invocalion  de  Saint-Louis. 

Outre  ces  deux  monaslèrcs  mentionnés  par 
Hélyot,  les  Dominicains  en  possédaient  à 
Paris  un  troisième,  doni  il  ne  parle  point,  et 
qui  élail  situé  au  fauliourg  Sainl-liermain. 
Afin  d'assurer  le  succès  de  la  réforme  du 
1*.  Sébastien  .Michaelis,  m'irt  dans  le  couvent 
de  la  rue  Sa'nl-Honoré,  le  P.  Nicolas  Ho- 
dol(ihi,  général  de  Tordre,  résolut  d'établir 
en  France  un  noviciat  génér  :1  pour  ceux 
qui  voudraient  embrasser  celle  réfar.Tie.  Il 
y  fut  autori-é  par  un  bref  d'Urbain  VIII  , 
donné  en  1C29,  par  des  lettres  patentes  de 
Louis  XIII,  et  trouva  en  même  temps  dans 
le  cardinal  Richelieu  un  protrdeur  puis- 
sant qui,  par  ses  bienfaits,  mérita  d'être 
considéré  comme  le  fundalenr  du  nouvel 
élablissemenl.  Dès  1G31  ,  quatre  religieux 
tirés  de  la  maison  de  la  lue  S.iinl-Ilonoré 
avaient  été  placés  dans  cille-ci,  siliiéc  rue 
Saint-Dominique-Sainl  Germain  el  i|ui  n  é- 
tait  alors  qu'un  b.'Uimenl  très-simple,  avec 
un  jardin  el  un  clos  conîcnaj.t  sept  arpents 
cl  demi.  Ils  s'y  firent  construire  ;iussili4  une 
peine  ctrapelle,  qui  fut  bénite  en  iG.i2.  Le 
nombre  des  sujets  qui  se  présentaient  pour 
obtenir  leur  ailmisslon  dans  l'ordre,  aug- 
mentant chaque  jour,  il  fallut  penser  à  h.ilir 
lies  lieux  plus  reïtnliers.  Ils  commencèrent 
par  l'église,  qui  fut  élevée  sur  les  dessins  de 
l'archiicctc  Pierre  Ruilet.  La  première  pierr.' 
en  fui  posée  en  16^-2,  jiar  Ilvicinlhe  Serroni, 


archevêque  d'Aibi,  el  par  madame  Anne 
Monibaziin,  duchesse  de  Luynes.  Elle  fut 
achevée  l'année  suivante.  Le  bâiimenl,  dé-, 
coré  inlérieurcmcnl  d'un  ordre  de  pilastres, 
corinthiens,  offre  tous  les  caractères  de  l'ar- 
chitecture employée  à  celle  époque  dans  les 
édifices  sacrés,  et  du  reste  n'a  rien  de  remar- 
quable. Le  portail,  rebâti  quelques  années 
avant  la  révolution  par  le  frère  Claude,  reli- 
gieux de  cette  maison,  se  compose  de  deux 
ordres  élevés  l'un  sur  l'autre,  dans  la  forme 
pyramidale  adoptée  pour  le  plus  grand 
nombre  des  églises  de  Paris  et  de  quelques 
autres  villes,  ci  n)éine  dans  la  boiserie  de 
quelques  autels.  Ces  deux  ordres,  demi  l'en- 
semble a  quelque  apparence,  sont  d'une  pro- 
portion el  surtout  d'une  maigreur  qui  peut 
(  hoquer  l'œil  le  moins  exercé.  Nous  sommes 
entré  dans  ces  détails  sur  celte  église  parce 
qu'elle  existe  encore  aujourd'hui  el  esl  celle 
de  la  paroisse  S3int-Ttiomas-d'A(iuin.  Le 
couvent,  qui  esl  habité  on  partie  pir  des 
particuliers  el  en  partie  occupé  par  le  musée 
d'.Vrtillerie,  a  été  le  séjour  de  plusieurs  reli- 
gieux célèbres,  enlre  autres  du  P.  Vincent 
Karon,  docteur  de  l'universiié  de  Toulouse 
et  llu'ologien  distingué  du  dix-septième  siè- 
cle ;  du  frère  Jean-André,  peintre  habile,  et 
dont  les  tableaux  taisaient  le  iirinci[)al  orne- 
ment de  l'église  el  du  monastère:  du  frère 
François  Romain  ,  ingénieur  el  architecte 
très-estimé.  On  lui  doit  le  plan  du  pont  de 
Maëslricht  et  une  partie  de  sa  construction. 
Louis  XIV.  qui  l'avait  chargé  de  la  conduiie 
du  Pont-Royal,  fut  si  content  de  ses  travaux, 
qu'il  lui  confia  l'inspection  des  ouvrages  des 
ponls  el  chaussées,  cl  la  réparation  des  bâ- 
timents dépendants  de  son  domaine.  C'est 
ainsi  que  les  monasières  renfermaient  une 
réunion  d'hommes  ignorants  et  inutiles. 

Celle  maison  des  Dominicains  du  faubourg 
Saint-lîermain  était  sous  la  seule  d.reclion 
du  général  de  l'ordre,  et  depuis  un  temps 
immémorial  les  supérieurs  claient  tirés  de  la 
province  de  Toulouse.  La  provinc'  occilaine, 
à  laquelle  elle  appartenait  d'abord,  ayant 
été  érigée  en  province,  elle  a\  ait  un  noviciat 
qui  n'avait  aucun  rapport  avec  celui  de  la 
rue  S.iinl-ilonoré.  Ce  noviciat  était  d'un  an, 
et  on  n'y  payait  point  de  pension.  La  biblio- 
thèque (le  la  maison,  composée  de  plus  de 
ving-quatre  mille  \olumes,  était  ornée  ùe 
deux  globes  de  Coronelli. 

Pour  résumer  ce  que  Hélyot  a  dit  de  lil- 
luslration  de  cet  ordre  célèbre,  nous  rap- 
pellerons qu'il  a  eu  plusieurs  saints  cano- 
nisi-s,  lies  savants  illustres,  el  surtout  sa  nt 
Ihoma^  d'Aquin,  quatre  papes  (InnocciU  V, 
lîenoil  XI,  saim  Pie  Vel,  depuis  la  morld'Ué- 
lyol,  IJenoil  .Mil),  un  grand  nombre  de  cardi- 
naux, de  patriarches  ,  d'ar<hevè(|<jes,  d'e- 
véques,  de  docteurs  el  d'écrivains  célèliris. 
I  e  P.  Jacques  Eihard  el  le  P.  louron,  tous 
deux  Français,  ont  écrit  l'histoire  des  hom- 
mes célèbres  de  leur  ordre.  On  a  vu  dans  le 
premier  article  d'Hélyot  que  l'habit  des  Do- 
minicains avait  été  dilTerenl  .i  l'origine  do 
l'ordre.  Comme  ils  metlaienl  sur  leur  habit 
blanc  un  inauleau  cl  un  capudiuo  noirs,  ou 


113 


DRA 


DRA 


114 


les  appela  jadis  en  Angleterre  les  Frères 
noirs,  tandis  qu'on  appelait  les  Carmes 
Frères  blancs. 

Les  Dominicains  ont  des  maisons  en  di- 
verses contrées,  en  Italie,  en  Angleterre,  en 
Irlande,  à  Gand  el  autres  lieux  de  la  Belgi- 
que. En  l'année  183:2,  l'empereur  de  Russie 
a  supprimé  dans  la  seule  province  de  Mohi- 
luw  cinquante-cinq  monastères  de  Domini- 
cains; vingt-neuf  restent  encore  ou  du 
moins  restèrent  alors.  La  révolution  d'Es- 
pagne a  détruit  tous  les  couvents  de  Domi- 
nicains; il  en  reste,  d;ins  les  Etals  soumis  à 
l'empereur  d'Autriche,  trente-sept  contenant 
deux  cent  deux  religieux.  Les  Dominicains 
ont  actuellement  pour  supérieur  ou  maître 
généra!  le  R.  P.  Ange  Ancarani,  et  pour  pro- 
cureur général  le  P.  Joseph  Alberti ,  tous 
deux  résidant  à  Rome.  Quelques  lentadves 
avaient  été  faites  sans  succès  aux  diocèses 
de  Rodez  et  d'Evreux  et  peut-être  ailleurs, 
pour  rétablir  en  France  l'institut  de  Saint- 
Dominique.  M.  l'abbé  Lacordaire  ayant  em- 
brassé l'ordre  des  Frères  Prêcheurs,  sous  le 
nom  de  F.  Dominique,  après  avoir  fait  son  no- 
viciat à  Rome,  a  été  autorisé  par  le  général  à 
rétablir  cet  ordre  dans  sa  patrie.  Après  plu- 
sieurs projets  d'établissement  en  divers  dio- 
cèses, il  a  pu  enfin  se  Gxer  à  la  maison  du 
Cholais,  appartenant  autrefois  aux  Char- 
treux et  oriffinairenient  à  une  congrégation 
spéciale  de  Rénéditlins  que  nous  (ferons  con- 
naître dans  le  Supplément.  C'est  donc  à  Cho- 
lais, au  diocèse  de  Grenoble,  qu'il  a  établi  le 
chef-lieu  de  celte  future  el  prochaine  pro- 
vince de  France,  el  qu'il  a  donné  l'habit  aux 
premiers  novices,  le  k  août  1845.  Comme 
celte  province,  sans  faire  une  réforme  parti- 
culière, sera  pourtant  une  sorte  de  congré- 
gation spéciale  dans  l'ordre,  nous  consacre- 
rons un  article  exprès  à  celte  palingénésie 
des  Dominicains  en  France.  Voy.  Domini- 
cains, au  Supplément.  B-D-E. 

DO.MINIOUE  (CoNGBÉGATiONS    DIVERSES  DE 

i.'oBDRE  DE  Saint-).  Voyez  Lombard  e,  etc. 

DOMINIQUE  {Ordre  de  Saint-).  Voyez 
Dominicains. 

DONAT  (Saint-)  Voyez  Césaire  (Saint-). 

DORDRECHT.  Voyez  Augustins. 

DORÉS  (Chevaliers).  Voyez  Constantin 
(Chevaliers  de). 

DRAGON  RENVERSÉ,  des  Disciplines,  db 
l'Aigle-Blanche,  du  Tusin  ,  de  Notre- 
Seigneur  et  de  sa  Passion,  de  la  Fidé- 
lité, ET  DE  SaIHT-RupEUT,   ElN    ALLEMAGNE 

(Chevaliers  du). 

Presque  tous  les  écrivains  conviennent  que 
l'empereur  Sigismond  a  institué  un  ordre 
militaire  sous  le  nom  du  Dragon  renversé 
ou  vaincu,  mais  ils  ne  s'accordent  pas  sur  le 
temps  auquel  se  Gt  celte  institution  :  les  uns, 
après  Michieli,  la  mettant  l'an  l'i^OO,  el  les 
autres,  après  Favin,  prétendant  que  ce  fut 
l'an  1418.  Michieli  ajoute  que  le  motif  qui 
porta  se  prince  à  instituer  cet  ordre  fut  afin 


que  les  chevaliers  qui  le  recevraient  pussent 
combattre  les  hérésies  qui  infectaient  la  Bo- 
hême et  la  Hongrie,  el  que,  pour  cet  effet,  il 
sollicita  la  convocaiion  des  conciles  de  Cons- 
tance et  de  Râle,  où  ces  hérésies  furent  con- 
damnées. Sur  ce  fondement  il  n'y  a  point  de 
doute  que  Michieli  ne  se  soit  trompé  en  met- 
tant l'inslitulion  de  cet  ordre  en  1400,  puis- 
que les  conciles  de  Constance  et  de  Bâie  ne 
furent  tenus,  le  premier  qu'en  1414,  et  le  se- 
cond l'an  1431,  el  que  Jean  Hus  ne  com- 
mença à  semer  ses  erreurs  en  Bohême  qu'en 
1407. 

L'abbé  Giusliniani  fait  voir  que  ceux  qui 
ont  cru  que  cet  ordre  n'avait  été  institué 
qu'en  1418,  après  la  tenue  du  concile  de 
Constance,  se  sont  pareillement  trompés, 
prétendant  qu'il  était  établi  avant  l'an  1397  : 
ce  qu'il  prouve  parle  testament  de  François 
del-Pozzo,  de  Vérone,  de  la  même  année,  où 
il  est  parlé  de  son  lils  Victorio  del-Pozzo, 
chevalier  de  l'ordre  du  Dragon,  qui  était 
pour  lors  auprès  de  l'empereur  Venceslas, 
ûùGaleas  Visconti,  prince  de  Vérone,  l'a- 
vait envoyé  pour  quelques  affaires.  Voici  ce 
que  porte  ce  testament,  dont  l'original  est 
conservé  dans  la  maison  dos  seigneurs  Poz- 
zo  de  San-Vitale,  et  dont  il  est  fait  aussi  men- 
tion dans  la  généalogie  de  celle  maison, 
écrite  par  Jean-Bapliste  Merlo  et  imprimée 
à  Vérone.  In  omnibus,  et  instituit  et  esse 
voliiit  sp.  et  egreg.  virum  D.  Viciorium  aPu~ 
teomilitem  Draconis  ejus  dileclissimum  fi- 
lium,  qui  modo,  prœcepto  magn.  et  potentiss. 
D.  Jo.  Gulealii,  rrperilur  apud  serenissimwn 
Venceslautn  imperalorein  nostrum,  pro  ejus 
negoliis  pertractandis.  Ce  qui  fait  croire  à 
l'abbé  Giustiniani  que  l'empereur  Sigismond 
avait  fondé  cet  ordre  lorsqu'il  épousa,  en 
1385,  Marie,  reine  de  Hongrie,  ou  le  jour 
qu'il  fut  couronné  roi  de  Hongrie  l'an  1387, 
parce  que  ce  jour-là  il  fil  chevalier  Panta- 
léon  Barbo,  ambassadeur  de  Venise.  Le  mê- 
me auteur  ajoute  que  ce  prince  étant  devenu, 
dans  la  suite,  empereur  el  roi  de  Bohême,  et 
ayant  reçu  la  couronne  impériale  à  Rome, 
l'an  1493,  il  fit,  en  passant  à  Vérone,  plu- 
sieurs chevaliers,  aussi  bien  qu'à  Mantoue, 
où  il  alla  ensuite;  el  que  les  armes  de  ces 
chevaliers  se  voient  encore  dans  plusieurs 
églises  et  sur  les  portes  de  plusieurs  palais 
de  Vérone,  avec  deux  dragons  au-dessous 
de  ces  armes,  dont  l'un  regarde  l'écu,  leurs 
queues  passées  sous  le  corps,  tortillées  au- 
tour du  cou  par  le  bout,  el  ayant  chacun  une 
croix  sur  le  dos.  Favin  a  donné  la  représen- 
tation du  collier  de  cet  ordre,  composé  de 
deux  chaînes  d'or,  sur  lesquelles  sont  des 
croix  à  double  traverse,  avec  un  dragon 
renversé  au  bout  du   collier  (1). 

Mennénius,  sur  l'autorité  de  Jérôme  Ro- 
man, historien  espagnol,  dit  que  sous  les 
empereurs  Sigismond  et  Albert  11  il  y  a  eu  en 
Allemagne  trois  ordres  militaires  fort  célè- 
bres, el  qu'un  certain  Moïse  Didace  de  Va- 
lera,  espagnol,  reçut  de  l'empereur  Albert 
ces  trois  ordres,  savoir  :  celui    du  Dragou, 


(I)  Voij..  a  la  fin  du  vol.,  n'  10. 


115 


DICTIONNAIRE  Dh;S  ORDRES  RELIGIEUX. 


lis 


donlnous  venons  de  p;irli  r,  que  ce  prinrc 
lui  donna  comme  roi  do  Hongrie;  ctliii  du 
Tusin,  comme  roi  do  llohémo,  ot  coiui  des 
Disciplines  vu  de  l'Aiizle-Hlanclic,  comme 
archiduc  d'Aulrithe.  M.iis  comme  l'Aulriclie 
n'a  éié  crig<  e  on  archiducho  q  :c  par  loinpc- 
rearMaximilien  1",  l'an  1195,  Alberl,  qui 
tnourul  l'an  lV+0,  n'aurail  pu  donner  l'ordre 
de  l'Aitile-lilanclic  à  ce  Moïse  Didace  de 
Valera  en  qualité  d'archiduc  d'Autriche. 
Aussi  les  historiens  sonl-il^  parla-és  au  su- 
jet lie  1  institution  de  cet  ordre,  que  quel- 
ques-uns attribuent  à  Uladislas  V.  roi  de  Po- 
logne, surnommé  Lokier,  qui,  selon  eux, 
l'institua  au  mariage  de  son  û!s  Casimir  le 
Grand  avec  une  fille  du  duc  do  Lilhuanic,  on 
1325,  ajoutant  qu'un  nid  d'aiglons  qui  fut 
trouvé  par  Lechus,  premier  prime  de  Polo- 
pne,  lorsqu'il  f.iisait  creuser  les  fondemonls 
de  la  ville  de  Gnisnc,  donna  occasion  à  Lla- 
dislas  di-  prendre  pour  marque  de  cet  ordre 
une  aigle  blauche  couronnée,  pendante  à  un 
collier  composé  de  chaîuc^d'or  (1).  Il  se  pout 
faire  qu'il  y  ait  eu  aussi  on  Autriche  un  ordre 
BOUS  ce  nom  et  sous  celui  dos  Disciplines, 
dont  le  collier,  selon  quelques  écrivains, 
était  en  forme  de  baudrier,  où  étaient  atta- 
chées des  aigles  blanches.  Quoi  qu'il  en  soit, 
l'an  1705,  Frédéric-.\uguste,  roi  de  Pologne  et 
duc  de  Saxe,  renouvela  dans  ce  royaume 
l'ordre  de  l'.Vigle-Hlanohe,  et  donna  à  plu- 
sieurs seigneurs  qui  avaient  suivi  son  paili 
uneaigle  blanche  avcccetledevi»e,  p'o  ^(/c, 
lege  et  rrge. 

S'il  est  vrai  que  rempereur  Albert  II  don- 
na à  ce  Moïse  Uidace  de  \'alora  les  trois  or- 
dres du  Driigon,  de  l'Aiglo-Blanche  et  du 
Tusin,  ce  dernier  aurait  été  institué  avant 
l'an  15G2,  quoique  l'abbé  Giustiniani  dise 
que  dans  l'incertitude  où  on  est  de  son  ins- 
titution on  doit  conjecturer  qu'elle  ne  peut 
avoir  élc  faite  que  dans  cette  année,  pui^que 
selon  lui  les  archiducs  d'.\utriche  en  ont  été 
les  fondateurs,  et  que  ce  ne  fut  que  dans  ce 
temps-là  que  l'on  donna  le  titre  d'archiducs 
à  Ferdinand  et  à  Charles,  neveux  de  l'em- 
pereur Charles  V.  Mais  cet  auteur  n'a  pas 
fait  reflexion  que  ce  Ferdinand  n'eut  que  le 
litre  d'archiduc d'Inspruck,  et  son  frère  n'eut 
que  Celui  d'areliidiic  de  Gratz;  que  leur 
père  Ferdinand,  frère  de  l'empereur  Charles 
\',  avait  été  archiduc  d'.Vuiriche  dès  l'an 
1520,  et  que  l'.xulrii  lie  avait  été  érigée  on 
archiduché  par  l'empereur  Mavimilion  I  ', 
comme  nous  avons  déjà  dit.  Schooncbecli, 
qui  ne  parle  qu'après  l'abbé  Ciusliniani  et 
qui  souvent  traduit  mal  cet  auteur,  dit  que 
l'iirdre  du  Tusin  dé|iCiidait  des  arehi.lucs 
d'Auiiicho,  et  que  Ferdinand  et  Charles,  qui 
étaient  frères,  furent  les  premiers  qui  reçu- 
rent cet  ordre,  l'an  lolJ2.  Ce  qui  e>l  certain, 
c'est  qu'on  ne  sait  point  quelle  a  été  l'origi- 
ne du  cet  ordre  ni  pouniuoi  on  lui  donna  le 
iiuLU  de  Tusin.  L'abbc  Ciustiniaiii  dit  encore 
que  ces  (hctaliers  portaient  un  manteau 
ruugc  sur  lequel  il  y  avait  une  croix  vertu 
[i],  (|u'ils  faisaient  vu>u  de  i  haslctë  cl  d'o- 


béissance au  s.nint-siégcet  à  leur  sonverain» 
et  qu'ils  suivaient  la  règle  de  Saint-Basile; 
mai^  cet  auteur  a  soumis  à  la  même  rèule  ri 
à  d'autres  tant  d'ordres  de  chevalerie  qui 
n'en  ont  ou  aucune,  que  nous  n'ajoutons  pas 
beaccoup  de  foi  à  ce  qu'il  dit  de  ces  cheva- 
liers, qu'il  confund  pout-élre  avec  les  che- 
valiers d'un  antre  ordre  qui  subsistait  en 
Hongrie,  et  qui  étaient  habillés  de  cette 
sorte,  desquels  Mennénius  fait  mention  sur 
le  rapfiort  de  Jérôme  Mégiser,  historiogra- 
phe de  l'archiduc  d'Autriche,  et  dont  Josse 
.\iiiiunus  et  quelques  autres  ont  donné  l'Iia- 
bilii  nient  sans  parler  de  leur  origine,  ne 
leur  donnant  seulement  que  le  nom  d-.-  che- 
valiers hongrois. Quoi  qu'ilen  soit,  nousdon- 
norons  l'habillement  de  ces  chevaliers  sous 
le  nom  du  Tiisin. 

Favin,  Thédlre  a'honneur  et  de  cheralfiie. 
Le  P.  Anselme,  Palais  de  l'IJonneur.  Ber- 
nard Giustiniani,  Uist.  <li  luit,  gti  ordini 
militari.  .Mennénius,  lleliciœ  equcst.  ordin. 
Herman  et  Schoonebeck,  dans  leurs  Uisloi- 
rcs  des  Ordres  rdigieur. 

A  ces  anciens  ordres  d'.\llemagne  nous 
joindrons  encore  trois  autres  ordres  militai- 
res qui  ont  été  établis  de  nos  jours  par  des 
princes  allemands.  Le  premier  est  celui  do 
Jésus-Christ  et  de  sa  Passion,  que  le  prince 
Charles,  neveu  de  l'okcteur  de  Saxe  Jean- 
Georges  IV,  institua  ;  dont  Us  chevaliers 
devaient  porter  sur  leurs  manteaux  une  crois 
de  salin  blanc  ou  en  broderie  d'argent,  au 
milieu  de  laquelle  était  l'image  de  Noire- 
Seigneur,  et  au  col  un  ruban  bleu  taliisé, 
ayant  au  bout  une  grande  médaille  d'or  où 
la  mêiue  imago  était  gravée;  et  étaienl  obli- 
gés d'assi^lcr  avec  dévotion  au  service  qui 
se  fait  le  vendredi  et  le  samedi  de  la  semai- 
ne sainte.  Le  7  février  fut  choisi  pour  la  cé- 
rémonie de  l'instilution  de  cet  ordre.  L'ar- 
chevêque de  SalzljoLir^  célébra  pontilica- 
leraent  la  messe  eu  l'église  des  Uécollels  do 
la  ville  de  Lolbe,  avec  la  musique  de  Sun 
Altesse  cl  l'harmonie  des  timbales  cl  trom- 
pelles;  après  quoi  ce  prince  donna  le  collier 
de  l'ordre  à  ce  piélat,  et  ensuite  au  prince 
Adolphe,  au  prince  Frédérie,  son  frère,  à 
celui  de  Nuremberg  et  à  plusieurs  autres 
personnes  de  la  p'us  haute  qualité. 

Frédéric  111,  marquis  et  électeur  de  Bran- 
debourg, ayant  pr.s  le  titre  de  roi  de  Piusse, 
institua  le  l't  janvier  1701  un  ordre  militaire 
sous  le  nom  de  la  l'iilililc,  cl  donn.i  aux 
chevaliers  pour  manjuc  de  cet  ordre  une 
croix  d'or  émaillée  de  bleu  ayant  au  milieu 
les  chilTres  de  ce  prince  F.  H.,  et  aux  angles 
l'aigle  de  Prusse  éinailléede  noir.  Celle  croix 
est  attachée  à  un  ruban  do  couleur  «l'orange 
que  les  chevaliers  portent  en  f.irnie  d'écharpc 
depuis  l'épaule  gauche  juxju'à  la  hanche 
droite  ,  dessus  le  just.iuciirps  ,  la  couleur 
d'orange  a' ant  été  choisie  apiiaremmeiit  en 
ii.émi)ire  de  la  mère  du  roi,  princesse  d'O- 
range. Ces  chevaliers  portent  encore  sur  le 
cote  gauclie  de  leurs  habil>  une  croix  brodée 
d'argent,  en  forme  d'étoile,  au  milieu  de  la- 


it) Vvy.,  à  la  liu  d  (  \ul.,  ii'  17. 


(î)  Voij.,  il  la  lirulu  vul.,n'  IS. 


in 


ECU 


ECU 


IIS 


quelle  est  une  aigle  en  broderie  d'or  sur  un 
fond  d'orange ,  l'aigle  tenant  dans  l'une  de 
ses  serres  une  couronne  de  laurier,  et  dans 
l'autre  u»  foudre  avec  cetle  inscriplion  au- 
dessus  de  sa  tête  ,  Suum  cuique,  en  broilerie 
d'argent.  Cet  ordre  ne  se  donne  qu'à  ceux  de 
la  maison  royale  et  aux  personnes  les  plus 
considérables  de  lEtat,  en  reconnaissance  de 
leur  mérite.  Ceux  qui  reçurent  cet  ordre  les 
premiers  furent  le  prince  royal,  les  trois 
margraves  frères  du  roi,  le  margrave  d'Ans- 
pac,  les  ducs  de  Curlande  et  d'Ifolstein  ,  les 
comles  de  Wartemberg,  de  Barfons,  de  Dona 
et  Lollum  ;  les  quatre  conseillers  régenls  de 
Prusse,  MM.  de  BerbanI,  Branschke,  Creulz, 
et  Vallenrond  ;  le  grand  maîlre  de  l'artillerie 
et  le  général  major  ,  le  commissaire  général 
comte  d'Onlioff ,  le  chambellan  comle  de 
Doua  et  M.  Billau  ,  grand  maître  d'hôlcl  de 
la  reine. 

Il  y  a  encore  eu  un  ordre  militaire  institué 
la  même  année  1701  par   l'archevêque  de 


Salzbourg  Jean-Ernest  de  Tliun,  sous  le  nom 
de  Saint-Uupert,  premier  é?éque  de  cetle 
ville.  Le  prélat  ,  après  en  avoir  obtenu  la 
confirmation  de  l'empereurLéopold  l",  créa, 
le  13  novembre,  fé  e  de  sa'nt  Léopold,  douze 
chevaliers  de  cel  ordre,  qu'il  choisit  entre  la 
plus  illustre  noblesse  de  ses  Etats  :  la  céré- 
monie se  fit  dans  l'église  de  la  Trinilé  ,  nou- 
vellement conslruiie  ,  et  il  donna  à  chacun 
de  ces  chevaliers  une  médaille  d'or,  avec 
l'imagede  saint  Rupert  d'un  côté,  etde  l'autre 
une  crois  rouge. La  cérémonie  fut  suivie  d'un 
magiiifiiiuc  festin,  auquel  les  chanoines  de  la 
cathédrale  et  plusieurs  personnes  de  qualité 
assistèrent,  et  deux  fontaines  de  \in  coulè- 
rent pen'ant  le  repas  dans  la  place  qui  est 
devant  le  palais.  Le  lendemain,  le  comte  Er- 
nest de  I  hun  ,  neveu  de  l'archevêque  ,  qui 
^a^ait  fait  commandeui  de  l'ordre,  donna 
aux  chevaliers  un  autre  repas  magnifique  , 
qui  fui  suivi  d'un  combat  d'ours  et  de  tau- 
reaux. 


E 


ÉCAILLE.  Voy.  Bande  (Ordbe  de  la). 
ÉCHARPE.  Voy.  Hache. 
ÉCHELLE     (  Religieux      hospitaliers    de 

Notbe-Dame  della  Sc:ala  ou  de  l'). 
Des   religieux  hospilnliers    de    Notre-Dame 
della  Scala  ou  iU  V Echelle,  à  Sienne,  arec 
la  vie  du  bienheureux  Soror,  leur  fonda- 
teur. 

A'oici  des  hospitaliers  à  qui  Barbosa,  Tam- 
burin,  Crusenius    et  quelques  autres  auteurs 
donnent  pour  fondateur  le  bienheureux  Au- 
gustin Novelli,  qui,  après  avoir  été  chance- 
lier de  Mainfroi,  roi  de  Sicile,  se  Ht  religieux 
de   l'ordre  des  Ermites  de  Saint-Augustin, 
dont  il  fut  ensuite  général  ,  étant  pour  lors 
péniicncier  el    coe.fesseur   du    pape   Boni- 
face  Vlll;  et  ils  prétendent  que  ce  fut  vers 
l'an  1300  qu'il  fonda  celle  congrégaiion.  Ces 
auteurs  se  sont  peut-être  fondés  sur  ce  que 
dans   la  vie  de  ce  saint   il  est  dit  qu'il  per- 
suada à  un  homme  riche  de  la  villede  Sienne, 
nommé  Ues'aurus,  de  donner  tout  son  bien  à 
l'hô;  ital  de  cetle  ville,  et  que,  comme  le  bien- 
heureux Augustin  avait  beaucoup  de  crédit  à 
Rome,  il  obtint  des  privilégesel  des  exemptions 
pour  cet  hôpital  et  pour  ceux  qui  le  desser- 
vaient, qui  prirent  le  nom  de  religieux,  et 
auxquels  il  prescrivit  une  manière  de  vivre 
et  quel  devait  être  l'habillement  du  recleur. 
Selon  l'auteur  de  cette  vie ,  qui  (à  ce  que 
dil  le  Père  Papebroch)  était  contemporain  de 
ce  bienheureux   Augustin,  il  n'aurait  pres- 
crit ces  règlements  pour  les  religieux  de  cet 
hôpital  de  Sienne  que  vers  l'an  1300,  puis- 
qu'il ne  les  fit  qu'après  avoir  renoncé  au 
généralat,  qu'il  exerça  pendant  deux  ans,  et 
auquel   il  avait  été  élevé  le  25  mai  1298, 
comme  remarque  le  même  Papebroch  dans 
ses  annotations  sur  cette  vie.  Par  conséquent 
ces  hospitaliers  n'auraient  été  religieux  que 
dans  le  même  temps,  puisque  l'auteur  de  la 
vie  du  bienheureux  Augustin  dit  qu'il  leur 


en  obtint  la  permission  ,  ce  qu'il  a  entendu 
par  ces  paroles  :  Insuper  et  omnia  bona 
privilégia  quœhabet  diclum  hospilale,  el  quod 
passent  vocari  fratres,  et  deeorumexemptione 
a  sancta  maire  Ecclesia,  ipse  cum  esset  tna- 
gnœ  repntalionis  in  curia  ,  acquisivil.  Ce- 
pendant il  y  avait  des  religieuv  dans  cel  hô- 
pital dès  l'an  1292,  selon  Giugurta  Tommasi 
dans  son  Histoire  de  Sienne  ;  et,  si  le  recteur 
et  (eux  qui  desservaient  cel  hôpital  n'eus- 
sent pas  été  religieux  ,  la  république  do 
Sienne,  à  qui  le  pape  Cclestin  III  avait  remis 
le  gouvernement  de  cet  hôpital  l'an  119i, 
en  l'ôtant  des  mains  des  chanoines  de  la 
cathédrale ,  aurait  pu  les  changer  el  en 
mettre  d'autres  en  leur  place,  l'an  1292, 
voyant  que  par  leurs  malversations  les  re- 
venus se  dissipaient,  et  que  les  pauvres 
étaient  privés  de  secours.  Mais  comme  c'é- 
tait dans  ce  temps-là  de  véritables  religieux 
qu'elle  ne  pouvait  pas  renvoyer,  elle  em- 
ploya seulement  son  autorité  pour  que  l'hô- 
pital fût  mieux  gouverné  à  l'avenir  qu'il 
n'avait  été  jusqu'alors.  Le  sénat  (dit  Tom- 
masi) envoya  pour  ce  sujet  six  députés  à 
Orlando ,  qui  en  était  recleur,  el  qui  le» 
rebuta  d'abord  sans  les  vouloir  entendre  ; 
mais  ils  furent  dereciief  envoyés  avec  ordre 
exprès  à  ce  recteur  de  réformer  avec  eux 
les  abus  qui  étaient  dans  cette  maison  ,  afin 
que  les  pauvres  fussent  mieux  soulagés  à 
l'avenir.  Le  sénat  lui  défenditenmême  temps 
de  soumettre  cel  hôpital  à  aucune  église  ni 
à  aucun  ecclésiastique,  et  ût  des  règlements 
pour  le  bon  gouvernement  qu'il  prétendit 
qu'on  observerait.  Ainsi  cela  détruit  ce  que 
l'auteur  de  la  vie  du  bienheureux  Augustin 
Novelli  a  avancé  ;  et  n'y  ayant  eu  que  huit 
ans  d'intervalle  entre  les  années  1292  et 
1300,  il  semble  que  Tommasi  aurait  dû  faire 
mention  des  règlements  qui  avaient  éléfails 
par  le  bienheureux'  Augustin  Novelli  ,  s'il 
est  rrai  qu'il  en  ait  fait  ;  mais  au  contraire  il 


«19 


DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  RELIGIEUX. 


120 


ne  parle  aucunement  de  lui,  non  plus  qu'Or- 
lando  MalaNolli,  dans  l'Hisloire  de  Sienne, 
iiu'il  a  failo  aussi.  Au  reste  il  si'  peut  faiie 
ijue  le  bii-nheiireux  Novelli  leur  ait  seule- 
ment procure  la  ri  gle  de  saint  Augustin. 

Il  se  trouve  une  peinture  dans  cei  hôpital, 
de  l'an  \'-t\-2,  laquelle  représente  le  bienheu- 
reux Augustin  Novelli  donnant  l'habit  au 
recteur  avec  celle  inscriplion  au  b.is.  Corne 
S.  Agostino  Noielo  die  l'abilo  a  rellore  de  lo 
spedale;  mais  on  ne  peut  pas  tirer  de  là  une 
ronséqurnrc  (lu'il  a  clé  le  fondateur  de  ces 
hospitaliers,  l'cul-étre  en  avait-il  commis- 
sion, ou  bien  ce  recleur  était  I  ien  aise  de  le 
recevoir  de  sa  main  par  dévotion.  D'ailleurs, 
il  en  était  de  ces  recteurs  comme  de  l'admi- 
nistraleur  de  l'Iiôpila!  du  Saint-Esprit  en 
Saxe,  à  Rome,  qui  est  toujours  une  personne 
distinguée,  qui  n'est  jias  tirée  du  corps  de  la 
religion,  quoiqu'il  en  soit  général;  et  il 
se  pourrai!  faire  que  le  bienheureux  Augus- 
tin ayant  persuadé  à  ce  Rostaurus,  dont  nous 
avons  parlé,  de  donner  tous  ses  biens,  qui 
étaient  considérables,  à  cet  hôpital,  et  cet 
homme  ayant  ^oulu  se  consacrer  au  service 
des  pauvres,  on  l'aurait  par  reconnaissance 
fait  recleur  do  cet  hôpiial,  cl  qu'il  aurait 
voulu  recevoir  l'habit  des  hospitaliers  des 
mains  du  bienheureux  Augustin  Novelli. 

Lombardelli,  dans  la  ne  du  bienheureux 
Soror,  qui  est  le  véritable  fondateur  de  ces 
hospitaliiTS,  après  avoir  dit  qu'il  reçut  l'ha- 
bit des  mains  de  rarchevéque  de  Sienne,  de- 
mande grâce  au  lecteur,  et  le  prie  de  ne  le 
point  faire  passer  pour  un  monteur,  si  par 
hasard  il  lui  tombe  entre  les  mains  une  vie 
du  bienheureux  Soror  écrite  par  un  auteur 
anonyme,  qui  dit  que  ce  fut  le  bii  iiheurcux 
Augustin  Novelli  qui  lui  donna  1  habit.  Il  fait 
en  même  temps  remarquer  que  ces  deux 
bienheureux  n'étaient  point  contemporains, 
que  le  bienheureux  Soror  mourut  l'an  8'J8, 
et  que  le  bienheureux  Augustin  Novelli  vi- 
vait en  1.30G.  Il  ajoute  qu'il  est  vrai  que  le 
bienheureux  Augustin  donna  l'habit  et  le 
vole  à  une  sainte  femme,  nommée  Diéla,  qui 
demeurait  dans  cet  hôjital  au  service  dos 
femmes  malades.  Ainsi,  selon  cet  auteur,  ce 
serait  peut-être  le  bienheureux  Soror  qu'on 
aurait  voulu  représenter  dans  ce  tableau  re- 
cevant l'habit  des  mains  du  bienheureux 
.Vugustin  Njvclîi,  el  qui  aurait  donné  occa- 
sion a  cet  anonyme  auteur  de  la  vie  du  bien- 
heureux Soror  de  dire  qu'il  avait  reçu  l'ha- 
bit des  mains  du  bienlieurcu\  Augustin  No- 
velli, ce  qui  ne  peut  pas  éire.cl  il  n'y  a 
nulle  apparence  que  ce  dernier  ait  institué 
les  iiospitiiliers  de  Sienne,  à  qui  nous  don- 
nons a  plus  juste  titre  pour  fondateur  le 
bicnlieurc'ux  Soror. 

Il  naquit  .1  Sienne  le  25  mars  do  l'an  832, 
de  parents  qui  subsistaient  plutôt  du  travail 
de  leurs  mains  ()ue  des  biens  de  leur  pairi- 
nioine,  dont  ils  claierit  médiocrement  pour- 
vus. Ils  ne  laissèrent  pas  de  donner  de  si 
bonnes  instructions  à  leur  fils,  et  de  l'élever 
dans  des  scntiinenls  d'une  piéié  si  solide, 
qu'il [irés  leur  mort, se  vovunt  libre  de!<  soins 
qu'il  leur  iciiduil,  cl  des  secours  qu'il  leur 


procurait ,  il  se  dévoua  entièrement  au  ser- 
vice de  Dieu  dans  1rs  exercices  de  la  péni- 
tence. Pour  cet  effet  il  se  presciivil  un  genre 
de  vie  qu'il  ne  changea  que  par  raison  de 
conlormilé  lorsqu'il  eut  établi  la  congréga- 
tion dont  nous  allons  parler.  Il  portait  con- 
tinuellement le  cilicc,  jeîinait  trois  fois  la 
semaine  au  p.iin  et  à  l'eau,  et  les  autres 
jours  il  ne  prenait  que  des  v  iandes  couiiiiu- 
iies  cl  en  très-pe'it.-  quantité.  Je  ne  sais  ;i 
l'auteur  de  l'Histoire  des  Flagellants  ne  s'é- 
lèvera poini  contre  moi  si  je  dis  que  le  bien- 
heureux Soror,  pendant  une  heure  du  jour 
et  autant  de  la  nuit,  déchirait  son  corps  avec 
des  disciplines  armées  de  pointes  de  fer, 
pui>que  c'est  aller  contre  son  sentiment,  et 
donner  un  exemple  de  cet^e  sorte  de  mar- 
tyre dans  le  neuvième  sièc  e.  Mais  comme 
je  ne  parle  qu'après  Lombardelli,  qui  rap- 
porte ce  f.iit  dans  la  vie  du  bienheureux  So- 
ror, l'auteur  de  l'Uistoire  des  Flagellants 
pourra  le  lui  contester  s'il  le  veut,  et  je  passe 
aux  autres  morlincaiions  de  ce  bienheureux, 
qui  à  peine  donnait  à  son  corps  quelque  re- 
pos la  nuit,  et  le  peu  qu'il  lui  accordait  n'é- 
tait (|ue  sur  une  planche,  employant  lo 
reste  de  la  nuit  à  la  jirière  et  à  la  uiédilation. 
Il  se  levait  à  minuit  pour  aller  à  quelque 
porte  d'église  dans  laquelle  on  disait  mati- 
nes à  cette  heure-là.  Le  jour  il  assistait  à 
tous  les  oflices,  et  visitait  presque  toutes 
les  églises  de  la  ville  et  les  autres  lieux  du 
piété. 

Mais,  comme  Dieu  le  destinait  à  secourir 
les  pauvres,  il  lui  inspira  d'alord  l,i  pensée 
de  donner  un  asile  aux  pauvres  pèlerins, 
qui,  passant  à  Sienne  j  our  aller  à  Rome,  et 
n'y  ayant  puini  de  retraite  assurée,  étaient 
obliges  de  coucher  le  plus  touvent  dans  les 
rues.  Il  avait  une  petite  maison  jo  gnant  l'é- 
glise cathédrale,  qu'il  destina  pour  cette  oeu- 
vre de  charité,  eu  l.i  faisant  servir  d'hospice 
pour  ces  pauvres  pèlerins.  Il  les  invitait  à  y 
venir  loger,  il  leur  lavait  les  pieds,  leur  don- 
nait à  manger,  et  raccommodait  leurs  babil'. 
Ses  soins  ne  se  terminaient  pas  à  des  assis- 
tances simplcmenl  corporelles  ;  il  s'appliquait 
à  leur  procurer  le  salul  éternel,  en  leur  fa. - 
sant  des  instructions,  les  entretenant  de  cho- 
ses spirituelles,  et  les  consolant  dans  Icuis 
misères. 

Son  exemple,  joint  à  ses  exhortations, 
anima  tellement  les  personnes  charitables 
de  Sienne,  qu'il  y  en  eut  plusieurs  qui  vou- 
lurent contribuer  à  son  pieux  dessein.  Les 
uns  l'assistèrent  d'argent,  d'autres  lui  en- 
voyèrent des  vivres  en  abondance;  de  sorte 
que  par  celte  assistance  il  se  vil  en  étal  d'aug- 
menter sa  chambre  et  d'y  mettre  un  plus 
grand  nombre  de  lits.  Les  étrangers  qii 
avaient  ressenti  les  effets  de  sa  chanté  en 
passant  à  Sienne,  étant  de  retour  chez  eux, 
tirent  connaître  «c  siiint  lioinmc,  auquel  ou 
envoya  de  différents  endroits  de  grosses  som- 
mes, par  le  mojcii  desquelles  il  se  vit  eu 
élat  d'entreprendre  de  grands  bâtiments ^ 
afin  de  pouvoir  recevoir  un  plus  grand  nom- 
bre de  pauvres.  Pour  cet  effet  il  jela  les  fon- 
demeuls  de  l'hopiUl  de    Notre-Dame  délia 


m  ECU 

Scala  ou  de  l'Echelle,  qui  fut  ainsi  nommé  à 
cause  qu'en  creusant  la  terre  pour  faire  les 
fondements,  on  y  trou.va  trois  degrés  de  mar- 
bre que  l'on  crut  être  des  restes  d'un  temple 
qui  était  dédié  à  Minerve.  Son  hôpital  éiant 
achevé,  et  élant  ainsi  beaucoup  augmenté, 
sa  charilé  augmenta  aussi  en  même  temps. 
Niin  content  d'y  loger  les  pèlerins,  il  y  reçut 
encore  les  malades  de  la  ville  et  les  étran- 
gers ;  et  voulant  que  les  pauvres  prisonniers 
se  ressentissent  aussi  des  aumônes  qu'on  lui 
faisait,  il  leur  envoyait  à  manger  trois  fois 
la  semaine.  Sa  charité,  qii  n'avait  point  de 
bornes,  le  porta  encore  à  recevoir  les  en- 
fants exposés,  et,  par  le  moyen  des  grands 
legs  que  l'on  fit  à  son  hôpital,  il  se  trouva 
en  état  de  faire  apprendre  des  métiers  à  ces 
enfants,  afin  qu'ils  pussent  gagner  leur  vie: 
et  il  mariait  même  les  files.  Enfin  cet  hôpi- 
tal est  devenu  si  fameux  dans  la  suite,  qu'il 
a  présentement  plus  de  deux  cent  mille  li- 
vres de  revenu,  sans  les  aumônes,  qui  sont 
considérables. 

Le  bienheureux  Soror,  voyant  son  hôpital 
solidement  établi,  et  que  plusieurs  personnes 
qui  s'étaient  joiiHes  à  lui  pour  servir  les 
pauvres  voulaient  persévérer  le  reste  de  leur 
vie  dans  ce  saint  exercice  de  charité,  il  leur 
prescrivit  une  forme  d'habillement  pour  les 
distinguer  des  séculiers,  et  des  lèglements 
tant  pour  leur  manière  de  vivre  que  pour 
l'ordre  du  service  des  malades,  la  réception 
des  pèlerins  et  l'élection  des  officiers.  11  y 
avait  des  règles  qui  regardaient  le  recteur  eu 
particulier,  et  d'autres  qui  ne  regardaient 
que  les  frères.  11  y  en  avait  aussi  pour  les 
sœurs;  car,  comme  il  y  avait  daui  l'hôpital 
des  appartements  séparés  pour  les  femmes, 
elles  étaient  servies  par  des  personnes  de 
leur  sexe,  qui  étaient  habillées  de  même  que 
les  frères.  Ces  règles  furent  d'abord  approu- 
vées par  l'évêque  de  Sienne,  et  confirmées 
dans  la  suite,  longtemps  après  la  mort  du  fon- 
dateur, par  le  pape  Célestin  III,  l'an  1194-,  et 
par  plusieurs  de  ses  successeurs.  On  y  fit 
néanmoins  des  changements  en  différents 
temps,  selon  qu'on  le  jugea  à  propos  pour  le 
plus  grand  bien  de  l'Iiôpital.  Plusieurs  hôpi- 
taux d'Italie,  voyant  le  bon  ordre  qu'on  ob- 
servait dans  celui  de  Sirnne,  y  voulurent 
être  soumis  et  le  reconnaître  pour  leur  chef. 
Le  recteur  de  Sienne  envoyait  des  hospita- 
liers dans  ces  hôpitaux,  qu'il  retirait  quand 
il  le  jugeait  à  propos;  et  il  y  faisait  la  visite 
comme  général  et  nommait  les  recteurs.  11 
avait  aussi  voix  à  l'élection  de  l'évéque,  et 
le  droit  de  patronage  dans  plusieurs  églises. 
Les  principaux  hôpitaux  qui  dépendaient  de 
celui  de  Sienne  étaient  ceux  de  Florence, 
de  Saint-Geminien  ,  d'Aquapendi  nte  ,  de 
Rieii,deTodi,deSan-Miniato,  de  Poggibonzi, 
de  Saint-Savinit,  de  Barberino,  et  de  Caslel 
délia  Pieve;  mais  dans  la  suite  ils  se  sont 
soustraits  de  l'obéissance  du  recteur  de 
Sienne,  et  même  tous  ces  hospitaliers,  qui 
eurent  dans  la  suite  grand  besoin  de  réforme, 
à  laquelle  ils  ne  voulurent  point  entendre. 


ECO 


»22 


ont  été  entièrement  supprimés  vers  le  milieu 
du  xvr  siècle.  Quant  au  bienheureux  Soror, 
voyant  que  l'hôpital  de  Sienne  augmentait  en 
revenus,  il  ne  voulut  faire  aucune  dépense 
sans  l'avis  de  deux  gentilshommes  de  la  ville, 
auxquels  il  fit  donner  le  nom  de  Sages  de 
Notre-Dame  delta  Scala  ;  m:n<  dans  la  suite 
le  nombre  de  ces  gentilshommes  a  été  aug- 
menté, et  on  en  élit  tous  les  ans  huit  le  pre- 
mier jour  de  janvier,  qui  doivent  prendre 
connaissance  de  toutes  le  recettes  et  de  tou- 
tes les  dépenses  de  cet  hôpital.  Le  bienheu- 
reux Soror  y  mourut  le  15  août  de  l'an  898. 
L'on  fut  quatre  jours  sans  le  pouvoir  mettre 
en  terre,  à  cause  de  la  grande  foule  du  peu- 
ple qui  ne  le  voulait  pointquitter.  On  le  leva 
de  terre  l'an  1192  pour  le  mettre  dans  la  sa- 
cristie, et  son  corps  fut  trouvé  tout  entier  et 
sans  corruption. 

L'habillement  de  ces  hospitaliers  consis- 
tait en  une  soutane  noire  comme  celle  des 
ecdcsiastiques,  sur  laquelle  ils  mettaient  une 
chape  ou  manteau,  et  par-dessus  cette  chape 
une  espèce  decamail,sur  lequel  il  y  avait  du 
côté  gauche  une  petite  échelle  à  trois  éche- 
lons surmontée  d'une  croix  en  broderie  de 
soie  jaune,  et  pour  couvrir  leur  têie  ils 
avaient  un  béguin  de  toile  noire  qu'ils  atta- 
chaient avec  des  cordons  sous  le  menton  ;  et 
sur  ce  béguin  ils  portai«!nt  un  bonnet  rond 
large  d'un  palme  et  demi  replié  de  la  lar- 
geur de  quatre  doigts  (1),  et  ils  n'ôtaient  ja- 
mais le  béguin  qu'en  présence  du  pape. 
L'habit  du  recteur  n'était  pas  différent  de 
celui  des  hospitaliers,  sinon  que  dans  certai- 
nes fêtes  et  cérémonies,  sa  chipe  et  son  bon- 
net étaient  de  velours,  et  l'échelle  en  brode- 
rie d'or;  mais  je  crois  que  la  vanité  y  avait 
fait  ajouter  quelque  chose  de  plus  que  ce  que 
le  bienheureux  Soror  avait  or.lonné. 

Voyez  Bolland.  tom.  IV  Mail.  Lombardelli, 
Vit.  dell.  B.  Soror.  ïomm  isi  et  Orlando  Ma- 
lavolti,  Hist.  de  Sienna.  Barbosa,  de  Jur. 
ecclcsiastico  lib.  i,  cap.  41.  Ascag./fambur. 
de  Jur.  Abhal.  tom.  11,  disp.  2i.  Crusen,  Mo- 
vastic.  August.  Luigi  Tortlli,  Secoli  Agosti- 
vinni  loin.  V  ;  et  Philip.  Bonanni,  Calalog. 
Ord.  Relig.  tom.  I,  p.  111. 

ECOLES  CHRÉTIENNES  kt  de  l'ENFANT 
JÉSUS  (Frères  et  Soeurs  des). 

Le  défaut  d'élucalion  et  d'instruction  des 
enfants  de  l'un  et  de  l'autre  sexe  ayant  tou- 
jours été  la  source  de  plusieurs  (léré«lements 
qu'on  voit  régner  au  milieu  du  christianisme. 
Dieu  a  suscité  de  temps  en  temps  de  saints 
fondateurs  et  autres  personnes  pieuses,  qui, 
poussés  d'un  saint  zèle  pour  la  gloire  de  sa 
divine  majesté,  ont  tâché  de  remédier  à  ces 
dérèglements  en  établissant  des  congrégations 
de  l'un  et  de  l'autre  sexe,  qui,  sous  différents 
noms  et  des  règles  p;irticulières,  ont  pour  fin 
principale  l'instruction  de  la  jeunesse.  Telle 
est  celle  des  Ecoles  Chrétienues  et  charita- 
bles de  l'Enfant  Jésus,  qui  ne  diffère  des 
précédentes  qu'en  ce  qu'elle  renferme  sous 


(1)  Vo:y.,  à  ialin  Juvol.,  n"  19. 


125 


DICTIONNAIRi;  DES  ORDRES  REUGIELX. 


tu 


un  même  nom  et  sous  une  même  règle  des 
personnes  de  l'un  et  de  l'auire  sexe,  dont 
les  uns  sont  dcsliiu's  pour  enseigner  les  gar- 
çons, et  les  autres  pour  enseigner  les  filles. 
I.e  P.  Nicolas  Barré,  religieux  de  l'ordre  des 
Minimes,  qu'ils  reconnaissent  pour  leur  in- 
iiituteur,nai|uitàAmiensvers  l'.in  lG21,depa- 
renls  lionuélesel  fort  vertueux, qui  n'omirent 
rien  pour  lui  donner  une  bonne  éducalion. 
Loriqu'il  fut  en  âge  de  choisir  un  étal  de  vie 
dans  lequel  il  pût  ser\ir  Uieu  comme  il  sou- 
haitait, il  entra  dans  l'ordre  des  Minimes,  et 
y  fil  ses  vœux  l'an  1GV2,  âgé  de  21  ans.  Son 
principal  caradèic  élail  de  retirer  les  plus 
grands  pécheurs  dos  abîmes  du  désordre  ,  cl 
de  porter  les  âmes  déjà  gagnées  à  Dieu  et 
avancées  dans  la  piélé  à  de  plus  hauts  de- 
grés de  perfeclion.  Ce  fut  ce  zèle  qu'il  avait 
de  gagner  des  âmes  à  Dieu  qui  le  porta  à 
unir  ensemble  plusieurs  filles  vertueuses 
qui  s'employassent  à  l'instruction  des  per- 
sonnes de  leur  sexe.  Le  premier  établisse- 
ment s'en  fit  à  Paiislan  lG78,et  le  P.  Barré, 
voyant  le  succès  de  cet  établissement ,  enga- 
gea aussi  des  maîtres  d'école  à  faire  une 
pareillesoi  iélé.riui  fut  commencée  l'an  1681. 

Les  uns  et  les  autres  vivent  en  cominu- 
naulé,  sans  faire  de  >œiix,  sous  la  conduite 
d'un  supérieur  ou  d'une  supérieure,  auxquels 
ils  sonl  obligés  d'obéir.  Selon  l'esprit  de  leur 
institut,  ils  doivent  travailler  sans  relâche  à 
leur  propre  sanctilicalion,  par  lacquisiùon 
de  toutes  les  vertus.  Leur  eiii])loi  princi|ial 
est  de  tenir  les  écoles  pour  des  enfants  pau- 
vres et  indi;;enls,  et  d'instruire  des  princi- 
paux mystères  de  la  foi  les  grandes  person- 
nes auxquelles  Dieu  inspirera  d'avoir  re- 
cours à  eux  ,  cl  cela  sans  aucune  distinction 
ni  acception  de  personnes.  Il  n'est  pas  néan- 
moins permis  aux  Frèrcsde  recevoir  en  leurs 
écoles  des  fil  les, de  quelque  âge  qu'elles  soient, 
ni  aux  Sœurs  des  garçons,  si  jeunes  qu'ils 
puissent  être.  Les  uns  et  les  autres  ne  peu- 
vent pas  non  plus  aller  dans  les  maisons  pour 
enseigner  à  lire,  écrire  ou  travailler,  sous 
ciuelque  prétexte  que  ce  soit.  Ils  doivent  être 
toujours  dispdscs  au  premier  ordre  de  chan- 
ger de  demeure  pour  aller  faire  l'instruction 
aux  lieux  et  aux  personnes  que  les  supé- 
rieurs jugeront  à  propos,  imiianl  en  cela 
lexeinple  de  Nolrc-Seigneur  Jésus-Christ, 
qui  elant  sur  la  terre  enseignait  dans  les 
bourgs  el  villages  aussi  bien  que  dans  les 
villes,  allant  pour  cet  elTel  partout  où  la 
gloire  de  son  l'ère  l'aiipelail. 

Ces  inslruriions  se  doivent  l'aire  graluile- 
incnl,  en  .soric  que  l.int  les  Frères  que  les 
So'urs  ne  doivent  rien  recevoir  de  ce  qui  leur 
sera  oITerl  par  les  parents  des  enfants  qu'ils 
instruisent,  soii  ri(  lies  soit  iiauvres;  el  à  plus 
forte  raison  leur  rien  deiiiamler,  ni  directe- 
nienl  ni  inilireclemenl.  Les  d manches  el  fê- 
tes les  Frères  font  des  instructions  publiques 
et  des  conférences  cliréliennes  pour  les  hom- 
mes el  les  «arçons  âgés  qui  y  veulent  venir, 
el  les  Sœurs  en  font  aussi  pour  les  filles  el 
les  femmes.  Quoiqu'ils  ne  fassent  pninl  vœu 
d  obéissance  ni  de  pau\relé,  ils  sont  néan- 
moins dans   une    si   grande  dépcnlancc  de 


leurs  supérieurs,  qu'ils  ne  peuvent  rieu  avoir 
à  leur  insu  ni  disposer  de  rien  sans  leur  vo- 
lonté ni  leur  permission.  S'il  y  a  des  écoles 
dans  la  ville  autres  (|ue  celles  qui  sonl  dans 
la  maison,  et  qui  dépendent  de  l'inslitul,  le 
supérieur  des  Frères  doit  visiter  celles  des 
garçons,  et  la  supérieure  des  Sœurs  celles 
des  ûlles,  lous  les  quinze  jours  ;  el,  s'il  y  en 
a  auprès  des  villes,  ils  sonl  obligés  d'y  aller 
au  moins  une  fois  lous  les  trois  mois,  et  y 
demeurer  loul  le  lenips  qui  sera  nécessaire 
pour  examiner  de  quelle  manière  les  maîtres 
et  mairesses  se  comporlenl,  el  l'édification 
que  le  peuple  en  retire.  Pour  ce  qui  est  des 
écoles  les  plus  éloignées  ,  ils  ne  sont  obli^iés 
d'y  aller  qu'ime  fois  l'année.  Ces  maisons 
des  Ecoles  charilablcs  sont  sous  la  protec- 
tion du  saint  Enfant  Jésus  et  de  la  sainte 
Vierge  sa  mère  :  c'est  pourquoi  leurs  fêles 
principales  sonl  celles  de  la  Nalivitô  d(i 
Nolre-Seigncur,  la  Pentecôte  et  celle  de  la 
Présculalion  de  la  sainte  A'ierge,  aux(iucls 
jours  les  Frères  el  Sœurs  doivent  faire  une 
proleslalion  nouvelle  de  ser»ir  Dieu  sincère- 
ment, de  se  rendre  dignes  de  lui  apparienir, 
et  de  suivre  sa  conduite  en  telle  manière 
qu'il  voudra,  el  qu'il  leur  sera  signifié  par 
leurs  supérieurs.  Ils  doivent  réciter  en  com- 
munions Icsdimanches  les  lilanicsdes  saints, 
les  jeudis  celles  du  saint  Nom  de  Jésus,  el  le 
samedi  celles  do  la  Vierge,  donl  ils  doivent 
réciter  aussi  l'office  lous  les  jours.  Tous  les 
ans  ils  font  une  retraite  de  dix  jours,  ils 
prennent  chacun  à  l'alternalive  un  jour  de 
leiraile,  depuis  le  premier  diman-  lie  de  l'A- 
veut,  jusqu'à  Noël,  et  depuis  le  dimaudie  du 
la  Passion  jusqu'à  Pâques,  el  en  quelques 
autres  jours  de  l'année.  Ils  ne  peuvent  faire 
aucune  mortification  ni  austérité  de  corps, 
sous  quelque  piélexie  que  ce  soit,  sans  lo 
consentement  exprès  du  directeur  général  , 
mais  au  jour  de  leur  association,  il  leur  esl 
permis  de  faire  quoique  dévotion  extraordi- 
naire, afin  de  renouveler  l'esprit  avec  lequel 
ils  se  sont  consacrés  ce  jour-là  aux  empli  js 
qui  regardent  uiii(]uciiieiit  la  gloire  de  Dieu 
el  le  service  du  prochain  ;  et  deux  fois  la  se- 
maine ils  reconnaissent  leurs  fautes  en  pré- 
sence de  toute  la  communauté  assemblée. 
Tels  sont  les  principaux  règlements  que  leur 
a  prescrilg  le  P.  Barré  ,  leur  insliluleur, 
qui  mourut  à  Paris  le  31  mai  1G86,  âgé  de 
lio  ans. 

Il  y  a  déjà  en  France  plusieurs  maisons 
lant  d'hommes  que  de  filles  de  ces  Ecoles 
chréliennes  et  cliaritabL  s.  La  principale  do 
celles  des  Frères  esl  à  Paris  au  faubourg 
Saint  (îennain,  el  ils  en  ont  en  plusieurs  pro- 
vinces, comme  le  l'oitoo,  l'Auvergne,  la  Lor- 
raine, la  Champagne,  la  Picardie,  la  Bour- 
gogne, le  Boulonnais  il  le  Berri.  Ce  qui  esl 
lionr.rablc  pour  les  Sœurs, c'i  st  que  madame 
de  Mainlcnon  en  choisit  quel(|nes-unes  [lour 
avoir  soin  de  l'éducation  des  jeunes  deinoi- 
selles  qu'on  élève  à  Saint-Cjr,  lorsque  le  roi 
Louis  \1V  fit  cet  élalilissemenl,  l'an  1(18(5. 
Les  Frères  ont  pour  habillement  une  sou- 
tane et  une  houppelande,  avec  des  manclirs 
pondantes,  le  tout  d'cloiïe  noire  et  gross;c- 


!2§ 


ECO 


ECO 


126 


re(l).  Los  Sœurs  sont  vêtues  plus  propre- 
ment, mais  moileslement,  à  peu  près  comme 
les  F. Iles  de  riliiion  Chrélicnne. 

Hermnnt,  Jlist.  des  Ordres  religieiiT,  lom. 
]V  ;  et  les  Statuts  et  Règlements  des  Ecoles 
Chrétiennes  et  tharitahles  ,  imprimés  à  Paris 
l'an  1G85. 

ÉCOLES  PIEUSES  ou  ÉCOLES  PIES  (Clkrcs 

RÉGULIERS    PAUVBES   DE    LA  MÈHE    DE  DlEU, 
DITS  des). 

De  lu  congrégation  des  Clercs  Réguliers  Pau- 
vres de  la  Mère  de  Dieu  des  Ecoles  pieuses, 
avec  la  vie  du  vénérable  P.  Joseph  Cusa- 
lunz,  leur  fondateur. 

Entre  les  éloges  que  les  souverains  pon- 
tifes ont  donnés  à  la  congrégation  des  Clercs 
Réguliers  Pauvres  de  la  Mère  de  Dieu,  ils 
l'ont  appelée  un  institut  pieux  et  ncomman- 
dable,  un  inslilul  digne  de  louanp:es,  un 
institut  fort  utile  à  la  république  chiéli^nne. 
et  un  ouvrage  d'une  chiriié  éprouvée  et 
d'une  éducation  rarf;iite.  Et  l'ordre  de  Saint- 
Dominique,  pour  montrer  l'estime  qu'il  fai- 
sait aussi  de  cet  e  congrégation,  ordonna, 
par  un  décret  du  chapitre  général  de  l'an 
1G86,  à  tous  les  provinciaux  de  l'ordr-,  d'avoir 
beaucoup  de  ri'>pccl  et  de  vénération  pour 
les  Clercs  Réguliers  de  celle  congrégation,  et 
d'en  procurer  autant  qu'ils  pourraient  le 
progrès  et  l'avanceinent,  ce  que  firent  aussi 
les  religieux  conventuels  de  l'ordre  de  Saint- 
François  ,  dans  leur  chapitre  général  de 
l'an  1695. 

Joseph  Casalanz,  fondateur  de  ces  Clercs 
Réguliers  des  Ecoles  pieuses,  naquit  à  Pé- 
ralte  de  la  Sal  au  royaume  d'Aragon,  le  11 
septembre  1556,  de  dam  Pierre  Cas.ilanz  el 
de  Marie  Gaston,  tous  deux  également  no- 
bles ,  alliés  aux  premières  maisons  du 
royaume,  et  qui  joignaient  encore  à  leur 
noblesse  beaucoup  de  piété.  11  recul  îiu 
baptême  le  nom  de  Joseph,  et  lit  paraître 
dès  ses  plus  faibles  années  les  fruits  de  la 
bonne  éducation  ((u'il  avait  reçue  de  ses  pa- 
rents. Etant  (larvenu  à  un  âge  plus  avancé, 
il  fut  envoyé  aux  écoles  pour  y  apprendre 
les  lettres  humaines,  cl  ap.ès  avoir  fini  ses 
humanités  il  fil  ses  éludes  de  philosophie  el 
de  droit  dans  l'université  de  Lélida,  comme 
la  plus  proche  de  Péialte,  et  qui  n'en  était 
éloignée  que  de  six  lieues.  11  alla  ensuite  à 
Valence  pour  y  faire  son  cours  de  théologie  ; 
mais  il  ne  demeura  pas  lon;;temps  dans  celle 
université,  car  une  dame  de  considération 
chez  laquelle  il  allait,  ayant  conçu  pour  lui 
un  amour  déshonnèle,et  ayant  voulu  donner 
atteinte  à  sa  chasteté,  il  abandonna  Valencs 
pour  éviter  ses  poursuites,  et  alla  continuer 
sa  lhéolo;^ie  dans  l'université  d'AUala  d'Hcn- 
narés,  où  il  reçut  le  bonnet  de  docteur. 

Dans  le  temps  qu'il  étudiait  dans  cette 
université, son  frère  aine  mourut,  après  avoir 
vécu  trois  ans  dans  le  mariage  sans  laisser 
d'enfants,  ce  qui  avait  porté  son  père  à  le 
solliciter  de  revenir  à  Péralle,  afin  de  l'enga- 


ger dans  le  mariage,  le  regardant  comme  le 
soutien  de  sa  famille,  étant  le  seul  enfant 
mAle  qui  lui  restât.  Mais  Joseph  Casalanz, 
(|ui  avait  bien  d'autres  pensées  el  qui  ne 
songeait  qu'à  se  donner  à  Dieu,  appréhen- 
dant que  son  père  ne  le  violentât  à  suivre 
ses  volontés,  auxquelles  il  avait  toujours  élé 
soumis,  ne  revint  point  à  Péralle.  Après 
avoir  pris  ses  degrés  dans  l'université  d'Al- 
cala,  il  alla  à  Jacca,  où  il  demeura  pendant 
deux  ans  avec  l'évêqiie  de  celle  ville,  dom 
Gaspard  Jean  de  la  Figuera,  en  qualité  de 
son  aide  d'étude.  Comme  ce  prélat,  qui  avait 
enseigné  dans  l'université  de  Sal.imanque, 
était  un  des  plus  savanis  de  l'Espagne,  Ca- 
salanz profila  beaucoup  de  sa  conversation  ; 
il  aurait  même  souhai'é  d'  meurer  plus  long- 
temps avec  lui,  mais  il  ne  put  enfin  résister 
aux  solliiiiaiions  de  son  père,  qui  le  voulait 
avoir  auprès  de  lui. 

Il  revint  donc  à  Péralte;  mais  il  demeura 
toujours  constant  dans  la  résolulion  qu'il 
avait  prise  de  ne  point  s'engager  dans  le 
mariage.  Son  père  lui  en  faisait  tous  les 
jours  de  nouvelles  propositions;  mais  il  les 
éludait  par  les  difficultés  qu'il  faisait  naître 
sur  les  partis  qui  se  présentaient,  es];érant 
qu'à  la  fin  il  pourrait  obtenir  le  ronsente- 
nient  de  son  père  pour  prendre  l'état  ecclé- 
siastique. Pour  cet  effet  il  se  recommandait 
jour  et  nuit  à  la  sainte  Vierge,  qu'il  avait 
prise  pour  son  avocate  auprès  de  Dieu,  afin 
qu'il  lui  plût  de  loucher  le  cœur  de  son 
père  :  il  ajouta  à  ses  prières  el  à  ses  oraisons 
les  jeûnes,  les  veilles  el  les  austérités,  afin  do 
pouvoir  plus  facilement  obtenir  de  Dieu  celle 
grâce,  qui  lui  fut  enfin  accorilée  ;  car  il 
tomba  dangereusement  malade,  el  se  voyant 
abandonné  des  médecins,  il  pria  son  père  de 
lui  permettre  de  recourir  aux  remèdes  di- 
vins, puisque  les  remèdes  humains  étaient 
inutiles.  Son  père,  les  larmes  aux  yeux,  y 
consentit,  el  dans  le  même  temps  Casalanz 
fit  vœu  à  Dien  de  se  faire  prêtre  s'il  lui  ren- 
dait la  santé.  Comme  Dieu  le  destinait  pour 
êlre  le  fondateur  d'une  congrégation  reli- 
gieuse, il  lui  accorda  la  santé  qu'il  deman- 
dait ;  car  à  peine  eut-il  fait  son  vœu,  qu'il 
commença  à  se  mieux  porter,  el,  ayant  en- 
lièrement  recouvré  ses  forces,  il  se  mil  en 
éial  d'exécuter  ce  vœu.  11  recul  les  quatre 
mineurs  el  le  sous-diaconat  au  mois  de  dé- 
cembre 1582.  Il  prit  le  diaconat  le  jour  du 
samedi  saint  de  l'année  suivante,  et  au  mois 
de  décembre  de  la  même  année  il  fut  fait 
prèlre. 

Il  ne  se  vil  pas  plutôt  revêtu  de  la  qualité 
de  ministre  du  Seigneur,  qu'il  redoubia  sou 
zèle  et  sa  ferveur  pour  son  service,  el,  fai- 
sant réllexion  que  la  dignité  du  sacerdoce 
demandait  en  lui  une  plus  grande  perfecliou, 
il  s'étudiait  de  joindre  une  vie  sainte  à  la 
sainteté  de  son  minisière,  el  il  célébrait  tous 
les  jours  la  sainte  messe  avec  beaucoup  de 
dévotion.  La  réputation  de  sa  verlu  s'étant 
bientôt  répandue,  l'cvêque  de  Lérida  le  vou- 
lut avoir  auprès  do  lui  ;  il  le  prit  pour  sou 


(1^  Vei/.,i  la  lin  du  vol.,  n*  20. 


127 


DICTIONNAIHE  DES  ORDRES  RELIGirUX. 


1?8 


confesseur,  et  le  fit  son  Ihéologien  et  son 
examinateur  synodal.  Pou  de  temps  après,  ce 
prclitl  ayani  éié  commis  par  le  roi  d'Kspii};ne 
pour  visiter  le  monastère  de  Notre-Dame  de 
Monl-Scrrat  en  vertu  d'un  bref  du  pape, 
prit  avec  lui  Casalan;:  pour  seirèliiire  de  la 
visite.  L'évèquc  de  Lérida  éianl  mort  dans 
le  cours  de  cette  visite,  on  lui  substitua 
l'évèque  de  Viih,  qui  pria  Casalanz  de  con- 
tinuer la  même  fonction  de  secrétaire;  mais 
il  s'en  excusa  et  retourna  à  Pèralte,  où  il  ne 
fil  pas  grand  séjour;  car  dom  André  Capri- 
plia  ,  évèque  d'L'rgcl,  non-seulemi'nt  lui 
donna  la  cure  d'Ortoneda,  mais  il  lui  donna 
encore  la  charge  d'official  dans  l'èleiidue  de 
Trcmp,  qui  comprenait  environ  trois  cents 
buur^'s  ou  villages.  Il  s'acquitta  de  cet  emploi 
pendant  l'espace  de  huit  ans;  mais  se  sen- 
tant inspiré  d'aller  à  Rome,  il  remit  son  bé- 
néfice entre  les  mains  de  son  évèque  avec 
l'emploi  qu'il  lui  avait  confié,  et  partit  pour 
aller  à  Rome,  oij  il  arriva  au  commencement 
(lu. mois  de  mai  lo92.  Il  y  visita  avec  une 
dévotion  extraordinaire  les  sépulcres  des 
saints  maityrs.  Pendant  quinze  ans  il  alla 
tous  les  jours  aux  stations  des  sept  églises; 
et  lorsque  quelques  affaires  le  détournaient 
de  cet  exercice  de  dévotion  pendant  le  jour, 
il  s'en  acquittait  pendant  la  nuit. 

A  peine  fut-il  arrivé  à  Rome,  qu'il  entra 
chez  le  cardinal  .Marc-.\ntoine  (iolomnc,  en 
qualité  de  son  théologien.  Ce  prélat  avait 
une  si  grande  vénération  pour  sa  piété  et  sa 
vertu,  qu'il  le  donna  pour  directeur  à  ses 
neveux,  fils  du  connétable  Colomne,  qui  ne 
sortaient  jamais  du  palais  sans  avoir  baisé 
la  main  de  ce  saint  homme.  Tous  les  same- 
dis il  faisait  une  exhortation  aux  domesti- 
ques de  ce  cardinal.  Il  avait  ses  heures  ré- 
glées pour  tous  SCS  exercices  sjiirituels,  il 
portait  pres(iue  continuellemenl  un  rude  ci- 
lice,  et  il  jeûnait  plusieurs  jours  de  la  se- 
maine au  pain  et  à  l'eau.  On  pouvait  même 
dire  que  ses  jeiiiics  étaient  continuels,  car 
les  jours  qu'il  ne  jeûnait  pas  au  pain  et  à 
l'eau,  il  ne  faisait  qu'un  repas  le  matin,  et 
il  ne  prenait  rien  le  soir,  ce  qu'il  a  continué 
de  faire  pendant  quarante  ans,  et  ce  ne  fut 
que  sur  la  lin  de  ses  jours  ([u'étanl  fort  in- 
firme et  caduc,  les  religieux  de  sa  congré- 
gation le  prièrent  de  modérer  ses  grandes 
austérités. 

Deux  ans  après  son  arrivée  à  Rome,  l'an 
loi)'»,  on  iui  conféra  uncanoiiical  dans  l'église 
catlié  Irale  de  lî.uji.islio  au  royaume  d'Ara- 
gon, qui  était  la  ville  la  plus  voisine  du  lieu 
de  sa  naissance  ;  mais,  charmé  des  exercices 
de  piété  qui  se  pratiquaient  à  Rome,  il  ne 
voulut  point  quitter  cette  ville,  cl  il  résigna 
son  bénéfiie  au  docteur  Pierre  Navarre,  lise 
fil  inscrire  dans  plusieurs  confraternités, 
coniine  dans  celles  di  s  Douzc-Apùlres,  des 
Stigmates  de  saint  François,  du  Suffrage  cl 
de  la  Sainte-Trinité,  observant  exactement 
les  exercices  prescrits  par  les  statuts  de  ces 
compagnies. 

Il  entra  aussi  parmi  les  Confrères  de  la 
Doctrine  Chrétienne,  et.  .onlormcment  aux 
coiutitulions   de  telle  compagnie,  il   allait 


avec  beaucoup  de  charité  dans  toutes  les 
places  de  la  vi  le  pour  enseigner  la  doctrine 
chrétienne  aux  gens  de  la  campagne  qui  s'y 
trouvaient,  et  il  faisait  assembler  les  enfants 
dans  les  égliacs  pour  leur  faire  les  mérm's 
instructions.  Ce  fut  dans  ce  saint  exercice 
qu'il  connut  par  ex|iérience  la  nécessité 
qu'il  y  avait  d'apprendre  de  bonne  heure  aux 
jeunes  enfants  les  principes  du  christia- 
iiisioe.  Il  pensa  dès  lors  aux  moyens  de  le 
faire  avec  plus  de  fruit,  et  ce  qui  le  Cl  ré- 
s  ludre  à  s'y  employer  enlièremenl  fut 
qu'ayant  trouvé  [lar  les  rues  plusieurs  en- 
fants qui  ne  s'amusaient  qu'à  jouer  ci  di- 
saient beaucoup  de  paroles  malhonnêtes,  il 
s'arri'ta  à  les  considérer.  Il  fut  \i\cment 
touché  de  voir  le  peu  d'éducation  qu'on  leur 
donnait,  et  pour  lors  ces  paroles  du  prophète- 
roi  lui  vinrent  tout  d'un  coup  dans  la  pen- 
sée :  C'est  à  vous  que  If  soin  du  iinuvre  est 
réservé,  et  vous  serez  le  protecteur  de  rnrphe~ 
lin.  Il  y  fil  réilesion,  il  crui  que  Dieu  les  lui 
avait  suggérées  afin  qu'il  prit  le  soin  d'in- 
struire ces  enfants,  et  il  chercha  dès  lors  les 
Il  oyens  de  leur  donner  une  boom'  éducation, 
afin  ()u°étant  élevés  dès  bur^  plus  tendres 
années  dans  la  crainte  de  Dieu  et  les  maximes 
du  christianisme,  ils  ne  pussent  pas  dans  la 
suite  ignorer  les  choses  ilc  leur  silul.  Il  en 
fit  la  pro|)osition  à  plusieurs  personnes  ; 
ni.iis  lous  les  moyens  qu'il  prit  n'ayant  jtas 
réussi,  et  ces  personnes  ne  l'ayant  fias  voulu 
seconder,  il  entreprit  de  !e  faire  seul.  11  loua 
pour  cet  elTel,  d'Antoine  liaudini,  curé  ilo 
Sainte-Dorothée  in  Ti  anslevere  proche  la  porte 
Sitlimania,  queb|ues  chambres  où  il  com- 
nieiiça  à  rassembler  tous  les  enfants  de  ce 
quartier, et  par  charité  il  leur  apprenait  à  lire 
et  à  écrire,  l'arithmétique,  et  leur  fournissait 
aussi  gratuitement  des  livres,  de  l'encre  et 
du  papier.  Tous  les  jours  il  leur  enseignait  la 
doctrine  chrétienne,  leur  faisait  des  exhor- 
tations spirituelles,  et  quoiqu'il  demeurât 
encore  au  palais  du  connétable  Colomne, 
(lui  est  fort  éloitrué  de  Sainte-Dorothée,  il  ne 
laissait  pas  d'jiller  deux  fois  par  jour  à  ses 
écoles,  où  le  nombre  des  enfants  s'augmcn- 
tant,  et  ne  pouvant  suffire  seul  à  leur  in- 
struction, il  s'associa  ()uelqnes  prêtres  qui 
étaient  aussi  Confrères  de  la  Doctrine  (Chré- 
tienne, i]ui  l'aidcrenl  dans  son  entreprise. 

L'ordre  qu'il  avait  établi  dans  ses  é.  oies 
lui  donna  une  si  grande  réputation ,  que 
plusieurs  familles  de  la  ville  y  envoyèrent 
aussi  leurs  enfants,  ce  qui  fil  résoudre  (Ca- 
salanz de  les  Iranslèri'r  dans  la  ville  pour  la 
plus  grande  commodité  de  ceux  ()ui  y  vou- 
draient venir,  ce  qu'il  fit  au  cominenccnient 
de  l'année  s  liiite  1000,  ayant  loué  pour  ci  l 
effet  une  grande  maison  proche  le  lieu  (|u'imi 
appelait  le  Paradis.  11  quitta  pour  lors  le  pa- 
lais Colomne  pour  venir  demeurer  dans  cette 
nouvelle  maison  avec  les  maîtresqui  s'étaient 
joints  à  lui.  Deux  ans  après  ils  la  quiltèreul 
pour  en  prendre  une  autre  à  louage,  proche 
de  Saint -André  delta  V(i//c  :  là  il  commença 
à  vivre  en  commun  avec  ceux  qui  s'étaient 
joints  à  lui,  et  il  partagea  cette  école  do 
[liété  en  p'usicurs  cÎjsscs. 


189  ECO 

Il  arriva  à  Casalanz  un  accident  dans  celte 
maison  :  c.ir  voulant  allacher  une  clorhe 
dans  un  lieu  assez  élevé  de  la  cour,  il  tomba 
de  l'échelle  où  il  élail  monté,  et  se  rompit 
uneja  nbe.  11  fut  en  danger  de  perdre  la  vie, 
à  laquelle  il  n'ava  l  aucune  attache,  et  qu'il 
aurait  quittée  sans  beaucoup  de  peine.  H  n'y 
avait  que  l'apptéhi'nsinn  que  son  ouvrage 
ne  vînt  à  manquer  s'il  mourait,  qui  lui  cau- 
sait de  l'inquiétude.  Mais  Dieu  pour  le  con- 
soler lui  envoya  de  nouveaux  ouvriers,  dont 
l'un  fut  le  P.  Gaspard  Dragonelli,  qui  avait 
déjà  tenu  des  éi^oles  pendant  quarante  ans, 
et  qui  persévéra  dans  la  congrégaiion  jus- 
qu'en l'an  1628,  qu'il  mourut  à  l'âge  de  cent 
vingt  ans,  dans  une  grande  réputation  de 
siiiiteté  ;  et  l'autre  fut  le  P.  Gellius  Gheilini, 
noble  Viceniiii. 

Casalanz  ayant  recouvré  la  santé  au  bout 
de  quelques  mois.  Dieu  le  voulut  consoler 
de  nouveau.  M.  Vestrio,  prélat  de  la  cour 
romaine,  qui  lui  avait  loué  sa  maison  pour 
servir  d'écoles,  assistait  souvent  aux  exer- 
cices qui  s'y  faisaient,  et  fut  si  content  du 
bon  ordre  qu'on  y  observait,  qu'il  en  parla 
au  pape  Clément  VUI,  qui  fit  venir  le  P.  Ca- 
salanz pour  être  instruit  par  lui-uiéme  de 
quelle  manière  les  maîtres  se  comportaient 
dans  les  instructions  qu'ils  faisaient  aux  en- 
fants. Ce  |)onlife,  conicnt  des  réponses  du 
fondateur,  l'exhorta  à  persévérer;  et,  afin 
de  l'animer  à  poursuivre  son  entreprise,  il 
promit  d'iillcr  lui-même  visiter  ces  écoles 
pieuses,  et  ordonna  que  l'on  donnât  tous  les 
ans  deux  cciits  ccus  pour  le  louage  de  celte 
maison. 

Celle  libéralité  du  pape,  jointe  au  bon  ac- 
cueil qu'il  avait  fait  à  nuire  saint  fondateur, 
donna  de  la  jalousie  aux  maîtres  d'école  de 
la  ville.  Ils  décrièrent  Casalanz  auprès  de 
ce  ponlife,  et  ils  lui  firent  entendre  que  les 
choses  n'étaient  pas  comme  on  les  avait  ex- 
posées à  Sa  Sainteté,  ce  qui  porta  le  pape  à 
nommer  les  cardinaux  Anioniani  et  Baro- 
nias  pour  faire  la  visite  des  écoles  de  piété. 
Ces  cardinaux  n'y  ay^int  trouvé  que  des  su- 
jets d'édification,  le  pape  de  vive  voix  ap- 
prouva ces  écoles  et  les  prit  sous  sa  protec- 
tion. Après  la  mort  de  Clément  VIII,  Pau!  V 
leur  donna  pour  protecteur  le  cardinal  de 
Torres,  et  ce  prélat  ét;inl  mort,  il  lui  substi- 
tua le  cardinal  Giustiniani.  , 

Les  écoles  pieuses  augmentant  de  jour  en 
jour  en  écoliers,  et  la  maison  que  (^,asalanz 
avait  prise  à  lou;ige  étant  trop  petite,  il 
acheta,  l'an  1G12,  le  palais  Torres,  qui  était 
coniigu  à  l'église  de  Sainl-Panlaléon,  située 
dans  la  place  qu'on  appelait  anciennement 
de  Malerazzari.  Le  cardinal  Giustiniani  con- 
tribua à  cet  achat,  ayant  donné  deux  mille 
écus,  cl  l'abbé  Landriani,  noble  Milanais, 
non-seulemenl  donna  une  somme  plus  con- 
sidérable ,  mais  entra  dans  la  suite  dans  la 
congrégation  ,  et  y  mourut  dans  une  si 
grande  réputation  de  sainteté,  qu'on  a  mé  le 
travaillé  au  procès  de  sa  canonisation.  Enfin 
le  palais  fut  eniièrenieut  payé  par  un  legs 
de  six  mille  écus  que  le  cardinal  Lancelloiti 
fil  aux  écoles  pieuses.  Casalanz  oblinl  en- 


ECO 


lof) 


core  l'église  de  Saint-Panlaléon,  et  le  papo 
Paul  V,  considérant  combien  cet  institut 
était  utile  à  l'Eglise,  l'approuva  par  un  bref 
du  6  mars  1617,  l'éiigeant  en  congrégation  , 
à  laquelle  il  donna  le  titre  de  Congrégation 
Pauline,  perniettaut  à  ceux  qui  y  entre- 
raient de  faire  les  vœux  simples  d'obéis- 
sance ,  de  chasielé  et  de  pauvreté.  Le  pape 
nomma  pour  chef  ou  supérieur  de  celte  con- 
grégation, sous  le  nom  de  préfet,  Joseph 
tiasalaiiz  ,  pour  gouverner  tant  les  malsons 
qui  étaient  déjà  établies  que  celles  qui  s'éta- 
bliraient dans  la  suite,  avec  pouvoir  de 
dresser  des  constitutions. 

Casalanz  consulta  ses  compagnons,  qui 
étaient  au  nombre  de  quinze,  sur  la  ma- 
nière de  vie  qu'ils  devaient  pratiquer,  et 
l'habillement  qu'ils  devaient  prendre;  et, 
après  être  convenus  ensemble  de  la  forme 
de  l'habillement,  le  cardinal  Giustiniani  fit 
faire  les  habits  à  ses  dépens,  et  le  jour  de 
l'Annonciation  de  la  sainte  Vierge  de  la 
même  année,  le  fondateur  fut  revêtu  de  cet 
habit  par  les  mains  de  ce  cardinal,  dans  la 
chapelle  de  son  palais,  lui  ayant  donné  cet 
habit  au  nom  du  pape,  avec  le  pouvoir  de  le 
donner  à  ses  compagnons,  ce  que  Casalanz 
fil  le  même  jour  lorsqu'il  fut  retourné  aux 
Ecoles  pieuses.  Il  voulut  encore  renoncer  à 
son  nom  du  monde,  et  il  prit  celui  de  la 
Mère  de  Dieu,  ce  que  firent  aussi  ses  com- 
pagnons, qui  changèrent  de  nom,  et  cila  sa 
pratique  encore  dans  cette  congrégation. 
Elle  fut  mise  au  nombre  des  ordres  reli^ 
gieux,  l'an  1621,  par  le  pape  Grégoire  XV, 
<iui  lui  donna  le  nom  de  Congrégation  dea 
Clercs  Réguliers  Pauvres  de  la  Mère  de  Dieu 
des  Ecoles  pieuses.  Par  un  autre  bref  do 
l'an  1622,  il  approuva  les  conslilulions  qui 
avaient  élé  faites  par  le  fondateur,  qu'il  dé- 
clara général  de  celle  nouvelle  congréga- 
tion, à  laquelle  il  accorda,  la  même  année, 
tous  les  privilèges  dont  jouissent  les  ordres 
mendiants,  cl  Urbain  VIII  dispensa  ces  reli- 
gieux d'aller  aux  processions  publiques,  par 
un  bref  de  l'an  1629. 

On  ne  peut  exprimer  le  progrès  que  le  Père 
Joseph  de  la  Mère  de  Dieu  fil  dans  toutes 
sortes  de  vertus,  se  voyant  engagé  dans 
l'étal  religieux.  Tout  ce  qu'il  avait  fait  jus- 
qu'alors, tant  pour  l'instruction  de  la  jeu- 
nesse que  pour  son  avancement  spirituel , 
lui  semblait  peu  de  chose.  Il  augmenta  ses 
mortifications,  ses  veilles  cl  ses  abstinences. 
Il  faisait  lous  ses  exercices  avec  plus  de  fer- 
veur que  par  le  passé;  cl  l'instruction  de  la 
jeunesse  étant  la  principale  fin  de  son  insti- 
tut, il  s'y  appliqua  encore  avec  plus  de  zèle 
((u'il  n'avait  fait.  Il  ne  se  contentait  pas  de 
donner  tous  ses  soins  à  ce  que  les  maSires 
s'acquittassent  de  leur  devoir,  il  enseignait 
encore  lui-même  les  enfants,  et  il  continua 
cet  exercice  jusqu'à  la  fin  de  sa  vie.  Sa  cha- 
rité le  portait  à  secourir  son  prochain  dans 
toutes  les  occasions.  Il  était  encore  le  plus 
souvent  au  confessionnal  ou  dans  les  hôpi- 
taux, il  visitait  les  prisonniers,  il  secourait 
les  pauvres  et  les  indigents,  et  souvent  il  leur 
donnait  jusqu'aux  choses  nécessaires  pour 


r.l  niCTIONNAlRE  DES 

rcnltclicn  de  ses  relijrieux,  auxquels  il  re- 
romin<nml;iit  Je  se  confier  en  la  l'rovidence, 
(]ui  en  elTel  ne  leur  manqua  jamais.  Il  n'en- 
seiunail  rien  â  ses  religieux  qu'il  ne  prati- 
quai lui-niéini'.  Il  leur  recounnamlail  sur- 
tout riiumiliié  ;  il  leur  eu  douuail  l'exemple, 
s'emplojanl  aux  ofiiics  les  |ilus  b.is  île  In 
maison,  quoique  pénéral  de  l'ordre.  Il  allait 
par  la  ville,  la  besace  sur  les  épaules,  pour 
recevoir  le<  aumônes  des  (idélcs,  et  ce  fui 
celle  même  litimilié  qui  lui  lit  refuser  l'ar- 
chcvèclié  de  Hrindisi,  qui  lui  fut  olTerl. 

L'opinion   que  l'on  avait  do  sa  sainlelc  fil 
que.  de  son  vivant,  on  ofîrit  à  sa  coiigréga- 
lion  plusieurs  eiahiisscmenls  qu'il  accepta, 
dans  l'étal  ecclésiastique,  dans  la  républKiuc 
de  l'iénes.   en  Toscane,  au  royaume  de  Na- 
ples,  en  Sicile  et  ci  Sardaigne.  Le  cardinal 
Krançois   de  Diclrichzau,   évéque  d'Oluius, 
lui  demanda,  l'an  IG^Jl,  de  ses  religieux  pour 
les   établir  ;i  Milmlshoui;;.  pi  il  leur  donna 
aussi  un  aulrc  établissement  à  L^pniek,  d'où 
ils  se  sont  répandus   par   toute   rAllemagnc 
rien  Hongrie.    Le   roi   de  rologuc,  Ladi^- 
las  IV,  vojanl  les  grands   fruits  qu'ils  fai- 
saient dans   les   lieux  où  ils  élairnl  établis, 
en  01  venir  dans  son  rojaume  l'an  IGil,  et 
ils  y  ont  lait  aussi  [dusieurs  établissements  ; 
ils  en  ont  aussi   quelques-uns  en  E^pugne  : 
de  sorte  que  le  Père  Joseph  de  la  Mère  de 
Dieu  oui  la  consolation  de  voir  sa  congréj;a- 
lion  étendue  en  plusieurs  provinces.  Il  a\ail 
quatre-vingt-douze  ans  lorsqu'il  fat  attaqué, 
à  Home,   de  sa  dernière  maladie;   ce  fui  le 
deuxième  d'août  de  l'an  lO'i-H.  Il  voulut  en- 
core dire  la  messe  ce  jour  là.   après  quoi  il 
se  mit  au  l;l  et  vécut  encore  jusqu'au  2j  du 
mémo  mois,  (ju'il   rendil  son  âme  à  Dieu. 
M  fut  cnierre  au  milieu  de  l'église  de  Saint- 
i'anlaléon,  où  il  esl  resté  jusqu'en  l'an  1()8', 
(lu'on    le    transféra  dans   la   nouvi  lie  église 
tjue  ses  religieux  ont  lait  bût  r.  L'on  travaille 
actuellement  à  sa  canonisalion. 

La  lin  de  cet  institut,  comme  nous  avons 
déjà  dit,  csl  de  procurer  aux  enfants  une 
bonne  éducation,  principalement  aux  pau- 
vres, à  quoi  les  religieux  a'obligenl  par  un 
quatiième  vœu,  en  leur  cnsL'ignanl  (par 
charité)  à  lire  et  à  écrire,  en  commençanl 
par  r.\,  IL  C,  à  jeter,  coinider,  calculer,  cl 
même  tenir  les  livres  chez  les  inarcliands 
et  d.ms  les  bureaux.  Us  enseignent  encore 
non-seulemeiil  les  liUiitaiiités,  la  rliéloriiiuc 
cl  les  langues  latine  et  grecque,  mais  dans 
les  villes  ils  liennenl  au^si  des  écoles  de 
philosophie,  de  Iheidogie  scidaslique  el 
morale,  de  iiiailiémati<|ues  ,  de  forlirualions 
n  de  géométrie.  Les  classes  durent  deux 
heurrs  ri  demie  le  malin  et  autant  le  >oir. 
Cl  tous  les  jour-,  pendant  le  dernier  quai  l 
d'heure,  chaque  légenl  Csl  obligé  de  donner 
aux  rcolurs  (|iiel(|iies  leçons  spirituelles. 
Tous  les  samedis  un  religieux  leur  fait  aussi 
un  sermon  d'une  deiiii-li(  ure  dans  l'e^hsc 
ou  dans  l'or.iloire,  ei  lorsqu'ils  sorlcnl  de 
classe  ils  vont  p.ir  bande  chez  leurs  parents, 
où  ils  sont  conduiis  par  un  religieux,  de 
|ieiir  qu'ils  nos'amtiseni  par  1  s  rues  à  jouer 
cl  a  perdre  le  temps. 


or.nnES  rf.licikux.  is: 

Nous    avons   dit   ci-dessus  que  ces  Ch  rcs 
Héguliers   avaient  été   mis  au   nombre  des 
ordres   religieux   par  le  pape  drégoire  XV, 
l'an  1G21,  et  qu'il    leur  permit   de   faire  des 
vœax   solennels  ;   mais   Alexandre  Vil,  l'an 
l()oG,  les  remit  dans  leur  premier  étal  sécu- 
lier, Toulant  qu'à  l'avenir  ils  ne  fissent  plus 
que  des   vœux   s  inpies  avec  un  serment  do 
persévérer  dans  la  congrégation  ,  ce  qui  ne 
dura  que  jusqu'en    l'an   lljlj'j,    que  le  pape 
Clémenl  1\  les  rétablit  dans  lear  étal  régu  - 
lier.  Il  y  en  eut  néanmoins  quelques-uns  qui 
ne   voulurent    point   s'engager  à  des  vœux 
solennels   et  qui    eurent    recours    au    pajie 
pour  en  obtenir  la  dispense  des  vo'ux  sim- 
ples qu'ils  avaient  faits  ,   el   du  serment  de 
persévérer daus  la  congrégation;  c'esl  pour- 
quoi Clémenl  X,  par  un  bref  du  18  odobre 
lli"0,  accorda  du  lemps  à  ceux  qui  n'avaient 
fait  que  des  vœux  simples,  pour  se  détermi- 
ner ou  à  sortir  de  la   congri'galion  ,  ou  à  y 
demeurer  en    faisanl    les    vaux   solennels, 
donnant   pouvoir  au  général  d'absou  Ire  du 
serment  et  de  dispenser  des   vœu\  simples 
ceux    qui    les   auraient    fails   el    qui    vou- 
draienl  sortir  de  la  congrégation  ,  pourvu 
qu'ils  ne  fussent   que  laïques   ou   dans  les 
ordres  mineurs  ;  que  s'ils   étaicnl   dans  les 
ordres  sacrés,  el  eussent  du  bien  de  palri- 
moinc  sufiisammenl   pour  vivre,  ou   qucl- 
(jues  bénéfices ,   ils   seraient   renvoyés  sous 
l'obéissance   de   leur   évéque;   que    si,    au 
contraire,  ils  élaieiil  dans  les  ordres  sacrés, 
el  s'ils  n'avaient  p  int  de  bien  île  palrimoino 
ou  de  bénéfices,  il  leur  sérail  libre  de  rester 
dans  quelque  couvent  de  la  congrégation  el 
de   vivre  avec    les    religieux  profès  de   cet 
ordre  ,  sans  pouvoir  preiendre  aucune  voix 
active  cl  passive,  auquel  cas  ils  pourraient 
exercer  leurs  ordres  ;   mais  que  si  absolu- 
ment ils  voulaient  sortir  de  la  congrégalion, 
n'ayant   point  de    bien  de  patrimoine  ni  de 
béiiélices,  ils  seraient  renvoyés  pour  vivre 
sous   l'obéissance  des  cvêques,   mais  qu'ils 
seraient  suspendus  de  leurs  ordres.  Le  même 
I  ontitu   approuva   derechef  leurs  conslilu- 
lions. 

Car  un  bref  du  28  avril  ICGO,  Alexandre 
\\l  ordonna  qu'ils  n'auraient  point  d'auires 
protecenrs  que  le  cardinal  vie. lire  de  Home; 
que  le  général  de  cette  congrégatinn  serait 
élu  tous  les  six  ans  ,  cl  qu'il  .lurail  quatre 
assistants.  Il  approuva  par  le  même  bref  la 
coutume  iiiiroiiuite  d.ins  celle  congrégaiion 
d'y  associer  de  pamres  jeunes  i;en<,  la  nu- 
dité des  pieds  el  la  grande  pauvreté  donlces 
Clercs  r.iisaient  profession  ,  princip.ilement 
dans  les  vovages  qu'ils  faisaient  a  pied  el  à 
l'Apostolique;  mais  Alexandre  \'lll,  par  un 
bref  du  '■Il  février  lO'JO  ,  les  obligea  i!c  se 
chausser.  S  m  prédécesseur.  Innocent  XI, 
les  avait  exemptés,  l'an  IGSO  ,  de  la  juridic- 
tion des  ordinaires,  el  les  avait  soumis  im- 
iiiedialemeiit  au  s.iinl-siege,  en  conlirmant 
tous  leurs  privilèges. 

Leur  liahil  esl  si  mbiabic  à  celui  des  Ji'sui- 
les,  excepte  que  leur  robe  s'attache  par  «le- 
vant ,ivcc  trois  boutons  de  cuir,  et  que  leur 
manteau   ne    descend    que   jusqu'aux    gc- 


» 


155  ECO 

noux  (I).  Ils  sont  au  nombre  des  mendiants, 
et  font  la  quête  parla  ville  comme  les  reli- 
gieux (les  autres  ordres  mendianU.  Il  y  a 
peu  de  bonnes  villes  en  Italie  où  ils  ne  se 
soient  établis;  il  y  en  a  même  où  ils  ont 
plusieurs  maisons  et  c  dlégcs,  comme  à  Na- 
plcs,  où  ils  en  onl  quatre,  et  à  Komc,  où  ils 
en  ont  cinq. 

Alexis  de  la  Conception,  Vie  du  Prie  Jo- 
seph de  Casalanz.  Cari.  Barlholom.  Piazza, 
husevolog.  Rom.,  tract.  3  ,  cap.  13  et  14. 
Asca^.  Tainbur.  de  Jur.  Abiat.  tom.  il, 
disput.  2V,  quœst.  8,  n.  C.  Bull.  liom.  tom. 
Il'l,  IV  et  V;  et  Philipp.  Bonanni,  Catalog. 
Ord.  Relig.  part.  i. 

Depuis  que  le  P.  Hélyot  a  écrit  le  chapi- 
tre consacré  à  l'histoire  des  Ecoles  pies,  le 
fondateur  de  cette  congrégalion  a  clé  canO' 
nisé,  et  la  fête  de  saint  Joseph  Casalanz  a 
été  lixée  au  27  août.  11  y  a  dans  le  bréviaire 
romain  un  olfice  en  son  honneur  approuvé 
en  1769.  L'institut  des  licoies  pies  n'a  jamais 
ou  d'établissemenls  en  France,  m;iis  il  a 
été  et  est  encore  répandu  en  plusieurs  Etats 
de  l'Europe.  Sa  conslitutiin  populaire  le 
rendait  infiniment  utile  et  a  contribué  à  sa 
propagatinn.  La  fidéliié  due  à  l'histoire  nous 
oblige  à  dire  ici  avec  une  certaine  franchise 
que  cetîc  congrégalion  n'a  pas  ,  croyons- 
nous,  gardé  l'esprit  primilil'  de  son  ctab'is- 
sement  ni  celui  do  son  pieux  fondateur.  Une 
certaine  émulation  avec  les  Jésuites  a  peut- 
être  pris  un  caractère  qui  ne  convient  point 
à  des  religieu'ï,  et  même  celui  de  la  jalou- 
sie, il  règne  dans  celle  société  un  all;i(hc- 
ment  ou  une  sorte  de  prédilection  pour  les 
idées  nouvelles  qui  ont  mis  le  trouble  dans 
l'Eglise  depuis  près  de  deux  siècles.  Nous  ci- 
terons l'exemple  du  P.  Jean-Baptiste  Mcli- 
nelli,  prêtre  des  Ecoles  pies  au  dernier  siè- 
cle, qui  a  professé  la  philosophie  dans  leur 
collège  d'Oneille,  puis  la  Ibéidogie  dans  re- 
lui de  Gènes,  sa  patrie.  En  17G9,  il  ri-mplaça, 
pour  professer  la  môme  seience  à  Rome,  le 
P.  Nitlali  ,  qui  venait  d'être  nummé  proles- 
seur  à  Pavie,  et  se  montra  favorable  aux 
idées  jansénistes,  il  joignit  des  remarques  et 
des  notes  à  l'édition  de  la  Théologie  de  Lyon, 
faite  à  Gênes,  par  Oizat',  en  1788.  Molinelii 
eut  sur  ses  opinions  di  s  démêlés  avec  le  sa- 
vant et  pieux  Lamhruschirii ,  a'ors  profes- 
seur au  séminaire  de  Gênes  ,  et  depuis  ar- 
chevêque de  cette  ville.  11  était  retourné  et 
professait  de  nouveau  la  théologie  à  Gênes, 
il  se  montra  favorable  à  la  révolution  de  son 
pays,  cl  il  faisait  partie  d'une  espèce  d'aca- 
démie rcclési.islique  formée  en  ce  sens  à 
Gênes.  Les  principaux  membres  étaient  l'é- 
Têque  Solari,  Pahmeri,  Degola  et  autres  pa- 
triotes; ils  donna. cnt  des  ouvrages  en  fa- 
veur du  système  démocr.ilique.  Molinelii  pu- 
blia pour  sa  part ,  en  langue  italienne,  le 
Préservatif  contre  la  séduction,  et  Du  droit 
des  propriétés  des  Eglises  sur  les  biens  ecclé- 
siastiques. Le  sénat  de  Gênes  lavait  nommé 
liu  de  ses  trois  théologiens,  et  il  rédigea,  en 
celte  qualité,  des  mémoires  et  des  lonsulta- 

(l]  Voij.,  3  la  (indu  vol.,  n"  21. 


ECO 


Î54 


lions  sur  différentes  matières.  Il  mourut  à 
Gênes  au  commencement  de  1799.  Molinelii 
n'était  pas  le  seul  de  son  corps  à  être  dans 
de  tels  sentiments,  qui  pourraient  peut-être 
expliquer  la  popularité  dont  jouit  la  con- 
grégation des  l'iarisles  ,  car  on  lui  donne 
aussi  celle  dénomination.  Il  faut  croire  que 
la  recommandation  faite  par  les  Dominicains 
et  les  Franciscains  à  leurs  religieux  en  fa-- 
veur  de  la  congrégation  des  Ecoles  pies  n'a- 
vait |)Our  motif  que  les  services  qu'elle  rend, 
et  nullement  ,  dès  ce  temps-là  ,  une  sorte 
d'antagonisme  contre  les  Jésuites.  Cet  anta- 
gonisme règne  malheureusement  depuis  lon- 
gues années,  et  passe  des  maîtres  aux  élè- 
ves, qui  n'aimeni  pas  les  Jésuites,  et  qui  ont 
quelquefois  affecté  de  répéter  cette  épigram- 
ine,  faite  par  leurs  processeurs  :  Il  tombera, 
ce  grand  arbre,  etc.  Les  Jésuites  répondaient 
par  d'autres  vers  qui  disaient  qu'il  tomberait, 
mais  qu'il  entraînerait  les  autres  dans  sa 
chute,  elc.  ils  avaient  raison,  et  nous  ose- 
rions soupçonner  que  les  Pères  des  Ecoles 
pies  n'ont  pas  vu  sans  peine  ce  grand  arbre 
relevé.  En  parlant  ainsi  d'une  société  esti- 
mable en  elle-même  ,  mais  gâtée  eu  quel- 
ques-uns, peut-être  en  le  grand  nombre  de 
ses  membres,  dont  on  accuse  le  mauvais  es- 
prit, nous  ne  prétendons  point  exprimer  lo 
désir  de  sa  suppression,  ni  méconnaître  les 
exceptions  honorables  qu'elle  renferme.  On 
dit  qu'en  Allemagne  les  Piaristes  sont  éga- 
leiiienl  animés  de  l'esprit  janséniste  ,  et 
peut-être  est-ce  à  cet  esprit  favorable  au 
pouvoir  séculier  que  l'institut  des  Eco- 
les pies  doit  d'avoir  été  l'objet  des  excep- 
tions et  même  des  affections  des  gouverne- 
menls  révolutionnaires.  Quand  Rome  déso- 
lée voyait  avec  horreur  et  indignation  les 
Français  et  leurs  opérations  à  Rome,  sous 
Pie  Vil ,  le  P.  Isai'e  ,  supérieur  des  Ecoles 
pies,  était  l'objet  de  l'estime  ou  de  l'affec- 
tion du  général  MioUis  ,  et  mangeait  frc- 
qucniment  à  sa  table.  Taudis  que  l'Espagne, 
révolutionnée  par  les  intrigues  d'une  reine 
coupable,  expulsait  tous  les  religieu  en  gé- 
néral,  elle  faisait  une  exception  en  faveur 
des  Ecoles  pies,  qui  môme  celte  année(1847) 
ont  reçu  une  nouvelle  preuve  d'attachement 
et  de  protection  du  gouvernement  de  la 
reine  Isabelli'.  Si  cette  prélérenee  est  due  à 
l'utilité  réelle  d'un  institut  qui  s'occupe  ac- 
tivement de  l'instruction  lie  la  jeunesse  ,  à 
qui  elle  apprend  l'A,  B,  C,  et  qu'elle  conduit 
jusqu'aux  sciences  élevées,  tant  mieux,  nous 
en  bénissons  la  Providence.  Nous  serions 
peiné  si  cette  prédilection  était  motivée  par 
les  idées  qu'on  supposerait  dominer  chez  les 
Piaristes,  qui  sans  doute  n'ignorent  pas  ce- 
pendant que  l'Eglise  et  son  gouvernement 
doivent  trouver  des  raisons  et  des  armes 
pour  soutenir  la  justice  de  leur  cause,  dans 
le  talent  et  le  zèle  des  religieux.  Au  dernier 
siècle,  les  Pères  des  Ecoles  pies  possédaient 
à  Rome  :  1°  l'établissement  de  Saint-Panla- 
léon,  qui  était  leur  maison  professe; 2"  Saint- 
Laurent  in  Borgu,  qui  était  le  noviciat;  3*ie 


ir.j 


DICTIONNAIUE  PES 


collège  dil  Xaznreno  ;  i  le  «ollrgc  tiil,  ca 
l'honneur  du  foml;itcur,t'(j:n/(/».<i((  ,  ou  Col- 
légc-Ncuf:  5°  le  collège  ecclésiaslique  ou  in- 
finncric  des  prélres  a  Putile-Sislo:  6'  l'hos- 
pice ai  ostolique  de  S;iinl-Michoi.  Aujour- 
d'hui ils  ont  encore  deux  maisons  dans  celle 
»ille  el  de  nombreux  clablis^ements  en 
Italie.  On  nous  a  dil  que  les  Jésuites  n'ont 
nu  ôlre  admis  dans  hs  lieux  où  professent 
les  Piarisles,  si  ce  n'est  dans  une  seule  ville  ; 
nous  ne  pouvons  attester  ce  fait.  Le  même 
institut  a  donc  rc(,u,  comme  nous  venons  de 
le  diri',  la  faveur  exceptionnelle  de  survivre 
en  lispagne  au  renvers-ement  de  tous  les 
couvents  de  religieux,  et  il  y  est  seul  subsis- 
î  tant  aujourd'hui,  avec  le  célèbre  monastère 
de  .Monl-Scrral,à  qui  on  a  aussi  permis  de  se 
■relever.  Dans  le-.  Etats  autrichiens,  ils  ont 
actuellement  soixante-sept  établissements, 
contenant  trois-cent  quarant'î  religieux.  Le 
préposé  général  est  aujourd'hui  le  U.  P. 
Jean-Baplisle  Itosani,  el  le  procureur  géné- 
ral est  le  U.  P.  Janvier  Fucile.  Tous  deux 
résident  à  Uomc. 

Extrait  de  recherches  fuites  passim,  el  de 
renseignements  fournis  par  M.  R.,  ancien 
élève  des  l'iaristes.  B-d-e. 

ÉCOLIERS  DE  BOLOGNE,  de  Saint-Piehhe 

DE     .MONTE-COiinULO      EN     IrALIE  ,      ET     DE 

Saint-Come-lez-Tolrs  en   Fhance  (Cha- 
noines RÉGULIKRS  DES  CONGnÉGATIONS  DEs). 

Le  cardinal  Jacques  de  Vitry,  dans  son 
Histoire  d'Occident,  fait  menlion  d'une  co:i- 
grég.ition  de  chanoines  réguliers  proche 
Bologne,  établie  par  quelques  écoiieis  de 
celle  ville.  Il  parle  d'eux  avec  éloge,  mais  il 
ne  marque  ni  le  monastère  où  celle  congré- 
gation a  commencé,  ni  ceux  qui  en  di^'pcn- 
d.iicnt.  Penot  dil  que  s'il  est  permis  de  devi- 
ner,  c'éiait  peul-étre  d.ins  le  monastère  de 
Saint-Victor,  proche  Bologne  ,  p  irci'  qu'il 
parait  par  plusieurs  bulles  de  -Martin  V  que 
ce  monastère  é:ait  le  chef  de  |)lusicurs  au- 
tres. .Mais  ce  niunaslère  ayant  clé  ruiné  en- 
tièrement, il  fut  uni  à  celui  de  Saint-Jean  de 
la  même  ville,  qui  fut  aussi  uni  dans  la  suite 
à  la  congrégation  des  chanoines  de  Saint- 
Sauveur  de  Lalran  l'an  l'*1.i.  Falconius,  (]ui 
élait  chanoine  régulier  de  Latran  aussi  bien 
que  Penot,  dil,  dans  ses  .Mémoires  histori- 
ques de  la  ville  de  liol();;nc,  pag.  201,  que, 
quel'jue  recherche  qu'il  ail  pu  laiie,  il  n'a  pu 
découvrir  ni  le  lieu  où  demeuraient  ces  éco- 
liers,  ni  le  pape  qui  avait  approuve  leur 
c'ingrcgalion  ,  m  à  quelle  lin  e.lc  avait  été 
instituée.  Mais  le  P.  Papclirocli  a  cru  avoir 
trouvé  le  nœud  de  la  dillicullé  en  disant  que 
c'étaii  ni  des  Frères  Prêcheurs  fondés  parsaiiit 
Uoininique,  dont  le  cardinal  de  \'iiry  avait 
voulu  parler,  l'habit  des  religieux  de  cet  or- 
dre ayant  beaucoup  de  rapport  à  celui  que 
les  Premonlres  portent  encore  à  présent  en 
Allemagne  ,  et  qui  ne  din'èrc  qu'en  couleur 
de  celui  des  Prêcheurs. 

Si  l'on  considère  néanmoins  les  paroles  du 
cirdin.'il  de  A  itry,  on  C'ninaiira  ()u'il  a  sans 
iloute  distingue  ces  Ecoliers  de  Bologne  d'a- 
vec les  l'réciieurs;  car,  après  avoir  dit  qu'il 


ORDRES  RF.Lir.lF.L'X.  130 

y  a  une  autre  congrég.ilioii  tic  chanoines 
hors  la  ville  de  Bologne,  etc.  :  Est  ulia  regu- 
larium  eanonicorum  Deo  grata  el  hominiùus 
graliosa  congrrgatio  extra  civitalem  Bono- 
niœ,  il  ajoute  plus  bas  qu'ils  unissent  en- 
semble l'ordre  des  Prêcheurs  et  relui  d.s 
Chanoines  :  Prwdicniorum  ordinem  Canoni- 
corum  ordini  conjungentes.  Mais  ce  qui  mon- 
tre plus  évidemment  que  ce  cardinal  n'a 
point  entendu  parler  des  Frères  Prêcheurs, 
c'est  que,  parlant  de  la  manière  de  vivre  aus- 
tère de  ces  chanoines  ,  il  dit  encore  qu'ils 
mangeaient  de  la  viande  trois  fois  la  se- 
maine :  Tribus  in  hebdomade  diebus  ,  carnes 
si  cis  apponantur  non  récusant,  in  refectorio 
manducantes  :  cependant  les  Frères  Prê- 
cheurs n'en  mangeaient  |)oinl.  Eiifin,  ce  qui 
me  persuade  davantage  que  cet  ordre  des 
Ecoliers  était  difTcrenl  de  celui  des  Frères 
Prêcheurs,  c'est  que  saint  Uominique  n'ob- 
tint une  maison  à  Bologne  pour  ses  reli- 
gieux que  l'an  1218,  et  que  selon  plusieurs 
auteurs  cette  congrégation  des  Ecoliers  était 
déjà  établie  avant  l'an  \iOQ;  mais  on  ne  snil 
point  quel  élait  l'habillement  de  ces  chanoi- 
nes, cl  combien  de  letniis  ils  ont  subsisté. 

Voyez  Jacob  de  Vilr.  //('»/.  Occid.,  c.  27. 
Penot,  Ilist.  Iriparl.  lib.  ii,  cap.  bï,  n.  1. 
Tamb.  de  Jur.  Abb.  disp.  2V,  qurst.  iï,  n.  21. 
Le  Pn'ige,  Bibliolh.  Prumon-l.;  et  P.ipi  broch 
Resp.  ad  P.  Sebast.  a  S.  Paulo  t.  ïl  ,  art.  \0, 
n.  170,  el  an.  22,  n.  32. 

A  ces  chanoines  di-  Bclngno  nous  join- 
drons une  autre  congrégation  de  chanoines 
réguliers  qui  ont  été  institué''  en  Italie  el 
qui  prirent  le  nom  de  .Monte-Corbulo  ,  à 
cause  que  leur  premier  monastère  était  si- 
tué sur  la  mont;igiie  de  Coi  bulo,  éloignée  de 
la  ville  de  Sienne  de  douze  milles.  Ils  eurent 
pour  instituteur  Pierre,  surnommé  de  Reg- 
gio  parce  (]u'il  avait  pris  naissance  dans 
cette  ville.  (Juelques-uns  néanmoins  disenl 
qu'il  était  de  .Milan,  qu'il  avait  passé  de  l'or- 
dre des  Chartreux  ilans  celui  (tes  Chanoines 
Réguliers,  et  qu'il  avait  mém:  pris  l'habit 
dans  le  couveiil  de  Saint-Sauveur  de  Bolo- 
gne. Ce  Pierre  de  Reggio  était  ami  de  Fran- 
çois Sodcrini  ,  évêqiie  de  Volterre  cl  réfé- 
rendaire de  l'une  el  de  l'autre  signature  sous 
le  pape  Alexandre  M.  Il  obtint  par  le  crédit 
de  ce  prélat  l,i  J)ermis^ion  de  fmder  une 
congrégation  sous  le  nom  de  S.iinl-Pierre 
daiii  l'église  de  Saint. Michel  sur  le  Mont- 
Corbulii,  laquelle  fut  conliriiiéc  par  Jules  II, 
selon  Raphaël  ilc  Volterre  ,  ou  par  le  [lape 
Léon  X,  comme  assure  Hcnoit  de  Saint  (îe- 
iiiinien,  chanoine  de  la  même  congregaiion, 
cité  p.ir  Penot  et  le  P.  B  nanni.  iNlozzagrii- 
nus  ajoute  que  ce  ne  fut  poini  sur  le  Monl- 
Coibulo  que  les  fiindements  lui  eut  jetés  , 
mais  au  monastère  de  Sainte-Marie  do  Bi- 
bona,  à  quelques  milles  de  Pive,  du  enté  de 
la  mer  et  du  diocèse  de  >'olterre.  Il  y  a  bien 
de  l'apparence  ne.iniiioins  que  ce  fut  au 
Monl-Corliulo,  pni-que  la  ciin.;régalion  en  a 
pris  le  nom.  Leur  habillement  cnnsistail  en 
une  luniijue  grise,  sur  laquelle  ils  niellaient 
un  rocliet  .  et  sur  le  roehet  une  aiiiiiiisse  ou 
capiice.  Le  P.   Bonanui  dit  que  l'an  iozï  ils 


137 


ECO 


ECU 


153 


I 


changèronl  la  couleur  grise  en  noire,  paur  se 
confoiiner  à  l'habillement  des  chanoines  ré- 
guliers de  Sainl-Frigdien  de  Lucques,  ce  qui 
ne  pcul  éire,  puisque  dès  l'an  1507  ceux-ci 
avaient  été  unis,  avec  dix  monastères  qui  dé- 
pendaient de  leur  congrégation,  aux  chanoi- 
nes réguliers  de  Latran,  qui  ont  toujours 
été  habillés  de  blanc  ,  et  qu'ils  convinrent 
fieulenient  que  dans  le  monastère  de  Lucques 
ils  retiendraient  la  chape  noire  au  chœur.  Il 
semble  que,  selon  le  même  auteur,  la  congré- 
gation de  Monte-Gorbulo  subsiste  encore  , 
rnr  il  dit  que  ces  chanoines  vivent  dans  une 
grande  pauvreté  et  du  travail  de  leurs  mains, 
étant  beaucoup  solitaires. 

Voyes  Mozzagrunus  Narrai,  rerum  çiest. 
Can.  Regul.  Penot,  Uist.  tripart.  Kaphaël 
Voilât,  lib.  XXI  ;  et  Uonanni,  CaCalog.  Ord. 
relig. 

Les  chanoines  réguliers  de  Saint-Côrae- 
lez-Tours  sont  du  nombre  de  ceux  qui,  ayant 
trouvé  la  règle  de  Saint-Benoît  trop  austère, 
ont  secoué  le  joug  de  cette  sainte  règle  pour 
en  suivre  une  plus  douce,  qui  est  celle  de 
Saint-Augustin,  et  ont  pris  le  tilre  de  Cha- 
noines Kéguliers.  Ils  ne  sont  pas  au  moins 
si  blâmables  que  les  clianoines  de  Saint- 
Martin  de  Tours,  dont  ils  dépendent,  et  qui 
ont  quille  entièrement  la  règle  de  Saint-Be- 
noît pour  se  séculariser.  Hervé,  qui  était 
trésorier  de  cette  dernière  église  au  commen- 
cement du  onzième  siècle,  se  relira  dans  une 
Ile  de  la  Loire  proche  de  Tours,  et  y  bâtit 
une  petite  église  sous  le  nom  de  Sainl-Gôme, 
avec  un  petit  monastère,  où  il  mena  une  vie 
solitaire  et  retirée.  Les  chanoines  de  Tours 
l'ayant  obligé  de  retourner  chez  eux,  il  les 
pria  de  donner  celte  île,  avec  le  monastère 
qu'il  y  avait  bâti,  aux  moines  de  Marmou- 
tiers,  ce  que  ces  chanoines  accordèrent  ;  et, 
comme  celle  île  appartenait  à  Hugues,  ccllé- 
rier  de  Saint-Martin,  il  y  consentit  aussi. 
Ainsi  cctle  île,  qui  prit  le  nom  de  Saint-Cô- 
me,  à  cause  de  l'église  dédiée  à  ce  saint,  qui 
y  avait  élé  bâtie  par  Hervé,  trésorier  de 
Saint-Martin,  fut  donnée  aux  religieux  de 
Marmouliers,  à  condition  qu'il  y  en  aurait 
au  moins  douze  qui  y  demeureraient  cl  y  fe- 
raient l'office  divin.  Nous  ne  savons  point  en 
quelle  année  k-s  religieux  qui  y  étaient  quit- 
tèrent la  règle  de  Saint-Benoît  pour  prendre 
celle  de  Saint-Augustin  et  vivre  en  chanoi- 
nes réguliers  ;  mais  ils  ont  toujours  dépen- 
du de  ceux  de  Saint-Martin,  et  n'ont  point 
reconnu  la  juridiction  des  archevêques  de 
Tours  ;  et  ce  n'est  que  depuis  l'an  1708  que 
les  chanoines  de  Saiut-Marlin,  qui  avaient 
uie  juridiction  presque  épiscopale  dans  une 
partie  de  la  ville  de  l'ours,  l'ayant  perdue  et 
ayant  été  soumis  à  celle  de  l'archevêque  de 
Tours,  ce  prélat  a  aussi  droit  de  visite  chez 
lus  Chanoines  de  Saint-Côme.  C'est  dans  leur 
«église  que  l'on  prétend  que  Bérenger,  archi- 
diacre d'Angers  et  écolâlre  de  Saint-Martin 
de  Tours,  fut  enterré.  11  fut  le  premier  qui 
osa  dire  que  le  sacrement  de  l'autel  n'était 
que  la  Qgure  du  corps  de  Nolre-St-igiieur, 
et  il  attaqua  les  mariages  légitimes  et  le  bap- 
(I)  Voi/.,àla  (in  du  vol.,  n"  22. 
DiCTiONNAina  des  Ordres  religieux.  H. 


lême  des  enfants.  Le  pape  Léon  IX,  â  qni 
l'hérésie  de  Bérenger  avait  été  déférée,  lit 
tenir  un   concile  il   Rome  l'an  1030,  où   elle 
fut  condimnée  pour  la  première  fois  ;  elle  lo 
fut  ensuite  dans  ceux  de  Brione,  de  Verceil, 
de  Plaisance,  de  'l'ours  ei  de  Rome,  sou*  Ni- 
colas 11.  Dans  celui  de  Tours,  tenu  l'an  1054, 
il  avait  abjuré  ses  erreurs,  et   les  légats  ihi 
pape  l'avaient  reçu  à  la  communion  de  l'E- 
glise. Il  Ht  aussi  ia  même  chose  dans  celui 
de  Rome,  l'an  1039,  et  le  cardinal  Humbert 
ayant  dressé  une  formule  de  foi,  il  la  signa 
et  jeta  au  feu  les  livres   qui  contenaient  son 
erreur  ;  mais  à  peine  le  concile  fut-il  termi- 
né, qu'il  écrivit  contre  cette   profession   de 
foi,  et  chargea  d'injures  le  cardinal  qui  l'a- 
vait dressée.  Au  concile  qui  se  tint  encore  à 
Rome,  l'an  1079,  sous  le  pap^î  Grégoire  VII, 
Bérenger   reconnut  encore  sa   faute  et   de- 
manda pardon.  On  lui  fit  signer  une  profes- 
sion di!  foi  ;  mais  à   peine    fut-il  arrivé   en 
France,  qu'il   publia  un  autre  écrit   contre 
cette  dernière  profession  de  foi.  L'annoe  sui- 
vante, 1030,  l'on  tint  un  concile  à  B  .rdiaux 
où    assistèrent    deux  légats  du  saini-sicge. 
Bérenger,  amené  apparemment  par  l'arche- 
vêque de  Tours,  y  rendit  raison  de  sa  foi, 
soit  pour  confirmer  la  profession  qu'il  avait 
faite  à  Rome,  soit  pour  rétracter  son   der- 
nier écrit,  el  depuis  ce  concile  il  n'est  p'uï 
parlé  de  lui  jusqu'à  sa  mort,  qui  arriva  le  5 
janvier  1088.  Il  mourut  ilans  la  communion 
de  l'église,  et  l'on  croit  qu'il  fut  enterré  dans 
l'église  de  Saint  Côme-lez -Tours,  où  il  s'é- 
tait retiré,  et  y  avait  mené  une  vie  (lénitente. 
Ce  prieuré  appartenait  pour  iors  aux  moines 
de  Marinoutiers,  selon  le  témoignage  du  sa- 
vant Père  Mdhillon  ;    et  ainsi   il  n  y  a    pas 
d'apparence  que  la  retraite  de  Bérenger  dans 
ce  prieuré   ait   donné   lieu  à  quelques  cha- 
noines de  Saint-Martin  de  suivre  son  exem- 
ple, et  qu'ils  aient  par  ce   moyen   formé   la 
communauté    des   Clianoines    Réguliers    do 
Saint-Gôiiie,  l'an  1003,  comme  a  avancé  la 
Père  dom  Etienne  Badior  dans   l'Histoire  de. 
l'Abbaye  de  Marmoutiers   et  de  l'église  do 
Saint-Martin  de  Tours,  qu'il  donna  en  1700. 
Ronsard,   le   prinee  des  poêles    du  seizième 
siècle,  qui  avait  élé   prieur   commenilalaire 
de  Saint-Côme,  y  est  aussi  enterré  dans  un 
magnifique  tombeau.  Il  mourut  lo  27  décem- 
bre 1383.  Ces  chanoines  sont  habillés  com- 
me les  ecclésiastiques,  el  mettent  seulement 
sur  leurs  manches  une  bande  de   tuile  de  la 
largeur  de  quatre  doigts,  qu'ils   lâchent   de 
cacher  le  plus  qu'ils  peuvent  en  retroussant 
leurs  manches  (1).  Au  chœur  ils  portent   un 
surplis  avec  une  aumusse  sur  le  bras,  et  un 
bonnet  c.Trré. 

Joan.  Mabill.  Annal,  liened.  Toin.  IV,  pag. 
133  e/  ieciiient.  Fïeurj.  Histoire  ecclés.  l'om. 
XII  el  XIII. 

ECU  D'OR  OU  VEUT  (Obdbe  de  i.'). 
Des  Chevaliers  des  Ordres  de  I'Ech  d'Or  ou 
Verl,  et   de  Notre-Dame  du  Chardon  en 
France. 
Louis  H,  duc  de  Bourbon,  comte  de  Cler- 


130  DICTiON'NAtr.E  1>ES  ORDRES  REI.IGIECX.  140 

inonl  en  Foroz,  sripnour  de  IJaatijni  cl  do  ses  successeurs  ducs  de  Boiirlinnnnis  on  fu?- 
Douilles,  pnirot  prand  eliambrier  de  France,  sent  aussi  cliels  ei  souverains,  cl  que  l'on  ne 
surnomiiK''  leI{oii,;'i  son  retour  d'Anfçleterre,  reçût  pour  chevaliers  que  des  personnes  no- 
où  il  avait  demeuré  prisonnier  avec  le  roi  birs  et  sans  reproche.  Ils  portaient  tous  les 
Jean  1"  ,  assembla  les  jilus  pr;in<ls  se.fineurs  jours  une  ceinture  de  velours  bleu  doublée 
lie  ses  terres  «mi  sa  ville  de  Moulins  en  IJour-  de  satin  roujre  bonlce  d'or,  avec  le  mut  lîf~ 
bonnals,  le  iireiiiier  jour  de  janvier  de  l'an  pt'rancc  en  broJcrie  aussi  d'or.  lîlle  ferma  t 
13C'.),  auquel  jour,  de  temps  inimémorial,  on  à  boucles  et  ardillons  de  (îu  or  cbarbillou- 
donne  les  i-irennes.  il  leur  dit  qu'il  avait  nés  et  échitiueiés  avec  l'éniail  vert,  comme 
dessein  de  prendre  pnur  devise  une  ceinture  la  lèled'un  chardon.  Aux  i;ran  les  fêles,  cl 
dans  laquelle  il  y  .lurait  en  écrit  le  joycu\  prinrip.ilement  à  celle  de  la  (]oiiee|)li.>u  de 
mol  ^.•.■;)fr(/jir(>,  cl  qu'il  voulait  les  étreniior  la  sainte  ^'ier;;e,  ce  prince  tenait  table  oii- 
il  un  l'rdrc  qu'il  a\aitfait,  et  qui  s'appelle-  verte  au\  cboaliers,  ((ui  étaient  couveris 
rail  l'A'fK  dur,  dont  la  mar(|uo  était  un  écu  de  soutanes  de  damas  incarnat  a»(C  les  mau- 
d'or  dans  lequel  il  y  avait  une  bande  de  pcr-  clies  'arg;es,  ceintes  de  leur  ceinUires  bleues, 
les,  avec  ce  mot  Allen.  Les  premiers  qui  re-  Leur  prand  manteau  était  de  bleu  ceb-sle 
curent  cet  ordre  furent  Henri  de  Montaçru,  doublé  de  satin  rouge,  et  le  grand  collier  do 
sci;;niur  de  la  'Jour;  (luicbard,  dauphin  l'ordre  de  lin  or,  du  poids  de  di\  marcs,  fcr- 
il'Au.  cijïiie  ;  GrilTon  de  Montajiu,  Huiïues  niant  à  boucles  cl  ardillons  d'or  par  derrière, 
de  Cbasti  Mus,  l'aîné  lieCbâie'moranl,  le  sire  II  éiail  composé  di' losanjies  entières  cl  do 
de  l^liaslel  de  Montagne,  l'aîné  de  la  l'aliss'*,  demies  à  diiuble  orle,  ém.iillécs  de  vert,  pcr- 
Guillaume  de  \"icliy  el  quelques  autres.  Le  cécs  à  jour,  remplies  de  lleurs  de  li>  d'or,  et 
dnc  de  liourbon  dii  à  ces  nouveaux  cheva-  du  mol  Jispcrance  écrit  en  lettres  capitales  à 
Jiers  qu'il  desirait  que  lous  ccm\  qui  rece-  l'antique.  Au  bout  du  collier  pendait  sur  l'cs- 
vraicnt  cet  ordre  à  l'avenir  et  ceux  qui  l'a-  loiiiac  une  ovale,  dans  laquelle  était  l'ini.igo 
vaienl  reçu,  vécus'-eiil  comme  frères,  se  de  la  sainte  Alerte  cniourée  d'un  soleil  d'nr 
donnassent  secours  les  uns  aux  autres,  fis-  et  couronnée  de  douze  étoiles  avec  un  crois- 
sent toutes  les  adioiis  d'Iionnenr  qui  con-  saut  sous  ses  pieds,  el  au  bout  une  létc  i!o 
viennent  à  des  chevaliers  et  gentilshommes,  chardon  émaillee  de  vert.  Leur  bonnet  é:ail 
Cl  qu'ils  s'absiinsscnl  de  jurer  cl  de  lilasphc-  de  velours  vert  rebrassé  de  panne  cramoisie, 
nier  le  nom  de  Dieu.  Il  leur  camm:inda  sur-  sur  lequel  élail  l'écu  d'.ir  à  la  ile.ise  Mien, 
tout  de  porter  honneur  aux  dames  cl  aux  dont  nous  avons  pari.'.  Cet  ordie  lui  rerhei- 
demuiselles,  de  ne  pas  souffrir  que  l'on  par-  clié  par  plusieurs  grands  seigneurs,  el  méuie 
lâl  d'elles  en  mauvaise  part,  et  de  ne  point  par  des  élranj,'ers,  qui  se  faisaient  honneur 
mal  parler  les  uns  dis  autres.  1!  les  exhorta  de  porter  l'ordre  du  d-ic  de  liourlion,  qui 
aussi  à  se  garder  réciproquement  loi  cl  passait  pour  le  |  lus  grand  cn|iilainc  de  son 
loynu  é,  et  à  se  poil  r  respect,  romm-  il  np-  lenips. 

par'.icnl  à  cheialiers  de  louanges  cl  de  vertu;  AL  ILM-man,  d.iiis  son  Ili>toire  des  Ordres 
el  p';ur  les  exciler  ,î  remplir  leur  devoir  il  militaires,  parlant  de  celui  du  (Chardon,  dit' 
leur  dil  que  le  mot  A  /en, qu'il  avait  fait  mel-  que  l'abbé  (jiusliniani  s'est  trompé  lorsque, 
tre  snr  l'écu.  voulait  dire  :  Allons  tous  en-  voulant  corriger  (luelques  auteurs  qui  oui 
femhlr  nu  senicf  dr  Dieu,  ri  demeurons  unis  fait  Louis  II,  duc  de  liourgogue,  insiiluleur 
pour  la  défense  de  noire  p<iy<,  et  rhcrchor.s  à  de  cet  ordre,  vers  l'an  \W.i,  il  en  altribue 
ocqu('rir  de  l'Iionnrur  pur  nosnciions  glorieu-  rétablissement  à  i'iiilippe  II,  duc  de  Boiirgo- 
ses.  il  promit  de  sa  |iarl  d'e\éruter  tout  gnc  l'an  l'i-^O,  el  que  la  raison  ()ue  l'abbé 
cela,  cl  les  chevaliers  prêtèrent  ensuile  ser-  (iiustiniani  en  donne,  c'est  qu'il  n'a  point 
ment  entre  ses  mains  de  le  servir  li.L  leuienf.  trouvé  de  Louis  li  duc  de  Hourgogne  en  ik03. 
Nous  donnons  l'habillcmenl  de  ces  cheva-  Apparemment  que  M.  Herman  n'a  p.is  lu 
liers  Ici  que  nous  l'avons  trouvé  dans  la  bi-  l'Histoire  des  Ordres  inilil  ires  de  cet  auteur, 
bliolhèque  du  Uoi  (1).  Il  y  en  a  qui  préleu-  et  qu'il  s'en  est  rapporté  à  d'autres  qui  lui 
detit  que  ni  n'était  poiol  un  ordre  (le  the-  ont  fait  un  fiux  rappo;l;  car,  bien  loin  ipie 
Valérie  qu'il  leur  donna,  mais  seulonient  une  l'abbé  liiuslini.ini  mette  rélalilisscment  di" 
devire  (ju'il  prit  pour  lui,  cl  qu'il  pcniiil  cet  ordre  en  1430,  Il  d;t  positivement  que 
ausài  de  |  renilre  aux  seigneurs  de  sa  cour  ;  l'on  en  doit  mellre  rinslitntion  en  l-'iTO,  se- 
ct  que  le  véritable  ordre  de  chevalerie  de  ce  Ion  l'Histoire  des  Ordres  militaires  nnpn- 
prii'.cc  fut  celui  du  (Chardon  o<i  de  l'I-spéran-  niée  à  Paris  en  l()7t,  à  laiiuclle  il  faut  ajou- 
re, qu'il  institua  l'an  L'ITO,  en  l'hiinneur  de,  ter  foi,  puisciu  elle  a  été  co  oposée  en  France, 
Dieu  et  de  ia  sainte  Vierge  immaculée,  sous  où  cet  ordre  a  pris  son  origine  :  l'er  (/wsln 
le  nom  d'ordre  des  chevaliers  de  Nolre-Da-  autoriia  Itistuncn,  clic  p<r  issere  orl/inain 
nie,  dil  autrement  du  ('Iiardon,  lorsqu'il  nrlla  Francia  doue  (juesl  ordine  7'rasseli  prii^- 
épousa  Anne,  (ille  de  iîéraud,  deuxième  du  cipii,  mérita  fedc,  pare  dotcrsi  dure  i'unuo  n 
nom,  comte  de  Clermonl  el  dauphin  d'.Vu-  talc  insiitutione  1370.  l]omnie  lauieur  de 
vergue;  mais  il  est  jdus  probable  que  ce-  cette  descriplion  des  ordres  militaires  en  a 
laienldeux  onlres  dilïéicnls.  atlr  bue  l.i  londation  à  un  Charles  11  duc  de 
(]el  ordr-  du  Chardon  élail  composé  de  Itnui  bon.  l'abtie  (Miisiiniani  f.iit  voir  que  ce 
vingt-six  chevaliers,  y  compris  le  duc  de  C*i,irles  de  Hourbon  ne  peut  |  as  en  avoir  été 
IJourbon,   qui  en  élail  le  chef.  Il  voul'il  que  le  fondateur;  cl,  bien  loin  d'en  allribuer  la 

(1)  \'otj.,  à  la  fin  du  vol.,  n''  2j. 


in 


ELR 


EI.E 


142 


fondalion  à  Pliilippe  II  duc  de  nouigojrne, 
roinnie  prétend  M.  Herman,  il  dil  qtie  c'est 
Louis  II,  et  non  pas  Charles  de  Bourbon  qui 
en  a  été  l'instiluleur  :  Ua  ta'e  essame  lien  si 
vcile  che  Lndovico  II,  non  Carlo  (luca  di  Hor- 
ion l'u  iinslilulore  di  questo  ordinc.  Kt  dans 
un  aulre  endroit,  où  il  corrige  aus^i  .Micliiili, 
qui  avait  avancé  que  Louis  du  Hourgognc 
él.iit  le  fondateur  de  cet  ordre,  il  dit  :  /•'»  Ln- 
dovico duca  di  Borbone  rinslitnlore,  el  non 
di  liorgo(jna,  corne  serive  Michieli.W  y  a  loii^'- 
Icinps  que  Cri  ordre  ne  sul)si>.le  plus,  quoi- 
que l'abhé  Giustiniaiii  ail  donné  uneclirono- 
logie  de  ses  grands  tnaîtres  depuis  Louis  II, 
duc  de  Bourbon, jusqu'à  Louis  le  Grand,  roi 
do  France.  Si  M.  Herman  avait  sculenienl 
jeté  les  yeux  sur  celle  chronologie,  il  n'au- 
rait pas  accusé  l'abbé  Giusliniani  d'avoir 
fait  PbiiippL-  II,  duc  de  Bourgogne,  inslilu- 
leur  de  cet  ordre,  puisqu'il  a  mis  à  la  Icle 
de  SCS  grands  maîtres  ou  clu-fs  de  l'urdr;! 
Louis  11,  duc  de  Bourbon,  cii  1370. 

Kavin,  Théâtre  d'honneur  et  de  chevalerie. 
Josef  Michicii,  Te.^oro  mililar  de  cavuleria. 
Mcnnénius,  De  iclœ  E'jiici^t.  Ord.  Bcrnarl 
Giusliniani,  Ilist.  di  lait,  gli  ord.  mililar.  Le 
P.  Anselme,  Le  l'alais  d'honnaur.  Herman  et 
Silioonebeck,  d  mis  leurs  Uisloireg  des  ordres 
mililaires. 

l!:i:UYEUS  AU  feu  D'AIIGENT.  Voyez 
Feu  d'or. 

EGYPTIENS  (Mo. NES).  Voyez  Coptes. 

ÉLÉPHANT  (ordre  de  l'). 

Des  chevaliers  des  ordres  de  VEléphanl  cl  de 
Danebroch  en  Danemark. 

L'ordre  de  l'Eléphant  en  Danemark  est  du 
nombre  de  ceux  dont  on  ne  connaît  point 
l'otigiiic.  Les  uns  la  font  remonter  jusqu'au 
temps  de  Chiisticrn  I",  d'au'rcs  piélendcnt 
qu'on  ne  la  doit  mettre  que  sous  le  rèijiie  de 
Cliristiern  IV,  et  d'auires  enfin  ne  la  lixcnt 
que  sous  celui  de  Fiédcric  II.  Mais  l'opinion 
la  plus  commune  est  que  Cbristiern  I"  a  clé 
l'instiluleur  de  cet  ordre,  l'an  14^78,  selon 
«|uelques-uns,  ou  l'an  1474,  selon  d'aufre-. 
M.  .\sluuole  dit  avoir  vu  une  lettre  écrite  l'an 
1537  par  Avoleide,  évêque  d'Arhusen,  chan- 
celier de  Jean,  roi  de  Danemark,  à  Jean  Fris, 
aussi  chancelier  de  Chrisliern  III,  dans  la- 
quelle ce  prélat  marque  que  Cbristiern  I", 
étaut  à  Rome,  demanda  au  pape  Sixte  IV  la 
permission  de  pouvoir  insliluer  cet  ordre  en 
l'honneur  de  la  passion  de  Nolre-Srigneur 
Jésua-Christ,  et  que  les  rois  de  Danemark 
en  fussent  toujours  chefs  ;  el  il  ajoute  que 
ce  prince  fonda  une  cliaielle  mai^difique 
dans  la  grande  église  de  Uosth;id,  lieu  de  la 
sépulture  des  rois  de  Danemark  el  éloigné  de 
quatre  lieues  de  Copenhague,  où  tous  les 
chevaliers  devaient  s'assembler.  Le  même 
auteur,  décrivant  le  collier  de  cet  ordre,  dit 
que  ce  n'était  d'abord  qu'une  chaîne  d'or  au 
lias  de  laquelle  pendait  un  éléphant  qui  av.il 
sur  le  colé  une  couronne  d'épines  dans  la- 
(juelle  il  y  avait  trois  clous  ensanglantés  eu 


mémoire  de  la  passion  de  No!re-Seigneur, 
que  dans  la  suite  ce  collier  fut  com;osé  de 
croix  entrelacées  d'éléphants,  et  qu'au  bas 
de  ce  collier  il  y  avait  encore  un  éléphant 
qui  tenait  sous  ses  pieds  une  image  de  la 
sainte  Vierge,  en  l'honneur  de  laquelle  il  y  a 
au^si  des  auteurs  qui  prétendent  que  cet 
xriWe  fui  iastilué.  Favin  cl  le  P.  Anselme, 
(|ui  sont  du  nombre  de  ces  auteurs,  disent 
que  les  cheval  ers  de  cet  ordre  portent  au 
cou  une  chaîne  d'or  au  bout  de  laquelle  [)cnd 
sur  l'eslomac  un  éléphant  d'or  émaiilé  de 
blanc,  le  dos  charge  d'un  château  d'argent 
maçonn  j  de  sable  ;  et  cet  éléphant  est  porté 
sur  une  terrasse  de  sinopic  émailléede  Heurs. 
J'ai  une  ancienne  cslampe  où  le  collier  de 
cet  ordre  est  ainsi  représenté,  à  l'exception 
que  le  collier  est  do  trois  chaînes  d'or.  Mais, 
quoique  Favin  et  le  P.  Anselme  décria  eut  de 
celte  manière  le  collier  de  l'ordre  de  l'Elé- 
phant, néanmoins  celui  qu'ils  ont  fait  gra- 
ver est  comj:osé  de  plusieurs  croix  entrela- 
cées d'éléphants  qui  portent  chacun  sur  leur 
dos  une  tour,  cl  au  bout  de  ce  collier  il  y  a 
une  médaille  cnlourée  de  rayons,  an  milieu 
de  laquelle  est  l'image  de  la  sainle  Vierge. 
J'ai  encore  une  ancienne  estampe  où  ce  col- 
lier n'est  que  d'une  c'iaîne  d'or  composée  do 
plusieurs  os  qui  paraissent  dos  vcriébrcs,  au 
bas  duquel  pend  un  éléphant  ayant  sur  le 
dos  une  tour,  et  au-dessus  de  la  tour  un  I, 
qui  pourrait  signifier  le  roi  Jean  ;  de  même 
que  le  C  que  les  chevaliers  qui  furent  fai  s 
{;ar  Chribliern  IV  mirent  sur  le  collier,  mar- 
quait le  nom  de  ce  prince.  Celui  que  I\Ien- 
nénius  a  fait  graver  est  semblable  à  celui 
que  Favin  et  le  P.  Anselme  ont  donné,  avec 
celle  dilî'érence  que  la  médaille  de  la  sainio 
Vierge  est  attachée  à  trois  peliies  boules,  et 
qu'au  bas  de  cette  médaille  il  y  en  a  encor(î 
une  autre  représcnlant  trois  cions  de  la  [)as- 
sion.  Enfin  la  plupart  des  auteurs  (|ui  ont 
parlé  de  cet  ordre  en  ont  donné  le  collier  do 
dilTérentcs  manières.  Celui  que  les  ch,;va- 
licrs  portent  présentement  est  (Ornposé  de 
plusieurs  éléphants  entrelacés  de  louis,  clia- 
qui!  éléphant  ayant  sur  le  dos  une  housse, 
bleue,  et  au  bas  du  collier  il  y  a  un  éléjjliant 
d'or  chargé  sur  le  dos  de  cinij  gros  diamants , 
en  mémoire  des  cinq  plaies  de  Notie-Sei- 
gncur;  cet  éléphant  esi  émailié  de  blanc  et 
a  sur  le  dos  un  pelit  Maure  assis. 

Quant  à  leur  habillenieni,  ils  portcal  dans 
les  jours  de  cércmonio  un  grand  manu  au  do 
velours  cramoisi  doublé  de  salin  blanc,  dont 
la  queue  traîne  de  deux  aunes,  avec  un  cha- 
peron par  derrière  attaché  au  manteau  :  les 
cordons  qui  lient  le  manteau  sont  d'argent 
et  de  soie  rouge,  le  haut-de-chausses  et  In 
pourpoint  de  satin  blanc,  et  les  bas  de  cou- 
leur de  perle.  Ils  portent  sur  le  côte  gauchi! 
du  manteau  une  croix  en  broderie,  entourée 
de  rayons  ;  leur  ciiapeau  est  de  velours  noir 
avec  un  boaquet  de  plumes  rouges  et  blan- 
ches (1).  Ce  qui  distingue  le  roi,  c'est  (jiic 
les  plumes  de  son  chapeau  sont  blaiK  lies 
avec  une  aigrette  noire,  et  que  son  mantea;; 


(!)  Vo'j.,  U  la  lliidiivol.,  li"  ii. 


Itô 


DICÏiaXSAinF.  DES  ORrtlîF.S  RKI.ir.lF.l'X. 


14i 


e>l  douldo  (riioimiiic.    I/hnliillcmont  do  ces 
cliov.ilii'is,  (jiie  l'iilit  <"  (îi'.isiiniaiii  a  failpra- 
vcr,  a  l'ié  iltssiné,  à  ce  qu'il  dit.  sur  un  por- 
Irjil  du  roi  Chrislicrn  \',  morl  l'an  JG'J'J.  Ce 
prince  j  csl   ri'prcsoiilé  avec  une  cuirasse, 
ayant  un  cordon  bleu  passé  en  écharpc  de- 
puis  l'épaule    gauche    jusqu'à    la    hanche 
droite,  et  un  éléphant  d'or  au  bout,  avec  un 
manteau  bleu,  snné  di;  couronnes  d'or  et  de 
cœurs  en   broderie  ;  le   nianteiu  est  doublé 
de  peaux  de  loups-ccrviers  et  a  sur  le  côté 
^'auche  une  croix  entourée  de  rayons.  Ainsi 
il  y  a  eu  souvent  du  changeinent  dans  l'ha- 
billenienl  ,  ;iussi   birn  que  dans    le   collier. 
Favin  ,  qui   a  été  siii\i   par  d'autres,   s'est 
trompé  lorsqu'il  dit   (jue  les  rois  de  Dane- 
mark ne  confèrent  cet  ordre  que  le  jour  de 
leur  eouronnenienl  :  car,  sans  parler  des  rois 
de  Danemark  qui  ont   réi;né  depuis  l'insli- 
liilion  de  cet  ordre,  Cli;  isticr:)  V,  qui,  à  son 
avénrmeni  à  li  coiironm-,  avait  fiit  des  che- 
valierv  «le  l'Eli  phanl,  fil  encore  chevalier  de 
cet  ordre,  l'an  \6~r2,  I  anib.is-adeur  d'Angle- 
terre qui  résidait  aupr.'s  de  sa  personne.  11 
y  eut  une  promotion  de  plusieurs  autres  che- 
valiers l'an  1679.  Le  marquis  de  Hadc  Dour- 
lach.  et  Chrislicrn.  prince  d' Osifrise,  le  fu- 
rent au^si  l'an  1C82.  L'année  suivante,  Fré- 
déric Charles  de  Koyc  de  la  Hochefoucault , 
comte  de  Uoye,  fut  l'ait  pareillement  (  heva- 
lier  de  1  Klephanl.  Il  y  eut  une  autro  promo- 
tion le  lo  jui  leî    IG'Ji  ,  (t  le  collier  de  cet 
ordre   fut  donne  à   livrard  Louis  ,  prince  de 
Wirteinberg;  S  utlgard  Georges,  landgrave 
de  Hesse-Diirms'adt;  Philippe,  iamlgravc  de 
Hesse  Casscl  ;  Albert,  duc  de  Saxe-Golha  ; 
Léopold  Evrard,  duc  de  Wirlemberg-.Mont- 
belliard.  et  à  d'autres  ;  et  l'an    l(i'.)7  le  duc 
Jean  Adolphe  de  Saxe-Weinsenfelz  le  re(;ut 
aussi. 

lilie  A'hmole,  dans  son  Traite  de  In  Jnr- 
rtlicre;  Favin,  ïluûtre  d'honneur  el  de  che- 
valerie ;  Bernarl  Ciustini:ini  ,  Ili^l.  di  Ciilli 
gli  Ordini  tni:itiiri  ;  .Mennénius  ,  Ilerroan  et 
Schoonebccii,  dans  leurs  Ilisloires  des  Ordres 
iiiilitntres:  et  le  V.  Anselme.  Le  Palais  de 
l  honneur. 

O  itre  l'ordre  de  l'Eléphant  en  Danemark  , 
il  y  a  encore  un  autre  ordre  sous  le  nom  de 
Danebroch  ,  <!onl  ((uebiues  écrivains  ,  ama- 
teurs des  fables,  font  remonter  l'origine  jus- 
qu'au temps  de  Dan,  fils  du  pairiarcbe  J.icob, 
qui,  selon  eux,  fut  le  premier  roi  de  Dane- 
mark cl  donna  son  nom  à  ce  royaume.  Ils 
disent  que  ce  roi  [rrélendu  étant  sur  le  point 
de  livrer  une  bataille,  l'an  du  monde  2898, 
vil  descendre  en  l'air  une  grande  croi\  blan- 
che qui  fut  le  signe  de  la  victoire  qu'il  rem- 
porta :  ce  qui  fut  cause  qu'il  institua  un  or- 
dre au  luel  il  donna  son  nom  et  celui  de 
lîroge,  qui,  en  danois,  veut  dire  peinture. 
D'.iuirrs,  plus  raisonnables,  croient  que 
Waldimar  il  en  a  élé  l'insUtuteur  vers  l'an 
12I'J.  M.  Harlholin  ,  qui  Cît  de  ce  sentiment 
et  ((ui  a  fait  une  dissertation  sur  l'origine  de 
cet  ordre,  aj')Ule  que  ce  prince  donna  aux. 
che*aliers  un*' croix  lilaïuhe.  Il  y  en  a  d'au- 
tres (|ui  <n  alliibui'nl  aussi  l'instiliition  à 
Waldemar,  el  qui  prelendeui  que  celte  croix 


1.1. m.  lie  était  bordée  de  rouge,  et  que  le  mo- 
tif qui  porl.i  ce  roi  h  instituer  cet  ordre  fut 
qu'étant  près  de  donner  combat  à  ses  enne- 
mis, il  avait  vu  une  croix  pareille  qui  des- 
cendait du  c:el.  Ce  qui  est  certain,  c'est  que, 
s'il  est  vrai   que  AValJcmar  ait  institué  cet 
ordre,    il    n'était   plus  connu   en   Danemark 
lorsque  Chrisliern  V  le  rétablit  l'.in    1672: 
mais  il   y  a  plus    d'np|iarence  qu'il  en  a  c!c 
plulol  l'instituteur  qrjc  le  restaurateur,  el  ce 
fut  à  l'occasion  de   la  naissance  du  prince 
royal  de  Da-iemark  Chrislicrn    Guillaume  , 
son  nis,  qu'il  célébra  avec  beaucouit  de;  ma- 
gnificence. Les  chevaliers  de  cet  ordre  por- 
tèrent alors  en  échaipe  depuis  l'épaule  gau- 
che jusqu'à  la  hanche  droite  un  ruban  blanc 
bordé  ('c  vert  ,  auciuel  pendait  une  croix  t!o 
diamants  ,  el  sur  leurs   manteaux   ces  deux 
Il  ots  en   broderie  ,  Pelu'e  el  Juslit  a  ,  dans 
une  conronui'  de  laurier.  Ce  prinC''  retran- 
cha dans   la  suite  ces  paroles,  et  ayant  ré- 
formé l'ordre,  il  ordonna  ^\\\c  les  chevaliers 
porteraient  un  manteau  de  couleur  aurore, 
doublé  de  salin  blanc.  C"  m  nteau  est  à  peu 
près  de  la  même  manière  que  celui  des  che- 
valiers   de    l'Elcphanl  ;    mais    le   h:iul-de- 
chausscs  est  plus  large  ,   semblable  à  celui 
des  Suisses.  Us  doivent   paraître  devant  le 
roi  avec  cet   habit  de   cérémonie   trois  fois 
l'an,  le  jour  de  l.i  n.iissance   de  ce  prince  , 
celui  de  son  couronnement  el  celui   de  sou 
mariage.  Leur  nombre  n'c-l  que  de  dix-neuf, 
le  roi  en  est  le  chef  et  ne  confère  cet  ordre 
qu'à  des  officiers  d'armée. 

Thim.  Hartho!.,  De  equest.  Ord.  Danehro- 
giii  Dissertai,  hislor.;  et  Schoonebeck,  His- 
toire des  Ordres  militaires,  loin.  IL 

ELISABETH  [Religielses  de  Sainte-).     ' 

De  l'origine  des  religieuses  du  Tiers  Ordre  de 
Saiitt-François ,  avec  la  vie  de  s-tinle  t'ii- 
snbelh  de  Hongrie  ,  veuve  du  landi^rtive  île 
Thuringe,  prentiôre  religieuse  de  cet  ordre. 

C'e-t  avec  raison  que  les  religieuses  du 
Tiers  Ordre  de  Saint- François  regardent 
sainte  Elisabeth  de  Hongrie  comme  leur 
mère,  puis(iu'elle  a  été  la  première  Tiertiaire 
qui  ait  fait  des  vœux  solennels.  Elle  était  fille 
d'André  11,  roi  l'e  Hongrie,  et  de  Gerirude  , 
fille  du  duc  de  Carinthle.  Elle  vint  au  monde 
l'un  1207.  Ses  vertus  commencèrent  à  écla- 
ter presque  dans  le  berceau,  parlirulière- 
ment  sa  cimpasson  envers  les  pauvres,  t|ui, 
dès  l'âge  de  trois  jins,  lui  mérita  un  miracle 
signale  d.-  la  [luissance  de  Dieu  ;  car  ayant 
été  surprise  par  le  roi,  son  père,  lorsqu'elle 
leur  portail  quelque  chose  qu'elle  ne  voulait 
pas  que  l'on  v  il,  el  lui  ayant  ilit  que  c'étaient 
des  roses,  cela  se  trouva  véritable.  Le  land- 
grave de  I  huringe  l'ayant  demandée  en  ma- 
riage pour  son  lils  aine,  el  ayant  envoyé 
pour  ce  sujet  une  célèbre  ambassa<le  au  roi 
de  Hongrie  ,  elle  fut  conduite  en  Thuringe 
dès  l'âge  de  quatre  ans  avec  toute  la  magni- 
ficence possible. 

La  cour  du  landgrave  la  vit  encore  plus 
fervenlc  et  plus  vertueuse  que  ne  l'ava  l  vue 
celle  du  roi  de  Hongrie.  Sa  gouvcrnanle  s'i  l~ 


115 


ELI 


KiX 


lie 


força  de  Jiiniinier  la  longueur  <l(!>scs  prières 
et  (le  ses  aulres  pratiques  de  dcvoVion  ;  mais 
ce  fut  toujours  inulilemenl.  Son  oraison  était 
presque  continuelle,  l'exercice  de  ses  vertus 
ti'avait  point  d'intervalle,  même  dans  ses  ré- 
créations, qu'elle  passait  dans  des  divertisse- 
ments saints  et  pieux.  Sa  dévotion  et  sa  ten- 
dresse étaient  si  grandes  pour  les  mystères 
de  la  passion  de  Jésus-Christ,  qu'elle  répan- 
dait une  grande  abondance  de  larmes  lors- 
qu'elle entendait  la  messe,  qui  en  est  la  re- 
présentation. Le  roi  de  Hongrie,  allant  à  la 
conquête  de  la  terre  sainte  ,  établit  un  sei- 
gneur de  sa  cour,  nommé  lîranebanl ,  pour 
gouverner  le  royaume  pendant  son  absence; 
mais  à  peine  ce  prince  lut-il  parti,  que  tier- 
irude  son  épouse  fut  tuée  par  ce  Br.inebant. 
Les  larmes  que  ce  meurtre  fit  répandre  à 
suinte  Elisabeth  furent  les  fidèles  témoins  de 
sa  douleur  il  de  sa  tcndressepour  celle  prin- 
cesse; mais  s.i  constance  n'en  lut  point  ébran- 
lée ;  elle  lâcha  même  de  porter  son  père  et 
SCS  frères  à  n'en  poinl  tirer  vengeance. 

Après  la  mort  (le  la  reine  sa  mère,  elle  com- 
mença à  vivre  d'une  manière  d'autant  plus 
ugré.ible  à  Dieu,  qn'clleélait  désagréable  à  la 
cour.  Sophie,  duchesse  de  Thuringe,  et  les 
gens  de  celle  cour  la  méprisaienl  ;  mais  ces 
mépris  la  consolaieiil  ,  dans  l'espérance  de 
celle  récompense  que  Dieu  pron«el  à  ceux 
qui  souffriront  la  pcrsécuiion  pour  la  justice. 
Le  landgrave  la  défendait  contre  la  malice 
des  envieux  ou  des  censeurs  de  sa  vertu  ; 
mais  Dieu,  qui  éprouve  ses  élus  comme  l'or 
dans  la  fournaise,  la  priva  de  celle  protec- 
tion par  la  mon  de  ce  prince  ,  qui  arriva 
lorsqu'elle  n'avait  encore  que  neuf  ans. 
Quoique  les  pratiques  de  la  pénitence  ne 
soient  pas  ordinaires  aux  personnes  de  cet 
Âge,  celle  jeune  princesse  les  embrassait  déjà 
a»ec  tant  d'ardeur,  que  la  haire  et  la  disci- 
pline lui  étaient  ordinaires,  el  elle  inventait 
tous  les  jours  de  nouvelles  mortifications. 
La  couronne  qu'elle  portait  sur  sa  léle  les 
jours  de  fêtes  el  de  dimanche,  pendant  qu'clie 
assistait  au  saint  sacrifice  delà  messe,  selun 
la  coutume  des  princesses  de  Thuringe,  lui 
paraissait  si  peu  convenable  au  mystère  d'hu- 
inililé  qui  y  est  représenté  ,  qu'un  jour  elle 
la  quilia;  mais  celle  action,  qui  auiait  dû 
fiiie  l'admiration  de  toute  la  cour,  déplut 
fort  à  la  duchesse  Sophie,  et  procura  de 
nouvelles  humiliations  à  notre  sainte  ,  qui , 
malgré  les  oppositions  de  celle  princesse  il 
lie  ses  courlisans,  à  qui  ses  vertus  donnaient 
de  la  jalousie,  épousa  enfin,  l'an  1221,  à  i'âi,'e 
de  quatorze  ans,  Louis  V,  landgrave  de  Thu- 
ringe, (|ui  en  avait  vingt  el  un.  Elle  eut  de 
ce  mariage  trois  enfants,  un  lils  nommé  Her- 
man,  qui  posséda  la  souverainelé  de  'i'hu- 
ringe  après  la  mort  du  landgrave  son  père  ; 
une  princesse  qui  porta  le  nom  do  Sophie, 
et  fut  mariée  au  duc  de  Brabanl  ;  el  une  au- 
tre fille  qui  fut  abbcssc  d'un  célèbre  monas- 
tère de  Franconie. 

Comme  le  landgrave  son  époux  avait  beau- 
coup de  piété  ,  il  lui  laissait  une  entière  li- 
berté de  vaquer  à  ses  exercices  de  dévotion. 
11  l'cDCOurageail  même  à  la  persévérance,  el 


approuvait  toutes  les  aumônes  qu'elle  distri- 
buait aux  pauvres.  Sitôt  que  celle  princesse, 
qui  cherchait  toutes  les  occasions  d'avancer 
de  plus  en  plus  dans  le  chemin  de  la  perfec- 
tion, eut  nouvelle  de  l'établissement  du  troi- 
sième ordre  de  Saint-François,  elle  demanda 
d'y  être  associée,  el  elle  fut  la  première  en 
Allemagne  qui  le  reçut  des  mnins  d'un  reli- 
gieux du  premier  ordre,  avec  la  permission 
du  prince  son  épou\,  qui  l'eût  pareillement 
embrassé,  s'il  eût  eu  assez  de  santé  pour  en 
pratiquer  les  règles.  Saint  François,  qui  \i- 
v,:it  encore  pour  lors,  ayant  appris  cet'e  nou- 
velle, aurait  bien  souhaite  lui  faire  un  pié- 
senl  digne  de  sa  qualité,  pour  lui  témoigner 
la  joie  qu'il  en  avait  ;  mais  sa  grande  pau- 
vreté lui  en  étant  les  moyens,  il  lui  envoya 
le  pauvre  manteau  qu'il  portait ,  comme  le 
gat;e  le  plus  assuré  de  son  amour  paternel 
pour  une  si  sainte  fille  :  aussi  sainte  Elisa- 
bclh  le  reçut  comme  un  riche  présent ,  et 
avec  le  respect  d'une  véritable  fille  pour  un 
père  si  saint  et  si  ami  de  Dieu.  Le  Saint-Es- 
prit, (|ui  avait  toujours  été  son  guide  avant 
son  mariage,  ne  le  fut  pas  moins  lorsqu'elle 
fui  engagée  dans  cet  état  :  elle  choisit  pour 
son  confesseur  le  Père  llodingerius  ,  dont  se 
voyant  privée  à  l'âge  de  dix-sept  ans  ,  elle 
prit  Conrad  de  .Masburg ,  à  qui  elle  rendit 
une  parfaite  obéissance,  après  en  avoir  fait 
le  vœu  entre  ses  mains  en  1223,  y  joignant 
en  même  temps  celui  de  chasteté,  si  elle  sur- 
vivait au  prime  son  époux. 

Les  pauvres  el  les  m;ilades  étaient  les 
principaux  objets  de  ses  soins  el  de  son  af- 
fection, leur  ayant  fait  bâtir  un  hôpital  à 
Maspuig,  afin  qu'on  leur  y  administrât 
tous  leurs  besoins  ,  tant  spirituels  (jue  tem- 
porels. Dans  un  temps  de  famine  elle  uourr  t 
pendant  deux  années  de  suite  neuf  cents 
pauvres.  Ses  greniers  étant  épuisés,  elle  eut 
soin  de  l'aire  venir  du  blé  de  touli'S  parts  ,  et 
employa  à  cette  œuvre  de  charité  non-sen- 
Iciuent  toute  sa  dut ,  (jue  son  mari  lui  avait 
accordée  ,  mais  encore  sa  vaisselle  d'argent, 
ses  perles,  sis  diamants  ,  et  loul  ce  qu'elle 
avait  de  plus  précieux. 

Le  landgrave, ayant  enti  épris  le  voyage  de 
la  terre  sainte,  laissa  cette  princesse  pour 
régente  de  ses  Etats;  mais  ayant  été  saisi 
d'une  violente  fièvre  dans  la  villu  de  Troïna 
en  Sicile,  il  ne  laissa  pas  d'aller  à  Trente, 
où,  sa  maladie  augmentant  ,  il  mourut  eu 
1227.  On  annonça  à  la  sainte  la  mort  de  st>i! 
mari  ,  dont  elle  reçut  la  nouvelle  avec  une 
parfaite  conformité  à  la  volonié  de  Dieu.  En 
même  temps  on  la  dépouilla  do  ses  Etals, 
comme  indigne  de  la  régence.  Etant  sortie  la 
nu  t  hors  de  son  palais  par  la  violence  de 
ses  ennemis,  qui  l'en  chassèrent  avec  mépris, 
non-seiilemcnl  elle  ne  trouva  aucune  mai- 
son qui  la  voulût  recevoir,  mais  encore,  pour 
surcroîtdcdisgràce.une  malheureuse  femme 
qui  en  avait  reçu  de  grands  secours  la  jeta 
dans  la  boue  au  milieu  de  la  rue,  et  elle  fut 
obligée  de  se  retirer  dans  une  pauvre  étalile 
avec  ses  deumiselles  ,  jusqu'à  ce  qu'ayant 
entendu  sonneràminuil  la  cloche  des  Frères 
Mineurs  pour  les  matines  ,  elle  se  fit  ouvrir 


117                                          ItlCTIONNAlRE  DFS  ORDRFIS  URLIGIRUX.  liS 

J.1  |)(>r!o  (le  ri''j;lis(>,  fl  l'-s  prin  lîo  clianiiT  lo  trouver;  cl  sur    lo    refus    r)u'il   lui  fil  de  la 

7> /'ci/m  m  aciioude  prâ(  os  des  huniilinlions  permission  qu'elle  lui  en  iIcmaiuLiit ,  el'n  lui 

où  Dieu  l'avail  réiluile.  répoiidil  :  Je  le  ferai  ,  je  le  ferai,  ri  roua  ne 

Tu  si  pr.iud  ehaujiciucnl  de  fortune,  eapa-  jionvtz  pas  m'en  empêcher  ;  el  elTectiveuieni , 

hic  djilialire  loul  autre  ciiuraire  que  le  sien,  élanl  euiréc  le  jour  du  vendredi  saint  dans 

ne  fU(|u'augmentersaconsianceelsouain(iur  l'éirlisc   des    Frères    Mineurs,     elle   mit  les 

pour  Dieu  ,  eonirne  il  parut  assez  par  la  pa-  mains  sur  l'autel  ,  el  là ,  en  [irésenec  des  re- 

lience  avec  laquelle  elle    snuiïril   ce  que  la  ligieux    el    de  son    confesseur,    elle  fit   une 

pauvrelé  a  do  plus  I  uile  et  de  plus  huiiiilianl,  profession  solennelle   par  laquelle  elle  rc- 

puisqu'cllc   fut  reduile  à    (iomaiider  du  paiti  nonça   à  loulcs  les  vanités  du  monde,  A  ses 

lie  porte  en  porte  pour  sa  subsistance.  1,'ab-  parents  ,  à  ses  eulanis,  à  sa  propre   volonté 

l)e>se  de  Kizingen  ,  sa    lanle  ,  en  ayant  eu  et  à  tout  ce  que  le  Sauveur  du   monde  con- 

avis,  la  lit  venir  chez  elle,  et    l'envoya  en-  scillo  d'abandonner  pour  <''lrc  parfait, 

suite  à  l'evèque  de  liamlcrf^ ,  qui  éiaii  aussi  Plusieurs   auteurs  disent  (ju'elle  se  retira 

son  oiule,  el  qui  lui  proposa  do  se  remarier,  ensuite  dans    un   monastère,   où  elle   s'eui- 

étanl  encore  dans  la  (leur  de  son  âne  ;  mais  ploya  à  filer  la    laine  el  à  exercer  les  plus 

elle  ne  voulut   point   entendre  parler  de  se-  vils   ministères  :  ce  qui  n'empiîeliail  point 

londes    noces,     ajant    choisi   Jésus-Christ  que,  comme  oilc  ne  s'étail  pas  oblij;ce  à  la 

pour  époux.  clôture  ,  elle  u'(ûl  soin  des  pauvres  de  l'hô- 

Conime  on   portait  le  corps  du  prince  son  pilai  qu'elle  avait   fait    bâtir.    Il  y  eut  aussi 

mari  en  Thuringe,    il  pa'-sa  par  liamberg.  trois  ou  quaire  de  ses  demoiselles  qui  l'inii- 

accompagné  des  sei;ncursqui  l'avaient  suivi  tèrent  ,  el  se  revêtirent  de  l'habit  du  Tiers 

en  Sicile.  La  sainte  veuve  lc\oulul  voir,  pour  Orilre  ;  mais  la  pauvreté  de  celui  de  la  sainte 

lui  donner  1rs  dernières  marques  de  sa  ten-  la  faisait  distinguer  des  autres.  Enfin  ses  aus- 

ilresse  en  l'arrosant  de  ses  larmes.  Ces  soi-  lérilés  et  ses  niortificaiions  ayant  abrégé  ses 

gneurs,  ayant  appris  le  mauvais  traileu)ent  jours  ,  elle  mourut  à  Maspurg  le  10  novem- 

»|ue  l'on  avait  fait  à  celle  princesse,  la  vou-  bre  1231,  u'élant  Cr:corc  que  dans  sa  ungt- 

lurent  rétablir  dans  la  régence,  mais  elle  dé-  quatrième  année. 

Clara   qu'elle  y  ri  nonçait,  et   ne  prétendait  Quelques-uns  doutent  néanmoinsquecellc 

aucune  part  au  gouvernement.  Elle  demanda  sainte  ail  été  du  Tiers  Ordre  de  Saint-Fran- 

soulemenl   que  Ion   conservât  les  droits  de  çois  cl  véritablement  religieuse;  mais  c'est  à 

.--es  enfants,  el  qu'on  lui  donnât  son  douaire  tort,     puisque    saint    lionaventnre     assure 

en  argent ,  jifin  de  le  pouvoir  distribuer  aux  qu'elle  eu  a  été,  et  qu'il  l'a  api)ris   de  son 

pauvres.  Uoddlphe  ,   qui   tenait  le   premier  confesseur  ;  el    que   Vincent  de   Iteauvais  et 

r.ing  parmi  ces  seigneurs  ,  la  ramena  en  Thu-  saint  Anionin,  qui  oui  été  suivis  par  plusieurs 

linge  ,  et  la  remit  en  possession  de  son  pa-  autres    écrivains,    disent   qu'elle  se   revêtit 

lais,  où  elle   fui   traitée   selon    sa  dignité;  d'un  habit  gris ,  el  qu'elle  fit  une   profession 

mais  celle   pieuse    princesse,  appréhendant  solennelle   :  Grisivum  hahilum  induit ,  ri  ha- 

i]ue  les  honneurs  (ju'un  luirendaitcl  l'ahon-  biius  sttsceplioium  voli  emissivnc  solrmnizii- 

dan(  c  où  elle  se  lrou^ait  ne  fussent  contrai-  r('i  .  Wading  .  qui  dispute  à   celle   sainte  la 

reg  au  va'u  de    piuvrelc   auquel  elle  s'était  qualité  île  religieuse  ,  dit  néanmoins  q,ue  sa 

engagée,  renonça  à  tous  ces  honneurs  et  re-  profession   fui  solennelle  :  Positis  super  ul- 

tourna  d'elle-même  à   cet  état  d'humiliation  turemanilius  ,  soicmni  ac  magnanima  profes- 

«jù   SCS   enneujis   l'avaient   d'abord    réduite  sione  renuntial  pormlibus  ,  etc.;  el   dans  un 

îiprès  la  mort  de  son  uiari.    liodolphe  el  les  autre  endroit,  en  rapportant  la  bulle  de  ca- 

aulres  seigneurs  de  la  cour,    peu  accoulu-  nonisalion  ,  où  le  jiapc  (^irégoirc  IX  marque 

mes  aux  humilialiiins  de  la  croiv  de  Jésus-  (|u'elic  se   revêtit  de   l'habit  de  religion,  il 

Christ,   i)ui    leur  semblait  plutôt   une    folie  n'a   pa«  manqué  de    ju.irqucr   à   la  marge 

qu'une  sagesse  .  ne  sachant  à  quoi  attribuer  qu'elle  avait  été  religieuse,   fuil  reliyiosu. 

un  si  grand  mépris  de  soi-même  el  si  con-  Ainsi  c'est  à  lorl  qu'il  loi  dis])uleceltequalilé. 

traire  aux  maximes  du  monde,  ne  la  regar-  Konlinius,  dans  son  llisioire  do  Hongrie,  dit 

dèrent  plusque  conmie  une  folle,  eln'eureni  qu'après  avoirpris  I  habit  de  S.iinl-François, 

plus   pour  elle  <|ue  du  mépris  :    ce   que  la  elle  se  retira  dans  un  monastère,  où  elles'oc- 

saiiite  souffrit  avec  une  joie  qu'il  n'est   pas  cupait  à  liler  cl  aux  ollices  les  plus  vils.  Nous 

faille   d'exprimer,    se  reconnaissant    à   ces  pourrions     rapporter  aussi    le    témoignage 

marques    servante  de  Jésus-Christ,  qualité  d'un  grand  nombre  d'auteurs, ([ui  n'ont  point 

i|u'elle  préférait  à  toutes  les  grandeurs  de  la  fait  diflicnlie.   de   la   reconnaître   pour   leli- 

lerre.  giensc  du    Tiers   Ordre   do    Saint-François; 

l,e  pape  t'.régoire  l\  la  prit    sous  sa  pro-  nrais  ce  que  nous  en   avons  dit  suffira  pour 

lection,  et  la  recommanda  a  Ciuirad  do  ,Slas-  faire  connaître  que  les  religieuses  de  cet  or- 

pur^',  son  confesseur,   entre  les  mains  du-  die  ont  eu  raison  de  la  reconnaître  pour  leur 

(|uel  elle  avait  fait  ,  comme  nous  avons  dit  ,  mire  el  pour  leur  patronne,  yen  ayant  même 

vœu  d'obéissance  el  de  i  hastelé  dèsl'an  122.').  quoIqucN-unes  qui  prenneul  le  lilre  de  reli- 

t^e  sage  directeur  voulut   modérer  son  /cle  gieuses  de  Sainlc-Elisabelh.  Il  est  vrai  qu'elle 

pour  la  pauvreté  ,   qu'elle  voulait  pratiquer  ne  gardait    pas   la  clôture  el   qu'elle  sortait 

dans  un  si  ljaulde!:re  do  perl'ectiun,  que,  non  souveul  de  smi   monasti-re  pour   aller  servir 

C'Urlcnle  do  renoncer  à  loul  ce  (|u'elle  pou-  les  pauvres  a  l'h^tpilal  ;  mais  la  clêlure  n'est 

vail  prétendre  darrs   le  monde,  elle  ne  vou-  p.rs  essentielle  à  la  profession   religieuse;  et 

Uil  vivre  que  des   aumônes  qu'elle  |iourrail  il  y  a  cueoie  aujuurd'hur  plusieurs  cuurinu- 


liO 


EU 


ENF 


S50 


iiaiil6s  de  religieuses  du  Tiers  Ordre  de 
Saint-François  qui  ne  s'y  engagrnl  pas,  et 
qui,  à  l'exemple  de  leur  Mère  sainte  Elisa- 
beth, sortent  de  leurs  monastères  pour  aller 
assister  les  malades,  consoler  ks  mourants, 
ensevelir  les  morts  ,  et  qui  prennent  la  qua- 
lité de  religieuses  hospitalières.  Il  y  en  a 
d'autres  qui  exercent  l'hospitalité  sans  sor- 
tir de  leur  clôture,  d'autres  qui  gardent  seu- 
lement la  clôture  sans  exercer  l'hospitalité; 
et  parmi  celles  qui  ne  sont  point  hospitaliè- 
res, il  y  en  a  de  réformées  qui  prennent  le 
nom  de  religieuses  du  Tiers  Ordre  de  Saint- 
François  de  1  Etroile  Observance  ,  d'autres 
de  religieuses  Kécollcclincs.  Lis  unes  suivent 
la  règle  de  Nicolas  IV,  d'autres  celle  de 
]-éon  X.  La  plupart  sont  habillées  de  gtis. 
Les  unes  ont  des  scapulaires  ,  d'autres  n'en 
porlciit  point.  H  y  en  a  aussi  qui  sont  habil- 
lées de  blanc ,  d'autres  de  noir  et  d'autres  de 
lileu.  Nous  avons  parlé  et  parlerons  encore 
(le  quelques-unes  de  ces  religieuses  plus  par- 
liculièreiiienl  dans  d'autres  articles,  et  nous 
donnons  la  ligure  d'une  des  anciennes  reli- 
gieuses hospitalières  de  cet  orJrc  qu'on  nom- 
mait de  la  Celle,  qui  étaient  habillées  de  gris, 
et  portaient  des  manteaux  noirs  lorsqu'elles 
sortaient  (1).  Gomme  la  règle  défend  de  por- 
ter des  habits  tout  à  fait  blancs  ou  tout  à  fait 
noirs,  ces  hospilaiières  de  la  Celle  des  mo- 
nastères di'  Saiiit-Oiner,  Hesdin  ,  Abbevillc 
et  Montrcuil  ,  eurent  du  scrupule  de  porter 
des  manteaux  noirs, quoiqu'elles  en  eussent 
eu  permission  du  pape  Sixle  IV.  Elles  s'a- 
dressèrent, l'an  14-89,  au  pape  Innocent  VIII, 
qui  leva  leur  scrupule  et  roiifirrai  la  permis- 
sion que  son  piédéccsseur  leurava:t  donnée 
de  porter  ces  manteaux  noirs  qui  les  cou- 
vraient depuis  la  tète  jusqu'aux  pieds  ,  et  ne 
portaient  point  de  scapulaire,  non  plus  que 
certaines  hospitalières  dont  nous  avons  lait 
aussi  graver  l'habillement ,  et  qu'on  appe- 
lait les  Sœurs  de  la  Faille,  à  cause  des  grands 
manteaux  ((u'elles  portaient  aussi,  au  haut 
desquels  il  y  avait  un  rond  de  chaperon  qui 
couvrait  leur  visage  pour  n'être  point  vues 
ilu  peuple  (2)  ;  elles  allaient  servir  les  u)a- 
ladcs  dans  leurs  maisons ,  et  avaient  soin  des 
peslileiés;  leur  habillement  était  gris. 

Vincent.  Bellovaccnsis,  lib.  ssx  Spcculi, 
Jlist.  c.  136.  S.  Anton.,  ui  part.  Ilist.,  titiil. 
19.  f.  2;  Wading,  Annal.  Minorum,  t.  I, 
ann.  1228,  n.  84.  S.  Bonavent.  Serm.  de  S. 
lîlisab.  Conrad  de  Masporg,  EpisI,  ad  Pa- 
pam.  Gregor.  IX  de  Vita  S.  Elhalielh.  Joan. 
Mar.  Vernon  ,  Annal.  Tei  t.  Ord.  S.  Fran- 
6-i«(;i.  Franc.  Bordon,  Chrvnolog.  FF.etSo- 
ror.  Tert.  Ord.  S.  Francisci. 

Nous  ne  partageons  point  le  sentiment 
d'Hclyot  sur  la  profession  de  sainte  Elisabeth 
de  Hongrie,  qu'il  dit  avoir  été  solennelle  ,  si 
le  mol  solennelle  doit  être  pris  à  la  rigueur. 
Néanmoins  nous  ne  décidons  pas  absolument 
que  sa  profession  ne  fut  point  solennelle, 
puisqu'elle  la  faisait  dans  le  Tiers  Ordre  , 
qui  est  un  ordre  véritablement  approuvé 
comme  ordre  religieux;  mais  quelle  commu- 


nauté habi(ai(-olle,  quelles  constitutions  y 
suivait-on  ?  Ce  seraient  des  points  à  éclaircir , 
puisque  Wading  est  allé  jusqu'à  contester 
l'état  religieux  de  la  sainte,  qu'il  reionnalt 
pourtant  à  la  fin  par  l'expression  rcliginsa. 
Quoique  les  religieuses  Tierliaircs  de  Paris 
soient  connues  aujourd'hui  sous  (e  seul  nom 
de  Religieuses  de  Sainte-Elisabeth  ,  elles  no 
sont  point  néanmoins  à  placer  au  rang  do 
celles  qui  sont  mentionnées  dans  ce  chapitre. 
Elles  appartiennent  à  celles  qu'on  appelle 
de  l'Etroite  Observance  ;  nous  renvoyons  les 
additions  que  nous  fournirons  à  leur  his- 
toire au  chapitre  où  leur  élablissemcnl  est 
raconté  parHélyot;  c'est  là  leur  place  nalu- 
relle  ,  c'est-à-dire  à  l'article  de  l'ordre  de  l.'i 
Pénitence ,  ou  Tiers  Ordre  régulier  de  Saint- 
François  d'Assise.  Nous  parlerons  en  même 
temps  de  deux  autres  maisons  que  les  Fran- 
ciscainsdu  Tiers  Ordre  avaient  aussi  à  Paris, 
et  sur  lesquelles  Hélyot  a  gardé  un  silence 
d'au:ant  plus  surprenant,  que  ces  deux  mo- 
nastères étaient  du  même  ordre  que  lui. 

Au  dernier  siècle  les  Franciscains  du  Tiers 
Orrfre.ainsi  qu'on  les  appelait  à  Rome, avaient, 
dans  celte  dernière  ville,  les  quatre  établis- 
sements suivants,  tous  quatre  gardant  la  clô- 
ture et  dirigés  par  des  prêtres  séculiers  : 
Saint-Bernardin  de  Sienne  ,  Sainle-Cluire,  la 
l'urification  ,  Sainte-Apolline.  Aujourd'hui 
les  Franciscaines  du  Tiers  Ordre,  à  Borne, 
sont  encore  sous  la  direction  des  prêtres  sé- 
culiers; nous  ignorons  si  elles  y  ont  plus 
d'une  maison  ,  mais  lous  les  monabtères  dont 
nous  parlons  ici  sont  plutôt  à  mentionner 
dans  le  chapitre  consacré  aux  religieuses  du 
Tiers  Ordrevivant  eu  clôture.  Dans  les  Etals 
autrichiens  ou  compte  aujourd'hui  dix  mo- 
nastères de  religieuses  de  Sainte  Elisabeth, 
diies  Elisabéthines,  renfermant,  en  totalité, 
319  religieuses.  B-d-e. 

ENFANCE   DE  NOTRE-SEIGNEUB  (Filles 

DE    l'). 

De  la  congrégation  des  Filles  de  l'Enfance  de 
Notre-Seigneur  Jésus-Christ. 

Dans  le  temps  que  les  Filles  de  l'Enfant 
Jésus  à  Rome  commençaient  à  former  leur 
congrégation,  comme  nous  le  dirons  à  l'ar- 
licle  Enfant  Jésis,  l'on  en  établit  en  France 
une  autre  que  l'on  nomma  de  l'Enfance  de 
Notre-Seigneur  Jésus  Christ ,  qui  eut  pour 
fondatrice  madame  de  Mondonville  Jeanne 
Julliard,  veuve  de  Claude  de  Turle,  seigneur 
de  Mondonville  ,  conseiller  au  parlement  de 
Toulouse.  Celte  pieuse  dame  avait  déjà  éta- 
bli, conjointement  avec  M.  l'abbé  de  Ciron, 
chanoine  de  la  cathédrale  et  chancelier  de 
l'univcrsilé  de  Toulouse,  quelques  maîtres- 
ses pour  l'éducation  et  l'instruction  des  nou- 
velles catholiques  et  des  pauvres  filles  de  la 
paroisse  de  Saint-Etienne  de  la  même  ville; 
mais,  voulant  changer  cet  établissement  en 
une  congrégation  de  vierges  chrétiennes  qui, 
sans  porter  l'habit  de  religieuses,  pratiquas- 
sent les  vertus  de  religion  et  se  donnassent 


(i)  Voy.,  à  la  fin  du  vul.,  Il"  2a. 


(i)  Voy.,  à  la  fin  du  vol.,  n"  26. 


i:>i 


DlCTIONNAlKi;  DES  OUDllES  RKLICIELX. 


lo2 


tout  à  Dieu   el  au  s>  rvicc  du  prochain,   cllo 
«0  n-iira  en  ItioT  dans  la  maison  qu'elle  avait 
aclielée  pour  l'inslruclion  des   nouvelles  ca- 
tholiques. Elle  y  assembla,  par  les  avis  de 
Al.  de  Ciron,  un  si  grand  nombre  de  Pilles,  que 
cette  maison  n'étant  pas    suffisante  pour  les 
•loger   toutes ,    elle    en    acheta    une   autre 
«l'an  ICtil,    où,   sitôt  qu'elle  fut   logée  avec 
•  J^loule.*  celles  qui  s'étaient  mises  sous  sa  con- 
■duile,  elle  demanda   pour  sa   congrégation 
naissante  des  règlements  el  des  constitutions 
à  l'arche»  L-(|uc  «Je  Toulouse,  Pierre  de  Marca, 
«]ui ,   ne  pouvant  refuser    une    demande  si 
lainte  et  si  juste ,  commit,  par  une  urdon- 
naiicc  du  2.'i  mai  16G1,  M.  de  Ciron  pour  tra- 
vailler à  CCS   mêmes  constitutions.  Elles  ne 
furent   pas    plutôt   Tinies ,   que   madame    de 
Mondoiiville  el  quatre  de  ses  fille»  présentè- 
rent une  requête  à   ce  même  prélat  au  mois 
de  janvier  de  l'année  suivan'e,  pour  le  prier 
«le  les  approuver  et  d'ériger  liur  congréga- 
tion sous  le  litre  de  \' l'.nfance  de  Nolre-Sei- 
f/neur  Jésus-Christ,  et  le  vœu  simple  de  sta- 
hilité  auquel   elles  voulaient  seiigagrr.    Le 
grand  vicaire  de  l'archevêque   répondit  à  la 
icquêlc,   «t  érigea  les  suppliantes  et   celles 
qui  se  joindraient  à  elles  en  société  et  con- 
grégation, sous  le   titre   cl  de   la    manière 
qu'elles  souliailaicnl,  pour  vaquer  à  l'édu- 
cation chrétienne  des  jeunes   tilles,   à   l'in- 
sirnction  de  celles  qui  étaient  nouvellemenl 
converties  à  la  foi  catholique,  au  secours  el 
à  l'assistance  des  pauvres  malades  honteux 
cl  autres,  avec  le  vœu   simple  de  staijililé, 
sous  la  conduite  de  leur  fondatrice  cl  insli- 
lulricc.   Il   approuva    les   conslilu;ions    (]ui 
avaient    été    dressées  par  M.  de   Ciron  ,   à 
condition     néanmuins     qu'aucune    lille     nu 
pourrait  êlre  reçue  à  fjire  le  vccu  do  stabi- 
lité dans  la  congrégation   avant  qu'il  y  eùi 
un  acte  public  de  la  donation  que  la  l'on  ia- 
irice  avait  promis  de  faire   p'  ur  l'entretien 
de  huit  filles  :  ce    qu'elle  oxécuîa  la  même 
iinnée,  et  fit  la  première  ce  vœu  de  staliililc 
le  i  mars.  Elle  envoya   ensuite   à  RoiPiC  les 
tnêines  constitutions,  pour  en  avoir  la  con- 
firmation du  sainl-siége,  que  le  papo  Alexan- 
dre \  Il  accorda  par   un   bref  du  G  novem- 
bre  1GG2.    Le    roi   donna   aussi    ses   lettres 
patentes  pour  cet  élaMissement  le  21  octo- 
bre 1CG3,  et  elles  furent  enregi-trées  au  par- 
lement de  Toulouse  le  17  novembre  suivant. 
Tels  furent  les   commencements  de  la  con- 
grégation  des   Filles   de    l'Enfance,  qui    ne 
sub-isièrcnl  pas  longtemps,  comme  nous  le 
verrons  dans  la  suite. 

Les  constitutions  qui  furent  dressées  par 
M.  de  (jron  contenaient  cinquante -trois 
chapitres.  Le  premier  tr;iilait  de  la  fin  de 
l'institut,  qui  était  d'honorer  tous  les  états 
de  l'Enfance  de  Nulrc-Seigucur  Jésus-Christ, 
mais  particulièrement  celui  dans  lequel  il 
commença  d'in><lruire  les  honmics  el  de  se 
réparer  de  ses  pan  nls  jiour  s'appliquer  plus 
parliculièreaienl  aux  aflaircs  de  son  l'ère  :  ce 
ijuc  les  filles  qui  embrassaient  cet  institut 
Jevaiinl  imiter,  en  jjroturantau  dedans  cl  au 
dehors  de  leurs  maisi  us  riiislruction  et  le 
ttiours   spirituel  el  temporel  du  prochain, 


autant  que  la  modestie  de  leur  étr-t  le  pou- 
vait permetire.  Li-  second  chapitre  déternii- 
nail  les  emplois  des  filles  de  cette  congréga- 
tion ,  dont  le  principal  était  d'élever  les 
jeunes  filles  dès  leur  enfance  dans  la  con- 
naissance des  obligations  de  leur  baptême, 
dans  l'estime  et  la  prali(|ue  des  promesses 
qu'elles  y  ont  faites  à  Dieu,  dans  la  haine  du 
inoude  cl  de  ses  pompes,  auxquelles  elles  ont 
renoncé,  et  daa>  l'amour  de  Jésus-Christ  el 
des  maximes  de  son  l'.vangile.  Le  troisième 
traitait  de  la  manière  que  les  filles  de  l'En- 
fance devaient  s'appliquer  à  celte  éducation, 
en  prenant  des  pensionnaires  dans  leurs 
maisons  el  en  tenant  des  écoles  publiques. 
Le  quatrième  cl  le  cinquièmi*  regarilaienl  le 
gouverneinenl  des  pensionnaires  cl  des  éco- 
i.'S.  Le  sixième  enseignait  la  manière  avec 
laquelle  ces  (illcs  devaient  se  comporter  dans 
la  visite  des  malades  et  la  di^l^il)ulion  des 
bouillons.  Le  septième,  ce  qu'elles  devaient 
faire  à  l'égard  des  nouvelles  catholiques.  Le 
huitième  el  le  neuvième,  le  soin  qu'elles  de- 
vaient avoir  des  hôpitaux  el  des  pauvres  en 
temps  de  peste.  Le  dixièiije  parlait  des  re- 
traites qu'elles  devaient  f.iirc  pendant  huit 
jours  tous  les  ans.  Les  onzième,  douzième, 
treizième  cl  quatorzième  regardaient  la  ré- 
ception des  filles.  Il  devait  y  on  avoir  de 
trois  sortes  :  les  premières  étaient  des  demoi- 
selles de  noblesse  d'épée  ou  de  robe,  qui 
pouvaient  seules  avoir  voix  délibéralivc  dans 
toutes  les  choses  qui  di-mandaient  les  suf- 
frages de  la  communauté,  comme  aussi  voix 
active  et  passive  dans  le-i  élections  aux  char- 
ges de  supérieure,  intenilantc  el  économe  de 
la  maison.  Dans  le  second  rang  étaient  les 
filles  d'une  condition  infeiieure,  qui  pou- 
vaient avoir  part  à  tous  les  emplois  do  la 
congrégation  aussi  bien  que  les  premières, 
comme  de  maîtresses  des  écoh-s,  du  gouver- 
nement des  pensionnaires,  de  la  visite  des 
pauvres,  distribution  des  bouillous,  el  au- 
tres choses  semblables  :  elles  étaient  seule- 
ment exclues  des  charges  de  supérieure,  in- 
lendanle  e'.  économe.  Enfin  dans  le  troisième 
rang  élaienl  les  suivantes,  femmes  de  cham- 
bre l't  servantes  du  gios  emploi,  qui  de- 
vaient toujours  demeurer  dans  la  condition 
que  la  naissance  leur  avait  donnée,  sans 
(]u'ellc$  pussent  en  éire  tirées  pour  quelque 
cause  que  ce  fût.  Avant  que  ces  filles  fissent 
le  v«ru  de  stabilité,  elles  devaient  être  éprou- 
vées pendant  'eux  ans,  lesquels  expirés,  la 
fondatrice  avait  droit  de  les  recevoir  elle 
seule,  cl  après  sa  morl  ce  droit  appartenait 
à  la  communauté.  Celles  qui  étaient  admises 
devaient  faire  vœu  de  stabilité  en  celti.'  ma- 
nière :  Je  pri.meis  sincèrement  el  librement,  et 
je  vuue  à  t'Itunncur  de  la  sainte  et  sacrée  £n- 
f'ince  de  \otre-Seigneur  Jésus-Christ  st<tbi- 
tilé  perpétuelle  dans  la  congré(jation  des 
l-'illes  de  i Enfance,  pour  y  vivre  le  reste  de 
vies  jours  conforméinciii  à  SCS  statuts  et  rè- 
glements, fans  cl6:ure  et  sans  aucune  liaison 
de  vœu  soirniiel,  et  sans  aucune  ajl'cctatiun 
d'habit  sinr/ulier.  Dieu  me  jnssc  lu  ijrùce  d'if 
être  fidèU.  L'épreuve  de  deux  années  ^y 
nommait  l'essai,  cl  \<i  profession  la  liaisoi). 


153 


ENF 


ENF 


154 


afin  de  n'avoir  rion  de  commun  avec  les  au- 
l'es  congrégations  régulières  et  séculières, 
(y est  pour  cette  raison  aue  le  dix-neuvième 
cliapiire  ordonnait  (jue  les  maisons  de  cette 
congrégation  de  l'Enfance  seraient  à  la  ma- 
nière des  maisons  des  bons  bour;;eois,  et 
qu'on  ne  bâtirait  point  surtout  ni  dortoirs, 
ni  réfectoires,  ni  cliaufToirs,  et  que  les  lieux 
(Icsliiics  à  ces  usages  n'en  devaient  avoir  ni 
1.1  forme  ni  le  nom.  Le  quinzième  défenilait  • 
de  recevoir  des  veuves.  La  fondalrice  devait 
être  en  cela  seule  privilégiée;  et  si  quelque 
/lutre  veuve  voulait  faire  quelque  nouvel 
établissement,  on  devait  lui  permettre  seu- 
lement de  passer  huit  jours  dans  la  maison 
do  six  mois  e-n  six  mois.  Lu  seizième  exciul 
toute  singularité.  Les  maisons  ne  pouvaient 
avoir  (le  chapelles  extérieures,  de  clocher, 
ni  de  cloche,  que  de  la  grosseur  nécessaire 
pour  élre  entendue  dans  toute  la  maison, 
i.es  niles  ne  devaient  point  changer  le  nom 
de  baptême  ni  celui  de  leur  famille,  el  \,e 
devaient  point  s';  ppeler  sœurs.  Conformé- 
ment au  (lix-septiènj  ■  ,  (lies  ne  devaient 
point  affecter  d'étoffe  particulière,  mais  de- 
vaient se  servir  iiidiiïéreniinent,  suivant  les 
saisons,  de  celles  qui  sobI  au-dessous  de  la 
pure  soie,  simples  et  unies,  sans  passements 
d'or  cl  (l'argent,  ou  de  soie.  Il  ne  devait 
point  non  plus  y  avoir  de  couleur  affeetée; 
mais  elles  pouvaient  choisir  indilTéremmcnt 
le  noir,  le  gris,  le  blanc,  le  leuille-morte,  ou 
au're  couleur.  Les  habits  des  demoiselles 
suivantes  et  des  femmes  de  chambre  ne  de- 
vaient être  t|ue  de  laine  avec  quelijue  dilïé- 
rence,  soit  dans  la  nature  des  étolfes,  soit 
dans  la  forme  d'  s  habits.  Le  dix-huitième 
prescrivait  quels  devaient  être  les  ameul)lc- 
menls  des  filles.  Les  chipilres  dix-neuf  et 
vingt  concernent  les  liquais,  les  carrosse-, 
les  chevaux  el  les  chaises  à  poricuis.  11 
était  dit  dans  le  vingtième  chapitre'  que  les 
laquais  ne  pouvaient  pas  être  reçus  s'ils 
avaient  servi  des  filles  dans  le  uiunde  ;  et 
que  les  cochers  devaient  être  mariés.  Il  de- 
vait y  avoir  beaucoup  d'union  entre  les  tilles 
d'une  méiue  maison,  et  cette  union  devait 
être  réciproque  entre  toutes  les  maisons  de 
l'institut,  comme  elle  est  recommandée  ilaus 
les  chapitres  vingt-sept  et  vingt-huit.  La 
maison  de  Toulouse  devait  élre  le  centre  de 
l'union  des  iiutres,  à  cause  qu'elle  avait  reçu 
les  prémices  de  l'esprit  de  l'institut  :  c'est 
pourquoi  elles  devaient  avoir  une  communi- 
cation particulière  avec  elle,  la  consulter 
dans  toutes  les  dilûcullés  considérables  ((ui 
poiivaicn;  survenir,  el  suivre  ses  décisions 
après  la  mon  de  1 1  foudairice,  qui  était  l'o- 
racle de  toute  la  congrégation,  el  qui  seule 
avec  l'économe  et  nue  autre  fil!e  nommée 
par  la  cumuiunaulé,  pouvait  recevoir  l'ar- 
gent, non-seulement  de  la  maison  de  Tou- 
louse, mais  encore  des  autres,  comme  il  est 
marqué  dans  le  chapitre  quarante-six.  Les 
trente-trois  et  irente-einq,  où  il  éiait  parlé 
de  la  nourriture,  des  pénitences  et  mortifi- 
cations des  filles,  ne  les  obligeaient  ([u'à 
celles  que  l'Eglise  impose  à  tous  les  chré- 
tiens. Elles  ne  soupaieiit  p:is  néanmoiiis  le 


vendredi  ni  le  samedi,  exrep'é  celles  qui  vi- 
sitaient les  malades,  qui  ne  pouvaient  s'en 
abstenir  qu'avec  la  permission  de  la  supé- 
rieure. Leur  nourriture  ne  pouvait  être  que 
de  viandes  ordinaires,  comme  bœuf,  veau, 
mouton,  pigeons  et  volailles,  la  venaison 
leur  étant  défendue,  hors  les  cas  auxquels 
les  médecins  la  jugeraient  absolument  né- 
cessaire ;  et  les  filles  de  service  devaient  être 
traitées  conim^^  elles  l'auraient  été  dans  les 
maisons  particulières.  Elles  ne  pouvaient 
sorlir  qu'avec  une  compagne.  Il  ne  leur 
était  pas  permis  de  manger  dehors.  Elles  de- 
vaient ordinairement  aller  les  dimanches  et 
les  fêtes  à  la  paroisse  pour  assister  à  la 
messe,  au  prône  et  aux  vêpres.  On  ne  pou- 
vait dire  la  messe  dans  leur  chapelle  domes- 
tique que  dans  des  cas  extraordinaires  ; 
mais  madame  de  Mondonville  s'était  réservé 
la  liberté  de  la  faire  dire  quand  elle  voulait. 
Elles  se  confessaient  toutis  dans  l'église  de 
la  paroisse,  où  leur  confesseur  devait  avoir 
un  confessionnal,  avec  la  permissiim  du 
curé  donnée  par  écrit  ;  et  ce  confesseur  ne 
pouvait  être  jamais  qu'un  prêtre  séculier, 
libre  de  tout  engagement  et  liaison  à  toute 
compagnie,  congrégation  ou  communauté. 
C'est  ce  qui  est  marqué  dans  les  chapitres 
trente-six,  trente-huit  et  quaraiile  et  un. 
Nous  omettons  les  aulres,  qui  ne  regardent 
que  les  pratiques  des  vertus,  les  élcciionj 
des  supérieures  et  oHQcières,  et  l'économie 
des  maisons. 

Ces  constitutions  trouvèrent  des  censeurs, 
on  écrivit  contre,  et  on  voulut  persuader  à 
M.  de  Ciron  d'en  changer  plusieurs  articles  ; 
mais  il  ne  put  s'y  résoudre.  On  y  fit  néan- 
moins quelques  changements,  l'an  lG8'i,  par 
ordre  de  M.  l'archevêque  de  Toulouse;  mais 
ces  cliangements  ne  lurent  point  considéra- 
bles, on  retrancha  seulement  quelques  mois 
de  peu  de  conséquence  et  quelques  pensées 
pieuses  :  en  sorte  que  ces  secondes  consiitu- 
lions  ne  diiTéraient  en  rien  des  premières 
dans  l'essentiel: ce  qui, selon  les  .ipparences, 
ne  fut  pas  agréable  au  roi,  qui,  peu  salis- 
fait  de  c-!S  filles,  ayant  voulu  voir  ces  con- 
stiluiioiis  tant  nouvelles  qu'anciennes,  pour 
être  iiilormé  de  leurs  coutuuies  et  usages,  fit 
défense,  le  7  noveuil)re  1685,  de  recevoir  des 
filles  dans  cette  congrégation  sans  nouvel 
ordre,  et  par  un  arrêt  du  conseil  d'Etat  du 
12  mai  168G  il  annula  la  fundaticn  de  celte 
congrégation,  cassa  l'institut,  et  ordonna  aux 
filles  de  se  retirer  chez  leurs  parents  ou  ail- 
leurs. Elles  en  appelèrent  au  saint-siége  la 
même  année  ;  mais  les  poursuites  qu'elles 
firent  furent  inutiles,  et  ne  servirent  qu'à 
faire  donner  une  lettre  de  cachet  à  madame 
de  Mondonville  leur  fondatrice  pour  se  re- 
tirer à  Goutances,  où  elle  a  fini  ses  jours. 
Ainsi  la  congrégation  de  l'Eufince  fut  enliè- 
rement  supprimée.  Elle  s'était  déjà  multi- 
pliée el  avait  des  établissements  à  Toulouse, 
à  Saint-Félix,  à  iMontesquiou,  à  Pézénas,  à 
Carmang  et  à  Aix  en  Provence. 

Constitutions  des  Filles   de  l'Enfance  ini' 
priinccs  en  IG'Ji,  et  Mcinoires  du  temps. 


»5r.  rsicTioNNAïui:  i)i;s 

K.NFANT  JÉSUS  (Fiilks  ou    Sûpubs  i>k   i.'). 
Voyfz  Ivcoi.rs  Cniii'.TiENJiEs. 

KM'AM  Ji-SUS  (l'iLi.KS  DE  1.'). 

I>ci  Filles  de  l'Enfant  Jésus  à  Rome, 

(.es  Filles  de  l'Enfant  Jésus  à  Homo  rccon- 
nnissrnl  |iour  fuiidalrico  une  sainte  nilc, 
nommée  Anne  ^loroni,  qui  prit  n.ilssance 
djnsla  ville  de  Lucqucs.  Se  »o);inl  i  rphclinc 
et  s.ins  biens,  elle  »inlà  Uoiiio,  où  elle  entra 
âu  service  de  t)ucli]U('S  ilanu'S  de  qualité. 
Elan(  iijjce  de  quarante  ans,  elle  voulut  si' 
retirer  de  l'emharras  du  monde,  donl  elle 
connaissait  la  \aniié  et  rincon>lance  par  l.i 
pratique  qu'elle  a\ail  eue  avec  lui  pendant 
le  temps  de  son  ser\iie;  el  Dieu  lui  inspira 
dassemlilcr  quelques  filles,  avec  li  squcllcs 
clleedmmenea  à  vivieen  commun, l'an  llilil, 
après  en  avoir  obtenu  la  permission  des  su- 
péri(  urs.  U'aLord  elle  les  cnlrelenail  de  ce 
qu'elle  avait  pu  amasser  élanl  en  service  ; 
mais,  comme  c»  la  n'était  pas  sulfisant  pour 
les  maintenir,  elle  leur  demanda  une  légère 
pension  |)our  aider  à  leur  subsistance.  Le 
F.  Côme  berlintani,  Clerc  Kcgulicr  de  la  con- 
grégation de  la  Mère  de  Dieu  cl  curé  de 
Sainte-Marie  ni  Cawpiiclli,  qui  était  son  di- 
recteur, voyant  la  lerveur  de  ces  saintes 
filles,  en  prit  un  soin  particulier;  cl ,  afin 
d'alTcrnilr  ce  [.ieux  tlablisseinent,  non-seu- 
lement il  le  fil  approuver  par  le  saiiil-siége, 
mais  il  dressa  des  rèjiicmenis  que  ces  filles 
suivirent.  Il  [lersuada  à  la  foiidulricc  de  se 
c<>nsacr<r  entièrement  au  service  de  Dieu  el 
du  procbair.  avec  ces  lilles,  et  de  vingt  qua- 
tre qu'elles  étaient  pour  lors,  il  en  choisit 
douze  dfS  plus  fcrvcnies  qui,  ayant  mis  en 
coiiimun  tout  ce  qu'elles  avaient,  sans  aucun 
égard  à  leur  intérêt  parliculier,  se  proposè- 
renldc  garder  inviolablemcnl  la  chasteté,  la 
pauvreté  el  l'obéissance.  Néanmoins  elles  ne 
s'y  engagèrent  par  aucun  vœu,  se  conlen- 
lant  de  celui  de  persévérance  jusqu'à  la 
mort  dans  la  congrégation.  Kllis  le  firent  le 
2  juillet  d(!  l'an  1073,  jour  consacré  par  l'I'^- 
gli«e  à  lion(ir(  r  la  visite  que  la  sainte  Vierge 
rendit  à  sa  cousine  Elisabeth. 

Ces  filles  ne  doivent  pas  être  pl;s  de  Iren- 
le-trois,  cn  l'bonneur  des  ircuie-lrois  années 
que  Nolrc-Scigiii  ur  Jésus-t^hrisl  a  vécu  sur 
la  terre.  .Après  lri;is  années  de  probalion, 
el  élanl  âgées  de  vingt  el  un  ans,  elles  font 
pubiiqunnenl  vo'u,  comme  neus  1  avons  dit, 
de  persévérer  jusqu'à  la  morl  dans  la  cori- 
gré;;alion,  el  un  f  rme  propos  de  garder  la 
pauvreté,  la  eliastelé  el  l'obéissance.  Si  pour 
de  justes  raisons  elles  veulent  être  relevées 
de  ce  voeu  de  per.-évtrance,  soit  pour  se  ma- 
rier ou  eniierdans  quibiue  religion,  elles 
peuvent  redemander  ce  qu'elles  ont  apporté 
a  la  (ommunauté  sous  le  litre  de  dot  ou 
d'aumône,  loul  y  esl  en  commun,  personne 
n'ay.inl  rien  en  propre.  Leur  baliillcmenl  esl 
de  serge  de  couleur  tannée,  cn  l'honneur  de 
Notre-Dame  du  monl  (^armcl,  el  consiste  eu 
une  robe  ceinte  d'une  ceinture  de  laine. 
Elles  ii'onl  ni  guimpes,  ni   voil»  s,  ni  coilTcs 


OnWlKS  nF.LIGHL'X 


\r.i, 


lorsqu'elles  sont  dans  la  maison  ;  mais  quaiid 
elles  sortent,  elles  mettent  un  grand  voilo 
noir  qui  descend  depuis  la  léle  jusqu'aux  ta- 
lons (1).  Ces  sorties  sont  fort  rares,  menant 
Une  vie  foil  retirée;  il  n'y  a  que  certains 
jours  de  l'année  qu'elles  vont  toutes  ensem- 
ble visiter  quelques  églises.  Les  jours  de 
jeûne,  tous  les  vendredis,  les  dinianches  el 
fêles,  el  pendant  loul  le  temps  de  carême, 
elles  ne  parlent  à  aucune  personne  de  de- 
hors, non  pas  même  à  leurs  parents  au  pre- 
mier degré.  Lllcs  oui  tous  les  jours  une  heure 
d'oraison  nienlalc;  el,  onire  les  prières  vo- 
cales et  plusieurs  exercices  de  pieté  qu'elles 
Ibnl  en  conminn,  elles  disent  toutes  les  fél  s 
le  grand  office  de  l'Eglise.  Tous  les  ans  elles 
font  les  exercices  spirituels  pendant  huil 
jours,  el  tous  les  mois  elles  ont  un  jour  de 
recueillement.  Le  jour  qu'elles  rommunirnl 
elles  portent  le  cilice  pendant  la  matinée. 
Trois  l'ois  la  semaine  elles  prennent  la  <lisei- 
[dine.  Outre  les  jeûnes  de  rf'glise,  i  Iles  jeû- 
nent encore  tous  les  vendredis,  les  samedis 
el  toutes  les  veilles  des  fêtes  de  la  sainte 
^'ierge.  A  certains  jours  elles  font  publique- 
ment des  mortifications.  Elles  s'occupent 
I  eauconp  au  tr.ivail  manuel,  comme  à  f.iirc 
loiiles  sortes  d'ouvrages  à  l'aiguille,  à  dessi- 
ner, à  peindre,  el  plu>ieu'S  autres,  lilles  ap- 
prennent le  plain-chant,  à  jouer  des  orgues, 
du  clavecin,  de  la  basse  (!e  viole,  't  autres 
instruments  de  musiijue,  qu'elles  enseignent 
aussi  à  d'autres  filles  qui  demeurent  chez 
elles  en  qualité  de  pensionnaires,  donl  le 
nombfi'  ne  doit  pas  excéder  celui  de  trente. 

Outre  cela  elles  doivent  recevoir  graluiie- 
iiient  pendant  huit  ou  dix  jours  les  liiles  qui, 
voulant  (aire  leur  première  communion,  leur 
demandent  à  se  retirer  chez  elles  pour  s'y 
préparer  cl  se  faire  instruire  de  ce  qu'elles 
doivent  savoir  pour  recevoir  avec  fruil  cet 
auguste  sacrenieut.  Elles  reçoivent  de  la 
même  manière  les  filles  qui  veulent  embras- 
ser l'élal  religieux,  afin  de  les  exercer  dans 
les  pratiques  de  la  vie  religieuse  ;  cl  font 
faire  pendant  biiilou  di\  jours  les  exercices 
spiriiuels  aux  filles  et  aux  femmes,  veuves 
ou  mariées,  qui,  avec  la  permission  du  car- 
dinal vicaire  el  le  consinlemenl  de  leurs  ma- 
ris ou  de  leuis  parents,  se  veulent  relirer 
chea  elles.  Celle  communauié  lui  d'abord 
établie  dans  une  maison  qui  était  à  la  place 
M  rgana,  proche  Sainte-Marie  l'n  Cainpitilli : 
elle  fut  ensuile  transférée  à  Sainle-l'ra\èdo 
el  enfin  [iroclie  Saint- Laurenl  inpanis  spci- 
Vil,  où  elle  subsiste  à  présent  avec  beaucoup 
d'édification. 

t>arlo.  liarthulom.  Piazzn  i'vsevuloi}.  Ko- 
uwnu.  pari,  i,  iruct.  k,  cup.  7;  et  l'hilipp. 
Uunanni,  Calai.  Ord.  rcligios..  part.  ii. 

t.VtE  (OuuRE  DE  Saint  JàcyL'Es  un  t). 

§  !•■'.  Dis  clinnoinrs  et  des  rhnnninrssrs  d 
l'ordre  de  Sainl-Juciiues  de  l' Ejicc  en  E 
paijnc. 

La  qualité   de  chanoines    ré;;uliersi  que 


(1)  Vov.,àl.i  lin  du  vol.   u'ïl. 


IS7 


EPE 


ErE 


158 


les  souverains  ponlifcs  ont  donnée  anx  clja- 
pclains  de  l'ordre  militaire  de  Sainl-Jacques 
de  l'Epée  en  Espagne,  nous  oblii^e  de  parler 
ici  de  cet  ordre.  Mais  comme  nous  ne  trai- 
tons p,irli(ulièrcnicnl  que  dos  ciianoincs  ré- 
g;uliers,  nous  ne  parlerons  des  (hevaliers 
de  Sainl-Jacquos  de  l'Epée  qu'après  avoir 
rapporté  ce  qui  concerne  leurs  chapelains, 
puisqu'ils  sont  chanoines  réguliers;  et  nous 
joindrons  aussi  dans  ce  chapitre  les  reli- 
gieuses du  nicnic  ordre,  (]u'on  peut  ausiii  re- 
garder comme  chanoinessos.  Il  y  en  a  qui 
prélendcni  que  RaiDire  1",  roi  de  Galice, 
a  fondé  l'ordre  militaire  de  Sainl-Jacques 
l'an  846,  apics  avoir  remporté  une  célèbre 
victoire  sur  hs  Maures  où  il  en  demeura 
soixante-dix  mille  sur  le  champ  de  bataille; 
parce  que  l'on  en  attribua  le  succès  au  se- 
cours de  ce  saint  apôtre,  (|u'on  avait  vu 
rombaltre  dans  la  mêlée,  tenant  à  la  main  un 
étendard  hlanc  sur  lequel  II  y  avail  une  épéc 
rouge  en  l'orme  de  croix  ;  ce  qui  fit  que  ce 
prince  institua, en  faveur  des  g;entilshommes 
qui  avaient  conib;itlu  en  celle  action,  une 
confrérie  sous  le  tilrc  de  Saint-Jacques,  à  la- 
quelle il  donna  pour  armes  une  épée  de 
gueules  en  champ  d'or  avec  celte  devise  : 
Itubet  eiisis  santjuine  Aiahum;  et  ils  ajoutent 
que  dans  la  suite  (Clle  confrérie  fut  érigée 
en  ordre  militaire  par  les  iouvcrains  ponti- 
fes. Mais  pour  détruire  celle  opinion  il  ne 
faut  que  faire  atlenliou  à  ces  armes,  qu'on 
donne  à  cet  ordre  dés  le  commencement  de 
son  institution,  ce  qui  en  marque  évidem- 
ment la  fausseté,  puisque  les  armoiries  n'ont 
été  en  usage  qu'après  le  dix  ou  le  onzième 
siÈcle. 

Ce  ne  fut  que  l'an  1170  ([ue  cet  ordre  com- 
mença, sous  le  rè^nc  de  Ferdinand  II,  roi  de 
Léon  et  de  Galice.  Et  ce  qui  y  donna  occa- 
sion furent  les  courses  des  mêmes  Maures, 
qui  troublaient  la  dévotion  des  pèlerins  qui 
allaient  à  Composlelle  visiter  le  sépulcre  de 
saint  Jacques.  Les  chanoines  de  Sainl-Eloi, 
qui  avaient  un  monastère  au  royaume  de 
(îalice,  bâlircntdes  hôpitaux  de  leurs  reve- 
nus, qui  élaienl  fort  considérables,  sur  le 
chemin  qu'on  appelle  communément  Voie 
Française,  pour  y  loger  les  pèlerins.  Le  pre- 
mier fut  celui  de  Saint-Marc  l'évangéliste  , 
hors  les  murs  de  la  ville  de  Léon;  el  le  se- 
cond au  détroit  deCastille  appelé  De  las  Tien- 
Uas.  Peu  de  lcm|)s  après,  treize  gentilshom- 
mes, à  leur  imitation,  prenant  le  même  apô- 
tre pour  leur  protecteur,  s'obligèrent  |»ar 
vœu  de  garder  el  assurer  les  chemins  contre 
les  incursions  des  iniidèles.  Ils  communi- 
quèrent leur  dessein  à  ces  chanoines  de 
Sainl-Eloi,  leur  proposant  de  ne  faire  qu'un 
corps  entre  eux,  de  mettre  en  commun  le  re- 
venu du  monastère  el  ce  qu'ils  pouvaient 
.•ivoir  cl  pourraient  acquérir  dans  la  suite 
par  le  moyen  de  ceux  «jui  se  joindraient  à 
eux.  Comme  ces  chevaiers  posbédaienl  déjà 
plus  de  vingt  châteaux,  les  chanoines  lurent 
plus  faciles  à  accorder  celte  union,  cl  devin- 
rent par  ce  moyen  dans  la  suite  depondanls 
de  ces  chevaliers,  dont  ils  ne  sont  que  lei 
t'hjjiclains. 


Celle  union  se  fil  l'an  1170,  et  l'accord  fut 
fait  entre  don  Pierre  Ferdinand  de  Fuenles 
Encalada  ,  de  la  part  des  cheva  iers  ;  et,  d.- 
la  part  des  chanoines, entre  don  Ferdinand, 
qui  fut  ensuite  évêqne,  comme  il  paraît  par 
son  épitaphp  qui  est  dans  l'église  du  couvent 
d'Uclès  :  Obiit  Ferdinandus  rpisco/ms  B.  Ma- 
riœ  prinms  prior  ordinis  mililiœ  S.  Jucobi, 
cru  CCXI  :  ce  qui  répond  à  l'année  1173, 
deux  ans  avant  la  confirmation  de  l'ordre, 
qui  ne  fut  accurdéc  que  l'an  1175,  auquel 
iimps  don  André  était  prieur.  Le  cardinal 
Hyacinthe  Bubo,  qui  a  été  pape  sous  le  nom 
de  (^éloslin  111,  et  qui  éiait  pour  lors  légat  en 
Espagne  du  pape  Alexandre  III  pour  termi- 
ner les  dilTérends  qui  étaient  entre  les  rois  do 
Léon  et  de  Caslille, allant  au  diocèse  d'Osma, 
reçut  le  maîtr.-  don  Pierre  Ferdinand  avec 
quelques-uns  de  ce*  chevaliers  qui  le  furent 
visiter  ;  et  il  ajiprouva  ce  nouvel  ordre.  Tou- 
tes choses  y  lurent  ré,'lées  par  son  conseil, 
cl  l'an  1175  le  même  Pierre  Ferdinand  alla 
trouver  l(!  pape  Alexandre  III  à  Home,  ac- 
compagné de  quelques  chevaliers  dont  le 
nombre  élail  augmenté,  et  oblint  la  confir- 
mation de  cet  ordre,  conformément  à  ce  que 
le  cardinal  Hyacinthe  avail  ordonnépar  une 
bulle  qui  fut  expédiée  la  même  aimée.  Elle 
enjoini,  enlreaulres  choses, aux  clercs  de  cet 
ordre  de  vivre  en  communauté  sous  l'obéis- 
sance des  supérieurs,  d'administrer  les  sa- 
crements aux  chevaliers  ,  qui  leur  doivent 
fournir  tout  ce  ((ui  esl  nécessaire  pour  leur 
entrelien  ;  et  elle  contient  en  substance  loul 
ce  que  les  uns  el  les  autres  doivent  faire. 
jMais  le  cardinal  Albert,  du  litre  de  Saint-Lau- 
renlm  Lucina  ,  de  l'ordre  de  Saint-Benoît, 
el  qui  fut  aussi  pape  dans  la  suite  sous  le 
nom  de  Grégoire  VllI,  leur  écrivit,  par  or- 
dre d'Alexandre  l!l,  une  règle  plus  ample, 
qui  contient  soixante  et  onze  chapitres,  qu'il 
approuva  el  qui  fut  confirmée  [lar  Jules  II 
l'an  1507.  Il  esl  vrai  que  par  la  bulle  d'A- 
lexandie,  les  chanoines  de  Sainl-Jac(iues  ne 
sont  appelés  que  clercs  ;  mais  par  deux  au- 
tres bulles  des  papes  Adrien  X[  de  l'an  1522, 
et  de  Clément  VII  de  l'an  1531  ,  il  esl  parlé 
d'eux  sous  le  nom  do  chanoines  réguliers, 
soumis  à  la  règle  de  Saint-Augustin. 

Une  des  premières  dignités  qui  est  tou- 
jours occupée  par  un  de  ces  chanoines  est 
celle  de  prieur,  auquel  était  confiée  li  con- 
duite de  tout  l'ordre  après  la  m:jrl  du  grand 
maître,  avant  que  la  grande  maîtrise  eût  été 
réunie  à  la  couronne  d'Espagne  ;  el  il  avail 
le  soin  de  convoquer  ceux  (jui  devaient  pro- 
céder à  une  nouvelle  élection.  Cette  dignité, 
qui  lut  d'abord  unique,  a  éié  dépuis  divisée 
en  deux,  pour  les  raisons  que  nous  dirons 
au  $  suivant  ;  el  il  y  a  |irésentement  deux 
prieurs,  savoir,  le  prieur  d'Uclès,  et  le  prieui 
du  Sainl-M.irc  de  Léon,  qui,  par  concession 
des  souverains  ponlifes,  porleiil  tous  deux  la 
milre  et  les  autres  ornemenls  pontificaux, 
Le  prieur  d'Uciès  a  néanmoins  retenu  quel- 
ques prérogatives,  comme  d'enseigner  la  rè- 
gle à  ceux  qui  veulent  être  reçus  dans  l'or- 
dre, qui  sonl  obligés  de  faire  leur  année  de 
probalion  dans  ce  couvent,  où  il  y  a  des  ica- 


159 


DICTIOÎSNAIUE  DES  OUimES  IIKLIGIEUX. 


I«0 


les  niïccicos  pour  ce  sujet,  et  c'est  aussi  dans 
ce  lieu  qu'ils  doivent  faire  profession. 

Ces  chanoines  sont  ^ï'ius  de  noir,  comme 
les  ecclésiasliqucs,  el  niellent  sur  leur  sou- 
tane un  surplis  sans  manclics  ,  appelé  giral- 
«lèle,  elsur  le  rôle  gauche  de  leur  manteau 
ime  croix  rouge  en  forme  d'épée  qui  est  celle 
de  l'ordre  (I).  Au  chœur  ils  mettent  par  des- 
^us  leur  surplis  ou  giraldt'te  .  une  chape  et 
un  camiil  noir  avec  la  croix  de  l'ordre  sur 
1 1  poilrino  2)  ;  et  dans  le  collège  d.-  S  ila- 
itiaiique  ils  -c  servent  de  la  chape  cl  caniail 
de  violet  lirun.  Les  prieurs  portent  les  sur- 
plis avec  des  manches  étroites,  c'est-à-dire 
dis  rocliets,  comme  les  prélats.  11  y  a  eu 
parmi  eux  plusieurs  personnes  illustres.  <  l 
qui  sont  sorties  de  cet  ordre  pour  remplir  des 
digniiés  e(  elésiasliques  :  comme  Julien  Ha- 
iiiiiez,  le  docteur  Uuraud  el  Nicolas  de  Car- 
riazo,  qui  onl  été  évéques  de  Cadix  ;  Martin 
Pc  irez  lie  Aïala,  archevêque  de  Valence,  Ter- 
(liniiid  de  Azevedo  ,  évèque  d  Os  lia  el  en- 
suite a  relie  véque  de  Bruges,  Jérôme  de  Leyna, 
archevêque  de  Montréal  en  Sicile,  Barthélémy 
de  l'erez,  évéquc  de  Tunis  ,  et  plusieurs  au- 
tres. (Juelques-uns  se  sonl  aussi  distingués 
par  leur  sainlclé,  comme  Alphonse,  prieur 
d'Uclès,  donl  .Martin  Peirez  ,  archevêque  do 
Valence,  a  donné  la  Vie  ;  d'auires  par  leurs 
écrits,  comme  Benoît  ,  Arias  Monlanus  ,  du 
monastère  de  ?aint-Mirc  de  Léon  el  prieur 
de  Saint-Jacques  de  Séville,  mort  en  1598, 
qui  a  travaillé  à  la  Bible  polyglotte  d'Anvers. 
llpossédiiil  parfaileiiient  treize  langues,  et 
entre  autres  l'hébraïque,  la  chaldécnne,  la 
grecque  el  la  syriaque.  11  fut  chéri  du  roi 
Ihilippell,  et  a  été  regardé  comme  un  des 
plus  graiiils  hommes  que  l'iispj^ne  ail  pro- 
tiuiis.  Le  Mai  re  Isla,  Didacc  de  la  Moïc  ou 
Mola.  J<an  llamircz.  oui  été  aussi  écri\ains 
de  cet  ordre,  qui  a  produit  plusieurs  autres 
p.  rsouues  illusl.'e>  par  leur  piété  et  par  leur 
doctrine. 

Autrefois  le  prieur  de  Saint-Jacques  de 
t^éville  uélail  poin(  soumis  aux  supérieurs 
de  l'ordre,  parce  que  ce  cojxenl  fut  fondé 
l'an  VM)  par  don  Laurent  Suare/  de  Figue- 
r.a,  grand  maitre  de  l'ordre,  qui  oblinl  du 
pape  des  bulles  pour  exempter  ce  couvent 
de  toute  juridiction  de  l'ordre  :  mais  l'an 
iVi'.)  don  Henri  d'Aragon  ,  neuvième  grand 
mailrc  el  son  successeur  ,  Us  lit  révoquer 
par  le  pape  Martin  V,  qui  soumit  ce  couvent 
au  grand  maitre  de  l'ordre  cl  au  prieur  d'U- 
clès ;  el  don  Alphonse  de  Cardeu.is  l'iucor- 
pnra  à  l'ordre  dans  un  chapHre  izénér.il,  l'an 
IWO.  Les  prieurs  d'Uclès  étaient  perpe  ucK; 
mais  don  l'erdiuand  de  Sanlojo,  ayant  éié 
élu  eu  r»2<j,  renonça  volontairement  à  celle 
digmié,  comme  il  parait  p.ir  la  bulle  d'A- 
lexandre NI  de  l'an  LiOl,  qui  ordonna  qu'a 
l'avenir  i's  seraient  élus  tous  les  trois  ans. 
Alinde  lever  lesilispules  qui  pourraient  sur- 
venir au  sujet  de  l'elecliou  de  ce  prieur,  les 
religieux  lireul  un  concordil  en  1()'»8,  par  le- 
(|uel  ils  consentirent  qu'alteruaiivemenl  on 
en  prit  un  de  la    province  de  lu  Manche  ou 

(I)   Yotj.,  ii  la  fin  ilii  vol.,  ii"  '2S. 

Ci)  Vvij.,»  la  liu  du  vul.,  Il"  2'J. 


Mamhn,  el  un  de  celiede  la  liiliera  elCnmpo 
(le  Moniicl,  el  que  de  quarante  religieux  dont 
il  y  en  avait  huit  dans  lecoUégede  Salaman- 
que,  il  y  en  aurait  la  moitié  d'une  provinco 
el  la  moitié  de  l'autre,  eu  sorte  néanmoins 
qu'il  y  en  aurait  toujours  quatre  de  Campo 
de  MontirI,  ce  qui  fui  approuvé  par  le  roi 
rhilip|ielVelconlirmé  par  le  pape  Urbain  VIII. 
Ceux  du  monastère  de  Saint-Marc  de  Léon 
onl  consenti  aussi  par  un  concordat  que 
leurs  prieurs  seraient  allernalivemenl  des 
provinces  de  Léon  et  d'Kslramadure. 

l'our  les  peines  que  les  chanoines  onl  d'ad- 
niiiiislrcr  les  sacrements  aux  chevaliers  , 
ceux-ci  sonl  obligés  de  leur  payer  les  dîmes 
de  tous  leurs  troupeaux  el  animaux,  comme 
veaux,  agneaux,  pouleis,  i  ochons,  poulains, 
vaches,  etc.  ;  et,  comme  il  y  a  beaucoiip  do 
chevaliers  an  service  du  roi,  il  y  a  toujoi  rs 
qualre  chanoims  qui  suivent  la  cour,  pour 
conlesser  el  administrer  les  sacrements  aux 
chevaliers  qui  s'y  trouvent.  Le  chevalier  ([ui 
est  éloigné,  et  qui  ne  peut  se  confesser  à  l'un 
de  ces  chanoines,  doit  prendre  la  ])ermissiou 
du  prieur  de  sa  province  pour  aller  à  un 
autre  confesseur  lel  que  bon  lui  semblera,  le- 
quel a  pouvoir  de  l'absoudre  de  tous  pèches, 
excepté  celui  de  n'avoir  pas  payé  les  dîmes 
à  l'ordre,  qui  est  un  cas  léservé  parmi  les 
chevaliers.  Les  chanoines  onl  des  couvents 
à  Tolède,  à  Séville,  à  Cuença,  à  Barcelone, 
à  Grenade,  à  Salamanque,  el  en  plusieurs 
autres  endroits  de  la  domination  d'Espagne. 
Pour  élrc  reçus  dans  l'ordre,  il  faul  qu'ils 
fassent  preuve  de  qualre  races  tant  du  côté 
paternel  que  du  c6lé  maternel,  non  jias  do 
noblesse,  qui  n'esl  que  pour  les  chevaliers, 
mais  seulement  ccni  ue  Icu'S  ancêtres  n'ont 
point  été  fadeurs,  commissionnaires  ,  cour- 
tiers, changeurs,  ni  exercé  aucun  arl  mé- 
canique ou  vil,  et  que  les  mêmes  ancêtres 
n'ont  point  êié  juifs,  hérétiques,  et  comme 
tels  punis  par  le  tribunal  de  l'inquisilion.  11 
y  a  aussi  qualre  autres  couvents  de  ces  cha- 
noines en  Portugal,  dont  un  à  Lisbonne, qui 
est  le  chef  de  cet  ordre  en  ce  royaume.  Le 
roi  Jean  111  voulut  le  réunir  à  la  congiéga- 
lion  de  Sainte-Croix  de  Conimbre  avec  un 
autre  de  religieuses  chevalôres  ou  cliauoi- 
nesses  du  mêm^  ordre,  qui  est  aussi  à  Lis- 
bonne ;  mais  la  mort  de  ce  prince,  qui  ar- 
riva peu  de  temps  après  qu'il  eul  pris  celle 
résolution,  l'empôeha  de  l'exécuter. 

L'on  prétend  que  le  premier  monastère  ilo 
ces  chevalières  fut  fondé  à  Salamanque,  l'an 
l.'Il-2,  par  le  chevalier  Pelay  l'erez  et  Marie 
Mendez,  sa  femme.  Le  principal  exercice  de 
ces  chanoiiiesses  chevalières  e>l  de  loger  l'I 
de  pourvoir  à  toutes  les  iiècessilés  des  pèle- 
rins ([iii  vont  visiter  les  reli(|ues  de  saint 
Jacques.  Mlles  sonl,  aussi  bien  i|uc  les  i  lia- 
noiiies,  habillées  de  noir,  tant  (elles  ijui  sont 
destinées  pour  le  clurur  que  celles  (ju'on  ap- 
pelle converses  ou  sœurs  lai(|ues,  les  premiè- 
res portant  une  croix  rouge  en  forme  d'é- 
pée (.'(i  semblable  à  celles  des  chevaliers,  cl 
les  converses  la  portant  avec  quelque  dillc- 
(3)  Yoy.,  ï  la  lin  du  vuJ.,  ii"'  ÔO  cl  ô[. 


161 


EPE 


EPE 


ira 


reiice.  Ellrs  ont  sept  monastères  en  Espapne, 
qui   sont    liï  Saiiil-Espril   de  Salamanque  , 
Sainle-Foi   de  Tolède,  Notre-Dame  de  Jun- 
queras  à  Barcelone,  Sainte-Croix  de  Valla- 
dolid,  Sainle-Eulalie  à  Mérida,  Notre-Dame 
de  Grenade,  et  un  à  Madrid,  fondé  \cts  le  mi- 
lieu du  dernier  siècle.  Celles  de  Barcelone  ne 
sont  pas  religieuses;  mais  les  autres  font  les 
vœux  solennels  de  pauvreté,  de  chasteté  et 
d'obéissance ,   et   dans    ce    monastère  elles 
gardent  différetnincut  la  clôture,  car  à  Val- 
ludolid,  à  Mérida  et  à  Grenade,  elles  obser- 
vent une  clôture  très-exacte,  ne  permettant 
à  (jui  que  ce  soit  d'entrer  dans  leurs  monas- 
tères, et   elles    n'en   sortent   point  pareille- 
ment. A  Sainte-Foi  de  Tolède  elles  reçoivent 
les  visites  des  femmes  dans  une  salle,  et  n'y 
admettent  point  d'hommes.  Dans  celui  de  Sa- 
lamanque les  hommes  et  les  femmes  entrent 
indifféremment  dans  le  monastère  avec  la 
permission  de  la  commandatrice.  Les  reli- 
gieuses mêmes  sortent  à  certains  jours  dans 
leur  église,  et  vont  jusque   sur  le   porche; 
mais  elles  ne  peuvent  aller  plus  avant  sans 
la  permission  du  conseil   des  ordres.  Celles 
de  Madrid,  ayant  été  fondées  sur  le  modèle 
de  celles  de  Salamanque,  ont  voulu  jouir  de 
ce  même  privilège;  à  quoi  le  conseil  des  or- 
dres s'est  opposé,  prétendant  qu'elles  n'en 
doivent  pas   jouir  sur  ce  qu'elles  n'avaient 
été  fondées  que  depuis  le  concile  de  Trente, 
qui  ordonna  la  clôture  à  toutes  les  religieu- 
ses, ce  qui  a  donné  lieu  à  plusieurs  écrits  de 
part  et  d'autre  en  Espagne.  Miis  à  l'égard  de 
celles  de   Barcelone .  comme  elles  ne  sont 
point  r<'ligieuses,  elles  peuvent  se  marier  et 
ne  sont  point  tenues  à  une  clôture  si  exacte. 
Elles  font  seulement  vœu,  comme  les  cheva- 
liers, de  pauvreté,  d'obéissance  et  de  chas- 
teté conjugale.  Kilos  sont  gouvernées  par  une 
prieure  ou  coinmanJatrice  ,  et  ne  diffèrent 
un  rien  des  véritables  religieuses  ,  soit  pour 
l'habillement,  soit    pour  les   exercices   du 
t'h  iMir  et  de  communauté;  et  étant  mariées 
ou  veuves  elles"  [jeuvent  toujours  porter   la 
croix   (le   l'ordre.   Celles  du    monastère   de 
SanctoK  en  Portugal  sont  de  même  que  celles 
de  Barcelone,  et  peuvent  aussi  se  marier. 

Les  religieuses  des  autres  monastères  ne 
faisaient  aussi  que  des  vœux  pareils  à  ceux 
que  font  celles  de  Barcelone  et  de  Sanctos, 
ce  qui  a  duré  jusqu'en  l'an  1480,  que,  sous 
le  grand  maître  don  Alphonse  de  Cardenas, 
le  chapitre  général  de  l'ordre  ordonna  qu'à 
l'avenir  elles  ne  pourraient  se  marier  et  se- 
raient obligés  de  faire  des  vœux  solennels. 
Les  anciens  statuts  obligeaient  les  femmes  et 
les  filles  des  commandeurs  de  se  retirer  dans 
ees  monastères  pendant  qu'ils  étaient  à  la 
guerre,  et,  s'ils  y  mouraient,  le  grand  maître 
fixait  le  temps  pour  qu'elles  pussent  se  dé- 
terminer ou  à  prendre  l'habit  de  l'ordre  ou 
à  sortir  des  monastères;  mais  cette  pratique 
a  été  abolie,  à  cause  que,  le  nombre  des  che- 
valiers augmentant ,  plusieurs  monastères 
n'auraient  pas  suffi  pour  recevoir  les  fem- 
mes, les  veuves  et  les  filles  des  chevaliers. 


Les  religieuses  ne  peuvent  être  reçues  sans 
le  consentement  de  toute  la  <o  i  niunaulé,  et 
les  supérieures  endonnent  avis  au  conseildos 
ordres  pour  avoir  aussi  son  consentement, 
et  afin  qu'il  commette  quelqu'un  pour  faire 
les  informations  nécessaires  ,  qui  sont  les 
mêmes  que  l'on  fait  à  la  réreptiDn  des  che- 
valiers, non  pas  louchant  la  noblesse,  mais 
seulement  touchant  la  religion  des  pères  et 
mères,  et  des  aïeux  ,  qui  ne  doivent  point 
être  soupçonnés  d'hérésie,  le  président  nom- 
me un  clianuinc  de  l'ordre  pour  faire  les  in- 
forcnations,  qui  sont  ensuite  présentées  au 
conseil,  qui  nonne  son  conscnlemenl  si  elles 
sont  approuvées.  Les  monastères  élisent  1  s 
supérieurs,  qui  sont  aussi  confirmées  parle 
conseil  des  or^lres,  et  le  roi  leur  accorde  des 
lettres  qui  ordonnent  aux  autres  religieuses 
de  lui  obéir.  Les  religieuses  de  Salamanque 
prétendent  faire  remonter  l'antiquité  de  cet 
ordre  jusqu'en  l'an  1030,  par  le  moyen  d'un 
privilège  qu'elles  conservent  dans  leur  mo- 
nastère, qui  est  daté  de  cette  année;  mais 
nous  en  avons  fait  connaître  la  fausseté  eu 
parlant  des  chevaliers  du  Saint-lîsprit  de 
Montpellier,  qui  ont  voulu  aussi  se  prévaloir 
de  ce  privilège. 

Voyez  Francisco  Garo  de  Torres,  nis(.  de 
lo.i  Ordines  militares  de  Santiago  Culatravay 
Alcanlara.  Francisco  de  Uadez  ,  Chronir.  de 
ias  Ordenes  y  Cavall.  de  Santiaga.  Diego  de  l.i 
Mola,  de  (a  Orden.  delà  Cavall.  de  S.  Tiayo. 
Andr.  Mendo,  de  Ordinibus  mitituribus  Uis- 
quis.  Canonic.  Joann.  Mariana  ,  de  Rebm 
Hispanicix  lib.  xi ,  cap.  13  et  14.  Turque!, 
Hist.  d'Espagne,  tom.  I,  liv.  x.  Fa  vin,  llist. 
de  Navarre,  liv.  iv.  Tambur.  de  Jur.  Abbat. 
dsp.  2k,  qutest.  k.  Philijip.  Bonauni ,  Caia- 
loy.  omn.  Ord.  riliij.  part,  i  et  ii.  L'abbé 
Giustiniani,  Mennénius,  Uermant  et  Schoo- 
nelieck,  dans  leurs  Uistoires  des  Ordres  mi- 
lilaires. 

§    2.    Des    chevaliers   de    Saint  -Jacquet  de 
i Epée  en  Espagne, 

Nous  avons  suffisamment  parlé  de  l'ori- 
gine des  chevaliers  de  Saint-Jacques  de  l'E- 
pée  dans  le  paragraphe  précédent,  il  nous 
reste  seulement  à  parler  des  principaux  évé- 
nements arrivés  dans  cet  orure.  Ces  cheva- 
liers, s'étant  joints  d'abord  aux  chanoines  de 
Sainl-Eloi ,  comme  nous  avons  dit,  embras- 
sèrent la  règle  de  Saiul-Augustiii  et  firent 
les  vœux  ordinaires  de  religion.  Leur  habit 
consistait  en  une  robe  blanche  et  un  chape- 
ron de  même  couleur  ;  et,  pour  marque  de 
leur  ordre,  ils  portaient  sur  la  poitrine  une 
épéeruuge.et  ils  avaient  la  têle  rasée  en 
forme  de  couronne  (Ij  comme  les  chanoines, 
et  vivaient  en  commun. 

Cet  ordre  commençant  à  se  multiplier  , 
leur  premier  grand  maître,  don  Ferdinand 
de  Fuenles  Encalada,  entreprit  le  voyage  de 
Rome  pour  en  avoir  l'approbation  du  saint- 
siége.  Alexandre  111,  en  le  confiriiianl  par 
sa  bulle  de  l'an  1175,  dont  nous  avons  fait 
metUiun,  fil  quebiuas  règlements  qui  concer- 


(II)  loi/.,  à  la  lin  du  vol.,  ii*  32. 


IGÔ 


niCTÎONNMRF.  DKS  ORDRES  REI.IGIECX. 


164 


iinipnl  ces  clievaliers.  cl  cnirc  autres  il  lour 
|i«'rinil  (li>  SP  marier.  Il  rép'la  1rs  clii^iiités  de 
cel  ordre,  dont  la  jjiiis  considérable,  a|irès 
celle  lie  graïul  maître,  est  celle  des  lieize, 
qui  ont  le  pas  devanl  tous  les  auires  com- 
inanJcurs.  Avant  (jue  la  grande  inailri)-e  eût 
v\c  réunie  à  la  couronne  .  ils  l'Usai'  iii  le 
grand  iiiailre.  le  pouv.iient  dé|  c-er  s'il  el.i.l 
Iciinbé  en  quehiue  fauie,  et  en  élite  iiit  .lUire. 
Us  donn.iicnl  l  ur>  conseils  dans  toutes  les 
alTains.  terminaient  les  dilTéremts  qui  pou- 
vaient ariiver  entre  le  };rand  maître  et  les 
chiïvaliers:  mais  leur  pouvoir  est  bien  dinii- 
iiiié  prcseiilement,  ()uc  le  conseil  dos  ordres, 
doi:t  nous  |)arlcr(ins  ci-après,  csl  juge  de  lu  us 
les  diiïérrnds  qui  arri^ent  dans  Tordre.  La 
seciMjile  dignic  est  celle  de  jirieur,  qui  est 
aiinoxcc  aux  chanoines  ;  et  la  troisième  celle 
de  grand  commandeur. 

La  première  place  (|u'ils  conquirent  sur 
les  Maures  fut  Caci  rès  dans  l'Kstramadure. 
Ils  la  prirent  l'an  1171 ,  et  le  roi  don  Ferdi- 
nand la  donna  à  ces  chevaliers,  (lui  aidèrent 
ce  prince  à  coniiuérir  liadajoz  ,  lîue\a,  Lu- 
chena  el  Monle-.Major,  dont  il  leur  lit  aussi 
présent.  iM.iis  Ferdinand  étant  entré  en 
guerre  avec  son  n(  veu  Alphonse  I\  ,  roi  de 
Casiille,  surnomnié  le  Nohle  ,  sur  lequel  il 
avait  usur;  0  plusieurs  places  pendant  la  mi- 
noriié  de  ce  prince,  et  soupçonnant  les  i  he- 
valiers  de  Saint-Jacques  de  favoriser  son  ne- 
veu, il  les  fil  sortir  de  ses  Etat«,  cl  reprit  les 
biens  qu'il  leur  avait  donnés.  Ces  chevaliers 
se  réfu;;ièrenl  en  (>asiille,  où  le  roi  Alphonse 
leur  donna,  l'an  1  I7i,  le  château  dTclès,  au- 
près duq'iel  i's  hâlireiil  un  couvent,  qu'ils 
élahlir(  nt  p'iir  chef  de  leir  ordre,  et  l'année 
suivante  1175  le  grand  maître  alla  à  Uume, 
pour  oblenir  du  pape  Alexandre  iil  la 
conrn  uialiun  de  son  ordre,  c<)nime  nous 
avons  dit. 

L'an  117G,  ce  grand  maître  et  les  cheva- 
liers prirent  les  urni  s,  pou'  le  service  ilu 
même  .Mphonse,  cnnire  le  roi  de  Navarre, 
Fanchc  \'l,  dit  le  Sage,  <)ui,  profilant  pareil- 
lement de  la  minorité  de  ce  pi  iiice,  i\u\  était 
aussi  son  neveu,  prit  des  places  du  royaume 
de  Castille,  (|n'A'phonse  recouvra  par  le  se- 
cours des  ciievaliers  de  Sainl-Jac(ines.  La 
même  année,  les  Maures  ciaiit  entrés  sur  les 
terres  de  la  dépendance  d'Uclès  (jui  apparte- 
naient aux  chevaliers,  ils  y  firent  de  grands 
ravages;  mais  il»  ne  i)urenl  s'emparer  du 
château  d  L'clés,  ni  de  celui  d'.VIliiarilla,  qtu- 
les  chevaliers  défendirent  vigoureusement. 
Le  roi  de  (bastille,  ayant  su  le  dégât  (|ue  les 
iulidèles  avaient  fait  sur  les  terres  des  che- 
va  i(!rs,  mil  des  troupes  sur  pied,  à  la  prière 
du  grand  iiiailie.  Il  lit  vetiir  aussi  les  cheva- 
liers du  Temple  el  de  CaTitrava,  el  niil  le 
.'-iége  devant  (^uei'.ça ,  donl  il  s'cmpar.i,  et 
donna  aux  chevaliers  de  Saint-Jacques  une 
maison  dans  cette  ville  avec  de  gros  reve- 
nus. Ce  prince,  rontinuanl  la  guerre  contre 
les  Maures,  prit  sur  eux  les  cliàieaux  d'A- 
larcon  et  qucli|Ucs  auires,  cl,  pour  récom- 
penser ces  (hev.aliers  du  secoais  qu'ils  lut 
avaient  dcmné,  il  leur  (il  don  encore  de  quel- 
ques héritages  a  Alarcoji. 


Le  grand  maître  Pierre  Ferdinand  de  T  ticn- 
tcs  ,  après  avoir  gouverné  l'ordre  pendant 
treize  ans  ,  mourut  Tan  118'».  Il  eut  pour 
successeur  Ferdinand  Diaz,  et  dès  lors  il  y 
eut  schisme  dans  Tordre,  parce  que  les  che- 
valiers qui  éiaii'iit  retournés  dans  le  royaume 
de  Léon,  el  qui  étaie:it  rcnirés  dans  Ts  bon- 
nes grâces  de  Ferdinand,  élurent,  par  les  or- 
dres de  ce  prince  don  Sanche  Fi mandez,  et 
ceux  de  Castille,  par  ordre  du  roi  Alphonse, 
don  Ferdinand  l)iaz  ;  et,  comme  cc^  chcv.i- 
liers  av.iient  déjà  acquis  beaucoup  de  biens 
dans  ces  deux  royaumes,  que  le  couvent  >'e 
Saiiit-.Marc  éiail  dans  celui  de  Léon  ,  cl  le 
couvent  d'Uclès  dans  ci'lui  de  ("aslile.ces 
deux  princes  prétendirent  avoir  (  hacun  dans 
leur  royaume  le  chef  de  l'ordre.  Sous  le  gou- 
vernement du  grand  maître  Ferdinand  Uiaz 
en  Castille,  qui  était  le  légitime  grand  maî- 
tre, les  chevaliers  de  Sainl-Jacques  cou(|ui- 
rent  sur  les  Maures  plusieurs  places,  el  ceui 
de  Léon  Gr>'nt  aussi  la  guerre  ,à  ces  infidè  es 
dans  Tlislramadure.  Mais  Tan  118G,  le  grand 
maître  de  Castille  ayant  i  énoncé  à  celte  di- 
gnité, celui  de  Léon  fut  reconnu  par  les  che- 
valiers de  Castille.  La  même  année  le  roi 
Alphonse  donna  à  Tordr.î  le  monastère  de 
Sainte-Fuphérnie  de  Cocollos  dans  la  vieille 
Castille  ,  i)our  y  meltro  des  religieuses  du 
même  ordre,  i\m  furent  transférées  dans  la 
suite  à  Sain'e-Foi  de  Tolède. 

Ce  fui  du  temps  de  ce  grand  maître  don 
Sanche  Fernandez  ,  que  se  donna  la  bataille 
d'Alarcos ,  Tan  1 193  ,  où  la  victoire  s'etant 
déclarée  piur  les  infidèles,  il  y  cul  un  grand 
nomlire  de  chrétiens  qui  y  périrent,  parmi 
lesquels  II  y  avait  plusieurs  chevaliers  des 
trois  ordres  de  Saint-Jacques  ,  de  l^alatrava 
el  d'Alcantara.  Ce  grand  maître  y  fut  blesse, 
et  mourut  peu  de  jours  a[)rcs.  donzalve  Ko- 
driguez  lui  succéda  la  même  année.  A  peine 
ful-il  élu,  qu'Alphonse,  roi  de  L-.'ou,  déclara 
la  guerre  au  roi  de  Castille  A'i)honse  l\,  et 
se  ligua  avec  le  roi  de  Cordoue,  qui  lui  en- 
voya un  grand  no^ibre  de  .Maures,  avec  'es- 
quels  il  entra  sur  les  terres  du  roi  de  Castille. 
Il  avait  aussi  avec  lui  plusieurs  dievaliers 
de  Saint-Jacques,  de  ses  royaumes  de  Léon 
et  de  Galice,  et  il  les  obligea'd'elire  un  grand 
maître,  afin  qu'ils  ne  fu>sent  pas  soumis  à 
celui  de  Castille  :  ainsi  l'on  vil  encore  deux 
grands  maîtres  dans  Tordre.  Mais  un  autre 
roi  maure  des  .\lmoades,  voyant  que  le  roi 
de  Castille  était  occupé  à  la  guerre  conlru 
le  î(ii  de  Ia^ou,  vint  du  lôté  île  la  Manche  el 
ravagea  les  terres  des  enviroiis  de  Tolède, 
de  Madrid  ,  d'Alcala  ,  d'Uclès  ,  d'Huète  el  do 
Cuen^-a,  jusqu'à  Alcarai,  et  ennnena  captifs 
un  grand  nombre  de  personnes  avec  un  ricli(> 
butin.  Les  deux  rois  de  Léon  et  de  (bastille» 
tirent  ensuiie  la  paix,  à  condilion  que  celui 
de  Léon  épouserait  la  fille  du  roi  de  Castille; 
cl  le  roi  de  Léon  voyant  (]iie  quelques  che- 
v.iliers  de  Saint-J.ici|ues  de  ses  sujet",  avaient 
suivi  le  paiti  du  roi  île  ('asiille,  s'en)paro 
d'une  p.iiiie  des  b  ctis  (!(•  Tordre. 

i.eL:r;inil  maire  (îonzalvcHodriguez,  étant 
mor^l  T.in  \-l.i'.\ ,  (ion/alve  Ordonnez,  <ioi 
avait  ele  élu  par  les  che>;ilicrs  de  Léon,  fut 


165 


EPE 


EPE 


10» 


reconnu  pnr  ceux  de  Casiille,  et  p.ir  ce 
moyen  le  schisme  cessa  dans  l'ordre.  Sucro 
Rodriguez,  sixième  grand  maître,  voyant  les 
rois  de  Léon  et  de  Castille  en  paix  ,  porta  ses 
armes  contre  les  Maures  ;  il  entra  sur  leurs 
terres  du  côté  de  Campo-de-MoulfuI,  et  prit 
sur  eux  quelques  places,  entre  auires  le  châ- 
teau de  Castil-Segura  et  celui  de  Villa-Nneva. 
Sous  le  gouvernement  de  Ferdinand  Gun- 
zalve  de  Maragnon,  huitième  grand  niaîlre  , 
le  roi  de  Castille  ayant  guerre  avec  celui  de 
Navarre  l'an  riOO,  les  cliev.ilit-rs  de  Sainl- 
Jacques  servirent  utiiemeiit  le  roi  de  Cas.ille, 
et  le  loi  d'Aragon  étant  eniré  sur  les  terres 
des  Maures  par  le  royaume  de  Valence,  le 
grand  maître  sortit  d'Utlès  avec  les  cheva- 
liers et  les  attaqua  de  l'autre  côté.  Il  prit  sur 
eux  les  châteaux  de  Javaloyas,  Villa-Queda 
et  Soutaner.  Ayant  joint  ensuite  le  roi  d'A- 
ragon, ils  firent  ensemble  le  siège  de  Mont.i- 
luan,  qui  fui  pris  d'assaut  et  dont  ce  rui  lit 
don  à  l'ordre.  On  y  fonda  la  grande  co:ii- 
maiiderie  d'Aragon,  dont  l'ordre  a  toujours 
joui  jnsqu'à  présent. 

l.e  graml  maître  don  Pierre  Arias,  qui 
succéda  à  ferdinand  Gonzalve  de  M.iragnon, 
lit  aussi  la  guerre  aux  Maures,  sur  lesquels 
il  lit  leaucoup  de  prisonniers  et  emporta  de 
riches  dépouilles.  Ces  mêmes  chevaliers  fi- 
rent j  araître  encr.re  leur  courage  l'an  1212, 
liaii!,  1,1  l'umeuse  bataille  a])pelée  de  Meura- 
dal  ou  des  Naves  de  Tolnsa,  où  les  rois  de 
i;aslille,  de  Navarre,  d'Aragon  et  plusieurs 
prinres  «le  France,  de  Provence  et  d'Italie, 
i|(ii  étaient  joints  ensemble,  remportèrent 
la  victoire  sur  ces  infidèles,  qui  y  perdirent 
plus  do  15')  mille  hommes  d'infanterie  et  30 
mille  chevaux.  Le  grand  maître  don  Pierre 
Arias  reçut  quelques  blessures  dans  ce  com- 
bat,  doni  il  mourut.  Son  successeur,  don 
Pierre  Gonzalve  d'Aragon,  eut  le  même  sort 
au  siège  d'Alcaiez.  Après  lui  don  Garcias 
tionzalve  de  Candaiiio  fut  élu  devant  la 
même  place  pour  grand  maître,  l'an  1213,  et 
peu  de  temps  après  la  ville  fut  prise. 

Après  cette  conquèle,  le  roi  de  Castille, 
ayaal  encore  lait  ligue  avec  celui  d'Arjgou 
pour  combattre  contre  les  Maures,  les  che- 
valiers de  Sain!-Jaci|ucs  lurent  obligés  de 
soutenir  les  intérêts  de  leur  pnnce  en  lui 
donnant  du  secours,  et  le  servirent  utilement 
dans  celte  guerre.  Mais  ce  prince  étant  mort 
l'année  suivante,  1214,  et  Ferdinand  111,  sur- 
nommé le  Saint,  et  qui  en  efl'et  a  été  mis  au 
catalogue  des  saints  l'an  16GI,  ayant  hérité 
du  royaume  de  Castille,  par  la  renonciation 
que  la  reine  Berengère  sa  mère,  femme  d'Al- 
phonse, roi  de  Léon,  en  avait  faite,  le  même 
Alphonse  déclara  la  guerre  à  la  Castille,  pré- 
tendant avoir  la  tutelle  ds  son  fils  Ferdi- 
nand et  le  gouvcrncmenl  du  royaume.  I^es 
chevaliers  de  Léon  suivirent  son  parti,  et  ne 
voulurent  point  reconnaître  le  grand  maître 
de  Castille;  ils  élurent  même  un  grand 
maître  dans  le  royaume  de  Léon,  qui  fut  don 
Mariiii  Pélaez,  ce  qui  causa  un  lurt  cunsi  I,  - 
ruble  à  l'ordre  pendant  les  trois  ans  que  dura 
le  schisme.  Les  chevaliers,  bien  loin  de  faire 
la  siuerre  aux  Maures,  en  vinrent  souvent 


aux  mains  les  uns  contre  les  autres.  Mais  le 
roi  (le  Léon  lit  cesser  le  schisme,  ordonnant 
à  Martin  Pélaez  de  renoncer  à  la  grande 
m  iîtrise,  et  aux  chevaliers  de  reconnaître  le 
grand  maître  de  Castille. 

Alphonse,  roi  de  Léon,  étant  mort  en  1230 
et  ayant  laissé  ses  royaumes  de  Léon  et  de 
Galice  à  ses  deux  filles  les  infantes  Sanche 
et  iJonce,  au  préjudice  do  son  fils,  saint  Fer- 
dinand, roi  de  Castille,  ce  prince  voulut  sou- 
leiiir  ses  droits,  et  vint  avec  une  puissante 
armée  pour  prendre  pessessiondt;  ces  royau- 
mes. Les  grands  se  partagèrent,  les  uns  pre- 
nant le  parti  du  roi  de  Castille,  que  la  reine 
Uérengère  sa  mère,  veuve  du  roi  de  Léon,  fa- 
vorisait, et  les  autres,  celui  des  infantes,  et 
du  nombre  de  ceux-ci  furent  les  chevaliers 
de  Saint-Jacques  avec  leur  grand  maître.  Lu 
roi  de  Castille  s'accorda  avec  les  infantes 
ses  sœurs,  elles  renoncèrent  aux  prétentions 
qu'elles  pouvaient  avoir  sur  les  royaumes 
de  Léon  et  de  Galice,  et  consentirent  que 
saint  Ferdinand  leur  frère  prît  possession 
de  toutes  les  places  de  ces  deux  royaumes, 
à  la  réserve  du  château  de  Castroras,  que  ce 
prince  leur  donna  leur  vie  durant,  avec 
treille  mille  maravéïlis  d'or  tous  les  ans,  jus- 
qu'à ce  (ju'elles  fussent  mariées  ou  religieu- 
ses. Ce  château  appartenait  aux  chevaliers 
de  Sainl-Jac(iues.  Saint  Ferdinand  l'avait 
donné  lui-même  auparavant  au  cardinal  Hia- 
cynihe  pour  l'Eglise  romaine, et  ce  cardinal 
l'avait  donné  a  l'ordre  de  Saint-Jacques  eu 
fief  :  c'est  pourquoi  le  pape  Grégoire  IX 
ayant  su  que  le  grand  maître  avait  consenti 
que  te  château  fût  donné  aux  infantes,  il 
l'exco/nmunia  pour  avoir  consenti  à  l'alié- 
nation d'un  bien  «lui  appartenait  à  l'Eglise, 
et  il  ne  lui  donna  l'absolution  iju'après  avoir 
déclaré  que  les  infantes  n'avaient  ni  la  pro- 
priété, ni  l'usufruit  de  ce  château,  ni  de  ses 
revenus,  mais  qu'elles  y  pouvaient  seule- 
ment demeurer,  l'e  grand  maître  fit  encnro 
la  guerre  aux  Maures;  et  il  y  eut  de  son 
temps  de  grands  dilTérends  entre  les  cheva- 
liers et  les  chanoines  de  cet  ordre,  qui  fu- 
rent terminés  par  les  évêqucs  de  lîurgos  et 
de  Placencia,  commissaires  du  pape,  et  le 
grand  maitre  renonça  à  cette  dignité  l'an 
122'^.  ^-'es  successeurs  tirent  aussi  de  temps 
en  temps  de  nouvelles  conquêtes,  cl  rcmpoi- 
tèrenl  des  victoires  sur  les  infiièles,  n'y 
ayanl  quelquefois  que  les  chevaliers  seuls 
qui  les  comljatlissent,  et  d'autres  Ibis  étant 
joints  aux  troupes  des  rois  de  Castille, 
comme  il  arriva  dans  la  bataille  de  Bellama- 
riii,  l'un  1340,  sous  le  roi  Alphonse  XI,  où 
il  y  eut  plus  de  deux  cent  mille  de  ces  infi- 
dèles qui  y  périrent.  On  y  lit  un  si  grand 
nombre  de  prisonniers,  cl  le  butin  y  fut  si 
gr.-.nd,  quu  le  prix  de  l'or  en  baissa  d'une 
sixième  partie.  Don  Alphonse  Mendez  de 
(jusman  était  pour  lors  grand  maître,  cl, 
étant  mort  en  13i2,  le  roi  Alphonse  lit  élire 
en  sa  jd  .ce  don  Frédéric,  l'un  de  ses  enfants 
naturels,  fïère  du  coinle  de  Tristemare,  qui 
succéda  à  la  couronne  de  Castille  après  la 
murt  de  Pierre  lo  Cruel.  Comme  ce  nouveau 
grand  maitre  n'avait  que  dix  ans  et  élail  bà- 


1C7 

l.irtl,  on  ohiiiit  une  ilisponso  du  pnpc,  ol  For- 
ilinanil  Koilri(;uoz  ilp  \  illalohos.  {»ran<l  cmn- 
inandeur  ilc  Léon,  gouverna  l'ordre  pondant 
sa  minorilé.   Alphonse,  roi  de  l>a>.lillf,  clanl 
mon  l'an  1350,  don    Pierre,  son  fiU,  auquel 
on  donna  avec  jusllce  le  nom  de  Cruel,  mou- 
la sur  le  trAne,  et  une  de  ses  premières  ac- 
tions de  cruauté  fut  de  faire  trancher  l;i  lèic 
à   F.léonore   de   (iusman.     mère    du    grand 
m.ittre.  Ce  roi  avait  épousé  Itl.inche  de  Bour- 
bon, princesse  qui  avait  autant  d'esprit  que 
de  vertu   et  de  beaulé,   et  qui   n'était  alors 
que  dans  la  qu.ilorzième   année  de  son  âge. 
Il  la   traita  de  la  manière  du  monde  la  plus 
cruelle;  trois  jours  après  son  mariage  il  II 
quitta,  la  relégua  à   Valladolid,  cl   l'ayant 
longtemps  retenue  en  prison,  la  fit  enfin  em- 
poisonner à  Medina-Sidonia,  l'an  1.3lil.  Toute 
l'aulorilé  du  royaume  était  ropendaiil  entre 
les   mains  des  oncles  de  .Marie  de   Palilla, 
maitress.e   de   ce   prince;   ce  que  les  grands 
du  royaume  ne  pouvant  supporter,  ils  se  li- 
guèrent contre    lui,    et    le   gr.ind    maître  se 
joignit   à  eux.  C'est  pour<|uoi   le  roi   en  fit 
élire  un  autre,  qui  fut  don  Jean  Garcias  de 
Villagera,  frère  de  sa  maîtresse,  ce  qui  cau- 
sa  un  nouveau   schisme  dans    l'ordre.  Mais 
les  choses  se  pacifièrent   dans  la  suite,  et  le 
grand  maître  Frédéric  servit  le  mi  son  frère 
dans  la  guerre  qu'il  eut  a\ec  le  loi  d'.Vragon 
l'an  i;jo7;  néanmoins,  sur  un  f.iux  rapport 
que  Ton  lit  à  ce   prince  que  le  grand  mjître 
avait  agi   contre  ses  intérêts,  il  le  fit  venir 
l'année    1.3a8.  Frédéric,  se   liant   trop   à   la 
bonne  foi  de  son  frère,  et  n'ay.int  pas  voulu 
croire  les  avis  qu'on   lui  donnait,   que   l'on 
ne  le  faisait  venir  que  |  our  le  faire  mourir, 
vint  trouver  le  roi  à  Séville,  et  ce  prince  le 
fit  assassiner  en  sa  présence   par  ses  arbalé- 
triers. Ils  l'assommèrent  à  coups  de  massue, 
et  le  roi,  voyant  qu'il  reypirait  encore,  donna 
son  poignard  pour  l'achever. 

Frédéric  étant  mort  n'ayant  encore  que 
vingt-six  ans,  après  avoir  été  grand  maitr.; 
pendant  seize  ans,  l'on  vit  encore  deux 
grands  maîtres  dans  l'ordre  de  Saint-Jacques, 
l'un  ayant  été  élu  par  les  chevaliers  qui  te- 
naient le  p^irti  du  roi  de  Caslille,  et  l'autre 
par  ceux  qui  s'étaient  joints  au  comte  de 
l'r.TiisInninre,  frèriMio  Frèilèrii-,  qui  voulait  se 
nirtire  la  couronne  de  (bastille  sur  la  tête. 
La  grande  miiîirisc  fut  aussi  contestée  en 
138()  entre  don  Pierre  Ituys  de  Sandoval,  et 
Kuys  lionzalve  Mexia,  qui  avaient  été  luus 
deux  élus.  Mais  la  division  cessa  peu  de 
temps  après  par  la  mort  de  Uuys  de  Sandu- 
val. 

Le  gouvernement  de  l'infant  d',\ragon  don 
Henry,  trente-sixième  g^and  m.iitre,  ne  l'ut 
pas  tranquille.  Il  épousa  l'iiifanle  Catherine, 
sœur  du  roi  de  Casiille  Jean  li,  a  laquelle  ce 
prince  donna  en  dot  le  duché  de  Villena; 
mais  le  grand  maiire  et  sa  femme  en  ayant 
voulu  prendre  posses>ion,  ils  y  trouvèrent 
des  oppositions  de  la  part  du  roi,  ce  <|ui  lit 
que  le  grand  niailrc  s'en  (ni|>ar.'i  par  iorce 
au  nom  de  sa  femme.  Le  ro  le  lit  arrêter  et 
enfermer  dans  une  prison  à  Mailrid,  d'où  il 
fut  irausfuré  peu  de  jours  après  au  cliàloau 


nif.TIONNMRK  PF.S  ORDRES  RELIGIF.LX. 


de  Mora.  H  en  sortit  deux  ans  et  demi  après, 
par  l'entremisi'  de  Jean,   roi  de  Navarre,  son 
f  ère,  i)ui  le  demanda  au  roi  de  Caslille,  lui 
promettant  de   s'assurer  de  sa  personne.  Le 
roi  de  Navarre  le  réconcilia  quelque  temps 
après  avec  le  roi  de  ('asiillc,  qui  lui  donna 
les  villes  de  l'ruxillo  et  d'.Mcaraz,  avec  d'au- 
Ires  terre§.  pour  le  dédommager  du  duché  de 
\illena.  Les  infants  d'Ara^ion  sciant  hrouillè» 
dans  la  suite  avec   le   roi  de  Caslille,   et  1.-, 
grand  maître  les  favorisant,  ce  prince  le  pri- 
va une  seconde  fois  de  tnus  ses  biens,  qu'il 
distribua   à    plusieurs   seigneurs.    Le  grand 
maître   se  retira  vers  le  roi   d'.Vragon,   qui 
était  son  frère,  avec  lequel  il  se  trouva  dans 
le  combat  naval  que  le  roi  de  Navarre  donna 
contre  les  Génois,  dans  lequel  les  trois  fières 
furent  faits  prisonniers  et  envoyés  à  Savone, 
et   de  là  transférés   à  Milan,  où  le  duc  leur 
donna    la    libirtè.    Peu    de    temps   après,  le 
grand  maître  et  le  roi  de  Navarre  entrèrent 
avec  de>  troupes  dans  le  royaumede  Caslille, 
pour  contraindre   le   roi  Jean  ill  à  rétablir 
le  grand  malIre  dans  sa  dignité,  dont  il  avait 
donné    l'administration    à    don    Alvarez   du 
Luna,  connétable  de  ce  royaume.  Ces  primes 
en  vinrent  aux  mains,  et  dans  la  bataille  qui 
se  donna  l'an   liio,  proche  de  la  ville  d'O!- 
niedo,  le  grand  maître  y  fui  blessé;  et,  étant 
mort  quelque  temps  après,  il   eut  pour  suc- 
C(  sseur  le  connèlalile  de  Caslille,  qui  fut  élu 
par  une  partie  des  chevaliers,  et   les  autri  s 
élurent  aussi  don  Uodriguc  .Menriquez,  com- 
mandeur de   Ségura,  qui   prit  aussi   le  titre 
de  grand   maître.  11  y  eut   une  guerre  san- 
glante entre   les   chevaliers  au  sujet  de   ces 
deux   grands    maîtres,   qui  avaient  chacun 
leur  fat  tîon.    Le  roi  de  Caslille  appuyait    le 
coniiélal>le,  son  favori,  et  le  prince  d'Aragon, 
don  Hodiigue;  mais  le  connétable,  abusant 
de  son   pouvoir,   alluma   la    guerre  dans  le 
royaume,  persécuta  les  grands,  s'enrichit  du 
bien  d'autrui,  et  rei;ul  même  de  l'argent  des 
Maures  pour  empêcher  la  prise  de  la  ville  de 
Grenade.  Ay.int   été   conv.iincu   de  ces  cri- 
mes, 1(!  roi  le   lit  mettre  en  prison,  enleva  ses 
trésors,  et  lui  fit  trancher  la  léle  à  Vallado- 
lid. l'an   l'»5J.     Ille   fut  exposée   plusiems 
jours  avec   un  bassin  pr>ur  trouver  de  quoi 
enterrer   son   corps,  ce  qui    p.irut    d'aulant 
plus  étonnant,  que  cet  homme  avait  acquis, 
par  une  faveur  de  plus  de  trente  années,  des 
biens  qui  égalaient  presque    les   richesses 
d'un  roi. 

Après  sa  mort,  le  roi  fut  admioistrateur 
de  l'ordre  par  auliirilè  du  (lape  Nicolas  V,  à 
cause  du  bus  âge  de  l'imani  don  Alphonse, 
son  lils,  auquel  il  avait  Lut  conlèrer  la 
grande  maîtrise;  et  Jean  III  étant  mort  l'an- 
née suivante,  liai,  le  roi  Henri  IV,  son  suc- 
cesseur ,  en  eut  aussi  radininislralion.  Il 
avait  épousé  Blanche,  fille  de  Jean  II,  roi  de 
Navarre,  et  ce  mar:age  ayant  été  dissous 
l'an  l'i-.'j.'J  .  il  épousa  en  secondes  noces 
Jeanne,  fille  d'I.douard ,  roi  de  Portugal. 
(>omme  il  n'avait  point  d'enfants,  et  qu'il 
était  incapable  n'en  avoir,  l'on  dit  qu'il  pria 
sa  l'i'mme  de  permettre  (inc  Hertrand  de  la 
Cucva  ,  son  la\oii,  snpj)léàl  à  son  défaut. 


1G9 


r:pi': 


EPE 


178 


La  leino  (Icvinl  grosse  el  mit  au  momie  une 
lill(!  (|Lii  l'iil  mariée  à  Alphonse  V.  r(;i  de 
Portugal,  el  que  le  roi  de  Caslille  déclara 
héritière  de  sps  Etats,  ce  qui  causa  une 
guerre  entre  elle  et  Isabelle,  sœur  d'Henri, 
inariéeà  Ferdin.iiid  d'Aragon,  laquelle  fut 
terminée  à  l'avantage  d'Isabelle.  Bertrand 
de  la  Cufva  eut  pour  récompense,  entre  au- 
tres choses,  la  grande  maîtrise  de  l'ordre  de 
Saint-Jacques,  dont  l'infant  don  Alphonse, 
Ir.'re  du  roi  Henri,  se  démit  en  sa  faveur,  ce 
qui  fut  confîriiié  par  le  pape  Pie  II  l'an  14-62; 
mais  les  chevaliers  s'élanl  plaints  de  v.c 
qu'on  leur  ôtait  le  droit  d'élection,  el  qu'il 
n'était  pas  raisonnable  que  l'infant  quittât 
la  grande  maîtrise  pour  la  donner  de  lui- 
même  à  un  autre,  le  roi,  voyant  leurs  oppo- 
sitions, porta  Ik'rirand  à  y  renoncer  en  le 
récompensant  de  plusieurs  belles  terres,  et 
don  Alphonse  y  fut  rétabli,  en  venu  d'une 
bulle  de  Paul  11.  Après  sa  mort,  don  Jean 
Pacheco,  marquis  de  Villena,  fut  élu  grand 
maître  l'an  1469,  el,  ayant  gouverné  l'ordre 
pendant  quelques  années,  il  se  démit  de  la 
grande  maîtrise,  en  faveur  de  sou  lils,  don 
l)ldacc  Lopez  Pacheco.  Le  roi  Henri  IV  fil 
solliciter  le  pape  pour  en  avoir  la  confirma- 
tion ;  mais,  n'ayant  pu  l'obtenir,  ce  prince 
mil  Didace  de  Pacheco  en  possession  de  la 
grande  maîtrise,  en  vertu  de  la  renonciation 
du  marquis  de  Villena,  qui  s'étail  faite  du 
conseiilcmcnt  de  la  plus  grande  partie  des 
treize.  Mais,  apiès  la  mort  de  ce  marquis, 
qui  arriva  l'an  1474,  don  Jean  de  Velasco, 
prieur  dUclès,  convoqua  le  chapitre  et  les 
treize  électeurs,  ce  que  fit  aussi  celui  de 
8aiiil-Marc  de  Léon  :  de  sorte  qu'il  y  eut 
trois  grands  maîtres  dans  le  même  temps  : 
don  llodrigue  Maniiquez,  comte  de  Parède, 
élu  par  ceux  dUclès  ;  don  Alphonse  de  Car- 
donas  par  ceux  de  Saint-Marc,  el  le  mar- 
quis de  Villena,  don  Didas  Lopez  de  Pa- 
checo, en  laveur  duquel  D.  Jean  l'achec", 
marquis  de  Villena,  son  père,  s'était  démis 
de  celle  dignité,  et  (jui  en  était  en  posses- 
sion. Ce  dernier  prélendit  se  ir.ainlenir  par 
la  voie  des  aimes,  et  chasser  ses  deux  com- 
pétiteurs qui  avaient  été  élus  à  Uclès  et  à 
Saint-Marc.  Il  s'empara  du  château  d'Uclès 
étant  protégé  par  le  roi,  mais  il  ne  put  s'y 
maintenir,  ni  être  reconnu  comme  grand 
maître,  car,  après  la  ii;ort  du  comte  de  Pa- 
rède, qui  arriva  l'an  1476,  les  chevaliers  qui 
dépendaient  du  prieuré  d'Uclès  élurent  aussi 
pour  grand  maîire  don  Alphonse  de  Carde- 
nas  :  ainsi  le  sdiisme  cessa  après  que  les 
chevaliers  se  lurent  réunis.  Mais  ces  divi- 
sions ayant  déplu  à  Ferdinand  et  Isabelle, 
rois  de  Castille,  qui  craignaient  qu'elles  ne 
causassent  quelque  guerre  dans  le  royaume 
à  cause  de  la  puissance  de  ces  chevalier>, 
ils  demandèrent  puur  eux  et  pour  leurs  suc- 
cesseurs l'admiulslra  ion  de  cet  ordre,  qui 
leur  fut  accordée  par  le  pape  Alexandre  VI, 
l'an  1493,  après  la  mort  du  grand  maître 
don  Alphonse  de  Cardenas,  cl  pour  lors  la 
grande  autorité  des  chevaliers  commença  à 
diminuer.  L'empereur  Charles  V  eut  au.-.si 
l'administration  de  l'ordre,  qui  lui  avait  été  ac- 

DlCrlONNAIRE   DES   Oi;DUI'.S  l;tL!(JlliUX.  IL 


cordée  l'an  1515  par  le  pape  Léon  X,  et 
l'an  1523  le  pape  Adrien  VI  annexa  pour 
toujours  à  la  couronne  d'Kspagne  les  gran- 
des maîtrises  des  trois  ordres  de  Sainl-Jac- 
ques,  de  Calairava  rt  d'Alcanlara. 

L'ordre  de  Saint -Jacques  s'était  aussi 
étendu  en  Portugal,  où  il  avait  reçu  de 
grands  biens  par  la  libéralité  des  souverains 
de  ce  royaume.  Les  chevaliirs  dépendaient 
du  couvent  d'Uclès  ;  mais  le  roi  don  Denis 
voulut  avoir  en  so!i  royaume  un  grand  maî- 
tre indépendant  de  celui  d'Espagne;  il  éta- 
blit le  chef  de  cet  ordre  à  Alcazar  d'OzaI,  et 
depuis  il  fut  transféré  à  Palmella.  Les  rois 
(le  Portugal  ont  élc  les  premiers  qui  obtin- 
rent l'administration  de  cet  ordre.  Elle  fut 
accoriléc  au  roi  Jean  II  après  la  mort  du 
prince  (ieorges,  duc  de  Conimbrc,  son  fils, 
qui  en  a  éié  le  dernier  grand  maître  en  Por- 
tugal, et  le  pape  Jubs  il  l'annexa  à  la  cou- 
ronne en  la  personne  du  roi  Jean  111. 

Comme  nous  avons  déjà  parlé  du  conseil 
des  ordres,  el  que  nous  aurons  encore  lieu 
d'en  parler  dans  la  suite  de  cette  histoire,  il 
est  à  propos  de  rapporter  l'origine  de  ce 
conseil,  qui  est  maintenant  comme  le  supé- 
rieur général  non-seulement  de  l'ordre  de 
Saint-Jacques,  mais  encore  de  ceux  de  Cala- 
trava  el  d'Alcanlara.  Le  pape  Adrien  VI  ne 
réunit  les  grandes  maîtrises  de  ces  ordres 
à  la  couronne  d'Espagne  qu'à  condition 
qu'en  ce  qui  regardait  le  spirituel,  le  roi 
n'agirait  point  par  lui-même,  mais  commet- 
trait pour  cela  des  personnes  des  mêmes 
ordres:  c'est  pourquoi  l'empereur  Charles  V, 
roi  d'Espagne,  établit  un  conseil,  qu'il  ap- 
pela le  conseil  des  ordres,  lequel  doit  être 
composé  d'un  président  el  de  six  chevaliers 
(dont  deux  de  chacun  de  ces  trois  ordres), 
qui  ont  le  même  pouvoir  et  la  même  aulo- 
riié  que  le  roi  peut  avoir  sur  ces  ordres  en 
iiuaiité  d'administrateur  perpétuel,  tant  eu 
ce  qui  concerne  la  juridiction  temporelle  ou 
sécu.ière  que  la  juridiction  ecclésiastique, 
pourvu  qu'elle  ne  soit  pas  purement  spiri- 
tuelle, comme  de  conférer  les  ordres,  ad- 
minislier  les  sacrements,  fulminer  des  ceii> 
sures  rt  autres  choses  semblables,  dont  les 
fondions  sont  exercées  par  des  personne^ 
ecclésiastiques  de  l'ordre,  et  qui  sont  dépu- 
tées par  le  conseil,  qui  connaît  des  causes 
civiles  et  criminel'es  des  chevaliers  et  di- 
leurs  vassaux,  el  qui  fait  exécuter  les  or- 
donnances laites  aux  chapitres  généraux. 
Il  donne  avis  au  roi  des  coinmanderies  , 
dignilés  ,  prieurés,  bénéfices,  gouverne 
ment»  et  charges  (jui  vaquent,  alin  qu'il  v 
pourvoie.  Cette  |uridiclion ,  qui  ne  forn.o 
qu'un  tribunal  avec  le  roi,  est  ecclésiastique 
et  légulière,  quoique  exercée  par  des  per- 
sonnes laïques.  Klle  est  souveraine,  juge  eu 
dernier  ressort  ,  et  on  n'en  peut  appeler 
qu'au  sainl-siége.  Clément  Vil  l'approuva 
par  des  bulles  des  années  1524  et  1525,  et 
ajouta  à  son  pouvoir  celui  de  connaître  des 
decnues,  des  bénéfices,  des  mariages  et  au- 
tres choses  semblables  dont  la  connaissance 
appartenait  aux  évêques  comme  ordinaires. 
Elle  lui  aussi  approuvée  par  le  pape  Paul  lil, 


n 


nr.TioNNAir.i:  itFS 


en  lî)'»2,  il  ilan>   la  siiilc  par  lo  papo  IMc  V. 

le  pouvoir  de  ci'  Irilniiial  s'élpiii  sur  doux 
>  illes,  deux  coiil  vin;:i  bourps  cl  soix.inle- 
i]iiiiue  \illapi's,  doiil  il  j  a  deux  villes  cl 
l'ciil  soixaiito-dix-huil  tanl  bourgs  (jue 
villages  qui  apparlioiiDonl  à  l'ordre  de  Siiut- 
J.irques,  soivaiile-iiunlre  à  celui  (le  (^■lla- 
liava,  el  riuquanle-lrois  à  celui  (rAlcaii- 
lara.  Noii-seuleuient  les  chevalier»,  les  clia- 
noiiies,  les  cliapeiaiiis  et  les  religieuse»  de 
ces  ordres,  sonl  soumis  à  l'obéissaiirc  cl 
correction  du  conseil  des  ordres;  mais  la 
juridiction  de  ce  conseil,  lant  pour  le  lerii- 
porel  que  pour  le  spirituel,  s'clend  aussi 
sur  lous  les  prêtres  séculiers  qui  onl  des 
Iténéfices,  el  les  reli{;ieuses  des  autres  or- 
ilres  qui  ont  des  monastères  situés  ilans  les 
lieux  qui  apparliennciit  à  ceux  de  SaiiU- 
.lac(iucs,  de  Calatrava  et  d'Alcanlara.  Le 
président  de  ce  conseil  est  ordinairement  un 
des  [dus  LMands  seigneurs  d'Espagne.  Il  y  a 
encore  plusieurs  ofiices  qui  dépendent  de  ce 
conseil,  dont  les  plus  considérables  sonl  ce- 
lui de  sccrélair»!  des  ordres,  le  conlador 
uiai/ur,  ou  çrand  trésorier  des  ordres,  le 
i;rand  huissier  des  ordres,  trois  procureurs 
(;énéraux  ,  trois  chevaliers  fiscaux  et  un 
t^rand  trésorier  du  conseil,  qui  dans  les  ac- 
tes pub'.ics  ont  lous  séance  dans  ce  tribunal. 
Ia's  autres  offices,  qui  sonl  en  grand  nombre, 
sont  moins  considérables,  cooiine  l'agent,  le 
liscal,  Tavocit  cl  le  procureur  des  pauvres, 
les  trésoriers  de  cba'in  de  ces  ordres  en 
jiarticiilier,  leurs  chanceliers,  les  huissiers 
cl  (luelqiies  autres. 

Nous  avons  vu,  par  ic  nombre  des  villes, 
liourgs  et  vilbiges  (lui  appartiennent  à  l'or- 
dre de  Saint-  ac(|iies,  qu'il  possède  lui  seul 
plus  de  biens  que  les  deux  autres.  A  l'égard 
(les  comniander.c.»,  il  y  en  a  quatre-vingt- 
quatre,  dont  il  y  en  a  tiois  grandes,  qui  sont 
les  grandes  conimanderies  de  CaslilIc.deLéon 
et  de  .Montaluan  en  .\r,igon.  Ces  qualie- 
vingt-quatre  commanderics  onl  •i.'JO.OOO  du- 
cats de  rcienu,  outre  deux  cents  prieurés, 
rurcs  cl  autres  bénélices  simples  qu'on  peut 
donner  avec  disl)cn^e  du  pape  à  des  person- 
nes qui  ne  sont  pas  de  l'ordre.  Il  y  u  treize 
bourgs  qui  sont  des  \i(ari,ils  avec  des  jurr- 
dictions  spirituelles  ,  s.ivoir:  \  illa-Nueva  de 
Ids  Infantes.  \'illa-Uoilri;z;uo,  \  illalua,  Ls- 
Iriana,  Xercs,  Enicri  a,  'ludia,  Jesle.  Gara- 
vacca,  \  cas,  Segura  de  la  Sierra.  Aledo  cl 
Tolana.  Il  a  encore  (juaire  ermitages, 
cinq  iKJpitaux  et  un  i  o'.lége  ;'i  Salamaniiue. 
r,el  ordre  est  di\isé(n  (|uaire  provinces, 
(jul  sont  Casiille,  Léon,  la  \'ieiile-(^astille  el 
1  Aragon,  où  hî  roi,  comme  administrateur, 
cl  le  chapitre  général  envoient  des  visiteurs. 
Celui  de  la  province  de  Léon  est  élu  par  le 
prieur  el  le  ch.ipiire  du  couvent  de  Sainl- 
Marc  de  Léim,  el  doit  cire  conlinné  |)ar  le 
1  onscil  des  ordres.  Outre  ces  visiteurs  géné- 
raux, le  roi  en  députe  encore  d'autres  pour 
■  'informer  si  les  chevaliers,  les  chapelains 
•  lis  ariires  observent  leur  règle  el  les  sia- 
l'ils  de  l'ordre,  '".es  viiileurs  sont  toujours 
<  hcvaliiTs  el  sonl  accoinpagnes  île  quci(|nes 
cJjajielaius  ;  b  ur  pouvoir  ne  s'élcnd  pas  scu- 


leiuenl  sur  li's  chevaliers,  mai*  aussi  sur 
«eux  qui  po-sèdenl  des  bénélices  dans  les 
Irenx  qrii  appartiennent  à  l'ordre.  Les  che 
laliers  doivent  (rliéir  au  conseil  des  ordre; 
et  aux  supérieurs  des  monastères  lorsqu'ils  > 
demeurent,  ou  qu'ils  y  font  leur  novrciat,  ou 
lorsqu'on  les  a  obligés  de  s'y  renfermer  pour 
<l(rel(iues  fautes 

l'our  être  reçu  chevalier,  il  faut  faire 
preuve  de  noblesse  de  i|uatre  races,  lant  du 
c  lie  paternel  que  du  (('ite  maliTnel  ;  el  quoi- 
((iie  anciennement  la  noble-se  maternelle  ne 
fi'il  pas  rer\nise.  clie  (  si  néanmoins  présen- 
lement  nécessaire  depuis  ((n'plle  a  été  or- 
donnée dans  le  chapitre  général  de  l'an  1(');>:{. 
Il  faut  encore  faire  preuve  que  les  iriémes 
ancêtres  n'ont  point  été  juifs,  .Sarrasins,  hé- 
rétit|ues,  el  qu'ils  n'ont  point  éié  imnis 
comme  tels  pirle  tribunal  de  rin(|uisitio  i . 
(^es  preuve»  se  doivent  faire  devant  un  che- 
valier el  un  chanoine  de  cet  ordre  ;  cl  si  el- 
les sont  approuvées  par  le  conseil  des  or- 
dres, le  roi  co.Tinet  quelqu'un  pour  donner 
riialril  à  celui  (|ui  doit  être  rei;u.  Les  no»i- 
ces  sonl  obligés  de  servir  sur  les  galères 
p.^ndant  six  mois,  el  de  demeurer  pendant 
un  mois  dans  un  raonaslèr.-  pour  y  appren- 
dre la  règb'  ;  mais  on  les  dispense  aiséirrent 
de  ces  obligalions  moyennant  une  somme 
d'argent;  le  roi  et  le  conseil  des  ordres  ac- 
cordent ces  dispenses. 

Us  él;ri(Mit  aulrefiis  vérilablcmenl  reli- 
gieux cl  fais-rierit  vteu  de  chasteté  ;  mais  le 
pape  Alexandre  III  1  .ur  ayant  permis  de  se 
marier,  ils  ne  le  peuvent  faire  sans  la  |)er- 
niission  du  roi,  qu  ils  doivent  avoir  par  écrit. 
Un  leur  impose  un  an  de  pénitence  s'ils  so 
marient  sans  celte  permission  ;  et  si  c'esl  un 
des  treize,  il  est  privé  de  cette  dignité.  La 
raison  de  celte  défense,  c'est  que  les  femmes 
des  chevaliers  doivent  faire  les  mêmes  preu- 
ves que  leurs  maris,  el  que  le  conseil  des  or- 
dres doit  nommer  des  commissaires  pour  en 
fiire  les  informations.  Ils  étaient  obliges  de 
s'abstenir  de  leurs  femmes  à  certaines  fêtes 
de  l'année,  comme  à  celles  de  la  Vierge,  de 
sa  ni  Jean-liaptiste  ,  des  saints  ap(jtres  et 
quelques  .lutres,  cl  les  veilles  de  ces  fêtes, 
comme  aussi  les  jours  d  >  jeûne  prescrits  par 
la  rèi;le,  (|ui  étaient,  oulre  le  carême  de  l'ii- 
glise  uiiiv.Tselle,  de|)Uis  le  huit  no\emlir(> 
jusqu'à  la  .Nativité  de  Noire-Seigneur,  et 
lous  les  vendr.'dis  depuis  le  premier  septem- 
bre jusqu'à  la  Penlerôte.  Le  pape  Inno- 
cent l\  dispens  I  du  jeûne,  deimis  le  huit  n;)- 
vembre  jusqu'au  iir.inier  dimanche  de  l'a- 
\eni,  les  cli(;valiers  qui  étaient  à  la  guerre. 
Martin  V  les  dispensa  entièrement  de  la 
règle  el  de  l'oblig-ilion  de  se  retirer  dans  des 
munaslères  aux  jours  qu  ils  devaient  se  sé- 
parer lie  leurs  femmes,  laiss.inl  cela  ta  leur 
volonté.  Innocent  \\\\,  ayant  été  consulté 
pour  savoir  si  les  chevaliers  qui  n'étaient 
pas  à  la  guerre  étaient  obliges  aux  jeunes 
de  la  règle,  déclara,  l'an  liSli,  (|ue  les  uns  el 
les  autres  n'y  étaient  pas  obliges;  el,  sur  ce 
(|iie  l'ordre  représenta  eiiror<'  à  ce  ponlile 
(in'il  )  avait  (iliisienrs  points  de  l.i  règle  ijiii 
oiiii^eaictit  à  pcclic  inoitel,  comme  de  s'ab>- 


173  EPE 

tenir  des  fommos  à  ccrlains  lemps,  de  réci- 
Icr  certaines  prières,  et  .mires  choses  sem- 
blables, ce  p;ipe  déclara  encore  In  même 
année  que  la  transgression  de  la  règle  n'o- 
bligeait point  à  péché  mortel. 

Ces  chevaliers  m-  font  pins  prcsenlcmonl 
que  les  voeux  do  pauvreté,  d'obéissance  et 
de  chasteté  conjugale,  auxquels  ils  en  ajou- 
tent nn  quatrième,  de  défendre  et  de  soule- 
nir  l'ininiaculée  concepiion  de  la  sainte 
A'iergc.  Les  trois  ordres  de  Saint-Jacques, 
de  Calatrava  et  d'Alcanl.ira  prirent  celte  ré- 
solution dans  leur:!  chipitres  généraux, 
({u'ils  tinrent  l'an  1052.  Ils  consullèrent  à  ce 
sujet  le  roi  Philippe  IV,  comme  administra- 
teur perpétuel  de  leurs  ordres  ;  et  ce  prince, 
qui  avait  une  grande  dévotion  à  la  sainte 
\  ierge  approuva  la  résolution  que  ces  or- 
dres avaient  prise.  Ils  voulurent  s'engager 
à  ce  dernier  vœu  [ubliqucmenl  et  par  une 
cérémonie  éilat  nte.  Ils  indi(iuèrent  des  neu- 
vaines  (ini  se  liront  à  Madrid,  dans  trois 
églises  dilTérenti's,  qui  élaii'iit  magniil(|ûe- 
ment  parées,  el  dans  iesqurlles  il  y  eut  tous 
les  jours  prédication  sur  le  mystère  de  la 
conception,  et  une  messe  célébrée  poiitiiica- 
lement  par  les  prieurs  de  ces  ordres  et  par 
des  abbés  de  ceux  de  Saint-Benoît  el  de  Cî- 
leaux  ;  ce  qui  se  fit  dans  différents  temps, 
afin  qu'une  cérémonie  n'empéciiât  pas  l'au- 
tre. L'ordre  de  Sainl-.Iacques  conaniença  le 
preiiiier  dans  ré;;lise  du  collège  de  Saint  Au- 
gustin appelée  de  Dona  Maria  de  Araçjon. 
L'ordre  de  Calalrava  fit  la  sienne  dans  l'é- 
glise de  Saint-Wariin  de  l'ordre  de  Sainl-lîe- 
noît  ;  et  celui  d'Alcantaia  dans  l'église  de 
Sainl-Iîernard  de  l'ordre  de  Cîteaux.  Dans 
ihacune  de  ces  églises,  les  chevaliers  de 
clia(|uc  ordre  assistèrent  en  habit  de  céré- 
monie. Après  l'évangile  de  la  messe,  un  che- 
valier prononça,  au  nom  de  tout  l'ordre  à 
haute  voix,  la  formule  du  vœu,  et  ensuite 
chacun,  en  présence  du  célébrant,  fil  la 
même  chose  en  mettant  la  main  sur  la  croix 
et  sur  les  Evangile.»,  et  l'on  fil  un  lèglenient 
dans  les  chapitres  généraux,  que  lous  ceux 
que  l'on  recevrait  à  la  profession  feraient  le 
même  vœu.  t^'est  pourquoi,  dans  la  formule 
de  la  profession  de  ces  ordres,  ap'  es  les  trois 
vœux  de  pauvreté,  d'obéissance  eldeclias- 
telé  conjugale  ,  celui  qui  fait  profession 
ajoute  :  y  asimesmo  liago  voto  de  tener,  de- 
fendcr,  y  guardar  en  publicu  ij  en  secrelo  que 
ta  y irgen  Maria  madré  de  Bios,  y  Sehora 
nuestra,  fue  concebida  sin  muncha  de  pecado 
original. 

Il  y  a  aussi  plusieurs  commanderies  de 
rct  ordre  en  Portugal,  el  il  y  en  avail  aussi 
une  en  France  dans  la  villed'lilampes.  L'ha- 
bit de  cérémonie  des  chevaliers,  tant  d'Es- 
pagne que  de  Portugal,  consiste  en  un  nian- 
leau  blanc  avec  une  croix  rouge  sur  la  poi- 
trine, avec  cette  difl'érence  que  les  cbcvaiicrs 
d'Espagne  la  portent  en  forme  d'épée,  fleur- 
delisée par  le  pommeau  cl  les  croisons,  d 
que  celle  des  Portugais  n'est  pas  en  forme 
(l'ipée,   mais  est  aussi    lleurdelisée    par    le 


EPf: 


171 


bas  (1).  Lorsqu'un  chevalier  de  cet  ordre 
meurt,  le  commandeur  de  la  (oannamicrie 
la  |)Iu8  proche  de  la  demeure  du  chevalier 
est  obligé,  outre  les  prières  ordinaires,  de 
nourrir  un  pauvre  pendant  quarante  jours. 

Voyez  les  auteurs  cités  au  paragraphe 
précédeni. 

liPÉES  (Ordre  dks).  Votiez  Sp.nAPniîvs. 

EPEUNAY  (SArNT-MARTiN  n).  Voyez  Jcan 
DE  Chartres  (Saint-). 

ÉPERON  DOR  (Chevaliers  de  i.'}. 

Anciennement  c'était  la  coutume  do  créer 
des  chevaliers  avant  le  combai,  afin  qu'ils  y 
allassent  avec  plus  d'ardeur,  ou  après  le 
combat  pour  récompenser  sur-le-champ 
ceux  qui  avaient  eu  plus  de  part  à  la  vic- 
toire. Les  cérémonies  que  l'on  a  pratiquées 
pour  faire  ces  sortes  de  chevaliers  ont  été 
diilérentes  selon  1rs  lemps  ;  car  d'aboid  on 
se  contenta  de  les  frapper  légèrement  d'une 
épée  nue  sur  le  dos,  et  de  leur  mettre  l'èpée 
dans  le  baudrier;  on  y  ajoulii  ensuite  l'acco- 
lade, et  enfin  on  leur  permit  de  porter  des 
éperons  dorés ,  (ju'o;!  leur  aitachait  aux 
pieds,  ce  qui  leur  fil  prendre  le  Uom  de 
Chevaliers  Dorés.  C'est  encore  aujourd'hui 
une  coutume  pratiquée  par  plusieurs  prin» 
ces  d'honorer  ainsi,  le  Jour  de  leur  couron- 
nement, ((uelques  seigneurs  de  leur  cour  en 
les  faisant  chevalieis  avec  les  mêmes  céré- 
monies. L'empereur  Ferdinand  I",ni  le  jour 
de  son  couronnement,  des  chevaliers  de  l'E- 
peron, qui  furent  ainsi  nommes  apparem- 
ment à  cause  dos  éperons  d'or  qu'un  leur 
attacha  aux  pieds.  Mais  ce  qui  n'était  autie- 
fois  que  la  récompense  de  la  valeur  es!  au- 
jourd'hui fort  commun  en  Angleterre,  el  se 
donne  indillérenimenl  ans  gens  d  épée  cl  de 
robe,  et  môme  à  des  marchands,  (jui  sont 
ainsi  reçus  en  ce  royaume  :  ils  se  metient  ;i 
genoux  devant  le  roi,  qui  les  touche  avec 
une  épée  nue  sur  l'épaule,  eu  disant  ces  pa- 
roles :  Sois  chevalier  aa  nom  de  Dieu,  cl  à 
cause  des  éperons  doré-;  qu'ils  porlent  le 
jour  de  leur  réeeplioii,  on  les  appelle  Che- 
valiers Dorés,  équités  aurali  ;  mais,  comme 
ces  chevaliers  ne  forment  point  de  société 
particulière,  ils  ne  portent  aucune  marque 
qui  les  dislingue,  et  sont  compris  dans  ce 
(ju'on  appelle  en  général  l'ordre  de  cheva- 
lerie. 

Il  n'en  esl  pas  de  même  des  chevaliers  Ai- 
l'Eperon  d'Or,  dont  nous  allons  parler  el  qui 
portent  pour  marque  de  leur  ordre  um- 
croix  d'or  à  huit  pointes  émaillée  de  rouge, 
au  bas  de  laquelle  pend  un  éperon  d'or  [•!)  • 
on  les  doit  regarder  comme  lurmant  un  or- 
dre militaire  dislincl  et  séparé  de  cet  ordre; 
général  de  chevali  ne  et  de  tous  ces  cheva- 
liers qui  prennent  le  lilre  de  Chevaliers  Do- 
res el  do  l'Eperon,  dont  nous  venons  de  par- 
ler. L'on  préleiid  (|ue  ce  lut  le  pape  l^ie  IV 
(|ui  institua  col  ordre  à  Home,  l'an  1559. 
Mais  il  ne  paraît  pas  (|ue  ce  ponl.fe  ail  donné 
a  (eiui  (ju'il  insliiia  le  nom  de  l'Eperon 
d'or,  au  cun!raire  il   lui  donna  son  nom  ;  el 


(I)   Voy.,  à  1.1  lin  du  vol.,  n"  55. 


(2)  Voy.,  à  la  fin  du  vol.,  n"  5'*. 


175                                mr.TiONN.Mr.F:  nr.s  onnars  nri.ir.ii  rx.  i:.- 

Ton  Ironie  il  ms  le  nnllairc  nminiii  iiiio  bulle  nrc»rdri  à  r<s  rlievalicrs  lipauroup  de  pri»i- 
de  Pie  V,  de  l'an  lilGl),    .  ù  les  clievaliors  de  le-res.  el   qu'entre  autres  il  voulut  que  tous 
cet  oidre  sont  appelés  chevaliers  Pics.  II  est  ceux  qui  veraicul  nuMi-jés  à  cet  ordre  fussent 
vrai  que  Pierre  de  Hilloy,  dans  sou  Traité  do  réputés   noliles  et  leurs  descendants.  Il  leur 
rOriuine  do  ciievalerie,   dit  que  res  clieva-  donna   le   titre   ilc    comtes  de  Lalrau,  avec 
liers~Pies  sont  faits  par  mcMie  moyen  elieva-  pouvoir  de  déléjîuer  des  juges  ccclésiastiqaes 
Hors  de  l'Eperon  d'or.  Favin  dit  aussi  (|u'ils  el  séculiers,  créer  des  docteurs  el  des  notai- 
soiil  appelés    Cl)e\alicrs  Dorés  à  cause  des  res,  de  lé.:itimer  des  bâtards  el  les  élèvera 
éperons  dorés  qu'ils  ont  permission  de  por-  des  di^nité>.  Il  onionn.i  de  plus  que  les  (  hc- 
lcr;et  dans  les  lettres   que  l'on  donne  nu\  valiers  clercs  si'r.iienl  notaires  aposloliqii.'s. 
chevaliers  de  l'Eperon,  ils  sont  appelés  Che-  que   les  laïques  ser.iiecil  chevaliers  dores,  et 
valiers   Dorés  cl  comtes  du   sacre  pala  s  de  que,  cessant  d'élre  parlieipants,  c'est-à-dir.- 
Lalran  ,  sacri   palulii  el   auhc   L'iteranensis  de  jouir  du   revenu  alî< de  à  loidre,  ils  au - 
comiie.i]    nuliles  ,   d    equiirs    Aurali     Mais  raient  toujours  l;>  litre  de  cumlos  de  Lalran, 
cette  cruix   avec  cet  épi  ron    qu'ils    porlenl  de  ni>taires  apostoliques  el  de  Chevaliers  l)o- 
pour  marque  de   leur   ordre   n'est  point  la  rés.  Il  leur  permit   aussi   de   posséder   plu- 
marque  que  le  pap;>  Pi^-  IV  donna  aux  che  -  sieurs  béuélices,  iiuoiquc  maries,  el  d'exercer 
valiers    qu'il  fil,    puisque    ce   fut    une   nié-  en  même  temps  plusieurs  ofiiees  de  einquante 
daille  d'or,  lù  d'un  c6lé  il  y  avait  l'iinapc  de  écus  d'or  de  revenu,  les  dispensant  de  ce  qui 
•iainl    Amliioise,   el   de   l'autre   ses    armes,  serait  dû  ,'i  la  componende  pour  les  pensions 
qu'ils  pouvaient  c  hanger  sous  chaque  pon-  ou  pour  les  bénclices  qui  leur  seraient  don- 
lilicat   pour  mettre    les   armes  du  pape   qui  nés.  Il  l'ur  élail  permis,  dcu\  ans  après  leur 
4;ouvernait  pour  lors  ri''.gli>e.  L'ahlic  Giusli-  réceplion  dans    l'ordre,  de  céder  à  qui   bon 
iiiani  rapporte  à  ce   sujet  les   paroles  de  ce  leur  semblait  la  pension  qu'iiscn  recevaient, 
pontife  dans  la  bulle  de  l'institution  de  l'or-  et  de  lister  de  ce  qu'ils  avaient  acquis  do 
<lre  de  ces  clievali'TS  Pies  :  Infijniaiiite  col-  biens  ecclésiastiques,  jusqu'à   la  somme  de 
Irijii  dictonim  viililum  Pioriim  esse  roltimus  mille  ducats  pour  (  haque   office  qu'ils  aii- 
imnginem   bctili    Ambrosii   epsntpi  ab   una  raient  exercé.  IN   furent  déclares  commen- 
pnrie  aliciJHS  peiidenlis  aurei  cl  nb  allerii  in-  saux  du  pape,  scriptcurs  el  cameriers  apos- 
sifjnid  }ws:ra,  vel  pro  tnnpore  exislmlis  pon-  toliqucs.    Le    pape   leur    accorda    encore  la 
n/icj.--,  cum  r.latibu'<  lirsitper  el  liara  puniifi-  préséance   sur  les  autres   chevaliers,  et  les 
cia.   .\insi  il  y  a  bien  de  l'app  irence  que  le  exempta  de  la  juridiction  des  ordinaires,  le-; 
pape  I  ie   W  n'a  [ciint    été    l'instiiiileur  des  mellanl    sous    la    protection    jr.imédialc   du 
cheviliers   de    l'Epercn,   cl  que  ceux   aux-  sainl-siégc.  Leur  obli;;alion  était  d'exécuter 
<]uels  il  don:. a  son  nom  ont  eu  le  même  sort  les  ordres  du  pape  dans  les  croisades  el  dans 
que  ceux  de  Saint-Pierre,  de  Saiul-Paul,  du  les  conciles  généraux  sans   aucun    émolu- 
Lis,  et  de   Noire-Dame   de  Lurette,  qui  ont  ment,  eu  égard   aux   pensions    qu'i's    recc- 
eté  su(iprimés,  et  sont  ilevenus  simples  ofii-  valent  de  l'ordre;  et  ils  devaient  aussi  veiller 
tiers  de  la  Chancellerie  ;  car  pa-mi  ces  offi-  à  la  défense  des  côles  de  la  Marche  dWncônc, 
cicrs  il  se  trouve  aussi  cinq  cent  trente-cinq  cl  principalement  de  la  ville  de  Lorelte. 
chevaliers   Pies  ,   dont  les  charges    coûtent  Mais,  soit  que   Ion  veuille   attribuer  ces 
chacune  mille  écus.  privilèges  aux  chevaliers  Pies  ou  au\  che- 
L'abbL-  (îiustiniani  dit  que  Pie  IV  créa  d'à-  valiers  de  l'Eperon,  les  chevaliers  Pies  n'en 
bord  irois  cent  soix.inte-quinze  chevaliers,  jouissent  plus,  ayant  été  supprimés,  comme 
.-luxquels  il  assigna  un  icveiiii  de  soixante-  nous  avons  dit;  et  tout  ce  que  lev  chevaliers 
treize  mille   écus,   pi  qu.'  l'aiiiiée  suivante,  de  l'I-'peron   en   ont  conservé  soni  les  titres 
ay;inl   augmenté   le  ncmilirc  de  ces   chev;;-  de  comtes  du   sacré  palais  de  Lalran  et  de 
lieis  jusqu'à  quinz  •  cent  lienle-cinq,  il  aug-  Chevaliers  Dorés,  qui  leur  sont  donnes  dans 
inenla  aussi  leurs  re»enus  jusqu'à  la  somme  leurs  lettres  de   rcre(>tioii.   Oi  ordre  môme 
de  Cent  quatre  mille  écus.  Ma'S   il   peut  y  s'avilit  tons  les  jours  ;  car,  quoique  ks  pa- 
jivoir  de   l'erreur  dans  le  calcul  de  cet   au-  |  es  le  confèrent  quel(|iierois  à  des  ainbassa- 
leur,  ou  bien  il  se  peut   laiie  que,  couinu-  Il  deurs,   comiKe  lil  le  pape  Innocent  XI,  l'an 
;i  mis   le  nombre   de  ces  chevaliers  en  cbif-  Ki"",   à    un    amb.issadeur    de    ^'enise.    l'on 
fres,    l'imprimeur  aurait   mis    un   mille   de  donne  aisément  à  Uome  la  croix  de  cet  ordre 
Irop,  et  qu'en  le  rctranihanl  il  ne  .'■e  trou-  à  tons  ceux  qui  ont  cinquante  ou  soixat:te 
vcrait  plus  que  cinq  cent  trente-cinq  cliev.i-  livres  pour  payer  lenrs  leitres  de  réception, 
lit  rs,  qui  e^t  jn-lemenl  le  nombre  de  ces  of-  Le  pape  Paul  111,  par  une  bulle  de  l'an  I.t'  9, 
ficiers  de  chancellerie  qui  |  rennenl  encore  à  .ici  orcla  à  Charles,  Mario,  .Mexandrc,  et  P. ml 
présent   le   titre  de  che»aliers    Pies    Ce  ciui  Sfurze  des  comtes  de   Sainte-Flore,  ses  ne- 
pronve  que  c'est   une  laule  qui  s'est  glissée  veux,  pour  eux  et  leurs  descendants  de  lègi- 
d.Mis  l'impression,  l'esl  que,  si  le  pa(ie  ai  ail  lime  mariai;!'  en  ligne  masculine,  le  droit  de 
.4nccté  un  revenu  de    soixante-treize  milice  créer  des   chevaliers   de    l'Eperon  ,    comme! 
cous  pour  trois  cent  soi\ante-i|uinzo  clieva-  aussi  de   faire  des  dicteurs  en  théologie,  en 
liers,  il  n'y  aurait  pas  eu  de  propori  on  gar-  l'un  el  l'autre   droit  et  en  médecine,  el  des 


.lec,  si  en  atigmoni.int  le  nombre  des  clieva-  abbes  titulaires  :  ce  (]ni  fui  confirmé  par  ses 

liers  jusqu'à  quinze  cent  trente-cinq,    il  n'a-  successeurs    Jules     111,    Crégoire     Xlll    et 

vait  augmente   leurs  revenus  que  ju-^qn'à  la  Sixte  \' .  Le  duc:  de  Sl'orze  jouit  présentement 

somme  de  cent  quatre  mille  ecus.  de  ce  droit,  et   accorde  aisément  des  Icllres 

Le   même   auteur   jijoule   ijnc   ce   jinntife  de  chevalerie  de  l'I-'-j'cron.  dont  l'expédilioii 


«77 


e:e 


EPI 


<78 


lie  coule  qu'une  pislole  :  ce  qui  l.iil  que  l'ou 
regarde  avec  mépris  ces  sortes  de  civevaliers. 
Les  nonces,  les  auditeurs  de  l'oie  et  quelques 
autres  prclais  de  la  cour  romaine  oui  aussi 
le  privilège  de  créer  chacun  deux  chevaliers 
«le  l'Eperon  dor;  c'est  pourquoi  l'on  voit  eu 
France  quelques-uns  de  ces  chevaliers  qui 
onl  clé  reçus  en  cet  ordre  par  des  nonces,  et 
j'ai  eu  en  main  les  lettres  d'un  d(î  ces  chev  i- 
liers,  de  l'an  1702,  que  M.  Fii'schi,  pour  lors 
nonce  en  ce  royaume,  accorda,  et  (|u.'  nous 
rapporterons  ici. 

Lnurentiiis  Fliscus,  Dci  et  sanctœ  sedis 
aposlolicie  (jralia  arcltiepiscopus  Aienioncn- 
sis,  sanclissimi  D.  ^' .  papœ  pnriatus  doinr- 
sticiis  et  assislens,  ejusdem  et  snnrtœ  sedis 
apnd  rrgein  Cliristianissimwn  nuntius  apo~ 
stolinii  ertrnordindriua.  Dilecto  nobis  in 
ClirUin  domino  Ludovico  filio  domini  Yincvn- 
tii  rie  Marlenne,  domini  de  Puvigné,  ne  sucri 
paliiiii  et  aida;  Latemvensis  comitis,  mililis, 
(l  rqiirstris  Aureati,  salntcm  in  Domino.  Sin- 
f/nlai  e.i  animi  lui  dotes  eximiœi/ite  drvoliouis 
iijjvvtus,  (/uein  nd  scmctissimiini  dominum  no- 
sfrwn  piipam  sanclamque  aposlolicam  sedem 
cl  nos  qerere  comprobaris,  vilœqite  ac  mo- 
nim  honestas,  oliaque  lattdahilia  probilalis  et 
virtutitm  mérita,  quee  iltaniia  largilor  altis- 
simus  in  persona  luu  exubérante  gralia  cumu- 
lavit,  merito  nos  inducunt  ut  persomun  cam- 
dem  dignioris  nominis  liliilo  extollamus  et 
singulaii  prœrogatira  decoremns.  Ilinc  est 
(/uoil  nos  volentes  te,  pi-wmissorum  tuorum 
intuitu,  specialis  exccUentice  dignilntc  subli- 
ma) e  et  cum  dignis  proseqni  favoribns,  te  Lu- 
dovieum  de  iMarlenne,  domiimm  de  l'uvi};nc, 
(nslrali  adoptione  plium  altissimi  polcnlissi- 
mique  principis  Ludovici  Delphini  Franciœ, 
fimul  et  al:is.<imœ  ac  polentissitnw  pvincipix 
Maria  Tlieresiœ  Auslriarte  Galliurum  rcginœ, 
sacri  putalii  et  aulœ  Lateranrnns  comitem, 
militcm  et  equilem  Aureaium  ,  auctoritale 
(ipostolita  nobis  uli  prœsuli  assifteiiti  a  san- 
cla  sede  aposlolira  loncessa,  ipia  [unijimiir  in 
hac  parle,  tenore  prœsentium,  facimus,  créa- 
mus,  insliluimus,  deputatnns,  ac  aliortini  co- 
mititm,  niiiiium  et  equilum  Aurentornm  sacri 
pnlatii  et  aidœ  Latcranen'is  hiijiismodi,  7iu- 
inero,  urdini  et  consortio  [avoriibdiler  aiigre- 
qamus  :  decernenles  qiiod  lu  ex  nunc  deinceps 
veslibiis,  cin(/ulo,  ense  et  cakaribus  aure  ilis, 
turque  et  aliis  insignibus  militaribus  ,ne  en  on  et 
omnibus  et  singulis  priviligiis,  immunitaii- 
bus,  exeD'ptionibiis,  ho)ioribus,  prweminentiis 
et  antelationihus,  qui'ius  ulii  sucri  palatii  et 
aulœ  Lateranensis  comités,  milites  et  ei/uiles 
Aureati  ab  endem  sancta  sedeapostolica  i  rcali, 
de  jure,  usu,  eonsuetudine,  privilegio,  aut 
alias,  quomodolibet  ittuntur,  potiunlitr  et 
gaudcnt,  uti,  potiri  et  gaudere  possis  et  va- 
i'os,  non  obstantilms  constitutionibus  et  or- 
dinationibus  aposlolicis  cœterisque  contrariis 
quibusciinque.  In  quorum  omnium  et  singu- 
lorum  fidem  et  lestimoniiim,  hoc  nostrum 
privilcgium,  manu  propria  firmalum  et  per 
infra  scriplum  secretaritim  nostrum  suliscribi, 
.'•iglllique  nosiri  quo  in  talibus  tttimur,  jussi- 
iiitis  iinpn ssione  iiitniiii.  Valum  l'arisiis  in 
palatio  nostro,  die  28  mensis  Novembris  anno 


1702.  L.  archiep.  ^icnîonen.;  et  plus  bas:  Jo- 
seph.  Ragm.  Alcorambonus  srcret.  et  scellé. 

Vogez,  pour  cet  ordre,  Favin ,  Théâtre 
d'honneur  et  de  (hevalirie;  Bernard  Giusti- 
nirini,  llisl.  di  tutti  gli  Ord.  militari;  de 
Bellay,  Mennénius,  HiTinan  et  Schooncbeck, 
dans  leurs  llisl.  des  ordres  militaires. 

Il  y  a  eu  aussi  à  Naples  un  ordre  de  l'Eperon 
institué  par  Ch.irles  d'Anjou,  roi  de  Naples 
el  (le  Sicile.  Ce  prince,  ayant  été  couronné  à 
Rome  l'an  12()G,  eu  partit  pour  aller  prendre 
possession  du  royaume  de  Naples.  Mainfroy, 
qui  le  lui  disputait,  ayant  succomhé  dans 
une  bataille,  tout  le  royaume  se  soumit  an 
comte  d'Anjou,  qui,  pour  avoir  [>lns  do 
moyen  de  récompenser  la  nob'esse  qui  s'élail 
«léclaréo  pour  lui,  él.ihlit  l'ordre  de  l'Eperon. 
Voici  de  quelle  manière  ou  y  était  reçu.  Lo 
chevalier  se  présentait  au  jour  marqué  dans 
l'église  calhédr.ile  de  Naples,  et  là,  sur  un 
théâtreélevé  oùétaicnl  le  roi,  la  riine  cl  toute 
la  cour,  il  prenait  place  dans  une  chaise 
couvcrfe  de  drap  de  soie  verte.  L'archevêque» 
en  habit  de  diacre,  accompagné  de  ses  suf- 
l'ra'jianls,  le  faisait  jurer  sur  les  saints  Evan- 
giles qu'il  ne  porterait  jaii'.ais  les  armes  con- 
tre le  roi,  s'il  n'y  él.iit  obligé  par  son  légilime 
seigneur,  el  qu'en  ce  cas  il  rendrait  au  roi 
la  marque  de  l'ordre,  sous  peine  d'éire  ré- 
puté infâme  el  mis  à  mort,  s'il  était  pri  ou- 
nier  de  guerre;  qu'il  défoudrail  de  toutes  ses 
forces,  quand  il  serait  rei|uis,  les  dames  tant 
veuves  qtie  mariées  et  les  orphelins  abrui- 
diinnés,  si  leur  cause  était  juste.  Deux  che- 
valiers des  plus  anciens  le  présentaient  en- 
suite au  roi,  qui  de  son  épée  lui  touchait 
l'épaule  en  lui  disant  :  Dieu  te  fasse  bon  che- 
valier; puis  sept  demoiselles  de  la  reine,  ve- 
lues de  blanc,  venaient  lui  ceindre  l'épée; 
(juatrc  chevaliers  des  plus  considérables  lui 
attachaient  les  éperons  dorés,  el  la  reine  lo 
prena  l  [lar  I;!  main  droite  et  une  autre 
dame  la  plus  considérable  p:r  la  gauche, 
el'es  le  conduisaient  sur  un  autre  siège  ri- 
cheiiicnl  paré.  Abirs  le  roi,  se  pbiçanl  à  sa 
(l)oite,  la  reine  à  sa  gauche,  toute  leur  coia* 
dans  des  sièges  au-dessous,  on  servait  un- 
collation  de  sucreries,  par  où  linissail  la 
cérémonie.  On  ne  sait  point  quelle  était  la 
marque  de  cet  ordre. 

Des  Noulis,  Histoire  des  rois  de  Sicile  et 
de  Nnples,  des  maisons  d'Anjou,  pag.  138. 

DOMINIQUE  (Congrégations  diveiises  dh 

Saint-).  Voy.  Lombardie. 

EPINAL,  DE  PoussAY  ET  DE  BouxifenE  E\ 
Lorraine,  de  Saint-Pierre  et  de,Sainte- 
Mar:e  a  iMetz  (Chanoinesses  d'). 

Les  chanoinesses  d'Kpinal  n'ont  pas  clé 
moins  religieuses  dans  leur  origine  que  cel- 
les de  llemiremonl  leurs  voisines,  (|u'elles 
ont  imitées  en  secouant  le  joug  de  la  régie 
de  Saint-Benoît;  el  il  en  est  de  même  de 
toutes  les  autres  dont  nous  |!arlerons  dans  la 
suite.  Elles  eurent  pour  fondateur  Thierri  1", 
évèqiie  do  Metz.  Mûrisse,  évèque  de  Ma- 
d:iure,  s'est  troinpé  lorsqu'il  a  dit  (juc  saint 
Guérie,  trentième  évèque  de  Metz,  qui  mou- 


170  niCTIONN.MRF.  PES  OniiURS  nrLioiF.ux  m\ 

rui   i';iii  Goi,   fondi    un  iiKinasliTC  à  Iviin.il  il  y  a  une  copie  .'i  hi  liihliolhôuuo  du  Roi  (1). 

011  I  lionneur  ilo  s.iiiit  M;uiiice  c\  en  faveur  Primo  quidum  rlericortim  coirentum  ad  om- 

des(»ideu>i  filles,  donl  l'ainoe,  nom:iiée  l'ré-  nipatenlis    Dei  lionorrm    coadunainl  ;    poft. 

«ie,  fut  la  iMeiiiière  supérieure;  e;  que  coIIl-  filoriam  t/ivinilalis ,  guunliim  in  Itomine   esc 

ahhuye,   ^ilul•e  sur  le   liord   de    la   Moselle,  tufis  viribus  onmir/U!^  coiiamine  gesliens,  a»- 

*'est  rendue  recouimaridable  par  la  niullilu>lc  cillas  Chrisli  siib  regiihiri  tiln  et  suh  instilii- 

des  il.iuies    ou   des   rolii;ieuses  qui   s"y  sont  lioiie  l'alris  noslri,  benli  sridcel   Benedicti, 

retirées,  par  sa  pranJeur,  son  elenl^u■^  et  les  Orne  rdoctna,  lieo  et  snitcl)  (îoerico  pontifici 

i;r.'inds  biens   ([u'elle   possédait  :  ce  qui  y  a  servire  ilesiimivit ,  d(ins  pradia  ri  possrssio- 

atliré  tant  de  nioiide,  (|u'iin  y  a  hûli  une  ville  nés,  qiiibns  si»  ■  inopia  et  sine  iiidifienlia  vi- 

à    l'enliiur   (lui    se    nuininc   l'pinal,   et   que  vere  possciit.  Le<   papes  Alexandre  III,   Ho- 

tjuelques  liisloriens  tiennent  que  c'i'Sl  de  là  norius   III,   F.iKius    III,  et    plusieurs  autres 

que  le  te  ville  ;i()parler:ait  au  refois  aux  évé-  pomiles  ,    prirent    ce    monastère    sous    leur 

ques  de   Metz.    Il    donne    assez  à  connaitre  protection. 

qu'il  reeoniiail  aussi  ce  saint  pour  le  fonda-  •  harles  \'II,  roi  de  Trance  ayant  pris  i  os- 

(eur  de  cette  ville,  pnisijue  dans  la  laide  des  session   de    la  ville  d  Epiiial,  en  IWi,  con- 

n?alières,  parlant  d'I^pinal.   il   dil  po-itive-  finna  à  ces  religieuses  tous  leurs  privilé-^es, 

ment  (|ue  celte  \ille  fut  bâlic  par  saint  Goë-  franchises,   libertés,  droits   el  préroi^alives, 

ric.  Cependant  il  e-l  certain  (jue  non-seule-  dont  elles  joui-saient,  par  ses  lettres  don- 

meiit  la  ville  d'Kjiie.al,  mais  même   l'abbaye  nées  à  lipinal  la  même  année;  el  pr.r  d'au- 

qui    porte  présentement  le  nom  de  ce  saint,  1res  lelties   il   les   prit   sous  sa  protection  cl 

n'ont  été  fondées  que  plus  de  trois  cents  ans  sauvegirde,  aussi  bien  que  leurs  chanoines, 

après.  Ce  fut  Dcuderic  ou  Thicrri  1",  évé(|uc  chapelains  ,    el    autres    personnes    de    leur 

dc.Melz.qniloiida  runecU'aulreversran'JdS.  éL-lise,  el  tous  leurs  officiers,  serviteurs  el 

«^eqnc  révêijuedeMadaiire  reconiiaitcnquel-  vassaux,  leur  départant  pour  gardiens  spé- 

qiic  façon  :  ç.ir,  lorsqu'il  dit   qu'il  y  a  des  ciaux  les  baillis  et  prévôts  de  t>ens,  de  Cliau- 

iiiémoires   qui   portent    que   Tliicrri  ,   outre  mont  el  d'Epinal. 

l'abbaye  de  ^'ainl-Vincnt,  qu'il  avait  fundée  Leur  église  avait  le  li  re  de  collépiale. 
à  M(tz,  en  f.  iida  encoïc  une  autre  à  Chau-  C'(St  ce  ()ui  se  prouve  par  un  acte  (2)  de  la 
nmni,  cette  fondation  ne  peut  être  antre  prise  de  possession  de  la  ville  dEpinal  et  ne 
chose  (|ue  celle  dij  l'abbaye  d'Iîpinal,  puis-  ses  dépendances,  par  Nicolas,  mai'i|uis  de 
(|u'ell  •  fui  bâtie  au  territoire  de  Chaumonl  Pont-à-.Monsson,  au  nom  de  Jean,  duc  de 
dans  le  diocèse  de  'l'oul.  Ce  qui  prouve  que  Calabre  et  de  Lorraine,  son  père,  el  du  scr- 
saiiil  Goëric  n'a  point  été  le  fondateur  ni  de  menl  de  lidcliié  el  d  obéissance  prêté  enlro 
la  ville  ni  de  l'abb  lye  d'Epinal,  c'est  que,  ses  mains  par  h-s  bourgeois  d'K|)iiial  (3), 
lorsque  les  bourgeois  d'Epinal,  las  de  la  do-  qui  s'élaienl  donnés  au  duc  de  Lorraine, 
mination  des  evêqucs  de  Metz,  se  donnèrent,  après  que  le  roi  de  France  Louis  XI  eut 
l'an  li'ci,  à  Charl.  s  \\l,  roi  de  France,  et  cédé  leur  ville  à  Ihibaul,  seigneur  de  Neul- 
Ini  prêlèreil  serment  de  lidélilé,  Conrard  château, ileCh;1tel-sur- .Muselle, et  maréchal  de 
llayer  (h;  Poppait,  évéque  de  .Met/,  ayant  I?ourg>gnc,  qu'ils  ne  voulurent  point  re- 
demandé au  roi  la  reslitiilion  d'Iipinaî,  cl  connaître  pour  souverain;  lequel  acio  est 
voiil.inl  prouver  qu'elle  avait  toujours  ap-  p  issé  |  ar-devanl  quatre  notaires,  ()ui  pren- 
parlenu  aux  évêques  de  .Metz,  qui  en  av.iieiil  "enl  la  qualité  de  noiaires  apo^toli;lues  et 
clé  les  fondateurs,  ne  remoiila  point  au  impériaux  en  I  église  collégiale  de  Sa;nl- 
Icinps  de  saint  Coéric  pour  prouver  son  an-  liooric  d'Fpinal.  Mais  quoi()ue  leur  église  eût 
tiqiiilé,  mais  bien  au  temps  de  Thicrri  1",  le  li  re  de  collégia'e,  ces  rhanoinesses  se  di- 
qui  en  était  le  premier  fondateur,  aussi  bien  saient  loujours  religieuses,  car  l'an  li7'i-, 
•ine  de  l'abbaye.  liené,  duc  de  Lorr.iine,  suivant  le  droit  qu'il 
'l'Iiicrri  I"  ayant  donc  fondé  la  ville  et  avait  d  son /oi/eux  avènement  à  son  duche(i), 
'.'abbaye  d'Epinal  vers  l'an  'J8-J,  coniiiK!  nous  de  pouvoir  placer  en  ihaque  monastère  de 
l'avons  dil,  lit  transporter  de  .Metz  le  corps  ses  Etats  une  rrli;;icuse,  présenta  à  l'abbesse 
di;  saint  (îoëi  ic,  qui  avait  tonjours  reposé  d'Epinal,  ,\lix,  lille  de  Louis,  seigneur  de 
dans  l'église  de  Saini  Sym|diorien,  et  le  mit  Dommarliu  et  d'Isabelle  du  ChàU'Iel  S'in 
dins  le  nouveau  moiiaslère  d'Epinal,  auquel  épouse,  pour  être  reçue  dame  et  religieuse 
il  donna  le  mmi  de  ce  sainl.  Ce  prélat  éianl  en  ce  monastère,  «n  l'uisani  pur  elle  les  droits 
mort  a\ant  d'avoir  mis  dans  ce  monastère  oppiirleinnti  à  celle  cijlise,  cl  lui  donner  et 
des  personnes  qui  y  cliantassent  le^  louanges  délivrer  tons  les  lii  us,  profits,  honneurs  et 
ilu  Sri|;neur,  sainl  Ad.ilbéroii  M  y  assembla  émolHmrnls  que  tes  dames  présentes  par  ses 
d'abord  des  clercs,  et  donna  ensuite  ce  mo-  pridccesseui s  y  amient  pris  el  reça<.  Mais 
nasière  à  des  religieuses  de  l'ordre  de  Saint-  dans  la  suite  elles  •  ni  pris  le  nom  île  clia- 
Itenoil.  C'est  ce  qui  paraît  par  la  \  ie  de  ce  noinesses.  Elles  sont  au  nombre  de  vingl. 
saint,  écrite  par  Uicher,  abbé  de  Sainl-Sym-  Leur  habillement  de  chov  r  est  semblable  i 
phurien  de  Metz,  auteur  conlem|iorain,  donl  ci  lui  des  chanoinesNCs  de  Uemir mont;  l'ab- 
l'original  est  chez  les  l'ère.  Carmes  Dé-  bi'sse,  la  doyenne,  el  la  secretle,  au  lieu  de 
chaussés  de  CIcrmont  en  Auvergne,  et  dont  couvre-chcr,  ont  une  espèce  de  guimpe,  et 

v'I)  Maiiiisi  rils  de  du  Cliéne,  ii  l:i  liiblioil.é<|ue  du  clmnes  du  rni.  I.nyclte,  Fn!ii:il   n.  147. 

Roi.  vol. XII.  {V  im..  n.  II;). 

(tj  liivcuiairc  d»  (jfrcs  (/<■  tcrifliii.' au  Trésor  de  (i)  llul.,  »,  S'-i. 


Itfl 


EPI 


KSG 


182 


I  abhc's^e,  aussi  Imimi  que  les  ,•^lt!(•^  cliaiioi- 
liesses,  porlciU  <mi  loul  lenips  et  en  (ou!  lieu 
un  ni'.iaii  bleu  tic  la  larijcui-  de  (iii.ilre  dorL-l', 
par-dc'ssus  l'ép^iule  droite  jusciu'à  la  haiiclie 
gauclu',  .-ivcc  un  nœud  ;iu  bout. 

Joan.  iMabil!.,  Annal.  Oril.  S-  Henni,  tom. 
IV,  pag.  21.  iMurisso,  lîisloire  (les  ct-rt/rteK  île 
Metz;  ci  Inventaire  des  litres  de  Lorraine, 
au  'J'résor  des  chartes  du  roi. 

Il  y  a  encore  en  Lorraine  deux  auties 
chapitres  de  tli.inoinesses  sccnlièies,  l'un 
à  l'oussay,  proche  la  ville  de  MirecourI, 
l'autre  à  lîousieres,  à  une  lieue  de  Nancy. 
Hernian,  évêquc  de  Toul,  avait  jeté  les  fon- 
dements du  nionaslère  de  Pnussay  dans 
un  lieu  api)elc /-"o/f-Suove,  qu'on  a  depuis 
iionimé  Poussai/:  mais  ce  prélat  étant  mort 
en  102(),  son  successeur,  saint  Brunon,  qui 
fut  depuis  pape  sous  le  nom  de  Léon  IX, 
le  fil  achever,  el  y  mil  des  religieuses,  qui 
dans  la  suite  ont  vécu  en  séculières,  sous  le 
nom  de  clianoinesses.  Celles  de  Bouxières 
furent  aussi  fondées  par  un  évéque  de  Toul, 
iiommé  Gozelin,  au  commcncemeni  du  dou- 
zième siècle.  Elles  étaient  autrefois  rrli- 
f^ieuses  de  l'ordre  de  Sainl-Benoîl  ;  mais  elles 
ont  secoué  le  joug  de  cette  règle  pour  se  sé- 
culariser sous  le  nom  de  clianoinesses. 

Les  ch;inoiursses  de  Saint-Pierre  et  do 
Sainle-.Marie  à  Metz  ne  peuvent  p.is  nier 
qu'elles  n'aient  été  filles  de  Sainl-15tnoî(, 
puisque  ce  n'esl  que  de  nos  jours  qu'elles 
ont  piis  le  nom  de  cbanoinesses,  el  qu'elles 
ont  renoncé  aux  vtrux  solennels.  L'abbaye 
iii'  Saint-Pierre  est  très-ancienne;  l'on  pré- 
tend qu'elle  fui  fondée  par  Eleutlière,  duc  du 
palais  des  Français  ,  sous  les  règnes  de 
1  bicrry  el  de  Tliéodcberl,  enfanls  de  Cbilde- 
berl,  et  qu'il  assigna  à  ce  monastère  des 
fonds  sulfisants  pour  l'entretien  de  trois 
cents  religieuses,  auxquelles  il  donna  saiule 
Waldrée  pour  abbesse.  Ce  monastère  fut 
d'abord  appelé  Haut- M  ou  lier  ou  Marnwii- 
tiir,  el  les  relig-euses  y  vécurent  avec  be;iu- 
coup  de  régularité;  mais  elles  avaient  déjà 
quitté  la  lègle  de  Saint  -  Benoît  dans  le 
dixième  siècle,  lorsqu'Adalbéron  l",  évéque 
de  Metz,  employa, l'an  960,  l'autorité  dei'em- 
percur  Olhon  pour  obliger  ces  religieuses  à 
reprendre  leur  règle.  Elles  tombèieiil  eu- 
cure  dans  le  re  âchen.ent  (juelques  années 
après  :  ce  (lui  obligea  l'évéque  Adalbéron  II, 
vers  lan  10  0,  d'y  apporter  la  réforme.  Et 
comme  le  grand  nombre  de  religieuses  (jui 
elaient  dans  ce  nionaslère  pouvait  causer  de 
la  confusion,  il  lit  bâtir  un  autre  monastère 
à  côté  de  celui  de  Saint-Pierre  pour  y  mettre 
une  partie  de  ces  religieuses,  et  servir  de 
noviciat  à  celles  qui  y  voudraient  faire  pro- 
cession de  la  vie  niona?tique.  Il  fit  bâiir  d'a- 
bord un  oratoire,  (]u'il  dédia  en  l'Iionueur 
de  la  sainte  \ierge,  et  y  fit  mettre  un  cru- 
cifix, devant  lequel  les  novices  Caisaienl  leurs 
vœux  solennels  :  ce  qui  fil  doniier  le  nom 
de  Bénil-Vœu  à  la  rue  où  ce  monastère  était 
situé;  et  les  gens  simples  appelèrent  ce  cri;- 

(1)  Franc.  Mod.  dcOid.  Kcclcs.  Oriij. 
(-)   ^'-"J-t  à  la  lin  du  vol.,  ii*  ob. 


cifix  s.iint  Uénit-Vo;u,  ce  nom  lui  étant  resté 
jus(iu'à  présent.  Lors(|ue  l'on  bâtit  la  cita- 
delle de  Metz,  en  15G0,  ce  monastère  fn'. 
ruiné,  el  les  religieuses  furent  (rausférées  en 
une  mai-oi)  qui  appartenait  aux  chevaliers 
(le  .Malle,  appelée  le  Pi  tit-Saint-Jean.  Jus- 
que-là elles  avaient  été  soumises  au  monas- 
tère de  Saint-Pierre,  qui  fut  aussi  transféré 
dans  la  ville;  mais  elles  se  sont  soustraites 
de  son  obéissance.  Plusieurs  évèqucs  ont 
tâché  inutilement  de  rétablir  la  discipline  ré- 
guli;''re  dans  ces  deux  abbayes;  mais  les  re- 
ligieuses, bien  loin  d'observer  la  clôture,  ei 
de  reprendre  les  observance>  régulières,  oui 
voulu  vivre  en  séculières  el  en  porter  l'habit. 
lîlli'S  ont  au  chœur,  comme  les  chanoincsses 
de  liemiremonl ,  de  Poussay  et  de  iinuxiè- 
res,  un  grand  manteau  doublé  d'hermine  : 
d'Iles  do  Saint-Pierre  vont  à  certains  jours 
tu  procession  avec  les  chanoines  de  la  ca- 
thédrale. 

Joan.  Mabillon,  Annal.  Bened.  t.  III  et  IV. 
Antoine  Yepez,  CInon.  génér.  de  l'Ord.  de 
Saint-Benoît,  t.  Il  et  V.  Mûrisse,  Histoire 
des  évi'ques  de  Metz. 

El{MITi''S.  Voyez  leurs  noms  spéciaux, 
par  exemple:  Augustin  (Ekmites  de  Saint-); 
Jiîan-Bai'Usïiî  (Kkmitks  oe  SAl^T-)  ,  etc. 
i'ui/rz  aussi  la  Dissertation  préliminaire,  cl 
le  Suiiplément. 

EUMl  lES  SERVITES.   Voijez  Servitiîs. 
ESCLAVES  DE   LA  VERTU.   Voyez  Hache. 

ESCLAVONS  (Moines). 

Quelques  auteurs,  comme  Modius  et  Dam- 
man  (1),  ont  parlé  d'un  ordre  de  moines 
Esclavous  dont  l'habillement,  à  ce  qu'ils  pré- 
tendent, était  rouge,  mais  ils  n'ont  rien  dit 
de  son  origine;  et  Abraham  Bruin,  Joss(! 
Ammanus  Michel  Colyn  el  Schoonebeck,  ont 
donné  riiabillemcnl  d'un  de  ces  moines  tel 
que  nous  l'avons  fait  aussi  graver  (2).  Ce 
qui  est  certain,  c'est  qu'il  y  avait  en  Bohême 
el  en  Pologne  des  moines  (jui  cékbraient 
l'office  divin  en  langue  esclavone.  Leur 
monastère  de  Pologne  était  situé  hors  les 
murs  de  Cracovie,  au  faubourg  de  Cléparz, 
et  fut  fondé,  sous  le  litre  de  Sainie-Groix,  par 
Ladislas  IV,  roi  de  Pologne,  l'an  138J  ou 
1.J90.  Ces  moines  furent  tirés  d'un  monaslèro 
qu'ils  avaient  à  Prague,  et  par  leur  fonda- 
l  on  ils  étaient  obligés  de  célébrer  les  divins 
offices  eu  langue  esclavone.  C'est  ce  que 
nous  apprenons  de  Dugloz,  de  Miechovita  et 
deCromcrius,  historiens  poloiiai-^. 

Uuglez,  qui  écrivait  vers  le  milieu  du  sei- 
zième siècle,  et  qui  met  la  fondation  de  ce 
monastère  de  Cléparz  en  l'an  138!),  dit  (3)  que 
de  son  temps  les  moines  qui  y  demeuraient 
faisaient  encore  l'office  divin  en  langue  escb- 
vone:  Wludislans  secnndns  Poloniœrex  eum 
consorte  sun  Ilediv'gi  excitait  exemplnri  si- 
mi'li  quod  in  civitute  Pragensi  habetur  monn- 
sleriiim  Sluvoruin  ordinis  S.  Bmedicti,  et  tnb 
ejus  regulari  ohservuniia  duraturum,  sub  ho- 
nore el  titulo    Sanctœ   Crucis    extra  mitroé 

(5)  iMisldz,  llist.  Polmi. ,  lib.  x,  pag.  tll. 


»83 


DICTIONNAmE  DES  ORDRES  REI.IC.IF.UX. 


Ï8l 


t'rucoviense.'!  m  oppido  CL'pnrz,  non  lonqe  u 
fjiimine  Hudawa  fub  pontificatu  l'elri  Vilz 
episcopi  Cracoiieiisis,  fundant  et  condnnt  et 
dotant,  et  pulcherrimo  muro  latericio.  circtii- 

litm Fratresqite  ex   monasterio    Praijensi 

tumplos  ad  iltam  intruducuni n  qnibus  us- 

qiie  ad  mea  trmpnra  et  sub  oculis  meis  ceclesia 
illa  SnnctcB  Crucis,  et  in  re  divina,  et  in  ma- 
lutinis,  horisque  canonici^,  cœleris/ue  cccle- 
ilnslicis  cœreinoniis,  sonoro  cnnlu  et  leclione 
idinmate  slaionico  per  monachos  fralresque 
S.  lienedieli  officittbatiir  et  admifiistrabatiir. 

Micchoïila,  qui  érrivail  plusieurs  années 
après  Dugloz.  dit  (1)  aussi  que  ces  reli'jicux 
suivaient  la  rôijle  de  Saint-Benoit,  quil  lurent 
fondés  l'an  13Ji),  et  que  dans  sa  jeunesse  il 
n'y  avait  plus  qu'un  prêtre  qui  célébrait  dans 
ce  monastère  la  messe  en  laniiue  csilavone  : 
Anno  Domini  1390,  fcria  quinla  post  frsium 
sancti  Jacobi  apustoti,  rex  Wladislaus  r,itm 
sua  consurie  lledtcigi  vtonasteriitm  Slavoruin 
ord.  S.  Benedicti  ex  Praga  sumptorum  tituU 
S.  Criicis  exIrnmurosCraeotienses  in  oppido 

Cleparz  fundavcrunt Ut  voce,  sonora  lam 

horas  canoriicas  quam  missas  in  idiomate  Sla- 

vonico  celelirannt  et  expièrent termn  in 

diebits  pueritiœ  meœ,  prcfbylcr  Slavus  idio- 
mate Slavonico  cuntinuabnt. 

J'ai  éiril  en  l'oUigiie  pour  savoir  s'il  ne 
serait  point  reste  dans  cette  éplisi;  de  Sainle- 
Croix  du  f.iuliourg  de  Cléparz  à  Cracovie, 
quelques  ani  ieiis  monuments  i^ui  jjussent 
donner  une  plus  ample  connaissance  de  res 
moines  l'^sclavon*;  et  les  ménioi  es  ((ui  m'ont 
été  env'ijés  de  ce  pays  eu  1712  marquent 
que  celle  église  ayant  été  rebâtie  nouvelle- 
ment, il  ne  s'y  trouve  plus  auitin  tableau  ni 
écrit  csclavon  <iui  fasse  mention  des  moines 
qui  Tont  \  ossédce.  Il  est  encore  marqué  dans 
ces  mémoires  qu'il  y  a  à  Cracovie  des  per- 
sonnes âgées  qui  di-ent  que  devant  la  pre- 
mière fiuerre  des  Suédois  on  faisait  dans 
cette  église  des  prédications  en  langue  cscla- 
vone,  et  qu'il  y  a  des  act  s  qui  portent 
qu'elle  a  été  desservie  par  des  moines  de 
Saint-I5asile  qui  suivaient  le  rite  grec.  Il  se 
peut  faire  que  quelques  moines  Moscov.tes, 
qui  sont  tous  de  l'ordre  de  Saint-Basile, 
ayant  embrassé  la  religion  ralho!i()ue,  aient 
•loillé  leur  pays  pour  s'élabiir  en  IJoliéme  , 
où  ils  ont  eu  la  pernùssion  de  suivre  le  riic 
grec  et  de  célébrer  l'office  divin  en  langue 
Cïciavonc  scion  l'usage  de  Moscovie  ,  et 
(ju'il  aient  passé  ensuite  en  Pologne,  où  ils 
ont  été  appelés  et  établis  à  Oacovie  par  le 
roi  Ladislas  IV.  (jue  quelques-uns  disent 
n'avoir  été  que  le  deuxième  du  nom. 

(^e  qui  me  fait  croire  que  ces  inoine^  l'.scla- 
vons,  ainsi  appelés  apparemment  à  cause 
qu'ils  célébraient  leurofliec  et  sseen  lan- 
gue csclavone  ,  pouvaient  être  sortis  do 
Moscovie,  est  la  couleur  de  leur  batiilleineiil, 
qui  était  rouge  ;  car  les  moines  Moscovites 
étaient  ainsi  habillés  anciennement;  c'est 
puur(]uoi  j'ai  mis  ces  moines  Ksclavons  au 
rang  des  religieux  de  Saint-Basile,  quoii|Uc 
Dugloz,  Miccbovila  et  quelques  autres  bisto- 


riens  polonais  disent  qu'ils  suivaient  la  règle 
de  S.iinl-Benoit.  Le  motif  qui  peut  avoir  porté 
le  roi  Ladislas  à  établir  ces  moines  en  Polo- 
gne, et  à  les  obliger  à  célébrer  leur  office  en 
langue  esclavone,  est  pcul-èlre  à  cause  que 
la  langue  i  olonaise,  de  même  que  la  bohé- 
mienne et  la  moscovite,  tire  son  origine  de 
l'esclavone.  Nous  avons  dit  ci-devant  à  l'ar- 
ticle B.vsii.k  que  les  moines  de  Sai;il- Basile 
dans  la  Bussie-Blanclie  ou  petite  Unssie, 
province  de  Pologne  qui  appartenait  autre- 
lois  aux  Moscovites,  disent  encore  h  ur  office 
en  langue  esclavone,  en  suivant  toujours 
le  rite  grec,  et  qu'ils  ne  renoncèrent  à  leurs 
erreurs  que  l'an  lo'J'i.  C'est  ce  qui  nous  con- 
firme dans  l'opinion  que  nous  avons  que  ces 
moines  Esclavons  qui  s'établirent  en  Bohème 
el  en  Pologne  pouvaient  avoir  été  des  moi- 
nes Moscovites  ou  Itussiens  qui  avaient  aussi 
renoncé  à  leurs  erreurs 

ESPRIT  (CiiANOiNKS  nÉGiLiF.ns  Associi;s  db 
l'ordre  uu  Saint-) 

On  sait  qu  il  y  a  eu  des  chanoines  régu- 
liers sous  le  nom  d'Associés  de  l'ordre  du 
Saint-Ksprit  ;  m  lis  on  ignore,  et  l'annccî  et 
le  lien  de  leur  établissement,  et  ce  qu'ils  sont 
devenus.  Il  y  a  néanmoins  bien  de  l'app;»- 
vence  qu'ils  ont  subsisté,  puisque  l'on  trouve 
plusieurs  éditions  de  leurs  consliiulions  , 
dont  lieux  se  trouvent  à  la  bibliothèiiuedu  lloi, 
l'une  de  Paris,  in-li",  de  l'année  158"^.  et  l'au- 
tre aussi  de  Paris,  in-i%  de  l'année  Ki'iO.  Ces 
constilulions  furent  approuvées  par  l'arche- 
vêque de  Bouen,  les  evéques  de  Bayeux  et 
de  (]outance,  et  par  plusieurs  docteurs  , 
comme  il  paraît  par  l'épîlre  dedicat'jire  de 
ces  constitutions. 

C'isl  d.ins  cette  épîlre  dédicaloire.  adres- 
sée le  '••  novembre  1588  au  pape  Sixte  V, 
que  le  fondateur  de  ces  ch. moines  se  fait 
connaître,  lise  nommaii  Jean  llerbetet  était 
Lorrain  ;  il  dit  au  pape  que  sa  mère,  étant  en- 
ceinte de  lui,  le  consacra  à  Dieu;  qui-  dans 
sa  jeunesse  Dieu  lui  inspira  un  grand  zèli; 
pour  son  service,  el  qu'il  eut  toujours  beau- 
coup d'aversion  pour  tout  ce  qui  élait  con- 
traire à  ses  cnnimandemeiils  et  à  ceux  de 
l'Kglise  ;  que  de|puis  vingt -six  ans,  ou  envi- 
ron,  il  avait  fait  serment  de  s'o|)poser  forte- 
ment jus(ju'à  la  mort  aux  héréli()ues,  aux 
méchanis  catholiques,  aux  ecclésiastiques 
im()udii|ues,  ivrognes,  avares,  et  qui  négli- 
geaient le  service  divin;  que  depuis  vingt- 
deux  ans  il  avait  tous  les  jours  célébré  la 
sainte  messe,  excepté  seulement  trois  jours 
qu'il  en  avait  été  empêché  par  des  personnes 
qui  s'opposaient  à  son  institut,  et  qu'il  aimait 
mieux  miiurir  que  d'être  privé  pendant  un 
seul  jour  d'offrir  le  sacrifiée  adorable  de  nos 
autels  ;  i)u'ciifin  il  avait  été  inspiré  de  Dieu 
d'instituer  sa  congrégation,  qui  est  divisée 
en  une  «onfratcrnité  et  en  un  ordre  de  cha- 
noines du  Saint-Ksprit  ;  que  la  confraternité 
est  pour  tous  les  catholiques  de  l'un  et  de 
r.iulrc  sexe;  qu'elle  éijit  déjà  fort  étendue 
en  Normandie,  principalcmeut  dans  le  dio- 


(l)Malli.   uc   Mietbjvila,  C/iro».   l'vhn.,    lit»    x,  rap.  19. 


18.-) 


ESP 


ESP 


186 


cèse  de  Coiilaiirc,  cl  que  les  sl.iluti  en 
avaient  élé  approuvés  pir  le  cardin.il  de 
lîourbon,  arclievêque  de  Ilouen,  par  le«  évo- 
ques de  Coulaiice  et  de  lîayeui  et  par  plu- 
sieurs docteurs  en  théologie  des  universités 
de  Paris  et  de  Caen;  et  il  présente  ces  sta- 
tuts au  pape,  avec  ceux  qu'il  avait  dressés 
pour  les  cliaiioini's,  pour  en  avoir  la  coiifir- 
nialion  de  ce  pontife;  niais  nous  ne  savons 
pas  s'il  la  lui  donna. 

Conformément  à  ce>  conslilulions ,  ces 
chanoines,  s'ils  étaient  prêtres,  devaient  cé- 
lébrer la  messe  tous  les  jours;  et  s'ils  ne 
l'élaienl  pas,  ils  devaient  en  enlendrc  une 
tous  le<  jours,  et  plutôt  deux  les  fêtes  et  les 
dimanches.  Ils  s'employaient  à  l'inslruction 
de  la  jeunesse;  c'est  pourquoi  ils  avaient  des 
colléfçes,  et  dans  ceux  où  ils  n'avaient  pas 
beaucoup  d'écoliers,  ils  pouvaient  clianter 
tous  les  jours  l'office  divin  àléglise,  si  quel- 
que fondateur  le  demandait,  et  seulement  les 
fêles  et  dimanches  dans  les  collèges  où  ils 
avaient  beaucoup  d'occupation.  Les  reli- 
gieux delà  communauté,  (H  rnênie  les  do- 
mestinne-i,  devaient  laire  absiinence  tous  les 
mercredis  de  l'année.  Si  l'on  ne  trouvaii  p;s 
de  poisson,  ils  devaient  se  conlenler  de  lé- 
gumes, lîii  mémoire  de  la  passion  de  Nutre- 
Srigucur.  ils  jeûnaient  tous  les  vendriMlis,  à 
moins  qu'il  ne  se  rencontrât  unjeùned'Kglisc 
dans  la  semaine,  et  il  était  libre  à  unchacm 
de  s'abstcnirdu  vin  le  vendredi,  par  morlifica- 
lion,  et  de  jeiJner  pendant  l'avent  :  personne 
n'était  aussi  obligé  au  jeûne  depuis  Pâques 
jusqu'à  la  Pentecôle;  et  si,  étant  en  voyage 
ou  pour  quelque  autre  raison,  ils  ne  pou- 
vaient satisfaire  au  jeûne  du  vendredi  et  à 
rab>liiience  du  mercredi,  ils  devaient  dire 
ou  les  sept  psaumes  avec  les  litanies,  ou 
trois  fois  le  cbapeltl,  ou  donner  cin(|  sols 
aux  pauvres  de  re  qu'on  leur  accordait  pour 
leur  usage,  et  dans  ce  nombre  étaient  com- 
pris les  curés  et  les  »icaires  qui  étaient  oc- 
cupés à  administrer  les  sacrements  aux  fi- 
dèles. T>)us  les  dimanches  ils  se  confessaient 
à  un  prélie  de  la  congrégation,  et,  hors  le 
collège,  à  un  aulre  prêt  e  approuve  par  l'é- 
véque,  (  t  au  moins  lous  les  ans  ils  devaient 
faire  une  confession  générale  à  leur  prov  n- 
cia!  ou  <i  son  vicaire.  Ceux  qui  n'étaient  [las 
dans  les  ordres  sacrés  communiaient  seuli- 
nienl  une  fois  le  mois  ;  ceux  qui  étaient  dans 
les  ordres  sacrés,  toutes  les  semaines,  [irin- 
cipalemenl  les  dimanches  et  les  fêles,  alin  de 
s'accoutumer  à  s'approcher  de  la  sainte  ta- 
ble, où  ils  devaient,  étant  prêtres,  tous  les 
jours  célébior  la  messe.  Tous  les  prêtres, 
diacres,  sous-diacres  et  bénéficiers,  étaient 
obligés  de  réciter  ou  ch.inter  les  heures  ca- 
nonialc-i  ;  et  ceux  qui  n'avaient  pas  les  or- 
dres sacrés  ,  seulei it  l'olfice  du  Saint- 
Esprit,  ou  de  la  sainte  A'ierge,  ou  les  sept 
psaumes  de  la  jiéniteiice.  Il  y  avait  des 
heures  destinées  pour  l'oraison  mentale,  et 
lexamen  de  conscience  se  faisait  soir  et 
malin.  Leur  habilicmenl  devait  être  honnête, 
semblable  à  celui  des  chanoines,  des  doc- 
teurs, ou  des  régents  des  universités,  sans 
aucune  supcrfluité;  ils  avaient  toujours   le 


bonnet  carré  dans  la  maison,  et  ne  portaient 
le  chapeau  que  quand  ils  sortaient ,  et  ils 
mettaient  à  leur  cnu  une  croix  d'or  ou  d'ar- 
gent, selon  la  qualité  des  personnes,  et  ils 
la  pouvaient  attacher  sur  leur  habit  exté- 
rieur, avec  la  figure  du  Saint-Msprit  en  forme 
de  colombe  descendant  sur  les  apôlres.  Voilà 
tout  ce  que  nous  savons  de  ces  chanoines  ; 
nous  donnons  seulement  encore  ici  la  fur- 
mule  de  leurs  vœux. 

l'Jgu  N.,  licet  non  sim  (liinns  conspectu  Dci 
optimi  marimi,  iiinini  in/inila  fjus  bonitale 
et  cleme.ntia,hodie  jjTofcsfii  ii'm  farin  in  or- 
(line  Siiiriliis  Snncti,  ei'ine  in  co  vulum  ptcio 
fol''miie  (ic  p/rptiliiuin  ohrdienliœ  et  ca:itil(ilis 
e!  abdicationis  prnprielntis  lionorum  lenipo- 
rnlinm  coram  cœl'sti  euriti  etniililanli  Eccle- 
sid  inler  manus  luas  [II.  domine)  eiiiue  et  tihi 
et  toti  asiociiilioni  Spirilim  Sancli,  sancic 
prnmilto  et  jiiro  et  vooco  me  perpétua  in  ea 
vicluriini,  servienu  Deo  cl  Eeclesiœ  Cliristintiic 
cl  cathulicœ,  aposlolieœ  et  Ilomanœ,  itsjue  nd 
mortem,  omnia  intellif/mdo,  fid'nvjue,  elpie- 
tntcm,  et  mores,  et  studia  nien  dirigendo  juxtn 
eJHs  (issociiitionis  eonslitulionis  a  M .  Jonnne 
llerbetio  pcr  graliam  Dei  ivntlulure prœscri- 
ptds,  et  a  summo  ponlifice  probnlns  aut  per- 
mifsas.  A  tua  ergo  imtnensa  bonitale  et  de- 
mcntia  humililer  pelo  (opiiinc  et  clemmtis- 
sime  Deus)  m(  gui  milii  dedisti  hoc  sanctum 
desiderium,  sic  etiam  ail  id  uwlius  et  io'jtfo- 
rius,  inlegrius  et  protnpHus  ndimplendum, 
gratin  Spiritus  sancli,  ubcrior(S  inilii  bénigne 
largiaris  ad  majorem ,  sancttoi  cm  et  clarioreiii 
Di  i  Patris,et  filii,  (t  Spiritus  sancli  gloriam, 
et  popuii  Chrisdani ,  polissimum  association  s 
Spiritus  Sancli,  sanctam  institut ionem,  incre- 
mentum  acdignil'ilem  et  meampluriniorwngue 
sidiitem.  Anien.  On  peut  consulter  les  Constitu- 
tions de  celle  congrégation,  qui  sont  sous  lo 
litre  de  Liliri  très  de  Legibus  CiUegiurum 
Ordinis  Canoiiicorum  S.  Spiritus,  instilu- 
tore  Joanne  llerbetio. 

iiSPUIT  (Chevaliehs  diî  l'ordue  du  Saiî(t-), 
en  France. 

H<'nri  111,  roi  de  France  cl  de  Pologne,  pis- 
s.int  par  Venise  à  son  retour  de  Pologne 
]:our  venir  prendre  possession  de  la  cou- 
ronne (!e  France,  la  république  de  Venise 
lui  lit  présent  de  l'original  des  sta'uls  de 
r<irdre  i.u  Saint-Espnt-au-Droil-Desir,  ap- 
pelé aussi  du  Nipud,  dont  Louis  de  'farenle, 
roi  de  Jérusalem  et  deSieile,  époux  de  Jeanne 
I",  reine  de  Naples,  avait  été  l'insiluleur, 
et  lui  avait  donné  le  nom  du  Saint-Esi^rit,  à 
cause  que  le  jour  de  la  Pentecôte  il  avait  élé 
couronné  roi  de  Jérusalem  et  de  Sicile.  C'est 
ce  qui  (il  nnîlie  la  pensée  à  Henri  lli  d'ins'i- 
luer  aussi  un  ordre  inilit  lire  suus  le  nom  du 
Saint-l'lspril,  à  i  au>e  que  le  jour  de  la  Penie- 
côle  de  l'année  lo7.'J  il  avait  été  élu  roi  de  Po- 
logne, et  qu'il  avait  succédé  au  royaume  de 
France  à  pareil  jour  de  l'année  suivante 
157'i.,  après  la  mortde  Charles  IX,  son  frère. 
Le  Laboureur,  dans  ses  Additions  aux  Mé- 
moires de  Castelnau,  dit  que  ce  prince,  ayant 
reçu  d(!  la  république  de  Venise  les  staluli 
de  l'ordre  du  SainlLspril  au-ltroil  Dési' ,  ius- 


IS7 


DlCTlONNAlUt':  DES  ORDRES  RKLIGII'LX. 


m 


lituc  par  Louis  de  Tarciili',  rôsolul  de  s'dp- 
l'iiipriiT  rel  ordre,  comme  s'il  avail  do  do 
!-oii  iiiveiilion,  cl  qu'.iprès  avoir  copié  e' 
iiDiiiiiiciilc  les  slaluts,  il  donna  ordre  au 
cli.incclicr  de  Chivoriiy  de  les  biùlcr  ;  m  lis 
ijuc  ce  ministre  se  (il  une  conscience  de  laire 
périr  un  si  rare  manuscrit,  le<)iiel,  outre  le 
mérite  île  son  sujet  et  d(!  son  antiquité,  él.iit 
encore  fort  estwnalile  pour  les  helles  rninia- 
lur.'S  en  »élin  où  l'on  voit  ce  qui  e--t  contenu 
en  cliaouc  rliapitre  deces  statuts  ;  (|ue  ce  li- 
vre eilinl  ensuite  en  paita^e  à  l'Iiilippc  Hu- 
riu(,  év((iue  de  Chartrc-:,  fils  du  sieur  de 
(".liiverny,  cl  qu'il  lomlia  enlinenlre  les  mains 
de  .M.  le  président  de  Maisons.  Ainsi,  se  on 
cet  auteur,  l'ordre  du  Sainl-I>;spril  de  Fiance 
n'est  antre  cliose  que  celui  de  Naples  ;  ce 
i|ui  ne  parait  pas  viaiseinhiabic  :  car  si  l'on 
compare  les  statuts  de  l'un  avec  ceux  de 
l'autre,  il  est  facile  de  juger,  par  la  dilîé- 
reiicc  (|iii  s'y  trouve,  que  ces  deux  ordres 
ont  été  faits  iudépendanimcnl  l'un  de  l'autre, 
la  conronnitc  (jui  s'y  renconlre  ne  consis- 
tant uiii(iuenient  qu'en  ce  qiic  Louis  de  Ta- 
renle  et  H.  uri  jll  eurent  le  même  nxilifen 
les  inï-litiiani,  le  prcmiurnc  l'ayant  l'ail  qu'à 
ciuse  (|u'il  av.iii  clé  couronné  roi  de  Jéiusa- 
lem  cl  lie  Sicile  le  jour  de  la  i'enlecote,  cl 
((lie  Henri  III  à  paicil  jour  avail  été  élu  roi 
de  roIi);.Mie,  et  qu'il  avaiisurcédé  au  royaume 
de  Fr.uice,  ce  (jui  n'était  pas  une  r.iison  assez 
forte  pour  l'obliger  à  supprimer  les  statuts 
de  l'ordre  du  Saint-Espril-au-Droit-l>ésir 
afin  d'en  abolir  la  mémoire,  (|ui  d'ailleurs 
se  serai  conservée  par  les  monuments  qui 
sont  encore  aujourd'hui  dans  Naples,  et  par 
le  témoignage  de  plusieurs  écrivains. 

(Juoi  ()u'il  eu  soit,  ce  ne  fut  ()ue  plus  de 
quatre  ans  apu's  que  Henri  lli  cul  reçu  l'o- 
riginal des  statuts  de  l'oidre  du  Sainl-Lsprit- 
au-I)roit-Uésir  ((u'il  institua,  au  mois  de 
décembre  de  l'an  lo7S,  un  onire  militaire  en 
l'honneur  et  sous  le  nom  du  Saint-Lsprit. 
Son  intention  ne  fut  point  d'abolir  lacitc- 
meiil  celui  de  Sainl-.Michel,  comme  (|uclques 
auteurs  ont  avancé,  puiscjue,  par  ses  lettres 
patentes  pour  lin  lilutiun  de  l'ordre  du  Saint- 
Kspril,  il  déclare  (ju'il  veut  et  entend  que 
relui  de  Sainl-.Michel  demeure  en  sa  force  et 
viijucur  et  soil  oliservede  la  même  manière 
qu'il  l'a  clé  depuis  son  institution.  Nous 
iivuns  misé,  dit  ce  prince,  iiirc  nuire  très- 
lunioi ce  diime  el  ni^re,  ô  Ini/urlle  noim  ricon- 
nuissuns  uvoir,  (iprès  Dieu,  noire  principale  el 
entière  obliijalion  ,  lei  princes  de  noire  sany, 
el  aitir  s  princes  el  uf/iciers  de  noire  cou- 
ronne, et  fegnrurs  de  norc  conseil,  étant 
prés  de  nous  ,  d'éri/cr  un  ordre  niili'aire  en 
cellutj  iKili  e  dit  roi/uume,  onli  e  celui  de  l\lon- 
neur  saint  Michel,  hi/ttel  nnus  voulons  el  i  n- 
leiidons  demeurer  en  sa  force  el  vigueur  cl 
être  olisi-rré  tout  ainsi  r/u'il  a  clé  pralii/uc  de- 
puis sa  première  inftiinlion  jusr/ucs  à  présent. 
l'.t  1  aji>u!c  cn>uil(;  :  l.e/uel  ordre  nous  créons 
cl  itlsiiiunns  en  riioiineur  et  sous  le  nom  el  li- 
tre du  bnitit  Sainl-li>pril,  pur  l'inspiration 
duffufl,  comme  il  a  plu  à  iJ.eu  ci-devant  dt- 
ri'/(r  nos  meilleures  et  plus  hearcu.-es  actions, 
nous  le  supplions   aussi  (/u'i!    j  tins  fasse  la 


i/rilie  que  now  voyions  liientôl  lous  ras  su- 
jets réunis  en  la  foi  el  religion  cahniique  et 
vivre  d  l'avenir  en  bonne  amitié  cl  concorde 
les  ttns  avec  les  aufr  s,  sous  l'oliservation  en- 
tière de  nos  lois  tl  l'ohéissanc  de  nous  et  de 
nos  successeurs  roii,  à  son  lioi  nnir  el  gloire, 
à  la  louange  des  lions  el  confusion  des  mau- 
vais, qui  esl  le  but  auquel  iende:il  nos  pensées 
et  actions,  comme  au  comble  de  notre  plus 
grand  heur  et  félicité. 

(>elle  prière  el  les  désirs  de  ce  prince  té- 
moignent assez  quelle  élai!  sa  piété,  cl  (|u'il 
n'y  a  rien  eu  que  de  saint  dans  l'instilu  ion 
de  son  ordre,  ce  qu'il  a\  ail  plus  cxpressé- 
menl  déclaré  un  peu  auparavant  d.ms  ses 
mcnics  lettres  palcnles.  où  il  dit  encore 
qu'ayant  adressé  ses  v(i>ux  et  mis  louie  sa 
conliaiice  dans  la  bonté  de  Dieu,  dont  il  re- 
connaît avoir  el  tenir  tout  le  bonheur  de 
celle  vie,  il  est  raisonnable  qu'il  s'en  res- 
souvienne, qu'il  s'efTorce  de  lui  en  rendre 
des  grâces  iminorlelles,  cl  qu'il  témoigne  ei 
toute  l.i  postérité  les  grands  bienfaits  qu'il 
en  a  reçus,  particulièrement  en  ce  qu'au 
niiiieu  de  lant  de  dilTérentes  opinions  au 
sujet  de  la  religion,  (|ui  avaient  partagé  la 
France,  il  l'a  conservée  en  la  connaissance 
de  son  saint  nom  dans  la  profession  d'une- 
seule  foi  calboliquc  et  en  l'union  d'une  seule 
Kglise,  apostolique,  et  romaine.  De  ce  qu'il 
lui  a  plu  par  l'inspiration  du  Sainl-Ksprit  W. 
j'Uir  de  la  Penlecôlo,  réunir  tous  les  cœurs 
c.  les  voloislés  de  la  noblesse  polonaise,  c! 
porter  tous  les  lîlats  de  ce  royaume  Cl  du 
duché  de  Li  liuanie  à  l'é  ire  pour  roi,  el  de- 
puis à  pareil  jour  l'appeler  au  gouvernemcnl 
du  royaume  <lc  France;  au  mo\cn  de  quoi, 
ajoute-l-il,  tant  pour  conserver  la  mémoiredu 
toutes  ces  choses  que  |)Our  fortifier  et  main- 
tenir ilavaotage  la  foi  el  la  religion  calboli- 
quc, cl  |)0ur  décorer  et  honorer  de  plus  en 
plus  la  noblesse  de  sou  royaume,  il  institue 
l'ordre  militaire  du  Sa!nl-lîs[iril. 

Des  expressions  si  pieuses  ne  sonl  que 
trop  suffisantes  pour  faire  voir  les  bonnes 
inteiilions  de  c^'  prince.  Cependant,  comme  il 
y  a  ••erlains  caractères  d'esprit  qui  ne  peu- 
vent s'cmpècher  de  donner  un  mauvais  sens 
aux  actions  les  plus  saintes  el  les  plus  jus- 
tes, I  institution  de  l'ordre  du  Saint-Esprit 
n'a  pas  ir.anqué  d'interprétations  anlanl  in- 
justes que  cliiméii(iues,  puisqu'on  l'a  pluli')l 
ailnbuée  à  des  mystères  d'amouretics  que 
de  reli;;ion.  Le  vert  naiss  ni,  dil  le  Labou- 
reur,/cjum/ei/o/c',  hbleuet  Ichianc,  élaicnttcs 
couleurs  de  la  maîtresse  d'Henri  III  :  les  dou- 
bles MM  qu'il  fil  mettre  au  collier  de  l'ordre 
ilésiijnaiciil  son  nom,  el  Irs  itcux  lettres  grec- 
ques qu'on  appelle  lilta  entrelacées  ensemble, 
i/iii  dans  la  rencontre  du  cercle  formaient  un 
phi  grec  pour  signifier  fidrlla,  devaient  ser- 
vir d'assurance  dt  celte  fidélité  qu'il  lui  ara  l 
jurée,  el  qu'il  ne  continua  pas  longtemps.  Les 
Il  qui  furent  ajoutées  aur  chiffres  des  double» 
MM,  miirquaiiul  le  nom  du  roi,  el  les  fleurs 
de  lis  dans  les  flammes  rcpréseniaienl  le  feu 
de  son  amour.  Ce  <|ui  est  donner  ainsi  une 
mauvai.->o  interprétation  aux  intenli<uis  de  eu 
[iiincc.  .\  la  vente  il  ne  s'est  puinl  expliqua 


IK9 


ESP 


ESP 


VJO 


sur  la  signilicalion  des  cliilïrcs  qu'il  fil  mot- 
lie  au  collier  ;  mais  ne  peul-on  pas  croire 
qtie  les  d(5ul>les  delta  entrelacés  ensemble 
qui,  par  la  rencontre  du  centre,  comme  dit 
le  Laboureur,  formaient  un  phi  grec  pour 
signifier  pdeitu,  marquaient  la  fidélité  que 
les  sujets  doivent  à  iiur  prince?  Les  doubles 
lambda,  qui,  selon  Favin,  désignaient  le  nom 
de  la  reine,  qui  s'appelait  Louise,  ne  pou- 
vaient-ils pas  plutôt  signifier  la  loyaulé  et 
riiommage  que  les  cbevaliers  doivent  à  leur 
souverain?  Les  doubles  MM,  la  magnanimilé, 
qui  est  la  vertu  des  héros  dont  un  chevalier 
doit  faire  profession?  El  les  flammes,  ces 
lani;ues  de  feu  sous  la  figure  desquelles  le 
Sainl-Espril  descendit  sur  les  apôtres  dans 
le  saint  cénacle  le  jour  de  la  Pentecôte?  Ce 
qui  semble  une  inlerprélalion  beaucoup  plus 
naturelle  (lue  celle  des  mystères  d'amouret- 
tes, et  qui  est  entièremenl  conforme  aux 
termes  de  ces  lettres  patentes,  par  lesquelles 
les  chevaliers  sont  excités  à  demeurer  fer- 
mes dans  la  religion  catholique,  dans  l'a- 
mour de  Dieu,  dans  la  fidélité  à  leur  roi  et 
dans  la  pratique  de  toutes  les  vertus,  dont 
les  lettres  et  les  flammes  qui  composaient  le 
colliir  (le  l'ordre  étaient  le  symbole. 

il  se  irouve  plusieurs  exeinplaii es  des  sta- 
tuts de  cet  ordre,  diiîérenls  li's  uns  des  au- 
tres, et  qui  ont  été  tous  siii\is  chacun  dans 
leur  temps.  Les  derniers  qui  ont  été  impri- 
înés  en  1703  et  qui  sont  les  plus  corrects, 
conlienni  ni  (]ualre-vingl-qu  nze  articles,  qui 
porleui ,  ei)lie  autres  those.s,  qu'il  y  aura 
dans  cet  ordre  un  snuverain  chef  et  grand 
maître  qin  aura  toute  autorité  sur  tous  les 
confrères,  commandeurs  et  officiers,  et  à  qui 
seul  il  .-ippariiendra  de  recevoir  ceux  qui  en- 
treront dans  cet  ordre.  Henri  III  s'en  déclara 
chef  et  souverain  grand  maî're,  et  unit  la 
grande  maîtrise  à  la  couronne  de  France, 
sans  qu'elle  puisse  en  être  séparée.  Les  rois 
S(•ssucce^seurs  ne  peuvent  disposer  en  façon 
quelconque  de  cet  ordre,  des  deniers  qui  y 
sont  alïoclé-,  ni  ilis|i0Sfr  d'aucune  commcn- 
ile,  quoiqu'elle  soi!  vacante,  qu'après  avoir 
été  saires  et  couronnés;  et  le  jour  de  leur 
sacre  et  couronnemenl,  ils  iloivent  être  re- 
quis par  l'archevêque  de  Reims,  ou  celui  qui 
lait  la  cérémonie  du  sacre,  eu  présence  des 
douze  pairs  (  t  officiers  de  la  couronne,  de 
jurer  l'observation  des  statuts  de  l'ordre,  se- 
lon la  forme  prescrite  par  les  mêmes  sta- 
tuts, ce  qu'ils  sont  tenus  de  faire  sans  en 
pouvoir  être  dispensés  pour  quelque  cause 
que  ce  soit;  cl  le  lendemain  du  sacre,  le  roi 
reçoit  l'habit  cl  le  collier  de  l'ordre  par  les 
mains  de  celui  qui  le  sacre,  en  présence  des 
(MCil  naux,  prélats,  commandeurs  et  ofiiciers 
de  l'ordre.  C'est  pourquoi  Henri  III  ordonna 
c.ue  la  lorme  du  serment  serait  insérée  et 
tryuscrile  au  livre  du  sacre,  avec  les  autres 
serments  que  les  rois  sont  tenus  de  laire 
avant  que  d'étie  couionnés  ;  et  comme  ce 
pri;ice  avait  déjà  été  sacré  et  couronné,  il  se 
réserva  la  liberté  de  prêter  serment  enire  les 
i:i;iins  de  l'archevêque  de  Ueims  ou  d'un  au- 
tre évéïjue  qu'il  lui  plairait  en  la  première 
assemblée  de  l'ordre  du'il  liendrail. 


Des    mémoires  portent  que  colle    assem- 
plée  se  Uni  pour  la  première  fois  le  dernier 
décembre  de  l'an  1578,  dans  l'église  des  Au- 
gustins  de  Paris.  Sa   Majesté  s'y  rendit  sur 
les  deux   heures,  tous  les  évêques  et  abbés 
qui  avaient  été  mandés  s'y  trouvèrent,  et  pa- 
reillement les   princes  et  seigneurs  qui  de- 
vaient être  reçus  dans  l'ordre,  tous  revêtus 
de  chausses  et   pourpoints  de  toile  d'argent 
sous  leurs  habits  ordinaires.  Dans  le  chœur 
de  l'église,  à  main  droite,  on  avait  dressé  un 
Irône  pour  le  roi,   couvert  de  drai)  d'or  et 
d'arijenl,  semé  de  fleurs  de  lis,  avec  un  dais 
au-dessus  de  pareille  étoffe;  au  bas  du  trône 
il  y  aval!  des  bancs  pour  les  officiers,  en  la 
manière  que   l'on  avait  accoulumé  d'obser- 
ver aux  térémonies  des  fêtes  de  l'ordre  de 
Saint-Michel.  A  l'entrée  du  chœur, à  main  gau- 
che de  Sa  Majesié,  étaient  placés   les  prin- 
ces et  seifjneurs  qui  devaient  être  faits  che- 
valiers, selon  leur  rang;  et  il  y  avait  d'autres 
bancs    pour    les   ambassadeurs    et  les  sei- 
gneurs de  la  cour.  Après  ((ue  les   vêpres  eu- 
ronl  été  chantées  par  la  musi(iue  du  roi,  ce 
prince  se  leva,  descendit  de  son  trône,  et,  ac- 
compagné des  olficiers  de    l'ordre,  alla  de- 
vant le  grand  autel,  où  s'étanl  mis  à  genoux, 
le  grand  aumônier,  assisté  de  cinq  évêques 
et  alibés  en  habiis  pontifie  aux,  l'un  lenanl  la 
vraie  croix,  et  un  autre  le  livre  des  Evangi- 
les, présentèrent  à  ï^a  Majesté   son  vœu   et 
serment  de  chef  et  grand  maître   souverain 
de  l'ordre   du   Saint-Esprit,   qu'il   prononça 
en  cette  manièie  :  Nous  Henri,  par  la  grâce 
de  Dieu  roi  de  France  et  de  Pologne,  jurons 
el  voiiuns  suleinm lleihent  en  vos  viains  à  Dieu 
le  Créateur,  de  vivre  et  mourir  en  la  sainte 
foy  el  religion   cafholigue  opostoliqne  et  ?o- 
ini>te,ci)tmne  à  un  roi  Ires  clinstten  appar- 
limt,  et  plustost  mourir  que  d'y  faillir  :  de 
maintenir  à  jamais  l'ordre  da  Saint-Esprit, 
fondé  et  institué  par  notis,  sans  jamais  le  luis- 
ser  declieoir,  amoindrir,  ne  diininutr,   tant 
nu' il  sera  en  nustre  pouvoir:  observer  Us  sla-~ 
luis  et  ordonnances  dudit  ordre,  entièrement 
selon  leur  forme  et  teneur,  el  les  faire  exac- 
tement observer  pur  tous  ceux  qui  sont  et  se- 
ront cy-aprés  receus  audit  ordre,  et  pur  exprés 
ne  contrevenir  jamais  ni  dispenser,  ou  essayer 
de  chanqer,  ou  innover  les  statuts  irrévoca- 
bles d'iceluy.  Sçavoir  est  le  statut  parlant  de 
l'union  de  la  grande-maistrise  à  la  couronne 
de  France  :  celuy  contenant  le  nombre  des  car- 
dinaux,  prélats  ,   commandeurs  et  ofjiciers  : 
celuy  de  ne  pouvoir  transférer  lu  provision 
des  commandes ,  en  tout  ou  en  partie,  à  au- 
cun autre   sous  couleur  d'appaniije  ou   con- 
cess  on,   qui  puisse  estre.   Item  celiiy  par  le- 
quel nous  nous  obligeons  en  lanl  qu'à  nous  est, 
de  ne  pouvoir  dispenser  jamais  les  comman^ 
deurs  et  ofjiciers  receas  en  l'ordre,  de  com- 
munier el  lecevoir  le  précieux  corps  de  jVos- 
Ire-Seigneur  Jesus-Christ,  aux  jours  ordon- 
nez, qui  sont  le  premier  jour  de  l'an,  et  le 
j.iur  de  la   Penlecosie.  Comme  semblablemenl 
celmj  pur  lequel   il  est  dit ,  que   nous  et  tous 
coinmandeurs  el  ifficiers  ne  pourront  estre  au- 
ires  que  caliioliques  el  gentilshommes  de  trois 
races  paleriielles,  ceux  qui  le  doivent  estre. 


1M                                               mCTIONNAinC  DESOKimES  ril'LIGIEUX.  lilj 

Jtcm  C'Iuy  par  le.jui-l   nnHx  ostunx  lont  pou-  comme  souverain  de  l'ordre  des  commamleur.'t 
voir  d'emidoyer  aillfurs  les  denien   u/fecliz  du   Saint-Kspril,  duquel   il   vous   plai(  prc- 
nii  revenu  el  enirelrneiniiit  dcsdiis  comiiiau-  ienleinent  m  honorer  :  qarderuy  et  ohservrrny 
deurs  et  of/iciirs,  pour  quelque  lause  et  occa-  lestoix.  statuts  cl  ordoiiiianres  dudit   ordre, 
tion  que  ce  soii,  ni  admettre  nudit  ordre  nu-  sans   en   rien    contrevenir:   en   porlerny  Us 
cuns  etranqers,  s'ils  ne  sont  naturalisez  et  re-  marques,  et  en  diray  tous  les  jours  te  service, 
'jnicoles  ;  et  pareillement  celaq  auquel  est  con-  autant  qu'un  homme  ccclcsiastique  de  ma  qua- 
lenti  la  forme  des  vœujc,  et  l'obliqation  de  por-  lite  peut  el  doit  faire  :  que  je  comi>aroiiri:y 
1er  toujours  la  croix  aux  habits  ordinaires,  personnellement  aux  jours  des  silemnitez,  s'il 
avec  cille  d'or  au  cou,  pendante  A  un  ruban  « //  a  empescherrent  legiiime  q.tim'm  qnrde  ; 
de   soye   couleur  bit  ui'  céleste,  el    l'hahit  aux  comme  je  donneraq  aris  à  Y  astre  Majesté',    et 
jours  destinez.  Ainsi  le  jurons,  ro'dons,  el  ino-  ne  reveleraq  jamais  chose  qui  soit    traitée  ni 
mettons  sur  'a  sainte  vraye  croix,  et  les  saints  conduit  a  ix  chapilns  d'iceluy  :  que  je  ferny  , 
Evantjilcs  touchez.  \.c  roi,  .-ipiùs  avoir  |iro-  conseilleray,    el    procureray   tout  ce  qui  win 
nonci^  fc  viL'u,  cl  l'nvoir  siiiiic  do  sa    miiiii,  semblera  en  ma  conscience r.ppartrnir  à  la  ma- 
ful    revi'iu   du    riiaiiicati ,  ijui  lui  fui  donne  iiutenlion,  grandeur   et   auqmenlation   dudil 
par  celui  qui  siTvail  de  premier  tieiililliomuic  ordre  ,  prieray   toujours  Dieu  pour  le  salut, 
de  sa  rliarnlire,  et  le  uratul  aumoiiier  lui  mil  tant  de  V ostre  Majesté  que  des  commandeurs  et 
le  ctillicr  au  cou,  cl  rcciia  quelques  prières,  supports  d'iceluy,  vivans  et    trépassez.    Ainsi 
après    lesquelles    le  roi  se  leva  cl  dfscendit  Dnu  me  soit  en  aide  et  ses  saints  Hravgiles. 
un  peu  plus  lias  où  élail  un  sioRc,  sur  lequel  Ouant  aux  aulies  clievaliers  et  commaii- 
il  s'assii.  Le  tliam  elier  de  Cliiveruy  se  pré-  (leurs,  nul  ne  peut  èlrc  admis  dans   l'onlrc  , 
scnla  devant   Sa  Majesté  pour  cire  fait  tlie-  s'il  ne  fail  profession  do  la  religion  calholi- 
valicr  de  ccl    ordre;   il  se  lail   à  genouv   cl  que,  apostoli(]ue  et  romaine,  s'il  n'est  !;ciiMI- 
ajaiil  les  mains  sur  les  saints  Mvaniii  es,  il  homme  de  nom  cl  d'armes  de  Irois  rares  p.i- 
•ii  le   scrmcnl,  cl  après  avuir  clcre\èludu  lernclics  pour  le  moins,  et  n'ait  iwiur  le  re- 
grand manteau,  le  roi  lui  mil  au  cou  le  collier,  j;ard  des  princes   vingt-cinq  ans  accomplis, 
et  ainsi  des  autres  ofliciers  el  des  cardinaux  ;  cl    trenic-cinq    pour  les   aulris.    D'.Miord    il 
le  cli.inceli' r  de   ('.liivernv   reçut   aussi   les  suflisait  ((uc  lous  les  chevaliers  eussi'nt  vinat 
sceaux  di'  l'ordre,  qui  lui  furent  donnés  par  ans,  cl  c'est  un  des  cliaigcnicnls  qui  ont  élc 
Sa  Majesté.   Les  olficiers  étant  créés,  le  pré-  faits  aux  slaluls.  Le  roi,  ayant  fail  choix  des 
*6t    m.'îlre   des     céién.onics,    le    héraut  el  sujets  qu'il   veut   honorer   de  ccl  ordre,   les 
l'huissier,  allèrent  (juerir  le  plus  ancien  des  propose  dans  le  chapitre  ans  prélats,   com- 
princcs  et  seigneurs   qui  devaient  élrt;  faits  maudeurs  cl  ofliciers,  afin  ()ue  chacun  donne 
chevaliers,  et  après  qu'il  eut  reçu  l'ordre,  is  son  avis  sur  leur  recrption,  el  dise  en  con- 
allèrcnt  prendre  les   autres  de  mômi;  à  leur  science  à  Sa  Majesté  les   raisons   qui    pour- 
rang.  Il  y  eut  d.ins  cette  pi  emièrc  promotion  raient  cm[)ècher  (]ue  quelqu'un   des  prélen- 
vingl-huil  clie\aliers  de  rcrus.  danls  ne  fut  reçu.  S'ils    sont  trouvés   diijncs 
Les  rois  de  France  su<-(csspurs  d'Henri  III  d'entrer  dans  l'ordre,  on  les  fail  avertir  qu'ils 
ont  l'ait  après  leur  sacre  le  même  serinent  quii  siml  reçus,   cl  on  leur  envoie    les  commis- 
'■eprincelit  lorsqu'il  reçutleprcmierlecollier  sions  nécessaires,  luit   pour  faire   faire  les 
de   l'ordre  qu'il  avait  iiisliluè,  ou  <'i  peu  près  preuves   de  leur  religion,  de   leur  vie    cl  do 
semhlahle,  et  ont  tâchede  donner  un  nouveau  leurs  mœurs,  que  de  leur  noblesse  cl  extrac- 
lustrc  à  cet  oïdie,  dans  lequel  il  doit  y  avoir  lion  ;  et   les   procès-vcrhaux    en    ayant   élc 
quatre   cardinaux    cl   quatre   archevêque»  ,  remis    entre    les    mains    du    chancelier,  ils 
l'véquis  ou  prélats,  outre  le  grand  au-i.ônicr  doivent  faire  faire  à  leurs  dépens   les   hahits 
de  rr.mce,  (]ui  est  cummaudeur  de  cet  ordre  de  l'ordre,  sans  être  obligés  d'eu    emprunter 
aus>ilôl  qu'il   est    puuivu   de   lacliaige  de  pour   assisli-r   aux   céréiiioiiies.    Le  dernier 
grand  anumnier,   sans    être  oblige  de   (aire  jour  de   décembre  est  marqué  dans  les  sta- 
preu»es  de  noblesse  comme  les  autres.  Tous  uits  pour  donner  l'habit  et  le  collier  de  l'or- 
ccs  prel.ils  purleul  la  croix  pendante  à   leur  dre,  et  la  cérémonie  s'en  doit  faire  après  vê- 
«ou,   avec  un    ruban  bleu.   Ils  sont  obliges  |;res   dans  l'église   des    Augusliiis  de  Paris, 
d'assister  aux  fi'tes  el  cérémonies  de  l'ordre,  lorsque   le  ri  i  est  ilans   celle    ville.    Aiiciiii 
les  cardinaux  avec  leurs  grandes  chapes  rou-  elnvalier  commandeur  n'est  admis  à  l'ordre 
ges,  cl  les  é\éqiies  et  prélats   velus    de  sou-  du  Sainl-I'!sprit,  qu'il  ne  soit  aussi   chevalier 
l.inrs  de  couleur  violetie,    avec  un  mantelil  de  celui  de  saint  Michel  :  c'est  pourquoi,  l;i 
de  même  couleur,  un  rochet  et  un  camail,  et  veille  qu'il  doit  recevoir  l'habit  et   le  l'ollier 
sur   le  manlelel  il   y    a  aussi  une  croix    de  jn  Sainl-lCsprit,  il  est  fait  chevalier  de  l'or- 
1  ordre  en  broderie.  Au  jour  (jue  l'o  fice   se  die  de  Sainl-Mirhel.  Il  se  ni' t  à  genoux  dc- 
f.iit  pour  les  chevaliers   decéiles,   les  cardi-  v..nt  le  roi,  qui  le  fiapjje  légèrement  sur  hs 
naux  porleiil  les  ih.ipcs  violettes,  «l  les  pré-  épaules  avec  une  cpéc  nue,  en  lui  disant  :  De 
lais  sont  velus  de  noir.  Chacun  de  ces  carUi-  p  ,,•  .uiint    (îeorqrs  et  de  jiur  .•■aint  Michel  je 
naux  et  prélats  est  obligé,  le  jour  de  sa  re-  vous  fiis  chevalier.  Le  lendemain  il  se  Irouvn 
ception,  de  faire  ciilrc  les  mains   du    roi   ce  à  l'église  avec   les  antres  chevaliers,   ayant 
nTii\eu\:  Je  jure  à  Dieu  el  mus  promets.  Su  e,  rh.ibil  de  novice,  qui  est  un  habit    blanc   de 
qu  je  vous  srray  luyal  et  fidèle  toute  ma  vie,  lojle  d'argent,  avi-c  la  cape  cl  la  loque  noi- 
toii.i   rcconnoilray,    honoreray  ei   serviray  ,  re  ' H.  Il  se  met  encore  à   genoux  devant  lo 

(I)  Voy.,  à  |j  tiii  du  vul.,  Il"  jt'. 


10" 


ESP 


toi,  à  qui  le  cliancelier  présente  le  livre  îles 
livangiles,  sur  lesquels  le  novice  tenant  les 
mains  fait  son  v  eu  et  serment  en  celle  ma- 
nière :  Je  jure  et  roue  à  Dieu  en  ta  face  de  son 
Hglise,  et  vous  promets.  Sire,  sur  ma  foi  et 
honneur,  que  Je  vivrai  et  mourrai  en  li  foi 
cl  riiigion  t-alliolique,  sans  jamnis  m'en  dépar- 
tir, ni  de  l'union  de  notre  mère  sainte  lùjlise 
(ipostolii/ite  et  romaine  :  que  je  vous  porterai 
entière  et  parfaite  obéissance,  sans  jamais  y 
mnnijuer,  comme  an  bon  et  loyal  siij."'.  doit 
faire:  je  tjarderai,  deffendi ai  et  soutiendrai 
de  tout  mon  pouvoir  l  honneur,  les  querelles, 
cl  droits  de  Votre  Majesté  royale,  envers  et 
contre  tous  :  (jit'en  temps  de  guerre  je  me  ren- 
drai à  votre  suite  enréijuipa/e tel  qu'il  appar- 
tient à  personne  de  ma  qualité,  et  <n  paix, 
quand  il  se  présentera  quelque  occasion  d'im- 
portance, Coûtes  et  quantes  fois  qu'il  vous  plai- 
ra me  mander  pour  vous  servir  contre  quelque 
personne  qui  puisse  vivre  et  mourir,  sans  nul 
excepter,  et  cejusqaà  la  mort:  qu'en  telles 
occasions  je  n'abnulonnerai  jamais  votre  per- 
sonne,ou  le  lieu  oà  vous  m' aurez  ordonné  de  ser- 
vir, sans  votre  exprés  congé  et  commandement, 
signé  de  votre  propre  main,  ou  de  celui  auprès 
duquel  vous  m'aurez  ordonné  d'estre  ,  sinon 
quand  je  lui  aurai  fait  apparoir  d'une  juste  et 
légitime  occasion:  que  je  ne  sortirai  jamais  de 
votre  royaume  spécialement  pour  aller  'lu  sei- 
vicc  d'aucun  prince  étranger  sons  votre  dit 
commandement,  et  ne  piendrai  pension,  ga- 
ges, ou  estât  d'autre  roi,  prince,  ou  potentat 
et  seigneur  que  ce  soit,  ni  m'oblige  ai  au  ser- 
vice d'autre  personne  vivante  que  de  Votre 
Majesté  seule,  sans  votre  expresse  per.nission  : 
queje  vous  révélerai  fidellemenl  tout  ce  que  je 
saurai  ci-aprés  importer  à  votre  service,  à  l'é- 
tal et  conservation  du  présent  ordre  du  Saint- 
Esprit,  duquel  il  vous  plail  m'Iionorer,  et  ne 
consentirai  ni  permettrai  jamais,  en  tant  qu'à 
moi  sera,  t/u'il  soit  rien  innové  ou  attenté  con- 
tre le  service  de  Dieu,  vi  contre  votre  autorité 
royale,  et  au  préjudice  dudit  ordre,  lequet  je 
mettrai  peine  d'entretenir  et  augmenter  de  tout 
mon  pouvoir.  Je  garderai  el  observerai  très 
religieusement  tous  les  statuts  et  ordonnances 
d'iceliii  :  je  porterai  à  jamais  la  croix  cousue  : 
et  celle  d'or  au  rott,  comme  il  m'est  ordonné 
par  lesdils  statuts  ;  et  me  trouverai  à  toutes 
les  assemblées  des  chapitres  généraux,  toutes 
les  fois  qu'il  vous  plaira  me  le  commander .  ou 
bien  vous  jerai  présenter  mes  excuses,  les /iiel- 
les  je  ne  tiendrai  pour  bonnes  ,  si  elles  ne 
sont  approuvées  et  autorisées  de  Vostre  Ma- 
jesté, avec  l'avis  de  la  plus  gronde  part  des 
commandeurs  qui  seront  jjrés  d'elle,  signé  de 
votre  main,  et  scellé  du  scel  de  l'ordre,  dont  je 
serai  tenu  de  retirer  acte. 

Après  que  le  chevalier  a  prononcé  ce  vœu 
et  serment,  le  prévôt  et  maître  des  lércnio- 
nies  présente  au  roi  le  manlelet  de  l'ordre, 
qui  en  le  donnant  au  chevalier  lui  dit  :  L'or- 
dre vous  revêt  et  couvre  du  mant,au  de  son 
amiable  compagnie  et  union  fraternelle  ,  à 
l'exaltation  de  notre  foi  et  religion  catholique: 
au  nom  du  Père,  du  Fils,  et  duSaint-Espril.  Le 
grai  d  li'ésorier  présente  ensuite  à  Sa  Majes- 
té le  collier,  (juVlle  iiiel  au  cou  du  chevalier, 


ESP  |î>!', 

en  lui  disant  :  Recevez  de  notre  main  le  coi- 
lier  de  notre  ordre  du  benoist  Saint-f'Jsprii, 
auquel  nous,  comme  souverain  grand  mniirc, 
vous  recevons,  et  ayez  en  perpétuelle  souve- 
nance la  mort  et  passioii  de  Notre-Seiqneur 
et  Rédempteur  Jésus-Christ.  En  signe  de  quoi 
nous  vous  ordonnons  de  porter  û  jamais  cousue 
en  Vos  habiss  extérieurs  la  croix  d'icelni,et  la 
croix  d'or  au  cou,  avec  un  ruban  de  couleur 
bleue  céleste,  et  Dieu  vous  fasse  la  grâce  de  ne 
conire venir  jamais  aux  vauix  et  serment  que 
vous  Venez  de  faire,  lesquels  ayez  perpétuelle- 
ment en  votre  cœur,  éiani  certain  que  si  voiis 
y  conlrev  'nez  en  aucune  sorte,  vous  serez  pri' 
vé  de  cette  compagnie,  et  encourrez  les  peines 
portées  par  les  Ualuts  de  l'ordre.  Au  nom  du 
Père,  du  Fils,  el  du  Saint-Esprii.  A  ((uoi  le 
chevalier  répond  :  Sire,  Dieu  m'en  donne  la 
grâce,  el  plutôt  la  mort  que  jamais  y  faillir  , 
remerciant  1res  humblement  Vostre  Majesté  de 
l'honneur  et  bien  qu'il  vous  a  plu  me  faire  ;  el 
en  achevant  il  liaisc  la  main  du  roi. 

G  imme  j)nr  le  serment  il  est  expres-.émeiit 
porlé  que  le>  chevaliers  commandeurs  ne 
s'ohligeronl  au  service  d'aucun  prinrc  étran- 
{,'er,  ce  qui  ne  pouvait  élre  ohservé  par  ceux 
qui  n'étaient  pas  sujets  du  roi  de  France  , 
c'est  ce  qui  lit  qu'Henri  lli  déclara  par  lo 
37°  article  des  statuts  qu'aucun  étranger, 
s'il  n'était  regnicole  et  naturalisé  flans  lo 
royaume,  ne  pourrait  être  reçu  dans  l'or^lre, 
ni  pareillement  les  Français  qui  auraieni 
déjà  quelque  autre  ordre,  excepté  celui  do 
Sainl-Mictiel.  il  execpla  aussi  les  cardinaux  , 
archevêques  et  évoques,  et  pareillement  tou-s 
ses  sujets  (]ui  avec  sa  permission,  ou  des 
rois  ses  prédécesseurs,  auraient  élé  ou  pour-i 
raient  être  dans  la  suite  reçus  aux  ordres  de 
la  Toison  d'Or  el  de  la  Jarretière. 

Mais  Henri  IV,  considérant  comliicn  il 
était  avantageux  pour  la  réputation  de 
l'ordre  du  Saint-Iîspril  el  pour  le  bien  du 
ro)aume  de  î'ranee,  que  les  rois  ,  les  princes 
souverains  cl  les  seiyneurs  étrangers,  non 
regnicoles  ,  fussent  agrégés  à  cet  ordre  , 
ordonna,  par  une  déclaration  du  dernier  dé- 
cembre 1607,  dans  l'assemblée  générale  de 
l'ordre  qui  se  tint  à  Paris,  que  les  rois,  les 
princes  souverains  et  les  seigneurs  étrangers 
non  regnicoles,  étant  de  la  qualité  ])rescrilfl 
par  les  statuts ,  pourraient  élre  à  l'aveniv- 
clievaliers  de  cet  ordre;  qu'à  cet  effet  ou 
enverrait  un  commandeur  et  chevalier  vers 
le  roi  ou  prince  souverain  qui  serait  élu  et 
associé  à  l'ordre,  pour  lui  donner  le  collier 
et  la  croix  et  le  revêtir  du  manteau  en  la 
niauière  qui  serait  prescrite  par  les  mé- 
moires el  instruclious  qui  lui  seraient  don- 
nes; (]ue  le  roi  ou  prince  souverain  ayant 
accepte  l'ordre,  serait  tenu  d'en  remercier  le 
souverain  et  grand  maitre  par  une  persoMno 
qu'il  enverrait  exprès  dans  l'année  ie  sa  ré- 
ception, et  qu'à  l'égard  des  seigneurs  étran- 
gers non  souverains,  ils  seraient  obligés  de 
venir  trouver  eu  personne  Sa  Majesté  dans 
r.innée  de  leur  élection  pour  recevoir  de  sa 
main  le  collier  el  la  croix  de  l'ordre  el  prêter 
lo  serment  ordonné  par  les  staluls,  à  moins 
qu'ils  n'en  lussent  dispensés.  L'an  1G08,  ce 


191 


prince  fil  chevaliers  de  l'onlrc  du  Saiiii-Kspril 
(Ion  Jcan-Anloinc  Drsin  ,  duc  de  Sanso-(îc- 
iniui,  prince  de  Scandn^lia  i-Uojile d'Krcoii". 
ol  don  Alexandre  Sforze-Conli.  duc  de  Segni. 
prince  de  Valnuinlaiie.  Louis  XIV  a  honoré 
de  cet  ordi-e  plusieurs  seigneurs  rspa^nols 
ol  il.ilirns;  il  rcnv()>a  aussi  en  l()7(i  à  Jean 
Sotiii'ski,  roi  de  l'olôgne,  cl  depuis  aux  «Unix 
princes  Alexandre  cl  Conslanlin  ,  ses  fils 

Pour  cnrelenir  cri  ordre  cl  donner  nio\cn 
aux  cardin:iux,  prélals  et  ronirnaiulcurs  de 
se  mainlenir  honorablcincnt  selon  leur  c  al. 
Henri  111  vuulul  qu'il  y  eùl  un  fonds  de  six 
vingl  mille  ecus  pour  être  partagés  el  payés 
tous  les  ans  en  plein  chapitre,  selon  l'clal 
qu'il  en  ferait.  II  voulut  aussi  (lUc  cet  ordre 
ne  fût  compose  que  de  <ent  personnes  outre 
le  souverain,  auquil  nombre  seraient  com- 
])ris  les  quatre  cardinaux  el  les  cinq  prélals, 
le  chancelier,  le  prévôt  maître  des  cérémo- 
nies ,  le  grand  trésorier  el  le  ;:reilier,  sans 
que  ce  I, ombre  put  être  auumenle  ,  ni  qu'à 
la  mort  du  (juclques-uns  drs  |piélals  ou 
tifliciers  l'on  pût  rem;  lir  leurs  places  que 
par  d'autres  de  li  même  qualité.  Outre  c.  s 
quatre  officiers,  qui  sont  ciicvalier.s  ou  com- 
mandeurs, el  qui  porUiil  la  croix  cousue  sur 
leurs  habits  el  une  autre  d'or  attachée  à  un 
ruban  bleu  connue  les  autres  thevaliors,  il 
y  en  a  encore  quatre  autres,  qui  sont  un 
intendant,  un  génealogi>te,  un  héraut  el  un 
liuissior  ,  qui  perlent  seulement  la  croit 
attachée  à  un  ruban  bleu  à  la  boutonnière 
(le  leur  justaucorps.  Ces  olûccs  d  intendant, 
de  héraut  el  d'huissier  sont  du  temps  de 
l'institution  de  l'ordre,  et  il  eu  est  fait  men- 
tion dans  les  statuts;  mais  l'oflice  de  généa- 
logiste pour  dresser  toutes  les  preuves  et  les 
généalogies  des  chevaliers  fut  créé  l'an  loJa. 
(jlairambaul,  qui  fui  pour\  u  de  cette  charge, 
a  fait  un  recueil  de  plus  de  cent  cinqu.mte 
volumes  in-folio  manuscrits  concernant 
l'Histoire  de  l'ordre  el  les  généalogies  de 
tous  les  chevaliers ,  depuis  leur  inslilulion 
jusqu'à  présent,  cl  plusieurs  autres  volumes 
concernant  les  autres  ordres  militaires. 

Outre  ces  olliciers,  il  y  a  les  trésoriers  el 
contrôleurs  généraux  du  marc  d'or,  ciéés  à 
l'instar  du  héraut;  ils  en  portent  la  croix  el 
jouissent  des  mêmes  privilèges.  Le  droit  du 
iuarc  d'or  est  uno  espèce  il  hommage  cl  de 
reconnaiss.incc  que  les  oflii  icrs  du  royaume 
rendent  au  roi  lorsqu'ils  sont  pourvus  de 
leurs  offices.  Henri  111  fut  le  premier  qui , 
par  une  déclaration  du  7  décembre  lo82, 
urdunna  que  les  deniers  (|ui  proviendraicnl 
de  ce  droit  seraient  affectes  cl  hypothéqués 
au  payemenl  des  frais  de  l'ordre,  auquel,  par 
une  autre  déclaration  du  7  décembre  de 
l'année  précédente  ,  il  avait  encore  accorde 
le  cinquièuii'  des  dons  el  aubaines  ,  ronlisci- 
lions,  amendes,  lots  el  ventes,  rachats  el 
autres  droils  sciuneuriaux.  Ce  prince  avait 
ulTi'Clé  ces  deniers  à  l'oidie  pour  remplir  en 
partie  les  six  vingl  niilli'  écus  par  an  qu'il 
lui  avait  assignes  (l'abord.  Les  trésoriers  des 
p.irii.  »  casuellcs  mettaient  entre  les  mains 
ilu  griind  trésorier  de  l'ordre  ce  qui  pouvait 
retenir  do  linquièmc  des  dous  cl  aubain'S, 


niC.TlDNNMRE  DES  OIIDRES  HLLIGIEUS.  196 

amende:!  el  autres  droits  seigneuriaux,  et  le 
commis  du  même  trésorier  de  l'ordre  fut 
chargé  de  la  n  celle  du  droit  du  mare  d'or. 
Mais  i.oiiis  Xlll  .  l'an  1028.  créa  trois  rece- 
veurs généraux  du  marc  d'or,  qui  devaient 
jouir  des  mêmes  honneur-  ,  prééminences  , 
privilèges,  franchi  es  vl  imiiiunit  s,  que  le 
héraut  ell'huissier  de  l'ordre  du  Saint-Esprit. 
Ce  prince,  par  un  arrêt  du  conseil  du  mois 
d'octobre  de  la  même  année,  augmenta  en 
faveur  de  l'ordre  le  droit  du  marc  d'or,  cl 
ordonna  que  tous  ceux  qui  obtiendraient 
des  dons  de  Sa  Majesté  à  l'avenir,  seraient 
tenus  d'en  payer  le  dixirmi'  denier  entre  les 
mains  des  receveurs  du  marc  d'or.  Par  une 
déclaralion  du  't  décembre  IG3'(,  il  ordonna 
que,  sur  la  recette  du  marc  d'or,  les  cardinaux, 
prélals,  chevaLcrs  et  officiers  de  l'ordre  se- 
raient payés  de  la  somme  de  trois  mille  li\res 
de  |iension  par  chacun  an  sur  leurs  simples 
quittances  a  la  fin  de  l'année,  nonobstant 
«lue,  par  le  38*  article  des  statuts  ,  il  fût  dit 
«lu  ils  devaient  é;re  payés  tous  les  ans  en 
plein  cha[iitre,  auqii.l  article  Sa  Majt-slc 
dérogeait,  allendu  que  les  chapitres  ne  se 
tenaient  p,is  régulièrement  sur  la  lin  du  mois 
de  décembre,  comme  il  est  porté  par  le  17' 
article  desdils  sialuis,  el  imuie  (lu'il  ne  s'en 
éiail  point  tenu  depuis  plusieurs  années  tn.l 
sous  le  rr'giie  d'Henri  1\  ,  son  préilécesseur, 
que  sous  le  sien,  sinon  pour  les  promotions 
qu'on  avait  faites  pour  remplir  les  places 
des  chevaliers  décédés.  Louis  XH'  augmenta 
du  double  le  droit  du  marc  d'or  l'an  îOoii,  et 
le  céda  pour  toujours  et  à  i^erpétiirlè  à 
l'ordre  du  Saint-Ksprit  pour  lui  tenir  lieu  du 
fonds  qui  lui  avait  été  |  romis  dès  le  temps  de 
sa  fondation.  Il  supprima  les  offices  de  rece- 
veurs générau'c  du  marc  d'or,  permit  à 
l'ordre  d'établir  pour  la  recette  de  ce  dioit 
tels  receveurs ,  contrôleurs  el  officiers  qu'il 
jugerait  à  propos,  et  ordonna  que  le  même 
ordre  loucherait  par  an,  sur  la  recette  de  ta 


généralité  de  Paris,  \ingi  mi. le  livres,  pour 
les  inlérêls  de  deux  cent  mille  livres  d'une 
part  qu'il  avait  prêtées  à  Sa  Majesté,  et  deux 
cen;  mille  livres  d'autre  qu'il  avait  fournies 
à  Louis  Xlll  pour  les  besoins  de  l'Klat.  Par 
un  autre  édil  do  la  même  année,  le  roi.  sui- 
vant ce  qui  avait  été  résolu  au  chapitre  lenu 
au  Louvre,  ordonna  l'aliénation  de  la  moitié 
du  droit  du  marc  d'or,  avec  faculté  à  l'ordre 
de  racheter  celle  moitié  aliénée  en  rend mt 
le  jirix  de  l'aliénalion,  el  qu'après  le  rachat 
elle  demeurerait  réunie  à  l'ordre  sans  m 
pouvoir  être  démembrée  ni  employée  ailb  urs 
qu'a  renlrelien  de  l'ordre;  cl  par  le  même 
édil  Sa  Majesté  créa  deux  trésoriers  généraux 
el  deux  contrôleurs  généraux  du  marc  d'or, 
auxquels  il  accorda  les  mêmes  honneurs  , 
privilèges,  franchises  el  immuiiil-s,  dont 
Joui^sail  le  héraut,  et  jusqu'à  présent  ils  ont 
été  maintenus  dans  leurs  droits  par  plu-ieurs 
arrêts  du  conseil.  Ils  prêtent  serment  entre 
les  mains  du  chancelier  de  l'ordre  et  rendent 
compte  au  grand  trésorier. 

Quant  aux  privilèges  dont  jouissent  les 
cardinaux,  prélats,  chevaliers  cl  ofliciers  de 
cet    or.lre,   Henri  111,    p,ir  les  statuts .   les 


I')7 


rsp 


ESP 


lO-S 


cxcinpla  lie  coniribuci-  un  b.in  el  arrière-ban 
(lu  royaume,  de  payer  aucun  rachat,  lot, 
veiUe,  quint  et  requini,  tant  îles  (erres  qu'ils 
vendraient  que  de  celles  qu'ils  pourraient 
acheter,  et  voulut  qu'ils  eussent  leurs  causes 
commises  aux  requêtes  du  palais  à  Paris;  et, 
I)ar  un  édit  du  mois  de  décembre  1580,  il 
ordonna  qu'ils  seraient  francs  et  exempts  de 
tous  emprunts, s ubsiiles,i m pcisit ions,  p6;igi's, 
travers,  passages,  fortifications,  f,'ar(jes  il 
giiels  de  villes,  cliâleanx  et  iorleresscs  :  ce 
iiui  a  été  confirmé  dans  la  suile  par  les  décla- 
rations d  Henri  IV  l'an  lo9!),  et  de  Louis  XIV 
l'an  IGoS,  en  vertu  desquelles  les  chevaliers 
ont  été  maintenus  el  conservés  dans  les 
mêmes  privilèges,  dont  leurs  veuves  jouis- 
sent pareillement.  Un  des  privilèges  dont  les 
prélats,  chevaliers  el  commandeurs  jouissent 
aussi ,  est  d'avoir  l'honneur  de  manger  avec 
le  roi  à  la  même  table  aux  jours  de  cérémo- 
nies de  l'ordre.  Henri  m,  par  l'arlicle  7V' 
des  statuts,  avait  ordonné  (lUe  ces  jours-là  le 
prévôt,  le  grand  trésorier  el  le  grellier  dîni;- 
raienl  à  une  lalile  à  part;  mais  Henri  1\', 
considérant  que  ces  trois  officiers  sont  aussi 
chevaliers  et  qu'ils  ont  les  mêmes  marques 
d'honneur  que  les  autres,  ordonna  l'an  lliO.J 
<]u"ils  mangeraient  aussi  à  sa  table  et  se- 
raient assis  immédiatement  après  le  chance- 
lier, ce  qui  fut  exccuié  à  toutes  les  promo- 
tions; mais  à  celle  qui  se  fit  l'an  ttitil  il  y 
eut  de  la  conteslalioii  sur  ce  sujet.  Les  che- 
valiers se  plaignirent  au  roi  de  ce  que  les 
officiers  prétendaient  mangera  sa  tabie  con- 
tre les  slaluls,  qui  le  défindcnt  et  qui  ordon- 
nent qu'ils  mangeront  en  un  lieu  à  part  avec 
le  héraut  et  l'huissier.  Les  olficiers  en  de- 
meuraient d'accord  ,  mais  ils  prétendaient 
m  inger  à  la  table  du  roi  en  consé  (uence  de 
la  déclaration  d'Henri  IV.  Le  roi  ordonna 
qu'avant  la  prochaine  eérémonie  les  olficiers 
lui  représenteraient  l'original  de  la  décl  ira- 
tion  d'Henri  lV,fuule  de  quoi  il  voulait  que  le 
statut  lût  observé.  El  cet  original  n'ayant  pu 
être  représenté,  il  n'y  eut  que  le  chancelier 
qui  dîna  à  la  table  du  roi  avec  les  chevaliers. 
Henri  111  ne  se  contenta  pas  de  distinguer 
ainsi  par  ces  marques  d'honneur  et  ces  pri- 
vilèges les  chevaliers  de  l'ordre  du  Saint- 
Esprit,  il  voulut  aussi  qu'ils  se  dislinguas- 
.sent  par  la  piété.  C'est  pourquoi  il  les  exiiorta 
d'assister  tous  les  jours  à  la  messe  et  les 
jours  de  fête  à  la  célébration  de  l'oflicc 
divin.  11  les  obligea  à  dire  chaque  jour  un 
chapelet  d'un  dixain,  qu'ils  doivent  porter 
sur  eux  ;  l'office  du  Saint-Esprit  avec  les 
hymnes  et  oraisons  comme  il  est  marcjnè 
dans  le  livre  qu'on  leur  donne  à  leur  récep- 
libn  ,  ou  bien  les  sept  psaumes  de  la  péni- 
tencej  avec  les  oraisons  qui  sont  dans  le 
même  livre;  el,  n'y  satisfaisant  pas,  de  don- 
ner une  aumône  aux  pauvres.  Il  leur  or- 
donna de  plus  de  se  confesser  au  moins  deux 
fois  l'an  et  de  recevoir  le  précieux  corps  de 
Noire-Seigneur  Jésus-Christ  le  premier  jour 
Ile  janvier  et  à  la  fête  de  l,i  Pentecôte,  vou- 
lant que  les  jours  qu'ils  commuiiicraienl,  en 


quelque  lieu  qu'ils  se  trouvassent,  ils  por- 
tassent le  collier  de  l'ordre  pendant  la  uiessc 
et  la  communion  :  ce  qu'ils  doivent  faire 
aussi  .lux  quairo  (êtes  annuelles,  quand  Sa 
Majesté  va  à  la  messe,  aux  processions  gé- 
nérales, et  .iux  actes  publics  qui  se  font  aux 
églises. 

Celle  des  Augusiins  de  Paris  fut  choisie 
par  ce  prince  pour  y  célèhrer  le  premier  jour 
di- janvier  la  tcte  de  l'ordre,  à  moins  c|ue  le 
roi  ne  soit  absent  de  cette  ville.  Celle  céré- 
monie commence  la  veille  de  ce  jour-là  à 
vêpres,  où  les  cardinaux,  prélats,  chevaliers 
et  ol'liciers  de  l'ordre  doivent  accompagner  le 
souverain  depuis  son  palais  jusqu'à  l'église. 
L'huissier  niarcho  devaiit,  le  héraut  après; 
ensuite  le  prévôt,  ayant  à  sa  droite  le  grand 
trésorier,  et  à  sa  gauche  le  grellier,  et  le 
chancelier  seul  jiprès  eux.  Puis  marchent 
les  chevaliers,  deux  à  deux,  selon  le  rang  de 
leur  réception,  el  ensuile  le  souverain  et 
grand  maître,  qui  est  suivi  par  les  cardinaux 
et  prélats  de  l'ordre.  Les  chevaliers  sont 
vêtus  de  longs  manteaux  de  velours  noir 
semés  de  llainmes  d'or  et  bordés  tout  autour 
du  collier  de  l'ordre.  Ce  manteau  es!  garni 
d'un  mantelcl  de  toile  il'argent  verte,  entouré 
aussi  du  collier  de  l'ordre  en  broderie.  Le 
minle.iu  <  l  le  manlelel  sont  doublés  lie  salin 
jaune  orangé.  Les  manteaux  se  portent  re- 
troussés du  coté  gauclie,  et  l'ouverlnre  est 
du  côté  droit.  Sous  ces  manteaux  ils  oui  des 
chausses  et  pourpoints  de  salin  blanc,  e| 
piur  couvrir  leur  tête  une  loque  de  velours 
noir  avec  une  plume  blinche  (1)  ;  à  l'ég  iril 
des  officiers,  le  chancelier  est  velu  comme 
les  chevaliers.  Le  prévôt,  le  grand  trésorier 
et  le  grelfier  ont  aussi  des  manteaux  de 
velours  noir  el  le  mantelet  de  toile  d'argent 
verte;  mais  ils  sont  seulement  bordés  de 
fiammes  et  d'une  petite  frange  d'or,  et  por- 
tent la  croix  cousue  sur  leurs  manteaux  ej 
une  autre  croix  d'or  pendue  au  cou.  Le  hé- 
raut et  l'huissier  ont  des  manteaux  de  salin 
noir  et  le  mantelet  de  velours  vert.  Ils  ont 
la  croix  de  l'ordre  pendue  au  cou;  mais 
celle  de  l'huissier  est  plus  petite  que  celle  du 
héraut. 

Le  lendemain  de  leur  réception  ils  vont 
entendre  la  messe  revêtus  des  mêmes  habits, 
el  le  roi  à  l'olTerioire  ofl're  un  cierge  où  il  y 
a  autant  d'écus  d'or  qu'il  a  d'années.  Après 
la  messe  les  chevaliers  accompagnent  Sa 
Majesté  dans  le  lieu  où  il  doit  dîner  et  man-< 
gent  avec  lui.  Ils  retournent  l'après-dînée  à 
l'église  ])our  assister  aux  vêpres  des  morls, 
el  pour  lors  ils  ont  des  manteaux  elm.inte- 
lets  de  drap  noir,  et  le  roi  un  manteau  violet. 
Le  troisième  jour  ils  vont  encore  à  l'église 
pour  y  assister  au  service  que  l'on  y  f.iil 
pour  les  chevaliers  décédés.  A  l'ofl'erloire  da 
la  messe  le  roi  et  lesche-valiers  offrent  cha- 
cun nu  cierge  d'une  livre.  Mais  on  n'a  pas 
vu  de  cérémonie  complète  depuis  l'an  1G62. 
Il  se  fait  tous  les  ans,  le  jour  de  la  Purifica- 
tion et  le  jour  de  la  Pentecôte,  une  procession 
où  le   roi  assiste  avec  tous   Us   prélats  el 


(I)  Yoij.,  à  la  fin  du  vol.,  n°  37. 


JH9                                         DICTION.N.MUF.  DHS  OnURI-S  lU-Lh^lEliX  îw 

chevaliers,   cl  li  mosso  cstcnsuilr»  céléhréo  il  av;iit  donné  l,i  «Uilaralion  donl  nous  avon<; 

p;ir  un  prclal  il i-  l'ordre.   Henri   III   doslitia  p.irlé,  pour  adnicllre  les  rois,  princes  cl  st-i- 

los  oiïrandis  «lui   se    loiit   dans   les   fjiaiulcs  ^netirs  cir;mî;ers,  avait  fail  ôler,  l'an  Î597,  les 

réreinnnifs    pour  les    religieux  dii    couvent  cliilTrc  s  qui  étaient  sur  les  grands  colliers,  et 

lies  Augustins.  et  obligea  cli.i()iie  chevalier,  à  y  avait  fait   nieilre  à   la  pliec  des   trophées 

sa  réceplinn  ,  de  donner  «iix.  cens  d'or  pour  d'armes;    avait  déclaré  qu'aucun  bâtard   ne 

eu\  au  «raiid   trestnier  de  i'onirc.  Ce  prince  pourrait  èlre  reçu  d.iiis  l'urdre,   sinon  ceux 

leur  doiina  aussi  mille  livres  de   rente   pour  des  rois  nconnus  et  léviiirnc'^.  I/an  lliOl,  à 

ilire  tous  les  jours  deux  messes,   l'une  pour  la   naissance  du  dauphin  de  l'rance,   qui  lui 

la   prosperilé   et   saute  du  souverain  et  des  succéda  sous  le  nom    de   Louis    Mil,   il  lui 

iirélais,   clievalieis  et  olliciers  de  l'ordre,  et  a  ait  donné  l.i  croix  île  l'ordre,  et  le  cordon 

l'autre '|«"'"  '•'*  difunU;  et,  dans   le  cliapi-  bleu;  et  l'.in  U)07  il  ,ivait  f.iit  assembler  les 

Ire  qui  >e  tint  à  I'. iris  l'an  I08O,  il  fut  arrêté  prel.ils,    chevaliers    et    ofliciers    de   l'ordre, 

que  chaque  chevalier  ((r.i  >ei;iit  trouvé  sans  pour  leur  dédarer  ciu'il    voulait   donner   la 

sa  croix  paverait  (lour  chaque  fois  dix  écus,  croix  et   le   cordon   bien   à    son    fils   le   duc 

cl,  si  c'était  un  jour  de  chapitre,  cinquante  d'Orléans,  coinnie  il  av.iU  fait  au   dauphin, 

écus,  (jui  seraieni  aussi  donnés  par  aumône  et   é'i   l'.ivenir  à  tous   ses   enfants    mâles  qui 

,TUX  .Au-'ustins.  naîtraient  en  lé^iliine  mariage,   étant  en  bis 

Cette  cérémonie  de  l'onlre,  (pii.   selon  les  âj^e,  pour  les  faire  connaitic  à  tout  le  monde 

statuts,  sediiil  faire  dans  l'eglisc  des  .\u;;u--  par  celle  marque  d'honneur  :  ce  qui   a  été 

lins,    esl  peut-élre  ce   qui   a    donné    lieu  à  praliquéjusiu':»  présent  i)ar  ses  successeurs, 

l'abbé  (îiu>tiniani  lie  dire  que  cet  ordre  aval  Quanta  ce  i;ue   Schooneheck  dit  encore, 

éé  soumis  à  la  rè^^le  de  S  ii  il-Aujrusiin   (lar  qu  tlenri  IV  obtint  ilu  pipe  que  toutes  les 

le  pape  tjréi;oire  XIII,  qui,  selon  lui  ,   l'ap-  rentes    et    les   revenus    de    l'ordre    seraient 

prouva  :  en  quoi  il  a  elé  suivi  par  Schoone-  convertis  en  commanderies,  il  y  a  plusieurs 

liecii,  qui  ajoute  qu'Henri  IV  obtint  du  pape  écrivains  ()ui  disent  au  contraire  que  ce  fat 

que  toules  les  rentes  et  les  revenus  de  l'ordre  Henri   III  qui   voulut  attribuer  aux  prélats, 

seraieni  converlis  en  commanderies,  et  qu'il  chevaliers  et  of.lciers,  des  commanderies  sur 

envoya  même  un  ambassadeur  à  Uome  pour  les  bénéfices;  mais  que  le  pape  et  le  clergé 

rc-monirer  à  Sa  S  liii  été  sue  cet  ordre  a>ait  n'y  ayant  pas  voulu  consentir,  ce  prince  leur 

été   insiitué  pour  la   pii  paga  ion  de   la  foi  assigna  à  chacun  une  pension,  qui  a  été  ré- 

catboliiiue  et  i)our  l'exlirpaiioii  des  hérésies,  diiile  à  mille  t'eus,  tomme  nous  avons  dit, 

et  ()ue  les    clievaliers   s'y  engageaient  par  et  le  roi  reçoit  sa  disiribulion  sur  l'évalua- 

scrmenl.   Il  est  vrai  (jue  ce  prnee  fil  repré-  lion  des  anciens  écus  d'or,  qui  monte  à  siM 

senler  au  |)ape   Paul   \',    l'an   l(i08.  que  les  mille  livres. 

chevaliers  cl  officiers  de  l'ordre  s'engageant  On   peut  excuser   le  même  Schoonebeck, 

]iar  \uu  et  serment  d'en  observer  les  sialuts,  comme  éiranger,  d'avoir  avancé  qu'au  lieu 

el  que  CCS  statuts  défendant  d'y  admellre  les  des    II   qu'Henri    111    fil  mettre    au   collier, 

élraiigers   non   regnicoles,    et  ordonnant   a  l'on  voit  aujourd'hui  dis    L,  qui   signifient 

Ions  les  chevaliers  de  con)inunier  aux  jours  Louis  :  mais  Ileiinan,  (|uiilit  la  même  chose, 

de    cérémonies  et  à  la  réccpiioii  des  cheva-  ne  pouvait  p.is  ignorer  qu'il  n'y    a  point  d'L 

licis,  il  pi  iait  SaSaiiilelé  de  dispenser  en  ces  au  tollicr,   el  que  les  H  n'en  ont  point  été 

deux  points  de  ce  vœu  el  sermenl,  en  ce  que  ôtées  :  au  contraire,  dans  le  chapitre  qui  se 

l'ontre  étant   établi   pour  l'exallation   cl   l.i  linl  le  •'31  décembre  ItilO,  où  Louis  XIII  était 

propagalion    de    la   loi    catholique,    il   élail  prêseul,    il  fut  arrêté  que   les    11  demeure- 

avaniageux  de  l'étendre  dans  li!s  pays  élran-  raiei.l  à   perpéluiié    sur  les    broderies   des 

(,'(  rs  ;  et  (ju'à   l'égard  de  la  coinmuuiun  que  manteaux  et  manlelels,el  sur  les  colliers  d'or 

les  chevaliers  doivent  faire  les  jours  de  ce-  <les  i  hevaliers,  en  mémoire  d'Henri  III,  fon- 

rémonies   et   à  la  réception  des  autres  che-  dateur  de  l'ordre,  el  du  roi  Henri  l\",  second 

valiers,  il  était  p!us  convenable  de  la  reinel-  chef  et  souverain  grand  maître  du  même  or- 

tre  à  un  autre  jour,  à  cause  que  dansées  dre.  Ce  tollicr  doit  être  du  poidsde  deux  cents 

jours  de  fêle   el  de    cérémonies   l'embarras  écus  ou  environ,  el  ne  peut  être  jamais  orné 

el    le  tumulte  leur   |  ouvail  cmser  plus   de  de   pierreries.    Lorsqu'un   chevalier    iiieurl, 

dislraclion  que  de  dévotion  :  c'esl  pouri|ui>i  ses  héritiers  le  doivent  renvoyer  au  roi.  Il  n'y 

ce  pontife,    par  un   bref  du   l(i  février  I(i08,  a  presenlemeiit  que  les  cardinaux,   les  prc- 

dlspensa  les  clievalieis   de  leur  vitu  el  sei-  lals   cl  les   uflicicrs  qui   sonl   de   robe,    (|ui 

ineiil,    pour  ces  deux  articles  seulement,  en  porlenl  la  croix  pendue  au  cou,   attachée  à 

permetlanl  de   recevoir   des   étrangers    non  un  ruban  bleu  large  de  quatre  doigts;   tous 

regnicolcs,  el  en  déclarant  que  les  chevaliers  les  chevaliers  la  porlenl  aussi  attachée  .i    un 

salisferaicnt  aux  sialuts,  pourvu  qu'ils  com-  ruban  bleu  eu  é.  li,ir()e,  depuis  l'épaule  droite 

muni. issent  un  des  jours  de  l'oit  ive  qui  pré-  jusiju'à    la  garde  de  l'epée.  Celte  croHx  esl 

céderait    les    cérémonies   de     l'ordre    «u    la  d'or  émail  ée  île  blanc, chaiiue  rayon  pmnmelé 

léceplion  des  chevaliers;  el,   par    un  .autre  d'or;  une  lleur  de  lis  d'or  d.ms  chacun  des 

bref,  du  17  avril  de  la  nu-me  année,   il  |  er-  angles  de  la  cioiv,  el   dans   le  milieu   d'un 

mil  à  Henri  l\  de  fane  tel  changement  aux  côte  une  colombe, el  de  l'anlre  un  saint  Mi- 

hialuls  qu'il  tiouverail  à  propos  pour  le  bien  chel.    Les   cardin.iux   et   prêtais   porlenl   la 

el   l'avaniage  de  l'ordic  :  ce  ijui  aulorisa  ce  colombe  des  deux  coles  do  ia  croix,   n'étant 

prince  dans  quelques   changemenls   qu'il  y  seulement  que  commandeurs   de  l'ordre  du 

iivait  dej.i  f.iiis  :  i.ir  dès  raiincc  prcccdcnte  Saint  Lsprit.   l'uules  bs  e\|,edilioiis  ei  pio- 


iOl 


ESP 


ESP 


202 


visions  coiircrnnnt  col  orilro  sont  scellées  par 
le  chancelier  en  cire  blanche. 

Le  Laboureur,  Addillnns  aux  Mémoires  de 
Caslelnau.  Favin,  Théâtre  d'honneur  it  de 
chevalerie.  Hernanl  Giiislini mi  ,  Hiat.  di 
luit,  gli  Ord.  milit.  Schoonebeck,  llist.  des 
Ordres  Militaires.  Hernian,  Uist.  drs  Ordres 
de  Chevalerie.  Du  Chêne  el  Hauilicquer,  lie- 
cherches  historiques  de  l'Ordre  du  Saint-Es- 
l)rit.  Les  Statuts  de  cet  ordre  imprimés  in 
1703,  et  Manuscrits  de  Brienne  à  la  biblio- 
thèque (Im  roi,  roi.  21k. 

En  1708,  le  roi  Louis  XV  fit  réviser  par  nn 
des  préals  (le  l'ordre  du  Sainl-Espril  l'olfico 
à  l'uragc  des  chi'valiers,  el  soumit  le  travail 
à  tous  les  prélats  dudil  ordre,  qui  l'approu- 
vèrent, el  cet  olfice  fui  réimprimé  avec  luxe. 
Les  chevaliers  du  Saint-Esprit  le  récitent 
tous  les  jours,  ou  bien  les  sept  psaumes  de 
la  pénitence.  Nous  supposons  ,  ea  parlant 
ainsi  ,  que  les  membres  vi'ant  encore  rrm- 
p'issent  une  obligation  (ju'ils  ont  contractée 
devanl  Dieu  et  leur  roi,  en  recevant  les  insi- 
gnes de  cet  ordre  aujourd'hui  siipprinié  par 
le  fait.  A  la  reslauraiion  des  liourbons  , 
Louis  XVIU  ne  fit  pas  lout  ce  qu'il  aurait 
dû  prudemment  faire  pou:  ramener  les  usa- 
ges des  temps  d'hcinncur  (t  de  loyauté.  Sous 
ce  rapport,  les  choses  prirent  une  face  exté- 
rieure plus  consolante  ou  plus  animée  sous 
Charles  X. 

Le  hin;li  30  mai  1825,  lendemain  du  sa- 
cre de  ce  monarque,  il  y  eut  dans  la  cathé- 
drale de  r.einis  une  réception  solennelle  des 
chevaliers  et  commandeurs  des  ordres  du 
roi,  ce  qui  n'avait  pas  eu  lieu  depuis  plus  de 
trente-cinq  ans.  Deux  trônes  étaient  élevés, 
l'un  dans  le  sanctuaire ,  l'autre  dans  le 
chopur.  A^aiit  la  cérémonie,  M.  le  dauphin 
reçut  d'abord  chevaliers  de  l'ordre  de  Saint- 
Michel ,  cnformément  aux  statuts,  tous  les 
chevaliers  qui  allaient  être  reçus  membres 
de  l'ordre  du  Saint-Esprit.  Celle  réce|)lion 
faite,  le  roi  Charles  X  arriva  processionnel- 
lement  à  la  cathédrale  pour  tenir  chapitre 
des  ordres.  S.  M.  poriail  la  dalmnlique ,  le 
nianican  et  le  grand  co  lier  de  l'o.die  di 
Saint-hsprit.  Les  chevaliers  qui  devaient 
être  reçus  marihaient  sur  deux  ranj^s,  pui, 
les  chev.ihers  reçus,  les  princes  ,  le  loi  en- 
touré des  grands  officiers  de  sa  miiison  el 
des  commandeurs  ecclésiastiques,  !\LM.  la 
cardinaux  de  la  Fare,  de  Croï  et  de  Cler- 
inonl-Tonnerrc  ,  l'archevêque  de  Keims  et 
l'ai  bé  de  Alonlesquiou  (l'archevêque  de  Bor- 
de.ius  était  absent,  mais  il  était  néanmoins 
comniaiid  ur  de  l'ordre).  Le  roi  assista  aux 
vêpres  assis  sur  son  trône  du  chœur.  Après 
les  vêpres  il  se  rendit  à  s  jn  trône  du  sanc- 
tuaire. Un  fauteuil  y  avait  été  aussi  préparé 
pour  l'archevêque  de  Reims  oiQcianI,  (]ui 
entonna  le  Veni,  Creator.  Les  commamlcurs 
cccicsia-tiquei  furent  reçus  les  premiers; 
ils  prêtèrent  le  serment,  à  genoux  devant  le 
roi  ,  furent  revêlus  par  lui  du  cordon  bleu, 
reçurent  de  ses  mains  le  liwe  d'ufliee  et  le 
dizain  ;  ils  baisèrent  ensuite  la  main  île  Sa  Ma- 
jesté. Les  chevaliers  laïques  furent  reçus  en- 
juiteavec  le  même  cérémonial. Ils  éluienl  au 

D:CÏ10\XA1RE    DES    OrDBES    nELIGIEUX.    II. 


nombre  de  trente-six,  dont  deux  étrangers, 
le  prince  de  CasIel-Cicala  cl  le  duc  de  San- 
Carlos;  ces  deux-ci  prêtèrent  un  serment 
parliculier.  On  chanta  alors  Compiles,  pen- 
ilant  lesquelles  le  roi  cl  tous  les  membres  de 
l'ordre  restèrent  assis  et  couverts.  H  n'y 
avait  eu  jusqu'alors  de  reçus  dans  l'ordre  du 
Saint-Esprit  que  les  trois  princes  existant  à 
relie  époque,  savoir  :  M.  le  dau|  hin,  M.  le 
duc  d'Orléans  et  M.  le  duc  de  Bourbon;  et 
encore  le  duc  de  la  Ilochefoueault  el  le  duc 
de  la  Vauguyon.  Le  dimanche  de  M  Pentecôte 
de  l'année  suivante  (182G),  le  roi  fit  une  nou- 
velle  réception  de  serments  et  de  chevaliers 
dans  la  chapelle  des  Tuileries.  Le  duc  de 
Chartres  (mort  depuis  si  misérablement  dans 
la  rue  de  la  Révolte)  <^lait  le  premier.  Ce 
jour-là  il  prêta  solennellement  le  serment  do 
fidélité  à  Charles  X,  comme  l'avait  tait  pré- 
cédemment le  duc  d'Orléans,  son  père,  à 
Louis  XVllI.  En  1827,  à  pareil  jour,  il  y  eut 
an>si  chapitre  de  l'ordre  et  réceptions  nou. 
s  elles.  Le  roi,  dans  le  cours  de  l'année,  nom- 
mait quelquefois  aux  dignités  de  l'ordre,  et 
les  rècept  ons  se  faisaient  le  jour  de  la  Pen- 
tecôte. Ainsi  eurent-elles  lieu  le  dimancha 
de  la  Peiitecôie,  30  mai  1830.  Comme  cette 
cérémoiiie  a  été  la  dernière,  nous  en  parle- 
rons ici  avec  quelque^  détails.  Le  roi  t;har- 
les  X  ,  comme  grand  maître  de  l'ordre  du 
Sainl-Lspril,  tint ,  à  11  heures  du  matin, 
dans  son  cabinet ,  un  chapitre  dudil  ordie. 
M.  de  Quélen  ,  an  he  êque  de  Paris,  qui,  à 
l'occasion  du  sacre,  'n'avait  reçu  aucune  la- 
veur, et  M.  rarchevê.|ue  de  Bordeaux  y  fu- 
rent nommés  commandeurs  ecclésiastiques. 
S.  .M.  sortit  ensuite  de  ses  appartements,  el 
la  procession  qui  se  fait  ce  jour-là  eut  lien. 
Le  roi  était  précédé  des  chevaliers  de  ses 
ordres  et  des  chevaliers  non  reçus  qui  de- 
vaient recevoir  les  insignes;  ceux-ci  étaient 
.MM.  les  princes  de  Politrnac  el  de  Broglie 
(M.  de  Polignac  e>l  resté  fidèle  à  son  souve- 
rain), les  marquis  d  Ecqucvilly,  de  Vérac  cl 
de  Conllaiis,  et  les  comtes  de  Durl'ort,  Uoy, 
Heille,  Bordesoulle  et  de  Cossé.  Tous  accom- 
|iagnèrenl  le  roi  jusqu'au  trône  qui  avait 
été  érigé  dans  la  chapelle.  M.  révê.|ue  de 
Metz  olticia.  Après  la  messe,  le  roi  se  plai, a 
sur  un  trône,  à  ganehe  de  l'autel.  Le  chan- 
celier de  l'ordre  lut  la  formule  ilii  serment. 
Leduc  de  Nemours,  lils  du  duc  d'Oiléans  , 
que  la  bonté  de  Charles  X  avait  élevé  au 
rang  d'altesse  royale,  et  qui  ,  quelques  se- 
maines plus  lard,  prenait,  avec  le  litre  de 
loi  des  Français,  la  couronne  des  mains  des 
députés,  le  duc  de  Nemours,  après  s'être  mis 
à  genoux  au  pied  du  trône,  prêta  le  serment 
enire  les  mains  du  roi,  qui  le  revêtit  des  in- 
signes do  l'o.-dre.  Le  même  cérémonial  fut 
observé  pour  les  chevaliers  nou  reçus,  el  le 
roi  fut  ensuite  reeoiuliiil  à  ses  apparlenients 
avec  le  même  cortège.  Onavaii  fait  pour 
celle  solennité,  au  château  des  Tuileries, 
des  prépara  ils  qac  nous  avons  vus  nous- 
inême.  B-d-e 

ESPRIT  (Obdbe  du  Saint-). 

§  1".  De  l'ordre  du  Suint-Esprit,  appelé  di 

1 


2113 


DICTIONNAIRE  DFS  OUOnES  KELICIEL'X. 


Afonlpellier  en    France ,  et    in   Sassia    en 
Italie. 

I.a  plupart  des  anciens  liislorirns  (|ui  nous 
«ml  donne  la  »ic  de  sainte  Marthe  l'onl  ac- 
coinpasînce  de  tant  de  faits  apocrjijlios  cl 
contraires  à  la  vérité  dp  l'histoire,  (ju'ils  se 
sont  rendus  suspects  et  n'ont  mérité  aucune 
créance.  On  peut  dire  la  même  chose  d'Oli- 
vier de  la  Trau,  sieur  de  la  Terrade,  qui  se 
qualifie  an  hihospitalicr  général  et  grand 
^  'jiaitre  de  l'ordre,  milice  et  religion  du  Saint- 
^  Ssprit,  qu'il  prétend  avoir  été  fondé  p.ir 
:ctle  sainte,  et  qui ,  dans  un  discours  tou- 
chant la  fondation  de  cet  ordre,  qu'il  adressa 
en  1629  à  la  reine  de  France  .Marie  de  iMcdi- 
cis,  qu'il  appelle  la  resliurairire  de  cet  or- 
dre, y  a  inséré  un  abrégé  de  In  vie  de  sainte 
Marthe,  où  il  a  enchéri  sur  tout  ce  que  l'on 
en  avait  avancé  de  Tibueus,  en  y  ajoutant 
des  circonstances  qui  le  sont  encore  davan- 
tage. 

Il  a  cru  que  ce  n'éîait  pns  .isscz  d'avoir 
f.iit  remonter  l'antiquité  de  cet  ordre  jusqu'à 
sainte  Marthe,  mais  qu'il  lallait  encore  mon- 
trer comme  il  a\a\l  toujours  subsisté  de|)uis 
ce  temps-là.  Il  ciic  pour  cet  effet  une  bulle 
de  Léon  X  du  lOjanucr  1519,  jar  laquelle 
te  I  ape  reconnaît  qu'il  subsi^t.iit  du  temps 
•le  Jean  III  ,  l'un  de  ses  prédécesseurs.  Il 
suppose  qu'un  certain  Guillaume  de  Foii- 
laine-Clairc,  général  et  grand  maître  de  cet 
ordre,  étant  allé  de  Monîpellier  en  Kspagnc 
pour  y  faire  sa  visite,  s'attira  l'cslime  de 
Ferdinand  I",  roi  de  Casiille,  qui,  ayant  ob- 
tenu par  ses  prières  et  pir  celles  des  reli- 
gieuses du  Saint-lisprit  de  Salaraanque,  u:ic 
victoire  complète  sur  les  .Maures,  donna  à 
ces  religieuses  la  coiiimandcrie  d'.'^taiaîa  et 
de  Palomera,  appartenant  à  l'ordre  de  Saint- 
Jacques,  suivant  le  vœu  qu'il  en  avait  fait, 
et  il  rai  porte  tout  au  long  en  langue  cas- 
tillane la  ilonation  qui  en  fut  faite  par  te 
prince  en  d  ,tc  du  15  nuvembrc  ÎOJO. 

11  fait  ensuite  tenir  un  chapitre  général  à 
Montpellier  au  mois  d'août  1032,  indiqué 
parce  Guillaume  de  Fonlaiuc-Claire,  à  la 
sollieitalion  d'Antoine  Perez,  son  vicaiie  gé- 
néral et  officiai ,  et  de  Jean  de  Rocheforl, 
gr;ind  prieur  d  •  la  province  d'.Vquilaine,  où 
I  on  cita  personnellement  don  Ferdinand  de 
Gordoue,  grand  prieur  de  la  province  de 
(lalice,  pour  y  venir  rendre  compte  de  ce  qui 
s'était  passé  au  chapitre  [roviuci.il  de  cet 
ordre  Kmui  à  Salamanque  .lU  mois  d'août 
lO.Jl.  Knfin  il  cite  des  lettres  p  itenles  ac or- 
•lées  par  Henri  11,  roi  de  France,  à  l'iiopi;,  I 
de  .>;ontpellier,  par  les(ioelles  il  paraît  <|ii,: 
eet  hûpilal  est  le  premier  de  la  cliréiienlé; 
qu'il  a  été  fondé  par  un  de  nos  rois  ()iii  alla 
il  ltome,où,à  la  sollicitation  ilu  jiape  quig-u- 
verii.iit  pour  lors  l'Fglise,  il  fonda  en  Tctte 
»ille  un  autre  hôpital  sous  le  nom  du  ^aiiil- 
iispril. 

Voilà  les  [priiitip.il  s  preuves  que  la  Trau 
de  l.i  l'errade  apporte  pour  prouver  l'anii- 
quilé  et  la  continu. it.on  de  son  ordre.  Mais 
Mari.ina  et  j'urquet.  dans  leurs  Histoires 
0  i'.spagnc  ,  prcteuJint  que  le  privilège  ic- 


£01 

cordé  aux  religieuses  du  monaMèrc  du  Saint- 
lispritde  Salamanque,  l'an  103V,  par  le  roi 
F(  rdinand  ,   et  non  pas  l'an   1030.  comme  lo 
dit  la  Terrade,  e>t  faux  et  contrefait,  parce 
qu'il  est  écrit  en  langue  castillane  moderne, 
et  que  l'on  y  compte  l'année  depui^  la  nais- 
sance de   Noirc-Seigneur ,   ce  qui    ne  peut 
être  puisque  tous  les  actes,  tous  les  titres  et 
les  lettres   se  faisaient  en  latin  ,  et  que  l'on 
comptait  depuis  l'ère  de  César;  outre  qu'on 
y  donne  à  don  Ferdinand  le   tilre  de  grand 
seigneur  de  Biscaye  et  de  roi  de  Léon,  ce  qui 
en    montre   plus   évidemment    la   fausseté, 
parce  qu'il  n  a  jamais  été  roi  de  Léon,   et 
par  conséquent  ne  pouvait  accorder  aucun 
privilège  à  ce  monastère  de  Salamanque,  qui 
a  été  sous  la  juridiction  de  Léon,  où  en  l'an 
103i  ,   qui  est  la   véritable  date   déco    pré- 
tendu   privilège  ,   régnait  don  Bcrmond  III. 
Les  autres  preuves  queceux  nui  prenaient 
la  qualité  de  chevaliers  de  cet  ordre  ont  ap- 
portées pour  en  faire  voir  l'anliquilé,  et  que 
dans  son  origine  i.  éiait  militaire  (lo.-squ'ou 
leur  a  disputé  c  ■Ile  qualité)  .  ne  sont  pas 
mnilourcs;  car  ils  ont  prétendu   que   s.iint 
Lazare,  frère  de  sainte  Marthe  et  de  sainte 
Marii -Madeleine  ,  en   avait  été  le   premier 
général  ou  grand   maître.  Ils  sesom  imagi- 
né que  sainte  Mario-.M;ideleine  avait  aujsi 
fonJé   plusieurs   maisons  de  cet  ordre  ;  de 
sorte  que  Lazare  et  ses  sœurs,  occupés  aux 
saints  exercices  de  l'hospitalité,  recevaient 
graliiiloment  les  pèlerins  qui  venaient  à  Jé- 
rusalem  pour  y  adorer   les  sacrés  vestiges 
du  Sauveur  du  mon  le  ,   et  que  cette  société 
s  et.int  augmentée  par  un  grand  noa.bre  de 
personnes    qui    en    y   entrant    consacrainii 
leurs    biens    au   service    des    hi'ipilaux.  il 
s'en   forma  un  ordre  militaire  pour  assurer 
1.  s  chemins  aux  pèlerins  qui  venaient  à  Jé- 
ru-alcm. 

Mais    sur    que'le   aulorité    appuyaienl-ils 
leurs    pièleoiions'?   Sur  celle    d  un    ancien 
bréviaire  de  l'an  1553,  où,  dans  l'une  des  le- 
çons de  la  fête  de  sainte   Mar  he  ,  il  est  dit 
que  pendant  que  Madeieine  s'appliquait  en  - 
tierenieiil  à  la  dévo:ion  et  à   la  tontempia- 
l  ou,  Lazare  s'adonnait  davant.ige  à  l'exer- 
cicedela  guerre,  et  que  Marthe, qui  étaitfori 
priidente,  prenait  lo  soin  des  alT.iires  de  son 
frère  et   fournissait  aux  sold.its  et  aux  do- 
mesiiques    ce   qu'ils   avaient  besoin   :  Dum 
aiilem  Magdairnn  decotioni  et  contemplationi 
se  t'.liim  ixponciet,  Lazurns  (/uoque  plus  mi- 
lilte   lacarcl,  Martha  prudens  cl  sororis  et 
frariis  parles  ftrrnuc  gubernnbiit  et  militibu^ 
ac    puniihs    scdiilc    mini!.trabnt.     ,\iiisi    ils 
av.ii,  nt  cru  trouver  dans  les  mots  de  nilliliœ 
cl  >;:iltnb!is  l'origine  de  leur  milice.  M  .is  les 
histoires  qui  se  trouvent  dans  les  bréviaires, 
prineip.ilcineiit  dans  les  anrieiis  ,   onl-ellc» 
louiesde  la  certitude?  et  les   changements 
qui  ont  ele  faits  tant  de  fois  dans  Ks  légen- 
des coiileiiues  dans  les  bréviaires,  ne  soiit- 
ce  p.is  des  preuves  (iiic  l'on  y   recevait  an- 
ceiinoiiient  le  vrai  comii;c  le  faux,  et  que 
ces  légendes  étai  ni  pleines  de  quantité  de 
<.ib  es  -lui  av.icnl  comme  étouffé  la  sinccritt' 
de  l  hiblo  re? 


235 


ESP 


ESP 


206 


M.  de  Blégny,  qui  prend  la  qualité  do 
commandeur  el  d'administrateur  général  de 
cet  ordre,  dans  un  projet  d'Histoire  des  re- 
ligions militaires  qu'il  donna  en  16  i4  et  qui 
n'est  proprement  que  pour  faire  voir  l'anti- 
quité de  l'ordre  militaire  du  Saint-Esprit, 
cite  aussi  pour  preuve  de  son  antiquité  un 
de  ces  anciens  brévi.iires  de  l'an  1514- où  il 
est  parlé  de  Lazare  comme  chef  d'une  milice; 
et ,  après  avoir  fixé  la  première  époque  de 
l'établissement  de  cet  ordre  sur  l'auloriîé  de 
ce  bréviaire  :  Lazare,  dit-il,  étant  arrivé  en 
France  ,  se  proposa  de  )  émettre  sur  pied  le 
corps  de  milice  (/u',l  avait  commandé  à  Jérti- 
salem,  et  fit  prendre  les  armes  à  ceur  de  sa 
congrégation  qui  portaient  sur  leurs  habits 
une  croix  blanche  de  truis  parties,  dont  la 
principale,  qui  était  V arbre  ou  le  tronc,  re- 
présentait Lazare  comme  chef  de  leur  compa- 
gnie, et  les  deux  autres  ,  qui  étaient  Irs  tra- 
verses ou  croisons,  désignaient  les  deux  sœurs 
comme  personnes  subordonnées.  Les  pèlerins 
exposés  par  de  longs  voyngrs  devaient  à  leur 
vigilance  la  sûreté  qu'ils  trouvaient  sur  les 
chemins  et  le  secours  qu'ils  trouvaient  dans 
les  hôpitaux.  Cet  ordre  devint  si  célèbre,  qu'il 
g'étendit  bientôt  dans  les  pays  étrangers.  Il 
passa  premièrement  dans  le  royaume  de  Na- 
ples,  où  ces  hospitaliers  s'établirent  à  Pouz- 
soles,  et  ensuite  à  Rome. 

Les  titres  de  l'ordre  n'ont  pas  apparen)- 
nient  conservé  à  M.  de  Blégnj  tous  les  noms 
des  premiers  généraux  successeurs  <le  La- 
zare, car  il  passe  tout  d'un  coup  à  l'anuce 
493,  en  laquelle  il  dit  que  Luc  de  Rri^cjuil 
était  général  ;  qu'il  eut  pour  successeur  eu 
498  Cécile  de  Mondiagon;  qu'à  celui-ci  suc- 
céda Lucale  feiral,  el  (pie  ce  fui  à  Jérôme  de 
Tiécis,  qui  fut  établi  général  en  573,  que  le 
pape  Jean  III  adressa  une  bulle.  L'on  est 
déjà  asstz  convaincu  que  toule  l'antiquité 
que  prétendaient  les  chevaliers  était  iiujigi- 
naire  ;  mais  cette  bulle,  adressée  par  Jean  III 
à  ce  prétendu  grand  maître  en  573,  en  est 
une  preuve  ,  puisque  ce  pape  était  mort  en 
572.  Nous  ne  suivr(jns  pas  les  chevaliers 
dans  toutes  leurs  autres  prétentions  sur  cette 
aniiquilé,  cjui  nous  conduiraient  trop  loin, 
lîlli's  étaient  si  peu  raisonnables  <  t  les  litres 
dont  ils  se  prévaiuient  élaicnl  si  manifeste- 
ment taux  ,  qu'il  y  a  Heu  de  s'ctonner  qu'ils 
les  aient  même  produits,  lursqu'eii  1093  les 
Chanoines  Keguiiers  de  cet  ordre  leur  dispu- 
tèrent celte  qualité  de  chevaliers,  tomme 
nous  dirons  dans  la  suite. 

En  eH'cl  ces  Chanoines  Réguliers  ont  tou- 
jours considéré  cet(e  antiquité  de  Lur  ordre 
comme  imaginaire,  et  n'ont  jaiiiais  recinnu 
d'autre  londaleur  que  Guy  île  Montpellier. 
It  était  fils  de  Guillaume,  seigneur  de  Aloiil- 
pellicr  et  de  Sibylle,  ei  il  bâtit  dans  cette  viile, 
hur  la  fin  du  douzième  siècle,  un  célèbre  hô- 
p.lal  pour  y  recevoir  les  pauvres  malades, 
ton  insigne  charité  le  rendit  très-ncom- 
niandable:  il  procura  de  grands  biens  à  son 
nouvel  établissement;  il  associa  avec  lui 
u'aulres  personnes  pour  en  avoir  soin  et 
âissister  les  pauvres  de  leurs  biens.  Son 
ordre   s'ctcudit'en  peu  de  temps  en  plusieurs 


endriils,  comme  il  parait  par  la  bulle  du 
p.ipe  Innocent  III  du  23  avril  1198,  qui,  en 
confirmant  cet  ordre,  fait  le  déuombreinenl 
des  maisons  qu'il  avait  déjà,  dont  il  y  en 
avait  deux  à  Konie,  l'une  au  delà  du  Tibre, 
el  l'autre  à  I'.  nirée  de  la  ville  sous  le  nom 
de  Sainte-Agatho  ;  une  autre  à  Perg'rac, 
une  à  Troyes,  et  d'auiresen  différents  lieux. 
Comme  ils  étaient  tous  laïqi!i,s,  et  qu'il  n'y 
avait  aucun  ecclésiastique  parmi  eux,  lu 
même  pontife  avait  le  jour  précédent  écrit  à 
tous  les  archevêques,  évéques  el  prélats  de 
l'église,  pour  les  prier  que  s'il  se  trouvait 
quelques  pei  sonnes  pieuses  de  leurs  diocèse» 
qui  voulussent  faiie  quelques  donations  à 
ces  Hospitaliers,  ils  ne  les  empêchasse  t 
pas.  11  exhortait  aussi  ces  prélats  d'accoiJer 
à  (es  Hospitaliers  la  permission  de  bâtir  des 
églises  el  des  cimetières,  de  faire  la  dédi- 
cace de  ces  églises,  de  bénir  les  cimetières 
lorsqu'ils  seraient  bâtis,  et  de  soulîrir  (jne 
le  fondateur  et  les  autres  frères  de  cet  ordre 
choisissent  des  prêtres  séculiers  pour  leur 
adminisirer  les  sacrements  et  aux  pauvres 
dans  leurs  églises.  Six  ans  après,  l'an  120'i', 
ce  pape  fit  Venir  à  Home  le  (ondaleur  pour 
lui  donner  le  soin  de  l'hôpital  de  Sainle- 
iMarie  in  Sassia,  ou  en  Saxe,  qui  s'appelle 
présentement  le  Saint-Esprit  ;  el,  comme  il 
e^l  le  chef  de  cet  ordre  et  l'un  des  pins  cé- 
lèbres de  l'Italie,  nous  rapporterons  son  ori- 
gine el  sa  fondation. 

L'éjlise  fui  fondée  par  Ina,  roi  des  Saxons 
Orientaux,  l'an  715,  sous  le  lilre  de  Sainte- 
Marie  in  Sassia,  ou  de  Saxe,  et  le  même  roi 
étant  venu  à  Rome  l'an  718,  ajouta  à  celta 
église  un  hôpital  pour  les  pèlerins  de  sa  na- 
tion, (ju'il  donna  à  gouverner  à  quel(|ues 
personnes  séculières,  ayant  assigné  sur  son 
(loiiiaine  un  revenu  annuel  pour  la  sub« 
sistance  des  pauvres  el  l'entretien  de  l'hô- 
pilai. 

OlTa,  roi  des  Merciens,  à  son  imitation, 
amidifia  le  même  hôpital  et  en  augmenta  les 
revenus  ;  mais  il  fut  brû'é  en  817  par  un  in- 
cendie qui  ne  put  être  arrêté  que  par  une 
image  de  la  sainte  Vierge,  que  le  papg 
Pascal  1  y  porta  en  procession.  Un  pâte  1 
incendie  acheva  de  le  désoler  en  S'H,  auquel 
le  pape  Léon  IV  remédia  aussitôt  le  mieux 
qu'il  put,  ayant  été  aidé  par  les  libéralités 
des  successeurs  des  rois  fondateurs.  Sliis 
les  guerres  des  Guelfes  et  des  Gibelins,  du- 
laul  les  o:ize  et  douzième  siècles,  ruinèroi  t 
tellement  le  quartier  de  la  ville  où  l'hôpital 
est  situé,  qu'ils  en  aboli,  eut  même  jusqu'à  la 
mémoire.  Enfin  Innocent  Ll,  étant  monte 
sur  la  chaire  de  saint  Pi  rre,  fit  bâtir  de  l'on  i 
en  comble  cet  hùpilal  à  ses  dépens  l'an  1198, 
pour  y  recevoir  les  malades  et  les  pauvres 
de  Rouie,  ci  en  augniciila  de  beaucoup  I.  s 
bâtiments,  les  posses^i.jiis,  les  revenus  et  les 
privilèges  ,  en  l'année  12U4,  après  que  des 
pêcheurs  eorent  tiré  du  Tibre  dans  leuis 
filets  une  grande  quantité  d'enfants  nouvel- 
lement nés  qu'on  y  avait  jetés  ;  car  ce  pap{i 
en  fut  tellement  touché,  qu'il  desiina  pr.nci- 
palemeui  cet  hôpital  piur  rect'fuir  les  en- 
lànts  exposés  el  abanJonnés  par  leurs  pa» 


5(17 


DICTIONNAIRC  DKS 


rcnls.  A  la  véiiU'  il  n'en  est  poinl  fail  nion- 
lion  (Inns  sa  liillp.  mais  tiit-n  dans  relies  de 
l'iusieurs  de  si";  Miree-iseurs,  comme  de  Ni- 
colas IV,  de  S  xle  W  cl  de  quelques  aulre >  ; 
1 1  l'on  Miil  encore  dans  ccl  IJopiiai  une  pcin- 
lureàfresque,(iui  rcpréscntodes  pécheurs  qui 
portent. lin  no  enl  III  ces  enfants  quils  a  v.iieni 
.rouv6s.ct  une  inscription  au  lias,  qui  fait  foi 
|ue  ce  lonlife  fut  averti  p.ir  un  aiificd')  re- 
ini'dirr;  c'est  pourquoi  l'on  prétend  (|u'il  fil 
en  même  temps  làtir  Cette  église,  qu'.l  dédia 
en  riionneur  du  Sainl-Kspril,  tant  à  cause 
qu'il  lui  avait  inspiré  une  si  bonne  œuvre, 
(|u'à  cause  des  reli{;ieu\  du  Saint-Ksprit  de 
Montpellier,  auxquels  il  donna  le  soin  de  cet 
hôpital  ;  mais  il  y  en  a  beaucoup  qui  regar- 
dent cette  histoire  comme  une  fable. 

Ce  qui  ist  vrai,  c'est  qu'il  n'y  avait  pas 
longtemps  que  le  comte  (luy  avait  fondé  son 
ordre,  dont  le  principal  soin  des  Hospitaliers 
était  d'exercer  l'h'ispitalité  envers  les  ma- 
lades, comnie  nous  avons  dit  ci- dessus.  Ce 
saint  pape,  (t.mt  bien  informé  de  leur  clia- 
liié  qui  les  rendait  alors  fort  célèbres,  en  fit 
venir  six  à  Itomc  avec  leur  fo:idateur  pour 
leur  donner  la  direct  on  de  cet  hôpital,  que 
les  papes  huccesseurs  d'Innocent  111  ont  en- 
richi dans  la  sui!e  |iar  plusieurs  donations 
(|u'il$  lui  ont  f.iites,  en  quoi  ils  oui  é  c  imités 
par  plusieurs  peisi)nnes  laeuscs  et  chari- 
tables. 

L'an  l'*Ti,  Sisie  IV,  voyant  que  les  bâli- 
luent-  de  cet  hô;  ital  tombaient  en  ruine,  e 
lit  rebâtir  avec  la  ma<;nificence  (|u'on  voit 
encore  aujourd'hui.  11  contient  plusieuis 
corps  de  logis  avec  une  salle  fort  longue  et 
élevée  à  proportion,  capable  de  tenir  mi  le 
lits,  et  un  grand  corridor  à  côté  de  celte  saile 
qui  en  contient  bien  encore  deux  cents,  les- 
((uels  sont  tout  remplis  en  été.  Oa  est  mèaie 
souvent  contraint  d'en  dresser  d'autres  dans 
le»  greniers  de  ce',  hôpital,  qui  sont  au  b.is 
de  !?aint-t)nuphie,  outre  une  grande  salle 
de  traverse  où  l'on  mot  les  blesse*,  l-cs  pré- 
Ires  cl  les  nobles  sont  dans  des  cliamli.es 
]iariiculières,  où  il  y  a  quatre  lits  dans  cha- 
cune, et  seul  servi>  en  vaisselle  d'argent.  Il 
y  a  encore  d'autres  charirbres  pour  les  fré- 
iicliques  et  pour  ceux  >iui  ont  des  maux  con- 
tagieux. 

Dans  un  appartement  qui  est  derrière 
l'hùpilal,  on  y  entreiienl  grand  nombre  de 
nourrice»  [  our  all.riler  les  enfants  exposés, 
outre  plus  de  d(ux  mille  de  la  ville  et  d.s 
villagci  circoirvoisins  A  qui  on  les  donne  à 
nourrir.  'Tout  proche  est  l'appartement  des 
g.'iri'orrs  qu'on  y  met  à  l'âge  de  trois  <iu 
<|ualre  ans,  ap:6s  qu'on  les  a  retires  dis 
nourrices.  Ils  sont  toujours  au  noiirbrc  de 
cinq  cents,  et  ils  y  demeureul  jusi)ii'à  ce 
qu'ris  soient  en  état  de,  g;rgner  leur  vie  à 
<|ue!(iiie  métier  ou  autre  exercice  qu'on  leur 
apprend. 

I.es  filles,  qui  sont  en  pareil  nombre,  soirl 
élevées  dans  un  autre  appariemenl  lerine 
jusqu'à  ce  qu'elles  soient  en  étal  d'être  ma- 
rrées uu  religieuses;  et  qu.ind  elles  sont 
pourvues,  clk's  reçoivent  de  l'iiopilal  cin- 
quante écus  rom;:ins  de  dot.  lilks  sont  sous 


ORDRES  RF.UCIF.tX.  S«8 

la  direction  des  religieuses  (le  cet  ordre,  dont 
le  monastère  est  renfermé  dans  l'hôpital.  Il 
fut  birti  l'an  lliuOpar  le  pape  Clément  VIII, 
(|ui  dédia  leur  église  sous  le  nom  de  Sainte- 
Thécle. 

I^rifin  il  y  a  le  palais  du  précepteur  ou  cum- 
mandeur  et  chef  de  cet  ordre,  qui  est  très- 
beau,  entre  lequel  et  cet  hô|  i!al  il  y  a  un 
grand  cloître  où  logent  les  médecins,  les 
chirurgiens  et  bs  serviteurs  de  l'hôpital,  <|rii 
sont  toujours  plus  de  cent,  et  à  côté  est  l'afi- 
parlement  des  religieux.  C'est  toujours  un 
prélat  distingué  qui  rem|ilit  cette  charge  «le 
commandeur,  qui  est  présentement  à  la  no- 
mination du  p.'ipe. 

La  dépense  tant  pour  les  enfants  que  pour 
les  malades  monte  par  année,  lune  portarM 
l'autre,  à  près  de  cinq  cent  mille  livres,  et 
le  revenu  serait  une  fois  aussi  considérable 
sans  la  fainéantise  des  Italiens,  qui  laissent 
la  plupart  des  terres  sans  être  culli.vées, 
principalement  dans  la  campagne  de  Home, 
où  cet  hôpital  est  seigneur  de  plusieurs  bourgs 
et  villages,  comme  la  Tolfa,  San-Severo,  l'o- 
lidoro,  Caslelguido  et  plusieurs  autres  sur  le 
chemin  de  Civita-Aecchia,  dont  il  y  en  a 
(juclques-uns  qui  sont  princi|iaulés.  Au  de- 
hors de  cet  hôpital,  il  y  a  un  tour  avec  uu 
[ictil  matelas  dedans  pour  recevoir  les  <  n- 
i.inls  exposés.  L'on  peut  hardiment  les  mettre 
en  plein  jour,  car  il  est  défendu  sous  de 
très-grosses  peines,  et  même  de  punition 
corporelle,  de  s'informer  qui  sont  ceux  qui 
les  apportent,  ni  de  les  suivre. 

A  oilà  quel  est  ce  fameux  li6pil;il  du  Paint- 
F.sprit  de  liome,  dont  le  pape  Innocent  III 
c'onna  la  direction,  comme  nous  avons  dit. 
au  comte  Guy  et  à  ses  Hospitaliers.  Les  prê- 
tres (|ui  ailministraierii  les  sacrements  dai  s 
les  hôpitaux  n'éiaicrit  pas  du  corps  de  l'or- 
dre, puisqu'ils  élaieril  amovibles  ;  ils  n'étaienl 
pjs  sujets  à  la  correction  du  maître,  et  dé- 
pendaient seulement  des  évéques  dans  lis 
diocèses  desquels  les  hôpitaux  étaient  situés. 
.Mais  Innocent  III,  par  sa  bulle  de  l'an  120i, 
voulut  que  dans  l'hôpital  de  Home  il  y  eût  <>u 
moiiis  quatre  clercs  qui  en  y  entrant  feraient 
profession  de  la  règle  que  suivaient  les 
Hospitaliers;  et,  afin  d'être  moins  à  charge- 
ai hôpital,  ils  devaient  se  (onlenter  de  l.r 
simple  noiiriituie  et  du  vêtcmenl.  H  leur 
était  défendu  de  se  mêler  des  afl'aires  tempo- 
relles, et  ils  étaient  soumis  <à  la  correction 
du  pape  :  .linsi  il  commença  à  y  avoir  parmi 
les  llosjiitaliers  du  Saintl'lsprit  des  jier- 
sonnes  ecelésiastiiiues  et  des  laïiiues,  avec 
celle  dilïérence  que  les  ecdési.istiques  s'en- 
g.igeaicnl  à  une  étroite  p.iuvrelé  cl  au  ser- 
vice des  malades  par  des  vœux  solennels,  et 
()ue  les  lau|ues  n'étaienl  engages  sculonvcnt 
que  par  des  vœux  simples.  (!ar,  q'Uui(|ue  le 
ji.ipe  obligeât  ceux-ci  a  faire  profession  ré- 
gulière, a(>rès  avoir  clé  éprouves  pendant  un 
■rrr,  et  à  ne  point  (juitler  l'ordre  que  pour 
p.isser  dans  un  autre  plus  austère,  on  ne 
doil  pas  conclure  tle  là  qu'ils  fussent  pour 
cri.i  nligieux,  puisqu'on  appelait  en  ce 
temps-là  religion  et  ordre  toute  société  dans 
laquelle  on  s'engageait  plus   étroitement  à 


Zl'9 


ESP 


ES!' 


o*'i 


fcrvir  Dieu  sous  l'obéissance  J'un  supérieur. 
Enfin,  par  la  niôme  bullo,  le  râpe  uiiil  les 
lieux  hôpitaux  du  Sainl-Esiirit  de  iMonlpel- 
iier  cl  de  Rome,  voulant  qu'ils  fussent  guu- 
vernés  par  un  mémo  maître,  et  que  celle 
union  ne  pût  préjudicier  aux  droits  do  l'évc- 
i|ue  de  Maguelone,  à  la  juridiction  duquel 
l'hôpital  de  Montpellier  était  soumis.  11  or- 
donna aussi  entre  autres  choses  que  ceux 
s;ui  seraient  commis  pour  chercher  ie.i  au- 
mônes pour  ces  hôpitaux  auraient  cha 'un 
h  ur  déparlemenl,  que  les  quêteurs  de  celui 
de  Home  se  contenteraientdesaumônesqu'ils 
recevraient  en  Italie,  en  Sicile,  en  Anijlc- 
lerre  et  en  Hongrie,  et  que  ceu\  de  l'hôpiial 
de  Montpellier  pourraient  aller  dans  toutes 
les  autres  provinces  de  la  chrétienté. 

Plusieurs  hôpitaux  s'unirent  ensuite  à 
celui  de  Montpellier ,  auquel  l'on  Gl  de 
grandes  donations.  Celui  de  Uonie  se  mit 
dans  la  même  répulation,  et  plusieurs  hôpi- 
taux s'unirent  à  lui;  c'est  pourquoi,  l'an 
1217,  Honorius  111  voyant  que  l'union  de 
ces  deux  hôpitaux  de  Uonie  et  de  Montpel- 
lier pouvait  préjudicier  à  celui  de  Uome  en 
particulier,  les  démembra,  ordonnant  qu'ils 
n'auraient  rien  de  commun  ensemble  ;  que 
les  aumônes  qui  seraient  reçues  en  Italie  et 
dans  les  royaumes  de  Sicile,  de  Hongrie  et 
d'Angleterre,  seraient  portées  à  rhô|;ital  de 
Hume,  et  que  celles  qui  seraient  reçues 
d^ins  toutes  les  autres  provinces  de  la  ciiré- 
lienlé  appartiendraient  à  celui  de  Mont- 
pellier. 

L'ordre  du  Saint-Esprit  a  donc  d'abord  été 
mixte,  composé  de  personnes  ecclésiasti- 
ques faisant  profession  de  la  vie  religieuse, 
engagées  par  des  vœux  solennels,  et  de  per- 
sonnes la'iqucs  qui  ne  faisaient  que  des  vœux 
«impies.  On  regarda  dans  la  suite  cet  urdre 
comme  militaire  ;  le  nom  de  maîlre  que  pre- 
naient ceux  qui  gouvernaient  les  hôpitaux 
et  ([ui  en  étaient  supéi leurs,  fut  changé  en 
celui  de  précepteur  ou  commandeur,  et  l'on 
se  servit  du  terme  de  respou-^ion  pour  mar- 
quer les  charges  que  les  conimanderics  de- 
vaient au  grand  maître  ou  générai,  ce  terme 
de  responsion  n'étant  en  usage  que  dans  les 
ordres  miliiaires.  Il  n'y  a  néanmoins  aucune 
preuve  que  ces  llospilaliers  aient  poi  lé  les 
armes  et  aient  été  employés  dans  les  croi- 
sades comme  les  autres  hospitaliers,  mais 
l'on  trouve  que  le  nom  de  commandeur  leur 
e,4  donné  dans  une  bulle  d'Alexandre  IV  de 
l'an  1-251)  :  Cum  içjilar  miujistri  commcnda- 
turcs  et  omnes  ulii  frnlres  noslri  hospiculis. 
On  Irouvc  aussi  la  même  chose  dans  d'au- 
tres bulles  do  dilTéicnts  pontifes.  Le  même 
Alexandre  IV,  dans  celle  dont  nous  venons 
de  parler,  et  le  pape  Nicolas  IV,  par  une 
autre  bulle  de  l'an  1291,  après  avoir  dit  que 
le  commandeur  de  Montpellier  et  les  mai- 
S')nj  do  sa  dépendance  se  sont  soumis  à 
i'Iiôpilal  du  Saint-Esprit  de  Home,  ajoute 
que  c'est  afin  que  l'hôpital  de  Montpellier 
soit  soumis  et  sujet  à  celui  de  Home  de  la 
même  manière  que  les  n)aisons  qui  dépen- 
dent de  l'hôpital  de  Jérusalem,  qui  est  une 
Qiilicc  temporelle,  sont  suuuiises  et  sujettes 


à  cet  hôpital  de  Jérusalem.  C'est  apparem- 
ment pourquoi  Bzovius,  le  P.  Mendo,  Cres- 
cenze,  l'abbé  (jiusiiniani  et  quelques  autres 
auteurs,  parlant  de  l'ordre  du  Saint-Esprit, 
l'ont  qualiûé  ordre  militaire. 

§  2.  Continuation  de  l'histoire  de  l'ordre  du 
Saint-Esprit  de  Montpellier,  et  suppres- 
sion de  la  milice  de  cet  ordre. 
La  première  atteinte  qui  fut  faite  à  l'au- 
torité du  grand  maître  ou  commandeur  de 
l'hôpital  du  Saint-Esprit  de  Montpellier,  qui, 
en  cette  qualité,  é'ait  général  de  tout  l'or- 
dre, fut  quand  le  pajjc  Honorius  III  sépara 
cet  hôpital  de  celui  de  Uome.  11  lui  laissa 
néanmoins  toute  juridiction  sur  les  hôpitaux 
qui  se  trouvaient  dans  toutes  les  provinces 
de  la  chrétienté,  excepté  en  Ha'ie  et  dans 
les  royaunirs  de  Sicile,  de  Hongrie  et  d'Aîi- 
glelerrc.  Grégoire  X.  lui  ôla  encore  relie  ju- 
ridiction, qu'il  donna  au  maîlre  de  l'Hùpilal 
de  Uome,  voulant  que  celui  de  Montpellier 
lui  obéît  comme  à  son  supérieur.  Nicolas  IV 
dit  néanmoins,  dans  une  bulle  de  l'an  1291, 
que  ce  fut  du  consontenienl  du  mai  re  do 
l'hôpital  de  Montpellier  et  de  ses  hospita- 
liers, qui  s'y  soumirent  volontairement  ;  et 
il  ordonna  que  le  maître  de  Montpellier 
payerait  tous  les  ans  à  celui  de  Rome  iroii 
ilurins  d'or.  11  y  en  a  qui  prétendent  que  le 
pape  Grégoire  XI  remit  les  choses  en  l'étal 
qu'elles  étaient  du  temps  d'Honorius  III,  en 
séparant  de  nouveau  ces  hôpiiaux  ;  mais 
le  Saunier,  religieux  de  l'ordre  du  Sainl- 
Esjirit,  et  sous-prieur  de  l'hôpital  de  Rome, 
fait  voir  que  la  bulle  de  ce  pape,  de  r.in 
i;J72,  qui  se  trouve  dans  le  Kullairc  de  cet 
ordre,  est  fausse  et  supposée,  en  ce  qu'ell  • 
est  adressée  à  Cérenger  (^iron ,  général  et 
grand  m  lîlro  de  l'archihôpital  et  m  lice  dn 
l'ordre  du  Saint-Esprit,  et  que  ce  Uérengcr 
mourut  l'an  14-87  ou  l'i88,  outre  que  celte 
bulle,  qui  est  datée  «lu  trois  des  calendes  de 
septembre  1372,  et  de  la  troi-ième  année  du 
pontificat  de  Grégoire  XI,  ne  peut  pas  être 
de  celte  année,  puisqu'il  ne  fut  élu  que  le 
39  décembre  1370.  Celait  pi'Ut-être  au  sujet 
de  ce  Bérenger  Giron  que  Sixte  IV  se  plai- 
gnit de  ce  qu'il  y  en  avait  au  del.'i  des  monis 
qui  prenaient  la  qualité  de  généraux,  et  il 
les  soumit  à  celui  de  Rome,  comme  au  seul 
général  de  l'ordre.  Le  généralat  fut  néan- 
moins restitué  au  commandeur  de  Montpel- 
lier par  les  papes  Paul  V  et  Grégoire  XV, 
mais  à  condition  qu'il  dépendrait  encore  de 
celui  de  Uome.  Celle  dignité  lui  fut  enfin  ac- 
cordée sans  aucune  dépendance  par  le  pape 
Urbain  VIII,  et  enc 'TC  contestée,  comaie 
nous  dirons  dans  la  suite. 

Mais  la  milice  de  cet  ordre  reçut  un  plus 
grand  échec  en  1439,  car  le  pape  Pie  II  la 
supprima  entièremeiil.  On  découvrait  quel- 
ques traces  de  chevaliers  depuis  la  bulle 
d  Alexandre  IV  de  l'an  12o(>,  dont  nous  avons 
l)arlé  ,  jusqu'à  ce  temps-là.  L'ordre  était 
composé  do  personnes  ecclésiastii|ucs  véri- 
lablement  religieuses  ,  el  de  laïques  qui 
n'élaient  poinl  engages  à  la  profession  reli- 
gieuse, et  on  était  en  peine  de  ce  qu'claieui 


m 


Dir.TIO.VNAllΠ Di:S  ORDRES  nELIGIEUX. 


iï2 


Jevrnns  ces  laïques  liopiiis  le  milieu  <i  i 
ijuiiizième  sièrle  jusqu'au  coimncnfcmcnl 
Hu  ili\-sop!i^me ,  qu'on  ne  voii  dans  cA 
ordre  que  de  véritables  reli«»ieus  ;  et  ce 
n'est  qu  •  vers  ec  temps-là  qu'on  y  voit  re- 
naître des  laïques  ou  séeulicrs  qui  sont 
ni<?nie  en-j.igt'S  dans  le  mariage.  Mais  M.  de 
L' ibnilz  nous  a  appris  quel  avait  élc  leur 
sort,  en  nous  conservant  dans  son  Codex 
iwis  ijendiiiii  la  huile  de  Pie  II  de  l'an  lioî), 
par  laque  Ile  il  ériiïc  l'ordre  mil. taire  de 
Nolrc-Uame  de  nelhlécm  ,  et  en  supprime 
qui'lqu(S  ai'trcs,  du  noihbre  desquels  est  la 
milice  du  Saint-Kspril  in  Sussia  à  Home, 
dont  il  np  liqu(^  les  revenus  à  son  nouvel 
ordre  île  Nolri'-Dame  de  l'etbléenj  :  Pro  ftin- 
damento  anlrm  oc  sxbstnnl  n  dicta'  reHiionis 
uovcF,  aliiis  rdlf/ion.s  sue  mililiits  ac  lio^jii- 
talia  infra  scrip'a,  vidclicet  S.  Laznri,  ubili- 
let  consislenlia,  S.  M.  dedislitlo  lirilonum 
de  D  lo';na,  ac  S.  S''piilcri,  vec  non  S-  Spi- 
ritiis  in  Saxia  de  Urtic,  d  omnia  ni)  eo  dcfien- 
deiiliii  aut  tllius  hahituin  seii  rrucem  duplicetn 
defvrentia,  et  11.  M.  Criicifrrvrum,  cic.  On 
pourrait  rire  que  c'est  Tiui  l'orilre  du  Saint- 
llsprit  in  Sassia  que  ce  pape  avait  supprimé, 
mais  il  n'a  >culement  entendu  parb-r  que  de 
la  milice,  religioues  su  militias.  Et,  bien 
loin  d'.iViiir  supprimé  rhôiiit.il  du  Saint- 
Esprit  de  Uo:i;e,  c'est  qu'il  liii  accorda  beau- 
coup de  pri\iléges  au-si  bleu  que  son  suc- 
cesseur l'aul  11,  comme  il  est  marqué  dans 
une  bulle  de  Sixte  IV  du  2î  mars  H78. 

Après  la  suppression  de  celle  milice,  il 
n'y  eut  plus  dans  l'ordre  du  Saint-Esp'it  de 
inel.mge  de  religieux  et  de  laïques.  Cei  or- 
dre lui  p»re;t;ent  réjfulier,  et,  s'il  y  eut  des 
la'iques  (]ui  possédèrent  encore  des  comiii.in- 
délies  sous  le  tilre  de  chevaliers  de  cet  or- 
dre, ce  tilre  n'éliiil  point  léfjitime.  C'est  ce 
que  nous  ajiprenuns  d'une  autre  bulle  ce 
Si\lc  1\'  de  l'an  li'G,  <iui  ordonne  que  les 
liô|iilaux  de  cet  or.lroct  les  conimanderie-, 
aussi  bien  que  leurs  liépemiances,  ne  pour- 
ront être  donnée  ,  soit  en  litre,  soit  en  com- 
meiide  ,  qu'à  des  reliuieux  procès  de  cet 
ordre,  qui  seront  ohl'gés  d»-  retourner  dans 
leurs  doit!  es  toutes  lois  et  (juaiid  il  plaira  au 
;;rand  maître  de  l'hôpilal  de  Kouie  de  les  f.iire 
Ceveu  r  ;  Slitluivtes  ac  etiam  dccerncnles , 
ipiod  ipsius  ordinis  liospiolia,  prœcrptoiir, 
inembni  cl  toca,  nulti  ciijttfcutiqtie  diijnitatis, 
niatuii,  f/ialus,  vel  ronililionis  fuent^  prœ- 
t  rr/Kim  iiitius  nosiri  ltuspit(dis  frnliibus,  il 
oïdinem  ijisiim  exprisse  profcssis,  cis  tainni 
pro  solo  nitiu  dicii  prwcepturis  existcnlis  cl 
pro  limporc  wl  clauslrum  r/uo/ifs  cxpedirrit 
I  evocdiidif,  in  lilnlum  iil  comiuend'nn  c,»- 
feiii  luliniil  «lie  ji'jssiiit.  \'o  là  qui  est  bien 
tort  contre  les  chevaliers  qui  ont  paru  au 
ciiniiienccment  du  diN-scpliùmc  siècle,  qui, 
bien  loin  de  vivre  en  commun  dans  un  cbii- 
tre  sous  l'obelssancn  d'un  supérieur,  ou  du 
ii.oiiis  d'y  pouvoir  être  rappelés  à  la  volonté 
des  supérieurs,  lors()u'ils  auraieui  des  com- 
luanderics,  étaient  au  contraire  la  p'upail 
maries.  l'eut-étre,  dira-ton  (juc  les  hôpitaux 
de  Uomc  cl  de  Montpellier  .ly.int  été  désunis 
|'.ir  \<î  piipc  tirég  ire  XI,  r.iii  rJ"i,  le  paj)C 


no  pnrlail  qu'à  ceux  qui  élaiefit  suunis  à 
Ihôpilal  de  Home  ;  niais,  outre  que  la  Iule 
tic  f'iregoire  XI  est  fausse  ci  suiiposée,  c'est 
(jue  Sixte  IV  s'adresse  plus  particulièremet.l 
aux  Français  qui  avaient  usurpé  des  com- 
niandcries  et  qui  prenaient  la  qualité  de  gé- 
néraux de  l'ordre  ;  Cum  iitu/ue.  ficul  itcce- 
pimus  displicenter.  tiunnttlli  in  ipsiiis  liospi^ 
tidis  fralres  etiam  prœceptoriait ,  fiospitcdin, 
V  eiubra,  et  loca  pia  ab  ipso  hospiiali  in  Saxia 
dpcndenlia,  obtinrntrs,  am'nliove  et  cupidi- 
laie  cœcainducli,  et  sub  terminis  non  conirnii 
lemeritate  propria  se  générales  prœceplores 
dicti  ordinis  prœripue  in  panilnis  ii/framon- 
lanis  nominare,  etc.  Il  déclare  ensuite  que 
tous  les  hôpitaux,  les  comm.inderies  et  les 
lieux  pieux  de  l'ordre  et  qui  portent  le  nom 
du  Saint-Esprit,  dépendront  de  l'hôpital  du 
Saint-Esprit  en  Saxe,  etiamsi  longœva  con- 
suetudo  aul  submissio  aligna  repwjnarint ;  et 
il  défend  à  aucun  religieux  posséd^int  une 
ccmmandcrie  de  l'ordre  de  prenlre  la  qui- 
lité  de  général  en  deçà  ou  eu  delà  les  monls, 
ni  de  prétendre  aucune  autorité  sur  les  au- 
tres lelig  eux,  qui  doivent  être  tous  soumis 
au  précepteur  de  l'hôpilal  de  Uome  :  Quin- 
imo  ,  onines  et  sin(,uli  dcli  ordinis  prcecep- 
tores,  liospilularii  el  relii/io^i  quos  eidcnt  prœ- 
cepturi  nostri  hospi:a!is  in  Saxia  pleno  jure 
subesse  volumus  et  tani/wim  suo  superiori 
obedienliani  et  revercnuam  cungrunm  exlii- 
bere,  ne  salta  hujus  sedis  auloritute,  in  om- 
nibus sicuti  un:co  eornm  praceptori  ob'.etn- 
periire  leneantur  et  dcbeant. 

En  effet  II  n'y  eut  point  de  généraux  en 
France  depuis  ce  lemps-là  jusqu'en  l'an  1G)9, 
que  l'aul  \' rendit  celle  (inalite  pour  la  Fran  e 
cl  toutes  les  autres  provinces  delà  chrétienté, 
cxceplé  rilalie.  la  Sicile,  la  Hongrie  et  l'An- 
gleterre, au  commandeur  de  Montpellier:  ce 
que  fil  aussi  (Jrégoire  XV  l'an  1(J2I;  m.iis 
ce  ne  fit  qu'à  condilion  qu'ils  dépendraient 
encore  de  celui  de  l'hôpital  de  Uome;  et  L.i 
'J'errade,  qui  fut  pourvu  de  celle  comman- 
derie,  av.iit  été  fa.t  par  le  grand  maîlic  ilc 
Uomc  le  i  septembre  1()17  vicaire  et  vi>iteur 
gér.ér.il  dans  les  royaumes  de  France  el  de 
Navarre,  à  la  charge  de  se  la  re  reigieux 
proies  de  l'ordre  dans  l'année.  Ce  fut  lui  qui 
lut  f.iit  pemier  général  en  France  dépend.nit 
de  celui  de  Uomc,  el  ce  ne  fut  qu'à  la  prii^re 
de  Louis  XllI  que  le  pape  l'ibain  A  III  ren- 
dit ce  général  ce  France  indépendant  de  ce- 
lui de  Uome,  l'an  lG2o.  Ce  fut  donc  an  com- 
mencement du  dii;-se[)ticme  siècle  que  l'on 
commença  à  songer  au  rétablissement  de  cet 
ordre  en  France,  ((ui  y  était  presque  anéanti  ; 
in;iis,  au  lieu  de  !e  remettre  dans  son  ancien 
luslie  el  dans  sa  splendeur,  ce  ne  fut  au  con- 
liaire  qu'une  confusion  et  qu'un  chaos  de- 
puis l'an  l(i02  jusqu'en  1700,  que  le  roi  dé« 
brouilla  ce  chaos  en  déclarant  cet  ordic  pu- 
rement régulier  et  iiul'cmenl  militaire. 

Antoine  I'ons,(|ui  prenait  l.r  qualilé  de 
commandeur  de  I  bôpit.il  de  S.iin'-Germaiu 
et  <le  procureur  général  de  l'oidre  ,  >()iilut 
cumtrieiic  r  ce  rélaldissement  en  KiOi,  m.irs 
ce  fut  en  f  ilsiliani  des  bulli  s  et  <les  imlnlgcu- 
ces  j  ceux  (lui  voulaient  conlribner  à  la  rcs- 


215 


ESP 


E'^P 


21  i 


lauralion  des  comniandcries;  et,  son  impos- 
ture ayant  été  dccouverle,  il  fut  condamné 
par  arrêt  du  parlement  de  Toulouse  du  21 
janvier  1G03  à  faire  amende  honorable  ,  nu 
en  tlicmise,  et  banni  à  pcrpétuilé  hors  da 
royaume.  Il  ne  laissa  pas  de  surprendre  en 
la  niôrne  i]i>nli[é  des  lellrcs  paten'es  d'Hen- 
ri IV  et  de  Louis  Xlll,  des  années  1C08,  1009 
cl  1010,  qui  lui  pcrmcltaient  de  faire  ses  di- 
ligences poiirré'ablir  cet  ordre;  mais  en  1012 
on  lui  lit  défense  de  faire  négoce  d'indulgen- 
res  à  peine  d'amende  arbitraire;  le  sénéchal 
de  Moissac  déi  réta  prise  de  corps  contre  lui, 
et  le  pai  leinenl  de  Toulouse  ordonna  que  en 
décret  serait  exécuté. 

Olivier  de  la  Tr^u, sieur  l'c  la  Terrado,  pa- 
rut ensuite  sur  les  rangs.  Il  obtint  des  papes 
Paul  V  et  tlrégoire  XV  la  (jualité  de  général 
aux  conditions  que  nous  avons  dit,  cl  fut  in- 
dépendant do  celui  de  Rome,  par  une  bulle 
d'Urbain  Vlil  l'an  1025.  En  celte  qualité  il 
créa  des  chevaliers  |,uiement  laïques  el 
inênie  engagés  dans  le  niaria;;e.  On  ne  laissa 
pas  iiéanmuins  de  voir  d.ins  le  uième  temjis 
un  prélendant  à  la  commanderic  générale 
de  Montpellier,  qui  de  son  côlé  faisait  des 
chevaliers.  C'élail  un  apostat  de  1  ordre  des 
Gapocius,  que  la  Terrade  fit  enfermer  dans 
les  prisons  de  l'ofliciailé.  La  Terrade  y  fut  à 
.Sun  (our,  et,  après  sa  mort,  M.  Désécures, 
l'un  des  comtes  de  Lyon,  qui  prit  la  qualité 
de  vicaire  général,  fit  aussi  des  chevaliers, 
aussi  bien  que  plusieurs  aulres  qui  se  di- 
saient officiers  de  l'ordre.  Le  roi  ,  par  un 
arrêt  du  conseil  d'Etat  de  l'an  1035,  ordonna 
que  les  pouvoirs,  privilèges,  possessions  et 
translations  des  prétendus  officiers  de  l'urdre 
du  ?aint-Espril,  seraient  examinés  p  ir  l'ol- 
fiiial  de  Paris  assisté  de  quatre  doclenrs 
nommés  par  l'arrêt.  Par  un  autre  de  la  même 
année,  Sa  Majesté  fit  défense  à  qui  <iue  ce 
fût  de  prendre  la  qualité  de  général  de  l'or- 
dre du  Suint-Esprii  ;  et  au  mois  de  janvier 
1030,  DésLCures  obtint  un  brevet  de  la  com- 
manderie  ou  préceptnrei  ie  de  Moiilpellier. 
Au  mois  de  mai,  le  roi  nomma  des  commis- 
saires pour  examiner  les  titres,  bulles  et  pro- 
visions de  ceux  qui  se  prétendaient  généraux, 
commandeurs ,  olfi(iers  et  religieux  de  cet 
ordre.  L'oCficial  de  Paris,  par  une  sentence 
de  la  même  année,  fait  défense  à  Désécun  s 
de  prendre  la  qualité  de  vicaire  général, 
coadjuteur,  supérieur,  commandeur  ou  reli- 
gieux de  l'ordre  du  Saint-Esprit,  d'en  port  r 
les  marques  ni  d'en  faire  aucune  fonclion  à 
peine  d'excommunication  ipso  facto.  Nonob- 
stant celte  senlence,  il  lui  est  permis  par  un 
arrêt  du  grand  conseil  du  3  septembre  1053 
de  prendre  possession  de  la  commanderie  de 
Montpellier,  à  condition  d'obtenir  des  bulles 
dans  SIX  mds.  Il  les  obtint  du  pape  Alexan- 
dre Vil  et  prit  possession  de  cette  comman- 
derie en  1059  avec  la  qualité  de  grand  maî- 
tre de  l'ordre.  Par  sentence  du  16  octobre  de 
la  même  année,  l'official  le  déclara  excom- 
munié pour  avoir  pris  la  qualité  de  supérieur 
de  cet  ordre,  et  lui  fit  itératives  défenses  de 
se  qualifiera  l'avenir  grand  vicaire  ou  reli- 
giuui  de  cet  ordre;  déclara  les   professions 


f.iites  entre  ses  mains ,  nuPcs;  le  condamna 
<i  100  livres  d'amende ,  à  tenir  prison  pen- 
dant six  ntois,  el  à  dire  les  sept  psaumes  têle 
nue  el  à  genoux.  Par  une  autre  sentence  du 
CluKelel  de  Paris  du  29  août  1007,  il  fui  con- 
damné d'è're  mandé,  b'âmé  nu-lé(e  et  à  ge- 
noux, et  défeiises  lui  furent  faites  de  prendre 
la  qualité  de  général  ;  el,  par  arrêt  du  parle- 
ment du  2;)  mai  1008,  il  fui  banni  pou rneu fans. 

Le  roi,  par  son  brevet  du  21  septembre  do 
la  rncme  année,  dojina  la  commanderie  de 
Montpellier  à  M.  Rousseau  de  Bazoche,  évê- 
que  de  Césarée  ,  conseiller  au  parlement  de 
Paris.  Un  liomnréCompanse  prélendit  pourvu 
de  celle  commanderie;  Désécures  eut  aussi 
toujours  les  mêmes  prélenlions,  mais ,  par 
arrêt  du  conseil  d'Etat  du  9  septembre  1009, 
l'évéque  de  Césarée  fut  maintenu  dans  la 
possession  de  cette  commanderie  contre  Com- 
pan  el  Désécures.  Par  arrêl  du  grand  conseil 
du  27  avril  1071,  il  fut  ordonné  qu'on  tien- 
drait le  chapitre  général  de  cet  ordre.  Le  roi, 
par  un  autre  arrêl  de  son  conseil  d'Elat  du 
mois  de  mai  de  la  même  année,  confirma  ce- 
lui du  grand  conseil,  et  ordonna  que,  no- 
nobslani  le  refus  qu'on  avait  fait  à  Rome  de 
donner  des  bulles  à  l'évéque  de  Césarée,  ce 
prélat  serait  reconnu  pour  général  de  l'ordre 
par  tous  les  religieux  et  religiei^ses,  cheva- 
liers, commandeurs  el  aulres  personnes  de 
l'ordre,  et  qu'on  assemblerait  le  chapitre  gé- 
néral. L'évéque  de  Césarée  mourut  la  mêmii 
année  sans  avoir  obtenu  de  bulles,  elMprès 
ï.,1  mort  55.  Morin  du  Columbier,  aimônier 
du  roi,  se  fit  pourvoir  pur  bref  du  pape  Clé- 
ment X  du  mois  de  février  1072,  de  la  cons- 
manderie  i!e  Montpellier  (vacante  dci)uis 
quarante  ans,  à  ce  qu'il  avait  exposé),  à  la 
charge  de  prendre  l'iiabil  et  de  faire  proies- 
sien  dans  l'ordre  régulier  du  Saint-E-pril. 

Celle  commanderie  lui  fut  conlesiéc,  el  il  y 
a  de  l'apparence  que  toutes  ces  divisions  ar- 
rivées parmi  ceux  qui  se  prétendaient  supé- 
rieurs, commandeurs  et  ofliciers  de  cet  or- 
dre, qni  la  pluiiart  n'avaient  ;iucun  tiire  légi- 
time, el  qui,  bien  loin  do  rétablir  cet  ordre 
en  France  dans  sou  ancien  lustre,  le  (létris- 
saicnl  au  contraire  par  leur  conduite  et  les 
al  us  qu'ils  coinmetlaiei'.t  dans  la  réception 
des  prétendus  chevaliers,  admettant  indiffé- 
reinmenl  tous  ceux  qui  leur  donnaient  le 
plus  d'argent,  portèrent  ia  roi  à  metire  l'or- 
dre du  Saint-Esprit  de  MonlpoUier  au  nom- 
bre de  ceux  que  Sa  Slajcbté  dé -lara  éteinîs 
de  fait  et  supprimés  de  droit  par  son  édit  du 
mois  de  déccaibre  d  ■  l'an  1072,  cl  qu'il  unil 
à  celui  de  Saint-Lazare.  Nonobslanl  cet  édil, 
M.  du  Colombier  obtint  au  Enois  dejainier 
1073  des  lettres  de  Fr.niçuis-M.irie  Pluebus  , 
archevêque  de  Tarse,  commandeur  de  l'hô- 
pital do  Rome  el  général  de  l'ordre  du  Saini- 
Esprit,  par  lesquelles  il  rétablissait  son  vi- 
caire général  et  visiteur  en  France  et  d.ins 
les  provinces  adjacentes  ,  ce  qui  lui  procura 
un  séjour  de  huit  années  à  la  Rasllle. 

Les  au'res  chevaliers  du  S  imi-Ksprit  for- 
mèrent opposition  au  grand  conseil  à  l'enrc- 
gislremenl  de  cet  édil.  Ils  continuèroni  à 
s'assembler  et  même  à  rccevjir  des  theva- 


215                                           DICTIONNAIRE  DLS  ORDRES  RELICIEUX.                                           2J6 

licrs.  Le  sieur  de  l;i  Cosie  se  liisail  grand  de  nouveaux  chtvalicrs.  Ils  élaicnl  divises 

inaiire  de  cet  ordre  comme  ay-'inl  élé  canoni-  en  plusieurs  bandes.  Il  y  en  avait   qui    pre- 

qui  nicnl  clu  par  1rs  chevaliers.  Mais  Sa  M.i-  liaient  le  lilre  d'anciens  chevaliers,  et  qui  ne 

jeslé.  par  deux  arr^'-ts  du  conseil  d'iîtal  des  repanlaienl  les  autres  (pie  roninie  des  intrus 

années    lG8i)  el    IGflO,  fil  défense  à  ce  grand  d,:ns  l'ordre.  Parmi  (c    ilie\aliers  anciens  il 

maître  de  prendre  celte  qu;ilité  à  l'avenir,  ni  y  en  avait  qui  se  disaient  premiers  officiers 

de  porter  la  croix  et  ré[iée  lui  et  les  siens  ;  el  fi'c()éc.  On  y  voyait  des  chc\aliers  de  grâce, 

dérl.ira  toutes   les  réci  plions  f  t   prétendues  des  chevaliers   d'obédience  .  des    chevaliers 

lettres  de   provisi^ins  par  eux  expédiées  de-  servants  et  de  petits  olficiers. 

puis  l'édit  de  1G72.  nulles  el  de  nul  eiïel  ;  el,  Dés   le  15  février  1G92  ils  avaient  lenu  un 

sans  avoir  égard  à  leurs  oppositions  ,  or-  chapitre  aux   firands-Auguslins  à  Paris,  où 

donna  que  son  édil  serait  exécuté.  entre  autres  cho^es  ils  av.iienl  délibère  qu'on 

I.cs  rhevaliesde  Saint-Lazare,  qui  jti«-  ncrecevraitaucunschcvaliersqu'ilsne  payas- 
qu'alors  av.iiunt  trouvé  beaucoup  de  laii-  seul  rliacun  à  l'ordre  pour  le  moins  la  somme 
lilé  à  obtenir  ce  qu'ils  avaient  souhaite,  de  600  livres,  leschevaliers  de  grâce  celle  de 
trouvèrent  néanmoins  dae.sla  suite  de  grau-  1200  livres,  les  chevaliers  d'obédience,  mer- 
des difficultés  pour  l'exécution  de  cet  édil;  vanis  et  autres  petits  officiers  'lOO  livres, 
car  les  religieux  profès  de  Tordre  du  Saint-  Mais  les  religieux  rompirent  toutes  leurs  me- 
Lspril  se  joignirent  aux  chevaliers  de  cet  or-  sures;  car,  à  peine  le  rui  eut-il  prononcé  le 
dre  pour  interrompre  le  cours  des  entrepri-  rétablissement  de  l'ordre  e;i  109.'},  qiiis  ré- 
ses  de  ceux  de  Sa  nl-Lazare.  Les  chevaliers  clamèrent  la  maison  magistrale  de  Monlpel- 
du  Saint-Esprit  oiïrirenl  à  Sa  Majesté  de  le-  lier,  qu'ils  avaient  auparavant  désavouée, 
ver  el  d'cnlre|enir  à  leurs  dépens  un  régi-  Ils  soulinrenl  que  l'ordre  du  Saint-l^sprit 
ment  pour  agir  contre  les  ennemis  de  l'Etat;  était  purement  régulier,  et  que  la  milice  était 
et  les  religieux  p'ofès.  qui  étaient  en  pos-  une  nouveauté  du  siècle  (ini  ne  s'él.iit  inge- 
session  de  plusieurs  maisons  conventuelles  rée  que  par  usurpation  dans  l'adminisiration 
dans  le  royaume,  où  ils  n'avaient  point  dis-  des  biens  de  l'ordre.  C'est  pourquoi  le  roi 
cmilini  c  de  recevoir  les  enfants  exposés.  n''mraa  encore  des  conimissaiies  pour  l'esé- 
preiendirenl  que  l'état  de  leur  élablisseme.  l  culion  de  son  dernier  èdit.  Les  chevaliers  ne 
su. lisait  pour  détruire  ce  qui  avait  été  sup-  nuinquèrent  pas  de  faire  valoir  1.  ur  antiquité 
pose  I  our  l'obieiilion  de  cet  èdit ,  alléguai.t  prétendue,  qu'ils  faisaient  remonter  jusqu'au 
au  surplus  qu'ils  n'avaient  jamais  dépendu  temps  de  sainte  Marthe,  cl  de  rapporter  le 
de  1  hôpital  de  Montpellier,  mais  qu'ils  préiendii  chapitre  général  tenu  à  Monipellier 
avaient  clé  toujours  soumis  à  la  juridiction  l'an  10.(2.  Le  roi,  le  10  mai  ITOO,  décida  eu 
du  précepteur  de  celui  de  Home,  el  qu'ainsi  fi\eurdes  religieux.  L'ordre  du  Saint-Esprit 
le  roi  n'avait  pas  eu  dessein  de  donner  al-  lui  déclaré  purement  régulier  cl  liuspilalier 
teinte  a  Icurs-droits,  Sa  Majesté  n'ayant  pro-  par  un  arrètdu  conseil  d'Etal  ;  el  Sa  Majesté 
nonce  par  son  édil  que  la  suppression  d'un  (it  défense  à  tous  ceux  qui  avaient  pris  des 
ordre  qu'elle  avait  cru  èleinl  de  fait  el  qui  qualités  de  supérieurs,  officiers  et  chevaliers 
e;ail  sous  le  litre  de  Montpellier.  du  prétendu  ordie  mililairedu  Saint-Espril 

Ils  furent  favurablemenl  écoutés.  Le  roi  de  Montpellier,  de  prendre  à  l'avenir  ces 
leur  donna  des  commissaires  en  1091  pour  (pialilés,  ni  de  porter  aucune  marque  de 
1  examen  de  son  édil,  el  accepta  en  1C!)2  le  celte  prétendue  chcvaleiie,  et  de  donner  des 
régiment  offert  par  les  chevaliers.  M.  du  lettres  ou  provisions  de  commandeurs,  clie- 
Jîoulay,  vicaire  général  de  cet  ordre  au  spi-  valicrs  ou  officiers  de  e<  t  ordre.  Sa  Majesté 
rituel,  cl  M.  Gra'idvoynel.  commandeur  de  ordonna  de  plus  que  le  bre\et  de  gr.ind  mai- 
la  maison  conu-nluelle  de  Slé|  hanfeld  en  .M-  Ire  accordé  à  M.  l'abbé  de  Luxembourg  sc- 
sa.e,  furent  députés  pour  solliciter  coiijoin-  rait  rapporté  comme  nul  et  de  nul  elTel,  el 
leii.enl  le  lélablissemeiil  de  cet  ordre,  le  pie-  qu'il  serait  sursis  à  faire  droit  sur  les  demaii- 
mier  par  le  clergé  séculier,  le  second  par  les  des  des  religieux  pour  éire  remis  en  posses- 
religieux  proies,  et  M.  de  lilégny  coniman-  sion  des  maisons  de  cet  ordre  et  des  biens 
deur  et  adminislrau-ur  général,  j  ar  les  che-  qui  avaient  elé  unis  à  celui  de  Saint-Lazare , 
valicrs.  Leurs  sdlii  iialions  curent  un  heu-  jusqu'à  ce  que  Sa  Majesté  cul  jiourvu  au  ré- 
reux  succès ,  car  le  roi  en  1093  révoqua  S'. n  lablissemenl  de  cet  ordre  cl  de  la  grande 
cdit  de  1072,  rétablit  cet  ordre,  lui  rendil  maîtrise  régulière  du  Saiul-Esprit  de  Monl- 
lous  les  biens  qui  avaient  é  é  un  s  à  celui  de  pellier. 

Saint-I.azarc,  el   nomma  pour  gr  ndmiihc  Après    la   mort  de  M.    l'abbé  de   Luxeni- 

*I.  l'alibe  d  •  I.uxeiiibourg,  Pierre  Hcnri-Thi-  biurg,  qui,  conformémei.t  à  cet  arrél  du  con 

biiull   de    .Moiilinorency  ,  alilié    commenda-  seil   d'Etal ,  avait  remis    entre   les  mains  du 

taire    des   abbayes   d'Orcamp   cl   de   Sainl-  ci  son  brevet  de  grand  miilre  de  l'ordre  du 

'^'"'"'l-  Saint-Esprit  de  Montpellier,  on   fit    de  nou- 

H  scnihlait  qu'après  cela  les  chevaliers  ne  vellcs  tentatives  auprès  du  ri.i  pour  le  réta- 

Hevaieiil    plus  craindre  qu'on    les    inqiiiéiàl  blissemenl  de  cet  ordre  ,  it  Sa  Majesté,  par 

touchant  leur  élablissemciit  ;  déjà  leur  nom-  un  arrêt  du  conseil  d'Elal  du  10  jan\  ier  1701 , 

hre  grossissait  tous  les  jours  ;  des  |)ersonues  nomma  Mgr  le  cardinal  de  Noaillcs,  arche- 

i|ui  n'av.iieiii  aucun  drol  lég. lime,  sous  pié-  vèque   de    Paris  ;  Mgr    llossiiet  ,   évéque   de 

le»tc  des  titres  de  vicaire  général,  de  clian-  Meaux  ;  le  révérend  Père  de  la  Chaise,  Mcs- 

•  elicr.de  vice-(  hancelier  et  même  00  \iiaire  sieurs   l'abbé   Itignoii ,  do   l'oiiimereu   de    la 

gér;éralibsiiiie,  qu'ils  s'attribuaient,  créaient  Keynic  ,  de  Manllac  cl  d'Agucsscuu,  pour 


2!7 


ESP 


rsp 


8iS 


(!snmiiicr  les  buMos,  lettres  patentes,  (ié<I.i- 
rations,  arrêts  et  antres  titres  concernant 
cet  ordre  ;  et  voir  sur  leurs  avis  s'il  conve- 
nait et  s'il  était  possible  de  rétablir  la  com- 
niandcrie  générale  du  Saint-Esprit  de  Mont- 
pellier et  ses  dépendances,  et  quelles  pré- 
cautions l'on  pourrait  prendre  en  ce  cas  pour 
le  rcglcnienl  tant  du  spirituel  (lue  du  tem- 
porel de  cet  ordre,  ou  s'il  ne  serait  pas  plus 
a  propos  d'en  employer  les  biens  elles  reve- 
nus à  quelque  autre  usage  p  eux  ;  et  ,  par 
deux  autres  arrêts  des  2ï  novembre  170i  et 
1"  juin  1707,  Sa  Majesté  nomma  pour  rap- 
porteur M.  Lauiicois  d'Inibcicourt,  maître 
des  requêtes. 

En  1707,  M.  le  duc  de  Ciiâiiilon,  Paul-Si- 
gismond  de  Honhiiorency,  ayant  dcinaïuié 
au  roi  la  grande  maîlrise  de  cet  ordre,  et  Sa 
Majesté  lui  ayant  permis  d'eu  faire  connaî- 
tre le  véritable  caractère  cl  la  milice,  il  con- 
sulta plusieurs  docteurs  de  Sorbonne,  neuf 
célèbres  avocats  et  quelques  autres  person- 
nes, ijui  furent  tous  d'avis  que  l'ordre  dans 
sou  01  igine  avait  été  laïque  et  séculier,  cl 
que  ce  n'a  été  qnc  dans  la  suite  qu'il  a  été 
mixte,  composé  de  personnes  laïques  pour 
l'administration  du  temporel,  cl  de  clercs 
réguliers  pour  l'administration  spirilueile; 
et  on  ne  trouvait  point  d'inconvénient  qu'un 
laïque  fût  grand  maître  de  cet  ordre  ,  à 
l'exemple  de  plusieurs  ordres  niilitaircs, 
qui,  quoique  composés  de  chevaliers  laïques 
et  (le  religieux,  ne  laissaient  pas  d'être  gou- 
vernés par  des  grands  maîtres  laïques. 

Les  religieux  de  l'ordre  du  Iraint-Esprit, 
qui  semblaient  avoir  intérêt  que  celte  milice 
ne  se  rétablît  point,  puisqu'ils  l'avaient  dis |iu- 
lée  en  1693,  et  que  ce  ne  (ut  que  sur  leurs 
remontrances  que  le  roi  par  son  arrêt  du 
10  mai  1700  avait  déclaré  leur  onlre  pure- 
ment r<gulieret  nullement  militaire,  se  joi- 
gnirent néanmoins  à  M.  le  duc  de  Ghâtiltou, 
et,  dans  une  requête  qu'ils  présentèrent  au 
ro',  ils  demandèrent  acte  à  Sa  iVîajesié  de  ce 
qu'ils  n'entendaient  point  se  prévaloir  ni  se 
servir  de  l'arrêt  du  10  mai  1700,  au  chef  qui 
ava'.t  réputé  l'ordre  du  Saint-Esprit  de  Mont- 
pellier purement  régulier,  mais  seulement 
en  ce  qu'il  avait  exclu  de  cet  ordre  les  pré- 
tendus commanileurs,  officiers  et  chevaliers, 
qui  paraissaient  pour  lors  sans  caractère  et 
sans  titres  légiliines  ,  et  dont  la  plupart 
étaient  plus  propres  à  le  déshonorer  qu'à  le 
rétablir  ;  et  de  ce  qu'ils  consentaient  que  cet 
ordre  fût,  comme  il  avait  été  dans  son  insti- 
tution, composé  de  religieux  de  deux  sorles 
de  conditions,  lis  uns  laïques  pour  l'admi- 
nistration du  tempo:  cl  ^euIement,  engagés 
à  l'ordre  par  les  vœux  d'obéissance  et  d'hos- 
pitalité à  un  chef  ou  grand  maiire  de  l'or- 
Jre  laïque,  et  les  autres,  clercs,  pour  l'admi- 
nistration du  spirituel,  engagés  à  l'ordre  par 
les  vœux  de  pauvreté,  de  chas'cié,  d'obéis- 
sance et  du  service  des  pauvres  ;  et  priaieiit 
aussi  Sa  Majesté  de  conserver  les  comman- 
Jenrs  proies  de  cet  ordre  dans  l'exercice  de 
la  juridiction  spirituelle  sur  les  religieux 
hospitaliers  cl  les  religieuses  hospitalières 
de  l'ordre  ;  et  qu'à  cet  effet  le  granJ  maître 


serait  chargé  par  le  brevet  de  Sa  Majesté 
d'établir  un  grand  prieur  d'église  et  visiteur 
général,  qui  ne  pourrait  être  qu'un  prêtre 
religieux  de  l'ordre,  qui  serait  confirmé  par 
le  pape. 

Il  semblait  qu'après  ce  consentement  des 
religieux  qui  demandaient  le  rétablissement 
de  la  milice  et  d'un  grand  maître  laïque,  le 
roi  allait  révoquer  son  arrêt  du  10  mai  1700, 
qui  déclarait  l'ordre  pnrenient  régulier,  et 
qu'il  allait  aussi  reconniitre  la  milice  de  cet 
ordre;  ccpenilanl  ,  par  un  autre  arrêt  du 
conseil  d'Etal  du  k  janvier  17().S,  Sa  Majesté 
Confirma  celui  du  10  mai  17i  0  et  ordonna 
qu'il  serait  exécuté  selon  sa  forme  et  teneur, 
et  en  conéquence  que  l'hospilalité  scrjiil 
rétablie  et  observée  dans  la  conimanderie 
générale,  grande  niaîtrise  régulière  de  l'or- 
dre du  Saint-Espril  de  Monlpellier,  par  le 
commandeur  général,  grand  maître  régu- 
lier, qui  y  serait  incessamment  établi.  On  ne 
saurait  en  ce  jugement  trop  admirer  la  jus- 
lice  et  l'équité  du  roi,  qui  prononce  et  dé- 
cide que  l'ordre  est  régulier  ;  parce  que 
c'est  le  dernier  état  où  l'on  le  Irouve,  et  quo 
c'est  un  princijie  de  l'un  et  l' lUlre  droit,  que 
dans  ces  matières  le  dernier  état  décide, 
uHimus  statKS  ntleniiitur. 

L'ordre  à  la  vérité  avait  été  dans  son  ori- 
gine laïque  et  séculier.  Il  était  devenu  en- 
suite mixte,  c'est-à-dire  composé  de  clercs 
ou  prêtres  religieux  et  de  laïques.  Les  ter- 
mes de  commandeurs,  de  responsion  et  au- 
tres dont  on  se  servait  dans  cet  ordre,  et  qui 
ne  sont  en  usage  que  dans  les  ordres  mili- 
taiies,  prouvent  assez  qu'on  le  reconnais- 
sait comme  une  milice;  mais  cette  milice 
avait  été  supprimée  par  Pie  II  l'an  l'tSO,  et 
l'ordre  était  devenu  purement  régulier, 
coumie  il  paraîl  par  les  termes  de  la  bulle  de 
Sixte  IV  de  l'an  1470,  que  nous  avons  ci-de- 
vant rapportés,  et  par  la  règle  de  cel  ordre 
imprimée  en  1564  par  ordre  du  général  Ber- 
nardin Cyrilli,  qui,  en  l'adressant  à  tous  les 
frères  de  l'ordre,  fait  assez  connaître  qu'ils 
sont  tous  véritablement  religieux,  par  ces 
paroles  :  Sponte  nos  ipsos  ubiulimus  et  saii^ 
cto  Dci  Spiriiui,  beatœ  Virijini  et  dominis 
infirmis,  ut  perpctui  essemus  eoruin  servi, 
ra^lilalem,  paujicrlalem,  obedient  am  ri  hit- 
vnlem  palicntium,  aclu  libero  iiemine  co'ienie, 
jurejurando,  solemni  voto,  sumus  polliciti. 
Il  est  néanmoins  parlé  dans  cette  règle  de 
religieux  lais,  c'est-à-dire  de  personnes  vé- 
ritablement religieuses,  et  qui  ne  sont  paa 
destinées  aux  fonctions  ecclésiastiques  :  le 
terme  de  lai  étant  en  usage  dans  presque 
tous  les  ordres  pour  désigner  ces  so  les  de 
personnes  ;  et  même  ils  peuvent  être  com- 
mandeurs dans  celui  du  Saint-Esprit,  car  il 
est  dit  [Cup.  26  îleg.i  que  lorsque  le  com- 
mandeur sera  lai,  il  ne  pourra  pas  faire  la 
correction  à  un  clerc  ;  mais  qu'elle  appar- 
tiendra aux  cardinaux  qui  seront  nommés 
pour  cet  effet  par  le  pape  :  Correclio  vero 
ilericorum  et  specialium  aliorum  ad  prw' 
ccplorem  lalcum  non  pcriineat,  sed  ad  (ardi~ 
nules  quibus  a  domino  papa  ipsa  domus  fuerit 
commcnduta.  Ouc  si  dans  le  couimencemenl 


ÏID                                          DICTIONNAIRE  DES  OUDRES  RELIGIEUX.                                        220 

ilu  dit-^cplii^mp  siècle   les   souverains  p.on-  sons,  ou  que  les  papes  ne  les  en  dispensent, 

tifes  ont  rendu  à  la  maison  (le  Monlpollicr  le  Ils  portent  néanmoins  sur   leurs   habits  I.i 

pi  néral  il   qu'on  lui  avait  ùlé,  ils  n'ont  pas  crois  de  l'onlre.  Le  prieur  de  la  maison  et 

prétendu  que  ces  généraux  réliblissent   la  hôpital  du  Saint-Espril  de  Home  lient  la  se- 

niilice  de  cet  ordre  en  créant  des  chevaliers  conde  place  dans  l'ordre,   cl  en  est  vicairo 

purement  laïques  et  même  engagés  dans  le  général. 

niari.ige.  Ils  ont  toujours  au    contraire  re-  Les    religieux  de  cet   ordre  s-.^nl  habillés 

{;ardé  cet  ordre  C' mine   régulu  r,  puisi|u'ils  comme  les  ecclésiasiiqurs,  ils  portent   seu- 

ont  obligé  les  commandeurs  de  Moiilpeliicr,  Icmenl   une  croix  de  loile   blanche  à  douze 

auxquels  ils  ont  accordé  des  bulles,  de  [ireii-  [lointes  sur  le  côté  gauche  de   leur  soutane 

drc  l'habit  religieux  de  cet  ordre,  et  d'y  (aire  et   de   leur  manteau,   cl   lorsqu'ils   sont   au 

profession  ;  et  de  tous  les  commandeurs  du  chœur,  ils  ont  l'été  un  surpls  a\ec  une  au- 

S.iinl-Ksprit  de   .Mont|icllier   qui  ont  élé  de-  musse  de  drap  noiriloublce  de  drap  bleu  ,  i't 

puis  l'an  1(119,  que  la  Tcrrade   prit  le  prc-  sur  le  bleu  une  croi\  de  l'ordre.  L  hiver  ils 

inier  la  qualité  de  général  de  cet  onlre  en  ont  un  grand  cumnil  avec   la  chape   noire 

l'ranre,  ni  lui,  ni  aucun  autre  n'ont  exéculé  doublée  d'une   etolTc  bleue,   et  les   boulons 

en  cela  l'intention  des  p.ipcs,  qui  oui  même  c!u    grand   camail  son'  aus-^i   bleus  (1'.    Kn 

refusé  des  bulles  à  quelques-uns.  Aii:si  (oui  l'r.iuce  il  mettent  toujours  l'aumusse  sur  le 

ce  que  ces  commandeurs  oui  fait  en  qualité  bras.  Celte  aum'issc  est   de  drap   noir  dou- 

di!  généraux  était  nul,    n'étant  pas  revêtus  blie  et  bordée  d'une  f.urrurc  noire  (:i).  Kn 

de  pouvoirs   légitimes,   et  ayant   niénie  été  li.ilie    ils    l:i    poricnl    quelquefois    sur    les 

contre  la  volonté  des  papes,  en  rétablissant  cp  iules,  et  en  l'oldgne  (•'!)  ils  ne  se  servent 

la  milice  qui  avait  été  supprimée  par  l'ie  II.  |  oint  d'aumu>se,  mais  ils  nictlenl  sur  leurs 

(;'e>l  pourquoi,  quoiqu'il  y  eiil  eu  170.)  des  surplis   une  espèce  de  mosetle  de  couleur 

chevaliers   la'iques  el  des  prêtres   religieux,  v;olelte,   qui    n'a    point   de  capuce  et   n'est 

ce  n'elail  point  son  véritable  état,  el  le  der-  point  ronde  comme  le'i  autres,  mais  descend 

nier  auquel  on   devait  avoir  égard.  Il  avait  eu   pointe  par  derrière.  Les  commandeurs 

toujours  été   purement   religieux  depuis   l.i  ont  à  la    1  outoiinière  de    leur  soutane   une 

suppression  do  la  milice,  c'étiiit  là  son  der-  croix   d'or  émailléc  d(>  blanc,   et   au    chœur 

nier  état  et  auquel  le  roi  cul  égard  :  Ulli-  une  aumusse  de  moiie  violette,  si  c'est  l'été, 

mus  status  (iKcndilur.  oa  un  camail  de  même  couleur  l'hiver. 

Les   prêtres   de   cet   ordre   sont  qualifiés  II   n'y   a  que  les   religieuses  de  Koine  qui 

(  hanoines   réguliers   dans   i)lusieurs   tiu  les  gardent  l.i   clôture  ;  la   plupart    demeurent 

(b  s  souverains  jioniifes.  Le  Saunier  prétend  dans  les  mêmes  hôpit  inx  que  les  reli:;ieu\, 

que  ce  fui  le  pape  Eugène  IV  qui  les  soumit  comme  à   Besançon  et  en  il'autres  cmlroil-. 

à  la  règle  de  Sjiiit-.\ugus;in,  outre  ce  le  de  l'Mes    sont    aussi    qui  Iquel'ois    seules   d.iiis 

Gui,    leur    foiuiatiur.    Le   cardinal    Pierre  d'autres   mais:ns,   comaie  à  liar-sur-Aubc, 

ISarbo.  neveu  de  ce  pape,  fui  le  premier  (jui  Neulchâleau  cl  autres  lieux.  Llles  di>enl  le 

n'étant  point  lie  I  ordre  fut  fait  commandi'iir  grand   oflice   selon   l'usage  de    l'Lglise   ro- 

ou   précepîeur  de  l'Iiôpitul   du   Saint-Esprit  maiiie.   La  plupart  ont  au  chœur  un  grand 

de  Rome,  el  eu  cet;c  qualité  général  de  tout  manteau    noir  où  il  y  a   une  croix  bbiiichc! 

l'ordre,  ce  qui  a  continué  jusim'à  présent,  iiussi   bien  (jue  sur  leur  robe,  avec  un  voie 

que  les  commandeurs  de  cet  hôpital  ont  élé  noir  ou  espèce!   de  cape;  el  dans  la  maison 

des  personnes   distingu'es   par   leur    nais-  elles  ont  un  voile  blanc  (4).  Celles  de  Uar- 

sance,  à  qui  les  papes  ont  aecordé  celte  di-  siir-.\ube    ont   dans    les    cérémonies  et   au 

gnité  pour  lécompenser  leur  mérite.  L'ordre  chœur  un  voile  noir  d'èlamine,  sur  lequel  il 

de  Saint-Iîenoil   en   a    fourni   un,   celui   de  y  a  aussi  la  croix  de  l'ordre.  11  y  a  d  s  mai- 

Sainl-Augustin  un,  celui  des  Servîtes  aussi  sons  de  cet  ordre  à  Rome,  à  Ti»oli,   Fnr- 

un,  celui  du  .Monl-l)li»cl  deux,  et  celui  des  nielli,  Tolenlin,  Viterbe,  Ancone,   Kugubio, 

Chartreux  un.    Il  y  en  a  eu  jusqu'à  présent  Floicnce,    Ferrare,  Alexandrie  ,   Nureie  el 

environ  soi\anle-dix,  depuis  le  comte  Gui  de  plusieurs   autres  villes   d'Italie.    Les  princi- 

IMontpellier,  fond.iteur  de  l'ordre,  parmi  les-  pales  de  Fiance   sont   à   Montpellier,  à  Di- 

()uels  il  y  a  eu  un  paiie.  sept  ou  huit  cardi-  jon    (5),  lte>aiiçon,  l'oligny,    Rar-sur-.^uiie, 

naux,   deux  archevêques  et  douze  évêques.  et    Stéphanfeld  en  Alsace.   Il   n'y  en  a  (luu 

Alexandre  Néroni  ,   qui   était   commandeur  trois  en   l'iilogne.  dont  la  prinripale  est  à 

général  en  1515,  fut  le  premierà  qui  le  p.iie  Cracovie,  qui  lut  fondée  d'abord  à  l'radnilv 

accurila  l'habit  violet  avec  la  mosetle  el  lu  par  Yves,    évê(iue   do  Cracovie,    l'an    1221 

mantelel  à  la  manière  des  prélats  de  Rome,  (Ouglosz,  llist.   Polo»,  lib.   vi,  pag.  (j2()); 

ce  (]u'ils  ont  toujours  porte,  à  moins  ()u'i  s  mais,   comme  cette  maison,   qui   ctail  aussi 

n'aient  élé  tirés  de  quelques  autres  ordres,  un  hôpital,   ne  pouvait  être  souvent  visitée 

au(|uel  cas  ils   retiennent   aussi,  comme  les  des  personnes   pieuses,    que  la    cump.issiuii 

prélats    religieux,   la    couleur  de  l'habit  de  jiouvail   4iorter   à   soulager   les  pauvres,   à 

I  ordre   dont    ils  sont   sortis.   Ces   cumman-  cause  qu'elle  était  trop  éloignée  de  Cracovie, 

deurs  ne   font   ordinairement  |  rolession    de  il  la  transféra  dans  celte  »iile  l'an  12V'».  il  y 

cet  onlre  qu'au  bout  de  l'an,  à  moins  qii'is  a  aussi  iiii  monastère  du  reli.ieuses  à  côté 

ne  dilTeieiit    à  la   faire  pour  quelques    rai-  de  cet  hôpital,   cl  il  s'en  trouve   quelqucs- 

(1)   l'oy.,  à  la  (in  du  vol.,  n"«  3S  cl  T.».  ('■)  Voij.,  i  l.i  (in  du  vol.,  ii"*  ij  cl  II. 

(i)  Yoy.,  il  la  (Ih  du  vol..  n"  iO  cl  il  {'o)  Vvy.,  il  la  Un  du  vol.,  n»>  io  cl  IS, 
('■)   \  uij  ,  ià  lu  lui  du  vul.,  11°  4.!. 


221 


ESP 


ETfl 


2?2 


unes  en  Allemagne,  en  Espagne  et  même 
dans  les  Indes.  (Juoique  la  ville  de  Memmin- 
genen  Souabe  ail  reçu  la  confession  d'Augs- 
bourg,  et  que  la  plus  fîi-ande  partie  de  ses 
habitants  soienl  hérétiques,  il  y  a  néan- 
moins un  liôpital  de  l'ordre  du  Saint-Esprit 
où  les  religieux  ont  une  église  ouverte;  et 
ils  portent  publiquenieiil  le  saint  sacrement 
aux  malades,  même  dans  les  maisons  des 
éréliques,  où  il  y  a  des  catholiques.  L'ad - 
minisiraiion  des  biens  de  cet  hôpital  est  en- 
tre les  m:iins  des  magistrats  de  la  ville,  et 
les  relit;ieux  ont  seulement  soin  des  mala- 
des. Cet  bôpil;il  fournit  à  Tenlrelien  de  ce- 
lui de  WiuiplTeu  du  même  ordre,  qui  est 
aussi  dans  la  Souabe,  et  au  milieu  de  l'hé- 
résie. 

Cette  croix  à  douze  po'nles,  que  ces  cha- 
noines hospitaliers  portent  sur  leurs  babils, 
n'est  qu'une  nouveauté;  ils  la  portaient  an- 
cieniiement  toute  simple  à  peu  près  comme 
la  croix  de  Lorraine,  et  comme  la  portent 
les  religieux  hospitaliers  de  l'Hôtel-Dieu  de 
Coulanci  s,  qui,  à  cause  de  celle  croix,  qui 
Cil  aussi  de  toile  blanche,  et  que  cet  Hôtel- 
Dieu  est  dédié  au  Saint-Esprit,  ont  fait  des 
tentatives  ponr  être  iticorporés  dans  l'ordre 
do  Saint-Esprit  de  Montpellier,  et  par  ce 
moyen  se  soustraire  de  la  jiiridictiou  de  l'é- 
voque de  Coulances,  auquel  ils  sont  soi;- 
mis  ;  mais  il  y  a  eu  plusieurs  arrêts  du  con- 
seil du  roi  et  du  parlement  de  Norman, lie 
qui  leur  ont  fait  défense  de  prendre  la  qua- 
lité de  chanoines  réguliers  de  l'ordre  du 
Saint-Esprit  et  de  porter  des  aumusses.  Ces 
bespitaliers  de  C<>utances  furent  institués 
sous  le  titre  de  clercs  réguliers  de  l'ordre  de 
Sainl-Augusiin  par  Hugues  de  Morville , 
évêque  de  Coulances,  l'an  1209,  pour  des- 
servir l'Hôtel-Uieu  de  celle  ville,  et  ce  pré- 
lat leur  donna  l'an  1224  des  règlements  qui 
ont  toujours  été  observés  jusqu'à  présent  ; 
ces  religieux  sont  toujours  au  nombre  de 
douze,  dont  il  y  en  a  six  qui  demeurent  dans 
l'hôpiial  ;  les  autres  desservent  des  cures  qui 
en  dépendent.  L'ordre  du  Saint-Esprit  a 
pour  armes  de  sable  à  une  croix  d'argent  à 
douze  pointes,  et  en  chef  un  Saint-Espiil 
d'argent  en  champ  d'or  dans  une  nuée 
d'azur. 

Pierre  le  Saunier,  de  Cap.  orcl.  S.  Spirit. 
Dissert.  lîarbosa,  de  Jur.  Ecdes.  cap.  41, 
num.  113.  Tambur.  de  Jur.  Abbat.  tom.  Il, 
disp.  24,  nnm.  35.  La  Terrade,  Discours  sur 
l'vrdre  du  Saint-Esprit.  De  ISlégny,  Projet  de 
l'Histoire  des  Religions  militaires.  Sylvesl. 
MaruI,  Mar.  Océan  di  lut.  gl.  Relig.  Pietr. 
Crescenze ,  Presid.  lîoni.  Bernard  Ciusl. 
Citron,  de  gl.  ord.  milit.  Hermanl,  Ilist.  des 
Ord.  de  chevalerie,  et  plusieurs  factums  et 
mémoires  concernant  cet  ordre. 

Ces  religieux  ,  chanoines  et  liospitaTers, 
n'existaient  peut-être  plus  qu'à  Kome,  où 
ils  étaient  comptés  les  premiers  dans  le  dé- 
nombrement des  réguliers,  ils  avaient,  il  y 
a  peu,  pour  commandeur,  Mgr  Antoine  Cioja, 
et  pour  vicaire  général,  le  U.  P.  dom  Pierre 


Zeocbini.    Le  pape  Pie  IX  a  supprimé  cette 
corporation  à  Rome,  en  1847. 

B-D-E. 

ÉTHIOPIENS  ou  ABYSSINS  (Religieux). 

§   1".    Des  religieux    et   religieuses   Ethio- 
piens. 

Comme  rEthiopie  est  divisée  en  haute  et 
basse,  nous  entendons  parler  de  la  haute, 
qui  nous  est  connue  sous  le  nom  d'empire 
des  Abyssins,  et  gouvernée  par  un  prince 
que  la  plupart  des  historiens  nomment  com- 
munément Prète-.rean,  qui  se  qn;ililie  quel- 
quefois de  Colonne  de  la  foi.  de  la  lignée  de 
Juda,  fils  de  David,  fils  de  Salomnn,  fils  du 
la  Colonne  de  Sion,  fils  de  la  Colonne  de  .la- 
cob,  fils  de  Marie,  fils  de  Nahod  selon  ly 
rhair,  fils  de  saint  Pierre  et  de  saint  Paul  se- 
lon la  grâce,  empereur  do  la  haute  et  basse 
Etliiopie,  ele.,  qui  sont  les  titres  que  prit 
l'empereur  David  écrivant  au  pape  Clément 
VII  en  1533.  Mais  la  foi  et  la  créance  des 
peuples  de  ce  vaste  empire  ne  correspon- 
dent guère  à  ces  beaux  litres,  puisqu'elles 
sont  corrompues  par  plusieurs  erreurs;  et  si 
lis  Abyssins  ont  quelquefois  écoulé  les  mis- 
sionnaires qui  leur  ont  élé  envoyés  pour  les 
faire  rentrer  dans  le  sein  de  l'Eglise  catholi- 
que, et  qu'ils  en  aient  reconnu  le  souverain 
chef  et  pasleur,  ce  n'a  élé  que  pour  un 
temps,  car  ils  n'ont  pas  persévéré  dan.**  la 
loi   orthodoxe. 

Quelques-uns  ont  prétendu  que  le  chris- 
tianisme avait  élé  introduit  en  Ethiopie  par 
l'eunuque  de  la  reine  de  Candace  ;  ce  que 
d'autres  révoquent  en  doute,  parce  que  cette 
reine  ne  régnait  pas  l'ans  l'Abyssinie,  mais 
seulement  dans  l'ile  de  Méroé.  D'autres  aussi 
rapportent  la  conversion  de  l'Ethiopie  à 
saint  Barthélemi  ou  à  saint  Matthieu  ;  mais 
les  Ethiopiens  le  nient  et  reconnaissent 
(ju'ils  ont  été  convertis  à  la  foi  chrétienne 
(lu  temps  de  saint  Alesandi'e,  évêque  d'A- 
lexandrie, environ  l'an  320.  En  elTet  nous 
apprenons  de  l'Histoire  ecclésiastique  (i), 
(]ue  Frumentius  ayant  été  emmené  aux  Indes 
par  un  marchand  de  Tyr,  fut  conduit  à  la 
cour  du  roi  d'Ethiopie,  qu 'il  y  annonça  la 
fui  de  Jésus-Christ;  el  qu'ayant  eu  permis- 
sion de  retourner  à  Alexandrie  pour  rendre 
compte  de  l'état  de  ces  nouveaux  chrétiens,  il 
y  arriva  peu  de  lems  après  l'ordination  ds 
saint  Atlianase,  qui  l'ordonna  évêque  du 
pays  et  l'y  renvoya. 

Le  christianisme  y  fil  un  très-grand  pro- 
grès ;  cl,  conmie  les  Ethiopiens  ou  Abyssins 
oui  toujours  eu  un  métropolitain,  que  IVju 
nomme  communément  patriarche,  qui  est 
envoyé  par  celui  d'Alexandrie,  les  Egyp- 
tiens étant  tombés  dans  les  erreurs  de  Dms- 
core  et  d'antres  hérésiarques,  ils  les  onuom- 
muniquéesaux  Abyssins  par  le  moyen  de  ce 
patriarche,  aussi  bien  que  quelques  obser- 
vations judaïques  que  l'Eglise  d'Alexandrie 
avait  relenucs.  Les  Abyssins  ont  même  ajou(à 
à  leurs   rites  d'autres   superstitions  juJaï- 


(Ij  Sucrai.,  Wisi.  ccd.,  l,b.  i,  c.  20;  Tlicoduroi. 


iTj  Dl(  TiONNAIUE  DES  ORDRES  UF.LIGIEUX.  254 

qucs,  el    aiiKi  01)1  l'ait  iiii   mélange  de  lAii-  qui  lui  sont  soumis,  ou   bien    il    envoie  îles 
lien   cl  du  Nouveau  Te<tamenl,    so  S'  rvanl  conimissairrs   qui  les  visitent  pour  les  cor- 
delà   rirconeisioiiau    liuiliùnx;    jour   envers  riger  el  pour  punir   ceux    qui    ont   commis 
les  tilles  auss!  bien  qu'envers  les  iiareons,  ob-  quelques  fautes.  Avant  que  les  llallcs  se  fiis- 
servant    le  j  >ur  ilu   sabbat    cl    le  ilimandie,  seul  emparés    du    royaume  de  Shcwa.que 
s'absti'iianl  .lussi  de    vi;iiides   immondes    cl  quelques-uns  appellent  \oa  ou  Xao.i,  ce  su- 
dcfenducs  dans  rancicniie  loi.  Je  (lasse  sous  p-rieur  ou  abbé  général  des  moines  de  l'Ins- 
siletiee     leurs    auîres    abus   comme    n'étant  litul  de  'récl.i-IFaïnianot  faisait  sa  résidence 
poi'il  de  mon  suj  t ,  n'aj.int  touclié  en  pas-  au  monas'ère   de    Debra-Lilianus  ,  ou  Moiit- 
»aal  la  rclit;ion  des  peuples    d'KMiiopie   que  Liban,  qu'il  a  transféré^' ensuile  à  lingendra  ; 
p.ir   rafiport   aux    religieux,   qiii    )  sont    en  ce  qui  faii.dil.M.  l,udolf,(|u"un  certain  moine 
trc<-gtan(l    nombre  et  qoi   cnlrt  lieniient   ces  nommé  'reifa-Tiion,  qui    a   inipr  uié  en  l.in- 
neuples  dans  leurs  erreurs.  yue  éthiopienne  le  Nou>eau 'l'eslamenl,  par- 
La  vie  monasliiiue  y  fut  iniroduite  presque  tant   de    lui    et   des    autres    n.oines,  à  la  fin 
eu  même    temps    (lue    le  { bristianisme  ,    cl,  d'un  discours  qu'il  a  fait  sur  saint  Mallliieu, 
sous  le  règne  du  roi  Amiamidas,   lils  de  Sa-  dit  f|u'ils  sont  tous  enfants  du  P.  Téela-Ilaï- 
ladobas,  elle  y  fut  portée  par  un  graml  nom-  manol  du  moiiaslére  appelé  le  Mont-Liban  ; 
bre  de  moines  de  riigypte  et  d  s  autres  pro-  c'est    pouriiuoi,  continue   M.    Ludoll',   quel- 
vinccs    voisines    de    l'empire    roiuaii»,   (  nire  (jues  savants   otil  mal   à  prop  s  nommé  ces 
lesquels    les  plus   célèbres   furent   ceux    cjui  moines   Maronites.  (>c    Téi  li-ILiïmanol   csl 
cboisireiit  leur  demeure  dans  le  royaume  de  en    très-grande    vénéraliou  chez  les  Llliio- 
'l'igré,  cl   qui  y   bâtirent,  des    cellules.    .\Lns  piens,  qui  eu  font  la  léle  K'  "i'i  décembre,  ils 
les  Abyssins  ont  cliangé  les  noms  de  ces  ins-  en  font  aussi  meulion  dans  leurs  dipty(iues, 
tituteursdela  vicmonastiquedans  celempirc,  eu  d  sanl  :  Suuecncz-VdU.'s,  Seigneur, de  l'ilme 
à  la  réserve  de  celui  de  l'anlaléon.  Les  neuf  de  votre  scrvUenr  cl  notre  PcrcTccla-Uiiimu' 
principaux  furent,  selon  eux,  abba  Arogavi,  nul  el  de  Ions  ses  die  plrs. 
abba    Pantaléon,    i.bba    Garima,  abba    Alef,  L<'  .«econd   inslilut   des  moines  ilTiibiopic 
abba  Sahani,  abba  Afe,  abba  Likanos,  abba  est   celui   de   l'abbé    liuslase,  qui   n'est  pas 
Adimala ,    <t    abba    Oz,  appelé    au^si    abba  moins    recommandable  dans    tout   l'empire 
Cuba,  qu'ils  reconnaissent  pour  saints, ayant  iiue  Técla-IIaïmanot  ;  les  Abyssins   en    font 
même  bûli  des  églises  en  l'honneur  de  quel-  aussi    mention   dans   leurs  diptyques  en  ces 
(lues-uiis  de  ces  premiers  solitaires  de  l'E-  termes:  Souvmez-vous,  Sciiiiieur,  de  notre 
Ibiopie.  J'ère  Eustase  el  de  tousses  enfants.  Si  fétc  se 
.\t)ba   Arogavi,  qui  avait  été   dise'ple  de  célèbre  Ie21  juillet.  L  a  eu  beaucoup  de  dis- 
saint  l'acôme,    fui  le  premier  supérieur  d;  ciples,  à  qui  il  a  aussi  prescrit  des  lois  ;  mais 
ces  moines.    Il    cul    pour  successeur  abba  il  ne  leur  a  pas  donné  de  supérieur  gcnér.il 
Chrislos-Iîesana  ,    abba    MesUel-.Moa,   abb.i  doul  ils  dépendent,  et  ils   ne  se  mcttciil  pas 
Joanni,  etc.  Leur  ;jus;érilé  était  si  grande,  beaucoup  eu  peine  d'en  avoir  un  ,  sous  pré- 
qu'il   s'en    est    trouvé   qui  se    conlenlaicnl  texte,  à    ce   qu'ils    disent,   qu'Eustase  étant 
pour  un   repas    do    trois  dalles   seulement,  allé  en  Arménie  sans  avoir  nommé  un  suc- 
d'aulres   d'un   petit   morceau  de    pain.    Les  cesscur,  il  ne  leur  est  pas  permis   d'en    eta- 
Abyssius  leur  attiibueiil  beaucoup  de  mira-'  blir  un   :    c'est    pourquoi    l'abbé  tic  chaque 
clés,  aussi  bien  iju'aux  autres  saints   qu'ils  monastère  de  cet  inslilutcsl  le  maitrc  absolu 
ont  eu  vénération  :  leur  poêles,  dans  les  ver>  chez  lui,  cl  peut  corriger  ses  inféri'  urs,  sans 
qu'ils  oui  faits  à  leur  loi' auge,  leur  font  Ira  us-  (|u'ils  puissent  en  appeler;  el  lors(]u'il  meurt, 
porter  des  munlagm  s  d'un  lieu  à  un  autre,  les  religieux  du  mcinc  monastère  eu  élisent 
passer  les  rivières  el  les   torrents  sur   leurs  un  autre. 

iiabils,  qui  leur  servaient  de  barques.  ]\Liis,  L'on    trou^e   parmi   les  Lettres  édifiantes 

entre  ces  premiers    solitaires  de   l'Lthiojiie,  cl  curieuses  CLTitcs  des  missions  étrangères, 

celui  qui,  selon  eux,  a  1  lus  excellé  en  sain-  par    les    missionnaires   delà   Compagnu;  de 

Ictc,  csl  tJabra-.Menfes-ivcd,  doul  ils  font  ;a  Jésus  (1),  la    relation   d'un   vo\a;.re    lail   eu 

fête  tous  les  mois.  Llh  opieen  1U!)8,  IG'j'Jct  1700,  par  >L  l'omet, , 

Tous  les   religieux  d'Ethiopie  se  disent  de  médecin  français,  qui  parait  avoir  été  mal  in- 

l'ordre  de  Saint-.\nloirie  ;  mais  ils  ii'oiil  pas  formé  de  ce   ((ui  concerne  le  clergé  séculier 

lous  les  mêmes  observances,  étant  di>  isés  en  et  régulier  de  cet  empire  ;  car  il  dil  (ju'il  n'y 

deux  ou  trois  congrég. liions  ou  instiluts  par-  a  [loiiit  de  prêtre  en  Llhiopic  ()ui  ne  soit  re- 

liculieis.  Le  premier  est  celui  de  'l'éela-llaï-  ligieux;  que  l'empereur  Aii-Ilasili.  aïeul  du 

maiio',  (]ui  vers  l'an  (»20  fut  le  restauralrur  prince  qui  régnait    pour  li.rs,  en  lit  précipi- 

dc  la  vie  mouasiique   en    lithiopie  :  il  près-  ter    sept    mille  du   haut  de   la  monl.igue  de 

crivll  des   b.is  particulières  aux  moinc>  qui  /lalbnu,  pour  s'être   révoltés   contre  lui  ;  el 

se  raiigèrcnl  .-■ous  sa  conduite,  el  voulut  en-  <iu<>  l'on  peut   juger  de  la  multiliule  ((u'il   y 

Irc  autres  choses  qu'ils  fussent  soumis  à  un  en  a  par  ce  (]ue  lui  dit   le    palriarcbe  pré  le- 

superieur  généial,  appelé  Icègue,  qui,  après  cesscur  de  celui  qui  goinerne  présentement 

l'abuna  ou  patriarche  d'Llhiopie,  a  loiijouis  l'I^g'isc  d'i;ihio|)ie,  ((u'eii  une  seule   ordina- 

ele  celui  de  luiit    rem|)ire    (|ui  a  été  le  plus  lion  il  avait  f.iitJiv  mille  préircs  cl  six  millu 

(onsidcTC   p.ir    rapport  à  sa  dignité  el  a  sou  di.icres. 
autorité.  Il  fait  la  visite  de  tous  les  religicii"w  François  Alvarez,  auuioiiicr   de  don  Eu»- 

(Ij  Le  Gobicu,  Letlnt  idifiuiiui,  4°  recueil,  p-ig.  '2jI. 


2-25  ETIi 

manuel,  roi  de  Portugal,  qui  ncrompagna 
l'ambassadeur  que  ce  prince  envoya  l'an 
1520  à  l'empereur  des  Abyssins,  cl  qui  a 
donné  la  relation  de  celle  ambassade,  nous 
assure  néanmoins  qu'il  y  a  di  s  prêtres  sé- 
culiers en  Ethiopie;  que  depuis  qu'ils  ont 
clé  ordonnés  diacres  ju>qu"à  ce  qu'ils  soient 
prêtres,  ils  peuvent  se  marier  une  fois  seu- 
lement ;  qu'ils  ne  peuvent  pas  entrer  dans  la 
iléricalure  s'ils  ont  été  mariés  ;  et  que  si 
étant  prêtres  ils  se  remarient,  ils  sont  dégra- 
dés et  réduits  à  l'état  la'rcal,  ne  pouvant  plus 
entrer  dans  l'église,  ce  qui  n'est  permis 
qu'aux  prêtres  et  aux  clercs.  Sous  la  qua- 
lité de  clerc  est  renfermé  aussi  l'ordre  de 
lous-diacre  aussi  bien  que  celui  de  diace, 
liue  ceux  que  l'on  fait  clercs  reçoivent  en 
même  temps  et  sans  aucun  cxam  n  ;  car  il 
y  a  un  grand  nombre  de  ces  ordinands  q  i 
ne  pourraient  répondre  aux  demandes  qu'on 
leur  ferait,  puisque  la  plupart  sont  encore  à 
la  mamelle.  L'on  peut  ajouter  foi  à  cet  au- 
teur, qui  s'élait  liouvé  à  plusieurs  de  ces 
ordinations.  Dans  la  première  qu'il  vit,  le 
patriarche  ordonna  deux  tnille  trois  cent 
cinquante-six  prêlrts  ,  parmi  lesquels  il  y 
avait  di'S  religieux  aveugles,  d'autres  qui 
n'.ivaient  qu'un  bras,  et  d'autres  qui  n'.i- 
viiienl  qu'une  jambe  ;  et  le  p  itri.irclin  lui  dit 
qu'il  y  iivail  eu  peu  (le  prêtres  dans  cetleor- 
dinaiion,  p.rcc  que  tous  ces  prêtres  n'é- 
taient que  des  environs  du  lieu  où  il  était 
pour  lors,  qu'ordinaircmenl  il  n'en  ordon- 
nait pas  moins  de  cinq  à  sis  mille  à  la  fois, 
et  que  l'on  ne  faisait  pas  l'ordination  des 
clercs  dans  le  même  leinps.  En  effet  le  lende- 
main celle  lies  clercs  se  lit  et  dura  depuis  le 
malin  jusqu'au  soir,  non  pas  à  cause  de  la 
longueur  des  cérémonies  qui  se  pratiqueni 
à  l'égard  du  chaque  ordinand  ,  mais  à  cause 
du  grand  nombre  des  personuL's  qui  rci,urent 
la  cléricatuie. 

Comme  il  n'y  a  point  d'autres  évcques  eu 
Etliiipie  que  le  patriarche,  il  fait  souvent  de 
ces  sortes  d'ordinations;  et  jamais  abus  n'a 
été  porté  jilus  loin  que  celui-là,  ncevaiit  in- 
difforemmenl  toutes  sortes  de  personnes, 
sans  aucine  attention  aux  qualités  requi- 
ses. Ainsi  jM.  Poiicet  n'a  peut-être  point  trop 
avancé  en  disant  qu'il  avait  appris  du  pa- 
triarche que  son  prédécesseur  avait  fait  d.ins 
une  seule  ordination  dix  mille  prëlres  et 
six  mille  diacres,  ce  (jui  a  pu  se  faireendeux 
dfférenis  jours ,  car  toute  la  cérémonie  que 
l'on  observe  dans  l'ordination  des  prêtres 
consiste  en  ce  que  le  patriarche  met  la  m;iin 
sur  la  tête  de  chaque  prêtre  en  disant  quel- 
ques prières,  et  enbuile,  après  avoir  lu  quel- 
que temps  dans  un  :ivre,  il  leur  donne  à 
tous  plusieurs  bénédictions  avec  une  croix 
de  fer. 

(Quoiqu'il  ne  soit  pas  vrai  iju'il  n'y  ait 
point  d'autres  prêtres  en  Eihio;iie  que  les 
religieux,  cela  n'empêche  pas  qu'il  n'y  ait 
un  si  grand  nombre  de  ces  derniers  dans  c;'t 
empire,  qu'Alvarez  assure  encore  que  tout 
en  est  rempli  ;  qu'oa  ne  voit  que  moines 
dans  les  monastères,  dans  les  églises,  dans  les 
rues,  dans   les  marchés;  qu'il  n'a  vu  aucune 


ET» 


22fi 


église  desservie  par  des  prêtres  séculiers  où 
il  n'y  eût  aussi  des  leligieux;  et  qu'il  n'a 
trouvé  aucun  monastère  où  il  y  eût  des  prê- 
tres séculiers. 

M.  Ludolf  confirme  celle  multitude  de 
moines  en  Ethiopie  ;  mais  il  ne  semb'c  pas 
être  d'accord  avec  les  relations  de  quelques 
voyageurs  louchant  les  monastères  de  ces 
religieux,  car  il  prétend  qu'ils  demeur  nt 
ordinairement  auprès  des  éslises  dans  de 
pauvres  cabanes  dispersées  çà  et  là  dans  un 
enclos;  qu'ils  ne  portent  point  l'habit  mona- 
c.il;  qu'on  ne  les  distinirue  des  séculiers  que 
par  une  crois  qu'ils  portent  toujours  à  la 
main;  que  leurs  demeures  ne  peuvent  pas 
être  appelées  des  cloîtres  ;  qu'ils  ne  méritent 
pas  le  nom  de  mo  nés,  et  qu'on  ne  les  doit  regar- 
der que  consme  des  colonies  de  gens  qui  ne 
sont  point  mariés. 

Cependant  Alvarez  doit  être  cru,  puisqu'il 
a  demeuré  six  ans  eu  Ethiopie,  qu'il  allait 
presque  tous  les  jours  au  monastère  de  la 
Vision  de  Jésus,  dont  il  ne  demeurait  pas 
loin,  et  qu'il  assistait  avec  les  moines  à  tou- 
tcsleursprincipales  fêles  et  cérémonies,  aux- 
quelles il  était  souvent  invité.  Cet  auteur,  f  li- 
sant la  description  de  ce  monastère,  situé 
dans  la  province  de  Tigré,  sur  une  haute 
montagne  au  milieu  d'une  forêt  et  dans  une 
alïri  use  sol.tude,  dit  qu'ordinairement  il  y  a 
cent  religieux  qui  y  demeurent  el  qui  man- 
g  nt  ensemble  dans  un  même  réfectoire,  ex- 
cepte les  vieillards,  qui  en  sont  dispensés,  à 
qui  l'on  porte  à  manger  en  particulier;  que 
les  revenas  de  ce  monastère  sont  très-consi- 
dérables ;  que  la  montagne  où  il  est  situé  lui 
appartient  entièrement ,  et  qu'elle  a  plus  de 
dis  lieues  d'étendue  ;  qu'au  bas  de  cette 
montagne  il  y  a  plusieurs  fermes  qui  dépen- 
dent du  monastère,  outre  plusieurs  antres 
que  l'on  Irouv  jusqu'à  trois  journées  au  delà, 
ijiii  s'appellent  Gultus,  c'esl-à-dire  les  fran- 
chises de  1 1  N'ision  ;  qu'il  y  a  encore  plus  do 
cent  villages  qui  lui  payent  tous  les  trois 
ans  chacun  un  cheval,  mais  qucle  procureur 
du  monastère  prend  des  vaches  à  raison  de 
cinquante  pour  chaque  cheval  ;  de  sorte  qu'il 
reçoit  bien  par  an  dix  sept  cents  vaches, 
dont  les  religieux  tirent  du  beurre  pour  ré- 
galer les  étrangers  qui  les  viennent  voir,  et 
pour  en  mettre  dans  leurs  lampes  au  lieu 
d'huile.  ^1 

Comme  il  y  a  des  auteurs  qui  ont  écrit  que 
dansée  irionastère  il  y  avait  ordinairement 
trois  mille  religieux,  el  que  l'on  avait  dit  la 
même  chose  à  Alvarez,  il  y  alla  le  jour  d.; 
l'Assoiu]  tion  (le  la  sainte  Vierge,  auquel 
jour  les  religieux  font  une  procession  géné- 
rale ;  i!  n'y  vit  néanmoins  que  trois  cents  re- 
ligieux ou  environ  ;  et  en  ayant  demandé  la 
raison,  on  lui  dit  que  les  autres  étaient  dis- 
pe:sés  dans  d'autres  monastères  ou  églises 
particulières  et  aux  foires  el  marchés,  pour 
gagner  leur  vie  pendant  qu'ils  étaient  jeunes^ 
à  cause  que  le  monastère  de  la  Vision  n'était 
pas  en  état  d'en  nourrir  un  si  grand  nombre, 
et  qiie  quand  ils  étaient  hors  d'élal  de  ga- 
gner leur  vie,  ils  venaient  passer  le  reste  (!e 
leurs  jours  au  couvent.  En  etT«t  le  même  au- 


227 


DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  RELIGIEUX. 


2Î8 


leur  nssiirc  cn'"orc  que  dans  toutes  les  foires 
il  dans  tous  les  marchés  l'on  ne  voit  que  re- 
ligieux cl  religieuses  qui  V  IrarKiuenl. 

M.  l'oncol  lOiilirnic  ce  "que  dii  Alvarez  de 
l'iuslérilé  de  ces  religieux  et  de  la  beauié 
lie  quelques  monastères  en  ce  pays,  et  dit 
aussi  qu'il  y  a  plusieurs  autres  monastères 
qui  dépendent  de  celui  de  la  Vision,  nom- 
mant entre  autres  celui  d'ilcleni,  qui  est 
très-beau  ,  et  où  il  y  a  une  mat;ni(iqiic 
église.  Il  ajoute  que  les  cellules  de  ces  reli- 
pîeux  sont  si  élroiles,  qu'un  homme  a  de  la 
peine  à  s'y  étendre,  qu'ils  ne  mangent  point 
de  vian  le  non  plus  que  les  autres  religieux 
d'Ktliiopie,  qu'ils  sont  toujours  appliqués  à 
Dieu  et  à  la  médilation  des  choses  saintes, 
et  que  c'est  là  toute  leur  occupation. 

L'abbé  du  monastère  de  la  Vision  le  reçut 
avec  beaucoup  de  cliaiilé  aussi  bien  que 
cens  de  sa  suite.  Il  leur  lava  les  pieds  et  les 
baisa  pendant  que  les  religieux  récitaient 
des  prières.  Après  cette  cérémonie,  ils  fu- 
ient conduits  processionnellemcnl  à  l'église, 
les  religieux  clianlaiit  toujours.  Ils  allèrent 
ensuite  dans  une  chambre  où  on  leur  ap- 
porta à  manger.  Tout  le  régal  consista  en  liu 
pain  trempe  dans  du  beurre;  el  pour  l.ur 
tioisson  on  leur  donaa  de  la  bière,  car  l'on 
ne  boit  ni  vin  ni  hydromel  dans  ce  monas- 
tère; et  labbé  leur  tint  toujours  compagnie, 
mais  il  ne  mangea  pont  avec  eux. 

Le  mcinc  viyageur  a    cru    apparemment 
embellir   la   relation   de   son  voyage   |iar  le 
récit  d'un  prodige  qu'il  a  vu,  à  ce  qu'il  dit, 
dans  l'église  de  ce  monastère  de  la  Vision. 
On   l'avait  assuré  que   d ms  l'église,  du  côté 
de  l'Epîtrc,   on  voyait   en  l'air,    sans  aucun 
appui  ni  soutien,  une  baguette  d'or,  ronde, 
long  ;e  de  quatre  pie.ls,  el  aussi  grosse  qu'un 
bâton.   Croyant  qu  il   y    aval  quelque  arti- 
lice,  il  plia  l'abbé  de   vouloir  i  icu   lui  per- 
mettre 0'c\aminer   s'il  n'y  avait  point  quel- 
que apjiui    qu'on   ne   vit  poi.il.    Tour  s'ea 
assurer  dune  manière  à    n'eu  pouvoir  pis 
dou'.er,   il  |  assa  un    bâton  pai-dessus,  par- 
dessous  cl  de  tous  les  côtés,  el  il  trouva  que 
la  ba"uel.c  était  vèritablenenl  suspendue  en 
l'air.  Les   religieux   lui  dirent   qu'il  y  avait 
environ  33:j  ans  qu'un  solitaire  noiiuné  Abba 
Pliilippos  se  relira  dans   ce  désert,  où  il    ne 
se  nourrissait  que  d'herbes  et  ne  buvait  que 
de  l'eau;  et   qu'un  jour  Jésus-Chi isl  se   (il 
voir  .1   lui,  et  lui  onloiina  de   bâtir  un  mo- 
nastère dans  l'eiidnil  du   bois  où  il  iroiiv  - 
rail  une  baguette  d'or  suspendue  en  l'air;  cl 
que  l'ayant  trouvée  et  vu  ce  prodige,  il  obéit, 
et  bâtit  ce  mon  isière  qui  se  nomme  ISihen 
Jcsiis,  \  ision  de  Jésus.  Cependant  Aharez, 
qui  a  demeuré  six   ans  en   Ethiopie  et  qui 
allait  pnsqiie  tous  les  jours  à  ce  monastère, 
comme  il  le  dit  lui-même,    ne  parle  point  de 
ce  prétendu  prodige,  quoiqu'il  ait  eu  soin  l'.e 
marquer  tout  ce  qu'il  y  avait  de   plus  parti 
culier  dans  ce  monastère.  Il  n'ignorait  pis 
que   cet   alibe  Philippe  était  non-seulcineiil 
révéré  comuie   saim  p  ir  les   religieux  de  c 
monastère,   mai>   encore   par   les  habitants 


des  environs,  qui  cèlèlrenl  tous  les  ans  une 
fêle  en  son  honneur;  el  il  rapporte  même  le 
sujet   pour  lequel  ils  l'ont   toujours  regardé 
comme  saint.  Ce   fut,  dit  cet  auteur,  à  l'oc- 
casion de  ce  qu'un   roi   d'l<"thiopie  ayaiil  dc- 
fi'iidu  qu'on  observât  le  jour  du  sabbat  daii! 
tons  les  lieux  de  son  obéissance,  l'abbé  l'iii- 
lip:ie    ol   ses    religieux    vinrent    trouver   « 
piiiicc,  et  lui  firent  voir  que   Dieu  avait  or- 
donné que  l'on  garderait  le  jour  du   sabba', 
et  que  ceux  qui   ne  le   garderaient   pas  se- 
raient lapidés.  Il  ajoute  que  les  religieux  de 
ce    monastère   et   les   peuples  des  environs 
.«ont   les  plus   attachés   à  cette  superstition 
judaïque;  que  lui-nièmc  a  vu  plusieurs  fois 
que  les  religieux  cuisaient  le  pain  et  ])rèpa- 
raient   leur   manger  le  vendredi  pour  le  sa- 
medi ;  qu'ils  n'allumaient  pas  même  du  feu 
le  samedi  ;  et  qu'ils  n'étaient  pas  si  scrupu- 
leux le  dimanche,    puisqu'ils   préparaient  à 
manger  ce  jour-là.   Sur  quoi   il  y   a  lieu  de 
s'elonner    de   ce   que   quelques   personnes  , 
principalement    M.    Ludoll',   aient    regardé 
comme  une  chose  innocente  l'observation  du 
sabbat  parmi   les   Ethiopiens,   après  que  le 
concile   de  Laodicée  a   prononcé  analbèmo 
contre  ceux  qui  s'abstiennent  pir  supersti- 
tion des  viandes   que  Dieu  a  créées,  et  con- 
tre ceux  qui  obse.  vent  le  sabbat  à  la  manière 
des  Juifs. 

Ce  que  disent  plusieurs  écrivains  que  les 
religieux  d'Elhiojiie  sont  habillés  de  peaux 
jaunes,  se  confirme    par  la  relation  d'Alva- 
rez, qui  dit  la  même  <h()se  ;  il  ajoute  qu'il  y 
a  quelques  monastères  où  ils  sont  au^si  b.i- 
biliés  de  toile  de  cotoa  jaune,  el  que  ces  re- 
ligieux    bibillés    de    jaune    ont     tous    dei 
chapes   de  la  même  couleur,  fai  es  comme 
celles  des  Dominicains.   .\ini  cela  ne   s'ac- 
corde pas  encore  avec  ce  ((ue  dit  M.  Ludolf, 
que   tous  les  religieux    d'Ethiopie  sont  ha- 
billés comme  les  séculiers,  et  ne  sont  distin- 
gués que  par  une  croix  qu'ils   portent  lou- 
jours  à   la  main  (1).  A   la  vérité  M.  Poneei, 
qui    demeure   aussi  d'accord   avec    jMvari-z 
que  les  religieux  des    monastères  de  la  Vi- 
sion et  d'IIèlèni  sont   habillés  de  peaux  jau- 
nes, parlant  aussi  de  <iuelqiies  autres   icli- 
gieux    (jui   sont    en   grand   nombre  dans  la 
ville  de  (iondar  (séjour  ordinaire  «les  empe- 
reurs), puisque,  outre  ((iialre  chapelles  im- 
périales qui   sont   dans  l'enceinte   du  palais 
de   l'empereur,    et  qui   sont   desservies   par 
cent  religieux  qui  ont  aussi  soin  du  collège, 
où  l'on  enseigne  à  lire  l'Ecriture  s  liiite  aux 
ollkiers  de   ce   prince,  il  }  a    environ   cent 
églises  dans   cette  ville;    il  dit  iiue  ces   reli- 
gieux sont  buliillés  lie  même  que  les  sécu- 
liers,  cl   n'en   sont  distingues  que  pa     une 
calollo  jaune  ou  violette,  el  que   ces  <liver- 
ses  couleurs  distinguent  leur  ordre.   .Mais  il 
y   a   bien   de  l'app.irence   que  ceux  qui   oui 
une  calotte  jaune,   et   qui  pour  habilleinciil 
portent,  comme  les   séculiers,   une  \esleou 
soutane   noire,  sont   de  rinstitut  de    l'abbe 
lùistase  (2),  et  les  antres  qui  ont  uiu-  calollo 
violclle  pouiraienl  bleu  élic  ceux  (lu'Alva- 


(1)  Yi'ij.,  j  1.1  lin  'lu  Vol.,  Il"  17. 


(J)  Voy.,  il  la  lin  du  vol.,  n'  48. 


229                                 ETn  ETII  2-0 
ppz,  Mjirmol,  M.  Luclolf  et  quelques  autres      l'on   ne    les    ordonnait  prêtres  qu  afin  qu'ils 
appellent  des   chanoines.  Ceux-ci    peuvent      pussmt  vivre  des   aumônes  de  l'Eglise    saiss 
(ilre  mariés  ;   leurs  enfants    leur   succèdent  quoi  ils  ne  pourraient  subsister. 
j;ms  leurs  i>rébendes  ;  et  quoique  la  plupirt          On  peut  ju|,'er  par  la  multitude  des  moinra 
vivent  en  leur  parliculier,  Alvarez  dit  né.in-  de  ce  pays  qu'il  doit  y    avoir  aussi  beaucoup 
moins  qu'il  a  vu  quelques  rommun.iulés  de  de  mon.istères,  n'y  ayant  guère  de  ville  où 
cos    sortes   de  chanoines.  Ces  moines,  qui,      il  n'y  en  ail  plusieurs,  outre  ceux  qui  ^onl  a 
selon  M.  Ludolf,  sont  dispersés  (à  et  là  dans  la  campi^^Mieet  dans  les   l)ois.   Les    plus  fa- 
de pauvres  cabanes,  et  dont  il  dit  que  la  de-  nieux  sont  premi'remen!  celui  de  la  Vision 
nieure  no  peut  pas  être  appelée  inon.istôre,  de  Jésus,  celui  de  Sainte-Anne,  situé  sur  une 
sont  sans  doute  ceux  que  les  couvcnis  où  i!s      nion(ai;ne   entre  Gondar  et  Eml'ras,  qui   est 
ont  pris  l'hahil   envoient  pour   gagner  leur  un  lieu  de  dévotion  où   il  vient  de  bien  loin 
vie  :  et  ainsi  M.  Ludolf  ne  s'est  peut-être  pas      un  grand  nombre  de  personnes  en  pèlerinage; 
•  rompe   Icrsqu'il    a   dit  que   chacun    de  ces      celui  de   Tzemba,  sur  la   rivière  de  Reb,  à 
moinPs  cultive  son  héritage,  qu'il  vit  de  ce      une    denii-iieue   d  •    Gondar,  qui   est    très- 
qu'il   produil,  en  pouvant  disposer  à  sa  vo-      beau    et    très-grand,    aussi    bien    que   celui 
lunté,  ayant  pouvoir  d'aller  où  bon  lui  seni-  d'HcIcni   et  celui  û' Alléluia.  Ce   dernier  fut 
ble  et  de  revenir  quand  il  le  juge  à  propos,  ainsi    nommé,  à  ce  qne  disent  cos  moines, 
Il  pouvait  même  ajouter  (jue  ces  moines  Ira-      par  celui  qui  en  fut  le  premier  abbé,  sur  le 
fiquaient,  et  que  les  marchés  en  étaient  rem-      rapport  d'un   ermite  qui,  étant  en   oraison, 
plis, comme  nousavons  dit.Cepcndantquai.d      vit  en  extase  et  entendit  des  anges  qui  th.m- 
ils  sont  retournés  dans  leurs  couvents,  ils  y      laient  Alléluia  dans  ce  lieu, 
vivent  en  commun  cl  très-ausièrement,  sous         II  y  a  aussi  un  grand  nombre  de  relig'eu- 
la  conduite  d'un   supérieur  dont  ils  dépen-  ses  en  î'^lhiopio,   qui  sont  pareillement   ha- 
denl  entièrement.                                                     billées  de  toile  de  coton  ou  de  peaux  jaunes, 
H  y  a  de  l'apparence  que  ce  monistère  de  cl  ne  portent  ni   manteau   ni  capuce.   Elles 
la  Vision  et  les   auires  qui  y  sont  unis  sont  ont  la  télé   risée,  autour  de  laquelle  elles 
de   1  institut  de   Tecla-Ha'imanot ,    puisque  ont  un  bandeau  de  cuir  lar;,'e  de  doux  doigt  , 
l'abbé  de  ce  monastère  en  est  non-seulemont  qui,   passant    par-dessous  le   menton,  se^lio 
le  supérieur,  mais  qu  il  a  aussi  une  juridic-  sur  le  froni,  et  dont  les  deux  bouts  pendent 
tion   sur  les  autres  qui  en  dépendent,  dans  sur  les  épaules  (1).  Il  y  en  a  qui  croieni  que 
lesquels  il  n'y  a  poi.it  d'abbés,  mais  seule-  ce   n'est   (]u  •  ihabilloment  dos   novices,  et 
oient   des   supérieurs    qu'il    nomme;  et   cet  que  les    professes    peuvent   mettre    un   voile 
abbé  de  la  Vision  pourrait  bien  être  le  même  ci  un  mantiîau.  D'aiiires  disent  que  cela  n'e>l 
qui  a  eu  autrefois  sa  résidence  au  monaslôie  permis  qu'ans  vieilles.  Elles  ne  sont   point 
de  Debra-Libanos,    et  ensuite  à  Bagendra,  ronfemiécs  dans  des  monasièrcs,  mais  elles 
qu'il  aurait   encore  transférée  au  nionaslèic  dcnjeurenl  dans  les  fermes  et  les  villages  qîii 
do  la   Vision.   A  l'éi^ard  des  monastères   de  dépendent   et    obéissent    au    monastère    (,ù 
l'île  de   Saint-Claude,   de   Sainlc-Annc,    do  elles  ont    pris  l'Iiabil.   Alvarez   dit  avoir  vu 
Tzemba  et  des  autres  dont  parle  AI.  Poncel,  quehiues   communautés  de    religieuses  qui 
qui  ont  chacun  un  abbé,  ils  sont  sans  doute  ont  néanmoins   la  liberté  de  sortir  de  leurs 
de  l'institut  de  l'abbé  Eust.ise,  pour  les  rai-  maisons  pour  aller  où  bon  leur  semble.  Il  y 
sons  que  noiis  avons  dites  ci-dessus  en  par-  a  de  ces   religieuses  qui  mènent  une  vie  as- 
lant  de  ces  doux  restaurateurs  de  la  vie  mo-  sez  réglée,  mais  il  y  en  a  beaucoup  qui  ne 
nastique  en  Eihiopio.  croient  pas  que  ce  soit  un  déshonneur  pour 
Tous  ces   moines,    selon  M.  Ludolf,  peu-  elles   d'avoir  des   cnf.inls.  Schojnebeck   met 
vent  exercer  des  ofiiccs  civils,  et  mémo  avoir  leur  iiistiinlion  vers  l'an  1325,  par  1 1  véné- 
des  gouvernements  de  province,  ma  s  il  n'est  rable  mère  Iniala;   mais  c'est  apparemment 
permis  à  qui  que  ce  soit   d'entre  eux  de  ro-  sur  Ja  relation  du  P.  Louis  d  Ureta  do  l'or  Ire 
noncer  à  la  vie  monastitiue  ;  et,  s'ils  sema-  de  Saint- Dominique,    qui,  dans    l'iiislojre 
rient,  ils  sont  regardes  comme  des  infâmes,  qu'il   a  donnée  d'une  province  supposée  da 
et  leurs  enfints  ne  peuvent  jamais  parvenir  son  ordre  en  Ethiopie,  a  prétenlu  que  pres- 
à  la  c'éricai.urc,   n'y   ayant  rien  tani  que  les  que  tous  les  religieux  de  ce  pays  étaient  da 
Ethiopiens  souliailent  avec  plus  de   passion  Tordre  de  Saini-Doniiniquo,  ei  que   la  mère 
(]ue  d'être  prêtres,  allu  d'avoir  la  vie  asu:-  linata   fonda   un  monastère  du    même  ordre 
rce,  ce   qui   l'ait   iju'il    y   en   a  un   si  grand  pour  d  s  religieuses  à  Bcdenagli,  où  il  u'y 
nombre;  en  elTol,  Alvarez   s'élonnant  de  la-  en  eut  d'.ibord  que   cin(|uante,  mais  doiil  le 
bus  que  le  p.îlriarche  d'Ethiopie  cûmme.tait  ii  aibre  angmeuia  jusi|u'à    cinq   mi  le  après 
en  ordonnant  un   si  grand  nombre   de  pic-  la  mort  de  celte  prétendue  fondairice  :  ce  (jui 
très,  quoi(iue  parmi  ces  prêtres  il  s'en  trou-  n'est   pas  moins   fabuleux  que  ce  qu'il   rap- 
vài  plusieurs  qui   étaient  aveugles,  d',;ulres  porie  des  couvents  de  P.urimanos  et  de  !'A!- 
qui    n'avaient   qu'un  bras,   el   d'autres   qui  leiiia,  où  il  met  neuf  mille   r.  ligieux  de  son 
n'avaient   qu'une  jambe  ;  ce  grand  nombre  crJre  dans   lu    premier,  el  sept  mille  dans 
de  prêtres  parai-sant  d'ailleurs  inutile,  puis-  l'autre,  sans   compter  les   doniosti{|uos  qui 
que  l'on  ne  dit  qu'une  messe  par  jour  dans  suut  au  nombre  de   plus  de   tro  s  nulle  dans 
chaque  église,  il  en  témoigna  sa   surprise  à  celui  de  Plurimanos,  comme  nous  l'avons  dit 
celui  qui  faisait  la  louciion  de  grand  vicaire  au  long  à  l'article  Dominicains. 
du  patriarche.  Cet  homme  lui    répondit  q  le          \  oyez  Job  Ludolf,  llist.  Etidop.  el   #'.« 
[t)  Fi^y.,  à  la  fin  du  vol.,  u"  4'J. 


2iJ 


Commrnlaire  sur  lu  mnne  Histoire;  Franr. 
Wvurcz,  sm  yoi/niie  en  lîthinpic:  Maniml. 
nescription  de  l'Afri'iiie  :  Louis  d  L'rcl.i,  llisi. 
lie  la  sngrada  orden  de  l'rrdic.  et)  Klliiopm: 
pl  le  1'.  le  (johion.  '*■  Ilecueil  des  Lettres  Edi- 
fiantes des  missions  étrangères. 

§  2.  D:s  jeûnes  et  ahstinenccs  des   moines  et 
des  religieuses  en  Ethiopie. 
Los  jeûnes  cl  abliiienrcs  >les  moines  nia- 
roniU's,aruién  eus,  jacobiles  et  copies,  sdiU 
l'.rn  lie   clmse  en  coinparaisou   des  jeûnes  ol 
morlilicalioiis   des    moines    élliiopiens,    qui 
coiiimciuenl  avec  les  séculiers   le  carcîme  île 
l'Eglise  universelle  à  la  Sexagéiime,  el  qu'ils 
■  ibservcnt    lrc>-rigoureuseinent ,    ne    inaii- 
geanl.  pendant  tout  le  l 'iiips  qu'il  dure,  que 
du  p:iin    el   ne    buvant  que  de  l'eau.    Il  est 
vrai  qu'ils  trempent   leur  pain  dans  une  es- 
père de  sauce  qu'ils  font   avec  de  la   graine 
decauiïa,  qui  est  fort  cuisante  à  la  bouche. 
Ils   se    servent  eneore   d'une    aulre    graine 
qu'ils   nomment  lehtia,  qu'ils  accommoilenl 
eu  manière  de  moutarde.  Il   se  trouve  beau- 
coup de  ces    nligicux  qui   par   dévotion  ne 
mangent  poinl  de  pain    pendant   lout  le  c.i- 
léme;   quelques-uns  même    s'absiicnr.ent 
d'en  manger  toute  leur  vie,  et  mangent  seu- 
lement de  l'agrinos,  qui  est  une  herlie  qu'ils 
font  cuire  dans  de  l'eau,  sans  sel  ni  beurre, 
et  sans    autre    assaisonnement.    Quand    ils 
n'en  peuvcni  pas  trouver,  ils  usent  de  qU'  I- 
(jiies  légumes,  comme  fèves,  lentilles  cl  a  .- 
1res  semblables,  qu'ils  fonl  seulement  an);)l- 
lir  dans   de  l'eau.  Ouelques-uns  portent  uu 
liabit  de  cuir  sans  manelies,  ayant  les  bras 
lout  nus  ;  plusieurs  oui  sur  leur   chair  une 
rcinlure  de  fer  large  de   quatic  doigis,  avec 
des  poiii(es  qui   entrent  bien   avant  dans  la 
ihair;  d'autres  ne  s'asscjcnl  point  pendant 
lout  le   temps   du   cart'mc,  mais   demeurent 
toujours  debout.  Il  y  on  a  aussi  qui  pendant 
ce  tcnips-là  se   vont  leniinner  dans  des  ca- 
vernes, où  ils  vivent  d'herbes  et   de  lentilles 
seu'cUK'nl.  Il  y   a  cnc.irc  beiucoup  de  reli- 
gieux il  de  religieuses  qui  tous   les  niercre- 
ilis  et   vendredis  du  c.iréiue   passent    II  nuit 
dans  I  eau.   François  .\lvarez   dit  qu'il  avait 
do  la   peine  à   le   croire;    mais  qu'ayant  été 
avec   plusieurs  personnes  sur  le    bord  d'un 
lac,   ils  virent  qu'il  y   en  avait  une  inlinilé 
d.iiis    ce    lae.    et  que  quelques-uns   étaient 
dans  de   petite;  loges  d  •  |  ierres   bàlics  e\- 
prés.  Il  y  a  do  ra|)par(iiee  que  les  nuils  sont 
iiien  friiiiles  en  ce  pays-la  ;  autrement  ce  ne 
serait  pas  une   nmrtilicalion  de   rester  dans 
l'eau  iniidanl  la    nuit  dins   le  temps  du  ca- 
rême, dans  un  p.iys  où  le   soleil  e>l  très-ar- 
dent  en  ce  tcin|)s-là,  il  où  niéme  les  fruits 
d'automne  de    nos  quartiers    sont   en  matu- 
rité, l'.nfin  il  y  en  a  qui  se  retirent  dans  d  s 
solitudes  le.  plus  affreuses   cl  des  foré  s  les 
plus  épaisses,  où  ils  ne  voient  aucun  homme, 
lai-anl  pénitence  dans  ces  lieux  écartes. 

«.Itioiqu'il  y  ail  près  de  deux  cents  ans 
qn  Alvarez  ail  écrit  sa  rel  ition  où  il  l'ail  un 
détail  d>"  ces  pénitences  et  de  ces  niorlifiea- 
tions  des  religieux  d'Ivthiopie,  il  stinblc 
iiéamiioiiis    qu'ils    n'en  aient  rien   diminue 


PlCTIONNAirîE  DES  OUDRES  RELIGIEIX.  5r.2 

jus^iu'à  [irésont  :  car  M.  Poncct,  qui  y  était 
en  171)0,  dit  aMiir  vu  dans  le  monastère  de 
la  Vision  de  Jésusun  vieillard  âgé  d'envii  oit 
soixante-six  ans,  frère  du  gouverneur  de 
ligré,  qui  n'avait  \  écu  pendant  sept  ans  que 
de  feuilles  d'olivier  sauvage,  rt  que  ceile 
morlilicalion  lui  avait  causé  un  crachement 
de  s;ing  qui  rincomn.odail  beaucoup  ;  c'e^t 
pourquoi  il  lui  ordonna  quelques  remèdes 
el  lui  prescrivit  un  régime  de  vie. 


La  snanlère  la  plus  ordinaire  i!e  j  ûner 
pirmi  ces  religieux  est  de  ne  manger  sou- 
ieinent  que  de  deux  jours  en  deux  ji:urs,  el 
toujours  le  soir  ipiand  le  soleil  est  couche  ; 
mais  le  samedi  ni  le  dimanche  ils  ne  jeûnent 
point  ;  et  comme  dans  chaque  église  il  ne  s'y 
dit  qu'une  messe  par  jour,  ils  ne  la  cclé- 
brenl  que  le  soir  les  jo  irs  qu'il.s  jeûnent,  el 
tous  y  communient,  après  quoi  ils  vont  man- 
ger. La  raisin  qo'ils  en  donnent,  c'est  c;u'ils 
disent  que  Noire-Seigneur  Jésus-Christ  fil  la 
cène  le  soir  un  jour  de  j  une.  Aux  aulri's 
jours  qu'on  ne  jeûne  point,  ils  la  disent  le 
matin. 

Ces  religieux  se  lèvent  deux  heu-.es  avant 
le  jour  pour  dire  leurs  malinrs  cl  ne  man- 
gent jamais  de  viande  dans  I;'  couvent.  Mais 
Alvarez  remarque  que  lorsqu'ils  se  trou- 
vaient avec  les  Portugais  .  ils  ne  laissaient 
pas  d'en  manger  1 1  de  boire  du  vin,  pourvu 
qu'ils  n'eussent  point  de  compagnon,  de  peur 
qu'il  n'en  ave  lit  le  supérieur,  qui  les  au- 
rait eliâiiés  sé\èremcnl  pour  celle  transgres- 
sion. M.  l'oncet  dit  qu'il  en  a  vu  qui  se  le- 
vaient deux  fois  la  nuit  pour  chanter  d^-s 
psaumes  :  peut-être  que  c'est  selon  les  dilTé- 
rcnis  insllluls  qu'il  y  a  en  ce  pays,  soit  de 
l'abbéTécla-Haïmanot,soilde  l'ablieKuslase. 

Outre  le  carénii'  dont  n-ms  avons  parle, 
qui  dure  cinquante  jours,  .^i.  Poucet  dit  qu'i  s 
en  ont  emore  trois  autres,  de  même  qu'  le 
reste  du  peujde  :  savoir,  celui  de  saint  Pierre 
tl  de  saint  Paul,  qui  dure  queli)uer,)is  qua- 
rante jours  et  quelquefois  moins,  sebiu  que 
la  fcle  de  Pâques  eslpUis  ou  moins  avanree  ; 
celui  de  r.\ssomptio  I  de  Notre-Dame,  qui 
est  de  quinze  jours  ;  el  celui  de  t'Avent,  qui 
est  de  trois  semaines.  François  Alvarez  mar- 
que néanmoins  ces  carêmes  d'une  aulre  ma- 
nière que  M.  Poncct.  Duire  le  carême  de  la 
llésuriection  de  Noire-Seigneur  ,  qui  com- 
mence à  la  Sexagcsiiiie,  il  dit  qu'ils  jeûnent 
depuis  le  lundi  de  la  Trinité  jusqu'au  jour 
de  la  Nativité  de  Noire-Seigneur  ;  que  de- 
puis ce  jour-là  jusqu'à  la  Purification  de 
Notie-Uame,  ils  ne  jeûnent  point,  m  .is  que, 
les  trois  jours  qui  suivent  celte  f..'le,  ils  ne 
mangent  qu'une  f.  is  en  ces  trois  jours,  ce 
qu'ils  appellent  la  pénitencede  Ninive.  Nous 
aimons  mieux  ajouter  foi  à  Alv.irez,  qui  était 
|)lus  insiruil  que  M.  Poucet  de  ce  qui  regar- 
dai! la  religion  el  les  impurs  des  Ltbiopien.;. 
Dans  tousces  carêmes  on  ne  se  sert  ni  d'ieufs, 
ni  de  beurre,  ni  de  fromage  ;  ou  |eùne  avec 
la  même  rigueur  lous  les  vendredis  de  l'an- 
née. On  ne  dispense  personne  du  jeûne,  les 
jeunes  gens,  les  vieillards  et  même  les  ma- 
l.ldes  y  sont  obligés. 

.Mais,  a\cc  tant  d'auslcrilés  ri  de  morlifi- 


353 


ETI 


ET/ 


23J 


calions,  ces  relip;icux  son!  si  attachés  à  leurs 
erreurs,  qu'ils  n'écoutent  point  les  mission- 
naires qui  vont  chez  eux  pour  les  faire  ren- 
trer au  sein  de  l'Eglise.  Ils  se  sont  toujours 
opposés  à  leurs  bons  desseins  en  empêchant 
que  les  peuples  ne  se  ronvertissent.  Ils  leur 
inspirent  tant  d'aversion  pour  les  Europé- 
ens, qui  sont  blanes  par  rapport  à  eux,  qu'ils 
leur  font  mépriser  et  même  haïr  tout  ce  qui 
est  blanc  ;  c'est  pourquoi,  s'ils  représentent 
saint  Michel  terrassant  le  diable,  saint  Mi- 
chel est  de  couleur  olivâtre,  qui  est  celle  des 
Abyssins,  et  le  diable  est  blanc. 

Le  pape  Clément  VII,  aQn  d'attirer  ces 
peuples  à  la  foi  orthodoxe  et  les  ramener  au 
sein  de  l'Eglise,  leur  accorda  en  1525  l'é- 
(rlise  de  Saint-Etienne  qu'on  nomme  des  In- 
diens ou  des  Maures  (1),  à  côté  de  laquelle 
il  y  a  un  hôpital  oiî  ceux  qui  viennent  à  Rome 
sont  logés  et  entretenus  aux  dépens  du  pape. 
Grégoire  XIII  ordonna  que  lorsqu'il  y  aurait 
des  Abyssins  à  Rome,  on  leur  fournirait  du 
palais  tout  ce  qui  leur  serait  nécessaire  (2). 
Innocent  XII,  imitant  la  piété  de  ses  prédé- 
cesseurs, a  établi  un  fonds  decinquante  mille 
écus  romains  de  revenu  pour  envoyer  des 
missionnaires  en  Ethiopie  et  dans  les  autres 
provinces  de  l'Afrique.' 

ils  ont  une  chapelle  à  Jérusalem  dans  l'é- 
glise du  Saint-Sépulcre,  oii  ils  font  l'office 
suivant  leur  rite  ;  et ,  selon  les  relations  de 
plusieurs  voyageurs,  ils  le  font  avec  tant 
J'indévolion  et  d'irrévérence,  qu'ils  s'attirent 
le  mépris  de  tous  les  étrangers.  Mais,  comme 
il  y  a  peu  de  voyageurs  qui  s'accordent  en- 
semble, M.  Poncet,  parlant  de  leurs  céré- 
monies de  la  messe,  dit  qu'elles  sont  majes- 
tueuses. 11  y  avait  autrefois  plusieurs  moi- 
nes Ethiopiens  qui  allaient  tous  les  ans  eu 
grand  nombre  en  pèlerinage  à  Jérusalem,  et 
faisaient  en  sorte  de  s'y  trouver  la  semaine 
sainte.  Alvarez  dit  qu'étant  à  Barua  dans  le 
gouvernement  du  Bernagas ,  il  y  eut  une  ca- 
ravane composée  de  trois  cent  trente-six. 
moines  et  de  quinze  religieuses,  qui  partit 
pour  ce  voyage,  mais  qu  ils  furent  pris  par 
les  Arabes  ;  que  les  vieux  furent  tués,  les 
jeunes  vendus  pour  esclaves,  et  qu'il  n'y  eu 
eut  pas  plus  de  quinze  qui  se  sauvèrent.  De- 
puis ce  temps-là  ils  n'ont  point  été  à  Jérusa- 
lem en  caravane;  il  y  en  a  seulement  quel- 
ques-uns qui  y  vont  comme  passagers.  Nouà 
donnonsl'habillementde  ces  religieuxet  reli- 
gieuses tel  que  ledécriventAlvarezelM.  Pou- 
cet. 

Voy.  Fran.  Alvarez ,  Yoyaqe  d'Elhiopu. 
Le  Gobien,  Lettres  édifiantes  des  missions 
JV'  vol.  Le  Monde  de  Davity  ;  et  Morigia, 
Jlist.  de  toutes  les  religions,  c.  10. 

ETIENNE  PAPE  ET  MARTYR  (Ordre  mi- 
litaire DE  Saint-),  en  Toscane. 
Pendant  que  l'on  travaillait  en  Espjigne  et 
en  Portugal  à  la  réforme  des  monastùres  de 
l'ordre  de  Saint-Benoît,  ce  môme  ordre  ac- 
quit un  nouveau  lustre  en  Italie  par  l'insti- 
tution de  celui  de    Saint-Etienne,   qui  com- 


.  prend  des  chevaliers  et  des  chapelains,  des 
religieux  et  religieuses  ,  qui  sont  l(.us  sou- 
mis à  la  règle  de  Saint-Benoît.  Ce  qui  donna 
lieu  à  l'institution  de  cet  ordre  militaire,  fut 
la  victoire  que  Côme  de  Mélicis,  qui  fut  pre- 
mier grand-duc  de  Toscane,  remporta  pro- 
che Marciano,  l'an  1554,  lii  deuxième  jour 
d'août,  fête  de  saint  Etienne  pape  et  martyr, 
sur  le  mnréchal  de  Strozzi,  qui  commainlail 
les  troupes  de  France.  Ce  prince,  pour  con- 
server la  mémoire  de  cette  viitoire,  qui  lui 
assurait  la  souver.iineté  de  la  Toscane,  ob- 
tint du  pape  Pie  IV,  l'an  1561,  une  bulle  qui 
lui  permettait  de  fonder  cet  ordre  militaire 
sous  la  règle  de  Saint-Benoît,  dont  la  princi- 
pale fin  serait  de  défendre  la  foi  catholiqueet 
de  faire  la  guerre  auxcorsaiiesqui  par  leurs 
pirateries  empêchaient  le  commerce  de  la 
Méditerranée.  Côme  de  Médicis  ayant  ins- 
titué cet  ordre  et  dressé  des  statuts ,  que  les 
chevaliers  devaient  observer,  le  même  pon- 
tife l'approuva  par  une  autre  bulle  de  l'an 
1562,  et  déclara  ce  duc  de  Toscane  et  ses 
successeurs  grands  maîtres  et  chefs  de  cet  or- 
dre, auquel  il  accorda  plusieurs  privilèges, 
affranchissant  de  la  juridiction  desordinaircs 
non-seulement  la  personne  des  chevaliers, 
mais  même  leurs  biens ,  en  ce  qui  regardait 
les  commanderies  et  bénéfices,  les  exemptant 
de  toutes  sortes  de  décimes,  leur  permettant 
de  se  marier  et  de  pouvoir  posséder  des  pen- 
sions sur  des  bénéfices  jusqu'à  la  somme  de 
deux  cents  écus  (même  ceuxqui  auraient  été 
mariés  deux  fois),  ce  qui  fat  augmenté  jus- 
qu'à la  somme  de  quatre  cents  écus  d'or  par 
les  papes  Sixte  et  Paul  V. 

Comme  le  duc  de  Toscane  fonda  cet  ordre 
à  Pise,  il  voulut  que  la  résidence  ordinaire 
des  chevaliers  se  fît  en  celle  ville,  où  il  leur 
fit  bâtir  deux  maisons  conventuelles,  aux- 
quelles il  joignit  une  magnifique  église,  que 
ses  successeurs  ont  eu  soin  d'embellir.  Ces 
deux  maisons  sont  les  principales  de  l'or- 
dre; il  y  a  toujours  un  grand  nombre  de 
chevaliers  qui  y  demeurent,  avec  des  cha- 
pelains pour  fiire  l'office  divin,  lesquels 
chapelains  sont  aussi  chevaliers  et  religieux 
de  cet  ordre,  et  vivent  en  commun  sous  l'o- 
béissance d'un  grand  prieur,  qui  est  grand'- 
croix  de  l'ordre,  et  qui  se  sert  d'ornements 
pontificaux  dans  les  fonctions  ecclésiastiques. 

A  peine  cet  ordre  eut-il  été  établi,  que  les 
chevaliers  se  mirent  en  mer  l'an  1563  et  con- 
tinuèrent pendant  plus  d'un  siècle  à  donner 
des  preuves  d'une  valeur  peu  commune; 
car  cette  même  année  1563  ils  s'emparèrent, 
avec  leurs  galères,  de  quelques  vaisseaux 
turcs,  et  donnèrent  la  chasse  aux  galères  de 
Rhodes.  Ils  se  joignirent,  l'an  1564,  aux  ga- 
1ères  d'Espagne,  qu'i's  aidèrent  à  prendre  la 
forteresse  de  Pignon.  Ils  donnèrent  secours 
l'an  1563  aux  chevaliers  de  Malte,  lors- 
que les  Turcs  assiégèrent  leur  île.  Ils  atta- 
quèrent en  1368  deux  vaisseaux  d'un  fa- 
meux corsaire  nommé  Carasceli,  et  s'en  ren- 
dirent maîtres.  Ils  armèrent  en  1571  douze 
galères,  avec    lesquelles   ils    se  joignirent  à 


(1)  Abb.  Piazza,  Uper.  piedU(oma,  Irait.  2, cap. 5.  (i)  Ibid.,  Tratt.  5,  cup.  5. 

Dictionnaire  des  Ordres  religieux.  H. 


S35 

l'armôc  des 


DCTIONNAIIIK  DKSOnURES  nrUClfLX. 


23« 


rhrôlirns  qui  rcinporl.'i  la  Ti- 
iiiousc  victoire  de  Lépiiiile.  Le  corsaire  l!ar- 
beroU'isc  éprouva  !cur  vylcur  en  1572  lors- 
qu'ils lui  (irirenl  sa  ca|)iiaiic  ;  ol  ,  après 
avoir  rcmpinlé  plusieurs  atanlagcs  sur  les 
iiifidùlcs,  ils  obligèrent  le  (iraiid  Seii;neur  à 
demaiuler  la  paix.  Les  arlicli  s  (■ronl  dres- 
ses de  part  et  d'autre  ;  mais  le  chevalier 
lluoii;;iaiini  Gianfiliazzi  avant  élu  envoyé  à 
Constanlinop  e  pour  la  faire  r.ililior,  il  trou- 
va que  les  Turcs  avaient  changé  de  senti- 
ment ,  el  retourna  en  Italie  sans  avoir  exé- 
cuté sa  commission.  Ainsi  la  puerre  recom- 
mença entre  les  infidèles  et  Cômedc  Méd.cis, 
ijui  avait  été  lait  {;rand-duc  par  le  pape  Pie 
V,  l'an  loC9,  malgré  les  oppositions  do  l'em- 
pereur Maxiinilien  et  de  Philippe  11 ,  roi 
cl  Espnsnc. 

François  de  Médicis  ayant  succédé  à  son 
père  Côme  l",  fit  armer  les  galères,  qui  rem- 
poilôrcntde  nouveaux  avantages.  Les  che- 
valiers de  Sainl-Elicnne  s'emparèrent  du 
Cole  en  Uarbaric,  en  1582,  de  Monaslero  et 
de  quelques  autres  places  en  1583,  de  Chio 
en  lo'JO,  de  Preveza,  sur  les  frontières  d'Al- 
banie, en  160i.  Ferdinand  1",  qui  hérita  des 
Etats  de  son  frère  François,  renforça  l'esca- 
dre des  chevaliers  de  Saint-Etienne  de  huit 
galères  et  six  gallions.  En  1607  ils  saccagè- 
rent la  forteresse  de  l'one  en  Barbarie,  et 
voulurent  s'emparer  de  Famagosle  en  Chy- 
pre ;  mais  ils  furent  repoussés  par  les  Turcs, 
qui,  croyant  vaincre  encore  ces  chevaliers, 
mirent  en  mer  l'an  IGOS  une  armée  de  qua- 
rante-cinq galères.  Les  chevaliers  ne  lais- 
sèrent pas  de  les  attaquer,  quoiqu'ils  n'eus- 
sent que  six  galères  et  onze  gallions,  et  les 
obligèrent  de  prendre  la  fuite.  Côme  II  ayant 
rejeté  les  propositions  do  paix  que  la  Porte 
îui  avait  faites,  arma  de  nouveau  ses  cheva- 
liers, qui  prirent  l'an  1610  Hischieri  en  U.ir- 
barie,  Disto  en  Négrepont,  l'an  1611,  Chier- 
mon  l'année  suivante,  et  la  forteresse  d'Eli- 
m  in.  dans  la  Caramanie,  l'an  1613,  d'où  ils 
icniporlèrent  de  riche»  butins. 

Après  la  mort  de  Côme  II,  Ferdinand  II 
lui  a.»  uni  succédé,  il  ue  lémoigna  pas  moms 
d'.irdeurà  faire  agir  les  chevaliers  de  Sainl- 
Eti<iine,  qui,  après  s'être  encore  emparés  de 
liischieri,  prirent  en  162'v  vingt-cinq  galères 
turques  et  un  grand  nombre  de  petits  bâti- 
ments, dont  on  voit  encore  les  dépouilles 
dans  les  couvents  de  cet  ordre  à  Pise  cl  à 
Livourne.  Le  long  siégo  de  Candie  fut  en- 
core une  occasion  à  ces  chevaliers  pour  faire 
preuve  de  leur  valeur,  et,  ciuoiquc  la  paix  se 
lit  l'an  1670  entre  les  \  éniticns  et  le  Grand 
Seigneur,  ils  ne  laissèrent  pas  de  poursui- 
vre leurs  avantages  sur  Us  tioupes  ottoma- 
nes. On  compte  plus  de,  cini  mille  siv  cents 
chrétiens  qu'ils  ont  délivrés  des  fers,  et  qua- 
torze mille  huit  rent-soixante  et  onze  escla- 
ves ()u'ils  ont  faits  jusqu'en  1678.  Depuis  ce 
temps- 1.1  on  n'a  guère  parlé  de  leurs  expé- 
ditions, si  ce  n'est  qu'en  168't,  la  république 
de  Venise  ct.inl  entrée  encore  en  guerre  .ivec 
les  Turrs,  les  galères  du  graml-duc  se  joi- 
Vo;/.,  a  la  lin  du  vol.,  ii"  .'  0. 
Vo'i:  à  b  lin  du  \ol.,  n°  61, 


gnirent  à  l'armée  des  Vénitiens  comme  trou- 
pes auxiliaires.  Les  figures  de  bronze  de  Côme 
l'^ctdc  son  fils  I''crdinaiid  1",  qui  sonlà  Flo- 
rence dans  la  place  Dui  aie  et  dans  celle  de 
l'Annonciadc,  ont  été  faites  des  canons  pris 
sur  les  inridclos,  comme  il  parait  par  l'ins- 
cription qui  est  sur  le  piéilest  il  de  la  pre- 
mière, où  on  lit  ces  paroles  :  Di  métallo 
rapilo  al  ficro  Trace. 

Il  y  a  dans  cet  ordre  des  chevaliers  de 
justice,  des  chapelains  et  des  frères  ser- 
vants. Parmi  les  chevaliers  de  justice,  qui 
sont  obligés  de  faire  preuves  de  noblesse  de 
quatre  races,  il  y  a  aussi  des  ecclésiastiques 
obliges  aux  mêmes  preuves,  et  les  uns  et  les 
autres  portent  la  croix  rouge  à  huit  angles 
criée  d'or,  tant  sur  le  c6ié  gauche  de  leiir 
habit  que  sur  le  manteau.  Les  chapelains  ou 
prêtres  d'obédience  sont  véritablement  reli- 
gieuxet  portent  du  tôle  gauche  la  croix  ron- 
georlée  seulement  de  soie  jauni',  et  les  frè- 
res servants  la  portent  de  même,  au  côiêdrnii. 
Il  y  a  aussi, comme  dans  l'ordre  de  Malle,  des 
demi-croix.  L'habit  do  eéréinonio  des  che- 
valiers consiste  en  un  grand  manteau  de  ca- 
melot blanc  doublé  de  lafTetas  incarnat ,  avec 
des  cordons  de  même  couleur  pendant  jus 
qu'à  terre  (1).  Celui  des  chapelains  consiste 
en  une  soutane  blanche  doublée  de  louge,  un 
camail  aussi  de  camelot,  sur  le(|uel  est  la 
croixdel'ordrectun  roi  het  (2).  Leur  habit  or- 
dinaire pour  le  chœur  consiste  en  une  soutane 
noire,  un  surplis  et  une  aumusse  noire  sur 
le  bras,  sur  laquelle  aumusse  est  la  croix  de 
l'ordre  (3j.  Et  l'Iiabil  des  frères  servants  n'est 
que  de  serge  ou  rase  blanche  avec  dos  man- 
chesêiroites, doublées  de  taffetas  rouge  et  la 
croix  du  côte  ilroii. 

Le  conseil  de  l'ordre  est  composé  de  douze 
chevaliers,  qui  s'assemblent  à  Pise  dans 
l'un  des  deux  palais  où  sont  la  chancellerie 
et  les  archives,  pour  y  traiter  de  toutes  les 
affaires  qui  cuncerneui  l'ordre,  tant  pour  le 
spirituel  que  pour  le  tein|.iorel.  Les  cheva- 
liers grdii'i'troiï  et  ceux  qui  sont  obliges  de 
servir  sur  les  galères  pour  faire  leurs  cara- 
vanes, doivent  résider  dans  1  un  dos  dcu\ 
palais,  où  ils  sont  nourris  et  entretenus  aux 
dépens  de  l'ordre,  et  les  novices  y  sont  ins- 
truits de  tous  les  exercices  quiconvionnenlà 
la  noblesse. 

Les  principales  dignités  de  l'ordre  sont 
les  grands  commandeurs,  dont  l'ofiice  dure 
pendant  la  vie  du  grand  maitre;  le  grand 
eonnét.ible ,  l'amiral,  le  grand  prieur  du 
l'ouveal,  le  grand  chancelier,  le  trésorier  gé- 
néral, le  conservateur  général  et  le  prieur 
de  l'église,  qui  s'élisent  tous  les  trois  ans 
dans  le  chapitre  général,  où  se  trouve  le 
grand-duc  comme  grand  maître,  cl  où  on 
elit  aussi  les  chevaliers  à  la  grand'croix  et 
les  douze  qui  doivent  roniposer  le  conseil. 
Ce  chapitro  se  lient  le  dimanche  in  Albis  : 
tous  les  chevaliers  qui  sont  en  Toscane 
sont  obligés  de  s'y  trouver.  Il  y  en  a  tou- 
jours plus  de  trois  cents.  Les  frais  de  leur 
voyage  leur  sont   payés,  et  ils  sont  nourris 

(■)  Y(iy  ,  il  la  fin  du  vul.,  n*52. 


237 


ETO 


Pi  logés  avec  leurs  seivileurs  pendant  le 
temps  du  chapitre.  L'ordre  possède  vingt- 
trois  prieurés,  Ireiile-cinq  bailliages,  et  an 
très-grand  nombre  de  commanderies.  Lors- 
que les  chevaliers  font  profession,  ils  font 
vœu  de  pauvreté,  de  charité  et  d'obéissance; 
et  les  chapelains,  comme  religieux,  de  pau- 
vreté, de  chasteté  et  d'obéissance.  Le  grand 
maitre  donne  l'habit  aux  chevaliers,  et  leur 
fait  faire  pofession  ;  et  les  chapelains  ne  la 
font  qu'entre  les  mains  du  grand  prieur,  qui 
leur  donne  aiis^i  l'habit. 

Bernard  Giusiiniani,  Hisl.  Chronol,  de  gli 
Ord.  milit.  et  relig.  caval.,  tum.  II.  Fran- 
cise. Mennenius,  de  Ord.  milit.  Silvestr. 
Maurol.  Mar.  Océan,  di  tult.  gl.  Religion, 
Ascag.  Taniburin.,  (/eyiir.  Abbat.  lom.  Il, 
disp.  24.  qiiœsl.  5,  n.  85.  Bullarium  Roma- 
num,  ei  Slatuli  et  Constitulioni  deW  Ordine 
dis.  Stefano. 

Après  que  Côme  I",  duc  de  Toscane,  eut 
institué  l'ordre  militaire  de  Saint-Etienne, 
l'an  1582,  pour  des  chevaliers,  des  chape- 
lains et  des  frères  servants,  comme  nous 
avons  dit,  il  voulut  encore  y  joindre  des  re- 
ligieuses, pour  imiter  davantage  l'ordre  de 
Malle,  qui  lui  avait  servi  de  modèle  pour 
former  celui  de  Saint-Etienne.  C'est  pourquoi 
les  religieuses  Bénédictines  qui  desservaient 
l'abbaye  de  Saint-Benoît  de  Pise,  quiav.il 
été  donnée  à  l'ordre  de  Saint-Etienne  par  le 
pape  Pie  IV  l'an  1565,  furent  incorporées  à 
cet  ordre,  et  en  prirent  l'habit.  Le  second 
monastère  de  ces  religieuses  fut  fondé  à  Flo- 
rence l'an  1588  sous  le  litre  de  l'Immaculée 
Conception,  et  le  pape  Clément  VIII  approuva 
cet  établissement  l'an  1592.  Le  P.  Bonanni, 
Jésuite,  dit  que  ce  fut  Eléonore  de  Tolède, 
femme  de  Côme  I"',  qui  fonda  ce  monastère; 
mais  cette  princesse  ne  peut  pas  en  avoir  été 
la  fondatrice,  puisque  Côme  1^'  mourut  en 
1574  et  qu'il  n'avait  épousé  Eléonore  de  To- 
lède qu'en  premières  noces. 

Les  religieuses  de  cet  ordre  doivrnt  faire 
prouve  de  noblesse;  elles  ont  pour  habille- 
ment une  tunique  ou  robe  de  laine  blanche, 
avec  un  scapulaire  de  même  étoffe,  et  sur  le 
côté  gauche  une  croix  rouge  comme  celle 
dos  chevaliers  (1)  :  celles  de  Florence  y  ajou- 
tent une  tresse  de  soie  jaune  à  l'entour.  Au 
chœur  et  dans  les  cérémonies  elles  ont  une 
coule  blanche  avec  de  grandes  manches  dou- 
blées de  talîetas  incarnat  [■>).  Les  abbesses 
portent  la  crois  plus  grande,  de  velours  rou- 
ge ;  les  sœurs  servantes  ou  converses  la 
portent  de  serge  rouge,  mais  plus  petite  que 
celle  des  sœurs  du  chreur. 

Philippe  Bonanni,  Cutnlogus  Ordinum  re- 
ligios.  in  Eccles.  milit.,  pari.  ii. 

ETIENNE  DE  STRASBOURG  (Saint-).  Voyez 
Cologne. 

ETOILE  DU  MIÎSSINE.  Voyez  Ampoule 
(Sainte-). 

ÉTOILE    DE    NOTRE-DAME    {Cuevaliers 
DE  l').   Voyez  Ampoule    (Sainte-). 


ETO  23» 

ÉTOILE  en  France  (Ordre  db  l'). 
Des  chevaliers  de  l'ordre  de  Notre-Dame  de 
ta   Noble    Maison,    communément   appelé 
l'Ordre  de  l'Etoile,  en  Franre. 

Favin  attribue  l'institution  de  l'ordre  do 
l'Etoile  à  Robert,  roi  de  France,  et  prétend 
que  ce  prince  ayant  pris  la  sainte  Vierge 
pour  la  protectrice  de  cet  ordre,  lui  donna 
le  nom  de  l'Etoile,  parce  qu'il  regardait  cette 
reine  des  anges  comme  l'étoile  de  la  mer  et 
la  guide  de  son  royaume.  Il  ajoute  que  cet 
ordre  était  composé  de  trente  chevaliers,  y 
compris  le  roi,  qui  était  le  chef  et  le  souve- 
rain grand  maître;  que  les  cérémonies  de 
l'institution  en  furent  faiies  le  jour  de  la  na- 
tivité de  la  sainte  Vierge  au  mois  de  septem- 
bre de  l'an  102-2,  dans  la  chapelle  du  Palais, 
dite  Notre-Dame  de  l'Etoile,  qui  est  la  basse 
Sainte-Chapelle,  et  que  les  premiers  qui  fu- 
rent honorés  de  cet  ordre  .iprès  le  roi  furent 
ses  trois  fils,  Hugues  le  Grand,  Henri  l""^  et 
Robert,  duc  de  Bourgogne;  Richard  H,  duc 
de  Normandie  el  de  Bretagne,  Guillaume  III 
dit  Tête  d'Eloupes,  duc  d'Aquitaine,  comte 
d'Auvergne  et  de  Poitou;  Guillaume  Jll, 
comte  de  Toulouse;  Baudouin  à  la  Belle- 
Barbe,  comte  de  Flandre;  Hébert  le  Vieux, 
comte  de  Troyes  ;  Odom,  comte  de  Beauvais  ; 
Geoffroy  Grise-Gonelle ,  comte  d'Angers; 
Amaury,  comte  de  Noy  on,  et  Baudouin  de  l'Ile, 
comte  de  Hainaut,  Gis  de  Baudouin  ù  laBelle- 
Barbe.  11  fait  même  la  description  de  l'habil- 
lement que  portaient  ces  chevaliers.  Leur 
manteau,  à  ce  qu'il  dit,  était  de  damas  blanc, 
le  maatelet  et  les  doublures  de  damas  incar- 
nat, et  la  cotte  ou  gonelle  de  même,  sur 
laquelle  était  une  étoile  d'or  en  broderie;  le 
grand  collier  était  aussi  d'or  à  trois  chaînes, 
entrelacées  de  roses  de  même  émaillées  al- 
tern;ilivement  de  blanc  et  de  rouge  (3).  11 
ajoule  que  ces  chevaliers  étaient  obligés  de 
dire  (eus  les  jours  en  l'honneur  de  la  Vierge 
la  couronne  ou  chapelet  de  cinq  dizaines  , 
avec  quelques  autres  prières  pour  le  roi  cl 
l'Etat,  et  il  rapporte  une  oraison  qu'il  pré- 
tend que  ce  prince  avait  composée  lui- 
même. 

Si  nous  voulions  encore  ajouter  foi  à  cet  au- 
teur, Philippe-Auguste  avait  reçu  de  Louis  VII, 
son  père,  dans  l'abbaye  de  Saint-Denis  en 
France,  le  collier  de  cet  ordre  l'an  1180,  le 
jour  de  son  couronnement.  Le  même  Phi- 
lipi>e  le  donna  en  la  ville  de  Gournay  en 
Normandie,  à  Artur,  en  lui  donnant  l'inve- 
stiture des  comtés  de  Bretagne,  d'Anjou  et 
de  Poitou.  Louis  VIII  fut  fait  aussi  chevalier 
de  cet  ordre  le  jour  de  son  sacre,  l'an  122V, 
dans  l'église  de  Reims.  Saint  Louis,  son  fils, 
le  fut  aussi  l'an  1226.  Le  même  saint  Louis 
donna  cet  ordre  à  Robert  de  France  l'an 
1227,  à  Corbeil,  et  l'an  1246  à  d'autres;  mais 
tout  ce  discoins  de  Faviu  i\'cA  que  fable  et 
fiction.  Outre  que  nous  sommes  persuadés 
qu'il  n'y  a  point  eu  d'ordres  mililaires  el  de 
chevalerie  avant  le  douzième  siècle,  cl  par 


(I)  Votj.,  à  la  fin  du  vol.,  n"  53. 
l'I)  Voy.,  à  In  fin  du  vol.,  n"  54. 


(5)  Voy.,  à  la  lin  du  vol.,  ii"  55 


eaa 


nicTioNNAinr  pes  ordres  religieux. 


liO 


consôqupnl  que  le  roi  Robert  n'n  pas  pu 
avoir  in^liltu-  lorJro  «le  l'Kloile,  il  osl  Irès- 
coiislaiU  que  tel  ordre  a  élé  inslilué  par  le 
roi  Jean  I  '  l'an  t3jl  :  ce  qui  est  facile  à 
jrouverpar  la  lellre  circul.iire  que  ec  prince 
écrivit  aux  seigneurs  qu'il  vnulul  lioiiorcrde 
cet  ordre,  qui  se  trouve  dan>  li  ehanibre 
des  Comptes  à  Paris,  Mémorial  C,  et  qui; 
nous  rapporterons  ici. 

Ilitiu  ci/u>in,  "Oiij!  d  l'honneur  de  Dieu   et 
en  assaucemenl  de  chevalerie  et  accroissement 
d'honneur,  avons  ordonné  de  faire  une  compa- 
gnie de  chevaliers,  qui  seront  appeliez  t'he- 
viliersde  Noire-Dame  de  la  Noble  Maison, 
yni  porteront  la  robe  cy  apris  divisiéc  ;  c'est 
assavoir  une   coite  blanche,  un  serret  cl  un 
chaperon   tcrmcil  quand  ils  seront  sans  man- 
Icl  ;  et  qunnd  ils   tcslironl   mantel,  qui  sera 
fait  à  (j'iise  de  chevalier   nouvel  ù  entrer  et 
demeurer  en   l'église   de  la   Noble  Maison,  il 
sera  vermeil  cl   fourré  de  vert  non  pasd'her- 
tnines,  de  cendail  ou  samist  blanc,  et  faudra 
qu'ils  aient  sous  le  dit  mantel  scrrel  blanc  ou 
cotte  hardie  blanche,  chausses  noires  et  soû- 
liez dorez,  et  porteront    conlinuellcmcnl  un 
annel  en  tour  la  verge  duquel  sera  escriplleur 
nom  et  surnotn,  auquel  annel  aura  un  esmail 
plus  vermeil,  en  t'esmail  une  étoile  blanche, 
au  tnilicH  de  l'étoile  une  rondeur  d'azur,  un 
petit  soleil  d'or,  et  au  muntelu  sur  l'épaule  au 
devant   en  leur   chaperon  un  fermnil   auquel 
aura  une  étoile  toute  belle  comme  en  l'annel, 
est  divisée,  et  tous  les  sabtnedis  quelque  part 
ils  seront  ils  porteront  ternuil  it  blanc  en 
cotte  et  serret  et  chaperons  comme  dessus,  se 
faire  se  peut  bonnement,  et  se  ils  veulent  por- 
ter mantel,  il  sera  vermeil  et  fendu  à  l'un  des 
castes  el  toujours  blnnc  dessous  ;  et  si  tous  les 
jours  de  la  semaine  ils  veullenl  porter  fermait 
faire  le  pourront  el  sur  quel  robe  il  leur  plai- 
ra. En  l'urmeure  pour  guerre  ils  porteront 
le  dit  fermait  en  leur  camail  ou  en  leur  colle 
à  armes,  ou  la  ou  Inir  plaira    apparemment. 
Et  seront   tenus  de  jeûner  tous  Us  sabmcdis 
s'ils  peuvent  bonnement,  et  se  bonnement  ne 
peitvenl  iceux  ou  ne  veullcril,  ils  donront  ce 
jour  quinze  deniers  pour  Dieu  en  l'honneur 
des  quinze  joyes  de  Notre  Dame.  Jureront  qu'à 
liur  pouvoir   ils    donront    loyal    conseil   au 
prince  de  ce  qu'il  leur  demandera  soit  d'armes 
et  d'autres  choses.  Et  se  il  y  a  aucun  que  avant 
celte  compagnie  nient   emprise  aucun    ordre  , 
ils  le  devront    laisser,  se   ils  peuvent  bonne- 
ment, et  se  bonnement  ne  le  peuvent  laisser  si 
srra  celle  compagnie  devant.  Et  si  en  avant 
n'en  pourront  aucune  autre  entreprendre  sans 
le  congé  du  ])rince.  Et  seront  tenus  venir  tous 
les  ans  en  In  Noble  Maison  assise  entre  l'aris 
el  Saint-Denis  en  France  à  la  veille  de  la  fcste 
de  .\otre  Dame  de  la  my  aoust   dedans  primes 
cl  y  demeurer  tout  le  jour  et  le  lendemain  , 
jour  de  la  feste  jusques  après    vespres.  Et  se 
Ijonnrmcnt  ils  n'y  peuvent  venir  ils  tn  seront 
crus  par  leur  propre  parole.    El   en  tous  les 
lieux  ou  ils  se  ircverons,  i  enir  ensemble,  au 
plus,  à  ta  veille  et  au  jour  de  ladite  mye  nous', 
(l  que  bonnnnrnt   ils  n'auront  pu  venir  à  ce 
jour  au  lieu  de  la  Noble  Maison  ;  ils  porteront 
Utdites  lobbes  cl  orront  vcsprcs  cl  ta  messe 


ensemble  se  ils  peuvent  bonnement.  El  jioiir- 
ront  tesd.  chevaliers  se  il  leur  p'ait  lever  ban- 
nière vermeil  s.'mé  d'éloilles  ordonnées  et  une 
image  de  .\olre   Dame  btiinche,  especiutement 
sur  les  ennrmys   de  la  foi  ou  pour  la  guerre 
de  leur  droiturier  seigneur,  el  nu  jour  ite  leur 
tiepasscmmt,  is  envoiront  à  la  Noble  Maison 
se  ils  peuvent   bonnement   leur  annel  et  leur 
fermait  tes  meilleurs  qu'ils  auront  faits  pour 
ladite  compagnie,  po  ir  m  ordonner  au  profit 
de  leurs  âmes  et  en  l'hnnneur  de  t'éijtise  de  Li 
Noble  Maison  en  laquelle  sera   fait  leur  ser- 
tice  solemnellemcnl.   El  sera    tenu  chacun  de 
faire  dire  ime  messe  pour  te  trépassé  au  plus- 
tosl  que  ih  pourront  bonnement  depuis  qu'i's 
l'auront  seeu.  Et  ist  ordonné  que  tes  armes  et 
timbres  de  tous  les  seigneurs  chevaliers  de  ta 
Noble  Maison  seront  peints  en  ta  salle  d'icdle 
au  dessiiiis  d'un  chacun  ta  ou  il  sera.  Et  se  il 
y  a   auctiu    que   honteusiinent   que   (  Diex  ne 
Noire  Dame  ne  veullenl)  se  parient  de  tn  bi- 
taille  ou  besogne  a  donnée,   il  sera  suspendu 
de  la  compagnie,  et  ne  pourra  porter  tel  habit 
et  H  tournera  en  la  Noble  Maison  ses  armes  et 
son  timbre  sans  dessus  dessous,  sans  effactcr 
jusques  à  temps  qu'il  fut  restitué  par  le  prince 
ou  son  conseil  et  tenus  pour  relevez  par  ton 
bienfait.  Et  est  encore  ordonné  qu'en  la  No- 
ble  Maison  aura  une  table  oppetlée  la  table 
d'honneur  en  laquelle  seront  assista  veille  et 
le  jour  de  la  feste  les  trois  plus  suffisions  bn- 
cheliers  qui  seront  de  ladite  fcste,  de  ceux  qui 
seront  reccus  enladite  compagniceten  chacune 
teille  de  feste  de  la  mye  aoust  chacun  an  après 
en  suivant  seront  assis  à  ladite  table  d'hon- 
neur les  trois  princes,  trois  bironnets  et  trois 
bacheliers   qui  l'année  auraient  plus  fait  en 
armrs  de  guerre;  car  nuls   faits  d'armes  du 
pays  ne  sera  mis  en  compte.  Et  est  encore  or- 
donné que  nut^d'iceux  de  ladite  comp/igniene 
pourra  entreprendre  el  aller  en  aucun  votage 
loingtain  sans   le  dire   ou  faire  scavoir  un 
prince.  Lesfuiex  chevaliers  seront  uu  nombre 
de  cinq  cens,  et  desquiex  nous  comme  inven- 
teur et  fondateur  d'iccite  compagnie  seront 
prince,  ainsi  t'en  devront  esirc  nos  succes- 
seurs roys,  el  nous  avons  du  es'.re  du  nombre 
di  ladite  compagnie  el  pensons  à  faire  se  Dieu 
plait  ta  première  fcste  cl  entrée  de  ladite  rom- 
pngnie  èi  S.  Ouyn  le  jour  et  la  veille  l'appa- 
rition  prochaine.    Si   soyez    aux  d.  jours  et 
lieux  se  le  pouvez    bonnentent   <)  tout  vostre 
habit  annel  it  fermait,  et  adoncqucs  sera  vous 
et  aux  autres  ])tus  à  plain  parlé  sur  celle  ma- 
lierre.  Et  est  encore  oi  donné  que  chacun  ap- 
portera ses  armes  et  son  timbre  peins  en  un 
feuillet   de  papier  ou  de  parchemin    afin   que 
tes  piinties  les  puissent  m  lire  plustot  et  plus 
proprcnirnl  la  ou   ils  devront  eslre   mis  à  la 
Noble  Maison.  Donne  à  s  lins  Christhop'ile  en 
Jlnlnttc  le  (j.  jour  de  novembre  l'an  de  grâce 
lliol. 

Il  y  a  des  auteurs  qui  prétendent  (|ue 
Ciiarlcs  \\ï,  vovaiil  ses  fmauces  épuisées, 
ne  trouva  point  d'autres  niojens  pour  ré- 
compenser les  rapilaines  de  son  ariiiec  (|uc 
de  leur  donner  le  collier  île  cet  ordre,  qui  ne 
se  duiinait  auparavaiil  qu'aux  princes  el  au\ 
grands  seigneurs   de   Iraiice;  «juc  pour  ce 


Ml 


KTO 


KTO 


515 


sujet  ceux-ci  firent  'eiir  rciiioiilraiiec  ;iii  roi, 
i|ue  c'était  avilir  l'ordre  que  de  le  donner 
indilTéremment  à  toutes  sortes  do  personnes, 
sans  avoir  égard  à  la  noblesse;  et  que  ce 
prince,  ayant  assemblé  le  chapitre  nu  palais 
de  Clichy,  l'an  153^,  Ala  le  collier  qu'il  por- 
tait cl  lé  mil  au  cou  du  cnpiiaine  du  guet  de 
nuit,  ri  l'appela  chevalier  du  guel,  ordon- 
nant qu'à  l'avenir  il  porterait  celte  marque 
de  l'ordre  de  l'Ktoile,  et  que  sur  les  hoque- 
tons des  archers  du  guet  il  y  aurait  deviiiit 
et  derrière  une  éioile  blanche  en  brodere  : 
ce  qui  donna  lieu  aux  princes  et  aux  sei- 
gneurs de  quitter  aussi  le  collier  de  l'ordre. 
Mais  les  chevaliers  ne  portaient  point  de 
Collier,  comme  on  a  pu  voir  dans  les  lettres 
de  Jean  l" ,  londateur  de  cet  ordre.  Aiu>i  le 
roi  Charles  VU  ne  pouvait  pas  avoir  ôté  son 
collier  pour  le  mettre  au  cou  du  chevalier 
du  guet.  Du  temps  de  saint  Louis,  cet  officier 
avait  déjà  la  qualité  de  chevalier  du  guet,  et, 
s'il  était  vrai  que  Charles  VU  lui  eût  donné 
l'ordre  de  l'Etoile,  il  n'aurait  pas  pour  cela 
avili  cet  ordre,  puisque  le  chevalier  du  guet 
était  toujours  gentilhomme  et  avait  même  le 
litre  de  chevalier,  comme  il  p;iraît  par  plu- 
sieurs titres;  nous  nous  contenterons  seule- 
ment de  rapporter  des  lettres  de  Louis  XI 
données  à  Heynes  en  Hainaut  le  3  août  l'ttSI, 
par  lesquelles  il  ôte  l'office  de  chevalier  du 
guel  à  Philip|;c  de  la  Tour,  chev.ilier,  pour 
en  revêtir  Jean  de  Harlay,  qui,  était  aussi 
chevalier.  LoijS  par  la  yrace  de  Dieu  Roi/  de 
France,  à  Inus  ceux  qui  ces  présentes  lettres 
verront,  salut.  Comme  par  le  trépas  de  notre 
très  cher  seiyneicr  et  père  à  cui  D.en  pardoint, 
la  couronne  et  seigneurie  de  notre  dit  royau- 
me nous  soient  par  la  dite  grâce  de  Dieu  ad- 
venuz  et  escheuz,  et  par  ce  nous  appartiengne 
pouivoir  aux  offices  d'icelui  nostre  royaume, 
de  personnes  ydoines  et  suffisantes  à  notre 
bon  plaisir,  gçavoir  faisons  que  par  la  bonne 
relation  qui  faite  nous  a  esté  de  notre  bien 
amé  Jehan  de  llarluij  escuyer  el  de  ses  vail- 
lances, proi  esses,  preudomie,  et  bonnes  dili- 
gences, à  icelui  pour  ces  causes  et  autres  à  ce 
nous  mouvons,  avons  donné  et  octroyé,  don- 
nons et  octroyons  de  grâce  especiule  par  ces 
présentes  l'office  de  chevalier  du  guet  de  nuit 
de  nostre  bonne  ville  et  cité  de  Paris,  pour 
icelui  office  avoir  et  tenir,  et  dorennavant 
exercer  aux  droits,  gaiges,  honneurs,  préro- 
gatives, prouffils  et  émoluments  accoutumez, 
el  qui  y  appartiennent,  tant  comme  il  nous 
plaira,  s'il  est  à  ce  suffisant.  Si  donnons  en 
mandement  au  prevost  de  Paris  qui  pour  nous 
sera  ou  à  son  lieutenant,  que  prins  et  receu 
dudit  Jean  de  Harlay  le  serinent  en  tel  cas 
accoutumé,  icelui  mette  et  institue  ou  face 
mettre  et  instituer  de  par  nous  en  possession 
et  saisine  dudit  office,  et  d'iceluy  ensemble  des 
droits,  gaiges,  honneurs,  prérogatives,  prouf- 
fitz  et  einolumens  dessusdits,  le  face,  souffre 
et  laisse  jouir  et  user  plaineinent  et  paisible- 
ment, et  à  luy  obéir  et  entendre  de  tous  ceux 
et  ainsi  qu'il  appartiendra,  es  choses  touchant 
et  regardant  ledit  office,  osté  et  débouté  d'i- 
celuy nostre  amé  et  féal  Phiiippes  de  la  Tour 
chevalier,  cl  tout  autre  illicite  détenteur,  non 


ayant  sur  ce  nos  lettres  de  don  précèdent  en 
date  de  es  présentes,  etc.  Pour  preuve  que 
ce  Jean  de  Harlay  était  chev.ilier  avant  que 
d'être  pourvu  de  1  office  de  chevalier  du 
guel,  nous  rapporterons  encore  les  lettres 
suivantes  du  (on>te  de  Clermont,  fils  du  duc 
de  Bourbon.  Nous  Jehan,  ainsné  fils  du  duc 
de  Bourbonnais  et  d' Auvergne,  comte  de  Cler- 
mont, lieutenant  général  et  gouverneur  pour 
monseigneur  le  rny  de  ses  pays  el  duché  de 
Guyenne,  certifions  à  tous  qu'il  appartiendra 
que  au  voyage  dernièrement  fait  an  pays  de 
Normandie  pour  la  réduction  d'iceluy  à  l'o- 
beissance  de  mondit  seigneur  le  roy  et  au  com- 
mencement d'iceluy  voyage,  preismes  et  meis- 
mes  en  nnslre  charge,  retenue  et  compagnie 
nostre  amé  et  féal  chevalier  messire  Jehan  de 
Harlay,  lequel  bien  et  honnorablemenl  monté 
et  armé,  servit  moniit  seigneur  durant  ledit 
voyage  en  nosiredite  compagnie  sans  départir, 
tant  en  sièges,  rencontres  el  courses,  qu'en 
autres  affaires  de  guerre,  esquelles  il  s'est 
trouvé  comme  bon,  vaillant  et  comme  doit 
faire.  Et  nous  tenant  siège  devant  la  ville  de 
Vire,  audit  pays  de  Normandie,  durant  iceluy 
voyage,  luy  donnâmes  l'ordre  de  chevalerie 
acec  taule  solemnité  deiics,  et  ce  certifions 
eslre  vray  par  ces  nos  lettres,  lesquelles  en 
lemoing  de  ce  avons  signé  de  nostre  main,  et 
fait  sceller  du  petit  signet  à  nos  armes  en 
l'absence  de  nostre  grand  scel.  Donné  au  Ho- 
chet en  Bourbonnais  le  22.  jour  de  janvier 
1455.  Il  y  a  encore  d'autres  lettres  de 
Louis  XI,  données  à  Bordeaux  le  20  mars 
l'iG2,  par  lesquelles  il  paraît  que  ce  Jean  de 
Harlay  avait  une  compagnie  d'ordonnance 
sous  le  titre  de  Crussol,  chevalier  et  sénéchal 
de  Poitou  :  ce  qui  l'empêchant  d'exercer  son 
office  de  chevalier  du  guet,  le  roi  lui  permit 
de  ie  faire  exercer  pendant  un  an.  Ces  let- 
tres sont  des  preuves  suffisantes  que  le  che- 
valier du  guet  était  assez  distingué  pour  no 
pas  faire  déshonneur  à  l'onlre  de  l'Etoile  en 
le  portant;  et  c'est  une  erreur  de  dire  qu'il 
ne  se  donnait  qu'aux  princes  e(  aux  gr;inds 
seigneurs,  puisque  le  roi  Jean  I",  ((ui  l'in- 
stitua, voulut  qu'il  y  eût  cinq  cents  cheva- 
liers, el  que,  l'an  1358,  il  le  donna  à  Jac- 
ques Bozzut,  qui  n'était  que  (oUatéral  ou 
conseiller  de  Louis,  duc  de  Duras,  comme  il 
paraît  par  l'épitaphe  de  ce  Bozzut  que  l'on 
voit  dans  l'église  cathédrale  de  Nnple^.  S'il 
était  vrai  aussi  que  Charles  VII  l'eût  donné 
par  mépris  au  chevalier  du  guet,  il  n'y  a  pas 
d'apparence  que  Louis  XI  l'eût  donne,  l'an 
i'j-58,  à  son  gendre  G^iston  do  Foix,  prince 
de  Navarre;  et  il  n'aurait  pas  mandé,  eu 
lilO,  aux  prévôt  des  marchands  et  échevins 
de  Paris  qu'il  voulait  veniren  celte  ville  pour 
célébrer  la  fêle  de  l'ordre  de  l'Etoile,  el  qu'il 
entendait  que  les  princes  et  les  grands  sei- 
gneurs qu'il  mènerait  avi  c  lui  fussent  logés 
liar  fourrière.  Cet  ordre  subsista  jusque  sous 
le  règne  de  Charles  ^  H!,  qui  l'abolit  à  cause 
de  l'ordre  de  Saint-Michel  que  Louis  XI,  sou 
père,  avait  institué. 

Favin,  Théâtre  d'honneur  el  de  chevalerie. 
Giusiiniani,  Jlist.  di  tutti  gli  ordini  militari. 
Archii.es  de  lu  chambre  des  comptes  de  Paris, 


iiZ 


DICTIONNAIRE  DES  OROHES  REUGIEllX. 


!IJ 


flîemortal  C,  fol.  lOS ,  cl  mfinufcritf:  de  Du 
Chi^nc,  à  1(1  bibliothèque  dti  fiai. 

KTOLK.  I  (fi/f:  IIande  iOnnHE  i»k  i.a). 

ETOLE  DOk  (i  Vrnise.  Voi/e:  CnAUSSE. 

ETKOITK  OBSERVANCE.  Voyez  les  divers 
titres  spéciaux  des  observances  slricles  cl 
réformées. 

ETROITE  OBSERVANCE  DE  CMI'AUX 
(Religieux,  de  l').  Voyez  Cîteaux,  §  3'. 

EUDISTES. 

Des  praires  wissionnairi's  communément  ap- 
pelés les  Eudisles,  avec  la  vie  de 31.  Eudes, 
leur  insliiulntr. 

Les  Endisles  forment  une  compagnie  de 
prêtres  séculiers  élablie  en  France  sous  le 
nom  et  litre  de  Jésus  et  Marie;  ils  sont 
employés  à  la  direction  des  séminaires,  cl  à 
faire  des  missions.  On  les  appelle  Iiudisles, 
parce  que  M.  Eudes  a  été  leur  instituteur. 

M.  Eudes  ,  connu  sous  le  nom  de  Père 
Eudes,  vint  au  monde  le  H  décembre  de 
l'année  ItiOl,  dans  l,i  paroisse  de  Rie  proche 
Argcnlan  ,  diocèse  de  Séez  ,  en  Normandie. 
Son  père  cl  sa  mère  furent  trois  ans  sans 
avoir  de  fruits  de  leur  maria^'C;  mais,  ayant 
fait  un  vœu  à  Dieu  sous  l'inyocalion  de  la 
sainte  A'icrge  ,  ils  obtinrent  un  fils  qui  fut 
nommé  Jean  sur  les  fonts  de  baptême,  et 
plusieurs  autres,  parmi  lesquels  se  distingua 
le  célèbre  M.  deMézeray,  liistoriographe  de 
France.  Comme  Jean  Eudes  ,  dont  nous 
parlons  ici,  était  destiné  à  devenir  l'instru- 
ment des  grands  desseins  que  Dieu  avail  sur 
lui,  il  fut  prévenu  de  tant  de  bénédi(  lions  du 
ciel,  qu'il  ne  fil  rien  paraître  de  puéril  dans 
son  enfance.  Dès  qu'il  fut  en  état  de  recevoir 
des  instructions ,  il  1rs  rechercha  avec  em- 
pressement ;  et,  comme  elles  éiaient  négli- 
gées dans  sa  paroisse,  il  fit  tant  auprès  de 
son  père  et  de  sa  mère,  qu'ils  lui  permirent 
de  les  aller  chercher  chez  les  curés  et  1rs 
pré'res  du  voisinage.  Ce  fut  parce  mo>en 
•lu'il  apporia  de  grandes  dispositions  à  faire 
"a  première  communion.  Il  en  retira  de  si 
grands  fruils,  et  des  instructions  qu'il  rece- 
vait de  ses  m.iitres,  que  sa  piété  croissait  à 
proportion  qu'il  avançait  en  âge.  Le  Saint- 
Esprit  alluma  dès  lors  dans  son  cœur  un  si 
grand  amour  pour  Dieu  et  lui  donna  une 
connaissance  si  parfaite  des  faux  plaisirs  du 
monde,  que  pour  y  mieux  renoncer  il  fit  vœu 
de  cliastelô  à  l'âge  de  ik  ans. 

Dès  qu'il  se  fut  ainsi  consacré  à  Dieu,  il 
alla  faire  ses  études  à  (^aen,  où.  craignant 
la  contagion  du  libcrlinagc  ordinaire  aux 
écoliers,  il  n'y  eut  point  de  précautions  qu'il 
ne  (irîl  pour  conserver  son  innociMice;  et, 
«omme  les  l'ères  Jésuites  n'élèvent  pas  moins 
la  jeunesse  dans  la  piété  que  dans  les  sciences 
humaines,  il  se  fit  recevoir  à  la  congrégation 
établie  dans  leur  collège,  où  il  faisait  ses 
études,  pour  être  sous  la  protection  spéciale 
«le  la  sainte  Vierge.  Ayant  été  admis  dans 
cette  congrégation ,  il  devint  le  modèle  des 
autres  écoliers  ,  non- seulement  par  son  as- 
siduité aux  assemblées  et  à  fré(|uenler  les 
sacrements,  mais  encore  par  son  ai'i'lii  alion 


à  l'élude,  dans  l.iquelle  il  fil  un  progrès  mer- 
V  eilleux. 

Sur  la  fin  de  son  cours  de  philosophie, 
étant  âgé  de  18  ans  ,  il  pensa  a  choisir  un 
état.  Ses  parents,  qui  le  regardaient  comme 
l'appui  de  leur  famille,  ne  manquèrent  pas 
de  lui  proposer  un  parti  avantageux;  mais 
M.  Eudes  leur  répondit  qu'il  les  suppliait  de 
ne  point  penser  <à  lui  pour  aucun  établisse- 
ment dans  le  monde,  et  qu'il  av.iit  fait  un 
choix  [ilus  noble.  Il  balança  quelque  temps 
s'il  se  ferait  religieux;  mais,  après  de  fer- 
ventes prières  et  des  jeûnes  réilérés  ,  il  se 
détermina  au  sacerdoce,  seulement  ])ar  lo 
conseil  d'un  sage  directeur  :  et  Dieu  voulant 
en  faire  un  saint  prêtre  et  un  digne  ministre 
de  l'Evangile,  il  lui  donna  dans  la  cérémonie 
de  la  tonsure,  qu'il  reçut  alors,  tout  le  dégoût 
du  monde  qui  dispose  à  la  vie  apostolique, 
dont  il  devait  faire  profession.  Etant  persuadé 
qu'on  ne  consulte  et  qu'on  n'écoule  Dieu 
parf.iitcmcnt  que  dans  la  retraite,  il  regarda 
la  maison  des  prêtres  de  l'Oratoire  comme  i 
un  lieu  propre  poursepréparerau  sacerdoce,  " 
auquel  il  aspirait.  Néanmoins  il  ne  voulut  y 
entrer  qu'après  en  avoir  obtenu  la  permission 
de  son  père  ,  qu'il  ne  lui  accorda  qu'au  bout 
de  trois  ans  ,  qu'il  employa  à  l'élude  de  la 
théologie  scolastique,  ;\  laquelle  il  se  donna 
tout  entier.  Si  l'humble  serviteur  de  Dieu 
avait  suivi  le  conseil  de  ses  amis,  il  aurait 
pris  ses  degrés  ;  mais  son  père  lui  ayant  enfin 
laissé  la  liberté  d'exécuter  son  dessein,  il 
aima  mieux  entrer  dans  l'Oratoire.  Ce  fut  le 
25  mars  de  l'an  1C2.'}  qu'il  y  fut  reçu,  à  l'âge 
de  2.3  ans.  Les  instructions  qu'il  y  reçut  et 
les  pieux  exercices  auxquels  il  s'appliqua 
augmentèrent  encore  son  zèle  et  sa  ferveur 
pour  son  jiropre  salut  et  celui  du  prochain. 

M.  le  cardinal  de  Bérulle  remarqua  en  lui 
de  grands  talents  pour  la  prédicatioo  :  c'est 
pourquoi  il  lui  fit  faire  quelques  discours  , 
avant  même  (|u'il  fût  dans  les  ordres  sacrés: 
en  quoi  il  réussit  si  avantageusement  au 
goût  de  ce  digne  supérieur,  que  pour  en 
tirer  tout  le  fruit  qu'on  en  devait  attendre, 
tiyanl  dessein  de  l'engager  au  ministère  de  la 
paro'e  ,  il  lui  fit  recevoir  les  saints  ordres; 
et  enfin  le  P.  Eudes  célébrasa  première  messs 
le  jour  de  Noi'l  de  l'année  IG'ifi. 

Dès  qu'il  fut  revêtu  du  caractère  auguste 
du  sacerdoce,  il  n'épargna  rien  pour  s'ac- 
quitter dignement  du  ministère  de  la  prédi- 
cation ;  mais  Dieu  arrêta  pendant  quelque 
temps  les  effets  de  son  zèle,  en  lui  envoyant 
une  maladie  qui  dura  deux  ans  entiers,  et 
qui  lui  interilil  l'exercice  de  ce  ministère 
pendant  ce  temps-là,  qui  ne  laissa  pas  de  lui 
être  utile  pour  l'étude  de  l'Ecriture  sainte, 
dont  il  faisait  le  sujet  de  ses  méditations  ,  et 
dans  la(|uelle  il  trouva  des  sources  inépui- 
sables de  science  et  de  sainteté. 

Il  ne  fut  pas  plulAt  rétabli  de  cette  maladie, 
qu'il  commença  ses  travaux  apostoliques  par 
une  action  héroïque  de  charité  :  car  étant 
touché  des  ravages  que  la  peste  faisait  dans 
le  diocèse  de  Séez  ,  plein  de  confiance  en 
Dieu,  il  y  courut  avec  la  permission  de  ses 
supérieurs ,  afin  de  secourir  ces  pauvres  af- 


'2(5 


ElD 


LVD 


'245 


Iligcs,  (i'aulanl  plus  à  plaimlie,  qu'ils  étaionl 
nljandonnés  (le  k'urs propres  pasteurs. Quand 
il  y  fui  arrivé,  il  se  relira  chez  un  buu  prèlre, 
qui  voulut  être  le  compagnon  de  ses  peines 
et  de  ses  fatigues,  lesquelles  élaicnl  très- 
prandes  et  trè-dangereuses  pour  leurs  pro- 
pres personnes,  puisque,  durant  quatre  mois 
que  dura  la  peste,  après  avoir  célébré  la 
sainte  messe  de  grand  matin,  et  consacré 
plusieurs  hosties  qu'ils  portaient  dans  une 
boîte  d'argent ,  ils  allaient  de  maison  en 
maison  pour  instuire,  exhorter,  confesser, 
donner  le  saint  viatique  ,  et  administrer 
rextréme-onction  à  ceux  que  la  contagion 
avait  fait  abandonner  par  les  personnes 
mêmes  auxquelles  ils  devaient  être  le  plus 
chers.  Les  plus  infectés  étaient  ceux  que  le 
P.  Eudes  recherchait  avec  plus  d'empresse- 
ment et  soulageait  avec  plus  de  tendresse. 

La  peste  ayant  cessé  au  diocèse  de  Séez,  il 
retourna  à  Paris,  d'où  il  fut  envoyé  à  Caen. 
Il  y  trouva  encore  une  autre  occasion  de 
s'immoler  pour  ses  frères  :  car  le  supérieur 
de  II  maison  de  l'Oratoire  de  cette  ville  ayant 
été  frappé  de  peste  avec  deux  autres  prêtres 
de  la  même  maison,  il  les  assista  tous  trois 
jusqu'au  ilernior  soupir;  mais  avec  tant  de 
charité,  que  ses  vertus  jointes  aux  autres 
talents  dont  il  était  doué  ne  permirent  pas 
qu'on  jetât  la  vue  sur  d'autres  que  sur  lui 
pour  remplir  la  place  de  ce  supérieur.  Ce  fut 
alors  que  se  voyant  chargé  de  ce  nouvel 
emploi ,  il  redoubla  son  zèle  pour  s'en  ac- 
quitter dignement  ;  et,  s'appliquant  à  la  pré- 
dication, non  par  le  désir  de  plaire,  mais  de 
convertir  les  pécheurs,  il  se  mil  |)eu  en  peine 
de  llatter  les  oreilles,  pourvu  qu'il  touchât 
leurs  cœurs.  11  reprenait  hardiment  le  vice, 
el  persuadait  la  vertu  avec  tant  de  force  et 
d'onction,  que  sa  répulalion  se  rép:indit  dans 
les  plus  grandes  villes  du  royaume,  <t  même 
jusqu'à  la  cour,  où  la  reine  régente,  Anne 
(i  Autriche,  mère  de  Louis  XIV,  l'entendit 
plusieurs  fois  avec  beaucoup  de  satisfaclioiî; 
mais  il  n'était  jamais  plus  content  que  quand 
il  annonçait  la  parole  de  Dieu  aux  pauvres 
et  aux  gens  de  la  campagne,  comme  il  arriva 
en  plusieurs  missions  qu'il  fit ,  étant  encore 
diins  la  congrégation  de  l'Oratoire.  Dieu  lé- 
paiidit  de  si  grandes  bénédictions  sur  celles 
(|u'il  entreprit,  que  les  plus  grands  pécheurs, 
touchés  par  la  force  de  ses  discours,  se  con- 
vertissaient et  entreprenaient  les  plus  au- 
sières  pratiques  de  la  pénitence.  De  si  heu- 
reux succès  attiraient  un  si  grand  nombre 
de  personnes  à  l'entendre,  que  dans  une 
mission  qu'il  fit  dans  l'église  de  l'abbaye  de 
Saint-Etienne  de  Caen,  elle  se  trouva  trop  pe- 
j  tite  pour  contenir  l'afduence  extraordinaire 
1  du  peuple  qui  y  accourait  de  toutes  parts, 
:  quoique  ce  temple  soit  un  des  plus  grands 
vaisseaux  du  royaume. 

Ce  fut  alors  quelc  P.  Eudes  connutdansles 
missions  le  grand  besoin  qu'on  avait  de  bons^ 
pasteurs  et  de  prêtres  zélés  pour  en  conser- 
ver les  fruits  et  soutenir  les  peuples  dans  les 
bons  sentiments  qu'ils  y  avaient  conçus. 
Dans  celte  vue  il  médita  l'établissement  des 
séminaires  pour  en  former;  mais  comme  il 


se  défiait  de  ses  propres  lumières,  il  ne  crut 
pas  devoir  se  déterminer  de  soi  même  à  une 
telle  entreprise.  Il  en  consulta  donc  les  per- 
sonnes les  plus  distinguées  par  leur  science 
et  leur  piété,  qui  approuvèrent  le  projet 
qu'il  en  avait  fait,  el  crurent  qu'il  devait  se 
priver  des  douceurs  qu'on  trouve  dans  des 
communautés  formées,  pour  se  livrer  avec 
confiance  à  toutes  les  peines  qui  sont  insé- 
parables des  nouveaux  établissemenls.  Le 
P.  Eudes,  qui  n'envis^igeait  que  la  gloire  de 
Dieu,  déféra  donc  à  leurs  sentiments. 

Après  être  sorti  de  l'Oratoire,  il  travailla  à 
l'éreclion  d'un  séminaire  dans  la  ville  d^- 
Caen.  Les  premières  lettres  patentes  ayanl 
été  obtenues  du  roi  le  2G  mars  de  l'année 
1613,  et  s'étanl  associé  huit  prêtres,  tous 
remplis  de  l'esprit  ecclésiastique,  il  jeta  les 
fondements  de  la  première  maison  de  sa 
compagnie.  Un  de  ses  associés  fut  M.  Blouet 
de  Than,  connu  par  sa  grande  piété  et  par 
le  rang  que  sa  famille  occupe  dans  la  ville, 
et  qui  fut  le  fondateur  de  celle  maison.  Co 
ne  fut  pas  sans  beaucoup  de  contradictions 
que  se  fit  cet  élablissement  ;  mais  M.  Eudes^ 
et  ses  associés  les  surmontèrent  [>ar  le  si- 
lence, la  douceur  et  la  patience.  Piu>.ieur* 
cvêques,  instruits  des  grands  fruits  que  fai- 
saient ces  hommes  de  Dieu  dans  le  séminaire 
de  Caen,  en  voulurent  avoir  chacun  dans 
leur  diocèse  ;  et  leur  compagnie  augmentant 
tous  les  jours  en  sujets  distingués  par  leur 
vertu  et  leur  mérite,  M.  Eudes  en  envoya  à 
Coulances,  à  Lisieux,  à  Uouen  et  à  Evreux  -, 
et  les  communautés  qu'on  érigea  dans  ces 
quatre  villes,  avec  celle  de  Caen,  pour  éle- 
ver les  jeunes  clercs  et  faire  aux  peuples  des 
missions,  furent  autorisées  sous  le  nom  e!  lo 
titre  de  Jésus  el  Marie,  par  les  lettres  des 
prélats,  les  patentes  du  roi  et  les  arrêts  d'eii- 
registremenl  du  parlement,  po  ir  être  unies 
cl  agrécées  ensemble,  ne  faire  qu'un  iné(ne 
corps  et  une  même  congrégation,  qui  était 
gouvernée  par  M.  Eudes. 

On  vit  eu  peu  de  temps  un  si  grand  chan- 
gement dans  le  clergé  de  ^ormandie,  que 
plusieurs  prélais  l'ayant  fait  conuiiîire  à 
l'assemblée  générale  du  clergé  tenue  en 
l'année  lGi6,  elle  approuva  le  zèle  de  M.  Eu- 
des, l'exhorta  à  continuer  ses  travaux  apo- 
stoliques, et  à  se  tenir  prêt  d'aller  dans  les 
autres  diocèses  où  il  pourrait  être  appelé 
par  les  évêiiues. 

Ouoique  ce  zélé  instituteur  et  ses  associés 
s'employassent  avec  beaucoup  de  ferveur  à 
l'éducation  des  clercs,  ils  ne  négligeaient 
pas  pour  cela  l'autre  fin  de  leur  institut,  qui 
est  de  faire  des  missions.  L'on  en  compte 
jusqu'à  cent  dix  où  JL  Eui'es  a  travaillé 
lui-même,  sans  parler  de  plusieurs  autres 
qu'on  fit  sous  ses  ordres  dans  les  principales 
villes  du  royaume.  Cet  abrégé  ne  permet  pas 
d'en  fiire  le  détail,  ni  de  rapporter  le  nom- 
bre infini  de  conversions,  de  restitutions  et 
de  réconciliations  que  ces  missiunsproduisi- 
reiii,  princip.ilement  à  Paris,  où  ce  grand 
serviteur  de  Dieu  fit  en  différents  temps  des 
missions  à  Saint-Sulpice.auxQuinze-Vingls. 
à  Sjiul  Gcrmain-des  Prés,  à  Versailles  el  u 


017 


niCTIONNAinE  DES  ORDRES  RF.I.ICIF.UX. 


248 


Saiii'-riprmnin-on-I.ayo.  Soincnl  cc!  Iicurcnx 
succô»  furent  traverses  par  des  ronTadic- 
lions  ;  mais  r'rlait  pour  lors  (|uc  le  zèle  et 
le  eourage  Je  ces  dignes  ouvriers  s'auffinen- 
tait  et  safTcrmissail  davanlape,  n'espérant 
jamais  plus  di'  froit  d'une  mission,  d'une  re- 
traite, d'un  avent  ou  d'un  car<^me,  que  quand 
Dieu  perraellail  qu'ils  fussent  rebutes. 

M.  Eudes,  croyant  devoir  laisser  par  écrit 
ce  que  lui  et  ses  compagnons  avaient  long- 
temps pratiqué  dans  les  missions,  composa 
deu\  livres  ;  l'un,  .nuque!  il  a  donné  le  nom 
de  lion  Confesseur,  instruit  les  missionnaires 
de  tout  ce  qui  concerne  le  minisîère  de  la 
confession  ;  l'autre,  qui  est  intitulé  le  Predi- 
rateur  aposloliqiir ,  njarque  à  tous  ceux  qui 
ont  l'honneur  d'annoncer  la  parole  de  Dieu 
les  règles  cl  les  moyens  de  le  faire  utilement 
pour  le  proch.iin,  ci  d'éviter  ce  qui  faisait  le 
sujet  de  la  crainte  de  saint  Paul,  c'est-à-dire, 
qit'apris  avoir  prêché  les  autres,  ils  ne  soient 
nux-m^mes  réprouvés.  Ces  deux  livres  sont 
trés-uliles  pour  former  des  confesseurs  fi.iè- 
les,  exads  et  prudents,  et  des  prédicateurs 
évangéliques,  qui  doivent  autant  instruire 
d'exemple  que  de  paroles  ;  mais  principale- 
ment le  premier,  i^ui  a  été  si  universellement 
estime,  qu'avant  la  mort  de  son  auteur  on  eu 
avait  fait  plus  de  neuf  éditions,  et  qu'un  des 
plus  illustres  archevêques  de  France  en  or- 
donna la  lecture  à  Ions  les  prêtres  de  son 
diocèse  par  un  statut  particulier.  On  passe 
sous  silence  plusieurs  au'res  livres  que  le 
même  auteur  a  composés  pour  apprendre  au 
peuple  à  bien  prier,  à  s'approcher  des  sacre- 
inenls,  etc..  et  (eux  qu'il  a  faits  en  l'honneur 
du  cœur  de  Jésus  et  de  celui  de  Marie,  aux- 
auels  il  avait  une  singulière  dévotion,  qu'il 
a  si  vivement  exprimée  dans  les  offices  qu'il 
a  composés  et  qu'on  chante  le  jour  de  leurs 
fêles,  dont  il  a  obtcuu  l'ét.iblissemcnt  dans 
quelques  diocèses. 

Non  conleni  d'cdifipr  rK|*lise  et  les  lidèles 
en  lou'es  ces  manières,  M.  Eudes  entreprit 
encore  un  établissement  dont  le  succès  fut 
une  preuve  d'une  ch.iriic  sans  bornes  et  d'un 
zèle  qui  l'avait  rendu  capable  di;  poursuivre 
les  plus  hautes  entreprises.  C'est  l'ordre  des 
Filles  de  Notre-Dame  de  Cb.inlé,  qu'il  com- 
mença en  l'an  16'*5  et  qui  fut  approuvé  du 
sainl-siége  l'année  lOGfi.  Après  ce  grand  ou- 
vrage, ce  digne  fondjitciir  n'atiendait  plus 
que  la  mort  précieuse  qui  devait  terminer  le 
rours  de  sa  vie,  comme  il  le  dit  lui-mémo 
dans  un  serintm  qu'il  fil  ;'i  ses  religieuses.  Il 
elait  pour  lors  iigé  de  soi\anle-dix-neuf  ans 
et  Use  de  iravaux.  .\yanl  éié  obligé  de  se  ser- 
vird'iine  voiture  incommode  dans  un  voyage, 
et  en  ayant  élé  blessé  ilangereusemenl.  les 
remèdes  qu'il  (il  ne  servireni  qu'.i  aigrir  son 
mal:  rn  sorle  que  s.i  mort  en  fut  accélérée. 
Il  véi  ul  néanmoins  encore  cinq  à  six  mois 
dans  des  douleurs  aigué»  et  continuelles, 
qu'il  supporla  avec  une  palienre  admiral)le, 
■•n  ranimant  sa  fui,  sa  constance,  son  espé- 
rance et  son  amour  pour  Dieu.  Il  avait  eu  la 
prévoyance  de  conviuiuer  une  assemblée 
dans  laquelle  on  établit  en  s.i  place  au  gou- 
vernement de  sa  congrégalinn,  M.  Hlouet  de 


r.amilly,  recommandahle  à  ton!  le  monde  jiar 
sa  douceur,  el  cher  aux  siens  par  le  grand 
amour  qu'il  a  loujours  eu  pour  eux,  el  par 
les  services  qu'il  a  rendus  à  sa  congrégation. 
Il  était  oncle  de  M.  de  Camiily,  évéquc  de 
Toul. 

Enfin  M.  Eudes  mourut  à  Cacn,  où  il  fut 
regrelié  généralement  de  tout  le  monde.  Ce 
fui  le  19  août  16S0.  Dès  qu'on  en  eut  appris 
la  nouvelle  dans  l.i  ville,  le  concours  du 
peuple  à  venir  voir  ce  fidèle  serviteur  de 
Dieu  fui  si  grand,  qu'on  eut  beaucoup  de 
peine  d'avoir  la  liberté  de  l'enlerrer.  L'em- 
pressement de  tout  le  monde  à  lui  rendre  les 
derniers  devoirs,  les  louanges  qu'on  lui  don- 
nait el  qui  retentissaient  de  toutes  parts,  fi- 
rent assez  voir  que  Dieu  honore  dans  le 
ciel  celui  à  qui  tant  de  monde  rendait  par 
avance  tant  d'honneur  sur  la  terre. 

C'était  un  hemme  doué  de  toutes  les  ver- 
tus chrétiennes  cl  ecclésiastiques.  Sa  foi 
était  si  pure,  si  vive  et  si  ferme,  qu'il  dc- 
nnndait  souvent  à  Dieu  la  grâce  de  la  scel- 
ler de  son  sang.  Il  avait  une  telle  expérience 
de  la  providence  de  Dieu  sur  lui,  qu'il  espé- 
rait dans  les  choses  mêmes  où  il  semblait 
qu'il  y  eût  moins  à  espérer.  Son  amour  pour 
Dieu  élait  si  ardent  que  son  cœur  poussait 
des  aspirations  continuelles  vers  le  ciel. 
Deux  vertus  qui  lui  furent  singulières  le  fai- 
saient aimer  de  Dieu  el  des  hommes,  son  hu- 
milité cl  sa  simplicité.  Toul  prêchait  en  lui  ; 
sa  modestie  dans  le  public,  son  recueille- 
fiient  à  la  prière  et  à  l'autel  lui  attiraient  une 
vénération  profonde  de  ceux  qui  le  voyaient. 
Quoiqu'il  prêchât  avec  tant  de  force  que  les 
plus  grands  liberlins  se  sentaient  portés  à 
quitter  leurs  vices  par  la  crainte  qu'il  impri- 
mait dans  leurs  cœurs  ,  néanmoins,  au  tri- 
bunal, il  avait  beaucoup  de  douceur,  surlout 
envers  ceux  qu'il  trouvait  disposés  à  profi- 
ter des  grandes  vérités  qu'il  leur  avait  an- 
noncées, il  se  conduisait  en  cela  selon  l'es- 
prit de  Dieu,  qui  sait  mortifier  el  vivifier  à 
propos.  Personne  ne  lui  a  jamais  reproché 
une  douceur  mondaine  et  complaisante.  Il 
conservait  en  toutes  occasions  la  fermeté 
évangélique  ;  cl  souvent,  plein  de  charilé 
pour  les  pauvres  pécheurs  qui  s'adressaient 
à  lui,  il  se  punissait  lui-même  pour  obtenir 
de  Dieu  les  grâces  dont  ils  avaient  besoin. 
Tous  ceux  qui  l'ont  connu  ont  élé  les  témoins 
de  sa  morlificalion  et  de  ses  austérités.  En- 
fin comme  son  principal  soin  avait  élé  de 
former  les  prêlres  qui  étaient  de  sa  compa- 
gnie, il  y  avait  employé  tous  les  moyens  que 
son  zèle  lui  avait  suggérés,  et  il  y  réussit  si 
bien,  qu'il  les  laissa  remplis  de  son  esprit  cl 
héritiers  de  ses  vertus. 

\'oilà  en  peu  d<'  mots  le  caractère  de  M. 
Eudes,  instituteur  des  prêtres  qui  portent  son 
iKimel  qu'on  appelle  communément  Eudistes. 
M.  Rlouet  de  Camiily,  grand  vicaire  de  ('^ou- 
taiiccs,  son  successeur,  a  suivi  son  dessein 
ri  ses  exemples,  jusqu'à  ce  que  son  grand 
Age  el  ses  infirmités  l'obligèrent  à  convo- 
quer une  a;<emblée  en  l'année  1711,  eu  la- 
quelle fut  élu  eu  sa  place,  un  peu  avant  sa 
mori,  M.   (le    Fontaines   de    Neuilly,  grand 


249 


EUD 


EUD 


250 


vicaire  rie  Bayeux,  qui  est  présenlcment  su- 
périeur de  cette  congrégation. 

Les  Eudisles  ne  font  aucun  vœu.  La  cha- 
rité est  le  seul  lien  qui  les  unit  ensetnb'e;  et 
presque  tous  ceux  qui  sont  incorporés  dans 
la  congrégation  y  restent  toute  Irur  vie. 
quoique  chacun  ait  toujours  la  liberté  d'en 
sortir,  et  qu'on  puisse  aussi  les  renvoyer 
s'ils  tombaient  dans  quelque  déréjïlenienl. 
Leur  habit  n'est  point  distingué  de  celui  des 
autres  prêtres,  et,  comme  ils  sont  membres 
du  clergé,  ils  font  professinn  de  suivre  les 
règles  qui  sont  prescrites  par  les  saints  ca- 
nons. Ils  ont  pour  maxime  d'employer  le  re- 
venu de  leurs  patrimoines  et  des  bénéfices 
qu'ils  peuvent  avoir  en  œuvres  pieuses,  et 
plusieurs  ont  beaucoup  contribué  à  fonder 
et  bâtir  leurs  maisons  et  à  y  fournir  les 
choses  nécessaires.  Ils  ont  pour  principe 
que,  lorsqu'ils  demeurent  dans  la  congréga- 
tion, ils  sont  obliges  d'obéir  au  supérieur, 
et  ils  s'acquittent  de  ce  devoir  avec  la  même 
fidélité  que  s'ils  en  avaient  f  lit  vœu.  Ils  en- 
seignent ordinairement  la  théologie  dans 
chacune  de  leurs  maisons  et  la  philosophie 
en  plusieurs;  et  on  fait  prendre  à  grand 
nombre  d'entre  eux  les  degrés  de  docteurs 
et  de  bacheliers.  Les  fins  de  leur  institut 
sont  de  former  les  clercs  aux  Ibiulions  de 
la  cléiiciiture,  et  de  travailler  à  faire  des 
missions  dans  les  villes  et  à  la  c;impagne.  Ls 
en  fijiit  partout  où  ils  sont  appelés,  et  Dieu 
rép.ind  de  si  grandes  bénédiilions  sur  leurs 
travaux,  qu'il  est  aisé  de  juger  combien  ils 
sont  agréables  à  sa  divine  majeslé. 

Le  supérieur  de  cetle  congrégalion  est 
chargé  de  mettre  de  lemiis  en  temps  un  nou- 
veau supérieur  particulier  dans  chaque  mai- 
son, qui  soit  agréé  par  l'évêque  diocésain, 
et  ils  regardent  ce  changement  comme  une 
règle  fondamentale  de  leur  société,  ils  font 
des  assemblées  pour  y  traiter  des  moyens  de 
perfectionner  leur  institut  cl  retrancher  tous 
les  abus  qui  pourraient  s'y  glisser. 

M.  Eudes  avait  encore  établi  sa  congréga- 
lion à  Rennes  avant  sa  mort,  et  depuis, 
M.  Bluuel  a  aussi  envoyé  de  ses  associés  en 
d'autres  diocèses,  et  toutes  ces  maisons  et 
communautés  ont  été  unies  et  agrégées  aux 
premièies  sous  le  même  nom  i  t  le  même 
titre  de  Jésus  et  ]\l;irie  par  les  lettres  d'éta- 
blissements des  évêques  des  lieux,  les  pa- 
tentes du  roi  et  les  arrêts  d'enregistrement 
des  parlements  de  leur  ressort:  eu  sorte  que 
toutes  ces  maisons  et  communautés  forment 
une  espèce  de  congrégation,  par  rapport  à 
l'Eglise  et  à  l'Etat.  Elle  a  un  supérieur  qui 
la  gouverne:  il  est  élu  dans  une  assemblée 
générale  à  la  pluralité  des  voix.  Le  gouver- 
nement canonique  en  est  fondé  sur  les  pou- 
voirs accordés  par  chaque  évêque  des  dio- 
cèses où  elle  est  établie,  qui  ont  été  autori- 
sés etconfirmés  pur  les  patentes  du  roi.  C'est 
pourquoi  les  évêques  sont  les  protecteurs 
de  cette  congrégation;  ei  on  s'y  fait  un  de- 
voir essentiel  d'être  entièrement  sous  leur 
juridiction. 

L'Histoire  des  Ordres  religieux  de  M.  Hcr- 
niant  parle  des  Eudistes. 


Eu  1810,  lors  de  la  démolition  du  sémi- 
naire de  l'aen,  les  corps  du  P.  Eudes  et  do 
ses  successeurs  dans  le  gouvernement  de  sa 
congrégation  furent  transférés  dans  l'église 
paroissiale  de  Notre-Dame,  et  le  tombeau 
du  P.  Eudes  fut  alors  couvert  d'une  table  do 
marbre  blanc.  Les  religieuses  de  la  Charité 
de  Notre-Dame,  de  la  même  ville,  obtinrent 
alors  le  chef  et  un  ossement  du  serviteur  do 
Dieu.  Elles  ont  fait  embaumer  ce  précieux 
dépôt,  l'ont  placé  sous  la  grille  de  leur  chœur 
et  y  ont  mis  une  inscription. 

Une  autre  œuvre  liée  à  l'établissement  des 
Eudisles,  que  le  P.  Hélyot  passe  sous  silence, 
mais  à  laquelle  nous  consacrerons  un  ar- 
ticle dans  le  Supplément,  est  celle  de  la  con- 
grégation séculière  du  Sacré-Cœur  de  Marie, 
connue  surtout  en  quelques  cantons  delà 
Bretagne.  L'opposition  que  témoigna  la  con- 
grégation de  ÏOraloire  à  celle  des  Eudistes 
n'a  point  été  non  plus  mentionnée  par  Hé- 
lyot, mais  elle  n'en  fut  pas  moins  réelle,  et 
cetle  opposition,  qu'on  peut  concevoir  sans 
peine,  était  basée  sur  le  regret  d'avoir  perdu 
le  P.  Eudes,  et  un  peu  aussi  sur  une  petite 
jalousie  de  corps.  La  société  de  Jésus  et  Ma- 
rie eut  le  bonheur,  quand  tant  d'autres  in- 
stituts, et  nommément  l'Ornloire,  se  lais- 
saient prendre  à  l'esprit  d'innovation  qui  a 
tant  cau^é  de  ravages  en  l'Eglise  depuis  deux 
siècles,  de  se  garantir  du  jansénisme.  Après 
M.  Guy  de  Fontaines  de  Neuilly,  supérieur 
eénérjil.  lorsque  le  P.  Hélyot  composait 
l'Histoire  des  Ordres  monastiques,  la  con- 
grégalion des  Eudisles  fut  gouvernée  par  M. 
Pierre  Cousin,  prêtre  du  diocèse  de  Cou- 
lances,  (jui  mourut  à  Caen  le  14  mars  1751, 
à  l'âge  de  96  ans.  Les  sucecsseurs  de  celui-ci 
dans  le  généralat  furent  M.  Jean-Prosper  Au- 
vray  de  Saint-André,  du  diocèse  de  Bayeux, 
mort  à  Caen  le  20  janvier  1770;  Michel  Le- 
fèvre,  mort  à  Rennes,  dans  le  cours  de  ses 
visites,  le  6  décembre  1775;  Pierre  Lccoq, 
mort  à  Caen  le  1"'  septembre  1777;  Pierre 
Dumont,  supérieur  du  séminaire  de  Cou- 
tances  et  vicaire  général  de  ce  diocèse,  mort 
en  1793  ou  1794-,  dans  la  ville  de  Caen,  où  il 
avait  trouvé  un  asile  après  la  dispersion  de 
son  séminaire  et  durant  les  cruelles  persé- 
cutions de  cetle  époque  malheureuse.  Une 
paralysie  l'avait  mis  depuis  plusieurs  années 
dans  la  nécessité  d'avoir  un  coadjuteur.  On 
avait  choiai,  pour  cetle  fonclmn  nouvelle  de 
coadjuteur  du  général,  M.  Hébert,  supérieur 
de  la  maison  de  Paris,  où  il  continua  de  ré- 
sider, et  qui  s'acquitta  dignement  de  la  nou- 
velle fonction  qui  lui  était  confiée.  Ce  saint 
prêtre  était  né  dans  la  paroisse  de  la  Croupie, 
diocèse  de  Lisieux,  vers  l'an  1738,  et  fut 
massacré  aux  Carmes  de  Paris,  le  2  sep- 
lembre  1792. 

Les  Eudistes  ont  donné  à  l'Eglise  et  aux 
fidèles  plusieurs  modèles  de  vertus,  entre 
lesquels  nous  devons  signaler  M.  Beurier, 
prédicateur  et  missionnaire  célèbre,  vers  la 
lin  du  dernier  siècle,  et  dont  M.  l'abbé  Car- 
ron  a  publié  la  vie  dans  le  recueil  intitulé. 
Modèles  du  clergé.  Nous  devons  aussi  eu  in- 
diquer queltiues  autres,  tels  que  M.  Michel 


on 


Lpfi^rre,  mori  à  Rennes,  ainsi  que  nous  l'a- 
vons (lit  ci-dcssiis.  t'M  1"7j.  Il  fui  enterré 
•laiis  l'éplise  du  praïui  séiniiinirc  tic  celle 
ville,  el  son  corps  y  fui  relrouvc  en  entier 
en  1799:  ses  lialiils  sacerdotaux  n'élaienl 
pas  niénic  cndommapés.  Le  médecin  qui  l'a- 
vait trailé  d.ins  sa  dernière  maladif  fut  ap- 
pelé pour  examiner  le  cadavre  el  le  recon- 
uul.  Nou<  ajouterons  néanmoins  ici  que  M. 
I.ffèvrc  avait  cru  devoir,  pendant  son  ad- 
iiiinistralioii,  écrire  en  faveur  du  prêta  in- 
térêt. La  cony;ro(jation,  indij;née  de  ce  qu'il 
eût  publie  un  ouvrage  si  opposé  aux  prin- 
cipes qu'elle  avait  toujours  professés,  lui  fil 
les  plus  vives  remonirances  clans  une  assem- 
Mée  générale,  el  voulait  même  le  déposer, 
>'il  ne  se  fût  ré'racté.  (".eus  que  nous  VdU- 
lons  encore  nommer,  sont  .MM.  Lelranc, 
Iteaulieu,  lilamin,  Dardai).  Duperroii,  Durvé, 
Grasset  de  Saint-Sauveur  cl  l,c  liis,  qui  tous 
furent  massacrés  aux  Carmes;  M.  Poiier, 
qui  avait  si  pénéreusement  rélraclé  son  ser- 
ment, et  fut  immolé  aux  Carmes  le  ,3  sep- 
Icmbrc  1792.  La  congrégation  de  Jésus-Ma- 
rie a  proiluit  aussi  plusieurs  écrivains  utiles, 
lels  que  le  I'.  Eud<'s  lui-même,  dont  une 
partie  des  ouvrages  ont  été  mentionnés  ci- 
dessus  par  le  P.  lléljot;  ,M,  Beurier,  dont  un 
volume  de  Conférencs  jouit  d'une  certaine 
vogue  quand  il  parui  ;  M.  Le  Co(i,  général 
aptes  M.  Lcfèvre,  dont  il  réfula  le  livre  dans 
une  di-scrialion  remarquable  par  la  nellelc 
cl  la  précision  qui  y  règneni  ;  il  eslégale- 
nienl  auteur  de  plusieurs  ouvrages  de  droit 
qui  ont  éle  fort  estimés,  surtout  celui  c|ui  a 
pour  lilre:  DcCélal  d(  s  personnes  et  des  biens. 
M.  Se\o\,  ntorl  à  Ucnnes  en  ITIi.'i,  et  auleur 
des  Devoirs  rcclésiastii|uc'S,  ouvrage  esliiné 
du  clergé;  M.  Daon,  auleur  de  la  Conduite 
des  confesseurs  el  de  la  Conduite  des  àmcs. 
L'n  des  plus  célèbres  cl  des  plus  remarqua- 
bles de  tous  ces  bonimes  niodesles  fut  .sans 
contredit  .M.  Hébert,  sur  leciuel  nous  vnu- 
loiis  revenir  en  terminant  cette  nomencla- 
ture. Il  habitait  Paris  lorsque  la  révolution 
éclata.  M.  Poupart,  curé  de  Sainl-Eustacbe, 
ayant,  par  sa  |iroslalion  du  serment  à  l;i 
consniulion  civile  du  clergé  en  1791,  perdu 
la  conliancc  de  Louis  W'I,  dont  il  élail  le 
confesseur,  M.  Hébert  fut  choisi  pour  le  rem- 
placer. Le  sage  su|  érieur  prévit  tout  ce 
qu'avait  de  périlleux  pour  lui  celte  charge 
honorable,  el  il  s'en  expliijua  devant  des 
personnes  cjui  lui  étaient  chères  ;  cependant 
il  ne  halanc;a  pas  ,'i  l'accejiler.  On  dit  qu'à 
sa  sollicitation,  l'infortuné  tnon.ir(|Uc  lit  un 
vci'u  au  S.icié  Ccriir  de  Jésus  pour  le  réia- 
Silisscmcnt  de  la  paix,  mais  ce  fait  ne  parait 
pas  liiin  prouvé.  Néanmoins  la  formule  de 
te  vcru  réel  ou  prétendu  a  élé  rendue  pu- 
blique, el  nous  la  possédons  nous-méme. 
La  fureur  des  impies  contre  les  prêtres 
fidèles  augineiilant  chaque  jour  davantage, 
M.  Hébert  fut  arrélé  à  répoc|ue  du  10  août 
1792  cl  renfermé  avec  c|iiel<iiies-uns  de  ses 
conirères  clans  le  couvent  cies  Carmes  Dé- 
chaussés, rue  de  \'augir.ird  ;  celle  maison, 
ronimc  ou  sait,  avait  élé,  ainsi  c|iie  c|uelc|ucs 
autres,  Iransformcc  en  ]irisuu.  t'est  dans  ce 


DICTIONNAIRE  PKS  OnOllES  tlELIGIEUX.  l'« 

lieu  que  ce  digne  ministre  de  Jésns-Chrisl 
finit  sa  vie,  dans  les  massacres  qui  y  eurent 
lieu  le  2  septembre  suivant.  Il  fut  frappé 
l'un  des  premiers  dans  l'oratoire  du  jardin, 
et  renversé  sur  le  marchepied  de  l'aulel, 
devant  une  slalue  de  la  sainte  Vierge.  «  Prête 
le  serment,  »  lui  dit  un  des  assassins,  en 
levant  sur  lui  son  sabre.  «  Non,  lui  répondit 
le  généreux  confesseur;  je  ne  veux  pas  renier 
la  foi.  »  Celte  noble  réponse  lui  valut  la 
mort ,  et  le  meurtrier  lui  donna  quatorze 
coups  de  sabre. 

Aux  villes  citées  par  le  P.  Héljot,  il  faut 
ajouter  les  suivantes,  où  les  Rudistes  avaient 
aussi  un  ^éminaire  ou  une  communauté  : 
Avranches,  où  les  Eudisles  furent  appelés  en 
l(i9;î  par  le  célèbre  Huet;  niois,oi"i  ilsallèrent 
en  l(i09,  époque  de  rérccticm  du  siège  épi- 
scopal  de  celte  ville;  Dol,  où  leur  séminaire 
fut  établi  en  1701;  Sentis,  où  ils  occupèrent 
le  séminaire  en  1700;  Dotufront  ,  au  diocèse 
de  Séez  actuellement,  mais  alors  du  diocèse 
du  Mans ,  où  la  congrégation  de  Jésus- 
Marie  entra  en  possession  du  séminaire  en 
1727,  en  s'associanl  les  directeurs  qui  y 
étaient  alors  et  qui  embrassèrent  son  régime; 
enfin  la  ville  de  Séez  ,  où  ils  furent  chargés 
du  séminaire  en  1702,  à  la  dispersion  des 
Jésuites  ,  qui  le  dirigeaient  auparavant. 
Ajoutons  aussi  qu'à  Houen,  à  Lisieux  et  à 
Hennés,  ils  avaient  un  second  élablissemciit, 
car  ils  y  dirigeaient  le  petit  séminaire. 

La  m.iison  de  Paris  n'était  point  un  sémi- 
naire ,  mais  un  hospice  destiné  surtout  aux 
jeunes  sujets  de  la  congrégation  qui  faisaient 
leurs  études  à  Paris.  On  y  recevait  aussi 
d'autres  ecclésiastiques  en  qualité  de  pen- 
sionnaires. Cette  maison,  établie  en  170.'i,  ne 
put  voir  enregistrer  ses  lettres  patentes  du 
roi  qu'en  1770,  par  le  crédit  de  M.  de  I?eau- 
mont,  archevêque  de  Paris  ,  qui  protégeait 
les  Eudisles.  Elle  était  située  rue  des  Postes, 
et  formait  une  partie  de  rétablissement  ac- 
tuel des  Jésuites.  La  maison  de  la  darlière, 
diocèse  d' Avranches,  était  occupée  seulement 
par  des  missionnaires  de  l'institut. 

Nous  croyons  pouvoir  insinuer  que  les 
lùidisles  avaient  commencé  cl  même  formé 
un  troisième  établissement  au  diocèse  de 
Uennes,  sur  la  roule  de  cette  ville  à  Fougères 
et  sur  le  territoire  de  la  paroisse  de  lloma- 
gnè.  Ils  y  occupèrent  une  petite  maison  at- 
tenante à  une  chapelle  sous  l'invocation  do 
sainle  Anne,  pèlerinage  célèbre  dans  ces 
(luartiers,  el  bâtie  au  village  de  la  lîosserie. 
Le  supérieur  s'appelait  Fontaines,  selon  uno 
noie  i{ui  nous  nomme  ainsi  le  supérieur  des 
Eudisles  de  la  maison  de  Sainte-Anne.  Ne 
serait-i  e  pas  le  même  que  M.  de  Fontaines 
de  Neuilly,  troisième  supérieur  génér.il  , 
mentionné  ci-dessus  ?  L'établissement  de 
Sainte-Anne  s'était  fait  précisément  à  l'é- 
poi)ue  où  celui-ci  pouvait  le  diriger  el  fut 
dissous,  nous  a  dit  le  directeur  de  Uomagné 
(M.  Delaunay),  par  .M.  de  llreteuil,  évéque 
de  Iteiines  ,  au  commencement  du  dernier 
siècle.  (]e  même  prélat,  qui  n'était  |ias  nc- 
commodani,  à  ce  qu'il  parait,  cl  était  peut- 
être  de  ces  liurnuics  qui  ne  connaissent  pas 


2r5 


EXE 


EXE 


S54 


en  ([Hoi  consisle  le  véritable  avantage  rie 
leurs  diocèses,  supprima  aussi  les  formes  de 
rollégiale  qu'av;iieiit  prises  les  obitiers  de 
l'éolise  paroissiale  Sainl-Léonard  à  Fou- 
gères. La  tradition  des  anciens  parle  encore 
des  séminaristes  de  Normandie  ,  établis  à 
Sainte-Anne;  néanmoins  cet  établissement, 
situé  à  une  demi-lieue  de  Fougères,  n'a  pas 
dû  avoir  une  longue  durée  ;  car  la  maison 
provisoire,  qui  se  voit  encore  ,  était  trop  pe- 
tite pourunecommunaiitc,etcelle  qu'on  vou- 
lait bâtir  n'avait  été  conduite  que  jusqu'aux 
fenêtres  du  rez-de-chaussée.  Ces  murs  ainsi 
élevésn'ontétédémolisqucvers  l'année  1825. 

Nous  tenions  à  sauver  par  cette  noie  les 
souvenirs  de  cet  établissement  qui,  vraisem- 
blablement n'est  point  mentionné  dans  les 
mémoires  des  Eudistes.  Hélyot  dit  que  les 
membres  de  la  congrégation  de  Jésiis-M;irie, 
ne  portent  pas  de  costume  particulier  et  sont 
habillés  comme  les  ecclésiastiques  sérulii-rs. 
CeTi  n'est  pas  rigoureusement  exact.  Les 
Eudistes  ne  portaient  point  le  rabat  noir 
qu'ont  aujourd'hui  les  prêtres  en  France; 
le  leur  était  tout  blanc,  comme  celui  que 
prennent  les  ecclcsiasl  ques  en  deuil ,  dans 
quelques  pays,  par  exemple,  au  diocèse  de 
Kennes.  Ils  avaient,  en  outre,  une  sorte  de 
manchette  en  toile  qui  se  rdeviil  sur  les 
manches  de  leurs  soutanes  ,  à  peu  près  ou 
même  absolument  comme  ces  poir/ncis  ana- 
logues que  portent  les  femmes  dans  le  deuil, 
lesquels  poignets  ou  manchettes  étaient 
autrefois  appelés  dans  le  monde  d.s  ptcti- 
reuses. 

Plus  heureuse  que  bien  d'autres,  dont  les 
membres,  contents  peut-être  d'une  liberté 
jadis  forcée,  n'ont  pas  eu  le  courage  de  se 
réunir,  la  congrégation  de  Jésus-Marie  a  été 
rétablie  en  182G,  sous  la  direction  de  M.  l'abbé 
Blanchard,  ancien  supérieur  du  petit  sémi- 
naire de  Rennes,  et  pro\iseur  du  collège  roj al 
de  cette  ville.  Elle  est  aujourd'hui  gouver- 
née par  \L  l'abbé  Louis,  et  sa  maison  mère 
est  à  Rennes.  Cette  résurrection  ou  organi- 
sation nouvelle  des  Kudistes,  mérite  un  ar- 
ticle spécial  que  nous  lui  consacrerons. 
Voyez  liuDiSTEs.au  Supplément. 

Notes  recueillies  passim.  Vie  du  P.  Jean 
Eudes,  missionnaire  apostolique,  instituteur 
de  la  congrégation  de  Jésus-iVlarie  et  de  l'or- 
dre de  J\ cire  Dame  de  la  Charité  ,  ouvrage 
posthume  du  P.  de  Montigny,  de  la  compagnie 
de  Jésus,  revu  et  publié  par  un  prêtre  du 
clergé  de  Paris.  (Ce  prêtre  est  M.  l'abbé 
Tresvaus,  chanoine  de  la  métropole.) 

B-D-E. 

EUGIPPR  (Saint-).  Vny.  Césaire  (Saint-). 
EVANGILE  (Frèkes  du  Saint-).  Voy.  Dé- 
chaussés. 

EXEMPTS  (Bénédictins). 

Des  Bénédictins  Exempts,  tant  en  Flandre 

qu'en  France,  où  il  est  parlé  en  particulier 

de  l'abbaye  de  Saint-Vaust  d'Arras. 

Après  que  le  concile  de   Trente  eut   été 

heureusement  terminé,  en  15G3,à  l'avantage 

de  la  religion  catholique  et  de  la  discipline 


ecclésiastique,  tant  pour  l'état  régulier  que 
séculier  ;  après  qu'il  eut  été  publié  et  accepté 
dans  les  provinces  de  Flandre  el  d'Artois  en 
15G4,  par  les  ordres  de  Philippe  II,  roi  d'Es- 
pagne, qui  en  était  pour  lors  souverain,  il 
se  forma  plusieurs  congrégations  en  consé- 
quence du  décret  de  ce  même  concile  qui 
obligeait  les  monastères  indépendants  à  s'u- 
nir en  congrégation,  ou  à  subir  la  visite  des 
évêques.  La  première  de  ces  congrégations 
fut  composée  des  monastères  de  Sainl-Vaasi 
d'Arras,  de  Saint-Pierre-Ies-Gands;  de  Saint- 
Berlin,  à  Saini-Omer;  de  Saint-Pierre  do 
Loblies,  au  pays  de  Liège,  diocèse  de  Cam- 
brai ,  cl  de  celle  du  Saint-Sépulcre  de  Cam- 
brai; mais  cette  dernière  abbaye  ayant  été 
obligée  de  se  soumettre  à  l'archevêque  de 
Cambrai ,  cette  congrégation  se  trouva  ré- 
duite aux  quatre  premières  abbayes  jusqu'en 
l'année  1627,  que  celle  de  Saint-Amand  au 
diocèse  de  Tournai,  et  de  Saint-Sauveur  Dee- 
name  près  d'Oudenarde,  y  furent  agrégées 
pnr  ordre  d'Albert  ,  archiduc  d'Autriche  ,  el 
d'Isabelle,  princes  des  Pays-Bas. 

Quoi(iue  les  supérieurs  des  premiers  mo- 
nastères <|ui  composèrent  d'abord  celte  con- 
grégation se  fussent  mis  en  devoir  de  se  sou- 
mettre au  décret  du  concile  aussitôt  après  sa 
publication,  cependant  ils  ne  purent  exécu- 
ter la  résolution  qu'ils  avaient  prise  de  faire 
à  ce  sujet  une  assemblée  générale  ,  que  l'an 
15C9,  qu'elle  fut  tenue  dans  l'abbaye  royale 
de  Saint- Vaast  d'Arras  avec  toute  la  solen- 
nité possible.  Cette  fameuse  abbaye,  qui  est 
comme  le  chef  de  cette  congrégation,  doit 
son  établissement  à  saint  Vaast ,  dont  elle 
|)orle  le  nom,  et  eile  est  redevable  de  son  ac- 
croissement à  saint  Aubert,  un  de  ses  siic- 
resseurs.  Elle  eut  pour  fondateur,  en  080, 
Thierri,  roi  de  France,  qui  la  dota  pour  cent 
vingt-deux  religieux  de  l'ordre  de  Saint-Be- 
noît, qui  devaient  être  de  famille  noble  et  rr> 
commandable  dans  le  royaume,  personne  n'y 
étant  ri  eu  qu'il  n'eu  ait  fait  les  preuves. 

Cette  abbaye  est  exempte  de  la  juridiction 
de  l'évêque  et  jouit  de  plusieurs  droits  spiri- 
tuels et  temporels;  ce  qui  lui  fut  accordé  par 
une  assemblée  d'archevêques  el  d'évéques, 
qui  se  tint  dans  la  ville  de  Compiègne,  la 
septième  année  du  règne  du  même  roi  Thierri, 
comme  il  se  voit  dans  son  épitaphc,  qui  est 
dans  l'église  de  cette  abbaye,  où  on  lit  ces 
deux  vers  : 

Régis  larga  nianus  et  prsesul  Yioiliciaiius 
Nobis  regale  danl  jus  et  ponlilicate. 

Les  principaux  de  ces  droits  consistent, 
1°  en  plusieurs  cures  de  la  ville  d'Arras, 
dont  les  curés,  les  vicaires  et  les  autres  prê- 
tres ne  reconnaissent  point  l'évêque,  elsonl 
soumis  immédiatement  à  l'abbé  et  à  son  of- 
ficiai. 2"  En  ce  qu'elle  jouitde  tous  les  droits 
royaux,  conformément  au  titre  de  sa  fonda- 
lion  ,  entre  lesquels  droits  il  y  a  celui  de 
main-morte,  qui  défend  les  mariages  et  la  fa- 
brique des  églises,  chapelles  ou  oratoires, 
sans  la  permission  de  l'abbé,  et  sans  payer 
certains  droits  qui  sont  présentement  éva- 
lués. Ce  droit  pour  la  construction  des  égli- 
ses ,  chapelles  cl  oratoires ,  se  voit  par  une 


2;.5 


niCTIONNAinE  DES  f  ROHES  HELICIEUX. 


956 


inscription  qui  csl  sur  une  pyrainidn  élcvfc 
dans  le  Pclil-M.irché  d'Arrns;  on  y  'il  rps 
paroles  :  Anno  Dominicœ  Incarnahonis  1200, 
hirc  pi/tamis  rrrcla  d  in  fundo  Snncti  Ve- 
dasti  prr  consenutm  alihatis  el  rapiiuli,  sine 
quo  assertfu  nrc  allnre  hic  potrsl  erigi.  nrc 
dirinn  celebiari,  nrc  nliud  firri.  3"  Les  douze 
échevins  de  la  ïillc  sonl  oblii;  s  de  jurer, 
tous  les  nns  ,  qu'ils  pnnlcroiil  les  droits  du 
roi  el  de  Ta!)'  .-ne,  veiiaiil  pour  cet  effet  dans 
l'éu'lise  de  la  Madrleine,  qui  est  une  de  celles 
(|ui  depiMidciit  alisolunu'iil  de  l'abbaye  ,  tant 
pour  le  spirituel  que  pour  le  temporel.  4" 
Celte  abbnye  jouit  du  droit  de  ton-lieu  ,  qui 
est  ce  qu'on  appelle  à  Paris  droit  de  iirand 
voyer.  5*  L'abbé  de  Siinl-N'aast  el  ses  reli- 
picux  ont  droit  d'occuper  toutes  les  hautes 
slalles  du  côlé  pauchc  rie  la  cathédrale,  lors- 
qu'ils y  vont  pour  les  processions  cl  les  as- 
seiiiblées,  conforméuienl  au  concordai  passé 
entre  les  parties  en  l'année  lo08,  par  lequel 
il  esl  dit  qu"  les  religieux  de  l'abbaye  de 
Sainl->"dast  marcheront  a\cc  les  cliaiioiiies, 
en  telle  sorte  (|n'un  chanoine  aura  la  droite 
el  un  religieux  la  gauche,  cl  cela  dans  les 
processions  générales. 

(k'Ke  abliaye  était  anciennement  d'une 
congrégation  qui  comprenait  généralement 
tons  les  niunastcres  de  l'ordre  de  Saint-Be- 
noîl,  qui  se  trouvaient  dans  les  provinces  de 
Flandre  ,  Sens  et  Reims,  exempts  et  non 
exempts,  qui  faisaient  pour  lnrs  leurs  assem- 
blées, sans  préjudice  au  droit  des  évèques, 
comme  il  est  facile  de  le  voir  dans  li-  \i  cha- 
pitre du  concile  de  Latran  sous  Innocent  MI, 
cnp.  In  fin(/itlifcle  Siatn  vwnarhorum,  où  on 
lit  ces  paroles  :  Siilvo  jure  diœcesnnornm  pon- 
tificum.  Mais  les  guerres  qui  sont  arrivées 
entre  les  rois  de  France, les  comtes  de  Flan- 
dre cl  les  ducs  de  Bourgogne,  divisèrent  tel- 
lement ce  grand  corps,  où  chaque  abbaye, 
étant  devenue  Indépendante  ,  tomba  dans  le 
relâchement  :  ce  qui  dura  jusqu'à  la  conclu- 
sion du  concile  de  Trente  ,  que  ces  monas- 
tères, étant  obligés  à  se  remettre  en  congré- 
gaiioiis,  reprirent  en  même  tfin(is  les  obsiT- 
vanres  regu  iéres,  mais  parliculièremcnl  ce- 
lui d'Arras,  où  la  discipline  nion;islique  com- 
mença à  revivre  par  la  piélc  cl  la  vigilance 
de  dom  Sarrasin,  qui  fut  chargé  du  soin  de 
remédier  aux  abus  qui  s'élairni  glissés  dans 
les  monastères  de  celte  nouvelle  congréga- 
tion, où  il  est  regardé  comme  le  reslaura- 
teur  de  l'observance  ré;;uliére  et  comme  un 
sujet  qui  lui  a  fail  plus  d'honneur  par  son 
grand  génie,  sa  piéie  solide,  son  zèle  pour 
la  religion  catholiciue  ,  les  emplois  dont  il  a 
éié  honore, les  ch.irgrs  el  dignités  auxquelles 
il  a  été  élevé  par  sou  gi  au'i  o:érile. 

Il  naquit  à  Arras  le  -10  juillcl  lo.'iO.  Ses  pa- 
rents,  qui  étaient  rcciiinniandaldcs  d.ins  la 
bourgeoisie  do  celle  >  il  le,  lui  Tirent  a|)prcndre 
Il  langue  latine,  l'ayant  mis  pour  cet  eiïet 
entre  les  mains  d'un  bon  maître  qui,  con- 
naissanl  bs  pranles  dispnsiiions  <le  son  éco- 
lier, le  présenta  à  l'ablie  de  Sainl-\  aast,  qui 
éiflil  pour  lors  Jér(^me  Uurfant.  L'esprit  et  les 
manières  solides  de  Sarrasin  lui  allirèrent 
l'cklimc  de  cet  abbi-,  qui  lui  donna  l'habit  <lc 


son  ordre  à  I  âge  de  dix-sept  ans.  Apiès  son 
année  de  probation,  pendant  laquelle  il  ga- 
gna le  cœur  cl  l'estime  de  toute  la  commu- 
nauté, dans  laquelle  il  fut  reçu  avec  tout 
l'applaudissement  possible,  il  fut  envoyé  a 
l'Université  de  Paris  pour  y  étudier  la  rbéto- 
rinue.  Il  y  fil  de  si  grands  progrès,  qu'en 
l'absence  de  ses  maîtres  il  donnait  les  leçons 
aux  écoliers.  Ensuite  il  fut  rappelé  à  son  mo- 
nastère, où  il  fil  ses  vcrux,  et  peu  de  temps 
après  il  y  reçut  les  ordres  mineurs  cl  les  or- 
dres sacrés  de  sous-diaconat  et  de  diaconat; 
après  quoi  il  fut  envoyé  à  Luuvain  pour  y 
étudier  en  théologie.  Il  y  fut  ordonné  prêtre 
el  il  se  fil  recevoir  bachelier  dans  cette  Uni- 
versité à  la  sollicit;ition  de  ses  maitres  cl 
avec  la  permission  de  Hoger  de  Momoranci  , 
qui  avait  succédé  à  Jérôme  Huiïaul  à  l'ab- 
baye de  Saint-Vaast. 

À  peine  eut-il  fini  ses  études  que  ce  même 
abbé,  connaissant  son  mérite,  le  (il  son  cha- 
pel.iin,  lui  donna  le  soin  d'une  partie  des  af- 
faires de  son  monastère,  el  le  fil  enfin  dans 
la  suite  grand  prévôt  de  son  abbaye,  dignité 
vacante  par  la  mort  de  dom  Jacques  Taffe. 
Cet  emploi,  qui  semble  si  oppose  à  la  piété  et 
à  l'observance  régulière  par  robligatiou 
presijue  continuelle  où  il  met  celui  qui  en 
est  pourvu  de  songer  aux  procès  cl  de  s'ap- 
pliquer à  la  conservation  des  droits,  des  pri- 
vilèges et  immunités  du  monastère,  ne  l'ein- 
pécha  point  de  pratiquer  ces  deux  vertus  qui 
sonl  le  f  indemcnl  de  la  vie  religieuse.  Aussi 
cela  parut  si  extraorilioaire  aux  Pères  qui 
élnienl  dans  celle  première  assemblée  qui  so 
tint  au  sujet  de  l'établissement  de  la  congré- 
gation, que,  dans  le  dessein  qu'ils  avaient  de 
réformer  en  même  temps  les  nueurs  et  de  ré- 
tablir la  discipline  régulière,  ils  le  deman- 
dèrent à  son  abbé  pour  remplir  la  charge  de 
grand  prieur,  dont  il  fut  revêtu  parce  même 
alihe  qui,  ne  pouvant  assez  lui  témoigner 
r<slime  qu'il  faisait  de  son  niéril-,  le  lit, 
quelque  temps  après ,  son  vicaire  général 
dans  le  spirituel,  avec  pouvoir  de  disposer 
des  bénélices. 

I.ii  supériorité  de  son  génie  lui  rend  lit 
toutes  choses  si  f.iciles,  que,  plus  on  lui 
donnait  d'emplois,  plus  il  donnait  de  preuves 
de  son  étendue  par  la  manière  dont  il  s'en 
aci|uitt.iit.  Cela  parut  principalement  dans  In 
soulèvement  de  la  ville  d'Arras,  qui  était  du 
nombre  de  celles  qui  par  la  faction  des  héré- 
tiques qui  avaient  à  leur  léle  le  prince  d'O- 
range, s'était  révoltée  contre  son  sou\erain, 
et  dans  biquellc  la  religion  catholi(|ue  était 
en  si  grand  danger  par  le  nombre  des  liéré- 
liques,  qui  surpassait  de  beaucoup  celui  des 
catholiques ,  que  l'évêquc  de  cette  mêmH 
ville  fut  obligé  d'abandonner  ses  ouailles  et 
d'en  sorlir  avec  tout  ce  <iu'il  y  avait  d'hon- 
nêtes gens,  afin  d'éviti  r  la  persécution,  lais- 
sanl  ainsi  le  soin  de  son  troupeiu  à  dom 
Sarrasin,  qui,  se  trouvant  en  même  temps 
ch.ii  gé  de  tout  le  goiivernement  de  son  mo.- 
nastère  par  la  mort  de  Thomas  Pareusi,  qui 
en  elail  ,»libé,  remplit  parfaitement  les  de- 
voirs d'un  supérieur  vigilant  et  d'un  zélé 
[laslcur,  animant  par  sou  e\eni|>le  ses  reli- 


2:i7 


EXE 


gicux  à  l'observance  régulière,  et  exliorlant 
les  peuples  par  ses  fréquentes  prédicalioiis 
à  (léleiiilrc  la  vérital)lc  foi  de  Jésus-Christ  au 
prix  de  leur  sang  et  à  être  fernies  dans  la  fi- 
délllé  à  leur  roi  ;  ce  qui  lui  réussit  hcureuse- 
iiienl.  Mais  ce  ne  fut  pas  sans  peine  et  sans 
lieaucoup  d(!  souffrances  :  c.ir  les  liéréli<]u(S 
et  leurs  adliérenls,  enragés  de  ce  qu'il  soule- 
nait  les  intérêts  de  ])ieu  et  de  la  religion 
avec  tant  de  zèlo,  lejelèrotil  dans  une  obs- 
cure prison,  où  il  soutTrii  la  faim  et  la  soif 
pend.inl  quinze  jours,  n'attend;int  que  le 
nioriienl  d'uiie  mort  ignominieuse  selon  le 
inonde,  mais  précieuse  au\  yeux  de  Dieu, 
qui,  en  ayant  déterminé  autrement,  suscita 
des  gens  de  probité  qui  les  déiouriièrent  de 
leur  mauvais  dessein,  diint  ils  ne  se  désistèrent 
qu'à  condition  qu'on  leur  donnerait  l'argen- 
terie du  monastère  pour  l'envoyer  au  prince 
d'Orange. 

Dans  le  temps  que  ce  grand  homme  était 
dans  la  persécution,  les  IClats  généraux  d'Ar- 
tois, qui  gouverna  eut  pour  le  roi,  voulant 
récompenser  son  niérite  elles  traviiux  qu'il 
avait  endurés  pour  le  soutien  de  la  foi  catho- 
lique et  le  service  de  son  roi,  le  nommèrent 
à  l'abbaye  de  Saint-Vaasl ,  dont  il  obtint  la 
conQrmalion  de  Pliilippell.  Il  serait  dllficile 
d'exprimer  les  grands  talents  et  les  vertus 
héroïques  qu'il  lit  paraître  dans  sa  nouvelle 
dignité  :  son  zèle  pour  le  bien  de  son  monas- 
tère tant  pour  l'observance  régulière  que 
pour  la  défense  de  ses  privilèges;  son  ap- 
plication et  ses  travaux  pour  la  paix,  qu'il 
procura  enfin  aux  Pays-Bas  au  grand  con- 
tentement de  tous  les  bons  catholiques;  sa 
charité  envers  les  pauvres,  auxquels  il  servit 
de  père  dans  une  laminu  qui  fut  pies;iue  gé- 
nérale dans  t.)uie  l'Europe  en  15ii7,  ayant  fait 
ouvrir  pour  cet  efl'et  les  gieniers  de  son  ab- 
baye; son  amour  pour  les  gens  savants,  aux- 
quels il  faisait  tous  les  biens  qui  étaient  en 
son  pouvoir,  fondant  plusieurs  collèges  où 
les  éluiiiants  pauvres  étaient  reçus,  donnant 
des  pensions  aux  couvents  des  religieux 
mendiants  afiii  qu'ils  pussent  plus  comcno- 
dément  avancer  leurs  religieux  dans  les 
s.ieiices,  et  faisant  de  grandes  aumônes  aux 
écoliers  pauvres  à  proportion  des  disposi- 
tions qu'ils  avaient  pour  les  sciences;  sa 
pieté  envers  le  |irochain  en  faisant  cons- 
truire un  jiôpitiil  pour  les  pauvres  et  en  fai- 
sant liàlir  un  couvent  aux  capucins  nouvel- 
lement arrivés  d'Italie  dan^  la  ville  d'Arras; 
cnlin  sonadressedans  les  négociations  les  plus 
épineuses,  desquelles  il  sortait  toujours  avec 
honneur  à  l'avantage  de  ceux  dont  il  prenait 
les  intérêts  et  avec  la  satisfaction  des  parties 
intéressées,  qui  ne  pouvaient  assez  louer  ses 
belles  qualités  et  son  bel  esprit,  tant  dans 
le  manieriient  des  alTaires  que  dans  les  con- 
versations particulières,  qui  lui  firent  aussi 
mériter  l'estime  de  Philippe  II,  roi  d'Espa- 
gne, qui  pour  récompenser  son  mérite  le  dé- 
clara conseiller  d'Etat  avec  tous  les  honneurs 
ci  prérogatives  appartenant  à  celle  charge, 
el  quelque  temps  après  lui  donna  l'archevê- 
ché de  Cambrai,  vacant  par  le  décès  de  M. 
de  Burlemoni,  qui  luourul  le  15  février  1590, 


EXE  25J 

et  dont  il  obtint  les  bulles  et  prit  possession 
le  1'*  septembre  de  la  même  année. 

Lorsqu'il  se  vit  revêtu  de  cille  nouvelle 
dignité,  il  crut  qu'il  était  de  son  devoir  de 
travailler  à  ramener  au  bercail  de  Jésus- 
Christ  les  âmes  ijui  s'en  étaient  écartées. 
C'est  pourquoi  il  s'appliqua  à  l'extirpation  de 
l'hérésie  et  à  l'augmentation  de  la  religionca- 
tholique.  Sa  vigilance  el  son  zèle  ne  lui  per- 
niettaieiit  pas  de  prendre  aucun  repos,  récon- 
ciliant lui-même  à  l'Eglise  les  hérétiques,  ré 
parant  les  églises  ruinées  par  les  guerres,  et 
s'appliquant  continuellement  au  soulage- 
ment (lu  public;  ce  qu'il  continua  jusqu'à  la 
mort  :  car,  sentant  diminuer  ses  forces  el 
prévoyant  que  sa  fin  approchaii,  il  ne  laissa 
pas  pour  l(!  bien  du  prochain,  denlrepren- 
dre  contre  l'avis  des  médecins  le  voyag-  de 
Bruxelles,  où,  élanl  arrivé  il  mourut  le 
troisième  jour  de  mars  de  l'année  1598, 
après  avoir  reçu  lous  les  sacrements  de  l'E- 
glise. 

Le  bon  ordre  el  la  tranquillité  que  ce 
grand  h  imme  avait  établie  dans  son  monas- 
tère ne  dura  que  pendant  la  vie  de  son  suc- 
cesseur, qui  fut  dom  Philippe  de  Caverel, 
qui,  pendant  Irenle-six  ans  qu'il  fut  abbé 
de  Saint-Vaast,  fut  presque  toujours  prési- 
dent de  la  congrégation  et  y  mainlint  l'ob- 
servance régulière;  mais  depuis  sa  uiori, 
qui  arriva  le  premier  décembre  1036,  elle 
éprouva  toutes  sortes  de  disgrâces  par  la 
gueire  qui  commença  en  1633,  enire  la 
France  et  rE<pagne.  L'abbaye  de  Saint- 
Vaasl  fut  celle  qui  en  souffrit  le  plus,  puis- 
qu'elle resli  jusqu'en  lO't^l  sans  gouverne- 
ment ni  spirituel  ni  leiniiorel.  Car  les  Fran- 
çais s'élant  emparés  d'Arras,  tout  l'Artois 
se  trouva  tellement  divisé  entre  la  France  et 
l'Espagne  elsiruinépar  les  deuxarmées,  que 
les  religieux  de  ce  monastère  ne  pouvaient 
rcievoirle  revenu  de  leurs  biens,  el  furent 
réduits  a  n'avoir  pas  même  de  pain  pour  se 
nourrir. 

Louis  Xlll,  voulant  se  servir  de  son  droit, 
donna  celle  abbaye  en  lOil  à  dom  Maximi- 
lien  de  Bourgogne,  qui  nomma  dom  Jean  de 
Nizar  pour  gouverner  ce  monastère  quant 
au  spirituel.  Mais  ce  fut  une  autre  source 
de  désordres  :  car,  Claude  Haccart  ayant 
été  élu  pour  supérieur  de  la  congrégation 
par  les  autres  monastères  qui  étaient  en- 
core sous  la  domination  d'Espagne,  el  ayant 
été  nommé  ensuite  à  cette  abb.iye  par  l'Iii- 
li|)pe  IV,  roi  d'Espagne,  l'an  1051,  aucun  de 
ces  deux  abbés  n'ayant  pu  obtenir  ses  bulles 
du  pape,  cela  causa  un  schisme  si  grand, 
que  le  monastère  de  Sainl-Vaast  étant  di- 
visé, les  revcmus  partagés,  et  les  moines 
désunis  el  dispersés,  tout  fut  renversé  tant 
pour  le  spirituel  que  pour  le  temporel  jus- 
qu'en l'aimée  1000,  que  la  paix  fut  conclue 
en!re  les  deux  couronnes,  par  laquelle  paix 
la  nomination  appartenant  au  roi,  et  dom 
Maximilien  de  Bourgogne  étant  mort  ,  ce 
prince  la  donna  au  cardinal  Jules  Mazarin, 
qui,  elanl  mort  avant  que  d'en  recevoir  les 
bulles  ,  eut  pour  successeur  le  cardinal 
René  d'Est,  qui  ne  se  fit  jamais  connaître  à 


••» 


DICTIONNMnE  DES  ORDRES  RKLICIF.UX. 
Pour  le  chœur 


celle  abbaye  que  par  le  soin  qu'il  cul  d'en 
recevoir  les  revenus.  Il  eul  pour  successeur 
le  cardin.ll  Emmanucl-Théoilose  de  llouillon 
de  la  Tour  d'Auvergne,  qui  eu  oblinl  les 
bulles  de  Cléuienl  X  au  mois  de  février 
1G7.Î.  Ce  cardinal  élanl  morl  à  Home  le  2 
mars  1713.  le  cardinal  de  Uohan  fui  pourvu 
de  celle  abbaye. 

Il  y  a  dans  ce  monastère  qualre  supé- 
rieurs pour  le  spirituel,  qui  sonl  le  gran  I 
prieur,  le  sous-prieur,  le  liers-prieur  el  le 
«|uarl-prieur.  Le  grand  prieur,  qui  passe 
pour  le  premier  officier  de  la  maison,  n'est 
point  sujet  à  la  clôture  du  dortoir,  ayant  un 
quartier  a  part,  d'où  il  peut  veiller  à  la  con- 
duite des  olliciers.  el  en  mémo  temps  au  bon 
ordre  du  monastère.  H  se  fait  par  scrutin,  et 
il  esl  perpétuel  ;  il  esl  aussi  oflicial  de  l'abbe 
dans  kl  p.iroisse  de  la  Madeleine,  el  d'au- 
tres qui  ea  dépendent,  el  il  a  un  chapelain 
religieux. 

Le  premier  oITicier  pour  le  temporel  est 
le  grand  prévôt,  qui  est  chef  de  la  justice, 
el  préside  au  siège  de  la  cour  abbatiale  pour 
le  civil,  el  est  gardien  des  titres  et  autres  pa- 
piers de  r»")baye.  Gel  emploi  esl  aussi  an- 
cien que  l'abbaye.  Le  çrand  bailli,  avec  les 
barons  el  hommes  de  hef,  servent  pour  le 
criminel. 

Le  grènetier  reçoit  les  grains,  el  a  soin 
du  bo:s  et  du  charbon  ;  il  est  aussi  chape- 
lain de  l'abbé. 

Le  cellérier  a  soin  de  la  cuisine  conven- 
tuelle el  du  rcfecloire. 

Le  receveur  général  lient  la  caisse  el  re- 
çoit la  finance  de  l'abbaye  des  mains  des  fer- 
miers el  des  autres  receveurs  particuliers  ; 
sou  bureau  s'appelle  communément  le  buf- 
fet. 

Le  trésorier  a  »oin  de  la  cire,  du  linge, 
des  ornements  de  l'église  el  de  la  sonnerie. 

Le  rentier  est  juge  du  ton-lieu,  et  reçoit 
les  rentes  foncières  de  la  ville  et  de  la  ban- 
lieue. 

L'hôtelier  avait  autrefois  la  direelion  de 
l'hôpital;  mais  depuis  l'érection  d  •  l'hôpital 
général  d'.Vrras,  el  même  peut-être  avant 
ce  temps-là,  ce  n'est  plus  qu'un  ofGce  sans 
exercice. 

Le  théologal  fait  sa  leçon  certains  jours  de 
la  semaine. 

Le  viiiier  a  soin  de  la  cave  au  vin  el  de 
celle  de  la  bière. 

Le  réfectorier  a  l'inspection  sur  la  bou- 
langerie, el  fait  cuire  le  pain. 

Le  cutnmis  aux  ouvrages  esl  chargé  de  la 
fabrique,  tant  au  dedans  qu'au  dehors  du 
monastère. 

Le  bibliothécaire  a  la  clef  de  la  biblio- 
thèque, qui  est  très -vaste  el  très -nom- 
breuse. 

L'aumônier  distribue  aux  pauvres  les  au- 
mônes accouiuiiiées,  el  entre  autres  tout  ce 
(jui  vient  du  réfectoire  comiiiiin. 

Le  sacristain  a  soin  des  reli<|ues  el  de  l'ar- 
genterie de  l'église. 

Le  Diallre  de  l'ordre  est  direc!eur  des  no- 
vices, cl  il  y  en  a  un  autre  l'our  les  jeunes 
profès. 


2C0 
sous- 


il  y  a   chantre   et 

à  l'inGrmerie,  et  a 
receveurs   forains. 


chantre. 

Le  sous-prieur  préside 
sous  lui  des  infirmiers. 

il  y  a    deux   ou    trois 
qui  reçoivent  les  renies  à  la  campagne. 

Il  y  a  dans  le  monastère  des  professeurs 
de  la  théologie  morale ,  el  des  langues 
orientale  ,  grecque ,  hébraïque ,  syria- 
que, etc. 

Outre  le  sacristain,  il  y  a  deux  prêtres 
séculiers,  qu'on  appelle  sénéchaux  ou  tar- 
des d'église,  qui  éveillent  les  religieux 
pour  aller  à  matines,  préparent  les  autels  el 
les  ornements,  et  servent  de  massiers  les 
jours  solennels,  auxquels  jours,  les  prêtres 
habitues  des  paroisses  de  la  Madeleine,  de 
Sainte-Croix,  de  la  Chapelle-au-Jardin,  el 
de  la  Itasècle,  et  tous  les  officiers  de  justice 
sonl  obligés  d'assister  à  l'office. 

11  y  a  qualre  principales  prévôtés  forai- 
nes, qui  dépendent  de  cette  abbaye;  la  plus 
considérable  esl  celle  de  Haspres,  cnire  Cam- 
brai el  Valencieunes,  où  il  y  a  ordinaire- 
ment dix.  ou  douze  religieux,  dont  il  y  en  a 
un  qui  esl  prieur,  el  un  autre  trésorier.  Le 
prévôl  est  membre  des  Etais  de  Hainaul.  La 
seconde  est  celle  de  Herclau  près  la  Uassée, 
où  il  y  a  ordinairement  trois  religieux  sous 
le  prévôt.  La  troisième,  de  Uorres  près  de 
llélhune,  qui  esl  semblable  à  la  seconde.  La 
quatrième,  de  Bœurières,  de  laulre  côte  de 
ISelhune,  qui  esl  aussi  de  même.  11  y  en  a 
encore  d'aulres  moins  considérables  que  ces 
quatre  premières.  La  première  esl  celle  de 
Sainl-Michel  près  d'Arras,  où  il  n'y  a  ordi- 
nairement qu'un  religieux.  Cet  endroit  sert 
pour  les  religieux  convalescents.  La  prévôté 
d'Angicourt  dans  le  diocèse  de  Beauvais, 
près  de  Chantilly  ,  celle  de  Sailli  sur  la  Lis, 
dans  le  pays  de  Lalloëne,  qui  e»t  entièrement 
du  domaine  de  l'abbaye,  avec  quatre  gros 
bourgs  ou  villages  ;  el  enfin  celle  du  Maisnie- 
les-Artoises,  entre  Bapaume  et  Péronne.  Les 
prévois  de  ce^  deux  dernières  sonl  ordinai- 
rement seuls,  et  ne  sonl  là  que  pour  veiller 
aux  intérêts  de  l'abbaye  Uans  les  terres 
quelle  y  possède. 

Le  grand  collège  de  Saint-Vaast  à  Douai, 
fonde  par  D.  Philippe  de  Caverel,  dont  nous 
avons  parlé  ci -dessus,  contient  trois  grands 
quartiers,  savoir  :  celui  des  bénédielins  an- 
glais, qui  sont  goHvernés  |)ar  un  prieur,  et 
qui  font  l'office  dans  l'église,  comme  on  fait 
à  Arras  dans  le  monastère;  celui  de  la  par- 
lie  conventuello  des  religieux  de  Saiiil- 
\  aasl,  où  il  y  a  un  président  el  un  vice-pré- 
sident pour  veiller  >ur  les  religieux,  tant 
enseignants  qu'étudiants  ;  et  enlin  le  quai - 
lier  des  pensionnaires  séculiers,  qui  sont 
sous  la  conduite  d'un  principal  ou  régeiH, 
d'un  siius-regeiit  et  d'un  préfet.  Dans  le 
même  quartier  sonl  la  grande  salle  des  dis- 
putes, el  les  classes  de  théologie,  de  philoso- 
phie el  de  rhétorique.  L'abbaye  a  aussi  un 
collège  à  Paris  nomme  le  collège  d'Airuf, 
proche  Saint-Victor. 

Ces  emplois,  olfices,  prévôté,  el  principa- 
lilcs,  sont  des   aduiinistraliuns   régulières, 


3G1 


EXE 


EXE 


2i;2 


l>«res  cl  simples,  coinplables  cl  révocables, 
à  la  voloulc  des  supérieurs  réguliers,  et  cela 
de  tout  lemps,  n'ayant  jamais  pas^é  pour 
des  vrais  litres  de  bénéfices,  comme  il  pa- 
rait par  plusieurs  arrêts  du  parlement. 

Cette  abbaye  a  toujours  été  ,  comme  les 
autres  de  Flandre  ,  régulière  et  déclive, 
comme  il  parait  par  les  tilres  de  sa  fonda- 
lion  cl  par  une  inTmité  de  bulles  des  papes, 
aussi  bien  que  par  la  lellre  de  nomination  de 
Louis  XIII  en  1641.  L'abbé  est  comie  de 
Lalloëve,  porte  milre  et  crosse  ,  et,  outre  la 
seigneurie  qu'il  a  dans  la  ville  et  banlieue 
d'Arras,  il  est  haut  justicier  dans  toutes  les 
terres  dépendantes  de  son  abbaye  ,  qui  sont 
de  fandalion  et  amortissement  royal. 

Les  principaux  exercices  de  celle  abbaye 
consistent  à  se  lever  à  onze  heures  du  soir 
pour  aller  à  matines.  On  leur  porlc  pour  cet 
cITet  de  la  lumière  dans  leurs  chambres  , 
d'où  ils  ne  sortent  qu'après  en  avoir  reçu 
ordre  du  supérieur,  qui  leur  ouvre  la  porte 
du  dortoir ,  dont  il  garde  la  clef.  Ils  disent 
tous  les  jours  l'office  de  la  Vierge  avant  que 
de  dire  le  grand  office,  et  souvent  ils  disent 
aussi  l'office  des  morts;  ce  qui  étant  fini  ils 
retournent  à  leurs  chambres  en  disant  le 
psaume  De  profundis.  Ils  se  lèvent  à  six 
heures  et  demie  pour  chanter  une  messe  de 
la  Vierge  aux  jours  qu'on  doit  selon  les  ru- 
briques en  chanter  deux  ,  uu  bien  du  saint 
sacrement  ou  des  morts.  Ils  chantent  prime 
à  sept  heures,  puis  l'office  de  la  Vierge,  en- 
suite Is  martyrologe  ,  lequel  étant  fini,  ils 
vont  au  chapitre  reconnaître  leurs  fautes  el 
retournent  au  chœur  pour  dire  tierce,  sexie 
et  noue,  cl  l'office  de  la  Vierge.  Quand  on 
ne  doit  pas  dire  deus  grandes  messes  ,  ils 
disent  prime  à  huit  heures  et  demie.  Après 
prime,  ils  vont  à  leurs  chambres,  où  ils  de- 
meurent jusqu'à  dix  heures,  que  l'on  dit 
tierce,  après  quoi  on  chante  la  grand'mes- 
se  ,  qui  est  suivie  de  sexle  et  de  noue,  ex- 
cepté depuis  l'Exallation  de  la  sainte  Croix 
jusqu'à  Pâques  ,  et  tous  les  jours  de  jeûne 
d'Eglise;  mais  aux  autres  temps,  none  ne  se 
dit  qu'après  les  grâces,  que  l'on  dit  après  le 
diner,  qui  suit  immédiatement  l'oflîce.  Après 
le  diner  ils  prennent  une  heure  de  récréa- 
tion ,  et  ils  se  retirent  ensuite  à  leurs  cham- 
bres jusqu'à  trois  heures  ,  que  l'on  chante 
vêpres.  Avant  le  souper,  on  fait  une  demi- 
heure  d'oraison  mentale,  el  après  le  souper, 
qui  se  fa>l  à  sept  heures  el  demie,  ou  après 
la  collation  pour  les  jours  de  jeûne,  qui  se 
f.iit  à  six  heures ,  on  chante  les  compiles, 
qui  sont  suivies  d'une  action  de  grâce  qui 
se  fait  devant  le  grand  autel  pour  tous  les 
bienfaits  qu'on  a  reçus  de  Dieu  ,  el  pour 
lors  chacun  se  relire  à  sa  chambre  en  si- 
lence. 

Personne  ne  peut  se  dispenser  des  offices 
divins  ;  ceux  même  qui  ont  des  offices  ou 
des  bénéfices  claustraux  sont  obligés  de  se 
trouver  à  vêpres,  à  matines  et  aux  messes 
i|ue  l'on  chante.  Il  ne  leur  est  pas  permis  de 
manger  en  particulier,  el  ils  doivent  servir  à 
table  les  uns  après  les  autres  sans  aucune 

(1)  Vo'j.,  à  la  fin  du  vol.,  n°''  56  el  57. 


distinction.  Ils  observent  l'avent  de  l'Eglise, 
pendant  lequel  on  ne  mange  point  de  vian- 
de, non  plus  que  tous  les  mercredis  de  l'an- 
née ,  non  pas  même  à  la  table  de  l'abbé.  Ils 
jeûnent  en  tous  temps  le  vendredi,  excepié 
pendant  le  temps  p.iscal ,  aussi  bien  que  lu 
mercredi,  depuis  la  fête  de  l'Exaltation  de  la 
sainte  Croix  jusqu'au  carême.  Ils  sont  obli- 
gés de  rendre  compte  une  fois  l'an  de  tous 
les  meubles  qu'ils  possèdent,  et  toutes  cl 
quautes  fois  que  le  supérieur  le  requiert.  Il 
leur  est  défendu  d'avoir  rien  hors  du  cou- 
vent. Ils  doivent  se  servir  de  chemises  de 
serge  ,  et  ils  ne  doivent  rien  avoir  d'affecté 
ni  d'immodeste  dans  leurs  liabits,  qui  con- 
sistent, dans  la  maison  et  au  chœur,  en  une 
grande  coule  noire,  et  en  un  fort  grand  capucc 
ou  froc  qui  leur  tombe  presque  jusqu'aux 
talons;  une  aumusse  noiie  qu'ils  portent  eu 
forme  d'étolc,  el  un  bonnet  e ai  ré  à  trois  cor- 
nes, avec  un  petit  rabal  ou  collet  large  de 
trois  doigts  ,  el  qui  est  fendu  par  derrière, 
comme  on  le  voit  dans  la  seconde  figure. 
Afin  qu'on  puisse  voir  la  forme  de  l'habit  , 
nous  donnons  deux  estampes  du  même  ha- 
billement :  l'une  le  représente  par  devant  el 
l'autre  par  derrière  (1).  Hors  du  monastère 
ils  sont  habillés  comme  les  prêtres  séculiers, 
à  l'exception  d'un  scapuluire  large  d'un  bon 
demi-pied,  qu'ils  portent  par-dessus  leur  ha- 
bit. Les  habillements  des  autres  monastères 
de  celle  congrégation  ,  aussi  bien  que  les 
pratiques,  sont  peu  différents.  Les  religieux 
des  monastères  de  Saint-Berlin  ,  de  Sainl- 
Pierre-les-tiands  eld'Ename  ontdesaumus- 
ses  de  dr.ip  el  onl  des  bonnets  à  quatre  cor- 
nes, et  ceux  de  Lobbes  et  de  Saint-Amand 
n'ont  (joint  d'aumusses. dite  congrégation  a 
élé  confirmée  par  Grégoire  XUl  en  1575,  et 
Innocent  XI  accorda  à  l'abbaye  de  Sainl- 
Vaast,  par  une  bulle  de  11376,  la  jouissance 
de  l'ius  les  privilèges  dont  jouit  le  Moiil- 
Cassin.  Celte  abbaye  porte  pour  armes  uu 
château  d'or  à  fond  de  gueuks,  avec  ces  pa- 
roles :  Caalrum  nobiliacuin ,  ce  qui  lui  lui 
donne  par  son  fondateur. 

Il  se  lorma  aussi  en  France  l'an  1380  une 
congrégation  de  Bénédictins  sous  le  nom 
d'Exempts ,  el  cela  en  conséquence  des  dé- 
crets du  concile  de  Trenie  el  de  l'ordonnance 
de  lilois,  sous  Henri  III.  Les  principaux  mo- 
nastères qui  formèrent  d'abord  celle  con- 
grégation lurent  les  abbayes  de  Marmoulier, 
de  Vendôme,  de  Khédon,  Sainl-Benoîl-sur- 
Loire,  le  Bourg-Dieu  et  quelques  autres.  Ces 
monastères  dressèrent  des  statuts,  le  k  sep- 
tembre 1581,  qui  furent  confirmés  au  mois 
de  lévrier  1588  par  le  pape  Sixte  V,  et  au 
mois  de  décembre  1590  par  le  pape  Grégoire 
XIV.  Plusieurs  autres  abbayes  firent  union 
dans  la  suite  avec  ces  premières  et  observè- 
rent les  mêmes  slatuti,  entre  autres  celle  do 
Saint  -  Maur-sur-Loire  y  fut  unie  dans  )« 
chapitre  général  qui  se  tint  à  Marmoulier 
l'an  16-23,  el  Claude  de  Saiiit-OITange,  qui  eu 
ét.iil  abbe,  y  lut  élu  général  de  la  congréga- 
tion. 

L'abbaye  de  Saint-Denis  n'avait  pas  eu- 


i(,5  niCTIONNAinF.  DES 

corc  ob6i  sur  ee  poiiil  au  ronrilc  ni  à  l'or- 
iloiinance  de  Hlois  ;   les  relisiii'us  H"'  y  dc- 
iiicuraicnl  ne  pouvant  se  résouiire  à  piilrer 
daiij  une  des  coniire^alions  di-jà  el.iblics,  el 
-i  se  souini'llre  à  leur  chof,  se  di-termint"'rc-iit 
eiilin,  après   hcaurotip  df   delilifraiions,  a 
donner  loniineniemenl  à  une  nouville  con- 
f;réf:aliiin,  afin  do  pou\oir  s'excnipler  de  la 
visile    des    év(*i|ues  d'une   inaniiTe   qui    fût 
honorable  à  celte  fameuse  abliave  ;  ils  for- 
luèreiil  celle  de  Sainl-Diiiis,  dont  nous  avons 
parle   à  l'article  Dkn\s    (Saint-),  et  l'abbaye 
dont  elle  prit  le  nom  fut  reconnue  pour  clief 
de   toute  la   con^regalion.    I.e  ])ape  l'aul  V 
[approuva  el  permit  aus  monastères  immé- 
di.'itcnu-nl  soumis  au  sainl-siége  (ie  s'unir  à 
elle;  mais  la  rérorme  de  la  congré{;alion  ilc 
Saint-Maur  ayant  elé   introduite  dans  cette 
cèltUtre    abbaye  en   lO.'J.J,    les   m  lisons   qui 
formaient    la   coiigré{;alioii    de  S;iinl-Ucnis 
ayant  perdu  leur  clu'f  en  clioisirenl  un  au- 
tre, qui  fut  l'alibaye  de  Saint-Ouen  de  Kouen, 
el  prirent  le  nom  des  Exempts,  qu'ils  étaient 
bien  aises  de  faire  revivre,  el  qu'ils  clioisi- 
renl prcférablemenl  à  celui  du  Saint-Denis  et 
à  celui  de   l'abb.iyi'   de   Saint-Ouen  ,   quoi- 
qu'elle fut  leur  chef.  Ils  y  lireiil  leurs  diètes 
cl  chapitres  généraux  ,  il  dans  celui  qui  se 
célébra  en  1043,  où  se  trouvèrent  les  prieurs 
cl  députés  de  (ha(|ue   monastère,  el  où  pré- 
sida doin  Claude  de  It^uidri   de    Picncourt, 
abbé  de  la  Croix  de  Sainl-Leufroi ,  général 
de  celle  congrégation  ,   on  revit  les   statuts, 
r,ui   y  furent  augmeiilés  de  nouveau,  cl  im- 
primés ensuite  a  Kouen  en  IGi^i. 

I,a  réforme  de  la  congrei^alion  de  Sainl- 
Waur  faisant  de  jour  en  jnur  de  nouveaux 
progrès,  et  ayant  été  introduite  dans  les  ab- 
bayes de  Saini-Ouen  de  Kouen,  de  Corbie  et 
en  quelques  autres  (jui  dépendaieiil  de  la 
congrégation  des  Kxempls,  celle-ci  diminua 
de  jour  en  jour  au  lieu  d'augiiientiT,  et  de- 
vint peu  de  chose,  principalemeiil  après  la 
Diort  du  général  dom  Kaudri,  La  plupart  des 
monastères  reconnurent  Ifs  évêi|ues  pour 
^upéricurs  cl  se  soumirent  à  leur  visite. 
1)  autres  qui  ctaicnl  imiuédialemcnt  soumis 


OKDRF.S  RELlCIF.rX. 


204 


au  sainl-siéiie  lâchèrent  à  secouer  le  joug  de 
toute  snpériorilé,  el  un  petit  nombre  resta 
toii|ours  uni  el  élut  un  chef  ou  supérieur 
géncr;il,  des  defiiiiileurs,  des  visiieurs,  <iui 
linreiit  des  assemblées  triennales  et  conser- 
vèrent le  litre  de  congrégation  des  Exempts 
en  France  sous  l'obéissance  d'un  général, 
qui ,  en  1707,  était  le  K.  I*.  dom  Jean-Kap- 
tistc  du  Verdicr  ,  religieux  du  Sauveur  de 
Ktajc. 

L  abbaye  de  Cerisi  dans  le  diocèse  de 
Bayi  ux  ,  ipii  avait  toujours  été  soumise  au 
saint-siège  ,  ne  voulant  poinl  reconnaître 
pour  supérieur  l'évé.jue,  qui  y  voulait  faire 
la  visile,  s'unit  à  la  congrégation  des  Kéné- 
diclins  lilxcmpis,  mais  elle  n'en  est  que  plus 
indépendante  :  car  elle  n'a  jamais  vu  depuis 
ce  leuips-l i  de  supérieur  général  ,  qui  se 
contente  d'y  envoyer  tous  les  trois  ans  une 
commission  en  blanc  pour  y  faire  la  visite, 
et  les  religieux  la  remplissent  du  nom  de  tel 
visiteur  que  bon  leur  semble.  Le  prieur  de 
celle  abbaye  reçoit  aussi  lus  lettres  d'indic- 
lion  pour  assister  aux  chapitres  gcnéraus  : 
mais  il  s'en  excuse  toujours,  cl  l'on  se  con- 
tente de  meilre  la  lettre  d'indiclion  dans  les 
archives.  11  y  a  de  l'apparence  que  la  même 
chose  se  prati(iue  dans  d'autres  maisons  de 
cette  coiigrégalion  ,  où  le  général  n'a  pas 
grande  autorité  sur  ses  religieux  ,  qui  i.e 
sont  pour  la  plupart  que  des  religieux  sortis 
des  ordres  réfoimésqui  ont  secoué  le  joug 
de  l'obéissance  pour  vivre  avec  plus  de  li- 
berté, si  on  excepte  néanmoins  le  prieuré  de 
Peireci  en  Bourgogne  ,  qui  est  membre  do 
celle  congrégation,  et  où  on  a  introduit  une 
étroite  observance, dont  nous  parlerons  dans 
la  suite. 

Le  l'elletier.  Histoire  et  descriptiim  des 
ordres  rcliijieux.  Lettre  écrite  de  Cerisi  en 
1707,  par  le  K.  1'.  de  Metz,  ancien  prieur  de 
cette  abb.iye.  Dom  .Michel  Fclibien,  Ilist.  de 
l'abbaye  de  Sainl-Denys,  et  Mcuioires  coin- 
munit/iic-i  par  te  grand  prévôt  de  l'abbaye  de 
Stiint-]  aust. 

EXEMPTS.  Voyez  Molck. 


F 


F.XILLE  (SoEuns  de   la).    Voyez    Cuises 

(SoF.l  RS). 

l'AISEUKS  DE  PONTS,   Voyez  Pontikks. 
FAJE  KEN    FKATI'LLl.    Voyez    Jean  de 
Dieu  (OnnuE  dk  Saint-). 

FEK  DOK  Ll    DES  ECUVEKS  DU   FEU 

D'AKtiE.NT    (OllUllE    DES    CIIEVALIEIIS    l>l  )  ,    (  »l 

l'rance. 

Jean,  duc  de  liouriion,  lils  de  Louis  II ,  iii- 
ttilulriir  des  ordr(  s  du  Chardon  el  de  l'Ecu 
d'or,  dont  nous  avons  parié  aux  articles  qui 
portent  ces  noms  ,  institua  d;ins  l'église  de 
.Notre-Dame  di-  Paris,  l'an  L'*I4,  l'ordre?  des 
chevaliers  du  Fer  d'or  el  des  écuyers  du  Fer 
d'argent,  1 1  lit  savoir  qu'il  l'éiablissail,  tant 
pour  éviter  l'oisiveté  cl  se  signaler  par  des 
faits  d'armea,  que  pour  aciiuerir  la  gloire  cl 


les  bonnes  grâces  d'une  très-belle  dame  qu'il 
servait.  Seize  uentilshommes  seulement,  par- 
lie  chevaliers  cl  partie  écuyers,  y  devaient 
être  reçus.  Ces  chevaliers  aussi  bien  que 
le  duc  de  Bourbon  ,  ((ui  en  était  le  chef  , 
él;iienl  obligés  de  porter  tous  les  dimanches 
à  1.1  jambe  gauclic  un  fer  de  prisonnier 
pendaiil  à  une  cliainc  ;  et  y  manquant,  i  s 
devaient  donner  quatre  sols  parisis  aux 
pauvres.  Le  fer  des  i  hevaliers  était  d'or  i  t 
celui  des  eeuyers  d'argent.  Les  premiers 
chevaliers  (jui  leçurent  cet  ordre  furent  les 
sieurs  Barbazan,  du  Cliàli'l,  Caucourt,  de 
la  lluze,  tlamaclies  ,  Sainl-Kemy,  de  Mous- 
siire>,  Bataille,  d'.Asniorcs,  La  Fayette  el 
l'oulargues.  Les  premiers  écuyers  lurent  les 
bicurs  Cannulct,  Cochcl  el  du  PuiiL 


9IC3 


FKR 


FEU 


200 


Ils  faisniont  sormcnt  de  s'cntr'aimor 
Comme  frères,  de  se  procurer  du  liicn  ,  de 
ne  point  souffrir  que  l'on  parlai  mal  d'eux, 
et  de  défendre  leur  honneur  à  quelque  pris 
que  ce  fû(.  Leurs  armes  surtout  étant  dé- 
diées au  service  des  dainrs  qui  imporcralenl 
leurs  secours,  ils  étaient  résolus  de  se  battre 
ensemble  dans  deux  ans  pour  l'amour  d'elles 
soit  à  pied,  ou  à  outrance,  armés  de  haches, 
de  lances,  d'épécs,  de  daguis  cl  même  de 
bâtons,  le  tout  au  choix  drs  adversaires;  ce 
terme  de  deux  ans  n'étant  pris  pour  le  com- 
bat qu'à  condition  qu'ils  ne  pourraient  pas 
plus  tôt  trouver  dix  -  sept  chevaliers  ou 
écuyers  sans  reproche  qui  voulussent  en 
venir  aux  mains  et  s'éprouver  contre  eux; 
qui"  s'ils  y  étaient  outrés  (c'est  le  terme  de 
la  fondât  on  )  ,  ils  demeureraient  <nlre  les 
mains  des  victorieux  et  deviendraient  leurs 
prisonniers,  ou  bien  donneraient  pour  ran- 
çon un  fer  avec  sa  chaîne  semblable  à  celui 
de  leur  ordro,  les  clievaliers  un  fer  d'or,  et 
les  écujers  un  fer  d'argent  ;  ou  que,  s'ils  se 
rachetaient  par  quelque  présent,  les  écuyers 
leur  donneraient  un  bracelet  daigent  et 
les  chevaliers  un  bracelet  d'or  ;  que  s'ils  y 
étaient  assommés,  ou  bien  que  par  maladie 
DU  autrement  ils  vinssent  à  mourir,  en  ce 
cas  leurs  fers  aussi  bien  que  les  chaînes 
seraient  envoyés  à  la  chapelle  de  l'ordre 
et  \à  attachés  devant  l'imiige  <le  la  sainte 
Vierge ;qu'alors  les  confrères  pour  l'âme  de 
chaque  défunt  feraient  dire  un  service  et  dix- 
sipl  messes  chacun,  où  ils  assisteraient  en 
haliil  de  deuil  ;  et  qu'enfin  quiconque  tom- 
berait dans  quelque  faute  serait  chassé  de 
la  compagnie.  Quoique  le  duc  de  Bourbon 
fût  l'instituteur  de  l'ordre  ,  il  ne  se  réserva 
pas  néanmoins  la  nomination  des  chevaliers; 
une  place  vacante  devait  être  remplie  par 
l'avis  de  la  meilleure  partie  ou  de  tous  les 
chevaliers  ensemble.  11  ne  conserva  d'autre 
supériorité  ni  d'autre  droit  que  celui  de  con- 
tribuer plus  largement  qu'eux  aux  dépenses 
qui  se  devaient  faire  à  frais  communs,  de 
leur  fournir  les  lettres  du  roi  dont  ils  avaient 
besoin,  et  de  leur  faire  savoir  le  jour  qu'il 
partirait,  quand  il  faudrait  aller  en  Angle- 
terre. Mais  il  ordonna  qu'aucun  des  cheva- 
liers sans  son  congé  ne  pourrait  entrepren- 
dre de  voyage  ni  faire  autre  chose  qui  pût 
l'empêcher  (le  se  trouver  au  rendez  -  vous 
au  temps  du  combat. 

Il  paraît  que  cet  ordre,  à  proprement  par- 
ler, n'était  qu'un  combat  à  outrance  de  dix- 
sept  contre  dix-sept,  où  les  duellistes  sa- 
crifiaient leur  vie  et  leur  honneur  pour  des 
femmes  et  peut-être  pour  des  concubines  ; 
et  iiéanmo'ns  il  fut  fondé  dans  l'église  de 
Notre-Dame  de  Paris,  en  une  chapelle  ap- 
pelée Notre-Dame  de  Grâce,  au  nom  de  la 
sainte  Trinité  el  de  saint  Michel.  Ils  s'obli- 
gèrent de  plus  de  faire  peindre  dans  cette 
chapelle  une  image  de  Notre-Dame  avec  les 
armes  de  leurs  maisons,  et  y  mettre  un  1er 
d'or  semblable  à  celui  qu'ils  portaient,  mais 
f.iil  en  chandelier,  afin  d'y  placer  un  cierge 
allumé  qui  brûlât  continuellement  jusqu'au 
jour  du  combat.  Ils  s'obligèrent  encore  de 

DICTIONNAIKE   DES   OrDRES    RELIGIEUX.    H. 


faire  dire  à  neuf  heures  tous  les  dimniiches 
une  messe  h.nute  de  la  sainte  Vierge,  et  une 
basse  à  pareille  heure  les  autres  jours,  et 
pour  cela,  de  fournir  de  calices,  chasubles 
el  autres  ornements  nécessaires  ;  et  que  si 
c'é'ait  le  bon  plaisir  de  Dieu  qu'au  combat 
général  ils  battissent  leurs  adversaires,  cha- 
cun d'eux  en  par  iculier,  non-seulement  y 
fonderait  sa  messe  et  un  cierge  à  pi  rpcluilé, 
mais  encore  s'y  ferait  représenter  avec  sa 
colle  d'armes  et  les  autres  armes  qu'il  avait 
en  combattant ,  el  même  y  donnerait  les 
bracelets  des  vaincus  que  Dieu  leur  aurait 
donnés  ce  jour-là,  ou  autres  de  pareille  va- 
leur. Cet  ordre  dura  peu,  et  même  les  cheva- 
liers ne  se  battirent  point  au  jour  fixé.  A  la 
vérité  le  duc  de  Bourbon  passa  en  Angleterre 
au  temps  porté,  ou  à  peu  près,  par  les  let- 
tres de  la  fondation  ,  mais  en  (jualilé  de  pri- 
sonnier de  guerre,  el  n  m  pas  de  chevalier 
du  Fer  d'or,  et  il  y  mourut  api  es  di.x-neul 
ans  de  prison. 

Mémoires  communiqués  par  M.  de  Clai- 
rambaut. 

FERÉOL  (Saint-).  Voyez  Césaiiie  (Saint-). 

FEllTÉ  (La,.  Voyez  Gîteaux,  §  2. 

FEUILLANTS,  et  eti  Italie  les  RÉFORMÉS  DE 
SAINT-BERNARD  (  Religieux  iiéioumks 
DE  l'ordre  de  CiTEAUX  appelés  en  France). 

Des  r.ligieux  réformés  de  l'ordre  de  CHenux, 
appeler!  e.i  France  Feuillants,  et  en  Italie 
les  Réformés  de  Saint-Rernard  ,  avec  la 
vie  de  doin  Jean  de  la  Barrière,  leur  ré^ 
formateur  et  instituteur. 

De  loules  les  réformes  de  l'ordre  de  Gî- 
teaux ,  il  n'y  en  a  point  de  plus  eonsidéralile 
que  celle  de  Notre-Dame  de  Fcuillans,  jiuis- 
qu'elle  a  formé  un  ordre  distinct  et  séparé  , 
qui  est  une  branche  de  celui  de  Cîieaux ,  et 
qui  est  présentement  divisé  en  deux  congré- 
gations, gouvernées  chacune  par  un  général 
particulier.  Dom  Ji  an  de  la  Barrière  en  a  été 
l'instituteur.  Il  était  d'une  famille  illuslre 
du  vicomte  de  Turenne  en  Querci.  Son  père, 
s'appelait  Barthélémy  de  la  Barrière  ,  el  sa 
mère  Léonarde  de  Amadon  ,  fille  de  M.  de 
Amadou  ,  conseiller  au  grand  conseil.  Il 
naquit  à  Saint-Geré,  petite  ville  de  celti; 
province,  le  23  avril  loii.  11  fut  élevé  avec 
grand  soin  ,  et  reçut  de  ses  parents  non- 
seulement  l'éducation  qui  était  convenable 
à  sa  condition,  mais  encore  les  premières 
teintures  d'une  piété  plus  qu'ordinaire.  Il 
commença  ses  éludes  à  Bordeaux  et  à  Tou- 
louse, et  les  acheva  à  Paris,  où  il  eut  pour 
maître  le  savaut  Arnaud  d'Ossat,  qui  de- 
puis a  été  évêque  de  Rennes  et  de  Bayeux  , 
et  ensuite  cardinal. 

A  l'âge  de  dix-huit  ans,  Gharles  de  Grus- 
sol  ,  ûis  du  comte  de  Grussol,  grand  pano- 
tier  «le  France  ,  ayant  embrassé  l'hérésie  , 
lui  résigna  l'abbaye  de  Feuillans  en  1362  , 
el  il  en  prit  possession  en  1565.  Il  la  tint 
onze  ans  en  commende,  sans  prendre  d'au- 
tres soins  pour  les  fruits  qu'il  en  recevait  , 
que  de  dire  son  bréviaire,  et  d'en  procurer 
les  avantages    temporels.    Mais,    en   1573, 

9 


5  7                                             DlCTIONNAmF.  DES  OnDURS  RELIGIEUX.  2fi.S 

,n)ir^s  plusieurs   combnls   inti'ri.uir*  ,    il    fut  lôrpnt   l'anrionnc  fcrvonr  des   rc1i?irnx  ilo 
si    ïi\cmoni    Imiolié   do    Dion,  (lu'il   almii-  Cilonu\  ,  uns  niûme  la  stiipass'i^ronl  :  c;ir 
iloniia    oui  oroinoni    lo   mnudo    pour  entrer  telle  é'ail  Iriir   miniôro  de   \ic. 
Jaiis   Tordre   dos  rovcmis   diiqiiol    il  jouis-  Dnin  Jean  do  la  Harrit^re,  outre  ruafio  des 
i.îil.  Il  en  oblint  à  cet  effet  les  iicrmissions  liaires,  dos  disriplinos  ri  des  autres  niorlili- 
uccessaires,  el  ,  ap;t^s  l'année  do  probation  calions   ordinaire-,  a^ail  encore  (t.ilili  col- 
dans   le   nninasl^rc   d'Aiino,   du   luêtne   or-  les-ci.    Les  religieux    allaient  nu-|'iods  sans 
drc  ,  au  dioct^so  ilo    Toulouse,  où  il  >'i'lait  sandales,  avaient  toujours  'a  léio    nue,  dor- 
retiro    à  cet  cfTot ,  il  fil  sa  profession  solon-  niaient    tout  votiis  sur  «les  planches,    et  prc- 
nellc  avec  beaucoup  ib-  piclé  el  de  ferveur,  naient   leur  réfc<  t  on  <à  pcnoux  sur  le  plan- 
II  alla  riisuilo  ri^sider  à  son   abbaye  ,  où  cher.  11  y  en  avait  même  qni,  pour  se  nior- 
sa  première  occupalon  fut  de  réformer  les  lificr  davanta!;e,  ne  buvaient  que   dans  des 
abus   qui    s'y    élaionl   plisses    par   le   relâ-  crànos  do  n  cris,  aci-nmnii^dos  en  forme  de 
(hcinent   de   la   discipline    ré;;uli(  ro  ;    mais  lasses.  Ils  ne  se  sorva  ont  que  do  vais;ellc  de 
il   y    trouva    tanl   d'oppositions   de   la   part  terre.    Ils  élaiml  si  Icrvenls,  ((u'ils  ne  vou- 
dos    rolisioiix    cl    do    quelques    personnes  laionl  manger  ni  œufs,  ni  poisson,  ni  b'^iirro, 
socnlii'Tos   qui    entraient    d.ins    leurs    inté-  ni  liuile,  ni  même  du  sel,  se  contentant  pour 
réis  ,   qu  il    résolut  de   quitter   son    abbaye  loulc  nonrriure  do  potase  fait  avec  d  s  lier- 
pour    se    ri  tirer    dans    une    soli'ud.- ,    afin  bos  cuites  seulement  à  l'eau,  et  arec  du  pain 
d'y    vivre  seul    el   séparé    dos    hommes,    à  d'oigo  pétri  avec   le   son  :  encore  était-il    si 
l'exemple  des  anciens  anachorôli  s.  Comme  noir,  que  les    botes  refusaient  d'en  m  inger. 
il  ilail  sage   el   prudonl ,  il   ne  voulut   pas  Leur  nombre   augmentant,  'cur  fer»  our  de- 
se  croire    lui-même,   ni  entreprendre   une  vint  plus    grande:  c'est  pourquoi  afin  de  se 
vio  SI  difficilo  cl  exposée  à  tant  di-  dangers  mortifier  davani.'go  el  d'assujettir  avec  plus 
sans  prendre   conseil  :  c'est  pourquoi  il  en  do  facilité  la  chair  à  l'esprit,    ils   retrandii^- 
écrivil  à   M.  d'Ossal ,  son   am  ien    maître,  rent  l'usage  du  vin.  Dom  Join  de  la  lîarri.^- 
qui,  étant  à   li   suite  de   M.  de   Foix  ,  ar-  rc  iniroduisit  aussi  dans  son  abbaye  un  clianl 
rhevèquo  de    Toiilousc,   eu   qa  ilité  de   se-  (ont  particulier  appelé  do   son  nom  léchant 
crctairc   dans    l'ambassade   dont    ce    prélat  dtM.de   /VuiV/nns- ;  mais  ayant  appiis  qiic 
fut  honoré  à  la  cour  de  Rome  ,  lui  fil   une  plusieurs  personnes  le   pr()fanai(nl,  |  rimi- 
réponse  ircs-judicieuse  ,    que    l'on    trouve  paiement  les    gens   de  métier,  qui   lo  clian- 
d.ins  SCS  leitres  d'Ktiil ,  par  laquelle  louant  taicnl  en  leurs  boutiques  pour  s'en  divoriir, 
son  zùle ,  il   lui   conseille  de  ne   pas  cher-  il   le  (juilla  deux    ans  apiès  pour  reprendre 
cher  la    solitude   dans    les   bois    et   les  ca-  relui  de  Citoaux.  11  employa   aussi  sos   reli- 
vcrnes    de   la    lorro  ,  où   il   ne  pourrait   ni  gieux  à  divers  motiei  s,  non-seulcnienl  pour 
secourir  le  proi  bain,  ni  accomplir  les  coin-  g.ign;T  leur  vie  du  travail   de    leurs   mains 
riiandomcnls  de   l'Kglisc,  ni    s'acquitter  des  (p.irce  que  leur   nombre   augmcnlanl    tous 
devoirs  du  saoordo(  e  ,  où  il  avait  été  pro-  les  jours,  il  n'avait  pas  grami   rev^^nu   ])our 
niu  ,   mais  qu'il    pouvait   être   solilaire    au  les  cnlrclcnir),  mais  encore  pour  éviter  l'oi- 
milicu  de  ses    fiéresen   gardant    le  silence  siveié,  qui  est  la  mèie  de  tous  les   vices  et  la 
et  observant  exa<temont  sa  règle.   Il   reçut  ruine  des  .'imes  religieuses.  Los  uns  cardaient 
cet  avis  comme  venant  de  la  part  de  Dieu  ,  de  la  laine,  les  autres  la  filaient,  cl  d'ai.tres 
cl  i    s'arrêta  à  sa  première  résolution  ,  qui  étaient  occupés  à  faire  du  d^ap. 
était  de  réformer  soi    mon  stère.  Telle  élail  la   vie  de  dom  Jean  de  la  Car- 
Ce  grand    dessoin    fut   d'abord  combattu  riôro  et  de  ses  disciples  dans  les  commonce- 
par  des  ol  si  clos  qui  paraissaient  invinci-  mcnts  de  ccHc  réforme  :  ce   qui  leur  attira 
blos  :    il    fui    abandonné   de    tons    ses   roli-  braucimp  do  traverses,  principalomont  de  la 
j;ieux  ;   il   y  en   eut  même   qui   attentèrent  part  dos  religieux  de  Citoaux,  qui  chcrcbc- 
à   sa    vie.   Il   d' meura   pondant  ()uatro  ans  rent  Ions  les  moyens  qu'ils  [inront  l'our  eni- 
sans  trouver  d'imitateurs  do  l'auslérifé  qu'il  pécher    son    progrès,  la   rcgaidanl  comme 
prali(iuait  ,  qui   était  si  grande,  que   peu-  une  singularité  incommode,  et  ijui  condani- 
danl  tout   ce  temps-là   il  ne  vécut  que   de  nait  le  relâchement  dans  lc(iuel  presque  tous 
fleurs    de   genêt   el  d'herbes  sauvages,   ou  les    monastères  de   l'ordre  éiaioiil    tomoés. 
de  qudques  fruils,  sans  pain  ni  vin.   Cotte  C'est  pourquoi  dom  Jean  de  la  Harrièrc,  vou- 
vie   parut   si   extraordinane  ,  qu'il    fut  dé-  lant  prévenir  les    empêchements    qU'   l'on 
féré  au  chapitre  général  de  Cîloaux  comme  pouvait  apporter  à  la  continuation  de  sa  ré- 
nn  inno>atcur  qui,  pif  son  nouveau  genre  forme,  eut  recours  au  pape  Sixte  V,  qui  ap- 
(le    vie   qu'il    voulait    faire    embrasser   aux  ]irouva  leur  manière  de  vie  l'an  laStî,  défon- 
aulros  ,  troublait   le   repos  cl  la    Iranqnil-  dant  aux  religieux  de  Cîteaux  de  les  troubler 
lilé  de  son  ablayo.   Il   reçut  celle   mortili-  dans  leur  observance,  oidoiinant  néanmoins 
cation   avec  tant  de  [latien  e,   el   répondit  que  les  Feuillants  seraient  soumis  à  bur  \  i- 
à  ces  accusations  avec  tanl  d'humilité,  ijuc  site  el  correction  dans  les  choses  seulement 
plusieurs    religieux,  concevant   une    haute  (;ui  ne  seraient  pas  contraires  à  l'étroite  ob- 
idéc  de  ses  vertus,  \inronl  se  soumeliro  à  sorvance  qu'ils  avaient   embrassée,  et  que, 
sa   condiiiie.   Lo  nombre  en  était  si  grand  s'il   arrivait  de  la   dilfioullé   au  sujet  de  ces 
en   \'.)~~,  <iuc  l'on  peut  dire   qu'il  somhiait  mêmes    observances,    pour   sa^oir   si    elles 
qu'il  avait  atiré  la   bénédiction  du  ciel  sur  étaient  contraires  à  la  ri  gle  de  Sainl  Honoil, 
son   nouvel    Institut  ;    ses   religieux   élaionl  ],■  connaissance  en   apparliendiail  aux  sou- 
ci iîélés ,  que  non  seulomcnt  ils  rcnouvc-  vcrains  pontifes.  L'année  suivaitc  l!ib7,  le 


21.9 


Fr.u 


FEU 


271 


inoinp  pnpe  npprouvn  de  nnnvcnu  rpito  ré- 
forme, qui  n'était  pas  encore  «((iIIr  (ie  l'ab- 
bayi'  (le  Feuillaiis,  dans  la(|ii('lif  il  y  avait 
pour  lors,  selon  le  lémoigiiage  île  ce  pontife, 
cent  quarante  rcli;;ieux  pr  ifès  et  plusieurs 
nov  ces,  comme  il  le  déclare  dans  sa  huile.  Il 
leur  donna  aussi  periuission  de  liàlir  des 
monastères  de  celle  réfurnie,  tant  pour  des 
religieux  que  poar  des  religieuses.  Il  (il 
même  rester  à  Home  deux  religieux  qui  y 
ataieiitélé  envoyés  par  dom  Jean  de  la  B.ir- 
rière  pour  obtenir  ces  huiles,  et  il  ordonna 
à  ce  réformateur  d'y  en  envoyer  un  plus 
grand  nombre,  parce  qu'il  voulait  leur  don- 
ner un  éiablissemeiit.  il  accepta  cet  ordre 
de  Sa  Sainteté  avec  beaucoup  de  jiiie,  et  i!  y 
CM  envoya  un  nombre  sulOsanl  pour  faire 
communauté.  On  les  logea  d'abord  dans  une 
petite  maison  de  l'ordre  appelée  San-Vito, 
et  le  pape  leur  doiina  quelque  temps  après 
celle  de  Sainte-Prudcntienne,  à  laquelle  ils 
ont  joint  depuis  un  beau  monastère. 

Le  roi  Ilenii  lil  en  voulut  aussi  avoir  à 
Paris.  Il  pria  le  saint  abbé  de  lui  en  envoyer 
soixante,  auxquels  il  Ht  bâiir  un  magnifique 
couveni  dans  la  rue  Saint-Honoré.  Dom  Jean 
de  la  Barrière  les  accompagna  lui-même.  Ils 
cntrpritcnt  te  long  voyage  nu-pieds  sans 
sandales,  nonobstant  la  faiblesse  où  les  jeû- 
nes et  les  veilles  les  avaient  réduits,  ils  fai- 
saient tous  leurs  exercices  par  le  chemin, 
comme  s'ils  eussent  été  dans  leurs  monastè- 
rrs,  sans  que  cinquante  cuirassiers,  qui  h  s 
accompagnaient  de  la  part  du  roi,  les  dé- 
tournassent de  leur  attention  cl  de  leur  dé- 
votion. Ce  monarque,  qui  était  au  couvent 
des  IJons-Homaies  dans  le  bois  de  Vincen- 
nes,  les  envoya  recevoir  à  Cbarenlon,  où  ils 
arrivèrent  le  11  juillet  1588.  Il  alla  lui-même 
à  leur  rencontre  pour  leur  témoigner  sa 
bienveillance.  Ils  se  prosternèrent  luus  en 
terre,  et  le  roi,  liur  ayant  (ail  donner  la  bé- 
Dédiclion  par  le  cardinal  de  Bourbon,  qui 
l'accompagnait ,  b  s  releva  et  les  conduisit 
en  ce  couveni,  où  il  les  logea  e!  les  enirelini 
jusqu'à  ce  que  leur  couvent  de  la  rue  Saint- 
Honoré  étant  achevé,  ils  en  prirent  posses- 
sion le  8  septembre  de  la  même  année. 

Pendant  les  troubles  dont  le  royaume  fut 
agité  dans  ce  temps-là,  dom  Jean  de  la  Bar- 
rière demeura  toujours  Odèle  au  roi,  malgré 
les  complots  de  la  Ligue  ;  el  s'étanl  trouve  à 
Bordeaux  dans  le  temps  de  la  mort  funeste 
de  ee  prince,  il  iui  ût  de  magnifiques  funé- 
railles, dans  lesquelles  il  prononça  son  orai- 
son funèbre.  Ses  religieux  ne  l'imitôient  pas 
d.ins  sa  fidélité  envers  leur  souvei'ain  :  plu- 
sieurs se  laissèrent  en  traîner  par  la  fureur  de  la 
Ligue, oùilsenlrèrent(l).  Undes  plusséditieux 
fui  dom  Bernard  de  Monlgaillard,  appelé  le 
Pt lit  Feuillant,  qui,  après  l'entrée  triom- 
phanle  d'Henri  IV  dans  la  ville  de  Paris,  qui 
s'éiail  volontairement  soumise  à  son  obéis- 
sance ,  ne  cioyanl  pas  que  les  excès  dans 
lesquels  il  était  tombé  pussent  lui  être  par- 
donnes, sortit  de  celte  ville  avec  la  garnison 


espagnole,  el  se  retira  imi  Fl.mdre  ■inpiès  di> 
l'achiduc  Albert,  qui  lui  donni  r,i!ibay<; 
d'Orval,dans  la  province  de  Luxcinbourg, 
(lù,  pour  réparer  ses  fautes,  il  éiablit  la  ré- 
farme  qui  subsiste  encore  el  iiui  approche 
de  (elle  de  la  Trappe  cl  de  Seplfonds  ,  dont 
nous  parlerons  dans  leur  li  u. 

Pendant  que  les  relgieux  Feiiillanis 
élaienl  ainsi  malheureusement  engagés  dans 
cette  Ligu^,  ils  devinrent  les  persécuteurs  de 
leur  sailli  instituteur,  qui  cundamnait  leurs 
f.iusses  démarches  par  sa  lidélilé  el  son  at- 
tachement à  son  prince;  ils  ne  le  rcg,:rd?~ 
rcnl  plus  que  comme  un  homme  qui  avait 
des  si-ntimenls  contraires  aux  intérêts  de  l.t 
religion,  et  ils  obiinrent  du  pape  Sixlc  V  U 
convocation  d'une  congrégation  générale  en 
Italie.  Dom  Jean  de  !a  Barrière,  infoiniédcs 
inleations  de  Sa  Sainteté,  se  rendit  à  pied  à 
Turin,  el  après  y  avoir  tenu  une  assemblée 
composée  seulement  des  supérieurs  des 
maisons  d'Italie,  il  alla  à  Home,  tandis  qu'on 
(enait  en  France  contre  lui  un  chapitre  gé- 
néral à  Cîleaux.  Le  P.  Alexandre  de  Francis, 
dominicain  el  depuis  évêque  de  Forli,  pré- 
sidant à  ce  premier  chapitre  général  des 
Fciiillanls  en  Italie,  qui  ne  se  tint  que  l'an 
la02,  sous  le  pontificat  de  Clément  VllI,  in- 
terrogea l'abbé  de  Feuillans  sur  les  crimes 
do:>t  il  était  accusé,  auquel  quoique  innuceil 
il  ne  répondit  qu'en  disant  qu'il  était  un 
grand  pécheur,  ce  qui  étant  regardé  comme 
un  aveu  de  ces  mêmes  crimes,  il  fui  suspendu 
de  l'adminislralion  de  son  abbaye  avec  dé- 
fense de  dire  la  messe, et  ordre  de  se  présen- 
ter une  fois  le  mois  au  tribunal  de  l'imiuisi- 
lion. 

Ce  fut  dans  ce  chapitre  (juc  do:!i  Jean 
Gualléron,  Français,  né  à  Chàions  en  Cham- 
pagne, lut  élu  pour  premier  vicaire  général 
de  la  cungrégaiion.  Les  religieux  y  quittè- 
rent leurs  noms  de  famille  pour  prendre 
ceux  de  quelques  saints.  Ainsi  ,  dom  Jean 
Cuaitéron  ajouta  à  sou  nom  de  baptême  ce- 
lui de  Sa  nt-Jérôme  ,  el  dom  Jean  de  la  Bar- 
rière celui  de  Saint-Benoît.  Un  des  premiers 
soins  du  vicaire  général  fut  de  faire  exempter 
sa  congrégation  de  la  juridiction  des  supé- 
rieurs de  Cîleaux.  C'est  ce  qu'il  obtint  la 
même  année  du  pape  Clément  VllI  ,  qui  la 
soumit  iiMmédialemenl  au  saint-siège,  et  qui 
accorda  à  ces  religieux  la  permission  da 
dresser  des  constitutions  particulières.  Six 
religieux  furent  noma  es  pour  y  iravailler, 
qui  furent  dom  Jean  de  Saint-Jérôme,  d(mi 
Pierre  de  Saint-Bernard  ,  dom  Philbert  de 
Sainle-Prudentienne  ,  dom  Pantaléon  de 
Saint-Placide  ,  dom  Jean  de  Saint-M.iur  cl 
dom  Alexandre  de  Saint-Michel  ;  le  pape,  de 
son  coté,  nomma  aussi  le  P.  Alexandre  de 
Francis,  dont  nous  avons  parlé,  qui  lui  dans 
la  suite  évêque  de  Forli,  el  Cônie  d'Ossone, 
religieux  barnabile,  qui  fui  aussi  évêque  de 
Torione. 

Ces  constitutions  ayant  été  dressées,  elles 
furent  présentées  au  th;ipilre  gcncial,  qui  se 


(I)  Ils  le  firent  par  auacliemeiit  à  la  foicaihuliiiue,  ne  voulant  passe  déclarer  pour  le  prince  huguenot. 
EniT. 


Î71 


niCTIONNAIRE  HES  ORDRES  UF.LIGirrx. 


572 


tint  l'an  l.'iO."),  où,  a\anl  rt«''  rcrups,  le  pn])e 
les  ai'prou\a,  ft  clii's   fiirpnl   iinpriiiiéos    à 
Ui)nic  la  mémo  année.  Ces  consliiulions  mo- 
iliTiTcni  leur  (jranilo  rij;neiir.   le  souverain 
poiilifc  l'ayant  ainsi    ordonné   à    rausc   (|iic 
«luatorze  rciiuioux   étaient  morts  d'ins  l'ab- 
It.ije  de  Fcuillans   en  une    semaine,    il  leur 
fut  permis  de   se  cou^rir   la  tête,  de  porter 
des  sandales  ike  liois,  de  mander  des  œufs,  du 
poisson,  de  lliuile,  du  licurre   et   du    sel.  et 
lie  boire  du  vin  ;   il   y   a  seulement  corlains 
jours    marques  auxquels    il    ne  leur  est  pas 
permis  do   mander  des  œufs  et  ilu  poisson, 
car  ils  doivent  s'en  abstenir  les  mercredis  et 
lc>  vendredi-^,  à  moins  qu«'  dans  ces  jours-là 
il  ii'arri>c  une   fèlc  de   première  rlasse  ,  et 
pour  lors  l'abstinence  des  oMifs  et  du  poisson 
est   r«misc  à  un  autre  jour.    Les  jours  de 
jeûne  d'Kglise,  et  pendant  .l'Avcnt  elle  ca- 
rême ,   ils   ne  doivent  mander  ni   œufs  ,  ni 
beurre,  ni  laitage.  Le  beurre  csl  .seulement 
permis  où  l'huile  ci'est  pas  commune;  mais 
ils  ne  le  doivent  manger  que  d.ins  les  sauces. 
Outre   les  jeunes   prescrits  par  l'Eglise,  ils 
jrûnent  encore  tous  les  mercredis  et  les  ven- 
dredis, cl  tous   les  jours,  d.  puis    la  l'été  de 
I  Exaltation   de   la  sainte  croix  ju-qu'à  Pâ- 
(|ues.   Ils  se  lèvent  à  d>  ux  heures  après  mi- 
nuit   pour   dire    nialiiips  ,    suivant    l'us;igc 
prescrit   dans    les   congrégaions   reformées 
qui  suivent  la  régie  de  Saini-Henoîl.  Ils  dor- 
ment sur  (les  paillasses  ,  et  il  est  permis  à 
ceux   qui   le    \eulenl  de  prendre  leur  repos 
sur  des  pl.inclies.   €eu\   qui.   [lareillemcnl, 
veulent  s'absienir  de  vin  le  peuvent,  à  moins 
que  le  supérieur  ne  le  défende  express6aici>l. 
Les  piètres  et  les  clercs  doivent  tour  à  toi;r 
servir  à  la  cuisine,  cl  ils  ne  se  servent  que 
de  vaisselle  de   terre.  Ces  ol)servances  sont 
enrore  en  pratique  dans  cet  ordre,  exce.  té 
qu'ils  se  sonl  chaussés  depuis  peu,  en  vertu 
d'un   bref  qu'ils  ont   obtenu  du    pape  Clc- 
nienl  XI. 

(Juelque  temps  après  la  tenue  de  ce  cha- 
pitre génér.il,  ils  obtinrent  un  autre  établis- 
sement dans  Home,  aux  Thermes  de  Dioclé- 
tien.  où  ia  comtesse  de  Santafiure,  Catherine 
Sforce,  leur  lit  bâùr  un  beau  mona^lère  et 
une  église,  sous  le  titre  de  Saint-Bernard, 
qui  fut  tiiiic  l'an  lotlS.  La  même  année,  ils 
tinr(  ni  un  autre  chapitre  ,  où  le  I'.  dom 
(iuillaumc  de  Saint-Claude  ctunt  élu  général, 
on  demanda  le  rétablissement  de  demi  Jean 
de  la  Uarrière,  ce  que  l'évéquc  de  Forli  ayant 
empêché  par  ses  intrigues  ,  le  cardinal  de 
Joyeuse  eut  envie  d'enlever  ce  saint  abbe  et 
de  remmener  à  l'aris  ;  mais  il  s'y  opposa  et 
n'y  voulut  jamais  consentir.  Catherine  de 
Nobilis  ,  duchesse  de  Sforce  ,  s'adressa  au 
cardinal  Itellarmin,  qui  parla  au  p  ipc  en  fa- 
veur de  l'innocence  opprimée  par  la  ca- 
I  innic.  Clément  \  III  chargea  ce  cardinal  de 
revoir  le  procès.  Il  le  revit ,  interrogea  les 
religieux  séparément,  s'entretint  plusieurs 
fois  avec  Jean  de  l,i  Itarrière  sans  lui  parler 
du  pi  ocès  ,  fit  rapport  do  tout  au  (lapc  ,  cl 
l'abjura  que  cet  abbé  était  un  saint  (|ii'on 
tenait  dan»  l'oppression.  Le  pa|>e,  détrompé, 
rei'ruclia  a  l'cvèquc  de  l'urli   l'injustice  de 


sa  senli'nce  ,  et  lui  défendit  do  par.itlre  ja- 
mais devant  lui.  L'évéque  ,  fr;ippé  de  cette 
disgrâce  ,  alla  faire  satisfai  lion  à  l'abbé,  cl 
mourut  trois  jours  après  ,  accablé  de  honte 
et  de  douleur.  Le  pape  ,  après  que  le  procès 
eut  été  revu  en  sa  présence  et  en  celle  de 
plusieurs  cardinaux  ,  ordonna  au  cardinal 
Itellarmin  d  aller  prononcer  la  sentence  d'ab- 
solution, avec  ordre  de  retenir  dom  Jean  de 
la  liarrièrc  à  Rome  ;  mais  ayant  reçu  son 
absolution,  il  mourut  dans  son  monasière  île 
Saint-Rernard  ,  à  Rome  ,  le  25  avril  KiOO, 
entre  les  bras  du  cardinal  d'Ossal,  étant  dans 
la  cini|uanle-sixièiiic  année  de  son  âge.  La 
comtesse  de  Santaliore,  fondatrice  de  ce  mo- 
nastère, voulut  que  ses  obsèiiues  fussent  des 
plus  magn  fiques  que  l'on  eùl  vues  depuis 
ïunglemps  à  Rome.  Son  coîur,  ayant  été  cn- 
f.Tmé  dans  une  boite  en  argent,  fut  envoyé 
à  l'abbaye  de  1-euillans;  el  l'an  lG2li,  comme 
on  transportait  ses  ossements  dans  un  sé- 
pulcre de  marbre,  au  milieu  de  la  même 
église  de  Sainl-liernard,  on  en  donna  la  tête 
et  les  pieds  à  M.  Sponde,  évèque  de  Pamicrs, 
pour  les  porter  aussi  a  Fouillans,  où  la  lêic 
est  seulement  restée,  les  pieds  ayant  été 
porté.s  à  l'aris  dans  le  premier  des  deux  mo- 
uaslères  de  son  ordre  qui  sont  en  celte  ville. 
Après  la  mort  de  dom  Jean  de  la  Rarrière, 
le  pape  Clément  ^'lll,  qui  était  en  droit,  par 
cette  vacance  en  cour  de  Rome,  de  donner 
l'abbaye  do  Feuillans  ,  la  conféra  à  Jean 
liall.ide  ,  qui ,  deux  ans  après,  l'an  1G02  ,  la 
remit  à  cette  congrégation  dans  un  chapitre 
général.  Le  roi  Henri  1\  céda  pour  toujours 
son  droit  de  nomination  à  cette  abbaye,  et 
consentit  qu'un  abbé  triennal  fût  élu  par  les 
i:h,ipitres  généraux,  ce  qui  lut  confirmé  par 
le  pape,  ei  depuis  ce  temps-là  cette  abbaye 
est  devenue  chef  d'ordre.  Le  premier  abbé 
régulier  triennal  fut  le  R.  dom  Jean  de  Sainl- 
.Maur,  qui  élait  général  de  la  congrégation, 
cl  depuis  ce  lomps-là  les  généraux  en  France 
ont  toujours  pris  le  titre  d'abbé  de  Feuil- 
lans, et  se  servent  pendant  le  triennal  d'or- 
nements pontificaux. 

Cet  ordre  avait  fait  du  progrès  du  vivant 
de  son  fondateur  :  cir,  nuire  l'abbaye  de 
Feuillans,  qui  en  était  le  chef,  il  avait  cn- 
co.e  un  célèbre  monastère  à  l'aris,  deux  à 
Rome,  un  à  Rordcaux  et  quelques-uns  en 
l'iémont.  Mais  après  sa  mort  il  fit  de  plus 
grands  progrès;  car  les  religieux  Feuill.ints 
tirent  des  éiablissements  à  Lyon,  à  Saint- 
Ouillein  Normandie,  à  Soissons,  à  Rouen, 
un  second  à  l'aris,  au  l'iessis- Piquet,  à  Fon- 
taines, lieu  do  la  naissance  de  saint  Bernard, 
cl  en  plusieurs  autres  lieux  de  France,  où 
ils  curent  aussi  les  abbayes  de  Sainl-Memin 
de  .Mici  près  d  Orléans,  qui  appartenait  aux 
Rénodictins,  et  celle  du  Val  au  diocèse  de 
IJeauvais,  qri  elail  do  l'ordre  de  Cîteaux. 
Celle  dernière  fut  donnée  à  celle  loagiéga- 
lion,  ou  |duti»l  au  inonaslère  de  Sainl-Rer- 
nard  de  Pans,  par  Henri  III.  Il  ne  la  possé- 
da que  deux  ans,  après  lesquels  elle  retour- 
na en  comuiciide.  Mais  Louis  XIII  et  Marie 
de  Mediii-,  sa  iiicic ,  la  ren.lirenl  à  ce 
munuslcre,  qui  en  prit  possession  lan  IGIG, 


273 


FED 


FEU 


271 


el  depuis  ce  temps-là  le  titre  abbatial  a   été 
supprimé.  Il  se  fit  aussi   des  établissements 
considérables  en  Italie,  de  sorto  que  le  pape 
Urbain  VIII,  voyant  le  sçrand  nombre  de  mo- 
iiasières  qu'ils  avaient  tant  m  Fr.ince  qu'en 
lialie,  et  appréhendant  que  l'observance  ré- 
pulière  ne  souffrît  quelque   atteinte  par   la 
loii^ue  absence  des  supérieurs,    qui  étaient 
oliligés  (le  se  trouver   aux    rhapitres  géné- 
raux qui  se  lenaient  qucbiuefois  en  France, 
quelquefois   en   Italie,  divisa,  l'an  1G30,  les 
Français  et  les  Italiens  en  deux    congrépia- 
lions  diflériMiles,  celle  de  France  sous  le  litre 
de  Notre-Dame  de  Feuillans,  et  celle  d'Italie 
sous  celui  des    réformés   de    S  lint-Hernard. 
Ces   deux    congrégations    sont    gouvernées 
chacune  par  un  génér.il  de  leur  nation.  Ainsi 
les  lieux  maisons  de  Konie,  qui  avaient  été 
fondées  par  les  Français,  restèrent  aux  Ita- 
liens ,    cl   le  pape   accorda   sèulemcjit    aux 
Français  un  ho-pice  dans  la  mênie  ville  pour 
leur  procureur  général,  au(|uel  les  Italiens 
sont   obligés   de   ilonncr  tous   les  ans    cinq 
cents  livres.  Cet  hospice  a   une  petile  cha- 
pelle dédiée  à  sainte  Marie  Mère  de  Dieu,  qui 
n'est  ouvcric  que  lorsi|u'on  y  dit    la  niesse. 
(lette  séparation  des  Français  d'avec  les  Ita- 
liens n'a  pas  empêché  que  les   Français    ne 
soient  restés  à  F'iorence,  où  ils  avaient   été 
établis  dès  l'an  1016  par  le  grand-duc  Côme 
Il  et  Catherine  de  Lorraine,  son  épouse,  qui 
leur  firent  bâtir  un  couvent,  dont  les  fonde- 
ments furent  jetés  le  trente  septembre  de  la 
même  année,  et  dont  celle  princesse  posa  la 
première  pierre. 

Le  premier  général  do  la  congrégation 
de  France  fui  le  V.  dom  Charles  de  Saint- 
Paul,  qui  fut  ensuite  évêque  d'Avranches;  et 
celui  de  la  congrégation  d'Italie  fui  le  P. 
dom  Philippe  de  Saint-Jean-Baptiste.  Les 
Français  dans  leur  chapitre  général  de  l'an 
l()3'i-  tirent  quelques  ch  ingemems  dans  leurs 
constitutions  qui  furent  imprimées  à  Paris  la 
même  année,  et  les  Italiens  en  firent  aussi 
quelques-uns  dans  les  leurs,  dans  leur  cha- 
pitre général  de  l'an  1067,  et  firent  impri- 
mer ces  constitutions  à  Kome  l'année  sui- 
vante. Les  uns  et  les  autres  sont  habillés  de 
même,  excepté  que  les  Italiens  ont  des  habits 
d'une  serge  fort  fine,  cl  beaucoup  plus  amples 
que  ceux  de  France,  mais  principalement  le 
capuce,  qui  est  beaucoup  plus  large  et  plus 
profond,  et  que  la  permission  de  se  chausser 
leur  a  élé  accordée  des  l'an  1070.  Leur  liabil- 
lemenl  consiste  en  une  robe  ou  coule  blanche 
sans  scapulain»,  avec  un  grand  capuce  de  la 
môme  couleur,  se  terminant  en  rond  par- 
devant  jusqu'à  la  ceinture,  el  en  pointe  par 
derrière  jusqu'au  gras  des  janibes.  Leur  robe 
est  ceinte  d'une  ceinture  f.iile  de  la  même 
étoffe  que  l'habit  (1)  :  ils  n'ont  puint  d'habil- 
lement particulier  pour  le  chœur.  Ils  peuvent 
porter  des  chapeaux  quand  ils  sortent  pour 
aller  en  campagne.  Les  convers  sont  habil- 
lés comme  les  prêtres,  à  l'exception  que  leur 
ceinture  doit  être  de  corde.  Ils  ont  aussi  des 
doiiués  ou  oblats  qui  n'ont  point  de  capuce , 


mais  ui>  chapeau.  Leur  robe  ne  vient  que 
jusqu'à  mi-jambe,  et  (|uand  ils  sortent,  ils 
portent  un  manteau  (2)  :  les  uns  et  les  autres 
se  servent  pour  le  travail  d'un  scapulaire  de 
toile.  Les  oblats  ne  sont  pas  religieux  ,  ils 
promettent  seulement  de  garder  la  chasteté, 
la  pauvreté  et  l'obéissance  tanl  qu'ils  demeu- 
reront dans  la  congrégation. 

Cet  ordre  a  donné  à  l'Eglise  des  cardinaux 
et  plusieurs  autres  prélats;  les  cardinaux, 
sont  le  P.  Bona,  qui  fut  fait  cardinal  par  lo 
pape  Clément  IX  ;  el  le  P.  Gabrieli,  par  le 
pape  Innocent  XI.  Le  P.  Charles  de  Saint- 
Paul  fut  évôciue  d'Avranches,  comnie  nous 
avons  dil.  Il  a  donné  au  public  la  Géogra- 
phie sacrée,  qui  fail  connaître  les  diocèses 
des  patriarches,  des  métropolitains  et  des 
évéïiues  de  l'ancienne  Eglise.  Cet  ouvrage 
fut  imprimé  pour  la  première  fois  en  lOVl  , 
à  Paris  ;  mais  cette  édition  étant  devenue 
rare,  un  en  a  fait  une  nouvelle  en  Hollande 
l'an  170'i-.  Le  P.  dom  Côme  Roger,  qui  avait 
été  aussi  général  de  la  congrégation  de 
France,  ell'un  des  plus  célèbres  prédicateurs 
de  son  leiiips,  fut  fait  évê(pie  de  Lombez  l'an 
1071,  et  est  mort  l'an  1711,  âgé  de  quatre- 
vingt-quinze  ans.  La  congrégation  d'Ilalie  a 
donné  aussi  à  l'Eglise  d'auires  prélats.  Clé- 
ment VIII  commit  les  religieux  Feuillants  des 
monastères  de  Sainte-Prudenlienne  el  de 
Saint-Bern.Til  à  Borne,  pour  jeter  en  moule 
les  Afjntts  Dei,  lorsque  le  p.ipe  en  doit  faire 
la  bénédiction;  et  ce  privilège  leur  a  été  con- 
firmé par  Léon  XI  et  Paul  V,  qui  ont  lail 
défense  à  toute  autre  personne  de  s'ingérer 
dans  cet  ouvrage.  Nous  ne  parlons  point  des 
personnes  illustres  par  leur  piété  et  des  écri- 
vains célèbre  s  de  celle  réforme,  parce  qu'ils 
sont  en  trop  grand  nombre;  les  ouvrages  du 
caidinal  lîona,  l'un  des  plus  célèbres  écri- 
vains de  la  congrégation  d'Italie,  sont  assez 
connus.  Le  P.  Joseph  Morolio  de  la  même 
congrégation  a  donné  l'histoire  de  celle  ré- 
forme, sous  le  titre  lieCistertii  reflurescentis, 
seti  congrer/Alionum  Cislcrtio-Monaslicariim 
B.  M.  Fuliensis  in  Gallia,  et  reformntorwn 
S.  Birnardi  in  llulia  CItronologica  Historia, 
Il  a  aussi  donné  le  Théàlre  chronologique 
de  l'ordre  des  Chartreux,  imprimé  en  1681. 
Il  promettait  celui  de  la  congrégalion  des 
Clercs  Uéguliers  de  la  Mère  de  Dieu,  el  celui 
de  l'ordre  de  Saint-Jérôme  en  Espagne;  mais 
ils  n'ont  pas  encore  été  imprimés.  Il  y  a 
aussi  [ilusieurs  autres  ouvrages  de  ce  mémo 
auteur. 

Chrysoslome  Henriquez,  Menolog.CisterC. 
et  ejufd.  fascicul.  sanclor.  ord.  Cistert.  Dom 
Pierre  de  Saint-Komuald,  Hist.  Chronotog. 
Joseph.  .Morotius,  Cislertii  re/lorescentis  seu. 
Cong.B-  M ■  Fuliensis  Cltronolog.Uistor.vom~ 
pend,  privileg.  et  constilut.  ejusd.  Congru], 
La  conduite  de  dom  Jean  de  la  Barrière,  pre~ 
tnier  abbé  il  instituteur  des  FeuilLarUs. 

FEUILLANTES,  dites  incorrectement  Feuil- 
lantines. 
Les  religieuses  Fcuillanles  ont  aussi   eu 


{l)  Vol/.,»  la  fin  du  vol.,  n"  58  et  [)9. 


(2)  Yoy.,  ibid.,  n"  CO. 


«TS 


niC.TIONNAlliE  OI'S  OUDRI.S  HKl.liilKliX. 


97(i 


jinur  in^l  liilcurdom  J.an  de  l.i  R.irrii^rt'.  La 
V4'rlii  (le  l'o  sa  ut  ablié  coiiiaifnçnnt  à  è'.ve 
couimc,  plusieurs  persoiinos  le  voulun  iit 
a\uir  pour  In  ;;uide  et  le  dircclour  de  le  r 
ronsciciice.DiH'  pieuse  da  ne.doiil  la  demeure 
n'elail  eluigiice  de  l'aliba^e  ilc  Feiiilluns 
nue  de  quatre  lieues,  fut  des  pr  niières  à 
rimlr  ricr  une  liaison  spirituelle  avic  lui. 
i;ilc  s'appelait  Anne  de  l'olastrou  de  la  llil- 
lièro,  el  était  feimne  de  Jean  de  ("ir.mdmimt , 
seigneur  de  Sauvciis.  Klle  denvurail  nrili- 
naireinent  au  château  de  Sauveiis.  près  de  la 
I  élite  ville  de  Muret;  et  li)-.itc>  les  fois  (|ue 
l'abbé  de  Feuilians  allait  prêcher  à  Tou- 
louse, la  piété  de  «cite  dame  l'cngage.iil  à 
I  asser  par  sa  maison  pour  s'y  entretenir 
avec  elle  des  choses  de  Dieu,  l'animer  à  la 
vertu,  augmenter  en  elle  le  mépris  des  van  - 
lés  ilu  monde,  et  l'amour  de  celui  qni  seul 
pi  ut  faire  le  bonheiir  de  l'iiomme  en  cette  vie 
el  m  l'autre. 

D'autres  dames  qui,  malgré  les  altachc- 
Diciils  qu'ell  s  avaient  au  monde,  se  plai- 
saient à  entendre  parler  de  spiritualité  , 
poussées  par  un  secret  mouvement  de  la 
grâce  de  Dieu,  s'y  trouvaient  aussi  pour 
avoir  le  pl.ii^ir  d'entendre  les  discours  spi- 
rituels de  Jean  de  la  Biriière.  Mais  Dieu,  qui, 
p.ir  un  effet  de  sa  bonté  et  de  sa  miséricorde, 
avait  choisi  ce»  âmes  mondaines  pour  en 
faire  de  saintes  pén  lenles,  donna  tant  de 
forc"  aux  paroles  de  ci't  instituteur,  qu'ou- 
Maiit  leurs  cœurs  à  la  grâce,  elles  changè- 
rent l'estime  qu'elles  avaient  eue  jusqu'alors 
pour  le  monde  en  un  si  grand  mépris,  ()ue 
leur  devenant  odieux,  elles  i»rircnt  la  réso- 
lution de  le  quitter,  et  pensèrent  au\  nmycns 
de  se  consacrer  entièrement  à  Jésus-Christ. 
.Mais  ne  pouvant  encore  exécuter  ce  pieux 
dessein,  et  profitant  de  la  facilité  que  leur 
di.nnait  madame  de  Sauvcns,  elles  se  con- 
tentèrent pour  lors  de  rendre  leurs  entre- 
tiens spirituels  plus  fré(|ucnts,  et  com- 
mencèrent à  imiter  la  solitude  el  les  aus- 
térités des  Feuillants  autant  qu'il  leur  dtait 
possible.  Madame  de  Sauvens  animait  et 
Eoulcnait  de  si  bea^i\  commencements  par 
ses  pieuses  exhortations  et  par  les  services 
spirituels  et  corporels  qu'elle  rendait  à  celte 
sainte  trou(>e.  lille  prévoyait  fort  bien  i|Uc 
tous  CCS  services  ne  serviraient  qu'à  la  pri- 
ver plus  IM  de  leur  compagnie,  puisqu'i  Iles 
ne  faisnieiil  que  solliciter  leur  entrée  en  reli- 
gion, où  elle  ne  pou\ait  les  suivre  à  cause 
de  son  engagement  d.ins  le  marwrge.  Miis  sa 
charité  pour  ces  nouvelles  épouses  de  .lésns- 
riuist  l'emporl^nt  sur  le  plaisir  dont  elle 
jouissait  dans  leur  sainte  compagnie,  elli^  ne 
fégligea  rien  pour  mettre  la  dernière  n)ain  à 
Ce  pieux  ouvr.'gi",  résilue  pour  lois  de  lais- 
ser cette  sainte  troupe  sous  la  conduite  de 
.Marguerite  de  l'olastrou  sa  scpur,  qui,  se 
trouvant  veuve  du  seigneur  de  Margestand, 
était  en  liberté  de  se  consacrer  en  religion  ; 
Cl-  qu'elle  fil  en  effet,  accompagnée  d'une  de 
ses  filles,  (|ui  lui  était  très-chère  à  cause  de 
SCS  grandes  vertus. 

Cette  illustre  vecive  entreprit  d'obtenir  de 
Uoui  Jean  de  la  Harrièru  du  Tivrc  sous  sa  di- 


rection cl  «l;ins  1rs  nii^mes  ohspfvanros  que 
l'abbaye  ite  Feuilians.  Klle  lui  fil  connaître 
son  sentiment  et  celui  de  ses  compagnes. 
l"ne  telle  iiroposition  étonna  autant  le  s.iinl 
;ibl)é  qu'elle  le  réjouit.  .Après  en  avoir  rendu 
grâces  à  Dieu,  Il  loua  leur  zèle;  mais  afin  do 
leur  faire  voir  riiii|iortaMce  de  ce  qu'elles 
deiiiandaienl,  il  leur  fii  une  desi  ription  de 
toutes  les  ausiériies  qu'on  pialiinait  à  Feuil- 
ians. Ce  tienrede  vie,  qui  aurait  clé  cap.ihle 
de  rebuter  des  cœurs  moins  animés  de  l'es- 
prit de  Dieu,  ne  servit  «ju'â  eiicour  iger  ces 
amaates  de  la  croix  de  Jésus-Christ  et  à  leur 
faire  demander  avec  plus  d'instance  ce  qu'el- 
les soubailaieiit  avec  tant  d'anleiir.  Doni 
Jean  de  la  Ilarrière  voulut  cepind;inl  les 
éprouver,  rnignanl  que  le  temps  ne  ralen- 
lit  leur  Zv'Ie.  Il  les  laissa  dans  cette  ^oloIlté 
pendant  deux  ou  trois  ans,  les  visitant  quel- 
quefois, les  animant  par  ses  dise  urs,  et  les 
exhortant  à  ne  point  aband  nner  leur  en - 
Ireprise;  el  comine  ses  prédications  lui  atti- 
raient un  grand  nombre  de  personnes  i|ul 
se  mettaient  sous  sa  direction,  entre  le-- 
quelles  il  y  eu  ;ivait  qni  voulaient  embrasser 
l'état  religieux,  il  eut  le  mojen  d'auf;inenier 
le  nombre  de  celles  qui  voulaient  embrasser 
la  vie  des  Feuillants. 

Ayant  envoyé  à  Uome  doux  de  ses  reli- 
gieux pour  y  faire  a;i|  rouvcr  sa  réforme,  et 
ie  pape  Sixte  V,  comme  nous  avons  dit  dans 
Farlicle  précédent,  ayant  lait  rester  dans 
celte  ville  ces  religieux,  et  donné  orilre  à 
l'abbé  de  Feuilians  d'y  en  envoyer  un  plus 
grand  nombre,  ils  furent  logés  dans  une  pe- 
tite maison  de  l'ordre  de  Cîieaux  appelée 
San-Vilo.  Durant  le  séjour  qu'ils  y  firent,  ils 
remarquèrent  que  sept  ou  huit  filles  vêtues 
de  blanc  et  portant  sur  la  tète  un  voile  de 
même  couleur,  à  la  manière  des  religieuses 
de  Cilcaux,  venaient  tous  les  jours  prier 
dans  l'église  de  ce  monastère.  Celte  nou- 
veauté les  surprit,  el  s'en  étant  informés,  on 
leur  dit  que  ces  bonnes  filles  avaient  la  vo- 
lonté d'être  religieuses,  mais  que,  faute  d'ar- 
gent pour  entrer  en  religion,  elles  vivaient 
ensemble  snus  la  protection  de  saint  Ber- 
nard. 

Dom  Jacques  de  la  Rochcmoiison,  l'un  de 
CCS  religieux,  voulut  aider  ces  bonnes  filles 
dans  leurs  saints  désirs,  et,  tout  étr.inger 
(]u'il  était,  sans  biens,  sans  appui  el  pri-squc 
sans  aucune  connaissance  à  Uome,  dans  le 
temps  même  qu'il  ne  devait  songer  qu'à  l'é- 
lahlissemenl  de  sa  congrégation,  il  entreprit 
lie  leur  procurer  une  maison.  Il  était  d'une 
famille  noble  d'Auvergne,  el  il  avait  f;iit 
firofession  dans  l'abbaye  de  l.i  Chaise-Dieu. 
Sa  naissance,  son  mérite  et  sa  granile  capa- 
cité le  firent  connaîlre  ;iu  roi  ("barles  IX, 
qui  voulut  qu'il  exerçât  la  charge  de  vicaire 
général  au  spiiitiiel  el  au  temporel  det'.har- 
les  de  N'alois,  son  fils  naturel,  grand  prieur 
de  France  el  alibé  de  la  Chaise-Dieu.  D.im 
Jacques  s'acquitta  de  cet  emjjloi  avec  hon- 
neur; mais  enfin  ayant  eu  occasion  d'aller 
à  l'abb.iye  de  Feuilians,  il  fut  si  l.uehé  do 
la  vie  ausière  des  saints  religieux  i)ui  y  de- 
meuraient ïuus  la  cunduile  de  duiu  Jian  do 


277 


FEU 


FEU 


878 


In  Barrière,  qu'il  le  pria  de  le  recevoir  au 
nombre  i)c  ses  disciples.  Le  saint  abbé  le 
reçut  avec  joie,  et,  après  qu'il  eut  f.iit  pro- 
fession de  cette  reforme,  il  alla  prêcher  quel- 
quefois à  Sauvens.  II  eut  lieu  par  ce  moyeu 
de  counaîlre  la  ferveur  de  ces  dames  qui  s'y 
d  S|)0saient  pour  embrasser  aussi  la  réforme 
dis  Fcuillaiils.  Ayant  été  ensuite  envoyé  à 
Uome,  il  entreprit  de  secourir  les  saintes 
filles  dont  nous  venons  de  parler,  qui  s'as- 
seiiiblaienl  djins  l'église  de  San-Vilo  pour  y 
f.iire  leurs  prières.  Et  il  s'en  présenta  peu  de 
temps  après  une  occa-^ion  favorable;  car  le 
cardinal  ll'.islicio,  proticleur  de  l'ordre  de 
Cîle;iux,  faisant  rebâtir  l'cglise  de  Sainte- 
Susaniie,  ([ui  élail  son  litre,  sans  autre  des- 
sein (pie  de  satisfaire  à  robli;j;alion  que  sa 
piété  lui  avait  inspirée;  dom  Jacques,  qui 
visit  lit  souvent  ce  prélat,  comme  protecteur 
de  l'ordre,  lui  persuada  de  joindre  à  cette 
ég'isc  un  monastère  de  saintes  vierges,  et  lui 
pa  la  de  ces  filles  qui  vivaient  en  commu- 
naulé  sous  la  proleclion  de  saint  Bernard,  el 
qui  faute  d'argent  ne  pouvaient  être  reli- 
gieuses. Le  cardinal,  ravi  de  trouver  une  si 
l)el!(>  occasion  de  signaler  sa  piété  envers 
Dieu  el  sa  cliarilé  envers  le  prochain,  écoula 
avec  plaisir  la  pioposilion  que  lui  fit  dom 
Jac(iues,  et  (it  bâtir  un  mon  stère  où  il  ml 
ces  saintes  filles,  auxquelles  il  donna  pour 
supérieure  une  religieuse  tirée  du  monastère 
de  Siinle-Cériic,  et  les  mil  sous  la  direction 
des  Feuillanl-i,  qui  leur  firent  embrasser 
l'étroite  observance  de  Cileaux.  Ainsi  on 
peu!  dire  que  les  religieuses  de  Sainlc-Su- 
s.nne  de  Home,  qui  subsistent  encore  au- 
jourd'hui, ont  été  les  premières  Feuillaules, 
quoiqu'elles  n'en  aient  pas  porté  le  nom,  cet 
honneur  étant  réservé  pour  les  autres  qui 
élaienl  à  Sauvens.  iJom  Jean  de  la  Barrière 
les  avait  touJL>urs  eulrelenu'es  dans  leur  des- 
sein, jusqu'à  ce  qu'enfin,  ayant  reçu,  l'an 
1586,  la  première  bulle  du  pape  Sixte  V  qui 
érigeait  la  nouvelle  congrégalion  des  Feuil- 
lants et  leur  peniietlait  de  bâtir  des  monas- 
tères de  l'un  el  de  l'autre  sexe,  il  travailla 
pour  établir  celui  des  Feuillanlcs;  et,  après 
avoir  qlilenu  les  permissions  nécessaires  et 
réglé  touies  choses  pour  les  mettre  à  Mon- 
lesquiou  de  Yolvestre,  diocèse  de  Kieux,  il 
en  laissa  l'exécution  à  un  de  ses  religieux, 
ayant  été  obligé,  par  ordre  du  roi  Henri  111, 
d'aller  à  Paris. 

Tout  étant  disposé  et  en  état  de  recevoir 
cette  Hou\elle  colonie,  elles  se  rendirent  à 
Feuillans  au  nombre  de  quinze,  d'où  elles 
partirent  le  23  mai  lo88  sous  la  conduite  de 
dom  François  Rabaudi,  leur  supérieur,  pour 
aller  premièrement  à  Hieux,  afin  d'y  rece- 
voir ta  bénédiction  de  l'évéque  Jean  du 
Bourg,  et  ensuite  à  Montesquiou,  où  ce  pré- 
lat se  transporta  pour  leur  donner  le  voile 
de  religion,  dont  la  cérémonie  se  fit  le  19 
juin  de  la  même  année;  et  l'année  suivante 
elles  firent  leurs  vœux  solennels.  Dom  Jean 
de  la  Barrière  ayant  destiné  pour  leur  supé- 
rieure Marguerite  de  Polastron  de  la  Hil- 
lière,  âgée  de  58  ans,  veuve  d'Anne  d'Yzal- 
quicr  de  Glcrmont  de  DieupanlaJe,  seii^ncur 


de  Margeslanil,  celte  danic  ne  voulut  pas 
recevoir  l'habi!  la  première  par  humilité, 
voulant  que  ce  fût  sa  fille  Jacqueline  de 
Dieupanlale,  à  cause  de  sa  virginité  :  elle 
accepta  néanmoins  la  supériorité. 

La  ferveur  de  ces  saintes  religieuses  devint 
l'ailmiralinn  de  tout  le  royaume.  Comme  il 
y  avait  alors  peu  de  monastères  de  filles  où 
l'observance  régulière  fût  gardée  exacte- 
ment, on  respectait  d'autant  p'us  le  monas- 
tère de  Montesquiou  ,  qu'on  y  voyait  des 
pratiques  de  vertu  cl  de  mortification  qui 
paraissaient  presque  ininitables.  F.u  effet, 
ce  genre  de  vie  pratiqué  par  les  Feuillants 
et  les  Feuillanlcs  se  trouva  si  au-dessus  des 
fones  humaines,  que  Clément  VIII  ayant 
a|)pris,  comme  nous  l'avons  dit  dans  l'arti- 
cle précédent,  que  quatorze  religieux  étaient 
morts  dans  une  seiuaine,  ordonna,  au  cha- 
pitre général  de  'an  1395,  de  modérer  ces 
grandes  austérités  :  ce  qui  fut  fait  de  la  m;i- 
iiière  dont  nous  l'avons  rapporté  au  même 
endroit. 

Le  nombre  des  religieuses  Feuillanlcs 
augmentant  de  jour  en  jour,  leur  maison  se 
trouva  liop  petite;  el.la  ville  deMi)nIesquiou 
n'étant  pas  assez  consi<lérable  pour  rcnfei'- 
mer  une  si  nombreuse  communauté,  on  ré- 
solut de  transférer  ces  religieuses  à  Tou- 
louse. Le  cardinal  de  Joyeuse,  archevêque 
do  celle  ville,  ayant  obtenu  une  bulle  du 
pape  pour  la  suppression  d'une  maison  reli- 
gieuse où  le  dérèglement  s'était  g  issé,  vou- 
lut donner  celle  maison  aux  Feuillaules; 
mais  ces  saintes  filles,  ne  voul.uit  nuire  à 
personne  ni  s'étab'ir  sur  les  ruines  d'aucune 
autre  communauté,  refusèrent  les  oITres  de 
ce  prélat,  el  trouvèrent  moyen  de  s'établir 
dans  un  autre  lieu,  dont  elles  prirent  pos- 
session le  12  mai  1599,  après  avoir  quitté 
a\ec  beaucoup  de  peine  Montesquiou,  dunl 
les  habitants,  fâchés  de  perdre  de  si  saintes 
filles,  prirent  les  armes  pour  s'opposer  à 
leur  sortie. 

Etant  arrivées  à  Toulouse,  on  commença 
les  bâtiments  d'un  monastère  et  d'une  égli>e 
par  les  libéralités  de  plusieurs  dames  qui  s'y 
retirèrent,  et  principalement  par  celles  d'An- 
toinette d'Orléans,  fjllc  de  Marie  de  Bourbon 
et  d'Eléonore  d'Orléans,  duc  de  Longueville, 
qui,  se  trouvant  veuve  de  Charles  de  Gondi, 
marquis  de  Belle-Ile,  et  n'ayant  pu  être  ad- 
mise au  nombre  des  religieuses  de  l'Ave- 
Maria  à  Paris,  qui  ne  recevaient  point  de 
veuves,  alla  à  Toulouse,  où  elle  fat  reçue 
par  les  Feuillaules,  dont  elle  prit  l'habit  l'an 
1599,  n'étant  âgée  que  de  vingt-six  ans. 
Quoiqu'elle  fût  obli;,'ée,  sept  ans  après,  de 
jrasser  dans  l'ordre  de  Fonlevrault  par  ordre 
du  pape,  pour  y  être  coadjulrice  de  l'abhesse 
Eléonore,  sa  tante,  elle  ne  quitta  pas  pour 
Cela  le  souvenir  de  sa  première  profession, 
car  elle  fonda  un  monastère  à  Poitiers  l'an 
1017,  où,  avec  quelques  religieuses  de  l'ordre 
de  Fonlevrault  qui  la  voulurent  suivre,  elle 
reprit  l'habit  des  Feuillanlcs  ;  et  étant  morte 
quelque  temps  après,  elle  voulut  que  sou 
corps  fût  porté  au  monastère  de  Toulouse. 

La  rclraile  de  celle  priuccsse  dans  le  mo- 


270                                             DICTI'.IN.NAIUK  Dl.S  OlîItlil.S  KKLIGII.UX.  ?S(» 

iinsUVc  des  Fcuill.inlcs  de  Foulnu^e  y  atlira  ;:iierile  de  Sninle-Marie.  File  s'appelait  dan» 
INI  grand  iiiiiiilne  de  personnes  de  distiiic-  le  monde  Mar<;iierjlc  de  ('l.itisse  de  Marclinn- 
lion  :  de  sorte  que,  i';in  1002,  qu^ilorze  ans  m  ni,  el  él.iil  fille  de  Henri  de  Clausse  de 
après  leur  fondation,  elles  se  trouvèrent  cin-  MarchaumonI,  seii;neur  de  Kleury,  conseiller 
((liante  professes,  el  il  y  avait  eu  plus  de  d'Ktal,  et  de  Denise  de  Neuville  de  Viileroi. 
deux  cents  novices  qui  en  él.iient  sorties,  Kllc  épousa  en  premières  nores  Henri,  sei- 
ne pouvant  supporter  lis  grandes  nu^térité<  jincur  de  Foui,  jjouverneur  du  Vexin;  mais 
de  cet  ordre.  La  réputation  de  ces  religieuses  ce  seigneur  étant  M,ort  six  mois  après  leur 
s'augmenlant  de  jour  en  jour,  plusieurs  per-  mariage,  elle  épousa  en  serondes  noces  Sa- 
sonnes  voulurent  fonder  d'autres  monastères  lomon  de  lîélliune,  seipneur  de  Uosny,  gou- 
du  iiième  ordre  pour  communiquer  aux  au-  verneur  de  Mantes  et  de  Meulan,  qui,  après 
lies  provinces  les  exemples  d'une  vertu  si  deux  ans  el  demi  de  mariage,  la  laissa  en- 
sainte,  et  donner  aux  âmes  pieuses  des  mai-  core  vemc  pour  la  seconde  fois  à  l'âge  de 
sons  de  retraite  où  elles  pussent  se  consa-  vingl-deux  ans. 

erer  à  jèsus-Christ  et  renoncer  aux  vaniiès  Une  si  grande  jeunesse  accompagnée  d'une 

du  siècle.  Mais  les  Feuillants,  qui  étaient  les  parfaite  beauté,  soutenue  (lar  sa  noblesse  cl 

directeurs  de  ces  religieuses  el  leurs  supé-  par  ses  grandes  rirhesses.  lui  attira  les  cœurs 

rieurs,  s'oppo-èrent  à  cette  pi  ojiagation,  et  de  plusieurs  seigneurs  de  la  cour,  qui,  se 

dans   le  chapitre  général  de  l'an  1592,  il  fui  faisant  gloire  d'entrer  dans  son  alliance,  la 

ordonné  qu'on   ne  se  cliarg<rail  plus  de  la  recherchèrent  en  mariage;  mais  ce  fut  inu- 

ilircclion  d'aucunes  ri  ligieuses,  à  l'excepliDU  lilemenl,  car,   écoutant   les   inspirations;  du 

du  seul   monastère  des   Feuillanles  de  Ton-  ciel  et  désabusée  des  vanités  du  siècle  et  des 

iuiise  :  ainsi,  eu   verlu  de  ce  règlement,  on  grandeurs  i!e  la  terre,  elle  forma  le  dessein 

quitta  les  religieuses   de   Sainlr-Ï^usanue  de  de  se  faire  religieuse  Feuillanle  et  de  ne  plus 

Home.    Il  y   a  de   l'apiareiice  que   dans  ce  aimer  que  .lé^us-Christ,  auquel  seul  elle  vou- 

leinps-Ià   on    présenta    plusieurs   établisse-  lait  sacrifier  son  cœur ,  el,  pour  accouinm  r 

meirs  pour  des  Feui  lantes,  puisque  dans  le  le  monde  à  l'oulilier.  elle  se  retira  peu  à  peu 

chapiire  général  de  l'an   l'.y.é  il  fui  de  nou-  de  la  cour,  n'y  paraissant  que  dans  le>  occa- 

veau  coiul  I  (|u'on   s'en  tiendrait  au  règle-  sions  de  nécesiité,  négligeant  celles  qui  u'e- 

riienl  du  chaiiitre  précédent,  el  qu'on  n'ac-  taionl  que  de  bienséance.  Elle  passa  quatre 

ceplrrait   pas    les   ncuvcaux   établissemenls  ans  dans  celle  espèce  de  retraite,  s'adonnanl 

que  Ion  offrait.  On   refisa   encore   en   1508  à  la  pratique  des  vertus,  et  éloignant  d'elle 

une  foiidalion   que   M.   Sub'.et  des   Noyers,  lout  ce  qui  pouvait  s'opposer  à  ses  desseins; 

maitre  des  compies  à  l'aris,  voulait  faire  en  elle  fil  connaître  celui  (lu'ellc  avait  d'entrer 

faveur  de  deux  de  ses  filles,  qu'il  conduisit  en  religion,  afin   d'écarter  ceux  qui   poiir- 

lui-mé:iie  depuis  à  Toulouse  au  monastère  raient  avoir  quelque  espérance  sur  l.i  pos- 

des  Fcuillantcs,  où   elles   [irin  ni  l'habit  el  session  de  son  cu-ur. 

tirent  profession.  linlre  ceux  qui  la  recherchaienl  en  ma- 
l-an 1C02,  le  comlc  de  Sainl-Pol,  é'anl  à  riage  ,  el  qui  se  mirent  en  étal  d'em;  ècher 
Home,  demanda  aux  [lères  Feuillants  assem-  qu'elle  ne  se  donnât  à  Jésus-f.hrist  ,  il  n'y 
blés  en  leur  chapitre  général,  au  nom  de  en  cul  point  qui  lit  paraitie  plus  d'.irdeur 
trois  princesses  ses  sœurs,  la  permission  de  que  le  marécb.il  de  Marillae.  Son  aulonlé 
fonder  à  l'aris  deux  maisons  de  Feuillanles  :  jointe  aux  mesures  qu'il  prenait  lui  fiisant 
ce  qu'elles  voulaient  faire  en  considération  craindre  qu'il  n'empéchâi,  ou  tout  au  moins 
de  madame  .\ntoiiielle  d'Orléans,  leur  sœur,  qu'il  ne  relardât  consiilerablement  l'exéiu- 
religieusc  à  Toulouse;  mais  ils  s'en  excusé-  lion  de  ses  bons  dess  iiis,  elle  jugea  qu'il 
rcni  sur  l.s  règlements  faits  dans  les  cba-  fall^il  encore  dissimuler  qu'  Ique  temps  , 
pitres  prccédeiils,  el  n'accordèrent  point  pour  éviter  ses  oppositions  cl  les  siiruionler 
celle  permission.  Le  cardinal  de  Sourdis,  ar-  par  adresse  ,  ce  qui  lui  réussit  parfailemeiil. 
cliocqiie  de  lîordeaux,  recul  un  semblable  lui  elTel ,  lorsqu'elle  vit  qu'on  la  croyait  bien 
refus  en  ICO't;  mais  enfin,  Mieu,  dont  les  des-  éloignée  de  ses  premiers  sentiments  de  re- 
seins sonl  bi.n  dilTérenls  de  ceux  des  hom-  trailo,  feignant  l'oliligatinn  d'accomplir  un 
mes,  voulant  faire  connailre  la  sainteté  de  vo'U  h  Notre-Dame  du  Puy  en  Auvergne, 
ses  nouvelles  épouses  el  multiplier  ces  sanc-  elle  (larlit  pour  Toulouse  avec  M.  do  Uou- 
luaires  où  on  chantait  jour  et  nuit  des  eau-  ranccs  ,  son  cousin  germain,  qu'elle  avait 
tiques  de  louanges  à  la  gloire  de  son  nom,  enga^^é  h  l'accompagner  dans  ce  voyage. 
p.  niiil  que  la  reine  Anne  d'Autriche,  épouse  File  y  arriva  le  7  aoûl  11)02,  et  se  retira  aux 
lie  Louis  Xlil.  voulut  avoir  des  Feuillanles  Feuillanles,  où,  h  l'exemple  de  madame 
a  l'aris.  Le  respect  qu'on  devait  à  celle  prin-  Anloiiieile  d'Orléans,  qui  s'y  élail  consacrée 
cesse  fil  cesser  loules  les  opjiosilions  qui  "u  Seigneur  un  an  auparavant,  elle  reçut 
s'élaieiit  trouvées  jusiiu'alor-  de  la  pari  des  l'haliit   le  15  .septembre  de  la   môme  année 

UWi,  élant  pour  lors  dans  la  vingt-sixième 
;iiuiée  de  son  âge.  Elle  fut  accompagnéo 
jusqu'au   pied    des   autels    par   M.  di;   Coii- 

..,iu.,.  .,...„,   „:...    .......    ,..., -  tances,  qui  ,  éiant  encore  resté  six  mois   à 

loiirg    Saint-Jaiqiies.    Les    ileu^    lilles    île  I  ouiouse  pour  voir  si  elle  ne  cliangerc^il  point 

M.   Desni.yers  fureiil  du  ujinlire  de  ces  six  de  résolution,  suivit  enlin  son  exemple,  el, 

tel  (iieuses.  méprisant  tous  les   avantages  qu'il   pouvait 

I-.llus  curent   pour  supcii.uic  dune  iMai-  liélciidre  dans  lomonde,se  relira  dans  l'eli- 


hupèrieurs,  qui  lin  ni  partir  de  Toulouse  sx 
religieuses,  le  .'{0  judlel  l()2-2,  pour  aller  à 
l'aris  prendre  possession  d'une  iiouveUe  di'- 
iiieuri!  (|ii'oii   leur   a»ait    pre[)aiée   au   f.iu 


^281  FIE 

baye  de  Feuillans,  où  il  reçut  lliabil  cl  y 
persévéra  jusqu'à  sa  mort  aussi  bien  que 
mlidame  de  Uosuy,  qui  inourul  à  Paris,  où 
elle  était  venue  pour  être  supérieure  de  la 
ixiuvelle  maison  qu'on  y  avait  établie, 
tomme  nous  l'avons  dil  ci-dessus. 

Los  religieuses  Fcuillantcs  ont  les  mêmes 
observances  que  les  religieux  de  cet  ordre, 
cl  elles  ont  lonjotirs  été  sous  leur  juridic- 
tion ,  ce  qui  leur  fut  accordé  par  le  pipe 
Clément  Ylll  par  sa  bulle  du  10  octobre  ItOG. 
Ce  iioiitife  les  exeinpla  de  la  juridiction  de 
l'abbé  de  Cîteaux  et  des  autres  Pères  de  l'or- 
dre, elles  soumit  immédiatement  à  celle  des 
Feuillants.  Ouant  à  leur  babillement  il  est 
aussi  semblable  à  celui  des  reli;^ieux  (1). 

Mémoires  communiqués  par  le  K.  P.  tlom 
Moucby  ,  religieux  de  cet  ordre. 

FKUILLANIINES.  Voyez  Feuii.lantes. 

FIDÉLITÉ  (OnuREDiî  Là).   FoJ/^z  Dragon 

RENVERSÉ. 

HLLES  DE  LA  SAINTE-VIERGE.  Voyez 

PliBIFICATlON. 

FILLES-DIEU  (diveres).  Voyez  Cuanoi- 

NESSES  IIOSPITALIÈIIES,   FoNTKVR  AULT. 

FiNlAN  (Saint-).  Voyez  Irlande. 

FLi;ur.Y,ouDESAiNT-nENorr-suii-LOiKî<:, 

DE  SAlNT-lENIGNE-Dlî-DIJON,  et  de  LA 

CHAlSE-DlEU  (  AnCILNNES  CONGKhGâXlOISS 

DE  ). 

Si  l'on  regarde  les  abbayes  de  Marmou- 
liiT,  de  Saint-Bénigne  de  Dijon,  de  Saint- 
Denis  et  de  la  Chaise-Dieu  en  France;  du 
monlCassin,  de  Cave  et  de  Cluze,  en  lla- 
lie;  de  Fulde,  d'Hirsauge,  de  Bursfeld  en 
Allemagne,  et  plusieurs  autres,  comme  au- 
tant de  chefs  d'ordre  par  rapport  aux  mo- 
naslcrcs  qui  en  dépendaient  et  qui  l'or- 
inaicnt  avec  leur  cliei'  comme  une  espèce  de 
congrég.ition  ,  à  [jIus  f  irte  raison  on  a  dû 
regarder  l'abbaye  de  Fleury  ou  de  S  int-Be- 
noît-sur-Loire  comme  un  chef  d'ordre  ;  non- 
seulement  par  rapport  aux  monastères  qui 
loi  étaient  soumis,  mais  encore  à  cause  de 
la  prééminence  qui  lui  a  été  accordée  par 
les  souverains  pontifes  au-dessus  de  tous 
les  autres  monastères  ;  Léon  Vil  l'ayant  ap- 
pelé le  pn  niier  et  le  chef  de  tous  les  monas- 
tères :  Cafiut  ac  primas  omnium  cœnobiorum; 
el  Alexandre  11  ayant  donné  la  qualité  de 
premier  des  abbés  de  France  à  l'abbé  de  ce 
monastère,  qui  a  en  effet  l'avantage  de  pos- 
séder les  sacrées  reliques  de  saint  Benoît, 
patriarche  des  moines  d'Occident. 

L'on  ne  peut  pas  marquer  positivement 
dans  quelle  année  cette  célèbre  alibaye  fut 
bâtie  ;  il  est  néanmoins  certain  que  ce  fut  au 
commencement  du  règne  du  jeune  Clovis, 
lils  de  Dagobcrt,  qui  donna  par  échange  le 
village  de  Fleury-sur-Loire  pour  la  terre 
d'Atligny  à  Léodebold,  évéque  d'Orléans, 
qui  fil  bâtir  à  Fleury  deux  églises  et  un  mo- 
nastère doni  il  donna  le  gouvernement  à 
lligoniar,  qui  en  fut  premier  abbé.  La  prc- 
rnière  et  la  principale  de  ces  é^^lises  fut  dé- 
diée à  sainl  Pierre,  ce  qui  lit  que  ce  monas- 


FLE 


282 


1ère  en  prit  le  nom;  et  la  seconde  fut  consr- 
crée  sous  le  titre  de  la  Sainte-Vierge;  mais 
le  corps  de  saint  Benoît  ayant  été  transports 
du  mont  Cassin  dans  cette  dernière  ,  elle  ile- 
vint  dans  la  suite  la  principale  église,  et  pni 
le  nom  de  Saint-Benoît.  Nous  avons  ci-de- 
vant parlé  de  celle  translation,  qui  s  ■  fil 
l'an  053  par  l'abbé  IMommol,  qui  succéda  à 
Rigomar  ;  et  depuis  ce  temps-là,  la  France 
a  toujours  [  ossé -'é  ces  saintes  reliques. 

L'oliservance  régulière  fut  longtemps  en 
vigufur  dans  ce  monastère.  On  y  enseignait 
les  sciences  divines  et  humaines  ;  on  y  for- 
mail  les  enfants  à  tous  les  exercices  de  la 
piété  la  plus  exacte  ;  et  celte  maison,  qui 
portait  bien  loin  la  lionsie  odeur  de  Jésus- 
Christ,  était  en  grande  vénération  dans  tou- 
tes les  provinces  voisines;  mais  la  fureur 
des  Normands,  qui  désolaient  toutes  les  cô- 
tes de  la  Loire,  obligea  les  religieux  d'en 
sortir  pour  échapper  à  leur  cruauté,  et  d'em- 
]iorler  avec  (  ux  le  corps  de  saint  Beiio  t, 
qui  était  l'objet  le  plus  sensible  de  leur 
piété  el  dont  hi  présence  animaii  un  chacun 
à  la  pratiqiie  de  tant  de  vertus  qu'il  avait 
])raliiiuées  pendant  sa  vie.  Ces  barbares  y 
vinrent  l'an  bOS,  el,  le  trouvant  abandonné, 
i's  ne  se  contenlèrent  pas  d'emporter  ce 
qu'ils  [lurent,  ils  niirenl  encore  le  feu  aux 
bâtiments;  presque  tout  fut  renversé;  lé- 
glise  fut  réduiie  en  cendres  ;  et  les  flammes 
ayant  seulement  épargné  une  partie  du  dor- 
toir, les  religieux  y  retournèrent,  le  firent 
servir  d'oratoire,  el  y  mirent  les  reliques  du 
sainl  en  attendant  que  l'on  eût  rebâti  una 
autre  é;;lise. 

Lbs  Normands  étant  retournés  à  Fleury 
l'an  878,  les  religieux,  qui  eurent  avis  do 
leur  marche,  s'cnfuireni  à  Matrini  dins  le 
Gâlinais,  où  ils  crurent  être  en  siirelé,  ayant 
emporié  avec  eux  inul  ce  qu'ils  avaient  de 
plus  précieux,  dont  ils  chargèrent  quantité 
de  chariots.  tZcs  barbares  n'ayant  trouvé  à 
Fleury  que  les  qu.itre  murailles,  suivirent 
les  religieux  à  la  piste  des  chariots,  dans  lu 
dessein  de  les  massacrer  et  d'emporter  tout 
ce  qu'ils  avaient  sauvé  de  leur  monaslère. 
Mais  l'abbé  Hugues,  qui  avait  été  chercher 
quelques  secours  en  Bourgogne,  étant  sur- 
venu comme  ces  barbares  se  disposaient 
pour  attaquer  les  religieux,  les  charge.i  si 
brusquement  avec  Girbord,  comte  d'Auxerre, 
qui  s'était  joint  à  lui  avec  ses  troupes,  que 
les  Normands  furent  tous  taillés  en  pièces. 
A  peine  en  rcsta-t-il  un  pour  porter  aux 
autres  la  nouvelle  de  leur  déf.iite,  el  l'abbé 
Hugues  avoua  qu'il  avait  vu  dans  le  combat 
saint  Benoit,  qui  d'une  main  tenait  les  rem  s 
de  son  chival,  el  de  l'aulre  son  bâton  pasto- 
ral, dont  il  aval  lue  un  grand  nombre  d'en- 
nemis. Diederic,  moine  d'Hersfetd  en  Alle- 
magne ,  qui  avait  demeuré  longtemps  à 
Fleury,  nndant  comiile  à  Richard,  abbé 
d'Amcrbach,  de  ce  qui  avait  donné  lieu  do 
célébrer,  le  4  décembre,  la  fête  de  l'Illalion 
ou  du  retour  de  saint  Benoîl,  dil  que  ce  fui 
le  retour  solennel  de  ces  reliques  qui  furent 


(1)  Vuy.,  à  la  lin  du  vol.,  n'Gl. 


2'.5  niC.TIONNAIftE  DF.S  (lUI)UES  IIEI.ICIKIX.  ?};♦ 

îiip.irljcs  il  Fliui  y,  .Tprès  avoir  él6  quelque  Iciiips.  I,e  coiiiH'  Elisinnl,  .ly.int   pris   avec 
i«Mii|>s   dans  l'i'^lis.' di;  Syiiit-Ai;;i)an   à  Or-  ui  deux  autres  iciniles  cl  deux  év*^(Hics,  ;u- 
Icans,  pour  les  iiicllie  à  i-ouvcrl  de  la  fureur  cinnpaL-na   s.iinl  Odoii  à  Flcury  ;   mais    les 
drs   Normands,   dont    il   rapp;irlo   une  sem-  rclijjieux  à   leur  arrivée  s'armèriTil  romiiif 
bl.ihic  di'laiie  proche  d'Anircrs  par  le  cornie  s'ils  eussent  tu  encore  à  c<inibalire  les  Nor- 
(iisUdfe,   avoue  de  celle  ahhaye,  a(uès  (luc  rnauds  ou  des  païen».  Ils  se  barricadèreni  el 
C' s   liarliarcs    l'eureul   eiicoie   pillée   cl  lue  moiiléreul  sur  les  lulls,  d'où  ils  jelèienl  une 
soixaii  e    religieux;    mais    il  y   a   lieu   d'eu  j,Télr  de  pierres  sur  ceux  qui  voulu:  enl  ap- 
douler.  proilipr-,  d'aulres,  armés  d'cpées  el  île  liou- 
I.cs  mêmes  Normands  eurent  plus  de  rcs-  cliers,   d(  f.  ndaieiit   les  avenues  de  I  alihaxc 
pccl  p  ur  ic  lieu  dans  la    suiie;   car,  sous  eu    proleslaiil  qu'ils  mourraienl   pliilol  que 
r.ililié    Lamlicrl,    l'au   90 J  ,    Uajnand,    qui  de  recevoir  un  abbé  d'un   aulre  m   naslère. 
<()niniandail   une  IloUe  de  ces  iieupb's,  qui  Trois  jours  se  passèrenl  ainsi,  lorsque  sainl 
élaicni  eniiirc  inlidèles   panuiuranl  tous  les  Odcii,    inS]  iré  de   Diru  el  contre  K'  conseil 
rivages  de  ia  Loire,  où  il    nu'llail  liul  à  feu  des    évêquis  el  des   seig'  eurs  donl   il   élail 
el  à  sang,   éiant   arrivé  à   Flcury,    lrou\a  accompagné,  qui  lui  persuadaient  de  ne  pas 
le  niona>tère   abandonné  de  tous  les   rcli-  s'exposer  à  la  fureur  de  ces  mutins,   monta 
gicux,   qui  s'étaient  retirés,  après  avilir  en-  sur  son  âne  cl  alla  droit  au  monastère,  ou, 
core  emporte  avec  eux  le  corps  de  s.iint  He-  par  une  espèce   de  miracle,  ceux  qui   s'op- 
noll.   Comme    ce    général   dormait   dans   le  pusiicnl  le    plus  à    son  entrée  vinrent  au- 
ilortoir  des    frèies,    l'on  prélend   que   saint  devant  de  lui,  el,  plus  doux  i|ue  des  agneaux, 
IJeiinîi  s'apparut  à  lui,  el  que  l'ayant  frappé  le  nçnreiU  avec  beaucoup  de  soumission, 
de  son  talon,  il  le   reprit  sévè:emenl  de  ce  Ma  s   li)rs(]iie  l'on  proposa  de   retrancher 
qu'il  inquiétait  SCS  reliiiiiux,  et  lui  dit  qu'en  l'usage  de  la  viande  el  de   bannir    la   pro- 
|iunition  de   ses  cruautés   il  mourrait  bien-  priélé,  les  nairmurcs  recommencèrent.    11  y 
u\[  ;   ce  qui   arriva  en    elTel  peu    de   temps  eut  de  nuivelles  di-pules  beaucoup  phis  for- 
aprcs.   Uaiiiaud  éant  évc  Hé,   fit  au  plus  tôt  les  et  plus  aniuiées.    Il  n'y  eut  que  la  con- 
soitir  ses  sold.ils  du  uuxiaslère;    et  Uollon,  slamc  du  s.iint  abbé  qui  put  mettre  à  la  rai- 
duc  des  Normands,  ayant  su  ce  qui  était  ar-  son  ces  désobéissants  ;  el  Dieu  par  un  niira- 
ii»é  à  son  général,   non-seulement  épargna  défit  connaître  combien  l'abslinencc  de  la 
ce  monastère  lorsque  peu  de  Icmiis  après   11  viande   lui  élail    agréable;   car   un  jour  de 
aMa  faire  une  incursion  en  lJourgo;,'ne,  mais  Saint-Benoît  iiue  le  poisson  niani|ua,  les  r.-- 
encore,  en  considération  de  saint  Benoit,  il  ligieiix  en  liduvèicut  abomlammenl  dans  un 
empêcha  que  ses  gens  ne  fissent  aucun  tort  niarais  voisin,  où  il  n'y  avait  jamais  eu  que 
au  pays  d'alcniour.  des  grenouilles.    lùifin    ils   reprirent  les  ob- 
II  était  impossible,  au  milieu  de  tant  de  scrvances  régi  Mères,  qui  furent    observées 
desordres    que    les   religieux    pratiquassent  dans   ce  mouaslère   avec   tant   d'exactitude, 
le- observances  régulières.  Ils  lombèrcnl  in-  que    l'on   y    vint   de   plusieurs   endroits,    ci 
sensiblemenl  dans  le  nlàchcmenl,  qui  d.ins  même  d'.^nglcîcrrc,  chcrclier  des  relig  eux 
la  suite  s'augmenta  de  telle  sorte,  que  l'an  pour  les  enseigner  à  d'autres   rnona>lères, 
03  )   on  ne   trouvait   plus   à    Flcury    aucun  conimc  à  S.iintPierre   de  Chartres,  à  Saint- 
vcslige  de  ces  prali<)ues  de  religion  si  sain-  N  incent  de  Faon,  à  Saumur,  à  Sainl-l'ierre 
les  el  si  sages  qu'on  venait  autrefois  admi-  dépens,  à  Saint-Fpvredc  l'oul ,   cl  à  quel- 
rer  dans  ce  monastère.  Les  religieux,  que  la  ques  autres,   tant   en    France  qu'en  Angle- 
crainte  des  Normands  avait  obliges  de  fuir  et  terre.  Mais,  quoique  celle  abbaye  eut  été  ré- 
d'aller  de  côté  et  d'autre,  élaienl  à  la  vérité  formée  par  un  abbé  de  Cluny,  elle  ne  lui  fui 
reloiirnés  à   Fleury  ;   mais  quoiqu'ils    l'os-  p  ,s  pourtant  soumise,  non  plus  que  plusieurs 
sent   unis  de  corps,    ils  élaienl  bien   divisés  autres  qui   furent  aussi   réformées  par  des 
d'esprit  el  n'avaient  rien  de  commun  que  le  religieux    de    C  uuy.    Le    comte    Klisiard  , 
vice.  Chacun  élail  propriétaire,  ou  ne  savait  voyant   la  discipline  régulière  bien  établie  à 
plus  ce  que   c'était  que   l'ai  slinence  de  la  Fleurv,  se  mil  lui-même  sous  la  conduite  do 
viande  ;  on   ne  connaissait  plus  le  silence  ;  sa  ni  Odon  l'an  !)'tl,  i  l  pril  l'habit  monasti- 
iU  voul, lient  tous  commamler,  personne  ne  que  dans  ce  monastère,  auqui  1  il  donna  une 
voulait  obéir,  el  on  se  mettait  peu  en  peine  terre   cousiilcrablc   qu'il   atait  dans  le  Câ- 
de  la  règle  de  Sainl-lîenoit.  linais. 

Tel  était  l'éial  déplorable  de  celle  maison.  Il  parait,  par  K-s  anciennes  coutumes  qui 

liirsque  le  comte  l'^lisiard,  animé  du  zèle  de  élaienl    en  pralii|ue  dans  cette!  abbaye,   que 

la  maison  de   Dieu,  obtint  cette  abbaye  du  le  P.   .lean   Dubois   nous  a   données  dans  sa 

roi  l'iodiilplie  ou  Itannl,  dans  1  iulention  de  bibliolliéque  di;  Fleury,    que    l'un    y    faisait 

la  réformer  el  d'y   rétiblir  la  disci|iline  ré-  beaucoup    d'aumrtnc-.     l.e  jeudi    saint    on 

giiliére,   ne   pouvant    [ilus    so;ilTnr  que  des  cliaiilail     une     grand'messe    à     l'autel     do 

moine-, 'lui  ne  portaient  pas  seulement  riia-  S.iinte-Croix,   à    laquelle  (levai,  ni    assister 

hit  de  l'ordre  de  Saiiit-Ilenoit  vécussent  plus  cent  pauvres,  à  chacun  desquels  on  donnait 

lun^'lemps    dans   le  iléreglemenl.    Mais,    ne  une  hostie  non  consacrée,  et  après  la  messe 

pouvant  pas  de  lui-même  corriger  ces  abus,  on   les    fais.iil    manger.    Ils  dcvaienî    avoir 

il  en  commit  le  soin  à  saint  Odon,  abbé  de  deux   pitances,   l'une  de   fèves,   l'autre   do 

('.iiiiy,   qui   élail    pour   lors    au    monastère  millet.  Après  le  dîner  des  religieux,   l'abbé 

d'Aiirillac  en  Auv(Tv;ne,  que  le  bienheureux  l.ivail  les  pieds  cl   les  mains  a  dimze   pau- 

(jérjrU  avait  lail  b.itir  il  n'y  avait  pas  long-  vres,  cl  leur  donnait  du  pain,  du  vin,  deux 


2fi5 


FLE 


FLR 


2SG 


harengs,  pl  douze  deniers  ;  et  le  niétne  jour 
ou  ilomiail  encore  du  p.iin  c(  du  vin  à  lnus 
ceu's.  qui  se  pic  ctilaieul.  Ou  fais;iit  aussi 
uu"  auuiôiie  fjéi'érale  le  jour  de  la  Pcnlc- 
c(Mc  ;  on  doniiail  encore  à  manger  à  cent 
pauvres,  qui  devaient  avoir  du  pain,  du  vin 
et  (le  la  viande;  et,  le  jour  de  lu  Coniiné- 
moraison  dos  Moris,  on  faisait  aussi  une  au- 
mône générale  de  blé.  La  manière  d'élire 
l'abbé  est  prescrite  dans  ces  anciennes  cou- 
tumes, où  il  est  marqué  que  l'abbé  élanl 
élu,  pouvait  se  faire  bénir  par  tel  évoque 
que  bon  lui  semblait,  exrepté  par  l'évêque 
d'Orléans  et  par  l'archevêque  de  Sens.  Il  y  a 
de  l'apparence  qu'ils  ne  se  faisaient  pas  bé- 
nir par  révéque  d'Orléans,  à  cause  des  dif- 
féiends  qu'ils  avaient  souvent  avec  ce  pié- 
lal,  qui  prétendait  avoir  juridiction  sur  ce 
monablère  ;  ni  par  l'archevêque  de  Sens,  à 
cause  «ju'il  était  le  métropolitain.  L'on 
trouve  aussi  après  ces  anciennes  couîumes 
de  Fit  ury  une  taxe  faite  par  l'ahbé  Mucaire 
sur  tous  les  prieurés  et  les  prévoies  de  la 
dépendance  de  celle  abbaye,  pour  avoir  des 
livres  pour  la  bibliolbèque;  et  il  paraît  qiie 
celle  abbaye  avait  pour  lors  trente  prieurés 
et  prévoies,  du  nombre  desquels  élaient  les 
prieurés  de  la  Riole,  du  Saux  en  Limagne, 
de  Perrcry  en  Bourgogne,  de  Sancorre,  de 
Vailly-sur-Gien,  de  Saint-Brisson,  de  Saint- 
Aignan,  d'Etampes,  d'Anecourt,  de  la  Chèze 
en  Sologne,  de  Lauris,  et  de  la  Cour  de  Ma- 
rigny.  Mais  il  y  a  rneuren  la  date  de  cette 
taxe,  que  le  P.  DiiLiois  marque  être  des  ca- 
lendes de  mars  13'i-6,  la  dixième  année  de 
Louis,  nii  de  France  et  duc  d'Aquitaine; 
puisque  Philippe  de  Valois  régnait  pouriors. 
il  y  avait  aussi  sans  doute  des  abbayes  qui 
dépendaient  <ie  F'ieury,  pui.sque  le  moine  Ai- 
moin,  dans  la  Vie  de  saint  Abbon,  abbé  de  ce 
monastère,  (|ui  fut  tué  l'an  1004,  dit  que  la 
douleur  qu'on  eut  de  sa  mort  augmenta  par 
l'arrivc  e  d'un  grand  nombre  d'abbés,  qui  ve- 
naient pour  la  tête  de  saint  Benoit,  qui  se 
célébrait  au  mois  de  décembre,  dont  il  y  en 
avait  qui  avaient  été  mandés  pour  pourvoir 
au  bon  ordre  de  la  congrégation,  et  d'autres 
qui  étaient  venus  pour  consulter  saint  Ab- 
bon, entre  lesquels  était  saint  Odilon,  abbé 
deCluny;  et  que  le  chagrin  que  ces  abbés 
(îrent  paraître  de  ne  plus  trouver  saint  Ah- 
boii,  renouvela  la  douleur  de  ces  religieux 
d'être  privés  d'un  tel  pasteur. 

Les  calvinistes,  dans  le  seizième  siècle, 
n'euT'  nt  pas  pour  celte  abbaye  les  mêmes 
égards  qu'avaient  eus  les  Normands,  quoi- 
qu'infidèles  et  païens.  Le  cardinal  Odet  de 
(iiiâlillon,  qui  en  était  abbé  commendataire, 
y  envoya  après  son  apostasie,  arrivée  l'an 
1562,  son  intendant  avec  des  soldats,  pour  en 
emporter  les  vases  sacrés  et  tout  ce  qui  était 
dans  le  trésor.  Juubert,  qui  en  était  prieur, 
obtint  seulement  de  l'intendant  les  reliques 
de  saiul  Benoit;  mais  la  châsse  d'or  qui  les 
enfermait  fui  brisée  et  emportée,  aussi  bien 
qu'un  reliquaire  d'argent  où  était  un  ossc- 
iiient  de  la  cuisse  de  saint  Sébastien,  que  le 
cbantro  de  cull'  abbaye  s.iuva  hcureuisemeiil 
dus  iiiaijis  sacrilèges  de  ces,  hcrctiques    Les 


satellites  de  ce  cardinal  apislat  avaient 
laissé  les  autres  rc'iques,  qni  étaient  dans 
des  châsses  de  bdis  doré;  mai-  la  même  année 
le  prince  de  Condé,  étant  à  Orléans,  envoya 
derechef  des  soldats  à  Fbury  pour  enlever 
ce  que  les  gens  du  cardinal  avaient  épargné. 
Les  reliques  furent  profanées  et  foulées  aux 
pieils,  tous  les  ornemenis  de  l'église  furent 
pillés,  et  les  calvinistes  firent  le  prêche  cl  la 
cène  dans  l'église.  Le  corps  de  saint  Benoît 
fut  néanmoins  à  couvert  de  leurs  insuit 'S, 
aussi  bien  que  la  relique  de  saint  Sébastien; 
mais  la  plus  considérable  perte  que  souffrit 
ce  monastère  (où  l'on  enseignait  autrefois 
les  sciences)  fut  celle  des  manuscrits,  qui 
furent  brûlés,  déchirés  ou  dispersés,  dont  le 
nombre  était  très-grand  :  ce  qui  n'est  pas 
difficile  à  concevoir ,  puisque  ses  écoles 
étaient  en  si  grande  recommandation,  (lu'il 
s'y  o-t  trouvé  ius(iu'à  cinq  mille  écoliers,  1 1 
r,ue  chacun  d'eux  donnait  par  reconnais- 
sance deux  volumes  à  la  bibliothèque. 

A  l'abhaye  de  Fleury  ou  de  Saint- Benoîl- 
sur-Loire,  nous  joindrons  celle  de  Saint- 
liéaignede  Dijon,  et  de  la  flbaise-Dieu.  L'on 
ne  peut  guère  refuser  le  tilrede  chef  d'ordre 
à  celle  de  Saint-Bénigne,  puisque  outre  les 
jirieurés  qui  en  déiiendaient,  saint  Guillau- 
me,  l'un  de  ses  alibés,  présidait  sur  plus  de 
quarante  abbayes  qu'il  réforma.  Saint-Bé- 
nigne de  Dijon  fut  fondé  au  commencement 
du  sixième  siècle  par  Grégoire,  évêque  de 
Langrcs,  qui,  ayant  trouvé  les  reli(iues  de 
ce  saint  martyr,  en  fit  la  translation,  et  bâtit 
autour  de  son  tombeau  une  église  et  un  mo- 
nastère, qu'il  dota  de  son  propre  bien  et  ds 
quelques  terres  de  son  évêclié.  Contran,  roi 
de  Bourgogne,  en  augmenta  consi  lérablement 
les  revenus.  Ce  prince,  ayant  fondé  l'abbiye 
de  Saint-Marcel  près  de  Cliâlons,  voulut  que 
celle  abbaye  et  celle  de  Saint-Bénigne  fussent 
associées  à  celle  de  Saint-Maurice  d'Agaune, 
dont  il  voulut  qu'elles  gardassent  les  cou- 
tumes, tant  à  l'égard  de  la  psalmodie  conti- 
nuelle qu'à  l'égard  des  autres  observances. 

Les  moines  de  Saint-Bénigne  tombèrent 
dans  la  suite  comme  les  autres  dans  le  relâ- 
chement. A  peine  dès  le  neuvième  siècle  y 
restait-il  encore  quelques  traces  des  obser- 
vances régulières  qu'on  y  avait  autrefois  ad- 
mirées. Ils  avaient  même  honte  de  porter  le 
nom  de  moines,  et  se  faisaient  ap;)eler  clercs, 
par  un  espril  de  vanité.  Herlogaud,  (jui  en 
était  abbé,  y  rétablit  pourtant  avec  beaucoup 
de  peine  la  discipline  régulière  l'an  819,  et 
fit  réparer  l'église  ;  mais  sous  le  règne  do 
Charles  le  Chauve,  roi  de  France,  ce  mo- 
nastère se  trouvait  encore  eu  si  mauvais 
ordre,  que  le  grand  nombre  de  religieux  qui 
y  était  autrefois  était  presque  réduit  à  dix, 
qui  vivaient  dans  uu  étrange  dérèglement. 
Lsaac,  évêque  de  Langres,  le  répara  une  se- 
conde fois,  et  y  fit  venir  des  religieux  plus 
rén-uliers  el  plus  exemplaires,  auxquels  il 
permit  d'élire  un  abbé,  conformément  à  la 
règle  de  Saint-Benoît.  Le  relâchement  s'y 
étmt  glissé  encore  dans  la  suite,  Bruno, 
évêque  de  l.angres,  n'oublia  rien  pour  faire 
rctourn  r  les   religieux  dans  leur  premier 


287  l»ICTIONN.\mr,  DES  OUDRES  UELICIEUX.  288 

iHal;  mais  ses  elTorls  ayanl  élé  inutiles,  il      Hrioud.-,  dont  il  fut  clore  et  onsuile  chanol- 


s-,-..lre^sa  à  saint  M;.veui:  nl.L.'-  de  CIuhv.  .im.  ..e  ;  m.M.s   voulant  renoncer  eniuVemenl 
iMant  en  re  tenij.s-là  le  r.->lanrateur  .le   la  n.ond.-    il    se  mil   en  clirmin  p„„r  aller  ,.„ 
>ie  monasliMue,  lui  ac.orda  douze  religie.iY  mon.-.ster.Mie  Lluny .  dans  le  dessein  d  y  prrn- 
,1'un.'  (:-.tiinrnie  niélé  iM.ur  re.nellre  la  n^^-n-  dre  I  l.iibil ;  mais  sçs  ami<  et  ses  domrMiquçs 
larilé  et  le  Imn  ordro  dans  elle  maison.  Us  ayant  appris  son  départ,  coururent  après  Im 
iirrivèr.-ni  ;i  Saini-lteiii^Mie   le  -i.'i    novembre  et   le  r.inienèrenl  :  ce  qui   lui  donna  tant  de 
de    l'an 'IK'J     iimiurl   comme  on  célébrait  la  cliajjrin,  q  .'il  en  tomba   malade,  .\yant  re- 
file de  I  I   I  ranslaiion  de  ce  s.iiiit  martyr,  ils  couvre  la  saule,  il  .illa  à  Home,  et  à  son  re- 
iissisliVcnl  a»ec  une  piété  édKianle  à  l'ollire  tour,  voulant  exécuter  le  dessein  qu'il  avait 
jc  maiiius.  Les  .inciens    reli^'ieux   aimèrent  toujours  cons('r\é  de  -e  retirer,  s'élanl  asso- 
mieux   .ihaudoiiner  le  monastère  <iue  de  se  lié  deux  jeunes   KeiHilsIioinmes ,  ils  allèrent 
s, uimrtlre  aux  observances  régulières;  ceux  dans    une   solitude,    et   sarrèièrcnl    .luprès 
de  Cluiiy  s'y  lireiil  admirer  jiar  la  sainicléde  d'une  église  à  demi-ruince.  Ils  oblinrenl  ce 
ieiir  vie;  Cl  celle  abbaye,  quiavail  été  désho-  li'U   de   deux   clianoims   du   l'uy  en  Vélay  , 
iiorée  par  la  corruption  des  mœurs  de  ceux  aux.juels   il  appartenait,    le  delrichèrenl  et 
nui  V  demeuraient,  devint  une  école  de  vertu  y  b.ilireiit  de  petiles  cabanes.  Hubert  eiicou- 
p.ir'la  sa-e  conduilc  de  ceux  qui   y  claieut  rageait    ses  deux  disciples,  et,  tandis  qu'ils 
iiouTellement  venus.  Irawiillaient   de  Icuis   mains    pour  avoir  do 
Saint  .Ma>eul  y  nomma   pour   abbé  saint  qi'oi  subsister,  il  s'ai  pliquail  à  la  leclure  et 
(inillanme,  ("ijamais  celte  abbaye  ne  fut  [)lus  à  l>  prière  pour  avoir  de  qui^i  les  inslrnire, 
noris^anle  que   sous   son  {.'ouvernemenl.  Sa  Us  avaient  néanmoins  les  heures  marquées, 
repulalion  se  répandit  de  tous  côtés.  Henri,  lanl  de  j  )ur  que  de  nuil,   pour   faire   leurs 
roi  de  liour'îi'pne,  lui  donna   la  ronduile  de  prières   en  commun  dans  un    oratoire.   Les 
l'abbaye  de'SaiiU-Vincent  de  \ergi,  où  il  ré-  babilants  îles  eiiv  irons,  s'opposant  à  leur  des- 
lablit  en  peu  de  lenips  la  vie  ré|»iilière.  au-si  sein,   les    incommodaient     beaucoup  et   les 
bien  qu'a  Itèze,  à  Itéomai,  à  Saint-.Micbel  de  chargeaie'it  même  d'injures  ei  de  menaces  : 
Tonnerre,  à  .Molome  et  dans  plusieurs   au-  >"ais  la  palience  et  la  charilé  de   Robert   et 
Ires  monuslères   qui    le  demandéreni    pour  de  ses  compagnons  adoucirent  lelleinenl  ces 
supérieur;  comme  ceux  de  Fecaitip,  de  Saint-  esprits  farouches,  qu'il  y  en  eut  iilusieurs 
tJerm.in-des-l'rés  à  Paris,  de  Sainl-.Wnoul  qui  >e  joignirent  à  eux.  Leur  nombre  s'ang- 
de  Metz,  de  Sainl-I'iivic  de  l'oul,  de  (iorze,  menlani,  l'observance  régulière  se  pratiquait 
du  Monl-Saiiil-.Michel.  de  .luMiié-e.deSainl-  avec  plus   de  ler»eiir  :  en  soite  que  ce  lieu 
t)uen,  de   liernav,  et   plusieurs  autres,  qu'il  acquit  en  peu  de  temps  beaucoup  de  répuia- 
reforma  pareillement,  se  trouvant  en  ii.éinc  ''O".  etqu  il  i'allnly  bàlir  un  m.inastère.  Les 
temps    supérieur  de  plus  de  quarante  mo-  fondements  en    furent  jetés   l'an  10'i();illut 
iiaslères,   entre    lesquels  fut  aussi  celui   de  promptement  aibe\6  par  les   libéralités  de 
l'ructuaro  en  Piémont,  qui  avait  été  bâti  par  plusieurs  personnes  qui  y  contribuèrent.  L'an 
ses  pi,r.  nts   sur  leur    terre,  ce  saint  étant  K'J-,  le  bienheureux  Itobert  le  lit  ériger  en 
oiimiiairede  ce  pays.  Il  est  même  surpre-  abliaje,  et  il  en  fut  le  premier  abbé.  Cette  ab- 
iiant  qu'il  ait  eu  un  si  grand  nombre  de  dis-  baye  devint  en  peu  de  temps  si  rccomman- 


'à  trois 
cin- 


II  cl  111    IJU    II     un     lu     Ull     31    ^lUIllI     iH-»IIIUIt    VH_     UIJ  -"■.'-        • ^--     l — ^       .....(,..    ..     ...^.r... 

ii,.les  pour  envoyer  en  tant  de  monastères,  dable,  qu'il  eut  sous  sa  conduite  jusqu'à 

voulant  «lU'il  y   en  eût   toujours  dans   celui  eents   religieux;  et  il    répara  environ  ^... 

de  Dijon  plus  de  (jualrc-vingis.  Celle  abbaye  «luanle   églises    abandonnées    depuis    long- 

eul   encore  besoin  de  rérurme  dans  la  suite  ;  temps.  Ce  monastère, qu'on  nommait  dès  lors 

mais   à    présent   que   les  licnédiclins   de  la  la  Chaise-Dieu,  en  latin  Tava  Z>fi,  c'est-à-dire 

congrégation   de    Siint-Maur    la    possèdent  la  maison  de  Dieu,  devint  dans  la  suite  chef 

depuis  l'an  1651,  l'on  y  voit  revivre  le  véri-  d'ordre   et  une    congrégation    de   plusieurs 

table  esprit  de   saint  ISenoit,  aussi    bien  que  monastères  qui   en  dépendaient,  d'où  sorli- 

' — ' ' ,-..':.    ,-_■  -Af A...  renl  plusieurs  personnages  illustres.  Robert 

mouriil   l'an   lUli",  et   il  est  honoré   comme 


dans  les  autres  maisons  qu'ils  ont  rélormées, 

du  nombre  desquelles  sont  celles  de  Fleury, 

de  Saint-Renoît-sur-Loire,  dont  nous  avons 

i-devant  [larlé,  et  la  Cliaisc-Uieu,  dont  nous 


■  ■•lyuiiii     liiti     A\/vji,ui     II     i;ai    iiv'iiiiii;     ,v»niiiit 

saint.  liiilre  les  prieurés   qui  dépendaient  de 
te  monastère,  il  y  eu  avait  quehiues-uns  en 


allons  rap()ortcr  l'origine.  lispagne,  donl  celui  de  Saint-Jean  de  Rurgos, 

Celte  abbaye,   qui  a  été  encore  regardée  qui  lut  érige  en  abbaye,  est  encore  à  présent 

comme  chef  d'ordre,   eut  pour  fondateur   le  un  des  plus  considérables  de  la  congrégation 

bienheureux  Robert,  chanoine  de  Saint- Ju-  de  \'alladoli:l,  à  laquelle  il  a  élé  uni,  comme 
liendc  linoude, 


ilui  ciuii    lu   iin:iiiv;uuill   v;iuil   aiiiii    n;    un.ii"'vu  ■.•v,...v»i.     •   ■    htuil    *_i\^    ivii— ivu.x    ,»»     iti    vjii*»..-^ 

reux   Gcraul,    comte  d'Aurillac.    Sa  mère.  Dieu;  il  avait  toujours  conservé  beaucoup 

éiaiit  grosse   de   lui,  ri  se   trouvant  pressée  d'alTection  pour  cette  maison,  où  il  avait  fait 

des    douleurs   de   renfantiiiient,    le    mit   au  profession,  et  il  voulut  même  y  être  enterré, 

inonde   dans   une  solitude,   comme   par    un  II  fui  inhumé  au  milieu  du  choeur  de  l'église, 

présage  que  celui  qu'elle  venait  de  mettre  au  dans  un  supei  be  mausolée  ;  mais  les  lieiéli- 

iiiomle  dey, lit  un   jour  ai.iier  la  soliluile.  Il  quus,  environ  l'an   I5<i.t,   étant  emrés    dans 

lut  élève   dans  l'cg  ise    de   S.nul-Julicii   de  cette  église,  où  ils  coinmirent  beaucoup  d'un- 


9S9 


FOI 


FOI 


2')0 


piélés,  la  ruinArent  enlièremcnt  cl  pillèrent 
il'  nionasièie,  où  los  Béiié  iir lins  Uéforinés 
de  la  coiif^régation  de  Saint-Maur  fureiil  in- 
tioiluits  l'an  JGW. 

Voyez  Joanii.  à  Bosco,  Bihliolh.  Flnria- 
cen.  BuKeiiu,  llisl.  de  l'Ordre  de  Saint-fle- 
nnit.  Joan.  Mabillon,  Annal,  liénéd.  et  Act. 
SS.  Fleury,  llist.  ecdés.  loin,  XII;  et  Yepez, 
Chronique  rjénérate  de  V ordre  de  Sain  t-Benoil . 

FLOUE  (CoxGRÉGATiov  de).  Voyez  Ber- 
NABD  (Congrégation  nu  Saint-). 

FOI  DK  JKSUS-CHBIST,i)E  LA  PAIX,  !T 
DE  L4  FOI,  EN  France  (Ciievalikrs  de  la). 

Nous  joindrons  ensemble  les  chevaliers  de 
la  Foi  de  Jésus-Christ  en  France  et  en  Italie  , 
dont  on  ne  connaît  point  l'origine.  Il  y  a 
bien  de  l'apparence  néanmoins  que  les  uns 
el  Icj  autres  ont  pris  naissance?  dans  !e  temps 
des  croisades  que  l'on  entreprit  contre  les 
Albigeois.  Ceu\  de  France  nous  auraient  été 
inconnus  si  nous  n'avioiis  trouvé  dans  le 
neuvième  volume  des  manusciils  de  M.  Du- 
cbêne  le  père,  qui  sont  à  la  bibliiUhùque  du 
roi,  des  letlrcs  du  P.  Savary  ,  grand  maître 
de  l'ordre  di-  la  Foi  de  Jésus-Christ,  en  date 
du  5  février  1220,  par  les(|uelles  il  s'engage 
avec  Ii's  chevaliers  de  cet  ordre  de  défendre 
la  personne  et  les  terres  d'Amauri  de  .Monl- 
l'ort,  comte  de  Narbonne  et  de  Toulouse,  con- 
tre ses  ennemis;  de  faire  la  guerre  aux  hé- 
ri'tiques  et  à  ceux  qui  se  révollcraient  contre 
rKglise  romaine;  et  au  cas  que  quelques  per- 
sonnes, soit  calholiques  ou  autres,  fissent  la 
guerre  à  ce  conile  ,  de  lui  donner  retraite 
dans  leurs  châteaux  el  sur  leurs  terres;  de 
ne  favoriser  en  aucune  maiii'rc  ses  ennemis, 
et  de  ne  recevoir  aucune  leriC  (jui  pourrait 
relever  de  ce  prince  sans  sa  permission,  ex- 
cepté les  aumônes  que  l'Eglise  leur  pourrait 
accoider.  Voici  la  leneur  de  ces  lettres. 

F.  P.  Savaricus  humilis  et  pauper  mngister 
militiœ  ordinis  Fidei  Jesu  Chrisli  tinivcrsis 
hominibus  ad  quns  prœsentes  litlerœ  pervene- 
rint,  scdutem  in  Domino.  Noverit  universilas 
vesira  quod  concilio  el  assensu  fralrum  no- 
slrorum,  nos  et  omnes  fraires  noslri  concessi- 
nius  domino  Amalrico  Oei  providunlia  duci 
Naibonœ,  comiti  Tolosœ  el  Leycesiriœ,  Mon- 
tisfortis  domino,  el  omnibus  heredibus  suis , 
succursum  el  adjuvamen  noslrum  ad  defenien- 
dum  et  observandum  corpus  suum  et  terram 
suam  pro  posse  nosti  o,  bona  fide,  et  ad  gui- 
rendum  el  deslruendum  rebelles;  el  si  forte 
aliquœ  génies,  sive  sint  Christianœ  vel  aliœ, 
contra  dominum  comilem  yuerram  aul  bel- 
lum  promoverint,  nos  ipsum  in  negoliis  suis, 
in  castris,et  villisnosirisfirmilerreciperemus, 
et  contra  ipsum  juvamen  vel  auxilium,  aut 
consilium  alicui  personœ  nullo  modo  prœsta- 
remus  el  de  cœlero  suam  terram  vel  feoda  sua 
non  possumus  sumere  ahsque  sui  licentia, 
exceptis  lielemosinis  rationabilibus  quns  san- 
cta  Ecclesia  concedere  el  donare  poleril. 
Qund  ut  firmum  sit  et  stabile,  sigilli  noslri 
munimine  lias  lilleras  corroboramus  anno 
M.  ce.  XX.  incarnaliijnis  Uomini,  nonis  Fe- 
bruarii.  M.  Ducbéne,  qui  a  transcrit  lui- 
iiiôfiie  ces  lettres  sur  lorit^inal,  dit  qu'elles 


sont  scellées  d'un  sr-eau  de  cire  jaune  où  esl 
représenté  un  homme  à  cheval,  lenaul  à 
la  main  un  écussoa  dans  lequel  il  y  a  une 
croix. 

Il  se  peut  faire  que  cet  ordre  fut  uni  q:irl 
ques  années  ajirès  à  un  autre  ordre  sous  !c 
nom  de  la  Paix,  qui  fui  institué  l'an  1229  par 
Améneus,  archevêque  d'Auch  ,  l'évèque  de 
Goniinge,  les  autres  prélats  et  seigneurs 
de  (iascogne,  pour  réprimer  les  violences  des 
brig:;nils  nommés  roît/fers,  les  entreprises  de; 
Albigeois,  el  ceux  qui  retenaient  les  biens 
ecclésiasiiqu's.  Cet  ordre  fut  aussi  nommé 
l'ordre  delà  Fui  et  de  la  P(nx,el  fui  confirmé 
par  le  pipe  Grégoire  IX  l'an  1230.  Il  subsista 
jusqu'en  l'an  1261,  (jue  tiuillaume  de  Marra, 
qui  en  éiait  grand  maître,  et  un  autre  reli- 
gieux de  cet  ordre,  lo  voyant  réduit  à  un  pe- 
tit nombre,  et  qu'il  n'y  avait  pas  d'apparence 
de  le  reformer  ,  passèrent  à  l'ordri;  de  Cî- 
teaux  ,  firent  les  vœux  dans  l'abbaye  de 
Fc  uillaus  ,  et  en  vertu  du  pouvoir  que  le 
grand  maître  avait  reçu  des  autres  cheva- 
liers, ils  consentirent  qun  la  terre  de  Ko(|ue- 
Koquelle  ,  qui  appartenait  à  l'ordre  de  la 
Paix ,  fût  unie  à  l'abbaye  de  Feuillans. 

FOI  Di':  JESUS-CHllIS T.  et  de  la  CROIX 
DE   SAINT   PII-BRE  MARTYR  (Chevaliers 

de  La). 

Nous  apprenons  par  le  livre  qui  a  pour  ti- 
tre :  Scudo inespugnabile  de  Cavaglieri  di  sanla 
fedc,  délia  Croce  di  san  Pielro  Martyre,  com- 
posé par  le  P.  Jean-Marie  Cannepano  de  l'or- 
dre de  Saint-Dominique,  el  imprimé  à  Milan 
l'an  1579,  qu'il  y  a  eu  dans  les  diocises  de 
Milan,  d'Ivrc'  et  de  Verceil,  des  personnes 
qui  prenaient  la  qualité  de  chevaliers  de  la 
Foi  et  de  la  Croix  de  saint  Pierre  martyr. 
Mais  ce  n'était  apparemment  qu  une  asso- 
ciation de  personnes  dévoles  de  l'un  et  de 
l'autre  sexe,  qui  en  recevant  une  croix  fai- 
saient vœu  de  porter  celle  croix  en  l'hon- 
neur de  Notre-Seigneur  Jé>us-Christ  pour 
l'exaltation  de  la  foi  catholique  et  la  destru- 
ction des  hérétiques,  qui  s'engageaient  d'ex- 
poser leur  vie  et  leurs  biens  pour  la  défense 
de  la  même  foi,  lorsqu'ils  en  étaient  requis, 
et  d'obéir  à  l'inquisiteur  et  à  ses  vicaires  en 
tout  ce  qui  concernait  l'inquisition,  tomme 
il  esl  marqué  dans  la  formule  de  ce  vœu 
qu'ils  prononçaient  en  ces  termes  :  Ego  fa- 
cio  votum  Vej,  B.  Mariœ,  et  B.  Petro  mar~ 
tyri,  accipicndi  el  porlandi  crucem  ad  hono- 
remJesa  (Jhrisli  Domini  noslri,  fidei  calholicw 
exaltationem ,  et  liœreticorum  eorumque  fau- 
lorum  exterminium  in  tota  diacesi  Mediola- 
nensi;  el  promitto  exponere  subslaniiam  meo'H 
temporalem  et  vilam  propriam  pro  fidei  dcfen- 
sione,  cum  opus  fuerit,  el  fuero  requisilus;  et 
quod  ero  obediens  H.  P.inquisilori  et  sueces- 
soribus  vel  vicariix  suis  in  omnibus  quœ  per- 
tinent ad  officium  inquisitionis.  Ceux  d'Ivrée 
et  de  Verceil  promeltaienl  la  même  chose 
pour  ces  diocèses. 

Le  P.  Cannepano  rapporte  les  statuts  de 
ces  prétendus  chevaliers  avec  les  indulgences 
et  les  privilèges  qu'il  dit  leur  avoir  été  ac- 
cordés iiar  les  souverains  pontifes.  Mais, 


ÎOI 


DiCTlONNAinE  DF.S  ORDUF.S  P.RLIf.IELX. 


t)(i.) 


coiiinir  parmi  les  bulles  qu'il  ciio  il  y  on  a 
qucliH;os-uncs  qui  oui  clé  .locordécs  on  f.i- 
\iMir  (lo  roux  qui  se  croisaient  pour  les  guer- 
res dos  Allii^'cois,  ol  qui  ne  f  Mil   iiulliiniMil 
inonlion  de  ces  chevaliers,  il  y  .1  bien  de  Tap- 
parence  que  dans  ce    l»iiips-là  c  \'C  préloii- 
iluc  chevalerie  clai'.  inconnue.  C'est  ce  qui 
m'a  obligé  d'écrire  à  .Milan  pour   en  avoir 
une  connaissance  plus  parliiulièrc  ;  et  la  rc- 
I  oiise  que  j'en  ai  reçue  l'an  Itl-i  esl  qu'il  y 
a  dans  le  .>!ilanais  une  comp  geieile  f;enlils- 
homnics  qui  sont  uflicicrsde  riiiqui>ili()n,  cl 
qui  faisaient  aulnfois  le  >(L'U  que  iiiuis  avons 
r.ipporlé  ;  mais  présenlcni  nt  ils  no  font  plus 
qu'un  scrnieiil  de  servir  l'inquisiti  n.cl  de  l'a- 
ve: tir  de  ce  qu'ils  sauront  lui  éire  projiuliiia- 
b!e.()n  n'a  poml  de  cunn^iissance  ((u'ils  aient 
jamais  porte  de  croi\  sur  leurs  habits,  l'ré- 
seiitemciil  lorsqu'ils  :irrélcnt  ou  conduisent 
un  prisonnier  par  otdre  de  rinquisiliiin,  ils 
en  poitent  une  ccarlclée  de  noir  ei  de  blanc, 
et  selon  le  dessin  que  l'on  m'en  a   envoyé, 
elle  esl  à  huit  pointes  comme  celle  des  che- 
valiers   de  Malle,  et  non    p.is    lleurdcliséc, 
Comme   est   ordinairement  la  croix  de  l'in- 
quisilion.  Ainsi  ces  prétendus  chevaliers  dont 
il  est  parlé  dans   le  lure  du   P.  Caunopano, 
que  l'on  me  marque   avoir  été  défendu  p;'.r 
l'inquisilion  ,  qu  liqu'écril  en   sa  fa\eur  .  ne 
sont  que  des  ofliciers  de  ci  tic  même  inquisi- 
tion, semblables  à  ceux  que  l'on  iiummc  en 
Kspagnc/'ajdi/ieci,  parmi  lesqui'ls  il  se  trouve 
des  seigneurs  des  plus  qualilics  du  rO}aume, 
qui  se  (ont  honneur  d'être  du  nombre  de  ces 
officiers,  et  dont  la   fonction  est   aussi    J'ar- 
réier   Is  prisonniers  par  ordre  de  l'inqui- 
sition. 

FOLKîNI    CoNGRÉtiATiON  i>e).  Vuijez  Unsu- 

LINES. 

FONTAINE-JAILUSS.^N'rE  (Chanoines  de 

LA  CONGRÉGATION   DE   La). 

Voici  encore  une  congrégation  de  chanoi- 
nes qui  a  pris  son  origine  des  clcr.s  de  la 
\'ie  commuiif,  institués  par  tiérard  Grool. 
^ous  avons  dit  que  ces  clercs  avaient  des 
maisons  à  Munsier,  à  Cologne  et  à  Wesel. 
Ces  trois  maisons  s'unirent  ensemble,  et, 
voulant  vivre  à  la  manicie  des  chanoines, 
ils  foi  nièrent  une  congrégation  qui  fut  ap- 
prouvée l'an  i  îilJ'J  par  le  piipe  liugène  IV,  cl 
à  laquelle  ce  poiilili-  dinna  le  nom  de  con- 
};ri  galion  des  chanoim^s  de  la  Foiilaine-Jail- 
lissanle.  Ce  fut  à  I  i  prière  d'un  saint  prêtre 
nomme  Henri  de  lliiys,  qui  avait  non-seule- 
ment fondé  Cil  i'rlï  la  maison  des  cleics  de 
la  \  ie  comiiiune  dans  la  ville  de  Munsier, 
in.'iis  était  encore  entré  parmi  eux.  Après  sa 
iiiiirt,  qui  arriva  peu  de  liin[is  après  l'crec- 
t  on  de  celte  congrégation  ,  ces  chanoines 
assciiililércnl  leur  premier  i  hapilro  général 
à  Munsier,  dans  lequel  ils  drcsséri-nl  les 
consiitutions  pour  l'observance  régulière  en 
vertu  du  pouvoir  que  le  pape  Eugène  leur 
en  avait  dunné  par  sa  bulle. 

Tous  les  ans  ils  ilevaieiil  tenir  ce  chapitre 
Kèiièr  il  dans  la  maison  de  .Munsier  le  dunaii- 
rlie  Juhilalr.  Les  prévols  ou  recteuis  des 
uiaisuiik  de  .Munster,  de  (Pologne  et  de  We- 


sel, devaient  s'y  trouver  .nver  quatre  chanoi- 
nes députe^  parleurs  communautés,  les  pré- 
vôts ou  recteurs  des  autres  maisons  unies  à 
ces  lroi<,  chacun  seulement  avec  un  cha- 
noine ;  les  recteurs  des  aulrcs  maisons  qui 
n'é  aient  pis  de  la  cong'ègation  si  ces  rec- 
teurs on  avaient  été  tirés  ,  et  les  confesseurs 
des  reliizieuses  qui  étaient  aussi  membres 
de  la  iné  ne  congrégation. 

Ils  rcicv   ienl    trois  sories  de  personnes  : 
desfrèr.  s  perpétuels,  des   chanoines   et  des 
donicsliques.   ('eux   ((ui  devaient  être  frères 
perpétuids  claienl   reçus  de  celte    manière. 
Le  supérieur  les  taisait  venir  en  ch;ipitie,  et, 
après  les  avoir  instruis  des  observants  de 
la  congrégation  cl  des  raisons  qui  pourraient 
les  obligera  élre  chassés,  il  leur  disait  qu'ils 
ne  devaient   plus    rien  avoir  en    propre,  cl 
qu'ainsi  ils  devai'  ni  fiiire  cession  par-dcvani 
notaire  ou  donation  cnlrc-vifs   à  la  ni  lison, 
de  tous  II  s  biens  qu'ils  possédaieni,  soil  par 
hérilage,  soit   de  leur   iravail,  ou  parquel- 
qu'autre   voie  que  ce    fût;  cl  que  qii.iiul  ils 
sortiraient  de  leur  bon  gré,  ou  (ju'il  y  aurait 
d. 'S  raisons  de  lesrtnvoyer,  ils  ne  |iourraienl 
rien  répéter   de   ce   ((u'ils   auraient   donné; 
mais    qui  s  seraient   obligés    d'iiitrer   dans 
une  religion   approivée  par  l'Iîglise,  et  c'est 
ce  qu'ils   promenaient  en   ces  termes  :  Eijo 
fratir  N.  promillo  jidelitatem  dumui  iiostiœ 
N.  cl  iiuxilianle  Deo,  castum,  c^ncordem,  et 
coiinminnn  vilain  serundum  slatula  capitiili 
generiilis,  deinccps  obscnabj;  et,  si  conlige- 
ril  quacunqite  occasione  me  de  hac  dntno  re~ 
cedere  (vt  fr-ii-ulum  prœilicln  erpil'i,  p  cfice 
recedam  nihil  repetendo,  et  ex  tune  oblignium 
me  faciii  ad  intraiidam  relirjionem  upproba'i.nx 
ubi  regulariter  vivilur,  sic  me  Dcus   luljuvel 
cl  liœc  sancln  EraïKjclia.  Ceux  qui  claienl  re- 
çus pour  chaiiDines  promcttaienl  fidélité  au 
chapitre  général  d'obéir  à  toutes  sis  ordon- 
nances l.int   qu'ils    seraient   meni'.ircs  de  la 
congrcgaiiop ,  et  d'en  garJer  le  secrel  aussi 
bien  que  du  chapitre  local.  Voici  la  formule 
de  leur   promesse.  Ego  [rater  A',   canonicus 
ccclesiœ  N.  promillo  bona  fide,  locojurdincnii 
cl  viyorc   ejus,  fidclitalrm  gencrnli   copitulo, 
rjusquc  ordinntiunU/us,  cl  slnlutis  faciis  cl  fn 
ciendis  obedientiam   t/uandiu   cjii.i   tnembniin 
fuero,  cl  scci  cta  rjiisdtin  capiluli  generalis  tl 
parliciilaris    celabo    ad    quemcumiin'    flaluiu 
pcrvcncro,  kiIvu  niliilaminus  promissiour  pri- 
(lem  pcr  me  facUt  in  sito  robore  et  VKjore.  On 
élisait  dans  le  chapitre  général  d'  u\  chanoi- 
nes pour  visiteurs  des  maisons  de  la  congré- 
g  iliiin. 

Voyez  Aubcrt  le  Mire,  licgul.  et  Constitut. 
clericA.r.  in  communi  vivenlium. 

FONTE-AVLLLVNK  ou  FC^M'-AVELLANK, 
présrulcmrnl  tmie  à  l'ordre  dis  Camatduli  s 

(Co.NGBÉiiATION    Di;). 

Morigia  cl  Maurolie,  parlant  de  la  congrc- 
galion  lie  Fonle-Avellaiie  ou  F'ont-Avell.me. 
di>eiil  que  son  fonda'eiir  fui  le  bienheureux 

Liiilolplio,  linminn  fort  nijonné  ?i  la  rnnieni- 
plalii)n,inii,avaiit  soufrert  une  gr.imle  pcrsT'- 
lulinn  (l'un  sei^;iu'iir  li'Onilirio,  se  relira  dans 
les  Ajieiiniiis  entre  les  monts  Carrio  et  Cor- 


S9S 


FON 


FON 


201 


vo,  où  il  mena  ure  vie  solitaim  ;  et  qu';iynnl 
eu  m  peu  de  temps  dos  disciples  qui  youki- 
reut  imiter  sa  manière  de  vie,  il  b;ilil  au 
même  lieu  un  monaslcie  qui  fui  dédié  ;iu 
Sauveur  du  monde, sousle  li(re  de  laSainte- 
Croix  ;  mais  qu'après  sa  mo' t  ses  disciples 
ét.int  lombes  dans  le  relâcliemcnt  ,  s;iinl 
Pierre  Damien,  qui  étail  muiiiede  l'abliaye 
de  Classe  de  l'ordre  des  CamaUlules,  vint  à 
Font-Avellane  cinquante  ans  après  la  fonda- 
lion  de  ce  monastère  ;  que  non -seulement  il 
le  réf.irma  et  y  rétablit  les  observances  qui  y 
é  aient  prati  lUées  du  temps  du  bienheureux 
Liidolphe,  mais  qu  il  obligea  ces  ermites  à 
euibrasser  la  règle  deSainl-Uenoîl. 

Mais  il  paraîtque  ces  auteurs  se  sont  trom- 
pés en  cela  aussi  bien  qu'on  beaucoup  d'au- 
tres choses;  car  saint  Pierre  Damien  n'a 
point  été  religieux  de  l'abbaye  de  Classe, 
puisqu'elle  n'était  point  de  l'ordre  des  Ca- 
malilu'es  pour  lors,  et  qu'elle  ne  fut  unie  à 
cet  ordre  que  l'an  1138,  comme  nous  avons 
dit  à  l'article  Camaldules.  Ce  fut  dans  le  mo- 
nastère même  de  Fonl-A'.  ellane  que  s.iiiit 
Pierre  Damien  prit  l'habit  monastique,  vers 
l'an  lOiO,  où  les  religieux  de  ce  monastère, 
qui  avait  élé  fondé  il  y  avait  cnviiou  qua- 
rante et  un  ans,  étaient  encore  dans  leur 
ferveur,  comme  nous  allons  le  montrer.  C'est 
pourquoi  nous  pouvons  dire  avec  raison  que 
saint  Pierre  Damien  n'a  point  élé  le  réfor- 
mateur de  cet  ordre,  mais  seulement  le  pro- 
pagaleur. 

Je  ne  suis  pas  surpris  que  le  P.  Grandi  ail 
fail  u;:e  dissertation  pour  prouver  que  le 
bienheureux  Pieire  Damien  a  été  Camaldule, 
puisque  disputer  ce  saint  à  cet  ordre,  c'est 
lui  enlever  un  de  ses  p'us  be:iiix  orncmenls, 
cl  lui  dérober  la  gloire  du  monastère  de 
Font-Avellane  d'où  est  sorti  Pierre  Damien 
avec  les  autres  cardinaux,  pus  de  quarante 
prèl  ils  et  autanl  de  saints  et  de  bienli  -ureiix. 
Mais  il  fallait  que  le  P.  Grandi  donnât  de 
bonncsr;iisons  pour  c'ii.vaiiicre  ses  lerlcurs  : 
car  de  dire  que  Fonl-Avel  aae  a  été  de  l'or- 
dre des  Camaldules  à  cause  que  son  fonda- 
teur Luilolphe  a  été  disciple  de  saint  Uo- 
iiiuald  ,  et  que  l'on  pratiquait  à  Fo:.t-Avel- 
laiie  à  peu  près  les  mêmes  observances  qu'à 
Camalduli,  celte  raison  n'esl  pas  suflîsanlc, 
puisque  saint  Jean  Gualberl  élablil  aussi  à 
\  allombreuse  les  mêmes  observances  qu'il 
avait  vuesel  q.i'il  avail  pratiquées  lui-même 
dans  le  temps  qu'il  demeurait  à  Camaldoli; 
qu'il  forma  le  monastère  de  Vallombreuse 
sur  li;  plan  de  celui  de  Camaldoli;  que  les 
cellules  y  étaient  séparées  les  unes  des  <iu- 
Ires,  sans  qu'on  puisse  dire  cependant  qu'il 
fût  de  l'ordre  des  Camaldules.  Il  senilile  que 
le  P.  Grandi  n'ail  différé  la  mort  de  saint 
llomuald  jusqu'en  l'an  1037  que  pour  donner 
à  connaître  que  ce  saint  avait  instruit  lui- 
même  saint  Jean  Gualberl  des  devoirs  de  la 
vie  érémilique  lorsqu'il  demeurait  à  Camal- 
doli ;  cependant  le  P.  Grandi  ne  dit  point 
que  Vallombreuse  ait  élé  de  l'ordre  des  Ca- 
maldules; mais,  comme  les  religieux  de  Val- 
lombreuse auraient  pu  avec  justice  lui  dis- 
(tutcr  celte  alliance,  il  a  seulement  attaqué 


les  religieux  de  l'ordre  de  Fonl-.\vtllane, 
(]ui  ne  pi'uv  ni  plus  défendre  leur  cause, 
ayant  été  supprimes  depuis  environ  cent 
cinquante  ans  ;  cl  il  les  a  incorporés  dans 
son  ordre  dès  le  commeiicement  de  leui  in- 
stitution, quoique  le  monastère  d.'  Font- 
Avellane  et  quelques  autres  de  sa  dépen- 
dance n'aient  été  unis  à  l'ordre  des  Camal- 
dules que  l'an  ISG'J,  comme  nous  dirons  ci- 
après. 

Nous  reconnaissons  doncl'ordre  de  Font- 
Avellane  comme  un  ordre  distinct  et  séparé 
de  celui  des  CamaMules.  Les  rondements  en 
furent  jetés  dans  le  monastère  de  Foiil-Avel- 
lanc  vers  l'an  1  iOi)  par  le  bienheureux  Lu- 
dolpbe,  qui  fut  dans  la  suite  évêque  d'Eugu- 
bio.  Il  est  situé  dans  un  lieu  solitaire  de 
1  Ombrie  au  diocèse  de  Faeiiza,  enire  les 
monts  Calrio  et  Corno.  Ludolphc  y  cul  d'a- 
bord plusieurs  disciples,  avec  lesquels  il  vi- 
vait en  anachorète.  Ils  ilemeuraienl  dans  des 
ct'llules  séparées  les  unes  des  autres,  occu- 
pés coniiouelleinenl  à  la  psalmodie  ,  à  l'orai- 
son et  à  la  lecture.  Ils  vivaient  de  pain  et 
d'eau  quatre  jours  de  la  semaine.  Lo  mardi 
et  le  jeudi  ils  mangeaient  un  peu  de  légu- 
mes qu'ils  faisaient  cuire  eux-mêmes  dans 
leurs  cellules,  où  ils  avaient  aussi  des  ba- 
lances pour  peser  leur  pain,  ne  le  pren ml 
<iue  par  mesure  les  jours  de  jeûne,  ils  n'a- 
vaient du  vin  que  pour  le  sacrifice  de  la 
messe  ou  pour  les  malades.  Ils  observaient 
trois  carêmes,  savoir  de  la  Uésuireclion,  de 
la  Nativité  de  Notre-Seigneur  et  de  saint 
Jean-Baptiste.  Pendant  ce  dernier,  qui  du- 
rait depuis  l'octave  de  la  Pen'.ecô'e  jusqu'à 
la  Saiiil-Jean,  on  leur  donnait,  le  mardi 
après  none,  une  portion  de  quelques  légu- 
mes. Ils  mangeaient  deux  fois  le  jour  le  jeudi, 
aussi  bien  que  le  mardi  après  la  fêle  de 
saint  Jean-Baplisle.  Depuis  le  13  septembre 
jusqu'à  Pâques  ils  jeûnaient  tous  les  jours, 
excepté  l'octave  de  Noël  ;  lous  les  dimanches, 
de  l'année  on  leur  donnait  deux  porlionii, 
excepté  les  diman'hes  des  carêmes  de  Pâ- 
ques et  de  Noël,  qu'on  ne  leur  en  donnait 
qu'une  ;  et  aux  fêles  de  saint  André,  de  saint 
lienol(  et  de  l'Annonciation  de  Notre-Dame, 
ils  ne  jeûnaient  pas  dans  toute  la  perfection. 
(Us  appelaient  jeûner  parfaitement,  lorsqu'ils 
ne  prenaient  que  du  pain,  de  l'eau  et  du  sel.) 
Us  marcliaienl  toujours  nu-pieds,  prenaient 
la  discipline,  faisaient  des  génuflexions,  se 
frappaient  la  poitrine,  demiuraienl  les  bras 
étendus,  chacun  selon  ses  forces  et  sa  dévo- 
tion, et  après  l'oflice  de  la  nuit  ils  disaient 
tous  le  psautier  avant  le  jour. 

Telles  étaient  les  obsersances  régulières 
qui  se  pratiquaient  dans  ce  monastère  ,  lors- 
que saint  Pierre  Damien  y  prit  l'habit  mo- 
nastique. 11  avait  entendu  parler  de  la  fer- 
veur de  ces  ermites;  el  comme  il  songeait  à 
quitter  le  siècle,  il  en  rencontra  deux.  S'é- 
tant  ouvert  à  eux,  ils  le  fortiiièrcnl  dans 
son  dessein;  et  comme  il  témoigna  vouloir  so 
retirer  avec  eux,  ils  lui  promirent  que  leur 
abbé  le  recevrait.  Il  leur  offrit  un  vase  d'ar- 
gent pour  porter  à  leur  abbé;  mais  ils  lo 
remercièrent  et  ne  voulurent  pas  le  recevoir, 


o;,:;                                            DICTlONNAini:  OES  OUDar-SRRLIGIELX.  206 

SUIS  pr^'exlo  «lu'il   le<:  omh.iirnsserait  dans  nppris   relie   pratique  de    sainl   Dominiqiif;. 

le  cli.'Miiii    11    fut    fort    c.lilie  di- Unir  dcsinif-  J'uii    de    ses    disriplcs,    qui    fui    suriioniiué 

rcs-iomcMil    cl  se  reiidilqiioiqup  (cmiis  .iprôs  riinruirnssé,   ;i  cause   d'une    cuir.isse   qu'il 

à  l-oui- Vv'ell.inc,   cù   on    lui    donii;!    Thabil  poriail    C'.>nlinuellciMcnl  sur   son  corps.  Ccl 

niiHiislique    Sou'supéneur  lui  donna  le  soin  hoinuie,  .ijaul  su  que  sainl    l'ierre    Daniicn 

do  faire  .!e<  e\liorlaliou'i    aux    frères,  cl   sa  avait  écrit  de  lui  qu'il   avait    récite   un  jour 

rrput.ilion  venant  à  se  répandre,  (".ui,  abbé  neuf  psautiers    avec    la    disciiiline,    en    fui 

do  l'oinposieiMLS  de   Ferrare,  pria  l'abbe  de  lui-niéme  eiouné,  et   voulut  en    fiire  enorc 

Konl-\»ellane    (\c   le    lui  envoyer  pour  ius-  l'expérience,   lise  dépouilla   donc    un  iner- 

Iruirequelquctcnipssacoiiinuiuauléquiéiait  crcdi,  cl   ayant  pris  des  >er^'es  à  ses  deux 

de    ceni    moines,  l'ierre    Damien  y  demeura  mains,  il  ne  cessa   toute  la  nuit  d'en  réciter 

deux  ans.  cl  son  aldié,  l'ay.iul  rajipelé,  l'en-  en  se  frapi  aiil  :  en  sorte  que  le  lendemain  il 

vo\a  quelque  temps  après  faire    les  mêmes  avait  d;l  douze  psautiers  el  plus.  Quelquesau- 

fonctioiis    au    monastère    de    Saint-Vincenl  nées  avant  sa  mirl,    il  redoulila   encore  ses 

près    de   l'ierre-Pei  luse.  Eulin    l'abbe  le  dé-  au>^térilés,  et  ayant  trouvé    que  les  lanières 

Clara  son  successeur,  du  coiisenleinenl  de  ses  de  cuir  étaient  jiius  rudes  (lue  les  verges,    il 

relif;icu\.  Ayant    pris  le   gouvernement   de  s'acouluina  à  s'en  ser\  ir.  Il   |)orlail  toujours 

cette  coMgrégalion   après  la   morl  de   l'abbé,  avec  lui,  quand  il  sortait,  un  fouei  de  lanièr.  s 

il    l'auguienla   de   cinq    autres    monasiércs,  pour  se   donner  la   discipline,   et  se  conlen- 

qu'il  fo'iula,  un  au  diocèse  de  C/imerino,  deux  lait    même  de  repasser   dans    son  esprit  les 

au  diocèse  de  Faenza,  un  au  diocèse  de  Hi-  paroles  des    psaumes   sans    les    prononcer, 

mini,    et    l'autre    proche    recouse,    on   il  fil  afin  de  se  donner  un  plus  grand  nombre  de 

pratiquer  les  mêmes  observances  qu'à  Font-  coups.   Sainl  Dominique  el  saiiil  Pierre  D.i- 

AvcUane.   Nous  avons  dit  qu'ils  n'avaient  du  mienne   furent  pas  ncanmoins   les   auteurs 

vin  que  pour   le  sacrifice  de  la  messe  ;  mais  de  ces    séries  de   flagellations    volontaires. 

Pierre   Uamicn  leur   permit   d'en    boire    un  Gui,   abbé  de    l'omposie,    morl   en  10V6.   el 

peu  hors  les  carêmes  de  l'àques,  de  la  Nati-  saint  l'oppon,  abbé  de  Slavolo,  mort  en  10'i8, 

vile  et  de  sainl  Jean-ltaptisle,   où   il    n'était  les  avaient  mises  en  pratique  avant   eux;el 

pas    permis  aux   inoim  s,  ni  même  aux  laï-  avant  eux  Uéginon  (1),  abhé   de  Pruin  ,   qui 

ques.  de  boire  du  vin  ni  de  manuerdii  pois-  vivait  au  commenccmeni   du  dixième  siècle, 

son.  Mais  il  semble  qu'il  ne  leur  permit  de  avait  ordonné  de  se  Irapp  r  jusqu'à  faire  des 

boire  du  vin  ijue  pour  avoir  plus   de    force  plaies  sur  son  corps  pour  ac(iuilter  lespéni- 

à  soutenir  les    di>cipiiiies  rigoureuses  aux-  lenccs. 

quelles  il  b  s  obligea,  le  plus  souvent  pour  Cette  manière  de  déchirer  sou  corps  ne 
aequitier  les  péiiilciic  s  des  autres.  Car  on  plut  pas  à  tout  le  monde,  il  y  en  eut  qui 
était  alors  persuadé  que  pour  chaque  péché  condamnèrent  la  disci|,line  volontaire,  coin - 
on  était  obligé  d  accomplir  la  pénilenic  inar-  me  une  nouveauté  contraire  aux  canons, 
quee  par  les  canons  :  en  sorte  que  s'il  y  avait  Pierre  Cérébrose  cl  le  cirdinal  lilienne,  qui 
di\  ans  pour  l'homicide,  celui  qui  en  avait  avait  élé  religieux  du  mont  Cassin,  furent 
commis  vingt  ,  devait  deux  cents  ans  de  pé-  en  cela  les  plus  grands  adversaires  de  l'ierre 
iiilenie;  el,  comm:;  il  était  impossible  de  Damien.  Le  premier  ne  condamuail  pas  tout 
r.icquit'.er,  on  avait  trouvé  des  moyens  de  à  fa.t  I  usage  de  la  discipline,  m.iis  il  regar- 
la  racheter  en  accoinplissanl.  par  exemple,  dail  comme  une  folie  ces  longues  fiagella- 
ceiit  ans  de  pénitence  par  vingt  psautiers  ac-  lions;  il  ne  désapprouvait  pas  non  plus  que 
compagnes  de  discipline.  Trois  mille  coups  l'on  récitât  un  psaujne  en  sedonuint  la  disci- 
ile  discipline  valaient  un  an  de  pénitence,  et  plinc,  mais  il  regardait  comme  quelque 
mille  coups  se  donnaient  pendant  dix  psau-  chose  d'excessif  de  la  prendrQ  pendant  loul 
nies:  par  conséquent  les  cent  <inquante  psau-  un  psautier.  Pour  le  cardinal  lilienne,  il 
mes  valaient  cinq  ans  de  |i6iiilence.  Sainl  croyaii  qu'il  fallait  plulcit  macérer  son  corps 
l'ierre  Damien  leur  fa  sait  souvent  faire  de  par  le  jeune,  el  soutenait  qu'il  n'était  pas 
ces  pénitences  pour  les  autres,  cl  même  honnête  de  se  dépouiller  tout  nu  en  pré- 
(pielquidois  pour  les  péchés  qu'ils  avaient  seiice  d'une  communauté.  Pierre  Uaniieii 
commis  élanl  laïi|ues,  ne  croyant  pas  que  écrivit  contre  ceux  qui  blâmaient  ces  sortes 
.  pour  les  péchés  <|u'ils  avaient  commis  il.ins  de  llagidlations  ;  mais  enfin  convaincu,  soit 
le  monde,  iU  en  fussent  quittes  [tour  prati-  par  les  objections  de  ses  adversaires,  soit 
quir  la  lommune  observance  delà  règle;  par  sa  propre  expérience,  qu'il  y  a\ail  de 
mais  ([u'ils  devaient  y  ajouter  des  pénitences  l'excès  dans  ces  mortifications,  il  y  apporta 
proportionnées  à  h  urs  péchés.  Ils  étaient  ou-  un  températnenl  ,  et,  écrivant  aux  religieux 
Ire  cela  obligés  par  la  règle,  lorsqu'un  reli-  de  sa  congrégation,  il  leur  dit  (]ue  celle  fia- 
gieux  était  mort,  de  prendre  sept  disciplines  geilalion,  sur  laquelle  ils  insistaient  si  »  ive- 
ile  ni  lie  coups  chacune,  de  jeûner  sept  jours,  ment,  pouvait  ''trc;  utile,  lorsqu'on  s'en  s<'r- 
dediie  trente  psautiers,  et  de  célébrer  trente  vail  avec  modération  ;  mais  qu'en  la  pous- 
iiiesses  :  et  si  un  novice  mourait  sans  avoir  sanl  si  loin,  elle  peut  être  imliscrète,  puis- 
accompli  la  pénitence,  ils  devaii'iil  |iarlager  qu'elle  alTaiblit  le  corps,  le  reduilen  l.ingiieur, 
entre  eux  ce  qui  restait  pour  l'accomplir.  elle  met  souvent  hors  d'élal  de  satisfiire 
(>es  sortes  de  disciplines  étaient  lorl  en  aux  autres  exercices  de  la  religion,  s  en 
u>age  dans  ce  lem|is-là.  P. erre  Dimien  avait  irouvani  parmi  eux  qui   prenaient  la   disci- 

(IJ  Kcgilio,  hb.  Il,  (.ip.  i.i  cl  seqneiil. 


Î97 


FON 


roN 


ÎS^ 


piine  pcnilant  un  p  ailier  cnlior,  et  mi^'me 
[ieiidaiil  deux  psautiers,  jusqu'à  s'incommo- 
lier  coiisidérablcmenl,  c(  se  rendre  efTeriivo- 
inenl  malades,  et  que  cela  détournail  mémo 
ceux  qui  avaieril  envie  de  venir  dans  leurs 
ermilJigi'S.  C'est  pourquoi  il  ordonne  qic 
personne  ne  sera  conlrainl  à  se  donner  voi- 
inémo  la  discipline,  mais  que  (eus  qui  au- 
ront assez  lie  ferveur  pour  se  la  donner,  l.i 
pourront  prendre  en  récilanl  seulement  qua- 
rante psaumes  pour  chaque  discipline,  sans 
qu'ils  puissent  passer  ce  nombre,  sinon  pen- 
dant les  dcus  carêmes  de  la  Nativité  et  de  la 
Uésurreclion  de  Notre  -  Seigneur  ,  auquel 
temps  il  leur  serait  permis  de  prendre  la  dis- 
cipline pendant  soixante  psaumes.  Nous  ne 
retranchons  pas,  dit-il,  par  ce  moyen  ce 
quiestbun,  mais  seulement  ce  qui  paraît 
excessif. 

L'éclat  de  sa  sainteté  et  de  sa  doctrine  le 
fit  créer  cardinal  et  évêque  d'Oslie  par  le 
pape  Etienne  IX,  en  105'7.  On  cul  à  la  véiiié 
de  la  peine  à  lui  f.iire  accepter  cette  dignité, 
et  le  pape  fut  obligé  d'employer  toute  son 
iiulorllé  pour  l'y  engager.  Il  s'y  soumit  ce- 
pendant p  ir  une  pure  obéissante  ;  mais, 
entraîné  toujours  par  l'amour  de  la  solitude, 
il  se  retira  ()uel(]ucs  temps  après  dans  sou 
ermitage  de  Font-Avellanc;  où  étant  arrivé, 
il  alla  premièrement  au  chapitre,  où  il  s'ac- 
<;usa  lui-même  de  ses  fautes,  et  pour  les  es- 
pi(r  il  demanda  qu'on  le  frappât  de  coups  de 
fouet.  Il  se  renferma  dans  une  cellule,  où  il 
affligea  cruellement  son  corps  par  des  jeûnes 
et  des  llagellations  fréquentes,  se  conicnlant 
d'eau  et  d'un  peu  de  pain  de  son  pour  sa 
nourr.ture.  Ses  disciples  l'ayant  prié  de  cor- 
riger ce  qu'il  y  avait  do  défectueux  dans 
leurs  observances,  il  retrancha  les  bonnets 
ou  chapeaux,  dont  ils  se  couvraient  la  tête, 
comme  peu  conformes  à  la  simplicité  et  à  la 
modestie  religieuse,  et  leur  ordonna  de  se 
contenter  de  capuces,  qui  élaient  en  usage 
parmi  les  religieux  ;  de  quitter  les  éloiïcs  qui 
venaient  des  pays  étrangers,  et  de  ne  se 
servirque  de  celles  qucporiaienlles  paysans. 
Il  écrivit  encore  plusieuis  ouvrages  dans  la 
solitude,  d'où  il  eut  ordre  de  sortir  une  se- 
conde fois  pour  terminer  des  affaires  pres- 
santes; et  revenant  d'un  voyage  qu'il  avait 
fait  à  Uome,  il  mourut  à  Faénza  l'an  1072. 

Nous  ne  savons  point  si  les  religieux  de 
l'ordre  de  Font  -  Avellane  se  maintinrent 
longtemps  dans  ia  ferveur  et  l'observance  de 
leur  institut;  mais  11  est  certain  que  dans  le 
XVI"  siècle  ils  vivaient  avec  beaucoup  de  li- 
cence, qu'ils  ne  faisaient  plus  mémo  de  pro- 
fession religieuse,  qu'ils  viv.iient  plutôt  en 
séculiers  qu'en  religieux  et  en  solitaires.  Ils 
avaient  quille  l'habit  mona^tiq^le,  qui  é  ait 
Hel  que  vous  le  voyez  représenté  dans  la 
première  figure  (1),  et  ne  portaient  plus 
qu'une  espèce  de  soulanclle  blanche,  qui  ne 
tioscendait  qu'aux  genoux,  avec  un  manteau 
bleu,  un  bonnet  carré  blanc  au  lieu  de  cap, 
comme  il  est  représenté  dans  la  seconde  li- 
gure (2).  Le  pape  Pic  V  ayant  donné  l'ab- 

(I)  Voy.,k  la  fin  du  vol.,  n*  62. 

Dictionnaire  des  Ordiies  religieux.  II. 


baye  de  Fonl-A  vell.me  en  commcnde  au  car» 
dinal  Jules  de  la  Uovère,  frère  du  duc  d'Ur* 
bin,  ce  cardinal  voulut  y  rélablii-  la  discipline 
monastique.  Il  y  Qt  venir  pour  cela  l'an  1570 
des  moines  cnmaldules  de  la  congrégation 
de  Saint-Michel  de  Murano.  Dieu  toucha 
leurs  cœurs,  et  la  plupart  des  religieux  do 
Font-Avellane  prirent  l'habit  de  cet  ordre, 
et  en  firent  profession  entre  les  mains  du 
Père  doin  Pierre  B.ilneoli  de  Bagnacavalli, 
qui  en  fut  élu  abbé  régulier;  et  depuis  ce 
temps  les  religieux  camuldules  ont  toujours 
possédé  ce  monastère. 

Voyez  la  Vie  de  Pierre  Damien,  écrite  par 
Jean,  son  disciple;  ejtisdem  Pétri  iJamiun. 
Optiscul.  14  et  15,  et  lib.  vi,  epist.  .33;  Joan. 
Mabillon,  Acla  SS.  ord.  S.  Bened.  sœcul.  vi  ; 
ejtisd.  Annal.  Benedict.  lom.  \V ;  et  Fleury, 
Hist.  eccl.  lom.  XII  cl  XIII;  Morigia,  Ilist. 
di  tulle  le  reliqioni,  cnp.  58  ;  Silvestr.  Mau- 
rolic,  Mar.  Océan,  di  lutte  le  Relig.,  lib.  ii, 
pag.  158;  Sehoonebeck,  Ilist.  des  Ordr.  re- 
lig. ;  (îuido  Grandis,  Dissert.  Camaldul.,  dis- 
seri.  4. 

FONTEVUAULT  (Ordru  de). 

§  1".  De  l'ordre  de  Fontevrault,  avec  la 
vie  du  B.  Boberl  d'Arbrissel,  fondateur  de 
cet  ordre. 

L'on  regarde  l'ordre  de  Fontevrault  comme 
une  singularité  dans  l'Fglise,  et  on  est  sur» 
pris  d'y  voir  une  abbesse  commander  égale- 
ment à  des  hommes  et  à  des  filles  sur  les- 
quelsellea  toute  autorité;  mais  pour  répon- 
dre à  ceux  qui  sont  étonnés  du  procédé  de 
leur  fondateur,  d'avoir  ainsi  renversé  en 
apparence  l'ordre  de  la  nalure  en  rendant 
sujets  ceux  qui  devraient  commander,  et 
maîtresses  cellesqui  devraient  obéir,  il  suffit 
(sans  vouloir  ap|irofondir  dans  les  raisons 
qu'il  en  a  eues)  de  leur  dire  que  s'ils  veulent 
chercher  dans  l'histoire,  i's  trouveront  de  quoi 
faire  cesser  ou  au  moins  diminuer  de  beau- 
coup leur  élonnrment  ;  car  (sans  parler  de 
Judith,  (  ntre  les  mains  de  la(|uelleDieu  avait 
mis  le  salut  de  son  peuple  ,  et  d'une  puccllc 
d'Orléans,  à  qui  la  France  est  redevable  d'ê- 
tre préseniement  l'Etal  le  plus  florissant 
qu'il  y  ait  en  Europe,  et  cela  par  la  soumis- 
sion aveugle  tant  de  son  prince  que  de  tous 
ses  peuples,  qui  s'abandonnèrent  cntièrc- 
mentà  sa  conduite)  ilsy  trouveront  beaucoup 
d'établissements  semblables  àcelui  deFontc- 
vraull.  Car,  dans  l'ordre  de  Sainte-Brigillc, 
princesse  de  Suède,  dont  nous  avons  déjà 
parlé,  les  hommes  qui  demeurent  dans  les 
monastères  doubles  sont  sous  robé:ssance 
des  abbesses  de  ces  mêmes  monastères,  ex- 
cepté qu'ils  sont  soumis  également,  commb 
les  religieuses,  auxévêques  dans  les  diocè- 
ses desquels  ils  sont  clublis,  comme  je  l'ai 
déjà  dit  en  parlant  de  cet  ordre.  Dans  l'ab- 
baye de  Sainl-Sulpice  en  lireta^ne,  le  bien- 
heureux Uaoul  y  établit  un  institut  sembla lila 
à  celui  de  Fontevrault,  imitant  en  cela  plu- 
sieurs  autres   instituteurs    qui     longtemps 

(2;  Voy.,  iliid.,  n"  63. 

10 


O'IO                                           niCTIONNAIRi;  DF.S  OIUiP.F.S  nF.LlGIF.l  X.                                          3M 
.nvani  lui  nvniftul  donné  la  nicmo  jiirilliflion  rili- sur   Ir?  l'r.  rps  Hoppilalicrs   tîe  nurRO<:, 
•i  des  inoii.isl.rcs   de  fill.'s.  Lc9  ri-li-iou\  de  pI  il    y  a  ou  d.-   pareils  oxcmplos  en  \n<^\r- 
l'oiilcvraiili,  pour  jiislincr  Ipnr  iiislilii!,  i.np-  Icrro.  Ain>i  ré'finnomcnl    don  ccssor   a  l'.>- 
porlenl  les  cvempics  de  p'iisicurs  mon:  su-  gard  ai  Tordre  do  Fonlevr;iiilt,   qui   ne  di.K 
^rcs  doubles  dins  lesiuils    ils  disent  que   les  pis  être  regardé  comme  une  singularité  dans 
I  religieux  élaieiil  soumis  aux  religienves.  cl  l'Iv^li^c,  cl'c  espèce  de  gouveniemenl  ayiiil 
ils  cilciil  plus  pnrlieulièremcnl  celui  deSmi-  é'é  d  ailleurs  approuvée  par  un  grand  noai- 
'  pegliaiu.  Mais  je  croirais    leur  faire   tort  si  b:c  de  souvcrai  is  poniifos. 
i'éablissais  mes  preuves  de  réquilé  de  leur  Cet  orlreciil   pour  fond  i leur  le  bie^ilieu- 
inslilut  sur  leur  aulori  é  ;    puisque   ni   dans  renx  Ilobc: t  d'Arbrissel.    sur  la    fiu   du  on- 
Ic  niouaslère  de  Siniprgh  un,  ni  dans  les  nu-  zième   siècle.  Il    niquil    de  parents  pauvres 
très,  les  religieuses  n'ont  jamais  eu  aucii   e  »ers   l'anlO'ioou  10i7,   dans  un  >i;iage    di; 
juridiction  sur  les  religieux,   excepté   celui  liretagnc    nommé   alors    Arbrissel,    dont    il 
de   Saint-Sulpice,   qu'ils  citent   avec  justice,  prit  le  nom,  el  qui  s'apaelîe  à  présent  Albrc- 
p  is(]uc,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  l'institiil  de  sec,  an  diocèse  de  Hennés,  près  delà  fiiiicr- 
cetlc  abbaveélait  semidable  à  celui  de  Fonte-  cbe.  Son  père.    Damai  nque,   qui    embrassa 
\rault.  Le  I'.  Lubineiu  n'a   pas  mieux  ren-  dans  la  -uile  l'état  ecclésiastique,  et  sa  mère, 
rontré  lorsque,   dans    son    Misoiri!  de  lîre-  Orvende,   qui  étaient   gens  de  bien   el  crai- 
lagnc.  pariant  de  l'alibayc  d.'  Loc  Mari,-,  qui  gnanl  I)  eu,  l'é'.e^èrent  dans  la  piélé,  jusqu'à 
avait  été  fondée  avant  l'ordre  de  Fontevianll  ce  qu'étant   en  âge   d  étudier,  ils  lui  permi- 
par  Alain   Cagnaril,   i  ointe  de  Coinoiiaille.  renl  d'aller  cherch<'r  des   maîtres  où  il  vou- 
dont   11   (ille  Hudierne   fut    cbbesse,   et   i;ui  drail,   d   ns  l'cspéianco  que  Dieu   n  •  l'ahan- 
etai!  gou\crnce  au  ddiors  par  un  abbéet  des  donueiait  point.  Fn   cffrt,    il  trouva    nioyen 
moines,   il  dit   qu'ils  él  lient  soumis  aux  ab-  de  vivre  et  d'étuiiii-r  dans  quelques  \illes  de 
I  esses  parce  qu  i  s  I  ur  rendaient  co  note  du  iîrelagne,  sans  être  à  cbargc  à  ses  parents  : 
revenu  qui  apprlenail  à  I  abbaye,  à  laquelie  ce  qui  lui    doana   courage  de  venir  à  Paris, 
S"  faisaiinl  les  dcna'.ions,   cl  qu'ainsi  c'était  i.ù   il   fil    tant    de    progrès  dans   les  éludes, 
un  inslilnl  semblable  à  celui  dj  Fonievraull.  qu'après  s'ôirc   distingue  en   pliilo>opliie  et 
(]c  qui  n'est  ]ias  une  eonséquence  fort  jisic:  eu    théologie,   de    pauvre  écolier,    il  fui  un 
ci\-    par  la    même    raison    on  pourrait  dire  ci  Kbrc  docteur  en  l'université  de  cette  capi- 
quc    les  liénédictins  de  sa  con;;régation  qui  taie  de  France,  on  il  leeut  le  bonnet,  après 
sont  à  CluUes  sanl  soumis  à  l'abbesso  de  ce  avoir  passé  par  lous  les  degrés  el  les  cliar- 
monaslcre,    parce  qu'ils  lui  rendent  com|ile  ges  de  ci  lie  célèbre  aradcm;e. 
des  revenus  de  l'abbaye  dont   ils  ont  la   di-  En  ce   temps-là.  S. Ivestre  de  la   Gnierclie, 
l'i'Ction  ;  ce  qui  n'étant  pas  vrai  dans  ci  u\.  qui  avait  été  marié,  et  clait  pour  lors  chan- 
ri,    penl  aussi  élrc    laux    d,in>    les    auSres.  celier   de  (Zonon    il,   duc   de   Bretagne,    fut 
.\insi  cette  preuve  de  la  conformité  de  l'i;is-  placé  sur  le  siège  épiscopal   de   Kennes;  cl 
lilul  de  Loc  .Maria  avec  celui  de  Fonle>rauIt  \oulanl  se  décharger  du  soin  de  son  évcclié 
cl  de  Saint-Sulpicc,  bien  loin  d'en  couvain-  sur  un  ecclcsiasii.iue  de  gran  1  mérite,  il  jela 
cre,  n'est  pa;  n:éme  suffisante  pour  en  f  ir-  les  yeux  sur  U  .berl,  qu'il  fil  son  grand  vi- 
iiier  le  moindre  doute.  Ce  qui  serait  le   plus  caire,  lui  donnant  un  pouvoir  absolu  dans 
capable   de  la  lairc  croire,   c'est  la  réunio  i  sou  diOcèse.  Il   s'en  servit  pour  y  rétablir  la 
qui  fui  faite  quelques  années  après  de  cette  discipline  ecclésiasliiiue,  y  bannir  les  vices, 
abbave  de  Loc  ALiria   avec  etlle    de  Saint-  laellre  la  paix  où  il  y  avait  des  dissensiois, 
Siilpiie  à  I  ause  de  cette  même  ronformité.  retirer  les    biens    ecclcsiasliques  d'entre  les 
Ce  (|ui  est  de  plus  particulier  dans  l'ordre  mains  des  personnes  laï  \ues,  abolir  l'infà.ne 
de    Fonlevraull,    c'est   que    ses    monastères  commerce  de   simonie,   qui   cliit  piibli  -,   el 
sontcxcmpls  de  la  juridiction  des  ordinaires,  rompre  les  mariages  inrestueii\  qui  se  Irou- 
el  que  toute  l'autorité  réside  dans  la  personne  valent  entre  les  lai(]nes,  el  les  concubinages 
derabhessedunionastércdcFonlevraull.com-  sc.indaleux  de  la  plupart  des  prêtres, 
me  gcnéraleet  chef  del'ordre;  maissi  l'on  veut  Son  évéque  l'appuyait  dans  de  si  pénibles 
ciaininer  ics  chus,  s  sans  prcviMilion,    il  n'y  travaux,  <  l,  par  son  crédit  el  son  autorité,  il 
a  pas   plus    d'inconvénient   qu'une   abbcssc  le  niellai!  à  couvert  des  ailaiiucs  des   mé- 
ail  une  égale  aulorilé  sur   les  religieuses  cl  chants;  mais  ce  prélat  étant  mort  quatre  ans 
les  religieux  de  son  ordre,  que  d'avoir  une  après,   lloberl,   privé  de   son   proli  cteur,  s>! 
juridiction  presque  épiscopalr  dans  plusieurs  vil  à  la  meici  des  ennemis  que  son  zèle  lui 
lieux,   comme   l'abbessc  de  .Montivilliors    en  avait  suscités   :   c'e^l   jiourquoi,  alin  d'em- 
Normanclie,    qui   est    dame   et    paltonne  de  pécher   i'  scandale  qui    pouvait   arriver  à 
rpiinzc  paroisses,  qui  rcssortisscnt  de  sa  ju-  son  occasion,  il  quitta  la  lîretagne,  el  vint 
ridiction,  qu'elle  fait  exercer  par  son    grand  dans  la  ville  d'Angers,  où  il  cnsrigna  quel- 
vicaire   cl    ollii'ial  ,    qu'elle   élililit    île   son  (jue  lemjis  la  thécdogie.  .Mais  voulant  se  c 'ii- 
aulorité,    il   qu'elle   révoque  quand  bon  lui  sacrer  entièrement  à   Dieu,  il  [irit  la  résolii- 
senible,  cl  doni  les  curés  sont  obligés  de  rc-  lion  d'aliaiidonner  le  monde  pour  se  retirer 
cevoir  les  approbations  et  les   mnndeincnls,  dans  une  solitude. 

aussi  bien  que  les  Capucins  d'IIarlleur,  qui  11  i)uitia  doue   la  ville  d'.Vngers,  et  alla  se 

est  un   lieu  île  sa  dcpentl.ince.  L'abbessc  de  c.ichera\ecun  compagnon  dans   la  forél  de 

Conversano  en  Italie  a   une  pan  ille  jinidic-  Craon    en    .\njou  ,    vers    les    fionlières    du 

lion  d.ins  II    terre   de  Casicilana.  L'abbesse  NLiiiie.  La  vie  qu  il  mena  dans  celle  solilu  le 

'c  las  Uucigas  ca  li!sj;agne  exerce  un;'  au  o-  fut  tout  ;\  fait   admirable  :  il   ne  vivait  que 


301                                  FON  Fi>N                                 502 

d'heiiios  ot  li^'  r.Tc  liOi  saiivag.s,  cf,  pour  sainte  :  co  qui  fil  iiîi'i!  se  ilémil  do  sa  non- 
quelque  nécessilé  que  ce  lïit,  il  ne  mangeait  vello  abbaye  <lo  la  Hoë  outre  les  mains  ifii 
jamais  de  viautle  et  ne  buvait  jamais  de  \  in.  l'évèque  d'Anp;rrs  ,  dans  le  dincùse  diKjuel 
il  ne  portail  pas,  connue  les  autres  soiilai-  elle  se  (ronvail.  Il  pourvut  à  si-s  crmitap;i's 
res,  une  luniqui^  de  peaux  de  cli;  vros  et  de  la  furèi  de  Craon,  et,  ayant  pris  avec  lui 
d'agneaux,  tniiis  la  sienne  étiil  lissue  do  quelques-uns  de  ses  disciples,  il  ronin\cnça 
poil  de  porc,  afin  de  loiirmcnlcr  davanlaje  à  prèclicr  non-sculemoni  dans  lr>s  villes,  ukts 
son  corps.  La  icrre  nue  lui  servait  de  lit,  el  encore  diiis  les  bouri;s  et  les  villages  I' s 
il  ri'y  prenait  nièaie  du  repos  qu,;  lorsqu'il  plus  pelits,  un  nouveau  baptcme  de  pcni- 
élail  arcalilé  de  souiineil.  tenre,  qui.  en  excitant  les  uns  à  sacrifier  leur 

Une  \ie.si  exiraoidiuaire  fit  du  bruit  dans  vie  pour  la  conquèle  des  lieux  arroses  du 
le  voisinage.  Quoiqu'il  eût  pris  soin  de  se  sang  de  Jéuis-Cliris!,  en?agei't  les  autres, 
cailicr  dans  celle  l'orèt,  oa  y  accourut  de  qui  n'ctaieni  pas  lapablcs  d'un  si  généreuit 
toutes  paris  pour  voir  ce  nouveau  prodifie,  dessein,  de  tout  jibaudonner  pour  le  suivre 
et  la  pénilence  qu'il  prêcha, comme  un  autre  el  servir  Dieu  sous  sa  ccnduilc.  Le  nombre 
,Ieau-liaptisl",  à  ceuM  qui  étaient  venus  pour  de  ces  derniers  fui  si  grand,  que  sa  cliarilé 
le  voir,  lit  une  impression  si  forlc  sur  leurs  ne  lui  pcrmeltant  pas  de  les  renvoyer,  il 
eprils,  que  la  plupart  renoncèrent  aux  dés-  leur  chercha  uu  lieu  de  retraite  où  ils  pus- 
ordres  de  leur  vie  passée  et  se  rangèrent  sent  travailler  à  leur  salut. 
sous  sa  discipline,  de  sorte  que  la  forêl  l'e  Sur  les  confins  do  i'Anjou  et  du  Poitou,  <à 
Craon  l'ut  bientôt  i-emplic  d'anachorètes.  Le  nue  petite  lieue  de  la  ville  de  Camies,  célè- 
nombre  même  eu  devint  si  grand,  ((ue  Ko-  bre  par  le  décès  de  saint  Mailin.il  y  a  de 
bcrt  fut  obligé  de  les  disperser  dans  les  fo-  vastes  cimpagnes  qui  étaient  .alors  toutes 
rêls  voisines,  comme  celles  de  Nid-de-Merlc,  couvertes  d'épines  cl  de  bui  sons,  cl  ([u'un 
de  Fougères,  de  S  ivigny,  de  Com  ize  et  de  vallon  arrosé  d'un  pclil  ruisseau  séparait  eu 
Mayenne.  Ne  pouvant  plus  veiller  seul  sur  un  deux  parties.  Ce  lieu,  qui  s'appelait  Fon'e- 
si  grand  nombre  de  solilaircs,  il  les  séjj.ira  en  i;r«i(/;,  lui  p.irut  propre  à  sou  dessein.  Ce 
trois  colonies,  dont  il  eu  retint  luic  pour  lui,  fut  l'an  109J  que  Hobe.t  commença  à  y  bâtir 
et  donna  les  deux  autres  à  deux  de  ses  dis-  quelques  cellules  ou  cabanes  ,  seuleaienl 
ciples,  qu'il  reconnut  pour  les  plus  paifaiis.  pour  mettre  à  couvert  ses  disciples  des  i:i- 
L'un  fut  le  bienbcurcux  Vital  de  Mortain,  jures  du  temps.  Mais,  pour  éviter  le  scandale 
(jui  l'ut  depuis  l'inslituteur  de  l'ordre  de  Sa-  qui  pouv.iil  arriver  de  la  confusion  des  doux 
vigny, qui  pritce  nom  de  l'abbaye  dcSavigny  sexes,  il  les  sépara  djiiis  des  demeures  dif- 
en  hornjandi',  comme  nous  le  dirons  ci-  férenlcs,  ajoutant  à  celle  des  femmes  une 
après,  el  l'autre  fut  le  bienheureux  Raoul  de  espèce  de  clôture,  qui  n'étail  qu'un  fossé 
la  Futaye,  fondateur  de  l'abbaje  de  Saint-  revêtu  de  haies.  Il  lil  dresser  doux  oratoires, 
Bulpice  de  Hennés  en  Bretagne.  l'un  pour  les  liommes,  l'autre  poiir  les   fem- 

Le  bienheureux  Pierre  de  l'iitoile,  et  le  mes,  où  chacun  allait  à  son  tour  faire  ses 
bienheureux  Firmal  voulurent  aussi  de-  prières.  L'occupation  des  fournies  éiait  de 
lueurer  quoique  temps  dans  la  compagnie  cbanler  conlinuelkmi'nt  les  louanges  de 
de  ces  saints  solitaires,  el  leur  exemple  fat  Dieu;  celle  des  hommes,  après  leurs  e\er- 
suivi  de  plusieurs  autres  personnes,  dont  les  cices  spirituels,  était  de  délricher  la  terre, 
plus  célèbres  furent  les  bienheureux  Alleau-  de  travailler  de  leurs  mains  à  quelques  mê- 
me, fondateur  de  l'abbaye  d'iistival  d  isis  le  tiers  pour  les  besoins  de  ces  esjiècs  docom- 
iMaine,  et  le  bienheureux  Bernard  d'Ablie-  ir.unaulés.  G'étal  une  dus;'  admirable  du 
ville,  fondateur  de  la  congrégation  de  Ty-  voir  l'ordre  el  le  règlement  qui  étaient  gar- 
ron,  dont  nous  parlerons  dans  la  suite.  Tous  dés  eijtre  un  si  grand  nombre  de  pcrsOiines. 
les  solitaires  qui  étaient  sous  la  conduite  des  La  cli  rilé,  l'union,  la  mo  le  lie,  et  la  dou- 
bienheureux  Koberl,  Vital  et  Raoul,  ne  vi-  ccur  s'y  observaient  inviolablcni  nt  :  i  s  ne 
valent  point  d'abord  en  commun,  ils  demeu-  vivaient  que  de  ce  que  la  loire  produisait, 
raient  dans  des  cellules  séparées  ;  mais  Ro-  ou  des  aumônes  qu'un  leur  envoyiiil;  ce  qui 
bert,  reconnaissant  que  plusieurs  d'entre  lil  que  le  bienheureux  Robert  leur  donna  le 
eux -étaient  [iorlc>  pour  la  Me  cénobitique,  nom  i\e  Pauir.'s  île  Jéstis-Chrisl. 
fit  bâtir,  l'an  1094,  un  monastère  dans  la  L'exemple  de  ces  nouvc  lUX  solitaires  en 
même  forêt  de  Craon,  en  un  lieu  appelé  la  atiira  beaucoup  d'autres.  On  voyait  des  fa- 
Roè',  du  côté  do  la  (Juierclie,  et  leur  donna  la  miles  eniières  venir  de;riander  à  vivre  sous 
règle  de  Saiat-Augustin.  Il  lut  pendant  un  la  conduite  de  ce  saint  fondalour;  et  il  ne 
temps  leur  supérieur,  ils  n'y  vécurentd'abord  refusait  personne,  lorsqu'il  reconnais' ait 
que  d'aumônes,  et  ne  mangeaient  que  des  dans  ceux  qui  s'adressaient  à  lui  i[u'ils 
racines;  mais  après  lui  cette  ma  s  m,  qui  étaient  attirés  pari  esprit  de  Dieu.  Il  y  ad- 
p.issait  pour  la  plus  pauvre  et  la  pics  sain!e  mettiiit  des  gens  de  tout  âge  et  de  toute  con- 
du  royaume,  quilla  cet  esprit  de  pauvreté  et  diiion,  sans  en  exclure  les  invaidcs,  les  ma- 
de  mortiiication,  et  se  ren  lit  eatièremeiit  lailes,  ni  môme  les  léiircux.  t^etie  al'iluence 
coulornie  à  celles  des  Chanoines  Réguliers,  de  tout  le  monde  augme.  tint  de  plus  en 
dont  elle  suivait  la  régie.  plus,  l'obligea  à  faire  bà  ir  plusieurs   mona- 

II  lui  obligé  de  les  quitler  pour  aller  pré-  stères  reniermés  dans  une  même  clôture.  Il 

cher  la  Croisade  par  ordre  du  pape  Urbain  en  ordonna  irois  pour  les  femmes,  l'un  pour 

11,  afin  d'exciter  les   peuples  à   prendre  les  les  vierges  el  pour  les  veuves,  qui  lut  nommé 

ariiics   ijour  le  recouvrement  de   la    terre  le  Gran'l-J\!ou:icr,  et  dédié  en  I  honneur  de 


3ii5                                          DICTIONNAIRE  DF.S  ORDRCS  RRLIGIEUX.  W. 

In  saillie  ViiTtic,  où  il  ronrcrrnn  trois  conls  donna  tout  poiivi.ir  d.ins  son  diocèse,  el  ' 
rtliuicu-o-;  ;  lauli  e  ilesline  pour  les  lépreu-  voynnl  les  pri>i;rts  qu'il  faisnil  dans  les  lieiii 
^es  el  les  iiilirincs,  au  noinlue  de  eenl  *insi,  où  il  fiassail,  lanl  par  ses  prédirations  «jur; 
(jui  lui  appelé  de  .S'aiiW-Z.'/;arf. •  el  il  milles  par  d'autres  œuvre;  de  pieté  auxquelles  il 
feuiiiie>  péiliercsscs  dans  le  Iroisièine,  cl  lui  s'appliquait  sans  relâche,  il  voulut  pir  re- 
donna le  nom  de  la  Madeleine.  ïas  hommes  (  oiinaissaucc  employer  ses  sillieltalions  au- 
eurcîil  aussi  leur  habitation  séi)ar6c.  leur  près  du  pape  P.iseal  M  pour  faire  approuver 
ayan:  lait  bâiir  un  m  inastèrc  auprès  de  ce-  par  ce  pontife  llnstitul  de  Fonlevrault.  te 
liii  des  relin  euses.  qu'il  dédia  à  saint  Jean  qu'il  obtint  l'an  IIOG.  Robert  retourna  à  rc 
l'i  vangélisîe.  On  liâiit  ensuite  une  grande  monastère  pour  porter  à  ses  filles  la  bulle 
église  coinoiune  pour  les  mmalèrcs,  la-  de  ce  pape.  C^  monaslère,  quoique  d'une 
<|uelle  ne  lut  arluMcc  que  l'an  1111).  Tels  grande  étendue,  ne  se  trouvant  pas  siifiisant 
forent  les  roniiinnei'mLMils  de  la  célèbre  ab-  pour  y  recevoir  toutes  les  personnes  qui  se 
baye  de  Fonlevrault,  dont  les  fondements  iirésentaient  pour  prendre  l'habit  de  l'ordie, 
furent  jetés  peu  de  temps  après  la  célébra-  le  saint  fondateur  songea  à  faire  de  nouveaux 
tion  du  coiiC  le  de  l'oilieri  qui  se  tint  établisscm  nl>;.  Ooelipics  personnes  |>ieu^es 
lan  IICO.  lui  ay.inl  donné  la  fiirét  des  Loges  el  quel- 
Jusqu'alors  le  saint  fondateur  n'avait  ques  liérit.  g  ■«  da;:s  le  diocèse  d'Angers,  il  y 
prescrii  à  sa  congrégation  aucune  formo  de  lit  hâlir  un  petit  couv:'nt,  auquel  il  dunna  l- 
vie  qui  lui  fût  parliculièrc  ;  mais  comme  la  nom  de  celle  forél  ;  el  comme  le  revenu  qui 
(  harilé  le  pressait  de  sortir  du  désert  pour  av;iit  été  donné  pour  c(^l  éiablissemeul  ne 
i.ller  préi  lier,  il  voulut,  avant  (juc  de  partir.  sulfi<.,il  pys  pour  entretenir  les  lilics  qu'il  y 
déclarer  l'esp:  il  de  son  Institut,  qu'il  avait  renlVrm.i,  il  ordonna  que  le  monastère  de 
ii.is  sous  la  pro'.ecli  in  pariiculière  de  la  Fonteviault  doniierail  tous  les  ans  quc!(|iic 
sainte  Verge  el  de  saint  Jean  l'èvangéFste,  aumône  à  celle  petite  maison.  Elanl  aile 
\oulanl  que  la  rei  omnianila'ion  que  Jésus-  préther  dans  la  Touraine.  on  lui  procura  un 
Clui^t  nuiuranl  (il  de  1  un  à  l'autre  fût  le  autre  monastère  dans  un  l.cu  appelé  t'hau- 
ii.odèle  de  Li  relation  qu'il  élablissait  entre  fournoia,  el  prés  nteiiuMit  Cli  :nstc)iois  ,  1 1 
les  bomiius  et  les  femmes  de  sa  eongiéga-  on  lui  en  offrit  un  autre  à  Uelay  dans  la 
tion,  il  que  le  respect  <iue  les  hommes  (rc-  mènie  province.  Fiant  n  tourne  dans  le  l'oi- 
présentanl  saint  Jean)  purleraieiit  à  la  supé-  lo;i,  Pierre,  évéque  de  Poitiers,  lui  donna 
rieure  gêné: aie  des  femmes  (qui  lepiéscntait  un  lieudésirt  noinmé  la  Puy,  où  il  bâtit  un 
la  sainte  N'icrgi  )  fût  accomp.gné  d'une  sou-  monastère,  qui  devint  si  ronsidérable  par  les 
iiii.-si  ai  réelle  à  son  autorité,  la  dé.larant  doualions  qu'on  y  lit,  (ju'il  se  trouva  en  e  al 
leur  supérieure,  lanl  pour  le  spirituel  que  d'y  loger  plus  de  cent  religieuses.  Cetiiî 
pour  le  iemporil.  La  piemièrc  à  (jui  il  confia  m.iison  ne  l'ut  pas  sitôt  comincucce,  que  lo 
la  conduite  de  ce  nouveau  peuple  choisi  fut  bruit  s'en  élinl  réi)and;i  au\  e.iviroas,  l'on 
Ucr'anilc  de  Ch;.mpagiie,  proche  p.ircnlc  du  convia  le  saint  d'en  venir  établir  deux  au  res 
Lomte  d'.^njou,  vcove  du  seigneur  de  Monso-  dans  le  même  diocèse,  l'uue  dans  la  forél 
rcaii.  Il  lui  donna  pour  assisiantc  el  coadju-  de  liiron!e,  qui  s'ajipelie  aujouid"  hui  l'/in- 
tricc  Péliouille  lie  ciao:>,  (eu\cdu  baron  de  cloître,  cl  qui  fui  londee  par  le  vicomle  do 
Chemillé.  Il  con'.iuua  ensuite  ses  missions  ChàlelUraui,  l'auln' dans  une  soltude  écar- 
evangéliqucs,  y  ay.nl  associé  ses  anciens  lée  qu'on  nomme  G  li su-,  à  deux  lieues  do 
dsciples.  Vital  de  .Mortain,  llaoul  de  la  Fu-  Loudun.  Ajaiit  quitté  le  Poitou,  il  passa  dans 
i.iye,  tl  lîernaid  dAbbcville,  qu'il  avait  le  IJerri,  ou  il  reçut  le  m  mas  ère  d'Orsaii, 
l,.i>sés  dans  l'ermitage  de  la  foi  et  de  Craon  ;  que  lui  procura  l'arch  vOq  le  de  Ho  irges.  Il 
et  après  que  les  uns  et  les  autres  tur.  ni  ga-  en  fonda  encore  deux  autres  dans  l'evécho 
gué  Lc.ucoup  d'ùmcs  à  Dieu  el  rassemblé  de  Poitiers,  l'un  d.ins  les  Lindes  de  la  (Jar- 
plusieurs  disciples,  ils  les  menèrent  dans  ce  nache,  dont  ce  monastère  a  pris  le  nom  de 
même  désert  de  Cranu.  Comme  ils  avaient  la  Lande,  et  l'autre  dans  la  lorét  de  l  uç  >n  ; 
èg.ilcmenl  employé  leurs  soins  |)our  leur  con-  el  l'évèque  d'OrkMus  Jean  II  l'aj.in!  fan  ve- 
veisiun,  "Is  les  p.irlagèrcnt  ensemble.  U  ibeil  nir  dans  son  diocèse,  lui  procura  le  mo- 
d'.Vrbiissel ,  qui  était  reconnu  comiiie  le  nastère  de  la  .Madeleine  d'tjileans,  qui  fut 
nidilrc  cl  le  chef  de  tous,  cl.oisil  isne  partie  bâti  dans  une  solitude  agréable  sur  la  riviè.e 
.:e  cet  c  sai.^le  troupe  (ju'il  einuicna  à  Fou-  de  Loire. 

tevr.;uli.  Haoul   île   la   Fut.iye   en    (irit   une  .Mais,  pendant  que  Dieu  répandait  si  abon- 

aulre,  qu'il  conduisit  en    a  loi  et  de  Nid-iic-  dammcat  ses  béneilictions  sur  ses  travaux. 

Merle  ;  le  reste  suivit  \  Il  I  dans  la  foiéi   de  il  penint  qu'il  fût  humilié  par  des  calomnies 

Sa\  igny .  Quaiil  à  llcrnarJ,  l'ordre  qu'il  rc.;ul  atroces  que  ses  ennemis  in\  enlôrenl,  el  auv- 

de  l'eveque  de  Poitiers  dailer  au  secours  (les  quelles   .Marbodius  ,  evéi|iic  de    Ueiines,    el 

religieux  de  Saini-Cjpricn,  pour  une  allaire  ijcolïroi,  abbe  de    N  eiidùme,  ajouiùreiit  loi 

qu'i. s  avaient  a»ec  ceusL  (!c  Claiiy,  lui  lit  rc-  trop   aise nunt.  Le  premier   lui  écrivit  une 

lariler  r>.talilisseiiicut  de  sa  congrégation   do  leliie  pleine  d'aigiear  el  de  reproches,  dau» 

i'yron.  la'juelie  il  lui  di>ail  ()u'il  avait  quitté  lonlr - 

Uoberl,   après    avoir    fait  quel.\ue  séjour  des  lihanoiiHS  Réguliers  pour  courir  apr-. 

d  .ut  le  mona:>tère  de  Fon  evrault,  alla  dans  des  le>i mes,  lui  rc,  rocbanl  toinmc  une  mai- 

le  i'oiluu   pour   y    ronllnuer    ses   missions.  ijuc  de  rinconliuence  de  ceux  de  sa  suite,  les 

l'ierre,  evéque  de  Poil  ers,    qui   cuunaissa  l  accouclienii  iit>  de  quebiuei  lemines,  les  cns 

kuu  lué.ile,  te  fiçu'  co.!  me  un  .ij)'  Ire  :  il  lui  des  enf  mis  uoaveau-ncj,  et  le  repreiianlde 


505  FUN 

re  qu'il  donnait  l'iiabil  rcli;;ioii\  à  tons  ceux 
qui  le  demandaient,  sans  les  cproiiver,  ne  se 
souciant  pas  qu'ils  lussent  bien  couverlis, 
pourvu  que  le  nombre  de  ses  disciples 
augmentât  ;  et  qu'après  qu'ils  avaient  donne 
leur  nom,  il  n'en  avait  point  de  soin,  el  les 
laissait  agir  comme  ils  voulaient.  Geoffroi  de 
Vendôme  lui  écrivit  que  l'on  disait  de  lui  une 
rliose  dans  le  monde  qui  ne  lui  faisiiil  pas 
honneur,  e»  dont  il  devait  proinptcinenl  se 
corriger  si  elle  était  vraie  :  savoir,  qu'il  avait 
une  si  grande  familiariié  avec,  les  l'cmiiies, 
qu'il  leur  permettait  de  demeurer  avec  lui, 
((u'il  avait  avec  ellrs  des  entretiens  secrets, 
el  qu'il  n'avait  pas  mèii:e  de  honte  de  cou- 
cher avec  elles,  sous  prétex'e  de  se  niorti- 
lier  en  souffrant  les  aiguillons  de  la  chair  : 
ce  qui  était  un  nouveau  genre  de  martyre 
inouï,  très-dangereux  el  de  mauvais  exem- 
ple. A  la  vérité  ces  iellres  sont  regardées  p  r 
quelques-uns  comme  des  ouvrages  supposés. 
Le  P.  Maiiifermc,  religieux  de  son  ordre, 
dans  le  Douclier  de  l'ordre  de  Fontcvrault, 
les  rejelle  toutes  les  deux.  Un  d  ■  ses  con- 
frères, dans  une  dissertation  qu'il  fit  impri- 
mer à  Anvers  en  1701,  reconnail  pour  véii- 
t  ible  celle  de  Geoffroi  ;  mais  BoUaiidiis  la  re- 
jelle. Le  P.  Sirmond  l'admet,  aussi  bien  que 
le  1'.  Alexandre,  qui  rejelle  celle  de  Marbo- 
dius.  Mais,  quand  elles  seraient  vérilable- 
ment  de  Marbodius  et  de  Geoffroi,  cela  ne 
délruil  pas  la  sainteté  du  bienheureux  lîo- 
beit  d'Arbrissel;  elles  font  seulement  con- 
naître que  Marbodius  et  Geoffroi  ont  cru 
trop  aisément  les  ennemis  de  ce  saint  fon- 
dateur; Geoffroi  reconnut  dans  la  siiite  la 
f.iussolé  de  celte  calomnie,  et  devint  ami  de 
iSoberl  el  de  l'abbaye  de  Fonlevraull.  Il  y  ûl 
de  grandes  fondations,  el,  afin  de  n'y  cire 
pas  à  chaige  dans  les  fréquentes  visites  qu'il 
y  faisait,  il  y  fil  (à  ce  que  l'on  dit)  bâtir  une 
maison  pour  lui,  que  l'on  a  depuis  appelée 
l'Hôtel  de  Vendôme. 

Après  tous  les  établissements  que  ce  ser- 
viteur de  Dieu  avait  faits,  il  crut  qu'il  était 
néci  ssairo  d'en  demander  la  conDrmaiion  au 
saint-siège,  et  de  faire  exempter  labbaye  de 
Fonlevraull  de  la  juridiction  de  l'évêque  : 
le  qu'il  obtint  par  une  bulle  de  l'an  1113 
adressée  aux  religieuses  de  Fonlevraull, 
qu'il  avait  portées  à  en  faire  la  demande  au 
pape.  Continuant  ses  missions  apostoliciues 
dans  le  Limousin,  il  y  fit  deux  nouveaux 
établissements,  l'un  nommé  Boubou,  l'autre 
le  Prieuré  de  la  Gusconicre.  Ayant  passé  du 
Limousin  dans  le  Périgord,  il  fonda  le  cju- 
venl  de  Cadouin,  qu'il  céda  dans  la  suite  au 
bienheureux  Giraud  de  Sales.  Enfin  le  der- 
nier établissement  qu'il  fit,  el  l'un  des  plus 
célèbres  de  son  ordre,  fut  celui  de  Haute- 
Uruyère,  à  huit  lieues  de  Paris,  au  diocèse 
de  Chartres,  qui  lui  fut  donné  par  Berlrade 
de  Monlfort,  femme  de  Fouhiues  le  Uechin, 
comie  d'Anjou.  Le  roi  l'hilippe  I"  ayant 
scandaleusement  épousé  celle  femme,  du  vi- 
vant même  de  son  mari,  elle  fui  enfin  con- 
vertie par  les  exhortations  de  Robert,  et,  se 
croyant  obligée  à  réparer  le  scandale  qu'elle 
0)  Yotf.,  à  la  lia  du  vul.,  ii"  Oi. 


KON 


5(i() 


avait  donné,  elle  se  retira  dans  ce  temple 
qu'elle  avait  présenté  au  Sciyneur,  où  ayant 
non-seulement  pris  l'habit  de  Fonlevraull, 
mais  encore  toutes  les  auslcrilés  de  cet  or- 
dre, qui  pour  lois  était  dans  toute  sa  fer- 
veur, elle  édifia  aiilanl  l'Kglise  par  sa  vie 
pénitente  el  mortifiée,  qu'elle  l'avait  scanda- 
liséi'  par  sa  vie  molle  el  déréglée.  Sou  pre- 
mier soin  fut  de  pourvoir  ce  nouveau  mo- 
nastère de  tout  ce  (lui  était  nécessaire  pour 
l'enlrelieii  des  religieuses,  afin  que  la  pau- 
vreié,  (jui  est  la  ruine  ordinaire  de  la  régu- 
larité, ne  les  empêchât  [las  d'offrir  à  leur 
céleste  époux  des  sacrifices  de  louange,  ni 
de  méditer  ses  grandeurs  pendant  tout  le 
temps  de  leur  vie  :  c'est  pourquoi,  craignant 
que  le  revenu  (|ui  en  dépendait  ne  fût  p.is 
suffisant  pour  l'enlretien  des  religieuses,  elle 
ajouta  à  ce  don  ce  (jne  le  roi  lui  avait  ass  - 
gué  dans  l.i  Tourainc  pour  paitie  de  son 
douaire;  ce  qu'elle  fit  agréer  par  ce  prince, 
(]ui  y  donna  son  consenlemcnl. 

Robert,  après  avoir  fait  tous  ces  établis- 
sements, prévojaut  (ju'il  n'avait  [)lus  encore 
beaucoup  de  temps  à  vivre,  voulut  achever 
le  dessein  que  Dieu  lui  ;.vait  inspiré  pour 
son  institut.  Il  fit  étabi  r  pour  chef  et  supé- 
rieure de  son  ordre  Péli  ouille  de  Craon  Gho- 
millé,  qui  est  reconnue  pour  la  première 
abhesse  de  Fonlevraull,  el  dressa  les  slalu  s 
de  cet  ordre,  qu'il  mil  sous  la  règle  de  Sainl- 
Benoîl.  Il  ordonn.i  l'abstinence  continuelle 
de  la  viande,  n'en  permetlaul  pas  môme 
rus:ige  au\  malades.  Les  religieuses,  entre 
autres  choses,  devaient  garder  le  silence  en 
tout  temps,  aller  toutes  ensemble  à  l'égliso 
et  en  revenir  de  même.  Leurs  voiles  devaient 
toujours  cire  abaissés  el  cacher  entièrement 
leur  visage.  Elles  ne  devaient  être  velues 
que  de  tuniques  faites  des  plus  viles  étoffes 
du  pays,  de  la  couleur  naturelle  de  la  laine, 
sans  être  tondues  (1).  Les  surplis  blancs 
leur  étaient  défendus  aus-i  bien  que  les 
gants.  Une  rrligicuse  ne  pouvait  sortir  hors 
du  cloîlre  pour  quelque  ouvrage  que  ce  fût 
sans  la  permission  de  l'abbesse.  (juaud  les 
prieures  allaient  dehors,  elles  ne  devaient 
mener  avec  elles  aucune  religieuse,  et  elles 
devaient  être  accompagnées  pour  le  moins 
d'un  rel  gieux  et  d'un  séculier  ;  nulle  autre 
que  l'abbesse  ou  !a  prieure  ne  pouvaii  parler 
d.ins  le  chemin,  jusqu'à  ce  que  l'on  fût  ar- 
rivé dans  l'hôtellerie.  Le  dortoir  élaii  tou- 
jours gardé  le  jour  par  une  converse,  et  la 
nuit  par  deux  ou  quatre.  Les  malades  ne 
pouvaient  recevoir  le  viatique  ni  l'cxlrême- 
onclion  que  dans  l'église;  cl,  quand  on  les 
portait  en  terre,  elles  devaient  être  couvert;  s 
d'un  cilice. 

Quant  aux  religieux,  ils  devaient  dire  en 
commun  l'office  canoni^il,  vivre  en  commun 
sans  avoir  rien  en  propre.  Ils  ne  poriaieut 
ni  uianteaux  ,  ni  cliemiscltes  noires  ;  ils 
avaient  une  ceinture  de  cuir,  à  laquelle 
élaii  attaché  un  ciiuieau  de  la  valeur  de  deux 
deniers,  et  une  gaine  de  la  valeur  d'un 
denier  [i).  Ce  que  l'on  desservail  de  leur 
table  devait  être  rendu  aux  religieuses,  pour 

(-2)  Voij.,  ibid.,  11°  tJJ. 


Ï07 


nicTioNNAinE  DES  oiinnES  religieux. 


308 


l'irc  riisuilc  (lislribuc  aux  pnuvrrs.  Toii<  les 
;liinaiiclies  cl  fi'lcs  ils  <lcvaioiil  aller  à  l'Iia- 
liit  (c'csl  ain*i  qu'on  nnniinc  le  iiKHiaslèie 
«les  religieux)  pour  y  cnlemiri'  la  messe  cl 
assister  au  chapitre  ,  d'où  ils  ne  sorlaifiil 
i|u'avec  la  pirniissoii  ilii  prieur.  Ils  ne  i!e- 
\aipiil  point  rcievoir  d'églises  paroissiales, 
ni  leu'Sdimes,  ni  ilonner  leurs  hicns  à  ferme 
à  des  séculiers  ;  il  ne  leur  é  ait  pis  permis 
de  recevoir  des  femmes  dans  leur  monastère 
pour  y  IraTailler  ;  il  leur  élail  défendu  do 
faire  des  serments,  desuhir  l'examen  du  feu, 
de  servir  de  cautions  et  d'elle  fermiers.  Les 
provisions  de  vin,  l<'  pitisson,  l'arj^enl  cl  1rs 
autres  élu  ses  nécessaires  à  la  vie  élaient 
entre  Us  mains  de  la  cellerière,  cl  distribuées 
par  l'avis  et  l'ordre  de  l'abbcsse  ou  de  la 
(.rienre.  Les  religieux  ne  piiu\aieul  aussi 
lecexoir  personne  à  la  religion,  ce  droit  ap- 
)iarlenai;t  à  l'abbesse. 

Le  bienheureux  fondateur  fut  le  premier 
à  se  sounu'tire  à  l'abbesse,  et,  pour  donner 
l'exemple  à  ses  re'igi  u\,  il  vceul  sous  sou 
o'iieissance  jus.;u'à  sa  mort,  qui  arriva  le 
2:3  février  de  lan  11  !7.  Il  était  [icur  lors 
dans  son  monastère  d'(Jrsan,  d'oîi  son  corps 
fui  porte  à  Fonlevraul!,  avec  une  poirpe 
exlraordiiiaire,  par  Léuer  ,  arcbevèiiue  de 
Bourges,  qui  i'.t  son  oraison  funèbre,  et  qui 
l'ut  aceompagiié  dans  le  convoi  par  l'arehc- 
véquc  lie  Tours,  l\vcque  d'Angers,  le  comte 
d'Anjou  il  plusieurs  ^eigiicurs  de  considé- 
ra ion  ;  sou  cœur  fut  seulement  laissé  à  ses 
li.les  d'Ursan. 

§  2.  Du  progrès  de  l'o'die  de  Foiilcvrault 
nprcf  lu  mui'l  du  birnl,eurcux  Robert,  el  de 
la  n' forme  de  cet  ordre. 

Le  bienheureux  Robert  d'Arl  rissel  avait 
vu  de  Son  vivant  pl'S  de  trois  luillo  reli- 
f;icuses  dans  le  seul  monastère  île  Fonle- 
vraull;  mais  après  sa  nort  ce  nombre  aug- 
ineiita  ;  car,  au  rapport  de  l'abbé  Sucer, 
dans  une  de  ses  lettres  au  pape  Eugène  III, 
au  sujet  de  l'évèque  de  l'oitiers  qui  inquié- 
tait ce  monastère,  il  y  avait  à  Funlevrault 
quatre  à  cinq  mille  religieuses.  Quoiq  e  ce 
t;rand  nombre  diminuât  dans  la  suie,  il  ne 
laissa  pas  d'élre  encore  considérable  l'an 
1-iVS,  que  le  pape  Innocent  IX  ayant  imposé 
nu  subside  de  dix  livres  louiuuis  sur  celle 
maison,  aussi  bien  que  sur  les  béncfices 
(I  Anjou  et  de  Poitou,  pour  l'entnlien  d'un 
e\é'iue  de  'l'ibériade,  ce  mou  stère  s'en  ex- 
,  cusa  sur  ce  iju'il  a>ail  sept  cents  iiersonncj 
à  nourrir.  Ce  nombre  se  Irouva  encore  ilimi- 
r.ué  en  li'.)7  ;  car,  sur  lis  plaintes  que  le 
pape  lionilace  \  MI  avait  reeaes  qu'on  avait 
di>si|:é  les  revenus  de  l'oiitevrault,  le  pon- 
tife ayant  donné  commission  .'i  (lilles,  cveque 
de  Nevi Ts  ,  de  régler  le  nombre  des  reli- 
gieuses de  ce  monastère,  ce  pré  al  en  ayant 
trouvé  trois  cent  soixante,  les  réduisit  à 
trois  cents,  sans  parler  du  nombre  des  reli- 
gieux tant  prêtre»  que  conver-.  Mais  celle 
•  TiU'niiancc  de  l'évèque  de  Nevers  ne  fut 
pas  a|>paren)iiicnt  evéculée,  (luisque  l'an 
IwOO  ce  monastère  ayant  encore  élé  laxé 
;  ou;   k   mcmc    iul  siile  ,    l'abbLiSe  alléf^ua 


pour  cause  de  son  fifus  qu'il  y  avaii  dans 
son  11  onastère  cinq  cents  religieuses.  Ce 
n'ctaii  pas  sen'ement  dans  le  inonastèr.-  ilc 
Foiiievraull  qu'il  y  avait  un  si  grand  nom- 
bre de  religieuses  de  cet  ordri',  car,  à  Ries- 
sac  dans  le  diocèse  de  Limoges,  on  y  eu  a 
vu  ju-qu'à  neu!  cents. 

Cet  ordre  acquit  une  si  grande  réput.ilion, 
que  des  monavtères  entiers  de  ililTèrents 
ordres  embrassaient  celui  de  Foiitevraiill , 
comme  le  [iriruié  de  Bragerac,  pour  lors 
du  diocèse  de  Toulouse,  à  présent  appel  ■  d.; 
Sainl-.\ignan  il  du  diocèse  de  iMuniaiiban, 
qui  était  de  la  cnngrégalion  du  bienlieureiix 
Ciiraud  de  Sales,  dont  le  prieur  elles  rel  gieux 
se  soumirent  l'an  1122,  avec  tous  leurs 
bien";,  à  l'ob;  issance  de  l'abbesse  PétroniLo 
de  Chemillé.  On  demanda  de  res  religieuses 
en  Fspagne,  fù  on  en  mit  dans  trois  nui- 
sons. La  première  so  nommait  S.sinte-Mario 
de  la  \'éga  au  diocèse  d'Oviédo,  la  seconde 
Noire-Dame  de  la  Véga  de  la  Cérana,  au 
diocè'-e  de  Léon,  et  la  troisième  le  Parameu 
au  diocèse  de  Saragosse,  et  sous  le  gouver- 
neraeut  d'Auileburge,  troisième  al. lies  e  de 
Fontivraull.  Henri  II,  roi  d'Angleterre,  lit 
venir  en  son  royaume  des  religieuses  d.'  cet 
ordre,  l'an  1177,  pour  rétablir  la  discipline 
régulière  dans  l'abbaye  d'.Xmbresbéri,  qu'il 
leur  donna  après  eu  avoir  ôtc  les  re  igieuses 
qui  y  élaient.  Eiies  eurent  encore  deux  mai- 
sons dans  le  même  royaume,  l'une  à  Ktoiiue, 
et  l'autre  à  Wes'uod.  Cet  ordre  fil  aussi  un 
grand  progrès  eu  France;  car,  outre  les 
maisons  fondées  du  vivi'.nt  du  saint  fonda- 
teur, il  y  en  eut  encore  quatre  eu  Norman- 
die, l'une  au  diocèse  d'Evreux.  et  les  trois 
autres  dans  celui  de  Rouen  ;  deux  en  Picar- 
die, le  Charme  el  Slaureaucourt  ;  trois  dans 
la  lirie  et  le  pays  de  N'alois,  le  Long-Pré, 
Fontaine  el  Colinanee  ;  Foicy,  au  diocèse  de 
'J'royes  ,  cl  Longui  au,  au  diocèse  de  Reims  ; 
Cousanie,  dans  le  pays  du  Maine;  lielloiucrl 
el  les  Epines,  au  diocèse  de  Chartres;  Sau- 
vement,  dans  celui  de  Besancon  ;  Cubes  et 
Fotitainc:),  dans  le  Périgord  ;  \'anassel  el 
T'ons-Clioles,  dans  le  Limousin;  el  \  air- 
ville,  dans  le  Reauvuisis.  Enfin  il  y  in  eut 
un  grand  nombre  dans  la  îiretagiie,  l'Anj  lu, 
le  lierii  ,  l'Auvergne,  la  Casco.;ne,  le  Lan- 
guciloc.  la  Guyenne  el  quelques  autres  pro- 
vinces. La  maison  des  Filles-Dieu  à  Paris  , 
fondée  par  le  roi  saint  Louis,  cl  sutfisauinnni 
dotée  pour  rentrelien  de  deux  cents  fi. les, 
élaiil  extrènieiueiil  iléehue,  el  !e  nonib  e  dis 
res  tilles  réduit  à  deux  ou  trois  seulement, 
Charles  \  111,  l'an  l'iS'l,  la  donna  à  l'ordre 
de  loe.tevrault,  qui  en  prit  possession  sous 
le  gouvernement  de  l'abbesse  Anne  d'Or- 
léans, sœur  du  roi  Louis  \ll.  Les  ordres  do 
Cluny,  de  Saint  François  el  un  grand  nom- 
bre de  maisons  de  chanoines  léguliers.  firent 
aussi  société  avec  l'ordi  e  de  Foute\  rault  pour 
la  pai  licijiation  des  prières. 

LU  grand  n,  nibre  de  souverains  pontifes 
ont  accorde  des  juivilégcs  à  cet  ordre,  et  oui 
témoigné  l'estiuie  qu'ils  en  f.isaienl.  (^1- 
lixte  11,  après  a>  oir  consacré  la  grasule  église 
ilu   mouabtùre  de  1  oiitevraull,  tonlirma  de- 


009 


voy 


r  diof  ccl  ordre  et  (oulcs  !os  don.'ilions  qui 
y  avaiciU  éié  f.iilcs  par  iiiie  htill»'  de  l'an 
1119.  On  voit  par  cfUe  bulle  combien  elles 
'  avaient  déjà  été  aiigincniécs  depuis  le  pape 
l'ascalil.  L'an  1143,  Eugène  111  alTraiicliit 
les  religieuses  et  les  relifsieux  de  cet  ordre 
des  épreuves  de  l'eau  bouillante  et  de  l'eau 
Iroidè,  du  fer  chaud  et  des  autres  (iui  ét.iiont 
alors  en  usage,  ordonriant  qu'ils  ne  seraient 
plus  obligés  à  justifier  leurs  prétenlions  que 
par  la  voie  des  témoins.  Honore  III  les 
exempta  de  lu  juiidiclion  des  ordinaires  , 
i'an  1^24.  Clément  VI,  l'an  1344,  constitua 
les  archevêques  de  Tours  et  les  abbés  de 
Marmoulier  et  de  Saint-Cyprien  de  l'oilicrs, 
pour  juges  cl  conservateurs  des  biens  et  des 
droits  de  Fonlevrault.  Sixte  IV,  l'un  1483  , 
donna  pouvoir  à  Anne  d'Orléans  ,  vingt- 
sept  ènie  abbesse,  cl  à  celles  qui  lui  suceé- 
deraienl,  de  dispenser  ses  religieux  de  l'of- 
fice canonial  et  des  jeûnes  de  riîglise,  avec 
le  conseil  du  médecin  et  du  confesseur. 

Quoique  le  bienheureux  Robert  eût  mis 
son  ordre  sous  la  règle  de  Saint-Binoît,  les 
religieux  se  qualifièrent  néanmoins  dans  la 
suite  clianoincs  léguliers,  cl  prirent  la  règlj 
do  Saint-Augustin;  mais  ils  îureul  derechef 
soumis  à  la  règle  de  S  lint-lîenoit  par  les  sta- 
tuts de  la  réforme  ([ui  lut  faite  en  1474  par 
le  zèle  de  Marie  de  lirctagne,  vingt-sixième 
abbesse.  Comme  cet  ordre  était  tombé  dans 
un  grand  relâi  henicnt,  celle  pieuse  abbesse 
s'adiessi,  l'an  145),  au  pape  Pie  II,  le  priant 
de  reii  édicr  aux  abus  (jui  s'y  claicnt  glissés. 
Ce  poulife  députa  Guillaunitï  t^hariier,  cvè- 
que  de  Paris,  et  les  abbés  de  Cormerie  et 
d'Airvau,  a\cc  le  doyen  de  Notre-Dame  de 
l'ai  is  ,  pour  réfoniier  cet  ordre  ,  avec  un 
plein  pouvoir  de  dresser  des  consliliit;ons 
selon  qu'ils  jugeraient  être  plus  à  propos. 
Ces  commissa.res  visitèrent  la  maison  de 
Fonlevrault  et  celles  de  sa  dcpendanee,  el  y 
firent  quelques  ordonnances,  ils  supprimé- 
rent  même  quelques  prieurés  (jui  étaient 
trop  ruinés  ,  où  il  n'y  avait  aucune  espé- 
rance d'y  pouvoir  rét;iblir  la  discipline  ré- 
gulière, el  ils  en  appliquèrent  les  revenus  à 
la  mcnse  du  grand  mona-4èrc  ,  à  condition 
qu'après  la  mort  des  religieuses  qui  y  de- 
meuraienl,  on  y  enverrait  tiuelqucs  religieux 
pour  y  célébrer  l'oftice  divin  ,  iesiiuels  reli- 
gieux seraient  révocables  à  la  volonté  de 
l'abbesse  de  Fonlevrault.  Mais,  comme  dans 
la  plupart  des  mais  mis  les  lieux  et  les  per- 
sonnes n'éiaienl  pas  pour  lors  disposés  à 
reccNoir  une  entière  el  parfuile  réforme,  ils 
ne  purent  remettre  l'ordre  dans  son  pre- 
mier espril,  el  ils  usèrent  de  grandes  mo.lé- 
ralions.  Ils  permirent  même  aux  religieuses 
de  sortir  de  leur  clôture  avec  la  seule  per- 
mission de  la  prieure,  attendu  la  pauvreté 
, où  étaient  réduits  la  plupart  des  monaslèies, 
donl  les  religieuses  ne  subsistaieal  qu'au- 
tant qu'elles  se  procuraient  quelque  soula- 
gement par  leurs  sorties. 

Quelques  religieuses  ne  furent  pas  conlen- 
tes  de  celle  réforme,  et,  voulant  vivre  dans 
une  observance  plus  exacte,  elles  engagè- 
rent Marie  de  Drelagne  à  se  retirer  au  aso- 


nr.sière   de    la   Madeleim 


510 


.^..     _-.     près   (Î'0rlé;iti3 , 

dans   l'c  péranre  d'y  pouvoir   plus  ;  isément 
commencer  une  rciorme  plus  p.irfaite.  Celle 
sainie  religieu  e,  qui  ne  lesj'iiait  que  le  zèle 
de  la  ii;aison  de  i)i(u,  accepta  celle  proposi- 
tion. Elle  se   relira  dans  ce  monastère,  et  y 
prit  loues    les  mesures   nécessaires  pour  y 
établir  une  réforme  fi"ve  el  stable.  Elle  c  >m- 
mença  pour  cet  effet  par  faire  faire  un  re- 
cueil de  divers  statuts,  tirés  en  [larlie  de  re 
que  les  visiteurs  apos!oli:iues  avaient  fait, 
et   en  partie   des  constitutions  du   bienheu- 
reux  Robert ,   comme   aussi  des   règles   de 
Saint-Augu-iiu  et  de  Saint-Benoît,  et  pria 
des  reliyieux  des  ordres  de  Sainl-François, 
des  Chartreux  el  des  Célostins  de  les  nieitre 
en  ordre,  ce  qui  fut  exécuté  en  fort  peu  de 
temps;  mais  avant  toutes  choses  elle  fit  re- 
bâtir de   nouveau  le  monastère  de  la  Made- 
leine, et  le  sépara  en  deux  habitations  sépa- 
rées ,  l'une  pour  les  filles,  l'autre  pour  les 
hommes.  Elle  y  fil  ensuite  observer  les  nou- 
veaux   staluls  ,    et   elle    s'adressa  au    pape 
Sixte  I\',  l'an  14'74,  pour  en  «obtenir  la  coo- 
firmaiion.  Sa  Sainteté  dépula   les   archevê- 
ques de  Lyon,  de  îiourgcs  cl  de  Tours,  avec 
les  abbés  de  Cormerie  cl  de  Saint-Laumcr, 
pour  les  examiner,  avec  pouvoir  d'y  chan- 
ger ce  qu'ils  jugeraient  à  propos.  L'archevê- 
que de    Lyon    subdélégna  Jean   Perlhelot  , 
chanoine    et    diantre   de   Sainl- Martin    (!•>• 
Tours.  Ces  commissaires  ,  après  y  avoir  fait 
quelques  chaiigeinents,  les  publièrent,  cl  Us 
furent  acceptés  le  23  juillet  1475  par  les  re- 
ligieuses et  les  religieux  du  monastère  de 
la  Madeleine  d'Orléans,  qui  fut  le  seul  pour 
lors  qui  reçut  la  réforme.  Mais  peu  de  temps 
ajirès,  ceux  de  la  Chaise-Dieu  el  de  Fontaine 
imitèrent  celui  de  la  Madeleine,  et  ces  trois 
maisons  furent  les  seules  qui  furent  réfor- 
mées du  vivant  de  Marie  de  Bretagne,  qui 
mourut   l'an   1477  ,   sous  le   gouvernemenl 
d'Anne  d'Orléans  ,  qui  lui  avait  succédé  à 
l'abbaye  de  Fonlevrault,  lorsqu'elle  la  quitta 
pour  se  retirer  au  monastère  de  la  Made- 
leine. Il  y  en  eut  encore  quatre  qui  se  sou- 
mirent à  la   réforme  ,  qui  furent  celles  de 
l'Encloître  en  Gironde,   de  Foicy  en  Cham- 
pagne, des  Filles-Dieu  de  Paris,  el  de  Var- 
ville  en  Beauvoisis.  Ce  fut  pour  lors  que  l'ar- 
chevêque de  Bourges  et  quelques  autres  des 
commissaires  qui  avaient  été  députés  par  le 
pape  Sixte  IV  pour  examiner  les  statuts  de 
la  rélurme  ,  avec  pouvoir  d'y  retrancher  ou 
d'y  ajouter,  comme  ils  le  jugeraient  à   |)ro- 
pos,    lis  rendirent  communs  pour   tous  l"s 
couvents  réfurméi,  par  un  acte  du  mois  de 
janvier  1479. 

Renée  de  Bourbin  ayant  succédé  à  ,\nno 
d'Orléans  l'an  141(1  ,  un  de  ses  principaux 
soins  fol  de  travailler  à  faire  recevoir  la  ré- 
forme dans  tout  l'ordre,  ce  qu'elle  fit  avec 
un  si  grand  succès  qu'elle  introduisit  la  ré- 
forme dans  viiîgl-liuit  maisons.  Elle  com- 
menta par  le  monastère  de  Fonlevrault,  (jui 
était  le  chef  de  l'ordre;  mais  elle  y  trouva  de 
si  grands  obstacles  de  la  part  des  religieux 
el  lies  religieuses  qui  ne  voulaient  point  de 
réforme  ,  qu'elle   fut  obligée  de  recourir  à 


3»  DICTIO.NNAIUE  DES  OIU)RES  ItELIGlEUX 

l'autorité  de  Louis  XII,  ((ui  la  favorisa  dans 


'<i^ 


son  |noux  dessein  ;  cl  l'an  loOi  elle  y  lit  venir 
jiar  ordre  de  ce  prince  quarante-deux  reli- 
gieuses réformées  qu'elle  lira  dis  nionasUV 
res  de  la  Mad.leine  d'Orléans,  de  la  Chaise- 
Pieu,  de  Fontaine,  de  Foicy,  de  riùicloître 
en  (lironde,  de  Varvilie  et  des  Filles-Dieu  de 
P.iris,  tous  couvents  réformés  par  Marie  de 
lirelaune  et  Anne  d'Orléans,  et  elle  envoya 
les  relifïieuses  qui  avaient  été  les  plus  op- 
posées à  la  réforme  en  d'autres  monastères. 

Comme  scion  les  nouveaux  statuts  il  fal- 
lait faire  vœu  de  clôture,  elle  fui  la  première 
à  eu  donner  l'exemple,  <e  qu'elle  fil  l'an  lo05 
entre  les  mains  de  Louis  de  Bourbon,  évé- 
que  d'Avranclies,  son  frère  naturel,  in  pré- 
sence de  la  reine  de  France  Anne,  duchesse 
(le  Hrelasjne;  de  Jeanne  d'Orléans,  duchesse 
do  Valois  ;  de  Charlotte  de  Hourhon  ,  com- 
tesse de  Nevers,  sa  sœur,  et  de  plusieurs  au- 
tres princes  et  princesses.  Deux  jours  après, 
les  relifîieuses  anciennes  qui  étaient  rcsiées 
à  Foutevrault  firent  le  même  vœu  de  clô- 
ture, cl  le  décret  de  la  rélormc  fut  univer- 
sellement re(,u  dans  ce  monastère,  l'an  liiOT, 
par  toutes  les  religieuses,  au  nombre  de 
(|uatrc-vinRt-deux  professes  et  de  dix  novi- 
ces, cl  par  plusieurs  religieux. 

Mais  ce  ne  fut  p;is  sans  peine  (lu'elle 
réussit  dans  l'établissement  de  celle  réforme 
générale,  car  elle  eut  à  surmonter  des  tra- 
verses que  lui  suscitèrent  les  religieux  ((ui 
.ivaienl  déjà  reçu  la  réforme,  qui  pour  leur 
intérêt  paniculier  ne  souhaitaient  point  celle 
réforme  générale  :  car  il  éiait  dit  par  les  sta- 
tuts de  II  réforme  dressés  par  les  commis- 
saires de  Sixte  l\',  que  l'abbesse  de  Foute- 
vrault ne  jouirai!  point  de  >a  juridiction  en 
tout  l'ordre  ,  (jue  lorsque  la  réforme  aurait 
élé  introiluite  dans  le  monastère  de  Foute- 
vrault; c'est  pourquoi  les  religieux  réformés, 
voyant  (juc  quand  la  réforme  serait  reçue  à 
l'onlevraull,  le  pouvoir  qui  leur  avait  éle  ac- 
cordé par  prousioii  de  visiter  les  couvents 
réformés  cesserait,  Iraversèrent  l'abbesse 
dans  le  dessein  de  la  réforme  générale,  el 
n'y  consentirent  qu'à  condiiion  qu'elle  leur 
continuerait  la  même  autorité,  la  menaçant 
de  la  faire  déclarer  tiiennalc  si  elle  ne  leur 
accordait  leur  demande.  Ce  fut  pour  le  bien 
de  la  paix  cl  pour  réussir  pins  aisément  dans 
son  entreprise  que  celte  princesse  fil  un  con- 
cordat avec  eux  ,  l'an  liiO'i,  par  lequel  elle 
leur  accorda  que  les  religieuses  cl  les  reli- 
gieux des  couvents  réformés  viviaii  ni  selon 
liMir  manière  accoutumée  ,  sans  (ju'ellc  eût 
aucune  puiss.inee  sur  eux  ,  à  raison  de  la 
ri  forme  (ju'elle  venait  d'établir  à  Fonle- 
vrault,  nonulislant  ce  (|ui  était  ronlenti  dans 
SIS  statuts  au  sujet  de  la  juridiction,  dont 
elle  se  démellail  en  leur  faveur,  el  que  quant 
à  la  personne  do  l'.ibhesse,  pour  savoir  par 
<|ui,  en  quel  tem|)s  et  de  iiuelle  minière  elle 
serait  visilee  ,  quelle  serait  son  aulnrité  el 
celle  des  vi5iteur>,  el  si  celbs  qui  lui  succé- 
«leraionl  seraient  |  erpetuelles  ou  pour  un 
li-nipg  ,  on  s'cu  rapporterait  à  des  arbitres 
qui  seraient  nommés  de  pari  el  d'autre. 
Cette  princesse  ttanl  lombcj  ma'ade  en 


150G,  on  exigea  d'elle  dans  rexircmilc  de  s.i 
maladie  une  procuration  pour  terminer  ces 
différends;  cl,  p.ir  un  concordat  qui  fut 
passé  en  vertu  de  celle  proruration,  elle 
devint  soumise  à  ses  inrericurs,  en  ce  qu'elle 
devait  être  visitée  par  ses  religieux  ,  qui 
avaient  même  le  pouvoir  de  la  su'^pen  Ire  et 
de  la  déposer.  Mais  étant  revenue  en  sanlé, 
elle  révoqua  celte  procuraiion,  el  poursuivit 
avec  zèle  la  réforme.  Elle  obtint  une  bulle 
de  Léon  X,qoi  l'approuvait  et  la  confirinail 
dans  son  pouvoir,  el  des  lettres  patentes  du 
roi,  qui  l'autorisait  dans  son  pieux  dessein. 

Les  religieux  réformés  voulant  se  préva- 
loir du  concordai  (]ui  avait  élé  signé  en  verlu 
de  cette  procuraiion  qu'elle  avait  révoi|oèe, 
voulurent  le  faire  homologuer  au  p.irlemeiii 
de  Paris.  Mais  les  anciens  religieux  s'y  op- 
posèrent, comme  étant  coniraire  aux  coutu- 
mes el  à  l'esprit  de  l'ordre.  L'abbesse  et  le 
procureur  général  se  joignireiil  à  eus  ;  le 
procès  fui  peniiant  à  la  cour  depuis  l'.ni  I.'IOS 
jusiju'en  l'an  l.'ilS  ,  que  le  roi  évoqua  l'af- 
faire au  grand  conseil,  qui  rendit  le  18  mars 
1520  un  arrêt  qui  cassa  le  concordat,  el  or- 
donna que  l'abbesse  scr.ilt  |)erpètuel'e  cl  ne 
ser.iil  visitée  que  d'aulorilé  apostolique,  par 
un  religieux  d'un  autre  ordre  réformé  :  ce 
()ui  fui  confirmé  par  le  pape  Clément  \'ll, 
l'an  1523. 

Kléonore  de  Bourbon,  qui  avait  été  nom- 
mée abbcsse  de  Foiitevraull  en  1573,  après 
avoir  gouverné  cet  ordre  avec  beaucouji  de 
conduite  cl  de  prudence  pendant  près  de 
Ircnle  ans,  se  voyant  dans  un  âge  fort  avan- 
cé, demanda  une  co  djnlrice  au  roi  Henri  IV, 
son  neveu  ,  pour  souti  nir  avec  elle  le  f.ir- 
deau  du  gouvernemenl  de  l'ordre  el  l'aider  û 
en  déraciner  quelques  abus  qui  s'y  étaient 
glissés  par  le  m.ilheur  des  guerres  civiles. 
Elle  jeta  pour  cela  les  yeux  sur  la  Mère  An- 
loinettc  d'Orléans,  sa  nièce,  qui  s'ciait  re- 
tirée au  couvent  des  Feuillantes  de  Toulouse, 
où  elle  avait  pris  l'habii,  comme  mius  avons 
dit  ailleurs.  (a-IIc  princesse  lui  fut  accordée 
pour  coadjutrice,  cl  les  bulles  en  furent  ex- 
pédiées à  Home  l'an  KîO'i..  La  Mère  Antoi- 
nette d'Orléans  necimsentit  à  aller  à  Foute- 
vrault qu'à  condition  (lu'elle  n'y  demeure- 
rait qu'un  an.  cl  qu'elle  ne  quiltcrail  point 
l'habit  de  Feuill.inte  ,  en  sorte  qu  il  fallut 
obtenir  un  second  bref  du  pape  Paul  V  pour 
l'obliger  à  prendre  l'habit  de  Foutevrault  el 
1.1  charge  de  coadjutrice.  Llle  obéit,  sans 
perdre  pourtant  l'espérance  de  revoir  son 
couvenl  de  loulou  e.  FI  e  commença  l'cxei- 
cice  de  sa  charge  par  bannir  de  Foutevrault 
la  propriété  de  tout  ce  que  posséJaienl  les 
religieuses,  et  les  obligea  ,  par  son  cxenulo 
et  |)ar  le  pouvoir  qui  lui  avait  élé  donné  par, 
l'abbesse  ,  à  vivre  dans  une  obser»;iiice| 
exacte  de  leur  règle.  Flic  procura  la  même 
chose  dans  les  autres  maisons  ;  mais,  après 
1.1  mort  de  r.ibliesse,  sa  taule,  elle  se  démit 
de  s.i  coadjolorerie,  et  olilint  du  roi  la  per- 
iiiïssii.n  p;)iir  pioièdir  à  l'elcclioii  d'une 
autre  abbcsse. 

Il  y  cul  encore  de  grandes  conleslationi 
dans    l'ordre  ,    sous    le    gouvi  i  iicmunl    de 


SJ3  FON 

leanne-Baplislc  de  lîourbon  ,  nu  sujol  de 
quelques  maisons  que  les  religieux  prclen- 
Jiront  avoir  pour  y  demeurer  seuls  el  y  re- 
cevoir les  novices.  I>ès  l'an  1G21  ils  sollkilè- 
renl  i'abbesse  Louise  de  Bourbon  Lavedan 
lie  fil  ire  revoir  la  rè^le.  Celle  princesse  de- 
manda pour  ce  sujel  des  commissaires  au 
pape  tirégoire  W ,  qui  nomma  pour  celle 
révision  quelques  prélats  par  sa  bulle  de  l'an 
1621;  mais  on  inséra  dans  la  règle  qui  fut 
dressée  de  nouveau  lant  de  choses  qui  ten- 
daient à  la  ruine  1 1  à  la  (îestruclion  de  l'ur- 
dre,  qu'elle  no  fut  leçue  ni  par  les  religieu- 
ses ,  ni  par  les  religieux.  Ce  qui  fil  iiue  la 
chose  resla  indécise  jusqu'après  la  mort  de 
ce  pontife,  que,  ceux-ci  [  ersislant  toujours 
dans  leur  même  demande,  I'abbesse  Louise  de 
Bourlion  Lavedan,  et  Jeaiine-Baptisie  i\' 
Bourbon,  sa  coaiijulrice,  lassées  de  leur  im- 
porlunité,  supplièrenl  le  pape  Urbain  Vlll, 
qui  avait  succédé  à  (itégoiro  XV  en  1G23,  de 
vouloir  permettre  que  )is  religieux  de  l'or- 
dre s'établissent  dans  les  liois  nionaslères 
de  l'Kncloîire  en  Ciironde  ,  de  la  Pu}e  et 
d'Orsan,  et  que  les  religieuses  de  ce-i  trois 
monaslères  fussent  transl'éiées  en  d'aures 
prieurés  de  l'ordre.  Le  molif  qu'elles  su[)po- 
sèrenl  jiour  (iblenii-  plus  facilement  leur  dé- 
ni iiide  lui  (juc  les  relij;ieux,  étant  obligés  par 
leur  profession  de  servir  les  religieuses  pour 
la  direction  de  leurs  consciences,  dans  la 
naissance  de  l'ordre  les  monastères  étaient 
doubles,  l'un  |iour  les  tilles,  l'autre  pour  1  s 
religieux  ,  mais  que  le  revenu  des  maisons 
étant  diminué,  elles  n'étaient  plus  en  état 
d'enirelenir  un  si  grand  nombre  de  religieux, 
quelques-unes  même  n'en  pouvant  entrete- 
nir qu'un  ou  deux  au  plus;  qu'il  n'y  avait 
i|  l'un  seul  ciiuvenl  de  religieux,  qui  était  à 
Fonlevrault,  où  ils  vécus  eut  en  coaimun, 
et  que  ce  monastère  ne  pouvait  pas  non  plus 
entretenir  le  nombre  de  religi.'ux  qu'il  fau- 
drait |iour  plus  de  cinquante  moiiaslèies  de 
filles  dont  l'ordre  é'ait  composé  :  ce  ([ui  fai- 
sait qu'on  était  obligé  d'avoir  recours  à  des 
religieux  île  dilïérenls  ordres  pour  suppléer 
au  délaul  de  ceux  de  Fonlevrault;  qu'ainsi, 
pour  remédier  à  cet  inconvénient  el  pour 
soulager  leurs  monastères,  elles  sup[)liaient 
Sa  Sainteté  de  vouloir  bien  permettre  qu'el- 
les abandonnassent  aux  religieux  trois  mai- 
sons de  celles  tjui  étaient  occupées  par  des 
filles,  pour  en  faire  des  séminaires  d'où  l'on 
tireraildes  personnes  capables  pour  être  in- 
vojées  dans  les  couvents  de  l'ordre;  el,  alin 
de  rendre  la  demande  plus  aisée  à  obtenir, 
on  supposa  que  I'abbesse  ne  perdrait  rien 
de  sa  juridiction,  et  que  ce  serait  toujours  à 
elle  d'admettre  au  noviciat  les  postulants  et 
de  recevoir  les  novices  à  la  piofession  ,  du 
consentement  néanmoins  du  chapitre  du 
couvent  où  ils  seraient  admis.  Le  pape  ac- 
corda l'an  1C36  ce  (iu'on  lui  avait  dcman  é. 
Mais,  comme  ce  dessein  n'avait  qu'une  fausse 
apparenced'utililé  [lour  l'ordre,  et  que  dans 
le  fond  il  lui  était  préjudiciable  ,  soil  que 
I'abbesse  ne  crût  pas  ijuo  le  pape  acrerdàl 
celte  demande,  soil  qu'elle  se  repentît  après 
de  l'avoir  faite,  ce  projet  ne  lu'  [las  exéculé. 


FON 


3f4 


cl   on    n'eut   aucun  é;;ard  à  la   bulle  d  Ur- 
bain VIlL 

Louise  de  Bourbon  Lavedan  étant  morte, 
(t  Jeanne-Baptiste  de  Bourbon  ayant  pris  lu 
gimvernement  de  l'ordre,  lis  religieux  re- 
nouvelèrent leurs  prétentions  l'an  1630. 
Après  bien  des  poursuites,  le  roi  Louis  X!l! 
vtulut  prendre  connaissance  de  celte  affaire. 
Sa  Majesté  nomma  des  commissaires.  On 
écri\il  de  part  et  d'anlre,  cl  les  religieux  fi- 
rent imprimer  un  Factnm  injurit  us  contre 
l'ordre,  sous  le  litre  de  Fartum  pour  les  rr- 
l  fjieux  de  Fontevrault  louchant  les  diffé- 
rends dudil  oriire,  qui  est  encore  conservé 
dans  quelques  biblioihè(]ues  do  Paris;  et  en- 
fin, sur  le  r apptirt  des  commissaires,  le  roi, 
l>ar  un  arrêt  du  8  octobre  IGil,  ordonna  que 
la  rèçle  de  l'ordre  de  Fontevraull  confirmée 
parle  |  a|)e  Sixie  IV, ensemble  l'arrêldu  grand 
conseil  de  lo20  el  la  bulle  de  Clément  VU 
confirniali^c  de  «et  arrêt,  seraient  gardés  et 
observés  dans  tout  l'ordre  par  les  religieu- 
ses et  religieux  selon  leur  l'orme  el  loueur, 
sans  que,  sous  prétexte  dos  bulles  des  an- 
nées 1621  el  1636,  il  |.ût  éire  apporté  aucun 
ciiangeiiieiit  à  l'observance  de  cette  règle  et 
ans  prali(|ues  cl  usages  de  l'ordre,  ni  que 
les  couvents  de  l'Encloître  en  Gironde,  Cr- 
san  et  la  Puye,  ou  autres,  pussent  être  cha::- 
gés  en  d'aulics  usages  que  ceux  de  leur 
fondation.  Sa  Majes'é  m  liiilint  I'abbesse, 
les  prieures  el  les  leligieuses  dansions  leurs 
|)riviléges,  et  I'abbesse  en  parliciilicr  dans 
toute  sa  juridiclioii  el  auiorité  sur  tout  l'or- 
dre, lant  au  spiiiluel  iju'au  temporel,  sans 
iine  les  c.nfesseurs  el  religieux  se  pussent 
ingérer  dans  l'administration  du  temporel, 
([u'en  tant  qu'ils  y  seraient  employés  par  la 
itame  abbcsse  dans  son  abbaye  et  dans  tout 
l'ordre,  ou  par  les  prieures  dans  leurs  mo- 
naslères; et  Sa  Majesté  ordonna  de  plus  que 
le  libelle  i:npri!né  sous  le  litre  de  Factuni 
serait  lacéré  par  le  greffi  r  de  la  commis- 
.«■ion;  (;i!e  les  pai'oles  injurieuses  el  scanda- 
leuses contenues  dans  les  mémoires  qui 
avaient  été  donnes  seraient  bilTées  en  pré- 
sence des  protureurs  des  religieux,  qui  se- 
raient tenus  d'en  demander  pardon  à  l'ab- 
b;  sse,  et  en  sa  prés  nce  à  toutes  les  prieures 
el  religieuses  de  l'ordre,  en  piésence  dis 
(omiiiissaires  ou  trois  d'entre  eus  ,  et  ce  à 
la  grande  grille  du  couvent  des  Filles-Dieu 
de  i'aris,  où  I'abbesse  était  pour  lors  :  ce  qui 
fut  exécuié.  Ainsi  la  paix  e!  la  tranquillité 
furent  rétabli:  s  dans  l'ordre,  el  I'abbesse  fil 
imprimer  les  statuts  (|ui  avaient  été  dressés 
par  les  commissaires  députés  par  le  pape 
Sixte  IV  pnur  la  réforme  de  cet  ordre,  les- 
quels slaluts  y  sont  encore  en  pratique,  (jeux 
qui  concernent  les  religieuses  eonlieniieiil 
soixante-quatorze  chapitres,  et  ceux  des  re- 
ligieux seize. 

Ceux  des  religieuses  concernant  l'office 
divin  renvoient,  jiour  le  nnmbie  des  psaumes 
qu'elles  doivent  dire  à  mai i nés  el  aux  heures 
canoi.iales,  selon  l'occunenee  des  fêtes,  et, 
pour  la  manière  de  le  célébrer,  au  bref  de 
l'ordre;  mais  ils  ordonnent  (]ue  pendant  l'a - 
vcul  el  le  eurcme  elles  diront  lievanl  matines 


niCiiuNNAïuE  Di:s  orinnKS  Ri:LiGitux. 


ÎI5 

iiuinze  psnuines,  cl  après  matines  Ic-s  jcpl 
tsiiiimos  péHiltnIiaux  avec  les  lilancs  dos 
saints,  cl  do  plus  en  caroiuc,  après  chaque 
liriiro  canoiiialo,  un  psaumo,  étant  pros  or- 
iicos  ronlrc  lorre.  Dans  'os  nulr.  s  ternis, 
oxcopté  le  temps  pa-eal.  ions  les  vendredis 
ri  les  jiiuis  de  jeûnes  ordonnés  par  .'l'^glis'-, 
.  Ilrs  eironl  (ininze  psaumes,  à  moins  qu'il 
n'.irrivo  ces  jours-là  une  lé  e  de  neuf  leeons 
ou  quelque  oelave.  Tous  les  jours  rolliie 
ili-s  morts  C  colui  de  la  Vierge,  c\eoplé  les 
foies  douli'es  majeures,  el  q;ielqnes  anlrrs 
jours  qui  leur  sont  marques,  et  une  fois  la 
s  niainc  vêpres  et  laudes  de  l'ofliee  de  Tous 
les  Saints. 

Ivlles  se  lèveront  à  n.innil  pour  dire  mati- 
nes, feront  l'oraison  iiienl.  le,  pardironl  le 
siloiice  aux  heures  et  dans  les  lieux  mar- 
<lués.Tous  les  vendredis,  ei!  tout  tomps,  après 
matines,  s'il  n'est  pas  fête  douhie,  et  loulcs 
les  vigiles  des  grands  douhle=,  si  ce  n'est  un 
<!inianehe  ou  une  fcte  douille,  comme  aus-i 
les  lundi-i  et  mercredis  pendant  l'avcnt  et  le 
earéme,  et  tous  les  jours  depuis  le  dimanche 
dos  Hameaux  jusqu'à  rù<iues,  elles  rece- 
vront la  diseipline  de  la  main  de  la  prieure, 
(lui  la  recevra  aus^i  des  mains  d'une  autre 
sœur. 

Tous  les  luuilis  et  nicrcroiiis,  elles  s'als- 
lieedront  de  manger  de  It  viande,  si  ce 
n'est  dans  les  maladies,  ou  par  raison  d'une 
(irandc  vieillesse  ou  jeuncsïo.  li  les  s'en  abs- 
liendront  ausM  depuis  la  iiepliiagésioie  jus- 
qu'à la  (Juinquagésime,  (t  depuis  l'Ascen- 
^ion  juscjuà  la  l'enlccôto.  r.ussi  liien  ([ue 
pendant  l'avenl.  Mais  depuis  la  Quinquage- 
sinie  jusqu'à  lài]ues,  elles  s'alislienilr((iil  Ue 
loules  choses  pioven;;nt  de  l.i  chair.  Tant 
aux  jours  do  jeûm  s  qu'à  ceux  qui  ne  le  sont 
pas,  on  leur  donnera  deux  so  les  tlo  viae.des 
luilis,  et  quelqus  fru.ts  et  légumes  pour 
troisième  portion.  Une  li»re  tie  pain  leur 
sullira  I  oiif  chaque  jour,  dont  elles  en  ré- 
serveront le  tiers  pour  leur  souper,  r'il  n'esl 
pas  jeune,  et  une  cliopinc  de  vin,  étant  à  !a 
iiherlé  de  la  prieure  d'augmenier  ou  dimi- 
nuer, selon  (lu'elle  le  juijera  à  [iropos.  Outre 
1rs  jCÛnes  prescrits  i  ar  riii^iise,  elles  jeû- 
I  Cl  ont  encore  tous  les  vcndieilis  depuis  Pâ- 
ques jusqu'à  la  Nativilé  de  la  sainte  \  ierge, 
el  depuis  celle  fêle  jusqu'au  promier  novoui- 
lire  tous  les  mercredis  et  vendredis;  depuis 
le  premier  novembre  jusiju'à  Pâques,  les 
luiolis  et  mercredis,  et  tous  les  jours  pen- 
dant l'avenl. 

(Juanl  à  leur  hnhillement,  on  leur  permet 
deux  robes  hlanclies  avce  tinc  coule  n  ire, 
un  surplis  sur  leur  habit  Idanc  avec  une 
ceinture  de  laine  noire  ou  de  lil  1).  Selon  le 
temps  et  les  lieux  eiles  penveni  quiller  la 
coule.  (Jn  leur  (lermol  aus>i  des  clieioises  de 
(lianvrc  ou  de  lin,  dont  elles  ne  doivent  se 
servir  qu'avec  la  permission  de  l.i  prieure, 
nais  ordinaiicnn  ni  elles  soC'  iil  de  lilancliel 
ou  d'éiamine.  Llles  coucheront  »étiies  avec 
leurs  robes  blanches  cl  leurs  surplis  dans 
des  draps  de  serge. 

(I)  Vvu.,  àlj  fin  du  vol.,»'"  CG  clC7. 


51ti 


Tous  les  lundi  ,  mercredis  cl  veiulrodis, 
elles  s'as>eml)'eront  au  chapitre,  tant  pour 
y  dire  leurs  conlpes  <ine  pour  les  nécessités 
du  monaslère.  I.e  (  ha]  ilre  du  vendredi  est 
principalement  élibli  pour  les  coolpes  en 
p  irlii  ul  er,  les  reliuieusos  disant  leurs  conl- 
pes en  général  los  lundis  et  mercredis.  Le 
premier  lundi  de  carême  on  lient  un  chapi- 
tre pareil  à  C'ux  des  vendre  lis,  cl  chaque 
oflicièrr,  en  disant  sa  coulpe,  lenunce  à  son 
office  outre  les  mains  de  la  prieure,  qui  peut 
l'en  liéi  liarger  et  le  donner  à  iiiip  aulro. 

Quant   à   la    manière   de    faire    los  visites 
dans  l'ot  ordre,  l'arrêt  du   grand   conseil  de 
l'an  i'.'rlO,  dont   nous  avons  parlé,  el  le  bref 
de   Clément  \'I1    do  l'.irr  Wii'i,    ordonnèrenl 
que    le    monnslèie   de   Fonlevrault,   les  ab- 
liosses  (qui  seraient  perpétuelles  el  non  pas 
Irieiin  lies),   les    religieuses   cl  les  religieux 
qui  denieuroiit  seulement  dans  l'onelos  de  ce 
monaslère,  seroni  »  i^ités  d'aulorilé  aposto- 
lique une  fois  l'an  par  un  religieux  d'un  au- 
tre ordre,  qui  sera  clu  pour  trois  ans  seulo- 
mcnl,  laquelle  élection  se  fera  le  mardi  de  la 
Pen!ec:ilo,  par  chaîne  mon.istère,  qui  ajirès 
l'oleclion  dépuiera  un  r(  ligieux  pour  la  por- 
ter à  Fonlevrault,  où  l'abbesse,  le  sainedi  de 
l'octave  du  Sainl-Sacremcnt,  sera  obligée  de 
la  puhl  er  à  la  grande  grille  du  couvent,  en 
préscce  de  tous  les  députés  de  ces   mêmes 
monastères,  en  choisissant  pour  visihur  ce- 
lui (iui  aura  [ilus   de  \o'.%;  qu'en  ca--  d'éga- 
lité de  voix,   il  lui  sera   permis  de  nommer 
relui  des  deux  ((u'elle  voudra;    que  pour  la 
visite  des   autres    couvents  de  l'ordre,   elle 
sera  obligée  de  commellro  un  ou  deux  visi- 
teurs du  même  ordre,  qui  seront  aussi  liien- 
iiaux,   et  qu'elle   ce  stiluera  !^es   grands  vi- 
caires aux   choses  spirituelles.   Telles  sont 
les  principales  observances  de  ces  religieu- 
ses, (|ui,  après  l'annéede  probalion.  proiuin- 
cciu  leurs  vœux  selon  celle  formule  :  Je  N. 
promets  stabili(é  salis  clôture,  conversion  de 
mes  miriir.i,   diaslelé,  pauvreté  et  ofidissancc, 
selon  les  ftiituts  de  la  réformation  de  l'ordre 
de   foiitevraull,    ordonnés  en   ce  lieu  par  le 
décret  du  pape  Sixie  I  V,  suivant  la   règle  de 
Saint-!lrnni[,  en  riioiniciir  du  Sauveur,  de  sa 
mère  (t  de  saint  Jean  l'évanfiélisle,  en  votre 
présence,  Mi're  prieure  de  ce  monaslère.  Les 
religieuses  du  cliœur  prononcent  leur»  vœux 
en  lalin  cl  les  S(iHir.>  converses  en  français. 
(Juanl  aux   religieux   de  col  ordre,    ils  ne 
])Cin  enl  recevoir  personne  et  lui  donner  I  ha- 
bit,  (c  droit  a|,;  ar  cnanl   à  l'abbesse  seule 
cl,  à  son  refus,   à   la   (irieure  el  aux  sœurs; 
ma  s  à  la  prolession  les  rel  gieux  y  diuineet 
leur  eonsenioment.  I.e  conf<'Sseur  leur  donne 
l'habit  d.ins  la  grande  église,  en  présence  des 
religieuses,  ot  après  l'année  de  probalion  ils 
pronouceiit  leurs  V(enx  en  c  siennes  :  Je  A'., 
de  telle  conditinn,  clc,  du  diocèse  de,  etc., 
proposant   servir    aux   servaules    de   Jésus- 
(.'iirist,  jusfju'à  la   vu,rt,  arec  in  réréreme  de 
soumi.'sion  due,  prumcis  slabil  té,  conversion 
de  mes  moeurs,  chasteté  pure,  pauvreté  nue  et 
obéissance  s  Ivn  les  statuts  di  /a  réformulivn 


517                                 FON  ™"                                   5. S 

de  l'orihc   de  Fo'Ui'vrault  ordunnés  au  pié-  oniros   rclifçirux  ,  où  il  a   ct6  si   i:\r.r:  :\  re- 

seiit  monastère  par  le  décrd  du  pape  Sixte  I  V,  iiréscnler  les  habiilemenls  religieux  tels  que 

en  l'honneur  de   Notre- Sauveur,  de  sa  très-  Scliooiichock   les    avait  donnés   en   1G88,    a 

di(jne  Hière  et  de  saint  Jean  l'évangélistr,  en  néaiiinoins  abandonné  cet  auteur  à  l'égaid 

voire  présence,  Mère  prieure  de  ce  mom.stère.  des  religieux  de  Fontevrault,  pour  suivre  le 

Le  vœu  des   l'rèies  ccuners   e>l  s<iublai.le,  P.  lîemicr,  Céleslin,  qui  leur  donne  un  sca- 

sinon  que  ceux-ci  le  ])ioiioni'enl  en  français  pul.iire  par-dessus  le  capuchon  ;  mais  en  crt 

cl  les  clercs  en  latin.  Leur  pauvre'.é  consiste  endioit  le   i'.  Boiianni  aurait  mieux  fait  de 

eu   ce  qu'ils   ne  peuvent  accepter,  eu    liur  suivre  Schoonebeck,  qui   a  représenlé  l'ha- 

[)roprc  nom  ni  en   commun,  aucun  le{^s,  ou  billenie;  l  de  ces  religieux  tel  nu'il  doit  être, 

donation,  ou  autre  chose  quelconque;    (ont  ce  (lu'il  n'a  pas  fait  à  l'égard  de  celui  des  re- 

ce  qui   leur  pourrait  être   donné   ou   qu'ils  ligieuses,  que  le  P.   B  naiini  a   néanmoins 

pourraient  gagner  par  leur  indnsirie  et  Ira-  fait  copier  sur  les  figures  qu'en   avait  dow- 

viiil   appartenant  aux    religieuses,   qui  leur  nées   Seiiooiicbeck.  Nous  ferons    remarquer 

doivent   fournir  t^us    leuis    besoins,  ils  ne  à   ce  sujet  que  le   P.   Uonanni,  parlant    de 

peuvent   pas  même  distribuer  aux  pauvies  la    fondation  de    cet  ordre  ,   l'attribue    vers 

ce  qui  reste  de  leur  tatde,  ils  le  do. vent  ren-  l'an  1110   à   un   nommé  Evrault,  qui,   à  ce 

dre  aux  reiigieu.'-es,  qui  en  font  cUes-mènies  qu'il  dit,  était  un  f,imeu\  chef  de  voleurs  qui 

la   distribution.    Ils   doivent   réciter   rolfice  fut  converti  par  Robert  Biésius,  natif  de  Pa- 

can^nial  à  voix  basse  dans  leur  cbape.le.  Ils  ris,  et  moine    bénédictin,  que  quelques-uns 


soiit  exemptés  des  quinze   psaumes,  dis  vê-  nomment  ArbrisscUe  et  d'autres  Arbrucell 
près  et  landes  de  Tous  les  Saints,  des  psau-  C'est  ainsi  que  le  P.  Bonauni  parlait  en  170G, 
mes  qu'on  dit   étarit  prosternés,   aussi   bien  lorsqu'il  donna   la  première   partie   de  son 
que  des  suilrages   et   commémoraisons ,    à  Catalogue,   qui    traite    seulement   des    reli- 
raison  de  leurs  occupations  puur  le  service  gieux.  Mais  il  a  parlé  d'une  autre  manière 
des  religieuses.  Ils  doivent  néanmoins  diiC  dans  la  seconde  partie,   qui  parut  en  1707, 
en    c.a'ême  tous   les  j^iurs  les  sept  psaumes  et  qni    contient    les  religieuses;    car  il   dit 
avec  les  petites  litanies,  excepté  les  diman-  que  l'ordre  de   Fontevrault  fut   fondé   vers 
elles  et  les  lèt'.  s  de  douze  leçons,  et  tous  les  l'an  1088  par  un  nommé  ilobert,  clief  de  va- 
jours  auïsi   l'ofîJce  de  la  Vierge  et  celui  des  leurs,  qui  fut  converti  par  un  célèbre  reli- 
fllorts,    excepte  les  jours   spéciués   dans    le  gieux   bénéiidin  nommé  Arbrisselle.  Je   ne 
bref  de   l'ordre.  Le  silence   leur  est  reconi-  sais  qui  peut  avoir  fait  tomber  le  P.  Bonanni 
mandé  au  cloître,  au  dortoir   et  au   réiec-  dans    cette   erreur,  puisque    Baronius,  du 
toire,  et  depuis  le  coiiimencenienl  de  com-  Saussay  et  Gono:i,  qu'il  cite,  ont  parlé  au- 
plies  jusqu'à  latin  déprime,  dans   toute  la  tremeiU  du  fondateur  de  cet  ordre,  qu'ils  re- 
inaison.  Ils  reçoivent  la  Ji>cipline  des  mains  connaissent  pour  Uoberl  d'Arbrissel. 
du  confeseur  aux  jours  qu'on  la  donne  aux  Riichaël  Cosnier,   FoiHis-Ebrakli   Eocord. 
sœurs.  Ils  sont  obligés  aux  mômes  jeûnes  et  et  Vit.  B.  lloberii;  la  Chronique  du  Fonte- 
aux  mômes  abstinences  que  les  religieuses  ;  vraull,  par  Baudri,  évoque  de  Uol,  et  André, 
mars  lorsqu'ils   sont  envoyés  par  la  pieure  moine  de  cet  ordre  ;  Pavillon,  Vie  du  U.  Ito- 
bors  du  monastère,  ils  peuvent  manger  de  la  iert  d'Arbrissel;    Bollandus,  23    Februarii, 
viande  aux  jours  défeiufus   par  la   règle  et  Act.  SS;  Honoré  NiqucI,  Jésuite,  Jlisl.  de 
même  souper,  s'il  n'est  pas  jeûne  d'Eglise,  l'ordre  de  Fon'cvraiiH;  Factum  pour  les  re- 
Leur  liabiileraont  (1)  consiste  en  une  (unique  Hgieu.z  de  FunCvrauU  touchant  les  différends 
ou  robe  noire,  unechaiie;  et  par-dessus  un  de  cet  ordre;  Joann.  a   Manw-Firma,  C///- 
chaperon  ou  grand  capuce  auquel  sont  atla-  peus  nascentis   ordinis  Fontis-Ebraldi;  Dis- 
cliées  deux  pièces  de  dr.ip,  l'une  par-devant,  sertation  sur  la  lettre  de  Geoffrot  de  Vtn- 
l'autre    par- derrière  :  ces    pièces  de    drap,  dôme,  par  un  anonyme  de  l'ordre  de  Fonic- 
qu'ils  nomment  des  robcris,  sont  de  la  Ion-  vrault  ;  Baillet,  \' ies  des  Saints,  23 /"eï-ne   ; 
gueur  et  de  la  largeur  d'un  palme  ,  avec  des  et  les  Constitutions  de  cet  ordre  imprimées 
ceintures   de    laine   pour  serrer  leur  robe,  à  Paris  en  1643. 
(Juand  ils  servent  la   messe,  en   tout  temps  ,         „   ,         ,,, 
ils  portent  des  surplis;  depuis  Pâques  jus-  FOUS,  au  duchk  de  Clkves  ((  hrvalieus  oe 
qu'au   preiuier  novembre,  aux  jours  des  di-  lordue  desJ. 
inanehes  et  des  fêtes,  ils  ont  aussi  des  sur-  Comme  on  a  donné  à  plusieurs  ordres  de- 
plis    pendant   la   grand'messe,  cl  depuis    le  chevalerie  le  nom  de  s;iciété  ,   l'on   peut  rc- 
premier  novembre  jusqu'à  Pâques  leurs  ciia»  tarder  comme  un  ordre  de  chevalerie  la  so- 
pes.  Les  frères  convers  sont  habillés  de  gris  ciété  qni  fut  instituée  à  Clèves  sous  le  nom 
avec  un   chaperon    et  des  roberts ,    coninie  do   société   des   Fons  :  re  qui    n'est  pas  une 
vous  le  voyez   a  la  première  ligure,   à  l'es-  chose  fort  e\traordinaire,  puis(iu'il  y  a  phi- 
ceptiou  que  la  lê;ière  ne  paraît  pas  comme  sieurs  académies  de  gens  de  lettres  en  Italie 
au   chaperon  des  prêtres,   parce  ((u'elle  e-t  qui  oet  piis  des   noms  aussi  bizarres,  y  en 
cousue  à  leurs  habits,  sur  lesquels  il  y  a  à  ayant  une  à  Péroise  sous  le  nom  d'insensés, 
la  poitrine  ces   lettres,  M.  et  I.  L'on   a  con-  mu'  à  Pisc  sous   le   nom  d'iîxtiavaganis,  et 
serve  dans  let  ordre  l'ancien   usage  de  dire  „uu  à  Pésaro  sous  celui  d'Hétéroclites.  L'oi- 
lénèbies  à  minuit.  dre  ou  la  société  des  Fous  à  Clèves  fut  insli- 
Le  P.  Bonanni,  dans  sou   Catalogue  des  uié  l'an  1380,  le  jour  de  Suinl-Uui.ubcrl,  [.«ar 

(1)  Vq'j.,  ?  la  fin  du  vol.,  u"  03  et  69. 


5l.-« 


DICTIONNAIRE  DES  OHORES  ÏIF.LICIEIJX. 


3^0 


AJulpIic,   cotn'.e   de  Clèvcs,   cinjoiiiiemcMit 
avec  Iroiilc-cinq  si'i|;neiirs,  qui  ilcviiienl  por- 
ter sur  leurs  ninnleaux    un   fou  d'argenl  eu 
liroderie  ,  v(?lu  d'un  [lelil  jiislaucorps  et  d'un 
capuclion  tissu  de   pièces  jnunes  et  rouj;i  s, 
avec  des  soiiuetles  d'or,  des  (h.iusses  jaunes 
ol  des  souliers  noirs,  lenanl  en  sa  main  une 
peiile  loupe  pleine  de  Iriiils  (1).  Ils  s'asseni- 
blaienl  le  premier  diinarielie  après  la  fêle  de 
saint  .Michel   il  devaient  se   trouver  tous  à 
l'assemblée,  à  moins  qu'ils   ne   fussent  ma- 
lades ou  à    plus  de  si\  journées  de  Clcves, 
comme  il  est  plus  ampleincnl    porte  par   les 
lettres  de  cet  elablissemeni .   dont  l'original 
se  trouve  dans   les  archives  de  Clèves,   au 
rapport  de  Schooncbeck,  et   qui   commence 
ainsi  :    Nous  tous   qui  aïons   opposé  noire 
sceau  il  ces  prési nies,  savoir  fuisims   ù   ions 
ceux  qu'il  uppariieudra  el  rccuyiimissons  qu'a- 
près une  tnùre  délibération  ,  et  pour  l'ajj'cc- 
tion  particulière  que  chacun  de  nous  a  },our 
les  autres  et  qu'il  continuel  a  d'avoir  à  l'ave- 
nir, nous  avons  établi  entre  nous  u«p  société, 
laque'le  nous  somma  convinis  de  nummer  la 
Société  des  Fous,  dans  la  ferme  et  manière  qui 
suit,  savoir  :  que  chacun  de  nntrc  société  por- 
tera un  fou  brodé  S'.ir  son  habit,  selon  qu'il 
lui  plaira  ;  que  s'il  y  a  quelqu'un  qui  ne  porte 
pus  tous  les  jours  le  fou  ,  les  antres  confrères 
qui  s'en  apercevront  lui  feront  payer  l'amende 
de  trois  grandes  livres  tournois,  lesquelles  se- 
rtint  données  aux  pauvres  pour  l'umour  de 
Dieu.  Les  confrères  feront  une  asscmhlée  gé- 
nérale el  tiendront  leur  cour  une  fuis  l'an,  et 
»e>onl  obUijés  de  s'y  trouver  tous  ;  ce  qui  se 
fera  à  Clèves  tous  les  ans,  le  dimanche  après  la 
l'été  de  saint  Michel.  Ils  ne  jiourrunt  sortir  de 
la  ville  ni  se  séparer  et  quitter  le  lieu  où  ils 
seront   assrmb'és,    que   chacun  n'ait  satisfait 
pour  les  frais  et  payé  sa  part  de  la  dépense. 
il  n'y  aura  aucun  de  nous  qui  puisse  se  dis- 
penser de  s'y  trouver,  à  moins  qu'il  n'y  envoie 
un  bon  certificat  des  affaires  importantes  qui 
l'empêchent,  ou  d'une  maladie,  s  ins  en  excep- 
ter ceux  qui  se  trouveront  être  en  voyage  dans 
le  temps  qu'on  les  ira  avenir  et  citer  au  lieu 
de   leur  domicile  ordinaire;    que  s'il   an  ire 
que  quelipies-uns  des  confrères  aiei't  différend 
ensemble,  la  société  fira  tous  ses  efforts  pour 
les  réconcilier  depuis  le  malin  du  vendredi  au 
lever  du  soleil,  avant  que  la  cour  tienne,  jus- 
qu'au coucher  du   soleil  du  vendredi  auquel 
la  cour  aura  tenu.    Outre  cela  ,   tous  les  ans, 
les  confrères  étant  à  la  cour  feront  élection  de 
l'un  d'entre  eux  pour  roi  el  de  ceux  qui  lui 
serviront  de  conseil ,  lequel  roi  el  son  conseil 
disposeront,  ordonneront  île  toutes  les  affaires 
de  la  Société,  et  porticulièrcmenl  de  ce  q  li  re- 
gardera l'assemblée  de  l'année  suivante,  et  les 
affaires  qui  y  seront  mises  sur  le  tapis  ou  qui 
concerneront  les  frais   et  la  dépense,  de  qu  i 
ils  rendront   compte  exact   et  fidèle,  lesquels 
frais  seront   payés   par    éijales   portions  par 
cliaqiie  chevalier  pour  lui  et  pour  son  valel;ifi 
comte  payera  un  tiers  ;j/ii>  qu'un  baron.  Le 
mardi,  les  confrères,  étant  et  t'hôlel  de  leur  as- 
ttmblée  à  Clèves,  iront  dés  le  malin  à  l'église 

(1)  Voy.,  il  la  lin  du  vol.,  ii"  70. 


(/('  .\otre-l>ame ,  afin  d'y  faire  leurs  prières 
pour  ceu  r  de  la  société  qui  seront  décédas  ,  et 
rltacin  ira  èi  l'offrande,  cic.  Donné  et  fait  l'un 
l.'tSO  de  notre  salut,  le  jour  de  saini  liumhert. 
('es  1  lires  sont  scellées  de  Irenle-six  sceaux, 
tous  en  cire  verle,  exci'plé  celui  du  comte  de 
Clèves  ,  qui  est  en  cire  roup;e.  Les  armes  do 
ces  scifTiieurs  son!  aussi  au  haut  de  la  pre- 
mière paf;e,  et  Shoonebcck  les  a  fait  graver 
dans  son  Histoire  des  Ordres  mili'aires.  Il 
ajoute  (jue  l'on  ne  peut  lire  le  resic  de  ce  qui 
e--!  contenu  dans  ces  lettres  ;  mais  il  y  a  de 
l'apiiarence  que  ce  n'est  qu'une  Iraduclion 
qu'il  nous  a  donnée  de  l'orifiinal,  puisque  lo 
style  ne  se  ressent  point  de  l'antiquité. 

Scliooiicbcck ,  Histoire  des  Ordres  mili- 
taires, tom.  II.  pag.  223. 

FHANCE  (CiiAisoiMïS  nÉGir.tEiis  ue  i.a  con- 
GiiiîGiTiojr  de).    Voyez  Génovkfains. 

IKANt^l";  CoNiiniir. ATioN  du  tikrs  oiiniiic 
DE  Saint-Kb^nçois  dit  de).  Voy.  I'énitiiNck. 

FUANCI-:  ET  DE  MAUMOUTIER  (anciennes 
(;o\GnK:GATioNs  hénédictinks  de). 

Comme  il  s'est  trouvé  des  critiques  (jui  ont 
comballii  la  vérité  du  martyre  de  saint  l'ia- 
cide  en  Sicile,  il  s'en  est  trouvé  aussi ,  sur  la 
lin  du  dernier  siècle ,  ()ui  ont  combattu  la 
vérité  de  la  mission  de  saint  Maur  en  France. 
M.  IJaiilet  ,  dans  son  recueil  de  vies  des 
saints,  dit,  au  snji't  de  celle  mission  de  saint 
ISIaur  ,  qu'il  ne  veut  point  entrer  en  dispulf 
sur  cette  matière  ,  et  fait  assez  connaîiri! 
d.ins  la  suite  du  discours  que  snn  sentiment 
n'<st  pas  que  ce  saint  soit  venu  en  F'rance. 
Cet  ce  qui  a  donné  lieu  à  la  savante  disser- 
tation que  n.  Thierry  Ituinarl,  bénédictin  de 
la  con^rétçation  de  Sainl-M>iur,  a  donnée  au 
public  l'an  1702,  où  il  prouve  par  des  argu- 
ni  nts  très-forls  (dont  M.  Haillet  n'a  pas  néan- 
moins été  convaincu),  que  saint  Maur,  fon- 
dateur de  l'abbaye  de  (ilanleuil  en  Anjou, 
est  le  disciple  de  saint  Reniîl,  et  qu'il  fut  en- 
voyé en  l''raiice  par  ce  saint  patriarche  des 
moines  d'Ociideul. 

(;'est  donc  ce  disciple  de  saint  lienoit  qui- 
nous  reconnaissons  pour  le  fondateur  de 
l'abbaye  de  Clanleuil.  Il  était  parti  du  !\Ionl- 
Cassiu  avec  trois  religieux  que  saint  Benoit 
lui  avait  donnés,  el  il  avait  été  accompagné 
par  Flodegard ,  archidiacre  de  s.iinl  Inno- 
cciil,  évèque  du  Mans,  et  par  llarderad,  son 
intendant,  qui  avaient  été  les  demander  à  ce 
saint  latriarchc  de  li  part  de  ce  prélat,  qui 
voulait  les  établir  dans  sou  diocèse.  Mais 
étant  ,irii\és  à  Orléans  et  y  ayant  app-is  la 
niorl  de  saint  Innoc "ni.  l't  que  celui  (|ni  avait 
usuri  é  son  sié^e  n'était  pas  disposé  à  les  re- 
cevoir, ils  allèrent  en  .\njou  ,  sur  les  assu- 
r.iiices  (((le  leur  donna  llardi'iad  qu'ils  pour- 
raient s'y  établir  par  le  crédit  d'un  seigneur 
nommé  llore,  (]ui  était  en  f.neur  auprès  de 
l'héoileliert,  roi  d'.Vuslrasie,  à  qui  celle  pro- 
vince obéi^sail  en  paitie.  Fn  effet  Flore  eut 
tant  de  vénérition  pours.iini  Maur,  i|ue  non 
cimleni  d'avoir  fondé  pour  lui  un  monaslèie 
à  Clanfiuil  sur  la  rivière  de  l.oire  ,  dans 


321 


FRA 


(iioci''Sc  d'Angers  ,  il  lui  oiïiil  encore  son  fil-i 
lierlulfc  ,  âgé  de  iiuit  ans,  pour  être  élrvé 
sous  sa  discipline  ;  el  n'élant  pas  rncore  sa- 
tisfait d'avoir  fait  bâtir  ce  monaslcre  et  d  y 
avoii-  donné  son  fiis,  il  s'y  donna  lui-même, 
après  avoir  demandé  la  i»crmission  au  roi  de 
se  retirer  de  la  conr  :  ce  (]u"il  obtint  de  re 
prince,  qui,  s'y  étant  trouvé  le  jour  qu'il  de- 
vait -prendre  lliabit  pour  honorer  la  cé'-é- 
monie  de  sa  présence,  lui  coupa  lui-méino 
les  cheveux  ,  donna  au  monastère  une  terre 
considérab'e  ,  et  confirma  les  donations  (|:  e 
Flore  y  avait  faites. 

Huit  ans  après  l'arrivée  de  suint  Maiir  en 
France,  l'abbaye  de  Gianfeuil  fut  dédiée  par 
Futrope,  évoque  diocésain  ,  aecomp.igné  de 
plusieurs  autres  évêques  de  la  province.  On 
y  avait  bail  quatre  églises,  dont  la  première 
fut  consacrée  en  l'honneur  de  saint  Pierre  ; 
la  seconde,  en  l'honneur  de  saint  Martin;  la 
troisième,  qui  était  la  plus  petite,  perla  le 
nom  de  saint  Séverin  ,  apôtre  des  Bavarois , 
et  la  quatrième,  qui  était  en  f<)rine  de  tour 
carrée,  à  l'enlrée  du  monastère,  eut  pour 
titre  Saint-Michi'l-Archaiige.  Les  religieux, 
qui  y  étaient  pour  lors  au  nombre  de  qua- 
rante, se  multiplièrent  beaucoup  dans  la 
suite,  de  sorte  que,  vingt-six  ans  après  la 
construction  de  ce  monastère,  il  y  en  avait 
cent  quarante  ;  lequel  nombre  fut  fixé  par 
saint  Maur,  parce  que  le  revenu  de  l'abhaye 
n'en  pouvait  pas  nourrir  davantage.  Suint 
Maur,  ayant  gouverné  ce  monastère  pendant 
plusieurs  années, el  sentant  ses  forces  dimi- 
nuer, résolut  de  ne  plus  sortir  du  monastère 
el  de  se  reposer,  pour  le  gouvernement  de  sa 
communauté,  sur  le  prieur  et  sur  les  autres 
officiers  de  sa  maison.  H  se  démit  ensuite  de 
la  charge  d'abbé  ,  el  ayant  l'ail  élire  en  sa 
place  rtei  tulfe,  fils  de  Flore,  fondateur  de  ce 
monastère  ,  il  se  renferma  dans  une  collu'e 
proche  l'église  de  Saint-Martin  ,  avec  deu\ 
religieux  qui  voulurent  bien  demeurer  avec 
lui  et  le  soulager  dans  sa  vieillesse.  Ce  fut 
dans  ce  lieu  qu'il  eut  une  révélation  que  Uieu 
(levait  bientôt  retirer  du  monde  la  plupuit 
de  ses  disciples.  En  effet ,  il  en  mourut  ,  en 
cinq  mois,  cent  seize;  en  sorie  que  la  com- 
munauté fut  réduite  à  vingt-quatre  person- 
nes. Ce  saint  abbé  ne  survécut  pas  long- 
temps à  cette  perte,  étant  mort  le  la  jan- 
vier j8'i.. 

Ce  que  Bucelin  et  quelques  autres  auteurs 
oui  avancé,  que  saint  Maur  avait  bâti  jus- 
qu'à cent  soixante  monastères  eu  France,  el 
réformé  encore  un  plus  grand  nombre,  est 
sans  aucnn  fondement  :  il  n'y  a  pas  non  plus 
d'apparence  que  le  monastère  de  Glanf^uuil 
ait  été  le  chef  d'une  congrégation  à  laquelle 
plusieurs  écrivains  onl  donné  le  nom  de 
Congrégation  de  France.  Il  est  bien  plus 
croyable  que  pendant  que  saint  Maur  vivait, 
ce  monastère  dépendait  de  celui  du  Mont- 
Cassin,  puisqu'il  lui  a  été  encore  soumis 
dans  la  suite,  jusqu'en  l'an  755,  que  le  roi 
l'epin  ayant  donné  ce  monastère  de  Glan- 
leuil  avec  tous  les  biens  (jni  en  dépendaient, 
a  Caidulphe,  originaire  de  Kavenne,  homme 
Irès-cruel,  il  le  ruina  eiitièreu;ent,  et  pcrsé- 


FIIA  5:-2 

cula  cruellcmcnl  les  re'igieux,  qui  y  étaient 
au  nombre  de  cent  (inarunle,  comme  il  avait 
été  fixe  par  saint  Muiii-.  La  |)lnpnrl  ne  pou- 
vant siippnrlpr  les  mauvais  traitements  de 
ce  tyran,  qui  leur  refusait  jusqu'aux  choses 
nécessaires  pour  la  vie,  abandonnèrent  le 
monastère.  11  y  en  cul  seulement  qnutnrziï 
qui  y  restèrent  pour  chanter  l'oflice  ilivin; 
mais  ù  la  fin,  étant  ab  illus  de  faim  et  de  mi- 
sère, et  ne  pouvant  observer  la  règle,  ils 
prirent  l'habit  de  chanoines. 

Gaidulphc  se  servit  de  cette  occasion  pour 
les  chasser  du  monastère,  cl  mit  en  leur 
place  cinq  chapelains.  Il  ruina  intièrement 
les  lieux  réguliers,  commençant  par  l'église, 
qu'il  renversa  de  fond  en  comble,  afin  que 
les  religieux  n'y  pussent  pas  revenir.  Il  brûla 
ou  jeta  dans  la  rivière  de  Loire  les  titres  et 
les  actes  de  donations  qui  avaient  élé  fuites 
à  cette  abbaye,  à  la  réserve  de  quelques-uns 
qu'il  mil  en  dépôt  dans  Saint-Aubin  d'An- 
gers, où  il  furent  aussi  perdus  pendant  les 
ravages  des  Normands.  Mais  il  ne  jouit  pas 
longtemps  du  fruit  de  ses  crimes,  car  ayant 
appelé  ses  amis  pour  se  réjouir  avec  lui  de 
l'esiinetion  de  l'ordre  monastique  dans  Glan- 
leuil,  il  mourut  au  milieu  du  festin.  Après 
sa  mort,  tous  les  biens  de  cette  abbaye  furent 
en  proic  à  tous  les  seigneurs  de  la  province  : 
le  comte  d'Anjou  et  plusieurs  autres  person- 
nes s'emparèrent  des  terres  et  des  revenus 
de  l'abbaye,  qui  demeura  déserte  (  t  inhabi- 
tée jusque  sous  le  règne  de  l'empereur  Louis 
le  Débonnuire,  quoique  dès  l'an  781  elle  eût 
été  restituée  au  Alont-Cassin,  comme  étant 
de  sa  dépendance,  par  le  pape  Adrien  I"  el 
par  l'empereur  Churlemagne. 

L'empereur  avuit  donné  celle  abbaye  au 
comté  lîorignon,  qui,  touché  de  l'état  pitoya- 
ble où  elle  elail  réduite,  en  fit  relever  les 
bâtiments,  fit  venir  des  religieux  de  Marmou- 
tier  pour  ré:ablir  les  observances  régulières 
dans  ce  monastère,  qu'il  soumit  quelques 
années  après  à  celui  de  Saint-Pierre-des - 
Fossés,  appelé  depuis  Suint-Maur,  et  en 
obtint  la  coiilirnialion  de  l'empereur.  Mais 
Pépin  I",  roi  d'Aquitaine,  ayant  donné  ce 
nninastère  de  Gianfeuil  à  Ebroïn,  qui  fui 
ensuite  évOque  de  Poili  rs,  du  vivant  même 
du  comte  Uorignon  ,  qui  était  proche  parent 
de  ce  prélat,  y  laissa  les  moines  de  Suinl- 
Pierre-des-Fossés  tant  que  le  comte  vécut; 
tnais,  après  sa  mort,  leur  ayant  demandé 
par  quel  titre  Gianfeuil  leur  avait  été  soumis, 
et  n'ayant  pu  représenter  les  lettres  de  l'em- 
pereur Louis  le  Débonnaire,  qui  avaient  élé 
enlevées  ou  brûlées  malicieusemiMit,  Ebroïn 
les  fil  sortir  de  ce  monastère.  Ils  y  rentrè- 
rent néanmoins  quelque  temps  après,  el  il 
leur  était  encore  soumis,  lorsque  l'an  8G8 
l'on  porta  chez  eux  le  corps  de  sainl  Maur, 
que  l'on  avait  retiré  de  Gianfeuil  pour  le 
sauver  de  la  rage  des  Normund-,  ce  qui  lui 
a  fait  donner  dans  la  suite  le  nom  de  ce  saint. 
Mais,  sous  le  {lontificat  d'Urbain  II, les  moines 
du  Mont-Cassin  ayant  encore  réclamé  Gian- 
feuil, il  leur  fut  restitué,  et  ils  l'ont  possédé 
pendant  près  de  deux  siècles.  A.  la  vérité,  si 
Gianfeuil  n'a  pas  élé  chef  d'une  congrégu- 


-ni,                                          niCTlONNUUF,  DF.S  OUDRES  UELICIEL'X.  "2* 

lion,  él.iiil  le  i^rpiuipr  niDn.isuVc  île  l'ordre  prnmie  dévolion  que  Ion  portail  en  France 

lie  Sainl-licnoit  en  France,   il  doit  èlre  re-  à  saint  Martin,  son  fomlaieur,  qu'à  cause  de 

uardé  coaime   une  soiir.e  lécinle  qui  rn  a  sainl   Dcnoil ,    pour   1.  quel   on    ii'av.ni    pas 

1  rodnii  une  infinilé  d'autres,  parrappoilà  moins  de  vi-ncralion .  et  dont  la  lè^lcélail 

!a  rè"lc  de  Sainl-lienoit,    qu'il  leur  a  coin-  praliiiuéc  avec  Leaucoiip  d'exactitude  dms 

înuniquce,  dont  saint  Maur  avait  reçu  l'an-  c>'  niona-tère.  Les  rois  île  Fraiicc  le   priicnt 

tocraphe,  écrit  de  la  main  d-c.' sainl  fonda-  même  sous   leur   protection.    Mais   |i(U    de 

leur,   on'partanl  du  Mont-Cassin,  avec  un  leinps  après,  Us  Normands  en  ii:lcrroin[,ireiil 

poids  cl  un  vase  pour   iiiieuv  o'servcr  ce  la   régularité  :  car,  y  étant   ^enus   l'aiiSoî, 

.luVlle  prescrit  de  la  quantité  du  pain  cl  du  ils  passèrent  au  lil  de  l'epée  ccul  seize  rel;- 

^in  dans  le  repas.  gieu\.  n'y  en  ayant  eu  que  vin;il-qualr e  q:  i 

l.f  inona-tèie  de  Marinoiitier,  qui  fol  l'un  s.iLi\èrenl  leur  vii-  en   se  cachant  dans  des 

de  ceux  qui  reçurent  cet  c  r.'gl',  doit   cUe  caverne  s.  Leur  aljl)é,  Héberne,  sciait  au-si 

re"arilc  comuiC  le  diof  de  la  plus  ancienne  relire  dans  un   lieu  secret;   mais  ces  harha- 

con-Mé^alion   de  l'ordre  de  Sainl-lîen;iîl  en  rcs   l'y   ayant  découvcrl  et  s'ctani  saisis  de 

France    avant  (U  pli^s  de  deux  C'Uls  prie.:-  lui,  ils  lui  lireut  soiilîrir  de  cruels  touruienls 

rcs  de  sa  dé|icndance.    Celle  célèbre  abbase  pour  l'obi  per  à  déclaicr  l'endroit  où  eiail  le 

eut  pour  fondateur  le  grand  sainl  Marlin,  trésor  de   l'éjjlise  cl  les  grottes  où  s'éiaient 

archevêque  de  Tours.    Il   exerça  d'ab  rd  la  réfugiés  les  religieux  ;   mais  ce  l'ut  inulile- 

profesviuu  religieuse  à  Milan,  il'où  ayant  clé  meni,  il  ne  voulut  rien  avouer.  Les  ennemis 

(  hassé  par  les   ariens,    il    passa   dans   l'ile  s'étanl  retirés,    les  chanoines  de  Sainl-Mar- 

d'Albengue,  qui  est  proche  la  c<ile  de  Gènes,  lin  et  les  bourgeois  de  Tours  allèreni  conso- 

où  il  mena  pendant  quelque  temps  une  vie  1er  ces  rtl:gicu\,  qu'ils  reconduisirent  avec 

solitaire.  11  quifa  ensuite  celle  letraite,  sur  leur  abbo  d..ns  leur  église,   et  auxquels  ils 

Favis  qu'il  eut  que  saint  Hilaire,    qui  avait  procurèrent  toutes   sortes  de  secours.    Six 

élé  banni  par  les  hérétiques,    rt  tournait  in  muis  iiprès,  comme  ou  cul  avis  que  les  Nor- 

i-on  diocèse;  et,   l'ayant  sui^  i  en  France,   il  mands  relunrnaienl  vers  la  ville  de  Tours, 

tiàlil  le  monaslère  de  Ligiigé  proche  Poitiers,  et  qu'iis  avaient  dessein  de  l'assiéger,  doa/e 

où  après  avoi"  demeure  environ  quinze  ans,  chanoines  de  l'église  de  Saint-Mariin,    pour 

il  en  lut  tiré  pour  remplir  le  siège  do  Tours,  soustraire  son  corps  à  la   fureur  de  ces  bar- 

Ftant  devenu  é\éque,   il   ne  cessa  pas  pour  hares,  prirent  ces  saintes  rtlinues,    cl  èlaiil 

cela  de  vivre  en  religieux;   cl,  pour  prati-  accompagnés  de  l'abbé  Héberne  cl  des  vingl- 

<iuer  toujours  exacli  nient  h  s  exercices  ino-  quatre  religieux  de  .Marmouticr,  ils  leslrans- 

nasliques,  il  fonda  un  monaslère  proche  sa  portèrent  à  Corme  ri  ,   à   Orléans,   à  Saint- 

vi.le  epi^copale,  dont  la  communauté  fut  en  lienoîl  surLoire,  et  enfin  à  Auxerrc,  où  elles 

peu  de    temps  de   quatre-vingts    religieux,  ont  été  pendant  trenio  et  un  ans  :  cl,  comme 

ijui  menaient  avic  lui  une   vie  austère  et  si  ce  saint  eût  voulu  procurer  de  1  honneur 

pénilenle.  Personne  n'avail  rien  en  propre,  à   ceux    qui   avaient  en  soin  de  ses  s.inles 

tout  était  en  commun  ;    il  n'était  pas  periiis  reliques,   lous  les  religieux  de  Marmouticr 

de  rien  vendre,  ni  de  rien  acheter,   quoique  fiireut  e  evés   à   l'èpiscopat  ou    lureiil   élus 

ce  lui  la  coutume  des  moines  de  ce  Icmps-là.  abbés  dans  des  mona^lères  l'e  Bourgogne; 

L'unique  art  que   l'on    y  exerçait   était  de  et    l'iibbé  Héberne,    qui    ne   (inilta   point  le 

iiaiiscrire  des  livres;  encore  n'y  avait-il  que  cerps  de  saint  Martin,   eut  la  joie,  vers  l'an 

les  jeunes  qui   y   fussent  employés,   cl  les  E8~,   de   le   reporter  à  Tours,    où,  après  la 

anciens  ne  s'occupaient  que  de  la  prière.  Il  mort  de  l'archevêque  Adalaud,  il  fut  mis  à 

était   rare  qu     l'on  sortit  de  sa  cellule,   à  .>-a    place,    et   gouverna   le  diocèse   peiidaul 

moins  que  ce  r.c  lût  pour  se  rendre  au  lieu  v:iigl-sei  t   ans. 

de  la  |iriére.  Ils  ne  laisiienl  qu'un  repas  |)ar  iMarmoulier   fut    comme   dcsi  ri  cl   aban- 

jour;   l'u-age  du   vin  n'ilat  perms  qu'aux  donné  peudant  tout  ce  temps-là,  et  pendant 

malades,    quoique  le   lien  où  le  monaslèie  presque  luul  le  dixième  siècle  il  n'y  eut  que 

était  silué  lut  un  giand  vignoble.  La  plupart  <|uelt|U(S   chanoines    légulier-i   (]ui    y  firent 

n'claienl   babilié^   que  d'clolles    de    poil   de  l'oriice  div  in,  cl  des  laïques  en  furent  abbés, 

«hameau,  et  c'était  un  crime  parmi  eux  d'à-  Hugues  de  France,  dit  lelirand,(ils  duroillo- 

voir  un  babil  ijui  lesscnlit  un  jeu  la  mol-  berl   111,  posséda    celle    abbaye,  aussi    bien 

lesse,  quoiqu'il  y  eût  ilai.s  celte  couimun.uic  que  son  (ils  Hugues  Capet  ;  mais  ayant   éle 

un  grand  nombre  de   personnes  (Je  quaiiic.  doiuiee  à    sainl  .Mayeul  qui  était  aussi  abbO 

lelleéiail   la  d.sciplinu  qui  s'observaii  dans  de  Cluny,  il   la  r.  ndit   aux  moines  bénédie- 

cc    niona-lère,    qui  lut  appelé   Marim  ulier,  lins,  ce  qui  paraît  être  arrivé  sur  la  Un  du 

après  l.i  mort  de  saint  Martin,   comme  ijui  règne  du    roi   Lothairc.    On  y  mit    d'abord 

'lirait,  le  (/»•««(/ Hionris/(';c,  pour  le  distinguer  tiei/e  religieux  d'une   Irès-sainle  vie,  aux- 

dis  autres  que  ce  saint  avait  fait  bâtir,  priii-  ([uels  on  donna  pour  ahbe  Guilibert  ou  NVili- 

cipalcment  lorsque  l'on  en  eulêle>6  un  sur  berl.  Alais,  quoique  saint  .Mayeul  eût  élé  le 

Mjn  lombcau,  qui  a  porté  son  nom  depuis,  restaurateur  de  celle  abbaye,  elle  ne  fui  pas 

Il    qui   est    présentement    un    chapitre    Ce  pour  cela    soumise  à  Cluny,   non  plus   que 

cliaiioines  séculiers.  beaucoup  d'autres  qui  furent  reroriuées   par 

Lorsque  ce  monaslère  de  .Marmoulier  eut  les  religieux   de  celle   congregaiioii  ;  car  le 

dans  la  suite  reçu  la  rèj;le  de  Sainl-lienoit,  pape  (irégoirc  V  ayant  conlirme,  à  la  prière 

plusieurs  seigneurs  l'eni  leliirenl  par  les  do-  de  l'cmptreur  Olhôn  III,  les  moiuislères  (|tii 

nations  qu'ils  y  lircul,   lanl  ù  cause  de  la  dépendaient  de  Cluny,  il  n'col  iminl  fait  meii- 


525 


FIÎA 


FilA 


320 


(lon  t)i;   Marmouticr  dans  les   IcHies  qui  en 
lurent  expédiées. 

L'exacte  discipline  que  l'on  cbscrv.iil 
daiis  ce  nionaslère  lui  nllira  l'estime  de  plu- 
sicurs  personnes  qui  y  (irenl  de^  donations 
(Oiisidérables  ;  le  nombre  des  reliiiiciix  aug- 
liicnla  ,  ils  retirèrciil  plusieurs  tiion.isières 
dfs  mains  des  séculiers  qui  s'en  élaienl  em- 
parés ;  I  t  sous  le  gouvernement  de  l'abbé  Al- 
beit,  qui  fut  élu  l'an  103i-,  il  était  devenu 
très-illuslre  par  le  grand  noiibre  do  monas- 
tères qui  lui  étaient  soumis;  cl  il  le  l'ut  en- 
core bien  davantage  dans  la  suie,  puisque 
sailli  Odiliiu  ,  abbé  de  Cluny  ,  étant  mort  à 
Suuvig.iy  dans  le  Bourbonnais,  les  religienv 
de  ce  monaslèie  écrivirent  à  Al'ncrl,  alibé  de 
Rlarmoulicr ,  pour  lui  en  donner  avis,  et  lui 
donnèrent  le  tiire  d'abbé  des  abbés. 

L'eslime  que  l'on  avait  pour  les  rcligieut 
de  Mariiioulier  s'augmenta  de  telle  sor.e, 
([lie  vers  l'an  lOG'i  il  n'y  avait  aucune  pro- 
vince qui  Eie  voulût  en  avoir  :  c'est  pourquoi 
quelque  pari  que  l'on  allai,  l'on  trouvait  des 
m  inaslères  de  la  dôpcnda.ice  de  ccl'c  ab- 
baye; el  même  il  y  en  eut  jusqu'en  Angle- 
terre. Entre  les  exercices  de  piélc  de  ces  re- 
ligieux on  loue  surtout  celle  qu'ils  faisaient 
paraître  à  l'égard  de  leurs  irércs  (jui  étaient 
à  l'agoiiii'.  L''  P.  Alabillon,  dans  ses  Annales, 
parle  avec  é'.ogc  des  jpûni's,  des  prières,  des 
o.acéialio.is  cl  des  pénitences  qu'ils  prati - 
«juaient  pour  leur  procurer  une  bonne  mort; 
el ,  pailant  à  ce  sujet  de  li  mort  d'un  t);in 
frère  de  ce  monastère,  il  fait  remarquer  qu'il 
reçut  deux  jours  de  suite  le  siini  viatiiiue, 
et  communia  sous  les  deux  espèces,  appa- 
remmenl  suivant  l'usage  ([.i  subsistait  pour 
lurs  dans  cette  abbaye. 

Deux  archevêques  de  Tours,  nommes  Ro- 
d(>l[jlie,  inquiétèrciil  ces  religieux  s  ;r  leurs 
privilèges,  mais  ils  furent  deiioutés  de  leurs 
prétentions  dans  plusieurs  conciles  proviii- 
ciaux ,  oii  les  religieux  lurent  niuinlenus 
dans  leurs  privilcges;  cl ,  Oi)mme  ces  reli- 
gieux étaient  toujours  molestés  sur  li;  même 
sujet,  le  pape  Urbain  11,  dans  le  concile  de 
(ileinionl,  après  avoir  fait  la  leclurc  du  pri- 
vilège qui  les  soumettait  ir.iniédialcmenl  au 
saint-siège,  ordonna  qu  il  sérail  observé,  el 
confirma  le  décret  du  pajje  Ciregoiie  Vil  ()ui 
défendait  à  tous  èvéqucs  d'inJiiiuer  aucune 
station  publique  dans  l'église  de  AJarmoulicr, 
afin  que  les  religieux  ne  fussent  point  inler- 
lompus  dans  leurs  exercices,  ni  d'exigi  rau- 
cuiie  iiliéissance  ou  soumission  des  aljbès, 
ni  de  fulminer  aucune  excoinmunicalion  con- 
tre le  monastère  ou  ces  religieux  ,  quelque 
part  qu'ils  demeurassent,  ce  qui  était  seule- 
ment réservé  au  souverain  pontife,  sous  la 
protection  duquel  ils  élaienî. 

Gliopin  dit  que  les  rois  de  Franco  se  quali 
fient  abbés  de  ce  monastère,  et  que  quand 
ils  y  font  leur  entrée,  ils  jurent  sur  les  saints 
livangiles,  comme  les  autres  abbés  qu'ils  en 
(OUberveront  les  privilèges  el  lc->  francbises. 
Les  comtes  d'Anjou  se  qiialilia.cnt  moines 
e.e  ce  monastère;  et  un  archevêque  de  Tours 
ayant  voulu  excommunier  Gokfioi,  duc  de 
Normandie  cl  comte  d'Anjou,  ce  prince  lui 


rép  indit  qu'il  ne  craignait  point  son  excom- 
niuiiicalion,  <à  cause  qu'il  était  chanoine  de 
Saint-Martin  el  moine  de  Marmouticr.  Des 
deux  cents  prieurés  ([ui  ,  comme  nous  l'a- 
vons (lit  ci-dessus,  étaient  de  li  dépendance 
de  ce  célèbre  moîiasière,  il  y  en  avait  vingt- 
six  dans  le  seul  diocèse  de  Lh  utrcs.  Le  iîîo- 
naslere  de  .Marmouticr  fut  un  de  ceux  qui 
composèrent  la  congrégalinn  dos  livcmpts, 
dont  nous  avons  pailé  à  l'article  qui  porte  ce 
nom;  mais  la  réforme  y  ayant  été  introduite 
par  les  religieux  bénôiticliiis  de  la  congréga- 
tion de  Sainl-Maur,  il  fut  uni,  l'an  10.57,  à 
celte  congrégation,  qui  a  fait  rebàlir  ce  mo- 
nastère avec  beaucoup  de  magnificence. 

Voxjz  Joann.  JMabill.  Annal.  Bened.  loin. 
1,  11,  Ml  et  IV.  Yepez,  Chioriii/ue  générale 
lie  l'ordre  de  Saint -Benoit,  tom.  1.  IJulleau, 
IJistuire  de  l'orJre  de  Saint-Benoît,  tom.  1. 

FRANCISCAINS  (Ordre  des). 

§  T'.  Origine  de  l'ordre  des  Frères  Mineurs, 
avec  la  v'e  de  Sainl-François  d'Assiie,  pa- 
triarche et  fondateur  de  cet  ordre. 

Ajjrès  toutes  les  vicloires  que  l'Eglise  ;ivait 
r(Mnportèes  dans  lis  premiers  siècles  de  son 
établissement  sur  le  paganisme,  il  sembi  lit 
(ju'elle  n'avait  p!us  rien  à  craindre;  mais  le 
douzième  (  t  le  treizième  siècle  lui  furent  si 
fatals,  que  si  .'èsus-Christ,  qui  avait  promis 
au  priuLC  des  apôtres  el  à  ses  successeurs 
que  les  puissanc  s  de  l'enfer  n'juraient  ja- 
mais aucun  avantage  sur  c  le,  ne  lui  eût  en- 
voyé un  nouveau  secours  pour  la  défendre 
coatrc  les  attaques  de  ses  ennemis,  elle  ciîl 
enSin  succotnbc  à  tous  les  malh.'urs  dont  elle 
fut  afiligèe  dans  ce  lemps-là  ;  car,  outre  les 
Vauiluis,  les  Alliigeois  ,  les  Humiliés  el  un 
grand  nombre  d'auh\s  héréliques,  qui  la 
combatlaient  par  leur  pernicieuse  doctrine, 
les  empereurs  chréliens  n'oub  ièrenl  rien 
pour  contribuer  à  son  affliction,  non-seule- 
ment par  le  schisme  qu'ils  embrassèrent, 
m  IIS  encore  par  la  fureur  de  la  guerre  qu'ils 
jioi  tèrenl  en  lialic,  où  l'on  vil  les  temples 
dépouillés  de  leurs  plus  beaux  ornements, 
les  cardinaux,  les  piéials  de  l'Eglise  soulTrir 
dans  des  prisons  les  derniers  outrages,  el  la 
iriaioiiie  régner  impunément,  au  scandale  de 
la  religion  el  au  mépris  de  la  pauvreté  de  Jé- 
sus-Christ. 

Ce  fut  au  milieu  de  ces  misères  et  de  ces 
calamités  que  Dieu,  louché  de  l'af.liction  de 
son  Eglise,  suscita  riiumbli,'  saint  François, 
pour  opposer  par  son  moyen  la  vérité  de  l'E- 
vangile à  l'erreur,  la  pauvreté  au  désir  des 
richesses,  el  l'humilité  à  l'ambiiion  ,  qui 
avait  été  la  source  de  tous  ces  desordres.  11 
na(]uit  à  Assise  ,  ville  d'Ombrie  ,  l'an  118:2. 
Son  père  ,  qui  était  un  riche  marchand  de 
celte  ville,  se  nommait  Pierre  liernardon,  el 
sa  mère  Pique,  femme  d'une  grande  piété,  et 
Irès-recoinniamlabie  par  ses  vertus,  qui,  se 
trouvant  au  terme  de  sa  grossesse,  souiïrit 
d'estrêmcs  douleurs;  et  plusieurs  jours  s'e - 
coulèrent  sans  aucune  apparence  qu'elle  put 
accoucher  heureusement  :  ce  qui  faisait  ap- 
préhender  qu'elle    n'en  mouriit ,  cl   qu'en 


5Î7                                           mCTiONNAinE  DES  OUnUES  RElJf.lEl'X.  328 

mour.inl  clic  u'Alàl  I.i  vie  à  IcufaiU  qiiVIIc  dans  l'un  dosqucls  Frnnrois  fui  folt  prison- 

ik-vail  molli c  au    iiioiuio;  mais   no  an:;.'  .'.i  ni.T  m  :r  rrn\  rie  Pcrouso.  Co;le  caplivilé  dura 

f.irnie  i\v  pèicria   s'olanl  |)iésenlé  à  la  |.o;  lo  un  an  ol  n'ola  jamais  rien  a  la  liberlé  de  s-ii 

lie  sa  maison  ,  sous   prélcxlo    de    demaiidiT  «  spril.  Les  soldais  do  son  |  arli  qui  avaicul 

raumono.  qu'on  lui  donna  en  rcconimamlai-.t  éU'  pris  avo;   lui  ii  ■  soufl'raienl  qu'avec  rlia- 

:i  ses  prières  la  délivrance  de  la   inèr.-  el  de  ;.  rin  les  peines  de  leur  prison  ;  mais  François 

rcnfanl,    il   leur  conseilla  de  ia  por  cr  dans  les  eneoirageail  par  sc>  discours  cl  par  les 

une  élalilc,  les  assurant  iiu'elle  se  Irouverail  excm|.les  de  sa  palience. 

bionliil  si)ùla-ee.  Son  conseil   fui    suivi,  el  11  n'.ul  pas    pliilôl   recouvré    ^a   liberlé, 

l'enfanl  vint  a^ lude  lieureascaienl  sur  le  qu'il  loinba  malade  ,  dune  manière  si   vio- 

foin  et  parmi  I  s  bêles  :  ce  que  l'on  a  re;;ardé  liMile,  qu'il   se  disposa  à   mourir,  croyant  sa 

roiniiie  la  prem  ère  cii  coll^l,lllee  des  conlor-  mal  :die    inorlelle.  Ces    pieniièrcs  afiliclions 

miles  qi:e  sainl  Fraiiçois  a  eues  avec  JésUs-  c  ininiencèreiil  à  disposer  son  cipiir  à  écouler 

Chrisl  dans  son    luim'ani  è.  11  riçul  au  liap-  la  voix  du  Seigmur,  à    mellre  à  prolil   les 

témo  le  nom  de  Jean;  mais   la  langue    fran-  inspirations  du  ciel  et  à  connaîlre  l'inutilité 

caisc,  que  son  père,  qui  lialiqnait  eu  France,  el  l'abus  de  ses  vanics   passées  :  rependant 

I  li    Ol   J'ppreiidrc  ,  lui    devint  si    l'amilière  ,  l'iieure  de  son  enli>rc  cou'.ersioii  n'ét.iil  pas 

qu'on   l'appela. t  ordinairement /i,'  Français,  encore  venue  ;  car ,  quoiq.iC  l'on  reiiLiniuâl 

il  ce  nom  lui  csl  toujours  demeuré.  Son  père  qiiehiue  clian;;emenl  dans  sa  conduite,  l'in^ 

lui  fit   aussi    apprendre   l<i  lan;;ue   latine;  et  clinalion  qu'il  avait  pour  la  vanile  n'étail  pas 

liuaiid  il  le  vit  eu  état  de  s'expliquer  en  celle  enlièremenl   eleinte  dans  son  creur;  miis  la 

.iiij;uc,  il  le  relira  des  écoles  pour  le  mcîlre  miséricorde  qu'il  avait  toujours  eue  pour  les 

dans  la  inareliamlisc.  Le  pèie  e".  le  (ils  avaient  pauvres  acheva  ce  que  rallliclion  avail  coiii- 

d.s    inc'inalions    bien    différentes  ;  cel.ii-'à  iiiencé  ;  car  ,  ajanl    fait   faire  un    habit   fort 

6. ait  avare,  et  celui-ci  libéral  et  généreux,  propre,  et  le  premier  jour   qu'il   le  mit  s'rii 

rien  ne  lui  coû  ant  pour  satisfaire  son  i.icii-  étant  dépouille  en   fav.'ur  d'un  pauvre  gen- 

natiou,  qui  le  portail   aux    passc-lemps  el  lilhomme    lo:  l  mal  velu,  auquel   il  le  donna 

aux   diverli-seuieiits,  sans    néanmoins  que  pour  l'amour  de  Dieu,  celle  aciion  de  cliarilc 

l'amour  des  plaisirs  l'entrainât  à  la  débauche  mit  la  eonsoininaiiou  à  rou\ragc  de  sa  co  i- 

el   lui   fit  oublier  la  loi  de  Dieu.  La   miséri-  version,  par  les  nouvelles  grâces  quelle  lui 

corde  semblait  être  lellcmeit   née  avec  lui,  attira,  eonlormémeiil  à  la  promesse  que  Je- 

qu'il  ne   pouvait   voir  de   malheureux  .«ans  sus-Ciirisl  fait  dans  son  Kvangile  à  ceux  qui 

cire    vivement   touché  lU-   leur   misère,  et  il  praliqueront    es   actes    de    celle    héroïque 

Bétail  fait  une  habitude  de  ne  point  refuser  verta  :  ce  que  Dieu  lui  fil  connaître  la  nuit 

l'aumàne  à  celui  qui   la  lui  demandait  pour  Kiivr.nte  par  une  vision,  dans  laquelle  il  lui 

l'amour  de  Dieu.  11  ava.t  une  douceur  el  une  sembl/iil  »oir   un    palais   magnilique   rempli 

huiinélelé  qui  gagnaient  le  cœur  de  loul    e  irarmes  marquées  du  signe  de  la  croix,  qu'on 

momie.  Il  était  si  caressant  ,  si    officieux,  si  l'assura  cire  pour  lui   el   pour  ses   soldats, 

poli  el  si  sincère,  que  ces  bel  es  (lualités  lai-  (domine   il    n'était   jias   eni  ore  asse/   éclaire! 

saicnl  cspérif  à  ses  comiiatrioles    ([u'il    de-  pour  pénétrer  h'  vrai  sens  de  cette  vision,  il 

viendrait  un  jour  l'ornemenl  de  leur  ville  ;  s'imagina  qu'il  ne  s'agis>aii  (|ue  dune  guerre 

et  l'on  vojail  dans  sa  physionomie  qu  l(|i:e  temporelle.  C'est  pnureiuoi  ayant  appris  que 

chose  de  si  urand    et   de  îi    cslraonliiMirc  ,  Ciaulier  ,  comte  de   lîrieiiue  eu  Chamiiague  , 

qu'il  y  avait  dans  Assise  un  bon  liiunme  qui,  gendre    du   feu   i'oi   de    Sic!  c  ,  T.inci  ède,  el 

toutes  les   fois  (ju'il  le  renconlrail    il  ins   les  frère  de  Jean, qui  fut  roi  de  Jerusaie.ii  iju^  I- 

ruis,  éleiidiit   sou    manlrau   par  lerie,  aiiii  iities  années  après,  étant  assiste  par  le  pape 

qu'il  passât  dessus  ,  disant  qu'on  i;e  pouvait  Innocent  111  et  par  Philippe-.\ugusle ,  roi  «le 

déjà    laire   trop   d'iionneur  a  une   personne  France,  était   entré  avec  un  >   grosse  armé'j 

(;ui  était  si  visildcmenl  destinée  à  de  grandes  dans   la   l'ouille,   il    alla   [lour  lui  olTrir  ses 

(hoses.  SiTvices  ;  mais  il  ne  fut   pas    plutôt    airivcà 

Cependant  comme  il  était  encore  plein  de  Spolelte,  son  premier  gîte,  (ju'il  fut  rappelé 

l'esprit  du  monde  «  t  distrait  par  les  occupa-  à  Assise  par  une  autre  \  isioii  où  l)ieu  l'aver- 

lions  (lu  commcree   où  son    père  l'aNail  en-  lit  de  ne  pas  préférer  le  pauvreau  rulif,  ni 

gagé,  il  était  foil  éloigne  de  comprendre  si-  le  valet  au    maître,  el  de  n'en    point  servir 

l<it  ce  que    Dieu    voulait  de  lui,  el   il   n'avait  d'autre  que  lui.    Il   coinmeiie  i    pour    lors   à 

du  guul  que  pour  les  chosrs  de  l.i  terre;  mais  coiiijiiendre   ()ue  la  milice  ou  il  deva  l  s'en- 

li' temps  au(|U(l  Dieu  a\  ail  delcniiine  l'ese-  gager  était  loute  spirituelle.   Il  revint   doiiC 

cution  des  gr.inds  desseins  <;u'il  a\aii  sur  lui  chez  son  pèri>,  mais  tout  autre  i|u'il  en  elail 

canl  enfin    vcn.i.il   penuit  i|ue  le  cours  d>;  sorti  ;  car    il   ne  trouva   plus  de   délices  que 

ses  plaisi  s  fût  inlen om{iu  par  des  auiertu-  dans  la  solitude,  se  lenaiil    rrliré   dans   sa 

mes  cl  des  alllieiioiis,  alin  de  D- délacher  du  maison,  el   ne   s'occupaiit   (|irà  la  prière.  Il 

monde  et   de  l'aUiiiT  à  son   ^ervicc  par  d is  (leniandail  à  Dieu  avec  beaucoup  d'instance 

voies  autant  pi  iililabli'S  à  l'àaie  que  contrai-  qu'il  lui    lit   connaître   sa    vulonié,  el  il    lui 

res  à  la  nature  el   aux    sens  :   ce  qui    coin-  semblait  que    la   réponse   du   <'icl  était  qu'il 

nxiiça  par  un  dé. nélé  qui,  étant  survenu  en-  l.illail  (]u  il    méprisai    toutes    lc<    choses  <lii 

Ire  les  liatiilanU  d  Assise  cl  d.;  l'eiouse,  iii-  monde,  el  iju'il  Irava  liât  fortement  à  se  eom- 

gril  de   telle  sorte  l'esprit  des  uns  cl  des  au-  battre  ri  se  vaincre  soi-même.  Un  jour  (]iie, 

1res,  qu'ils  priiciil  lc>  arni.s  ,  et  lireiil   pin-  rempli  de  ces  d 'UX  gr.indes  ma\imes,  il  était 

r.ieurs  acte»  ahostilué  les  uas  sur  les  autres,  à  cheval  dans  la  plaine  d'.\ssise ,  il  eut  à  sa 


529 


rnv 


FRA 


330 


reiiconlre  un  lépreux  dont  la  vue  lui  (il  lior- 
rpur.  Il  avait  déjà  détourné  les  youx  de  dos- 
sus  un  objet  si  hideux  et  si  découlant,  lors- 
que, se  souvenant  qu'il  devait  travailler  à  se 
vaincre  lul-inême  s'il  voiil.iit  être  soldat  «le 
Jésus-Clirisl ,  il  descendit  de  cheval  et  alla 
einlira'-ser  ce  lépreux,  malgré  toute  sa  répu- 
gnance, et,  après  lui  avoir  fait  une  aumône 
considérable,  il  remon'a  à  cheval.  Mais  il  fut 
élonné.un  moment  après,  lorsque,  tournant 
la  tête  pour  voir  ce  que  faisait  ce  pauvre  mi- 
sérable, il  ne  vit  plus  personne,  quoique  la 
place  fût  découverte  de  lous  côtés  :  ce  qui, 
au  lieu  de  l'otTrayer,  lui  donna  une  joie  inté- 
rieure qui  l'encouragea  à  marchr^r  «ians  la 
voie  de  la  perfection  où  il  éiait  entré,  el 
dans  laquelle  il  commençait  à  jouir  des  con- 
solations des  âmes  qui  cherchent  vèrilable- 
inent  Difu. 

L'amour  qu'il  conçut  pour  la  pauvrelc  et 
les  humiliations  lui  faisait  porter  envie  à 
l'état  des  pauvres  et  des  plus  misérables.  H 
le  lit  paraître  peu  de  temps  après,  dans  un 
voyage  de  dévotion  (ju'il  fil  à  Uome.  Car 
après  avoir  visité  le  tombeau  des  saints  apô- 
lies,  ayant  vu  sortir  do  l'église  une  grande 
qu.inliléde  pauvres  qui  atlendaient  les  effets 
de  la  miséricorde  des  passants,  il  leur  distri- 
bua tout  l'argent  qu'il  avait,  se  dépouilla  de 
son  habit  pour  le  donner  à  celui  qui  parais- 
sait le  plus  nu,  prit  ses  haillon ',  dont  il  se 
couvrit,  et  passa  le  reste  de  la  journée  au 
milieu  de  ces  pauvres,  avec  beaucoup  de  sa- 
tisfaction de  se  voir  revêtu  d'un  méchant 
habillement  plein  d'ordure  et  de  vermine, 
qu'il  avait  pris  en  échange  de  celui  qu'il  avait 
donné  à  ce  misérable. 

Peu  de  temps  après  son  retour  à  Assise,  so 
trouvant  dans  l'église  de  Saint-Oamien,  et 
priant  avec  beaucoup  de  ferveur  de\ant  l'i- 
mage du  Oucilix,  il  en  sortit  une  voix,  qui 
lui  dit  :  Va,  François,  répare  ma  tnnison,  qui 
tombe  en  l'uine.  Notre  saint  ne  comprenant 
pas  que  celle  voix  céîeste  lui  ordonnait  qu'il 
s'appliquât  à  i'édilication  tl  au  salut  des 
âmis,  qui  sont  la  demeure  de  Uieu  et  les 
temples  de  son  Saint-I{sprit ,  et  croyant  que 
c'était  celte  église  de  Suint-Datiiien  (qui  vé- 
ritablement tombait  en  ruine)  que  Dieu  vou- 
lait qu'il  réparât,  il  retourna  chez  son  pOre, 
prit  des  étoiles,  qu'il  alla  vendre  à  l'^oligny 
avec  le  cheval  qui  les  avait  portées,  et  eu 
porta  l'argent  au  prêlre  qui  servait  cette 
église,  le  priant  qu'il  lui  fit  la  charité  de  le 
loger  clu'z  lui.  Le  prêlre,  (jui  d'ailleurs 
él, lit  fort  pauvre  ,  voulut  bien  le  recevoir, 
mais  non  pas  sou  argent,  craignant  de  se 
faire  des  alîaires  avec  son  père.  Ce  refus  ne 
découragea  pis  François,  qui  jela  sa  bourse 
sur  une  fenêtre,  el  passa <|uelques  jouis  avec 
ce  bon  prêlre  dans  la  prière,  les  veilles  el 
les  auslerilés.  Son  père,  n'en  ayant  point  de 
nouvelles,  s'informa  da  ce  qu'il  étail  devenu, 
cl  ayant  su  qu'il  était  à  Sainl-Damien,  il  y 
vint  tout  en  co  ère,  accompagné  de  gens  pour 
prendre  son  lils,  comme  s'il  eûtélé  question 
de  poursuivre  un  voleur.  Dieu,  qui  prenait 
la  protection  de  François,  le  cacha  aux  yeux 
de  ce  pè.c  furieux,  qui,  n'ayanl  point  trouvé 

DicTiojfNAirtii:  i)i;s  OnuBiis  riciigilux.  11. 


ce  qu'il  cherchait,  s'en  retourna  à  Assise,  et 
François  so  retira  dans  une  caverne,  où  il 
demeura  pendant  quarante  jours  dans  lp3 
jeûnes  et  les  larmes,  exerçant  sur  son  corps 
les  auslerilés  les  plus  rigoureuses.  Mais  , 
honteux  de  sa  fuite,  qu'il  regardait  commît 
une  lâcheté,  il  sortit  de  sa  retraite  déterminé 
à  supporter  pour  l'amour  de  Dieu  loul  ce 
qu'on  voudr;iit  lui  faire  souffrir.  Il  parut 
dans  les  rues  d'Assise,  dans  un  équipage  si 
différent  de  son  premier  état,  qu'on  le  re- 
garda comme  un  fou.  On  lui  jela  (!c  la  bouc 
et  di  s  pierres,  et  les  cnfanis  le  poursuivaient 
avec  de  grandes  huées.  Son  père  accourut 
au  bruit  de  ces  clameurs  ,  qui  retentissaient 
par  louie  la  ville,  et,  voyant  quiî  son  fils 
était  le  jouet  de  loule  la  populace  ,  il  le  fit 
mener  chez  lui,  où,  après  l'avoir  chargé  de 
coups,  il  l'enferma  dans  une  espèce  de  c  xhot 
où  il  lui  fit  souffrir  loiiles  sortes  d'outrages 
et  de  mauvais  traitements.  Mais,  étant  obligé 
d'aller  à  la  campagne,  il  en  laissa  la  garde  à 
saremme,qiii,élinl  persuadée  des  grands  des- 
seins que  Dieu  avait  sur  son  fils,  lui  donna 
la  liberté. 

François  se  retira  aussilôl  là  l'église  de 
Sainl-Damien.  Son  père  à  son  retour  l'y  al!a 
encore  trouver  ;  mais  noire  saint  ne  s'enfuit 
pas  comme  la  première  l'ois,  il  se  prisrnia 
hardiment  devant  lui  ,  et  protesta  qu'il  élait 
prêlà  souffrir  loulcs  sortes  de  supplices  plu- 
tôt que  de  changer  de  résolution.  L'.issu- 
rince  du  Dis  donna  de  réloimcment  au  père, 
qui,  voyant  ses  remontrances  inutiles  ,  se 
contenta  de  reprendre  son  argent  (|ui  élait 
encore  sur  la  fenêlre  où  François  l'avait  jeté. 
Mais,  sachant  que  ce  jeune  homme  était  na- 
turellement porté  à  faire  des  aumônes,  cl 
qu'il  avait  dessein  de  réparer  l'église  de 
Sainl-Damien  ,  craignant  qu'il  ne  ruinât  sa 
Timi.le  par  ces  dépenses,  il  lui  proposa  ou 
d'ac'iuiescer  à  ses  xolontés  ou  de  renoncer  à 
sa  succession.  François  ne  dé  ibéra  point  à 
choisir  le  dernier.  Le  père,  indigné  de  ce 
[iroeédé,  qui  lui  semblait  trop  iiijurieux,  l'o- 
bligea de  lui  rendre  loul  ce  qui  lui  restait 
d'argent  ;  et,  pour  lui  ôter  toute  espérance 
de  retour  dans  la  possession  de  ses  biens  ei 
de  ses  héritages,  il  voulut  que  ce  renonce- 
ment fût  général  et  accompagné  de  forma- 
lités solennelles.  Il  le  mena  pour  cosujctà 
l'évéque  d'Assise  ,  qui  voulut  bien  rccevoir 
Icur  concordai.  François  ne  fut  [las  /ilulôt 
en  présence  du  prélat,  ([u'il  se  dépouilla  (ic 
lous  ses  babils  jusqu'à  la  clicmise,  et  les  re- 
mit entre  les  oaius  lie  son  père,  en  lui  di- 
sant que  jusque-là  il  l'avail  appelé  son  père, 
mais  (jue  dorénavant  rien  ne  l'empêciieiait 
de  rapporter  celle  qualité  à  Dieu  seul,  en  quj 
élait  tout  son  trésor  et  son  espérance.  On 
découvrit  pour  lors  qu'il  partait  sur  sa  chair 
nue  un  rude  cilice,  ce  qui  commença  à  dé- 
couvrir que  Dieu  seul  et  l'amour  de  la  j)éni- 
lence  élaienl  le  véritable  el  le  seul  motif  d'un 
si  granii  détachement  dos  biens  de  la  forlune. 
L'évéque,  touché  d'admiration,  embrassant 
François,  le  couvrit  du  manteau  qu'il  avait 
sur  ses  épaules,  cl  lui  fil  donner  l'habit  d'iTii 
paysan  qai  se  Iroinaii  là.  François  le  rcçsll 

11 


35»               ..                            DiCTlOXNAlUF,  DESORDRES  RKLIGIEDX.  353 

comme  l.i  première  nuniôiic  qui  lui  était  fitiic  sVinnt  rcvi'-iu  d'un  li.il'ii  pnrcil  à  celui  (li- 
en l'élnl  tif  menilMiit.  où  il  voiil  lil  il<  niftiri-r  saint  François, s'associa  à  lui  le  Kîniai  \H)0; 
le  reste  do  srs  jours  ;  il  y  lit  une  ;:raiide  croix  cl  c'est  à  ce  temps-!.i  (juc  l'on  rapporte  l'o- 
nvcc  une  pierre,  et  le  disposa  inèiiic  eu  celle  rij^iiie  de  l'ordre  des  Jlineurs.  Le  niêuie  jour, 
forme,  s'en  revêtant  avec  satisfaction.  l'icrre  de  Calaue,  chanoine  d'Assise,  anime 
11  av;iil  pour  lops  vin;;t-cirii|  ans,  et,  se  d  un  zèle  de  la  gloire  de  Dieu  et  d'un  aidi  ni 
Toyant  degat^e  du  tous  les  biens  qui  l'avaienl  >!ésirdc  la  pénilenc,  imita  liernard  de  (Juin- 
relenu  dans  le  Sicile,  il  prit  le  .  Iii-inlu  delà  tavalle.  Cilles  d'Assise,  qui  elait  un  saint 
soliluile.  alin  de  s'y  appliquer  uuiciuoinent  à  homme  el  craipnanl  Dieu,  u'élail  point  dans 
raci|uisil  on  des  lertns  (jui  sont  lis  verila-  letle  ville  lorsque  lîernaid  de  (Juin  avallc  el 
hies  ricliesM's  et  consolations  de  l'âme.  Mais,  l'icrre  de  Calaue  renoncèrent  ainsi  pènereu- 
ilans  liHcmps  qu'il  u'élail  occupé  que  de  la  sèment  au  monde  ;  mais  à  sou  n  leur,  sepl 
joie  que  lui  inspirait  l'espérance  qu'il  avail  Jours  après,  ayant  ap|>ris  ce  ijui  s'était  passe 
(l'y  trouver  son  hien-aiiné,  dont  il  chanlait  ru  son  absence,  il  en  fut  si  vivement  touché, 
les  louanges  en  français,  il  ti  inha  ciilic  les  qu'il  voulut  aus>i  les  suivre.  Saiiii  François, 
mains  de  quelques  voleurs,  qui,  ne  lui  ayant  les  ayant  instruits  ,  ne  voulut  pas  les  laisser 
rienliou\é  el  n'ayant  pu  tirer  d'autre  rai-  oisifs.  11  envoya  liernard  de  (Juiiitavallc  el 
sonde  lui,  sinon  qu'il  étail  le  héraut  du  Pierre  de  Calane  dans  l'Fmiiie  pour  ins- 
praiiil  Roi.  le  battirent  cruellement  el  le  je-  Iruire  les  peuples  de  l'import  nce  du  salut 
tèrent  dans  une  fosse  pleine  de  neige  ;  d'où  et  de  la  nécessité  de  la  pénitence,  et  pour  lui 
étant  sorti  et  "ouaiil  Dieu  de  ce  qu'il  le  trou-  il  alla  avec  (lilles  d'Assise  dans  la  Al.irclie 
vail  digne  de  souffrir  quelque  cliose  pour  d'.Vncônc,  où,  manquant  île  toutes  choses, 
son  amour,  il  alla  à  lùiguldo,  où  un  de  ses  ils  s'estimaient  heureux  d'avoir  trouvé  lo 
anciens  amis  l'ayant  lecouiiu  lui  donna  un  trésor  évangélique.  Onclijues-uns  les  rece- 
hatjil  d'crniiie  fort  court,  dont  il  se  servit  valent  néanmoins  avec  beauioup  de  cliariié, 
l'espace  de  deux  ans  avec  une  ceinture  c'e  mais  il  y  en  avail  d'autres  qui  se  moquaient 
t'uii  :  ce  qui  a  Tiil  croire  aux  ermites  de  de  la  nouveauté  de  leur  habillement,  et  les 
Sainl-.\ugjstiu  qu'il  avail  d'abord  suivi  leur  regardaient  cnmmc  des  fous,  ce  iju'ils  souf- 
instilul  (ee  que  nous  avons  réfuté  dans  un  fraient  avec  beaucoup  de  joie.  Clillos  d'As- 
auiro  eiiilroil).  Le  désir  (ju'il  avail  de  réparer  sise  témoigna  même  son  thagriii  à  saint 
l'cglise  de  Sainl-Damien  le  rappela  à  Assise  François  de  ce  qu'il  y  en  avail  quelques-uns 
pour  satisfaire  à  cet  ordre  ,  (|u'il  croyait  ((ui  leur  faisaient  des  honneurs,  ce  qu'il  re- 
avoir reçudu  ciel.  11  quéla  suffisammcnl  pour  gardait  comme  un  alTront  pour  une  âme 
y  fournir,  cl  travailla  lui-même  avec  les  véritablement  religieuse,  qui  ne  devait  mel- 
m.içons.  11  en  réjiara  encore  une  .lulre  sous  tre  toute  sa  gloire  ()ue  dans  le  mépris  et  les 
le  litre  de  SaiiU-l'ierrc,  el  entreprit  la  même  opprobres.  Saint  F'iançois  fut  bien  aise  de 
chose  à  l'ép'ard  d'ur.e  troisième  dédiée  sous  voir  que  ses  disciples  ne  S"  gloriliaieul  point 
le  uom  de  iNoîre-Daiiie-des-,\nges,  qui  était  des  honneurs  iju'on  leur  faisait,  el  que  les 
enlièrement  abandonnée.  Le  heii  où  se  trou-  opprobres  qu'ils  indur. lient  ne  troublaient 
vait  celte  derii.ère  s'appelait  l.i  l'orlioncule,  point  la  trauiiuilité  de  leur  âme  et  n'ajipor- 
ainsi  nommé  à  cause  ()u'il  faisait  une  petiie  taiint  .lucun obstacle  à  la  persévérance  dans 
|iartie  du  bien    que   les  béiiédii  tins  du  mont  leur  vocation. 

Souh;izc|,osscdaienl,  et  était  éloigné  d  Assise  (Juoique  ce  sainl  fondateur  ne  suivît  pas, 
d'environ  uiiedeini  lieue.  (]e  heu  lut  si  agréa-  dans  les  vérités  êvangéliques  qu'il  prêchait 
hie  à  sailli  François,  qu',!  rêsolul  de  s'y  ar-  â  ses  peuples,  la  méthode  el  l'éloquence  or- 
rêler  el  d'y  lixer  sa  demeure,  et  il  y  jela  dinaire  des  iirédicaleurs,  il  ne  laissait  pas  de 
dans  la  suite  les  fondements  de  son  ordre.  11  faire  de  grands  fruits  par  ses  discours  qui, 
yccul  seul  en  ce  lieu  pendant  di;ux  ans.  In  quoique  simples, étaieiil  si  aiDiués  de  l'espril 
jour,  i  tant  à  la  messe,  il  entendit  cet  endroit  divin,  qu'il  leur  inspirait  l'amour  de  Dieu 
de  riivangile  où  Jesus-Clirisl  recommandait  et  un  ardent  dcsir  de  la  pénitence.  Enfin, 
à  ses  disciples,  qu'il  envoyait  prêcher,  de  ne  après  avoir  parcouru  quelques  villes  el  quel- 
point  avoir  d'argent  el  de  ne  porter  ni  be-  ques  bourgs  de  ces  provijiccs,  ces  quatre 
sace  ni  deux  babils,  ni  chaussure,  ni  bâton  ;  hommes  apostoliques  se  retiièrenl  dans  leur 
il  le  prit  pour  sa  règle  el  voulut  l'observer  à  pauvre  cbaumiiie,  où  eu  peu  de  jours  ils 
la  leltie.  11  quill.i  pour  loissa  ceinlure  de  eurent  un  cinquième  compagnon,  qui  fui  lo 
luir  pour  prendre  une  coi  de,  el  alia  prêelii  r  fière  Saliall  n,  dont  on  ignore  le  pays,  mais 
la  pénitence  avec  tant  de  lerveur,  (|u'il  1:1  iini  étail  uii  homme  d'une  emineiile  vertu, 
des  conversions  admirables.  Ouelques-uiis  Frère  .Morique  se  joignit  bientôt  à  eux  ;  el 
de  ceux  que  Dieu  toucha  par  ses  d.scouis,  trère  Jean  de  la  tlapella  ou  du  Chapeau  fui 
ne  se  conient.inl  p.is  de  ce  iju'il  prc^cri^all  le  septième  disciple  de  s.iinl  François  ;  mais 
pour  bi<  n  vivre  dans  l'état  ou  l'on  se  Irou-  il  lut  dans  l'ordre  comme  un  autre  Juil.is 
v.iil,  voulurent  le  suivre  el  s'att.ieher  à  lui,  parmi  les  apôtres.  C'était  lui  qui  avail  soin 
alin  de  l'imiter  plus  parlailemenl.  Lèpre-  de  dislriliuer  en  commun  au  i  frères  ce  qu'on 
inier  fui  le  bienbeureuv  Iternanl  de  (,)uinla-  leur  donn.iil  par  auniAne  [lour  leur  subsis- 
»alle,  riche  bourgeois  d'.\ssise,  qui,  admirant  lance.  Il  lui  souvent  repris  |)ar  sainl  Fran- 
daiis  ce  sailli  londateur  un  si  grand  rne|)ris  çois  de  ce  qu'il  amassait  au  delà  de  ce  qui 
du  monde,  assembla  d.ius  l'église  de  S.iinl-  él.iil  nécessaire,  de  ce  qu'il  avail  trop  d'al- 
lieorges  tons  les  pauvres  ,  les  veuves  el  les  tache  aux  biens  et  aux  alTaires  temporelles, 
orpliLlms,  leur  disliibia   tous  ses  biens,  c',  cl  une  Iroji  grande  familiarité  avec  les  séci* 


Î^Ttti 


FRA 


FI\A 


551 


licrs;  mnis  il  ne  voulut  point  s'en  corridor. 
il  fut  le  promior  (|iii  iniroiluinil  li;  roMclic- 
iiicnl  (lauR  l'onlic;  qiipl<|iics-iiiis  siiivirriU 
son  exctiij)!<>,  cl  introduisiroiU  l'usiigc  des 
chapeaux,  ou  plutôt  des  boîuietsou  aumusses 
pour  couvrir  la  tête,  qu'on  appelle  capelle, 
selon  le  langage  du  pays  :  ce  qui  fit  donner 
à  ce  religieux  le  non)  de  Jean  de  ta  Capelia. 
Saint  François  lui  prédit  qu'il  aurait  une 
maladie  honteuse  et  une  fin  tiiallieureuse  ; 
et  il  expérimenta  l'une  et  l'autre  :  car  il  l'ut 
tout  couvert  de  lèpre,  et,  bien  loin  de  sruf- 
frir  ce  mal  patiemment,  il  entra  dans  le 
désespoir  el  s'ctrangla. 

Le  nomhre  des  liisciples  de  saint  François 
étant  donc  augraenié,  il  leur  enseigna  les 
moyens  d'acquérir  toutes  les  vertus,  mais 
Iirincipalcnient  celle  de  la  pauvreté,  dent  il 
s'efforçait  de  leur  faire  connaître  le  mérite 
et  de  leur  persuader  la  pratique.  C'est  pour- 
quoi il  les  conduisit  par  la  villi!  d'Assise, 
afin  de  dcniander  l'aumône  à  toutes  les  por- 
tes ,  et  qu'ils  apprissent  qu'ils  n'auraient 
point  d'autre  patrimoine  que  ce  que  la  cha- 
rité des  personnes  pieuses  et  dévoles  li'ur 
procurerait.  Outre  la  honte  qu'ils  avaient  de 
demander  ainsi  l'aumône,  ils  avaient  encore 
à  soulîrir  des  paroles  piqu.inles  et  des  rail- 
leries, les  reproches  de  leurs  parents,  les  ir.- 
sultes  des  enfants  qui  leur  jetaient  de  la 
hoiie,  et  les  rebuts  de  plusieurs  personnes; 
m;iis  Dieu,  qui,  outre  la  béatitude  qu'il  pro- 
met à  ceux  qui  soufirironl  les  injures,  les 
mépris  cl  les  persécutions  pour  son  amour, 
prévient  souvent  cette  récompense  éternelle 
par  des  bénédictions  de  douceui'  qu'il  lait 
éprouver  à  ses  élus  dans  le  ter.ips  de  leurs 
plus  grandes  amertumes,  voulut,  i)ar  un  eiïet 
de  sa  miséricorde,  l'aire  connaître  à  ces  nou- 
veaux disciples  de  la  Crois  quelle  était  son 
attention  à  la  patience  el  au  plaisir  avec 
lesquels  ils  soutiraient  ces  mépris,  permet- 
tant qu'ils  trouvassent  des  gens  de  bien  qui, 
par  les  libéralités  el  les  bons  Iraitemenis 
qu'ils  leur  tirent,  modérèrent  la  rigueur  du 
leur  pauvreté,  et  adoucirent  ramcrluine  des 
mépris  el  des  humiliations  qu'ils  avaient  en- 
durés. 

Le  saint  fondateur  voulant  ensuite  les 
exercer  parmi  les  é  rangers  el  h  s  inconnus, 
les  mena  dans  la  vallée  de  l'.iéii,  alin  qu'us 
pussent  demander  l'aumône  avec  plus  de 
confiance  de  leur  pari,  et  moins  de  repro- 
ches et  d'insultes  de  la  pari  de  ceux  auxquels 
ils  s'adressaienl.  Pendant  qu'il  y  demeura, il 
y  eut  plusieurs  personnes  qui,  attirées  par  sa 
réputation,  qui  commençait  déjà  à  s'étendre, 
le  venaient  trouver  pour  être  instruites  par 
lui  des  voies  de  la  perfection,  et  profiter  de 
ses  exemples.  11  y  en  eut  un  entre  h  s  autics 
qui,  ne  se  coutentant  pas  de  recevoir  des  in- 
stiuctions,  voulut  encore  être  reçu  au  nom- 
bre de  ses  disciples.  Le  saint,  après  avoir 
augmente  sa  petite  société  jusqu'au  nombro 
de  sept,  retourna  à  Assise,  où  il  instruisit  ses 
disciples  de  tous  les  exercices  de  la  vie  spi- 
rituelle, leur  faisant  de  fréquents  discours 
sur  le  royaume  de  Dieu,  le  mépris  du  monde, 
l'iibnégaiion  de  leur  volonté  el  les  morliiici- 


Jions  du  rorps,  afin  de  les  mieux  disposer  a 
rexéculion  d<j  dessein  (lu'il  avait  de  les  en- 
voyer dans  les  qitaln;  parties  du  inonde,  ei 
aiin  de  les  piévenir  suf  toutes  les  dillicullés 
et  les  perséculions  (lu'ils  auraient  à  soulîrir 
de  la  jiart  du  monde  et  du  démon.  Les  ex- 
horlalions  de  ce  saint  patriarche,  animées 
du  feu  do  l'amour  de  Dieu,  et  soutenues  par 
un  zèle  ardent  du  salut  des  âmes,  eurent  sur 
le  cœur  de  ces  disciples  do  la  Croix  tout 
l'efl'et  qu'il  en  avait  espéré  :  car  un  jour  qu'il 
K'ur  parlait  de  ces  missions,  [loussés  d'une 
sainte  impatience,  ils  se  proslernèTcnt  à  ses 
pieds  pour  le  prier  do  n^•  plus  diiférer  l'ac- 
complissement de  ses  désirs,  iju'ils  rcgar- 
d. lient  cotnme  les  signes  assurés  des  victoires 
qu'ils  se  flattaient  de  remporter  sur  les  puis- 
sances de  l'enfer  ;  mais,  comme  il  devait  être 
te  jiremier  à  donner  l'eximple,  il  prit  un 
compagnon,  avec  lequel  il  alla  d'un  côlé, 
après  leur  avoir  accordé  leur  demande,  en 
leur  assignant  d'autres  endroits  oîi  ils  pus- 
sent annoncer  la  pénilcncc. 

Saint  François,  ayant  employé  quelque 
temps  à  la  mission  qu'il  s'éiait  proposée,  re- 
tourna à  Assise,  oîi  il  lui  vint  encore  quatre 
nouveaux  disciples.  11  souhaita  revoir  les 
autres  six  ,  qui  étaient  allés  en  différents 
pays,  et,  ne  pouvant  leur  faire  savoir  sa  vo- 
lonté, faute  de  savoir  où  ils  étaient,  il  pria 
Dieu  de  les  réunir  ensemble  ;  et  en  peu  de 
temps  il  reconnut  que  sa  prière  élait  exau- 
cée :  car,  sans  avoir  été  avertis,  ils  se  trou- 
vèrent tous  au  même  lieu  et  dins  le  môme 
temps,  comme  saint  François  l'avait  sou- 
haité. Ce  ne  fut  pas  sans  un  grand  étonne- 
ment  de  ces  saints  religieux,  qui  admiraient 
en  cela  la  providence  divine;  et  le  saint  re- 
çut beaucoup  de  satisfaction  lorsqu'i  s  lui 
racontèrent  les  travaux  qu'ils  avaient  en- 
durés dans  leur  voyage,  et  le  fruit  (ju'ils 
avaient  l'ait  dans  le  salut  des  âmes.  11  com- 
mença pour  lors  à  leur  prescrire  nu  règle- 
ment de  vie,  cl  leur  ordonna  de  réciter  pour 
chaque  heure  de  l'office  trois  Paler,  Il  leur 
recommanda  aussi  d'entendre  la  messe  tous 
les  jours,  vouiant  que  quand  ils  y  assiste- 
raient ils  fussent  plus  appliqués  à  la  con- 
templation des  diviiis  mystères  qu'à  la  prière 
vocale.  L'année  suivante,  1210,  ce  sainlTon- 
daleur  ayant  assemblé  ces  onzes  disciples, 
il  leur  dit  qu'il  voyait  bien  (juc  Dieu  voulait 
augmenter  leur  congrégation  ,  qu'ainsi  ii 
était  à  propos  qu'ils  se  prescrivissent  une 
manière  de  vie  uniforme,  el  qu'ils  la  lissent 
approuver  par  le  souverain  pontilc.  Ils 
a^^reèrenl  tous  sa  proposition,  et  lui  dirent 
qu'ils  étaient  prêts  à  se  soumettre  à  la  règle 
qu'il  leur  prescrirait.  11  n'y  avait  alors  au- 
cune obligation  de  demander  celle  confirma- 
lion,  et  il  n'y  avait  même  aucun  exemple 
que  l'on  eût  déjà  contraint  quelque  ordre 
religieux  à  la  demander  ;  mais  saint  Fran- 
çois le  voulut  faire  pour  mieux  alTcrmir  le 
sien,  de  peur  qu'il  ne  lui  arrivât  de  mémo 
qu'aux  Vaudois,  dont  l'insiitut  avait  été  re- 
jeté par  les  papes  Lucius  el  innocenl  l\\.  11 
écrivit  donc  la  même  année  sa  règle.  Elle 
était  divisée  en  vingt-trois  chapitres,  qui  cou 


DICTIONNMIU: 


tPtiaient  vinctsppl  procpptes,  que  K>s  souve- 
rains pontifes  oui  doilaré  ob'iger  sous 
poiue  lie  pèrhé  morlcl;  el  c'est  de  ces  vlngi- 
sept  précep  es  que  los  trois  \œnx  ordinair.s 
de  reli"ion,  qui  sont  coniniuns  à  tous  les 
ordrcs.'isont  environnés  cnniine  de  forts  rem- 
parts qui  defenilenl  les  rc!i!;ieu\  de  cet  or- 
dre de  toutes  sortes  de  transgressions.  Pre- 
inièreinent,  poir  la  défense  de  la  pauvreié, 
saint  François  rejette  comme  une  peste  dans 
son  ordre  tout  maniement  d'argent,  s  ijt  par 
soi-même,  soit  par  quelque  nuire  personne 
int  rpo^ce.  Il  prescrit  11  qualité,  la  quantité 
el  la  valeur  des  habits.  Une  tunique  avec  un 
capuce,  une  autre  sans  capucc  (si  la  néces- 
sité le  dcminde),  avec  une  corde  ou  cein- 
Inre,  et  un  caleçon.  C'est  Tut  ce  qu'il  ac- 
corde pour  vêtement  à  iliaque  religieux,  et 
il  leur  pcruict  di:  rapiécer  leurs  rolies  avec 
des  sacs  ou  quelque  autre  étoffe  vile.  Il  leur 
défend  d'aller  à  cheval  et  d'avoir  des  chaus- 
sures; el  afin  que  cela  puisse  élre  pratiqué 
eiaclemeiil,  il  que  la  propriété  ne  se  puisse 
introduire  sous  aucune  apparence,  il  donne 
le  soin  aus  miuistr.  s  cl  auK  custodes  de 
pourvoir  à  la  néCLSsilé  des  infirmes,  à  l'ha- 
billenienl  des  Frères,  et  généralement  il  leur 
laisse  le  soin  de  pourvoir  à  tous  leurs  be- 
soins, aulani  que  la  pauvreté  cl  la  charilé 
le  pounoni  permettre. 

Pour  conserver  le  précieux  trésor  de  la 
chasteté,  il  défend  Irés-rig  )ureusen)cnt  les 
conversations  avec  les  femme-i,  l'enlrée  dans 
les  monastères  des  religieuses ,  la  délicatesse 
dans  les  habits  elle  manger,  les  coniinodilés 
dans  leurs  voyages,  cl  leur  ordonne  la  nu- 
dité des  pieds,  les  jeûnes  de  tous  les  vendre- 
dis de  l'année,  ceux  depuis  la  Toiissainl 
jusqu'à  Noél  et  depuis  ri'.|>iphanic  jusqu'à 
l'àijues,  sans  parler  des  autres  morti'jcalions 
el  pcnit"  lices  capal)les  de  conlriluicr  à  l'ac- 
quisiiion  de  celle  \erlu  el  de  réprimer  les 
ardeurs  de  la  concupiscence,  leur  rccom- 
inai  danl  aussi  la  pratique  de  l'oraison  (que 
ce  sainl  vrul  que  l'on  prcl'ere  à  l'étude  des 
lettres  humaines),  principalemenl  l'olfice  di- 
vin, doiil  il  lait  un  picteple  tant  pour  les 
clerc-  que  pour  les  f.-ères  laïques. 

Ce  qu'il  ordonne  pour  servir  de  remparts 
el  de  défenses  à  l'olieissaiice,  c'est  le  renon- 
ccmeiil  à  sa  propre  voioulc  pour  suivre 
avcuglcmenl  celle  de  ses  supérieurs  sans  ap- 
porter aucune  raison,  sans  réserve  et  s.ins 
aucune  limitation  dans  toutes  les  choses  (|ui 
ne  sont  point  contraires  à  la  règle;  el,  afin 
d'ôler  lous  les  scrupules  que  les  religieux 
pciirraient  avoir  au  sujet  de  cette  même  rè- 
gle, il  les  renvoie  aux  su;iérieurs  pour  lever 
leurs  doutes  cl  mellre  leur  conscience  en 
repos.  Il  y  ajoute  encore  dix-liiiil  avis  ou 
iustructiuiis  <)ui  n'obligent  point  à  péché 
morlcl,  et  qui  regardent  la  manière  avec  la- 
quelle les  religieux  se  doivent  comporter 
dans  toutes  leuis  conversations  in'erieures 
<i  extérieures,  soit  par  rapport  à  eux,  soit  à 
l'égard  ilu  prochain,  dans  la  maison  ou  dans 
les  vovagrs,  avec  les  religieux  ou  avec  les 
kicuhers.  A  ces  préceptes  el  à  ces  avis  il 
joint    eucorc   douze  conlitiuiis    nécessaires 


DI.S  OUDUICS  nixiG.r.tx.  536 

pour  la  réception  des  novices,  el  six  que  l'on 
appelle  les  libertés  de  la  règle,  qui  contient 
eu  suh^tancc  ce  que  nous  venons  de  dire. 
Les  disciples  de  saint  Françoi-  l'ayant  agréée, 
il  alla  avec  eux  à  Rome  trouver  le  p  ipe  lii- 
noi-enl  ill,  qui  ne  l'écouta  pas  d'abord  et 
qui  le  rejeta  niéaie  avec  indignation;  m  lis 
Fraiirois,  sans  se  rebuter,  se  relira  avec  sa 
troupe  à  l'hôpital  deSainlAnlnine,  el  se  con- 
tenta de  reconiinander  son  .iffaire  à  Dieu,  en 
qui  il  mettait  toute  sa  conliauce.  Ce  ne  fut 
pas  en  vain,  car  dès  le  lendemain  le  pape 
l'envoya  chercher  et  lui  donna  une  audience 
lavorable  sur  un  songe  qu'il  avait  eu  la  nuit, 
d'une  palme  qui  était  crue  à  ses  pieds  et  qu'il 
avait  interprété  eu  sa  favenr,  el  sur  ce  qu'il 
lui  avait  semblé  voir  saint  François  soutenir 
l'église  de  Lalran,  qui  était  prèle  à  tomber. 
Le  pape  fil  examiner  sa  règle  dans  la  con- 
grégation des  cardinaux,  et  l'approuva  de 
vivcvoix  après  que  l'on  cul  levé  le-  difficullés 
qu'on  y  avait  trouvées  touciiant  celte  grainle 
pauvreté  qu'il  y  prescrivait  cl  nu'on  croyait 
presque  impraticable.  Il  leur  ordonna  de  prê- 
cher partout  la  pénitence,  d'elendie  la  foi 
catholique  de  touies  pails.  el  lit  fa  rc  de  pe- 
tites couronnes  à  lous  les  frères  laïqu'S  qui 
accompagnaicnl  le  sainl  fondateur,  afin  qii  i's 
fusseul  uistingués  davant  ige  des  séculiers  , 
et  qu'ils  pussenl  aider  les  prêtres  dans  les 
roiu'lious  de  leurs  ministèn-s.  Wadingue  dii 
qu'il  y  aeiicoro  clcspays  où  les  frères  laïques 
portent  de  ces  sortes  de  couronnes;  mais 
elles  ne  sont  pas  en  usage  dans  le  reste  d-; 
l'ordre,  parce  que  cette  grâce  que  leur  avait 
accordée  ce  pontife  servit  d'occasion  dans  l.i 
suite  à  quelques-uns  de  loin  pcr  d  ins  l'or- 
gueil, cl  à  leur  enfler  I  ■  rœur  en  voulant  su 

iui  ces  couronnes 


I 


coinpar"!'  ntix   prêtres 
appartiennent  de  droit. 

Ouoi  juc  saint  François  eût  écrit  sa  régie 
et  l'eut  fait  approuver  par  le  papi?  Inno- 
cent m  l'ail  1:210,  il  n'avait  pas  eucorc  ilc 
couvent  loriiie  et  n'avai!  demeuré  jusqu'alors 
avec  ses  co!ii|)agnoiis  que  dans  une  pauvre 
ch.iumine  proche  d'Assise.  Ayant  quille  la 
ville  de  Rome,  et  voulant  obéir  aux  ordres 
du  pape,  qui  lui  avait  ordonne  de  prêcher  la 
péuiieiice.  il  alla  du  côté  de  Spoic'.le  ;  el , 
ctuiimc  dar.s  le  chemin  il  s'cnlrelenail  avec 
SOS  disciples  des  moyens  de  iiiellrc  en  prati- 
que leur  règle,  étant  las  cl  faiigués  el  tout 
a'ienues  (lar  la  faim,  ils  s'arrêlèreul  dans 
une  solitude  où  ils  ne  trouvèrent  rien  à 
manger;  mais  la  providence  divine,  qui  est 
allenlive  à  fournir  la  noiirnlure  nécessaire 
aux  anim.iux  mêiiie  les  plus  vils  et  les  plus 
meprisaliles,  irabanduniia  pas  ses  servileurs 
dans  leur  besoin.  Car  un  homme  se  présenta 
à  eux  qui  leur  doiuia  un  pain  et  disparut 
aussitôt,  ee  (|ui  les  conlirma  dans  la  résolu- 
tion qu'ils  avaient  prise  d'observer  exacte- 
ment la  pauvreté. 

Ils  arrivërciil  à  Orli,  petite  ville  do  l'Elat 
erclesiaïliqiie,  sur  les  fronlières  de  Toscane, 
du  ci'ile  de  i.omliardie.  lis  trouveront  dans 
Uii(^  plaine  proche  de  celte  ville  une  églisj 
alianduiiiiee,  dans  laquelle  ils  entrèrent  pour 
l'aire  leurs   prières,  el  résolurer.l  de  deuicu- 


-.',1 


FKA 


rcr  ijuclqurs  jours  dans  ce  lieu,  jusqu'à  ce 
(jue  JJiiu  leur  cûl  faii  connaître  celui  où  il 
Vduljit  qu'ils  fixassent  leur  demeure.  Ils  ne 
furent  pas  oisifs  pendant  ce  temps-là,  car 
ils  allaient  continuellement  à  la  ville  pour  y 
instruire  le  peuple,  et  y  firent  beaucoup  de 
conversions.  Le  grand  concours  du  monde 
(jui  les  venait  trouver,  troublant  le  repos  de 
ces  bons  religieux,  obligea  saint  François 
d'abandonner  ce  lieu,  qui  d'ailleurs  lui  pa- 
raissait trop  agréable.  Il  pnssa  dans  la  vallée 
de  Spolelle,  où,  après  avoir  conféré  avec  ses 
conipeTgnons  pour  savoir  s'il  élail  plus  à  pro- 
pos qu'ils  restassent  dans  des  lieux  solitaires 
que  dans  des  villes,  ils  se  mirent  en  prières 
l'iiur  connaître  la  volonté  de  Dru.  Ils  furent 
1  xaiicés,  car  Dieu  man  fesia  <t  ce  saint  pa- 
triarelie  qu'ils  étaient  destinés  à  la  conver- 
sion des  âuies.  Ils  retournèrent  à  leur  pre- 
mière cbauniine  proche  d'Assise,  qui  était  si 
petite ,  qu'ils  ne  pouvaient  pas  môme  s'y 
asseoir  tous  ni  étendre  leur  corps  étant  cou- 
chés ;  mais,  comme  il  y  avait  plusieurs  per- 
.••onnes  qui  deiir;nd,!'rnt  d'entiL:'  d.ins  kur 
compagnie,  et  que  d'ailleurs  ils  ii'avaienl 
point  d'église,  saint  François  chercha  un  lieu 
plus  commode  et  plus  ample  pour  y  recevoir 
ceux  qui  voulaient  entrer  dans  son  ordre.  H 
s'adressa  à  l'évêque  et  aux  chanoines  d'As- 
s  se,  pour  les  prier  de  lui  donner  une  église  ; 
mais,  comme  ils  n'en  avaient  point  qu'ils 
voulussent  quitter,  le  saint  en  demanda  une 
aux  béflcdiclins  du  mont  Soubaze,  qui  lui 
accordèrent  celle  de  Notre-Dame-des-Anges, 
appelée  de  la  Porlioncule.  Il  n'en  pouvait  pas 
;ivoir  une  qui  lui  fût  plus  agréable,  puisqu'il 
avait  toujours  eu  beaucoup  de  dévoiiou  pour 
celle  église,  qu'il  avait  autrefois  réparée,  et 
où  il  avûit  conçu  les  premiers  desseins  d'éta- 
tilir  son  ordre.  Saint  François  n'en  voulut 
avoir  que  l'usage,  afln  que  lui  et  ses  enfants 
parussent  éiraugers  sur  la  terre;  et,  pour 
taire  voir  qu'elle  ne  lui  appartenait  pas  et 
qu'il  ne  la  tenait  que  de  la  litiéralilé  des  re- 
ligieux bénédictins  de  Soubaze,  il  leur  en- 
voyait tous  les  ans  un  panier  plein  de  petits 
poissons  que  les  Iialiens  appellent /asc/ti,  et 
qui  se  pèchent  dans  une  rivière  voisine,  ce 
que  les  bénédictins  recevaient  agréablement, 
estimant  plus  ce  présent  que  tous  les  autres 
revenus,  et  ils  envoyaient  aussi  de  leur  côié 
im  vase  plein  d'huile  à  ces  pauvres  reli- 
gieux. 

Ce  fut  dans  ce  pauvre  lieu  que  les  fonde- 
ments de  l'ordre  des  Mineurs  furent  jetés. 
C'est  celte  pauvre  maison  qui  en  a  produit 
tant  de  milliers  d'autres,  et  de  laquelle  sont 
sortis  tant  d'illustres  martyrs  qui  ont  com- 
battu pour  le  nom  de  Jésus-Christ,  et  qui 
l'ont  fait  connaître  par  toutes  les  parties  du 
inonde,  qui  a  donné  tant  de  docteurs  et  de 
prélais  à  l'Eglise,  qu'ils  ont  édifiée  par  la 
bainleié  de  leur  vie  et  soutenue  par  la  pureté 
de  leur  doctrine.  Quoique  sai^t  François  eût 
dit  plusieurs  fois  que  celte  petite  maison  lui 
.suflisait,  qu'il  ne  voulût  pas  qu'on  l'augmen- 
tât, et  (ju'il  en  eût  fait  abattre  les  couvertu- 
res, qui  lui  avaient  paru  trop  somptueuses, 
e.le  a  néanmoins  été  tellement  augraculéc, 


FRA  r,38 

qu'il  y  a  ordinairement  plus  de  deux  cents 
religieux  qui  y  demeurent  de  famille.  L'on  y 
voit  encore  la  peUte  chapelle  de  Noire-Dame- 
dcs-Anges,  qui  est  comme  la  maison  de  Lo- 
retle,  au  milieu  d'une  vaste  et  magnifique 
é;::ise,  qui  est  un  des  plus  beaux  édifices  de 
toute  l'Italie,  et  qui  a  été  beaucoup  embellie 
par  les  libéralités  des  grands-ducs  de  Tos- 
cane. Vis-à-vis  de  cette  église  le  grand-duc 
Côme  de  Médicis  fit  faire  une  belle  fontaine 
pour  la  commodité  des  i)èlerins  qui  y  abor- 
dent de  toutes  par:s,  pour  gagner  l'indul- 
gence dont  nous  parlerons  dans  la  suite,  et 
ce  prince  y  fit  conduire  l'eau  par  un  aiiue- 
duc  qui  a  plus  d'une  lieue  et  demie  de  lon- 
gueur. 

Saint  François  et  sa  petite  troupe  s'étant 
établis  dans  cette  maison,  ils  reçurent  la 
même  année  de  nouveaux  compagnons,  dont 
les  principaux  furent  Léon  ,  Etienne,  Léo- 
nard et  Simon  d'Assise,  Massée,  Junipère, 
Illuminé,  et  un  autre  Simon  de  (Jollozano. 
L'année  suivante,  l'ordre  comniença  à  s'é- 
tendre, tant  par  les  couvents  que  l'on  donna 
à  ce  saint  fondateur  à  Cortonc,  à  Aagheret, 
à  Piscia,  à  Pise,  à  Saint-Geminicn  et  en  d'au- 
tres lieux,  (|ue  par  le  grand  nombre  de  dis- 
ciples qui  le  venaient  trouver  de  toutes 
parts,  attirés  par  ses  prédications  ou  par 
celles  des  autres  religieux  qu'il  avait  envoyés 
en  plusieurs  endroits  pour  l'instruction  des 
peuples.  Ce  fut  dans  le  couvent  de  Cortonc 
qu'il  donna,  la  même  année,  l'habit  à  frère 
Héiie,  qui  fut  son  successeur  dans  le  gouver-» 
neuienl  de  l'ordre,  mais  qui  n'imita  pas  la 
sainieléde  son  maître,  comme  nous  dirons 
dans  la  suite.  L'ordre  lit  encore  de  grands 
progrès  eu  Italie  et  dans  d'autres  provinces. 
Le  saint  entreprit  le  voyage  d'Espagne,  dans 
le  dessein  d'aller  ensuite  en  Afrique,  où  il 
es[)érait  trouver  le  martyre  parmi  les  Mau- 
res et  répandre  son  sang  pour  la  foi  de  Jésus- 
Christ.  11  fut  reçu  favorablement  d'Alphonse, 
père  de  Blnnche,  qui  fut  reine  de  France  et 
mère  de  saint  Louis.  Ce  prince  lui  permit  de 
fonder  un  couvent  de  son  ordre  à  liurgos;  et, 
étant  allé  par  dévotion  a  Saint-Jacques  de 
Coinpoitelle,  il  y  fit  un  autre  établissement 
et  en  obtint  d'autres  en  plusieurs  endroits  de 
ce  royaume.  D'Espagne  il  alla  en  Portugal, 
d'où  étant  retourné  dans  le  même  royaume, 
il  y  fil  encore  d,;  nouveaux  établissemenli. 
Partout  où  il  passait,  il  laissait  des  marques 
du  pouvoir  que  Dieu  lui  avait  donné  sur  les 
maladies,  sur  les  dénions,  sur  les  animaux, 
et  même  sur  le  cœur  de  l'homme,  par  les 
conversions  extraordinaires  qu'il  faisait.  Mais 
il  ne  put  exécuter  le  dessein  qu'il  avait  pris 
d'aller  annoncer  la  foi  de  Jésus-Christ  aux 
infidèles  du  royaume  de  Maroc,  car  il  fut  ar- 
rêté par  une  autre  maladie,  qui  lui  fit  juger 
que  Dieu  réservait  cette  conquête  à  d'autres 
et  qu'il  le  rappelait  en  Italie.  Il  y  revint  l'an 
1215,  dès  que  sa  santé  le  lui  permit,  et  toute 
sa  route  ne  fut  qu'une  suite  de  prodiges. 
Etant  arrivé  au  couvent  de  Nolre-Dame-des- 
Angcs,  il  réprimanda  Pierre  de  Calane,  son 
vicaire,  de  ce  qu'il  avait  fait  faire  en  son  ab- 
sence une  nouvelle  maison  pour  recevoir  les 


5Ô3 


liiMcs;  cl  il  la  \oulait  faire  aballic,  disant 
ijUf  crus  qui  y  vcn.iipiit  ilcvaipiil  aussi  so'if- 
Irir  palii'miiiciil  los  incomnKntili's  do  la  p.m- 
vrcié;  riini>  ■  n  lui  fil  laiil  d'invt  iikps  (xuir 
la  laisser  ciimim'  illo  l'Iaii,  ipi'il  y  «■onscnlil. 
l.c  roriilo  Oilaiido  ilc  (^iil.nu-  lui  .i\.iiil  doiiiu! 
pendant  son  aliscni;.-  le  aïonl  Alvenio,  et  l<  s 
ri'Iipii'ux  qui  y  dcincuraionl  ot  tiui  rcLiiciit 
venus  Iroiivtr  pour  le  saluera  son  retour, 
lui  ayani  fait  la  description  de  ce  lieu  soli- 
taire, des  douceurs  et  des  consolations  s[ii- 
ri'uelies  que  l'on  y  goûtait  par  le  repos  et  la 
Iranquilliié  avec  lescjucls  on  pouvait  s'y  ap- 
pliijuer  à  la  niî'dilalion  et  à  la  prii^re,  sans  y 
être  disirait  par  le  bruit  et  l'embarras  du 
monde,  il  voulut  y  aller  et  fut  cbarmé  tic  la 
solitude  de  ce  lieu  et  de  la  pauvreté  que  ses 
frères  y  pratiquaient.  Il  passa  de  là  dans  la 
vallée  de  Fabriano,  où  il  travailla  à  aiîerniir 
divers  établivscnienls,  et  en  (il  de  nouveaux 
[>our  ses  lelii^ieus,  qui  si;  imillipliaienl  tous 
les  jours  d'une  nianii're  prodigieuse. 

Cette  niécue  année  1215,  dans  laiiucMc  s'as- 
sembla leconcilc  généraldo  Lalran.qui  se  tint 
suus  le  pape  Innocent  III,  Fraiieois  alla  en- 
core à  Uotne  pour  faire  ajiprouver  sa  règle 
dans  ce  cuncile.  Ei|e  y  fut  lue  et  approuvée, 
mais  il  n'(  n  rerul  pas  l'approbation  par 
écrit.  Il  s'en  retourna  ensuiO  à  Assise,  où 
l'année  suivante  il  assembla  un  chapitre  gé- 
néral dans  lequel  il  coainienija  à  distribuer 
des  missions  à  ses  frères,  pour  la  France, 
l'Angleterre  et  l'Allemagne,  il  en  envoya 
aussi  d'autres  en  Lombardic,  dans  la  Marclic 
d'Ancône,  dans  la  Calahre,  la  Pouille,  la 
Terre  de  Labour  et  en  Toscane.  Il  avait  seu- 
lement destiné  ceux  qu'il  avait  envoyés  eu 
France,  pour  iadaule  narbonnaise.et  il  avait 
réservé  jiour  lui  la  capitale  de  ce  royaume  ; 
mais  il  fut  détourné  de  ce  voyage  par  le  car- 
dinal Hugolin,<|ui  fut  ensuite  pape  sous  le 
nom  de  Grégoire  IX.,  et  il  demanda  pourpn- 
inier  prolecteur  de  son  ordre  ce  cardinal,  à 
Honorius  lit,  qui  avait  succédé  à  Innocent  lii. 

C'est  une  chose  surprenante  de  voir  h; 
grand  progrès  (jue  ci;l  ordre  lit  en  si  peu  do 
ïeinps  ;  car  dans  le  cliapitrc  général  qui  se 
tint  l'an  1210  au  couvent  de  Nolre-l)anie-di  s- 
Anges  [irès  d'.\ssise  (et  qui  fut  nommé  le 
chapitre  dis  Naites,  à  cause  (jue,  pour  loger 
les  religieux  qui  s'y  rendirent,  on  fut  obligé 
de  faire  en  pleine  campagne  des  cellules  do 
joncs,  de  roseaux  et  de  nattes) ,  on  y  en  vit 
plusdecini]  mille,  qui  n'étaient  que  les  dé- 
putés d'un  plus  grand  nombre  (|ui  étaient 
restes  dans  les  convt-nts.  Le  cardinal  Uugo- 
lin,  protecteur  de  l'ordre,  y  présida  ;  saint 
Franeois  nes'élait  point  mis  en  peine  de  laire 
aucune  provision  pour  tant  de  monde; 
ma. s  la  divine  providence  y  pourvut,  car  les 
habitants  d'Assise,  de  Spoletle,  de  i'érouse, 
de  Foligny  et  autres  villes  voisines,  lourni- 
rint  ;i  l'envi  tout  ce  (jui  leur  était  nécessaire. 
Le  saint  fondateur  avait  souhaité  voir  les 
princip.iux  de  ses  enfants  ainsi  assemblés 
(101. r  renouveler  son  ei-pril  ,  c'est-à-dire  les 
^entiml'nts  de  la  [lauvrelé,  de  l'iiumililé  et 
dis  autres  verius  évangéliques  qu'il  leur 
aMtl   iuspirés,crai|juant   iiuo  la  uiuUiluJc 


lilCTIONNAlllt:  Of.S  OUUr.ES  KELIGIEUX.  3iO 

n'eût  produit  le  relâchement.  Mais,  loin  d'y 
trouver  ce  qu'il  opprèhendait,  il  ne  fut  pres- 
que occupé  i|u'à  modérer  les  austérités  que 
les  particuliers  avaient  ajoutées  à  la  règle.  Il 
n'y  eut  (jue  le  Irère  llelie  et  Jean  Stiachia, 
ministre  de  Toscane  rt  de  liologne  ,  avec 
quelques  autres,  qui  allèrent  trouver  le  car- 
dinal protecteur,  pour  le  prier  de  persuad  r 
à  saint  François  de  prendre  l'avis  de  ses  frè- 
res, dont  la  plupart  étaient  gens  de  lettres 
et  propres  jiour  le  nouvernement,  n'étant 
pas  capable  lui  seul  de  gouverner  un  si 
grand  nombre  de  religieux  ;  d'autant  plus 
qu'il  était  simple  et  sans  élude,  et  ils  lui 
proposèrent  beaucoup  de  choses  des  règles 
de  Saint-Augustin  et  de  Saint-lîenoît,  qu'il 
aurait  été  (ilus  à  propos  de  suivre,  le 
cardinal,  pour  les  contenter,  en  parla  à 
saint  François;  mais  le  saint  fondateur  ne 
voulut  rien  relâcher  des  rigueurs  de  l'ordre. 
Il  envoya  de  nouveaux  niissionnaires  en 
(^irèce  et  en  Afrique,  et,  pour  lui,  il  cboisii 
la  Syrie  et  l'Kgyple,  où  il  résolut  d'aller 
avec  douze  compagnons  ;  et,  comme  il  ik; 
voulait  pas  que  ses  religieux  prêchassent 
sans  en  a\oir  eu  la  permission  des  ordinai  • 
res,  il  obtint  du  pape  Honorius  111  des  lettres 
adressées  à  lous  les  archevêques,  évéques  et 
abbés,  pir  lesquelles  il  leur  recommandait 
saint  François  et  ses  religieux,  qui,  ayant 
renoncé   à    toutes    les   vanités    du    inonde. 


avaient  choisi  une  vie  approuvée  par  le 
sainl-siege,  et  allaient  en  diverses  provin- 
ces pour  y  Semer  la  parole  do  l'Fvangile  : 
c'est  pourtiuoi  il  les  priait  de  les  recevoir 
comme  du  fidèles  catholiques  et  de  saints 
missionnaires  zélés  pour  la  foi  de  Jésus- 
Clirisl  et  le  salul  des  âmes. 

Le  chapitre  étant  iiiii,  saint  Fr.mçois  .so 
mil  en  eliemiu  avec  ses  eompagnous  pour 
aller  en  Syrie,  et,  après  une  navigalion  heu- 
reuse qui  ie  mil  au  port  d'Acre  en  Palestine, 
il  passa  à  Damielte,  où  élait  l'armée  eliré- 
tienne  des  Croisés,  contre  le  sultan  d  E;:yp- 
te;  ces  derniers  venaient  de  prendre  la  ville, 
après  un  siège  de  vingt-deux  jours,  lorsqu'il 
y  arriva.  îl  y  laissa  div  de  ses  compagnons,  et 
aiia  hardiment  avec  le  frère  Illuminé  au 
c.imp  des  infidèles,  qui  le  battirent  cruelle- 
uient,  et  après  mille  oulrages  le  conduisi- 
rent devant  le  sultan,  comme  François  le  sou- 
haitait. Ce  prince  parut  disposé  à  écouler 
favoralilemeiU  cet  homme  apostolique  il  lui 
demanda  ce  qui  lameuail  en  Egypte.  Fran- 
çois lui  répondit  que  celait  le  désir  de  lui 
procurer  le  salut  éternel  et  à  tous  ses  sujets, 
et  que  Dieu  l'avait  envojé  pour  le  tirer  do 
l'inlidélité,  et  lui  faire  eonnaitre  la  vérité  de 
ILvangile.  Tout  ce  qu'il  pul  dire  au  sultan 
fut  inutile,  et  il  voulut  persister  dans  l'erreur. 
11  conçut  néanmoins  une  si  grande  esiiiiie  de 
la  vertu  do  ce  grand  saint,  qu'il  voulut  lui  eu 
donner  des  marques  par  les  présents  qu'il  lui 
oITrit.  Le  relus  généreux  qu'en  lit  le  saint 
acheva  do  lui  faire  coiin  litre  le  mérite  d'un 
homme  si  rare.  II  insi.-^la  à  lui  f.iire  recevoir 
au  moins  une  somme  d'argent  pour  les  pau- 
vres chielieiis  ou  pour  leur  église  ;  mais  ses 
instances  lureui  mutiles.  Lulin,  ne  pouvant 


Ul 


FP.A 


rien  ailier  sur  ce  cœur  insensible  à  loul 
ce  (|ui  n'é(ait  pas  du  salut  des  âmes,  il  lu 
iloiJiia  perniissiou  de  prêcher  l'Evangile  dans 
ses  Etais,  ce  qui  clail  la  plus  grande  mar- 
que d'estime  qu'il  pouvait  lui  donner,  par 
rapport  à  l'opposition  que  ces  infidèles  ont 
«on-seulemeiii  pour  l'Evangile,  mais  même 
pour  le  nom  chrétien.  Le  saint,  après  y 
avoir  demeuré  quelque  temps,  voyant  qu'il 
perdait  son  temps,  eut  le  déplaisir  de  s'en 
revenir  sans  avoir  pu  gagner  une  âme  à 
Dieu  ou  répandre  son  sang  pour  Jésus- 
Christ,  ce  qu'il  souhaitait  ardemment. 

Une  des  raisons  qui  obligèrent  encoresaint 
Français  de  retournercn  l(alic,fut  qu'il  ap- 
jiril  avec  beaucoup  de  chagrin  que  le  frère 
liélie,  qu'il  avait  établi  vicaire  général  en 
son  absence,  avait  innové  beaucoup  de  cho- 
ses qui  tendaient  au  relâchement,  ayant  at- 
tiré dans  son  parti  plusieurs  provinciaux 
*)ui  blâmaient  la  simplicité  du  saint  fonda- 
teur et  taxaient  d'imprudence  l'austérilé  à 
laquelle  les  obligeait  sa  règle,  dont  ils  re- 
tranchèrent quelques  points  essentiels,  et  eu 
modérèrent  d'autres.  Saint  François,  étant  de 
retour  en  Italie  l'an  1220,  ne  vit  qu'avec 
douleur  le  danger  oîi  son  ordre  était  exposé 
par  le  relâchement  qui  y  avait  été  introduit. 
Il  cassa  l'élude  que  l'on  avait  établie  à  Bolo- 
gne, il  voulut  que  ses  religieux  abandonnas- 
^ent  ou  démolissent  ce  couvent,  qui  avaitéié 
bâti  avec  trop  de  magnificence  et  qui  ne  se 
ressentait  point  de  la  pauvreté  :  néanmoins, 
à  la  sollicitation  du  cardinal  protecteur,  il 
consentit  qu'ils  y  demeurassent;  et,  comme 
le  provincial  de  cette  province,  Jean  de  Siria- 
cliia,  qui  avait  ordonné  ces  bâtiments  et  (|ui 
avait  contribué  au  relâchement,  persistait 
toujours  à  soutenir  ce  qu'il  avait  fait ,  il  lui 
donna  sa  malédiction.  A  l'égard  du  P.  Hé- 
lii-,  i.l  «assa  tout  ce  qu'il  avait  introduit  de 
nouveautés  dans  l'ordre  en  son  absence,  à  la 
réserve  d'un  statut  qu'il  avait  fait  de  ne  point 
manger  de  viande,  quoique  contre  l'esprit 
de  la  règle,  qui,  conformément  à  l'Evangile, 
permet  aux  religieux  de  manger  ce  qu'on 
leur  présente,  de  peur  qu'il  ne  semblât  qu'il 
voulait  favoriser  la  gourmandise,  ce  «ju'il 
jugea  plus  à  propos  de  tolérer  pendant  un 
temps. 

§  2.  Continuation  de  l'histoire  de  l'ordre  des 
Frères  Mineurs,  et  de  la  vie  de  saint  Fran- 
çois d'Assise  leur  fondateur. 

Toutes  choses  éiant  pacifiées  dans  l'ordre, 
rt  saint  François  ayant  écoulé  ceux  ((ui  .ip- 
prouvaieiit  le  gouvernement  du  P.  Hélie 
et  ceux  qui  le  condamnaient,  il  assembla  le 
chapitre  générai  à  Nolie-Dame-des-Auges  la 
ijiêiue  année  1220.  Le  provincial  de  lîoloiîue 
y  fut  privé  de  son  oi'iice,  et  le  P.  Hélie  ayant 
clé  aussi  déchargé  du  vicariat  général,  le 
.>>aint  fondateur  uoiiirra  à  sa  place  le  P. 
Pierre  de  Calane,  qui  avait  élé  son  second 
disciple.  Mais  celui-ci  étant  mort  l'année  sui- 
vante 1221,  dans  une  grande  répulaliou  de 
sainteté,  saint  François  indiqua  un  aulrc 
chapitre  pour  les  fêles  de  la  i'enlecùle,  où, 
j)ar  rcvélatiou  diviue  et  selon  le  comuian- 


IHA  ZVi 

dément  qui  lui  en  avait  été  fait  dans  une  do 
©   es  oraisons,  il  désigna  encore  une  fuis  pour 
vicaire  général  le  P.  Hélie. 

Cet  homme  élail  plein  d'ambition  ;  il  rece- 
vait à  la  vérité  fort  bien  les  religieux  qui 
venaient  voir  saint  François  ;  mais  ayant 
égard  à  Id  qualité,  à  la  science  et  à  la  di- 
gnité des  personnes,  il  donnait  les  premiers 
rangs  à  ceux  qui  avaient  plus  de  mérite,  ne 
donnant  aux  simples  que  les  dernières  pla- 
ces, et  souvent  il  négligeait  ceux-ci  pour 
accorder  toutes  les  commodités  aux  autres. 
Saint  François  ne  pouvait  souffrir  celle  ac- 
ceptation et  cette  préférence  dans  des  per- 
sonnes d'un  même  ordre;  c'est  pourquoi,  un 
jour  qu'il  en  vint  de  plusieurs  conditions,  de 
doctes  et  d'ignorants,  le  saint,  après  la  béné- 
diclion  de  la  table ,  en  fit  asseoir  à  ses  côlés 
deux  qui  paraissaient  les  plus  simples,  et  af- 
fecta de  ne  pas  regarder  les  autres  qui  pa- 
raissaientavoirdu  mérite. Hélie  en  fut  choqué 
et  ne  put  pas  s'empêcher  d'en  murmurer,  eu 
disant  en  lui-même:  Hélas  1  frère  François, 
que  ta  simplicité  fera  tort  à  l'ordre  1  Tu  meis 
à  tes  lôtés  des  ignorants,  et  tu  ne  fais  ])as  do 
cas  des  personnes  doctes  et  savantes.  Mais 
le  saint,  connaissant  sa  pensée  par  révéla- 
tion divine,  lui  répondit  qu'il  faisait  plus  de 
tort  à  l'ordre  par  son  orgueil,  son  faste  et  sa 
prudence  humaine.  «  0  que  les  jugements  de 
Dieu  sont  impénétrables!  s'écria  le  saint;  il 
te  connaît  pour  tel,  et  il  a  voulu  cependant 
que  tusois  supérieur;  il  a  même  déjà  ordonné 
que  je  le  laisse  le  gouvernement  de  l'ordre  ; 
mais  que  j'appréhende  que  ce  juste  juge  no 
porte  un  aulre  jugement  de  toi,  et  n'ait  d'au- 
tres sentiments  que  le  peuple  en  a,  et  qu'il 
no  donne  un  pasteur  tel  qu'il  prévoit  qu'il 
aura  un  jour  des  brebis  1  Hélas  1  misérable 
que  tu  es,  ton  sort  est  déjà  décidé,  tu  ne 
mourras  pas  dans  la  religion,  tu  as  déjà  élé 
pesé  dans  la  balance,  et  tu  as  été  trouvé  trop 
léger  avec  Ion  orgueil  et  ta  science  mon- 
daine. »  Ct'lte  propliélie  du  saint  fut  accom- 
plie, car  Hélie  fui  le  second  général  de  l'or- 
dre après  la  mort  du  saint  fondateur,  et  a|)os- 
tasia  dans  la  suite,  loinme  nous  lavons  dit 
à  l'article  Césarins  {Frères  Mineurs). 

Siinl  François  obtint,  l'an  1222,  un  privi- 
lège du  pape  Honorius  III  ,  qui  permettait 
aux  religieux  de  son  ordre  de  célébrer  les 
offices  divins  les  portes  fermées  dans  un 
temps  d'interdit,  et  un  an  après  il  obtint 
cette  indulgence  si  fameuse  pour  l'église  de 
la  Portioncuie,où  il  vient  de  toutes  parts  une 
infinité  de  pèlerii>s,  le  second  jour  du  mois 
d'août,  qui  est  celui  auquel  est  fixée  cette  in- 
dulgence, à  cause  que  l'on  y  célèbre  ce  mêau; 
jour  la  dédicace  de  celte  première  église  et 
beiceau  de  l'ordre.  Cette  indulgence  a  éie 
confiruiée  par  les  papes  Martin  IV  ,  Alexan- 
dre lV,l]oniface\iH,ClémenlV,Jean  XXlî, 
Benoît  XI,  el  SixicIV,  qui,  l'an  l'i81,  reten- 
dit à  toutes  les  religieuses  de  l'ordre,  vou- 
lant qu'elles  le  pussent  gagner  dans  leurs 
monaslères,  ce  qu'il  communiqua  aussi  à 
toutes  les  maisons  d'hommes  lanl  du  pre- 
mier que  (lu  troisième  ordre.  Léon  X  con- 
firma te  que  Sixte  IV  avait  accordé,  co  quo 


DICTIONNAIRE  DKS  OflDRF.S  llF.l.ir.lEDX. 


313 

fireiil  aussi  Paul  V  pi  Gréiioirc  XV  ;  pt  l'an 
1C2V.  Urliain  VIII  ayant  pulilié  |p  juliilé  uni- 
versel, qui  (Ipvait  comiiipncer  le  jour  de  Noi'l 
de  raiiiicc  ■suivante,  cl  a\anl  sjs[ien(lii,  se- 
lon la  couluinc,  pcndaiil  le  leipps  qu'il  du- 
rerait, toutes  les  autres  iiidulscucps ,  il 
donna  une  bulle  par  laquelle  il  exreplait 
celledcNotie-D.ime-des-Aiisis  ou  de  la  Por- 
lionrule.  Innocent  X  déclara  la  même  cliosc 
ilans  le  jubile  universel  de  l'an  Kî.'iO,  ce 
qu'ont  fuit  aussi  ses  successeurs,  et  Inno- 
conl  XII  a  éloiidu  eelle  indulgence  à  perpé- 
luilé  pour  tous  les  jours  de  raniiée  en  faveur 
de  ceux  qui,  ne  pou\anl  pas  s'y  trouver  le 
jour  de  la  dédicace  de  celle  église,  <  hoisis- 
scnt  un  autre  jour  dans  l'année  auquel  ils 
peuvent  jouir  de  la  même  indulgence  pour 
une  fois  seulement.  Le  concours  des  pèle- 
rins éiail  si  grand,  le  jour  de  celle  fie  de 
Notrc-Dame-desAnges,  qu'il  y  allait  jusqu'à 
cenl  mille  personnes,  et,  [mur  emiêcher  le 
désordre,  les  officiers  d'Assise  et  de  Pérousc 
se  mettaient  sous  les  armes;  et,  quoique  la 
ferveur  des  fidèles  soil  bien  diminuée  pour 
toutes  les  autres  indulgences,  ils  onl  pour 
celle-ci  une  si  grande  vénération,  (jo'ij  est 
difficile  de  s'imaginer  le  nombre  des  pèlerins 
qui  s'y  trouvent  le  deuxième  du  mois 
d'août  :  en  sorle  qu'il  est  facile  d'y  voir  l'ac- 
complissement delà  propliéliede  saint  Fran- 
çois, lorsque,  refusant  les  lettres  patentes 
que  le  pape  lui  oITr.iil  pour  la  publication 
de  cette  indulgence,  il  répondit  à  Sa  Siiinlelé 
qu'étant  l'ouvrage  de  Dieu,  il  prendrait  lui- 
inémc  le  soin  de  la  divulguer. 

Nous  jivons  déjà  dit  que  le  pape  Inno- 
cent III  avait  seulement  approuvé  de  vive 
voi\  la  rè:;le  de  sainl  François,  et  qu'elle 
avait  été  lue  cl  approin  ée  aussi  de  \  ive  \  «lix 
dans  le  concile  général  lic  Lalran;  mais  le 
saint  fondateur,  voulant  avoir,  la  même  ;in- 
née  i-l-2:i.  li  conlirmalion  par  écrit  du  pape 
Honorius  III(vur  une  vision  qu'il  eul),  il  alla 
avec  deu\  compagnons  dans  la  vallée  de 
Uiéii,  et  monta  sur  le  mont  delà  Colombe, 
éloigné  de  deux  milles  de  la  ville  de  Kiéli, 
pour  retoucher  sa  règle,  invoquant  pour  cet 
effet  les  secours  d  i  ciel  par  un  jeûne  au  pain 
et  à  l'eau  qu'il  y  pratiqua  penilanl  ijuaranie 
jours,  ap  es  lesquels,  ayant  fait  érrire  celle 
même  règle  selon  (|ue  le  Sainl-Fsprit  la  iiii 
avait  inspirée,  il  descendit  de  la  montagne  et 
«'en  retourna  à  Assise,  où  il  la  donna  au 
P.  Hélic,  son  vicaire,  pour  la  lire  et  la  gar- 
der. .M.iis  celui-ci  la  trouva  trop  austère 
])our  lui  et  pour  ceux  qui  étaient  ]iortés  an 
relàclicn)ent.  Le  saint  alla  ctisnite  à  Home 
pour  en  demander  la  coiifiruiation  an  pape, 
<|ui  la  lui  accorda  [lar  une  bulle  clu  .'10  octo- 
bre (le  la  niémc  année.  (]etle  règle  est  plus 
rovjrlp  pt  plus  méthodique  que  celle  ijui  avait 
été  approuvée  de  vive  voix  par  Innocent  III, 
••I,  quoiqu'elle  ne  renferme  (|uc  do\l/e  clia- 
pilrc-i,  ils  contiennent  néanmoins  en  sub- 
Blancc  tout  en  i|tii  élail  marciué  dans  les 
ving'-troi»  cha|>itrcs  de  la  première. 

•-e  lui  l'an  \ii\  ipie  ce  sainl  fondateur 
connut  parlailemenl  (|uil  devait  travailler 
à  devenir  un  niodélcaccomivli  ii'unDieu  cru- 


ôi» 


cifié.  Dieu  le  lui  ayant  fiil  ronnj'.itre  par 
l'ouverture  du  livre  des  Kvan;;iles  ,  ce  qui 
arriva  de  la  manière  suivante.  Ce  saint  s'é- 
latit  retiré  sur  le  mont  Alverne  pour  y  jeû- 
ner quarante  jours  en  l'honneur  de  saint 
Mi(  bel,  et  y  priani  Dieu  avec  Ik  aucoup  d'iii- 
sl.iuces  de  lui  fiire  connaître  sa  vcdonlé, 
afin  de  s'y  conformer  eniièremenl,  il  eut  une 
forte  pensée  ijup  Dieu  la  lui  révélerait  à 
louvrrture  du  livre  des  Evangiles.  C'est 
poir(;uoi  il  dit  h  son  compagnon  de  l'ouvrir 
en  l'iioniipur  de  la  très-sainie  Trinité.  Ce 
fiu'ayanl  fait,  et  ayant  trouvé  par  trois  fois 
dJlTérenles  la  Pas»ion  de  No're-Seigneur  .lé- 
sus-Chrisl,  il  comprit  que,  comme  il  avait 
iuiiié  ce  divin  lïédeniplp'.ir  dans  toutes  les 
actions  de  sa  vie,  il  devait  lui  élre  aussi  con- 
forme dans  les  douleurs  et  les  souffrances 
avant  qu'il  mourût  :  ce  qui  ranima  telleuienl 
m  lui  le  feu  île  l'amour  divin  et  l'ardent  dé- 
sir qu'il  avait  d'être  crucifié  avec  .lésus- 
Cbrist,  qu'il  mérita  ce  qu'il  souhaitait  avec 
tant  d';ir.leur  :  car  le  jour  île  la  fête  de 
i'Fxaltation  de  la  sainle  C'oix,  qu'il  priait 
a>ec  plus  (11-  ferieurel  qu'il  était  tout  péné- 
tré de  douleur  de  celui  qui  par  un  excès  de 
chariié  a  voiilu  être  crucifié  pour  nous,  il 
vit  un  séraphin  descendant  du  haut  des 
cieiix,  qui,  s'approcbanl  de  lui  avec  un  vol 
piécipiié,  lui  parut  non-seulement  aie, 
mais  même  crucifié,  ayant  les  pieds  et  les 
mains  en  forme  de  croix.  Sa  létc  était  cou- 
verte de  deux  ailes,  deux  lui  servaient  pour 
voler,  et  ies  deux  aulics  lui  couvraient  les 
pieds. 

La  vision  disparut,  et  aussitôt  ce  sainl 
[lalriarcbe  s.entit  son  ccrur  eiifl  imtné  d'une 
ardeur  séraphique,  et  les  marques  des  plains 
du  Sauveur  p.irurenl  sur  son  corps,  par  li 
représentalii>n  îles  clous  dont  les  têtes  pa- 
raissaient très-dislinclcn;cnl  r.ii  dedans  des 
mains  et  sur  les  (lieds,  et  les  pointes  à  l'op- 
posé, la  cicatrice  du  côté  était  rouge  et  ver- 
meille, et  le  sang  en  coulait  souvent  en 
abondance.  On  ne  peut  douter  de  la  vérité  «le 
ces  sliginales  après  le  témoi;;nage  du  pape 
Alexandre  IV,  qui,  dans  un  sermon  qu'il  fil 
en  présence  de  sainl  Honaventure,  dil  les 
av  oir  vues  :  ce  qui  est  suflisainmpnl  confirmé 
par  les  dépositions  do  plusieurs  autres  per- 
sonnes, qui  assurèrent  aussi  la  même  chose, 
et  ()ui  ne  tirent  point  de  difficulté  d'en  faire 
leur  serment,  lorsque  le  saiol  fui  canonisé, 
aussi  bien  (]ue  par  le  bref  du  pape  Oé- 
goire  IX,  donné  l'an  1-2:57,  par  lequel,  souhai- 
tant qu'on  le  croie  fermemenl,  il  exhorte 
tous  ks  (idoles  à  ne  poiiil  écouter  le  con- 
traire. \  tituntuuen  grande  tic  singuinre  mi- 
riirulttm  (jiio  ip^Hin  sanclorum  fplendore  et 
i/loriii  Dominiis  Je.ius  Clirhlux  tnirnliiliierdti- 
lornvi!.  nnivrrsiiiiii  vsirœ  tennre  jirœsen- 
(iiiin  u(in  i)i.liipie  dn.rimu'i  cj-;i}-inicii(luin,  tt- 
delircl  i/iiad  idem  sanrltis  rum  ndhuc  spnliuin 
jiiirseniis  vilœ  pcrciirrrret,  et  poslguam  illud 
fcliiiler  consummnvil,  mavihus,  latert  ar 
prdibits  fpccie  slirimnlH'n  diiiiiiiiis  r.TsIilit 
insif/nitiis....  Igiliir  ci.in  id  <ib  ittiitrrsis  fidc- 
lihus  crcdi  firmilcr  ciii)iiiiu.i,  tlcvoiioncin  re- 
flrain  rognmHS  et   hmlntuur  iti  Domino  Jcfr, 


5i5 


ia.\ 


ra.\ 


3i6 


fhiistn,  in  remissionem  vobia  peccaminum  in- 
iuni/enili),  quatenus  nb  nsseï  lione  coniraiii 
aures  de  cœtero  penitus  averlenles  confrssorem 
cumdem  apiid  Deum  pin  rohix  reddalls  vene- 
raliiiiie  prcpiliitm.  Ce  ponlife,  qui  voyait 
souvent  saint  Françi-is  pendant  qu'il  vivaii, 
n'aurait  pas  parlé  <le  la  soi  le,  s'il  n'avait  été 
assuré  de  la  vérité  de  ces  siiRmates.  Be- 
noit XI  permit  d'en  faire  l'office  publiqiie- 
iiienl.  Sixte  IV  en  fit  insérer  la  mémoire  dans 
le  l\Iarlyrolo;;e'  romain  ;  et  Paul  V,  à  la 
prière  de  Philippe  III,  roi  d'Espagne,  sur  ce 
(lue  d.ins  quelques  lieux  on  avait  ci  ssé  de 
dire  l'olfice  des  Stip;mates  de  saint  François, 
en  fit  une  obligation  à  tous  les  ecclésia- 
stiques. 

Ce  saint,  après  avoir  demturé  encore 
(]uinze  jours  sur  le  mont  Alverne  pour  finir 
son  carême,  en  destendit  portant  l'image  de 
Jésus-Christ  crucifié,  gravée  non  sur  des  la- 
biés d'airain  ou  de  bois  (aillées  par  la  main 
de  ^ou^  rier,  mais  écrite  sur  sa  chair  avec  le 
do'gt  de  Dieu,  faveur  dont  il  s'eslimait  si 
indigne,  qu'il  faisait  son  possible  pour  la 
cacher  et  dérober  aux  yeux  des  hommis; 
mais  inuli  emcnt,  car  Dieu  nianif  s'a  ces 
signes  de  son  amour  pour  François  en  fai- 
sant plusieurs  mirac>s  qui  en  firent  con- 
naîlre  la  vrrlu  et  la  sainteté  à  tout  le  monde. 
!\la'gré  les  douleurs  qu'elles  lui  causaient, 
et  qui  étaient  quelquefois  si  violentes,  qu'il 
ne  pouvait  marcher,  il  ne  1  .issait  pus  de 
continuer  ses  fonctions  aposlo!i(iues,  se  fai- 
sant porter  pour  cet  t  ffet  sur  des  charrelt -s 
dans  les  villes  et  les  bourgades,  pour  animer 
tout  le  monde  à  porter  la  croix  de  Jésus- 
Christ.  C'était  là  tou'e  sa  science  ;  il  f;iisait 
profession,  comme  l'Apôtre,  de  ne  savoir 
point  d'autre  clrnse  que  Jésus  crucifié, 
n'ayant  poiut  fait  d'autre  étude  depuis  sa  con- 
version. 

Depuis  le  jour  qu'il  reçi  t  les  stigmates 
jusqu'à  sa  mort,  sa  vie  fut  toujours  laugiiis- 
sanle;  et  il  eut  tant  d'occasions  de  soulTrir 
pour  l'amour  de  Jésus-Christ,  qu'il  pouv^iii 
dire  avec  ce  divin  Sauveur  qu'il  n'y  avjit 
pas  une  partie  dans  son  corps  qui  fût  exemple 
de  souffrance  :  car,  outre  les  douleurs  dont 
nous  venons  de  parler,  et  qui  étaient  conti- 
nuelles, il  eut  un  mal  aux  yeux,  pour  lequel 
on  lui  fit  un  cautère  qu'il  soulïrit  avec  au- 
tant de  patience  qu'il  était  cruel  et  extraor- 
dinaire, puisqu'on  lui  brûla  la  peau  et  les 
chairs  juscju'aux  os,  depuis  l'oreille  jusqu'au 
sourcil  ;  et  il  eut  peu  de  temps  après  le  corps 
tout  brisé  par  une  chute  violente  qu'il  fit  par 
l'inadvertance  de  l'infirmier,  ce  qu'il  souil'rit 
avec  tant  de  patience,  que ,  bien  loin  de  se 
plaindre,  il  baisa  plusieurs  fois  la  terre  qui 
devait  bientôt  le  recevoir  dans  son  sein.  En- 
fin, Dieu  l'ayant  voulu  éprouver  par  toutes 
sortes  de  manières,  le  saint,  sentant  que  sa 
fin  approchait,  se  fit  transporter  du  couvent 
de  Font-Colombe  à  celui  de  Notro-Dame-des- 
Anges  proche  Assise,  pour  mourir  dans  le 
lieu  où  il  avait  reçu  le  premier  esprit  de  dé- 
voiion,  et  qui  avait  servi  de  berceau  à  son 
ordre.  Y  étant  arrivé,  il  se  fit  mettre  nu  sur 
•a  terre,  disant  (|u'il    voulait  combattre  en 


athlète.  Le  gardien,  voyant  sa  pauvreté,  prit 
une  méch  inle  robe,  avec  une  corde  et  un 
Cl  puce,  et  lui  dit  de  les  recevoir  par  aumône 
comme  un  pauvre:  ce  qu'il  lui  commanda 
en  vertu  de  la  sainteotiéissance.  Le  serviteur 
de  Dieu,  ravi  de  ce  qu'on  lui  donnait  par  au- 
mône un  habit  pour  sa  sépulture,  le  reçut 
pour  y  être  enseveli  comme  un  Frère  Mi- 
neur, à  roniiilion  qu'il  mourrait  nu  et  qu'il 
demeurerait  quelque  temps  en  cet  état  après 
sa  mort.  Ayant  fait  ensuite  assembler  tous 
ses  frères,  qui  se  trouvaient  pour  lors  dans 
cette  maison,  il  leur  donna  sa  bénédiciion, 
et  à  tous  les  absents,  de  la  manière  que  le 
patriarche  Jacob  l'avait  donnée  aux  enfants 
lie  son  fils  Joseph,  en  se  faisant  croiser  les 
bras,  et  mourut  tranquillement,  le  quatrième 
jour  d'octobre  de  l'an  1226,  dans  la  qua- 
rante-cinquième année  de  son  âge,  ayant  vu 
plus  de  quatre-vingts  maisons  de  son  ordre 
établies,  presque  d ms  tous  les  royauuies  de 
1 1  chrétienté.  Il  n'était  que  diacre,  son  humi- 
lité  l'ayant  empêché  de  recevoir  la  prêtrise. 
A  peine  fu!-il  expiré,  que  l'on  vit  en  son 
corps  un  changement  merveilleux  :  sa  peau, 
qiii  était  noire  et  brûlée  du  soleil,  devint 
Manche  comme  la  lieige;  les  stigmates  s'y 
découvrirent  avec  plus  d'évidence  qu'aupa- 
ravant :  on  eut  alors  toute  la  liberté  pour 
les  examiner,  et  toute  la  ville  d'Assise  ac- 
courut pour  voir  ces  signes  salutaires  de  no- 
Ire  rédemption  dont  Jésus-Christ  l'avait  fa- 
vorisé, et  que  son  humilité  lui  avait  fait  ca- 
cher pendant  sa  vie.  Le  lendemain,  de  grand 
matin,  l'on  porta  dans  la  ville  d'Assise  ce  sa- 
cré dépôt,  escorté  d'une  multitude  incroya- 
ble de  peuples,  qui  avaient  des  rameaux  ou 
des  cierges  à  la  main.  Il  fut  porté  en  passant 
dans  l'église  de  Saint-Damien,  pour  donnera 
sainte  Claire  et  à  ses  religieuses  la  satisfac- 
tion de  le  voir  et  de  baiser  ses  stigmates,  et  on 
l'enterra  ensuite  dans  l'église  de  Saint-Geor- 
ges, où  Dieu  rendit  son  tombeau  glorieux 
par  le  grand  nombre  des  miracles  qui  s'y  fi- 
lent. 

Le  P.  Hélie,  qui  était  vicaire  général,  écri- 
vit une  lettre  circulaire  à  tous  les  couvents 
lie  l'ordre,  pour  leur  donner  avis  de  la  mort 
du  saint  fondateur.  Grégoire  IX,  ayant  fait 
assembler  le  chapitre  général  l'an  1227 ,  y 
voulut  assister,  et  le  gouvernement  de  l'or- 
dre fut  mis  entre  les  mains  du  P.  Hélie,  qui, 
affectant  beaucoup  de  piété  et  un  grand  zèle 
pour  maintenir  la  régularité,  fit  difficulté 
d'accepter  le  généralat,  sous  préîexte  de  ses 
infirmités  et  de  son  peu  de  capacité;  mais  il 
ne  faisait  cela  que  pour  en  venir  à  ses  fins, 
qui  étaient  de  se  procurer  ses  aises  et  ses  com- 
modités au  préjudice  de  la  régularité, en  trom- 
pant par  ces  belles  apparences  les  religieux, 
qui,  le  voyant  si  humble,  l'en  crurent  plus 
digne,  cl  consentirent  que,  selon  qu'il  en  au- 
rait besoin,  il  pût  se  dispenser  en  quelques 
choses  des  austérités  de  la  règle,  et  se  ser- 
vir de  montures  dans  ses  voyages.  A  ces 
conditions  il  accepta  l'office  de  général,  et 
fut  le  premier  après  saint  François.  Ce  qu'il 
fit  de  mieux  pendant  tout  le  temps  (ju'il  gou- 
verna l'ordre,  fui  qu'il  procura  la  canonisa- 


517                               niCTioNNAintinisoitonES  r.r:Li(.ii;ux.  sis 

lion  i\c  rc  s.iiiil  fiMiilaUMir,  (juo  le  |  ape  »!rc-  faniillc  osl  onrorc  divisée  en  provinces,  vi- 
Ci'iro  I\  lil  avec  ln-aiirou|i  de  Sdli-iiiiiii'  l'an  cair  es  cl  Ciislodies.  On  eiilcnd  par  proviii- 
12-JS,  ol  «lonitit  son  tulle  dans  lou'e  l'église,  ces  l'union  de  certain  nonihre  de  cnuvenls 
en  livanl  si  fêle  au  V  o(lol>re,  par  une  bulle  sous  un  ciief,  qui  dépciid  du  ijenéral.  On  ap- 
qu'il  piililia  ou  iliO.  On  n'eut  pas  pliilol  pelait  au  coinnicncfiiuenl  de  Tordre  vicairie 
.iclicve  la  ci-romonic  de  la  lanonisalioii,  (lue  t|uolquos  couvenis  unis  ensenil)le  qui,  à 
l'on  iiav.iilla  aux  foiideiiieiils  d'une  éi;lise  cause  de  leur  pciil  nombre,  ne  pouvaient  pas 
inapiiilique,  qui  devait  cire  dédiée  en  son  jouir  de  la  di;;nilé  et  des  prérogatives  des 
lu.niicur  pri''S  des  murs  d'Assise.  Le  pape  pro»inces.  Sous  le  pape  lùif;ène  I\',  les  con- 
v.ului  incitrc  la  première  pierre,  cl  donna  };ré^alions  provimiales  de  l'Observance  , 
de  f;rosses  sDUimes  pour  contribuer  à  cet  é.li-  quoiqu;;  consiJcrabk'S  par  le  praïul  nombre 
lice,  dont  il  donna  le  soin  au  général  Ilélie,  des  couvents,  n'avaient  néanmoins  queleliiro 
qui,  par  une  iransgressioii  manifeste  à  la  ré-  de  vicairies  ,  iiaice  qu'elles  étaient  subor- 
j;lc  du  saint  p.itriarehe,  lil  oicltrc  des  troncs  données  au  minisire  provincial  de  la  cmn- 
ilans  celle  éi;lise,  et  faire  une  quéle  d'argent  iminauté  ou  des  (Conventuels;  et  l'un  appelait 
dans  toutes  les  [)rovin(U"S.  Nous  avons  vu  vicaires  provinciaux  ceux  qui  étaient  supé 
dans  l'ariicle  Cksauixs  les  troubles  tjue  cela  i  leurs  de  ces  con;;ré, rations  ,  parce  qu'ils 
causa  dans  l'ordre,  aussi  bien  que  le  rclâ-  étaient  obliijés  de  demander  leur  confiruia- 
cliLMiient  que  i]uelquesaulrcsgénéraux  intro-  lion  au  provincial;  mais  elles  ne  laissaient 
duisircnt  dans  la  suite.  Nous  nous  contente-  pas  de  jouir  des  prérogatives  des  provinces  : 
ions  de  raj  j'orter  ici  en  peu  de  mots  l'clat  ce  qui  dura  jusqu'à  la  bulle  d'union  de  Léon 
présent  de  cet  ordre,  qui  s'est  étendu  dans  X,  dont  nous  parlerons  dans  la  suite, 
toutes  les  parties  du  momie,  où,  nonobstant  On  appelait  aussi  cuslodies,  au  commeii- 
b  s  liérésii  s  dont  lAnglelerre,  rr.cossc.  Tir-  cemcnl  de  l'ordre,  quel()i;es  couscnls  (|iii 
lande,  le  Danemark,  la  Suède,  la  Slollande  ('.lisaient  partie  d'une  province  qui,  à  cau.-c 
et  plusieurs  autres  provinces,  tant  en  Alli-  de  sa  trop  grande  étemlue,  ne  [louvant  pas 
tiiagneque  dans  d'autres  paj's,  ont  été  infcc-  être  gouvernée  par  les  provinciaux,  éiait 
lees,  et  où  l'ordre  de  Saint-François  a  per<lu  divisée  eu  plusieurs  custodies  gouvernées 
une  infinité  de  monastères  de  l'un  et  l'autre  par  des  custodes,  dépendant  toujours  iiéan- 
se\e,  il  ne  laisse  p  is  d'avoir  encore  pins  moins  du  provincial  de  colle  province,  qui 
desepl  mille  maisons  d'iiommes,  tant  de  l'Ob-  était  obligé  d'y  faire  la  visite  tous  les  ans. 
scrrance,  Decbaussés,  Ivéforinés,  HécoLels,  l'résenleaiCiit  les  custodies  ont  succédé  aux 
(Conventuels,  (Capucins,  que  du  Tiers  Ordre,  vicairies,  et  celles  qui  ne  dépendent  d'aucun 
danslcs(\uellesil  y  a  plus  lie  cenl(iuinze  niilie  [iruvincial  sont  immédiatement  sujettes  au 
religieux  ;  et  plus  de  neuf  cents  monastères  général.  Kllcs  tiennent  leurs  chapitres  en 
de  lilles,  lanl  Clari^ses  et  Urbanistes,  que  du  particulier,  ont  un  délinito;rc  cusiodial  ef 
"l'iers  Ordre,  de  la  (Con<  C|jlion  et  Annoiuia-  se  gouvernent  d'cllcs-uiémes  sou.  l'aulorilé 
des,  toutes  soumises  aux  supérieurs  du  pre-  d'un  custode;  et  les  préfectures  sont  les  inis- 
miereldu  troisième  ordre, d.ins  lesquels  ilj  a  sions  parmi  les  infidèles, 
plus  de  vii'gt-liuit  iiiille  trois  cents  religieu-  La  Famille  Cismontainc  a  soixnnte-six 
ses  :  ce  qui  soconiKiit  parles  cliapilros  gêné-  provinces,  trois  custodies  et  six  prélectures; 
taux  deces  dilTerentes  congrégations,  où  l'on  j'illtraiiiontaine  a  quatie-vingl-unc  provin- 
fail  toujours  le  calcul  des  maisons  ctdesreli-  ces  et  plusieurs  custodies  ;  et  toutes  ces  pro- 
j^ieux  el  religieuses,  sais  compter  les  monas-  \  inccs  et  custodies  sont  soumises  à  un  géiié- 
lères  de  lillcs,  qui  sont  sous  la  juridiction  des  rai  qui  prend  la  quali  é  de  ministre  général 
ordinaires  des  lieux  où  ils  sont  silues,  et  qui  de  tout  l'ordre  de  Saiiil-Fr. niçois.  Il  a  encore 
sont  aussi  en  lrès-;^ranil  nom!)re.  sous  sa  juridiction  les  Clarisses  et  Urbanis- 
Tout  l'ordre  do  Saint-rrar.çois  est  divisé  tes,  et  les  religieux  du  Tiers  Ordre  de  Saint- 
en  plusienis  hranelies,  «lui  sont  les  religieux  rrant;ois,  (jui  oui  une  pro\  ince  eu  Portugal, 
lie  l'Observance,  les  Déchaussés,  Kelormés  deux  en  lispagne,  et  quatre  en  France.  Les 
ri  Kécollets,  qui  se  disent  de  rFtroite  Obser-  CCouv  nluels  ont  un  général  qui  prend  le 
vaiice,  les  r.oin  cnluels  elles  Capucins,  qui  titre  de  m.;îlre  général  des  Frères  Mineurs 
(orincnt  Ions  le  premier  onlre.  Les  Clarisses,  (Conventuels;  cl  les  Capucins  en  ont  aussi  un 
irbanistes  et  (Capucines,  qui  sont  du  second  (jui  se  dit  ministre  général  des  Frères  Mi- 
ordre;  et  le  troisième,  qui  n'avait  été  insti-  neurs  Ca|jucins.  Les  religieux  du  Tiers  Ordre 
tué  par  saini  François  que  pourdes  séculiers,  en  Italie  en  ont  aussi  un  parliculiei ,  que 
r.oiii|reiid  aussi  <les  religi;ux  el  religieuses,  c<'ux  de  Flandre  reconnaissenl  pour  supé- 
qui  foiineiil  diflércntes  congrégations.  Les  rieur,  (^eux  d'.Vlleniagne  sont  peu  connus, 
leligieux  du  [iremier  ordre  de  l'une  el  i'au-  el  font  bande  à  part,  l,i  plupart  étant  souuiiii 
Ire  observaiici!   sont  di»i-és  en  Famille  (Ci*-  aux  évéqnes. 

moni.'iiiK.' el  l.'lramontaine.  La   Cis<iioiilaine  Le  gi'iiéral  de  tout  l'ordre  de  Saint-Fran- 

(diiiprcnil    les  coiivcniï  (|ui  sont  en  Italie,  rois  est  à  l'aiternniive  de  11  Famille  Cismon- 

ti'iis  d'Alli  magne  su|  érii  ure,  la  Hongrie,  la  tiinc   ou   de   rUllramuntaiiie,  et  depuis   uii 

roiogiie,  et  les  autres  ()ui  sont  en  S\ricet  leinjis   considérable  on    choisit  tonjonis   un 

dans  la  l'alesliue,  L'L'Ilramuntaine  est  coui-  sujet  du  roi  d'I'Cspagne.  Comme   la   rèule  ni 

piivcc  de  couvents  de  France,  d'I'Cspagne,  de  les  slaluls  de  l'ordre  ne  nianiuent  point  lu 

l'Alleuiagne   inférieu  e,  de   S, . xe  ,  jusqu'au  temps  que  iloit  durer  son  office,  les  premiers 

«oiitinenl;  les  îles  de    la  Méditerranée.  i'.\-  généraux    l'exerçaient  jusqu'à  leur  iiioil,  à 

Iriquc,  rA.sic  vt  Ici  Iiidcs,  L'uuc   cl  l'autre  luuiui   iiu'ils   n'y   rcuun<;asscut    volunlaire- 


ment,  comme  firent  Ips  bieiilnuniix  Jo.m 
!»arei»t  f'I  Jenn  do  rariiie;  on -iiuili^Té  cu-x, 
comme  firent  K.iimoml  C.jiufrcdi  ,  (lar  ordre 
de  l5oi)il'a<e  \III,  ft  (lilles  Delpliino.  Il  v  en 
n  iii(''nic  i|iii  ont  été  dé;  osés,  coriitiie  Uélio 
lie  Corloiiiio,  Ciesceiiza  Esiiis,  Miclicl  do 
(li'sèiic,  Antoine  de  Massa,  Kaimond  de  ('ot- 
liiiuala  et  Paul  Pisoli:  mais  en  ôlanl  à  ce 
dernier  le  goiivernenicnt  do  l'ordre,  on  Ini 
laissa  le  lilrc  de  général.  Le  |)apo  Jules  II, 
(]ni  avait  été  pendant  vingt-sis  ans  prolec- 
U'ur  de  l'ordre  avant  (]ue  de  niontor  au  sou- 
verain pnnliiical,  voyant  ijuo  l'office  de  j-'é- 
nér.il,  <|ui  était  à  vie,  appoitaii  un  préju'lice 
considérab'e  à  l'ordre,  le  réduisit  à  six  ans 
seulement,  d;ins  le  sixième  chapitre  jiénéi  a- 
lissime  qui  se  linl  à  Rome  l'an  loOG,  après  la 
renonciation  forcée  de  Gilles  Uclphino.  Hai- 
mond  de  Cotlignola  fut  élu  pour  le  premier 
général  [lour  sis  ans,  confurn'.ément  à  celte 
réduction  de  Jules  I!.  l'ie  V,  par  une  bulle 
de  l'an  1571,  ordonna  que  tes  générauK 
exerceraient  leur  olOce  pendant  huit  ans; 
mais  Sixte  V,  Tan  1387,  le  remit  à  six  ans, 
comme  il  avait  élé  ordonné  par  Jules  II.  Si 
le  général  meurt  avant  que  d'avoir  fini  ce 
temps,  ou  qu'il  soit  élevé  à  quelque  dignité 
de  l'Eglise,  on  lui  sulistiUie  un  vicaire  géné- 
ral qui  est  élu  par  les  pères  discre's  perpé- 
tuels de  l'ordre,  qui  sont  ceux  qui  ont  exercé 
l'office  de  général  ou  qui  ont  été  vicaires 
généraux  pendant  deux  ans,  s'ils  sont  pré- 
sents dans  l'une  et  l'autre  famille,  c'est-A- 
dire  Cismontaiiie  ou  Uliramoiitaine,  ne  de- 
vant point  cire  appelés  s'ils  sont  abicnls. 
Dans  la  Famille  Cismontaine,  on  doit  appeler 
à  l'élection  le  procureur  iréncral,  le  commis- 
s.iire  général  en  cour  de  Home,  le  procureur 
général  des  Uélormés ,  tous  les  déiinitours 
généraux  cismontains  et  les  ullratnonlains 
qui  se  trouvent  au  lieu  de  l'élection,  aussi 
bien  que  le  provincial,  le  vicaire  ou  com- 
missaire de  la  piovince  dans  laquelle  se  fait 
l'élection  ;  et,  dans  la  Famille  Ultramontaine, 
le  vicaire  général  est  élu  par  le  ccmmissaire 
général  des  Indes,  les  déiinileurs  généraux 
de  la  nal  on  seulement  où  se  fait  réiection, 
el  les  autres,  s'ils  sont  présents,  avec  six  des 
provinciaux  les  plus  proches.  Si  le  géiiéial, 
aviiit  que  de  mourir,  n'a  pas  fini  son  pre- 
mier triennal,  ou  qu'il  donne  sa  renoncia- 
tion, ou  qu'il  ioil  déposé,  ou  qu'il  soit  élevé 
à  quel([iie  dignité  do  l'Kglise,  le  vicaire  gé- 
néral qui  lui  succède  ne  peut  pas  gouverner 
l'ordre  jusqu'au  premier  chapitre  général, 
mais  il  doit  assemider  les  vocaux  de  sa  fa- 
mille et  procéder  à  l'élection  non  d'un  vi- 
caire, mais  d'un  iisinislre  général.  Que  si  le 
général  meurt  avant  que  d'avoir  fini  son 
second  triennal,  ]v.  vicaire  générai  qui  lui 
est  substitué  doit  finir  ce  qui  restait  de  ce 
triennal,  et  il  ne  peut  être  de  nouveau  élu 
général  qu'après  seize  ans  de  vacance.  Ce 
qui  a  toujours  été  observé  jusqu'en  l'an  1700, 
que  le  révérendissime  P.  Je. m  de  Las  Torrcs 
lut  élu  général  dans  le  chapitre  qui  se  tint  à 
Konie.  Ce  général  étant  mort  l'an  1701,  ou 
lui  substitua  le  révérendissime  P.  Alphonse 
do  liicziud,  pour  lors  touiniissaire  ijéiiéiul 


Ff.A 


5n0 


des  Tndes,  qui  fut  confirmé  en  qualité  do  gé- 
néral par  II!  papeClémenI  XI.  Mais  à  la  lin 
du  second  triennal,  n'ayani  pu  faire  tenir  le 
cliapiire  général  à  cause  de  la  guerre  tloni 
l'îùirope  a  élé  affligée  depuis  l'an  1700,  il 
fut  d'abord  continné  dans  son  ofllci'  pour 
deux  ans  par  le  même  Ciémeni  XI,  par  un 
brefde  l'an  170G,  el  enfin  jusi]u'à  la  conclu- 
sion de  la  paix  par  un  antr<'  bref  de  l'an 
1707.  Mais,  élanl  mort  en  1710,  et  les  mêmes 
r.iisons  qui  ont  empêché  l'assemblée  d'un 
chapitre  général  depuis  1700  subsistant  en- 
core par  les  prétentions  do  l'emiiereur  (^.har- 
les  ^'1  sur  les  royaumes  d'IîsfiajJîi.ie,  nonob- 
s'ant  la  jusle  [icissossion  de  Philippe  V,  le 
révérendissime  P.  Joseph  de  tîarcia  lui  l'ut 
substitué  par  l'élection  qui  m  fui  faite  selon 
la  pratique  de  l'ordre  en  sensblables  cas  :  ce 
(]U!  a  élé  confirmé  par  un  bref  de  Clément  XI, 
en  vertu  duquel  il  jouit  de  tous  les  droits  cl 
do  la  qnalitô  do  général. 

On  élit  aussi  dans  les  chapitres  généraux 
un  commissaire  général  pour  la  famille  dont 
le  général  n'a  point  élé  lire.  Pour  conserver 
la  pais  entre  les  religieux  de  l'une  el  l'autre 
observance,  on  déciéta,  dans  le  chapitre  gé- 
néral tenu  à  liome  en  tOGi,  que  le  commis- 
saire général  sera  pris  à  l'alternative  d'entre 
les  Observants  et  les  Réformés,  el  qu'ils  au- 
raient également  des  définitcurs  généraux  : 
ce  qui  fut  approuvé  par  le  pape  Alexan- 
dre VII.  Il  a  le  même  pouvoir  dans  sa  famille 
que  lo  général  dans  tout  l'ordre,  cxcepié 
qu'il  ne  peut  nommer  aux  offices  dont  la 
nomination  appartient  de  droit  au  général. 
11  peut  même  faire  valoir  S'  n  autorité  en 
présence  du  général,  esceplé  dans  les  pi(!- 
vinces  que  le  générai  s'est  réservées.  Son 
office  ne  dure  que  pendant,  un  triennal.  Le 
général  pouvait  autrefois,  quand  bon  lui 
semblait,  ne  pas  assembler  de  chapitre  pour 
en  élire  un  autre,  et  il  lui  était  permis  de 
faire  élire  un  vice-commissaire  jns(ju'au 
premier  chapitre  général  par  les  iiéres  dis- 
crels  de  la  famille  dont  le  commissaire  gé- 
néral était  tiré.  Dans  le  chapitre  général  do 
Rome  de  l'an  1G76  on  fit  un  décret  par  lequel 
le  commissaire  général,  aussi  bien  (pie  les 
déSnilours  généraux  de  la  même  famille, 
exercerait  son  oflce  depuis  un  chapitre  gé- 
néral jusqu'à  l'autre;  mais  Innocent  XI  ne 
voulut  pas  approuver  ce  décret,  el  même  io 
révoqua  par  une  bulle,  ayant  donné  ordre 
au  général  de  tenir  un  chapitre  pour  l'élec- 
tion d'un  commissaire  général.  Ainsi,  ou 
vertu  de  la  Imlie  do  ce  ponlife,  après  que  lo 
commissaire  général  a  fini  son  triennal,  les 
vocaux  de  sa  famille  en  élisent  un  antre,  à 
moins  que  la  tenue  du  chapitre  ne  soit  em- 
pêchée p::r  la  guerre,  auquel  cas  le  général 
peut  continuer  lo  commissaire  jusqu'à  ce 
(juo  le  chapitre  se  puisse  tenir,  ou  bien  il 
peut  de  son  autorité  en  nommer  un  autre 
de  la  même  famille.  Ce  commissaire,  après 
son  triennal,  est  discret  [)orpélael  dans  ia 
même  famille,  et  ne  peut  être  de  nouveau 
élu  couMnissaire  général  ou  ministre  général 
(ju'après  avoir  vaqué  seize  ans,  à  moins  qu'il 
ii'tu  soit  dispoii.é  pur  le  saint  siège. 


5-,                                          niCTIONNAlIlE  DES  ORDRES  UKLIGIELX.  553 

Lrs  principntiï  offres  de  l'orJro  à  In  no-  anlrcs    rcrsonncs  de  l'un  cl  l'.a.lre  scx-  qui 

n-ii.nli'.n   .lu   pen6r.il   sonl  ceux  .le  commis-  onl  répnn.lu  l.-ur  sanR  poijr  l.;_nom  .le  Jesiis- 

8.-..re,l.-.  l,..i.'sresidnnlàlaco..rduroi.ri'S-  Llmsl,   ou   qui    onl    mcncdelre   regardes 

j.apne,  le  commissaire   en  cour   de  ll..me  et  comme  sa.i.  s  par  .a  pureté    <.o     eur   v.e.la 

le  procureur  pneral  de  la  r.-puliere  ol.ser-  n!:.,eur  de  leur  pénitence  etlo^don  des  mi- 

vance.  q..léiait  a.itrefois  commun  pour  lous  ra  les.   Sans  parler  ues.unl    Bonaventure. 

les  relisieux  de  l'une  et  Tauire  ohservan.e;  qui  a  me.iié  le  litre,  de  D.Kleur  Serapii.que ; 

mais  les  H.formcs  dltalio    en   nl.liuienl   un  de  s:i.nl  Antoine  de   Padoue.  dosant  Rer- 

du   pnic  (^li-ment  Ml!,  l'an  1(;03.  Il  fut  d'.i-  n.irdin  de  S  enne,  de  saint  Jean  Cajuslran, 

bord  iiisliiuépar  lespenéraux;  maisparun  et  de  saint  Louis,  evéquc  de  Toulouse,  qui 

bref  d'I'rb  lin  VIII  de  l'an  1(3:2.  il  est  présen-  ont  fait  un  des  plus  l.e.iux  ornements    de  oc 

teineni  à  la   nomination  du  cardin.il   protec-  '"''me  or.lrc,  qui   se  gloiili,"  d'avoir  eu  aussi 

leur.  L'an   Iti.'i.i,   on   accorda   au\  Fr.incais  Alexandre  de  Haies,  maître  de  saint  Rona- 

un  aj-eul  en  courde  Home;  mais  ils  ontaûssi  venlurc.   et   Jean    Duis,  surnomme   Scot   à 

obtenu  un  procureur  pcnéral    l'an    170V.  11  cause  qu'il  était  Ecossais.  au.]uc  on  a  donné 

n'y  a    néanmoins   que  le  procureur  pénéral  le  nom  de  Doclcur  Sublil,  pour  avoir  défendu 

de  lobs.'rNance  qui  ail   place  dans  les  <ba-  •■'u-c  autant  de   force  que   d'erud::ion  la  vé- 

polles  papales.   Le  général  nomme  aussi  le  «i'^'  de   l'immainlée  coiiceplion   de  1 1  sainte 

gardien  du  couvent  du  Mont-de-Sion  àJéru-  ^■ie^ge,  que  l'ordre  prit  pour  patronne  sous 

^.:Ienl.  ou  du  Sauil-Sépiil.re.l.'quel  est  coin-  relitiC.  dans  le  chapitre   péiiéral  qui  se  tint 

iiiissaire  «-t  nonce  apostolii|ue  dans   la  terre  à  Tolède  l'an   IGio.  Nous  irions  lro|i  loin  si 

.'•ainlc.  cl  a    droit   de   se  servir  d Oriieinenls  nous   voulions    parler  de    tous   les   céiibres 

pontiticaux.  Le  couvent  d'Aracrli  à  Kome,  écrivains  qui  en  sont  sortis.  Wadiniiue  en  a 

et  le  graii.l   couvenl  d  s  Cnnielieis  de  l'aris  lionné  uii  talalogue  qui  contient  uii  volume 

sont  aussi  -ou mis  immédialement  ,-iu  gêné-  in-folio,  cl  dont   le  nombre   a  élé  bien  aug- 

ral,  aussi  bien  que  l'hospice  des  IV'iiilcnciers  nienlé  depuis  l'an  IGoO,  qu'ii  fulimpriméà 

de   la   basilique  de   Saint-Jean-de-Lairan    à  Uonie.  Les  personnes  qui  onl  été  cmidojées 

lîome,   qui  sont  des  religieux  l?élormés;  le  P'T  les  souverains  .lonlifes  el  les  princes  do 

couvent  <Ic  Saint-Pierre  Îii-Montc-Uno  d.-  la  l'Europe  dans  les  légations  ci  les  aiïaiies  i/n- 

nirnie    ville,    oîi   l'on   enseigne  les  langues  portantes  sonl  aussi  en   trop  grand   nombre 

orientales;   le  gardien     de   Cousiantinople,  pour  en  faire  un  détail.  Le  pape  (jrc;.'oire  1\ 

ijui  est  commissaire  sur  les  couvenis  de  Chio  donna  ordre  à  Haimon,  général  de   l'ordre, 

de  Smjriie  el  quelques   autres  du    Levant;  de  réformer  le  Bréviaire  et  le  Missel  romain, 

les  pauvres  Claiisses  de  Madrid  .1  de  Vienne  et  les  corrections  qu'il  y  Til  ne  furent  pas  seu. 

<n  Aulricbe.  les  Urbanistes  du  célèbre   nio-  lemenl  reçuesdans  l'oidn  de  Saint  François, 

iiaslère  du    Sainl-Suremenl   de   Naples,   el  mus  elles  le  lurei:l  aussi  dans  toute  l'Kglise. 

celles    do    Sainle-Marie-I'gyplienne   de   la  t.iémenl  Vil  d.mna   ordre  aussi  au  cardinal 

niéuie  ville.  Quignonez.   qui    aval'  été  général  ilu   même 

L'ordre  de  Saint-François  a  donné  à  Î'E-  ord  e,  de  composer  un  Bréviaire  par  iculicr 
g'i>.c  quatre  papes,  qui  sont  Nicolas  IV,  pour  les  personnes  de  sa  cour,  e.iii  lut  aj)- 
Al  xandre  V,  Sixic  IV.  el  Sixte  \ ;  quarante-  prouvé  par  son  successeur  Paul  lil  et  impri- 
ciiiq  cardinaux,  un  nombre  infini  de  pa-  nié  pour  la  prcm  ère  fois  à  Home  en  l.'iîlo.  La 
iriarclies,  .l'an  hevéqnes  cl  d'évéqucs  .  cl  commodiié  de  ce  Bréviaire,  qui  élail  lurt 
deux  de.  teuis  duSaiiil-Empire;  lanl  de  per-  couri,  et  di  posé  de  li  Ile  sorte  qu'on  lisait 
Sonnes  illustres  par  leur  science  el  parla  l'Ecriluie  sainte  pendant  lonli  l'année  cl  le 
s.riniclé  de  leur  vie,  ou'il  est  pres.iue  im-  Psautier  euinr  chaque  si  maine.  fil  que  plu- 
possible  d'en  f.iire  le  détail;  non  plus  que  sieurs  personnes  voulurent  >'en  ser»ir;  il 
des  missionnaires  que  cet  ordre  a  produiis  "  .V  avait  (]ue  les  prclres  el  les  ciercs  sécu- 
dans  les  siècles  passés,  .(ui  s.î  sont  cIimuIus  '''TS  qni  le  pussent  réciter,  cl  encore  avec 
dans  tant  de  pays  dirTeieuls,  que  l'on  peut  ""c  pi  rmission  particulière  du  sainl-siége, 
dire  <iu'i!s  oui  lail  enlciutre  leur  voix  par  ce  qui  dura  jusqu'à  la  réformalion  du  Bré- 
louli-  la  terre,  et  qu'ils  onl  porlé  la  parole  viaire  romain,  laite  l'an  l.'JGS  p;ir  ordre  de 
de  Dieu  jusqu'.'i  ses  exlremili-s  les  plus  re-  1''"  ^  .  qui  supprima  tous  les  aiUres  lîre.iai- 
culecs.  sans  parler  de  ceux  .|ui  sonl  eucore  res  speci.ileineiil  celui  .lu  cardinal  (,)ui;jno- 
prcsentemcnl  occupés  .lans  les  qu.ilre  par-  n^z,  donl  il  y  a\ait  eu  un  Irès-grand  liomhri; 
lies  du  iiioude  à  la  cim>er>ii)n  de  inn.léles.  .l'éditions,  mais  toutes  falsifiées,  à  l-'î  réser»o 
lieielii|iies  cl  fcliismalinues.  Il  se  glorifie  des  trois  premières,  qui  sonl  très-rares, 
d'avoir  i|uaranli--six  martyrs  (|ui  .)nt  été  mis  Outre  la  Bible  d'AIca  a  en  langue  latine, 
an  <  .iialouiie  des  saints  cl  donl  ou  f.iil  l'of.  grecque,  hébraïque  el  cbaldaïque,  que  le 
fi  c  d.ins  tout  l'orilre.  il  y  en  a  dix-sejit  qui  cardinal  Ximenès  fil  faire  à  ses  dépens,  on 
uni  ctc  canonisés  sous  le  (lire  de  confesseurs  ;  lui  est  aussi  obligé  .le  nous  avoir  ouservô 
plusii'urs  auiri's  à  qui  l'Eglise  a  donné  le  r.incien  f)ffice  mo/araliique,  donl  les  cxem- 
niirn  d.;  bienheureux  el  dont  eLe  a  permis  plaiies  sont  .levenus  Irès-rares,  principale- 
de  faire  l'i.ffice.  L'an  !(;28,  .lans  le  chapitre  menl  le  Missel,  quoiqu'il  en  eût  fait  tiier  un 
geiicr;il  qui  se  tint  à  Uome,  l'i  n  en  complail  liès-grand  noml.re  d'exemplair,  s. 
unaire-v  liigt>  donl  .)n  poursui\ait  l.'i  can.ini-  L.'  vérilalde  habillem.'iil  de  saint  Fran- 
»..iion,  el  n-  iDiiibre  esl  angmenlé  depuis  ce  çois  consisiait  en  une  robe  de  mé'li.'inl  dr;i|) 
Icmps-là  jus.)u'à  cent  quaire,  aux.jucis  on  de  couleur  de  cendre,  avec  un  capuce  p.nnlu 
puurrail  encore  ajouter  plus  de  deux  mille  allaclié  ù  la  niôiiic  rcbc  faite  eu  forme  du  sac< 


coiiiiiie  on  le  peul  voir  dans  IVstampc  qui  est 
aucomtnenci'siieiitileceloine  (1).  Ses  inemiers 
disciples  claieul  aussi  habillés  de    la    même 
manière.   De   toutes  les  congrégations   qui 
subsistent    encore  sous   le    nom    de   Frères 
Mineurs,   comme   Observants,    Déchaussés, 
Réformés,  Récollets,   Conventuels   et  Capu- 
cins, il  n'y  a  que  l'habit  de  ces  derniers  qui 
approche  le  plus  de  celui  de  saint  François; 
ils  ont  seulement  élargi  etallon;;é  le  capuce, 
par  la  forme  pyramidale  qu'ils  lui  ont  don- 
née. La  pauvreié  de  cet  habillement  ne  tanla 
pas  longtemps  à  être  altérée   par   la   vanité 
du  P.  l'iélie,  qui,  ayant  i-ris   un  habit  plus 
ample,  en  lut  repris  par  saint  François  d'une 
manière  aussi  sévère  qu'elle  était  humilian- 
te ;  car  ce  saint  fondateur  le   lui   ayant  de- 
mandé, s'en  revêtit,  et,  après  s'être  promené 
avec  ostentation  en  présence  de  ses   frères, 
du  nombre  desquels  était  ce  premier  infrac- 
leur  de  la  pauvreté,  il  le  dépouilla  et  lejcia 
par  terre  avec  indignalion,  en  disant  que  les 
bâiards   de    l'ordre    étaient    ainsi    habillés. 
Saint  Bonavenlure,  dans  le  chapitre  général 
de  Nai  bonne,  l'an   12t)6,  (il   du  cbangement 
dans  Ihabillement,   premièrement  afin    que 
les  religieux  fussent  distingués  des  bergers, 
et  secondement  pour  ôter  un  abus  que  quel- 
ques-uns   avaient   introduit ,    qui  était    de 
p  )rter  des   capuces  amples    qui  ,  ne    pou- 
vant pas  bien  couvrir  leur  léte,  les  obligeaie.it 
à  y  ajouter  des  aumusses  ;  c'est  pourquoi  il 
ordonna  que  les  capuces    seraient    ronds, 
attachés  à  une  espèce  de  mosette  aussi  ronde 
par  devant,  qui  se  terminait  en   pointe   par 
derrière.  La  d.lïérence  qu'il  pouvait  y  avoir 
entre  ces  sortes  de  capuces  et  ceux  que  por- 
taient les  bergers  de  ce  temps-là  ,  c'est  que 
les   capuces  des    bergers  étaient  pointus   et 
longs,  et  ceux   que    saint   Bonavenlure    (Il 
prendre  à  ses  religieux  étaient  rondsetcourls; 
mais  les  uns  et  les  autres  avaient  des  moset- 
les,  et  il  y  a  bien  de  l'apparence  que  le-  ber- 
gers les  portaient  encore  de  celte  forme  sur 
la  lin  du  quatorzième  siècle   et  le  commen- 
cement du  quinzième,  car  j"ai  vu  des  Heu- 
res en  vélin  qui  étaient  à  l'usage  du  cardi- 
nal Jean  d'Armagnac,  mort  l'an  li09,  où, 
entre  les  miniatures  qui  y   sont,  il  y   a   un 
berger  représenté  avec  un  capuce  pointu   et 
une  mosette,   comme  on   peut  voir  dans    la 
figure  que  nous  avons  fait  graver  (2).  U  y  a 
bien  de  l'apparence  que  cette  forme  d'habil- 
lement, qui  fut  ordonnée  dans  le  chapitre  de 
ISarhonne,  ne  fut  pas    introduite   tout  d'un 
Coup  dans  l'ordre,  puisque  dans  la  mosaïque 
que  le  pape  Nicolas  IV  lit  faire  dans  la  basi- 
lique de  Saint- Jean-de-Lalran,  saint  Fran- 
çois y  est  représenté  avec  un  capuce  long  et 
pointu  assez  semblable  à  celui  des  capucins, 
qui  ont  toujours  lait  tant  d'estime  de  la  dé- 
couverte  qu'ils  avaient   faite  de  ce  capuce 
Itmg   et    pointu,   qu'ils  ont  souvent   intenté 
procès  aux  autres  congrégations  de  l'ordre 
au    sujet  de  l'habillement,  particulièrement 
aux   religieux  du  troisième  ordre  de  Saint- 
Fiançois  en  Sicile,  sur  la  coulear  de    leur 


F  ko:  S5i 

habit;  aux  Conventuels  Itéfurmés,  sur  la 
forme  de  l'habit  et  les  sandales  de  cuir;  au». 
Récoltels  sur  leur  capuce  po  ntu,  et  aux  re- 
ligieux l'énilents  du  tiers  ordre  de  saint  Fran- 
çois en  Franix',  sur  ce  qu'ils  laissai.nl  croî- 
tre leur  bai  be,  et  (ju'ils  portaient  comme  eux 
une  corde  b  anche. 

Luc  Wading,  Annal.  Minorum.  Francise. 
Goiizaga,  de  origine  Seraphicie  lieliyionis. 
Rodulph.  Tussinian.  Historia  Seraphica. 
Dominic.  de  (iubernatis,  Oiùis  Seraphicus. 
Marc  de  Lisboa,  Cronica  de  las  Menores. 
Juanetin  Ninno,  Cronicas  de  lus  Menores. 
J'Vancisco  lie  Uoyas,  Aniud.  de  la  Orden  de 
los  Menores.  Michel  de  la  Purification,  Vida 
Evanijelica  de  los  Frayks  Menores.  Sanclus 
Ronavenlura,  Vit.  S.  Francisci.  Itartholom. 
de  Pisis,  Liber  Conformitutum  vil.  S.  Fran- 
cisci cuin  viln  J.  C.  Henricus  Sedulius,  ///- 
sloria  Seraphica.  Peirus  de  Alva  ,  NaturcE 
prodigiuiri,<jrutiœ poi  lenlum,  hoc  est  Seruphi^ 
ci  Francisci  viliv  acta  ad  Christi  vitan  et 
mttrlem  regulata.  Arturiiis  à  Monasterin  , 
Marlijrvloijium  Franciscanum.  Spéculum  Mi- 
tiurum.  Munumenla  Ordinis  Minorum,  et  Fir- 
mamenia  Irium  Ordinutn  S.  Frandsci. 

FRANÇOIS  (TiRRS  oudbe  de  Saint-).  Vry. 
PÉNITENCE  et  les  divers  noms  qui  dilîéren- 
cient  les  congrégations  du  Tiers  Ordre. 

FRANÇOIS  o'ASSISE  (Ohdke  de  SaINT-). 
Voyez  FuANCiscAiNS. 

FRANÇOIS  DE  PAULE  (Ordre  oe  Sai.nt-J. 
Voyez  MiiMMEs. 

FRANÇOIS  DE  SALES  (Ordre  de  Saint-) 

Voyez   VlSITAND.NES. 

FRERES  JOYEUX  (Chevaliers  de  l'or- 
dre DE  LA  (jLO:\iEllSE  ViERGE  MaIUE,  AFPELÉS 
AUSSI  led). 

Après  avoir  rapporté  l'Iiistoire  des  ordres 
et  congrégations  religieuses  qui  ont  suivi  la 
règle  de  saint  Augustin,  aussi  bien  que  quel- 
ques ordres  militaires  dont  les  chevaliers 
sont  véritablement  religieux  ou  l'ont  été 
dans  leur  origine,  ce  qui  fait  (juc  nous  ne 
les  avons  pus  séparés  des  congrégations 
religieuses,  il  nous  reste  encore  à  parler  de 
quelques  ordres  militaires  dont  les  cheva- 
liers, à  ce  que  l'on  prétend,  ont  été  soumis 
à  la  règle  de  saint  Augustin,  quoiqu'ils  ne 
fussent  pas  religieux.  Les  premiers  sont  les 
chevaliers  de  l'ordre  de  la  Glorieuse  Vierge 
Marie,  Mère  de  Jésus-Clirist,  qui  furent  éta- 
blis par  le  P.  Rarihélemy  de  Vicence,  reli- 
gieux de  l'ordre  de  Saint-Uoininique,  qui  fut 
ensuite  évêque  de  cette  ville.  Ce  père,  voyant 
l'Italie  en  trouble  et  en  confusion  par  la  fac- 
tion des  Guelfes  et  des  Gibelins,  institua 
cet  ordre  l'an  123J.  Le  principal  institut  et 
l'obligation  des  chevaliers  étaient  de  prendre 
les  armes  contre  les  perturbateurs  du  repus 
public,  et  contre  ceux  qui  violaient  impu- 
nément la  justice.  Us  Tiisaient  aussi  vœu  de 
chasteté  conjugale,  d'obéissance  et  de  proté- 
ger les  veuves  et  les  orphelins.  Les  premiers 
qui  furent  faits  chevaliers  turent  Pélegriis 
(jastelli,  Castellau  Malcuulo,  Hugolin  Lam- 
bertini,   Lodérii»  Andalo,  Giranion,  Caccia- 


(Ij  Voi/.,  à  la  un  du  vol.,  n*7l. 


(2)  Voy.,  à  la  lin  du  vol.,  n"  72. 


DiciioNN.viRr>  nns  ounr.r.s  uf.i.icif.ux. 


iKMiiiri,  loim  p  iil  Islinmnos  l!n!onni«,  Fc'-la- 
iii.i.  I.i  iz.iiii  <lo  r.i'jïs'".  f'  l5.iii>ior  A'lc'.ir>lo 
lio  Miiiiloiic.  1  l  il  y  en  n  (|ui  loiir  dimiicnl 
pour  iiri'iiiiiT  lî'niiJ  m.'iilrc!  Loilorin  Aiidalo. 
D.ins  l.i  s-Uilc  ils  fircnl  cunCirmcr  leur  onln- 
l'.ir  lp  p.ip''  rii.iiii  IV,  l'ail  12()2,  ce  qui  a 
l.iildireà  qni'hiu.'S-uiis  que  col  ordre  ii'a- 
\nn  Ole  iiiï-tiiuè  qii.-  celle  .nméf-là.  (k-silie- 
\.ilicrs  porta ciil  un  lialiil  blanc  et  un  man- 
teau ^ris  reiiiltc  sur  lequel  ils  niellaioiil  une 
croix  roniTC  II  y  en  a  qui  prétcmleiil  qu'ils 
m  porlaii'nl  aussi  une  orleo  il'or  sur  l>  poi- 
trine. Nul  ne  pou\ail  cire  reçu  dans  cel 
ordre  s'il  n'ctjil  Rcnlilliomme.  il  leur  était 
néanmoins  défendu  de  porter  des  éperons 
dorés,  et  d'avoir  les  harnais  d'  leurs  che- 
vaux dorés.  Comme  il  leur  était  permis  de 
se  n^arii-r,  qu'ils  avaient  des  cominandcrics, 
qu'ils  jouissaient  de  plusieurs  privilé|;es  et 
commodiiés  (iiii  leur  donnaient  moyen  de 
subsister  honorablement  et  avec  éclat,  et  que 
même  dans  la  suite  ils  songèrent  plutôt  à 
passer  le  temps  dans  les  plaisirs,  (ju'à  s'ac- 
qniller  des  oblig:atiGns  de  leur  orlre,  le  piu- 
ple,  par  une  espèce  de  raillerie  et  de  mépris, 
les  a[  pela  Frères  Joyeux. 

Les  sentiments  sont  dilîérenls  loucliant  la 
croix  qu'ils  portaient;  les  uns  leur  donnent 
une  cieix  de  yueules  à  huit  an^;!es,  orléc 
d'or  et  cantonnée  de  qualrc  étoiles;  d'au- 
tres ajoutent  à  celle  rrois  l'imjige  de  la 
sainte  N'ierpe  ;  <juelqucs-uns  prelc.idcnt 
qu'elle  éta  t  plus  longue  que  large  ct(]u'elle 
avait  seulement  deux  éloiles  d'or  aux  deux 
angles  au-dessus  du  travers  (I).  L'abbé 
Giustiniani,  passant  à  Holognc  en  1G77,  vou- 
lant s'inloriner  de  la  vérité,  trouva  d:ins  la 
maison  d'un  des  successeurs  du  comte  Jé- 
rôme lîentivoj;lio  une  croix  en  peinture  sein- 
Mable  à  celle  dernière,  quoique  le  peu  de 
chevaliers  de  cel  (>rdre  qui  restent  à  pré- 
sent portent  la  croix  à  huit  pointes  canton- 
née de  qualrc  étiiles.  Il  y  en  a  encore  qui 
font  nicntioii  d'une  antre  croix  Heurdelisee 
par  les  bouts,  au  milieu  de  la<iuclle  est  le 
nom  de  Marie  en  cliilïre,  avec  un  cercle  do 
rayons  sous  les  flc^irs  de  lis.  Cet  ordre  avait 
lies  commandcries  à  Dolognc,  à  Modène,  à 
Mantone,  à  'l'iévise  et  en  divers  endroits 
d  Italie.  Le  dernier  commandeur  de  l{(diii;ne, 
iioiiMiié  C  iinille  \olta,  mourut  en  liiSÙ,  cl 
les  biens  de  cet  ordre  furent  donnés  par  le 
p.ipe  Sixte  \  an  collège  de  iMonlaîte.  Les 
églises  de  Saint-Matthieu,  de  Saiiil-l'ierre  et 
de  Saint  Paul,  à  (^as  irate  hors  de  lîologne, 
él  lient  autrefois  des  coininanicrics.de  cet 
ordre.  Lorsiiu'il  fut  éteint,  les  clievaliers 
qui  demeuraient  A  'l'révisc  conservèrent  une 
comiiu'inderie  sous  le  nom  de  Sainte-Marie 
de  la  Tour  ;  et  lorsque  le  chevalier  qui  en 
est  prieur  mi'urt,  les  chevaliers  nomment  un 
d'intie  eux  pour  lui  succéder,  l'eutétre 
qu'au  temps  de  l'extinction  de  l'ordre,  ces 
(hcvaiiers  s'y  opposèrent,  et  que  par  acconi- 
jiiodemenl  on  leur  laissa  cette  couimanderie 
e»ec  pouvmrde-  porter  la  cr.iix. 

yuyez  Alennénius,  de  lielloy,  l'abbé  Gius- 


(inlani,  Scliotneheck  et  Ilermant,  dans  leurs 
f/ixloirrs  des  Ordrfs  mililiiirat  rt  de  rhrva- 
lerie.  Taniburin,  de  Jiir.  Ald>-iltiin  disinii. 
;?'»■,  qu,r%lion.  o,  n.  Oli  ;  et  Carol.  Si-;oii:us, 
lih.  xvii  et  XIX  de  Ilcqno  Ilaliœ. 

rilfcltlvS  MlNEUllS.  V<»ic:  FiivNciscAiNs 
cl  les  titres  de  leurs  diverses  branclies;  par 
exemple  :  Jtc'rollcls  .  Ca/nichis  ,  Ob.-eiran~ 
ti  is,  Convcnluch.  Colletants,  etc. 

FUÈUKS     l'KÈCllliUKS.     Voyez    Do.y.Ni- 

CAINS. 

FRÈRIiS  UNIS.  Voyez  Arméniens  de  Cit.- 

Vftir.DIEN  DE  LUCOIIES  (  Congréga- 
tion de).  Voyez  Latran  (Saint-Sauveur  dk], 
§2. 

FRISE  ou  DE  la  couronne  DE  FlîR  (Che- 

VALIKRS  de). 

Quoique  Sclioonebeck,  dans  son  Histoire 
des  Ordres  militaires,  dise  qu'avant  l'ela- 
blissement  de  celui  de  Saint-J.irques  de  l'E- 
|iéc  en  lisjjagne,  il  n'y  avait  eu  encore  au- 
cune société  militaire  qui  consacrât  s  s 
biens  et  sa  vie  à  combattre  contre  les  infi- 
dèles pour  le  bien  de  la  cbrélicnté,  il  ne 
laisse  pas  néanmoins  de  nous  en  d  )nner 
d'autres  qu'il  prétend  avoir  élé  institués  [ilu- 
sieurs  centaines  d'années  avant  celui  de 
Saint-Jacques  de  l'Epéc  :  tel  est  entre  autri's 
l'ordre  de  Frise  ou  de  la  Couronne,  dont  il 
fait  remonter  l'origine  jusqu'en  l'an  802  , 
après  Mennens.  .Michieli,  (îiusiiniani  et  quel- 
ques autres,  qui  disent  que  ce  fut  Cliarle- 
magne  qui  en  fut  le  fondateur,  et  que  co 
prince  donna  aux  clievaliers,  pour  marquo 
de  cel  ordre,  une  couronne  qu'i's  devaient 
porter  sur  un  habit  blanc  avec  cette  de- 
vise ci)  :  Coroiinbilur  letjilime  ccrians.  Quel- 
ques-uns disent  <iue  ce  fut  pour  récompen- 
ser les  Frisons,  qui  lui  avaient  été  il'un 
gr.ind  secours  dans  la  guerre  qu'il  eut  con- 
tre les  Saxons.  D'autres  prétendent  que  ce 
fut  ([uand  il  eut  défait  les  Lombards  cl  (]u'il 
eut  lait  prisonnier  leur  roi  Didier.  Giusli- 
niani  rapporte,  après  Hanconius,  historien 
de  Irise,  un  prétendu  privilège  que  ce  princf! 
accorda  à  Rome  à  ces  nouveaux  chevalier-.- 
l'an  802,  cl  il  ajoule  avec  d'autres  ((u'il  leur 
donna  la  règle  de  Sainl-liasile.  Mais,  outre 
que  nous  ne  reconnaissons  point  d'ordre  mi- 
litaire avant  le  douzième  siècle,  quelle  ap- 
[larence  y  a-l-il  que  Ch  irlemagnc  cùl  donné 
à  ces  chevaliers  la  règle  de  Saint-liasile,  lui 
qui  était  si  zélé  pour  faire  observer  celle  de 
Saint -lîenoil  ,  et  qui  n'en  reeonnaissali 
point  d'autre  dans  ses  Etats?  Ainsi  je  re- 
garde cel  oidre  comme  sup-posé.  Ces  auteurs 
ajoulent  que  les  chevaliers  de  Frise  f lisaient 
voni  d'obéir  à  leur  prince,  el  de  delendre  la 
religion  chrétienne  aux  dépens  de  leur  sang. 
La  pi'incipaie  cérémonie  .qu'on  observait  a 
leur  réception,  selon  ces  écrivains,  était  de 
leur  attacher  le  t)audrier  et  de  leur  metlic 
l'epee  ,iu  côlé  ;  on  leur  donnait  un  souiflet, 
i|ui  fut  changé  depuis  en  un  li.iiser  el  l'ac- 
colade;  cl  on   ne    recevait    personne    qu  il 


0)  Voy.,  i  l;i  niiibi  V.I.,  ii'  Ij. 


{.')  V')i;.,  .i  1,1  fin  du  vol.,  n*  'i. 


?.;?  FIL 

n'cûl  S'Tvi  lin.]  ans  l'enipprcnr  ;"i  sns  fr.Tis. 
Mais  cet  onire,  cohiiih'  nous  avons  ilil,  es! 
suppose;  cl  jo  ne  sais  sur  ()Ui)i  foiulé  Sclioo- 
iielx-ck  dil  (|iie  les  roi-  ilo  Franco  s'en  aUri- 
Inient  toujours  la  dit;iiilé  de  grands  maîtres, 
quoique  le  pouvoir  di-  faire  des  chevaliers 
apparlieiine,  dil-il,  aux  empereurs,  conime 
élai;l  attaché  à  la  couronne  im;  crialc  ;  car 
nous  ne  voyons  pas  que  les  rois  de  France 
ni  les  empereurs  aicni  créé  de  ces  sorlrs  do 
chevaliers;  cl  ainsi  Tabhô  Ginsliniani  pou- 
vait se  dispenser  de  donner  une  suite  cliro- 
nologiquc  dos  {grands  m.iîircs  de  cet  ordre 
préieiulu,  depuis  Charlemagiie  jusqu'au  roi 
de  FraïKC  Louis  XIV  et  l'empereur  Léo- 
pold  I". 

Mennénius,  Dclirin;  Equesl.  Oui.  L'abbé 
r.iusl  niani,  Uist.  di  tuti  f/li.  Ord.  miliiuri. 
And.  Mentio  ,  Ile  Ord.  milil.  Hennan  et 
Schooncheck  dans  leurs  flist.  dr.t  Ord. 
milil.;  cl  Joseph  Michieli  Teroso,  M  dit.  di 
Cavul. 

FULDE   EN  Allkmagne  (Ancienne  congré- 
gation de). 

L'abbaye  de  Fulde  est  sans  contredit  la 
plus  noble  et  la  plus  illustre  d'Allemagne, 
non-seulcnicnl  à  c;!use  de  ses  grandes  ri- 
chesses et  du  grand  non  bre  d'abb.iyes  et  de 
prieurés  qiii  en  dépendaient,  mais  encore  à 
cause  des  [)rérogalives  accordées  à  l'abbé  de 
ce  monastère  ,  qui  est  prin<c  de  l'Fmiiire, 
primat  et  chef  de  tous  les  abbés  d'AlIcma- 
pne,  et  chancelier  perpétuel  de  l'impcra- 
Irce.  S  iint  IJonirace,  archevêque  de  Mayenco 
et  apôtre  d'Al'emagne,  fat  le  principal  fou- 
d;ileur  de  celle  fameuse  abbaye.  O  saiiil, 
(jui  s'était  servi  de  religieux  pour  élre  ses 
coadjutcurs  dans  la  convcrsinu  d'une  infi- 
nité de  peuples  en  Allemagne,  et  qui  se  ser- 
vait aussi  d'eux  dans  d'autres  afl'aires,  sou- 
haitait y  liâlir  un  célélre  monaslère  pour 
les  y  établir.  11  avait  déjà  fondé  ceux  d'(Jr- 
doff  et  (le  Frislar,  mais  ils  no  suffisaient  pas 
pour  le  grand  nombre  d'ouvriers  apostoli- 
ques qui  le  soulageaient  dans  ses  travaux; 
fâché  de  voir  que  saiiit  SUirme,  l'un  de  ses 
disciples,  s'ctait  retiré  avec  quilques  com- 
paiinons  dans  le  désert  d'Horsfelil,  où  ils 
étaient  tous  les  jours  exposés  aux  insuUcs 
des  Saxons,  il  leur  ordonna  de  s'établir 
dans  un  autre  lieu.  Ils  en  trouvèrenl  un 
plus  commode  proche  la  rivière  de  Fuldc 
dans  le  pays  de  IJuchow,  qu'on  appelait  au- 
trefois (.irapfeld,  entre  la  Messe,  la  Franto- 
nie  cl  la  Thuringo. 

Ce  lieu,  qui  s'appelait  Ei!oha,  appartenait 
à  Carloman,  duc  et  prince  des  Français,  que 
sailli  l'oniface  alla  trouver  pour  le  prier  de 
le  lui  donner  afin  d'y  établir  une  commu- 
nauté de  religieux;  ce  que  personne  n'a- 
vait encore  lait  en  ce  pays.  Non-seulement 
Carloman  le  lui  accorda  avec  une  étendue 
de  quatre  mille  pas  aux  environs,  mais  il 
exIxTta  encore  les  seigneurs  de  sa  cour  de 
contribuer  ii  rétablissement  de  ce  moMas- 
lére,  ce  que  la  plupart  ayant  fait ,  saint 
Sluime  y  conduisit  sept  religieux  l'an  Ihk, 
et  deux  mois  après  saint  Boiiilarc  y  fit  bàlir 


FUI, 


''^ 


une  cglise  avec  le  monastère,  qui  prit  le  iiojii 
d;>  la  rivière  de  Fulde  tjni  y  passait.  Sainî 
Sturme  en  fut  le  (irer;  ier  abbé.  En  peu  de 
temps  le  nombre  des  religieux  angmeala  iIr 
telle  soile,  et  les  biens  (jiio  l'on  fit  à  ce  mo- 
nastère fuient  si  considérables,  qu'il  y  eut 
pliîs  de  cinq  cents  religieux  qui  y  demeu- 
rèrent du  vivant  même  de  saint  Slurme. 
Saint  lioniface,  pendant  qu'on  travaillait 
aux  édifices  de  ce  monastère,  se  relira  sur 
nue  montagne  voisine  depuis  appelée  pour 
ce  sujet  le  Mont  de  l'Evcque,  et  y  |!ass  i  lout 
U\  temps  qu'il  y  demeura,  dans  l'oraison  et 
dans  la  leclu-e  dos  saints  Pères.  Etant  re- 
tourné à  Fulde,  il  oxhorla  les  religiiux  à, 
bien  pratiquer  leur  règle,  leur  ordonna  ih; 
no  prendre  aucune  boisson  qui  pût  enivrer, 
et  de  se  contenier  d'un  peu  de  petit j  bière; 
mais  la  communauté  s'éiaut  auginonlée  no- 
tablement ,  colle  rignrur  fui  modérée  du 
temps  du  roi  l'opin  le  Bref;  ni  dans  un  con- 
cile il  leur  fut  permis  de  boire  du  vin,  à 
cause  de  ceux  qui  étaient  faibles  et  infirmes. 
11  se  trouwi  néanmoins  un  grand  nombre  de 
religieux  qui,  ne  voulant  point  se  servir  do 
cotte  permission,  ne  burent  point  de  viu 
lout  le  temps  di!  leur  vie. 

Les  bâtiments  de  Fulde  étant  achevés, 
rixtrèmo  désir  que  les  religieux  avaient  de 
bien  ob.i  rver  la  règle  de  Saint-Benoît,  les 
fil  résoudre  d'envoyer  quohjues-uns  d'entre 
eux  aux  grands  monisières  pour  y  remar- 
qner  la  discipline  réguli.re,  et  la  pia  ii|uer 
ensuite  dans  toute  son  exacliludo.  Ils  en 
parlèrent  à  saint  ISonifacc,  qui,  apjirouvani 
leur  dessein,  choisit  pour  ce  voyage  saint 
Sturme,  qui  alla  au  mont  Cassin,  où  il  de- 
meura quoique  temps  pour  s'instruire  par- 
faitement de  toutes  leurs  pratiques  réguliè- 
res. Saint  Boniface,  remarquant  que  ces  re- 
ligieux élaienl  pauvres  et  avaient  peine  à 
subsister,  leur  donna  quelques  terres  pour 
subvenir  à  lou,  s  besoins  ;  et  ce  fut  à  sa  prière 
que  Carloin m  :  ugineiiia  encore  le  territoire 
de  Fulde  do  trois  mille  pas,  de  sorte  qu'il 
conlonail  sept  millos  de  tour.  Ce  [irélal, 
pour  alTcrmir  davantage  cet  établissomenl, 
ob!iut  un  privilège  du  pape  Zachario  qui 
soumeltait  ce  monastère  iminédiatement  au 
Suinl-sicge;  et,  pour  marque  de  sou  alTcc- 
tion,  il  y  voulut  élre  enterré.  Ce  sain!  fut 
martyrisé  par  les  Frisons  l'an  75.").  Son 
corps  fut  d'abord  enterré  à  Uliecbt;  mais  les 
religieux  de  Fulde  l'allèrent  chercher  pour 
le  transporter  dans  leur  abbaye,  comme  ce 
saint  l'avait  souhaité. 

Après  la  mort  de  saint  Boniface,  saint 
Stuinie  ne  put  éviter  la  malignité  do  la  ca- 
lomnie. Saint  Liillo  avait  succédé  à  saint 
Boniface  dans  l'archevêché  de  Mayonce.  Ou 
prévint  ce  prélat  contre  ce  saint  abbé;  il  se 
trouva  de  faux  frères  dans  sa  communauté 
qui  l'accusèrent  de  n'être  pas  alïecliunné  au 
service  du  roi,  qui  était  alors  Pépin  le  Bref, 
ce  qui  le  fit  reléguer  dans  le  monastère 
d'Unnedice,  ou  plutôt  Jum:ége,  au  diocèse 
do  Uouen.  Saint  Lulle  en  son  absence  obtint 
du  roi  que  le  monaslère  de  Fulde  lui  sérail 
soumis,   et  y  nomma   pour  abbé   un  de  ses 


;iussit(M 
retour   dt!   son 


-S9 

doinpsliqucs,  nppelt-  Mire.  Mais  les  rn'i- 
uiciix,  refusiinl  ilo  se  souincltre  à  ce  pas- 
leur,  qui  ét:iil  i-trangcr  et  qui  pnorait  leurs 
usages  cl  I"  urs  lois,  sorlimU  du  moiiasli"'re 
|.(iur  en  all(  r  porter  leurs  plaintes  au  roi, 
qui  leur  perniil  de  choisir  un  abbé.  Celui 
.;u'ils  éhiniil  fui  !.■  véiwrahle  l'reszoldc, 
qui,  ayaiil  été  «lisciple  di-  saiul  Sturuie  dès 
sa  plus  tendre  jeunesse,  chercha 
les  moyens  de  procurer 
riKillrc,  qui  fui  rappelé  d'exil  deux  ans  après 
par  Pépin.  Ce  prince  ne  se  co  ileiila  pas 
incinc  de  le  renvoyer  avec  honneur  à  Kulde, 
il  \oulul  encore  «juil  fûl  réiabli  d;!ns  sa  di- 
giiilé  d'abbé;  il  retira  aussi  ce  inonastèro  de- 
là juridiction  de  l'èvéque  de  Mayence,  el 
conlirma  le  privilé<:e  que  !e  pape  Zarharie, 
lui  avait  accordé,  en  le  soumeltaril  imnic- 
diatemcnl  au  sainl-sié;;e.  11  le  prit  de  plus 
sous  sa  protection,  el  lui  donna  OiusMl  avec 
SCS  dépendances. 

Le  V.  Maiiillon  (I)  r.ipporte  tout  au  long 
ce  privilège  du  pape  Zaïharie,  aliii  que  per- 
sonne n"en  puisse  douter,  el  l'ail  observer 
ensuite,  après  le  P.  Tliomassin  ,  qu'avanl  ce 
pape  il  n'y  avait  aucune  alibaye  qui  lui  sou- 
mise imtnédialenient  au  saiiil-siége.  Elles 
élaienl  pour  lors  réputées  ou  excinplcsde  la 
juridiclion  de  l'évéquc  diocésain,  ou  soumi- 
ses au  mclropolilain  ou  aux  assemblées  des 
évoques,  qui  élaienl  fréquentes  ci  ce  temps- 
là  ;  ou  au  palri.iiche  pir  une  condilioii  ta- 
cite, quoique  cela  ne  fùl  pas  marqué  prcci- 
séinenl  par  le  privilège.  Nous  en  rapporte- 
rons quelques  exemples.  Siiiil  Tlieoilore  Si- 
ceote,évéque  d'Anastasiopole,  ayant  renoncé 
à  l'épiscopat,  reprit  la  conduite  des  motias- 
lères  qu'il  avait  fondés,  cl  dont  il  avait  été 
tiré  quelque  temps  après  sa  retraite.  N'ers 
l'an  5'.)",  elanl  venu  à  Constanlinople,  il  ob- 
linl  de  grands  privilèges  pour  ses  iiionas- 
tens,  qui  lurent  exemptés  de  la  juridiction  de 
tout  autre  évoque,  tl  soumis  seulement  à 
riîglise  de  (>onst;inliuop'e.  Le  pape  saint 
Ciregoire  accorda,  l'an  598,  un  priviléL'e  à 
l'abbaye  de  Classe  dans  le  diocèse  de  Ka- 
venne,  par  lequel,  en're  autres  choses,  il  dé- 
fendit a  l'èvéque  de  prerdre  connalssaïKi; 
des  revenus  de  ce  monastère  el  d'en  rien  di- 
minuer, de  soustraire  ai:cun  titre,  d'ordon- 
ner aucun  clerc  sans  le  consenlemeiil  de 
l'aDbé,  tl  d'eu  tirer  aucun  religieux  malgré 
lui  pour  gouverner  d'autres  m  'uaslèrcs. 
'l'roi>  ans  après,  le  même  [lapo,  dans  le  con- 
cile de  Konie,  où  souscrivirent  vingt  el  un 
cvéques  cl  treize  prêtres,  fit  une  ronstitulioii 
en  faveur  de  lous  les  moines  ,  qui  n'est 
qu'une  conlirm.ilion  el  une  extension  du 
privilège  accordé  à  l'abbiiye  de  Classe:  car 
il  défendit  de  jdiis  aux  évè(|ucs  de  célèlircr 
des  messes  pulili()ues  daiu  les  monasières, 
d'y  niellrc  leurs  chaires,  ou  d'y  f.iirc  le  moin- 
dre règlement,  à  moins  qu<'  ce  ne  fûl  à  la 
prière  de  l'alibé,  ()ui  devait  toujours  avoir  les 
inoincs  en  sa  puissance. 

(1)  Miliillon,  Atinnl.  linirdid.,  Inm.  II,  |i.  15'». 
Tlioiiiass.  biicipl.  Eccles.,  pari,  i,  lib.  m,  c.qi.  51), 
n.  8. 

(2)  .Mab.!lr)n,  Aiiinl.  Itm-iUct.,  loni    lll,  p.  I "2. 


Di(:TioNN.\im';  ni:s  unniiES  r.Ki.ioii  i;x.  nr.u 

Les    nionastèri'S  fondés  par  les  empereurs 
tant  d'iirieni   que  d'Occident  étaient  enùère- 
menl  exempts  de  la  jurilictiou  des  cvéques 
el  des  arehevètiucs.  Nous  avons  un  exemple 
de  celte  exemption  in  Occident  dans  le  mo- 
nastère de  Pescara  ,  au  royaume  de  Naples, 
qui  a  clé  aulrefois   le  plus  célèbre  an   Italie, 
qui  fut  même  apfielé  la   Maison'  d'Or,  taul  à 
cause  de  la   magnili;ence  de   ses   bâlimi  nts 
(|;ic  de  ses  revenus  iinmenses('2|.  il  fut  fondé 
par  l'empereur  Louis  11  l'an  8ii(j,   et  lui  fut 
enlière. lient  soumis  ,  el    les   évêques   de   la 
l'enna  n'y  prclen  lirent  Jamais  aucune  juri- 
diction spirituelle  avant  l'an  Itol,  que  Je, m, 
évéquc  lie  la  l'enna,  lenia,  mais  inulilemeul, 
de  le  soumellre  à  soa  auloiité  ;  el  même  les 
religieux  de  ce  monastère,  avnnl  le  pontifical 
de  Léon  IX,  ne   s't  talent    point  adressés  à 
Home  pour  avoir  des  privil.'ges,  croyant  que 
l'auloctc  de  l'empereur  suffis-iit  pour  main- 
tenir leurs  immunités.  Une  des  prérogatives 
dont  jouissait  l'iibbé  de  ce  monastère,  c'est 
«lu'il   se    servait  du    sceptre  de    l'empeieiir 
Louis  an  lieu  de  bâion  pasl'  rai,  comme  ou 
le  peut  voir  dans  la  ligure  (3)  que  nous  don- 
nons d'un  de  ses  anciiiis   abbés  ,  ijue    nous 
avons  fait  graver  d'après  celle  que  le  P.  .M.i- 
billcii  a  donnée  dans  le  cinquième  loine  de 
Si  s  Annales  Uenédictines.  Le.  rois  de  France 
ont   pré'.endu  aussi   avoir  le  même  pouvoir 
sur  les  monasières  de  leurs  fondations,  et  le 
doge  de  Venise  est  encore  aujourd'hui   pro- 
lecleur  du  monastère  des   religieuses  iliiis 
Belle  Vergini  (4),  qui  n'ont  pdini  d'autie  juge 
que  lui,   non  pas   même  le  patriarche  ;   en 
sorte  que, s'il  arrive  quelque  désordre  parmi 
ces  dames,  c'est  au  dope  seul  d'y  pourvoir, 
comme  s'il  élait  leur  è\éque,  le  patri.irclie 
de   \'enise  n'ayant  aucune  juridiclion    sur 
elles.  Le  lecteur   nous   pardonnera   cet. ■di- 
gression, à  laquelle  le  privilège  d'exemption 
accordé  à  l'abbaye  de  Fulde  a  donné  1  eu. 

Saint  Slurme  ayant  reçu  ordre  du  r.ii  Pé- 
pin de  reprendre  le  goiivernenicnl  de  son 
abbave,  les  religieux  ail  renl  au-devant  de 
loi  avec  leur  croix  d  or  et  leurs  reliques  ,  el 
le  reçurent  avec  beaucoup  de  joie.  Sa  pre- 
mière application  fut  dtv'den  régler  sa  com- 
munauté et  de  corriger  ce  qu'il  y  avait  de 
défectueux  dans  la  vie  cl  les  mœurs  de  ses 
disciples.  11  embcliit  ensuite  l'église  ;  il  chan- 
gea le  cours  de  la  rivière  de  Fulde  et  la  lit 
entrer  dans  le  monastère,  alin  que  l'on  y  pût 
avoir  plus  ab>)nd<lmm(>nl  de  l'eau  pour  ever- 
cer  li's  arts  nécessaiics  à  la  vie,  el  que  les 
religieux  qui  y  seraient  occupés  ne  fussent 
p.is  obligés  de  sortir  hors  du  monastère. 

C'est  une  chose  surprenante  de  voir  com- 
bien les  richesses  de  celte  abbaye  au^oieu- 
lèrent  sous  le  gouvernement  de  ce  saint  abbé, 
aussi  bien  que  le  nombre  des  religieux,  qui 
èlail  de  ()lus  de  cinq  cents.  Les  quatre  èvê- 
ches  de  Ifavièrc,  qui  avaient  élé  fondés  par 
sainl  lioniface,  eu  reconnaissance  cl  pour 
mémoire  de  leur  fondateur,  oflrirent,  iuime- 


("))   Yoij.,  à  la  lin  du  v«l..  n*  7.">. 
(l)  \iii.  de  la  llyii'S-.yi;,  Iliitoire  du  ijuuvern.   Je 
Vfiiiic. 


50! 


r'i'L 


(liaU'menl  après  la  moil  de  ce  saint,  ci  l'ab- 
haye  de  Fuldc,  comme  à  leur  mère,  cliacun 
lin  don.  Premièrement  ,  celui  do  Salzhonrg 
lui  donna  une  saline  qui  lui  appartenait  dans 
!e  bourg  d'Hall ,  qui  pouvait  produire  tous 
les  ans  douze  talents.  L'église  de  Ralisboniie 
lui  donna  quatre  vignes  et  quatre  métairies 
royales  avec  tous  les  serfs  qui  y  étaient,  qui 
(levaient  envoyer,  tous  les  ans,  à  Fulde  un 
esturgeon  et  la  charge  de  deux  cliev.tux 
d'huile.  L'église  de  l*assa\v  s'obligea  de  don- 
ner tous  les  ans  de  l'huile  et  du  poisson. 
Celle  de  Freisingue  promit  de  donner  tous 
les  ans  de  grands  Irosnagcs,  cl  il  n'y  avait 
presque  point  t!e  fidèle  qui  ne  doiiniil  quel- 
ques métairies  à  celti'  abbaye.  VA  e  en  avait 
trois  mille  dans  la  Thuringe,  auianldans  11 
provins  e  de  Hesse  et  du  Wcslph-alie,  autant 
dans  celle  du  llhin  et  le  pajs  du  Worins ,  et 
un  p.;rcil  nombre  en  lîavière  et  dans  la 
Souabe  ,  qui  faisaient  en  tout  quinze  mille 
mélaiiies.  Les  Français  iniitèrenl  aussi  les 
Allemands  cl  augmentèreiil  considciable- 
menl  par  leurs  libéralités  les  revenus  de 
cette  abbaye  ;  car,  culte  que  le  prince  ('ar- 
b^man  donna  le  lieu  où  les  fondements  en  fu- 
rent jetés  avec  sej'l  mille  pas  de  tour,  le  roi 
Pepiii  lui  donna  Omstat  ,  et  Cliarlemagne 
Amelembure  avec  leurs  dépendances,  ce  qui 
servit  à  la  subsistance  non-seulement  de 
.  cette  abbaye,  mais  encore  des  monastères  de 
Hoitzkirchen  et  de  Soinhofen,  qui  furent  bâ- 
tis par  la  permission  de  cet  empereur.  Enfin 
saint  Slurme,  après  avoir  gouverné  cette  ab- 
baye pendant  près  de  trente-sis  ans,  mourut 
le  17  décembre  779. 

Après  sa  mort,  IJaugulfe,  que  d'autres  ap- 
pellent Gangulfe  ou  Landulphc,  lui  succéda. 
L'empereur  Cliarlemagne  lui  écrivit  ,  aussi 
bien  qu'à  tous  les  évoques  et  les  abbés,  pour 
les  exciter  à  faire  fleurir  les  sciences  dans 
leurs  communaulés,  afin  que  les  religieux 
])usscnl  plus  aisément  pénétrer  les  mystères 
de  l'Eiriture  sainte.  Jîaiidulfe  Qtbalir  le  mo- 
nastère de  Wolfniunsler,  où,  après  s'être 
démis,  l'an  802,  de  sa  dignité  d'abbé  de  Fulde 
entre  les  mains  de  Ualgar,  il  se  relira  pour 
mener  une  vie  privée  le  reste  de  ses  jours. 
Le  P.  Mabilton  appelle  ce  monastère  de 
Woli'munsler,  qui  ne  subsi  le  plus,  Baugolf- 
?jinnst  r,  comaie  ayant  pris  le  nom  de  son 
fondaieu'r,  qùiavaii  aussi  jeté  les  fondements 
il'un  autre  monastère  sur  le  mont  Saint- 
Pierre,  pioche  Fuldc. 

llatgar  avait  été  airssi  disciple  de  saint 
Slurme;  mais  c'était  un  homme  dur  et  in- 
llexiblc,  (|ui  ne  savait  pas  allier  la  charité  et 
la  douceur  avec  une  jusic  fermeté.  Pour  une 
petite  parole  que  lui  disait  un  religieux, 
même  par  nécessité,  il  le  maltraitait,  et,  sans 
asoir  égard  ni  à  l'âge  ni  à  la  qualité,  il  le 
reléguait  dans  quelque  prieuré  de  la  dépen- 
dance de  l'abbaye,  sous  prétexte  d'en  faire 
valoir  le  bien.  Cette  grande  sévérité  causa 
beaucoup  de  Irouldes  dans  ce  monastère  :  ce 
qui  lit  que,  sur  les  plaintes  des  religieux, 
l'empereur  Louis  le  Débonnaire  le  lit  déposer 
(le  sa  charge  et  l'envoya  en  exil.  11  fomla  in\ 
aalie  monastère  proche  Fulde,  au  Mont  de 
DictIiDnnaikl:  des  0;idiii;s  ntLi^iEi  s, 


FIL  362 

l'Fvèquc,  qui  dans  la  suite  fut  appelé  le 
Mont  de  Noire-Uame,  à  cause  de  l'église  qui 
fut  dédiée  à  la  sainte  Vierge. 

Ey  gil ,  successeur  de  llatgar,  Gl  aussi  bâlir 
sur  une  haute  montagne  un  monastère  dédié 
à  saint  Michel.  Le  célèbre  i'aban-Maur,  qui 
succéda  à  Eygil,  en  fit  aussi  bâtir  un  sur  le 
mont  Sainl-Jean.  Ainsi  Fulde  se  trouvait 
entre  quatre  monastères  ,  sur  autant  de 
montagnes  qui  environnaient  celte  abbaye. 
Rabau-Maur  y  fit  fleurir  les  belles-lettres; 
l'école  de  Fulde  devint  très-fameuse  :  on  y 
venait  do  toutes  parts;  on  y  voyait  non-seu- 
lement des  moines  de  divers  monastères, 
mais  encore  des  chanoines  de  plusieurs 
cat  lédrales.  Raban  y  avait  enseigné  n'étant 
que  sim[)le  religieux;  mais,  étant  devenu 
ab!:é  ,  il  eut  un  grand  soin  d'y  entretenir 
d'excellents  maîtres  :  l'on  y  en  comptait 
mê:i  e  douze  des  plus  doctes  et  des  plus 
habiles  de  ce  temps-!.'!.  H  fit  encore  bâtir  le 
monastère  de  Saint-Sol  ou  Solenhosl.  Ces 
nouveaux  monasières  ,  qui  étaient  de  la 
dépendance  de  Fulde  et  dans  lesquels  il  fal- 
lait envoyer  des  religieux,  avaient  diminué 
ce  grand  nombre  qui  y  était  du  temps  de  saint 
Slurme,  car  il  n'y  avait  pas  plus  de  cent 
soixante  ou  soixante  et  dix  religieux  à  Fulde 
du  Icmpsdel\aban-Maur.  lien  envoya  encore 
quinze  pour  peupler  le  monasièred'Hirsauge, 
et  leur  donna  pour  abbé  Luilberl,  l'un  de  ces 
savants  maiircs  de  Fulde,  lequel  établit  aussi 
une  école  à  Hirsauge  qui  devint  très-célèbrt! 
dans  la  suie.  Uaban-Maur,  ayant  gouverné 
F'ulde  pendant  vingt  ans,  se  démit  de  sa 
charge  l'an  8^2.  Il  y  en  a  qui  ont  prétendu 
que  c'étaii  à  cause  du  peu  d'union  qui  était 
parmi  les  religieux  ,  les  uns  tenant  le  part! 
de  l'empereur  lytbaire,  les  autres  celui  de 
Louis,  roi  de  Germanie,  ces  deux  frères  étant 
puur  lors  en  guerre,  parce  queLothaire, 
après  la  mort  de  son  père,  Louis  le  Débon- 
naire, ne  s'était  pas  voulu  contenter  du  par- 
tage que  ce  prince  avait  fait  entre  lui  et  ses 
deux  fières, Louis,  roideGeruiatiie,ctCh,irles, 
roi  de  France.  Quoique  Raban  eût  tenu  le 
parti  de  Lothaire,  cela  n'empêcha  pas  le  roi 
Louis  d'agréer  son  élection  lorsqu'il  fut  choisi 
pour  être  archevêque  de  Maycncc  :  ce  princo 
assista  même  à  son  sacre. 

Raban-Maur  eut  des  successeurs  qui  eu- 
rent soin  d'entretenir  à  Fulde  la  régularité  , 
et  d'y  faire  fleurir  les  belles-lettres  et  les 
beaux-Trts  ,  entre  autres  furent  Sigheard  , 
qui,  comme  il  était  fort  habile  architecte  , 
selon  Bruschius,  fit  faire  de  t^è^-beaux  bâti- 
ments et  un  pont  de  pierre  à  Fulde  de  six- 
vingts  couilées  de  long;  Helmfride  ,  qui  par 
son  exemple  excitai:  les  religieux  à  observer 
exactement  leur  règle,  et  Hildebrand ,  que 
l'on  prétend  avoir  eu  le  d  m  de  prophétie  , 
et  qui  fut  aussi  archevêque  de  Mayenee. 
Mais  sous  Hademar,  successeur  d'Helmfri  le 
dans  le  gouvernement  de  l'abbaye  de  Fulde, 
il  y  eut  une  très-grande  division  et  un  désor- 
dre excessif  et  scandaleux  ,  dont  on  attribue 
la  cause  à  Fridcric,  archevêque  de  Mayenee, 
qui  fut  obligé  de  s'y  retirer  par  l'inrideni 
(jui  suit. 

II.  12 


.-,.J3                                            HXTIONN.MHE  DF.S  OUHRES  URIJCIEUX.  7Gi 

L'an  030,  Henri,  fri^rc  puînt'  ilc  IVmporour  autre,  rn  avaa  ilfj;\  parlé  dans  sa  Clirono 

()lh(m  I",  croj:inl  qu'il  avait  plus  lie  «iroil  A  li)j;ic    des     nionaslères   d'Alleniaiînt" ,     qu'il 

1.1  couronne  que  so!i  frère,  par.  e  qu'il  élail  donna  en  i;>5(),   cinq  ans  avant  que  ceux  de. 

né   depuis   l'élcvalion  de  leur   père   ll.nrià  .M,ii,'del<ourg  eussent  coinniencé  leurs  ccntu- 

Tempire,  voulu!  maintenir  sa  prétention  par  ries.  Au    re>le  ,  aucun  auteur  contemporain 

les  arntes.  Hvcrard  .  Iièrc  du   defunl  empc-  île  ce  prélat  n'a  parlé  de  ce  fait, 

reur  Conrad,  cl  dislelnit.  due  de  Lorraine  ,  La  discipline  réc;ulièrc  était  encore  beau- 

sc  lipuèrenl  avec  lui  contre  Oïhon  ,  qui ,  les  coup  relâchée  lorsque  Hii  liard   prit  le   çou- 

ajaiU  défaits  ,  obligea  son  frèie  à  \enir  im-  verncmenl    de   l'abbaye  de    Fnldern     1021; 

plorcr  sa  clémence.  Ce  prince,  cnijant  que  mai»,  par  le  moyen  des  religieux  liibernois, 

l'rideric,  archevêque  de  Mayencc,  avait  fi-  i.  reforma  ce  monastère,  d,  selon  Urusrliius, 

vorisé  les  rcbi  Iles  ,  le  relégua  dans  l'abbaje  il    obligea    les    religieux   à   prendre   I  habit 

de  l'ulde,  quoiqu'il  se  fùl  purgé  de  ce  soup-  monastique    et   la   ù  n.uire  ,   qu'ils    avaient 

çon  par  la  réce,.lion  du  corps  cl  du  sang  de  quilles    pour  en   prendre  d'antres  qui    n'a- 

Jésus-Christ.Iîruschius  s'est  trompé  lorsqu'il  v.iient  jamais  été  en  usage.  Il  fil  bâtir  le  mo- 

a  dit  que  ce  prélat  é:ail  fils  du  roi  de  France,  nastére  d'.Vnierbak  dans  le  diocèse  (l(  >N'iii(z- 

rl  qu'on  le  fit  revêtir  de  l'habit  monac;il  pour  bourg,  et  celui  de  Sainl-André  sur  la  rivière 

rcnfernier    dans    ci'lte  abbaye  :   car,  outre  de  FuUle,  et  eut  un   grand  soin   d'entretenir 

qu'il  n'était  point  du  sang  royal  de  France,  les  éludes  dans  son   abbaye,  où  il  y  eut  ce- 

c'esl  qu'il  avait  été  religieux  à  Fulde  avai  l  pendant  de  grands  désor.lres  sous  le  gouver- 

que  d'être  élevé  sur  le  siège  archiépiscopal  ne menl  de    l'abhé   NViderad    l'an   lOG.'J.    L" 

de  Majcnce,  et  parcor.stqueni  il  devailavoir  dilTercnd   qui   suit  fut  ce  qui  y   donna   lieu, 

toujours  censer\é  lliabil  religieux,  conf  ir-  C'était  la  coutume  depuis  un  long  temps  que 

mémenl  au  huitième  concile  général    leiui  à  les  abbés  de  Fu'de, dans  les  assemblées  d'évê- 

l'(in>l,iiilino|ilc    c!i      81)9,  qui  dérendail  aux  ques,  avaient  pl:ic«  imnié  liatement  aprèsl'ar- 

éïéqucs   de"  quitter    l'habit    religieux,    sur  clic\6que  de  Miiyence.  L'em;)ereiir  Henri  l\' 

peine  d'circ  déposés,  lorsqu'ils  avaient   été  étant  à  Goslar    l'an   I0(;2,  et  devant  assister 

lires  du  cbitic  pour  monter  à  l'éiiicopat.  à  l'olficc  du  jour  de  Noél  ,  comme  on  plaçait 

Frideric,  ayantélé  relégué;»  Fulde,  comme  dans   l'église   pour  les  premières  vé,jres  L  s 
nous  venons    de  le  dire,    suscita  ,  à  ce  que  sièges  des  évéquos ,  il  y  eut  querelle    entre 
l'on  croit,  une  cruelle  persécution  dans  tous  les    officiers   de    l'évéque   de  llildesheini   et 
les  monastères  qui  élaieal  de  sa  dépendance  ceux  de  l'abbé  de  Fulde,  l'évèiiue  prétendant 
conlre   les  rcligii'U\  ,    sous   préiexte  de  les  avoir  le  pas  au-dessus  de  l'abbé,  à  cause  que 
reformer.  Ils  avaient  à  la  vérilc  grand  besoin  Goslar  était  de  son  diocèse.  Des   parobs    on 
de  l'être  ,  et  plusieurs  évéques  témoignaient  en  vint  aux  mains  ,   et  on  courait  déjà   aux 
qu'il  valait  micuxqu'il  n'j  eùlqu'un  pet  t  nom-  armes,  lorsque  Oihon,  du  •  de    Ila^ière,   qui 
iirc  dcrtligicux  sanslaclic,  qued'in  voir  un  soutenait  l'aidié,  fil  cesser  la  quere  le. 
Irès-grand  nombre  mener  une  vie  mond.iinc  L  année  suivante,  l'empereur  voulant  as- 
el  rel;kliée  :  ce  qui  lit  que  plusieurs,  se  scn-  sisler  à   l'oflice  du  jo.ir  de  la  Penlccdle  ,  il  y 
tant  coupables  et  ne   voulant  pas  arriver  à  eut  une  nouvelle  dispute  lorsqu'il  fallut  en- 
une  si  grande  perfection  que  celle  à  laquelle  core  placer  les  siéjes.  L'évéque  d'ilildeslieini, 
on  le«  voulait  obliger,  aimèrent  mieux  quil-  se  ressouvcnanl  de  l'alTront  qu'il  avait  reç-i 
1er  riiab;l  et  sorlir  du  monasière;  quelques-  l'année  précédente,  fit  cacher  d  rrière  l'auti  l 
unsmëmcscmaiièienl,  commcdit  iinischius.  des  gens  armés   qui  se  jilèrent  sur  les   ofli- 
Hademar  était  pour  lors  abl;é  de   Fulilc;  il  cicrs  de  l'abbé  de  Fulde  lorsqu'ils  voulurcnl 
traita  d'abord  avec  assez  d'iionnètelé    l'ar-  placer  le  siège  de  leur  maître.  Ci'ux-ri  ayant 
chevéque  de  .Mayencc;  mais,  ayant  iiiterfe|ilé  été   secourus    par  di  s  soldais  de  l'abbé   qui 
des  lettres  qu'il  écrivait  secrètement,  il  usa  entrèrent   dans    l'église,  il   se  lit  de  pari  et 
de  rigueur  envers  lui  :  ce  (jui  lut  cau«e   que  d'autre  un  grand  carnage,  dont  on  jela  toute 
ce  prélat,    [  our  s'en  venger,  lorsqu'il  fui  en  la  faute  sur  l'abbé,  qui,  iiui)ii|uc  innocent  de 
liberté,  pcisécula  les  pelils  mon  isléres  avec  ce  désordre,   fut  obligé  ,  pour  se  rédirner  de 
violence;   cepcnd.int   il  ne  put   rien    faire    à  la  vexation,  de  donner  de  grosses  sommes  à 
Fulde,    à   cause  d'Hademar.   qui  avait   les  l'empereur,  .à  lévèque,  et  à  leurs   officiers: 
bonnes  grâces  de  l'empereur.  de    sorle  qu'il   fallu^  pour  cela  engager  uin- 
Ha'.iun   surnommé    bonose,    (^ui   succéda  grande  partie  des  biens  de  l'abbaye  :  ce  qui 
dans  le  gouvernement  de  l'ulde  a  llidemar,  irrita  tellcnuMit   les  religieux,   que,    lorsque 
fui  aussi  archevêque  de  Mayencc.  ISru-chius  l'abbé  reiourn  i  à  Fulde,  la  plupart,  iiriiui- 
(l:t  i|ue  dans  une  famine  il  fit  assembler  une  paiement   les  jeunes,   se  soulevèrent  contre 
(grande  ()uaiiliié  de  pauvres  dans  un  grenier,  lui,  et  les  plaintes  qu'ils  lui  firent  de  ce  qu'il 
sous  prétexte  de  leur  faire  donner  du    blé;  avait  ruiné  leur  monaslè  e  liégénérèrent  en 
niais  qu'il  y  fit  mclire  le  feu,  et  qu'en  puni-  une  sédiiion  ouverte.  L'.ibbé  ayanl  eu  ordre 
lioii  il  fut  mangé  des   rats,  quoiqu'il  se  fût  d'.iiler     trouver    l'empereur  ,   son    absence 
ftauvé  dans  une  île  au    milieu  du  lUiin  pour  échaufTa  encore    de  plus  en  plus  ces  esprits 
éviter  ces  animaux  ,  qui  passèrent  ce  fleuve  muliiis,  doiil  seize  prirent  la  résolution  d'al- 
a  la  nage   pour  l'y  aller  trouver.    Quelques  1er   trouver    ce   prince  pour  se   plai..drc  de 
auteurs   piélcmlcnl  i)ue   c'est  une  calomnie  leur  abbé.  Pour  cet  elTet  ils  s.)rtireiit  du  inu- 
iiiventée  contre  ce  preial   par  bs   cenluria-  n.istère  en  piocession,  portant  :a  croix  éle- 

teurs  de  Magdebourg  :  néanmoins  Uruschius,  vée,  cl,  alin  do  prévenir  l'empereur  sur  leur 

qui  iip|iari.'U)U)ent   l'.na  l  appris-  de  tiuelque  iléinaichc,  ils  eu»o_ièreiit  Ion    d'eux  à  clie- 


5(i5 


ruL 


Fur. 


5G6 


val  avoc  une  lettre  pour  ce  prince,  liais 
l'empereur  fui  si  Indigné  de  ce  procédé,  que, 
sans  attendre  leur  arrivée,  par  le  ronsoil  de 
rarclievcque  de  Cologne  et  du  duc  de  Bavière, 
il  fil  arrêter  le  porteur  de  la  lellre  avec  trois 
autres  qui  étaient  les  auteurs  de  la  sédition, 
qu'il  envoya  en  divers  monastères  pour  y 
être  enfermés  dans  des  prisons  ,  et  ordonna 
à  l'iibbé  d'user  do  main-forte  pour  contrain- 
dre les  autres  de  se  soumetlre  à  l'obéissance. 
Widerad  envoya  des  soldats  qui  obirgcrcnt 
les  relifrieux  mutins  de  retournera  Fulde;  il 
fil  mettre  des  gardes  aux  environs  du  mo- 
nastère, et,  ayant  f.iit  assembler  les  séililieux, 
il  en  fit  fusliiçcr  deux  ,  dont  l'un  était  prêtre 
et  l'autic  diacre,  ri  les  chassa  tous  deux  du 
monastère.  A  i'égar.l  des  autres  ,  il  usa  de 
plus  grande  sévérilé  ou  de  plus  grande  dou- 
ceur, selon  leur  naissance  et  leurs  fautes. 

Le  gouvcmemonl  de  Gottard  ou  (îoltfiiil, 
successeur  de  WideraJ ,  ne  fut  pas  plus 
trauqnillc.  La  guerre  qui  survint  entre  l'em- 
pereur Henri  IV  et  son  fils  Henri  V,  I  anlIO^i, 
causa  de  nouveaux  troubles  à  Fulde.  L'abbé 
avait  pris  le  parti  d'Henri  IV,  après  la  mort 
duquel  on  porta  des  plaintes  conlre  lui  à 
Henri  V  de  ce  qu'il  avait  dissipé  les  bier.s  de 
l'abbaye.  Ce  prince  les  écouta  et  priva  Col- 
lard  de  son  abbaye.  La  firtunc  de  son  suc- 
cesseur Woiiïliem  ne  fut  pas  meilleure;  il 
assiégea  le  cbâteaude  Haselsleim  ;  et,  comme 
il  faisait  le  sieste  de  Wartemburgavec  l'abbé 
d'Hersfeld,  il  l'ut  pris  et  relenu  pri.sounier 
jicndant  liois  ans  dans  le  château  de  Mul- 
semburg.el,  ayant  clé  encore  accusé  d'avoir 
dissipé  les  biens  dont  il  n'avaii  que  l'écono- 
mat, il  fal  aussi  déposé  l'an  1114. 

Les  abbés  de  Fulde  ne  s'étaient  pas  mis  en 
peine  jusqu'alors  de  pouvoir  se  servir  d'or- 
nemcnls  ponlilicaux;  mais  Berih  Schliz,  qui 
fut  élu  l'an  1133,  les  obtint  du  pape  Hono- 
rius  M.  Cet  abbé  cul  un  grand  dilTérend  avec 
l'archevêque  de  Magdebourg  an  sujet  de  la 
préséance.  La  cause  fut  plaiJée  devant  l'eni- 
periur,  qui  ordonna  que  l'abbé  de  Fulde 
prendrait  sa  place  au-dessus  de  l'archevêque 
ue  Magdebourg.  L'abbé  .Marquard  fil  entou- 
rer de  murailles  le  bourg  de  Fulde,  et  en  fit 
une  ville  l'an  lioO;  mais  l'an  1331,  les  bçur- 
geuis,  oubliant  que  les  abbés  ctaieul  les  fon- 
dateurs de  cette  ville,  se  rcvollèrenl,  démo- 
lirent la  citadelle  qui  joignail  Tabbaye,  rui- 
nèrent les  lieux  réguliers,  pillèrent  tous  les 
meubles,  et  enlevèrent  ce  qu'il  y  avait  de 
jilus  précieux.  Henri  de  Hombourg,  qui  ea 
etaU  pour  lors  abbé,  ayant  porté  ses  plain- 
tes àrempercui  Henri  VU,  ce  princeordonna 
à  l'aichevêque  de  Trêves  de  réduire  les  re- 
belles à  la  raison  el  do  les  soumetlre  à  l'o- 
béib^Saiice  de  leur  seigneur.  Il  ramena  l'abbé 
cl  les  religieux  à  Fulde,  el  obligea  les  bour- 
geois de  recevoir  avec  soumission  l'abbé, 
q.ii  en  fil  mourir  douze,  et  en  envoya  aulant 
en  exil.  Les  paysans  de  la  dépendance  de 
Fulde  se  révoltèrent  aussi  vers  l'an  lo2o  el 
ruinèrent  tous  les  moiiastcrcs,  lorsque  Jean, 
comte  d'Hemerberg,  de  la  maison  de  Bran- 
debourg, en  était  abbé. 

Ce  u'elail  pas  seulement  c  )ntrc  leurs  su- 


jets que  les  abbés  de  Fulde  avaient  à  com- 
battre, ils  avaient  encore  à  soutenir  par  la 
force  des  armes  leursdroits  contre  leurs  voi- 
sins, et  à  défendre  leurs  terres  contre  des 
troupes  de  bandits  et  de  voleurs  qui  s'étaient 
fortifiés  dans  plusieurs  châteaux.  Conrad  de 
Malk,  ayant  été  abbé  en  1220,  fil  entourer  de 
murs  ikimelburg  e!  y  fil  faire  des  forliHca- 
tions;  mais  Hennan  do  Lodembourg,  évêtiu  '. 
deWiirtzbourg,  ayant  voulu  l'euipêchcr,  el 
s'élant  avancé  pour  ce  sujet  avec  des  trou- 
pes, fut  mis  en  fuite  par  celles  de  l'abbé,  qui 
lit  prisonniers  plusieurs  seigneurs  du  parti  (hi 
révéque,  qui  fut  libli  >,é  ilc  payer  leur  ran- 
çon, ilmri  de  Este!,  successeur  de  Gon  ad 
de  Malks,  l'an  1248  ajiuta  de  nouvelles  for- 
tifications à  Haiiîrburg  ,  et  fortifia  aussi 
Aîaciilieiizell,  Bruckneau,  Ncugenhoffen,  et 
Sioltzberg,  et  rasa  les  cliâlcaux  de  Witters- 
perg,  Trunberg,  Kralak  el  plusieurs  autres, 
qui  servaienlde  retraite  aux  voleurs  el  aux 
b  indits  qui  ravageaient  le  pays,  licrihold.qui 
f  itabbécnl2t31,aclietalechâteaud'Haselte;n, 
fil  bàlir  Lutlerbak  et  Bridcnbalk,  changea  lu 
château  de  Blaukual,  qui  était  une  retraite 
de  voleurs,  en  un  munaslôr'de  saintes  vier- 
ges, et  ruina  plusieurs  châteaux  qui  ser- 
vaient de  retraites  à  ces  bandits.  Mais,  pen- 
dant qu'il  travaillait  ainsi  pour  le  bien  pu- 
blic et  à  assurer  le  pays,  des  personnes  aux- 
quelles il  avait  fait  le  plus  de  bien  conspirè- 
rent contre  lui  cl  l'assassinèrent  l'an  1270. 
Bcrlhold  de  Mackencell  ,  son  successeur, 
vengea  sa  mort,  fil  mourir  trente  des  com- 
pilées, cl  brûler  la  citadelle  de  Sleiuaw,  où 
ils  s'étaient  réfugiés. 

Les  limites  que  nous  nous  sommes  pres- 
crites ne  nous  permettent  pas  de  nous  éten- 
dre davantage  sur  les  événements  (Jiiîérenls 
arrivés  en  cette  abbaye,  dont  nous  croyons 
avoir  rapporté  les  plus  singuliers.  Nous 
ajouterons  seulement  que  l'abbaye  d'Hirs- 
feld,  qui  était  aussi  chef  d'une  congrégaliou 
eu  Allemagne,  fut  unie  à  celle  de  Fulde  sous 
le  pontificat  de  Léon  X.  Nous  avons  déjà  dit 
en  parlant  de  la  fondation  de  Fuhie,  qua 
s.iiul  Slurmc  ,  son  fondateur,  s'était  d  abord 
retiré  à  Hirsfeld, qu'il  abandonna  à  la  persua- 
sion de  saint  Boni  l'ace  archevêque  de  May  encc, 
à  cause  que  ce  l:eu  était  trop  désert  ;  mais, 
après  la  mort  de  saint  Boniface,  saint  Lulle, 
son  successeur  dans  cet  archevéeiié,  fit 
achever,  l'an  75a,  le  monastère  que  saint 
Sturme  avait  commencé  à  Hirsfeld.  Le  corps 
de  saint  Wirgberl,  abbé  de  Fritziar,  qu'on 
y  transporta  l'an  780,  rendit  ce  lieu  si  célè- 
bre, qu'on  y  bâtit  une  ville.  11  y  avait  ordi- 
nairemenl  cent  cinquante  religieux  dans  le 
monastère.  Pepiu  el  Cbarlemagni-  lui  don- 
nèrent de  grands  biens,  et  Louis  le  Oébon- 
naire  y  ajouta  de  grands  privilèges.  Mais  ses 
richesses  furent  la  cause  de  sa  perte,  par  la 
cupidité  et  l'ambition  de  ses  abbés,  qui,  ayant 
eu  le  titre  de  princes  de  l'empire,  la  ruinè- 
rent presque  entièrement  par  des  dépenses 
sufcrliues.  KUc  était  aussi  bien  que  Fulde 
itnmédialemcnt  soumise  au  saiiU-siége.  Vol- 
pert  en  étant  abbé,  voyant  lapauvrciéoù 
clic  était  réduite,  cl  voulant  punir  les  ha'  i- 


niCTIONNAIIlE  DES  OROHES  IIEI.ICIEUX. 


5(;7 

Iniils  de  1.1  ville  donl  il  avnil  roçu  du  mécoii- 
Ifiiloinpiii,  s'i-n  dé^nil  cuire  les  mains  d;i 
linpc  l.eon  X  lan  15l;i.  Uannaiil  de  Ivirc- 
lnTg.  qui  ctJil  pour  lors  abbi'  de  Fuldc  , 
l'oluiiu  à  la  prière  de  l'empereur  M  ixiini- 
licn,  pour  l'unir  à  son  abbaye,  et  le  pipe 
supprima  ce  lilrc  pour  celle  d'UirsfL-Ul.  Har- 
inanl  y  envoya,  la  même  année,  son  chance- 
lier a\cc  le  pri.ur  du  n)onl  Sainl-Jeaii  et 
quelques  religieux,  accompagnés  de  plu- 
sieurs gens  à  c.'icval.  Us  dé|)osiT.nl  le 
doven,  et  en  mirent  un  autre  du  monastère 
de'  FulJe,  qui  rerut  1  obéissance  des  rdi- 
^-ieux. 

Peu  de  jours  après,  l'abbé  y  alla  lui-même, 
accompagne  d'un  grand  nombre  de  person- 
nes, cl  se  mit  en  possession  d'un  château  où 
l'abbé  d'Hirsfold  faisait  ordinairement  sa  ré- 
sideme,  et  fil  piclcr  serment  de  (iJélilé  à 
quelques  paysans;  mais,  ayant  voulu  exi- 
ger la  même  chose  des  habilanls  d'IIirsfel.l, 
ils  fermèrent  leurs  perles  et  se  mirent  eu 
étal  de  défense,  ayan!  renvoyé  sans  aucune 
réponse  à  l'abbé  de  Fulde  la  personne  qu'il 
leur  avait  envoyée  pour  savoir  leur  volonté. 
Anne  de  Meclulbourg,  veuve  de  Guillaume, 
.surnommé  le  Puiné.  Iandgra\e  de  llcssc- 
Casscl,  et  tutrice  de  Pliilippe  l"  dit  le  .Magna- 
nime, son  lils,  prit  les  intérêts  des  habiian  s 
«i'Hirsfeld,  et  fit  mettre  un  autre  abbé  dans 
le  monastère,  ayant  obligé  l'abbé  de  Ful.le 
«le  relourn.  r  dans  le  sien.  .Mais  le  landgrave 
Philippe  ayani  introduit  dans  la  suite  la  reli- 
fzioii  protestante  dans  ses  Etats,  l'abbaye 
d'Hirsfeld  fut  ru  i  née  par  les  licré  tiques  ;el,éia  lit 
devenue  principauté  séculière  par  les  Ir.ii- 
lés  de  Westphalie,  elle  a  été  cédée  au  land- 

f;rave  de  Hessc-Cas-el.  Les  principaux  vil- 
agrscl  cliàlcaux  (jui  dépendaicntdc  cette  ab- 
baye, cl  (jui  font  [iréscnlemenl  p:irtie  de  la 
(irincipauté,  sont  Friling,  haute  et  basse, 
Gcila.Ulcrsdorf,  Kerpeshauss,  Mcngshauss, 


Nedersula,  llarlenbacli,  Wergfarl  el  Noder- 
Jossc. 

Quaiil  à  l'abbaye  dL'  Fulde,  elle  est  sou- 
mise, comme  nous  avons  dit,  imiuédi  itc- 
incnt  au  saiiit-siégc,  auquel  l'abbé  paye  uno 
rL'di'vance  de  quatre  cents  florins  aussil(>l 
qu'il  est  élu.  Elle  a  été  longtemps  un  sémi- 
naire d'évéques:  et,  entre  ses  privilèges, 
clic  avait  celui  do  fournira  l'allernalive  uu 
arcbevcquL'  à  l'Eglise  de  .Mayence;  en  sorlc 
que  de  trois  il  devait  y  en  avoir  un  lire  de 
l'abbaye  de  Fulde.  On  n'y  rero  l  que  dos 
personnes  nobles,  aussi  bien  que  dans  plu- 
sieurs autres  monastères  d'.Mlemagne,  donl 
les  abbés  sont  pareillement  princes  de  l'em- 
pire, cl  ont  aussi  voix  el  séance  dans  les 
diètes  de  l'empire  et  dans  le  collège  des 
princes,  tels  que  sont  les  abbés  de  Kemp- 
len,  de  l'rume,  de  Stavclo  el  de  Corwey,  tous 
(le  l'ordre  de  Saint-B,  noil.  Les  abbayes  de 
Murbach  el  de  Lure  en  Alsace  avaient  aussi 
le  même  droit  avant  que  le  roi  fiit  maître 
de  celle  province.  Il  3  en  a  encore  plusieurs 
autres  donl  les  abbés  sont  aussi  princes  de 
l'empire.  Outre  les  monastères  d'h.immi's 
qui  dépendaient  de  l'abbaye  de  Fulde,  il  y 
en  avait  aussi  plusieurs  de  Gllos.  Les  reli- 
gieux ont  toujours  conservé  le  droil  d'élire 
leur  abbé.  Nous  donnons  ici  l'ancien  habil- 
lement des  religieux  de  celte  abbaye.  La  pre- 
mière figure  représente  un  religieux  en  ba- 
bil ordinaire  ,  la  seconde  un  leligieux  en 
habit  de  chx'ur  (1).  Quant  à  l'habillement 
moderne,  ii  est  couforme  à  celui  des  autres 
Bénédictins. 

Bruvcrius,  Antiquit.  Fuldens.  Bruschiup, 
Chronolog.  Momisier.  Gennaniœ.  Slangel, 
Monastcriolog.  Monast.  S.  licned.  in  Giiina- 
nia.  Trilhème,  Annal.  Ilirsiiug.  Uulteau, 
Jlist.  de  l'ordre  de  Sainl-Benoit,  Joan.  Ma- 
billon,  Annal.  Dened.  Heiss,  llisl,  de  l'em- 
pire. 


G 


GABRIEL  (CoxcnÛGATiON  de  S.\int-) 

Di  la  congrégation  de  Suint -Gabriel,  avec  la 
l'i'e  du  vénérable  serriieitr  de  Dieu  César 
Iliai^chetli,  sénateur  de  Bologne,  fondateur 
de  cette  congi  égation. 

La  congrégation  de  Saint-Gabi  i^l  recon- 
nail  pour  fondateur  César  Hiaiulu'tli.  issu 
delà  f.imille  de  ce  nom,  (|ui  prelend  tir.  r 
son  origine  de  Robert  111, indu  l,  neveu  du 
gran  1  ThéoJoric,  dit  le  Saxon,  duc  de  Hour- 
l^ogne,  lequel,  étant  venu  s'établir  à  Bologne 
vi  rs  l'an  80'*,  y  cul  pour  fils  Cunibcrl  Bian- 
chctli,  el  y  donna  aiusi  commencemnnt  à 
cette  illustre  el  ancienne  famille,  de  laquelle 
iiont  sortis  de  grands  hommes  ()ni,  par  leurs 
écri  s  cl  la  force  des  armes,  ont  pris  la  dc- 
fen-e  de  i'Ivglisc  romaine.  César  Bianchetti 
eut  pour  père  .Marc-.\n'.oine  Bianchetti,  sc- 
ij.ili'ur  de  Bologne  et  chevalier  de  Calairava, 
«•l  (ii)ur  mère  Alessandra  deCarminati,  d'une 
famille  distinguée  de   Milan.  Ccj  deux   illus- 

(I)   Vojf.,  a  U  lui  du  vol.,  n">  70  cl  77. 


très  personnes  vivaient  dans  une  si  parfaite 
union,  que  leur  bonheur  eût  élé  parfait  sans 
le  (  liagrin  qu'ils  avaient  de  voir  qu'aucun  de 
leurs  enfants  mâles  ne  pouvait  parvenir  au 
neu\ième  mois,  ni  survivre  à  l'enfantemenl, 
malgré  toutes  les  précautions  humaines  qu'ils 
prenaient  pour  empéclicr  celte  disgr.icc.  Dans 
celle  peine,  ils  curent  recours  à  l'interces- 
sion de  sainte  Catherine  de  BdIo^uc,  pour 
ublcnir  par  son  moyen  un  héritier  qui  em- 
pêchât l'extinction  d'une  famille  si  ancienne. 
Leurs  prières  eurent  un  plus  heureux  suciès 
que  tous  les  auires  moyens  dont  ils  s'étaient 
servis  jusqu'alors  :  car.  ayant  été  exaucées, 
ils  curent,  le  8  mai  1585,  cet  enf  ml  de  béné- 
diction qui  fui  nommé  César  sur  les  fonts  de 
baptême.  Il  lit  paraîire  dès  sa  jeunesse  do 
grandes  dispositions  à  la  piété  cl  aux  scien- 
ces, cl  apprit  en  très-peu  de  tem|)S,  outre  la 
langue  latine,  les  langues  espagnole,  alk-- 
mandc  cl  csclavone.  Le  cardinal  Laurent 
Bianchetti,  son  oncle,  cliariué  du  récit  qu'un 


3C9 


CAB 


GAB 


570 


lui  tivail  fait  de  ses  bonnes  qualités,  et  sur- 
lont  de  sa  piété,  voulut  l'avoir  auprès  de  lui, 
e!  le  fit  venir  à  Rome,  où  il  fonnut  par  iui- 
iiiôine  la  justice  qu'on  avait  rendue  à  son 
neveu,  ne  pouvant  assez  admirer  sa  sagesse 
el  sa  conduite  ;  car  ilans  un  âge  où  on  ne 
respire  que  les  plaisirs,  il  f;iisait  pariître 
tant  d'cloignemenl  pour  les  divertissements 
(!e  la  jeunesse  et  une  si  grandi)  aversion  pour 
le  jeu,  qu'il  fit  vu>u  de  ne  jamais  jouer,  ce 
qu  il  a  iiivioiablement  observé  jusqu'à  la  fin 
de  ses  jours. 

De  justes  raisons  l'ayant  obligé  de  rotour- 
ner  cbeï  son  père  après  avoir  passé  quilques 
années  dans  Home  auprès  du  cardinal,  son 
oncle,  il  lui  donna,  en  le  quitt.int,  une  nou- 
velle preuve  de  cet  esprit  de  piété  et  de  re- 
!i;^ion  qui  animait  toutes  ses  actions,  car 
celte  Eniinence  l'ayant  fait  entrer  dans  une 
galerie  plrine  de  raretés  et  de  pièces  cu- 
rieuses (le  très-grand  prix,  le  pressa  avec  de 
grandes  instances  de  choisir  ce  qui  lui  agréait 
le  plus;  m;iis  le  jeune  Biancbetti,  regardant 
liiutes  ces  raretés  et  ces  bijoux  comme  des 
bigatelles,  les  méprisa  toutes,  à  la  réserve 
d'un  crucifix  de  simple  stuc*  qu'il  prit,  quoi- 
qu'à  regarJer  la  matière  el  le  travail,  il 
n'eût  rieu  de  considérable.  Un  choix  si  peu 
attendu  surprit  et  édifia  extrêmement  tous 
ceux  qui  étaient  présents,  et  le  cirdinal  en 
p  irliculier,  à  qui  le  jeune  César  dit  qu'il  le 
voulait  garder  pour  l'amour  de  lui.  Il  tint  sa 
promesse  el  le  conserva  toujours  pi'écicuse- 
uient,  ne  s'en  étant  détail  qu'eu  f.veur  de  la 
congrégation  de  Saint-Gabriel,  où  on  le 
garde  encore  aujourdliui  en  n.émoire  de  cet 
illustre  fondateur. 

11  n'avait  pas  encore  vingt  ans  lor  que  ses 
parents  songèrent  à  le  marier.  Ce  ne  lut  que 
par  une  soumission  aveugle  à  leurs  volontés 
qu'il  consentit  à  prendre  cet  état,  tout  à  fait 
opposé  à  son  inclination,  qui  l'avait  porté  à 
rei-evoir  la  tonsure  et  les  quatre  mineurs, 
après  ses  études,  afin  de  se  consacrer  au  ser- 
vice de  Dieu  dans  l'état  ecclésiastique.  Il 
épousa  donc  en  iG02  Erméline  de  Gamba- 
lunga,  d'une  ancienne  famille  de  Iliniini, 
donl  il  eut  neuf  enfants,  trois  garçons  et  six 
filles,  cinq  desquelles  embrassèrent  l'état 
religieux,  et  la  dernière  fut  mariée  àScipiou 
Butrigeri,  d'une  famille  illustre  de  Bologne. 
L'aîné  des  garçons  fut  le  comte  Georges- 
Louis,  en  faveur  de  qui  son  père  se  démit  de 
sa  dignité  de  sénateur,  el  qui  épousa  Aime- 
Marie  de  Lorenzo  Ralta.  Le  second  fut  le 
comte  Jules,  colonel  d'un  régiment  du  pape, 
qui  fui  marié  trois  fois,  et  eut  de  sa  dernière 
femme,  Ma;  ine  Uiplovalasi,  le  comle  César, 
sén.itcur  de  Bologne,  qui  a  hérité  des  biens 
lie  la  maison  de  Gambalunga,  qui  est  éteinte. 
Le  troisième,  nommé  Jean,  prit  le  parti  de 
l'Iïglise,  el  fut  abbé  de  Monte-Armato  et  de 
Saint-Gaudonne  de  Bimini ,  prolonotaire 
apostolique  et  prélat  de  la  sacrée  consulte. 

Outre  les  biens  de  la  fortune  el  de  la  nais- 
sance que  ces  trois  enfants  (donl  les  deux 
premiers  eurent  une  nombreuse  postérité) 
reçurent  de  leur  père,  ils  eurent  l'avantage 
de  recevoir  celui  d'une  sainte  éducation,  les 


faisant  souvent  ressouvenir  de  ce  que  dit 
saint  Jérôme,  qu'il  faut  s'appliquer  ici- b<is 
il  des  sciences  qui  puissent  passer  avec  nous 
dans  le  ciel,  et  ne  les  laissant  jamais  sortir 
de  la  maison  sans  leur  dire  auparavant  iiuel- 
que  mot  d'instruction  qui  pût  leur  inspirer 
la  haine  et  l'éloignenient  du  péché,  ce  qu'il 
faisait  avec  tant  de  zèle  et  tant  de  tendresse, 
qu'ils  en  sortaient  toujours  extrèmcmeiii 
touchés,  et  avec  une  résolution  vive  d'éviter 
toute  occasion  d'offenser  Dieu. 

Il  y  avait  dix  ans  qu'il  était  marié,  lors- 
qu'il apprit  la  mort  du  cardinal  Bianchotll, 
son  oncle,  que  son  mérite  encore  plus  que 
sa  naissance  avait  fait  parvenir  à  cette  émi- 
nente  dignité,  et  qui  se  vit  deux  fois  sur  le 
point  d'être  élu  pape.  Ce  grand  personnage 
avait  pris  les  degrés  de  docteur  en  l'un  et 
l'autre  droit  dans  l'université  de  Paris.  A 
son  retour  à  Rome,  Grégoire  XIII  le  fit  pré- 
lat de  la  sacrée  Consulte  et  auditeur  de  Rote. 
Pendant  cinq  ans  qu'il  exerça  celle  charge, 
il  composa  trois  grands  volumes  sous  le 
titre  de  Décisions  de  la  Rote,  qu'on  a  gardés 
longtemps  dans  la  bibliothèque  de  Rimini, 
et  qui  sont  à  présent  entre  les  mains  du 
comte  sénateur  Bianchelli  Gambalunga,  soa 
arrière-pelil-neveu,  qui  doit  les  donner  au 
public.  Sous  le  pontificat  de  Sixte  V  ,  il  fut 
envoyé  en  France  avec  le  cardinal  Gaétan, 
et  depuis  en  Pologne  avec  le  cardinal  Hippo- 
Ijle  Aldobrandin,  qui,  ayant  été  élevé  au 
souverain  pontificat  après  la  mort  d'Inno- 
cent IX,  l'honora  de  la  pourpre  à  la  promo- 
tion qu'il  fit  le  5  juin  15'JG;  le  mil  en  même 
temps  des  congrégations  de  lu  Signature  du 
Concile  et  du  Saint-Office,  el  le  fit  protecteur 
de  l'église  de  Lauretle  à  Rome,  où,  après 
s'être  distingué  dans  tous  ces  différents  em- 
plois, il  mourut  l'an  1612  et  fiff*enterré  dans 
l'église  du  Jésu  de  celte  même  ville. 

César  Bianchelli  fut  trèi-sensiblc  à  la 
perte  d'un  oncle  de  ce  mérite,  qu'il  aimait 
très-tendrement;  et,  la  regardint  comme  un 
de  ces  contre-temps  qui,  prouvant  l'incons- 
tance des  grandeurs  de  la  lerrc,  en  doivent 
détacher  le  cœur  du  véritable  chrétien,  il 
s'en  fit  un  nouveau  motif  de  se  consacrer  au 
service  de  Dieu.  C'est  pourquoi,  voyant  sa 
maison  assurée  par  la  nombreuse  famille 
donl  il  avait  plu  à  la  divine  Providence  do 
bénir  son  mariage,  il  fit,  du  consentement  de 
sa  femme,  voeu  de  chasteté  pour  le  reste  de 
ses  jours,  quoiqu'il  n'eût  encore  que  trente- 
cinq  ans.  Depuis  ce  temps-là  il  vécut  plus 
retiré  qu'il  n'avait  encore  fait,  et,  lorsqu'il 
se  fut  démis  en  faveur  du  comte  Georges 
Louis,  son  fils,  de  la  dignité  de  sénateur  de 
Bologne,  il  forma  le  dessein  de  se  retirer  une 
partie  de  l'année  dans  une  chartreuse.  Ses 
directeurs,  qui  le  jugeaient  nécessaire  au 
gouvernement  de  sa  famille,  l'empêchèrent 
de  l'exécuter;  mais  il  se  réserva  la  liberté  de 
s'y  retirer  en  certains  temps,  principalement 
durant  la  semaine  sainte,  qu'il  passait  avec 
ces  saints  religieux  dans  un  oubli  général 
de  toutes  les  choses  du  monde.  Lorsqu'il  était 
à  sa  terre  d'Ozano,  il  y  passait  la  plus  grande 
partie  du  jour  à  la  prière,  el  faisait  presque 


S7I 


dict:onn.muf-  des 


la  même  chosf  à  Bologno,  dans  un  app;irtc- 
rnenl  éloigné  du  bruil.  qu'il  s'élail  priiliqué 
pour  vaquer  plus  lihremeiil  à  ses  exercices 
de  piété  cl  de  dévotion,  en  sorte  qu'il  porlait 
partout  l'cspril  do  recucillenienl  el  de  soli- 
tude. 

La  mort  de  sa  fi  mme,  qu'il  perdit  l'an  1C38, 
]ui  causa  une  sensible  alfliclion.  C'était  une 
d.ime  d'une  piété  cxiniplaire,  avci-  laquelle 
il  av.iit  toujours  vécu  dans  une  parfaite 
union.  11  aurait  bien  voulu  jouvoir  se  reti- 
rer à  la  campagne  dans  une  si-  triste  con- 
joncture, mais  cela  ét.iii  incon)palible  avec 
les  dignités  qu'il  posséd.iit  encore,  dont  une 
des  principales  était  celle  d'elle  un  des  gar- 
diens des  clefs  du  palais  public,  charge  d'une 
grande  dislinclion,  qui  ne  se  confère  qu'à  des 
sénateurs,  et  qui  s'ci-t  conservée  longtemps 
dans  la  famille  des  liianclii-tti,  sans  parler 
de  celle  de  gonfalonier  de  la  justice,  dignité 
à  laquelle  il  était  é!c\é  pour  la  troisième 
fois,  et  dont  l'autorité  étail  si  grande,  que 
l'on  crul  devoir  la  limiter  en  quelque  >orle, 
en  bornant  à  deu\  mois  l'exercice  et  la  pos- 
session de  celte  charge,  dans  laquelle  il  se 
comporta,  aussi  bien  que  dans  tous  les  au- 
tres emplois  dont  il  fut  honoré,  d'une  ma- 
nière qui  mérita  l'approbation  universelle  de 
tous  ses  ct:ncitoycns,qui  l'honoraient  comme 
le  père  de  la  pati  ie. 

Le  zèle  dont  ce  saint  homme  était  animé 
pour  le  salut  des  Ames  ne  lui  permellail  pas 
de  voir  avec  indiflérence  le  pi  u  de  soin  (jue 
l'on  avait  d'instruire  la  jeunesse  cl  les  igno- 
lants,  en  sorte  qu'il  se  liouvail  non-seule- 
nieiil  des  enfants,  mais  même  des  personnes 
il'ilgc  cl  de  toutes  sortes  de  conditions,  qui 
ne  savaient  pas  les  principaux  mystères  de 
la  foi  ni  les  obligations  du  chrétien  les  plus 
nécessaires  ausalut.  Il  y  avait  eu  autrefwis 
lies  écoles  de  la  Doctrine  Chrétienne  insii- 
luces  à  cet  cff^.-!;  mais  elles  étaient  tombées, 
à  la  négligence  de  ceu\  qui  devaient  y  avoir 
l'd'il.  On  avait  réglé  que  les  écoles  seraient 
gouvernées  jiar  un  sénateur,  qui,  sous  le 
litiedc  re,  leur  ou  de  préfet,  en  aurait  la 
>u:intendancc;  cependant  il  ne  ^o  trou\ail 
plus  ])crsonne  de  ce  rang  qui  vi.ulût  s'en 
iharger.  I.cs  n  blés,  à  qui  on  av ail  attribué 
celte  charge  [lour  donner  plus  d  autorité  aux 
écoles,  l'ayant  dcd.iigncp,  comme  étant  au- 
dessous  d'eux.  César  <  ntrepril  de  les  rétablir, 
et,  ayant  comniuniqué  son  dessein  aux  pu;s- 
s.inccs  ecclésiastiques,  il  fit  nommer  pour 
présider  à  celle  sainte  entreprise  le  père  Cé- 
sar .Maruffi  de  la  C!impagnie  de  Jésus,  fcr- 
r.iro'S,  honnne  également  liistingné  par  la 
>-.iinl('lé  de  sa  vie  et  par  sa  capacité.  H  oh- 
lint  (a  même  temps  du  sulTraganl  du  cardi- 
nal Horghèic,  archevêque  de  I  ologne,  l'insli- 
lution  d'une  confrérie  de  gentilshommes  dans 
1  église  de  Sainle-Lucic,  pour  travailler  au 
rétablissement  des  écoles,  dont  il  f:il  lai  sni-- 
inlcndant  général,  nonobsl.int  toutes  les  dif- 
ncullés  qu'il  lit  pour  acce,  ter  cet  (uipl  >i  de 
chanté,  duqiU'l  il  se  croyait  incapable,  il 
«.oiiiniença  p.;r  d  iiiner  l'evemple  d'une  pieié 
H  duue  buinililc  véritablement  chrétiennes, 


unOKES  IIF.I.1CIEI.\.  S72 

allant  lui-même  le  crucifix  à  la  main  cher 
cher  les  enfants  dans  les  rues  de  Hologne 
pour  les  conduire  à  ces  écoles  saintes,  où  on 
les  instruisait  ;  et,  quand  on  lui  représentait 
que  pir  ces  actions  basses  cl  humiliées  il 
déshonorait  en  quelque  façon  sa  dignité  : 
Enseignoz-moi  ,  disait-il  ,  un  emploi  plus 
noble  et  [dus  important  que  celui  d'instruire 
les  ignorants  des  choses  nécessaires  à  leur 
salul,  et  je  laisserai  celui-ci  pour  prendre 
l'autre.  Il  ne  se  contenta  pas  de  les  instruire 
lui-même  de  vive  voix,  il  le  t'~l  cm  orc  par 
écrit  en  composant  un  pe  il  livre  intitulé  : 
H'anicre  d'instruire  les  ignoranl»,  auquel  il 
joignit  un  dialogue  qu'il  traduisit  de  l'espa- 
gnol, où  l'on  enscicnait  la  manière  de  faire 
des  actes  de  contrition. 

Tour  rendre  les  clTels  de  son  zèle  plus  du- 
rables, il  entreprit  d'établir  une  congréga- 
tion de  gentilshommes  qui  s'engageassent  à 
procurer  l'avancement  de  la  doctrine  chré- 
li:  nne,  et  qui,  sans  demeurer  en  cominn- 
nanlé,  s'assemblassent  à  certains  jours  dans 
un  lieu  marqué,  pour  y  vaquer  aux  exer- 
cices de  piété  el  picndre  des  mesures  effica- 
ces touchant  l'exécution  de  leur  dessein.  Cette 
compagnie  fut  d'abord  établie  dans  l'église 
paroissiale  de  Saint-Uonat,  sous  le  nom  do 
Jésus  el  Marie,  et  ensuite  transférée  dans  un 
autre  lieu  où  les  confrères  firent  bâtir  une 
chapelle  sous  l'invocation  de  saint  Gabriel, 
dont  le  nom  est  demeuré  depuis  à  celte  con- 
grégation. Outre  celte  première  inslilution, 
il  en  fit  dans  la  suite  une  seconde,  (omposée 
de  I  ers  inncs  zélées,  qui,  vivant  en  commu- 
nauté, concouraient  au  pi  ux  dessein  des 
premiers  d'auianl  plus  efficacement,  que, 
débarr.issées  de  tout  autre  soin,  elles  en  fai- 
saient leur  unique  alT.iire.  Ces  associés  furent 
a|  pelés  6"o(!i'i'te»;j,  comme  vivant  ensemble, 
à  la  différence  des  premiers,  qu'on  appela 
Conflitenli,  comme  personnes  qui  se  ren- 
daieiil  à  certains  jours  ilans  un  uiênic  lieu 
destiné  pour  leurs  assemblées.  Les  Conviicnli 
furent  d'abord  établis  dans  la  maison  de 
Saint-Gabriel  ;  ensuite,  pour  laisser  entière- 
ment celte  maison  libre  aux  Con/Iucnti,  ils 
furent  transférés  dans  un  antre  quartier,  où 
ils  acquirent  une  maison  et  firenl  bâtir  une 
église  sous  le  nom  de  Tous-les-Sainls.  Cette 
instilulion,  qui  lut  approuvée  par  un  bref 
exprès  du  cardinal  François  Rarberin,  légat 
a  lalcre  cl  vicaire  général  dTcbain  Vlll.  son 
oncle,  tant  au  spiriiuil  qu'au  temporel,  dans 
tout  l'Etat  ecclésiastique,  a  ceci  de  particulier, 
(ju'ellc  ne  doit  être  composée  <juc  de  per- 
sonnes laïques  qui  aient  un  bien  boe.nélo  et 
suffisait  pour  leur  entretien,  sans  autre  con- 
formité pour  l'habit  que  la  couleur  noire, 
etinl  permis  à  ceux  dont  la  qualité  le  de- 
mande, de  porter  des  étoffes  de  soie.  Ils 
lienvenl  entrelenir  un  ou  den\  valets  pour 
les  suivre  quand  ils  vont  en  ville;  mais  dans 
l'intérieur  de  la  maison  ils  ne  s>:nl  pas  plus 
à  eux  qu'au  reste  de  la  communauté,  l-'àge 
poury  elrc  reçu  est  depuis  18  ans  jusqu'à  50. 
I.c  noviciat  est  de  trois  ans  partages  en  deux 
probaliuns,  dant  la  [iremièrc  dure  un   au  cl 


373  CAN 

la  seconilo  les  deux  aulrcs  suivants,  au  boni 
desquels,  s'ils  ont  les  deux  tiers  des  vois  de 
ceux  qui  ont  droit  de  voter,  ils  sont  ineor- 
porés  à  la  congrégation.  Us  sont  encore  trois 
;ins  sans  y  avoir  vois  délibcralive,  c'est-à- 
dire  qu'ils  ne  l'ont  que  si  i  ans  après  leur 
entrée.  Cette  congrégation  doit  être  gouver- 
née par  un  chef  sous  le  litre  de  supérieur, 
assisté  de  quatre  conseillers,  qui,  aussi  bien 
que  le  supérieur,  sont  élus  par  la  couiniu- 
naulé  à  la  pluralité  des  voix,  dont  ils  doivent 
avoir  plus  de  la  nioiiié.  Tous  les  ans  on  pro- 
cède à  une  nouvelle  élection  ou  confirmation 
lani  du  supérieur  que  des  autres,  qui  dispo- 
sent de  concert  des  emplois  et  des  offices  de 
la  maison,  lesquels  ceux  qui  y  sont  nommés 
sont  tenus  d'accepter.  Telle  est  la  congréga- 
tion de  Saint-Gabriel,  où,  sans  être  astreint 
à  aucun  vœu,  chacun  s'emploie,  sous  l'obéis- 
sance du  su(;crieur,  à  procurer  le  salut  du 
prochain  par  tous  les  moyens  conformes  à 
.son  état.  ÈWd  fut  fondée  Tau  Hikï  et  établie 
à  Bologne  l'an  ICiG,  dans  le  lieu  où  elle  est 
encore  aujourd'hui.  Ce  l'ut  après  ces  deux 
établissements,  qui  produisirent  dès  lors  cl 
qui  produisent  encore  aujourd'hui  de  grands 
biens,  et  après  une  infinité  d'autres  bonnes 
œuvres,  que  le  saint  fondateur  fut  appelé  au 
ciel  pour  y  recevoir  la  lécompenso  de  son 
zèle  et  de  ses  travaux,  l'a  n  16  j5,  et  le  soixante  • 
dixième  de  son  âge;  laissant  après  lui  une 
fçrande  roputatiou  de  sainteté,  auiorisée  de- 
puis par  des  miracles.  Sa  vie  a  été  donnée  au 
public  par  M.  Uelfrate,  docteur  en  l'un  et 
l'autre  droit,  et  chanoine  de  Téglise  cathé- 
drale de  Saint-Pétronne  de  Bologne,  et  im- 
primée en  cette  même  ville  l'an  HOï. 

Carlo  Antonio  Delfralc,  Viti  del  Venereh. 
fcrvo  di  Dio  Cesare  BianclieUi  fondiitor.  délia 
conqreg.  di  S.  Gubriele.  Herman,  IJist.  des 
Ordres  rclùjieux,  lom.  IV  ;  et  les  mémoires  de 
Trévoux,  juillet  170D. 

(jALLICANE  (Dominicains  de  la  congré- 
gation). Voy.  Lombahuie. 

GANDERSHEIM  (Guanoinesses   proiestam- 

TES    de). 

Des  chanoinesses  de  Gandersheim  ,  Quedlim- 
boitrej,  Herf'Vd  et  autres  chanoinesses  pro- 
testantes, en  Allemafjne. 

Au  milieu  do  l'hérésie  dont  une  partie  do 
l'Allemagne  et  les  provinces  du  Nord  ont  été 
iiifeclées,  les  monastères  de  filles  ont  eu  des 
sorts  difierents.  Les  uns  ont  été  tellement  dé- 
truits ,  qu  il  n'en  reste  plus  que  la  mémoire; 
d'autres  ont  été  ch.mgés  en  des  usages  pro- 
fanes. Il  y  en  a  qui  ont  conservé  la  pureté 
de  la  foi  ,  et  se  sont  maintenus  dans  les  ob- 
servances régulières,  et  d'autres  enfin  où  les 
r;'ligieuses,  qui  avaient  déjà  renoncé  aux 
vœux  solennels,  pour  vivrc.en  chanoinesses 
séculières,  ont  dans  ce  dernier  état  embrasé 
l'héréiie  de  Luther.  Telles  sont  les  chanoi- 
nesses de  Gandersheim,  de  Qucdlimbourg, 
d'Herford.  et  quelques  autres  en  AlleiiKig'ne, 
dont  nousallons  rapporter  l'origine,  n'ayant 
dessein  de  parler  que  de  celles  qui  pieiinenl 
la  qualité   Je  chanoinesses  ;  c'isl  pourquoi 


CAN 


5-i 


je  no  dirai  rien  de  quelques  aulrcs  monastè- 
res qui  se  trouvent  dans  le  royaume  de  Da- 
nemark, où  les  religieuses,  ayant  renoncé  à 
la  foi  catholique,  ont  toujours  vécu  en  com- 
munauté sous  l'obéissance  d'une  supérieure, 
et  gardé  une  uniformilé  dans  l'hahillemcnt, 
comme  ont  fait  les  religieuses  de  l'ordre  de 
Saint-Dominique  à  Copenhague,  qui,  après 
avoir  embrassé  l'îicrésie,  «mt  toujours  gardé 
la  vie  commune,  et  sont  habillées  de  même 
que  les  filles  de  la  communauté  de  Sainte- 
Geneviève  à  Paris  qu'on  appelle  les  Miramio- 
nés,  dont  nous  donnerons  une  estampe  à 
l'ariicle  de  ce  nom. 

L'abbaye  de  Gandersheim,  dans  la  princi- 
pauté de  Wolfcrahulel,  à  trois  lieues  d'Kym- 
bek,  et  à  six  de  Goslar,  dans  l'évéché  d'Hil- 
desheim,  a  été  l'une  des  plus  considérables 
d'Allemagne  ,  et  Yepez  la  met  au  nombre 
des  quatre  abbayes  princièrcs,  où  l'on  ne 
recevait  que  des  filles  de  princes.  Elle  fut 
fondée  vers  l'an  852  par  Lutolph  le  Grand, 
duc  (le  Saxe,  ri  Ode  sa  femme,  dont  Irois  de 
leurs  filles  furent  successivement  abbesses. 
La  première  fut  Halmode,  l;i  seconde  Ger- 
bcrge  et  la  troisième  Christine.  La  princesse 
Sophie,  fille  de  l'empereur  Olhon  11,  en  en- 
trant dans  ce  monastère  pour  y  être  reli- 
gieuse, y  causa  de  gra-ds  Iroubles.  Elle  fit 
bien  paraître  qu'elle  n'y  entrait  pas  dans  un 
esprit  d'humilité  :  car,  croyant  que  ce  serait 
un  déshonneur  |  ourdie,  comme  fille  d'em- 
pereur, de  recevoir  le  voile  des  mains  d'un 
prélat  qui  n'eût  pas  le  pallium,  elle  ne  vou- 
lut pas  le  recevoir  de  l'évoque  d'IIildesheim, 
auquel  ce  monasièrc  avail  toujours  été  sou- 
mis depuis  sa  fondation,  cl  elle  voulut  que 
ce  fut  l'archevêque  de  iUayence  qui  le  lui  don- 
nât. Osdage,  qui  était  évéquc  d'Hildesheim, 
s'y  opposa,  et  les  évêques,  qui  étaient  venus 
pour  assistera  cette  cérémonie  avec  l'empe- 
reur Othon  ,  favorisant  i'évêquc  d'Hildes- 
heim, on  convint  que  ce  prélat  et  l'archevê- 
que do  Mayence  lui  donneraient  ensemble  le 
voile,  aprèsque,  selon  la  coutume,  elle  aurait 
promis  l'obéissance  el  la  soumission  à  l'évo- 
que d'Hildesheim.  Les  choses  demeurèrent 
en  cet  état  sous  le  reste  du  p  ntificat  d'Os- 
dagc  cl  de  Gerdage,  et  sous  les  premières 
années  de  celui  de  Beniardj  qui  monta  sur 
le  siège  épiscopal  d'Hildesheim,  l'an  092. 
Pour  lors  le  relâchemen!,  qui  s'était  déjà  in- 
troduit dans  l'abbaye  de  Gandersheim,  alla 
jusqu'à  un  tel  excès,  que  les  religieuses  y 
viraient  sasis  aucune  subordination.  Le  luxe 
et  la  vanité  y  régnaient,  et  l'on  n'y  recon- 
naissait plus  l'autori'é  de  l'évcque.  La  prin- 
cesse Soph  e,  malgré  l'abbesse,  qui  s'y  op- 
posa fortement,  se  rendit  auprès  de  l'arche- 
vêque de  ]\layence,  et  demeura  plus  d'un  an 
dans  son  palais.  L'évêque  d'HilJcsheim  l'a-; 
virtit  plusieurs  fois  de  retourner  dans  son ' 
monastère,  mais  ses  remontrances  furen! 
inutiles.  Elle  anima  l'archevêque  de  Mayence 
contre  lui,  et,  oubliant  co  qu'elle  lui  avait 
promis  le  jour  de  sa  consécration, elle  publia 
qu'elle  n'avait  point  reçu  le  voile  de  ses 
mains,  mais  bien  de  cdlcs  de  l'archevétiuc 
de  Mayence;  que  Gandersheim  n'était  point 


r75 

(le  sn  jiiriilitlion,  et  qu'dlo  no  devait  pas  lui 
obéir;  el,  olinl  retournée  en  son  monastère, 
rllc  cxt  ita  aussi  les  autres  re'i>;ieuses  à  ne 
point  reeoniinilre  l'évéquc  rlHildeslieirn. 

Kn  effet,  le  temps  appro(  li.inl  qu'on  devait 
faire  la  dé  licaee  de  la  nouvelle  éplise  de  ee 
nionaslcre.la  princesse  Sophie,  àquil'abbesse 
ovait  donné  le  soin  de  pourvoir  à  tout  ce  qui 
serait  nécessaire  pour  la  cérémonie,  invlla 
l'archevêque  de  .Mayencc,  et  le  jour  fut  (ixé 
à  la  félc  de  rKxallâlion  de  la  sainte  croix. 
L'évéqnc  dllildi^sheim,  qui  de  son  ccUc  avait 
été  prié  par  rabl)esse  de  faire  ce  jour-là  la 
cérémonie,  promit  de  s'y  trouver.  Mais  l'ar- 
chcvéque  de  Mayence  voulut  différer  jusqu'à 
la  fêle  de  saint  Malthicu,  et  le  fit  signifier  à 
l'évêque  d'ilildeshciiii,  (]ui,  ne  pouvant  s'y 
trouver  ce  jour-là,  vint  à  Gandcrsjjcini  le 
jour  de  rF.xaltalion  de  la  sainte  croix,  pour 
consacrer  l'église,  comme  il  en  avait  éléprié 
parl'alibi'sse  ;  mais  au  lieu  d'y  trouver  ce  qu'il 
fallait  pour  la  cérémonie,  il  y  trouva  au  con- 
traire des  personnes  aposiées  pour  l'insulter. 
Il  dit  néanmoins  la  messe  en  présence  des 
religieuses,  qui  étaient  fort  animées  conire 
lui.  et  les  obligea  à  poi  ter  leurs  offrandi  s  et 
recevoir  la  bénédiction.  Le  prélat,  au  milieu 
de  la  messe,  fit  une  exboilntion  pour  conso- 
ler le  peuple,  qui  murmurait  liaulemcnt  de 
ce  qu'on  traitait  son  évéquc  si  indignement, 
cl  à  la  fin  du  discours  il  défendit  que  l'on  fit 
la  consécration  de  l'église  s.ins  son  consen- 
tenieni,  ce  qui  irrita  si  fort  les  religieuses, 
que  lorsqu'elles  présentèrent  leurs  offrandes, 
elles  les  jelèrent  par  terre  avec  indignniion, 
en  disant  des  injures  à  leurcvêque.  L'arelie- 
véque  de  Mayence  vint  à  Gandershi  im  le 
jour  d?.  saint  Maithieu  pour  faire  la  dé. li- 
caee. L'cvéque  d'Hildeslieim  ne  s'y  trouva 
pas,  et  envoya  à  sa  place  lilikéliiird,  cvêque 
de  Si  hieswig,  que  les  guerres  avaient  obligé 
d'abaiïiloiiuer  son  diocèse.  Il  s'oppusi,  au 
nom  de  l'éièque  d'Hildeslieim,  à  toutes  les 
'  nlrcprises  de  l'archevêque,  et  la  consécra- 
tion de  l'énIise  fut  suspendue.  Ilcrnard  eut 
recours  à  Uome;  l'on  y  tint  un  synode  l'an 
10;)l  pour  (orminer  ce  différend,  et  l'on  y 
donna  pain  de  cause  à  c^  prélat  ;  mais  à  son 
retour  de  Itome,  étant  allé  à  Gandersheim,  il 
y  trouva  des  gens  en  a' mes,  tant  de  la  part 
•le  la  princesse  Sophie  que  de  rarclievé(iue 
do  .Mayence,  qui  l'obligèrent  de  se  retirer. 
L'on  tint  encore  [ilusieurs  assemblées  d  évo- 
ques en  Allemagne  pour  le  même  suji'l,  et 
celle  affaire  ne  lut  terminée  i]ue  l'an  10  i7. 
La  juiiditlion  de  re  monasière  fut  cntiére- 
minl  adjugée  à  l'cvéïiuc  d'Hildeslieim  ,  qui 
(il  enfin  la  dédicace  de  l'église;  cl  I  ar(  lie- 
véijiie  de  Maycme,  ayant  reconnu  sa  faute 
dans  le  < oncile  de  FraiicforI,  renonça  à  tou- 
tes les  preientions  qu'il  pouvait  avoir  sur 
(janderslieiiu,  et  pour  témoignage  il  donna 
à  l'é^êque  d'Hildeslieim  une  crosse  ou  bâliui 
pasioral.  Aribe  ,  an  hcvéque  de  Mayence, 
voulant  renouveler  relie  querelle  eu  102i, 
l'enqiereur  Conrad  II  l'en  einfiéclia;  mais  la 
prineessc  Sipliie,  qui  av.iit  élé  faite  abliesse 
'le  dan  ler-InMiu  .ipiés  l.i  mort  de  (ierburtre, 
Mc  usii  point  d'iuqui.  1er  les  cvéques  d  Uil 


DICTIO.V.NAIUE  DES  OUDUES  RELIGIEUX. 


376 

dcshrim  au  sujet  de  la  juridiclion.  Elle  re- 
connut sa  fauie  avant  que  de  mourir,  et  elle 
alla  Irouver  l'évèquc  saint  lioilard,  qui  le- 
n.iil  pour  lors  le  siège  d'Hildeslieim.  lïile  lui 
l'romil  toule  sorte  de  salisfactions  ;  et  ce  pré- 
lat, qui  eiail  malade,  lui  ayant  répondu 
qu'il  examinerait  celle  affaire,  il  lui  donna 
terme  jusqu'à  la  fêle  delà  Puri.lealion  de  la 
sainic  Vierge.  S. ipliic ,  qui  appréhendait  la 
mort,  lui  dit  :  l'hu  à  Pieu  que  et  jour-là  nous 
Iroivc  en  bonne  santé  l'un  el  l'autre!  L'évè- 
que  à  ces  paroles  lui  répliqua  :  Moire  vie  est 
entre  les  ma  ns  île  Dieu  ;  muis  quelifue  chose 
qui  arrive  ,  nous  discuterons  certainement 
cette  affaire  ilevnnt  le  véritable  Ju/e  au  jour 
de  la  fête  delà  l'urifii  alion  de  la  sainte  Vierge. 
La  chose  arriva  couime  le  saint  l'avait  prédit, 
car  il  niouriil  huit  jours  après,  el  l'alihesse 
Sophie,  le  jour  de  la  Purificaliou  de  la  sainlo 
Vierge,  de  l'an  lO.'iS. 

L'on  lie  put  réparer  les  désordres  que 
celte  ablu'sse  avait  ca\isés  à  (îaiideisheim. 
Les  religieuses,  qui  à  son  exemple  vivaient 
en  séculières  ,  s'acioulumèrenl  à  celle  ma- 
nière de  vie,  et,  ayant  renoncé  à  la  règle  do 
saint  Benoit,  aux  observances  régulières  et 
aux  vœux  solennels  dès  le  xr  siècle,  elles 
cmbrassèrcnl  facilement  l'hérésie  de  Lullier 
lorsque  toute  la  Saxe  en  fut  infectée,  ce  qui 
arriva  sous  le  gouvernement  de  l'.ibbesse 
Claire,  fille  d'Henri  Ili  dit  le  Jeune,  duc  do 
Brunswick,  qui  épousa  dans  la  suite  l'Iii- 
lippc  de  Brunswick,  duc  de  fîubenhagen, 
sou  cousin,  et  mourut  en  l.'JOo.  Il  y  a  eu 
aussi  plusieurs  autres  princesses  de  la  même 
maison  qui  ont  élé  abbesses  de  (landcrs- 
heirn  :  comme  I)orolhée-.\ugiiste,  morte  en 
IGil  ;  Christine-Sophie  île  lirunswick,  qui 
épousa  en  1G81  Auguste  (îuill.uime,  son  cou- 
sin germain.  La  prineessc  Henrielie-Chris- 
line  de  Brunswick  Wolfenbutel  lui  succéda  ; 
mais,  l'an  I7li,  erllc  princesse,  après  avoir 
reiionré  à  la  qualité  d'.ibbesse  de  Ganders- 
heim, abjura  le  luthéranisme  en:re  les  ui.iius 
de  l'abbe  de  (]orvey,  el  reçut  le  sacrciUi'iU 
de  (••Mjfirmalion  à  Burcmonde  par  les  mains 
de  l'évêque  de  la  même  ville.  Ce  monastère 
a  élé  si  considérable,  que  Bruschius,  qui  écri- 
vait en  lool),  dit  que  dans  ce  temps-là  il 
avait  encore  pour  vassau\  non-seulemeut 
des  princes  de  la  maison  de  Briinswiek,  mais 
aussi  de  celle  de  Saxe  et  de  Brandebourg  et 
plusieurs  barons  et  seigneurs  d'Allemagne. 
L'abbesse  est  princesse  de  l'empire,  mais 
r.on  pas  imméJiatc,  cl  elle  n'envoie  pas  des 
députés  aux  diètes.  La  religieuse  Uoswid, 
qui  s'csl  rendue  célèbre  par  les  ouvrages 
qu'elle  a  composés  eu  vers  et  en  prose, 
était  professe  de  ce  monastère.  |{|le  parlait 
le  grec  et  le  latin  avec  faeililé.  Islle  écrivit 
eu  vers,  à  la  prière  de  l'empereur  Oihon  II  el 
par  ordre  de  Gerbcrge,  son  abbesse,  un 
KIoge  historique  de  la  vie  d'()tlion  premier, 
cl,  depuis,  le  M.irlyre  de  saint  Denis  et  de 
s.iint  Pelage,  avec  d'aulres  ouvrages.  Elle 
mourut  l'an  1)07. 

Joan.  Mabill.,  Annal.  Hcnid.,  lom.  IM  et 
IV;  el  Gaspar  ISruschius,  Chronoloij.  lU'j- 
Hdslei'.  Gcrm. 


377 


G  AN 


CEN 


Z1S 


L'abbaye  (rErfurlli ,   sidicc   dans   la   ville 
(le  C'  nom,  sur  la  rivière   de  Vehra,dans  le 
comté   de  Uavensboiirï,  a  eu  le  même  sorl 
que  celle  de   Gandcrshcim.  Elle  fut  fondée 
par   Louis,  roi   de   Cicrmanio,  l'an    822.   Ce 
prince,   ayant   fait  bâiir    pour  des  bommes 
l'abbaye  de  Corbie-la-Ncuve  sur  le  modèle 
de  celle  de  Corbie   en    France,  voulut  aussi 
avoir  un    monastère  de  filb  s  en  Allcmai^ne 
semblable  à  celui  de  Notre-Dame  deSoissons, 
d'où  il  fil  venir  Telle,  qu'il  fit    première  ab- 
besse  de  l'abbaye  d'Herfoid,  do:it  l'église  fut 
dédiée  à  sainte  Pusine,  après    que   l'on  eut 
apporté  de  France  en  Allemagne  le  corps  de 
celle  sainte.  Ces  deux  monastères  en  produi- 
sirent beaucoup  d'autres  non -seulement  en 
Allemagne,  mais  encore  en  d'autres  provin- 
ces. Celui  d'firfuiih    fut  preinièrenicnt  ruiné 
par  les  Huns  ou  Hongrois,  l'an  933,  cl,  après 
qu'il  cul  été  établi  ,  il  fut  pillé  par  l'avarice 
de   Tliiedmarl,   frère    de   Dcrnard  ,   duc  de 
Saxe,  et  de  Godesle,  (]ui  en  était  abbesse  :  il 
en    emporla    les    trésors  ;   mais    INLiinwerc, 
évéquede  Paderborn,  l'ayant  fait  comparai- 
Ire  dans  un  synoiie,  le  cond;imna  à  restituer 
à  ce  monastère  trente  talent'* ,  el  Tliiedmarl, 
ne  pouvant  payer  une  si  grosse  somme,  cé- 
da à  ce  monastère  des  Irrrcs  qui  lui  ap|iar- 
lenaienl.  Celte  abbaye    fut    rctablii-  dans  sa 
première  splendeur,  et  l'abbesse   Godestc  y 
renouvela  les  observances  régulières,  que  les 
religieuses    abandonnèrent    an   commence- 
ineril  du  xir"  siècle,  et  elles   ont   eu    enfin  le 
mallu'ur  de  lomber  dans  l'bérésie.  qu'elles 
cnibras.^èrent  lan   1!J13,  n'ayant   pas    imité 
l'abbaye  de  Corbie-la-Neuve,  qui  a  toujours 
conservé  la  pureié   de  la   foi  avec  les  obser- 
vances règulièies  sous  la  règle  de  saint  He- 
nnit. L'abbesse  d'Erfuilii    est    princesse    de 
l'empire  et  a  rang  parmi  les  prélats  du  cercle 
de  Weslphalie,  envoyant  des    députés    aux 
diètes   de   l'einpire.    File   fournit    pour   sou 
CdUtingenl,  en  temps  de  guerre,  six  fantas- 
sins.   File  était   autrefois    dame    d'Frfarlli, 
mais  l'électeur  de  Brandebourg  s'en  empara 
en  1C4-7,  comme  étant   de  la  dépendance  du 
conilc  de  llavensbourg. 

Joan.  Mabill.  ,  Annal.  Onl.  S.  BemdicC., 
tom.  Hl  el  IV.  Annal,  cl  Monuimnl.  Pa- 
derborn. el  Annal.  Westphal. 

L'abbaye  de  Qucdlirnbourg ,  située  dans 
la  vile  du  même  nom,  qui  confine  les  prin- 
cipautés d  Anhalt  et  d'H.;lberslad  avec  le 
comté  de  Biakembourg,  a  imité  celles  d'Her- 
foid et  (le  Gandersbeim.  Elle  fut  fondée  l'an 
930  par  Henri  l'Oiseleur,  roi  de  (jerinanie  , 
cl  sa  femme  Matbildc,  e  i  l'honneur  de  saint 
Servais.  Ils  y  donnèrent  de  grands  biens  et 
y  choisirent  leur  sépulture.  Ce  le  abbaye, 
dont  l'abbesse  est  princesse  immédiate  de 
l'empiie  cl  du  cercle  de  la  haute  Saxe,  eu- 
voie  des  députés  aux  dièli  s  et  fournil  pour 
son  coniingent,  en  temps  de  guerre,  un  cava- 
lier et  dix  laniassins.  La  ville  de  (Juedlim- 
bourg  a  été  longtemps  libri;  el  impériale  ; 
mais  l'abbesse,  avec  qui  le  magistrat  se 
brouilla,  ayant  appelé  <à  son  secours  Er- 
nest ,  électeur  de  Saxe  ,  son  frère ,  ce  prince 
s'en  rendit  uiaitre  en  U77,  et   prit  l'abbaye 


sous  sa  protection.  Les  électeurs  de  Saxe  eu 
ont  élé  les  protecteurs  depuis  ce  temps-là  et 
jouissent  de  la  supériorité  tcrritoria'e  dans 
la  ville  el  dans  son  territoire  ,  où  l'abbesse 
n'a  que  la  basse  justice.  Il  y  a  eu  plusieurs 
princesses  de  la  maison  de  Saxe  qui  ont  éié 
abbesses  de  n'i^^l'imbourg ,  comme  Hed- 
wige,  fille  de  Frédéric  II ,  dit  le  Pacifique  , 
électeur  de  Saxe,  morte  en  1512;  Marie, 
fille  de  Jean  Guillaume  ,  duc  de  Saxe-Wei- 
mar,  morte  en  IfJlO  ;  Dorothée ,  fille  do 
Christian  I  ,  aussi  électeur  de  Saxe,  morte 
en  lfil7  ;  Dorothée-Sopliie,  fille  de  Frédéric- 
Guillaume,  due  (le  Saxe-Allembourg,  morte 
en  ICiS;  el  Annc-Dirolhée  ,  fille  de  Jean 
Ernest  du  Saxe-Weimar.  La  princesse  Anne- 
Marguerite  de  Brunswick  en  a  élé  aussi  ab- 
besse ,  et  ce  fut  la  comtesse  Anuo  de  Stol- 
berg  qui,  en  1339,  y  fit  recevoir  la  confession 
d'Augsbourg. 

L'abbaye  de  Gérenrode,  dans  la  princi- 
pauté d'Anhalt  ,  à  trois  lieues  de  Quedlim- 
bourg,  fut  fondée  aussi  pmr  des  religieuses 
de  l'ordre  de  Saint-Benoît  par  le  duc  Géron, 
mort  l'an  9(io.  L'abbesse  est  princesse  im- 
médiale  de  l'empire  et  du  cercle  de  la  haute 
Saxe,  fournissa  t  peur  son  contingent,  en 
temps  de  guerre,  un  cavalier  et  six  fantas- 
sins. Elisabeth,  comtesse  de  Wied,  (^ui  en 
était  abbesse,  y  fit  recevoir  la  confession 
d'Augsbourg  en  1521.  Les  princes  d'Anhalt 
oui  depuis  longtenijjs  l'avouerie  de  celte 
abbaye,  dont  ils  payent  les  charges  qu'elle 
doit  à  l'empire. 

Joiu.  Mabil.,  Annal.  Bened.,  tom.  111  ;  et 
Audifrel .  Geograph. ,  tom.  VA. 

GÈNES    (AUGUSTINS     de    la     C0M(3nÉGAT10N 

de).   Voy.  AuGUSTiJi    (Ermite,    vu  SAnr-), 

§  III  • 

GENETTE  (Orduk  de  la).  Voy.  Ampoulk 

(Sainte-). 

GENEVIÈVE    (  CoNRaÉGATtox    des    cha- 

NOINi;S    RÉGULIERS    OE   SaLNTE-).     Voy.    GÉNO- 
VÉFAIN'5. 

GENEVIÈVE   (FiLLES  de  Sainte-1.    Voy. 

MlRASllO\ES. 

GÉNOVÉFAINS  (Cuanoines  réguliers \ 
Des  Gcnovéfains  chanoines  rrgnliers  de  la 
congrégation  de  France,  vulgairement  ap- 
pelée de  Sainte-Geneviève  ,  avec  la  vie  du 
révérend  père  Charles  Fauve,  instituteur  de 
celte  congrégation. 

Nous  étani  proposé  de  donner  dans  cette 
Histoire  des  Ordres  religieux  un  abrégé  des 
vies  de  leurs  principaux  fondaleurs  et  rcl'or- 
maleurs,  il  est  juste  que  nous  parlions  du 
II.  P.  Charles  Faure,  à  qui  la  France  est 
redevable  de  lui  avoir  procuré  la  congré- 
gation des  chanoines  réguliers  qu'on  ap- 
pelle de  France  el  plus  communément  de 
Sainte-Geneviève,  qui  fait  l'un  des  plus 
beaux  ornements  de  l'état  régulier  dans  ce 
royaume. 

Il  naquit  l'an  1594,  à  quatre  licucs  do 
Paris,  (lans  le  village  de  Luciennes ,  où 
ses  parents  avaient  une  maison  de  cam- 
])agne.  Son  père  se  no>umail  Jean  Faure, 
seigneur  de  M:!rsinval ,  commissaire  orsii- 


070                                           niCTiONNAir.E  DF.S  OUPllF-S  T.ELICIEL'X.  SS») 

nniro  lies  guerres  ;  cl  sa   mi-re  ,   Mailciciiic  Ueims  cl  de  Sens.  Mais,  peu  de  temps  après, 
le  Rossu.  U  fui  ncii'nmé  Charles  sur  les  fonls  les  guerres  que  causètcnl  les  Au^ImIs  dans 
lie  bapti^me  ,  1 1  d's  sa  plus  lendic  jeunesse  ce  royaume,  el  qui  empêclièrenl  la  tenue  des 
il    im.iitra    beaucoup   d'Inclination    pour   la  chapitres    pro\inciauK    ord mnés     par    Ite- 
\ertu  el  une  grande  aversion  pour  le  vice;  noîl   XII,  turent  rausc   que  le   relâehemenl 
car  à  peine  aval-il  cinq  ans,  qu'.:)anl  su  «.'introduisit  dans    la   plupart   des   niai-ons. 
que  sa  nourrice  avait  été  reprise  Uo  quel-  le  partage  des  liiens  et  la  propriété  en  ban- 
ques  désordres,  il  ne  voulut  plus  soulTrir  nirent  la  pauvreté  ;  les  offices,  qui  devinrent 
bcs  caresses,  et  fuyait  ir.è;!ic  su  présence.  perpétuels,  anéantirent  l'ohéissaiice  ;  el  les 
Il  aimait  pa>sionnenienl  l"  les  les  choses  religieux   se  plongèrent   dans  l'oisivelé,  ne 
qui  regnrdenl  le  culîe  des  au'els ,  et  il  était  snngeanl  plus  aux  études  et  ne  s'adonnant 
si  porté  à  fa  rc  l'aunione,  qoc    souvent   il  qu'à  la  b'>nne  chère  et  au  déré^lenienl. 
se  levait  exprès  de  grand  nv»  ia  pour  pren-  l.c  n)alheur  des  coniniendes  fut  UU'-  suite 
dre  les   fru;ts   qui  étaient  sors  1.  s  arbres,  el  une  punition  de  ces  desordres,  el  l'abbaye 
afin  de  Us  cacher  et  de   les  donner  ensuite  de  Saint-\incenl  y    fut  assujellie  des  pré- 
aux  pauvres.    Son   hunieur   était  extrême-  n)ières;  le  dérèglement  dans  lequel  on  y  vi- 
mcnt  douce,  son  cirur  tendre  et  généreux;  vait  en  1V02  fut  si  grand,  que  le  parieinenl 
et  ,  (]uoiquil  fût  vif  et  plein  de  feu  ,  il  était  de  Paris  fut  obligé  d'en  prciulrc  cimnaissan- 
léannioins  judici  u\  et  modéré  ,   palieni  et  ce.  Il  était   plus  grand  en   laOo.  Il  y  eut  des 
persé\éranl  dans   le  travail  ;  enfin   il   sem-  commissaires  nomtnés  pour  y  faire  une  vi- 
lilait   ((ue    Dieu    avait   mis   eu   lui   tous  les  site  dans  les  formes;  et   tous   ces  désordres 
carac  ères   qui   sont   propres   à   former   les  n'approchaient   pas   encore  de  ceux   qui    y 
grands    homme;;.  régnaient  lorsque  le  It.  P.  Faure  y  prit  l'ha- 
Son   père   reu\03a  à   l'âge  de  dix   ans  à  lit  en  IGl'i.   Ce  jour  si  saint  el  si  heureux 
r.ourgcs  pour  y  faire  ses   études  au  collège  pour  lui  ne  fui   pour  ainsi  dire  qu'un  jour 
des  K.  r.  Jésules  ,    mais  l'air  du   pajs  lui  d;' débauche  el  de  profanation    pour  les  au- 
ayanl  é'c  cimtrairc,  il  le  rappela  auprès  de  très  (lul  assistèrent  à  celle  cérémonie.  On  vit 
lui  ;  et  à  peine  ful-il  de  retour,  qu'il  le  laissa  dans  ce  saint  lieu  des  festins,  des  danses,  et 
orphelin,  c  ant  décdé  et   ayant  laissé  à  ses  J'autresdiverlissemeuts.  Les  femmes  mangè- 
enfants  plus  d'honneur  que  île  biens  ;  ce  qui  renl  avec   les  r,  ligicux  dans    le  réfectoire; 
fit  que  la  mère  de  n  Ire  Charles   le    dcsiiua  elles  enlrèrcnl    partout,  jouèrent   d.ins   les 
I  our  rF.glise  ;   ei,  comme  l'abbé  de  Saint-  cloîtres   el  dans    le  chapitre;  et   ce   ne   fut 
\incenl  de  See.lis  était  de  ses  amis  ,   on    lui  (ju'uu  jour  de  licence  et  de  désordre, 
conseilla  de   le   lui  donn<r   pour  être    reli-  Le  jeune    noviic    était    pendant   tout    ce 
gieux   dans   son  abl  ave  ,  ce  qui  était  alors  Icmjis-là  enfermé  dans  sa  cellule.  On  ne  le 
considéré  comme  une  esp'ce  de  bénéfice.  y\i  pjiraîlre  que  lors(]u'il  fillut   a'Ier  à  l'ol- 
II  entra  dans  cille  abbaye,  suivant  en  ap-  (Ice,  et  il  ne  jiarla  à  ses  parents  sur  le  soir 
parence  les    inipressio\is  de   sa  mère,  niais  (jue  [  our  leur  dire  adieu.  Ci  nime  ce  n'est  ici 
coiiduileu  I  ff'l  ynr  la  divine  providence,  qui  qu'un  p.elit  abrégé  de  sa  vie,  je  ne  rappor- 
!c  ch  lisissail  pour  y    réta!  lir  la  discipliie  lerai     point  toutes    les   moriiiicaiions    qu'il 
régulière  ;  et,  ciimme  cette  abbaye  est  rcL'ar-  exerça  sur  sou  corps,   et   civles   (ju'il   cul  à 
«lée  comme  le   berceau  où  la   congrégation  soulTrir  de  la  pari  des  religieux,  (jui,  vivant 
des  clianoincs  réguliers  de  ?ainle-(îeneMève  dans  le  libertinage,  ne  pouvaient  v>iir  sans 
a    pis  naissance  ,  nous    rapporterons    sou  rougir  de  ho:!le   la  vie  exemplaire  rju'il  ine- 
origine.  ii.iit  el    les  ausiéri  es   qu'il   |)ratiquiit;  el, 
lille  fut   fondée     l'aa   lOG)  par   Anne    de  sans  l'autorité  de  l'évéque   de   Itieux,  abbe 
Hussie,  lille  de  tieorges   l'E^clavon,   rui  des  do  »elle  maison,  et  do  il  les  religieux  dépen- 
l'.nr.sicns  el  des  Moscovites,  f  mmc  de  lieis-  daient  à  cause  de  ceriaius  avantages  tempo- 
;i  I"  cl  mère  de  Philippe  \',  rois  de  France.  rds  qu'ils  espéraient  pouvoir  obtenir  de  lui, 
l'^le  y  mil  des  clianoines  viv.ml  en  commun,  je  jeune  novice  eût    été  nnvoyé  chei   ses 
(pii  par  la  sainteté  de   leur  vie  se  rendirent  parents. 

•-i  leièbreset  si  recomiMandables,  qu'en  118G  Knfin,  l'année  de  probalion   étant  finie,  il 

'iuillaume  de  Carlinde,  .'éiiéchal   cl   grand  prononça  ses  vœux  le  premier  jour  de  mars 

naître  de  France,   ayant  fonde   l'abbaye  de  IGIÎ).  Tout  s'y  passa  à  l'égard  des   religieux 

Notre-Dame  de  Livry  à  trois  lieues  de  P.iris,  comme  à  la  prise  d'Iiabil  ;  mais,  à  l'égard  du 

s'adressa  à  Hugues  ,  abbé  de  Saint   Vincent,  iKuneau  proies,  il   redoubla   son  zèle  cl  sa 

poury  envoyer  de  ses   religieux,  lis  pers.s-  f,  rveiir.   Il  ne  songea   plus  qu'à   s'acquitter 

lèrenliians  ce  le  ferveur  jusque  sous  le  pon-  de   ses  obligations,    et  quelque  temps  après 

lilical  de  lîenoit    MI,    qui,  ayant    formé  lu  il  vini  à  Paris   poury  finir  ses  éludes.  Il    lit 

ilesg.in   «le  réunir  tous  les  chanoines   régii-  son  cours  de  philosophie  sous  François  Abra 

liers  sous  une  néine  règle,  et  les  raïuemr  à  t\c  Haconis,  qui   fut  depuis  e\èque  de  Li- 

li   même  ob>i:rvance  cl  aux   mêmes   pr.iti-  vaur;  et,  a;  rès  ainir  reçu  à  la  lin  le  bonnet 

qnes,  voulut  iiue  les  i-onstitulions  qu'il  avait  ,|,.  maitre-è^-arls,  il  étudia  en  théologie  sous 

dressées  à  ce  sujcl   fussent  universellement  Philippe  de  t'iamaches  et  André  du  \  al.  Il  fil 

ohscrvées.                      "  un  iiier»eilleux    progrès    sous  de  si   habiles 

La   première    assemblée    qui    se   tint    en  maiires;  de  soi  le   qu'au   bout  de  deux  ans 

France  pour  les  recevoir  fui  à  Saiut-'i  iucenl  ji^  lc-  «■outraigiurenl  de  prendre  le  degré  de 

lie  henli^,  où  i|  se  trouva  soixante  cl  un  ab-  bach.-lier.  Il  lui  forlemcnl  sollicité  de  coiili- 

lies  tl   du  jiriiuis  des  seules  provinces    de  nuer  tes  études,  afin  d  •  passer  jus'ju'au  doc- 


5SI  ^       t;t-N 

loral.  ISÎa^s  le  ilcir  de  In  ivforrnc  do  «on 
iiiouaslèrc  de  Saiiil-Vinccnl  cl  les  sollirila- 
Ijoiis  roiiliiiuelies  di-.  diUA  de  ses  confrères, 
(loiil  Dieu  avaii  louché  les  cœurs, qui  le  pres- 
saient de  retourner  au  plus  tôt,  !'(  mporlè- 
rent  sur  loules  les  raisons  qu'on  lui  put 
donner  pour  continuer  ses  l'Uules.  Ces  s  inls 
reii^zieux  curent  d'ahonl  beaaicoup  à  sonHrir 
de  la  part  de  leurs  coufti'-res,  qui  ne  vou- 
laient point  entenilre  p.irlcr  de  réforme;  cl 
la  protection  que  le  cardinal  de  la  Uoclie- 
foucaukl,  pour  lors  cvêque  de  ScTilis,  vou'ut 
bien  leur  donner,  servii  à  les  tnellrc  à  cou- 
vert des  mauvais  traitements  que  le  priein- 
de  rctie  maison  leur  f.iis.iil.  Leurs  discours 
cl  11  urs  bons  exemples  en  atlirèrcnt  quel- 
ques-' ns;  mais  les  morts  funestes  et  lra;j;i- 
ques  (te  cinq  religieux,  qui  s'opposaient  fo:- 
Icineiil  à  leurs  bonnes  intentions  avec  le 
prieur,  cl  qui  furent  suivii-s  par  celles  de  ce 
inouïe  prieur  en  moins  d'un  an,  furent  ce  qui 
donna  cnlièrenient  n;ii^sance  à  la  réforme. 
On  chercha  dès  lors  des  mesures  pour  y  par- 
venir;  et,  quoi(jue  le  P.  Faure  n'eût  encore 
aucune  charge  ni  aucun  caractère,  parce 
({ue  son  âge  ne  le  lui  permellail  pas,  c'élait 
néanmoins  par  ses  avis  que  furent  dressés  la 
pliiparl  des  rèjilenienls  nécessaires  et  des 
jiraliques  qui  ont  depuis  servi  au  grand  ou- 
vrage de  la  réforme;  et  un  des  principaux 
arl'cles  fut  qu'à  l'avenir  les  pr.eurs  seraient 
triennaux,  au  lieu  ([u'aup.iravant  ils  élaienl 
perpétuels. 

Lorsque  ces  règlements  eurent  été  dres- 
sés, les  religieux  sollicilèrcnt  si  fort  le  P. 
Faure  pour  prendre  l'oidre  de  préirise, qu  il 
ne  put  s'en  défendre.  Ce  fui  le  22  septembre 
de  l'année  1G18  qu'il  le  recul,  des  mains  du 
cardinal  de  la  Rocliefoucauld.  On  lui  doi;na 
ensuite  le  gouvernement  de  telle  maison,  (  l 
Dieu  versa  une  si  grande  abondance  de  bé- 
nédictions sur  ses  travaux,  que  celte  abbaye 
lépandil  partout  une  odeur  de  sainielé  qui 
lui  aciiuit  aulant  d'estime  qu'elle  s'était  at- 
tiré de  b  âme. 

11  vint  de  toutes  paris  des  personnes  de 
tout  âge  et  de  toutes  conditions  pour  em- 
brasser la  vie  reliï;ieuse  dans  une  si  i-aiiiie 
compagnie.  On  y  voyait  s 'Uvent  venir  des 
religieux  de  plusieuis  maisons  pour  y  ob- 
server la  régiilarllé,  s'insiruiredeS  véritables 
devoirs  des  chanoines  réguliers,  et  appren- 
dre sous  la  conduite  du  P.  Faure  les  règles 
de  lavie  spirituelle. Le  U.  P.  Pierre  Four;er, 
curé  de  Malaincr.ur!,  (rava'llant  pour  lois  à 
la  rcfo:me  des  chanoines  réguliers  de  Lor- 
raine, y  envoya  exprès  un  religieux,  qui  fui 
depuis  général  de  sa  congrégaiion,  pour  s'in- 
struire des  règlemenls  d/  celle  nouvelle  ré- 
forme, et  pour  consulter  ceux  qiii  l'entre- 
prenaient. L'abbaye  de  Notre-Dame  d'Eu  y 
envoya  aussi  quatre  novices  pour  y  é  ra 
c  evés  dans  la  régularité.  Enfin,  le  cardinal 
de  la  Rochefoucauld  ayanl  c  é  l'ail  abbé  de 
Sainle-lieneviève-du-Mont  à  Paris,  en  1G19, 
cl  ayanl  résolu  de  la  léfornier  et  de  la  mel- 
tre  sur  le  niffuie  pied  (ju'clait  celle  de  Saint- 
Viiiccnl  de  Senlis,  il  trul  qu'un  des  moyens 
dont  il  pou»  ait  se  servir  iiourcela  élail  li'o-      rtnl  en 


CEN 


Z.i'i 


bliger  quelques  religieux  de  celte  abbaye 
d'aller  à  Saint- Vincent  pour  voir  ce  qui  s'y 
passait,  el  pour  y  prendre  l'idée  d'une  vie 
régulii  re. 

Nous  dirons,  en  parlant  des  chanoines  ré- 
guliers de  Sainl-Viclor,  coinmenl  ce  eaidinai 
avait  lâché  de  relever  les  aniiennes  congré- 
gations; mais,  n'ayant  pas  réussi  d.ins  son 
dessein,  c'e-t  ce  qui  lui  fil  naître  la  pensée 
d'en  ériger  une  nouvelle,  dont  son  abbaye 
de  Sainte-Cieneviève  a  loujours  été  le  chef, 
quoiqu'elle  ne  soit  que  la  troisième  (jui  re- 
çut la  réforme,  qui  ;<\ ai',  été  auparavant  in- 
troduite dans  celle  de  Sj.inl-.lean  de  Chir- 
Ires;  et  nous  rapporterons  en  peu  de  mots 
l'origine  de  celle  célèbre  abbaye. 

Elle  fut  fondée  par  le  roi  CInvis  an  com- 
mencement du  VI'  siècle,  veis  l'an  511,  à  la 
prière  de  la  reine  Clotilde,  son  épouse,  qui 
avait  procuré  la  conversion  de  ce  prince,  cl 
à  qui  toute  la  France  est  retievable  de  la  foi 
catholique.  L'ég'i';e  fui  consacrée  [lar  saint 
llemi  en  l'honneur  des  apôtres  saint  Pierre 
el  sainl  Paul,  doal  elle  retinl  les  noms  jus- 
qu'à ce  que  saillie  Geneviève  y  ayanl  été 
enterrée,  on  ajouta  celui  de  celle  sainto  à 
ceux  des  saints  apôtres.  Jlais  la  ville  de  Pa- 
ris ayanl  reconnu  celle  petite  bergère  pour 
sa  patronne,  et  le  royaume  de  France  ayant 
ex|)érinienlé,  dans  plusieurs  occasions  par 
des  miracles  visibles,  la  proleci on  de  celle 
sainte  vierge,  celte  église  n'est  plus  connue 
présentement  que  sous  le  nom  de  celle  il- 
lustre [la'ronne  de  la  capitale  du  royaume  de 
France. 

Clovis  y  ayant  mis  d'abord  des  chanoines 
séruliers,  ils  s'acquittèrent  de  leurs  obliga- 
tions pendant  nn  temps  considérable,  jusqu'à 
ce  que  les  Normands,  n'ayant  pu  prendre 
Paris  en  8Vo  et  ii,kG,  se  conlcnlèrenl  de  sac- 
c.iger  les  faubourgs.  Leur  cruauté  n'ayant 
pas  épargné  ce  saint  lieu,  ils  le  pillèrent  par 
deux  fois  :  de  sorte  (lue  les  chanoines  ayant 
été  obligés  de  prendre  la  fuite,  le  si'rvice  di- 
vin ne  s'y  fit  plus  avec  lanl  d'exactilude.  Ils 
tombèrent  insensiblement  dans  le  relâche- 
ment, qui  s'augmenta  beaucoup  dans  la 
suile,  prindpaleuient  dans  le  xii*  siècle, 
qu'ils  en  furent  chassés,  el  Von  mit  en  leur 
place  des  chanoines  réguliers  :  y  aya\it 
donné  lieu  par  le  scandai.»  qu'ils  causèrent 
lorsque  le  pape  Eugène  III  alla  dans  leur 
église  l'an  11 'i8.  Ce  pontife,  qui  élail  reli- 
gieux de  l'ordre  de  Cîleaux  el  disciple  do 
saint  Peinard,  avait  éié  élu  pour  chef  de 
l'Eglise  uni  vei  sel  le  a  près  la  nuirldo  Lncius  1(, 
l'an  llio.  Une  sédi  ion,qui  s'éleva  aussitôt  à 
I\ome,  l'obligea  d'en  sortir  avec  les  cardi- 
naux, qui  le  coaronnèrci'.t  au  monastère  do 
Farfe,  le  h-  mars  de  la  niènie  année.  Il  revint 
à  Konic  après  que  la  révolte  eut  été  apai<ée; 
mais  la  paix  cl  la  Iranquillilé  n'y  durèrent 
p  is  longtemps.  Le  pape,  fatigué  par  les  sédi- 
tions des  Romains,  vint  en  France  l'an  ll'iS, 
cl  lu!  reçu  à  Paris  par  le  roi  Louis  VU,  dit 
le  Jeuni',  et  l'évéquc  Thinaul,  auparavar^t 
prieur  de  Saint-Marlin-les  (Champs.  Ils  allè- 
rent au-<levanl  de  ce  ponlif.,el  l'emmenè- 
^rande  solennilé  à  l'éj^lisc  l'.c  Notre- 


-^y^                                             Dlf.TIONN  Uai;  l^i  s  ORDUES  RELIGIEUX.  384 

D.unc  Ouolqncs  jours  nprès  ,  Kng('>nc  voulut  président,  et  Charles  de  Dnrmnns,  runseiller, 

iillpr  dire   la    messe    à   S.iinlp-(;cnovli'>ve.  à  s'y  IransporkVent    pour  tacher  d'y  réialilir 

r.iuso  nue  n-lle  éiïlise  elail  immcdialomonl  la  paix.   Leurs  bonnes  inlonliiins  ne  fuie  r.t 

Muimise  au  saiiiI-SK-u'e.  Qinnd  il  y  fularri\c,  poiiil   secondée'! ,  an   coiiliairc   le  désordre 

les    ofliri.rs    de    rei:li<.e    élcmlirenl    drvaiil  auiimenLi  daîis  la  suite  par  une  cireonslaiire 

r.iutel   un   lapis  de  "soie,  où  il  se   prosicrna  qui    ne   devait  pas    naturellement  produire 

iHiur  fa-rc  son  oraison.  Hnsuile  il  entra  dans  cet  effet. 

la  sarrislie  et  se  revéïit  pour  la  messe.  Ce-  Joseph  Koulon,  qui  gonvern  lit  celte  ab- 
pendant  les  officiers  du  i)ape  prirent  le  ta-  baye  depuis  l'an  li.ï",  voulant  empêcher 
pis,  prétendant  qu'il  leur  appartenait  selon  qu'elle  ne  lon-.bit  en  comni' mie,  crut  que  le 
la  coniumc;  les  chanoines,  au  contraire,  meilleur  expédient  était  de  resi^mr  son  litre 
prétendirent  qu'il  devait  rester  à  leur  église,  à  quelque  personne  de  qualité  qu'il  pût 
et  |ir;rent  (|uerelle  avec  eux.  Des  paroles  ils  faire  agréer  au  roi  et  à  ses  religieux,  par  la 
en  vinrent  aux  mains  :  les  ofiiciers  du  pape  considération  de  sa  naissance,  l'.iur  cet  effet 
furent  si  maltraités  par  les  chanoines,  qu'il  il  jcla  les  yeux  sur  HenjamiM  de  lîrirhanteau, 
y  en  eut  plusieurs  de  blessés,  cl  le  roi  même  fils  du  marquis  de  Nangis,  qu'il  riçut  à  l.i 
pensa  l'être  aussi,  voulant  apaiser  le  désor-  profession,  et  qu'il  fil  ensuite  élire  abbé 
lire.  Le  pape  cl  le  roi,  pour  punir  ces  clia-  coadjuleur  peu  de  temps  avant  sa  mort,  qui 
noines  de  Irur  insolence,  résolurent  de  met-  arriva  l'an  1G07,  après  avoir  possédé  cette 
Ire  des  Réaédiclins  en  leur  place  et  de  leur  abbaye  pendant  cinquante  ans. 
<')ter  celle  église.  Néanmoins  ,  comme  il  y  Quelque  temps  après,  ce  nouvel  abbé  fut 
avait  parmi  eux  des  personnes  dislingnécs  fait  évéque  de  Laon,  de  sorte  qu'il  ne  résida 
par  leur  noblesse  et  leur  science,  ou  ne  voi:-  point  à  Saintc-fieneviève,  quoiqu'il  y  soit 
lut  pas  d'abord  les  priver  de  leurs  prébcn-  mort  et  enterré.  Ainsi,  les  religieux,  se 
lies,  mais  seulement  leur  en  laisser  le  revenu  voyant  sans  chef  pour  les  gouverner,  se  lais- 
penilant  leur  vie,  pour  élre  réuni  après  leur  sCrenl  aller  à  loules  sortes  de  dérèglements, 
niori  à  la  mense  conventuelle.  L'abbé  de  et  ne  gardèrent  plus  aucune  observance. 
S  linl-^  iitor  et  ses  religieux,  en  ayant  eu  Cela  dura  jusqu'en  l'an  Kil'.',  que  l'évéque  do 
avis,  firent  tant  d'instances  auprès  de  ces  Laon  étant  mort,  le  roi  lui  d.mna  pour  suc- 
princes  pour  leur  accorder  celte  église,  allé-  cesseuren  celle  abbaye  le  cardinal  de  la  Ko- 
uuanl  pour  raisons  que  les  chanoines  sécu-  chefoucauld,  cl  Sa  Majesté  lui  témoigna  qu'il 
liers  s'accoutumeraient  mieux  à  leur  ma-  ne  l'avait  nommé  que  parce  que ,  con- 
nière  de  vivre  qu'à  celle  des  Bénéiliclins,  naissant  son  zèle,  il  ne  doutait  point  (]u'il 
(ju'ils  obtinrent  leur  demande.  On  tira  de  ne  Iravailiàl  de  loules  ses  forces  pour  remlre 
l'abbaye  de  Sainl-^'ictor  douze  chanoines,  à  celle  abbaye  son  premier  lustre,  et  iiue 
qui  furent  conduits  , à  Sainle-Cicneviève ;  cl  son  intention  élait  que  les  choses  fussent 
l'un  d'eux,  nommé  Odon,  en  fut  élu  premier  remises  en  leur  premier  état,  quant  à  l'é- 
;ibbé.  Ainsi  ,  d'un  chapitre  séculier  celle  leclion  libre  d'un  abbé  régulier,  sitôt  que  le 
église  fui  érigée  en  abbaye  l'an  11 V8.  bon  ordre  y  aurait  élé  rétabli. 

C'est  ainsi  que  l'histoire  de  ce  dilTérend  est  Le  cardinal  de  lallochcfoucauld  reçut  celte 
rapportée  dans  la  vie  de  saint  (îuillaume  (Ij.  abbaye  à  ces  condiiions,  cl,  pour  seconder 
qui.  ayant  été  du  nombre  des  anciens  clia-  1  s  pieuses  intentions  du  roi,  il  commença  à 
noines  séculiers,  se  joignit  aux  réguliers,  et  travailler  au  rélablissemenl  de  la  discipline 
fut  dans  la  suite  abbé  de  Koscbildein  en  l)a-  régulière.  I!  fil  assembler  en  l'année  1li"il  ce 
nemarli.  Néanmoins,  Sugcr,  abbé  de  S.iint-  qu'il  y  avait  de,  reli;^ieux  reformés  à  Paris, 
Denis,  qui  avait  eu  comuiissiim  du  jiafie  de  jour  l'assister  de  leurs  conseils  sur  les 
faire  ce  changement  eo  celle  église,  rendant  moyens  qu'il  devait  prendre  pour  exécuter 
compte  ,1  ce  |i()nlife  de  ce  (|u'il  avait  fail,  dit  son  entreprise,  et  l'on  y  convint  de  certains 
que  ce  fut  [)our  le  bien  de  la  paix  qu'il  n'y  articles  de  réforme  qui  furent  mis  par  écrit, 
mil  pas  tlos  l'énédictins,  comme  Sa  Sainteté  On  les  rooununiqua  aux  rcli:;ieux  de  l'.ib- 
l'avail  nrdoMué,  et  que  ce  fut  à  la  prière  des  baye;  quelques-uns  témoignèrent  vouloir 
«hanoines  séculiers  (ju'il  y  mit  des  religieux  s'y  soumcllre.  Il  y  eut  même  d'abord  (inel- 
de  Sainl-\'ictor.  que  apparence  de  régularité;  mais  cela  n'eut 
Ils  y  véiurent  conformément  à  leur  état  aucune  suile.  Il  fallut  employer  l'auUirilé  du 
jusqu'aux  guerres  des  Anglais;  mais  les  dés-  roi  pour  faire  recevoir  la  n  forme.  De  dix- 
ordres  qu'i  Iles  causèrent  donnèrent  orca-  neuf  anciens,  il  n'y  en  eut  (|ue  cinq  (;ui  s'y 
sion  au  n  lâchement,  qui  s'introduisit  encore  soumirent;  et  Sou  Kminencc  fit  venir  de 
en  celte  maison  aussi  bien  (juc  dans  plu-  Si'nlis  douze  religieux  en  H'flï,  qu'il  condui- 
sieurs  auires,  comme  nous  avons  dit  ail-  sil  Ini-méme  à  l'église,  au  cloître,  au  cbapi- 
li'urs;  et  il  s'augmenta  de  telle  sorte,  que  Ire  et  aux  dortoirs,  pour  en  prendre  p;>sses- 
sous  le  règne  de  François  l  ',  le  parlement  sion.  Il  établit  le  P.  Faure  supérieur  de  celle 
fut  <ibligé  de  donner  commission  à  Pierre  maison  en  particulier  pour  avoir  la  dire- 
Urulard,  conseiller,  pour  informer  des  désor-  clion  de  tout  le  spirituel,  non-seulenient  à 
drcs  qui  y  éiaicnt.  Mais,  bien  loin  ((ue  cela  l'égard  de  ses  religieux,  mais  même  à  l'égard 
servit  à  réiablir  le  bon  ordre,  le  relâchement  de  ceux  de  l'ancienne  observance  qui  n'e- 
alla  jusqu'à  un  Ici  point,  f|ue,  ciuclques  an-  talent  pas  encore  prêtres,  (ju'il  obligea  de  se 
iil'cs    après,   Christophe   de  Tliou,   premier  snumeltrc  à   lui,   cl    de    lui   obéir  en  loules 

l)AiMi.l   IV.lIand.,  l.'m.  1,  A|Mil  ,  .Ui.  SS.,  p.iij.  O-C. 


58S 


GEN 


G  EN 


SSG 


choses.  On  vil  en  peu  «le  loaips  la  reforme 
fjiire  un  meivi'illcux  progiès,  ayanl  été  in- 
troduile  clans  plusieurs  maisons,  ce  qui  lit 
que  la  congrégation  commençant  à  s'aug- 
menter, on  jugea  à  propos  de  lui  donnei-  un 
général. 

Quelques  années  après,  on  poursuivit  en 
cour  de  Uome,  pour  rendre  celte  abbaye  éle- 
clive  de  trois  en  (rois  ans,  sur  ce  que  le  loi 
s'était  démis  do  tout  dioit  de  nomin:iliou  à 
cette  abbaje,  et  avait  (onsenli  que  non-seu- 
lement elle  lût  élective  comme  auparavant, 
m  lis  que  l'clcclion  d'un  abbé  se  fît  tous  les 
trois  ans.  Le  pape  l'accorda  au  mois  do 
février  1534-,  confirmant  aussi  cette  nou\elle 
congrégation.  L'on  assembla  ensuite  le  cha- 
pitre général  composé  des  supérieurs  «le 
quinze  maisons  qui  avaient  déjà  embrassé  la 
réforme,  et  le  H.  l'.  Faure  fui  élu  canonique- 
ment  pour  abbé  coadjuleurde  Sainlr-Ciene- 
viève  et  général  de  louie  la  congrégation. 

Autant  que  les  religieux  avaient  de  joie  de 
son  élection,  autant  lui  causa-t-cUe  de  cha- 
grin. Il  commença  par  un  acte  d'humiliié; 
car  il  voulut  senir  la  communauté  ;:U  réfe- 
ctoire jusqu'à  la  lin  du  repas,  quelque  chose 
que  l'on  pût  faire  pour  l'empêcher;  et  il  con- 
serva toujours  cette  pratique  toutes  les  fois 
qu'il  ofliciail  pontificaieineut.  Ce  n'élail  point 
en  lui  une  vaine  cérémonie,  mais  un  elTet  sin- 
cère et  une  véritable  marque  de  la  disposition 
de  son  cœur;  car  il  éiait  humble  et  modeste,  et 
on  ne  s'apercevait  du  rang  qu'il  tenail  parmi 
ses  frères  que  par  les  marques  extérieures 
attachées  ta  sa  dignité. 

Il  s'.:cquitta  si  dignement  de  cet  emploi  , 
qu'il  fut  élu  plusieurs  fois  dans  la  suite  pour 
la  même  dignité,  et  il  était  général  pour  la 
troisième  fois,  lorsqu'il  mourut  dans  le  temps 
qu'il  travaillait  le  plus  pour  l'agrandissement 
de  sa  congrégation;  car  sa  pénitence  et  son 
application  continuelles  ayant  épuisé  ses  fur- 
ets, la  flèvre  le  prit  dans  le  cours  de  ses  vi- 
sites à  Senlis.  Il  le  dissimula  d'abord  et  vint 
coucher  à  N.inlcrre  sans  rien  dire  de  son 
mal,  qui,  augmcnlani  de  plus  en  plus,  l'obli- 
gea de  s'arrêter  dans  une  ferme  dépendante 
de  l'abbaye  de  Sainte-Geneviève,  proche  de 
Versailles,  où  le  cardinal  de  la  Hochefôucauid 
lui  envoya  son  carrosse  avec  des  religieux 
pour  le  ramener  à  Paris.  Mais  il  les  avait  déjà 
prévenus,  et  i!  était  parti  pour  Chartres  lors- 
qu'ils arrivèrent,  voulant  s'y  rendre  le  même 
jour  et  môme  prêcher  le  lendemain  à  cause 
de  la  l'etc  de  saint  Augustin.  Accablé  de  son 
mal,  il  n'eul  pas  seulement  assez  de  force 
pour  célébrer  la  sainte  messe  ce  jour-là.  On 
le  transporta  à  Paris  avec  assez  d'incommo- 
dité, où,  étant  arrivé,  il  voulut  saluer  et  em- 
brasser toute  la  communauté  avant  de  se 
mettre  au  lit. 

11  acheva  néanmoins  pendant  sa  maladie 
V'S  constitutions  qu'il  avait  déjà  commen- 
cées. 11  dressa  des  mémoires  et  des  instru- 
ctions sur  quantité  de  points  particuliers  qui 
ont  beaucoup  servi  pour  le  bon  gouverne- 
ment de  cette  congrégation;  après  quoi  il  ne 
songea  plus  qu'a  la  mort;  et,  bien  loin  que 
celle  pensée  lui  causât  de  la  frayeur,  elle  lui 


donnait  au  contraire  de  la  joo  et  de  la  con- 
solation. On  le  voyait  souvent  prosterné  au 
pied  d'un  crucifix.  Il  élait  presque  toojouis 
dans  des  méilit.ilions  continuelles.  Il  n'ou- 
vrait la  bouche  (|ue  pour  exprimer  des  sen- 
timents a:lmirables;  et,  quoique  son  mal  fût 
pour  lui  une  assez  grande  pénitence,  il  ne  >c 
croyait  pas  pour  cela  exempt  de  pouvoir 
morlilier  son  corps,  lui  refusant  tous  les 
s  lulagenients  superflus.  Enfin,  dans  le  temps 
(ju'ou  commençait  d'avoir  quelque  espérance 
de  sa  gnérison,  il  lit  une  confession  générale 
et  demanda  le  saint  vialiqui'. 

Comme  il  semblait  se  mieux  porter,  les  re- 
ligieux qui  ét.iient  iirésenls  en  furent  extrê- 
mement surpris,  ils  n'en  pouvaient  compren- 
dre la  raison;  ils  le  supplièrent  de  vouloir 
é|iurgner  celle  d  ulcur  à  ses  enfants,  qui 
seraient  alarmés  (juand  i!s  entendraient  celte 
nouvelle;  mais  il  répondit  qu'il  n'y  avait 
pointa  dilTérer,  et  que,  pour  éviter  ce  qu'on 
appréhendait  on  pouvait  faire  la  cérémonie 
])endanl  la  nuit.  L'on  fil  ce  qu'il  souhaitait  ; 
cinq  ou  six  anciens  y  a^sislércnl,  et,  silôt 
(ju'il  vit  le  Sauveur  du  monde  entrer  dans  si 
chambre,  il  se  jeta  à  ^;enoux  jjour  l'adorer 
et  le  reçut  avec  des  transi  orts d'amour  qui  ne 
se  peuvent  exprimer. 

Le  matin,  les  religieux,  qui  ignoraient  ce 
qui  s'était  passé  la  nuit,  le  viiuenl  saluer, 
parce  que  c'était  le  jour  de  sa  fête.  Jam  lis  il 
ne  parut  jilus  joyeuv,  il  les  entretint  fami- 
lièrement, il  leur  fit  à  sou  ordinaire  quelques 
exhortations,  donna  même  l'habit  à  un  po- 
stulant, et  traita  de  plusieurs  alTaires;  mais 
sur  le  soir  la  fièvre  s'étant  augmentée,  il 
touiba  en  faiblesse,  il  perdit  tout  sentiment, 
cl  on  n'eut  que  le  temps  de  lui  donner  l'ex- 
Irème-onction  ;  après  quoi  il  rendit  son  âme 
au  Seigneur  le  4-  novembre  Hikk,  étant  âgé 
de  cinquante  ans,  ayant  eu  la  satisfaction  de 
voir  sa  congrégation  augmentée  de  plus  de 
cinquante  maisons,  où  par  ses  soins  et  ses 
travaux  la  réforme  avait  élé  introduite.  Son 
co.'ps  fut  ouvert  et  enterré  à  Sainte-Gene- 
viève, après  qu'on  eu  eut  tiré  le  cœur,  qui 
fut  porté  â  Saint-Vincent  de  Senlis,  où  la  ré- 
forme avait  commencé,  et  ses  entrailles  fu- 
rent aussi  portées  à  Sainte-Catherine  du  Val 
des  Kcohers  à  Paris. 

Après  sa  mort,  cette  congrégation  s'est 
tellement  augmentée  ,  qu'elle  cA  présente- 
ment la  plus  ample  et  la  plus  nombreuse  do 
toutes  celles  qui  composent  Tordre  des  cha- 
noines réguliers,  puisqu'elle  a  plus  de  cent 
monastères,  dans  une  partie  desquels  les  re- 
ligieux sont  employés  à  l'administration  des 
paroisses  et  des  iiôpitaux,  et  en  l'autre  à  la 
célébration  de  TolUce  divin  et  à  l'instruction 
des  ecclésiastiques  et  de  la  jeunesse  dans  les 
séminaires.  Klle  a  en  France  soixante-sept 
abbayes,  vingt-huit  prieurés  conventuels,' 
deux  prévôtés  et  trois  hôpitaux;  et,  aux 
Pays-lias,  trois  abbayes  et  trois  prieurés, 
outre  un  très-grand  nombre  de  cures.  La 
même  réforme  a  subsisté  pendant  un  temps 
dans  la  cathédrale  d'Uzès.  Ces  chanoines  ré- 
guliers disent  matines  le  soir  à  huit  heures, 
immédialcmenl  après  l'examen  de  conscieu- 


3n 


d'.ct;onn.mue  bi:s  oudp.es  Riair.itux. 


580 


00.  ol  les  lil.iiiioj  lie  l.i  sainte  \icrge;  et  se 
It'voiil  le  innlin  à  cir.c]  liours.  Ils  jeûnent 
lousics  vcndroilis,  pourvu  qu'en  cesj  lurs-là 
il  lie  se  ronronlre  p  linl  de  foie  solennelle,  ou 
qu'il  n'y  ail  point  de  jcùnc  d'Eglise  le  jeudi 
iiu  le  Samedi.  Ils  jeûnent  encore  toulcs  Is 
veilles  lies  fèl-s  de  la  sainte  Vier;;e  et  de 
celles  de  saint  Au<;ustin,  pendant  l'Avcnl,  1 1 
les  deux  jouis  qui  précèdent  le  carême 
universel. 

Depuis  un  temps  immémorial,  l'un  i  es 
chanceliers  de  l'iiiiiversiie  de  Paris  est  tiré 
del'alib.ije  de  Sainle-(iene\  iève.  liatre  ceux 
(|ui  oui  reuiiiH  ceUe  charge  depuis  la  réfor- 
me, le  P.  Jean  Ironleau  e-t  celui  quia  aciiuis 
plus  de  ré|Uiiation.  Il  était  d'Angers,  et  lut 
reçu  eu  lli^O  parmi  les  religieux  d(?  celte 
congiégalion.  Il  enseigna  pendant  plusieurs 
aiiiit'os  11  philosophie  et  la  théologie,  il  ai  ait 
appris  les  langues  grecque,  latine,  liéhraï- 
(jiie,  syriaque  cl  chaldeenne,  et  il  n'y  a  point 
d'ouvra  es  en  ces  cinq  sortes  de  langues  qu'il 
n'ait  lus.  Il  parlait  aussi  les  langues  vivantes 
île  l'Kurope,  et  dressa  cette  lellc  bibliotliè(|ue 
de  Sainte-Geneviève  qui  a  été  augmentée  de 
plus  de  la  moitié,  l'an  1711.  par  celle  de  feu 
M.  l'archevêque  de  Ueims  M.cliel  le  Tclliir, 
qui  la  laissa  à  celle  abbaye  par  sou  lesta- 
iiient,  ce  ([ui  la  rend  une  des  plus  considé- 
rables de  l'Europe,  étant  préseiite-nenl  com- 
posée de  plus  de  soixante  mille  volumes  et 
d'un  cabinet  très-curieux.      * 

Le  P.  Fruiiteau  avait  été  fait  chancelier 
(le  l'univerMié  en  16V8,  et,  ayant  eu  depuis 
le  prieuré  de  lîenelz  eu  Anjou  cl  ensuite  la 
cuic  de  .M<)nlar'.;i-,  il  en  lut  |ireiulre  jios- 
seS'iion  sur  la  lin  du  carèine  de  l'an  1G;>2,  et 
se  donna  lani  di;  pcini-  durant  les  lètes  de 
l'à(|uvs  en  l'admiiiisualiim  des  sacrements 
et  en  la  visite  des  malades,  qu'il  en  tomba 
malade  lui-mèin'  le  12  avril  de  la  même  an- 
née, et  mourut  le  17  suivant,  n'étant  qu'on 
la  quarante-bui' iè.ne  année  de  sou  ;!:;c. 

Le  1'.  LallcioanJ,  qui  ;.  fail  un  abrégé  de 
sa  vie,  lui  succéda  dans  l'oflice  de  chancelier 
de  l'université,  et  a  été  un  des  plus  illustres 
oriiemeiits  de  ce.te  célèbre ac.idemie.  Avant 
d'être  rel  gieux,  il  en  avait  é'.é  plusieurs  fois 
recteur,  cl  aprè>  la  mort  du  V.  Frc^nleau, 
elle  le  demanda  pour  ch mceliL'r  à  l'aSbe  de 
Sainle-deneviève,  qui  a  droit  d'y  nomincr, 
et  qui  ne  pouvait  reluser  celle  dignité  au  I'. 
Lallemand  sans  quelque  sorte  d'injustice.  Il 
mourut  le  18  lévrier  l(j73,  âgé  de  i  iiKiuante 
ans,  après  avoir  pindant  un  long  temps  mé- 
dité la  mort  et  s'y  éire  préparé.  11  nous  en  a 
laissé  des  preuves  par  les  livres  qu'il  a  lO  i.- 
pusés  sur  se  sujet. 

Le  1'.  du  Moulinet  s'est  aussi  rendu  trés- 
recummandable  dans  celle  congrégation  par 
sa  profonde  érudition,  surtout  par  la  con- 
naissance <|u'il  a\ait  de  l'antiquité  et  des 
médailles.  Entre  les  dilTerenls  ouvrages  qu'il 
a  donnés,  il  y  en  a  un  qui  traite  des  cha- 
noines réguliers  avec  la  ili'scriplion  de  leurs 
différents  habillcmenls. Celui  de  sacoiigrcga- 
lion  ciinsiste  en  une  sout.iiie  de  serge  blan- 
che avec  un  collet  fort  large  et  un  rochet  de 
loilc.   Lorsqu'ils  sont  a  la  maison,    ils  ont, 

(t)  Vi'i/  ,  îili  Hn  ■:«  vil.,  n°«  S,  T9. 


l'été,  un  bonnet  carré,  cl  pendant  l'hiver  un 
cani.iil  noir.  Cl  lii)rs  le  monastère  ils  porter.t 
un  manlcau  noir  à  la  manière  des  ecclési  is- 
liques.  l'our  habit  de  chœur,  ils  ont,  l'été,  un 
surplis  et  une  aumtisse  n:iire  sur  le  hras.l'hi 
VIT  un  grand  camail  1 1  une  eh  ipe  noire  (1  ). 

Il  y  a  encore  eu  lie;iuconp  de  célèbres 
écrivains  parmi  eux,  cl  entre  les  autres  les 
l'èrcs  Chapoiicllc  et  le  Large,  ()ui  ont  fat 
lies  pccIk  relies  et  des  dissertations  savantes 
cl  curieuses  sur  l'histoire  des  chanoines  ré- 
guliers. Les  ariiif's  de  celle  congrégation 
sont  d'azur  à  une  main  tenant  un  cœur  en- 
liainmé,  avecce'le  devise  •.Sapcrcmine-tl  Cha- 
r(7as. Entre  les  privilèges  dont  jouit  l'abbavo 
(le  Sainle-tieneviève,  le  plus  considérable 
est  que  l'abbé  cl  les  religieux,  à  la  descente 
dL'  1,1  châsse  de  celle  sainte,  palronne  de  Pa- 
ris, dans  les  calamités  publiques,  et  lorsqu'on 
1,1  porte  en  procession,  ont  la  droite  sur  l'ar- 
cbevéquc  de  Paris  et  les  chanoines  de  la  ca- 
lliédr.ile,  cl  que  l'ablié  donne  la  bénédiilion 
dans  les  rues  auisi  bien  que  l'archevêque. 
Cette  abba\e,  suivant  les  privilèges  des  pa- 
pes et  des  rois  de  France,  n'est  jamais  va- 
ciule,  et,  suivant  l'us.igc  ordinaire,  le  m  irl 
saisit  le  vif.  L'abbé  étant  mort,  le  premier 
et  le  sec'.nd  assistant  lui  succèdent,  en  venu 
d  une  bulle  d'Alexandre  Vil,  du  1  aoi'il  1G55, 
et  letires  paîcn:es  du  roi,  le  tout  confirmé  et 
enrcg'Slre  aux  cours  souveraines.  Un  des 
privilèges  dont  jouit  cet  abbé  est  de  donner 
des  inoniloires  comme  Ks  évoques,  et  il  .i 
clé  mainl'HU  dans  c^  droii  p.ir  un  ariél  du 
conseil  d'Klat. 

Voyez  la  Y >e  du  P.   Fa-.ire  imprimée  d  Pa- 
ris en  1G98.    Du  Moulinet,  Hist.    des  (lijjé 
renls  habits  des  chnn.  ti'yul.  Hei  manl,ii'/i(/;/i.- 
si'inenl  des  Ord.    reliij.    .Malingre,  Antiquités 
de  Paris;   et  Sammarlh.    Gall.  Christ.,  loin. 

\y,pn:j.  1001. 

ClEOiU'iES  (Chlvai.ilrs  de  Saint-).  Voy. 
BiiriiLitM. 

GEOUGES  fCuBVALiERS  DE  Sài.NT-).  Vuy. 
Constantin. 

GEOlUîES  (Ordres  divers  de  chevaliers 
DE  Saint-) 
L'abbé  Giustiniani,  Sclioonebeck,  ]\I.  Her- 
niant  et  quebiues  aulres  auteurs,  parlant 
dans  leurs  Ilisloues  des  Ordres  militaires, 
de  celui  de  Saiut-Georgi  s  dans  I  Autriche 
cl  la  Carinthic,  disent  qu'il  y  en  a  qui  en  atlri- 
buenl  l'iiisliluliou  à  liodofphe  d'ILiiisliourg, 
jremier  empereur  de  la  maison  d'.\ulriche, 
qui,  pour  rendre  cet  ordre  plus  illustre,  ac- 
corda au  premier  grand  mailrc,  entre  au- 
tres privilèges,  le  titre  de  prince,  et  lui 
ilomia  pour  lui  et  pour  ses  chevaliers  la 
Ville  de  Milleslad  dans  la  Carinthie,  où  il 
fonda  iiussi  un  chapitre  de  chanoines  régii- 
liei  s  de  l'ordre  de  Saint- .\ugustin,  sous  la  di- 
rection de  l'évêiiU'-,  (jui devait  être  choisi  de 
leur  corps,  et  porter  .lussi  bien  qu'eu  s  l'habil 
de  ror,ire.lle8l  aise  de  détruire  celle  Ojiinion, 
puisi|iie  remperenr  lU)dol|ilie  niourul  l'an 
riHI,  et  (jue  le  duché  de  Carinthie  n'appar- 
tenait pai  encore  à  la  maison  d'Autriche, 
qui  ne  le  [losséda  (lu'aprcs  la  niorl  d'Henri, 


.v«- 


ÔS9  CF.'J 

roi  Je  Boliôine  et  diriiicr  duc  de  Carintîiie, 
ipii,  s'étant  rtndu  odieux  aux  peuples  de 
lidliAnie  par  ses  lyraunies,  lut  déposé  l'an 
1309  par  les  Elais  de  ce  royaume,  el  ne  mou- 
rut que  l'an  ISil. 

Quanta  lavilledcMillcslad,  elle  n'a  jauia's 
été  évcehé;  mais  il  se  peut  faire  que  l'empe- 
reur Frédéric  lîl,  qui  est  le  vérilahle  fonda- 
teur de  cet  ordre,  ayant  donné  une  riche  ab- 
baye de  l'ordre  île  S.iint-Renoît  dans  celle 
ville,  pour  servir  de  demeure  aux  miuvoaux 
chevaliers  et  chapelains  de  l'ordre  de  f-aiul- 
Georj;es,  on  ail  donsié  le  nom  de  ch.inoines 
à  ces  rliapelains,  el  que  l'on  aitpiis  la  ville 
de  Nt'UslaJ  pour  Millestad,  car  cel  empereur 
Cl  aussi  ériger  en  évcché,  dans  le  même 
temps,  la  ville  de  Ncuslad,  dont  l'évéque  no 
fui  point  soumis  pour  le  temporel  au  grand 
mailrc  de  l'ordre  de  Saint-Geoigcs,  comme 
prélcudent  Meniiéus,  de  ISelloy  et  quelques 
aulres,  qui  appellenl  celle  ville  de  Neuslad, 
Cilé  Neuve,  à  cause  de  son  nom  lalin  civi- 
tas  nova. 

Celle  abbaye  de  Milleslad,  autrefois  chef 
d'ordre  des  chcvali -rs  de  Saint-Georges  , 
étant  préscntcinenl  en  la  possession  dc'.  Pè- 
res de  la  compagnie  de  Jésus,  le  t'.  itollan- 
dus  a  parlé  de  l'origine  de  cet  ordre  mili- 
taire dans  un  Irailé  particulier  qu'il  a  laissé, 
el  qu'il  avait  dessein  de  faire  servir  de  sup- 
plément à  la  vie  de  saint  Doniilien,  fonda- 
teur et  liuilaire  de  celte  abbaye  ;  mais  le  P. 
l'apebroch  a  trouvé  plus  à  propos  de  le  join- 
dre à  la  vie  de  saint  Georges  martyr  au  23 
avril,  où  il  parle  aussi  de  plusieurs  aulres 
ordres  miliiaires  qui  ont  prij  ce  saint  pour 
patron  el  prolecteur.  Ainsi  nous  ne  croyons 
jias  pouvoir  nous  égarer  en  suivant  les  PP. 
lîoUandus  el  Papebroch,  d'autant  plus  que 
ce  que  le  P.  Bollandus  a  avancé  n'est  fondé 
(|ue  sur  les  bulles  des  souverains  pontifes  et 
les  lettres  de  l'empereur  Maximilien  I". 

Ce  fut  donc  l'empereur  Frédéric  Ml  qui 
fonda  l'ordre  mililiire  de  Sainl-Geoigcs  en 
Autriche,  vers  l'an  l'iG8.  Il  voulut  qu'il  fût 
érigé  el  iiislilué  par  le  sainl-siége  aposlo- 
li(iue  en  l'honneur  de  Dieu  el  de  la  sainie 
\ierge,  jiour  l'exallalion  de  la  foi  catholi- 
que, pour  le  salut  de  son  âme,  et  pour  don- 
ner du  lustre  à  la  maison  d'Autriche,  dont 
il  sortait.  Ce  prince,  ayant  été  à  Rome  la 
même  année  pour  accomplir  un  V(ru  qu'il 
avait  fait,  obtint  du  pape  Paul  II  l'érection 
(le  (Cl  ordre  ,  ce  qui  se  jirouve  par  la  bulle 
de  ce  ponlife  qui  commence  ainsi  :  Sane 
charissiiniis  in  Christo  filius  nos  ter  Fridcri- 
cus  Rumanorum  imperalor  semper  Auguslns, 
qui,  ftrvore  devolionis  accemtis,  nuper  ad  vi- 
silcndmn  s  .cratissima  BB.  Pclri  el  Pnuli 
upostolorum  et  alia  Deo  dicala  loca,  ud  Al- 
main  urbeM  ex  vota  persona'iter  se  contulii, 
nobis  humiliicr  cxplicavit,  qnod  ipse  ad  tan- 
dem et  gloriam  Omnpulcnlis  ac  glorios.e 
virgiiiis  Rlariœ,  pro  (xallalione  quoque  ca- 
tltûlicœ  fulei,  aiiiinœ  suœ  salule,  ac  doinus 
Auslriœ  (  o  qua  originem  Iraiil  )  commeinu- 
ralione  et  décore,  unuin  miliîarem  ordincin 


CEO 


5P0 


sul)  invocntione  sanctt  Gcorgii  marlgris,   ^cr 
nos  erigi  alque  institui  tola  mente  desidevul. 

Quoique  le  pape  Léon  X  dise  aussi  la 
mênîe  tli  ise,  on  ne  doit  pas  néanmoins  infé- 
rer de  là  que  cet  em|  creur  ne  soit  pas  lo 
fondateur  do  cel  ordre;  car  Jules  11  lui 
donne  celle  qualité  dans  une  autre  bulle,  où 
il  dit  posiliveuienl  qu'il  érigea  cil  ordre  et 
en  fui  le  premier  fondateur  :  Ordinem  Diii 
Georgii  marlyris  errxit  et  aucluritate  sanctie 
scdis  apustolicœ  primus  fiindavit.  Celles  du 
pape  Paul  11  et  de  Léon  X.  nous  apprennent 
ce()ue  ce  prinre  (il  après  avoir  fondé  sou 
ordre.  Il  prit  le  monastère  de  Milleslad,  du 
diocèse  de  Salzbourg,  pour  en  faire  le  chef 
de  cel  ordre,  et  pour  servir  de  demeure  lanl 
aux  chevaliers  qu'aux  chapelains.  H  fil  re- 
bAlir  l'ég  ise  à  ses  dépens,  acrominider  les 
cloîtres,  les  dortoirs  et  les  autres  lieux  ré- 
guliers de  celle  abbaye,  qu'il  fournit  abon- 
damment de  meubles  el  d'autres  choses  né- 
cessaires pour  l'usage  des  chevaliers,  dont 
pour  la  première  l'ois  il  nomma  un  pour  grand 
maîlrc,  voulant  qu'.à  l'avenir  il  fût  élu  par 
les  chevaliers,  toutefois  de  son  consente- 
meul  ou  du  chef  de  la  maison  d'Autriche; 
que  les  chapelains  ou  ecclésiastiques  se- 
raient gouvernés  par  un  prévôt  qui  serait 
leur  chef;  que  les  chevaliers,  le  prévôt  et 
les  prêtres  seraient  soumis  au  grand  maî- 
tre; que  la  première  chambre  serait  desti- 
née pc;ur  Sun  logement,  la  seconde  pour  lo 
prévôt  des  prêtres,  la  troisième  pour  le  plus 
a  cien  chevalier,  la  (lualrième  pour  le  pins 
ancien  prêtre,  el  ainsi  des  aulres  ;  de  tel H 
sorte  qu'entre  deux  (hevaliers  il  y  aurait 
un  pi'élre,  el  entre  deux  p  cires  un  cheva- 
lier, et  qu'au  chœur  le  grand  maîlrc  seule- 
ment auiait  la  première  place;  mais  que  les 
prêtres  précéderaient  tous  les  chevaliers. 

Le  grand  maîiie  cl  les  chevaliers,  aussi 
bien  que  le  prévôt  el  les  prêtres,  devaient 
L.ire  vœu  de  chasteté  et  d'obéissance;  unis 
personne  n'était  obligé  à  celui  do  pauvreté. 
ils  relenaient  seulement  la  propriété  de 
leurs  biens,  tant  da  patrimoine  que  d'ac- 
quêts, avec  la  permissim  de  leur  supérieur, 
el  en  recevaient  les  revenus,  qu'ils  eonver- 
tissaienl  à  leur  propre  usage,  sans  qu'il  leur 
fût  permis  de  rien  vendre  de  leurs  biens 
tant  meubles  qu'immeubles  ,  qui  apparte- 
naient cnlièrement  après  leur  mort  à  la  mai- 
son où  ils  avaient  fait  profession,  ou  à  quel- 
que autre  qui  en  dépendait.  L'habillement 
des  uns  el  des  aulres  consistait  en  une  rohe 
ou  soulane  de  quelque  couleur  que  ce  fût, 
pourvu  que  ce  ne  fût  point  de  rouge,  de  verl 
ou  (le  bliu;  el,  les  vigiles,  toutes  les  fêtes  de 
la  sainie  Vierge,  et  tous  les  samedis,  ils  de- 
vaient mcltre  par-dessus  celle  soutane,  ou 
robe,  une  autre  robe  blanche  de  la  mêm:- 
longueur  sur  laquelle  il  y  avait  une  croix 
rouge  (1). 

Le  pape,  afircs  avoir  marqué  les  prières 
que  les  chevalieis  devaient  dire  tous  les 
jours,  parle  eiisui'e  de  toutes  les  posses- 
s  ons  que   rcmpereur   leur   avait   données, 


(!)  Voy.,  à  la  lin  du  vul.,  n"  80. 


SIU 


DICTIONNAIRE  DES  (IKHRES  niXICIEL'^. 


Ô02 


snvoir  :  l'jil.hayo  do  Millcsl.id  di-  l'urdrc  de 
Sainl-Hcnoil,  la  coMim.indcrii' de  Morlicj;  do 
l'tirdro  des  clio\a!iois  de  Saiiil-Joan  de;  Jé- 
rus  ilern,  siliioo  dans  le  dincô^e  do  l'ass  m  ; 
l'Iiôpilal  ol  lo  monasièrc  do  Sainl-Mailiii  au 
iiUMiie  dioii^so,  cl  à  prosenl  de  celui  de 
Viiiino;  la  rliapellc  de  Noire-Damo  do  nou- 
vollo  f  iiKla'ion  ,  cl  l'otilisc  paroissiale  du 
Monl-S  ra  icn  au  diocèse  de  Sai/boiir;;,  donl 
lo  droil  de  patronage  apparlouail  à  rempe- 
rour;  et  ce  piuilife  supprima,  dans  le  m'i- 
nash're  de  Milloslad  el  dans  la  cnnimaïuiorie 
(lo  MorliOL',  les  ordr.s  de  Sainl-lîonoil  ol  de 
Sainl-!eaii  do  Jérufialoni.  Il  y  a  des  auteurs 
(jui  ajouUiil  que  l'empiTeur  donna  encore  à 
<es  clicvaliors  lous  les  biens  des  soigneurs 
de  ("ranichorg,  donl  la  maison  éliil  nouvel- 
lotnenl  cleinlo,  el  (ju'ils  possédaient  aussi 
Traulmandorf,  Stliarlencli  el  plusieurs  au- 
tres biens. 

l'aul  11  pcrniil  à  ral)bé  et  aux  moines  de 
Millestad  de  passer,  s'ils  voulaient  ,  dans 
li'autros  monaslères  de  l'ordre  de  Sainl-He- 
iioîl  où  ils  Iroiiveraionl  dos  récepteurs  bé- 
tié\o!es,  à  condiliun  nue  les  chevaliers,  sur 
les  revenus  de  Millcslad,  leur  donneraient 
de  quoi  s'cnirelonir  pendant  leur  vie,  el  que 
co  monastère  aussi  bien  que  les  autres  égli- 
ses donl  nous  avons  parlé  ne  seraient  ja- 
mais changés  en  usages  profanes  ;  mais  que 
l'on  y  té:él>rerait  les  olficos  accoutumés,  que 
l'on  ac<iui:t  rail  les  fomlalions,  ot  ((uc  l'on 
exercerait  toujours  riiospilaliié  dans  l'hôpi- 
tal de  Saint-Martin,  lînlin  il  apjirouva  et 
conlirma  l'ordre  de  Sainl-Goorgos  ad  inslur 
de  l'ordre  'i  cutonique  ;  et  Sixte  ï\",  qui  suc- 
céd.t  à  Taul  II,  le  10  juillet  li71,  approuva 
aussi  cet  ord. e. 

Jean  Sibonhii  1er.  qui  en  était  grand  maî- 
tre en  li'J3,  voyant  qu'il  avait  soulTirl  beau- 
coup de  I  erics,  lanl  par  les  incursions  fré- 
quentes des  Turcs  que  par  les  guerres  que 
l'i  Mipcrour  avait  eues  à  soutenir  contre  Jla- 
Ihias  V,  roi  do  Hongrie:  que  la  jiluparl  dos 
villes  el  des  villages  claienl  abandonnés, 
qu'un  grand  nombre  d'églises  avaient  été 
brûlées,  les  uioiiaslLTCsd'Iionimes  cl  de  filles 
détruits,  qu'à  peine  restail-il  du  monde  pour 
cultiver  les  terres,  cl  que  les  chevaliers  ne 
pouvaient  pas  résister  aux  firccs  et  à  la 
puissance  des  Turcs:  il  institua  une  confré- 
rie ou  société  sous  le  nom  de  Saiiit-lieor- 
ges,  dans  l.iquillo  pouvaient  entrer  des  pei- 
bonnos  de  l'un  ol  de  l'autre  sexe,  sans  cire 
obligées  à  aucune  oliservance  régulière.  Les 
uns  devaient  poiulant  un  an  combattre  con- 
tre les  Turcs,  à  leurs  dépens  ou  il  la  solde 
de  l'empereur,  ol  les  autres  contribuer  par 
leurs  aum6iios  ol  leurs  libéralités  à  la  con- 
fclrucliun  d'un  forl,  el  à  le  pourvoir  de  mu- 
nitions pour  SOI  vir  de  rempart  contre  bs  in- 
cursions de  ces  inlidélos.  L'empereur  Maxi- 
niilien  1"  approuva  celle  société  par  ses  lel- 
Ires  pali-nlos  données  à  Inspruck  lo  18  sep- 
lembrc  W'J',,  et  le  pape  Alcxaiulre  VI  la 
cuiilirnia  l'an  li'J'»,  ordonnant  qu'il  y  aurait 
doux  vicaires  généraux,  savoir  :  le  grand 
uiaiire  de  l'ordre  do  Sarnt-lieorges  et  l'cvé- 

(1)  Yiy.,  à  l:t  lin  du  vol.,  n'  81. 


(|uedc  ("lUicIi,  (]ui  y  présideraient,  el  aux- 
quels on  s'en  raiiporterail  pour  loui  ce  i|ul 
reu'ardaii  le  spiiiluel;  et  que  l'empereur 
Maximilien  et  ses  suooesseurs  dans  les  du- 
chés d'.\utrieho,  do  Slyrie,  de  Caiiiilhie  et 
de  Carniole,  députeraient  deux  ou  plusieurs 
capitaines  généraux  auxquels  on  i  béir.iil 
P'jur  les  choses  qui  concernaient  la  guerre, 
ol  qu'ils  recevraieul  le  seraient  de  fiJelilé  ol 
d'obéissance  (1). 

L'em|)ereur  ordonm  que  ceux  qui  sor  ient 
de  celte  confrérie  auraient,  pour  les  distu- 
gucr,  une  croix  d'or  avec  une  couronne  e;  un 
cercle  d'or,  que  chaque  chevalier  pourrait 
enrichir  de  pierrenes  ou  autres  pierres  pié- 
cieuses  à  sa  volonlé,  cl  qu'ils  Ii  pourraient 
porter  puliliquement,  en  présence  des  rois 
et  des  princes,  à  leur  chajieau  ou  à  leur 
bonnet,  ou  en  tel  autre  lieu  que  bon  li'ur 
semblerait.  Le  m'-mc  Maximilien  leur  ac- 
corda beaucouji  d,'  privilèges  par  ses  lettres 
données  à  Anvers  le  jour  des  saints  aiôires 
Simon  ol  Judo,  do  l'an  IWV;  entre  autres  il 
voulut  qu'ils  [irécéilassent  lous  les  aulics 
chevaliers,  qii'on  les  aiipelàl  Chevaliers 
Couronnés,  cl  que  leurs  enfants  porlasseul 
('2]  couroaiie  sur  leurs  armes.  L'évoque. 
en  les  leccvanl  chevaliers,  leur  attacliaii  la 
croix  au  bras,  leur  mettait  en  iiia:ii  un 
cierge  ,  cl  des  gentilshommes  leur  atta- 
chaient les  éperons.  Kniin  le  pape  Alexan- 
dre \'l  déclare  par  sa  bulle  qu'il  a  voulu  so 
faire  inscrire  dans  celle  confrérie  aussi  bien 
que  plusieurs  cardinaux,  et  il  adressa  iiu 
bref  à  lous  les  cvéques  d'Allemagne  ,  dans 
It'ciuel  il  leur  recommanda  celle  milice,  à 
laquelle  il  accorda  beaucoup  d'indulgencc' ; 
c'est  pourquoi  il  se  trouve  encore  une  oi- 
doiinance  de  Jean  Sibenhirter,  grand  maître 
(le  l'ordre  de  Sainl-lieorges,  où  il  traite  le 
pape  de  confrère  :  Oreinus  pro  saiiclifsiinu 
vus(ro  Alextindro  Y I  confratre  nostiu. 
L'empereur  Maximiiien  dit  aussi  dans 
ses  lettres  qu'il  a  voulu  élre  inscrit  au 
nombre  des  confrères,  el,  dans  celles  (ju'il 
écrivit  à  Jean  .  roi  de  Navarre,  le  l(j  octo- 
bre lall  ,  il  dit  que  son  père  ,  renipereur 
l'riJcric,  à  cause  de  la  grande  déîolion  qu'il 
portail  à  saint  Georges  ,  avait  voulu  entrer 
dans  C(!t  ordre:  et  que,  pour  lui,  suivant  Ks 
traces  de  son  pore,  il  a  dessein  de  le  conser- 
ver el  d'augmeuler  ses  revenus.  Le  pape  Ju- 
les Il  ,  parlant  de  cel  empereur,  dit  qu'il 
avait  résolu  d'entrer  dans  l'ordre  de  Saint - 
(îeorges,  de  s'y  consacrer  pour  le  reste  de 
tes  jours,  de  s'opposer  aux  in  idèbs  qui  vou- 
laient ravager  la  vigne  du  Seigneur,  1 1 . 
avec  les  Frères  de  cel  ordre,  répandre  jus- 
qu'à la  dernière  goutte  de  son  sani:  pour  la 
défense  el  l'auguienlalion  de  l'Iigli  e  et  do 
rKmpire,  el  de  recouvrer,  a>ec  le  secours 
du  ciel,  la  ville  de  Jérusalem,  col  e  de  Cons- 
tanlinople  el  les  autres  lieux  qui  étaient  oi> 
cupés  par  les  infidèles.  Le  niémi'  pajie  ,  eu 
cunlirmanl  cet  ordre,  lui  accor^la  lioaucou|. 
d'indulgeii' es  ;  el  Léon  X,  en  le  conlirmaut 
de  nouveau  aussi  bien  que  la  conircrie  ou 
société  qui  y  a>ail  été  annexée,  lui  accorda 
encore  dos  indulgences  cl  les  inéiiics  privi- 

l^)  Vvy  ,  il  Ij  lin  (lu  \o\    ii"  bi. 


55?> 


CEO 


CEO 


39« 


lé^cs  donl  jouissaient  les  autres  ordres  inili- 
laircs. 

Mais  l'ordre  de  Saint-Georges,  nonobstant 
tout  ce  que  l'empereur  Maxlmilicn  fit  pour 
son  agrandissement,  et  les  précautions  qu'il 
prit  pour  qu'il  pût  se  conserver  dans  sa 
splendeur,  a  eu  le  môme  soit  que  plusieurs 
autres  donl  il  ne  reste  plus  que  la  mémoire  ; 
et  les  guerres  civiles,  principalement  celles 
qui  s'élevèrent  en  Allemagne  au  sujet  de  la 
religion,  ont  causé  sa  ruine.  Les  ducs  d'Au- 
triche et  les  princes  s'emparèrent  des  biens 
qui  lui  appartenaient  et  se  trouvaient  sur 
leurs  terres  ;  et  enfin  l'archiduc  Ferdinand, 
qui  fut  ensuite  empereur  sous  le  nom  de 
Ferdinandll,  donna,  avec  le  consentement  du 
pape ,  l'an  1598,  aux  Pères  de  la  compagnie 
de  Jésus,  le  couvent  de  Milleslad  pour  la  fon- 
dation de  leur  collège  de  Gralz  en  Slyrie. 
Ceux  qui  ont  dit  que  l'empereur  Frédéric  IV 
avait  institué  Tordre  mililairede  Saint-Geor- 
ges, mettent  sans  doute  au  nombre  des  em- 
pereurs Frédéric  d'Autriche,  qui  fut  le  com- 
pétiteur de  l'empereur  Louis  V,  et  qui  lui  dis- 
puta l'empire  pendant  neuf  années;  mais, 
comme  la  plupart  des  écrivains  ne  le  mettent 
point  au  nombre  des  empereurs,  non  plus 
que  Frédéric  de  Brunsvick,  qui  fut  élu  après 
la  mort  de  Venceslas,  et  qui  fut  tué  lorsqu'il 
venait  pour  prendre  la  couronne  impériale 
à  Francfort ,  nous  avons  donné  à  l'insti- 
tuteur  de  l'ordre  militaire  de  Saint-Georges 
le  non»  de  Frédéric  111,  et  ce  que  nous  avons 
dit  de  cet  ordre  la  t  assez  connaître  que  ces 
clievaliers  étaient  véritablement  religieux. 

L'abbé  Giustinlani,  de  Belloy,  Schoone- 
beeck,  Menneus,  Hermant,  lionanni  et  Fa- 
vin,  dans  leurs  Uistoires  des  Ordres  militai- 
res; et  BoUand.,  tom.  111  ApriL,  pig.  155. 
11  y  a  plusieurs  auteurs,  comme  Menneus, 
Tambourin,  Schoonebeeck,  M.  Hermant  et 
quelques  autres,  qui  ont  parlé  d'un  ordre  de 
Saint-Georges  institué  par  Alexandre  VI 
pour  la  dcleuse  de  l'Eglise  contre  les  enne- 
mis de  la  foi  (1);  quelques-uns  disent  que  ce 
fut  l'an  1W2  que  ce  pape  1  institua.  M,  Her- 
mant prétend  que  ce  ne  fut  qu'en  H98  ; 
u)a:s  ce  pape  n'a  point  institué  d'ordre  mili- 
taire, et  celui  que  ces  historiens  lui  attri- 
buent est  le  même  que  cette  confrérie  ou 
société  que  l'empereur  Maximilien  joignit  à 
l'ordre  do  Sainl-Georges  dans  la  Carinlhie, 
et  qui  fut  confirme  par  le  pape  Alexan- 
dre VI,  l'an  IWi. 

L'abbé  Giusliniani,  Menneus,  Schoone- 
beeck,  Hermant  et  le  P.  Bonanni,  Hist.  des 
Ord.  milit.  ;  et  Tambur.,  de  Jur,  Abb.  disp.  24. 
Ou  attribue  encore  l'institution  d'un  ordre 
militaire  sous  le  nom  de  Saint-Georges,  au 
pape  Paul  111,  qui  assigna  la  ville  de  ila- 
venncs  aux  chevaliers  pourleurdemeure  (2). 
Ils  devaient  veiller  à  la  délense  de  cetie 
ville,  et  donner  la  chasse  aux  corsaires  qui 
venaient  sur  les  côtes  de  la  Marche  d'An- 
côue.  Cet  ordre  l'ut  aboli  dans  la  suite  par  le 
pape  Grégoire  Xlll,  à  ce  que  dit  l'abbé  Giu- 
sliniani, qui  prétend  que  cela  se  justifie  par 

(I)   Voij.,  à  la  fin  du  vol.,  n°  85. 
{-1)  Yoy.,  a  1.1  lin  ilu  vu!.,  ii"  ijl. 

l>ltT10.SNàlIlC   DES   Ouur.ES    RELIGIEUX.    IL 


une  bulle  de  Sixte  V  qui  institua  les  cheva- 
liers de  Lorette. 

L'abbé  Giustiniani,  Menneus,  Hermant, 
Schoonebccck  et  le  P.  Bonanni,  dans  leurs 
HiHoires  des  Ordres  mil  laires. 

Ces  auteurs  parlent  aussi  d'un  ordre  mili- 
taire à  Gênes,  dont  ils  rapportent  l'institution 
à  l'empereur  Frédéric  111.  L'abbé  Giusti- 
ni.ini,  le  P.  Bonanni  et  Schoonebccck,  di- 
sent que  ce  prince  ,  revenant  de  Borne 
l'an  1472,  passa  p;ir  Gènes  où  il  fut  reçu 
avec  beaucoup  de  magnificence,  et  que,  pour 
marquer  sa  reconnaissance  envers  cette  ré- 
publique, il  institua  un  ordre  suus  le  nom  et 
la  protection  de  suint  Georges,  et  donna  pour 
marque  aux  chevaliers  une  croix  rouge  (3); 
mais  que,  comme  il  avait  f  il  le  doge  de  cette 
république  chef  ou  grand  maitre  de  cet  or- 
dre, et  que  ce  doge  change  tous  les  deux 
ans,  l'ordre  n'avait  pu  se  maintenir  et  éiait 
entièrement  éteint.  H  est  vrai  que  l'empe- 
reur Frédéric  111  alla  à  Home  en  U52  pour 
s'y  faire  couronner  avec  l'impératrice  Eléo- 
nore  son  épouse  ;  mais,  comme  il  y  retourna 
en  14G8  (comme  nous  avons  dit)  et  qu'il  pria 
le  pape  Paul  II  d'ériger  et  approuver  l'ordre 
de  Saint-Georges,  auquel  il  fit  unir  par  co 
pontife  l'abbaye  de  Milleslad  pour  la  princi- 
pale demeure  des  chevaliers,  il  se  peut  faire 
que  cet  empereur,  passante  son  retour  par 
Gènes,  créa  quelques  nobles  Génois  cheva- 
liers de  ce  nouvel  ordre,  et  que  l'on  a  tiré 
de  là  une  conséquence  qu'il  avait  institué  un 
ordre  à  Gènes  sous  le  nom  de  saint  Georges. 
Comme  ces  auteurs  n'apportent  point  de 
preuves  solides  pour  l'existence  de  cet  ordre, 
je  ne  fais  point  de  difficulté  de  le  mettre  au 
nombre  de  ceux  qui  sont  supposés,  aussi 
bien  que  celui  de  Saint-Georges  à  Rome 
dont  nous  avons  parlé  ci-dessus. 

GEORGES  AU  COMTÉ  de  Bourgogne   (Che- 
valiers DE  Saint-). 

Quoique  Gollut,  dans  ses  Mémoires  de 
Bourgogne,  parlant  des  chevaliers  de  Saint- 
Georges  dans  le  comté  de  Bourgogne,  ne 
donne  à  leur  société  que  le  litre  de  confrérie, 
elle  n'en  doit  pas  être  moins  regardée  comme 
un  ordre  de  chevalerie,  puisque,  pour  y  être 
reçu,  il  faut  faire  preuve  de  trente-deux 
quartiers  de  noblesse  du  côté  paternel,  et 
autant  du  côté  maternel;  de  même  que  l'or- 
dre de  la  Jarretière  en  Angleterre  ne  doit  pas 
être  regardé  comme  une  simple  confrérie, 
parce  que  Froissard  ne  lui  donne  que  ce  ti- 
tre, qui  était  donné  à  presque  tous  les  or- 
dres de  chevalerie  dans  leur  origine.  La  so- 
ciété des  chevaliers  de  Saint-Georges,  dont 
nous  parlons  dans  cet  article,  peut  avoir 
été  instituée,  selon  le  même  Gollut,  vers 
l'an  1390  ou  1400,  parce  qu'il  y  avait,  dit-il, 
en  ce  temps-là  quelques  gentilshommes  qui 
furent  du  nombre  des  premiers  conirères, 
comme  Humbert  de  Rougemont,  sieur  d'Ut- 
sie;  Jean  de  Bye,  sieur  de  Til-Castel  ;  Etienne 
de  Monstret,  sieur  de  Villeroy-le-Bois.el  Phil- 
bert  de  Miolans,  fondateur  de  la  confrérie, 

(ô)  Voy.,  à  la  fin  du  vol.,  n"  83. 

13 


395 

flous  avons  un  ronicil  ilos  nrmoirics  ilo  Mus 
rrsriipvn  lier*,  ilcpui'*  leur  inslilulioii  jusqu'en 
lati  iCCt.],  qu'elles  furonl  pravôcs  pi  données 
nu  public  sous  le  lilre  ii"/;/(jt  de  la  confii'rie 
tte  .S'<iirif-6>('i.9  .«.  nulrenienl  dile  de  ItoïKje- 
mtint  m  Finnchc-Comté.  Ces  chevaliers  por- 
tent pour  marque  do  leur  ordre  un  saint 
Cioorges  d'or  massif,  et  A  leur  réceplioii  ils 
font  serment  de  mainlenir  d.ins  la  province 
la  pureté  de  la  religion  caiholiquc  el  l'obéis- 
sance au  souverain. 

C'est  à  la  devoliuu  de  Pbililiertde  Miolans. 
pentilbomme  du  conilé  de  l?ourt,'0!;ne,  que 
l'on  doit  cet  éiablissemcnl,  qu'il  (il  à  son 
rirlonr  d'un  voyage  d'Orient,  d'où,  ayant  ap- 
poit<>  quelques  reliques  de  sninl  (îeorj^es,  il 
iil  bûlir  une  chapelle  proche  l'ésilise  parois- 
siale de  l'ioujîemonl,  donl  il  élail  seigneur  en 
partie:  et,  les  ayant  fa.l  mettre  dans  une  ri- 
che châsse,  il  convoqua,  lan  1309,  un  grand 
nombre  de  gentilslioninies  de  ce  comté  pour 
assister  à  la  translation  de  ces  reliques,  qui 
fui  faile  avec  beaucoup  de  niugiiificence. 
Ces  pcnlilslioinines,  voulant  témoigner  la 
dévolion  particulière  qu'ils  avaient  pour  ce 
saint  martyr,  s'unirent  dès  lors  ensemble, 
s'cngageant  d'assister  à  tous  les  services  et 
onices  que  Pliilhert  de  Miolans  avait  fondés 
dans  celle  chapelle.  Ils  firent  quelques  rè- 
Cl.  ments,  et  donnèient  à  leur  chef  le  litre  de 
ïiàlonnier,  qu'on  a  changé  depuis  en  celui 
de  gouverneur:  et  ils  élurent  pour  premier 
bâlonnier  ce  Philberl  de  Miolans,  ipii  donna 
sa  maison  de  Uougemoni  à  celle  confrérie. 

L'an  l'iSS.l'on  (il  des  staluls  qui  portaient 
cnlre  autres  choses  que  chacun  aurait  son 
rang  selon  l'ordre  de  sa  réception  dans  la 
confrérie,  sans  avoir  égard  à  aucune  dignité, 
richesses,  chevalerie,  ni  autre  chose  donnant 
jirééminence  ;  que  tons  les  ans  ils  s'assem- 
bleraient la  veille  de  la  lélc  de  s.iiiit  (îeor- 
ges  ,  audit  lieu  de  Kuugeniont,  pour  faire  le 
servii'C  divin,  accinipagner  le  bàloiinier,  et 
traiter  d(S  affaires  qui  concerneraient  la 
confrérie:  que  celui  qui  ne  pourrait  s'y  trou- 
ver enverrait  au  bâtonnier  les  droits  dus  à 
la  confrérie  el  les  excuses  de  son  absence  ; 
qu'ils  iraient  en  la  maison  du  bâlonnier,  de- 
vant lequel  ils  marcheraient  deux  à  deux, te- 
nant un  cierge  à  In  mam;  qu'ils  demeure- 
raient à  l'église  pendant  le  service  sans  en 
pouvoir  Sortir  ;  que  les  ecclésiastiques  se- 
raient revêtus  de  surplis  et  piécéderaienl  les 
co:  frères ,  que  le  jour  de  saint  Georges  l'on 
rh.inlerait  les  vé|)res,  et  qu'ensuite  l'on  di- 
rait les  vigiles  des  morts, cl  que  le  lendemain 
l'on  dirait  trois  messes  hautes,  l'une  du 
Sainl-Hspril ,  une  ;iulre  de  la  \ierge  ,  et  la 
troisième  des  moris  pour  les  confrères  décè- 
des ;  que  le  bâtonnier  y  offrirait  du  pain  ,  du 
^'^n  el  l'épéo  du  dernier  confrère  qui  serait 
décédé,  dont  bs  confrères  ,  ses  parenis  ,  pre- 
scnlcraienl  aussi  l'eeu  de  ses  armes  ,  et  que, 
s'il  y  en  avait  plusieurs  cjni  fussent  décèdes, 
les  aulres  confrères  feraiiiil  la  même  chose; 
que  si  quelques  confrères  se  trouvaient  dans 
I'  lieu  aui|ucl  l'un  des  confrères  décéderait, 
ils  porteraient  son  corps  à  l'éf^lise  ,  el  que  , 
u'cljul  [Ms  en  nombre  sulii^ant,  ils  l'acconi- 


DICTIONNAIRE  OF.S  OUnilES  RFLIGIEUX.  3% 

pagneraient  nu  moins,  cl  demeureraient  dam 
i'ig'ise   jusqu'à  ce  (|up  son  corps  fùl  mis    en 
terre  ;  que  Ions  les  ans  ils  (layeraient  nu  bâ- 
tonnier un  franc  pour  les  frais  de  l'ofCice  di- 
\  in;  (lue  le  b:'ilonnier  donnerait  à  la  collation 
du  p.iiu  el  du  vin  seulement  ,    et  le  jour  de 
siinl  tîcorges ,  à    diner,    du    bouilli    seule- 
ment ,  et  à  souper  du  rôti  avec  deux  sortes 
de  vin  pur  cl   net,   sans  excès  ;  autrement , 
que  le  procureur  de  la  confrérie  prendrait  le 
surplus  et  le  distribuerait  aux  pauvres:  que 
le  jour  de  saint  G(  orges  on  donnerait  la  col- 
lation comme  le  jour  précédent,  elque,  pour 
supporter   les  frais,  on  donnerait  au  bâton- 
nier six  gros  vieux  ;    que    chaque  confrère 
payerait  aussi  au  procureur  deux  gros  pour 
la  rélribulion   des   chapelains;  que  le  bâton 
serait  donné  par  <  rdre  de  réception  ,  el  que, 
si  celui  qui    devait  être   bâtonnier    refusait 
cet  emploi ,    il  payerait  dix  livres  ;  que   son 
nom  serait  raye  de  la  liste  des  confrères  ,  et 
l'écu  de  SCS  armes  ôlè  de  sa  p!ac.';quc  celui 
qui   serait    reçu  dans  la  confrèiie  enverrait 
dans  l'année   l'écu  de  ses  armes   blasonnées 
1  our  élrc  mis  en  sa  place,  dans  la  chapelle  ; 
<iue  s'il  arrivait  dillérend  entre  les  confrères, 
et  (lue   quelqu'un  ne  voulût  pas  acquiescer 
au  jugciiienl  qui  en  serait  donné  pir  les  au- 
tres ,  il  serait  exclu  de  la  confrérie  ;  qu'ils 
ne  pourraient  soutenir  plus  d'un  an  une  sen- 
tence d'excommunication,  cl  ne  feraient  i  ien 
conire  leur  honneur,  sous  peine  délre  aussi 
exclus  ;  qu'ils   poi  leraienl  toujours    l'image 
de  saint  (ieorges  ,  el   que  ,  s'ils  manquaient 
de  se  trouver  deux  ans    do    suite  à    Hougc- 
inonl  ,    leur  nom    serait  biffé  de  la  liste  des 
confrères  :  eiiliu    que   les  héritiers  des  con- 
frères décédés  s  raient  tenus  de  donner  Irenlo 
sous  à  la   c  nfrerie  ,    qui   ne   pourrait    être 
composée  que  de  cinquante  gentilshommes. 
L'an  l-VH*?,  on   ajouta  à  ces   slntuts  que  le 
bâlonnier  serait  obligé  de  donner  â  souper, 
outre  la  collation,  la  veille  de  la  fête  de  samt 
Georges:  cl,  sur  ce  que  quelques  bâtonniers 
inan(|(ièrcnl    d'y    satisfaire,   il  fut  ordonné, 
l'an  l'i-i)i,  que  chai]ue  bâtonnier  nianquantâ 
celte  obligaiion  payerait  quarante  livres.  Le 
nouibre  des  confrères    était   augmenté    l'an 
liiOi  jusqu'à  cent  sepl  ;  et  en  1518  ils  ordon- 
nèrent que  les  lieriters  du  bâlonnier  feraient 
les  repas  qu'il  n'aurait  pu  faire,  sur  peine  de 
50  livres.  L'an  lo.iJ  ,  l'on  ajouta  encore  aux 
statuts    que    dans   ces  sortes  de  repas  il  n'y 
aurait  point  d'autre  viande  que  du  bœuf,  du 
mouton,  du  veau,  du  cabris,  du  cochon,  des 
chapons,  des  poules  et  des  poulets,  sans  au- 
cune   pâtisserie    pour  le  de>serl  ,  el  (jue  les 
Confrères  seraient  tenus  de  faire  preuve  de 
noblesse.  Mais  ces   repas  ont  été  retranchés 
depuis.  Les  assemblées  se  tiennent  présente- 
ment d.ins  l'église  des  Carmes  de  Hesançon. 
Le  baron  deChnmplile,  gouverneur  de  la 
Franche-Comté,  s'ètanl  f.iii  insi  rire  au  nom- 
bre des  confrères  l'an  15G9,  l'on  lit  un  nou- 
veau statut  par  lei)uel  l'on  recommanda  l'ob- 
servance des  anciens  ;    cl  l'tMi  .ijouta  que  les 
confrères  feraient  serment  de  vivre  et  mou- 
rir dans  la   reliL:i(Mi  c.'tlliolii)ue  ,  apostolique 
cl  romaine,  cl  d'obéir  à  lMilli{>pe  ll.ioid'L,- 


5f17 


GEO 


G  KO 


r,"s 


pagne,  vt  à  ses  successeurs  nu  comté  de 
Bourgogne  ;  sur  (iiioi  le  duc  tlo  TolèJo,  gou- 
verneur des  Pays-Bas,  leur  icmoigna  la  re- 
connaissance qu'il  en  avait  par  une  lettre 
qu'il  leur  écrivit ,  et  on  élut  un  gouverneur 
de  la  confrérie.  Il  paraît  que  l'on  y  recevait 
aussi  quelquefois  des  femmes;  car,  dans  une 
liste  de  ces  confrères,  l'on  trouve  Uenrietlc 
de  Vienne,  darne  de  Uougemoiit,  et  Jeanne 
deChauvirey,  dame  de  Bevouges.  Ces  con- 
frères prennent  présentement  la  qualité  de 
chevaliers  de  l'ordre  de  Sainl-Ueorges,  el 
portent  pour  marque  de  cet  ordre  un  saint 
Georges  à  cheval,  tenant  un  dragon  sous  ses 
pieds,  le  tout  d'or  massif  du  poids  d'une  pis- 
tole  ou  plus,  à  leur  volonté,  attaché  à  un  ru- 
ban bleu. 

Gollul,  Mémoires  de  Bourgogne;  et  VEtat 
de  la  confrérie  de  Sainl-Georges  dite  de  Rou- 
gemonl,  imprime  en  1CG3. 

GEOllGKS  d'aLFAMA  (Chevaliers  de 
Saint-).  Voy.  Montesa. 

GEORGES  EN  Sicile  (Congrégation  de 
Saint-).  Voy.  Georges  in  Algiia. 

GEORGES  IN  ALGHA  (Chanoines  séculiers 

DE  Saint-). 

Des  chanoines  séculiers  de  la  congrégation  de 
Suinl-Georges  in  Alglia  à  Venise,  avec  la 
vie  de  saint  Laurent  Juslinim,  patriarche 
de  Venise  et  l'un  des  fondateurs  de  celte 
congrégation. 

L'on   accordera  aisément   les    différentes 
opinions  touchant    les  fondateurs  de  la  con- 
grégation de  Saint-Georges  in  Algha,  si   Ton 
considère  que  ce  fut  par  la  force  des  prédi- 
cations du  V.  P.  Barthélémy  Colomnc,   dunt 
nous  avons  déjà  parlé  ,  et  par   son  conseil , 
qu'Antoine  Corr.irio  et  Gabriel  Gondclmaire, 
tous  di'ux  neveux  de  Grégoire  XII, et  le  der- 
nier l'un  de   ses  successeurs   sous    le  nom 
d'Eugène  IV,  résolurent  de  se  donner  entiè- 
rement à  Dieu  en  établissant  une   commu- 
nauté oiî  ils   menaient  une  vie  apostolique, 
vivant  en  commun  ,   el  où  plusieuirs    nobles 
Vénitiens   se  joignirent  à  eux  ,   du  nombre 
desquels   fut  saint   Laurent  Justinicn  ,  qui 
dans  la  suite  (ut    patriarche  de  Venise.  Car 
il  y  en  a  qui  ont  prétendu  que  Barthélémy 
Colomnc  a  été  le  fondateur  de  cette  congré- 
gation ;  d'autres  ont  attribué  cet  honneur  à 
Gabriel    Gondelmaire,   d'autres   à  Antoine 
Corrario  el  Gabriel  Gondelmaire  ;  d'autres 
enfin,  et  qui  ont élé  les  plus  suivis  ,    disent 
que  c'est  saint  Laurent  Justinicn  ,  apparem- 
ment parce  qu'il  a  élé  le  premier  général  de 
cette  congrégation  ,  el  qu'il   en  a  dressé  les 
statuts   et   règlements.  Nous  n'avons  gaide 
de  lui  refuser  ce  liirc  de  fondateur  ,   que  les 
papes  Clément  VIII  et  Paul  V  lui  ont  donné, 
lorsqu'ils  ont  accordé,  en  1598  et  1605,  aux 
chanoines  de  cet  ordre  de  célébrer  sa  fête  et 
de  réciter  son  office  ;   mais    on  ne   peut   en 
même  temps  ôter  celle  qualité  de  fondateur 
à  Antoine  Corrario,   puisque,   sur  son  lom- 
beati,    qui  est  dans  l'éylise  de  Sainl-Georges 
in  Algha,  à  Venise,  on  lit  celle  Inscription  : 

Scpulcrum  piissimi  Patris  Dom  Anionii 
Cvrrarii  bealx  mcmoriœ  eoiicopi  Ostiensis, 


Ctirdinalis  Bononiensis,  fundaloris  hujus... 
Congrcgntionis,  qui  obiit  nnno  a  Nativitnte. 
Domini  M.CD.XLV.  die  19 /an.  Orate  pro  eo 

semper. 
Ce  que  l'on  voit  aussi  sur  celui  d'EugènefV, 
qui  est  à  Rome,  dans  l'église  de  Saint-Sau- 
veur in  Lauro,  i\u\  appartenait  à  telle  con- 
grégation lorsqu'elle  fut  supprimée,  comm« 
nous  le  dirons  dans  la  suite. 

Ce  fut  sous  le  jiontifical  de  Donifacc  IX, 
l'an  1404,  qu'Antoine  Corrario  et  Gabriel 
Gondelmaire,  nobles  vénitiens,  désirant  ser- 
vir Dieu  plus  parfaitement  en  méprisant  les 
pompes  et  les  vanités  de  ce  monde,  aban- 
donnèrent leurs  maisons  et  leurs  biens,  et 
choisirent  d'abord  pour  leur  retraite  une 
église  proche  Vicencc,  sous  le  tiire  de  Sainl- 
Augiislin.  Leur  vie  exemplaire  leur  ayant  en 
ppu  de  temps  attiré  plusieurs  compagnons, 
et  le  lieu  se  trouvant  trop  pelil,  ils  allèrent  à 
Venise,  oîi  ils  nsolurent  d'établir  leur  de- 
meure au  monastère  de  Saint-Nicolas  au 
Lido,  regardant  ce  lieu  comme  retiré  el  éloi- 
gné du  bruit  du  monde  ,  où  ils  pourraient 
plus  tranquillement  vaijucr  a  la  prière  et  à 
l'oraison  ;  mais  Louis  Barbo,  prieur  du  mo- 
nastère de  Saint-Georges  in  Algha,  de  l'ordro 
de  Saint-Augustin,  qui  y  était  resté  seul  avec 
deux  frères  lais ,  désirant  d'y  rétablir  la 
régularité,  el  étant  persuadé  de  la  vertu  cl  de 
la  sainteté  de  Corrario  el  de  ses  compagnons, 
les  fut  trouver,  leur  offrit  son  église  cl  son 
monastère,  cl  les  sollicita  si  fortement,  qu'ils 
acquiescèrent  à  sa  demande.  Us  vinrent  de- 
meurer avec  lui ,  el  il  sollicita  ensuite  le 
pape  Bonifuce  IX  à  les  faire  chanoines  de 
cette  Eglise. 

Ce  pape,  par  une  bulle  du  mois  de  mars 
1404  ,  donna  commission  à  l'évêque  de 
Kishame  de  réformer,  ce  monasière  ,  d'en 
changer  tout  le  gouvernement,  et  do  faire  ce 
qu'il  jugerait  à  propos  pour  y  élablir  l'ob- 
servance régulière. Cet  évoque,  n'y  ayant  trou- 
vé que  Louis  Barbo  et  deux  frères  lais, 
qui  professaient  tacitement  la  règle  de  Saint- 
Augustin,  et  ne  voyant  aucune  apparence  de 
réforme,  jugea  à  propos  d'ériger  ce  monas- 
tère en  collégiale,  qui  serait  dcsserviio  par 
des  chanoines  séculiers  qui  vivraient  en 
commun  ,  suivant  le  premier  dessein  do 
Corrario  et  de  son  compagnon  ,  qu'il  mit  en 
possession  de  celte  église,  du  consentement 
de  Louis  Barbo,  à  qui  il  laissa  le  titre  do 
prieur  sa  vie  durant. 

Us  étaient  dix-huit,  tous  dans  les  ordres 
sacrés,  savoir  :  dom  Antoine  Corrario,  doni 
Gabriel  Gondelmaire,  dom  Etienne  Mauro 
cini,  dom  François  Barbo,  nobles  vénitiens  ; 
dom  Mathieu  de  Strada,  de  Pavie;  dom  Ro- 
main de  Rodvillo,  milanais,  el  dom  Luc  Phi- 
lippi  d'Esté,  prêtres;  dom  Martin  Quirino, 
dom  Michel  Gondelmaire,  dom  Laurent  Jus- 
tinicn, nobles  vénitiens  ;  dom  Jean  de  Pizzé- 
nado,  dom  Simon  de  Persico,  crémonois,  doui 
Jérôme  de  Mussis,  de  Pavie,  diacres;  dont 
Augustin  Gaslaldi,  de  Pavie  ;  dom  Jean  Sar- 
donati,  de  Collri  ;  dom  Marc  Gondelmaire  et 
Dominique  Maurocini,  nobles  vénitiens, sous- 
diacres,  <[u\,  étant  tous  à  genoux  aux  pieds 


V)9 


DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  REI.ICIIUX. 


tM 


lie  l'cvéqu*',  fiiront  ilalilis  rlianoinos  do  celle 
églisi',  cu\  et  leurs  j^uceesseurs.  Ce  prélat 
leur  donna  toiile  la  luruliclion  spiriUiille  et 
leiiipoiolle  qui  en  depiiidail,  el  leur  pres- 
crivit des  reniements  tant  pour  leur  inaiiiùrc 
de  vi\rc  que  pour  leur  h.iliilliinent,  laissant 
la  lilierlé  .lU  prieur  d'en  f.iire  d'autres,  selim 
qu'il  le  jugerait  expédient  pour  le  bon  ordre 
Il  le  niainl'ien  de  la  régularité,  lui  donnait 
auvsi  pomoir  de  recevoir  des  frères  lais 
ixi  convers  qui  \ivraient  aussi  en  commun, 
tl  dont  le  nombre  ne  serait  point  limité,  non 
1  lus  que  celui  des  chanoines.       • 

.\n(;e  Corrario,   ayant  été  élu   pape,  l'.m 
l'iO(i,  sous  le  nom  de  Giégoire  XII.  confirma 
cet  établissement    par   un    bref   du  27  juin 
U07,  par  lequel  il  approuvait  aussi  les  con- 
stitutions qui  avaient  clé  dressées  par  l'évé- 
(juc  de  Kishamc.   11  fit  aussi  cardinaux  An- 
toine Corrario  et  Gabriel  Gondelmairc  ,   et 
donna  l'abbaye  de  Sainte-Justine  de  l'adouo 
à   Louis  lîarbo,  qui   réforma  ce  monastère, 
lequel    devint  rluf  d'une   congrégation   fa- 
meuse dont  nous  parlerons  dans  la  suite, 
ayant  pris  pour  l'aider  dans  celte  réforme 
d<Mn    Etienne    Maurocini   el   dom   François 
Itarhi),  chanoines  de  Saint-Georges  in  AUjha. 
11  y  a  bien  de  l'apparence  que  dans  le  com- 
mencenienl  cc  s  chanoines  vivaiinl  dans  une 
très-grande    pauvreté  el  même  d'aumônes, 
puisque   nous   lisons   dans  la   Vie  de  saint 
Laurent  Juslinien  ,  qu'il    la   demandait    de 
porte  en  porte  par  la  ville  de  Venise,  s'esti- 
manl  heureux  de  se  voir  méprisé  où  il  avait 
été  honoré,  et  que  sa  mère,  ayant   ordonné 
à  ses  serviteurs  de  lui  emplir  sa  besace  afin 
qu'il  n'eût  pas  la  peine  cl  la  confusion  de 
lourir  ainsi  toute  la  ville,  il  la  remercia,  se 
contentant  de  recevoir  de  sa  main  deux  pe- 
tits  pains,  pour  avoir  sujet  d'en  demander 
à  d'autres. 

Ces  chanoines  se  rendirent  si  recomman- 
dablc-  en  peu  de  temps,  et  vivaient  dans  une 
si  grande  réputation  de  sainteté,  qu'ils  fu- 
rent introduits  dans  plusieurs  collégiales, 
qui  toutes  cnsiinble  formèrent  la  conj;réga- 
lion  de  S.iinl-Geurgi  s  in  AIgha,  à  cause  de  ce 
lieu,  où  se  lit  le  premier  élablis>enienl,  et  qui 
fut  rcioniiu  pour  chef  de  celle  congrégation, 
i]ui  dans  la  suite  fut  composée  de  treize  mai- 
sons ,  dont  celle  de  S.iinl-Sauvcur  m  Lauro 
à  Home  était  du  nombre. 

Le  premier  chapitre  général  se  tint  l'an 
V»2V  ,  dans  lequel  saint  Laurent  Justinien 
fut  élu  (ireinier  général.  11  augmenta  les 
constitutions  el  lit  plusieurs  règlements,  qui 
fuient  toujours  observés  dans  la  suite,  ce  qui 
san.>  doute  lui  aura  fat  donner  par  les  sou- 
verains pontifes  le  titre  de  fondateur  de  lcHo 
congtéi;alion,  quoique  à  la  vérité  il  n'ait  pas 
été  le  |ircmiir  qui  en  ait  jeté  les  fondements, 
comme  nous  avons  montré  ci-dessus,  puis- 
que Antoine  Corrario  el  Gabriel  Gondelmairc 
lurent  les  premiers  qui  conçurent  ce  dessein. 
Le  même  doiidelmairc,  ayant  été  élevé  au 
souverain  pontificat  sous  le  nom  d'Kugènc  i\ , 
accorda  plusieurs  privilèges  à  cette  congré- 
gation, qui  furent  confirmés  et  même  ampli- 
Lh»  p.ir  SIS  ^u^^:cssenr^,  Sixte  IN  ,  Nicolas  \  , 
(1)  I  iiii  ,  -.1  l.i  lui  liu  t»l.,  n"  80. 


Pie  11.  l'iul  11,  Innocent  VIII,  AleT.indre  VI 
el  l'nul  III.  Le  pape  Pie  \,  l'an  LwO,  obligea 
ces  chanoines  à  f.iire  des  vceux  solennels  en 
reienant  toujours  le  nom  de  chanoines  sé- 
culiers, afin  d'avoir  la  préséance  sur  les  au- 
tres réguliers. 

Ils  se  sont  bien  éloignés  dans  la  suite  do 
la  pauvreté  el  de  l'humilié  dont  leurs  fon- 
dateurs avaient  fail   profession    el   dont   ils 
leur   avaient    laissé    l'exemple.    Les  grands 
biens  qu'ils  possédaient  en  plusieurs  endroit» 
leur  firent  bannir  la  régularité  de  leurs  mo- 
nastères. La  plupart,  étant  nobles  Vénitiens, 
se  prétendaient    indépendants    b  s    uns    des 
autres;  ils  ne  marihaienl  par  la  ville  qu'ac- 
comiiagnés  de  plusieurs   bandits  et  coupe- 
jarrets,  qui  étaient  les  ministres  de  leurs  dé- 
bauches (comme  on  m'assura  étant  à  Venise), 
de   sorte    que   c'est    avec  iai>on    que   Clé- 
ment IX  les  supprima  en  lG(i8  et  donna  tous 
leurs  biens  à  la   république   de  Venise  pour 
s'en  servir  dans  la  guerre  qu'elle  avait  con- 
tre les   Turcs  ,  qui  assiégeaient   pour  lors 
Candie  cl  dont  ces  infidèles  se  sont  cmparés. 
Ils  portaient  une  soutane  blanche,  el  par- 
dessus, une  robe  à  la   vénitienne  de  couleur 
bleue,  el  un  chaperon  sur  l'épaule  ,  qu'ils 
prirent  à  la  place  d'un  capuce  qu'ils  por- 
taient autrefois  (!)•  La  couleur  bleue  leur  fui 
ordonnée  par  Clemenl  Vlll  comme  étant  celle 
de  l'habit  que  portait  saint  LaurenlJusIinien, 
leur  instituteur,  ainsi  qu'il  est  marqué  dans 
le  bref  de  ce  pape  de  l'an  1C()2,  et  ils  avaient 
pour  armes  un  saint  Georges  à  cheval  tuant 
un  dragon,  avec  ces  mots  pour  devise:  Super 
afpidein  it  basiliscum  nminilabis. 

11  parait  assez  par  leurs  illustres  fondateurs 
qu'il  y  a  eu  ]  armi  eux  des  personnes  distin- 
guées, puisque  Gabriel  Gondclmaire  a  été 
pape;  qu'Antoine  Corrario,  Marcel  François 
Gondclmaire  ont  élé  cardinaux;  que  saint 
Laurent  Justinien  a  été  patriarche  de  Ve- 
nise, el  qu'il  a  eu  pour  successeur  dom  Ma- 
phéc  Conlarini,  de  la  niéme  congrégation. 
Philippe  Monticelli  fut  confesseur  des  papes 
Alexandre  VI.  Pie  III,  et  Jules  IL  Ceux  qui 
se  sont  rendus  célèbres  parmi  leurs  écri- 
vains ont  été  Jean  Haptiste  Salici,  professeur 
de  l'université  de  Padoue  ;  Jacques-Philippe 
Thomasini,  évéque  de  Cilla-Nova  d'Istrir ; 
Eusèbe  lîonfanti  ,  Alexandre  Conscdenii, 
mais  surtout  saint  Laurent  Justinien,  dont 
les  ouvrages  ont  élé  imprimés  en  un  vo- 
lume in-folio  à  Lyon,  en  15fi8,avecsa  vie, 
écrite  en  douze  chapitres  par  son  neveu 
Uernard  Jusiiuien,  Chartreux,  dont  voici  un 
abrégé. 

Il  elail  de  l'illustre  famille  des  Justinien 
à  A'enisi".  qui  prétendent  descendre  de  l'em- 
pereur Justinien.  Son  père  s'appel.iitlîernard, 
el  sa  mère  elail  de  la  famille  des  Quirino, 
laquelle  demeura  veu\eà  l'âge  de  vingt-qua- 
tre ans  el  chargée  de  cinq  enlanls,  dont  le 
plus  illustre  fut  notre  saint,  qui  naquit  lu 
premier  jour  de  juillet  1381,  lorscjue  toute  la 
ville  faisait  des  feux  de  joie  pour  la  victoire 
obtenue  en  la  journée  de  Cliioza;  ce  qui 
donna  sujet  .1  sa  mère  de  demander  h  Dieu, 
au  moiiienl  de  s.)  naissance,  qu'il  lut  un  jour 


I 


v\i  r.EO 

la  terreur  de  ses  ennemis  et  le  salut  d  •  ses 
citoyens  :  ce  qui  est  arrivé  dans  la  siiilc  ;  car 
l.i  ville  de  Venise  l'a  choisi  pourundesos  pro- 
terteurs  cl  lulélaircs,  aussi  bien  que  la  ville  de 
Palerme,  depuis  qu'elle  cul  recours  à  son  in- 
tercession, l'an  1625,  pour  être  délivrée  de 
la  peste,  dont  elle  clail  pour  lors  affligée. 

On  reconnut  dès  son  bas  âge  la  forte  in- 
clination qu'il  aurait  à  s'occuper  aux  choses 
saintes,  et  ce  fut  ce  qui  le  porla,  à  l'exem- 
ple de  dom  Martin  Quirino.son  oncle  mater- 
nel, qui  s'était  associé  à  Antoine  Gorrario 
et  Gabriel  Gondelmaire,  d'entrer  aussi  dans 
leur  compagnie,  ayant  été  du  nombre  des 
dix-huit  qui  furent  les  premiers  chanoines 
de  Saint-Georges  in-4/(7Aa,  comme  nous  avons 
dii  ci-dessus  en  parlant  de  cette  congréga- 
tion, à  l'augmentation  de  laquelle  il  travailla 
avec  tant  de  zèle,  que  c'est  ce  qui  lui  en  a 
fait  donner  le  litre  de  fondateur.  11  se  pres- 
crivit d'abord  une  rigueur  de  vivre  qu'il  a 
toujouis  observée  jusqu'à  la  fin  ;  et,  un  jour 
que  Iroisdesplus  anciens  Pères  lui  comman- 
«Ièrenl,dc  la  part  du  chapitre,  de  modérer  les 
rigueurs  excessives  qu'il  pratiquait,  il  leur 
répondit  fort  humblement  :  Je  ferai,  mes 
Pères,  ce  que  vous  me  commandez,  mais 
sachez  que  celui  qui  a  résolu  de  souffrir 
pour  Dieu  ne  manquera  pas  d'en  trouver  les 
moyens. 

11  n'y  avait  rien  de  plus  humble  que  lui, 
et,  quoiqu'avec  le  temps  il  fut  fait  supérieur, 
il  ne  s'en  éleva  pas  davantage,  et  ne  laissa 
pas  de  s'appliquer  toujours  aux  plus  vils  mi- 
nistères. Ses  entretiens  ordinaires  étaient  de 
ses  défauts  ou  bien  de  l'humilité  jie  Noire- 
Seigneur  Jésus-Christ.  On  l'accusa  deux  fois 
en  plein  chapitre  d'avoir  commis  quelques 
fautes  dont  il  était  innocent.  La  première  fois 
il  reconnut  cette  fauie,  mais  la  seconde  fois, 
pour  ne  pas  fivoriser  la  malice  de  ceux  qui 
l'avaient  accusé  faussement,  il  ne  répondit 
rien  et  se  tint  dans  le  silence. 

Toutes  ses  vertus  éclatantes  ne  purent  pas 
demeurer  cachées  ;  c'est  ce  qui  fit  que  le  pape 
Eugène  IV,  qui  le  connaissait  plus  que  les 
autres,  puisqu'il  était  aussi  l'un  des  fonda- 
teurs de  la  même  congrégation,  le  nomma  à 
l'évéché  de  Venise,  et,  bien  qu'il  refusât  con- 
stamment cet  honneur  par  deux  fois,  néan- 
moins le  pape  lui  ayant  commandé  une  troi- 
sième fois  de  l'accepter,  il  fut  contraint  de 
se  soumettre  à  l'obéissance.  Il  était  pour  lors 
âgéde  cinquante-un  ans;  et,  durant  les  vingt- 
trois  qu'il  vécut  depuis,  il  ne  changea  jamais 
sa  façon  de  vivre  qu'il  avait  pratiquée  dans 
son  monastère.  Il  porta  toujours  l'habit  do 
sa  congrégation,  qui  était  de  couleur  bleu 
céleste,  comme  nous  avons  dit.  H  ne  voulut 
point  de  tapisseries  en  sa  maison,  ni  d'autres 
ornements  qui  se  ressentissent  de  la  vanité 
du  siècle.  Tout  son  tr/iin  consistait  en  deux 
chanoines  qu'il  prenait  du  monasière  pour 
l'aider,  l'un  à  réciier  son  office,  l'autre  pour 
partager  avec  lui  les  fonctions  pénibles  de  sa 
charge;  et  en  cinq  ofiiciers  domestiques: 
cm  Oie  se  plaignait-il  quelquefois,  quoiqu'on 
souriant,  qu'il  avait  une  trop  grande  fj' 
mille  à  uourir;  mais  il  entendait  parler  de 


GEO 


4-n 


fous  les  pauvres  de  la  ville,  dont  il  prenait 
un  soin  particulier,  s'informanl  de  leur  nom- 
bre et  de  leurs  nécessités  les  plus  pressantes, 
afin  de  les  soulager.  Un  de  ses  parents  l'ayant 
prié  de  le  vouloir  aider  de  quelque  argent 
afin  de  pouvoir  marier  sa  fi  le,  ils'cn  excusi, 
lui  disant  que  s'il  lui  donnait  une  petite 
somme, celaluiservirait  pcu;elques'il  lui  en 
donnait  une  plus  grosse,  il  ferait  tort  à  p'u- 
sieurs  pauvres  pour  qui  les  biens  de  l'Eglise 
sont  destinés. 

Le  pnpe  Eugène  fit  ce  qu'il  p'it  pour  l'atti- 
rer à  Rome  afin  qu'il  pût  l'assister  de  son 
conseil.  Il  s'en  excusa  toujours  tant  sur  (a 
longueur  du  chemin  que  sur  sa  faiblesse; 
mais  ces  excuses  n'ayant  plus  de  lieu  lorsque 
le  pape,  étant  contraint  de  sortir  de  Konie,  se 
réfugia  à  Florence  et  ensuite  à  Bologne,  il 
vint  trouver  ce  pontife,  qui  en  l'embrassant 
lui  dit  :  Soyez  le  bien  venu,  l'ornement  et  la 
gloire  des  prélats  Mais  le  saint,  qui  ne  respi- 
rait que  son  diocèse,  obtint  bientôt  la  per- 
missi  m  d'y  retourner  ;  et  ce  fut  sous  le  p«n- 
tificat  de  Nicolas  V,  successeur  d'Eugène,  que 
le  patriarcat  de  Grade  et  l'évéché  de  Venise 
furent  réunis  en  sa  personne  pour  terminer 
les  différends  qui  étaient  entre  les  prélats  ili> 
ces  deux  sièges,  car  il  avait  été  ordonné  ipK! 
le  survivant  de  l'un  d'eux  serait  patriarche 
et  évéque  de  Venise. 

Enfin,  étant  âgé  de  74  ans  sans  avoir  rien 
relâché  de  ses  ferveurs  ni  de  ses  rigueurs 
ordinaires,  la  fièvre  le  saisit,  causée  par  la 
grand  froid  qu'il  avait  enduré  pendant  l'office 
divin,  et  en  peu  temps  il  fut  réduit  à  l'exlré- 
mi'é.  Il  ne  voyait  qu'à  regret  les  empresse- 
ments qu'on  témoignait  pour  le  secourir  dans 
son  mal,  parce  qu'il  ne  croyait  pas  qu'on  sa 
dût  mettre  si  fort  en  peine  de  lui  ;  il  ne  put 
se  résoudre  à  se  servir  de  viandes  délicates 
pendant  sa  maladie,  et,  voyant  sa  dernière 
heure  a])prochcr,  il  leva  les  yeux  au  ciel  et 
dit  amoureusement  ces  paroles  :  Je  viens  <ï 
vous,  6  bon  Je'aus  !  et,  pour  consoli'r  ses  do- 
mestiques qui  versaient  des  larmes,  il  leur 
dit:  Arrêtez  ces  larmes,  c'est  ici  un  jour  de 
joie  et  non  pas  de  pleurs.  Il  se  fil  ensuite  por- 
ter à  la  chapelle,  où  il  rendit  paisiblement 
son  âme  à  Noire-Seigneur  le  8  janvier  1433. 
Il  avait  ordonné  que  son  corps  serait  porté 
sans  aucune  pompe  à  son  monastère  de 
Sainl-Georges  in  i4f. y/ta/ mais  les  chanoines 
de  sa  cathédrale  ne  le  voulurent  jamais  per- 
mettre, et  c'est  dans  leur  église  ((u'il  a  tou- 
jours reposé  depuis  ce  temps-là,  où  il  a  opé- 
ré un  grand  nombre  de  miracles  qui  ont 
obligé  le  pape  Clément  Vil  à  le  déclarer 
bienheureux,  l'an  132V,  et  Alexandre  VIII  à 
le  canoniser,  l'aa  IG'JO. 

Il  y  a  aussi  une  congrégation  du  même 
institut  en  Sicile,  fondée  pir  Henri  deSiméoii 
de  l'alerme,  qui,  ayant  suivi  Alphonse,  roi 
d'Aragon,  à  Uome  l'an  14-33,  obtint  de  vivo 
voix  du  pape  Eugène  IV  la  permission  de 
porter  l'habit  des  chanoines  de  Saint-Geor- 
ges in  Alyha,  et,  étant  retourné  en  .ion  pays 
cl  ayant  assein'.ilé  quelques  prèlr.s  avec  lui, 
doiina  commencement  à  ce  te  congrégation. 
Le    même  i)ai»e,  par  Uii  bref  de    l'au    14T7, 


iiC, 


OiCTIONNAlRE  DES 


coiifirmn  l.i  <J«>nalion  qui  leur  fut  ''a  to  l'c 
I  hofiiial  «le  Saini-J.ir()iics  tie  iM.izz.ir.i  à  Pa- 
Icrnic,  rt  la  inèmi'  aniii-o  il  approuva  leurs 
loiislilulions.  Ils  avaient  encore  ((iieltiues 
autres  monastc  rcs  ,  et  vivaient  Jans  une 
^;randc  pauvreté.  Leur  hatiil  consis'ait  en 
une  suulane  de  drap  blanc  cl  un  manteau  ou 
rliape  de  drap  bleu  fort  prossier,  avec  un 
petit  eapucc,  ei  ils  allaieiil  nu-pitds  avec  des 
sandales  de  bois,  comme  on  peut  »oir  dans 
la  fifîure  (jtie  nous  joiirnons  ici  (1).  C'était 
sans  doute  le  vérilaldc  iialiillement  des  dia- 
noines  séculiers  de  Saint-tjeorfjcs  in  AUjtii 
il  ins  leur  origine,  et  la  robe  à  la  vénitienne 
qu'ils  ont  portée  depuis,  aussi  bien  que  ceuv 
de  Portugal,  est  apparemment  TelTet  de  quel- 
que relâchement  ;  car  Morijjia,  de  l'ordre 
des  Jésuales,  dans  son  Histoire  des  hommes 
illustres  de  son  ordre,  parlant  du  cardinal 
Antoine  Corrario,  l'un  des  fondateurs  de  celte 
eoiigrégatidu,  qu'il  préiend  néanmoins  avoir 
Clé  de  l'ordredcs  Jrsuates,  apparemment  pour 
faire  honneur  à  son  ordre,  dit  qu'il  fit  p  rier 
aux  chanoines  de  Saint-Georges  in  Ahjha 
des  sandales  de  bois,  et  qu'il  1(  s  obligea  à 
faire  la  (luète  par  la  ville  comme  il  se  prati- 
<|uail  dans  l'ordre  des  Jésuales  ;  et  que  liir-.- 
qu'il  écrivait  (c'clail  en  ItiOV),  il  n'y  avait 
}<as  liingiemps  que  ces  chanoines  faisaient 
encore  porter  des  sandales  de  bois  à  leurs 
novices. 

Maurolic  et  Giesccnzc  font  aussi  mention 
de  quelques  chanoines  de  Saint-Georges  qui 
lormaicnl  une  aulrc  petite  congrégation, 
dont  le  principal  monastère  et  le  chef  clail 
proche  Gènes.  !ls  avaient  encore  des  monas- 
tères à  Loili  le  vieux  et  le  nouveau,  cl  deux 
autres  dans  le  Parmesan  et  le  Plaisantin. 

Jean  'i'homassini,  èvOque  de  t^itla-N  )va, 
l'i  qui  a  fait  les  annales  dt;  la  congrégation 
lie  Saint-Georges  de  \'enisc,  dit  que  les  cha- 
noines du  mont  Saint-Eloy  près  d'Arra-,  de 
Sainl-Aubert  de  Cambrai,  et  quelques  autres 
aux  l*ajs-Iîas,  èlaii'nl  aussi  du  même  insti- 
Mil.  Il, se  fonde  peut-être  sur  ce  (juc  la  cou- 
li'ur  di-  li'ur  hahil  était  b!eue  ou  violellc  ; 
mais  il  était  dilïerenl  quant  à  la  forme. 

Voyez  Jacq.  Philipp.  Aimai.  Cunonicuruin 
cccul.  S.  Gi'urgii  in  Ah/fin.  Francisco  Maria, 
lliflnriti  dos  anij rades  Cuni/rvciioc.i  ilos  Cone- 
ijo  »fcn/(ires  de  S.  Jeurije  cm  Alqa  de  V eiie-a 
et  de  S.  Jiiau.  Kvantjclisld  ein  Parlugid.  Sil- 
vcsl.  Maurol,  Mur.  océan,  di  lui.  <jli  Itelii/. 
tih.  V.  Moiigia.,  Oriijinr  de  toutes  les  reti- 
ijions,  liv.  I,  iliap.  hk.  l'ciiot,  llisl.  tiiparl. 
<'(inoiiic.  Itryul.  til).  II.  cap.  70.  Taiiibur.,  de 
Jnr.  abhat..  tom.  il,  dispiil.  ii,  fiiursl.  4, 
iium.  32.  iîernard  Jus;iii,  Vil.  S.  Laurcnl. 
Justin.  Vies  des  S5.du  P.  Giry.  Herm.,  Lla- 
Idi.itement  des  ordres  religieux,  cliap.  51.  Gio 
l'iclr.  Crcscenzio  ,  J'residio  Rom.  lib.  ii, 
png.  -28. 

Cf'OHClKNS  (.M()iM,s).roy.  Mi'.i  cuites. 

GliltENHODli  (Cil  >>oiNiiSiES  rnoiEsr anti;s 

DE).   Voy.  GlNDEIlSUEIM. 


onnuES  rtEi.iriix'x.  hk 

gékéon  (clievaijers  df   loiidre    de 
Saint-). 

(Quoique  nous  ayons  mis  sous  la  régie  de 
saini  It.isile  les  ordres  inililaires  dont  nous 
avons  parlé  dans  quelques  arliclos,  nous  n'o- 
son*  pas  néanmoins  assurer  qu'ils  aient  vé- 
riiablemcnt  suivi  cette  règle,  ou  qu'ils  y 
aient  été  soumis,  excepté  celui  de  C'instan 
lin.  Il  y  a  si  longtemps  qu'ils  no  subsislenl 
plus,  et  il  en  est  resté  si  peu  de  mémoire,  que 
nous  nous  en  sommes  rajiporlé  à  la  bonne 
foi  des  écrivains  qui  ont  parlé  de  ces  ordres. 
Nous  n'avons  pas  mémo  voulu  les  suivre  eu 
mettant  quantité  d'aulrts  ordres  sous  la 
même  règle.  Si  nous  avons  cru  devoir  donner 
place  dans  cet  ouvrage  à  ceux  dnnt  nous 
avons  déjà  parlé,  c'est  qu'ils  ont  été  institués 
e.i  Orient,  ou  établis  pour  la  défense  des 
saillis  lieux  de  la  Palestine;  et  c'est  pour  la 
même  raison  que  nous  y  joignons  aussi  les 
chevaliers  de  Saint-Géréon  dont  on  ne  con- 
naît point  l'origine.  iMcnnénius  parle  de  col 
ordre  sur  le  témoignage  d'un  voyageur, 
Jean  de  llocvel,  qui  dit  avoir  vu, dans  la  Pa- 
lestine, des  chevaliers  de  Saint-Géréon  qui 
piiriaicnt  une  croix  patriarcale,  de  la  même 
manière  que  ce. le  qui  c>t  dans  les  armes  du 
royaume  de  Hongrie,  il  y  a  des  auteurs  qui 
allribiimt  l'.nstituiion  de  cet  ordre  à  l'eni- 
pcjeurFrédéric  llarberousse,  d'autres  à  Fré- 
déric il.  Les  uns  leur  donneni  pour  niari]uo 
de  cet  ordre  une  croix  patriarcale  d'argent, 
posée  sur  trois  montagnes  de  sinople  en 
champ  de  gueules,  d'autres  prélcndent  qu'ils 
avaient  sur  un  habit  blanc  une  croix  no  rc 
en  liroiierie  sur  trois  montagnes  de  sino[ile, 
et  d'autres  leur  donnent  encore  une  auirc 
croix  différente  (2).  Ainsi  on  ne  peut  ricu 
(lire  de  certain  touchant  cet  ordre,  que  Fa- 
vin,  sans  aucun  fondement,  prétend  a»oir 
été  soumis  à  la  règle  de  saint  .Vugiistin. 

11  y  a  bien  de  l'apparence  <iue  ces  chevaliers 
de  Sainl-ljcrcon  étaient  les  mêmes  que  ceux 
de  Hongrie,  que  le  V.  Melchior  incholTer  de 
la  ciimpagnic  de  Jésus,  dans  les  annales  ec- 
clésiastiques de  ce  royaume,  dit  iiue  l'on  ap- 
pelait Porte-Croix,  à  cause  qu'ils  portaient 
pour  marque  de  leur  ordre  une  croix  sem- 
blable à  celle  que  l'un  voit  dans  les  armes 
du  même  royaume,  qui  e^i  une  croix  patriar- 
cale posée  sur  trois  montagne!»,  t'.et  auteur 
leur  dniine  pour  fondateur  saint  lUienne, 
premier  roi  de  Hongrie,  qui,  à  ce  qu'il  pré- 
tend, insliiua  ces  chevaliers  en  mémoire  du 
la  croix  que  le  pape  lui  envoya,  avec  permis- 
sion de  la  faire  porter  devant  lui,  à  caosc 
que  ce  prince  avait  travaillé  avr  c  tant  de 
/élu  à  é:ablir  la  religion  chr<'tienne  dans  ses 
lt!tats,  qu'il  a  élè  considéré  comme  l'apolre 
de  Hongrie.  Mais,  comme  les  ordres  militai- 
res n'ont  commencé  que  dans  le  xii'  siècle, 
il  se  peut  faire  que  saint  l'Uienne,  ay.int 
reçu  du  pape  Silvestre  H,  l'an  lOOt),  la  cou- 
riiniie  de  Hongrii-  ,  avec  une  croiv  qu  il 
pouvait  faire  porter  devant  lui,  il  établit  des 
oliiciers  pour  por;er  celte  croix,  auxquels, 
pour  ce  sujet,  l'ou  donna  le  uoin  de  Puitu- 


(l)  Vuy.,  à  U  lin  du  vul.,  n'  87. 


(:)  Vvy.,lih  lia  du  vol.,  n'  88. 


405  CIL 

Croix,  cl  que  dans  la  suite  l'on  en  ail  formé 
un  ordre  militaire  qui  no  subsiste  plus. 

Mcnncnius,  deliciœ  Equest.  Ord.  Favin, 
Théâtre  d honneur  et  de  cheval.,  lotn.  II. 
Scho  mebeck,  Hist.  des  Ord.  Milil.,  cl  Mel- 
chior  inchoffer,  Annal.  Eccles.  regni  Uung., 
tom.  I. 

Géiondins.  Yoy.  Césaike  (Saint). 

GILBEBT  DE  SIMPHINGHAM    en    Angle- 
TERnE  (  Religieux    et    Religieuses    de 

Saint). 

Les  chanoines  réguliers  et  les  Bénédictins 
ont  raison  de  mettre  au  rang  des  congrép;a- 
lions  des  ordres  de  Sainl-Auguslin  et  de 
Paint-Benoît  celle  de  Saint-Gilbert  de  Sim- 
pringliam,  puisqu'il  fit  observer  la  règle  de 
saint  Augustin  à  ses  religieux,  qu'il  appelle 
des  ch.inoines,  et  qu'il  donna  à  ses  roligieu- 
ses  celle  de  saint  Benoit  ;  et  c'est  à  tort  que 
les  religieux  de  Cîteaux  prétendent  que  cel 
ordre  doit  appartenir  à  eux  seuls,  comme 
leur  ayant  été  soumis;  car  Saint-Gilbert  dit 
lui-même  le  contraire  dans  ses  constitu- 
tions {Capital,  de  initio  monast,,  art.  2), 
oîi  après  avoir  rapporté  de  quelle  manière 
se  fit  l'établissement  de  ses  religieuses,  il 
ajoute  que  leur  nombre  se  multipliant  et  qtio 
n'ayant  point  de  religieux  lettrés  pour  en 
avoir  soin  aussi  bien  que  des  converses,  il 
avait  été  au  chapitre  général  de  Oiteaux,  où 
le  pape  Eugène  était  en  personne,  afin  de  re- 
mellre  sous  la  juridiction  des  religieux  de 
cet  ordre,  ses  maisons,  les  servantes  de  Jésus- 
Christ  et  les  frères  lais  ;  mais  qu'on  ne 
tui  accorda  pas  sa  demande  ;  c'est  pourquoi 
il,avait  été  contraint  par  nécessité  de  s'asso- 
cier des  clercs  pour  avoir  soin  tles  religieu- 
ses el  des  frères  lais ,  et  qu'il  leur  avait 
donné  la  règle  de  saint  Augustin. 

L'on  pourrait  néanmoins  leur  accorder  les 
frères  lais,  parce  que  saint  Gilbert  dit,  dans 
un  autre  endroit  des  mêmes  constitutions 
(Scripta  de  fratribus ,  art.  1),  que  dans 
le  temps  que  l'ordre  des  moinesses  de 
Simpringliam  fut  commencé  ,  il  vint  des 
religieux  de  Cîteaux  accompagnés  de  quel- 
ques frères  lais  de  cet  ordre  qui  étaient 
propres  [our  le  travail,  pauvres  dans  leurs 
iiabillements ,  se  contentant  de  la  nour- 
riture des  pauvres,  préférant  les  herbes  et 
les  légumes  aux  plus  grandes  richesses,  qui 
ne  buvaient  que  de  l'eau,  qui  avaient  soin 
des  fermes  el  qui  n'avaient  point  d'autres 
emplois  dans  l'ordre.  Ce  que  quelques-uns 
des  siens  du  nombre  de  ceux  qui  étaient  des- 
tinés au  travail  ayant  appris,  ils  désirèrent 
vivre  de  la  même  manière  el  avoir  les  mêmes 
observances;  c'est  pourquoi,  voulant  satis- 
faire à  leur  désir,  et  pour  le  salut  de  leur 
âme,  il  ordonna  que  les  frères  lais  de  son 
ordre,  tant  en  rhabillenicnt  qu'en  la  nour- 
riture, suivraient  la  manière  et  l'observance 
des  frères  de  Cîteaux. 

Ainsi  il  y  avait  du  mélange  dans  l'ordre 
de  Saint-tîilberl,  et  l'on  peut  dire  que  les  re- 
ligieux, les  religieuses,  les  converses  et  les 
frères  lais  formaient  (jualrc  ordres  uil- 
fcreuls,  puisqu'ils   faisaient  quatre  couiuiu- 


CÎL 


406 


nautés  différentes  <iiii  avaient  chacune  un 
réfectoire  a  part  où  présidait  unsupéiiour 
ou  supérieure  tirés  de  leur  corps,  et  qu'il» 
étaient  aussi  distingués  par  la  forme  el  la 
couleur  de  leurs  habillements,  comme  nous 
ferons  voir.  Nous  mettons  néanmoins  cet 
ordre  au  rang  des  chanoines  réguliers,  puis- 
qu'on ne  peut  pas  disputer  aux  religieux 
prêtres  cette  qualité,  que  saint  Gilbert,  leur 
fondateur,  leur  a  donnée. 

Ce  saint  naquit  en  Angleterre  vers  l'an 
1083,  du  temps  de  Guillaume  le  Conquérant. 
Son  père  était  un  gentilhomme  de  Norman- 
die nommé  Jocelin.seigneurde  Siinpringham 
cl  de  Tyrington,  dans  le  comté  de  Lincoln  ; 
cl  sa  mère  était  anglaise,  qui,  étant  grosse  do 
lui,  eut  un  présage  de  ce  qu'il  devait  être  un 
jour,  dans  un  songe  qu'elle  eut,  où  il  lui 
sembla  que   la  lune  tombait  dans  son  sein. 

Il  fut  envoyé  en  France  pour  y  faire  ses 
études  ;  lesquelles  étant  achevées,  il  retourna 
chez  lui,  où  il  s'appliqua  à  instruire  gratui- 
tement la  jeunesse.  Mais  en  enseignant  aux 
enfants  les  lettres  humaines,  il  les  formait 
en  même  temps  à  la  vertu,  leur  prescrivant 
une  manière  de  vie  qui  approchait  de  celle 
qu'on  pratiquait  dans  les  monastères  les 
plus  réglés. 

Il  demeura  quelque  temps  dans  le  sémi- 
naire de  Robert  Bloës,  évêque  de  Lincoln,  et 
fut  promu  à  la  prêtrise  par  son  successeur 
Alexandre,  qui  eut  bien  de  la  peine  à  obte- 
nir son  consentement  ;  car  il  résista  long- 
temps au  désir  de  son  prél.it,  se  croyant  in- 
digne du  sacerdoce.  Depuis  ce  temps-là,  il 
aug.iienta  ses  exercices  de  piété,  fon  zèle  el 
sa  ferveur.  Il  fit  paraître  un  généreux  mé- 
pris des  richesses  et  des  honneurs  dans  lu 
refus  (]u'il  fit  de  l'archidiaconé  de  l'église  do 
Lincoln,  qui  avait  de  gros  revenus  et  beau- 
coup de  droits  honorifiques,  disant  qu'il  no 
connaissait  point  de  plus  prompte  voie  pour 
se  perdre.  Quoiqu'il  eût  de  gros  biens  de  pa- 
lrimi)ine,il  ne  se  regarda  plus  comme  en  étant 
le  propriétaire,  mais  seulen^enl  l'économe  et 
le  dispensateur,  qui  devait  les  répandre  sur 
les  pauvres  el  les  indigents,  pour  qui  il  avait 
beaucoup  de  tendresse  el  de  compassion, 
principalement  pour  les  filles  qui  étaient 
dans  la  pauvreté  et  qui  n'osaient  la  faire 
connaître. 

Il  en  choisit  sept  entre  les  autres,  qu'il 
trouva  plus  portées  à  la  piété.  11  en  eut  un 
soin  particulier,  et  elles  se  consacrèrent  en- 
suite à  Dieu  par  le  vœu  de  virginité.  Ce  fut 
ce  qui  donna  commencement  à  son  ordre  ; 
car,  par  le  conseil  el  sous  l'autorité  de  l'évê- 
que  Alexandre,  il  les  renferma  dans  un  mo- 
nastère qu'il  leur  fit  bâtir  dans  sa  maison 
paternelle  de  Simpringham,ran  1146.  11  leur 
ordonna  sur  toutes  choses  un  étroit  silence, 
et,  afin  qu'elles  ne  fussent  point  distrai'tes 
dans  leurs  exercices  spirituels,  il  prit  de  pau- 
vres femmes  qui  avaient  soin  de  leur  pré- 
parer à  manger  hors  le  monastère,  et  on  leur 
passait   par   une  fenêtre  tous  leurs  besoins. 

Celles-ci  diruandèrent  aussi  d'être  admi- 
ses à  la  profession  religieuse  en  qualité  de 
sœurs  converses,  bainl  Gilbert  les  instruisit 


i07  l>ICTK)NN\mF,  DES  ORDUES  RF.I.ir.irUX.  i  18 

lie  lous  les   devoirs  de  l.i  vio   rcli;;ieusc.  Il  resnrdor.    Si    les  religioiix    rlaieiil    ol)Ii!;i>s 

voulu!    les  éprouver  prml.int  un    an,  aprôs  (rcnlrer  ilans  l'habilalioiidi's  filles  (onr  (lucl- 

quoi  il  lour  arc  >rila    lour   dcmando,  cl  c  les  qucs  nécessilés  spirituelles,  ils  ne  pouvaient 

s'cniiapiVoMl  à  (cl  étal  par  des  VdMix  solen-  voir  le  visa;:?  découvert   de  ces  vierpcs,  <|iii 

iicls,  avant  elc  renfermées  dans  le  même  ino-  devaient   toujours  avoir    le   voile   liaissé  en 

nastèrè  avec   les    re!i;;ieuses.  Il  choisit  aussi  leur  |>résence.    Ce    saint    exi{;eait   l'aj^o    d« 

des  hoinines  pour  avoir  soin  des  affaires  du  quinze   ans   pour   admettre  les  fri'res  clercs 

monastère  et  faire  valoirles  lerres  qui  en  dé-  au  noviciat,  et  vin^jt  ans  pour  la  profession  : 

pendaient,  et   ils   furent  reçus  comme  frères  les  frères  convers    n'y  pouvaient  èire  reçus 

convers.  avant  vinj^t-quairc  ans.  Les  filles,  (jui  ilemaii- 

Cct   établissement  cul    l'agrément  du   roi  daienl  d'entrer  en  cet  ordre,  devaient  avoir 

KlitiiiiL', lies  princes  et  lie  lous  les  grands  sei-  douze  ans  pour  être  admises  dans  le  monas- 

gnewrs,  qui   firent  de  grands  dons  à  ce  mo-  tère,  el  quinze  pour  avoir  la  qualité  de  no- 

iiaslère.  Saini  Ciilbert  fut    contraint  par  né-  vice;  et  il  fallait  (ju'clli's  sussent  le  psautier, 

cessilc  de  les  accepter  eu   jinrlie;  mais  il  en  les  hymnes  el   les  antiennes,  avant  que  de 

refusa  aussi  beaucoup,  de  peur  que  les  grands  faire  profession. 

biens,  comme  de  nié(hanli'S  herbes,  nétouf-         Lorsque  ee  saint  visitait  ses  monastères 

fassent  le  bon  grain  qu  il  avait  semé  dans  ce  il  allait  toujours  accompagné  de  deux  clercs 

champ,  qui  devint  si  fertile,  que  des  pcrson-  et  d'un   frère   lai.   Il  ne  s'entretenait  pas  do 

nés  de  l'un  el  de  r.iutre  sexe  se  rendaient  de  discours  inutiles,  mais   il   psalmodiait  conti - 

toutes  parts  à  ce  nlona^tèrc  pour  embrasser  nuellement  ou   priait    mentalement,  c!   por- 

cet  institut,  ce  qui  l'obligea  de  f.iirc  de  nou-  lait    toujours  de   quoi  donner  suffisamnu'nt 

veaux  établissements.  aux  pauvres  qu'il  rencontrait  dans  les  che- 

Cesaint  fondateur,  plein  d'humilité,  voyant  mins.  Il  ne   mangeait  point   de  viande,  si  ce 

un  si   grand    nombre  de  disciples,  crut  q:j'i!  n'ciaitdaus   les  grandes  inlirmités,  et  mémo 

n'avait  pas  assez  de   capacité  pour  les  con-  s'abstenait  de   manger  du   poisson  pendant 

duire  ;  c'est   pourquoi  il  vint  en  France  l'an  l'.Vvenlet  le  Carême.  11  ne  se  servait  ((uc  de 

1118,  trouver  les   r(digieu\   de    Citeaux  as-  vaisselle  de  bois;  ses  austérités  et  ses  mor- 

senililés  dans    leur  chapitre    général,  où  le  lilicalions  étaient   très-grandes,  et  il  n'était 

pape  lùigènc  111  assistait,  pour  leur  mettre  pas  plus  velu  en    hiver  qu'en   été,  (|ii)i(]uil 

entre  les  mairis  le  soin  de  ses  maisons.  Mais  paraisse   par  ses   conslitutions  qu'il  voulait 

ils    ne    les    \'julurenl    pas    accepter,   disant  que  ses  disciples  fussent  bien  vêtus  :  car,  tou- 

qu'il  ne   leur    était  pis    permis   d'avoir    la  chant  les   habits,  il  ordonne  que  les  ehanoi- 

conduiie  des  moines  d'un  autre  ordre  ((ue  le  nés  aient  trois  tuniques,  une  pelisse  de  pe.iux 

leur  el  encore  moins  (les  religieuses.  Le  pape,  d'agneau,   un   manteau  blanc   cl  un  cap'ico 

informé  de  ses  vertus,  loin  de  consentir  à  s  1  fonnés  aussi  de   peaux  d'agneau.   Les  reli- 

prière,  l'exhorta  à  ne  point  abanilonner  son  gieuses    devaient  avoir  cinq    tuniques,  sa- 

troiipeau,   et   lui   témoigna   le   regret  (lu'il  voir    :    trois    pour    le   Iravail    et    deux  fort 

avait  de  ne  l'avoir  pas  connu  plus  l(^t,  parce  amplc'i ,   c'e4-à-dire,  deux    couler     blan- 

qu'il  l'aurait  encore   chargé  de  l'arclievéïlié  clies   qu'eiles    portaient  au  cloître,  à    l'é- 

d'Vork,  aii(|uel  il  avait  pourvu  depuis  peu.  glise,  au   cli.ipitre,  au    réfectoiie  et  au  dor- 

llionsulta  ensuite  saint  lîernard  el  reçut  loir  ;  une    pelsse  de   peaux   d'agneau,   une 

de  lui  des  aiis  touchant  la  conduite  (ju'il  de-  chemise    ou    tunique   de  gros  drap,  et  leur.'» 

vait  tenir  dans   le   gouvernement  de  son  or-  voiles  étaient    aussi    fourrés    de    peaux  d'a- 

dro  :  et,  étant  retourné  en  Angleterre,  il  mit  gneau.  F.,es  sœurs  con^ erses  étaient  habillées 

la  dernière  main  pour  le  rendre  parfait.  Sur  de  noir,  et,  au  lieu  de  coules,  elles  avaient 

le  refus  (jue  les  rcli'^ieux  de  Citeaux  avaient  des  manleaux   aussi    fourrés  de    peaux  d'a- 

fait  de  prendre  1.1  conduite  de  ses  religieuses,  gneau.    Hnfiii    les    frères   lais    avaient  trois 

il  établit  des  chanoines  <à  qui  il  eu  confia  la  tunii]ues   blanches,  un    manteau  de  couleur 

ilirection.  Il  leur  donna  la  règle  de  saint  Au-  tannée,  doublé  de  grosses  peaux,  une  chape 

gustin,  et  aux  religieuses  celle  de  saint  Ile-  aussi  tannée  el  un  capuce.Oii  leur  permet- 

noil.  Il  dressa  ensuite  des  constitutions  pour  tail  encore  pour  le  Iravail   une  pelisse  faite 

le  gouvernement  des  uns  et  des  autres,  el  les'  de  quatre  peaux  de  bélier, 
envoya  au  pape   lùigène  III  pour  y    reIran-         (Juanl  à  leur    m  inièro  de  vivre,  elle  élait 

cher  ou  augmen'crce  qu'il  jugerait , à  propos,  aussi  très-austère  :   ils  ne  mangeaient  point 

Mais  ce  pontife  n'y  trouva  rien  à  redire,  cl  y  de  viamie    et   n'en  donnaient  pas  même   aux 

donna    son   ;ipp'iilialic)ii,  ce  que  ses  succès-  elrangers,  sinon   aux    prélats,  aax  archidi.i- 

s<'iirs  Adrien    IV  et   Alexandre  III  confirmé-  cres  et  au\  malades  ;  et  si  ces  personnes  eu 

relit  dans  la  suite.  voulaient,  ils  lesde\aicnt  f.iire  appièler  par 

Il  semble  q  ue  dans  l'établissement  (l(>  son  leurs    ilonicstiques   el  non   pas   parles  reli- 

nnlre  il  ait   voulu  imiter  saint  ^orlle^l,  dont  gieux.  Les  réfectoires  des  chanoines    cl   des 

les  monastères    étaient   communs    pour   les  frères  convers   étaient  disposés  >le  telle  ma - 

hommes    et    les    lillos,    séparés     néau'iioins  nicre,   qu'il     y    avait  des   ienélres    ou    loiirs 

d'habiialinn.lLir  ceux  de  saint  (iilbcrt  étaient  qui  repomlaieiit  à  ri)^'il)ilation  des  s<eurs,  par 

aussi  doubles,  el,  de  même  que  tians  loidre  oà  elles  leur  p.iss.iienl  à  manger.  L'vs  convers 

de  l'rcmonlré,  ses   reiigieuses  ne   pouvaient  gardaient   niicvact  sileiue  pendant  le   ira 

parler  à  la  grille  qu'accompagnées  ('Il  ded.ins  vail,    coninie    tailleurs,    tisserands,   cord.in- 

pai  deux  aiii  eniH's,  et  au    dehors  par  deux  niers,  peaussiers  :  les    firgerons   pouvaient 

rclii;icuii.  Les   uns  cl  les  autres  ii'vsijicul  tiC  i>arlui'.  Ils    dctaicut    lous   faire    piioleïsiuu 


400 


CIL 


CON 


«<0 


dans  lecliapilru  des  religieuses.  Il  ne  leur 
éldil  pas  permis  d'avoir  iiueiin  livre.  Ils 
ne  devaient  savoir  que  le  Pnler,  lu  Cieilo, 
le  Miserere  mei,  Deus ,  el  quelques  aulrcs 
prières  ;  el  ils  disaient  cerlaiu  nombre  do 
Pater  et  d'Ave  ,  pi)ur  matines  ,  laudes  el  les 
.lulres  heures,  qu'ils  récitaienl  dans  un  ora- 
toire parliculicr.  La  même  chose  élail  obser- 
vée à  l'égard  des  sœurs  converses. 

Saint  Gilbert  ne  prit  pas  d'abord  l'h.ibil 
de  son  ordre  ;  mais,  appréhendant  que  cela 
ne  tirai  à  conséquence  dans  la  suite  pour 
ceux  qui  en  auraient  la  conduite,  il  !<■  |irit  ; 
mais  il  ne  voulut  plus  commander  el  se  sou- 
mit entièrement  à  l'obéissante  sous  la  con- 
duite de  Uoijer,  aussi  de  ?impringham,  entre 
les  mains  duquel  il  se  démit  de  la  supério- 
rité, après  avoir  reçu  l'habit  de  son  ordre  à 
liulington. 

La  sainteté  de  sa  vie  et  la  pureté  de  ses 
mœurs  ne  purent  pas  le  mcllre  à  couvert  de 
la  calomnie,  dont  on  lâcha  de  le  noircir  et 
son  insiitut.  I^a  priniière  persécution  qu'il 
souffrit  fut  à  l'occasion  de  saint  Thomas  de 
Cantorbéry.  On  l'iiccusa  faussement  d'avoir 
envojéde  l'argoiit  à  ce  sa  ni,  qui  en  passant 
par  les  couvents  de  cet  ordre,  lorsqu'il  sor- 
tit il'Angleterre  pour  passer  en  France,  y  fut 
reçu  avec  beaucoup  de  charité.  Comme  on 
connaissait  Gilbert  pour  un  homme  d'une 
grande  vertu,  les  juges  devant  lesquels  il  fut 
cité  voulurent  qu'il  alTirmât  par  serment  si 
ce  q-j'on  lui  imputait  était  véritable  ;  mais  il 
ne  le  voulut  jamais  fjire,  quoiqu'on  le  mena- 
çât de  renvoyer  ses  relii;ieux  et  ses  religieu- 
srs  hors  de  leurs  monastères,  et  de  détruire 
son  ordre,  el  que  lui-même  en  souffrit  consi- 
dérablement pendant  un  assez  long  temps,  jus- 
qu'à ce  que  le  roi  Henri  11  eûl  ordonné  (lu'il 
retournât  avec  ses  religieux  dans  leurs  mo- 
nastères. Pour  lors,  il  avoua  aux  juges,  sans 
prélor  serment,  que  ce  qu'on  lui  avait  im- 
puté était  faux,  et  qu'il  n'avait  jamais  envoyé 
d'argent  à  saint  Thomas. 

La  seconde  persécution  lui  fut  d'autant 
plus  sensible,  qu'elle  lui  fut  susciice  par  les 
frères  convers,  qui  avaient  à  leur  têle  un 
pauvre  tisserand  dcmand.mt  l'aumône,  qu'il 
avait  admis  par  charilé  dans  son  ordre,  aussi 
bien  que  quel(iues  autres  misérables  à  qui  il 
avait  fait  apprendre  des  métiers.  Ces  frères 
convcr.4, qu'il  avait  établis  en  plusieurs  lieux 
pour  raduiinislralion  du  bien  de  ses  monas- 
tères, non-seulement  s'éleièrenl  contre  lui 
et  voulurent  le  contraindre  par  force  de  les 
décharger  d'une  partie  de  l'observance  de 
leur  règle,  comme  trop  sévère  ,  mais  ils  le 
diffamèrent  encore  auprès  du  pape  Alexan- 
dre 111  par  des  calomnies  atroces,  auxquel- 
les il  ;ijoula  foi  trop  l'acileoiei»!.  11  décréta 
contre  Glbcrl  el  ses  chanoines  ;  mais  le  roi 
Henri  11  et  les  évêques  de  son  royaume  ayant 
écrit  à  ce  pontife  pour  lui  faire  connaître 
l'innocence  du  saint  fonilaieiir,  il  reconnut 
la  venté,  écrivit  à  Gfliiert  en  lui  donnant 
beaucoup  de  louantes,  cl  ordonna  que  ses 
constiluliuus  ne   seraient  point  changées  eu 


aucune  manière,  si  ce  n'était  de  l'avis  de  lu 
plus  grande  et  de  la  plus  saine  partie  de  tous 
les  religieux  de  l'ordre,  auquel  il  accorda 
beaucoup  de  grâces  el  de  privilèges. 

lînfin  ce  saint  homme,  accabléde  vieillesse, 
tomba  malade  dans  un  de  ses  monastères  qui 
était  dans  l'île  de  Kadencia.  Il  y  reçut  ses  sa- 
crements ;  mais  ses  religieux  le  firent  trans- 
porter à  Simpringham,  où  il  mourut  le  six  fé- 
vrier de  l'an  1 189,  âgé  de  cent  six  ans,  ayant 
vu  sept  cents  religieux  dans  treize  couven's 
de  son  ordre,  dont  il  y  en  avait  neuf  qui 
étaient  doubles  de  religieux  et  religieuses,  et 
quatre  seulement  de  religieux  ;  cl  il  y  avait 
près  de  douze  cents  religieuses.  Il  s'est  fait 
beaucoup  de  miracles  à  son  tombeau,  qui 
obligèrent  le  pape  Innocent  III,  après  plu- 
sieurs informations, de  le  canoniser.  Lorsque 
les  monastères  furent  ruinés  au  temps  que 
la  religion  catholique  fut  bannie  de  l'Angle- 
terre, il  y  avait  vingt-un  nionastèrcs  de  cet 
ordre  dans  ce  royaume.  Simpringham  eu 
était  le  chef ,  on  y  tenait  les  chapitres  géné- 
raux, auxquels  deux  religieuses,  supérieu- 
res do  chaque  maison,  l'une  des  filles  du 
chteur,  el  l'aulre  des  converses,  devaient  as- 
sister; mais  les  frères  convers  n'y  avaient 
aucune  voix.  M.  Allemau,  dans  son  Hisloire 
monastique  d'Irlande,  niarquc  encore  une 
maison  de  cet  ordre  à  Baltimore,  dans  la  iJio- 
viuce  de  Munster,  au  comté  de  Weslhméath  ; 
mais  il  se  trompe  lorsqu'il  dit  que  cet  ordre 
dépendait  de  celui  de  Promonlré.  Dodwortli 
et  Dugdallc,  dans  l'Histoire  monastique 
d'Angleterre,  ont  représenté  un  chanoine  el 
une  sœur  converse  de  cet  ordre  dans  leur 
habillement,  el  tels  que  nous  les  donnons  ici, 
auxquels  nous  avons  ajouté  une  religieuse  du 
chœur,  selon  leur  habillement  prescrit  par 
les  constitulion^  (1). 

V^oî/.  Roger.  Dodworlh  elGuillel.  Dugdalle, 
]tIonasticum  Anglicanum ,  tom.  II.  Nicol. 
Harspsfeld,  IJist.  Angl.  stcuL  xii,  cap.  18. 
Holland.,  Act.  SS.,  4  Feb.  Bailiel,  Vies  d<.i 
5. S'.,  4  /ie'yr/cr.  Tamb.,  De  Jur.ahb.,  loin.  Il, 
disp.  24,  quœst.  5,  niiin.  3'i-.  Ilermant,  llisl. 
des  Ord.  relig.,  tom.  Il,  ctp.  3o  ;  el  le  P.  Bo- 
nanni,  Catalog.  omn.  Ord.  relig.,  part,  i  et  ii. 

GLORIEUSE  VIERGE  MARIE  {CnisvâUERs 
DE  la).  Voy.  Fbkres  joyeux. 

GONZAGUE  (Ermites  de  Notre-Dame  de). 

Des  Ermites  de  Notre-Dame  de  Gonzaijue  el 
des  Ermites  de  Sainl-J ean-Baptiste  de  la 
Pénitence. 

Morigia.parlantdesErmites  deNotre-Damo' 
de  Gonzague,  dit  que  François  de  Gonza- 
guc,  dernier  marquis  de  Manloue,  allant  un 
jour  se  promener  à  une  maison  de  plaisance 
aux  environs  de  Manloue,  ajipidée  la  Gon- 
zague, son  cheval  se  cjbra  el  le  jeta  par 
terre,  où  il  fut  quelques  temps  tenu  pour 
mort;  mais  qu'un  nommé  .lérôine  Uaigni  de 
Casielgioffro.  s'élanl  prosterné  devant  une 
image  de  la  Vierge  ((ui  se  trouva  en  ce  lieu, 
il  lit  vœu  à  Dieu  (|ue,  s'il   rendait  la  sauté 


(i)  Voy.,  à  la  lin  la  vol.,  11°=  SU,  1)0  el  91. 


4lt 

à  ce  princo  il  (iiiilU-riil  lo  imnulo  pour  se 
CKUsacrcr  à  smi  service,  cl  pri.i  avec  l;iiil  «le 
ferveur  la  sainte  Vierge  diiilcrcéder  pour 
lai  auprès  de  Dieu,  que  ses  prières  furent 
exaucées,  el  le  manjuis  de  Maulouc  se  re- 
leva sans  sentir  aucune  douleur. 

Ce  prince,  ayant  su  le  vœu  que  Jérôinc 
Uaigni  a\aitfair.  il  lui  fit  bàlir  un  monastère 
au  îiiênie  lieu,  où  il  mena  une  vie  si  sainte  et 
si  exemplaire,  que  plusieurs  pcisonncs  se 
joicnirent  en  peu  de  temps  à  lui.  L'evëquc 
de  Ueggio  leur  prescrivit  une  manière  de  vie, 
qu'ils  ohscrvèrenl  csaclcaienl  et  qui  fut  con- 
lirmèe  par  le  |  ape  Alexan  Ire  VI  ;  mais  dans 
la  suite  ils  priicnt  celle  de  saint  Aujinstin. 
Morigia  ne  dit  point  quel  était  leur  liahiilc- 
menl.  Leur  principal  monastère  était  celui 
de  (ionzagup,  oli  demeurait  ordinairement 
leur  général,  et  ils  avaient  cui-orc  cinq  ou 
six  couvents  en  Italie;  mais  l'on  ne  coiuiait 
plus  présentement  ces  ermites. 

l'aolo  Morigi.i.  Jlist.  dell.  origin.  di  luit, 
(jli  liclig.  lib.  I,  cnp.  59. 

Silvcstre  Maurolic  parle  aussi  d'un  ordre 
de  relii.'ieuv  Ermites  de  Saint-Jean-Iîap!islc 
de  la  rénitcnce,  qui  subsistait  de  son  temps 
dans  le  royaume  de  Navarre  ,  cl  dont  le 
principal  couvent  ou  ermitage  était  éloigné 
de  sept  lieues  de  la  ville  de  Pampelune.  Ils 
vivaient  sous  l'obéissance  de  l'évèque  de 
celte  ville  ;  mais  leur  supérieur  ou  prévôt  vint 
àRunnc,  sous  le  pontiOcat  de  GrégoircXIlI, 
dont  il  obtint  la  confirmation  de  son  nrJrc, 
cl  ce  pontife  approuva  aussi  leurs  constilu- 
lions,  leur  permetlaiit  de  faire  des  vécus  so- 
lennels. Ils  avaient  cinq  ermitages,  dans 
chacun  desinels  il  n'y  avaii  pas  plus  de  liuit 
ou  dix  reliirieux.  Le  premier  de  ces  cou- 
vents, qui  était  clief  de  la  congrégation,  s'ap- 
pelait Saint- Clément  le  \  ieux,  le  second, 
S..iut-MiJcaire  de  Monlscrrat,  le  Irnisième, 
Saint  liarilielemy,  le  quatrième,  Sainl-.Mar- 
lin,  elle  cinquième,  Sainl-l'ulgence. 

Ces  ermites  étaient  Irès-auslèies.  Ils  mar- 
chaient  nu-pieds   sans  sandales,    ils  étaient 
velus  de  bure  (  I  )  ,   ils  ne  portaient  point  de 
linge,  ils  couchaient  sur  des  planciies,  ayant 
pour  ebcvel  une  pierre,  el  ils  portaient  jojr 
el  nuit  une  grande  croix  de  bois  sur  la  poi- 
trine. Ils  demeuraicnl  seuls  dans  des  cellu- 
les séparées  les  unes  des  autres,    au  milieu 
d'un  b<is,  el  ils  gunlaient  un  étroit  silence. 
Ils  mangeaient  aussi    seuls,  vivant  de  légu- 
n)es,  ne  buvaient  du  vin  que  rarement,  el  ne 
mangeaient  tie  la  viande  que  dans  les   mala- 
dies, avec  la  permission  de  leur    supérieur. 
Ils  réeitaienl  l'oflice  divin  ru  commuu,  dans 
une  église  qui  était   au  milieu  de  leur  ermi- 
tage, prenaient  la  diseipliuc   trois  fois  la  si- 
niaine,  el  tous  les  jours  co  carême,  pendant 
lequel  lemj.s  ils  jeûnaient  trois    fois    la  se- 
maine au  lain  et  à  l'eau.  H  y  avait  (juelqucs 
jirôtres  p;irmi  eux;  mais  ils  ne  s'adonnaient 
iii  à  la  prédication,  ni  à  la  confession    M.iu- 
rolic  ajoute   (lue   ce  qu'il   dit  de   cet   «idre 
n'esl  que  sur   le  rapport  d'un    certain   frère 
Jcrôukc  ilcuriqucz  du  Qiéiuc  ordre,   qu'il  vil 


DlCTlO.N.N.Vir.E  1)1  S  OHnilKS  ItEI-lGIEUX. 


4IJ 

à  N.'iples  nu  commencement  du  dernier  siè- 
cle, et  ()ui  ne  put  lui  dire  (|ui  avait  été  lo 
fondateur  de  celte  coiigrégalioii,  ni  dans 
(|uel  temps  elle  fut  fondée.  Leur  liabiliemcnt 
consisl.iit  eu  une  robe  d(>  gros  drap  de 
couleur  tannée,  serrée  d'une  ceinliirn  do 
cuir,  avec  un  nianleau  el  un  seaiujlaire  de 
la  même  couleur.  Ils  avaient  aussi  toujours 
sur  la  poitrine  une  graude  croix  de  boiK, 
comme  nous  l'avons  dii. 

Silvestre  Maurolic,  Mur.  Océan,  di  tult. 
gl.  llrlig.,  lib.  III, /j.  200. 

Il  y  a  eu  aussi  en  France  uu  ordro  sous  lo 
titre  d'Lrmitcs  de  Saint-Jean,  coinino  il  p.i- 
raît  par  les  lollrcs  d'un  prieur  général  do 
l'ordre  des  Ivrmiles  de  Saint-Je.in,  par  les- 
(jnelles,  il  s'oblige  de  f.iiredirc  tous  les  jours 
trois  messes  pour  Alphouse,  comte  de  Poi- 
tiers el  de  'roulousc,  la  comtesse  Jc.innu  sa 
femme,  el  pour  le  père  el  la  mère  de  eo 
prince.  Ces  lettres  sont  sans  date;  mai* 
comme  Alphonse,  loinle  de  l'oilicrs  el  do 
Toulouse,  mourut  l'an  1270,  il  y  a  de  l'appa- 
reneo  que  cet  ordre  subsistait  daus  lo  \iii* 
siècle. 

Ah  Trésor  des  Chartres  du  Roi.  TohIousi-^ 
sac.  \,  n.  49. 

GUANDFLUIL.  Voy.  Marmoutiehs. 

GllANDMONT  (Ordre  de). 

§  I.  Des  religieux  de  l'Ordre  de  Grand- 
mont,  nvrc  la  Viede  saint  Etienne  de  Muret, 
leur  fond  ileur. 

Ce  n'est  pas  seulement  dans  le  dernier 
siècle  que  l'on  a  été  en  dispute  pour  savoir 
de  (|nel  insiilul  étail  l'ordre  de  ("irandmont, 
cl  s'il  devait  èire  censé  membre  de  celui  le 
Sainl-Angu^tin  ou  de  Sainl-Henoîl  ;  car,  du 
temps  nién)e  de  saint  Etienne  de  Muret,  fon- 
dateur de  cet  ordre,  on  était  dans  la  mémo 
iiicerlilude;  c'est  pourquoi  on  s'adressi  à  lui 
pour  en  éire  éclairji,  en  lui  demandant  s'il 
était  moine,  chanoine  ou  ermite.  Mais  la 
curiosité  de  ceux  qui  lui  tirent  celte  dem  mde 
n'en  fut  pas  plus  satisfaite,  car  il  leur  ré- 
poiijil  que  non,  et,  comme  on  le  pres-aii  do 
dire  ce  qu'il  était,  puisque  tous  les  religieux 
se  rapportaient  à  ces  trois  espèces,  il  n  piu- 
dil  que  ni  lui  ni  ses  religieux  ne  porl.iieiit 
point  l'habit  de  moines  ni  de  chanoines,  el 
.  qu'ils  ne  s'allribuaient  pas  de  si  saints  noms; 
(jue  les  clianoiiies,  par  leur  inslilution,  oui 
le  pouvoir  de  lier  elded('lierà  rex'iirde  des 
apotr.  s  ;  ()ue  les  vrais  moines  n'ont  soin  que 
d'eux-mêmes  el  ne  s'occupent  que  de  Dieu, 
et  ((ue  les  ermites  doivent  demeurer  dans 
leurs  cellules  et  ne  vaciuer  qu'à  l'oraison  el 
au  silence.  Nonobstant  cette  réponse  de  saint 
Etienne,  les  ermites  de  l'ordre  de  Sainl-Ai- 
gustin  n'oiil  pas  laissé  de  mettre  l'ordre  de 
(irandmonl  au  nombre  des  congrégations  qui 
ont  suivi  la  règle  de  saint  Augustin.  (Jael- 
ques-uns  d'entre  eux,  comme  Cru>énius,  onl 
prétendu  ()u'il  avait  seulement  ruminencu 
sous  celte  règle  l'an  1070.  ()ii'il  av.iil  été  ap- 
prouvé par  lo  i>d\>c  .Vlexandrc  II,  cl  qu'cu- 


(»)  Voy.,  a  la  nu  du  vol.,  n*  1)2. 


413 


CRA 


CHA 


414 


guilc  il  avail  quille  la  rtîgle  de  saint  Augus- 
tin pour  pipndre  rollo  de  saint  Ocnoil;  mais 
comment  cet  ordre,  qui  n'a  commencé 
qu'en  1076,  aurait-il  pu  être  approuvé  par 
le  jiapo  Alexandre  11,  qui  élail  mort  dès 
l'an  1073.  Ainsi,  le  témoignage  de  Crusénius 
n'est  pas  roccvable,  non  plus  que  celui  de 
son  confrère  Ki-ius,  qui,  en  disant  abso- 
lument que  saint  Etienne  prescrivit  à  ses 
disciples  la  règle  de  saint  Aupuslin,  qu'il 
avail  pour  lors  trente  ans,  et  qu'il  était  atil>é 
de  Muret,  se  trompe  considérablement,  prin- 
cipalement dans  le  dernier  article,  puis(iue 
cet  ordre  n'a  eu  pour  supérieurs  que  des 
prieurs  jusqu'au  temps  du  |iape  Jean  XXII, 
(|ui  le  premier  donna  la  qualité  d'abbé  au 
prieur  de  Grandmont. 

Le  cardinal  Jacques  de  Vitri  semble  agré- 
per  cet  oidre  à  celui  de  Cîteaux  plutôt  qu'à 
celui  des  ermites  de  Saint-Augustin,  lorsqu'il 
dit  qu'il  observait  la  règle  et  les  coutumes  de 
cet  ordre;  ce  qui  a  fait  que  Ghrysostome 
lienriquez  a  mis  saint  Elienne  au  nombre 
des  saints.  Mais  saint  Elienne  ayant  institué 
son  ordre  vingt-deux  ans  avant  que  celui  de 
C.îleaux  commençât,  on  ne  iloit  avoir  aucun 
égard  ni  au  témoignage  du  cardinal  de  Vitri, 
ni  à  celui  d'HenrIquez. 

Enfin,  plusieurs  écrivains  de  l'ordre  de 
Saint-Benoît  n'ont  point  fait  difficulté  de  dire 
qi:c  saint  Ktienne  avait  prescrit  la  règle  de 
saint  Itenoit  à  ses  religieux,  entre  les  au- 
tres, Yépez,  qui  dit  qu'il  leur  donna  celle 
règle  avec  des  constitutions  particulières.  Le 
P.  Mabillon  a  été  aussi  de  même  senliment, 
et  dit  que  le  pape  Grégoire  Vil  lui  permit 
d'établir  un  ordre  monastique  suivant  la 
règle  de  saint  Uenoît,  qu'il  avail  déjà  long- 
temps pratiquée  avec  des  moines  de  (ïalabre, 
lorsqu'il  alla  en  Italie.  C'est  ainsi' qu'il  eu 
parle  dans  sa  préface  du  Second  Siècle  des 
saints  de  son  ordre;  et  dans  ses  Annales  du 
luéme  ordre  il  dit  que  celui  de  Grand:i;oul 
n'élait  pas  tout  à  fait  assujelli  à  la  règle  do 
saint  Benoît, non  plusqueccluides  Cbartreux: 
A  tins  or  do  Curlhusunsium  alque  Grandimon- 
tvnsiwn,  quorum  Instilulores  Bruno  et  Ste- 
phiinus  lienedictinœ  rcgulœ  non  oinnino  ad- 
dicli  fuere.  Cependant  la  règle  qui  est  aciuel- 
lemeul  en  pratique  dans  l'ordre  de  Grand- 
mont,  el  qui  fut  écrite  après  la  mort  de  saint 
Elienne,  son  foudaleur,  sur  te  qu'on  lui  avail 
entendu  dire  ou  vu  faire,  est  si  dilïércnte  de 
celle  de  saint  Benoît,  qu'il  n'y  a  aucune  ap- 
parence de  vérité  dans  le  senliment  de  ca 
auteurs. 

Ou  ne  doit  pas  être  surpris  si  les  Augus- 
tins  et  les  Bénédictins  ont  agrégé  à  leurs  or- 
dres celui  de  Grandmont,  puisqu'il  s'est 
trouvé  aussi  des  écrivains  de  cet  or;lre  dont 
les  uns  ont  cru  qu'il  appartenait  aux  Béné- 
dictins, et  les  autres  aux  Augustins.  Entre 
autres  le  P.  Jean  Lévéque,  religieux  Grand- 
tuoutain,  avait  fait  une  apologie  pour  prou- 
ver que  son  ordre  était  sous  la  règle  de  saint 
Augustin  ;  et  les  raisons  qu'il  en  donnait 
étaient  que  saint  Elienne.,  en  fondant  sou 
ordre,  en  avait  eu  un  pour  modèle  (]u'il  aviiil 
vu  en  Calabre,  cl  (fui  élail,  s<;lyu  tel  auteui. 


de  l'ordre  de  Saint-Augusiin;  que  ce  saint 
avait  été  pendant  un  temps  disciple  de  Gau- 
clier,  qui  était,  à  ce  qu'il  prétend,  aussi 
chanoine  régulier;  que  les  Granduiontains 
sont  appelés  clercs  et  non  pas  moines: 
que  depuis  le  pape  Jean  XXII  ils  se  sont 
q uni  fiés  Chanoines  Réguliers,  Conventuels, 
Colléijiaten  el  Stables;  que  dans  l'assemblée 
des  grands  jours  ((ui  se  lint  à  Tours,  l'on 
donna  un  de  leurs  monaslères,  oii  le  relâebe- 
ment  s'él  lit  introduit,  à  des  religieux  réfor- 
més de  l'ordre  de  Saint-Augustin  ;  et  enfin 
que  depuis  Pan  12'i5  jusqu'à  présent,  les 
Granduiontains  se  servent  au  ibœur  de  sur- 
plis et  de  bonnets  carrés,  et  même  que  pen- 
dant un  temps  ils  ont  porté  dis  aumusses. 
Mais,  a|)rès  avoir  examiné  toutes  choses  avec 
plus  de  réllexion,  il  se  rétracte  dans  ses  An- 
nales, en  disant  que  l'ordre  de  Grandmont 
doit  élre  regardé  comme  un  ordre  particulier, 
qui,  ayant  été  autrefois  érémiliquc,  est  de- 
venu cénobiii'iue,  et  est  maintenant  mixte, 
ayant  une  règle  qui  lui  est  particulière. 

Quoi  qu'il  en  soit,  l'ordre  de  Grandmont 
eut  pour  fondateur  saint  Etienne,  que  plu- 
sieurs nomment  de  Muret  à  cause  du  lieu  de 
sa  retraite.  1!  vint  au  monde  l'an  104(5,  dans 
le  château  deTliiers,  ville  de  la  Limagne  en 
Auvergne,  appartenant  à  sa  famille  en  titre 
de  vicomte.  Son  père  se  nommait  aussi 
lïtienite,  et  sa  mère  Candide,  tous  deux  au- 
tant illustres  par  leur  noblesse  que  recom- 
ni:indab!es  par  leur  insigne  piété.  Après  avoir 
été  longtemps  sans  avoir  d'enfants,  ils  OrenI 
des  prières,  des  jeûnes  et  des  aumônes,  pour 
en  obtenir  de  Dieu,  et  promirent  de  lui  con- 
sacrer le  premier  qu'il  leur  donnerail.  Leur 
vteu  fut  exaucé,  car  Candide,  quel(|ue  temps 
ajirès,  accoucha  d'un  fils  auquel  on  donna  le 
nom  de  son  père.  Ses  parents,  le  considcrant 
comme  le  fruit  de  leurs  prières,  prirent  un 
soin  tout  particulier  de  l'élever  dans  la  jiiélé. 
Ce  qui  leur  réussit  d'autant  plus  fatilemeni, 
qu'il  s'y  portait  de  lui-mi'me,  car  il  com- 
mença dès  ses  plus  faibles  anriées  à  s'adon- 
ner à  la  prière  et  à  la  retraite.  Son  père, 
ayant  eu  dévolion  d'aller  visiter  quelques 
r<liques  des  saints  en  Italie,  y  mena  avec 
lui  son  fils,  qui  n'avait  que  douze  ans  ;  mais, 
roinineil  revenait  en  France,  le  jeune  EtieniK! 
étant  louibé  malade  à  Bénévent,  il  fut  obligé 
de  l'y  laisser  sous  la  conduile  de  l'archevê- 
que de  celle  ville,  appelé  Wilon,  qui  élail 
originaire  d'Auvergne.  Ce  prélat  en  eul  brau- 
coup  de  soin,  le  fit  instruire  dans  les  scien- 
ces, lui  avant  donné  pour  cet  elTet  d'ixcel- 
lenls  maîtres,  sans  parler  du  soin  qu'il  vou- 
lait bien  (ucndre  lui-même  de  lui  donner 
quelquefois  des  leçons.  Etienne  fit  de  si 
grands  progrès  dans  la  vertu,  dans  l'in'elli- 
gence  des  saintes  Ecîilures  el  dans  toul  ce 
qui  n  garde  la  vie  spirituelle,  que  ce  saint 
prélat,  qui  s'appli  luail  à  le  former  particu- 
lièrement pour  le  minislèie  de  l'Eglise,  le 
jugeant  dij;ue  de  rerevoir  les  ordres  srierés, 
lui  donna  \<-  sous-diaconat  et  enfin  le  diaco- 
nat, le  faisant  en  môme  temps,  selon  quel- 
ques-uns, son  officiai  et  archidiacre. 

Apiès  id   mort    du   bicnbcurcux  Milou, 


itS 


r.icTioNN.MiiF,  i)i:s  oiinuKS  iiia.icii-L'X. 


l'.tionnr.  iM.iiil  ;'i;;i-  «le  \  in(;l-qiialrp  .ins,  nlla 
à  RoiiK-,  où  il  s'arrrla  (  hcz  un  ranliiial  l'on- 
ilanl  qiialroans.  s'iiislrui^aiU  fori  soi|;ncii- 
SOiiuMiI  lie  la  (Dnikiilc  ilf  divers  rclif;ieti\  el 
du  pouierneiiioiil  de  loiile  riij;lisc.  Mais, 
srnlanl  augmenter  en  lui  ilc  jilus  en  plus  le 
ilé>ir  i|u'il  aval  eu  à  liénévent  de  se  retirer 
tout  à  fail  du  monde,  il  pnl  la  résolulion 
d'iniiicr  certains  moines  de  Calabre  qui  vi- 
vaient dpns  une  Irès-^randc  observance, 
dont  il  avait  ouï  souvent  parler  avec 
prando  esiime  à  rarchev<»que  Milon  ,  cl 
qu'il  avait  fréquentés  lui-même.  Il  s'adressa 
pour  cet  cfTet  au  pape  Grégoire  VII.  qui  le 
connaissait  dans  le  lemps  qu'il  était  aiclii- 
diacre  de  l'Kjilise  romaine,  et  lui  demanda  la 
permission  de  vivre  quelque  part  dans  la 
pénitence,  conformément  aux  coutumes  de 
celte  f'ommunaulé  de  moines  de  Calabre.  Le 
pape  dilTéra  quelque  tetnps  de  lui  accorder 
ce  qu'il  désirait,  se  défiant  de  la  délicatesse 
de  son  tempérament  ;  mais  enfin,  pressé 
par  ses  continuelles  instances,  il  lui  permit 
de  se  joindre  avec  queUiucs  autres  saints 
personnages  qui  auraient  le  même  dessein  de 
vivre  selon  les  observances  de  ces  moines  ca- 
labrais, défendant  à  toutes  personnes  laïques 
ou  ecclésiastiques  de  le  troubler,  lui  et  ses 
compagnons,  dans  le  lieu  qu'il  choisirait  pour 
faire  pénitence,  comme  étant  sous  la  pro- 
tection du  saint-siége:  ce  que  Sa  Sainteté 
lui  accorda  par  une  bulle  qui  fut  donnée,  à 
Itome,  en  présence  de  l'impératrice  Agnès  et 
de  six  cardinaux,  le  1'''^  mai  de  l'année  1073, 
et  la  première  de  son  pontificat. 

I'".lienne,  bien  content  de  ce  que  le  pape  lui 
avait  accordé  sa  demande,  revint  en  France 
it  demeura  quel()uc  temps  à  Tbiers  proche 
de  ses  jiarents,  qui  n'oublièrent  rien  pour 
le  retenir  dans  le  monde.  Mais,  dans  le  temps 
qu'ils  se  n,itt. lient  le  plus  de  réussir  dans 
celle  entreprise,  Etienne  disprirut  et,  so 
laissant  conduire  par  l'Ksprit  de  Dieu,  il  alla 
d'abord  à  Aureil  ouSoviat,  à  quelques  lieues 
de  IJmo;;es,  où  il  demeura  quelque  temps 
sous  la  conduite  de  saint  (jaucher,  qui  y  avait 
bâti  un  monastère,  occupé  présentement  par 
des  chanoines  ré;;uliers,  et  que  l'on  appelle 
Saint-Jean-  d'Aurcille.  Mais  saint  tlauclnT 
ayant  fait  liàlir  aussi  aux  en\  irons  un  autre 
monastère  pour  des  femmes  qui  avaient  été 
touchées  par  ses  instructions,  cl  auxquelles 
il  prescrivit  une  règle  et  une  disci|dine  pour 
mener  une  vie  spirituelle  et  retirée  du  mon- 
de, l'Miennc  appréhendant  (jue  le  voisinage 
de  ce  monastère  ne  lui  fût  nuisible,  qiiitia 
saint  (îaiicbcr  et  se  relira  a  Muret  l'an  H)7li. 
C'était  une  montagne  assez  près  de  Limoges, 
où,  dans  le  milieu  de  quelques  rochers  ijiii 
et, lient  couverts  de  graniK  bois,  il  se  lit  une 
petite  loge  avec  des  branches  d'arbres  entr^  - 
lacées  les  unes  ilans  les  autres.  Ce  fut  là  que 
noires. lint,  âgéd'environ  trenicans, commen- 
ça une  nouvelle  vie  par  un  sacrifice  de  soi- 
même,  en  se  vouant  à  Jcsuv-Christ  d'uiu! 
inaniérn  toute  particulière,  et  en  lui  coiisa- 
ciant  la  pureté  de  son  rorp>  et  de  son  àme  , 
qu'il  lui  ;ivait  gardée  in>  iulalileuieat  |u>- 
({u'alors  :  ce  qu'il  lit  en  jironaul    un  aiiucau 

(Ij  t'o7  ,  i  U  liD  Ju  vol.,  Il»  1)3. 


4t6 

qui  était  la  seule  chose  qu'il  s'était  réscrTée 
de  tout  le  bien  de  son  père,  et  en  prononç.int 
ces  mois  :  Moi  lilienne,  je  renonce  mi  diable 
et  à  toutes  ses  pompes,  et  je  tn'offrc  et  me 
donne  ù  Dieu  le  l'ère,  le  Fils  et  le  Sfant~f''s— 
prit,  seul  Dieu  vrni  et  virant  en  trois  person- 
nes. Puis,  mettant  cet  écrit  sur  sa  tête,  il 
ajouta  :  0  Dieu  tout-puissrmt,  qui  rivez  éter- 
nellement et  régnez  seul  en  trois  ])ersi  nnes,  je 
promets  de  vous  servir  en  crt  ermitage  en  la  foi 
collioliqur  ;  en  signe  de  <iuoi  je  pose  celte  écri- 
ture sur  ma  tête,  et  mets  cet  anneau  à  mon 
doif/i,  afin  qu'à  l'heure  de  7na  mort  cette  pro- 
tnisseme  serv  de  défense  contre  mes  ennemis. 
l'"nsuilc  de  cela  il  s'adressa  à  la  sainte  ^'iergc 
par  ces  p.irolcs  :  Sainte  Marie,  Mère  de  Dieu, 
je.  recommande  à  votre  Fils  et  <]  vuus-mémc  , 
tnon  âme,  mon  corps  et  mes  sens. 

Ce  v(i"u  étant  fait,  il  résolut  de  ne  plus  re- 
tourner au  monde  pour  quelque  néi  essilc 
que  (e  fût  ;  et,  s'enfermant  dan'i  sa  cellule, 
il  y  supportait  également  les  chaleurs  de  l'été 
et  les  rigueurs  de  l'hiver,  n'étant  pas  plus  vè'u 
en  une  saison  qu'en  une  antre,  et  se  servant 
en  tout  teiniis  d'une  cotte  de  m.iilles  pour 
chemise  (1).  Sa  1^"  nourriture  fut  d'h  rbes 
et  de  racines  lel'cs  qu'il  les  trouvait  dans 
son  désert  ;  mais  quelques  bergers  l'ayant 
découvert  au  bout  d'un  temps,  et  s'élant  ac- 
coutumé à  lui  apporter  du  pain,  depuis  co 
temps-là  sa  nourriture  ordinaire  fut  de  jiain 
et  d'eau,  y  joignant  quebiuefois  un  bouillon 
de  farine  très-insipide.  Son  lit  ressemblait 
plutôt  au  sépulcre  d'un  mort  ([u'au  lit  d'un 
homme  vivant,  ne  consistant  ([u'en  deux  ais 
enfoncés  dans  la  terre,  sans  matelas  ni 
paillasse,  ni  même  de  couverture.  Outre  lo 
grand  ollice  de  l'Eglise,  il  récitai!  chaque 
jour  celui  de  la  Vierge  et  celui  des  Morts, 
aussi  bien  que  celui  de  la  Trinité,  à  neuf  le- 
çons ;  et  si,  pour  entretenir  ceux  qui  le  ve- 
naient voir,  il  avait  manqué  à  quelques-uns  de 
ces  offices,  il  le  disait  ensuite  avant  que  de 
manger  :  ce  qui  était  cause  qu'il  passait 
quelquefois  les  journées  entières  sans  man- 
ger, n'y  ayant  rien  qui  le  pût  détourner  d'en- 
tretenir ceux  quivenaientà  lui  pourenlendro 
la  paroi;'  de  Dieu.  Sa  ferveur  ét.iit  si  grande, 
qu'il  priait  toujours  à  genoux  et  la  tête  nin'; 
cl  il  se  prosternait  si  souvent  le  visage  con- 
tre terre,  ((u'il  en  était  de\cnu  tout  livide,  et 
que  les  calus  paraissaient  à  ses  genoux, 
à  ses  coudes,  et  même  à  son  front  el  à 
so  1  nez. 

Il  demeur.i  seul  dans  celte  solitude  pen- 
dant la  première  année,  api  es  laquelle  il  eut 
deux  disciples  :  mais  ils  ne  furent  de  long- 
temps suivis  de  personne  à  cause  de  ses  aus- 
tér.tés,  qui  épouvantaieiil  tout  le  monde. 
Cependant  l'odeur  de  ses  vertus  y  attira  en- 
lin  un  grand  nombre  de  personnes  qui  se 
soumirent  à  sa  conduite,  persuadées  qu'il  les 
iiietlr.iit  dans  le  chemin  assuré  du  salut.  Le 
saint  les  reçut  avec  toute  la  tendresse  et 
toute  1,1  charité  d'un  véritable  père,  m.iis  à 
Condition  (]u'elles  ne  lui  donner.iient  jamais 
le  nom  de  maître  ni  d'o'*/;i',  mais  seulement 
riiuiiilile  liire  de  correcteur.  Il  adoucissail 
toujours  eu  leur   faveur  ses  austciilés,  afin 


m 


CRA 


GRA 


«!8 


«le  rc  les  point  obliijer  à  passor  pnr  un  clio- 
niin  qu'il  ne  friiyaii  que  pour  lui.  11  prenait 
garde  sur  toutes  choses  <Je  ne  leur  point  im- 
poser un  joui^  trop  pesant,  qu'elles  ne  pus- 
sent point  porter.  Il  était  avec  elles  cotnrae 
le  dernier  de  tous,  s'exerçant  aux  offices  les 
plus  vils;  et  lorsqu'elles  étaient  assises  pour 
manger,  il  se  mettait  à  terre,  au  lieu  de 
s'asseoir  avec  elles. et  leur  faisait  une  lecture 
spirituelle  pendant  le  repas. 

Quoique  ce  saint  Tondaieur  voulût  élrc  ca- 
ché aux  hommes,  sa  réputation  ne  laissa  pas 
de  le  faire  connaître  fort  loin;  elle  lui  attira 
la  visite  de  deux  dos  premiers  cardinaux  de 
là  cour  de  Rome,  envoyés  en  France  en  qua- 
lité de  légats,  dont  l'un  était  Grégoire  de  Pa- 
perescis,  qui  fut  depuis  pa[)e  sous  le  nom 
d'Innocent  II,  et  l'autre  Pierre  de  Léon,  qui, 
après  l'élection  de  ce  pontife,  élu  légitime- 
ment, fit  schisme  dans  l'Eglise,  et  se  mit  sur 
la  cliaircde  saint  Pierre,  l'an  1130,  en  prenant 
le  nom  d'Anaclel  II.  Ce  furent  ces  deux  car- 
dinaux qui  lui  demanilèrcnt,  comme  nous 
l'avons  dit  ci-dessus,  s'il  était  moine,  cha- 
noine ou  ermite,  le  pressant  de  leur  dire  ce 
qu'il  était.  Son  humilité,  qui  l'empêchait  de 
s'atlritiuer  aucune  de  ces  qualités,  cédant 
pour  lors  à  l'obéissance  qu'il  devait  à  ces 
princes  ecclésiastiques,  il  leur  fit  la  réponse 
suivante  :«  Un  mouvement  de  la  grâce  nous 
a  l'ail  chercher  dans  ces  déserts  un  asile 
contre  les  pièges  et  les  périls  de  ce  monde  , 
et  la  profession  de  la  pauvreté  et  de  l'abais- 
semcnl  que  nous  avons  embrassée  nous  a  éié 
imiosée  par  le  souverain  pontife  romain  en 
pénitence  de  nos  péchés,  selon  la  prière  que 
nous  lui  en  avons  faite.  Notre  faiblesse  ne 
nous  permit  pas  d'atteindre  à  la  perfection 
de  ces  saints  ermites  qui  passaient  autrefois 
les  semaines  entières  dans  la  contcmplaiion 
sans  manger;  mais,  en  lâchant  de  suivre 
l'exemple  de  nos  frères  qui  servent  Dieu  si 
purement  dans  la  Calabre,  nous  attendons 
la  miséricorilc  de  Jésus-Christ  au  jour  de  son 
dernier  jugement.  Vous  voyez  aussi  que  nous 
n'a«ons  ni  l'habit  des  chanoines  ni  celui  des 
miiiiies.  Nous  n'avons  pas  la  témérité  de  nous 
attribuer  la  puissance  des  chanoines,  qui 
p.'ir  leur  institut  ont  le  pouvoir  de  lier  et  de 
délier,  à  l'exemple  des  apôtres,  ni  la  sainte- 
lé  des  moines,  dont  la  profession  fait  voir 
l'excellence  de  leur  état.  » 

Huit  jours  après  le  dépari  aes  cardinaux  , 
suint  Etienne  connut  par  inspiration  di- 
vine que  sa  fin  élai!  proche  :  c'est  pourquoi  il 
s'app  iqua  tout  entier  à  la  prière  et  à  1  in- 
struction de  ses  disciples,  qui  lui  demandant, 
quelque  temps  avant  qu'il  mourût,  de  quelle 
manière  ils  pourraient  subsister  après  sa 
mort,  vu  qu'ils  n'avaient  aucuns  b.ens  tem- 
porels, il  leur  répondit  :  «  Je  ne  vous  laisse 
<iue  Dieu,  à  qui  toutappartient,etpûur  lequel 
vous  avez  renoncé  à  tout  et  à  vous-mêmes. 
Si  vous  aimez  la  pauvreté  et  vous  attachez 
à  lui  constamment,  il  vous  donnera  par  sa 
providence  tout  ce  qui  vous  sera  expéJicni.» 
Cinq  jours  après  il  se  trouva  niiil  ;  on  le 
porta  à  la  chapelle,  où,  après  avoir  entendu 
u   messe,  il  recul  rextrémc  onction  cl  le 


saint  viatique,  et  mourut  un  vendredi  S  de 
février  de  l'an  ll^'*,  étant  âgé  de  près  de 
quatre-vingts  ans. 

Son  corps  lut  enterré  secrèlcment  dan» 
ré;;lise  de  Murel,  de  peur  que  les  peuples 
n'accourussent  à  son  tombeau  et  ne  trou- 
blassent le  repos  des  religieux  ;  mais  les  mi- 
racles que  Dieu  fil  pour  manifester  la  sain- 
teté de  son  serviteur  annoncèrent  sa  mort 
de  tous  côtés.  On  lui  donna  pour  successeur 
Pierre  de  Limoges,  qui  était  déjà  prêtre 
avant  (jue  d'entrer  dans  l'ordre;  mais  à  peine 
(juatre  mois  fureni-ils  écoulés,  que  les  re- 
ligieux d'Ambazac  (qui,  selon  quelques  au- 
teurs, étaient  des  chanoines  réguliers  de 
l'ordre  de  Saint-Augustin,  contre  le  senti- 
ment de  M.  l'abbé  Châtelain,  qui,  dans  le 
premier  tome  de  son  Martyrologe,  prélend 
que  c'étaient  des  Bénédictins  qui  dépendaient 
de  l'abbaye  de  Saint-Augus  in  de  Limoges, 
et  qui  desservaient  la  prévôté  d  Ambaz.ic) 
inquiétèrent  ceux  de  Muret  sur  la  possession 
de  ce  lieu,  quoiqu'il  y  eût  près  de  cinquante 
ans  qu'ils  y  fussent  établis,  prétendani  sans 
fondement  que  Muret  leur  appartenait,  les 
menaçant  de  les  en  chasser,  s'ils  n'en  sor- 
taient de  bon  gré.  Les  disciples  de  saint 
Etienne,  voulant  mettre  en  prati(|ue  les  ver< 
tus  que  leur  maître  leur  avait  enseignées,  ré- 
solurent d'abandonner  cette  montagne,  et 
cherchèrent  effectivement  un  autre  lieu  où 
ils  pussent  servir  Dieu  en  paix  et  sans  trou- 
ble. Ils  en  visitèrent  beaucoup  ;  mais,  n'eu 
trouvant  pas  de  propre,  ils  jugèrent  (|u'ils 
le  devaient  demander  à  Dieu,  qui  avait  dé- 
signé à  Abraham  celui  où  il  voulait  qu'il  le 
servît.  Le  prieur  fut  chargé  d'offrir  pour  cela 
le  saint  sacrifice  de  la  messe,  et  les  prières 
des  religieux  furent  si  ferventes  et  si  agréa- 
bles à  Dieu,  qu'immédiatement  après  qu'on 
eut  enionné  trois  fois  \'Afjnus  Det,  une  voix 
se  fit  entendre  qui  dit  aussi  par  trois  fois,  A 
Grandmonl.  Plusieurs  ayant  entendu  distin- 
ctement cette  voix,  l'assemblée  se  persuada 
aisément  que  c'était  là  le  lieu  que  le  ciel  leur 
indiquait.  Les  religieux  y  coururent  sans 
perdre  de  temps;  ils  bâtirent  à  peu  de  frais 
une  chapelle  ei  de  petites  cellules,  après  (juoi 
ils  retournèrent  à  Muret,  où  ils  avaient 
laissé  quelques-uns  des  leurs  pour  garder  le 
corps  de  leur  bienheureux  père,  dont  s'éiant 
chargés ,  ils  revinrent  dans  le  désert  du 
Graiidmont,  et  l'enterrèrent  sous  le  marche- 
pied (le  l'autel  de  leur  nouvelle  cliapelle. 
Celle  Iranslalion  du  corps  de  saint  Etienne  et 
la  transmigration  de  cette  sainte  famille  se 
firent  le  25  juin  de  la  môme  année  112'4'. 

Après  la  mort  de  Pierre  de  Limoges,  (|ui 
arriva  l'an  1139,  on  élut  à  sa  place  Pierre 
de  S.iiiil-Christophe  ,  qui  ne  gouverna  ce 
monastère  que  jusqu'en  l'an  1141,  qu'il  mou- 
rut. On  lui  donna  pour  successeur  Etienne 
de  Lisiac,  qui  réduisit  par  écrit  la  règle  de 
l'ordre,  sur  ce  que  l'on  avait  entendu  dire 
ou  vu  faire  au  saint  fondateur.  Jusque-là  on 
n'avail  presque  connu  que  par  conjecture 
les  austérités  extraordinaires  de  la  pénitence 
et  de  la  pauvreté  de  ces  saints  solitaires  et 
de  leur  chef;  m:iis ,  lorsque   l'on  vil  celte 


419 


niCTIONNAlRK  DES  OROnES  RELIGIEUX. 


rt^glc  bcrWc,  on  cessa  de  s'clomicr  pourquoi 
le  nonitiro  ilc  ces  reli^ieuv  péiiiienls  ^-lail  si 
pilit.  Sous  le  pouverneinnil  de  cet  Kliennc 
de  Lisiac.  Dieu  réi)aiuiil  tant  de  béiiedicMons 
sur  cil  ordre,  qu'm  moins  de  Ireule  ans  l'on 
fonda  plus  di-  siiix.inlc  maisons  en  divers 
lieux,  prineipalomenl  dans  l'Aiiuilaine,  qui 
comprenait  le  Limousin  ;  dans  l  Anjou  et  dans 
la  Normandie,  qui  appartenaient  |  our  lors 
à  l'An-ilcterre,  dont  les  rois  firent  de  grands 
Liens  à  cet  ordre,  qui  prit  le  surnom  de 
(iraixlinont,  h  cause  qu'on  soumellail  à  ce 
iiiona>lèrc.  qui  av.iil  titre  de  prieuré,  tous 
»eu\  que  l'on  hfitiss.iil,  auxqmls  on  donnait 
le  nom  de  Cellrs;  de  même  qu'on  donnait 
celui  de  lions- Noriimes  aux  religieux  de  cet 
ordre,  eomme  il  par.iîl  par  les  actes  des  do- 
nations de  ce  temps-là  .  dans  lcsi|Uels  les 
bienfaiteurs  déclarent  qu'ils  donui  ni  à  Dieu, 
à  la  sainte  Vierge,  au  prieur  cl  aux  frères  ou 
Bons-Hommes  de  tîrandmonl. 

Le  premier  monastère  de  cet  ordre,  qui  fut 
liâti  en  France,  fut  celui  de  \  incennes  près 
Paris,  fonde  par  le  roi  Louis  Vil  lan  lllii.  Il 
a  toujours  été  l'une  des  prin.ipales  maisons 
de  l'ordre,  tant  ((u'il  en  a  été  en  possession. 
Jean  XXII  l'engcacn  juieuré.  I.c  corredeur 
éliiil  le  premier  visiteur  de  l'.ibba^e  de 
(JrandmonI,  chef  d'ordre,  et  confirmait  aussi 
l'élection  de  l'ablié,  avec  les  prieurs  de  Bois- 
rayer,  du  Pui-Chévrier  et  DeiVends;  et.  lors- 
que le  roi  Louis  \1  eut  inslilué  l'ordre  de 
Saint-Michel,  il  voulut  que  le  prieur  de  ce 
monastère  de  A  incennes  tùl  chancelier-né  de 
cet  ordre  imliiaire;  ce  qui  fit  qu'il  fut  bienlot 
en  commende.  Le  cardinal  de  Lorraine  fut  le 
piemier  commcndatairc  ;  (îabiicl  le  \'cneur, 
au>si cardinal,  lui  sueeéda,  et  après  lui. Michel 
de  Chiverni,  chaneeli.  r  de  France,  qui  fut 
aussi  le  premier  chancelier  de  l'ordre  du 
Sainl-Espril  et  rn  niéoïc  temps  ehaneelierde 
relui  de  Saint-Michel.  Knfin,  l'an  loSi,  le  roi 
Henri  III  donna  ce  couvent  à  des  relij;ieux 
de  l'ordre  de  Saint-Jer()me,  qui  le  cédèrent 
l'année  suivante  aux  .Mmimes,  qui  en  soiil 
encore  en  possession;  et  le  roi,  pour  dédom- 
m.ijîcr  les  religieux  de  Gramlmont,  leur 
donna  en  échange  le  collé;;e  de  Mi;;nun  à 
Paris,  qui  porte  présentement  le  nom  de  col- 
lège de  liranduiont. 

Dans  les  commenicmenls  de  cet  ordre,  le 
nombre  des  frères  convers  était  plus  grand 
que  celui  des  prêtres  ei  des  clercs,  ce  qui 
causa  sourent  de  la  division  entie  eux.  Les 
convers  poussèrent  même  si  avant  leur  inso- 
lence, qu'ils  reliurenl  en  prison  (iuill.iome 
de  rrc}iiac,  sixième  prieur  de  (irantlmont,  et 
voulurent  le  déposer.  Ce  dilTérend  dura  pi  es 
de  Irois  ans,  cl  ne  fui  termine  i)iie  par  le  pape 
liinuuenl  111.  Son  predéeeseur,  Luciuslll, 
avail  déjà  commis  celle  affaire  aux  soins  de 
rew'que  de  (iharlres  cl  de  l'.ililié  de  Sainl- 
\'iclor  à  l'iiris,  qui  rétablirent  (luillaiimc  de 
Irejnac.  (^e  prieur  nnuirul  l'an  IISS,  et  eut 
pour  su<  ee>seur  (ieranl  llhier,  qui  poursui- 
vit la  canouisalion  de  saint  F.licnne,  fonda- 
teur de  cet  ordre,  l  rbiin  III  en  avait  déjà 
iiistiuitle  (iroces.  à  lu  sollicilalion  du  roi 
d'AiigleUrre  et  de  quelques  seigneurs  fran- 


420 

ç.iis;  mais  ce  fut  Clément  lli  qui  publia  h 
bulle  de  sa  caiKuiisalion,  l'an  1180;  cl  la  cé- 
rémonie s'en  fil  à  (îiandiuonl,la  même  année, 
par  le  cardinal  deSaint-Man-,  légat  du  pape, 
accompagné  de  vingt-huit  prélais  du  royau- 
me. Le  même  pape  confirma,  en  1188,  la  rùi;lc 
de  cet  ordre,  qui  avait  déjà  été  approuvée 
p.ir  ses  prédécesseurs,  AdiienlV  en  1150, 
Alexandre  III  en  117'»,  Lucius  III  en  1182,  et 
Urbain  III  en  118(>.  Céleslin  III  y  fit  qucli{ue 
chaiigcmcnl  en  ll'.il.  aussi  bien  i|uescssiie- 
ccsseurs.  Innocent  lil  en  l:i02,  Ilonorius  III 
en  1-218,  et  (Irégoire  IX  en  12.'li.  Mais  Inno- 
cenl  I\',  en  12'»5,  y  fit  plus  de  changements 
que  les  autres;  car  il  en  retrancha  plusieurs 
chapitres.  Clément  N'  y  fil  encore  quelques 
additions  cl  des  changements  vers  l'an  IM'J, 
aussi  bien  que  Jean  .\XII. 

Nous  avons  dit  ()uc  sous  Guillaume  de 
Treynac  les  frères  convers  avaient  couiuien- 
cé  à  mettre  la  division  dans  l'ordre,  s'i  lanl 
soulevés  contre  les  cleiC';,  cl  que  même  ils 
mirent  en  prison  ce  prieur,  à  cau^e  «lu'il 
prenait  leur  parti.  Casurem,  qui  fui  élu  en 
1210,  souffrit  aussi  de  leur  part  une  .lulre. 
persécution,  parce  qu'il  prenait  en  ore  lu 
p.irli  des  clercs;  mais  il  léduisil  si  bien  le-i 
convers,  qui  exerçiiienl  l'office  de  eorre(  leur 
aussi  bien  que  les  clercs,  qu'il  leur  donna 
l'exclusion  pour  toutes  les  supériorités  des 
maisons  de  l'ordre.  Ce  prieur,  ajjrès  avoir 
gouverné  l'ordre  pendant  douze  ans,  re- 
uonya  à  son  olliee,  el  Ilélic  Arn.iudi  fut  mis 
en  sa  place  en  1228.  Sous  son  gouvernemeui, 
le  pajie  Grégoire  IX  ordonna  que  deux  reli- 
gieux de  l'ordre  des  Chartreux,  el  autant  de 
Celui  deCiteaux,  se  trouveraient  |)endanl  trois 
ans  consécutifs  aux  chapitres  généraux  (jui  se 
tiendraient  à  tirandmunl,  et  qu'ils  fer.iient 
dans  eel  ordre  telle  réforme  qu'ils  ju^er.iient 
à  propos,  sans  que  1  on  pût  appeler  de  leurs 
urJonnances.  Les  religieux  a^anl  dénoncé 
leur  prieur  au  saint-siège  comme  coupable  d,) 
plusieurs  crimes  qu'on  lui  impul.iii,  le  pai^e 
nomma  l'évéque  de  Poitiers,  les  abbes  de 
Savigni  et  un  autre  de  l'ordre  de  Cîteaux,  e| 
les  prieurs  de  Ligetz  et  de  Glandière  de  l'or- 
die  des  Chartreux,  pour  commissaires  apo- 
stoliquea.  Ceux-ci,  ayant  examiné  celte  af- 
laire.  prononcèrent  contre  lui  une  scntenca 
de  déposition,  sous  peine  d'excommunication 
s'il  s'in.;éraii  dans  le  gouvernement  de  l'or- 
dre; mais,  le  jour  qu'on  devait  lui  sij^nilier 
1.1  sentence,  il  fit  enfermer  l'évéque  el  les 
autres  commissaires,  et  alla  à  Rome  liouver 
le  pape,  qui  l'envoya  à  l'abbé  de  Saint-Lau- 
rent cxlra  miiros  pour  élre  absous  de  l'ex- 
communiialion  qu'il  avait  encourue  pour 
être  venu  à  Home  sans  sa  permission  ;  el  , 
comme  il  poursuiv.iil  son  rétablissement,  il 
mourut  dans  la  même  ville  en  12i.'). 

Aptes  sa  déposition.  Jean  de  Laigle  fel 
mis  à  sa  place,  ayant  éié  élu  dans  un  cbajo- 
Ire  général  qui  se  tint  a  \'ineeniies,  dans 
lequel  on  publia  les  statiiis  el  les  règlements 
qui  avaient  ele  laits  par  les  commissaires 
•ipostoliiiues  |)our  la  relorinc  de  l'ordre.  Ce 
prieur  reiion(,a  aussi  à  son  office  pour  tnener 
Une  vie  privée,  n'ayant  {jouverné  l'oidiequo 


%<i} 


cn.v 


GKA 


422 


l.ondant  trois  ans  et  domi.  Iiicrs  de  Merlo, 
quinzième  prieur,  se  démit  aussi  de  celte  su- 
|)ériorilc  en  12G0.  Ce  tut  de  son  temps  que 
lis  religieux  français  voulurent  avoir  un  gé- 
lu-rai   et  transférer  le  chef  d'ordre  au  mo- 
iKislèrc  de  Vinccnncs.  Le  roi  de  France  les 
f  rotégea  d'abord,  mais  il  les  obligea  ensuite 
il'obéir  au  prieur  de  Grnndraont,  après   que 
Iliers  de  Merle  lui  eut  fait  connaître  le  tort 
que  cela  causerait  à  l'ordre,  s'il  était  divisé 
«1  soumis  à  deux  généraux.  Pierre  de  Gaussac 
lut  aussi  un  de  ceux  qui,  pour  mener  une 
vie  plus  tranquille,  se  déniil  de  la  supériorité 
«le  cet  ordre,  à  laquelle  il  avait  été  élu  en 
1282.  Son  gouvernement  ne  fut  pas  paisible, 
car,  deux  ans  après   son  élection,  les    visi- 
teurs de  l'ordre  le  déposèrent  et  firent  élire 
à  sa  place  Bernard  lUssé.  Pierre  de  Gaussac 
eu  appela  au  pape,  qui  nomma  pour  juges 
lie  ictie   affaire   et  réformateurs  de  l'oidre, 
B  rnard  de  Montaigu,  abbé  de  Moissiac;  Gé- 
raiid,  provincial  des  Dominicains  ;  et  Uadul- 
plie,  doyen  de  l'église  de  Poitiers,  qui,  ayant 
lait  attention  à  tout  ce  qui  leur  fut  dit  de  part 
et  d'autre,  prononcèrent  en  faveur  de  Pierre 
<le  Gaussac,  iiui  fut  rctibli   dans  son   office, 
dont  il  se  démit  en  1290.  Gui  de  Fouchôrcs 
fil  aussi  la  inéine  chose  après  avoir  gouverné 
l'ordre  pendant   quinze  ans.  Ce  fut  de  son 
temps  que  le  pape  Cément  V  alla  en  1300  à 
Grandmoni  avec   si'i)t  cardinaux  cl  toute  la 
cour   romaine.  Il  y  demeura    pendant  cinq 
jours,  cl  fit  venir  devant  lui  le  prieur  et  les 
religieux,  auxquels  il  dit  qu'il  y  avait  envi- 
ron vingt  ans  qu'il  avait  appris  les  divisions 
qui  étaient  dans  l'ordre;  qu'il  était  venu  ex- 
près pour  cela  de  Lyon  à  Grandmont,  et  que, 
après  avoir  examiné  leur  règle  si  les  privi- 
lèges des  visiteurs  de  ce  chef  d'ordre,  le  pou- 
voir qu'ils  avaient   après  la  mort  ou  la  dé- 
mission du  prieur  de  nommer  douze  électeurs 
tant  clercs  que  convers,  et  d'elire  tous  les 
ans  avec  le  prieur  neuf  definitcurs  clercs, 
selon  le  privilé  e  qu'ils  avaient  obtenu  d  In- 
nocent IV,  il  révoquait   tout  cela  ,  à  cause 
que  les  visiteurs,  du  temps  du  jirieur  Pierre 
de  Gaussac  (qu'il  avait  connu  dès  l'enfance 
lorsqu'il  était  correcteur  de   la   maison   de 
Deffends,  dans  laquelle  il   avait  clé   élevé) 
l'avaient  déposé  injusUment  en  lui  imputant 
des  crimes  (ioiit  il  était  innocent. 

Guillaume  de  Pré  Slorelle,  après  la  démis- 
sion de  Gui  de  Fouehères,  fut  éiu  dans  le 
chapitre  général  pour  lui  succéder.  Le  même 
Glément  V  accorda,  à  la  prière  de  ce  prieur, 
des  dispenses  à  l'ordre  louchant  l'abslinence 
de  la  viande,  et  cita  le  même  prieur  pour  se 
trouver  au  concile  général  de  Vienne  ;  ma  s, 
étant  mort  en  1312,  Jordan  de  llapistang  lui 
succéda  et  fut  le  dernier  prieur  de  Grand- 
mont.  Son  gouvernement  ne  lut  pas  tran- 
quiLe;  car  en  l.'Jiii  il  y  eut  encore  de  gran- 
des divisions  dans  l'ordre.  La  plupart  des 
religieux,  ne  voulant  plus  reconnaSlre  ce 
prieur,  qu'ils  accus. lient  d'avoir  dissipé  les 
biens  du  monastère,  le  déposèrent  et  mirent 
à  sa  place  Hélie  Ademart  :  ce  qui  causa  un 
srîiisinc;  car  il  y  en  eut  d'autres  qui  obéi- 
rent 'oujours  à  Jordan  de  Uapistung.  Cette 


division  dura  jusqu'en  131G,  que  Jean  XXII, 
ayant  été  mis  sur  la  chaire  de  saint  Pierre, 
et  ayant  pris  connaissance  do  ces  dilTérends, 
réforma  encore  l'ordre,  et  changea,  comme 
nous  avons  dit,  beaucoup  de  choses  à  la  rè- 
gle. De  cent  quarante  celles  ou  environ  qui 
dépendaient  de  Grandmont ,  il  en  érigea 
trente-neuf  en  prieurés  conventuels,  à  cha- 
cun desquels  il  unit  quelques-unes  des  au- 
tres celles,  et  divisa  ces  prieurés  en  neuf 
provinces,  savoir  :  France,  Bourgogne,  Nor- 
mandie, Anjou,  Poitou,  Saintonge,  Gasco- 
gne ,  Provence  et  Auvergne.  Il  permit  aux  re- 
ligieux de  ces  prieurés  d'élire  leurs  prieurs, 
et  les  obligea  d'en  demander  la  confirmation 
à  celui  de  Grandmont.  Il  ajouta  un  quairièmc 
visiteur  aux  trois  qui  avaient  toujours  été 
dans  l'ordre,  et  quant  aux  deux  prieurs  qui 
disputaienl  ensemble  pour  le  gouvernement 
de  l'ordre,  il  les  mit  d'accord  en  ne  recevant 
ni  l'un  ni  l'autre.  Il  érigea  le  monastère  de 
Grandmoni  en  abbaye,  en  1317,  et  nomma 
pour  premier  abbé  Guillaume  Pcllicier,  qni, 
selon  la  coutume,  reçut  le  bâton  pastoral  des 
mains  du  cardinal  d'Oslie  l'an  1318.  et  gou- 
verna l'ordre  jusqu'en  1337.  Pierre  d'Albert 
fut  son  successeur  et  fut  confirmé  par  le 
pape  BeniiîtXII.  Clément  VI  lui  accorda  lo 
droit  de  nommer  au\  quatre  premiers  prieu- 
rés de  l'ordre  qui  viendraient  à  vaquer  lors- 
qu'il aurait  reçu  la  bénédiction  abbatiale;  et 
les  atiliés  de  Grandmoni  ont  joui  jusqu'à 
présent  de  ce  droit.  Guillaume  de  Fumel,  qui 
fut  palriarihe  d'Antioche,  s'étanl  démis  do 
cette  abbaye  entre  les  mains  du  pape  Paul  II 
en  1471,  ce  ponlifela  donna  au  cardinal  de 
Bourbon,  archevêque  de  Lyon,  qui  en  fut  le 
premier  alibé  commendatairc.  Antoine  Alle- 
mand, éïéiiue  de  Cahors,  lui  succéda.  Il  y 
eut  après  lui  quatre  cardinaux  de  suite  qui 
la  possédèrent,  qui  furent  Guillaume  Briçon- 
net,  Sigismond  de  Gonzague,  Charles  de  Ca- 
retlo  cl  Nicolas  de  Fiesque,  après  la  mort 
duquel  on  redonna  celte  abbaye  au  cardinal 
de  Gonzague,  qui  s'en  élail  demis  en  faveur 
du  cardinal  Carello.  Le  dernier  abbé  com- 
mendatairc fut  François  de  Neuville,  qui  ré- 
signa cette  abbaye  à  son  neveu  François  do 
Neuville,  religieux  de  celle  maison,  et  depuis 
ce  lemps-là  les  abbés  ont  toujours  été  régu- 
liers jusqu'à  présent. 

Il  y  avait  plus  de  cent  trente  ans  que  l'on 
n'avait  point  tenu  de  chapitres  généraux 
dans  cet  ordre,  lorsque  dom  Georges  Barny, 
abbé  de  Grandmoni,  et  quarantcdeuxièmo 
général,  en  convoqua  un  dans  c.  ttc  abbaye 
en  1G43,  pour  rétablir  dans  l'ordre  l'obser- 
vance régulière.  A  cet  elîel  on  dressa  des 
statuts  qui  contiennent  douze  chapitres, dont 
le  premier,  qui  regarde  l'office  divin,  or- 
donne que  tous  les  jours  les  prêtres  célébre- 
ront la  suinte  messe,  selon  la  coutume  de 
l'ord  e,  et  que  tous  les  religieux  assisteront 
à  la  messe  conventuelle,  pendant  laquelle 
on  n'en  pourra  point  dire  d'autres,  ni  chan- 
ter aucun  office  canonial;  que  dans  tous  les 
irieurés  conventuels  on  chantera  aussi  tous 
les  jours  une  messe  haute,  pnurvu  qu'il  y 
ait  un  nombre  de  religieux  sufiisant,  et  que 


ilnns  Tabbayc  ilc  riraïKimoiil  on  en  cliantora 
(U'Uf.  que  tous   les  «liiiiatK  lies,  les   fêles  de 
|ireni  ère  i  lasse,  el  celles  de  la  sainte  Vierge, 
csceple  le  jour  de   Nolre-Daine   des  Neig'  s, 
r»in  fera  la  procession  auiour  du  cloilre.  Le 
pure  l.evéïiue,  dans  les  Annales  de  ccl  or- 
dre, imprimées   en   1003,  dil  néanmoins  que 
l'on  fail  lous  les  jours  trois  processions,  la 
première  après  prime  dans  le  cinielièrc,  et, 
où  il  nj  en  a  point,  à  l'entrée  du  cloître;  la 
seconde  après  vêpres,  de  la  même  minièie; 
et  que   la   troisième,  que   l'on    faisait  aussi 
autrefois  dans  le  cimetière  avant  complios, 
se  lait  pié^eiitemcnl  hors  de  l'église.  Il  ajoute 
que,  dans  le  cominencemcnl  de   l'ordre,   les 
religieux   allaient  si    souvent   prier  d.ins  le 
cimctièie,  (ju'on  ne  permellail  à  aucun  ve- 
nant de  dehors  de  parler  à  personne   qu'il 
n'y  eût  été  prier.  Selon  ces   mêmes  statuts, 
tous  les  lundis,  hors  le  temps  de  l'Avent  et 
du  Carême,  l'on  doit  dire   une    messe  pour 
les    relii;ieuv  ilccédés  dans  l'ordre;  l'on  en 
doit  dire  aussi  une  de  la  \  iergc  tous  les  jours, 
dans  l'abliayc  de  Grandmont,  et  une  fuis  la 
semaine  dans  les  prieurés,  pour  la  conscrva- 
ii<in  du  même  ordre,  pourvu  que  ce  ne  soient 
point   des  jours  de  la   première  el  seconde 
classe.  Ils  réciteront  l'oilice  selon  l'usage  de 
l'Kglisc  romaine;   personne  ne  pourra  s'ab- 
senter des   oflices,  t^int  de  jour  (]ue  de  nuit, 
sans    la   permission    du    supérieur  ;   el   les 
clercs,  outre  le  grand  oflice,  réciteroiit  en- 
core lous  les  jours  au  choîur   l'oilice  de  la 
Vierge  et  celui  des  morts,  sous  un  nocturne, 
i-xcepté   les  dimanches  et  les  fêtes  doubles, 
|)endanl  les  octaves  et   pnnilant  la  semaine 
sainte;  mais  pour  lors  ils  seront  obligés  de 
les  réciter  en  leur  paiiiculier.  Les  cimvers, 
[lour  matines,  diront  treize  l'aler,  trois  pour 
ch  icunc  des  autres  heures,  et  cin<i  pour  vê- 
pres, l'ersonne  ne  peut  rien  avoir  en  propre, 
4n   sorte  que   ()uaiid  quelqu'un   par  oliéis- 
sance  sort  d'un   couvent  jiour  alier  demeu- 
rer dans  un  autre,  il   ne  pourra  emporter  ni 
livres,  ni  ses  propres  écrits,  ni  chose  aucune, 
sans  le  consentement  du  supérieur,  qui   est 
m. litre  di;   l'en  priver  s'il  le  veut.  Les  supé- 
rieurs  exerceront  l'hosiiiialile  et  distrilme- 
loni  les  aumônes  selon  ce  qui  aura  clé  pres- 
rrit  par  les  visiteurs.  Il  est  défendu  de  man- 
ger de  la  viande   tous   les   mercredis  et  les 
^amedisd  après  Nnc'l,  jusipi'à  la  ['urificaliou 
de  la  sainte    \'ierne,  quoiqu'iU   se    trouvent 
dansle>  lieux  où  il  e>t  p;'rmis  d'en  manger  : 
ce  qu'ils   doivent  même  observer  dans   les 
voyages,  comme  aussi  depuis  la  fête  de  l'As- 
c.  iision    jusqu'à   la    Pcntecùle.    Ils  jeijnenl 
di'puis  la  fête  de   tous  les  Saints   jusciu'à    la 
Nativité  de    Noire-Seigneur,  depuis  1 1  Sej)- 
tuaL;csime  jusqu'à  l'âques,  el  tons  les  ven- 
dndis  de  1  année   hors    le  temps  pascal.  Us 
Ifûnenl  aussi  le  jour  de  saint  Marc,  les  veil- 
l«  .s  de  la  féli!  du  saint  sacrement,  celles  de 
l.l    saint'-    \icrgc,  excepté  celles   de   la    \  i- 
sit.ition   et  de  Notre-Dame   des   Neiges;  les 
veilles  lies    Aprtties,  excepté  celle  de   s  lint 
Jean  l'Evangeliste;  les  trois  jours  des  Koga- 

(1)  Vuy  ,  a  1j  lui  ilu  vol.,  ii"'  'j!,'J5  cl  Ufi. 


wcTioNNAini:  m:s  oisdkf.s  rklicikl'x. 


42i 

lions,  el  les  jours  ordonnés  par  TTgUse,  et 
depuis  le  premier  dimanche  de  l'Avent  jus- 
qu'à Noël,  les  quatrc-tenips  et  lous  les  ven- 
dredis, quand  il  n'y  a  point  d'office  double. 
Toutes  les  veilles  des  fêtes  de  la  \'ierge  el 
les  autres  jeûnes  de  l'iîglise,  ils  ne  doivent 
manger  que  des  viandes  quadragésimalcs,  au- 
tant que  cela  se  peut.  Le  silence,  selon  ces 
mêmes  constitutions,  doit  éire  observé  exac- 
tement dans  l'église,  le  cloître,  le  dortoir  et 
le  réfectoire. 

Telles  sont  les  principales  observances 
prescrites  par  ces  staïuts,  bien  (lifferenli-s 
de  celles  qui  se  pratiquaicnl  avant  les  miii- 
galions  de  Cette  règle  par  les  souverains 
pontifes  :  car  ils  ne  mangeaient  jamais  de 
viande,  niêmc  dans  les  maladies,  el  ils  jeû- 
naient depuis  la  fête  de  l'ExalIalion  de  la 
s.iinle  croix  jusqu'à  l'àques.  Le  silence  était 
égal  à  celui  des  Chartreux.  Ils  avaient  seu- 
lement une  conférence  une  fois  le  jnur,  el, 
si  quelqu'un  y  avait  parle  d'affaires  du 
monde  ou  de  choses  inutiles,  il  était  sévère- 
ment puni.  Il  y  avait  un  porche  ou  portique 
hors  le  couvent,  proche  l'église,  pour  parler 
aux  séculiers,  qui  n'entraient  jamais  ou  que 
fort  rarement  dans  le  couvent.  L'on  exerçait 
riiospilalité  envers  les  étrangers,  pour  les- 
quels il  y  avait  une  maison  hors  le  couvent. 
Ouanl  à  l'habillement,  il  consistait  en  une 
robe  el  un  scapulaire  auquel  était  attaché 
un  capucc  pointu.  Clément  V  ordonna  que 
les  habits  seraient  noirs.  (Juelqucs  auteurs 
disent  que  dans  ce  temps-là  ils  devaient  être 
de  laine  naliirelleracnl  noire;  elle  1'.  l'Evé- 
quc  dit  qu'il  a  vu  dans  l'abbaye  de  Mache- 
rets  un  lilre  par  lequel  Henri,  comlc  da 
Champagne,  donna  cent  aunes  de  bureau 
pour  haliillcr  les  religieux,  l'réscntement, 
leur  habillemrnl  cons  sle  en  une  robe  de 
serge  noire  avec  un  scapulaire  fort  large  de 
même  étoffe,  auquel  et  attaché  un  capuce 
ou  chaperon  assez  ample.  Ils  ont  un  petit 
collet  de  toile  large  de  diux  doigts  ;  au 
chœur  ils  luettenl  un  surpUs  avec  un  bonnet 
carré  (1). 

11  y  a  aussi  trois  monasièrcs  de  religieu- 
ses de  cet  or<lre,  mais  l'on  ne  sait  point  par 
qui  ils  ont  été  fundés  ni  eu  quel  temps.  Le 
1*.  Lévêque  dit  que  l'an  13'40  il  y  eut  une 
convention  entre  l'évê'iue  de  Limo;:cs  el 
l'abbé  de  (irandmoMl  au  sujet  du  mon.istèrc 
de  I)rouille-la-lMani:he,  par  laquelle  toute 
la  juridiction  sur  ce  muna^tèlC  l'iil  laissée  à 
l'abbé  de  lirandiiionl  ,  <|ui  en  a  toujours 
joui,  aussi  bien  (|ue  sur  le  monastère  de 
Drouilie-la-Noire,  qui  est  un  autre  monas- 
tère de  religieuses  de  cet  ordre.  Krançois  de 
Ni'uville  ,  abbé  de  Grandmont  ,  fonda  le 
prieuré  de  C  istenelle,  qui  est  du  nombre 
des  qu.itre  auxquels  \ci  abbés  de  Ijrand- 
monl  ont  droit  de  nommer,  après  avoir  reçu 
la  bénédiction  abbatiale,  lorsqu'ils  vieniienl 
à  vai|uer.  Les  religieuses  ont  les  lucmes 
observances  que  les  reli;;ieux.  et  sont  aussi 
habillées  di;  noir. 
Juan.  LÉvêqiiu,   Annal.   Ord.   Grandmont. 


425 


CRA 


GRA 


4*2€ 


I 


BolKindns, '^cr.  SS.,  tom.  II  Feftr.  Sainte- 
Miirlhe,  GuUia  Christ.,  tom.  IV.  Henri  de  la 
Marche,  Vie  de  saint  Etienne  de  Muret.  Kail- 
Ipl  el  Giry,  Vies  des  Saints.  Régula  S.  Ste- 
phani  edit.  ann.  1C71,  et  capitul.  General, 
ejusd.  ord.  celebr.  ann.  1G43. 

§  II.  Des  religieux  réformés  de  l'ordre  de 
Grandmont,  appelés  de  /'Klroile  Obser- 
vance, orec  la  vie  du  révérend  Père  Charles 
Frémont,  leur  réformateur. 

L'ordre  de  Grandmont  s'élanl  beaucoup 
relâché  de  son  ancienne  observance, comme 
on  a  vu  dans  le  paragraphe  précédent,  dom 
Charles  FrémonI,  religieux  de  cet  ordre,  fut 
inspiré  de  Dieu   pour  la  rétablir.  Il   naquit 
à  Tours   l'an   1610,  de    parents   distingués 
parmi  les   bourgeois  de  celte   ville,  et    prit 
l'habit  de  cet  ordre  à  l'âge  de  dix-huit  ans. 
11  fit  son  noviciat  avec  une  exactitude  qui 
allait  au  delà  de  ce  qu'on  pouvait  désirer  de 
lui;  et,  étant  sur  le  point  de  faire   profes- 
sion, il  s'y  prépara  par  un  renouvellement  do 
ferveur,  bien  résolu  d'observer,  après  la  pro- 
nonciation de  ses  vœux,  la  règle  primitive, 
dont  l'inobservance  lui  était  tout  à  fait  sen- 
sible. Ce  qu'il  exécuta  en  effet  comme  il  l'a- 
vait résolu  :  car,  à  peine  fut-il  engage  dans 
cet  état  de  péniience,  qu'il  s'étudia  à  en  pra- 
tiquer  secrètement    toutes    les   austérités , 
principalement    rabslincncc  de   la  viande. 
Quelque  soin  qu'il  eûl  de  se  cacher  aux  yeux 
des  hommes,  l'ennemi  du  genre  humain,  ja- 
loux de  sa  sainteté,  fit  en  sorle  qu'on  les 
découvrît  et  que  l'on  mît  des  empêchements 
à  son  zèle;  mais  Frémont  n'en  avança  pas 
moins  dans  le  chemin  de  la  perfection,  par 
sa  parfaite  soumission    aux    ordres   de  ses 
supérieurs  et  par  la   pratique  de  plusieurs 
autres  vertus  et  mcriiiications,  qu'il  substi- 
tua à  la  place  de  cette  inob  ervaiice,  éludant 
ainsi  tous  les  efforts  de  l'ennemi  de  son  sa- 
lut. Tous  les  jours  il  servait  cinq  ou  six  mes- 
ses avec  une  modeslie  angélique;  et,  après 
qu'il  eut  reçu  la  prêtrise,  dom  Georges  liarni, 
qui  fut  élu  général  eu  1G35,  le  fit  prieur  de 
l'abbaye  de  Grandmont.  H  s'acquitta  de  cet 
emploi  au   contentement  de  tous    les  reli- 
gieux; mais,  voyant  qu'il  ne  pouvait  en  ce 
l)oste  entreprendre  la  réforme,  qui  occupait 
son  esprit  nuit  et  jour,  il  demanda  permis- 
sion au  général  de  venir  à  Paris,  sous  pré- 
Icxle  d'y  éludier  en  Ibéologie,  espérant  qu'il 
trouverait  dans  cetie   grande  ville  quelque 
moyen  de  réussir  dans  son  entreprise.  11  ob- 
tint celte    permission,  el   le  général   le   fit 
prieur  du  collégii  de  Grandmont,  où  en  effet 
il  étudia  en  théologie  ,  jusiiu'à  ce  qu'eiitiu, 
se   croyant   suflisainmeiit   versé  d.ms   cette 
science   pour  remplir  son  ministère,  il  de- 
manda au  général  la  permission  de  se  rcti- 
.  rer  en  quelque  maison  de  l'ordre  pour  y  ob- 
;  server  à  la  lettre  la  règle  que  le  pape  Inno- 
cent IV  avait  mitigée,  et  qui    est  regardée 
iiaiis  l'ordre  comme  la  règle  primitive. Ce  gé- 
néral, bien  loin  de  lui  accorder  sa  deiramle, 
s'y  opposa  fortement;  mais  Charles,  qui  n'a- 
vait souhaité  aller  à  Paris  que  dans  l'espé- 
r;ince  d'y  trouver  quelque  protection  qui  lui 

DlCTlO.NXilKE    !1E3    Oaur.iiS    RELL3SEUX.    îl. 


pût  f;iire  surmonter  les  obstacles  qu'il  se 
doutait  bien  qu'il  trouverait  à  re\éculion  de 
son  dessein,  et  principalement  le  refus  de 
son  abbé,  dont  il  était  presque  certain,  s'a- 
dressa au  cardinal  de  Uicheiieu,  qui  lui  fit 
obtenir  ce  qu'il  souhaitait  :  en  sorte  qu'il 
commença  sa  réforme  le  4  août  164-2,  no- 
nobstant l'opposition  de  ce  même  abbé,  qui 
lui  donna  enfin  une  obédience  pour  se  reti- 
rer dans  le  prieuré  d'Epoisse  près  de  Dijon, 
avec  dom  Joseph  Boboul,  religieux  du  même 
ordre,  qui  fut  le  premier  qui  embrassa  la 
réforme.  Cette  maison,  qui  avait  été  fondée 
l'an  1189  par  Odon,  duc  de  Bourgogne,  était 
presque  ruinée;  mais  ces  religieux  y  menè- 
rent une  vie  si  sainte  et  si  pénitente,  que 
leur  réputation  s'étant  étendue  par  toute  la 
Bourgogne,  celte  maison  changea  en  peu  de 
temps  de  face  par  la  libéralité  de  ceux  qui 
étaient  les  témoins  de  leurs  vertus  el  de 
leurs  austérités.!!  serait  dilficile  d'exprimer 
ce  que  ces  religieux  eurent  à  souffrir  de  la 
part  de  ceux  de  l'observance  mitigée,  et  p  ir- 
liculièremenl  le  P.  Charles  FrémonI  ;  mais 
ce  saint  religieux  ne  fit  paraître  qu'une  pa- 
tience et  une  douceur  admirables,  pardon- 
nant de  bon  cœur  les  entreprises  de  quel- 
ques religieux  »nalintentionnéi  coatrc  sa 
personne. 

Mais,  dans  le  temps  que  les  hommes  s'ef- 
forçaient de  le  persécuter  et  de  renverser 
ses  desseins,  Dieu  bénissait  son  travail  :  car 
sa  réforme  fut  augmentée  en  1650  par  une 
nouvelle  maison,  dont  les  fondements  furent 
jetés  le  2i  mars  dans  la  ville  de  Thiers  en 
Auvergne,  où  saint  Etienne,  fondateur  do 
cet  ordre,  avait  pris  naissance.  Celle  maison 
fut  bâlie  par  les  libéralités  des  habilanis,  à 
cause  de  la  dévotion  qu'ils  portaient  à  co 
saint  fondateur,  dont  les  parenls  étaient 
vicomtes  de  ce  lieu.  Le  roi  Louis  XIV,  p;ir 
les  lettres  patentes  qu'il  accorda  pour  cet 
établissement,  permit  à  ces  religieux  réfor- 
més de  recevoir  des  novices  dans  cette  mai- 
son. Celte  même  réforme  fut  introduite  eu 
1668  dans  le  couvent  de  Chavanon,  au  do- 
cèse  de  Clermont  ;  dans  celui  de  Saint-Michel 
de  Grandmont,  au  diocèse  de  Lodève,  en  1679; 
dans  celui  de  Louyes,  au  diocèse  de  Chartres, 
en  1681  ;  dans  celui  de  Vieux-Pont,  au  dio- 
cèse de  Sens,  en  1683,  et  dans  l'abbaye  do 
Macherets,  au  diocèse  de  Troycs,  en  168". 

Ce  fut  dans  la  maison  de  Tbiers,  qui  est  la 
plus  considérable  de  celte  étroite  obser- 
vance, quoiciu'elle  ne  soit  pas  la  plus  riche, 
que  dom  Charles  Fréniuiil  dressa  les  sialuts 
propres  à  celle  réioriiie  et  à  l'observance  de 
la  règle,  (ju'il  voulait  rétablir  dans  sa  pureté. 
Les  points  principaux  et  auxquels  tous  les 
autres  se  réduisent,  sont  l'assiduité  à  l'office 
el  à  l'oraison,  aux(|uels  ou  emploie  plus  de 
huit  heures  par  jour;  l'abblinciict!  delà  viande 
tant  au  dedans  qu'au  dehors  de  la  maison, 
excepté  dans  les  maladies,  selon  la  règle 
modifiée  par  Innocent  IV;  les  jeûnes  de  près 
de  huit  mois  de  l'année,  l'usage  des  viandes 
quadragésimales,  depuis  la  fête  de  tous  les 
saints  jusqu'à  Noél,  et  depuis  la  Sepluigé- 
siiac  jusqu'à  Pâiiuosj  el  !a  solitude,  les  reli- 

li 


427 


DICTIONNAIRE  DES  OUDRES  UELIGIEUX. 


4-28 


giouv  ne  sortant  que  Irès-raremcnt,  cl  jnmais 
pour  voir  leurs  parciUs  cl  leur  rendre  visilc. 

La  fonimuiiaulé  de  la  maison  dcTIiicrs, 
où  le  P.  Frémont  fiiisail  sa  résidence  ordi- 
naire, était  si  bien  réi:lée,  que  toute  la  pro- 
vince, édifiée  de  la  sainteté  de  ces  religieux, 
ne  pouvait  s'enipèiher  île  donner  des  louan- 
tes et  des  bénédictions  A  ce  saint  réforma- 
teur, qui  y  exerça  pendant  trente  ans  l'of- 
liec  de  supérieur,  animant  ses  inférieurs  et 
les  autres  religieux  de  la  réforme,  par  ses 
exemples  et  ses  exhortations,  à  maintenir 
cette  réfiirme.  Enfin,  dans  ses  dernières  an- 
nées, il  était  si  rempli  de  la  pensée  de  sa  der- 
nière fin.  que,  pour  s'y  disposer  plus  parti- 
culièrement, quoique  toute  sa  vie  eût  éié  une 
préparation  presciue  continuelle  à  la  mort, 
on  le  vil  plus  assidu  à  l'oraison  el  à  ses  au- 
tres exercices  de  piété  el  de  mortification.  Ne 
se  eonlentanl  pas  des  instructions  qu'il  avait 
faites  à  ses  religieux,  il  voulut  encore  leur 
en  donner  par  écrit,  en  composant  un  livre 
(le  piété  qu'il  leur  adressa,  dans  lequel  entre 
autres  avis  qti'il  leur  donne  pour  bien  rem- 
plir les  devoirs  de  leur  solitude,  il  les  cx- 
iiorte  à  être  dans  une  continuelle  médi:ation 
des  mystères  de  la  Trinité  cl  de  Jésus-Chrisl 
on  sa  vie  cachée  à  Nazareth  :  mystère  qui  le 
ravissai!,  ei  qu'il  disait  souvent  devoir  èlrc 
lin  objet  particulier  aux  religieux  do  la  ré- 
firrmc  de  tîrandmont,  qui,  par  leur  état  pau- 
vre, caché,  humble,  pénilcnl,  cl  uniquement 
altnelié  à  Dieu,  devaient  représenter  celui 
de  Jésus-Christ  à  Na/arcth,  souhaitant  qu'ils 
y  fussent  sans  cesse  unis.  Enfin  il  inspire 
dans  ce  livre  une  dévotion  singulière  à  la 
s.iinte  famille  de  Jésus,  Marie  el  Joicph,  pour 
laquelle  il  avait  une  si  grande  dévotion  et 
un  amour  si  parfait,  qu'il  en  faisait  les  dé- 
lices de  son  âme  :  ce  qu'il  conserva  jusqu'à 
la  fin  de  sa  vie,  qu'il  termina  dans  la  prière 
eU'oraison.ct  avec  une  parfaite  soumission  à 
la  volonté  de  L'ieu,en  1G89,  étanl  âiié  de  près 
de  79  ans.  Sa  mort  ayant  été  divulguée  dans 
la  ville  de  1  hiers,  il  y  eut  une  si  grande  foule 
(le  peuple  qui  accourut  an  monastère,  que 
l'on  rompait  tout  pour  le  voir  et  pour  en  ap- 
[irocher. 

Cette  réforme  s'est  maintenue  ju^^u'à  pré- 
sent dans  l<  s  maisons  où  elle  fui  introduite 
du  vivant  (lu  réformateur;  mais  depuis  sa 
ii.ori  elle  n'a  fait  aucun  progrès.  Avant  que 
t  Mlles  ces  maisons  fussent  réformées,  elles 
étaient  en  désordre  :  il  n'y  avait  dans  cha- 
cune qu'un  ou  deux  religieux,  qui  y  vi\aieiil 
à  leur  liberté,  sans  aucune  régularité,  et 
sans  télélirer  l'iifiice  divin.  I'ré>entcinent  il 
y  a  au  moins  dans  chacune  de  ces  maisons 
liuil  ou  dix  rcli-'icux,  ri  méinc  dans  quel- 
(]urs-unes  il  y  en  a  jusqu'à  vingt.  Les  reli- 
gieux de  celle  étioite  observance  dépend,  ni 
du  généra',  rer,  i\  eut  de  lui  leurs  obédiences, 
cl  ne  font  point  de  corps  séparé. 

Ils  ont  éti'  longtemps  on  possession  de 
toutes  les  maisons  dont  nous  venons  de  (lar- 
ler,  sans  qu'un  les  inquiétât;  mais  l'abbé  do 
Madierets,  qui  les  avail  appelés  dans  sou 
abbiycen  l(iiS7,  se  repentant  de  les  avor 
fait  venir,  voulut  les  en  chasser,  sous  pré- 


texte qu'ils  y  avaient  été  introduits  s.ins 
lettres  patentes  du  roi,  contre  l'édit  de  S.i 
Majesté,  du  mois  de  juin  lG7i,qui  défend  aux 
réformés  de  s'introduire  dans  des  monastères 
sans  lettres  patentes  ;  mais,  par  un  arrcl  du 
conseil  d'Etat  du  27  juin  17(i0,  le  roi  con- 
firma et  autorisa  cet  établi  sèment ,  peniiet- 
lanl  aux  réformés  d'y  vivre  en  conimunauté 
religieuse  sous  la  juridiction  de  leur  général, 
suivant  leur  institution,  Sa  Majesté  ayant  re- 
connu que  celle  réforme  n'était  on  aucune 
manière  contraire  à  son  édit  de  l'an  11J7I, 
dont  les  motifs  ne  regardent  que  les  monas- 
tères indépendants,  et  qu'un  assujettit  à  un 
nouveau  chef;  cl  (|ue  l'inconvénient  auquel 
clic  avail  voulu  remédier  par  le  même  édit 
regarde  seulement  les  nouvelles  congréga- 
tions exemples,  cl  les  élablissemenis  nou- 
veaux des  maisons  religieuses.  L'abbaye  de 
Macherets  était  autrefois  prieuré,  et  fut  éri- 
gée en  abbaye  par  le  pape  Innocent  X  en 
1650.  Ces  religieux  réformés  ont  pris  l'ancien 
habillement  de  l'ordre,  ijui  consistait  en  une 
robe  de  drap  noir,  avec  un  scapulairc  auquel 
esl  attaché  un  ca]  uce  qui  se  termine  en 
pointe,  aussi  de  couleur  noire,  avec  une 
ceinture  de  cuir. 

Mémoires  manuscrils. 

GRANDMONÏAINS.  Voy.  Gbandmont. 

GIUGNANS  (RÈGLE  des).  Voy.  Césauie 
(Sai.nt-)  ad  calcem. 

GRISES  (SoEUus\ 

Des  relifjietises  hospitalières  du   Tics  Ordre 
de  Sninl-François  dites  les  Sœurs  Grises. 

Peu  après  la  naissance  du  Tiers  Ordre  de 
Saint-François,  l'on  C'nfiaaux  frères  elaiix 
sœurs  qui  en  faisaient  profession  la  conduite 
des  hôpitaux  el  des  maisons  les  plus  cél>'- 
bres,  pour  les  exercices  de  charité  :  ce  qui  a 
été  cause  que  d.ins  la  suite  ou  a  formé  des 
congrci^ations  particulières  d'hospitaliers  et 
d'hospitalières  do  cet  ordre.  Gui  de  Joinville 
ayant  fondé  sur  la  fin  du  xiii*  siècle  l'ordru 
des  HosiiitaLcrs  delà  Charité  de  Nolre-Uame, 
ils  prirent  de  leur  propre  autorité  la  règle 
du  Tiers  Ordre,  qu'ils  ont  suivie  jusque  sou.n 
le  pontifical  de  Clément  VI,  qui  leur  ordonna 
de  la  quitter  pour  prendre  celle  de  saint  Au- 
gus'in  ;  el  ils  conimcncèrenl  pour  lors  A 
faire  des  vœux  solennels.  Sur  la  lin  du  svr 
siècle,  les  Obregons  furent  institués  aussi 
bien  que  les  Hons-Fieux,  qui  comincncèrcnt 
vers  l'an  lOlo,  <  l  qui,  sans  laire  de  vaux 
solennels,  non  plus  que  ces  anciens  hospita- 
liers du  mèine  ordre,  observent  la  Iruisièuie 
règle  de  saint  François  avec  beaucoup  de 
fidélité.  Il  n'en  a  pas  été  de  mémo  des  Hospi- 
talières, qui  sous  dilTérents  noms  sont  répan- 
dues en  grand  nombre  en  (Jiffercnles  pro- 
vinces de  France,  d'/Mlemagne  et  de  Flandre, 
puisque  (lès  leur  institution  elles  ont  fait  des 
vtiMix  solennels,  t'cllcs  qui  n'avaient  point 
de  rentes  cl  vivaient  des  aumônes  qu'elles 
allaient  chercher,  furent  appclcis  les  Sœurs 
de  la  Celle,  et  elles  allaient  ser\  ir  les  malades 
liors  leurs  monastères  ;  le*  autres  furent  ;ip- 
pelécs  les  Saurs  de  ta  Faille,  à  caus.- qu'elles 


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Clîl 


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porl.iioni  sur  leurs  habits,  quanJ  elles  sor- 
laienl,  de  grands  manlcaux  ou  chapes  qui 
avaient  au  haut  une  espèce  de  chaperon, 
dont  elles  se  couvraient  le  visage  pour  n'être 
lioint  vues  aisément,  comme  ou  a  pu  remar- 
«luer  dans  la  figure  que  nous  eu  avons  ci- 
devant  donnée.  Celles  qui  exerç;iic  .t  dans 
leurs  hôpitaux  la  charité  envers  les  maladis 
ou  les  pèlerins,  furent  appelées  simplomcut 
llospilalières;  elles  vivaient  de  leurs  renies 
et  ne  mendiaient  point.  Enfin  il  y  eu  a  eu 
d'autres  qu'on  a  appelées  tes  Sœurs  Grises,  à 
cause  qu'elles  étaient  habillées  de  gris  hlanc. 
Celles-ci  sont  encore  en  grand  nombre,  el  ont 
toujours  retenu  le  nnm  de  Sœurs  Grises, 
quoique  la  plupart  soient  présenienieiil  ha- 
billées de  blanc,  quelques-unes  de  noir,  et 
d'autres  de  bleu  obscur. 

Les  Sœurs  dises  de  Flandre  et  de  France 
avaient  li;ujours  été  sous  la  juridiciion  cl 
l'obéissance  du  provincial  des  Frères-Mi- 
neurs de  a  province  de  France  parisienne; 
mais  depuis  que  la  réforme  des  llècoliets  a 
été  introduite  en  ces  quarliers,  quehiiics- 
unes  de  ces  Sœurs  Grises  se  sont  soumises 
à  leur  obéissance.  L'an  1483,  le  P.  Jean 
Cbrochin,  vuaire  provincial  de  la  province 
de  France  parisienne,  el  le  P.  Jacques  Sloe- 
tl:n,  visiteur  de  ces  hospitalières,  ayanl 
dressé  des  statuts  pour  elles,  les  supérieures 
et  (jnelques  religieuses  députées  des  couvcnis 
de  ï-ainl-()mi  r,  Uunkerque,  Boulogne,  Bour- 
bourg,  l'Ecluse,  Wissebecq,  Vianne,  Nieu- 
port,  Ostende,  Mons,  Douai,  Avesnes,  l*o- 
puringues,  Bergucs  Saiiit-Mnoc,  Beaumont, 
Ardre,  Bray-sur-Somme,  Nivelle,  Amiens, 
Bruges,  Tournai  et  autres,  se  trouvèrent  à 
Wissebecq,  où  tes  statuts  furent  reçus  par 
Ces  leligieuscs.llscontiennent  sept  chapitres, 
dont  le  premier  traite  de  la  réception  des 
sœurs  ;  le  second,  du  service  divin  ;  le  troi- 
sième, de  ce  que  les  sœurs  doivent  faire  étant 
à  la  maison  ;  le  quatrième,  de  ce  qu'elles 
doivent  observer  étant  auprès  des  malades  ; 
le  cinquième,  do  la  manière  qu'elles  se  doi- 
vent comporter  hors  le  couvent;  ic  sixième, 
de  la  correction  des  sœurs  quand  elles  font 
quelques  fautes  ;  et  le  septième,  des  prières  el 
sutlrages  pour  celles  qui  seraient  décédées. 
Elles  doivent  se  lever  à  minuit  pour  dire  les 
inalines  du  petit  office  de  la  sainte  Vierge, 
el  demeurer  ensuite  en  récolleciion  et  à 
l'oraison  jusqu'à  deux  lïpures,  qu'elles  re- 
tournent au  dortoir  pour  reposer  jusqu'à  cin.f 
heuresdu  matin  en  été,  et  à  six  en  hiver, 
qu'elles  disent  primes,  tierce  cl  sexle,  qui 
sont  suivies  de  la  messe  conventuelle,  après 
laquelle  elles  vont  travailler  eu  commun  eu 
gardant  le  silence,  jusqu'à  diner.  Depuis  le 
dîner  jusqu'à  trois  heures,  elles  relourneiil 
au  travail,  et  disent  ensuite  vêpres,  après 
lesquelles  elles  vont  encore  travail  1er  jusqu'au 
souper.  Quand  elles  sont  envoyées  dehors 
pour  le  service  des  malades,  elles  vont  tou- 
jours deux  ensemble  ;  elles  ne  doivent  point 
se  séparer,  mais  aller  directement  où  elles 
sont  envoyées,  et,  afin  d'éviter  la  fainiliarilé 
avec  les  séculiers,  elles  ne  doivent  pas  veil- 
ler [ilus  (le  trois  jours  dans  une  même   mai- 


son. Quand  elles  sont  envoyées  par  la  supé- 
rieure pour  d'autres  alTaires,  elles  ne  doi- 
vent ni  lioiie  ni  manger  hors  le  couvent 
qu'avec  une  permission  expresse.  Toutes  les 
seaiaines  on  tient  le  ehapit  c  au  moins  une 
fois,  et  deux  ou  trois  l'ois  s'il  est  nécessaire, 
pour  rcco. maître  leurs  fautes  devant  la  su- 
périeure. Les  jeûnes  et  abstinences  sont  les 
mêmes  que  ceux  qui  sont  ordonnés  p.ir  la 
règle.  Voiei  la  formule  de  leurs  vœux  :  Je 
N.  voue  et  promets  à  Dieu,  à  la  glorieuse 
vierge  iMarie,  à  saint  François,  à  tous  les 
saints,  cl  à  vous,  ma  révérende  Mère,  d'èlre 
tous  les  jours  eie  ma  vie  obéissante  à  notre 
saint  père  te  pape  et  à  ses  successeurs  canoni- 
quemtnl  élus,  el  vivre  en  obéissince  el-  pau- 
vreté sans  propre  el  en  chasteté,  et  garelcr  la 
troisième  règle  de  saint  François  confirmée 
par  le  pape  Nicolas  JV,  à  lu  discrétion  de 
«tes  supérieurs. 

Elles  tenaient  aufrefois  des  assemldées 
générales  de  toutes  les  sup'Ticures  des  nio- 
naslèrcs  de  leur  cidre,  nia:s  cela  ne  se  pra- 
tique plus  à  présent.  Plusieurs  de  ces  Hos- 
pitalières ont  même  embrassé  la  clôture, 
comme  celles  d'Amiens,  de  Montreuil,  de 
Dourlens,  d;;  Rue,  de  Saint-Qut  nlin,  de  Muii- 
didier.  de  Neufchâlel,  de  Grandvillicrs  ,  de 
Gournai,  de  Bernai,  de  Wons,  el  d'autres  dont 
quelques-unes  n'ont  pas  po;ir  cela  abandon- 
né l'hospitalité,  qu'elles  exercent  chez  elles, 
soit  à  l'égard  des  pèlerins,  soit  à  l'égard  des 
malades;  cl  celles-ci  ont  des  conslilutions 
pariiculières.  11  y  a  aussi  des  Sœurs  de  la 
Celle  qui  ont  pris  la  clôture.  Les  maires  et 
échevius  de  Beauvais,  voyant  que  celles  (]iii 
étaient  établies  dans  leur  \  ille,  où  elles  s'em- 
ployaient au  service  des  malades,  voulaient 
prendre  la  clôture,  s'v  opposèrent  l'an  lti27, 
el  eurent  recours  à  l'autorilé  du  pailcmeiU 
de  Paris  pour  les  en  empêcher;  mais  le  par- 
lement, par  un  arrêt  du  4-  août  1029,  accor- 
da la  demande  des  religieuses,  à  condilion 
qu'elles  abandonneraient  la  maison  qui  leur 
avait  été  donnée  par  la  ville  et  qui  était  au- 
trefois un  béguinage.  Cependant,  ces  reli- 
gieuses ayant  fait  voir  (|u'elles  avaient  ac- 
quis la  plus  grande  pariie  du  lieu  où  elle* 
demeuraient,  elles  lurent  confirmées  dans  la 
possession  de  ce  béguinage,  et  la  réforn;e  fut 
introduile  dans  leur  maison  avec  la  clôture, 
l'an  1630.  L'évêquc  de  Toul,  Henri  de  Thiard 
de  Bissi,  depuis  évéque  de  Meaux  el  cardi- 
nal de  la  sainte  Eglise  romaine,  voulut  obli- 
ger les  Sœurs  Grises  de  Nancy  à  recevoir 
aussi  la  clôture:  ce  prélat  donna  pour  cet 
elîet  une  ordonnance  le  31  octobre  Kiat»; 
mais  ces  religieuses  en  appelèrent  comme 
d'abus  au  parlement  de  Metz,  el  elles  sont 
demeurées  dans  leur  premier  état. 

Quoique  ces  Hospitalières  soient  appelées 
Sœurs  Grises,  à  cause  de  leurs  habits  gris, 
qu'elles  portaient  autrefjis  avec  un  voile 
blanc,  il  y  en  a  néanmoins  plusieurs  qui  sont 
habillées  de  blanc  avec  un  scapulaiie  de 
même  et  un  voile  noir,  principalement  cellfs 
de  Lorraine,  et  il  y  en  a  d'autres  qui  sont  ha- 
billées de  noir,  el  d'autres  de  bleu  obscur. 
Nous  donnons  sculeuieiiî  ici   riiabilleineut 


r.i 


DICTIONNAIRE  PF-S  ORDRES  RF.LIGIEUX. 


432 


<lo  ccllps  lie  Lorraine   et  de  ces    anriennos 
Hospilnlii^resqui  élaiont  liiibilloes  ile(:ris(l). 

I,uc  >V;i(1inj;,  AiDitil.  Minnr.  Facltims  im- 
primén  pour  les  Sœurs  (irises  de  \iincy.  Leurs 
ronsliltttions  tnanuscriles  ;  cl  Louvci,  Anti- 
quil.  de  llenuviiis. 

Dt's  l'ati  I.'ÎOO,  un  sninl  prélre  ayant  fondé 
un  liojiiiiil  dans  la  ville  de  Mons  pour  do 
pauvres  femmes,  il  en  donna  le  soin  à  des 
«éeulièros,  et  l'adminislration  au\  magistrats 
de  la  ville,  qui,  l'an  li7(),  peu  contents  de 
res  stVuliiTcs,  y  tirent  venir  des  rclii;icuscs 
du  Tiers  Ordre  de  Saint-François,  'lu  mo- 
nastère de  liruficlette,  à  trois  lieues  de  cette 
ville,  nlln  que,  comme  elles  ne  pardaienl 
point  de  clôture,  elles  pussent  soii;ner  les 
malades  dans  leurs  propres  maisons.  La  mère 
(Ilairc  Ilamliray,  en  clanl  supérieure  l'an 
1CV8,  fil  son  possible  pour  réformer  ce  mo- 
nastère, où  les  religieuses,  quoique  sous 
l'habit  de  Sainl-François,  ne  laissaient  pas 
d'avoir  un  air  assez  mondain,  comme  on 
peut  voir  dans  la  ligure  que  nous  donnons 
d'une  de  ces  anciennes  religieuses  {-2).  Klle 
voulut  pour  cet  effet  les  obliger  A  la  clôture; 
mais,  les  magistrats  et  les  principaux  bour- 
geois de  la  ville  s'y  étant  opposés,  elle  se 
contenta  d'introduire  peu  à  peu  la  réforme 
par  ses  bons  exemples  et  par  le  relranclie- 
mcnl  des  sorties  fréquentes,  ne  permettant 
à  ses  religieuses  de  sortir  du  monastère  que 
rarement  elpour  des  affaires  urgentes  et  ab- 
solument nécessaires.  Elle  obtint  la  permis- 
sion de  faire  dire  le  grand  office  de  l'Eglise 
selon  l'usage  de  l'Eglise  romaine  et  de  l'or- 
dre de  Saint-Erançiiis,  et,  outre  les  trois 
vœux  ordinaires,  ses  religieuses  en  ajoulè- 
rcnl  un  quatrième,  de  garder  la  règle  du 
Tiers  Ordre  de  Sainl-Francois  réforn)ce  par 
Léon  X.  La  mémo  année,  le  V.  Marchant, 
commissaire  général  de  l'ordre,  leur  permit 
de  porter  un  babil  brun  au  lieu  de  celui 
qu'elles  avaient,  qui  était  gris  blanc;  et  cet 
habit  consiste  en  une  robe,  un  scapulaire  sur 
lequel  il  y  a  l'image  de  la  sainte  ^'ierge,  cl 
«n  manteau  descendant  jusqu'aux  lalons.  11 
leur  permit  aussi  de  porter  le  »oile  noir  en 
ayant  toujours  eu  un  blanc  jusqu'alors, 

Enfin,  l'an  108S),  la  mère  Jésus-Marie  de 
Sainlc-llélrne,  de  l'illustre  famille  de  Hryas, 
étant  supérieure  et  désirant  voir  ses  reli- 
gieuses cloîtrées,  sollicita  son  frère  Jacques 
de  Dryas,pour  lors  archevêque  de  Cambrai, 
d'obtenir  celle  [jcrniission  de-,  magisirats  de 
Mons,  qui  ne  |iurcnt  refuser  à  ce  prélat  une 
demande  si  juste;  et  ces  religieuses  embras- 
sèrent la  clôture  et  prirent  le  nom  de  Sœurs 
Grises  Ueformées.  licite  dic^ne  sui)érieure 
avait  été  chanoinesse  dans  l'illustre  cha|)ilrc 
de  Sainte-Vauiiru  de  la  même  ville,  et  était 
entrée  ensuite  dans  ce  nu)nasière,  où  peu  de 
temps  après  sa  profession  elle  fui  élue  su- 
périeure ;  et,  pendant  \  ingl-neuf  ans  qu'elle 
a  exercé  celte  charge,  elle  a  reçu  quaraiile- 
sepl  filles  à  la  prufes^^'ou,  sans  avoir  jamais 
eu  en  vue  aucun  intérêt  temporel.  Elle  était 
infatigable  aux   offices  divius  cl  en  tout  ce 

(!)  Voy.,  ï  la  Un  du  vol.,  n"'  97  et  98. 


qui  regardait  le  service  de  Dieu  cl  la  disci- 
pline régulière.  Elle  était  douce  aux  autres, 
très-sévère  à  elle-même;  et,  après  avoir  ser- 
vi à  ses  filles  de  modèle  de  charil",  do  p,i- 
tience,  d'humilité  et  de  toutes  les  autres  ver- 
tus chrétiennes,  elle  mourut  l'an  IGO'.t.  \  oici 
les  instructions  qu'elle  laissa  à  ses  filles  en 
mourant,  selon  le  témoignage  du  P.  Fran- 
çois .Mosens,  son  confesseur.  Elle  les  exhor- 
ta d'être  toujours  fidèles  à  Dieu,  d'observer 
inviolablemenl  ce  qu'elles  lui  avaient  pro- 
mis le  jour  de  leur  profession,  et  d'avoir  un 
grand  zèle  jiour  tout  ce  qui  regarde  son  ser- 
vice et  leur  institut.  Elle  leur  lecoinmanda 
la  pauvreté,  qui  a  toujours  été  le  caractère 
particulier  de  celte  maison  drpuis  que  la  ré- 
forme y  a  été  établie,  et  de  ne  pas  se  servir 
de  la  nioiudrc  chose  sans  la  permission  de 
l.i  supérieure.  Elle  leur  recommanda  aussi 
la  charité  et  l'union,  sans  laquelle  Dieu  ne 
pouvait  pas  demeurer  parmi  elles  ni  régner 
dans  leurs  coeurs,  les  avertissant  que  par 
cette  vertu  divin!  elles  seraient  toutes  en 
Dieu  et  pour  Dieu,  et  qu'el'cs  devaient  dissi- 
muler el  supporter  les  unes  cl  les  autres 
leurs  faiblesses.  Elle  les  conjura  de  n'avoir 
jamais  d'ijuires  désirs  ni  d'autre  ambitiou 
(jue  de  plaire  à  Dieu,  et  de  faire  toutes  leurs 
actions  avec  autant  de  perfection  qu'ellrs 
voudraient  les  avoir  faites  à  l'heure  de  la 
uiort.  lùifiii  elle  les  pria  de  ne  jamais  s'oc- 
cuper que  de  Dieu  et  d'elles-mêmes,  sans 
s'arrêter  ni  aux  actions  ni  à  la  conduite  des 
autres.  Tels  furent  les  derniers  seniiinenis 
de  cette  sainte  supérieure,  qui  mourut  àgéo 
de  soixante-cinq  ans. 

Mémoires  envoyés  de  Mons  en  1711. 

CROTTE.  Vot/.  Mo\t-Cassin. 

GUASTALINES.  Voy.  Anuélkjies.  l 

GUILLAUME  (I'hovince   de  Saint-).  Voy.  : 
AiGisri.NS  (Ermites  de  Saint-).  | 

GUILLELMITES  (Moines).  I 

Des  moines  Guillelmites,  avec  la  vie  de  saint 
Guillaume  le  Grand,  ermite  de  Mulavul,  leur 
fondateur. 

De  tous  les  auteurs  qui  ont  écrit  de  l'ordre 
des  (juillclmites  el  de  leur  fondateur,  il  y  rii 
a  tiès-peu  qui  l'aient  fait  conformément  à  la 
vérité,  faute  apparemment  de  s'être  donné  la 
)ieine  de  la  ciiereher  dans  l'Iiistoire,  ou  de 
faire  une  juste  combinaison  des  lieux,  des 
temps  et  des  personnes  qui  faisaient  la  ma- 
tière du  sujet  qu'ils  traitaient.  Mais,  entre 
ces  auieurs,  M.  Hernian,  curé  de  Maltot,  est 
celui  qui  a  le  plus  erré  dans  ce  qu'il  dit  de 
cet  ordre  (dans  son  livre  de  rEtablisscmcnl 
des  ordres  religieux)  tant  au  sujel  du  nom  do 
lilnncs-Manteaux  (([u'il  prétend  leur  avoir 
été  donné  par  rapport  aux  n)anieaux  qu'ils 
portaient  de  l'el  e  couleur  qu'au  sujel  de 
leur  fondateur.  Sa  première  erreur  au  sujel 
du  nom  est  faille  à  détruire,  puisqu'il  n'est 
pas  vrai  (|ue  ces  religieux  aient  jamais  porlô 
(le  manteaux  lianes,  el  qu'il  est  Irès-sùr  qu'il 
n'y  eut  que  ceux  qui  demeuraient  dans   le 

(2)  Yoy.,  à  la  un  du  vol.,  ii"'  90  el  100. 


i55 


GUI 


GUI 


433 


monaslère  de  Paris  qui  perlassent  ce  nom, 
par  rapport  aux  religieux  qui  l'avaient  oc- 
cupé avant  eus,  qui,  étant  servîtes  ou  serfs, 
portaient  des  manteaux  blancs,  et  laisstVent 
le  nom  de  Blancs-Manteaux  au  monastère, 
el  non  pas  à  la  congrégation  qui  vint  s'y 
établir  après  eux,  dont  le  véritable  nom  était 
celui  de  Saint-Guillaume  du  Désert,  comme 
il  est  facile  de  le  voir  par  l'acte  de  la  consé- 
cration de  l'église  des  Billettes  à  Paris,  faite 
l'an  1408  par  un  évéque  de  Nassau,  qui  de- 
meurait pour  lors  à  ce  monastère  de  Saint- 
Guillaume  :  Joannes  miseratione  divina  epi- 
scoptts  Nassoviensis  P.  resideris  in  domo 
rcligiosorum  Stincti  Guillelmi  de  Dcsertis  , 
alins  de  Albis  ManteUis.  La  seconde  erreur 
de  cet  écrivain  n'est  p.is  moins  grande,  lors- 
qu'il dit  que  les  auteurs  ont  confondu  leur 
fondateur  avec  celui  du  Mont-Vierge.  H  ne 
ciie  aucun  de  ces  auteurs  ;  et  il  a  raison  en 
cela,  car  il  aurait  bien  de  la  peine  à  en 
nommer  aucun.  Il  confond  lui-même,  puis- 
qu'il n'est  pas  vrai  que  les  auteurs  aient 
confondu  saint  Guillaume  de  Malaval  avec 
saint  Guillaume,  fondateur  du  Mont-Vierge, 
mais  bien  avec  un  autre  saint  du  même  nom, 
fondateur  du  Val-des-Ecoliers,  comme  le  re- 
marque fort  bien  le  P.  Henschenius  dans  la 
dissertation  qu'il  a  fait  ajouter  à  la  vie  de 
saint  Guillaume  ermite,  qui  se  trouve  dans 
le  second  tome  de  février  des  Actes  des  Saints 
de  Bollandus,  au  10  de  ce  mois. 

Ce  n'csl  pas  seulement  avec  saint  Guil- 
laume fondateur  du  Val-dos-Ecoliors  ,  <|ue 
l'on  a  confondu  saint  Guillaume  fondateur 
des  Guillelmites,  puisque  Kraiitius,  dans  son 
Histoire  de  Saxe,  liv.  v,  dit  qu'il  croit  qu'il 
était  Guillaume  IV,  surnommé  le  Fier  à  bras. 
Quelques-uns  l'ont  pris  pour  Guillaume  VIII, 
duc  de  Guyenne;  quelques  autres  pour  son 
fils  Guillaume  IX,  et  plusieurs  pour  Guil- 
laume le  Débonnaire,  fondateur  de  Cluny  : 
en  sorte  qu'il  n'y  a  presque  aurun  duc  do 
Guyenne,  à  commencer  depuis  Guillaume  II, 
dit  Tête  d'Etoupe,  qui  n'ait  é'é  pris  pour  le 
fondateur  des  Guillelmites.  Enfin,  si  l'on 
veut  croire  les  religieux  de  cet  ordre,  ils 
n'ont  point  eu  d'autre  fondateur  que  saint 
Guillaume  IX,  duc  de  Guyenne,  converti  par 
saint  Bernard  ;  mais  ils  ne  sont  pas  mieux 
instruits  que  les  autres  :  car  ils  n'en  ont 
point  eu  d'autre  que  celui  du  désert  de  Ma- 
laval, surnommé  le  Grand,  comme  il  paraît 
par  cet  acte  de  l'évêque  de  Nassau,  que  nous 
avons  rapporté  ci-dessus. 

Il  est  vrai  qu'il  est  fort  difficile  de  dé- 
brouiller la  vérité  du  grand  nombre  de  fa- 
bles dans  lesquelles  elle  se  trouve  enveli)|>- 
pée  par  la  faute  de  plusieurs  auteurs  qui, 
attribuant  les  actions  de  saint  Guillauuie  1", 
duc  d'Aquitaine,  el  de  saint  (juillauine  IX, 
duc  de  (lUjenne,  à  saint  Guillaume  de  Ma- 
laval, et  appropriant  réciproquement  les  ac- 
tions de  celui-ci  à  ces  deux  saints  ducs,  les 
ont  tellement  confondus,  que  des  trois  ils 
n'eu  ont  fait  qu'un,  aussi  bien  que  l'auteur 
des  leçons  de  l'office  de  saint  (îuillaume,  qui 
se  trouve  dans  le  Bréviaire  des  Ermites  de 
Baiul-AugUïtiu,  qui,  ne  [louvaul  suulTrir  les 


contrariétés  qui  s'y  trouvent,  ont  cru  être 
obligés  de  les  corriger;  usai';,  dans  l'idée 
qu'ils  ont  que  c'est  saint  Guillaume  IX  qui 
est  de  leur  ordre,  ils  ont  corrigé  une  erreur 
par  une  autre  erreur. 

H  faudrait  une  trop  grande  dissertation 
pour  f  ire  voir  ces  erreurs,  aussi  bien  quo 
celle  des  auteurs  qui  ont  écrit  sur  ces  saints. 
Bollandus,  dans  l'endroit  que  j'ai  cité  précé- 
demment, traite  cette  matière  si  amplement, 
que  le  lecteur  y  trouvera  de  quoi  s'y  satis- 
faire. Pour  moi,  il  me  suffit  de  croire  avec 
cet  auteur  que  le  fondateur  des  Guillelmites 
est  différent  de  ces  deux  saints  ducs  :  ce  qui 
n'est  pas  difficile  à  concevoir,  si  on  examine 
attentivement  quelques  traits  de  l'histoire 
qui  sont  particuliers  à  chacun  de  ces  saiils, 
principalement  pour  ce  qui  regarde  leur 
conversion  cl  le  temps  el  le  lieu  de  leur 
mort.  Je  les  rapporte  ici  en  deux  mots,  pour 
la  .«iatisfaclion  de  ceux  qui  no  voudront  pas 
se  donner  la  peine  de  lire  tout  ce  que  dit 
Bollandus  à  ce  sujet. 

Le  premier  do  ces  saints  est  saint  Guil- 
laume I  ^  duc  d'Aquitaine,  contimporain  de 
Cbarlemagne,  qui  mourut  dans  l'abbaye  de 
Gcllonc  eu  Languedoc,  où,  désabusé  des 
grandeurs  de  la  terre,  il  s'était  fait  moinn 
avec  l'agrémen!  de  ce  prince,  qui  crut  devoir 
son  consentement  à  l'amitié  qu'il  avait  tou- 
jours eue  pour  le  duc,  aussi  bien  qu'à  la  re- 
connaissance des  grands  services  qu'il  lui 
avait  rendus  et  à  son  Etat  par  les  victoires 
qu'il  avait  remportées  sur  les  Sarrasins,  dont 
il  avait  délivré  la  France  en  les  oiilîgeant  do 
repasser  les  Pyrénées. 

Le  second  était  Guillaume  IX  ,  duc  de 
Guyenne  et  d'Aquitaine,  (lui,  éiani  convcrii 
par  saint  B<'rnard,  fut  si  repentant  d'avoir 
persécuté  l'Eglise,  et  de  la  vie  scandaleuse 
qu'il  avait  menée  pendant  sa  jeunesse,  que, 
renonçant  à  toutes  choses,  il  entreprit  lo 
voyage  de  Saint-Jacques  on  Galice,  où  il 
mourut  en  1137,  après  avoir  fait  son  testa- 
ment, par  lequel  il  laissait  ses  Etats  à  Louis 
le  Jeune  ,  aNjrs  roi  de  France,  mais  à 
une  condition,  c'est  qu'il  épouserait  sa  lille 
Aliénore. 

Enfin,  le  Iroisiènio  est  celui  qui  se  retira 
dans  la  vallée  de  Malaval,  où  il  eut  pour 
disciple  et  pour  compagnon  Albert, entre  les 
bras  duqut'l  il  mourut  l'an  1157,  après  avoir 
vécu  quatre  ans  dans  ce  désert,  où  il  donna 
le  commencement  à  l'ordre  des  Guillclnn'tes, 
comme  il  est  facile  de  le  voir  par  sa  vie,  que 
je  rapporte  telle  que  nous  l'avons  reçue  d'Al- 
bert, qui,  en  ayant  été  témoin,  doit  nous 
convaincre  de  la  différence  qu'il  y  a  entro 
saint  Guillaume  de  Malaval  et  tous  les  au- 
tres de  ce  nom,  el  que  cet  ordre  n'a  point  eu 
d'autre  fondateur  que  lui. 

Nous  ne  dirons  rien  de  sa  naissance;  lo 
peu  de  connaissance  qu'on  en  a  eu  aussi 
bien  que  de  sa  famille,  des  occupations  do 
sa  jeunesse  et  de  tout  ce  qu'il  a  fait  dans  le 
monde  jusqu'à  sa  conversion,  est  cause  qu'on 
lui  a  attribué  une  partie  des  dérèglements  de 
Guillaume  IX,  duc  do  Guyenne.  On  croit, 
mais  sans  aucuue   certitude,   (jue  ce  saiut 


435                                           niCTIONNAlHE  OES  ORDRES  RELICIF.UX.  4ô6 

était  nn   jrciiiillioinmc    français   qui,   apri-s  f^tcs  ;  (rois  fois  la  srniainc  il  no  prcnail  qiriii» 

avoir  vécu   avec   leaucoup  "île  licence  dans  peu  do  noiirrilurc  el  buvait  un  peu  de  vin, 

la  priilc-ssion  des  armes,  fui  lourlio  de  Dieu  mais  si  Irempc  d'eau,  qu'il  n'y  rcstaii  que  la 

ri  se  c«n>arra  à  son  service  |  ar  le  conseil  couleur  de  vin;  et  les  aulres  jours  il  jeùnail 

de  quel(iuis  solitaires.   Il  cnlrejir  I  quelques  au  pain   et   à   l'iau,  y  ajoutant   qucl(juefois 

pèleriMapes,  soit  à  Saint-Jacques   en  (i.ilice,  des   lierbes  crues.    Il  avait  un  petit  plat  qui 

soil  dans  la   lerrc  sainte  :  ce  qui   est  encore  lui  servait  à  mesurer  son  inanirer,  et  un  pciit 

traité  confusément  par  les  liisinriens  de  sa  vase  de  hois   pour  mesurer  sa   boisson,   et 

vie,  les  uns   \  retendant  que  ce  fut  à  Saint-  qui  Ique  api  élit  ou  quelque  soif  qu'il  eût,  il 

Jacques  qu'il  alla,  et  d'aulrcs  que  ce  fut  le  ne  passait  jamais  ces  mesures  :   encore  en 

voyape  de  Jérusalem  qu'il  entreprit   |iar  les  retrambail-il  le  plus  souvent.  Il  portait  con- 

«inlres  du  (lape  liuu'ène   III,   auquel  il  sa-  linucllenienl  un  cilicc,  el  n'avait  point  d'autre 

drc-sa  élanl  à  Rome,  où  il  alla  d'abord  pour  lit  que  la  terre  nue.   il  fut  doué  sur  la  fin  do 

V  isilcr  les  lombeaux  des  sainis  apôtres.  Ouoi  sa  \  ie  du  don  de  propbélie.  Son  compagnon 

(|u'il  en  soil,  ce  fut  au  retour  de  son  pcleri-  Albert  en  eut  une  preuve  en  sa   personne  : 

nage,  vers   l'an   1153,  qu'il  vint  en  Toscane  car,  le  voyant  près  de  mourir  et  se  plaignant 

pour  y   chercher  quelque   désert   où   il    put  à  lui-rnénic  de  ce  qu'il  le  laissait  seul,  il  lui 

si-r\  ir  Pieu  dans  l.i  solilude,  éloigné  du  coni-  dit  do  se  cons(der,  cl  (ju'avant  qu'il  lui  r.ndît 

tnerce  des  hommes.  1,'ile  de  Lupoca\io  dans  les  derniers  devoirs.  I)icu  lui   enverrait  une 

les  terres  de  Pise  lui  parut   f.ivorablc  à  .'on  personne  pour  remplir  sa  p'ace  et  lui  Icnir 

dessein  ;  il  y  fi\a  sa  demeure,  et  y  commença  compagnie  dans  ccilc  solilude.  ,\lbcrl  avait 

un  goure  de  vie  si  édifiant  et  si  saint,  qu'en  de  la  peine  à  ajouler  foi  ans  paroles  du  saint; 

peu  de  temps  plusieurs  personnes  se  joigui-  mais  il  ne  tarda  guère  à  en  voir  l'accomplis- 

renl  à  lui   pour  vivre  sous  sa  conduile.  Mais  scmonl  :  car,  sortant  de  sa  cellule,  il  vil  ar- 

leiir  ferveur  se  r.ileiilii  peu  de  Icmps  après,  river  un  nommé   l'enaud,  médecin  de  pro- 

l'I  leur  piolé  se  (hangea  en  un  si  grand  dé-  fes>ion,   qui   apprenant  d'.Mbert  l'extrémité 

goût   pour   les   choses  spirituelles,  que,   ne  de  la   maladie  de  saiut  Guillaume,   lui  té- 

voulanl   plus   ccou'er   ses   exhortations    ou  moigna  le  chagrin  qu'il  en  avait,  |)arce  que, 

suivre  ses  avis,  ils  robligèrcnl  par  leur  in-  voulant  renoncer  au   monde,   il   élait   venu 

dévotion    et    leurs    mauvaises    manières    à  dans  le  dessein  de  vivre  sous   sa  conduile. 

«luitter  cette  preniiè.  c  solilude  et  à  les  al  an-  Albert,  craignant  que  celle  circonstance  do 

donner.  la  mort  du  saint  ne  fit  i|ucl(|ue  changement 

Il  se  relira  ?nr  lo  mont  Prune,  où  il  bâtit  dans  son  crcur,  se  jela  à  ses  pieds,  le  priant 

une  petite  celiulc  au  milieu  d'un  bois  fort  de  ne  point  changer  de  dessein;  et,  afin  de 

épais.  La  sainlelé  de  sa  vie  lui  allira  encore  le  mieux  engager  à  persévérer  dans  son  bon 

queliiues   nouveaux    disciples,    qui,   après  désir,  il  lui  dit  qu'il  se  soumettrait  à   lui,  et 

avoir  demeuré  quelque  temps  avec  lui,  ne  se  lui  conseilla  de   se  donner   au   saint  avant 

g<iuvernèrcnt    pas  mieux  que  les  autres  à  qu'il  rendit  l'àmi'.  Guillaume  le  reçut  avec 

son   égard   :    car,   ayant   conçu    de    l'envie  beauctjup  de  joie,  et  lui  dit  de  retourner  chez 

contre  lui,  ils  le  chassèrent  honleusemenl  de  lui  (  our  liiellre  ordre  à  ses  affaires,  el  do  ro- 

ce  lieu,  et  l'outragèrent  de   paroles,  ce  qu'il  venir  au  |;lus  lot;  mais,  pendant  (|uc  Renaud 

souffrit  avec   une  modéraiion  véritablement  y  él.iil  a. lé,  saint   Guillaume  mourut  entre 

chrétienne    et   religieuse.   Il    retourna   dans  les   bras  d'AlbrrI,  le   10  lévrier  lto7,  après 

l'ilc  de  Lupocavio,  où  n'ayant  pas  trouvé  ses  a\oir  reçu    les   sacrements   de  l'Eglise,  (|ue 

premiers  disci[iles  disposés  à  le  recevoir,  il  lui  apporta  un  préire  de  Cliâtillon  qui  avait 

fixa  enfin   sa   demeure  dans  une  vallée  dé-  été  averti  de  sa  maladie, 

série,  et  dont  le  seul  aspect  faisait  horreur  l'.en.iuJ    revint   à    l'i'^lalile     de    Rhodes  , 

aux    liontmes.   l'.llc  s'appelait   a\oTS  l'Etuble  comme  il  avait  promis,  et  aida  ,^   enterrer   le 

ilr  Itliodcs,  et  on   lui  a  donné  dejiuis  le  nom  corps  du  saint  dans  son    pelit  jardin.   .\près 

de  MaldVfil  ou   Malcifil.  Celte   vallée  est  si-  la  mort  de  ce  saint   bomiue,  dont  ils  consor- 

luéc  d.ins  le  terriloire  de  Sienne  au  dioiè^o  vèrenl  reS|)rit  de  pénitence  el  do  morlifiea- 

dt;  tirosselo,  à  une  lieue  et  demie  ou  environ  lion  iju'il  leur  avait  inspiré  liondant  sa  vie, 

•le  dislance  presque   égale,  entre   les   villes  ils  lâclièrciU  de  suivre  ses  maximes  et   ses 

de  Chàtillon,  l'escaire,   de   Ruriano   cl    de  exemples,  et  donnèrent  ainsi  l'origine  à  l'or- 

Scarino.  dre   des  (juillelmiles.    Us  bâtirent   un    petit 

Ce  fut  l'an  ll.'io  qu'il  se  renferma  d.ins  erniilage  avec  une  chapelle  sur  le  tombeau 
celte  solitude,  n'ayant  d'abord  qu'un  trou  de  saint  Guillaume,  el  ils  commencèrent  on 
d:ins  la  (erre  pour  si?  mettre  à  couvert  des  ce  saint  lieu  une  viesi  exemplaire  et  si  sainte, 
injures  do  l'air,  jusqn'.'i  ce  que  le  seigneur  qu'ils  y  attirèrent  plusieurs  personnes,  c|ni 
•le  Ruriann,  .lyant  piiié  de  lui,  lui  fil  faire  ab  indonn.uit  le  monde  venaient  s'y  consa- 
uneccllule.  11  ne  vécut  pend.inl  ijualre  mois  crer  ;'i  Dieu  et  à  la  pénitence.  La  bénédic- 
tine d'herbes  et  de  racines,  n'ajant  point  lion  que  Dieu  versa  sur  celte  congrégation 
«l'autre  compagnie  <iuc  celle  lies  hèles;  mais,  naissanUî  fut  si  grande,  qu'elle  se  Irom  a 
an  commencement  de  r.mnée  ll.'jO,  il  reçut  lépanduepresque par lonle  l'Italie, la  France, 
nn  disciple  nommé  Allerl,  qui  vint  se  reii-  les  l'ays-Iîas  et  l'Allemagne,  dès  le  sièelo 
fermer  avec  lui  cl  qui  écrivit  les  dernières  suivant.  Ils  no  vécurent  (l'abord  que  selon 
<  irconst.inccs  de  »a  vie.doiil  il  fol  le  témoin.  les  instiiuls  de  saint  Guillaume,  qui  étaient 
f'i'  saint  praliqn.iii  des  ausiérkés  surpre-  les  exemples  de  ce  saint  dont  Albert  avait 
iianlcs,  il  jeûnait  tous  les  jours,  même  les  «lé  le  iMèle  dépositaire.  I.cur- jeûnes  ciaiert 


i57 


GUI 


GUI 


làS 


presque  conlinuels,  el  ils  allaient  nu-pieds. 
Mais  le  pape  Grégoire  IX  modéra  leurs 
{»randes  austérilés,  leur  permit  de  se  chaus- 
ser, et  leur  donna  la  règle  de  saint  Benoît. 
Innocent  IV,  l'an  12i8,  leur  accorda  beau- 
coup de  privilèges  par  sa  bulle  adressée  au 
prieur  général  et  aux  autres  prieurs  des  frè- 
res Krn)i(es  de  l'ordre  de  Saint-Guillaume, 
et  il  ordonna  qu'après  le  décès  du  général 
ou  de  ses  successeurs  on  n'en  élût  aucun  que 
par  le  commun  consentement  des  frères, 
conformément  à  la  règle  de  saint  Bcnnît, 
dont  ils  faisaient  profession,  aussi  bien  que 
de  l'institut  de  saint  Guillaume. 

Alexandre  IV,  l'an  1236,  <iyant  fait  l'u- 
iiiou  lie  plusieurs  ermites  de  différents  or- 
dres, dont  la  plupart  suivaient  la  règle  de 
saint  Augustin,  pour  n'en  faire  qu'un  seul 
sous  le  nom  des  Ermites  de  Saint-Augustin, 
les  religieux  Guillelmites  furent  compris 
dans  celte  union;  mais,  ayant  représenté  au 
pape  qu'ils  avaient  toujours  suivi  les  insli- 
tuis  de  !-aint  Guillaume  avec  la  règle  de 
saint  Benoît,  qui  leur  avait  été  donnée  par 
Grégoire  IX,  ce  qui  avait  été  confirmé  p.ir 
Innocent  IV,  ils  prièrent  ce  pontife  de  les 
laisser  toujours  dans  le  même  étal.  Le  pape 
eut  égard  à  leur  demande,  et  leur  permit, 
l'an  i'I'oi),  (ie  vivre  toujours  sous  la  même  rè- 
gle de  saint  Benoît  et  selon  l'institut  de  saint 
Guillaume.  Cela  n'empêcha  pas  que  plusieurs 
couvents  de  l'ordre  des  Guillelmites  ne  se 
soumissent  aux  Augustiiis;  mais  Alexandre 
IV,  sur  les  remoiilrances  des  supérieurs  de 
l'ordre  dos  Guillelmites,  défendit  aux  reli- 
gieux du  même  ordre  de  passer  dans  un  au- 
tre sans  le  consenlenienl  du  chapilre  géné- 
ral. Nonobstant  Ci's  défenses,  les  Augustins 
ne  laissèrent  pas  d'usurper  des  couvents  do 
Guillelmites,  sous  le  même  prétexte  de  l'u- 
nion générale  qui  avait  été  faite  par  l'auto- 
rité de  ce  pontife.  RLiis  Urbain  IV%  par  une 
bulle  de  l'an  1263,  défendit  aux  religieux 
qui  avaient  fait  iirufession  dans  l'ordre  des 
Guillelmiies  de  passer  dans  celui  des  Augu- 
stins s.ins  la  permission  du  saint-sicge. Cette 
dernière  bulle  donna  du  scrupule  à  ((uelques 
Guillelmites  qui  avec  leurs  couvents  entiers 
avaient  abandonné  les  instituts  de  saint  Guil- 
l.iumc  el  la  règle  de  saint  Benoît  pour  em- 
brasser celle  de  saint  Augustin.  Il  y  avait 
entre  les  autres  les  monas'èrcs  de  Semans- 
hausem  et  de  Si  hoiilall  dans  le  diocèse  de 
llatisbonne,  qui  étaient  dans  ce  cus-là. 
Les  religieux  qui  y  étaient  allèrent  pour  ce 
sujet  trouver  l'cvêque  de  cette  ville  pour  le 
consulter  sur  ce  qu'ils  aviiient  à  faire.  Ce 
prélat,  par  ses  lettres  de  la  même  année 
12(33,  leva  leur  scrupule  et  prétendit  qu'ils 
étaient  obligés  île  s'unir  aux  Augustins.  Lo 
général  et  le  prieur  de>  Gui.lelmitcs  s'en 
lilaigniicnt  au  pape  et  de  ce  que  quelques 
autres  monastères  dans  les  diocèses  de  Ma- 
yence,  de  CoiistanLe.,  de  Prague  et  plu- 
sieurs autres  d'Allcma;^ne,  avaient  fait  la 
même  chose.  Ces  contestations  durèrent 
quelques  années,  et  ne  furent  terminées  que 
l'an  1266  par  sentence  du  cardinal  litienue 
de  Hont;rie,  évcque  dePalcstriiic,  t^rotecteur 


des  Guillelmites,  qui,  comme  commissaire 
apostolique  du  pape  Clément  IV,  ordonna 
que  les  monastères  d'Ibiseborne  du  diucfso 
de  Mayence,  de  Fuvisen  au  diocèse  de  Cons- 
tance, et  de  quelques  autres  endroits  qui 
avaient  pris  la  règle  de  saint  Augustin,  re- 
tourneraient à  l'ordre  de  Saini-Guil'aunic, 
et  que  les  religieux  seraient  obligés  de  re- 
prendre les  instituts  de  ce  saint  et  la  règle 
de  saint  Benoît,  avec  l'habit  qu'ils  portaiint 
avant  que  d'avoir  passé  à  celui  des  Augu- 
stins, et  que  les  autres  maisons  (|ui  étaient 
en  contestation,  aussi  bien  que  celles  qui 
étaient  en  Allemagne  el  en  Hongrie,  qui 
s'étaient  unies  aux  Augustins,  leur  reste- 
raient :  ce  qui  fut  confirmé  par  le  pape. 

Les  Guillelmites  obtinrent  du  concile  de 
Bâie  l'an  H351a  confirmation  de  leurs  privi- 
lèges. L'ordre  était  pour  lors  divisé  en  trois 
provinces.  La  première  de  Toscane,  la  se- 
conde d'Allemagne,  et  la  troisième  de  Flan- 
dre et  de  France,  quoiqu'il  n'y  eût  qu'une 
maison  de  cet  ordre  dans  ce  royaume,  toutes 
les  autres  étant  situées  dans  les  Pays-Bas. 
Le  P.  Ilenscheuius  a  donné  le  catalogue  des 
maisons  de  ces  trois  provinces,  et  entre  cel- 
les d'Allemagne  il  ne  s'en  trouve  pas  une 
de  religieuses  Guillelmites.  Cependant  il  y  a 
encore  à  présent  un  monastère  de  ces  reli- 
gieuses à  Montpellier ,  dans  le  Languedoc. 
Ces  religieux  vinrent  s'clablir  au  villaLçe  du 
Monlrouge  près  Paris,  l'an  1236,  dans  le  mo- 
nastère desMachabées,  d'où  ils  furent  trans- 
férés à  Paris  l'an  1298,  le  roi  Philippe  le  Bel 
leur  ayant  donné  le  monastère  des  religieux 
Blancs-Manteaux,  ainsi  appuies  à  cause  de? 
manteaux  blancs  qu'ils  purlaienl,  mais  dont 
le  véritable  nom  était  celui  de  Serviteurs  ou 
Serfs  de  la  sainte  Vierge.  Comme  cet  ordre 
était  un  de  ceux  qui  lurent  abolis  d.ins  lu 
concile  de  Lyon,  le  pape  Boniface  Vl:l  obli- 
gea les  religieux  de  cet  ordre,  on  d'entrer 
dans  celui  des  Guillelmites,  ou  de  leur  cédrr 
le  monastère  qu'ils  avaient  à  Paris. Ces  Guil- 
lelmites y  restèrent  jusque  vers  l'an  1618, 
que  le  prieur  de  ce  monastère  y  introduisit 
les  Bénédictins  de  la  congrégation  de  Saiiil- 
Maur,  sous  prétexte  de  le  rolormcr.  Ceux-ci 
obligèrent  une  partie  des  religieux  Guillelmi- 
tes qui  y  étaient  d'embrasser  leur  ordre,  et 
renvoyèrent  ceux  qui  s'y  opposèrent.  Les 
Guillelmites  plaidèrent  eoutre  les  Bénédic- 
tins pour  rentrer  dans  la  possession  de  cetio 
maison.  Les  recteurs  etsuppois  de  ruiiivei- 
sito  de  Paris  intervinrent  pour  eus  d.ins  la 
cause  contre  les  Bénédictins,  sur  ce  que  les 
Guillelmites  étaient  memlires  de  leur  corps. 
Le  plniJoyer  de  ['université  est  rappoité 
tout  au  longdaiis  le  secoml  tome  de  la  Biblio- 
tlièquc  c.inouique,  ausii  bien  qu'une  longue 
requête  que  le  provincial  des  Guilltluiitis 
présenta  au  mi  a  ce  sujet  :  mais  toutes  ces 
procédures  furent  iiuiiiics.  Le  monastère 
des  Blancs-Manteaux  fut  adjugé  aux  Béné- 
dictins de  la  congrégation  de  Suint-Maur, 
qui  étaient  encore  eu  «luclque  façon  unis  eu 
ce  temps-là  avec  ceux  de  la  congrégation  do 
Saiiit-Vanne.  C'est  pourquoi  M.  Baillct, 
dans  la  vie  de  saint  Guillaume,  au  lo  lévrier. 


459                                            DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  RELIGIEUX.                                           .i\9 

dil  qu'il   fui  côiii-  aux   rollgicus  de    S.iinl-  seul  que  les  Guillelmilcs  ont  oct'upé  à  Paris, 

Vanne;  ceux  des  (liiillelmiles  qui  no  voulu-  ne  fut  bâli  pour  ces  premiers  religieux   que 

reni    point   emtirisser  la    rérirnie    des   15é-  plus  de  120  ;ms  aprùs   la   mort   de   ce  saint, 

iiédiclins   se   relirèrenl    à     Moulrongp,    où  c'est-à-dire   l'an    12o8,   oulre   que  les  reli- 

Ic   dernier  mourut    en    IGSO.    Le   P.IIelier,  pieux  Guillelmites  n'y  sont  entrés  que  l'ao 

dans  son  Histoire  des  Ordres  religieux,  dil  r2!)8. 

que  (It^s  l'an  Kilo  sis  religieux  Ciuillelmites  Cet  ordre  n'a  présentement  qu'environ 
avaient  passé  contrat  le  29  jan»ier  avec  le  douze  maisons  en  Flandre,  ayant  perdu 
pro\in(ial  des  Feuillants  pour  lui  renieitre  tous  les  monastères  qu'il  avait  en  Allemagne 
entre  Us  mains  le  monastère  <'es  Blancs-  et  en  Italie.  L'Elalde  de  Uhocies  ou  Malaval, 
Manteaux,  à  condition  de  leur  payer  une  qui  en  était  le  chef  et  où  résidait  le  général, 
pension,  mais  que  les  aulrcs  religieux  s'y  fui  détruit  dorant  les  guerres  des  Siennois 
oppo-èreni,  et  que  l'an  1018  sept  autres  reli-  cl  des  Florentins.  On  a  rétabli  dans  la  suite 
pieux  Guillelmiles  y  introduisirent  les  René-  ce  monastère,  auquel  on  a  Junné  le  nom  de 
dict  ns.  Chopin  dit  qu'ils  ont  encore  eu  une  Sainl-fiuillnume.  Il  a  été  érigé  en  abbaye  et 
maison  en  France  dans  la  ville  de  Reims:  donné  aux  ermites  de  l'ordre  de  Saint-Augu- 
ninsi  ce  serait  au  plus  deux  maisons  qu'ils  slin,  ci  le  pipe  l'ie  IV  la  donna  eu  com- 
auraienl  eues  dans  ce  royaume,  ce  qui  est  mcnde  l'an  ISGià  ISarlhélemy  Conclii\i  lie  la 
bien  dilTéronl  de  ce  qu'a  avancé  Sylvestre  famille  des  comtes  de  la  Penna.Les  religieux 
Maurolic,  lorsqu'il  a  dit  que  sainlGuilIaiime,  de  ce  monastère,  par  leur  travail  et  leur  in- 
due de  Guyenne,  voyant  que  l'ordre  de  saint  dustrie,  ont  rendu  très-commode  et  très- 
Augustin  était  presque  aboli  en  France,  fil  agréable  cet  affreux  désert  qui  n'inspirait 
en  sorte  par  ses  prédications  que  cet  ordre  auparavant  que  de  la  tristesse.  Les  Guillel- 
fiU  rétabli  dans  ce  royaume,  qu'il  y  fit  plu-  mites  sont  présentement  gouvernés  par  un 
sieurs  établissements,  et  qu'il  fut  le  premier  supérieur  qui  ne  prend  que  le  litre  de  pro- 
qni  par  privilège  des  papes  Anastase  IV^  et  vincial  cl  qui  selit  tous  les  quatre  ans.  Leur 
Adrien  IV  abandonna  la  solitude  pour  se  re-  habillement  est  semblable  à  celui  des  reli- 
lirer  avec  ses  religieux  dans  les  villes,  et  gieux  de  Citeaux,  dont  nous  avons  donné  le 
qu'il  fit  bâtir  un  magnifique  monastère  à  Pa-  dessin  à  l'article  de  ce  nom.  Ils  en  ont  pris 
ris,  qui  fut  le  premier  de  sa  congrégation  et  aussi  le  bréviaire.  Le  couvent  de  Grevem- 
de  la  réforme  bâli  dans  une  ville,  leur  de-  brok  au  pays  de  Juliers  se  soumit  même  en- 
nteure  étant  auparavant  dans  des  ermitages,  fièrement  aux  lois  de  Citeaux  vers  le  milieu 
Mais  cet  auleur  se  trompe  dans  tous  ces  ar-  du  dernier  sièc'e. 

ticics  :  car,  premièrcmeni,  saint  Guill  lume,  Bollaml.,  Acl.  SS-,  tom.  IF,  Fehr.,pag.h^3 

duc  de  Guyenne,  n'a  jamais  été  ni  fondateur  ef  .«cy.  Ang.    .Manriq.,   Annal.    Ord.  Cister., 

ni  réformalcur  d'aucune  religion,  puisqu'il  tom.  I.   Clirysostom.    Henriquez  ,    Fascicitl. 

est  mort  dans  son  voyage   de  Saint-Jacques,  Sunct.  Cistert.,  et  regul.  et  conslitut.  ejusd. 

qu'il    entreprit   aussitôt   qu'il    fut  convcrli,  ord.  Uubouchtil,  Bihliotli.  canonique,  tom.  U. 

c'est-à-dire  en  1136  (ce  qui  fait  voir  une  au-  Silvesl.    .Maurol.,   Mar.   Ocenn.  di  tutt.  (jl. 

Irc  erreur  de  ce  même  auteur,  qui   dit  qu'il  relig.,  piq.  2~1.  iîaillet.  Vies  des  SS.,  10  fe- 

vivait  encore  en  1178).  Secondement,  le  mo-  trier.  Ilerm.in,  îli.'t.  des  Ord.  reliy.;  et  Cbà- 

nastèrc  des  Blancs- Mautcaux  ,   qui    est  le  Main,  Martyrologe  Romain,  tom.  ï,  p.  G02. 

H 

H.VCHE  (CnF.VAî.if:RF:s  nr.  i.v;,  de  l'Écharpi;,  tr;e,'iu'elles  obligèrent  les  infidèles  de  se  re- 

DE  LA  CoRDRLiKnE  ,    PES  Ksci.AVES  DE  LA  tircr.  Le  comte  de  Barcelone,  ayant  été  in- 

Verti' ,  ET  DE  LA  ViuiE-Cnoix.  foruié  de  celle  action  généie-jse,  institua  en 

Outre  les  ordres  mililaires  et  de   chevale-  leur  faveur  un  ordre  de  chevalerie   sous  lo 

rie  dflns    lesquels  plusieurs   darnes  ont  été  nom  des  dames  du  Passetemps,  qu'on  a  aussi 

.'igrégéee,   comme   dans  ceux   de  Malle,  de  appelé  de  la  Hache, à  cause  qu'elles  porlaienl 

Saint-Jacques   de  I'F^ik'l',  de  Calalrava  .   <lc  sur   leurs    habits   une  hache  rouge.    Le   P. 

Sainl-Flicnnc  ,   de  l'Hermine,  du  Camail  et  Moiulo,  dans  son  Traité  des  Ordres  militaires, 

quelques  autres  ;  il  y  a  eu  aussi  des  ordres  dil  qu'elles  portaient  un  flambeau;  mais  l'ab- 

|d(ï   chevalerie   instilués   en  particulier  pour  lié  Giusliniani,  sur  le  témoignage  de  UoJri- 

les  femmes.  Le  ])remier  est  celui  de  la  H.iclie  gue  Mendez  Silvi,  historien   espagn<d,  pré- 

ou  du  Passeiemps,  (jui  fut  institué  à  Toriose  leiul  <]!ie  c'était  une    hache,  et  que  ce  qui  a 

.lar  Uaimond  li-,  rcng'T,  comte  de  Barcelone,  trompé  le  P.  Mendo  e>t   le  mol  espagnol  ha- 

vers  l'an  1  l'»n.  L("  Maures,  ayant  iicrdu  celte  c//(i,qiii  signitie  également   un  flambeau  et 

place,  la  vciuliirei.t  reprendre  quelque  temps  une  hache  (I). 

aiirès,  rt  lallaquèrenl  si  vivemen!,  que,  la  Les  femmes  de  la  ville  de  Placenlia  en  Es- 
plupart  des  chréiiins  qui  la  défen'laienta\anl  pa;ne  ne  firent  |)as  paraître  moins  de  cou- 
été  tués  ,  elle  était  sur  le  point  de  retourner  rage  que  celle  de  Toriose  ,  lorsque  les  An- 
sous  la  doininaiiitn  des  barbares,  lorsque  les  glais,  qui  l'an  l.'J.'iS  avaient  donné  secours  i 
femnies  ,  prenant  les  armes,  combattirent  si  Jean  I  ',  roi  de  Portugal,  qui  était  en  guerro 
vigoureusement  pour  la  défense  de  leur  pa-  avec  Jean  I  ',  roi  deCuslilIc,  assiégèrcul  P!a- 

(I)  V.y.,i  la  fin  du  vul.,  Il"  lOU 


441 


IIAC 


MAC 


44>i 


conlia.  Ces  généreuses  femmes,  ayant  pris 
les  niniis  pour  la  tiéfense  de  leur  pajs,  mi- 
rent en  fiiile  les  Anglais  dans  une  sortie 
ju'elies  ûrenl,  et,  les  ayant  oliligés  de  lever 
le  siège,  elles  procurèrent  la  paix  à  leur  pa- 
trie. Le  roi  de  Castille,  pour  les  récomncnser 
de  leur  valeur,  leur  permit  de  porter  sur 
leurs  habits  une  écharpe  d'or  (1),  et  leur  ac- 
corda les  mêmes  privilèges  dont  jouissaient 
les  chevaliers  de  la  Bande,  qui  avaient  été 
institués  parle  roi  Alphonse,  son  aïeul. 

Anne  de  Bretagne,  reine  de  France,  épou- 
se de  Charles  VIII,  qui  commença  à  régner 
l'an  1483,  puis  de  Louis  XII,  qui  lui  snccéila 
l'an  l't98,  institua  une  espèce  d'ordre  en 
riionneur  des  cordes  dont  Noire-Seigneur  fut 
lié  en  sa  Passion  ;  et,  pour  la  dévoîion  qu'elle 
avait  à  saint  François  d'Assise,  dont  elle  por- 
tait le  cordon,  elle  donna  à  cet  ordre  le  nom 
de  la  Cordelière,  et  pour  marque  ou  devise  un 
collier  fait  d'une  corde  à  plusieurs  nœuds  en- 
trelacés de  lacs  d'amour  (2),  dont  elle  honora 
les  principales  dames  do  sa  cour  pour  le  met- 
tre autour  de  leurs  armes.  M.  Herman,  dans 
son  Histoire  des  Ordres  militaires,  dit  que 
celte  princesse  institua  cet  ordre  après  la 
mort  de  Chai  les  Vlil,  cl  qu'elle  prit  ces  pa- 
roles pour  devise  :  J'ai  le  corps  délié,  faisant 
allusion  au  mot  cordelière,  parce  que  la  mort 
de  son  mari  l'avait  affranchie  des  lois  et  du 
joug  du  mariage;  mais  cette  cordelière,  com- 
posée de  plusieurs  nœuds,  et  qui  devait  en- 
iourcr  les  armes,  signifiait  plutôt  un  enga- 
gement qu'un  affranchissement  de  lois;  et  il 
y  a  bien  de  l'apparene  que  cet  auteur  s  est 
trompé,  et  qu'il  a  pris  Anne  de  Br.  tagne, 
reine  de  France,  pour  Louise  de  la  Tour- 
d'Auvergne,  veuve  de  Claude  de  Montagu, 
de  la  maison  des  anciens  ducs  de  Bourgogne, 
qui,  comme  dit  le  P.  Ménestrier,  prii  pour 
devise,  après  la  mort  de  son  mari,  une  corde- 
lière à  nœuds  déliés  et  rompus  avec  ces  mois  : 
J'ai  le  corps  délié.  Anne  de  Bretagne  avait 
plulôt  voulu  imiter  le  duc  de  Bretagne  Fran- 
çois II.  qui,  pour  la  dévotion  qu'il  avait  à 
saint  François  d'Assise,  mit  un  semblable 
cordon  autour  de  ses  arm:  s  vers  l'an  li-iO,  cl 
fit  sa  devise  de  deux  cordelières  à  nœuds  ser- 
rés comme  les  cordoi:s  qu'on  nomme  de  saint 
François.  Aujourd'hui  toutes  les  veuves  de 
qualité  mettent  autour  do  leurs  armes  une 
cordelière  semblable  à  celle  d'Anne  de  Bre- 
tagne. 

LiinpératriccE!éonoredeGonzague,vouve 
fie  Ferdinand  111,  institua  deux  ordres  à 
Vienne  en  Autriche,  l'un  sous  le  nom  des  Es- 
claves de  la  veitu,  et  l'autre  de  la  Vraie- 
Croix.  Le  premier  fui  établi  l'an  16C2.  Il  ne 
devait  être  composéquede  trente  damesd'unc 
nohiesse  distinguée,  outre  les  princesses, 
dont  le  nombre  n'était  point  limité.  L'impé- 
ratrice leur  donna  pour  marque  de  leur  or- 
dre uue  médaille  d'or  représentant  un  soleil 
d.ins  une  couronne  de  laurier,  avec  ci  tte  lé- 
gende tout  autour  :  Sola  ubique  Iriumjihat. 
Cette  médaille  était  att;ichée  à  une  chaîne 
d'or  en  forme  de  bracelet  qu'elles  portaient 
(I)  Voy.,  à  la  lin  du  vol.,  ii°  102. 
{ij  Vvy.,  ibiJ.,  n°  IU3. 


nu  liras  an-dcssns  du  coude.  Elles  devaient 
avoir  cette  médaille  avec  la  chaîne  d.ins  les 
jours  de  iéréiiionies  ;  et  les  autres  jours  elles 
|)orlaient  seulement  une  médaille  plus  petite 
attachée  à  un  ruban  noir  (.3).  Elles  promet- 
taient d'observer  les  règles  et  les  statuts  de 
cet  ordre,  qui  furent  dressés  par  l'impératri- 
ce, qui  en  était  chef;  et,  en  cas  de  mort  d'une 
de  ces  chevalières, ses  héritiers  devaient  ren- 
dre à  cette  princesse  la  grande  médaille,  et 
pouvaient  conserver  la  petite  en  mémoire  de 
l'honneur  que  leur  famille  avait  reçu  d'avoir 
eu  une  chevalière  -le  cet  ordre. 

L'ordre  de  la  Vraie-Croix  fut  institué  par 
la  ir.cme  impératrice  l'an  lUfiS.  I,e  motif 
(lu'elle  eut  fui  à  cause  qu'au  milieu  de  l'em- 
brasement du  palais  impérial,  qui  arriva  l.i 
même  année,  une  croix  qu'elle  ava't  et  (|ui 
était  faite  de  deux  morceaux  de  la  vraie  croix, 
se  trouva  miraculeusement  préservée  des 
flammes;  et,  pour  en  marquer  sa  reconnais- 
sance à  Dieu  ,  e'Ie  voulut  établir  une  com- 
pagnie de  dames  sous  le  litre  de  dames  de  la 
Vraie-Croix,  duntles  obligations  étaient  d'ho- 
norer particulièrement  la  croix  où  Jésus- 
Christ  avait  été  attaché  pour  nos  péchés  ,  de 
procurer  sa  gloire  et  son  service,  et  de  tra- 
vailler principalement  au  salut  de  leur  âme. 
Pour  les  distinguer,  elle  leur  donna  une  croix 
d'or  au  milieu  de  laquelle  il  y  avait  deux  li- 
gnes, qui  régnaient  dans  le  long  et  le  travers, 
qui  étaient  de  couleur  de  bois  pour  marquer 
la  vraie  croix  ;  aux  extrémités  de  celte  croix 
il  y  avait  quatre  étoiles,  el  aux  quatre  angles 
des  aigles  noires  qui  tenaient  chacune  un  rou- 
leau, sur  lequel  il  y  avait  en  écrit  ces  paro- 
les :  Sulus  el  glorin.  Elles  la  devaient  porter 
sur  l'estomac  au  côté  gauclie  ,  attachée  à  un 
ruban  noir  (4).  La  sainte  Vierge  et  saint  Jo- 
seph furent  choisis  pour  patrons  et  protec- 
teurs de  cet  ordre  ,  qui  fut  approuvé  par  le 
pape  Clément  X.  Ce  pontife  lui  accorda  beau- 
coup d'indulgences,  cl  les  règles  el  les  statuts 
furent  dressés  par  le  P.  Jean-Baptiste  Mani, 
de  la  conipagnie  de  Jésus.  L'impératrice  Eléo- 
norc,  Madeleine-Thérèse  de  Neubourg,  veu- 
ve de  Léopold  ,  est  présentement  chef  de  cel 
ordre  ;  cl  le  troisième  jour  de  mai  ,  fêle  do 
l'Invention  de  la  sainte  croix  de  l'an  1709, 
elle  le  donna  à  l'archiduchesse  Marie-Joseph, 
fille  aînée  de  l'empereur  Josojih,  et  à  trente- 
deux  dames  ,  dans  l'église  de  la  maison  pro- 
fesse des  Jésuites  de  Vienne. 

Bernard  Giusiiniani,  Ilist.di  tutl.  gli.Ord. 
militari.  L'on  peut  voir  aussi,  pour  les  or- 
dres de  la  Vraie-Croix  et  de  la  Cordelière, 
W.  Herman  ;  et,  pour  ceux  de  la  Hache  et  de 
l'Echarpe  ,  le  P.  Mendo,  dans  sou  Traité  des 
Ordris  militaires. 

Outre  ces  ordres  particulièrement  institués 
pour  des  femmes,  il  y  en  a  aus^i  d'autres  qui 
se  donnent  indifféremment  aux  hommes  et 
aux  femmes ,  comme  celui  de  l'Amarante, 
institué  par  la  reine  de  Suède,  dont  nous  par- 
lerons à  l'article  Sérapiuv,  et  celui  de  la 
Mouche  à  miel,  que  Louise-Uénédiclinc  de 
Bourbon,  épouse  de  Louis-Auguste  de  Bout- 

(".)  Voy.,  ibid.,  n°  101. 

(>)  Voy.,  ibid.,  n*  1115. 


;•,-.  PICTIOXNAIRF,  DF.S 

liiiii,  duc  (lu  M.iiiin  ol  siuivor.iin  ilc  Dombcs, 
iiislilu.-i  à  Sroaux  le  k  jniii  l'/O.t.  I.;i  rn.iiiine 
(le  c<l  onlro  ol  une  nuvl.iil  c  d'or  qno  donne 
relti'  prinrossc,  où  d'un  râlé  il  y  a  son  |  or- 
Iraii.cl  de  r.iulrc  une  mouche  à  miel  avec 
cilli'  devise  :  Je  suis  petite;  mais  mes  piqûres 
ton!  profondes. 

HA  M.  PANS  LK  Tyrol  i;t  de  CASTH.LIONE 
J)K  SÏIMKUA  DANS  LU  M ANTOUAN  (société 
DKS  >ii;kgi;s  de). 

Trois  princesses  de  la  maist  n  d'Aulriclie, 
filli'S  de  l'empereur  Ferdiiiaml  1",  savoir 
madeleine,  Marguerite  cl  Hélène,  ne  vou- 
lant point  avoir  d'autre  époux  «ine  Jésus- 
(MiriNi,  prirent  la  rés  ilulion  de  >ivre  dans  la 
rclrailc,  éloi^-nées  du  tumulie  et  de  l'em- 
barras de  la  cour;  mai<,  comme  elles  ne 
voulaient  point  (piitlcr  les  l'crrs  de  la 
compairnic  de  Jésus,  sous  la  direclion  des- 
quels elles  s'ét'iiciit  mises,  cl  (]u'e!les  app:é- 
liendaient  qu'elles  n'eussent  pas  celle  liberté 
vn  se  renl'ermaiU  dans  un  monasièrc,  elles 
établirent  une  eommunaulé  de  lillcs  dans 
Hall,  ville  du  Tyidl,  pour  s'y  retirer  et  y 
fivre  sous  la  (llreelio:i  et  l.i  discii  linc  de  ces 
Pères,  auxquels  elles  foulèrent  aussi  un  col- 


lège dans  la  ii.émc  ville.  I  Iles  écrivirent 
d'Inspruck,  où  elles  demeuraient,  à  saint 
François  de  lîor;;ia,  pour  lois  };énéral  de  la 
compa;;nie  de  Jésus,  afin  d'avoir  sou  consen- 
tcmenU  qu'il  accorda  volontiers;  et,  l'ayant 
reçu,  elles  acbelèront  à  Hall  deux  maisons, 
l'une  pour  elles  et  l'aiilrc  pour  les  Jésuites. 
Mais,  pendant  que  l'on  disposait  leur  maison 
cl  que  l'on  bâtissait  les  lieux  ré{;iilieis,  la 
princesse  Mar;;ueritc  mourut;  ainsi  il  n'y 
cul  que  Ses  deux  Siiurs  Madeleine  et  Hé- 
lène qui,  avec  quclijues  autres  demoiselles 
de  qualité,  culrèrent  dans  celle  coniuiunaulé, 
le  second  dimanche  di;  l'avenl  de  l'an  150i), 
et  quelques  jours  après  les  Pères  de  la  Com- 
pagnie (le  Jésus  prirent  possession  du  col- 
léf,'e  que  ces  princesses  leur  avaient  fonde. 

Ces  (illes  font  un  V(pu  solennel  de  chasteté 
pirpè'ucUe,  el  promettent  à  leur  supérieure 
pau\relé  et  obéissance,  ne  pouvant  disposer 
il'aueuiie  chose  sans  sa  permission.  Files 
«•mploient  la  matinée  à  la  prière  cl  à  l'o- 
raisun,  cl  l'après-dinoe  elles  s'occupent  au 
travail  el  aux  exercices  corporels.  Files  ne 
gardent  point  de  clôture,  el  sorlent  pour 
alliT  entendre  la  messe,  se  confesser  et  coai- 
munier  dans  réj;lise  des  Jesuiles  ;  qiH'lqnefuis 
il  leur  est  permis  de  sortir  de  la  ville  pour 
aller  se  promener,  ou  pour  visiter  les  terres 
qui  leur  apparlicnnenl  :  elles  tout  toujours 
Ueux  à  deux.  Leur  liabilleineni  (I)  dans  la 
maison  lonsiste  en  une  robe  on  tunique  de 
laiiK!  noiie  Irainanle  jiar  derrière  :  elles 
oui  un  petit  c<illel  :  el,  pour  couvrir  leur  lèlc, 
elles  mellenl  un  [lelil  voile  blanc,  avec  un 
bonnet  par-dessus  en  forme  de  tO(|iic.  Fois- 
«lu'elles  borteiil,  dles  6lenl  ce  bonnet,  et 
portent  un  chapeau  pointu,  à  la  manière  du 
pays,  avec  un  petit  manteau  i|ui  ne  vient 
que  jusqu  à  la  teinliire,  ou  un  peu  plus  bas. 

(1)  V  !/.,  à  |j  Gn  da  vol  ,  ii"'  ll)(i  el  10'. 


oniMiEs  nt:Lir.iKii\.  us 

Conr.id  Jannin;j,  npud  Ifollnnil.  Art.  55. 
l'iVK  W  .Jtinii;  et  l'bilippe  l\ov.aini\,Catalug. 
Ord.  lielifjios.  part.  \u,pnq.  3i. 

Trente-cinq  ans  ou  environ  après  cet  éta- 
blissement, trois  autres  sœurs  princesses  de 
la  maison  île  t^ionzague,  soit  à  l'exemple  de 
ces  princesses  de   la  maison  d'.Vutricbe,  ou 
par  quelque  autre  molif.  établirent  une  pa-r 
reille  comniunauié  de  lillcs  dans  la  ville  de 
(^a'-li;:lione  de   Sliviera.  Ces  trois  princesses 
furent  Cynlhic,  Olympie   et    (iridonie,  filles 
de  Hodolphe,  prince  de  Cislislione,  cl  nièce.s 
du  bienheureux  Louis   de  Gonzague  ,  de  la 
Coni]  agnic  de  Jésus.  Leur  père  étant  mort, 
l'an  l.'i!i2,  sans  laisser  aucun  enfant  mâle,  el 
le  prince   François  de  (jonzagtic,  son   frère, 
lui  ayant   succédé   dans   la    principauté   de 
Casliglione,  elles  furent  en\oyécs  à  Mantoue 
pour  y  être  élevées  dans  la  maison  du  mar- 
quis Aliprandi.  sous  la  conduite  de  la  mar- 
quise son  épouse,  leur  aïeule  maternelle,  et 
eilcs  y  demeurèreiil  juyqti'.i  ce  que  le  prince 
François,  leur  oncle,  qui  était  à   la  cour  do 
l'empereur    liodolphc   il    lorsque   son    frère 
mourut,  élanl   retourné  à   (^astiplione,  prit 
leur  liilelle,  cl   les    fit  venir  auprès   de    lui. 
Dèj.'i  Cyntbie   cl  Olympie,   quoique  enfants, 
avaient  pris  la  résolution  (ie  vivre  dans   la 
retraite,  el  n'attendaient  que  l'îi'j^c  nécessaire 
pour  exécuter  ce  pieux  dessein,  lorsqu'elles 
apprirent  avec  beaucoup  de  chagrin  la  réso- 
lution que   l'.'ur  oncle  (qui    ne  pensait  qu'à 
les  établir  dans  le  monde)  avait  prise  de  les 
envoyer  à    la  cour  d'Fspagnc  el  à  celle  de 
Savoie  :   ce  qu'elles  lésolurenl  d'empêcher 
autant  qu'il  leur  ser.iit  possible,  principale- 
ment par  1,1  prière  et  l'oraison,  qui  leur  pa- 
rurent  les  moyens  les   plus   puissants  pour 
détourner    ce   coup  ,    qu'elles    regardaient 
comme   i.n  obstacle  que  le  démon  mettait  à 
rexécution   de  leur  projet,   qu'elles   recom- 
maiulèrenl  à  la  sainte  Vierge  en  implorant 
sa  protection. 

La  confiance  que  ces  saintes  princesses 
eiirenl  dans  le  secours  du  ciel  ne  fut  pas  sans 
(ff(l;  car  nonohslanl  toutes  les  mesures  que 
le  prince  avait  prises  pour  envoyer  les  deux 
aînéi's  à  la  cour  de  Savoie,  et  de  mener  la 
plus  jeune  à  llome,  où  il  était  envoyé  par  le 
roi  d  l';spagne  en  qualité  d'ambassad  ur 
auprès  de  l'aul  V,  pour  ensuite  la  conduire 
en  Kspagne,  tous  ces  projets  n'euient  aucun 
elTet,  par  la  sollicitation  de  .Marginritc  do 
("lonzague,  sa-ur  de  Vincent  de  Cionzague 
duc  do  Mantoue,  cl  veuve  du  duc  de  Fer- 
rare,  qui,  ayant  lotidé  à  Mantoue  un  monas- 
tère de  religieuses  de  Sainte-Claire,  où  cljo 
se  retira,  voulut  avoir  la  princesse  Olympie 
pour  élrc  élevée  auprès  d'elle.  Cridonie  fut 
mise  d  ins  le  monastère  de  Saint-Jean  de  la 
même  ville,  el  Cyntbie,  qui  èlait  l'aînée,  suivit 
le  prime  à  llome,  où,  d'a'-ord  qu'elb'  lut  ar- 
rivée,elle  lit  va'ii  de  viri^iiiilé,  et  prit  la  réso- 
lution de  fonder  un  institut  (onfoniie  à  celui 
de  la  Compagnie  di'.  Jésus,  el  de  vivre  sous 
la  direction  de  ces  Pères.  Celle  sainte  prin- 
cesse élanl  r.  tournée  à  Casliglionc  au  coui- 


U5  IIAL 

uienccmonl  de  l'année  1G07,  c!  y  nvnni  trouvé 
sa  sœur  Olympie,  âsce  pour  lors  do  Siize 
ans,  elle  lui  découvril  la  résolution  qu'elle 
avait  prise.  Olympie,  qui  avait  voulu  em- 
brasser Tordre  de  Sainte-Glaire  dans  le  mo- 
nastère qui  avait  élé  fondé  à  Manloue  par  la 
duchesse  de  t'errare,  mais  que  ses  infirinilcs 
^  avaient  obligée  de  quitter  avant  qu'elle  y 
1  eût  prononcé  ses  vœux,  approuva  la  réso- 
'  lution  de  sa  sœur,  et  voulut  lui  servir  de 
compagne.  Leur  autre  sœur  Gridonie,  qui 
était  la  plus  jeune,  voulut  aussi  les  suivre, 
nonobstant  le  desein  qu'elle  avait  formé 
d'accompagner  son  oncle,  qui  était  sur  son 
départ  pour  aller  à  la  cour  d'Espagne.  Ainsi 
Cl  s  (rois  princesses,  d'un  commun  consen- 
tement, cédèrent  au  prince  de  Casliglione 
tous  les  biens  qui  leur  pouvaient  appartenir, 
tant  du  côlé  de  leur  père  que  de  leur  mère,  à 
condition  qu'il  fonderait  deux  maisons,  l'une 
pour  elles,  et  l'autre  pour  les  Pères  de  la 
compagnie  de  Jésus  :  ce  qii  ayant  été  ac- 
cepté de  part  et  d'au'ri',  elles  sortirent  le 
premier  juin  de  l'an  1G07  du  |:alais  du  prince, 
où  elles  avaient  p'ris  naissance,  et  allèrent 
demeurer  dans  celui  du  marquis  et  de  la 
marquise  Aliprandi,  leurs  aïeuls  maternels, 
qui,  Après  avoir  marié  leur  fille  au  prince 
Uodolphe,  étaient  venus  demeurer  à  Casli- 
glione, où  ils  avaient  fuit  bâtir  ce  palais  avec 
beaucoup  de  magnificence.  Ce  fat  là  qu'elles 
conimcnci^rcnl  leur  communauté, qui  fut  d'a- 
bord composée  de  treize  filles.  Elles  y  de- 
meurèrent pendant  quatre  mois  sans  changer 
leur  habillement  ,  s'occupant  pendant  ce 
temps  là  à  divers  exereices  de  piété  pour  se 
disposer  à  l'institut  qu'elles  voulaient  em- 
brasser sous  la  direction  du  V.  Ccpaire  de  la 
Compagnie  de  Jésus,  qui  était  venu  pour  cet 
effet  de  Rome  à  Casliglione.  Elles  quillèrent 
ensuite  leurs  habits  mondains  pour  en 
prendre  un  noir,  tel  qu'il  est  représente  dans 
la  figure  que  nous  en  donnons  (1).  Le  I'.  Cé- 
paire  dressa  leurs  constitutions,  qu'elles  ob- 
servèrent exactement  ;  et  cet  inslilut,  qui  prit 
le  nom  de  Vierrjes  de  Jésus,  fut  approuvé  de 
vive  voix  par  le  pape  Paul  V.  Cynlliie  fut  la 
première  supérieure  de  celle  communauté, 
jusqu'en  l'an  îG^V,  que  ses  grandes  infirmilés 
lobliijèrent  à  se  démettre  de  celte  charge  en 
faveur  do  sa  sœur  Olympie,  qui  néanmoins 
mourut  (levant  elle  l'an  1G45.  Cynihie  vécut 
encore  quatre  ans,  cl  mourut  l'an  IGiO.  Elle 
fut  suivie  environ  dix-buit  mois  après  par  sa 
sanir  Cridonie,  qui  qui;la  ce  monde  l'an  IGoO. 
Dieu,  pour  maaifesler  la  sainteté  de  ces  trois 
sœurs,  a  voulu  préserver  leurs  corps  de  cor- 
ruption :  car  ils  fuient  trouvés  environ  Ironie 
ans  après   ton!  entiers,  quoique   leurs   cer- 

*cucils  fus'  rni  pourris,  el  que  les  babils  dans 
lo'îiinels  elles  avai.  ni  clé  ensevelies  fussent 
mangés  des  vers.  Celle  commiinauié  a  pro- 
duit aussi  plusieurs  saintes  filles  d'une  émi- 
nenle  vertu  :  comme  Olympie  Rerîonacci  de 
Casliglione,  Hippolyle  Giiigini  de  .Milan,  qui 
furent  les  premières  compagnes  des  fonda- 
Iriecs  ;  Isabelle  Fracassani,  '\  ictoivc  de  Guidi- 


11  AL 


4i6 


de-Iîagno,  et  plusieurs  autres.  Marie  de  Gon- 
zague,  fille  du  marquis  Louis-François  de 
Gonzaguect  de  Catherine  de  Gonzagùe,  prit 
au^si  l'habit  de  ce!  institut  l'an  1G45. 

Ces  Vierges  de  Jésus  ne  gardent  point  de 
clôture.  Elles  font  vœu  de  cliasteté  perpé- 
tuelle ,  et  promettent  par  serment  qu'elles 
vivront  et  mourront  dans  cette  société  do 
Vierges.  Ellcspromettent  enrore  à  l'abbesse, 
et  à  celles  qui  lui  succédi  ront  ,  obéissance 
perpétuelle  :  ce  qu'elles  font  pendant  la 
messe  qui  se  dit  dans  leur  chapelle  domes- 
tique, en  présence  de  toute  la  communauté; 
et  elles  renouvellent  ce  vœu  et  ces  promes- 
ses deux  fois  l'année;  la  première  le  jour 
de  la  Circoncision,  et  la  seconde  le  jour  de 
la  fête  du  bienheureux  Louis  de  Gonzaguc  , 
après  avoir  fait  auparavant  une  retraite  de 
trois  jours.  Elles  se  confessent  et  commu- 
nient trois  fois  la  semaine  ,  le  dimanche,  le 
mercredi  et  le  vendredi.  Elles  jeûnent  tons 
les  samedis  el  la  veille  de  la  lè;e  du  bien- 
heureux Louis  de  Gonzagne.  Le  vendredi 
elles  ne  soupent  point  et  prennent  la  disci- 
pline. Le  mercredi  elles  ne  mangent  point  de 
viande,  el  ne  font  le  soir  qu'un  léger  souper. 
L'été  elles  se  lèvent  à  qiiatre  heures  du  ma- 
lin, el  l'hiver  à  cinq,  et  font  dans  leurs  cham- 
bres une  heure  d'oraison  mentale.  E:ies  vont 
ensuite  à  leur  chapelle  pour  dire  l'office  de 
la  Vierge;  et,  après  qu'un  a  lu  un  chapitre 
de  l'Imitation  de  Jésus-Clirist,  elles  vonl 
travailler  en  commun.  V^ers  le  midi  elles  font 
un  quart  d'heure  d'examen  de  conscience,  et 
vont  ensuite  au  réfectoire  ;  et  le  dîner  étanl 
fini,  elles  ont  une  heure  de  récréation,  après 
laquelle  elles  récitent  les  litanies  de  la  sainte 
Vierge  dans  leur  chapelle,  d'où  elles  sortent 
pour  aller  chacune  dans  leur  chambre,  faire 
la  méridienne  pendant  une  heure  :  ensuite 
elles  disent  vêpres  et  compiles,  et  vont  au 
travail  comme  le  malin.  Après  le  travail  elles 
disent  Matines  et  Laudes  pour  le  lendemain, 
en  faisant,  aussi  bien  qu'à  vêpres,  mémoire 
du  bienheureux  Louis  de  Gonzagne.  Après 
les  matines,  elles  vont  souper,  el  ont  cnsuile 
encore  une  heure  de  récréation,  Uuiuelle 
étant  finie,  elles  disent  les  litanies  des  saints 
et  d'autres  prières;  cl  après  un  quartd'heuro 
d'examen  de  conscience,  elles  se  retirent 
dans  leur  chambre  pour  se  reposer.  Ces  fil- 
les vont  se  confesser  et  communier  à  l'églisQ 
des  Jésuites,  dans  laquelle  elles  ont  leur  sé- 
pulture qui  est  couverte  d'une  tombe  de  mar- 
bre, où  sont  écrits  ces  mois;  Ossa  Virginiim 
Jc<u.  Celles  qui  veulent  être  reçues  dans 
cette  société  doivent  être  nobles,  ou  au 
nniins  de  famille  honorable,  et  apporter  une 
dot  suffisante.  La  supérieure  a  le  litre  d'ab- 
bosse  ;  colle  qui  gouverne  sous  elle,  le  nom 
de  ministre,  et  a  soin  du  temporel  de  la  mai- 
son. 11  y  a  une  maiiresse  des  novices  et  queU 
ques  autres  ollicières. 

Pomp.  ëavazin  ,  lit,  Olympiœ  Gonzag^ 
lîolland.  Ad.  SS.  tom.  iy,junii,  par/.  1155; 
cl  Philip.  Bonaniii.  CaCaloij.  Ord.  Reliijios,.^ 
part.  III. 


(\]  yo;/.,à  lalÎM  du  vol. j  n'  lO.S. 


4i7 


nif.TIONN.MRF,  DF.S  ORDUPS  r.F.I.If.IF.LX. 


.r.3 


KArDIîll'.TIKS  (Hi-iir.iF.KEs),  présenUmcni 
appflvfs  les  FiHei  de  l'Assumpiion  de  No- 
tre-Dame. 

Il  )  a  i-u  à  P.iris  des  rdiçieiiscs  hi)«pila- 
licrcs  sous  le  nom  irHaiidriettes,  qui  furent 
roiidées  du  leiniis  du  roi  snini  Louis  par 
Klieiine  llaudry.  Tnii  des  secrétaires  de  ce 
prince.  Il  le  suivit  dans  la  terre  sainte  ;  el  , 
a  son  retour  on  Frani;c,  il  eut  la  dévotion  do 
faire  encore  le  voyage  de  Saint-Jacques  en 
(îalice.  Sa  feninie,  qui  se  nomniail  Jrannc  la 
Dalone,  ayant  éle  un  temps  considérable  sans 
recevoir  de  ses  nouv  elles,  se  consacra  au  ser- 
vice do  Dieu,  s'enferniaiil  dans  une  maison 
qui  lui  ap|)ai  tenait  dans  la  rue  de  la  Mor- 
tcilciie,  a»ei'  quilques  autres  l'emnies,  et  cl!e 
y  vécut  dans  les  exercices  de  piélé,  d'or;ii- 
son  et  de  inoriilicalion.  Klles  no  laissaient 
Ciilrer  personne  dans  celle  maison,  qui  élail 
liâlie  en  l'orme  de  monastère,  et  elles  n'en 
sorla  eut  que  les  dlm.inches  et  les  fèies  pour 
aller  enleiulie  la  parole  de  Dieu  el  assister 
aux  oiliies  divins. 

Ayant  ainsi  passé  quelque  temps  dans  celle 
maison,  l'Uiennc  Haudry,  élanl  de  retour. 
Voulut  reprendre  sa  femme  ;  mais  il  y  trouva 
de  la  difli(  ullé  de  sa  pari,  sur  ce  qu'elle  avait 
fait  vœu  de  cliaslelé,  ce  qui  obligea  llaudry 
d'aller  à  Home  pour  en  obtenir  dispense  du 
pape,  <]ui  ia  lui  accorda  à  condiiion  qu'en 
reprenant  sa  femme  il  laisserait  un  fonds  à 
celle  maison  |iOur  enlrelenir  et  nourrir  douze 
pauvres  femmes  ;  à  quoi  il  salislit  ;  et  di-puis 
ce  temps-la  ou  a|)|iel,i  ces  femmes i/autineHi  s, 
du  nom  de  leur  londaleur. 

Leur  nombre  s'augmenta  dans  la  suile; 
car  les  an(  iens  statuts  de  ces  religieuses,  qui 
furent  conlirmés  par  le  cardinal  de  l'ise, 
légat  du  pape  Jean  XMII,  l'an  IVlV,  sont 
adresses,  aux  hunncs  femmes  veuves  étant  au 
nomtire  de  Iretite-dear,  île  la  Maison- Dieu  ou 
Itiipital  et  cliapellc  fondée  par  ftn  Etienne 
llaudry  ou  ses  snccessiurs  emprès  Grève  à 
Paris.  Ces  statuts  commencent  ainsi  :  /li« 
nom  du  Père,  el  du  fils,  et  du  Siiinl-p:sprit. 
Ci-après  s'ensuivenl  les  ordonnances  et  con- 
slilutiuns  de  l'Iiôpital  des  bonnes  femmes  de  la 
chapelle  fondée  par  feu  li tienne  llnudri/,  jadis 
Oouri/eois  de  Paris,  et  Jianne  sa  femme;  les- 
quelles ordonnancis  fiumaiire  d'Ailli/,  en  son 
vivant  docteur  en  thé  loyie  et  amnémier  du 
roi  notre  sire,  a  voulu  el  mandr  flre  gardées 
par  Icsditcs  bonnes  femmes,  et  écrites  en  vn 
tableau  du  dortoir  d'icclles,  afin  que  nulle 
ne  s'en  puisse  ejcuser  pur  iijnorancc. 

Cet  établissement  fut  conlirmc  par  plu- 
sieurs souverains  pontifes,  et  ces  bonnes 
femmes  pendant  plusieurs  années  vécurent 
avec  beaucoup  d'edilicalion  ;  mais  dans  la 
suiic  du  temps  leur  ferveur  se  ralenlil,  et 
jieu  A  peu  elles  abandonnèrent  leurs  obser- 
vances; en  sorte  que  le  cardinal  du  rerron 
élanl  mort,  cl  le  cardinal  de  11  Uodiefou- 
<aull  lui  ayant  succédé  dans  la  cbarge  de 
gr.ind  auniAnier,  (jui  est  supérieur-né  de 
telle  maison,  l'un  des  [)rcm  ers  soins  de  te 
prélat,  qui  était  si  zélé  pour  la  rcfurmu  des 


monastères,  fut  de  faire  revivre  l'observance 
régulière  chi'z  les  Haudrietles,  où  il  trouva 
un  assez  bon  nombre  de  femmes  el  de  Glies, 
dont  il  en  (il  élire  une  jiour  supérieure. 

L'on  vil  en  peu  de  temps  un  notable  chan- 
gement dans  eetlo  maison,  el  l'observance 
régulière  y  fui  parfaitement  rétablie  par  les 
soins  de  ce  cardinal  el  de  l'abbé  de  la  Pose  , 
son  grand  vicaire,  qui  fut  dans  la  suite  évé- 
que  do  Lodève.  Cette  éminence  obtint  du 
papo  (ircgoiic  XV  le  pouvoir  d'agréger  celle 
communauté  à  l'ordre  de  Sainl-.\nguslin,  et 
do  confirmer  les  nouveaux  statuts  ipii  avaient 
été  dressés,  el  qu'on  avait  ajoutés  aux  anciens. 
Les  religieuses  comMieneèrcnl  ;i  cbanler  l'ofli- 
ce  de  la  \'ierge.  lilles  joigiiirciil  le  vœu  de  pau- 
vreté à  ceux  decbasleté  el  d'obéissance  qu'el- 
les faisaient  déjà,  et  pratiquèrent  les  autres 
exercices  des  monastères  réglés.  Leur  coin- 
munau'.é  s'augmenta  de  lelle  sorte,  que,  se 
trouvant  trop  élroilcmenl  logées  et  en  un  lieu 
malsain  à  cause  du  voisinage  de  la  rivière, 
elles  oblinrent  les  permissions  nécessaires 
pour  changer  dedenu'ure.  Elles  furent  trans- 
férées dans  la  rue  Sainl-Honoré  cl  prirent 
possession  de  leur  nouvelle  maison  lo 
7  septembre  10:22,  y  ayant  été  conduites 
par  plusieurs  dames  de  qualité.  Kllei  ont 
depuis  b.'ili  un  très-beau  monastère  avec  une 
belle  église  sous  le  litre  de  l'Assomption  do 
Noire-Dame,  dont  elles  ont  retenu  le  nom, 
ayant  quitté  celui  d'IlaudrielU  s  ,  qu'elles 
avaient  conservé  jusqu'alors.  lilles  sont  pré- 
sentement au  nombre  de  (lu.llre-vingl^  filles. 
Klles  sont  habillées  de.  noir  avec  de  giandes 
manch  'S  el  une  c  inlure  de  laine,  el  portent 
un  crucifix  sur  le  ca-ur  (I). 

(Juaiil  à  leurs  observances,  par  la  bulle  du 
pape  tirégoirc  \V,  octroyée  pour  leur  .ippro- 
bation  et  conlirni.ilion,  il  leur  élail  ordonné 
de  direl'otfieede  la  sainte  \  ierge  tout  entier 
les  jours  de  fêtes  seulement,  el  elles  n'elaienl 
tenues,  les  jours  ouvrables,  qu'à  dire  prime, 
liercc,  vêpres  et  complies.  Mais  le  cardinal 
de  la  lîochefoucanlt,  par  les  conslilulions 
qu'il  leur  donna,  les  obligea  à  dire  tous  les 
jours  cet  office  loul  entier,  el  le  grand 
officia  de  riiglise  selon  le  bréviaire  romain 
pendant  les  trois  ilerniers  jours  de  la  semai- 
ne sainte.  Klles  doivent  dire  outre  cela  loua 
les  jours  vingt-quatre  Pater  el  autant  ti' Ave 
pour  leurs  bienfaiteurs,  el  par  une  louable 
coutuu«e  elles  en  disiint  trente-trois  pour 
parfaire  la  couronnede  Nolrc-Seigneur.  l'illes 
ont  une  demi-heure  d'oraison  menialo  le  ma- 
tin ,  et  autant  après  vêpres  ,  l'examen  do 
conscience  avant  le  diner.  el  celui  du  soir 
après  avoir  dit  en  commun  les  litanies  des 
saints. 

Outre  les  jeûnes  ordonnés  par  l'Kgliso  el 
les  abstinences,  elles  font  encore  abslinenco 
de  viande  pemiant  tout  l'.^venl.  tous  les  mer- 
credis de  l'année,  les  veilles  des  fêles  de  la 
sainte  \  ierge,  le  lundi  et  le  mardi  do  la 
(,)uiii((uagé>ime  ;  el  le  vendredi  saint  elles  na 
mangent  rien  de  cuit  avec  apprêt.  \  oici  la 
formule  de  leurs  vœux  :  Au  nom  de  Notre-Sct 


(I)  Voij  ,  i  la  Du  du  vol.,  n"  iO'J  cl  1 10. 


449 


IIEL 


riEL 


450 


gneur  Jésus-Christ  et  de  sa  très-sainte  Mère; 
le  sœur  N.  dite  de  Saint  N.,  voue  et  promets 
ù  Dieu  stabilité  sous  clôture,  pauvreté,  chas- 
teté et  obéissance,  selon  la  règle  du  bien- 
heureux Père  saint  Augustin  et  les  constitu- 
tium  dressées  pour  le  règlement  de  c  tte  mai- 
son dite  de  l'Assomption  de  Notre-Dame,  en 
présence  de  monseigneur  N.,  grand  aumônier 
de  France,  nore  supérieur.  El  si  c'est  son 
grand  vicairo,  en  présence  de  N-,  grand  vi- 
C'iire  de  monseigneur  N-,  grand  aumônier  de 
France. 

Sur  la  fin  du  dernier  siècle,  la  Mère  Petit, 
dite  de  Sainlc-Tliérèse,  religieuse  de  ce  mo- 
nastère, fil  un  second  élablissenicnl  de  cet 
ordre  dans  la  même  ville  de  Paris,  au  fau- 
bourg Saiiil-Gerinain,  proche  le  couvent  des 
Carmes  Déchaussés.  L'on  appela  ce  nouveau 
monastère  la  pelile  Assomption,  cl  l'on  y 
gardait  les  mêmes  observances  que  dans  ce- 
lui de  la  rue  S.iint-Honoré  ;  mais  comme  il 
ne  se  trouva  point  de  fonds  sulfisaiits  pour 
l'enlrelien  des  religieuses,  ce  monastère  a  été 
supprime. 

Dubreuil  el  Malingre,  Antiquités  de  Paris, 
et  les  constitutions  manuscrites  de  cet  ordre. 

11  y  a  aussi  à  lléc;inati  en  Italie,  proche 
Laurelle ,  des  reli;;ieuses  sous  le  titre  de 
l'Assomption  delà  sainle  Vierge,  dont  le  mo- 
nastère lut  fondé  l'an  1(526  par  le  cardinal 
Jules  Roma,  évèque  de  celle  ville.  Ce  qui 
donna  lieu  à  cet  établissement  fut  qu'une 
femme  de  la  ville  nommée  Barbe  Martille 
Cl  donna  par  son  testament,  dt-  l'an  1593,  que 
si  soi  fils  mouiait  sans  enfant,  l'on  fonde- 
rait dans  sa  propre  maison  un  monastère  de 
veuves  qui  y  seraiententreleiiuesdes revenus 
des  biens  qu'elle  laissa  pour  cet  effet  ;mais  le  fils 
éliinl  mort  sans  enfants,  et  ayant  laissé  beau- 
coup de  detles,  le  cardinal  Roma,  voyant  que 
l'o.i  ne  pouvait  esécuter  entièremenl  la  fon- 
dation, se  détermina  à  mettre  dans  cette  mai- 
son quelques  pauvres  filles  orphelines,  dont 
six  prirent  l'habit  religieux  ;  d'autres  filles  y 
étant  aussi  cntiétsdans  la  suite,  et  y  ayant 
porté  des  dots,  on  y  établit  la  clôture  l'anlCSi, 
et  l'an  IGSion  leur  donna  des  constitutions 
particulières  qui  furent  dressées  par  le  I'. 
Oratio  Patiani  de  la  Compagnie  de  Jésus^  el 
approuvées  par  le  cardinal  Roma,  Comme 
leur  église  fut  dédiée  en  Ihonneur  de  l'As- 
somption de  Notre-Dame,  elles  en  prirent 
aussi  le  nom.  Elles  disent  tous  les  jours  au 
chœur  l'oifice  de  la  Vierge,  observent  une 
exacte  pauvreté,  el  ont  leurs  heures  d'orai- 
son, de  silence,  de  travail,  et  autres  exerci- 
ces. Leur  habillement  consiste  en  une  robe 
bleue  ceinte  d'une  ceinlure  de  laine  blanche, 
avec  un  scapulaire  blanc;  leur  voile  est  blanc 
aussi,  el  leur  guimpe  est  un  peu  plissée  sous 
Ja  gorge  ;  au  chœur  et  dans  les  cérémonies, 
elles  ont  un  manteau  bleu  traînant  jusqu'à 
terre. 

Philip.  Bonanni.  Calalog.  ord.  Relig.  , 
rari.  lii  ;  et  Didace  Calcagni.  Hist.  di 
Rccanall. 

HELVETIQUE  (Gongrkgation  Bénsdiotine), 
au  il  est  parlé  de  l'ordremilita,re  de  l'Ours. 
Quoique  la  congrégation  Bénédictine-Hel- 


vétique ou  de  Suisse  ne  comprenne  ()ne 
neuf  monastères,  elle  ne  laisse  pas  d'être  une 
d.'s  plus  illustres  de  l'ordre  de  Saint  BenoU 
par  les  prérogatives  dont  jouissent  ce»  mô- 
mes monastè{es  qui  sont  très-considérables, 
y  en  ayant  cinq  dont  les  abbés  sont  princes 
de  l'Empire,  savoir  Saint-Cal,  Einsidien  ou 
Notre-Dame  des  Ermites,  Mûri,  Pfers  et 
Disonlis.  Si  les  quatre  autres,  qui  sont  Rlii- 
naw,  Frischinchcn,  Engelberg,  el  Uhunwil, 
ou  Notre-Dame-de-la-Pierre,  sont  obligés  de 
le  céder  en  dignité  aux  cinq  premiers,  ils 
ont  au  moins  l'avantage  de  leur  être  égaux 
par  rapport  à  la  sainteté  de  leurs  premiers 
abbés,  aux  personnes  illustres  qui  en  sont 
sorties  el  à  la  magnificence  de  leurs  bâti- 
ments. Le  relâchement  s'était  inlroduil  dans 
la  plupart  de  ces  monastères,  et  il  y  avait 
lieu  d'appréhender  qu'il  n'augmentât  encore 
dans  la  suite  par  le  voisinage  des  provinces 
d'Allemagne  infectées  d'hérésies  dont  la 
Suisse  même  n'avait  pu  se  garantir.  Mais 
Bernard,  abbé  de  Saint-Cal;  Augustin  d'Ein- 
sidlen,  Josse  de  Mûri,  et  Benoît  de  Fischin- 
gen,  afin  de  prévenir  le  mal  qui  les  menaçait, 
s'unirenl  ensemble  pour  taire  revivre  dans 
leurs  monastères  cette  ferveur  dont  les  pre- 
miers religieux  qui  les  avaient  habités 
avaient  été  animés  sous  la  conduite  de  leurs 
saints  fondateurs,  et  prirent  les  mesures  né- 
cessaires pour  y  rétablir  la  discipline  monas- 
tique cl  l'économie  du  temporel,  l'une  et 
l'autre  fort  délabrées.  Pour  cet  effet  ils 
firent  des  règlements  qui  y  sont  encore  obser- 
vés avec  beaucoup  d'exac  iludc,  aussi  bien 
que  dans  les  autres,  qui  se  joignirent  à  eux 
dans  la  suite.  L'union  de  ces  quatre  premiers 
monastères  se  fitl'an  1(302,  el  elle  lut  approu- 
vée par  le  pape  Clément  VIII  sous  le  titre  de 
Congrégation  Bénédictine-JIsUélique  ;  elle 
fut  augmentée  après  la  mort  de  ce  pontife 
par  l'union  qui  y  fut  faite,  l'an  1606,  des  ab- 
bayes de  i'fers  el  de  Rhainaw.  Celle  d'En- 
gelberg  et  de  Discntis  suivirent  leur  exem- 
ple, el  Rhunwil  ou  Notre-Dame-de-la  Pierre 
y  fut  uni  l'an  163:J  sous  l'abbé  Finlan,  qui, 
y  étant  venu  avec  quelques  religieux  de 
celte  abbaye  cl  de  celle  d'EinsidIen,  répara 
entièrementce  monastère,  qui  avait  été  ruiné 
par  les  guerres  et  où  il  ne  resta  l  plus  qu'un 
seul  religieux.  La  congrégation  Beriédictine- 
Hilvéii(iue  fut  pour  lo.s  composée  de  neuf 
monastères  auxquels  les  souverains  pontifes 
el  leurs  nonces  en  Suisse  accordèreni  beau- 
coup de  grâces  elde  privilèges.  Cette  congré- 
gation n'a  point  de  supérieur  général,  les 
abbés  s'assemblent  seulement  tous  les  dix 
ans  ou  lorsque  la  nécessité  le  demande.  Ils 
élisent  dans  leurs  assemblées  des  visiteurs 
généraux  pour  faire  la  visite  des  monastères  ; 
cet  honneur  est  ordinairement  déféré  aux 
premiers  abbés:  on  nomme  aussi  des  visi- 
teurs particuliers  pour  les  monastères,  des 
visiteurs  généraux;  le  secrétaire  est  choisi 
indifféremment  de  tous  les  monastères.  Ces 
abLés  s'assemblèrent  l'an  1702  à  Sainl-Gal, 
pour  y  célébrer  la  centième  année  de  l'insti- 
tjlion  du  leur  congrégation.  Ce  monastère 
est  le  plus  considérable  de  la  Suisse,  l'abbo 


451                                          nr.TIONNMRE  DRS  OROUES  KF.UCIF.LX.                                            J52 

est  prinrc  souverain   cl  peut  incUrc   dix    à  teinciil.  Car  tlciuis   cr  Icmps-là   il   n   ]icrilii 

•Jouzc  mille  lionimos  sur  pii-d.  Celle  ahlinyc,  Appcnzcl,  ijni  a  (loniié  son  nom  à   l'un   des 

qui  esl  !.iluéo  dans  lo  Tur^ow,  à  un  mille  du  treize  canions  ;  Schvendy,  Brusilow.Cionlés, 

lae  de  Constance,  a  eu  de  liùs-faibles  corn-  Nintk.ilbach,  et  Hasiem,  qui  se  sonl  sous- 

lnencenu•nt^  :  le  nom  de  Saint  ti.il  lui  a   été  tiaits   de   son    oliéiséance,    ayant    fait    une 

do.  né  à  cause  nue  ce  saint,  (jui  était  irlan-  union  pourse  défendre  niuluellemcnt  contre 

d.iis  et  disciple  de   saint  C.olomban,  se  retira  cet  abbé,  qu'ils  ne  >oulaient  plus  reconnaître 

nu  conimi'iuement  du  vir  siècledansce  lieu,  pour  souverain.  Cun.',  «lui  fut  clu  abiié  l'an 

q-.ii  cia  t  pour  lors  une  solitude  affreuse,  cl  i;3T."i,  lit  armer  les  autres  sujets  de    l'abbaye 

y   liâiit  un  petit  monastère,  où  (;uelquis  per-  pour  soumetln-  les  habilafils  d'Appenzcl    cl 

sonnes,  attirées  par  la  vertu  de  ce  saint,  vé-  les  auires  (jui  s'éiaienl  révoltés  ;  mais  ce  fui 

curent  sous  sa  conduite.  .\près  sa  mort,  qui  inu  ilement:  car,  après  plusieurs    tentatives 

arriva  l'an  G'»G,  ce  lieu   fut   appelé  la  Celle  quiliii  pourrcussirdaui  sou  enliepr:se,  il  f  .1 

d<!  Saint-Cal.   Le*    Franc  lis  s'etant    rendus  enfin  oblige  de  faire  a\ec  euxuntrailé  depaix 

maîtres  de  ce  pays  l'an  "10,  un  certain  NVal-  par  lequel  il  consentit  qu'ils  se  raclictassenl 

liamn,  à  (|ui  appartenait  celle  solitude,  pria  delà  souveraineté   des  a'.ibes   de   Saiiii-Gal 

le   comte   \'ictor>   qui  était   gouverneur  du  pour  une  somme  d'artçtnt. 

piys,  de  donner  telle  celle  et  ses  dépendan-  Pour  mieux   alTermir   leur  liberté,   ils   se 

tis  à  saint  Otbmar:  ce  que  ce  comte  a '.corda  liguèren;  avec  l''s  can  ons  d'L'ri.  île  Scliwitz, 

l'an  720,  et  en  demanda  lu:-niéine  la  conlir-  d'Underval  cl  de  Lucerne.  Les  abbés  de  Saint- 

mation  à  Charles  Martel  maire  du  ]iaiais,  qui  Cal   ayaul    prutesié    contre    cette   alliance, 

l'ai'corda,  à  condition  que   saint    Otlim.ir   y  Henri   de    M.imlrolï  renouvela   ses    preten- 

eiablirail  les  observances   réjçu'.ièrcs;  et   ce  lions  l'an  r*2.)  à  la  cour  de   l'emjicreur  Si- 

piioi  e  érigea  pour  cet   effet    celte   colle    en  gisniond,  et  lit  mettre    au    ban  de   riimpirc 

abbaye,  dont  saint  Otbmar  fut  premier  abbé.  ceux  d'.^ppenzel  et  les  autres.  .Mais   loin  do 

Le  prince  t.arloman,  fils  de  Charles  Mar-  s'en  cionner,  ils  entrèrent  dans  lis   lùals  de 

lel,  allant  en  Italie  l'an  7i7   pourse  reliier  cet  abbé,  démolirent   quelques  châteaux    et 

dans    l'abbaye  du    Monl-Cassin,   où  il  prit  le  forcèrent  à  f. ire  la  paix.   Qaeique    temps 

l'h.ibil  nionasliqiie,   passa   par  S.iint-Cal,   y  après,  l'abbé  de  S. lint-Cal  s'unit  CMitre  eux 

étant  attiré  par  le.s   miracles  continuels  qui  avec   la    noblesse    de   Consliiice,  mais   ses 

s'y  faisaient  par  l'iiilercession  de   ce  saiu\  troupes  lurent  encore  del'ailcs.    Enlin  l'abbé 

Il  y  avait  alors  peu   dereligieux,  à  cause  de  Gaspard  de  Landerberg,  ayant  reconnu  que 

la  petitesse  du  monastère.   Ce  jirince   fut   si  ses  prétentions   sur    Appenzel   et  les   aulres 

louche  de  voir  un   lieu  si  célèbre   réduit  ca  lieux  qui  avaient  été  aulrelois   de   son    do- 

cel  étal,  qu'il  écrivit  à  réjiin.son  frère,   roi  maine   seraient  le  sujet  d'une  guerre  perpé- 

de  I'r;.nic.  pour  lui  recoinmander  ce  inouas-  luclle,  y  renonça  par  l'alliance   (ju'il   lit  l'an 

1ère  et  le   prier  de  lui   faire   quelques   duns.  IVo'*  avec  les  canions  de  Zurich,  de  Schwit/, 

S.iint  Otlimar,    sur   celte    recommandation,  de  Lucerne  et  de  Claris, 

alla  trouver  i'é[iin,   qui  asMgna  au    moiia-  Les  terres  que  possèdepréscnleinenl  l'abbé 

stère  de  Saint-Cal  des  revenus  considérables  de  Saint-Cal  en  souveraineté,  outre  la  xilleih; 

pour  en  aiignieiiler   les    bâtiments    et   pour  Saint-Cal  el  son  lerritcire,  sonl  Vil,  Coltzliu- 

i'enticiien  des  religieux.  fulil  et  le  conilé  de  Tokcrnljourg,  qui  renf.r- 

Crosberl,  qui   fut   élu   abbé  l'an   SIC,   fit  ment   plusieurs  villages,  dont  les   habilan  s 

exempter  par  l'empereur  Louis  le  Débonnaire  sont  pariiecalboli(|ucs  et  partie   proteilanls. 

son  abbaye    de  la  juridiction    des   cvéques  L'église  de  Tokembourg  esl  commune  aux  uns 

de  Constance,   qui   l'avaienl  exercée  surcllo  et  aux   autres;    les    protestants   y    lais. lient 

avec  une  grande  autorité,  el  depuis  ce  lemps-  l'exercice  deleur  religion  après  que  lesc.itlui- 

là  ce  monastère  devint  puissant.   Le  même  liqucs  avaient  liui  le    leur;  mais  le  jour   de 

abl  é  l'embellit  par  des  bâtiments  nouveaux  l'aques  de  l'an  1708,  les  protestants    voulu- 

qu'il  lit  f.nre  avec  beaucoup  de  magnilicence  renl  commencer  de  piéciier    avant    (jue    le 

et  auxquels  les  ouvriers  furent  employéspen-  service  des  catholiques    lût  achevé:   ce   qui 

liant  SI  pi  ans.  .Mais   ce  beau    mun.istère   fut  excita  de  grands  truubics  en  SuiSse,   où  ici 

ruiné  par  les  Hongrois  lan  0-23  sous  le  goii-  deux  partis  en  \inrent  à    une    rupture    ou- 

VI  rnenieiil  de   l'abbé  Lngelbert  11  ;   el,    l'an  verie.  L'abbe  de  Saiiil-'ial,  avei;    le  secours 

1/117,  ce  qui  en  restait  fut   réduit    en  cendres  des  cantons  catholiques,  voulant   mainleuir 

par  le  feu.  qui  s'y  attacha  par  accident.  sessujets  catholiques  dansleurs  dmits  par  la 

Ultic  d'A.tsan,  que  l'empereur  Philippe  force  des  armes,  les  canions  de  Zurich  et  de 
éleva  à  la  diguilc  de  prince  de  l'Lmpire,  Itirne  lirenl  la  mémo  chose  pour  soutenir 
ttendil  considerahlcment  son  domaine,  el  les  protestanls.  Cette  guerre  fui  tunesie  aux 
les  abbés  de  Saiut-Cildivinrcul  d.ms  la  suiio  caiholiques  par  les  avanla;:es  que  les  proles- 
si  puissants,  que  IlerlhoUI  de  l'alkenslin  as-  tanls,  qui  ciaienl  en  plus  grand  nombre, 
sisia  au  sacre  Ile  Cauiicr,  é\èiiii:  de  Siras-  remporièreiil  sur  eux.  Les  deux  partis  se 
bourg,  avec  une  suUe  de  plus  de  mille  gen-  réunirent  né.inmoins  l'an  1712  et  liienl  cn- 
ti:shoiiimrs  ,  la  plupart  ses  vassaux.  Les  semble  un  traite  de  paix,  par  la  medialioii 
lerres  suumises  à  l'obéissance  de  cet  abbe  de  M.  le  comte  du  Lue,  ambassad;  ur  de 
Claient  pour  lors  plus  considérables  et  l'ii  France  en  Suisse  (1).  .Mais  l'abbé  de  Saint- 
plus  grand  nombre  qu'elles  ne  le  sont  présen-  Cal  n'ayant  pas  voulu  entrer  dans  ce  Iraile, 

(i)  Joiitnnl   'iii(.  sur  les  imilièra  du  Ii'ih/'J,  Uni.  XVU. 


t.;3  IIRR 

les  cantons  de  Berne  et  Je  Zuricli  firent  un 
grand  (légal  d.ins  son  monastère,  dont  ils  en- 
levèrent toutes  les  cloches,  au  nombre  de 
vingt-quaire,  do  dilTérenles  grosseurs  ;  pri- 
rent les  riches  meubles  qui  y  étaient,  un 
grand  nombre  de  tableaux  et  une  bililiolhè- 
que  de  livres  rares  et  curieux.  L'abbé,  se 
lialtanl  du  secours  qu'il  attendait  des  cours 
de  Kome  et  de  Vienne,  fut  trompé  dans  ses 
espérances;  car  le  pape  et  l'empereur  ne 
jugeant  pas  à  propos  de  s'engager  dans  une 
guerre  dont  les  suites  auraieiit  lire  à  con- 
séquence, il  se  vil  contraint  d'aller  chercher 
un  asile  dans  le  duché  de  Milan,  n'ayant  plus 
ni  abbaye  ni  souveraineté. 

Les  abbayes  d'EinsidIen  etdeRhunwil,p!us 
connues,  la  première  sous  le  nom  de  Nnlrc- 
Dame-des-Ermiles,  cl  l'autre  sous  celui  de 
Notre-Dame-de-la-Pierre,  qui  snnt  aussi  de 
la  congrégation  Bénédictine-Helvéti(iue,  sont 
très-célèbies  parles  miracb's  qui  s'y  font 
tous  les  jours,  et  il  y  vient  de  toutes  paris 
un  gran<l  nombre  de  pèlerins. 

Jdœa  Congreg.  Ilelvet.  Benediclinœ-  Yso 
Pfaw.,  Cottect.  sive  summar.  privileg.  ejusd. 
Congreg.  Christoph.  Hartman.,  Annal.  Éremi 
Deiparœ  in  Helvetiis;  et  Mémoires  envoyés 
de  Suisse  en  ITIO. 

L'on  peutconsuller  pour  l'abbaye  deSaint- 
(ial  en  particulier,  Joan.  Mabill.  Annal.  lienc- 
dict..  Corn.  1,  11  et  IlL  Uom  Antoine  Yepez, 
Chroniques  générales  de  l'ordre  de  Saint-Be- 
noit. Gaspar.  lirusch,  Annal,  prcecipuorum 
monasteriorum  Germaniœ  ;  et  Audilîrel, 
(iéograph.  anc.  et   mod.,  tom.  IL 

Lcsabbés  ileSainl-Gal  conféraient  autrefois 
l'ordre  militaire  de  l'Ours,  institué  par  l'empe- 
reur Frédéric  II,  l'an  1213,  en  laveur  de 
l'abbé  de  Sainl-Gal  et  de  la  noblesse  du 
pays,  en  reconnaiss mce  de  ce  qu'ils  l'avaient 
aillé  à  ciiasser  de  l'Empire  Otiion  IV.  Le  col- 
lier de  cet  ordre  était  composé  de  chaînes 
d'or  entrelacées  de  leuill'js  de  chêne  aussi 
d'or,  au  bout  desquelles  pendait  un  ours 
d'or  éiiiaillé  de  sable  (1);  mais  cet  ordre 
nesubsislc  plus. 

Favin,  Théâtre  d'honneur  et  de  chevale- 
rii' ;  el  Bernard  Giustiniani,  Hist.  Clirouol.de 
gli  Ord.  miltt. 

HEiU'"01lD  Voy.  Gandersheim. 

HERMLNE  ET    DE  L'ÉPI  (OaDftES  militai- 

KES    DE    l')    en    BllETâGNB. 

L'ordre  de  l'Epi  institué  en  Bretagne,  et 
que  quelques  auteurs  ont  mis  sous  la  rèylc 
de  saint  Augustin,  quoique  peut-être  sans 
aucun  fondement,  nous  donnera  lieu  de  parler 
en  même  temps  de  relui  de  l'Hermine,  qui 
fut  aussi  institué  dans  la  mêoie  province.  Ce 
dernier  eut  pnur  fondateur  Jean  IV,  duc  de 
Bretagne,  surnommé  le  Vaillant  ou  le  Con- 
quérant, vers  l'an  1381,  el  non  pas  l'an  13!33, 
comme  quebiues-uns  ont  avancé.  Le  collier 
de  cet  ordre  éiail  composé  de  deux  chaînes 
dont  les  deux  extrémités  étaient  attachées  à 
deux  couronnes  ducales,  chacune  desquelles 
renfermait    une   hermine  passante  (ij.  Une 


IlER 


454 


des  couronnes  pendait  sur  la  poitrine,  et 
l'aulrc  était  sur  le  cou.  Les  chaînes  étaient 
composées  chacune  de  quatre  fermoirs,  et 
Cl  s  fermoirs  n'étaient  qu'une  hermine  avec 
un  rouleau  entortillé  autour  du  corps  sur 
lequel  était  écrit  :  à  ma  vie.  Les  rouleaux 
étaient  allcnialivement  émaillés  de  blanc 
avec  de>  lettres  noires,  et  de  noir  avec  des 
lettres  blanches.  Autour  du  cou  de  chacune 
des  dix  hermines  il  y  avait  un  collier  où 
I)enda il  un  chaînon  de  qualre  ou  cinq  au- 
ne lUX  :  les  colliers,  selon  la  (|ualité  des 
personnes  à  qui  les  ducs  en  faisaient  présent, 
étaient  d'or  ou  d'argent  doré,  ou  d'argent 
tnul  pur.  Ce  qu'il  y  avait  de  parlirulier  dans 
cet  ordre,  c'est  que  l'on  y  recevait  des  fem- 
mes qui  prenaient  le  uom  de  chevalercsses. 
Le  P.  Lobineau,  dans  son  Histoire  de  Bre- 
tagne, rap;)i)rle  une  liste  de  ces  chevaliers, 
parmi  lesquels  on  trouve  une  duchesse  de 
Bretagne  qui  reçut  le  collier  en  \h\\\  une 
Pélronille  d'-  Jlaillé,  deux  demoiselles  do 
Penlioel  et  du  Plessis  Augieren  1133,  el  une 
Jeanne  de  Laval  en  l'i-oS.  Le  même  auteur 
rapporte  aussi  une  histoire  du  même  duc 
Je.in  IV  eu  vieilles  rimes,  composée  pir  M" 
Guillaume  de  Saint-André,  licencié  en  décret 
scolaslique  de  Dôle,  notaire  apostoli(|ue  et 
impérial, conseiller  et  ambassadeur  du  uiênia 
duc,  où  il  est  parlé  de  c^l  ordre  en  ces 
ternies  : 

A  Nantes  ses  gens  envoya, 

.Mais  de  ta  rendre  on  dtloii 

Jusiiu'à  la  Nativité 

De  saint  Jean,  c'est  vérité. 

Deux  jours  avant  ne  plus  ne  moins 

iîntra  à  Nantes,  j'en  suis  cerlatn.<. 

Et  fut  reçu  à  grand  honneur 

Comme  leur  Prince  el  vrai  Seigneur  ; 

Ne  sembla  pas  être  exil 

Quand  l'en  lit  rendit  Pîremil; 

Toufj'ou  assis  en  la  forêt 

Se  rendit  l'en  et  sans  arrél , 

Lors  fil  mander  tous  ses  prélats 

Abbés,  et  clercs  de  tous  Eiuts, 

Barons,  chevaliers  escuiers. 

Qui  lors  purtoisnt  nouveaux  colliers 

De  moult  bel  port,  de  belguise; 

lit  étoit  nourelle  devise 

De  deux  lîolets  brunis  et  beaux 

Couples  ensemb'e  de  deux  fermeaux, 

Et  au  dessous  êloit  l' Ermine 

En  fijure  el  en  couleur  fine 

En  deur  cedules  avoit  tscript 

A  ma  vie,  comme  fui  dit 

L'un  mot  est  blanc  l'autre  noir 

Il  est  certain;  tien  le  pour  voir. 

Pour  ce  qui  est  des  raisons  qu'eut  le  duc 
de  Bretagne  il'iustitucr  dt  ordre  et  de  choi- 
sir la  devise  d  ma  «l'c  ;  c'est  une  chose,  dit 
le  P. Lobineau,  sur  quoi  chacun  peut  donner 
carrière  à  ses  conjectures,  les  auteurs  n'en 
ayant  rien  dit.  Il  croit  que  le  duc  voulut 
marquer  par  ces  deux,  couronnes  el  par  celte 
devise  qu'il  avait  conquis  deux  fois  la  Bre- 
tagne, et  qu'il  avait  exposé  sa  vie  pour  cou- 


(1)  Voy.,3L  la  fin  du  vol.,  Il*  111. 


(-2)  Voy.,  à  la  fia  du  vol.,  n*  112. 


45:; 


DICTIONNAIRE  DKS  OnORES  RF.IJCIEIIX. 


4:.c 


sorvor  sa  Jigiiilé,  et  que  par  les  hcriiiincs 
et  lo  rollicr  à  iliiiîiics  piiulaiiti's,  il  ;iur;iil 
pu  faire  allusinn  par  l.i  au  li''\riir  b'aiic  de 
Charles  lie  Irtois  qui  .iliamlomia  son  mailrc 
avaul  la  kuaillc  d'Auray. 

Ce  l'ère  ajoute  que  les  ducs  de  Bretaoïno 
ajouliVenl  dans  la  *ultc  au  collier  de  I  Her- 
mine un  autre  collier  de  moindre  prix,  qu'ils 
appclèronl  le  collier  de  l'Kpi,  et  qui  était 
roniposc  d'épis  de  blé  et  Icrniinc  par  une 
licrmine  pendante  attachée  au  collier  avec 
lieux  chaines,  lequel  collier  était  ordinairc- 
iiuMit  (Pargent.  Ceux  qui  ont  Irailé  des  or- 
dies  militaires  ont  rappurlé  riiistilulion  de 
rel  ordre  do  l'Kpi  au  duc  François  I",  qui 
l'inslilua  vers  l'an  IV.JO,  selon  quelques-uns  ; 
et,  selon  d'autres,  l'an  liV8;  mais  le  l\  I.o- 
liineau,  parlant  de  ce  prince,  dit  que  les  An- 
glais ayant  menacé  la  lîietauno,  il  en  vint 
quelques-uns  trouver  ce  duc  l'an  1VV7  pour 
séclaircir  apparemment  avec  lui,  et  que  ce 
jrimc  leur  lil  de  riches  présents  atin  de  les 
gagner  ou  de  les  apaiser,  el  donna  même  à 
quel()ues-uus  le  collier  de  son  ordre  de 
riîpi,  et  que  c'est  la  première  fois  qu'il  est 
parlé  de  cet  ordre.  Ainsi  il  était  institué 
avant  l'an  iVtS. 

iMais  ce  que  le  P.  Lobineau  ajoute  que  ce 
«lui  donne  lieu  de  croire  qnc  le  collier  tissu 
d'épis  de  blé  peut  avoir  été  invente  par  le 
duc  François  1  '  pour  être  distribue  aux 
geutilshomnu's  nioins  dislingues  que  ceux 
à  qui  l'on  donnait  des  colliers  d'or  et  d'ar- 
gent composés  d'hcrmiiios,  ilc  ciiî;ronnes 
el  de  cbainetics.  ne  nie  parait  pas  juste, 
puii-qu'lsabcau  d'Ecosse,  femme  de  ce  prince, 
est  r.  présentée  dans  l'église  cathédrale  de 
Vannes  avec  le  collier  de  l'Hpi,  quoiqu'elle 
eût  n  çu  aussi  en  14-17  le  colli;  r  de  l'ordre 
de  l'Hermine,  et  que  le  duc  François  II  por- 
tail aussi  toujours  le  cnllier  de  Tordre  de 
l'Fpi,  au  lieu  de  celui  de  l'Hermine.  Les  au- 
teurs qui  ont  traité  des  ordres  de  chevalerie 
ont  eu  d'autres  sentiments  que  le  P.  Lobi- 
neau, el  même  leurs  sentiments  onl  été  par- 
tagés. Les  uns  onl  cru  que  le  duc  François  I"' 
av.iil  institué  cet  ordre  et  pris  la  même  de- 
vise que  celui  de  l'Hermine  pour  faire  con- 
iiailre  sa  vertu,  sa  grandeur  et  jon  courage, 
ri  qu'il  se  serait  plutôt  laissé  tuer  que  de 
commellic  une  niéihantc  action  (jui  iiûl  ter- 
nir sa  vertu,  désignée  par  la  blancheur  de 
riieruiiiic,  qui,  se  voyant  poursuivie  (  t  ren- 
contrant de  la  boue,  se  laisse  plulo!  prendre 
que  se  souiller.  D'autres  onl  cru  qu'il  avait 
él.ildi  cet  ordre  pour  marquer  le  soin  que 
lui  el  ses  prédécesseurs  avaient  pris  pour 
rendre  leur  p.iys  fertile  en  toutes  sortes  de 
grains,  li'autres  enliu  ont  préicnilu  ((u'il 
institua  rel  ordre  pour  montrer  la  dévotion 
qu'il  portail  au  saint  sacrement,  <\uc  ces  e|iis 
de  ble  représeiitinl  les  espèces  du  pain  sous 
lesquelles  nmis  l'.idorons  ,  et  qu'il  joignit  ,"i 
ces  epis  une  ln-rmine  (11,  pour  l'aire  souve- 
nir les  chevaliers  qu'ils  devaient  plutôt  mou- 
rir que  di'.  se  souiller  cl  se  ploager  dans  les 
ordures  du  péché.  Ainsi  chacun  a  donné  car- 


rière à  ses  conjectures,  cl  c'est  sans  aucun 
ronilemenl  <)ue  l'un  a  mis  cet  ordre  sous  la 
règle  de  saint  Augustin. 

l'oy.  Favin,  Théùtre  d'honneur  et  de  che- 
valerie. Menuénius,  du  lîelloy,  Ciiusliniani, 
Sclioouebek  et  llermani,  dans  leurs  lits!, 
des  Ordres  tnilitiiires;  et  le  P.  Lobineau  dans 
son  llisinirc  de  llrctague. 

HFUMITKS.   Voi/.  Eumites. 

HIÉUONY.\llTliS,  Vuy.  Iicrome  (  EnuiTF.s 
DE  Saint-). 

niPPOLYTE  (Ordre  de  la  Charité  dk 
Saixt-). 

Environ  l'an  loSJ,  sous  le  pontificat  de 
Grégoire  XllI  ,  un  saint  hiunmc  nommé 
IJernardin  Alvarez  ,  bourgeois  de  la  ville 
de  Mexi  |ue  aux  Imles  occidentales  ,  animé 
du  même  esprit  et  de  la  même  compassion 
envers  les  pauvres  malades  que  saint  Jean 
de  Dieu,  s'associa  quelques  personnes  pieu- 
ses et  dévoles  pour  eu  avoir  soin.  Il  b)nda 
un  hôpital  hors  des  murs  el  à  quelque 
dislance  de  relie  ville,  avec  la  permission 
de  l'archevêque,  cl  le  dédia  en  l'honneur  ilo 
saint  Hippolyte  martyr,  patron  de  la  ville  do 
Mexique,  en  mémoire  de  ce  que  le  culte  des 
idoles  y  fut  aboli  el  qu'elle  tomba  entre  les 
mains  des  chrétiens  le  13  août,  jour  auquel 
ri'glise  célèbre  la  fêle  de  ce  saint.  Hernardin 
dressadcs  règlements  pour  ceux  qui  s'étaient 
consacrés  avec  lui  au  service  des  pauvres 
malades ,  et  il  en  demanda  la  confirmalion 
au  papo  Grégoire  \II1,  après  qu'ils  eurent 
été  examinés  par  l'arche»  êquc.  Le  pape  les 
a|)prouva  aussi  bien  que  la  fondation  el  l'é- 
rection de  cet  liôpital  ;  mais  avant  que  les 
lettres  en  fusscnl  expédiées,  ce  pt^ntife  mou- 
rut, et  elles  ne  furent  signées  (|ue  p.ir  son 
successeur  Sixte  V  ,  qui  approuva  tout  ce 
qu'il  avait  f.iit  en  faveur  de  celhôpilal.  L'on 
bâtit  ensuite  deux  autres  hôpitaux  dans  la 
même  ville,  dont  l'un  fui  dédié  au  Saint-Es- 
prit, el  l'autre  fut  appelé  l'hôjjilal  royal,  à 
cause  qu'il  fut  bâii  par  les  libéralilés  du  roi 
d'Espagne.  Il  y  en  eut  aussi  un  autre  dans 
la  ville  de  Pueblesdc  Los  .Vngelos,  sous  lo  li- 
tre de  Saint-ltoch,  et  le  nombre  de  ces  hôpi- 
taux augmentant,  ils  s'unirent  ensemble  cl 
formèrent  une  c  mgrégalion  sous  le  litre  de 
la  Charité  de  Sainl-Iiippolyle,  à  cause  du 
premier  hôpital  qui  avait  été  liâli  sous  l'in  vo- 
cation de  rc  saint  martyr,  qu'ils  rccoiinnrcnl 
pour  leur  chef.  Le  pape  Clément  \  111,  ayant 
appris  le  pnigiès  (|ne  iaisaient  (  es  hospiia- 
liers,  et  la  chariié  qu'ils  exerçaient  einei  s 
les  malailes,  leiiraccoida  par  un  bref  du  2 
avril  l.jll'»  tous  les  privilèges,  grâces  el  pré- 
rogatives dont  jouissaient  les  Frères  de  la 
Chanté  de  Sainl-Jcan  de  Dieu,  (|ui  étaient 
pour  lors  inconnus  aux  Indes  occidentales, 
où  ils  n'avaient  pas  encore  passé,  lcs<|uels 
privilèges  leur  avaient  été  accordés  par 
ses  prédécesseurs  Pic  V,  Grégoire  XIII,  el 
Sixte  V. 

Ces  hosjjitalicrs  de  la  charité  de  Saint-IIip- 
polytc  ne  t'aisai.Mii  (^uc  deux  vœux  siuiplcj, 


(I)  Voï  ,àb  nii  d;«  vol.,  n"  1!3. 


i57 


IIlP 


iim 


4.5f! 


l'un  dethasielc  il  l'aiiiic  de  pauvreté;  mais, 
cuiniiic  ils  ne  se  crojaieiii  p.is  pourcelj  enga- 
ges à  la  congrégalion,  ils  en  smljiieiil  quand 
bon  leur  semblait.  C'esi  ce  qui  obliicca  leur 
{générai  (<iui  prenait  la  qualité  de  frère  ma- 
jeur) ei  les  hospitaliers  tant  de  l'hôpital  de 
SiiirU-Hij)poljte  que  de  sept  autres  qui  en 
dépendaient,  d'avoir  encore  recours  au  pape 
Clément  VIII  pour  aviser  au^t  moyens  d'i^m- 
[échor  les  hospitaliers  de  quiUer  l'inslilut. 
Le  pape  crut  pouvoir  l'empccheron  les  obli- 
geant [)ar  une  bulle  du  premier  oclobie  1594- 
de  faire  à  l'avenir  les  vœux  de  perpétuelle 
hospitalité  et  d'obéissance,  au  lieu  de  ceut 
di;  chasteté  et  de  p  luvreté  qu'ils  l'.iisaienl 
auparavant,  et  ordonna  que  ceux  qui  les 
avaient  faits  et  qui  étaient  acluellement  dans 
la  eongiégali.Hi  reconimenceiaienlainsi  leurs 
»œiix. 

Ma  s  il  est  aTivc  dans  la  suite  un  autre 
inconvénient  de  celte  sorte  de  manière  de 
s'engager  dans  celle  congrégation  ;  car  il  y 
en  eul  qui  transgressaient  et  la  chasteté  et 
la  pjiuvrtlé  ,  sous  prétexte  qu'ils  n'étaient 
obligés  qu'à  la  perpétuelle  hospitalité  et  à 
l'obéissance  ;  et  ils  prétendaient  même,  com- 
me n'éianl  pas  religieux,  qu'ils  pouvaient 
sortir  de  lacongrégalion  quand  boa  leur  sem- 
blait. C'est  ce  que  le  frère  .ean  Cabrera,  pro- 
eureur  général  de  cet  nrlre,  exposa  au  pape 
Innocent  XM  l'an  1700,  et  il  supplia  aussi  ce 
pontife  de  changer  la  umnière  d  élire  le  gé- 
néral. Clément  V'III  avait  ordonné  que  l'élcc- 
lions'en  ferait  par  vingt  des  plus  anciens  de 
la  congrégation  ,  et  (jue  l'on  aurait  égard  à 
leur  ancien  ncté  du  jiiur  qu'ils  auraient  fait  les 
deux  vœux  de  perpétuelle  hospitalité  et  d'a- 
béissance  ;  mais,  comme  parmi  ces  anciens 
il  y  en  avait  sans  expérience,  qui  ne  con- 
naissaient point  l'étal  de  la  congrégation,  et 
que  souvent  ils  élisaient  des  personnes  peu 
capables  de  la  gouverner,  ce  procureur  gé- 
néral demanda,  au  nom  de  ses  confrères,  la 
]  erinissionilefa  re  des  vœux  solennels  sous  la 
icgie  de  saint  Augustin,  afin  d'engager  par 
des  lieud  indi  solutiles  les  hospitaliers  dans 
la  congrégation,  et  qu'au  lieu  des  vingt  plus 
anciens  qui  devaient  élire  le  général  ou  ma- 
jeur, on  en  choisirait  vingt  autres  des  plus 
CApérinientés  et  plus  capables.  Le  pape  eut 
seulement  égtrJ  à  la  première  deaiande,  et 
par  une  bulle  du  20  mai  1700  il  permit  à  t  es 
hos|;italiers  de  la  Charité  de  Suint-Hippoljle 
de  faire  les  vœux  solennels  de  chasteté,  pau- 
vreléfObéissanceeld'hospilalité,  sous  larégle 
de  saint  Augustin,  et  érigea  leur  congréga- 
tion en  ordre  religieux.  Il  les  initsousla  pro- 
tection du  saint-siége,  et  confirma  tous  les 
privilépes  qui  leur  avaient  été  accordés  par 
ses  prédécesseurs,  et,  pour  ce  qui  regardait 
l'élection  du  majeur,  le  pape  n'y  voulut  rien 
changer,  laissant  les  choses  comme  elles 
eiaienl  aup  .ravanl. 

Le  fn  re  Cabrera  fil  ensuite  sa  profession 
solennelle  entre  les  mains  du  vice-regent.en 
ayant  obtenu  la  permission  de  la  congiéga- 
lici!  des  réguliers, et  présenta  quelques  jours 

(1)   Vry.,  à  1;.  (indu  vol.,  n'  1 1  i. 

Dictionnaire  des  Ouuues  nFuciEUx. 


après  une  supplique  au  pape,  par  laquelle  il 
lui  exposait  qu'il  était  sur  le  po  ni  de  retour- 
ner aux  Indes,  et  qu'il  pri.iil  Sa  Sainteté  de 
lui  permettre  de  recevoir  la  profession  du  gé- 
néral et  des  autres  hospitaliers  de  sa  congré- 
ga  ion,  à  cause  que  l'on  devait  dans  peu  pro- 
céder à  l'élection  d'un  général.  Le  pape  ne 
lui  accorda  (las  encore  entièrement  sa  de- 
mande, car  il  lui  pcriuil  de  recevoir  seule- 
ment la  profession  du  général  ou  du  vicaiie 
général;  mais  il  ordonna  que  les  autres  frères 
la  ferjient  entre  les  mains  du  général  ou  du 
vicaire  général,  ou  doceux  qui  seraient  com- 
mis par  eus  pour  cet  effet,  etijue  l'éleetion  du 
général  se  forait  au  lieu  et  en  la  manière  ac- 
coutumés par  ceux  qui  avaient  droit  de  la 
faire  selon  leurs  constitutions  et  statuts,  qui 
seraient  observé;,  comme  il  est  plus  au  long 
porté  parle  bref  de  ce  pontife  du  3  juille' ito 
la  même  année  ;  et  sa  bulle  fut  reçue  en  Es- 
pagne, le  '27  novembre  aussi  de  la  niémeiin- 
née,  par  le  conseil  des  Indes,  qui  e!i ordonna 
l'exécution.  Clément  XI  ac(orda,  l'an  1701,  la 
communication  des  privilèges  des  orilies 
mendiants  et  de  la  congrégation  des  Clercs 
Ministres  des  inlrmes,  à  ces  hospitaliers  d« 
la  Charité  deSaint-Hippolyte.  Leur  habit  est 
semblable  à  celui  des  frères  de  la  Charité  do 
Saint-Jean  de  Dieu,  et  ne  diffère  que  par  1 1 
couleur  qui  est  tannéi'  (1). 

Pliilipp.  Bonanni,  CaCulog.  Ord.  religion, 
part.  I.  BuU.  Innocent  XII  et  Cléinenl  XJ,  et 
Mémoires  envoyés  de  Rome  en  1709. 

HîHSAUGE  {Congrégation  d')  en  Allemagne. 
L'abbaye  d'Hirsauge  en  Allemagne  a  été 
autrefois  chef  d'une  Horissanle  congréga- 
tion ,  qui  commença  vers  l'an  1080  par  lu 
zèle  de  sa  nt  Guillaume,  qui  fut  le  restaura- 
teur de  la  diseipline  monastiijue  en  ce  pays. 
IZelte  abbaye,  située  dans  le  dioi  èsc  de  Spire, 
reto;iiiaît  pour  fondateur  le  comte  lîrlalride. 
H  était  père  de  Noling,  évéque  de  Vercel , 
qui,  ayant  apporté  dans  sa  cathédrale  le 
corps  de  saint  Aurèlius,  évé(iue  de  llediciine 
en  Arménie  ,  en  voulut  ensuite  enrichir  sa 
patrie  en  le  porlanl  secrètement  en  Alle- 
magne.!! y  avait,  pas  loin  du  château  de  s:in 
père,  un  orato're  dédié  à  saint  Nazaire  :  c'é- 
tait dans  ce  lieu  que  Nor  ing  voulait  faire 
reposer  ces  maintes  riiliques  ;  mais,  d  ins  le 
chemin,  un  aveu:;le  ayant  recouvré  la  iu:i 
par  l'iiitcrie'^sion  de  saint  Aui  élius,  le  comte 
lîrlafride,  touché  do  ce  miracle,  fit  bâtir  un 
monastère  au  lieu  même  où  le  miracle  était 
arrivé,  et  en  jeta  les  fondements  avec  son 
flis  Ermenfride  l'an  830.  Mais,  comme  il 
voulait  le  rendre  un  des  plus  superbes  et 
des  plus  magnifiques  de  l'Alemagne,  il  ne 
fut  achevé  que  sejil  ans  après,  l'an  837  ou 
83S.  Ou  y  mit  douze  religieux  qui  furent 
tirés  de  l'abbaye  de  Tulde,  auxciuels  on 
donna  pour  abbe  L'iilperd.I'our  lors  l'église 
lut  consacrée  par  Olgar,  archevêque  de 
Mayence,  en  présence  d'un  grand  nombre  d.î 
prélals  et  de  seigneurs  qui  .ivaiLUt  été  in- 
vités  à   cette  cérémonie    par  le  comte  Erla- 


11. 


15 


^„                               DiCTiONN.\mK  ors  onnnES  ur.Lir.frcx.  tno 

,.       .        i.-   i-,-»    ^iiifiii  «iiiip   il  ne  mit  voir  sans  douleur  les  ruinos 

rndo    cl  l'on  trnn.rorn    .^"^^  ^  ^''^^^^^     I  do    e  ..',  'nn't' re.  ,u..  les  .nuèlres  .le  ce  cc.„e 

dohée  a   sa.nl     ''•'^  «,'  -»;;     Vlu^reùn^^  .vaicnModail  on  cl   cial.  Ce   prince  s'.,,)- 

corps  d-  .0  .^•';'^'-'  ,^  \"''V^  ■' -^  ;'j'j^,  slinV  >li,,u,.  à  chercher  le  corps  de  saint  Aurélius. 

N  ::;;  r",'"""  .:,;  I  r  ..."  riU   e'n  21  1,^^  ron  avni.  caché  du  .e.np.  des  irruptions 

^JZ.ll.e.    ''^.  '^"'",     '''','    ,1,.  re   inonasl^rm  des  Normands,    qui,   entre    tous   les  (  ruuei 

,eaM.sdonal,onsolen   elle   dece   .«o..asl^^^^^^  i         c.Mnmcttaienl  dans    toutes   sortes    d- 

..,„re  1rs  ma.ns  de  »  f  ^«  ];"'/''^7i[  \,  ^J    ^  \.„r,.,  s'atlacl.aien.  p  .rliculière.nent  à  p.o- 

"""  ""'.    et  h,!  a  fa  1  b      é  a^  rèlig    uï  faner  'tout  ce  qnM  y  ivai.  de  plus  saint  et  d. 

'^'^:uô\?i^T\^    alb^^''^'^  choir.r  un  pus  sacré,  les  cri.nes  ordinai.cs  nVla...  pas 

de  P'>"'"'J.f^';''^^,'V  -,.,,,,, n^i,, ère.  swlfisanls   pour  contenter  les  passions  bru- 

avouc  ou  défenseur  de  cl  ..u.nasierc.  ^  ^^^^  d'une  nation  si  feroee  et  si  barbare.  Ce 

La    discipline   rc^iu  lere    y   futinainlcnne      ,,,è,.icux  dépôt,   qui,  par  la   préeaniion  d.s 
diiis  toute  sa  vigueur  jusqu  en  1  an  J8S,  que      ^p|i„im,x  de  ce  lenips-là,  avait  échappé  à  leur 
IMlemasnc,  a,  rès   avoir  été  afll.gec  d  une      f^yç^^^^  f,ji  c.,fi„  trouvé  par  la  dili-once  de 
f;ra..dc   lamine,   se    trouva    dans  une  plus      ^.^     ,„,,   ,,i,i  ordonna  à  Adelberl  de  réparer 
{-rande  dé-olatiou    par   u.ie  ma  adie  coala-      ,.,.  ,„,„asière  et  son  église,  tant  pour  h  .iior.r 
gieuse  qui  suivit  celle  faniin.'  et  qui  enleva      j^,^  reliques  dccecrand  saint  que  pour  expier 
u\\  ^rand  nouilire  de  personnes  dans  luules      j^  crime  que  ses  ancélres  avaie.it  co  luuis  en 
les  i-roviuces.  Soixante  religieux  de  1  abbaye      jpiruisai.t  le  temple  de  Dieu  et  en  persccn- 
(iHirsau-een  ayant  clé  attaqués,  .nourureiil      ,;,„i  ses  ministres.  Le  coinle  obéit  au   pape 
av.c   leur   abbé,  et  il  n'en  resta  q^ie  douze  ,      ^^  rebâtit  ce   monastère,  mais  non  pas  avec 
qui  ne  purent  s'accorder  sur  le  chois  de  son      ^^^^^  j^  diligence  qu'il  devait  :  car  il  ne  fui 
suceesscur.    Les    idus    fervents  et    les    plus      ^^^  étal  d'être  habile  que  l'an  lO.io.  Il  y  lit 
zélés  {lour  la  régularité  élurent  Conrad,  qui      ^.^^^^^  douze  religieux  de  l'a!)baye  de  Kinsi- 
ful  confir.né  da..s  celle  dign;té  par  leveque      jj^^^^  ^^^  Suisse,  plus  connue  sous  le  nom  de 
de  Spire.  L  s  autres,  (lus  portés  au  relâche-      i^()irc-Daine  des  Er.nites,  aux  [ueU  on  donna 
ineni.  élurent  liberhanl,  cellérier  de  ce  mo-      .„„„.  ^bbé    Fridéric.   Ils    furent    rcru^    avec 
iiastére.    Mais   trois  religieux    de  son  p.irti      [,c^ucaup    d'humanité  par    le   comte    et   s.-i 
l'ava.il  abandonné  pour  reconnaître  leur  le-      fg,„„,p    Viluude,  qui  leur  fournireul  toiil  ce 
(jifiiue  supérieur,  il  se  relira  avec  deux  au-     „„;  ^.(^'it  „ccûssaiic  pour  leur  entretien  ;  cl 
1res  vers  le    comte  de  CaUe,  ennemi  de  ce     ^^^  j^  j^,,„pg  ^^^  acii  vèreul  l'église,  qui 

m  naslèrc,  qui,  profitant  de  celé  occasion,  „-^,aJi  p^s  encore  finie.  L'abbé  Fridéric  eui 
y  vint  à  main  armée  cl  en  enleva  loul  ce  |,ea„coup  à  soulTrir  de  ses  religieux,  qui, 
îju'.l  put,  qu'il  distribua  à  ses  soldats  sous  ^  .^  ,^j  ^^^,1^  f.,H  ,„i|ie  i„djg„iiés,  le  dépo- 
)r6le\le  de  conserver  les  biens  du  moiias-  j^^p^,,!  ^j  yiur.'ut  en  sa  place  sa:nt  Guillaume, 
1ère  pour  ensuite  les  reinellre  entre  les  ^^^^  y^^^^  religieux  du  monastère  de  Saiui- 
inains  d  Fberhard,  leur  légitime  abbe,  pre-  |£„„„çra„  ly  Uatisb  auie. 
tendant  que  Conrad  élait  un  usurpdleur.  j,  ^^^^^  originaire  de  Bavière,  et  fui  oiïerl 

Conrad  copendanl  demeurait  à  Hirsauge      par  ses  parents,  élnil  encore  jeune,  au  mo- 
avec  huit  religieux,  el  y  vivait  dans  des  m-      nnsiére  de  Saini-Kinmeran,  ou  les  rel  gieux 
(luiélud.-s  continuelles,  appréhendant  à  tout      vivaient    avec    beaucoup  de    liberté.   M  lis  , 
luoiiienl  quelque  cliosc  de  funesie  de  la  part      malgré   (  es  mauvais   exemples,    il  avançait 
de   son  per-écutcur.    Ses  craintes   n'elaient      néanmoins  tous  les  jours  dans  la  perfection  : 
pas  m  il  fondées;  car  Fberhard,  ne  pouvant      ce  qui  fiisail   que   les    méchants    religieux, 
souffrir   de   se  voir  plus  long'cmps  privé  de      qui  étaient  portes  au  rclâchemenl,  le   crai- 
i'abbaye  d'Hirsauge,   y   vml    de  nuit  la  se-      {rn.iieiit,  cl  qu'au  contraire  les  bons  et  les 
1  onde   année  de  son  élection,  avec  des  sol-      plus  p;irl'ails  le  chérissaient  cxtrcoicmenl.  Il 
dais,  dans  le  dessein  d'enlever  l'abbé  Conrad,      apprenait  avec  beaucoup  de  facilité  tous  les 
(iui,'cn  ayant  été  averti,  s  était  relire.  Eber-      arts  libéraux,  cl  il  excella  entre  auires  dans 
Iiard,  f.uhé   d'avoir   manqué   son   coup,   se      le  chanl  el  l'arl  de  compter,  comme  e.i  fo.il 
contc'nta  de  piller  le   monastère   sans    faire      foi  les  ouvrages  qu'il  a  lai-sés  sur  ces  sricn- 
aucnn   mal  aux  religieux,  et  se  retira  plus      ^pj   Qq  fui  Pan  10C9  ((u'il  fut  élu  abbé  d'Hir- 
c.hargc  de  crimes  que  de  dépouilles.  Conrad      sauge.  11  ne  refusa  pas  Ihoniicur  qu'on  lui 
i-jl  deux  ans  crranl  de  coté  et  d'autre,  jus-      faisait,  parce  qu'il  ignorait  la  dép  isition  do 
qu'à  ce  (lue,  son  compé'.i  eur  éiant  mort,  il      Fridéric  et  les  différends  qu'il  avait  eus  avec 
retourna  à  son  monaslère,   où,  avec  le  peu      ses  religieux  ;  mais,  les  ayani  appris  lorsqu'il 
de  religieux  qu'il  y  avait,  il  vécut  dans  une      fui  arrivé  à  Hirsauge,  il  alla  trouver  le  comte 
};rande   régularité,  nonobstant   les  persécu-      Adelberl    pour    l'exhorter   à    faire    rétablir 
lions  (fue  lui  suscita  le  comte  de  Calve,  qui,      Fridéric,   lui  représentant  que  personne  ne 
après   sa    morl,    autant  par  haine  que  (lar      pouvait  occiip  r  sa  place  tant  qu'il   vivrait, 
.ividilé,  s'empara  eiiliércmcnl  du  mo.la^tè^c,      n  ^.g  disposait  déjà  à  retourner  dans  son  mo- 
()u'il  réduisit  dan>  une  si  grande  dexil.ilio.i,      naslèrc   pour   ne    |ia.s   être  complice   de   ce 
qu'.l   fui   abandonné  des   n  jigicux   el   qu'il      crime  ;    mais    les    religieux    firent   tant   par 
resta  ai.isi  jusqu'en  l'an  tOba.  leurs  prières,  qu'ils  l'obligèroat  à  rester.  Il  y 

Dès  l'an  10'»'),  Je  pape  Léon  IX,  étant  en  consentil,  mais  à  condilion  qu'il  ne  serai 
Allemagne  cl  allant  à  .viayence,  logea,  à  ce  pas  béni,  cl  ne  prendrait  pas  la  plac-  do 
que  l'on  prelend,  chez  Adelb  ri,  son  nevc  i,  Fridéric  de  son  viv,..it  :  ce  t|ui  dîna  jus.iu  a 
touilc  de  Calve;  cl  ayaai  élu  avec  lui  à  llir-      l'année  suivante,  qu.',  Iridénc  clai.t  moil, 


m 


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HIR 


■m 


(Juillaumc  recul  publiquement  î.i  bénédic- 
lioii  des  mains  d'Henri,  évêque  (Je  Spire. 

Lorsqu'il  arriva  à  Hirsauge,  l'ctat  de  ce 
monastère  n'était  pas  encore  certain,  tant  à 
cause  des  brouillerles  qui  étaient  survenues 
entre  Fridéric  et  ses  reiigit  us  qu'à  cause 
de  l'inconstance  du  comte  Adi'lherl,  qui  n'a- 
vaii  pas  encore  restitué  les  biens  de  ce  n)o- 
nislère,  qu'il  retenait  depuis  un  si  long 
temps  ;  mais  Guillaume  sut  par  sa  prudtMice 
apporter  remède  à  ces  maux  11  fit  paraître 
tant  de  grandeur  d'âme  dans  les  adversités 
(lui  lui  arrivèient,  sa  piété  et  sa  dévdi'on 
furent  si  grandes,  et  son  zèle  si  ardent  pour 
def  ndre  et  maintenir  la  discipline  mo- 
iiasliquc,  que  c'est  avec  raison  qu'on  le  met 
jiu  nombre  des  plus  grands  boinmes  du 
xi""  siècle. 

Aussitôt  qu'il  cul  été  béni  abbé,  il  com- 
mença à  sonjjer  aux  moyens  de  pDUVoir  ré- 
tablir la  régularité  et  l'observance  dans  s  m 
monastère  et  remélier  aux  abus  qui  s'y 
étaient  glissés  ;  il  commença  par  examiner 
les  revenus  dont  il  jouissait,  afin  que,  s'ils 
n  étaient  pas  suffisants  pour  l'entretien  des 
rel  gieux  (comme  effectivement  ils  ne  t'é- 
taient pas,  puisqu'à  peine  pouvaient-ils  suf- 
fire pour  en  entretenir  quinze  ou  seize),  il 
pût  cliercher  les  moyens  d'y  suppléer  el  de 
leur  fournir  leur  nécessaire,  étant  Irès-per- 
L'.jadé  que  la  c.;use  ordinaire  du  relâchement 
est  le  manque  des  choses  nécessaires  à  la 
xie.  [/aulur.té  qui'  le  comte  Adelbrrt  s'était 
acquise  sur  les  reli;^  eux  était  si  grande, 
qu'ils  n'osaient  rien  faire  sans  sa  permission, 
en  sorte  qu'il  semblait  qu'il  lût  leur  supé- 
rieur et  qu'ils  fussent  obligés  de  lui  obéir.  Le 
saint  abbé,  ne  pouvant  sou'Trir  cet  abus,  lit 
si  bien,  qu'il  persuada  au  cemte  de  se  dé- 
sister (Je  Celle  prétendue  supériorité,  el  de 
donner  une  entière  liherié  à  son  monastère, 
afin  qu'élanl  indépendant  des  puissances 
séculières,  on  y  pûi  observer  avec  plus  de 
facilite  la  discipline  régulière  et  monastique. 
El,  afin  que  celte  indépen  lance  lût  plus 
stable,  il  la  fil  cotifirmer  par  le  pape  et  l'em- 
pereur. L'église  (jue  ce  comte  avait  c)m- 
Mieiicée  depuis  dix  aiis  étant  achevée,  elle 
lui  consacrée,  l'an  1071,parrévêquede  Spire, 
à  la  solliciialion  de  ce  seigneur.  Les  richesses 
de  ce  monastère  augmentèrent  avec  le  nofu- 
bre  des  religieux,  et  du  temps  de  saint  (juil- 
laumo  il  n'y  en  eut  jamais  moins  de  cent 
cinquante,  qiioi(iu'il  lût  souvent  obligé  d'en 
envoyer  pour  fonder  ou  pour  réformer  d'au- 
tres monastères;  car  le  nombre  était  aussitôt 
rempli  par  d'auires,  qui  prenaient  l'habit  à 
Hirsauge  pour  cire  ses  disciples,  entre  Is- 
«juels  il  y  eut  plusieurs  comtes,  marquis, 
barons  et  autres  gr-inds  se  gneurs. 

Ces  religieux  s'occupa  eut  jour  el  nuit  à 
chanter  les  louanges  d,;  Dieu,  à  prier,  à  mé- 
diter, el  à  l'élude  des  saintes  Ecritures.  Ceux 
qui  n'étaient  pas  propres  jjour  la  contempla- 
lion  des  choses  célestes  travaillaient  des 
mains  afin  d'éviter  l'oisiveté.  Ce  saint  aiibé, 
éiarii  j;ersuaiié  que  la  lecture  de  la  s.iinte 
Eciiliire  est  la  nourriture  de  l'àme,  établit 
douze  habiles  écrivains  pour  transcrire  les 


saintes  Ecritures  el  les  ouvrages  des  saints 
Pères.  Il  y  en  avait  aussi  d'autres  en  plus 
grand  nombre  qui  étaient  occupés  à  trans- 
crire d'autres  ouvrages,  et  il  y  avait  un  re- 
ligieux habile  en  toutes  sortes  de  sciences 
qui  avait  l'inspection  sur  les  uns  et  les  au- 
tres, qui  présidait  à  leurs  ouvrages  et  corri- 
geait les  fautes  qu'il  y  trouvait.  Mais,  quoique 
ces  religieux  aieni  tr.iiiscrit  un  nombre  in- 
fini de  volumes,  il  en  est  néanmoins  resié 
peu  dans  ce  monastère,  à  cause  que  saint 
fiiiillaume,  en  reformant  ou  fiindant  d'au- 
tres monastères,  y  envoyait  beaucoup  de  ces 
livres.  Outre  les  cenl  cin(|uanlc  religieux 
qui  étaient  dans  ce  monastère  sois  la  cori- 
duite  de  ce  saint  abbé,  il  y  avait  aussi  des 
frères  barbus  ou  convers  qui  éiaieni  des- 
tinés pour  le  travail  et  pourvoyaient  aux 
besoins  de  ceux  qui  ne  s'occupaient  qu'à  la 
contemplation.  Il  y  .'■vail  entre  eux  d'habiles 
ouvriers  en  toutes  sortes  d'arts  et  de  pro- 
fessions, comme  architectes,  maçons,  char- 
pentiers, menuisiers,  scul[)leurs,  forgerons, 
tailleurs,  corroyeurs,  cord  )nniers  et  plu- 
sieurs autres.  Saint  Guillaume  fui  le  [neniier 
qui  établit  ces  sortes  de  convers  en  Alle- 
magne. Ils  lui  furent  d'une  grande;  ulililé, 
car  ce  furent  eux  seuls  qui  firent  loi, s  les 
bâlidienls  du  nouveau  mouaslère  d'Hirsauye 
cl  des  autres  qu'il  f mda.  Il  fii  des  règlemenis 
particuliers  pour  eux  el  propoi  lionnes  à 
leur  occupation.  Tuules  les  nuits  ils  se  trou- 
vaient à  l'égiise  p  lur  chanter  matines,  mai-i 
elles  étaient  courtes,  à  cause  de  la  laligue 
qu'ils  avaient  eue  pendant  le  jour.  11  éait 
libre  ensuite  à  ces  convers  de  rciournir 
dormir,  mais  plusieurs  des  plus  fervents 
restaient  à  l'église  jusqu'à  ce  que  les  reii- 
(■ieux  du  chœur  eussent  achevé  leurs  mati- 
nes. Le  l-ndemain  de  grand  malin,  ils  en- 
tendaient la  mesS'^  ol  allaient  ensuite  au 
chapitre  pour  y  dire  leurs  coulpes.  Tous  les 
dimanches  il  y  en  avait  (]ui  communiaient, 
en  sorte  que  la  moitié  communiait  un  di- 
manche, et  l'auSre  inoiiié  le  dimanche  sui- 
vant; mais  aux  fêtes  solennelles  ils  commu- 
niaient tous,  et  si  qîjclques-uns  allaient  en 
campagne  et  qu'ils  ne  dussent  pas  revenir 
le  dimanche  suiv.int,  ils  communiaient  U? 
jour  qu'ils  partaient.  H  établit  aussi  des 
oblats  à  l'eseuipie  de  ceux  de  Cluny;  ils 
éiaient  dilïérenls  des  frères  convers,  en  ce 
que  ceux-ci  étaeiil  religieux  el  en  portaient 
l'Iiabit,  et  que  les  oblats  étaient  vêtus  en 
séculiers.  Il  lit  aussi  des  règlements  pour  eux. 
Ce  saint  abhé,  n'ometiant  rien  pour  main- 
tenir l'observance  léguiiàre,  voulut  l'aire  re- 
cevoir dans  son  monastère  les  coutumes  de 
Cluny  :  c'est  pourquoi  Ulric,  qui  était  proies 
de  (illuny,  ayant  été  envoyé  en  Aliemag  e  par 
saint  Hugues,  el  étant  revenu  voir  saint 
Guillaume,  (]ui  éiait  son  ami  ;  ce  saint,  pro- 
fit iiii  d'une  o'ca-.iou  si  iavorable,  le  pria  de 
vouloir  mettre  par  écrit  ce»  coutumes,  ce 
qu'il  fit  volontiers.  Il  y  a  à  la  tète  de  cci  ou- 
vr.ig',  qui  est  divisé  en  trois  livres  nus 
é,  lire  .îéuiciloirc  adressée  à  saint  Guillaume, 
où  Uiric  se  plaint  d'abord  d'un  aîius  qu'il 
dit  êire  lu  principale  cause  de   la   ruine  des 


403  DICTIONNAinK  HF.S  ORDRES  RELIGIEUX.  /,'„4 

niïinasl  rcs.  qui  p^l  île  recevoir  les  oiif.inls  tance  et  légal  du  saint-siége;  saint  Théngrr, 

iliinl  les  pères  el  les  mères  qui   en   avaient  é\èi|ue   de   Metz,    et  GéUeliard,   évéque   de 

uranil  nombre  (  herchaicnl    à   se  défaire  en  Spire. 

les    ulTiant  aux    riioiiaslèrcs  ,   avant    même  Ce  dernier  fut  d'abord  son  successeur  dans 

()u'ils  eussent  rusa;;('  de  raison,  prin(  ipali--  le  pouvernemeiil  d'Hirsauge,  avant  ijue  de 

ment  s'ils  en  avaient  (luclques-uiis  de   nian-  mouler  sur  le  siège   épiscopal  de  Spire.  Il  y 

cliots,  de   boiteux,   ou  (jui   eussent   quelque  maintint    l'observance  régulière  t|uc   saint 

aiiire  inconimodilé.I.a  r.iison  qu'il   apjiorie  l'iuiliaumey  avait  établie,  aussi  bien  que  dans 

P"ur  prouver  que  c'e>l  un  abus,  esl  (]ue  les  les  autres  monastères  de  sa  dépendance:   ce 

maisons  remplies  de  ces  invalides  ne  peuvent  <|ue  lirenl  aussi  les  abbés  Uruiion,  Volinar  et 

fiarder    aucune  réguLn  ito,  el   ([ue   l'obser-  Harlwige.    Mais,  sous   le  gouvcriiemenl   de 

v.iiice  n'est  exacte  (lue  dans  celle  où  le  plus  JMancgolde,  dix-septièine  abbé  d'Hirsauge, 

grand  nombre  de  religieux  esl  de  ceux   qui  ()ui  lut  élu  l'an  1157,  il  veut  quelque    divi- 

y  sont  entrés  en  âge  mûr,  de   leur  propre  sion  en're  lui  et   ses  religieux.  Ceux-ci  se 

iiioiNcnieiil,  et  exempts  de   ces  sortes    d'in-  plaignaient  de  ce  (]u"il  usait  envers  eux  d'une 

firmiiés  ou  défauts  de  nature.  trop  grande  autorité,  (]u'il   méprisait   leurs 

Mais,  comme  saint  Cjiiillaunie  trouvait  des  conseils  pour  suivre  ceux  de  ses  domoti- 
tliilieultés  dans  ces  coulumcs  de  Cluny,  qui  (]ues,  (ju  il  soutenait  dans  loul  ce  (ju'ils  fai- 
ne pouvaient  être  bien  expliquées  par  écrit,  saienl  au  préjudice  même  du  monastère,  ap- 
il  jugea  à  propos  d'envoyer  à  Cluny  des  re-  prouvant  jusqu'aux  insolences  excessives 
ligieux  qui  les  \issent  pratiquer,  ou  pour  (lu'ils  commeltaienl  tous  les  jours  contre  l.i 
m  eux  dire  qui  les  pratiquassent  eux-mêmes,  comuuin.iutc  ou  contre  les  particuliers,  <'l 
il  en  enioya  premièrement  deux,  et  ensuite  qu'au  lieu  d'y  mettre  ordre,  il  mullraitail 
deux  autres,  afin  qu'i  s  en  pussent  être  par-  encore  les  religieux  que  ces  mêmes  domes- 
r.iitemenl  instruits,  cl  qu'étant  plusieurs  ils  liciues  avaijnt  insultés.  Leurs  [ilaintes  u'î- 
pussenl  mieux,  les  retenir  cl  lui  en  faire  un  laienl  pas  sans  f.)ndeuu'nl  :  car,  un  jour  (|tm 
fidèle  rapport.  A  leur  retmr,  il  fil  assembler  cet  abbé  était  ab-eni,  un  de  ses  domestiques 
les  anciens,  et,  après  avoir  examiné  avec  ayanl  fait  quel<iuc  chose  qui  c'ait  contraire 
eux  les  coutumes  de  CUiiiy  el  entendu  les  re-  au  bien  du  m  inaslère,  un  religieux  l'eu  le- 
ligieux  qu'il  y  avait  envoyés  il  en  retr.incba  prit;  mais  le  domesliquc  recul  celte  correc- 
cc  qui  ne  convenait  point  aux  pratiques  du  tien  a*ec  tant  d'insolence  et  île  mépris  , 
pays,  au  climat  et  à  la  silualinn  des  lieux,  el  que,  se  jetant  sur  ce  religieux,  il  lui  diinna 
(,'arda  celles  qui  lui  convenaient,  sur  les-  (lu.lques  iou;s  el  le  jeta  à  ses  pieds;  ce  qui 
ijuclles  il  en  dressa  d'autres  qu'il  divisa  en  (il  que  le  prieur  lit  mettre  en  prison  ccl 
lieux  livres,  qu'il  appela  les  t'uM/i(;/i('j«  (/'//(■/•-  liomme,  (jui  y  resta  jusqu'au  retour  de 
snwje.  l'abbé,  qui,  au  lieu  de  corriger  un  tel  excès. 

Le  zèle  de  saint  Guillaume  ne  se  renferma  lui  donna  la  liberté  et  lit  mettre  en   sa   plare 

pas  dans    le  seul    monasière  d'flirsauge  :  il  le  relijticux  (]ui  avait  ele  frappé  ;  ce  qui  ir- 

en  fonda  cl  réforma  plusieurs    autres,  dont  rita  davantage  les  religieux  contre  leur  abbe. 

les   plus    considérables   sont    Uichemliarcb,  Un  procédé  si  indigne  el  si  injuste  aurait  eu 

Saint-Georges  dans    la   Forêt-Noire,  Saint-  sans   doute   de    lâcbeuses   suites;  mais    par 

Martin    dans  la    lîavière,    lù'pbord    dans    la  l'entreiiiise  de  saint  Hildegarde  ils  se  réuni- 

Thiiringe,  Zuvifaiten  dans  la  Souabe,    Wil-  nnt  el  vécurent  dans  la  suiie  en    bonne   in- 

beim  et  Laven  dans  la  Carintbie,  qui  furent  telligence.  Cette  division,  qui  avait  altère  l.i 

fondés  ;  Schaluse,  l'eler>liausem  el  Campcrg,  chanté,  avait  aussi  donné  queliiue  entrée  au 

qui    furent   rétablis;    Allof  au    diocèse    de  relâthemcut  ;  mais  par  les  soins   de  l'abbe, 

Strasbi'urg,  Isncn  au  diocèse  de  Constance,  qui,   malgré  cet  amour  déréglé  qu'il  avail 

ri  Hasung  dans  la  l'huringe,  qui  furent    ré-  pour  ses  domestiques,  élail  fort  zélé  pour  I.  s 

l..rmés.  'l'riibème,   dans  ses  Chroniques  de  observances   régulères,  les  religieux  repri- 

l'abbaye  d'Hirsauge,  nomme  viiigl-lrois  mo-  renl  leur  première  ferveur,  et  s'attaclièrent 

naslères  ((ue  ce  saint  fonda  do   nouve.iii,  et  plus  (jue  jamais  à  la  pratique   de  leur  règle. 

soi\ante-neul  (lu'il  réforma,  dans  lesquels  il  iiupeil  cl  Conrad,    qui   lui   succédèrent    de 

lit  observer  les  coutumes   d'Hirsauge.    Il  fit  suiic,    y     maintinrent  aussi    la    régularité; 

aussi   société  avec  plusieurs  monastères   de  ma  s    Henri,    leur  successeur,   qui    fut   élu 

dilTerenls  ordres,  comme  l'église   cathédrale  Lan  1IS8  après  la  mon  deC  wiiad,  se  mil  plus 

de  l^aniorbery,  dc'sseï  vie  par  les  Itenedicliiis,  en  peine  du  lemjiorcl   «[ue    du   spirituel,    en 

les   abbavcsd;;   Cluny,  de    .Marmmitier,    de  sorte  ()iie  pendanl  huit  années  qu'il  lut  ablie, 

Saint-Hénigne   de  Dijon,  de  Saiiil-\  iclor  de  l'observanc"  regul.ére    lut    (iies  pu!   bannie 

Marsiilb'.de   Saint-Max  min,    et   de   Saint-  de  ce  mouastéie.  Il  reconnut  à  la  tin  la  l.iuo 

M.ilhiiis  à  Irèves,  de  S.jiiil  TanLileon   à  Co-  qu'il  avail  faite,  et,  voulant    en    f.iire  peui- 

logiic,  de  S,\iiit-Ein,.riin   de    Katisbonne,   et  tenu!,  il  se  démit  de  son  abb.iye  eu   ll'Jti,  se 

avec  les  cbaiioincs  réguliers  de  Marb.ic  el  de  cuntciilanl  du  |irieuré  de  Uotli,  que  les  rel.- 

rranckenlal,  etc.  Kiilin,  après  avoir  été  abbé  gi-  ux  d'Hirsaugi'  lui  laissèrent  pour  son  en- 

d'Ilirs.Migc  pendant  vingt-deux  ans  el  s'éirc  lietii  ii, du  co,l^enlemenl  de  l'abbe  .Mai  quard, 

a<  qiii.t  le  litre  de  Kestiur.iteur  île    la    disri-  (|ui  fut  son  successeur. 

Iiioe  monasiiiiue  en   Allenuigne,   Il    mourut  Oiui-ci  était  assez  (lorté  pour   la    régula- 

le  6  juillet   lU'.H.I^cs    plus    iilu,trcs   de    ses  rite,  mais  il  ne  put  exécuter   le  dessiin  (|u'il 

UiDCiples  lurent  saint 'Ihiémon,  archevêque  avait  de  I,i  léiablir  dans  sou  monastère,    eu 

Ue  Salzbeurg  ;  Gcbéhard,  cvéquc   de  Cons-  étant   empiîché  par  les   alïaires  qu'il  eui  ù 


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soutenir  conlre  le  com(c  Adclhf^rl,  qui  en 
^'lail  avoué,  el  qui,  au  lieu  d'en  être  le  pro- 
Iccleur,  s'érigea  en  lyran  et  voulut  lui  ôter 
tous  les  privilèges  cl  inimunilés  dont  il  jouis- 
sait. Il  usa  de  violence  envers  les  religieux 
en  plusieurs  rencontres  ;  et,  comme  il  leiuiit 
le  parti  de  Philippe  de  Souabe,  qui  avait  clé 
-^  élu  pour  empereur  par  quelques-uns  de  son 
parti,  et  que  les  religieux  ne  voulaient  point 
reconnaître  à  cause  des  censures  que  le  pape 
Innocent  III  avaient  fulminées  contre  lui,  il 
les  chassa  tous  du  monastère,  et  les  réduisit 
dans  une  si  grande  nécessité,  qu'ils  avaient 
à  peine  du  pain  et  de  l'eau. 

Il  y  eut  dans  la  suite  qui  lijues  abbés  qui 
tâchèrent  d'apporter  quelque  réforme  dans 
ce  monastère;  mais  ce  fut  inutilement.  Il  y 
eut  d'autres  abbés  et  en  plus  grand  nombre, 
qui,  par  le  mauvais  excn)ple  qu'ils  donnaient 
eux-mêmes  aux  religieux,  les  enlretenaienl 
dans  le  relâchetnent  :  en  sorte  que  les  Cou- 
tumes de  saint  Guillaume,  si  connues  sous 
le  nomdeCoulwnesd' llirsauge,  el  qui  avaient 
servi  de  règle  à  tant  d'autres  monastères,  y 
étaient  entièrement  abolies  et  même  incon- 
nues, lorsque  Wolfram,  trente-huit  èmeabbc, 
introduisit  dans  ce  monastère  d'Hirsaiige  la 
réforme,  qui  avait  commencé  dans  c>lui  de 
Molk  au  temps  du  concile;  et,  l'an  li57,  ce 
même  abbé  voyant  que  cette  congrégation 
de  Molk  ne  pourrait  pas  subsister,  il  y  fit 
recevoir  la  réforme  de  Bursleld,  dont  nous 
parlerons  dans  la  suite. 

Joau  Trilh.,  Chronic.  Ilirsnuj.  Joaon.  Ma- 
billon,  Acta.  SS.  ord.  S.  Bened.  s;  eut.  \], 
tom.  Il,  e/  Annal,  ejusd,  ord.  li>m.  lil  it  W . 
Buceliii,  Menolog.  Bened.  el  A</uil.  Benedict. 

HOMBOUKtî.  Voy.  Cologne. 

HONOUAT  (SAnr-).  Voy.  Tarasi:o\. 

HOCITAL  D\L  LA  SAINTK-ÏKINITÉ  (PuÉ- 

TBES-DUVRlEns    I)E  l').      Voi).    C1.OU    (SACilÉ-). 

HOàPlTALlEKS  DE  (:LEUM0NT.  Voy. 
Loches. 

HOSPITALIÈUES,  etc.  Voy.  leur  désigna- 
tion particulière,  comme  le  nom  de  lieii,  de 
corporation,  etc. 

HOSPITALITÉ.  Voy.  Jea>  de  Dieu. 

HOTEL-DIEU  DE  PARIS  (Heligikuses  hos- 
pitalières UE  l'),  et  autres  du  iitcme  ins- 
titut. 

Nous  avons  vu  ailleurs,  en  parlant  de 
quelques  hôpitaux,  qu'ils  étaient  desservis 
coiijoiiiiemeul  par  des  religieux  et  des  reli- 
gieuses qui  avaient  leurs  habitations  sépa- 
rées. C'était  la  pratique  dans  tout  l'Occident, 
du  temps  du  cardinal  Jacques  di-  Vitry,  qui 
mourut  vers  le  milieu  du  xiii'  siècle,  et  liiii, 
parlant  des  ordres  hospitaliers,  dit  qu'il  y 
avait  un  grand  nombre  de  congrégaiions 
d'Iioiiimes  el  de  femmes  qui,  renoiiçanl  au 
siècle,  derneuraicnl  dans  les  léproseries  et 
les  hôpitaux  pour  ser\ir  les  malades  el 
lespauvies,  vivant  soui  la  règle  de  saint 
Augustin,  sans  propre  cl  en  commun  , 
obéissant  à  un  supérieui"  ,  el  promettant 
à  Dieu  une  continence  pei  peiuelle.  Les  hom- 
mes demeuraient  séparés  des  femmes  ,  ne 
maat:cant  pas    mêuie  cusemble,  et   vivant 


dans  une  grande  retenue  et  une  grande 
pureté.  Les  uns  cl  les  autres  assistaient 
aux  heures  canoniales  ,  tant  de  nuil  que 
de  jour  ,  autant  que  riiospitalité  el  le 
soin  des  pauvres  le  pouvaient  permelire. 
Dans  les  grandes  maisons,  où  le  nombre  des 
frères  ei  des  sœurs  était  plus  grand,  ils  s'as- 
semblaient fréquemmenl  en  chapitre  pour 
reconnaître  publiquement  leurs  fautes  et  en 
recevoir  la  correction.  Ils  se  faisaient  faire 
la  lecture  pendant  qu'ils  mangeaient,  gar- 
daient le  silence  dans  le  réfectoire,  et  dans 
d'autres  lieux  à  des  heures  prescrites,  et 
avaient  plusieurs  autres  observances. 

Tels  étaient  autrefois  une  infinité  d'hôpi- 
taux qui  étaient  desservis  par  des  religieux 
et  des  religieuses,  et  le  cardinal  de  Vitry  a 
voulu  sans  doute  parler  des  religieuses  de 
1  Hôtel-Dieu  de  Paris,  lorsqu'il  a  dit  qu'il  y 
en  avait  qui,  se  faisant  violence,  souffraient 
avec  joie  et  sans  répugnance  les  puanteurs, 
les  ordures  et  les  infections  des  malades,  si 
insupportables,  qu'il  lui  semblait  qu'aucun 
genre  de  pénitence  ne  pouvait  cire  comparé  à 
cette  espèce  de  martyre.  Car  il  n'y  a  personne 
qui,  en  voyant  les  religieuses  de  l'Hôlel-Dieu 
non-seulement  panser,  nettoyer  les  malades, 
faire  leurs  lits,  mais  encore  au  plus  firt  do 
l'hiver,  casser  la  glace  de  la  rivière  qui  passe 
au  milieu  de  cet  hôpital,  et  y  entrer  jusqu'à 
la  moitié  du  corps  pour  laver  leurs  linges 
pleins  d'ordures  et  de  vilenie,  ne  les  regarde 
comme  autant  de  saintes  victimes,  qui,  par 
un  excès  d'amour  el  de  charité  pour  secou- 
rir leur  prochain,  courent  volontiers  à  la 
mort  (lu'elles  affrontent,  pour  ainsi  dire,  au 
milieu  de  tant  de  puanteurs  et  d'infections 
causées  par  le  i(rand  nombre  des  malades 
qui  sont  quelquefois  3ii  nombre  de  plus  do 
six  mille  dans  cet  hôpital,  OÙ  l'on  reçoit  in- 
dilTéremment  tous  les  pauvres  de  queiqtio 
pays  qu'ils  soient  et  quelques  maladies 
qu'ils  aient,  pourvu  qu'elles  ne  soicul  pas 
conlagieuses. 

Saint  Landry,  vingt-huitième  évèquc  de 
Paris,  fil  bâtir  cet  hôpital  joignant  l'église 
Saint-Christophe,  et  il  appartint  toujours  aux 
évéqui  s  de  Paris  jusqu'au  lempsde  Kaynaud, 
qui  était  évê(|ue  sous  le  roi  Uoberi.  Ce  pré- 
lat donna  la  moitié  de  cet  hôpital  aux  cha- 
noines de  sa  cathédrale;  mais  l'évéque  (jiiil- 
laume  le  donna  entièrement  à  ces  chanoines 
avec  l'église  de  Saint-Christophe,  l'an  1097, 
et  leur  céda  tous  les  droits  que  les  cvô(iues 
de  Paris  pouvaient  y  prél  ndie.  Depuis  ce 
temps-là  l'Hôtel-Dieu  el  l'église  de  Sainl- 
Chnstophe  firent  gouvernés  par  le  chapitre 
de  Notre-Dame.  11  y  envoyait  deux  prêtres 
qui  avaient  soin  de  l'hôpilal,  cl  préiaient 
serment  de  fidélité  au  chapitre.  Ils  desser- 
vaient aussi  alternativement  pendant  une 
semaine  l'église  de  Sainl-Chrislophe  ;  et 
lors(iue  celle  église  fut  érigée  en  paroisse  , 
l'hôpital  fut  transféré  apparemment  au  lieu 
où  il  est  présentement  situé  ;  ce  que  le  P.  ■ 
du  Bois,  dans  son  Histoire  de  l'Eglise  de 
Paris  croit  être  arjivé  sous  le  règne  de  Phi- 
lippe-Auguste, lorsque  l'on  uugmeuta  la  ville 
de  l'aris. 


Wl  DICTIONNAIIIE  DCS  ORDRCS  RELIGIEUX.  /,C8 

Ci'Kc  \iIIo  s'é(anl  ngranilie  dans  In  suite  roi  aux  quatre  fôl'-s  anntiolles  ,  jusqu'à 
ri  (-laiit  cicvriiiic  plus  peuplée,  le  nomlire  lies  troiile-ijuaire  lieues  de  Paris  (Tom.  ViJ 
laovrrs  ina  ad  s  élanl  p.ir  ce  moyen  aug-  Spic^lcj.,  /?.  211),  où  le  roi  pouvait  élre, 
imiilé,  l'on  .iirrnndil  l'tiA;  ilal,  et  I  •  nombre  comme  il  parait  par  un  accord  pas<é  laii 
de  ceux  qui  él.ii.  ni  destinas  pour  leur  servi-  i;{22enlre  Charles  IV,  roi  de  France,  d'une 
ce  fut  aussi  auiimcnlé.  ttienn-,  doyen  de  la  part,  et  le  maiire,  les  frùres  el  les  sœurs  do 
calliéilrnle,  qui  i  0<s6da  relie  dignité  depuis  l'Holel-Dieu  de  Paris  do  l'autre,  par  lequel 
I  an  1217  jusqu'en  l'an  1223,  dressa  des  sla-  ce  prince  leur  donna  à  cause  de  cela  cent 
luis  pour  cet  liôpilnl  qui  contiennent  soixan-  charretées  de  bois  de  moulage  A  prend  e 
le-ilouze  a  lii  les.  et  il  [  ara  I  par  le  prcmirr  Ions  les  ans  dans  ses  bois, 
qu  il  y  avait  deux  chanoines  sous  le  litre  de  Le  roi  saint  Louis  au-înienla  les  b;Uimen(s 
proviseurs,  préposes  [lar  le  chapitre  pour  y  do  cet  hôpital  1'.  n  1.58.  Antoine  da  IVal, 
maintenir  le  be.n  ordre.  Il  y  avait  des  ri  li-  chancelier  el  depuis  cardinal  et  lé;;at  en 
piiMix  et  des  riligicuses,  savoir  :  trcnle  huit  Trance,  fil  bàlir,  l'anlSi.'i,  la  salle  qu'on ap- 
reliçieux  el  vinul-cinq  religieuses.  Parmi  les  pelle  encore  aujiurdhui  la  salle  du  légal, 
lelinieux,  il  n'y  avait  que  qiialre  prélies,  (ly  donna  de  gros  revenus  ;  et  le  roi  [L'uri 
«lualre  (lires  (jui  pouvaient  élre  promis  aux  H"  (il  faire  la  grande  ri  la  petite  salle  de 
ordres  sacrés,  et  irenie  laïfiui'S  ;  et  entre  ces  ^ainl-Tliomas,  qui  furent  commencées  l'an 
religieux  on  en  élisait  un  pour  avoir  soin  de  KiOiel  ne  furent  finies  que  l'an  KiOli,  avec 
l'hopilal  comme  supérieur  sous  le  n  un  de  les  Irois  gros  piliers  ijui  sont  dans  la  rivi.re. 
itiaiire,  quia\ec  les  proviseurs  nommait  une  La  chapelle  de  cet  liôpilal  fut  fondée  par  un 
iii.iîlresse  pour  les  sœurs.  Il  prclail  serment  nommé  Oudarl  de  Mocreux,  maître  cIkiii- 
aii  chapitre  de  Nolre-Danie.  qia  pouvait  le  geur  el  bourgeois  de  Pai  is,  l'an  13-5,  qui 
révoquer  quand  bon  lui  sem!)  ait.  Les  frères  laissa  une  rente  de  qii  irante-quaire  livies 
«  I  les  sœurs  devaic  il  faire  \(ru  de  chasielé,  pour  le  vêtement  de  ceux  qui  y  fi  raient  l'of- 
de  pauvreté  el  d'obéissance,  tant  au  chap-  fîce  ,  comme  il  parait  pa  une  ancienne  épi- 
Ire  de  Notie-Damc  qu'aux  proviseurs  cl  laphc  en  vieille  rime,  .'ilinrhce  contre  le  mur 
au  maiire.  tic   celte  chapelle,    où  il  est  parlé    de   celle 

Ils  devaient  assister  , à  la  oesse,  à  vêpres  et  fondalion,    laquelle  épiiaphe   esl  rapporlée 

■à  matines,  à  moins  qu'ils  ne   fussent    occu-  par  du  lîreuil  dans  les  Anti  iui:és  de  P.irii, 

pes  au  servi  e  de>  malades.  Ils  disaient  pour  et  que  nous  joindrons  aussi  ici   pour  la  cu- 

ni.itines   sept   Poler,   pour    vêpres    cinq,  et  riosilc  du  Icileur. 
p  Mir   les  autres    heures  Irois  ;  1 1,   lorscju'ils  Oudarl  de  iMucrrur  en  f:uriiom. 

eiaicnt  absenis  pour  quelques  affaires  qui  ne  Clinngeur,  homme  de  bon  imuin, 

regardaient  pas   le  service  de    l'IiAjiiial,   ils  lïl  Ooiirgeiis  de  Paris  jadi-i, 

disaient  pour  malii  es  vingt-cinq  l'nlir,  neuf  Que  Di'u  melteddus  s:>n  p  muni  s, 

|)our  vé|ires  el  ^ept  pour  les   ;iulres  heure;.  A  fait  faire  celte  chapelle, 

ils  pouvaient  manger  de  la  viande  le  diman-  En  letlc  Uôlel-Diiu  bonm  el  belle, 

rhe,    le  manli  el  le  jeudi;  mais   ils  étaient  Bien  aorné  de  verriires, 

obligés  de  faire  abstinence  les  autres  jours  ,  Et  efl  aorné  de  c'njnires, 

à  moins  qu'il    n'arrivât  quelque   fête  solen-  El  plusieurs  aulrcs  b^etis  notaldes, 

iiellc  dans  ces  jours-là.  11  ne   leur   était  pas  Lesquels  Dieu  ail  pour  ugrenblcs  : 

permis  de  sortir  seuls  pour  aller  à  la  ville,  et  Et  avec  ce  quarante  quatre 

sans  avoir  pris  la  bénédiclion  du  maille.  lU  Livres,  treize soiUls,  cl  quatre 

n'y  pouvaient  pas  manger,  et  on  leuraccor-  Deniers  parisis  de  annuelle 

dait  s<ulemcnllaper;iiis>ion  de  boire  de  l'eau.  lienle  à  totijuurs  perpétuelle, 

On  les  <  nvoyait   ilenienrer  dans    les  fermes  A  lessié  en  Paris  assise 

qui  dépendaient  do  l'brtpiial  quand  on  le  ju-  A  cmpluier  i  ar  buvne  quise, 

{;eail  nécessaire.  Une  fois  la  S'.Mnaine,  ]  our  le  F^r  le  cheiecier  de  ce  leu 

moins,  ils  se  Ironvaieni  ensemble  an  chapi-  Pour  icstir  pour  l'amour  de  Dira 

Ire  pour  y  reconnaitre  leurs  fautes,  el  si  (juel-  Presircs  et  clercs  faisant  l'office 

qu'un  on  quelqu'une  avait  fait  une  faute  con-  En  l'holel  et  divin  service. 

sidérable  i]ui  méritât  la  discipline,  le  maiire  Le  chevecicr  recevra 

Li  faisait  donner  sépaiéincnl  aux  frères   en  La  i cnic,  et  en  achiptcrn 

présence  des  antres  frères,  el  séparénicnl  aux  Draps  pour  eux  faire  vestement 

MCtirs  en  présence  di  s  autres   sœurs.   Quant  El  c'  re  plus  lion   étetneul, 

,1  l(  ur    habiilemei.l,    les    uns    el    les   autres  Chacun  un  au  jour  île  Tuuss  iuh. 

avaient  des  robes    noires  et  dis  b.is    blanc  Or  domt  Dieux  qu'ils  soient  loUf  '•■tirais 

Les   frérrs  él.inl   au    chœur   portaient    par-  Car  ils  saul  as  ruinls  et  tenus, 

dessus  leurs  robes  des  chapes  noires, des  ^ur-  'l'anl  les  qratids  comme  h  s  menas, 

plis  >  l  des  peaux  d'agneau  (1).  De  chnnler,  célébrer  et  dire, 

Le  roi  ^ainl  Louis,  t)ui  ,'illail  souvent  vi-  Au  vendredi,  sans  escon  luire 

siler  les  m.iljides  de  cet  bApit.M,  li-  prit  sous  Messe  des  di  jfunis  trépassez, 

•»a  proleclnin  cl  il  est  atipele  dans  ^es  lettres  .Irrc  ce  ne  soient  lassez 

IMlcmc»,   l'hApital  de  Notre-Dame  de  l'aris.  Chacun  jeudi  de  rendre  grâces, 

Auircfois  les  frères  el  les  scurs  étaient  cbli-  El  vigiles  et  coniniendaccs, 

pis  de  porteries  reli(|ue9  de  la   rha|>clle   du  Chacun  en  chacun''  snnuiuc, 

(Il  »  VII.,  «  l.i  lui  ilii  \iil,,  II""  ll.'i,  llti  cl  117. 


400 


IlOT 


IICT 


/j'O 


Par  voix  de  dévotion  plaine, 

Humblement  et  solemnellenicnt 

A  lotijoui  s  perpétuellement 

Pour  l'ame  de  de/funt  Oudai  I, 

Que  Vieux  te  reçoit  e  à  sacurt, 

Et  pour  les  (mes  de  son  pcre 

El  de  sa  femme  et  de  sa  mère 

Parens,  bienfaicteurs  et  amis. 

Pour  ce  l'dit  Oudart  a  mis 

Ses  deniers  à  celte  œuvre  faire 

Qui  est  à  tous  bon  exemptai:  e 

De  faire  prier  peur  les  morts, 

{hie  Dieux  leur  soit  misericors 

Ceux  de  l'Iiôlelt/  sontliez 

El  par  lettres  bien  obligiez. 

Du  consentement,  et  au  tillre 

Des  seiipieurs  Dian  et  ehapiire 

De  Véglne  de  Notre-Dame 

De  Paris.  Priez  /  o«r  son  ame 

En  !  an  de  l'incarnation 

Mil  trois  cent  quatre-vinfjt-cinquiéme 

De  decemb  e  le  vingt-se  tiéine, 

Lors  s'en  alla  de  ce  monde 

En  Diiti,  à  qui  tout  bien  habonde. 
Il  est  parlé  dans  celle  épila,  ho  du  cliapiire 
diNûlre-Pame,  à  cause  qu  il  en  est  seii;neur, 
Coiun  e  nous  avons  dil  ci-dcvanl,  et  qu'il  y 
Il  toute  juridielion  tempo  elle  et  spirituelle  ; 
cl,  lorsqu'un  chanoine  tneurl,  toute  la  gar- 
niture de  son  lii  appartient  à  cet  hôpital,  à 
moins  que  les  héritiers  n'aiment  mieux  don- 
ner une  certaine  somme  d'argent  qui  a  été 
fixée  par  le  chapitre. 

II  y  a  longtemps  qu'il  n'y  a  plus  que  des 
rdigieuses  dans  cet  hôpital.  Elles  suivent  la 
règle  de  saint  Augustin,  cl  elles  ne  pouvaient 
ôire  autrefois  admises  à  faire  profession 
(ju'après  un  noviciat  de  douze  années;  mais 
ce  terme  a  été  réduit  à  sept  ans  depuis  cn- 
V  mil  l'an  1C3G.  Cent  ans  auparavant,  l'an 
l535,enverlu  d'un  arrêt  du  parlement  du 
ÎO  septembre  de  la  même  an  née,  cette  maison 
fui  réformée  par  des  commissaires  députés 
I  ar  le  chapitre  de  Notre-Dame,  qui  fixèrent 
le  nombre  des  religieuses  pour  servir  les 
pauvres  à  (luaranle  sœurs  professes,  et  qua- 
rante sœurs  blanches,  qui  étaient  les  novi- 
ces, ayant  égard  apparemment  au  nombre  des 
malades  qui  y  étaient  en  ce  temps-là  ;  mais, 
comme  les  malades  ont  toujours  élé  depuis 
en  plus  grand  nombre,  et  que  l'on  a  bûti 
plusieurs  salles  nouvelle-,  le  nombre  des 
leligieuscs  a  élé  aussi  augmenté,  et  l'on  y 
voit  (luelqucfois  jusqu'à  cinquante  novices. 
Elles  eurent  encore  besoin  de  réforme  au 
comiiiencenient  du  xv!!"" siècle  ;  mais  la  Mère 
("leneviève  Bouquet,  dite  du  Saint-Nom  de 
Jésus,  sut  si  bien  par  ses  bons  exemples  et 
ses  exhorlalions  les  ramènera  la  pratique 
des  observances  régulières,  qu'elle  peut  ètie 
ri'garilée  comme  leur  réformatrice.  Elle  était 
fille  d'un  orfèvre  de  Paris,  qui  la  mit  dès  sou 
I  as  âge  chez  la  reine  Marguerite.  Mais  l'a- 
mour qu'elle  avait  dès  lors  pour  Dieu  ne  lui 
[lermeltant  pas  de  demi  urcr  longtemps  dans 
le  grand  monde,  elle  retourna  peu  de  temps 
après  (liez  ses  parents,  oij  clic  prit  la  réso- 
lution de  se  faire  religieuse.  Son  premier 
dessein  c'ait  d'entrer  chez  les  religieuses  de 


Sainte-Claire  de  V.ii-c  Maria;  mais  l'cilinie 
et  l'affcclion  qu'elle  conçut  [jour  l'Hôlel-Dieu 
et  pour  les  pauvres  malades  l'y  attira  à  l'àg*} 
de  vingt-deux  ans,  ayant  pris  l'habit  à  cet 
âge;  mais  elle  ne  fil  profession  que  treize 
ans  après,  la  coutume  étant  pour  lors, 
comme  nous  avons  dil,  qui  les  religieuses 
de  l'Hôtel-Dieu  fissent  douze  ans  de  noviciat, 
on  au  moins  dix.  La  mère  Cou(iuet  voulut 
néanmoins  encore  prolonger  ce  Icmps-là, 
ne  croyant  pas  qu'une  novice  dût  jamais  se 
presser  à  l'Hôlel-Dieu  de  faire  profession. 
Elle  se  f  lisait  d'ailleurs  un  scrupule  de  pro- 
noncer ses  vœux,  à  cinse  qu'il  n'y  avait 
point  alors  de  noviciat  élabli;  c'est  pour- 
quoi elle  consulta  queique.s  docteurs  de  Sor- 
honne,  si  elle  poavait  faire  ses  vœux  en  cet 
é'ai,  et  elle  ne  voulut  point  s'engager  que 
1.  s  supérieurs  ne  lui  eussent  donné  espé- 
rance qu'on  éla'uliraii  le  noviciat  et  la  vie 
commune  entre  les  sœu  s. 

Enfin  éiaut  professe,  et  voyant  ce  défaut 
de  noviciat,  chaque  Môe  ancienne  élevant 
alors  un  certain  nomb  e  de  fiUisqui  vivaient 
avec  elle,  elle  prit  la  résolution,  après  avoir 
passé  par  quelques  offices  de  la  maison,  do 
composer  elle-même  une  espèce  de  noviciat, 
et  de  mellre  ensemble  les  filles  qu'on  vou- 
drait lui  donner  pour  les  instruire,  qu'elle 
gouverna  dès  lors  et  encore  depuis,  ayant 
été  deux  fois  maUresse  des  nivioes.  Son  ap- 
plication était  de  faire  prendre  à  ses  novi- 
ces de  bonnes  résolutions,  pour  bien  panser 
et  servir  les  pauvres.  Elle  ne  ]  ouvait  souf- 
frir qu'une  sœur  dil,  je  suis  lusse,  alléguant 
aux  sœurs  que  le  travail  qu'elles  faisaient 
pour  les  pauvres  et  l'assislaïue  qu'elles  leur 
donnaient,  étaient  toute  leur  austérité;  cl 
qu'au  contraire  elles  devaient  être  bien 
ji)3euses  le  soir  de  s'êîre  lassées  pendant  le 
jour  pour  Dieu  :  ainsi  elle  appelait  un  jour 
bien  rempli  un  jour  où  l'on  avait  bien  tra- 
vaillé. 

La  peste  étant  survenue  à  Paris,  elle  fut 
tirée  de  son  office  de  maîtresse  des  novices 
pour  iil'.er  à  l'hôpital  de  Saint-Louis,  où  elle 
pansa  les  peslilerés  avec  une  telle  charité, 
qu'on  l'a  quelquefois  trouvée  baisant  leurs 
plaies.  Elle  procura  qu'il  y  eût  un  autd  dans 
les  salles  des  malades  de  ol  hôpital,  elle 
procura  aussi  un  réservoir  d'eau  et  une 
éluve  pour  sécher  les  linges.  La  peste  étant 
finie,  et  étani  de  retour  à  l'Hôtel-Dieu,  cile 
fut  mise  à  l'apoiliicaireric,  où  elle  commença 
de  faire  faire  les  composilions  (pii  ne  s'y 
faisaient  point  auparavant.  Elle  eut  soin  en- 
suite des  femmes  en  couche,  et  (|uelqua 
lemps  après  elle  fut  élue  prieure.  Elle  refusa 
celli-  charge  avec  beaucoup  d'instame,  et  no 
l'atccpta  que  par  obéissance,  y  ayanl  élé 
conirainte  par  ses  supérieurs.  Elle  l'exerça 
pendant  neuf  ans,  ayant  un  soin  tiiut  parti- 
culier des  malades,  et  faisant  auprès  d'eux 
les  actions  les  plus  viles  1 1  les  plus  basses. 
Ce  fut  elle  qui  procura  les  tours  do  lits  qui 
sont  pré^enlement  au  noviciat  et  en  la  sallo 
du  Légal,  où  auparavant  il  n'y  avait  <iue  des 
coui  lu  lies  à  bis  piliers.  Elle  fil  donner  des 
sandalcî  de  bois  aux  malades,  qui  aupara- 


47» 


DICTIONNAmF,  [>£S  ORDRES  RF.Ur.lF.UX. 


v.inl  élnieiit  coniraiiils  de  se  lever  et  de  mnr- 
«lier  nii-pi"  ds,  tl  elle  pn^pos.n  une  su-ur 
(l'Uir  en  avoir  boin,  ce  qui  s'ubscrve  i  ncore 
à  pn•^e^ll.  l-l!c  (il  clablir  par  les  supciieiirs 
la  réiio»alii>ii  di's  vtpux  en  coinnmn.  K'.ie 
aholil  Us  plissures  des  rubes  et  ce  qui  pou- 
v.iii  re>senlir  la  vaiiilc  ;  elli;  preniil  pour 
el'e  lc<  plus  usées  et  les  plus  méchanles. 
i;ilc  établit  la  (oinmunaulé  du  noviciat,  et  le 
vivre  en  conieniin  des  doiiK  siiqucs.  Ce  fut 
aus^i  à  sa  solli(italion  que  les  religieuses 
quillérent  leur  nom  de  lainille  pour  en  pren- 
dre un  (le  quelque  saint.  Ivll'  (il  elle-même, 
ou  (il  f.iirr  par  les  supérieurs,  plusieurs  au- 
tres règlements,  tant  pour  les  religieuses 
que  pour  les  malades,  qui  la  peuvent  faire 
regaidcr  avec  justice  conimp  réi'orraatrice  de 
cette  maison.  Enlln  elle  mourut  subitement 
la  veille  de  Saint-Jean  de  l'an  KiGo,  allant  à 
l'oraison  avec  la  communauté,  étant  âgée  de 
soixanie-qu  itorze  ans. 

Outre  riloIcl-Dieu,  les  religieuses  ont  en- 
core soin  des  m:ilades  qui  sont  à  l'bôpital  de 
Saint-Louis,  fondé  par  le  roi  Henri  IV  pour 
ciu\  qui  sont  attaqués  de  la  peste.  Cet  hô- 
pital est  très-beau  ;  il  est  composé  de  (lualie 
grands  pavillons  aux  quatre  coins,  avec  au- 
tant de  portes  pour  y   entrer.  Ces   pavillons 
sont  ac  ouîpagnés  d'oTices,  et  dan»  leur  sé- 
paration i:  j  a  quatre  salles  et  d'autres  lieux 
pour   la    commodité  des   malades.    Dans   la 
becoiide  cour  est  une  fontaine  av(  c  un  grand 
bassin  de   pierre,   d'où  l'eau  roule  dans   l.i 
cour  de  derr  ère  et  va  se  rendre  dans  deux 
lavoirs  faits  de  pieires  fort  larges  pour  y  la- 
ver la  lessive.  Ùu   côté  de   la   ville  sont   les 
offices,  les   cuisines,   les  appartements   des 
oTiciers  de   la  m.iiscm,  et  les  lngeinrnls  des 
icligi  uses.  Du  ci'ité  du  septentrion,  hors  de 
l'hôpital,  est  un  timclière  fermé  de  murailles, 
où  l'on  enterre  h  s  corps  de  ceux  qui  y  meu- 
reiil.  La  première  pierre  fut  posée  à  l'église 
le   13  juillet   1607,   et   l'édifice  lut  continué 
jusqu'en    l'an  KitO.  On   envoie  aujourd'hui 
les  convalescents  de  l'Holi  l-Dieu   dans    cet 
hopi'.al,  pour  y  prendre  l'air  pendant  quel- 
que tem[is  ,  ou  bien  ceu\  qui  sont  attaqués 
«lu  scorbut,  lorsqu'il  y  en  a  un  grand  nom- 
bre. Pour  ce  qui  est  des  liAlimenls  de  l'Hô- 
Icl-Dieu,   ils  sont    très   spacieux  ;   on    les   a 
éleiulus  sur  la  rivière  de  S.  ine  sur  une  voûte 
foil  longue,  siuis  laque  le  coule  l'eau  ;    il  y 
a   aussi   d'aut  es  salles  de    l'autre  coté  de 
l'eau,  iiuxquelles  on    va   par    un    pont  de 
pierre,  en  sorte  que   l'un  des  bras  delà  ri- 
vière pa'-se  au  milieu  de  cet  bôpiial. 

Le  temporel  est  goivirné  par  des  adnii- 
nislralcurs,  cl  b  s  dépenses  se  montent  tous 
les  ans  à  plus  de  six  cent  mille  livres.  Les 
religieuses  pr.  fesses  sont  au  nombre  de 
cent,  et  il  y  a  ordinairement  près  de  cin- 
quante novices.  Oulri?  les  religieuses,  il  y  a 
encoie  lies  (illes  et  des  feintncs  au  nombre  de 
cinquante  ou  soixante,  qui  se  donnent  à 
riinpital  pour  servir  le^  malades,  outre  un 
prand  nombre  de  servantes  et  Jilus  de  cent 
kerviti  urs.  L'habillement  ilcs  religieuses  eon- 
8  sie  CM  une  lobe  noiie,  sur  laquelle  ell(.>i 
ijielteut  ,  loisqu'ellcs  urvent   les  malades, 


un  sarrau  de  toile  blamiie  fait  on  forme 
d'aube  descendant  jusqu'.iux  talons  :  dans 
les  cérémonies,  et  lorsqu'elles  vont  en  pro- 
cession à  certains  jours  dans  les  salles,  cil  s 
n'tuit  que  des  robi's  noires  avec  on  grand 
manie.iu  :  leur  guimpe  est  carrée  et  furt 
grande,  descendant  jusijue  sur  l'estomac,  et 
leur  voile  est  fort  ample,  étant  soutenu  par 
un  carton.  Les  sreurs  données  sont  habillées 
de  gris,  avec  un  mouchoir  en  pointe  sur  le 
cou,  aussi  bien  que  les  servantes,  et  les 
données  ne  sont  dislinguécs  (|ue  par  une 
coiffe  noire.  Les  religieuses  de  l'Ili'itel-Dieii 
ont  fait  d'autres  établissements  en  France 
comme  à  Moulins  en  linurbonnais,  et  en 
d'autres  lieux.  L'on  voit  souvent  dan^  l'IIn- 
tel-Dieu  de  l'.iris  des  princesses  et  des  per- 
sonnes de  qualité  exercer  leur  charité  envers 
les  malades,  en  s'abaissanl  ju-qu'aux  em- 
plois les  pins  vils;  et  ce  fut  dans  ce  même 
hôpital  que  la  baronne  d'.MIemagne  M.irthii 
d'Oraison,  fille  du  marquis  d'Oraison,  des 
plus  illu-tres  maisons  de  Provence,  mou- 
rut l'an  1027,  s'élant  donnée  au  service  des 
niiladcs.  Voici  la  formule  des  >œux  de  ces 
religieuses. 

Je  sœur  N.  voue  et  promets  à  Dieu,  à  ta 
lienoiste  Vierge  Marie ,  au  tjlorieux  saint 
Jean-  linplifte ,  à  notre  bienheureux  l'ère 
saint  Augustin,  nos  patron',  et  généralement 
à  tous  les  saints  et  tainles  de  paradis,  ei  à 
vous  mes  très-révérends  Pères,  jiauvietr, 
chasteté,  obédience,  et  servir  aux  pau>r(S 
malades  toxts  les  jours  de  ma  rie  m  /  llôtcl- 
fficu  de  Paris  ou  ailleurs,  si  par  vous  il  tu'est 
enjoint,  gardant  la  règle  de  saint  Aagustin, 
accommodée  èi  notre  saint  état  par  les  statuts 
et  constitutions  faites  de  l'autorité  de  vous 
mesieiirs  les  révérends  (lo:en  et  chapitre  de 
l' Eq'iye  de  Paris,  sujiéricurs  de  celte  maison. 
Témoin  mon  seing  manuel,  etc. 

("ouiiiie  il  n'y  a  point  de  bornes  à  la  cha- 
rité qu'on  exerce  dans  cet  liô]  ital,  toutes 
sortes  de  personnes  y  étant  reçues  sans  dis- 
llnclion  d'âge,  de  sexe,  de  nation  et  d'  reli- 
gion, et  que  le  nombre  des  malade»,  qui  s'est 
monté  quelquefois  jusiiu'à  plus  de  six  mille, 
obligeait  de  temps  en  temps  de  les  mettre 
jusqu'à  six  ou  huit  dans  un  même  lit;  c'est 
ce  qui  a  porté  les  administrateurs  à  augmen- 
ter les  bâtiments  auxcjuels  on  travaille  pré- 
senlcuient.  Les  bnurgeois  de  l'aris  el  plu- 
sieurs personi\es  de  considération  j  ont  con- 
triliuô  par  leurs  aumônes,  y  ayant  été  exci- 
tés tant  par  leur  piété  et  leur  compassion 
ea\ers  les  (lauvres  (lue  par  un  maidemenl 
((ue  Mgr  le  cardinal  Louis-.Xnto  ne  de 
Noaille-.  aichevéque  de  Paris,  a  donné  à  cet 
effet  le  -ii)  marsili;  la  présene  année  ITIii. 

(îéranl  du  Hois,  IJist.  ecchs.  l'aris.  lom.  Il, 
lib.  xvi,  cap.  1.  Du  llreuil  et  .'\lalingre,  Anti- 
gui  tés  de  l'aris,  et  -lus  aux  religieuses  d« 
rUôtcl-Diiu. 

Eu  annoni  ant  <]u'il  va  traiter  des  religieu- 
srs  hospitalières  de  l' IIùtd-Dim  de  l'aris,  le 
P.  Ilelyot  promettait  d'en  mentionner  d'au- 
tres du  même  institut;  néanmoins  il  n'en 
parle  point  et  se  bornir  à  dire  que  cis  reli- 
gicasiS   ont   fait    d'autres   établiiscincnts   en 


«73 


HOT 


IIOT 


474 


France,  cl  à  ajoulor  :  comme  à  Moulins  et 
en  (raulrcs  lieux.  Il  aurait  dû  les  nninmer, 
s'il  les  connaissait:  il  amail  dû  aussi  nom- 
mer les  daines  de  l'Hôlel-Dieu  de  Mraiix.  Il 
est  jircl)..l)le  qu'il  manquait  da  rcnseii;nc- 
mcnls.  On  ne  peut  donc  savoir,  et  vraisem- 
blablement on  ne  saura  jamais,  quelles  sont 
les  maisons  hospitalières  de  la  filiation  de 
l'Hôtel-Dieu  de  Paiis.  Quoi  qu'il  en  soit,  ces 
maisons  deiiicurèreni  indépendantes  et  vrai- 
semblablement modifièrenl  leurs  constitu- 
tions et  leur  costume  suivant  les  localités. 
Ainsi,  à  Mcaux,  la  cilonii'  garde  toujours 
l'habit  noir,  cl  ne  porte  point  re  sarrau  de 
toile  blanche,  dont  parle  Ililvot,  et  qu'ont 
en  effet  leurs  Mères  de  Paris,  pour  le  travail 
des  jours  ouvriers.  Vers  l'année  18V5,  un 
hôpital  général  ayant  été  établi  à  M'  aux,  les 
religieuses  dont  nous  pailons  ont  quitté  leur 
maison  (détruite)  et  ont  fondé  une  maison 
pan  culière  qui  est  appelée,  de  la  rue  qu'elles 
liabilent,  la  maison  des  religieuses  de  la 
Paix. 

Depuis  longtemps  et  jusqu'à  la  révolu- 
tion, il  y  avait  douze  prêtres  chapelains  à 
i'Hôtcl-Dicu.Ces  ecclé'-iastiqucs  y  chantaient 
tous  les  jours  les  heures  canoniales,  aux- 
quelles les  religieuses  devaient  assisier  au- 
tant que  possible.  Aujourd'hui  ces  dames 
récitent  eres-mémes  l'olfice  canonial  du  rite 
parisien,  mais  en  français. 

Grâces  à  Dieu,  toutes  ne  quittèrent  pas 
l'Hôtcl-Dicu  lors  des  troubles  de  la  révo- 
lution. Plusieurs  partirent  voloniairemcnt, 
ni.iis  le  corps  do  la  communauté  resta  tou- 
jours dans  la  maison,  au  service  d  s  mala- 
des. Mais  elles  furent  longues  années  rédui- 
tes à  porter  l'habit  séculier  et  à  souffrir  les 
duretés  et  la  grossièreté  des  hommes  de  ces 
circonstances. 

Malheur  à  ces  citoyennes  si,  par  distrac- 
lion,  par  crainte  ou  par  habitude,  elles  (lua- 
1  fiaient  du  nom  de  monsieur  les  hommes  du 
temps  qui  savaient  bien  leur  pailer  suivant 
les  habitudes  de  l'époque.  Aucune  néanmoins 
n'a  été  guillotinée.  Il  ne  reste  plus,  au  mo- 
ment où  nous  écrivons  ceci,  qu'une  seule  des 
rclig  cuscs  qui  avaient  survécu  à  ce-  malheu- 
reuses et  cruelles  épreuves.  Celte  Mère  a  été 
menacée  alors  de  la  prison  et  sur  le  point 
d'éire  rcnlermée.  —  Apri's  le  concordai,  les 
choses  repr  rent  peu  à  peu  les  formes  régu- 
lières dans  la  direciion  de  la  communauté; 
mais  on  conçoit  qu'il  y  eut  des  usages  qu'on 
ne  put  reprendre,  et  qu'il  resta,  même  dans 
ce  qu'on  (il,  beaucoup  à  désirer.  Nous  avons 
vu  dans  Hélyot  comment  la  rommunaulé 
avait  éié  réformée,  il  y  a  deux  siècles,  ])arle 
zèle  d'une  pieuse  religieuse.  Le  même  zèle, 
peu  après  la  révolution  de  18J0,  porla  aussi 
(|uelques  religieuses  à  essajer  d'introduire 
plus  de  régularité  dans  le  régime  de  l'insti- 
tut. Elles  n'eurent  pas  tout  le  succès  désira- 
ble, peut-être  n'y  mirent-elles  pas  toute  la 
prudence  nécessaire. 

Par  suite  peut-être  des  projets  déjà  nour- 
ris [lour  la  réforme,  les  élei  lions  avaient 
mis  à  la  place  de  prieure  !a  il.  M.  des  An- 
ges, et  à  la  place  imporlaiule  de  maîtresse 


des  novices,  la  R.  JI.  Sainte-Cécile.  Ces  don  ^ 
dames,  avec  quelques  autres  religieuses,  fu- 
rent l'âme  du  pieux  complot  qu'elles  nour- 
rissaient dans  l'esprit  de  toutes  les  novices, 
et  qui  était  partagé  par  plusieurs  filles  de 
l'institut  de  Saint-N  inren!-de-Paul,  par  Tau- 
mônier,  M.  l'abbé  le  Clère,  etc.  Les  réunions, 
([u'on  ne  put  tenir  assez  secrètement,  pi- 
(|uaient  la  curiosité,  et  excitèrent  peut-être 
aussi  l'émulation  de  celles  qui  n'étaient 
p  lint  dans  le  projet.  Nous  prenons  ici  l'ex- 
pression la  plus  douce.  Une  des  religieuses 
entrées  dans  les  assemblccs  proviso  res  (la 
M.  Saint-Landry,  morte  depuis  (C  temps-là) 
trahit  les  autres  el  alla  découvrir  ce  qu'elle 
avait  entendu  à  l'ex-prieur,  qui  aussitôt  fit 
appeler  le  supérieur  ecclésiastique  de  la 
maison.  (C'était  alors  M.  l'abbé  Salandre, 
vicaire  général  de  Paris.)  Celui-ci,  au  lieu 
de  rélléchirct  de  mûrir  l'alTairc,  alla  promp- 
Icment  demander  compte  de  cette  intrigue  à 
la  Mère  des  Anges,  ([ui  eut  la  faiblesse  de 
man(|ucr  de  franchise.  Le  plus  grand  nom- 
bre des  religieuses  fui  doni-  contre  le  projet 
nouveau,  qui  n'a  jamais  été  bien  connu,  et 
vil  l'autorité  ccclésiaslique  de  son  bord.  Les 
choses  en  vinrent  au  point  que  le  promo- 
teur du  diocèse  fit  une  enquéle,  et  inter- 
rogea toutes  les  Mères.  Ce  promoteur  était 
alors  M.  l'ablic  Quanlin.  Le  récit  que  nous 
avions  à  faire  était  nécessaire  ici.  Nous  n'o- 
sons dire  tout  ce  que  nous  savons. 

Il  est  difficile  de  ne  pas  blesser  l'amour- 
propre  en  nommant  (juelques  personnes  qui 
vivent  encore,  ou  la  susceptibilité  de  quel- 
ques autres  en  parlant  de  celles  qui  ne  sont 
plus  aujourd'hui,  telles  que  le  respectable 
abbé  Salandre  et  l'abbé  Quanlin.  Nous  n'a- 
vons pourtant  l'envie  de  blesser  personne, 
el  no're  unique  désir  comme  notre  but  est 
de  servir  la  vérité  de  l'hisloire.  Nous  nous 
bornerons  donc  à  dire  que  les  nligieuses  do 
l'Hôtel-Dieu,  môme  les  plus  cap:ibles,el  nous 
pailons  de  celles  qui  n'étaient  pas  dans  le 
projet  de  réforme,  ont  blâmé  el  condamné 
la  manière  d'agir  du  piomulcur,  qui,  au  lieu 
de  les  interroger  simjjlement,  excitait  leurs 
répunses  contre  les  religieuses  en  cause.  La 
révérende  Mère"*  osa  lui  faire  remarquer  ce 
[  rocédé.  Les  choses  se  terminèrent  par  la 
sortie  et  peul-ôlie  l'expulsion  des  religieuses 
qui  avaient  nourri  el  fonicnlô  le  projet  de 
reforme.  Ces  religieuses  étaient  la  révérende 
Mèi'e  des  Auges,  prieure  ;  la  révérende  Mère 
Sainie-Cécile,  maîtresse  des  novices;  la  révé- 
rende Mère  de  la  Trinité;  la  révérende  Mère 
Saint-Lazare,  et  une  ou  deux  autres  avec 
toutes  les  novices  qui  se  trouvaient  alors  à 
l'Hôiel-Dieu,  au  nombre  de  douze,  n'en  lais- 
sant qu'une  dont  les  moyens  bornés  ne  pou- 
vaient leur  convenir  el  ijue  les  autres  eu 
effet  n'ont  point  gardée.  Grâces  à  Dieu,  cette 
affaire  n'eut  point  d'éclat  dans  le  public  et  no 
fut  appréciée  que  par  les  personnes  qui  com- 
prennent combien  il  est  di'ficile  de  s'enten- 
dre à  la  supériorité  et  au  gouverncnicnl 
d  une  maison  religieuse.  Les  Mères  qui  sor- 
tirent se  retirèrent  momcnlauémeut  à  Ver- 
sailles. Ceci   se  passait  au  miliiu  de  l'année 


175                                           DICTIONNAIRE  OF.S  CRORES  nF.I.lCIF.UX.  475 

1S35.  I,a   More    La    Trinil(^  et   la   M're  drs  fil  une  Irôvc  avec  lui  pour  dix  ans.  .\(lo!|i!if 
Aii';es  sont  reslccs  à    la   maison  de  (îiand-      él.uil  morl  sans  enfants,   et  Gorard  V,  son 

(^liaiiip  à  \'ersaiile<.    I.os  autres  sont  allées,  neveu,   ayant   sncrédé  au   diulic  de  Jiilier>i 

a»cc  leurs   novices  ei  l>'  pii-iix  auo'ônier  de  l'an  l'i.l",   Arnould   dK^mond,   renouvelant 

Il    romnuinauli*   de  l'Holel-Diiu,   M.  l'alibc  ses  prélenlions  sur  ce  duclié,  y  rentra  avec 

l.e  Clère,   diri;;er  un  iKii'ilal    à   Anvers,   en  une  année  l'an  llV'i  ;  mais    il  fut  dcTait  par 

!!cl;;i(|ui',  d'où  elles  ont  iléjà  envoyé  une  co-  Gér.ird,  qui  remporta    sur  lui   une   céièi)re 

lonie  à  un  hôpital  de  I.i<"p'e.  Ainsi  la  religion  victoire  le  jour  de  Saiiit-Uulierl  de  la  même 

a  trouvé  son  profit,!  ces  divisions  apparen-  année.  Cest  en  mémoire  de  celte  victoire  que 

les,  où  avec  de  bons  desseins  de  part  et  d'au-  qnel.|iios  histuriens,  comme  Sciioonobec!»   et 

Ire    on  sert  ceux  de  Dieu  sans  c;i  connaître  le  P.  Ilonanni,  disent  que  ce  prince  inslitua, 

les  voies.  Les   novices  resté-  s  dans  les  deux  l'an  l'i'io,  un  ordrcde  chevalerie  sous  le  non» 

.iiitres  maisons  de  Paris,  celles  qu'on  reçut  et  la   protection  de   saint   Hubert;   d'autres, 

bientôt  à    l'Ilotel-Dieu,  firent  que   le  départ  comme  AubcrI  le  Mire  et  l'abbé  Ciiiistiuiani, 

des  anciennes  fui  iires(|ue  insensible.  11  exis-  ne    meltent  linstilulion    de   cet  ordre    cpie 

tait  autrefois  des  préventions  contre  le  jusé-  l'an  H7.'l  ou  1477.  Mais  il  ne  peut  pas  aveir 

nismedes  idigiense^  de  rilolel-Dicu  de  Paris,  été  institue  l'an  li77,  pU!S(]ue  Gérard  mou- 

tlesprévcntionsélaientpcul-élretropgénérali-  rut  l'an  li7o  ;  et  il  y  a  plus  d'apparence  (luo 

sées,  maiselles  étaicnlfoiidécs".  nousen  pour-  ce  prince,  qui  avait  vaincu  le  duc   de  Guel- 

rions  fouinii-  des  i)reuves.  Aujoi:rd  liui  celte  dres  l'an  l'i'tl,  le  jour  de  Saint-Hubert,    in- 

prévenlion  existe  encore  en    quelques  per-  stitiia  son  ordre  la   même  année  ou   l'année 

-sonnes.  Elle  est  une  injustice  d'autant  plus  suivante. 

toupable,    que   ceux   qui  produisent  à    cet  Ces  auteurs  ne  s'accordent  point  non  plus 

égard  leurs  |  ensé-'s,  parlent   sans  avoir  ap-  sur  la  forme  du  collier  de  cet  ordre.  Schoo- 

I  rufondi  les  choses,  et  blessent   les    intérêts  neîcckdit  qu'il  était   composé   de  plusieurs 

«l'une  communauté  respectable  qui  se  ver-  cors  de  clia-^sc  oîi  pendait  une  médaille  avec 

rail    privée    qu.  Iqucfois   de    sujets  aptes  à  l'image  de  saint  Hub  ri.   Le  P.  Fîonanni   dit 

l'augmenter,    par  l'iiMprudencc  de  quelques  seulement  que  ce  collier  était  d'or,  où   pen- 

hiunnes  irrénéchis.  dail  cctle  médaille.  L'alibé  (îiust  niani  prc- 

On    ne    voit   plus    à    l'Hôlel-Dicu   de   ces  tend  qu'on  ne  sait  point  quelle  élail  la  mar- 

sieui-s  données,  dont  parle  HJI30I.  Les  rcli-  que  de  cet  ordre,  et  Aubcit   le  Mire  assure 

giiuses  de  celle  maison  ont   toujours  eu    la  que  les  statuts   de  cet  ordre   sont  écrits  en 

iliiection   de  l'hôpital    Saint-Louis,  et    elles  langue  allemande  et  qu'on  les   trouve   ma- 

n'avaient  autrefois  que  ces  deux  maisons-là.  nusrrils  dans  la  maison  des    Cortembachs  et 

Depuis  la  révululion,  elles  ont  desservi  peu-  chez  d'autres,  avec  le  catalngne  des  clieva- 

dml    queitiue    temps    rhô|iilal   ue /a  l'ilié,  liers  jusqu'en  l'an  LV87,  iiarini   les(]iieN  l'on 

(lu'elles  quitlèreni  en  1S18,  et  celui  de /a6'/in-  veilles  comtes  de  Limbourg,    de   Tciilem- 

I  i/r,  qu'elles  quiltér'-nt  en  1816.  Depuis  une  bourg  cl  de  .Nassaw,  les    barons    di-    Mi-rod, 

douzaine  d'. innées, elles  sont  rentrées  au  ser-  i!e  Pallence,  de  SombrfF,  de  liirgel,  de   Wla- 

vicedece  dernier  cl   dessc.venl    égilcnient  Iimi,    de   Hlungart    et   d'autres;    mais   il    ne 

l'diincxe  (/« /'//-;/f/-i*('ei(,  située  au  faubou' g  marque   point  ce    qui    distinguait   ces   chc- 

Saint-Anloine.  Ces  quatre  maison'*  de   Pans  valicrs. 

ont  bien  chacune  une  supérieuie  locale,  Q'ioi  qu'il  en  soit,  aj  rôs  la  morl  do  Jean- 
mais  elles  ne  fvut  néanmoins  qu'une  seule  Guillaume,  duc,  de  Jaliers,  sur  les  dilTér  nds 
f.imille.  Les  religieuses  ont  obé.iience  d'une  qui  survinrent  au  suji't  de  sa  suc.  e-si' n 
maison  à  l'autre,  cl  les  novices  doivent  être  entre  l'éiccieur  de  Brandebourg  et  Wolfang- 
cnvoyces  à  louies  avant  d'être  a  Imises  à  la  Guillaume,  duc  de  Neubourg.  ces  princes 
prufess  on,  qui  n'est  accordée  que  sur  le  firent  un  accord  entre  eux,  par  lequel  le  dû- 
suffrage  des  .Mères  de  touti  s  les  maisons,  ché  de  Juliers  échut  au  duc  de  Neubourg. 
Dans  ces  quatre  établissenienls  ,  il  y  a  Cli.irles,  comte  palatin  du  Itliin,  et  liuitièn:e 
en  totalité,  au  moment  où  nous  ccrivo  is,  électeur  de  riwn|)ire,  étant  mort  suis  enf  mis 
soixante. cin(]  |ir(ifis-es  et  vingt-six  novices.  I  an  1G8'),  Philippe-Guillaume,  duc  de  Neu- 
Kensrifjncmrnls  fournis  par  la  rctéremie  bourg  et  de  Juliers,  (lar  la  faveur  de  l'eni- 
Mi're  A'..  rclirjicu>e  de  cet  iiifiitul  depuis  perenr  Léopold-Ignace,  qui  avait  épousé  une 
l'année  181G.  15  n-ii.  de  ses  filles  succéda  au  palalinat  du  Rhin  cl 
...,...<.. -n/^  .  c  ,  à  la  dignité  d'éleclenr.  01  élcctorat  avait  été 
HUBLUl^CnEVAUKnsDni.ORDnEnESA.NT.).  créé  en  faveur  de  Cbarles-Louis,  comte  pa- 
Raynaul  111,  duc  de  Juliers  cl  de  Guel-  latin  du  Rhin,  confoiniémenl  au  traité  de 
d;es,  étant  mort  l'an  lV2:t,  A(lnl|>lH'lI,  romie  Munster  de  l'an  IfiVS,  quoique  par  la  Rullo 
lie  Mors,  lui  succéda,  et  re«;ul  l'inveslilure  d'Or  il  ne  doive  y  a\  oir  que  sopt  électeurs  de 
des  duchés  de  Juliers  et  de  Gueidres  de  l'em-  l'iMiipire  ;  mais  ce  fut  l'expédient  (]iie  l'on 
pcreur  Sigismond,  l'an  l'*2").  Mais  Arnould  trouva  pour  parifi-r  les  deux  branches  pal.i- 
d  Lgmond,  qui  avait  des  prétcnti  ns  sur  ces  lines,  l'une  que  l'on  ajipelle  Rod  Ipliine,  (]ui 
provinces,  s  empara  du  dm  hé  deGueldres,  et  est  celle  des  comtes  palatins, et  l'antre  qu'on 
intra  avee  des  Iroiipes  dans  le  pays  de  Ja-  nomme  Guillelmine,  qui  est  celle  des  ducs 
liers:  ce  qui  obli;ie.i  Adolphe  de  laire  un  ac-  de  Itaviére,  qui  avait  clé  mise  en  possession 
lord  aicc  lui,  par  bquci  il  lui  céda  pour  d'  la  dignité  d'électeur,  do  .1  Ferdinand  V, 
loojnurs  le  dnche  de  tlue!dre<,  loi  donna  dix  comte  p.ilalin  du  Rhin,  avait  été  pri^é  par 
uulle  llor.ns  i)our  so  autres  prélenlions,  cl  l'empereur   rerdiiiaiid   II,    l'an    Iti^'l,    pour 


4Î7 


HUM 


IIUM 


478 


avoir  accepté  la  couronne  de  lioliêmo,  qui 
lui  avait  été  offerte  par  les  rebelles  de  ic 
royaume. 

En  créant  ce  huitième  électoral,  on  avait 
au- si  en  même  temps  créé  la  charge  de 
grand  trésorier  de  l'Empire  pour  y  être  al- 
lacliée,  afin  de  dédommager  cet  électeur  de 
la  charge  d'archimaîlre  d "hôtel  attachée  à 
l'électoral,  possédée  par  le  duc  de  Havière. 
Ma's  Maxiiiiilien-Maric ,  duc  de  Bavière, 
ayant  été  privé  de  son  élector.it  contre  les 
lois  de  l'Empiie,  par  l'empereur  Joseph,  à 
cause  que  ce  prince  avait  soutenu  les  droits 
et  les  libertés  du  môme  Empire  et  (ju'il  avait 
reconnu  pour  roi  d'Espagne  Philippe  V 
(peîit-fils  de  Louis  XIV,  roi  de  Fr.mce),  qu;; 
(Charles  II  avait  appelé  à  la  succession  de  1 1 
monarchie  d'Espagne  par  un  les  aincnl  iiu'il 
(il  quelque  temps  avant  sa  mort,  la  charge 
d'archimaîlre  d'hôtel  de  l'Empire,  aUachée 
à  l'électorat  du  duc  de  Bavière,  fut  rendue 
|)ar  le  même  empereur  à  l'électeur  palatin 
Jean-Guillaume,  ducdeNeubourg,  ((ui,  pour 
en  conserver  la  mémoire,  voulut,  comme 
duc  de  Julicrs,  rétablir  l'ordre  de  Saint- 
Hubert,  qui  était  depuis  longtemps  aboli.  Ce 
prince  conféra  cet  ordre  à  plusieurs  seigneurs 
de  sa  cour,  auxquels  il  assigna  des  pensions 
cunslilérablcs,  à  condition  que  de  ces  pensions 
ils  seraient  obligés  d'en  donner  la  dixième 
p;\rtic  pour  l'entrelien  des  pautres  de  l'hô- 
pital, 61  qu'ils  donneraient  aussi  le  jour  de 
leur  réception  dans  l'ordre  cent  hongres 
d'or.  Ces  chevaliers  aux  jours  solennels  sont 
habillés  de  noir  à  l'espagnole,  excepté  qu'ils 
nout  point  de  gor.ile.  Ils  ont  sur  cet  habit 
une  chaîne  d'or  pendue  au  cou  à  laquelle  est 
attachée  une  croix  d'or  large  de  quaire  doigts 
et  ornée  de  di.imants,  au  milieu  de  laquelle 
est  l'image  de  saint  Hubert  à  genoux,  priant 
devant  un  crucifix  qui  est  entre  le  bois  d'un 
<  erf  ;  el  au  côté  gauche  de  leur  pourpoint  ils 
ont  en  brodi  rie  d'or  un  ccicle  entouré  de 
rayons,  au  milieu  duquel,  sur  un  fond  rouge, 
sont  ces  paroles  eu  langue  allemande  :  De- 
meurez ferme  dans  la  foi  (1).  Hors  les  céré- 
monies el  les  fêles  solennelles,  ils  ne  portent 
point  le  collier  et  ont  sur  leurs  babils  ordi- 
l'aires  un  ruban  rouge  en  écharpe,  passant 
ilepiiis  l'épaule  gauche  jusiju'à  la  hanehe 
ilroile,  auquel  rubau  est  altai  bée  la  croix, 
el  au  côlé  gauche  de  leurs  justaucorps, 
1  ovile  dont  nous  avons  parlé. 

Wernher  Teschen  jMacher,  .4Hi'?fi/.  Clivhv, 
Julifinœ,  etc.,  pcuj.  403  et  515.  Schoonebeck, 
Histoire  dis  Oidres  militaires,  tum.  II.  Bo- 
lianni,  Ta^a/of/.  Ord.  militur.  Aubert  le  Jîire, 
Oriyo  e/uest.  Ord.  Bernard  tjiustiniaui,  llisl. 
CliruiioL  de  (jli  Ord.  militari. 

HUMILIÉS  (Ordre  des). 

j  I.  Des  religieux  de  l'ordre  des  [fumiliés  et 
de  leur  suppression. 

Les  différents  sentiments  que  les  écrivains 
qui  oui  parlé  de  l'ordre  des  Humiliés  ont  eus 
louchant  son    origine,  les    uns   la    mettant 


en  1190,  sous  l'empire  de  Frédéric  Barhe- 
rousse,  d'antres  en  1180,  quelqnes-uus  i  ii 
ll'JG.  el  plusieurs  enfin  la  f.iis;inl  remou'er 
jusqu'en  l'an  1017,  sous  l'empire  d'Henri  H 
surnommé  le  Saint,  m'ont  obligé  d'avoir  re- 
cours aux  religieuses  de  cet  ordre  pour  sa- 
voir si  elles  n'auraient  point  d'anciens  titres 
qui  pussent  lever  ces  diffieultés.  Si  je  n'en  ai 
point  été  tout  à  fjiléclairci  p.ir  les  mémoires 
qui  m'ont  été  envoyés  en  1709  par  l'abbesse 
du  monastère  de  Saint-Erasme  de  Milan,  j'.ii 
au  moins  appiis  beaucoup  de  pai  licularilés 
concernant  cet  ordre  qui  ont  été  inconnues 
jusqu'à  preseiil.  )îl,  comme  dans  ces  mémoi- 
res on  cite  souvent  une  chronique  de  cet 
ordre  composée  en  latin,  l'an  l'il'J,  par  lo 
P.  Jérôme  Toreccbio  (prévôt  du  couvent  que 
les  Humiliés  avaient  à  la  Porte-Neuve  à  Mi- 
lan), el  que  l'on  me  marque  qu'elle  se  trouve 
dans  la  fameuse  bibliothèque  Ambrosienne 
de  la  même  ville,  dans  le  désir  que  j'avais 
de  découvrir  la  vérité,  je  me  suis  adressé  à 
d'autres  personnes  desquelles  j'espérais  de 
p'us  grands  éclaircissements;  mais  je  n'ai 
pas  eu  un  succès  plus  heureux  dans  celte  se- 
conde lenlalive,  puisque  les  mémoires  que 
j'en  ai  reçus  en  1710  ne  ililîcrenl  des  pre- 
miers qu'en  ce  qu'ils  m'ont  appris  de  plus 
qu'il  y  avait  dans  la  même  biblioihèque  une 
a;itre  chronique  de  cet  ordre  composée  aussi 
en  latin,  en  i'^dS,  par  le  P.  Marc  Boslo,  avec 
des  ordonnances  des  chapitres  généraux  do 
celte  congrég.itijn,  la  règle  de  saint  Benoit 
adapfée  pour  les  religieux  Humiliés,  leurs 
constitulions,  un  catalogue  de  leurs  saints  et 
de  leurs  bienheureux,  avec  un  abrégé  de 
leur  vie,  et  quantité  d'autres  pièces  qui  l'ont 
qua're  volumes  in-folio ,  el  que  Pierre  Puri- 
ce  li  (qui  donna  eu  163.'J  les  monuments  de 
I  Eglise  ambrosienne)  avaittraduit  en  italien 
ces  d(ux  chroniques  et  toutes  ces  autres  piè- 
ces, qu'il  avait  ramassées  el  éeriles  de  sa 
main,  dms  le  dessein  de  donner  au  public 
une  histoire  de  cet  ordre,  (\ue  le  P.  Pape- 
broeh  dit  avoir  vue  entre  les  mains  de  si  s 
héritiers. 

Ce  qui  llaltait  le  plus  mes  espérances,  < 'est 
que  |e  m'attendais  que  celle  cbroniiiue  du 
P.  Toreccbio,  qui  est  le  plus  ancien  original 
que  l'on  m'indiquait  dansées  mémoires,  me 
donnerait  quelque  connaissance  de  ce  quo 
je  cherchais  ;  mais  ce  que  cet  auteur  met  sur 
i'élablissement  de  cet  ordre  est  si  peu  proba' 
ble  et  s'accorde  si  mal  avec  la  chronologie, 
que  nous  ne  pouvons  pas  adhérer  à  son  sen- 
timent. Voici  ce  qu'il  en  dit. 

Les  villes  de  Pavie,  de  Lodi,  de  Crémone, 
et  queli]ues  autres  de  Lo  nbardic,  principa- 
lement celle  de  Milan,  s'élanl  révoltées  cou-' 
Ire  l'empereur  Henti,  ce  prince,  étant  passé 
en  Italie,  remit  ces  villes  sous  sou  obéis- 
sance, el,  pour  châtier  les  chefs  des  rebelles, 
qui  étaient  les  personnes  les  plus  considéra- 
bles d'entre  la  noblesse,  il  les  mena  prison- 
niers en  Allemagne.  Ces  gentilshommes  se 
lassant  de  leur  captivité,  le  bienheureux 
Gui,  qui  s'était  ac(iuis  beaucoup  de  crcUit 


(I)   Vo-j.^  [>.  la  li  I  du  vol  ,  II"  i  lis. 


j:')                                            DICTKJNNAIUE  DES  OnuUES  IlELIGi;  l!X.                                          480 

p.irrai  eus,  les  exhorta  à  profiler  de  leur  de  sps  armes  pliisiiur-i  villes  de  I  ombardic 
ni.iMicur  el  de  fiiire  un  viriiable  retour  vers  qui  ne  voulaient  pas  le  retonnaîlre  pour 
Dieu,  en  méprisant  toutes  les  vanités  de  ce  souverain  après  l,i  mort  de  la  comtesse  Ma- 
«iion'ie,  dont  l'inconsianee  leur  était  connue  lliilde,  dont  il  était  héritier,  aurait  pu  avoir 
par  leur  propie  expei  ience,  et  on  s'exereanl  envoyé  en  Allemagne,  on  comme  prisonniers 
dans  la  pratique  des  >eitus.  Ces  grniilsliom-  de  guerre,  ou  comme  rebelles,  des  genlils- 
III.  s  avant  suiu  S' n  a\is,  se  revélirenl,  l'an  hommes  de  Lombardie,  qui,  enfin  lassés  île 
1017  ,  d'hal)  ts  de  couleur  cendrée,  qui  cou-  leur  captivité,  se  seraient  revêtus  d'haliiis  de 
si-'laienl  eu  une  robe  de  gros  diap  ,  cciulc  péuilcnie  pour  implorer  la  miséricorde  do 
d  une  ceinture  de  morne  étofle  ,  avec  un  l'empereur  el  en  obtenir  la  permission  de  re- 
grand nianleau  qui  descendait  jusqu'à  terre,  tourner  en  leur  pays. 

el  des  bonnets  de  même  étolTe  pour  couvrir  Quoi  qu'il  eu  so;l,  Tordre  des  Humiliés  doit 
leur  léte  (I).  Les  exercices  de  |)iété,de  cha-  être  regardé  eu  trois  élals  dlITeients,  qui  ont 
rite  cl  de  monilicalion  qu'ils  prati(|uaienl,  clé  afipelés  dans  cel  ordre  même,  premier, 
étant  venus  à  la  c^)nnai^sance  de  l'empereur,  second  et  troisième  ordre.  Le  premier  est 
il  les  fil  venir  en  sa  prc-ence  ,  où  s'étanl  celui  (/e* /;errc.'Ù!.<  (/e /a  /'c'inVrnre, (]ui  a  pris 
prosternés  à  ses  pieds  les  larmes  aux  yeux,  son  origine  eu  AUemigne,  lorsque  ces  gén- 
ies premières  paroles  que  ce  prince  leur  dit  lilsliommes  lombard*,  qui  avaient  été  (i>n- 
furent  celles  qui  suivent  :  vous  voilà  donc  duits  prisonniers  embrassèient  sous  un  ha- 
ù  la  pn  huniilirs;  cl,  après  avoir  continué  à  bit  de  couleur  de  cendre  une  vie  pénitente,  cl 
leur  dire  quel  jue  chose  de  leur  rébellion  formèrent  mire  eux  une  société  pour  prali- 
p.issée,sur  les  assurantes  (lu'ils  lui  donné-  qucr  les  niémes  exercices  de  p  été,  d'orai- 
reiil  de  leur  lidélité  à  son  service  et  de  la  ré-  sons  el  de  mortificalion,  et  rélablirent  à  leur 
S()!u  ion  où  ils  étaient  de  continuer  le  genre  retour  en  Italie  ks  manuraclurcs  de;  laine, 
de  vie  qu'ils  avaient  entrepris,  il  leur  accorda  donnant  à  li  aval  lier  à  une  infinité  de  pau- 
la  liberté,  leur  permettant  de  relourner  eu  vres  artisans,  s'occupanl  eux-mêmes  à  f.nrc 
leur  pays.  des  draps,  vivant  du  travail  de  leurs  mains. 

Etant  arrivés  en  Lombardie,  leurs  femmes  el  distribuant  aux  pauvres  ce  qui  leur  res- 
les  voulurent  imiter  dans  leurs  exercices  de  lait  de  leur  gain,  après  en  avoir  pris  te  qui 
piété  et  dans  li  praique  des  vertus  ;  elles  se  était  nécissaire  pour  la  vie. 
revêtirent  aussi  d'habils  de  même  couleur,  Le  second  commença  lors(iue,  l'an  1I3V, 
el,  comn)e  leurs  maris  introduisirent  la  fa-  par  le  conseil  de  saint  IJernard  ,  ils  se  sépa- 
brique  des  élolTes  de  laine ,  auxquelles  ils  rèrenl  de  leurs  femmes  pour  vivre  dans  la 
lra> ail'aieiit  eux-mêmes, el'es  s'enipliiyaient  conlinence,  prirent  dis  habits  blancs  |iour 
aussi  àlilerla  l.iino.  Mais,  dans  le  séjour  (luo  marquer  la  pureté  de  leur  âme,  s'engagèrent 
saint  l'crnard  lit  à  Milan,  les  Humiliés  (que  à  un  nouveau  genre  de  vie  el  jetèrent  les 
l'on  nutnmait  les  Itti  retins  de  lu  Pénitence,  à  fondements  de  leur  premier  monaslèie  à  Mi- 
cans  •  qu'ils  portaient  un  gr  s  bonnet  que  les  lau  au  quartier  de  Brcra.  Ils  ne  changèrent 
Italiens  appellent  boretlino,  oulre  «lu'ils  se  rien  à  la  forme  de  leur  habillement  :  il  con- 
servent tiuelquefois  de  ce  terme  [lour  signi-  sislail  en  une  robe  el  un  m.inleau  ne  draji 
lier  le  ^ris  brun  (|ui  était  la  couleur  de  leur  blanc,  avec  de  gros  bonnets  bl mes  pour  cou- 
habit;  prièrent  ce  saint  de  leur  prescrire  vrir  leur  tète  au  lieu  de  ceux,  de  drap  gris 
quelques  règlemenls  pour  leur  conduite.  Il  (ju  ils  porlaionl  auparav.ml.  Ils  rccitaienl 
leur  conseilla  de  se  séparer  de  leurs  femmes  toutes  les  scm  liucs  le  l'saulier,  s'excrçiienl 
et  de  vivre  en  coiiimiiu.  Il  les  exhorta  aussi  à  b/aucoup  d'autres  œuvres  pieuses,  et  tanl  à 
de  se  mettre  sous  la  proteciiou  de  la  saiule  cause  de  l'humililé  de  la  sainte  \'ierge,  A 
\'ierge,  cl  pour  cet  elTct  de  i  hanger  leurs  laqnel'e  ils  avaient  beaucoup  de  dévotion  et 
babils  cendrés  en  babils  blancs,  puur  mar-  qu'ils  prirent  pour  leur  protectrice  ,  qu'à 
uuer  la  pureté  de  leur  âme.  cause  que  l'empereur,  lorsqu'ils  se  prosliT- 

l'els  fu  eut  les  commencements  de  l'ordre  nèrent   à   ses    pieds,    leur    avait    dit    qu'ils 

des  Humiliés  selon  le   I'.   Toreccliio,   le  plus  élaient   enfin   liuiiiiliés,    ils    prireni    le  nom 

ancien  historien  de   cet  ordre  :  mais,  si  Ton  li' llitmilics   et  quillérenl  celui   de  Jlerrelins. 

ci'iisiiière  (|iie   saint  Bernard   n'alla  à  Milan  îinlin   le   troisième  ordre  ,  el  celui  qui  a 

que  l'an   1  l.'j'»,  el  qu'il  y  aurait  déjà   eu    près  subsiste  jiis(iu'à  leur  suppression,  commença 

de  six-vingts  années  d'écoulées  deituis  le  re-  lorsqu'ils  embr.is»èrenl  la  règle  de  .saint  Ue- 

lour  de  ces  genlilsbommcs  en  Lombardie.  ou  noîi  et  qu'ils  apportèrent  eu'.ore  du  cliange- 

iroiiM-ra    que   cela    ne    peut  pas  être  arri\é  mentdans  leur  babillemenl  :  lar  ils  prirent!  un 

sous  Ti  mpereur  Henri  11,  n'y  ayant  pis  d'ap-  scapulaire  auquel  était   allaclié  un  pe  il  ea- 

parincc  qu'ils  eussent    de   sans   règlements  iiuce,    et  portaient  par-de-sus   le    manteau 

pour  leur  «(induile  depuis  Tan  1017  |usqu'en  long,  ou  chape,  une  moselte  blanc  lie  (2).  Ce 

U.'T»,  d'.nil.inl  plus  que  le  1'.   Toreci  liio  parle  fui    à    l.i   persuasion   de    sainl  Jeau  de  Meda 

comme    s'il    n'y   avait  (jUc    quelques  années  qu'ils  suivirent    la  règle  de    s.iinl  Iteiidît    il 

qu  ils  eussenl  einlirassé  ce  noH\Cau  genre  de  étail  de  la  famille  des  Oldrati    de  Milan,  qui. 

Me  lorsque  s.iinl  liernard  alla  à  Milan.  Ainsi  selon   Morigia,  a  diuné  à  TKglise  deux  car- 

11  parait  plus  vraisemldab'e  (juc  cet  ordre  n'a  dinaux,  qiialre  archevêques  de  .Milan,  deux 

'OU nié  que    Tan    1117,  sous  l'empereur  èvêques  de  Novare,  et  un  général  à  Tordre  de 

Henri  \',  (juj,  apri  >  avoir  soumis  par  la  forte  Saint-Uumini(|ue.  Le  surnom  de  Mvda  lui  fui 

U)  Voj/.,  il  |j  lin  (lu  vul.,  Il*  II:».  (ï)  Voij.,a  l.i  lin  du  vol.,  n    120. 


481  IIUM 

donne,  parce  qu'il  naquit  dans  ce  lieu ,  qui 
es(  éloigné  de  dis  milles  de  la  ville  de  Gôine 
en  Italie,  dont  même  il  était  seigneur  ;  mais 
il  renonça  à  toutes  les  richesses  de  la  terre, 
cl  se  reiiri  dans  la  solitude  de  Kondenario, 
sur  la  Tivière  de  Coscia,  à  quelque  dislance 
(le  la  ville  de  Côme,  où  l'on  prétend  qu'étant 
lin  jour  en  oraison,  li  sainte  Vierge  s'appa- 
rut à  lui,  et  que  lui  montrant  un  habit  hianc, 
e!le  lui  ordonna  d'aller  se  joind  eaux  Hu- 
miliés à  Milan.  Il  fut  reçu  dans  le  couieni 
de  Brera ,  et  comme  il  était  déjà  prêtre,  et  le 
seul  de  cet  ordre,  qui  n'était  pour  lors  com- 
|iosc  que  de  frères  lais,  la  dignité  de  son 
caraclère,  jointe  à  ses  grandes  vertus  et  à  la 
sainteté  de  sa  vie, lui  attira  tellement  l'amour 
et  le  respect  de  tous  les  religieux,  qu'ils  se 
soumirent  à  sa  conduite. 

Ce  fut  pour  lors  qu'il  leur  fit  prendre  la 
règle  de  saint  Benoît,  avec  riiahillement 
dont  nous  avons  parlé.  Il  leur  drc  ssa  un  bré- 
viaire particulier  sinis  le  litre  d'ollîce  des 
cliauoinos.  En  effet  ils  prirent  ce  nim,  et, 
dansia  règle  de  sainlBenoîl  qu'ils  suivaient, 
et  qui  leur  était  adaptée,  les  noms  de  moines 
et  de  frères  sont  changés  en  cel.ii  de  cliaiio.- 
nes.  Il  les  obligea  aussi  à  dire  tous  les  jours 
l'office  de  la  Vierge  (ce  que  quelques  monas- 
tères de  religieuses  du  même  ordre  obser- 
vent encore  à  présent),  et  il  fit  prendre  les 
ordres  sacrés  à  ceux  qu'il  jugea  avoir  assez: 
de  piété  et  de  science  pour  s'en  rendre  capa- 
bles. Pour  lui,  il  s'adonna  à  la  prédication, 
et  fit  tant  de  conversions,  qu'un  giand  nom- 
bre de  personnes,  autant  touchées  de  ses  pa- 
roles qu'édifiées  par  sa  conduite,  entrèrent 
dans  cet  ordre.  U  y  en  eut  plusieurs  qui  y 
donnèrent  leurs  biens ,  ce  qui  donna  le 
anoyen  à  saint  Jean  de  Meda  de  faire  plu- 
sieurs établissements  dans  la  Lombardie  ; 
de  sorte  qu'en  peu  de  temps  cet  ordre  Ht 
beaucoup  de  progrès  sous  sa  conduite  :  ce 
■{jui  lui  a  acquis  W.  iWie  de  Propagaleur  de 
l'ordre  des  Huxiliés.  U  acheta  Kondenario, 
qui  était  le  lieu  de  sa  première  retraite.  Il  y 
lit  bâtir  une  église,  qui  fut  dédiée  en  l'Iion- 
neurde  l.i  sainte  Vierge  et  de  tous  le-,  saints, 
cl  il  y  joignit  plusieurs  cellules.  Dieu  fil  pa- 
raître par  plusieurs  miracles  combien  les 
charités  que  ce  saint  faisait  aux  pauvres  lui 
étaient  agréables  :  car,  dans  une  cherté 
d'huile,  ajant  ordonné  à  ses  religieux  dj 
n'en  point  refuser  aux  pauvres  qui  en  de- 
manderaient, le  vaisseau  où  on  la  conservait 
se  trouva  toujours  plein,  nonobstant  la 
grande  distiibuiion  que  l'on  eu  faisait.  En- 
lin,  après  avoir  gouverné  cet  ordre  pendant 
plusi'  urs  années,  il  mourut  le -2(5  septembre 
1  ISO.  Les  miracles  qu'il  avait  faits  pendinl 
sa  vie,  et  qui  continuèrenl  après  sa  mort,  le 
tirent  mettre  au  catalogue  d(  s  saints  par  le 
pape  Alexandre  lil.  On  voit  son  tombeau 
d.iiis  l'église  de  Kondenario, où  il  fut  enterré. 
Celte  égl.se  est  présentement  occupée  par  les 
clercs  réguliers  Somasques. 

Alexandre  111  avait  succédé  à  Adrien  iV, 
qui  était  morl  aussi  au  mois  de  si'piemlue 
1)59.  Il  avait  clé  élu  pirla  plus  grande  par- 
tie des  carlinaux;  mais  les  autres  lui  duu- 


II L  M  ^,82 

nèrent  un  compétiteur,  qui  fui  l'antipape 
Viclor  IV,  que  l'empereur  Frédciic  Barbe- 
rousse  reconnut  comme  légitime,  ce  (|ui 
causa  un  schisme  dans  l'Eglise.  D'abord  les 
Milanais  et  le  reste  de  la  Lon)bardie  recon - 
mirent  aussi  Viclor;  mais,  la  cause  d'Alexan- 
dre ayant  été  examinée  cl  trouvée  bonne  par 
les  rois  de  France  et  d'Angleterre,  qui  le  pri- 
rent sous  leur  proleciion,  les  Milanais  se 
rangèrent  de  leur  côté,  et  chassèrent  les 
partisans  de  l'empereur  et  de  Victor  :  ce  (jui 
obligea  Frédéric  de  venir  encore  assiéger 
cette  ville,  qu'il  avait  déjà  soumise  une  fois 
à  son  obéissance.  Ce  dernier  siège  fui  si  opi- 
niâtre, que  l'emiereur  après  s'être  rendu 
maître  de  celte  ville  l'an  11G2,  la  fit  entière- 
ment démolir,  hors  les  églises.  Il  la  fil  même 
labourer  avec  une  charrue,  y  fit  semer  du 
sel,  en  mémoire  de  sa  rébellion  ,  et  envoya 
prisonniers  en  Allemagne  ceux  qui  en 
avaient  été  les  principaux  auteurs.  Ces  pri- 
sonniers, qui  se  ressouvinrent  de  ce  qui 
était  autrefois  arrivé  aux  Humiliés  dans  une 
pareille  captivité,  firent  vœu  d'entrer  parmi 
eux,  et  de  f.iire  bâtir  une  église  à  Milan,  s'ils 
pouvaient  obtenir  leur  liberté.  Ils  se  revêti- 
rent d'habits  blancs  comme  les  Humiliés,  et 
allèi enl  se  prosterner  aux  pieds  de  l'enipe- 
ri  nr,  dont  ils  implorèrent  la  misôricoide,  et 
lui  demandèrent  la  permission  de  retourner 
en  leur  pays  ;  ce  qu'il  leur  accorda.  A  leur 
retour,  ils  accomplirent  leur  vœu,  et  firent 
bâtir  une  église  magnifique  à  Milan,  au 
quartier  de  Brera,  qui  subsiste  encore  au- 
jourd'hui, et  qui  a  été  donnée  aux  Jésuites 
après  la  suppression  des  Humiliés. 

La  paix  ayantélé  rendue  à  l'Italie,  leur  or- 
dre se  mulliplia  beaucoup.  Il  fut  approuvé 
l'an  1200  par  le  pape  Innocenl  III,  cl  con- 
firmé par  ses  successeurs,  Honorius  III,  l'an 
12i>tj;  Grégoire  IX,  l'an  1227;  Nicolas  IV, 
l'an  1289,  et  par  plusieurs  autres  souverains 
pontifes,  qui  lui  accordèrent  beaucoup  de 
privilèges.  Le  supérieur  de  cet  ordre  ne  prit 
le  litre  de  général  que  l'an  1246. Le  premier 
fut  Bertrand  de  Brescia.  Il  y  en  a  eu  trente- 
quatre  de  suite  jusqu'en  l'an  1570,  que  l'or- 
dre lut  supprimé  par  le  pape  Pie  V. 

Tandis  qu'il  se  conserva  dans  la  ferveur 
cl  dans  l'esprit  de  son  fondateur,  et  que  la 
règle  de  saint  Benoît  y  fut  fidèlement  obser- 
vée, sa  réputation  se  répandit  de  toutes 
paris.  Il  en  sortit  un  grand  nombre  d'excel- 
lents religieux,  dont  quelques-uns  ont  mé- 
rité le  litre  de  saints  et  de  bienheureux,  et 
d'autres  ont  été  élevés  aux  premières  digni- 
tés de  l'Eglise  :  ses  biens  et  ses  revenus 
augmentèrent  de  jour  en  jour  par  la  piété 
des  fidèles;  mais  le  temps  cl  les  richesses  y 
produisirent  le  relâchement,  et  la  propriété 
s'y  éleva  sur  les  ruines  de  la  discipline  ré- 
gulière. Les  supérieurs,  qu'on  appelait  pré- 
vôts, se  rendirent  maîtres  du  revenu  des 
monastères,  et  s'en  allrihuèrent  enfin  la 
jouissance,  de  même  que  s'ils  en  avaient  été 
les  titulaires;  et  les  prévois,  devenus  perpé- 
tuels, ne  donnaient  que  ce  qu'ils  voulaient 
h  leurs  religieux,  qui  avaient. 'i  peine  de  quoi 
vivre.   Ils    résignèrent   ensuite  ces    places 


<33 


niCTlONNAinC  DKS  OnDUES  heugieux. 


iM 


ctiinino  Ac  vérilabliS  bcmTices  «lonl  ils  ,nii- 
iniciil  ou  le  pouvoir  de  disposer;  rc  qui  ('l.iit 
l.i  source  d'uiio  iiiliiiilé  d'abus  :  car  o'.i  vcr.c- 
»nil  lr('s-pcii  «le  rclifiicux  dans  .'os  m  lisons 
dei'or.lic  ;  Il  s  prévois,  par  avarice,  en  re- 
Iraiuliaieiii  lo  nomlirc  auianl  qu'ils  pou- 
v.iicnl.afiii  d'avoirplusd'ocrasions  d'  grossir 
Iturs  revenus,  nilovaiil  ainsi  à  Die  idos  re\c- 
nusque  leurs  foiidatours  avaieiu  consacrés  à 
rentroticn  du  lomple  do  sa  majoslè  divine  et  de 
ceuvqui  dov.iiciily  ch.iiiler  ses  louaii^i  S  jour 
el  huil.  Mais  c'esl  ce  qui  neles  ombairassail 
puèrc  :  ;:u  conlrairc  on  n'y  recevait  ordinaire- 
menl  que  des  sujets  indignes  cl  is;noraiits,  et 
pour  la  plupart  adonnés  à  toutes  soi  tci  de  vi- 
ces, afin  quiis  ne  fussent  pas  en  clat  par  leur 
lionne  cDnJuile  et  leur  capacité  de  dépossé- 
der ceux  qui  s'étaient  emparés  des  supério- 
rités, qui,  enrichis  de  tant  d'injustes  dépouil- 
les, menaient  une  vie. si  licencieuse,  (lu'ils 
ne  refusaient  rien  à  leuf  sensualité  :  ils  ne 
marcliaieut  ([u'avec  de  grands  équipages  ; 
ils  allaient  à  la  chisse,  el  élaic-nt  continuel- 
lement dans  les  jeux  et  dans  les  plaisirs,  se 
souciant  forl  peu  de  ce  qui  regardait  la  con- 
duite de  leurs  monastères,  où  les  religieux, à 
leur  exemple,  faisaient  lionle  aux  séculiers 
les  plus  débauchés,  qu'ils  surpassaient  dans 
leurs  excès. 

Tclélail l'état  (lé,)lorable  de  cet  ordre, lors- 
que saint  Cli  irles,  (jui  en  était  protecteur, 
forma  le  dessein  d'j  f.iiie  revivre  les  observan- 
ces régulières  qui  en  étaient  hannics.  11  avait 
déjà  cbauclié  cette  entreprise  par  un  cotn- 
ini>sairc  qui  y  fui  envové  sous  le  pontincat 
de  rie  IV,  avec  ordre  d'y  travailler,  aussi 
Mcn  que  j.ar  divers  règlements  qu'il  lit  faire 
dans  un  chapitre  général  qui  se  tint  à  Mi- 
lan ;  mais  le  peu  d'effet  qu'eurent  les  remon- 
trances du  commissaire  et  les  règleaiewls  de 
ce  <  ha|iitre,  lui  ayant  fait  cuniiaître  qu'.l 
était  nécessaire  d'em[iloycr  l'autorité  du 
(lape,  il  en  parla  à  l'ie  V,  qui  ordonna  qu'à 
l'avenir  le.  prévôts  ne  seraient  plus  pcipé- 
luels,  mais  pour  un  temps,  et  qu'on  établi- 
rait nu  noviciat  pour  y  élever  les  j<!unes  gens 
dans  l'esprit  de  rinslilul  et  la  veritalle  ob- 
servance de  la  discipline  régulière.  Sa  Sain- 
teté accorda  pour  cet  cVet  au  saisit  cardinal 
deux  brefs  :  l'un  par  lequel  il  lui  donnait 
I  ou\  oir  de  lever  la  dixième  partie  des  reve- 
nus de  toutes  les  [irevotés  pour  contribuer  à 
l'etablssement  et  à  l'entretien  du  noviciat, 
et  l'autre  par  h-quel  il  le  déléguait  commecom- 
inissaire  ap  sloiique,  piiiir  faire  toul  ce  qu'il 
jugera  t  à  propns  pour  la  reforme  de  cet  or- 
dre. En  vertu  de  ces  biefs,  il  conTO(|iia  le 
(bap^lre  (général,  qui  se  luit  à  Créni me  l'a:! 
1o(i8,  où  il  ùla  a\i\  religieux  tout  ce  qu'ils 
avaient  en  propre,  el  les  obligea  de  niellie 
en  coiiiiiiuii  tous  les  biens  de  clia<|ue  iiioiia- 
»lére,  dans  les<iuels  il  établit  pour  cela  un 
Irésiiiier.  II  ordonna  qu'on  changerait  tous 
les  trois  a,.»  les  p.evôls  d  iiis  le  cliapitie  gé- 
néral, où  ils  'ciaiiiil  é  us  à  la  p  iirjlite  des 
Voix,  et  que  nul  d'eux  ne  pourr.iit  jamais 
porter  cette  qualité  eu  liin-  et  pour  l>  u- 
Juurs  ;  el  eu  même  temps  il  (il  élire  le  i-éné- 


ral,  qui  fut  le  P.  Louis  de  la  Basllicitc,  pré- 
vit de  Sainle-f^atlicrine  de  Crémone. 

La  plupart  des  religieux  particuliers  re- 
çurent avec  beaucoup  de  joie  les  ordonnan- 
ces de  saint  Charles,  et  lémoignèren!  d'abord 
de  s'y  vouloir  soumetlre  ;  mais  les  prévôts  au 
contraire  nepeiisèrenl  qu'à  s'opposer  à  leur 
exécution  et  à  se  maintenir  dans  la  supério- 
rité. Ils  tâchèrent  par  toutes  sortes  de  voies 
de  faire  condescendre  le  pape  à  les  appui  er 
daiw  leurs  piélcnlioiis  ,  mais  ce  fut  inutile- 
ment ;  car  ce  pontile  ayant  renvoyé  celle 
all'airc  <à  saint  Charles,  ce  cardinal  demeura 
ferme  dans  ce  qu'il  avait  ordonné,  el  voulut 
(|ue  ses  (  rdounaiiccs  fussent  puucluellemciil 
execjtées. 

La  grande  autorité  de  ce  saint,  jointe  à  si 
fermeté  inébr.inlablo,  leur  fil  tellement  per- 
dre l'espérance  de  réussir  dans  leur  entre- 
prise, qu'ils  ne  s'attendaient  à  rien  inoiii'. 
que  de  se  voir  obligés  à  embrasser  la  refor- 
me :  ce  qui  leur  étant  la  chose  du  monde  la 
plus  sensible  cl  la  plus  opposée  à  leurs  pl.ii- 
sirs,  les  mettait  dans  des  transports  exces- 
sifs de  colère  contre  le  saint  cardinal,  à  qiw 
ils  souhaitaient  tous  les  maux  imaginablev  : 
mais  irois  d'entre  eux,  qui  furent  les  prévôt, 
de  \'erccil,  de  Caravage  et  de  \érone,  plos 
passionnés  que  les  autres,  non  c  mtenls  d  • 
lui  souhaiter  mille  morls,  cunvinrenl  par 
une  entreprise  la  plus  impie  et  la  plus  bar- 
bare qu'on  ait  jamais  pu  concevoir,  de  le 
faire  tuer.  Ils  communiiiuèrent  leur  dessein 
à  linéiques  autres  compagnons  de  leurs  dé- 
règlements, qui  étaientdu  méineordre.  Ceux- 
ci  ap;irouvèrenl  cet  attentat  comme  le  moyen 
le  plus  sur  el  le  plus  court  pour  s'exempte  r 
de  recevoir  larelorine,  mais  principalemeiil 
un  certain  Jérôme  Doaat,  s;irnom;ne  Fiirinn. 
Ce  mallieuroDX,  toul  prélre  qu'il  étail.  s'y 
oiTrit  de  lui-même,  sans  qu'on  lui  en  parlai, 
pourvu  qu'on  voulûl  lui  donner  quelqu  ■ 
somine  d'argent  ponr  récompense.  Les  pre- 
\ot>  étanl  convenus  avec  lui  pour  quarante 
écus,  songèrent  où  ils  prendraient  cet  ar- 
gent ;  et  ne  trouvant  poi.it  d'autres  moyens 
pour  en  avoir  sans  s'incommoder,  ou  plu- 
tôt sans  letirerde  leurs  bourses,  ils  ver. dirent 
[lour  cet  clîet  i'argenlerc  el  les  ornements 
de  l'église  de  Brera,  qui  élail  la  principale 
maison  de  l'ordre  à  Milan.  Farina,  apiès 
a\oir  dépensé  son  argent  dans  les  ca'.aiets, 
voulant  exécuter  l'assassinat  dont  il  était 
convenu,  trouva  le  moyen  un  mercredi  iS  i 
octobre  de  l'an  liiti'.),  de  s'iulro  luire  secrèie- 
menl  dans  la  cha|)elle  du  saint  cardinal, 
et  lui  lira  un  coup  d'a^quebu^e  peiiJa.il 
qu'il  faisait  la  prière  du  soir  avec  ses  doiiie>- 
(i(|ues.  Mais  que  peut  la  malice  lies  liomiiie> 
contrôla  puissance  de  Dieu?  Par  un  etïe; 
de  celle  |)roteclion  divine,  qi.i  veille  tou- 
j;)ursà  la  conservation  de  ses  sa  n's,  la  balle 
ayant  frap|)é  lecardiii.il  à  l'epuie  du  dos,  ne 
lu  que  noircir  sonroclil  el  tomba  à  ses 
pieds.  Il  n'y  eui  qu'un  carreau  .lui  perça  s  s 
h.ibils  jusfic'a  la  chair  sans  la.io  autre  clio.-e 
qu'une  peli.e  tumeur. 

(Juehjiies   diligences   que    les  ofliciers   i!? 
la  justice  lissc'ii  puur  découvrir  les  uuluurs 


as 


iîl'M 


IIUM 


4»6 


(!e  cet  attentat,  elles  furent  inutiles;  mrJs  le 
jiape,  peu  satisf:iit  qu'un  crime  de  celte  im- 
portance reslâlim|iuni,  crut  ne  devoir    pis 
s'en  rapporter   enlièro.'iiont   aux  poursuites 
que  la  jusiice  en  avait  faites,    et  qu'il   élait 
(ie  soii  devoir  d'employer  loule  l'autorité  (jue 
Dieu  lui  avait  conliee   pour   venger   l'injure 
faite  au  sacerdoce  et  à  la  dignilé  du  cardina- 
lat. C'esl  pourquoi  il  envoya  exprès  à  Mil.m 
un    délégué  apostolique    pour  en   infoniicr. 
Ce  fut  Antoine  Scarampa,  évéquc  de  Lo'ii, 
qui  fui   chargé  de   celle  commission.   Sitôt 
qu'il  y  fui  arrivé,  il  fit   publer  une   ordon- 
nance purlanlde  tiès-grandes  censures  con- 
tre ceux  qui  ,  ayant  eu  connaissance  du  l'al- 
ti-ntat  commis  contre  la  personne    de   sainl 
Charles,    ne    viendrairnt   |  as     le     révéler. 
Deux  prévôts  dos  Humiliés,  dont   l'un    était 
(■on)plice  de  l'assassinat  et  l'autre   en  avait 
été  seulement  averti,  autant  p:r  la   crainte 
des  censures  que  par  les    remords  du  leur 
conscience  criniinelh',    qui   leur  rcprdcliait 
l'énormité  d'un  attentai  si  sacrilège,  vinrent 
trouver  le  délégué  apostolique,  et  lui  en  dé- 
couvrir, ni  quelque  chose.  Il  les  fil  arrêter  , 
t'I  dans  leurs  interroj;aloires  ils  no   purent 
«"empêcher    d'avour    le  crime    détestable 
qu'ils  avaient  voulu  commettre.  Les   autres 
c-oinplices  lurent  aussi   arrêtés,  et    Farina, 
auteur  de  l'assassina',  fut  pris  dans  les  trou- 
pes du  duc  de  Savoie,  où  il  s'était  fait  soldat, 
le  pape  ayant  écrit  à  ce  prince  pour  le  taire 
saisir  sur  ses  terres.  Les  plus  coupables  fu- 
rent exécutés   à  mort  le  iS  juillet    15"0.  11 
s'en  trouva    parmi    eus   qui  étaient  g(Mitils- 
liomiucs,  parmi  les(îuels  étaient  les  prévôts 
de  Virce;!   et   de   Gaiavage,  qui  curent    la 
lèti'  tranchée,   et  les  autres   furent  pendus 
avi'C  Farina. 

Lepapevoyant  la  difficulléqu'il  y  avait  de 
réformer  l'ordre  des  Humiliés,  prit  la  réso- 
lution de  le  suppri  ner.  Cette  nouvelle  ayant 
été  portée  à  Milan,  ce  fut  une  affliction  très- 
grande  non-seulement  pour  les  religieux  de 
cet  otdre,  mais  encore  pour  les  haliilantsde 
<:etie  ville.  Us  s'adressèrent  à  saint  Charles 
pour  prendre  son  conseil,  et  savoir  de  lui 
l>ar  quelle  voie  on  pouvait  empêcher  ce  coup. 
il  fut  d'avis  que  le  général  allât  à  Kome  se 
jeter  aux  pieds  du  pape  ;  qu'il  promît  à  Sa 
Sainteté  de  recevoir  telle  reforme  qu'elle 
voudrait  Lu  jjiescrirc  ;  que  la  ville  de  Milan 
écrivit  au  pape  en  faveur  do  cet  ordre,  et 
qu'il  écrirait  aussi  de  son  côté,  pour  porter 
le  pape  à  accorder  la  grâce  qu'on  lui  deman- 
dait, et  l'assurer  qu'il  avait  (  onçu  de  gran- 
des espérances  que  ces  religieux  accepte- 
raient sans  aucune  difficulté  la  réforme, 
pour  \  ivre  à  l'avenir  avec  plus  de  régularité. 
Le  général,  selon  l'avis  du  sainl  cardinal, 
alla  à  itome  se  jeter  aux  pieds  du  pape,  et 
le  supplia  les  larmes  aux  j  eux  de  conserver 
son  ordre  ;  mais  ni  ses  prièies  ni  les  so.lici- 
lations  de  saint  Charles  et  de  la  ville  de  Mi- 
tau  ne  purent  fléchir  l'esprit  de  Pie  V,  tant 
il  avait  horreur  du  crime  qu'on  avait  com- 
mis; en  sorte  que  par  une  bulle  du  8  février 
VSii  il  supprima  cet  orJre,  qui  était  com- 
posé pour  lors  de  quatre-vingl-qualorzeimi- 


naslôrcs,  dans  lesquels  il  n'y   avait   en  tout 
que  ceul  soixante  cl  dix  religieux. 

Le  même  jour,  le  pape  par  une  autre  bulle 
réunit  ensemble  plusieurs  prévôtés,  et  en 
donna  quelques-unes  à  sainl  Charles,  pour 
les  appliquer  à  tels  usages  pieux  qu'il  juge- 
rail  a  propos,  lien  donna  d'autres  à  dilTe- 
rents  ordres,  comme  aux  Chartreux,  aux 
religieux  de  Saint-François  el  de  Sainl-Do- 
iniiiique,  et  à  d'autres  communautés.  Quant 
au\  religieux  Humiliés,  il  voulut  qu'il  res- 
tât vin:t-huit  préires  et  sept  frères  convcrs 
dans  la  prévoie  de  Brera  à  Milan,  seize  prê- 
tres el  qualre  convers  à  Sainte-Abonde  de 
Crèm:)ne  ;  liuit  prêtres  el  (;uatre  convcrs 
dans  la  prévôté  de  Sainte-Catherine  de  l;i 
même  ville  ;  dans  la  prévôté  de  Vérone,  hu:t 
prêtres  et  doux  convers,  et  ainsi  de  quelques 
autres  prévolés,  où  il  les  dislril>ua  pour  cé- 
lébrer l'office  divin,  voulant  qu'ils  vécussent 
lincouimun  dans  les  prévôtés, où  ilsdemeure- 
raient  plusieurs  ensemble,  leur  ayant  assi- 
gné pour  c*t  effet  des  revenus  sullisants,  qui 
devaient  diminueràmesure  que  quelques-uns 
d'eux  décéderaient. 

Le  P.  Torecchio  dit  que  ces  religieux 
étaient  les  receveurs  des  enirées  et  des  péa- 
ges, qu'ils  éiaieul  cummiisaires  du  peuple, 
qu'ils  exerçaient  quelques  offices  dans  la 
justice,  el  qu'a  cause  du  grand  crédit  qu'ils 
avaient,  ils  exerçaient  encore  l'office  de  la 
canevaria  dans  toute  la  Lombaidie,  et  que 
chaque  supérieur  des  monastères  de  cet 
ordre,  dans  les  villes  où  il  y  avait  un  maga- 
sin de  uiuBitions,en  avait  une  clef.  Peu;-tlra 
leur  uvail-on  accordé  quelquesdroiis  sur  les 
marchandises,  à  cause  que  c  étaient  eux  (]ui, 
comme  nous  avons  dit,  avaient  non-seulc- 
uienl  introduit  dans  la  Lomhaidie  les  manu- 
factures de  laine  ,  mais  a'issi  les  fabriques 
d'élolTes  d'or  cl  d'argent,  lorsqu'ils  n'avaient 
encore  que  le  nom  de  Berretins. 

Nous  avons  dit  ci-devant  quels  étaient 
leurs  habilh  mcnts  ,  tant  dans  le  premier  el 
le  second  oidre  que  dans  le  troisième.  Celui 
du  premier,  dont  nous  avousdonné  ci-dessus 
la  représentation, se  Irouvecncore  représenté 
dans  un  ancien  tableau  qui  se  conserve 
chez  les  religieuses  du  même  ordre  de  cainle- 
Calherine  de  Brera  à  Milan,  où  l'on  voit 
quelles  étaient  aussi  les  armes  de  cet  ordre  , 
savuir  :  un  agneau  couché  sur  une  terrasse 
avec  un  rouleau  de  |  ajier  sortant  de  sa 
gueule,  sur  lequel  soat  écrits  ces  mots: 
Oiimia  vincil  humilitas.  Silvestre  Maurolic 
a  pris  appaiemment  cet  agneau  pour  un 
chien  ,  et  il  donne  pour  devise  à  cet  ordre, 
Tuta  fides  ;  mais  no:is  aimons  mieux  nous 
en  rapportera  cet  aneien  tableau. 

L'habit  du  secind  ordre  n'étant  différent 
de  celui  du  premier  que  dans  la  couleur, 
nous  n'eu  donnons  point  d'estampe  ;  mais 
bien  de  ceiui  du  troisième  ,  que  nous  avons 
représenté  conlormément  à  des  mémoires 
qui  nous  siiul  venus  d'ilalie. 

Nous  ne  [.'ouvond  rien  dire  de  la  vie  du 
bienheureux  Gui  ,  que  le  P.  Torecehio  re- 
connaît pour  fondateur  de  cet  ordre, et  après 
lui  saint  Anloiiin  ,  Silvestre  Maurolic,  Ar- 


487 


PICTIONNAÏKF,  DF.S  OnDRES  RIXIGILUX. 


48S 


iioulJ  Wiiin  rt  quelques  autres;  nous  avons 
ifcii  à  la  \('rile  de  Milan  un  cxlrait  «l'un 
Abrfj;o  lies  \'ics  dos  saiiils  iii'  TorJic  disUu- 
iiiilfos  ,  que  Piirici'lli  a  compose ,  cl  qui  se 
Iroine  dans  la  l.ibliolh.'quc  Anibiosuiine 
parmi  1rs  maiiusrrils  dont  nous  avons  parlo. 
(;.'l  oxir.iii  contient  le  iroisitnic  cliapilicdo 
r«'l  Aliri'iii-  d<'S  \'iL'S  des  saints  l'e  Tordre, 
lequil  cli.ipitro  ne  re},'arde  que  le  bienlieu- 
ri'us  tjiii,  l'I  a  piiur  litre  Ctipilulo  'i"  det  H. 
(iuidoilii  MHano,  fotidalore  deU'ordine  ddli 
JLiiiiiliati  ;  mais  «m  ne  trouve  rien  dans  ce 
cliapilre  ni  de  sa  naissance,  ni  de  ses  ac- 
tions, ni  de  !-a  niorl  :  tout  ce  qui  y  est  con- 
li  liu  ne  tend  (lu'à  faire  cunnailrc  qu'il  a  clé 
reconnu  pour  fondateur  de  ce  l  ordre,  cl  cela 
fondé  sur  un  vieux  missel  du  même  ordre 
i;i.i  lui  donne  ce  titre;  parce  que,  selon  Pu- 
riiclli,  Gni  s'éianl  acquis  beaucoup  de  cré- 
dit sur  l'esprit  de  ce»  gentilsliomnies  lom- 
bards que  leuipereur  Conrad  III  envoya 
prisonniers  eu  Alleinaj;ne  ,  il  leur  persuada 
de  rcnonicr  au  monde  et  de  mener  une  vie 
pénitente.  A  la  marge  de  ce  chapitre  il  y  a 
une  pi  litc  apostille  par  laquelle  l'auteur  dit 
(ju'il  s'est  trompé,  et  que  ce  qui  a  fait  don- 
ner le  litre  do  fondateur  au  bienheureux  Gui, 
c'est  que,  i'.m  113i,  il  recul  de  saint  Bernard 
quehiucs  règles  pour  cet  ordre,  et  qu'il  les 
fit  confirmer  par  le  pape  Innocent  111  l'an 
lit)".),  \oici  SCS  paroles  :  Arinyannaio,  queslo 
li.  Gttido  ntU'  unno  11  Ji  riceveile  da  S.  lier- 
nardo  Alcune  Jicyole  per  D.  Ordine  /^'  quali 
ftce  confirmai e  da  Innocenzo  PP.  Jll  neli' 
anno  11!j9,  et  percio  ne  fu  uddimcnlato  fon- 
dai or  c. 

l'our  moi  ,  je  crois  que  Puricelli  s'est 
trompé  et  dans  le  corps  du  chapitre  et  dans 
l'aposhlie  ;  car  l'empereur  Conrad  dont  il 
parle  ne  doit  pas  élrc  le  Iruiséme  du  no  n, 
qui  ne  parvint  à  l'empire  que  l'an  1139, 
quatre  ou  cinq  ans  après  que  si.inl  Bi'rnard 
fut  retourné  en  France,  cl  qui  d'uilleuis 
ti'cul  point  de  guerres  à  souleiiir  en  Lom- 
liardie  pendant  son  règne.  Il  esi  plus  pro- 
bable qu'il  veut  parler  de  Conrad  II,  puis(|uc 
ce  prince  fui  en  Italie  en  102"  pour  reluire 
les  Lombanls  .  qui  s'étaient  révoltes  conirc 
lui;  mais  il  n'y  a  pas  moins  de  dilfi  ulté  à 
accorder  cela  avec  l'arrivée  de  saint  liernaid 
en  llalie.  Car,  si  ('onrad  lil  ne  régna  (ju'a- 
près  que  saint  lleru.ird  fut  retourne  en  Iran- 
ce,  cl  qu'il  eul  par  couse  (ucnl  don. é  ces 
règlements  à  Gui,  qui  était  déjà  revenu 
d'Allemagne  en  Loinbardie,  Conrad  II  ré- 
gna si  longtemps  avant  l'arrivée  de  saint 
licrnard  à  Milan,  qu'il  serait  inq)ussilile  que 
liui  eût  ri\'u  de  lui  ces  mêmes  règlcmenls 
en  113'» ,  et  qu  il  les  eût  lail  approuver  par 
Innocent  Ml  en  lliiU,  coniiii''  le  dit  cet  au- 
teur, a  ni();ns  qu'il  ne  donne  i'rl  ans  de  vie 
à  ce  fuiidaleur  ;  ainsi  il  est  plus  |)rolia!ile, 
tomii.c  nous  l'avons  dij  i  dil  ci-dessus,  qUi: 
ci'l  ctablisscnicnt  est  arrué  sous  l'cmieri  ur 
llrnri  V,  pui>que  pour  1  rs,  s'il  est  dillicile 
d'accorder  que  (iui  ail  fait  approuver  ces 
rèi;leincnls  en  1111'.),  au  inoins  cela  n'esi  pas 
impossible.  (Julie  qu'il  sera  Irès-f  .cile  oe 
cujicctuir  que  saint  licinurd  lui  a  pu  donner 


ces  mêmes  rèalemcnls  eu  113'*,  d'autant 
piu.s  que  Cl  l  empereur  vivait  en  ce  temps-là 
cl  avait  eu  guérie  avec  les  Lombards. 

S.  .\ntiinin.  part,  ii  IlisC,  lit.  lo,  cap.  23. 
Sil»e-lre  .Maurolic,  Mur.  Océan,  di  tu: t.  U 
lidiij.  Pliilipjie  Bonaani,  ('atido(j  Oïd.  rclùj., 
p.  1.  Uermau,  Jlist.  des  Urd.  relii;.,  loin.  ïl. 
(jio  Bapi.  Jussiino,  Vit.  di.  S.  Carolo  Bor- 
rumeo,  153,  lib.  ii,  cap.  li-:  et  Mémoires  cn- 
toyés  de  AJilan  en  17U9  et  1710. 

§  II.  Des  religieuses  de  l'ordre  des  JIu- 
iniliés. 

Les  religieuses  de  l'ordre  dis  IlumiCés  ne 
furent  point  comprises  dans  la  suppression 
des  religieux  de  cet  ordre,  et  il  en  resie  en- 
core à  présent  treize  ou  quatorze  monastè- 
res en  llalie.  Nous  avons  dit  dans  le  para- 
graphe précédent  que  ces  gcnliishommos  de 
Lombardie  qui  avaient  été  menés  prisonniers 
en  Allemagne,  étant  de  retour  en  leur  pays, 
s'étaient  occupés  à  divers  exercices  de  pié- 
té, vivant  du  travail  de  leurs  mains;  qu'ils 
avaient  formé  entre  eus  une  société  sous  le 
nom  des  Berrclins  de  la  Pénitence,  que  leurs 
femmes  avaient  embrassé  le  même  génie 
de  vie;  et  enCiii  que  sa'nt  Bernard  ,  étant  A 
.Milan  l'an  113i  ,  leur  avait  prescrit  des  rè- 
glements, et  leur  avait  conseillé  de  se  sépa- 
rer de  leurs  femmes  et  de  vivre  dans  la  con- 
tinence. Il  y  eu  eut  plusieurs  qui  consenti- 
rent à  celte  séparation  avec  l'agrément  de 
leurs  femmes,  qui  se  relirèrenlà  Miian  dans 
une  maison  appelée  les  Prisons, au  quanicr 
de  Brcra  ,  cl  y  jetèrent  les  fondements  du 
monastère  qui  subsiste  aujourd'hui  sous  le 
litre  de  Sainte-Calherinc  de  Brera;  et,  com- 
me les  premières  fondatrices  de  ce  mona- 
stère étaient  de  la  famille  des  lilassoni  ,  on 
appela  d'abord  ces  religieuses  les  religieuses 
de  DIassoni. 

Comme  la  plupart  de  ces  nouvelles  ser- 
vantes de  Jcsus-tJhrist  étaient  des  plus  dis- 
tinguées de  la  ville,  il  y  eut  un  grand  nom- 
bre de  demoiselles  qui,  I  énonçant  à  la  vanité 
et  aux  faux  plaisirs  du  monde  ,  suivirent 
leur  exemple;  niais  celle  maison  ne  se  trou- 
vant pas  assez  grande  pour  y  recevoir  tou- 
tes celles  qui  se  prescnlaienl  pour  embrasser 
ce  nouvel  institut,  elles  achetèrent  une  aulic 
maison  d.ins  le  quartier  appelé  Borgo  \oco, 
et  donnèrent  encore  le  nom  de  Sainle-Ca- 
Ihennc  à  ce  nouveau  monastère.  LUes  quit- 
tèrent néanmoins  qiicUiue  temps  après  ce 
nom,  parce  (ju'ayanl  fonJé  à  cote  de  ce  cou- 
vent un  hopilal  pour  les  pauvres  teigneux, 
afin  d'avoir  lieu  d'exercer  la  charité  cl  de 
pratiquer  riiuinili  é.  on  les  appela  les  reli- 
gieuses de  illopilal  de  l'Oliser tance.  .Mais 
préseniement  ce  monastère  n'est  connu  que 
sons  le  nom  de  S.tinl-Krasme,  qui  en  e>l  ti- 
tulaire; (t  il  n'y  a  (juc  la  rue  qui  est  à  coté 
du  monastère  qui  a  retenu  le  nom  tivTcgno- 
si,  à  cause  de  cet  ancien  hôpital. 

Plusieurs  villes  il'Iialie  li  ur  oITrirenl  des 
élablissemenls,  qu'elles  acceptèrenl  :  ce  qui 
Gt  que  le  nombre  de  leurs  luonaslères  devint 
treb-coiisidcrable  ;  mais  présentement  il  n'iii 
roïlu  plus  (lue  treize  ou  quatorze,  ((ui  sont 


m 


litM 


HUM 


^90 


(eux  de  Sainle-Callioriiie  de  Brera,  de  Saint- 
Erasme  de  J{ors;o  Novo  el  de  Sainlc-Made- 
U'iiie  al  Ci'ichio,  à  iMilan;  de  Saiiil-BoiioU  à 
Lodi  ,  de  Sainle-Ursule  à  Corne,  de  S  linle- 
A'jalheà  Novarre,  de  Sainte-Marthe  de  Mou- 
le Ugo  à  Florence,  de  Saiiile-Agalhe  à  Ver- 
ceil,  de  Sainle-Margucrite,  el  de  Saiiite-Ma- 
(icieiiieà  Mouza,  diocèse  de  Milan;  de  Saiiit- 
MartiiiàVarè.se,au  mêmediotèse;  de  Saiiile- 
Catherine  à  Graiiedona  ,  au  diocèse  d.'  Cô- 
iiie;  de  Sainte-Marie-Madeleine  à  Lugaiio, 
ville  appartenant  aux  Suisses  el  aussi  du 
diocèse  de  Cônie;  et  de  Sainie-Cccile  à  Uu- 
iiie.  Mais  quoique  les  religieuses  de  ce  dei- 
nier  inonaslère  soient  de  l'ordre  des  Humi- 
liées, conitne  elles  le  reconnaissent  par  les 
mémoiresqu'ellesm'ont  envoyés,  elles  n'ont 
pas  néanmoins  toutes  les  observances  des 
autres  Humiliées.  Ce  monastùre  appartenait 
autrefois  aux  religieux  de  cet  ordre ,  qui 
l'abandonnèrent  ,  et  le  p;ipe  Clément  Vil  y 
mit,  l'an  1527,  quelques  filles  devoirs,  aux- 
quelles il  donna  la  règle  de  saint  Benoit  et 
l'habit  des  Humiliés.  Maure  M.igalotti ,  qui 
était  religieuse  de  l'ordre  de  Saint-Benoit 
au  couvent  de  Campo-Marzo  ,  en  fut  tirée 
pour  gouverner  celte  communauté  et  for- 
mer ces  fi  les  à  la  vie  religieuse:  et  il  pa- 
raît par  l'inscription  qui  est  au-dessus  de 
leur  porte  ,  et  qne  nous  rapporterons  ici, 
qu'elles  étaient  véritablement  de  l'ordre  des 
Humiliés,  comme  elles  le  prétendent  encore. 
Maura  Magalutla  abbalissa  a  Clemenle  sep- 
timo  et  Franciotla  cardindi  Ursino  prœposi- 
to  hue  accila,  œdem  haiic  ,  divœ  Cœciliœ  sa- 
crum, quam  monachi  Humiliatorum  Sancti 
Benedicli  anlea  oblinebant ,  m  prœsentis  tno- 
nasterii  ejusdem  ordinis  monialum  formam 
redegit,  eumqtie  pêne  collabcnlem  rcitituii  , 
adjeclis  insuper  hortis,  quorum  eliam  ut  ho- 
nestior  usus  esset,  claustrali  eus  muro  cinxil, 
anno  a  partu  Virg.  MDXXXX. 

H  semble  cependant  que  celles  de  Milan 
U8  veulent  pas  les  reconnaître  pour  leurs 
sœurs  :  car,  par  les  mémoires  que  j'ai  reçus 
de  l'abbesse  de  Saint-Erasme  de  la  même 
ville,  et  qui  sont  écrits  de  sa  main,  elle 
avoue  que  le  monastère  de  Sainle-Cécile  de 
Rome  était  aussi  de  religieuses  de  son  ordre, 
mais  que  depuis  quelques  années,  à,  la  solli- 
citation de  quelques  personnes,  elles  ont 
abandonné  l'ordre  des  Humiliés  pour  se  faire 
Bénédictines.  H  est  pourtant  certain  que  les 
religieuses  de  Sainte-Cécile  de  Ki  me  portent 
encore  l'habit  des  Humiliées,  el  qu'elles  se 
reconnaissent  toujours  pour  religieuses  de 
cet  ordre.  Une  dilïérence  qu'il  y  a  entre  les 
observances  de  celles  de  Rome  et  celles  des 
autres  Humiliées,  c'est  que  celles  de  Itome 
ne  mangent  de  la  viande  que  trois  fois  la  se- 
maine, et  que  les  autres  en  mangent  quatre 
fois,  en  quoi  celles  de  Rome  paraissent  plus 
austères.  Tous  les  monastères  de  cet  ordre, 
à  la  réserve  de  celui  de  Rome,  étaient  sou- 
mis à  la  juridiction  des  religieux  Humiliés, 
qui  avaient  soin  aussi  de  leurs  affaires  tem- 
porelles :  ce  qui  causa  la  ruine  de  quelques- 
uns  de  ces  monastères,  qui,  dans  la  suppres- 
sion qui  fut  faite  de  l'ordre  des  Humiliés 
Dictionnaire  des  Ordres  relu  ieux.  II 


(ayant  perdu  tous  leurs  litres,  qui  étaient 
enfie  les  mains  de  ces  religieux),  lurent  ré- 
duits dans  une  si  grande  pauvreté,  que,  so 
trouvant  hors  d'état  de  fournir  à  la  subsis- 
tance des  religieuses  ,  elles  se  trouvèrent 
obligées  de  se  procurer  des  pensions,  doni 
elles  ont  toujours  joui  en  particulier  jusqu'à 
présent,  cl  sur  lesquelles  elles  donnent  une 
certaine  somme  à  leur  monastère.  Mais  d'ail- 
leurs, quoique  la  vie  commune  n'y  soit  pas 
observée,  les  religieuses  ne  laissent  pas  d'y 
vivre  avec  beaucoup  d'édification. 

Elles  se  lèvent  la  nuit  pour  dire  matines. 
Landes  et  primes,  qu'elles  disent  le  malin, 
sont  suivies  d'une  demi-heure  d'oraisou 
mentale;  elles  en  font  encore  une  autre  de- 
mi-heure après  compiles.  Quatre  fois  la  se- 
maine, il  leur  est  permis  de  manger  de  la 
viande;  mais  l'abstinence  du  mercredi  e-l 
inviolable.  Elles  jeûnent  tous  les  vendredi^ 
de  l'année,  toutes  les  veilles  des  fêtes  de  la 
Vierge, de  plusieurs  saints, et  encore  l'aveni, 
outre  les  jeûnes  ordonnés  par  l'Eglise,  aux- 
quels elles  ne  mangent  aucun  laitage.  Elles 
prennent  la  discipline  trois  fois  la  semaine 
en  carême.  Elles  ont  beaucoup  de  dévotion 
à  la  sainte  Vierge,  leur  proicctrirc,  et  il  y  a 
quelques  monastères  où  les  religieuses  di- 
sent tous  les  jours  son  ofiice,  le  chapelet  et 
ses  litanies.  Quelques-unes  ont  retenu  l'an- 
cien Iréviaire  de  l'ordre,  comme  dans  les 
deux  monastères  de  Sainte-Catherine  de 
Rreia  et  de  Sainle-.Madelcine  al  Cerchio  à 
Milan;  les  autres  l'ont  quitté  pour  prendre 
le  b.'éviaire  romain,  mais  aj)p;iremment  avec 
répugnance,  car  il  y  a  eu  plusieurs  écrits 
qui  ont  été  laits  à  ce  sujet  ;  et  de  ces  recueils 
de  manuscrits  concernant  l'orJrc  des  Humi- 
liés, qui  se  trouvent  dans  la  bihliolhèquc 
Ambrosienne,  dont  nous  avons  parlé  dans  le 
paragraphe  précédent,  il  y  en  a  deux  qui  ne 
regardent  presque  que  ce  bréviaire,  doiil 
l'un  a  pour  titre  :  Joannis  Pétri  Puricelli 
Mediotuni  coHegialœ  S.  Tliomœ  theologi  doc- 
loris,  responsto  ad  Italicum  quoddam  scri- 
plum  sub  hoc  titulo,  nuper  edilum,  Rugioni 
per  le  quati  le  monacite  ddl'  Ordine  de  gti. 
Ilumiliali  lasciato  l'antico  breviario  deiT 
anno  1548,  devono  pigliare  il  Rotnano ;  et  an 
commencement  de  l'autre  l'on  trouve  écrit 
de  la  main  de  l'eu  M.  Bosca ,  bibliothécaire  : 
In  hoc  libro  conlinentur  :  Joannis  Pétri  Pu- 
ricelli Laurentianœ  Mediul  .ni  basiticœ  archi- 
presbiteri  argumenta  quœ  cogunt  moniales 
ordinis  llumiliatorum  psallire  more liomuno. 
H  y  a  encore  dans  un  antre  recueil  une  con- 
sultation du  même  Puricelli  au  sujet  de  m 
bréviaire,  qui  est  sous  ce  litre  :  Consulta 
del  Puricelli  pcr  le  nionache  inlorno  ull'  uf/i- 
cio  ,  avec  uu  traiïe  particulier  de  l'ofUn; 
divin. 

L'habillement  de  ces  religieuses  consiste 
en  une  robe  et  un  scapulaire  de  drap  blanc; 
et,  pour  conserver  quelque  chose  de  l'ancien 
liabillenient,  elles  portent  par-dessous  une 
petite  tunique  de  couleur  de  tendre.  H  y  a 
même  un  des  (rois  monastères  de  Alilan  uu 
elles  mènent,  l'hiver,  par-dessus  l'Iiabit  blai-.o 
une  tunique  de  couleur  cendrée.  Leurs  voi- 

10 


m 


niCTIONNMRE  DES 


les  sont  titanes  dans  la  plupart  des  monaslù- 
rcs,  et  ils  doivent  l'être,  selon  l'espril  de 
l'ordre;  n)ais  dans  quelques  nion;isi(^ies  , 
comme  dans  ceux  de  lUimc  el  de  N'erceil,  ils 
SiMil  noirs.  On  |i  ur  en  donne  (lour  in  profes- 
sion un  de  suie,  qu'elles  portent  aussi  à  la 
roinniunion  et  d.ms  les  grandes  Cf^'rénionics. 
Leurs  pniitOLifles  sonl  Manches  aussi,  et  elles 
ne  porienl  i  oint  de  manteau;  il  n'y  a  que  le 
seul  monastère  de  Sainte-Marthe,  à  Florence, 
où  les  rclipicuses  en  perlent.  Les  saurs  con- 
»<'rscs  ont  retenu  le  nom  de  Berrctines,  el 
elles  sont  encore  habil'ées  de  couleur  cen- 
drée, ayant,  connno  les  reliijicuses,  une  tu- 
nique, un  scapulnire  el  un  voile  de  loilc 
lilanclie  (I).  Elles  disent  pour  Itur  office  cer- 
tain nombre  de  l'ater  il  d  .4ic. 

Il  y  a  encore  dans  le  Milanais  d'autres  rc- 
LiRieusis  du  môme  ordre  qui  observent  la 
même  règle;  mais  leur  habillement,  leurs 
constitutions  cl  leurs  pratiques  sont  dilîé- 
renls,  principalement  dans  lo  bourg  de  Va- 


OlUifltS  RELIGIEUX.  495 

rèse,  situé  sur  les  confins  de  l'Etat  de  Milan, 
où  il  se  trouve  un  monastère  fort  ancien 
appelé  Saint-Martin,  parce  que  apparem- 
ment l'église  est  consacrée  à  l'Iionncurde  co 
saint.  Leur  habillemenl  consiste  en  une 
robe,  une  cdnlnre  cl  un  scapulnire  fort  lar- 
ge, (|ui  tombe  depuis  les  épaules  presque 
jusqu'au  bord  de  la  robe,  l'illcs  ont  deux 
voiles  pour  couvrir  leur  léic.  Tout  cet  li.ibil- 
lemcnl  est  blanc,  aussi  bien  que  le-,  deux 
voiles.  Nous  en  donnons  ici  un  desj-in  (2)  Itl 
que  nous  l'avons  trouvé  dans  le  P.  Bon.mni, 
Jésuite.  Ce  monastère  de  Sainl-Marlin  a  été 
soumis  au  général  de  l'ordre;  mais  dans  la 
suite  les  religieuses  en  furenlsouslrailes,  et 
se  gouvernèrent  par  elles-mêmes. 

Mémoires  envoyés  de  Milan  par  l'ablies.<e 
(hi  monastère  de  SainC-Erasme  en  1709,  it 
])ar  d'aulrcs  personnes  en  1710,  tant  de  Romr. 
que  de  Milan.  Phil.  Bonanni ,  Calai,  de  (jli 
Urdini  rcligiosi,  parte  ii. 


INDIENS.  Yoij.  Carmks  de  l'Etroite  Ob- 
si;nvANCE. 
INFIIIMIERS  MINIMES.  Voy.  Omucr.oNS. 

IRLANDE  (Anciens  ordhes  d')  unis  à  celui 
des  Chanoines  lldguliers. 

La  vie  monastique  est  aussi  ancienne  en 
Irlande  que  la  religion  chrétienne,  puisque 
ceux  qui  ont  travaillé  à  y  planter  la  foi 
étaient  engagés  dans  la  vie  monastique,  et 
qu'ils  bâtirent  un  grand  nombre  de  monas- 
lèrcs  qui  furent  remplis  d'un  si  grand  nom- 
bre de  religieux  qui  se  sont  rendus  recom- 
mandables  [lar  la  sainteté  de  leur  vie,  que 
l'on  a  donné  par  excellence  à  l'Irlande  le 
nom  d'Ile  des  S„ints.  Les  (hanuincs  Régu- 
liers prétendent  ;iVoir  fourni  les  premiers 
Pères  de  la  vie  monastique;  mais  c'est  sans 
;iucun  fondement  qu'ils  ont  mis  au  nombre 
des  saints  de  leur  ordre  saint  Patrice,  patron 
ri  apôtre  de  l'Irl.inde,  puisque  ce  sainl  avait 
appris  les  observances  régulières  dans  h  s 
inon.islèrcs  de  Marn  oulicr  et  de  Lérins 
avant  que  de  passi  r  en  Irlande,  cl  que  ces 
monastères  n'ont  jamais  appartenu  aux 
C^hancincs  Urgulicrs,  qu'on  ne  connaissait 
pas  même  du  l<  mps  île  sainl  Patrice.  Il  en 
est  de  même  des  autres  fondaieurs  de  la  vie 
monastique  en  cette  île, dont  il  y  a  (iuel(|ues- 
iins  (|ue  les  lléncdiclins  réclament;  mais  ils 
n'ont  jamais  été  ni  ISéncdictins  ni  Chanoines 
lUgulicrs;  cl,  si  nous  en  parlons  ici,  ce 
n'e>t  qu'à  cause  que  ers  ordres  diflérents 
il'lrbnde,  au  moins  la  plus  grande  partie, 
ont  été  confondus  dans  la  suite  dans  celui 
des  Chanoines  Réguliers,  et  que  ces  anciens 
monastères, au  temps  du  malheureux  schisnie 
dont  nous  avons  parlé  à  l'article  Anote- 
11  iinK,  élaient  possédés  par  des  Chanoines 
Réguliers. 


Ussérius,  arclievêquc  d'Armaih,  dans  son 
Histoire  de  l'Antiquité  des  Eglises  de  la 
Grande-Bretagne,  fait  mention  d'un  ancien 
7nanuscrit  où  l'on  voit  que  les  anciens  sainis 
d'Irlande  élaient  partagés  dès  le  commence- 
ment en  trois  ordres  réguliers;  que  le  pre- 
mier était  appelé  très-saint  el  était  du  lemfis 
de  saint  Patrice,  qui  en  était  reconnu  cimime 
chef;  que  cet  ordre  était  composé  de  trois 
cent  cinquante  évêques  de  dillérentes  no- 
tions, tous  saints,  qui  n'avaient  tous  qu'une 
même  tonsure  et  une  même  liturgie;  qu'ils 
convenaient  dans  le  temps  de  la  célébration 
de  la  pâ(iue;  (ju'ils  parlaient  aux  femmes,  el 
que  C(  l  ordre  dura  sous  le  lègne  de  quatie 
rois  d'Irlande. 

-Le  second  ordre  n'était  pas  si  sainl  que 
le  )iremier.  Les  moines  qui  en  dépen- 
daient élaient  presque  tous  prêtres,  au 
rombre  d'environ  trois  cents.  Il  y  avait  peu 
dévéques  dans  cet  ordre,  où  il  ya»ail  dil- 
férenlcs  liturgies;  ainsi  ils  célébraient  l.i 
messe  et  l'olficc  divin  dilTéremment  les  uns 
des  autres;  c'est-à-dire  (selon  le  sentiment 
de  M.  Alleman)  qu'ils  suivaient  dilTerentcs 
règles  ou  qu'ils  formaient  plusieurs  congré- 
gations. Il  les  compare  aux  différenles  con- 
grégations de  l'ordre  de  Saint-Augustin  ou 
de  Saint-Benoît,  qui,  par  la  diversité  l'c 
leurs  babils  el  la  difléience  de  leurs  maniè- 
res de  uvre,  semblent  être  des  ordres  sépa- 
rés, quoiqu'il  soit  vrai  de  dire  qu'ils  sonl  do 
l'ordre  do  Saint-Benoît  ou  de  Saint-Au- 
gustin. 

Ce  second  ordre  avait  cela  de  commun 
qu'il  célébrait  la  p'iquc  comme  le  premier. 
I!  y  avait  une  môme  tonsure,  on  n'y  parl.iil 
jamais  aux  femmes,  et  il  dura  encore  pen- 
dant quatre  règnes. 

l'jilin  le   troisième  ordre  était  sainl  aussi, 


(I)  Voy.,  iln  fin  du  vol.,  n'  121. 


Ci)  Voy.,  à  la  l.n  .lu  vul.,  ii"  12"2. 


493 


IflL 


IRL 


494 


mais  il  l'élail  moins  que  les  dent  autres.  H 
comprenait  encore  plusieurs  saints  moines, 
au  nombre  de  cent,  qui  étaient  presque  tous 
•prêtres,  dont  il  y  en  avait  aussi  quelques-uns 
d'évêques.  Leurs  couvents  étaient  bâtis  dans 
des  bois  et  dans  des  déserts.  Us  ne  buvaient 
que  de  l'eau  et  ne  mangaienl  que  des  hi  rba- 
gi'S  qu'ils  cultivaient  eux-mêmes.  Us  sui- 
vaient encore  des  règles  différentes  qui 
aryiept  chacune  leur  liturgie  et  leur  ton- 
sure; car  les  uns  avaient  des  couronnes,  et 
les  autres  laissaient  croître  leurs  cbeveux. 
Ils  différaient  encore  dans  la  pâque;  car  les 
uns  la  célébraient  le  quatorzième  jour  de  la 
lune,  les  autres  le  treizième,  et  les  autres 
le  seizième.  Les  uns  la  célébraient  en  tris- 
tesse et  les  autres  en  joie.  Cet  ordre  dura  en- 
core sous  le  règne  de  quatre  rois. 

La  différence  qu'il  y  avait  donc  entre  ces 
trois  ordres  est  ainsi  rapportée  par  Ussériu<  : 
Primus  ordo  erat  sanclissimns  ,  secundus 
ganclior,  lertius  sanctus  :  primus  sicui  sol 
oriens  ,  secundus  sicut  tuna,  terlius  sicitt 
stellœ;  et  le  temps  di^  ces  douze  règnes  a  éié 
depuis  433  jusqu'en  GG'*. 

Les  saints  dont  nous  allons  parler  sont 
reconnus  pour  les  fondateurs  de  ces  ordres 
par.iculiers,  (jui  avaient  dts  règles,  et  nous 
suivrons  le  rang  que  M.  AU  iiian  leur  a 
donné,  à  l'excepliou  île  saint  Patrice,  qui 
doit  passer  le  piem  er  pour  avoir  é:é  l'apô- 
tre d'Irlande,  n'éiant  pas  certain  que  suint 
Ailbe,  saint  Moctée,  saint  Kieran  et  quel- 
ques autres  y  aient  prédié  l  Evangile  avant 
lui,  comme  ont  prétendu  quelques  histo- 
riens irland  lis. 

Tous  les  auteurs  ne  reconnaissent  pas 
saint  Patrice  pour  être  le  fonJaleur  d'un  or- 
dre particulier,  quoiqu'il  le  soit  de  plusieurs 
monastères;  mais  ce  qui  a  fait  peut-être  que 
(juelquesuns  lui  ont  donné  cette  (jualité, 
c'est  à  cause  de  ce  manuscrit  rapporté  par 
U^sérius,  où  il  est  qualiûé  chef  de  cel  ordre 
Irès-sainl  dont  nous  avons  parlé.  M.  Alle- 
nuin  prétend  qu'il  est  l'instituteur  d'un  or- 
dre particulier  dont  la  principale  abbaye 
était  à  Sabal.  M.  BuUcau  semble  être  aussi 
(le  cet  avis,  lorsqu'il  dit  qu'outre  Sabal,  il 
fonda  plusieurs  autres  monastères  el  y  éta- 
blit une  sainte  observance;  que  les  novices 
faisaient  leurs  vœux  à  l'âge  de  vingt  ans; 
qu'il  introduisit  parmi  eux  la  tonsure  ro- 
maine en  forme  de  cercle;  qu'il  portail  un 
scapulaire  blanc,  et  qu'à  son  imitation  les 
antres  religieux  irlandais  se  revêtaient  de 
robe  de  laine  de  couleur  naturelle  et  sans 
teinture,  et  qu'enfin  il  mourut  dans  son  mo- 
nastère de  Sabal  vers  l'an  460. 

L'ordre  de  Saint-Colomb,  que  Bède  appelle 
aussi  Colomban,  éluit  un  des  plus  étendus, 
car  il  avait  plus  de  cent  abb:iyes  ou  monas- 
tères qui  en  dépendaient  dans  t  lUtes  les  lies 
Itritanniques.  La  principale  maison  ou  chef 
de  l'ordre  était,  selon  quelques-uns,  à  Dair- 
mag;  Selon  d'autres,  à  Derry,  aujourd'hui 
Loudondéry;  el,  selon  la  plus  coiiiiuune  opi- 
nion, dans  l'iie  de  Hu,  Hi,  ou  de  Juna,  qui 
depuis  a  été  appelée  du  nom  de  ce  sainl 
Ycolmlàl,  cl  csl  située  au  liord  de  l'irlan  le. 


et  peu  distante  d'Ecosse.  Ce  saint,  ayant  été 
préi  her  la  loi  aux  l'icles,  en  convertit  un 
grand  nombre  et  b.'ilit  des  églises.  11  fut  en 
si  grande  vénération  comme  apôlrc  de  ce 
pays,  que,  du  temps  de  Bède,  c'evt-à-dire 
vers  l'an  731,  par  une  discipline  tout  extra- 
ordinaire, tous  les  évoques  de  la  province 
des  Picles  étaient  sous  la  juridiction  el  la 
dépendance  du  prêtre  qui  était  abbé  du  mo- 
nastère d'Ycolmkil,  à  cause  que  saint  Co- 
lomb, apôlre  de  la  nation,  avait  été  seule- 
ment prêtre  et  religieux.  Sa  mort  arriva 
vers  l'an  598.  Il  se  trouve  une  règle  en  vers 
hibernois  qu'il  avait  dictée,  et  qui  fui  en 
usage  non-seulement  dans  l'ile  de  H',  mais 
dans  les  autres  monnstères  d'Ecosse  qu'il 
fonda  ou  qui  furent  bâtis  par  ses  discipliis. 
Saint  Colomb  portait  une  tunique  blanche 
et  une  tonsure  faite  en  demi-cercle.  Gel  ordre 
était  compris  dans  celui  qu'on  appelait  Sane- 
tior,  dont  nous  avons  parlé  ci-dessus;  mais 
le  nombre  des  moines  de  Saint-Colomb  de- 
vait excéder  celui  du  second  ordre  en  géné- 
ral, puisqu'il  est  marqué  dans  ce  manuscrit 
que  le  nombre  des  moines  de  ce  second  or- 
dre n'était  ((ue  de  trois  cents,  presque  tous 
prêtres.  Il  y  avait  plus  de  cent  mon  istères 
de  celui  de  Sainl-Colomb,  et  nous  verrons 
dans  la  suite  plus  de  trois  mille  moines  sous 
la  conduite  de  sain'  Congall.  C'est  une  diffi- 
culté qu'Ussérius,  Colgan  el  les  autres  his- 
toriens d'Irlande  n'ont  point  expliquée  lors- 
qu'ils en  ont  parlé.  L'on  pourrait  dire  que 
ce  manuscrit  n'a  seulement  entendu  parler, 
par  ce  nombre  do  trois  cents,  que  des  abbés 
ou  supérieurs  des  monastères  qui  conipo- 
s:iienl  ce  second  ordre,  qu'il  appelle  Sanc- 
tior. 

Après  l'ordre  particulier  de  Saint-Colomb 
suit  celui  dj  Saint-Albéc  ou  Ailbo,  au  moins 
selon  le  rang  que  lui  donnent  Ussérius  et 
M.  Alleman,  lorsqu'ils  ont  parlé  de  ces  or- 
dres, quoique  saint  Albéj  soit  compris  dans 
le  premier  r.iiig  des  saints  d'Irlande,  c'est- 
à-dire  dans  le  premier  ordre  appelé  Sanctis' 
simus;  aussi  bien  que  saint  Ueclan,  saint 
Moclée  el  saint  Kieran,  dont  nous  parlerons 
ci-après.  Quoi  qu'il  en  soit,  l'ordre  de  Saint- 
Albee,  quoique  des  plus  anciens,  était  le 
moins  étendu.  Sa  principale  abbaye  était 
celle  d'Emely  dans  le  comté  de  Tiperari 
en  Momon  e,  et  cette  abbaye  a  été  depuis 
érigée  en  évêché  qui  est  uni  à  l'archevccho 
de  Cassiiel.  Ussérius  fait  mention  d'une  rè- 
gle en  vers  irlandais  qu'il  composa  pour  ses 
diîC-ples. 

Saint  Declan  ,  selon  Golgan  ,  avait  aussi 
fondé  un  ordre  particulier  dont  la  principale 
abbaye  était  à  Ardimore,  sur  les  côtes  de 
Mouionie,  et  il  était  peu  étendu.  j 

L'ordre  de  Saint-Congall  était  plus  consi-, 
dérable.  Ce  saint  menait  une  vie  si  austère 
avec  ses  disciples,  qu'il  y  en  eut  sept  qui 
moururent  de  faim  el  de  froi  I.  Ou  lui  con- 
seilla de  modérer  celle  austérité;  il  suivit 
cet  avis,  pcrmeliaiU  à  ses  disciples  de  vivre 
couiiiie  le  commun  des  religieux;  mais  pour  lui 
il  ne  diminua  rien  de  sa  pénitence.  11  bâtil 
le  célèbre   monaslèro  de    Bcncîior  dans  le 


i% 


nif.TIONNMRE  DRS  OIÎDRES  ULI.IGIEUX. 


l'oiiilc  de  Dounc,  cl  on  dit  qu'il  cul  sous  sa 
cuiiduile  jusqu'à  trois  mille  religieux.  Il 
inourul  dans  celle  iiblinje  l'un  COI.  Il  com- 
posa aussi  une  rè^lc  pour  ses  disciples,  qui 
se  trouve  en  vers  liibernois. 

Saint  Mochude,  qui  a  été  appelé  C.irlage, 
ricrlla  en  sainteté  et  liàtit  le  monastère  de 
Hatlien  dans  la  Médie  occidentale  ou  West- 
me:iili.  où  il  eut  plus  du  huit  cents  religieux 
(|ui  >i\  aient  fort  austèrciiient.  Il  fonda  aussi 
l'église  de  Lismor  en  Momonie,  donl  il  fut 
le  premier  évéque.  Sa  règle  se  trouve  encore 
ccriie  en  très-ancien  langage  liiheniois. 
Tnc  des  prati(iues  de  ses  religieux  élail 
([ue  ceux  qui  avaient  élc  envoyés  hors  le 
monastère  allaient  à  leur  retour  se  nietlre 
à  genoux  devant  l'abbé,  el  lui  marquaient 
qu'ils  avaient  laihé  d'exécuter  ses  ordres. 

Saint  Luan,  ou,  comme  (luelciues  autres 
l'appellent,  saint  Molu.i,  avait  été  disciple 
de  saint  Congall.  Il  élail  si  exact  à  obser- 
ver les  deviiirs  do  l'obéissance,  qu'elle  lut 
souvent  honorée  de  plusieurs  miracles  pour 
relever  le  mérite  de  ce  saint  religieux;  car 
pour  exéeuler  plus  promptcnient  les  ordres 
de  saint  Congall,  il  mania  un  fer  ardent 
sans  se  brûler,  el  s'étant  prosterné  le  long 
de  la  mer,  parce  (]u'on  lavait  repris  d'une 
faute,  l'eau,  montant  dans  le  temps  du  rc- 
llux,  n'inonda  point  la  place  où  il  élail.  Il 
fonda  un  grand  nombie  de  moiiaslèies,  el 
même  jusqu'à  cent,  selon  le  témoignage  des 
Irlan 'ais  rapporté  par  sainl  IJernard^l'ir 
S-  Miilach.  Cdp.  II).  Le  principal  fui  celui  de 
Cluainfei  t  dans  la  Lagenie,  ou,  selon  d'au- 
tres, Clonfeil  dans  le  comté  de  Galway  en 
("onnacie,  qui  est  aujourd'hui  un  évéchc. 
On  dit  que  l'abbé  Dagan,  allant  à  Itoaie, 
jirésenta  à  saint  Grégoire  la  règle  qu'il  avait 
•ioniiée  à  ses  disciides,  cl  que  ce  sainl  pape, 
l'aj  a  ni  lue.d  il  en  présence  de  tout  le  monde  que 
lesaini  abbéqui  l'avait  composéeavail  envi- 
ronné sa  communauié  dune  haie  qui  s'éle- 
vait jusi]U  au  ciel.  Il  ne  laissait  point  entrer 
de  femmes  dans  son  monastère  ;  et,  se  voyant 
près  1  e  mourir,  il  exhorta  ses  disciples  à  la 
I)crsé^él■ance  dans  le  service  de  Dieu,  leur 
recommandant  entre  au'.res  choses  la  stabi- 
lité el  le  silence;  el,  après  avoir  reçu  la 
sainte  comiuuniun  des  mains  de  saint  i>o- 
iian,  qui  l'étail  venu  voir,  il  mourut  proche 
de  la  cellule  de  saint  Stellan,  son  d.sciple, 
l'an  G2>. 

L'ordre  de  Sa inl-.Moclée  n'était  pas  des  moins 
considérables, au  rapport  de  t^olgan.t^e  saint 
foiiila  plUNieurs  abliajes,  dont  la  principale 
était  celle  de  Fcrnes,  où  il  résidail,  et  dont 
il  fut  en^uiie  évé(iue,  lorsque  Férues  lut 
érigée  en  évéché. 

Saint  l'inian  ou  l' inncn  naquit  dans  la  La- 
génie  el  fut  bajilisé  par  sainl  Albaii.  Klant 
en  âge  d'étudier,  il  ^e  retira  auprès  ite  saint 
Korcliène,  ablié  de  Itoscur,  qui  lui  ajiprit 
les  devo.rs  de  l'elat  religieux.  A  l'âge  de 
trente  ans,  il  passa  en  l'r.inte  et  alla  à  Toîts 
pour  )  continuer  ses  eiuiles.  l-itantde  retour 
eu  Iriande,  il  enseigna    Us  lettres   saintes 


49P 

dans  une  des  maisons  donl  il  fut  le  fonda- 
teur, cl  ensuite  dans  l'abbaye  de  Clonard, 
(jui  est  reconnue  pour  avoir  été  le  chef  de 
cet  oidre.  11  eut  plusieurs  disciples  qui  fu- 
rent depuis  illustres  par  leurs  venus  et  par 
leurs  emplois.  Sa  nourriture  ordinaire  n'e- 
tail  que  du  pain,  des  légumes  el  de  l'eau. 
Aux  jours  de  fêles,  il  mangeait  un  peu  de 
poisson  et  buvail  du  petit  lait  ou  de  la  bière. 
La  terre  lui  servait  de  lit,  et  une  pierre  de 
chevet.  Hnlin  une  mal.idie  contagieuse  qui 
aflligea  le  pays  l'an  5'i8  l'emporta  avec  plu- 
sieurs autres,  el  le  fit  passer  dans  la  gloire 
des  bienheureux. 

Sainl  Ki.iran  ou  Keran  avait  eu  ponr  maî- 
tre dans  l'élude  des  leitres  saint  Finiaii 
Ussérius  dit  que  son  ordre  reçut  l'approba- 
tion des  papes.  Les  deux  principales  mai- 
sons de  cet  ordre  étaient  Seir-Keiran  en  Esl- 
m  alh  ou  Médie  orientale,  cl  Cluan  Xlicnois, 
Cluiies  ou  Kiloom  en  Westmeath  ou  Médie 
ocrideiitale,  qui  a  été  érigé  en  évéché  et  est 
présenlcmcni  uni  à  celui  de  Médie.  Colgan 
dit  que  cette  abbaye  fut  comblée  de  bienfails 
par  les  princes  d'Irlande,  el  qu'elle  eut 
(|uantité  d'autres  églises  ou  prieures  sous  sa 
dépendance.  Ce  saint  mourui  l'an  5'i9,  étant 
âge  seulement  de  trente-trois  ans.  Il  est  dif- 
lérent  d'un  autre  sainl  Keiran,  évéque  de  Sa- 
gir,  qui  mourut  vers  l'an  5120. 

liiifin  l'ordre  de  Sainl-Hreiidan  avait  pour 
sa  (iriiicipale  maison  l'abbaye  de  l'ort-Pur 
dans  la  ville  de  Cloiiferl,  au  comté  de  (ial- 
way  en  Connacie,  qui  depuis  a  été  érigée  en 
cathédrale.  On  dit  qu'un  ange  lui  dicta  la 
règle  qu'il  prcscrivii  à  ses  disciples  et  qu'il 
en  eut  deux  ou  trois  mille  sous  sa  conduite. 
Il  mourui  fort  âgé,  selon  quelques-uns  vers 
l'an  577;  d'autres  mettent  sa  moi  t  dix  ans 
après. 

Les  historiens  irlandais  mettent  encore 
l'ordre  de  Saiul-Colomban  et  celui  de  Sainte- 
Itirgitle;  mais,  comm«  le  |iremier  regarde 
l'onlrc  de  Sainl-Benoît,  dans  lequel  il  a  clé 
incorporé,  nous  n'en  dirons  rien  ici, en  ayant 
parle  à  l'artiele  Coi.omban,  outre  qu'il  n'a 
p.iinl  fondé  de  maison-,  en  Irlande.  L'.  rdro 
de  Sainte-Birgitte  a  eu  aussi  son  article  spé- 
cial. 

Voyez  U>sérius,  de  Anliquit.  Ecchs.  Bri- 
taniair.  Colgan,  I  il.  SS.  Ilibernur.  Bulleau, 
llis!.  de  l'ordre  de  Suint- llcnoit.  .\lleniiin, 
Ilist.  monistiqur  d'irlattde;  cl  Joan.  Mabill. 
AniKtl.  Ord.  S.  lieti'd.  loin.  I. 

ISAII'^  (Dks  UiV.i.es  t)E  SAI^T),  dk  saint  M  »- 
CàiuK  el  de  quilqurs  autres  l'ères  de  la  ti'e 
monastique  en  Orienl. 

Après  avoir  parlé  des  ordres  de  Sainl-.\n- 
toirre  et  de  Sainl-ltasiie,  et  avant  que  de  dé- 
crire l'origine  et  le  progrès  de  celui  tle  Sairit- 
racbome,  nous  dirons  un  mol  de  (inchpies 
anlns  l'ères  de  la  vie  nioni.sli(|ue  d't)iienl, 
dont  (|ueli)ues-uirs  ont  de  disciples  de  saint 
Antoine  el  île  saint  i'aclionie,  cl  doiil  les  rè- 
gles ont  été  reeueil  ies  par  saint  Itenoit  d'A- 
nianc  (t  .  Il  s'en  trouve  une  sous  le   nom  de 


(I)  C«d.    Ilegul.;  el  Uulleau,    Ilist.  Monatl.  d'Ciiini. 


m  ISA 

l'abbé  Isaïe  qui  est  propre  pour  les  Krmiles, 
principalement  pour  les  novices,  mais  on  ne 
sail  quel  était  son  monastère;  l'on  conjec- 
lure  que  cet  abbé  pourrait  bien  avoir  vécu 
dans  l'Egypte  ou  la  Thébaïde.  11  y  en  a  en- 
core une  dans  le  Code  des  Règles  composée 
,  par  deux  saints  Macaire,  par  saint  Sérapion, 
par  saint  Paphnuce  et  par  trcnte-quaire  au- 
tres abbés.  Cet  abbé  Sérapion  est  Sérapion 
de   Nilrie,    ou     Sérapion    d'Arsinoé.    Saint 
Paphnuce  était  celui  qui  gouvernait  un  mo- 
nastère situé   près   d'Hérai  lée  ,   ville  de  la 
basse  Thébaïde,  ou  plutôt  Paphnuce  Bubale, 
prêtre  du  désert  de  Scélis.  Les  deux  !\Iacaire 
sont  sans  doute  les  disciples  de   saint   An- 
toine, et  l'Ancien  ou  l'Egyptien,  et  sont  dif- 
fcrents  d'un  autre  Macaire  l'Alex^andrin  ou 
le  Jeune,  dont  on  voit  aussi  une  règle.  Celui- 
ci  était  d'Alexandrie,   lequel,  ayant  quitté 
l'emploi  qu'il  exerçait,  embrassa  la  vie  reli- 
gieuse, et  fut  un  prodige  de  uior.ification  cl 
d'abstinence.  Pour  repousser  les  attaques  de 
la  volupté,  il  s'exposa  nu  dans  un  lieu  plein 
de  mouches,  et  y  demeura  pendant  six  mois, 
de  sorte  qu'il  en  sortit  tout  défiguré  comme 
un  lépreux.   Il  alla  une  fois  à  Tabeune  vêtu 
comme  un  ariisan  ;  et,  ^ans  se  faire  connai- 
Ire,  il  fut  admis  dans  la  communauté.  Mais 
ensuite  saiui   Pachome  le  reconnut  i)ar  ré- 
vélation, (t  fut  surpris  de  la  rigueur  de  sa 
pénitence;  car  il  se  tint  debout  pei:dant  lu 
carême,  mangea  seulement,   ou  plutôt  il  fit 
s.enjblant  de    manger   un    peu   de   légumes 
chaque  dimanche,   il  retourna  en  Egypte  et 
continua  d'y   servir   Dieu.   Il  avait  Uivirscs 
cellules  cl  demeurait  tantôt  dans  le  désert  d.^ 
Mlrio,  tantôt  dans  celui  du  Scétis  et  enco.e 
ailleurs.  Enfin  sa  lîiorl  arriva  vers  le  com- 
mencement du  V"  siècle,  et  l'on  prétend  qu'il 
utait   sous   sa  conduite  cinq  mille  moines. 
(Juelques-uns  croient  que  la  règle  qui  est 
suus  son  nom  n'a  point  été  écrite   ni  dictée 
par  lui ,  mais  que  c'est  seulement  un  recueil 
(le  ses  maximts  et  de  l'observance  régulière 
qui  se   pratiquait   dans   ses   monastères,  et 
que  l'auteur  de  cette  règle  n'a  vécu  qu'après 
saint  Jérôme.  On  allribue  encore  une  règle 
monastiqueà saint  Posthume, abbé dePisper, 
qui  succéda  à  saint  Macaire  dans  le  gouver- 
nement des   moines  dont  saint  Antoine   lui 
avait  laissé  la  conduite;  et  le  diacre  Vigile 
fil  une  collection  des  maximes  et  des  coutu- 
mes des  anciens  m<ùnes  sous  le  nom  de  Règle 
Orientale. 

il  y  a  eu  sans  doute  d'aulres  règles  dout 
on  n'a  point  du  connaissance;  car  en  Onenl 
aussi  bien  qu'en  Occident,  il  y  avait  presijue 
autant  de  règles  que  de  monastères,  selon  ce 
queditCasb.!  ii  [lib.  ii  Institut.,  c,  2j.  La  plu- 
pari  en  avaient  d'écrites,  quelques-uns  obser- 
vaient seulement  ce  qu'ils  avaient  appris  de 
leurs  anciens  et  qu'une  suite  de  temps  sans 
interruption  y  avait  fait  recevoir  comme  loi; 
d'aulres  n'avaient  pour  règles  que  la  volon- 
té de  leurs  supérieurs  (1).  Comme  toutes 
ces  règles,  soit  écrites  ou  verbales,  tendaient 
toutes  à  une  môme  fin,  qui  était  de  ne  songer 


ISA 


Vïi 


uniquemonl  qu'à  Dieu  et  de  ne  s'occuper 
qu'aux  choses  spirituelles  en  se  débarrassant 
de  lout  ce  qui  pouvait  y  apporter  quelque  ob- 
stacle, c'est  ce  qui  fai.-ait  que  clinque  mo- 
nastère n'était  pas  si  aitaché  à  une  règle, 
qu  il  n'en  observât  encore  quelques  autres, 
selon  que  l'abbé  le  jui^eail  à  pro|ios  :  de  sorte 
que  dans  un  même  monastère  l'on  observait 
plusieurs  règles  écrites,  auxquelles  on  re- 
tranchait ou  l'on  ajoutait  ce  qui  semblait 
plus  convenable  à  ce  monasièrc,  eu  égard 
au  lieu  où  il  était  siluô  et  au  temps  au(iuel 
on  introduisait  celte  règle.  Cependant,  parmi 
une  si  grande  diversité  de  règles,  il  y  avait 
une  si  grande  union  entre  les  moines,  qu'ils 
semblaient  ne  former  <iu'une  même  congré- 
gation par  rapport  aux  observances  et  aux 
vêtements,  qui  étaient  uniformes  ;  c'est  pour- 
quoi on  passait  aisément  d'un  monastère 
en  un  autre,  non-seulement  des  L  ilins  aux 
Latins,  des  Grecs  aux  Grecs,  mais  encore 
des  Latins  aux  Greis,  et  des  Grecs  aux 
Latins. 

De  ces  règles  orientales  dont  nous  avons 
parlé  ci-dessus,  celle  de  saint  Macaire  fut 
introduite  dans  le  monastère  de  Lérins  en 
ProveiKC,  et  dans  celui  de  Réomay  ou 
Moiistier-Saint-Jean  en  Bourgogne,  aussi 
bien  que  dans  celui  de  Saint-Seine.  Le  mo- 
naslèie  de  Saint-Mémin,  proche  d'Orléans, 
reçut  celle  de  saint  Antoine,  ou  du  moins 
cefle  qui  se  trouve  sous  son  nom,  qui  lut 
observée  aussi  avec  celle  de  saint  Paeliome 
et  relie  de  saint  Benoit,  dans  un  monastère 
de  filles  fondé  sous  le  lilre  de  Sainte-Colombe 
et  de  Sainie-Agalhc  [IbicL,  lib.  \iii,  el  inap- 
pendice),  comme  il  paraît  par  les  lettres 
apostoliques  du  pape  Jean  IV,  qui  confirment 
celle  fondation  à  la  recommandation  de  Clo- 
vis  II,  roi  de  Erance.  Celle  du  diacre  Vigile 
sous  le  titre  de  Règle  Orientale  ^C'ot/.  RctjuL), 
fut  reçue  dans  queh|ucs  monasières  du  dio- 
cèse de  Trêves.  Enfin  celle  de  saint  Basile 
dont  nous  avons  parlé  à  l'article  de  ce  nom, 
fut  reçue  dans  presque  tous  les  monasières 
d'Italie,  après  qu'elle  eut  été  traduite  en  la- 
tin par  Ruûn  {Annal.  Beneilict.  lib.  i  et  vi). 
Elle  fut  aussi  introduite  en  France  dans  quel- 
ques monastères,  entre  les  auircs  dans  l'ab- 
baye bâtie  par  saint  Yrier,  proche  de  Limo- 
ges, qu'on  appelle  pré^enleraent  de  son  nom 
Saint-Yrier-la-Perciie.  Ce  saint  y  fil  obser- 
ver cette  règle,  conjointement  avec  les  Insli- 
tuliDUS  de  Cassien  et  les  règles  de  tous  les 
abbés  qui  avaient  été  les  fondateurs  de  la 
vie  monastique,  selon  le  témoignage  de  Gré- 
goire de  Tours  (lib.  x,  c.  2'.)). 

L'on  doit  mettre  au  nombre  des  règles 
d'Orient  les  Instilulions  de  Cassien,  puisqu'il 
ne  les  rédigea  par  écril  qu'à  la  prière  do 
Castor,  évcque  d'Apt,  qui  avait  fonde  un 
monastère  dans  le  diocèse  de  Mines,  dans 
lequel  il  souliailait  faire  observer  les  mêmes 
manières  de  vivre  que  celés  que  (jassien 
avait  vu  praiiquer  aux  moines  d'Orient,  el 
qu'il  avait  établies  dans  les  deux  maisons 
qu'il  avait  fondées  à  Marseille.  Ce  ne  lui  pas 


(l)  Joanii.  ALb;ll.,  Anial.  Uciiedici.,  tuin.  I,  lib.  i. 


tas 


DlCTIONNAinE  DES  ORDRES  RELIGIEUX. 


r;oo 


sculeiiiciil  en  France  que  ces  Inslilutinns  , 
auxquelles  plusieurs  écri»€iins  oui  donné  le 
n-im  (Je  règli-,  furoiil  observées,  mais  elles 
le  furenl  encore  en  plusieurs  inoniislc^ns 
il'EspaL'ne  (I),  où,  dans  l'abbaye  tie  Sainl- 
l'iorre  d'Ariane,  il  se  Irouve  un  inantisi  ril 
Rous  le  litre  de  lUgulœ  Pulitim,  qui  renferme 
les  règles  desainlMaraire,  de  sainl  Fachoine, 
de  sainl  Rasi:e,  de  sainl  Cassicn,  de  sainl 
Beniiîl,dc  s.iinl  Isidore  et  dcsainl  Fniclueux, 
qui  se  Irouvcnl  encore  avec  celle  île  sainl 
Poslhunie  dans  un  autre  manuscrit  sous  le 
même  litre  de  Rrgulœ  Patrum,  d.ins  le  mo- 
nastère de  Saint-Pierre  de  Cardapnc  au  tlio- 
côsc  de  Bui  gos.  D'où  l'on  doil  conclure  qn"a- 
\anl  que  la"  règle  de  sainl  Benoit  fut  reçue 
en  Kspagne,  on  y  ob^ervail  les  règles  de  ^ainl 
Basile  ou  de  Cassicn,  et  pcul-étre  les  deux 
ensemble. 

A  la  vérité  les  écrits  de  Ca'sien,  cl  surioul 
ses  Conférences,  qui  contie'ineiil  les  maxi- 
mes cl  les  instructions  (ju'il  avait  apprises 
de  la  bouche  d  s  plus  célèbres  dciiirc  les 
Pères  ou  abbés  des  déserts  d'Egypte,  ne  fu- 
rent pas  exempts  d'erreurs.  Il  y  avait  quel- 
quessi'nlimenls  qui  ne  s'accordaient  pas  avec 
la  foi  touchant  le  libre  arbitre  cl  la  grâce. 
Siint  Prosp(  r  ùcrivil  contre  lui,  et  ne  laisse 
pas  de  reconnaître  sa  sainlelé,  quoiqu'il  com- 
i)alte  SCS  erreurs,  qu'il  ne  défendit  pas  avec 
opiniâtreté.  Victor,  é» èiiue  de  .Marlyril  en 
Afrique,  et  quelques  antres,  ont  purgé  cei 
ouvrages  de  Cassen  des  ei  rem  s  qu'il  ^  avait; 
t'csl  pourquoi  le  célèbre  Cassiodre  ,  ayant 
bâ'.i  lo  monastère  de  Viviers  dans  la  Caiabrc, 


près  de  .*»qnilace,  ordonna  à  ses  religieux  de 
garder  la  règle  îles  Pères  el  de  s'appliquer 
avec  grand  soin  à  la  leclurc  des  iraites  de 
Cas'-ien  pour  rinsiruclion  des  moines:  mais 
il  les  avertit  de  les  lire  avec  précaution  et 
d"y  j(  iîidre  les  rorre  lions  qu'y  avait  faites 
A'irlor.  évèque  de  Marlyi  il. 

C'est  dans  la  règle  de  Cassicn  ou  ses  Insli- 
lulions  monastiques  qu'on  apprend  quel 
était  riiabillemei  l  des  anciens  moines  d'O- 
r  cnl.  Ils  avaient  de  peliies  luniqurs  de  lin 
dont  les  manches  ne  venaient  que  jusqu'a'ix 
coudes.  Ils  portaient  un  capuchon  ou  fioc 
qui  leur  descendait  de  la  tète  sur  le  hanl  des 
épaules.  Ils  avaient  deux  bandes  de  laine 
qui,  descendant  du  haut  des  épaules,  se  sé- 
paraient et  venaient  se  joindre  sur  reslomac 
<  n  serrant  l'habit  et  le  pressant  sur  le  corps, 
Jifin  qu'ils  eussent  les  bras  libres  pour  s'a- 
donner plus  facilement  à  toute  sorte  de  tra- 
vail. Leur  manteau  était  d'une  matière  fort 
grossière  qui  leur  couvrait  le  cou  et  les 
épaules.  Ils  portaient  une  robe  de  peau  de 
chèvre  ou  de  brebis  el  marchaient  loujcurs 
nu-[)ieds  ;  mais  dans  le  besoin  ils  se  serv.  icnt 
de  sandales,  qu'ils  quitlaient  lorsqu'ils  s'ap- 
proihaient  des  S.  S.  mjsterrs  [-I].  La  célèbre 
al)baye  de  Sainl-Viclor  à  Marsei  le  nous 
donnera  encore  occasion  de  parler  deCassicn 
à  l'ariiclo  Victor. 

ISIDORE  (Saint-).  Voy.  Césaire  (Sunt), 
ISTBIK   (Congrégation    nu   Tieus-Oudrk 
ne  Saint-Fbasçois  en).  Voy.  Sicile  (Congkk- 
GATiuN  de). 


J.VCOBINS.  Voy.  Domimcains. 
JACOBITES  (Moines). 

Les  Jacobiles,  que  l'on  devrait  plutôt  np- 
yeU'T  Monoiihysilef,  puisque  ce  nom  convient 
particulièn-menl  à  ceux  qui  croient  qu'il  n'y 
a  qu'une  nature  en  Jésus-Chri>t,  (ont  pro- 
fe>sr6n  de  suivre  la  doctrine  de  Dioscore, 
patriarche  d'Alexandrie  ,  de  Sévère  d'Antio- 
che,  il  de  Jacques  surnommé  Zanzale  (.t).  Ils 
disent  anathèmc  à  saint  Léon  el  au  concile 
de  (^halcèdoinc,  el  ne  reconnaissent  qu'une 
nature  en  Jésus-Christ  .  comme  une  seule 
pcrsonic  el  une  seule  volonié.  Ils  ont  pris 
leur  nom  de  ce  Jacques  dont  nous  venons  de 
parler,  parce  qu'il  a  le  plus  contribué  à 
maintenir  cette  hérésie  el  à  l'éieidre  eu 
Orienl.  Le  surnom  de  Zanzale,  ou  de  Bardai, 
selon  les  Arabes,  el  que  les  Grecs  expriinenl 
par  celui  de  liariuUil  ,  lui  fut  donné  ci  cause 
qu'il  n'était  ordinairement  habillé  que  de 
haillons  ou  de  pièces  de  ces  grosses  clorfcs 
•  liint  on  c  Mivrc  lis  cliameaux.  Il  fut  serrè- 
ti-mcnl  ordonné  arrluvèquc  par  les  évéqucs 
de  sa  secte,  qui  étaient  en  [irisnn  en  exécu- 
tion des  édits  des  empereurs  contre  les  hé- 
rétiques; el,  après  avoir  reçu  d'eux  uni>  en- 
tière autorité,  il  alla  dans  toute  la  Syrie,  la 

(1)  Riify,  Ilis'.  lie  }lars,ilU.  Jn.nnn.  Mal.illon.,  An- 
rMl.  Diitiùict.,  Iib.  m. 


Mésopotamie  cl  d'autres  provinces.  Partout  où 
il  ne  trouvait  point  d'évèque,  il  en  ordonnait 
ainsi  que  des  prêtres  el  des  diacres,  ei  il  en  or- 
donna un  si  grand  nombre  ,  que  le  nom  de 
Jacobiles  demeura  à  ceux  de  sa  communion, 
qui  l'ont  toujours  eu  en  si  grande  vénération, 
qu'ils  l'ont  même  inséré  dans  leur  calendrier. 
-Mais,  comme  il  y  a  quelques  auteurs  qui 
disent  qu'il  cl  il  disciple  et  contemporain  do 
Sévère,  patriarche  d'Antiochc,  qui  vivait  à 
la  fin  du  \»  siècle,  1 1  qui  sotitenait,  à  ce  qu'ils 
prétendent  ,  les  erreurs  d'Eutychès  et  de 
Dioscore,  le  P.  Du  Solier,  de  la  compagnie  de 
Jésus,  dans  son  Traiié  historique  des  Pa- 
triarches d'Alexandrie,  prétend  que  ce  no 
fui  que  dans  le  vii«  siècle  que  ce  Jacques 
Zanzale  employa  tous  ses  soins  à  rassembler 
et  <i  réunir  les  restes  dispersés  des  sectalcnrs 
d'Iiulycliès  el  de  Dioscore,  divisés  en  plu- 
sieurs branches  connues  sous  les  noms  de 
Sévériens .  de  ïhéodosiens  ,  de  (iaïnailcs  el 
de  Julianistes,  cl  fort  affaiblis  par  les  persé- 
cutions qu'avaient  excitées  contre  eux  les 
Melchites  ou  orthodoxes  ,  sous  l'empire  de 
Jusiinii'i),  de  Justin  dit  le  Jeune,  de  Tibère 
et  de  Maurice,  et  que  des  débris  île  ces  héré- 
tiques il  forma  un  nouveau  parti  sous  son 
nom.  Il  avoue  que  ce  Jacques  Zanzale  peut 

(2)  Vnji  ,  h  la  lin  <lii  \ol.,  ir  li". 

(5)  Heuaud'ii,  iV  ()<'(«,(/ rfi  /«  foi,  l.  IV,  liv.i,  c.  7. 


SOI 


JAC 


JAC 


502 


élre  appelé  disciple  de  Sévère,  palriarclic 
d'Anliochc  ,  qui  certainement  vivait  à  la  fin 
du  V  siècle,  mais  seulement  en  ce  sens,  qu'il 
était  un  des  plus  zélés  défenseurs  des  dogmes 
soutenus  parce  patriarche,  et  qu'il  ne  s'en- 
suit nullement  de  là  qu'ils  aient  été  contem- 
porains. 

Comme  il  y  en  a  qui  prétendent  encore 
que  Sévère  et  Jacques  Zanzale  commencè- 
rent à  brouiller  en  Orient  sous  l'empire 
d'AnasIase,  et  que  ce  sentiment  est  appuyé 
sur  l'autorité  d'AnasIase  le  Sinaïle,  qui,  dans 
le  livre  intitulé  Le  Guide  ou  Le  Conducteur, 
on  spécifiant  les  divers  sectateurs  d'Euiychès 
et  de  Dioscore  ,  n'oublie  pas  Jacques  et  ses 
Jacobiles,  le  P.  Du  Solicr  répond  que  c'est 
à  tort  qu'on  a  fixé  l'époque  ite  ce  livre  à 
l'année  550,  auquel  temps  vivait  à  la  vérité 
un  Anastase,  patriarche  d'Anlioche  ;  mais 
qu'il  y  a  en  trois  Anastase  qu'on  a  confon- 
dus ensemble  pour  n'en  faire  qu'un  seul  ; 
qu'il  y  en  a  eu  deux  patriarches  d'Anlioche, 
tt  que  le  dernier  et  le  plus  jeune  des  trois 
était  moine  du  mont  Sinaï  et  auteur  de  ce 
livre,  (lù  il  raconte  des  faits  arrives  depuis 
l'an  G04  et  vers  l'an  630,  après  les  commen- 
cements du  niahomélisme  ;  d'où  leP.  Du  Sulier 
conclut  que  ce  moine,  n'ayant  parlé  de  Jac- 
ques et  des  Jacobiles  que  dans  un  livre  écrit 
vers  le  milieu  du  vu*  siècle,  on  ne  peut  pas 
tirer  de  là  un  avantage  pour  prouver  que  les 
Jacobiles  aient  été  avant  le  vu*  siècle. 

Quoique  le  P.  Du  Solier  prétende  que  Jac- 
ques Zanzale  ait  rassemblé  les  restes  disprr- 
sés  des  sectateurs  d'Eutychès  et  do  Dioscore, 
itivisés  en  plusieurs  branches  connues  sous 
les  noms  de  Sévériens,  de  Théoilosiens  ,  de 
Gaïnailes  et  de  Jnlianistes,  ce  sentiment  n'est 
|ias  approuvé  par  M.  l'a  bbéKenaudol,  pu  isi)  lie, 
selon  cet  illustre  écrivain,  les  Jacoliilcs  di- 
,sent  anathème  à  Eutychès  ;  qu'ils  reganleiit 
comme  héréliqurs  les  disciples  de  Julien 
d'Halicarnassc,  qui  disiil  (jue  le  corps  dans 
lequel  Jésus-Ciiri^l  avait  pris  cliair  était  in- 
corruptible; et  (lue  (iftns  leurs  prières,  ils 
louent  Sévère  d'Anlioche  d'avoir  détruit  les 
imaginations  de  Julien. 

La  principale  erreur  des  Jacobiles  est 
donc  de  n'admettre  qu'une  nature  en  Jésus- 
Christ.  On  leur  en  a  imputé  d'autres  dont  ils 
lie  sont  nullement  coupablfs,  comme  de  nier 
la  Trinilé,  et,  par  celle  raison,  de  ne  faire  le 
signe  de  la  croix  qu'avec  un  do'gl.  Le  peu 
d'erreurs  où  ils  sont  présentement  engagés  a 
beaucoup  contribué  à  la  réunion  de  plusieurs 
personnes  decelie  sccteàl'Eglise  roinaine(l). 
L'an  1662,  Andic,  arclievéque  d'Alep,  qui 
était  déjà  caiholique,  et  avait  envoyé  sa 
profession  de  foi  au  pape  Alexandre  VU, 
après  avoir  abjuré  ses  erreurs,  fiit  élevé  au 
patriarcat  d'Anlioche  pour  la  nation  jaco- 
iiile.  Il  n'accepta  celte  dignité  que  pour  tra- 
vailler plus  tfficaceinent  à  ri-unir  les  Jaco- 
biles à  l'Eglise  romaine,  et  y  réussit  en  par- 
lie,  malgré  les  persécutions  que  lui  suscitè- 
rent les  hérétiques.  Mais,  ajjrès  la   nio;tde 


ce  patriarche,  qui  arriva  le  28  juillet  1677, 
un  nommé  Abd-Elmésich  se  mit  en  possession 
du  patriarcat  à  force  d'argent,  et  persécuta 
fort  les  catholiques  ;  ce  qui  fil  que  les  plus 
fervents  et  lespluszélésfirent  si  bien  par  leur 
adresse,  qu'ils  trouvèrent  moyen  de  le  faire 
dé|  oser  et  de  mctlre  en  sa  place  levéquc  de 
Jérusalem, Ignace-Pierre,  zélé  catholique.  On 
employa  le  crédit  de  l'ambassadeur  de  France 
à  la  Porte  pour  avoir  un  commandement  du 
Grand-Seigneur,  qui  confirma  son  élection, 
avec  ordre  à  lous  ceux  de  sa  nation  de  lui 
obéir.  Il  fut  installé  dans  son  siège  patriar- 
cal par  huit  archevêques  et  évêques.  savor: 
un  Maronite,  trois  Jacobiles  calhoIi<iues, 
deux  Grecs  et  deux  Arméniens.  11  envoya 
ensuite  sa  profession  de  foi  au  pape  Inno- 
cent XI,  qui  lui  envoya  le  pallium.  Cepen- 
dant les  hérétiques  jacobiles  ayant  employa 
beaucoup  de  fourberies  pour  faire  confirmer 
par  le  grand  visir  et  le  mufli  d'Alep  l'élcc- 
tiou  qu'ils  firent  en  1687  d'un  patriarche  de 
leur  cabale,  leur  faisant  accroire  que  le  pa- 
triarche Ignace-Pierre  était  mort,  ils  réussi- 
rent dans  leur  entreprise.  Mais,  en  1693,  le 
patriarche  catholique  fut  rétabli  dans  son 
siège  à  la  soUieitalion  du  roi  de  France,  et  le 
patiiarche  Ignare-Pierre  choisit  pour  coad-- 
julcur  un  archevêque  jacobile  catholique,  qui 
fut  reconnu  en  cette  qualiié  par  les  catholi- 
ques de  celle  nation. 

Cepenilanl  une  furieuse  persécution  s'éleva 
en  1701  contre  le  patriarche  Ignate-Pierre 
(•2).  Le  Grand-Seigneur  Mustapha  II,  pressé 
par  le  mufli,  grand  ennemi  des  catholiques, 
qui  en  éta.l  sollicité  par  les  hérétiques,  en- 
voya un  eoiiimandcment  pour  obliger  les 
Jacobiles,  qui  fai-aient  profession  de  1 1  reli- 
gion catholique,  de  retourner  à  l'hérésie  de 
leurs  ancêtres.  Le  patriarche,  l'archevêque 
d'Alep  et  les  principaux  du  clergé  de  la  na- 
tion surienne  ou  jacobite,  n'ayant  jias  obéi 
à  cet  ordre,  après  avoir  reçu  plusieurs  mau- 
vais Iraiîements  et  une  rude  bastonnaile, 
furent  condamnéâ  à  êlrc  renfermés,  le  reste 
de  leurs  jours,  dans  le  ihâteau  de  la  ville 
d'Adané.  Le  patriarche  et  l'archevêque  d'Alep 
eurent  le  bonheur  d'y  mourir  pour  la  défeiiso 
de  la  foi.  Mais  les  révolutions  arrivées  dans 
l'empire  ottoman,  en  1703,  le  Grand-Seigneur 
Muslapha  ayant  été  déposé,  et  le  mufti  ajant 
subi  une  mort  houleuse,  ramenèrent  pour  un 
temps  la  paix  dans  les  Eglises  jacobiles  ca- 
tholiques, ou  plutôt  dans  les  Eglises  surien- 
nes,  car  les  Jacobiles  ,  après  avoir  abjuré 
leurs  erreurs,  prennent  le  nom  de  Suneiis, 
et  quittent  celui  de  Jacobiles  comme  un  nom 
infâme.  Celui  qui  succéda  au  mufti  se  mon- 
tra plus  favorable  à  leur  égard  ;  mais  le<  per- 
sécutions ont  été  renouvelées  quelque  temps 
après,  ce  qui  est  cause  que  la  religion  ca'.ho- 
lique  ne  fait  pas  parmi  les  Jacobiles  schisma- 
liques  lout  le  progrès  qu'on  pourrait  atten- 
dre du  zèle  des  prélats  qui  sont  toujours  de- 
meures fermes  dans  la  loi  catlinl.que  malgré 
les  pcrscculions. 


(I)  Le!lre  du  P.  Verz'^nn  an  P.  Fleiirinn,  dans  le 
IV*  Kccueil  (li!S  Lcltres  editian  es  des  Missions  de  la 


Coirip.  de  Jésii.,  et  l'épi.'rc  dédie,  du  inènie  Recueil. 
(-2j  IL<:d.  Lellrc  du  P.  Vcrz  •au  au  l\  de  la  Cliaise. 


805                                            DlCTlONNAinE  DES  ORDRES  RELIGIEUX-  ;i04 

Quoique  pnrmi  les  séruliors  il  y  ait  grand  ris,  donne  le   nom  de  chevaliers  aux  cla- 

iionihrc  de  calholi(iui-s,  la  plus  gr.inde  partie  iiolncs  hospitaliers  dont  nous  allons  parler, 

ties  religi.'u\    .-ont  luMiinio  ns  toujours  dans  De  tous  les  ailleurs  néanmoins  qui  ont  tr.iité 

l'erreur.  Leur  principal  monastère  est  à  D<r-  dos  ordres  militaires,   il  n'y  en  a  aucun  qui 

zaphar.im,  firoche  la  ulle  de  .M.irdin  en  Mé-  ait  fait  memion  d.»  celui  de  Saint-Jacques  du 

sopotamie,  dans   lequel    le  patriarelic  fait  sa  Haut-Pas:   peul-ëire  aussi  ont-ils    cru  qu'il 

résidence  lorsqu'il  est   schismatique.  Il  y  en  élait  le  même  que  celui  de   Sainl-Jacqucs  de 

a  encore  un  autre  proche  de    la  même  ville;  l'iipée.  Il    y  en  a  d'autres   qui  leur  donnent 

cleiix  ,i   une  journée  de   la  ville  de  Damas  ;  le  nom  de  chanoines  réguliers;  mais  aucun 

deux  à  une  journée  de  la  ville  de  Ninive  ;  un  ne  rapporte  rori|;ine  de  cet  ordre.  Il  est  cer- 

à  l'iiiiris,  sur  le  chemin  de  Mardin  ;  un  autre  tain  cependant  qu'il  y  a  eu  un  ordre  de  Sainl- 

à  Kilesse,  et  quelques  autres   en  différents  Jacques  du   Haut  Pas,  dont   il  y    a  une  pa- 

|ieux;mais  presque  tous  abandonnés,  et  où  roisse  à  Paris,  qui  en  a  rel<'nu  le  nom  à  cause 

il  y  a   peu  de  religieux.   Ils  ne  mangent  ja-  que  tluillaunie  Violle,   évèqui;  de   Paris,  du 

mais  de  viande,  non  pas   même  à  l'extrémité  consentement  du  commandeur  d'un  Ix^pital 

de  maladie,   aussi  bien  que  le  patriarche  et  dépendant  de  cet  ordre,  et  qui  était  situé  au 

Icsévèques,   et  ils  observent  les  mémos  ca-  faubourg  Saint-Jacques,  érigea  la  chapelle 

rémcs  et  les  mêmes  jeûnes  que  les  Maroni-  à-  cet  hôpital   en  église  succursale    pour  le 

les,   excepté  la   veille  de  saint  Maron,  qu'ils  secours   des   paroisses  de    Sainl-lienoîi,    de 

ne  reconnaissent   point,    et  auquel  ils  snb-  Saint-Hippolytc  eldeSaint-.Médard.l'an  156U; 

slituent  Jacques  Zanzale,  qui   les  a  pervcr-  ce  qui  dura  jusqu'en  l'an  lo12,  que  les  reli- 

tis.  Je  parle   seulement  des   schismatiques;  gieux     bénédictins  de    Saint-.Magloire,    qui 

car  il  y  a  de  l'apparence  que  les  catholiques  demeuraient  où  sont  présentemefil  les  filles 

jeûnent  la  veille  de  saint  Kplirem,  qu'ils  ont  Pénitentes  en  la  rue  Saint-Denis,  furent  Irans- 

pi  i>  p.iur  pa!rou  de  leur  Eglise  de  Home.  férés  par  ordre  du  roi  Charles  IX  en  cet  hô- 

t^nfôrmément  au   rite  que   suit  cette  na-  pilai.  Ils  se  trouvèrent  incommodés  d'avoir 

ton,  ilschanienl  l'ofrwe  en  1  ingue  syriaque,  une  paroisse  dans  leur  église,   et  les  parois- 

oiil  les  mêmes  inslriimints  de  niusi(iue  que  siens,  d'un  autre  côlé,  étant  bien  aises  d'a- 

les    Annéiiicns,  et  consacrent  avec  du  pain  voir  une  église  dont  ils  fussent  les  maîtres, 

kvé,  (le  n)émc  que  les  (in  es,  contre  la  pra-  en  firent  bâiir  une  à  côlé  de  cet  hôpiial,  la- 

ilque  lies  Maronites  et  des  .\rméniens  ;  luais  quelle  fut  achevée   l'an  i'Slk  et   a  toujours 

lisent   ceci   de   particulier  qu'ils  mettent  de  retenu  le  nom  de  Saint-Jacques  du  Haut-Pas, 

l'huile  et  du  sel  dans  leur  hostie,  qui  est  si  que  l'hôpiial  quitta  pour   prendre   celui  do 

griinde   et  si  épaisse,  qu'on  en   peut  facile-  Siint-.Magloire,  à  cause  du  corps  de  ce  saint 

ment  communier   plus   de   cent   personnes,  que  les  iJénédictins  y  apportèrent  avec  eux. 

J,'habiilcmeiil(t)  des  religieusest  assez  sem-  |,e  P.  du  Rreuil,    faisant   mention   de  cet 

blable  à  celui  des  Maruniles.  Il   n'y   a  point  |,ôpil;il    qui  fut  fondé  par  le  roi    Philippe  le 

d£  mon, islères  de  rcligieusesde  cette  nation,  Bel,   qui  commença  à  régner  l'an    1-28G,  dit 

et  celles  qui  se  consacrent  à  Dieu  pir  la  pro-  qu'ji    fut    nommé'di  Haut-Pas,   non    pas  à 

fession  reiigijusc  demeurent  chez   leur-  pa-  cause  de  la  situation  du  lieu,  ni    parce  qu'il 

rents.  fai.le  monter  des  degrés  pour  y  cinrer,  mais 

M. 'Saphar,évêquedeXIardin,(iui  demeure  parce  qu'il    était  membre   et  dépendant  du 

depuis  quelques  années  à  P.ume,  où  il  ét.iit  grand  hôpital  de  Sainl-Jacqucs  du  Haut-Pas 

>cnu  recom.ailre  le  souverain  pontife  comme  j^  Luques  en   Italie,  aux  de[iens  duquel  ou 

chef  de  l'Kgli-e  universelle  de  la    part   dis  entretenait  un   pas-age  sur  la  rivière  d'.\r- 

Kglises  catholiques   surienncs,   a  acheté  un  gue-le-Hlanc  dans  TElat  de  Florence,  sur  le 

hospice  dans  cette  capitale  de  l'univers  pour  grand  chemin  de  Home,  où  l'on  avait  accou- 

Ics  evéciueset  les  auires  personnes  de  sa  na-  luiiié  de  payer  de  grands  iributs  et  exactions, 

lion.  lien  prit  possession  le  18décembrel(59G,  q„j   furent  alTraiichis    par  ceux  de  cet  hôpi- 

a^aiit  aussi  obtenu  la  permission  de  célébrer  jal  cl  des  auhes  qui  y  étaient  unis,  de  sorte 

H   ceitaiiis  jours  de  l'année  dans  l'église  de  que  les   [èlennsy   passaient  librement  sans 

.et   hospi.e,   conformément   i\   leur  rite;  ce  ri,<n  payi  r.   lia  voulu  sans  doute  parler  de 

q  (il  fit  pour  la  première  fuis  le  9fevrierlG'J7,  l'Ariio,  ny  ayant  point  de  rivière  qui  porto 

|uur  de  saint  Kphiein  de  S} rie,  dont   la   fête  \^.  „om  d'.\rgne-lc-l!lanc. 

avait  été  transférée  à  ce  jour.  Outre  le  grand  maître  général  de  cet  or- 

i'rances.  Quaresm.  Ehici-I.  Terr.  Saiiclw.  (),e.qui  résidait  en  Italie,  il  y  n\ivl  un  com- 

Jiiaiin.   liapt.  Du  Solicr,  Tractât. hixl.  de  pa-  „.andiur  généialponr  le  royaumede  France, 

iiuiici.    Alexand.  Le    Ferre,    Tliéùtre   de  ta  ,.„inmc  il   paraît    par   l'épitaphe  d'un   com- 

y  11/7. ic /.'' ,)/oH/r  de  D-jvit).  Kugènc  Roger,  mandeur  qui  était  contre  le  mur  de   l'église 

»'oj/'i,e  (/c /((  Terre  Sainte;  et  M éinuii es  ma-  ,1,;  l'hôpital   de  ce  nom   à  Paris,  avant  que 

«^■criis.  les  Pères  de  l'Oratoire,  qui  le  fiossèdent  prè- 

JACtjLKS  ni:  SALOMON  A   Vf.msf.  (DoMi-  sentement  sous    le   nom   (V  Saint-.Magloire, 

nu:ains  du  la  congiiicgaTiON  01;).    \  uy.  Losi-  ,,1  qui  ont  sureédé  aux   Bénédictins,  eussent 

•'Ai«i»iE.  fait    embellir  le    chœur.  Nous   la  rapportc- 

JACtJL'KS   DU   HAUT-PAS    ou  di:   LUQUIiS  rons  ici. 

(i:u*>oiNKS   iiusi-nALiKiis  DK  Saint-).  I.'an  mil  rirt']  cei}'!  vinqt-sir  ddvanliige 

Le  P  du  Breuil,  dans  ses  Antiquités  de  Pa-  l'ar  m  fil  crtinneati  ilvnuer  hertluyc, 

(I)   Voy.,  ;.  1.1  lin  .lu  V..I  ,1,"  \ll. 


505 


JAC 


JAC 


SOG 


Fut  mis  et  clos  en  ce  dévot  séjour 
D'octobre  prins  le  quinzième  jour, 
llalifjieuse  ethonneste  personne 
Dont  renommée  en  plusieurs  places  sonne. 
Publiquement,  frère  Antoine  Cann 
Qui  par  bon  droit  lui  vivant  advenu, 
Fut  commandeur  de  ce  ne  doute  pas 
En  gênerai,  Saint-Jacques  du  Haut-Pas, 
Et  pur  mérite  exempt  de  maléfices 
Il  posséda  inctres  trois  bénéfices. 
Sens  naturel  montra  en  tout  endroit 
Par  sens  acquis  il  fut  en  chacun  druit 
Licencié,  et  après  tous  ses  titres 
Vertu  en  lui  déclara  par  registres. 
Que  riiospital  en  très-belh  devise 
Fit  faire  neuf,  et  qrand  part  de  l'église, 
Semblablement  comme  on  a  etidence 
Le.  corps  d'hostel  estant  en  décadence 
De  charité  fut  le  vrai  exemplaire 
Pauvre,  repeul  pour  à  Jésus  complaire, 
Et  sans  cesser  prenait  la  cure  et  soin 
De  tes  panser  quand  il  eslo't  besoin, 
Priez  pourlw,  dites  dessus  sn  lame 
Ci  (jistle  corps,  en  paradis  suit  l'ame.Amcn. 
Au  bas  de  ce  mur  il  y  a  une  tombe   sur 
laquelle  il  y  a  cet  autre  épilupbc  du  môme 
commandeur: 

Ci  gist  vénérable  religieux  et  discrète  per- 
sonne F.  Antoine  Canuen  son  vivant  licentié 
en  chacim  droit  et  commandeur  gênerai  de 
l'hospital  de  Saint-Jacques  du  Haut-pas  en 
roiaume  de  France,  qui  trépassa  lel^  jour  d  oc- 
tobre l'un  1526.  Priez  Dieu  pour  son  ame. 
L'on  voit  encore  celle-ci  surune  aulru  tombe: 
('i  gist  noble  homme  Reveiend  Père  en  Lieu, 
F.  Jean  Dimanche  de  Lucques  autrement  De- 
pesse,  jadis  grand  maistre  général  de  l'ordre 
de  Saint-Jacques  du  Haut-pas  qui  trépassa 
l'an  de  (;race  l'i0.3,  le  qu  triéme  jour  du  mois 
de  janvier.  Dieu  en  ail  l'ame. 

Il  paraît  par  l'épitaphe  di-  ce  grand  maî- 
tre Dimanche,  qui  y  est  qualifié  de  Révérend 
Pt-re  en  Dieu,  et  par  ce'.lc  du  commandeur 
Canu  licencié  en  l'un  el  l'autre  droit  et  qui 
possédait  trois  bénéfices,  aussi  bien  que  par 
les  figures  qui  sont  représentées  sur  les 
lombes  quel'on  voilencore  dans  elle  église, 
el  qui  ont  toutes  la  tète  rasée  en  fiirnie  de 
couronne  comme  la  portent  les  reclésiasti- 
ques.queces  hospitaliers  se  firent  ordonner 
prêtres  dans  la  suite,  quoique  dans  1  ur 
urigincils  ne;  fussent  que  des  frères  lais  qui 
faisaient  eux-mêmes  les  bacsoùils  passaient 
les  pèlerins  sur  les  rivières,  se'cin  leur  pre- 
mier insliUil,  au  moins  ceux  ([ui  avaient  des 
élablissements  sur  les  boids  des  rivières  oîi 
il  n'y  avait  point  de  ponts.  Cai',  pour  reux 
qui  demeuraienlà  Paris,  ils  éiaicnt  bien  éloi- 
gnés de  la  rivière,  el  n'avaient  été  élalilis 
dans  cette  vile  que  pour  exercer  Ihospita- 
lilé  envers  les  pèlerins.  Mais,  comme  les  au 
très  religieux  de  cet  ordre,  ils  porta  enl  sur 
leurs  manteaux  des  marteaux  (lui  avaient  le 
manche  po  nlu  par  le  bas,  con.me  pour  faire 
des  trous, afin  de  faireentrerplusaisémeni  les 
clous  dans  le  buis.  Ces  religieux  portaient 
CCS  ntarteaux  de  différentes  formes,  comme 

(1)  Voy.,  à  la  llii  du  vol.,  n"  ISo 


l'on  remarque  aussi  .sur  les  tombes  qui  sont 
restées  dans  l'église  de  Sainl-Magloire,  où 
l'on  voit  de  ces  hospitaliers,  dont  les  uns  oui 
le  marteau  en  furme  de  maillet  de  tonnelier, 
d'autres  dont  les  marteaux  ont  deux  pointes 
à  chaque  côté, d'autres  qui  ont  des  marteaux 
dont  les  travers  sont  en  forme  de  haches, 
tous  ces  marteaux  ayant  le  manche  pointu. 
Quanta  la  couleur  de  leur  habillement  ()), 
elle  était  blanche,  el  non  pas  noire,  comme 
dit  le  P.  Alhanase  de  Saint-Agnès  dans  >oii 
Chandelier  d'Or,  qui  prétend  que  cet  halil- 
lement  consistait  en  une  tunique  et  un  man- 
teau noirs,  avec  un  capuce  rouge.  Le  P.  du 
Breuil  donne  la  qua'ité  de  chevaliers  à  ces 
hospitaliers  ;  il  y  en  a  d'autres  qui  leur 
donnent  celle  de  chanoines  réguliers.  Il  se 
peut  faire  qu'ils  étaient  chanoines  hospita- 
liers comme  ceux  du  Saint-Esprit  de  Mont- 
pellier ou  in  sassia,  et  ceux  de  Saint-An- 
toine de  Viennois,  qui,  quoique  chanoines, 
sont  aussi  hospitaliers,  et  à  qui  quelques- 
uns  donnent  aussi  sans  aucun  fondement  le 
titre  de  chevaliers. 

L'ordre  de  Saint-Jacques  du  Haut-Pas  fui 
du  nombre  de  ceux  que  le  pape  Pie  II  suppri- 
ma, et  dont  il  appliqua  les  revenus  à  l'ordre 
de  Notre-Dame  de  Bethléem,  qu'il  institua  par 
sa  bulle  de  l'an  l'i59,  d.mt  nous  avons  parlé 
à  lariicle  Bethléem.  Il  subsista  néanmoins 
longtemps  en  France  depuis  celte  suppres- 
sion, comme  fait  foi  l'épitaphe  du  comman- 
deur Canu  mort  en  lo2G  ;  et  il  y  avait  même 
encore  que'ques-uns  de  ces  religieux  dans 
le  mêmeliôpilil  de  Paris  lorsque  les  Béné- 
dictins de  Saint-Magloirc  y  fureni  transférés, 
l'an  157:2,  par  ordre  du  roi  Charles  IX.  Cet 
ordre  est  aussi  énoncé  dans  l'édit  de  Louis 
XIV  de  l'an  1(]72,  par  lequel  Sa  Majesté 
avait  uni  à  l'ordre  de  Saint-Lazare  les  biens 
de  plusieurs  ordres  militaires  et  hospilaliers, 
(]ue  l'on  regarda  comme  supprimés,  du 
nombre  desquels  était  celui  de  Saint-Jacques 
du  Haut  -Pas. 

Voyez  Du  Breuil,  Théâtre  des  Antiquités  de 
Paris,  lie.  il,  paq.  579,  et  les  mêmes  par 
Malingre,  liv.  ii,  paq.  V.»7. 

JACQUES  DE  L'Èl'ÉE  (Moines  de  Sâiisi-). 
Voy.  Épée. 

JACQUES    EN    Hollande    et    de    SAINT- 
ANTOINE     EN     HaINAUT    (CUEVALIEIIS     DK 

Saint-). 

Auberl  le  Mire,  dans  ses  Origines  des  Or- 
dres militaires,  dit  que  Florent  V,  comte  do 
Hollande,  Zélande  et  Frise,  institua  à  la 
Haye,  l'an  1290,  un  ordre  militaire  sous  le 
nom  de  l'apôtre  samt  Jacqu  s.  SchoonebecL:, 
qui,  clanl  hollandais,  devrait  avoir  mieux 
êié  instruit  de  cet  ordre  que  les  écrivains 
étrangers,  s'en  rapporte  néanmoins  au  lé- 
ino  gnage  d'Auberl  le  Mire  et  à  celui  de  M. 
Ashuiole,  qui  discal  que  l'on  trouve  dans  les 
arehisesde  Hollande  un  manuscrit  authen- 
tique de  rinslitutiun  de  cet  ordre.  H  y  a  bien 
de  l'apparence  que  M.  Ashmole  et  l'abbé 
Ciustiniani,  ((ui  ilii  encore  la  même  chose,  uo 
parlent  aussi  qu'après  Auberl  le  Mire,  qui 


.',07                                           DICTIONNAIIIE  DES  OUDUES  nF.LIGlEL'X.                                           S08 

a«sure  avoir  lire  fiJùlcmpul  ci'  qu'il  dil  <lc  des  personnes  Je  I.i  première  noblesse  qui  en 

(el  «inlrc  d'un  ancien  registre  en  liingue  aile-  auraient  fait  preuves,  cl  les  duclcurs  qui  se 

maniie,  nDuinié  Reiiister  der  lUddersap,  cl  seraient  rendus  nob'cs  p  ir  leur  science;  el 

l'avoT  triduil  enlalin.  (}uoi  qu'il  en  soil,  ce  que  les  rhevaliers  porteraient  un  collier  d'or 

coinle  lie  lîollanile,  selon  Aubert  le  Mire,  (Il  auiiuel  divail  pendre  un  T  d'or  ou  d'arjii-nt, 

rlievali'-rs  de  cet  ordre  douze  sei-jneurs,  en-  selun  leur  noblesse,  avec  une  clochette  d'ar- 

Irc  lesquels  furent  l.aurelol.  comte  d'IIamil-  genl  (2). 

Ion,  aiiibassaili'ur  du   mi  (rKcos«c;   fiod.ird  Ces  ailleurs  ajoutent  que  le  duc  Albert, in- 

deHoi>ihols,  envojé  de  Wesiplialie,  et  Hen-  stiluleur  de  ces  chevaliers  df  Saint-Antoino 

ri,  comle  d'Ilenneber.',  envoyé  de  l^idognc,  dans  I.' Ilainaul,  ayant  résolu  d'envoyer  une 

ri  leur  donna  pour  marque  de  leur  ordre  une  armée  en  Prusse  au   secours  des   chevaliers 

rliaine  d'nr  sur  laquelle  il  y  avait  six  cnquil-  Teuloniques,  établit  dans  l'ordre  des  che.va- 

Ics,  avec  une  méda  lie   pendante  au  bas  du  liers  de   S  liiit-Anloine  un   connétable  et  un 

loliier,  où  était  l'iniafic  de  l'apiilrc  saini  Jac-  iiiaiéchal  de  camp  ;  que  les  seigneurs  d'An- 

(liies  (Ij,  le  tout  pesant  un  mire  cl  demi  ;  et  loin,  de  Lii;ne,  d'IIauré,  de  Lonuucval  cl  de 

chaque  chevalier,  après  avoir  fait  serinent  lîossu,  s'enj:a:;èrent  dans  celle  milice:  que 

sur  les  saints  Evangiles  entre  les   mains    de  fiérardd'Enghien,  seigneur  d'Hauré,  elJeni, 

l'évéquc  d'L'Irceht.   donna  à    Jean  PayporI,  seigneur  de  Ligne,  chevaliirs   de  cet  oriiro, 

héraut  de  ir  Taiide,  son  cru,   cù  ét.iienl  les  élanl  allés,  l'an  1390,  à  la   guerre   d'Afrique 

armes  di'  sa  maison,  iiiu'  l'on  al  lâcha  dans  la  avec  plusieurs  seigneurs  du  coin  lé  dii  Haiuaul, 

salle  du  p  liais  de  la  Haye  |iour  en  conserver  cl  se  Irouvaiil  la  même  année  à  lihodes  avec 

l.i  mémoire.  quelques  seigneurs  français  qui  étaient  aussi 

Florent   V,  instituteur  de  cel  ordre,  ayant  chevaliers    de  l'ordre  de   Sainl-Antoine,   ils 

(■orrom|iula  fimiiicd'un  genl  il  homme  nommé  leur  firent  un  récit  si  avantageux  des  miracles 

llérard    de  \'elsen,  ce   genlilhomme    cl    sou  que  ce  saint  faisait  dans  la  chapelle  déJ  ée 

heau-pèrc  conspirèrent  contre  lui  l'an  129o,  en   son  honneur  dans  le  bois  d'Haurc,  (juc 

le   prirent   el    le   menèrent   au    chàieau    de  ces  seigneurs  français   leur  conseUèrenl  de 

Mude.    Ayant  appris  qu'on  levait  contre  eux  faire  venir  en  ce  lieu  des  rc'igienx  de  l'ordre 

une  armée  en  Hollande,  ils  mirent  ce  comle  de  Sainl-Anloine  ;  ce  qu'ils  exécutèrent  dans 

sur  un  cheval,  croyant  l'emmener  en  Angle-  la  suite,  le  comle  d'Os  Ire  va  ni  enayant  obleuu 

terre  ;  mais  Gérard,  se  voyant  pressé  de  Irop  sept  de   l'abbaye  de  Saint-Antoine  en  Dau- 

prés,lui  donna  vingt  coups  d'epée  et  le  laissa  pliiné,  qui  furent  établis,  l'an  l'tlo,  dans  celle 

mort  dans  un  fossé.  Ce  qu'il  paya  bien  chè-  chapelle,  et  auxquels  on  fit  bâtir  un  monas- 

remeiil  peu   de    temps   après,   car  quelques  1ère  el  un  hiipital   pour  y  loger  les  pauvres 

auieurs  r.ipporient  qu'il  fut  exécuté  à  Ley-  pèlerins  ;  qu'enfin    les    clievaliers   de  Saint- 

den,  ayant    été   mis  dans  un  lonneau  |)lein  Antoine  en  Hainaut  choiMrent  ce  monasiére 

de  clous,  dans  lequel  ou  le  roula  par  toute  la  pour  le  lieu  de  leur  assemblée,  qu'ils  y  met- 

\ille.  laienl  leurs    portraits  avec  leurs  armes  en- 

l-'oidrc  militaire  de  Sainl-Antoine  fut  in-  tourées  d'un  collier  d'or  failde  corde  à  nœuds 

slitué  en  l.'i82  par  Albert  de  Bav  ière,  qui,  par  avecIcTetuneclochetlc, comme  l'on  en  voyait 

la  mort  de  Guillaume  dit  l'ins^'usé,  son  frère,  encore  de  leur  temps.  Auherl  le  .Mire,  parlant 

hérita  des   comtes  du    Hainaut,  de  Hollande,  de  cel  ordre   (Orig.  ord.  equ.   cap.    12),  dit 

Zélande  et  Frise,  qu'il   avait  gouvernés  en  aussi    que  le   collier  était    f.iit  eu  forme  de 

qualité  de  tuteur  pendant  1 1  delenlion  de  ce  corde  d'ermite,  auquel   pendait  un    hâiou  à 

même  tiuillaume,  ((uc  ses  stiels  avaient  été  s'appuyer  el  une  clochette.  Tous  les  auteurs 

obligés  d'enfermer  à  cause  de  ses  frénésies  ,  qui  ont  Irai  lé  des  ordres  militaires  disent  aussi 

qui  éta  eut  qiieli|uefois  si  excessives,   qu'il  (jue  le  collier  de  l'ordredeSaint-.Vntoine  était 

tua  de  sang  froid  un  gentilhomme  d'un  mai-  composé  d'une  ceinture  d'ermite,  qu'ils  ont 

son  très-  illustre.  représentée  comme  unuccinlure  i!e  cuir  avec 

Vinchenl,  (|ui  a  f.iit   les  annales  du   liai-  une  boucle;   mais  nous  aimons  mieux  nous 

naul,  el  le  P.  Uuleau  de  l'ordre  des  Minimes,  en    rapporter   aux    auteurs    des  annales  du 

qui  les  a  aui;meulèes,  disent  (chip.  2-'l)  que  Hainauiel  à  Auberl  le  .Mire,  qui  o:ilèlé  mieux 

le  motif  qui   porta  ce   prime  ;i  instituer  cet  instruits    de    ce   qui    concernait  cet    ordre, 

ordre  fut  ()uc   le  Hainaut   étant  affligé  de  la  (Juant  ;'i  son  institution,  dont  ces  aiinali>li  s 

mal.idie  que  l'on  appelait  feu  sacré  ou  feu  de  du  Hainaut  font  auteur  le  pape  lioniface  \'1II 

S.iiiit-.\iituine,   il  icux  qui  en  étaient  alt.i-  en  citant  sa  bulle  de  l'an  1298,  je  n'aitrouiù 

qués  ne  trouvant  point  d'    meilleur  remède  /incun  autre  hisloricu  (jui  en  ait  parle, 

cl  plus  assuré  que  de    vi-iter    une  i  hanelle  ,,  „„,-,-,;-,>!- /r.                               •         i 

dcdiee  a  cesainl,  située  dans  le  bois  d'IIauré,  JARRLliLllL  (Chevaliers  de  la;  EN  Arclb- 

proche  Mons,   Albert  de  Kav.ère  inslilna  un  TKnRE. 

ordre  de  chevalerie  en  l'honneur  de  ic  saint  Presque   tous   les   historiens   conviennenl 

pour  lémoiLiner  la  dévolion  qu'il  lui  p  irlait,  qu'lvlouard  III,  roi  d'Aiiglelerro,   n'iiislilu  i 

el  lit  cette   iiistiluliou  de  ch.-v.iliers  eonfor-  l'ordre   de   la  Jarret  ère   (|n'à    l'orcasion  de 

méineni  à  celle  qui  en  avait  clé   fa. te  par  le  celle   que  la    comtcsso  de   S.ilisbiiry  ,    qu'il 

pape  Uonifacc   \  111,  dès   l'an    129S,  par  une  aimait,  laissa  tomber  dans  un  bal,  cl  que  ce 

liulle  qui    poilail  entre   autres    choses   qua  prince  releva  ;  ce  qui    ayant  donné  occasion 

l'on  ne   recevrait  dans  crlle   chevaic  ie  que  de  rire  aux  courtisans  bÏ  causé  du  chagrin  à 

(Il  Voj  ,  il  jj  lin  .lu  Md.,ii'  UO.  (~)  Voy.,  à  la  lin  du  vol.,  n"  11'. 


eQ3 


JAIjL 


JAR 


510 


la  comtesse,  le  roi,  pour  Icmoijtncr  qu'il  n'.i- 
vail  poiiileu  de  mauvais  dessein,  liil,  en  lan- 
gage de  ce  temps-là,  Ilonnij  soil  qui  mal  y 
pense,  le  mol  hoiiny  sigiiiflanl  maudit  ;  et  lit 
un  serment  que  lel  qui  s'était  moqué  de  celte 
jarretière  s'estimerait  heureux  d'en  porler 
une  semblable.  Cet  ordre  lui  institué  dans  le 
châleau  de  Windsor  et  fut  mis  sous  la  pro- 
tection de  saint  Georges.  Mais  ces  historiens 
ne  s'accordent  point  sur  le  temps  de  celte 
inslilulion.  Les  uns  prélendenl  que  ce  fut 
l'an  1344,  el  les  aulres  l'an  1350. 

Froissard  donne  à  connaître  qu'il  fut  In- 
stitué l'an  1347,  on  disant  qu'après  qu'E- 
douard m  eu'  chois-i  quarante  chevaliers  de 
cet  ordre,  dont  la  léte  se  devait  célébrer  tous 
les  ans,  et  auquel  il  donna  le  nom  du  bleu 
jarretière,  et  qu'ils  se  furent  engages  par  ser- 
ment d'observer  les  statuts  qui  en  avaient 
éié  dressés,  ce  prince  envoya  publier  une 
fête  par  ses  hérauts,  en  France,  en  Ecosse, 
en  Bourgogne,  en  Hainaut,  en  Flandre,  en 
Brabantel  en  Allemagne,  pour  le  jour deSaint- 
Georges  suivant  de  l'an  13't8.  Mais,  quoique 
cet  auteur  parle  de  l'amour  qu'il  avait  pour 
la  comlesse  de  Salisbury  etqu'il  fasse  la  des- 
cripiion  d'un  tournois  qu'il  fil  faire  à  Lon- 
dres à  sa  considération  et  où  elle  se  trouva, 
il  ne  dit  point  quelle  laissa  lomber  sa  jar- 
retière ni  que  ce  fut  le  motif  qui  porta  ce 
prince  à  instituer  cet  ordre. 

tluker,  dans  sa  description  du  royaume 
d'Angleterre,  d'Ecosse  el  d'Irlande,  attribue 
l'institution  de  ci  t  ordre  au  rétablissement 
de  Pierre  le  Cruel  sur  le  trône  de  Castille  par 
les  troupes  auxiliaires  d'Angleterre,  com- 
mandées par  le  prince  de  Galles  ;  mais  il  s'est 
iiompé,  puisque  cela  n'arriva  que  l'an  13GG, 
seize  uns  après  l'instilulion  de  l'ordre.  Cet 
auteur  ne  laisse  pus  de  dire  que  la  marque 
de  cet  ordre  fut  une  jarretière  lileue,  à  cause 
de  celle  que  la  reine  avait  perdue;  sur  quoi 
leroil'ayanlrailléeet  luiayantdit  qu'il  l'avait 
donnée  aux  chevaliers,  elle  lui  répondit, 
Ilonny  soit  qui  mal  y  pense,  ce  que  ce  prince 
fit  ajouter  en  lelires  d'or  sur  la  jarretière. 

Le  peu  J'intelligence  que  Joseph  Miciiicli 
avait  apparenmiL'nt  de  la  langue  latine  lui  a 
fait  croire  que  quelques  auteurs  avaiinl 
irouvé  un  autre  motif  de  l'institution  de 
l'ordre  de  la  jarretière,  car  il  dit  que  quel- 
(jups-uns  prétendent  qu'Edouard  institua  cet 
ordre  en  considération  de  Périssélide  ,  reine 
dt;  la  Jarretière  :  Algunos  dizen  haver  insli- 
luido  esta  ordena  contemplacionde  Perisclidc 
reyna  de  la  Giuirliera,  ayant  pris  le  mol  pc- 
riscelis,  qui  signifie  jarietière  pour  le  nom 
d'une  reine,  cl  la  jarret icre  pour  le  nom  d'un 
royaume.  Enfin  il  y  eu  a  qui  onl  fait  remon- 
ter l'origine  de  cet  ordre  jusqu'au  temps  de 
lUchardl", roi  d'Angleterre, et  qui  prétendent 
qu'Edouard  n'en  a  éléii  ne  le  restau  râleur. Tels 
ont  été  les  différents  seniiments  des  écrivains 
sur  l'origine  et  rinslitution  de  l'ord.c  de  la 
Jai  retière. 

M.  Ashmole,  héraut  de  cet  ordre, qui  en  a 
donné  une  ample  histoire,  en  attribue  l'insti- 
lulion àEilouard  III  ;  mais,  regardant  comme 
fable   l'histoire  de  la  i  irrelière  de  la  com- 


tesse de  Salisbury,  relevée  par  ce  prince,  il 
prétend  qu'il  l'insliliia  par  un  autre  motif, 
el  que  ce  fui  la  vingt-troisième  année  de  son 
règne  :  ce  qui  revient  à  l'an  13'i.9,  puisqu'K- 
douard  monta  sur  le  trône  d'Angleterre  l'a:» 
13i(5.  En  effet,  au  coinmcncemcnt  des  statuts 
de  cet  ordre  ,  qui  furent  dressés  par  ce 
prince,  et  même  dans  ceus  qui  furent  réfor- 
més par  ses  successeurs,  il  est  marqué  qu'il 
avait  institué  un  ordre  militaire  en  l'honneur 
de  Dieu,  de  la  sainte  Vierge  el  de  saint  Geor- 
ges, martyr,  la  vingt-troisième  année  de  son 
règne  :i4f/  honoiein  omnipolenlis  Dei,  sfinctœ 
Mariœ  Yirginis  gluriosœ  et  :ancti  Georgii 
marlyris,Uominns  noster  supremus  Edunrdus 
Icrtius  rex  Angtice  unno  rerjni  siii  post  con~ 
guestum  xxiii,  ordinavit,  slabitivil,  cl  funda- 
vlt  qnamdam  societalem  sive  ordincm  mili- 
tarrin. 

Le  roi ,  avant  que  d'instiiuer  cet  ordre, 
avait  fait  achever  l'église  de  Windsor,  com- 
mencée par  ses  prédécesseurs ,  comme  il 
paraît  par  ses  lettres  du  G  août  de  la  vingt- 
deuxième  année  de  son  règne,  c'est-à-dire  de 
l'an  1348,  par  lesquelles  il  déclare  que  ses  pré- 
dé -esseurs  ayant  commencé  à  Windsor  une 
églisesoas  le  titre  de  Saint-Eilouard,  dans  la- 
quelle il  avait  été  régénéré  par  les  eaux  du 
baptême,  et  où  ils  avaient  établi  huit  cha- 
noines, il  avait  fait  achever  celte  église  eu 
l'honni'ur  de  Dieu,  de  la  sainte  Vierge,  de 
saint  Georges,  martyr,  el  de  saint  Edouard, 
confesseur;  et  que,  voulant  augmenler  le 
nombre  des  chanoines  et  des  autres  minisires 
de  celte  église,  il  ordonnait  qu'on  ajouterait 
encore  aux  huit  chanoines  qui  y  étaient  déjà, 
un  custode  pour  être  leur  chef,quinzeaulies 
chanoines  el  vingl-qualre  pauvres  chevaliers 
qui  n'avaient  pas  de  quoi  vivre,  avec  des 
chapelains  qui  obéiraient  au  cuslode  et  qui 
seraient  entretenus  sur  les  revenus  qu'il 
assigna  à  cette  église. 

Le  pape  Clément  VI,  par  une  bulle  du  30 
novembre  do  la  même  année,  donna  pouvoir 
aux  évéqnes  de  Salisbury  el  de  Winchester 
d'ériger  l'église  de  Windsor  en  une  collé- 
giale de  chanoines,  de  prêtres,  de  clercs,  de 
])auvres  chevaliers  du  royaume,  el  d'autres 
iiiinislns  qui  devaient  y  faire  le  service  di^ 
vin,  el  d'en  fixer  le  nombre  conformément 
aux  revenus  qui  leur  avaient  été  assignés; 
et,  par  une  autre  bulle  du  12  février  de  l'an- 
née suivante,  il  exempta  cette  collégiale  do 
toute  juridiction  de  l'ordinaire,  la  mettant 
sous  la  protection  du  saint-siig',  voulant 
que  le  custode  eût  tout  juridiction  sur  les 
clianoines,  les  prêtres,  les  clercs,  les  pauvres 
chevaliers,  et  les  autres  ministres  de  l'église  • 
et  que,  pour  ce  qui  regardait  la  conilui  e  des 
âmes,  il  reconnût  l'autoriiéde  l'évcqne  de 
S  ilisbury,  dont  il  recevrait  le  pouvoir.  Ce 
ciislxleet  celle  colléf;iatc  étaient  obligés,  eu 
vertu  de  celle  même  bulle,  à  payer  tous  les 
ans  au  sainl-siége  un  marc  de  sterling,  le 
jour  de  la  fêle  de  saint  Georges,  en  l'Iioii- 
licur  duquel  cette  église  avait  été  fondée. 

Il  paraît  par  le  quatrième  article  des  sta- 
tuts de  cet  ordre  qu'il  ne  devait  y  avoir  quo 
treize  chanoines  dans  celle  cgiiic,  cl  autant 


on                                          DICTIONNAinF.  DES  OROUES  RELIGIEUX.  512 

lit'  vic.nires,    f.iisaul   on   loiil  le  noinlir.!   do  deux  roses  ;  que  dnns  une  jnrrctii'rc  la  rose 

vliif;l-six.  aiiqiirl  fui  aussi  lixé  le  nombre  des  de   dessus   sera    blanche,  el  celle  de  dessous 

i  lie\nli(TS  de  la  Jarreiirn»,  el  non  pas  à  celui  rouge,  el  (lue  dans    une  aulre  jarrelière   In 

de  quarante,    connne  Frois-ard  a  avancé;  rose  île  dessus  sera  rougi',  et  celle  de  dessous 

lesquels   \ini;l-six    chevaliers  ,  y  compris  le  blani  lie  ;  qu'au    bas  du  collier  il  y  aura  une 

roi,  qui   éla.l  (hefd  souverain  de  l'ordre,  ima^e  de  saint  Georf^cs;  que  ce  collier  sera 

devaiiiil  présenter  chacun,  ponria  première  porté    dans    les    grandes    solennités;    mais 

fciis   seulement,  un  de    ces    Ir.  izc  chanoines  qu'aux  autres  jours   on    portera   seulement 

et  un  de  ces  lieize  vicaires,  dont  la  noniina-  l'image  de  saini  (u'orges  attachée  à   une  pe- 

(ion  devait  apparlenir  dans  la  suite  au  clicl'  lile  chaîne  d'or,  à  moins  <iu'oii  ne  soit  oblijié 

de  l'ordre,  aussi  bien   que  celle  des  pauvres  d'aller  à  la  guerre,  que  I  on  soit  malade,  ou 

(  hevaliers,  qui,  par  les  inémes  statuts,  ayant  que  l'on  entreprenne  un  grand  voyage,  aux- 

<  le  anumentés  ju-qu'au  nombre  de  vingt-six,  quels  cas  il  s'.iffira  de  poi  1er  l'image  de  saint 

•levaient  aiis-i    être    [  résenlés    [  ar    chaque  deoriies  attachée  à  un   peiit  cordon  de  soie, 

chevalier   de  l'ordre,  pour  la   première   l^is  l'ar  les  mêmes  statuts,  le  r.ii  Henri  >  111  ré- 

.si'uli'ment.    L' s    Ir  ize    chanoines   devaient  <luisit  à  treize  le  nombre  des  pauvres  chcva- 

purter  un  manleande  pourjire,  .ivcc  un  rond  liers  de  l'église  de  Windsor,  donl  il  au;,'min- 

Mir  le  cTiié   gauche,  dans  lequel  élaienl   les  la  le  nombre  des  ecclésiastiques,  ordonnant 

.irnies  de  sa  lui  (leoiges,  savoir,  une  croix  de  qi'il  y  aurait  à  pcrpélnilé  un  doyen  el  douze 

gueules  m  chmip  d'argent;  et  les  vingl-six  chanoines,  treize  auires  prêtres ,  dont    une 

I  auvres  chevaliers  dcvaii  iil  aussi  porter  un  p;irlie  serait  appelée  /jcfi/v  chnnoin''f,  el  l'au* 

manteau   rouge,  el   sur  le   côté   gauihc  un  Ire  ficaires,  cl  que  s'ils  n'étaient  pas  prétns 

écusson  aux  armes  de  saint    Georges,   sans  en  entrant,  ils    fussent  au  moins  en  ûge  de 

jarretière   suiour.  Ch.ique   chevalier  de    la  l'être  dans  l'annie  ;  qn'ily  aurait  outre  cela 

Jarrelière,  à  ^a  réception  dans  l'ordre,  devait  lieizc  clercs  et  aul;int  de  choristes,  qui,  avec 

«loriner  en  aumône  |  our  Icntrelicn  des  cha-  les  petits  chanoines  et   les  vicaires,   chantc- 

iioines  cl  des  [lauvres  elievaliets,  savoir  :  le  raient  au  chœur  et  feraient  l'oflicc  d  vin.  Le 

roi, quarante  man  s  d'argeiil,  un  roi  clranger  nombre  des   pauvres  chevaliers  a  été  aug- 

vingi  livres,  le  prince  de  Galles  vuigt  marcs,  mente  dans  la  suile  jusqu'à  dix-huii. 

I  liaque  duc  di\   livres,   chaque    coniie   dix  Ce   prince    par    ses    statuts    n'avait    rien 

marcs, chaque  bannerel  cent  sous,  el  chaque  changé  louchant   les  prières  auxquelles  les- 

bachelier  cin(i  marcs.  chevaliers  de  l'ordre  ctaienl   obligés  envers 

Quant  à  l'Iiabillement   des  chevaliers  de  ceux   qui   étaient  décédés.   Il   y   est   encore 

l'oj'dre,  il  consist  lil  en  un  manteau  bleu,  sur  niaïqué,  aussi  bien  que  dans  les  anciens,  ()U0 

letiuel  il  y  avait  du  colé  gauche   une  croix  le   roi   d'Angleterre  devait   faire   dire  (lour 

rouge  (iitouric  d'une  jarrelière  :  ils  devaient  chaque  chevalier  défunt  mille  mes  es,  un  roi 

aussi  porter  toujours  a  !a  juniie  gauche  une  étranger  huii  cents,  le  prince  de  Galles  sept 

jarrelière  bleue,  où  ces  mois  étaient  en  hro-  cents,  un  ducsix  cen^s.un  m.irquisqiialrecent 

derie  d'or:  llonnij  soit   riai  vtal  y  pense,  el  (inquanle,  un  comte  trois  (enis,un  vicumle 

ceux  qui  élaienl  trouvés  sans  celte  jarretière  deux  cent   cinquante,  un  baron  deux  cenis, 

ilevaiciil  payer  un  demi-marc.  Il  y  a  des  st  i-  et  un  écuyer  cent.  Mais,  après  que  ce  prince 

tuls  en  français  ([ui  poitenl  qu'un  chevalier  eut  introduit  l'Iiérésie  dans  son  royaume,  il 

("lait  dispensé  de    la  porter,  quand  il    estai!  changea  cet  article  des  statuts,  cl    ordonna 

liousé  pour  chei  (uicliier,  il  i\ue:   pour   lors  il  que  lorsqu'un  chevalier  décéderait,  tous  les 

elait  oblige  de  [lork'r  ■soit.'' son  ftyuicfiu  en  Al-  autres   donneraient    de    l'argent    pour   être 

(jnifiance  du  jin relier,  un  fil  bleu  de  soye.  Les  employé  en  œuvres  pieuses  :  savoir,   le    roi 

t  hevaliers  devaient  avoir  ce  manteau    bleu  d'Angleterre  8  liv.    ti  sous  H  den.,    un   roi 

depuis  les  premières  vêpres  de  la  fête  de  saint  étranger  G  liv.  13  s.  '»■  d.,  un  prince  5  1.  Ifi  s. 

Georges  jusqu'après  le  souper;  le  jour  de  la  H  d.,  un    duc  .'i  I.,  un  marquis  .'t  I.  l.'i  s.,  un 

lê:c  en  enlranl  dans  la  cliapeTe  jusiju'au  dî-  comte   2  1.  10  s.,   un  vicomle  2   1.   1  s.  8  d., 

ner,  cl  depuis   les  secondes  vêpres  jusqu'au  un  baron  1  1.  1.')  s.  V  d.,  et  un  écuyer  lli  s.  8  d. 

souper,  el   cela  en   quehiue  lieu   qu'ils  fus-  Il  y  a  eu   dans  la   suite  du   cliangemenl  à 

sent,  comme   s'ils  avaient  été   présents  à  la  l'habit  et  au  collier,   l'résenlemenl,  le  maii- 

IV'lc.  Ilsn'avaiinl  point  pour  lors  de  colliers,  tcau,  qui  d'abord  n'élail  que  de   drap  bleu, 

n'ayant  (ommemé  ,i  en    porter  ((uc  sous  le  est  de  velours;  l'on  a  changé  la  robe  en   un 

règne  d'Henri  \  III,  n'y  ayant  (|iie  les  slaluls,  justaucorps  de  velours  cram  'isi  ;  el  les  che- 

qui   turent  réformes  par  ce   prince   en  l.'ri2,  valicrs   portent   un    bonnel  de   velours  noir 

qui  en  fassent  mention  ;  et  cela  dans  le  Iroi-  autour  du(]uel  il  y  a  un  cercle  d'or  garni  de 

sième  article,  où  il  est  iiiarciué  que  depuis  les  pierreries,  avec  des  plumes  b'anchi's  el  une 

premières  vêpres  de  la  lêle  de  saint  (ieorges  aigrette  noire.  Sur  le   côté  gauche  du  man- 

jusqu'.jprès  les  secondes,  el  même  jusi]u'au  teau,  il  y  a  une  croix   rouge  cntouiée  d'une 

souper,    tous     les    chevaliers    porteront    le  jarrelière  au   milieu   d'uiie    étoile,  donl    les 

iiianleau,  la  robe,  l'iiuinéral    el  le  collier;  cl  rayons  sorlenl  toui  ;iulour  de  la  jarrelière. 

d.'ins  le  Irenlc-huil  et  liernier  article  de  ces  L'abbé  Giusiiniaiii  dit  que  les  chevaliers  ne 

statuts,  ce  prin<:e  déclare  que  du  conseille-  portent  celle  éloile  que  depuis  l'an  l(J2t>,  par 

ment  des  chevaliers  il  a  ordonné  qu';'i  l'ave-  une  ordonnance  de  Charles  1"  ;   mais  il  y  .i 

iiir  tous  les   chevaliers   porteront  un  collier  bien  de  l'appaienec   qu'ils  la  portaienl   déjà 

d'or  du  poids  de  Irenlc;  onces,  qui  s  la  cum-  auparavant,  comme  il  parait  par  le  lombe.iu 

pOoc  de  j.irreliércs,  dans  lesiiuelles  il  y  aur.t  de   Guillauuie   llalloii,  co.inceiier    d'Angle- 


513 


JAR 


JAR 


514 


lerrc  el  chevalier  de  col  ordre,  décédé  l'an 
1591,  qui  est  dans  l'église  du  Saint-Paul  de 
Londres,  où  il  est  représenté  avec  le  man- 
teau de  cérémonie,  avant  sur  le  côté  gauclie 
la  crois  entourée  délia  jarretière  au  milieu 
de  celte  étoile  :  ce  que  Ion  peut  voir  dans  la 
di  scriplion  de  celte  église  que  Dugdale  a 
donnée  en  1658. 

Les  chevaliers  portent  encore  sur  l'épaule 
droite  un  chaperon  d'écarlalo  comme  1rs 
présidents  et  les  conseillers  de  nos  parle- 
ments de  France.  Le  collier  est  présentement 
composé  de  jarretières  au  milieu  desi|uellcs 
H  y  a  une  rose,  et  ces  jarretières  sonl  entre- 
lacées de  nœuds  faits  de  cordons  d'or  avec 
des  houppes,  quequelques-uns  prennent  pour 
des  chardons,  el  au  bas  du  collier  il  y  a  l'i- 
mage de  saint  Georges,  armé  de  (oulcs 
pièces,  sur  un  cheval  émaillé  de  blanc.  Cette 
image  est  ordinairement  garnie  de  diamants. 
La  jarretière  est  de  velours  bleu  garnie  de 
perles  qui  forment  les  paroles  qui  sont  des- 
.sus.  La  boucle  et  le  fermait  sont  garnis  de 
diamants  (1).  Tel  est  l'habit  de  cérémonie 
*]u'ils  portent  dans  les  solennités;  mais,  aux 
autres  jours,  outre  la  jarretière,  ils  portent 
un  cordon  bleu  en  forme  d'écharpe,  depuis 
l'épaule  gauche  jusqu'à  la  hanche  droite,  et 
au  bas  de  ce  ruban  il  y  a  une  médaille  d'or 
où  d'un  côté  est  l'image  de  saint  Georgej 
dans  un  cercle  d'or  garni  de  diamants,  el  du 
l'autre  quelques  ornements  au  milieu  d'un 
cercle  d'or  garni  aussi  de  diamants  :  c'est  ce 
qu'on  appelle  le  Georges.  Celle  médaille  est 
néanmoins  comme  une  petite  boite  qui  s'ou- 
vre et  où  quelques  chevaliers  conservent  le 
portrait  de  leurs  maîtresses,  selon  la  repré- 
sentation de  celte  médaille  que  nous  a  don- 
née M.  Ashmole,  el  qu'il  a  lait  graver  avec 
les  habits  cl  les  ornements  de  cet  ordre. 

Lorsque  les  roi^  d'Angleterre  donnent  cet 
ordre  à  (jueliiue  prince  étranger,  ils  loi  en- 
voient tous  ces  ornements,  selon  qu'il  est 
ordonné  par  les  statuts  et  qu'il  paraît  par 
celte  lettre  du  roi  Charles  11  à  Fridéric- Guil- 
laume, marquis  de  Brandebourg,  lorsqu'il 
lui  envoya  l'ordre  de  la  Jarretière  l'an  105i  : 
Mon  Frire,  l'assurance  que  j'ai  de  voire  ami- 
tié pc.r  plusieurs  témoignages  que  vous  m'a- 
rez  donnez,  m'oblige  à  rechercher  tous  les 
mc>ïens  qui  seront  capables  de  l'entretenir  et 
de  la  conserver.  Pour  ce  sujet  j'ay  trouvée 
propos  comme  souverain  du  très  ancien  et  du 
très  noble  ordre  de  la  Jarretière,  de  vous  élire 
l  un  des  chevaliers,  pairs  cl  compagnons  dudit 
ordre,  estimant  par  là  de  faire  une  plus  étroite 
amitié  avec  vou<,  et  d'augmenter  le  bien  el  la 
prospérité  de  celle  très  noble  société,  laquelle 
par  plusieurs  siédes  a  eu  non  seulement  Ls 
rois  d'Angleterre  nos  prédécesseurs  pour  sou- 
verains, mais  aussi  l'honneur  d'avoir  plu- 
sieurs empereurs,  rois  el  princes  étrangers 
pour  compagnons  ;  comme  aussi  de  vous  don- 
ner par  là  une  marque  évidente  de  mon  affec- 
tion et  de  la  haute  eslime  que  j'ay  de  vos  mé- 
rites et  de  voire  personne  ;  et,  pour  confirma- 
lion  de  ladite  élection,  je  vous  envoyé  pur  le 


sieur  chevalier  de  Walher  jarretière  roi  d'ar- 
mes, la  médaille  dite  le  Georgis,  la  jat  reiiere 
el  l'étoile,  pour  les  porter  à  la  manière  accou- 
tumée, à  sçatoir  la  mednille  autour  du  corps, 
la  jarretière  à  la  jambe  gauche,  el  l'étoile  sur 
le  côté  gauche  de  la  casaque  ou  du  manteau. 
Ledit  sieur  de  ]]'(dl;er  vous  assurera  de  ma 
part  que  je  désire  avec  passion  de  vous  témoi- 
gner que  je  suis,  mon  frère,  votre  bien  affec- 
tionné frère  el  cousin  C.  />'.  Celte  L'ilre  fut 
éciile  de  Paris  l'an  llJSi.  Mais  les  babils  rie 
l'ordre  ne  furent  cnvojés  au  marquis  dii 
IJrandebourg  que  l'an  l(i(J3,  comme  il  paraît 
p.ir  la  let'.re  suivante  d;i  chevalier  Walker, 
écrite  de  Londres  au  prince  d'O.  ange  :  Mon- 
seigneur, j'ay  reçu  avec  les  Ictlr's  de  Sa  Ma  - 
jcsté  le  roi  mon  maUre,  tout  l'habit  du  très 
noble  ordre  de  la  Jarretière  pour  Son  Altesse 
le  prince  électeur  de  Brandebourg,  avec  ordre 
de  les  envoier  à  Votre  Altesse,  que  par  vos 
mo'iens  soi^nt  adressez  à  Son  Altesse  Electo- 
rale. Cda  contient  un  juste-au-corps  de  ve- 
lours tr<imoii,  un  manteau  de  velows  bleu, 
le  grand  collier  du  très  noble  ordre,  d'or,  arec 
l'image  de  saint  Georges  émaillé  poisanl  «JO 
onces,  el  un  bonnet  de  velours  nutr.  Co  urne 
on  se  diiil  porter,  le  papier  donra  pla>  de  su  ■ 
tisfaition  à  Son  Altesse  électorale,  quoique 
l'habit  n'est  jamai'i  porté  sinon  qu'à  la  fêle  de 
saint  Georijes;  mais  le  grand  collier  est  porté 
par  le  souverain  et  compagnons  pendant  les 
prières  du  malin,  sur  tous  les  jours  menlionez 
dans  le  papier.  Pour  le  ivre  des  statuts  de 
l'ordre,  quand  ils  seront  reformez,  je  tâcherai 
avec  tout  soin  de  les  envoier,  en  attendant 
j'ai  envoie  tout  l'habit  à  mon  cher  ami  le  che- 
valier Guillaume  Davison  ,  de  les  envoier  à 
Votre  Altesse,  de  qui  vous  recevrez  cela  el  la 
lettre  de  Sa  Majesté  ;  el  je  n'en  double  point 
bien-tôt  tout  le  reste,  el  puis  je  prie  humble- 
ment Votre  Allesse  de  les  adresser  à  Son  Al- 
tesse électorale  avec  les  très  humbles  el  obéis- 
sons services  de  celui  qui  sera  toute  sa  vie  de 
Sa  Sercnissime  Allesse  électorale,  el  de  votre. 
Monseigneur,  le  très  humble  el  obéissant  ser- 
viteur Ed.  Walker.  Garter.  Chaque  prince 
étranger,  après  avoir  reçu  (es  marques  el 
ornements  de  l'ordre,  est  obligé  d'envoyer 
un  procureur  au  château  de  Windsor  pour 
être  reçu  cl  installé  à  sa  place  avec  les  so- 
lennités requises,  el  doit  donner  un  manteau 
de  l'ordre,  son  heaume,  timbre  et  épée,  pour 
demeurer  toujours  dans  l'église  de  Windsor. 
Lorsque  ce  procureur  est  installé,  le  souve- 
rain de  l'ordre  ou  celui  à  qui  il  en  a  donné 
commission,  lui  allache  le  manteau  sur  le 
bras  droit,  el  après  celte  installation  il  ne  le 
doit  plus  porter  en  aucun  temps  pour  celui 
qui  l'a  envoyé.  Henri  IV,  roi  de  France, 
iiyanl  reçu  l'ordre  de  la  Jarretière  de  la  reine 
Elisabeth, l'an  1596,envoja,ran  lti(X),à  Wind- 
sor le  sieur  de  Chastres,  chevalier  d;;  l'ordr;- 
de  Saint-Jean  de  Jérusalem,  gouverneur  de 
Dieppe  et  l'un  de  ses  lieutenants  généraux 
en  Normandie,  comme  son  procureur  pour 
être  installé  à  sa  pl.ice,  ce  qui  fut  lait  après 
que  le  dit  sieur  de  Chaslres  eut  promis  au 


(\)  Vûy.,àL.  ûii  du  vol.,  n"  128. 


5ir,                                           DICTIONNAIRE  DKSOIUHU.S  RlXIGIEl'X.  E16 

nuiii  tlu  roi  Je.  France  d'observer  les  stauils  rcmc  qu'ils  porl^nl  sur  le  côté  gau.he  l'é- 
(If  roritre,  -eloii  la  forme  cl  leiiour  que  Sa  cusson  de  l'ordre  sans  jarretière.  Le  liéraiil 
Maie.ste  l'.i'vail  déjà  juré  l'an  lo'.Ki.  lorsqu'il  porle  sur  leslomac  une  médaille  entourée 
rerul  l'ordre,  et  duni  voici  la  teneur  :  Aoi(.<  d'une  jarretière,  sur  laquelle  médaille  (  si  un 
Ilèiiri,  pur  Ui  (jrdcc  de  Diru  roi  de  l'i  mice  et  éeusson  parti  aux  armes  de  l'ordre  el  aux  ar- 
le  .So'riii  re,  jurons,  rouons  et  proniriions  so-  mes  d'Angleterre,  surmonté  d'une  couroni;e 
/.■nnellentint  sur  noire  honneur  en  parole  de  royale  d'or,  (•!  il  lient  un  liàlon  d'argent  dore 
r,t\,  que  nous  observerons  cl  m  ini.i.ndruns  les  aux  exirémilés  el  au  haut  ducjuel  il  y  a  les 
flatutset  ordonnnnce<,  du  liès-noble  ordre  de  armes  ilel'oidre  et  d'An|;leterie.  L'huissier 
Monsieur  satnl  Georges,  nommé  la  Jan  etière,  à  la  vci'^e  noire  a  une  médaille  aussi  entourée 
en  ce  qu'ils  ne  se  troutcrunt  conlraires  à  no-  d'une  jarretière  au  milieu  de  laquelle  il  y  a  un 
tre  r;li(jion  callwlique ,  (jrandcur  el  majcsié  ncend  pareil  a  ceux  du  collier  de  l'ordre,  el 
roiale,  ni  aux  staluls  el  ordonnances  de  nos  tient  à  la  main  une  verge  noire  garnie  d'ivoi- 
d  ux  ordres  du  hcnvil  Sainl-Espril  el  Mon-  re,  au  milieu  el  aux  exirémilés  de  laquelle 
sieur  siinl  Micitel.  lîn  léinoin  de  quoi  nous  il  y  a  un  lion.  L'office  de  greffier  est  annexé 
avons  signe  la  présenlc  de  noire  iwiin  il  icrlle  depuis  longtemps  à  la  dignité  de  doj  en  do 
juit  sceller  de  noire  scelsevrel.  A  Rouen,  le  2  Windsor,  cl  Alarc- Anioine  de  Dominis,  ar- 
oilobrc  LiiîG.  Franeois  1",  Henri  11,  Cliar-  chévéque  de  Spalilro,  si  eonnu  par  son  ap.i- 
li  s  IX.  el  Henri  III,  aussi  rois  de  France,  onl  stasie,  ses  éerits  et  sa  fin  lragi(|uc  ,  a  eié 
reçu  pareillement  cet  ordre,  qui  a  été  encore  greffier  de  cel  ordre,  en  celle  qualili  du 
dmiiie  à    cinq    empereurs,   à  plusieurs   rois  doyen  de  Windsor. 

d'Espagne,  de  Portugal,  de  Pologne,  de  Na-  Elias  Ashmole  ,    The  Inslilulion   Latcs  et 

pics,  de  Danemark,  el  de  Suède,  à  des  ducs  céninonies  of  The  Most  noble  Order  of  ihe 

(le  Bourgogne  de  Savoie,  de  Milan,  de  Fer-  Parler.  liolland  ,  Acl.  SS.   lom.   III   Ap'ilis, 

r.ire,  d'Crbm  cl  à  plusieurs   princes  souve-  pog.  158.  Mondon  lîelvalel ,  Cn/rrAiii/i.  Ord. 

rains  d'AHeniagne,  dont  il  y  en  a  cinq  ou  six  l'eriscelidis.  Froissard  ,  Chronique  de  Fran- 

delà  maison  Palatine.  ce,  d'A'xjlelcrre  cl  d'Ecosse,  liernard  (liu!,ii- 

Le  nombre  des  chevaliers  n'a  poi.it    èlé  niani,  ïlisl.  di  Util.  <jli.  Ord.  milil.  Jo-epli 

ai:gmenté   depuis    l'iiislilutiun    de    l'ordre  ,  Michieli,  Tesoro  tnilil.  di  Ciivaleria. 

ayant  toujours   élé  fixe  à  vingt-six    y  co.n-  j^aN  -  BAPTISTF  ex  Fuance  (Fu.uites  ..e 

pris   e  souverain  et  chcfde  I  ordre.  La  reine  c           >                n            »      /                i> 

lilisaheth  lit  sous  son  régne  vingt-trois  che-  ^^^^^-)   »«  ^  *  '"''■'■-  An^^éliqie  a  Uom.:, 

valiers,  parmi  lesquels  ils  y  eut  trois  rois  de  '''  "^  Mo.\r-LU(.o. 

France,  deux  empereurs  el  un  roi  de  Dane-  La    congrégation   des  Ermites  de    Sainl- 

niark.  M.  Aslimole  a  fait  graver  l'ordre  de  la  Jean-lîap  isie  en  France  reconnaît  pourfon- 

tnaichc  d'une   procession   de  ces  chevaliers  dateur    le    lïcre    Michel    de   Sainte-Sabine, 

qui  se  fil  à   une  lélc  de  saint  Georges,  sous  qui  en  jeta   les  fondeuienls  vers    l'an  1630. 

le  règne   de  celte  princesse,  au  commence-  C'était  un  prêtre  d'une  grande  piété  el  d'une 

menl  da  dernier  siècle,  où  elle  est  rc|irésen-  vie  fort  austère  ,  à  ((ui  U.eu  avait  donné  un 

lec  avec  l'habilel  le  grand  collier  de  l'ordre,  zèle  tout  particulier   pour   la   vie  solitaire. 

I.  y  a  cinq  ofliciers  de  cet  ordre  ,  savoir  :  le  H  s'y   consacra  tout  entier  dès  son  bas  âge, 

1  relal  ,  le  chncelier,    le  grefiier,  le  héraut  cl   s'y   rendit    si   parfait,    que,    voyant    les 

appelé  .larretière  roi  d  armes  d'Angleterre,  grands  abus  qui  s'y   étaient  glissés  el  le  [leu 

et  l'liui>sier  appelé  de  la  Vrrgc  noire,  à  cause  de   rapport   qui  élail  entre  les  Frmites  des 

qu'il  en  lient  toujours  une  à  la  main.  Levé-  premiers   siècles  et    ceux  île  son    temps,  il 

i|ue  de  Wincesler  est   prélal-iié  de  l'ordre,  entreprit   de   les  réformer.    II   lit  pour  cela 

L'office   de  chancelier   lui    crée    par  le  roi  penùant  quinze  ou  seize  ans  plusieurs  voya- 

lidouard   IV   en  laveur  de  Uichard  de  Beau-  ges,  consulla  k-s  plus  habiles  maitrC'.  en  la 

champ,  évéque   de  Salisbury,  et  ce  prince  vie  ércmllique,  el,  après  avoir  surmonté  par 

ordonna    (jue    les  su  ccsscurs  de  ce  jirélal  sa  patience  tous  les  obstacles  qui  s  opposè- 

exeiceraienl  toujours  cet  office.    Cependant  re.il  à   l'exécution  de  son  dessein  ,  il  dressa 

il  n'y  en  cul  qnr  six  de  suite  qui  l'exercé-  des   statuts   [)Our   cette  rélorine  à  laquelle  il 

leni,  ayant  etc  donné  après  cela  à  d'aulrcs.  d.inna   le   non  de  Sainl-Jean-lta|)tiste.  Ces 

Les  evequcs  de  Salisbury  nrcnt  de  temps  en  statuts  contiennent  vingl-dcux  articles,  aux- 

temps   des   tenlatives   i)Our   rentrer  dans  la  quels    il  ajouta  des  annotations   également 

possession  de  cel  office  ,   mais   ce    fut  inuti-  doctes    cl  judicieuses,  qu'il    avait  Urées  des 

lement  :   cepemlani    Sethward  ,    évéïjue    de  conciles,  des  Pères  et  des  plussavantsautcurs, 

Salisbury,  fil  de  nou\ei;e5  poursuites  auprès  el  iU   furent   aiqirouvés  du  vivant  do  ce    ré- 

du  roi   Cliarles  11  el  oltiint  sa  demande.  Ces  formateur  par   l'évéque  de  Madaure,  Martin 

deux   ofticiers,  c'esl-à-dire   le  prélat  et   le  Mûrisse,    sulTragant    d'Henri  ite   Bourliou, 

chancelier,  ont   un  manteau   de    satin  hb  u  évé  lue  de  Metz,  l'an  IG'I.J,  cl  par  l'arehevè- 

douldé  de  taffetas  blanc, sur  le  côté  droit  du-  que  de  Cambrai,  François  de  Wandcrburch, 

quel  il  y  a  la  croix  de  l'ordre  .Milourec  d'une  l'an  lG3i,  (|iii  in  ordonnèrent  la  pratique  a 

jarretière;  cl  le  cbanrclicr  porte  ouire  cela  tous  les  Frm.les  des    d.oc>''>i\s  de  Cambrai  el 

sur   l'esloiiiac    une  médaille    d'or  entourée  de  Metz;   el   apiès  sa  murt  ils  furent  i  ncore 

d'une  jai  retiere  au  milieu  de  la(]iielle  il  y  a  approuvés    par    revèqne   du   l'uy   en   \'clay 

une  ruse.  Le  greffier,  le  héraut    el  l'huissier  Henri  de  Maiipea>  du  Tour,  l'an  1Cj3,  el  i)ar 

ont  aussi  ch  icun  i;n  manteau  de  même  que  plusieurs  docteurs, 

ceux  du  prélat  cl  du  chancelier,  ù  la  dilTe-  Ce  rélonnateur   les   obligea   cnlrc  autres 


817  JE.\ 

choses  de  s'assembler  loiiS  les  ans  cii  cha- 
que diocèse  pour  conférer  ensemble  des 
choses  qui  regardent  l'inslitul  et  procéder  à 
rélcclion  d'un  visiteur,  de  quatre  majeurs 
ci  d'un  secrétaire,  auxquels  il  appartient 
d'examiner  ceux  qui  se  présentent  pour  en- 
trer dans  la  congréiialion.  Ceux  qui  ont  élé 
examinés  et  trouvés  capables  doivent  rece- 
voir l'habil  de  l'évôiiue  diocésain  sous  la 
juridiction  duquel  sont  ces  ErmiUs,  ou  de 
celui  qu'il  ;iura  commis  ;  et  après  avoir  reçu 
l'habit  ils  doivent  être  sous  la  conduite  d'un 
maître  (jui  les  instruise  des  observances  de 
l'instilul.  L'ofûce  du  visiteur  est  de  faire 
les  \isiies  des  Ermites  ,  les  corriger,  leur 
donner  des  avis  salutaires ,  et  lui  seul  peut 
leur  donner  la  permission  de  faire  des  voya- 
{^cs  et  de  changer  de  demeure.  Les  majeurs 
sont  les  assesseurs  du  visiteur,  qui  lui  ser- 
vent de  conseillers  dans  toutes  les  affaires 
(jui  concernent  l'institut;  et  ce  qu'ils  ont  dé- 
terminé doit  être  inviolablement  observé, 
(les  visiteurs  et  majeurs  peuvent  aussi  chas- 
ser les  incorrigibles,  vagabonds  et  desobéis- 
sants. Si  quelqu'un  quitle  l'habit  de  l'institut 
ou  sort  du  diocèse  pour  aller  dans  un  autre 
cl  y  demeurer,  il  ne  peut  retourner  ni  être 
de  nouveau  reçu  dans  celui  d'où  il  est  sorti, 
sans  le  consentement  du  visiteur  et  des  ma- 
jeurs. Quand  ils  ont  atteint  la  quarante- 
cinquième  année  de  leur  âge,  et  qu'ils  ont 
demeuré  vingt-cinq  ans  dans  l'instiiut ,  ils 
doivent  faire  profession  entre  les  mains  des 
évoques  et  en  présence  des  visiteurs,  du 
secrélaire  et  de  deux  témoins,  en  ces  termes  : 
Je  N.  en  présence  de  toute  la  cour  céleste  et 
de.  vous,  Mesiieurs  ,  voue  et  promets  à  Dieu, 
à  lu  bienheureuse  Vierge,  à  suint  Jian-Bapti- 
ele  notre  patron  ,  il  tous  les  saints,  et  à  vous. 
Monseigneur,  perpétuelle  chasteté,  pauvreté, 
obéissance  et  stabilité  en  rinslitul  des  Ermi- 
tes, re.^tauré  sous  l'invocation  de  Saint-Jcun- 
Baptisle. 

L'habillement  que  le  F.  Michel  de  Sainte- 
Sabine  prescrivit  à  ces  ermites  consistait  en 
une  tunique,  une  cuculle  ou  chaperon  et  un 
manteau  de  couleur  tannée  avec  un  scapu- 
laire  noir  et  une  ceinture  de  cuir  (1). 

Le  F.  Jean-Jacques,  qui  prit  dans  la  suite 
le  nom  de  Jean-Baptiste,  et  dont  on  a  donné 
la  vie  au  public  en  1C99  sous  le  nom  d'un 
soliliiire  inconnu  mort  en  Anjou,  a  été  le 
propagateur  de  cette  réforme,  qu'il  embrassa 
l'an  1C32.  l'eu  après  qu'il  eut  pris  l'habit,  il 
se  retira  dans  leimitage  de  Saint-Bodille  au 
diocèse  de  Vienne  en  Daupliiné,  d'oii  il  fut 
tiré  pour  aller  établir  un  ermitage  dans  le 
diocèse  du  Puy;  où  ayant  demeuré  un  an,  il 
retourna  dans  celui  de  Saint-Bodille,  qu'il 
quitta  encore  vers  l'an  1633  pour  aller  à 
Annecy,  où  il  fut  appelé  par  l'évéque  de  Ge- 
nève, Charh  s-Augusie  de  Sales,  qui  le  char- 
gea du  soin  de  réformer  les  Ernutes  de  son 
diocèse.  Il  reçut  ensuite  counnission,  l'an 
1057,  des  archevêques  de  Lyon  et  de  Vienne, 
et  de  l'évéque  du  Puy,  puur  visiler  les  ermi- 
tages de  leurs  diocèses,  cl  dans  le   cours  de 


JE.V 


5!S 


ses  visites  il  donna  l'haliit  à  plusieurs  no- 
vices et  établit  de  nouveaux  ermitages.  Les 
Ermites  de  ces  trois  diocèses,  voyant  que  la 
régularité  commençait  à  fleurir  parmi  eux, 
furent  tentés  de  se  souslraire  à  la  juridul.ou 
de  ces  prélats;  mais  frère  Jean-l>a()lisle,  qui 
en  prévoyait  les  conséquences,  s'y  étant  op- 
posé inuliieiiieul,  se  démit  de  sa  chaige  de 
visiteur. 

il  fil  ensuite  un  voyage  en  Italie,  et  à  son 
retour  il  alla  en  Lorraine,  où,  après  avoir 
demeuré  quelque  temps,  il  bâtit  un  nouvel 
ermitage  à  Oisilly  dans  le  diocèse  de  Lan- 
gres.  Il  en  établit  encore  d'jiulrcs  en  Bour- 
gogne et  dans  le  même  diocèse,  et  fit  quitter 
a  ses  Ermites  leur  habit  tanné,  qu'il  changea 
en  un  bhinc,  pour  les  dislingner  de  cerlains 
ermites  vagabonds  qui,  vivant  d'une  manière 
scandaleuse,  faisaient  la  quêle  dans  les  vil- 
lages du  diocèse  de  Langres,  s  us  le  nom  et 
l'habit  des  Ermites  réformés  de  Saiiit-Jean- 
Baptiste,  qu'ils  savaient  être  en  grande 
estime  dans  le  monde.  11  fut  élu  visiteur  ou 
vicaire  général  de  tous  les  Ermites  du  dio- 
cèse de  Langres  l'an  1G73,  et  son  élection  lut 
confirmée  par  l'évéque  du  même  dioeèse 
Lnuis-Armand  de  Simiane  de  Gcrdcs,  qui 
l'obligea  d'accepter  cet  emploi,  dont  il  s'ac- 
quitta si  dignemeni,  qu'il  allait  tous  les  ans 
visiter  les  ermitages  de  sou  district,  qui 
étiiient  au  nombre  de  quatre-vingts.  Ce 
même  prélat  fit,  l'an  16S0,  des  règlements 
p.iur  tous  les  solitaires  de  son  diocèse,  qui 
sont  à  peu  près  les  mêmes  que  ceux  qui 
avaient  élé  dressés  par  le  P.  Michel  de 
Sainte-Sabine,  ordonnant  de  plus  qu'ils  au- 
raient un  visiteur  ou  vicaire  général  trien- 
nal, qui  aurait  la  direction  de  tous  les  Er- 
mites de  cet  institut,  et  qui  visiterait  tous  les 
ans  les  ermitages;  qu'il  y  aurait  encore 
quatre  visiteurs  particuliers  qui  auraient 
soin  de  veiller  sur  les  quatre  déiroits  ou 
cantons  du  diocèse,  savoir  le  Langrois,  Di- 
jonnais,  Tonnerrois  et  Chaumoiiois,  lesquels 
visiteurs  seraient  élus  par  les  Ermites  dans 
leurs  synodes  généraux,  qu'ils  liendraient 
tous  les  trois  ans,  et  que  le  visileur  géné- 
ral, conjointement  avec  le  visiteur  du  canton, 
nommerait  un  surveillant  dans  chaque  er- 
mitage, dont  il  aurait  la  conduite  et  le  gou- 
v<!rnement,  sans  avoir  égard  à  l'âge,  aux  an- 
nées de  réception,  ni  même  à  la  prêtrise, 
mais  seulement  à  la  prudence,  à  l'expérience 
et  à  la  bonne  conduite;  el  l'an  1687  le  même 
prélat  approuva  le  ch.mgement  d'habit  qui 
avait  été  fait,  de  tanné  en  blanc. 

Dès  l'an  1676,  le  frère  Jean-Bapliste  avait 
quitté  le  diocèse  de  Langres  pour  deux  rai- 
sons :  la  première  fut  le  bruit  qui  se  répan- 
dit qu'il  était  le  comte  de  .Morel,  fils  naturel 
d'Henry  IV,  roi  de  France,  que  l'on  avait 
cru  tué  à  la  t)aiaille  de  Castelnaudary  ;  ce 
qui  était  appuyé  sur  ce  qu'il  ressemblait 
parf  litemeut  à  Henri  IV  et  sur  ce  qu'il  avait 
avoué  qu'il  s'était  trouvé  à  la  bataille  de 
Castelnaudary,  et  qu'il  avait  été  élevé  dès  sa 
jeunesse  au  château  de  Pau,  en  Béarn;  lu 


(1)  Vcy.,  à  la  lUi  du  vol.,  n°  i;9. 


t.\'J 

seconde  raison  furent  lo>  (iiiorrcs  du  (•«ni^ 
de  r.oiir(;o;:iu\  qui,  Iroiili'aiil  l;i  lr>;ii(juillil.! 
di-  sa  suliludi',  ri)lilii;èrriit  de  se  retirer  en 
Anjou,  où  il  biUil  i'erinii.if:»'  ''i-'  (lar.lelles, 
pruclie  l'alibave  d'Aiiières,  oîi  il  donna  en 
peu  de  lein;  s  Vliab  I  à  sis  l'.Qiiees.  Son  à^e 
el  ses  inlirinités  ne  lui  perniellanl  plus  d'as- 
sister à  t'ius  les  exenires  de  sa  coiuinu- 
nanté,  il  se  démit  de  sa  eli.uije  de  supérieur, 
el  pria  l'evèque  d'Angers  d'en  mettre  un  au- 
tre .  n  sa  place.  Enfin,  au  coniuiencemenl  de 
l'aient  de  l'année  lO'JI,  éiant  allé  avec  ses 
novices  à  la  paroisse,  il  en  rev  ni  avec  une 
nusion  sur  la  poitrine.  Averti  par  celle  ma- 
ladie de  se  préparer  à  la  mort,  il  rcrut  les 
sacrenicnts  avec  de  ç;rands  sentiments  de 
pielc,  cl  U-  24  décembre,  veille  de  II  fêle  do 
Noél,  il  rendit  son  âne  à  Dieu  avec  une 
grande  Iranciuilliié  d'esprit  et  une  pnrf.itc 
soumission  à  la  volonté  de  Dieu.  Ai)rès  sa 
mort,  cet  ermitage  des  Ciardcllcs  fui  presque 
abandonne,  jusqu'en  1()'J3 ,  que  l'évéque 
d'Angers  y  lil  venir  deux  saints  solitaires  de 
Hourgogne,  auxquels  Dieu  envoya,  en  16'JS, 
un  truisiènie  comiiagnon  natif  de  Sens.  Les 
limites  qui  demeurent  en  ce  lieu  mènent 
une  vie  Irès-édilianle  el  très-austère. 

Gran  Ici,  Vie  d'un  solitaire  inconnu  mort 
tn  AnjiiH. 

A  cci  lirmiles  de  la  eongrégnlion  de  Saint- 
Jenn-ltaptiste,  en  France,  nous  enjoindrons 
quelques-uns  qui  sont  aussi  en  grande  estime 
en  Italie.  Les  premiers  sonl  ceux  qui  de- 
meurent à  Uome  à  l.i  |)orle  Antrcliquc  (1).  Ils 
oni  l'U  pcuir  foiidatiur  un  ceiiain    Albenze, 
Cal.ibrois,    qui,   uyanl    servi    longtemps   de 
qnéliur  au  inon:isière  de  Sainle-Citherinc 
de  la  Itosc  ou  des  (^ordicrs,  et  à  l'arcbicon- 
fra'icrnilé  des  Courtisans,  et  ne  croyant  pas 
faire  son  salul  dans  cet  étal,  se  rc  ira,  vers 
l'an  1588,  dans  ce  lieu,  proche  la  Porte  An- 
géli(iue  à  Home,  où,  avec  les  aumùnes   qu  il 
rciut  de  plusieurs  personnes  cliaritabics,   il 
jeta  les  loiidemcnts  d'un  hôpital  jioury  loger 
les  Lrmites  (|ui  »enaieiil  à  Kome  x  isiler  les 
tombeaux  des  saints  apôtres,  et  y  faire  trai- 
ter ceux  qui  tombaient   maladi's.   Il    cul  en 
jieu  de  temps   plusieurs  compagnons  qui  se 
joigiiireiila  lui,  cl  i\u\  \ivaicnlees  aumônes 
qu'ils  allaient  clierclier  par  la  \ill'',  en  criant 
tout  haut:  l-'i.ilcs  du   bien  piés'nlcmnil   que 
tous  (H  uiez  le  temps,  ils  étaient  vélos  d'une 
toile  blancbc,   n  avaient  rien   pour    rouvrir 
leur  tétc  el  marchaient   les  pieds  nus    sans 
sandales.  Leur  vie  était  si   cxem|dair('.  (;ue 
plusieurs  personnes,  touchées   de  l'esprit  de 
Duii,  ayant  embrassé  leur  institut,   accru- 
rent leur  communauté,  qui  devint  lorl  con- 
sidc'rable.  Ils  bàiirenl  dans  la  suite  une  pe- 
tite église   sou-    le    tilre    de   l'Ascension   de 
Notrc-Seigneur,  où  ils  faisaient  célébrer  tous 
les  ji'urs  un  grand  nombre  de  messes;  mais, 
en  lois,  une  iiii.ige  di-  la  saiiilc  Vierge  que 
le  fundaleur  de  ces  Lrmites   avait  apportée 
de  la  terre  sainte  et    i|u'il  avait   mise  dans 
leur  ebai'clle,  ayant  c  'Uimencé  à  faire  des 
miracles,  y  attira  un  si  grand  concours  de 


Dlf-TIONNAIRE  DES  OIIDRES  UEI.ICinUX.  bîO 

pcnpli',  que,  par  le  moyiMi  des  grandes  au- 
mùnes  qu'on  leur  Ht,  ils  riienl  li.ltir  une 
belle  église  el  augmenièrent  considérable- 
ment les  bâtiments  di!  leur  maison  et  do 
l'hôpital,  où  ils  vivent  sous  la  prutcctiuii 
d'un  cardinal  qu'ils  élisent. 

Celle  maison  a  servi  de  retraite  aux  nou- 
veaux convertis  à  la  f  d,  jus(|u'à  ce  (|u°ayant 
été  transférés  en  un  autre  lieu  sous  le  poii- 
tilicat  de  Clément  X,  on  laissa  aux  Hrinites 
leur  maison  libre.  Ils  soi  l  pré^cnlemcnl  ha- 
b.llés  de  drap  blanc  sans  capuce,  ayani  pour 
coiiviir  leur  léle  un  eliapeiu  blanc.  Le  r 
robe  est  ceinte  d'une  ceinture  do  cuir  sans 
seapulaire  ,  el  ils  vont  nu-pi  ds  avec  des 
sandales  de  cuir. 

l'roche  la  ville  de  Spidetti"  en  Ombri?,  il 
y  a  une  congrégation  d'Krmites  sur  le  monl 
Luco,  qui  prétendent  faire  remonter  leur 
origine  jusqu'au  commencement  du  iv'  siè- 
cle, el  avoir  été  établis  par  saint  Jean  d'.\n- 
tioclie,  évoque  deSpolelle,  qui  fut  martyrise 
sous  l'empire  de  Maxiraicn.  Ces  Ermites 
vivent  dans  des  cellules  séparées  les  unes  des 
autres,  coinnic  celles  des  Camaldules.  Ils 
font  un  au  de  noviciat,  après  lequel  ils  sont 
reçus  dans  la  congrégation,  sans  néanmoins 
faire  de  vu'ux.  Us  font  leurs  exercices  spiri- 
tuels en  commun,  après  le-quels  chacun 
travaille  en  sou  pariiculier  selon  son  lalcnl. 
Ils  peuvent  posséder  des  fonds  el  des  reve- 
nus, et  sonl  libres  de  sortir  de  la  congréga- 
tion quand  bon  leur  semble.  Ils  élisent  tous 
les  ans  un  supérieur.  Leur  habit  est  presque 
semblable  à  celui  des  Minimes,  el  la  plupart 
portent  des  sandales. 

Pnilij)p.  Boiianni ,  Catalog.  Ord.  relig. 
pari.  m. 

JEAN-HAPTISTE  DE  COVENTKY  as  X\- 

ULETEUBE      (CUANOINES       UOSPITALI.  KS       DB 

Saint-),  el  de  (jUitijues  autres   Ito^pitalicn 
duns  ce  roijaume. 

Les  religieux  Porte-Croix  des  P.iys-Iî.is  el 
de  France  ne  reconnaissant  point  ceux  d'Ir- 
lande pour  avoir  été  de  leur  ordre  ,  ce  qui  a 
fait  que  M.  Alleman  les  a  attribués  à  ceux 
d'îtalic;  mais, comme  la  plupart  des  maisons 
que  les  religieux  Porie  -  Croix  d'Irlande 
avaient  étaient  aussi  des  hôpitaux  dédiés 
à  saint  Jean-Hapiiste,  je  crois  qu'ils  pour- 
raient avoir  été  semblables  aux  chanoines 
hospitaliers  de  Saint-Jeaii-Haptisle  de  Coven- 
try,  en  Angleterre,  dont  Dodsworlh  el  Dug- 
dale  ont  fait  mention  dans  leur  Histoire  mo- 
nastique d'Angleterre,  et  que  la  crois  noire 
«lu'ils  portent  sur  leurs  robes  el  leurs  man- 
teaux leur  a  fait  pcut-élre  donner  le  nom  de 
Porle-Croix. 

(Juoi  (|u'il  en  soit,  Dodsworth  et  Diigdale 
nous  ont  dMiiné  rhabillement  d'un  de  ces 
chanoines  hospitaliers  deSainl-Jean-ltaptiste 
de  Coveniry,  tel(|uc  nous  le  donnons  aussi  (•2). 
Us  n'ont  point  mar(]ue  le  temps  de  leur  éta- 
blissement ;  in,'iis  cet  hôpital  était  desservi 
par  des  religieux  et  des  religieuses,  cl  avail 
été  fondé  par  le  p>ieur  el  les  moines  de  la  ca- 


(I)  yoy.,  3  la  lin  du  vol.,  n''  IjIJ. 


(2)    l'dj/.,  à  1.1  fin  du  vol.,  11*  IjI. 


£21  JEA 

tlièJrale    de    Covs!  Iry    de  l'ordre  de  Sainl- 
Jtenoît,  qui  y    tenaient   lieu    de    chanoines 
comme  dans  plusieurs  autres  cathédrales  des 
royaumes  d'Angleterre,  d'Ecosscel  d'irlandc. 
il  y  a  une  bulle  d'Honorius  III  de  l'an  llH 
adressée  au  recteur  et  aux  frères  de  cet  hô- 
|iilal,  par  laquelle  ce  pape  les  reçoit  sous  sa 
protection,  leur  accorde  des  privilèges  et  con- 
iiruie  toutes    les  donations  qui  leur  avaient 
été  fuites.  Une  semblable  protection  leur  fut 
aussi  accordée  par  le  roi  Henri  III;  mais    il 
y  a  bien  de  rapparenee  que  celte  bulle  causa 
un  procès  entre    les   moines  de  Coveniry  et 
les  hospitaliers,  qui  dura  piès  de  deux  cents 
ans,  puisque  ce  ne  fut  que  le  29  tnars  d<'  l'an 
142Ï  (lu'il  fui  termii'.é  par  des  arbi'res  qu'ils 
avaient  clioi^is,  et  qui  ordonnèrent  que  celte 
bulle  d'Huuorius  111  n'aurait  aucun   elTet  et 
serai!  de  nulle  valeur,  à  cause  des  divisioiis 
qu'elle  avait  causée-i  ;  que  le  prieur  et  le  eha- 
pitic  de  Coveniry  étaient   les    véritables  fon- 
dateurs de  cet  hôpital,  et  seraient  reconnus 
à  l'avenir    pour    t.ds;    que  pour  ce  sujet  le 
uiaiire  ou   recteur,   siiot  qu'il  serait   élu  et 
installé,  leur  prêterait  obéissance  el  Gdélité, 
2t  leur  payerait  les  dî.nes  des  champs  seule- 
ment, et  non  de  leurs  jardins  et  des  animaux, 
dont    ils  étaient  exempts  coainie  religieux  ; 
i|ue  le  prieur  accoiii[)agné  de  huil  personnes 
xisi  erail  tous  les  ans.  s'il  le  trouvait  à  pro- 
pos, le   reeleur,  les    frères  et    les    su'urs  de 
l'hôpital,  qui  seraient  tenus  de  faire  piofes- 
sion  entre  ses  m  lins,  selon  la  formule  énon- 
cée par  cet  acte,  qui    conlieni  plusieurs  rè- 
gle .  enls    el  statuts   pour  ces   hospitaliers, 
comme  aussi  la  manière  dont  ils  doivent  être 
habillés   :    savoir,  tant   les  frères    que  les 
sœurs,  d'une  robe,  d'un  scapulairc  juir-dcs- 
sous   la  robe,  el  d'un    manteau  de  couleur 
biuiie,  sur   lesquels  devait  cire  allaehoc  une 
croix  noire.  Les  religieuses  avaient  an  voile 
blanc.  Apparemment  qu'elles  assistaient  au 
chapitre  avec  les  fières,  puisqu'il  y  est  aussi 
marqué  que  le  maître   ou   recteur  tiendrait 
tous  les  vendredis  le  chapitre,  pour  punir  les 
fautes   des   frères   et   des  sœurs,  qui  se  de- 
vaient aussi   trouver  aux  processions  géné- 
rales et  aux  enterrements  des  prieurs  et  des 
moines  de  la  lailiédrale. 

Il  y  avait  grand  noaibrc  de  ces  sortes 
d'hospitaliers  en  Angleterre;  cl,  quoique 
Dodsworlh  et  Dugdale  les  aient  rais  au  nom- 
bre de  ceux  qui  suivaient  la  règle  de  saint 
Augustin,  il  parait  néanmoins  qu'ils  avaient 
des  règles  particulières,  et  qu'ils  dépendaient 
des  évcques  des  lieux  où  leurs  hôpitaux 
étaient  situés,  comme  on  peut  voir  dans  les 
règlements  de  quelques-uns  de  ces  hôpitaux, 
qui  sont  rapportés  par  ces  auteurs,  et  qui 
font  assez  connailre  que  ces  hospitaliers 
étaient  véritablement  religieux;  car  les  frè- 
res et  les  sa'urs  de  l'hôpital  de  Saint-Léonard 
d'York,  s'ils  avaient  commis  ijuclque  péché 
contre  la  chasteté  et  la  pauvreté,  ne  pouvaient 
être  absous  que  par  le  m  lître  de  l'hôpital,  si 
ee  n'était  à  l'article  de  la  mort  ;  auquel  cas 
ils  pouvaient  recevoir  l'absolution  de  quel- 
que |>rètre  que  ce  fût;  mais, s'ils  retournaient 
un  sanlé,  ils  devaient  se  [ircsentcr  au  maître 

DlCTIU.NNAlKE  D£S  Of.DIlES  rtELIGIKUX .  Il, 


pour  la  recevoir,  et  si  qutilqn'un  d'eux  nmu- 
rat  propriitaire,  il  était  privé  de  sépulture. 
Vautier  de  Grey  ,  archevêque  d'York  , 
dressa  aus<i  une  règle,  l'an  12'^l,  pour  les 
frères  et  les  sœurs  de  l'hôpital  de  Sain!-Jean- 
Baptiste  de  Dotingham,  adressée  à  AIwin,  qui 
en  était  maître  ou  recteur.  Il  ordonna  entre 
autres  choses  que  la  propriété  serait  bannie 
entre  eux,  et  que  si,  sept  jours  après  la  pu- 
blication de  son  ordonnincc,  il  se  tiouvalt 
quelqu'un  qui  fût  propriétaire,  il  serait  ex- 
communié, el  mourant  en  cet  état,  qu'on  ne 
lui  donnerait  pas  la  sépulture  en  terre  sainte. 
Les  frères  et  les  sœurs  de  cet  hôpital 
avaient  des  tuni  jues  grises  tirant  sur  le 
roux,  avec  des  manteaux  noirs,  ne  man- 
gcaieutdela  viande  que  trois  fois  la  semaine, 
gard.iient  un  étroit  silence  au  réfectoire,  s'as- 
semblaient toutes  les  semaines  au  chapitre 
pour  s'accuser  de  leurs  fautes  et  en  recevoir 
la  correction  ;  ils  y  devaient  lire  une  fois  le 
mois  le  règlement  de  cet  archcvê(iue  en  lan- 
gue anglaise  ou  française,  et  les  frères 
laïques  el  les  sœurs  récitaient  un  certain 
nombre  de  Pater,  pour  chaque  heure  de  leur 
office. 

lly  avaitcn  Angleterre  plusieurs  hôpitaux 
destinés  pourles  lépreux,  et  qui  s'engageaient 
par  vœu  à  la  pauvreté,  à  l'obéissance  et  à  la 
chasteté.  L'on  trouve  à  la  fin  des  œuvres  de 
Mattliieu  l'àris  les  statuts  de  l'hôpital  de 
Saint-Julien,  où  il  est  dit  que  les  frères 
qu'on  recevra  dans  cl  hôpital  ne  seront 
point  mariés,  et  que,  s'il  s'en  présente  quel- 
qu'un qui  le  sot,  il  fera  vœu  solennel  de 
chasteté  entre  les  mains  de  l'archidiacre  de 
l'abbaye  de  Saint-Alban,  dont  cet  hôpital  dé- 
pendait ;  que,  si,  après  sa  réci  ption  et  après 
avoir  fait  ce  vœu,  il  le  transgresse,  il  sera 
chassé  de  l'hôpital,  selon  l'ancienne  pratique 
de  celte  maison,  et  renvoyé  à  sa  femme,  si  elle 
est  encore  en  vie,  comme  étant  pour  lors  li- 
bres tous  les  deux  ;  el  que  si  elle  est  morte,  il 
sera  puni  sévèrement. 

Ils  ne  s'engageaient  pas  à  une  pauvreté 
fort  exacte,  car,  par  un  des  articles  des  mê- 
mes statuts,  il  est  dit  que,  comme  ce  qu'on 
leur  donnait  dans  l'hôpital  ne  suffisait  pas 
pour  leur  entretien,  il  leur  était  permis  d  a- 
voir  des  effets  mobiliers  qui  se  pouvaient 
acquérir  honnêtement,  à  condition  que,  ve- 
nant à  mourir  ou  à  sortir,  les  biens  appar- 
tiendraient à  l'hôpital  pour  être  distribués  en 
commun.  Ils  pouvaient  néanmoins  disposer 
par  testament  de  la  troisième  pai  tiède  ces 
effets,  pourvu  que  ce  fût  avec  la  permission 
du  maître  ou  recteur,  autrement  le  testa- 
ment était  nul. 

On  éprouvait  pendant  un  temps  celui  qui 
devait  faire  profession,  et,  s'il  avait  fait  pa- 
raître une  conduite  réglée  et  qu'il  eût  été  di 
bon   exemple,  on    le  recevait  en  chapitre 
après   quoi    il    faisait    profession    entre   le 
mains  de   l'archidiacre  de  Saint-Al  .an.  Fa- 
cette profession    il  proiuettait  et  jurait  su 
les  saints  Evangiles  d'obéir  en  toutes  cliosei, 
pendant  tout  le  temps  de  sa  vie,  à  l'abbé  de 
Saint-Alban,  pourvu  qu'il  ne  lui  commandât 
rieu  contre  U  loi  de  Dieu;  de  ne  comuicllr» 

17 


t.?ô                                        DICTIO.NN.vmE  DES  ORDRES  [lELIGlEUX.  -                 ^îi 

(loiiil  Je  vol,  lie  no  Imllrc  point  aucun  frère,  (Chartres  suivil  hieiiliMson  exemple  il  s'iiniià 
île  ne  l'oinl  violer  le  vu-u  ilc  cli.islel«',  de  ne  elle,  nj.int  elé  la  première  à  euilirasscr  la 
point  s'approprier  cl  do  ne  laisser  par  tes-  réforme  par  les  soins  de  Lconorc  dKlamprs, 
iani<iil  que  drs  clinses  dont  les  frères  pou-  évèque  de  Chartres,  qui  y  fit  venir  des  nli' 
vaimt  disposer,  d'eviler  toute  sorte  d'usure,  gieux  de  Sainl-\iiuenl,  l'an  ItiîiV.  Ce  mo- 
de ne  proeuriT  par  aucune  »oie  qu'aucun  naslère  de  Sainl-Jean  eut  pour  fundaieur  le 
iTiitrc  que  celui  qui  aurait  clé  nommé  |  ar  bienheureux  Yves,  prevôl  de  Sanl-thiciilin 
l'allié  de  Sainl-Alban  fut  mailie  ou  recleur  de  Iie,:uvais,  qui,  ay.int  été  eu  évéïiuc  i!e 
de  riiôpilal  ;  de  se  contenter  de  ce  (|iie  ce  Chartres,  lit  venir  en  ^a  ville  épiseopah-  des 
niaîlic  lui  donnerait,  sans  mu;  murer,  et  de  chanoines  île  son  njonasière  de  Sainl-tjuen- 
iic  point  sorilr  des  bornes  qui  éiaient  près-  tin,  l'an  1097,  qu'il  tlabht  en  ré;;lise  do 
crites.  Que,  s'il  transgressait  aucune  de  ces  Saint-Jean  en  \allée.  Il  leur  donna  des  re- 
chos';s,  il  consentait  qu'on  le  punit  sévère-  venus  considérables  [tour  leur  subsistance, 
m  n.  .ielon  la  qualité  ou  la  prandeur  du  entre  autres  le  pr  curé  de  Saint-!]ticnne,  qui 
crime,  cl  même  qu'on  le  chass;"'l  de  la  cou-  était  dans  l'enceinte  de  la  ville,  et  les  anna- 
grégalion  coninic  apostat,  sans  aucune  espi'-  tes  des  prébendes  des  chanuines  qui  vien- 
rance  de  retour,  à  moins  que  ce  ni:  l'ûl  par  draienl  à  décéder,  qui  est  un  droit  dont  les 
une  grâce  spéciale  de  l'abbe.  chanoines  réguliers  (selon  le  l'.Du  Moulinet) 
'^eur  habillement  cons  .«lait  en  une  robe  jouissent  enpiusieurscalliédralcs  de  France. 
et  capuce  de  couleur  tannée,  et  lorscju'ils  Celte  abbaye  ayant  été  ruinée  l'an  15(12  par 
allaient  au  chœur  ou  parla  ville,  ils  avaient  les  1  érétiiiues,  elle  fut  depuis  transportée  au 
une  ch.:pe  en  forme  de  manteau  et  un  ca-  prieuré  de  Saint-Kiienne  dans  l'enceinte  do 
puc"  d;'  tlrap  noir.  Leurs  robes  et  capuces  la  ville,  où  eTe  a  élé  rebâtie  i)ar  les  cliaiioi- 
pouvaicnl  être  fourrés  de  peau  d'agneau,  nés  réguliers  de  la  Congrégation  di;  France, 
L'habillement  des  prélres  était  noir  et  sem-  lorsqu'ils  y  furent  établ.s.  L'habillement  de 
blalile,  quant  à  la  forme,  à  celui  (les  lépreux,  ces  thanoines  consistait  en  une  soutane  de 
Cet  h(j|iital  de  Saint-Julien  fut  fondé  vers  serge  blancheavee  un  rocbet  et  un  cbapi  ron 
l'an  ll'iO,  sons  le  règne  d'Henri  1",  par  noir  sur  l'épaulcau  lieud'aumusse(l),ce  qui 
Gcoffroi,  seizième  ubbe  de  Sainl-Alban,  qui  leur  était  commun  avec  les  chanoines  régu- 
élait  Français  et  avait  pris  naissance  dans  le  liers  de  Sainl-Acheul  d'Amiens,  de  Sainte- 
|)ays  du  Jlaine  ;  et  les  statuts  cl  règlements  Barbe  en  Auge  et  quelques  autres  qui  ont 
dont  nous  venons  de  p  irler  avaient  été  dres-  été  aussi  unis  danj  Id  suile  à  la  Congréga- 
sés  par  l'abbé  .Miehel  l'an  13'iV.  tien  de  France. 

Dodsuorth   cl    Dugdalc  ont  aussi   inséré,  L'abbaye  de  Saint-Denis   de  Ilcims,  à  la 
fl.'.ns  li'ur  Histoire  monastique  d'Angleterre,  réquisition  d'Henri  de  Maupas,   évèque   do 
les  règ'ements  de  l'hôpital  des  lépreux  d  hl-  Lavaur,  qui  en  était  albé,  reçut  aussi  la  ré- 
leford  dans  le  comlé    d'Fsscx,  qui  avait  au-  forme  et  lut  unie  à  la  même  congrégation  lo 
irelois  clé  fondé  par  l'abbi  sse  cl  les  religieu-  13  août  U'ùVA.  Celte  abbaye  avait  été  fondée 
ses  (In  monastère  de  lierkyng.Ces  règlemenls  par  le  gr.iml  lliiicmar,  archevêque  de  Keuns, 
lurent   dressés  l'an   l.'iVli    par    Uadulphe  de  sous  le  règne  de  Charles  le  Chauve  ;  mais  ce 
liabloli,  évèque  dcLondres,  du  consentement  monastère,  (]ui  était   hors   l'enceinie  de  la 
de  Malhildede  Montaigu,  pour    lors  abbesse  ville,  ayant  été  ruine  par  les  gu  'rres.  Cer- 
cle rcrkyng,  cl  on  y    lemarque  que  ces  lé-  vaise,  (jui  élait  arihe>éque  en    101)7,  voulut 
preux  p.omeliaient  et  juraient  sur  les  saints  le  rétablir  en   sa  première  splendeur,  et  lo 
lOvangiles   i!e  garder  la  rlristelé,  di!  n'a\oir  transférer  dans  la  ville,  où  il  y  mil  des  cli.i- 
rien  en  profire,  et  d'obéir  à  l'abbesse  du  nio-  noines   réguliers  sons  la   règ'e  de  saint  Au- 
nastère  de  l>(M  Ivjng.  pusiin,  qui  ont  retenu    les   derniers  l'ancien 
(domine  il  }  a\ait  d'antres  lir)pitaux  de  ces  habit  des  chanoines,  savoir  le  gr.ind  surplis 
lépreux,  sous   c  litre  de  Sainte-Marie-Mad,-  descendant  jusqu'à  terre,  etlhi^er  la  chape 
leine  et  de  Saint- Lazaie,  c'est  ce  (pii  a  peut-  par-dessus  sans  aucune  ouverture  pour  pas- 
';trc  donné  lieu  à  .\ilrien  Damnan  et  à  quel-  scr  les   mains  (i),  ce  (jui  était  incommode  ; 
qucs  autresd'avuir  supioséun  ortirede  sainte  aus>i  les  anciens  (|ui   s'en   ^ervaienl  oni-ils 
Madeleine  cl  de  saint  Lazare.  quitté  ces  habits  pour  se  conformer  auxcha- 
Voyez     Itoger     Dodsvvorlb,    it    Cuillelm.  noines  de   la   (Aingrégalion  de  Fiance  lors- 
Dngdale,    Mnnuslicon    AtKjlic mnin.  Imii.  II.  qu'ils  fnrenl  introduits  ilaus  cel'c  abbaye. 
JFAN-HAI'Il.SIK  Dli  LA  l'/iNlTLNCK  ^Fn-  l/an  lO.îli,  le  parlement  de  Kouen  ob.igea 
MiiKS  i)K  Saint-).   Voy.  (îonzacle.  les  <liani  incs  réguliers  du  prieure  de  Saiiit- 
JKAN  UF  lîICLAlU'^  loi/.  CÉSAiim  {Sain!-].  Lô  di-  Houen  d'embrasser  aussi   la  rérorme 
miv  i.i-n«i  lo  ini-..-  /,-                      -  ^'^  ''1  l^iiigrégxiion  de  France;  et,  ajant  l'ail 
JEAN  DL  CIlAlt  I  \  h>  (CuANoiMS  u.çr.i  i.n.i.s  ,,,„,  ^  ,,^,  ,,,t,i  ,|es  religieux  de  l'ans,  il  les 
m:  S  VINT-),  I.KS  Diu  X  Am.nis,  nii  Sum-Lo  „„t  ^.„  ,,„ssession   de   et"  prieuré,  qui   avait 
«K  UoiiiN,  1.T   i.K  SAiNT-MAim.M    lFc..»-  éic  autrefois  bâti  par  saint  Mellon,  arclic^è- 
^xy   prcevicuent  unis  à  la  (.ongre<juUou  ,,^.  ^,„^  ,,,|,,^   ,„„,   ,'i„v„caIion   de    la 
tlehumeoudeSninU-Grvciicvc.  ,.,i,„^.   T,i„i,,..    Mais,    les  Normands  s'elant 
Après  que  la  reforme  eut  étéintroduitedans  établis  dans  laNeu'.lrie,  a  laquelle  ils  don- 
l'abbaje  de  Sainl-^'in(•cnl  de  Senlis  par  les  nèrenl  leur  nom,   laisant  de  grands   ravajies 
(uins  du  It.  1*.  Faure,  celle  de   Sainl-Jeaii  de  dans  cette  i)rovinci',    principalement  dans  la 

(1}  Voy.,  à  1.1  fin  du  vol.,  ii"  »>i.  (1)  Vuy.,  ii  la  fin  du  vnl.,  ii"  lôr>. 


52".  JE  A 

haiso  Normandie,  !i's  reliques  de  saint  Lô  cl 
de  saint  Uoniphard,  évê(iue  de  Contanrcs, 
furent  apporléfs  à  Uoucn  et  déposées  dans 
colle  église  de  la  Trini  é,  qui  depuis  ce  temps 
a  retenu  le  nom  de  Sainl-Lô.  Rollo.  duc  des 
Normands,  s'clant  (ail  chrétien,  accorda  en 
leur  cons  déralion  l'église  où  ces  saints  re- 
posaient, à  Thierry,  évêquede  Goulances,  et 
à  ses  chanoines  pour  leur  servir  de  calhé- 
dialc  et  y  faire  le  service  divin  jusqu'à  ce 
(ju'ils  fussent  rétablis  dans  leur  propre  ville. 
Quatre  évéques  de  Goulances  conséculi's  y 
tinrent  leur  siège  pendant  plus  de  cent  vingt 
ans, et  ils  y  laissèrent,  en  se  rclirant  en  hasse 
Normandie,  un  collège  de  chanoines,  les- 
quels, étant  tombés  dans  le  dérèglement,  fu- 
rent remplacés  par  des  chanoines  réguliers 
qu'Algare,  évé(iue  de  Goulances  fit  venir  do 
Sainte- Barlic  en  Auge  en  11V4;  qui,  ayant 
aussi  ah.'in  lonné  la  vie  régulière,  furent  unis 
à  la  Gongrégalion  de  l'raiice,  l'an  1G39, 
comme  nous  avons  dit  ci- dessus.  Ils  étaient 
en  possession  de  porter,  l'hiver  à  l'église,  la 
cliapc  violette,  elen  été  l'aumusse  d'étoffe  de 
même  couleur  doublée  et  bordée  de  fourrure 
blanche  (1). 

Lo  prieuré  des  Deux  Amants,  au  même 
diocèse  de  Kouen,  embrassa  aussi  la  môme 
rcibrme  le  24  mai  1G48.  11  y  a  eu  plusieurs 
opin  ons  touchant  l'orig  ne  de  ce  nom.  La 
Iradilion  du  pays  est  qu'un  jeune  gentil- 
homme ayant  recherché  en  mariage  une  de- 
moiselle dos  (iivirons  de  ce  lieu, ses  parents 
ne  crurent  pas  ce  pnrli  avant.igeux  pour  elle 
et  refusèrent  sou  alliance.  Go  gentilhomme 
ne  se  rebuta  point  de  ce  refus,  au  contraire 
il  icdouhla  ses  poursuiles  jusqu'à  se  rendre 
importun,  desoile  que  le  père  de  la  (ille, 
croyant  se  défaire  de  lui  en  lui  demandant 
quelque  chose  d'impossible,  lui  promit  sa 
lille  s'il  la  p  uva  l  porter  jusqu'.iu  haut  de 
ia  monlagnc  où  l.-  monastère  est  présenlc- 
nient  siiué,  laquelle  csl  fort  roide  et  do  diiTi- 
ciic  accès.  Il  accepta  la  condition  et  la  porta 
hcurcusemenl  jusqu'au  Iiaui  de  celle  mon- 
tagne, mais  si  las  1 1  si  épuisé,  qu'il  expira 
siir-le-chanip.  Gel  aci  ident  toucha  si  sensi- 
!  lemcnl  la  fi  le,  qu'elle  mourut  aussi  de  de- 
plaisir,  de  sorte  que  les  parenis  de  l'un  et  de 
l'autre  les  tirent  inhumer  ensemble  au  même 
lieu  ,  qui  a  gardé  depuis  le  nom  des  Deut 
Amants. 

Gomme  celle  hisloire  approche  du  roman, 
c'csl  pour  cela  que  d'autres  ont  cru  que  ce 
nom  avait  cié  donné  à  ce  monastère  en  cou- 
sidéraiion  d'un  mari  et  d'une  femme  d'Au- 
vergne dont  parle  Grégoire  de  Tours  au  li- 
vre xxxii  De  (ïloria  Con/essorum.  Lesquels 
ajanl  gardé  loute  leur  vie  la  virginité  dans  le 
mai  iage,etayanl  élc<nterrés  aprèslcurmort 
l'un  après  l'autre  dans  deux  sépulcres  dilïe- 
reulsdf  pierre,  on  trouva  le  lendemain  qu'ils 
éiiiicnt  si  bien  joinlsenscmblr', qu'il  n'en  pa- 
raissait qu'un  :  c'est  pourquoi  ils  furent  hono- 
rés dans  loul  le  pays  sous  le  nom  des  Deux 
Amans. Mais  il  y  en  a  d'autres  qui  ont  estimé 
qu'il    ne   fallail  point   chercher  d'autre  ori- 

(I)  Voij.,  i\  la  fin  du  vol.,  n*  l.ïi. 

(.;)  Voi)  ,  ù  la  lin  du  vol.,  n'  1.">5. 


.ÏF.S 


.'M 


gine  que  l'amour  saiai  et  réciproque  de  N'o^ 
Ire-Seigneur  envers  la  .Madeleine,  qui  egl  la 
patronne  de  cette  église.  Les  chanoines  ré- 
guliers de  ce  lieu  avant  la  réforme  portaient 
l'aumusse  sur  la  tête  et  avaient  un  rochet 
par-dessus  leur  robe  (-2). 

L'abbaye  de  Saint-Marliu  d'Epermy  en 
Ghampagne  fui  du  nombre  de  celles  qui, 
étant  tombées  dans  le  relâchement,  voulu- 
rent embrasser  la  vie  régulière  en  s'unis-ianl 
à  la  Gongrégation  de  France  ou  de  S.iiiste- 
Geneviève.  Llle  avait  été  fondée  dès  le  com- 
niencemenl  du  xii'  siècle  par  les  comtes  de 
Ghampagne,  et  fut  toujours  desseri  ie  par  des 
chanoines  séculiers  jusqu'en  l'an  ll'^8,  que 
Gallerand  ou  ValleranI,  quatrième  alibé, 
ayant  été  louché  par  les  prédications  de 
saint  Bernard,  réolut  de  quitter  le  monde 
pour  se  faire  religieux  à  Clairvaux  ;  mais 
avant  d'exécuier  son  dessein,  il  fit  venir,  par 
le  conseil  de  ce  saint,  cl  du  consenteniint  do 
Thibaut,  comte  de  Ghampagne,  des  chanoi- 
nes réguliers  a  Sainl-Marlin  d'Lp.  rnay. 
Foulques,  religieux  de  Saint-Léon  de  Tmij, 
fut  élu  abbé  et  fui  béni  par  llenaud,  arch  — 
véque  de  Keiins,  en  prèseiiice  de  saint  lier- 
nard,  du  comte  de  Ghampagne,  et  de  Josse- 
lin  ,  évoque  de  Soissons.  Ges  ihanoines, 
avant  leur  union  avec  la  Gongré|,'atioii  de 
France,  portaient  une  robe  blanche  à  l'an- 
liiiue,  et,  i)ar-dessus ,  une  espèce  île  peiit 
rochet  que  quelquci-uns  appelIcLl  (selon  la 
P.  Du  .Moulinet)  sarrociuin  ou  scoi iiciuin  (3). 
Les  chanoines  réguliers  de  la  prévôté  do 
Beaumont,  au  diocèse  de  Vabres,  en  ont  un 
qui  consiste  en  une  pièce  ou  bande  de  linge 
à  l'enlour  du  cou,  qui  descend  en  poinic  sur 
l'eslomac. 

Les  chanoines  réguliers  de  la  Congréga- 
tion de  France  ont  aussi  réformé  ceux  de  la 
cathédrale  d'Uzès,  qui  est  une  des  plus  an- 
ciennej  de  Fcuice,  puisque  le  catalogue  de 
ses  évéques  remonte  jusqu'au  V  siècle.  Il  y 
a  de  l'apparence  que  le  clergé  ou  chapitre  do 
celle  église  lut  d'abord  comme  celui  ilc  tou- 
tes les  auires  églises  épiscopales  de  France, 
où  le.s  chanuines  pratiquaient  la  vie  com- 
mune selon  les  règles  des  canons.  Depuis  il 
devint  régulier  et  suivit  la  règle  de  saint 
Augustin,  lorsque  la  plupart  des  chanoines 
qui  vivaient  en  commun  prirent  le  nom  de 
réguliers,  et  se  glorifièrent  d'avoir  eu  saint 
Augustin  pour  l'ère.  Les  églises  épiscopalei 
de  Languedoc  et  de  Provence,  qui  firent  la 
même  cimse,  formèrent  avec  celle  d'Uzès  une 
espèce  de  congrégation.  File  avait  des  sta- 
tuts communs.  Ou  y  tenait  des  chapitres  gé- 
néraux, et  on  y  élisait  des  visiteurs  ;  muis 
l'on  ne  peut  dire  le  temps  que  cette  congré- 
gation fut  détruite,  et  que  toutes  ces  églises 
lurent  sécularisées.  Il  n'y  a  eu  que  celles 
d  Uzès  et  de  Pamiers  qui  jusqu'à  présent 
onl  été  légulières,  et  les  désordres  des  guer- 
res, joints  à  l'hérésie  qui  a  dominé  si  long- 
temps en  ce  pays,  ayant  fait  souvent  aban- 
donner aux  chanoines  les  observances  régu- 
lières, elles  ont  eu  besoin  de  temps  en  teH^JlS 

(')   Voy.,  à  la  lin  du  vol.,  u°  lôO. 


:27                             •             DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  RELIGIEUX.                                         ^19 

<lc  réforme.  Nicolns  Grillcl,  évi^quc  iITzi^,  Icnd  l'aumusse  on  camal!,  à  c,ii;sp  qu'il  cou- 
til vonir,  l'an  IGiO,  les  clianoincs  r6i;ulicrs  rie  vrait  non-scuicmcnl  la  ItUc,  mais  aussi  li's 
h  Congrcpalion  de  France   pour  nnnavclcr  épaules. 

dans  son  liplise  le  premier  esprit  de  l'ordre  II  ajoute  que  la  raison  qu'on  peut  donner 

canonique.  Ils  y  ont  demeuré  pendant  quel-  pour  laquelle  les  chanoines  nient  li-urs  cha- 

ques  années,  et  vivaient  sel. m  les  obsrrvan-  pcs  aux  jours  des  grandes  fêtes,  c'csl  que  la 

ces  delà  Conprépalion  de  France,  dépendant  cliape  noire  clanl  un  habit  de  deuil  et  d.-  p6- 

(lu  pénéral  de  cette  congré(!;alion,  qui  y  en-  nilcnce,   il  est  convenable  qu'ils   la  quittent 

voyait  des  religieux  et  les  rappelait  lorsqu'il  aii\  jours  que  l'Fglise  destine  aux  solennités 

le  jugea  l  ;\  propos  ;    mais  le  concordat  qui  et  aux  réjouissances. 

a\a  l  été  passé  entre  l'évéque  d'Uzès  et  les  Voyez  Du  Moulinet,  Figures  des  diffrrents 

chanoines  réguliers  de  la  Congrégation   de  habits  des  chanoines  réijut.  ;  ?i.\mm»rlU,  (înll. 

l'rance  a  été  cassé,  il  y  a  environ  quarante  christiana:  Scliooiiebok,  llisl.  des  Oidres  r«-. 

nns.  par  un  arrêt  coniradicluire  du  conseil  lig.,  et  Philipp.  lionanni,  6'u((i/o^.  omit.  OjJ. 

d'Ftat  du  roi,  qui  a  remis  celte  Fglise.dans  reliy. 
l'étal  où  elle  est  aujourd'hui.  M.Michel  ron- 

cetdcla  Uiviére,  qui  est  prcsentemenl  évé-  JE.\N  DE  DIEU  (Hospitaliers  de  Saint-). 

que  (l'Uzès  ,   donna  des  constilulions   parti-  p^,  religieux  hospitaliers  de  l'ordre  de  Snint- 

cnliéres  à  ses  chanoines  ;  mais  il  n  a  pu  les  j,„„  ^/g  ^,v„_  appelés  en  France  les  Frères 

obliger  a  vivre  en  commun,  ce  que   prali-  ^g  /„  cuarité,  en  Espagne  de  l'Ilospialilv, 

qucnl  ceux   de   Pamiers.   L  habillement  des  g,  j„  y,„//g  pa,^  i,p„  Pralelli;  arec  la  vie 

(hanoincs  d'Uzès  couMstc    eu    une  soutane  de  saint  Jean  de  Dieu,  Uiir  fundalcur. 
Maiulie  avec  un  rabat  coiiimc  les  ecc'e  las- 

liqurs,  et  lorsqu'ils  sortcnl,  ils  onl  un  man-  I-cs  religieux  dont  nous  allons  jiarler  ont 
Icau  noir  (li.  Ceux  de  l'amiers  sont  habiles  dilTérents  noms  selon  les  dilîérents  pays  où 
lie  noir,  et  onl  une  banderole  de  lin  (ju'ils  ils  sont  établis;  car  en  Kspagne,  où  ils  onl 
portent  en  échariie,  el  Us  uns  et  ks  autres  pris  leur  origine,  on  ne  les  connaît  que  sous 
uni  au  chieiir  un  surplis  avec  une  aumusse  le  nom  de  Frères  de  l'Hospilalilé,  à  cause 
grise  sur  le  bras.  Anciennement,  ceux  do  riiospitalilé  qu'Us  exercent  envers  les 
d'Uzès  portaient  un  surplis  tout  fermé  sans  malades,  et  qui  est  le  propre  de  leur  institut  ; 
manches,  à  la  manière  des  anciennes  clia-  en  Italie  ils  ne  sont  connus  que  sous  celui 
subies,  et  qui  était  communaux  chanoines  des  Frères  F(/<e  ben  Fraldli,  ou  par  abré- 
ile  Saint-I.aon  de  louars,  et  ils  avaient  sur  viaiion  Bon  Fratclli,  à  cause  qu'autrefois  i's 
l'épau'e  une  espèce  de  chaperon  noir.  avaient  coulumc  dodemander  ainsi  l'aumône, 
Le  P.  Du  Moulinet,  entre  les  différents  ha-  comme  ils  l'avaient  appris  de  leur  fond  ileur, 
bilU-mcnls  de.  chanoines  réguliers  qu'il  a  <t  qu'en  traitant  de  frères  ceux  à  qui  ils  de- 
donnés,  a  mis  celui  d'un  chanoine  leguli-r  mandaient  l'aumône,  ils  les  cxhorlaient  à 
de  Closlerneubnrg  en  Allemagne,  qui  a  hien  faire  et  à  avoir  compassion  pour  les 
aussi  un  surplis  à  la  manière  des  anciennes  pauvres  malades;  el  enfin  ils  sont  appelés 
chasubles,  cl  une  aumusse  .sur  la  lête,  mais  en  France  les  Frères  de  la  Chanté,  à  cause 
carrée  par  le  haut,  ciunme  on  peut  voir  dans  que  le  roi  Henri  IV,  voyant  ([ue  les  malades 
la  figure  d'un  de  ces  cliam.ines  que  nous  étaient  traités  avec  un  soin  extraordinaire 
avons  la  t  graver  (2).  Le  monasièrc  de  Clos-  dans  leur  hôiiital  du  faubourg  Sainl-Cer- 
tcrneuburg  fut  fondé  à  huit  lieues  de  Vienne  main,  donna  à  celle  maison  le  nom  de  Cha- 
cn  Autriche,  et  bâti  avec  beaucoup  de  ma-  >ilé  de  Jean  de  Dieu,  et  ce  noir,  est  demeuré 
gnificence  en  l'honneur  de  la  sainte  Vierge,  en  France  à  tous  les  religieux  de  cet  or.lrc 
par  Léopold,  marquis  d'Autriche,  qui  y  mit  et  à  tous  leurs  hôpitaux,  quoique  le  veri- 
des(hanoines  réguliers  du  tem|  s  d  liino-  table  nom  de  celle  congrégation  soit  celui  de 
cent  11,  environ  lan  1140.  Ordi  airemenl  ils  la  congrégation  de  Saint-Jean  de  Dieu,  ainsi 
portent  la  chape  A  l'église,  mais  aux  jours  qu'il  a  élé  déterminé  par  le  pape  Sixte  V. 
des  grandes  Icies  ils  la  quitlenl  et  mctu  ni  Saint  Jean  surnommé  de  Dieu,  fondateur 
sur  la  tête  une  aumusse  grie  pour  se  cou-  de  cet  ordre,  naquit  â  .Monte-Major-el-Novo, 
former  à  la  caihéd.ale.  P<'l''c  ville  du  royaume  do  Portugal,  de  l'ar- 
■  Celle  façon  de  qu.tter  la  chaiic  aux  jours  tlievéchéd'lîvora,  le  8  mars  li'.Ki,  de  parents 
des  grandes  fêles  nest  pas  nouvelle  (selon  d'une  mé.lioire  fortune  et  peu  distingués 
ce  que  dil  le  P.  Du  .Moulinet),  puisque  dans  parmi  le  peuiile.  Soa  père,  André  Ciudad,  et 
l'ordre  romain,  qu'on  lient  avoir  élé  fait  il  s.i  mère  iloiit  on  ne  sait  point  le  nom,  l'éle- 
y  a  pus  lie  huit  lents  ans,  il  est  dil,  par-  vèrent  il'abord  dans  tous  les  exercices  do 
lant  du  service  qui  se  fait  par  l'évéïpie  au\  P'éié  dont  son  enfance  était  susrepl  b'e. 
jours  solennels  cl  de  la  m.mière  q  ce  les  Leurs  soins  ne  fuient  loial  inutiles,  car  leur 
chanoines  y  doivent  assister,  que  ceux-,i  lils  prolila  de  jo  ir  en  j  .ur  de  leui  s  inslruc- 
vi.ndronl  au  chœur  à  l'heure  de  lierre,  re-  lion>,  et  recul  sans  peine  L  s  sinlimenls  de 
velus  d'aubes  et  d'.iumusses  :  Cum  liiiliiina-  pielé  qu'ils  \oulnrenl  lui  inspirer. 
buliim  ad  trriiam  sonurrii,  oiniirs  siinul  in  A  peine  eut-il  atleinl  l'agi!  de  neuf  ans, 
c.horum  ordiualim  conrrnirr  dclicnl,  litttnera-  qu'ils  le  perdirent  par  un  accident  imprévu. 
libus  et  albtt  induli;  le  P.  Du  Moulinet  pré-  (Sommeils  étaient  portes  l'un  et  1  autre  à 
tendant  que  par  le  mol  d'/iumerfi/ii  l'on  en-  l'hospitalité,    ils   roçurcal   el  logèrent  chez 

(I)  Voij.,  :.  la  lin  du  vol.,  i,*  157.  (i)  Ycy.,  ;i  la  fin  du  vul.,  ii"  138. 


£23  jrA 

eux  un  prôlro  qui  voyagoail  ctallail  du  cMc 
de  Ma.lrid.  11  parla  dans  la  conversalioii  île 
la  i>  élé  qui  r^'^nait  dans  celto  ville  capil.ile 
de  riîspagne,  pI  dos  églises  crlèbres  qu'on  y 
voyait,  ce  qui  fit  une  si  foric  impression  sur 
l'esprit  du  jeune  Jtan,  qu'il  voulut  suivre  ce 
prèire.  Il  se  démba  à  son  pire  cl  à  sa  mire, 
et,  étant  sorti  à  leur  insu  de  leur  logis,  il  se 
mil  aussitôt  en  chemin  i  our  aller  droit  à 
Madrid.  Sa  mère,  après  be.iucoup  de  perqui- 
sitions inutiles,  ne  l'ayant  pu  trouver,  en 
mourut  de  regret  au  bout  de  vingt  jours,  et 
son  père,  n'ayant  ;ias  moins  é  é  touché  de 
son  absence,  se  relira  à  Lisbonne,  où  il  se 
(ît  religieux  de  l'ordre  de  Sainl-François. 

Le  prêtre  qui  s'claU  chargé  de  Jean  ne  le 
conduisit  pas  jusqu'à  Madrid,  car,  étant  ar- 
rivé à  Oropesa,  ville  de  Castille,  il  se  sépara 
de  lui  et  l'abamlonna  (  nlicremcut.  Jean,  se 
voyant  seul  dans  un  pays  étranger,  fut  se- 
«ouru  par  quelques  personnes  de  pieté  qui, 
ayant  compassion  de  sa  misère,  lui  donnè- 
rent retraite.  Il  s'adressa  à  un  berger  nouiiné 
François,  que  Ton  appelait  simplement  le 
nwijoral ,  c'est-à-dire  le  maître  berger, 
mnyoral  dt  ganado  en  espagnol  signifiant 
un  berger  qui  a  intendance  sur  les  autres 
bergers.  Jean  passa  une  partie  de  sa  jeu- 
nesse à  son  service.  Il  fut  d'abord  employé  à 
ta  garde  des  troupeaux,  et  il  avait  le  soin  de 
porter  à  manger  aux  autres  bergers.  Le 
niayoral,  ayant  quitté  sa  profession  pour  se 
faire  geôlier  de  la  prison  d'Oropesa ,  ne 
voulut  pas  se  défaire  de  Jean,  dont  il  avait 
éprouvé  la  fidélité.  11  l'envoya  à  une  maison 
de  campagne  pour  avoir  le  soin  des  trou- 
peaux, et  au  bout  de  quelque  temps  il  lui 
donna  la  charge  de  veiller  sur  les  domesti- 
ques de  cette  maison,  et  l'établit  l'économe 
de  ses  biens. 

Dieu  bénit  les  soins  et  le  travail  de  Jean,  car 
les  biens  de  son  maitre  s'augmentèrent  entre 
ses  mains,  les  troupeaux  se  multiplièrenl,  et 
la  prospérité  régna  dans  la  maison  ;  ce  qui  lit 
que  son  maître,  pour  l'attacher  davantage 
dans  ses  intérêts  et  lui  ôter  la  pensée  de  se 
reliier  et  de  s'engager  ailleurs,  lui  offrit  sa  lille 
en  mariage;  mais  il  n'y  voulut  point  consentir, 
cl,  comme  son  mafirc  le  pressait  d'accepter 
ce  parti,  il  se  relira  de  chez  lui  et  s'engagea 
parmi  les  troupes  que  l'empereur  Charles- 
Quint  levait.  Il  s'enrôla  dans  une  comp;ignie 
d'infanteiie  que  faisait  don  Jean  Feiuz,  qui 
était  un  gentilhomme  dont  son  maiire  avait 
élé  le  mayoral  avant  qu'il  fût  geôlier,  et  qui 
avait  eu  ordre  du  comle  d'Oiopesa  Ferdi- 
nand Alvarès  de  Tolède,  de  marcher  au  siège 
de  Fonlarabie,  ville  de  IJiscaye,  sur  les  con- 
fins de  France.  Elle  avait  été  prise  en  dix 
jours  sur  les  Espagnols  l'année  précédente, 
par  le  roi  François  1"^  ;  et  l'empereur  Charles- 
(Jninl,  ayant  entrepris  de  la  reprendre,  y 
faisait  venir  des  troupes  de  tous  côtés  pour 
en  couvrir  le  siège  et  pour  empéclicr  le  se- 
cours que  les  Français  y  envoyaient. 

Le  tumulte  des  armes,  les  mauvais  exem- 
ples des  soldats  et  la  vie  licencieuse  que  l'on 
mène  ordinairement  à  la  guerre,  firent  ou- 
blier à  Jcau  SCS  exercices  de  pieté,  il  s'ac- 


c  luluiiia  iiisensililemcnl  à  faire  comme  les 
autres;  el,  perdant  peu  à  peu  la  crainte  ipi'il 
avait  eue  d'ofl'enser  Dieu,  il  cul  honte  do 
paraître  meilleur  que  les  autres  soldats.  Mais 
Dieu,  qui  veille  sans  cesse  sur  ses  élus,  el 
qui  ne  pern)et  qu'ils  tombent  dans  quelques 
I  échés  qu'afin  que  la  manière  dont  ils  se  re- 
lèvent serve  à  édifier  les  fidèles  el  à  leur  ap- 
prendre à  faire  pénitence ,  ne  laissa  pas 
longtemps  Jean  dans  le  désordre,  et  lui  fil 
bientôt  connaître  sa  f.iute.  Il  arriva  un  jour 
que  lui  et  ses  compagnons  manquant  de 
vivies  cl  n'étant  pas  éloignés  d'un  village 
où  ils  espéraient  en  trouver,  Jean,  comme, 
le  plus  jeune  de  la  bande,  fut  destiné  pour 
y  aller.  Il  monta  sur  une  jument  (|ni  avait 
élé  nouvellement  prise  sur  les  Français,  cl 
s'avança  du  côté  où  ils  ét:iient  occupés  à 
lenler  le  secours  des  assiégés.  La  jument  su 
reconnut  dans  les  lieux  où  les  F'rançais  l'a- 
vaient souvent  menée,  elle  courut  à  toute 
bride  comme  pour  retourner  à  leur  camp. 
Jean  la  voulut  retenir,  elle  se  cabra  el  le 
précipita  avec  \  iolence  sur  des  pierres  el  d(!s 
roches,  el  lui  froissa  tellement  le  corps,  ((u'il 
demeura  longtemps  sans  mouvement  el  sans 
paroles.  Mais  enfin,  élanl  un  peu  revenu  à 
lui  el  voyant  le  danger  où  il  étail  de  perdre 
la  vie,  parce  qu'il  était  sur  le  point  de  tomber 
entre  les  mains  des  ennemis,  qui  étaient 
proches,  il  se  releva  avec  beaucoup  de  peina 
et  se  jeta  à  genoux,  implorant  le  secours  de 
la  sainte  Vierge  et  la  priant  de  le  délivrer  do 
ce  péril  et  de  ne  pas  permcllre  (ju'il  tombât 
entre  les  mains  des  ennemis.  Sa  prière  étant 
finie,  il  sentit  revenir  ses  forces,  rentra  en 
lui-nicmc  et  regarda  cet  aciidenl  comme 
une  punition  de  ses  péchés.  Il  se  traîna  le 
mieux  qu'il  put  vers  le  camp  des  Espagnols, 
où  il  pleura  ses  désordres  et  proinit  à  Dieu 
d'être  plus  fidèle  à  son  service.  De  cet  acci- 
dent il  tomba  dans  un  autre  malheur.  Son 
capitaine  lui  ayant  confié  la  garde  de  quel- 
que butin  qu'il  avait  fait  sur  l'ennemi,  des 
voleurs  l'enlevèrent,  et  le  capitaine  l'accu- 
sanl  d'infidélité  et  d'avoir  eu  part  au  larcin, 
le  voulut  mettre  entre  les  mains  de  la  justice, 
après  l'avoir  maltraité  extraordinairement. 
Plu-ieurs  personnes  s'intéressèrent  pour  lui, 
el  obtinrent  sa  grâce,  à  condition  qu'il  le- 
noncerait  à  la  profession  des  armes. 

Il  retourna  à  Oropesa,  où  il  alla  truirer 
son  ancien  maître,  qui  le  reçut  avec  beau- 
coup (le  tendresse.  Il  lui  rendit  son  premier 
emploi,  lui  confiant  de  nouveau  le  soin  de 
tous  ses  biens.  Il  s'acquitta  de  cette  commis- 
sion avec  encore  plus  d'exactitude,  et  sn 
comporta  de  telle  sorte,  que  son  maîlrc, 
ayant  toujours  dessein  de  le  choisir  pour  son 
gendre,  lui  en  fil  encore  la  proposition.  Il 
n'y  voulut  point  consentir,  cl,  pour  se  déli- 
vrer de  ses  poursuites,  il  prit  une  seconde 
fois,  en  se  retirant ,  le  ])arti  des  armes  , 
croyant  que  la  guerre  que  l'empereur  Cbarles- 
Ouint  soutenait  alors  contre  le  Turc  était 
sainte  cl  qu'il  y  pouvait  souffrir  quelque 
chose  pour  Jésus-Christ.  Il  évita  tous  les 
désordres  où  il  étail  tombé  dans  la  première 
guerre,  il  s'y  comporta  avec  toulc  sorte  de 


631  lUCTIONNAmE  DKS  OUPRES  r.ELIGIEtX.  S32 

rplenuc  et  do  modcsiip,  cl,  liiin  loin  diiilcr-  l.iiil    Cfinliniidlemenl   ceux   qui  en   éinient 
rompre  se.'cxritici's  de  pirlé,  il  les  .inj,'!!!!'!!!;!.  les  exériiU-urs,  le  mil  à  deux  doigts  du  loiii- 
I.;i  ptitrre  ol.iiii  Itiiic  et  les  lioi;pi's  ;i>.Mit  lienii.  .\\  iln  en  fut  nvorti, et,  l'étant  venu  voir, 
été  licenriéfs.  Jc.in  \iiil  en  l'orlMi.',!!  et  »oii-  il  lui  dit  qu'il  éinil  ternis  de  nietlrc  fin  à  ses 
lut  aller  ri'voir  ses  pareiiis  à   Moule-Major.  fol  es  volonl.iires  et  d:' s'apiiliqucr  désoiinais 
Il  )■  apprit  d'un  de  ses   ourles  que  son   pérc  àdes  elnses  plus  iililrs  pourlui  el  pour  le  pro- 
tl  sa  mèieélalenl    niorls,  cl,    ajanl    su  que  eliain.  Jean  oliéil,  les  ;idiiiiuislrateurs  fureul 
sa  fuite  avait  clé  la  nu'^e  des   malheurs   de  sur[iris   d'un    eliani;einenl    si  soudain  ;  ils  le 
sa  famille,  il  viiiilul  enlièienienl  ahaiulonner  firent    traiter   avec    beaucoup    d-    soin,   et 
son  pays  pour  aller  suvir  Dieu  d.ius  un  au-  en  peu  de  tcni;  s  il   recouvra  la  santé   cl  les 
Ire  emlroil.  1'  passa  pour  cet  cfTet  ilans  l'An-  forces.    11  demeura  <iMclque  lemps  à  servir 
•iaiousic,  où  il  se  mit  au  service  d'une  dame  les  malades  du  même  li(ji)ilal  ;  il  en  sortit  au 
rielic  du  lerri'oirc  de  S;  ville,  cl   entra  chez  mois    d'octobre   de    l'an    loJlt,  qu'il    voulut 
elle  en   qualité  debericr.   11    comnienra   à  exécuter  le  vœu  (ju'il   avait    fait  de   servir 
passer  les  jours  d  les  nuits  dans  les  exerci-  Dieu  dans  -es  pauvre*.  Il  forma   le  plan  du 
ces  de   la   pénitence  et  à  pleurer  sa  vie  pas-  dessein  qu'il  av.ut  de  leur  procurer  des  ali- 
sée,  à  prier  et  à  implorer  la  iiiiséricorde  de  nicnls,  des  habits,  et  des  lelriilcs  assurées, 
Dieu.  Croyant   faire  quelque  chose  qui    lui  à  son  retour   d'un  pèlerinage  qu'il  fit  à  No- 
serail  plus  ajjré  ihlc,  il  passa  en  Afri(|ueafin  Ire-Dame  de  Guadaloupc  pour  remercier  la 
il'y  lrou\er  l'occasion  d'y  s(;ulTrir  le  martyre,  sainte  Aieri^e  do  sa  protection  et  lui  recoin- 
11  fut  pour  ce  sujet  à  (^'ula;  mais,  jiar  l'avis  mander  le  succès  de  ses  onlrepiises.   Il  coin- 
ile  son  confesseur,  il  repass.i  en  Kspagne,  et  niença  par  nourrir  quel  jues  pauvre^,  du  tra- 
ayant   tlél'ar(|u6   à    (îibi  altar,  il   s'occupa  à  vail  de  ses  main^  ;  il  allait  pour  cet  efTel  rou- 
veiulre  lies  images  et  des  |  etils  livres  de  de-  jier  du  bois  dans  la  forêt,  et   le   vei\dait  à  la 
Vol  on.  ville  pour  les  faire  sulisistir;    et  sou  exem- 
De  G  b.aitar  il  passa  à  f.renade,  où  il  c!a-  P'^^  J«''-^  "^  ^^  exhortations  anima  tellement 
Mit  d'abord  une  peiiie  boutique  sous  la  porte  li'S  personnes  chaniables  de  la  yi  le  de  Grc- 
d'I' Ivirc,  cl.  sachant  qu'où  avait  couluu.e  de  "'".',';  v1"^;  P^""  !f  '"",5,'^"  ']?  luelnu^s  quêtes 
célébrer  la  fétc  de  saint  Sébastien  à  Grenade,  1"  "  «';  ''  '^'^  ^"  ^"  '^^'■".'  '  •'"  ^^'^'•'  ^'«  '""" 
dans  l'ermilaiic   de   son    ncm,    qui   était   au  U'.c  maison  pour  y   rel.rcr  les  pauvres  ma- 
quarlicr  le  plus   élevé  de  la  ville,  il  y   fut  cl  ^^i':^':^  '"''  '';'  /  "ssusler. 
y  entendit  p.écher  le  do.leur  .lean  Avila,  le  ...V  ^ '',"'"  '  ''"■''',"  '"  f'""'"<'"C("'"'^"''*  ''^ 
■plus  célèbre  prédicateur  d'iispasne  et    sur-  '  *!'^1"''''  '';"  ^T' "a>  e,  cl  proprenient  les  pre- 
'  ommé  l'apôtre  de  l'Andalousie.'  Il  en   fut  si  "".'■'«  fondcuenls  de  son  ordre,  ^on  pnmier 
louché,  que,    fondant  en  larmes,    il   remplit  «ûtn,  après  avoir   oue  celte  maison,  lu   de  la 
IVgliscde    cris    cl    de    lamenlalious    qui    le  fourn  r  des  meubles  qu  il  crut  et:  c  absolu- 
firent  prendre  pour  un  homme  forcené    il  se  ""^'.V  n.'cessaires  ;  el    sans  perdre  de  temps, 
frai.paitla  poiirine,  se   dédirait    le    visage,  i   alla  dans  toute  la  ville  chercher  des  mala- 
s'arrachail  la  barbe  el  les  cheveux,   se  rou-  ^f.*-  ''"  '^,'^l'""P'f ',  ''«^=*  '"'l'olouls.  pour  rrm- 
lait  dans  la  boue,  cour.iit  d'une  manière  ex-  p!""  «""   l!<>l"lal.  La   plupart  de  ceux  qui  lo 
Iravaganie    par   les   lues,     ne  faisant   aulro  \\]''''^   '"'ST   ^'''S'    le   blâmèrent,    1  accusant 
chose  que    crier  à  Dieu  de  t.:ule  sa    force    :  d  ""''scdion  ,    le     regardant    comme    un 
jl/i..c;ùon/c.  Chacun  jugea  nu'ilavaiHespril  ''""""«   entr.prenant  et   qui    son-  geait  a 
troublé.  La   populace  s'attroupa    autour  de  ""c  chose  qui  lui  elail  absolument  impossi- 
lui,  hs  eufanls,   la  canail'c  le  poursuivinnt  1"';  "^ais  sa  fenueie  les   donna,    sa  foi   les 
a  coups  de  pieres.  Il  ani^a  chez  lui  tout  en  ch  n-gea  de  confusion,  d  I  ardeur  de  sa  clia- 
sang,  et  avani  continué  le  lendemain  à  (aire  '"'"^  '"  ••'  r.  ntrer  en  eux-mêmes.  Ils  voulu- 
la   n.éme'diose.  on  le  ccnduisit  au   dod.ur  ri>nt  avoir  part  a  1  établissement  qu  il  fiisail, 
Avila  afin  de  \oir  s'il  ne  pouirail  lias  guérir  ''=*  '"'   '""■'^'"  'l"':l'I"es   aumoius   ciilie    les 
cd  esprit  que   sou  sermon  avait  si  étrange-  n.ains  pour  fournir  aux  besoins  h  s  plus  pres- 
inenl    blessé.   Ce    saint   prêtre,   après   a^oir  s'inlsde  ses  pauvres,  d  leur  exemple  en  attira 
écouté   Jean  dans  la    confession,   leeonnut  ^,'"";-es  a   lui  faire  aussi  quelques  libeiali- 
IVsprit    de    Dieu   dans   1.  s   mouvements  du  l<-'^-    >'•'«   pauvres  ne   manquaient  de   rieu  ; 
cœur  de  ce  pénileni  qui  ne  contrefaisait  l'in-  "''P'"'^,''   T'f   •'.''■'"    ' ''  I'"'"  ^'^  avait    assistes 
sensé  (|ue  pour  se  procurer  des  humiliations;  P^^'"  ant    le  jour  et  leur  avait  procure   tous 
Il  l'encouragea  dans  ses  sainte,  résoluiions.  '•'''   '"^'"f  si";>luels  dont  ils  |  ouvaient  avoir 
d  lui  promit  de  l'assislcr  dans  toutes  les  len-  ^''■-""''  '''"'•  '-"sanl  venir  des  con  esseurs  d 
contres  autres  personnes  pieuses  qui   leur   lais.iienl 

souvent  des  insliuciions  famili.'rcs,  il  allait 
Jean,  consolé  par  un  si  saint  homme,  lo  soir  vers  les  huit  à  neuf  heures  (luèter 
crut  qu'il  ne  pouv.iil  pas  assez  s'huirii  ier.  pour  eux  :  il  marchait  dans  les  rues  avec 
Jl  recommença  ses  extravagances  d  ses  to-  une  hotte  sur  son  dos  et  deux  marmites  ;i 
lies  app.'irentrs.  Ou  l'enfirma  dans  l'hôpital  ses  bras.  La  pluie,  |c  vent  et  les  aulres  io- 
des insensé',  où,  après  les  rrmèdes  (jii'on  jures  du  temps  ne  l'an  élaieul  poiiil,  d,  lors- 
lui  lit  prendr<>  et  (|ni  furent  inutiles,  on  crut  qu'il  voulait  demander  l'aumône  pour  les 
que  li;  plus  efficace  pour  le  guérir  dail  do  le  malades,  il  criait  à  haute  voix  :  J/p.«  c^fr.v 
louellor  lous  les  jouis  jusqu'au  sang,  jus-  frrrrs,  Inilcs-vaiis  du  bien  pour  l'amour  d» 
i|ii 'à  ce  que  son  esprit  lui  re\  enti.  (>c  sup-  y^i'cii.  Celle  m.inière  exiraordinaire  de  dc- 
l'Iicc,  (ju'il  u\  iiit  50  u   d'augmenter  eu   ini-      mander  l'aumouc  alliiuil  luul  le  looiidc  aux 


l 


î;33  jea 

feiiôlrcs,  et  on  lui  donnait  abondamment  de 
quoi  nourrir  ses  pauvrc«.. 

Le  siège  épiscopal  de  Grenade  était  oc- 
cupé pour  lors  par  dom  Pierre  Guerrero. 
Ce  prélat  rrul  qu'il  était  de  sa  charge  pas- 
torale de  prendre  connaissance  de  ce  nou- 
vel élablissement  cl  d'examiner  comme  tou- 
tes choses  s'y  passaient.  Il  en  fui  si  satisfait, 
que,  non  content  de  lui  donner  sa  protec- 
tion, il  donna  dis  sommes  considérables 
pour  fournir  aux  frais  de  cet  hôpital,  ce  que 
plusieurs  personnes  de  la  ville  firentà  l'exem- 
ple de  leur  pasteur.  L'approbation  que  l'ar- 
chevêque de  tîrenade  venait  de  donner  à 
cet  hôpilal  le  mit  en  grand  crédit,  les  pau- 
vres y  accouraient  de  toutes  parts,  de  sorte 
que  la  maison  qu'il  avait  d'aboid  prise  se 
trouvant  trop  petite  ,  il  fut  obligé  d'en 
louer  une  plus  grande  et  plus  com- 
mode, afin  d'y  pouvoir  admettre  tous  ceux 
qui  se  présenteraient.  Tout  y  était  admiré, 
Li  propreté  des  lieux,  l'ordre  du  service,  l'a- 
bondance des  vivres  cl  des  meubles,  la  cha- 
rité, la  modestie,  la  patience  des  ministres 
qui  travaillaient  sous  noire  saint  ;  et  on  s'é- 
tonnait comment  un  homme  sans  crédit  et 
sans  autorité,  n'ayant  ni  biens  ni  revenus, 
avait  pu  établir  un  si  bel  hôpital. 

Comme  notre  saint  était  enlièremenl  mort 
au  monde,  il  ne  désira  t  point  de  lui  plaire, 
et  paraissait  toujours  avec  des  habits  très- 
méchants  et  tout  déchirés;  car,  s'il  rencon- 
trait un  pauvre  dans  la  rue  qui  fût  plus  mal  vêtu 
que  lui,  il  prenait  son  habit  et  lui  donnait 
le  sien.  Mais  l'extérieur  méprisable  et 
dégoûtant  que  les  gens  du  monde  trou- 
vaient dans  sa  mine  et  dans  ses  babils  n'em- 
pêchait pas  quelques  personnes  de  considé- 
ration de  marquer  toujours  beaucoup  d'em- 
pressement pour  l'avoir  chez  elles  dans  le 
cours  de  ses  quêtes.  L'évèquc  de  Tuy,  pré- 
sident de  la  chambre  royale  de  Grenade, 
l'ayant  un  jour  retenu  à  dincr,  et  lui  ayant 
deman  lé  son  nom,  notre  saint  lui  répondit 
qu'il  s'appelait  Jean  :  Vous  vous  appellerez 
à  l'avenir  Jean  de  Dieu  (dit  le  prélat);  et  de- 
puis ce  temps-là  ce  surnom  lui  demeura. 
François  de  Castro,  adininistralcur  de  son 
hôpital  de  Grenade,  qui  rapporte  ainsi  la 
cause  de  ce  surnom,  et  qui  le  premier  écri- 
vit la  vie  de  saint  Jean  de  Dii'u,  environ 
vingt-cinq  ans  après  sa  mort,  doit  être  plu- 
tôt cru  qu'Antoine  Goëva,  évêque  de  Cyr, 
qui  n'écrivit  la  même  vie  que  qualie-vingls 
ans  après,  et  qui  dit  que  ci-  fui  Noire-Sei- 
gneur qui,  s'élantappa  u  à  lui  sous  la  forme 
d'un  enfant,  comme  il  se  reposait  sous  un 
arbre,  lui  montra  une  grenade  ouverte,  du 
milieu  de  Liquelle  formait  une  croix,  et  qui 
lui  dit  :  Jean  de  Dieu,  grenade  sera  la  croix, 
ce  qui  serait  arrivé,  selm  cet  auteur,  dans 
le  temps  que  notre  saint  demeurait  à  G.bral- 
tar,  et  qu'il  s'était  mis  en  chemin  pour  al- 
ler dans  les  lieux  des  environs  de  cette 
ville  pour  y  vendre  ses  images  et  ses  livres. 
L'éyôque  de  Tuy  lui  dit  encore  (|ue,  puis- 
qu'il lui  avait  donné  son  surnom,  il  voulait 
aussi  !ui  donner  un  habit,  lui  représentant 
que  l'humilité  et  la  simplicité  dont  il  faisait 


JEA 


S54 


profession  ne  le  dispensaient  pas  de  garder 
une  bienséance  lionnêle,  et  qui'  celui  (ju'il 
portail  était  dégoûtant  et  empéihait  (lue 
plusieurs  honnêtes  gens  ne  le  fréquentas- 
sent :  c'est  pourquoi  il  envoya  sur  l'heure 
acheter  de  l'étoile  pour  lui  faire  un  habit 
dont  il  prescrivit  lui-même  la  firme,  et  il 
l'en  revêtit  lui-même  de  sa  main,  lui  ordon- 
nant d'en  donner  un  semblable  à  ceux  qui 
s'uniraient  avec  lui. 

Le  saint  ni  le  prélat  n'avaient  aucune  in- 
tention d'éiablir  un  nouvel  ordre  religieux 
dans  l'Eglise;  mais  il  y  a  bien  de  l'apparence 
qu'ils  avaient  dessein  de  former  une  société 
ou  congrégation  de.  personnes  séculières 
pour  avoir  soin  de  l'hôpital  de  Grenade,  et 
que  CCS  personnes  devaient  être  distinguées 
des  autres  séculiers  par  des  habillements  dif- 
férents. 

Jean  ne  fut  pas  plutôt  revêtu  de  cet  habit, 
que  plusieurs  personnes  s'offrirent  à  lui  pour 
être  de  ses  disciples.  Les  premiers  furent 
Antoine  Martin  et  Pierre  Velasco,  qui  se 
portaient  une  haine  mortelle.  Le  premier 
accusait  l'autre  d'avoir  tué  son  frère,  et  était 
venu  exprès  à  Grenade  pour  le  poursuivra 
en  justicci  mais  Jean  de  Dieu  les  réconcilia 
si  bien  ensemble  que,  pour  vivre  dans  une 
plus  grande  union,  ils  voulurent  être  disci- 
ples de  notre  saint,  et  furent  les  premiers  à 
qui  il  donna  l'habit  de  sa  congrégation,  selon 
la  forme  qui  lui  avait  été  prescrite  par  l'évo- 
que de  Tuy. 

Son  hôpital  se  trouva  encore  trop  petit  , 
et  il  fallut  le  transférer  pour  la  troisième 
fois.  L'archevêque  de  Grenade,  dom  Pierre 
tjuerrero,  sollicita  les  principaux  de  la  ville 
à  contribuer  à  l'achat  d'une  maison  fort 
vaste,  qui  avait  été  autrefois  occupée  par 
des  religieux,  cl,  pour  donner  l'exemple, 
il  fournit  pour  sa  part  quinze  cents  ducats. 
Ce  fut  encore  à  la  sollicitation  de  ce  prélat 
que  notre  saint  entreprit  un  voyage  à  Val- 
ladolid,  où  la  cour  d'Espagne  était  pour  lors, 
afin  d'obtenir  un  secours  pour  ses  pauvres. 
U  y  fut  favorablement  reçu  de  Phi  ippe  11, 
qui  n'avait  pas  encore  le  litre  de  loi ,  et 
qu'on  nommait  le  prince  des  Espagnes  , 
parce  que  l'empereur  Charles  V  ne  lui  avait 
pas  cnrore  cédé  ses  Ktals,  ce  qu'il  ne  fit  (]ue 
l'an  1553.  Jean  de  Dieu  reçut  de  grandes 
libérables  de  ce  prince  et  des  srigneurs  do 
sa  cour. 

Sa  charité  ne  se  bornait  pas  scnle.ner.t  aux 
malades  et  aux  pauvres  de  son  hôpital,  il  se- 
courait encore  les  pauvres  honteusde  la  ville, 
retirait  une  infii\ité  de  femmes  et  de  lillcs  de 
la  débauche,  et  non-seulement  pourvoyait  a 
leur  snbsitanc',  mais  en  mari;iil  encore 
quelques-unes,  linfin  ses  forces  se  trouvè- 
rent enlièremunl  épuisées  pir  sa  charilé  et 
sa  pénitence;  et,  dans  le  temps  (]ue  l'on  se 
promettait  qu'il  travaillerait  plus  que  jamais 
pour  les  pauvres,  il  se  trouva  presque  hors 
d'état  d'agir.  U  ne  laissait  pas  néanmoins 
de  continuer  ses  exercices  «rdinaircs,  de 
faire  ses  quêtes,  de  veiller  et  de  s'occuper 
au  dedans  de  la  maison  ;  mais  enfin  un  acci- 
dent imprévu  lui  causa,  l'an  loaO,  la  aula- 


5Û5  DICTIONNAIRE  DES  OROUF-S  RELIGIF.UX 

iHe   clonl   il   nv'urul.    I-os   caus    du    Xonil 
6inirnl  cxiraordiiinircmcnl  grosses  celle  an- 


53G 


i>ve-là,  cl  ciilrainaieiil  .nvoc  elles  quantité 
de  buis.  Noire  saint  fondateur,  voulanl  en 
retirer  pour  l'usage  de  son  hôpital,  cl  étant 
entré  dans  ce  lurrenl,  le  froid  le  siisil  lellc- 
iiienl,  qu'il  fut  d'.iliord  attaque  d'une  vio- 
lente nial.'idic  qui  s'.iusmenla  lorsque,  par 
lin  excès  de  sa  charité,  il  se  jeta  encore  dans 
le  fleuve  pour  s  courir  un  jeune  homme 
<iui  y  était  entré  trop  a>ant.  et  que  1 1  rapi- 
ililé  des  eau^  emrainait.  Il  se  mit  au  lit,  où 
il  fut  visité  par  larchciéque  et  les  plus 
i|uaiillés  de-  la  ville,  du  nombre  desquels  fut 
la  dauic  Anne  Osoria,  épouse  de  dom  G.ir- 
cias  de  IMse  ,  qui  fil  tant  d'instances  pour 
qu'on  l'amenât  à  son  logis,  afin  qu'il  fût 
mieux  assisté  dans  sa  maladie,  que  l'on  ne 
put  lui  refuser  celte  grâce  ;  et  ce  fut  dans  la 
maison  do  celle  dame  qu'il  mourut ,  le  8 
mars  1350,  âgé  de  55  ans. 

(^omme  il  n'y  avait  qu'une  petite  cha- 
pelle dans  son  liôpila',  on  ne  put  pas  l'on- 
lerrer  dans  ce  lieu.  11  fut  inhumé  dans  l'é- 
glise des  Minimes,  et  enseveli  dans  l'habit 
des  religieux  de  cet  ordre  avec  une  pompe 
funèbre  où  la  magnificence  se  trouva  jointe 
à  la  piété  publique  ;  l'archevêque  môme  y 
officia  pontificalement.  Ces  religieux  pos- 
sédèrent les  précieuses  reliques  de  ce  saint 
jusqu'en  l'an  IGGi,  qu'ils  les  rendirent  à  ses 
enfants  pour  les  tiausfcrrr  à  l'hôpilnl  de 
(ircnade.  Les  grands  miracles  qui  se  firent 
à  son  tombeau  porteront  le  pnpe  Urb.iin  \'ll! 
à  le  béatifier  par  une  bulle  du  21  septembre 
1630.  Innocent  XI,  par  un  décret  du  13  juin 
1G79,  déclara  qu'on  pou>ail  procédera  sa 
canonisation  ;  mais  il  se  pa^si  encore  quel- 
ques années  sans  qu'on  en  fit  la  cérémonie; 
ce  ne  fut  que  sous  le  pcnlificat  d'Alexan- 
dre \]\,  l'an  lOrfO,  le  10  octobre,  qu'on  lui 
rendit  (Cl  honneur. 

Saint  Jean  de  Dieu  ne  donna  point  de  son 
<ivant  d'autre  règle  à  ses  disciples  que 
l'exemple  de  ses  vertus  avec  l'ordic  qu'il 
leur  prescrivit  pour  l'assistance  (orporcllc 
et  spirituelle  des  malades.  Après  sa  ir.oii, 
ils  obéirent  à  un  supéi  leur  (]u'ils  nommaient 
majeur;  ce  fut  en  cct'.e  (|u:ililé  qu'ils  re- 
connurent le  frère  Antoine  Mirtin,  à  qui 
saint  Jean  de  Dieu  av.iil  donné  en  mourant 
1  adininisiralion  de  sim  hôpital.  Conimc  ce 
saint  fondateur  avait  reçu  de  grandes  au- 
mônes de  Philippe  11  lor.^qll'il  était  à  \'alla- 
dolid,  le  frère  Aii'.oinc  fut  trouver,  pour  le 
même  sujet,  ce  prince,  qui  était  pour  lors  à 
Madrid,  à  qui  il  pcr>uada  aussi  de  faire  bâ- 
tir dans  C(  lio  capitale  d'Kspagnc  un  hôpital 
sur  le  modèle  de  celui  qui  a^ait  été  bâti  à 
Grenadi;  par  saii;l  Jean  «le  Dieu  ;  ce  que  ce 
prince  exécuta  ,  cl  (Ct  hôpital  a  été  appelé 
rendant  un  long  temps  l'Ii  |>ilal  d'Anloiiic 
Martin,  à  cause  de  ce  frère,  qui  en  avait 
procuré  l'élablissemi  ni ,  cl  qui,  .'iprès  avoir 
reçu  des  nuii  ônes  considérables  de  ce  prince 
pour  l'hôpital  de  (ireiiade,  y  lelourn.i  pour 
rendre  compte  à  l'arci  evè  jue  de  ce  ipiil 
a\ait  fait  a  Madriil,  oii  il  alla  encore  qiicl- 
ijuc  li.mps  (i['rcs,  avec  la  iiciuiis:>iun  de  ce 


prélai,  pour  prendre  radminislralion  de  ce 
nouvel  hôpital,  dans  le(iu;'l  il  mourut  le  2V 
décembre  de  l'année  135'}.  n'ayant  survécu 
que  trois  ans  au  saint  fondateur. 

A  l'exemple  de  ces  deux  hôpitaux,  on  en 
établit  d'autres  en  Espagne,  comme  à  ("or- 
doue,  à  Lucane  et  en  d'autres  endroits.  Celui 
de  Grenade  était  le  plus  fameux,  il  était 
gouverné  par  le  frère  Uodrigue  de  Sigucnça, 
qui  s'acquit  une  si  grande  réputation,  que 
les  comiiiunautès  de  ces  autres  hôpitaux 
voulurent  être  unies  à  la  sienne  ct  le  recon- 
naître pour  supérieur.  Si:.^uen(;a  les  reçut  et 
les  incorpora  à  sa  société,  qui  se  trouva  par 
ce  moyen  assez  nombreuse.  Il  crut  qu'avant 
lout'S  choses  il  fallait  faire  approuver  par 
le  saint-siége  leur  institut  ;  il  en  conféra  avec 
dom  Pierre  lîuerrero,  qui  loua  son  dessoin  ; 
c'est  pourquoi  il  choisit  le  frère  Sébastien 
Arias  pour  aller  à  Rome  avec  une  supplique 
adressée  au  pape,  qui  contenait  ce  qui  s'était 
passé  dans  la  société  depuis  son  établisse- 
ment. Sébastien  Arias,  élanl  à  Naples,  y  ren- 
contra dom  Juan  d'Autriche  ,  qui  allait  à 
Kome  comme  en  triomphe  ,  après  la  vic- 
toire de  Lépanle,  qu'il  avait  remportée  sur 
les  Turcs.  Ce  prince  s'engagea  de  l'itilro- 
duire  auprès  de  Sa  Sainteté ,  do  présenter 
lui-même  la  supplique,  et  d'en  solliciter 
l'expédition.  Pie  V,  qui  était  pour  lors  assis 
sur  la  chiirc  de  saint  Pierre,  approuva  cet 
ordre  par  une  bulle  du  premier  janvier  1372, 
ct  donna  à  ces  religieux  la  règle  de  saint 
Augustin.  Il  leur  prescrivit  de  plus  la  forme 
('e  l  ur  habillement,  leur  donna  p  <uvoir 
d'élire  un  supérieur,  sous  le  nom  de  ma- 
jeur, dans  chaque  hôpital,  et  leur  permit  do 
faire  promouvoir  aux  ordres  sacrés  un 
d'entre  eux  aussi  dans  chaque  hôpital,  pour 
leur  administrer  les  sacrements  aussi  liii-n 
()u'aux  malados,  les  soumettant  à  la  juri- 
diction des  évoques  des  lieux  où  leurs  mai- 
sons seraient  situées. 

Le  frère  Sébastien  .\rias,  qui  avait  logé, 
pendant  son  séjour  à  Home,  dans  le  palais  do 
dom  Juan  d'.\utriclie,  reçut  en  parlante!.^ 
nouvelles  faveurs  de  ce  prince,  qui  lui  mit 
entre  les  m;iins  cinq  mil  e  ducats,  afin  qu'eu 
passant  à  Naples  il  y  fon  iàl  un  hôpital  sous 
le  nom  de  Notre-Dame  de  la  \ictoire.  Pen- 
dant qu'il  était  occupé  à  la  consiruciion  da 
cet  hôpital,  les  bourgeois  d»;  .Mi!an  le  pliè- 
rent de  venir  faire  aussi  un  élablissement 
dans  leur  ville.  11  ne  put  alors  saiisi'airc  à 
leur  dcmindc,  parce  qu'il  était  pressé  de 
retourner  en  Lsiiagne  pour  y  rendre  (ompto 
de  ce  qu'il  avait  fait;  mais,  élanl  relouiiiù 
une  secon  le  fuis  à  Uomc,  il  fonda  à  Milan 
un  grand  hô|  ital,  qui  est  aujourd  hui  Irès- 
célèiire  ct  irès-magninque. 

tîrégoirc  XIII  ayant  succédé  à  Pic  V,  le 
frère  Sebastien  .\rias  lit  un  troisième  voyage 
à  Home  par  le  (•(immandemcnt  de  ses  sujie- 
rieurs,  afin  d'obtenir  du  pape  la  confirma- 
lion  de  leur  ordre  ;  non-seulement  il  le  con- 
firma et  lui  donna  plusieurs  |)iitiléges,  mais 
il  choisit  Sebastien  Arias  pour  aller  secou- 
rir les  Klam.in  Is  qui  claicnt  afiligcs  de  lua- 
ladic  cuuiagicusc.  Il  voulut  uicuic  fonder  à 


657  JtA 

Rome  une  maison  pour  y  élabîir  des  reli- 
pieux  de  cel  ordre  :  c'est  |;ourquoi  il  lil 
éi-rirc  au  frère  Uodrigue  de  Si;;ucnça  afin 
(le  lui  en  envoyer.  11  leur  doiiiin,  l'an  158-2, 
l'église  de  Saint-Jean  Caiibile,  et  fit  con- 
struire à  ses  frais  l'hôpiial  joignant,  où  il  y 
a  ordinairement  soisanle  lils. 

Le  notiibre  des  hôpitaux  s'éiaut  augmenté 
jusqu'au  nombre  de  dix-huit,  tant  en  Kspagne 
qu'en  Italie,  le  pape  Sixte  V,  l'an  lo8J,  leur 
permit  de  tenir  un  chapitre  général  à  Rome 
et  de  dresser  des  constitutions,  érigeant  leur 
ordre  sous  le  titre  de  Congrégation  de  Jean 
de  Dieu.  Et  Grégoire  XIV,  en  confirmant 
leurs  privilèges,  leur  donna  pour  prolecteur, 
l'an  1391,  le  cardinal  Rusticucci,  du  titre  do 
Sainîe-Susannc  cl  vicaire  de  Rome.  Jusque- 
là  toutrs  choses  avaient  heureusement  pros- 
péré dans  ci'l  ordre  ;  mais,  comme  le  pape 
Grégoire  XIV  leur  avait  accordé  la  con)mu- 
nication  des  privilèges  de  l'hôpital  du  S.iinl- 
Esprit  en  Saxe,  qui  avait  été  oxemi.l  de  la 
juiidiction  des  ordinaires  par  le  pape  Nico- 
las V,  l'an  1436,  et  que  ces  relii;ieux  de  la 
congrégalion  de  Sainl  Jean  de  Uieu  préten- 
daient jouir  du  même  privilège  :  le  pape 
Clènienl  VllI,  sous  prétexte  qu  ils  s'étaient 
relâchés  de  leurs  observances,  et  que,  ne 
songeant  qu'à  parvenir  aux  ordres  sacrés, 
ils  s'occupaient  à  l'élude  cl  négligeaient  le 
soin  des  malades,  soumit  cntièremenl  i elle 
congrégation  à  l'aulori  é  et  juridiction  des 
évoques  ,  ordonna  qu'ils  ne  seraient  plus 
gouvernés  à  l'avenir  par  un  majeur,  leur 
défendit  do  ])rendre  les  ordres  sacrés  et  de 
f.iire  profession  solennelle  ,  voulant  qu'à 
l'avenir  ils  ne  fissent  qu'un  seul  vœu  de 
(lauvrelé  et  d'hospitalité,  ainsi  qu'il  est  porté 
par  le  bref  de  ce  pape  du  13  février  l.)92. 
Cependant  ce  pontife,  à  la  prière  du  cardinal 
Rusticucci ,  leur  prolecteur,  (jui  lui  repré- 
senta que  les  hôpiiaux  d'Italie,  ainsi  séparés 
cl  sans  chef,  souffraient  considérablemeul 
de  celle  désunion,  remit  ces  religieux  dans 
le  droit  «ju'ils  avaient  d'élire  un  géiièral,  par 
son  bref  de  l'an  159G.  11  y  en  a  qui  oui  cru 
qu'il  leur  avait  permis  aussi  de  faire  pro- 
mouvoir aux  ordres  sacrés  un  de  leurs  frères 
dans  chaque  hôpilal,  pour  aJminisirer  aux 
malades  les  secours  spirituels  dont  ils  avaient 
besoin. 

Le  1*.  Hensclionius  {Apiid  Boll.  lom.  l, 
Aprilis,  p.  812,  n.  12),  qui  est  de  ce  nombre, 
n'avait  pas  vu  sans  dnute  la  bulle  de  Clé- 
ment vin,  puisqu'il  s'étonne  que  le  pape 
Paul  V  ail  été  prié  par  ces  religieux  de  leur 
permettre  de  faire  promouvoir  quelques-uns 
de  leurs  frères  aux  ordres  sacrés,  pour  ad- 
ministrer dans  chaque  hôpital  les  bcsoii's 
spiritueis  tant  aux  religieux  qu'aux  mala- 
des, comme  si,  dit  ce  savant  houmie,  le  pape 
(.lémeiil  Vlll  ne  s'élait  pas  exjdiqué  assez 
formellement  en  leur  fjveur  en  1-ur  accor- 
dant cotte  permission,  et  pour  cet  effet  il 
rapporte  l'endroit  de  la  bulle  où  il  veut  que 
celte  permission  leur  est  accordée,  et  qui  est, 
à  ce  qu'il  prétend ,  énoncée  en  ces  termes: 
Ut  cuiifi  (lires  ad  sacerdolium  socris  ordini- 
bui  iniliari  possint,  modo  juxla  piiinum  co- 


JEA  533 

rum  inslilulum  in  simplicitule  pauperibus  in- 
firinis  interviant.  On  lit  néanmoins  loiil  le 
contraire  dans  cette  bulle, où  il  est  expressé- 
ment défendu  à  ces  religieux  de  prendre  les 
ordres  sacrés.  Voici  en  quels  termes  ce  pape 
s'est  expli(iué  iQuadve  confralrcs  luiju^  con- 
grcgationis,  saccrdoUs,  aut  savrix  ordinibus 
conslituti  esse  non  possint,  nec  ail  hujusmodi 
sacros  ordines  promoieri  vateant,  sed  juxta 
primœium  eoruni  institulam  in  simplicilalc 
pauperibus  infinnis,  ut  prœfertur,  inscivire 
debennt  {  Bull.  Roman.,  lom.  III.  Consl. 
Clem.  Vlll,  kk,  §  10  ). 

Les  religieux  de  cet  ordre  curenl  donc  rai- 
son de  s'adresser  l'an  1G09  au  pape  l'aul  V  , 
et  de  lui  représenter  que  le  pape  Clément  \  III 
leur  avait  défendu  de  faire  promouvoir  aux 
ordres  sacrés  aucun  de  leurs  frères,  et  de  lo 
prier  de  leur  accorder  celle  grâce,  puisque 
lis  prêtres  séculiers  dont  ils  se  servaient  sj 
contentaient  le  plus  souvent  de  dire  la  messe^ 
ne  parnissaicnl  plus  le  reste  du  jour  dans  les 
hôpitaux,  cl  qu'ils  n'y  demeuraient  pas  aussi 
le  plus  souvent  la  nuil;  ce  qui  faisait  que 
les  pauvres  manquaient  de  secours  spirituels. 
Paul  V  leur  percnil  donc  de  faire  prendre  les 
ordres  sacrés  à  quelques-uns  de  leurs  frères, 
qui  ne  pourraient  exercer  aucune  charge 
afin  d  être  plus  en  étal  de  vaqueraux  besoins 
spirilueis  des  malades.  Le  mêuic  pape,  par 
un  autre  bref  du  7  juiliel  IGU,  sur  la  repré- 
senlalion  que  lui  firent  les  religieux  de  cel 
ordreen  Espagne,  que  le  bref  de  Clément  Vill 
du  13  février  1392,  qui  défendait  aux  reli- 
gieux de  cet  ordre  de  faire  à  l'avenir  la  pro- 
fession solennelle  des  trois  vœux  de  pauvre- 
lé,  de  chasteté  et  d'obéissance,  n'avait  eu 
aucun  lieu  dans  leurs  hôpitaux  d'Espagne, 
et  <iu'ils  y  avaient  toujours  fait  ces  trois 
vœux,  en  y  ajouliint  un  quatrième,  de  servir 
les  malades,  leur  permit  de  faire  ainsi  leur 
profession  après  l'année  de  probation  ;  il  leur 
permit  de  plus  d'avoir  deux  prèires  de  leur 
ordre  dans  cliaquc  hôpital,  el  déclara  qu'ils 
étaient  véritablement  religieux.  Il  aceorda  l;i 
même  gràc.'  à  ceux  de  France,  d'Allemagne, 
de  Pologne  cl  d'Italie  par  un  autre  bref  du 
13  février  l(jl7,  el  il  les  déclara  eucoro 
cxem,  ts  de  la  juridiction  des  évoques  par 
un  autre  bref  du  10  mars  IGID  ;  mais  le  pape 
Urbain  Vlll  modéra  cette  exemption  l'an 
1G3S,  cl  déclara  que  les  évéques  auraient 
droit  de  visite  dans  les  hôpitaux  où  il  n'y 
aurait  pas  douze  religieux,  el  qu'ils  esami- 
ueraienl  les  reccltes  el  les  dépenses  conjoin-, 
leincnl  avec  les  provinciaux  et  les  autres 
supérieurs  de  cel  ordre.  Cela  n'empêcha  pas. 
l'archevciue  de  Cagliari,  en  1G39,  de  préleu-  ] 
dre  le  droit  de  visite  dans  tous  les  hôpitaux  qui  \ 
él, lient  dans  son  diocèse,  quoiqu'il  y  eût  plus 
de  douze  religieux  ;  mais  le  pape  Alexandre 
Vil,  par  un  bref  du  3  novembre  de  la  même 
année,  ordonna  que  celui  d'Urbain  Vlll  sera.l 
exécuté,  et  que  Ion  s'en  tiendrait  à  ce  que  ce 
pontife  avait  décidé. 

Depuis  le  bref  de  ClémennUI  de  l'an  1592, 
dont  nous  avons  parlé  ci-dessus,  les  religieux 
d'IIspagne  ont  toujours  été  séparés  des  reli- 
gieux des  autres  hôpitaux  situés  hors  dcco 


559                                           DICTIONNAinE  DES  ORDRES  UELICIF.IX.  540 

ro\auiiie;ile  sorlo  qu'il  v  nru  doptiisrclwips  les  lro:s  ,iiis  lo  chnpitre  provin<ia),  dans  le- 

ili'iiv généraux, riiiipdurl'Ivsi'.Tjiipfili'sliKli's  <|iicl  (li.'<]iic   province  élil   son    provinri.il. 

«trculcnlalcs,  c\  l'iUiTc  pourl.i  Frnnio.  l'AlIc-  ilonl  rofiice  ne  ilure  (]uo  trois   ans,  cl   celui 

iii;ii;nc,liiroii>L;ne«l  i  Italie,  qui  f.iilordin.iin-  du    péneialsix    ans.  (Jiiaiil   à    leur  linlMllc- 

iiienl  sa  résidence. 1  Uonio.l.es  luipil'Hix  d'Iis-  PK-nl,  il  tonsisie  en    une  robe  de  dr.ip  hruu 

p.ii;n''   sont  divisés  on  (iini\  rri)>inccs,  lune  aviciin  scapulaire  c'e  n  èine  et  un   ciii  ucc 

soiîs  le  nom  d'Andalou'ie,  l'autre  sous  celui  rond,  la  tunique  ou  robe  Clanl  serrée  d'une 

(le  Caslille  ;  et  comme  l'ordre  a  lait   de  plus  eeiiiliirc     de    cuir   noir    (1).    Ils    n'ont    que 

firands  prO';rés  dans  les  Indes,  il  y  est  divisé  d.  s  i  hemises  de  ser|;e,  et  ne  courbnnl  aussi 

eu  quatre  {;ran(les  provinces,  qui   sont  celle  que  dans  des    linc  -nls  de  serge.   Les  arnus 

du  l'erou.de  la  Nouvelle-Espagne, delà  Terre-  de  cet  ordre  sont  d'azur  à  une  grenade  d'or 

Ferme,  cl  des  I'iiilip|pinf  s.  surmontée  d'une  croix  de  méuic,  l'ccu  timbré 

Les  autres  liopilaux  (jui  reconnaissent  le  d'une  couronne, 
général  de  Rome  sont  l'ivisés  en  sis  provin-  .le  m'étonne  que  M.  Herinant,  dans  son 
ces.  Ce  ne  fut  que  l'an  ItiOl  que  ces  religieuv  Histoire  de  rLtablissemenl  des  ordres  reli  - 
passèrent  en  France  par  Ieni03en  de  la  reine  pieux,  parlant  de  saint  Jean  de  Dieu,  ait  ilit 
Marie  de  Médicis,  qui  y  mena  avec  elle  le  que  c'est  le  pape  Innocent  \II  qui  l'a  mis  au 
frère  Jean  Donclli  et  quelques  autres  reli-  calalo^-uc  des  saints,  puisque  sa  canonisa- 
gieux  d'une  piélé  exemplaire,  à  qui  elle  tion  s'est  faite  de  nos  jours,  el  que  personne 
donna  une  maison  au  faubourj;  Saint-Ger-  n'ignore  qu'elle  a  été  faite  par  le  pape 
main  ,  où  ils  ont  bâti  un  bôpiial  qui  s'esl  Alexandre  Vlll  ;  et  qu'il  ait  encore  mis  que 
rendu  célèbre  dans  la  suite  par  la  ma;;nifi-  ce  fut  Léon  X  qui  approuva  sou  ordre  C(.m;nc 
cence  de  ses  bâtiments.  Au  mois  de  mars  de  une  société,  l'an  lo20,  el  qui  donna  la  rè|;le 
l'année  1002,  Henri  l\  leur  accorda  des  Ici-  de  sainl  Augustin  pour  lis  sœurs  converses, 
très  patentes  pour  leur  é  ablissement,  avec  puisque,  l'an  1520,  sainl  Jean  de  Dieu  n'a- 
permission  de  faire  bâtir  et  construire  des  vail  pas  encore  songé  à  prendre  soin  des  pau- 
Iiopitaux  dans  toutes  les  villes  el  les  lieux  de  vres  malades  ;  qu'il  s'enrrtia  dans  l'armée  de 
son  royaume  où  ils  seraient  appelés.  Lou'S  l'empereur  l'an  lb22,  qu'il  rttourna  peu  de 
Xlll,  l'an  1017,  leur  en  accorda  d'autres  qui  temps  après  au  service  de  son  premier  maî- 
conlirmenl  rétablisseincnl  de  leur  ordre  en  lie,  où  ayant  encore  demeuré  environ  dix 
France,  érigé  en  vraie  religion  par  le  pape  ans,  il  alla  pour  la  seconde  fois  à  la  guenc 
rie  V,  et  qui  veut  que  ces  religieux  soient  l'an  lo.'52  ;  qu'il  ne  commei-ça  à  se  couver  ir 
reconnus  pour  tels.  Ils  oui  un  vicaire  gêné-  qu'en  15  JO,  que  son  parfait  renonremcnl 
rai  lésidaut  à  Paris,  lequel  a  droit  de  visiter  au  monde  n'arriva  qu'eu  l.')30,  el  qu'enfin  il 
tous  les  liôpilaux  du  royaume,  qui  sont  au  ne  commença  s  n  premier  bôpilal  iiu'en 
nombre  de  vingt-quatre.  Ces  religieux  fran-  15iU.  (Juant  aux  rel  gieuses  converses,  à  cpii 
çais  ont  aussi  traversé  les  mers,  et  onl  éla-  le  mèu;e  pape  donna  la  règle  de  sainl  Au- 
iili  trois  hôpiiaux  considérables,  un  dans  guslin  (selon  .M.  Heimant),  elles  n'élaienl 
l'Amérique,  uu  dans  l'ilc  de  la  Guadeloupe,  lias  sans  doule  de  l'ordre  de  Saint-.!ean  de 
nie  troisième  dans  celle  de  Saiiit-Chrisioplic.  Dieu,  puisqu'il  n'y  a  jamais  eu  de  religieu- 
Lcs  religieux  de  Pologne  onlaussi  un  vicaire  ses  de  cet  ordie.  Il  a  suivi  apparemment 
général.  Schooneb.k,  qui  dit  la  même  chose  ;  mais  on 

Leurs  constitutions  furent  approuvées  par  s'égare  souvent  eu  le  prenant  pour  guide. 
le  pape  Paul  V  l'an  1C17.  Ils  se  lèvent  deux  François  de  Castro,  Antoine  (ïieva,  de 
heures  avant  le  jour  depuis  la  fête  de  tous  Loyac,  de  Ville-Tliiery,  liaillil  et  Giry,  dans 
les  saints  jus(iu'à  Pâques,  pour  aller  à  l'ora-  la  Vie  de  siiinl  Jean  île  Dieu.  Henscben., 
toire  ou  à  l'église,  où,  après  leur  office,  qui  apud  (lollaïut.  loin.  III,  Aprilis.  Silvesir. 
consi-le  pour  ceux  qui  ne  sont  pas  prêtres  Maurol.  Mnr.  ovean  di  tiill.  gl.  Relig.,  lib. 
en  un  certain  nombre  de  Pater  cl  d'Ave,  i's  v,  pag.  k'.iO.  lîarbosa,  de  Jur.  ccclrs.  Ascag. 
font  oraisonmentale  deux  foispar  jour,  l'une  Tambur.,  rfr  yur.  aObal.  Ronanni,  Cnlaloy. 
le  matin  et  l'autre  avant  le  souper;  mais  Oïd.  relig.  llt:Tm;in[,  L Idl'liss. des  Ord.  rcliij. 
depuis  Pâques  jusqu'à  la  Toussaint,  l'o-  Scboonelnli,  JlisC.  des  Ord.  rclig.;  et  les 
raison  du  malin  est  remise  <à  une  heure  après  Cousliluiiutis  de  cet  ordre. 
dii'.er.  Le  uialin  au  S'rlir  de  l'oraison,  et  le  A  l'époque  où  le  P.  Hélyol  écrivait  l'his- 
soirà  l'issue  du  réfectoire,  ils  vont  à  l'bopilal  toire  de  l'oidre  de  la  (Ibaritê,  cet  institut 
pour  y  visiter  les  pauvres  et  les  consoler,  et  pouvait  se  glorilier  d'un  avantage  cjne  noire 
ils  y  restent  le  matin  jusqu'à  la  messe,  cl  le  auteur  n'aurait  pas  mantiué  de  signaler  sans 
soir  jusqu'à  l'heure  du  silence.  Oulre  les  doule,  s'il  l'avait  connu.  Les  PI'.  Norbert, 
jeûnes  prescrits  par  ITÎglisc,  ils  jeûnent  en-  Ilippolyte,  Anselme  et  lùislache,  avec  dis- 
corc  Pavent,  les  vendredis,  la  veille  de  la  huit  confrères,  tous  religieux  de  l'ordre  de 
Nativité  de  la  sainte  Vierge,  de  Saint-.\ugus-  Sainl-.leau  de  Dieu,  soulïrirenl  le  martyre 
tin,  el  du  patron  de  leur  église.  Ils  prennent  eu  Iti.'jli,  les  uns  à  ^'a^sovic,  les  autres  à 
la  discipline  tous  les  vendredis  (  excepté  le  Lublin.et  les  autres  à  Lovilz.  Un  artiste  bo- 
teuips  pascal  ;  el  pendant  l'avenl  cl  le  caré-  louais,  J.  l''abl)rl,  a  consa<  ré  son  burin  à  re- 
ine, les  lundis,  mercredis  el  vendredis.  Tous  présenter  celle  scène  louchante  cl  précieusn 
les  six  ans  ils  lienn  ni  le  chapitre  général,  à  Tordre  de  la  Charilé  dans  une  gravure  nui 
ilans  lequel  on  élit  le  majeur  général,  cl  tous  porte  cette  inscri[iliun  :  VcncraliiliS  servi  Dei 

(l)  luy.,  j  la  lin  Ou  vul.,  a"  loi*. 


Norherttis,  Ifippolylti.i,  Anse'ivus   et  Fnstn-  ilispi-.sn  l;i  cour  sur  ttii    nnuvpan  plan  et  dé- 

chius  u'diris  S  Jo'atuu's  de  Ho,  qui  hnn  mm  rora  rciilrcc  <!c  l'hôpila!  d'un  pclit  porclie  à 

ucloiliciin  soihdibus  ul  Cliristi  fv'.c.m  liierev-  colonne  >nns  bases,  (J"un  Irè^-bon   slyle.  Ce 

tur,(inno  1655,  ab  liwrclicis  pnrlim  Ungriris,  poicho  a  clé  gravé,  el  préservera   ainsi    de 

pni  tint  Surcis,  parlim  Mosci^,  qui  Yorsoviœ,  Irmber,  ;:ii    hou!  lie  (|uel(]ues  années,  dans 

qui  Lublini,qui  Loticii  diverso  loriniiilorum  l'erreur   qui    e(infonilr;.it    ce   porliiiiie   avcr, 

(jeiiere   ad  moitem  acii,  uUvvniv.  in   Uumiiio  celui  (]i]'oii  vient  de  lerniiner  rcretninenl  à 

cbicrutH  f//')n.Nous  ignorons  si  i'ordri^  a  fail  l'entrée  du   même  élablissement,  rue  J.icob. 

des  (l(  inartiies  pour  auencr  la  constat  lion  Au  portail  de  M.  Antoine,  cet  arclii  ecle  vou- 

de    leur  mariyre   el   rauloiisalion   de   kur  lui  faire  un  es>;ai  de  l'ordre  iloriiiut»  grec,  el 

culte.  tlonner  une  légère  idée  de  ces  propylées  cé- 

Au   ilernirr  siècle,   l'inslilul   des   FF.   de  lèbres   (lu'alors   les   professeurs   d'arcliitrc- 

Sainl-Jean   de   Dieu   continua  de  se   rendre  turc    comineiiç  lent  à  faire   connaître   dans 

utile  cl  de  s'étendre.  Les  souverains  roniifes,  les    Irçuns   académiques.   Les    connaisseurs 

depuis  saint  Pic  V  jusqu'à  Léon  XII  (peut-  trouvèrent  qu'il  avait  :rop  francisé  son  genre 

être  jusqu'à  ses  deux  sucresseurs),  l'ont  en-  grec.  Au  resl:  ces  propylées  sont  mis  de  nos 

riclii  p.ir  des   bulles,   brefs   et  décreis  nom-  jours  presque  à  tous   les  étabiisseui'nîs  [lu- 

breux  (le  plusieurs  privilèges  el  des  Iréoors  bliis. 

de  ri'glise.  La  maison  de  Paris  était  le  cbef-lieii   de 

Le  P.  liernard,  si  connu  par  ses  o?uvrrs  toutes  celles  du  même  ordre  établies  dans  1h 

de  charité,  fut  inhumé  (et  après  lui  M.M.  Le-  royaume  et  dans  les  colonies.  Celai:  aussi  le 

gauffre  el  Lejuifs   très-dignes  prêtres,    ses  seul  noviciat  et  la  reiraile  des  religieux  hors 

discipli's)  dans  l'église  de  l'hôpital  de  laClia-  de  service.  Cet  hôpital  royal  était  admiuisiré 

rite  de  la  rue  des  Saints-l'ères,  à  Paris. Cet!e  non  comme  les  autres  hôpilaus  de  malades, 

maison,  si  importante  par  le  nombre  di'  s  /s  par  des  séculiers,  mais  par  l'ordre  même  des 

religieux  el  de   ses  tnaladcs,  le  fût  devenue  religieux  qui  s'y  cons:icraient.  Le  bien  ii'y 

bien  davantage  si  elle  eût  vu  réaliser  tous  souffrait  donc  point   les  entraves  ap[)orlces 

les  projets  (ju'avail  formés  sur  elle  le  cardi-  trop  souvent  au  zèle  des  aun.ôniers  et  des 

nal  de  Uicbelieu,  qui  la  protégeait  tout  par-  religieuses  dans  les  èlablisseniculs  du  même 

ticulièremenl.  C'est  lui  qui  fit  cor.struire   la  genre.  On  avait  mal  à  propos  répandu  dans 

salle  dite  de  la  \'ieri;e,  où  étaient  les  blés-  le  UJOnde,  par  une  erreur  populaire  qui  s'é- 

sés,  du  temps  des  Frères.  11  voulait  en  con-  tait  inlroduite  jusque  chez  les  personnes  de 

slruire  d'autres  pour  y  contenir  jusqu'à  cinq  condition,  qu'il  y  avait  dans  celle  maison  des 

cents  lils.  La  mort  arrêta  ses  proje  s.  chambres    particulières   dans   lesquelles   ou 

Au  milieu  du  derniersiècle,  il  y  avait  deux  était  reçu  en   payant.   La  cho-e  n'élail  pas 

cents  lils    pour  les  pauvres   malades, qui  y  vraie;  mais  les /'oH(/a/r'ii»s  et  \es  bienfaiteurs 

élaienl   parfiiement  soignés,  sans  compler  avaient,  par  rapport  à  ceux  pour  qui  ils  s'in- 

les  secours  qu'ils  recevaient  dans  lu  maison  Icressaienl,  des   préféicnces   el  des   fieilités 

des  convaleaccnls,  rue  du  lîae.  que  leurs  libéralités  leur  avaient  ae([ui-es. 

Celle  maison   des    convalesrents,  où  l'on  Lors  de  l'expulsion  des    Irères  de  Saiiil-Jean 

consolidait  la  santé  d'un  ceriain  nombre  de  de  Dieu,  Ihôpital  pouvait  recevoir  environ 

malades  sortant   de    l'hôpital   de   la  (Mi:irilé  deux  cent  trente  malades  (1),  «  (jui  y  étaient 

(on  en  recevait  douze  chaciue  semaine),  élail  soignes,  dl  un   hihtorien  distingué,  avec  un 

due    aux    bienfai'.s   (îe   dame  Angéli(iue    de  soin,  un  zèle  et  une  cli.'rité  qu'on  ne  pouvait 

Faure,    veuve  de  Claude  de   îîullion,  niar-  tiop  admirer.  «   I^es  infirmei  les,  tenues  par 

quis  de  Gallardon,  et  garde  des  sceaux.  Elle  les  religieux   de  France,  passaient  pour  des 

datait  de  l'année  1G52  cl  était  desservie  par  modèles  dans  l'ordre.  Quand  on  voulut  bàlir 

quatre  religieux.  l'Iiopiial  de  Milan,  c'est  en  France  qu'on  vint 

L'église  de  l'hôpital  de  la  Charité,  que  l'on  en  eiTel  se  modeler.  Les  religieux  de  l'hôpi- 

voil  encore  rue  des  Saints-Pères,  el  (lui  sert  lai  de  la  Charité    de    Paris   possédaient   une 

aujourd'hui   de   vcsiibule,    fut    entièrement  pharmacie,  un  jardin  botanique  el  un  cabi- 

teruiinèe  en  1733,  el   on   y   mil  la  dernière  net  d'histi>iie  nalurelle.  (!n  reui,iri|uail  dans 

main    en   y    faisant    construire     le     portail  leurs  salies  et  dans  leur  église  plusieurs  la- 

d'assez  bon  goût  cju'on  y  \oil  encore,  el  (jui  bleaux   et  monuments   bien  exécutés.  Nous 

fut  élevé  sur  les  dessins  de  Cotte,  archilcete.  citerons  seulement  la  statue  du  Pauvre  Prc'- 

lîn  17;i8,  les  religieux  acquirent  une  portion  Ire  (le  P.  IJernard),  en  terre  cuite,  qui  avait 

de  terrain  aliénée  peu  de  temps  auparavant  été  faite  par  un  sculpteur  nommé  IJenoît.  Ils 

par  l'abbaye  de   Saint-Germain-des-Prés,  cl  avaient  chez  eux  un  religieux  Inrl  habile,  le 

sur  cet  emplaccmeni  ils  lirent  bâlir  des  salles  P.  Corne,  qui   était   surtout   très  adroit  dans 

plus  vastes   pour  y  recevoir  un  plus  grand  l'art  d'extraire  la  pierre,  avant  que  la  lilho- 

nouibrc  de  malades.  M.  Antoine,  architecte  trilie  moderne  fût  connue.  Ailleurs,  qael(|ucs 

de  l'hôlel  des   oionuaies,  donna  le  dessin  et  confrères  se  f.iisaieni   remarquer  par  leurs 

dirigea  la  construction   d'une  de  ces  salles,  connaissances  chirurgicales,  el  nous   p-jU' 

(I)  L'hospice  des  convalescents  av.iit  aussi  pris  de  (pie  celle  maison  avait  en  pour  propriétaire  l'ami  de 

rexleiisiuii,  el,  vers  les  derniers  temps,  on  roniptiiit  S.  FraïKjnis  de  Siles,  Le    CaiiuK,  évè  |ue  de  IJelley, 

dans  celle  maison  viiigl-tni  lils  poiii' les  eoiivalecenls,  ipu  la  vendit  an  Liérantde  li    (oiidalriro.  Elle  esl  dc- 

(lui   [Kiiiv.deiil  y  lesier  liiiil   jouis.  [Suus    dirons   iei  venue  depuis  une  fabr  (pic  d'ouviages  en  cuivfd» 
;  eut  ceux  ijuc  ce  i;en.c  de  iciisti;;i;euicuts  inlciesie. 


543 


KCTioN.N.MH!-:  rn:s  oi'.onr.s  nri  I!T!F,i;x. 


•MV 


vous  ciliT  siirtiiul  lit»  r,-l  j»ii'ux  de  la  m.iis'>n 
«II»  Sciilis,  i|iii  a  suivécu  à  la  lourmiMite  rc- 
vohilioiinairi'. 

I.(»r<<iut;  to  P.  Ili'Ijol  écrivait  ,  «ii  pi'u 
ir.-iniircs  •ipri^'i.  l'onlrc  de  Saiiil-Jonn  de  Dieu 
niinpUiil  en  Frniire  el  d  ms  nos  rohmies 
irtMile-qi'.'i're  élahlissomenis,  dnnl  voici  la 
li^te  ,-il|>li.'ib(!>liqiie  :  Avon  pr^s  de  Fonl:iinc- 
lilfflu,  Ilrest.  Cadillac,  Celles,  Cli;irenlon, 
Cli.ileau-'riiierry.  Clernionl,  Comloin,  la  mai- 
son des  Coiivalesrcnls  (à  I'aii>),  l'iflial,  Fon- 
l.iinehleau  on  Avon,  Fiirt-Uoyal  à  la  Marli- 
nii|ue,  rorl-Sainl-Pierre  à  la  Marlinique, 
Gavclle,  (îraim  illc-la-rcinluiièrc  (diocèse 
de  Houen),  drenolde,  la  riuadclou;ie,  le  Cap- 
l'iançais  ,  ile  Sainl-Domingiii') ,  La  Hoclielic, 
Lesler  (ijuarli.T  de  I.cofiani'',  île  Saint-Domin- 
piie) ,  l.oiiis-liour'^  (î'.e  Uojalc,  au  Cina.la), 
.Mcl/,  Moulins,  Niort,  l'aris,  Poiiers,  Pontor- 
siin  ,  Itunians,  Roye,  Saint-Martin,  Saintes, 
Senlis  ,  \'esins,  Vitry-le-Français,  Vizilles. 
Ma:s  d  ^ns  le  rours  du  dernier  siècle  le  nom- 
Itre  en  élail  anirmenlé;  car,  suivant  un  cal- 
cul que  nous  croyons  basé  sur  des  ri>nsei- 
giienierits  cxaris,  Finstitut  de  Sainl-Jeaii  do 
JJii'u  desservait,  dans  le  royaume  et  ses  co- 
lonies, environ  quarante  IiAjiilaux  contenant 
Iroi<  ccnis  religieux  et  quatre  niillu  lits.  Le 
«lernier  éialiFssenicnt  qu'il  eût  formé  clait 
sans  douie  l'hospice  (]ui  se  voit  encore  près 
ih-  la  barrière  d'Enfer,  à  Paris.  Le  di:c  de  la 
Itoclii  foticaull  ,  désireux  d'acquérir  deux 
inaisons  ((ue  b  s  r.'lii^ieus  île  la  Cliarilc  pos- 
séilairnl  dans  la  rue  de  A'arennes,  al  linl 
celle  acquisition  de  leur  complaisance.  Par 
re.i>nn;iissance  et  par  un  clTct  de  la  bienfai- 
sance h.ibiluelle  de  celle  généreuse  finiilb', 
il  contribua  aux  frais  de  la  fondation  (|ue 
fireni,  en  conséjuciue  de  la  vent'-  de  leurs 
maison--,  el  de  burs  propres  deniers,  les  rc- 
liïicux  d:'  Il  Charilé,  d'un  hos|i<e  destiné 
flux  malaib's  d'une  classe  élevée.  Par  <;ra;i- 
luile,  ces  reli^'ieux  donnèrent  au  nouvel  é(a- 
biisscncnt  le  nom  lï'liofpire  de  la  Hucl^rf^u- 
ifintlt,  ([ui  lui  est  res!é.  Cet  boypiee,  fondé 
«juebiues  années  seulement  avaîil  la  révolu- 
lion  fiai  r  lise,  éiait  tiesliné  à  recevoir,  en 
payant,  des  malades  à  qui  le  séjour  de  Paris 
liait  nécessaire  it  qui  ne  pouvaient  déeem- 
inenl  lo;;er(lans  les  b(')pilaux,  car  c'étaient  d(  s 
prélals.  des  milil.iires  en  f^i  aile,  etc.,  etc.  Un 
«'lablisscment  analo;;ue,  tenu  par  les  mêmes 
reliiîieux,  existe  aujourd'hui,  mais  sur  de 
niiiiiulres  propoilions  peiit-éire,  dans  la  rue 
Plumet ,  à  Paris.  Noos  en  parlerons  dans  no- 
Ire  quatrième  volume. 

L'ordre  avait  au  dernier  s  èrle  deux  mai- 
sons à  Home  :  l'hop  lai  de  Sainl-.lean-Cali- 
bite  cl  l'hospice  de  Spaj;nuoli  ou  des  Fspa- 
pnols.  l-;i,  m  178:),  le  snpérienr  Relierai,  ou, 
|>lus  régulièrement  pari  ml,  le  vieaTe  géné- 
ral, en  France,  ctaii  le  P.  liomuald  Niuccnl, 
résidant  ;'i  Paris. 

Comme  cet  ordre  vénérable  a  eu  une  snric 
de  rrcalioii  nou\clle  en  se  rétablissant  en 
t'ranre,  où  d'ai  leurs  un  bref  de  Léoii  \1I 
lui  a  lionne  une  le;,'ère  modifKalion  adai)téc 
^  l.i  li'gislalion  de  notre  pays,  nous  consa- 
trcruiis  un  article  spécial  à'i'liibloirc  de  sa 


ren;ii>-sancc  en  France.  Foi/.  Ji;vn  oii  Dieu 
(Oiilrc  (le  Sain'-),  :\u  Srpri.::MiNr. 

Ilrriiril  des  huile'  ri  des  Irrfs  i/iii  conrcr- 
iirnl  l'ordre  de  lu  Chnriic  n\  Frniicr  ,  vol. 
iii-V",  1723.  .Silice  du  Recueil  des  biillis  et  des 
brefs  qui  concernent  l'ordre  de  In  Charité  en 
Fiance^  17'i7,  Tableau  historir/uc  ri  pillorrs- 
g'ie  de  l'aris.  8  vol.  in-8°,  par  J.-li.  de  Snint- 
Vlctiir.  Htnt  ou  Tableau  de  la  ville  de  Paris, 
P'ir  de  IJcaumonI,  in-8",  17(i2.  \oles  fournira 
par  les  rrlitjieux  de  la  mciisun  de  l'aris.  .Votes 
recH'illics  passim.  Iî-d-e. 

JKAN  DF  LA  PI'NIÏFNCE  (  Ueligiluses 
DE  Saix't-K  Voi/.  Noli. 

JFAN  DF  JÉUUSALEM  (Saint-).  Voy. 
Malte. 

JFAN  DE  LA  PUftltLA  (Ukkorme  des  Fbax- 

CISCAINS   DU   IllEN'UKl'Unrx). 

Le  bienheureux  Jean  de  la  Puébla  est  re- 
connu pour  le  premier  auteur  de  ce  le  étroite 
observance,  que  tant  de  relijjieux  de  l'ordre 
de  Saint-François  ont  embrassée  ,i  son  exem- 
ple. Il  était  comlc  de  lîellacazar,  tils  d'Al- 
plions.-  de  So'o-M  ijor  et  d'Flvire  de  Zimiiia, 
l'un  et  l'autre  di  s  plus  nobles  maisons  d'Ks- 
pa2;ne  et  alliés  à  la  maison  royale.  Jean  de 
la  Puébla,  méprisant  tous  ces  avantages,  so 
fit  religieux  de  l'ordre  des  iMtnites  de  Sainl- 
Jèrônie.  vers  l'an  l'i-'fi,  dans  le  couvent  do 
Notre-D  me  de  Cuad  iloupe  ;  mais,  quatre 
ans  après,  voulant  embrasser  une  vie  plus 
austère,  il  a!a  à  Uome,  où  ayant  été  reçu 
f.ivorablemeiil  du  pape  Sixie  i\',  il  lui  de- 
manda permission  de  passer  dans  l'ordre  des 
Fières  Mineurs  de  l'Observance,  ce  (|ue  ce 
pon'ife  non-seulement  lui  accorda,  mais  il 
voulut  lui  donner  lui-même  l'habit  de  cet 
ordre,  et  après  lui  avoir  fait  faire  profession, 
il  l'envoya  proche  Assise,  au  couvent  des 
prisons,  au  mont  Subaze  ,  delà  province  do 
Saint-l'raiiçois,  ayant  à  cet  effet  adressé  un 
bref  au  vicaire  de  cette  province,  daté  du  '24 
janvier  l'iSO,  par  lequel  il  lui  ordonnait  do 
le  recevoir. 

Jean  de  la  Puébla  y  demeura  pendant  sept 
ans,  a[;rès  lesquels  il  fut  oiilipè  de  le  ()iiitler 
par  ordre  du  pape  Innocent  \lll,  qui,  à  la 
sollicit.'^lion  de  ses  parents,  lui  ordonna  de 
re'ourner  en  l'spa|;ne  pour  prendre  la  con- 
du'îe  el  1 1  tnlellc  de  son  neveu,  le  jeune 
comlc  de  Rellacazar,  devenu  orphelin  par  la 
mort  de  «on  père,  qui  avait  été  lue  dans  la 
bala  lie  de  (î-enade.  11  obéit  aux  ordres  du 
piinlife  .  et  arriva  en  ICspagne  l'an  l'i87; 
mais  l'ol  éissance  (|ul  lui  avait  fait  laisser  la 
province  de  Saint-François  ne  lui  Ata  pas 
i'eslime  el  l'amour  qu'il  avait  pour  les  ob- 
servances qu'il  y  avait  pratiquées;  car,  ;'i 
peine  fut-il  arr.vé  en  Fspafrne,  qu'il  songea 
à  y  élali'ir  une  pareille  reforme  cl  même 
(lins  austère  au  sujet  de  la  pauvreté,  ayant 
obtenu  (lo'ir  cet  elTet  quatre  relii^ieux  de  la 
même  province  de  Sa  nt-Franrois  ,  qui  lui 
furent  envoyés  par  le  pape  en  li.*-'8,  afin  qu'ils 
lui  aidassent  dans  rétablissement  de  sa  ré- 
forme ,  (]u'il  coumiença  l'année  suivante, 
sous  la  protection  de  la  reine  Isabelle,  avec 
aulaut  (l'cdilicaliou  |iuur  le  public  iiuc  de 


un 


JFA 


jr.\ 


ua 


jalousie  pour  les  Conventuels  et  les  Ohser- 
vanls  dlîspngne,  qui  ne  inanquèronl  pas  de 
le  Iraverscr  dans  ses  pieux  desseins.  Mais, 
ayant  eu  recours  au  ciiapilre  général  de 
l'Observance,  qui  se  tenait  l'an  1489  à  La 
llochclle,  il  obtint  du  vicaire  général  Jean 
Croïn  et  des  Pères  du  <  hapilre  la  permission 
de  fonder  deux  couvents  sous  le  litre  de  cus- 
lodie,  au  mont  de  Moréna,  communément 
apjielé  Sierra  de  Moréna.  Muni  de  cette  per- 
mission, il  se  relira  dans  celte  solitude,  où  il 
jeia  les  fondements  de  sa  reforme  sous  le 
iilie  (le  l'Elroiie  Observance,  et  y  bâtit  un 
pauvre  couvent  fait  de  branches  d'arbros  et 
de  joncs,  dont  les  murailles  étaient  revêtues 
de  boue  et  de  paille  mêlées  ensemble. 
Noiiolistant  cette  grande  pauvreté,  tant  dans 
ce  bâtiuirnt  que  dans  les  autres  choses  de  la 
vie,  les  religieux  (lui  y  demeuraient  étaient 
très-contents;  mais  le  démon,  jaloux  de  leur 
repos  cl  envieux  du  bonhaur  do  il  i!s  jouis- 
saient dans  cette  solitude,  ayant  exciié  un 
embrasement  dans  un  bois  toisin  du  mona- 
stère, y  poussa  les  flammes  avec  tant  de 
violence,  que  ces  saints  religieux  eurent 
bien  de  la  peine  à  en  retirer  le  saint  sacre- 
ment, tout  le  reste  ayant  été  réduil  en  cen- 
dres en  un  moment.  Mais  ils  ne  perdirent  pas 
courage  pour  cet  accident,  et  en  peu  de  temps 
ils  rebâtiienl  un  autre  cou^ent  aussi  pauvre, 
qui  fui  dédié  en  l'honneur  de  Notre-Dame 
d"s  Anges,  comme  le  pretuier  l'avait  été. 

Jean  de  la  Puébla  eut  eu  li93  un  second 
couvent  à  Bellicazar,  dont  Alphonse  ,  son 
pupille,  le  mit  en  possession  ,  afin  qu'il  fut 
plus  (irès  de  lui,  ayant  obligé  d'autres  reli- 
gieux de  l'ordre,  qui  y  avaient  été  établis 
dos  l'an  1474,  de  le  leur  céder.  La  vie  que  ce 
saint  réformat  ur  mcn;!it  était  si  austère, 
qu'il  allait  toujours  nu-pieds  sans  sandales. 
Il  n"élail  velu  que  de  pauvres  habits  tout  ra- 
piécés ;  sa  nourriture  n'était  que  de  IcSguuies 
insi|iides,  et  quoique  son  c  rps  fût  tout  atté- 
nué |iar  les  mort  licalions  ,  il  en  inventait 
liius  les  jours  de  nouvelles.  EiiQn,  tout  atté- 
nué par  la  pcniicnee  ,  il  mourut  dans  son 
couvent  de  Itellacazar,  l'an  1493.  Soixante 
ais  ap:ès  sa  mort  ,  un  ouvrit  son  lonibea:i, 
d.ins  lequel  on  trouva  son  corps  enrorc  tout 
entier,  qui  rendait  une  odeur  agréable.  L'on 
porta  sa  tête  à  son  pieuiii  r  couvent  de  ?'Jotre- 
bame  des  Anges;  les  religieuses  Claiisses  de 
Kellacazar,  ou  ses  deux  sœurs  tlisabelh  et 
Eléonore  de  Solo-Major  avaient  piis  l'h  ibil, 
eurent  pour  partage  de  ses  sainte-  dépouilles 
sa  pauvre  tunique  cl  son  ciliée.  Sou  neveu, 
le  couUe  Al[)bonse,  après  avoir  perdu  sa 
femme,  Philippe  de  Portugal,  se  fil  religieux 
de  celte  rélorme,  et  [nourul  en  odeur  de  sain- 
teté dans  ce  couvent,  qui  fut  a^^randi  l'ai 
1510,  cl  bàli  de  pierres  par  les  soins  du  Père 
Franrois  des  Anges,  qui  a  été  dans  la  suite 
général,  et  à  quelque  dislance  du  couvent, 
il  fit  faire  quatre  ermitages,  où  les  religieux 
se  retirent  tour  à  tour.  Ils  n'y  peuvent  pas 
demeurer  plus  d'une  semaine.  Le  samedi,  on 
nomme  les  quatre  religieux  qui  doivent  aller 
dans  CCS  solitudes.  Le  dimanche  matin,  après 
avoir  cnicndu  la  messe  au  couvent,  ils  de- 


mandent la  b:'nédic!ion  au  supérieur,  el  vont 
en  silence  à  l'ermitage  qui  leur  a  été  destine. 
Ceux  qui  en  reviennent  après  avoir  euleudu 
la  messe  à  l'ermitage,  entendent  encore  au 
couvnt  la  conventuelle,  et  lorsque  l'on  a 
sonné  le  dîuer,ils  se  prosternent  à  la  porte  du 
réfectoire  pour  baiser  les  piedsàtous  les  reli- 
gieux qui  y  entrent.  Ils  gardent  toujours  un 
étroil  silence  dans  leurs  solitudes.  Jamais  ils 
n'y  mangent  rien  de  cuit  ni  qui  ail  eu  vie,  el 
ils  se  conlenient  de  racines,  d'herbes,  de 
fruits,  de  pain  et  d'eau,  s'abstcnanl  même  de 
laitage.  Ils  peuvent  néanmoins,  s'ils  veulent, 
assaisonner  leurs  herbes  d'huile  et  de  vinai- 
gre. Ils  prenneut  trois  fois  la  discipline  eu 
vingt-quatre  heures,  tant  de  jour  que  de 
nuit,  lis  ne  sont  point  obliges  au  travail  ma- 
nuel ,  afin  de  vaquer  plus  longtemps  à  la 
méditation,  (  t,  hors  le  temps  d.-  l'oraison  el 
de  l'olfice  divin,  ils  doivent  s'appliquer  à  la 
lecture  spirituelle. 

Ce  cou\eul  fut  encore  brûlé  en  Io4j  ;  il 
n'y  resta  pas  pierre  sur  pierre;  les  arbres 
mêmes  qui  étaient  aux  environs  furent  aussi 
ronsumés,  en  sorte  que  ce  lieu  fut  réduit  en 
un  désert.  Mais  les  religieux  ne  voulant  point 
pour  cela  l'abandonner,  un  novice,  frère  du 
duc  de  Véjar,  qui  n'avait  pas  encore  renon- 
cé à  son  patrimoine,  le  fit  rebâiir  plus  soli- 
dement qu'il  n'était  auparavant.  1  h. lippe  I!, 
roi  d'I'^spigne,  augmenta  la  dévotion  et  lu 
beauté  de  ce  lieu  lorsqu'il  y  passa  en  a'iaiil 
faire  la  guerre  contre  les  Maures.  I!  y  laissa 
une  grosse  aumône  pour  faire  un  dortoir  il 
euibellir  ré.;lise,  et  donna  à  ces  religieux  un 
bois  i|ui  était  dans  leur  voisinage,  avec  uu 
grand  pâturage  de  deux  milles  de  tour. 
(Ju.iiorze  couvents  s'étant  joints  à  celui-ci, 
on  en  a  formé  une  ]:rovince  sous  le  ti  re  des 
Anges,  qui  fui  érigée  l'an  1518  el  qui  fut  in- 
corporée dans  la  suite  avec  la  Hé,;u!iire  Ob- 
servance. Leur  habillement  est  icmblabîe  à 
celui  que  nous  avons  donné  à  cet  article. 

Francise.  Gonzag.,  de  Orig.  Seroph.  relig.; 
Luc  Wading.  ,  Anncl,  Muwr.  ,  imn.  VU  ; 
Dnminic.  de  tîubcrnatis,  Orb.  Seraph.  Ub.  v  ; 
Marian.,  Citron.  O  serv.  striclior.  el  refoim., 
Ub.  1,  cap.  1  ;  et  And.  de  Guadaloupe,  Ilist. 
de  lu  l'rovinc.  de  lus  Atujelos. 

JEAN  DES  VALLÉES  ET  DE  GiiNTlL  DE 
.'t  l'OLE  1  TE  f  KÙFOUME  Diis  Franciscains 

Dli). 

S  JUS  le  généra'at  de  GérauJ  de  OJonis,  qui 
fut  élu  dans  le  chapitre  général  qui  se  liiitj'i 
Paris  l'an  i;J29,  les  religieux  de  l'ordre  du 
S  lint-François,  iiui  étaient  portés  au  relâ- 
chement ,  Irouvèreat  un  proti  cleur  en  la 
personne  de  ce  général,  qui,  loin  de  icfornier 
les  abus  qui  s  étaient  glissés  dans  l'ordre 
cl  de  maiuienir  les  règlements  qui  avaient 
été  faits  par  ses  prédécesseurs  pour  l'obser- 
vance de  la  règle,  porta  au  conlrairo  le  pape 
Benoît  XI!  à  faire,  l'an  LiiSG,  d'autres  rôgle- 
mcn'.s,  qui  tendaient,  selon  son  inclin  iiion, 
au  relâehemenl  de  la  pauvreté  et  des  autres 
ausléri.és  de  l'ordre,  les  fit  recevoir  l'année 
suivante  dans  le  ch  ipitre  général  qui  tv  tiul 


547                                         Dir.T!ONNAiaE  DF.S  onnUF-S  REI.ICIF.UX.                                          543 

il  Ciihors,  cl   les  envoya  ensuilo  dans  Imilrs  sdlUcil.Hioii  do  qiidi|iics  <;oisnours,  i|iiaiio 

1rs  proviii((>s  ;  cl  c'o.A  ci>   (jui   iloiina  lii-ii  à  polils  ccmm  oiils  île  la  |U(i\iiu-i' de  Sainl-I'ran- 

r<'l;ilillssriiu"iil   lie  la   reforme   de  Jean    des  çiis  ,  iini  ruieiil  ecax  des  IVisims  .  do  Moiil- 

A  allées,  c.ir  (leraiid  de  Odoiiis,  dès  l'an  l  i.f»,  laici,  de  l'I^rint  i!,'e  elde  Jani,  où  il  demeura 

avant  d'eiilreprendre  le   dessein  qu'il  avail  a>cc  ses  reli^'ieus,  et  cù  il  eut  |icrinission  de 

d'alTranrliir  l'ordre  de  (oiiles  ses  auslérilés,  recevoir  (les  novices  cl    les  autres  reli;;ieux 

jii;:i'.inl,  par  une   pidilimie  nionilaine  et  une  qui  si'raient  p  irles  à  roi)seiv;incc  cx.icte  de 

prudenee  de  la  chair,  qu'il  était  néci'ssairc  la  règle,   et  ce  poniil'e  lit  dèlensi'  an\  supè- 

dc  sedefaire  de  ceux  qui  pourr.iiinl  apporli  r  neuis  de  l'ordre  de  les  Irouliler    en  .iiuumc 

quel  lUC  olisiaile  à  l'executio  i  de  son  projet.  manière. 

donna  permission  à  ce  réiornialeur,  dont  il  Les  supérieurs  ne  purent  néanmoins  sonf- 

ciai;;nait  le  zèle  cl  la  piété,  d.'  se  retirer  dans  frir  celle  séparation.  Ils  appréhen  lèreni  quo 

quelque  lieu  solitaire  avec  quelques  autres  celle  coiifjrejîalion  naissante  n'auginenlai  cl 

relii^ieux  qui  désiraient  eouiin-    lui  d'obser-  qu'elle  ne  causât  une   plus  grmde  division 

ver  la  rè^le  dans   toute  sa    pureté.  Le  frère  que  celles  qui  avaient  été  piiciliécs  sous  les 

Jean  des  N'allées,  muni  de  celte  permission,  papes  t'iémenl  \'   clJeanWll;   c'est  pour- 

sc  retira  à  Itruliano,  proche  le  mmil  Klori  le,  (pioi  ils  pensèrent  aux  mojens  de  la  détruire 

entre  Camérino  et    Foli^ni  ,  <  ù   il   liâlil  un  avani  (ju  elle  lil  un  plus  grand    pro|.'rès.  Ce 

petit  c<iu>cnt  qui  ;iv,iit  plus  l'air  d'une  pau-  «lui   les  y   excita  encore  d,ivanlaL;c   fui  que 

vre  chanmine  ((ue  d'une  maison  relii;ieuse,  ces  religieux  prenaient  des  haliils  différents 

cl  là.  avec  ces  religieux  zélés,  il  vécut  d.ins  d("s  autres  et  semlilables  à  ceux  des  premiers 

une  grande  pauvreié  et  dans  la   prali(|ue  des  rclormaleiirs  deNarhonnc,   qu'ils  ne   vou- 

austeritè-  de  sa  réi;le  et  de  toules  les  vertus  l.iienl  avoir  rien  de  commun   avoe   le    reste 

év.ingél  ques  ,  ce  (ju'il   conlinua  jusqu'à  sa  de  l'ordre,  et  qu'ils  s'élaienl  presque  enliè- 

morl.  qui  arriva  l'an  l.'îil.  rement  soaslraits  de  son  obéissance.  L'alTairc 

Fori;;iiier   \assal  ,  qui,  d.nis  le  chapitre  fut  proposée  d:nis  le  chapitre  général  qui  se 

général   icnu   à   .'\larsei:ie  l'an    KJilJ ,  avail  luil  l'iin  l3oi  à  Assise:  la  plupart  des  vocaux 

succédé  à  (léraud  de  Odonis   (que   le    pape  furent  d'avis  (lu'oii  exposât  au  pape,  en  plein 

(ilémenl  \'l  avait  lait  palri.irelie   d'Anliochc  consistoire,  que  la  condiiile  de  ces  solitaires 

l'année  prècédeiiic) ,  se  montra  favorjible  à  nienaçiil  l'ordre  d'un   nouveau  schisme,  et 

ces  réformes,  leur  accordant  toutes  les  urà-  qu'on. suppliât  Sa  Sainteté  d'ordonner  qu'on 

ces  qui  dépend  licnt  de  lui  ;  miis  l'envie  et  la  les  traitai  comme  on  avait  fait  des  scctaienrs 

jalousie  ne  lardèrent  guère  à  s'y  Ojjposer,  en  de  l'ierrc-Jcan  Olive;  m;iis  le  général  (iuil- 

excitant  les  murmures  des  non-réformés,  ou  launic  l'arinier.  qui  dès  l'an  l.'Jia  a*  ait  suc- 

pour  mieux  dire  d  s   relâchés  ,  (lui  se  plai-  cédé  à  Fortanier  Vassal  (que  le  pape   avait 

pnirent    ouverNup.ent    de   la   conduite  d  du  l.iil  arclievéqne  de  U.ivenne) ,  s'onposa  à  ce 

gouverncmeiii  du  général ,  sous  prelexleiiue,  dessein,   leur  faisant  connaître   que  si  l'on 

/avorisanl  ces  s  iiils  religieux  et  leur  accor-  f.iisail  éclater  cotte  alTaire,  le  peujile  en  pour- 

djiil  tant  de  grâces  et  de  privilèges,    il  li-ur  rail  cire  scandalisé,   et   (luc   cela  exciterait 

<lonnait  les  inojcns  de  se  séparer  de  l'ordre,  plus  de  bruit  parmi  le;  religieux.    L'on  défc- 

Le  piipe,  rra  giian!  que  ce  ne  fût  une.  occa-  r.i  à  sou  avis  cl  l'on  remit  à  sa  prudence  h; 

sion  de  faiic  lenaitre  l.i  division  dans  l'ordre,  soin  de  diss  per  cette  nouvelle  congrégation, 

défendit  ;iu  général  de  leur  accorder  aucune  H  était  de  son  honneur,  après  une  defe.encc 

cxenqition  ou  grâce  p;irlicu  ière  jusqu'à  ce  si  soumise,  de  réussir  dans  celle  alTaire  ;  ainsi 

(pie  le  s.iint-siegc  fût  mieux  inlornu'  île  leur  il  coniinenea   à  en   reclierclier  les  moyens, 

m.inière  île  vie,  et  qu'il  i  ùl  ordonné  ce  qu'il  mais   le  frère  Gentil  lui  en  fournit  l'occasion 

jugerait  à  (irojjos  sur  ce  sujet.  peu  de  temps  a,  rès  par  son  imprudence  ;  car 

(;etle  défense  ayant  été  publiée,  ces  s.iinls  ce  gé:iéral  ayant  voulu  coni  nander  qu<  Iquo 

religieux  ne  perdirent  pis  j)our  cela  l'espril  chose  à  un  de  ses   religieux,  le  frère  lientil 

de  11  ur  vocation,  et,  s'abandonnanl  entière-  lil  retii'er   le   religieux   et  dit   hardiment   au 

mentaux  dispositions  de  la  ^li^  iiie  providence  général  qu'il  n'avait  aucune  juridiction  sur 

sur  eux,    ils   n'en  furent  pas   moi:. s  fidèles  ceux  (lui  étaient  sous  sa  conduite.  Les  rcli- 

à  l'obsenaïuc  de  leur  règle  et  à  la  p  aiique  gieux  (|ul  accompagn.iient  le  général  le  por- 

«les  vertus  cap.iMes  de  les  rendre  agiealdes  i;ient    à    punir  ce  lemiraire   qui    mè|iris.iit 

a  l)ici>,  qui,  voulant  recomijeaser  celle  eon-  ainsi  son  autorité;  mais  il  aima  niieu\  lem- 

liaiicc  cl  celle  conlorinité  à  sa  sainU-  volonté,  porixer  enc  ne  iiuelqne  temps  pendant  lequel 

leur  donna  la  consula'ion  de  voir  croître  leur  il  lit  examiner  secièlemeni  l,i  con.lnite  que  le- 

petite  congrégation  ,  non-seulement  par  l'ar-  naieol  (îenlil  et  ses  religieux.  Il  trouva  qu'ils 

rivée  de  plusieurs  icligieux  i)ni,  quillant  les  avaient  retenu  chezcuxduraniquelqne  leinps 

iion-réf  innés,  où  le  désordie  auumenlail  de  des  hérétiques  ;  cl,  quoique  ce  fût  dans  le  des- 

jour  en  jour,  venaient  se  joindre  à  eux  dans  sein  de  les  convertir,  iieannuiin;,  comme  ils 

leur  solitude  pour  y  observer  la  règle  ilans  n'y  avaient  pas  réussi,  il  se  servit  de  cela 

loute  ^a  pureté,  in.iis  encore  par  l'augmcn-  pour  les  rendre  oïli^-iix  au  pai'e  en  les  accu- 

t.ition  de  quel>|iies  rouvenis  (|ui  leur  fiireid  sanl  d'avoir  comniunique  avec  ci  s  hérétiques 

donnés  par  les  soins  du  frère  (ienlil  de  Spo-  dans  leurs  propres  maisons  en  m  tngeanl  en- 

lelu;,  qui ,  après  la  morl  di- Jean  des  \  allées,  semble  et  en  leur  donnant   reiraile,   comme 

elanl  ri'g.ir  le  ci.ni'ne  ehi'l  de  celle  même  cou-  aussi  <le  les  avoir  lais>e  échapper  sans  correc- 

gre^'.'iliuii ,  quoiqu'il  ne  f.it  ijue  frère  laïijui* ,  lion  ni  chàlimenl,  fauie  d'en  avoir  donné  ai  i'i 

ubtinl,  l'an  JJ.jI,  du  pape  iJcmcnl  \  I ,  a   la  aax  ii.quiiilcur.>.  11  n'en   l.iUul   pai    da\au- 


S40 


JEA 


lagc  que  c  lie  ncciis.iiioii,  qui,  lonti!  fausse 
qu'elle  éiail,  cul  loiit  le  succès  qu'il  pouvait 
m  allendrc  :  car  le  pape,  qui  élail  pour  lors 
Inuocent  VI,  sans  autre  examen  de  cause, 
révoqua  par  une  bulle  de  la  même  année 
nSS  celle  nue  Clément  VI  k'ur  avait  accor- 
dée; les  quâlre  couvenis  qui  leur  avaient  éié 
donnés  furent  remis  sous  l'obéissance  des 
supérieurs  de  l'ordre,  avec  un  commando- 
mcnt  exprès  à  frère  Gentil  et  ses  religieux 
de  se  conformer  aux  autres  pour  l'habille- 
ment (1).  Le  cardinal  Albornoz,  légat  du 
saint-siége  en  Italie,  pressé  par  les  sollici!a- 
lions  du  général,  fit  mettre  en  prison  frère 
Gentil  dans  Orviélo,  avec  deux  de  ses  com- 
pagnons qu'il  menait  à  Rome.  Ainsi  le  chef 
é  aiit  arrêté,  et  le  frère  Marlin,  aussi  frère 
laïiiue,  son  principal  coadjuteur  et  religieux 
d'une  émineute  vertu,  reconnue  même  par 
des  miracles,  étant  mort  l'année  suivante,  la 
congrégation  fut  aisément  dissipée. 

LucWading,  Annal.  Miiior.  lom.  III  et  IV. 
Dominic.  de  Gubernalis ,  Orb.  Seraphic.  , 
tom.  II. 

JEAN  DES  VIGNES  (Gh4noinf,s  réguliers 
UE  Saint-),  à  Soissons. 

L'abbaye  de  Saint-Jean  des  Vignes  à  Sois- 
sons  fui  fondée  p.ir  Hugues,  seigneur  de  Châ- 
teau-Thierry, l'an  1076,  suus  le  règne  de 
Philippe  I",  roi  de  France.  Ce  Hugues, 
ayant  usurpé  plusieurs  églises  avec  les  biens 
qui  en  dépendaient,  louché  de  repentir,  alla 
trouver  Tliibaud,  évêque  de  Soissons,  pour 
les  lui  rcinellre  entre  les  mains,  à  condition 
que  l'église  de  Saint-Jean,  qu'on  appelait 
pour  lors  du  Mont,  située  dans  la  ville  de 
Soissons,  cl  qui  élail  celle  qu'il  avait  injus- 
tement relonue, serait  desservie  par  des  cha- 
noines vivant  en  cummun,  et  que  les  autres 
églises  avec  les  biens  qui  en  dépendairnl,  cl 
dont  il  avait  aussi  eu  la  jouissance,  y  seraient 
unis.  Le  roi  approuva  celle  fondation  la 
même  année;  cl,  l'an  1088,  Hugues,  croyant 
n'avoir  pis  assez  satisfait  à  sa  conscience 
louchant  son  usurpa' ion  simoiiia(|ue,  fit  don 
au  monastère  de  Siinl-Jcaa  de  trente  ar- 
pents dj  vignes  qui  étaient  aux  environs, 
d"où  est  venu  le  nom  de  Saint-Jean  des  Vi- 
gnes que  ce  monaslère  a  porté  jusqu'à  jiré- 
seiit.  (jellc  fondaliou  fui  approuvée  par  l'é- 
vôqiie  Henri,  qui,  voulant  encore  favoriser 
ces  chanoines  réguliers,  leur  donna  une  pré- 
bende dans  l'église  calliédrale,  du  consente- 
ment de  ses  chanoines. 

Odon  fut  le  premier  abbé;  après  avoir 
gouverné  ce  monaslère  pendant  treize  ans,  il 
mourut  l'an  1088,  et  eui  pour  successeur  Ko- 
ger,  auquel  Urbain  H  adressa  l'année  sui- 
vante un  bref  par  lequel  il  le  reçut  lui  et  ses 
chanoines  sous  la  protection  nu  saint-siége, 
et  a;'prouva  les  couslilulions  qui  avaient  clé 
dicssées  p'iur  celle  abbaye,  ordonnant 
qu'elles  y  seraient  inviolahlemenl  observées. 
H  confirma  toutes  les  donations  qui  leur 
avaient  été  faiies,  et  on  leur  en  fit  plusieurs 
dans  la  suite.  Hugues,  seigneur  de  la  Ferlé- 
Milun,  et  Helmide,  sa  lenune,  leur  donnèrent 

(i)  Vuy.,  à  la  fin  du  vol.,  m"  iiU. 


JtlA  550 

la  fliapeUc  de  Saiiil-Vulgis  dans  leur  cliA- 
leau,  à  condition  qu'il  y  aurait  loujours  pour 
le  moins  trois  chanoines  pour  la  desservir, 
Thibaut,  comte  de  Champagne,  leur  fit  don 
aussi,  l'an  1122,  du  prieuré  d'Ouchy,  après 
eu  avoir  fait  soi  tir  les  chanoines  séiuliors. 
lîucbard,  évêtiue  de  Meaux,  fil  aussi  sortir 
des  chanoines  séculiers  du  (u-ieuré  de  la  Fcr- 
té-Gaucher  pour  le  donurr  à  l'abbaye  do 
Saint-Jean  dos  V^ignes.  Ils  ont  encore  deux 
autres  prieurés,  savoir  Montmirail  etla  Fer- 
lé-sous-Jouarre,  et  plus  de  trente  paroisses; 
cl,  quoique  les  béuifices  qui  sont  possédé; 
par  les  chanoines  réguliers  soient  appelés 
prieurés,  il  n'en  est  pas  de  même  parmi  les 
chanoines  de  Saint-Jean  des  Vignes,  qui,  se- 
lon l'ancienne  tradition  de  l'abbaye,  n'ont 
que  cinq  prieurés  qui  lui  soient  annexes,  et 
auxquels  ils  donnent  ce  nom  à  cause  qu'an- 
ciennement ils  étaient  possédés  par  des  cha- 
noines séculiers.  On  ne  laisse  pas  néanmoins 
de  donner  le  litre  de  prieurs  aux  cuiés  qui 
desservent  les  paroisses. 

Le  pape  Lucius  III,  par  un  breT  adressé  ^ 
l'abbé  Hugues,  leur  permit  de  mettre  dans 
chacune  île  ces  paroisses  troii  ou  quatro 
chanoines  pour  le  moins;  le  mcaïc  abbé  Hu- 
gues ayant  voulu  révoquer  à  sa  volonté  les 
chanoines  qui  étaient  pourvus  de  cures,  et 
en  ayant  fait  revenir  quelques-uns  dans  lu 
cloître,  l'évêquc  do  Soissons,  Nivellon,  s'y 
^opposa,  à  cause  ([u'en  qualité  d'évêijue  dio- 
césain, il  leur  avait  confié  le  soin  des  âmes 
dont  ils  devaient  lui  rendre  compte.  Ils  re- 
mirent leurdifTérend  entre  les  mains  du  p.iiie, 
(l  firent  tous  deux  à  cet  elTet  le  voyage  de 
Home.  Urbain  M,  qui  gouvernait  pour  los 
1  Eglise  Universelle,  leur  donna  des  commis- 
saires qui  déci'lèreiil  en  faveur  de  l'ablié: 
mais  les  chanoines  de  Saint-J  an  des  Vigiico 
appe  èrenl  de  leur  jugement  au  pape,  disant 
que  leur  abbé  n'avait  pu  sans  leur  coiiseii- 
li'menl  faire  celle  innovation,  qui  était  coi- 
traire  aux  privilèges  qui  leur  avaient  été  ac- 
cordés |iar  plusieurs  souverains  poulifes  qui 
leur  avaient  permis  de  rester  l;ois  ou  qualru 
reli;^icux.  dans  ces  cures,  dont  l'un  .serait 
seulement  présenté  à  l'évê!]U(!  [iour  avoir  ta 
conduite  des  âmes,  et  lui  en  rendrait  coinple, 
et  qu'à  l'égard  de  la  discipline  réguiière.  ils 
de\  aient  l'obéissance  à  l'abbé.  Hugues  élail 
ami  d'Etienne  de  Tournai,  (|ui,  étant  de 
niêmc  sentiment,  érriviten  sa  faveura  Home. 
Mais  la  recomuiandalon  de  ce  savant  hooiiiio 
n'eut  aucun  eiîet,  et  les  elianuiiiiS  furent 
maintenus  dans  leurs  droits,  el  ou  ne  peul 
les  faire  sortir  de  leurs  bénéfices,  ni  les  rap- 
peler dans  le  cloilro,  que  pour  de  grands 
crimes.  Ce  qui  est  de  singulier  dans  celle 
congrégation,  c'est  que  ces  mêmes  bénéli- 
ciers  assistent  à  l'élection  du  grand  prieur 
de  l'abbaye  de  Saint-Jean  des  Vignes,  n'y 
ayant  plusprèsenlemmiqu'un  abbe  commen. 
dalaire,  el  qu'ils  peineal  mônu'  être  élus; 
mais  cette  supériorité  ne  duri;  que  trois  aii^, 
après  lesquels  ils  retournent  à  leurs  béné- 
fices. 

Les  peines  qu'on  imposait  aux  apostats, 


SfA                                        niCTJON.NAmF.  DES  ORDRES  flEI.IOlRUX.  5*2 

nui  sont  r.ippnrli'<-s  d  MU  les  cliroiiinucs  de  ville,  clioisil  douze  curés,  l.inl  do  Kl  villo 
(Otto  .iblinj'i',  foiil  tiieii  coiiiiaitio  (incllc  ol.iit  que  des  cm  Irons  pour  lui  sor\ir  d'jissisl.inls, 
robscrvanci'  o:roili!  (|ui!  Vow  ij.iiilail  dans  cl  q^c  ili''<  ce  lomps-Ià  ils  corniiu-iu-i^rpiil  à 
celle  con?ré;;alii>n.  Sous  le  goin  itiumiiciiI  s'appeler  caniiiiaux.  Ils  s'asseniblaiciil  le 
de  l'iblic  Mallliieu  ilo  (]uizv,  un  religieux  jour  de  Sainl-Tlionias  pour  clioisir  un  d'en- 
aposlal  s'ctant  prcsonlé  pour  subir  1  i  peine  Ire  eux  pour  super  eur,  el  l'inslallaieiil  dus 
de  si:r)  trime,  il  vint  à  la  porle  de  l'e^^lise  celle  digni  é  le  jour  de  Sainl-Mlieiiiie,  aliu 
dans  rii.ibit  qu'il  aval  porle  d  ins  le  monde;  que  pend. ml  celle  année-là  il  présidai  à  !•  urs 
l'ajanl  (l.'|)oullie  jus  lu'.i  la  rli.'niivc,  il  niar-  assemblées,  qui  se  faisa  enl  pour  le  moins 
cha  nu-pieds,  la  lè.c  ilécouverlc,  el  lenanl  aux  (luaire-liuips  de  r.innee  dans  (|U(di|ue 
une  b.i'r'ueiie  .^  la  main,  traversa  loule  la  église,  où  l'uu  cliaiilail  l'oniie  des  défiinis, 
cour,  cl,  élanl  ariive  au  cliapiUe,  il  se  mil  }  ayanl  des  revenus  annexés  à  cel  elTei, 
à  genoux,  d.iuandanl,  les  larmes  au\  yeux,  do'.l  ces  douze  curés  ou  cardinaux  jous- 
pardon  à  l'ai)!  é  en  iirésenee  des  religieux,  saieni,  lîeilin,  (l'.ii  a  fail  les  Anlii|iiilés  de 
ol  suppiianl  iju'ou  lui  donnai  la  discipline.  Soissuns,  dil  que  ces  cardinaux  avaient  élé 
Ce  qui  ayail  clé  fail  par  le  prieur,  on  lui  en-  ainsi  crées  afin  d'assister  ré»éi]ue  de  Suis- 
ioi;»nil  pour  1  énilence  qu'il  rcccvrail  lous  sons  aux  fêles  soleniulles,  ce  qui  est  bien 
les  jours  la  tliscipline,  cl  (ju'il  se  |  réscnle-  vraisemblable.  Dans  lancicu  poulilical  écrit 
rail  à  cel  elïel;  que  pour  loujours  il  serait  à  la  uiain,  qui  bcrvail  aux  évè(iues  do 
privé  de  VOIX  dans  le  cliapilie  ;  (ju'il  u'.iurail  'rroyes(i),  il  y  a  plus  de  (jualre  cent  clii- 
place,  soil  au  ilneur  ou  ailleurs,  qu'après  (juanle  ans,  il  esl  aussi  fait  uifi.liou  île  prè- 
les novices,  cl  au  dernier  lieu:  qu'il  ne  ce-  1res  cardinaux,  qui  ne  sont  autres  ([ne  les 
lébrcrail  point  la  luesso;  qu'il  inangerail  à  treize  curés  dénommés  au  lliiui  I  m.inuscnt 
penoux  sur  un  petit  banc  au  réfectoire;  de  l.i  nièmo  éi;lise,  lesi|uc'.s  doivent  encore 
qu'im  ne  lui  présenterait  ()uc  du  pain  noir  aujouririuii  assister  l'é\éque  iiuind  il  coii- 
ci  du  vin  rouj^e,  avec  un  p  dage,  à  moins  sacre  le  clirème  el  les  saintes  liuil  s  l' jeu  li 
qui-  le  prieur  ne  voulut  bien  lui  envoyer  saint,  cl  à  la  bénéd;tlion  solennelle  d.'S 
que'qiie  cliose  do  ce  qu'on  lui  aurait  présen-  foiils,  les  veilles  de  l'aques  et  de  l'entecole. 
lé.  Il  fut  dispensé  au  bout  de  six  mois  de  l'aquier  rapporte  sur  ce  sujtl  qu'en  un  coii- 
maa;;er  à  terre;  mais,  tant  qu'il  vécut,  il  i\ii  cile  tenu  à  .Metz  sous  Cli  irlem  ii;ne,  il  e-l 
ni;M)i;ea  qu'à  la  troisième  table,  (jui  était  ordonné  que  les  évè  |Ui'S  di-poseront  cano- 
celle  des  ron\  ers.  .Vu  bout  de  deux  ans,  ou  uiquemcui  des  titres  de  carlinaux  établis 
lui  permii  de  d.re  la  messe  en  parliiulicr,  dans  les  villes  et  dans  les  faubourgs,  c'esl-à- 
iiiais  jamais  en  pub'.ic,  cl  les  autres  peines  dire  des  cures;  et,  dans  l'abbaye  de  Sainl- 
liii  fu:  enl  imp  isécs  pour  toujours.  Kiuii  de  Ueiins,  il  y  a  eu  do  tout  temps  quatre 

Celle  abbaye 'ouffrit  beaucoup  de  donima-  religieux  cardinaux  appelés  princiiianx, 
pes  par  lis  liér<liqaes  calvinistes,  l'an  loG8,  parce  que  ce  sont  ceux  qui  oflicicnl  au  grai;'J 
lorsqu'ils  prirent  la  ville  dcSoissoiis:  ils  rui-  aulel  dans  les  léles  solennelles, 
nèreiit  cniièrement  le  monastère  el  l'églse.  Les  clnuoines  de  Saint-Jean  des  \  ign  s 
cuiporlèrcnl  les  vases  sacrés  et  lous  les  a*aienl  autrefois  la  direction  d'un  collège  à 
meubles,  el  contraignirent  les  religieux  de  Soissons,  qui  avait  été  fondé  par  .Viiberi, 
sauver  leur  vie  parla  fuite.  Ces  Ciaiioiiies  doyen  de  la  c  iili.drale  ;  mais  cette  maison 
vendirent  ensuite  beaucoup  de  biens  pour  fut  cédée  aui  Minimes  l'an  1583.  Le  collège 
rebâtir  l'église.  Le  parlement  de  l'aris  or-  de  lîcauvais  à  l'avis  a  elé  londé  |)arlecardi- 
donna  que  la  quatrième  partie  du  revenu  de  ual  Jean  de  Doruian,  à  coiuli  ion  que  l'abbé 
l'abbé  serait  employée  à  cet  eiïel  :  elle  fut  de  Saint-Jean  des  Vignes  au  ail  soin  de  ce 
aelievée  l'an  loMi.  Duiant  cette  guerre,  un  collège  el  aurait  droit  d'y  noinincr  les  bour- 
des cbanoiues  nommé  S  ivreux  s'etant  retiré  siers^  de  les  corriger,  de  les  oter,  d'avoir 
de  celle  abbaye,  ayant  élé  cliercber  un  asile  soin  que  la  fondation  fût  exécutée  ;  et  parmi 
cnLspagnc,  lui  ilans  la  suite  cliapc  l.iin  du  les  \ingt-quatic  boiirsier>  il  peut  y  avoir  un 
roi,  qui  le  pourvut  d'une  abbaye  en  Mclle.  cbano  ne.  Il  y  a  eu  trente  et  un  abbés  régu- 
Cel  abbé  lit  bàlir  un  biipital  à  .Madrid  pour  liers.  .\|irèi  la  morl  de  l'ierie  lîazin,  qui  fut 
les  l''r.inçais,  doiil  il  donna  le  gouvei  iiement  le  dernier,  le  cardinal  Cliarles  de  H  luibon 
aux  (  liaiioine.'  deSaini-Jean  d.  s  \  ignés,  qui,  lui  noininé  jiar  le  roi;  depuis  ce  temps-là  il 
ù  sa  réquisition, cnvoyèreni  deux  clianoines.  y  a  tiaijours  eu  îles  abbés  coinmendalaires. 
Ils  ont  élé  longtem|is  eu  possession  de  cel  L'an  llilid,  la  mensc  abiiatialc  fil  se;  arci-  do 
<ii"i|iital.  la  conventuelle  ;  l'abbé  est  premier  clianoiuo 

Dans  les  litres   de    la   fonJalion   de  Sainl-  do  l'egliso    calliediale   de   S.iiiit-'îer»  ais   do 

le.Mi  des  \'ignes,    et    dans  les  lettres  du  roi  Soissous.  Celle  maiion    a    toujours    regaidé 

riiil.ppe  I' et  de  Tévéquc  de  Soissons   Tlii-  les  cvéques  de  Soissons  comme  supérie\irs; 

baul,    qui  confirment  celle  fonda  ion,    il  esl  l'He  n'a  jamais  été  unie  à  aucune  congréga- 

inarq'iè  (|iie  le  pré  re  cardinal    du    lieu   esl  linu,  el  n  a  poinl  soullei  l  de  réliu'ii  o   élran- 

<enu  de  rendre  raison  du  soia  qu'il  aura  cj  gère-  elle  lut  enfermée  dans  la  ville  en  L:til, 

doses  paroissiens  ù  l'évêque  de  Soissons  el  ^ous  le    régne  d'Henri  11;   elle  a  donné  un 

-i  seu  arcliidiarre,   comme  il  faisait  aujiara-  sulVciganl   a  l'évèi  lie  do  Soissons   cl    treize 

vaut.    L'origine    de    ces   cardinaux  ,     selon  abbes  réguliers  a  d'aulrcs  abbayes,   laiil   en 

J'icrre  11!  (iris,    cbanoine   ilo   celle  abbaje,  l-Lmce  qu'eu  llandre  et  en  Sicile, 

vient  de  ce  (|u'un  pi,  c  étant  venu   eu  celte  Le  conseil  de   ta   maison   esl  composé   de 

(t)  UUt.  Uiilor.  lioiiun-  iilii.,  loin.  Il,  )' :o   UI-- 


l,M  JEA 

quatre  anciens  ou  semeurs,  qui  snnl  élus 
(liius  les  cliapiiros  généraux;  ils  sont  pris 
l.ml  du  corps  dos  bénclkiers  que  de  ceux 
qui  composent  la  coiiinitinaiité.  Tous  les  ans 
à  la  Saint-Martin  d  hiver,  ils  se  irouveiil  à 
Saint-Jean  des  Vignes  pour  y  recevoir  les 
comptes  du  procureur,  tant  des  rcceltes  que 
des  mises  de  tous  les  revenus  de  la  maison, 
connue  aussi  ceux  du  trésorier  des  receltes 
et  mises  du  revenu  do  l'église,  et  dan^  cette 
assemblée  ils  reniôdiciit  aux  abus  qui  peu- 
vent s  cire  glissés  dans  les  observances  ré- 
giilière-'. 

Matines  se  disent  louj  mrs  à  minuit  dans 
cette  abbaje  ,  et  l'ofàce  canonial  s'y  l'ail 
pendant  tout  le  jour  avec  beaucoup  d'éilifi- 
cation  ;  on  n  y  mange  do  la  viande  que  tiois 
fois  la  semiinc,  le  dinianclie,  le  mardi  et  le 
jeudi;  l'abstinence  y  est  observée  depuis  ie 
jour  de  Saint-Martin,  11  novembre,  jusqu'à 
i'AvenI,  et  depuis  i'Avenl  jusqu'à  Noël  on 
jetiie  ;  l'abstinence  recommence  à  la  Sep:ua- 
gésime,  el  le  jeûne  le  lundi  d'après  la  Ouin- 
quagésime  jiisiu'à  Pâques.  Le.  jours  de 
jeûne,  laiil  de  l'Iiglise  que  de  la  règle  sont 
égaux  pour  Li  collation.  Autrefois  ou  ne 
preuait  rii  n  le  ^oi^,  à  présent  on  va  au  ré- 
lecioire,  après  avoir  entendu  lire  aux  pupi- 
tres qui  sont  dans  le  cloître  un  chapitre  de 
l'Imitation  de  Jé^us-Cbrist  ;  oa  y  enire  en 
habit  de  chœur  ;  chacun  se  met  selon  sou 
rang,  et  le  dernier  novice,  après  avoir  lait 
une  prol'oude  inclin.ilion  au  grand  prieur, 
lui  demande  en  laliii  la  permission,  au  nom 
lie  toute  la  comuiuiiaulé,  de  manger  du  pain; 
on  en  sert  à  cli  icun.et  on  boit  un  peu  devin 
une  fois  seulement  ;  on  ne  sert  ni  nappes 
ni  serviettes,  ni  portion  de  vin  à  ces  colla- 
lions,  et  en  quelque  temps  que  ce  soit  il  n'y 
a  jamais  de  recrealion. 

On  lient  tous  les  liois  ans  le  chapitra  gé- 
néral vers  la  léte  de  la  Penlecôie.  (^)uand  le 
temps  approche, le  grand  prieur  deSaint-Jean 
envoie  un  mandement  à  tous  les  bénélkierset 
>icaires  de  la  campagne  pour  se  trouver  au 
chapilre.  Ils  s'y  rendriit  la  veille  du  jour  in  li- 
qué  pour  les  premières  vêpres  ;  ils  se  trouvent 
tous  à  matines  à  minuit.  Le  lendemain  ils 
assistent  à  la  procession  eu  chapes  ;  la  m  sse 
du  Saint-Es[)i  it  est  ensuile  chaulée  soleu- 
nell  menl,  a  latin  de  laquelle  on  se  trouve  au 
chapitre  où,  après  les  prières  accoutumées, 
un  chanoine  fait  un  discours  eu  latin  sur  un 
point  de  la  règle.  Le  grand  prieur  parle  en- 
suite sur  le  sujet  du  chapitre,  après  quoi 
l'on  procède  à  l'élection  d'un  nouveau  grand 
prieur,  qui  est  ensuite  conduit  au  palais 
épiscopal  pour  avoir  la  confi.matioa  de  l'é- 
vêque  de  Soissons.  Ce  grand  prieur  est 
triennal,  et  fait  régui  èrement  la  visite,  pen- 
dant ces  trois  ans,  dans  loui  les  béncQees 
réguliers  qui  (iépendenl  de  l'abbaye.  11  y  en 
a  trente-trois  dans  l'évêché  de  Soissons,  et 
ili  ux  dans  celui  de  Meaux,  qui  ne  peuvent 
tire  possédés  que  par  des  chanoines  régu- 
liers proies  de  cette  maison  ,  et  qui  ne  sont 
point  sujets  aux  induits  et  aux  grades, 
cumule  il  a  été  jugé  jiar  arrêt  du  grand  con- 
seil du  dernier  décembre  ltj83. 

Dictionnaire  des  Orukes  religieux.  II. 


lEA 


HU 


Quant  à  l'habillement  de  ces  chanoines, 
l'on  verra  les  changements  ^\m  ont  été  fjiis 
(le  temps  eu  temps  dans  cet  habillement  ei 
celui  qu'ils  portent  présciitcmciil,  dans  !a 
Icllre  (|ui  su:i,  qui  m'est  loiubée  entre;  les 
mains,  et  quej'.ii  insérée  tout  au  long  dan- 
cette  hisîoiic,  puisque  celte  lettre  est  une 
espèce  de  dissertation  sur  l'habillement  tic 
tous  les  chanoines  réguliers  en  général:  elle 
est  de  M.  di;  Louen,  chanoine  de  celte  abbaye, 
el  prieur  curé  de  Latiily,  de  qui  j'ai  reçu 
des  mémoires  louclianl  les  obser/ances  ré- 
g  liôres  qui  se  pi„li(|nciit  à  Saint-Jeaii 
des  Vignes,  dont  j  ai  pailé  ci-dessus. 

Lettiif.  de  m.  de  louen,  chanoine  régulier 
de  Saint-Jean  des  Vignes  el  prieur  curé  de. 
Latiily,  sur  l'habit  des  chanoines  réguliers 
de  cette  abbaye,  écrite  eu  1708. 

MoNsiEun, 

Pour  m'aciiiitter  de  la  parole  que  je  vous 
i.i  donnée  de  vous  faire  voir,  1"  quel  est  l'ha- 
bit que  nous  devons  parler  dans  lu  miisun  ds 
Sainl-Jean;  :i"  dans  nos  bénéfices  ;  3"  lorsque 
nous  sommes  en  voyage,  et  résoudre  en  pei 
de  mots  les  scrupules  que  vous  aiez  pu  avoir 
sur  cette  matière,  je  vous  dirai  que  l'Iiubit  que 
nous  portons  dans  la  inaison  et  partout 
uilleus  e<l  par-dessous  un  hubil  noir,  c'est- 
à-dire  des  bas  noirs  vu  b  uns,  une  culotte  et 
une  veste  de  même  couleur ,  et  por-des.Ms 
nous  portons  une  soutane  blanche.  Celte  sou- 
tane n'était  point  fermée  autrefois  par-devant , 
el  c'est  pour  cette  raison  que  quelques-uns  de 
710S  confrères  bénéficiers  lu  purlenl  encore 
fe  méeavec  des  boutons;  mais  l'usuf/e  d'aujour- 
d'hui le  plus  régulier,  c'est  de  la  porter  fermée 
sans  boutons. 

Cette  soutane  a  toujours  été  de  couleur 
blanche,  car  nous  n'avons  aucune  preuve  d<t 
contraire.  Il  e<t  vrai  que  les  chanoines  réij.i- 
liers  ont  droit  de  porter  des  soutanes  rowjes, 
comme  ta  purtenl  ceux  de  Saint-Maurice  en 
Suisse,  et  commp  en  ], criaient  autrefois  ceux 
de  l'ahbaije  de  Saint-Vincent  de  Sentis,  fondée 
en  lOiJl  par  Anne,  reine  de  France,  femme 
d'Henri  1"  qui  y  mit  des  chanoines,  et  ordonna 
qu'à  la  différence  des  autres  ils  portassent  des 
robes  et  capuchons  routjes  de  couleur  de  sung, 
en  mémoire  de  saint  Yincenl  martyr;  d'autres 
portent  la  soutane  violette,  comme  ce-.ix  de 
Saint -Auberl  de  Cambray  el  de  Saint- Eloy 
d'Arras,  et  comme  la  portaient  les  frères  con- 
vers  d  .ns  notre  maison  de  Saiil-Jean,  lorsque 
l'usage  était  d'y  en  recevoir.  D'autres :a  por- 
tent noire  co  rtne  les  chanoines  réguliers  de 
Cantipré  en  flanare,  et,  en  Lorraine,  ceux  de 
ta  congrégation  de  Saint-Sauveur,  instituée 
par  le  B.  Pierre  Fotinicr,  curé  de  Malin- 
c.iurt,  et  confirmée  par  une  bulle  du  pape  Ur- 
bain Vin  de  /'oh  11)28.  Mais,  t/ev  qu'une  com- 
munauté a  pris  une  cbuUur  d'habit,  il  ne  lui 
est  pus  permis  de  changer  une  couleur  en  une 
autre,  à  moins  que  de  prendre  la  blanche,  que 
les  anciens  thanoints  réguliers  ont  portée 
plus  qu'aucune  autre.  Cettevérité  est  inconles- 
table,  puisque  B  no.t  XII,  qui,  après  avoir 
été  moine  de  Ciieuux,  fut  élu  à  la  dignité  de 

18 


55.'; 


icc.TioNNAïKi:  i»i:s  01!  i;i:s  uv.i,i(;iEi  x. 


r.T. 


cariiir.iil.  tl  riisit.le  ù  c  lie  tle  ioiivrruin  pon- 
tife l'ii  133i.  dans  tes  conslilulitns  ijt'il  /il  en 
i;i:jl  pour  la  réforme  des  clintioines  régulier.^ 
de  Soini  J-o,i  de  l.iilr(in,iini  urait  ciimiiict>cr 
à  s\liiblir  Ci  Ilalie  <  n  10>'3,  sous  Alexandre 
11,  dit  ces  paroles  :  (Juilibci  col  r  sl-idcI  as- 
sumpîus  non  pulcsl  imil;iri  iiisi  in  al   uin. 

Pir-desms  celle  soutane  Olmiclie  nous 
port  ms  un  ruche;.  Le  rochel  ni  un  s  trilis  à 
iiianilies  ilroiles  comme  ccll  s  d'une  nuhe  ;  ./ 
est  plus  court  aujou'd'htii  qu'il  ne  l'étail  au- 
trefois; car  le  rocli'l'Sl  ce  qu'on  appeU.it 
luiiic.i  lalari'  liuca;  «7  tombai! jusqu'aux  la- 
Ion^,  comme  les  nn6.\s-  que  v'/us  portons  A 
laulel.  Cervch't  ou  ctteaube  éUiit  Vurue- 
mrnt  que  portaient  aitrefuii  les  prêtres  par- 
dissuf  le  irs  soutanes,  comme  ion  va  t  encore 
dans  icaucoup  de  cnthéaraks,  rt  particulic- 
rnitenl  dans  ce''e  de  So'ssons,  où  es  chanoi- 
nes m  n:'urs  cl  les  enfants  dj  clia.ir  en  por- 
tent un''. 

.\o:is  roi/ons  dans  /«<  conciles  de  France 
qu'an  évéqùc  de  Soissons  nommi  Uiculphe  or- 
ilonn'i  dans  ses  statuls  synodaux  de  l'an  8S0, 
ù  tous  les  pri'ires  de  son  diocîse,  d'avoir  deux 
anb-^,  une  qu'il'  ne  devaient  jamnif  quitter, 
et  une  autre  de  toilf  pLts  fine  qui's  menaient 
par-dessus  quand  ih  célébraient  lis  divins 
mystêics:  l'r.  hibcmusprcsb  Icris  iioslris  u'.i 
eadcm  alha  in  sairs  nijbleriis  qua  iilunlur 
foii»  in  quo!i;iiano  et  cxlerioii  eu, lu;  e(  c'est 
upparemmenl  peur  garder  et  observer  cet  an- 
cien slalul  du  diocèse  qu'il  est  ordonné  anx 
dùyens  ruraux  île  se  trouver  au  synode  de  /V- 
véque  reci'lus  d'une  aube,  comme  il  est  mir- 
qué  dans  un  ancien  cérémonial  imprimé  en 
1532  par  ordre  de  Sympliurien  de  Bullion, 
ttéque  de  Soissons. 

Celle  aube  dur.t  nous  p  .rions  a  été  dimi- 
nuée de  sa  Idnijucur,  et  on  l'appelle  rochel, 
que  les  évoques  purlenl  encore  dans  toutes  les 
fondions  ép.scopules,  niissi  bien  que U-s abbés, 
les  anmôniers  du  roi  et  es  doyins  des  cathé- 
drales de  Noyon  et  d'Auxerre,  qui  le  portent 
pur-desfusle  surplis  qnand  ils  vont  <)  l'église, 
comme  nu'ifi  tous  les  chanoines  des  mlludra- 
les  de  France  dasous  l  urs  chapes  pndavt 
l'hirer. 

La  plupart  des  c':anf>inrs  ont  retenu  lu-- 
taqe  d  ce  rochel,  el  on  t'en  est  toujours  fervi 
dans  notre  maison.  Fn  effet  le  rochel  est  le 
propre  el  véritable  hibii  des  chanoines  régu- 
liers, comme  le  montre  fort  bien  M.  de  Saiule- 
Jieuie  lans  ses  Itésolutions  morales,  cas  ')■», 
i.I;et  Benoit  XI i  était  tellement  persuadé 
que  le  rochel  était  l'habit  essentiel  de.<  cha- 
noines réguliers,  qu'au  chapitre  VO  îles  cons- 
lilulii.ns  qu'il  a  faites  pour  la  ré  fui  me  des 
ch.nui  es  du  Saint- Jean  de  Lalron,  il  or- 
donne que  si  queliin'un  d'eux  est  wsez  hardi 
de  paruUri  en  public  sans  cet  habit  de  lin,  ou 
s'il  c><  asftz  téméraire  de  le  cacher  ;  si  après 
ariiir  été arcrli  ./  ne  se  corrige  fias,  qu'il  soit 
su'jiendu  de  son  bénéfice  pendant  quatre  mois, 
$'ii  est  bénéficier,  et  s'il  ne  l'est  pas,  qu'il  toit 
déclaré  inhabi  e  pendant  le  mime  temps  d'en 
posséder  aucun  :  Qui   auicMii  se  cxliibcns    in 


jinblino,  habituin    (supdiiiilninenla   s.iliicl 
liuca)  liniorc  ocrullavi-iil,  si  inonilus  enitii 
ilaïc  tiolueril, jiixla  prii':ii'ssain  pcrsonarijni 
(lis  incliu.ioin.  ilicl.is  susjX'nsionis  el  inlials- 
lilati-.  pœnas  por  i  Iimii  leinjui"  incurr.it. 

Api  es  vous  avoir  parlé  des  habits  que 
nous  portons  pour  couvrir  1,^  corps,  il  faut 
vous  p  irter.  Monsieur,  de  celui  que  nous  por- 
tons sur  la  télf.  Mous  n'iivi  ns  point  autre- 
fois d'à., tic  couverture  de  tête  que  notre  au- 
m  isse.  Celte  aumusse,  comme  celi  que  p  n- 
lénl  enco  e  aujourd'hui  nos  novices  improfès, 
Moi(..<  rvail  de  couvrlur--  df  tête  pendant 
l  hiver  dans  la  maison,  el  pen.lani  l'été  au 
c.'œ-ir  et  ailleurs. 

Nous  jiurlons  aujourd'hui  dans  la  mais  in 
un  camail  pendant  Ihiicr,  c'cs!-à  dire  i.'cjiuis 
la  veille  de  lu  Toussa  ni  après  vêpres,  jusq  iM 
lu  veille  de  l'dques  à  coinjUcs  exclusicemenl. 
('e  camail  ou  mozeile  est  un  orn.  m:  ni  fait  d  é- 
lofl'e  >  oire,  qui  sei  t  j.our  couvr  r  la  lêle  et 
les  épaules.  Lis  évêques  s'en  rerven  encore 
aijourd  hui,  ù  la  réserve  que  ce  c.nnnil  ne 
le  ir  couvre  pliis  la  tête,  depuis  que  l'on  u 
trouvi:  l  usage  (/<;.<  bonn  Is  carrJs.  Un  ne  pre- 
nait autrefiiS  le  camail  à  SarUjean  t/ryiis  la 
Toussaint  jusqu'à  Pâques,  qu'a;jrès  les  .secon- 
des vêpres  de  la  Toussaint  ;  on  le  quitta  t  le 
malin  tous  lis  autret  j  lurs,  et  on  p  rt.iit  le 
bon  lel  carré  jusqu'à  lêprcs. 

Voilà  quel  est  l'habit  que  nous  porlor.i 
dans  la  ma  son;  nous  allons  montrer  à  pré- 
sent quel  est  celui  que  nous  port.nis  au  chcruc 
P'mlant  l'éié  et  pendant  l'I.iver.  l'cndunt  iclc. 
c'est-à-dire  depuis  la  veille  de  Pu /aes  d  corn- 
plie <,  jusqu'aux  premières  vêpres  de  la  Tous- 
siint  exclusivement,  nous  poi  Ions  ai  dœ  r 
sur  l ,  soutane  blanche  el  le  rocket,  un  su  plis 
à  m  tnches  longues,  une  aumusse  noire  sur  le 
bras  (j:iuche,  el  un  bonnet  cari  é  hc  la  tête  (J). 
Le  surplis  avail  autrefois  les  manches  rondes, 
comme  les  portent  encore  aujomd  hui  les  cliu- 
nuines  de  Notre-Dame  de  Heims.  Nous  n  n- 
vons  changé  celte  forme  de  surplis  qu'en  IGOT, 
pour  nous  conformer  aux  chanoines  delaculbé- 
drale  de  Soissuns,  comme  nous  aviinsfatl 
pour  nos  chipes  d'hiver  en  1070. 

Le  surplis  s'appelle  en  latin  su;urpt'lli- 
ccnin,  (1  (!iiii5e  que  les  chanoines  le  portaient 
par-  dessus  i.es  raies  fourrées  apjieLes 
pi'lliciuin,  pour  se  garantir  du  foid  pendant 
t  hiver,  particulièrement  dans  les  pays  septen- 
trionaux. Ou  voit  encore  un  reste  de  cette  an- 
cienne coutume  dans  l'abt.aye  d  S lint-Floi 
d'.lrras  ,  <;«  les  novices  por'.ent  des  robes 
fourrées  pendant  leur  noviciw.  On  en  portail 
aussi  dans  notre  maison  de  Sainl-Jean,  puis- 
qu'il est  dit  dais  nos  consiiiuiinns  que  nous 
aurons  des  habits  fourrés  p  lur  aller  à  miii- 
nes  à  minuit. 

Les  :urplis  dont  nous  pariims  avaient  In 
même  firme  que  Us  aubes,  puis  lu'is  él.  ient 
de  pareiil  longueur ,et descendaient  jusqu'aux 
talons,  Ts  ont  été  raccourcis  par  Ueno'it  XII 
dans  les  constitutions  qu'il  ftt  pour  lu  reforme 
des  chano.nes  de  Suinl-Jcun  de  Lulrun  en  133i(, 
dans  lesquelles  il   ordonne  que  le  surplis  ne 


(I)  V«y.,  ^  b  (in  du  vol.,  n»  111. 


5:.7 


iVA 


JIF.V 


K"S 


passera  pas  pr:r  an     onqwur  la   moitié  ilc  la 
idinlie  :  ulira  nicciiam  libiam  vel  circa. 

Le  surplis  (iu:-si  bien  que  h  rocket  nu  les 
aubes  qui  servaient  pour  l'autel ,  néuiirnt 
point  ptifsés  autour  du  cou.  On  a  re!e>in  cet 
usage  à  Notre- L'ame  de  Paris,  on  les  viinis- 
tres  de  l'autel  portent  des  aubes  qui  n-  snnt 
peint  plissées  autour  du  cou,  non  plus  que 
celles  des  enfants  de  chœur  de  cette  mrtropule. 
Dans  notre  maison  de  Saint-Jean,  nos  novi- 
ces portent  encore  des  rockets  qui  ne  sont 
point  plisse's  autour  du  c  n. 

Pendant  l'été,  nous  portons  au  chtrur  r.ne 
<ium%isse  noire  sur  le  bras  gauche.  Nous  derons 
regardir  cet  habit,  dans  notre  maison  de  Sair.t- 
Jean,  comme  ttn  ha'jit  que  l'on  y  portait  en 
été  et  en  hiver,  puisqu'avant  l'usage  drs  bon- 
nets carrés  on  le  portait  toujours  sur  la  téie  , 
tt,  quand  on  le  mettait  sur  le  bras,  l'exlré- 
milé  d'en  haut,  qui  serrait  à  couvrir  la  té'e, 
se  mettait  toujours  en  dehors,  comme  le  por- 
taient les  chanoinesrégutiers  de  Saint- Rcmi  de 
lieims,  ainsi  qu'on  le  peut  voir  dans  la  fiq  (re 
qu'en  adonnée  ai  public  le  li.  P.  du  Mouli- 
net, channine  régulier  de  Sainte-Genevièie  de 
Paris,   en  ICCli. 

Nous  avons  gardé  long'emns  à  Saint- 
Jean  l'usage  de  porter  l'aumufse  sur  le  bras 
dans  la  maison,  même  pendant  l'hiver  ;  car  on 
ne  prenait  le  camail  que  le  soir  après  rcpri$  , 
comme  nous  avons  dit  ci-dessus.  Le  change- 
ment du  contraire  ne  s'est  fuit  qu'en  1670. 
Aujourd'hui,  pend  mt  l'été,  nous  portons  l'au- 
musse  s.xr  le  bras  gauche ,  non-seulement  au 
chœur,  mais  encore  pai  tout  dans  la  maison  , 
tant  la  nuit  que  le  jour. 

L'aumusse  que  nous  portons  est  noire  au 
dehors  et  blanche  en  dedans  ,  c'est-ù-dire 
qu'elle  est  faite  de  pattes  d'agneau  de  Lom- 
hardie  de  couleur  noire  au  dehors  et  fourrée 
de  peaux  d'aqneau  blanc  en  dedans.  Nos  no- 
vices la  portent  encore  noire,  mais  d'étoffe 
fourrée  de  peaux  d'agneau  blanc  en  dedans, 
et  ils  la  mettmt  sur  la  télé  à  l'église  et  ailleurs, 
Il  semble  que  les  aumusses  noires  soient  celles 
qui  aient  été  te  plus  en  vogue  dans  l'antiquité, 
et  dont  l'usage  a  été  plus  universellement  reçu, 
méoie  dans  les  cathédrales,  c'est  ce  qm  nous 
apprenons  d'un  concile  tenu  à  Paris  ,  où 
il  est  dit  :  Statuiinus,  ce  sont  les  Pères  du  con- 
cile qui  parlent,  et  provisione  concilii  (iixi- 
iniis  slatuenduin,  quod  canoiiici  calhcdra- 
liuiu  et  collcgialarum  ecclcsiaruiu  uiantur 
alinuliis  nigris. 

Aujourd'hui  que  l'aumusse  n'est  plus  en 
usage  pour  couvrir  la  tête,  mais  que  les  cha- 
noines la  portent,  les  uns  sur  le  bras  gauche, 
qui  est  l'usage  le  plus  unitcrscUement  reçu,  et 
Us  autres  sur  les  épaules,  l'on  se  sert  du  bon- 
net carré  pour  couvrir  la  tête  pendant  l'été. 
Le  bonnet  était  fait  d'abord  en  forme  de  ca- 
liilte,  à  la  réserve  qu'il  état  plui  large  en  ha  t 
qu'en  bas.  La  coutume  est  venue  ensuite  de  les 
fu'ire  encore  plus  amples,  mais  ronds  et  plu^ 
petits,  prestjue  semblables  à  ceux  que  portent 
encore  aujourd'hui  les  novices  des  Rli.  PP. 
Jésuites.  On  appelait  autrefois  ces  bonnets  du 
mot  latin  liirrelum,  et  c'est  encore  aujourd'hui 
l'usage  en  France  de  dire  que   le  pape  a  en- 


ragé la  barrette  à  quelqu'un  de  ses  noncs-  vu 
autre:,  lorsqu'il  lui  envoie  h  bonnet  de  car- 
dinal. Enfin  on  a  donné,  il  g  a  plus  de  deii  r 
cents  ans,  â  ces  bonnets  lu  figure  carrée,  étant 
tous  ;iss  s  de  laine,  et  ayant  quatre  espèris 
de  cornes  qui  paraissaient  fort  pnt  au-i'essus. 
Pour  ce  qui  est  de  ceux  qui  sont  faits  de 
carte,  rouverts  d'étoffe,  et  qui  sont  tout  car- 
rés, l'inxwntion  en  est  assez  moderne. 

Voilà,  Monsieur,  quel  est  l'habit  qw  nous 
portons  au  chœur  pendant  fêlé  ;  rot/ons  pré- 
s:'ntement  celui  dont  7ious  sommes  ntélus  au, 
chœur  pnidant  l'hiier.  Nous  portons  an  cloî- 
tre en  hiver,  pur-dessus  la  soutane  I  tanche  et 
le  rochet  ,  une  chape  d'it'  ffe  noiye.  Cette 
chape  dont  nous  allons  parter  est  aussi  un 
habit  essentiel  aux  chanoines  comme  le  rochet. 
La  chape  cH  un  rêtemenl  qui  prend  à  lu  télt 
et  va  jusqu'aux  pieds.  Ce  vêterienl  a  toujou'S 
été  en  usage  parmi  hs  chanoines,  et  nous  ap- 
prenons d'un  ancien  onlinnire  ou  cérémoni  l 
de  Notre-Dame  de  Paris  que  l'on  ne  recevait 
aucun  chanoine  au  chapitre  qui  ve  fût  revc.u 
(l'un  habit  canonique,  c'est-à-dire  d'une 
chipe,  ainsi  qu'il  est  marqué  dans  ce  c'rémo- 
nial,  ot'i  il  est  dit  que,  qwind  un  chanoine  se 
présentera  en  chapitre  pour  être  reçu,  il  sera 
revêtu  d'une  aubj  sur  la  soutane,  et  aura  une 
chape  d'étaffe  noire  par-dessus  arec  le  capu- 
chon. Le  même  ordinaire  porte  qu'on  n'enter- 
rera pas  un  chanoine  sans  chape.  Nou.< 
voyons  même  encore  aujourd'hui  que  le  doyea 
des  enfants  de  chœur  de  cette  métropole  porte 
une  aube  sans  plis  autour  du  cou  sur  su  sou- 
tane, et  tine  chap-  noire  en  été  et  en  hiver  à 
tous  les  offices  du  jour  et  de  la  nuit. 

On  commençait  autre fo$  à  prendre  celte 
chape  dans  notre  maison  de  Saint-Jean  le 
premier  jour  d'oclobie,  comme  il  est  marqué 
dans  MM  ancien  ordinaire  écrit  du  tenijis  de 
nos  abbés  réqu'iers.  Elle  était  différer- te  pour 
la  figure  de  celle  que  nous  portons  aujourd'hui  ; 
car  le  chaperon  et  le  manteau  tena'eut  ensem- 
ble, et  elle  était  sentblable  à  celle  que  portent 
les  chanoines  de  Notre-Dame  de  lieims  ,  <l  la 
réserve  que  le  manteau  descendait  plus  tav  et 
n'était  point  fourré.  Nuits  avons  changé  la  fi- 
gure de  celte  chape  en  IC7(),  et  nous  en  avons 
pris  de  semblables  à  celles  que  pi.r  ent  les 
chanoines  de  la  cathédrale  de  Soissons. 

Après  vous  avoir  fait  voir,  Monsieur,  quel 
est  l'habit  que  nous  portons  dans  la  maison  et 
au  chœur  en  été  cl  en  hiver,  il  faut  tous  par- 
ler de  celui  que  nous  devons  porter  à  la  cam- 
pagne lorsque  nous  sommes  en  voyage.  On  n 
vu  dans  les  siècles  passés  plusieurs  chanoines 
réguliers  d'ailleurs  très- réglés  dans  leur  con- 
duite, porter  l  habit  noir  tout  simple,  c'est-à- 
dire  sans  aucune  marque  de  chanoine  régulier, 
lorsqu'ils  étaient  hors  de  leur  maison.  U  e^i 
trai  que  les  chanoines  régidiers  gui  sont  élevés 
à  l'épiscopat  peurent  quitter  l  ha'iit  de  leur 
profession  qu'ils  portaient  dans  le  cloître,  et 
prendre  l'h  Mt  noir  ou  violet,  comme  le  por- 
tent nos  seigneurs  les  évêques,  à  la  différence 
des  moines,  qui,  quoiqu'ékvés  à  cette  haute  et 
sublime  dignité  de  l'Eglise,  même  à  lapourpre, 
ne  peuvent  quitter  l'habit  de  leur  profession, 
ainsi  qu'Innocent  III  l'a  défini  dans  le  coii- 


5,vi                                         IHC.TION.NAlUEnF.S  1>I'.1M;ES  KKI.IMKL'N.  fm 

cil'' (It  l.atii'nlni  1213.  Voici  comme  parle  emprrfsemeiit ,  et  i/ue  sun  hahil  blunc  Ht. 
ce  concile  :  Mmuiclios  ad  ppiscopiiuni  evac-  commoilnil,  il  ('criii/  an  supérieur  de  son  mo- 
ins prrrrc  (lehoro  smun  li.ibiluin  moii.uli.i-  nalcre,  qui  troitvnit  mauvais  de  ce  im' il  por- 
lem.  M  lis  le  meute  piipe  un  pusjiujé  de  màue  lait  un  luibil  noir,  el  lui  manda  qu'il  en  aialt 
iil'éyttrd  lies  cAonoi;i«  ri'guli'rs,  quin  rcmi  -  oblmit  la  permission  de  Jules  II,  qui  la  lui 
\x  iii^crviiMil  Inxiori,  iil  proiuiiri.n  il  liuio-  avait  accordée  à  conditian  .,iri'  garderait 
conl.  m,  tap.  Oiiod  Dfi  limorem  in  causa  toujours  dans  ses  habits  quclqu-  marque  de 
Zachjriié  ShA-  Cette  decisioji  duconiilede  celai  de  .«a  jirofession  :  lî(  pro  ai  bitrio 
Latran,  nti/ticl  jtrésidait  Innocent  IH .  ne  se  qunilc  iinciuc  sigiium  iiislituli  vcre  gcsla- 
nrnti/ue  i.li-.s  en  l-'raneeà  l'égard  des  moines  rem.  L'n  eU'et  il  n'est  pas  pnmis  à  un  cha- 
eicics  ù  l'ipiscopal ,  depuis  que  le  clertjc  de  noine  régulier  de  cw  h' r  de  telle  manière  son 
France,  m  Kiôo,  les  en  a  dispens'fs ,  co  ime  Itafit,  qu'd  ne  iiaraisse  point  du  tout  :  c'e  t 
ritnnique  M.  Godcau  diiis  son  Hiftifie  lie  r  fi-  pour  celle  raismi  et  dans  ctflefue  que  nos 
ijlis-fen  exposant  le  règlement  du  huitième  Pères  assrml/lès  dans  un  chapiti  e  gèjiéral  au 
concile  œc'imènique.  niuis  de  juin  de  l'an  H)2.3,  pirrlant  de  l'ha' it 
La  difficulté  est  de  savoir  si  les  ch  naines  que  m  us  deions  porter  quand  nous  (i//on>-  en 
réguliers  pourvus  île  bénéfices,  ou  les  cloitriers  rnmpi  gne,  ordonnent  que  nnus  aurons  des  bas 
mêmes,  lorsqu'ils  sont  envoyés  pur  leurs  suié-  noirs  ou  bruns,  un'  culotte,  une  ves:e  noire, 
rieurs  dan*  les  unitersilés  pour  y  étudier,  oit  el  par-dc  sus  un  pi  lit  io:liit  de  toile  avec  une 
en  campagne  p>)ur  se  promener,  peurenl  qnit-  soutan  ie  noire  par-dessus.  Ce  stutut  et  cet  e 
ter  tout  à  fuit  iUah.t  de  c.'oitre.  et  s'habi'Irr  ordonminre,  ptits  peinint  que  le  siège  épisco- 
tout  de  noir  eom  ne  font  /<■«  séculiers.  .\ous  pal  de  Sois-oas  était  vac:inl  pir  la  mort  (/« 
ne  voyons  point  non  plus  de  statut  dans  notre  Mgr  Charles  de  llaqueville,  furent  ensuite 
maison  qui  l'aut  .1  ise,  ni  de  décision  d'aucun  confirmés  par  Mgr  Sim  lU  le  Gr  s.  son  suce  s- 
docteur  qui  l  approuve.  Il  est  vrai  que  l'on  seur,en  Itiiii,  dans  une  visje  qu  l  fit  pour 
garde,  dans  le  carlutaire  de  l'abbaye  des  clin-  exercer  les  droit<  que  les  évéques  de  Soissuns 
noines  régul  ers  de  Saint-liarthélmiy  de  ont  sur  notre  maison.  On  dira  peut-être  qu'un 
Noyon.  un  privdége  de  Martin  IV , qui  virait  préire  ni  un  clerc  ne  doivcnl  jamais  quitter 
en  iidij,  par  le /i  el ,  sur  la  requé.e  de  l'abbé  la  soutane, el  que  quand  ils  tout  en  cimpagne 
et  de  sa  communauté,  il  leur  accorde  la  p>r-  ils  la  doivent  trousser,  mais  jamais  li 
mission  de  porter  l'habit  noir  hors  de  la  mai-  quitter. 

son,  et  mime  aux  bénéficiers  qui  en  dépendent.  Il  est  vrai  que  les  souverains  pontifes  el  les 

Voci  ce  privilège  :  concilts  obligent  tous  tes  clercs  à  porter  tou- 

Marlimis  cpi-copiis,  «icrMis  scrvorum  Dci,  jours  l'habit  clérical;  mais   il  est  aussi  à  rc- 

(lilitli;,  li  iis  abbali  cl  canonicis    innnasterii  marquer  q  te  les   clercs  doivent  avoir   trois 

Saiuli  B.iilholoina'i  pr>pe  No\  ioJuiium,  or-  sortes  d'habits,  l'un  pour  le  ministère,  l'autre 

diiiis  Sanc:i  Auguslini,    salulcni  cl  aposioli-  pour  l'usage  ordinaire,  et  le  iroisicme  pour  la 

oain   bcnniictiiiiiem.   Sintcraj  dévotion  s  af-  campagne.  Celui-ci  peut  être  porté  plus  eoui  t 

fetlus,   (iiiom   ad    nos  cl    lÀomanam   frcrilis  que  les  autres  ,  selon  qw  saint  Charles  Bor- 

Kccloïiam,   protnerelur  ul   pciilionibus  vc-  romée  l'a  décidé  (/(.n-  i«n  île  ses  conciles  de 

siris,  (luaiiluiii  cuni  Dco  possuinus,  favora-  Milan,  dont  il  était  archevêque,  en   I5(i8,  où 

biliier    annuainus.    Hinc  tsl    (|uo,I    nos  vi-  il  est  dit  :    CIcricis    ilcr   li.ihcnlilius  (|uovis 

slris    siipplicalioiiibus  iiicliiiali,  ul  alibas  el  vcsiilu    tonlracliori  uli   liccbil,  cl  doccnlcm 

reli   iosi  monaslerii  ve  Iri,  eliain   p.irroc  lii.i-  lamoii  illum  alqiic  hujusnndi   C'SC   opurlcl, 

liiiiii  ecclc>iarum  redores,  (jui  ex  dicii  onl  -  <\  quo  eos  esse  tcclcsiaslici  ordinis  liomiiiei 

nis    inslilulis,    \e>lcm    supcriorem     alb.iiii  facile  po  sinl  a^çncsii.  ('um  vcro  en  Vriicriiil 

(:;eslare  consueveriinl,  quolies  ipsos  pro  irac-  qno   perveui  c  conleiulunl ,    lalarem  logmi 

landi»,  procuraulis   el  pcrageirlis  mon  isle-  iiiduant. 

rii  €l    parocliialiUMi     fcc'.esiarum    iiego;iis,  Celte    soulanclle    est   aussi  npprouicc  par 

aliisque  rationabi'ibiis  el  lion' sliscaiisis  mo-  Son   Lminnce  Mgr  le   cardinal  le   Camus, 

nasleriuiii  pra-falum  (\ire   cuiiligcril,  vesle  évéque  de   Grenoble,   dans   ses  slaïu's  sym- 

■supcriitri    iii;;ri   coloria,  doncc  in  iTa-faluin  daux,  èi  la  page  '.i'*,  article  'i.   D'où  l'on  peut 

riion..slei  iniii  sinl  reversi,  libère  el  licile  uli  conclure,  1°  que  ce  n'est  i,ue  dans  les  voyages 

valcaiil.  eoiislitulion  bus   cl   ordinalioiiibus  qu'il  isl  permis  de  porter  un  habit  cnwl,   et 

nposiolicis,  iicc  non  sialulis   el   (onsueUidi-  m  second  lieu  que  celle  sonlanelle  ne  doit  rim 

lubus  inonaslerii  elordiiiis  jtra'dicli,  cœleris-  avoir  que  de  modeste.    Il  est  aisé  de  conclure 

i\uc  coiilrarii^  ne  ;u  iquain  olisl.mlibus,  au-  de  tout  ce  que  nous  vcn'tis  de  diie,  i^ue  nous 

clunialc  aposlolica    lenore   puesenlinni  m-  devons  dans  nos  v^ya, es  tous  tenir  èi  l'ordoii- 

dulgeiiius.  Ualnin  (jincsiani    l'r;enrslineiisis  iinîice  de  notre  chapitre  de  l'an  Kii.'J,  oii  li  est 

Dia'ies.  iv  id.   Augusli,    pwnlilicaUis    nosiri  d  t  ijue  nous  aurons  toujO'rs  un  rochet,  qii 

aniio   scrunilo.  est  noire  habit  (sscnliel,  urtc  une  souianelle 

Lriitme ,   qui    était    chanoine    régulier    de  nuire  par-d' ssus. 

l'abbaye  de  Sion,  et  qui  n'ignorait  pas  le  pri-  Je  suis,  ce. 

filé ;e   accordé   aux   chanoines    léguliers   de  ("elle   décision  en  faieur  du    rocliel  seul, 

Sainl-llarthélemy  de  t\oy un,  se  fit  néanmoins  que    M.  de    Louen    rrganle   coiimie   la  seule 

un  icrupu'e  de  t'en  servir.  En  effet,  comme  il  marque  csstnlielle  de   l'Iiabil  des  elianoiiies 

étaii  obligé  d'être  foavenl  <\  la  cour  des  pria-  ié;;uliers,  n'a   jiiis  plu  ;'i   loiis  ses  lonfrôres  ; 

ces  et  parmi  les   personnes   de  distinction  de  car  j'ai  iinelellie   d'un   ilianoincde    Siiul- 

tun  temps,  qui  cherchaient  jo  compagnie  avec  Jean  des  ^  igiies,  qui,ajai:l  lu  celle  disserta- 


•,c,ï 


JE  A 


JEA 


SCÎ 


Jiou,  marque  quil  n'ypprouve  iiulleuicnt 
celle  décision,  cl  que  la  soulane  csl  encore 
riiabil  essenlicl  de-i  chanoines  réguliers  ;  m 
effcl  ils  ne  doivent  pas  se  conformer  aux  ec- 
clésiastiques en  toules  choses,  cl  si  ceuv-ci 
portent  d*s  soutaneiles,  ce  n'es!  pas  une 
conséquence  que  les  chanoines  réguliers  eu 
doivent  porler,  on  du  moins  en  porter  par- 
dessus le  rochet  sans  avoir  encore,  leur  sou- 
l.ine  sous  le  mcwe  rocliel  :  c'est  ce  (|ue  pr;i- 
tquenl  les  religieux  de  la  Congrég.iUon  de 
Fr.ii  ce  et  Ls  plus  réformés  d'entre  les  cha- 
noines réguliers.  Nous  ajouterons  encore  que 
M.  de  Louen  s'isl  trompé  lorsqu'il  dit  que  la 
réfiirmc  que  fil  le  pape  Benoît  XII  ne  regar- 
dait que  les  chanoines  léguliersde  Lalran, 
I  iiisqu'il  n'y  avait  point  de  congrégalion  de 
I.alran  en  1339,  (  l  qu'elle  n'a  commencé 
que  plu-i  de  cent  ans  aprè«,  ou  plutôt  que 
celle  de  Siinte  Marie  de  Frisonaire  fut  éta- 
blie à  Saiiil-Jcan  de  Lalran,  dont  elle  pi  il 
pour  lors  le  nom,  qui  lui  fut  donné  pnr  Eu- 
gène IV  l'an  14i5.  Celle  réforme  de  Benoît 
XII  regardait  tout  l'ordre  canonique,  puis- 
<);ie  ce  pape  ordonna  à  tous  les  cliaiioiiies, 
en  quelque  lieu  qu'ils  fussent,  (le  tenir  des 
chapitres  provinciaux  tous  les  (|ualre  ans. 

Voi/fz  le  P.  leGi  is,  Chronic.  abb.  S.  Joann. 
nd  Vineas.  Sammarlh.  Gall.  Christian. 

JEAN  ET  DE  SAINT-THOAI.AS  (  Oudue  mi- 
LiTAiHE  DE  Saint-). 

M.  Hermar.t,  curé  di;  Maltol,  (larlanl  de 
cet  ordre,  dit  que  la  noble  ville  d'Ancôno, 
ville  épiscopale  et  port  de  mer  en  lialie,  si- 
tuée dans  l'Etat  (  cclé.siaslique,  vante  parmi 
ses  antiquités  d'avoir  donné  naissance  à  un 
ordre  militaire  qui  portail  le  nom  de  Saint- 
Jean  Bai  tisie  et  de  Saint-Tlioinus,  et  que  le 
zèle  cl  la  pié'é  de  quelques  genlilshontmes 
de  cette  ville  en  commencèrent  l'élablisse- 
n;cnt  par  le  secours  qu'ils  donnèrent  aux 
pauvres  malades,  qu'ils  reçurent  charila- 
hlcmenl,  cl  a'ixi;uels  on  bâtit  des  hôpitaux 
(jui  se  changèrenl  bientôt  en  comiiianderies 
par  les  biens  qu'on  y  fit  et  les  privilèges  que 
leur  accoidèrenl  les  souveiains  pontifes, 
()ni,  les  ayant  élevés  à  la  dignité  d'ordre 
militaire  dans  rEjjlise,  sous  les  heiireuv 
auspices  de  sainl  Jcan-Baptisle  cl  de  saint 
Thomas,  les  obi  gèrent  de  faire  la  guerre 
aux  bandits,  pour  faciliter  le  passage  aux 
pèlerins  que  la  dévotion  portait  à  visiter  les 
saints  lieux. 

D'un  autre  coté,  l'abbé  Giustiniani  et 
Schoonebek,  parlant  aussi  de  cet  ordre,  di- 
sent qu'entre  les  monuments  d'antiquité  dont 
la  ville  d'Acre  en  Syrie,  aneieiincmenl  Plu- 
lémaïde,  se  glorifie,  on  compte  l'insliluiion 
des  chevaliers  de  Sainl-Jean  et  de  Sai  .1- 
Thoinas.  Il  s'agit  de  voir  qui  de  ces  auteurs 
a  raison.  Il  est  certain  que  W.  Hi  rmaiil  sesl 
trompé,  puisque  les  papes  Alexandre  IV  cl 
Jean  XXIi,  qui  ont  approuvé  cet  ordre, 
comme  il  en  convient,  oui  adressé  leurs 
bulles  au  grand  maître  de  l'onlrc  de  Sainl- 

(I)  TobUl,   in /osiie,  cap.   xv,  el  \\\\\b.\S  i\aj., 


Thomas  d'Acre  el  non  pas  d'Aucône,  Mugi- 
stro  et  fralribus  militiœ  hospilalis  S.  Thoma 
martyr.  Cunluarien.  Aecon.  C'est  ain.si  que 
parle  celle  d'Alexandre,  et  celle  de  Jean  est 
conçue  aussi  en  ces  termes  :  S.  Thomœ  ma- 
gislro  et  fialribus  hospilalis  S.  Thomœ  mar- 
lyris  Acconen.;  el  c'est  ce  qui  fait  croire  à 
AJennénius  que  l'ordre  de  Saint -Thomas 
pourrait  être  séparé  d'un  autre  sous  le  nom 
de  Saint-Jean  d'Acie,  puisque  ces  papos  ne 
parlent  que  de  l'ordre  de  Saint-Thomas  ;  H 
le  laisse  pas  néanmoins  de  les  joindre  en- 
semble sous  le  nom  de  Saint-Jean  d'Acre  et 
de  Saint-Tliouias  :  Ordo  cqticilris  S.  Joan- 
nis  Acconensis  et  S.  Thomœ. 

Toslat,  dans  ses  commentaires  sur  Josué, 
parlant  de  la  ville  d'Accaron,  où  le  roi  Oehn- 
sias  envoya  consulter  Beelsébub,  dit  que  l'on 
appelle  présenlemenl  celle  ville  Acre ,  et 
qu'elle  a  donné  son  nom  à  un  ordre  de  che- 
valiers appelés  de  Saint-Jean   d'Acre  :  Isla 

civilas  vocalur  nunc  vnlijariler  Acre 

et  tib  hoc  loco  nominaiitr  quidam  ordo  mili- 
tum  qui  fuit  in  Ecclesia,  cum  oblinucruni 
Tcrram  Sanclam,  sciticet  ordo  Beati  Joann. 
de  Acre,  vel  de  Acharon.  Il  dit  encore  la 
même  cliosc  dans  ses  Commentaires  sur  te 
quatrième  livre  dis  Rois  :  lîst  autem  Acca- 
r.jfi  famosa  civilas  in  terra  Philistiiiorum 
circa  mare  Mediterrnneum,  in  qua  poslea  fuit 
ordo  quorumdam  militum  qui  vocanlur  de  S. 
Joanne,  el  illa  dvilas  vucatur  vulgnritcr  de 
Acre,  Accaron  (1). 

Ce  n'est  point  ici  le  lieu  d'examiner  si 
Toslat  a  eu  raison  de  croire  que  la  ville 
d'Acre  ou  Ptolémaïde  fût  l'ancienne  ville 
d'Accaron,  que  plusieurs  auteurs  prétendent 
n'être  qu'un  méchant  village  ruiné;  mais  au 
moins  Toslat  cl  tous  les  écrivains  qui  oui 
parlé  de  cet  ordre  militaire,  à  l'exception  de 
M.  Hermant,  disent  qu'il  a  pris  son  origine 
dans  la  ville  d'Acre.  L'on  ne  sait  point  l'an- 
née de  son  institution,  mais  plusieurs  au- 
teurs conviennent  qu'il  fut  approuvé  par  le 
pape  Alexandre  iV,  qu'il  lui  donna  la  icgic 
de  saint  Augusl  n,  el  ([u'il  fut  dans  la  suite 
confirmé  par  le  pape  Jean  XXII.  Alpiioiise 
le  Sage,  roi  de  Ca  tille,  ayant  fait  venir  de 
ces  chevaliers  dans  ses  Etals  pour  les  dé- 
fendre contre  les  incursions  des  Maures,  les 
combla  de  bienfaits,  cl  leur  laissa  encore 
par  son  testament  do  grandes  richesses; 
mais  rel  ordre  ayant  été  beaucoup  affaibli 
par  les  |iertes  qu'il  fil  dans  la  Syrie,  il  fut 
uni  à  celui  de  Alalte.  Ceux  qui  s'opposèrent 
à  cette  union  prirent  toujours  le  nom  de 
clievaliers  de  Sainl-Tliomas,  el  con.ervèrcHi 
la  croix  rouge  au  milieu  de  laiiuelle  était  un 
ovale  où  était  l'image  seule  de  saint  Thomas, 
au  lieu  qu'auparavant  ils  y  joignaient  cdlt 
d(;  sainl  Jean  Baptiste  (2). 

Voyez  Mennénius,  Gius'inlani  ,  Schoone- 
bek  ti  Hermant,  dans  leur  Usl.  des  Ordres 
inililains;  et  Ascag.  Tambur.  UeJur.  Abbal. 
d  sp. 


{■!)  Vcj. 


la  fia  (lu  vol.,  Il"  IS-2. 


jrr,                              nir.TKiNiSAmE  kes  orhkes  religieux.  .-ini 

JKAN   L  ftVAN(î/:i.lSTîi    (Ciunoi:xf.s   sixi-  ironttc,  et  qui  sr  souciail  jifii  où  il  demeurât, 

i.iKRS  DE  Saint-).  pourvu  iju'il  y  pût  s  rvir  Dieu,  acccpl.i  aTrC| 

,      .       ,  SOS   rotnpncnoiiii   l'onrc  lîo  rarrhpvrijno  de 

/)«  chanoines  fcculicr.i  de  In  cmujrrgahon  (le  jt^a.^,,,..   |/(,blR.  ,lu  monasUVc  ilo  S,iinl-Sau- 

Sainl-Jtan  rEvongéhsieen  P,  rujjal,  aiec  ^,,-,j.  ^^  yi„y  j^.  p.adcs,  rie  l'ordre  de  S  .int- 

h  yiededowJ'an  de  Ucenzr    ivique  de  ,{,,„„(, ^   ^,,^„i  n^o^l,   c!   la  répularilé  clant 

f.nwKffo  cl   emuHe  de  T  isfu,   /  ur  lomln-  j.„|  èn-mrnt  lianiiie  do  ro  n  onnsliTC,  il  était 

'""'•  toml)6  en  lonnnendo.  Cisl  pourquoi  cet  ar- 

Coiiunc  la  roiicri'gal'on  (lc<  rliniioincs  se-  chov(?quc,  de  son  auldiitc.    leur  donna  re 

rulicrs  <lp  Saint-Jean  rKvancolisie  en  Purlu-  monastère,    et  ils  en  (jrinnt  possession  l'an 

cal  stilisisin  encore  avec  c:l.it  (l.ms  ce  royaii-  l'»2o.    Martin   Laurent   revint  joindre  Jean 

me,   n'ayant  pas  eu  le   même  sort  que  celle  Vicenze,  et  leur  société  se  multiplia  en  ]  eu 

île  Sii'.l-("ieori;es  in  Alghn,  quoiqu'elle  suive  de  temps. 

le  n  émc  institut ,   et  qno  ces   i  li.;noiiies  re-  Pend.mt  ce  temps-là,   Alphonse.    q»ii  était 
crnnaissent    aussi   saint   Laurent   Jusiinicn  allé   à   Uonie,  y   entendit   parler  de   la    vie 
pour  leur  p.itriaidie  et  leu''  Père,  .linsi  (iti'il  exemplaire  des  chanoines  sécul  cr-i  de  Saint- 
est  porté  jiar  le  bref  lie  Clément  VIII,  du  27  (ieorges    l't»   Alfjha,    dont   la    réputation   se 
seplembre  1598,  dont  nous  avons  déjà  parlé  répandait  par  toute  l'Italie,  et  qui  au^impii- 
à  l'arliclc  (îi:(inr.i;s  n  Ai.i^in,   par  lc(iucl  il  tait  davantage  par  les  vertus  éd.. taules  qu'on 
leur  pcimet  d'en  lé'itcr  riiffire,  c'est  ce  qui  voyait  liriller  dans  les  personnes  des  cardi- 
fail  que  nous  traiterons  d  ;  leur  origine  en  nau\  Corrario  et  ("lOiideiinaire,   qui  étaient 
particulier.  des  principaux  fondateurs  de  cotte  congré- 
Sous  le  règne  de  Jean  I".  roi  de  Portugal,  Ration.  Il  alla  exprès  à  Venise  pour  vir  ces 
il  y  a\  ail  à  Lislionne  un   f.imeux  médeciti  et  hommes  aposloliques,  et  fut  si  louché  di-  leur 
professeur    de   belle^- Icilres ,   nommé   Jean  conversation   ri  de  la   vio  qu'ils  menaient, 
Vicenze,  natif  de  celle  ville,  qui,  dé},oûté  des  qu'il  résolut  d'embrasser  leur  institut.    C'est 
vanités  du   uionde  «t  désirant   se   (loiiner  à  puurquei,  ayant  appris  i'|UC  l'archevêque  de 
Dieu,  s'associa  avec  Martin  Laurrni,  eélèlire  nra^u-   avait  donné   un   monastère  à  Jean 
prédicateur,  et   Alphonse  Nogueyr.i,  gentil-  Vicenze  et  à  ses  compagnons,  il  transcrivit 
iKtmuie  et  fis  du  praiid  prévôt  de  Lisbonne,  la  règle  et  les  constitutions  de  ces  ch.inoines 
qui  avaient  conçu  le  même  dessein.  Ils  réso-  de   Saint-Ceorges,   qu'il   porl.i   avec  lui   en 
lurent  de   vi»re  enscml.li'  en   commun,    ot  l'orluç;  I.    S'élaiit   ren<l;i    au    uona^tère   de 
pour  cet   liïel   ils   se    rel'rèrcnl    pour   f,iire  Saiiil-t:<  u;vi;ur  de   \"i!Iar  d-    Frades ,    il   (il 
leurs    exercices  spiiiliiels   et   leurs    prières  ré<  it  à  Jean  <'t  à  ses  ci  inp  gnons  tle  la  ina- 
<!ans  l'église  de  Sainte-Marie  des  Olives.  ])ri-  n  ère   de   vivre  de>   channines  séculiers  du 
clie  Lisbonne,  avec  le  conseutenient  du  curé  Saint-Ccorgcs    in   Alfjha,    cî   les    )  ersuad>i 
de  ce  leu,   qui  ."pprouva  leur  sainte  résolu-  d'cmbra'^scr  cet  insliiut  ;   ce  qu'ils  Hreut  et 
li  .n.  Mais  dum  Vaquez,  évéque  de  Porto,  et  (hanpèreut   leurs  habits,   qui  étaient  n  irs, 
qui  I  tait  auii  de  Jean  Vicenze,  ayant  appris  en  d'autres  de  couleur  céleste  et  conformes  à 
sa  relr.-iite,  l'eng.igea  de  venir  avec  ses  coin-  ceuv   des  chan  lines   de  Sainl-lîcoigcs,  cx- 
p.ignons  dans  son  diocèse,  et  leur  oiïrit  l'é-  cepté  qu'ils  ont  un  caniail  (I). 
;ili>e  de  Sainte-Marie  de  Comp;mhaan  (éloi-  Leur  téputalion  se  répmdit  bicnlôl   par 
gnéc  de  Cl  lie    ville  d'environ  deux  lieues),  tout  le  royaume,   cl  ils  furent  en  si  grande 
«^juiine  un  endroii   retiré  du  monde,   où  ils  estime  auprès  du  roi    que  ce  pri;iee  confia  à 
pourraient   tranquillement   vaquer   à    I  urs  .lean    Vicenze   et  à  Martin  Laurent   l'infanlc 
excreices  et  songer    à   l'èternilé     bienheu-  Isabelle,   sa  (ille,   pour  la  remettre  euire  les 
reuse.   Ce   prélat,    à   quelque   temps  de   là,  mains  de  Philippe,  duc  de  Mourjjogne,  à  ijui 
ayant  été  transféré  à  l'évéché  d'iîvora,  ils  elle  avait  été  promi«c  en  n)aria!.^e,  ei  ils  par- 
ne  Irouvèrenl  pas  dans  son  successeur  des  lireol  avec  cette  princesse  l'.in  li'ÎO,  ay  .ni 
inclinations   aussi    favorab'es  à  leur  égard,  laissé  pour  supérieur  au  monastère  de  Sainl- 
«•l  il?  lurent  même  oMigés  d'abaiidonnei'  ce  Sauveur  llodrigue  Arnaud. 
Ijfu.    Alphonse  alla  à   Itome,   et   les  autres  Après  avoir  e\écuté  leur  rommissioi,  ils 
retournèrent  dans  leur  jiays.  .'lUèrent  à  l'.ome  pour  oMenir  la  confirma- 
Jean  ne  se  rebuta  poinl  pour  cela;  il  souf-  lion  de  leur  coii;'regation.  Le  caidinal  (îon- 
frit  patiemment  cette  disgrâ  e,   et  persévé-  dclmairc  se  trouvant   pour  lors  fort  m.iiadc 
ranl  toujours  d.iiis  le   de  sein  de  iieser»ir  et  abindonnè  des  médecins,  Jean,  qui,  com- 
nniquement  <)ue  Dieu,  il  distribua  tout  son  me  nous  avons  dit,   avait  excrré  cette  pro- 
bien auxpauvres,  cl,  ayant  pris  avec  luiJe.in  fission  et  s'y  était  rendu  très-habile,  rendit 
'lodriguez  et  l'ierre  Alvarez,   ils   se  rcvêli-  la  santé  au  cardinal,  ce  qui  aui;menta  beau- 
ent  dhaliils   noirs  fort  simples,  et  p.ireou-  cou|.>  l'eslinie  qu'on  avait  conçue  de  lui;  et  le 
urenl  eomoie  pèlerins  tout  le  Portugal.    Ils  pape  .Martin  V  conlirma  leur  congrégation 
irrivèrent  à  Urague,   où  dom  Ferdinand  de  sous  le  lilro  des  llons-llommes   de  Villar   de 
fîucrra,   qui  m  était  archevêque,   les  reçut  Frades,  et  l.i  donal  on  qui  leur  a>ail  été  faite 
très-humainement;    et,    y   ayant  demeuré  du  mon  is'ère  de  Saint-Sauveur,  ayant  coni- 
i|uelques  jours,    il   fut  si   iharmé  de   leurs  mis  celte  affaire  à   l'évêque   de   \  iseu   el  à 
I  ntretiens,  qu'il  résolut  de  ne  les  point  lais-  Loup  d'Olmedo,  général  de  l'ordre  de  Saint- 
«.er  sortir  de  son  diocùse.    Jean  ,    qui  av.iit  Jérôme. 

rcnoneé  volontairement  à  tous  lus  bi«ns  du  Leur  congrégation  ayant   pris  le  nuai  cUi 
(t)  Voij.,  à  la  fin  du  vol.,  n*  143. 


5Gri 


JEA 


JEA 


W, 


ec  inoiîaslèrp,  op.  1c>  np(iel.i  les  Bi;i>^-Ilt>n>- 
iiios  (:C  S  iiil-S;uivfiir  de  Vill;ir  d  •  Fradii-. 
Miiis  la  reiiip  Isni'pllc,  fcmiop  d'AlpliDiise  V, 
leur  ;ij;inl  fait  bûlir  un  nionjisttip  luir.  Ii's 
murs  de  Lislionin',  snus  le  lilre  de  ï^aiii  - 
Jean  rEvan^iélislc.  celle  )  rincesse,  qui  ava  l 
praïuîe  d;  volion  à  ce  sainl  apôlrc,  olilinl  du 
|)aj)e  Fugèiic  iV  que  crllc  con'^rcKalinn  iic 
s'apprlleriit  ()l:)s  à  l'avenir  de  Saint-Sau- 
veur (le  Villar  de  Frailes,  mais  de  Saini  Jean 
ri'^vaiigélislc. 

Ils  «ni  qualoize  monastères  en  Porli!!;;il, 
ilont  l'nn  des  plus  considérables  est  C(  lui  de 
Sa'nl-Eloi  à  Lisbonne,  qui  a  été  autrefois  un 
hôfiilal  cl  oratoire  fondé  par  Isard  ,  évè<iiic 
de  celte  >  ill(>,  sous  Tinvocalion  de  sainl  l'.iul, 
de  saint  Clément  et  de  saint  Eloi ,  nyani  re- 
t<  nu  le  nom  de  ce  dernier.  Ce  prélat  avait  in- 
séré une  clause  dans  la  fondation  ,  qui  po:- 
tail  qu'eu  cas  qu'il  s'établit  une  cunsrégatiou 
de  personnes  pieuses  qui  vécussent  en  com- 
mun, on  leur  pourrait  donner  cet  hôpital 
pour  avoir  soin  des  malades  et  leur  adminis- 
trer les  sacrements.  C'est  pourquoi  l'infant 
doni  Pierre,  qui  jjouvernait  le  royaume  pen- 
dant la  minor  lé  d'Alphonse  \,  son  neveu, 
obtint  une  bul'e  d'iusèno  lY ,  l'an  l'iiO,  qui 
accorda  cet  hôpital  à  ces  clianolnes,  cl,  à 
cause  (ju'il  porte  le  tilrc  de  Saiul-Eloi,  le 
peuple  ai  i  elle  aussi  ces  chanoines,  <"«  ce 
royaume,  Loijos,  (leoiquc  leur  vérilablc  nom 
Boil  celui  de  Saint-Jean  l'Evan^élisle. 

Jean  Vicenze  ,  (;u'on  a  toujours  reconnu 
pour  fondateur  de  celte  congrogalion,  fut 
év^^quc  de  Laïueso,  cl,  en  faisant  la  visiîo  de 
Ci'  diocèse,  voyant  qu'il  n'y  a\ait  pUjs  de  ré- 
tiulaMié  dans  le  ukui  islère  de  Saiii(-lieor.;es 
de  Llécia,  à  cause  du  peu  de  religieux  qui  y 
élaienl,  il  I<js  dispeisa  dans  d'auires  iiiunas- 
lére',  et  donna  C;  In  ~v\  aux  ciianoiiies  <ie  sa 
congrégaliou.  Il  lut  en^uile  lian-.|'é;é  à  )  évé- 
cbé  de  A'iscu  ,  où  II  n  oiirul  t'au  14...  Al- 
phonse Noguera  fjl  aussi  év,<iuc  de  Coniju- 
brc  et  ensuile  de  l.:slio:.ne.  Ces  chanoin  s 
avaieot  aulri  fois  le  soin  de  lo  s  les  hôpitaux 
du  royaume  de  PorUii;al  ;  ;\iais  Thouiassioi 
4ii;  <;u'ils  ont  quiilé  cet  em|)loi  pour  se  dou- 
j cr  à  l'élude  cl  à  la  iiréditalion. 

Il  y  a  aussi  des  clianoinesses  de  cet  insti- 
tut. I  (laime  à  Redordella,  dans  le  royaume 
de  daliie  ;  maii  elles  ne  sont  poul  soumises 
.-.ux  chanoines,  parce  qu'il  leur  est  défendu 
par  leurs  consliluljons  de  prendre  la  diiec- 
lioii  dC'  religieuses.  Quoiciuc  Pic  Vail  obligé 
ceu'i  d'ilalie  à  faire  des  vœux  solennels, 
ceux  de  Portugal  ne  s'y  sont  point  soumis. 
Après  deux  aus  de  nov.ciat,  ils  font  scuL- 
inenl  enîre  les  mains  du  supériear  une  sim- 
pK>  projnosse  (i'oi)ser\er  la  règle  el  les  cons 
tituiions  de  la  congrégation,  et  vœu  de  clias- 
leié,  de  pauvreté  et  d'obéissasiee,  tant  qu'ils 
t'emeureronl  dans  la  congrégation  ,  dont  ils 
peuvent  sortir  quar.d  lion  leur  seuîble  ,  cl  on 
les  renvoie  aussi  s'ils  foni  (îuelfjucs  l'anles, 
mais  cela  est  arrivé  raremenl.  Ils  sont  l,;rt 
riches  et  ont  plui  de  soixai\te  miile  écus  de 
revenu. 

Leur  vie  est  (rès-ai!sl'>rc.  Ils  se  lèvenî  à 
Une  hcuic  iq^rès  iwinuit  pour  dire  H!alJ:ies, 


ne  portent  que  des  chemises  de  laine  ,  font 
l'oraison  mentale  pendant  certaines  heur'  s 
du  jour,  el  pers.iuiie  n'en  est  cxcn)pi.  Ils 
commciiccnl  le  caiém  •  au  lundi  de  I,i  (,  ui-.;- 
quagésime,  et.  outre  les  jeûni  s  cou:niaudcs 
par  l'Eglise  ,  ils  jeûnent  encore  l'avcnt  tr;  s- 
élroi'ement,  cl  lous  les  iiercicdis  et  vendre- 
dis de  l'année,  excepté  depuis  Pâques  jusi]  Ta 
la  î'ciilrcôle,  qu'ils  ne  jeûnent  que  le  ven- 
dredi. Tous  les  mercredis  <l  vendredis  de  l'an- 
née elles  lundis  pendant  le  carême,  ils  pren- 
nent la  discipline,  comme  aussi  tous  les  jour; 
de  la  semaine  sainte,  elils  j.ûiienlaupainetà 
l'e/iu  le  jour  du  vendredi  saiul.Lcs  noiices  ne 
sont  point  reçus  avant  l'àgc  de  dixhuil  aus, 
et  sont  iiabillés  de  noir  en  méiii.;i:  c  de  i'ha- 
bil  que  portaient  les  preniiei's  fo  alaleurs. 

Le  roi  Jean  III  leur  ddima  le  soin  de  tous 
les  hôpitaux  de  Portugal  qui  étaient  de  fou- 
dation  royale,  le  |  re:uier  fut  ceWii  de  'l'ous- 
les-Sain's  à  Lisbonne,  qui  est  très-considé- 
rable, cl  dans  lennel  il  y  a  une  vingt  :ine  de 
salles  qui  peuvent  conlinir  six  mile  malades; 
le  Second,  celui  de  Jésus-Chri  Ide  Sanlarem; 
I  ■  troisième,  de  .Mor.(e-Mor-o-Novo,  et  le  qiia.- 
trièiiie,  du  Sai'.t-Es|)ril  d  Evora. 

Le  roi  D.  Emmanuel  se  servit  d'eus  poir 
aller  prêcher  aux  Indes  et  en  Eih.opie.  L'é- 
véque  de  V'iseu  ,  leur  fondateur  ,  reft)ruia 
l'ordre  de  Christ.  Didace  Gonzalve  ,  confes- 
seur de  1:j  reine  Eléonore,  femme  de  Jean  li, 
réforma  l'ordie  de  Saint  Paul,  j/rcniier  er- 
mite, en  P'ortugal,  el  b  s  chanoines  de  Saiu'- 
(ieo;gtfs  in  Al<j!ia  en  Italie  ,  dont  ils  avaieiil 
a  iprjs  les  observances  réguliéri  s  ,  les  ay..nt 
eus-jnéiiies  abandounées,  le  pape  Pie  V  or- 
donna ,  l'an  i'idi  ,  au  général  dis  chanoines 
de  Saiul-Jean  l'Iîvaugéliste  ,  «l'en  envoyer 
sept  ou  bu  t  pour  réforuver  ceux,  de  Sa.nt- 
Georges.  Teules  les  grâeeset  privilèges  que 
CCS  <leiiK  coiigrég. liions  ont  obtenus  des  sou- 
verains pontifes  oui  été  impri  nés  à  Lisbonne 
en  IS.il'i-,  et  les  papes  l'inoeeut  XI  et  Ale.^an- 
d.e  \  113  eu  ont  encore  accordé  eu  particulier 
à  la  congrégation  d(!  Portugal ,  depuis  que 
celle  d'Italie  a  été  supprimée. 

Ceux  de  Portugal  ont  aussi  eu  parmi  eus 
des  personnes  qui  se  sont  distinguées  ])ar 
leur  science,  ronmio  Fran(;ois  de  Sainle-Ma- 
rie,  évcque  suffragautde  Brague  ;  Vincent  de 
la  îtésurreclion,  qui  mourut  étant  général  tu 
i(J3G;  iMichel  du  Saint-Ksprit ,  miri  en  Iti't'i, 
;iprè>  avoir  élé  aussi  génér.il  ;  î'-mmanuel  de 
S«iut-Paul,  mort  en  lGi3  ;  Emmanuel  de  la 
Résurrection,  et  plusieurs  aulies. 

Le  nom  de  Bous-ilianmes  de  Saint-Sau- 
veur de  Villar  de  Frades  qu'on  dunua  à  ces 
chanoines  est  p  ut-clre  ce  qui  a  donné  lieu 
à  Cresccnze  de  d.r  ■  que  Uiebard,  cojiile  de 
('ornouaille,  frère  d'Henri  III ,  roi  d'Augîe- 
lerre,  avait  fondé  ccrlains  religieux  sous  le 
nom  de  Bons  Hommes,  et  qu'ils  avaient  été 
lie  celle  cougrég  ition  ;  mais  .M.  Huel,  évé(jue 
d'Avrai'.ciies,  dans  ses  Origines  de  la  ville  de 
(]ae!!,  dit  que  c'étaient  des  religieux  Sachets, 
dont  nous  parlerons  à  l'article  do  ce  nom,  cl 
qui  étaient  aussi  habillés  de  bleu. 

Voijez  Francisco  de  S.Muna,  Uist.  das  sti- 
(jiaclas  Conijreijacou:s  dos  conegos  seculares 


\lr  s.  Jrorge  em  AIgn  de  Vcnela,  cl  de  S.  .ïono 
Hvmrf/rlh'a  rm  Portugal.  Jncqurs-Pliilippiî 
Tiioinasini,  Annnl.  Cotuireg.  Canonir.  Senti. 
S.  (ieorg.  in  Mglia.  I).  Nicol.i.  ilc  S.  Marin  rtc 
Lisboa  ,  Chronic  <ln  Ordni  dos  Conrgos  Ur- 
.  rnnlc.x,  lih.  i.  (îio  Prli-o  Cro  ron/i,  j'resiilin 
Uomuno  hb.  ii,  pag.  2S.  iMiimanucl  Hodi  ig., 
Quirst.  Rrgul.,  fom.  I,  quœst.  3,  art.  1. 

JEAN  PASCHASli;  RT  DE  JÉIIOME  DE 
lANZA  (Fui-iiKS  M  M.i  us  de). 

Jean  Paschasc  ,  snriif  tnmé  d'-l/itiVi ,  qui 
avait  é.  6  di  ciplc  du  liii'nlieiircux  Jean  de 
('■iiadaloiipe  ,  cl  l'avait  braucoiip  aidé  dans 
léialilissotncnl  dr  sa  réforim- ,  voyaiil  apiès 
sa  iiHirl  toutes  Irs  oiipositioiis  que  l'on  con- 
linuail  à  faire  contre  la  pro\in'e  de  Saint- 
Gabriel,  que  l'on  voulait  supprimer  dans  sa 
naissance,  cnlreprit  le  vo\age  de  Rome  pour 
les  faire  lever  dans  li-  ch.ipilrc  généralissime 
qui  s'y  lut  l'an  loi".  Mais  ,  y  ayant  trouvé 
pi  is  de  difliculté  qu  il  ne  croyait ,  et  crai- 
L'iiant  (juc  l'autorité  de  ses  adversaires  ne 
remportât  enfin  sur  l.i  justice,  il  résolut 
d'enli éprendre  une  nouvelle  réforme  avec 
le  consentement  du  péiié  al  de<  conventuels, 
qui  lui  afcorila  la  permission  d'ériger  des 
cou»euls  ,  de  recevoir  des  novices  ,  et  même, 
les  ronvciitiieN  qui  voudraient  se  niellre  sous 
sa  conduite.  Ce  fui  en  vertu  de  cette  [lermis- 
sion  ,  qui  fui  confirmée  par  le  pape  I.éon  X, 
qu'il  (oaiinenea  la  cusiodie  qui  fut  appelée, 
de  son  nom  ,  des  Pasclinsites.  Son  premier 
couvent ,  qui  était  situé  dans  une  île  proche 
Uedoudella  ,  fut  dédié  aus  ap.^itres  saint  Si;- 
iMon  el  sainl  .lude,  La  réi'Ulaliun  de  Jean 
P.isiliase  ronmiençani  à  se  répandre,  1(> 
nombre  di-  ses  dii^riples  ;uif;ii',ciila  :  ce  qui 
lui  donnani  bonne  esp  riince  pour  l'iigran- 
dissement  de  sa  réforme  ,  il  alla  à  Kome  en 
lo.'J'i,  pour  deni  inder  au  pape  Pau!  III  la  [i  r- 
niission  de  recevoir  des  1  rères  de  l'Obscr- 
v,jnce,  afin  que,  inuitipliani  le  nombre  de  ses 
disciples,  il  eût  le  moyen  d'étendre  davan- 
tage ret:e  même  réforme.  Mais  il  ne  trouva 
pas  le  pape  disposé  en  sa  faveur  :  ce  qui 
n'empêcha  pas  ,  malgré  le  refus  (jn'il  en  re- 
ç!:l,  de  persister  dans  son  dessein  peiidanl 
sept  ans,  au  bout  desquels  il  obtint  enfin  un 
bref  du  même  |  ape,  le  10  iiiai  lo'il  .  par  le- 
quel il  lui  fut  permis  de  recevoir  tous  ccuv 
<iui  voudraient  embrasser  sa  rél'orme  ,  soil 
qu'ils  fussent  de  l'Observanceou  de  quelque 
autre  ordre,  quand  même  ils  n'auraient  pat 
la  permission  de  leurs  supérieurs  ,  pourvu 
qu'ils  l'eussent  demandée  ;  mais,  comme  cela 
lii  ait  à  consC(iuenrc,  cl  qu'il  en  arrivail  tous 
les  jours  des  inconvénieuls,  sur  re  que  ceux 
lies  Obscrvanis  qui  étaient  tombés  en  faute 
passaient  dans  la  réfomie  de  Pascliase  pour 
éviter  la  eurrcrlion  que  leurs  supérieurs  leur 
pouvaient  faire  ,  !e  pape  ,  en  étant  in'ormé  . 
rcvocpia  son  bref  cl  délend  t  aux  ()liser\aiils 
(le  passer  chez  les  Pasi  basiles,  à  moins  qu'ils 
n'en  eussent  (bieiiii  l.i  permission  de  leurs 
supérieurs  ou  du  sainl-siege, 

l^e  zélé  réfornialeur  (il  un  second  élabiis- 
M'uicnl  à  llayoïine,  biinrg  de  Oaslllle,  el  un 
£iiireà  N'igo  l'an  1551.  Dans  le  leuips-là  Al- 


niiillO.N.NAIIÎI.  IdCi  OUDliLS  ntLlGltUV.  5ii3 

plion-c  de  Mazanelte,  qui  faisait  aus<-iune  ré- 
forme lai  liculière  au  couvent  de  Mazanelte, 
lieu  :!e  sa  naiss  'nre.elqui  en  avait  aussi  ob- 
tenu la  permission  du  ^'énéral  des  conven- 
tuels, ayant  entendu  parlerdu  P.  Paschase,  le 
fui  voir, el  trouva  sa  manière  île  vivre  si  con- 
forme à  «elle  qu'il  faisait  pratiquer  à  ses  re- 
ligi'Ux,  qu'il  unit  le  couvent  de  M.iznuette 
à  ci'U\  du  P.  Paschasc, fl  le  reroniiul  pour  su- 
pé  leur.  Paschasc  cl.iul  mort  ((uelijuc  lemps 
aprè<,les  conventuels  firent  ce  qu'ils  purent 
|)our  s'emparer  de  ses  couvents,  et  s'opp  i- 
ïèreiil  à  ce  que  cette  réforme  s'augmentât  ; 
mais,  nonobstant  leurs  opp  isitions  ,  on  en 
fil  une  custod  e  sous  le  nom  de  Sainl-Joscph, 
el  ils  furent  ensuite  unis  avec  les  pauvres 
couvents  de  la  réforme  de  S  lin'.-Pierri'  d'.\l- 
cantara,  comme  nous  le  dirons  à  l'article  de 
ce  nom. 

Dominic.  de  Oubermlis  ,  Orb.  Seraphic, 
tom.  I,  lib.  V,  rnp.'.'>,  §  9.  Franci  c.ljonzag,, 
De  Oiig.  Srraph.  lielig. 

A  celte  réforme  des  Pascliasiles  nous  jo'n- 
drons  celle  du  P.  Jérrtme  I.aiiza  ,  qui,  vou- 
lant iiniler  les  l'ércs  des  déserts,  se  relira 
dans  une  solitude,  où  ayant  assemblé,  l'an 
lois,  quelques  personnes  qui  voulurent  vi- 
vre avec  lui,  ils  le  reconnurent  pour  maître 
el  supérieur.  Ayant  tenu  conseil  enlre  eux 
sur  le  genre  de  vie  qu'ils  embr.isseraienl,  i's 
prirent  la  résolution  de  former  une  congré- 
gation particulière,  dans  laquelle  on  obser- 
verait à  la  lelire  el  sans  glose  ni  iulerpré- 
lalion  la  règle  de  saint  François,  dans  do 
pauvres  (■rmila;,;es  séparés  les  uns  d  s  au- 
tres, au  milieu  desquels  ils  bâtirent  une 
église.  Ils  s'enga:;èrenl  à  observer  conti- 
nuellement la  vie  quadragésimale,  à  jeûner 
tous  les  mercredis  el  jrudis  de  l'année  ,  et 
convinrent  enlre  eux  qu'ils  recevraieiii  tous 
les  frères  el  les  leligieux  de  l'ordre  de  Saint- 
Domiiiiiiue  qui  voudraient  eiilrcr  dans  leur 
congrégation  ,  el  (lue  ceux  qui  y  seraient 
reçus  seraient  obligés  de  reronnaitie  Jé- 
rôme Lanz.i  pour  supérieur.  Ils  obtinrent  à 
ce  sujet  une  bulle  du  pi\,>c  Jules  11!  l'an 
l'iaù.  Le  bienlieureiix  lîenoil  de  Palernie, 
suruouimé  te  Noir,  dont  on  poursul  la  ca- 
nouisalion  en  cour  de  llonic,  fut  un  des  [ire- 
miers  qui  entra  dans  celle  congrégation  : 
elle  fui  suppriméiî  l'.n  loG2  par  le  pape 
Pie  IV. 

Doiniiiic.  de  (iubernatis  ,  Urb.  Scaphic, 
tum.  I,  lib.v,  §  9  et  10. 

jiMlOME  (Ouniii:  di;  Saint-). 

SIXTIOX    PUKMlliRK. 

KUMITES  l)K   SAI.N'I'-JKHOMK. 

§  1  ■^  iJcn  religieux  L'niiilc.^  (le  Sdinf-Jcrômeen 

Jïsp(i'/iir,  appelés  eomiimucmenl  Jcroni/mi- 

ti.i,  mer   la  rie   du   rrnrrnble  l'ère   l'iirre 

l'crdiihin  t  de  iiuudiitnjdra,  leur  [onduleur. 

Outre  les  Jésuales  d'  Sainl-JérAine  donl 
nouH  parlerons  à  1'.  ilicle  de  ce  nom,  il  y  a 
eiirore  quatre  ordres  rel  gieux,  ou  difléieii- 
les  congrégations,  qui  se  sont  mis  sous  la 
protection  de  ce  l'ère  de  l'I'^glise  el  qui  ont 
pris  les  noms  d'Ermilcs  de  Saiiil-Jérôiuc  de 


fifiî)  JF.P. 

rOhservaacc  ou  de  Lombardic,  d'Ki miles  do 
Sainl-Jérôniedcla  coiisiégalion  du  li.l'ierrc 
de  Pise,  el  d'Eriiiiles  de  Saint-Jérôme  de  la 
congrcgalion  de  Fiésoly  ;  el  quoique  ces 
quatre  ordres  soient  entièrement  différents 
les  uns  des  autres,  ceux  d  Espagne,  de  Loni- 
barilic  et  du  B.  Pierre  de  l'ise,  oui  été  néan- 
moins confondus  ensemble  par  M.  Hcrmant, 
qui  n'en  fait  qu'une  seule  coni;régation. 
Cette  congrécjalion,  dit-  il  (Uisl.  des  Uni.  re- 
li<j.  tom.  II,  pag.3J2)  est  assez  céU'bre  en  lln- 
lie  et  en  Espaijne.  Le  li.  Pierre  de  Pise,dit 
(j'aiitbacurla,  y  travailla  avec  un  zèle  exlré.i  e 
en  Italie,  et  un  certain  'l'honuis  en  Eapmjne, 
vu  il  était  passé  avec  (jneliiues-uns  de  ses  cum- 
pngni,ns  vers  l'un  1380.  Quelques  liisluriens 
les  appellent  les  Ei mites  de  Suint-Jéiô:iie  : 
ils  portent  une  tunique,  un  scaiiulairc  et  un 
cnpuce  minime,  avec  une  ceinture  de  cuir. 
Dans  leur  premier  éla'dissement,  ils  ne  fni- 
saient  point  de  vœux,  et,  vivant  du  travail  de 
leurs  mains,  leur  but  principal  é  ait  de  s'em- 
ployer au  soulagement  des  p:uvres.  Le  ixipe 
Grégoire  XI  confirma  cet  institut  en  1373  un 
137Î  ,  sous  la  règle  de  suint  Augustin.  Le 
chef  de  l'ordre  est  à  Lupiana,  dans  le  diocèse 
de  l'olède.La  congrégation  de  Saint-Isidore, 
dont  le  monastère  i si  à  Sécille,lui  appartient, 
avrt  celui  de  Saint-Laurent  à  Lescurial,  b:Hi 
p(.r  les  li  éralités  de  Philippe  II;  et  celui  de 
Saint-Just,  I  «  Cliarles-Quint  se  relira  sur  ta 
fin  de  sis  jou:s.  Il  y  en  a  plusieurs  en  Italie 
sous  divers  noms.  Lupo  d'Olmedu  ,  religieux 
espagnol,  avait  composé  tme  règle  tirée  des 
écrits  desLnt  Ji'iôme  qu'il  voulut  faire  re- 
cevoir à  son  ordre,  mais  cela  n'eut  point  de 
suite.  Il  fonda  la  congrégation  de  Saint-Isi- 
dore, qui  se  sépara  du  reste  de  l'ordre;  mais 
enfin,  p:.r  les  soins  de  Philippe  II,  ils  se  réu- 
nirent pour  ne  faire  qu'un  seul  corps.  Lupo 
d'Olmédo  mourut  à  Roms  en  1433.  Pie  Y 
obligea  ces  religieux  de  faire  des  vœux  solen- 
Ik/v,  et,  s'élant  adonnés  à  l'étude,  ils  ont  tra- 
vaillé comme  les  autres  congrégations  de  l'E- 
glise à  l'instruction  des  fidèles,  et  à  la  prédi- 
cation de  l'Evangile. 

M.  Hermant  ^e  trompe,  premièrement  en 
ce  que  ces  trois  différentes  congrégations 
n'ont  jamais  été  unes  ensemble,  et  ont  tou- 
jours eu  des  observances  différentes  et  des 
habillements  différents  dès  le  coainiencenicnt 
de  leur  institution.  Ce  que  cet  auteur  dit 
qu'un  certain  Thomas  travailla  beaueoup 
à  la  fondation  de  cet  ordre  en  Espagne,  où 
il  ét;iit  passé  avec  quelquis-uns  de  ses  com- 
pagnons vers  l'an  1380,  ne  peut  pas  avoir 
été,  puisque  ce  même  Thomas,  qui  par  la 
sainteté  de  sa  vie  a  acquis  le  titre  de  bien- 
heureux, mourut  à  Foligny  l'an  1377,  sclun 
Juste  Roseo,  le  premier  écrivain  de  sa  vie; 
Jacques  Jacubilli,  qui  l'a  insérée  dans  sc^ 
Vies  des  Saints  de  Foligny  ;  Wadingh,  dans 
ses  Annales  des  Mineurs;  le  P.  Jean-Marie 
deVernon,  dans  ses  Annales  du  Tiers  Onire 
de  Saint-François;  le  P.  Arlhus  du  Mous- 
licr,  dans  le  Martyrologe  des  Saints  des  trois 
ordres  de  Saint-François,  au  15  septembre, 
et  généraleuunt  tous  ceux  qui  ont  f.iii  mcn- 
îiou  de  ce  bienheureux  Tlium  :s,  outre  tiue 


i\:\K 


37(3 


M.  Hcrmant  reconnail  que  l'ordre  de  Sainl- 
Jcrônie  (n  Esp.igne,  aui)uel  à  la  vérité  !«■! 
disciples  du  bienheureux  Thomas  doimè- 
rcnl  commencement,  fut  confirmé  en  1373 
ou  137V. 

Ce  qu'il  ajoute,  qi:e  Loup  d'Olmédo  com- 
pcs!  une  règle  tirée  des  écrits  de  s.ii  it  Jé- 
rôme qu'il  voulait  faire  recevoir  à  son  or- 
dre, mais  que  cela  n'eut  point  de  suite,  n'est 
pas  conforme  à  l'histoire;  car,  comme  nous 
le  prouverons  dans  la  suile,  Loup  d'Olmédo 
ne  composa  cette  règle  tirée  des  ccri's  de 
saint  Jéiôme  que  pour  les  religieux  île  sa 
coiigrégali,in,  qui  élait  celle  des  Moines  Jir- 
miles  de  lObscrvance  «u  de  LombarJie;  et 
il  ne  pouvait  pas  obliger  ceux  d'Espagne  à 
la  recevoir,  puisqu'il  n'avait  plus  pour  lors 
jiucune  juridiclioo  sur  eux.  Il  est  vriii  que 
celle  congrégation  de  Lombardie  a  élé  ap- 
pelée par  quelques-uns  la  congrégation  de 
Saint-Lsidore.cl  que,  par  les  ordres  de  Phi- 
lippe H,  les  couvents  que  les  religieux  de 
celte  congrégation  avaient  en  Espagne  ont 
clé  unis  à  celle  des  Ermites  de  Saint-Jérôme, 
plus  connus  sous  le  nom  de  Jéronymites  ; 
mais  relte  congrégation  des  Moines  Ermites 
de  rObservance  a  toujours  su!)sislé  en  Ita- 
lie, où  elle  a  encore  à  présent  dix-.->ept  cou- 
vents. Enfin  ce  que  dit  .M.  Hernianl,  que  tous 
les  religieux  de  Saint-Jérôme  ne  faisaient 
point  de  vœux,  el  que  ce  fut  le  pape  Pie  V 
qui  les  obligea  à  faire  des  vœux  solennels, 
ne  doit  regarder  que  ceux  de  la  congrégalioa 
du  bienheureux  Pierre  de  Pise,  qui,  à  la  vé- 
rité, n'onl  commencé  à  en  faire  qu'en  loG'J, 
(]uoiqu'ils  eussent  été  élablis  dès  l'an  1380. 
Miiis  les  autres  congrégations  d'Espagne  et 
de  Lombardie  en  ont  toujours  l'ait  dès  leur 
origine.  Peut-être  que  eel  établissement  des 
Ermites  de  Saint-Jérôme  de  la  congrégation 
du  bienheureux  Pierre  de  Pise,  fait  eu  1380, 
a  fait  croire  à  M.  Hermant  que  le  P.  Thomas 
ét^iil  passé  cette  année  en  Espagne  pour  faire 
l'établssement  des  Jéronymites  de  ce  royaume. 

M.  Hermant,  parlant  de  ces  Jéronymites, 
n'a  rapporté  presque  que  ce  qu'en  avait  déjà 
dit  M<iréri  dans  son  Dictionnaire.  Ceux  qui 
l'ont  augmenté  ont  ajouté  que  les  Jéronymi- 
tes suivirent  d'abjrd  la  règle  de  saint  Augus- 
tin; m;iis  que  Loup  d'Olmédo,  leur  général, 
dressa  uue  règle  composée  des  sentiments  de 
saint  Jérôme,  laquelle  lui  approuvée  par  le 
pape  Jlartin  V,  qui  dispensa  les  Jéronymites 
de  garder  celle  de  saint  Augustin;  el  qu'où 
doit  observer  que  les  Ermites  de  la  congré- 
gation de  Siiinl-Jéiôme  en  Italie  suivent  au- 
jourd'hui la  règle  de  saint  Augustin.  Comme 
il  y  a  eu  encore  deux  différentes  congréga- 
tions de  Saint-Jérôuie  en  Italie,  ces  conti- 
nuateurs de  Moréri  devaient  faire  observer 
eux-mêmes  que  ce  sont  les  Moines  de  Saint- 
Jérôme  en  Italie  qui  ont  autrelois  suivi  la 
règle  que  Loup  d'Olmédo  avait  dressé-,  et 
qu'ils  suivent  présentement  (uUe  de  saint 
Augustin.  M.BuUeau(//('5/.  de  iord.de  Saint' 
Bmoit,  liv.  I,  ch.  6,  p.  72j  s'est  aussi  troiu- 
pé  lorsqu'il  prétend  que  ce  sont  les  Ermites 
de  Siinl-Jérôme  en  Espagne  qui  prirent 
cette  règle  que  Loup  d'Olmédo  avait  compo- 


571 


se 


ser,  puisque,  roinmc  nous  nvons  dit  ri-ilc- 
\M\i,  il  «e  pouvait  oliIi;;er  les  Eruiilcs  d'Ks- 
paçn-j  ;"i  larcccvnii,  cl  qu'iiu  ( oulrairc  ils 
^■v  oppo  èrciil  rirleiiiciil.  Lnfm  nois  i!i)nni>- 
r  iiis  des  preuves  conv.ilncaiilis  dans  la  sui(c, 
«iiuimo  il  V  a  eu  ]  lusieurs  e(in;;répalioiis  de 
lUrdrc  deSainl-Jcrôuic  qui  n'oiU  eu  aucune 
rrlaiioii  les  unes  avec  les  autres,  et  qui  oui 
luujours  élé  difforenles,  cl  uous  allons  coui- 
iticnrer  par  la  congrégatiou  des  Jcroujmiles 
d'Iisi  a-^uo. 

Le  Iroisii^mc  ordre  de  Saint-Fram  ois  se 
filorific  avec  raison  d'avoir  donné  naissance 
à  celui  des  Kruiiles  de  Salnl  Jérotne  eu  K  - 
pa^ne,  puisque  ce  furent  quelques  disciples 
t;u  liieiiiicureux  l'Iionias  de  Sienne  ou  Tlio- 
iiiasuciio,  proies  (lu  Tiers  Ordre  de  Saint- 
Iraneois,  qui  passèrent  eu  i:spr.f,'ne  et  s'y 
lelirèrenl  d'aburd  dans  divers  ermitages  qui 
furent  en  p<  u  de  temps  peuplés  d'un  grand 
nombre  de  per>onnis  qui  les  voulurent  imi- 
ter, et  qui  tous  ensemble  formèrent  quebiwe 
trmps  après  un  ordre  religieux  (jui  fut  ap- 
prouvé parle  pape  Gréj^oire  Xlsous  le  noni 
«le  saiul  Jeiôme,  (lu'ils  avaient  choisi  pour 
leur  protecteur  el  leur  modèle,  ayant  voi-.lu 
imiter  la  vie  péuilcnîe  cl  retirée  que  ce  sa  ni 
docteur  pr.Jiijua  dans  le  u;onas'.ère  de  lietli- 
iéein. 

On  ne  peut  pas  di^co:»venir   que  ces  pre- 
miers enu.tes  qui  passèrent  en  Kspagnc  ne 
fussent  du  Iroisicmu  ordie  dcSalut-François, 
puisque  le  bienlieureus  Thomas  de  Sienne, 
leur  !n,.ilrc,  ené'.ail,  sc'nn  ce  que  disent  nou- 
>eulenicnl  tous   le<   historiens  de  l'ordre   de 
Sainl-rrauço'.s,  mais  encore  saiul  Anli  niii, 
archevêque  de   Moreuce,  Jacobil'i,   et  pl;i- 
>icurs  autres.  Jos  p!i  Sig;  cnça,   qui  a    lait 
riiistoirc  de  l'ordre  de  Saint-JcrôniO,  en  de- 
meure même  d'ac  ord,  s'iii    rapportant   au 
(én»o  g-.iage  de   saint  Anionin,  loisqu'il   lil: 
Aqiiien  Unma  S.  Antonio  de  h'iorencia   en  m 
Hisloria  Tliomas  Sucriu,  y   dize  que  rr.i  de  lu 
Ivrccra  rcjla  de  S.   /'laïKisro,  y  que  tenian 
es]/irilu    prophilno.   Mais    Cresccr.ze,    ijui, 
rouime  n.ms  avor.s  dit  dans   1 1   préface,  se 
qiialilie   de  iiairiiicu  de  Pliisanee,  et  se  fait 
nc.Tumoins   a«si  k   coi^nallie    pour  religieux 
de  i'oidic  de  Sainl-Jéromc,   n'est  pas  de   ce 
s<ntim''iit.    Il    prélen.l  au   contraire    que   ee 
liieiilieurcux  1  iiomas  cl  ses  liiscijjles  élaienl 
de  l'ordre  uième  de  ^a  nt-Jérùme,  qui,  selon 
lui,  a  pMS  son  origine  au  temps  des  piopiiè- 
Ics,  a  été  établi  par  saint  Aniuine,  dilate  j'ar 
saint  Jéiôuie,  étendu  par  tout  l'univers,  tan- 
tôt se  mainlenant.de  lui-même,  tantôt  chan- 
geant <lc  nom,  el  s'uniss.int  à  d'autres  sans 
cesser  d'étr^'  toujours    l'oidrciie  J-ainl-.lè- 
rôiue.  /:rco  rordincGierunimiuiio,  dit-il  dans 
nu    endroit  (/')iM(/.    ruindnv,    pari,  i,  pnij. 
'ÔG'.i],  oriijiiiiito  (In  proplieli,    ristorulo   da  S. 
Auionio,  dil'itdio   da  S.  Gironawo,  dijfnso 
nell  unii  crsoj  har  de  fc  stesso   ninlirnsi,  tinr 
viuta  minic  ri  nd  (diri  si  uni-ce  senzn  militri 
d'isserc-  Ou  (/cut    bien   s'imaginer  ipi'il  dis- 
[lUle  aux  Carnn  s  l'antiquité  et  la   préséance  : 
en  efT"'!,  il  met  non-senicmcul  au  nomliredes 
religieux  de  l'ordre  de  Saint-Jérôme  le  bien- 
lieuitux  Allicrl,  législateur  des  (Jarmes,  cl 


DICTIONNAllli:  DES  Ulll)IU,S  UEI.RiltUX.  [.72 

lois  ceux  qui  (ni  haliiic  le  monl  Cirmel  ; 
mais  il  y  mel  aussi  saint  l'aul  preniicr  ci  tuit<-, 
saint  Antoine ,  saiul  Pacénie,  les  premiers 
l'èies  de  la  vie  solitaire,  cl  les  aiities  f 'lula- 
leurs  des  ordres  religieux  qui  les  oui  suivis, 
coiumc  saint  It.tsile,  saint  Augusiin,  sa  nt 
i!euoî!,  et  par  conséquent  leurs  disciples.  r,e4 
aiileur,  ne  croyant  pas  que  le  grand  nou>bre 
tie  religieux  qui  sont  sortis  de  ces  ordres  fût 
suflisaul  pour  former  l'ordre  de  Saint-Jé- 
rôme, y  a  encore  fait  entrer  une  infinité  de 
saints  qui  n'ont  jamais  été  disciples  de  ces 
saints  fondateurs  u'ordros,  et  qui  la  plupart 
même  n'ont  jamais  élé  religieux.  Il  eu  a  été 
chercher  dans  tous  les  |iays,il  il  a  eiu  trou- 
ver eu  France  (sans  parler  des  autres  royau- 
mes) saint  Martin,  évêque  de  Tours  ;  saint 
lieiiii  ,  arciicvêque  de  lleims;  s.iint  l.loi, 
évé(|uc  de  Noyou;  saint  Loup,  évêque  île 
'l'royes  ;  saiiit  Fiacre  et  plusieurs  autres. 
Ainsi  il  ne  faul  pas  s'é:onner  s'il  dit  que  le 
bienheureux  Thomas  de  ?ieniie  était  de 
ror<lie  de  Saint-„'érômc,  avant  méoie  qu'il 
fûi  é\'ibli. 

Sigueuea    se  trom|>e  lorsqu'il  d.miu'  <à  ce 
saint  le  surnom  de  Surho  ou  Sueeo,  cl  qu'il 
dit  (juc   saint   Aniouin   lui  a  doiuié   (  elui  de 
Succio.  Cii  saint  archevêque  à  la  vérité  l'a 
appelé  Tbom.isueci   s,  coumic  tous  les  histo- 
riens <juf  eu  1  u!  pairie;  mais  ce  n'est  qu'un 
seul  mot,  qui  vctit  diie  en  it.ilien  Tiu)m  isuc- 
eio  ou  le   petit  Tlioiiias,  parce  qu'il  voulu' 
prcniire  ce  nom  par  huuiilité.  Il  eut  un  gniiuî 
nombre   de   discijil  s,    ((ui   denu  uiaieul    en 
divers  ermitages  sur  un-  monlagne  des  Al- 
l'cs;  el,  si  ou  eu    vcal  croire    les   hisloricns 
de  l  or.de  de  Saiut-Jér<îiue,  ce  bienheureux 
Thomas,  qui  ;ivait  le  don  de  propliélie,  dis- 
courant plu^ieuT'  fo  s  avec  ses  discples  des 
cliotes  qui  devaient  arriver,  leur  disait  tou- 
jours qu'il  voyait  dcseemlre  le  Sainl-lîsjirit 
sur    rhspague  ;  t'est   ee   qui   donna   lieu   à 
quelques-uns  d'eulrc  eux  de  quitter  l'Italie 
p>;ur  passer  eu  Iv  pague.  Siguenea  dit  «(u'ils 
é  aient  sept  ou  huit,  et  n'en  nomme  qu'un, 
(jui  était    un    frère   \'asco   de  Portugal,   qui 
av.iil  demeuré  prés  de    trente   ans   avec   le 
bii  nheureux  Thomas.  Us  airi\è;eiil  <u  Ks- 
p  .gne  sous  le  règne  d.\l|)îionse  W,  père  de 
Pu  ire  dit  l-Ouil.  Ils  se  re'.irèrent  d'aliord 
en  deux  dilTerenis  ermilagi-s,  les  uns  à  Nolre- 
l'ame  de  \  illaescua,  iiroebe  d  un  lieu  appelé 
Oiuseo.   sur  la   rivière  de    T.ixunna,  el   les 
aulres  à  Nolie-Dame  de  f]astinnal,  dans  les 
montagnes  de  rob''(Ic.  Leur  nombre  augmen- 
tant, ils  inulliplièreiil  leurs  ermitages  :  il  y 
eu  eut  qui  allèrent  dans  le  royaume  de  Va- 
lence, pioche  de  la  ville  de  tjau'lia,  cl  d'au- 
lies    |iassè:enl   en    Poriugal  ,   n'ayant    lou» 
qu'un  même  dessein,  d'imiler  saint  Jérôme  , 
((u'ils  prirent  dès  l^rs  pour  leur    proleeleur. 
Knlro   les  personnes   qui    se   joignirent  A 
eux,  il  y  en  eut  tiuelquesunesde  dislini  lion, 
tloiii  les  principa  es  furent  l'.erre-Ferilinauil 
l'eeha,  chambellan   ilu    roi   dom  Pierre  ;  son 
Irère   Alphonse   l'eeha,  évêque  de  Jaeii,  qui 
ri  no.  ça  à  celle  digoiié  pour  le  suivre  dans 
la  solitude,  et  doiii  Ker.lmand   Y.iuez  de  Fi 
gucra,  ihauoiue  de  Tolède  el  ciiapclain  ma- 


î,73 


JER 


JER 


574 


jcur  de  la  chapelle  des  anck-ns  rois.  C'csî  ce 
l'ivire -Ferdinand    Pccha    qui    est    reconnu 
p  iir  le  fondateur  des  Ermites  de  S.iint-.lé- 
roine,  tant  pour  avoir  obtenu  la  contirniatioii 
de  cet  orJre   et  y  avoir   presnil  des  règie- 
n-.ents,   que    pour   avoir   fait  le  pieiuicr  les 
vreux  solennels  enîre  les   m.ins  du  pape.  Il 
était   lils   de   Ferdinand    llodriiiucz    Pécha , 
ciianibellan  du  roi  Alphonse  Xi,  cl  d'Elvire 
Martinez.    il   sucrcla   à    so.i    père  dans   la 
charfÇi"  de  chanibell m   du  roi,  et,  après   Ja 
mort  de  ce    prince,   il  eut   le  a;ême   einplui 
aujiiès  du  roi  doni   Pierri',  qui,  à  cause  de 
son  esprit  farouche,  qui  n'aiinait  que  ie  sang 
cl  le  desordre,  fut  suriioinmé  le  Cruel.  Les 
irtiautés  que   ce    prince    exerçait  tous   les 
jours  sur  les   personnes   mêmes  qui  le  tou- 
ciiaicnl  ilc  plus  près,  obligèrent  Pierre-Ferdi- 
nand à  quiller  la  cour  el  à  renoncer  à  toutes 
les  vanités  du  monde,  pour  se   retirer  d.sns 
l'cimilage    lic    Nolre-D,unc:    d^    ^'iKaescua. 
Ferdinand  Yanez.qui  n'eut  p^s  moins  d'hor- 
reur que  lui  des  cruaulf  s  du    roi,  dont  son 
pro(ire  frère   le  prince  Frédéric  et  deux  in- 
faiils   d'Ara;çnn   n'avaient    pu  élre  à  l'abri, 
suivit  bientôt  Ferdinand  i'eclia  dans  sa  soli- 
tude ;  el,  peu  de  temps  après,  le  frère  de  Fer- 
dinand Pécha,  djni  Alphonse   Pécha,  évoque 
de  Jaen,  s'élant  dém  s  de  son  é>èché,  se  vint 
joindre  à  eux. 

Il    y   avait    procl;,;  de   cet    ermitage  une 
église  sous  le  nom  de  Sain'.-Baiihéleioy,  qui 
avait  éic   bâiie  depuis  (Muiron  qu.iraiiie  ans 
par  dom    IMdac'   Aiaitincz,   qui  était   aussi 
chambellan  du  roi  Aiplio   sl-  XI  et  oncle  des 
deux  Pécha,  ils  y  allaient  .vouvenl  faire  leurs 
priires,  cl  même  t  niendre  ia  messe,  à  cause 
qu'ils  n'avaient  jias  de  chapelle  à  Villaesciia. 
La  situation  de  tcite   église,  qui  clail  dans 
un  lieu  retiré,  el  où  lou   pouvail   bâtir  îles 
ermitagi's  aux  environs,  leur  fit  concevoir  le 
dessein  d'y  demeuicr.  Comme  c'était   un   de 
leurs  oncles  qui  en  avaii  été  le  fondateur ,  ils 
crurer.l  qu'ils  pourraient  en  obtc-nir  facile- 
ment la  permission.  En  effet,  les  consuls  et 
le  conseil  de  Lupiana,  à  qui   le   fondateur 
avait  donné  le  droit  de  nommer  aux  chapel- 
lenics,  y  consnntiienl,  aussi  bien   que  l'ar- 
chevêque de  Tolède,  qui  était  pour  lors  dom 
Gotnez   Menrique.   Non-seulement    ils    leur 
donnèrent  cette  église,  mais  encore  les  cha- 
pcllenics  et  les  revenus  qui  en  dépendaient, 
et  ils  en  prirent  possession  l'an  1370.  Ils  hâ- 
tirenl   plusieurs   cellules    aux    environs   de; 
celte  église,  où  ils  dem^  uraient  séparés   les 
uns  des  autres  ;  el  ce  fut  pour  lors  qu'ils  tà- 
ch"èrent  d'imiter  la  vie  solitaire  et  retirée  que 
saint  Jérôme,   qu'i's   prirent  pour   modèle  , 
avait  pratiquée  dans  la  Palestine.  Mais  quel- 
ques personnes  malintentionnées,  jalouses 
4e  ce  que  les  saints  Fruiites  commençaient  à 
éli"c  eu  réputation,  el  que  le  peuple  des  en- 
virons avait  de  l'estime  pour  eux,  les  décriè- 
rent, en  publiant  qu'ils  étaient  infectés  des 
erreurs  des  IJéghanls,  el  que  leur  manière 
(le   vie  n'était  pus   approuvée  par  le   sainl- 
siége.  C'est  pourquoi  ces  Ermites  convinrent 
entre  eux  que,  pour  se  mettre  à  couvert  de 
ces  calomnies,  il  fallait  aller  trouver  le  pape 


et  obtenir  ia  confirmation  de  leur  nouvel 
ordre,  en  approuvant  aussi  le  résoluliou 
((u'ils  prirent  pour  lors  de  changer  la  \ieso- 
lilairc  et  érémitiquc  en  cénohilique,  romm(? 
étant  la  plus  assurée  ol  celle  où  ou  est  moins 
exposé  aux  périls  el  aux  tentations,  se  re- 
niellanl  à  la  volonté  du  pape  pour  leur  pre- 
scrire telle  règle  qu'il  voudrait  leur  donner. 
Ilsjolèrent  pour  ce  sujet  les  yeux  sur  Pierre- 
Ferdinand  Peclia,  à  qui  ils  donnèrent  pour 
compagnon  Pierre  de  Uome,  <iui  était  nn 
des  premiers  Ermites  qui  avaisnt  passé  d'I- 
talie en  Espagne.  Ils  allèrent  à  Avignon,  où 
11!  pape  faisait  pour  lors  sa  résidence.  C'était 
Grégoire  X!  ,  qui  leur  accorda  ce  qu'ils  sou- 
h  lilaienl  par  une  bulle  du  18  octobre  1373, 
ayant  cor.lirmé  leur  ordre  sous  le  titre  de 
S.iint-Jerônie,  el,  outre  la  règle  de  saint  Au- 
gustin, qu'il  leur  prescrivit,  il  leur  donna 
encore  les  constitutions  que  l'on  o!)ser\,iit 
dans  le  monastère  de  Sainte-.Marie  du  Sépul- 
cre, hors  des  murs  de  Florence,  qui  était  du 
l'ordre  de  Saint-Auguslin. 

Le  P.  Hermcncgilde  de  Saint- Paul,   reli- 
gieux de  l'ordre   de  Saint-Jérô:i!e,  fâehc  de 
ce  que  Siguença  n'avait  pas  sagement  donné 
dans   les   opininns  pu  raisonnables  de  crux 
qui  prèiemlcnl  que  tous  les  ordres  de  S  :ini- 
l{asile,de  Saint-lîenoît  el  de  Saint-Augustin, 
ne  sont  que  des  braeches  de  celui  de  Saint- 
Jérôme,  a  fail  uu  volume  eniier  pour  p. cu- 
ver que  l'ordre   de  S.iiut-Jérôme,   fou  lé,  à 
ce  qu'il   prélend,   par  re  l'ère  de  l'Eglise  à 
lielhlcem  ,  a  toujours  subsisté  jusqu'à  p  é- 
sent.    Ainsi,    parlant   de    ce    monastère    de 
Sainte-Àîurie  du  t^épulcre,  près  de  Florence, 
dont  les   religieux  de  S.ilnl-Jérôme    prirent 
les    constilutiois   par  les    ordres    du    pape 
Grégoire  XI,  il  avance   hardiment  qu'il  ajj- 
partenail  à  des  religieux  de  l'i^rdre  de  Sainl- 
Jérônie,   el  que,   coaitue  le   B.  Thomas   de 
Sienne,  dont   nous  avons  déjà   parlé,   avait 
beaucoup  de  disciples,  c'était  sans  doute  l'un 
des  couvents  où  ils  demeuraient.  Pour  prou- 
ver ce  qu'il  avance,  il  dit  que   c'est  à  lort 
que  l'on  prétend  que  ce  bienheureux  Tho- 
mas a  été  du  Tiers  Ordre  de  Saint-François, 
el  que  si  Jacobilli  ea  a  p^irlé,  ce  n'a  été  qu'à 
cause  qu'il  a  dédié  ia  vie  de  ce  lî.  à  l'évéquc 
de  Foligny,  qui  était  religieux  de  l'ordre  <lo 
Saint-F'rançois,  et  que,  du  temps  du  bien- 
heureux   i  humas  ,  les    religieux  du  Tiers 
Ordre  de   Saint-François   ne   pouvaient  pas 
avoir  des   couvents,    puisqu'ils   n'ont   com- 
mencé à  ea  avoir  que  l'an  l''«.21.  Ceci  se  dé- 
truit par  ce  que  nous  avons    dit  en  parlant 
de  l'ordre  des  Hospitaliers  de   la  Charité  de 
Notre-Dame,   où  nous  avons   rapporlé   une 
bulle  de  Clément   VI  de   l'au  1346,  qui,  en 
leur  per.iiellani  de  quitter  la  règle  du  Tiers 
Ordre  de  Saint-François,  qu'ils  avaient  sui- 
vie jusqu'alors,  pour  prendre  celle  de  saint 
Augustin,  fait  mention  de  plusieurs  de  leurs 
monastères  et  hôpitaux,  et  entre  autres  de 
ceux  de  la  Cliirilc  sur  la  rivière  d>'  Koignon, 
des   Billetles  à   Paris,   el  de   Saint-Louis   à 
Seulis.  Avant  l'an  1323,  il  y  avait  des  reli- 
gieux  du   Tiers  Ordre   dans   le   diocèse   do 
Liège,  puisque    l'on    trouve  des   lettres  de 


573                                            niCTlONNAllŒ  DES  OIUH'.LS  UKI.KMKUX.                                           iîVj 

l'tMéquo  Ailol|.hc,  (jui  leur  ortloiinont  il'ôlirc  Jir«)inr,    (ie  les  unir  à  celui   de  Sainl-Hor- 

nilre  i'U\    un  siipiriour  qui   les  corrige   il'  Uiélomy  de    l.upiaiia  ,  cl   de   rrccToir   à    l,i 

leurs  fautes  seuliniciil  des  légères  les  plu*  pnfission    solenaeile  1rs    jiulres  cniiile»  de 

j;rièves  cl.iiil   re«c.-vées  au   visHeur,  cl   qui  sa   coiig;ré;;iilioii    qui  claieul  ro.sîcs    eu    lîs- 

ieur  dcfeiidiiil  ilc  sorl  r  sans  sa   peruiiss  dm  pa^ne. 

cl  tans  nM)ir  u\  coiiipapu'in,  de  nianpe:  hors  V>  rdiuand  de  (lua  'a'ajara,  niiiui  dp  loiilrs 

ilu  réfecioiie.  île  coudicr  hors  ilu  l'oiloir.  <ie  ces  perniissi()n<,  s'en    re:oi:riia    eu  Es|ia!;ne 

pailer  à  îles  roniiiies   eu  particulier  cl   à  des  avec  sou  compagaou  l'ierre  de  Uorue,  cl  ar- 

l.einr>  in  lui  s,  ric.  Nous   pourr.ons  eu  ii!cr  rita  à  Sainl-Itarlliéleuiy  de  I.upiaua  le   pre- 

cucorc  de  plus  ancicn>  au  V.  llerincueuililc  niier  février   I37'»-.  li    reçut    à  la  profosion 

de  Saiiil-l'aul,  si  nous  viuiiions  parcourir  les  les  autres    liiuiiles,  lit   travaillera    la   rou- 

pro\  iiicis  ;  niais,  bieu  Iiiin  que  ce  mnnislèie  s  ruclion  d'un  nionastère,   et    prescrivit   des 

de  Saiule-.Marie  du  S.'pulire  ail  éic  de  l'or-  rrgleuicnls  pour  le  maintien  de  rohser>ince 

dr-  de  Saiiit-Jen  ine.  et  qu'il  ail   appartenu  iéi;ulière,  tels   qu'ils  ont  toujours  élé  obser- 

au  biculieiireuv  lliouias  et  à  ses  disci(>les,  le  »cs  dans  la  suite.  V.n  moins  d'un  au,  le>  hk- 

p.ipe  dil  positivcuieiil  qu'il  était  de  l'ordre  de  tiui'  u^s  furent  achevés,  .1  quoi  conlribuirenl 

Saint-Augustin,   ne  pouvant  pas  faire  uicn-  beaucoup    les    parents  de    Fcrd  uand,    qui, 

lion  d -•  cc'ui  de  Saiiil-Jérônie,  qui  était  eu-  pour  les  grands  biens  qu'ils  y  (irciit,   en  ont 

I  ore    inconnu  ;    d'ailleurs    le     bienheureux  toujours  été    reconnus    comme    principaux 

Tiiumas  u'.i   jamais  de^ieuré  avec  ses   dis;  i-  bienfaiteurs.  .\près  cel  1    Ferdinand  de  (iua- 

jiles  dans  aucun  n;onastère,ces  Krmite.s  ayant  dalajara,  «jui  n'avait  accepté  roffiie  de  prieur 

l'iujoui  s  vécu  dispersés  dans  diflcrenls  ernr-  q.ie  pour   obéir  au  pape,    ijui   lui  avait  en 

lai;es,   comme  lireul  ceu\   qui  passèrent  en  même  lemps  permis  de  s'en  démellre  qu  ind 

Espagne,  où  ils  allèieiit  d'abord   dans  ceux  il  le  ju;;crait  à   pro|)os,  rcuoiiça  à  celte  di- 

«le  Nolre-Dan.c   de  Villacscua  et   de  Notre-  gui  é,  et  lit  élire  en  sa  place  Ferdinand  Ya- 

Dame  de    (>aslaunal,  que    les   religieux    de  nez  de  Caceres,   ijui  ét.iit  pour  lors   le  seol 

S.iint-Jéromc  ne  regardent  jias   sans  i!oule  prélie  qui   fût  dans  l'ordre  :   car,  avant  l.i 

ciimir.e  des  couvents,  puisqu'ils  couvienueut  c  mlirmaloii  du  pape  (iregoire  \l,  A'phonse 

que  le  premier  fut  celui  de  Saiut-Harthélemy  l'eclia,  évéque  de  Jaen,  av  lil  quilté  l'F.spa- 

de    I.upiaua,   (jui   est  encore  aujourd'hui    le  p:ie  pour  aller  en    pèlerinage  à  Kume,  m'i  il 

(liof  de  ccl  ordre,  et  où  le  général  :ait  sa  ré-  iii  une  cession    de  tous  ses   biens  eu  f.iveur 

s:ilence.  du  monaslèredeSaiui-îîarlhéleiny  lii:  l.upiau.i. 

I>e  pape  firégoirc  \1,  ayant  donc  donne  à  Après  cei;e   élection,  Ferdinand  de  (iuada- 

ccs  religieux  de  Sain'-Jero:iic  les  (onslilu-  l.ijara  alla   fou  1er  d'autres   umnaslères.  l,c 

lions  du  couvent   de  Sainie  M.irie  du  Sépul-  premier  fut  celui  d' Notr  -Dauu' de  la  Syss,!. 

cre,  avec  la  règle  de   saint   Augustin,    leur  pioche   de    l.i  ville   ih;    Tolède  ;  cl,  pendant 

pris;  rivil  encore  (]uel!e  serait  la  forme  et  la  qu'il   l'.iisait  Iravailier  aux   bâtiments,   il  se 

louleur   de  li  ur  lialiillcmenl,  qui  consistait  lit  encore  deux   ou   trois   éliblisseineuts    à 

en  une  tunique  de  drap  blanc,  un  scapulaire  duil  nJ  -,  F,iirral.  l'.uccio  el  Sainte-.\iiiie  de 

coulci.r  laniiée,  un  petit  capure  et  un  man-  la  Oliva;  el,  ne  piiuv;iut  y  aller  en  personne, 

leau  de  même  couleur,  le  loul  de  couleur  na-  il  envoya   les  pouvoirs    nécessaires  pour  les 

lurclle   et   non    teinte,    el   d'un    pii\    «il   et  incorporer  a  l'ordre   en  vertu  de  la  bulle  de 

médiocre.  Ce  pontife  ne  se  conleiiia  p,is  d'à-  (Iregoire   XI   qui    lui  (lermetail  do   luuder 

loir  ainsi  prescrit  riiabilleineul  de  ces  1:011-  cinj  monastères  de  cel  ordre, 

veaux  Frmites  de  Saint-JérOme,  il  le  \oulut  (les  premiers  lùiuiles  venus  d'Italie  ,  qui, 

encore    donner   de    ses     propres    manu    à  ciuume  nous  .ivou-i  dit,  av.iieul  passé  dans 

l'ierri  -Ferdinand  l'ccba  et  à  Pierre  de  Home;  le  ri.'yaume  de  Valence,  voyant  que  ceux  qui 

el,  loiiimc  il.  furent  les  premiers  roêlus  de  claieul  restés  eu  (bastille  avaient  pris  i.i  vie 

l'habit  de  la  re.igion,  iU  rirent  aussi  Icspre-  commune   et  qu'ils  avaient  fondé  l'ordre  de 

iniers  les  \rpux  solennels  eiilri-  les  mains  du  .'*ain-Jérôuie,  voulurent  aussi  les  imiter  eu 

pape,  i)ui   ordonna    de  plus   que  l'église  de  quillaut  la  vie  solil.iiie  jour  pieudi  e  la  vie 

Sainl-lf.irihelemy  de  Lupiana  avec  les  crmi-  c.iiohilique  selon  leurs  mêmes  nbsi  rvaiiccs. 

Ia::es  qui  cl.iieut  aux   environs  serait  éiigée  Ils  ru  obtinrent  aussi  la  permission  du  |>.^pc 

I  II  mou.istète  de  cet  ordre,  doiit  illit  pi  cmiir  (iregoire  XI,   qu'Us    f.ir.ni   trouver   a   .\vi- 

prieur  Ferdinand    l'echa,  que  nous  appePe-  gnon  l'.in  I.'ITV;  cl,  après  av  o:r  fait  les  vn'u\ 

roiis  doien.ivant  Ferdinaïul  de  (îuailal.ij  ir.i,  s  ilennels,  ils  soudèrent   de  leur  rô'é  à  fou- 

ay.int  quitté  le  nom  de  sa  f.imille  jiour  pren-  der  des  niiiuaslères  dans  le  rovauuic  de  Va- 

dre  Celui   du  li  u   de  sa    naissance,   ce  qui  Iciice.  l.e  premier  fut  à  t'iandia  ;  mais,  ayant 

s'est  toujours  |)ralique  dans  cel  ordre,  où  les  clé  obliges  peu  de  temps   apièsde    l'abaii- 

nligieiiN,  aussi  bli  II  (|uc  dans  plusieurs  cou-  donner,  ils  lirent  une  autre  lond.iliun  à  Ca- 

gregal.ons,  quiileiit  leurs  noms  pour  pren-  tiniia.    Icrdinaid    V.inez,    prieur   «le  Saiiil- 

dre  celui  de  qm  Ique  saint,  ou  du  lieu  où  ils  liai  theicmy  de  l.upi.iiia,  obliut,  1'.!!»  l.'iyi),   le 

Miiil  nés.  Le  pape  voulut  encore  que  l'on  le-  célèbre  monastère  de  ISotic-Dame  de  (luada- 

{ût  dans  ce  miiii.isièe   ;iul,iiil  de   religieux  loii|ie  dans   rFslrama'liiie  .  qui,  à  cause  de 

que  les  revenus  sei  aienl  siifiisanls  pour   les  la  s.iiiilele  de   ce  lieu,  où    les  pèlerins  .ibor- 

riitretenir,  et  (lue  les  prieurs  ;  ci  aient  Irien-  dent  de  Ions  cotés  pour  v  révérer  une  imago 

iiaiix.  Il  accunifl  encore  à  l'i  rd.n.iud  deliii.!-  miraiuleuse  de  l.i  s.iiiiU;  \'ier^;e,  lient  le  m - 

«ial'ipir.i  la  I  ermissioii  de  fonder  qu.itre  ,iu-  rond  i.iiig  d.ins  cel  oïdic,  qu<>ii|u'ii  v  eu  ail 

lies  inuiias'tcrcii  du    imiuie  ordre    de  î^jiiil-  d'.iiircs  de  plus  am  icunc  fuidaliou. 


£77 


J!;r 


jEn 


578 


§    II.   Coiilinuation   de  l'origine   et  progrès 
de  l'ordre  des  Ermites  de  Saint-Jérôme. 

Nous  avons  p.irlé  dans  ic  parni^raphe  pro- 
cèdent   d'un    frère   Vasco.   lo   seul  que  Si- 
guenen  nomme  des  lîrmiics  venus  d'Ilalie  en 
Espagne.  A  peine  y  ful-il  arrivé,  qu'il  passa 
en  l'orlugal,  où  il  avait  pris  naissanc,  et  il 
fll  sa  deni'ure  .ivee  quelques  autres  d.ms  un 
ermitage  nommé  Penalonga;  mais,  voyant 
que  ses  compagnons   avaient   embrasse  en 
Espagne  la  vie  cénobitiquo,  il  en  voulut  faire 
de  même  uvec  ceux  qui  s'éiaient  jo  nls  à  lui 
en  Portugal.  Il  s'adressa  pour  cet  efl'el  à  IJo- 
niface  IX,  qui  était  r  connu  j)  lur  pape  légi- 
time   en    ce    rojaume    dans    le    temps    du 
schisme,  et  il  en  obtint  l.i  permission  d'éri- 
ger son  ermitage  de  Penaiongacn  monastère 
de  l'ordre  de  Saint-Jérôme  sous  la  règle  de 
saint  Augustin,   et  de  jouir  di  s  mêmes  pri- 
vilèges qui  avaient  été  accordés  par  le  pape 
Grégoire  XI  à  ceux  de  Castillc  et  deValcm  e. 
Dans   le   même  temps,  d'autres  Ermites  qui 
demeuraient   en   Galalogne  firent   la   mc.i:e 
chose  en  l.'J93,  avec  la    permission  de  l'anti- 
pape Clément  VII,  qui  y  é^ait  reconnu  \to\xv 
souverain  pontife,  et  (jui  en  avait  été  ^olli- 
cilé  par  la    reine  Yolande  d'Aragon,  qui  lit 
hâlir  à  ces  relig  eux  lo  monastère  de  Valhe- 
liron.  L'an  1300,  cet  ordre  fut  augmenté  par 
le  don  qui  lui  fat  fait  du  monastère  de  Saint- 
lilaise  de  Villaviciosa,  qui  apparlenaii  à  des 
ciianoines    ié;;aiiers    qui,  ne   portant  quj 
le  nom   de   réguliers     et    vivant     dans    un 
gi and  désordre,  en  furent  chassés  par  l'ar- 
clievcque  de   'folide  dom   l'ierre   Tenorio. 
Gomme    le   Tiers   Ordre   de   Saint-François 
avait   donné    commencement    à    l'ordre    de 
Saint-Jérôme,  il  lui  donna   aussi  un   nouvel 
accroissement,  les  religieux  du  monastère  de 
la  Mejorada,  qui  étaient  du  Tiers  Ordre  de 
Saint-l'rançois  ,   ayant    embrassé    celui    do 
Saint  Jérôme.  Leur  supérieur  Ferdinand  de 
Villalobos  avec  deux  antres  religieux  furent 
trouver  Ferdinand  de  Guadalajara,  qui  était 
regardé  comme  premier  fondateur  de  l'ordre 
de  Saint-Jérôme,  pour  recevoir  de  ses  mains 
Ihab  t  de  son  ordre  ;  et,  apr.'S    l'avoir  reçu, 
ils  retournèrent  à  la  Mejorada,  où  ils  donnè- 
rent le  même  habit  à  ceux  qui   le  voulurent 
recevoir,  et  obi  gèrent  d'en  sortir  ceux  qui 
s'opposaient  à  ce  changement;  ce  qui  arriva, 
selon  SigUL'uça,  vers  l'an  1397,  ayant  obtenu 
la  conQrmatioii  de   cette  translation  d'ordre 
de  l'autipaiie  lienoît  XIII,  qui  é  ail  reconnu 
pour  lors  comme  légitime  en  E-pagnc.  Ainsi 
les  religieux  du  Tiers  Ordre  de  Saint-Fran- 
çois avaient  des  couvents   longtemps  avant 
lan  l'til, contre  lesentiment  du  l'.Hermene- 
gilde  de  Saint-Paul,  de  l'avi  u  même  des  his- 
toriens de  son  ordre.    Ferdinand  de  Guada- 
lajara  eut  encore  part  à  l'ét  iblissenuiii  d'un 
autre  monastère  qui  se  fit  la  même  au   ée  à 
Talavera,  qui  est  le  dernier  ijui  se  lit  de  sou 
vivant. 

Il  avait  é:é  fait  prieur  du  couvent  de  Notre- 
Dame  de  la  Sysla  après  sa  fondation,  et  il 
exerça  cet  emploi  pendant  vin^t-den\  ans, 
Son  humilité  clait  si  grande  que,  quoiqu'il 


fut  très-versé  dans  la  langue  laline  et  dans 
la  science  de  l'Erriiure  .<;ainte,  il  ne  voulut 
jamais  prendre  les  ordres  sarrés,  quelques 
instaures  qu'on  lui  en  fil.  Ses  austérités 
étaient  liôs-grandes,  il  ne  dormait  jamais 
qu'à  terre  sur  un  jieu  de;  paille,  il  portait 
continuellement  la  h  ire  et  le  <  ilice,  et  ses 
abstinences  et  ses  jeûnes  étaient  presfiuu 
continuels.  Sa  sicur  .Mayor  Ferdiiiande  l'e- 
clia,  qui  avait  épousé  Arias  Gonsalve  de 
\'old(s,  seigneur  de  A'elena,  éiaul  veuve, 
prit  la  ré>olutioii  d'exéiuler  le  dcssem 
([u'elle  avait  pris  depuis  longtemps  de  se 
consacrer  eiilièremenl  au  servire  de  Dieu. 
Elle  avait  une  sin^iulièrc  dévoiion  à  Notre- 
Dame  de  Guadaloupc  ;  c'est  pourquoi  elle 
voulut  se  retirer  dans  cette  sainte  maison, 
pour  y  servir  Dieu  eu  (|ualité  d'oblate,  et  y 
iinir  ses  jours.  Elle  vint  pour  cet  effet  trou- 
ver son  frère  à  Sotrc-Dame  de  la  SNSia,  qui 
non-seulement  la  fortiOa  dans  son  dessein, 
mais  voulut  encore  l'imiter.  Ce  fut  pour  lors 
qu'il  se  démit  de  son  office  de  prieur  de  ce 
monastère  pour  aller  finir  au^si  ses  jours 
dans  celui  de  Notre-Dame  de  (inadaloupe, 
dans  la  compagnie  de  Fer  inand  Yaiiez,  son 
ancien  ami,  qui  en  était  prieur.  Il  y  fut  reçu 
avec  sa  sœur,  et  y  demeura  eiicore  quelques 
années.  Nonobstant  ses  grandes  inlirmilés  et 
son  grand  âge,  il  et.il  toujours  le  premier  à 
tous  les  exercices  réguliers,  tant  de  jour  quo 
de  nuit  ;  et  ce  fut  dans  ces  saints  exereieej 
qu'il  termina  sa  \ie  par  une  mort  glorieuse 
l'an  1402.  Sa  sœur  le  suivit  peu  de  lemps 
après,  et  fut  enterrée  avec  lui  revêtue  de 
l'habit  de  l'ordre  de  Saint-Jérome,  comme 
oblale  et  comme  principale  bienfaitrice, 
ayant  beaucoup  cont.ibué  à  léJifice  du  cou- 
vent do  Sainl-îjarthélemy  de  Lupiana. 

Après  la  mort  de  Ferdinand  de  Guadala- 
jara  ,  l'ordre  fit  encore  de  nouveaux  établis- 
sements; de  sorte  que,  l'an  1415,  lorsque  l'on 
tint  le  premier  chapitre  général ,  il  y  avait 
vingt-cinq  m  jnastères  tant  en  Espagnequ'en 
Portugal.  Jusque-là  ils  avaient  toujours  été 
soumis  à  la  juridiction  des  évoques  des 
lieux  où  les  monastères  étaient  situés;  et 
s'ils  avaient  eu  recours  quelquefois  au  prieur 
de  Saint-Barthélémy  de  Lupiana,  ce  n'était 
pas  pour  lui  obéir  en  qualité  de  supérieur, 
mais  seulement  pour  le  i  onsulicr  et  prendre 
ses  avis,  reconnaissant  ce  monastère  comme 
le  premier  de  l'ordre.  Ils  n'avaient  point  en- 
core tenu  d'assemblées  générales  ,  les  cou- 
vents avaient  élu  leurs  sujériears,  et  les 
coutumes  et  les  observances  commençaient 
déjà  à  être  différentes  en  {(uelques-uns  de 
ces  monastères  :  c'est  pourquoi,  pour  main- 
tenir u  e  uniformité  et  une  même  obser- 
vance partout,  ils  priienl  la  résoluiion  da 
s'unir  tous  ensemble  sous  un  seul  chef,  et 
de  f.ire  des  assemblées  générales,  où  l'un 
ferait  des  règlements  pour  le  mainlien  de  la 
discipline  régulière  à  l'exemple  des  autres 
congrégations  régulières.  Le  schisme  liiv- 
jait  encore  l'Eglise,  on  y  »  oyait  trois  papes, 
deux  faux  et  un  véritable  :  les  deux  faux 
étaient  Grégoire  XII  et  lienoii  Xlll,  et  le  vé- 
ritable était  Jean  XXIll  ;  mais  les  royaumes 


?^''9  i.ir.TioNN.vira:  df.s  or.itUKS  l'.F.ur.ir.ix.  5rc 

iJe  fn^lillc  el   d  Ar.ipon  obpissnnt  .-^    Hennîl,  l'aulre  ilc  ces  rojauiiics,  où  ils  ont  de  ririu-s 
Io>i  ri'Ii;;icii\  di'  S.iiiit-.U'ri'imc  ciirciil  recours  cl  suporbcs  nionasliTos.  Ci-liii  (lui  esl  le  plus 
a  lui  peur  <i|)liMiir  l'union  qu'ils  souliiilaionl,  fréi]uenl6   pour  la  dovoiion   cl   iiui   licnl  le. 
el  la  poruiission  d'iliie  un  général.  Cul  an-  premier  ran;;    d;ins   l'ordre   après  celui   de 
lip.ipp,  par  sa  huile  du  IcS  oclobre  lill,  don-  Sainl-narlliéiemy   de  Lupiani,   esl    Nolre- 
nee   à  Sa  nl-.Ma(liieu  au   dincô-c  de  Torlose,  Daine  de  Guadaloup  •,  qui  ne  le  cèd,;  en  rii-n 
urdoiMi'i  (jue  tous  les  [iricurs  cl  les  procii-  aux   aulres  pour  les   rirlicsses.    I,a   inaisun 
rnirs  ilcs  monastères  s'assernbleraienl  à  l'a-  esl  si  grande  el  si  spacieuse,  que  l'iiilippc  II, 
venir  dans  un  lieu  convenalde  pour  Icnir  le  y  passant  l'an  15G0  pour    lier  à  la  guerre  de 
rbaiiiire  {.'éner.il  ;  mais  que  pjur  la  premiôrc  Grenade  avec  rarciiidue  l!odol|Wie  ,  qui   fui 
fois  il>  le  tiendraient  au  nsonastère  de  Notre-  eisuitc  cm|.ereur,  cl  l'arcliiduc  lirnesl,  ces 
Drime  ^ie  (itiadalonijc ,  donnant  p  luvnii' an  princes  y  demeurèrent  a\ec  toute  leur  cour 
(iTiCur  de  ce  moriaslère  d'envoyer  des  Icllris  pendant  vingt  jours,  sans  une  les  religieux, 
circniaires  au\  aulres  prieurs  pDur  lenr  in-  qui  sont  au  nombre  de  six  vingts,  en  lussent 
diquer  Icj'urque  se  licndrail  celle  asseii-  incommodés.  Le  raé:i:e  rui  lit   don  à  l'au'.el 
Idée  générale,  a  latiuelle  dcu\  religicu\  de  de  la  sainte  Vierge  d'une  lampe  d'or.  î,a  sa- 
l'ordre  des  Cbartreux  ileva  enl  présider  p  mr  crislic  de  ce  monaslè.e  esl  une  des  plus  li- 
ccllc  fois-!i"(  senlemenl.  Il  e\.eiiipia  en  mèaie  elles  lic  l'iîuropc.  Les  aumônes  (lu'uii  y  re- 
teinps  tons  les  prieurs  et  les  nionaslère>  de  çoil  sont  Iràs-consiiléraldes,  el  c'est  en  par- 
cet  ordre  de  la  juridiction  des  évèques.  lie  ce  quiserlà  rcnticlien  de  ce  grand  iioin- 
iiii    leriu  de  celle  bu  le,  i!s  l.nr.eni  leur  bre  de  religieux,  d'un  se. ninaiic  de  qu  ranle 
chapitre  a   Nolre-Danie   de   (îuadalonpe    le  jeunes  clercs,  à  qui  Ton  apprend  les    lin  ua- 
'2()  juillet  l'*15,  où   se  trouvèrent  les  prieurs  niiés  e    les  exercices  de  la  vie  clé.ieale;  de 
et  les  procureurs  di-  vingl-ciiui  nionasicres,  deux  liôpiiaux  joignant  le  inoiust  re,  l'un 
qui  élurent    pour  premier  général  le  1'.  Ui-  pour  les  hommes,  l'autre    pour  l.s   feinines, 
(lace  (le  Alcaron,  preur  (le  Saint-Barlliélemy  et   d'un    grand    nombre  de   domesliqu>'S   el 
(le  Lep  ana,  etdejui*  ce  lemis-là  les  pr  eurs  d'ouvriers  de  toutes  sortes  de  méùers.  L'Iii^- 
de  le  niona  tère  ont  toujour>  élé  généraux,  pital  des  hommes  csi  servi  par  plus  de  qua- 
lls  y  l'ont  leur  résidence,  et,  s'ils  en  sortent  rante  serviteurs,  el    ce'.ui  des   femmes  par 
(lueliu.fo^s,  ils  ne  peuvent  i-as  s'en  éloigner  des  Oblates    qui  -0111  en  pan  il  nombre  ;  cl, 
plu^decill(l  lieues.  Ils  tinrent  le  second  clia-  sans  compter  le  grand  nonilirc  de  pèlerins, 
pilrc  général  en  liKi,  le  lioisième  en  1418:  ()Ui  y  arri.eni  queliiuefois  par  jour  jusqu'.ai 
dans  la  suite  Us  les  «ml  tenus  lous  les  trois  comlire    de    deux  m:lie,    el    qui  sont    reçus 
ans.  Co  1  me  en  14-17  l'antipape  lienoîl  Xill  pendanl  trois  jo  iis  dans  ce  couvent,  il  noue- 
;ivail  élé  déposé  pour  la  seconde  fus  dans  le  rit  tous  les  jours  plus  de  sept  cen;s   person- 
concile   de  (Joiisiauce,  el  (jue  Mariin  V  v  l'ut  nés.  Les  aunicmes  qu  on  distribue  aux  pau- 
olu  et   reconnu   pour  siuveiaiu  poniifi'  par  vres  à  la  porte  sont  considérables.  On  y  dis- 
toule  l.i  cliretii'iilé ,  ils  firent  approuver  par  Iribue  |iar  an  plus   de  diux   cents  nn>utons  , 
ce  nio3en  tout  ce  (jne  l'antipape  iSeiioîl  avait  oulre  le  pa  nquc  l'on  y  donne  tous  les  jours, 
lait;    ce   qui  lut   conlii  nié  linéiques   années  et  un  giand  nombre  de  souliers  :  l'on  dit  que 
après  [lar  le  pape  lunocent  VIII.  le   8   septembre,    fêle  de    la   Nativité    de   la 
Le  papi'  Nicolas   V  eut   quelque  de-sein,  sainte  Vierge,  on  en  distribue  ordinaircme   l 
l'an  IV'iTde  réunir  en  un  seul  corps  tons  les  jusqu'à  huit  cents  paires.  Dn  y   fait  des    le- 
dilTeienls  ordres  religieux  qui    portaient  le  tons  (Mibliques  de  médecine  et  de  chirurgie, 
tioin  de  S.iinl-Jcri'nne,  tant  celui  des  Jésua-  Ce  monastère  a  élé  quclquefo  s  d'un   grand 
les  de  Sai  .t-Jértime  [Voyez  Jésuates),   que  secours  aux   rois  d'Lspagne,  auxquels  il  a 
ceux  dont  nous  parleioiis  dans  la  suite.  Il  lit  souvent  donné  de  grosses  sommes  pour  sub- 
jiour  ce  sujet  défense  aux  religieux  de  Saint-  venir  aux  besoins  de  riiiat. 
Jérôme  d'Espagne  d'y  tenir  leur  clKipitre  gé-  Sainl-Laurent  de  I  Kscurial,  célèbre  pour 
neral,  cl  leur  ordonna  de  venir  à  Home,  où  être  la  sépulture  des  rois  d'Espagne,  n'a  pas 
il  convoqua  ce  ch   pitre  pour  L-  jour  de  l.i  lint  de  revenu   que  celui  de  Nolre-Daïue  de 
l'en'et(jle  de  l'an  l'»'i-S.  .Mais  tous  les  monas-  (îuadaloupe,  nuis   il  le  surpasse  par  la  m  i- 
lèrcs  d'Espagne  ne  députèrent  que  douze  re-  gnilicence  de  ses  bâtimenls,  qui  furent  coni- 
ligieux  pour  laire  en  leur  nom  loul  ce  qu'ils  mencés  l'an  lao7  par  l'hilippe  II.  il  qui,  jus- 
trouveraienl  de  plu>  à  pro|)os  ,  bur  recoin-  qu'à  sa   m  irt .  (jui   arriva  l'an  Ij'JJ,   y  cin- 
iiiand.iiit  sur  lonles   t  lio^es  d'empêcher  celte  ploya  cini|  millions  deux  ciiit    soix.inle-dix 
niiion.  En  elT'l ,  i  s    lireiil  si   bien  parleurs  mil. e  ducats,  tant  en  bâtimenls  qu'en   pein- 
rem   niranci's,  que  le  pape  laissa  les  cli  oses  turcs  el  sculptures,  el  plus   d'un   iiilllon  en 
«laiii  Tel, il  où  elles  élaieni.  Sous  le  règne  de  oriienienls  d'I'glise.   IMiilippe  l\   fit   fiire   la 
doiii  LiiiiianucI ,  roi  de  t'ortug.l,  les  reli-  (h.ipelle   des   lomlieanx,    nommée    le    l'.in- 
gicnx  de  ci;  rojaume  se  séparèrent  des  \:  -  lliéon,  à  cause  (jUe  sa  sli  uclure  esl  prise  sur 
pagnols,  et  lo.  nièrent   une  congrég.ilion  q  il  le  desein  du  l'anlbcon  de  Home,  ;',pp.dé  aii- 
claii  gouveMiéepar  un  p.ovimial  ;  inai>riii-  Ireineiil  Nolrc-Dime  de   la  llotoiub'.  l'oiii  le 
lippi!  Il,  mi  (l'Espagne  ri  de   Portugal,  solll-  delans  de  cet  e  chapelle  rst  de  m.irbre  noir, 
cil. 1  auprès  du  pape  ('.lenicni  \lll  la  réuni  >n  à  la  réserve  de  qnelque.i  oinrinents  de  jaspe, 
(le  Ces  deux  naiions;  cec)iie  le  pape  accord. i  de  marbre  ronge  cl  de  bronze  doré.  L'église 
(an  lo'Ji),  ordonnant  nn'il  n'y  aurait  qu'un  est  d'une   belle  slrncluic,  ornée  de  qiianlilc 
lîiéine -général  pour  les  Espagnols  el  les  l'or-  de  ligures  de  bron/e  doré  d'un  travail  admi- 
tuyais.  Ils  soui  Irùs-puisïanls  d.iiis  l'un   cl  rable;  l'aulel,  qui  fait  l'un  des   plus  beaux 


■;si                           iMî  J' !"«                            r.<!-2 

ornenicnls    de   ci  lie   égliso,  est   cslimé  un  (iiielijiio^-uiis,    si\    lioissenns    di-   Pjiris,  oA 

tnilli  n;  il  est  élevé  de  seize  degrés  nudes-  selon  d';iiitres,  un  boisseau   el  demi,   re  qui 

si:s   du  pavé  de  l'ciilise  ;  CCS    degrés  sont  de  csl  plus  vraisembl.ihle.  l.orsinio   c'est   d;iiis 

porphyie,  cl  l'autel  est    embelli  d.»   quatre  des  année-- de  tlicrlé.oiiewdoniie  mille,et  on 

ran"S  de  rolonncs  de  jaspe;  l'on  voit  dans  lu  en  a  vu  lionnir  jusqu'.i  quinze  ceiils.  I.ejour 

l.ibernaele,  (pu  ist  esliuié  plus  de  deux  mil-  de  Noël  un  en  donne  cinqu  inlemesurrs  à  dfs 

lions,  briller  l'or  de    Idutes  p.irts  aus-i  bien  pauvres  lion'.cux  ;  le  jour  de  l'àques,  qualio 

que  les  pierreries,  qui  soni  si  transparentes,  moutons;  le  prieur   peut  doiin>'r  à   qui  bon 

qu'on  voit    au    travers    le    saint  sacrement  lui  semlile,  ponivii  que  ce  sot  à  des  pcrsou- 

qui  repose  dans  un   vase  d'agale.  Le  dessus  ncs  qui  sont  dans  la  nécessité,  trente  raesu- 

de  la  cusiodc  où  l'on  tient  le  saint  sarrcmei'.t  res  de   blé,    six    mesures   d'buile,    et   douze 

est  euricbi  d'une   émeraude  de  la  (grosseur  l'ucals  en  .irirenl;  et,   lorsiju' il  y  a  iiuelpie 

(l'unoMiICt  d'un  prix   inestimable.   La  eus-  p.iiivre  malade,   on   lui   envi.ie  cliai]ue  joui" 

Iode  est  de  la    bauieur   d'un    homme,  el    de  te  don!  il  a  besoin. 

rcpniss''ur  de  deux   brasses  :  elle  c^t   fai  e  Le   couvent  de  Madrid  distribue  rii\  p.Tu- 

d'une  |iicrre   p'us  riche  que  le  porphyre,  es-  vres  par  mois  douze  mille  maravéïlis,  cl  uiia 

limée  cinq  cent  mille  écus.  La    sacristie  esl  grande  (pi-inlilé  de  pa  n  Ions  les  jours,  outre 

l'une  d.  s  plus    riches    de   l'Iîurope;   l'on    y  ce  qui  soit  de  la  table  des  religieux  ;  ildonne 

voit  une   iolini'.é   d'ornements  en   broderio  au  prieur  vingt   ducats    pour  distribuer  aux 

d'oret  deperlcs  dont  la  plupart  lint  été  donnés  pauvres,  comme  ille  juge  à  propos,  et   c- 

par  leroi  I  liilipiio  SV, aussi  bien  que  des  ca'.i-  prieur  jouit  de(|uanlilé   <le  beaux  dr-its.  Il 

ces  d'un  grand  prix, dis  vaseietdes  chaude-  est  mailre  avec  son  couveat  de    l'hopital  de 

liers  d'oretd'argenl.  A  côté  de  ce  le  sarrislie  il  S.iintc-daliierne  t/e   lus  I)  iii:idijs.  l\  t'.iitdis- 

y  a  une  chambre  oùl'on  voit  deux  vases:  l'un  Iribiier  par  an,   à  six  pai;vres  de  la  parusse 

est  d'un   seul  saphir  enrichi  d  •  perles  et  de  de  Saint  André,  douze   mesures  de  froment 

pierres    précieuses  ,    au    iiiilieu    desquelles  et   quairo    mille  maravéïlis.   Il   nomme  co;i- 

iirilîe  un  gros  rubis  ;  l'autre  est  de  fonte  en-  joinîemi-nl  avec    un   gouverneur  de    poliee 

rii'hi  aussi  de  piei-rerics,  qu'on  dl  avoir  été  (juclques  filles  qui  doiveul  receior  des  dots 

lait   tie  la  propre  main  de   l'empereur  ?,]  im-  pourse  marier,  selon  l'inlenlion  de  <]uclqiies 

milien  !î.  Ces  deux  vases  servent  à  porter  h  foiuia'eurs  qui  lui    en   ont   doun^  la    no m- 

faint   sacrement.  Généra'ement  tout  ce  qui  nation. 

sert  à  la  décoration  et  au  service  de  l'église  Le  priee.r  deSéville  jouit  aussi  ile  plusieurs 

a  ciûlé  de  grosses  sommes  ;  car  les  formes  oa  droits  :  il  est  maître  lonj  >iiite  iCiil   avec   le 

stalles  du  chœur  où   s'as-eyent  les   religieux  pri.'ur  de  la  t-li  irlr.  use    do  1  hôp  l.il  Ju  car- 

sout  d'un  b.iis  venu  des  Indes,  et  ont  coûté  dina!   dom  Jaui    Cerv  ;nlès,    et   de  cilui  des 

I  lus  de  ving -quatre    mille  écus,  el   l'archi-  lilessés,  fonilé    p.ir   la  ma;  qui»e  de  Tarifa  et 
lecture  drs  orgues,  vingt-sept  mille  ducats.  Ii   duch  s-.o   de  Alcala.  li    est   proleciiurde 

II  y  a  (tans  le  chœur  deux  cent  seize  livres  l'université  de  celte  ville;  il  donne  de  qua- 
poiir  l'usa.'e  des  religieux,  qui  onl  coulé  Ire  ans  en  quatre  ans  une  dot  de  treize  cents 
tliiar.  nte-cinq  mille  écus,  el  l'armoire  où  ou  ducats  pour  une  pamre  demoiselle  qui  veut 
les  enferme  sept  mille  écus.  Ce  monastère,  y  .se  faire  religieuse  dms  le  mona-lere  do 
compris  le  quartier  du  loi  el  celui  des  éco-  Saint-Clément  ou  de  S  linte-Paule.  Il  dislri- 
licrs,  contient  dix-sept  cloîtres,  vingt-deux  bue  tous  les  ans  d'autres  dois  de  quatre 
cours  on/c  mille  fenèlres,  huit  cents  co-  cents  réaies  chacune  ,  et  cinquante  milte 
lunnes,  cl  plus  do  cent  vingt  religieux,  qui  niaravédis  pour  les  pauvres,  les  captifs  cl 
onl  plus  ('e  quarante  mille  écus  de  revenu,  les  prisonniers;  douze  mil  e  maravé  .is  à  de 
Il  y  a  toujours  jour  el  nuit  deux  religieux  pauvres  orphelins  qui  sont  dans  la  iiéces- 
devant  le  saint  sacrement  ;  ils  cntrelienneut  sité;  el  le  jeudi  saint  il  lave  le.  pieds  à 
un  séniinaiie  décent  quatre-vingts  jeunes  dix  neuf  pauvres,  auxiiuels  1  donne  des  ha- 
eeclésia-tiques,  aux(juels  ils  apprennent  lis  bits  et  à  dîner.  Le  couvent,  outre  irs  aii- 
humanilés  et  la  philosophie,  el  ces  clercs  inôncs  qu'il  l'ait  à  toute  heure,  donne  au-si  à 
assistent  avec  eux  au  chaur  en  surplis.  Ou  mangera  dix-neuf  pauvres  dans  un  rélVc- 
voit. aussi  dans  ce  monastère  une  riche  bi-  loire  desliné  pour  ce  sujcl.  Il  donne  encore 
bliotbèque  qui  contenait  plus  de  cent  mille  tous  b's  ans  au  môme  prieur  cinquante  me- 
volumes,  tant  manuscrits  qu'imprimés,  mais  sures  de  fromcui.  douze  mesures  d'huil.», 
une  p;:rtie  de  celle  bibliothèque  fut  cousu-  chaque  mesure  d'huile  pesant  vingt-iinq 
niée  par  un  incindie  l'an  1(371.  livres,  et  douze  mille  niaravédis  pour  dis- 
Le  couvent  de  Saial-Jérôuic  de  Juste,  que  Iribuer  aux  pauvres  selon  qu'il  le  juge  à  pni- 

pliisieurs  de  nos  écrivains  français  appellriit  pos.    Les    aulres    louvenlsde    cet  ordre  eu 

Saial-.!usl,  a  été  célèbre  à  cause  que  rem|)e-  Espagn-  foula   ssi  de   grandes  auniôues. 

reur  Charles-tjuint  le  choisit  pour  le   lieu  de  Ceux  ds  l'ortugaluesoi.li)asmoius  cousidé- 

sa  retraite,  lorsqu'ilcut  ce  :é  ses  Elalsd'Alle-  râbles.  Celui   de  Belcm,  sépulture  ord  nairo 

magne  à   l'erdinrind,  son  frère,   el  qu'il   eut  des  rois  de  ce  roy.iume,  esl  le    plus   <  élèbre. 

rea;is  les  aulres  à  Philippe  II,  son  fils,  le  23  II   fut  fondé  par  le  roi  dom  iiiuimanuel,  laa 

octobre  1355,  à  Î5ruxclies.  L'on  peut  juger  de  IW".  L'église  est   bâtie    en    forme   do    croi'c 

ses  grands  revenus  par  les  aumônes  qu'il  fait  sur  une  longueur  et  largeur  Irès-cousidérn- 

aux  pauvres  des  environs  ;  car  oa  distribue  b.'es.  E  le  reçoit  la  clarté  du  sulcll  parbeass- 

par  an  à  la  porte  du  couvent  six  cents  mcsu-  coup  de    fenêtres,  ce   qui  est   contraire  aux 

res  de  frouiciit,  chaque  mesure  valant,  selon  autres   églises  qu'on  bàlit    en  Tortugal  ,   un 


,•;,;,•,                                             lUCilONNAlllK  ItKS  Dl'.DKIvS  UKI.lGll  l\.                                              .'ISi 

l'on  en  f.iil  fo:l  peu,  iilin  d'olic  nuiiiis  ex-  I! ,  en  Rspn-^nc,  les  .ioroiij min  s  furcnl  aussi 
posé  à  l.'i  chnleur.  C'-lle  éj-lise  reroil  une  ilipuiés  par  le  nonce  .ipololi  jne  poiirla  rii- 
ollramlo  bien  singulière,  car  à  cliJKiue  jour  I  Tmcilesl'rcoionlrés, cl  le  preinier  hôpital  iiuc 
«lui  >e  passe  sans  que  le  so'ii!  paraisse  dans  fonda  sainl  Jean  de  Dieu  fui  des  aumônes  des 
la  »illo  de  Lisbonne,  la  \ille  de  Toniar  esl  ri'li|;icux  jéron3niiles,  (jui  oui  eu  aussi  parmi 
oldiu'éo  d'envoyer  une  brebis  à  la  reine,  qui,  eux  plusieurs  peisonnes  distinguées  par  b  ur 
par  un  pieux  saeriiice,  ren\oic  à  ré;;lise  de  science  el  par  les  dii;niles  qu'elles  onl  oe- 
liideni  {|i.  Le  maîlre  aulcl  esl  au  bout  de  rupécs;  el,  sans  reinonler  aux  temps  les  plus 
l'enronceiiienl  de  ^e^lise,  dans  une  grande  reculés,  Anloiiic  Augustin  éla.l  évêque  il  Al- 
(bapelle  ijui  lienl  lion  de  chœur.  A  i-  aquc  barazin  en  IGOj  ;  Ballazar  de  los  Heyes, 
(Ole  de  l'aulel  il  y  a  dans  le  gros  mur  trois  évé<iue  d'Oi  enee  en  IGjS  ;  .M  inuel  de  Naci- 
l'iifoucemenls  ou  pcliies  retrailes  donl  ledes-  mienlo,  évèque  de  S.  Thomé  ;;ux  Indes  orien- 
sns  esl  tourné  en  cinlre,  el  sous  cliaque  laies  eu  1()T8  ;  et,  l'an  17(),'j,  Jean  de  Saint - 
cintre  il  j  a  un  tombeau  de  niarbrf- blanr  el  Islevan,  prieur  de  l'ICscurial,  fui  nominé  à 
noir  all.iclié  contre  la  muraille.  Les  loui-  l'évéché  de  Mondonédo  par  le  roi  d'Kspagm- 
beaux  sont  soutenus  par  des  éléphants  de  Philippe  V.  Les  religieux  de  Saiiil-Jérômo 
marbre  noir,  cl  sont  séparés  le-  uns  de-,  au-  éiaient  gouverneurs  de  l'ile  de  Saiiit-Dn- 
Ires  par  de  petites  C(donnes.  A  cliai|uc  ex-  mingue,  lorsuuc  Coriez  lit  la  conquête  du 
Irémité  de  la  traverse  ou  cioisée  de  l'église,  Mexique  {Hist.  du  Mcjcii/iic,  liv.  m,  ch.  1). 
il  V  a  aussi  une  représentation  de  l mibeaux  Ces  ieli;;ieux,  comme  noui  avons  dit, 
laite  de  meiuiisirieet  couverled'uu  dais  noir  élaieiil  autrefois  habllé'i  de  Idanc  avec  un 
cl  blanc,  (jue  l'on  ne  change  que  lorsqu'on  S('apulairect  une  chape  de  couleur  tannée.  Ils 
ciitirrc  un  roi  ou  iiuebju'un  delà  mai>on  onl  conscr\é  la  robe  blauilu',  mais  ils  ont 
royale.  Lo  tour  du  c'oîlrc  de  ce  monastère  esl  pris  un  scaiiulaire  noir  fort  élro  l  avec  un 
composé  d'un  double  portique  l'un  au-Jcs-  ca]iuce,  dont  la  mozeltee-t  ronde  pir-ilevanl 
sus  de  l'autre  ;  ce  portique  environne  un  el  en  |)oinle  par  derrière.  LorS(in"ils  sorlcnl 
parterre  coupé  par  des  canaux  d'eau  ^i^e,  ils  mettenl  une  chapi^  aussi  noire,  iraîuanl 
où  l'on  nourrit  quantité  de  poisso:is.  jusqu'à  terre  et  lort  pliisee,  el  leur  robe  est 
Les  nligieux  jeronymites,  lanlen  Kspagnc  ceinte  d'une  ceinture  de  cuirl'2].  Quant  à 
qu'en  Portugal,  ont  toujours  été  en  si  ^;rande  lenrs  observances,  ils  se  lèvent  a  minuitpour 
estime,  que  l'on  s'est  servi  d'eux  p»ur  la  ré-  dire  malfncs,  cl  ont  tons  les  jours  une  heure 
fornie  de  plusieurs  rongi  égalions  religieu-  d'oraison,  demi-heure  avant  vêpres  et  autant 
se-,  et  de  plusieurs  ordres  militaires.  Le  P.  après  les  con)pl:es.  Outre  les  jeûnes  ordou- 
Lonp  d'Olmédo,  fondateur  des  .Moines  de  nés  par  l'i'^glise,  ils  jeûnent  pemlanl  l'.ivenl 
Saint  Jérôme,  dont  nous  parlerons  dans  la  entier,  le  lundi  el  le  m.irli  d'après  la  (Juin- 
suite,  el  qui  a  été  troisième  général  des  Lr-  (luagésime,  tous  les  vendredis  de  l'année,  et 
mite»  de  Saint-Jérôme  enLs|iagne,  dressa  les  même  li^  jour  de  Noél  ,  s'il  arrive  à  pareil 
1  remiers  règleiaen's  de  la  congrégaliou  des  jour;  les  trois  joursdes  Kogalions.avec  celte 
ihauoincs  séculiers  de  Saint-Jean  l'Evangé-  dilTérence  que  le  lundi  iis  peuvent  manger 
liste  en  Portugal;  c'est  pourquoi  le  pape  des  (rui's,  du  lait,  du  fromage,  el  le  mardi  ils 
Pic  II,  l'an  I 'i(Jl,  leurcommuniqua  les  privi-  doivent  s'en  abstenir.  Ils  jeûnent  aussi  les 
lége»  dont  jouissaient  les  religieux  de  Saint-  veilles  des  fêles  de  la  Nativité  et  de  la  l'uri- 
Jerôme  dans  le  xm*  siècle.  Le  P.  Hector  fication  de  la  s.iintc  \  ierge  et  de  saint  Jé- 
Piiito,qui  était  aussi  religieux  de  Sainl-Jé-  rôme.  Le  vendredi  sainl  ils  jiûnenl  au  pain 
rônie,  fut  fait  visiteur  de  cette  congrégation,  el  à  l'eau,  cl  ils  ne  mangent  jain.iisd  \i  inde 
et  y  aiiporla  queUiue  réforme.  Sous  le  règne  le  mercredi,  même  hors  le  moiias;ére.  Tons 
des  rois  catholique  s  Ferdinand,  et  Isabelle  les  irois  an-  ils  tiennent  leur  chajjilre  gené- 
en  F.spague,  I  s  ibevaliers  et  les  chanoiors  rai  le  troisième  dimanihe  d'ajjrès  Pà|ues. 
de  Saint-Jac  lues  de  l'Epco  furent  réformes  'l'uns  les  prieurs  s'y  trouvent  avec  un  dCiUité 
par  le  P.  Jean  de  Suria.  Jean  II,  roi  de  de  clia(iue  mason,  et  le  général  el  b  s  autres 
l'orliîgal,  cl  les  députés  apostoliques  pour  la  sn|iérieurs  dcmandenl  d'être  absous  de  leurs 
réforme  deschanoines  réguliers  en  ce  royau-  o^liees.  Ils  onl  des  donnés  et  desdoimees,  dont 
me,  se  servirent  pour  cela  du  P.  Alphonse  l'Iiabil  consi.-te  en  une  lobe  blanche,  avec 
de  Léon,  qui  était  pour  lois  frère  con\ers  un  manie.iu  tanné  sans  scapulaire. 
d.iiis  l'ordre  de  Saint-Jèrôine,  mais  (jui  dans  l'oyc:  Jose|)h  de  Siguenea  el  Lraïuisco  de 
le  monde  était  dicteur,  el  avait  rempli  pilu-  los  Sanios,  //  si.  de  lu  ordcn  dr  S.  Gcroiiimo. 
sieuis  emplois  distingués. Souble  roi  Jean  lit,  Ilermcnegildo  de  S.  P.iblo,  Orii/cn  y  Conti- 
(11  Portugal,  les  ehcvalieis  de  l'or. Ire  de  immion  de  il  lusliUilu  y  lelig.  (ierunimiana. 
Christ  leçurenl  pour  réforinatenr  aumonas-  Co/islilulioues  ij  ixlrnviii/iinlcs  de  la  ordcn 
1ère  de  'i'omar  le  P.  Antoine  Monni/. ,  pro-  dcl  (/lurioso  l'adr.  S.  (icroiiynui.  Sil\csl. 
\in(ial  des  Jéronjniilesde  Poituual.  Sous  le  iMaurol.  Mar.  Oceitii.  di  lull.gl.  rcliy.,  lib.  lu. 
mi'mc  roi,  lil  lise  de  Barros  réforma  les  iha-  l'iel.  (irescenz.  l'iesid  liumano.ltb.  i.  Ascag. 
noines  régn  ier>  de  la  congrégation  de  l'.o-  Tainliur.,  de  Jur.  ALInil.  mm.  Il,  Disp.  -i'i-. 
niinl)re,cts'aci|nilta  si  bien  de  cet  emploi, que  iju  ift.  \,  iium.  'M.  Ilei  inant,  Uist.  des  oiilie» 
ce  prince  lui  lit  encore  donner  la  commiss. on  rcUyiCux;  c\.  le  P.  lîouanni  ,  C'o/d/oy.  Oi'd. 
pour  réformer  les  l'riuitaire.-..  Sous  Philij)pe  rd  (jios.parl.  i. 

(I)  Hinincss.  Ma'cl.  /«.'j.ri/if.  île l'niiivert,  ton).  IV,  (2)  Vny.,  ù  l.i  lin  du  vul.,  ii'^   I  1 1  el  U5. 


';s3 


JF.R 


§  ni.  Des  rirlifiiciifrs  de  l'odre  de  S  int - 
Jérôme,  avec  la  vie  de  f^iar.e  Gardas,  leur 
fondatrice. 

Les  religiruscs  (lo  l'ordre  Je  S;iiinl-.Iérôma 
^lanl  soumises  aux  religieux  lîrii.iles  de 
S.iinl-Jcrôme  en  Espagne  .  où  elles  onl  j)r,s 
naissance,  et  n'cianl  point  sorties  de  ce 
royaume,  nous  parlerons  d'elles  dnns  ce  i)a- 
r.igraphe  avant  q  ede  passer  en  Italie,  où  il 
V  a  eu  Iroi'  différents  ordres  qui  onl  porté 
ie  nom  de  Saint-Jérôme,  et  dont  il  eu  reste 
encore  deux.  Crs  ri'ligieuscs  reroniiais^ent 
pour  leur  fondatrice  une  sainte  fille  nonnv.ée 
M.iiie  darcias,  qui  eut  pour  père  doni  Did.i- 
ce  G.ircia'-  de  Toi:  de,  et  pour  mère  Gonslanco 
(le  Tolède.  N'étant  encore  qu'enfant,  t/l!e  l'ai- 
.sait  déjà  [laraître  tant  d'amour  pour  Dieu, 
(jne  SCS  paients  d'un  commun  consentement 
la  lui  offrirent,  en  faisant  vœu  de  la  consa- 
crer à  son  service.  Ils  eurent  un  si  grand 
soin  di;  l'entretenir  dans  celte  dévotion,  (jui 
lui  était  tomme  naturelle,  qu'ayant  atteint 
V;'.-;e  de  raison,  et  sachant  le  vœu  que  ses 
iiartnls  avaient  fait,  et  qui  aurait  été  nul 
siins  son  consentement,  elle  le  renouvela  et 
jiril  la  résolution  de  demeurer  toujours  vier- 
ge, et  de  n';ivoir  jamais  d'autre  époux  que 
Jésus-Christ.  Klle  n'avait  que  du  mépris  pour 
le  monde.  Li's  honneurs,  les  richesses,  les 
pompes,  les  vanités,  les  divcrlissenienis  et 
tout  ce  que  les  personnes  de  son  sexe  rccher- 
chrnt  avec  tant  d'empressement,  n'étaient 
pour  elle  que  de  vains  objets  qui  lui  faisaient 
au  contraire  désirer  avec  plus  d'empresse- 
ment 1.1  relraiie  ei  la  solitude.  Et,  pour  évi- 
ter ces  objets  fiitals  qui  causent  la  perte  de 
tant  de  filles  mond.iiiies,  elle  se  ntira  dans 
un  monas  ère  appelé  Saint-Paul  de  lus  Duea- 
iias,  où  sa  soeur  était  prieure,  et  où  II  y  avait 
lie.iucoup  de  religieuses  d'une  éminenle  ver- 
tu. Sj  sœur  crut  qu'elle  n'y  venait  que  pour 
en  au-;iiieiiler  le  nombre;  mais  Dieu,  (ini 
avait  d'autres  desseins  sur  cetlo  sainte  fiile, 
ne  ])erniil  pas  qu'elle  prît  l'habil  dans  ce 
monastère,  elle  y  apprit  seulement  toutes  les 
observances  régulières  qu'elle  fit  praliqu  r 
dans  1,1  suite  ù  d'autres  saintes  vierges,  et 
elle  les  pr.iliqua  da^is  ce  monasière  avec  tant 
d'exactitude  et  tant  d'édification,  que  sa  ré- 
piil.ttion  ne  se  répandit  pas  seulement  dans 
la  ville  de  Tolède,  mais  qu'elle  pénétra  en- 
Ciire  dans  le  mimastère  iie  Sainle-Ciaire  da 
'J'orilesillas,  d'où  les  religieuses  lui  écrivirent 
pour  la  prier  de  vouloir  embrasser  leur  règle, 
il  les  venir  gouverner  en  qualité  de  supé- 
rieure. Mais  t'était  a  sez  d,^  lui  proposer  la 
suj)crii)rilé  pour  qu'elle  ne  consentît  pas  au 
uéjirde  ces  leligieu^es. 

Après  avoir  demeuré  quehiues  années  à 
Sainl-l'aul  de  lus  Ùuennas ,  elle  retourna 
dans  la  maison  de  ses  parents,  où  à  peine 
fui-elle  arrivée,  qu'une  sainte  veuve  iioin- 
niée  MayorGomez  se  joignit  à  elle  pour  i)ra- 
liquer  ensemble  plusieurs  œuvres  de  piété. 
Tour  montr<  r  le  mépris  qu'elles  fais. lient  du 
mimde,  elles  sortaient  tous  les  jours  ayant 
chacune  une  besace  sur  l'épaule,  pour  aller 
de  porte  en  porte  par  la  ville  demander  l'au- 

DlCTIONiVAlRE  DES  OrOIU'S  !i  Kl.îr.  iki;  X  . 


.IRU  886 

inône  pour  les  p.'iiivroi  prisonniers  et  lo'i 
pauvres  houleux  ;  et  l.>rsijue  leurs  besaces 
él.iieiit  pleines  de  p.iin,  elles  allaient  le  dis- 
tribuer aux  pauvies  prisonniers  et  à  ceux 
qu'elles  savaient  cire  dans  la  nécessité.  Celte 
manière  de  vivre  déplut  for;  à  ses  parents,  ce 
qui  lui  allira  quelques  reproches.  Mais  cela 
ne  l'empéclia  p.is  de  coniinuer:  elle  allait 
même  les  dimanches  et  les  fèies  dans  l'église 
c.itliédrale,  et  y  demeurait  pendant  tout  le 
jour,  en  dcmamJant  l'aumône  pour  les  mômes 
pauvres,  et  comme  ses  parents  virent  que 
leurs  remontrances  étaient  inutiles,  touchés 
de  l'esprit  de  Dieu,  ils  laissèrent  leur  fille 
dans  la  liberté  de  continuer  celte  œuvre  cha- 
ritable, et  ils  tirèienl  dans  la  suite  une  gloire 
de  ce  qu'ils  avaient  d'aburd  regardé  comme 
un  affront. 

Dans  le  même  temps,  le  roi  dom  Pierre  vint 
A  Tolède,  et  comme  ce  prince  n'était  pas 
moins  impudique  que  cruel,  Marie  Garcias  . 
qui  était  aussi  belle  qu'elle  était  vertueuse 
et  chas  e,  voulant  éviter  les  amours  déshon- 
nêtes  du  roi,  qui  avait  jeté  les  yeux  sur  elle 
pour  contenter  ses  désirs,  se  relira  secrète- 
ment avec  sa  comiiagne  à  Talavera  dans  i;n 
bien  qui  apparlenait  à  ses  parents.  Elles  y 
demeurèrent  quelques  jours,  mais  elles  n'y 
lurent  pas  si  bien  cachées  que  le  roi  n'en  eût 
av;s.  Il  y  envoya  des  gens  pour  les  enlever, et 
elles  évilèrcnl  ses  poursuites,  étant  sorties  de 
Talavera  par  un  chemin  délourné  (]ui  les  c  in- 
duis t  dans  l'ermitage  de  la  Sysia,  où  elles  de- 
iiieurèreal  encore  tachées  jus(iu'à  ce  que  le 
roi  eût  quitté  la  ville  de  Tolède;  et  ainsi  eibs 
s'échappèrent  de  ses  mains.  Elles  trouvèrent 
cette  solitude  si  agréable,  qu'elles  y  firent  un 
plus  lung  séjour;  elles  tâchèrent  d'imiler  dans 
«e  lieu  les  anciens  solitaires  d.:  l'Egypte,  et 
elles  y  restèrent  jusqu'à  la  mort  du  roi  dom 
Pierre,  qai  rassura  une  infinité  d'âmes  chas- 
tes qui  fuyaient  ses  impudicilés. 

Ces  deux  saintes  compagnes  ayant  su  que 
pendant  leur  absence  il  s'était  formé  à  TolèJe 
une  coiigrégalion  de  filles  pieuses  qui  étaient 
en  grande  réputation,  et  qui  étaient  gouver- 
nées par  une  supérieure  (|ui  menait  une  trcs- 
siinte  vie,  elles  prirent  l.i  resoluiion  d'en- 
irer  dans  cette  eommunaulé,  c.les  y  furent 
reçues,  et  y  vécurent  quelque  leiiips  dans 
les  exercices  de  I  humilité  e;  de  l'obéissance; 
mais  la  su|)éricure,  (|ui  était  runique  appui 
et  le  soutien  de  celle  communauié  naissante, 
et  les  pire  il  mère  de  Marie  G.Hcias  étant 
morts  en  même  lemps,  cette  sainte  fille,  qui 
avait  hérité  des  biens  coiisider.ibles,  acheta 
une  grande  maison  dans  Tolède,  où  elle  alla 
demeurer  avec  sa  couipag  .e  Mayor  (jomez 
et  quelques  autres  filles  de  celle  première 
communauté,  qui  avait  été  dissipée  par  la 
mort  de  la  supérieure, et  elles  prirent  la  réso- 
lution de  n'en  point  sortir  de  leur  vie.  Une 
dame  de  la  même  ville,  qui  depuis  quelques 
jours  avait  auhsi  assemblé  dans  sa  maison 
sept  ou  huit  personnes  de  son  sexe,  avec 
k'ïqueiles  elle  vivait  d.ins  une  gr.inde  ré- 
tollei  lion,  ayant  appris  le  nouvel  ctalilisse- 
ment  de  .Marie  Gartias,  entra  dans  sa  com- 
iiuin.iDle  avec  ses  cump.ignes  :  ainsi  celle 
II.  li> 


SS7  DICTIONNAIRK  DF.S 

fiiiii.-nuiiniili' il.\in(  J'.ibord  .nssoz  consiJcra- 
lilr,  ri  elles  |ir.ilinUL«rfnt  los  nbs  rvaiic-s  rc- 
pulières.  Pour  élre  cntièrcin'-nl  (liOinguôcs 
lies  so(Miliore«,  elles  prirent  un  h.ibit  rcli- 
u'ieux  lil  que  le  porlaicnl  les  religieux  de 
Saint-Jérôme,  savoir  :  une  robe  lilanchecl  un 
scapulnirc  de  couleur  lanuce  (1),  après  ijuoi 
elles  élurent  d'un  commun  consentement 
pour  supérieure  Marie  Garcias  qui  n'accep^i 
cette  chaifîc  qu'avec  beaucoup  de  difli- 
rulté.  Tel  fut  lo  commencement  du  célèbre 
monastère  de  Saint-l'aul  de  Tolè  le,  qui  est 
le  premier  des  religieuses  jéronymites,  cl  où 
elles  ont  pris  naissance. 

Pierre-Ferdinand  Pécha  ou  deGuadalajara 
é'anl  venu  presque  dans  le  même  temps  pour 
fondir  le  seco:iil  monastère  de  son  ordre  à 
Notre-Dame  de  la  Sysla,  où  Marie  darcias  et 
sa  compagne,  MayorGomcz,  avaie;'.tdemeui6 
quelque  temps,  elles  se  soumirent  à  lui 
comme  à  leur  supérieur,  et  elles  ne  faisaient 
rien  q<ie  par  ses  avis  et  ses  conseils,  et  dès 
lors  elles  t.kbèicnt  d'imiter  les  religieux  de 
>olrc-I)ami' de  la  ^\  s'a  dans  toutes  leurs  ob- 
siTvanciS.  Klles  ne  furent  néanmoins  vérita- 
lilemcnl  religieuses  et  ne  firent  des  vœux 
solennels  que  longtemps  après,  l'in  clTet,  ce 
inonascrc  a  été  appelé  pm  !ant  un  temps 
onsidérable  Saint-Paul  des  Béates  de  Marie 
Ciarcias,  S.  Publo  (h  las  riedtas  de  Maria 
Gi.rcia  ,  le  nom  de  béate  signifiant  une  fem- 
me ou  liile  dcYole  qui  porte  un  habit  de  re- 
ligieuse. 

Cette  communauté  s'augmenta  de  jour  en 
jour  et  devint  considérable,  plusieuci  per- 
sonnes y  étant  entrées,  attirées  par  la  sain- 
telé  de  vie  de  i.i  fondatrice,  qui  éla  t  l.i  pre- 
mière dans  toutes  les  occasions  qui  se  |  ré- 
srnt:;icDt  pour  pr;>.liqu:  r  quelque  vertu  ,  et 
surtout  celle  de  l'iinmilité.  Elles  récitèrent  le 
grand  offiie  par  ordre  de  FcrJinan  I  de  (îua- 
(lalajara,  prieur  d  •  la  Sysla.  Kiles  se  l.vaient 
à  minuit  pour  dire  mal:nes,  aiircs  liSjuelles 
Marie  île  (îarfias  ne  retournait  point  à  sa 
<h:imbre,  emplojant  le  reste  de  la  nuit  en 
orisoii,  coutume  qu'elle  a  mémo  pratiquée 
lians  de  grandes  niriirnitcs  où  r,;v,iienl  ré- 
duite sui  l<i  (iu  de  ses  jours  ses  grandes  aus- 
tcrilés  cl  ses  moriilications  ;  et  lorsqu'.'llo 
prenait  un  peu  de  rr  pos,  ce  n'était  que  sur  la 
lirrenue.  Klle  ne  laissa  pas  malgré  ses  aus- 
térité» de  parvenir  à  un  âge  fm  l  avancé  ;  et, 
voyant  sa  fin  approcher,  rllo  fit  un  excellent 
d  scours  ;\  ses  sœurs  pour  les  exhorter  à  la 
petsévérance.  Elle  p.édil  à  plusieurs  ce  qui 
devait  leur  arriver,  el,  après  avoir  reru  les 
s.icrcmrnls  de  l'Egide,  elle  renlil  son  .'imc 
à  Dieu  le  10  février  IViO.  Kllc  avait  ordonne 
que  son  corps  fût  (>orté  au  monastère  de 
^olrc-Damc  de  la  Sysla,  [larcc  quelles  n'a- 
vaie;it  pas  encore  d'église  ;  ses  parents  vou- 
1, lient  iiéaniiiojns  qu'elle  lui  enterrée  dans 
la  grande  église;  m  iis  les  religieuses,  voulant 
e\éciiter  IC'' dernières  volontés  de  leur  Mère, 
duiinèrcnt  son  corps  aux  religieux  île  Sainl- 
Jeiùine,  (jiii  le  reçurent  avec  beaucoup  de 
rcjpcci,    el  l'eiilerràrcnt  avec   beauciuii  de 

(l)  Voy.,  .1  lu  lin  ilu  \ul  ,  II'  1  .(>. 


(iRniiEs  KKi.toiiux.  srs 

pompe  dans  leur  égli>e  proche  le  pranJ  au- 
tel, l's  lui  firent  élever  un  timlicaii  ih'  mar- 
bre, où  elle  était  représentée  rn  relii  f  aTec 
ses  haliiis  de  reliu'ieuse. 

Quoique  les  religiei:scs  de  ce  momstère 
eussent  été  d'.ihord  sous  la  juridiriion  de 
Ferdinand  de  Guadalajar;i,  aui|ui>l  elle»  s'é- 
taienl  soumises,  il  y  a  de  l'apparence  qu'elles 
n'obéirent  pas  aux  aulr.s  prieurs  de  l:i 
Sjsia,  puisque  ce  ne  fut  que  l'ai  1510 
qu'elles  furent  in.orporées  ,à  l'ordre  de 
Saint-,lèrAme  dans  le  chapitre  général  où 
le  P.  Michel  d'Ocanna  fil  élu  général,  el 
qu'elles  demandèrent  à  quitter  le  nom  de 
béates  poiir  prendre  celui  de  relgieus.'S ,  en 
embrassant  la  clôture  el  faisant  les  vœux 
solennels.  On  recul  aus-i  dans  le  méiiic  cha- 
pitre un  autre  monasière  de  filb'S  du  méim^ 
ordre  qui  avait  été  fond  •  à  .Madrid  sous  lo 
nom  de  la  Conception  jéronyme  par  B  'alrix 
Galindo  ,  en  loOi.  Le  second  n  onastère  de 
ces  religieuses  avait  été  fondé  dès  l'an  117:{ 
par  une  certaine  femme  de  la  ville  de  Se- 
Tillc  noiiimée  Anne  de  Sautilla,  veuve  do 
Pierre  do  Ortiz,  l'un  des  consuls  de  retle 
ville,  il  avait  été  dédié  à  sainte  Paule.  Le; 
pape  Sixle  IV,  qui  eu  avait  permis  la  fonda- 
tion, a*.îil  mis  les  nli'.jieiises  sous  la  juri- 
diction des  religieux  de  S,iint-Jéi  ôme  ,  cl 
leur  avait  donné  les  conslittitions  d'un  mo- 
nastère de  Sainte-Marthe  à  Cordoue  :  mais  le 
pape  l.éon  X  les  en  dispensa  en  loi'*,  et 
leur  orlonnade  prendre  celles  de  l'ordre  de 
Saint-Jérô  ne.  L'an  1321,  il  y  eut  encore 
une  autre  fomlalion  de  religieuses  de  cet 
ordre  à  Grena  le  sous  le  nom  de  Saiiile- 
Paule.  On  fit  sortir  des  reli;;ieuses  de  Madrid 
pour  faire  ce  nouvel  établisscinenl  ;  il  s'en 
est  encore  fait  quelques  autres  dans  la  suite  ; 
et  il  y  a  plusic  ;rs  religieuses  de  cet  ordre 
qui  sont  mortes  en  odeur  de  sainteté.  .Snne 
de  Zuiiiga,  religieuse  du  monastère  de  To- 
lède, a  donné  les  vies  d  •  soixante-quatorze 
religieuses  de  ce  même  monastère,  où  le 
corps  de  la  bieiiheareu^o  Marie  d'Aj  ifin  esl 
en  grande  vénération.  Les  religii'uses  de 
Sailli-Jérôme  ont  ,  comme  les  religieux , 
quitté  le  scapulaiic  el  la  chape  de  couleur 
tannée  pour  en  prendre  de  noirs. 

Voi/cz  Joseph  Sigucnça  cl  Francisco  de 
los  Santos,  Histor.  de  l'Ordrn  de  S.  Gero- 
niino  ;  el  Pior.  Crescenz.,  l'reiid.  Ilom. 

SECTION    DF.USU'lMIi. 

DIVERSES  co.ngué<;atio  s  des  IUMITES 

DE    L'OKuIlE  UE    SAl-M-JEllO-ME. 

§  1er.  /yf.«  ICrmites  de  Saiiit-Jci  ôme  de  la  ron- 

yi  éfjiili 'H  du   biin/icuieiix  Pierre  de  l'isr, 

(iiec  la  vie  de  ce  saint  fondateur. 

Les  religieux  dont  nous  allons  parler  ont 

été   apielés  dans    le   co«nmencenien(  ,    Lrs 

pauvres  l-'r ères  pour  l'amour  de  Jésus-Christ, 

ensuite.   Les  pnHirrs    Ermites  de.    Saint  Je 

rom  :  et  ce  n'a  éle  qu'après  la  mort  du  bieii- 

hriiniix  Pii'rre  de   l'ise,  leur  fondateur,  que 

l'o.i  a  donne  sou  noiu  aux  religieux  de  .sa 


530 


JF.P, 


JF.P. 


59;) 


rongr6p;nlion,  pour  les  di'^liii'rncr  ds  autres, 
qui  prcnnciil  aussi  le  lilied'Krmilcs  de  Saiiil- 
Jcrôme.  Ce  saint  fondateur  naquit  à  Pise  le 
IG  février  de  l'an  1355,  dans  le  temps  que 
si>n  père  ,  lierre  fiambacorli,  avait  la  sou- 
veraine autorilo  à  Fisc  cl  à  Lucques  ;  et  sa 
mère  se  nonim.iit  Niève  Gualandi.  A  peine 
cul-il  en  naissant  fait  connaîtic  par  ses  lar- 
mes que  nous  ne  soninies  ici-bas  que  dans 
une  vallée  de  misères  ,  qu'il  espérimenla 
aussi  presque  en  même  temps  que  nous  n'y 
avons  aucune  ville  (lerma'iiiilc  ;  car  ses  pa- 
rrnis,  ayant  été  (sbiigés  de  celer  à  la  for- 
tune qui  leur  était  contraire,  se  retirèrent 
di'  Pise,  y  ayant  été  contraints  p'ir  la  vio- 
l' nce  de  leurs  ennemis  ,  et  cmnierièrent 
avec  eux  le  petit  Pierre,  qui  n'avait  rncorc 
que  trois  mois,  l'fi  u  l'accouium/int  de  bonne 
li.'ure  à  la  croix  et  aux  souffrances. 

Il  fut  élevé  dans  tons  les  exercices  de  la 
noblesse.  Il  s'en  acquittait  à  la  satisfaction 
de  SCS  parents;  mais  en  même  temps  il  pra- 
liquait  ceux  (;ui  conviennent  à  un  véritable 
'.hrétlen,  et  ne  résista  po'iil  aux  mounmenls 
intérieurs  que  lui  dictait  le  Saint-Ksprit ,  cl 
qui  lui  faisaient  concevoir  du  dégoût  et  du 
mépris  pour  les  vanités  de  la  terre.  Comme 
lin  navire  prêt  à  nicttre  à  la  voile,  il  n'allen- 
dail  (ju'un  venl  favorable  pour  sortir  du  tu- 
multe et  de  l'emb.irras  du  monde,  et  pour 
abandonner  sa  pairie  et  ses  parents.  Dieu 
ne  l'appela  point  à  la  soliiude  dès  l'enfance, 
(omiiie  saint  .lean-Baptistc,  ni  au  coinmon- 
cemcnl  de  l'adolescence,  comme  saint  Paul, 
le  père  des  solitaires  ;  mais  il  attendit  qu'il 
fût  dans  un  âp;e  mûr  et  avancé.  Ce  fut  la 
mort  de  s,i  mère  qui  le  détermina  à  d  re  un 
dernier  adieu  au  monde:  à  l'âge  de  vingt- 
cinq  ans,  il  renonça  aux  grandes  esiiérantes 
(]u'il  pouvait  avoir  pour  suivre  Jésus-Christ  : 
et,  dans  le  temps  que  son  père  avait  plus  de 
pouvoir  d;ins  Pise,  où  il  était  reîourné  pour 
repremlre  le  «iouvernement  de  la  république, 
il  le  qui  la  cl  se  revêtit  d'un  habit  pauvre  et 
méprisable  pour  aller  chertlier  quelque  soli- 
lu:ic  où  il  pût,  inconnu  aux  hommes,  me- 
ner une  vie  austère  et  pénitente. 

C'i  si  ainsi  ()u'un  religieux  de  la  congréga- 
tion du  bienheureux  Pierre  de  Pisedéciil  les 
premières  annéisde  la  vie  de  ce  saint  fonda- 
teur, dans  l'histoire  qu'il  en  a  donnée  en 
1695  ;  mais  !e  P.  Papebroch  ne  prétend  pas 
qu'il  se  donna  sitôt  à  la  piélé,  il  dil  au  con- 
traire que,  l'an  1377,  avec  le  secours  de  son 
frère  aîné  André  Gambacorli,  il  enleva  pir 
force  sa  sœur,  la  bienheureuse  Claire,  d'un 
monastère  où  elle  s'élait  retirée  pour  y  ser- 
vir Dieu  ;  et  qu'ajirès  l'avoir  retenue  dans 
iine  espèce  de  prison  [icnJanl  cinq  mois,  ce 
fut  peut-être  la  persévérance  de  colle  sainte 
fille  qui  le  toucha  viveuienl  et  lui  (it  conce- 
voir le  dessein  de  se  donner   aussi  à  Dieu. 

Quoi  qu'il  en  soit,  ce  fut  vers  l'an  1375  ou 
1377  que,  s'etant  revêlu  d'un  habit  de  péni- 
tent, cl  ayant  abandonne  sa  patrie.  Dieu  le 
conduisit  dans  l'Oiibrie,  où  il  trouva  sur 
les  confins  de  Cessana  une  montagne  nom- 
mée Monlébello,  belle  à  la  vérité,  tant  pour 
sou  agréable  situation,  (lui  fait  découvrir  une 


grande  éiendiiedc  payset  toute  la  m^r  Adn.i- 
iique,  que  pour  un  vallon  qu'on  y  t  ouvc 
environné  d'une  multitude  de  chênes  et  de 
sapins  qui  forment  une  charmante  solitude. 
Ce  fut  ce  lieu  que  notre  bienheureux  choisit 
pour  sa  demeure.  Il  était  obligé  de  descen- 
dre tous  les  jours  de  cette  mont  igné  pour 
aller  dans  les  villages  circonvoi<ins  demm- 
der  l'auujône  pour  si  subsisl;ince  :  nin-seii- 
Icmcnt  on  lui  donnait  du  pain  ,  m  lis  encore 
de  l'argent,  de  sorte  qu'il  amassa  une  somme 
assez  considérable  pour  bâtir  d  ins  sa  soli- 
tude une  église  qui  fut  achevée  l'an  1380  et 
dédiée  eu  l'honneur  de  la  S  linle-Trinié  ;  et, 
joignant  celle  église,  il  fil  faire  des  bâiimcnts 
pour  contenir  plusieurs  ermites,  prévoyant 
bien  qu'il  devait  êlre  fo'.idaleur  d'une  nou- 
vel'e  congrégation.  En  effet,  peu  de  temps 
après  il  eut  douze  compagnons,  que  l'on 
prétend  avoirôléaulantde  voleurs  qui  élaient 
venus  dans  sa  solitude  dans  le  dessein  de  lui 
prendre  tout  ce  qu'il  avait  et  pour  le  mal- 
traiter; mais  il  sut  les  gagner  a  .Jésus-Christ 
par  ses  discours  et  par  ses  remontrances  ,  et 
ils  suivirent  si  bien  l'exemple  de  leur  maître, 
et  profilèrenl  de  ses  instruclions  avec  lanl  de 
fruil,  que  quelques  uns  ont  eu  le  don  des  mi- 
racles, et  ont  été  honorés  comme  bienheu- 
reux après  leur  mort,  tels  que  les  bieniieu- 
reux  Pierre  Gualcerano  et  Barthélémy  Sla- 
Icrba  do  Césène  ,  qui  étaient  de  ce  nombre. 

Noire  saint  fondateur,  qui  avait  un  grand 
mépris  de  lui-même,  et  qui,  pour  éviter  tout 
ce  qui  pouvait  lui  donner()uelquevainegloiro 
et  le  faire  ressouvenir  de  la  grandeur  de  sa 
famille,  avait  voulu  être  appelé  seulement 
Pierre  de  Pise,  cl  non  pas  Gambacorli,  ne 
voulut  pas  aussi  que  sa  congrégation  portai 
son  nom  ;  mais  il  donna  à  si  s  ermites  celui 
de  saint  Jérôme,  qu'il  prit  pour  patron  et 
protecteur,  parce  que  ce  saint,  ayant  visité 
tous  les  saints  ermites  et  anachorètes  de  la 
Syrie,  de  l'Egypte  et  de  la  Thébaïde,  avait 
pratiqué  l'austérité  des  uns,  le  silence  des 
autres,  avail  appris  de  ceux-ci  à  être  doux 
et  humble,  de  ceux-là  à  être  patient  cl  chaste; 
et,  comme  Pierre  tendait  au  plus  haut  degré 
de  la  perfection,  il  le  choisit  pour  son  maître 
et  son  guide  ;  et  Siirlout  il  imita  tellement  son 
humiliié  cl  sa  pauvrelé,  que,  se  confiant  en 
la  seule  Providence,  il  ne  possédait  rien  cl 
ne  souhaitait  rien,  et  mérita  par  ce  moyen 
que  souvent,  lorsque  les  charités  des  fidèles 
manquaient,  des  anges  lui  apporlassi  iil  ce 
qui  était  nécessaire  pour  faire  vivre  sa  com- 
munauté, qui  devint  dans  la  suite  fort  nom- 
breuse. Il  fuyait  pareilleinenl  les  honneurs, 
et  en  avait  un  si  grand  mépris,  que  ce  fut  ce 
qui  lui  fil  choisir  saint  Jérôme  pour  patron, 
dont  il  voulut  que  ses  ermites  portassent  le 
nom,  afin  qu'ils  ne  prissent  pas  le  sien;  mais 
ce  qu'il  a  voulu  empêcher  pendant  sa  vie  est 
arrivé  après  sa  mort,  puisque  sa  congréga- 
tion n'est  connue  que  sous  le  nom  du  B. 
Pierre  de  Pise. 

Après  avoir  ainsi  donné  commer.cement  à 
sa  congrégalion,  le  démon  lui  livra  on  furieux 
comlial.  Il  avait  (lejà  été  vaincu  par  ce  saiul 
liominc,    lorsqu'il   lui    avait   repi éventé   Icf 


DICTIONNAIRE  DE?  ORDUES  RF.I.'CIEUX. 


501 

lioiiiicurs,   les   liions  <l   les   rinliosscs    qu'il 
avail     quilles  ,    il    lorsqu'il     l'av.iil    solii- 
rité   il'ali.imloiinor   sa    soliliide   pour  li'S  rc- 
|irendro.  Il  (il  un  nnuvtl  cIToil  en  sollicil.inl 
tlcrrchcf  iiolrc  saiol  crmiic  d'aller  venger  la 
mort  de  sou  père  el   de  deux  de  ses   (rèrcs, 
(|ui  furent  assassines   le  21  octobre  139i  j-ar 
Jacques    Appiani,  secrclairc   de   sou    père; 
mais  il  fui  inchraiilabic  coulri'  (elle  nouvelle 
secousse,  il  .'econteuli  di    prier  Oicu  el  il'a- 
dorer   les  ordres  de  sa  providence,  et,  pour 
lira\er  le  démon,  il  afllis;ca  son  corps  par  de 
rudrs  pcuilcuces  cl  de  grandes  auslériics.  Il 
mi!  eu  usage   les  liaires,  lesciliccs,  les  dis- 
ciplines, il  r(  d  ubia  ses  jeûnes  el  ses  veilles, 
et,   lorsqu'il  était  accable  de  sommeil,   il  se 
jelail  sur  un   peu  de  pai'le.  le  plus  souvent 
sur  la  terre  nu  •.  Outre  quatre  carêuies  qu'il 
observait  dans  l'aiinéc,  savoir  depuis  le  jour 
d  s  Cendres  jusqu'à  Pâques,  depuis  le  lundi 
lies  Uogali ms  jusqu'à  la  fête  de  la  l'enlccôle, 
depuis  le  premier  jour  d'août  jusqu'à   l'As- 
-omplion   de  la  sainte  \'ierge,  et   depuis    k- 
premier  novembre  jusqu'à  Noël,  il   jeûnait 
tous  ks  lundis,   mercredis  el  vendredis  de 
l'année,  el  il  observa  toujours  celte  pratique 
jusqu'à  la  mort.  Celait  aussi  une  partie  des 
observances   qu'il   ordonna    à   ses  ermites, 
auxquels  il   prcscrivil  encore  de  prendre  la 
discipline   tous  les  jours  pendant  le  carême, 
et  pendant  le  reste  de  raonée  seclenienl  les 
lundis,  mcrcrLdis  et  vendredis,  afin,    disait- 
il,  d'imiter  Jésui-Clirisl,   qui  avail   été  lla- 
gellé  pi:ur  leurs  pécbés.  Il  défendit  par  les 
constitutions  de  recevoir  ceux  qui  se  présen- 
leraicnl    pour  prendre    l'iiabil,  s'ils   avaient 
moins  de  dix-liuit  ans  et   plus  de  cinquante, 
de  peur  qu'ils  ne  fussent  pas  en  elat  de  sup- 
port.r  les  austérités  cl  les  rigueurs  de  la  pé- 
nitenc  qui   soat  prescriUs  par  ces  constitu- 
tions. Ils  se  levaient  à  minuit  pour   réciter 
matines,  apiès  lesquelles  ils  restaient  deux 
liiures  au  iliœur  i)our   faire  oraison  I  été,  cl 
l'hiver   ils   y   emplojaient  trois  heures.  Ils 
faisaient  encore  une  heure  d'oraison    pen- 
dant   lété,  et   deux  heures    pendant  l'hiver 
après  compiles.  C  etail  la  règle  générale  pour 
lous  ses  criinles  ;  mais  l'on  pouvait  dire  que 
le  bienheureux   fondateur  était   continuelle- 
ment en  oraison,   car  il   y    cinploy:iii  irès- 
so  ivent  le  temps  (jui  i  esta.l  dejiuis  les  deux. 
ou  trois  heures  d'oraison   commune  d'après 
matines  jus(iu'au    jour,  el  une  bonne  p;irlie 
lie   la  journée.    Leur   nourriture    ordinaire 
e:ail  un  peu  de  pain  avec  des   fruits  ou    des 
herUes  cuites  en  petite  quantité,  à  la  volonté 
du  supérieur.  Us  devaient  reconnaître   lous 
les  jours    leurs    fautes    dans     le    réfectoire 
,ivant  (juc  de  se  ni  tire  à  table,  el  accomplir 
(idèicmenl  les  pénilences  ijui  leur  élaient  en- 
juiiiles.  Si    au    milieu  du    ri'jias    quelqu'un 
couimellait  quelque  faille,  il  devait  se  lever 
pour  s'en  accuser,  el  devait  demeurer  liu- 
jours  debout  jusqu'à  ce  qu'on  lui  eût  fait  si- 
gni;  de  s'asseoir,  yiiant    à   la  pauvielé,  elle 
elail   e\aclonicnl    observée   :   tout   était    en 
r.otniiiiin,  el  le  supérieur  a«  ait  soin  d(;  dlslii- 
buei  a  un  ihacui>  ce  dunl  il  av.iit  besoin  (I). 
(Ij  Yoij.,  i)  la  fin  dii  vol.,  n'  147. 


.195 


Une  vie  si  austère  leur  attira  l'estime  deq 
personnes    verlueuses  ;    mais    les   libertins 
s'en  scandai  sèreiil.  Ils  répamlireiit   de   fanir. 
bru;is  coiitie  la  réputation  de  ces  saints  la- - 
miles  ,  et  publièrent  (jue   ce  qu'ils   faisaient 
n'était  «lue  pour  abiis'  r  de  la  simplicité   du 
peuple;  que  c'étaieiil  des  loups  ciuvcrls    de 
peaux    d'agnciux;  qu'ils    faisaient  à  l'exté- 
rieur  profession   d'être  austères   et   de   mé- 
priser les    honneurs  el   les  richesses  ,  mais 
(jue  ce  n'étaient  que  des  ruses  cl  des  stratagè- 
mes dont  ils  se  servaient    pour  s'attirer  de 
l'estime  cl  de  la  i;loire.  Ces  libcitins,  croyant 
Cjue  de  si  grandes  austérités  étaient  au-des- 
sus dis  forces  humaines, accusèrent  aussi  ces 
saints  Ermites  de  sortilège,  attribuant  à  l'art 
magique   cette   grâce  surnalurelle  de   Dieu 
(]ui  les  soiitinail  cl  leur  donnait  la  force   et 
le  courage  pour  supporter  ce  genre  de  vie  , 
qu'ils  avaient  embrassé  pour  sa  gloire.  Sur 
tes    faux    rapports  ,  les    inquisiteurs   firent 
des  informations.   Les  Ermilcs   furent  con- 
traints do  sortir  de  temps  en   temps  de  leur 
solitude   :    c'est   pourquoi    le    bienhenrcui 
Pierre  de  Pise  ,  pour  faire  cesser  celle  per- 
sécution, cul  recours  au  pape  Martin  V,  (jui, 
I  ersuade  de   la  sainteté  de  ce  fondateur  el 
de   la  vie  excmp'aire  de  ses  disciples  ,   leur 
accorda    une   bulle  le  21  juin    ^^21    qui    les 
exemplail  de  la  jur.diciion  des  inquisiteurs, 
déclarant  nulles  les  sentences  d'excommuni- 
cation qui  pouvaient  avoir  clé  données  ,   cl 
toutes  les  procédures  qui  pouvaient  avo  réiô 
laites  contre  eux.  De  celte  manière  la  persé- 
cution cessa,  ce  saint  cl  ses  disciples  furent 
en  plus  grande  estime,  et  on  leur  offrit  des 
élalilisseiiK  nls  en  idusicurs  endroits. 

Ils  avaient  déjà  des  couvents  à  \"cnisc  ,  à 
Pcsaro,  à  Talachio,  Fano,  Trévise,  Crispano 
et  i  adoue;  mais  l'an  l'f22  ils  furent  reçus  à 
l'rl  iii,  et  firent  un  nouvel  établissement  à 
\enisc.  Comme  le  lieu  qu'ils  avaient  déjà 
dans  celte  ville  était  trop  petit  pour  conte- 
nir le  grand  nombre  d'Lrmilcs  qui  y  demeu- 
raient ,  Luce  Conlarini  ,  femme  du  iiiblo 
Henri  Dciphino,  accorda  au  bienheureux 
l'ieire  de  Pise  et  à  ses  compagnons  l'IiApital 
de  Saint-Job,  qu'elle  avait  fait  bâtir,  ce  qui 
se  fit  du  consentement  d'Henri  l)el[iliiiu),  iiui 
se  rendit  lui-même  disciple  du  bienbcureux 
Pierre  de  Pise,  à  qui  cet  elablisscment  servit 
de  nouveau  motif  pour  exercer  s;i  charité  , 
servant  les  malades  cl  leur  donnant  tous  les 
secours  spirituels  el  corporels  dont  ils 
avaient  besoin.  On  lui  donna  en  \k2\  l'égliso 
«le  Saint-Marc  de  lîarocio.  L'an  li^^i ,  il  alla 
à  Uonic,  où  il  lit  amitié  avec  le  bienheureux 
rîicolas  de  Founiue-Palènc  ,  qui  était  ehel 
d'un»!  congrégation  d'Krmites  qui  fol  unie  a 
la  sienne,  comme  nous  dirons  dans  la  suite  , 
aussi  bien  que  ccl  e  du  fière  Ange  de  Corse, 
qui  d'.mna  a  noire  saint  fund.iteur  quatre  ou 
cini|  couvents  qu'il  avait,  linlin  ce  s. nul  fnn- 
d.iteur  ,  ayant  de  appelé  à  \  enise  pour  les 
aflaies  de  sa  congicgalion  ,  y  mourut  âgé 
de    quatre-vingts   ans,  le    1'  juin  de    l'an 

Le  P.  Pierre  lionnaeioli,    général    de    ccl 


5'J3  JEU 

ordre  ,  d.ins  un  petit  livre  intitulé  Pisana 
Iiremus  ,  etc.,  imprimé  à  Venise  en  1692  ,  et 
qui  contient  les  vies  en  aiirégé  des  princi- 
paux saints  de  celte  congrésation  ,  parlant 
(lu  bienheureux  Pierre  de  Pise  ,  dit  qu'il  fut 
enterré  dans  le  même  liApilal  de  Saint-Job  , 
qui  fut  depuis  cédé  à  des  religieuses  de  l'or- 
dre de  Saint-Ausustin.  Cela  semble  contraire 
à  ce  que  dit  le  P.  Papebroch  ,  que  le  bien- 
heureux Pierre  de  Pise  ,  étant  retourné  de 
Home  à  Venise,  abandonna  ce  lieu,  les  amé- 
liorations qu'il  y  avait  faites  ayant  été  i  sli- 
mées  afin  que  le  prix  lui  fût  rendu  pour 
l'employer  aux  bâtiments  qu'il  faisait  faire 
au  premier  couvent  qu'il  av;iil  eu  à  Venise 
dans  la  paroisse  de  Saint-Uaphaël  ,  lequel 
couvent  s'afipelle  aujourd'hui  Saint-Sélias- 
lien.  Peut-être  aussi  que,  quoique  les  Er- 
mites de  Saint-Jérôme  aient  eu  des  raisons 
pour  abandonner  cet  hôpital,  notre  saint 
fondateur  ne  laissait  pas  d'y  aller  pour  y 
continuer  ses  services  cbariinbles  envers  les 
malades,  et  qu'étant  t'imbé  lui-même  mala- 
de ,  il  voulut  y  mourir  et  y  être  enterré  , 
parce  que  les  religieux  decetie  congrégation 
n'avaient  pas  encore  d'église  ouverte  à  Ve- 
nise en  1V35  ,  s'il  est  vrai,  comme  le  dit  l'a- 
nonyme qui  a  écrit  la  vie  de  ce  bienheureux 
en  1()9o  ,  que  ce  fut  le  pape  Calixte  III  qui 
leur  accorda  la  permission  d'en  avoir  une 
publique,  sur  l'appel  qu'ils  avaient  interjoté 
à  ce  pontife  d'une  sentence  rendue  par  saint 
Laurent  Juslinien,  pour  lors  patriarche  de 
Venise  ,  qui  leur  défendait  d'en  avoir.  Cet 
auteur  s'est  néanmoins  trompé  en  citant 
«•etie  sentence  de  saint  L:iurent  Justini<  n  de 
l'an  1414,  puisqu'il  ne  fut  évê(iuc  de  V^enise 
que  l'an  1433  ,  et  premier  patriarche  de  lu 
même  ville  que  l'an  1431  ;  mais  il  se  peut 
faire  que  ce  fut  sur  la  fin  de  l'année  1454 
qu'il  donna  cette  sentence,  puisqu'il  mourut 
le  7  janvier  14S5;  ces  religieux  ont  pu  avoir 
appelé  de  sa  sentence,  non  pas  à  Calixte  III, 
mais  au  pape  Nicolas  V,  qui  vivait  au  cotii- 
inenccment  de  la  même  année  1455;  et, 
cimime  il  mourut  au>si  au  mois  de  mars,  et 
qn'jiu  mois  d'avril  de  la  même  année  Ca- 
lixte lii  lui  succéda,  rien  n'empêche  de  croire 
qi;e  ce  fut  ce  pape  qui  leur  jiccorda  cette 
permission  d'avoir  une  église  publique,  que 
Nicolas  V,  auquel  ils  avaient  ;ippclé  d'abord 
de  la  sentence  de  saint  Laurent  Juslinien  , 
n'av&it  pu  leur  accorder,  ayant  été  prévenu 
par  la  mort. 

Le  P.  Papebroch  dit  qu'il  peut  avoir  été 
pnlerré  dans  le  monasière  de  ces  re  igienses, 
l'ayant  ainsi  désiré  ,  ou  peut-être  par  ordre 
du  sénat,  et  qu'il  y  en  a  aussi  qui  prélen- 
denl  qu'il  est  enterré  dans  l'église  de  Saint- 
Marc  ;  mais  qu'il  croit  qu'on  y  fit  plutôt  la 
cérémonie  de  ses  obsèques.  Ce  qui  est  cer- 
tain,  c'est  que  les  religieux  de  son  ordre 
n'ont  pu  jusqu'à  présent  découvrir  l'endroit 
où  il  a  été  enterré  ,  soit  à  S  inl-Marc  ,  s-oit 
dans  ce  monastère  des  religieuses  de  l'ordre 
de  Saint-Augustin,  qui  demeurent  d.ins  cet 
ancien  hôpital  de  Saint-Job  ,  cl,  quelques  di- 
ligences que  le  cardinal  Delci  ,  qui  était 
uonce  du  pape  auprès  de  la  répubi  que  de 


JEn 


E3.5 


Venise  en  I55C,  y  apportât  pour  le  décou- 
vrir, elles  funnt  inutiles,  (vmime  plusieurs 
papes,  principalement  Pie  V  el  Clément  VHl, 
ont  donné  à  ce  foiulateur  le  litre  de  bieniieu- 
reux,  les  religieux  de  son  ordre  poursuivirent 
auprès  du  pape  Alexandre  Vlll  la  permis- 
sion d'en  faire  l'office  ou  d'en  célébrer  la 
messe  dans  tout  l'ordre.  Le  pape  souscrivit 
la  commission  pour  sa  béatification  et  sa  ca- 
nonisalion.  et  nomma  pour  ponent  le  cardi- 
nal Casanate,  protecteur  de  cet  ordre;  mais, 
comme  les  affaires  vont  fort  lentement  en 
(  ()  r  de  Rome,  ils  n'ont  pu  encore  oblenir  ce 
qu'ils  souhaitaient. 

Après  la  mort  du  bienheureux  Pierre  de 
Pise,  le  bienheureux  Barthélémy  Malerba  de 
Césène  fut  le  premier  général  ijui  prit  h;  gou- 
ver  ncment  de  sa  congrégation,  comme  il  pa- 
raît par  une  bulle  d'Eugène  IV  du  22  février 
1437.  Il  avait  été  du  nombre  des  douze  pre- 
miers disciples  de  ce  saint  fondateur  ,  et , 
pendant  près  de  quinze  ans  qu'il  fut  général, 
il  fit  plusieurs  établissements,  dont  les  prin- 
cipaux furent  ceux  de  Vicence  et  de  Man- 
to  e.  De  son  temps ,  la  congrégation  des  Er- 
mites du  bienheureux  Nicolas  de  Fourque- 
Palène  fut  unie  à  celle  du  bienheureux  Pierre 
de  Pise  ,  el ,  outre  les  privilèges  qu'il  obtint 
du  pape  Eugène  IV  pour  cet  ordre,  ils  eurent 
permission  de  pouvoir  piendre  les  ordres 
sacres  ,  et  de  tenir  tous  les  ans  le  chapitre 
général.  Nicolas  V  ordonna  l'an  1453  qu'il 
se  tiendrait  à  l'avenir  tous  les  trois  ans ,  et 
leur  permit  d'y  élire  un  général,  dos  provin- 
ciaux el  quatre  définiteurs.  L'an  147G  , 
Sixte  IV  confirma  ce  qui  avait  été  ordonné 
par  Eugène  IV  et  Nicolas  V  touchant  la  te- 
nue des  chapitres  généraux;  mais  ,  comme 
par  les  constitutions  de  l'ordre  on  élit  pre- 
mièrement un  vicaire  général  ,  entre  les 
mains  duquel  le  général  et  les  prieurs  sedé- 
metient  de  leurs  offices,  et  qu'ensuite  tout  la 
chapitre  élit  quatre  Pères  qui  doivent  faire 
seuls  tous  les  prieurs  ,  et  iioc  ces  prieurs 
nonvellemenl  élus  par  ces  quatre  députés  du 
chapitre  doivent  élire  ensuite  le  général  , 
S;xle  IV  approuva  cette  manière  d'élection  , 
ordonnant  seuleuie-.it  que  le  chapitre  élirait 
six  députés  pour  élire  les  prieurs;  mais  ce 
nombre  n'a  pas  toujours  éé  fiice,  car  pir  un 
autre  bref  d'Alexandre  VI  du  14  avril  i4':G, 
il  est  permis  au  chapitre  d'en  élire  six  , 
quatre  ou  cinq  ,  comme  il  le  jugera  à  pro- 
pos. 

L'an  1444,  sous  le  géncralat  du  mêuie  Bar- 
thélémy de  Césène,  on  y  dressa  les  pnmières 
constilutons  de  l'ordre,  qui  furenl  impii- 
mées  à  Venise  en  latin  et  (  n  italien  l'an  1  iSS, 
cl  on  commença  déjà  à  y  retrancher  quel- 
que chose  des  grandes  austérités  que  le  hieu- 
heureux  Pierre  de  Piic  avait  prescrites.  El- 
les furent  corrigées  et  mises  en  meilleure 
forme,  l'an  1540,  par  le  P.  Bernard  de  Vé- 
rone, qui  était  pour  lors  général,  et  reçues 
dans  le  chapitre  génér^il  qui  se  tint  à  iîimiiii 
l'an  1549,  après  que  tous  ceux  qui  foriuaient 
cette  congrégation  curent  protesté  qu'ils  ne 
prétendaient  pas  cju'ellos  les  obligeassent  à 
aucun  péché  uio^tel,  ni   (ju'on   les   put  c'.3!i- 


r95                                           mrTIONNMRE  DES  ORORES  RELIGIEUS.                                           S'IO 

trnin.lic  ;"i  faire  iIcs  vgpux  soUmiikIs.  Dhik  Ii-  ri(|iio,  cic.  Ia(iinlli'  fui  iinprinuM-  ,\  \"cnisc  en 

«liapilre  pcncral  de  l'an    lO-i'J.  on  nppidiiva  l(io(>,  (|iii  esl  r.miu'o  où  fiiiil  celle  cliroiiolo- 

ile  iiDiivrlIos  ((iii>.lituUons  nui  furent  reçues  gie.  Le  1'.  Papebrorli  croil  que  ce  fui  la  rai- 

ilans  eeiui  de  l'an  1018  el  ileierluf  publiées  >on  pour  laquelle  cel  ordre  ne  fui  pas  seu- 

dans  le  diapilre  -îeiifr.il   i!e   l'an  lOU;  el  es  leinpiil  roin|)rJs  dans  la  bulli"  de  Clénienl  l\ 

lu  eiil  iniprinioes'"cn  lalin  à  Tesaro.  el  on  (il  de  l'an   1008,  (|ui  supprimait  les   congréga- 

cinorc   (|uelciu','s    diclaralions    el    (lUcKiues  lions  di's  chanoines  séculiers  de  SainlGeor- 

éclaircis'.enienls   sur  c- s  tonailulions  dans  pes /«  /l/r/ri  à  Venise,  des  Jésuates  de  SaiiU- 

le  cliaplre  de  l'an  Hi'iV  :  ic  so;il  ces  demie-  Jérôme  el  des  Ermites  de  Saiut-Jérô'ne  de 

res  <  oiisiiluioMs   ijui  smil  présenkinent   oli-  Fiesoly  ;  mais  qu'il   a  été  encore  augmenlé 

scrvecs  dans  cel  ordre,  où  entre  aulres  clio-  dans  la  suile,  el  ((u'il  a  reçu  de  nouvelles  grà- 

ses  on  a  relranclié  ral'>liueiicc  pcrpéluelle.  ces  el  de  nouveaux,  privilèges,  comme  il  pa- 

(Jes  reliuieux  ne  fais. lient  que  dts  vœux  rail  p,ir  un  autre  spicilégc  ci)rri;;é  et  aug- 
si  i  pies  elpouv^iieiit  disposer  de  leurs  liiens,  mente  en  1C'J2  par  le  l'.  l'ierre  Honnacioli, 
jusqu'en  l'an  loC8,  (lue  11' pape  Pie  V.  par  un  gi'iiéral  de  cet  ordre,  que  le  1'.  l'apebrocl» 
bref  du  15  no\embre  de  la  même  année,  leur  n'a  p.is  voulu  joindre  à  celui  du  V.  liusèbe 
orilonna  de  faire  des  voux.  solennels.  Kn  Jordan,  qu'il  a  inséré  dans  le  Iroisième  tome 
verlu  (le  ce  bref,  le  cardinal  i.ouis  Corneli,  du  mois  de  juin  de  la  conlinnalion  des  Actes 
qui  élait  protecteur  de  cet  oidre,  se  trans-  des  Saints  de  lîollandus .  aliii ,  dil-il ,  de  no 
porla  au  couvent  de  S.iint-Onuplire  a  Rome,  (las  prévenir  l'Iiisioire  générale  de  cet  ordre, 
qui  appai  lient  à  cel  ordre,  et  3  re(:ul  la  pro-  (ju'il  espère  qu'on  donnera  un  jour  lU  pu- 
lession  des  religieux  (jui  y  et  .ienl,  ce  qui  se  blic.  Il  esl  vrai  ((ue  l'an  lli2()  on  résolut  dans 
lit  aussi  d.ins  les  autres  couvents,  laquelle  le  chapitre  général  qui  se  tint  à  Iljspida  au 
profession  ils  tirent  selon  la  règle  de  s.iiiit  territoire  de  l'adoue ,  de  Irav.iiller  à  celle 
Augustin,  ((ue  le  pa|)e  leur  donna  aussi.  Le  hisloire,  cl  pour  cet  eflel  on  nomma  deux 
même  l'ie  V  confirma  leur  coiigrégalion,  el  cislodes  auxejuels  un  donna  le  soin  de  faiic 
leur  accorda  lan  1507  tous  les  privilèges  des  un  recueil  de  ce  qui  s'étail  passé  dans  l'or- 
ordres  mendiants.  Il  conlirma  derechef  leurs  dre;mais  depuis  ce  temps-là  l'histoire  n'a 
privilèges  l'an  1571  il  liur  accorda  iudul-  point  paru,  el  ces  oflices  de  custodes  ont  été 
gence  plèiiièic  en  forme  de  jubilé  le  (lua-  supprimes  dans  la  suile  comme  inutiles. C'est 
Irièiue  d  manche  de  carême,  la(iuelie  indul-  pourquoi  je  nie  suis  servi  de  ce  dernier  spi- 
geucc  le  pa|ie  Lîiégoire  XIU  étendit  l'an  cilége,  qui  m'a  élc  envoyé  par  les  rel  gieux 
15,*'.'J  pour  toutes  h  s  personnes  qui  visite-  de  cel  ordre  (|iji  sont  à  Home,  avec  I  i  vie  de 
raient  leurs  églises  ce  joui-là,  ayant  aussi  leur  fondateur  imprimée  à  >'enise  en  lGi)5, 
Confirmé  par  un  autre  bref  de  l'an  î.'iSI  tous  ((ui  esl  plus  .impie  que  celle  que  le  P.  Mer- 
les privilèges  ijui  leur  avaient  été  arcir.ies  nardin  l'ncci  avait  donnée  el  que  le  P-  Pape- 
par  ses  prédécesseurs.  Mais  Paul  ^  leur  <)la  broch  a  insérée  dans  la  conliiiualion  de  Ool- 
celui    que  leur  a»ail   acordé   Martin  V  qui  laiidu;  au  I  '  juin. 

les  exeiuplait   de  la  jui  idiction  des  inqui-i-  détordre  est   divisé   en   deux    provinces, 

leurs,  i'ani  \'  a\aul  vnulu   (|u'ils    y   fussent  qui    sont  celles   d'.\iic(")ne  il  de  Trèvise,  qui 

.Miuinis.  Innocent  X  ne  leur  fut   pas  favora-  cnuiprc  .nenl    environ    (juaranle     maisons, 

Ide,  caril  leur  défeiidil,  l'an  IGoO,  de  recevoir  sans  compler    celle  du  Tyrol  et  de  liavière, 

des   novices  e    d'admettre    à    la    professioii  (jui  apparlenaieni  à  certains  Krmiles  (lui  S(! 

•■eux    q  li   étaient    déjà   reçus,  ce   qui   dura  jciignirenl  en   1095  à  ceux  du    bienheureux 

jusiju'eu    l'an    lOot),    que   le  pape    Aiexan-  Pinredc  Pisc,  el  donl  nous  parlerons  dans 

dre  \'ll,  a  la  prière  du  cardinal  Fagn  mi,  pro-  \i-  paragraphe  suivant.  L'habillement  d.'  ceux 

lecteur  de   l'oidre,  leur  permit  de  recevoir  d'Italie  consiste  en  une  robe  el  un  capuc  •  de 

des    novices  et  de  les    adnielire  à  la   prop  couleur  tannée,  avec  une  ceinture  de  cuir,  la 

l'cssioii.                                                              "r  mozelle  du   capuce  étant  eu  pointe  parder- 

Le   pape  .Mexandre   VII  ayant   supprime,  rière  el  descendant  jusiiu'.i  la  ceinture  ;  mais 

l'an  1050,  l'ordre  des  chiinoines  lèguliirs  du  ils  ne  niellent  point  le  capuce    sur   l,i    îèle, 

Saini-Ls|)tit  à  Venise,  qui  était  réduit  à  n'a-  ayant  toujours  un  bonnet  carré  dans  la  mai- 

voir  qu'un  seul  monastère,  et  celui  des  Croi-  snn,  et ,  lorsqu'ils    sorenl,  il.    mcllenl    uno 

siés  ou  l'ort  -Croix,  (jui  di-  vingi-ciiK]  inai-  ch.ipe   plissée  par  le  haut  et  (|ui  a  un  co  lel 

sons  n'en  avaient  plus  (lue  (lualre,  Il  s  liriiii-  assez  eleve,  el   porieul   un  chapeau  iioir(lj. 

les  de  Sailll-Jér(^me   delà   cungrègation    du  Leurs  armes  s. )nl   d'a/.ur  à  six    petiies  mon- 

bii  nlienreu\  Pierre  de  Pise  appréhendèrent  i  gnes  surmontées  d'une  croix,  le  loul  d'or 

|inur  leur  ordre  :  c'est  pimr(|uoi,  alin  de  laire  cl  accompagné  de   qualri?  étoiles  aussi  d'or, 

coniiaitre  que,  quoi(in'ils  n'eussent  i|iie  deux  I  éeu  limliré  dune  couronne, 

jirovinces,   ils    avaient    néanmoins  p:u>   de  (Juant  à  leurs  observances,  ils  se  lèvent  à 

quarante  m. lisons,  cl  (|ue  l'observance  régii-  nniiu  l  pour  dire  matines.  Ils  font  absliiienco 

lièie  y  était  exaclcmenl  observée,  le  P.  l'ii-  K  s  luiuiis  el  mercredis  à  la  volonlé  dti  siipé- 

sèbe  Jurdan  de   \'icencc,  religieux  diî  cel  or-  rieur,  et  outre  les  jeunes  de  l'I^glise,  ils  jeù- 

dre  ,  docteur    en    l'uiiivcrsilé   de    l'adoue    el  i.ent   depuis  le  premier  dimam-lie  di;  l'avenl 

consulleur   du    Sainl-Oflice    dans    la    méuie  j(isi|ii°à  Noël.  Ils  prennent  la  discipline  tous 

ville,   (il  une   espèce    de   chronologie   de   ce  le>  jours  pendant  le  c.irèine  ,  excepte  les  sa- 

iiiéino  urdre  suus  le  nom  de  Spicilégc  liislu-  iiicdis  el  les  dimanches  ;  el  en  avent  le  luadii 

H;  Vry.,  à  1.1  lin  du  \i.!.,  u"  !i3  et  li'J. 


597 


JER 


JEr, 


5,!  s 


iiiercrcili  cl  v.'iulrcdi,  lorsqu'il  n'arrive  pont 
lie  fètc  iloul)lc  CCS   joiirs-là.  Depuis   Pâques 
jusqu'à   la    foie  de  l'Exallalion   de  la  sainte 
croix,  ils    font  l'oriiison  après   nonc,  qui  se 
dit  à  midi ,  el  dans  un  autre  temps  ils  la  font 
après  complies.  Tous  les  trois  ans,  le  troi- 
sième dimanche  d'après  Pâques,  ils  tiennent 
leur  chapitre  général  où  ils  élii^enl  leurs  su- 
périeurs  qui  peuvent   être  cont  nues    pour 
trois   autres  années  dans  un  autre  chapitre. 
Si  le  général  meurt,  le  provincial  de  la  pro- 
vince où  il  demeurait  gouverne   l'ordre  jus- 
qu'à l'élection  d'un  nouveau  général ,  qui  se 
fait  pour  lors  seulement  pai"  les  prieurs  de 
Home  ,  de    Pesaro  ,  de  Venise  et  de  Padoue 
avec  l'autre  provincial.  Le  chef  de  cet  ordre 
csl  à  Montebcllo.  Ils  ont  une  niaisoii  consi- 
dérable à  Naples,  et  une  autre  à  îlome  sous 
le  nom  de   Sant-Onupbre   au    Moni-Janus, 
doiil   l'église   fui  érigée    par  Léon  X  en  une 
diacooic  cardinale,  et  que  Sixte   V  changea 
en  tilre  de  cardinal   prêtre,  l^esl  dans  celle 
église  que  le  fameux  Torqiiato  Tasso  est  en- 
terré, aussi  bien  que  Gwillaume  Bardai,  gen^ 
tilhomme    anglais   auteur  de    rAri;enis.   On 
voit  dans  la  même  église  une  épiiaphe  assez 
pflriiculière,  et  qui  fjil  allusion  à  celui  qui 
csl  efllerré  dessous. 

D.  0.  M. 

Jacel  hie  jacltis,  ictus  ariele  fali ,  Bartlto- 
loinœus  Arietes  de  Subaudia,  ab  ejus  filio  Pâ- 
tre Cesare,  huj  us  cœnobii  vicario,  hoc  lapide 
lectus,  suique  tegcndi  quos  fatum  sic  artelabit. 
Vixit  annos  lxxii,  obiil  die  cxlix,  antc  arie- 
tis  siijnum  mdcxxii. 

Il  y  a  eu  dans  cet  ordre  plusieurs  person- 
nes d'une  éminenle  sainleic,  comme  les  bien- 
heureux Pierre  Qualcérano, Nicolas  de  Four- 
que-Palène,  Barihélemi  de  Césène,  Laurent 
l'Kspagnol,  Paul  Quirino,  Philippe  de  Sainle- 
Agaihe,  Marc  de  Manloue,  Bertrand  de  Fer- 
rare  el  plusieurs  autres,  dont  tes  vies  se 
trouvent  dans  le  livre  dont  nous  avons  déjà 
parlé ,  intitulé  Pisana  Ereintis  ,  e(c.  Le  P, 
François  Coccalini ,  qui  fut  élu  général  de 
cet  ordre  en  1647,  fut  ensuite  évêque  de 
Trau  eji  Dalmatic  el  mourut  à  Vmise  l'an 
1661. 

Bernardin  Pucci ,  Vit.  B.  Pétri  de  Pisi<!. 
Kusèbe  Jordan  ,  Spicilegium  historicum  Re- 
tiij.  Prtr.  de  Pisis.  Peir.  Bonnacioli,  Pisana 
Ereiinis  et  Spicilej.  hisloric.  Polydur.  Virg. , 
JJe  Hcrani  inventai  ibus.  lib.  vu,  cap.  3.  Paul 
Morigia,  Oriy.  de  Relig.,  lib.  i,  cliap.  4-3.  Sil- 
vestr.  Maurol.,  Mar.  Océan,  di  Cuit.  gl.  Re~ 
lig.,  lib.  VII.  Thadœus  Bongianlinus,  clc  liea- 
tis  Pisanis;  et  Bollandus,  tom.  111,  Junii  17. 
Philip.  Boninni.  Cnlalog.  Ord.  relig.,  tum  1, 
png.  121  et  122;  et  les  Cunstitutions  de  cet 
ordre. 

§  11.  Des  Ermites  des  congrégations  d  s  bien- 
heureux Ange  de  Corse  et  Nicolas  de  l'uur- 
gue-Palène,  de  Pierre  Malerba,  du  Tyiol, 
(le  II  Dière,  et  aulr£s  unies  présentement 
A  celle  du  bienheureux  Pierre  de  Pise. 

Je  ne  suis  pas  du  sentiment  du  P.  François 
Bourdon,  rclii^iiux  du  Tiers  Ordre  de  3ain;- 


François,qui  prétend  que    la   congrègaiioii 
(les  Ermites  de  Saint-Jérôme  du  bienheureux 
Pierre  de  Pise  a  pris  son   commencement  et 
reçu    les    premières   instructions  des  obser- 
vances régulières  du   fière  Ange  de  Corse, 
profès  du  Tiers  Ordre  de  Saint-François,  ni 
que   le   bienheureux   Pierre  de   Pise    le  fut 
trouver  dans  l'ermitage  de  la  Scolea,  proche 
Ilimini,  pour  ce  sujet,   puisqu'il  est   ceit  in 
que  le  bienheureux  Pierre  de  t'ise  commença 
sa  congrégation  à  Monlebello  dès   l'an  1;180, 
cl  que  le  frère  Ange  de  Corse  ne  vint  demeu- 
rer à  la  Scolea,  comme  le  P.  Bourdon  en  de- 
meure d'accord,  que  l'an  139,'],  où  il  bâtit  un 
ermitage  dans  un  lieu  qui   lui  fut  donné  par 
Charles  de  Malalesla,  seigneur   de  Rimiiii. 
Mais  si  ce  frère  Ange  de  Corse  n'a  pas  donné 
commencement   à    l'ordre    des    Ermites    de 
Saint-Jérôme  du  bienheureux  Pierre  de  l'ise, 
il  a  au  moins    procuré   l'accroissement  de 
cette   congrégation  ,  ayant  remis  entre   les 
mains  du  seigneur  de  Uimini  rcrmitage   de 
la   Scolea  pour  le   donner   au   bienheureux 
Pierre  de  Pise  et  à  ses   disciples,  et   ayant 
aussi  cédé,  tant   en   son  nom  qu'en   celui  de 
ses  disciples  (tous  du  Tiers  Ordre  de  Saint- 
François  ,  qui  formaient  une  congrégation 
qui  portait  le  nom  du  frère  Ange  de  Corse  ) 
les  autres  i  ouvents  qu'ils  avaient  au  nonibre 
de  quatre,  outre  celui  de  la  Scolea,  savoir,  un 
à  Venise  dans  le  quariicr  de  Saint-Baphaël, 
un  sous   le  nom  de  S.iini-Jérôme  proche  Ur- 
bin,  un  autre  appelé  Notre-Dame  dos  Anges 
à  Noviliara,  au  diocèse  de  Pé>aio,  et  le  qua- 
trième sous  le  nom  de  Notre-Dame  de  Aiisé- 
ricorde  dans  le  diocèse  de  Ferrare. 

L'on  ne  sait  rien  de  la  vie  de  ce  frère  Ange 
de  Corse  ;  ii  paraît  par  tiiie  bulle  d'Eugène  IV 
de  l'an  1432  qu'il  était  déjà  mort,  et  qu'il  ne 
restait  plus  aucun  de  ses  disciple  s  qui  sni\  is- 
sent  la  troisième  règle  de  saint  François.  Se- 
lon toutes  les  apparences,  ils  avaient  tous 
embrassé  l'institut  du  bienlieureux  Pierre 
de  Pise,  qui,  appréhendant  qu'on  ne  l'inquié- 
lât  à  l'avenir  dans  la  possession  des  cinq 
couvenis  qui  avaient  appartenu  à  la  congré- 
gation du  frère  Ange  de  Corse  ,  à  cause  que 
par  les  contrats  d'acquisition  il  était  dit  que 
le  frère  Ange  les  acquérait  pour  lui  et  ses 
compagnons,  qui  étaient  du  Tiers  Ordre  de 
Saint-François,  il  eut  recours  au  pape  Eu- 
gène IV  pour  approuver  la  cession  qui  lui 
avait  été  faite,  tant  par  le  comte  de  UniJni 
de  celui  de  la  Scolea,  que  des  quaire  autres 
par  le  frère  Ange  de  Corse  ,  ce  que  le  (lapo 
lui  accorda  par  celte  bulle  de  l'an  Î432,  at- 
tendu qu'il  ne  restait  plus  aucun  des  disci- 
ples ilu  frère  Ange  de  Corse  qui  fissent  pro- 
fession du  Tiers  Ordre  de  S  iint-Frau:  ois, 
déclarant  que  ces  maiions  appartenaicni  au 
bienheureux  Pierre  de  Pise  et  à  ses  disciples, 
cl  que  les  religieux  du  Tiers  Ordre  de  Saint- 
François  n'y  pouvaient  rien  prétendre. 

La  congrégation  du  bienheureux  Nicolas 
de  Fourque-Palène,  qui  était  aussi  du  Tiers 
Ordre  de  Samt-Fr.inçois,  fut  encore  ui.io  à 
celle  des  Ermites  du  bienheureux  Pierriî  de 
Pise  l'an  14'i6.  Ce  bienheureux  Nicolas  do 
Fourque-Paiène  fut  ainsi  nomme  du  lieu  du 


f;)0                                             n!C.TION>\ir.E  PKS  ORDIîES  REI.ICIEl'X.                                         CM 

sn  tiais«<-ince,  qui  osl  un  bourg  de  l'Abru/zc  l.iieiit,  «luoinuc  l'cvéquc  de  lîrc.innli,  <juc  le 
-  du  diorèse  dp  Suliimni'.  .m  roy.iiime  de  N.i-  pnpc  .ivail  nommé  pour  juge  de  ce  dilTorcnd, 
pies.  11  él.iil  [in'lrc  el  vcrui  plusieurs  années  cûl  piononrc  en  sa  faveur  par  une  seiiten(  e 
dans  son  pays,  djiis  une  (!r,inde  eslimc;mais,  du  premier  mai  li3o.  Le  pape  Iriuva  h"u 
voulant  se  donner  à  Dieu  plus  parfaitement  qu'il  retournai  à  Rome,  où  on  lui  donna,  l'iiti 
el  passer  le  nsle  de  ses  jouis  dans  la  péni-  li:JO,  l'église  de  Saint-Onuplire,  sur  le  mont 
lencc,  il  prit  l'Iiatiit  d;i  troisième  ordre  de  Janus,  qu'il  ré  la  aux  Ermites  de  la  congré- 
Siinl-François,  et,  étant  fort  âgé.  il  vint  à  galion  du  bienheureux  l'ierre  de  Pise,  l'an 
Home,  où  il  demeura  d'ahord  dans  une  pe-  l'tifi,  avec  le  monastère  de  Notre-Dame  des 
lile  maison  avec  un  compagnon  nommé  Ue-  (îrâces  de  Naples  et  les  autres  ermitages 
naud  de  Piedmoiit.  Le  pape  Eupè.iie  W ,  in-  qu'il  avait  ailleurs.  Il  >;  a  de  l'apparence  (juc 
formé  de  ses  vertus,  lui  donna  !e  soin  d'une  te  couvent  de  Nolri-Dame  des  Grâces  n'clail 
petite  église  sous  le  nom  du  Sau\eur,  qui  pas  grand'rhosc  pour  lors  ;  il  y  aurait  même 
était  pour  lors  fort  fréquentée  par  la  dévo-  à  douter  .si  vérilablcracnt  les  Ermites  de  la 
lion  des  fhlèles.  Il  y  eul  encore  cinq  person-  congrégaiion  du  bienheureux  l'ierre  de  Pise 
nés  de  dilTéronles  nalioiis  qui  se  joignirent  à  le  prsséJèretil  drs  ce  temps-Li;  car  l'ompcio 
lui  dans  ce  lieu  avec  les(iueil;^s  il  s'ijdouna  à  Sarnelli  ,  évoque  de  liiseglia  ,  dit  (Guid.  de 
diverses  œuvres  de  pieté,  jusqu'à  ce  que  /'orp5/.!/i /Y(I/)o^ p.  1.ï3j  que  c'était  ancienne- 
Dominique  Zurlo  de  la  noble  famille  des  Ca-  ment  une  petite  église  qui  appartenait  à  la 
péie  de  Najiles.  s'(  tant  joint  <à  lui,  il  fut  dins  famille  des  (îrassa,  el  que  l'an  1500  c'Ie  fui 
ce  royaume  pour  y  visiter  certains  ermites  accoriléc  au  bienheureux  Jériimc  de  lirindi^i, 
qui  demeuraient  dans  une  solitude  de  la  ^ro-  qui  fut  le  premier  qui  amena  de  Napl.'s  dt  s 
vince  de  Labour;  mais,  ne  les  y  ayant  pas  religieux  de  la  congiégalion  du  bienheureux 
lrou\  es,  pane  qu'ils  élaieit  allés  à  Naplis,  il  Pierre  de  Pise,  et  que  dans  ce  lieu  il  (il  b.l- 
s'y  ren  lit  aussi,  où,  avec  le  secours  de  (es  tir  un  monastère  et  amplifier  l'église  (|ui  e>l 
ermites  cl  de  ses  autres  compagnons,  qui  fort  belle;  mais  l'on  peut  croire  qu'il  a  auff- 
viiirenl  aussi  à  Naples,  il  fonda  un  monas-  mente  lo  nionaslére  avec  plus  de  magnifi- 
tère  sous  le  nom  de  Nolre-Uame  des  Grâces,  cenie  qu'il  ne  l'étail  du  temps  du  bienheureux 
r|u'il  lit  bâ  ir  des  aumônes  qui  furent  don-  Nicolas  de  Fourque-Palcne,  comme  il  l'a  été 
nées  au  frère  Dominique  Zurlo,  son  compa-  aussi  dans  la  suilc  par  les  religieux  de  cet 
gnon,  par  les  personnes  b  s  plus  illustres  de  ordre,  ainsi  que  le  rapporte  pareillement  lo 
la\ille,  qui  lui  élaient  alli( es.  Le  bionlieu-  P.  lîonnacioli  dans  son  Spicilt  ge,  où  il  mar- 
reuv  Nil  olas  en  fui  le  premier  supérieur,  el,  (|uc  que,  l'an  liV7,  ce  fut  le  bienheureux 
:omine  il  venait  sou\  eut  à  Home,  il  j  rencon-  Ikiioîl  t!e  Sicile,  prieur  de  ce  monastère,  qui 
Ira  le  bienheureux  Pierre  de  Pise,  avec  le-  commença  à  faire  liâlir  l'église.  Le  P.  Pape- 
qiiel  il  lU  amilié.  Ce  que  le  P.  Pierre  Bonna-  brodi  rapporic  dans  toute  sa  teneur  le  brel 
noii  dit  dans  la  vie  de  ce  bienlieureux,  que  que  le  pape  liugène  W  lit  expédier  pour  l'ii- 
l'an  \\-2"i  il  se  (il  avec  ses  coiiipagions  dis-  nioii  de  ces  deux  congrégations;  mais  il  j  a 
ciple  du  bienheureux  Pierre  de  lise,  ne  s'.ic-  à  corriger  dans  l.i  date  de  ce  bref,  qui  est  des 
Corde  pas  a\ ce  ce  qu'il  dit  dans  son  Spicilége,  calendes  de  janvier  IVVlî,  dans  la  vinsi-uniè- 
qiie  ce  ne  l'ut  que  l'an  H'iti  que  sa  congiéga-  me  année  de  son  pon.'ificat.  puisqu'il  fut  fait 
lion  fut  unie  à  celle  des  Ermites  du  bienbeu-  pijie  le  3  mars  IV'îl,  el  qu  il  ne  gcuvern.i 
reij\  Pierre  de  Pise  ;  ni  i  areillement  avec  co  l'Eglise  que  quinze  ans;  ainsi  ce  ne  pour- 
qu'il  dit  aussi,  que  le  liienlieuieux  Nicolas  rail  être  que  la  quinzième  année, 
ne  fut  à  Naples  qu'après  avoir  quit  é  l'éuUse  Quant  au  bienheureux  Nicolas  de  Fourque- 
de  Saint-Sauveur,  ((ue  le  pape  Eugène  IV  loi  Palène,  deux  ans  après  l'union  de  sa  con- 
a\ail  donnée  ;  (pTil  ie  retourna  à  Kome  qu'a-  gre;'.alion  avec  (elle  du  bienlKUrc'ux  Pierre 
firès  avoir  fondé  le  couvent  de  Noire-Damc  de  Pise,  il  mourut  à  Home  le  20  seplembri; 
des  Grâces,  el  que  c'est  d;ins  ce  temps-là  l'iVS,  étant  âge  de  cent  ans.  11  se  fil  plusieurs 
qu'il  se  fil  ilisci|)le  du  bienheureux  l'ierre  de  miracles  à  son  tombeau  qi.i  ohlipùrenl  les 
Pise,  puis(|ue  U-,  pape  Eugène  IV  ne  succéda  religieux  de  son  ordre  de  le  Iriinsforer  dans 
a  Martin  ^'  que  l'an  H31.  un  lieu  plus  décent  a\ec  la  permission  de  la 
Il  n'y  avait  donc  seulement  qu'une  amilié  congrégation  des  Kiles.  l'an  IGOfi;  cl,  l'an 
rècipro()ue  entre  les  bienheureux  Nirobis  de  lGi7,les  babilanls  de  Fourque-Palènc,  lieu 
Foiirque-Palène  el  Pierre  de  Pise.  quiét.iienl  de  sa  naissance,  ajaiit  souhaité  avoir  de  S' s 
tous  deux  chefs  di;  deux  congrégations  dif-  reliques,  le  P.  llenii  Landau,  qui  était  pour 
feien!es,  celle  du  bimbeureux  Nicolas  f,ii-  lors  général,  leur  donna  une  C(')te,  pour 
saut  profession  de  la  troisième  règle  de  saint  re\poser  à  la  vénéralion  des  fiilèlcs,  à  ron- 
l'rançois,  cl  celle  du  bienheureux  Pierre  de  dition  que  si  un  jour  on  Taisait  un  èlaldisse- 
Pise  ayant  seuleiiienl  quelques  consliluliuiis  ment  de  religieux  à  FoUMiue-l'alène,  leur 
iiu  règlemenls  particuliers  que  ce  saint  fon-  ordre  serait  préféré  au\  autres,  el  que  la  re- 
ilaleur  lui  avait  prescrits.  Après  que  le  bien-  lii|ue  du  bienheureux  Nicolas  serait  déposée 
heureux  Nicolas  cul  \écu  quelques  années  à  dans  leur  égLse. 

Home  dans  une  grande  lépiitalion  de  sain-  L'an  l.'i-'il,  les  ermites  de  Sainl-.Iér(jmc  do 
tulé,  le  pape  Eugène  IV  lui  donna  le  couvent  la  congrégation  du  frère  Pierre  de  Malerha, 
et  l'église  de  Notre-  Dame,  proche  l-'lorencc  ;  <iui  demeuraient  dans  les  couvents  de  Sainte- 
niais,  sur  ce  ()u'on  lui  en  coniesla  la  posses-  l'iliiiléde  Itomano  du  diocèse  de  P.idoue, 
sioii  ,  il  aima  mieux  rab.indonner  que  d'être  et  de  Saint-f  ausiin  de  la  Tour  du  diocèse  do 
ex;}oié  à  l'envie   de   ceux  (jui  la  lui  di.s|iu-  \    loiie,  expobèrciil    au   pape    Clément    ^  H 


COI 


ir.n 


JF.U 


602 


que  leurs  coiivciils  el  les  lieux  (juils  lialii- 
Ijiciil ,  qui  claienl  gouvernés  par  un  vicaire 
{^i'iiér  I,  dépérissaient  tous  les  jours  plulôl 
qufi  d'aupinicnter  ;  c'est  pourquoi  ils  dési- 
raient embrasser  l'ins'itut  du  bieiilieureux 
Pierre  de  Pise  et  être  unis  à  sa  congré<;ation, 
sil  voulait  y  consentir.  Le  p 'pe  accorda  leur 
demande  par  un  bref  du  26  janvier  1531  ; 
«insi  ils  prirent  l'habit  des  Ermites  du  bien- 
heureux Pierre  de  Pise,  et  le  bienheureux 
lîeriranJ  de  Ferrare  fut  envoyé  par  les  supé- 
I  leurs  pour  leur  apprendre  les  observances 
de  celte  congrégation.  On  ne  sait  rien  de  la 
vie  de  ce  Pierre  Malerba.  Il  est  fait  mention 
dans  un  acte  passé  l'an  14(55, qui  concerne  les 
reli;;ieiix  de  la  congrégation  de  î'iesnii,  d'un 
Pierre  Malerba  de  Venise,  qui  y  servit  de  té- 
moin cl  qui  y  est  qualifié  prêtre.  11  pourrait 
peut-être  avoir  été  le  fondateur  de  cette  con- 
grégation. 

Une  autre  congrégation,  sous  le  nom  des 
Krniiies  du  Moni-Ségcslre,  fut  aussi  unie  à 
celle  du  bienheureux  Pierre  de  Pise,  l'an 
157!).  Ces  Erinites  reconnaissaient  pour  fon- 
dateur le  bienheureux  Laurent,  espagnol  de 
naissance,  qui,  voulant  imiter  les  anciens 
ermites,  s'était  retiré  en  Italie  sur  le  mont 
Ségesire,  proche  Génrs,  où  il  avait  bâti  plu- 
sieurs cellules  séparées  les  unes  des  autres 
pour  plusieurs  personnes  qui  voulurent  vivre 
SDUs  sa  conduite  et  qui  y  n)enaieiit  une  vie 
frs-auslére  ;  il  les  gouverna  jusqu'à  sa 
mort,  dont  on  ignore  l'année.  Il  y  a  de  l'iip- 
parence  qu'elle  arriva  avant  l'an  l.'iSl,  car 
ce  fut  cette  année  que  les  frères  Jacques, 
aussi  espagnols,  liaphaël  d'Orgio  cl  .lacques 
Galesio,  qui  étaient  du  nombre  de  ses  disci- 
p'es,  firent  bâtir  au  même  lieu  une  égli^e 
sous  le  nom  de  Nolre-Danie  de  l'Annoncia- 
tion de  la  Côte  de  Ségesire  de  PonenI,  avec 
un  monastère  qui  fut  amplifié  l'an  14-50  par 
un  frère  Nicolas ,  qui  en  était  pour  lors 
prieur.  Quoique  les  religieux  de  ce  monas- 
tère et  les  autres  de  la  coigrégation  du  bien- 
heureux Laurent  eussent  été  agrégés  l'an 
1579  à  celle  du  hieiiheureux  Pierre  de  Pise, 
ce  ne  fut  néanmoins  que  l'an  1581  que  le 
P.  Jean-B;iptiste  de  Monte-Silice,  qui  en  é'ail 
génér.il,  prit  possession  de  ce  monastère  au 
nom  de  l'ordre.  L'on  ne  sait  autre  chose  de 
la  vie  du  fondateur  de  celle  congrégation  du 
Mont-Ségestre ,  sinon  qu'il  paraît  par  des 
actes  pullics  de  l'an  1520  qu'on  lui  donnait 
le  titre  de  bienheureux.  Le  marlyrologe  rn- 
maiii  fait  mémoire  d'un  saint  Albert  de  (^lè- 
nes,  que  les  religieux  de  la  congrégation  du 
bienheureux  Pierre  de  Pise  prétendent  avo  r 
été  de  celle  du  Mont-Ségeslrc,  el  (jui  uiourut 
l'an  1450. 

Enfin,  l'an  1695,  plusieurs  ermiles  du  Tyrol 
et  de  Bavière,  qui  vivaient  dans  différents 
endroits  et  en  commun,  demandèrent  aux 
religieux  du  bienheureux  Pierre  de  Pise  as- 
semblés le  2  avril  de  la  même  année  dans 
leur  chapitre  général  à  Rome,  dans  le  cou- 
vent de  Saint-Onuphre,  d'être  unis  à  leur 
congrégation,  de  porter   le   iiiéine  habilL'- 


menl,  quant  à  la  forme, de  professer  la  même 
règle,  et  de  jouir  de  leurs  priviléires,  pro- 
menant obéissance  aux  supérieurs  de  cet 
ordri';  ce  qui  leur  fut  accordé,  à  la  prière  de 
l'empereur  Lêopold  1",  qui  avait  êrril  in 
leur  faveur  au  cardinal  Casanale,  protecteur 
de  l'ordre,  ce  qui  fui  confirmé  par  le  p.ipo 
Innocent  XII.  Ls  se  sonl  depuis  multipliés 
dans  ces  provinces,  où  ils  ont  fait  do  nou- 
veaux établissements.  Ils  observent  les  an- 
cienms  constitutions  de  l'ordre  dans  toute  la 
vigueur,  ne  mangent  jamais  de  viande,  vont 
nu-pieds,  sont  vêtus  de  gros  drap  et  portent 
la  barbe,  mais  non  pas  longue  (1).  Quant  à 
la  forme  de  l'habillement  et  à  la  règle,  ils  se 
conforment  à  ceux  d'Italie. 

Voyez  Vila  del  lieafo  Pieiro  Gnmbacnrii, 
pat/.  48.  Peir.  Bonnncioli,  Pisim.  Erem.  Eu- 
sei).  Jordan.,  Spicileg.  Iiisl.;  et  BoUaud.  tum. 
111  Junii. 

§  III.  Des  ermites  de  Sa'tnl-Jérôme  de  Fie- 
soli,  avec  la  vie  da  bienheureux  Cliiirles  de 
Montegrari'li,  leur  fondateur. 

Nous  avons  dit,  en  parlant  des  Jéronymiles 
d'Espagne,  qu'ils  avaient  lire  leur  origine 
des  disciples  du  bienheureux  Thomas  de 
Sienne,  ou  Thoinasurcio  du  Tiers  Ordre  de 
Saint-François;  nous  avons  aussi  montré 
dans  le  par.igraphe  précédent  (jne  la  congré- 
calion  des  Ermites  du  bienheureux  Pierre  de 
Pise  avait  reçu  son  aci  roissemeiit  par  l'union 
des  congrégations  du  frère  Ange  de  Corse  el 
du  bienheureux  Nicolas  de  Fourque-'alène, 
qui  élairnt  pareillement  du  Tiers  Ordre  de 
Sainl-Franço's.  Voici  encore  un  ordre  qui  a 
porté  le  nomdeSaint-Jérome,  qui  a  (oujours 
été  dislingué  de  ceux  d'Espagne  1 1  d'Italie, 
cl  dont  le  fondateur  était  aussi  du  Iroisième 
ordre  de  Saint-François.  Il  y  en  a  qui  ont 
cru  que,  lorsque  les  disciples  du  bienheureux 
Thomasuccio  passèrent  en  Espagne,  l'ordr» 
de  Saint-Jérôme  de  Fiesoli,  qui  est  celui  dont 
nous  allons  parler,  était  déjà  établi,  et  le 
P.  Papebroch  a  suivi  ce  sentiment  [Ajmdliol- 
latid.,  tom.  UIJun.,  p...),  mais  cela  ne  peut 
p  is  être,  puisque  les  disciples  du  bienheu- 
reux Thomasuecio  passèrent  en  Es|  agno 
sous  le  régne  d'Alphonse  XI,  roi  de  Castille, 
selon  le  témoignage  de.s  historiens  de  l'ordre 
de  Saint-Jérôme,  lequel  Alphonse  mourut 
l'an  1350,  el  que  l'ordre  des  Ermiles  de  Saini- 
Jérônie  de  Fiesoli  ne  fut  commencé,  ou  plu- 
lot  que  le  bienheureux  Charles  de  Moute- 
graneli.  son  fomlaleiir,  ne  se  relira  dans  la 
solitude  que  l'an  1300. 

Quelques-uns  ont  jirélendu  que  le  bien- 
heureux Charles  de  Montegraneli  élait  gen- 
tilhomme llorcnlin;  il  est  sûr  au  moins  qu'il 
élait  de  la  famille  îles  comtes  de  Montegra- 
neli, qui  est  une  terre  dont  il  ne  reste  plus 
que  les  vestiges  entre  Sainte-Sophie  de  la 
liomagne  et  Saint-Pierre  de  Bagne,  dans  les 
Etats  du  grand-duc  de  Toscane;  et  il  se  peut 
faire  que  celte  famille  ait  été  agrégée  parmi 
les  citoyens  de  Florence,  comme  plusieurs 
autres  iamilles  nobles  de  cet  Etat.  Il  s'adonna 


(!)  Voï.,à  Uniidu  vol.,  n"  ISO. 


C'13 


nicTioN.N.Miii':  ni'is  oukres  rei.icif.ux. 


ROi 


;'<  In  piclé  <l(''s  ses  plus  Iciidrcs  années,  rnr  il 
fi'équcniait  sou>eiii  les  l'plisoset  s'nppliqnnil 
à  la  prière  ri  à  l'oraison;  il  avait  lio.iucoiip 
lie  compassion  p<)ur  les  pauvres  el  les  niisé- 
ralilcs,  et  aiilanl  qu'il  le  i  ouvail  il  les  srctiu- 
rait    cl  leur  Junnait  lili^ralement  l'aunione. 
Quand    il   fui  en  àpe  de  choisir  l'clal   où  il 
devait  passer  sa  vii',  il  prit  le  parti  de  l'Ii!- 
plisi'  <l  reçut  les  ordres  sacrés  de>  mains  de 
i'ciè()ue;  mais,  tendant  toujours  de  plus  en 
plus  à  la  perfeclion,  il  quiita  ses  [larents,  ses 
amis,  et  tout  ce  qu'il  a>ait  de  plus   cher  au 
inonde   pour  embrasser  le   Tiers  Ordre   de 
Saint-François,  et,  s'étanl  associé  le  bien- 
heureux (laulier  do  Marzo,  qui  était  aussi 
du  même  ordre,  il  se  retira  dans  la  solitude. 
Ficsoli, autrefois  l'uncdesdouzc  iiremièrcs 
villes  de  la  Toscane  et  le  séjour  des  augures 
el   des   devins    toscans,   élait   si    puissante, 
((u'avec  le  secours  de  ses    habitants  Stilicon 
défit    Kadagaise,  roi  des  Ooihs,  et  l'on  pré- 
tend qu'il  resta  plus  de  cent  mille  de  ces  bar- 
bares sur  le  (  iiatnp  de  bataille;  mais  d;ins  la 
suite  des  temps,  les  Florentins  étant  devenus 
plus  puissants  que  les  Fiesolans,  ils  détrui- 
sirent Fiesoli,  l'an  lOCO,  paur  accroître  Flo- 
rence,  el   il  n'en  reste  plus  que  les  ruines. 
Ce  fut  dans  ce  lieu  que  le  bienheureux  ('liarles 
se  relira  l'an  13G0.  Il  y  en  a  qui  lui  diuincnt 
d'abord  un  troisième  compagnon ,  qu'ils  ap- 
pellent Redon  de  Montcf^ianeli  ;  mais  d'.juiies 
croyenl  que  ce  Redon  <  t  noire  saint  fonda- 
teur ne  sont  que  le  môme,  et  que  Redon  pou- 
vait être  son  surnom.  Ouoi  qu'il  en  so  t,  à 
peine  ful-il  arrivé  à  Fiesoli,  qu'il  conimença 
par    bâiir   une   petite   église  sous  le  nom  de 
Notre-Dame   du    Saint-Sépulcre,   que   quel- 
ques-uns  prétendent    lui    avoir   été  donni>c 
par  l'évéque  de  Fiesoli.   Là   il  commença  à 
mener  une  vie  très-austère  el  pénilcnle  avec 
son   compagnon;    ils    eniployaii'ul    presijue 
tout    le   jour  cl    une  partie  de  la  nuit  à  la 
prière  el  à  l'oraison;   leurs  jeûnes   et    leurs 
abstinences  étaient   presque  continuels,  un 
peu  d'herbes  ou  de  racines  avec  un  peu  de 
pain   faisait  toute  leur  nourriture,  el   ils  ne 
buvaient  que  de  l'eau.  Ils  ne  crurent  pas  ces 
ausiérités  suflisautes  pour  chàlier  leur  corps, 
ils  y  ajoulèrent  encore  la  haire,  le  cilice,  les 
discipliims,   et   ils  inventaient  tous  les  jours 
de  nouvelles  mortifications,  (jela  n'empêcha 
pas  qu'il  n'y  eût  <'n  peu   de  Icnips  plusieurs 
personnes  qui   se  joignirent  à  eux  pour  les 
iniiler  dans  ce  genre  de  v;c  ;  de  sorte  que  le 
grand  (^ome   de  Médîcis,   <|ui  fut  honoré  du 
nom  de  l'èri;  du  peuple,  et  de   l-ilieratcur  de 
la  jialrie,  leur  fit  bàtir  dans  un  lieu,  un  peu 
au-dessus   de  celui   où   ils  demeurai   ni,  un 
nÉouasIèrc  suffisant  pour  les  loger,  avec  une 
église   qui    fui  dédiée  sous  le  nom  t'c  Sainl- 
Jeronie;  el,   charme  de  la  be.iulé  de  c(!  lieu, 
d'où  l'on  decDUvie  loute  la  ville  de  Florence 
et  une  grand*'  clcndue  de  pays,  il  fil  cjicorc 
bàlir  pour  lui   un  palais  au  pied  de  ce  mo- 
na>lère. 

I.e  jjreniier  élablissemenl  que  fit  f  otre 
sailli  foHdaleur  après  celui  de  Fiesoli  fui  à 
Vérone,  où  ayant  été  appelé,  on  lui  donna 
l'ctjlisL  de  bjiut-JcdU  du  M  'ul.  11  y  demeura 


qnel<)ue  temps,  el,  après  l'axcir  pourvu  d'un 
nombre  sulfisant  de  religieux,  il  alla  à  Ve- 
nise, où  il  bâtit  un  content  8'>us  le  nom  de 
Nolre-Uanio  des    lîràccs,   et  quelque  temps 
après  il  en   eut  un  autre  à   l'adoue  sous  le 
nom  de   Saiiit-Jérc^me.  N'oulanl   affermir  sa 
congrégation,  il  en  demanda  l.i  confirmation 
au  pape  Innocent  VII,  l'an    IVHO,   qui  la  lui 
accordi;  mais  la  mort  ra\aot  prévenu,  il  ne 
put  signer  les  lellresqui  en  furent  dressées: 
c'est   ce  qu'on  ai  jirend    par  un   brefdesoH 
.successeur,  (îiégoire  MI,   daté    de    Monte- 
F'iore,   au   di)ièse   de   Kimini ,  le  8  juillet 
1'»!.'),  qui  déclare  que  la  confirmaiion  de  cet 
ordre  aura   lieu  du  jour  (p.ie  son  |)rédéccs- 
seur   l'avait   accordée  ,   quoique   les   lellres 
n'en  eusscnl  pas  élé  ex pé  liées  à  cause  de  !n 
mort  qui  l'avait  prévenu:  Ipso /ne  i^iœilrres- 
sore  nosli  o,  siciit  Domino  pldcidt,  siiprr  Im- 
jnsinodi  concessionis  grulia   lillfiis  von  con- 
feclis  xubicilo  de  tnedio,  dit  le  pape  ("rrégoire 
.\ll  dans  sa  bulle,  nos  divina  favcnte  clcmen- 
lia  ad  (ipiccm  ntnimi  (ijioittdiat'is  nssiiiii})  i, 
ne    i'p.s)    Caiolus  tt  socii  Itujiismodi  conccs- 
slonis  fruslrarenlur  e/fectu,  roliiimus  et  apo- 
slolica  auclorilale  decievinnis  (/uod  concess^o 
ipsa  },eiinde  a  die  dutœ  ipsius  cnncexsionis 
viilcrcl   cl  plennm  oblincret  roboris  ftrmitd- 
tnn,  ac  si   super  ci    c/usden   prœdec(Ssoi'is 
lillcrœ  snb  ipi^ius  diei  'laid  confctœ  fuissent. 
C'est  en  venu    dt?  ce    bref,  qui   se  trouve 
dans  le  bullairc  de  Laerlio  Cberubini,  (]u'As- 
cagne  Tamburin,  qui  l'a  rapporLc  d.ins  toute 
s.i  icneur,  met  rétablissement  de  l'ordre  (Je 
Sainl-Jérôme  de  Fiesuli   l'an   J'iOO,    sous  le 
pouiificat  d'Innocent  \'II,  ce  qu'ont  failaussi 
l'.iul  Morigia  el  Lœlius  Zeccliius.  Mais  le  1*. 
(«onon,  dans   ses  Vies  des  l'èns  d'Occident, 
n'attaque  que  ce  dernier,   el   prelcnd    qu'il 
s'est  évidemment  lron)pé,  par  le  léinoi;:nage 
de  (]asarubio<,  Philippe  de  Rergame  cl  d'iino 
infinité  d'auteurs  qui  onl   mis   cet   ét.ihUssc- 
miiil  l'an  iM'6.    Ce  sont  plutôt  ces  auteurs 
(  l  le  I'.  Conon  qui  se  sont  trompés,  puisque 
le  pape  Crégoire  XII  déclare  (jue  son  prédé- 
cesseur liniucenl  A  II  avait  accordé   la  con- 
firmation de  cet  ordre,  (ju'il  en  avait  fait  e\- 
pédierlcs  lettres;  mais  que  la  mort,  qui  lo 
prévint,  l'empêcha  de  les   signer.  Or,   il  esl 
certain   qu'Innocent   ^'II  esl  mort   en  l'iOG, 
et  qu'il  ne  fut  pas  même  lon;;lemps  malade, 
|)Uisqu'il    fui    attaqué    d'apoplexie    dont    il 
mourut  le  0  novembre  de  la  même  année.  Il 
y  a  bien  de  rapp.ucnce  que  cet  ordre,  ayant 
obtenu  ce  bref  de  Crégoire  XII,  le  reconnais- 
sait encore  pour  souverain  ponli'c,  quoiqu'il 
eût  élé   déposé  dans  le  concile  de  l'ise  le  5 
juin  VM);    mais,  comme    nous    l'avons    dit 
ailleurs,   l'on  voyait   pour  lors    trois   papos 
daus  l'Fglise.  Il  ne  faut  pas  s'étonm  r  si  Ché- 
rubin a  inséré  celle  bulle  dans  le   bullairo 
romain,  (juoique   ce    p:|(e    ail    élé    déposé; 
puis(|ue  le  concile  de   Constance  apjirouva 
et  autorisa  tout  ce  (|u'il  avail  fait,  non-seu- 
lement jusiju'au  jour  de  sa   renonciation  au 
[lontilicat,  qui  fut  f.iilc  dans  la   qu.ilurziènio 
session  de  ce  concile,  qui  se   tint  le  qiialri- 
juillet   de  l'an   l'illl,  par   ('h.irles  de   Mala- 
lesla,  seigneur  de  Kiinini,  au  nom  de  ce  i»  ir.- 


ns 


jm 


1ER 


GOC 


tife,  en  vi'ilu  du  pouvoir  qu'il  en  .ivail  re- 
çu ,  mais  encore  jusqu'à  ce  que  cette  renon- 
ciation eût  été  notifiée  à  tout  le  monde,  le 
con(  ile  ayant  pour  ce  sujet  donné  terme  d'un 
mois. 

Après  que  le  bienheureux  Charles  de  Moii- 
Icgraneli  eut  obtenu  cette  bulle  de  Grégoire 
XII,  il  travailla  à  augmenter  sa  coii^iréga- 
lion,  à  laquelle  il  donna  le  nom  de  Société 
de  Saint-Jérôme.  11  eut  enfin  envie  d'aller  à 
Jérusalem  pour  y  visiter  le  saint  sépulcre  et 
les  autres  lieux  de  la  terre  sainte;  mais, 
pendant  qu'il  était  à  Venise  et  attendait  une 
occasion  favorable  pour  f^ire  ce  voyage,  il 
tomba  malade,  et  mourut  le  5  septembre 
IVn,  après  avoir  recommandé  sa  société  au 
P.  Pierre  de  Gênes,  qui  en  fui  le  premier  gé- 
néral après  lui,  et  au  P.  Jacques  Filibcrli 
d'Alexandrie.  Il  fut  enterré  dans  son  couvent 
de  Venise,  et  son  chef  fui  transporté  plu- 
sieurs années  après  dans  celui  de  Fiesoli, 
où  il  a  été  en  grande  vénération. 

Innocent  VII  avait  approuvé  cet  ordre 
sous  une  règle  et  des  constitutions  de  saint 
Jérôme  tirées  apparemment  des  écr.ts  de  ce 
Père,  et  leur  avait  permis  de  faire  des  vœux 
solennels,  ce  que  Grégoire  XII  avait  con- 
firmé ;  mais  Eugène  IV,  l'an  l'i4!,  leur  don- 
na la  règle  de  siiiiil  Augustin,  leur  permet- 
tant de  retenir  toujours  le  nom  de  Saint-Jé- 
rôme et  l'habit  qu'ils  avaient  accoutumé  de 
porter  dans  leur  société,  qu'il  voulut  qu'on 
appelât  à  l'avenir  la  Congrégation  de  Saint- 
Jérôme  de  Fiesoli,  établissant  le  couvent  de 
Fiesoli  pour  chef  de  celte  congrégation.  Il 
ordonna  aussi  qu'ils  y  tiendraient  leurs  cha- 
pitres généraux  tous  les  ans,  où  ils  éliraient 
leurs  généraux  et  les  supérieurs  des  mai- 
sons, qui  pourraient  être  continués  tant  et 
si  longtemps  qu'ils  jugeraient  à  propos;  et 
(lue  dans  ces  chapitres  généraux  ils  pour- 
raient faire  des  constitutions  pour  le  bon 
gouvernement  de  cet  ordre.  Il  les  obligea  à 
l'aire  les  vœux  solennels  d'obéissance,  de 
ch.isteté  et  de  pauvreté.  Il  les  soumit  à  la 
règle  de  saint  Augustin,  et  déclara  que  le 
P.  Jacques  Filiberli  d'Alexandrie,  pour  lors 
général  de  cet  ordre,  serait  tenu  de  renouve- 
ler ainsi  sa  prolèssion  entre  les  mains  do 
l'évêque  d'Ostie,  et  les  autres  religieux  de 
l'ordre  entre  les  mains  de  ce  général. 

L'habit  qu'ils  portaient  dans  cet  ordre,  el 
([ue  le  pape  Eugène  IV  leur  avait  permis  de 
retenir,  était  celui  du  Tiers  Ordre  de  Saint - 
François  que  le  bienheureux  Charles  de 
Montegraneli  cl  la  plupart  de  ses  premiers 
disciples,  qui  étaient  de  ce  Tieis  Ordre, 
avaient  voulu  toujours  porter  pour  se  res- 
souvenir de  leur  premier  état;  mais  le  géné- 
ral el  queUiues  religieux  de  cet  ordre  s'a- 
dressèrent l'an  l'iGO  au  pape  Pie  H  pour  leur 
permettre  de  quitter  cet  hiibil,  afin  d'être 
distingués  des  religieux  du  Tiers  Ordre  de 
Saint-François,  ce  que  le  pape  leur  accorda 
par  un  bref  du  20  mars  de  la  même  année, 
comme  il  paraît  par  un  autre  bref  du  îiOaoût 
suivant,  où  ce  pape  fait  mention  de  ce  pre- 
mier bref  :  iJudum  siquiilem,  videlicel  siih 
Uatum  \m  calend.  A^jr.,  ponlifcalm   nuilri 


anno  secundo,  dileclis  filiisJacubo  deÀltxun- 
dria  tiinr  priori  gênerait  el  universis  frulri- 
bus  Societalis  Sancii  llieronymi,  ordinis  fjug- 
dem  sancti,  et  eorum  succe'Soribtis  ejusdem 
Soiieiatis  prœsenlihus  et  futuris,  lune  nb  eo' 
rum  primœva  inslilulione  lalem  habilum  qiia- 
lem  Fralres  Terlii  Ordinis  Sancii  Francisci 
de  Pœnilentia  nuncupali  el  nunnulli  Eremilœ 
gerunt  deferenlibus,  el  ob  ipsis  Eremitis  et 
Fratribus  Terlii  Ordinis  hujusmodi  in  hafnia 
dl/fcrenliam  habere  cupientibus  differentem 
habitum  ud  caulelam  duntaxat  ab  eisdem 
Eremitis  et  Fratribus  Terlii  Ordinis  ejusdem 
coloris  recipiendi  el  receptum  perpétua  ge- 
slandi  per  aliai  nostras  concessimus,  etc. 
Mais  il  y  en  eut  plusieurs  qui  ne  voulurent 
point  quitter  cet  habit,  que  quel(|ues-uns 
d'entre  eux  portaient  depuis  plus  de  quarante 
ans  :  c'est  pourquoi  ce  même  pape  permit 
à  ceux-là  de  retenir  toujours  cet  ancien  ba- 
bil, et  leur  accorda  deux  maisons  qui  appar- 
tenaient à  cet  ordre  pour  y  demeurer,  savoir 
Saint-Jérôme  de  Paiioue  el  Saint-Pierre  de 
Vicence,  les  ayant  absous  de  l'obéissance 
qu'ils  devaient  au  général  de  cet  ordre,  et 
les  soumettant  aux  ordinaires  des  lieux  où 
ils  auraient  des  maisons.  Il  ordonna  que  les 
religieux  qui  demeureraient  avec  l'ancien 
habit  s'appelleraient  les  Frères  de  Sainl- 
Jérâme  de  la  congréijaUon  de  Frère  Charles 
de  Montegraneli,  leur  fondateur,  qu'ils  joui- 
raient des  mêmes  privilèges  de  tout  l'oidre, 
et  qu'ils  pourraient  faire  la  quête  dans  les 
lieux  où  ils  demeuraient,  accordant  six  mois 
de  temps  à  tous  les  religieux  de  cet  ordre 
pour  faire  choix  de  cet  habit  et  de  la  con- 
grégation. Ainsi  ayant  divisé  cet  ordre  en 
deux  congrégations,  il  ordonna  qu'en  cas 
que  l'une  des  deux  vînl  à  manquer,  soit  du 
nouveau,  ou  de  l'ancien  hahit,  les  couvents 
cl  les  biens  qu'elle  posséderail  apparlien- 
draient  à  celle  qui  resterait;  ce  qui  fut  con- 
firmé par  le  pape  Paul  11  l'an  liCo  ;  et  pour 
lors  les  religieux  du  nouvel  habit  cédèrent 
ces  deux  couvents  de  Padoue  et  de  Vicence 
à  ceux  qui  retinrent  l'habit  du  Tiers  Ordre 
de  Saint-Fiançois,  comme  il  parait  par  l'acte 
qui  en  fut  passé  par-devant  Ange  de  Fasa- 
lo,  évé  lue  de  Feltri,  lequel  acte  est  rap- 
porté tout  au  long  dans  le  bref  dePaul  II,  du 
20  juin  de  la  même  année  1465.  Mais,  soit 
que  la  congrégation  de  ceux  de  l'ancien  ba- 
bil à  qui  !e  pape  Pie  II  avait  donné  le  nom 
de  leur  fondateur  eût  été  éteinte,  el  que  les 
autres  du  nouvel  habit  fussent  entrés  dans 
la  possession  de  leurs  biens  et  de  leurs  cou- 
vents, cet  ordre  n'était  point  divisé  en  deux 
congrégalions  iliflerenles,  lorsqu'il  fut  sup- 
primé l'an  16()8  par  le  pape  Clément  IX,  qui 
accorda  aux  prêtres,  pendant  leur  vie,  qua- 
rante érus  romains  par  an,  et  aux  frères 
laïques  v  ingt  écus.  ils  avaient  autrefois  plus 
de  quaranle  maisons  ;  mais  ce  nombre  était 
bien  diminué  lorsqu'ils  furent  supprimés. 
Ils  en  avaient  une  à  Rome,  sous  le  litre  do 
Sainl-Vinceni  el  de  Sainl-Anastase,  paroisse 
])apale  que  Paul  V  leur  avait  donnée  en  1612, 
L'i  qui  depuis  leur  suppression  a  été  donnée 
aux  Clercs  Kégulieis  Mineurs.  Le  cardiual 


niCTIONNAlUE  DES  ORDRES  UI.LIGIEUX. 


cor 

Iules  Mnzariii,  qui  avail  ^li-  liaptisô  tl.iiis 
cvUc  rfilise,  I  avail  f.iil  reliàlir  avec  un  Iri^- 
ln-aii  (lorlail.  Si  «m  eu  voui  <  rnire  M.  Ili-r- 
tiianl  dans  son  llisloire  dis  Orlrcs  religieux, 
Cis  Kriniles  «le  Fiesoli  subsislenl  toujours, 
et  oui  encore  treiile  ou  qn.iranlc  maisons; 
mais,  s'il  avait  lu  la  l)ullf  de  suppression 
de  l'ordre  des  Jésuaics,  iju  il  nconn.iil  avoir 
élé  supprimé  par  le  pape  Clément  IX,  il  au- 
rait vu  que  ce  pontife  supprima  aussi  par  la 
même  bulle  les  Kriniles  de  Saint-Jérôme  de 
la  congrégaliou  de  Fiesoli,  et  les  chanoines 
de  la  congrégation  de  Saint  -  lîcorjzes  i» 
Ah/ha. 

Leur  habillement  consistai!  en  une  tuni- 
que giise  serrée  d'une  ceinture  de  cuir,  un 
eapuce  attaché  à  une  grande  mosctie  et  une 
chape  plissée  par  le  cou  aussi  de  la  même 
couleur.  Ils  avaient  aussi  autrefois  des  san- 
dales de  bois  (1).  mais  ils  les  quiltèrcnl  vers 
la  tin  du  xvr  siècle. 

Voj/ez  Silvano  IV  zzi.  Vile  de  Sauti  (la 
Tofcàna,  pag.  t323.  Francesco  Cattani  da  Dia- 
relto.  Vite  di  SS.  di  Fiesuli.  (îonon,  Vil. 
PI'.  Occident.,  lib.  vi,  pay  380.  Wading., 
Atiiinl.  Minor.,  toin.  V,  ann.  1405,  num.  18  ; 
lum.  \'I,  ann.  l'iCO,  n.  k'.];  et  ann.  l'iCo,  »i. 
7.  Francise.  liordou.,  Chronoloq.  Fralrvm 
'J'ertii  Ord.  S.  Fruncisci.  Joau.  Mar.  Vern., 
Anniil.  p/u.irf.  OiJ.  Silvestr.  Maurol.,  Mar. 
Ocenn.  di  tut.  (jl.  ReHij.  Paul  Morigia,  llist. 
de  tontes  les  lielig.  Asca;;.  Tanihur.,  De  Jur. 
Ahlint..  tom.  il,  dis/).  2k,  f/uw.^t.  4-,  n.  72  ; 
liuUnr.  Rom.  l'tdsdor.  Vir-iil.,  De  Rnum  In- 
tenlaribus,  lib.  vu,  rap.S.  Philipp.  Hergom., 
Siipplem.  Clironic.  lih.  xiv,  jkkj.  .'545.  Bo- 
naiini,  Calalotj.  Ord.  relig.  part.   i. 


eo3 


SECTION    TROISIEME. 


DE 


MOINES    ERMITES    DE    SAINT  -  JI-.ROME 
L'OIISERVAMCE,  OU   DE   LOMBAUDIE, 

Avec  la  vie  de  Loup  d'Otmédo,  leur  fondateur. 

Siguença,  parlant  de  Loup  d'Olmédo,  in- 
stituteur des  moines  Ermites  de  Saint-Jé- 
nWne,  dit  que  ce  sont  des  ignorants  qui  ont 
écrit  qu'il  avait  réformé  l'ordre  de  Saint-Jé- 
rôme, et  qu'ils  devaient  savoir  ce  que  veut 
dire  le  mot  de  réformer,  qui  ne  signifie, 
selon  lui,  que  remcUrc  en  son  premier  état 
ce  qui  avail  é  é  perdu  ou  corrompu  p,r  né- 
gligence :  Los  ignoraiilrs  que  dizcn  en  sus 
escritos  que  fniy  Lojte  reforma  lu  orden  de 
Son-deriinima,  no  devrn  de  super  de  quiere 
dtzir  reformur.  Hrformar  rs  reduzir  una  cosa 
à  la  primera  forinn  que  se  ha  perdilo.  o  estra- 
gailo  por  nejligcncia  [llist.  de  ta  Orden.  de 
San-ùeron.).  Je  veux  croire  que  l'ordre  de 
Saint-Jérôme  était  pour  lors  dans  toute  sa 
frr»eur,  et  ()ue  les  religieux  étaient  de  fidè- 
les observateurs  de  leur  lègle  ;  iii.iis,  comme 
le  mot  de  réformer  signifie  aussi  dunnrr  une 
meillcuic  lorme,  on  ;iuiait  pu  iloiinir  en  ce 
sens  à  Loup  d Olmédo  le  nom  de  Kèiorma- 
tcur,  puisqu'il  prétendait  changer  iiuehiucs 
anciennes  observances  drs  l'.rmites  deSainl- 
Jéiome,  et  leur  en  donner  de  nouvelles  qu'il 


croy.iil  plus  conven.ibles  à  leur  état,  et  qu'en 
ellel  il  donna  aux  religieux  de  sa  congréga- 
tioii  une  règle  tirée  des  écrits  de  saint  Jé- 
rôme, parce  qu'il  ne  croyait  pas  (jue  celle  de 
saint  Augustin  fût  projjre  pour  des  moines 
tels  qu'il  préiendail  que  les  religieux  de 
Saint-Jérôme  devaient  être,  l'eul-éirc  que  le 
titre  de  Itesxtscitator  ordinis  S.  Ilieroni/mi 
qu'on  a  joint  à  celui  de  lii  formator  dans  l'é- 
pilaphe  de  Loup  «l'Olmédo  est  ce  qui  a  cho- 
qué Siguença,  et  qui  lui  a  fait  dire  que  cette 
épitapho  n'était  pas  assez  inodesic,  non  uiug 
modesio.  .Mais  je  ne  veux  point  entrer  d.ins 
leur  dispute,  et,  si  quelquefois  le  mol  de  lé- 
forine  m'échappe  en  parlant  dans  la  suite 
des  moines  de  l'observance  de  Loup  d'Ol- 
médo, c'est  que  je  suivrai  hs  historiens  de  sa 
vie  et  les  mémoires  qui  m'ont  été  donnés 
par  le  H.  P.  Antoine  lionacioa,  moine  de  l.i 
niéine  congrégation,  ancien  ledcur  en  théo- 
logie, et  Irès-vcrsé  dans  l'hisloirc  de  son 
ordre. 

Loup  d'Olmédo  naquil  l'an  1370  au  bourg 
d'Olmédo,  au  diocèse  d'Avila  en  l'spagne, 
d'où  il  a  pris  son  nom.  Les  historiens  de  sa 
vie  ne  sont  point  d'.iceord  touchant  ses  pa- 
rents; les  uns  le  font  sortir  de  la  famille  des 
t'ionzalez,  les  autres  il' s  Ferrari  de  Valence, 
et  d'autres  disent  iju'il  était  frère  de  saint 
Vincent  Ferricr,  «jui  s'appelait  Fcrreri.  Dès 
ses  plus  tendres  années,  il  méprisa  les  petits 
|ilaisirs  qui  sont  permis  aux  jeunes  gens  :  il 
s'appliijua  à  former  sa  vie  sur  le  modèle  di'S 
plus  excellen'es  vertus;  il  s'adonna  entière- 
ment à  l'élude  des  sciences,  et,  comme  Pè- 
rouse  ciait  pour  lors  le  lieu  où  llorissaienl 
les  lielles-lellres  en  Italie,  il  y  lut  et  li  i  une 
étroite  ainilié  avec  domOllioii  l'.oloiniie,  qui 
fui  élevé  dans  la  suiie  au  souverain  ponlili- 
cat  sous  le  nom  de  .'\lariii>  \',  et  qui  y  étu- 
diait aussi. 

Ayant  lini  ses  élude-,  il  relourna  en  son 
pays,  où  il  s'acquit  bientôt  l'estime  de  Fer- 
dinand, loi  d'.\rag'>n,  qui,  lejugeanl  capable 
d'alTaires  iinportanles,  l'envoya  auprès  de 
l'aniipipc  lienoit  Xlll,  que  l'Aragon  r<con- 
iiaissait  pour  légitime  successeur  de  saint 
Pierre,  et  ■luprès  lU'.  la  rèpulili(|ue  de  liéiies 
et  de  quelques  princes  d'Italie.  A  son  retoui', 
il  voulut  l'élever  à  de  hautes  dignités,  mais 
il  les  refusa  courageusement  pour  se  retirer 
dans  le  nionaslère  de  Notre-Dame  de  t!ua- 
daloupc  de  l'ordre  <le  Saint-Jérôme,  dans  la 
[irovince  d'Kstramadure ,  où  il  prit  l'Iialiit 
religieux.  Il  n'alandonna  pas  pour  cela  le 
soin  de  ses  études,  il  les  associa  de  telle 
sorte  avec  la  prière  et  l'oraison,  que  l'un 
surcédail  à  l'autre,  et  ces  exercices  n'étaient 
interrompus  que  par  le  peu  de  lemps  qui 
lui  était  nécessaire  pour  prendre  un  peu  de 
repos  et  de  nourriture. 

Ses  vertus  le  firent  en  peu  de  lemps  pas- 
ser par  toutes  l 's  dignités  de  l'ordre  ju^ju'à 
celle  de  géni  rai,  où  il  fui  élevé  l'an  l'i2J, 
(|uoic|ue  son  humilité  y  apportât  beaucoup 
(!'•  p[)OMlion.  t",e  fut  dans  ci't  ernjiloi  qu'il  té- 
moigna  son   grand   zèle  pour  l'observance 


(I)  Voy  ,  ï  la  fui  duvuL.n"  i;.>l. 


rm- 


JER 


JEP. 


610 


régulière.  Selon  les  hisloricns  de  sa  congré- 
gation, quoique  ciux  des  Eriniles  d'Espa- 
gne disent  le  cunliaire,  il  apporta  tous  ses 
soins  pour  corrigrr  des  ;ibus  qu'il  préten- 
dait être  dans  l'ordre.  H  exhortait  les  ali- 
senls  jar  lettres,  il  sollicilail  les  présents  par 
ses  discours  à  la  pratique  des  vertus  et  à 
l'oliscrvance  de  leur  règle;  et,  afin  que  son 
exemple  les  animât  davanl.îge,  il  se  relir.at 
de  temps  en  temps  dans  la  solitude,  où  il 
gardait  une  perpétuelle  abstinence.  11  voulut 
bannir  du  rélccîoire  l'usage  de  la  viande,  1 1 
inspirer  au\  religieux  l'esprit  de  retraite  cl 
de  solitude  qu'ils  s'étaient  proposé,  cl  où  ils 
vivaient  dans  les  cummenciuients,  «omme 
nous  avons  vu  dans  les  pjiragîaphes  précé- 
dents; mais,  voyant  les  oppositions  qu'ils  y 
apportaient,  et  qu'ils  voulaient  toujours  per- 
sister dans  leur  manière  de  vie,  il  se  démit 
de  5(11  ollice,  et  se  relira  pour  quelque  leinps 
chez  les  Chartreux,  afin  de  fdrmer  sur  les 
exeicicesde  ces  salnls  rilit;i(ux  la  réforme 
de  son  ordre  qu'il  ujcdilait  toujours. 

Etant  assuré  de  quelques  religieux  qui 
voulaient  seconder  ses  pieuses  inienlions,  il 
vint  à  Uomc  l'an  ik2h,  sous  le  pontilical  de 
Martin  V,  qui,  à  eau  e  de  leur  ancienne  ami- 
tié, comme  nous  avons  dit,  lui  fit  un  accueil 
d'autant  plus  favorable,  qu'il  ne  venait  pas 
aux  pieds  de  Sa  Sainlelé  pour  recheiclur  sa 
propre  gloire,  mais  celle  de  Uieu,  qu'il  sou- 
haiiail  être  mieux  servi  dans  son  ordre.  Il 
lui  exposa  donc  le  dessein  qu'il  avait  de  ra- 
mener les  religieux  à  l'étal  monacal  et  à  la 
solitude,  ou  d'établir  un  ordre  nouviaude 
moines  sous  le  titre  de  Saint-Jérôme  et  la 
protection  de  ce  Père  de  l'EgliSe,  si  les  reli- 
gieux d'Espagne  persisiaient  à  s'opposer  à 
ses  biins  desseins.  Le  pape  fit  venir  d'Espa- 
gne les  défiiiiteurs  de  l'ordre  pour  écouter 
leurs  raisons,  et  ils  lui  firent  de  si  humbles 
remiintrances  pour  qu'il  ne  changâl  rien  de 
leur  manière  de  vie,  que  ce  pontiiè  le-,  ren- 
vo)a  dans  leur  monastère  en  leur  accordant 
leur  demande. 

Mais,  ne  voulant  pas  q.ue  les  dcss:  ins  de 
Loup  d  Olméilo  lussent  sans  effei,  il  lui  ac- 
coida  une  bulle  datée  de  la  même  an- 
née 1424,  par  laquelle  il  lui  permit  de  fon- 
der une  congrcgaiion  sous  le  titre  de  moines 
Ermites  de  Saint-Jérôme,  dans  les  monta- 
gnes de  Cazalla,  au  diocèse  de  Sévilh  ,  en 
Espagne,  l'établissant  général  perpétuel  de 
celte  nouvelle  congrégation,  avec  un  pou- 
voir absolu  sur  ses  religieux  ;  il  lui  aceonla 
d'autres  bulles  qui  contiennent  plusieurs 
privilèges,  et  la  communication  de  ceux  dont 
jouiï'Saicnl  les  autres  Ermites  de  S,iint-Jé- 
rôuie,  avec  la  confirmation  de  ce  nouvel  or- 
dre sous  la  règle  de  saint  Augustin. 

11  retourna  donc  en  Espagne  muni  de  ces 
bulles,  et  jeta  les  fondements  de  sa  congré- 
gation dans  le  monastère  de  Saint-Jérôme 
(le  l'Aeella  au  mont  Cazalla  ;  et,  afin  que  ce 
nouvel  édifice,  étant  bâti  sur  des  fondements 
fermes  cl  solides,  pût  être  élevé  plus  baui, 
il  ajouta  à  la  règle  de  saint  Augustin  des 

(1)  Voy.,  à  lu  lin  du  vol.,  n""  15-2  ci  153. 


constitutions  très-austères  et  très-rigoureu- 
ses tirées  en  partie  de  celles  des  Cliarireux. 
Kllcs  portaient  entre  autres  choses  que  Ls 
religieux  ne  pourraient  étudier  dans  le  cou- 
vent, et  ne  |)ourr.iienl  en  sortir  pour  aller 
étudier  dans  les  universités,  selon  la  prati- 
que des  Chartreux,  alléguant  ce  passage  de 
l'Apôlre,  que  la  science  enfle,  et  que  la  charité 
édifie;  que  les  femmes  ne  pourraient  (las  en- 
trer dans  leurs  églises,  et  encore  moins  dans 
l'enclos  du  monastère  ;  qu'on  ne  inangi  rail 
jamais  de  viande;  (|u'oii  ne  porterait  du 
linge  que  dans  les  malailies,  et  i|u'ils  jeûne- 
raient depuis  la  fêle  de  saint  Jérôme  jusqu'à 
Pâquis.  Loup  d'Olmédo  (hangej  encore  quel- 
que chose  de  riiabillement  des  religieux  da 
Saint-Jérôme  ;  car.  comme  il  fil  porter  aux 
religieux  de  sa  congrégation  le  nom  de  moi- 
nes, il  vou  ut  (|u'ils  en  portassent  l'habil, 
leur  ayant  fait  prendre  une  coule  à  la  ma- 
nière des  moinis  bénédiciins,  qu'ils  portent 
au  cha-ur  et  lorsqu'ils  sortent  (Ij. 

Pende  leoi|s  après  qu'il  eut  fondé  son 
premier  monastère  de  Saint-Jéiôme  de  l'A- 
eella, l'on  en  bâtit  encore  cinq  autres  dans 
ces  mêmes  montagnes,  et  ces  solitudes  so 
changèrent  en  des  colonies  de  moines.  Le 
pape  ra}aut  fait  venir  à  Kome,  lui  donna, 
l'an  142o,  le  monastère  de  S.unl-Alexis  au 
mont  Avenlin,  qui  avait  été  occupé  jusque- 
là  par  des  Preuiontrés.  Ce  souverain  pon- 
tife, voulant  enirelenir  la  paix  cl  l'union 
cnire  cette  congrégation  et  celle  des  Ermi- 
tes, dlinna  une  bu. le,  l'an  1428,  par  laquelle 
il  onloniiait  que  Loup  d'Olmtdo  pourrait  ti- 
rer (le  l'ordre  des  Ermites  d'Espagne  les  re- 
ligieux qui  voudraient  passer  dans  le  sien, 
et  ((ue  les  biens  qu'ils  avaient  apportés  en 
entrant  dans  celui  des  Ermites  relourne- 
raieni  ù  celui  des  moines  deLoup  d'Olmédu; 
que  tous  les  couvents  d'Espagne  qui  vou- 
dra eut  lecevoir  les  coiistituiions  de  Loup 
d'Olmédo  le  pourraient  faire  après  en  avoir 
demandé  et  obtenu  la  permission  des  supé- 
rieurs ;  que  quand  les  Ërmiies  d'Espagne 
iraient  dans  les  couvents  de»  moines  de 
Saint-Jérôme,  et  réciiiroquemenl  les  moines 
dans  ceux  des  Ermites  de  Saiiil-Jérôme,  ils 
y  seraient  reçus  et  traités,  tant  en  santé 
qu'en  maladie,  coiiiinc  s'ils  n'étaient  tous 
que  d'un  même  ordre  et  d'une  même  con- 
giégation;  et  qu'eniin  dans  les  deux  ordres, 
l'on  dirait  réciproquement  des  sutVrages 
pour  les  religieux  qui  y  décéderaient.  Mais  ' 
cette  bulle  n'apporta  pas  ta  paix  dan;*  ces 
deux  ordres,  qui  n'euiretinreut  pas  une 
trop  bonni:  correspondance  entre  eux. 

lies  couvents  do  Loup  d'Olmédo  se  mul- 
tiplièrent cependant  en  Italie.  Le  second 
({u'ils  curent  lut  à  Casiellacio,  à  un  niilie 
de  la  ville  de  Milan,  qui  avait  été  fondé  par 
Jean  Galéas,  duc  de  Milan,  pour  les  Ermites 
de  Sainl-Jerôme  d'Espagne,  et  qui  deman- 
dèrent d'être  unis  aux  moines  de  l'Obser- 
vance: c'est  ainsi  qu'ils  sont  nomniés  dans 
les  bulles  de  plusieurs  papes.  L'on  ne  doit 
pas  passer  sous  silence  que  Philiiipc-Marie, 


cil 


DlCTlONNAinE  DES  OUDRES  RELIGIEUX. 


6« 


•lue  dcMil;in,fiUdi'Jonn  riali-.is.  njant  odort 
à  Loiiiid'Oliiicdode  gros  revi-iius  pour  l.i  sub- 
sistance df>  religieux  do  ce  luonaslèrc,  il  les 
refu»a,  disant  que  la  pauvreté  n.>  pouvait  pas 
s'aciordor  avec  le  superflu.  Après  avoir  ré- 
glé toutes  fliosis  dans  ce  monasièrc,  el 
après  ovdir  fait  renouveler  à  ces  religieux 
II'  \a-u  de  vivre  dans  Tobscrvance,  il  alla  à 
(icnes  pour  prendre  possession  d'un  autre 
monastère,  d'où  il  retourna  à  Home,  où  il 
forma  le  dessein  décomposer  une  règle  tirée 
(les  éciils  de  saint  Jér<)mc,  ne  trouvant  pas 
celle  de  saint  Augustin  propre  pour  dis 
iiioinis.  Il  y  travailla,  et,  après  l'avoir  aclie- 
\éo,  il  la  préseiit.i  au  pape  pour  y  donner 
son  .ipprobation,  ce  qu'il  lui  accorda,  l'an 
li20,  avec  la  permission  de  la  faire  observer 
à  ses  religieux,  au  lieu  de  celle  de  saint  Au- 
gusliii,  dont  il  les  dispensait.  Ainsi  ce  ne 
lut  point  parce  que  Loup  d'Olmédo  voulut 
faire  reciîvoir  cette  règle  tirée  des  écrits  de 
saint  Jérôme,  que  les  Ermites  d'iîspagne  ne 
voulurent  point  embrasser  la  réforme, 
lonimc  quelques-uns  ont  écrit,  puisque 
le  papc.M.iriin  approuva  d'abord  la  coiigrè- 
galioii  dr  Loup  d'Oiiiiédo  sous  la  règle  de 
saint  Augustin,  et  que  ce  ne  fut  que  l'an 
li^iO  qu'il  permit  au\  religieux  do  cetli'  con- 
grégation de  prendre  la  icgie  qui  avait  été 
tirée  des  écrits  de  saint  Jérôme  par  leur  fon- 
dateur. 

Siguença,  qui  en  quelques  occasions  pa- 
rait ]  eu  favorable  à  Loup  d'Olmé.lo,  ne 
peut  pas  néanmoins  s'empêcher  de  louer 
celte  règle.  Il  dit  qu'elle  est  écrite  avic  es- 
prit el  lidèlcmeiit  recueillie,  que  ce  sont  les 
plus  lieaux  centoiis  qu'il  a  t  tus,  et  qu'ils 
nièrilenl  plus  de  louanges  que  ceux  que 
l'roba  Falcoaia  composa,  tirés  d'Homère  et 
du  A'Irgile,  et  qui  sont  si  estimés  dans  le 
inonde  ;  tslnia  ordcnnda  cou  buen  iriymio, 
iltltijenriii,  y  ficlnienle  cugida,  y  los  mus  bien 
(ilados  cent  unes  que  yo  visto,  digiios  de  mus 
(sdma  que  los  que  liizo  de  las  obi  as  de  Virgi- 
lio  1/  d'ilvmero  l'ruba  Falcunici,  tan  utaba- 
dvs  en  cl  mundo. 

Loup  d Dimedo,  pour  s'acquitter  de  son 
oflire  de  général,  résolu  après  crla  de  r. - 
tourner  en  lispa;;ne  pour  y  laire  la  viitt;  de 
SOS  iiionas  ères.  Il  y  av.iit  p.uir  lors  quel- 
ques divisions  entre  les  évoques  de  CastiLc, 
l't  I  Kglisc  de  Séville  éiait  aussi  sans  pasieur. 
A|>rès  la  mort  de  dom  Alphonse  de  i'Aéca, 
(|ui  en  était  archcvèqui',  qui  arriva  l'an 
til7,  duni  Didace  Malilonat  de  Aimay.i  lui 
avait  succède;  il  gouverna  son  dioi  èse  pen- 
dant (|uinze  ans;  mais  ajaiit  eu  diiVerend 
avec  son  clia|iitre  au  sujet  de  que. que  le- 
lorme  qu'il  voulait  introduire  parmi  sis  cha- 
noines, ceux-ci  richerclièniii  sa  vie,  el  eu 
lirenl  des  informations  peu  lavurables  qu  ils 
envoyèrent  au  pape  M.iriin  \  .  lis  lui  npro- 
cltalcat  entre  autres  choses  qu'étant  au  con- 
cile drdonsianic  en  qualité  d'eutoyé  des 
rul^  di-  Castille  et  de  Léou,  il  y  avait  favorise 
l'aniipape  lieiioit  \lll.  Le  pape  en  était  con- 
vaincu, et  avait  toujours  ciinser\é  conlre  ce 
prêtai  i|iieii|iie  ri'sSi-ntiiiieiit  ;  de  sorte  que 
ceci   jouit  a  d'autres    faits    imjiortjnts    ilonl 


on  l'avait  informé,  fit  que  ce  pontife  le 
priva  de  son  archevêché,  cl  iui  donna  seule- 
ment le  titre  d'archevêque  de  Tarse,  llomme 
Loup  d't3!médo  se  disposait  à  retourner  m 
l>p.igiie,  le  pa[ie,  qui  le  connaissait  pour  un 
humilie  expérimenté  dans  les  affaires,  lui 
donna  railiiiiiilsiratiou  de  cet  arclicȏche,  el 
un  pouvo  r  pour  arcoiiiiiunler  les  dilTerends 
qui  étaient  entre  les  évéqucs  de  t'asiille.  11 
arriva  à  Séville  l'an  14-29;  il  prit  d'abord  le 
gouvernement  de  cette  Eglise,  et,  après  y 
avait  fait  quelques  règlements,  il  alla  en 
Cas  ille  pour  s'acquitter  de  sa  commission  11 
réussit  SI  bien  par  sa  sagesse  et  par  sa  |  ru- 
deiice.  que  tous  les  évéques  se  réunirent  en 
peu  du  l  m|)S,  el  vécurent  dans  la  suite  en 
(larfaite  intelligence.  Etant  retourné  n  Sé- 
ville, il  lit  un  autre  établissement  pour  sa 
congrégation.  11  y  avait  proche  de  la  ville 
une  abbaye  sous  le  nom  de  Saint-l«idore  del 
Crtm/)'»,  (jui  était  extrêmement  riche  el  de  la 
fondation  des  comtes  de  Gusmaii.  Elle  avait 
élé  possédée  par  les  moines  de  Citc.iux  ;  mais 
l'observance  régulière  en  ayant  été  bannie, 
elle  fut  olTerle  à  notre  fondateur,  qui  l'ac- 
cepta :  ce  qui  a  fait  donner  à  cette  congré- 
gation, par  quelques-uns,  le  nom  de  S.jiiil- 
Jsidore.  Il  y  lit  un  plus  long  séjour  que  d.iiis 
le  palais  archiépiscopal;  1 1,  après  avoir  fait 
la  visite  de  ses  autres  monastères,  il  s'adonna 
entièrement  au  gouvernement  de  ccîtc 
Eglise,  qu'il  quitta  pour  un  temps,  ayant  été 
encore  envoyé  parle  pape  pour  aller  faire 
la  visite  do  la  nouvelle  congrégation  des 
chanoines  séculiers  de  Saint-Jean  l'Evange- 
listc  eu  i'urtiigal,  dont  nous  avous  parlé. 
Elinlde  retour  à  Séville,  i!  continua  à  gou- 
verner cette  Eglise  ;  mais  le  iié>ir  qu'il  uv  .il 
de  retourner  dans  sa  soliiiide  fit  qu'il  remit 
entre  les  mains  d'Eugène  IV,  qui  avait  su  - 
cédé  à  Martin  V,  ladministraiion  de  l'Eglise 
d,-  Séville.  Il  vint  quelque  temps  après  à 
Hume,  où  en  ayant  leiidu  compte  à  Sa  Sain- 
teté, il  se  relira  dans  le  monastère  de  Saim- 
Alexis,  dont  il  ne  sortit  plus.  Il  y  mena  une 
vie  irès-austèrc  jusqu'à  la  mort.  Il  jeûnait 
six  ou  sept  mois  de  l'année,  et  le  plus  sou- 
vent au  ;>ain  et  à  l'eau.  Il  portail  cuntiiu.el- 
lemeiit  le  cilice,  cl  prenait  de  singlantes 
disciplines.  Sou  lit  était  une  planche,  i)uel- 
queluis  un  pt^u  de  paille.  Il  ne  vivait  plus 
que  pour  Dieu,  il  soiihailail  d'être  uni  a\ec 
lui,  il  soupir.iil  sans  cesse  après  cette  union; 
et  (  iiliii,  accable  par  ses  austérités,  il  lumbi 
malailc  el  lut  attaqué  dune  fiètre  violeiiiu 
()iii  peu  de  jours  après  le  réduisit  à  la  der- 
nière extièmiie;  c'est  pourquoi,  voyant  la 
moi  t  approcher,  il  demanda  avec  beaucoup 
irhuiiiilite  les  sacrements  de  l'Eglise,  cl, 
après  en  avoir  été  muni,  il  rendit  sou  âme  à 
son  i.rcaleur  !•  IJ  avril  l't.'JJ,  en  préscnco 
de  tous  se»  frères,  qui  fondaient  en  larmes, 
étant  âgé  de  soixante-trois  ans.  S. in  corps 
fui  enterré  dans  l'eglise  de  ce  monastère,  ou 
un  lit  celle  épilaphe  sur  son  tombeau. 

Uic  j>icei  H.  iM  Clirislo  P.  /•".  Lupus  de 
Ohnilo  fuilionc  //i'>//u/iiij,  Rcsusciiator  il 
H'  f'iinutor,  lie  piimus  iiencralis  t'iic/iosituy 
o!d.nis     M  nuhi.ruin     Suncti    JJicronymi, 


HT, 


.IKR 


JFR 


Gli 


l'i-iiiri/uelnijus  monasterii,  gui  obiit  die  XI 11 
Apritis,  nnn.  M  CCCCXXXIII,  Ponlificalus 
Hoinini  Eugenii  Papœ  !V  nnn.  III. 

l'Iiilippe  11,  roi  d'Kspagiie,  fil  réunir  les 
iiionaslères  que  cel  ordre  avait  eu  Kspagiie 
au  nombre  de  sept,  à  relui  des  lù-iniies  ou 
.léronymiles.ran  1595.11  leurcn  reslecii  Ita- 
lie encore  dix-sepl,  dont  le  principal,  et  qui 
est  chef  d'ordre,  est  celui  de  Sainl-Picrre  de 
rOspitalcllo,  au  diocèse  de  Lodi;  les  autres 
sont  ceux  de  Saint-Alexis  à  Rome,  où  réside 
cnlinaircment  le  procureur  général;  Suinl- 
Paul  à  Albano,  Saint-Jérôme  de  Caslellacio, 
Saint-Côme  et  Saint-Daniieu  à  Milan.  Saiiit- 
Carpolbro  proche  de  Cômc,  Saint-Jcrônic 
pro.lic  de  Novare,  S  iin:-Jérôiiie  du  Biella, 
Sainte-Marie  de  Carauiagna,  Saint-B.ir- 
bacien  à  Bjlogiie,  Saiul-Savin  à  Plai- 
sance, Saint-Michel  ci  IJrcmliio,  Sainl-Sigis- 
mond  à  Crémone,  Sainle-Marie  à  IJi.idena, 
Sainl-Jcrônic  proche  de  Mantouc,  Saint-Mar- 
tin à  Pavie,  el  Saints-Gervais  et  Protais  à 
Montébelli)„  Le  général,  qui  prend  le  litre 
de  comte  de  l'Ospitaletlo,  fait  ordinairement 
sa  résidence  dans  ce  lieu  ;  il  perle  le  man- 
telel  elle  cainail  comme  les  prélats  deKome, 
cl  se  sert  d'ornements  pontificaux  par  une 
concession  du  pape  Paul  V;  et  Urbain  \  111  lui 
permit  de  donner  les  ordres  mineurs  ù  s  s 
religieux. 

Ils  suivir(  nt  d'abord  la  règle  de  saint  Au- 
gustin, coninie  nous  avons  dit  ;  ils  prinnl 
ensuite  celle  qui  leur  avait  été  prcsi nie  par 
leur  tondalcur  Loup  d'olniédo,  qu'il  a\ait 
tirée  des  écrits  de  saint  Ji'rôme;  mais,  après 
sa  mori,  ils  quiltèrent  cette  règle  pour  p.  en- 
dre  cfUe  di'  saint  Augustin,  qu'ils  suivent 
encore  aujouid'liui.  Il  y  a  cependant  des  au- 
teurs qui  ont  avancé  qu'ils  suivent  celle  que 
ijoup  d'Olmédo  leur  a  donnée:  mais  le  can- 
Irairese  piouve  par  l'ordinaire  ou  lituel  de 
celtt;  congrégation,  qui  a  été  rél'ormé  dans 
le  chapitre  général  tenu  l'an  1G14,  où,  en 
pailantdaiis  le  chapitre  deuxième  des  saints 
dont  ils  doivent  faire  l'offioe,  il  e4  maniiié 
que  le  28  février  ils  feront  l'olfi  c  double  de 
la  Trans'iation  de  saint  Augusiin,  dont  ils 
suivent  la  règle:  D.e  i28  Fcbruarii  Trunslu- 
lionis  sancti  Atigusliiii  episcopi  ne  EccUsiœ 
(loctoris,  duplex,  subcitjus  régula  nos  (juoque 
viililumus.  Il  en  est  aussi  fait  mention  dans 
la  formule  des  vœux,  tant  des  moines  que  des 
frères  c  nvers,qui  est  conçue  en  ces  termes: 
Moi  F.  N.,  d'un  lel  lieu,  promets  obéissance 
à  Dieu  tout-puissant,  à  lu  glorieuse  V terge 
Marie,  à  notre  Pire  S.  Jérôme,  et  à  vous 
dum  N.,  prieur  de  ce  monustère  du  diocèse  de 
N.,  et  à  vas  successeurs  (  sauf  l'obéissance  due 
au  général  et  au  chapitre  général),  de  vivre 
sans  propre  en  chasteté,  selon  la  règle  de  saint 
Augustin,  et  de  conformer  mes  mœurs  selon 
les  statuts  apostoliques  de  l'ordre  jusqu'à  ma 
mort.  Donné,  etc. 

11  y  a  aussi  dans  cel  ordre,  outre  les  frères 
convers,  des  frères  commis  et  des  donnés 
qui  font  des  vœuK  en  cette  manière  :  Moi 
F.  N  ,  natif  de  N.,  pour  l'amour  de  Dieu  el  le 
iidut  de  mon  âme,  j'abandonne  et  donne  ma 
propre  personne  et  tous  mes  biens  présent."  et 


à  venir,  droits  et  actions  qui  peuvent  m'appar- 
tenir  présentement  ou  qui  pourront  m'uppar- 
tenir  à  l'avenir,  à  Dieu  lout-piAssant,  à  lii 
bonne  vierge  Marie,  à  notre  Père  saml  Jérô- 
me, et  à  vius,  domi\.,  qui  êtes  ici  préstiil 
pour  recevoir  mon  abandon  et  mn  donation, 
et  pioniels  obi  s  ince  à  vous  et  à  vos  succis- 
scnrs  [sauf  celle  que  je  dois  au  chapitre  géné- 
ral et  au  général)  ;  el,  s'il  arrive  (ce  qu'à  Dieu 
ne  plaise)  que  je  sorte  d'ici  sans  permission, 
il  sera  permis  aux  serviteurs  de  Dieu  du  même 
ordre,  de  leur  pleine  autoiité,  de  me  pour- 
suivre et  de  me  contraindre  par  force  de  re- 
tourner à  leur  service.  Il  n'y  a  p  int  de  reli- 
gieuses de  cet  ordre,  les  statuts  défendant 
expressémeni  d'en  recevoir.  La  rè;;le  de  Loup 
d'Olmédo  défendait  aussi  aux  religieux  d'é- 
tudier, afin  d'être  plus  en  état  de  remplir  les 
devoirs  de  leur  état,  dont  un  des  principaux 
était  d'être  toujours  dans  la  retraite  ol  dans 
la  solitude;  mais  les  statuts  (|ui  ont  été  dres- 
sés après  la  mort  de  Loup  d'Olmédo  ont  ré- 
tabli les  études.  Ils  tiennent  leurs  chapitres 
généraux  tous  les  trois  ans.  On  y  élit  le  gé- 
néral, les  définit(yirs,  les  visiteurs  cl  les  su- 
périeurs particuliers  des  maisons.  Ils  se  lè- 
vent à  minuit  pour  dire  maiines,  et  ils  no 
mangent  poiufde  viande  dans  leurs  malsons, 
si  ce  n'est  dans  celle  d(î  Saint-Alexis  à  ''.orne, 
à  cause  qu'elle  est  située  en  mauvais  air. 
Outre  les  jeûnes  presrrils  par  lliglise,  li  y 
en  a  encore  plusieur  s  qui  leur  sont  ordonnés 
par  les  statuts,  et  depuis  le  premier  oclobre 
jusqu'à  Pâques  on  ne  leur  donne  aucune 
pitance  le  soir,  les  lundis,  les  mercredis  et 
le-,  samedis.  Leurs  constitutions  furent  ap- 
prou\ées  par  le  papï  Paul  V  l'an  ICll. 

Quant  à  l'habillement,  les  moines  ont  une 
luni(|ue  blanche  serrée  d'un  ceinture  de  cuir, 
un  scapulaire  de  couleur  tannée  auquel  est 
attaché  un  petit  capuce,  dont  ils  ne  se  ser- 
vent point  pour  se  couvrir  la  tète  ;  car,  lors- 
qu'ils n'ont  que  la  robe  et  le  scapulaire,  ils 
portent  un  bonnet  carré  ;  mais,  lorsqu'ils 
sont  au  chœur,  exiepté  pendant  sextc, 
noue  et  compiles,  ils  mellent  par-dessus  la 
robe  une  coule  de  couleur  tannée,  qu'ils 
porte  .1  aussi  allant  par  la  viile.  Ils  n'ont 
point  les  pieds  nus,  et  ne  portent  point  de 
sabots,  comme  dit  M.  Hermanldans  son  His- 
toire des  Ordres  religieux;  ils  n'en  ont  même 
jamais  porté.  Les  frères  convers  ont  pareil- 
lement une  tunique  blanche  el  un  scapulaire 
de  couleur  tannée,  et  au  lieu  de  coule  un, 
manteau.  Les  frères  commis  ont  une  luui(|uu 
de  couleur  tannée  et  un  manteau  do  même, 
et  les  frères  donnés  ou  oblats  qui  demeurent 
dans  les  monastères  ont  une  petite  luniquc 
aussi  de  couleur  tannée  qui  ne  desiend  que 
jusqu'aux  genoux;  mais  ceux  qui  sont  hors 
le  monastère  sont  vêtus  comme  les  séculiers. 

Celle  congrégation  a  pour  armes  d'azur  à 
des  nues  en  chef,  un  bras  issant  du  côté 
gauche  de  l'écu  en  partie  nu  et  en  partie  re- 
vêtu d'une  manche  de  couleur  tannée,  tenant 
à  la  main  une  pierre,  une  croix  de  bois  bro- 
chaitt  sur  le  tout,  et  un  lion  couché  aii  pied 
de  la  croix  sur  une  terrasse  de  sinople,  l'écu 
timbré  d'un  chapeau  de  cardinal. 


etr,  mcTioNN.MUF.  dks  oudkks  ueugieux.  ci  g 

^i'uciira,  llisi.  di   ht    Oui.  de  S.   Ctnin.  de   la   lorre  de  Ccriélo,  qui    ajjpai  leiiail  à 

Il.TinénogiMc   (le   S.    l'ahlo,   Oriyen  el  (on-  celle  famille. 

liiiuacion  de  t'Iuft.  y  irli.j.  (icronim.  Silu  si.  La  nai.'Jsancc  distiiigiici>  de  .loan  .  joiiilo  à 

M.iiirol.,  Mnr.  Océan,  di  lut.  gl.  Hclig.  l'io'r.  .••es  graiuls  biens,  le  lit  passer  par  louU-s  lis 

Orscoii/. ,  /'»vr»i(/. /{(im.  l'ielro  Kos,"i,  rW.  (/i  rh.irgos   de    la    répiiiiliijuo  ,    dont    il    do\iiU 

l.up.    (/'0/".e(/o.  Aseagii.  T.iiiiliur.,    HeJur.  même  nonlaloiiicr  ;    ni.iis    il    n'en   élait    pis 

Abbal.,    loin.   11.    Philip.  Iterij.im.   >"(//////(»".  plus  liltéial  :  au  coulriiiri' .  son  cu'iir  élail  si 

Chroni.,  lib.    xiv,  et  .Slntitt.  et  Ord.   Muni-  allaclic  aux  richesses,  (|u'il  él.iit  uniquement 

c/ior.  Ercm.  Cong.  S.  Jeroiii/mi.  occupe   des   moyens   de   les  augmi'iiicr   par 

J.  K()MI<:  DK  L.\.NZ.\.r<;M.Ji:A>f  I'aScuase.  t""!*"»  «"f'^s  ^^  *"'«'*  Jus'es  <''  i"jus(es.  LU 

,r...^«vï»iiii.-»;    t'        I-    A       ,t\  jour,  étant  venu  chez  lui  avec  un  grand  ai - 

JLUONV.Mllt^>.  }oy.  J.:uô.«e  (Oiu.nK  m;  j,^,^    ,,,  ^^  imuvanl   point  le  dîner  prél  à 

^^"'^  '•  i'Iieure  ordinaire,  il  se  mit  dans  une  colcii! 

j/iSUATES  (OnnnE  diîs).  t'irannc  contre  son   cuisinier,  et  s'einporl.i 

§  I-.  De  l'ordre   des   Clercs  aposloliqurs  ou  "H'""- /onlre  sa   femme,  comme  vi  çeûi  clé 

Jésuotes   de   Sainl.Jérôme.   avec  la  vie  de  f?  ■'"'^-  '/.'^^  '  a^'.n.e,  qui  était  fort  vc,  ueuse. 

,«mi  Jean  Colombin,  leur  f„ml,Ueur.  'j'''^^  ''^'  '  ^"lo^cir;  et    .ilin  ,iu  i    eut  de  ,|uoi 

'  s  occuper  pendiiil   qu  ou  apprêterait   le   di- 

Si  les  provinces  se  glorifient  d'avoir  donné  ner,  elle    lui  mil  eiilre  les  mains  la  Vie  des 
naissance  à  des  hommes  illustres  qui  se  sont  Saints;  m  is  Jean  la  rebuta  el  jeta  brusque- 
fait  admirer  par  leur  science  ou  qui  ont  e^-  ment  le  livre  par  terre.  Sa  femme  se   relira 
collé  dans  quelque  art,  à  plus  forte  raison  se  sans  lui  répondre,  et  Jean,  se  trouvant  seul, 
doivent-elles  esiimer  heuieuses  qunud  elles  ramassa  le   livre.  Dieu    permit   qu"eu    l'oii- 
produisent  des  personnes  ((ui  se  rendent  re-  vranl  il  luiiibâl  sur  la   vie  de   sainte    .Mar.o 
cominandables  par   la  s.iinltlé  de  leur  vie,  Kgyjilienne;  et  le  plaisir  qu'il  prit  à  la  lire  lui 
arcoiiipagnée    il'une    grande    innocence   de  lit  oublier  le  rf|ias  pour  le.iuel   il  avait  eu 
mœurs,  qui   leur  foui  inériler  le  culte  et  la  lanl  dimpatience.  Il  fut  si   louché  de  celli- 
vénération  des  fulèlis.  La  'roscane  a  fourni  lecture,  qu'il  coinmença  à  méiiriser  ce  qu'il 
des  personnes  illustres  de  toutes  les  façons,  avait  le  plus  a'iiié  juscju'alors.  D'avare  i|u'il 
et  elle  a  l'avantage  qu'entre  les  saints  qu'elle  él.iit,  il  devint   fort   libéral   envers   les   pau- 
a  donnés  à  l'Lglise  on  y  compte  plus  de  fon-  vres.  il  jeûnait  presque   tous   le*  jours,  Iri;- 
daleurs  d'ordres  que  dans  les  autres  provin-  queutait  les  églises,  cliâti.iit  son  corps  par 
ces.  Car,  outre  le  bienheureux  Etienne  Cioiii  des  austérités  et  des  mortifications   surpre- 
dc  Sienne,  fon  lateur  des  chanoines  réguliers  nantes  ;  et  sou  zèle  croissant  de  jour  en  jour, 
de  la   Ciingrégation  de  liidogne,  et  les  sept  il  fil  la  proposiiion  à  sa  femme  de  garder  la 
fondateurs  de  l'ordre  des  Servîtes,  dont  nous  conlinence  et  de  vivre  à  l'avenir  comme  frère 
ddiiiierons   les   vies   à   l'iinicle   de   ce    nom,  el  sa'ur.  Celle  dame  étail  encore  jeune;  mais, 
nous  parlerons  dans  la   suie  de  saint  Jean  comme  elle  s'élaitdejà  exercée  dans  toutes  le» 
Gualbert  de  Florence,  instituteur  de  l'ordie  veilus,  elle  n'eut  pas  de  p  iiie  à  consentir  à 
de   \'allombreuse;  du   LiLulieureux   Charles  une  séparation  de  corps,  1 1  elle  n'eut  plus 
(iranclli  de  Florence^,  qui  a  donné  commun-  avec  lui  d'autre  liaison  que  celle  du  coMir. 
renient   à    la   i  oiigrégalion    des    lîrmiles   de  Jean  quitla   pour  lors  ses  riches  habits  el 
Sainl-Jèrôme   de   Fiesoli  ;   du    bienheureux  se  revéïil  de   l'étoffe   la   plus  vile  qu'il   put 
l'ierre  fiainbacurli  de  Pise,  père  des  Ermites      trouver,  se  souciant  peu  lic  ce  que  le  momie 
de   Saiiil-Jér('une,  pi  csenteiuent  surnommés  eu  dirail.  Il  fil  di- sa  maison  un  hôpital  pour 
du  bienheureux  Pierre  de  Pis'',  leur  fonda-  y  rcievoir   les  pauvres,  les  élraiigeis  et  les 
leur;   du   bii'i, heureux  Hernard  Plolomei  de      malades.  Il  leur  lavait  les  pieds,  leur  donnait 
Sienni-,  biudiileur  d  s  moines  du  Mont-Oli-  de  bons  lits  et  des  nourritures  en  abondance, 
vel;   de   saint   François  d'Assise,  patriarche  les  servait  lui-même,  el  n'oubliait  rien  de  ce 
des  Frères  Mineurs,  né  dans   l'Ombrie,  que      que  sa  iliarité  lui  pouvait  sui:;;èrer.  Il  s'as- 
les  géographes  renardeut  comme  une  parlie  socia  dans   ses   s.iials   exercices   un   genli!- 
de  la  Toscane;  de  saint  Iternardin  de  r  ieniie,      homme  sienno  s  de  ses  amis,  nommé  Fran- 
propagileur  de  l'observance   du   nutne   or-      cois   de  Mino  \'n\  cuti  ,  qu'il  disposa  à  faire 
4lre;   et  enlin  ,  eu   ra|pi;rl,iul   l'origine   des      avec  lui  un  généreux  mépris  du  monde. 
Clercs   apostoliques   ou   Jesuales   de  Saint-         Jean, étant  tombé   malade,  el   >oyaul(jee 
Jérôme,  nous   allons   donner  la  vie  de  saint      sa   femme   et   sou   compagnon    le    traitaient 
Jean  Colombin  de  Sienne,  leur  fonda:eur.          avec  trop  de  délicatesse,  se   leva  de   siui   lit 
Ce  saint  lirai:  son  origine,  du  coté  de  son      lorsqu'ils  étaient  absents,   et  alla  au    plus 
père,  lie  la  m.iis'  n  des  (]olombiui,  et  ilu  côté      pauvre  bôpil.il  di;  la  ville  pour  s'y  f.iirc  irai- 
de  sa  mère,  des  'l'ommasi,  toutes   (h'ux   des      ter  avec  les  pauvres.  Sa   iemnie  et  François, 
plus  nobles  et  des  principales  de  la  ville  de      le    (herchèreul    iiiulilciuenl    pendant    deux^ 
Sienne,  qui  elail  alors  une  icpubiique.  Il  fut      jours   chez   leurs   p.irenls  el  leurs  amis;  et' 
d'.iboril  engagé  dans  le  mariage,  el  épousa      ayant  ele  ensuite  dans  tous  les  hôpitaux,  ils 
uni-    demoiselle   de    qualité   nouunce   lllaisc      furent  fort  surpris  de  le  trouver  dans  le  plus 
li.inilinelli,  qui   sortait  aussi    d'une    famille      pauvre  de  tous.  Ils  !■  firent  ronsenlir  à  re- 
rneore  plus  illustre  que  celle  des  Culumbini,      tourner   chez    lui,  mais   ce   fut  à    coudilion 
l'iiiir  avoir  donné  à  l'i'Iglisc  un  pape,  qui  fui      i)u'ils  ne  le  Iraileraienl  plus  avec  laiil  de  de- 
Alexjiidre   III,   el    plusiems   (  ariliii,iu\  ,  el      licalesse  et  i|u'ils  ne  lui  douueraieiit  que  dcs' 
«au'ou  niimmail  ciiiure  de  Ceiiclaiii;  à  cause      alimciil->  giubsicrs. 


C17 


/lis 


Etnnt  retourne  en  santé,  et  condiuiaiit  ses 
pxcic'ces  de  charité  avec  son  compagnon,  ils 
trouvèrent  à  la  porte  île  la  grandi;  C|i;lise,  où 
ils  allaient  pour  entendre  la  mes>G,  un  pau- 
vre lépreux  tout  couvert  de  plai  s.  Jean  le 
cliaigea  sur  ses  épaules  et  ne  rougit  point 
de  le  porter  chez  lui  à  travers  la  place  et  les 
rues,  devant  tout  le  tiionde.  Sa  femme  en  rut 
horreur  et  ne  put  souiïrir  rinlVclion  de  si'S 
nicéres;  elle  fit  même  ce  qu'elle  put  pour 
ohl  ger  son  mari  à  le  faire  sortir  de  la  mai- 
son ,  m.iis  il  persista  à  le  vouloir  garder.  Il 
lui  lava  ses  plaies,  et  hut  même  de  l'eau 
dans  laquelle  il  les  avait  lavées.  Il  retourna 
avec  sou  compagnon  à  l'église  poury  eiileiidre 
la  messe,  priant  sa  lemine  de  rrndre  quel- 
(]ues  visi  es  à  ce  pauvre  pour  voir  s'il  n'ai!- 
rail  point  hesoin  de  quelque  chose  pendant 
leur  aliscnre;  mais  elle  lui  déchira  qu'elle  ne 
pouvait  pis  lui  promeltrc  ce  q  l'il  souhaitait, 
à  cause  de  la  grande  répugnance  qu'elle  r?s- 
senlail  [lour  ce  pauvre.  f!eiiendant  elle  eut 
houle  de  sa  faildesse,  et,  voulant  avoir  part 
au  mérite  de  celle  sainte  action,  elle  voulut 
entrei-daus  la  cfianibre  du  ni.iladc;  m.iis  elie 
sentit  à  la  porte  une  odeur  agréable  au  lieu 
de  l'inferlion  et  de  la  puanteur  dont  elle 
avait  eu  d'aliord  de  l'horreur,  et  elle  fut  sai- 
sie d'un  si  grand  respect,  qu'elle  n'o<a  passer 
outre.  Peu  de  temps  après,  Jean  et  François 
revinrent  de  l'église  avec  quelques  douceurs 
qu'on  leur  avait  données  pour  leur  malade. 
Cette  dame  leur  dit  ce  qu'elle  avait  senti.  Ils 
res|iirèrent  eux-mêmes  celte  odeur,  ei  fu- 
rent encore  plus  surpris  lorsque,  ét'mt  en- 
trés dans  la  chambre,  ils  n'y  trouvèrent  pus 
le  malade,  qui  était  Jésus-Christ  lui-même 
qui  avait  pris  la  forme  du  lépreux  :  ce  que 
Noirc-Siigucur  confirma  à  Jean  dans  une 
vision  qu'il  eut  quelque  temps  après. 

Cet  evétiemont  surprenant  fortifia  nos 
d'-ux  saints  dans  la  résolution  qu'ils  av.iient 
prise  lie  tout  abandonner  pour  su  vre  Jésus- 
Christ  pauvre.  Il  leur  restait  à  chacun  une 
fille  de  leur  mariage.  Celle  de  Jean  était 
âgée  de  treize  ans,  el  celle  de  François  seu- 
lement de  cinq  ans.  Ils  les  mirent  dans  un 
monastère  de  l'ordre  de  Saint-Bmoît  dédié  à 
saint  .\hundius,  el  que  le  vulgaire  a  toujours 
appelé  par  cnrruplion  Sainte-Bonde.  Jean, 
ayant  déjà  distribué  une  granue  partie  de 
son  bien  aux  pauvres,  Cl  trois  parts  de  ce 
qui  lui  restait.  Il  en  donna  une  au  grand 
iiôpilal  de  Sienne,  une  autre  au  monastère 
de  Sainte-Bonde,  et  l'autre  à  l'hôpital  de 
Niitre-Dame  de  la  Croix,  à  cond  lion  qu'ils 
donneraient  une  certaine  somme  à  sa  femme 
tant  qu'elle  vivrait.  Pour  François,  il  donna 
tous  ses  biens  au  môme  monastère,  à  condi- 
tion que  l'ablicsse  sirait  obligée  de  recevoir 
six  pauvres  filles  qui  voudraient  embrasser 
la  vie  religieuse,  sans  qu'elles  fussent  obli- 
gées de  donner  aucune  dot.  Il  mit  ensuite  sa 
fille  sur  l'autel  pour  l'offrir  à  Dieu,  et,  s'of- 
frant  encore  lui-même,  il  fil  vœu  de  chasteté, 
de  pauvreté  et  d'obéissance  en  présence  de 
tout  le  monde,  en  disant  qu'il  ne  prétendait 
point  que  le  monastère  fiil  obligé  en  aucune 
façon  à  lui  rien  donner,  et  qu'il  ne  voulait 
Dictionnaire  des  Ordres  religieux.  II. 


JF.5  «SI8 

rccevo'r  de  lui  qu«  quelques  morceaux  de 
pain  dans  la  distribuiijn  qu'il  avait  accou- 
hnné  d'en  fairo  au\  pauvres,  di)nt  il  voulut 
passer  un  acte  par-devant  notaire. 

Ces  deux  serviteurs  de  Dieu  commencè- 
rent pour  lors  à  ne  plus  vivre  q^ie  d'aumô- 
ne ,  allant  de  pnrle  en  porte  demander  du 
pain.  Ils  se  revêlirent  d'un  habit  de  bure  el 
encore  tout  rapiécé,  et  tant  l'hiver  que  l'été, 
et  quelque  temps  fâcheux  qu'il  fit,  ih  allè- 
rent toujours  nu-picds  el  ne  coiivraienl  point 
leurs  lêtcs.Ont-re  les  cilices  et  les  discip  incs 
dont  ils  déchiraient  leur  corjjs,  ils  inven- 
taient tous  les  jours  île  nouvelle:  morlifica- 
lions.  Piiur  être  les  parfaits  imitateurs  de 
Jésus-Christ,  ils  voulur,'nt  êlre  méprisés 
dans  le  lieu  même  où  ils  avaient  reçu  le 
plus  d'honneur.  Ils  avaient  tous  les  deux 
exercé  les  principales  charges  de  la  républi- 
que; cl,  comme  poniianl  les  deux  mois  qu'ils 
avaient  été  du  nombre  des  neuf  prieurs  de 
la  \ille,  ils  avaient  été  considérés  et  traités 
avec  beaucoup  de  respect  et  de  dcférenco 
dans  le  palais,  ausi  voulurent-ils  pendant 
deux  mois  exercer  dans  le  même  lieu  les  of- 
fices les  plus  viis  et  les  plus  méprisibles.  Il 
n'y  avait  pas  pour  lors  de  fontaine  dans  le 
palais;  ils  allaient  tous  les  jours  à  celle  de  la 
place  puiser  de  l'eau  (lour  y  en  porter,  et 
chargeaient  encore  sur  leurs  épau'es  le  bois 
et  les  autres  choses  nécessaires;  ils  .lidaient 
le  cuisinier  dan<  son  office,  lavaient  les 
écuelles,  balajaient  les  salles  et  la  place  qui 
est  devant  le  palais;  el ,  pendant  tout  le 
temps  qu'ils  s'employèrent  à  ces  aciions 
d'humilité,  ils  n'y  voulurent  jamais  manger, 
mais  ils  allaient  demander  l'aumône  d,;ns  la 
ville  pour  vivre. 

Une  niau  ère  de  vie  si  surprenante  leur  al- 
lira  beaucoup  de  railleries.  Qicbiues-uns  les 
regardèrent  comme  des  fous;  mais  il  y  eu 
eut  aussi  plusieurs  qui  en  furent  vivement 
tounliés,  et  qui,  voyant  le  mépris  qu'ils  fai- 
saient des  honneurs  el  des  richesses,  voulu- 
rent les  imiler.  Les  uns  entrèrent  dans  des 
ordres  religieux  ;  d'autres  ,  en  demeurant 
dans  leurs  propres  maisons,  se  coutenlaiont 
d'y  mener  une  vie  chrétienne  et  relirée  ; 
d'autres  enfin  se  joignirent  à  eux.  Ce  ne  l'ut 
néanmoins  quedoux  ans  aiirès  leur  entier  rc- 
noncenieiit  au  monde,  c'est-à-dire  l'an  1365, 
qu'ils  commencèrent  à  avoir  des  compa- 
gnons, el  on  les  voyait  souvent  tous  en- 
semble aller  par  les  rues  chantant  des  canti- 
ques, ayaiit  sans  cesse  le  nom  de  Jésus  à  la 
bouche  et  exhortant  les  pécheurs  à  faire  pé  - 
nilence. 

Ils  ne  recevaient  ceux  qui  voulaient  en- ■ 
irer  dans  leur  société  qu'.iprès  de  rudes 
épreuves.  Le  plus  souvent,  au  rapfiort  de 
ftiorigia,  qui  a  é'é  général  de  cet  ordre.  Ht 
conduisaient  le  novice  par  les  rues,  ayani 
une  couronne  d'olivier  sur  la  tête,  le  faisaient 
monter  sur  un  âne,  quelquefois  le  visage 
tourné  vers  la  queue;  el  ceux  qui  l'accoui- 
pagnaienl  avaient  aussi  des  couronnes  d'o- 
livier en  tête  et  des  rameaux  en  main,  et 
criaient  sans  cesse ,  Vive  Jésus-Clirisl,  et 
loué  soit  à  Jamais  Jésus-Cfiiist.  D'aulres  fois 

20 


«ifl                               nir.TioNNAinF.  tes  ononKS  rclioimix.                               cso 

ils  I.' coiidiiis.iipnl  nii jusqu'à  1.1  rt'inturc,  los  qu'ils  «levaiciU  avoir  do  quoi  couvrir  leurs 
mains  liecr*  derrliTC  h-  dos,  en  lui  dis  lut  des  K-les,  cl  iiu'il  consonlait  (juils  allassput  iiu- 
injurcs,  cl  oxlioraul  le  peuple  à  |>rlcr  Dieu  pieds,  mais  qu'il  voul.iii  (|u'ils  porlasscnl 
pour  co  uiisérabic  |.crheur:  mais  la  plupart  des  sandales  de  bois.  Le  iiapc  alla  ensuite  à 
du  temps  el  la  manière  la  plus  or.linaire  Vilcrbe,  où  ces  bons  religieux  j'acronipaj^nè- 
|i;irmi  dix,  c"elail  de  rondiiirc  le  novice  de-  renl.  Mais  à  peine  y  furenl-ils  arrivés,  i\ua 
vanl  une  imape  de  la  Vierjjc  qui  é:ail  dans  <les  personnes  mniintonlionuées  les  calum- 
l.i  grande  pl.ice  de  la  ville,  el  là  ils  le  dé-  nièrent  auprès  de  Sa  S.iinlclé,  les  j.cciisanl 
fioiiillaienl  île  ses  babils  pour  le  revélir  de  d'être  iiifi'clès  des  erreurs  des  fratricelles  ; 
mécli.inis  baillons,  el  tous  avec  des  couroii-  de  sorie  (lu'Urbain  V  donna  commission  au 
nés  d'olivier  en  télé  et  des  rameaux  en  main  cardinal  (juilliuaic  Sodre,  évéqui-  do  Mar- 
ilinnlaienl  des  cantiques  spiriluels.  (]ette  scille,  d'examiner  leur  doctrine.  Leur  inno- 
pratique  de  porter  dos  couroiuirs  el  des  ra-  cence  ayanl  été  reconnue,  le  pape  ap[iriiuva 
incaux  d'olivier  était  particulière  à  ce  saint  leur  institut  l'an  1307,  et  donna  de  sa  pro- 
fondateur, et  il  s'en  servait  dans  toutes  les  pre  main,  à  ceux  qui  étaient  pré-cnts,  Iha- 
cé.'émonies  d'éclat,  coninie nous  \eri'ous dans  bit  qu'il  voulait  ()ue  l'on  portât  à  ra^cnir 
la  suite.  dans  cet  ordre,  savoir  :  une  lunique  blancbe 

lanl  de  mortifications  et  de  si  rudes  épreu-  serrée    d'une  ceinture  de    cuir,    avec     une 

ves  que  s.iint  Jean  Colombin  exerçait  envers  chausse  ou  cbaperon  bljucpour  couvrir  leur 

ceux  qui  voulaient  être  ses  disciples,  n'em-  tète,  qu'ils  avaient  accoutumé  de  porter  sur 

péchèrent  pas   qu'en    moins   de  deux  ans  il  l'épaule  lorsqu'ils  avaient  la  lélc  dérouverte, 

n'en  eût  plus  de   -oixante  il  dis,  parmi  les-  ordonnant  de  plus  qu'ils  porteraient  des  sau- 

queis  il  y  en  avait  qui  étaient  des  principa-  dal  s  de  bois  (1);  el   le  cardinal  Anglic  lîri- 

les  noblesses  de  la  province.  Sou  zèle   pour  mo.ird,  frère    du  pipe   cl   non    pas    ncM'u, 

le  salut  des  âmes  ne  se  bornait   pas   seule-  comme  quelques  auteurs  ont   avancé,  el  qui 

ment  à  la   ville  de  Sienne,  il  parcourut  en-  était  aussi  évé(|ue  d'Avignon,  leur  fil  faire  des 

core  les  biuirgs  et  les  villages  de  la  Toscane  manteaux  d-  couleur  tannée  qu'i  s  oui  aussi 

pour  porter  les  pécheurs  à  la  pénitence,  el  toujours  portés  depuis,  il  n'est  pis  vrai  que 

fit  beaucoup  de  fruits  dans  tous  les  lieux  où  ce  pajie  leur  donna  la  réj.'ledc  saint  Augus- 

il  passa.  Comme  il  allait  un  jour   avec    trois  tin,    comme   plusieurs    historiens   ont  dit  : 

ou  ()ualre  de   ses    discipL's  à   IM  lUlichellio,  Morigia,  qui  a  été  s;èn6ral  de  cet  ordre,  doit 

dans  le   territoire  de   Sienne,   et   qu'il    était  é  re  cru  lorsqu'il   dit  que  ces  religieux  f.ii- 

oblige  de  passer  dans  une  terre  i|ui  lui  avait  sai  ni  Us  trois  vœu.x   essentiels  de   religion 

appartenu   cl  où  il  avait   commis  beaucoup  sous    la    protection  de  saint   Augustin,    et 

(le  vexations,  il  se  dépouilla  tout  nu  jusqu'à  qu'ils  avaient  une   règle  que  leur  écrivit  un 

la  ceinture,  se  fit  lier   avec  des  cordes,   et  religieux    de  leur  ordre  qui  fut  fa  t   évèque 

pria  ses  compagnons  de  le  tirer  avec   vio-  de  Feirarc  ;  et  le  même  auteur,  parlant  des 

li'nee,  en  disant  tout  haut  aux   habitants  de  ordres  (|ui  suivent  la  règle  de  saint  Augus- 

ce  lieu  :  N'oilà  celui   qui  voulait    vous    faire  lin,  dit  encore  que  les    Jésuales  observaient 

mourir  de  faim,  cl  qui  n'avait  point  de  coin-  la    jirofession  de  suint  Augus'in,  mais  non 

p&ssiou   des    pauvres,  qui    vous    prêt  lil   de  pas  sa  règle,  parce    qu'ils    en    avaient   une 

mauvais  grain  dans  la  nécessité  |iour  eu  li  -  qui  leur  avoit  été   donnée   par  un   de    leurs 

rcr  de  bon  au  temps  de  la  récolle,  el  au  dou-  frères  qui  fut  fait  évèque,  laque  le  fut  con- 

hle  de  ce  qu'il  avait  prêté,  cl  qui  souhaitait  firuiôe  i)ar  le  saint-siège.  Ce  fut  le  bienlieu- 

<Iuo  le  blé  lût  bien  cher  alin  de  s'enrichir.  reux  Jean  de  Tossignan  qui  drossa  celte  rè- 

Le  nombre  des  disciples  de  ce  saint  fou-  gle.  il  fut  fait  évé(|ue  de  Ferrare  l'an  14-.'il, 
dateur  aiigmenl '.ni  de  jour  en  jour,  il  vou-  et  mourut  l'an  ik'M.  Ils  ont  néanmoins  vé- 
liil  faire  approuver  son  ordre  par  le  pape  ri  ahlemenl  suivi  la  règle  de  saint  Augu-tia 
Urbain  \',  qui  venait  d'Avignon  à  Home;  il  dans  la  suite,  cl  elle  est  à  la  tète  de  leurs 
alla  au-devant  de  ce  pontife  avec  un  grand  dernières  coHstitulions  qui  furent  imprimées 
nombre  de  ses  disciples,  lis  s'arrèlcrent  à  Ferrare  l'an  IGVI,  après  avoir  été  approu- 
quelque  lemj'S  à  \  itcrb'',  en  attendant  sou  vèes  l'année  prècéilente  par  le  papo  Urbain 
arrivée;  cl,  sachant  qu'il  devait  débarquer  \\\\,  (|tii  par  sa  bulle  a]ipi'lle  leur  congre- 
à  Cornéto,  ils  s'y  rendirent  et  se  trouvèrent  galion  la  congrégation  des  Jésuales  de  Saint- 
aii  |iort  avec  des  cou:ounes  d'olivier  sur  Jérc'ime  sous  la  rè,,'le  de  saint  .\ugustin,  et 
leurs  léles  el  des  r.imeaux.<  n  main;  et  lors-  ces  conslilutions  lurent  tirées  de  la  règle  do 
<|ue  le  pape  mit  pied  à  ti  rro,  ils  s'écrièrent  :  saint  Aug-istin,  de  celle  du  bienheureux  Jean 
Loiluto  sin  (iicsti  ('lirislo  et  viva  il  sunciis-  de  Toss.gnan,  et  des  règlements  qui  avaient 
siwo  Padre.  Ce  pontife,  les  voyant  hab.l.éj  élé  faits  dans  leurs  chainlres  généraux, 
d'une  man  ère  extraor.linaire,  et  ayant  su  Le  nom  de  Jésuales  fut  donné  à  ces  reli- 
ée ([u'ils  diinaudiiicnl,  admira  leur  siinpli-  giciix,  parce  qu'ils  avaient  toujours  le  nom 
cité  el  les  reçut  favorablement.  Il  interrogea  de  Jésus  à  la  biuche;  el,  comme  dans  le 
Jean  Colombin  sur  leur  manière  de  vie;  el,  commencemeni  ils  eurent  une  gr.indc  devo- 
comme  ils  avaient  de  méchantes  robes  toutes  lioJi  à  !>ainl  Jèionic,  ils  résniurent  de  le 
r.ipiécécs,  el  qn«  parmi  eux  il  y  avait  plu-  prendre  pour  leur  pro'i-cteur  el  avoc.it,  cl 
sieurs  gentilshoiniiies  cl  personnes  lettrées,  dédièrent  en  sou  houneur  la  plus  gr.indo 
il  leur  dit  qu'il    leur    donnerait  des    babils,  partie  des  églises  el  des  oratoires  qu'ils  pos- 

(1)  Voit.,  'J  b  lin  ilil  vid..  Il*  l.'ii. 


Giil 


jitS 


JES 


62-2 


sédaient.  Ce  ne  fut  néanmoins  que  lon^lemps 
.•tprcs,  l'an  1V.Î2,  que  le  pnpe  Alexandre  VI 
ordonna  que  les  religieux  de  cet  ordre  no 
s'appelTeraient  plus  simplement  Jésunles, 
mais  les  Jésiialcs  de  Sainl-Jcrôaio,  et  défen- 
dit à  toutes  les  conprégalions  qui  bâtir^iieTil 
dorénavant  des  églises  de  les  dédier  à  l'iion- 
ni'ur  de  saint  Jirônic,  dans  les  lieux  où  il  y 
en  avait  déjà  de  ce  nom  appartenant  aux  Jc- 
suales,  el  que  dans  les  processions  publiques 
où  ils  avaient  droit  d'assister,  aucune  é^ïlise 
ne  pût  poi  1er  une  bannière  avec  l'image  de 
saint  Jérôme.  Depuis  ce  lemps-là.  cet  ordre 
a  toujours  clé  appelé  les  .lesuales  de  Sair.l- 
Jérôoie  par  les  p;ipe<  successeurs  d'Alexan- 
dre VI;  le  nom  de  Clercs  apostoliques  leur 
fut  aussi  donné  à  cause  de  la  vie  apostoli(iue 
qu'ils  menaient. 

SainUean  Colombin  ne  survécut  pas  long- 
temps à  la  confirmation  de  son  ordre.  Comme 
il  relournail  à  Sienne  avec  ses  compagnons, 
il  fui  attaqué  d'une  grosse  fièvre  à  liolsenne. 
On  le  mena  à  Aquapendentc,  où  l'on  espé- 
rait trouver  plus  de  secours  qu'à  Bolsenne; 
il  y  reçut  le  saint    viatique;  et,  comme    ses 
disciples  souliaitaicnl  qu'il  pût  mourir  dans 
l'abbaye  de  Sainle-P>onde,  ils  le  conduisirent 
encofL-  plus  loin.  Ils  furent  cependant  con- 
traints, la  maliidie  augmentant,  de  s'arrêter 
au  bourg  de  l'abbaye  Saint-Sauveur,  où  saint 
Jean  Colombin,  aprèsavoirreçu  le  sacrement 
derestrcme-onclion,  mourut  un  samedi,  der- 
nier jour  de  juillet  de    l'an    13G7.    Les    reli- 
gieux   n'exécuièrcnl  pas  ses  dernières   vo- 
lontés, car  il  avait  ordonné   qu'on    le  portât 
après  sa  mort  dans  l'abbjiye  de  Samie-Bonde, 
pour  y  êlie  enteiré  au   pied   de  la  muraille 
du    monastère,   et   qu'on   l'y    conduisit    les 
mains  liées  derrière    le    dos,   eusi'veli    dans 
un  lin  eul  el  porté  sur  un  âne;    mais    ils   le 
portèrent  sur  leurs  épaules  dans  une  caisse 
lie  bois  avec  un  grand  nombre  de  llauibeaux, 
el  les  peuples  des  lieux  où  ils  passaient  ac- 
couraient  en    foule   pour    révéïer   ce    saint 
corps;  plusieurs  même  par  dévolion  vnuUi- 
renl    l'aiconipagner    jus(iuà     l'abbaye    de 
Sainle-Bonde,  où  il  fui  en'erré    avec    beau- 
coup   de   pompe.    11   fil    plusieurs    miracles 
qui    obligèrent  dans  la   suite    le    jiape  Cré- 
goirc  XIII  à  insérer  son  nom  dans  le  Marty- 
rologe  romain  ,   el  le    pape   Sixte  V   a  .ic- 
cordé    indulgence    plénière    à   ceux   qui    le 
jour  de  sa  fcte,   laciuelle   est  de   précepte  à 
Sienne,  visiteraient  l'église  de  son  ordre. 

Ce  saint  avait  nomme  pour  son  successeur 
dans  le  gouvernement  de  son  ordre  le  liien- 
beurcux  François  Mino  Viiicenti,  son  pre- 
mier compagnon;  mais  la  mort  ne  put  désu- 
nir que  pour  un  peu  de  temps  ces  deux  ser- 
viteurs de  Dieu, qui  avaient  été  si  unis  sur  la 
icrre  du  lien  de  la  charité.  Le  bienheureux 
François  ne  survécut  que  de  quinze  jours 
à  saint  Jean  Colombin,  et  alla  êlre  dans  le 
ciel  le  comiiagnon  de  sa  glnire,  comme  il 
avait  élé  ici-basiecompagnon  de  scslravaux. 
lUomba  malade  le  S(pli(kiie  jour  après  la  mort 
doce  saint  fondateur  ;  el,  étant  décédé  dans 
l'abbaye  de  Sainte-Bonde  le  13  août  de  la 
même  aunée,  il  fut  enterré  à  côté  de  saint 


.lean  Colombin  dans  l'église  de  colle  abbaye. 
Ainsi  il  ne  prit  point  le  gonvernenient  de 
l'ordre,  puisqu'il  fallut  bien  employer  six 
jours  àijorlcr  le  corps  de  saint  Jran  Co'oui- 
bin  du  lieu  où  il  était  mort  A  Saime-Iîonde, 
cl  à  lui  rendre  les  derniers  dovuirs:  ainsi 
ceux  qui  ont  dit  que  cet  ordre  aval:  fait  de 
t'raiids  progrès  sous  le  gouvernemc  il  du  B. 
François  Mino  Vincenli  se  sonl  visiblement 
trompés. 

Ce  fut  le  P.  Jérôme  Dasciano  qui,  après  la 
mort  de  ces  deux  serviteurs  de  Dieu,  fut  le 
chef  de  ce  nouvel  ordre,  qu'il  élondilen  plu- 
sieurs lieux  penilai\l  trente. et  un  ans  quM 
If  gouverna.  11  lit  des  établissements  à  San- 
Léoiiarilo,à  Casb Murante,  à  Cilla  di  Cis- 
Icllo,  à  Arezzo,  à  Florence,  à  Pistoie,  à  Luc- 
ques,  à  Pise,  à  Sambuca  cl  à  Bologne.  Cet 
ordre  fil  di;  ii  .uveaux  progrès  sous  le  P.  Spi- 
ncllo  de  Sienne,  qui  succéda  au  bienheureux 
Jérôme  l'an  1398,  el  qui  fui  général  pendant 
Irenle-quatre  ans,  aussi  bien  que  sous  le 
!'.  Antoine  de  Venise,  qui  exerçi  cello 
charge  pendant  vingt-cinq  ans.  Ce  Lit  sous 
le  général. il  du  P.  Spinello  que,  l'an  142G, 
l'on  tint  le  premier  chapitre  général  de  cet 
ordre  dans  le  couvent  de  Bologne,  où  il  fui 
résolu  ([uc  toute  l'autorité  pour  le  gouver- 
nement de  l'ordre  S(  rail  dans  la  personne  du 
P.  Spine  lo,  qm  élail  dé, à  chef  de  toul  l'or- 
dre, el  dans  celle  de  deux  autres  Pères  (ju'on 
clul  pour  définiteurs.  Ce  fut  aussi  dans  c« 
même  chapitre  qu'on  re;ut  la  rèiile  qui  avail 
clé  dressée  par  le  bienheureux  Jean  de  Tos- 
signan,  qui  était  pour  lors  prieur  du  cou- 
vent de  Kerrare,  et  qui  fut  d  ins  la  suite  évê- 
que  de  la  même  ville,  comme  nous  avons  dit. 
Le  SI  cor.d  chapitre  général  ne  se  tint  que 
l'an  lkk2.  Dans  la  suite,  on  en  tint  un  tous 
les  quatre  ans  ;  el  dans  celui  qui  se  tint  l'aa 
li58,  où  le  P.  iNieolas  de  Monlépulciaiio  fut 
élu  général,  il  fui  ordonné  que  le  général 
ne  serait  plus  à  vie,  et  qu'à  chaque  chapitre 
on  en  élirait  un,  ce  qui  a  été  observé  dans  la 
suite. 

Plusieurs  papes  ont  accordé  des  privilèges 
à  cet  oïdie,  el  le  bienheureux  Pie  V,  en  lo 
confirmant  derechef,  le  riiit  au  nombre  des 
mendiants,  el  lui  ace  'rda  les  mêmes  [irivi- 
léges  doiil  jouissai' ni  ces  crd  es.  Pendant 
plus  de  deux  siècles,  les  religieux  jésuales 
n'étaient  que  des  frères  laiR  qui  n'étaient 
ob  i|.és  qu'à  réciter  [lar  jour  cent  soixante- 
cinq  Palir  et  aulanl  d'.lre.  Ils  se  Irouvaent 
trois  fois  le  jour  à  l'oratoire  pour  en  dire  à 
chaque  f.is  un  certain  nombre.  Ils  avaient 
ciiKj  à  six  heuies  d'oraison  par  jour.  Après 
la  prière  du  malin,  le  supérieur  leur  faisait 
une  exhortation.  Tous  les  jours,  le  malin  el  le 
soir,  ils  prenaieni  la  discipiiae;  ils  réeiiaient 
aussi  l'ofiice  de  la  sainte  \  ierge,  mais  sans 
aucune  ubl  galion;  el,  après  avoir  satisfait  h 
leurs  exercices  de  religion,  ils  allaienl  aux 
hôpitaux  servir  les  malades,  ou  ils  travail- 
laient mannellemenl.  Mais  dans  la  suite  lo 
pape  Paul  V,  par  un  bref  de  l'an  1G06,  leur 
permit  de  recevoir  les  ordres  sacrés,  et  de  rc- 
ciler  le  grand  office  du  l'Lgliie,  selon  l'usago 
de  l'Eglise   romaine.  Le  pape  Urbain  \'Al, 


«2:^                                  ■         IiICTlO.NNAIRE  DES  ORDllES  HIXIGILUX.                                           024 

r;in  ICiî'i,  leur  rtl.1  cp'lc  clmussc  ou  (h.npcron  ce  cnrdinal  leur  ayanl  aussi  donné  une  par- 
<l<int  ils  se  «ouvraient  la  Iclc,  cl  leur  or-  rie  de  son  palais,  qui  était  joi<;nanl  elle 
dniinn  de  jiorter  un  pelii  cipurc  de  la  cou-  église,  et  dont  ils  lircnl  leur  monastère, 
leur  de  l<  urs  manteaux.  Cv  fut  ce  niême  pon-  Cet  ordre  a  produit  beaucoup  de'  [lerson- 
life  qui,  ronuue  nous  avons  dit,  approuva  nés  illuslres  tant  parleur  sainteté  (|uc  par 
l'an  ilîiO  leurs  nou<ell('S  conslilutions,  <iui  leur  science  ;  ear,  quoi  ;u'ils  ne  fusseni  pen- 
ne dinisnuaienl  rien  de  leurs  an(  jeunes  aus-  danl  les  premiers  siècles  de  leur  èlbhsse- 
leril»^,  car  elles  les  ol)lit;e.iicnl  à  prendre  en-  ment  que  des  frères  lais,  il  j  avait  ce- 
rore  deuv  fuis  le  jour  la  (tisci|>line  pendant  pendant  parmi  eux  |)lusieurs  personnes  sa- 
l'espati-  d'un  Miserere,  li'un  De  profundis  et  vantes  et  que  leur  nu'rile  éleva  dans  la  suite 
d"un  l'iiter,  avec  quelques  or  lifi  lis.  Depuis  aux  dignilcs  ili-  Tl^l'jlisc,  comme  le  bicnlieu- 
la  fêlede  l'Ascension  juscju'à  Celle  de  la  l'en-  reux  Jean  de  Tossignau,  qui  fut  év(''que  d,! 
leiôle.  ils  ne  devaient  a\oir  (Tue  des  vian  les  Fcrrare,  et  le  bienheureux  Anioue  de 
quadragesimales.  Depuis  la  lèle  de  Icus  les  Sienne,  évêque  de  Folipny,  qui  fut  emplové 
^ainls  jusqu'à  celle  de  saint  (îrégoire  Thau-  en  plusieurs  ué|.'ociations'par  le  pape  l'ie  II. 
maiurj;e,  ils  faisaient  le  st:ir  une  plus  grande  Les  bienheureux  JérAme  de  Veni^e  etJai- 
alisliuince;  mais  [leudant  l'aveiil  ils  s'absie-  nette  de  Vérone  élai.Mil  en  si  graiule  esliine, 
n  lient  de  viandes  permises  aux  jours  ordi-  que  le  doge  de  \'enisc  Nicolas  .Marcelle  v.)U- 
II. lires  de  l;i  règle,  et  n'usaient  que  de  vian-  lut  élre  couronné  ()areu\.  La  cérémonie  de 
des  quad!ag:siuiales.  Ils  jeûnaient  aussi  de  ce  couronnement  se  voit  encore  peinte  a 
iiiènic  tous  les  vendredis  de  l'année  cl  les  fresque  dans  le  réfectoire  du  couvent  de 
veilles  de  quelques  fêles,  et  tous  les  lundis  Saint-Iiarlliéleiny  de  Vérone,  qui  appartenait 
et  mei{  redis  ils  faisaie.  l  abstinenre,  ne  nian-  auiiefois  à  cet  ordre,  et  qui  est  présenle- 
peanl  ces  j<jurs-là  à  dîner  qu'un  po'.agc  et  du  ment  occupé  par  les  religieux  du  Tiers  Or- 
Iromage,  et  le  soir  une  salade  et  du  fromage  ;  dre  de  Sainl-François.  Ou  lit  au-dessous  de 
quant  aux  collations  des  jours  de  jeûnes,  ils  cctlc  peinture  :  Sfrenissivius  Venctiaruin 
pouvaient  seulement  boire  un  coup  et  inaii-  primeps  Aicoluus  Mcrccl'us  a  D.  P.  Iliero- 
ger  un  peu  de  fruit  sans  pain.  7iymo  Vcnetoel aU-  I'.Jiinc(o\  eranense.coro- 
C.es  relij:icux  s'occupaient,  dans  la  plupart  nari  voluit,  anno  DuminiMCCCC LXXll l {\). 
de  leurs  maisons,  à  la  pharmacie,  et  disiri-  Avant  leur  abolition,  riirchiconfraiernilc 
buaieiil  gratuilemc.l  aux  pauvres  des  inédi-  duSauveurau.'>i/»ic/iKS'«n(7orum  deriîehclle- 
rainei  Is.  Il  y  en  avait  d  autres  où  i'.s  faisaient  S  linie,  à  Uoii:e,  donnait  le  jeu  li  saint  à  dîner  i 
le  métier  de  di-tillatcurs  el  f.îsaienl  (ralic  si\  religieux  de  cet  ordre  du  couvent  des 
«l'eaH-{le-\io,  ce  qui  faisait  que  dans  queKjues  saints  .lean  et  Paul,  el  à  six  autres  de  l'ordre 
lieux  on  les  ap;)e'ail  les  l'éres  de  leau-de-  de  Sainl-Aïubroise  a;/  .\eiiius  du  couvent  de 
\'\p, 'jli  Poilri  ddruqua  vitii  ;  luiùsdaus  VEiii  Sainl-Clcmenl,  et  après  le  diuer  ou  leur 
de  Venise  ils  claienl  assez  riches  ,  ce  qui  (It  dinn^iit  à  chacun  une  paire  de  souliers,  un 
riue  la  ré,  ubiiquc  demanda  leur  siippre-siou  julc  (2j  el  un  p.iiu.  l'.iul  .M.iri.;ia,  quia  éle 
à  Clément  IX,  afin  de  piolîter  de  leurs  biens,  général  de  ccl  ordre  a>ant  que  le  pape  Paul  V 
qui  furent  employés  à  soulen  r  la  guerre  que  eût  permis  à  ces  religieux  de  prendre  les 
Celte  république  avait  contre  les  Turcs  qui  ordres  saerés,  a  donne  les  vies  de  soixante 
assiégeaient  jioiir  lors  Candie; ce  que  le  jiape  religieux  du  incme  ordre,  morts  en  odeur  de 
aci  orda  l'an  1G()8,  ayanl  fail  subir  le  même  sa  nleté.  Il  a  fait  encore  une  histoire  des  or- 
sorl  à  l'ordre  de  Saîiil-rieiirges  in  Alylm,  dres  religieux,  celle  de  Milan,  cl  s  ùxanle  et 
dont  nous  avons  parlé  à  l'arlicle  (pii  porte  un  trailés  sur  différents  sujeis,  dunl  il  est  f.iit 
ce  nom,  el  à  celui  des  Lrmiles  de  Saini-Jé-  mention  dans  l'épilapheque  (îeorge'l'rivulce, 
rôiue  de  Fiesoli,  qui  furent  aussi  supprimes  comte  de  Melfe,  lui  fit  ele^er  après  sa  mort, 
par  la  n.éme  bulle.  Ce  p  niife  accorda  aux  q'î"  arriva  l'an  l(i(!^,  cl  qui  est  dans  l'église 
prêtres  de  ces  ordres  pendant  leur  \iu  qua-  de  Sainl- Jérôme  de  iMilan,  qui  appartenait  à 
ranle   écus     romains  ,   et     aux    frères    lais  son  ordre. 

■»iiigl  écus.   Le    général   des   Jésuates,   (jui  ("les  religieux  avaient  pour  armes  un  nom 

elaii  pour  lors    le  P.    Crhain    d'Aviano,    Til  de  J  sus,  avec  des  rayons  d'or  en  champ  d'a- 

l'ait  curé   de   la    paroisse   de  Saint-Jean  de  z'r,  et  au-dessous  u.ie  coombe  blancln- par 

Maha,  à  Rome,  ijui  était  une  des  église  s  que  ailusion  à  leur  fondateur  saint  Jean  ('olom- 

cel  ordre  possédait  dans  celle  ville.  L'aulrr,  bin.  Sî.  de  la  Faille  dans  ses  .\nnales  de  l'ou- 

ilediée  aux  s:iints  Jean    cl  Paul,   qui    est    un  louse  (I,  pag    Ls"),  dil  qu'au   mois  d'atrildo 

litre  de  lardinal.  a  été  donnée  da  is  la    suite  l'anl^^oil  y  en  eiil  cinq  qii    vinrent    dans 

aux  préircs  de  la  Mission  de    la  congrcga-  celle  ville, el  s'adressèrentauxcapitouls pour 

lion  de  M.  Vincent  de   Paul  par  le  pa|)e  lu-  avoir  la  periiiission  de  s'y  établir,  ce  qu'ils 

iiocent   \ll,ay,int   été  occupée   au|>di'av.'inl  leur  accordèreiil   de    leur  aulorîlé    cl  sans 

pendant    quel<|ue   leiiips    par  des   Jacobins  assembler  les  bourgeois,  qui  s'y  opposèrent  ; 

anglais  que  le  cardinal  de  S'orfoick,  Anglais,  mais  que  deux    c.ipilouls   s'élanl   pr^l-senlés 

y  avail  fail   venir,  el    qu  il   euircienail.  Les  au  parlement   pour   lui    demander  qu'il    lui 

Jésuates  l'avaicnl  possédée  (Icjiuis  l'an  l'i48,  plût  autoriser    leer  délibération,    cel  i    teur 

que  le  pa|ic  Nicolas  V,  à  la  prière  du  cardi-  fol  accordé  par  un  arrêt  du    18  du    même 

nal  laiiii  des  L'rsins,  la  leur  avait  accordée,  mois.  Cet  auteur  ajoute  que  bs  cellules  de 

(I)  tail.  ll3!tliid.Pi:u/.:i,  0/xT.  pic.  di  Romn,  li:icl.  (-)  l'eiiLî  pièce  d'argent  v:ilanl    te|il  sous  et  demi 

f',  c»p.  5.  de  t{   lice. 


62o 


JES 


JES 


6% 


CCS  religieux  élairnl  peUlcs  cl  liasses,  et 
ilcv.iient  élre  à  rez-ilc-clwiussée,  à  ccriaincs 
(iisiancos  les  mios  dos  autres,  connue  celles 
des  Camalilules.  Cet  établissement  de  Tou- 
louse est  le  seul  que  je  sache  qu'ils  aient 
fait  hors  de  l'Italie. 

Voi/.  Morigia.  Ilist.  des  Ord.  reliq.,  !iv. 
\,  chap.  38, '69,  M-  et  Uist.  de  ijl.  Ifuomini 
illtist.  Giesnali.  Jo.  B.  lîossi,  Triumphus  di- 
vinip  gratiœ  per  B.  Jonnn.  Colwnhinutn. 
Auto.  Corlelli,  De  Paup.  Jrsual.  confirmât. 
Leurs  Constitutions  Imprimées  à  Fcrrare  en 
Itt'i.;.  Silvest.  Maurol.,  M((r.  Ofcan.  di  tulC. 
ijl.  Reiig.  Crescenz.,  Prend.  Rom.  Philip, 
itonanni,  Calulog.  omn.  relit/.  Ord.  Giri  cl 
Hailk'l,  Vies  des  Saints,  31  juillet, 

§  II.  Des  religieuses  Jésnutrs  de  Suinl-Jérô- 
me,  iiree  la  vie  delà  bienheureuse  (Uiiherine 
Colombin  de  Sienne,  premère  religieuse  de 
cet  ordre. 

Les  religieuses  Jésuales  de  Saint-Jcrôinc 
n'ont  p.is  eu  lo  iiicnie  sort  que  les  religieux 
du  même  ordre,  car  elles  ne  furent  pas  com- 
prises dans  la  bulle  de  Clément  IX  de  l'an 
16G8,  qui  supprimait  seulement  les  reli;;ieux 
de  ci't  ordre,  sans  faire  mention  des  religieu- 
ses ;  c'est  pourquoi  il  en  reste  encore  quel- 
ques monastères  en  Ilalie.  Elles  ont  été  aussi 
instituées  par  saint  Jean  Colombin,  ce  qui 
ne  peut  pas  être  arrivé  l'an  i;i57,  comme 
quehjucs  auteurs  ont  avancé,  puisque  Mo^ 
rigia  dit  que  ce  ne  fut  qu'aprt^s  que  ce  saint 
fut  de  retour  des  missions  qu'il  lit  dans  la 
Toscane,  où  il  convertit  une  infinité  de  per- 
sonnes par  la  force  de  ses  prédications,  dont 
il  y  en  eut  plusieurs  qui  voulurent  être  de 
ses  disciples  :  ainsi,  comme  ce  sa  nt  ne  se 
dépouilla  de  tous  ses  biens  et  qu'il  ne  com- 
mença sa  vie  apostolique  que  l'an  1303,  et 
qu'il  ne  reçut  des  disciples  ijue  deux  ans 
après,  on  peut  mettre  le  commencement  des 
religieuses  .lésuates  un  peu  avant  la  confir- 
mation de  l'ordre  que  saint  Jean  Colombin 
obtint  du  pipe  Urbain  V,  l'an  13ij7. 

Comme  le  zèle  de  ce  saint  fondateur  pour 
le  salut  des  âmes  s'étendait  indilîén  mment 
sur  toutes  sortes  de  personnes,  voyant  que 
le  nombre  de  ses  disciples  augmentait,  il 
Voulut  aussi  établir  une  congrégation  de 
filles  qui  servissent  Dieu  dans  une  pauvreté 
aussi  grande  que  celle  qu'il  faisait  pratiquer 
à  SCS  disciples.  Il  jela  les  yeux  sur  une  de 
ses  cousines  pour  donner  commencement  à 
cette  congrégation.  Klle  s'a()pelait  Cathe- 
rjie  Colombin,  et  était  fille  du  seigneur 
Thomas  Colonjbiu,  chevalier  de  l'ordre  de 
la  Saiiile-Viirge  mère  de  Dieu,  (|uc  le  vul- 
gaire appelait  les  Frères  Joyeux,  à  cause 
que  CCS  chevaliers  étaient  mariés  et  vivaient 
aveu  beaucoup  de  splendeur.  Cette  sainte 
n:!e  élaii  résolue  do  g.rdcr  sa  virginité,  et 
n'avait  jamais  voulu"  entendre  à  toutes  les 
propositions  ([u'on  lui  avait  faites  du  mariage. 
Elle  voulait  bien  se  consacrer  au  service  de 
Dieu,  mais  la  vie  pauvre  et  austère  que  nie- 
nail  saint  Jean  Colombin  l'éjouvanta  d'a- 
bord à  la  première  proposition  que  le  saint 
lui  fil  de  l'embrasser;  cl,  riche  qu'elle  était, 


elle  ne  pouvait  se  résoudre  à  (ou!  ahaniiou- 
ner  pour  aller  velue  pauvrement  et  iiu-pieds 
demander  son  pain  de  porle  eu  poiie,  comme 
faisaient  les  disciples  de  siinl  Jean  Colom- 
bin. Cependant  ce  saint  demanila  si  forte- 
nenl  à  Dieu  qu'il  lui  plût  loucher  le  cœur 
de  sa  parente,  que  ses  prières  furent  exau- 
cées, et  Catherine  se  soumit  à  tou!  ce  qu'il 
voulut  lui  ordonner.  Elle  commema  d'a- 
bord par  (li^ll  ibuer  ses  biens  aux  pauvres 
sans  se  réserver  auciMU!  chose,  mettant 
toute  sa  confiance  dans  la  divine  providence. 
Elle  se  fil  ensuite  un  gros  habit  de  Imre, 
dont  elle  voulut  être  revêtue  par  notre  saint 
fondateur  ;  et,  cotnme  il  y  avait  déjà  plu- 
sieurs filles  cl  fiinnu'S  veuves  qui,  touchées 
par  SCS  prédications,  menaient  en  leur  par- 
ticulie  •  une  vie  retirée,  il  n'eut  pas  de  peine 
à  leur  persuader  de  suivre  l'exemple  de  la 
bienheurcu  c  CrilhiMini-,  et  elles  voulurent 
aussi  recevoir  le  môme  habit  de  ses  mains. 
Ce  saint  leur  accorda  leur  demande,  et,  ajjcès 
les  avoir  revêtues  de  cet  habit  pauvre  et  mé- 
prisable au\  yeux  des  hommes,  il  leur  donna 
encore  uu  voile  blanc  j)our  couvrir  leur  tôle. 
Elles  choisirent  la  maison  de  la  bienheureuse, 
C.lheriue  pour  y  faire  en  commun  leurs 
cxen  iccs,  cl  elles  élurent  pour  supérieure 
colle  sainte  fille,  qui  quebiue  temps  après 
fil  bâlir  le  premier  monastère  de  celte  con- 
grégation à  Valpialla,  ce  qui  n'arriva  ap 
paromment  qu  après  la  mort  de  sainl  Jeaa 
Colombin. 

Il  est  difficile  d'exprimrr  avec  quel  zèle  et 
quelle  ardeur  ces  saintes  religieuses  servi- 
rent Dieu  dans  celle  communauté  naissante. 
Elles  avaient  leurs  heures  oiarquées  pour  la 
prière,  l'oraison  et  les  lectures  spirituelles, 
auxquelles  elles  employaient  même  una 
bonne  partie  de  la  nuit.  Après  leurs  exer. 
cires  s(iirilucls,  elles  s'occuiiaieul  au  tra- 
vail des  mains  ;  et  pendant  ce  temps-là  il  y 
en  avait  toujours  une  qui  faisait  la  lecture 
ou  bien  toutes  ensemble  chantaient  quelques 
cantiques  spirituels,  ou  s'entretenaient  de 
■saints  discours  qui  pouvaient  les  porter  à 
l'aoïour  de  Dieu  et  à  l'avancement  de  leur 
salit,  etde  cette  manière  leur  vie  élail  une 
continuelle  oraison.  Celait  une  chose  ad- 
mirable de  voir  leur  modestie  cl  leur  reie- 
nue.  On  n'entendait  jamais  chez  el  es  le 
moindre  bruit,  tant  était  grande  leur  union. 
Tout  y  était  en  conuMun,  r  en  ne  fernsait  a 
clef,  cl  personne  n'avait  rien  en  propr<',  puis- 
(]u'elles  n'admettaient  aucune  fille  parmi 
elles  qui  ne  se  fût  auparavant  dépouillée  de 
tout  ce  qu'elle  avait  en  faveur  des  pauvres. 
Ainsi  elles  ne  vivaient  que  du  travail  de 
leurs  mains;  et,  si  le  gain  qu'elles  en  reti- 
r.ient  n'était  pas  suffisant  pour  leur  m- 
tretien,  elles  allaient  par  la  ville  demander 
l'aumône  le  visage  couvert,  ne  s'arrélant 
avec  personne  pour  parler  ;  et  à  leur  retour 
il  ne  leur  était  pas  permis  de  s'entretenir 
de  ce  qu'<  Iles  avaient  vu  dans  a  vilie. 

Non-seuleiiicnt  ces  saintes  religieuses,  qui 
étaient  la  plupart  filles  ou  veuves  do  geu- 
lilsliummes  el  des  plus  qualifiés  de  la  Tos- 
cane,  étaient    revêtues    de   gros   habits    de 


r.n                               MrTioNNMr.F,  r.îs  or.imF.s  HF.i.ioirL'X.                              c^g 

l>i:ro,  mais  rllcis  m.TrcliHipnl  nicore  mi-picds  Girxvati,  m  vit.  S.  Giovan.  Culnnih.,  cap.  .'îi, 

s.iiis  s.iii.!<ilcs.    gllcs   |)ronaicnl    deux  IViis  l.i  el  Jlisl.  de  toutes  les  IUlig.   Thilip.  lSoi>;ii)ni 

iliscipline  pendant    lu    n'iil,    dormnicnt  sur  Caialug.  Ord.  riHg. 

lies   paillasses,  i<l   la   plupart    porlaicnl  des 

liairos,  des  cilici  s,  des  rciiitures  de  ftr.  l.a  JKsUlTIiS  (OuDnE  des). 

bioiiliciircuse  Catherine  liurriassait  iDiilrs  les  g  •.,     r,      ,/.,.„„  ^-«.c    .   j     »      f     ■■,> 

.ulrrs  en   vertu   cl  en  au.  érilés,   car   clt»  ^^oJrn.n       il  iT           '''/"  Société  ou 

leur  servait   de,en>ple    .l'humilité,    de    pa-  £    f?'   '. ',' f?';''    ""'  '"  ''" '^^  '""" 

.1       1      ••      .     11     i.   •.     i.         1  Jumne,  Ir.ir  fonda  eur. 

tu'iuc  cl  lie  chariie,  el  elle  etiit  vctiie  plus  ■'                    ' 

pauvrement  que  les  autres.  Klle  couvrait  sa  11  s'est  élevé  de  temps  en  temps  des  hérc- 

p.iillasse  irun  rude  cilice,  elle  faisait  de  plus  sies  dans  rUi^lis*,  et  Dieu  a  loujours  suscité 

pr.indes  alislidi'nees,  el  loules  les  fois  qu'elle  de  saints  personnniies  ren)]ili<  de  son  esprit 

eommuniall,  elle  ne  mani^eail  rien  de    toute  pour  les  comliatlre  et  en  arrêter  le  proj^rès, 

la  journée.    Klle   jeun  ;it    la    veille   de   ces  par  leurs  écrits,  leurs  prédications  «  I  autres 

ji)urs-là  au  pain   et  à  l'eau,  le  plus  souvent  travaux  évangéliqucs,  et  pour  maintenir  la 

elle  fiassaii  la  nuit  en  jiriérc  cl  en  oraison,  foi  catholique  dans  sa  pureté.   Ainsi  il  a  op- 

1-lle   avuil  encore    le,    don    de   toucher    les  posé  saint  .Mhanase  aux  ariens,  saint  . \ii- 

cd'urs  par  ses  discours,  el  elle    persuada  à  {;ostin  aux   pél.it;iens   el  aux  manichéens, 

plusieuis  personnes  i!c  son   .«exe  de  vouer  à  saint  Cyi  ille  aux  nestnriens,   saint  Fruiii-uis 

Dieu   leur  virginité,  el  de  finir  Ici.rs  jours  et  saini   Domiui(iue  aux  ailii;;eiiis  ,  et  eiitiu 

dans  la  retraite  et  la  péni  once.  saint   Ip  'aee  de  Loyola   et  ses  compagnous 

Un  jourque   le  démoH    la   tenta,   et  qu'il  aux    luthériens  el  aux   calvinistes.   Un  ce - 

▼  oulul  salir  sou   imagination    par  quelques  lèbre  écrivain  de  la  vi;-  de  ce  saint  a  remar- 

pcnsées  d'imiiureté,  elle  arn>a  son  bras  d'une  que   que    dans   le    temps    que    Luther  sou- 

tlisdpline  de  fer,  el,  s'étinl  recommandée  à  tint    publiquement    son    apostasie  dans    la 

Dieu,  elle  se  déchira  le  corps  pendant  tonlle  diète  do  Worms,   el  que.  s'étanl  retiré  dans 

temps  qu'elle  récita  les  sept  psaumes  de  \n  la   solitude   d'ANlat,    il    composa   un    livre 

pénitence,  et  de  cette  manière  elle  résista  à  contre  les  vœux  monastiques,  qui  lit  une  in- 

la  tentation.  Le  démim  l'attaciua  encore  en  finité  d'anostats,  sainl  Ignace  se  consacrait 

plusieurs  rencontres,  mais  il  se  déclara  lou-  à  Dieu  dans  l'église  de  Nlunl-Serrat,  el  écri- 

jours  vaincu  par  notre  s  linte,  qui,   le  mé()ri-  vait  dans  sa  retraite  de  .Manrèzc  les  lixerci- 

iant,  le  défiait  quelquefois  au  combat,  oîj  elle  ces   spirituels,  qui   ser\  irenl  à   former   sou 

n'employait  pour  armes  que  la  prière  et  l'o-  ordre  <t  à   repeupler  tous  les  autri-s  ;   (|ue 

raison.  lorsque  l^alvin  commença  à  dogmatiser  el  à 

Après  avoir  ainsi  persévéré  dans  le  service  se  l'aire  des  disciples  A  l'aris,  saint  Ignace, 
de  Uieu  |iend,inl  vingt-deux  ans,  sans  s'ètfe  qui  y  était  venu  étudier,  assembla  de  son 
jamais  relâchée  en  aucune  chose,  elle  tombi  côlé  des  compagnons  p^ur  déclarer  la  guerre 
malade,  et  siinie  (lallirrine  vierge  el  mar-  aux  enieoiis  de  la  foi  ;  et  (i«'enlin  dans  le 
lyre,  sa  patronne,  s'étanl  apparue  à  elle  letnps  qu'Henri  Vlll  se  fit  nommer  chef  de 
pour  l'avertir  que  sa  fin  était  proche,  cUe  se  l'Kglise  anglicane  el  qu'il  ordonna  sous 
prépara  à  la  mort  par  la  ré.  eption  di-s  sacre-  peine  de  mort  à  ses  sujeis  d'cflarer  le  nom 
inrnts  de  l'Kglise.  Ulle  fil  un  excellent  dis-  du  p;ipe  «le  lous  les  papiers  el  île  tous  les  li- 
cours  à  ses  religieuses  pour  les  exhorter  à  vres  qu'ils  avaient  entre  les  mains,  saint 
la  persévérance,  el,  en  prononçant  ces  paro-  Ignace  jeta  les  fondeniei;ls  de  son  ordre,  (|ui 
les  :  Ooin/ii-,  dikxi  decorcm  domus  tua' et  fait  profession  particulière  d'obéissance  aux 
locum  hdijitationis  gloriœ  luœ,  elle  rendit  '  sniiverains  pontifes  par  rapport  aux  mis- 
son  âme  au  Seignenr  le  20  octobre  1387.  L'on  si!)ns  dans  les  pays  étrangers, 
fut  suri)iis  en  la  dépouillant  de  lui  trouver  Ce  saiiil  naquit  l'an  li'.ll,  au  château  do 
.sur  le  corps  un  rude  cilice  el  une  ceinture  Loyola,  dans  une  partie  de  la  Biscaye  espa- 
de  fer  qui  elail  cnliée  si  profondément  dans  guolc  qui  porte  aujourd'hui  le  nom  de  (îui- 
sa  chair,  qu'on  eut  de  la  peine  ù  la  rc-  puscoa  ,  el  fut  le  dernier  d'onze  enfants 
tirer.  ((u'eurent  dnm  Bertrand,  son  père,  seigneur 

Après  sa  mort  ,  la  Mère  Simone  Gallcroni  dOgnez  el  de  Loyola,  el  M  irline  Saéz  de 
prit  le  gouvernement  du  nionaslère,  el  par  lîalde.  Ils  l'élcvèrenl  dans  les  sentiments  (lue 
.son  moyen  les  religieuses  se  niulliplièrcnt  pouvait  leur  ins[arcr  l'ainour  du  siècle.  Son 
en  plusieurs  cndroils.  IMos  firent  d'abord  un  père,  le  jugeant  propre  pour  la  cour,  l'y  en- 
nouvel  élablissem  lit  à  Florence,  el  ensuite  voya  de  bonne  hrure.  et  le  fil  page  du  roi 
à  l'istoie,  à  Lucques,  à  l'ise,  à  liologne  el  en  catholi(|ue  Ferdinand  V.  JLiis  Ignace,  ([ui 
d'autres  lieux.  Klles  ont  le  même  habille-  a»ait  une  passion  ardente  pour  la  gloire,  >e 
ment  (|u'avaient  1rs  Jésu.iles,  savtiir,  une  lu-  dé.  oi'ila  bicnti'4  de  la  cour,  et,  suivant  l'exeni- 
nique  de  drap  blanc  avec  une  ceinture  de  pic  de  ses  frères,  qui  se  signalaient  dans 
cuir,  un  inanleau  de  couleur  tannée  el  un  l'armée  de  Naples,  il  voulut  prendre  le  parti 
voile  blanc  (1).  Il  y  a  de  l'appareiiee  qu'elles  des  armes.  Il  s'en  dédira  au  duc  de  Najarc 
[irirent  cet  hahilleiueul  api  es  (|ue  l'ordre  eut  dom  Antonio  M.tnriiiue,  s  n  parent  et  ami 
eié  confirmé  (i.ir  le  pape  Urbain  V,  l'an  particulier  de  sa  maison,  qui  approuva  sou 
l''67.  desS!  in.  Il  lui  fil  apprendre  ses  exercices, 
y'oijez  Morig.  /Ii>t.  de  gl.  fluoinini  illust.  s'appliqua  lui-niéuie  à  le  former,  cl  le  rendit 

M)  Voy  ,  i.1.1  niidu  vol.,  n"  155. 


I 


C'i'J 


JES 


JES 


<m 


en  peu  de  trinps  capable  de  servir  son  prince 
dans  SCS  armées.  11  se  signala  dans  sa  pre- 
mière caiTi|)agnc  au  siése  de  Najire  même, 
pclile  ville  située  sur  la  fronlièrc  de  Biscaye, 
dont  la  prise  lut  attribuée  en  partie  à  sa 
bravoure.  Quoique  celle  ville  eût  été  aban- 
donnée au  pillage,  il  ne  voulut  point  y  avoir 
de  part,  et  se  coniciita,  pour  toute  récom- 
(  ense,  de  la  gloire  d'avoir  fail  une  belle  ac- 
tion, jugeant  qu'il  était  indigne  d'un  grand 
cœur  de  prollter  de  la  disgrâce  des  mallicu- 
rtux.  Sa  conduite  alors  n'était  pas  fort  ré- 
gulière :  plus  occupé  de  la  galanterie  el  de 
la  vanité  que  de  toute  autre  chose,  il  ne  sui- 
vait guère  dans  toutes  ses  actions  que  les 
fausses  maximes  du  monde  ,  et  il  vécut  de 
Il  sorte  jusqu'à  l'âge  de  vingt-neul  ans,  que 
Dieu  lui  ouvrit  les  yeux. 

Le  moyen  dont  la  Providence  se  servit 
pour  lui  toucber  le  cœur  fui  l'accident  qui 
lui  arriva  lorsque,  défendant  en  1521  le  cliâ- 
icau  de  Pampelune,  capitale  de  la  Navarre, 
contre  les  Français  qui  l'assiéçoaient ,  il 
fut  blessé  d'un  éclat  de  pierro  a  la  jambe 
(Iroiie  et  d'un  bouk-l  de  canon  à  la  gauche, 
dont  elle  fui  cassée.  Les  Navarrois,  le  voyant 
l  lessé,  perdirent  courage,  cl  se  rendirent  à 
discrétion  ;  mais  les  Français  usant  bien  de 
la  victoire,  Irauspoitèrenl  Ignace  au  quar- 
tier du  général,  oij  ils  prirent  soin  de  le  faire 
panser;  el,  quand  sa  jambe  eut  été  remise 
et  que  l'état  de  sa  plaie  lui  permit  de  chan- 
ger de  lieu,  ils  le  firent  porter  en  li;ière  au 
cliàteau  de  Loyola,  qui  n'est  pas  éloigné  de 
Tampelune. 

A   peine  y   fut-il   arrivé,    qu'il   sentit  d(! 
grandes  douleurs.  Les  chirurgiens  qu'on  ap- 
pela jugèrent  que  les  os  de  sa  jambe  n'étaient 
pas  remis  dans  leur  situation   naturelle,  et 
lui  dirent  que  pour  les  remettre,  il  lui  fallait 
casser  la  jambe  de  nouveau.  Ij-Miace  les  crui, 
el,  s'élant   mis   pour  cet  effet  entre   leurs 
mains,  il   ne  fil   paraître   aucune   faiblesse 
dans  une  si  cruelle  opération.   La   douleur 
qu'il  en  ressentit  lui  causa  une  fièvre  si  vio- 
lente, qu'elle  le  réduisit  à  l'extrémilé.  11  re- 
çut ses  sacrements  la  veille  de  la   fête  des 
apôtres  saint  Pierre  et  saint  Paul,  mais  avec 
tant  de  faiblesse  el  d'abiitlement,  qu'on   ne 
crut  pas  qu'il  piil  passer  la  nuit.  Saint  Pierre 
la   mcuie   nuit   lui  apparut  en  songe,  et  le 
touchant  de  la  main  le  guérit  de  la  fièvre  ; 
en  sorte  qu'à  son  réveil  on  trouva  ses  dou- 
leurs cessées,   ses  forces   revenues,   el  qu'il 
èiait   hors  de  danger.   Celle  guérison  mira- 
culeuse   ne    lui    fit   pas    perdre    l'esprit   du 
monde.   Sa  jambe,  qu'on   avait  cassée  une 
seconde  fois  ne  fui  pas  si  bien  rétablie,  qu'il 
n'y  restât  une  difformité.   C'était  un  os  qui 
avançait  trop  au-dessous  du  genou,   et  qui 
empêchait  que  sa  botte   ue   fût   bien  tirée. 
Coniuie  il  aimait  la  bonne  grâce  el  la  pro- 
preté, la  vanité  le  porta  à  se  faire  Si  ier  cet 
os,  opération  qui  ne  se  dX  pas  sans  d'extrc- 
II  es  douleurs.  Cela  ne  l'empêcha  pas  de  su- 
bir  volontairement   une    nouvelle    torture, 
plutôt  que  d'avoir  rien   de  difforme  en  sa 
personne  ;  car  une  de  ses  cuisses  s'élant  re- 
liiée  depuis  *a  Llessur*,  et  craignant  étran- 


gement de  paraître  boiteux,  il  se  lit  tirer 
irès-violemment  la  jamlie  durant  idusieurs 
jours  avec  une  machine  de  fer;  iiiais  sa 
j  ;nibe  droite  demeura  toujours  i)lus  courte 
qie  l'autre. 

Durant  cette  longue  cure,  Ignace,  qui  était 
obligé  de  garder  le  lit  ou  la  chambre,  avait 
tiiul  le  temps  de  s'ennuyer.  11  demanda  un 
roman  pour  se  divertir  ;  mais,  ne  s'en  Iron- 
vaut  point  dans  la  mai-on,  on  lui  apporlala 
Vie  de  Jésus  Christ  et  celle  des  saints.  11  h  s 
lut,  précisément  pour  s'amuser,  el  n'y  t)ou\a 
d'abord  aucun  plaisir;  mais  la  grâce  de  Dieu 
agissant  sur  ce  cœur  mondain,  il  se  laissa 
toucher  par  la  douceur  de  ses  attraits,  prit 
goût  insensiblement  à  cette  lecture,  et  fut  si 
charmé  et  si  édifié  des  exemples  de  veriu 
(ju'il  y  trouva,  qu'il  f  irma  au  même  temps  le 
dessein  de  les  imiter.  Il  se  proposa  pour  cela 
de  visiter  les  saints  lieux  et  de  s'enfermer 
dans  un  ermitage  ;  n)ais  ces  bons  mouve- 
ments duraient  peu,  étant  combattus  parla 
passion  qu'il  avait  pour  la  gloire  cl  par  l'a- 
iiour  qu'il  portail  à  une  dame  de  la  cour  de 
Casiilleeldcs  premières maisonsdu royaume. 
Ainsi  oubliant  en  un  moment  les  projets 
qu'il  venait  de  faire,  il  n'avait  l'esprit  oc- 
cupé q  le  de  la  guerre  el  de  l'amour,  se  for- 
mant des  chimères  de  vanité  el  de  plaisir, 
dont  les  folles  idées  l'eiichantaienl  à  un  tel 
point,  qu'il  ne  compreniit  pas  qu'on  pût 
vivre  sans  une  f;rande  ambition,  ni  être  heu- 
reux sans  un  grand  allacliemenl. 

Lorsqu'il  étaii  las  de  rêver,  il  se  remettait 
à  la  lecture,  qui  enfin,  par  le  sicours  do  lu 
grâce,  l'éclaira  si  bien,  que,  n'estimant  plus 
que  les  vériialiles  honneurs  el  les  p!aisirs 
du  ciel,  il  commença  à  connaître  la  vanilé 
de  la  gloire  du  momie  à  laquelle  il  aspirail, 
cl  le  danger  où  il  s'exposait  en  suivant  ses 
maximes;  c'est  pourquoi  prenant  la  résolu- 
tion de  le  quitter  eniicremenl  cl  de  se  con- 
sacrer à  Jésus-Christ,  il  se  proposa  d'entre- 
priudre  le  pèlerinage  de  la  terre  sainte  , 
pieds  nus  et  revêtu  d'un  sac  ,  résolu  à  son 
retour  de  se  cacher  dans  quelque  solitude, 
où,  inconnu  aux  hommes,  i.l  pût  penser  uni- 
quement à  son  salut,  el  passer  le  reste  da 
ses  jours  dans  les  exercices  de  la  pénitence. 
Mais,  comme  sa  jambe  n'était  pas  encore 
tout  à  fait  guérie,  il  ne  pul  pas  exécuter  si- 
tôt ces  projets  ;  et  il  se  con  tentait  pour  lors 
de  se  lever  toutes  les  nuits,  cl  d'en  passer 
une  partie  la  face  prosterné-  contre  terre, 
pleurant  amèrement  ses  péchés.  Lorsqu'il 
lut  en  état  de  marcher,  ne  songeant  plus 
(ju'â  suivre  la  voix  qui  l'appelait  à  la  per-^ 
leclion,  il  sortit  de  Loyola,  résolu  d'aller  eu 
pèlerinage  au  monastère  de  Monl-Serral,  fa- 
meux par  la  dévotion  des  pèlerins  qui  de 
tous  les  endroits  du  monde  y  viennent  im- 
plorer le  secours  el  honorer  l'image  mira- 
culeusi;  de  la  sainte  \ierge,  dont  nous  avons 
déjà  parlé  ailleurs.  Mais,  pour  mieux  ca- 
cher son  dessein,  il  alla  à  Navarel,  sous  pré- 
texte de  rendre  visite  au  duc  de  INajare,  qui 
avait  souvent  envoyé  demander  des  nouvel- 
les de  sa  santé.  Sa  visite  étant  faite,  il  ren- 
voya  les  deux  valets  qui  l'avaicut  -jii couipa • 


531                                            niCTIONNAmiC  DES  OROniCS  nEMCIl-LX.                                          CjÏ 

pilé  JMfqu'alors,   ri    prit    sent  le   rliemiii  de  sU'rc   Je   l'ordre  do  S.iinl-Doinini  [iio   el  nu 

Aîoiil-Sciral.   En   sctrl.irl  de   N.ivarel,    il  fil  hc''|jilal  pour  les  pèlerins  pI   les  inalado*.  I.e 

vipu  de  cliaslelé  peipéluelle,  pour  .se  rende  saini  enlra   dans  tel  lii'i|iilal,  qu'on   aj'pelail 

plus   n;;iéable   à   la  sainte  N'ierge,   snus    la  pour  lors   l'hôpital  de  Sainle-Luc-,  f,. il  con- 

proIcTlion   lie  laquelle  il  allait  sr  niellre,  et  lent  de  se  voir  au  nombre  des  pauvres,  el  en 

se  ilisposa  à  se  rociincilier  avec  Dieu  par  une  él.it  de   faire   pénitence   sans   èlre  connu.  Il 

sinei'ie   confission  cle  tous  ses  poêlés.   Doni  comim-nça  par  jeûner   toute    la    semaine  au 

Jaan    Cliaronnes  ,  Français   de   nation,    qui  pain  et   à  l'eau,   cxceplé   le  dimanche,  qu'il 

.ivanl   sa    rotraile  à   ]\lont-Sei  rat   avail   été  mangeait    un  peu   d'herlies   ruilos,  encore  y 

i;rand  vicaire  de    l'evéciue  do  Mirepoix,   fut  mcll.iit-il  de  la  cendre.  Il    ceignit   ses    reinî 

le   religioUT    anquol   Ignaco  s'adr<'ssa   pour  d'une  chaîne  de  fer  et  prit  un  cilic  sous  l'ha- 

l'aire  une  confession  générale  de  ses  péchés,  billeinoni  de  loiiei.'onl  il  était  revêtu.  Il  pre- 

«pi'il  écrivit  avec  loue  rox.iciitude  pos<ihlo.  nail  la   disi  ipline  trois  fois  le  jour,  dormait 

Il  la  fil  avec  une  douleur  si  vive  et  nno  telle  peu  et  couchait  .à  terre.  O.ilre   le  servi  e  di- 

.•ibondance   de  larmes,   qu  il    fut   obligé  du  vin,  qu'il   entendait   tous  les  jours  av  c  une 

l'interrompre  souvent;    ce   qui   la   fil  durer  picé  cl  une  dévolion    lonic    singulière,    il 

trois  jours.  Il  lui  découvrit  loulos  ses  pon-  i'aisail  sept  heures  de  prières  ;  il  visitai!  sou- 

sées,   cl  snrloiit   il   lui   fil  le  plan  do  la  vie  vent  l'église  de   Notre-Dame   do  ^■illallnrdis, 

aus  ère  qu'il  v(.u'ait  mener,  ("e  saini  houime,  qui  n'e  l  qu'à  une  dorni-lioue  de  Manrézo.  el 

ijui    vivait    lui-même    trôs-ausièrement,   le  dans  es   polils   pèleriiiagos   il  ajoulail  d'or- 

confirnia   dans  son  dessein,  en  Ini  prescri-  dinaire  au  cilico  et  à   la  chaîne  de  for  qu'il 

vanl  néanmoins  des  règles  de  prudence  pour  porlail  ,   une   ceinture   do    cei  laines    herbes 

sa  cr)nduilo,  el  pour  éviter  les  pièges  que  le  iiès-piquanti  s. 

malin  cspril  |i<iuvail  lui  tendre  dans  ses  prc-  Le  démon,  ne  pouvant  su[)[iorler  celle  fer- 
mières feivcurs.  veur,  employa  tous  ses  elTorls  pour  l'en  dé- 
Ignace Ht  présent  de  son  cheval  au  mo-  lournor,  en  lui  reprc-entant  la  dureté  de  su 
nastère,  pendit  son  épée  à  un  pilirr  proche  pénitence  cl  la  difficulté  qu'il  y  avail  d'y 
l'ante!  ,  pour  niar(]ue  qu'il  renonça.t  à  la  persévérer,  le  ('ésagcén;eni  d'éire  dans  un 
milice  séculière,  el  n'emporta  avec  lui  que  lioiiilal,  la  honte  qu'il  y  avait  pour  un  homme 
les  in.struments  de  pénitence  qu'il  avait  de-  de  sa  qualité  d'être  toujours  avec  des  pau- 
mandés  à  son  confesseur.  Puis,  revêiu  de  vros,  el  le  urand  profit  qu'il  ferait  à  la  cour, 
l'habit  d'un  pauvre,  au>|uel  il  avail  donné  le  où  ,  par  la  régularité  de  sa  conduite  el 
sion,  jusqu'à  sa  chemine,  il  sortit  de  Mont-  l'exemple  de  ses  vertus,  servant  de  modèle 
Serrai  le  bourdon  à  la  main,  la  calebasse  au  au\  courtisans,  il  les  attirerait  insensible- 
côté,  la  léle  elun  piod  nus  car  pour  l'.iu  re,  ment  au  service  de  Jésus-t^hrisl  et  à  la  pra- 
qui  se  sentait  de  ta  blessure,  et  qui  s'enllait  tique  des  vertus  chrétiennes.  C'était  prendre 
îoutes  les  nuits,  il  jugea  à  propos  de  le  le  nouveau  soldat  de  Josus-Christ  par  dos  en- 
chausser),  cl  il  marchait  avec  une  vigueur  droits  bi(n  sensibles;  niais,  ayant  reconnu 
qui,  surpassant  la  force  d'un  homme  élevé  la  malice  de  l'espiil  tenialour,  il  repoussa 
aussi  dél  catemenl  qu'il  l'avait  été,  ne  j)iiu-  ses  suggestions  par  la  pr;;lique  des  vertu;» 
vait  venir  que  d'en  haut,  fort  consolé  do  ne  <l"i  leur  étaient  opposées.  Bien  loin  de  fuir 
plus  p(yicr  les  livrées  du  monde  et  tout  glo-  les  piuvns,  il  se  familiarisa  avec  eux  plus 
rieux  d'être  revêtu  de  (elles  de  JêsU'-Chrisi.  que  jamais.  Non  content  do  demeurer  dans 
A  peine  eut-il  fait  une  lieue,  qu'il  entendit  cet  bopi'al,  il  s'ait.icha  aux  malades  les  plus 
ilcrrière  lui  un  cavalier  qui  cour;ut  à  bride  dégoût,  nts;  el,  au  lieu  de  retourner  à  la 
abattue;  c'était  un  officier  de  la  justice  de  cour,  il  résolut  de  se  cacher  encore  plus  au\ 
Monl-Seiral  qui  vor.ait  lui  demander  s'il  you\  des  hommes.  Cependant,  nonobstant 
était  vrai  qu'il  eûl  donné  do  riches  habits  à  toulçs  les  diligences  (ju'il  prit  pour  réussir 
un  gueux;  parce  ([u'élani  soupçonné  de  les  dans  celte  dernière  résolution,  le  bruit  courut 
avoir  volés,  on  l'avait  ujis  en  prison,  jusqu'à  dans  Manrézo  que  ce  pèlerin  qu'on  ne  con- 
ce  qu'on  (  n  connût  ui  vériié.  Ignace  à  ces  uiiissait  point  el;iil  un  homme  de  qiialilé  qui 
paroles  fui  pênéiré  do  douleur,  et,  se  repro-  faisait  |  énitence.  Ce  que  l'on  lOiijoctur.i  par 
••.liant  à  lui-iiu'inc  d'avoir  été  cause  de  la  la  nouvelle  qui  s'y  répandit  de  l'avenlur(! 
disgrâce  de  c«  i  ativre  homme,  il  le  déchar-  du  pauvre  de  .Monl-Sorrai,  auquel  il  avail 
{jca  i!u  crime  dont  on  l'accusait,  sans  nean-  di  nné  ses  liai  ils  :  c'est  pourquoi  on  com- 
inoins  vouloir  dire  qui  il  était.  Après  celle  nu  nça  à  le  regarder  avec  d'aulres  yeux  dans 
.aventure  il  poursuivit  son  chemin  vers  .Man-  rhê)p,lal  et  dans  la  ville.  On  le  venail  voir 
rèze,  où  il  avait  résolu  de  se  cacher,  en  al-  piir  curiosité,  cl  on  l'admiriiil  d'autant  pins, 
lend.inl  que  la  pesle  cessât  à  itarcelone,  cl  qu'on  l'avait  traité  avec  mépris.  I.e  saini 
que  le  port  lui  ouvert,  espérant  y  trouver  s'en  aperçut,  et.  prenant  ce  ihaiigement  (lour 
<',uclr|ue  bâtimenl  sur  lequel  il  pût  monter  un  nouveau  pioge  (|uc  le  demun  lui  tendait, 
pour  commencer  ton  vovage  de  la  terre  cl  qu'il  deviiil  éviier,  il  se  relira  pour  cet 
fiainle.  effet  dans  uni!  caverne  qui  était  au  |)ied  d'une 
Manréze  est  une  petite  ville  à  trois  lii  ues  monlat;ne  éloignée,  de  six  cents  p,is  de  la 
de  Mont-.^erral,  fameuse  aujourtl'hui  par  la  ville. l'iu  degonsconn.iissaieni  cotte  caverne, 
pénitence  de  s.iint  Ignace  et  par  la  i  iole  dos  et  personne  n'avait  osé  y  entrer,  tant  elle 
peuples  qui  y  viennent  de  tous  ci'ilés  en  pè-  paraissait  affreuse  ;  mais  Ignace,  ju|;eant  ()uc 
leriii.igc,  mais  alors  de  peu  de  consoiiuonce,  ce  lieu  en  élait  d'.iiilant  plus  propre  à  se  ca- 
u'dvanl  lieu  do  c  iisidérablc  qu'un  oiuiu-  cher  au»  yeui  di s  l.ommcs,  perça  Icj  brous- 


I 


C35                                 iES  JES                              034 

«ailles  qui  en  fermaient  les  avenues  et,  s'y  modéra  ses  auslérilé-,  cl  prit  un  li;ii)illoiiieiit 
étant  coulé  au  travers  des  ronces,  il  y  cta-  de  ((ros  dr;ip,  moileste  et  propre.  Il  pailait 
blit  sa  demeure.  L'horreur  de  ce  lieu  lui  publi(jueincnt  dos  choses  du  ciel;  el,  pour 
inspira  un  nouvel  esprit  de  pénitence,  à  la-  se  mieux  fiire  entendre  du  peu|)le  (|ui  l'cn- 
quelle  il  s'adonna  avec  tant  de  rigueur,  vironnait,  il  inonlail  sur  une  pierre  qu'on 
qu'on  le  trouva  un  jour  évanoui  à  l'entrée  montre  encore  aujourd'hui  dans  l'ancien 
de  sa  caverne  :  ce  (jui  ayant  découvert  le  hôpital  de  Sainle-Luco.  Quelques  personnes 
lieu  de  sa  retraite,  on  le  ramena  malgré  lui  furent  si  touchées  de  ses  estliortations  , 
à  l'hôpital  de  Manrèze,  où  il  fut  attaqué  de  qu'elles  renoncèrent  au  siècle  pour  em- 
nouveau  par  la  tentation  de  changer  le  brasser  une  vie  pénilcnto.  Les  léflexions 
genre  de  vie  austère  (lu'il  avait  embrassé;  fréquentes  ((u'il  fit  sur  la  force  des  m;i\inies 
mais  une  lièvre  mali;5ne  dont  il  fut  attaqué  évanïtéliques  qu'il  enseignait  le  portèrent  à 
si  violemment  que  l'on  désespérait  de  sa  vie,  composer  son  livre  des  Exercices  spirituels, 
le  délivra  de  celte  tentation,  qui  fut  imnié-  pour  le  profit  des  âmes  mondaines.  Le  pape 
diatement  suivie  d'une  autre  de  présomption,  Paul  111  l'a  approuvé  depuis  comme  un  livre 
qui  le  port, lit  à  se  regarder  comme  un  grand  auquel  on  ne  saurait  donner  trop  d'éloges, 
saint,  il  se  délivra  de  celle-ci  en  rappelant  et  qui  renferme  une  méthode  admirable  pour 
dans  sa  mémoire  les  péchés  de  sa  vie  passée;  retirer  les  âmes  du  désordre  el  pour  les 
mais  il  en  conçut  tant  d'horreur,  qu'il  tomba  conduire  à  la  perfection  du  ehrisliani^me. 
dans  un  état  beaucoup  plus  funeste  que  celui  Après  ce  travail,  se  sentant  assez  fort  pour 
dont  il  sortait.  A  peine  eut-il  recouvré  la  entreprendre  son  voyage  de  la  terre  sainte, 
santé  du  corps,  qu'il  perdit  la  tranquillité  el  sachant  que  la  peste  était  cessée  à  Barce- 
dont  son  âme  avait  joui  depuis  qu'il  s'était  lone  et  le  commerce  rétabli,  il  quitta  Man- 
donné  à  Dieu.  Toutes  les  joies  spirituelles  rèze,  où  il  était  depuis  plus  de  dix  mois.  11 
qu'il  avait  goûtées  jusqu'alors  et  les  eonso-  s'embarqua  à  Barcelone,  sans  autre  provi- 
latioiis  dont  Dieu  l'avait  favorisé  se  changé-  sion  qu'un  peu  de  pain  qu'il  avait  mendié, 
renl  en  amertume  et  en  tristesse  par  les  et  il  arriva  en  cinq  jours  au  port  de  Ga'iette. 
scrupules  dont  il  se  sentit  accablé.  On  eut  d'où  il  prit  la  roule  de  Home,  seul,  à  pied, 
beau  lui  défendre  de  s'airéter  à  ses  doutes  jeûnant  tous  les  jours,  et  mendiant  à  son 
el  d'écouter  ses  scrupules,  tout  cela  ne  ser-  ordinaire.  Il  y  arriva  la  veille  du  dimanclio 
vait  de  rien.  Plus  il  s'efforçait  de  s'en  débar-  des  Rameaux,  l'an  1523,  et  en  partit  huit 
rasser,  plus  il  él. lit  accablé  d'inquiétudes;  et,  jours  après  Pâques  pour  aller  à  Venise.  Il 
s'imaginant  qu'il  ne  recevait  plus  aucun  se-  était  fort  tard  lorsqu'il  entra  dans  cette  ville; 
couis  du  ciil,  iicrui  que  Dieu  l'avait  dé-  el,  ne  sachant  où  se  retirer,  il  alla  se  mettre 
laissé  et  que  sa  damn^ition  était  certaine,  souà  un  portique  de  la  place  de  Saint-Marc, 
Dans  cette  pensée,  il  se  trouva  agité  de  plu-  pour  y  prendre  un  peu  de  repos  ;  mais  Dieu 
sieurs  mouvements  de  désespoir,  auxquels  il  ne  voulut  pas  que  son  serviieur  y  passât  la 
aurait  infaïllibiemeni.  succombé,  si  Dieu  par  nuit.  Il  y  avait  parmi  les  sénateurs  de  la  ré- 
Un  effet  de  sa  miséricorde  ne  l'eût  soutenu  publique  un  homme  d'un  mérite  extraordi- 
contre  ces  aliaques  de  l'esprit  tentateur,  qui,  naire,  nommé  JLirc-Antoine  Trévis.mi,  que 
ne  pouvant  réussir  de  co  côté-là,  le  tenta  sa  vertu  éleva  depuis  à  la  dignité  de  doge. 
avi'C  plus  de  succès  du  côié  de  la  piésomp-  Ce  sénateur,  qui  logeait  dans  la  place  da 
tion.  il  lui  persuada  de  ne  prendre  aucune  Saint-Marc,  s'élant  (ouché  et  endormi,  il  lui 
nourriture  jusqu'à  ce  qu'il  eût  recouvré  la  sembla  entendre  une  \oix  qui  lui  disait  que 
paix  de  son  âme.  11  jeûna  effectivement  sept  tandis  qu'il  était  à  son  aise,  dans  son  lit,  le 
jours  entiers,  sans  boire  ni  manger  :  il  au-  serviteur  de  Dieu  était  sous  un  portique  de 
rait  même  poussé  ce  jeûne  plus  loin,  si  son  la  place.  Un  songe  si  extraordinaire  l'éveilla 
confesseur,  qui  était  un  religieux  de  l'ordre  aussitôt,  et,  ne  pouvant  s'imaginer  que  le 
de  Saint-Dominique,  ne  lui  eût  ordonné  de  hasard  en  fût  la  cause,  il  se  leva  et  alla  lui- 
l'interrompre.  Lnfin  ses  troul)les  se  calmé-  même  chercher  celui  que  la  voix  du  ciel  lui 
renl,  et  il  ne  fut  pas  seulement  délivré  de  indiquait,  le  conduisit  à  son  logis  avec  hon- 
tous  ses  scrupules,  mais  il  obtint  encore  le  nenr,  et,  après  lui  avoir  rendu  tous  les  de- 
d<m  de  guérir  les  consciences  scrupuleuses,  voirs  de  charité,  il  lui  procura  une  audience 
et  r.  çut  diverses  faveurs  du  ciel,  qui  le  de-  du  doge  André  (jritti,  dont  il  obtint  une  place 
doiiimagèrent  du  passé.  dans  la  Gapitane  de  la  républiiiue,  qui  allait 
Jusque-là  il  ne  s'éiait  proposé  dans  toutes  dans  lîledeChypre.  Ils'y  embarqua, el, après 
ses  pratiques  de  piété  que  sa  perfection  par-  quar.inte  huit  jours  de  navigation,  il  arriva 
ticulière;  mais  la  Providence,  qui  le  desti-  enfin  le  dernier  jour  d'août  delà  même  an- 
iiait  au  iiiinislère  évangelique,  et  qui  l'y  née  au  port  de  Jalfa,  d'où  il  prit  le  chemin 
avait  d'abord  piéparé  sans  qu'il  le  sût,  par  de  Jérusalem  par  lerre,  el  s'y  rendit  le  4 
jle  fnépris  du  monde  qu'elle  lui  avait  inspiré,  septembre.  Son  des<ein  était  de  s'arrêter  en 
par  la  retraite  et  la  mortification,  lui  donna  Palestine  pour  travailler  à  la  conversion  des 
d'autres  vues  et  d'autres  desseins  :  elle  lui  peuples  de  l'Orient;  mais  le  provincial  des  re- 1 
inspir.i  de  s'appliquer  à  la  conversion  et  à  Iigieux  de  Sainl-François,  qui  aval  un  pou- 
la  sanctification  des  âmes  :  dans  ce  dessein,  voir  du  sainl-siége  de  renvoyer  les  pèlerins 
quelque  clièie  que  lui  fût  sa  solitude,  il  en  ou  de  les  retenir,  selon  qu'il  jugerait  à  pro- 
soriii.  11  corrigea  ce  que  son  extérieur  avait  pos,  ne  le  lui  permit  pas,  ce  qui  l'obligea  de 
il'affreux  el  de  rebulaui,  afin  de  ne  pas  éloi-  revenir  en  liaropc.  Il  arriva  heureusement  à 
gucr  ceux  qu'il   voulait   attirer  à   Dieu.  11  ^enise  sur  la  fin  de  janvier  152'i-,  après  une 


fi35                               nurnoN.NAïuK  iii:s  onnuKS  iir;Li(:ii;ux.  rjg 

navip;alion  de  plus  ilo  iJou\  mois,  pendant  drc  connaissance  ;  m.iis.  voy.inl  (iiiil  n'était 
laquelle  il  oui  loul  le  Icmp'*  de  (aire  des  ré-  ni  licrélique  ni  v  sionnaiie,  ils  remirent  le 
llexion'i.  Il  rtiiicul  tiue.  ponr  travailler  à  la  reste  de  rinformation  au  ^T:\n>\  vicaire,  ((ui 
conversion  des  âmes,  il  fallait  avoir  dis  traita  saint  Ignare  très-favorablement,  et  lui 
connaissances  qui  lui  (nanquaii'iil  ;  et,  ju-  permit  de  continuer  ses  fonctions  pour  le 
■îcant  qu'il  ne  pourrait  jamais  rien  faire  de  service  du  prochain;  il  l'aiertil  ([ue  lui  et 
solide  sans  le  fondement  des  lellrcs  humai-  ses  compagnons  n'él.inl  pas  reli;:ieu\,  on 
nés,  il  prit  la  résolution  de  retourner  à  lîar-  n'apjironvail  pas  qu'ils  fussent  tous  haliillés 
celonc  pour  s'y  appliquera  l'étude.  Il  n'eut  de  la  même  sorte;  ce  qui  était  une  dislinc- 
poinl  de  honte,  (luoiiiu'à^é  de  trente-trois  tion  dans  laiiue!  e  il  y  avait,  selon  le  senti- 
ans,  d'étudier  les  premiers  principes  de  la  ment  de  plusieurs  [leisonnes,  I  eaiicuup  d'af- 
lani.'iic  latine,  et  de  se  trouver  tous  les  jouis  fe>  talion.  Le  saint,  qui  ne  li-  f.iisait  que  par 
en  classe  avec  des  entants,  sous  la  conduiic  ui\  lion  motif,  ne  voulant  point  dimner  aucun 
de  Jérrtme  Anlebale,  qui  y  enseignait  pu-  sujet  de  plainte,  s'haf)illa  de  noir  avec  un 
bliquemenl  la  grammaire.  Il  fit  un  si  f;ran  I  autre,  laissa  un  iiabilgris  au  Français,  et  en 
progrès  dans  l'élude  de  la  langue  latine  (il  premlre  un  de  couleur  minime  aux  deux 
])cndant  deux  ans,  que  son  maître  lui  cou-  autres  Kspagnols,  et  prit  des  souliers,  pour 
seilla  d'aller  l'aire  son  couis  de  philosophie  oliéir  au  nième  grand  vicaire,  (lui  !<■  lui  or- 
dans  l'université  d'Alcala,  qui  avait  élé  fo:i-  donna.  L'iiuliscrélioii  de  deux  dévotes  riches 
dée  depuis  peu  parle  cardinal  Ximenès.IIsui-  et  de  qualité  (jui  suivaient  ses  conseils,  et 
vil  ce  conseil,  el  y  mena  avec  lui  trois  ilisci-  qui  entreprirent  alors  sans  sa  participation 
pies  qu'ilavait  faitsduranlsonséjour  à  Bane-  quelques  pèlerinages,  vêtues  en  pèliTines,  à 
lone.  V  élanl  arrivé,  il  y  commença  ses  élu-  pied  et  d>  mandant  l'auuiôiie,  donna  lieu  à  de 
des,  el  y  fil  un  quatrième  disciple  d'un  jeune  nouvelles  plaintes  contre  lui,  comme  étant 
Français  qui  avait  été  page  de  dom  Martin  l'auteur  d'un  zèle  si  outré  cl  si  peu  conforme 
de  ("ordoue,  vice-roi  de  Navarre.  Quoiqu'ils  à  leur  sexe;  on  le  mil  en  prison  avec  ses 
ne  demeurassent  pas  ensemble  (Kerdinand  compagnons,  d'uù  il  ne  sortit  qu'au  retour 
de  l'ara  cl  André  d'Arzc  en  logeaient  deux  deces  dévotes,  au  bout  desis  semaines,  après 
par  (  hariti",  el  Ignac  e  avait  une  chambre  à  qu'elles  eurent  avoué  que  saint  Ignace  n'a- 
l'hôpilal  d'Anlezena),  ils  étaient  néanmoins  vait  point  lu  de  part  à  leur  jjèlei  inagi', 
tous  (inq  habillés  de  niê'iie  façon,  perlant  qu'au  contraire  il  les  en  avait  détournées. 
un  habit  long  de  drap  gris,  avec  un  chapeau  On  les  crut,  el  le  saint  fut  élargi  par  une 
de  même  couleur,  et  ne  vivaiint  que  d'aumô-  sentence  du  premier  juin  1527.  Va:  jugement, 
lies.  L'im[)alience  qu'il  avait  de  se  ilonner  à  lui  rendant  sa  liberté,  ne  laissa  pas  de  lui 
la  conversion  des  âmes  lui  lit  embr.isser  d'inner  du  chagrin.  Il  fut  ordonné  en  mémo 
l'étude  avec  une  extrême  ardeur;  et,  croyant  temps  que  lui  et  ses  compagnons  prendraient 
avancer  beaucoup  en  abrégeant  les  matières,  r!ialiillemenl  iirdin.iire  des  écoliers,  et  (|ue, 
à  peine  eut-il  commencé  son  cours,  qu'il  se  n'i  tant  ()as  théologiens,  ils  s'absliendr.iient 
jeta  dans  la  physique  et  la  théologie  scola>-  d'expliqurr  au  peuple  les  mystères  de  la 
tique.  On  expli  (uail  aux  écoles  la  I.ogi-  religion  ,  jusqu'à  ce  (|u'ils  eussent  élud.é 
que  de  Solo,  la  l'hysiquc  d'.Mberl  le  Grand  quatre  ans  en  théologie, 
et  la  l'héolDgie  du  Maitre  des  Sentences  ;  il  Ignace,  peu  satisfait  dece  jugement,  rendu 
prenait  ces  trois  leçons  l'une  après  l'autre,  par  le  grand  vicaire  d'Alcala,  alla  trouver 
et  éludiail  sans  relâche  jour  el  nuit  ;  mais  l'archevêque  de  'l'olède,  qui  lui  conseilla  de 
ces  dilTérenles  études  lui  mirent  tani  de  con-  quitter  cette  université  et  d'aller  étudi -r  à 
fusion  d.ins  l'esprit,  que  lout  son  Irav.iil  ne  Salamanque;  (I,  l'exhoitaiil  fortement  à 
|)ro(lnisit  pas  ce  qu'il  en  espérait.  Kebulé  du  conl^auer  ses  fonctions  de  pié;é  envers  le 
peu  de  progrès  qu'il  faisait  dans  les  sciences,  prochain,  il  lui  promit  sa  pioleclion.  Notre 
il  s'appliqua  entièrement  avec  ses  quatre  saint  y  alla,  et,  eu  aitendant  qu'il  pût  re- 
disciples aux  bonnes  o-uvres  et  à  l'explica-  picn.lie  le  cours  de  ses  éludes  ,  il  commença 
lion  delà  doctrine  chrétienne,  àscivirlcs  par  tr,i\ailler  au  salut  des  àincs  avec  d'autaiit 
malades  de  l'hopilal,  à  soulager  les  pauvres  plu.  de  ferveur  el  de  liberié,  (j-ie  sa  m  ssioii 
honteux,  et  |iarliculière(nenl  à  réformer  les  semblait  èire  autorisée  par  l'archevêque, 
uiii'urs  des  écolier>  dehaïuhés.  iMiis  on  y  trouva  encore  à  redire  :  il  lui  mis 
La  (onversiou  siirpreiianle  qu'il  (il  d'un  derechef  en  prison  avec  ses  compagnons, 
prel.il  (|ui  corroini)ail  les  jeunes  gens  de  cl,  après  y  avoir  clé  retenus  peu  laiil  trois 
l'univerhite  par  ses  mauvais  exemples,  ses  semaines,  ils  fnrent  renvoyés  absous  par 
libertés  el  ses  caresses,  lit  du  bruit  p.ir  tout  une  sentence  qui  permet  ail  A  Ignace  d'iii- 
le  pays,  surtout  lorsqu'on  vit  (in'iDe  lut  slruire  le  peuple,  a  comijtion  (jue,  dans  ses 
suivie  de  celle  d'un  grand  nombre  d'écoliers,  catéchismes  cl  dans  ses  entretiens,  il  ne  se 
que  le  prélat  lui-même  entreprit  de  relircr  mêlerait  point  de  vouloir  marquer  la  dilTé^ 
du  liliertinage  où  il  les  avait  jetés.  Le  peuple  rence  qu  il  y  a  entre  le  péché  mortel  el  lo 
eut  d'etranms  idées  d'Ignace;  quelques-uns  péché  véniel.  Ignace,  sur|)ris  de  ce  dernier 
le  prenaient  pour  un  enclianleur,  el  disaient  arlii  le  de  la  sentence,  vil  bien  que  c'était  un 
que  sans  magie  on  ne  pouvait  faire  ce  qu'il  piège  qu'on  lui  tendait,  d'autant  plus  (ju'il 
taisait;  el  d'autres,  ()uu  c'était  un  hêrélii]ue  sut  que  ses  ennemis  l'ivaieiii  f.iil  mettre 
qui,  sous  prétexte  de  porter  les  jeunes  gens  alin  d  avoir  lieu  de  le  chicaner  et  de  lui  faire 
a  la  vertu,  leur  ins|iirait  des  erreurs.  Les  une  querelle  quand  ils  voudr. lient  :  c'est 
inquisiU'Uis  do  Tolède  en  vouluicnl   pren-  pourquoi,  persuadé  de  leur  malice,  «lui   lui 


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r38 


fttait  les  moyens  de  satisf.iire  son  zèle,  il  prit 
la  résolution  de  (cuiller  Sal.im.innuo ,  rt 
même  de  sortir  de  l'Espagne.  11  l'iirma  le 
dessein  d'aller  en  France,  pour  continuer  ou 
pluiôt  pour  recommencer  ses  études  d;ins 
l'université  de  Paris,  qui  était  depuis  long- 
temps la  plus  célèbre  de  l'Europe. 

Ses  compagnons  n'étant  pas  disposés  à  le 
suivre,  il  partit  seul  sur  la  fin  de  dcccnibic, 
arriva  à  Paris  au  comincnienienl  de  février 
de  l'an  1528,  cl  se  logea  au  quartier  de  l'U- 
niversité avec  des  écoliers  espagnols.  Pour 
mieux  posséder  la  langue  latine,  il  reprit  ses 
iiunianilés  au  collège  de  Montaigu;  mais, 
ayant  été  volé  par  un  de  ses  compagnons, 
auijuel  il  avait  confié  une  somme  d'argent 
que  ses  amis  lui  avaient  donnée  en  partant 
d'Espagne  pour  la  continuation  de  ses  étude;, 
il  fut  contraint  de  se  relirer  à  Sainl-Jacrjues 
de  l'Hôpital,  où  les  Espagnols  ét^iitnt  reçus. 
11  n'y  avait  (jue  le  couvert,  et  il  lalliiit  que 
pour  vivre  il  mendiât  son  pain  de  porte  en 
porte.  Gomme  il  demeurait  loin  du  collège 
de  Alontaigu  ,  perdant  du  temps  à  chercher 
des  aumônes,  il  aurait  bien  voulu  servir  un 
des  professeurs  ;mais,  quelque  diligence  qu'il 
lit,  il  ne  put  jamais  l'obtenir.  Quoique  sa  mi- 
sère fût  grande,  il  ne  laissait  pas  d'exciter 
les  gens  de  sa  connaissance  à  faire  la  charité 
aux  pauvres,  auxquels  il  faisait  donner  ce 
qu'il  aurait  pu  demander  pour  lui.  Ses  paro- 
les firent  tant  d'impression  sur  l'esprit  de 
trois  Espagnols,  qu'ils  vendirent  d'eux-mê- 
mes leurs  meubles  et  en  donnèrent  l'argent 
aux  pauvres,  après  quoi  ils  se  retirèrent 
aussi  a  Sainl-Jac(iues  de  l'Hôpital,  où  ils  vi- 
vaieiit  d'aumônes  comme  lui. 

Cette  nouvelle  société  rendit  encore  notre 
saint  suspect.  H  fut  déféré  à  l'inquisiteur 
Matthieu  Ory,  religieux  de  l'ordre  te  Sainl- 
I)oniini(|ue  et  prieur  du  grand  couvent  de  la 
rue  Saint-Jacques.  ((Juoique  le  tribunal  de 
l'inquisition  naît  jamais  été  établi  en  France 
de  la  manière  qu'il  l'est  en  Espagne  et  en 
Italie,  il  y  a  eu  néanmoins  dans  de  certains 
temps  des  inquisiteurs  délégués  du-  pape 
pour  y  conserver  la  pureié  de  la  foi  et  tenir 
les  peuples  dans  l'obéissan'e  de  l'Eglise;  et 
cette  qualité  avait  été  déférée  à  Matlliieu 
Oiy  par  le  pape  Clément  Vli,  à  l'ociasioii 
des  hérésies  d'Allemagne.)  Cet  inquisiteur, 
\ayant  donc  pris  connaissance  de  celte  alïaire, 
et  ayant  reconnu  l'innocence  d'Ignace  par 
les  perquisitions  qu'il  fit,  le  renvoya  absous. 
Ayant  étudié  les  tiumauités  près  de  di\-huit 
mois  au  collège  de  ftlontaigu,  il  commença 
son  cours  de  philosophie  au  collège  de 
Saiute-ISarbe.  Le  docteur  Govea,  Esp  gnol, 
principal  de  ce  collège,  prévenu  contre 
Ignace  par  les  Tiux  rapports  qu'on  lui  en 
avait  faits,  voulut  d'abord  l'en  chasser;  mais, 
ayant  examiné  avec  diligence  la  conduite  de 
notre  saint,  el  n'y  ayant  rien  trouvé  qui  lui 
digne  de  réprchensi  n  et  qui  ne  mériiàl  au 
contraire  l'estime  el  l'approbation  de  tout  le 
monde,  lui  fit  satisfaction  publique  devant 
tous  les  écoliers,  el  rendit  justice  a  sa  vertu 
par  l'éloge  qu'il  en  fit.  Le  professeur  l'egna, 
gui  avait  éie  U  cause  de  telle  prévention, 


voulant  aussi  réparer  l'injure  qu'on  lui  avait 
faite,  lui  lUmna  pour  répétiteur  un  garçon 
fort  capable,  nommé  Pierre  Lefi'vre ,  sa- 
voyard, qui  demeurait  au  même  collège  avec 
François  Xavier,  gentilhomme  navarrois  , 
peu  accommodé ,  et  presque  aussi  pauvre 
que  Lefévre.  Ignace  si;  mil  avec  eux  piur 
1.1  commodité  de  ses  études,  et  avança  lelSe- 
nient  par  le  soin  que  Lefèvre  prit  de  loi, 
qu'à  la  fin  de  son  cours,  qui  fi:l  de  trois  ans 
el  demi,  selon  l'usage  de  ce  temps-là,  il  fut 
reçu  maître  ès-arts,  et  continua  ensuite  sa 
théologie  aux  Jacobins.  Ce  fut  alors  que, 
sentant  croître  en  lui  le  zèle  pour  le  salut 
des  âmes  à  proportion  qu'il  avançait  dans  la 
connaissance  des  mystères  de  la  foi  et  des 
vérités  évangéliques,  il  forma  le  dessein  d'é- 
lablir  une  compagnie  d'hommes  apostoliques 
qui  pussent  l'aider  à  porter  et  étendre  ce 
même  zèle  jusqu'aux  extrémités  de  la  terre. 
-Ne  doutant  point  que  le  penchant  qu'il  se 
senlait  pour  l'instruction  des  peuples  el  la 
conversion  des  infidèfes  ne  fût  un  secret 
mouvement  de  la  grâce  de  Dieu,  qui  le  desti- 
nait à  un  si  noble  emploi  et  si  digne  do 
l'ambition  d'un  véritable  chrétien  ,  et  ne 
comptant  plus  sur  ses  anciens  compagnons 
qu'il  avait  laissés  à  Barcelone,  où  ils  avaient 
pris  différents  partis,  il  s'en  associa  (juel- 
ques  autres  qui  étaient  de  l'université.  Lo 
premier  qui  se  joignit  à  lui  fut  ce  Pierre  Le- 
fèvre, qui  avait  éié  son  répétiteur;  il  gagna 
ensuite  François  Xavier,  et  peu  de  temps 
après  il  eut  quatre  nouveaux  compagnons, 
qui  furent  Jacques  Lainez,  d'.Mmazan,  au 
diocèse  de  Siguença;  Alphonse  Salmeron, 
d'auprès  de  Tolède;  Nicolas  Alphonse,  sur- 
nommé Bobadilla,  du  lieu  de  sa  naissance, 
village  proche  de  Paltnze,  au  royaume  du 
Léon;  el  Simon  Uodriguez  d'Azeudo,  gentil- 
homme portugais. 

Quoique  le  choix  de  ces  six  personnes 
parûl  venir  de  la  main  de  Dieu,  el  qu'I- 
gnace, persuadé  de  leur  zèle  pour  l'agran- 
dissemenl  du  royaume  d^'  Jésus-Christ,  n'eût 
aucun  lieu  de  douicr  tie  leur  fidélité  el  per- 
sévérance dans  le  dessein  (ju'ils  se  propo- 
saient ;  cependant,  se  ressouvenant  de  l'in- 
constance de  ceux,  qui  s'étaient  joints  à  lui 
en  Espagne,  et  faisant  rèllexion  sur  la  lé- 
gèreté de  l'esprit  humain,  il  se  persuada 
que,  quelque  bonne  que  fût  la  volonté  de 
ses  nouveaux  disciples,  il  était  nécessaire  de 
les  fixer  par  des  engagements  indispensa- 
bles. Le  jour  de  l'Assomplion  de  Notre- 
Dame  de  l'an  153i,  ap;ès  les  avoir  [iré- 
parés  sur  son  dessein,  il  les  mena  dans 
l'église  do  l'abbaye  de  Montmartre  près  Pa- 
ris, où  Pierre  Lefèvre,  qui  avait  été  fait 
prêtre  depuis  peu,  leur  ayant  dit  la  messe 
et  les  ayant  communies  dans  la  chapelle 
souterraine,  ils  firent  tous  sept  ensemble, 
d'une  voix  haute  el  distincte,  vœu  d'enlre- 
[irendre  le  voya;re  de  Jérusalem  pour  l,i 
conversion  îles  infidèles  du  Levant  ;  de  quit- 
ter tout  ce  qu'ils  avainnl  au  mofede,  hors  co 
iju'il  leur  faudrait  pour  aller  en  terre  sainte; 
el,  en  cas  qu'ils  ne  pussent  y  entrer  ou  y 
demeurer,  de  s'aller  jeter  aux  pieds  du  pape, 


c:9                               niCTiON.NAiiiK  n:.s  onDRr:s  kf.licielx.  (uo 

pour  lui  oiïrir  leurs  services,  et  aller  sous  Le  nonce  examina  l'alTaire  avec  «on  risses- 

sesorilrcs  p.irtoul  où  il  vouilrail  li'S  envoyer.  seur,  et,   ne  trouvant  rien  qui  pût  donner 

(",oniinc  il  _v   «n  avait  parmi  eux  qui  n'a-  lieu  aux  bruits  qui   couraient,  il   porli  en 

valent  pas  fi  il  i  l<'iir  ilieiiIof;ie,  il  leur  laissa  faveur    du    saint    uac   senlcncc   juri(li(iuc , 

continuer  celle  clmle  jusqu'au   2")  janvier  qui  le  disculpait  de  ces  fauises  accusations. 

15.17,  cl   en   lis  attendant  II  travailla  à  ar-  Pierre  Cariffo,  qui  fut  élevé  au  souverain 

rcler   K-   couis   et    les    désonlrcs   que  eau-  ponlificat   sous  le   nom  de   Paul   IV,  cl  qui 

saienl  en   Francs  les  nou\clles  hérésies.   11  auparavant  d'archevêque  de  Tliéa'e,  s'clant 

avait  coulun\e  de  se   retirer,  ou  à  Noire-  fait  compagnon  de  saint  (laéian  de  Tyenne  , 

Dame   des   Cliainps .    (jiii    él  lit   le    lieu    où  avait    été    l'un    des    fondateurs    de    l'ordre 

l'on   a    bàii   depuis  1(>  couvent  des  ("armé-  des  Tlicalins,  du  nom  de  l'archcvéclié  qu'il 

liles  du    faiiboiiri;  Sainl-Jacqucs ,  on   dans  quilla,  ne  contribua  pas  peu  à   cmifondrc 

les   c.irriiTcs   de  .Munlm.irlre  ,  qui,   lui   rc-  ces   cal:)mnies,  par  rcstimo  et  les  liaisons 

présentant   sa   caverne   de   Manrczo,    l'ex-  qu'il  eut  avec  Iy;nace  dans  le  séjour  qu'il  lit 

citèrent  à  reprendre  des   exercices   de    pé-  à  ^'enise,  où  enlin  il  eut  La  consolation  de 

nitonce  ;  mais  ses  nouvelles  austérités  ayant  voir  ses  compagnons  plus  lot  qu'il  ne  l'cs- 

ruiné  ses    forces,   le   réduisirent  dans   une  pérait  et  qu'ils   n'en  étaient   convenus.   La 

laiigiicur,  qui  ne  lui  permettait  pas  n.éme  de  guerre  se  ralhiinanl  plu<  ([ue  jamais  entre 

s'ap.pliquer  aux  exercices  de  piété.  Comme  François  l",  roi  de   Fran.  e ,  et  l'emperc-iir 

les    remèdes    ne    le    soulageaient    pas,    les  Charles  \',  par  la  mort  de  Françnis  Sioize, 

niédeciiis   lui    p»  rsuadèrei:t   d'aller   rcpren-  duc  de   Mil. m,  sur  l'Etat  duquel  ces  deux 

dre   l'air  de   son    pays.    I!   se   détemiina    à  princes  avaient  des  prétentions,  au  premier 

ce  vt)yage;    mais,   avant   sun   départ,   cjui  bruit  qu;'  ces  fi  ièles  disiplos  en  eurent,  ils 

fut   au  cummencemenl  de  janvier   de   l'an,  se  résolurent  d'av.incer  leur  voyage  et  de 

1335,    il    convint    avec   ses    disciples    qu'il  sortir  du  royaume  avant  que  les   passai;e8 

irait  les  attendre  à   Venise  ,  et  qu'ils  par-  fussent  formés.  Ils   partirent  de  Taris  le  1j 

liraient  le   25  j  invier   LjST   pour  l'y  \cnir  novembre  de  l'année  1336, trois  snois  plus  UU 

trouver.  Sa  faiblesse  ne  lui   permit   pas  de  qu'ils  n'élaientconvenus  avec  leur  saint  fon- 

faire    le    voyage   à    pied;    il   le    lit   sur   un  dateur,  sans  autre  équipage  (ju'un  bâton  à 

cheval  que  ses  compagnons  lui  athotèrcnl;  la  main  et  une  petite  valise  sur  le  d<  s,  où 

et  à  peine  eut-il  passé  les  Pyrénées  et  res-  chacun  avait  ses  écrits.  Us  prirent  leur  clie- 

piré  l'air  de  Guipuscoa  ,  qu'il  recouvra  sa  min  par  la  Lorraine  pour  éviter  la  Provence, 

ganté  et  sentit  revenir  ses  forces.  et  arrivèrent  à  ^'euise  le  8  janvier  de  l'an 

Pendant  le  séjour  <]u'il  fit  en  Lspagne ,  1537.  Ignace  les  reçut  avec  beaucoup  de 
ses  compagnons,  qu'il  avait  laissés  à  Pa-  j  ie,  et  leur  donna  un  autre  compagnon, 
ris,  poursuivirent  leurs  études.  Lefèvre  nommé  Jacques  llozoz,  qui  fut  le  onzième  de 
les  gouvernait  en  son  absence  et  augmenta  la  Compagnie.  En  attendant  qu'ils  pussent 
leur  nombre  de  trois  autres  théologiens,  aller  ensemble  recevoir  la  bénédiction  du 
dont  le  premier  fut  Claude  le  Jay  d'An-  pape  pour  le  voyage  de  Jérusalem  ,  le  saint 
necy ,  Jean  Codure  et  Paquicr  lirouel ,  fondateur  les  oceu|)a  dans  les  hôpitaux  à 
tous  deux  Fr;.nçais,  l'un  du  diocèse  d'iîm-  instruire  les  ignorants,  à  servir  les  malades, 
brun  et  l'autre  du  diocè  e  d'. Amiens.  Ces  à  assister  les  mourants  cl  à  ensevelir  les 
Irois  (îerniers  firent  à  .Moulin. irire  le  même  morts.  Ils  s'occupèrent  de  la  sorte  jus(|ue 
vœu  tiue  les  autres  y  avaient  fait  cl  qu'ils  vers  la  mi-carcme,  que  tous  partirent  pour 
lirent  (  ncorc  |iour  la  seconde  fois.  Ces  nenf  Home,  hors  Ignace,  qui  ne  jugea  pas  à  pro- 
disciplcs  d'Ignace,  qui  avec  lui  firent  les  Ion-  po-.  de  parailie  dans  un  lieu  où  sa  présence 
déments  de  la  Cumpagiiie  de  J  'sus,  étaient  cûl  pu  iaire  tort  à  ses  compagnons  :  car  (',a- 
tcllemeiil  unis  ensemble  ,  ((ue,  quoie,ue  dif-  raiïe,  que  Paul  III  avait  fait  cardinal ,  sem- 
féienls  <l  de  nation  el  d'humeur,  ils  sem-  blait  alors  forl  contraire  aux  desse  ns  «lu 
blaienl  iiéaninoins  n'avoir  qu'un  ccrur  el  saint,  soit  ])ar  resscnlimiul  de  ce  que  lui  et 
qu'une  aine;  ce  qui  était  d'une  grande  conse,.  Hozez  n'avaient  pas  voulu  entrer  parmi  les 
lation  pour  ce  sainl  fondateur.  Ignace,  après  Théalins,  ou  soit  qu'il  eût  ajoute  foi  aux 
avpir  demeuré  c|u.;si  un  an  en  Lspa;;nc,  eu  bruits  qu'on  avait  semés  à  Venise.  Les  coin- 
partil  pour  aller  à  N  cuise,  où  il  arriva  sur  pignons  de  notre  saint  étant  arriiés  à  Ko- 
la fin  de  l'année  i'.i'-lo.  Son  zèle  ne  lui  donna  me,  furent  reçus  si  favorableoienl  tlu  pa[>i', 
pas  de  relâche  dans  celle  ville,  où  il  ue  fat  que,  sur  le  lécil  qu'on  lui  avait  fail  de  leur 
pas  jilulùl  entré  ,  qu'il  s'y  occupa  à  gagner  savoir  cl  de  leur  piété,  non-seulement  il 
des  âmes  à  Dieu.  .>Iais  ce  qui  lui  devait  alti-  leur  accorda  ce  qu'ils  lui  demandèrent, 
rer  de  l'estime  fui  le  sujet  d'une  nouvelle  per-  mais  même  .  ajirès  leur  avoir  donné  sa  bé- 
secution.  l-.lle  lui  lut  suscitée  par  les  liber-  nédielion,  il  leur  donna  de  l'aigcnt  jiour 
lins,  qui,  ne  pouvant  soulïnr  la  censure  leur  voyage,  et  permit  à  ceux  qui  n'étaient 
qu'il  f lisait  de  leur  vie,  firent  courir  le  bruit  |ias  prêtres,  du  nombre  desquels  était  Igna- 
qu'lgnace  était  un  héréli(]ue  déguisé,  qui,  ce,  qui  (|iioique  absent  fut  <  ompris  dans  celle 
après  avoir  infeeté  la  France  el  l'Espagne,  permission,  de  recevoir  les  ordres  sacres 
venait  gâter  l'ililie.  Dès  qi>e  le  s  linl  sut  ce  de  (|uel(|uc  évèquc  que  ce  fût  ,  cl  accorda 
i|ue  l'on  (lisait  publiquement  de  lui.  il  alla  une  dispense  il'àge  pour  Alphonse  Salme- 
iriiuver  Jerrtine  N'eralli  ,  non'C  du  pape  ron ,  afin  qu'il  reçût  l'ordre  de  la  préirisc 
P.iul  III  vers  la  république,  pour  le  prier  avec  les  autres  dès  qu'il  entrer. lil  dans  sa 
Je   lui  faire  son  procès,  s'il  étal  couiublc.  vinglièine  auiiée.  El.uil  rclourncs  à  Venise, 


(iil 


JES 


JES 


042 


ils  firent  vœu  de  pauvre  é  cl  Je  ch.istelé 
porpéluelle  outre  les  mains  (lu  nonce  Vc- 
ralii ,  cl  le  jour  de  la  Nalivilé  du  saint  Jean- 
Baplislo,  ceux  qui  n'étaient  pas  prêlrcs  fu- 
rent ordonnés  par  Vincent  Ni'iulati,  cvê(|ue 
d'Aibc.  La  U'^ue  qui  fut  conclue  dans  (e 
tinips-là  entre  l'Eniporeur  et  la  républi- 
que contre  le  Turc,  ayant  rompu  le  cotu- 
luerce  du  Levant,  les  empêcha  de  faire  leur 
voyage  de  Jérusalem:  c'est  pourquoi,  après 
être  restés  un  an  entier  sur  les  terres  de  la 
république,  comme  ils  s'y  étaient  obligés, 
et  n'y  ayant  nulle  apparence  que  la  navi- 
j^alion  fût  lilire  de  longtemps,  Ignace  les 
rassembla  tous  à  Vicenze ,  où  il  leur  fit 
iMitendre  que,  puisque  la  porte  de  la  l'aies- 
linc  leur  était  fermée,  ils  ne  devaient  pas 
différer  d'accomplir  l'autre  partie  de  leur 
vœu,  qui  était  d'aller  offrir  leur  service  au 
[)ape.  Il  fut  résolu  que  le  saint  fondateur, 
Lei'èvrc  et  Lainez  iraient  les  [  remiers  à 
Uonie,  pour  exposer  à  Sa  Sainteté  les  in- 
tentions de  toute  la  Compagnie.  Avant  que 
de  se  séparer,  ils  se  prescrivirent  une  ma- 
nière de  vie  uniforme  et  des  règles  qu'ils 
s'obli|;érent  de  suivre.  Comme  ou  leur  de- 
mandait souvent  qui  ils  étaient  et  quel  était 
leur  institut,  saint  Ignace  leur  dit  qu'ils 
devaient  répondre  qu'ils  étaient  de  la  Com- 
pagnie de  Jésus,  puisqu'ils  étaient  unis  en- 
semble pour  combattre  les  hérésies  et  les 
vices  sous  la  bannière  de  Jésus-Christ.  Le 
.•laint  fondateur,  Lefèvre  et  Lainez  arrivè- 
reiii  à  Home  sur  la  (in  de  l'année  1537.  Ils 
eurent  dès  les  premiers  jours  audience  du 
pape,  qui,  recevant  avec  joie  leurs  offres, 
employa  aussitôt  Lefèvre  et  Lainez  à  en- 
seigner la  théologie  dius  le  collège  de  la 
Sapience  à  Uumo,  et  Ignace  à  la  réforma- 
tion des  mœurs  par  la  voie  îles  exercices 
spirituels  et  des  exhortations,  qu'il  faisait 
d'une  manière  si  pathétique  et  si  édilianie, 
qu'il  y  eut  plusieurs  personnes  de  grand 
mérite  qui  se  mirent  sous  sa  conduite. 

Pendant  que  ces  trois  hommes  a|iostoli- 
ques  travaillaient  si  utilement  dans  Home  , 
Xavier  et  liobadilla  s'employaient  dans  Bo- 
logne au  salut  des  âmes,  le  Jay  et  Rodriguez 
f.iisaieut  de  même  dans  Ferrare  ,  Brouet  et 
aalmeion  dans  Sienne,  Codure  et  Hozez  dans 
l'adoue  ;  mais  ce  dernier  étant  mort  quelque 
temps  apièi ,  saint  Ignace  retrouva  presque 
aussitôt  un  autre  compagnon,  qui  fut  Fran- 
çois Strada.  Jusqu'alors  Ignace  n'avait  point 
eu  d'autre  vue  que  ce, le  de  travailler  au  sa- 
lut d'js  âmes  de  concert  avec  ses  compa- 
gnons, cl  cela  sans  aucun  engagement  parti- 
culier ;  mais  Dieu  ,  qui  l'avait  destiné  à  être 
le  chef  d'un  corps  qui  devait  être  si  utile  à 
son  Eglise  ,  lui  donna  des  notions  plus  dis- 
tinctes de  l'institut  dont  il  devait  être  le  fon- 
dateur, et  une  forte  pensée  de  l'établir  au 
jilus  tôt.  11  en  communiqua  avec  Lefèvre  et 
Lainez  ,  et  manda  les  autres  qui  étaient  dis- 
persés en  Italie,  afin  i|ue  convenant  avec 
eux  ils  pussent  faire  un  établissement  solide. 
A  peine  ces  ouvriers  évangéli-iues  eurent-ils 
reçu  l'ordre  du  saint ,  qu'ils  quittèrent  tout 
pour  se  rendre  ù  Home,  où  étant  arrivés  sur 


la  lin  da  carême  de  l'an  15.'î8  ,  ils  logèrent 
tous  ensemble  chez  un  genliihoinme  romain 
nommé  Quirino  Garzonio  ,  qu'Ignace  avait 
gagné  à  Dieu.  Le  saint  leur  ayant  déclaré  le 
motif  pour  lequel  il  les  avait  fait  venir  ,  ils 
l'approuvèrenl  et  conviiironl  qu'il  fallait  éri- 
ger leur  société  en  religion,  et  que  pour  cela 
il  fallait  pré|)arer  l'esprit  du  papr;  ,  ()ui  sem- 
blait fort  èloiïiné  des  nouveaux  établsse- 
ments  ;  mais, comme  le  pape  lartaitde  Homo 
pour  aller  à  Nice,  celle  affaire  fut  retardée. 
En  attendant  le  retour  de  Si  Sainteté  ,  saint 
Ignace  et  ses  rompaj^nons  ,  traitant  souvent 
du  projet  de  l'institut  ,  résoluient  dans  une 
de  leurs  assemblées,  suivant  les  propositions 
du  saint  foudateur,  qu'ou:re  les  vœux  da 
pauvreté  et  de  chasteté  qu'ils  avaient  faits  à 
Venise,  ils  en  feraient  un  d'obéissance  per- 
pétuelle à  leurs  supérieurs,  et  déterminè- 
rent dans  une  autre  que  ceux  qui  feraient 
profession  dans  leur  Compagnie  ajouteraient 
aux  trois  vœux  de  pauvreié,  de  chasteté  et 
d'obéi-sance  ,  un  \œu  exprès  d'aller  partout 
où  le  vicaire  de  Jésus-Christ  les  enverrait  , 
pour  travailler  au  salut  des  âmes  ,  et  d'y  al- 
ler sans  viatique  et  en  demandant  l'aumône, 
s'il  le  jugeait  à  propos.  Ils  eurent  encore 
d'autres  conférences  ,  et  ils  déterminèrent 
(|ue  les  profès  ne  posséderaient  rien  ni  eu 
particulier  ni  en  commun  ;  mais  que  dans 
les  universilés  on  pourrait  avoir  des  collèges 
avec  des  revenus  et  des  rentes  pour  la  sub- 
sistance de  ceux  qui  y  étudieraient. 

Au  milieu  de  ces  [irojets,  il  s'éleva  conlrn 
eux  une  tempête  qui  pensa  renverser  leur 
plan  et  leurs  espérances  ,  pour  avoir  atta- 
qué un  prédicateur  célèbre  accusé  de  luthé- 
ranisme. Celui-ci  eut  l'adresse  d;^  rejeter  sur 
saint  Ignace  le  soupçon  d'hérésie  ,  et  gagna 
trois  Espagnols  qui  avaient  un  air  de  sagesse 
et  de  probité  tout  propre  à  autoriser  une  ca- 
lomnie.Il  COI  rompit  encore  Michel  Navarre, 
qui  avait  été  à  Paris  compagnon  de  François 
Xavier,  et  qui  ha'issait  saint  Ignace  à  cause 
qu'ayant  voulu  être  de  ses  disciples  ,  il  ne 
l'en  avait  pas  jugé  digne.  Saint  Ignace  fut 
dénoncé  devant  le  gouverneur  de  Kome 
comme  un  liérétique  et  un  sorcier ,  qui  avait 
été  briilé  en  effigie  à  Alcala,  à  Paris  et  à  Ve- 
nise. Sur  celte  accusation,  le  peuple  se  sou- 
leva contre  lui  et  ses  compagnons  ;  mais  leur 
innocence  fut  reconnue  et  leurs  accusateurs 
furent  contraints  de  se  dédire  et  d'avouer 
leurs  impostures.  Le  gouverneur,  par  ordre 
du  pape  ,  rendit  une  sentence  qui  contenait 
l'éloge  des  accusés  et  les  justifiait  entière- 
ment. Ils  parurent  do  nouveau  en  public  ,  et 
recommencèrent  leurs  exercices  de  charité  , 
tant  en  soulaye.int  les  pauvres  dans  une  fa- 
mine (jui  alfligea  dans  ce  temps-là  la  ville  de 
Home,  qu'en  les  instruisant  des  devoirs  du 
christianisme  :  ce  qui  leur  attira  l'estime  du  • 
peuple,  qui  leur  donna  autant  de  béiiédie- 
lioiis  qu'il  leur  avnit  souhaité  de  mal  au  su- 
jet des  accusations  susdites. 

Saint  Ignace  crut  qu'il  devait  profiter  d'une 
si  heureuse  conjoncture  pour  l'exécution  do 
son  dossein.  Ayant  fait  un  abrégé  de  l'insti- 
tut, que  lui  cl  ses  compagnons  avaient  cou- 


c;r,                              nif.TiONNMUE  nr.s  oudues  urMCiF.iix.  eit 

rerlé  eiisrml>l<>  ,  il  \c  |iri'sciila  .m  pape  r;ml  §  II.  Condnualion  ilc  l'/HHoire   île    lu  C'>m- 

111  p;ir  ri'iilrnivsc  du  c.irdiiial  (".aspard  Cou-  paijnie  de  Jésus  el  de  tu  vie  de  mnit  I^nuce 

lariiii.    Les  iiil-pèic   rorul  cl  écrit,    clic  de  Loyola. 

donna  niissiiùl  à  examiner  au  maiirc  du  sa-  j^^^  ^y^  ig  saint-siégc  cul  approuvé  la 

cré  palais.    Thomas    liadia  .    qui  fui  depuis  c,,mp;,ir„je  de  Jc-us,  sainl  Icnace  ju;,'<-a  qu'il 

cardinal.    Badia  le  reiiiil   deux  mois,    apns  (alhni    commenrcr  par   lui  donner  un    chef, 

lesquels  il  le  .end.l  a  ba  Nnniele.  lui  proies-  ,  ^^^  ecl  elT.l ,    il  rappela  à  Uomo  ,    avec  la 

l.iiil  qu'il  nj   Irouoil  ne  i  que  de  Ires-loua-  permission  du  pnpe.ceuv  'le  ses  conipnjrnons 

l)le,    el    le  pape    I  .ijant  lu    lui-même,   ap-  ^uj  se  pou\  aient   trouvera   lélecliou.  Il    ne 

prouva  de  vive  »oi\    cet    iiislilut.  Ii;ua.c   le  j.^  ^^  trouva  que  sis  ;  car  Xavier  el  Uodri- 

pria  de  le  coiilirmer  auilienliqucment  ;  ma-s,  ^^^^^  étaient  en  l'ortu-al  ,  en  allcndanl  l'oc- 

quoiquc   «e  sou^eraln  ponlile  »y  seiilil  por-  ç^^^i^,,  .ig  ^.^^^cr  aux  Indes;  mais  ils  avaienl 

lé.    il   ne  voulut  rien  l.mc  que  par  lavis  de  ,3(^5,,.   p,^   parlant  de   llomc  leurs  sullVages 

trois  cardinaux  ,    dont   le   p.emicr  ,    qui  lut  .^^j,    ,,,.,^,^0  envoya  le  sien  de  Worms, 

chargé  de  1  allairc  ,   se  nommait  lîarthelemy  „-,    j,    assistait  à   la    diète  qui   s'y   tenait,   il 

C.uidiCLioni.  C.l.i  n  empêcha  pas  .  en  alleu-  „.      ^,^^^             Hohadilla   qui    ne    concourut 

dant,  que  Sa  .Sainteté  ne  demandai  a    gnacc  p  ,^  .-,  |Vloction.  étant  re.le  a  Naples  par  or- 

quelques-uns  de  ses  disciples  pour  reformer  ^^^^  ,,jj            ^.^  „-ayaiil  point  envoyé  son  suf- 

un  monastère  de  relij;icuses  qui_  otail   dans  f^^      .  „,.,ij  ■^  c„„iirma  à  son  retour  le  choix 

un  -rand  désordre  ,    et  qii  elle  n  en  destinai  ,1,.^,,^  ,,  ^  .,„,,.y^  ^  ^i      ,;  ,^,,,,[,3  ^^^^  ^^j^f 

d  autres   a   d  autres    emplois    qui    ne     leur  j„„;,cc.  Le   saini  ,   quoiqu'il   eût    toutes    les 

étaient   pas  moins  honorables.  Le  Jay  alla  a  ^^j^     „p  pouvant  consentir  à  accepter  celle 

Hrescia  pour  extirper  1  liercMe  que  des    pre-  (.i,ar.r,.,les  obligea  à  recommencer  l'élection; 

dicateurs  peu  catholiques  y  av.nenl    semée.  ,i,;,is.ayantcncorceu  toutes  les  voixdans  celle 

liobadilla  lut  envoyé  a  l  ilc  d  Ischia,  vers  les  se(.„,„|c  élection,  cl  après  avoir  fait  de   nou- 

côles  de  Naples  ,    pour  accorder  les  princi-  ^,,_,,^,^  ^ly^^i^        ,,.  „,.       j^  accei.lcr  cet  eii:^ 

paux    du  pays  ,    qui  se  haïssaient  morlelle-  ,■    j,      ,^,(  p„j,„  ,|éu,,.,ni„é  par  l'avis  du  I'. 

nient.   Lainez  d  Leievre   accompasinerent    e  .,,,  ■  ,,1^^^     reli-ieux  de  Sainl-Fraucois  ,  qui 

cardinal  de  .saïut-Angc   dans   sa  légation  de  ^.,.„^  ^^,,,  confesseur, 

rarme.    Lainez   resta    a  l'hiisamc.   el  Lele-  ,,           ,          ,                                ,    , 

vre  demeura  à  l'arme  .  doù  il  fut  retiré  en-  "  pnl  donc   le  gouvernement  de  la  com- 

»uitc  pour  aller  .'i  Worms  assister  à  un  col-  P-'J;""'   ''«  -"esus    le  jour  de  l-Jiqucs  de   I  an 

loque    qui    se   devait  tenir  entre  les  catholi-  l•;'^^.^l   •«  vendredi  suivant,  2/  avril,    tous 

ques  el  les   proteslanls.  Enfin    llodrii;uez   el  ceux  de  ses  discip  es  qui  et.nent  a  Ko.iie  (1- 

Xavier  partirent  pour  les  Indes  ,    sur  la  de-  «•eut  dans    la   hasi  ique  de  >aiiil  Paul,   hors 

mande  que  Jean  III  ,    roi  de  Portugal  ,  avait  'es  '«""s  de  la  vi  le,   leur  profession   solen- 

failc  de  ces  nouveaux  missiouaaircs.  nelle,  par   laquelle   ils    s  en^'.igerent   i„us  a 

garder   une   pauvreté,   une  chaslcie  cl   une 

Il  est  dilficile  d'exprimer  la  joie  que  saint  obéissance    perpétuelles,   s 'Ion  la  forme  de 

Ignace  eut  de  voir  ses  coupagnoiis   engagés  vie  contenue   dans  la  bulle  de  leur  inslilu- 

dans  les  emplois  de  l'apostolat;  mais  elle  lut  »'""•   "»   '""i""'    pareillement    le   vœu   d'une 

un  peu  troublée  par  les  opposilions   que   (i-  obcissince  spcci.ile  au   souverain  ponti  e.  a 

reui  les  trois  cardinaux  à  son  grand  dessein.  I"a''"'d  des  missions   marque  dans  la  mène 

Il  continua  ses    poursuites    auprès  du  pape  huile,  el  s  obligèrent  d'enseigner  aux  cnla. ils 

avec  plus  de  chaleur  que  jamais  ,    el  redou-  '•'  'loetrine  chrétienne.  La  dilTereuce  qu  il  y 

bla  ses  prières  auprès  de  Dieu  avec  d'autant  '""'  «""i'  ';'  P'olessiou  du  saint  loiid.iteur  el 

plus  de  coiiliance  ,  que  ,  ne  doutant  point  du  ci'l>i'  ''''»  ai't^cs,  c'est  qu'il  (il  sa   promesse 

succès  de  son  entreprise  ,   il  lui  promit  trois  imu.ediatemeiil  au  pape,  cl  (lU-  ses  compa- 

mille  messes  eu  reconnaissance  et   en  action  gnons  lui  lirenl  la   leur  a  lui-méuic,  comm  • 

de  glaces  de  celle  faveur  (ju'il  espérait   ob-  à  leur  gênerai  el  a  leur  cheL 

tenir  de  sa  divine  majesté.  Son  espérance  ne  Ce  nouveau  général  commença  sa  ch.irgi^ 

fut  pas  lroiii|iée  ,  Dieu  permit  que  les  hère-  par  faire  le  catéchisme  dans  l'église  de  Siiii- 

sics  qui  se  mullipliaicnl  en  France,  en  Aile-  ic-.Maric  de  Sirata,  (|ui   fut  ensuite  donnée  à 

niagnc  et  en  .\ngleterre.  et  qui  avaient  mé-  sa  Com,>agn:e.  Il  conlinua  cet  exercice  peii- 

me  pénétré  jus(iuen  Italie,  laisanl  juger  ;iu\  danl  (juaranle-six  jours;  el  c'est  à  son  e\ -m- 

iruis    cardinaux  que  cette  nouvelle  religion  pie  (|iie  les   supérieurs   de   son   institut  font 

serait  nécessaire  pour  en  arrêter  le    cours  ,  qu.iranle  jours  le  catéchisme  quand  ils  eii- 

les   firent  changer  de  senlimeuls.    Le  pape,  lrcnlencliarge.il  dressa  eusuile   iiticlq'es 

a|>prouvanl   les   conversions    merveilleuses  règleiiicnl-i   pour  le  gouvernement   de  celte 

que  faisaient   les  disciples  d'Ignace  dans  L's  société   n  lissante,  dans    laquelle  ,  outre   lej 

lieux  où  ils  étaient  employés  hors  de  Home,  six  proies  qui   avaient  concouru  .'1  son  élec- 

se  déterunna  enlin  à  conlirmer  le  nouvel  in-  li<)ii,  d>iiize  autres  personne»  étaient  entrées, 

slilul:ce    (ju'il   fil  par  une  bulle  du  "27  sep-  el   furent  snivii>s   peu  de  temps  après  d'un 

teinbre  de    l'an    lo'tO  ,  donnant  à  ce    nouvel  plus    grand  nomlire,  entre   autres   do   deu\ 

ordre  le  nom  de  C'o(n/)f/(/nie  (/e  y(;.«iis,  el  per-  Espagnols,   diinl   l'un,    pareiil   d'Ignace,   se 

inetlanl  à  saint  Ignace  el  à  sis  cuiii,  agnons,  nommait  Kmil  en  di'  Loyola.  Nous  avons  dit 

iju'il  fixa  au  nombre  de  soixante  proies  ,   de  que  Xavier  el  Uodriguez  étaient  en  Portugal, 

dresser  des  constitutions  telles  qu'ils  le  juge-  Le  roi  procnr.i  au  premier,  sans  qu'il  le  sût, 

raient  à  propos.  un  b  cf  do  légal   a|'Ostolique  aux   Indes.  Il 


61."  JES 

parlil  (le  Lisbonne  la  nicmc  année,  y  ayant 
laissé  Uiiilrigiicz.  Bobadilla  el  leJay  allèrent 
prendre  à  \  ienne  el  à  Hatisbonne  la  place  lia 
l.eCèvre,  qui  fut  envoyé  à  Madrid.  Le  pape 
envoya  au-si  en  Irlande  Salmcroii  el  Broui-!, 
avec  le  caractère  de  noncrs,  pour  niainlonir 
la  foi  calliolique  parmi  ces  peuples,  qui, 
noiiobslanl  les  édils  d'Henri  Vill,  étaient 
d  meures  fidèhs  au  sainl-siége  ,  et  l'année 
suivante  15'*2,  la  république  demanda  Lai- 
nez.  Suint  Ignace  envoya  étudier  à  Paris 
(|iielques-iins  di'  ses  nouveaux  disciples,  qu'il 
joignil  à  il'aiilres  qui  y  étaienl  dès  l'année 
précédente,  et  qui  demeuraient  au  collège 
(k's  Lombards,  au  nombre  de  seize.  Ce  tut 
celle  uiémc  année  que  le  premier  collège  de 
la  Compagnie  de  Jésus  fut  fondé  à  Coninibre 
par  Jean  lil,  roi  de  Portugal,  pour  êlrc  le  sé- 
niiiiaire  des  apôlres  du  nouveau  monde.  Ce 
collège  se  trouva  composé  de  vingt-cinq  sujets 
dès  l'année  suivante  154.3,  el  le  P.  Rodriguez 
écrivit  à  saint  Ignace  que  l'inlention  du  roi 
clait  d'y  en  entretenir  cent. 

La  nouvelle  compagnie  était  déjà  compo- 
sée de  quatre-vingts,  répandus  en  divers 
pays  ;  et,  comme  ce  nombre  surpassait  celui 
qui  avait  élé  limité  par  la  balle  du  pape,  le 
sainl  fondateur  alla  trouver  Sa  Sainteté  pour 
lui  re|)réseiiler  la  nécessité  qu'il  y  avait 
d'augmenter  leur  nombre.  Paul  III,  convain- 
cu du  grand  profit  que  ces  hommes  apostoli- 
ques avaient  fait  pour  le  salut  des  âmes,  ô(a 
la  restriction  qu'il  avait  tnisi;  dans  sa  pre- 
mière bulle,  permit  à  cet  ordre  de  s'étendre 
sans  limitation  de  personnes  et  de  temps,  el 
le  confirma  de  nouveau  par  une  autre  bulle 
le  !5  mars  de  l'an  1543.  Ce  pontife  donna 
aussi  la  même  année  à  ces  religieux  l'église 
de  Saint-André  de  Phraeta,  qui  n'était  pas 
éloignée  de  celle  de  Sainte-Marie  de  Slrala, 
dont  nous  avons  parlé,  où  ils  jetèrent  dès  la 
même  année  les  fondements  de  leur  maison 
professe,  qui  fut  en  èlat  d'être  habitée  l'an- 
née suivante.  C'est  celle  inéme  maison  qui  a 
élé  telleirenl  agrandie  dans  la  suite,  qu'elle 
est  entourée  de  quatre  rues.  L'église,  s-)Us  le 
nom  de  Jésus,  a  été  bâtie  avec  beaucoup  de 
magnificenc  •,  par  les  libéralités  du  cardinal 
Alexandre  Farnèse,  qui  en  fil  jeter  les  fon- 
dements l'an  15G8. 

D.ins  le  temps  qu'on  travaillait  ans  bâti- 
ments de  celle  maison,  Ignace,  dont  le  zèle 
était  sans  nlàclie  pour  le  salut  des  âmes, 
songea  aux  m  lyens  de  procurer  une  relraile 
pour  des  filles  el  des  femmes  que  la  nécessité 
avait  jetées  dans  le  désordre.  Il  y  avait  déjà 
un  monastère  de  filles  el  femmes  repen- 
ties, sous  le  litre  de  Sainte-Madeleine  ;  mais 
on  n'y  recevait  que  celles  qui  voulaient  être 
religieuses.  Noire  saint,  considérant  que  la 
grâce  qui  excite  les  pécheresses  à  quiiler  le 
vice  ne  les  porte  pas  toujours  à  quitter  le 
monde,  et  que  l'état  du  mariage  ne  s'accorde 
pas  avec  celui  de  la  religion,  forma  le  des- 
sein de  fonder  une  autre  maison  où  des  per- 
sonnes séculières  tant  femmes  que  fiU,  s  fus- 
sent admises  indifléremment.  Il  s'en  ouvrit  à 
plusieurs  seigneurs  romains,  qui  approuvè- 
reut  son   dessein,   el  fournirent  de  grosses 


JES 


un 


sommes  pour  cel  établissement  :  de  soito 
qu'en  peu  de  temps  on  bâtit  une  maison  pour 
ces  pécheresses  ,  sous  le  litre  de  S^iinie- 
Marlbc.  Il  cul  encore  soin  des  jeunes  lillcs 
qui  sont  exposées  à  de  grands  |  érils.  ou 
faute  d'éducation  ou  faute  de  biens  :  il  fit 
fonder  pourcllcs  un  autre  munaslère  sous  b- 
nom  de  Sair.le-Catherine  dclli  i\initri,  où  il 
y  a  ordinairement  cent  filles  qui  y  sont  eu- 
Irelenues  sous  la  conduite  de  quelques  reli- 
gieuses qui  suivent  la  règle  de  saint  Augus- 
tin, dont  uous  avons  déjà  [  arlé  en  un  autre 
lieu. 

Pendant  que  le  saint  fondateur  s'employait 
ainsi  dans  Uome  à  de  bonnes  œuvres,  el  ((u'il 
travaillait  aux  constitutions  de  son  ordre, 
plusieurs  villes  d'Espagne,  d'Italie,  d'Alle- 
magne et  des  P.iys-15as,  lui  demandèrent  de 
ses  disciples,  et  lui  olTrirent  des  collèges  ; 
suivant  en  cela  l'exemple  de  Jean  III,  roi  de 
Portugal,  qui  avait  fondé  le  premier  collège 
de  la  Compagnie  à  (]onimbre,  et  un  séminaire 
à  Goa.  Alcala,  Valence,  Candie,  Cologne , 
Louvain  et  Padouc  furent  les  premières  vil- 
les qui  voulurent  en  avoir,  cl  dont  l'exem- 
ple lut  bientôt  suivi  de  plusieurs  antres  villes 
de  différents  Ktatsel  royaumes  ;  en  sorte  que 
celle  compagnie  s'étendit  en  fort  peu  de 
temps  dans  Ions  les  pays  catholiques,  à  l'ex- 
ception de  la  Fiance,  où,  quoiqu'elle  y  eût 
pris  naissance,  elle  ne  fui  pas  reçue  dans  ses 
commencements,  soit  parce  que  les  béréli- 
ques  qui  commençaienl  à  s'établir  dans  co 
royaume,  la  rendaient  odieuse,  soit  parc 
que  la  guerre  s'étanl  renouvelée  entre  (ihar- 
les-Quinl  et  François  I",  on  n'aimât  pas  une 
société  dont  le  chef  el  les  principaux  mem- 
bres étaienl  espagnols  :  de  sorte  qu',  bien 
loin  d'être  reclierchés  des  villes  de  France, 
ceux  de  celle  compagnie,  qui  étudiaient  à 
Paris  et  qui  n'étaient  pas  Français,  lurent 
contraints  de  sortir  du  royaume,  pour  obéir 
à  ledit  qui  bannissait  les  sujets  de  l'Empe- 
reur. 

De  si  heureux  commencemenls  annon- 
çaient les  progrès  de  celle  société.  Plusieurs 
savants  personnages  de  toutes  sortes  de  na- 
tions, el  même  des  Français,  vinrent  à  Rome 
pour  se  mettre  sous  la  conduite  Un  saint  fon- 
dateur, et  I  our  embrasser  son  instiiul.  Il  les 
reçut  avec  d'autant  plus  de  joie,  qu'il  recon- 
nut qu'ils  élaieul  d'un  mérite  distingué  et 
d'un  caractère  à  remplir  dignement  l'esprit 
de  leur  vocation  ;  en  quoi  il  ne  se  trompa 
pas,  excepté  en  la  personne  de  Guillaume 
Postel.  Ce  dernier,  né  à  Barenton  en  Nor- 
mandie, sur  le  bruit  que  faisait  la  Compagnie 
de  Jésus  dans  toule  l'Europe,  lut  exprès  à 
Rome  en  1.345  pour  voir  le  fondateur  de  ce 
nouvel  ordre  ;  et,  charmé  de  ses  manières  et 
de  la  beauté  de  son  institut,  fil  vœu  d'y  en- 
trer. Il  Sollicita  si  fortement  le  saint  de  l'y  re- 
cevoir, qu'il  ne  put  le  lui  refuser;  mais  ce  fut 
pour  fjrt  peu  de  teuips  ;  car  le  saint,  recon- 
naissant dans  son  novice  un  fond  d'impiété  et 
d'erreur,  le  renvoya,  nonobstant  les  grands 
talents  dont  il  était  doué,  puisque,  sans  par- 
ler de  la  connaissance  qu'il  avait  de  tous  les 
sccrtls  des  rabbins  et  des  cabalislcs  (ce  qui 


(47 


DK'.TIO.NNAIUE  DKS  ORDRES  UFXIGIEtX. 


C48 


Hurail  l'ié  un  çrand  nvanln;:i"  pour  los  con- 
Idiiilro,  s'il  oui  voulu  eu  fair.'  un  hou  usaiir)  : 
il  savait  les  lauiiurs  l.tlint'.  grecque,  héliriï- 
(|ue,  rlialclaïii  e  el  syriaqui- ,  ei  il  parlaii  et 
euleudait  si  liien  relies  qui  snut  vivantes, 
qu'il  se  vantait  de  pouvoir  faire  le  lour  du 
nionile  sans  liucliemeui'i.  Il  elait  bon  nialhé- 
uialirien,  et  il  po>si'.lait  quasi  toutes  les 
sciences.  Il  sétait  tillcmenl  acquis  l'estime 
de  François  I",  qui  aimait  l<'s  bulles-leltres, 
ijue  ce  prince  l'envoya  en  Orient  pour  y  re- 
iherclior  des  m;iiiu>crils,  el  lui  donna  une 
ih.iire  de  professeur  dans  le  colléite  royal 
qu'il  avait  fondé  à  Paris,  l'ostel  s'y  distingua 
plus  ((ue  jamais.  La  rcini-  de  Navar  e,  sœur 
du  roi,  re^liniail  sinsulièreuieui.  Les  plus 
grands  sei;;ni'urs  de  la  cour,  cl  surtout  les 
cardinaux  de  Tournon,  de  Lorr  line  et  d'Ar- 
nia^uac,  reclicrth^ient  sou  entretien.  Postal 
enfin  faisait  l'aduiiraiion  des  plus  savants. 
Heureux  si,  doué  de  taul  de  science,  il  se  fût 
nilaché  à  celle  des  saints  ;  mais  la  lecture  des 
ouvrages  des  rabb  ns  lui  ayant  mis  des  clii- 
luères  et  dos  illusions  dans  la  léle,  il  ne  put 
si  bien  cacher  ses  seniiiiienls  au  aujet  d'un 
nouvel  avènement  de  Jésus-Chri^t,  qui  devait 
être,  selon  lui,  dans  peu  de  temps,  que  le 
saint  fondateur  ne  s'en  aperçût:  ce  qui  l'o- 
bligea à  le  chasser  de  la  Compagnie,  après 
avoir  tenté  toutes  sortes  de  voies  pour  le  le- 
lircr  de  ses  erreurs  ;  mais  ce  fui  toujours  si 
inulilenicnl,  que,  dès  qu'il  fui  sorti,  il  se  mit 
à  dogmatiser  dans  Uonie.  Il  se  retira  ensuite  à 
Venise,  où  il  se  crut  plus  en  sûreté.  Ils'y  infalua 
lelleracnl  d'une  certaine  rc:igieuse  appelée  la 
Ui're  yi^nnnp,  qu'il  osa  dire  que  dans  le  nouvel 
avènement  de  Jcsus-Ctirist  elle  serait  la  ré- 
demptrice des  femmes,  de  mêiiie  que  Jésus- 
Christ  avait  été  le  rédempteur  des  h  mimes, 
ri  composa  sur  ce  sujet  uu  livre  ialilale 
Vircjo  Venetn.  On  lui  attribue  aussi  d'autres 
erreurs  gro.ssièrcs,  qui  l'ont  fait  metlc'  au 
nombre  iies  hereti()ues,  et,  entre  autres,  d'a- 
voir publié  que  l'anjie  llazicl  lui  avait  révélé 
les  secrets  divms  ;  qu'il  n'y  avait  que  six  sa- 
crements, cl  que  ses  écrits  étaient  les  écrits  de 
Jésus-Chrisl  même.  Il  se  reconnut  néanmoins 
sur  la  fin  de  ses  jours,  et  mourut  dans  la 
communion  de  l'Lglise,  au  monastère  de 
Saint- .Mariiti  dis  l^liamps  à  Paris,  l'an  13'-1, 
dans  un  â^'e  fort  avancé. 

La  fermeté  que  le  saint  fond.iteur  Ht  pa- 
raître en  clia'>sant  (lUlILiumc  Postd  de  sa 
Compagnie  lut  une  preuvesi  convainraiite  de 
son  atiachemeiil  à  la  foi  ralholi<|ue  ,  que  le 
pape  lui  demanda  deux  de  ses  tlieolo^iieus 
pour  assister  en  sou  nom  avec  ses  legits  au 
concile  général  qui  devait  se  celélir.T  à 
'l'iente.  Le  saint  choisit  Lainez  el  Salineron, 
el  leur  donna  des  invtruetiuiis  pour  remplir 
dignement  leur  ministère  dans  une  si  célè- 
bre a'-scmhlée.  Le  I'.  le  Jay  y  vint  aussi 
il'Allemai^ne,  comme  théologien  de  l'evéque 
d'Ausliourg,  d  le  P.  Lefévre  y  fut  aussi 
envoyé  d.uis  la  sui'.c.  La  première  sessi m 
du  concile  commença  le  l.'t  décembre  de  l'an 
Ij'tD,  et  la  dernière  ne  Huit  ()ue  dix-huit 
an»  après.  Le  V.  le  Jay  y  arriva  le  premier  , 
«itfjagna  d'abord  la  bicmeilUiuce  cl  ^e^iimc 


du  cardinal  de  Trente  ,  qui  le  consulta  sur 
des  alïaires  épineuses.  Le  P.  Salineron  pro- 
nonça un  discours  l.tin  devant  les  PP.  du 
concile  ,  qui  monta  l'applaudissemenl  de 
l'assemldee.  Le  P.  Lainez  se  fil  admirer  dès 
la  preuiiére  fois  ((u'il  parla  ,  el  tous  trois 
liieiil  paraitre  une  erudiiion  si  profonde  , 
que  les  légats  du  pape  les  chargèrent  de  re- 
cueil.ir  toutes  les  erreurs  des  hérétiques  an- 
ciens et  modernes,  avec  li!s  autorités  de  l'Ecri- 
ture et  des  Pères   capables  de  les  confondre. 

Quoique  les  Jésuites  eussent  déjà  plusieurs 
collèges  ,  ils  ne  s'employaient  pas  encore  à 
l'iustruciion  de  la  jeunesse,  excepte  dans  le 
séminaire  de  (îoa  ,  où  le  P.  Nicolas  Lenci- 
loti,  italien,  avait  commencé  à  enseigner  aux 
enfants  les  principes  de  la  langue  latine; 
m. lis  l'au  15'»G  ils  curent  des  écoles  pulili- 
(jues  pour  enseigner  toutes  sortes  de  s.icn- 
ci  s.  Le  premier  collège  où  ils  conimencérent 
cet  csercice  si  utile  lut  celui  de  (jandic  ,  '\\X". 
saiul  François  de  Borgia,  duc  de  Can- 
die ,  leur  fonda  avant  que  d'eutrer  dans 
celte  Compagnie,  dont  il  fui  le  troisième  gê- 
nerai. Son  des^eiu  étant  que  ce  collège  de- 
vint célèbre,  il  obtint  du  pap  !  el  de  l'iimpe- 
reur  qu'on  l'èrigerait  en  université  ,  el  que 
les  écoliers  qui  y  prendraieul  les  degrés  au- 
raient tous  les  pri\ lièges  dont  jouissaient  les 
gradués  d'Alcala  et  de  Salimanqnc.  Ce  duc 
avait  l'ail  vœu  à  Crenade  d'embrasser  l'clal 
religieux,  s  ins  se  déli  rminer  à  aucune  reli- 
gion en  particulier  ;  mais  eiiû:i,  s'etaut  résolu 
à  exécuter  son  vœu,  il  choisit  la  Compagniu 
de  Jésus  et  écrivit  à  saint  Ignace  pour  lui 
demander  la  grâce  d'y  être  reçu.  Le  saiul 
fondateur  la  lui  accorda  avec  joie,  mais  à 
condition  qu'avaai  son  entrée  il  pren- 
drait du  teuips  pour  mettre  ses  enfants  en 
état  de  u'atuir  plus  besoin  de  sa  conduite  ni 
de  ses  soins  paternels.  Le  duc,  qui  av  :it  uni! 
sainte  impatience  d'entrer  dans  la  Comjia- 
guie  avant  l'exécution  des  choses  ijui  lui 
avaient  été  prescrit.-s  ,  écrivit  une  se  on  le 
Iclire  au  saint  fondateur,  dans  laquelle  il  c- 
maiidait  cette  grâce  avec  tant  d'ardeur,  qu'il 
lui  obtint  du  pape  l'an  13'i7  la  permission  <  u 
faire  les  vœux  des  proies  ,  sans  iiuiiter  lo 
monde,  avec  le  pouvoir  de  garder  ses  biens 
pendant  trois  années  :  en  sorte  que  ce  no 
lut  que  l'au  1551,  après  avoi'  cède  son  ilu- 
che  de  Candie  à  son  fils  aîné,  qu'il  prit  l'ha- 
bit lie  la  Compagnie  dans  le  collège  d'Ognate, 
à  ijuatre  lieues  de  Loyola. 

LaCom|iagnicavaitdejà  fait  pour  lors  beau- 
coup de  progrès  ;  elle  était  divisée  en  quatre 
pioMiucs,  (|ui  étaient  celles  d'Itaiic,  d'Espa- 
gne, de  Portugal  et  (les  Indes. Celled'Iispagne 
lut  même  divisé,'  en  deux  r.inuée  suivante, 
el  en  troi<  l'an  loj't  11  n'y  avait  (|ue  la  F'rance 
où  les  Jésuites  u'avaicnt  point  encore  d'eta- 
bli»sements,  quoique  leur  ordre  y  eût  pris 
naissance.  Ils  a>  aient  toujours  été  renfermés 
dans  le  collège  des  Lombards  où  ils  èlaieiil 
au  iKuiilire  de  treize  ,  soit  en  qualité  de 
pensionnaires,  so;t  eu  qualité  de  boursiers  : 
eneore  ne  se  vairaient-ils  pas  d'être  iiieiii- 
bres  de  la  Société  ;  mais  ils  se  déclarèrent 
cnliu  l'an  lo'»'.t.  Le  P.  Viole  ,    qui  était  leur 


GiO 


JES 


JES 


CÏÏO 


supérieur,  voyant  que  dans  ce  colléjîe  ils  ne 
pouvaient  pas  s'acquiiler  des  exercices  qui 
lonviennenl  à  des  religieux,  obtint  de  Guil- 
laume Duprat,  évéque  de  Clermont,  son  liô- 
tel  pour  les  loger.  Ils  y  allèrent  tous  à  l'ex- 
ception de  trois,  qui  n  sièren!  au  collège  des 
Lombards  jusqu'à  l'année  suivante  ,  que 
saint  Ignace  leur  ordonna  d'aller  demeurer 
avec  ceux  qui  étaient  à  l'hôtel  de  Clermont. 
Ce  saint  fondateur  fit  une  sévère  réprimande 
au  P.  A  iolc  de  ce  qu'il  avait  accepté  la 
charge  de  proviseur  du  collège  des  Lom- 
bards, et  voulut  qu'il  la  quittât  incessam- 
ment, quoique  cet  emploi  ne  l'obligeât  pont 
d'aller  à  ce  collège.  Comme  il  n'y  avait  point 
(le  proies  en  France,  il  lui  ordonna  quelque 
temps  après  de  fiiire  ses  vœux ,  selon  la  for- 
mule qu'il  lui  envoya  de  Uome ,  cl  pria 
i'évèque  de  Clermont  de  vouloir  les  rece- 
voir. 

A  peine  les  .lésuilcs  furent-ils  entrés  dans 
l'hôtel  de  Clermont,  qu'ils  trouvèrent  beau- 
coup d'oppositions  à  leur  établissement; 
mais  ils  ne  manquèrent  pas  de  protecteurs. 
Le  cardinal  de  Guise  ,  qu'on  nomma  le  car- 
dinal de  Lorraine  après  la  mort  de  son  on- 
cle, fut  un  des  principaux.  Ce  prince  fil 
connaître  au  roi  Henri  II  saint  Ignace  et  ses 
enfants,  et  leur  fil  obtenir  des  lettres  de  ré- 
ception, qu'on  leur  avail  refusées.  Elles  fu- 
rent expédiées  l'an  1550.  Le  roi  leur  permet- 
tait par  ces  lettres  d'avoir  un  collège  à  Paris, 
et  de  s'établir  dans  son  royaume.  Le  parle- 
ment refusa  d'enregistrer  ces  lettres;  mais 
le  roi,  persuadé  |)ar  le  cardinal  de  Lorraine 
cl  par  les  commissaires  qu  il  avait  lui-même 
nommés  pour  examiner  l'institut  des  Jésui- 
tes, qu'il  ne  contenait  rien  de  contraire  au 
bien  de  l'Etat  et  de  l'Eglise,  donna  de  secon- 
des lettres  avec  ordre  au  parlement  de  les 
enregistrer  ,  sans  avi  ir  égard  aux  remon- 
trances de  son  procureur  général.  Le  parle- 
ment ,  pressé  par  des  ordres  réitérés  de  la 
cour,  donna  un  arrcl  le  3  août  ISo'i'  ponant 
que,  comme  l'affaire  des  Jésuites  reganiail 
principalement  la  religion  ,  les  bulles  qu'ils 
avaient  obtenues  du  saint-siège  seraent 
communiquées  à  l'évéque  de  Paris  et  au 
doyen  de  la  faculté  de  théologie,  et  que 
l'un  et  l'autre  en  rendraient  compte  à  la 
cour. 

L'évéïiue  de  Paris,  par  son  rapport,  fut 
enlièreoient  oppusè  à  leur  établissement,  et 
entre  autres  choses  fit  eniendre  que  leur  in- 
stitut blessait  les  dio  Is  des  évêques  et  les 
concordats  laits  entre  les  papes  et  les  rois 
de  France.  Le  doyen  de  la  faculté  de  théo- 
logie poussa  l'afl'aire  plus  loin  ;  il  assembla 
les  docteurs,  (]ui  firent  le  décret  suivant  : 

Que  la  nouvelle  Sociélé ,  qui  s'attribue  le 
nom  de  Jésus,  reçoit  sans  nul  choix  toutes 
sortes  de  gens,  queli/ue  crime  (/uils  aient  com- 
mis et  quelque  infâmes  qu'ils  soient;  qu'elle 
ne  diffère  en  rien  des  prêtres  séculiers,  n'ayant 
ni  l'habit ,  ni  le  chieur ,  ni  le  silence  ,  ni  les 
jeiines  ,  ni  les  autres  observances  qui  dislin- 
(juent  et  qui  maintiennent  l'étal  rcliijieux  ; 
qu'elle  semble  lioUr  la  modestie  de  la  profes- 
sion monastique  par  tant  d'immunités  et  de 

DiCTIONNàlRK    DES    OrDHES    REI.ir.lliL'X. 


libellés  qu'elle  a. dans  ses  fonctions  ,  snrtouS 
dans  r administration  des  sacrements  de  péni- 
tence et  d'eucharistie  ,  sans  nulle  distinction 
des  lieux  ni  des  personnes  ,  dans  le  ministère 
de  la  parole  de  Dieu  et  dans  l'instruction  de 
la  jeunesse,  au  préjudice  de  l'ordre  hiérarchi- 
que, des  attires  religieux  et  même  des  princes 
ou  des  seigneurs  temporels,  lontre  les  privilè- 
ges des  universités  et  à  la  charge  du  peuple  ; 
qu'elle  énerve  le  suint  usage  des  vertus  ,  des 
pénitences  et  des  cérémonies  de  l'Eglise  ; 
qu'elli'  donne  occasion  d'aposlasier  librement 
des  autres  sociétés  religieuses;  qu'elle  refuse 
aux  ordinaires  l'obéissance  qui  leur  est  due  ; 
qu'elle  prive  injustement  de  leurs  droits  /e.s 
seigneurs  ecclésiastiques  et  les  seigneurs  tem- 
porels :  qu'elle  introduit  partout  des  divisions, 
des  jalousies,  des  querelles  et  des  schismes; 
enfm  que ,  pour  toutes  ces  raisons  ,  cette  So- 
ciété semble  être  périlleuse  en  matière  de  foi  , 
ennemie  de  la  paix  de  l'Eglise,  fatale  à  la  re- 
ligion monastique,  et  pliUfil  née  pour  la  ruine 
que  pour  l'édificalion  des  fidtles. 

Les  Pères  de  Uome,  à  (jui  le  général  com- 
muniqua cet  écrit,  furent  tous  d'avis  (ju'on 
y  répondit  dans  les  formes,  pour  désabuser 
la  France  et  pour  instruire  les  docteurs  de 
Paris,  qui  semblaient  n'avoir  nulle  connais- 
sance de  l'institut  des  Jésuites  ;  mais  le  saint 
fut  d'un  autre  sentiment.  Outre  (lu'il  hono- 
rait la  Sorhonne,  qu'il  regardait  comme  une 
des  plus  fortes  colonnes  de  l'Eglise,  il  crut 
que  ce  qu'on  leur  imposait  dans  ce  décret 
était  trop  outré  pour  faire  aucun  mal,  et 
qu'une  réponse  [lublique,  quelque  modeste 
qu'elle  pût  être,  ne  servirait  (ju'à  irriter  da- 
vantage les  esprits,  les  assurant  que  malgré 
tous  les  obstacles  qui  semblaient  faire  déses- 
pérer de  leur  réception  en  France,  la  Com- 
pagnie s'y  établirait,  et  que  le  collège  de  Pa- 
ris serait  un  jour  très-célèbre.  11  eut  soin 
néanmoins  de  ftire  venir  de  tous  les  lieux 
où  sa  Compagnie  était  établie  des  témoigna- 
ges authentiques  de  la  bonne  coniluite  qu'y 
tenaient  ses  enfants  ei  des  fruits  qu'ils  y  fai- 
saient. De  plus  il  permit  au  P.  Martin  Ôlave, 
qui  enseignait  la  théologie  dans  le  collègn 
Romain  et  qui  était  docteur  de  Sorbonne, 
d'envoyer  à  ses  confrères  une  réponse  mo- 
desle  et  solide  à  tous  les  articles  de  leur  dé  - 
cret.  La  publication  de  ce  décret  ne  laissa  pas 
d'émouvoir  tout  Paris  contre  les  Jésuites. Les 
professeurs,  les  prédicateurs  et  les  curés  at- 
taquèrent publiquemenl  leur  institut  et  en 
donnèrent  d'horribles  idées.  On  afficha  aux 
carrefours  de  la  ville  des  papiers  Irès-inju- 
rieux  pour  décrier  leur  doctrine  et  leur  con- 
duite, el  le  peuple  leur  fit  diverses  insultes. 
11  semblait  alors  que  le  meilleur  luirti  qu'ils 
eussent  à  prendre  était  celui  de  se  reiirei' 
de  cette  grande  ville;  mais,  dans  le  temps 
qu'il  paraissait  y  avoir  le  moins  à  espérer, 
l'orage  se  dissipa,  et  la  Compagnie,  restant 
tranquille,  eut  un  libre  exercice  de  ses  fonc- 
tions. Elle  commença  à  enseigner  dans  la 
ville  de  lîillom,  où  le  même  Guillaume  Du- 
prat, évèque  de  Clermont,  fonda  un  collège 
en  attendant  qu'on  ouvrît  celui  de  Paris. 

Ce  n'était  pus  seulement  en  France  que  la 
II.  21 


rri                                 niCTioNNAinR  des  ordres  rf.i.igieux.  r.r.a 

r.onipniinic  l'înit  mallrniloo  :   Jean   Silic,   nr-  l,n  p  lix  dont  cclU'  sooii'Mo  j(Uii<s  lil  en  Iia- 
rlicti^qiic  (II"  4'iili'di',   se  déclara   ronCre  elle,  Mo  cl  priiicipalciiiciil   à   Ro:iic   fui   Irouliléc 
sous  pri'Icxîe  qiip  li'S  Jésuites  ci\lrepr<'naieiil  par  le  pape  iiiénie,  (|iii  en  l.')53  s'irrita  coii- 
Mir  les  droits  de  l'épiscofal,   par   la   hl>erié  ire  les  Jésuiles.  Il  cr.it  (pic  ceux  d'I-lspagno, 
qu'ils  se  diiuiiaicni  da  liniiiislrcr  les  sacre-  ((ui  éiaienl  à    la  cour    de    Castillc,  s'elaicnl 
iiienls    en    tous  lieux  sous  urnhre   île   leurs  rangés  du  côté  de   Clnrles-Ouinl  conlre  les 
|iriTiléj;e<.  Il  n'y  avait  dans  son  diocèse  qu'un  intérêts   du  sainl^siége;    mais  ces   soupçons 
collège  de  ces  Pères,  qui  était  celui  d'Aliala;  se  dissipèrent  par  les  l)ons  ollices  de   Ferdi- 
i\^  les  interdit  tous  en  un  jour  et  fuhnina  une  nand,  roi  des  Romains,  et  le  pape  donna  de 
scnleme    d'cxconimunicaiion  contre    toutes  ii'iuvclles    niar(|ues   de    son    aflVrlion    à    la 
les   personnes  «lui  f-e  confe-scraient  à  eux  :  Compagnie.   Son  successeur  .Marcel  II   n'eut 
ordonnant  aux  religieux  et  aux  curés  de  son  pas  moins  de  bienveillance  pour  elle  ;   mais 
diocèse  de   ne    laisser    ni   prêcher  ni  dire  la  son  ponlilicai  n'ayant  duré  que  trois  semai- 
messe    dans    leurs    églises    à   aucun    de   la  nés,  les  Jésuiles  tomhèrenl  dans  de  nouvcl- 
(;ompagnie,  défendant  même  la  confession  à  les   appréhensions    lorsqu'ils    virent    en   sa 
tous   les  prêtres  qui  auraient  fait  sous  leur  place  le  cardinal  CaralTe,  qui  prit  le  nom  de 
conduiie  les  exercices  spirituels.  Ce    n'était  l'aul  l\ .  Us  le  croyaient  irrité   conlre  eux. 
qu'une  suite  d^s  opposiiioiis  qu'ils  avaient  laiil  à  cause  que  saint  Ignace  avait  n  fusé 
déjà  trouvées   dans   le  royaume   d'Espagne,  d'unir  son  ordre  à  celui    des  Thêalins,  dont 
où  dès  l'an  15i8  on  avait  employé  plusieurs  CaralTe  était  l'un  des  fondateurs,  que   parce 
moyens    pour    les  détruire  dans  l'esprit  du  qu'il  avait  fait  casser  parle   pape   Paul    III 
peuple.  Entre  les  autres,  Melchior  Canus,  de  une  sentence  que  le  même  CarafTe,  étant  ar- 
1  Ordre  de  Sainl-Dominique  et  docteur  de  Sa-  clievêciue  de  Naples,  .avait  donnée  conlre  lui 
lamanque,  y  avait  iiubliê  lanl    de  choses  à  ]iour  l'obliger  de  rendre  un  jeune  Napolitain 
leur  désavantage,  que  le  peuple,  qui  comp-  qui  avait  été    reçu  dans   sa   Compagnie,    el 
tait  beaucoup  sur  les  paroles  de  ce  docteur,  que  ses  parents  redemandèrent;  mais  ils  re- 
traita  d'imposteurs   ceux    qui     lui     avaient  connurent  bientôt  qu'ils  s'étaient    trompés, 
paru  auparavant  des  hommes  descendus  <lu  Paul  IN   leur  fui  si    favorable,   que  dès   les 
ciel.  On  croyait  pcul-être  en  cela  faire  plai-  premiers  jours  de  son   pontifical   il    voulut 
sir  à  l'empereur  Cbarlcs-Quint,  qui    a>ail  faire  le  P.  Lainez   cardinal,  si  saint  Ignace 
chassé   de    l'Emiiirc   le    P.  Robadilla,    parce  ne  s'y    fût  oppisé  fortemeni,  comme  il  avait 
qu'il  s'élail  opposé  à  la  formule  de   foi  que  déjà    fait    lorsqui-   P.iul  111    voulut    revêllr 
l'on   appela    \  Intérim,   cjuc   ce    prince,  par  saint  François  (le  Bc)rgia  de  la  même  dignité, 
condescendance  pour  les  hérétiques  d'Allé-  el    lorsiiin'    Feriiinand,    roi    des    Romains, 
magne,     avait   fait    publier   dans  la    diète  non)ma  le  P.  Le  Jay  à    l'évèché  de   Triesle. 
d'.Vugsbourg.  Ce    qui    consolait   les  Jésuiles  Le   saint  fondateur  ne  consentit  jamais  que 
dansleus   peines,  était  que  leur  fondateur  ses  enfants    re(;ussenl   aucune  prélalure,  si 
n'en  avait  pas  élé  eseinpl  :  car  dès  l'an  1553  ce  n'est  dans  les  pays  étranger-,  où   il  man- 
il  en  avait  soullVrl  beaucoup  au  sujel  de  son  qu(^  (!e  pasteurs  capables  de  retirer  les  peu- 
liire  des  Exercices  spirituels,  que  l'on  taxait  |)les  des  ténèbres  de  rerieurel  de  l'idolâtrie; 
d'hérétique,    noiiobsianl  l'apijrobiiion   qu'il  comme  les  PP.  Nugncz,   Carnero  et  Oviédo, 
avait  (  uc  de  Paul  III  en  loiG;  en  sorte  qu'il  qui  furent  envoyés  en   Ethiopie,  le    premier 
y  aurait   peut-être  succombé,    si   idusieurs  en  qualité  de  patriarche,    le    second   comme 
"théologien!;,    et    entre    autres    Rarthélemi  é\êque  de  Nicée,  et  le  troisième  comme  èvê- 
■J'orrcs,   qui    fut   dans  la  suiic  évéque    dis  que  de  Iliérapolis;  aux(iuels  on  donna    dix 
•'.anarics,  n'eussent  pi  is  sa  défense  cl  celle  compagnons  pour  les  ai(Jer  dans   leurs  mis- 
du  saiiil-siége,  (]ue  l'on  attaquait  indirecte-  sions.  Enfin  saint  Ignace,  ajirès  tant  de  tra- 
iiieni,  et  si  les  inquisiteurs,  enlr.'  les  mains  vaux  pour  la  gloire  de  Jésus-Christ  et  pour 
desquels  on  avait  mis  le  livre,   n'en  fussent  le  salut  des  âmes,  mounii  à  Rome  le  31  juil- 
dcvenus  les  apologistes,  après  avoir  fait  con-  lel  de  l'an  looli,  âgé  de  (ij  ans,  trente -cini 
naître  la  mauvaise  foi  de  l'accusateur.  ans  après  sa  conversion,  el  seize  ans   après 
Tant  d'oppositions  n'ét.iienl  que  trop  ca-  la  fondation  de  sa  (compagnie.  Il  eut  la  cou- 
pables de  dégoûter   ces    nouveaux   hommes  solatiou  de  la   voir  avant  sa  mort  répandue 
aposloli(ini>s  ;  mais  Dieu  les  soutint  toujours  [lar  tout  le  inonde  cl  divisée  eu   douze  pro- 
dans leurs  iieines.  Tandis  (]u'on  s'opposait  a  viiues,    (jui    toutes    ensemble    avaient    au 
eux  en  Fr.iiice  et  dans  une    partie    de  l'Es-  moins  cent  collèges  ;  il  la  vil  même  lionoréi; 
pagne,    ils  avaient  la  consolation  de  se  voir  du  m  irlyre  en  la  personne  du    P.   Anloiiio 
taire  un  grand  iirogrès  dans  l'il.ilic.  Outre  l.i  Criminal  et  en  celles  d.s  frères   Pierre  Cor- 
iiouvello  coiifiriiialioii  ()(ie  le  saint  lonilaleir  lea  el  Jean  de  Foia,  qui  furent   mis  à   mot 
•  iblinl  lie  son  iiislitulen  l.'ioO,    on   lui    fmda  pir  les  barbares,  le  premier  dans  les  Indes, 
'iffs  collèges  el   des  maisons  à  Rome,    à  Lo-  cl  les  deux  autres    au    lïiêsil.    Le    corj  s  du 
l'clle,    à  Naples,    à  Florence,    à  Rologne,    à  saint  fondateur  fat  enterré  à  Rome  dans  l'e- 
^'cnisc.  à  Pérouse,  à  Modène  d  en  d'autres  plise  de  la  m.iisoii  prol'ess-,  au  pied  du  grand 
'-■n.iroits  :  sans  parler   de  l'eLililisseiiieiil   du  autel,  du  côté  de   l'évangile,  ou    il   demeura 
■ollége  Geimaiiique,   (|u'il    procura   en  1;)52  jusqu'en  l'année  15li.S,  (|u'on  l'en  relira  pour 
l'our  l'èilucatioii  des  enfants  de  la  pa(nreiio-  jeler   les  foinleiiients   de   la   nouvelle   égiise 
olessc  éirangère.  Ignace  fil  des  statuts  pour  (jue  le  cardiii.il  Farnèse  lil  bâtir,  el  ce  sacfi" 
l 'lie  maison,  el  les  Pères  de  laCoiii|)agn  c  en  dépôt  fui  porte  en  un  autre  endroit  de  l'an- 
•^ureil  la  conduite.  cieniie  église.  Lorsijuc  la  nouvelle  fut  cnliè- 


S53 


JES 


JES 


G54 


rpmenl  bâtie,  le  P.  Aquaviva,  l'an  lo87,  pour 
lors  général,  le  transféra  dans  celte  église; 
et  après  que  le  pape  Grégoire  XV  l'eut  cano- 
nisé en  1622,  on  érigea  en  son  honneur  une 
chapelle,  qui  a  été  embellie  sur  la  fin  du 
dernier  siècle  avec  heaucoupdemagnificenre. 
Après  la  n)orl  de  saint  Ignace,  on  fut  deux 
ans  sans  lui  donner  de  successeur.  La  guerre 
qui  survint  entre  le  pape  Paul  iV  et  Phi- 
lippe 11,  roi  d'Espagne,  ayant  fermé  les  pas- 
sages aux  Espagnols,  on  ne  tint  point  la  con- 
grégation générale.  Les  Italiens  pendant  ce 
temps-là  élurent  pour  vicaire  général  le  P. 
Jacques  Lainez  ;  elles  Espagnols,  qui  igno- 
raient ce  que  les  Italiens  avaient  fait,  élurent 
de  leur  côté  le  P.  Natal  ;  mais  celui-ci  par 
humilité  céda  ù  Lainez  la  supériorité.  Il 
n'en  fui  pas  de  même  du  P.  Bobadilla,  qui, 
comme  un  des  premiers  compagnons  de 
saint  Ignace,  prétendit  avoir  part  au  gou- 
vernement de  l'ordre,  mais  il  l'ut  obligé  (le 
céder  à  Lainez,  qui  indiqua  la  congrégation 
générale.  Elle  se  tint  l'an  1558,  et  il  y  fut  élu 
général.  Après  son  élection,  le  cardinal  de 
"Trana  lui  déclara  de  la  part  du  pape  que  Sa 
Sainteté  trouvait  deux  choses  à  redije  dans 
l'institut  de  la  Compagnie  :  la  première,  de 
ce  que  l'on  n'y  récitait  point  l'ofiice  canonial 
au  chœur;  la  seconde,  de  ce  que  le  général 
n'était  point  triennal,  mais  perpétuel.  La 
coiigrcgalion  ajant  délibéré  sur  les  difûcul- 
lés  que  le  pape  proposait,  chargea  le  P.  L:ii- 
iiez  daller  trouver  Sa  Sainteté  et  de  lui  pré- 
senler  une  lettre  signée  de  toute  l'assemblée, 
par  laquelle  on  lui  faisait  connaître  la  iié- 
cessiié  qu'il  y  avait  que  le  général  lût  per- 
pétuel, sans  parler  des  heures  canoniales. 
Le  pape  les  reçut  Irès-mal,  et  leur  déclara 
avec  des  expressions  très-lortes  qu'il  voulait 
que  le  général  fût  triennal,  et  qu'ils  chaiilas- 
^enl  au  chœur  les  heures  canoniales,  n'en 
exceptant  que  le  général  et  ceux  qui  seraient 
occupés.  Le  P.  Lainez  apaisa  le  pape  par  un 
discours  qu'il  lui  fit;  mais  le  pontife  persisli 
à  vouloir  que  le  général  fût  triennal  el  que 
l'on  récitât  au  chœur  les  heures  canoniales. 
Il  fil  faire  un  décret  par  lequel  il  fut  ordonné 
que  dans  les  collèges  on  chanterait  la  mebse 
et  les  vêpres,  les  dimanches  et  les  fêtes,  et 
que  dans  les  maisons  professes  on  y  dirait 
toutes  les  heures  canoniales.  Les  Jésuites 
souffrirent  avec  peine  qu'un  les  assujettit  à 
ces  obligations,  si  contraires  aux  missions, 
confessions  et  prédications  auxquelles  ils 
élaient  conlinueilemenl  occupés  ;  mais  ils  se 
consolèrent  lorsque  le  cardiu;ildel  Pozzo  ou 
du  Puis,  qui  étaii  un  savant  inierprèle,  les 
assura  que  le  décret  du  pape,  n'étant  qu'un 
simple  tomiuandement,  n'aurait  de  valeur 
que  pendant  la  vie  de  ce  pontife.  Pie  V  les 
obligea  cncoie  l'an  15G7  de  réciter  l'office 
au  chœur,  et  leur  défendit  de  faire  promou- 
voir au  sacerdoce  aucun  de  leurs  Pères  qui 
ne  fût  profès  et  n'eût  prononcé  ses  vœux  so- 
'lennels  ;  mais  Grégoire  XIII,  par  une  bulle 
de  l'an  1573,  rétablit  la  Compagnie  dans  son 
premier  élat,  dispensant  les  Jésuites  de  réci- 
ter leur  office  au  chœur  et  en  commun;  et 
permit  à  ceux  qui  n'auraient   fait  que   les 


vœux  simples  de  recevoir  la  préirise.  La 
Compagnie  fil  de  nouveaux  progrès  sous  ie 
gouiernement  du  P.  Lainez.  principalement 
en  Europe,  il  se  trouva  en  1561  au  colloque 
de  Poissy,  où  son  ordre  obtinl  enfin  la  per- 
mission de  s'établir  en  France  dans  le  col- 
lège de  Glermout.  Ce  collège  s'est  beaucoup 
augmenlédans  la  suite  par  les  libéralités  des 
rois  de  France  Henri  IV,  Louis  XIII,  et 
principalement  de  Louis  XIV,  qui  déclara 
l'an  1683  ce  coWà^e.  Ac  fondation  royale;  el 
en  reconnaissance  des  grands  bienfaits  de  ce 
prince,  on  lui  a  donné  son  nom,  élanl  pré- 
sentement connu  sons  le  litre  de  Collège  de 
Louis- le-Grand.  Après  que  le  P.  Lainez  eut 
gouverné  cet  ordre  pendant  huit  ans,  il  mou- 
rut l'an  1564.,  et  eut  pour  successeur  saint 
François  de  Borgia.  La  Compagnie  avait 
pour  lors  cent  trente  maisons  ou  collèges, 
divisés  en  dix-huit  provinces,  qui  furent  en- 
core beaucoup  augmentées  par  les  soins  de 
ce  saint,  qui  fit  plusieurs  établissements  lant 
en  Europe  que  dans  l'Amérique.  Les  Jésuites 
avaient  déjà  cinq  maisons  à  Rome,  savoir  la 
maison  professe,  le  noviciat,  le  collège  Ro- 
main, le  collège  Germanique  et  le  séminaire 
Romain,  lorsque  saint  François  de  Borgia 
obtint  du  pape  Pie  V,  Lan  1570,  le  collège 
des  Pénitenciers  de  Saint-Pierre.  Les  collè- 
ges des  Grecs,  des  Maronites,  îles  Anglais, 
des  Ecossais  et  des  Irlandais,  leur  ont  c!o 
donnés  depuis:  ce  qui  marque  l'estime  que 
les  souverains  pontifes  ont  eue  pour  cette 
Compagnie. 

Après  la  mort  de  saint  François  de  Borgia, 
qui  arriva  l'an  1572,  le  P.  Mercurien,  Fla- 
mand, fut  élu  général  de  cet  ordre.  Il  eut 
pour  successeur  l'an  1581  le  P.  Aquaviva, 
de  la  maison  des  ducs  d'Atri ,  au  royaume 
de  Naples,  qui  occupa  cette  place  jusqu'en 
l'an  1615,  qu'on  lui  donna  pour  successeur 
après  sa  mort  le  P,  Vitelleschi,  qui  mourut 
l'an  16I|.5.  Ce  fut  sous  ce  général  qu'on  so- 
lennisa  avec  beaucoup  de  pompe  et  de  ma- 
gnificence à  Rome,  en  Allemagne  et  eu  plu- 
sieurs provinces, l'année  séculaire  de  l'ordre. 
Cette  cérémonie  fut  d'abord  commencée  à 
Rome  dans  le  collège  Romain,  l'an  1039,  le 
25  septembre,  fête  des  saints  martyrs  Côme 
ctDamien;  auquel  jour,  cent  ans  aupara- 
vant, l'ordre  avait  reçu  de  vive  voix  sa  pre- 
mière approbation  du  pape  Paul  III.  11  était 
pour  lors  si  multiplié  par  toutes  les  parties 
du  monde,  (jue,  suivant  le  catalogue  des 
maisons,  qui  avait  été  publié  l'an  1626,  il 
s'en  trouvai!  plus  de  huit  cents,  tant  collèges, 
maisons  professes  et  de  probalion,  que  rési- 
dences ;  le  tout  divisé  en  trente-six  provin- 
ces ,  dans  lesquelles  il  y  avait  plus  de 
quinze  mille  Jésuites.  La  Conipiignie  a  fait 
depuis  ce  temps-là  de  nouveaux  progrès 
sous  les  généraux  qui  ont  succédé  au  P.  Vi- 
telleschi qui  sont  les  PP.  Nickel,  Oliva,  Gon- 
zalès,  Taœburin  et  Carall'i!. 

Les  constitutions  que  saint  Ignace  dressa 
pour  sa  Compagnie  sont  divisées  eu  iVm  par- 
ties, qui  sont  précédées  de  l'examen  qu'on 
doit  faire  de  ceux  qui  se  présentent  pour  y 
èlre  reçus,  auxquels  on  doit  faire  plusieurs 


Kv; 


DICTIONNAIIΠ DKS  ORltHES  nF.UCIEUX. 


br.6 


(Ipiiiaiules.  JonI  il  f.iil  un  prnnd  dolail.  Aprt^s 
K'ur  rocc|ili<>ii,  il  veut  qu'on  les  éprouve 
pcndiinl  un  mois  dans  la  maison,  eu  leur 
faisant  faire  lc<  pxereices  spirituels  et  une 
conlession  générale,  après  laijuelle  i's  doi- 
vent prendre  l'Iiahil  ordinaire  de  la  Cutnpa- 
pnie  ;  que  le  iKnicinl  soil  de  deux  ans, 
pl  qu'ils  apprennent  tous  li  s  jours  (luelque 
chose  par  r<pur  pour  rulli\er  la  mémoire, 
sans  néanmoins  leur  pcrinellre  l'étuile.  Il  or- 
donne de  plus  qu'ils  scrviroiil  les  malades 
l'esparc  d'un  mois  dans  un  liôpilal,  e[  que 
pendant  un  autre  mois  ils  feroul  un  pèleri- 
iMpc  de  dévotion  à  pied,  sans  viatique,  on 
demandant  l'aumône.  Après  les  deux  années 
de  noviciat,  il  veut  que  les  jeunes  gens  de  la 
C.ompajinie  soient  appliqués  aux  éludes,  et 
délero  ine  les  scieiires  qu'ils  étudieront;  et, 
dans  la  crainte  qu'il  avait  iiue  l'amour  do  la 
science  n'aflainlit  peu  à  peu  l'esprit  de  piété, 
il  a  prescrit  les  pratiques  qui  peuvent  r<ri- 
irclinir  pendant  le  temps  des  études  ;  après 
lesquelles  il  ordonne  un  second  noviciatd'un 
an,  où  l'on  ne  s'apidiiiue  qu'aux  exercices 
de  la  vie  spirituelle,  pour  ap[)rendre  à  pra- 
tiquer ce  que  l'on  doit  enseigner  aux  autres. 

Le  saint  fondateur  mitdans  sou  ordre  trois 
différents  degrés,  l'un  de  profès,  l'autre  de 
coadjutcurs  lormé»,  et  l'autre  d'écoliers  ap- 
prouvés, outre  les  novices.  Parmi  les  profès 
il  y  en  a  de  deux  sortes,  les  uns  de  quatre 
vœux,  les  autres  de  trois  seulement.  11  y  a 
aussi  de  deux  sortes  de  coadjutcurs,  les  uns 
spirituels  et  les  autres  temporels.  Los  vœux 
dis  priifes  sont  solennels,  ceux  des  coadju- 
leurs  sont  publics,  mais  simples.  Ceux  des 
écoliers  sont  seulement  simples  ,  ils  ne  se 
font  qu'«  n  présence  des  domestiques,  et  per- 
sonne n'est  député  du  géniral  pour  les  rece- 
voir; an  lieu  que  ceux  des  profès  el  des  coad- 
juleurs  formés  se  font  entre  ses  mains,  ou  de 
personnes  qu'4  a  députées  pour  cet  ellet. 
Voici  la  formule  des  vœux  des  profès: 

Moi  N.  fais  profession  cl  promets  à  Dieu 
tout-puisfant,  en  présence  de  /.i  tris-sainte 
Vienie,  de  toute  la  cour  rélesle,  et  de  ions  tes 
asfislnnls,  el  à  vous.  Hévérend  Piregénéral  de 
lu  cowpiKjnie  de  Jésus,  tenant  ta  place  de 
Dieu,  et  à  vos  successeurs,  pauvi  elé,  chasteté 
el  obéissance,  el,  selon  cette  ohéissance,  d'avoir 
un  soin  purliculier  pour  ce  qui  regarde  ce  que 
l'on  doit  enseigner  aux  jeunes  gens,  selon  la 
forme  de  vivre  contenue  dans  les  lettres  cpo- 
stoliques  de  ta  Compagnie  de  Jésus  et  dans  ses 
constitutions.  Fait,  cic.  Ceux  qui  font  les 
quatre  vœux  ajoutent  :  Et  en  outre  je  pro- 
mis spécialement  ohéissancc  au  souverain 
pontife  pour  ce  gui  regarde  les  missions, 
comme  il  est  porté  par  les  mêmes  lettres  apo- 
stoliques et  lis  constitutions.  Les  coadjutcurs 
ne  disent  point,  je  fais  profession,  m  us  seu- 
lement, je  promets  éi  Dieu;  el  les  coadjutcurs 
temporels  retranelienl  ce  qui  regarde  l'in- 
slruttion  de  la  jeuiie>se.  Les  écoliers  approu- 
vés, qui  font  seulement  des  vœux  simples 
et  non  puldics,  s'engagent  à  la  Compa;;nie, 
riromellaut  d'y  \ivre  et  mourir  dans  l'obser- 
vation des  vœiix  de  pauvreté,  de  chasteté  et 
d'obéissance  ;   et  s'oidigenl  i)ar  vœux  exprès 


d'accepter  le  degré  (|u'on  trouvera  dans  la 
suite  leur  être  plus  cinvenalile.  Comme  ces 
voMix  ne  sont  que  siujples,  sous  le  bon  plai- 
sir du  pape,  saint  Ignace  laissa  à  la  Com- 
pagnie le  droit  d'en  dispenser  pour  de  justes 
causes,  laissant  par  là  aux  écoliers  le  do- 
maine et  la  propriéléde  leurs  biens,  quoiqu'il 
leur  Ole  le  pouvoir  d'en  jouir  et  d'en  disposer 
iiidèprnilamment  des  supérieurs;  et  c'est  un 
usage  reçu  en  Italie,  en  Ivspagne,  en  Flandre 
el  on  tous  les  autres  pays,  excepté  en  France, 
où  ces  écoliers  el  ces  c  >.idjuteiiis  ne  peuvent 
disj  oser  do  leurs  biens,  tant  ()u'ils  sont  dans 
laConipagnie  ;  m.iis,  s'ils  en  sorteni,  ils  peo- 
voni  redemander  partage  dos  bii'us  diins  leurs 
familles.  Les  profès,  avant  ()ue  de  faire  pro- 
fession, et  les  coadjutcurs  formés,  a\ant  que 
de  prononcer  leurs  vomix,  doivent  faire  l.i 
quéle  et  mendier  de  porte  en  porte  pendant 
trois  jours;  et  il  est  à  la  volonté  des  supé- 
rieurs d'y  obliger  les  écoliers  avant  qu'ils 
soient  réputés  approuvés.  Quoique  les  coad- 
jutcurs ne  soient  pas  proies,  ils  ne  laissent 
pas  d'être  recteurs  des  collèges  et  rcgonis; 
ils  peuvent  être  quelquefois  élus  pour  as- 
sister à  la  congrégation  générale;  mais  ils 
n'ont  |)oint  voix  dans  l'éleeiion  du  général, 
et  ne  peuvent  précéder  les  profès  de  qaat.ro 
vœux. 

Saint  Ignace  veut  que  le  général  soit  per- 
pétuel et   maître  absolu  dans  toute   la  Coii- 
pagnic  ;il  veut  même  que  ce  soit  lui  (|ui  fasse 
les  provinciaux,   les  supérieurs  de  maisons 
])rofesses  el  de  probation   elles  recteurs  des 
collèges  ;  et,  afin  ((u'il  connaisse  tons  les  su- 
jets qui  sont  propres  pour  remplir  les  postes. 
les  provinciaux  de  toute    l'Europe  lui   écri- 
vent une  fois  lous  les  mois  ;  les  recteurs,  les 
supérieurs   des  maisons    et  les    maîtres    des 
novices  tous  les  trois  mois  ;  et  ceux  des  Indes, 
lorsque   la    commodité   de    la  navi;zaiioii  se 
présente,  lui  rendent  compte  en  général  de 
leurs   inférieurs.   Ou  lui  envoie  de    trois  eu 
trois  ans  les  catalogues  de  chaque  province, 
dans  lesquels  on  marque  l'âge  de  chaque  re- 
ligieux, ses  forces,  ses  talents  naturels,  sou 
civancenieni  dans  les  leltrcs  cl  dans  la  vertu, 
et  toutes  ses  qualités  bonnes  ou  mauvaises. 
Saint  Ignace  donne  au  général  quatre   assi- 
stants, qui  sont  comme  ses  ministres;   mais 
on  en  a  ajouté  de[iiiis  un  cin(]uième  pour  la 
France  :  ainsi  les  cinq  assistants  du  général 
sont  présentement  d'Italie,  de  France,  d'Ls- 
pagne,   d'Allemagne  et  de,   l'ortn-^al,  et  sont 
élus  par   la    congrégatioa  générale  ,  comme 
tous    les  autres  supérieurs.    Outre  ces   as- 
sistants, il  a  encore  auprès  de  lui  un  admo- 
niteur,  aussi  élu   par  la   congrégation  géné- 
rale ,  qui    est    on    droit   de  représenter   au 
général  ce  que  lui  ou  les  assisl.ints  auraient 
remarqué  d'irrégulier   dans  son   gouverne- 
ment ou  en  sa  pirsunne. 

(iominc  saint  Ignace  aimait  f  irt  la  pau- 
vreté, il  la  recommande  en  plusieurs  endroits 
de  ses  conslilulions.  Il  ne  veut  pas  que  les 
maisons  professes  aient  aucun  revenu,  il  n'y 
a  que  les  collèges  et  les  maisons  de  proba- 
tion <|iii  eu  peuvent  avoir.  Il  défend  de  rece- 
voir des  fondations  pour  des  messes  ù  perpé- 


cr? 


JRS 


tuile,  ni  audinn  rétribution,  soit  pour  les 
messes,  les  confessions,  les  prédications,  les 
visites  des  malades,  pour  enseigner,  ou  pour 
quelque  autre  emploi  de  eeu\  que  la  compa- 
},'nie  est  obligée  d'exercer  selon  son  institut. 
Il  ne  donne  point  d'autre  habillement  à  ses 
religieux  que  celui  des  ecclésiastiques.  Il 
ordonne  qu'il  sera  honnête  selon  l'usage  du 
pays,  sans  avoir  néanmoins  rien  de  contrai- 
re à  la  pauvreté  religieuse.  Cet  habit  con- 
siste en  une  soutane  et  un  manteau  long, 
comme  celui  des  ecclésiastiques  ;  mais  ils 
n'ont  point  de  rabat,  parce  qu'au  temps  de 
leur  établissement  les  ecclési.istiques  n'en 
portaient  pas  (1).  Les  écoliers  approuvés 
portent  aussi  en  France  le  manteau  long;  et 
en  Italie,  au  lieu  de  manteau,  ils  ont  une 
robe  à  peu  près  semblable  à  celle  qui  est  re- 
présentée à  l'article  Jérôme  (  en  Italie  ).  Le 
dessein  que  le  saint  fondateur  avait  de  con- 
vertir tous  les  hommes,  s'il  était  possible  , 
lui  fit  juger  que  la  Ci)mj)agnie  ayant  à  traiter 
souvent  avec  les  hérétiques  et  les  libertins, 
(jui  se  moquent  de  l'habit  des  religieux,  elle 
n'en  dev.iii  point  prendre  de  singulier,  pour 
avoir  plus  d'accès  partout.  On  voit  ici  (2) 
l'habit  qu'ils  ont  étéol)ligés  de  prendre  dans 
les  pays  infidèles,  où  ils  annoncent  la  foi. 
Enfin  le  saint  fondateur  règle  le  logement, 
la  nourriture  et  le  reste,  conforniément  à 
l'habit,  selon  les  lois  de  la  biinséance  et  de 
la  pauvreté,  et  il  ne  prescrit  aucune  austérité 
d'obligation. 

Cette  Compignie  a  eu  une  infinité  d'illus- 
tres écrivains  en  toutes  sortes  de  genres  de 
science.  Le  P.  Alegambe  en  a  donné  le  cata- 
logue, qui  a  été  augmenté  depuis  par  le  P. 
Bonanni.  Elle  aurait  fourni  un  grand  nom- 
bre de  prêtais  à  l'Eglise,  si  saint  Ignace  n'eût 
point  obligé  ses  religieux  par  vœu  à  renon- 
cer aux  prélutures  et  à  les  refuser  quand  on 
les  leur  offrirait  •.  c'est  encore  un  vœu  sim- 
ple que  les  profùs  font  après  leur  profession. 
il  y  a  eu  néanmoins  (|uelques  cardinaux  de 
cet  ordre,  qui  sont  les  cardinaux  Tolet,  lîei- 
larmin,  de  Lugo  ,  Palavicin,  Pasmanni  ,  qui 
fut  aussi  archevêque  de  Slrigonie  ;  Nilard  et 
Ptoloméi,  nommé  pir  Clément  XI,  auxquels 
il  a  fallu  un  précepte  de  Sa  Sainteté  pour  ac- 
cepter le  chapeau.  Les  Jésuites  metteni  en- 
core au  nombre  des  cardinaux  de  leur  ordre 
Alexandre  des  Ursins  ,  qui  fit  seulement  les 
vœux  simples  de  la  Compagnie,  étant  cardi- 
nal, sans  quitter  pour  cela  sa  dignité.  Enfin 
cet  ordre  a  eu  trois  saints  canonisés,  qui  sont 
saint  Ignace,  fondateur,  saint  François  Xa- 
vier, surnommé  l'Apôtre  des  Indes,  et  saint 
François  de  Borgia.  Trois  autres  béatifiés,  sa- 
voir :  les  bienheureux  Stanislas  Koske,  Louis 
de  Gonzague,  et  Jean-François  Régis.  Trois 
martyrs  reconnus  pour  tels  par  l'Eglise,  sa- 
voir, les  saints  Paul  Michi,  Jean  de  Gotho,  et 
Jacques  Cliisaï,  sans  parler  d'un  grand  nom- 
bre d'autres  qui  ont  répandu  leur  sang  dans 
les  différents  pays  où  ils  ont  porté  la  foi. 
Cet  ordre  a  pour  armes  un  nom  de  Jésus  d'or 
entouré  du  rayons  de  même  en  champ  d'azur, 
avec  cette  devise  :  ,4(/  majorem   Dci  glorium. 

(IJ  Voy.,  à  \a  lin  du  vol.,  n"»  I5U,  lo7  el  IjS. 


JES  6^8 

Orlandin.  Sachin.  et  Possevin.  Ilist.  So- 
ciet.  Jrsii.  Jmiigo  primi  sœculi  Societ.  Jesu. 
Jacob  Damian.  Sijnops.  primi  sœculi  Sorirt. 
Jes.  Malhias  Tanner,  Societ.  Eurnp.  lîarlhe- 
lem.  Telez,  Chronic.  de  la  Companhia  de  Je^u 
tia  Provinc.  de  Porluç/al.  P.  de  Uybadencira, 
Vide  de  S.  Ignaùo.  Bouhours  ,  Vie  de  saint 
Ignace.  Euseb.  Nieremberg,  Cliros  Varones 
de  la  comnannia  di  Jésus.  Philip.  Alegambe, 
Mortes  illustres  Societ.  Jes.  Hcriiian  ,  Ilist. 
des  Ord.  religieux,  tom.  lll.  Haillel  et  Giri  , 
Viedes suints.  Regul.  Comm.  Coiistitut.  Liller. 
Aposlol.  et  priviieg.  Soc.  Jesu. 

Le  P.  ITélyot  s'est  borné  à  raconter  l'his- 
toire de  l'origine,  de  l'extension  prodigieuse, 
de  la  Compagnie  de  Jésus;  Il  a  donné  un  ex- 
posé succinct  de  son  régime  et  des  services 
immenses  qu'elle  a  rendus  à  l'Eglise,  mais  il 
s'est  très-peu  étendu  sur  les  luttes  auxquel- 
les (Ile  a  été  exposée,  sur  les  combats  qu'cIU; 
a  dû  soutenir  contre  les  novateurs.  Nous  de- 
vons, en  continuant  son  travail,  suivre  sou 
plan;  il  l'avait  d'ailleurs  suivi  lui-mêm& 
dans  tout  ce  qu'il  a  écrit  sur  les  autres  or- 
dres religieux.  Néanmoins  elle  s'est  trouvée, 
après  la  mort  do  notre  auteur,  mêlée  de  tant 
de  façons  aux  maux  qu'asouffcrisia  religion, 
elle  a  été  elle-même  en  butte  à  tant  d'inju-;- 
tes  attaques,  l'objet  de  tant  de  calomnies, 
que  le  peu  que  nous  en  allons  dire  sera  sous 
certains  rapports  le  récit  des  combats  livres  à 
l'Eglise  même. 

(juand  le  P.  Hélyol  mourut,  la  bulle  Uni- 
genilus  venait  de  paraître.  Sollicitée  par  l'I'l- 
glise  de  France,  elle  devait  être  le  remède 
aux  maux  que  cette  Eglise  ressentait  depuis 
l'apparition  du  jansénisme.  L'hérésie  sut  pa- 
ralyser longtemps  les  effets  de  ce  remède  sa  ■ 
lutaire.  La  philosophie  profila  des  troubles 
qu'elle  fomeulail  pour  jeter  du  ridicule  sur 
tout  ce  que  la  religion  el  la  morale  avaient 
de  plus  sérieux.  Les  parlements  se  mirent 
au  service  de  la  philosophie  el  du  jansénis- 
me, et  tous  firent  de  la  Compagnie  de  Jésus 
leur  point  de  mire,  cachant  sous  son  nom 
celui  de  la  religion  catholique,  à  laquelle  ils 
en  voulaient  réellement.  Les  Jésuites  de- 
vaient succomber  sous  le  poids  de  coups  si 
nombreux  et  si  puissants,  car  les  rois,  dans 
leur  aveuglement,  se  firent  l'écho  des  cla- 
meurs de  leurs  ennemis,  cl  hâtèrent  leur  pro- 
pre chute,  en  sollicitant  et  extorquant  celle 
des  religieux  les  plus  utiles  à  l'Iiglise  dans 
les  dures  circonstances  où  elle  se  trouvait 
alors. 

Les  Jésuites,  zélés  pour  la  doctrine  catho- 
lique, se  soumirent  aux  décisions  du  sainl- 
siége,  et  propagèrent  autant  qu'ils  purent 
l'adhésion  auxdécrets  vcnusde  Rome.  Nous 
devons  avouer  ici  que  quelques  membres  de 
leur  Compagnie,  alors  missionnaires  dans  les 
contrées  d'Orient, ne  mon  traient  pas  une  obéis- 
sance aussi  ponctuelle  aux  prescriptions  du 
souverain  pontife.  On  sait  toutes  les  difficul- 
Il's  élevées,  toutes  les  disputes  occasionnées 
par  les  cérémonies  religieuses  de  la  Chine. 
Depuis  plus  d'un  demi-siècle,  les  religieux 
de   diveis   instituts  ,  missionnaires  dans  ces 

(2)  Voj/.,  ix  la  fin  du  vol.,  m"  159,  100,  101  el  102 


P59  niCTlONNMRE  DES  ORDRES  RELICIEUX.  660 

rontrécs  loinlainos,  ét.'iionldivisés  sur  le  sons       lilé  où  nous  laisse  l'espare   rétréci  ilpsliné  à 
qu'on  atlnrhait  à  certains   mots,  sur  l'olij'l  raconter  ses  travaux,  clo  les   montrer  en  ilè- 
de   certaines    cérémonies.    La   plup.irt   cou-  l.iil,  nous  nous  liorncrons  à   dire    que   si   le 
damnaient  l'oxprcssion  par  la(|uelle  les  iiili-  eliristianisme  a   f.iit    des  proirrès    si  surpre- 
gènes    nommaient  le  ciel,  n'y  voyant  que  le  nanis    dans    l'Amérique  du  Nord   depuis  un 
ciel  matériel  :  le  plus   prand  nombre  des  Je-  sièc!e,  ces  proi;rés  sotii  dus  en  grande   partie 
suites,  et    même  quelques   prélais  y  reon-  aux  travaux  des  Jésuites.  Os  evéchés  noni- 
naissaienl  l'invocation  du  Seigneur    du  riel.  breux  qui  semlilent   suri^ir  comme  par  cn- 
I.a  même  division  exislall  sur  le  sens  moral  cliaiilement   dans   les    l'Ua's-Unis,    nous  ne 
des  cérémo:.ios  dont  nous  avons    parlé.  Uo-  crai;;noiis  pas  de  le  dire,  ont   leurs  bases    cl 
me,  consumée,  envoya  un  loiral,  M.  de  Tour-  leurs  racines  dans  celte  terre  que  les  Jésui- 
non,  patriarclio  d'.\iitioihe,  ipii    ne  fut    pas  tes  plus  qiu'  tous   les  autres    missionnaires 
reçu  de  tons  les  catholiques  avec   1^    respect  avaient  défrichée  et  arrosée  de  leurs  sueurs, 
que  lui  mérilaent  son  (araclère  cl  son  titre.  Les  Puraxis.  les  Manacicas,  les  Quiriquieas, 
11  est  juste  de  ne  pas  laisser  peser  sur  les  Je-  bs    Lulles,  les    Ptiizoeas,   les    .Morabis,    les 
suiles  seuls  le   tort  de  ce  manque  de  respeil  Abipones,    les   Mala;;uvos     et    vin^t    autres 
et  de  s-oumissioli.  Nous  donnons  sur  eux  un  peu|ilades  ou  tribus   sauvages,  dans    l'autri! 
aperçu   liisloriiine  ;  notre  impartialité   nous  pu  liedii  nouveau  monde  sont  amenés  par  les 
<)blii;e  à  dire  que  le  plus  grand  nombre  d'en-  Jésuites  à  la  connaissance  de  la  vérité  et  aux 
irceux  se  montra  récalcitrant  auxordres  du  usagesde  la  vie  civile.  Toutes  cesnalions, dont 
pape.  Le  lé-jat  condamna  les  cérémonies  clii-  les  noms  étranges  ne  nous  seraient  peul-étrc! 
noises  ;  les  Jésuites,  s'appiiynnl  trop  sur  leurs  pas  connus  si   elles    n'avaient  été  l'objet   du 
connaissances  éti-ndues  et  plus  a|  pro'"ondies  zèle  des  Jésuites,  furent  amenées  à    l'etal  do 
de  [a  langue  el  des   usages   du  pays,  sur  le  W''c/i/c<i9n, c'est-à-dire  à  ce  genre  de  gouver- 
maintien  des  intérêts  du  clirislianlsme  dans  nemenl    moitié   monarchique,  moitié  Ihéo- 
rcs  contrces,  ajournèrent  leur  soumission  et  cralique,  où   les  établi>saii'nt  leurs  apôtres 
appelèrent    au  pape     mieux   informé.  (Nous  pour  les  sousiraire  aux    horreurs  de    la  vie 
voulons  appnjer  sur  la  dilïérence  de  cet  ap-  sauvage.  De  toutes  ces  Héductions,  celles  du 
pel  d'avec  ceiui  des  appelants    français.)  Ils  Paraguay  on'  été   les  plus  célèbres  :  tout  le 
eurent  tort  ;  mais  si    le  légal  cul   à  se  plain-  niunde  connaît  jusqu'à   (|uel  point  les  Jésui- 
dre  de  leur  conduite,  il  eut    bien    plus  à  se  les  parvinrent  dans  celle   république  chré- 
plaindre  des  vexations  des  Portugais,  de  Par-  tienne  à  rendre  agréable  à  des  êtres  abrutis 
chevéque  de  Goa,  de  l'évéquc  de  .Macao.  Les  le  joug  de  l'obéissance,  «lu  travail   el  de  la 
fautes  de   ceux-ci  n'excusent  pas  celles  des  famille.  Comme  si    les  dil'licullés    sans  non)- 
autres,  sans  lioute,  mais  elles  les  explique-  bre  qu'avaient  demandées  ces  conquêtes  rue- 
raient peut-être  un  peu,  d   devraient  obli-  riioires  avaient  surexcité  le  zèle   des  Jésui- 
ger  les  ennemis  des  Jc>uiles  à  plus  de  discré-  'ps,  l'Amérique  méridionale  vil  de  nouveaux 
lion    dans    leurs    attaques   fondées    sur    ce  Pères  de  l'instilut  marcher  à    la   découverte 
point.  Au  reste,  le  11  juillet  17V2ctle  12  sep-  de  U'iuvelles  peuplades.  On  leurdisait  qu'elles 
lembre    174V,  Benoit    XIV,    par    ses  bulles  étaieni  encore  plus  sanguinaires,  plus  disso- 
Jix  quo  sittf/ulari  el  Omnium  sollicitiulinum,  l-es  que  celles  dont  ils  avaient  comprimé  les 
trancha  toutes  les  diflicullés  en  parlant  dans  insiincls.  I]es  récits  furent  pour  eux  un   sli- 
le  sens   de  ses   préilécesseurs.  Les   Jésuiics  niulanl.  On  ne   peut  dissimuler  que    toutes 
cesséicnt  leurs    lésisiances,    qui    dans    un  ces  cmiquètes  faites  aux  lumières   de  la  foi, 
grand  nombre,  el   peut-être  dans    lous,  n'a-  ne  fussent  aussi  à  l'avanlai;e  de  l'Iispagneet 
vnienl  été  (|ue  conditionnelles.  Ors  avant  ce  du  Portugal, qui  favorisaient  les  missionnai- 
temp-,  en  17;j.ï,  les  Jésuiles    duMaduré;en  res;ilfaulen    même   temps    rappeler  com- 
1741,  les  Jésuiles  de   la  l>hine  cl   des  Indes  bien   ces    services   nombreux  et   iniporlanis 
avaient  fait  leur  soumission,  et    la  ilistance  rendus    à    la    mère  patrie   élaient     souvent 
des  lieux  avait  retardé  l'arrivée  de  leurs  lei-  payés  d'ingratitude,  de  calomnies  el  de   pcr- 
ires  à  Rome.  Au  milieu  de  ces  malheureuses  séditions.  La   France  n'était   pas  moins  in- 
divisions, les  Jésuites  de   ces   contrées  loin-  téressée  aux  conquêlt^s  spirituelles  des  Jésui- 
lalnes    faisaii'nt  lionneur  à  leur  Compagnie  tes  dans  l'Améri(|ue  du   Nord.    Les  Murons, 
cl  à  la  religion,  si    nn  peut  parler  ainsi,  par  les  K>(|uimaux,  les  Algonkins,  les  .\benakis, 
l'éclat    donl  ils    brillaient  dans  les  sciences  ,  les  Minois  et    les   Miamis   aiceplèrenl  avec 
dans  des  missions  (liplomali(|ocs  et  délit  aies,  joie  l'I^vangile.  De   l'étal  sauvaue  ils  étaient 
cl  les  noms  des   PP.   Parrenin,  Caubil,   etc.,  peu  à  peu  arrivés  à  une  condition  heureuse, 
sont  restés  cliers   aux   lettres,  suivant  le    té-  Ils  a(>prenaienl  à  cont'iinlre  dans  leur  amour 
oiuignagc  même  de  ceux  i|ui  ne  semb'eiit  pas  Jesns-t^lirist  el  la    France.  ,\ près  leura\oir 
faits  pour  comprendre  el  pour   d  rc  combien  d  inné  un  cnlle,  des  moMirs,  une    famille,  on 
aussi   ils  .sont  d«meure$  cheis  à  la   mémoire  leur  offrait  un-  patrie  qui   les  protégeait,  el 
des  hommes  de  foi.  si  le  nom  de  rnlies  noi  es  réveille  encore  de 
A  la  même  cpuque,  el  pendant  toullc  reste  nos  jours  les  sentiments  de  la  reconnaissance 
de  son  existence,  la  Socieié  de  Jésus  rendait  chez    le;»  sauvages    et  chez    les  Canadiens, 
a  l'autre  extrémité  du  monde  des  services,  si-  n'oublions  pas  ijne  ce  nom,  devenu  commun 
non  aussi  éclatants ,  ilu  moins   plus    étendus  à  tous  les  missionnaires  catholiques,  fut  pri- 
ct  peut-être  plus  Siliiles  et  p'us  utiles.  Nous  mitivcmenl   donné  aux   seuls  Jésuites.  Une 
ne  faisons  point   ici    un    panégyrique,    mai'i  partie  «les   œuvres  donl   nous   rappelons  ici 
suulcuicnl  de  riiisloirc,  et  dans  l'impossibi-  l'ellct     miraculeux    avait    commencé    san» 


eni 


JES 


JICS 


65? 


doule  à  une  époque  anlérieuro,  à  ctlle  qui 
nous  sert  de  dale  dans  ces  addiiions,  mais 
elles  se  coiilinuèrenl  cl  quelques-unes  com- 
iiienrèrenl  au  xviir  sit^cle.  Il  en  esi  de  même 
des  cBiivres  plus  difficiles  el  peiit-cire  plus 
niériloiies  que  l;i  ch.irilé  des  Jésuites  leur 
faisait  suivre  alirs,  eu  Giiinéi-,  à  la  Séné- 
gambie,  au  Congo,  à  Angola  el  sur  (raulres 
poinis  meurtriers  des  rôles  et  des  haliilalions 
de  l'Afrique;  et  si  jamais  l'inslilul  écrit  un 
martyrologe  de  famille,  il  trouvera  dans  les 
missions  que  nous  avons  indiquées,  pour  en- 
richir sa  nomenclalure,  les  noms  de  Soliios, 
RomiTo,  de  Arcé,de  Blende,  Baraze  ,  Ki- 
chler,  (jravier,  Uupuissoii,  Sénal,  douze  Pè- 
res massacres  sur  les  bords  du  Xingu,  el 
cinquanie  autres,  dont  la  mort  date  à  peu 
près  de  l'époque  sur  la(iuelle  nous  écrivons; 
il  lous  ne  périrent  pas  sous  les  flèches  ou  la 
hache  des  sauvages,  p!us  d'un  mourut  sous 
le  fer  des  protestants  anglais. 

Nous  abandonnons  à  rcgn  l  Icsniissionnai- 
icsjésiiilcs  dans  leurs  liaviiux  du  nouveau 
monde  et  des  autres  coiilrées  U)intaines,  pour 
repr 'ndic  leur  histoire  en  Europe,  où  nous 
les  voyons  en  proie  à  la  calomnie  el  aux  per- 
sécutions de  l'hérésie  et  de  l'impiété,  lin 
France  comme  dais  le  reste  du  continent, 
partout  où  ils  étaient  établis,  les  Jésuilessou- 
((Miaicnl  avec  honneur,  continuaient  avec  zèle 
)  ■  bien  qu'avaient  fait  leurs  devanciers  dans 
la  prédication,  la  direction  des  consciences, 
des  congrég;itions  pieuses,  etc.;  ils  soule- 
iiaicnl  aussi  la  réputation  lillérairc  et  scien- 
tifique de  leur  ordre,  soit  en  formant  toujours 
des  élèves  distintiués,  soit  par  des  ouvrages 
remarquables  dans  lous  les  genres.  Comme, 
au  milieu  de  tant  de  richesses  intellectuelle-, 
nous  ne  pouvons  rien  citer  dans  notre  abré- 
gé, nous  nonniions  à  peine  ici  le  Journal  de 
Tréioux  cl  sou  immense  action;  nous  omei- 
lons  aussi  à  regret  tant  de  noms  que  la 
France  même  seule  pourrait  ici  nous  four- 
nir. Encore  une  fois,  nous  n'avons  envie  de 
faire  ni  dans  le  fond  ni  d;ins  la  forme  un 
éloge  des  Jésuites;  noire  tâche  serait  pour- 
tant alors  d'autant  plus  facile,  si  l'espace  nous 
était  laissé,  que  nnus  n'aurions  (lu'à  prendre 
les  paroles  .'irrachées  par  la  force  de  la  vérité 
de  la  bouche  de  leurs  plus  célèbres  ennemis, 
pour  les  justifier  des  principaux  reproches 
qu'on  leur  a  faits.  S'agit-il  du  régicide,  par 
exemple,  dont  on  n'oserait  plus  parler  au- 
jourd'hui, mais  qui  a  servi  de  thème  à  tant 
d'hypocriies  amis  du  21  janvier  179.'J,  on  se 
rappelle  celle  lettre  de    Voltaire  à    Damila- 

ville  :  « Vous  devez  voir  que  je    n'ai   pas 

ménagé  les  Jésuites  ;  mais  je  soulèverais  la 
postérité  en  leur  faveur,  si  je  les  accusais 
d'un  crime  dont  l'Europe  et  Uamieus  les  ont 
justifiés.  »  Un  hornme  dont  le  nom,  la  posi- 
tion, la  patrie  (il  était  de  la  religieuse  pro- 
vince de  Bretagne),  auraienldû  arrélerla  plu- 
me, quand  il  eût  élé  capab!e  d'écrire  de  lui- 
même,  LaChalolais,quis'élail  fait  par  orgueil 
le  méprisable  copisie  ou  le  viléchoded'Alem- 
berl,  avait  porté  l'expression  de  l'ignorance 
jusqu'à  dire  que  les  Jésuites  n'nvnient  jias 
praduil  de  mathémaliciens.  Et  à  celle  occa- 


sion l'aslrononu'  l.alaude,  ijui  ccriv.iii  dans 
le  Bulleiin  de  l'Europe  :  «  Le  noui  de  Jésuite 
intéresse  mon  cœur,  mon  espril  et  ma  recon- 
naissance. On  a  beaucoup  parlé  de  leurré- 
lablissenieni  dans  le  Nord;  ce  n'est  qu'une 
chimère;  mais  elle  m'a  rappelé  tous  nu'S  re- 
grets sur  l'aveuglement  des  gens  en  place  en 
1762...  Carvalho  et  Choiseul  ont  détruit 
sans  retour  le  plus  bel  ouvrage  des  hommes, 
dont  aucun  établissement  sublunaire  n'ap- 
prochera jamais..,»  l'astronome  Lalande , 
qui  malheureusement  n'était  pas  incité  par 
le  sentiment  icligieux,  disait  aussi  :  «  L'es- 
pèce humaine  a  perdu  pour  toujours  celle 
réunion  précieuse  et  étonnante  de  vingt  milh; 
sujets  occupés  sans  relâche  cl  sans  inlérêt, 
de  l'inslrucliuii,  de  la  prédication  ,  des  mis- 
sions ,  des  conciliations ,  des  secours  aux 
mourants,  c'est-à-dire  des  fonctions  les  plus 
chères  et  les  plus  utiles  à  l'humanité...  l'ar- 
ru'  les  calomnies  absurdes  que  la  rage  des 
proteslants  et  des  jansénistes  exhala  contro 
eux,  je  remarquai  La  Clialotais,  qui  porla 
l'ignorance  el  l'aveuglement  jusqu'à  dire  que 
les  Jésuites  n'avaient  pas  produit  de  mathé- 
maliciens. Je  faisais  alors  la  table  de  mon 
Astronomie;  j'y  mis  un  article  surles  Jésui- 
tes astronomes  ;  le  nombre  m'étunna  ;  j'eus 
occasion  de  voir  La  Clialotais  à  Saintes  en 
1773,  je  lui  reprochai  son  iiijusl  ce,  el  il  en 
convint.  » 

lit  ce  La  Clialotais  lui-même  n'èiait-il  pas 
obligé  de  convenir  de  bien  d'autres  avanta- 
ges dans  la  Compagnie  de  Jésus  ?  «  Si  les  Jé- 
suites, dit-il,  n'avaient  enseigné  que  les 
maximes  d'une  morale  corrompue  et  relâ- 
chée, loin  de  se  soutenir,  ils  eussent  élé  chas- 
sés de  lous  les  royaumes  ;  mais  ils  joignaient 
les  arts  aux  mœurs  régulières;  il  se  trouvai! 
chez  eux  du  bien  el  du  lual.  Leur  inslilut  n'it 
point  eu  de  modèle,  et  vraisemblablement  il 
n'en  servira  jamais  à  aucun  ordre.»  (LaCha- 
lolais  se  trompe  on  cela,  comme  quand  il  dit 
que  les  constitutions  el  les  mœurs  des  Jé- 
suites ne  peuvent  s'accorder  avec  les  lois  et 
les  mœurs  des  Elals  républicains.  La  règle 
des  Jésuites,  ctimme  toutes  les  règles  monas" 
tiques,  s'accorde  avec  tons  les  régimes  poli- 
tiques possibles  ,  puisqu'elle  n'est  que  l'ex- 
pression de  la  perfection  évangélique,  possi- 
ble partout.)  Les  évéques  réclamèrenl  pres- 
que tous  en  faveur  de  la  Compagnie  de  Jésus. 
De  Fitz-James,  évéquc  de  Soissons,  jansé- 
niste connu,  fut  le  seul  à  s'élever  ouverte- 
ment contre  eux,  et  néanmoins  il  déclara 
que  leurs  mœurs  étaient  pures  :  «  On  rend 
volontiers  aux  Jésuites  (écrivit-il)  la  jusliie 
de  reconnaître  qu'il  n'y  a  peut-être  point 
d'ordre  dans  l'Eglise  dont  les  religieux  soirnt 
plus  réguliers  et  plus  austères  dans  leurs 
mœurs.  »  Sur  le  même  sujet,  Voltaire  a  dit 
aussi  :«l'endanl  sept  années  que  j'ai  vécu  dann 
Il  maison  des  Jésuites,  qu'ai-je  vu  chez  euxi 
La  vie  la  plus  hiborieusc  cl  la  plus  frugale  j 
toutes  les  heures  partagées  entre  les  soins 
(ju  ils  nous  donnaient  el  les  exercices  de  leur 
profession  au;tére  :  j'en  ailcste  des  millicra 
(l'hommes  élevés.comme  moi.  » 

Après  avoir  lu  de  tels  lénioignages,  ou  es\ 


603 


nicTioNNAini':  des  onoREs  iieugieux. 


C54 


j)ou  surpris  lio  »oii  lo>  éM"'(|ui'S  ilc  France  do- 
ehirrr  à  Louis  XV  que  «  la  sii|iprt's-i(in  des 
Jpsuilrs  potti-rait  tin  luil/iblc  préjudico  à 
leurs  dior«^srs  cl  à  l'iiislniclioii  tic  l;i  jeiinos- 
sp.ol  qu'il  serait  Irôs-diflicile  de  les  rouipla- 
tpr  a»cc  1.1  riiêinc  ulililé.  n 

Ci[)('ndaiU  «oUc  fuppression  eut  lieu;  il 
iiDUS  reste  à  raconter  c.oniinenl  elle  fui  défi- 
nitivement amenée. 

L'oraçe  éclata  d'aliord  contre  elle  en  Por- 
luiial,  oii  elle  eut  pour  ennemi  déclaré  un 
homme  ((uelle  s'était  pourtant  atliiché  [lar 
les  liens  de  la  reconnaissance.  Cet  homme 
est  le  fami'ux  Pomlial,  comte  d'OKjras,  né 
d'une  famille  noble  mais  [lauvre.  Deux  ma- 
riages avantageux  ra\aii'nl  mis  sur  la  voie 
de  la  fortune,  et  la  iir'itection  du  P.  Morcira, 
confesseur  du  roi  Joseph  1',  plus  que  tout 
autre  soutien  peut-être,  l'avait  fait  nommer 
uiiDlsIre  secrétaire  d'Etat  des  affaires  élraii- 
pères.Ce  P.  Moreira  était  un  Jésuite  qui  fui, 
ainsi  que  quelques-uns  de  ses  confrères, 
trompé  par  l'hypocrisie  de  Pombal.  Pour  les 
remercier  de  leur  intervention  bienveillante 
en  sa  faveur,  le.  ministre  trouva  des  prétex- 
tes de  ^exalians  contre  la  Compagnie  de  Jé- 
sus, fit  exiler  quelques-uns  de  ses  membres, 
fitcxpulsir  les  autres  des  missions  du  Para- 
guaj',  etc.  C'est  surtout  à  partir  de  l'attentat 
contre  la  vie  du  roi  que  Pombal  se  monira 
sans  rcienue  contre  les  Jésuites,  dont  la  [tré- 
•ence,  le  zèle  et  les  succès  l'auraient  empê- 
ché de  parvenir  à  ses  fins.  Le  ."î  se|itenibre 
l'ion,  le  roi  Joseph  1"  revenait  d'un  rendez- 
vous  coupable  avec  la  jeune  marquise  de  i  a- 
vora,  on  attenta  à  ses  jours.  Plusieurs  per- 
sonnes delà  cour,  le  duc  d'Aveiro,  le  mar- 
quis it  la  mar(|uise  de  Tavora,  le  comie 
d'Antognia  furcut  accusés  d'avoir  pris  jiart  à 
ce  crime  et  subirent  la  peine  capiiale.  On  a 
dit  que  cet  assassinat  était  une  fiction  inven- 
tée par  Pombal;  cela  est  possible,  néanmoins 
Li  conjuration,  ou  supposée  ou  plus  proba- 
blement vériiable,a  éie  depuis  considérée  en 
Portugal  comme  un  fait  incontestable.  Au 
milieu  des  tortures  qu'on  lui  lit  scuPTrir,  le 
duc  d'Aveiro  compromit  ((uelqucs  Jésuites 
comme  iiistigaleurs,  et  se  rétracta  dès  qu'il 
ne  fut  plus  violenté  par  les  tourments.  Néan- 
moins trois  Jésuites  turetil  impli<)ués  dans 
le  procès;  mais  Pombil,  (;uoique  lout-];uis- 
saut,  n'osa  pas  les  faire  juger  en  même  temps 
que  les  autres  pré^elllls  ,  el  l'un  d'eux,  le  P. 
Malagrida,  fut  déféré  trois  ans  plus  tard, 
])0ur  hérésie,  au  tribunal  de  l'inquisition, 
présidé  par  le  frère  de  Pombal,  sur  le  refus 
«le  l'inquisiteur  général  ,  et  ,  condaojne  à 
mort  comme  sorcier,  (ut  hrùlé  vif  dans  un 
aulo-(la-fe,  le  :J1  septembre  17i  1.  Un  édit  du 
19  janvier  1759  avait  déclaré  tous  les  Jésui- 
tes portugais  complices  de  l'.itlentat;  en 
conséquence,  ils  furent  enfermés,  (luis  de- 
portés  par  mer  eu  Italie,  et  leurs  biens  fu- 
rent séijucstrés.  Il  est  inutile  que  nous  clicr- 
c'hions  à  éiabl.r  ici  leur  innocence  en  ce 
complot;  elle  est  reconnue  et  avouée  par 
tous  les  écrivains  sérieux, à  qucl(]ue  couunu- 
iiion  qu'ils  appartiennent.  Les  Jésuites  m; 
doutaient    plus   depuis    lrès-loui5ten)ps   des 


disposiiions  du  ministre  à  leur  égard,  et  au 
milieu  des  persécutions  nombreuses  dont  il 
les  avait  déjà  rendus  vidimes,  ils  avaient  dû 
plus  vivement  sentir  le  bref  éionnant  arra- 
ché à  la  faiblesse  de  lîenoit  Xl\'  mour.inl. 
Iequ(l  bref  oidonn.iit  visite  et  reforme  de 
leur  institut  eu  Portugal,  et  confiait  cette 
mission  étr.inge  et  inutile  au  cardinal  Sal- 
danh.i,  protégé  de  Pombal.  Cette  Lmincnce, 
qui  s'ét.iit  entourée  des  plus  violents  enne- 
mis de  l'institut,  exécuta  sa  singulière  mis- 
sion en  1758.  L'année  suivante  le  nouveau 
pape,  t]  émeut  Xlll,  mû  par  des  sentiments 
de  justice,  avait  en  janvier  donné  un  bref 
d'a|.])robalion  et  de  confirmation  des  Jésui- 
tes. Pombal,  qui  venait  de  les  chasser  du 
Portugal,  irrité  de  ce  bref,  renvoya  le  nonce 
du  souverain  pontife.  D'où  venait  doue, 
dans  Pombal,  celte  haine  des  Jésuites  ,  qui 
allait  noii-sculcment  à  la  cruauté  mais  au 
f.inalisine  et  au  ridicule?  Imprégné  des  idées 
jansénistes  qui  régnaient  alors  en  France, 
il  était  en  outre  le  serviteur  caché  des  An- 
glais; il  voulait  chasser  le  catholicisme  du 
Portugal,  y  établir  une  Eglise  nationale  el 
changer  l'ordre  de  succession  au  lr<^nc.  Ici 
noi  s  ne  devons  pas  omettre  uu  fait  à  la  louan- 
f.  e  d'une  corporation  religieuse  qui  se  distin- 
gua par  ses  procédés  envers  les  Jésuiles, 
exi)u!scs  du  Portugal.  Embarqués  sur  le 
'Page  en  17o9  ,  ils  fuienl  contraints  de  f.iire 
relâche  en  plusieurs  villes  où  on  les  reçut 
avec  riîspect.  Le  2i  octobre  1759,  ils  débar- 
quèrent à  Civita  A'ecchia,  au  nombre  de  cent 
trente-trois.  Magistrats,  corps  religieux, 
tout  dans  celle  ville  tint  une  conduite 
digne  d'éloge  envers  ces  nobles  exiles  ; 
mais  les  Ùominicains  surpassèrent  tout 
le  monde  en  cordialité  el  en  générosité. 
Ils  \oulurent  consacrer,  par  une  inscription 
dans  leur  église  ,  le  souvenir  du  passage  de 
ces  premières  victimes  d'une  attaque  qui  al- 
lait bientôt  devenir  gêné,  aie  contre  les  or- 
dres monastiques.  Cette  conduite  est  belle 
dans  une  société  qui,  par  sentiment  du  ta- 
lent et  du  zèle  plutôt  que  par  jalousie  peut- 
élrc,  s'était  souvent  montrée  l'émule  des  Jé- 
suites. D'autres  navires  chargés  des  Pères  de 
la  Compagnie  partirent  à  différentes  époques 
})Our  les  Etats  ecclésiastiques.  Celle  expédi- 
tion plaisait  iulinimeut  aux  jansénistes  fran- 
çais, et,  ce  qui  n'a  peut-être  été  reman|ué 
par  aucun  historien,  .'ijoutaul  l'ironie  à  la 
ciuautéet  à  l'insulte,  ils  consacrèrent  par  le 
burin  la  mémoire  de  celle  expulsion  et  de 
cette  translation  en  Italie.  Nous  avons  vu 
nous-inême  des  gravuies  secrètes  faites  par 
le  parti  pour  s'amuser  de  cette  catastrophe 
des  Jésuites.  Li.'  cardinal  Salda-  ha,  il  faut  le 
dire  à  sa  honte,  s'arrogeait  le  pouvoir  de 
dis(ienser  de  leurs  vo'ux  les  jeunes  Jésuites. 
Il  y  eut  quelques  défections;  m  lis  les  huées 
du  peuple  et  dis  sold.ils  eu  lirenl  justice.  Le 
plus  grand  nombre  résista  aux  flatteries  el  à 
l'intimidation.  Ou  fil  dans  les  missions  les 
mêmes  expulsions  qu'au  sein  (le  la  métro- 
pole. Itornons  ici  le  récit  de  la  persécution 
(le  Pombal,  qui  fut  la  plus  calculée  et  la  pins 
cruelle  peut-élrc  contre  les   Jésuites.  Nous 


I 


CCj 


JES 


JF.S 


666 


lui  avons  donné  une  certaine  étendue.  On 
sait  qu'avant  sa  mort,  Poinbal,  disgracié  cl 
traduit  en  justice,  vit  réliabililer  toutes  les 
victimes  qu'il  avait  chargées  du  crime  «le 
ièsc-majesié.  A  part  ses  procédés  contre  les 
Jésuites,  il  n'est  aucun  historien  qui  ait  pu 
dissimuler  l'exécration  ou  si  l'on  veut  la 
haine  dont  le  poursuit  déjà  la  poslétilé.  Il 
éla  t  un  de  ces  hommes  qui"  le  crime  no  re- 
tient pas  quand  ils  veulent  parvenir  aux 
honneurs  et  à  la  fortune.  La  franchise  nous 
oblige  à  ajouter  qu'il  trouva  grand  nombre 
d'ectlési.isliques  et  d'évéquos  qui  le  servi- 
rent avei:  bassesse. 

Kn  France,  les  choses  se  passèrent  autre- 
ment. On  blâmait,  sans  en  excepter  Choisrul, 
les  cruelles  prévenlioiis,  les  procédés  do 
Tombal  ;  mais  tout  le  monde  sait  qu'on  ton- 
dait au  même  but  et  qu'on  y  parvint  par  la 
calomnie  tt  le  sarcasme.  Il  nous  suffit  donc 
de  le  rappeler  ici,  en  rappelant  aussi  la  cir- 
constance malheureuse  qui  porta  un  coup 
si  terrible  à  l'ordre  des  Jésuites.  Nous  par- 
lons du  l'ait  du  P.  Lavaleile,  que  tant  de 
gens  allèguent  sans  le  connaître.  On  a  quel- 
quefois rrproché  aux  Jésuites  leur  immix- 
tion dans  le  commerce,  conire  les  disposi- 
tions des  saints  canons  qui  Tinter  lisent  aux 
clercs  et  aux  religieux  ;  or,  ce  n'étaient  pas 
ceux  qui  étaient  chargés  de  veiller  sur  l'ob- 
servation des  règles  ecclésiastiques  qui  for- 
mulaient ce  reproche.  Chargés  des  intérêts 
de  leurs  néophytes,  les  missionnaires  jésui- 
tes ont  qu<.'lquefois,  comme  l'ont  pu  faire 
d'autres  corporations,  dirigé  l'exploitation 
de  leurs  possessions  et  l'expurtatiou  de  leurs 
produits  :  c'était  là  un  acte  de  chariié,  cl  non 
une  profession  ni  une  pratique  de  commerce 
qui  consiste  à  acheter  pour  revendre.  Le  P. 
,de  Lavaleile,  doué  de  zèle  pour  le  prochain 
el  d'habileté  pour  le  m;iniement  des  affaires, 
étant  devenu  supérieur  des  missions  de  l'A- 
mérique du  Sud,  loin  de  ses  supérieurs  ma- 
jeurs, alla  peu  à  peu  trop  loin,  conlracla  des 
emprunts  auxquels  la  guen  e  et  des  événe- 
ments imprévus  rem|jéchèrenl  de  salisfaire. 
A  une  autre  époque  que  celle  où  éclata  ce 
desasire,  dans  une  aulre  France  que  la 
France  du  xviii'  siècle,  les  Jésuites,  secon- 
dés même  de  quelques  créanciers,  auraient 
réussi  à  laire  agréer  leurs  olVres  ou  à-comp- 
les  généreux  (  ils  a\ aient  même  déjà  soldé 
près  de  800,000  fr.  )  ;  mais  la  disposition  des 
esprits,  les  animosités  de  madame  de  Poin- 
padour,  les  persécutions  hypocrites  du  dus 
de  Choiseul  secondant  alors  si  favorablement 
la  haine  des  jansénistes,  des  philosophes  el 
des  parlements,  tout  salut  était  impossible, 
parce  que  l'(jn  pouvait  employer  avec  vérité 
CCS  paroles  du  livre  des  Juges  :  7/  n'y  avait 
point  en  ce  temps-là  de  roi  en  Israël.  On  sait 
que  les  Jésuites  furent  condamnés  à  solder 
les  dellesdu  P.  Lavaleile. Maiscequ'on  ignore 
généralement,  c'est  le  désaveu  de  la  conduite 
du  Jésuite  coupable,  par  ses  supérieurs,  et 
sou  expulsion  de  la  Compagnie  de  Jésus.  Cet 
épisode  malheureux  de  l'hisioire  de  sa  deslrue- 
lion  se  trouve  rapporté  d'une  manière  plus 
lucide  el  plus  véridique  que  partout  ailleurs 


dans  le  LXX*  volume  de  la  Biographie  uni- 
verselle. Le  procès  intenté  aux  Jésuites  à  l'oc- 
casion d(!  la  faillite  du  P.  de  Lavalette  ame- 
na devant  les  parlemenls  la  révision  et  l'exa- 
men de  leurs  constilulioiis.  On  blâma  l'es- 
prit de  leur  institut  el  on  les  accusa  eux- 
mêmes  d'y  être  trop  attachés  el  trop  fidèles. 
Kn  Portugal,  Pombal,  dans  son  hypocrisie, les 
accusait  de  s'en  être  écartés  el  pi  élexlail  vou- 
loir les  ramener  à  leur  roguljirité  |>rimitive. 
Mcnlita  est  iniquilas  ,vî7*(.  La  commission  du 
conseil  que  le  roi  avait  chargé  de  la  révision 
des  constitutions  des  Jésuites,  convoqua  une 
réunion  du  clergé,  el  lui  adressa  quatre 
questions.  Le  30  novembre  ITlil,  cinquante- 
un  cardinaux,  archevêques  el  évêques,  s'as- 
semblèrent sous  la  présidence  du  cardinal  de 
Luynes.el,  après  un  mûr  examen,  tous,  moins 
six  voix,  prononcèrent  en  faveur  des  Jésui- 
tes sur  les  quatre  questions  ;  et  même  il  n'y 
cul  que  l'évêque  de  Siiissons  qui  demanda 
l'entière  expulsion  de  la  Compagnie  de  Jésus. 
Le  premier  coup  que  frappa  le  parlement 
fut  un  arrêt  d'interdiction  el  de  suppression 
lancé  en  17G0  conire  les  congrégations,  dans 
lesquelles  depuis  deux  siècles  les  Jésuiles 
faisaient  un  bien  inappréciable.  La  faillite  du 
V.  de  Lavalette  n'avait  été  qu'un  prétexte 
heureux  pour saisirl'occasion, depuis  si  long- 
temps désirée,  de  sévir  conire  la  Compagnie 
de  Jésus  tout  entière.  On  examina  les  consli- 
lutions  ;  l'un  des  commissaires  chargés  de 
ce  soin,  l'abbé  de  Chauvelin,  janséniste  systé- 
matique, se  montra  plus  forcené  que  les  au- 
tres peul-élre.  Les  Jésuites  demeurèrent  fer- 
mes devant  les  concessions  qu'on  leur  de- 
mandait relativement  à  leurs  relies,  mais  ils 
en  accordèrent  d'autres  qui  ne  devaient  pas 
plus  les  sauver,  el  entre  celles-ci  il  ne  faut 
pas  omettic  de  remarquer  l'acceptation  des 
quatre  articles  de  1GS2.  Aux  évêques  qui 
avaient  donné  des  déclarations  si  favorables 
à  la  Compagnie  de  Jésus,  soixante-dix  au- 
tres se  joignirent  bientôt  en  écriv  ml  dans  le 
sens  de  cette  manifestalion,  elle23mai  1702, 
le  clergé,  par  l'organe  du  cardinal  de  la 
Uoche-Aymon  ,  archevêque  de  Narbonue, 
demanda  au  roi,  en  termes  pressants  et  élo- 
f,icux,  la  conservation  des  Jésuites  au  nom 
des  intércis  de  la  religion.  Tout  fut  inutile  I 
Nous  n'avons  qu'à  constater  l'arrêl  délinilif, 
puisque  les  delails  n'enlrenl  ni  dans  notre 
but  ni  dans  noire  plan.  Mais,  si  nous  avons 
omis  à  dessein  do  rappeler  ces  noms,  ces 
mots  alors  si  calomnieusemenl  sonores,  D.a- 
miens,  régicides  ;  extrait  des  assenions,  etc.,. 
nous  ne  pouvons  nous  empêcher  de  signaler 
avec  douleur,  entre  les  parlenienls  qui  s'as- 
socièrent aux  injustes  violences  du  parle- 
ment de  Paris,  celui  de  Uennes  1  L'arrêl  du 
parlement  de  Bretagne  renchérit  sur  l'exa- 
gération des  autres.  Il  déclara  privés  de  tou- 
tes fonctions  civiles  el  municipales  les  pa- 
rints  qui  enverraient  leurs  enfants  étudier 
^•liez  les  Jésuites  à  l'étranger  ;  ces  enfants,  à 
leur  retour,  se  trouvaient  dans  la  même 
exception  1  I  Ne  croirait-on  pas  lire  par 
anticipation  l'arrêt  porté  par  quelques  ra- 
dicaux Irènéliqucs  de  France  ou  de  Suisse,  au 


f.fiT 


DICTIONNAIRE  OFS  ORDRES  REI.IGIKUX. 


CCS 


milieu  du  ii\'  siècle?  A  ()tii  oïdil  iliic  une  l'Ile 
i'\ngorali()ii  ou  une  Icllo  lnlie,  si  ce  n'est  siins 
iloiile  à  riiilliieiice  (lu'avail  ohleiitir-  un  liom- 
iiic  iliMit  le  iimn  esl  reso   liidi-ux  en    f;ic  ■    d' 
régule  de  ^lli^lOlrl•,  el  qui  cause  sau»  dou'.e 
aulanl  de  r""^'rels  qu'il  ,i  causé  de  ma  heurs  à 
son  hi)niiraliIef;Mnille.  Ali!  si  du  tuoliis   celle 
récrimiiiatiiin  iimocenle.  arrache'  par  l'iiidi- 
i;nali(iii  à  In  plume  d  un  roinp.ilriole,  pouva^l 
être  un  désaveu  suffisanl  !  Il  es!   hou  cepen- 
dant d  a|<>iiter  qu'il  n'y  eutdans  la  décision  du 
parleinenl  hrolon  que  majorité  de  trenle-ileuv 
voix  contre  rimit-neuf.    La   seulence    iriiqui! 
du  parlement,  contre  laïuelle  réclamèrent  la 
conscience  des    honnêtes  cens,   l'inslruclinn 
pasioralede  M.  l'arche»  cque  de  P  ijis,  le  cri  de 
In  reliiîion,  amena  l'édil  du  mois  de  novemhre 
171)'»,  portant  s  ippression    de   ta   Société  des 
Jésuites  en  iraiicc.  Cet  édit  laissait  du  moins 
aux  religieuv  supprimés  la  faculté  de  rester 
e.n  l'"raiicc  >ous   la  jurididion   dC'i   éiciues. 
Le  t"  décembre,  If  parlement   mil  au    bien- 
fait de  celte  disposition    les    resIricUons    les 
plus  iyranMii]ues  conlre  ce  qu'il  appelait,  par 
une  expression  aussi  inconséqueiiie    qu'elle 
est  solle  et  ridicule,  les  ci-devant   soi-disant 
Jéstiiles.Deu\  serments  déshonorants  avaient 
élé  imposés  aux  religieux  (  le  fi  août  17G2  cl 
le  22  février  17G4  )  ;  en  17(37,  un  arrêt  de   la 
même  cour  expulsa  du  rojaumi-  ceux  qui  ne 
l'auraienl  pa-.  p  élél  Cinq  tout  au  plus  jurè- 
rent, et  qua  re  mille  rclijiieux  furent  réiluils 
au  sort  le  plus  cruel.  On  leur  avait  accordé 
une  pension   ri  liiule  par  son  exiguïté;   et, 
contradiction  singulière  ,  si   elle  n'était  pas 
dans  la  nature  des  procédés  libéraux I  le  pir- 
leuienl  rcfcsail  celte  pension  aux  Jésuiics  qui 
n'étai."nl  (\iie  scolusti/^ws ,    c'est-à-dire  qui 
n'avaient  pas  fait  les  quatre  vœux,  ne  les  re- 
gardant pas  comme  véril.ihlement  religi  ux 
apparcmiiienl,  et  néanmoins  on  leur  enlevait 
le  droit  de  rentrer  dans  leur  pairimoine  et  la 
facullc  d'hériter!  Dans  un  grand  nombre  de 
diocèses,  sinon  dans  tous,  h  s  Jésuiles  coiili- 
iiuèrenl    néanmoins    pend  int   longtemps  ,  el 
queiquelois    sous  des  noms    déguisé-,  à  faire 
le  bien  qui"  les  véritables  fidèbs  avaient  tou- 
jours désiré  el  re^ ;u  d'eux.  Terniiiiuiis  ce  qui 
concerne  les  Jésuiles  de  France  par  ce  pas- 
sage d'une  lettre  alressée  à  N'ollaire  pard'A- 
lemberl ,  (|ui ,  sans  élrc  prophète   ni  (ils  de 
prophète,  préilisait  par  ses  vœux  ce  qu'il  ne 
vil  pas  ,   mais  ce  qui  se  lit  lienlc  ans  après 
I  arrêt  ilu  parlcnienl:  Pour  moi,  qui  vois  tout 
en  ce  moment  coiilrur  de  rose,  je  vois  d'ici  les 
jnn.>:énixtes  mourant  l'année  prochaine  de  leur 
belle  mort,  après  avoir  fait  périr  cette  année- 
ci   les  Jésuites  de  mort  violente;  lu  tolérance 
s'établir.  Us  pro'estants  ra;tpelé<,  les  prêtres 
mariéi  ,   la  confession  abolie  ei  l;  k\nai  ismk 
éiTasé  sans  (/u'on  s'ej}  aperçoive.  Ou  sait  quel 
esl  ici  le  synonyme  de  fanatisme. 

iin  17(io  ,  la  t^ompagine  de  Jésus  recevait 
une  cniisolalion  bien  louchante.  Le  pieux 
pape  Clément  XIII,  élevant  la  toix  en  sa  fa- 
veur, disait  à  l'univers  catholique  :  '/ue  fin- 
itilut   de  lu  Compagnie  de  Jésus  i  espire  au 

l'Li  s  HAIT  iip.dRi'.  la  pillé  et  la  sainteté 

Dans  le  méuic  Icnips ,  la  catliuliiiuc  Lspagnc 


se  disposait   pourtant  à  lui   porter  aussi  le 
dernier  coup.    «Choiseul,  dit   le   proteslaiit 
Si-mondi   dans   son    Histoire   des    Français, 
loue  \\l\,   f  lisait  pour  lui-même  une  af- 
fiire  personnelle  de  la  persécution  contre  les 
Jésuites.     Il    s'altaebait    surtout  à    lei    fiir<! 
chasser  de  tous   les    lîtais  de  la   maison  de 
Hourbon,  el  il  profita  ,  dans  ce  bul ,  de  l'in- 
llueiice  qu'il  avait  acquise  sur  Charles  III.  » 
Ce  prince  était  pourtant  vertueux  et  habile, 
dévoué   à   la   Compagnie  de  Jésus,  au    point 
qu'il  fut  le  premier  à  llétrir  les  calomnies  of- 
licielles  de  la  cour  de  Lisbonne.  Néinuioins  , 
parla  perfidie  île  son   indigne  ministre  d'A- 
randa,  il  fut  amené,  en  17(16,  à  les  regarder 
avec  suspicion  el  jalousie  dans  une  circons- 
tanie  où  il  ne  devait  les  voir  qu'avec  recon- 
naissance ;  ils  avaient  apaisé  une  énieule,  on 
lui    lit  conclure  qu'ils   l'avaient   donc   exci- 
tée.   (!n    aciiewa  de  l'indisposer  contre  eux, 
en  fabriquant  et  mettant  sous  ses  yeux  une 
lettre  qu'on  disait  venir  du  général  des  Jé- 
suites ,   et  où  riioiineur  de    sa   propre   mèro 
était   attaqué.    Avec    des   circonslances   qui 
licniienl   plutôt  de  la  folie  (|ue  de   la  ven- 
geance   d'un   homme   ordinaire,   le   2  avril 
17ii7,  à  la  même  heure,  par  suite  des  dispo- 
sitions   prises   par  d'Vranda,    les   Jésuiles, 
dans    les    possessions   espagnoles   des  deux 
mondes,  furent  embarqués.  «  Si  après  l'ein- 
barqueincdt  ,  ajoutait  l'ordre  du   monarque 
aveuglé  .   il  existait   encore  un  seul  Jésuite  , 
même  malade  ou  moribond,  dans  voire  dépar- 
lement, vous  serez  puni  de  mort.  >>  Six  uiillo 
religieux  furent  victimes  :  on  les  entassa  sur 
des  vaisseaux,  on  les  transporta  vers  l'ilalie, 
où  une  sage  politique  de  (jlémenl  XIII  recla- 
mait en  vain  pour  eux  auprès  de  Charles  111; 
on  les  débarqua  enfui ,  à  la  prière  du  pape  , 
d.ins  l'iie  de  Corse,  d'où  Choiseul  les  lit  bien- 
tôt chasser,  l'ar  suite  d'une  fascination  dont 
l'aveugle  maison  de  lîourb;in  a  été  el  sera  en- 
core providentiellement  punie,  les  auteurs  de 
tant  d'injustices  réussirent  à  les  faire  parta- 
ger par  les  deux  princes  de  celle  famille  dont 
les  Klals  él  lient  en  Ita'ie. 'fanucci,   minisire 
de  i-"erdinand    IV,  roi  de  Naples  ,  Tanucci  , 
créature  di'  (Charles  III,  dans  la  nuit  du  3  no- 
vembre 1707,  chas<a  le.s  Jésuites   de   la   ma- 
nière la  plus  barbare.  Le  jeune  duc  de  l'arme, 
pctil-iils  de  France  el   infant  d'I'-spagne ,  fui 
sollicité  par   Choiseul   et   d'Araida   d'entrer 
dans  la  coalition  contre  les  Jésuites.  Ils  réus- 
sirent, cl,  au  commencement  de  17(}S,  ces  le- 
ligieiix   furent   renvoyés    de   Panne.    l'inlo, 
grand  maitre   de  Malte,   était  feudataire  du 
royaume  de  Najdes  ;  |).ir  suite  des  mêmes  in- 
trigues, il  fui  amené,  en  17(18,   à  bannir  les 
Jésuiles  de  son  ile.  L'année  suivante,  la  Coiii- 
pa;;iiie  tleJésus  perdit  sou  dernii'r  et  son  plus 
leriiie   appui;    le    pieux    pape   Cleinenl  XIII 
mourut.  On  sait  que  Clèiiieni  XH'  lui   -iic- 
ceda,  et  l'Iii^toirc  comineitce  à  éclaircir  l'in- 
trigue i|ui  l'amena    à   abolir  les  Jésuiles.  Le 
21  juillet  177.'1  ,  il  se  rendit  aux  inslance»  el 
peut-êire  aux    promesses  qui  l'obligeaient  à 
lancer  le  décret  de  di-solution  de  la  Compa- 
gnie de  Jésus.  Ce  décrel  est  étendu,  et  com- 
lucnce  par  rappeler  l'cstinctiuu  de  plusieurii 


669  JES 

ordres  religieux  dans  les  siècles  précédents  , 
tels  que  les  Franciscjilns  de  la  réforme  dos 
Conventuels,  les  Humiliés  ,  les  religieux  de 
Saint-Ambroise  ad  Nemus  ;  les  Basiliens  Ar- 
méniens, les  Jésuntes,  les  ch'inoines  'le  Sa  nt- 
Georges  in  AIr/ha,  eic.  ]'  finit  par  prononcer 
l'extinclion  ilè  l'ordre  de  la  Ginupagnie  de 
Jésus  ,  dont  il  rend  les  membres  à  l'elal  sé- 
culier, les  remettant  sous  11  juridiction  des 
ordinaires  des  lieuv. 

L'Institut  avait  éié  gouverné  au  dernier 
siècle  par  les  Pères  Mirbel-Ange  Tainbiirini , 
l''rançois  Retz,  Ignace  Visconli,  Louis  Cenlu- 
rioni.  Le  8  mai  1758,  la  ilix-neuvième  et  der- 
nière congrégation  générale  seri'nuilauGésu, 
et  élut,  le  21,  pour  général  de  la  Compagnie, 
le  P.  Laurent  Uicci  ,  né  à  Florence  et  alors 
âgé  de  55  ans.  C'éiait  un  liomnie  d'esprit, 
rempli  de  piété,  mais  qui  n'avait  poini,  dit- 
on  ,  ce  qu'il  eût  fallu  d'énergie  de  caractère 
dans  le  cruel  combat  où  se  trouvait  engagée 
sa  Compagnie.  Il  la  gouvernait  quand  elle 
fut  éti'inte.  Dans  le  bref  de  dissolution,  Clé- 
ment XIV,  rappelant  les  extinctions  des  ins- 
tituts dans  les  siècles  précédents,  disait  :  On 
leur  assigna  uti";  pension  honnête  ;  mais  il  ne 
pouvait  citer  comme  précédent  ce  qu'il  crut 
devoir  faire.  Par  son  ordre  ,  le  général  Lau- 
rent Ricci  fut  enfermé  au  cbâteau  Saint-Ange, 
où  il  resta  ins(iu'à  la  mort  du  pape.  Pie  VI 
succéda  à  Clément  XIV;  il  aimait  et  estimait 
les  Jésuites,  et  pourtant  il  ne  rendit  point  la 
liberté  à  Uicci,  qui  mourni  dans  sa  prison,  le 
2'i  novembre  1775  ,  dans  les  sentiments  de 
piété  et  de  résignation  dont  il  n'avait  jamais 
cessé  de  donner  l'exemple.  Tout  l'intérêt  de 
Pie  VI  se  borna  donc  à  accorder  des  funé- 
railles honorables  au  malheureux  général  1 
Pourquoi  ? 

Quand  la  Compagnie  de  Jésus  fut  éteinte, 
elle  comptait,  dit-on,  dans  VAssislanc'  d' Ita- 
lie :  la  province  Romaine  ayant  848  religieux, 
dont  425  prêtres  ;  la  province  de  Sicile,  où  il 
y  avait  775  personnes,  dont  317  étaient  prê- 
tres ;  la  province  de  Napics,  où  sur  6C7  reli- 
gieux, 296  étaient  prêtres;  la  province  de 
Milan,  ajant  (J25  suj<  ts,  dont  29ri  prêtres  ;  la 
province  de  Venise  ,  riche  de  707  religieux  , 
dont  357  prêtres.  Dans  V Assistance  de  Por- 
iH'/al  :  la  pruvince  de  Portugal  ayant  8C1  Jé- 
suites, dont  38'i-  prêtres  ;  la  i  rovincede  Goa, 
150  Jésuites,  103  prêtres  ;  la  provincede  Ma- 
labar, kl  relig  eux.  dont  4(3  prêtres  ;  la  pro- 
vince du  Japon,  57  religieux  ,  dont  41  prê- 
tres ;  la  vice-province  de  la  (^hine  ,  avec  54 
Jésuiies,  dont  37  prêtres  ;  la  province  du 
I5ré^il,445  Jésuites,  dont  228  prêtres;  la  vice- 
province  du  Maragnon,  145  Jésuites,  dont  88 
prêtres.  On  a  remarque  que,  lors  de  l'expul- 
siiin,  en  1759,  l'Assistance  ilu  Portugal  comp- 
tait précisément  1759  Jésuites,  autant  qu'on 
comptait  d'années  depuis  la  naissance  du 
Sauveur.  Dans  V  Assistance  d'Espai/ne  :  la 
provincede  Tolède,  où  il  y  avait  059  Jrsuites. 
dont  288  prêtres  ;  la  province  de  C  istille,  718 
Jésuites,  dont  360  prêtres  ;  la  province  d'Ara- 
gon, 604  Jésuites  ,  dont  272  piètres  ;  la  pro- 
vince d'Andalousie  ,  062  religieux  ,  dont  308 
prêtres  ;  la  province  de  Sardaigne,  300  reli- 


JES 


670 


gieux,  dont  114  prêtres  ;  la  province  du  Pé- 
rou, 526  religieux,  dont  306  prêtres  ;  la  pro- 
vince du  Chili,  242  religieux,  dont  130  prê- 
tres; la  province  du  Nouveau-Royiume,  193 
Jésuites,  dont  100  prêtres  ;  la  province  du 
Mexique,  572  Jésuites,  dont  330  prêtres  ;  la 
province  des  Philippines,  12G  Jésuites,  97 
prêtres  ;  la  province  du  Paraguay,  où  il  y 
avait  303  religieux,  dont  20S  prêtres  ;  la  pro- 
vince de  (luito  ,  209  Jésuites,  dont  107  pré- 
Ires.  Dans  l'Assistance  de  France,  on  voyait 
la  province  de  France  ,  où  il  y  avait  918  Jé- 
suites, dont  495  prêtres  ;  la  province  de  Bor- 
deaux, 437  religii'ux.  dont  240  prêtres;  la 
province  de  Lyon,  773  Jésuites,  dont  405 
prêtres;  la  province  de  Toulouse ,  655  Jé- 
suites ,  dont  3'r4  prêtres  ;  la  province  de 
Champagne,  594  Jésuites,  dont  292  prêtres  ; 
la  province  d'Outre-Mer  (ou  vice-province), 
en  l'Amérique  méridionale,  54  Jésuites  ;  en 
l'Amérique  septentrionale,  50  Jésuites.  Dans 
li'S  missions  d'Orient  :  25  Jésuites  en  Grèce, 
17  en  Syrie,  7  en  Perse  ;  aux  Indes  orien- 
tales, 23  Jésuites.  Dans  l'Assistance  d'Alle- 
magne, on  voyait  la  province  d'Allemagne 
supérieure,  où  il  y  avait  lOtiO  religieux,  dont 
496  prêtres  ;  la  province  du  Bas-Hhin,  772 
Jésuites,  dont  '^98  prêtres  ;  la  province  du 
Haut-Rhin,  497  Jésuites,  dont  240  prêtres  ;  la 
province  <rAulriche,  1772  Jésuites,  dont  751 
pîôlres  ;  la  provincede  Bohême,  dont  nous 
ignorons  le  chilTro  ;  la  province  de  1^  Bcl- 
giniie  flamande,  342  Jésuiies  ,  dont  232  pré- 
Ires  ;  la  (irovince  de  Belgique  Walonne,  471 
Jésuites,  <lont  260  prêtres  ;  la  province  de 
Pologne,  1050  Jésuites,  dont  55?  prêtres  ;  la 
province  de  Liihuanie,  1047  religieux,  dont 
475  prêtres  ;  la  province  d'Angleterre  (dont 
plusieurs  maisons  en  France,  en  Flandre,  en 
.\uiérique) ,  299  religieux,  dont  208  prêtres. 
Il  faut  plutôt  reporter  cet  étal  à  l'époque  des 
diverses  suppressions  locales,  où  l'abolition 
de  tant  de  noviciats,  les  suites  de  tant  de  per- 
sécutions, avaient  bien  décimé  le  chiffre  que 
nous  venons  de  donner  d'après  Dénisarl,  qui 
résume  ainsi  son  énuméralion  :  39  provinces; 
22,589  Jésuites,  dont  11,293  prêtres.  Nous 
croyons  que  l'Assistance  d'Allemagne  avait 
é  é,  sur  la  fin,  subdivisée,  et  qu'on  avait  for- 
mé une  province  de  Pologne. 

Par  une  disposition  toute  particulière  de 
la  Providence,  deux  souverains  séparés  de 
riiglise,  le  roi  de  Prusse  et  l'impératrice  de 
Russie,  voulurent  garder  les  Jésuites  dan» 
leurs  Klats,  et  préparèrent  ainsi  les  voies  à 
l'exécution  des  desseins  de  Dieu  sur  le  réta- 
blissement de  la  Compagnie  de  Jésus.  Des 
autorisations  sei  rètes  furent  données;  les 
Jésuites  trouvèrent  moyen  d'accorder  les  de- 
voirs de  l'obéissance  aux  décisions  du  pape 
et  les  désirs  de  Frederick  et  de  Catherine  ,  si 
conformes  aux  leurs!  Dans  l'article  consacré 
à  l'histoire  de  la  Compagnie  de  Jésus  dans 
notre  volume  supplémentaire,  nous  aurons  à 
la  montrer  cachée  ,  mais  agissante  et  fruc- 
tueuse dans  les  contrées  du  Nord,  passant 
en  Sicile,  désirée  à  Parme  (car  un  mouve- 
ment favorable  aux  Jésuites  s'était  établi, 
uiêiue  dans  l'esprit    du    peuple,    jusqu'en 


c-i 


PlCTIONNAinr,  DKS  ORDRRS  RF.I.IGIKUX. 


072 


Fr.incp),  et  onfiii  routine,  par  ri'";;Iise  déso- 
lée, aiii  (Icmniulcs  des  princos  délriniipés  et 
ù  loul  l'unives,  en  181t.  Voyez  JfcsiiTKS  au 
Siippli'iiiciil. 

IJistnire  religieuse,  politique  et  litlérnne 
de  ta  Compagnie  de  Jc'us.  o  vol.,  parj.  Ci''- 
tin'ai-Johj.  A'o/c.<  fournies  parle  It.  /'.  De 
Moiilezon,  S.J.  Pietioniinire  de  Droit  cano- 
nique, por  Durand  de  jMaillaue,  Inm.  III. 
Jlifloire  des  Ordres  religieux  ,  par  M.  Hen- 
rion,  tom.  II.  liiogrnphie  universelle,  ar- 
moires ecclesiasliqucs  ,  par  l'icol.  tXoles  le- 
cueillics  pjissiin.  B-d-e. 

JÉSUITESSES  (Religikuses). 
Des  Jésuilesses,  et  de  leur  suppression. 

Pendant  le  séjour  quesiiiit  Ignace  fità  Har- 
celone,  il  fui  enircItMiu  par  les  aun1(^^cs  d'une 
dame  Irés-vcrluiuse  iiui  se  nomuiail  Isaix-ilc 
Rozel,  et  «jui  lui  en  procurait  aussi  d'aulres. 
Celte  dame  ayant  appris,  (luclqiies  annoes 
après,  que  le  saint  n\n\l  fondL'  sa  f.ornpa- 
gnie,  elle  alla  le  trouver  à  Komc  l'an  loVo,  cl, 
étant  pour  lors  veuve,  elle  lornia  le  dessein 
de  se  retirer  du  monde  et  de  vivre  selon  lis 
conseils  évanf^cliques  sous  l'obéissance  de  la 
Cotnpagnie.  Kllc  se  joignit  à  deux  dames  ro- 
maines et  obtint  du  [lape  l'aul  III  la  peruiis- 
siou  d'embrasser  ce  gi-nre  di'  vie.  (Juoiquc 
saint  Ignace  vil  bien  que  ces  sortes  de  direc- 
tions ne  convenaient  guère  à  son  institut,  la 
reconnaissance  iiu'il  avait  pour  si  bienfai- 
trice et  le  petit  nombre  de  ces  nouielles  reli- 
gieuses le  delerminèrenl  néanmoins  à  pren- 
dre soin  d'elles  ;  mais  il  s'en  re|ientit  bientôt, 
avouant  que  le  gouvernement  de  (rois  dévo- 
les lui  doiin.iit  plus  de  peine  que  toute  la 
Compagnie;  car  ce  n'elail  jamais  fait  avec 
elles,  et  il  (allait  è  toute  lieure  résoudre 
leurs  questions,  guérir  leurs  scrupules, 
écouter  leurs  plaintes  et  même  terminer 
leurs  différends.  C'est  ce  qui  l'obligea  de  re- 
présenter au  pape  combien  une  telle  charge 
nuirait  à  la  Compagnie  et  de  <)uelle  imiior- 
tance  il  était  que  Sa  Sainteté  l'en  délivrât,  ju- 
geant bien  que  si  cette  petite  communauté 
de  lilles,  qui  n'était  ((ue  de  trois  per>onnes, 
devenait  plus  nombreuse  dans  la  suiti-  et  se 
multipliait  dans  les  autres  villes,  il  n'eu  se- 
rait que  plus  embarrassé.  Le  pape  lui  ;m-- 
corda  sa  demande  cl  délivra  en  15't7  la  Cmn- 
pagnio  du  gouvernement  des  nHigieuses. 
Aiusi  celle  communauté,  (|Ui  vuul.iil  uvre 
selon  les  lois  prescrites  par  saint  Ignace,  fit 
delruilc  en  peu  de  temps. 

Mais,  sous  le  pontilical  d'Urbain  \111  ou 
sur  la  lin  de  celui  de  (îrégoire  X\  ,  son  pré- 
décesseur, certaines  femmes  ou  lilles  en  quel- 
ques endroits  d'Italie  et  en  d'autres  provin- 
ces prirent  Ir  nom  lif  Jt'suilesses,  et  s'assem- 
blcrciit  en  communauté  ,  sous  prétexte  de 
mener  uni;  \ii'  religieuse ,  (|ti()iqii'elles  n'eu 
eussent  pas  eu  la  permission  do  s.iinl-siége. 
Mlles  prirent  on  lialiil  particulier,  avaient 
desédiliies  accominouésen  forme  de  collèges 
el  des  maisons  de  probalioii,  et  élurent  une 
supérieure  géiierab-  à  qui  elles  donnaient  le 
ituiii  de  préposée,  tilles  faisaient   entre  ses 


tna'ns  les  vœux  de  pauvreté,  de  chasteté  el 
d'obei<sance  à  la  manière  des  vœux  solen- 
nels  de  religion,  sans  êlrc  astreintes  à  au- 
cune loi  de  la  clôture.  Klles  allaient  de  côté 
el  d'autre  sous  prétexte  de  procurer  le  salut 
des  âmes  et  de  faire  plusieurs  autres  choses 
qui  ne  cunvenaiiMil  point  â  la  faiblesse  de 
leur  sexe  et  de  leur  esprit,  enlreprenanl  dos 
choses  que  des  hommes  d'une  grande  expé- 
rience, savants  dans  les  lettres  saintes  et  re- 
commandables  par  l'innocence  de  leur  vie, 
n'enlrepiennenl  ([ue  diflicilcmenl  et  avec 
beaueou|i  de  circonspcclion.  Outre  la  géné- 
rale elles  avaient  encore  des  visitalrices,  des 
re*trices  et  d'autres  noms  de  dignités  selon 
les  diffèrenls  oflices  ((u'ellcs  exerçaient. 

Urbain  "NIII  les  fit  avertir  par  son  nonce 
dans  la  basse  .MIeinagne  cl  par  qu<-li)ues 
évéquos  des  autres  lieux  où  elles  s'èiaienl 
établies,  de  se  désister  de  leur  enlreprise. 
Mais  ces  Jésuilesses  n'ayant  eu  aucun  égard 
<à  toutes  les  remontrances  qu'on  leur  lil,el 
ayanl  même  osé  enseigner  des  choses  con- 
traires à  la  saine  doctrine,  le  pape,  par  un 
bref  du  21  mai  1C31,  supprima  celle  préten- 
due congrégation,  priva  de  leurs  offices  la  gé- 
nérale, les  visitalrices,  les  reclrices  el  les  au- 
tres officières,  les  abs(>ut  de  tous  vœux  el  pro- 
messes auxquels  les  femmes  el  filles  decetlo 
congrégation  s'étaient  engagées,  leur  or- 
donna en  verlu  de  sainte  obédience  el  sous 
peine  d'excommunication  encourue  ipso  fac- 
to, de  sortir  incessanimcnt  des  collèges  et 
des  maisons  où  elles  avaient  demeuré  jus- 
(ju'alors,  el  de  vivre  séparément  les  unes 
des  autres.  Il  leur  commanda  aussi  de  ne 
s'assembler  jamais  pour  délibérer  ensemble 
sur  quoi  que  ce  soit,  cl  de  i)uitter  leur  babil 
de  Jésuitesses  sans  pouvoir  le  re|)rendrc  cl 
encore  moins  de  le  donner  ni  admeltro  au- 
cune femme  et  fille  à  le  recevoir. 

Ce  pontife  déclara  encore  tous  les  vieux 
qu'elles  avaient  faits  nuls,  comme  si  elles  ne 
les  avaient  jamais  f.iits,  permit  à  celles  qui 
eu  avaient  fait  de  vivre  dans  lo  monde,  sé- 
parément toutefois  des  autres  de  la  même 
congrégation,  sous  l'obéissance  de  leur  évè- 
«lue,  avec  l'usufruit  mais  non  pas  li' domaine 
de  leurs  biens,  leur  accordant  la  permission 
d'en  pouvoir  disposer  pendant  leur  vie  el  à 
leur  mort  en  a-nvres  pieuses,  ordonnant  que 
ces  biens  retourneraient  à  leur»  parents  ou  à 
ceux  qui  devaient  naturellement  leur  succé- 
der, si  elles  n'en  avaient  jias  disposé  par  testa- 
ment. 11  leur  permit  aussi  de  se  maiier  en 
cas  qu'elles  le  voulussent;  mais  il  les  ex- 
horta d'entrer  plutôt  dans  quelque  ordre  ap- 
prouvé et  de  s'y  consacrer  à  Dieu  par  des 
vd'iix  solennels,  se  ressouvenant  toujours  du 
désir  sinière  ()u'ellcs  avaient  eu  de  se  faire 
reli^ieu-es. 

Je  m'étonne  que  M.  Uichard  Simon  dans 
sa  Iiibliolliè(|ue  criliquc-  [Inui.  I,  patj.  2!)S) 
ail  avancé  que  c'est  inutilement  que  l'on 
cherche  dans  le  bnllaire  romain  la  suppres- 
sion (le  cet  or. Ire,  et  (|u'il  dise  qu'on  ne  peut 
pas  l'y  trouver,  parce  que  le  pape  rrbain  \  III 
n'a  point  donné  de  bulle  sur  ce  sujet,  mais  un 
simple  bref.  Scrail-il  possible  que  ce  savant 


r.73 


jr.s 


JRS 


C74 


criliquc  n'eût  jamais  lu  le  bullairc  romain, 
cl  pouvait-il  ignorer  que  la  plus  nr.inile  par- 
tie tl<'S  constitutions  apostoliques  qu'il  con- 
tient ne  sont  point  (les  bulles,  m.iis  des  brefs? 
Quiconque  voudra  se  donner  la  peine  de  lire 
le  bulluire,  il  y  trouvera  certainement  la 
suppression  de  ces  Jésuilesses  au  tome  qua- 
trième de  l'édition  de  Rome  de  l'cin  11)38, 
pag.  115. 

JÉSUS  (Chevaliers  de  la  société  de).  Voij. 

lÎETHI.ÉEM. 

JÉSUS  (Clercs  réguliers  de  la  compagnik 

de).    Voy.  JÉSUITES. 

JÉSUS  (Clercs  Réguliehs  do  Bon-). 

Des  clercs  réguliers  du  Bon- Jésus,  arec  Ivs 
vies  des  BB.  Marguerite  et  Genlille  de 
Bavcnne  ,  leurs  fondatrices,  et  du  V.  P. 
dom  Jérôme  Maluselli  de  Mensa  ,  aussi 
fondateur  et  premier  religieux  du  mêine 
ordre. 

Nous  avons  fait  voir,  en  parlant  des  clercs 
réguliers  Bariiabites  ,  ([ue  c'est  à  tort  que 
quelques-uns  leur  ont  donné  pour  fondateur 
dom  Sérapliim  de  Ferme,  chanoine  régulier 
de  la  congrégation  de  Lairan.  Voici  encore 
un  ordre  sous  le  nom  du  Bon-Jésus,  dont  on 
il  prétendu  qu'il  était  aussi  fondateur,  quoi- 
que cet  honneur  soit  allribué  aux  BIJ.  Mar- 
guerite el  Gentille  de  Uavenne.  et  au  P.  Jé- 
rôme Maluselli.  Si  c'est  à  cause  que  le  P.  Sé- 
raphim  a  dressé  les  règles  de  l'ordre  du  Bon- 
Jésus  que  l'on  a  cru  qu'il  en  était  fondateur, 
on  s'est  trompé,  puisque,  parle  titre  de  ces 
règles,  il  reconnaît  lui-même  qu'il  n'a  fait 
que  rédiger  par  écrit  ce  que  Marguerite  de 
Ravcnne  avait  prescrit  de  vive  voix  à  ceux 
qui  avaient  embrassé  l'ordre  du  Bon-Jésus, 
qu'e.le  avait  insiilué  :  Regulœ  aliijuul  e  du- 
cumenlis  Margaritœ  Ravennatis  viryinis,  qui- 
bus  illa  ordinna  suum  tilulo  Boni  Jesu  in- 
signitum  imtiluit.  Et  à  la  un  de  ces  règles  il 
dit  encore  qu'il  ne  les  a  recueillies  que  sur 
les  paroles  de  cette  vierge  :  lias  régulas  e 
terbis  (livinœ  hujtis  virginis  collegi.  De 
croire  aussi  que  ces  règles  n'eussent  été 
dressées  par  te  P.  Séraphim  que  pour  les 
seuls  prêtres  de  la  congrégation  du  Bon-Jé- 
sus, Il  n'y  a  nulle  apparence,  puisque  par  le 
quinzième  arliïle  il  est  marque  que  ceux  de 
cet  ordre  se  doivent  contenter  de  leur  état  ; 
(|ue,  s'ils  sont  mariés,  ils  doivent  observer 
ce  qui  convient  à  ce  genre  de  vie,  et  que, 
s'ils  sont  prêtres,  ils  ne  doivent  désirer  au- 
cune digniié  ni  aucun  bénéfice,  mais  se  con- 
tenter seulement  de  leurs  revenus,  sans 
chercher  les  moyens  de  les  augmenter.  Le 
seizième  article  ne  convient  nullement  aux 
prêtres,  car  il  porte  que  les  filles  seront  hum- 
bles et  chastes,  non-seulement  de  corps,  mais 
eucore  d'esprit  ;  que  les  veuves  demeureront 
dans  l'état  de  viduité,  et  que  les  femmes  ma- 
riées conserveront  la  paix  dans  leurs  famil- 
les et  obéiront  à  leurs  maris. 

Il  est  vrai  aussi  que  Marguerite  de  Ra- 
venne  u"a  pas  directement  institué  la  con- 
grégation desClercs  Réguliers  du  Bon -Jésus, 
nui  n'a  été  établie  que  vingt  ans  après  sa  mort  ; 


mais  il  est  au  moins  certain  qu'elle  a  institué 
une  société  séculière  sous  le  nom  du  Bon- 
Jésus,  et  que  quelques  prêtres  qui  en  étaient 
embrassèrent  la  vie  commune  l'an  1538, 
sous  la  conduite  du  V.  P.  Jérôme  Maluselli, 
qui  dressa  des  constitutions  pour  ces  prêtres, 
tirées  des  règles  de  la  II.  Marguerite,  dont  il 
retrancha  ce  qui  n'était  propre  que  pour 
ceux  qui  vivaient  dans  le  siècle.  C'est  de 
cette  manière  qu'elle  a  été  la  fondatrice  des 
clercs  réguliers  du  Bon-Jésus;  ce  qui  sem- 
ble être  conlirmé  par  le  même  Séraphim  de 
Ferme,  qui,  en  parlant  de  cette  sainte  vierge 
et  de  la  B.  Gentille,  dont  il  a  écrit  le>  vies, 
dit  que  le  pape  Paul  111  nomma  des  commis- 
saires l'an  1537  pour  examiner  les  miracles 
qui  se  faisaient  à  leurs  tombeaux  ,  et  qu'il 
approuva  la  société  que  la  B.  Marguerite 
avait  instituée.  Jérôme  de  Rubéis,  dans  son 
Histoire  de  Ravenne,  parle  aussi  des  infor- 
mations qui  furent  faites  par  ordre  de  ce 
pape,  et  ajoute  qu  il  approuva  aussi  la  con- 
giégatlon  des  Prêtres  du  Bon  Jésus,  que  le 
P.  Seraph  m  de  Ferme  a  sans  doute  confon- 
due avec  cette  société  séculière.  Mais,  comme 
te  n'est  pas  seulement  la  B.  Marguerite  de 
Ravenne  que  les  Clercs  Réguliers  du  Bon- 
Jésus  ont  reconnue  pour  fondatrice,  et  qu'ils 
ont  aussi  regardé  eu  la  même  qualité  la  B. 
Gentille  de  Ravenne  et  le  P.  Jérôme  Malu- 
selli ,  dont  le  P.  Simon  Marini  ,  général  de 
cet  ordre  ,  donna  pour  cette  raison  les  vies 
en  1017,  c'est  ce  qui  fait  que  nous  en  donne- 
rons aussi  un  abrégé. 

Wari;uerite,  à  qui  Ferrarius,  dans  son  Ca- 
talogue des  saints  d'Italie,  donne  le  nom  de 
liicntieureuse,  fut  surnommée  de  Russi  à 
cause  du  lieu  de  sa  naissance,  qui  est  un  pe- 
tit village  entre  Faënza  et  Ravenne,  et  fut 
encore  appelée  de  Uavenne  à  cause  du  long 
séjour  qu'elle  fil  en  ceile  ville,  et  qu'elle  y 
mourut,  lille  perdit  la  vue  à  l'âge  de  trois 
mois,  Dieu  ayant  permis  que  celle  qui  n'é- 
tait née  que  pour  contempler  les  choses  cé- 
lestes fût  privée  de  la  vue  des  choses  terres- 
tres. A  peine  eut-elle  atteint  l'âge  de  5  ans, 
que,  voulant  de  bonne  heure  châtier  son 
corps,  elle  s'accoutuma  à  marcher  nu  pieds, 
ce  qu'elle  a  toujours  continué  de  faire  dans 
quelque  saison  fâcheuse  que  ce  fût  et  quel- 
que rigoureux  que  fût  le  froid.  A  sept  ans 
elle  augmenta  sa  vie  pénitente  par  des  jeû- 
nes el  des  abstinences;  elle  ne  prenait  son 
repos  que  sur  la  terre  nue  ou  quelquefois 
sur  un  peu  de  sarment;  et,  voulant  imiter 
la  pauvreté  de  celui  qu'elle  avait  choisi  pour 
époux,  elle  renonça  à  tout  ce  qu'elle  pou- 
vait posséder  et  prétendre  ,  et  ne  reçut  que 
sous  le  titre  d'aumône  tout  ce  qui  était  ué- 
cessaire  pour  l'entretien  de  la  vie. 

Après  avoir  demeuré  quelques  années  à 
la  campagne,  elle  vint  à  Ravinne,  où  Dieu 
voulant  éprouver  sa  patience  comme  il  avait 
fait  celle  du  saint  homme  Job,  il  l'afiligea 
l'espace  de  quatorze  ans  par  diverses  mala- 
dies, pendani  lesquels  elle  ne  reçut  aucune 
consolation  des  hommes  ;  et  ,  comme  les 
amis  de  Job  ,  lé  voyant  couvert  d'ulcères  el 
couché  sur  un  fumier,   venaient  insulter  à 


6TS 


DX-TIONNAIRE  OF?  OHOUFS  nF,l,'GlFA'X. 


67G 


giS  maux,  II  yeul  aussi  un  prand  nombre  de 
porsoniies  (jui  ne  ven.iieiil  visiter  celle  sainte 
fille  dans   ses   maladies  que    pour  s'en  mo- 
quer el  lui   reiirocher  que  >cs  maus   ne   lui 
étaient  arrives  que  pour  ses  péchés,  el  pane 
que  sous    une  fausse  apparence   de  saii  Iclé 
elle    lioinp:iil    les   peupU'S ,    n'étant    dans    le 
/ond  qu'une   hypocrite  ;  mais,  au    milieu   de 
ces  perséculioiis,  son    esprit   ne  perdit  point 
le   calme  et   la  tranquillné  :  plus  on  l'olTen- 
sait,  plus   elle    téiiioi(;nait  de   joie,   croyant 
qu'on  la  trailail  encore  doucement  el  qu'elle 
méritait  de  plus  grands  •  pprobres.  Cependant 
Dieu,  qui  avait  permis  qu'elle  fùl  ainsi  mé- 
prisée, permit  aus.si  que  ceux  mêmes  qui  en 
étaient  les  auteurs  fussent  les  premiers  à  pu- 
blier ses  louanges.  Les  discours  qu'elle  leur 
tenait  de  temps  en  temps  étaient  si  vifs  el  si 
louchants,  qu  ils   rentrèrent  en  eus-mêmcs 
et  se  convertirent   entièrement,   cl  il  y  eut 
plus  de  trois  cents  personnes  de   l'un  el  de 
l'autre  sexe  qui,  ilanl  persuadées  de  la  sain- 
teté de  SI  vie,   la  voulurent  avoir  pour  mai- 
tresse  el  pour  guide  dans  les  \oes  de  leur 
salut.  C'est  ce  qui  lui  donna  occasion  d'ela- 
bl.r  la  société  du  l$on-Jésus  ,  à  laquelle  elle 
prescrivit  des  règlements  qu'elle   ne   put  ré- 
diger  par  écrit  ,  ayant  clé  piivéf  de  la  vue 
des  l'âye  de  Irois  mois  ,   mais  qui  le  furent, 
comme  nous  avuiis   dit,  par  le  P.  dom  Séra- 
phin! de    Ferme,    ihanoine   régulier   de  la 
congrégation  de  Lutian. 

Ils  sont  compris  dans  vingt-qualie  arti- 
cles qui  font  connaître  quel  éUiil  l'esprit  de 
celle  bicnheuieuse,  puisque  les  enseigne- 
ments qu'elle  y  donne  à  ses  disciples  ci  à 
()uniellc  les  oblige  consistent  principalement 
à  avoir  sur  toutes  choses  un  grand  an.our 
pour  Dieu  ;  qu  elle  leur  recommande  la  si.ii- 
plicité  de  cœur,  I  humilité,  le  mépris  de  soi- 
même;  qu'elle  les  exhorte  à  conserver  la 
paix,  l'union,  la  concorde  eilre  eux,  à  fuir 
les  jugements  téméraires,  à  fréquenter  snu- 
veni  les  sacrements  el  à  châtier  leur  corps 
par  les  jeûnes  et  les  abstinences  qui  sont 
mari|ués  dans  le  vlngl-quatrième  article  : 
saxnr,  de  jeûner, outre  les  jouis  pre>ciits  cl 
ordonnés  par  l'I'.glise,  pendant  tout  l'avent, 
tous  les  mercredis,  vendredis  el  samedis  de 
l'année,  el  au  pain  et  à  l'eau  les  veilles  des 
fêles  lie  l'Anuoni  ialion  de  la  sainte  N'ierge  el 
le  vendredi  sainl  (IJ.  lille  survécut  encore 
quelques  annéi  s  à  lelalilissemenl  de  celte 
société,  et  mourut  le  23  janvier  1505,  étant 
âgée  de  OU  ans. 

lintre  les  disciples  de  celle  sainte  vierge, 
il  y  eut  une  veuve  nommée  Genlille,  qui  a 
acquis  aussi,  par  la  sainteté  de  sa  vie,  le  li- 
tre de  bienheureuse,  lille  na()uil  à  Ua\eiinc 
l'an  l'i"!.  Son  (lère,  qui  était  un  orlévrc,  se 
nommait  Thomas  l'iiusti,  ou  Juste,  el  éla  t 
véiilablemeiit  un  homme  juste  et  craignant 
Dieu  ,  aussi  bien  (jue  sa  femme  l)ominii)ue. 
Ils  eurent  un  grand  soin  de  l'eilucalioii  de 
leur  iille  lientilie  j  et  elle  profil  i  si  bien  des 
bonnes  instructions  qu'ils  lui  donnèrenl 
que,  dès  sa  plut  tendre  jeuilcs^e,  elle  lit  pa- 


raître de  grandes  mnrques  do  sainteté.  C'est 
ce  qui  l'ai  ira  de  bonne  heure  dans  la  so- 
ciété de  la  bienheureuse  Marguerite  de  Ka- 
venne,  dont  elle  fut  une  des  (premières  disci- 
ples, elelle  fil  sous  sa  conduite  de  si  grands 
progrès  d.ins  la  veriu,  qu'après  la  mort  de 
cette  sainte  (ille,  elle  devint  la  maîtresse  des 
autres. 

Ses  parents  l'aynnt  eng-'gée  dans  le  ma- 
riage ,  elle  épousa  un  N'énilien  nommé  Jac- 
ques Piaiiella,  tailleur  d'habils,  homme  cru -1 
el  farouche,  qui,  non-seuloriienl  la  traitait 
comme  une  esclave,  la  frappant  souvent  et 
la  mallraitant  rruelleinent,  mais  la  dénonça 
même  un  jour  à  l'archevêque  de  Havenne 
comme  une  sorcière  et  une  magicienne.  Son 
innocence  ayant  été  reconnue  el  sou  mari 
ne  pouvant  plus  supporliT  l'éclat  de  sa  sain- 
teté, il  l'abandunnadans  un  temps  de  famine, 
ne  lui  laissant  rien  pour  sa  sulisistance; 
mais  celte  sainte  femme,  ayant  mis  toute  sa 
confiance  en  la  divine  pro\idence,  en  res- 
sentit souvent  les  effets  merveilleux.  Elle 
demeura  plusieurs  années  ainsi  aliandonnéc 
de  son  mari,  qui  retourna  enfin  à  sa  maison 
lont  changé,  et  qui ,  d'homme  cruel  el  bar- 
bare qu'il  était  auparavant  ,  devint  dciux 
comme  un  agneau  el  n'eut  plus  que  de  l'es- 
time el  de  la  vénération  pour  sa  femme, 
avec  laquelle  il  vécul  encore  queli]ue  temps 
et  mourut  ensuite  de  la  mort  des  justes, 
ayant  réj  are  par  les  bons  exemples  (jn'il 
donna  les  scandales  qu'il  avait  causés  par 
SCS  brutalités. 

C'est  aux  prières  de  cette  sainte  femma 
que  l'on  peut  attribuer  la  conversion  de  son 
mari  ;  mais  ce  ne  fut  pas  la  seule  qu'elle  pro- 
cura. 11  y  avait  dans  Havenne  un  jeune 
homme  âgé  de  \ingl-cinq  ans  qui,  après  la 
mort  de  ses  |  ère  et  mère,  s'elail  abandonne 
à  toutes  sortes  de  licences  cl  était  le  scandale 
de  la  \ille  :  il  y  avait  même  plusieurs  années 
qu'il  n'avait  approché  des  saciemenis;  ma's 
ayant  été  sollicilé  par  sa  sœur  d'aller  voir 
la  bienheureuse  Gentille,  il  lui  si  touché  par 
ses  discours  el  par  les  avis  qu'elle  lui  donna, 
qu'il  se  convertit  enlièiemeni.  ("e  fut  le  V. 
I'.  Jérôme  Maluselli,  principal  fondateur  des 
Prêtres  de  l'ordre  du  Iton-Jésus,  natif  de 
Mensa  au  territoire  de  Céséna,  qui,  après 
avoir  été  ainsi  converti  parla  bienheureuse 
Gentille,  devint  l'un  de  ses  disciples  el  mena 
dans  la  suiie  une  vie  si  sainte  el  si  exem- 
plaire, (|u'ayant  pris  les  ordres  sacrés  el 
étant  parvenu  au  sacerdoce,  celte  sainte 
veuve  le  prit  pour  son  directeur,  t^omme  il 
lui  était  reste  de  son  mariage  un  fils  nommé 
l.eon,  qui  était  aussi  prêtre  et  qui  demeurait 
chez  elle  iivec  une  de  ses  cousines,  elle  en- 
gagea Jérôme  Maluselli  à  venir  aussi  de- 
meurer .ivcc  eux,  et  ils  praliiiuèrenl  ensem- 
ble les  règles  qui  avaient  été  laissées  par  la 
bienheureuse  Marguerite,  obser>ant  exacte- 
ment les  jeûnes,  les  absiinenccs  el  les  autres 
exercices  de  pieté  qu'elle  avait  prescrits  a 
ses  disciples. 

Le   démon,  voyant   le   progrès  que    celle 


(1)  ly.,  a  briiidii  v<>l.,n'  1<<Â 


07? 


JES 


JKS 


G78 


saillie  comij.'igiiic  f.iisail  dans  la  verlu,  et 
combioii  leur  exemple  lui  enlevait  tous  les 
jours  de  pécheurs  qui  se  converlissaient  à 
Dieu,  suscila  des  persoiines  dans  la  ville  qui 
les  accusèrent  auprès  de  l'archevêque  de 
mener  une  vie  pleine  de  superstitions  sous 
une  fausse  apparence  de  sainteté.  Mais  la 
vérité  ayant  été  reconnue,  et  le  démon 
trompé  dans  ses  artifices,  il  leur  suscita  une 
nouvele  persécution  et  réussit  enfin  à  les 
(aire  chasser  de  Ravenne.  La  peste  ayant  af- 
fligé cette  ville  l'an  1.312,  la  bienheureuse 
(lentille,  Léon  son  fils,  sa  parente  et  Mulu- 
sclli,  furent  envoyés  hors  di;  la  ville,  quoi- 
qu'ils n'eussent  aucun  mal  et  qu'ils  eussent 
été  préservés  de  la  contagion,  el  ils  ne  retour- 
nèrent à  Ravenne  que  lorsque  cette  ville  fut 
enlièremeiit  délivrée  de  ce  (léau.  La  sainteté 
de  la  bienheureuse  Gentille  augmeniait  tous 
les  jours,  et  l'estime  que  l'on  en  faisait  était  si 
grande,  que  le  pape  lui  permit  de  faire  célébrer 
la  messe  dans  sa  chambre,  ne  pouvant  aller 
l'entendre  à  l'église  à  cause  de  ses  iufirmiiés 
continuelles.  Llle  perdit  son  tils  l'an  1528, 
mais  Jérôme  Malusclii  lui  tint  lieu  de  fils,  et 
clic  le  ûl  même  héritier  de  ses  biens  à  sa 
mon,  qui  arri\a  l'an  1530,  le  28  janvier. 
lîllo  lui  laissa  entre  autres  choses  une  mai- 
son qu'elle  lui  ordonna  de  changer  en  une 
église,  l'assurant  que  U  eu  susciierait  plu- 
sieurs personnes  pieuses  qui  par  leurs  au- 
mônes contribueriiieiit  à  cet  ouvrage. 

Jéi'ôme  Maluselli  exécuta  la  même  année 
les  dernières  volontés  de  la  bienheureuse 
Gentille,  et,  avec  la  permission  de  l'arche- 
vêque de  Ravenne  Pierre  Ferrelli,  il  jeta  les 
fondements  de  cette  église  le  23  seplembie 
1530,  quoiqu'il  n'eût  en  main  qu'une  somme 
fort  médiocre;  mais  ce  que  Gentille  avait 
prédit  arriva,  les  aumônes  de  ceux  qui  con- 
tribuèrent à  cet  édifice  se  trouvèrent  sulfi- 
saiiles  pour  le  conduire  à  sa  perleclion,  et  il 
fut  consacré  l'an  1531,  le  premierjour  tl'aoùt, 
par  le  même  archevêque. 

Mais  une  nouvelle  persécution  s'i  leva 
aussitôt  contre  le  saint  fondateur  :  quelques 
prêtres,  ayant  conçu  de  la  jalousie  contre 
lui,  cherchèrent  les  moyens  de  lui  ôter  celte 
église.  11  y  en  eut  quelques-uns  qui,  pour 
soulever  le  peuple  contre  lui,  prêchèrent 
publiquement  que  c'était  un  hérétique,  un 
trompeur  et  un  superstitieux,  et  l'on  voyait 
déjà  accourir  le  peuple  pour  raser  celle 
église,  mais  il  ne  s'en  trouva  aucun  assez 
hardi  pour  l'entreprendre;  et  le  pape  Clé- 
ment VII,  en  ayant  eu  a»is,  envoya  des 
commissaires  à  Ravenne  pour  prendre  con- 
naissance de  celle  aiVairc,  qui  fui  décidée  à 
l'avantage  de  Maluselli  et  à  la  conlusion  de 
ses  ennemis. 

Ce  saint  fondateur,  se  voyant  paisible 
dans  la  jouissance  de  son  église,  dressa  les 
règlements  de  la  congrégation  de  prêlres 
qu'il  projetait  d'établir,  et  il  les  tira,  comme 
nous  avons  dit,  de  ceux  qui  avaient  été  dic- 
tés par  la  bienheureuse  Alarguerite,  dont  il 
retrancha  ce  qui  n'était  propre  que  pour 
les  personnes  qui  vivaient  dans  le  monde.  Ce 
lut  dans  ce  même  le.nps  ijue  le  duc  de  Man- 


toue  Frédéric  de  Gonz.igue  II  et  la  duchesse 
Marguerite  Paléologue,  son  épouse,  qui 
avaient  beaucoup  de  dévoiion  pour  les  Rft. 
Marguerite  ei  Geniille,  dont  iis  avaient  fait 
écrire  les  vies  par  dom  Séraphim  de  Ferme, 
demandèrent  des  commissaires  au  pape 
Paul  III  pour  inform  r  des  miracles  qui  se 
faisaient  à  leurs  tombeaux,  alin  de  travail- 
ler à  leur  canonisation.  Le  pape  accorda  leur 
demande  et  envoya  commission  au  gouver- 
neur de  Ravenne,  l'an  1537,  pour  faire  ces 
inlormations  ,  et  l'année  suivante  1538  il  ap- 
prouva aussi,  à  la  prière  du  même  duc  de 
Manloue,  les  règles  qui  av. lient  elé  dressées 
par  le  P.  Jérôme  Maluselli,  auquel  il  permit 
(le  donner  l'habit  de  son  ordre  à  ceux  qui  se 
présenteraient  pour  le  recevoir.  Les  premiers 
(jui  le  reçurent  furent  dom  Simon  Crespoli 
de  Ravenne,  dom  Philippe  Solavolo,  et  dom 
Zacharie  Perdurcini,  qui  avait  été  l'un  des 
disciples  de  la  bienheureuse  Gentille.  Malu- 
selli fui  le  premier  supérieur  de  cet  ordre, 
qu  il  gouverna  jusqu'en  l'an  1541,  qu'il 
mourut  le  20  août. 

Le  nombre  des  Prêtres  du  Bon-Jésus,  qui 
s'étaitdéjà  .ugmenlédeson  vivant,  augmenl.i 
encore  après  sa  mort,  el  les  princes  de  l,i 
maison  de  Gonzague  continuant  à  proléger 
cet  ordre  à  cause  des  iilJ.  Marguerite  et  Gen- 
tille, pour  les(|uelles  ils  con^ervèrent  tou- 
jours beaucoup  de  vénération,  Guillaume, 
duc  de  Mantoue,  demanda  au  pape  Jules  111 
la  confirmation  de  cet  ordre,  ce  que  ce  pon- 
tife accorda  l'an  15ol.  Il  fut  derechef  ap- 
prouvé par  le  pape  Paul  IV, qui  permit  à  ces 
Prêtres  du  Ron-Jésus  de  faire  des  vœux  so- 
lennels. Cet  ordre  ne  Dtpas  de  grands  progrès, 
et  il  fut  sujiprimé  pur  le  pape  Innocent  X  l'an 
1G51.  L'on  prétend  qu'il  n'y  avait  pas  pour 
lors  plus  de  dix  religieux  de  cet  ordre.  Mau- 
rolic  dit  qu'outre  leur  maison  de  Ravenne, 
ils  en  avaient  encore  une  à  Rome  et  une  au- 
tre en  Toscane. 

Ils  suivaient  la  règle  de  saint  Augustin 
avec  les  règlements  qui  avaient  été  dressés 
par  le  fondateur.  Us  se  levaient  à  minuit 
pour  dire  matines,  officiaient  selon  l'usage 
de  l'LgIise  romaine.  Ils  étaient  assidus  au 
conf(Ssionnal,  assistaient  les  malades  à  la 
moit,  et  s'adonnaient  à  la  prédication  el  aux 
autres  exercices  qui  concernent  le  salut  du 
prochain.  Outre  l'avent  (  t  les  jeûnes  ordon- 
nés par  l'Eglise,  iis  jeûnaient  encore  toutes 
les  semaines  le  mercredi,  le  vendredi  el  le 
samedi  et  plusieurs  autres  jours  ordonnés 
par  leur  règle.  G'esl  ainsi  que  le  P.  Simon 
iMarini  qui  a  été  général  de  cet  ordre,  décrit 
les  observances  (lui  y  éla:enl  en  pratique,  et 
il  doit  être  plutôt  cru  que  IVIorigia,  qui  dit 
qu'ils  ne  confessaient  el  ne  prêchaient  point. 
Ce  qu'il  ajoute  encore,  (ju'ils  ne  possédaient 
aucune  chose,  n'est  pas  conforme  à  ce  que 
dii  aussi  le  P.  Marini,  que  le  duc  de  Man- 
.  loue  leur  donna  un  palais  dans  Ravenne; 
que  Julie  Sfondrale  leur  donna  aussi  des 
maisons,  des  teires  et  des  rentes  ;  et  qu'An- 
gèle  Louatelli  lut  leur  principale  bienfaitrice, 
par  les  biens  considérables  qu'elle  leur 
donna.  Quant  à  leur  habjllcmcnt,  il  était  »&- 


67? 

se»  semblable  à  celui  des  eoclesi.istiqaos,  et 
nu  lieu  tie  boniicl  carré,  ils  en  porlaiciil  un 
<iui  avait  une  forme  ronlc  (I):  tous  les  trois 
ans  ils  linaicnl  liur  chapitre,  ilans  lequel 
ils  élisaionl  leur  supérieur  ;;cnéral. 

Aucusiin  H.irbo-a  parlant  de  ce<  Prêtres 
(lu  r.oii-Jesus,  leur  (Idimio  pour  fo:iil.ilriie  la 
t)ienlieureuse  Marj^uenle  <le  llavenne:    mais 


iipe  lorsqu'il  dit  ijuc  les  premiers 

îiil  ses  rèiî  es  l'an  150+  ou  1.KI8,  et 

les'  donnèrent  aux  autres,   furent  Léon 


il  se  trom 
qui  recure 
i|Ui 

cl  Jérôme;  car  elle  ne  pouvait  pas  avoir 
donné  ses  rèiïlcs  en  loOV  à  Léon  qui  n'eiail 
pas  encore  prêtre,  pui>que  sa  mère  Gentille 
n'avait  pas  pour  lors  plus  de  irente-irois  ans; 
et  Marguerite  ne  pouvait  pis  non  plus  avoir 
donné  ses  rèul<s  à  Jérôme  eu  1508,  puis- 
qu'elle m  lurut  en  1505. 

Scbooiiebeli  parlant  aussi  de  ces  Prêtres, 
dit  que  ce  fut  le  P.  Séraphim  de  Ferme  qui 
les  fonda  environ  l'an  l.'3itj  ;  nous  croirions 
volontiers  que  c'est  une  faute  d'impression, 
s'il  ne  l'avait  ropite  de  .Maurolic  où  elle  se 
trouve  aussi:  ainsi  nous  excusons  Alaurolir, 
mais  Sehoonebek  ne  peut  être  excusé,  et  il 
devait  prendre  garde  que  c'était  une  faute 
d'impression  qui  s'était  sans  doute  glissci; 
dans  Maurolic,  puisque  dom  Séraphim  de 
Ferme  vivait  en  15:20,  et  non  pas  en  1326. 
Lorsqu'il  donne  a  ces  mêmes  Prêtres  la  bien- 
heureuse Marguerite  pour  fondatrice  l'an 
1500  il  devait  faire  attention  à  sa  mort  qui 
arriva  l'an  1505,  et  elle  n'a  point  fondé  de 
religieuses  comme  il  prétend.  (Jet  auteur  dit 
néanmoins  dans  la  piéfacc  de  sa  dernière 
édition  que  l'ou  y  a  reformé  [ilusieurs  dates 
qui  n'étaient  pas  d.ins  l'ordre  et  qu'on  les 
a  corrigées;  c'est  de  quoi  on  ne  s'aperçoit 
pas  beaucoup,  et  on  n  sans  doute  corrigé  des 
laules  par  d'autres  fautes  (2J. 

l{olland.,.4f^.S'S.,er  -iae/ iSJon.  Simon  Ma- 
rini.  lit.  dell.  lUi  Manjaiil.  et  (ienlil.,  et 
det  P.  (iieroniino  fundalori  délia  relig.  de  Pu- 
dri  del  iSuon  Giisu. }iuo\>.  Morand.,  tom.  VU 
Add.  ndSurium  23  Van.  Jeronim.  de  Uubéis, 
Jlisl.liavenn.lib.w.  Silvettr.  M.iurol.,  Mar. 
océan,  di  lut  t.  yli  Kelig.,  lib.  v,  pnq.  398. 
Barl).,  Ue  Jur.  ec<tes.  i.inibur.,  JJe  Jur.  nbb. 
Monnia,  Ihst.dcll.  /{(/i(y.Scht>onebik,  Hisl. 
de»  Urd.  relig.  l'iiilipp.  lionanni,  Caliilog. 
Ord.  ri'Uijios.,  part,  m  ;  ut  Heruiant,  llis- 
toire  des  Ordres  relig.,  tom  il. 
JKSLS-CHKlSr  ET  Dli  S.\  PASSION.  Voy. 

Du  \GON   nENVKIlSK. 

JKSUS  i:r  MAIUE  (CuEVALiEBS  de).  Voy. 

UkIIII  I  EM. 

JKSIS     Er      MAUIE     (C0NGBÉG*1I0N      l>K  . 

Voy.  EiDisTEs. 

JOSEPH  (CoNfiRKGATios  DE  Saint-)  à  Homc. 
Voy.  Clou  (SACnÉ-). 

JOSEPH  {  Conoukc.  vTioN   ors  missionnaibks 
DI-;  Saint-). 

Di$  prélrcê  mitsionnaires  de  la  congrégation 


DicTioN.vAir.E  DES  ouDRF.s  liEi-ir.iF.ux.  e«n 

de  Soinl-Jdseph  avec  la  vie  de  M.  Crétenet, 
leur  fondateur. 

Il  n'est  pas   extraordinaire  que   Dieu,  qui 
dit  dans  ses  saintes  Ecritures  qu'il  penira 
la  sagesse  des   saines  et  qu'il    réprouvera  la 
prudence  des  prudents,  se  sirve  «luelqucfois 
de  ce  ((u'il  y  a  de  plus  faible  pour  enseigner 
ses  voies  à  ceux  qui  se  croient  les  plus  spi- 
rituels et  les  plus  éclairés.    Mais  que  sa  di- 
vine majesté  confie  à  des   laïques  le  soin  de 
conduire   dans   le   chemin  de   la   pcrfeclion 
les  ministres  de  ses  autels,  c'est  ce  qui  serait 
sans  exemple  si  elle  ne  s'était  servie  dans  le 
dt'rnier  siècle  de  M.  Crétenet,  laïque  et  chi- 
rurgien de  profession,  pour  établir  une  con- 
grégation   de   missioiin.iires   cl    diriger  des 
préires  dans  tout  ce  que  la  vie  spirituelle  a 
de  plus  saint  et  de  plus   relevé.  Ce  serviteur 
de  hieu  naiiuit  au  bourg  de  Cliamlitc,  dans 
le  comté  de  Bourgogne,  l'an    1003,  et  reçut 
le  nom  de  Jacques  sur  les  fonts  du  bapléme. 
Ses  parents  étaient  d'une  londition  niéJiocre, 
mais   recommandables   par    leur  vertu.    Ils 
eurent  de  leur  mariage   six  garçons  et  trois 
filles.  Jacques,  de  nui  nous  parlons  ,  était  le 
sixième  et  le  dernier  de  ces  garçons.  Ils  né- 
gligèrent assez  son  éducation  dans   le  com- 
nieiKemcni,  mais ,  l'ayant  reconnu  dans  la 
suite  d'un  bon  naturel  et   porté  à  la   vertu, 
ils  prirent  le  dessein  de  le  faire  étudier,  dans 
la  pensée  que  Dieu  le  destinait  au  sacerdoce. 
Il  apprit  d  un  de  ses  oncles  les    rudiments 
de  la   grammaire  en   très-peu  de    temps  et 
avec  une  lacililé  qui  fil  bien  voir  qu'il  n'au- 
rait  pas  été  moins  éiiiinenl  par  sa  doctrine 
qu'il  l'a  été  par  sa  pieté ,  si   ses   [lareats   ne 
l'avalent  enipêclié  de  poursuivre   ses  études 
pour  substituer  un  de  ses  fières  en  sa  place: 
ce  qni  ne  réussit  pas   néanmoins  comme  ils 
s'en  élaicnl  fiatles,  Dieu  >oulanl  par  là  don- 
ner à   connaitre    le   tort   qu'ils    avaient   de 
changer  les  dispositions  de  sa  di»inc  provi- 
dence ,  qui   réservait    l'auguste   dignité  du 
sacer.loce  à  c>"lui  pour  qui  elle  leur  en  avait 
inspiré  la  première  pensée,  et  cju  elle    retira 
pour  cet  effet  comme  un  autre  Abraham  du 
sein  lie  ses  parents  et  du  lieu  de  sa  naissance 
pour  le  conduire  jieu  à  peu  à  l'exécution  de 
ses  desseins.  Il   sortit  donc  de   son   pays  à 
I  il;;e  de  quinze  ans,  sans  argent  et  sans  sa- 
voir où  il  irait   s'établir,  mais  avec  l'espé- 
rance  (lue   Dieu   ne  raliandomierait  pas.    Il 
s'arrêta  à  Laiigres,  où  il  apprit  la  clnriirgie, 
et  s'y   (omport.i  toujours  avec  tant  de  sa- 
gesse et  de  piéé,  tiuc  la  sainte  Vierge,  pour 
lai|iielle  il  avait  une  singulière  dévotion,  le 
préserva  de  plusieurs  dangers  où  il  se  trouva 
engage,  et  pour  l'àme  cl  pour  le  corps,  lanl 
dans    le   temps   de   son    apprentissage    que 
pendant  l.i   cour-e   qu'il    lit  après,  selon  la 
coutume  de  ceux  qui  veulent  se  rendre  par- 
faits dans  cette  prole.ssioii.  Avant  aihe»e  ses 
courses  ,  et  élanl  arrivé  à  Lyon,  il  se  trouva 
sans  argent  et  s  ns  emploi;  mais  Dieu  ,  qui 


(I)  Voy.,  A  la  fin  du  vol..  n"  IGV. 

\'i)  M.  Il>-riii.iii(,  ruic  de  M:iUiil,  a  ciipic  aussi 
ScliOoiii'bt'.k  ni  aiinl  ii.iiii  l;i  Inndiilinii  île  lei  ordip  il 
Oom   Scripliini  ilc  Kmiic,   l'an  152C  ;  n  il  parli:  de 


ers  clercs  réguliers  comme  s'ils  subsisiaicni  eiicor<;, 
(|uoiqu'ils  .lient  clé  siippiiiiics  par  le  pape  hinuccnt  )( 

laii  ig:>i. 


fiSl 


]0S 


J05 


(J8î 


veillait  sur  lui,  ne  l'aba  idonna  pas,  car, 
s'élaiU  mis  on  clieinin  pour  aller  de  Lyon  à 
Grenoble,  il  rencontra  le  baron  de  la  Roche, 
qui,  d'aliord  qu'il  le  vit,  se  sentit  louché  de 
tant  daffection  pour  lui,  qu'ayant  su  dans 
la  conversation  qu'ils  eurent  ensemble  qu'il 
était  chirurgien,  il  lui  offrit  sa  maison  et  de 
l'emploi  sur  ses  terres.  M.  Crélenet  admira 
la  bonté  de  Dieu  sur  lui,  et,  après  l'en  avoir 
remercié  intérieurement,  il  accepta  les  offres 
de  ce  seigneur,  qui  dans  la  suite  fut  si  satis- 
f.iil  de  ses  services ,  qu'il  le  mena  peu  de 
lemps  ;iprès  au  château  d'Amnistie,  qui  est 
(  nlre  Nînns  et  Uzès  ,  où  il  était  envoyé  par 
le  roi  pour  réprimer  les  huguenots  révolté». 
Ce  fut  là  que  ladouci-'ur  et  les  autres  bonnes 
qualités  de  M.  Crélenet  le  firent  aimer  de 
tous  ceux  qui  le  conversaient,  1 1  qu'il  acheva 
de  gagner  le  cœur  de  son  mailrc,  qui  le  fit 
manger  à  sa  table,  sans  que  cela  donnât  la 
moindre  jalousie  à  ses  compagnons,  parce 
qu'ils  l'aimaient  tous  tendrement,  et  qu'ils 
admiraient  l'humililé  et  la  charité  qu'il  avait 
pour  supporter  les  faiblesses  de  son  prochain, 
l'endaiit  quelques  années  qu'il  fut  dans  ce 
château,  il  traitait  les  malades  du  voisinage  ; 
et,  comme  il  avait  pour  le  moins  autant  de 
soin  et  d'empressement  de  la  santé  de  leurs 
âmes,  il  ne  les  quittait  jamais  sans  leur  avoir 
parlé  de  D;eu  et  tâché  de  leur  insinuer  quel- 
ques maximes  de  piété. 

Ce  zèle  si  rare  dans  les  jeunes  gens  de  sa 
profession,  non-seulement  lui  acquit  l'estime 
de  tous  ceux  qui  avaient  quelque  disposilion 
à  la  verlu,  mais  même  le  fit  aimer  d'une  jeune 
fille  de  la  meilleure  faniilled'Amnislie.llneîul 
pasabsolument  inseiisibieaus  amiliés  (]u'elle 
lui  témoigna.  11  y  répondit,  et  ils  s'ainièrenl 
tous  deux,  mais  d'une  amilié  si  réglée,  qu'il  ne 
se  ])assa  rien  ni  dans  leurs  entretiens  ni  dans 
leur  fréquenlation  qui  ne  lût  de  la  dernière 
retenue,  et  d'une  modestie  toute  chrétienne, 
quoiqu'ils  s'aimassent  dans  le  dessein  de  se 
marier  ensemble.  Mais,  comme  il  n'entre- 
prenait r;en  sans  avoir  auparavant  recours 
à  Dieu,  il  fit  dire  plusieurs  messes  afin  qu'il 
lui  fit  la  grâce  de  lui  déclarer  sa  sainte  vo- 
lonté. Ce  qui  ne  fut  pas  sans  effet;  car, 
priant  un  jour  avec  ferveur  pour  ce  sujet,  il 
entendit  intérieurement  une  voix  qui  lui  dit: 
Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  où  je  le  veux,  je  te 
montrerai  où  lu  iras  pour  ma  gloire. 

C'en  fut  assez  pour  obliger  ce  serviteur 
de  Dieu  à  suspendre  la  poursuite  de  ce  ma- 
riage, quelque  avantage  ([u'il  y  trouvât,  et  à 
renoncera  l'incinatiou  qu'il  avait  pour  celte 
])ersonne  ,  dont  il  estimait  encore  plus  la 
venu  que  la  beauté  cl  les  autres  qualités 
naturelles  dont  elle  était  douée.  Néanmoins, 
comme  ses  amis,  qui  ne  savaient  encore  rien 
de  ce  qui  se  passait  dans  son  cœur,  avaient 
pris  jour  avec  les  parents  de  la  fille  pour 
passer  le  contrai  el  convenir  du  jour  du 
mariage,  il  se  rendit  au  châleau  d'Amnistie 
à  l'heure  assignée;  mais  à  peine  y  fut-il  en- 
tré, que,  se  sentant  plus  pressé  que  jamais 
de  suivre  la  voix  de  Dieu  qui  l'appelait 
ailleurs,  il  remercia  la  compagnie  de  l'Iion- 
ueur  qu'on  voulait  lui  faire,  sous  prétexte 
Dictionnaire  des  Ordres  religieux. 


qu'il  avait  un  frère  à  Paris,  el  qu'il  serait 
bien  aise  de  le  consulter  sur  leltc  aflaire 
avant  que  de  la  conclure.  Il  demanda  ensuite 
son  congé  au  baron  de  la  Roche,  qui  n'ou- 
blia rien  pour  le  retenir  el  ne  consentit  qu'à 
regret  à  son  éloignement. 

Il  arriva  à  Lyon  l'an  1628,  dans  le  lemps 
que  Dieu  y  faisait  sen:ir  la  pesanteur  de  son 
bras  par  la  peste,  qui  y  causait  des  ravages 
si  funestes,  que  celte  grande  ville,  autant 
célèbre  par  son  commerce  que  par  le  grand 
nombre  de  ses  habitants  ,  se  vit  en  peu  de 
jours  changée  en  un  déserl,  iant  par  la  fuite 
de  ceux  qui  l'abandonnèrent  que  par  la  mort 
d'un  grand  nombre  de  personnes,  il  ne  fui 
pas  plutôt  arrivé  dans  cette  ville  ,  qu'il  se 
mit  chez  un  maître  chirurgien  ,  où  le  démon 
lendit  des  pièges  à  sa  pureté  par  le  moyen 
d'un  de  ses  compagnons,  qui  lui  découvrit 
que  leur  maître  entretenait  une  fille  dont  il 
pourrait  aussi  jouir  quand  il  voudrait,  lui 
conseillant  de  profiler  de  l'occasion.  Mais  le 
saint  jeune  homme,  s'étanl  aperçu  de  la  ma- 
lice de  l'esprit  lent;ileur,  sortit  de  cette  mai- 
son pour  s'exposer  au  service  des  pestiférés, 
ce  qui  lui  procu;a  un  établissement  de  la 
manière  suivante. 

La  peste  était  si  enllammée  à  Lyon,  que 
presque  tous  les  garçons  chirurgiens  qui 
pansaient  les  pestiférés  étaient  morts,  et  la 
plupart  des  maîtres  s'étaient  retirés  à  la 
campagne  pour  se  mettre  à  couvert  de  ce 
fléau  terrible.  Les  magistrats ,  pour  obliger 
les  garçons  chirurgiens  qui  étaient  encore 
dans  la  ville  à  s'exposer  au  danger,  firent 
publier  partout  que  ceux  qui  serviraient  les 
pestiférés  gagneraient  1.  ur  maîtrise.  M.  Cré- 
lenet, qui  avait  quille  s^^u  maître  pour  évi- 
ter le  péL-hé,  embrassa  le  parti  que  Dieu  lui 
présentait,  el  se  donna  de  bon  cœur  au  ser- 
vice des  pauvres  malades  abandonnés.  Ce 
fut  au  mois  d'avril  de  l'année  1029  qu'il 
commença  cet  exercice  charitable.  La  pre- 
mière personne  qu'il  traita  de  la  pesle  fut 
une  jeune  veuve,  qu'il  servit  avec  tant  d'hon- 
nêteté el  d'affection,  que  sa  mère  la  lui  pro- 
mit en  mariagi!  s'il  pouvait  la  guérir  el  se 
faire  recevoir  maître  chirurgien.  Dieu,  qui 
lui  avait  destiné  celle  veuve,  bénit  tellement 
le  soin  qu'il  prit  d'elle,  qu'ayant  été  guérie 
en  peu  de  lemps,  on  ne  pensait  plus  <iu'à 
l'exécution  de  la  promesse  qu'on  lui  avait 
faite.  Lorsque  la  peste  cessa,  les  maîtres 
chirurgiens  revinrent  de  la  campagne  ,  et 
s'opposèrent  à  rentérinemcnt  des  lettres  que 
leurs  garçons  avaient  obtenues  des  magis- 
trats :  ce  qui  étant  un  obstacle  au  projet  du 
mariage  de  M.  Crélenet,  lui  lu.  un  nouveau 
sujet  d'.iilorer  les  dispositions  de  Dieu  sur 
loi  et  de  redoubler  ses  prières  pour  obtenir 
lu  grâce  de  connaître  sa  volonté  et  de  s'y 
conformer  en  toutes  choses,  mais  principa- 
lement dans  ce  mariage,  qu'il  ne  souhaitait 
qu'autant  qu'il  serait  agréable  à  sa  divine 
majesté  cl  utile  au  salul  de  son  âme  :  ce 
qu'il  demanda  avec  une  si  parfaite  soumis- 
sion aux  ordres  du  ciel,  que,  nonobstant  cet 
ob  lacle,  qui  parais.sait  invincible,  il  eu  ob- 
II.  22 


W5 


PICTIONNAIFIE  OFS  ORDRES  KF.LICIEUX. 


C84 


tint  1.1  conclusion  de  son  mariage,  cl  reçut 
la  bénédiction  nuptiale  le  20  novembre. 

AjanI  obtenu  des  Icllrcs  de  maîtrise  quel- 
que lenip>i  après,  il  régla  lellenient  sa  mai- 
son, que  l'on  y  ^ivail  comme  dans  un  mo- 
nastère le  plus  régulier,  prenant  lui-même  le 
soin  de  coniluire  ses  dom  stiqucs  dans  le 
clicmin  du  salut  et  de  les  former  à  la  »io 
chrétienne  par  les  saintes  maximes  de  l'Isvan- 
pile,  qu'il  leur  «nseignaii.  Souvent  il  leur 
faisait  des  cnireliens  particuliers  pour  leur 
inspirer  Ihorreur  «lu  péché  et  l'amour  de  la 
venu.  La  prière  se  faisait  en  commun  le  soir 
et  le  malin,  et  il  Miulait  qu'ils  y  assistassent, 
qu'ils  allassent  lous  les  jours  à  la  messe, 
qu'ils  fisvcnt  des  leciures  spirituelles  et  qu'ils 
fréquenlassi  nt  sou\enl  les  sa<remenls.  Non 
content  de  bannir  de  sa  maison  toutes  sortes 
de  jeux,  de  débauches,  de  jurements  et  de 
paroles  libres,  il  lit  de  sages  règlemenls,  et 
les  y  lit  observer  imiispensablenient. 

Tour  ce  qui  est  de  ses  enfants,  il  n'épar- 
gna ni  son  bien  ni  ses  peines  pour  les  élever 
dans  la  pieté.  Outre  le*  inslructioni  qu'il 
leur  donnait  lui-même,  il  leur  choisit  des 
maîtres  pour  veiller  de  plus  près  à  leur  con- 
duite :  ce  qui  leur  réussil  si  heureusement, 
que  les  deux  enfants  qui  lui  restèrent,  dont 
l'un  était  g  rçon  d  l'.iulre  fiile,  se  consa- 
crèrent au  service  de  Dieu  :  le  garçon  entra 
dans  la  congrégation  des  miss  onnaires  dont 
son  père  fut  dans  la  suite  l'instituteur,  et  la 
fille  se  fil  religieuse  du  Tiers  Ordre  deSaini- 
François  de  la  plus  éiroite  observance  dans 
le  monastère  de  Uouane,  où  elle  vécut  avec 
tant  de  sainlelé,  quelle  fui  choisie  pour  faiiC 
rétablissement  du  lroi>ième  monastère  de 
cet  orlre  à  Lyon. 

Une  (onduite  si  sainte  et  si  utile  au    pro- 
chain ne   pouvait  être  que  f  irt  agréable  à 
Dieu,    qui,    prévenant  son  serviteur  de  ses 
bénédictions,  lui  donna  un  si   ardent   désir 
d'arriver    à   la    perfection,    qu'il  rechercha 
avec  empressement  la  conversation  des  per- 
sonnes capables  de  lui  en  enseigner  les  voies. 
Il  dem;inda  à  la  divine  majesté  par   de   ter- 
ventes  et  continuelles  prières  quelle  voulût 
bien  lui  procurer  celte  grâce  par  le    moyen 
de  quelques-unes  de  ces  âmes  choisies   (pii, 
quiiiiiue  dans  un  corps  mortel,  vivaient  dans 
le  monde  comme  si  elles    n'y   élaienl  pas,  et 
dont  toute  la  convcrsilion  elail  dans  le  ciel. 
La    Mère    Madeleine    de    Saint-François  , 
première  supérieure  du    premier  nion.islère 
du  Troisième  Ordre  de  Saint-François  dans 
la  ville  de  Lyon,   à  l.iqnelle   plusiems   per- 
sonnes s'adressaient  pour  apprendre  à   f.iire 
l'oraison  et  à  pratiquer  les  autres  exercices 
de  la  vie  spiriiuelte,  fut  celle  donl    Dieu   -e 
servit  pour  l'ai  <  omplissemenl  du   désir   de 
M.  Crelenct,  qui,  |iar  les  suins  de  celle  sainte 
fille,  lit  un  si  grand  progrès  dans  la  prali.iue 
de  toutes  les  \crtus  qui  conduisent  a  la  pi  r- 
feciion  évangéli'iue,  que,  se  trouvant  en  eiai 
de    marcher    seul   dans    les    voes   les   plus 
étroites  du  salul,  il  se  lésolut  d'y  servir  de 
guide  au  prochain  en  enseignant  aux  igno- 
rants les  obligations  de  la  vie  chrétienne  et 
eu  conduisant  ceux  qui  en  étaient  instruits 


à  une  vie  plus  parfaite,  selon  les  règles  qu'il 
en  av.iit  reçues  de  cette  charitable  maîtresse, 
que  Dieu  récompensa  enfin,  la  faisant  pas- 
serdeeelte  vie  à  une  meilleurele  -2.'1  juin  1G'»2. 
Après  la  mort  de  celle  sainte  fille,  dix   ou 
douze  de  ses  disciples  dans  la  vie  spirituelle, 
se  joignant  à  M.  Crélenet,  se  mirent  sous  la 
conduile  du    II.   I*.  dom   Arnaud,    pour   lors 
lirieur  des  Feuillants  de  Lyon,  donl  Dieu  se 
servit  pour  faire  connaître  le  mérite  de  son 
serviteur.  Car  ce  zélé  directeur,  étant  foil 
occupé,  soit  dans  son   couven'  cl  dans  les 
autres  de  son  ordre,  dont   il   était  toujours 
ou  prieur  ou  provincial,  soit  à  prêcher  des 
avenls  et  des  carêmes  dans  la  ville  de  Lyon 
et  ailleurs,  renvoyait  à  .M.  Crélenet  les   per- 
sonnes qui  venaient  à  lui  pour  le  consulter 
dans  leurs  besoins  spirituels,  comme  à  celui 
qu'il  connaissait  le  plus  capable  de  les  sou- 
lager dans  leurs  peines  :  ce   qui    établit  si 
bien  sa   réputation,  que   lous  ceux  qui  lui 
élaienl  ainsi    envoyés  ,  non  contents   de  la 
consolation   qu'ils   trouvaient  dans  ses  dis- 
cours (  t  ses  entretiens  particuliers,  ne  man- 
quaient pas  dans    la   suite  aux  conférences 
spirituelles  qu'il  faisait  une  fois   la   semaine 
dans  sa  maison  ou  dans  quelque  autre,  afin 
d'allumer  dans  le  cœur  de  ses  auditeurs  le 
feu  de  l'amour  divin  et  un  ardent  désir  d'ar- 
river à  la  perfection.   Mais    dans  le  temps 
qu'il  ne  soi^geail  qu'à  continuer  ces  saints 
exercices  d'une  charité   vérilablemenl  chré- 
tienne. Dieu  les  interrompit  en  lui  fournis- 
sant de  nouvelles    occasions  d'exercer  son 
zèle  et  son  amour  pour   le   prochain  :  car  la 
vilh;  de  Lyon  ayant  été  allligée  une  secon  le 
fois  de  la  peste  en  16!i3,   sa   divine    majesté 
lui   donna  de    si  fortes   inspirations    de   ne 
point  abandonner  les  pauvres  malheureux 
(|ui  étaient  aliaqués  de  ce   mal,  qu'il  se  ren- 
ferma avec  eux  pour  leur  administrer  les  re- 
mèdes nécessaires.  Il   les  consolait  par  des 
paroles  de  piélé  el  d'édification,  les  encou- 
ragi'ant  à  souffrir  patiemment  jiour  l'amour 
de  Jésus-Christ;  et,  parce  que  celle  maladie 
est  presque  toujours  suivie  de  la  mort,  il  les 
disposait  par  des  instructions  chrétiennes  à 
recevoir  les  sacrements,    et   n'oubliait   rien 
de  toul  ce  (|ui  pouvait   les   préparer  à   bien 
mourir.  Lorsqu'ils  approi  liaient  de  ce   der- 
nier   moment,   il   redi)ubl.iit  son   zèle   pour 
leur  salut,  les  exiiorlani  à  se  confier  en    la 
miséricorde  de  Dieu  et  à   faire  un   sacrifice 
de  leur  ve  à  sa  justice.  11  leur  enseignait  à 
faire  des   acti-s    de    contrition,  d'amour  de 
Dieu  et  de  résignation  à  sa  volonté.    Il   fai- 
s  lit  des  prières  en    particulier  et  en   public 
pour  e  ix,  et  engageai   ceux  qui  étaient  pré- 
sents à  leur  donner  le  même  secours. 

En  s'appliquaiil  de  la  sorte  au  salul  des 
moribonds,  il  ne  né;;ligeait  pas  le  soin  des 
autres  malades,  qu'il  catéchisait  lous  les 
jours,  leur  ensci  ,n.iiit  a  >>e  bien  i  onfesser  el 
à  manger  dignement  le  (i.iiii  îles  anges  :  <-e 
qui  produisit  un  tel  effcl  dans  le  cœur  des 
malheureux  qui  élaienl  renf  rniés  dans  ce 
lieu  de  misère,  que,  changeant  de  vie,  ils 
relourn.iicnlà  Dieu  par  une  véritable  cl  sin- 
cère pé.iiicuc''. 


C8o 


JOS 


JOS 


C80 


Le  P.  dom  Arnaud,  qui,  comme  nous 
l'avons  dit,  diri'^e.iil  M.  Crc(enet  el  coux  des 
disciples  de  la  Mère  Madeleine  de  Saint- 
François  qui  avaient  fait  aveclui  une  sainte 
société,  ayant  été  clioivi  d.ins  un  ciiapilre  de 
son  ordre  tenu  à  Paris  pour  aile  r  faire  nu 
établissement  à  Marseille,  les  en  a^er:it,afin 
qu'ils  fissent  choix  il'uii  auiro  directeur  ou 
supérieur  qui  coniinuâl  à  'es  conduire  dans 
la  voie  de  la  perfeclion.  M.  Crélenel,  qui 
c'ait  le  plus  zélé  de  (cKe  peliie  Iroiipe,  pria 
re  Père  de  recommander  celte  affaire  à  Dieu 
el  de  dire  à  celte  intention  la  messe  pendant 
n(  uf  jours,  afin  que  sa  majesîé  divine  leur 
fît  connaître  sa  sainte  M)!onlc,  qui  leur  fut 
enfin  manifestée  par  la  boiiche  de  ce  même 
religieux,  qui,  après  avoir  fini  cette  neu- 
vainc,  leur  conseilla  de  rester  unis  ensemble 
el  de  fhoisir  cnlre  eux  quelqu'un  capable  de 
les  gouv(rner.  Ils  reçurent  celte  réponse 
comme  venant  de  Dieu  même  ,  et,  ayant 
augmenté  leurs  prières,  leui's  jeûnes  el  leurs 
mortificalions,  ils  se  .sentirent  inspirés  de 
choisir  M.  Crélenel,  qui  dès  lors  fut  rega;dé 
comme  leiir  niaî  re  et  leur  supérieur. 

Ce  choix  d'un  laïque  el  même  engage  d  ii:s 
le  mariage  pour  conduire  celle  nouvelle 
compagnie  de  serviteurs  de  Dieu,  dans  la- 
q  iclle  il  y  avait  trois  ecclésiasiiques,  parut 
si  extraordinaire,  que  Ion  traita  d'illusion, 
d'ambilion  cl  de  lémérité  l'acceptation  que 
ftl.  Crélenel  lit  de  cet  emploi.  Myis,  non- 
obstant toutes  ces  conlradictions,  le  nombre 
de  ses  disciples  augmenta  par  un  grand 
nombre  d'écoliers,  (jui,  s'éla;it  mis  sous  sa 
conduite,  devinrent  la  bonne  odeur  de  Jé- 
sus-Christ el  pnitcrent  partout  les  fruits  de 
sainteté  el  de  grjces  que  ce  sainl  m.iître 
avait  semés  dans  leur  cœur  par  ses  i;isli  uc- 
tions  el  ses  bons  exemples. 

Le  zèle  qu'il  avait  pour  la  gloire  de  Dieu 
et  le  salut  des  âmes  était  trop  vaste  pour 
être  horiic  au  seul  avancement  spirituel  de 
ceux  dont  ii  .ivnit  la  conduite.  Comme  il 
poi  tait  out  le  inonde  dans  son  cœur,  et  que 
sa  charité  s'élendall  sur  tons  les  hommes, 
non-seulement  il  priait  avec  ferveur  pour  la 
conversion  des  intidèles,  hérétiques  el  mau- 
vais chrétiens;  mais,  dans  l'impossibilité  où 
il  était,  à  raison  do  son  étal,  d'ail  r  lui-même 
chercher  tes  brebis  égarées,  il  lâLhait  d'en- 
gager ceux  qui  avaient  clioisi  Jésus-Ghriçt 
pour  leur  pailage  d'entreprendre  un  si  saint 
exercice  :  ce  qui  lui  réussit  eniin  selon  ses 
désirs.  Car,  un  jour  qu'il  donnait  à  mang.  r 
ta  (luelques-uns  de  ses  disciples,  la  conver- 
sation tomba  insensiblement  sur  l'ignorance 
des  peuples  de  la  campagne,  el  parliculière- 
jnenl  du  grand  besoin  d'instruction  qu'avait 
le  village  de  Marlignat  dans  le  Bugey,  dont 
un  prêlre  de  la  compagnie  qui  avait  dit  sa 
première  messe  le  même  jour  était  natif. 
Ce  s.iint  homme  profita  de  celle  occasion 
pour  leur  découvrir  le  dessein  qu'il  avait 
depuis  plus  eurs  années  de  les  engager  à  se 
dévouer  au  service  du  prochain,  et  les  y  ex- 
horta d  une  manière  si  efficace,  que,  ne 
pouvant  ré-ister  à  la  force  de  ses  discours, 
ils  prirent  la  résolution  d'aller  instruire  les 


pauvres  gens  de  ce  lieu  sitôt  que  les  vacan- 
ces seraient  arrivées,  la  plupart  étu  ianl 
pour  lors  en  théologie.  Ce  temps  étant  ar- 
rivé, ils  allèrent  recevoir  leur  mission  du 
grand  vicaire  du  cardinal  de  Richelieu,  ar- 
chevêque de  Lyon,  qui,  louant  leur  zèle  el 
les  encourageant  à  souffrir  généreusement 
toutes  les  peiites  el  les  fa'igues  qu'ils  au- 
raienl  à  Siiuienir,  leur  donna  tout  le  pouvoir 
(i:ii  leur  était  nécessaire.  M.  Crélenel  four- 
nil aux  frais  de  leur  voyage  el  do  la  mission, 
à  laquelle  ils  se  disposèrent  par  le  pèleri- 
nage de  Sainl-Claude,  qu'ils  entreprirent  à 
pied,  jeûnant  au  pain  et  à  l'eau,  afin  d'obte- 
nir par  l'intercession  de  ce  sainl  archevêque 
les  lutnièrcs  el  les  grâces  dont  ils  avaient 
besoin  dans  leur  ministère  apostolique.  Ils 
l'exerièrenl  enfin  dans  le  village  de  Marli- 
gnat avec  tant  de  satisfaction  par  rapport  aux 
grands  fruiîs  qu'ils  y  firent  ,  qu'ils  réso- 
lurent de  consacrer  à  la  mission  tout  le 
temps  des  vacances  qu'ils  auraient  à  la  fin 
de  chaque  année  de  théologie,  et  de  s'y  em- 
ployer entièrement  lorsqu'ils  auraient  achevé 
leurs  éludes. 

M.  Crélenel,  ayant  connu  par  les  fruits 
des  pieniières  missions  que  ses  disciples 
avaient  fa. tes  combien  il  était  important  pour 
le  salut  des  âmes  de  les  continuer,  s'appliqua 
avec  beaucoup  de  soin  à  former  les  ecclé- 
siastiques qu'il  croyait  être  appelés  de  Dieu 
à  cel  emploi;  dont  le  nombre  s'augmenlant 
tous  les  jours,  il  leur  conseilla  d'entrepren- 
dre toutes  les  missions  qui  se  présenteraient 
et  d'aller  dans  tous  les  lieux  où  on  les  de- 
manderait. Le  Bugey,  la  Bresse  cl  le  Dau- 
phiné,  furent  les  premiers  champs  qui  eu- 
rent le  bonheur  d'être  délri(  hés  par  ces  bons 
missionnaires,  qui,  dans  une  mission  qu'ils 
firent  à  Verjon,  au  mois  d'octobre  1648,  lou- 
chèrent si  vivement  par  leurs  prédie^itions 
le  marquis  de  Coligni  et  sa  femme,  qu'ils  ré- 
solurent dès  lors  de  se  donner  entièrement  à 
Dieu  par  un  généreux  renoncement  à  toutes 
les  choses  de  la  lerre.  Depuis  ce  temps-là,  ce 
seigneur  s'élant  mis  sous  la  conduite  de  ces 
mi&sionaires  el  ayant  réglé  sa  maison  par 
leurs  avis,  il  commença  de  mener  une  vie  si 
chrétienne,  qu'après  avoir  fait  l'admiration 
de  tout  le  monde,  il  mourut  Irès-sainlenient 
en  1661.  Ce  qui  ne  fut  pas  le  premier  ni  le 
seul  fruit  de  leurs  travaux  évangéliques  : 
car,  sans  parler  d'une  infinité  de  personnes 
de  tous  âges,  sexes  et  conditions  qui  leup 
étaient  redevables  de  leur  conversion  ,  ils 
avaient  eu  le  bonheur,  dès  l'an  1647,  de  ga- 
gner à  Jésus-Christ  le  baron  d'Allignal,  qui 
mourut  en  1650  dans  sa  quarante-deuxièino 
année,  après  avoir  donné  des  preuves  d'une 
véritable  conversion  el  d'une  singulière 
piclé. 

De  si  heureux  progrès  semblaient  devoir 
mettre  ces  zélés  missionnaires  à  couvert 
de  la  persécution  ;  mais  Dieu,  qui  veut 
éprouver  les  justes,  permit  qu'il  s'élevâl  con- 
tre eux  trois  bourrasques  en  trois  dilîéren- 
tes  années,  non-  eulemcnt  par  ia  malice  des 
méchants,  dont  ils  combattaient  les  vices, 
mais  même  par  la   trop  grande  facilité   de 


CS7 


DICTIONNAIIU-.  lir.S  OROUKS  llKLIGIF UX. 


WS 


qtiplqiios  personnes  ilc  pii^lé,  qui,  mal  infor- 
mées «le  leor  condiiilc  l't  prévenues  contre 
M.  Créli-nel,  sur  qui,  c.rnnie  sur  leur  chef, 
lombail  le  plus  uros  de  la  Icmpéle,  crurcnl 
qu'ils  feraient  un  grand  service  à  Dieu  el  à 
ri-^îllise,  s'ils  I  ouvaient  contribuer  à  détruire 
celle  société  naissanli'  avant  qu'elle  auj,'m,n- 
làt.  Dans  l'une  de  cis  persécutions,  Tarclie- 
véque  de  Lyon  publia  un  mandemenl  par  le- 
quel il  déclarait  excommunié  un  ccrt.iin  chi- 
rurgien qui  se  mélail  de  gouverner  des  prê- 
tres, et  défemlait  h  ces  mêmes  préires  de  se 
conduire  à  l'avenir  par  les  conseils  de  ce 
laïque,  leur  ordonnant  de  comp;iraitre  au 
plus  lôl  (levanl  lui  pnur  être  inlerrogés  sur 
ce  fait.  Mais  ce  pré'at,  après  les  informa- 
tions qu'il  fit,  ayant  été  désabusé  des  mau- 
vaises impressions  qu'on  lui  avait  données, 
révoqua  tout  ce  qu'il  avait  failionlre  les 
missionnaires,  leur  permit  de  consulter  M. 
Crélenet  ci>mme  auparavant,  et  leur  donna 
même  des  pouvoirs  beaucoup  plus  amples 
que  ceux  qu'ils  avaient  reçus  de  son  grand 
»iraire,  .ifin  qu'ils  pussent  sans  aucun  obs- 
tacle continuer  leurs  niissioiis  dans  son  dio- 
cèse. 

Dans  une  autre  persécution  qui  s'éleva 
contre  eux  au  même  diocèse  el  dins  celui 
du  Puy  en  Vel.y,  on  prêcha  pub  iqnenient 
contre  leur  doctrine;  on  les  traita  de  caba- 
lisles  et  de  sectaires,  qu'il  fallait  éviter 
comme  hérétiques.  L'on  distribua  partout 
des  libelles  diffamatoires  ;  l'on  fit  même  gra- 
ver à  Lyon  une  estampe  qui  représentait  les 
hérétiques  vaudois,  qui  avaient  eu  pour  chef 
un  niarchand  de  celle  ville,  cl  au-dessous 
deTestimpe  on  avait  mis  des  discours  inju- 
rieux contre  M.  Crélenet  et  contre  ses  mis- 
sionnaires pour  les  rendre  odieux  :  ce  qui  fit 
qu'on  les  insultait  partout  et  qu'on  les  char- 
geait d'injures,  principalement  M.  Crélenet, 
contre  lequel  on  fit  des  vers  satiriques,  qui 
furent  imprimés  cl  affichés  ;iu  coin  des  rues, 
et  qu'on  venait  insulter  jusque  dans  sa  mai- 
son. Mais  enfin  cet  orage  cessa  l'an  1G56  : 
la  vérité  prévalut  sur  le  mensonge,  el  lama- 
liie  des  ennemis  de  M.  Crélenet  cl  des  mis- 
sionnaires fjl  confondue  par  le  témoign.ige 
aulhenliquequ'une  infinité  de  gens  de  bien 
rendirent  en  leur  faveur  :  en  sorte  que  l'on 
commença  à  honorer  ceux  qu'on  avait  mé- 
prisés ;el  D;eu,  pour  réc.nipenscr  la  patience 
de  ses  serviteurs,  leur  procura  d  illustres 
protecteurs  et  de  puissants  amis.  Monsieur 
le  prince  de  Conti  fut  de  ce  nombre,  cl  les 
employa  aux  missions  qu'il  fil  faire  dans 
son  gouvernenieni  de  Languedoc. 

(Quelques  années  après,  l'archevêque  de 
Lyon,  persuadé  du  I  ieii  qu'ils  faisaient  dans 
son  diocèse  pour  rinstruclion  des  peuples, 
consen'il  (|i'ils  fissent  un  établissement  à 
Lyon.  Pour  cet  elTet,  .M.  le  prince  île  (^onli 
leur  obtint  des  lettres  patentes  du  roi  qui 
leur  permeilaienl  de  s'établir  dans  celle 
ville,  à  l'Ile-Adam  dans  le  diocèse  de  Ite.iii- 
\ii'\s,  el  à  Kagnols  en  L.ingnedor;  et  le  inai- 
(juis  «le  Collgnj,  dont  nous  avons  parle,  et  sa 
lemine,  foiirnircnl  .in\  frais  de  la  fondation 
de  Lyon  avec  tanl  de  ténérosilé  cl  d'humi- 


lité, qu'ils  ne  voulurent  pas  même  pren- 
dre le  nom  ni  la  qualité  de  fondateurs,  quoi- 
qu'ils en  fissent  toutes  les  dépenses.  Un  si 
heureux  succès  donna  bien  de  la  joie  à  M. 
Oélenel,  il  en  remercia  Dieu  et  le  pria  de 
protéger  celle  communauté  naissante,  de  bé- 
nir les  sujets  qui  la  devaii'nl  composer  et  de 
verser  abondamment  ses  grâces  sur  tous 
leurs  travaux.  Celle  nouvelle  maison  clant 
achevée,  ce  zélé  fondateur  proposa  aux  mis- 
sionnaires de  faire  une  retraite  spirituelle 
avant  que  d'y  aller  demeurer,  ce  qu'ils  ac- 
ceptèrent avec  joie,  el  voulurent  même  la 
faire  l'un  après  l'autre  dans  sa  maison.  Lors- 
qu'elle fut  finie,  ils  allèrent  dans  leur  mai- 
son, où  ils  commencèrent  leur  établisse- 
ment et  continuèrent  à  suivre  les  règlements 
qu'ils  avaient  observés  depuis  si  longtemps 
par  les  conseils  de  M.  Crélenet,  ((u'ils  ont 
toujours  reconnu  comme  leur  père  et  le 
véritable  insliluteur  de  leur  congrégation, 
à  laquelle  ils  donnèrent  le  nom  de  Saint-Jo- 
seph, quoique  dans  quelques  lieux  on  les 
appelât  les  Cr('tenisies. 

Quelque  temps  après,  ces  missionnaires 
prièrent  leur  instituteur  de  prendre  un  ap- 
parlemen!  dans  leur  maison,  mais  il  ne  se 
prévalut  point  de  cet  avantage,  et  voulut 
payer  le  loyer  des  chambres  qu'il  occupait, 
comme  s'il  eût  été  un  étranger;  el  son  hu- 
iinlilé  fut  si  grande,  q.u'il  ne  discontinua 
point  l'exercice  de  sa  profession,  (juelqu'ins- 
tanccct  quelque  sollicitation  qu'on  lui  en  fît, 
afin  qu'il  eût  plus  de  fac  lilé  el  de  temps  pour 
continuer  à  conduire  ces  missionnaires  et 
toutes  les  personnes  qui  allaient  à  lui,  dont 
le  concours  fut  plus  grand  qu'il  n'avait  en - 
core  été. 

Sa  femme,  avec  laquelle  il  y  avait  plus  de 
vinut  ans  qu'il  vivait  en  continence,  étant 
morte  l'an  IGiio,  il  se  sentit  inspiré  de  se 
consacrer  à  Dieu  dans  l'étal  du  sacerdoce. 
11  redoubla  ses  prières,  ses  jeûnes  et  ses 
moi  lific.ilions,  il  fit  dire  plusieurs  messes 
pour  connaître  la  volonté  de  Dieu,  et  con- 
sulta ce  qu'il  y  avait  de  plus  habiles  gens 
dans  Lyon,  qui  tous  lui  conseillèrent  de  se 
faire  pi  être,  l'assur.inl  (]ue  Dieu  l'appelait  in- 
failliblement à  cet  étal.  Il  commença  d'espé- 
rer que  Dieu  lui  ferait  la  grâce  d'y  arriver, 
el  cela  avec  tant  d'assurance  que  loules  les 
contrariétés  du  monde  ne  lurent  pas  c  ipables 
de  lui  faire  changer  de  senlinienl.  lin  jour, 
étant  en  prières  dans  l'église  de  Saint-Ko- 
main,  où  le  saint  sacrement  était  exposé 
pour  1,1  fête  de  ce  saint,  qu'on  y  solennisait 
le  18  novenib  e  IGfiii .  il  fol  si  l'orlement 
pressé  par  des  mouvements  intérieurs  de  so 
faire  prêtre,  qu'il  re  put  s'empêcher  d'en  faire 
le  vfi'u,  <i  condiiion  que  l'archevêque  de 
Lyon  le  Iroinerait  bon.  Ce  prélat,  qui  con- 
n.'iissait  la  sainteté  de  ce  serviteur  de  Dieu, 
y  consentit,  nonobstant  son  peu  d'étude;  il  le 
dispensa  même  du  séminaire,  el  lui  accorda 
un  diiiiissoire  pour  aller  prendre  les  ordres 
où  il  vou  liait,  ne  pouvant  les  lui  donner  lui- 
même,  parce  (ju'il  éiaii  pour  lors  à  l'aris.  M. 
Crélenet,  pourvu  de  ce  dimissoirc  el  d'une 
permission  de  Itonie   jionr  recevoir  tous  les 


6S9 


JOS 


JOS 


cm 


Krdres  hors  les  (cmps  prcscrils  parles  saints 
canons,  iiarlil  pour  les  aller  riTovoir  à  lîel- 
îcy,  où  il  .irriva  le  (i  août  IGGG.  L'cvêque, 
:]iii  connaissait  aussi  sa  vertu,  lui  donna  la 
tonsure  et  les  i]'  aire  mineurs  dès  le  lende- 
main,  qui  était  un  sanedi  ;  le  dimanche  il 
lui  donna  le  sous-diaconai  ;  le  mardi,  fête 
de  saint  Laurent,  le  diaconat  ;  et  le  jour  de 
l'Assomption  do  Notre-Dame,  la  prêtrise. 
l\l.  (]rétenet  la  reçut  avec  de  si  saintes  et  de 
si  humbles  disposiiions,  que,  quniqu'il  lût 
>enii  à  l'église  dès  cinq  heures  du  matin,  il 
y  resta  jusqu'à  une  heure  après  midi  pour 
remercier  Pieu  de  la  faveur  qu'il  lui  avait 
faite.  Etant  sorti  deBelley,  il  prit  la  route  de 
Lyon  pour  y  retourner;  mais  ,  en  passant  à 
Monlluel,  où  il  arriva  le  19  du  même  mois, 
il  tomba  le  lendemain  en  défaillance  après 
avoir  eniendu  la  messe,  à  Luiuelle  il  com- 
munia; et  cette  déf.iillance  fut  suivie  d'une 
grosse  fièvre,  qu',  augmentant  tous  les  jours, 
l'enleva  de  ce  monde,  le  |  remier  jour  de 
septembre  de  la  mênie  année.  Son  corps  fut 
inhumé  dans  une  chapelle  de  l'église  collé- 
giale de  Montluel,  dont  une  partie  des  cha- 
noines avaient  été  ses  disciples.  Son  ccciir, 
une  («arlie  de  son  foie  et  ses  poumons  furent 
cuibaunK  s  et  portés  au  ttoisicme  monastère 
lies  religieuses  du  Tiers  Ordre  de  Saint-Fran- 
çois à  Lyon,  où  il  avait  mis  sa  fille  ;  et  dix 
ans  après,  l'an  1677,  les  ciiunoines  de  Moiit- 
luet  accordèrent  encore  une  partie  de  ses  os- 
senients  à  ces  religieuses. 

Ce  saint  homn.e  avait  prédit  sa  mort  six 
ans  au(  aravant,  et  il  semble  que  c'était  pour 
cela  qu'il  souhaitait  de  recevoir  si  prompte- 
oirnl  les  ordres,  n'ignorant  pas  que  pour 
peu  qu'il  eût  dilîéré,  il  serait  mort  sans  cette 
consolation  ,  après  laquelle  il  soupirait 
comme  étant  la  consommation  de  toutes  les 
grâces  qu'il  avait  reçues  de  Dieu  diins  cette 
vie. 

Ces  missionnaires  sont  habillés  comme  les 
autres  ecclésiastiques  et  sont  gouvernés  par 
un  général. 

N.  Orame,  Vie  de  M.  Crélenet,  insliCutcur 
de  la  congréijalion  di^s  Prêtres  Missionnaires 
de  Saint-Joseph. 

JOSEPH  ^Congrégation  des  soeurs  de 

Saint-). 

La  congrégati  m  des  soeurs  ou  filles  de 
Saint-Joseph  a  pris  son  origine  dans  la  ville 
du  l'uy  en  V'elay,  où  elle  fut  érigée  par  Henri 
de  Maupas  du  Tour,  évéque  et  comte  de 
cette  ville,  l'an  1C50,  à  la  sollicitation  du 
P.  Jean-Pierre  Médaille  de  la  Compagnie  do 
Jésus.  Ce  saint  homme,  qui  a  employé  sa  vie 
à  faire  la  utission  non-seulement  dans  le  dio- 
cèse du  Puy,  mais  encore  dans  ceux  de  Saint- 
Flonr,  de  Ûodez  et  de  tienne,  ayant  trouvé 
dans  le  cours  de  ses  missions  plusieurs  veu- 
ves et  filles  qui,  ne  voulant  point  se  marier, 
avaient  dessein  de  quitter  le  m^inde  pour  va- 
quer plus  librement  au  service  de  Dieu  et  du 
prochain,  et  ne  pouvaient  pas  entrer  dans 
lies  monastères  pour  n'avoir  pas  de  quoi 
fournir  leur  dot,  propo'^a  à  révé()iie  du  l'uy 
d'établir  une  cong^éga  ion  dans  laquell  ■  ces 


filles  cl  veuves  pourraient  se  retirer  pour  y 
travailler  à  leur  salut  et  vaquer  à  tous  les 
esercices  dont  eles  seraient  capables  pour 
le  service  du  prochain.  Ce  prélat,  qui  avait 
beaucoup  de  zèle  pour  la  gloire  de  Dieu  el 
l'avancement  du  salut  du  prochain, approuva 
ta  dessein  du  P.  Médaille,  et  fil  venir  auPuy 
\('s  filles  qu'il  avait  disposées  à  la  retraite. 
Ellis  logèrent  toutes  ensemble  pendant  quel- 
ques mois  chez  un«  demoiselle  fort  vertueuse 
nommée  Lucrèce  de  la  Planche,  femme  de 
M.  de  Jous,  gentilhomme  de  Taner,  laquelle 
demeurait  pour  lors  au  Puy,  et  qui  ne  con- 
tribua pas  seulement  de  tout  son  pouvoir  à 
l'élablissemcnl  de  ces  filles,  mais  travailla  en- 
core jusqu'à  sa  mort  avec  un  zèle  et  une  cha- 
rité exlraurdinaii  es  à  l'avancement  de  leur 
congrégation.  Enfin  toutes  choses  ayant  été 
disposées  par  l'évé>|ue  du  Puy  pour  l'exécu- 
tion  d'un  si  pieux  dessein,  ce  zélé  prélat  as- 
sembla toutes  ces  filles  dans  i'hôpilal  des 
orphelines,  dont  il  leur  donna  la  conduite, 
et,  le  15  octobre,  fêle  de  sainte  Thérèse,  do 
Pan  1050,  après  leur  avoir  fait  une  exhorta- 
lion  pour  les  animer  à  l'amour  de  Dieu  et  à 
la  plus  parfiile  charité  du  prochain,  il  les 
mit  sous  la  protection  de  saint  Joseph,  et  or- 
donna que  leur  congrégation,  qu'il  confirma 
par  ses  lettres  du  10  mars  1051,  porterait  le 
nom  de  ce  saint  patriarche.  Il  leur  prescrivit 
des  règles  pour  leur  conduite  et  une  forme 
d'habillement,  et  eut  pendant  toute  sa  vie  un 
soin  si  particulier  de  l'avancement  de  cette 
congrégation,  qu'il  en  fit  plusieurs  établisse- 
ments dans  son  diocèse,  dont  le  premier  fut 
à  Moiitferrand.  Après  sa  mort,  M.  de  Bé- 
Ihune,  qui  lui  succéda  sur  le  siège  épisco- 
pal  i'e  cette  ville,  ayant  été  convaincu  par 
expérience  et  par  plusieurs  témoignages  d  - 
gnes  de  foi  des  services  que  les  sœurs  de 
celte  congrégation  rendaient  dans  son  dio- 
cèse, la  confirma  de  nouveau  et  approuva 
leurs  cons'ilutions  et  règlements  le  ^iS  sep- 
tembre 1605.  Le  roi,  par  ses  lettres  patentes 
de  l'an  1666,  autorisa  ^ous  leurs  établisse- 
ments ;  et  Dieu  a  répandu  tant  de  bénédi- 
ctions sur  celte  congrégation,  qu'elle  s'esl 
étendue  dans  les  diocèses  de  Clermont,  da 
Vienne,  de  Lyon  ,  de  Grenoble,  d'iîmbrun, 
de  Gap,  de  Sisteron,  de  Viviers,  d  Uzès,  et 
plusieurs  autres.  HiMiri  de  Villars,  archevê- 
que de  Vienne,  avait  établi  ces  filles  dans  le 
grand  hôpital  de  c  Ue  ville  l'an  1668,  et  ce 
fut  par  Ses  ordres  que  leurs  constitutions 
furent  imprimées  à  Vienne  l'an  It  9V. 

Ces  servantes  de  Jésus-Christ  embrassent 
tous  les  exercices  de  charité  et  de  miséri- 
corde; car  elles  prennent  la  conduite  et  h- 
soin  des  pauvres  dans  les  hô|iitaux,  la  direc- 
tion des  maisons  de  refuge,  pour  ramener  à 
la  pénitence  les  filles  égarées,  et  le  soin  des 
maisons  des  pauvres  orphelines  pour  les 
élever  à  la  piété  et  leur  apprendre  à  travail- 
ler. Elles  tiennent  des  écoles  pour  l'instruc- 
tion des  petites  filles  dans  les  lieux  où  les 
religieuses  qui  y  sont  établies  n'en  [irennenl 
pas  le  soin.  Elles  visitent  tous  les  jours  les 
m.iiades  et  li's  prisonniers  une  fois  ou  deux, 
plus  ou  moins,  selon  qu'il   c^^   néccssaiic, 


f:l 


DiCTIONNAlia:  DES  ORDItES  UFI.IGIEUX. 


692 


|.s  cxhorlanl  à  1 1  ['énilcnco  et  .i  la  palicncp-, 
illes  prient  pour  eux,  leur  iTiicurciil  ilcs  aii- 
iiiôncs,  les  assislonl    corpori'llomrnl  <'ci  fai- 
sant leurs  houilloas  et  les  remèdes  c|u;'  les 
médecins  ordonneiil,  selon  leur  pouvoir,  cii- 
Ireiciiaiit  jour   cet  effet  iluis  la  pluparl  de 
leurs  maisons  une  pharmacie  où  elles  tien- 
nenl  le^  dropui  s    les   plus  <  omnuii;es  cl  les 
plus   née  ssaircs.    Elles   veillent  soigneuse- 
ment au  salut  des  pauvres   tilles   qui,  pour 
n'avoir  personne  qui  les  gouverne,  eu   ])our 
lire  dans  la  nécessité,  courent  risque  de  per- 
dre leur  honneur,  lâchant  de  les  lofjer  ou  de 
leur  procurer  du  travail  pour  pa^ner  leur 
vie.  Elles  ont  aussi  un  soin  parliculier  d'at- 
lirer  les  jeunes  filles  qui  comnirnccnl  à   fré- 
quenter le  monde  et  les   couip.igiiies  où  les 
hommes  se    trouvent,   afin   de  leur  inspirer 
la  crainte  de  Dieu  <t  leur  enseigner  la  u.o- 
destie  et  les    autres   verlus   qu'elles  doivent 
pratiquer.  Pour  cet  effet  t  ll(  s  leur  permil- 
leiitde  venir  travailler  chez  elles  et  leur  ap- 
prennent  toutes  sortis   d'ouvrages  propres 
au\  personnes  de  leur  sexe.   Elles   doivent 
établir  l'es  rongrcgalions  de  la  Misérico:de 
dans  les  lieux  où  il  n'y  en  a  point,  et  y  rece- 
voir les  femmes,  les  veuves  et  les  filles.  Ou- 
Ire  l'assemblée  des  dames  qui  se  fait  une  fois 
le  mois,  pour  pourvoir  à  la  visite  et  au  se- 
cours des  pauvres  malades  de  leurs  paroisses, 
il  y  a  eu<ore  tous  les  diMianches  et  les  fêles 
des  assemtdécs  particulières,  de  veuves,  de 
femmes   mariées   et  de    filles,  séparées  les 
une?  des  autres,  pour  y  traiter  non-seulement 
des  œuvres  de  miséricorde,  mais  aussi  de 
leur  direction  particulière  et  de  la  manière 
dont  elles  doivent  vivre  en  qualité  de  chré- 
tiennes. 

Chaque  maison  est  gouvernée  par  une  su- 
périeure qui  a  le  titre  de  prieure,  par  une 
intendante  et  une  coadjulrice.  11  y  a  encore 
une  économe,  une  aduionilricc,  une  inten- 
dante des  pauvres,  une  direcirice  de  l'assem- 
blée de  la  Miséricorde,  tl  quehjues  autres 
officières.  Tous  les  dimanches  et  fêles,  elles 
disent  en  commun  le  petit  olGce  de  la  Vierge 
dans  leur  chapelle,  et  tous  les  jours  le  petit 
ullice  du  Saint-Esprit,  les  litanies  du  saint 
nom  de  Jésus,  de  la  sainte  N'ierge,  de  saint 
Joseph,  et  le  cl)ap<'li'l.  Elhs  font  deux  fois 
le  jour  l'oraisoii  n  c  itile,  une  fois  le  matin 
cl  une  fois  le  soir.  Elles  jeûnent  tous  les  sa- 
mcd  s  et  prennent  ce  jour-là  la  discipline. 
Elles  assistint  au  chapitre  le  vendredi,  et  les 
diman;lies  à  la  conlVreiice  spirituelle.  Elles 
font  dux  ans  de  no\iciat,  après  lesquels 
elles  proïKinceiit  leurs  v  i  ux  simples  cl  leurs 
promc-scs  en  celte  manière:  Mon  Dieu  tout 
jntifsaiit  et  éternel.  Je  N.,  voire  itidifjne  filte 
il  sirvanle,  désirant  de  vivre  toute  pour  tons 
it  dépendre  absolument  de  la  conduite  de  ro- 
Ire 'irâce,  en  présence  de  Jésus-Clirist  rolie 
Fils  et  lie  la  iilorirnsc  V  icrrje  Marie,  dr  noire 
patriarche  saint  Joseph  et  de  toute  la  cour 
ivlesle,  fais  vœu  à  votre  divine  majesté,  de 
p'iuiTrté,  de  rliasltir  et  d'ohcissance  perpé- 
tuelle en  la  conyrripilion  des  S'Kurs  de  Saint- 


Joseph,  et  ce  entre  vos  mains,  nfonsienr,  qui 
tenez  la  place  de  Monseigneur  noire  évéque  et 
Irès-hnnoré  supérieur;  et  je  promets,  selon 
les  rcf/les  de  ladite  congrégation,  de  professer 
moi/ennant  votre  grâce  la  p'us  profonde  hu- 
niililé  en  toutes  rltnsts  it  la  plus  cordiale  cha- 
rité envers  le  prochain,  que  je  désire  servir 
I  ar  l'exercice  de  toute'i  les  auvres  de  miséri- 
corde, tant  spirituelles  que  corporelles  por- 
tées par  notre  institut.  Mon  Dieu,  recevez 
ce! te  offrande  en  odeur  de  suarit''.  Mnst 
soit-il.  Lorsque  les  sœurs  sortent  de  la  con- 
erégalion  ou  qu'elles  en  sont  chassées  pour 
leur  incorrigihiliié,  l'évéque  du  lieu  d'où 
«Iles  sorlent  les  dis;  ense  de  leurs  va-ux  ; 
mais,  conformémcnl  aux  constitutions,  il  ne 
doit  accorder  celle  dispense  qu'après  avoir 
pendant  un  loug  temps  employé  les  voies  de 
douc.'ur,  et  ensuite  de  rigueur,  pour  rame- 
ner l'cprit  faible  ou  incorrigible  de  ces 
sd'urs,  qui  s'exposent  au  malheur  de  quitler 
leur  vocation  ;  et,  s'i  arrive  que  quelqu'une 
sorte  furtivement  de  la  congrégalion ,  il  la 
doit  faire  reconduire  à  la  maison  d'où  elle 
est  sortie,  ou  à  une  autre  où  elle  doit  être 
ei! fermée  durant  quelqucsjours.  |  endant  les- 
(;ue's  on  fera  loul  ce  (jue  l'on  pourra  pour 
la  f  ire  rentrer  dans  son  devoir,  soit  par  des 
remontrances  charitables,  soit  par  des  cor- 
recli  ins  sévères  ;  et  si  apr.''S  cela  elle  persé- 
vère dans  son  obstination,  l'évéque  doit  ac- 
corder la  dispense  de  ses  vœux  et  la  renvoyer 
dans  le  monde. 

Leur  liabillemei'.t  est  honnête  et  modeste, 
d'une  étolTe  commune  de  laine  noire,  qui  ne 
doit  poini  avoir  éié  pressée  ni  lustrée  ;  lo 
corps  de  l'habit  doil  étresiins  tailb',  les  man- 
ches simples  et  il'uno  l.irgeur  médiocre,  dont 
la  longueur,  quaud  elles  sont  étendues,  va 
jusqu'au  bout  delà  main;  la  longueur  des 
jupes  ne  doit  point  toucher  à  terre,  et  leurs 
souliers  doivent  élre  noirs  cl  sans  faç  n. 
Elles  portent  un  bandeau  de  toile  blanchi! 
sur  le  front,  une  coiffe  loile  simple  aussi  do 
toile  blanche  qui  se  joint  avec  une  épingle 
sous  le  menton,  une  auire  petite  coiffe  do 
t.iffelas  noir  qu'elles  ont  toujours  dans  la 
maison,  en  forme  do  pelil  voile;  et  quand 
elles  sortent,  elles  metient  une  grande  coiffe 
de  taffetas  noir  comme  les  dames  du  monde. 
Elles  onl  sur  les  épaules  un  mouchoir  sim- 
ple de  toiie  blanche,  et  porlenl  sur  la  poi- 
trine une  croix  de  bois  noir  avec  un  christ 
de  cuivre  jaune,  et  à  la  ceinture  un  cliapelit 
noir.  Les  sirurs  servantes  sont  habillées  do 
même  façon,  exce;  té  (juc  leurs  babils  sont 
d'une  étoffe  plus  grossière  cl  tiu'elles  ne  per- 
lent ni  coilTcs  de  taffetas,  ni  baudeaux,  ni 
crucifix  (I). 

G  rmuic  il  y  a  dans  jilusicnrs  villages 
quanii'.é  de  piiuvrcs  filles  qui  sont  appelées 
(le  Dieu  à  une  vie  pure  cl  retirée  du  monde, 
1rs  s(i>urs  de  S  .int-Joseph,  avec  la  |)ermis- 
siou  lie  l'évéque  cl  de  ra>is  du  Père  spirituel, 
peuvent  agréger  à  leur  congrégalion  ces 
sortes  de  pauvres  lilh  s, c  t  en  établir  d.ins  ces 
mêmes  vlllaijes  de  [ictilcs  cuuiiuuu.iulcs  du 


(I)  Voy.,  a  U  lin  du  vul.,  n    lol^. 


613S 


JOS 


Iroisou  qualrc  seulement.  On  les  appelle  les 
sieurs  agrégées,  et  dépendent  de  la  supé- 
rieure de  la  plus  prochaine  maison  des  sœurs 
(le  Saint-Joseph,  laquelle  doit  veiller  sur  elles 
et  sur  leur  cimduile,  les  corriger  et  donner 
avis,  s'il  est  nécessaire,  des  choses  qui  se 
passent  entre  elles,  au  Père  spirituel  qui  lis 
doit  visiter  au  moins  une  fois  l'année,  aussi 
bien  que  les  sœurs.  Ces  agrégées  sont  habil- 
lées de  la  mému  façon  que  les  Sd'urs  de  la 
congrégation,  à  la  réserve  que  tant  dedans 
que  dehors  la  maison  elles  ne  portent  qu'une 
simple  coiffe  de  toile  blanche  et  jamais  de 
noires,  et  leur  crucifix  doit  être  un  peu  plus 
pelil  que  celui  des  sœurs  de  la  congrégation. 
Avant  que  de  prendre  l'hahil,  elles  demeu- 
rent au  moins  trois  mois  dans  la  maison  des 
sœurs  agrégées,  après  lesquels  la  supérieure 
de  celte  maison  les  fait  examiner  par  la  su- 
périeure des  sœurs  de  la  rongrégalioii,  et,  si 
elles  sont  reçues  ,  on  leur  donne  l'habit  de 
sœur  agrégée  sans  aucune  cérémonie.  Elles 
font  aussi  deux  ans  de  noviciat,  après  les- 
quels elles  font  seulement  trois  vœux  sim- 
ples de  pauvreté,  de  chastelé  et  d'obéissance 
perpétuelle,  tant  qu'elles  demeureront  parmi 
les  sœurs  agrégées,  en  sO;te  que  soit 
qu'elles  en  veuillent  sortir,  ou  qu'elles 
en  soient  expulsées  pour  quelque  faute  con- 
sidérable, elles  sont  absolument  libres  de 
Kurs  vœux  sans  autre  dispense.  Elles  doi- 
vent observer  autant  qu'il  leur  est  possible 
les  règles  prescrites  par  les  constitutions  des 
sœurs  de  la  congrégation  ;  mais  elles  ne  sont 
point  obligées  comme  elles  à  dire  l'office  du 
Siint-Espril  ni  celui  de  la  Vierge  ,  non  plus 
que  les  litanies  de  Jésus,  de  la  sainte  Vierge 
et  de  saint  Joseph.  Néanmoins  si  elles  savent 
lire,  et  qu'elles  aient  le  temps,  on  leur  per- 
met de  dire  en  commun  ou  en  particulier 
l'office  de  la  Vierge.  11  n'y  a  point  dans  leurs 
communautés  d'assistantes;  mais  en  l'ab- 
sence des  supérieures,  les  plus  anciennes  de 
profession  tiennent  le  premier  rang  et  gou- 
vernent les  maisons. 

Consliluiions  pour  la.  Congrégation  des 
Sœurs  de  Saint-Joseph. 

JOSEPH  (Filles   séculières  hospitahèues 

DE  Saint-). 

Des  filles  séculières  Hospitalières  de  la  so- 
ciété de  Saint-Joseph  pour  le  gouvernement 
des  filles  orphelines,  comme  aussi  des  reli- 
gieuses de  la  même  société,  dites  les  Filles  de 
la  Triniié-Créée. 

Le  cardinal  François  ti'Escoubleau  de  Sour- 
liis,  archevêque  de  Bordeaux,  qui  non-seu- 
lement avait  procuré  à  son  diocèse  rétablis- 
sement dos  Uisulines  dans  sa  ville  métropo- 
litaine, mais  avait  encore  contribué  à  la 
fondation  de  l'ordre  des  filles  de  Notre-Dame, 
qui  avait  pris  naissance  dans  la  même  ville, 
dont  l'inslilut,  aussi  bien  que  celui  des  Ur- 
sulincs,  est  d'instruire  les  jeunes  filles^ 
comme  nous  dirons  à  l'article  qui  porte  ce 
nom  ;  voyant  que  ces  religieuses  ne  pou- 
vaient élPnilre  leurs  exercices  et  leur  tra- 
vail jusqu'aux  pauvres  orphelines  de  père  et 


JOS  fi9l 

do  mère,  abandonnées  et  délaissées  sans 
aucun  appui  pour  être  élevées  chréiienne- 
mcnt,  approuva  le  zèle  de  quelques  filles  et 
veuves  qui,  s'étant  unies  ensemble,  s'em- 
ployaient à  l'instruction  de  ces  filles  orphe- 
lines, et  conçut  dès  lois  la  pensée  de  former 
une  société  de  ces  filles  et  de  ces  veuves, 
qui  vivraient  en  commun  et  recevraient 
charitablement  les  filles  orphelines  pour  les 
élever  dans  la  piété  chrétienne  et  dans  la 
pratique  de  toute  sorte  de  vertus;  mais  ce 
pieux  cardinal  étant  morl  l'an  1628,  son 
dessein  ne  put  être  entièrement  exécuté  de 
son  vivant. 

Ce  fut  son  frère  et  son  successeur  dans 
l'archevêché  de  Bordeaux,  Henri  d'Escou- 
bleau  de  Sourdis,  qui  acheva  ce  qu'il  avait 
commencé.  Une  sainte  fille  nommée  Marie 
Delpcch  de  l'Estang  était  celle  qui  avait  reçu 
dans  une  maison  ces  filles  orphelines,  dont 
elle  prenait  soin,  avec  quelques  filles  et 
quelques  veuves  qui  s'étaient  jointes  à  elle 
pour  cette  œuvre  charitable  ;  mais  celte 
maison  n'étant  p.is  suffisante  pour  contenir 
le  grand  nombre  d'orphelins  qui  se  présen- 
taient, elle  acheta  trois  autres  maisons  joi- 
gnantes pour  l'agrandir,  et  elle  en  fit  dona- 
tion aux  orphelines  le  ii  avril  1633,  par  un 
contrat  qui  fut  accepté  en  leur  nom  par  les 
grands  vicaires  de  l'archevêque.  Ce  prélat, 
par  un  acte  du  16  juin  de  la  même  année, 
approuva  cette  donation,  et  érigea  cette 
maison  en  société  ou  congrégation  de  filles 
et  de  veuves  sous  le  titre  de  Société  des  sœurt 
de  Saint-Josephpour  le  gouvernement  des  or- 
phelines, voulant  qu'elles  s'employassent 
non-seulement  à  l'instruclion  de  ces  pau- 
vres filles,  mais  qu'elles  pourvussent  à  leur 
eniretien  et  à  leur  nourriture.  Il  voulut  aussi 
que  ces  sœurs  vécussent  en  commun  sous 
son  autorité  et  sa  direction  en  faisant  un 
vœu  simple  d'obéissance,  et  il  leur  prescrivit 
des  règles  et  des  constitutions  (ju'elles  sui- 
virent jusqu'en  l'an  1652  ,  que,  pour  l'avan- 
cement de  cette  société,  on  en  dressa  de 
nouvelles,  qui  furent  encore  approuvées 
par  le  même  prélat  et  confirmées  par  l'un  de 
ses  successeurs,  Louis  d'Anglure  de  Bourlc- 
moat,  l'an  1694. 

Cet  établissement  fut  autorisé  par  lettres 
patentes  du  roi  Louis  XIII  du  mois  de  mai 
lG3t),  par  lesquelles  Sa  Majesté  permit  aux 
sœurs  do  celte  société  de  recevoir  toutes 
sortes  de  donations,  legs  et  aumônes,  tante» 
meubles  qu'en  immeubles,  pour  être,  les 
deniers  ou  revenus  en  provenant,  employés 
à  l'instruction,  nourriture  et  entretien  des 
tilles  orphelines,  comme  les  autres  hôpitauxL 
el  communautés  pourraient  faire;  ce  qui  fut 
confirmé  par  le  roi  Louis  XIV  par  d'autres 
lettres  patentes  du  mois  de  mai  1673,  qui  fu- 
rent enregistrées  en  l'hôtel  de  ville  de  Bor- 
deaux par  un  arrêt  du  parlement  de  la  même 
ville  du  27  avril  1674. 

D'abord  il  ne  pouvait  y  avoir  dans  celte 
maison  plus  de  sept  sœurs  pour  l'instructiou 
des  orphelines  ;  mais  le  nombre  de  ces  pau- 
vres li  les  étant  augmenté,  on  a  aussi  aug- 
menté celui  des  sœurs  ;  et   présentement  il  y 


(;■;:, 


IIICTION.NMUF.  DLS 


PU  a  douze  du  clurur  cl  scpl  sœurs  domrsli- 
HUi-s.  I,(  s  unes  soiil  doliiiccs  .i  approndre  à 
lire  cl  à  écrire  aux  urphclinos,  les  autros  à 
leur  a|)prcndrc  lous  les  ouvra;;ps  qui  cnii- 
\ieiiui'iil  aux  |iors(in;ics  de  leur  sexe,  el  le 
profil  i|ue  la  maison  retire  de  re  Irav.ril  csl 
son  r(Mi'nu  le  plus  liquide,  n'ayaiU  que  Irès- 
peu  de  renies  fixes,  la  plupart  tnême  provc- 
nanl  des  dois  que  les  sœurs  onl  apportées 
en  entrant  dans  celte  maison  :  c'est  ce  qui 
les  a  aussi  obligées  à  rccrvoir  de  jeunes  fil- 
les pensionnaires,  qui  sont  élevées  chez  elles 
dans  toutes  sortes  de  vertus. 

Présentement  ces  sœurs  de  Saint-Joseph 
ne  reçoivent  plus  de  veuves,  et  elles  ont 
ajoute  le  V(eu  de  chasteté  à  celui  d'obéissance, 
auquel  elles  étaient  seulement  obligées  dans 
le  coaimencement  de  leur  établissement; 
mais,  quoiqu'elles  ne  fassent  pas  celui  de 
pauvreté,  aucune  sœur  néanmoins  ne  peut 
rien  avoir  en  particulier,  et  ne  peut  rien 
ilonnerà  l'insu  de  la  supérieure,  qui  doit 
pourvoira  toutes  leurs  nécessités.  Elles  di- 
sent eu  commun  tous  les  jours  le  petit  office 
«le  la  Vierge.  Elles  onl  demi-heure  d'or.iison, 
le  malin  avant  prime  etautant  l'après-dinée  ; 
avant  le  souper,  après  la  récréation  du  diiier, 
ellc'i  vont  devant  le  saint  sacrement,  où  elles 
récitent  les  litanies  des  saints:  elles  travail- 
lent ensuite  en  commun  jusqu'à  trois  heu- 
res, et  elles  gardent  toutes  ensemble  le  si- 
lence pendant  une  heure.  A  sept  heures 
trois  quarts  du  soir,  elles  disent  matines  et 
laudes  pour  le  jour  suivant,  et  ensuite  elles 
font  l'examen  de  conscience,  et  disent  les 
litanies  de  saint  .loseph.  Outre  les  jeunes 
ordonnés  par  l'Kglise,  elles  jeûnent  encore 
lous  les  samedis  el  les  veilles  des  fêles  so- 
Icnn  Iles  de  la  sainte  >'ierge.  Tous  les  ans 
elles  font  une  retraile  de  huit  ou  dix  jours, 
et  elles  renouvellent  aussi  une  fois  l'an 
leurs  vœux,  dont  voici  la  formule  :  Je  .V. 
donne  d  dédie  ma  personne  à  la  Société  de 
Saint -Joseph,  puur  l'inslmclion  et  poxir  Vé- 
duculiun  des  filles  orphelines,  pour  y  viirc  et 
mourir  ;  el  fais  vœu  à  Dieu  de  cliasieté  et  d'o- 
béissance en  icelle,  conformément  à  notre 
institut  ;  lesquels  vœur  je  garderai  moyen- 
nant sa  fainle  grâce,  suppliant  la  divine 
bonté  que  ce  soit  ù  sa  p/us  yiandc  gloire  et  à 
mon  salut.  Ainsi  soii-il.  {)\\:\n\.  à  leur  ha- 
billement, il  est  noir  eu  la  forme  que  l'on 
peut  voirdans  la  figure  qui  représente  une 
de  ce?  su'urs  de  Bordeaux  (1),  qui  a  éle  gra- 
vée sur  un  dessin  qui  m'a  élé  envojé  par 
la  sœur  Jean  lierland,  supérieure  de  ccite 
maison.  Les  sii'urs  domestiquas  sont  liuliil- 
lées  de  même  que  les  sieurs  du  chœur  :  ce 
qui  les  distingue  seulement,  c'est  que  le 
mouchoir  de  cou  des  sœurs  du  chœur  csl 
rond  par-devant  el  par  derrière,  el  que  ce- 
lui il(  s  sœur>  domestiques  est  en  pointe  par 
derrière. 

Quoique  celle  maison  de  Hordeanx  ail 
produit  celles  de  Tans,  de  Itoiieii,  de  Tou- 
l"Use,  d'Agen,  lie  Litnogei  el  de  l.i  Ittx  hrlle, 
qiii    reconnaissent    aussi     pciur    (oulairce 


oi'.niii.s  UF.Lir.iEUx.  nos 

mademoiselle  Delpech  de  lEslnng,  néan- 
moins, comme  ces  maisons  sont  situées  dans 
différenls  diocèses,  elles  ont  toutes  des  cons- 
tilulions  différentes  (|iii  leur  ont  été  données 
par  les  prêtais  de  ces  dio 'èses.  Les  sœurs 
de  cet  institut  dans  ces  diiïerenls  diocèses 
sont  distinguées  aussi  les  unes  des  autres 
par  des  hal>iilemenls  difféienis.  Celles  de  la 
Uoclielle  et  de  Limoges  ont  même  embrasse 
l'état  régulier  sous  la  règle  de  suint  Augus- 
tin, et  celles  de  Itoucn  se  sont  conlenlécs 
d'en  prendre  l'habit,  sans  s'eng  igcr  par  des 
vœux  solennels.  Nous  ne  parlerons  ici  que 
de  celles  de  Paris  el  de  la  lUicheile,  de  qui 
nous  aïons  reçu  dos  mémoires. 

Après  que  l.i  maison  de  l!orde:iux  eut  élé 
érigée  en  société,  et  que  cet  institut  cul  élé 
autorisé  par  lettres  patentes  du  roi  Louis  XIII, 
comme  nous  avons  dit  ci-dev;ml,  mademoi- 
selle  Delpech  fut  appelée  à  Paris  pour  y 
faire  un  pareil  établissenient  au  faubourg 
Saint— Gernijiin,  près  de  I>ellechas«c  ;  et, 
comme  elle  avait  éprouve 'es  ellets  de  la  di- 
vine providence  dans  rétablissement  de  la 
maison  de  Bordeaux,  elle  donna  à  la  maison 
de  Paris  le  litre  de  Divine  l'roiJenee,  el  les 
sœurs  de  celle  maison  ont  toujours  élé  ap- 
pelées, depuis  ce  lemps-là  jusqu'à  prcseni, 
les  filles  de  Saint-Joseph,  dites  de  la  Provi- 
dence. La  duchesse  de  Morlemart,  Diane  de 
Grandseigne,  contribua  beaucoup  par  ses 
aumônes  el  par  ses  libéralités  à  cet  établis- 
sement, et  la  marquise  de  .Mouiespan  sa  fille, 
ayant  choisi  cette  maison  pour  retraile,  y  a 
f.iit  faire  de  beaux  bâtiments.  Ce  fut  dans  ce 
lieu  que  mademoiselle  Delpech  de  l'Eslang 
mourut  le '21  décembre  1C71,  dans  un  âge 
très-.ivaiicé,  ajirès  avoir  eu  la  consolation 
de  voir  loules  les  maisons  de  son  institut 
solidement  établies. 

Les  sœurs  de  celle  maison  suivent  pré- 
sentement les  consiiUiliiins  qui  onl  clé  ap- 
prouvées par  l'archevêque  de  Paris  Fran- 
çois de  ILirlay  de  Ch.impvaloa,  l'au  1G91. 
Conformément  à  ces  consliluiioiis,  elles 
doivent  avoir  soin  des  filles  nobles  ou  d'Iiou- 
nète  famille  qui,  ét.int  pauvres  ou  orphe- 
lines, n'ont  pas  le  moyen  de  se  donner  une 
bonne  éducation  el  de  se  former  dans  le 
travail  ;  c'est  pourquoi  en  leur  apprenant 
les  principes  du  christianisme,  à  lire,  à 
écrire,  et  en  les  élev.int  dans  la  pratique  de 
loules  sortes  de  vertus,  on  leur  apprend 
aussi  lous  les  ouvrages  qui  conviennent  à 
leur  sexe,  afin  d'avoir  par  leur  trav.iil  une 
ressource  contre  lu  pauvreté  el  une  honnête 
occupation  pendant  leur  vie.  Les  sœurs  s'en- 
gagent à  cette  iiislruclion  par  des  vœux  sim- 
ples après  deux  ans  de  noviciat.  La  commu- 
nauté peut  renvoyer  né:inmoins  une  sœur 
après  sa  profession  pour  eerliiines  failles 
niarquées  dans  les  c.mslitutions  ;  mais  cel- 
les (]u'ou  est  obligé  do  congédier  ne  peuvent 
rien  prétendre  pir  forme  Me  réioinpeiise  ou 
de  s.'ilaire  |iour  les  seri  iees  qu'elles  ont  ren- 
dus pendant  le  temps  qu'elles  ont  été  dans 
la  maison.  On  leur  lit  cel  article  des  consli- 


(•)  'ej/  ,  il  la  (In  .lu  vol  .  n    IG(>. 


r.'jT 


JOS 


JOS 


es 


liilions  devant  leur  profession,  auquel  elles 
prouioltenl  de  se  souincltre,  el  on  l'insère 
dans  l'acle  qui  csl  dressé  par-dcyanl  notai- 
res pour  leur  .'issncialion  à  la  maison. 

Tous  les  jours  elles  disent  en  commun,  au 
rlireur,  le  pclil  olfice  de  la  Vierge  ;  elles  ont 
ilomi-heure  d'oraison  mentale  lo  malin  el  au- 
tant l'après-dînce.  Avant  la  me-se  de  com- 
munauté, qui  se  dit  tous  les  jours  à  si\  heu- 
res ,  elles  cliantont  le  Veiii  Crenlor  avec 
quelque  antienne  du  saint  sacrement  à  l'élé- 
vation et  au  temps  de  la  communion.  Après 
la  messe,  elles  chanient  Y E xaudial  pour  le 
roi,  et  elles  disent  les  litanies  de  saint  Jo- 
Ecph.  Tous  les  jnurs  une  des  sœurs  de  la 
communauté  communie  pour  madame  de 
Montespan,  leur  bienfaitrice;  et  tous  les  ans 
elles  doivent  faire  tmc  retraite  de  six  jours  , 
pour  le  moins.  Voici  la  formule  de  leurs 
vœux  :  Au  nom  du  Père,  du  Fils  et  du  Saint- 
Esprit,  Je  N.,  de  la  ville  et  du  diocèse  de  N., 
promet<  à  Dieu  7non  créateur  et  mon  sauveur, 
lie  garder  la  chasteté ,  la  pauvreté  et  l'obéis- 
sance, tant  que  je  demeurerai  dans  cette  com- 
munauté des  Sœurs  de  Saint-Joseph,  établies 
flans  le  faubourg  de  Saint-Germain  des  Prés, 
à  laqu'lle  je  m'engage  selon  les  constitutions 
4e  cette  commun  lulc  approuvées  par  monsei- 
gneur notre  archevêque ,  entre  les  mains  de 
N.  supérieur  ,  et  en  la  présence  de  ma  sœur 
2V.,  supérieure,  et  de  toute  la  communauté.  Ce 
fjuej'ai  signé  de  ma  main  ce  N-  du  mois  de  N. 
de  l'an  N. 

Les  sœurs  de  cette  communauté  onl  voulu 
faire  approuver  leur  institut  par  autorité 
apostolique  ;  elles  ont  même  obtenu  à  cet 
effet  une  bulle  du  pape  Innocent  XII.  Mais  , 
suit  (|ue  la  bulle  ne  fût  pas  confirme  à  la 
supplique  qu'elles  avaient  présentée,  ou  pour 
quelque  autre  raison  ,  elles  n'ont  pas  reçu 
cette  bulle,  qui  jusqu'à  présent  u'a  eu  aucun 
lieu  (l;. 

Vers  l'an  lG6i  ,  les  sœurs  du  même  insti- 
tut de  la  maison  de  La  Hochelle,  qui  avaient 
éié  établies  dans  cette  ville  dès  l'an  1G50  , 
voulurent  embrasser  l'état  régulier;  et  ap- 
paremment que  ceux  qui  en  avaient  la 
conduite ,  en  leur  inspirant  de  faire  des 
vœux  solennels,  voulurent  qu'elles  jetassent 
les  fondements  d'un  ordre  tout  particulier 
dans  l'Eglise  dont  ils  formèrent  le  projet,  et 
dn.'ssèrentdes  règles  et  des  constitutions,  qui 
furent  imprimées  à  Paris  la  même  année 
1<;G4,  sous  le  titre  d'Institut,  Règle  ou  Cons- 
titutions des  Filles  de  liTrinilé-Créée,  dites 
Religieuses  de  la  (Jongrégation  de  Sainl-Jo- 
spph,  instituées  pour  l'éducalion  des  filles  or- 
phelines dans  la  ville  de  La  RochcUe. 

Ce  qui  regarde  l'institut  est  compris  dans 
cinquante  paragraphes.  Dans  le  premier,  il 
est  parlé  de  la  fin  de  cet  institut,  qui  est 
d'avoir  soin  de  l'éducation  des  pauvres 
orphelines  et  de  les  élever  dans  la  perfection 
ei  la  praiique  de  toutes  sortes  de  vertus,  de- 
puis l'âge  dt-  huit  à  neuf  ans  jusqu'à  quinze 
l't  seize ,  qu'elles  sont  placées  en  service. 
Dans  le  second  ,  il  est  dit  que  les  filles  de 


celle  con|;rcga(ion  seront  sous  la  prolccliou 
de  .lésus,  de  Marie,  et  de  Joseph  ;  que  pour 
celle  raison  elles  seront  nommées  les  billes 
de  la  Triiiiti -Créée;  qu'elles  en  poiteront  les 
marques  dans  leurs  habits;  que  la  robe  re- 
])réseiilera  eell' de  saint  Joseph  ,  et  qu'elle 
sera  violelh?  po  ir  marque  de  son  humilité  ; 
que  le  scapulaire  sera  de  pourpre  poui'  si- 
gnifier la  rolic  de  pourpre  de  Noire-Sei- 
gneur, et  que  le  manteau  et  le  voile  seront 
(le  couleur  céleste  ,  à  cause  de  la  sain  e 
Vierge,  qui  es:  reine  du  c  el. 

Le  nombre  de  trente-trois  filles  est  fixé 
pour  chaque  maison  ,  en  l'honneur  des 
trente-trois  ans  que  Jésus-Christ  a  vécu  sur 
la  terre.  Il  ne  leur  était  permis  d'avoir  que 
deux  cents  livres  de  rente  chacune  pour  leur 
nourriture  et  pour  leur  entreli^'u  ,  et  sur  le 
total  des  pensions,  cinq  sœurs  converses  de- 
vaient passer  pour  les  offices  pénibles  do  la 
maison.  On  devait  faire  un  fonds  solide  qui 
ne  pouvait  être  emjilojé  à  autre  chose  que 
pour  leur  subsistance,  quelque  besoin  et 
quelque  nécessité  qu'il  y  eût. 

Le  nombre  des  trente-trois  filles  étant 
rempli,  elles  pouvaient  recevoir  d'autres  fil- 
les ou  veuves  sur  le  pied  de  quatre  cents  li- 
vres do  pension  ,  dont  deux  cents  pour  leur 
nourriture  el  leur  entretien  ,  et  les  autres 
deux  cents  pour  les  orphelines  ,  auxquelles 
ell  s  devaieni  en  laisser  le  fonds  par  don  ition 
simple  trois  jours  avant  de  prononcer  leurs 
vœux,  et  on  les  rece.ail  ainsi  coinmo  bien- 
faitrices. Il  leur  était  p  rmis  aussi  de  rece- 
voir des  séculières  associées  à  l'ordre,  enga- 
gées aux  mêmes  oblig<ilio:i£  que  les  religieu- 
ses, à  l'exception  des  vœux  solennels  el  de  la 
clôture  ,  et  elles  devaient  faire  donation  do 
la  moitié  de  leurs  biens  aux  orphelines  irois 
jours  avant  que  de  faire  leurs  vœux  simples. 
Quoique  ces  associées  ne  fissent  pas  vœu  do 
clôture,  elles  ne  devaient  pas  néanmoins 
sortir  sans  la  permission  de  la  supérieure  , 
elles  devaient  pratiquer  la  pauvreté  aussi 
exactement  que  les  sœurs  de  la  comomnauté, 
elles  devaient  avoir  soin  de  placer  en  condi- 
tion ou  en  service  les  oi  phelines  qui  avaient 
été  élevées  dans  la  maison  ,  cl.es  devaient 
rei;dre  visite  aux  bienfaiteurs  et  aux  amis  , 
et  elles  ne  devaient  sortir  (|u'avec  une  com- 
pagne. Leur  habillement  devait  être  sembla- 
ble à  celui  des  séculières,  elles  devaieni  être 
reçues  comme  les  sœurs  de  la  communauté 
à  trois  mois  de  probation  et  deux  ans  de  no- 
viciat, et  à  l'âge  de  vingl  ans,  elles  pou- 
vaient faire  les  vœux  simples  de  chasteté,  de 
pauvreté  el  d'obéissance. 

Toutes  les  maisons  de  cet  ordre  ne  de- 
vaient faire  qu'un  même  corps,  et  s'enlr'ai- 
der  les  unes  les  autres  dans  les  besoins  tem- 
porels ;  et,  afin  de  conserver  le  même  esprit 
partout,  elles  devaient  être  gouvernées  pour 
le  spirituel  (sous  la  dépendance  néanmoins 
des  ordinaires)  par  des  prêtres  qui  devaient 
aussi  former  une  congrégation  du  même  in- 
stitut, qui  s'y  devaieni  donner  par  vœu  el  s'y 
consacrer  en  y  donnant  leurs  biens  et  leurs 


(1)  Voij.,  à  la  fni  du  vol.,  n"  Uû. 


603 


DICTION.NAIUE  DES  OKDiiES  RELIGIEUX. 


possessions  Irois  jours  avant  leur  eiigagc- 
nifiii.  Ils  no  pouvaient  pas  aussi  être  plus 
(le  Irontc-iruis  ilans  clia^iue  maison  ;  mais 
ils  (ouvaiont  assoe-er  et  recevoir  à  leur  con- 
çrétî.ilion  des  liicnraitours  autant  et  lic  même 
«luo  les  lilles  ,  el  aux  inèuies  rondilinns. 
liiai.l  lorniés  clans  une  soiiile  vertu  ,  ou  de- 
vait les  «nvover  dans  les  maisons  de  filles 
pour  en  prendre  la  conduite  en  ciualilé  de 
superii'urs  el  de  confesseurs,  et  ils  ne  pou- 
vaient pas  élre  continués  plus  de  six  ans 
dans  la  même  maison,  après  lesquels  ils  de- 
vaiint  retourner  à  leur  comniunaulé  où  ils 
demeuraient  au  moins  trois  ans  sous  l'obcis- 
Miuco,  et  on  pouvait  ensuite  lesienvo^er 
dans  la  même  maison  de  filles  dont  ils  étiiienl 
sortis.  Knlin  ces  pri^lres  devaicr.l  avoir  un 
général  et  !cs  lilles  une  générale  dont  l'office 
aurait  été  à  vie,  el  ce  général  et  cette  géné- 
rale pouvaient  nommer  celui  ou  celle  qui 
devait  leur  succéder.  L'un  et  l'autre  devaient 
demeurer  dans  la  même  ville  pour  agir  tou- 
jours de  concert  dans  les  alTaires  de  Tordre  , 
e(  ils  devaient  fiiri^  la  visite  des  maisons. 
Tels  étaient  les  principaux  articles  qui  re- 
gardaient rinstilul  en  général. 

Les  cOMStilutions  sont  divisées  en  six  par- 
lies.  Il  est  encore  parlé  dans  la  i)rcmiére  de 
la  fin  de  l'inslilut ,  de  la  Mère  générale  et 
des  .Mères  supérieure  ,  adjulrice  ,  direciricc, 
assistantes  ou  conseillères  ;  de  la  maltresse 
cl  sous-maîtresse  des  novices  et  des  sœurs 
bienfaiiric'S.  Dans  la  seconde,  on  parle  des 
vœux  en  général  et  en  particulier,  de  la  pau- 
vreté, de  la  chasteté  ,  de  l'obéissance  ,  de  l,i 
clôiure  ,  du  noviciat ,  de  la  profession  ,  des 
novices  et  des  jeunes  professes.  \'oici  la  for- 
mule des  vœux  :  Cinix,  écoulez  ce  que  je  dis, 
que  la  leire  entende  le  j)ropos  de  mu  bouche  ; 
c'est  à  tous  ,  6  mon  aimable  Sauveur,  à  qui 
mon  ccrur  parle,  bien  que  je  ne  sois  que  pou- 
dre et  cendres.  Je  Sœur  ^.  donne  el  drdie  ma 
personne  à  la  Congrégation  des  Sœurs  de 
Siiint-Josepli  élablic  pour  t'inslruclion  et 
éiluciition  dts  filles  orphelines  ,  piiur  y  vivie 
et  mourir,  el  fuis  iwu  de  pauvreté  ,  de  chas- 
teté, obéissance,  el  d'instruire  et  élever  les 
pauvres  filles  orphelines  en  gardant  la  clô- 
ture, conformément  à  notre  institut.  Lesquels 
xœux  je  promets  à  mon  Dieu  el  à  vous  iV.  de 
garder  l'^ul  le  temps  de  ma  vie  moi/cnnant  sa 
sainte  grâce,  snppliint  su  divine  boulé  que  ce 
soit  à  sa  plus  grande  gloire  't  à  mon  salul. 
Ainsi  soit-il. 

Dans  la  Iroisième  partie  de  ces  conslitu- 
lions,  il  est  p.jrlé  des  scrurs  m  généial,  île  la 
eliarilé  mutuelle  ,  des  j<  Unes,  des  abstinen- 
ci  s  ,  de  la  discipline,  de  l'oraison  .  de  l'of- 
fict!  divio,  des  prières  vocales,  de  l'usage  des 
sacrement-,  des  conle>seurs  cxtraor.iinaircs, 
do  la  retr.iite  ,  de  la  rénovation  des  vti-ux  , 
du  vilenee  et  des  aulrc-<  pra  i(iues.  Les  jeû- 
nes et  1rs  .'ibslinences  à  ijuci  ces  constitu- 
tions les  obli;;eaienl  n'étaient  pas  considera- 
l)les  :  outre  les  jeûnes  ordonnes  par  I  l'"gli«e, 
elles  devaient  encore  jeûner  les  \eilles  des 
féic»   de   Nolrc-Scigneur  ,  de  la  Vierge  ,  de 


700 

saint  Jose|ih,  de  saint  Augustin.  Quoiqu'elles 
ne  fussent  pas  obligées  de  jeûner  les  ven- 
dredis ,  elles  ne  pouvaient  pas  néanmoins 
avoir  de  pitance  le  soir,  et  ne  devaient  faire 
que  coilation.Tous  les  samedis  i  Iles  devaient 
prendre  la  discipline  en  com  Minaulé,  i  t  tous 
les  vendredis,  les  veilles  des  fêtes  de  la  sainte 
Trinité,  de  saint  Joseph,  el  le  vendredi  saint, 
elles  devaient  recevoir  des  mains  de  la  supé- 
rieure eu  esprit  de  pènileiiee  cin(|  coups  de 
discipline,  pour  honorer  en  ces  jours  la  lla- 
gellation  de  Nutrc-Seigneur  Jesus-(]hrist. 
Ces  constitutions  ne  les  obligeaient  qu'au 
petit  office  de  la  Vierge,  et  les  S(eurs  conver- 
ses devaient  récit'  r  seulement  ceri.in  nom- 
bre de  Pater  cl  ii' Ave.  Les  dimani  lies  et  les 
fèti  s,  elles  divaienl  chanter  la  messe  el  l'olfi- 
ce,  et  aux  autres  jours  seulement  psalmodier. 
Dans  la  quatrième  partie,  il  est  parlé  des 
lieux  réguliers,  du  cha|iilre,  de  la  coulpe,  do 
la  distribution  des  ouvrages,  des  cellules,  de 
riiabillement;  dans  la  cinquième ,  des  offi- 
cières  en  particulier;  el  dans  la  sixième,  de 
l'ordre  el  de  l'emploi  de  la  journée,  lanl 
pour  les  sœurs  que  pour  les  orpliclines  et 
les  pensionnaires.  Telles  furent  les  constitu- 
tions de  cet  ordre,  qui  n"a  fait  aucun  pro- 
grès, n'y  ayant  que  les  religieuses  de  la  Ko- 
clielle  qui  suivent  présentement  ces  consti- 
lulio  is,  et  qui  obtinrent,  le  21  juillet  IlitJ'i-, 
u:i  déc:et  du  card.nal  Fahio  Cbigi,  b'gal  en 
France  ,  pour  avoir  permission  de  faire  des 
vœux  solennels.  Mais,  comme  il  fallut  que 
ce  décret  fàt  autor.sé  par  lettres  patentes  du 
roi ,  enregistrées  au  parlement  de  Taris  et 
dans  les  justices  de  la  Rochelle,  el  (jue  ces 
religieuses  eurent  encore  besoin  du  conseii- 
lement  de  Tcvèque,  ce  qui  ne  se  fit  pas  s.ins 
oppositions ,  elles  ne  firent  leurs  vœux  so« 
Icnnels  que  Tan  1G72. 

lilles  avaient  pris  d'abord  l'habit  prescrit 
par  les  cons'.ilutions  ,  savoir  une  robe  vio- 
lette avec  un  scapulaire  de  pourpre,  un  maii- 
Icau  bleu  traînant  jusqu'à  terre,  une  guimpe 
et  un  voile  blanc  ,  sur  lequd  eibs  eu  mct- 
laienl  un  bleu  de  toile  claire  (I)  ;  mais,  en 
faisani.  leurs  vœux  solennels,  elles  ont  quille 
cet  habillement  pour  en  prendre  un  noir, 
qui  consi>te  en  une  rube,  un  scapulaire  et  un 
manteau  noir,  avec  un  grand  voi  e  (jui  est 
noir  aussi  (2).  Le  projet  d'établir  une  géné- 
rale s'est  évanoui,  aussi  bien  ()ue  I  èlaldisse- 
inent  de  I  i  Congrégation  de  prêtres  et  de 
leur  général.  Les  filles  de  Limoges  font  aussi 
des  Vieux  solennels,  et  sont  habillées  comme 
les  leligieuses  de  l.i  \  isitation  ;  mais  elles 
n'ont  pi  inl  de  croix. 

Telles  de  K  uen  ont  seulement  pris  Thabil 
religieux,  mais  elles  ne  font  (jue  des  vceux 
simples.  Liles  reconnaissent  aussi  pour  lon- 
d  ilnce  mademoiselle  iJelpccli  de  TLstang. 
Mad.ime  de  Hrébion  ,  saur  de  .M.  Il.inivelic 
de  .Mènevilletle,  receveur  général  du  dergé 
de  l''r,ince,  et  femme  de  M.  de  IJréhion,  maî- 
tre en  la  chambre  des  comptes  à  Kouen, 
donna  de  grand»  b;eus  à  celte  maison,  el, 
non   contente  d.;  ce. a  ,  elle  s  y  consacra  au 


UJ   Vvij.,  à  la  liu  du  vol.,  n*  166. 


('2)  Voij.,  à  h  (in  Jj  vol.,  n"'  WJ  cl  17U. 


70i 


JOS 


JOS 


702 


service  des  pauvres  orphelines  du  vivant  et 
du  conseiileinenl  de  son  mari.  M.  de  Mène- 
viilelle,  président  à  mortier  au  parlement  de 
Rouen,  en  a  élo  aussi  un  des  principaux  l)ien- 
fai:curs,  et  lui  a  donné  la  terre  et  seigneuiie 
de  Néauville,  à  une  lieue  de  celle  ville,  qui 
a  près  de  2,000  livres  lie  levenu.  L'an  1654, 
le  rni  acionla  à  celîe  ma  son  d'orphelines  des 
lettres  paleiiics  où  il  est  parlé  des  autres 
éiahlisscnicnls  du  même  institut  faits  à  Bor- 
deaux, à  Taris  et  à  Aj;en. 

Les  sœurs  de  Saint-Joseph  di'  Rouen  sui- 
vent pré>enlement  les  cousiitu  inns  qui  leur 
ont  été  données  l'an  1695  par  l'arclievéquc 
de  cette  ville  Jacques-Nicolas  Colbeil,  et, 
conformément  à  ces  constilulion'i,  outre  les 
jeûnes  ordonnés  par  l'Eglise,  el'es  jtûneul 
encore  tous  les  samedis  de  l'année  et  tnus 
les  vendredis  de  l'a  veut,  les  veilles  lies  fèics 
solennelles  de  Notre-Seigneur,  de  la  sainte 
Vierge,  d(  s  apôtres  et  de  saint  Michel;  n:a;s 
cjuand  ces  fêles  arriienl  un  veuiliedi  de  l'a- 
venl  ou  un  samedi  de  l'année,  elles  sont  dis- 
pensées de  jeûner  ces  jours-  à,  s'il  est  jeûne 
d'iîglise  les  veilles  de  ces  lèles.  Elles  disent 
au  ehœur  le  petit  office  t!e  la  \iergc.  Elles 
ne  vont  poiit  aux  parloirs  pendanl  ra\ent 
ni  pendant  le  carême;  et,  dans  un  autre 
temps,  elles  n'y  vont  qu';  ccompagnées  d'une 
écoule.  Le  nombre  des  sœurs  est  limité  à 
seize,  et  ne  peut  élre  augmenté,  à  moins  que 
le  nombre  des  orphelines  n'augmonle.  Elles 
font,  comme  nous  avons  dit,  le-'  vœux  sim- 
ples de  pauvreté,  de  chasteté,  d'oliéissance 
en  cette  man  ère  :  Je  N-  sœur,  me  confiant 
en  ta  grâce  de  Notre-Seigneur  Jésus  Christ, 
de  l:t  très-sainie  Vierge,  de  sa:nl  Joseph,  pa- 
tron et  prolecteur  de  cette  maison;  de  toits  tes 
anges  et  des  saints  de  païadis,  fais  vœu  à  Dieu 
de  pauvreté ,  île  clins  rté  et  d'obéissance,  pour 
m' imployer  au  servite  des  pauvres  or  phi  Unes, 
suivant  les  constitutions  de  la  Congrégation 
de  Saint-Joseph,  dont  je  déclare  avoir  eu  une 
particulière  et  parfaite  connaissance,  en  pré- 
sence de  notre  supérieur.  En  foi  de  quoi  j'ai 
écrit  et  signé  le  présent  acte,  etc.  Quant  à  leur 
habillement,  il  cons  sie  en  une  robe  de  griS 
obscur,  ouverte  seulement  jusqu'à  la  cein- 
ture, et  fermée  par  des  agrafes;  elles  oui  pour 
coifl'ure  un  petit  voile  blanc,  et  par-dessus 
Un  autre  voile  noir  d'élamine.  Elles  ont  aussi 
un  basideau  et  une  guin)pe  carrée,  et  au  bas 
de  cette  guimpe  une  médaille  d'argent  où 
d'un  coté  est  l'image  de  saint  Joseph  tenant 
l'enfant  Jésus  par  la  main,  et  de  l'autre,  l'i- 
mage de  la  suinte  Vierge  tenant  le  môme  en- 
fant entre  ses  bras  (I). 

Voyez  l'Institution  de  la  Société  des  Sœurs 
de  Saint^Josepli  pour  le  gouvernement  des  fil- 
les  orphelines  de  la  ville  de  Bordeaux,  impri- 
mée en  1708.  Constitutions  des  Filles  de  Saint- 
Jose,M  dites  de  la  Providence,  imprimées  à 
Paris  en  1(J91.  Institut,  Règles  et  Constitu- 
tions des  Filles  de  la  Trini:é-Créée,  imprimées 
à  Paris  en  lUti'i .  Constitutions  des  Fillis  Hos- 
pitalières de  la  Congrégation  de  Saint-Joseph 
pour  l'instruction  des  orphelines,  imprimées  à 


Rouen  en  1C9G;  et  Mémoires  envoyés  parles 
religieuses  de  la  Rochelle  en  1709. 

JOSEPH  (Hospitalières  de  Saint-). 

L'ordre  des  Hospitalières  da  Saint-Joseph 
a  commencé  par  une  commnnanlô  d-  filles 
séculières  établie  par  les  soins  de  mademoi- 
selle de  la  Ferre,  fille  d'une  grande  piété  et 
d'une  famille  distinguée  de  la  vi'le  de  la  Flè- 
che en  Anjou.  Gomme  elle  avail  un  attrait 
singulier  pour  l'oraison,  et  que  Dieu  lui  com- 
muniquait beaucoup  de  grâces,  ses  directeurs 
lui  conseillèrenl  de  se  retirer  dans  un  mo- 
nastère pour  y  faire  profession  de  la  vie  re- 
ligieuse; mais,  étant  tombée  malade  jusqu'à 
qualie  fis  lorsqu'elle  avait  voulu  exécuter 
ce  dessein,  elle  connut  que  Dieu  l'appelait 
ailleurs.  La  charité  la  porta  l'an  lC4'2à  pren- 
dre le  soin  des  ])auvres  de  l'hô;  ital  de  la 
Flèche.  Dans  le  même  temps,  mademoiselle 
de  Uibère,  fille  d'honneur  de  madame  la  prin- 
cesse de  Coudé,  étant  tombée  dangereuse- 
ment malade  à  Paris,  le  P.  Bernard,  dit  le 
Pauvre  Prêtre,  en  qui  elle  avait  beaucoup 
de  confiance,  lui  dit  que  si  elle  fais  lil  vœu 
de  quitter  le  monde,  «lie  recouvrerait  la 
santé.  Elle  le  fit  et  elle  fut  guérie.  Pour  exé- 
cuter son  vœu,  elle  vint  dans  un  monastère 
assez  proche  de  la  Flèche  pour  s'y  consacrer 
à  Dieu;  mais,  ne  se  sentant  point  d'inclina- 
lion  pour  y  demeurer,  on  lui  proposa  de  se 
joindre  à  mademoiselle  de  la  Ferre,  dont  la 
vertu  et  les  emplois  lui  étaient  connus.  Elle 
ne  crut  pas  pouvoir  mieux  accomplir  son 
vœu  qu'en  suivant  son  exemple.  Une  troi- 
sième fille  s'associa  <à  elles,  et  elles  allèrent 
toutes  tiois,  le  jour  de  la  Sainte-Trinité,  de— 
uKurer  à  rhôpilal  pour  prendre  soin  des 
pauvres.  La  même  année,  elles  eurent  dix 
aulres  compagnes  ,  et  leur  communauté 
s'auginentant  a  nsi  toi  s  les  jours,  l'évêque 
d'Angers,  Claude  de  Ru.  il,  leur  donna  des 
constitutions  qu'il  approuva  le  25  octobre 
1Gi3  Leur  nombre  devait  être  fixé  par  ces 
conslilulions  à  trente  filles  hospitalières  et 
six  sœurs  domestiques.  Tous  les  trois  ans, 
elles  devaient  élire  une  supérieure  le  22  jan- 
vier, fête  des  Epousaille^  de  la  sainteVierge. 
Après  avoir  demeuré  huit  ans  dans  la  con- 
grrgation,  elles  iaisaienl  des  vœux  simples 
de  (  hasteté,  de  pauvreté  et  d'obéissance,  et 
de  s'employer  au  service  des  pauvres;  mais 
elles  ne  s'engageaient  que  pour  trois  ans, 
pour  un  an,  ou  pour  quelque  autre  espace 
de  temps,  après  lequel  elles  renouvelaient 
leurs  vœux  pour  un  autre  temps.  Leurs  ha- 
l)its  étaient  simples  et  modestes,  et  consis- 
taient en  une  robe  fermée  par-devant  avec 
des  crochets  et  des  portes,  en  forme  de  sou- 
tane un  peu  ample,  serrée  sur  les  reins  avec 
une  ceinture  de  laine,  un  corset  et  une  jupe 
par-dessous,  le  tout  de  serge  noire.  Les  filles 
hospitalières  portaient  une  coiffe  noire  avec 
un  mouchoir  de  cou,  et  les  sœurs  domesti- 
(■,ues,  un  capot  tl'étamine  avec  un  mouchoir 
de  cou,  dont  la  toile  était  plus  grosse  que 
ceux  des  filles,  et  l'ou  donnait  aux  unes  et 


(IJ  Voij.,  à  1.1  lin  du  vol  ,  u"  171. 


703 

.TUS  nulrps.  lorsqu'elles  avaienl  prononcé 
leurs  vtrux,  une  li.i^uc  d'arjîcnl,  où  il  y  ■'vail 
en  éeril  autour  :  Ji'sus.Marie.  Joseph,  iiu'cl- 
les  i)i>riaicMl  au  petit  doitit  de  la  main  gau- 
che (1). 

A  peine  relie  coiiprégalion  ful-cllc  établie, 
qu'elle  reçut  un  i^r.mil  avantage  par  la  pré- 
seiirede  la  prinfe>se  d'Kpiiioy,  Aune  de  Mc- 
lun,  (ille  de  Guillaume  de  Mclun.  Celle  prin- 
cesse avait  été  pendant  plus  do  vingt  ans 
chanoines-e  de  Mons.  Kilo  se  relira  après  la 
niorl  de  son  père  et  à  l'insu  de  ses  parents, 
chez  les  (illes  de  la  Visil.ition  de  S.iUfiiur, 
sous  un  nom  déguisé;  tuais  elle  y  fut  bien'ot 
découverte,  el,  ci)mmc  on  pailuil  de  faire  un 
etabllsscmcnl  du  même  institut  en  Flandr>', 
el  que  l'on  proposa  à  mademoiselle  de  Melun 
d'en  aller  jeter  les  foiidetneuts,  elle  regarda 
riioniieur  qu'on  lui  f.iisait  comme  une  ten- 
tation du  denion,  qui,  jaloux  de  son  bonlicu  , 
voîilail  dej.à  lui  faire  perdre  le  fruil  de  sa 
soliiudeeii  la  retirant  de  sa  vie  cai  héo.  dont 
elle  commençait  à  goûter  les  douceurs  ;  c'e^t 
pourquoi  elle  pensa  aux  moyens  de  sortir  de 
ce  monastère  sans  que  l'on  sût  où  elle  devail 
aller.  Kllc  communi(|ua  son  dessein  au  V.  du 
IS.euil,  de  la  compagnie  de  Jésus,  qui  lui 
ayant  proposé  les  llospitalières  de  la  Flèche, 
dont  la  congrégation  ne  faisait  (jue  de  naî- 
tre, et  dont  les  religieux  de  celle  compagnie 
avait  ni  la  dircclion,  elle  se  senlit  intérieure- 
ment portée  à  embrasser  cet  instilul.et, 
|iour  n'être  point  connue,  elle  entra  dans 
celle  congrégation  sius  le  nom  de  mademoi- 
s<  Ile  de  l.i  Haye.  Mais  ces  Ilospilaliè;  es,  qui 
étaient  pri  venues  d'estime  el  de  considéra- 
tion ]i()ur  elle  sur  le  récit  que  le  P.  du 
lireuil  leur  avait  fail  de  son  mérite,  furent 
extiémemcnl  surprises  de  la  voir  entrer 
chez  elles  en  équipage  de  .'crvanle  ;  car  elle 
avait  un  gros  babil  de  bure,  un  bounel  de 
laine  ^ur  sa  léte  el  des  clous  sous  ses  sou- 
liei  s  ;  el  quelqu'une  lui  ayant  demanilé  son 
nom,  elle  répondit  qu'elle  s'apjielait  .\nne  de 
la  Terre.  Tout  cela  n'empêchait  pas  qu'on 
n'aperçut  à  trav(  rs  cet  extérieur  si  pauvre 
un  air  de  grandeur  cl  des  in.inières  aisées  , 
qui  la  taisaient  distinguer  du  commun  ;  et, 
i|uoii)u'elle  s'eludiâl  à  se  cailler  avec  beau- 
roii[i  de  soin,  elle  ne  put  si  I  ion  f.iire,  qu'on 
ne  vil  dans  sa  val. se  qu.inliié  de  liiigi'  de 
toile  de  llullandi'  très-fine,  qu'elle  donna 
ensuite  à  l'église  pour  f.iirc  des  nappes  d'au- 
tel et  des  aubes,  priant  la  supéiieure  de  lui 
faire  ilonniT  du  linge  cl  des  chemises  de  la 
cumiiiunaulé  ,  comme  on  faisait  ch  kjuc 
semaine  à  toutes  les  sœms ,  et ,  lors- 
qu'elle pouvait  choisir  sans  i)u'on  la  vil,  elle 
prenait  toujours  les  plus  grossières  el  aux- 
quelles il  y  avait  le  plus  de  pièces. 

.Madenioiscllc  de  .Melun  ayant  été  reçuiî 
dans  Cille  congrégation  d'hospil  .l.ères,  on  rn 
demanda  quelques  années  après  pour  aller 
faire  de  pareil»  et  il  lissernents.  La  ville  de 
l.av.il  fut  la  première  (]ui  en  demanda,  l'an 
Il  52,  et  la  même  année  elles  furent  appelées 
a    baugé.    Mademoiselle  de    Melun     fui  du 


DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  RKLIGIEL'.X.  701 

nombre  de  celles  qui  furent  destinées  pour 
ce  dernier  élablissetnent  ;  elles  y  furent  con- 
duites par  la  .Mère  Maiie  de  la  Ferre,  pre- 
mière snpérieiire  el  fin  lalrice  de  celle  ron- 
grégalioii,  el  dans  l'obédience  qu'elles  reçu- 
rent de  l'cvêque  d'.Vngers,  Henri  .Arnau  l  , 
m-idemoiselie  de  Melun  est  appelée  sœur 
Anne  de  la  Haye.  Mais,  quoiqu'elle  fût  re- 
connue pour  la  princesse  d'Fpiuoy  quelquci 
années  après,  lorsque  son  rère  le  >i  omtc 
de  Gand,  s.ichant  (ju'elle  était  à  lîaugé,  l'y 
vint  irouver,  elle  retint  toujours  le  nom  de 
la  Haye  ju  qu'à  sa  mort. 

.■\pre-.  avoir  été  découverte,  cl  ne  pouvant 
plus  e. cher  sa  qualité,  le  désir  qu'elle  avait 
de  faire  du  bien  à  son  liApilal  l'cmport-î  sur 
celui  qu'elle  avait  de  passer  le  reste  de  s  s 
jours  dans  la  solitude.  Trois  de  ses  frères 
la  vinrent  prendre  à  H.iugé  pour  la  conduire 
à  Paris,  afin  d'assister  au  paitage  des  biens 
du  piiiiie  d'Kpinoy  leur  prre.  File  ne  demeura 
que  deux  mois  dans  celte  ville,  el  les  biens 
qui  lui  échurent  en  partage  servirent  non- 
sculemenl  à  faire  faire  des  bàliments  <i  son 
hôpital  de  Haugé  et  à  lui  assigner  des  renies 
pour  son  enlreiien  ;  mais  elle  fauda  encore 
dans  la  suite  celui  de  lîeauforl.  Nous  ne  nous 
étendrons  pas  davantage  sur  les  verlusetirs 
actions  de  celle  princesse,  qui  n'csl  pas  la 
fondatrice  de  la  congrégalion  des  hos|iitaliè- 
res  dont  nous  parlons,  et  qui  ne  peut  être 
regirdée  que  comme  fondatrice  et  bienfaitri- 
ce des  hôpitaux  de  Haugé  et  de  Beaufort  du 
même  institut;  l'on  peut  voir  sa  Vie  qui  fut 
donnée  au  public  l'an  1C87  ;  el  nous  pas- 
sons à  re  (jui  regarde  cette  congrégation. 

Los  hôpitaux  de  Bauge  et  de  Laval  ayani 
êlé  fondés,  comme  nous  venons  de  dire,  ces 
hospitalières  firent  encore  d'autres  établisse- 
ments. Hles  furent  appelées  à  Moulins  en 
liourbonnnis,  l'an  10.'JI.  Cet  établissement  se 
fit  encore  par  !  i  .Mère  de  la  Ferre,  qui  y  mou- 
rut ;  et  en  ICo9  elles  p:isscrenl  les  mers  pour 
aller  dans  le  Canada,  où  elles  s'établirent 
dans  la  ville  de  .Montréal.  Jusque-là  elles  n'a- 
vaient tait  que  dos  vœux  simples,  el,  comme 
elles  pouvaient  sorlirde  la  congrégation  avec 
dispense  de  l'cvêiiue,  plusieurs  l'avaient  de- 
mandé cl  l'avaient  olilonu.  Ce  qui  avait  cau- 
sé des  procès  dans  leurs  familles, lorsqu'elles 
avaient  voulu  entrer  en  paitage  des  biens  : 
c'est  pourquoi  1  i  plu|iart  de  ces  hospitaliè- 
res se  déle minèrent  à  prendre  la  stabilité  et 
à  s'y  engager  par  des  vœux  solennels.  La 
mais  m  de  Laval  commença  l'an  llil'),'},  et  lui 
la  première  à  prendre  l<i  slabiliié  ;  el  dans  le 
même  temps  elles  furent  demandées  pour 
aller  fa  re  un  éiablissement  à  Nimes,  où  elles 
f  rent  fondées  par  lévêque  de  ce  lieu  N... 
Cochon.  Les  maisons  de  .Moulins,  Bauge  el 
Montréal  dans  le  C.anada  prncnl  ensuite  la 
stabilit  ',  •  t  le  pa,io  .Mex.indrc  \  II,  par  un 
bref  du  1'.)  janvier  llilil).  vérilie  au  parlement 
de  l'ai  is  le  MO  août  llili", approuva  cet  iiisli- 
lul,  el  dèclar.i  (|ue  les  liospitaliéios  s  >ities 
de  l'hôlel-ilicu  de  la  Flèche  pour  aller  à  La- 
val, à  Nimes,  à  Baugé,  à  Moulins  el  à  Monl- 


(I)  Viiy.,  à  la  lin  du  \ol.,  a"*  172  cl  175. 


70.-1 


LAT 


LâT 


:o'j 


ré.il  dans  le  Canmla,  étaicnl  véritahlcment 
religieuses,  ayanl  fail  les  (rois  vœux  solen- 
nels el  embrassé  la  clôture  sous  la  règle  de 
saint  Augustin.  L'urs  consùtuions  lurent 
dressées  l'an  1085,  par  l'évêquc  d'Angers 
Henri  Arn.iud. 

Gete  congrégation  fit  ensuite  de  nouveaux 
progrès.  La  ville  d'Avignon  fit  venir  de  ces 
religieuses  l'an  1670,  pour  leur  donner  le 
Roiii  du  grand  hôpital.  Celui  de  Beauforl  fut 
fondé  par  mademoiselle  de  Melun  en  1671. 
Klles  furent  appelées  en  1683  dans  la  ville  de 
risle  au  comté  Venaissin,  et  en  1093,  la 
Mère  des  Essarts,  première  religieuse  de  la 
maison  de  Laval,  et  qui  avait  f.iit  rétablisse- 
ment de  lîeaufort,  fut  rappelée  par  un  arrêt  lu 
consi  il  à  la  Flèche,  couime  y  ayant  fait  ses 
premiers  vœux,  l'arrêt  portant  que  les  pre- 
mières filles  qui  en  étaient  sorties  y  revien- 
«Iraient  pour  y  mettre  la  siabililé.  Mais  , 
comme  les  autres  étaient  mortes,  elle  mena 
avec  elle  quatre  religieuses  de  Beaufort,  qui 
établirent  la  stabilité  à  la  Flèche,  el  celte 
maison,  qui  avait  donné  naissance  à  la  con- 
grégation, éiant  la  première  de  l'institut,  fut 
la  dernière  à  prendre  l'étal  régu'icr.  Les 
hospitalières  de  Nîmes  ont  fait  encore  un 
autre  établissement  à  Uivire  dans  le  Lan- 
guedoc, en  1700. 

Les  religieuses  de  cette  congrégation  ont 
toutes  les  mêmes  observances,  elles  n'ont 
changé  que  fort  peu  de  choses  à  leurs  pje- 
mières  constitutions  ;  elles  ont  aussi  toiiscrvc 
le  même  habillement,  sinon  qu'au  luu  do 
coiffe,  elles  ont  ])ris  le  voile  noir,  et,  au  lieu 
de  mouchoir  de  cou,  la  guimpe  comme  1rs 
autres  religieuses.  L'essentiel  de  leur  insti- 
tut, c'est  le  service  des  pauvres  ;  à  quoi  elles 
s'obligent  par  un  quatrième  vœu,  et  t|ue  - 
ques  monastères  donnent  à  la  mort  de  cha- 
que religieuse  professe  trois  cents  livres. 
Elles  ne  sont  obligées  qu'aux  jeijnes  ordin- 
nés  par  l'Eglise  el  à  réciter  tous  les  jours  le 
petit  office  de  la  sainte  Vierge.  Les  diuian- 
ches  et  les  fêles,  elles  chantent  seulemenl  les 
vêpres.  Voici  la  formule  de  leurs  vœuN.: 
Dieu  tout-puissant,  mon  créateur  el  sauver  .in 
Seigneur,  Je,  N.,  quoique  indigne  de  me  pré- 
senter devant  vous  ,  toutefois  me  confiant  en 
votre  miséricordieuse  bonté,  et  poussée  du  dé- 
sir de  vous  servir  de  ma  pure,  francité  et  dé- 
libérée volonté,  en  présence  de  toute  la  cour 
cileste  el  de  cette  communauté,  fais  vœu  pour 
t  mie  ma  vie  à  votre  divine  majesté,  de  pau- 


vret ',  lie  chasteté  el  d'obéissance  ,  et  de  m'ent' 
ployer  au  service  des  pauvris  en  uni'.n  Je 
charité,  selon  la  règle  de  saint  Augustin  et  les 
constitutions  de  cette  congréguliun;  vous  sup- 
pliant t'vs-liumljlement,  ù  mon  Dieu,  par  les 
méritesde  Jésus-Christ  viitre  Fils,  de  sa  sainte 
mère,  de  saint  Josep'i  et  de  saint  Augustin, 
que,  comme  il  vous  plaît  me  faire  la  grâce  de 
me  consacrer  à  vous  par  ces  vœux,  il  vous 
plaise  me  la  continuer  abondante  pour  m'en 
acquitter  fidèlement.  Ainsi  soit-il. 

Tous  les  ans,  le  22  féyrier,  fête  du  Maria- 
ge du  la  sainte  Vierge  avec  saint  Joseph, 
elles  reiiouvelli  nt  leurs  vœux  en  cet  e  ma- 
nière :  Je,  N.,  confirme  et  renouvelé  à  mon 
Dieu  les  vœux  que  je  lui  ai  fuiis  pour  toute 
ma  vie,  de  pauvreté,  de  chasteté  et  d'ohéissan" 
ce  ,  et  de  servir  les  pauvres  en  union  de  cha- 
rité en  cette  congi égaiion,  r.u  nom  du  Père, 
du  Fils  et  du  Saint-Esprit.  Ainsi  soit-il. 

Si  quelque  maison  de  l'institut  détient 
pauvre  el  en  nécessité,  les  autres  doivent 
l'assister,  prétérablcment  à  toute  .lUlre  cha- 
rité, selon  leur  pouvoir,  plutôt  ([ue  de  faire 
un  établissement  nouveau  ;  et,  pour  empê- 
cher (pie  cette  union  entre  les  maisons  de  la 
congrégation  ne  diminue  par  succession  de 
temps,  toutes  les  maisons  do. vent  s'écrire  de 
temps  en  temps  pour  s'exciter  à  ag  r  dans  un 
même  esprit  et  pour  la  même  fin.  Ouire  les 
sœurs  destinées  pour  le  chœur  el  les  sœurs 
domestiques  on  converses,  chaque  maison 
peut  encore  recevoir  des  sœurs  associées ,  qui 
sont  des  filles  ou  des  veuves  qui,  par  infirmité 
ou  autrement,  ne  piuvantêire  reçues  à  l.i 
profession  rel  gieuse  ,  désirent  néanmoins 
passer  le  reste  de  leurs  jours  dans  celte  mai- 
son, pour  y  vivre  avec  les  religieuses,  sans 
être  obligées  à  leurs  observai)ces.  Ces  asso- 
ciées doivent  f.iire  des  vœux  simples  el  porter 
un  habit  simple  et  modeste. 

Règle  et  Constitutions  pour  les  religieuses 
hospitalières  de  Saint-J  seph  Mémoires  en- 
voyés par  les  I  eligie  .ses  de  la  Flèche  ;  el  l'on 
peut  consulter  la  Vie  de  mademoiselle  de  Me- 
lun, imprimée  à  Paris  en  16S7.  Celle  prin- 
cesse ne  fut  point  religieuse,  el,  après  avoir 
demeuré  Ireiili!  ans  dans  riiôpilil  de  liaugé, 
elle  y  mourut  le  13  août  1679. 

JOYEUX.  Voy.  Frères  Jhyf.ux. 

JULIEN  DU  P'OIKIEK.  Votj.  Alcantara. 

JUSTINE  DE  PADOUE  (SAl^Tu;-).  Voij. 
Mont-Cassin. 


K 


KL\RAN  (S^iNT-).  Voy.  Irlande. 


L 


LANFRANG  (Saint-).  Voy.  Augustin  (Com- 
GnÉGATioN  DE  Saint-). 

LANGUES     (  Hospitalières  de  )•     Voy. 
Dijon. 

LATRAN  (Chanoines  DE  Saint-Sauveur  de). 
§  I".  Origine  des  Chanoines  Réguliers  de  Saint- 


Sauveur  de  Latran,  avec  la  vie  du   V.   P. 

Barthélémy  Colomne,  leur  réformateur. 

Lorsque  le  grand  Constantin  eut  donné  la 
paix  à  rEg!ise  el  qu'elle  commença  à  jouir 
de  la  liberté,  après  laquelle  elle  soupirait  de- 
puis  trois  cents   ans,  il  fil  bâtir  plusieurs 


707                               mr.TioNNMriF.  nr.5  ouorf.s  nn.iniErx.                                rjs 

éj'Iisos   CI)  (li\ors    lio::\  ,   priiK ipaliniipnl    à  pr-chcs  de  cp  Rinnd  homme,  déchirôrcnl  sa 

Jionie,  où  les  é.liscs  de  S.iitil-.IiMii,  de  S.iiii!-  répulalion  p.ir  lanl  de  calomnies  et  de  iinSdi- 

l'i.  rre,  de  S.iini-Paul,  de  S,iintc-Croi\  cl   «!c  sauces,    que,    pi)ur    céder  à   leur    envie, 

SaiiUe-Açnès /lors  deg  murs,  sont   encore  à  il  fui  o!ili|;é  de  quillcr  Rome  pour  relourner 

piéscnliies  marques  de  la  piéle  de  cet  ein-  dans  la  Palesline. 

pcreur.  Ce  fui  dimc   sous   le   poulifical   de    saiiil 

lihlre  ces  éplises,  relie  qui  lient  le  premier  Lé^n   l"  que  les  clercs  de    ré:;lise  de  Sainl- 

r;ing   noii-seulement   dans  retle   ville,    mais  Jean  de  Lalr,:n  véiurent  en  commun.  1  s  ùe- 

qui  csl  encore  reconnue  pour   la   mère    do  meuri'renl   |  endanl  plusieurs    années  dans 

loutes  les  éi;lises  du  monde,  est  ce'.lc  qu'il  (il  l'observance  des  canons  aposloli(iues  ;  mais 

liiVir  dans  le  palais  de  l'impératrice  Fausta,  le  relàcliemenl  s'élanl   introduit  peu  à    peu 

sa  femme,  auparavant  nommé  la  maison  de  parmi  o\ix,  Aisxandre  11,  qui  avait  été  Cha- 

Latran,  du  nom  de  Plaulius    Lateranus  ,  se-  noine  de  la  congrégation  de   Saint-FriLçdien 

naknir  romain,  à  qui  elle  appartenait   lues-  de;  l.ucques,  fil  venir  des  Chanoines  de  celle 

que  l'empereur  Nrcn  le   fit   mourir  comme  congrégation  l'an  lOtil , pour  réformerl'Ejjlisc 

un  des  chefs  de  la  conjuration  qui  s'était  for-  de  Lalian,  et,  ay  inl  fait  assembler  un  con- 

mée  contre  lui  l'an  Go.  Ses  biens    ayant  élé  cile  à  R(/mc  l'an  10G3,   où  l'on   traita  de  la 

confisqués,  cel  empereur  et  ses  successeurs  réforme  des  Chanoines,  il  assujellil  ceux  de 

l'ont  toujours    possédée  jusqu'au   temps  de  l.airan   à  l'observance  de   ce  qui  avait  élé 

Conslanlin,   qui  la  donna  à  saint  Sylvestie.  ordonné  dans  ce  concil;'.  Il  déclara  aussi  celle 

Ce  prince  y  ayant    fait  bâtir  une  église,  eile  Eglise  chef  de  plusieurs  maisons  de  Clianoi- 

ful  appelée  de  son  nom  Conslantinienne,  au-  nés  qui  en  dépendaient,  et   qui  tous  ensem- 

Iremenl   l'église  du  Sauveur,    à  cause  que  bln  fermèrent  une  congrégation   (|ui  d,''S  ce 

lien  lanl  que  s  linl  Sjlvcsti  e  en  fiisaii  la  dé-  lemps-là  prit  le  nom  de  Lairan,  el  élail  sépa- 

(licace,  Pimage  du  Sauveur  du  monde  appa-  rée  de  celle  de  Saint-Frigdicn  de  l.uc()ues. 

rul  sur  la  muraile  ;  et,  comme  CCI  empereur  Ils   possédèrent  cette  cj;lise  pend  ml   plus 

fit  faire  proche  de  celle  église  un  b.i|itislcre,  de  huit  cciils  a^  s,  d'|iu  s  >aint  Léon  I"  jus- 

el   que    les   baptistères  avaient    l'image   de  qu'à  Bonifare  \'lll,  ((ui,  ayant  élé  élevé  sur 

saint  Jean-Bapt  sie,  on    lui  donna    aussi   le  la  chaire  de  saint  Pierre  l'an  129V,  les   obli- 

iiom   de  Saint-Jran   de  I.alran,  qui    lui  est  gea  d'en  sortir  pour  mettre  des  séculiers  à 

resté,  (|uoiquesou   véiitable  nom  soit  celui  leur  pla.c.  Pour  lors  la  congrégation  de  La- 

de  Sainl-Sauveur,  puisijue  c'est  sons  ce  notn  Iran  commença  à  diminuer,  cl  s'éle^gnil  peu 

que  ri<'glise  solcnni  'jle  9  noveiiil)re,la  dédi-  de  lemps  après,  ayant  perdu  lous  les  mouas- 

cace  de  cette  église.  très    qu'elle   pv).ssédail,   les    uns    ayant  été 

Les   papes    l'ont   touj'  urs  reconnue  pour  sécularisés,    les  aulies  ayant  été  dv)nnés  à 

leur  ca!hedr;!le,el  depiis  sainlSylvestrc  Cs  y  d'autres  ordres,  comme  celui  de  tjrolta-Fer- 

ont  toujours  fait  leu;  demeure,  à  l'excei.liou  r.ita  aux  moines  de  Sainl-liasile. 

dedeuN  ou  trois,  jusqu'au  lemps  que  le  sailli •  Penol   dit   que  les  autres  actions  de  Boni- 

siége  fui  Iranslérc  à  .Avignon.   (îrégcire  XI  face  ^'III  rapportées  par  Plaline  et  lesaulri's 

r.iyani  transporté  à  Home  après  soixante  et  historiens  de  sa  \ie,  font  assez  coniiaitre  les 

dix  ans  d'absence,  comme  le   iialais  de  La-  raisons  qui  le  portèrent  à  leur  ôler  l'église 

Ir.-in,  conligu  à  celle  église,  étaii  tombé  près-  de   Lalran.    Il   semble  qu'il    veuille  accuser 

que  en    ru. ne,  les    souverains   pontifes   o:,l  s  n  avarice,  qui  le  voulait  faire  profiter   des 

f.'iii  depuis  ce  teuips  leur  lésidence  au  \'ali-  grands  biens  qu'ils  possédaient,  et  <iui  peut- 

ran  ou  à  .Monte-Cavllo.  être  servirent  à   augmenter  ces  tre-ors  i  n- 

l)om  (jabiicl  l'en  t,  Chanoine  Uégulier  de  menscs  qu'on  lui  trouva  lorsque  Nogarel  , 
la  congrégation  de  Lalran,  qui  en  a  fait  gentilhomme  français,  avec  quelques  che- 
riiisloire,  [irélendani  qu'il  y  a  eu  une  con-  vaux  du  duc  de  \'alois,  accompagné  des  Co- 
linualioii  siins  interrupiion  de  clercs  <iui  ont  lomnes  et  de  quebiues  autres  gcnl  IshonimC'» 
Técu  en  commun  depuis  les  apôtres  jusqu'au  di-  1 1  faction  des  Cibelins,  se  saisit  de  sa  per- 
tem(>s  de  saint  Sylvestre,  diti)ue  ce  fui  ceu\-  sonne  a  Anagnie.  Nous  verrons  dans  un  au- 
là  que  ce  pape  établit  dans  celte  église;  mais,  tre  endroit  l'adresse  dont  il  se  servit  pour 
comme  celle  [iréienlion  esl  disputée  et  que  parvenir  à  la  papauté,  el  la  manière  duit  il 
la  véritah'e  origine  des  communautés  de  agit  envers  son  prédécesseur,  qui  s'était  dé- 
clercs n'est  attribuée  qu'à  saint  Augustin,  mis  île  celle  dignité,  et  que  l'I'iglise  honore 
nous  croyons  plus  aisément  ce  (jii'ajoute  cet  comme  un  saint;  mais  il  ne  faut  pas  nous  eloi- 
autpur.  (|ue  saint  Léon  I"  se  seivil  vers  l'an  pner  des  Chanoines  Kéguliirs,  qui  furent  rela- 
ie'lO  de  (îé  ase,  qui  fut  dans  II  suie  un  de  ses  blis  cent  cinquante  ans  après  dans  celle  mémo 
successeurs,  el  qui  était  disciplede  saint  Au-  église  de  Lalran  par  Ivngène  l\'  ;  et,  comme 
gusiin,  p'iur  réformer  les  clercsde  celle  église  la  congrégalicm  Frigdioinennc  ou  de  Sainte- 
et  les  fain- vivre  selon  les  règles  que  ce  grand  Marie  de  I  risonaire  fui  celle  sur  laquelle  ce 
docteur  de  l'I'.glise  ava.l  prescnles  à  ceu\  de  pajie  jela  les  yeux  pour  en  lirer  ces  C.bauoi- 
son  Iv^lise  d'Hippone,  qui  ne  contenaient  ([ue  nés,  el  qn  il  voulut  qu'elle  fut  appelée  dans  la 
re  que  les  a;6lres  el  les  premiers  fidèles  do  suite  de  S.iint-S.iuveur  de  Latraii,  il  esl  à 
ri'glise  de  Jérusalem  nvai'iil  pratiqué.  propos  de  r.qipoiler  son  origine. 

lui  eflel   le  clergé  de  Uonie   .avait    besoin  La     congrégation     Fr  igdioniinne     ou    de 

de  riforiiie,  puii(|ii(;  saint  Jérôme  se  plaignait  Sainte  Marie  de  Frisoiiaii  e  esl   differenle   de 

dès  I  an  :i8.')  des  deri  glemcnls  des  clercs   «le  celle   de   Sainl-Frigdien   de    Lncques  ,    dont 

celle  ville,  qui,  n'ayant  pu  supporter  les  re-  nous  parlerons  au  S  I"  >  quoniue  ce  ne  soil 


709 


LAÏ 


LAT 


710 


qu'à  eausc  de  ce  saint  qu'elle  ail  clé  appelée 
I  riiçtlionienne  ;  car  l'on  prétend  qu'étant 
évéque  de  Lucques,  il  fit  bâtir  à  trois  milles 
de  cette  ville  une  église  sous  le  nom  de  Noire- 
Dame,  qui  par  succession  de  temps  a  élé  ap- 
pelée, à  cause  de  son  fondateur, Sainio-Maric 
Frijîdionii'nne,  et  par  corruption  Frisonaire. 

Celte  égli-e  avait  toujours  été  desservie  par 
(les  clercs  vivant  en  commun,  qui  devinrent 
("lianoines  Iléguliers,  lorsqu'on  eut  obligé  les 
clercs  qui  vivaient  en  commun  à  la  désappio- 
priiition.  Ils  se  rendirent  recommandahles 
par  la  sainteté  de  leur  vie  ;  mais  leurs  succes- 
seurs au  xiv"  siècle  s'étaient  bien  éloignés 
de  leur  esprit.  A  |.eine  trouvait-on  chez  cok 
des  traces  de  la  discipline  régulière,  le  tem- 
porel était  aussi  mal  adminisiré  que  le  spiri- 
tuel, et  ce  qui  restait  des  revenus,  qui  avaient 
été  aulr<fois  considérables,  ne  suffisait  pas 
pour  l'cnlietien  de  trois  religieux  qui  s'y 
trouvaient  en  1382. 

L'évêque  de  Lucques,  y  ayant  fait  la  visite 
cette  même  année,  avait  tâché  d'y  apporter 
quelque  réforme.  Les  religieux  y  ava'enl 
consenti  et  avaient  même  tenté  plusieurs  fois 
d'exécuter  un  si  bon  dessein  ;  mais,  hien  loin 
d'y  pouvoir  réussir,  les  fréquents  jassagcs 
des  armées  et  plusieurs  partis  qui  étaient 
souvent  venus  piller  le  monastère  IfS  avaient 
contraints  de  l'abandonner  pour  se  réfugier 
dans  la  ville. 

Comme  ils  persistaient  toujours  dans  leurré- 
solution.  Dieu  envoya  à  leur  secours  un  saint 
homme  qui  a  élé  le  réformateur  des  Chanoi- 
nes Réguliers  en  Italie,  et  à  qui  l'on  a  donné 
le  tilre  de  fonilateur  do  la  congrégation  de 
Sainte-Marie  de  Frisonnire.  Il  s'appe'ait 
Barlhéle.i)  Colomne.de  cette  ancienne  famille 
des  Culomncs  en  Italie  si  connue  par  sa  no- 
blesse, par  les  grands  hommes  qu'elle  a 
donnés  à  I  Egl.se  et  dans  les  années,  et  |iar 
la  charge  de  grand  connétable  du  royauiuc 
de  Naples,  qui  lui  est  héréditaire.  Parmi  ceux 
qui  en  sont  sortis,  il  s'en  est  trou\é  beau- 
coup qui  ont  préféré  Ihumiliié  et  uoe  vie 
pauvre  el  relirée  à  tous  ces  avantages  que  les 
f;ens  du  pionde  estiment  tani.  L'ordre  de 
Saint-François  se  glorifie  d'en  avoir  eu  tro  s, 
qui  s'y  sont  rendus  célèbres  par  la  sainteté  de 
leur  vie,  qui  sont  les  bienheureuses  Catheri- 
ne, Marguerite  el  Séraphine  Colomne  ;  et, 
sans  parler  des  autres  ordres,  celui  d<  s  Cha- 
noines Réguliers  a  eu  dom  Barihéleiny  Guloin- 
ne,  qui,  étant  né  de  parents  si  illustres,  no 
manqua  pas  d'êire  élevé  dans  tous  les  exer- 
cices qui  regardent  la  noblesse  ;  mais  il  ne 
s'appliqua  qu'à  ceux  qui  conviennent  vérita- 
blement à  un  chrétien.  La  grandeur  de  sa 
maison  ne  l'éblouil  pas.  il  ne  se  ilatla  pas  de 
l'espérance  de  pouvoir  possédrr  un  jour  i  es 
premières  dignités  dont  ses  ancétros  avaient 
élé  revêtus  ;  et,  s'il  embrassa  l'élal  ecclé- 
siastique, ce  ne  fui  que  pour  servir  Dieu 
plus  parfaitement.  H  seconlcnla  à  cet  ciLt 
d'un  simple  canonical,  dont  il  rcni|  lit  les  di- 
voirs  avec  une  fidélité  irréprochable. 

Quoique  Dieu  lui  etit  donné  de  grands  ta- 
lents pour  la  prédication,  il  fut  néanmoins 
un   assez  long  icmps  sans  les  faire  valoir, 


pendant  lequel  il  s'appliqua  à  l'élude  de  l'o- 
raison (  t  de  la  méililalion.  Mais,  considé- 
rant l'élal  déplorable  où  l'I'^glisc  était  réduite 
par  le  schisme  qui  la  désolait  depuis  plu- 
sieurs années,  el  qui  él.iit  conlinné  par  l'an- 
tipape HiMioît  XIII  contre  le  vfritable  suc- 
cesseur de  saint  Pierre,  Boniface  IX;  et,  pour 
me  servir  des  mémos  termes  de  Nico'as  de 
Clémangis  dans  la  remontrance  qu'il  fit  au 
r  )i  Charles  VI  au  nom  de  l'université  de 
P;iris  touclianl  ce  schisme,  voyant  que  l'K- 
glise  était  toute  défigurée,  que  les  choses  sa- 
crées élaienl  foulées  aux  pieds,  que  les  vices 
«■e  multipliaient,  que  les  erinies  demeuraient 
impunis  par  la  tolérance  de  ceux  qui,  pour 
se  ni.iinli  iiir  dans  !a  p'pauté,  appréhen- 
daient qu'en  les  punissant  leur  parti  ne  di- 
minuât ;  et  enfin  que  la  barque  de  saint 
Pierre  au  milieu  de  la  lempéle  était  près  de 
périr,  il  quitta  son  pajs,  ses  parents,  ses 
amis,  el,  s'armanl  du  zèle  de  l'amour  de 
Dieu  et  du  salut  des  âmes,  il  entreprit  de 
combattre  les  vices  qui  régnaient  si  fort,  en 
prêchant  la  parole  de  Dieu,  faisant  partout 
des  conversions  merveilleuses,  el  exhortant 
tous  les  fidèles  à  s'unir  ensemble  sous  un 
môme  chef. 

Il  vint  premièrement  en  Toscane;  delà 
passant  par  l'Emilie,  il  s'arrêta  longtemps 
dans  la  Marche  irév'sano  ,  où  il  fit  un  assez 
long  séjour,  aussi  bien  qu'à  Padoue  et  à  Vi- 
cenze.  Non-seulement  plusieurs  pécheurs, 
touchés  vivement  par  la  force  de  ses  prédi- 
cations, changeaient  entièrement  dévie  et  se 
convenissaienl  à  Dieu  par  une  sincère  pé- 
niienco;  mais  même  plusieurs  eeclésiasti 
ques,  désirant  embrasser  un  étal  de  vie  plus 
parfait,  entrèrent  d  ms  des  ordres  religieux 
ou  en  établirent  de  nouie.iux. 

Kntre  les  autres,  dom  Gabriel  Condel- 
maire,  dont  nous  avons  déjà  parlé  sous  le 
nom  d'Eug'ne  IV.qu'.l  ()rit  loiS(|u'il  fut  él  'vé 
au  souverain  pontifical,  el  dom  Antoine  C»r- 
rario,  nobles  Vénitiens,  tous  deux  neveux 
de  Grégoire  XII,  furent  du  nombre  des  fon- 
dateurs de  la  congrégation  des  Chanoines  de 
Sailli-Georges  inAl(/lm;el  Louis  Barbo,  aussi 
noble  Vénitien,  qui  fut  dans  la  suite  évéque 
de  Prévise,  entra  dans  l'ordre  de  Saint-lte- 
noîl,  où  ayant  rétabli  la  discipline  monasti- 
que, qui  avait  souffert  beaucoup  de  relâche- 
ment en  Italie,  il  fonria  la  célèbre  congréga- 
tion de  Sainte-Justine  de  Padoue.  Nous  ne 
devons  pas  oublier  le  fameux  jurisconsulte 
Albéric  Avogadri,  genlilhonniie  deBergame, 
qui,  renonçant  à  toutes  les  vanités  du  siècle, 
se  fit  religieux  dans  l'ordre  de  Saint-Dotni- 
nique.et,  n'osant  pas  espérer  de  pouvoir 
parvenir  aux  ordres  sacrés  à  cause  qu'il 
élail  bigame,  il  se  contenta  de  l'humble  con- 
dition de  frère  lai  ;  mais,  comme  il  et  lit  rede- 
vable de  sa  conversion  à  Barthélémy  Co- 
lomne, il  reçut  peu  d'années  .iprès  par  ses 
mains  l'habi't  de  Chanoine  Régulier  dans  le 
monastère  de  Siinle-Marie  de  Frisonaire, 
aussitôt  qu'il  y  vit  la  réforme  établie  par  les 
soins  du  P.  Barthélémy,  qui  dans  le  cours  do 
sa  mission  étant  venu  à  Luc(iuos,  où  il  ap- 


VA                                           DICTIONNAIRK  DICS  OKDRES  RELIGIEUX.                                           7l3 

pri*.  les  bonnes  inlcnlions  do  ces  ('hanoiiies,  La  répulalioii    quils    s'acquirent    par    Ici 

qui,  cuinnic  nous  avons  d  (,  souliailaicnl  cni-  sainlclé  '  c  !our  vie  fil  i)u'ou  les  souhaita  dans 

brasser  une  N  il-   plus  rcenlicre,    \isiia    leur  plusieurs  endroits,  lanl  pour  y  faire  de  nou- 

inmiaslère,  dont  la  situa!ii>n,  (|ui  se  (rouv<iil  veaux    élablisscnients    que     |  our    réformer 

au  niilieu  d  un  buis,   lui    pariil   si  favorable  d'aiieiens  rnonaslères.  L'an   liO.j,  un    b  ur- 

au  dessein  qu'ils  avaient  de  \  ivre  dans  la  re-  f;eois  de  M.lan  ayant  iJossein  d'en  fonder  u'i 

traite  et  dans  la  soiiiude,  qu'il  les  exlmrta  à  dans  une  maison  qu'il  avait  proche  de  cette 

la    persévérance,  tandis  (lue  de  son  coté   il  ville,  en  un  lieu  ap[ielé  Caroscite,  il  y  fit  ve- 

ira  l  leur  chercher  des  conipaynons  pour  les  nir  de  ces  Chanoines.  Le  pape  Gréiioire  XII, 

aider  dans  leur  entreprise.  l'an  1V07,  leur  donna  l'abbaye  de  Sainl-Léo- 

C'esl  pourquoi  il  retourna  dans  la  Marche  nard  pro  lie  de  \  érone  ;  ils  eurent  en    fiO'J 

trévisane.  ei  passa  ensuiie  dans  la  Lombar-  celle  de  Notie-Dame  de  la  (Charité  ù  Venise, 

di-,  ne  cessant  point  de   (irècher   partout  la  et  en   lili  celle  de  Sainle-.Marie  de  Treniiti 

pénitence.  Il  liide  si  ;^rands  fruits, que  parmi  avec  toutes  ses  dépendances,  dont  les  iles  qui 

ceux  qui  se  convei  t  reiit  à  Dieu,  il  y  eut  plu-  lui  ont  donné  le  nom   font  partie,  et  qui  a|  - 

sieurs  personnes   religieuses  qui   résolurent  parliennent  à  ces  Channines,  qui  y  ont  toute 

d'embrasser  la  rélorme  qu'il  s'éiail  proposée,  j'iridiclion  spirituelle  et  temporelle.  Le  no'ii- 

l)e   ce  nombre  furent  Léon  de  Carat ,  Mil  I-  lire    des     monastères    s'auj^mrnla    dans    ta 

nais,  et  Thadce  de  Itonasco,  tous  deux  Cha-  suite,  et  il  y  en  avait  déjà  quinze  qui  étaient 

no  nés  Uejiulicrs  de  Saint-Pierre  au  Ciel-d'Or  unis  à  celle  congrégation  lorsque  D.  iiartlié- 

de  l'avic,  (|u'il  envoya  à  Sainle-.Marie  de  Fri-  lemy  mourut. 

sonaire   pour  y  commencer    cette   réforme,  Ouoiqiic  ses  fatigues  joinicî  à  ses  ausléii- 

ce  qui   a  fait  dire  à  quelques  auteurs  qu'ils  tés  l'eussent  lellement  affaibli  qu'il   en  était 

étaient  les  fondateurs  de  celle  con^'régalion.  devenu  aveugle ,  il  ne  discontinua  pas  pour 

Klanl  arrivés   à    Lu  ques,   ils    trouvèrent  cela  ses  prédications.  11  allait  toujours  a  |i  ed 

d'ab  ird  de  gr.inde^  diliicultés  ,  t'înt  à  cause  dans  ses  voyages,  son  coni().ignon  le  cou. lui- 

que  ce  monastère  étail   dépourvu  de  tout  ce  sani  par   la   main,    lùifin,    l'an    li;JO,    élaul 

qui  était  nécessaire  pour  l'entretien  des  re-  parti  de  Venise  pour  aller  dans  le  Monifcr- 

lii.icux,  que  parce  qu'clant  depuis  quelques  rat,  il  tomba  malade  dans  le  fameux  mona- 

années  sous  la  juridicti.in  de  l'évèque,  ils  ne  slère  de  Saint-Benoit  proche  de  .Manloue,  où 

pouvaient  y  entrer  ni  rien  entreprendre  sans  il  avait   demandé   rhos|iit.ilité,    etla(i\re 

sa  permission;  mais,  l'ayant  à  la  fin  oblenue,  dont  11  avait  été  attaque  l'ayant  emporté  en 

ils  jetèrent  les  [iremiers  fundemcnts  de  cette  peu  de  jours,  il  alla  dans  le  ciel  receioir  la 

réforme  sous  le    punliûcat  de  Bouilace  IX,  récompense  de  ses  travaux, 

l'an  IVOI.  11  par.iil  par  réjrilaphe   qu'on  a   mise  sur 

L'année  suivante,  Barthélémy  vint  dansée  son  tombeau  qu'il  n'était  (jue  prêtre  séculier 

monastère  de   Frisouaire   avec  un  compa^  et  iju'il  n'avait  pas  été  religieux,  mais  il  y  a 

gnon,  et  y  ayanl  reçu  l'habit,  il  fut  aussitôt  bien  de  l'appa-ence  qu'il  a  élé  (Chanoine  lié- 

élu  prieur.  Il  y  eut  ensuite  plusieurs  person-  gulier,  puisqu'il  a   élé  prieur  du  mona^lèri! 

nesqui  reçurent  riiabitparsesmains, entre  les-  de  Saiiiie--M.iiie  de  Frisouaire,  qu'il  a  assisté 

quelles  l'ut  le  frère  Jacques  .\vogadri,  nommé  à  des  chapitres  généraux  et  qu'il  y  a  donne 

uiip.iravant  .Sibérie,  dont  nous  avons  parlé;  sa  voix,  ainsi  qu  il  jiarail  par  les  actes  au- 

qui  non-seulement  en  avait  obtenu  la  per-  lhent:ques  qui  suit  cités  par  l'enol. 

mission  de  son  général,  mais   avait  encore  ^  n,   /-     ,■       ,        i    n  ■  ,   ■      i     ,-i 

été  dispensé  de  son  irrégularité  par  le  pape  §  \]  ConUnuaUon  de  I  Instoue  desl  hanojnes 

jusqu'au  diaconat.  Barihelemv  neut  pas  plu-  Réu"liers  de  la  con,jre,jul,on  de  ^ainC-Sau. 

lAUini  le  temps  de  sa  supériorité,  quille  prit  '"-'*'  "*  '-'""'"■ 

avec  lui  pour  être  son  compagnon  dans  le  Entre  les  monastères  que  la  congrégation 

cours  de  ses  prédications.  de  Sainte-Marie  de  Frisouaire  a  possédés,  le 

l'endanl    son    absence  ,    les   religieux    se  plus  lecommandable  a  éle  sans  doute  celui 

trouvèrent    dans    une   si    grande    pauvreté,  (|ui  ét.iit  attaché  à  l'église  de  Saint-Sauveur, 

que,  manquant  lie  tout  ce  qui  étail  nécessaire  que  l'on  appelle  plus  communément  de  Saint- 

a  la  V  ie,  ils  avaient   résolu  d'abandonner  ce  Jean  de  Lalran ,   puisque  cette  église  est   la 

iiionaslère;  mais  les  Jésuates,  (|ui  avaient  ui\  mèreel  le  chef  de  toutes  les  églises  du  monde, 

couvent  à   Lucques,  en   ayanl   eu  connais-  comme  nous  avons   dit  dans  le   paragraj  h  • 

sauce,   les   exhorièrent  à   la   persévérance,  précé  lent  ;  laquelle   leur  fut  accnrdce  par  le 

s'olïrant  d'aller  chercher  l'aumône  pour  eux  |)ape  l'Eugène  1\'  l'an  l'r'i"2. 

par  la    ville    cl  les  lieux  circonvoisins  ;  ce  Suit  (juc  ce  pape  eût  naturellement  de  l'in- 

qu'ils  lirenl  avec  tant  de  succès  en  donnant  ciination   pour   les   Cha   oines    Beguliers   à 

à  connaître  à   tout  le  monde  la   sainteté  de  cau^e  qu'il  était  lui-même  l'un  d  s   londa- 

ces   bons  religieux,  que  non-seulement   ils  leurs  de   la  congré;;ation  des   (chanoines  de 

eurenl  abondamment  pour  leur  subsistance,  Sainl-Ceorges  m  Ahjha,  ou  que,  comme   dit 

mais  que  par  le   moyen  de  ces  aumônes  ils  l'enol,  celle  église  fut  dépouillée  de  tous  ses 

rétablirent  entièrement  le  monastère,  dont  ornements,  ahaudoiinèe  |iar   ses  ministres, 

les  bâtiments  tombaient  en  ruine,  cl  en  très-  et  que    le  service  divin  y   lill  enlièrement 

{  eu  de  temps  les  revenus,  qui  n'étaient  pas  négligé,  h  peine  eut-il  surcédé  à  Marlir.  V, 

a   peine   suflisanls  pour    l'enlrelicn   de  liois  qu'illil  venir  des  Chanoines  Uéguliers  de  la 

religieux,    s'augmentèrent   de    telle   sorte,  congrégation   de   Frisouaire  pour   réformer 

qu  il  y  en  avait  assez  pour  trente,  celte  liglise;  mais  il  ne  jiul  e\éculcr  pour 


Tn  LAT 

lois  son  dessein,  à  cause  de  la  scdilion  que 
les  Coiomne  parents  de  son  prédécesseur 
exci'.èrent  coiilre  lui,  et  des  différends  qu'il 
eut  avec  le  concile  de  Baie,  qui  durèrent 
quelques  années  et  qui  lui  donnèrent  d'au- 
tres occupations. 

Une  autre  séJilion  des  Romains,  qui,  sol- 
Iic!t<'S  par  le  duc  de  Milan,  voulaient  se  sai- 
sir de  sa  personne,  l'obligea  de  songer  plutôt 
à  sa  sûreté  qu'à  la  réforme  de  l'Eglise  de 
Lalran.  Il  eut  mémo  de  la  peine  à  gagner 
l'embouchure  du  Tibre  pour  s'embarquera 
Oslie  sur  une  galère,  d'où  il  vint  première- 
ment à  Pise,  et  ensuite  à  Florence,  où  il  fut 
honorablement  reçu  ,  lorsque  les  Romains 
pillaient  ses  biens  et  emprisonnaient  son 
neveu  le  cardinal  Gondelmaire. 

Enrin.l'an  14't2,  après  qu'il  cul  heureu- 
sement terminé  le  concile  de  Florence,  où 
assislèrenl  Jean  Paléologue  ,  empereur  de 
Conslantinople,  son  frère  Uémétrius  et  le 
patriarche  de  la  même  ville,  avec  plusieurs 
éiêques  grecs,  qui  se  réunirent  à  l'Eglise 
romaine,  aussi  bien  que  les  Arméniens  et 
plusieurs  autres  scliism;itiques  ;  étant  encore 
à  Florence,  il  ordonna  aux  Ch moines  Fri- 
sonaires,  qui  tenaient  pour  lors  leur  chapiire 
général  à  Ferrare,  d'envoyer  à  Rome  trente- 
deux  de  leurs  religieux  pour  réformer  l'E- 
glise de  Latran.  Ils  n'en  envoyèrent  que 
cinq,  qui  logèrent  d'abord  dans  le  palais 
contigu  à  l'église  même;  it,  lor  qu'ils  se 
disposaient  à  bâtir  un  monastère,  ils  tom- 
bèrent tous  malades;  il  y  en  eut  môme  qui 
moururent,  ce  qui  fit  abandonner  aux  autres 
cell"  entreprise  pour  relourncr  dans  les  cou- 
vents de  leur  congrégation. 

Le  pape  cependant ,  persistant  dans  son 
dessein,  envoya  l'année  suivante  des  lettres 
adressées  à  Irur  chapiire  général,  da;ées  de 
Sienne,  où  il  était  pour  lors,  par  lesquelles 
il  commandait  aux  supérieurs  d'envoyer  à 
Rome  trente  Chanoines  avec  un  prieur,  lis 
obéirent  à  cet  ordre,  el  lurent  encore  nçus 
dans  le  méuie  palais  do  Latran,  jusijn'à  ce 
que  le  monastère  fût  a;  hevé.  Mais  les  cha- 
noines séculiers  qui  desservaient  celle  église 
et  qui  n'étaient  qu'au  nombre  de  douze,  pro- 
lilanl  de  l'absence  du  pape  et  de  la  fêle  du 
saint  sacrement  ,  auquel  jour  on  fa:l  une 
procession  solennelle  qui  allire  à  Rome  tous 
les  pa}sans  des  environs,  prirent  avec  eux 
une  troupe  de  ces  paysans  ,  et  quelques-uns 
des  plus  malinienlionués  d'enlie  le  peuple 
altaquèrcnl  les  religieux  dans  le  palais  de 
Latran,  lorsqu'ils  y  pensaient  le  moins  et 
qu'ils  rendaient  grâces  à  Dieu  à  l'issue  de 
leur  dîner;  et,  ayant  rompu  les  portes,  ils 
en  contraignirent  quelques-uns  de  se  jeter 
en  bas  par  les  fenêtres;  ils  en  prirent  d'au- 
tres, à  qui  ils  firent  mille  outrages,  donnè- 
rent tous  leurs  meubles  à  cette  canaille  pour 
les  emporter,  et  il  y  en  aurait  eu  même 
quelques-uns  de  tués,  sans  les  conservateurs 
du  peuple  romain,  qui,  élanl  accourus  à  leur 
secours,  les  tirèrent  de  leurs  mains  et  les 
conduisirent  au  Vatican,  où  ils  restèrent 
jusiju'à  ce  que  le  tumulte  fût  apaisé  et  qu'Us 
DicvioNNAïuE  Des  Ordres  uelîgiecx.  IL 


L\T 


7n 


pussent  en  sûreté  retourner  dans  leurs  cou- 
vents. 

Cette  nouvelle  ayant  été  portée  au  pape, 
qui  était  encore  à  Sienne,  il  en  fut  fort  ir- 
rité. Il  attendit  à  son  retour  pour  punir  les 
coupables,  il  avança  même  son  voyage  pour 
ce  sujet;  ri,  étant  arrivé  à  Home  sur  la  fin 
de  septembre  1443,  il  ordonna  pour  la  troi- 
sième l'ois  à  ces  religieux  de  renvoyer  à  Rome 
trente  Chanoines  avec  un  prieur.  Ils  furent 
fâchés  de  cet  ordre;  ils  s'imaginaient  que  le 
pape,  après  lant  de  difficullés,  se  désisterait 
pcni-êire  de  son  dessein.  Néanmoins,  pour 
obéir  à  Sa  Sainteté,  l'année  suivante,  dans 
leur  chapitre  général  (ju'ils  avaient  accou- 
tumé de  tenir  tous  les  ans,  ils  com|)osèreiit 
une  famille  de  trente  religi(  ux  qu'ils  desti- 
nèrent pour  Saint-Jean  de  Lalran,  anxiinels 
ils  donnèrenl  pour  prieur  I).  Nicolas  de  Bo- 
logne, et  qui  (levaient  se  mettre  en  chemin 
au  piemier  ordre  qu'ils  recevraient  du  [lape, 
auquel  cependant  ils  envoyèrent  le  prieur 
seulement  avec  deux  religieux  pour  lui  faire 
d'humbles  remontrances  sur  l'impuissance 
où  ils  étaient  de  pouvoir  surmonter  toutes 
les  difficultés  qui  se  rencontreraient  dans 
l'exécution  du  dessein  (|u'il  avait  pris,  et 
dont  ils  le  suppliaient  de  vouloir  bien  se  dé- 
sister. 

Le  pape  recul  Irès-mal  ces  remontrances, 
et  fut  plus  d'un  mois  sans  les  vouloir  admet- 
tre à  son  audience.  Cependant  ayant  été 
lléchi  par  le  moyen  de  leurs  amis,  qui  avaient 
parlé  en  leur  faveur,  il  les  fit  venir,  et  leur 
témoigna  beaucoup  de  tendresse  lorsqu'il 
apprit  que  la  famille  de  Latran  avait  été  dé- 
signée dans  leur  chapitre,  el  (ju'il  n'y  ava  t 
que  le  danfjer  où  ils  avaient  élô  exposes 
l'année  précédente,  qui,  les  ayant  inlim.des, 
les  avait  einjiêché.-i  de  venir. 

Dans  cet  intervalle,  les  chanoines  séculiers 
lâchaient  sous  maind-;  soulever  le  peuple  en 
lui  faisant  accroire  que  ce  pontife  voulait 
chasser  les  Romains  de  Saint-Jean  de  Lalran 
pour  introduire  en  leur  place  des  étrangers 
qui  n'avaient  auire  dessein  que  d'emporter 
les  têtes  des  saints  apôtres  qu'on  conserve 
dans  cette  église.  Le  p  ipe,  en  ayant  eu  con- 
naissance, lei  fit  venir  en  sa  présence,  em- 
ploya toutes  les  voies  de  douceur  pour  paci- 
fier ces  esprits  qui  étaient  si  fort  animés 
contre  les  Chaïuines  Réguliers  ;  et,  voyant 
que  les  caresses  el  les  promesses  qu'il  leur 
faisait  étaient  inutiles,  il  assembla  les  canli- 
naux  dans  un  (onsistoirc,  auxquels  il  pro- 
posa le  dessein  qu'il  av.iit  de  réformer  l'E- 
glise de  Saint-Je m  de  Latran  en  y  n)L'ttant 
des  Chanoines  lîéguliers  à  la  place  des  sé- 
culiers, qui  s'acquittaient  mal  de  leur  dc\  oir. 
Il  y  en  eut  quelques-uns  qui  ne  furent  pas 
de  cet  avis;  mais  la  plus  grande  partie  ap- 
prouva le  zèle  du  pape  et  consentit  qu'il 
nommât  deux  cardinaux  pour  faire  la  visile 
de  cette  Eglise,  qui  furent  Thomas,  évéque 
de  Bologne,  qui  lui  succéda  sous  le  nom  de 
Nicolas  V,  et  Pierre  Barbo,  \  éailien,  qui 
succéda  à  Pie  II  sous  le  nom  de  Paul  H, 

Ces  cardinaux,  ayant  trouvé  parmi  ces 
chanoines  séculiers  plus  de  désordre  qu'on 

23 


'*5                                           Dir.TION.NAllŒ  DRS  OIIDUF.S  RELIGIF.l'X.  •                                         71(. 

ne  s't'Inil 'm.i>;int',  les  crurent  loul  ;1  fail  imli-  qui   avnil  sucroulo   à  Calixlo   III,  les    cniJi- 

gnes  (!'<  fcupcr  relie  et;li>e,  ijui  est  la  mère  iians  a\aienl  eiioisi    lierre  Harbo  pour  son- 

ile    liiulos    lis   autres;   et  ces   elianuiiies   ne  verain  poulife,  (jui  pril  le  nom  de  l'.iiil  II.  Ku 

pouvant  rien  avaiiecr  pour  leur  juslilii'alio:i  elTel,  cuiiime  il  avait  été  l'un  des  coniinissai- 

ioisquMs  lunnt  en  présence  du  pape,  ils  se  res   nommés  par   lùijîène  IV   pour    l'aire   la 

«leiiiiienl  volontairement  entre  ses  mains  de  visite  de  l'église  de  Latran,  et  qu'il  avait  été 

tous  leurs  bénéfices.  S.i  S.iinte'é  fil  en  même  léninin  de  la  nét;l  genee  des  chanoines  sécu- 

lenips  1  Sjiédier   une  bulle  par  laquelle   cl'.e  liers  pour  le  service  divin,  il  rendit  au  com- 

Jiccordail  aux   f.lianoines  Keguliers  la  basi-  mencemenl  de  son  ponlilical  celle  église  .:ux 

ique  de   Saint-Jean   de  Lalran  avec  tous  les  Clianoines   Réguliers  ,  ordonnant  à  leur  gc- 

caiion  cals,  les   bénéfices  ,  les   chapelles,  les  néral  d'envojer   trente    relig  eux  à    Home; 

biens  et  les  droits  teaipoicls  et  spirituels  qui  qui, y  étant  arrivés  cl  croyant  apparemnienl 

on  dépendaient.  Il  créa  ().ir  la  même   bulle,  qu'ils  ne  devaient  plus  sortir  de    l'église  de 

qui  est    du  mois  de  j.in\icr  li'»5,  tous   les  Lalran,  voulurent  que  tout  Home  fut  témoin 

<;bir.oincs     de     la    congrégation     l'riglio-  de  leur  prise  de  possession  ;  car  ils  y  furenl 

iiienne   ou  de   Sainle-.Marie  de   l'risonaire,  en  procession,  accompagnés  des  principiux 

C.lianoinis  de  Saint-Sauveur  de  Latran,  vou-  officiers  du  papeel  suivis  d'une  grande  foule 

ianl  quediins  la  suite  ils  e^i  prissent  le  nom.  de  peuple,  qui  fui  aussi  témoin  de  leur  sor- 

L'annec   suivante    il   leur    en   accorda   une  lie  sepl  ans  après,  lorsqu'ils  y  furen'  coii- 

auire,   par  laquelle,   en   leur  confirmanl  le  Iraiiils  par  la    violence  des  chanoines  sécu- 

litre  de  t^lianuines  de  Saint-Sauveur  de  La-  liers,  qui,    l'an   1471,   immédiatement  après 

Ir.n,   il    les    déclarait    originaires  d.'   celle  le  décès  de  l'aul  II,  élanl   entrés  par  force 

église,    en    conséquence   de    leurs   anciens  dans  leur  monasièrc  avec  un  grand  nombre 

litres  et  privilèges,  qu'il  avait   l'ail  exami-  de  gens    armés,  les   en  chassèrent  pour   la 

"cr.  dernière    fois,  pillèrent   tous  leurs   nuu'.iles 

Les  Chanoines    llégulicrs   ne    furenl    pas  cl  s'emparèrent  de  luus  leurs  papiers, 

longtem,  s    paisibles    possesseurs    de    celle  Ils     prcseiitèreul     plusieurs     requêtes    ;\ 

église,  (ar,  deux  ans  après,  le  pape  Eugène  Sixte  IV,  successeur  de  l'aul  II,    pour  avoir 

étant  dccedé,  les  chanoines  séculiers,  \oulant  justice  de  ces  violences  et  être  rétablis  dans 

prolitrde  la   vacance  du  saint-siège,  se  li-  Saint-Jean   de  Latran.   Mais   ce  fut  inutile- 

guèrcnt  ensemble  pour  les  en  chasser.  Les  ment,   car  le  pape   appréhendait  lui-même 

caidinaux  ,  qui  craignaient   les   suiics  que  pour  sa  personne,  après  ce  (jui  lui  était  ar- 

pouvait  avoir  celte  afl'aire    p 'ndanl  le  ron-  rivé  en    allant   prendre   possession  de  celte 

clave ,  les    apaisèrent    en   leur   promettant  même  église,    qui    est    le    siège   des    papes 

qu'ils    y    seraient     rétablis    immcdialemenl  coiume   évécjues   de   Kome,   lorsqu'il   fut  eu 

après   (|u'ils   auraient  donné  un   chef  à  l'K-  danger  de  sa  vie  par  les  pierres  dont  il  pensa 

gi  se.  (!e  lui  Nicolas  N'  sur  qui  tomba  l'clec-  être    accablé    pur    quelques   Humains   qui 

lioii,    l'an   lï'w  ;  qui,  à   la  sollicitation  des  étaient  poursuivis   par  ses  gardes   achevai, 

cardnaux,  les  remit  en  possession  de  cette  avec  lesquels  ils  avaient  pris  querelle.    Il  se 

église  conjointemcnl  avec   les   Uéguliers,  à  contenta  seulemenl  de  leur  donner  une  bulle 

condiii'tn  néanmoins  qu'ils  ne  se  méleraienl  au  mois  de  mai  lï'rl  par  laquelle  il  leur  con- 

poiiit  dans  les  alTaires  de  ceux-ci  et  n'assis-  lirmait  le  tiire  de  Chanoines   Uéguliers  de 

Icraient  point  au  cha-uravec  eux.. M. lisil  était  Saint-Sauveur  de  Latran,   avec  les  privilé- 

impossible  que  des  esprits  (|ui  étaient  si  fort  ges  qui  leur  avaient  été  accordés  parsespré- 

;:igris  les  uns  contre  les  autres  pussent  vitre  «lécesscurs    lorsqu'ils   c!aient  en  possession 

longiemps  en  bonne  intelligence  et  dans  une  de  cette  église,   prélendanl    .[u'ils   en  joui- 

partaile  union.  Les  dilïérends  qu  ils  avaiciil  rair.il  comme   s'ils  et  lient  encore  du  corps 

loiijours  ensemble  obligèrent  ce  pape  à  don-  de  ce  chapitre.  Il  leur  eu  accorda  une  autre 

ner  d'autres  bénélices   aux  chanoines   sècu-  eu  liSO  par  laquelle    il  érigeait    en  abbaye 

tiers,  il    y  en    eut   même    (juchpies-uns   qui  plusieurs    monastères    qui   a\aienl  perdu  ce 

liirenl   faits  èvêqiies,  cl   il   n'en   rest  i  qu'un  litre  lorsqu'ils  emluassèrenl  la  réforme  dont 

avec  quatre  bénéliciers  pour   la    garde   des  nous  avons  parlé  ;  et  enlln,  l'an  l'iS.'J,  voyant 

reliques,   auxquels   on   assigna    un    revenu  toute  l'Iialie  en  paix,  il  lit  bâtir  au  milieu  de 

annuel.  l'.oiiie  une  église  sous  le  nom  de  Notrc-Manu! 

Les  choses  ne  demeurèrent  pas  longtemps  de  la  l'aix,  suivant  le  \a'u  qu'il  en  avait  fait, 

en  cet  étal,  car  Nicolas  \'  élanl  mort  en  l'ij.'l,  Il  y  lit  mctlie  une  image  de  la  sainte  \.  ier^e 

cl  Alphonse  liorgia  ,  Lspagnol  de  nation,  lui  qui  avait  rendu  be.iucoup  de  sang,  ayant  ele 

a)aiil   succédé   sous  le  nom  de  t^.ilixle  III  :  fr.ippeede  idusieurs  coups   de  poignard    p.ir 

comme   il    était   étranger,  il   voulnl  d'abord  un  soldat  impie  (|ui  av.iit  perdu   son  argent 

s'allirer   l'amitié  des  Komains  eu   reinoj.int  au  jeu,  et  donna  celte  église  à  ces  Clianomes 

les  Clianoines   Uéguliers  dans  leurs  monas-  Uéguliers,  qui  y  sonl  restés  jusiiu'à  pré  Cul. 

U'-res,  il  rétablit   les   chanoines   séculiers   et  Lc!    ca>-,linal  Olivier  CaralTe  leur  fil  bâtir  un 

cassa  loul  ce  qu'Lugèiic  l\   avait  fait.  monastère  cl  leur    laissa  par  son  Icsiaiiient 

Il    se.nblait    après     tant    de    revoliilions  sa  bibliollièque  avec  une  maison  de  plaisance 

qui   étaient   arrivées  ù  ces  Chanoines  llegii-  Iits  de  Kome. 

liers,  qu'ils  ne  devaient  pins  penser  à  rentrer  Celle  église  de  la  Paîx  est  présentement  un 

flans  la  possession  de  celle  église  :  ne  iimoins,  lilre  de  cardinal,  cl  .VUxandre  \ll,    l'.iyant 

l'an  l'ili'j,  leurs  espérances  se  renom  eéi  eut  fait  réparer  sous  son  pou  ilicat,  lit  meilre  sur 

lofiqu'ils  virent  qu'après  la  inoil  de  l'ie  11,  un  des   cotés  de  la  façade  son  portrait  avoc 


7J7 


I..VT 


L\T 


;i8 


ce  vrrsel  du  psaume  71  :  Orielur  in  diebus 
ejusjustiliaetabiindiintiaPacis.  Mais,  comme 
ce  pape  ne  manquait  pas  d'ennemis,  on  fit 
parler  Pasquin,  on  ajouta  un  M  au  commen- 
cement et  on  changea  le  c  de  Pncis  en  n  : 
de  sorte  qu'on  lisait  :  Morietur  in  diebus  ej us 
justilia  et  abundanlia  panis. 

A  l'égard  des  chanoines  séculiers,  ils  ont 
loujoursétêdepuis  ce  temps-là  paisibles  pos- 
sesseurs de  la  basilique  de  Saint-Jean  de  La- 
tran,  qui  est  depuis  plusieurs  siècles  sous  la 
protection  de  nos  rois,  qui  l'ont  enrichie  de 
plusieurs  présents  ;  et  Henri  IV,  surpassant 
ses  prédécesseur^,  a  donné  l'abbaye  de  Clé- 
rac  en  Languedoc  à  ces  chanoin.  s,  qui,  pour 
léinoigner  leur  reconnaissani  e  envers  leur 
bienfaileur,  lui  ont  érigé  une  magnifique 
statue  de  bronze  qui  est  sous  lo  portique  de 
celte  église,  et  tous  les  ans  le  13  décembre, 
fêle  desainteLuce,  ils  fonlchanlcr  une  messe 
avec  une  superbe  musique  pour  le  roi  el  le 
royaume  de  France,  à  laquelle  l'ambassa- 
deur, les  cardinaux  et  les  prclals  de  cette 
faction  assistent. 

Les  Chanoines  Itéguliers  n'ont  pas  laissé 
néanmiiins  de  faire  encore  quelques  tenta- 
ti\es  piîury  rentrer,  l'enol  prétend  que  L'ie  IV 
les  voulait  réiablir  dans  cette  église,  que 
les  bulles  en  av.jient  été  dressées,  mais  que 
la  mort  l'cmpécha  d'exécuter  son  dessein. 
11  avait  aussi  érigé  seize  de  leurs  prieurés 
en  abbayes,  dont  le*  lellres  ne  purent  pas 
élrc  aussi  expédiées  avant  sa  mort,  et  elles 
ne  le  furent  ([ue  sous  le  pontifie  it  de  Pie  V, 
son  suicesseur.  Ce  lut  au -si  sous  celui  de 
Pie  IV,  l'un  l"Gi-,  qu'ils  gagnèrent  le  procès 
qu'ils  avaient  avec  les  moines  du  .Mont-Cas- 
sin,  dont  nous  parlerons  à  l'article  de  ce 
nom  ;  et  en  reconnaissance  des  bienfaits 
qu'ils  avaient  reçus  de  ce  pape,  ils  ordonnè- 
rent dans  un  chapitre  général  que  l'on  fe- 
rait tous  1rs  ans  son  anniversaire  dans  tous 
les  monastèrL's  de  la  congrégation. 

Ces  Channines  11 'guliors  avaient  antrcfois 
quarante-cinq  abbaye-^,  cincjuante-six  prieu- 
rés, viiig'-une  prévôtés  et  deux  archipré- 
Irises,  ouire  les  monasières  des  Gbanoines- 
ses  qui  leur  ciaicnl  soumis.  Ils  sont  sei- 
gneurs des  îlesd  ■  Tremiii  dans  la  mer  Adriati- 
que,elde^  dépendances  du  royaume  ileNaples. 
Ils  ont  un  beau  monastère  avec  une  église 
déiliée  à  Notre-Dame,  dans  la  principale  de 
ces  îles,  appelée  Santa-Marii  di  Tremiii. 
Plusieurs  personnes  y  vont  en  dévotion  h 
cause  d(!S  miracles  fréquents  qui  s'y  fon'.  Il 
n'y  a  aucun  capitaine  de  vaisseau  (jui  ose 
passer  devant  sans  saluer  la  Vierge  de  trois 
coups  de  canon.  Celte  église  et  le  monas- 
tère ont  de  fort  bonnes  murailles  et  une 
forme  de  forteresse.  La  seconde  de  ces  îles 
se  nomme  San-Domino,  el  la  troisième  Ca- 
prara. 

11  est  sorti  de  celle  congrégation  quelques 
cardinaux,  el  elle  a  fourni  à  l'Eglise  des  ar- 
chevêques el  des  évcqucs.  Barthélémy  Co- 
lomne,  qui  est  reconnu  pour  le  Père  et  le 
réformaieur  de  cette  congrcgnlion,  a  acquis 
par  sa  sainteté  le  titre  de  bicnheu.reu£,  aussi 
bien   que  Léon  de  CLiralle  et  Martin  de  Uer- 


game,  qui  ont  été  du  nombre  des  Channines 
de  celle  réforme.  Penol  fait  encore  mention 
des  bienheureux  Théodore  de  Plaisance, 
Fr  inciscain  do  Casai,  Biaise  de  Vicenze  et 
André  de  Novarre:  il  a  fait  le  calalogue  des 
écrivains  de  cette  congrégation,  dont  or» 
pourrait  retrancher  saiulLéon  l"p;)pe,  saint 
Prospcr  d'Aquitaine,  et  quelques-autres  qu'il 
y  a  insérés  comme  ayanl  été  Chanoines  Ué- 
guliers  de  celle  congrégation,  à  ce  qu'il 
prétend. 

Mais  si  clic  a  eu  l'avantage  d'avoir  pro- 
duit un  grand  nombre  de  personnes  illustres 
par  leur  science  el  par  leur  piété,  elle  a  eu 
aussi  le  chagrin  d'avoir  nourri  dans  son  seiu 
un  des  plus  grands  ennemis  de  l'Iîgli^e, 
Pierre  Vcrmili,  plus  connu  sous  le  nom  de 
Martyr,  qu'il  avait  pris.  Il  excellait  en  esprit 
el  en  science,  et  avait  une  éloquence  natu- 
relle qui  le  fil  considérercomme  le  plus  grand 
préiicateur  Je  son  temps  en  Italie.  Il  fui  fait 
visiteur  général  de  son  ordre  en  155i,  el  en- 
suiteprieurde  Lucques.  Quelquetempsaprès, 
la  lecture  des  livres  de  Zuingle  el  de  Bucer 
commença  à  le  pervertir,  et,  s'étant  tout  à 
fait  jeté  dans  le  sentiment  des  protestanls, 
il  pervertit  aussi  quatre  religieux  de  sa  con- 
grégation, savoir,  Emmanuel  Tremel,  Fcr- 
rarais  ;  Celse  Marlingot  et  Paul  Lascio,  lous 
trois  professeurs,  le  premier  en  langue  hé- 
braïque le  seconJ  en  langue  grecque,  le 
troisième  en  langue  latine;  el  le  quatrième 
fut  Jérôme  Lancius  de  Bergam  • ,  qui  le  sui- 
virent dans  son  apostasie,  aussi  bien  que 
Bernard  Ocliin,  vicaire  général  des  Capucins, 
qui  fut  aussi  perverti  par  cet  impie. 

FerranlePalaviciniélaitde  la  même  congré- 
gation et  est  recommand.iblc  dans  l'hisloire 
par  ses  écrits  et  par  sa  fin  tragique.  Il  publia 
diverses  pièces  contre  le  sainl-siége  el  la  mai- 
son des  Barberius,  en  faveur  d'Odoarl  Far- 
nèse,  duc  de  Parme,  son  souverain,  qui  était 
en  guerre  avic  le  pape  Urbain  VIII:  te  qui 
fit  que  ce  pontife  mil  sa  tête  à  trois  niillo 
ducats.  Il  fut  trahi  par  le  fils  d'un  libraire  do 
Paris,  qui  se  disait  de  ses  amis, et  qui,  au  lieu 
de  le  conduire  à  Orange,  où  il  voulait  se  re- 
tirer, le  fit  passer  sur  le  Pont  de  Sorgues 
dans  le  Comté  Venaissin,  pour  le  faire  tom- 
ber entre  les  mains  des  officiers  de  justice  du 
p  ipe,  qui  le  conduisirent  à  Avignon,  où  ou 
lui  Iraocha  la  tête  après  quatorze  mois  de 
prison,  l'an  ICi'i-,  n'étant  que  dans  la  vingt- 
neuvième  année  de  sou  âge.  Celui  qui  l'avatt 
trahi  reçut  quelque  temps  après  la  récom- 
pense de  sa  perfidie,  ayant  été  tué  par  un  des 
amis  de  Palavicini,  lo  squ'il  se  croyait  en  sû- 
reté dans  Paris. 

Les  Chanoines  de  celte  congrcgati  in  de  La- 
Iran  jeûnent  pendant  l'avcnt  et  lous  les  ven- 
dredis de  l'année,  excepté  dans  le  temps  pas- 
cal. Ils  font  abstinence  tous  les  mercredis  ; 
et,  depuis  la  fête  de  l'Exaltation  de  la  sainte 
croix  jusqu'à  Pâques,  ils  jeûnent  encore  les 
lundis,  les  mercredis  el  les  samedis  ;  mais  il 
est  permis  au  supérieur  de  donner  quelque 
chose  le  soiravec  le  pain  et  le  vin.  Ils  font  un 
qualrième  vœu  de  ne  recevoiraucun  bénéfice 
sans  la  permission  du  chapitre  général.  Voici 


ri9 


niCTIONNAlIlF.  DES  OlUtUES  IIKI.ICICIX. 


lalormule  delpiirs  vrru\  :  Anno  Pomini \'.,die 
N.,n>ensis \.,  Fgndo'hnusiV..  in  fwculo  rnrn- 
liis  y.,  rlitis  y  ,  ror-o,  con/îlror  ri  promillo 
Deo,  Il  Miir'nr  V  irijini  rt  II.  Auntiflino,  et  libi 
J'alii  dnmno  .\.,  nlib  li  {  feu  priori  )  eju^  nio- 
r.tiftei  li  Sdiicii  .V.,  orilinix  Cattonicorum  Jir- 
gnlaniim  S.  Augtiftini,  rnngrrf/nliunis  Siil~ 
riiloris  Lntrrdnrvsia,  rcripienli  nomincrl  vice 
rei  erenilifsiiiii  l'alrin  \.  fjiisdcm  conqrega- 
lionis  nhbiilif  f/rticralis.  ae  furcessorum  ejus 
rnnoitiiC  inimnlium,  nbeilicntiam,  caslilale»}, 
et  vivere  in  rommuni  sine  prnpi  io,  usque  ad 
tnorletn,  sccutidum  rei/u!nni  sanrti  Augnstini, 
(l  quod  nttnqiKiin  nbsi;iie  licetilia  cnp  IhH  (je- 
nnalis  dichr  congrfi/alionis,  tel  ejitn  nurtn- 
riiatc  funf/iiilis,  aliqnod  cum  cu:ti  vel  sine 
cura  bencficium  accepliibo,iiilHS  vel  extra  or- 
dinem  nosirum,  remintiando  omnibus  jurihus, 
privilegiis  et  consuctudinib'is,  vel  quomodo- 
libfi  cowpelituris.  Eijo  domnus  i\.  supradi- 
clusmanu  pi  opria  scripsi,  et  vre  proprio  pro- 
tiuntiavi.  Leur  li.ilijllcincnt  consiste  on  une 
soLiianc  (le  serge  bl.ini  ho,  avec  un  rochel 
pnr-dcssus  fort  plissé,  et  un  bonnet  carré 
lorsqu'ils  sont  d.ins  la  maison  ;  ils  ajoutent 
un  surplis  par-dessus  lerochet  sans  aumus- 
ses   lorsqu'ils  vont  au  clurur  tant  l'éié  que 

I  hiver;  et  (|uand  ils  sortent,  ils  portent  un 
inaiiteau  noir  à  la  uianièrc  des  ecclésia?- 
ti(iues(l). 

Ils  ont  pour  a  mes  d'azur  à  l'image  de  la 
sainte  \ier};p  tenant  l'eufanl  Jésus  entre  ses 
bias,  ayant  à  sa  droite  saint  Jean  l'évangé- 
lisle,  et  à  sa  gauche  saint  Augustin,  à  ses 
pieds  un  aigle  de  sahie,  et  au-dessus  de  sa 
tête  la  sainte  face  de  Notie-Seigncur,  l'écu 
orne  d'une  mitre  il  d'une  crosse,  dont  se  ser- 
vent les  ahliésde  ci  tte  congrégation,  qui  d.uis 
les  jours  de  cérémonie  se  revêtent  d'habiis 
IiUMiificaux. 

<Juelques  auteurs  ont  avancéquo  les  fJn- 
noiues  iiéguliers  de  l'abbaye  de  Sainl-Mii  bel 
proche  l'ise,  qui  sont  aussi  de  la  congréga- 
tion de  Lalraii,  étaient  déchaussés  depuis 
i'an  I.JOO,  qu'ils  introduisirent  une  ré^ormi- 
|iarlieulié;e  dans  celle  abbaye;  mais  ils  ont 
été  mal  informés.  Il  est  vrai  que  dans  une 
ralaiiiilc  publique  ces  Chanoines  tirent  une 
procession  où  ils  allèrent  nu-pieds,  et  que 
•lepuis  ce  temps-là  on  les   a   appelés  Scalzi, 

II  s  J)ôchaussés  ;  mais  ils  n'ont  point  pour 
cela  introduit  d'autre  réforme  dans  cette 
abbaye  que  ceitc  des  l'Iianoiues  de  Lalran. 
auxquels  ils  furent  unis  l'an  \W.i,  et  ils  ont 
les  mêmes  oi)servances  que  les  autres  de  la 
cimuréL'atiou  de  l.atran. 

l'eiiot  ,  Ilisl.  Tripeirt.  Cnnonic.  Requl. 
Jndiiitn  et  priii'eq.  ponlif.  Ci:n(inici>r. 
cjnsitein  Confircg.  Ordinniiones  et  ('atislitat. 
eiimd.  Le  l'aige,  llii  lii>i!i.  l'rirvionsi.  lili.  i, 
STI.  r;.  Tambur..  Dejnr.  n'b  tom.  11,  di^p. 
Ik,  qwvsl.  k.  Ivmmanuel  Uodrig.,  qna'st.  .'(, 
nrl.  13.  Ni( olao  de  S.  Mar  a,  Chrnnic.  de 
Ord.  dns  Conrgos  Iteqrautes.  Joann.  ISaptist. 
Sii/n.  de  Ord.  ae  slalu  cananirn.  Mori;;ia, 
Hisl.  de  toutes  les  Reliq.  Sylvest.  Marul., 
àlar.   Ocian.   di   tult.  ql.  Reliq.  l'ietro  Crc- 


T-'ÎO 

scenzi,  Presidio  lionmnn  ;  et  Pbilipp   Uonau- 
ni,  Calaloq.  omnium  Ordinum,  part.  i. 

§  III.  Des  rongréqalions  de  Sainte-Marie  du 
Port  Adri  ilique,  de  Celle-Volanc,  de  Mor- 
Inre,  de  Creseenzagn  et  de  Saint-Friqdieu 
de  Lucques,  unies  à  celle  de  Saint-Sauveur 
de  Lalran. 

Nous  avons  dit  dans  le  paragraphe  I''  que 
les  Chanoines  de  Sainle-.Marie  de  Frisouaire 
ay;inl  été  réformés,  s'acquirent  une  si  i;rande 
estime,  que  non-seulement  on  les  appela  en 
jilus'eurs  endroits  pour  y  faire  de  nouveaux 
élahlissemeiils,  mais  que  plusieurs  anciens 
monastères  voulun-nt  embrasser  leur  ré- 
forme. Celui  de  Sainte-Marie  au  l'ort  Adria- 
ticiue  fut  de  ce  nombre  ;  il  avait  été  ainsi  ap- 
pelé à  cause  qu'il  avait^étè  bâti  sur  le  bord 
de  la  mer  Adriatique  auprès  de  Haveiuie,  et 
que  l'église  avait  été  cimsacrécen  l'honneur 
de  la  sainte  Vierge.  Jérôme  de  Kubeis,  dans 
son  Histoire  de  Uavenuc  (l.ib.  v,  /j.Sd.'i),  dit 
que  Pierre  de  lloneslis  surnomme  ilo  Ha- 
vennc,  lieu  de  sa  naissance,  en  fut  le  fonda- 
teur; que,  se  trouvant  dans  un  naufrage  et 
jirès  de  périr,  il  fit  V(eu  de  faire  bàiir  une 
église  en  l'honneur  de  la  sainte  \"ierge.  s'il 
échappait  de  ce  péril;  et  que  ce  fut  pour 
exécuter  son  venu  (lu'il  lit  jiter  Is  fonde- 
ments de  ce  monastère,  qui  est  devenu  dans 
la  suite  chef  d'une  congrégation  de  Cha- 
noines réguliers;  car  Pierre  de  H  incsti» 
ayant  assemblé  plusieurs  clercs,  avec  les- 
quels il  vécut  en  commun  dans  ce  monastère, 
il  leur  prescrivii  des  règles  ou  constitutions 
qui  furent  approuvées  i)ar  le  p.ipe  Pascal  II. 
Elles  fuient  trou\ées  si  bonnes,  que  plu- 
sieurs monastères  qui  s'élablireiit  dans  la 
suite  les  voulureul  observer,  et  qu  Iques- 
uns  se  soumirent  h  celui  du  Port  Adriatique, 
qu'ils  reeoiinureni  pour  leurclief. 

(Juelques  auteurs  ont  voulu  attribuer  ces 
conslitiiiions  au  cardinal  Pierre  Dainien  ; 
mais  l'enol  et  d'autres  écrivains  prouvent 
que  cet  abbé  du  Port  était  dItTerent  de  Pierre 
Damien  cardinal,  ((ui  mourut  en  tOli  et  s'ap- 
p  lait  aussi  de  Iloiicstis.  Ain>i  il  ne  faut  pas 
ô:er  In  gloire  à  Pierre  de  Honestis  d'eu 
avoir  été  l'auteur,  ce  qui  lui  a  fiit  donner  le 
titre  de  réformateur  des  (;han  liiies  liéLitiliers. 
(^e  saint  homme,  après  avoir  gouverné  le 
monastère  du  Port  pendant  (luelques  années, 
y  mourut  le  2:1  juillet  1 1  l'.l.  (le  monastère  fut 
donné  dans  la  suite  en  commeude  à  .\nge, 
c.  rdinal  du  titre  île  Saiiite-Putenlienne.  que 
Crégoire  XII  priva  de  cette  dignité  pour  ses 
mauvaises  uxeurs.  Il  fut  presque  détruit  et 
ruiné,  et  ses  biens  vendus  et  dissipés,  ce  i|ui 
fit  que  la  congrégation  de  Sainte-Marie  du 
l'ort.  qui  consistait  en  huit  couvents,  se 
voyant  sans  chef,  se  désunit. 

Cependant  Obi/ou  I  olentaui,  seigneur  de 
Itavenne,  obligea  ce  cardinal  de  n  mettre  ce 
monastère  entre  les  mains  du  pape,  (]ni  ne 
peut    pas   avoir   été    liinncenl    VIII  ,  comnio 


élu  i|uc  1 


avancé,    |)uisque   ce  |)oiitil'e  ne  fut 
'an  ViH't  ;  miùs  ce  fut  ou    le  même 


(1)  V't-j.,  à  la  fln  du  vol.,  n"'  171  et  lî.'i. 


m 


L\T 


Grégoire  XIJ  ,  ou  Alexandre  V,  ou  Jean 
XXIII,  qui,  sur  la  démi>sion  de  ce  cardinal, 
donna  le  monastère  du  Porl  à  Pierre  Mini  de 
lîagna-Cavallo,  Chanoine  Réïulii  r,  a(in  qu'il 
y  iclablît  l'observance  régulière,  en  conser- 
vai les  droits  et  pût  rentrer  dans  les  biens 
qui  avairnt  été  usurpés.  Mais  il  n'exécuta 
pas  ce  qu'il  avait  promis  au  pnpe,  el  le  nom- 
bre des  religieux  de  ce  monastère  ne  consis- 
tait que  dans  le  seul  prieur  et  son  compa- 
gnon, lorsque  le  même  Opizon  Polenîani  et 
les  bourgeois  de  Pavenne  lui  persuadèrent 
(le  faire  vi-nir  les  Clianoines  de  SainieMarie 
de  Frisonaire,  auxquels  il  céda  ce  monas- 
tère l'an  H20  ;  ce  qui  fut  confirmé  la  même 
année  par  le  pape  Martin  V,  qui  leur  rendit 
les  monastères  de  Saint-Barlhélemy  près  de 
Manloue  ,  de  S;iinle  Marguerile  de  Ferrare  , 
de  Sainlc-Marie  de  la  Slridella  proclic  de 
Faenza,  et  de  Saint-Augusiin  de  Forly,  qi;i 
avaient  i^pparîenu  à  la  congrégation  du  Porl. 
Mais ,  l'an  li32,  la  guerre  que  le  p  ipe  Eu- 
gène IV  eut  avec  les  Véniliens,  qui  assié- 
gèrent Ravenne,  ayant  obligé  les  Chanoines 
Itéguliers  d'abandonner  le  monastère  de 
Sainte-Marie  du  Porl,  ce  pontife  le  donna  en 
tommeniie  à  son  neveu  L.iurent,  patriarche 
d'Antioche,  et  les  Chanoines  Hégulicrs  n'y 
relournèrcnl  qu'après  la  mort  de  ce  prélat, 
qui  ne  le  possé  la  que  pendant  deux  ans. 
Comme  ce  monastère  éiait  seul  en  pleine 
campagne,  à  Irois  milles  deliavennc,el  qu'il 
avait  élé  ruiné  plusieurs  fois  par  les  guerres, 
les  Chanoines  HéguTers  le  transférèrent  dans 
la  ville  l'an  iro:î.  Le  P.  Sylvain  Moroceni, 
qui  (  n  était  prieur,  (il  jeter  celle  année  les 
fondemenis  d'une  magnifique  église  et  d'un 
monastère,  qui  ont  élé  beaucoup  enriciiis 
par  les  libéralités  et  les  aumônes  des  ci- 
toyens de  Uavenne.  Le  P.  Philippe  Bonanni, 
dans  son  Catalogue  des  Ordres  religieux,  a 
donné  l'habil  enseiit  d'un  ancien  Clunoine 
de  la  congcégalion  du  Port  Adriatique,  tel 
qu'il  c-t  représené  dans  quelques  tableaux 
à  Ravenne,  et  que  nous  avons  fait  graver 
aussi.  Cet  h,:bil!emenl  consistait  en  une  robe 
blanche,  nu  r(  chil,  un  manteai!  noir,  et  ils 
avaicn!  pour  couvrir  la  lèteune  aumusse  de 
serge  giise  (1). 

La  sec'  nde  congrégation  qui  fut  unie  à 
celle  de  Sainte  Marie  de  Frisonaire  élail  peu 
considéiabie  par  lappori  au  pelit  nombre 
de*  monasières  qu'elle  a  possédés,  el  on 
ignore  même  l'année  de  s;i  l'ondalion.  File 
lui  appelée  de  ^ainl-Jacques  de  Celle-Vo- 
lane,  à  cause  descn  premier  mon.isière,  qui 
fui  bâli  suus  le  lilie  de  Saint  Jacques  dans 
un  lieu  appelé  Celle-\  oiane,  dont  la  sitna- 
ti^m  ,  se  trouvani  au  milieu  d'un  bois  el  en- 
toure d'un  murais  (jui  rendait  l'air  trop  mau- 
vais, causait  des  mahidies  fréciuenies  aux 
r>  ligieux,  qui  les  obligèrent  à  r.ibandonner. 
Un  saint  homme  nommé  Biaise  de  Novell!  y 
ciail  néanmoins  resté  en  qualité  de  prieur  ; 
cl,  désirant  y  établir  les  observances  régu- 
lières, il  ne  trouva  point  d'autre  moyen  que 
de  le   céder   aux    Chanoines   Réguliers  de 

(t)  t'cy.,  à  la  fin  du  vul.,  n'  i7(i. 


Sainte-Marie  de  Frisonaire,  ce  qui  se  fit  l'an 
J42i  eî  fut  confirmé  par  le  cardinal  Gabriel 
Gondelmaire,  légat  de  Bologne. 

Les  Chanoines  Frisonaires,  ne  pouvant 
(las  non  plus  y  demeurer  à  cause  du  mau- 
vais air,  le  transférèrent  dans  un  des  fau- 
bourgs de  Ferrare,  avec  ses  revenus,  dans 
une  maladrcrie  que  Nicolas,  duc  de  Fenare, 
lenrdonna,  du  consenlemeni  de  Martin  V.  Il 
lui  ruiné  l'an  1505  lorsqu'on  voulut  agran- 
dir la  ville  et  la  fortifier,  et  on  le  transféra 
encore  dans  la  ville,  où  l'on  bâtit  une  église 
en  l'honneur  de  saint  Jean-Baptiste,  ijui  (ut 
érigée  en  abbaye  par  Pie  V  l'an  lo66.Fugôno 
IV,  l'an  IWi  ou  14V7,  leur  accorda  aussi  le 
monastère  de  Saint-Laurent  à  Ravenne,  qui 
avait  élé  a'si  membre  de  cette  congrégation, 
cl  qui  cul  le  même  sort  que  son  chef,  ayant 
été  aussi  abatlu  lorsqu'on  fortifia  celle  ville. 
Ces  Chanoines  de  Celle-Volane  avaient  des 
habillements  différents  pour  la  forme  et  la 
couleur  de  ceux  que  portaient  les  Chanoines 
de  Frisonaire,  comme  il  paraît  par  les  lettres 
d  union  ;  mais  on  ne  trouve  pi)int  quelle  était 
la  coulei:r  de  cet  habillement.  Il  est  sorti  de 
celle  congrégation  quelques  évéques,  connue 
Biaise  et  l'ile  Novelli,  qui  l'ont  élé  d'Agria, 
et  Daniel  d'Arnuli  de  Forli.  Thomas  et  Bar- 
thélémy Garzoni,  frères,  qui  ont  donné  des 
écrits  au  public,  étaient  de  la  même  congré- 
gation. 

Les  Chanoines  de  Sainle-Marie  de  Friso- 
naire ,  ayant  pris  en  l'tlS  le  litre  de  Cha- 
noines Réguliers  de  Sainl-S:iuveur  de  La- 
Iran,  comme  nous  avons  dit  ailleurs,  leur 
congrégation  se  vit  augnr  niée  quelques  an- 
nées après  de  celle  de  Mortare,  qui  y  fut 
unie.  File  avait  pris  le  nom  de  son  premier 
nmnastère  situé  à  Moriare,  qui  est  un  bourg 
proche  de  Pavie.Cc  lieu  était  autrefois  très- 
agréable  à  cause  des  bois  et  des  forêts  qui 
l'environnaient  et  qui  lui  avaient  fait  donner 
le  nom  de  Belle-Forét;  mais  après  que  l'em- 
P'rcur  Charlemagne  eut  vaincu  Didier,  roi 
lies  Lo  iibards,  qui  perdit  en  ce  lieu  cl  son 
royaume  et  sa  liberté,  le  nom  de  Moriare  lui 
est  resté. 

Un  saint  homme  natif  de  ce  lieu,  qui  était 
fort  riche,  nommé  Adam,  à  qui  les  histo- 
riens donnent  le  litre  de  clerc,  fil  bû  ir  sur 
ses  Icrres,  l'an  1180,  une  église  magniliquo 
sous  le  nom  de  Sainte-Croix,  qu'il  donna  d'a- 
bord à  des  moines  (|ui  ne  la  possédéienl  que 
trois  ans;  après  lesquels  les  Chanoines  Ré- 
guliers l'occupèrent.  Ils  furent  gouvernés  par 
D.  Candulpiie  de  (îarlasco,  qui  mourut  quel- 
que lemps  après  et  eut  pour  successeur  doua 
Ayralde,  qui  fut  dans  la  suite  archevêque  de 
Gènes.  Ce  fut  sous  son  gouvernement  que 
celte  congrégation  s'augmenta,  el  elle  devint 
même  si  considérable  qu'elle  a  possédé  qua- 
rante-deux   monastères   et   plusieurs  turcs. 

Les  Bénédictins  avaient  possédé  l'église  de 
Saint-Pierre  au  Ciel  d'Or  de  Pavie  depuis  le 
commencement  du  viii''  siècle,  que  Luit- 
prand,  roi  des  Lombard;;,  y  avait  l'ail  mellro 
le  corps  de  sai'ii  An^u^lin,  docteur  de  l'K- 


75r.                                           DICTIONNAIRE  DF.S  ORDRES  nELICIF.UX.  724 

glisc  M.iis,  aynnl  eu  bofoin  lic  réforme  au  Latran,  pour  l'union  du  monasière  de  Mor- 
foinineiicrmiMil  ilu  xiii'  siècle,  le  jinpe  Ho-  tare  à  leur  coiigréfralioii  ,  mojennant  une 
norias  III  leur  ôla  celle  éirlive  l'an  \'22i.  Il  pension  annuelle  de  cenl  durais,  ce  ((tii  fut 
la  donna  aux  Chanoines  Uéjjulicrs  de  la  con-  approuvé  par  le  pape  Nicolas  Y,  par  SC'S  let- 
prép.ilion  de  Morlare;  cl,  à  cause  (|ue  le  1res  du  13  (evrier  IV  lO.  Ce  pontife  en  ilonna 
corps  de  saint  Aupnslin  y  reposait,  il  voulut  d'autres  le  26  juillel  IVol,  par  l(Si|uellcs  il 
«in'à  l'avenir  ce  monastère  fût  chef  de  leur  leur  accordait  tous  les  monastères  qui  depeii- 
coni:réi.'alion  et  i\\i'on  y  tint  les  chapitres  daicnt  de  celle  congrégation,  ce  qui  n'a  pas 
généraux.  Les  Chanoines  Réguliers  qui  empêché  qu'il  n'y  en  ail  eu  quolques-uus 
étaient  restés  à  .Morlare  eurent  de  l.i  peine  à  qui  aient  passé  à  quelques  autri's  ordres, 
ronscnlir  que  le  chef  de  leur  congréga'ion  Celle  congrégation  a  fourni  plusieurs  per- 
fùi  transféré  au  mona  tère  de  Sainl-l'ierre  sonnes  illustres  par  leur  sainti  lé,  leur  nais- 
au  Ciel  d'Or;  i's  préiendirenl  retenir  ce  droit  sauce  et  les  digntés  qu'el'es  oni  occupées, 
de  supériorité  après  la  morl  du  pape  Hono-  couimc  Guariri,  cvêquc  de  l'alestrine  et  car- 
rius.  Mais  (irégoire  I\,  l'an  12-28,  leur  or-  dinal  ;  Ayrald  et  Jacques,  archcvê  !ucs  île 
donna  d'ohéir  .i  l'ahbé  de  Saint-Pienc  au  Gènes;  liernard,  évé^iue  de  Pavie  ;  Obcrt  de 
Ciel  d  Or  comme  ;'i  leur  chrf;  et,  sur  les  Torloiie ,  Uadole  de  Plaisance,  un  autre 
plainics  que  formaient  toujours  ceux  de  Obert  de  Bobio.  et  Albert,  patriarche  de 
jlorlare,  il  ordonna,  l'an  12.'i8,  que  les  cha-  Jérusalem,  légis'aleur  des  Carme-.  Penol 
pitres  généraux  se  liendraiiiit  à  l'allernilive  met  encore  un  autre  .\lbort,  évéque  de  Ver- 
à  Mortac  il  à  Pavie.  Il  y  a  cependant  de  ceil  ;  mais  il  peut  s'être  trniupé  :  cet  Albert 
l'apparence  que  ceux  de  MDrtare  ne  furent  est  sans  doute  le  même  que  le  patriarche  de 
pas  encore  satisfaits,  et  que  dans  la  suite  les  Jérusalem,  (]ui  a  été  aussi  cvéquc  de  Ver- 
couvents  qui  dépemlaient  de  la  congrégation  ceil  après  avoir  été  nommé  à  l'évèché  de 
«le  .Morlare  ne  furent  plus  sou:nis  à  la  juri-  Bobio,  d  jut  il  ne  pril  pas  possession,  n'ayant 
ilirlion  de  l'abbé  de  Saint-Pierre  au  Ciel  pas  encore  été  sacré  lorsqu'il  fut  élu  pour 
«l'Or  de  Pavic,  et  reconnurent  le  min  islère  celui  de  Verceil. 

de  Morlare  pour   leur  chef  ;   car,  quand   les  La  congrégation  de  Crescenzago,  ainsi  ap- 

Chanoiucs  de  Latran   en  prirenl  possession  pelée  à  caus' de  son  premier  monastère,  situé 

cl  qu'on  leur  cul  accordé  en   lloi   tous  les  dans  le  bourg  do  ce  nom,  à  trois  milles  de 

luonaslères    qui    en    dépendaient,   celui  de  Jlilan,  a  éié  autrefois  ionsi(lcrable.  Ce  inona» 

Saint-Pierre  au  Ciel  d'Or  n'y  fol  point  corn-  stère  fut  bàli   l'an  ll'kO,  et  l'église  fui  dédiée 

jjfis,  cl  ils  n'en  fuient  les  maîtres  que  l'an  sous  le  nom  de  la  sainte  \'ierge.  Le  premier 

1583,  y  ayant  élé  appelés  pour  le  reformer  prieur  fut  un  nob!e  Milanais  nomiié  OUon 

par  le  cardinal  Haphaél  Uiaire.  deMorhi,  sous  le  goui  criieoienl  duquel  et  de 

Le  monastère  de  Morlare  avait  en  le  même  ses  suce  sseurs  la  discipline  régulière  fut  si 

sort  que  plusieurs  autre*  i)ui  éiaient  tombés  bien  observée,  que  ce  mona-lère  devint  chef 

dans  le  relâcbenjenl,  cl  lis  guerres  qui  trou-  de  plusieurs  autres,  qui   se  joignirent  à  lui 

blèrenl  le  Milanais  perdant  plusieurs  :>n-  écs  cl  formèrent  une  congrégalion  qui  avait  des 

lui  caisèrent  hraiironi)   de   douiiiiagc,  tant  statuts  qui  lui  étaient  pariiculicrs  :  les  supé- 

dans  le  spiriluel  que  dans  le  lempoid.  \crs  rieurs  s'assemblaienl  tous  I  s  ans   dans  un 

l'an  li'i8,  le  P.  Uapbai^l  Salviali  de  Calahre,  cbapiire  général  qui  se  Icnail  au  monastère 

de  l'ordre  i!c  S  lint-Dominique,  par  le  loojen  do  Crescenzago,  dont  les  revenus  se   mon- 

«le  son  frère,  qui  éiail  secrétaire  de  Louis  de  talent  à  plus  de  quinze  mil'e  écus.  ("e  mona- 

Saillt-Sé^  erin,  seigneur  de  Morlare,  obiint  stère  n'avait  que   le  tilre  de   prévoie,  et  lo 

du  pape,  à  la  recouiniandation  de  ce  seigneur,  cardinal   de   San    Sévérino   le   possédait   en 

la  I  révêjté  de  Morlare  ;  il  prit  riiabit  de  Cha-  coiuniende  ,  lorsque   l'an   i'Ml  il   transigea 

iioinc  Régulier,  cl,  profitant  du  crédit  de  son  avec  les  Chanoines  de  La  raii  pour  y  inlro- 

firc,  il  rciiîra    d.ms  la  jouissance  de   plu-  diiire  leur  reforme,  n'y  ayant  ()-)ur  lors  qu'un 

sieurs    biens    qui    avaient    appartenu   à    ce  seul  chanoine  dans  ce  monasière.  Mais  il  ne 

iM'  na-,tère  et  qui  a>aiei;i  été  usurpés  jiar  des  Irur  abindoifa  pas  les  revenus,  qu'il  retint 

féculicis.  Il  fil  cnsuilc  assembler  le  chapitre  pour  lui  et  pour  les  prieurs  (■ommendalaires 

général  à  Toiione  le  10  a\ril  de  la  menu;  an-  (|ui  lui  succéderaient,  ce  qu'avait  fai'   aussi 

née,  p  lur  introduire  qiielipic   réforme  dans  trois    ,'ins   auparavant    Antoine    «le    Stangi, 

les    monastères    i;ui    en    dépendaient.    Mais  protonolaire   apostolique,    en    leur    celant 

Louis    de  Sainl-Séveriu  étant   nio'-t  sur  C'S  aussi  Ir  monastère  de  Saint-Georges  de  Hri- 

enlrefaites,  et   Irançias  Sforze    s'èiant   cm-  niale,  qui  avait  élé  membre  de  celte  congrc- 

paré  «le  .Morlare  par  la  force  des  armes,  le  P.  g  ilion.  dmit  il  (  si  sor  i  il  nx  rar  inaus,  qui 

Salviali    appréheuila    pour   sa    iropr»;    per-  sont 'l'Iiomas  et  Alliin  de  Milan,  comme  aussi 

sonne  ;    voyant    (]ue    les    habitants    avaient  plu^^ieurs  évéqnes. 

chassé  son  Irère  de  leur  ville,  il   se  retira   à  Knfin  la  congrégalion  de  Sainl-Frigdien  t'a 

Gênes,  dans   le   monastère   <lc  Saint-Théo-  Lurques,  qui  av.iit  aulrefois  servi,  ^ou3  le 

liore,  qui   dépendait   d  •  cette  congrégalion.  poaliniat  (l'Alexandre  11,  à  réformer  rb'gliso 

Le  ilésir  iju'il    av.nt  ,1e   r<'toiirnir  dans  son  de  Saint  Sauveur  de  Lairan,  cul  lu-soin  elle- 

[lays  et  dans  son  premier  ordre,  joint  à  l'ap-  même  de  réforme  dans  le  \vr'  siècle,  cl  so 

préhension    qu'il   .ivail   que    la    prévrtié    de  soumit  à  i  elle  de    Latran.    F.llc  avait  pris  le 

Morlare  ne   tomb.at    en    commende,  coiiime  nom  de  saint   l'rigilien,  e\èque  de  Lucques, 

c'était  la  C'U:umc  de   ce   ti-mps-là,  fit  qu'il  qui  (itbàtircn  celle  viil-,  l'an  5i(), une  cgliso 

transigea  a\ec  les  Chanoines  Réguliers  de  eu  l'honneur  des  saials  diacres  lilieiiuc,  Lan 


-2S  L\T 

ren)  el  Vincent.  Il  y  mil  des  clercs  avrc  lesquels 
ou  prélend  qu'il  vcciil  en  commun  jusqu'à  sa 
mort;  el  ayant  été  enlerré  dans  cette  éclise, 
les  miracles  continuels  qui  se  firent  à  son 
lo:nbeau  furent  cause  qu'on  donna  à  celte 
église  le  nom  de  son  fondalcnr,  qu'elle  a  re- 
'^   tenu  jusqu'à  présent.  M;iis  la  congrés.ilion 
dont  elle  a  aussi  porté  le  nom  n'a  commencé 
que  sous  le  p mlilical  d'Alexandre  il  ;  car  ce 
pape,  qui  avait  aussi  élé  évoque  (!<■  Lucque-i, 
cl  qui  connaissait  la  piélé  des  Chanoines  de 
celle  Eglise,  en  fil  venir  à  Rome  pour  réfor- 
mer riîglise   de   Latraii   cl  celle  de  Sainte- 
Croix  de   Jérusalem.   Cille  de  Liilrnn  ne  fut 
pas  un  des  membres  de  celle  congrégation  ; 
ce  pontife  voulut  qu'elle  fût  imtnédiatemenl 
soumise  au  saint-siége.  Elle  devint  chef  d'une 
autre  congré;îalion,  qui  fut  éteinte  lorsqu'on 
les  obligea  à  abandoinur  celle  église,  comme 
nous  avons  dit  dans  le  paragraphe  l".  Ainsi 
l'église  de  Sainte-Croix  de  Jérusalem  à  Rome 
fui  la  première  qui  fut  unie  à  la  congréga- 
tion de  Saint-Frif^dien   de   Luc(]ucs,  avec  le 
monastère   de  Sainte-Mari  -la-Neuve  ,  situé 
aussi  dans  l'enceinte  de  Rome,  et  douze  au- 
tres  monastères  conventuels,  sans  compter 
un  Irès-grand  nombre  de  prieurés  el  de  cures. 
Mais,  l'an  1307,  le  prieur  de  Sainl-Frigdien 
de  Lucques  et  ses  religieux,  voyant  que  leur 
congrégation  diminuait  tous  les  jours  elque 
la   plupart  de  leurs  monastères  avaient  élé 
donnés  en  commonde,  ils  firent  union  avec 
ceux  de  Saint-Sauveur  de  Latran,  et  cédèrent 
â  cette  congrégation  le  moiuislère  de  Sain'- 
Frigdien  de  Lucques  avec   les  prieurés  qui 
en  dépendaien(,  qui   étaient  au  nombre  de 
dix  ,  à  condition   que  ceux    de  Latran  (|ui 
viendraient  demeurer  dans  le  monastère  de 
Lucques  se  conformeraient  à  eux  pour  l'Iia- 
billemeiil,  qui  consislait  en  une  chapi'  noire 
avec  le  capuce  par-dessus   le  surplis;   que 
l'iincien    prieur  de  Sainl-Frigdien  conserve- 
rait celle  dignité  pendant  sa  vie,  el  que  celui 
qui    lui    succéderait   jouirait   de  ses  mêmes 
privilège-,    qui    consislaienl    entre    autres 
choses  à  se  servir   d'ornements   ])onlificaux 
les   fêles   solennelles   et   à   quelques  autres 
rondiiions  exprimées  dans  la  bulle  du  pape 
Léon  X,  qui  conlirma  celle  union. 

Li;  pape  Lucius  11  avait  élé  de  celle  con- 
grégation. Ce  fut  lui  (|ui  ordonna  qu'aucun 
cardieal  ne  pourrait  prétendre  au  t. Ire  de 
l'église  de  Sa  ntc-Crois  de  Jérusalem ,  s'il 
n'était  du  corps  des  Chanoines  Réguliers  de 
la  congrégation  de  Sainl-Frigdien.  Le  pape 
Innocent  II  avait  aussi  onlonné  la  même 
chose  à  légard  du  litre  de  Sainte-.Maric-la- 
Neuve,  ce  >\n\  fut  confirmé  par  les  papes  Cé- 
leslm  II,  Eugène  I!!,  Adrien  IV  el  Alexan- 
dre 111  ;  et  c'est  peul-ctie  ce  qui  a  oliligé  les 
papes  qui  leur  onl  succédé  dans  la  suile 
d'ôter  ces  deux  églises  aux  Chanoines  l'égu- 
liers.  Elles  sont  présentemenl  possédées  par 
les  moines  de  Citeaux  el  du  Mont-Olivel. 

Penot  ,  Hisl.  Tripar(.  Cnnonicor.  Rcr/ul.; 
Silveslr.  Maurol.,  Mnr.  Océan,  di  luti.  yt. 
tlclig.;  le  Pai^e,  Bblioth.  PrœmunH.  iib. 
I.  tccl.  15;  '\nm\nxv.  ,  De  Jur.  Abbal. ,  lom. 
li,  dtsiiut.  4, 


LAT 


72G 


Nota.  Ici  nous  voyons  les  Chanoioos  do 
I^alran  appelés  par  le  P.  Ilélyot  Chanoines 
de  Silint-Sau^eur  de  Latran.  Néanmoins, 
dans  le  Crncax  (almanach  ol'liciel  de  Rome) 
du  dernier  siècle,  on  trouve  désignés  d'iibord  : 
les  Clifinoines  Uéguliem  de  Ijilian,  à  S.iinte- 
Marie  de  la  Paix  ;  puis  les  Chanoines  Régu- 
liers de  Saint-Sauveur,  aux  trois  élablissc- 
menls  suivants  :  Sainl-Pierre-ès -Liens  ; 
Sainle-Agiiès-hors-d(  s-Murs  ;  Suinl-Lauri  ni- 
hors-iles-.VIurs.  Dans  le  Cracas  actuel,  on  ne 
trouve  point  celle  disiinclion,  m;;is  seulement 
l'indication  des  Chanoines  Réguliers  tieSaint- 
Sauveur  de  Latran,  ayant  pour  abbé  gé- 
néral le  R.  P.  Alexandre  Gozzi,  et  pour  vice- 
procureur    général   le   P.   Vincent   'lizzani. 

B-U-H. 

LATUAN  (Chanoines  RÉr.ui.iKRS  de)  en  Po- 
logne et  en  Moravie. 

Pei'.ot,  pari  mt  des  Chanoines  Régulicr>  de 
Pologne,  dit  (]u'il  semble  que  du  temps  (la 
Benoît  XII  cet  ordre  élait  peu  considéra, 
ble  en  ce  royaume  ,  puisque  par  la  bulle  de 
ce  pape  de  l'an  1339  pour  la  réformalion  gé- 
nérale des  Chanoines  Réguliers,  il  y  est  parlé 
de  toutes  les  provinces  où  il  y  avait  des  Cha- 
noines Réguliers,  el  qu'il  n'y  est  fait  men- 
tion d'aucune  province  en  Pologne.  Le  P.  du 
Moulinet  dit  au  contraire  ,  sur  la  rela'ion  du 
P.  Hyacinthe  Libéri,  prévôt  du  mona-tère  du 
Saint-Sacremeni  de  Cracovic  ,  que  la  ]jrc- 
mière  abbaye  fut  fondée  l'an  970  au  bourg 
deTremesse,  au  diocèse  de  Gnesne,  par  Mie- 
cislas  ,  roi  de  Pologne.  Ainsi  cet  ordre  y 
serait  aussi  ancien  que  la  religion  chréiienne, 
puisque  Miecislas  fut  le  premier  prince  polo- 
nais qui  fut  éclairé  des  lumières  de  la  foi.  Le 
P.  du  Moulinet  dit  encore  qu'il  fil  venir  des 
Chanoines  Réguliers  de  Vérone  en  llalie; 
mais  il  devait  retrancher  le  mol  de  régulier 
cl  ajouter  seulement  que  ces  chanoines  vi- 
vaient en  commun  ,  puisque  l'on  ne  com- 
mença à  parler  des  Chanoines  Réguliers  que 
dans  le  XI"  siècle,  et  les  Chanoines  que  le  roi 
Miecislas  fit  venir  de  Vérone  vivaient  appa- 
remment selon  les  règles  qui  avaient  été 
prescriles  au  concile  d'Aix-la-Chapelle. 

Ce  qui  est  vrai,  c'est  qu'on  ne  sait  pas  le 
temps  ([ue  l'ordre"  canoni:]ue  lui  iniroduitcn 
Pologne  ;  mais  il  y  est  présentemenl  floris- 
sant. Il  y  a  cinq  sortes  de  Chanoines  Régu- 
lier-, savoir  :  de  Lalr.m,  du  Suiiil-Sé;iulcrc, 
des  Prémonirés,  du  Saint-Esprii  in  Saiia  et 
de  1,1  Péiiilcnce  des  Martyrs.  Nous  parierons 
des  quatre  derniers  selon  leur  ordie  alph  i- 
béii(!ue,e!  nous  traiierons  dans  cet  ar  iclu 
des  Chanoines  de  Lalran  ap:ès  avoir  p.irléilu 
ceux  d'Italie  ,  suivant  ce  que  nous  nous 
sommes  proposé,  de  mellre  de  suile  toutes 
les  congrégations  qui  portent  le  même  non» 
el  qui  suivent  la  même  rè^iie  ,  ou  qui  ont 
rap['orl  les  unes  avec  les  autres. 

Les  Chanoines  de  Lalran  en  Pologne  sont 
di»isés  en  trois  congrég.itions  ou  provinces. 
La  première  el  la  plus  ancienne  est  colle  do 
Trzemeszno  ou  ïreniesse  aa  diocèse  de 
(jnesne.  L'abbaje  dont  nous  avons  parlé  ci- 
dessus  ,  el  qui  lui  a  donné  son  noai ,  eu  est 


T-'                                            MCTlONNAinE  DES  OUDHES  IlELICIEUX.                                        723 

rhrf.  Elle  rsl  li  As  noble  cl  Irôs-riclic ,  mais  rut  pendant  ce  temps  A  se<  concitoyens  au 

rlle  est  en  coiiimiMicle   et  a  quelques  mon.is-  milieu  des  nues.   Les  F!B.  Nicolas  de   Hiecz, 

lùres  qui  en  dépendent  ,  .  us^i  hien  que  que!-  Jean  de  Leslilin.  Je.in  de  Nis<ia,  Eiicnne  Sino- 

ques  cures.   C'est  dans  Ci  lie  alibayc  que  re-  lenslii  et  plusieurs  aulrcs  ,  se  sont  aussi  ren- 

posc  le  corps  de  s.iiut  Ailalliei  t  mari)  r ,   ar-  dus  célèbres  par  leur  s.iiiitelc.  Enfin  D.  Jac- 

ilievéque  lie  Gncsiie.  ques  Mrovinï.ki  ,  sous-diacre,   cl  Jcan-15  p- 

La  seconde  congrégation  se  nomme  Czer-  liste  Malonouski  ,  prévôt  de  Kranislaw  ,  ont 

kénène,  au  (lioeése  de  l'osnan  .  et    non   i)as  ré(andu  leur  sang  pour  la  défen-o  des  biens 

l'Iozko,  coiiiiiie  dit  le  P.  du   Moulinet  ;  l'ab-  de  ce  monastère  ,  le  premier  ayant  clé  tué  par 

baje  qui  lui  donne  aus>i  sou  nom  est  pareil-  les  Suédois  ,  et  l'autre  par  les  Cosaques. 

Imienl  en  roir.mende,  et  était  possédée  l'an  II  y   a   aussi  eu  dans  cette  congrég  .lion 

1704     par    I).    ÎSicnlas    Nyzyki  ,    évéq-ic    de  plusieurs  personnes  qui  se  sont  rendues  re- 

Chclin,    ClitUioirte    Kéjiu  ierde  la  congréga-  commandal/les  par  leur  science,  et  que  leur 

lion  deCracovie  dont  nous  allons  p.irler.  Ce  mérite  a  lail  choisir  par  d'autres  monastères 

piélal  fut  ncmiiié  à  cet  évèché  et  à  celte  ah-  qui  n'étaient  pas  de  la  même   consrégation  , 

liaye  par  le  roi  de  Pologne  Jean  Sobieski  ,  et  pour  les  gouverner  ,  comme  D.  Nicolas  Ny- 

<ei:e  alibaye  a  ;;ussi    quelques    monastères  zyki  ,  dont  nous  avons  [>arlé  ci-dessus,  qui, 

q  >i  en  dépendent.  avant  que  d'avoir  été  nommé  à  lévéclié  do 

La  troisième  coni^iégation  est  celli'  de  Cra-  Cheimno,  fut  demandé  pourprévolparlesCha- 
•  ovir« ,  qui  reconnaît  pour  fondateur  U.  .Mar-  noines  Kéguliers  de  Msliono,  aussi  bien  que 
i:n  KIoezjnski,  docteur  en  l'un  et  l'autre  D.André  Strembosk.  Ceux  de  la  prévoté  de 
'iro  !t,  qui  a  été  prévôt  de  Cracovie  et  qui  a  Semberg  en  Moravie  ,  dont  le  prévôt  a  droit 
tloniié  de  gros  biens  à  celte  congrégation,  de  se  servir  d'ornements  pontific.iux  ,  appe- 
lle est  gouvernée  par  un  prévôt  claustral  iérent  D.  Maltiias  Caszynski  pour  remplir 
»jui|  rend  la  ijualilé  de  général  des  Chanoines  cette  dignité;  les  Chanoines  Réguliers  do 
Itéguliers  dans  le  royaume  de  Pologne  et  Clodaviensko  choisirent  D.  Martin  Ciecierski 
dans  le  grand  duché  de  Lithuanie.  Cette  pré-  pour  leur  prévôt ,  et  ceuK  de  Louxbranic  , 
^ôlé  ne  cède  point  en  dignité  aux  deux  ab-  D.  Paul  Nolenski.  Enfin  il  y  en  a  plusieurs 
bayes  dont  nous  avons  parlé,  elle  a  même  autres  qui  ont  été  considérés  par  leur  insigne 
plus  de  ()rérogalives  ,  pui>qu\lle  conserve  le  piété  jointe  à  leur  noblesse,  comme  D.  Jac- 
«Iroit  d'elcdion  que  Us  autres  ont  perdu,  qu.  s  Bleniski,  I).  Jean  Chrysoslome  Korsale, 
Cetlecongr(  galion  devrait  plutôt  s'appeler  de  D.  DersIas  de  lioiznisko,  chanoine  et  archi- 
Cazimir  ,  puisque  son  princi|ial  monastère  diacre  de  l'église  cathédrale  de  Cracovie; 
est  situé  à  Cazitnir,  qui  est  une  des  quatre  Martin  KIoezynski,  fondateur  de  cette  con- 
villes  qui  divisnil  Cracovie  ,  dont  Cazimir  grégalion,  et  U.Hyacinhe  Librorius,  docteur 
n'est  s(  parée  que  par  la  Vistule.  Ce  monas-  en  l'un  el  l'autre  droit ,  tenseur  des  livres  du 
tère  fut  fondé  parle  roi  Ladislas  II  l'an  l'*02,  diocèse  de  Cracovie  el  prévôt  du  mouaslèro 
sous  le  litre  du  Saint-Sacrement.  C'est  pour-  de  la  mèiue  ville. 

quoi  ces  Chanoines  ont  pour  armes  un  calice  L'hahit  de  ces  chanoines  con^is'e  en  une 
iiurmonté  d'une  hostie.  Il  y  a  cinq  autres  soutane  blanche  avec  une  espèce  de  rocliet 
monastères  en  Pologne  qui  en  dépendent ,  cl  sans  manches  ,  en  forme  de  se:ipulaire  des- 
plusieurs djns  la  I-iihuanie,  doni  les  princi-  cendanl  jusque  sur  les  reins  ,  où  il  s'élargit 
p.iu\  sont  celui  de  Vilna,  qui  est  1res  magiii-  el  en'oure  le  corps.  Par-dessus  ce  rochel , 
(ique  ,  et  fui  bâli  par  le  grand  général  de  (ju'on  noirme  farracium  ,  ils  milleul  un 
I.ilhuanic  Michel  Paiz,  el  celui  de  Bichou  par  manlelet  noir  descendant  jusqu'aux  genoux, 
Charles  Kolievicz  ,  qui  éiail  aussi  grand  gé-  à  la  manière  des  prélats  de  Home;  el  dans 
néial  du  même  duché.  les  fjnctions   publiques  ,  à  Cracovie,  ils  se 

Celte  congrégation  a  produit  beaucoup  de  servent  du  surplis,  qu'ils  mettent  par-des<U9 
siints  personnages.  Ceui  qui  tient  le  premier  le  4«rrncii'»i  ,  avec  une  mosetle  ou  cainail 
r.ing  est  le  lî.  S:anislas  surn.mmc  de  Caz--  noir  :  en  d'autres  lieux,  au  lieu  tiu  surplis 
mil-,  à  cause  du  lii  u  de  sa  naissance.  Il  avait  ils  mettent  un  rocliel  »  1).  Il  se  peut  faire  qu'ils 
élé  religieux  du  mona-lèredu  Saint-Sacre-  poriaicnlautrefois  une  aumussesur  les  epau- 
inenl  de  cette  ville  ,  où  il  mourut  l'an  l'»89  ,  les  ,  comme  il  paiait  p;ir  la  figure  de  l'h  bil- 
le 3  mai;  cl  depuis  ce  temps-là  ,  il  y  a  lou-  leineiitd'un  de  ces  Chanoines  qu'a  donnée  le 
jours  eu  une  grande  afiluence  de  peuple  à  son  P.  du  Moulinet  sur  la  relation,  à  ce  qu'il 
lonibeau  ,  où  il  se  fa  l  encore  tous  les  jours  Oit,  des  [ier>onnes  (]ui  ont  voyagé  en  ce  pays, 
plusieurs  m  racles.  Le  corps  du  I!.  .\dam  d'autant  plus  que  l'enol  dil  que  ceux  du  nio- 
Siboiiius  ,  qui  a  élé  autrefois  prieur  du  naslère  du  Sainl-Saerement  à  Cracovie  por- 
inéme  monastère  ,  repose  aussi  dans  celte  talent  des  surplis  et  des  aumusses  violetlrs  ; 
église,  où  Dieu  a  fait  connailre  sa  sainteté  mais  ils  ont  sans  doute  quille  cethabilleinent 
par  la  vertu  qu'il  a  accordée  à  ses  saintes  pour  prendre  celui  dont  nois  avons  l'oniic  la 
reliques  de  chasser  les  démons  des  corps  des  desiription,  conrormemenl  aux  mémuires 
possédés.  L"S  corpt  des  I5IJ.  Nicolas  Siekicrki  qui  nous  ont  élé  envoyés  de  Poloi;n<'  dates  du 
el  tielase  y.orauski  se  sont  conservés  jusqu'à  17  août  170'»  et  attestés  par  le  11  P.  I).  .\gui- 
1  résent  sans  coiruption.  Le  bienheureux  lin  Michel  Corczyiiski  ,  docteur  en  théologie 
Nicolas  de  lladoiiisco  deliira  sa  pairie  d'un  cl  en  droit  canon  ,  commissaire  général  des 
incendie  qui  la  nienaçail  de  ruine  ,  et  iippa-  ChaQuincs   Réguliers  dans  la  petite  Pologne 

(1)  Voij.,  ù  l.i  lin  d  1  vol.,  »"  177, 


7?a 


LAT 


L\T 


73or 


el  le  grand  duché  de  Liihuanie.  On  peut  con- 
siiltci-  Penol  ,  H  si.  Tripart.  Cannnicor.  Ré- 
git'., lib.  II  ,  et  du  Moulinet,  Habillement  des 
Chanoines  R'-gtiliers. 

La  ronsroK.ilion  de  Tous  les  Saints  d'Ol- 
niuiz  en  Moravie  fut  fondée  au  rommonrc- 
iiient  du  XVI"  siècle,  el  le  monastère  d'OI- 
iiiutz  sous  le  liire  de  Tous  les  Saints,  qui  en 
est  le  chef,  fut  fonde  pir  les  Cluiiioincs  Ré- 
guliers sur  les  ruines  de  celui  de  Langstron, 
(|ui  avait  été  ravagé  par  les  liérétiques  peu 
lie  temps  avant  ((ue  le  pape  Alexandre  Vi 
parvint  au  souverain  ponlficat,  l'an  l'i-9-2. 
Jean  Sliakoka,  qui  en  fut  le  premier  prévôt, 
el  les  autres  Chanoines,  le  firent  bâtir  à  leurs 
propres  frais. Ce  monastère  étant  liàti,  la  pré- 
vôté de  Stemherg  et  quelques  autres  monas- 
tères firent  union  ensemble  el  reconnurent 
celui  d'Oliniilz  pour  leur  chef,  ce  qui  fut  ap- 
prouvé par  le  pape,  qui  accorda  à  ces  Clia- 
noines  le  lilrc  de  Chanoi  es  Réguliers  de  La- 
Iran  el  l!'S  privilèges  dont  jouissaient  ceux 
d'Italie.  11  les  exempta  du  la  juridiction  des 
ordinaires  el  les  reçut  sous  la  proleclion  iiii- 
inédiale  du  saint-siége.  Le  roi  Uladislas  leur 
accorda  beaucoup  de  privilèges  ,  et  les  mit 
aussi  sous  sa  protection  l'an  1510.  Le  jjrè- 
vôt  d'Olmuiz  se  s  ri  d'habits  pontificaux  et  a 
voix  et  séance  diins  les  Etals  de  Moravie. 
Le  prévôt  de  Siemberg  a  aussi  l'usage  de  la 
mitre  et  de  la  crosse.  Mais  il  y  a  apparence 
que  cette  congrégalion  ne  subsiste  plus, 
puisque  les  Ch^inoines  Réguliers  de  Sk^nberg 
cl  de  quelques  autres  monastères  de  la  con- 
grégation d'Olmutz  ont  eu  recours  plusieurs 
lois  aux  Chanoines  Réguliers  de  Pologne 
pour  les  gouverner,  et  que  l'évéque  de 
Cheim  ,  qui  vivait  encore  l'an  1704,  a  été 
prévôt  de  Siemberg  ,  quoiqu'il  fiJl  Chanoine 
Régulier  de  la  congrégation  de  Cracovie  :  le 
prévôt  du  monastère  d'Olmutz  était  autre- 
fois général  de  la  cougi  égal  ion  de  ce  nom 
lorsqu'elle  subsis  ail. 

Penot,  llisL  Tripart.  Canonic.  Regul.  lib. 
Il,  cap.  40  el  6G. 

LATBAN  (CuANoiNESSES  Régulières  ,  et  en 

PàRTICULIEK  CELLES    DE). 

Avant  que  de  parler  dis  Chano-nesses  Ré- 
gulières de  Lalran,  il  e^t  à  propos  de  rappor- 
ter l'origine  de  toutes  les  Chaiioinesses  Ré- 
gulières en  général.  Nou>  reconnaissons  bien 
que  saint  Augustin  a  été  l'instituteur  des 
Chanoines  Réguliers  ,  puisqu'il  est  le  pre- 
mier qui  ait  fait  vivre  les  clercs  en  commun 
selon  la  règle  des  canons  et  l'exemple  des 
apôtres;  mais  nous  ne  pouvons  pas  dire 
qu'il  ait  étalili  des  (^hanoinesses  telles  que 
nous  en  voyons  à  présent.  Il  est  vrai  que  les 
religieuses  tiu'il  établit  à  Hippone  peuvent 
avoir  été  appelées  Chanoinesses  aussi  bien 
que  cel  es  qui  étaient  avant  lui  répandues 
dans  plusieurs  provinces ,  tant  chez  les  Grecs 
que  chez  les  Latins  ;  mais  les  noms  de  Cha- 
noines et  de  Chanoinesses  ,  conmie  nous 
avons  dit  en  parlant  de  l'origine  des  Chanoi- 
nes, étaient  donnés  iiidifféreminent  autrefois 
aux  ecclùsiasiiques ,  aux  moines  ,  aux  reli- 
gieuses cl  aux  vierges  ,  aux  plus  bas  officiers 


de  l'EgHse,  aux  domestiques  des  monastères, 
el  généralement  à  tous  ceux  qui  é' aient  em- 
ployés dans  la  matricule  ou  calalo;;ue,  in  ca- 
ri.nne.  Le  P.  le  Large  ,  Chanoine  Régulier  de 
la  congrégalio  I  de  France,  avoue  (]ue  c'était 
l'usage  parmi  les  Crées;  mais  il  soutient  que 
depuis  le  VI'  s  ècle  il  y  a  eu  en  Occident  des 
Chanoinesses  qui  ont  été  dilîérenles  des  moi- 
nesses,  cl  il  apporte  pour  preuve  la  fonda- 
lion  d'un  monastère  faite  par  saint  Kiiilolia 
d  MIS  rîlc<JeSL'kiiiL;on.suiluiUiin,près  de  Râle, 
où  il  mit  des  Chanoinesses.  Comme  il  ne 
parle  que  sur  le  lémoignaïe  de  Ra'Ier,  moine 
deSL'kiiigeii,i|uiiraéeritque  dansle  %'  siè<'le, 
en  partie  sur  ce  qu'il  se  souvenait  d'avoir 
lu  dans  une  Vie  de  ce  saint,  el  en  p  irtie  sur 
ce  que  l'on  eiis;ivait;iSokiiiy;eii  par  Irad  tiou. 
Celle  preuve   n'est  pas  sufiisante. 

Les  Chanoinesses  n'étaient  po'nt  connues 
au  commencement  du  Mir  siècle,  puisiiuc  lo 
concile  assemblé  en  Allemagne  l'an  742  or- 
donna que  les  religieux  el  les  religieuses  se 
conl'ormeraieiit  i\  la  règle  de  saint  Benoît 
pour  la  conduite  de  leurs  mtcurs  el  le  gou- 
vernement des  monaslèies  et  des  hôpitaux  : 
car  dansée  temps-là  il  n'y  avait  aucun  mo- 
nastère, soit  d'hommes,  soit  ctc  filles,  qui 
n'eût  un  hôpital,  ou  pour  y  recevoir  les  pè- 
lerins ,  ou  pour  y  avoir  soin  des  pauvres  ma- 
lades. Les  décrets  de  ce  concile  furent  confir- 
més dans  celui  qui  se  tint  à  Lesline  l'aiinéo 
suivante  740.  Le  cinquième  canon  de  celui 
de  \  erneuil  ,  se'on  le  P.  Mabillon  [Tom.  111 
Annal,  Bcned.,  p.  117),  et  que  dauires  nom- 
ment de  Vernon,  li  nu  sous  le  roi  Pépin  l'an 
733, ordonne  que  dans  les  monastères  de  l'un 
et  de  l'autre  sexe  on  vivra  régulièrement  se- 
lon l'ordre,  c'est-à-dire  selon  la  règle  de  saint 
Renoîl,  cl  je  ne  crois  pas  que  les  Chanoines- 
ses voulussent  appliquer  pour  elles  ce  qua 
dit  le  sixième  canon  du  même  concile,  lors- 
qu'il défend  à  une  abbesse  d'avoir  deux  mo- 
nastères, el  de  sortir  du  sien  à  moins  que  ce 
ne  soit  pour  cause  d'hostililé  ou  étant  man- 
dée par  le  roi  ,  et  que  la  môme  défense  do 
soriir  est  pour  les  autres  religieuse/  qu'il 
appelle  moir.esses  :  Monachœ  vero  extra  viO' 
n:islcrium  non  cxeanl,  puisque  ce  serait  faire 
une  grosse  injure  aux  (Chanoinesses  Réguliè- 
res de  les  appe.'er  moinesscs. 

Elles  ne  trouveront  pas  qu'il  soil  parlé 
d'elles  dans  le  capilulaire  (|ue  fit  l'empereur 
Charlem.'gne  à  Héristal  l'an  779.  11  y  est  seu- 
lement ordonné  [CapiluL,  tom,  1,  p.  193)  que 
les  moines  y  vivront  selon  la  règle,  et  les 
religieuses  selon  le  saint  ordre  ,  c'est-à-dire 
la  règle  et  l'ordre  de  Saint-Benoît  ;  que  cha- 
que abbesse  demeurera  dans  son  monastère, 
el  qu'elle  n'en  pourra  avoir  deux.  A  la  Cu  du 
ca|iilulaiie  il  y  a  une  ordonnance  pour  des 
prières  publiques  et  des  aumônes  à  causa 
de  la  sécheresse  et  de  la  famine  de  celle  an- 
née 779.  Chaque  évè<iue  devaii  chanter  trois 
messes  et  trois  psautiers  ,  pour  le  roi  ,  pour 
l'armée  de  France  et  pour  la  calamité  pibli- 
que;  les  prêtres,  trois  messes;  les  moines, 
les  moinesses  el  les  Chanoines,  trois  psau- 
tiers ;  el  tous  devaient  jefinur  trois  jours  de 
suite.  Chaque  évèiue,  abbé  ou  abbesse,  de- 


7.-i|                                            nCTIONNMUE  DLS  ORDIIKS  UELlf.lEL'X.  732 

V;iil  aussi  nourrir  jusqu'au  lomps  de  la  mois-  13' il   onlonne  que  les  rcligiousos  qui   fai- 

M.ii   qcalre   pauvres,    on    nu   nioins    Iro  s  ,  s.iicnt  profession  de  la  r(^K'«  Je  S'iiul  Ik-noîl 

diux  ou    un,  <t'lon  Sfs  l'acuilc-i  ;  el  dans  ce  vivraient  réfçulièninenl,  elqueiellcs  qui  n'eu 

c.ipitnliire   il  n'esl  fal  aiu  une  menlion  des  f.iisnienl  pas  profession  \  ivraienl  canonique- 

Clianoinessis  ,  pane  qu'il  n'j  eu  a\ail  poiul  nienl  :  Qiiœ  vcro  profcssioiicm  fmicUe  Kgulw 

d.Mis  ce  Irinps-I.'i.  Jlcuedicli  fcccrunt,    irguluiitcr   liiunt:   sii» 

Ce  n'i'sl  qu'à  la  fin  ilu  iiii^'ine  siècle  auleiii.  canonice  vivitni  pleniter. 
que  l'un  cooimenre  à  découvrir  ([iirlques  Ce  u'étaienl  pas  les  Chanoines  qui  pou- 
v.--li;;es  (le  Cli.iiioiiiesses  ;  car  dans  le  c.iniiu  vaienl  les  instruire  de  leurs  ohliy:ations, 
47  du  ron<  iic  de  l^rancTirt.  tenu  sous  le  eux  qui  n'avaient  (]ue  le  nom  de  Chanoines 
rè;.Mie  de  Ch.irleinai^n-,  l'an  7!Vi-,  il  est  porté  el  neconnaissaieni  MuHernenl  lescaiions  ;c'est 
qu'à  l'éjrard  des  alihesse-  qui  ne  vivraient  pourquoi  l'eniiereur  Louis  le  Déhonnairu 
pas  cdnoitiijHtiiient  on  nu/nlicrrmfnt,  on  en  ayant  lail  asseniMcr  le  coni  ilc  d'Ais-la-Cha- 
diMinerait  a\is  au  roi,  alin  qu'elles  fussenl  pille  l'an  8l(i,  il  y  (ît  dresser  par  le  diacro 
dc|iosces.  Ou  trouve  encore  quelipic  trice  Ainalai  ius  des  rèyles  pour  ces  Chanoines  et 
de  Chanoine  ses  au  co'nuieiicenietil  du  ix"  Chinoinesscs,  afin  de  les  ramènera  une  vio 
siècie.  !,'■  niéiui'  empereur  ayant  convo  jué  refilée.  Ou  ne  les  connaissait  point  pour 
une  asscuihlée  di-  tous  les  orJres  à  Aix-la-  enfanls  de  saint  Augustin  ;  car  dans  l'une 
Chapelle  l'.in  802,  les  cvèques  el  les  ahbcs  et  l'autre  de  ces  règles  ou  uc  fait  point  uieu- 
s'y  trouvèrent,  cl  on  Us  séiiara  eu  deux  ban-  lion  de  ce  saint  doc'eur,  au  contraire  lelle 
d<s,  ch  icune  dans  u:i  lieu  différent.  Les  évê-  des  ChaTioincsses  e.;l  tirée  des  écrits  de  saint 
ques  examinèrent  en  particulier  si  les  clercs  Jérôme,  de  samt  Cyprien,  de  saint  Alhanasc 
vivaient  selon  I  s  canons,  el,  afin  de  les  ra-  et  de  saint  Ccsaire,  cl  il  n'y  est  poiril  parlé 
mener  à  leur  devoir,  ils  firent  Lrc  les  dé-  diï  la  règle  que  saint  Auguslin  avait  donnée 
crcts  des  souverains  pontifes.  Les  a'obés  de  aux  religieuses  dHip])one,  et  qu'on  ne  pro- 
leur coié  se  proposi'reut  la  règle  de  saint  posa  point  aux  Chanoincsses.  (]ouime  ()ar 
Itcnoit  [>>)nr  modèle,  el  cxHiniut  riiil  s'il  y  celle  que  leur  prescrivit  ce  concile  d'Aix-la- 
fl' ait  des  alibés,  qui  s'en  éluiguasscnt  el  vé-  Chapelle  on  leur  permeitail  de  garder  leur 
(  ussent  eu  Chanoines, et  si  dans  les  inonaslè-  bien,  à  la  charge  de  passer  iirocuratiou  par 
ri  s  où  on  avait  promis  de  la  garder,  elle  acte  public  à  un  parent  ou  à  un  ami  pour 
et  lit  oh^er\ée;  car  il  y  avait  déjà  des  luo-  l'adfniuislrer  el  défendre  leurs  droits  en  ju- 
n.isièns  qui  avaient  secoué  le  |oug  de  ce  le  slice,  et  qu'on  leur  peruu'llaii  aussi  d'a>oir 
siinte  rèi;le,  et  où  l'on  ne  connaissait  plus  des  sirvan'es,  cet  abus  fut  condamné  dans  lo 
ni  cvMc  règle,  ni  même  li!s  canons.  Lnlin  an  concile  de  Home  où  présiilait  le  pape  Nico- 
eximina  aussi  si  dans  les  monastères  de  lil-  lis  II,  l'an  lOUO,  ce  qui  n'avait  jamais  éié 
les  o  1  y  observai!  la  règle  de  saint  Benoit,  permis  à  aucune  relij;ieuse  depuis  le  temps 
ou  si  on  y  vivait  canoniquemml,  c'esl-à-dire  de.  apôlrrs  jusqu'à  Louis  le  Débonnaire,  qui 
à  la  uiaïKèrc  des  Chanom  s,  dml  la  plupart,  avait  fait  ass^nih  erce  concile  d'Ais-la-Cha- 
commc  nous  \enons  de  dire,   avairnt  (juillé  pelle, 

la  règle  de  saint  lieuoil,  (lui   n'a>aient  que  Le  concile  de  Roue  (I)  reconnaît  quejus- 

le  nom  de  Chanoines,   el   qui  appareuunrnt  qu'à  ci'Ite  année  lOiJO    l'instiiut  de  ces    sor- 

avaient  élc  imités  par  d'S  leliji  uses,  qui  de  les   de  Chanoincsses  n'avait  été   reçu  dans 

lieuédiclines  claicnt  devenues  tout  d'un  coup  aucun   endroit  de  l'Asie,   de  l'Alriiiue  et  de 

Chanoincsses,     sans    savoir    à   quoi    elles  l'I'^urojje,  sinon  dans  un  petit  coin  de  l'Alle- 

claienl  engagées  ni  quelles  étaient  leurs  oh-  magne,  et  dit  qu'il  était  ceriain  qu'avant  cet 

?ervar.ces.  (i'est  pourf|uoi  le  concile  de  (]lià-  empereur  loules  Ls  religieuses,  en  i)uelqiio 

lous-sur-Saône,  l'an  .SLi,   se  crut  obligé  de  endroit  qu'elles  fussenl,   n'avaient  point   eu 

prescrire  des  règlements  à  ces   filles  qui   so  d'iiutre  règle  que   celle  de   saint  Ri-uoit.  Il  y 

disaient  Chanoinesscs  :    lis  sanclimuninlUjus  a  eu  toujours  ce;  eiulaut   des    religieuses  eu 

tjitœ  se  Cunutiicns  vocuiit,  ce  qui  fa  t  voir  que  .\sie  qui  ont  suivi  la  régie  de  .saini  lia  si  le.  Il  y 

le  concile,  en  se  sei  vaut  de  ces  leriiKS,    re-  en  avait  mèmeeiiOiicidenl  du  tempsile  ce  eoii- 

gaidait  cet  iiislilut  comme   une  nou\ea':lé,  cile,   il  y  en  a  eu  aussi  qui  ont  suivi  d'autres 

qui  nes'éliil  pas  iniroiliiil  dans  les  formes,  règles;    mais  il   est  vrai  (]ue  les  ir.ouaslèies 

cl  que  CCS  filles  prenaienl  le  nom  de  (^liaiMi-  qui  f.iis.iieui  profession  de   la  lègle  de  saint 

nés  es  sans    un  pouvoir  légitime.  Ces  règle-  Renoit  étaient  en  plus  gr.ind  nombre,  el  ap- 

inenls  regardent  prim  ipilement  la   clôture,  p.iremmenl  (|ue  le  concile  pi  il  la  plus  grande 

le  sib  nce,    la  récilaiiou  de  l'oKice  divin,    cl  pariic  des  munaslères   pour   le   loul ,    ()aico 

la  règularilédcs  abbesses  ,  ruais  il  n'ordonna  qu'en  elVel  dans  (|uel(|ues  (irovinces  d'Italie 

rien  pour  les  autres  religieuses,  parce  qu'el-  il  n'y  avail  que  des  reiigeuses  beuediclines, 

les  Irouvaienl  dans  la  règle  de  saint  R.  noit  cl  le  coiici  e  qui  s'èlail  leuu  à  l'avie  r..uivo3, 

toutes  les    pratiques   saintes    de   la  vie  nio-  suis  l'empereur  Louis,  lils  de  l.olliaire,  n'ud- 

nasliiinc.  Ce  concile  avait  été  encore  asseui-  niit  que  deux  régies,    l'une  de  saint  Rcnoit 

Me  par  les  ordres  de  Charleinague,  qui  d.iiis  p.iur  li'S  moines  et  moiuesses  ,   cl  l'autre  des 

le  même  leni[is  eu  fit  lenir  quatre  autres,  a  caïuuis   pour    les   Clian uines  ,    <  t    ne    p  nia 

M.iyence,  à  lieims,  à  Tours  el  à  Arles,  mais  point  des   Chanoinesscs,    quoqu'ilycu  eût 

il  n'y  a  que  celui  de  Mayenee  où  il  soit  aussi  pour  lors, 

parle  de  ClianoiiMsscs  ;   cardans  le   cjiiou  l\notpréloud   faire   rcmoulor   l'auliiiuilô 

(i)  MubiW.,  Muai.  Ucittit.,  unu.  Il,  pjg.  430. 


733                               LAT  Ï-AT                                 734 

do  ces  Ch.moincsscs  jusqu'au  temps   de  la  obligèrent  enfin  los  papes  cl  les  roncilos  de 

primitive  lisiiso   aussi     bien  que   celle   des  leur  prescrire  une  féfi)rm;itii>n  qui  en  fit  des 

Chanoines  Réguliers,  et  dii  ((uedès  ce  lenips-  Cli^inoinesses  Régulières,  tl  les  obligeât  à  la 

là,  ou  au  moins  du  lemps  de  saim  Augustin,  désapîiropriation. 

les  uns  et  les  auires  étaient  dislingués  des  Comme  d  ms  le  môme  temps  il  se  forma 
moines  par  leurs  habits  blancs,  et  apporie  des  congréualions  de  Clh.inoines  HèguliL'rs 
pour  garant  de  ce  qu  il  avance  la  règle  de  ce  qui,  poui' se  maintenir  dans  l'tibservance, 
saint,  qui  ordonne  à  ses  religieuses  de  faire  dressèrent  des  règlements  et  des  coiisiiiu- 
laver  leurs  habits  par  des  foulons,  ou  de  les  tions,  il  y  a  de  l'apparence  (jiie  quel(|ues 
laver  elles-mêmes. Mais  cette  preuve  n'est  pas  Chanoinesses  se  soumirent  à  leur  direct  on 
convaincante;  car,  outre  que  l'on  porte  aux  el  embrassèrent  les  mêmes  règleinejils.  Les 
foulons  toutes  sortesdedraps, de  quelqnecou-  Chnnoinrs  de  la  congréKalion  de  Latran  s'è- 
leur  qu'ils  soient,  pour  les  laver  et  les  ren'Ire  t.iient  iinposé  une  loi  de  ne  se  point  ingérer 
plus  fermes  el  plus  unis,  et  que  nous  voyons  d.iiis  le  gouvernement  des  rcligieusts  et  do 
encore  aujourd'hui  des  Chanoines  Héiiuliers  n'en  point  [irendre  la  conduiie  ;  ils  ne  pu- 
cl  des  Chanoinevses  Ucguli:res  habiles  de  rcnt  néanmoins  résisler  aux  sollicilaiions 
dilTérenles  couleurs;  c'est  que  les  actes  du  des  souverains  pontifes  el  des  seigneurs  qui 
uiôme  concile  d'Ais-la-(^bapeIle  de  l'an  8IG  fondèrent  des  liiona^tères  de  Chanoinesses. 
marquent  préciscment  [Can.  10)  que  les  ha-  Il  y  en  a  environ  trente  qui  sont  soumis  à 
b  Is  des  Chanoinesses  claient  n  lirs.  Les  Bè-  des  abbés  de  cette  congrégation,  dont  la  plu- 
iiédictines  des  abb.iyes  de  Saint-Pieire  de  part  sont  considérabies. Dans  celui  deSainie- 
Jieims,  de  Montmartre  près  de  Paris,  de  Marie  de  l'Etoile  à  Spolette,  il  y  a  ordinaire- 
Xaintes,  de  la  rrinilc  de  Caeu  et  quelques  ment  cent  rd'gieuses.  Le  corps  de  la  lî. 
autres,  auraient  pu  à  plus  juste  tiire  se  (|iia-  Marine  s'est  conservé  sans  corruption  dans 
lifier  Chanoinesses,  si  on  avait  égard  à  la  le  monastère  de  S.iint-Matlli  eu  de  la  même 
couleur  et  à  la  l'orme  des  habits,  car  elles  ville.  Le  corps  de  la  bienheureuse  lùiplim- 
ont  piirlc  des  babils  blmcs  avec  des  surplis  sine  est  en  vénéraiion  à  Viceuze  dans  nii 
jusqu'à  ce  qu'elles  aient  été  rèfurmées  \ers  monastère  de  Chanoinesses.  La  Mère  Bap- 
le  commencement  du  dernier  siècle.  Celles  li?tc  Venace,  religieuse  professe  do  celui  do 
Je  Reims  assistiiient  même  aux  piocessious  Sainle-Marie  des  Cràces,  a  donné  au  public 
avec  les  Chanoines  de  la  cathédrale, les  Cha-  plusieurs  ouvrages  de  piété  qui  sont  renler- 
iioines  formant  un  rang  el  les  religieuses  nu  niés  en  quatre  volumes  imprimés  à  Venise 
autre;  et  sans  rapporter  un  gr.nd  nombre  et  à  ^'éron>^.  il  y  avait  autrelois  un  plus 
de  religieuses  bénédictines  (jui  ont  porté  des  grand  nombre  dj  ces  monastères  qui  dépcn- 
liabils  blancs,  el  mcn  e  des  habits  niirs  avec  daicnt  de  celle  congrégation,  et  que  les  CJia- 
des  surplis,  il  y  a  encore  l'ordre  de  Funle-  noines  Héguliers  ont  abandonnes,  (oinuio 
vrault,  oii  les  religieises  sont  habillées  de  celui  du  Sainl-Lsprit  <i  Home,  qui  est  main- 
blanc  avec  des  snrp'is  ou  des  rochets,  et  tenant  sous  la  protect  on  des  rois  de  France, 
dans  les  congrégalions  du  Monl-Olivct,  du  II  était  soumis  à  l'abbé  di' Nutre-Daioe  de  la 
Mont-Vierge  et  dts  Camaldules,quoiqu'aussi  Paix  de  la  môme  ville,  qni  en  remil  ladirec- 
sous  la  règle  de  saint  Benoît  les  religieux  tion  au  cardinal  vic.iire  l'an  160G.  G  s  Cha- 
boiit  néanmoins  habillés  de  blinc.  noiiiesses  de  Laîran  sont  haliillees  de  serge 
Il  paraît  donc  par  ce  qne  nous  avons  dit  blanche  avec  nu  roebet  de  toile  par-dessus 
qu'on  ne  doit  mettre  l'établissement  des  Cha-  leur  robe,  et  elles  mettent  encore  un  surplis 
noinesses  qu'à  la  fin  du  viir  siècle  on  au  p.ir-dessus  le  rocliet  quand  elles  assistent  au 
cominenceiiie'it  du  i\',  el  quoique  les  Cha-  chœur  (1).  La  congrégation  de  Windeseiiii 
noines  aient  pris  le  nom  de  Réguliers  el  la  en  Fl.indre  a  aussi  plusieurs  monastères  de 
qualité  d'enlants  de  saint  Augustin  vers  la  Chanoinesses  qni  sont  habillées  de  même.  Il 
lin  du  xr  siècle,  lorsqu'on  les  eut  obligés  à  y  en  a  au-si  en  France  qni  ne  soni  d'aucune 
la  tiésap;  ropriation,  il  paraît  néanmoins  que  con;;réga  ion,co:iiiiiï  ciles  do  Saiut-liiienna 
ce  nV'bt  que  vers  le  milieu  du  XII' siècle  que  de  Reims,  de  INotre-Uaire  de  la  Victoire  à 
les  Chanoinesses  furent  soumises  à  la  règle  Picpus  près  Paris,  de  Saiiite-Périne  de  la 
de  ce  saint  docteur  de  l'Iîglise,  puisque  le  Vilictle  et  en  plusieurs  autres  lieux,  qui  oui 
d  uxième  concile  de  Lalran  tinu  sous  le  le  même  habillement  que  celui  des  t^hunoi- 
pape  liin.  cent  11,  l'an  1139,  défend  (Ch».  ÎG  )  nesses  de  Latran  ,  aussi  bien  que  celles 
au\  religieuses  de  demeurer  dans  des  mai-  d'Espagne,  et,  s'il  y  a  quelque  différence,  ce 
s.ins  sépaiées,  sojs  prclexle  (riDspilalité,  n'est  que  dans  les  manches  delà  robe  et  du 
couiiiie  élan^  contraire  aux  règhs  ne  saint  rochei,  qni  sont  ou  pins  larges  ou  pins 
Basile,  de  saint  Bennît  el  île  saint  Augustin  ;  étroites,  el  la  p'iip;irt  de  ces  Chanoinesses 
cl  le  concile  de  Reims  sous  le  pape  En-  portent  anssi  dans  les  cérémonies  et  au 
gène  111,  l'an  1148,  oblige  les  Chanoinesses  chœur  pcmlant  l'hiver  un  grand  m.inleaii 
qui  vivent  sous  la  règle  de  saint  Anguslin  noir  (2).  Et  Languedoc  et  eu  (iuienue,  il  y  a 
de  renoncer  à  toute  propriété.  C'eU  à  l'iicca-  des  Ciianoinesses  qui  sont  habillées  de  noir 
sion  de  ces  deux  conciles  que  le  P.Thomas-  avec  une  bande  ou  b.inderole  de  toile  blan- 
siu  dit  qu'il  se  peut  faire  qiie  c'élaienl  les  chc  larLie  de  quatre  doi(its  qn'el  es  meitenl 
mêmes  (Chanoinesses  du  concile  d'Ai\-!a-  en  éch.irpe  ou  bandoulière,  ce  (pii  leur  set  1 
Lhiipeile,  dont  les  dérèglements  scandaleux  aussi  d'habilleinenl  de  chœur;  mais  il  y  en  a 

(I)  Voy.,ii  la  liiidu  vol.,  u"^  178  et  179.  (i)  Yvij.,  ii  h  fin  du  vo'.,  n*  i.;0. 


735  DlCTlONNAIIit:  PES 

quolmics-uncs  (|ui  incllciit  ciicoro  dos  siir- 
l'Iis  p.ir-ilrssiis  lors(|ii"i'llos  y  vont.  l'hiCm  il 
V  en  .1  bc-nuri)ii|)  d'iiutres  qui  ont  des  li;ilill- 
"loninil'*  iliiTiTciiU,  nous  parieioiis  ircllos  (mi 
Irailaiii  dis  coiijjit'fjjitioiis  auxii'icllcs  files 
smil  soiiini-es  ou  auxquelles  elles  oui  quel- 
«]U"  rap  orl. 

On  n'esl  pas  surpris  de  voir  ces  Clianoi- 
iicsses  on  n  cliel  et  en  surplis,  et  niènie  avec 
I  ne  liaiide  ou  haiulcrole  de  toile,  puisque, 
comme  nous  avons  dit  en  parl.inl  des  Cha- 
noines lleiiulirrs,  ces  rorliels,  surplis  et  blin- 
des étaieni  dans  leur  ori'.'ine,  et  avani  qu'on 
les  eût  acconrcis  el  élréeis,  une  aube  qui 
liait  eouimuue  à  tout,  s  sortes  de  personnes 
(le  l'un  el  de  l'autre  si-xe,  même  aux  laï- 
(lui's;  mais  on  csl  S'irpris  de  voir  ([ue  quel- 
ques ('.liaiioine-ises  aient  pris  de<  aumusses, 
puisqu'il  n'y  av.iii  aulref  lis  que  les  liommes 
qui  s'en  s  rv.iieul  pour  couvrir  leurs  tètes, 
el  (]ue  les  reli^'ieuses  oit  eu  toujours  des 
voiles  pour  cet  usagi-.  A  la  vérité  ces  sortes 
de  ('.lianointsses  avec  des  aumusses  sont  ra- 
res. Les  religieuses  prémontréi's  en  portent 
on  (pieliines  provinces,  cl  ou  ce  trouve  que 
IcsCli.inoinesses  deCJi  lillol  près  Paris  (parmi 
celles  qui  se  disent  pureiiieni  et  simp'cmenl 
('.hanoinesses)  ((ui  les  aient  imitées,  à  la  dif- 
férence qur  les  aumusses  des  religieuses  pré- 
monlrces  sont  blanches,  et  q':e  celles  des 
(^hanoincsse-i  de  ('.liaillnt  sont  noires,  niou- 
thclce<  de  blanc  (1  .  Klles  s'établirent  d'a- 
bord à  Naulerre  en  1C'»7.  Ce  furent  d  'S  reli- 
gieuses de  Saiu'-I'"tienne  de  Ucims,  d'où  sont 
aussi  sorties  celles  de  l'.cpus,  qui  firent  cil 
clai  lissemenl  ;  mais  les  guerres  civiles  élanl 
survenues  peu  de  lemp->  après,  cette  commu- 
nauté naissait  e  fui  o.ihgec  de  s'approcher 
plus  jirés  de  Paris,  et  vint  d(  lueurer  à  (^liai:- 
lol,  qui  est  re,'arde  coiume  un  des  faiibour;;s 
de  celle  gr.inde  ville,  et  qu'on  appelle  en 
cITet  le  faubourg  de  la  ("onrércnce. 

Aola.  Au  dernier  siècle  les  Cbanoincsscs 
de  I>alran  avaient  à  Komc  la  Cummuniulé 
du  Saint-I-Jsiii it.  lîllcs  existenl  encore,  el 
sont  aujiiurd'luii,  comme  autrefois,  sous  la 
direction    d'ecclésiastiques   séculiers. 

K-D-E. 

LAUHKN'l'    D'OULX  (Chanoines  Rkgiukiis 

DE   LA    CUiNGIlÉGil  10>'   DU  tJAlNT-j. 

I,c  mon.isièrc  de  Sainl-I.aiircnt  situé  pro- 
che d'Culx,  qui  est  un  bourg  du  I),iii|liiné 
dans  le  lirianc  onnais,  el  du  diocèse  de  l'urin, 
a  (iouné  le  i.om  a  celle  congrég.itioii.  Selon 
l'aniienne  Iradilion  ,  on  (retend  iju'il  a  élc 
l.àii  avml  la  n.:iss.incc  de  saint  lienoit  (( 
({u'il  fui  b.iliilé  dès  ce  lemps-l,i  par  de  saints 
moines.  S  I  situation,  qui  se  liouve  au  milieu 
de  plus  curs  nu)iilagnes  e^ca^pces  ijui  |.a- 
raissi  ni  in.icces-ibles  ,  a  vait  donné  lieu  à 
pli.>i' urs  lidèlrs  de  s'y  réiugicr  pour  eviler 
la  lureur  des  \andales.  Mais  ces  barb.ires, 
après  avoir  ravagé  I  lialic,  ne  laissèrent  pas 
d'y  passer  et  de  faire  mourir  tous  ceux  ()ui 
se  trouvèrent  sous'b  urs  mains  ;  el,  à  cause 
du   gr.ind  nuiiiiiru  (jui  suulTrircnt  le  uiar- 

(I)  Vwj.,  j  |j  lui  du  vid.,  Il'  161. 


oitD)ii:s  iti:Licii;Lix.  7:.o 

lyie  en  celte  occasion,  l'église  de  S.iiiil- 
l.aureul  lut  surnommée,  de  lu  Populace  t'es 
Mai  Ij/rs. 

Depuis  la  relr.iile  des  A'andalcs,  ce  lieu 
demeura  inhabile  pemlant  jdusieurs  sièi  les, 
jusqu'à  >e  que  Dieu  inspira  à  un  saint  liom- 
i:  e  nommé  (1er,  ni  (',h:irl)ri  rius,  natif  dOulx^ 
de  s'y  relircr.  Il  bâiil,  l'an  1050,  une  petite 
cellule  proche  de  celle  église  ,  cl  quelques- 
uns  l'ayant  voulu  suivre  dans  sa  retraite,  ils 
rc>olureut  d'enibiasser  l'ordre  canonique, 
(lerard  fut  à  cet  ellel  trou\er  Cnnilierl,  évè- 
ijue  de  Turin,  de  (|ui  il  obtint  la  permission, 
tant  pour  lui  que  piur  ceux  qu'il  recevrait 
dans  Sd  connnunaulé,  de  \  ivre  selon  cet  ius- 
tilul. 

11  parait  par  un  cartulaire  de  l'ait  1057, 
(•,ui  est  dans  les  archives  de  Turin,  cl  raii- 
porié  par  Ciuiclienon  d.uis  son  liisloire  de  la 
(îenéalogii!  de  la  maison  de  .'^.ivoii',qu'()don, 
coMile  de  Savoie  cl  de  Maurit  nue,  la  com- 
tesse Adélaïde  sa  b'mme  cl  leurs  enfants,  fi- 
rent (hjnaiion  à  (jér.ird  cl  à  ses  Chanoi  iCS 
(I  ■  ladite  église  de  Saint-Laurent,  de  celle  do 
Saiut-Just  de  Suze  (que  la  comtesse  Heribe, 
mère  d'Adélaïde,  avait  co.mnence  à  faire  bâ- 
tir) ;  de  celle  de  Sézanue  d'Oulx  et  de  Selle- 
berlr.iud,  avec  les  dé. ii. es,  les  prémices  cl 
les  oblalions.  Voici  les  termes  de  la  fonda- 
tion, qui  prouvent  (]ac  dans  ces  commence- 
ineiils  ils  ne  suivirent  pas  l.i  règle  de  samt 
Augustin,  non  plus  ijuc  ceux  de  la  caihé- 
(Irale  de  Turin,  de  qui  ils  avaient  pris  la 
manière  de  vivre.  Huuc  dniiilioneni  faiinms 
(1(1  clciico.i  ipti  in  eo  'cm  loco  vivitnl  ri(jula- 
rîler,  quorum  noiniuii  sci  iptu  vidcnlur  adcsse  : 
numtKa  (iiilemliœc  sunl  :  Uiididna  et  Uldiiri~ 
eus,  Aicnrdiis  et  Mai  lin  is  et  Lunlilmus,  c  c, 
t/ui  mudi)  ibi  sunl  d  fuluri  eruiit  in  eudem 
loco,  ut  i.iti  et  lli.  h(i'>eanl  po!csliUein  Ic- 
iicndi,liiibeutli  d  possid.-ndi ,  sccttndum  reiju- 
tain  cununicam.  lit  ce  le  règle  était  sans 
dou  c  celle  qui  avait  été  ordounéu  dans  le 
conc  ile  d'.\ix-la-('h.i pelle. 

Cuniberl,  evèquc  de  Turin  ,  non-seule- 
nicnl  confirma  celle  donation  Tan  lOllii,  mais 
il  d  ;nna  encore  à  ces  Cbinoines  prés  d.'  qui- 
raiite  autres  églises,  dont  la  plus  considéra- 
ble fut  celle  de  Sainle-.Marie  de  Suze,  dont  la 
juriiliction  comme  èpisiO|iale  s'étendait  d.iiis 
tout  le  mirquisal  de  Su/e.  Cetévè(iue,  pour 
lémoiguer  l'eslime  qu'il  f.iisail  de  celte  con- 
gregalion  ,  lui  donna  encore  un  tanonical 
dans  sa  calbédrale  de  Tui  in,  voulut  que  le 
prevol  d'Oiilx  en  lut  loujours  pourvu,  el  en- 
lin  (jue  l'église  de  Saint-Laurent  de  tu  /'o/iu- 
tiice  (les  iMurlijnt,  chef  de  relie  con^iég.itii.n, 
fût  exemple  de  la  juridiction  des  évèques 
de  Tuiin  tant  qu'il  y  aurait  des  tibanoines 
qui  y  demeureraienl  el  v  vivraient  réguLère- 
meiii. 

La  coinlessc  Adélaï<Ie  de  Suze  et  la  com- 
tesse .\giiès  sa  bru  donnèrent  aussi  à  ces 
l]|ianoii:es,  l'an  10^i't,  une  autre  église  avec 
liius  les  revenus  (|ui  en  dèpeiid.iienl  ;  lo 
comte  ;\mé  ou  Amedee  imila  la  piele  de  sou 
père;  Tan  1107,  llumbcrt   III  put  l'cglise  de 


757 


l.MI 


I.\7, 


7-3 


Sainl-Laurenl  sous  sa  protcitiuii,  et  dmiua 
encore  à  ces  Clianoiiies  en  1170  un  liopKnl 
et  une  é{;lisc  avec  les  revenus  qui  y  él/iienl 
annexés.  Les  souverains  pontifes  n'ont  pas 
moins  favorisé  cette  congrégation,  qui  a 
reçu  beaucoup  de  privilèges  des  papes 
Alexandre  II  et  II!,  Urbain  II,  Kugène  III, 
Adrien  IV  et  Lucius  III.  Il  y  avait  environ 
trente  prieurés  qui  en  dépendaient  ,  dont 
qui'lqucs-uns  sont  possédés  préseniem  nt 
par  les  Chanoines  Héguliers  de  la  congréga- 
tion de  Latran  ;  et  celui  de  Saint-Laurent, 
qui  en  était  le  chef,  sulisiste  encore  sous  lo 
litre  de  i)rcvôié.  Le  prévôt  exerce  une  juri- 
diction spirituelle  dans  l'étendue  de  sa  pré- 
vôté. Il  ne  reconnaît  que  le  pape,  dont  il  re- 
lève immédiatement.  Il  confère  les  bénéfices 
cl  fait  toutes  les  fonctions  qui  ne  sont  point 
attachées  au  caraclère  épisco.ial.  L'hahille- 
ment  de  ces  Chanoines  ne  dlITère  de  celui 
des  ecclésiastiques  que  par  un  petit  sca- 
pulaire  de  lin  de  la  largeur  de  deux  doigts, 
qu'ils  mettent  sur  leur  soutane.  Au  chœur 
ils  portent  pendant  l'été  un  surplis,  et  l'hi- 
ver un  rochet  avec  un  camail  noir  par-dts- 
SlIS  (1). 

Quant  à  Gérard  Charbrérius,  fondateur  de 
celle  congrégation,  il  fut  peu  de  temps  api  es 
élu  évêque  de  Sisteron  dans  un  synole  de 
plusieurs  évêqucs  assemblés  à  Avignon  par 
Hugues,  légat  du  pape  Nicolas  II.  Il  y  avait 
|;rès  de  dix-s;'pt  ans  que  ce  siège  était  va- 
cant. Uambaud,  qui  était  un  seigneur  très- 
riche  et  parent  des  conVes  de  Forcalquicr, 
ayant  achelé  cet  évôché  pour  son  fils,  qui 
était  encore  jeune,  en  avait  dissipé  les  r.  ve- 
nus, et  même  avait  vendu  loul  ce  qu'il  avait 
pu  ;  de  sorte  qu'il  ne  restai!  pas  seulement 
un  lieu  qui  appartînt  à  l'évéque  et  où  il  pût 
demeurer  une  nuit,  selon  ce  que  dirent  les 
anciennes  chartes  de  cette  église  :  ce  qui 
lit  qne  le  fils  de  Rambaud  ,  étant  devenu 
grand  ,  Iriuva  encore  des  simoniaqucs  ijui 
lai  vendirent  l'évêché  de  Vaisoii,  dont  il  pi  il 
possession  l'an  10C0.  C'est  ce  qui  donna  aussi 
lieu  à  l'assemblée  de  ces  évoques  à  Avignon, 
où  Gérard  fut  élu  évéque  de  Sisleron.  Son 
iiumilité  l'einpécha  d'abord  d'acieptcr  celle 
dignité;  mais  le  légat  layiinl  envoyé  au  pape 
avec  des  lèraoignagnts  de  sa  probité,  il  eu 
rcçiil  un  accueil  fivorabîe,  et  ce  pontife, 
l'ayant  obligé  de  consentir  à  sou  élection,  il 
le  sacra  liii-mêine. 

lîlant  de  retour  en  France  ,  il  trouva  son 
église  tellement  ruinée,  qu'il  n'y  avait  pas 
un  hospice  où  il  pût  se  reliier;  et,  outre  les 
maux  que  Uambaud  lui  avait  causés,  Pierre 
Kostan  et  l'once,  frères  et  seigneurs  de  Sis:e- 
run,  avaient  usurpé  la  plus  grande  partie  des 
biens  de  celle  ég  ise;  mais  il  sut  si  bien  leur 
représenter  le  crime  qu'ils  commettaient  en 
rdenant  ainsi  les  biens  d'église,  qu'ils  re- 
connurent leur  faute  et  restituèrent  tout  ce 
qu'ils  avaient  pris.  L'église  de  Forcalquicr 
avilit  éié  réunie  à  celle  de  Sisteron  ;  mais 
Gérard  les  sépara,  transféra  son  siège  à  For- 


calquicr avec  tous  les  honneurs  donl  eeiie 
de  Sisleron  avait  toujours  joui,  et  autant 
qu'il  fit  de  bien  à  celle  de  Forcabiuier ,  an- 
t.int  fil-il  de  mal  à  celle  de  Sisteron  ,  disent 
aussi  CCS  anciennes  cluirles.  Après  sa  mori, 
ses  successeurs  rapporièient  le  siège  èpisco- 
pal  à  Sisteron,  et  depuis  ce  temps-là  l'église 
collégiale  (le  Forcabiuier  a  été  concathédrale 
avec  celle  de  Sisteron. 

Penot,  llist.  liiparl.  Cunonicor.  licgul. 
lib.  11,  cap.  33.  Siimniarth.,  Giill.  Christ, 
lom.  11.  (luiclienon,  ilist.  (jcnéalog.  de  la 
tnuisoii  de  Savoie  ad  c.ilceui  ,  puy.  2,  20 
et  42.  Le  Large,  de  Ord.  Canonic.  disiju., 
pag.  3\'). 

LAZAlîE    (ClIlîV  ALIERS    DE     S.VINT-).     Voij. 

Mont-Caiuiiil. 

LAZARE     DE    JÉRUSALEM     [chevaliers 
110SPITALIEHS  DE  Saint-). 

Onoi(jue  l'or. Ire  militaire  de  Saint-Lazare 
ait  èlé  soumis  à  la  règle  de  saint  Augusliii  et 
qu'il  soit  encore  soumis  en  Savoie  à  celle  de 
sailli  Ronoîl,  néanmoins,  comme  il  y  a  plu- 
sieurs historiens  qui  rapportent  sou  origine 
à  saint  Basile,  dont  les  chevaliers  de  cet  or- 
dre (à  ce  qu'ils  prétendent)  ont  suivi  la  règle 
pendant  plu  leurs  siècles,  nous  ne  pouvons 
pas  nous  empêcher  d'en  pirleren  cet  en- 
droit, en  attendant  que  nous  en  parlions  en- 
core en  tialtant  de  l'origine  des  ordres  mili- 
taires de  Notre-Dame  du  Mont-Carmel  et  de 
Sainl-Maurice,  auxquels  il  a  été  uni  dans  la 
suite.  Mais,  si  nous  en  parlons  présente- 
ment, ce  ne  sera  pas  pour  lui  accorder  une 
origine  si  éloignée,  que  de  Bclloy  a  rendue 
eiicoie  plus  chimérique  en  la  faisant  remon- 
ter jusqu'à  l'an  72  de  Jésus-Christ ,  ajou- 
tant que  <  et  ordre  avait  d'al'ord  été  insti- 
tué pour  la  défoiise  des  ch  éliens  persécu- 
tés après  la  mort  de  .Sésus-Chris',  par  les 
scribes,  les  pharisiens,  les  saducéens  et  les 
Romains  {2). 

Il  est  certain  que  saint  IJ.isile  fil  bâtir  un 
hôpital  u>agninque  dans  l'uu  des  faubourgs 
de  Césarèe,  qui  peut  avoir  été  comsiiciicé 
vers  l'an  370  ou  371 ,  et  que  saint  tirègoire 
(le  Nazianze,  après  en  avoir  fait  la  descrip- 
tion [Orat.  20),  compare  à  une  ville.  0  01- 
qu'on  y  reçût  indilTéreminent  loutes  sortis 
de  personnes  à  qui  la  faiblesse  et  les  incom- 
modités rendaient  nécessaire  le  secours  des 
autres,  et  qu'il  servît  même  pour  recevoir 
les  étrangers  qui  passaient  par  Césarèe,  il 
n'y  a  pas  de  doute  nèamnoiiis  qu'il  ne  fût 
spécialement  établi  pour  y  recevoir  les  lé- 
preux, puisque  le  même  saml  Grégoire  do 
Nazianze  dii  aussi  que  l'on  ne  voyait  plus 
dans  Césarèe  ce  triste  et  misérable  spectacle 
des  lépreux,  qui  avaient  été  inlerdits  de  la 
conversation  de  leurs  proches  et  du  com- 
merce de  tous  les  liommes  ,  et  dont  l'abord 
causait  auparavant  plus  d'horreur  que  de 
pitié. 

C'est  ce  qui  est  confirmé  par  Tliéodorel 
{Lib.  IV,  cap.  IG) ,  qui  remarque  ([ue  saint 


{!)  \oy..  à  la  (in  du  vol.,  n*  1S2. 

(tJj  be  liclloy,  de  l'oriijinc  de  Chevalerie,   cliap.  9,  pag.  liG. 


739                                           niCTIONNAlKE  DES  OIinnKS  ni-.î.ir.lîîL'T.                                           7'.() 

iJasilc  pronnil  irnix  un  s  lin  (ou!  particulier.  Il  parle  pnsuilo  <l.->  rinslitiitinn  des  autn-s 

il  nui?    rciiiiicrcur  \  aloiis  ,  loul    ..rii'ii  qu'il  onires  iiillilniri>s  ilii  Siiinl-Si'puicrp,  ile>  Tcni- 

élail,  donna    aux    pauvres    lépreux  dont  ce  pliers  ri  (jcNdlrc-Datnedes  Alleninnds  ouTou- 

.saiiil  avaJl  soin   les  plus  belles  terres  ((u'il  loi!i(]ue  ;  et.  rexeiiaul  à  relui  deSainl-La/are, 

tût   en  ces  i|uarlifis.   ("eux  qui   préleuilent  \l  i\\i  :  5Itiis,  pendant  i/ue  ces  ordres  mililturef 

que  l'ordre  de  Sainl-Lyz.ire  tire  son  Drijjiiie  comwençniint   ainsi  prrsqudi  même  tcnps  à 

de  cet  liopilal  di.senl  que  le  zole  de  saint  lia-  5  élahlir  peu  à  peu  dons  Ji-rusalem  ,   relui  des 

si  e  fut  iniilé  par   [iliisieurs  villes,  qui  à  son  liosp'la'iers    vcims  ei  modernes,  que  l'.npeut 

eveniple  I  alireii!  aussi  des  lirtpitaux  ;  cl  que,  dire  <n  oir  été  le  mudèle  des  nulres  ,  faisait  de 

cuuimc  les  lépreux  claitnt  foi  l  communs  en  grands  pro'/rès  dans  la  Palestine  et  s'attirait 

ce  lemps-là  el  pouvaiint  communiquer  leur  beaucoup  de  cons  d  'ratinn  par  les  grands  ser- 

iiialaiie  p.ir  la    Iréquenlat  on,  les  liopitaux  vices  qu'il  rendait  en  paix  et  en  guerre.  C'est 

qu'on    li'ur  deslina  iïircnt  nofi\més   Icprose-  poKrf/noi  le  nombre  des  pi'Ierins  aussi  bien  que 

rirs  el   malailrcric  s    sous  le  titre    d(!   Saint-  clui  des  soldats  et  des  gentilshommes  qui  rn- 

Lazarc  ,  el    q.ic   leux    cjui    eurent   soin    de  trirent  dans  cet  o>-dre,  ci  oissunl  tous  les  jours, 

tes     hcpiliiux     eniliras>crcnl     la    règle    de  le /].  Gc  ard  Tung,  l'rorcnçal  de  l'île  de  Mar- 

sainl  lîasile  et  firmèn'iit   un   instilul  difl'é-  ligues,  //ui  et  lil  maUre  des  hospitalirrs  lors- 

rent  de  son  ordre  sous  le  nom    de  Sainl-La-  gne  Ji  rusa'em  fui  prise  sur  1rs  Sarrasins,  bd- 

zare ,  qui    l'ut   approuvi"  p.ir    le   jiape  saint  til.  euriron  l'an  1112,    un  ircisième  ltô;ital 

Damase.  sotts  le  nom  de  Saint-Jein-Haptiste,   el  y  lo- 

jM.  .MaimbDiirp,  dans  son  Histoire  des  Croi-  gen  ses  nonreau.r  chevili^rs  ,   i/ui  commencé- 

sades  [Liv.  m,  pag.  23i;,  conlo.id  les   clu'-  rent  peu  de  temps  après  à  former  le  dessein  de 

valiers  de  Sainl-l.aziirc  avec  ceux  de  S.iint-  suivre  une  conduite  et  une  forme  de  vie  plus 

Jean  de  Jérusalem  appelés  comiMuncmL'ut  de  sévères  encore  et  p'us  parfaites  que  celles  de 

Ma  t.' ;  ou  du  m   iiis  il    seinlile   ins;nui'r  que  leurs  anciens  confrères,  l'n  iff't,  comme  après 

C' ux-ci  ont  pris  leur  orii,'ine  des  chevaliers  /(/  nort  de  Gcr.ird  un  élut  à  lu  pluralité  des 

de  Saint-Laz.iie,  car  il  dit  que  les  chevaliers  voix   frère  Bayant  liogir  /  oiir  grand  maiirt 

de  S.  iul-L  izare  sont  les  plus  iincieas  liospi-  d'S  hospilaliers,  les  nnaicaux  chevaliers  de  ce 

laliCiS    (lui    s'éliililirent   à   Jérusalem;   que  troisième  hôpital  de  Sainl-Jean-B  ipliste,per- 

lorsque  les  princes   chrétiens  coni|uirenl  la  sislnnt  dans  leur  première  résolution  de  me- 

terre  sainle.  il  y  avait  à  Jérusalem  dos  hos-  lur  une  vie  plus  parfaite  et  d  ajouter,  comme 

p.l.iliers  dont  les  uns  recevaient  les  pèlerins,  les  chev'liers  du  Tem/ile,  à  leurs  autres  vœux 

el  les  antres  avaient  soin  des  malades,  cl  par-  celui  de  ehustelc,  se  séparèrent  (/e>  anciens 

liculiéremeiit  des  le|  riux  ;  que  ceux  (|ui  re-  hospitaliers  el  choisirent  pour  Imr  chef  frère 

cevaii-nl  les    pèlerins    iront   con)menec   ((ue  Jlui/tuoud  du  Puii.(/enltlltmme  de  Dauphiné... 

loniçlenips  après  les  hospitaliers  tle  Saiiit-I.a-  (Ju  ml  aur  anciins  cheialiers  qui  furent  ainsi 

2.11e;  que  ce  qui  y  donna  lieu  fut  que  certa  ns  séparés  des  nouveaux,  avec  lesquels  ils  ne  fai- 

Jiiaicliaii.ls  d'Aiiialphi ,  au   royaume  de  iNa-  salent  auparaiant  qu'un  seul  ordre  sous  un 

;)les,(|ui  traliiuaienl  dans  la  Syrie,  ayant  oli-  même  grand  maître,  ils  retinrent  leur  unc:eii 

tenu  d  un  cilife  d'l';;.'yplc  la  (lermissiou  de  h;i-  nom  de  .Saint-Lazare. 

lir  un  monastère  proche  le  suint  sep  ilcre,  ils  II  pirait  par  ce  discours  de  M.  IM.iimhoiiriî 

y  ajoutèrent  iiii  hôpital  avec  un  oriitoire  dé-  que  l'Iu'ii.iiial  de  Saiut-Je;in-lfa.  tisic  clait  dil- 

die  en  l'honneur   ue  saint  Jean  l'Auiiiôuier  forent  de  celui  île  SaintJaii-i'Aumôner,  qui 

pour  y  recevoir  les   pèlerins  cl  les  pauvres  av.iit  été  hàii   proche  le  monastère  que  ces 

malades,  et   qu'alors  il  s'y  (il  une  commu-  marchands  d'Amalphi  avaient  fail  cons'ruirc 

Jiauté  qui,  outre  ceux  qui  s'employaient  au-  au'c  environs  du  saint  sépulcre  ,  et  que  l'un 

p.'uavant  à  traiter  les  m. il. ides  et  les  lépreux,  nommait  de   Sainli'-]\I,irie  de  la   Latine.  Cc- 

coniprenait  aussi  ceux   qui   ét;iienl  liestiiiés  pendant  ("luillauine  do   Tyr,    auquel  on   doit 

p.irlicul  élément  nu  service  des  pèlerins,  cl  ajouter  foi,   lé.'iioi^ne  que  de   son  temps  cl 

que  1rs  uns  (1  les  autres  s'appelaient  indlile-  lorsqu'il    écrivait    son    Histoire    (  /,//).  xvin, 

remmi'iit   hospitaliers.   Il   ajoute  qu'ils    vé-  c.   5  et  (J,inllt'3,  ce  meiiasicre  s'appelait 

cureni   longt  iiips  dans  ci  t  exercice  de  clia-  encore  de  la  L.iline  :  /•."/  quoui'ivi  viri  Lntini 

rilé  sous    i.n    supérieur   que    l'on   appelait  rrant  (/ui  locuin  fund  ncrant  et  i/ui  relii/ionem 

maître  de    Ihi^pilal,  jusquà  ce    qu'.ipiès  l.i  conservahant,  id-irco  ah  ea  die  usque  in  prœ- 

coiii|néie    de    la    l'alcaline    par    les    priiics  sens  locus  ille  mmiasteriuin  de  Latin  1  diritur. 

cioises,  ils  prirent  les  aunes,  nou-seulemrnl  i|  m»  dislingoe  point  rhojiital  de  Saint-J  an- 

pour  la  défense  des   pau»ris   pèlerins,  mais  l'Aumonier  d'avec  celui  de  S.iint-Jean-ltap-- 

aussi  pour  SCI  V  ir  les  rois  de  Jcrusale.n,  aux-  liste,  que  M.  .Maiinhouig  dit  que  le  I!.  (iéiard 

quels  ils  fuient  d'un  grand  secours  dans  tou-  fil  liâiir;  il  ne  pa  le  que  d'un  seul,  dont  l'c- 

les  les  guerres.  Tour  lois,dil-il,  ils  partagé-  glise  avait  été  dédiée   à  saint  Jean   l'AuniA- 

rent   leur  communauté  eu   trois  étals  dille-  ii:er:    t'rexcrimt  cliam  in  codcm  loro  attare 

rciils,  dont  le  premier  fui  celui   des  tlieva-  in  hunore  IL  Joannis  l\lvcmos.  (;'esl  d.insicl 

liiTs,  qui  allaient  à  la  guerre;  le  second  des  lu'ipilal   qu'il   dit  que  le   H.    (iér.rd   mourui 

frères  servants,  qui  avaieni  s:)in  des  mala'les  aprc<  y  avoir  s  rvi  les   pauvres   peu. tant  un 

el  des  pèlerins,  cl  le  troisième  était  celui  des  temps  considéralde  sous  les  ordres  de  r.ililH' 

ecclésiasliques   el   des    chapelains,  qui  leur  cl  des  religieux  du  monastère  de  la   Latim-, 

administraient  les  sacrements;  el  cette  coin-  pt  que  llaymond  lui  succéda  :  l'I  in  xenodu- 

pagiii.-  fut  éiigéeeii  ordie   u.ilitaire,  que  'c  chio  similitcr  rrperlus  est  quidam  (ierardus, 

pape  Ta»;  al  11  conlirm.i.  vir  prubalœ  cuni\rsutiouis,  qui  paupcnbus  i» 


71»  r'.z 


I.\2  T.'i 


eodem  loco  tempore  hostililalis   de  mondain  préicnd  quo  1  on  ne  doit  pas  conclure  de  U\ 

nbbath  H  monachorum,  multo  tempore  d-vulc  quo  ce  Roger  ait  de  rrclcur  ou  prcin  ,1c  Vh(,, 

serriehrJ  ■   cui  poslea   successif    Itai/miindus  \Al:i\,  qui  sont  des  litres  qui  no  <onv  ei.nont 

|s7e   de   quo   nobis   Si-rmo   in   prasmli.  !i   se  qu'à  un  sui.eiier.r,  et  non  pas  celui  de  g  u- 

piaint  ensuite  que  ce  Raymond  et  ses  lio  pi-  vcrn-ur,   et  (ju  ,1   se    peut   laire  (ju'il  ail  été 

laliers    nui  n'avaient  eu  que  de  f;iil)les  cutu-  étal)li   ;,MiUverni'ur  dr   I  hôpital  en  l'absence 

mencements,  se  voyant  exlrêinenient  iichcs,  de  Hayuiond  du   l'uy,  qui  succéda  à  (iérard, 

s'étaient  d'abord  soustraits  à  la  juiidiition  d'autant  plus  qu'il  n'y  a  aucun  tiire  djiis  la 

de  l'abbédu  monastère  de  la  Lat  ne,  et  av.iieiit  chancellei  ie  de  l'ordre  où  il  soit  parlé  de  ce 

tenu  des  bulles  du  pape  ,   qui  les  cxemp-  Uoger  en  qualité  de  supérieur  ou  de  inaîire. 


»i> 


talent  aussi  de  celle  du  patriarche  de  Jéru-  D'ailleurs,  s'il  é  ait  vrai  que  les  cli-  val  ers 
salem  :  Sic  eryo  de  lam  modico  incrementinn  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  et  de  Saint-La- 
hahinles  piœ  Hclœ  domiis  fratres,  prius  a  ju-  zare  ne  se  fi.s-ent  séparés  qu'après  l'eleclinn 
risdiclione  ss  suhtraxerunt  ahbo.t.s  ;  dvinde  de  ce  frère  Doyaiit  Roger,  il  s'cnsuivrai  qu'î 
vi'dàpiicalis  in  immensum  divitiis.  per  Ecclc-  cette  sépa'aiion  n'.iurait  clé  faite  qu'apiès 
siam  Itomanam  a  manu  et  poleslafe  domini  pu-  l'an  1120,  puisqu'il  esl  fait  meniion  de  ce  Ko - 
triarchœ  sunt  émancipait.  Ce  n'est  unique-  pcr  en  qualité  de  gouvemcur  de  l'IjôpitaJ  do 
ment  que  des  chevaliers  de  Siint  Jean  de  Je-  Sai;it-Jein  de  Jérusalem  dans  la  donation 
ri:8;Iem  do:, t  cet  auteur  pirle  ;  d'où  l'on  doit  du  comte  d'Abruzze  dont  nous  avons  parlé, 
conclure  que  c'est  san-i  aucun  rondement  que  ce.  i\u\  est  contraire  aux  prétentions  de  M.  dj 
M.  Maimbourg,  qui  cite  même  (iuillaume  de  Guénégiud  ,  ci-devant  chancelier  de  l'ordre 
Tyr,  a  avancé  que  les  chevaliers  de  Saint-  de  Saint-Lazare,  qui,  dans  un  de  ses  faclums 
Je'an  de  Jérusalem  et  ceux  de  Saini-La/arc  contre  M.  le  marquis  de  Dangeau,  grand 
avaient  élé  unis  et  n'avaient  fait  pendant  un  maître  de  cet  ordre,  s'est  déjà  déclaré  e.i  fa- 
temps  qu'un  même  ordre.  veur  de  l'union  des  deux  ordres  de  Saint-Jean 

Il  est  vrai  que  le  grand  maître  Raymond  et  de  Saint-Lazare  de  Jérusalem,  et  dit  qu'ils 
du  Puy,  de  l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusa-  fuient  séparés  dans  le  xr  siècle.  P,ut-étre 
lem,  changea  le  liire  de  son  hôpiial  qui  avait  que  M.  de  Guénég  lud,  dans  l'Hisloire  de  son 
élé  dédié  à  saint  Jean  l'Aumànler  ,  «  n  celui  ordre  ,  et  qui  n'a  rien  épargné  pour  recou- 
de saint  Jeai.-Baptisle,  qu'il  pr.l  [lour  prolec-  ^rcr  les  titres  de  cet  ordre,  a  apporté  dis  lé- 
leur  de  son  ordre,  ayant  voulu  imiter  la  pé-  moJgnagrs  plus  convaincants  que  C;ux  quo 
nitence  de  ce  précurseur  du  Sauveur  du  M.  Mainihourga  donnes,  pour  prouver  l'uni  ,n 
inonde,  et  l'ayant  proposé  pour  modèle  à  ces  <'«  ces  deu\  ordres  de  Saint-Jean  et  de  Saint- 
chevaliers.  C'est  peut-être   ce    qui   a    donné  Lazare  de  Jérusalem. 

lieu  à  M.  Maimbourg    de  croire  qu'il  avait  Ce  que  l'on  peut  dire  de  plus  certain   tou- 

bàtià  Jérusalem  un  trois  èine  hôpital  sous  ce  chant   les  chevaliers  de  Saint-Lazare,   c'est 

nom,  comptant  apparemment   pour  le   pre-  qu'ils  ont  commencé  d'abord  pir  exeicer  la 

niier  de  ceux  qui  étaient  en  celle  ville  celui  charilé  envers   les  pauvres  lépreux  d  ins  des 

de  Sainl-Jean-l'Aumônier  proche  le  menas-  hôpitaux  dc-tinés   pour  les  recevoir;   (|u'ils 

(ère  de  Sainte-Marie  de  la  Latine,  et  pour  le  prenaient  le  nom  d'hospitaliers  ,  el  que  dans 

second  celui  que  les  Allemands  avaient   fait  'a  suile,  à  l'exemple  des  autres  hospitalier-, 

bâtir  sous  le  titre  de  Notre-Dame  des  Aile-  ''  y  en  eut  une  partie  qui  prit  h  s  arme,  pour 

mands  ou  des  Tcul  ms.  le  service  des  princes  chrétiens  qui  comiui- 

(Juanl    à   ce  frère  Boyant    Roger,  que  le  ''eut  la  ter;e  sainte  ,  sans  abandonner  |  our 

même  auteur  dit  qu'on  élut   à    la    pluralité  cela  l'Iio-pitaliié  ;   ce  qui  ne  peut  être  arrivé 

des  voix  pour  grand  maître  di's  hospitaliers  l^e  dans  le  xir  siècle. 

après  la  mort  Uu  B.  Gérard,  je  ne  sais  si  les  "s  recevaienl  même  dans  leur  ordre  des 
chevaliers  de  Saint-Lazare  le  mellent  au  lépreux,  apparemment  pour  avoir  soin  des 
noinbie  de  leurs  grands  maîtres  ;  mais,  quoi-  autres  lépreux,  qui  se  relii  aient  volontairc- 
qne  Bûsio,  dans  son  Histoire  de  l'Ordre  des  ment  dans  leurs  hôpitaux,  ou  (jue  i'on  obli- 
Chevaliers  de  Saint-Jean  de  Jérusalem,  ail  geait  par  force  d'y  enircr;  et  ce  qui  est  re- 
dit que  ce  frère  Boyant  Roecr  fut  élu  pour  niarquable,  c'est  (jii'ils  ne  pouiaient  élire 
grand  maître  de  cet  ordre  après  la  mort  du  pour  grand  maître  qu'un  chevalier  lépreux 
B.  Gérard,  il  ne  se  trouve  p  is  néanmoins  au  ^le  l'Iiôpilal  de  Jérusalem,  ce  qui  a  duré  jus- 
nomlire  des  grands  maîtres  dont  le  comman-  que  sous  le  pontificat  d'Innocent  IV,  c'est-à- 
(leur  Naberat  nous  a  donné  un  abrégé  des  dire  vers  l'an  1233,  qu'ayant  élé  obligés  d'à- 
Vies  dans  les  privilèges  de  cet  ordre  qu'il  a  bandonner  la  Syrie,  ils  s'adressèrent  à  ce 
recueillis.  Le  commandeur  Maruli  ,  dans  les  pontife  et  lui  rrmonirèreni  (ju'aj  aiiUoujours 
Vie»  des  mêmes  grands  maîtres  (1),  mais  cKi  pour  leur  grand  maître  depuis  leur  iiisii- 
plus  amples  que  celles  que  Naberat  avait  lution  un  cheviilier  lé(>reux,  ils  se  trou-' 
données,  n'y  met  point  aussi  ce  Boyant  Ro-  vaient  dans  l'impossibilité  d  en  élire  un, 
ger.  Il  avoue  bien  qu'il  en  est  fait  mention  p  irce  que  les  inlidèlcs  avaient  tué  tous  les 
dans  une  donation  de  l'an  1120,  que  fil  à  chevaliers  lépreux  de  leur  hôpital  de  Jérusa- 
l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  Olton,  lem.  C'est  pourquoi  ils  prièrent  ce  pontife 
cumle  d'Abruzze  ,  où  il  déclare  avoir  l'ait  ce  de  leur  pL-rmetlrc  d'élire  à  l'avenir  pour 
Roger  gouverneur  de  l'hôpilal  de  Saint-Jean  grand  maître  un  chevalier  qui  ne  fût  pas  ai- 
de Jérusale.n  ;  mais  le  commandeur  Maruli  laqué  du  lual  de  lèpre  et  qui  fût  en  bonne 

et)  Geroniiu.  Maruli.   Yii.    de  Grand.    Miusl.  di  ilalta. 


:;',                               nicTio.NNAïui:  i>F,s  ouDur.snF.i.if.ir:i]\.                              7*4 

saiilo,  cl  le  p.ipc  los  renvoya  à  l'cvcquc   du  cnr,  aynnt  6l6  rlmsséj  6v  l:i  Imc  sainte  1  an 

FiMScali,  l'our  nu'il  leur  ai  cordai  celle  per-  12o3,  ils  siiivirenl  le  roi  saiiil  I,otiis,  qui,  en 

tnissiiin  après  avuir  cxaniinc  si  cela  se  pou-  rcconiiaissatice  des  services  qu'ils  lui  avaient 

*ail  faire  selon  Dieu.  C'csl  ce  qui  esl  rap-  rendus  en    Orient,    confirma    les  doiialions 

porié  par  le  p  ipe  Pie   IV  dans   sa    bulle   de  que  ses  prédécesseurs    leur   avaient    f.iiti», 

l'an  lot).'),  si  étendue  et  si  f.ivurablc  à  l'ordre  les  mit  en  possession  de   plusii-urs  maisons, 

de  Saini-Lnz.irc.   par  laiinelle   il   renouvelle  cominanderies   cl    hipilaux  que    ce    prince 

tous  les  priviléjïi'S  et  Uiutes  les    grâces   que  fond.),  et  leur  accorda    plusieurs   pr.v  lépes. 

ses  prédécesseurs  lui  ont  accordes  et  lui  en  l'our  lors  ils  clab:ireiil  le  dief  de  leur  ordre 

donne   de  nouveaux.  Voici  comme   il  parle  à  liniguy  près  d'Orléans,  qui  leur  avait  éié 

de  l'éleclion  qne  les  clievaliers  de  cet  ordre  donné  dès    l'an    llo'i-  par    Louis   VU  dit   la 

devaient  faire  d'un  grand  mailrcléprenx  (  I)  :  Jeune,  et  le  grand    ni.iilrc    prit    le    tilrc  do 

ISt  Innucenliiis  IV ,  per  eum  acceplo  qitoii  li-  gran  I    maître   de   l'ordro  de   Saint-Lazare, 

cet  de  mili(iHri,  fpprohata   et  ealenii-t  paiificc  tant  deçà  (jue   delà  les    mers,  sa  juridict  on 

obseriala  consuetitdine  vblrnlum  essrl  ut  mi-  s'éteniianl  non-seulement  sur   les  clieva  iei  s 

les  leprostis  tlomtis  Sancli  Lnziiri   llieroso'ij-  qui  élaienl  eu   France,  mais  uiènie  sur  tous 

vtilani  in  ejus   magisti  itin   assumcretiir  :    re-  les  élrangiTS.    C'est  pourquoi   Jian  de  Cou- 

rum  quiii  /ère  o-imes  milites  Icprosi  dictœ  do~  ras,  (jui  avait  été  pou  vu  de  celte  charge  l'aa 

mus  ni)  iniinicis   fidei   miserabitiler  iiitcfcti  i'-iVl  par  l'Iiilipiie  do  Valois,  donna  pouvoir 

fuernni,   et  luijusmodi  ccnsuctudo  iiefjuihat  l'an   IHoV  à  frère  Jean  Ilallidei,  Lcoss.iis,  de 

commode    oOfennri ,   idcirco   tune   episcopo  gouverner   en  son    nom,    tant   au   spirituel 

Tuicuiiino   per   qinsdam  commis  rut,  vt,si  qu'au   tenipirel,    loul   ce  qui   apiiarlenail  â 

$ibi  secundun   Deum   risum   foret  expedire,  l'ordre   en    Angleterre  et  en    Liossc,   à    lu 

fialrilju<  ipsis  ticmliiim  a/i/ue;;i  mititem  sa-  cliarge  de   faire    tenir  par  chacun    an   à    la 

niim,  et  fralribus  pr.pilictic  damas  Sancli  L'i-  grande  co-nmanleric  de  lîoigny  irenle  marcs 

;inri  m  ejux  waji.tirum  (non  ob-liinle  consn-  sterling  d'argen'.Le  ro;  Charles  \',  surnomn)é 

titdine  liiijiismodij  de  cœtcro  eligendi  auctori-  le  Sage,  ayant  pourvu  «le  la  grande  enaîtrisc, 

late  (iposloUcii  concedeiet.  l'an  1377,  Jacquesde  licyms.ce  grind  maître 

Les  chevaliers  qui  n'étaient  point  lépreux  donna  à  frère  Doniniquc   de  Sainl-Koy    la 

cl  qui  étaient  en  élat  de    porter    les   armes  couimanderic  de    Seringon    en    Hongrie,    cl 

rendirent  de  signalés  services   aux    princes  l'établit   son    vicaire   général   dins    tout   co 

chrétiens  dansia  Palestine,   ce   qui   obligea  royaume,  avec  obligation  de  se  trouver  aux 

les  rois  Haudouin  II.Koii'.qufs,  Amauri  lil  et  chapitres  genér.iux   à  !!oii;ny,   et  d'y  appor- 

IV  et  les    reines    Melisiiide   et    Théodore,  à  1er  quatre  marcs  d'argent    lin.    L'on    trouve 

prendre  leur  ordre  sous  leur  prole.tion  et  à  un  V.  V.   Potier  dit  Conilans,    prêtre  de   cet 

faire  beaucoup  de   bien   aux  maisons   ((u'ils  or. lie,   commanilcur    de    la    Lande- Uaron, 

avai'  ni  dans  la  Syrie.  Ils  reçurent  aussi  plu-  mort  en  l'ioO,  qui  prenait  1 1  qualité  de  vi- 

sieurs   privilèges  des    souverains    ponlifs;  cairc  général  du  grand  tnailre  ti.  Desmarcs, 

et,  étant  passés  en   Lurop',  les  princes  leur  La  grande   mai.'risc  l'ut   encore  donnée   pir 

donnèrent  de  riches  possessions. Clément  IV  Ch  nies  Vil  à  Pierre    Hu:iiix    l'an    UVI.    et 

oidoiiiM    sous   peine   d'excouicnunication   à  par  Louis  XI  à  Jean  Co.  nu  l'an  li81. 

tous  les  ]  relais  «le  l'Eglise,  que,  lorsque  b'S  .M.ii.s,  comme  les  lépreux  étaient   rares  et 

(hevaliers  «le  Sainl-L.izarc  s'adresse;  aient  à  que  l'on  voyait  peu  de  personnes  attaquées 

eux  pour  ol.liger   les    lépreux  de   se  retirer  de  celle  ni.iladie,   il  semble  queccscheva- 

dans  leurs  hôpitaux,  ils   eussent   à   donner  liers   hospitaliers,    qui     d'ailieurs  s'étaient 

main-lorle  a  ces  chevaliers  et  à  c mlraindre  beaucoup  relâches  de  leur  premier  iusliiul, 

les  lépreux  de  se  rciirer  chez  eux  aver  leurs  priacipaiemeal    ceux  d'Italie,    ét.iieni   dcve- 

liiens  meubles  et  immeulile-.  Alexan.lre  IN',  nus  iiiulilcs  :  c'est  ce  qui  obligea  le  pape  In- 

par  une  Imlle  dt;  l'an  |-i'i5,    leur  permit   de  noceat  VIII  de  suppriaicr    Icar  ordre    et    d>^ 

suivie  la  ré;:le  di- saint  .Vuuustin,  ipiils  as-  l'unir  avec  tous   les  biens  «jui    lui   appa  te- 

suralenl  avoir  su  vie  jus,|u',ilor3,   touiine  il  naieiil  à  l'ordre  de  Saiui-Jean  de  Jérusalem, 

est  marqué  «1  ins  la  bulle  «le  ce  p«)nlife,  où  il  par  une  bulle  de  l'an  1V',)0.   Mais  celte  bulle 

n'est  point  lait  m  iilion   de  la  rè^le  de  saint  ni-  fui  point  rei-ue  en  France,  où  il   y  a  tou- 

Itasile,  ce  «lui  l'ait  voir  «lue  c'est  s.ins  raison  jouis  eu  des   grands    maîtres  de   l'.irdie   do 

que  «inelqu«'s  uns  disent  qu'ils  ont  autrefois  Saint  -  L  izare   de  Jeriis  ileui,    qui  oui    reçu 

suivi  la  règle  de  saint  Itisile.  Le  même  pape  di'S  chevalu  rs  auxquels  ils  oui  conleié    Ls 

les  mit  sous  la  pro:eclioii  «lu  saint-siege  r.ni  co.iimamieries  qui  en  dépen  lent,  et  ont  lou- 

l-i.'>7,  et  conlirina  1«'S  donali«)ns  qne  l'emiic-  jours  et."  m.iinlenus  dans  ce  droit.  Le  grand 

reur  Friderie  11   leur  avait  laites  «lans  la  Si-  prieur  d'.Vquitaine  d.-  r«)rdre  d«'  Saiut-Jeaii 

«lie,  la  Puuille,  la  t^.ilalire  et   qneliiucs   au-  de  Jérusalem  ayant  pourvu  iii  de  ses  clieva- 

Ires  provinces.  Henri,  r«)i  d'Angli'terre,  duc  licrs  de  l.i  couimanderie  ili'  Saint-l'honias  «lo 

<rAnjou  el  de  Normandie;  Thibaul,  comte  de  Fonti'iiay.   apiiarlenanl  à  l'ordre  de    Siint- 

Itlois  ,    cl    plusieurs   autres,   augmentèrent  Lazare,   le  grand   m.iitre  de  cet  onlre  et  ses 

leurs  revenus.  chevaliers  s'y  opposèrenl.  Il  y  eut  à  ce  suj -l 

Mais  de  tous  les  princes  chre'.iens  il  n'y  procès  an  parli'iiienl  de  Paris,  (jui  fut  déi  ulé 
<•«  a  p  oini  dont  ces  clnvaliers  aient  n  eu  de  l'an  l.')V7  eu  faveur  du  graml  maître  de  l'or- 
plus  grands  bionla:ls  «luedes  roi»  de  France;  drc  de  Saint-Lazare,  qui  fut  maintenu  dans 

(1)  Huit.  Hom.,  tim.  Il,  c-rnsL  0:<  Pii  IV,  §  i. 


745 


LAZ 


LAZ 


740 


lo  droit  (le  conféicr  toutes  tes  commaiulerics 
de  son  ordre  à  S8s  clievaliers,  et  les  cheva- 
liers de  Saint-Jean  de  Jérusalem  fuient  dé- 
boules de  leurs  prétentions.  Le  roi  Louis 
XII  donna  la  grande  maîtrise  à  Aigiian  de 
MareuiL  Sou  frère,  Ciamle  de  Mareuil,  en  fut 
aussi  pourvu  par  François  i",et  Henri  II  y 
nomma  Jean  de  Con(y,  qui  asseinbla  un  clia- 
pilre  général  à  Boigny,  où  il  donna  à  biil 
emphylcolique,  pour  deux  cent  vingt  florins 
par  an,  tous  les  bi  ns  apparlcnant  .à  l'or- 
dre au  territoire  de  Sussaiio,  dans  la  pro- 
vince de  la  i'ouiile,  à  un  ihevalier  d^^  Cala- 
bre  qui  était  prés(  ni.  Le  mê:ne  roi  pourvut 
de  la  grande  maîtrise,  après  la  mort  de  Jean 
de  Co'nly,  Jean  de  Lévi,  qui  asscmlda  aussi  lo 
cliapiire  général  à  l'oiyiiy  l'an  15iJS,  où  il 
se  (rouva  un  grand  nombre  de  ilicvalicrs 
de  toutes  les  parties  de  l'Europe.  Michel 
de  Seurre  fut  encore  fut  grand  maître  par 
le  roi  Francoii  11,  cl  François  Salviati  par 
Charles  IX.' 

S'il  est  vrai  ce  que  dit  le  P.  Toussaint  de 
Saint-Luo  dans  son  Abrégé  historique  de 
l'Institution  de  l'ordre  de  Saint-Lazare,  que 
le  grand  mailre  Salviati  fil  chevalier  de  cet 
ordre  Jcannot  de  CastiMon  et  Octave  Frégiise, 
à  la  recommandation  du  pape  Pie  IV'  et  de  la 
reine  de  France  Catherine  de  Méilitis,  ce 
pontife  aurait  reconnu  le  grand  maîlre  de 
l'ordre  de  Suint-Lazare  en  France  ,  quoi- 
que cet  ordre  eût  élé  supprimé  par  Innocint 
V  III.  Mais  ce  que  le  P.  Toussaint  ajoute  en- 
suite me  rend  cette  réception  à  l'ordre  de 
Jeannot  de  llaslillon,  à  la  recommaiidation 
du  [;ape  Pie  iV,  fort  suspecte;  car  il  dit  en- 
core que  le  griinil  maître  SalviaU  donna  à  ce 
Jeannot  de  Castillnn  l'administration  du 
grand  hôpital  de  Saint-Lazare  de  Capoue, 
l'ctabi  ssanl  son  vicaire  général  et  grand 
maître  de  l'ordre  en  Ilalie.  Le  litre  de  grand 
maître  donné  [lar  ui  grand  m  lîlre  à  son  vi- 
caire général,  commissaire  ou  délégué,  n'a 
jamais  élé  en  pratique  dans  aucun  ordre.  Les 
grands  nsaîtres  ou  généraux  qui  sont  chefs 
d'ordre  peuvent  bien  donner  à  leurs  vicaiies 
ou  commissaires  leur  autorité  et  leur  pou- 
voir, mais  ils  ne  leur  donnent  jamais  les  li- 
tres qui  ne  conviennent  qu'à  leurs  propres 
personnes  comme  chefs.  L'intention  du  P. 
Toussaint  a  été  d'insinuer  par  ce  moyen  que 
Jeanno!  de  Caslillou,  nommé  grand  maître 
de  l'oidre  de  Saiiil-Lazue  dans  la  bulle  de 
Pie  IV  de  l'an  15Go,  dont  nous  avons  parlé, 
n'était  que  le  vicaire  général  du  grand  maî- 
lre de  cet  ordre  en  France;  n^ais,  s'il  n'a- 
vait été  que  vie, lire  général  du  grand  maître 
de  France,  (omincni  ce  ponlife,  dans  cette 
bulle  si  ample  et  si  étendue,  aîirait-il  pu  ou- 
blier le  grand  maître  de  France,  dont  il  ne 
fait  aucune  menlioi,  voulant  au  contraire 
(ju'après  la  mort  du  grand  niaiire  Jeannot 
de  Caslillin  et  de  ses  successeurs,  ou  sur 
leur  démission  volonlaire,  les  chevaliers 
procéJassenl  à  l'elcclion  d'un  autre  grand 
maître  en  tel  lieu  (|ne  bon  leur  semblerait? 
JHunnut  de  Caslillon  ne  se  prélenilait  pas 
8e;il<'mc!it  grand  maiire  de  l'ordre  de  Sainî- 
L.'izare  en  Italie,  mais  il  se  disai!  grand  mai- 

UîCTIO.NNAIBE  DES  OllDaES  RFLIGIEUX.  IJ. 


Ire  de  cet  ordre  par  loul  ii-  mondi>.  C'est  co. 
qu'on  lit  à  la  fin  des  privilé„'rs  de  cet  ordre 
qui  furent  imprimés  à  Home  l'an  lo()G,  chez 
Antoine  Blade.  imprimeur  de  la  chambre 
apostolique,  où  il  y  a:  Aiipiiis  illuslrissimi 
et  reverendissimi  jeannotti  Castitlionei  Me- 
diolaninsis,  l'i-lig'unis  et  mliliœ  Sancli  La- 
zriri  nierofoli/milani  per  lolum  orbcin  gène- 
mlis  niagistri,  Vincentiiis  Mcrenda  in  luccin 
edidit.  Ainsi  i!  est  plus  vrai  de  dire  que  ce 
Jeannot  de  Caslillon  qui  était  commandeur 
de  riiôp'tal  de  Capoue  avait  usurpé  le  t'.tre 
de  grand  maître,  qui  n'appartenait  qu'au 
commandeur  de  la  maison  de  Boigny  ea 
France,  dont  François  Salviati  était  pour 
lors  pourvu,  celle  conimanderie  étant  an- 
nexée à  la  dignité  de  grand  maître. 

Mais  il  n'était  pas  le  premier  qui  avait 
usur|)é  ce  tilre.  Il  y  avait  eu  avant  lui  Mntio 
de  Azzia,  qui  se  disait  aussi  grand  maîlre 
général  de  l'hôpital  de  Saint-Lazare  de  Jéru- 
salem, comme  il  paraît  par  une  antre  bulle 
du  même  Pie  ÎV  de  l'an  1561,  où  ce  pontife 
lui  donne  ce  tilre  :  Dilecto  filio  iMulio  de 
Aszid,  magistro  gemmli  Iwspilnlis  Sancli 
Laziri  IJierosolymitani  ordinis  s  mit  Au' 
(luslini  [l'rivileg.  Ord.  S.  Lnznri,  pag.  28). 
L'on  Irouve  encore  (n  1539  un  Pyrrhus- 
Louis  Caraiïa,  qui  prenait  le  liire  de  maître! 
ou  commandeur  général  de  Saint-Lazare  de 
Jérusalem,  dans  l'une  et  l'autre  Sicile  deçà 
et  delà  le  Phare,  ce  qui  f.iit  voir  que  ceux- 
là  se  sont  trompés  qui  ont  é  rit  que  Pie  IV 
avail  rétabli  l'ordrq  de  Saint-Lazare,  qui 
avait  été  supprime  par  Innocent  Vlll.  et  qu'il 
en  avait  accordé  la  grande  maîtrise  à  Jean- 
not de  Caslillon  par  sa  bulle  de  l'an  ISlio, 
puisque  outre  les  grands  maîtres  Caraiïa  et 
d'Azzia,  qui  avaient  précédé  de  Caslillon. 
celui-ci  était  déjà  gr.ind  maître  lorsqu(= 
Pie  IV  lui  accorda  cette  bulle  si  ample  et  si 
favorable  à  cet  ordre,  l'an  1563.  Pour  s'en 
convaincre,  il  n'y  a  qu'à  lire  celte  bulle,  où, 
parlant  de  Jeannot  de  Caslillon,  il  dit  :  ISios 
igitur  volentcs  dileclum  filium  JcannoUnm 
Caslillionetim  modernum  hospitahs  d  mUitiœ 
prccdictwn  magnum  nuigistrum,  ejusque  siic- 
cessorcs  m-.gnos  ipsius  lioapitalis  magislros 
P'o  lempore  existente<,  ac  iiuffiitale  et  ):ii~ 
iitiam  hujusmudi  eorumque  cvnvenlum 
eliam  amptioribns  quam  quispiam  nustro~ 
mm  prœdecessorum  prœdictorum  eos  jirv 
feculi  fueriiil ,  fnvoribtis  et  gruliis  prosM/ui. 
Cet  hôpital  et  couvent  dont  parle  ce. 
pape  était  l'hôpital  et  couvent  de  Saint-La- 
zare de  Jérusalem,  qui  était  chef  de  l'ordru 
avant  que  les  chevaliers  eussent  élé  obligés 
d'abandonner  la  lerre  saiiile,  et  ce  n'est  poinc 
ce  pape  qui  transféra  ce  chef  d'ordre  à  l'iiô- 
[lital  de  Capoue,  comme  ont  écrit  aussi  plu- 
sieurs auteurs.  Voici  comme  ce  ponlife  s'en 
explique  dans  la  même  bulle  :  Motti  proprio 
non  ad  Jeannotti  nut  priorum,  piœceptonim, 
ndlitum,  fialium,  vel  personnrum  seu  alio- 
rum,  pro  eis  nobis  super  hoc  obltilœ  petilionis 
instanliam,  sedmei  a  liberalitale,  et  ex  ccrlu 
scitnlia  noslra,  ac  de  apcstolicn  polcslalis 
pleniludine,  iii.tiilutionem  et  ercctionenihospi- 
talis  et  mililix hitjiisnio'ji,  ejusrjne  translaiio- 

24 


Ti7  DlCTIONNAmE  DKS 

won  oliin  ad  prœeeptoriam,   ici  flomwn  Cii- 

fiuanam  piœilirtam  fact  m appiobamw, 

confitmntnns. 

Celait  le  pape  I.éon  X  «(iii  .iv.iil  f  connu 
riiôpilal  ileCipoiu'  pour  «lu  fil''  l'orlre, 
puisqu'à  In  prit  rc  de  l'eiiipeniir  Cliarles  V 
il  avait  rei^iiu  à  l'onlie  de  SainiLazaie  les 
iiApitaux  de  b^aiiit-Jean  de  l'alennc  et  de 
Saiiite-Açalhe  d.>  Messine,  el  les  avait  !0!:- 
iiiis,  coiiiiiic  au  chef,  au  eoinniai.deur  de 
rhôpilal  de  (Papoue,  à  qui  il  dniine  le  litre 
(le  firand  mailie,  comme  il  est  eiicore  mar- 
qué liai'.s  la  bulle  de  l'ie  IV.  Jl  i  arait  donc 
parcelle  bulle  que  ce  fut  Léon  X  qui  réta- 
blit l'ordre  de  s.iinl-Laz:)re,  el  que  l'ie  IN  le 
remit  dans  tous  ses  droits  d  lui  accorda  de 
nouveaux  privilèges. 

Pie  \ ,  par  une  aulre  bulle  de  l'an  loG7, 
révo()i!a  quelques-uns  des  pi  ivléges  que  son 
prédécessiur  avait  acc.irdés,  et  en  modéra 
quelques  autres.  Mais,  après  la  mort  de 
Jeannol  de  Casl  lion  ,  qui  arri\  3  à  Verciil 
l'an  1572,  Cirégoire  Xlll  unit  l'ordre  de  Saint- 
Lazare  à  celui  de  Saiiil-M.iurice  1 1  en  ae- 
corda  la  grande  maîtrise  a  Emmanuel  I'h;l:- 
beil,  due  de  Savoie,  sous  prêt  nIc  que  celte 
grande  maîliise  était  vacante  :  Ac  prrtcrea 
cémentes  tiiiliiinm  hospilatis  S.  Luznri  Hie- 
tosolymilmii  snb  re(jula  sancli  Aufiiulini  jain- 
pridem  mo(jislri  rryiuine  desiilutnm.....  C'est 
ain^i  que  le  pape  parle  dans  la  bulle  d'union 
de  ces  deux  ordres  Cependant  François  Sal- 
viali  était  grand  maître  en  France  de  l'ordre 
de  Saint-Lazare;  ainsi  l'on  peut  dire  que  le 
pape  ne  lit  celte  union  que  sur  un  faux  ex- 
posé. Kn  elîet  le  grand  maître  ."^alviali  fit  des 
proleslalions  el  des  oppositions  à  la  (lualilé 
que  le  duc  de  Savoie  prenail  de  grand  maître 
.<le  l'ordre  de  Saint-Lazare,  et  au\  bulles  du 
pape  Grégoire  XIII  ;  il  lil  assembler  le  chi- 
pilrc  général  à  Boigny  l'an  1578,  el  les  che- 
valiers de  France  se  niainlinrent  toujours 
dans  la  possession  des  commaiuleries  qu'ils 
avaient  en  ce  royaume.  Après  la  mort  de  ce 
•  raiid  maître,  le  roi  Henri  111  donna  la 
(;r.;nd('  mailiise  à  Aimar  de  Chaites.  Jean  de 
Oavan  lui  succéda,  el,  sur  la  démission  vo- 
lontaire qu'il  donna  de  celte  charge  à  Henri 
1\  l'an  llJO'i,-ce  |irincc  en  pourvut IMiiliberl 
de  Nrri  slang,  qui  fui  aussi  premier  grand 
mailrc  de  l'ordre  Je  Notre-Dioïc  de  Mont- 
Carniil,  auquel  l'ordic  de  Sainl-La/are  fut 
aussi  uni  en  France,  comme  nous  dirons  à 
l'article  .Mum-Caumel. 

Cille  suc  ce^sion  de  grands  maîtres  de  l'or- 
dre de  Sainl-Lizare  en  Franc  depuis  que  le 
pape  Innocent  \Ul  supprima  cet  oidre  en 
Italie  l'an  IVJO,  fait  \oir  qu.'  c'est  à  tort  que 
le  1'.  lîonanni  de  la  compai;niedc  Jésus,  dans 
son  Catalogue  des  Ordr.  s  mililaires  qu'il 
donna  au  publie  l'an  1712,  du,  (;u'après  la 
suppression  de  cet  ordre,  sa  mémoire  fut 
cbscurcic  peu  à  peu  en  France  :  Sic  pnihdim 
tjUS  stiduliiu  iiicmorin  tuin  apud  (i<dlos  lum 
apud  Halos  ttl  obscurata;  pui  cjuil  a  lou- 
jours  subsisté  en  France,  où  il  n'.i  rien  di- 
minué de  8un  ancienne  splendeur,  qui,  bien 
toin  de  s'obscurcir,  a  iiiénie  augmenté. 
(1)   Vot/.,  a  la  lin  du  \ol.,  ii"  18">. 


Or.nilES  RFXIGIF.UX. 


7S8 


Ces  chevaliers  faisaient  autrefois  des  vœux 
solennels.  Il  y  avait  môinc  des  religi'  uses  do 
cet  ordre,  et  il  en  reste  encore  un  monastère 
eu  Suisse.  Le  P..  lionauni  a  donné  l'habille- 
ment d'un  de  ces  chevaliers  tel  que  nous 
l'avons  f.iil  gla^er  (I);  mais  cet  li.billeineiil 
est  supposé,  et  n'a  été  dessiné  appareminent 
ijue  sur  nue  s  tnple  idée.  Les  chevaliers  de 
SaintLaz;ire  n'ont  commencé  à  porter  la 
crois  à  huit  l'oinles  qu'à  la  fin  du  xv  siècle 
ou  au  commeiueineiil  du  xvr,  et  cette  iroiv 
a  toujours  été  verte,  à  la  diffèr.  née  de  cella 
des  chevaliers  de  Saiiit-Jcan  de  J^rus.ilem, 
qui  est  blanche.  Le  plus  ancien  iiionument 
qui  puisse  faire  connaître  quel  é  ait  le  véri- 
table habillenicnt  de  ces  anciei:5  clicviliers 
se  trouve  dans  la  commandciie  de  tïrale- 
monl,  où,  au  pied  d'une  image  de  saint. \n- 
loinc  en  relief,  posée  sur  une  espèce  de  co- 
lonne, l'on  voit  cinq  chev.iliers  de  Sainl- 
Lazarc  à  genoux,  am  es  de  eu  rasse,  ei  un 
chapelain  du  même  ordre,  ayant  tous  un 
manteau  long,  sur  leijuel  il  y  a  une  cro!x 
.M'i  pie,  srulemenl  un  peu  pâtée  aux  c\lré- 
niilés.  ('elle  qu'ils  ont  sur  la  poitrine  est 
néaiii!:oins  dilTérenlc  en  ce  qu'elle  est  un 
P'U  plus  longue  par  le  pied,  qui  se  termine 
en  pointe.  L'on  y  liliiuece  fut  Pierre  Poli  r, 
commandeur  de  cet  ordre,  qui  (il  faire  celle 
image;  el,  comme  elle  a  quelque  chose  do 
s:ngul  cr,  c'est  peul-etre  ce  qui  a  obligé  des 
curieux  de  la  faire  graver:  car  saint  An- 
toine est  au  milieu  des  fianimes,  ayant  à  ses 
pieds  plusieurs  pourceaux  dans  le  même 
leu,  qui  font  des  sauls  en  l'air:  et  ce  saint 
n'a  I  oint  un  Tau  sur  son  habit  comme  les 
peintres  le  représentent  ordinairement,  mais 
au  lieu  du  Tau  on  lui  a  mis  une  co  ironiie. 
J'ai  vu  deux  d.rfcrentcs  estampes  de  celte 
im  igc,  el  une  autre  où  est  gravé  le  tombeau 
de  ce  F.  l'ieire  Poiier  avec  son  épitapli  , 
qui  fait  voir  que  cette  image  a  pu  être  la  Ij 
vers  le  milieu  du  xv'siècl.',  puisque  ce  com- 
mandeur mourut  l'an  H50.  \  uiei  cette  épi- 
laplie  : 

Ci  devant  ce  grand  autel  dit  noble  homme 
et  religieuse  personne  F.  Pieire  Potier  dit 
Con/liuis,  frère  ^^restre  en  l'Ordre  el  Chevale- 
rie Saint  Ladre  de  Jérusalem,  commandeur  de 
céans  el  de  la  Lande  Uarun,  en  son  vivant 
vicquaire  gênerai  dr  noble  et  puissant  Sei- 
gneur F.  G.  Dcsmaies  cbevalirr  grand  maître 
gcnei  al  de  toute  la  susdite  Ordre  et  (  /icvalcrie 
deçà  et  delà  la  tner,  commandeur  de  la  maison 
conventuelle  de  liuigni  prrs  Orlcans,  qui  tré- 
passi  l'an  mil  quatre  cent  L. 

Il  y  a  liien  de  l'apparence  que  ce  ne  fui 
qu'à  la  fin  de  ce  siècle  ou  au  commencement 
du  XVI',  après  que  Léon  \  eut  rétabli  Tordre 
de  Saint-Lazare  en  Italie,  ijuc  les  chevaliers 
de  cel  ordre  prirent  1.1  (roix  à  huit  pointes 
comme  la  portaient  les  chevaliers  de  M,: lie  ; 
car,  dans  les  (iriviléges  de  l'ordie  de  Saint- 
Lazare,  imprimésà  Uome,  comme  nous  avons 
dit,  en  l.jlili,  il  y  a  une  vignette  où  l'on  voit 
plusieurs  chevaliers  ayant  tous  la  barbe  lon- 
gue et  recevant  la  croix  de  l'ordre  avec  une 
vycc,  des  ma  ns  d'un  pape  (peul-élrc  a-l-oii 


7W 


LAU 


LAU 


750 


voulu  représenter  Léon  X,  qui  rélablil  cel 
or.dre),  el  ces  chevaliers  ont  une  robe  noire 
à  grandes  manches  avec  la  croix  à  huit 
pointes  sur  la  poilrine.  11  y  a  aussi  à  la  hi- 
liliothè  |ue  du  roi  une  estampe  de  l'an  1325, 
qui  représente  les  différcnls  ordres  qui  sui- 
vent la  règle  de  saint  Augustin,  où  Ton 
trouve  un  clievaliiT  de  Sainl-L;!zare  avec 
une  paicille  robe  ;  c'est  pour^iuoi  nous  avons 
fait  graver  cet  habillement  et  celui  que  por- 
taient les  mêmes  chevaliers  dans  le  xv  siè- 
cle (1),  tel  qu'il  est  représenté  au  bas  de 
l'imago  de  sain!  Antci  c  dont  nous  avons 
p.irlé. 

Voi/.  le  P.  Toussaint  de  Sainî-Luc,  Mé- 
moircs  en  forme  d'abrégé  liistorii/ue  de  l'Or- 
dre de  Noire-Dame  de  Monl-Carm-'l  et  de 
Sr.inl-Lnzare  de  Jérusalem.  Plusieurs  Fac- 
tams  et  '  Mémoires  concernant  cet  ordre. 
Bullar.  Rom.  loin.  U  et  111.  Maimbourg, 
nist.  f/cs-  Croisades.  Homard  Ginsliniani, 
[list.  Clironolog.  de  <j'i  Ordini  militari.  De 
lîelloj,  de  rOriijine  de  Chevalerie.  Philippe 
Bonanni,  Caialog.  Ord.  milil.  num.  63:  et 
Srliooni  beck.  Histoire  des  Ordres  militaires, 
toi»,  prrmier.  Voij.  Mont-Carmel  ci-dessous, 
c.)l.  lOVO. 

LAUUF.S  DE  LA    PALESTINE   (Anciknnes). 

L'on  peut  regarder  encore  comme  des  in- 
stituts particuliers  ces  anciennes  laures  qui 
otit  été  si  célèbres  en  Orient.  L'on  entend 
par  le  mol  de  laure  une  demeure  de  s  ;lilaires 
qui  logeaient  dans  des  cellules  éloignées  1rs 
unes  des  autres  par  une  dislance  rai-onna- 
bie,  cl  vivaient  en  société  sous  l'obéissance 
d'un  supérieur.  La  première  de  ces  laures 
fut  fondée  par  saint  Chariton.  Ccuk  qui  ont 
donné  la  vie  de  ce  saint  disent  qu'il  éiait  il'l- 
cone,  capitale  de  Lycaonie;  qu'ayant  em- 
brassé le  christianisme,  il  en  accomplit  si 
bien  les  devoirs,  que  sa  piété  le  distingua  du 
commun  des  fidèles  et  l'exposa  davantage 
aux  violences  des  païens,  qui  se  saisirent  de 
lui  pendant  la  persécution  excilée  sous  l'em- 
pire d'Aurélien;  qu'il  souffrit  de  cruels 
tourments  avec  beaucoup  de  constance;  et 
qu'ayant  été  jeté  en  prison,  il  en  sortit  après 
la  mort  d'Aurélien,  qui  fut  lue  l'an  273; 
qu'étant  en  liberté  il  alla  à  Jérus.-ilem,  où  il 
fonda  à  six  milles  de  celle  \ille  la  laure  de 
l'haran,dont  l'église  fut  dédiée  par  saiiil 
M.iiaire,  évêque  de  Jérusalem;  (ju'il  fonda 
ensuite  deux  autres  laures,  l'une  vers  Jéri- 
cho, cl  l'autre  dans  le  désert  de  Théma,  d.ins 
les(|uelles  il  eut  plusieurs  disciple^  ;  et  qu'en- 
fin il  mourut  vers  l'an  340. 

Mais,  quoique  le  cardinal  Baronius  (2) , 
dans  ses  Annales  ecclésijistiqiies,  dise  que 
les  acles  de  ce  saint  soient  fidèles,  néanmoins 
M.  de  Tillemont  (;5)  ne  les  croit  pas  d'une 
grande  autorité,  se  persuadant  que  Méla- 
phraste,  qui  est  le  premier  auteur  de  celle 
vie,  et  qui  déclare  que,  n'ayant  point  eu  do 
mémoires    pour  l'écrire,  il   ne    l'avait com- 

(I)   Foi/.,  à  la  lin  du  vol.,  n"»  184  et  185. 
("^I  Baronius,  ad  ann.  275,  §  U. 
(5)ne  Tillem.,  Hist.des  Emp.,  loin.  III,  p.  718,  cl 
His(.  Kccles.,  loin.  IV,  pag.  (i82. 


posée  que  sur  la  simple  tradition,  avnit  con- 
fondu, aussi  bien  que  les  autres  lîrecs,  deux 
Chaiilon  ,  l'un  confesseur  ou  martyr  du 
temps  des  persécuteurs,  l'autre  fondateur  de 
jiliisieurs  iiKiiiastèrcs. 

Une  des  principales  raisons  sur  lesquelles 
ce  savant  critique  s'appuie,  c'est  que,  s'il 
était  vrai  que  saint  Ghiriton  eût  fondé  ses 
laures  dans  la  Palestine  après  la  mort  d'Au- 
rélien ,  qui  arriva,  comme  nous  avons  dit, 
l'an  275,  cela  ne  pour. ail  s'accorder  avec  ce 
que  dit  saint  Jérôme,  (|ue  saint  Hilarion  a 
été  le  premier  instiluleur  des  moines  de  la 
Palestine,  où  l'on  n'en  avait  aucune  connais- 
sance avant  lui,  c'esl-â-dire  après  la  mort 
de  Dioclélien,  qui  arriva  l'an  313.  L'église  de 
la  première  lame  de  saint  Chariton,  dédiée 
par  saint  Macaire  de  Jérusalem,  qui  ne  fut 
évéquc  (ju'en  31!|.,  quarante  ans  après  la 
mort  il'Auiélien,  fournit  une  autre  difficulté 
à  cet  auteur,  ce  temps  lui  paraissant  troii 
considérable  pour  croire  que  saint  Chariton 
rûl  vécu  assez  pour  fonder  encore  deux  au- 
tres laures  et  passer  ensuite  quelque  temps 
dans  une  entière  solitude.  Ainsi  il  aimo 
mieux  distinguer  ileux  Chariton,  l'un  qui  a 
soufiVrl  la  persécution  du  temps  de  l'empe- 
reur Aurélien,  et  l'autre  fondateur  des  pre- 
mières laures  de  la  Palestine,  après  que 
saint  Hilarion  y  eul  iulroduil  la  vie  monas- 
tique. 

Quoi  qu'il  en  soil  de  ces  deux  Charilon, 
Cf'lui  qoi  fonda  les  premières  laures  de  la 
Palestine  fut  imité  dans  le  \'  s  ècle  par  saint 
Euthyme  le  Grand,  qui  bâtit  aussi  une  laure. 
Elle  fut  fort  renommée,  et  était  éloignée  de 
quatre  ou  cinq  lieues  de  la  ville  de  Jérusa- 
lem ;  mais  le  saint  abbé  n'y  voulait  point  re- 
cevoir de  jeunes  gens  qui  n'eussent  point 
encore  de  barbe,  c'est  pourquoi  saint  Sabas 
cl  saint  Ouiriace  s'étanl  présentés  pour  être 
du  nombre  de  ses  disciples,  il  envoya  saint 
Sabas  au  monastère  de  saint  Théoctisle,  et 
saint  Quiriace  àceluidcsainlGérasime,  parce 
qu'ils  n'avaient  point  encore  de  barbe  (4)  ; 
et,  à  son  imitation,  saint  Sabas  ayant  bâti  la 
célèbre  laure  qui  a  porté  son  nom,  il  n'y  re- 
cevait point  non  plus  de  jeunes  gens  et  les 
envoyait  d'abord  dans  d'autres  monastères. 
Saint  Sabas  (3)  naquit  au  bourg  de  Muta- 
lasijue  en  Cappadoce,  dans  le  diocèse  de  Cé- 
s  irée,  vers  l'an  l^kO.  Dès  l'âge  de  huit  ans  il 
se  retira  dans  le  monastère  de  Flaviane,  h 
une  petite  lieue  de  Mutalasque.  Il  y  demeura 
dix  ans,  alla  ensuite  à  Jérusalem  avec  la 
permission  de  son  abbé,  et  passa  l'hiver 
dans  le  monastère  de  Saiiit-Passarion,  alors 
gouverné  par  Eipidt'.  Ensuite  il  se  rendit 
auprès  de  sa  ut  Euthjme  pour  vivre  sous  sa 
conduite;  mais  le  saint  abbé,  le  jugeant  trop 
jeune  pour  demeurer  parmi  les  erjniL's  de  sa 
laure,  l'envoya  au  monastère  d'en  bas,  dont 
était  abbé  saint  Théoctisle. 

Le  relâcliement  s'élant  glissé  dans  ce  mo- 
nastère, saint  Sabas  le  quitta  et  s'établit  dans 

(i)  Cyrill.  Vit.  S.  Euih.  apud  Bolland.  20  janv., 
pag.  503. 

(.'i)  Cyrill.  VU.  S.  Snb.  apud  C.olel.  monum.  Ecà. 
Cnvc.  loni.  III. 


la  solituiio  du  désert  do  sninl  fiérasimc.  assez 
près  du  Jourdain.  Il  avait  pour  lors  Ironie - 
rinq  m  s;  cl,  ;i|  rèsen  avoir  demeure  quatre 
dans  ce  désiTl.  il  quilla  le  séjour  de  relie  so- 
HUide  |o  r..llir  iiabiler  une  eaveriie  dans 
les  ro(hes  d'une  monlagnc,  au  pied  de  la- 
quelle passait  le  torrent  de  Cédrun,  à  trois 
lieues  de    Itetlréeni   et  à  cinq  de 


.'érusaleni. 
H  y  vécu'  seul  pendant  cinq  ans  occu|ié 
tiniqucnicnl  du  soin  de  son  salut,  lorsqtiC 
rieu  lui  inspira  le  désir  de  travailler  au<si  à 
procurer  celui  des  autres.  Il  y  bàlil  une  fa- 
meuse laure,  cl  y  assembla  soixante  -dis  so- 
litaires qui  se  mirent  sms  sa  conduite;  le 
nombre  s'augment  i  jusqu'à  cent  cinquante. 
.Mais,  quelque  grandes  que  fussent  l'union, 
la  cliaritc  et  h  bonne  int.'lliiiencc  qu'il  en- 
tretenait parmi  eux,  il  ne  put  empêcher  que 
quelques-uns  n'y  apportassent  du  troubln,  et 
ils  furent  même  assez  hardis  pour  entre- 
prendre de  le  priver  de  sa  charge  d'abbc.  Ils 
aliért  ni  pour  cet  effet  trouver  Salluste,  pa- 
triarche de  Jérusalem,  cl  lui  représentèrent 
que  saint  Sabas  était  un  homme  d'un-  sim- 
piiité  grossière,  impru  !enl,  inca[iable  de 
gouverner  un  si  grand  nombre  do  solltair.s, 
cl  scrupuleux  jusqu'au  point  de  ne  voulor 
pas  être  prêtre  ni  perme'ire  que  l'on  con- 
férât cet  ordre  aux  rcligeux.  Saluste,  in- 
formé d  1  mérite  de  saint  Sabas,  feignit  d'c- 
cou  cr  leurs  plaintes,  mais  il  ordonna  prêtre 
le  saint,  et  dit  à  ces  faux  frères  :  \'oilà  votre 
supérieur  ;  ce  n'est  point  par  le  choix  dcj 
hommes,  m  is  par  l'éleciion  de  Dir u  même 
qu'il  est  établi  dans  cet  e  cbari^e.  Il  les  ra- 
mena tous  à  la  laure,  où  il  c-nsaera  l'église 
que  saint  Sabas  y  avait  construite. 

Ce  saint  fonda  aussi  un  monastère  sur  la 
colline  de  ("aslil,  ,i  une  petite  lieue  de  sa 
laure.  Il  b;itit  encore  un  cloître  à  une  demi- 
lieue  de  celle  laure,  où  il  fa. sait  instruire 
les  novices  ;  et  si  c'élaienldes  jeunes  gens, 
il  les  envoyait  à  une  lieue  et  demie  <:c  là, 
dans  le  monastère  de  l'abbé  saint  Thcodose, 
son  ami,  pour  les  former  cl  les  mettre  un 
jour  en  état  d'en'.rcr  dans  sa  laure  ,  (|ui 
était  le  séjour  des  parfiils.  Ayant  été  fait 
exarque  ou  supérieur  général  de  tous  les  so- 
litaires (jui  étaient  dans  les  déserts,  les  er- 
mitages et  les  laures,  il  veillait  toute  l'année 
par  sa  présence  avec  beaucoup  d'.ipplicaliou 
sur  ces  solitaires  qui  avaient  «  lé  commis  à 
SCS  soins;  mais  depuis  l'épiphanie  jusqu'au 
dimanche  des  Rameaux,  il  se  relirait  dans  le 
fond  do  désert,  accompagné  d'un  seul  disci- 
ple, et  s'y  préparait  à  solenniscr  la  fêle  de 
i'âqucs. 

Les  religieux  rebelles  do  sa  laure  lui  ten- 
dirent tant  de  pièges,  que,  pour  ce  ier  <i  leur 
malice,  il  ré^dul  de  les  (]uilli  r  et  se  r(  tir.i 
dans  differenles  solitudes  ;  mais  le  patrian  lie 
de  Jérusalem  ayant  obligé  les  religieux  sé- 
dilieux  de  la  laure  de  l'y  recevoir,  ils  aimè- 
rent mieux  se  retirer  eux-mêmes.  Ils  étaient 
au  noml>re  de  <|uarantc  i|ui  all.'renl  à  la 
liiure  de  Suça  dans  l'esperaucc  qu'on  les  y 
r>cevrait;  mais  Aiiuilin,  qii  en  était  supé- 

(I)  liiilieiii,  Iliii.  Mon.  d'Onciil,  p.  Q'j8. 
(i)  Ibid.,  pag.  H'). 


DIC.TIUNNAIUE  DES  OUimES  RELIGIEUX.  752 

rieur,  ne  voulut  pis  seulement  qu'ils  s'y  re- 
posassent en  (jualilé  il'holrs.  Quehiues  cel- 
lules abamlonnees  qui  étaient  près  du  tor- 
renl  de  1  béioé  leur  servirent  île  retraite.  Ils 
en  firent  encore  d'autres  au  même  lieu,  et 
commencèrent  ainsi  ce  qu'un  appela  depuis 
la  nouvelle  laure. 

Le  zèle  que  le  saint  nbbé  avait  pour  ces 
moines  révoltés  le  tenait  dans  une  sainte  in- 
quiétude. Sachant  qu'ils  étaient  dans  la  né- 
cessité, il  leur  lit  tenir  une  somme  d'argent, 
olitinl  pour  eux  la  priipriétc  des  cellules 
qu'ils  occupaient,  entreprit  un  voyage  ex- 
près pour  leur  porter  lui-même  divei  ses  cho- 
ses dont  ils  avaient  besoin,  cl  leur  bàlit  une 
é;;lise.  P.ir  ce  moyen  il  sut  les  vaincre  et  ils 
se  soumirent  à  son  obéissance.  Il  leur  donna 
pour  ahhè  Jean,  le  premier  de  tous  ses  dis- 
ciples. Il  bàtil  encore  d'aulrcs  monastères,  où 
il  mil  des  sujiérieurs  d'une  grande  sainteté; 
et,  comme  il  n'avait  pas  moins  de  zèle  pour 
la  pureté  de  la  foi  que  pour  l'exacte  obser- 
vance de  la  discipline  régulière,  il  veillait 
sans  cesse  pour  empêcher  que  le  venin  diî 
l'hérésie  ne  se  glissât  dans  tous  ses  monas- 
tères. Il  convertit  même  quelques  solitair('S 
nestoriens  et  travailla  depuis  avce  le  ménie 
succès  à  faire  revenir  ceux  qui  suivaient  l.s 
Cl  reurs  d'Kulycliès  et  de  Dioscore.  Enfin  i  e 
saint  iibbé,  étant  âvéde  plus  de  quatro-vin.;t- 
douze  ans,  mourut  dans  sa  princip.ile  laure 
le  5  décembre  de  l'an  531. 

L'on  prétend  que  la  liturgie  qui  est  au- 
jourd'hui en  usage  parmi  les  Grecs  esl  celle 
que  l'on  observait  dans  les  monastères  d  i 
saint  Sabas,  qui  l'avait  reçue  de  ses  maitr.  5 
saint  Luthynie  et  saint  Thooctisle  (1).  A  sou 
exemple,  il  y  eut  plusieurs  de  ses  disciples 
qui  fondèrent  aus-i  des  laures,  dont  les  plus 
remarquables  furent  Jacques  f2) ,  qui  fomia 
auprès  du  Jourdain  la  laure  des  Pyrges,  ou 
des  Tours;  le  H.  l'irmin,  qui  bàlit  la  laure 
de  Malische,  ronnu-  depuis  p  ir  son  nom; 
Sé»érien  qui  eu  fonda  au^si  une  dans  un  lieu 
nommé  .M, •.riche,  <  t  Julien  qui  bâtit  près  du 
Jourdain  la  laure  d'iilcérabe. 

Nous  avons  ci-devant  parlé  du  monastè.o 
de  saint  (iérasime,  où  saint  Quiriaie  fut  en- 
voyé par  saint  liiuthjmo.  11  était  au  milii  u 
d'une  laure  que  saint  liérasime  a\ail  bàlie  à 
un  (|uarl  de  lieue  du  Jourdain,  à  peu  près 
dans  le  même  temps  (jue  saint  Satias  vint  au 
monde.  Elle  était  iomj)osée  île  >,o.xante-dix 
cellules.  Les  no>ices  et  les  jeunes  gens  d.- 
meuraient  dans  le  monastère,  et  y  prati- 
quaient les  exercices  ordinaires  des  comur;- 
iiaulés,  cl  1.1  laure  n'était  que  pour  ceux 
i]ui.  étant  .ivanecs  cl  bien  alVermis  dans  l.i 
vertu,  pouvaient  supporter  une  plus  ex.acie 
solitude  et  unr  plus  austère  pénitence  i-^j. 
lis  se  ten.iienl  seuls  dans  leurs  celiu'es  cinq 
joui  s  de  la  semaine,  u'.iyant  pour  toute  iioiir- 
rilurc  ((ue  du  p.iin,  de  l'e  u  et  quelquis 
dattes.  Le  samedi  cl  le  dimanche,  ils  >eiKiient 
au  monaslère,  où,  après  .avoir  pariicipè  aux 
sacrés  mystères  ,  ils  mangeaient  (juclquc 
cliose  de  cuit  et  buvaient  un  peu  de  vm. 
(5;  Vit-  S.  Eu:li.  a|iuJ  liollaiid.  20  jan.,  p.  51G. 


-53 


LAZ 


LAZ 


754 


Après  les  v(5pros  du  dimanche,  ils  reloiir- 
iiaient  dans  leurs  cellules,  ernporlant  avec 
eus  du  pain,  de  l'eau  cl  des  dalles,  pour  se 
imurrir  pendant  les  cinq  jours  qu'ils  y  devaient 
rester  seuls.  Ils  s'y  occupaient  au  travail  et 
à  la  prière.  Ils  n'y  po.ivaient  pas  allumer 
•le  feu,  non  pas  même  de  lampe  pour  faire 
la  lecture;  et  c'éiaii  une  loi  parmi  eux  que 
lorsqu'ils  sortaient  de  leurs  cellules,  ils  en 
devaient  laisser  la  porte  ouverte  pour  mar- 
quer par  là  qu'ils  n'avaient  rien  en  propre 
l'i  que  les  autres  pouvaient  disposer  de  leurs 
peti's  meubles  {i).  Saint  Gérasiine  mourut 
i  an  475.  H  y  eut  encore  d'autres  laures  aux 
environs  du  Jourdain  ,  et  celle  qui  fut  bâtie 
par  un  saint  solitaire  nommé  Antoine  fut 
nommée  la  laurc  des  Elioles.  Nous  donnons 
ici  l'iiabillotnent  d'un  moine  de  Saint-Charilon 
et  celui  d'un  moine  de  Saint-Sabas  tels  que 
le  P.  ISonaiiiii,  Odoart  Fi  ilclli  et  Schoone- 
beck  les  ont  fait  graver  (2).  11  y  a  bien  de 
l'apparence  que  du  temps  des  fondateurs  de 
CCS  laures,  ils  n'étaient  pas  ainsi  habillés  ; 
mais,  comme  les  laures  de  ces  deux  saints 
ont  subsisté  pendant  plusieurs  siècles,  ceux 
qui  ont  habité  ces  laures  ont  pu  prendre 
dans  la  suite  de  pareils  habillements.  Quant 
à  la  couleur,  il  paraît  que  la  robe  des  moines 
de  Sainl-Charilon  était  blanche,  la  ihape  et 
le  capuce  noirs,  et  que  l'habillement  des 
moims  de  Saint-Sabas  était  entièrement  noir. 
On  voit  encore  aujourd'hui  des  vestiges  de 
la  laure  de  ce  saint  dans  un  monastère  de 
moines  grecs,  qui  a  toujours  retenu  le  nom 
de  laure  de  Sainl-Sabas. 

LAURÉTANS   PAKTIGIPANTS.    Vuij.    1!e- 

IHLÉEM. 

LAZARISTES, 

Des  Lazaristes  ou  de  la  congréijation  des  Pré- 
Ires  de  Id  niissiun  ,  avec  la  via  de  saint 
Vincent  de  Paul,  leur  inslitutcnr. 
Les  désoiilreà  causés  par  l'hérésie  cl  la  li- 
cen.e  des  armes  durant  les  guerres  civiles 
dont  la  France  fut  al'lligée  sur  la  (in  du  xvi" 
siècle  et  au  commi'nceinent  du  xvii%  étaient 
trop  grands  pour  que  les  Prêtres  de  l'Ora- 
toire pussent  seuls  y  remédier,  soit  en  fai- 
sant relîeurir  dans  Télal  ecclésiastique  les 
verlus  cléricales  et  sacerdotales,  soit  en  ai- 
dant les  pasiears  à  ramener  au  bercail  les 
brebis  que  l'hérésie  ou  le  libertinage  eu 
avait  fait  sortir.  C'est  pourquoi  Dieu,  qui, 
L'onnaissanl  les  besoins  de  son  Eglise,  nu 
manque  jamais  de  lui  donner  les  secours 
qui  lui  sont  uécessaii  es,  suscita  encoie  dans 
ce  royaume  d'autres  saints  personnages,  qui, 
animés  de  son  esprit  et  fortifiés  par  sa  grâce, 
luiidèreul,  à  l'exemple  du  cardinal  de  Bérulle, 
des  congrcgalions  dont  le  princi[)al  but  est 
de  travailler  aux  missions  et  d'inspirer  aux 
jeunes  clercs  l'esprit  de  piété  et  de  dévotion 
qui  leur  est  nécessaire  pour  s'acquitter  di- 
gurmenl  des  fonctions  de  leur  miiiislère.  Tel- 
les sont  les  congrégations  des  Prêtres  de  la 
Mission,  des  Eudistes  du  Saint-Sacrement, 
des   AJissionuaires  de  Lyon,  et  quelques  au- 

(!)  Bulicau,  lliil.  iloimt.  (l'Orient,  png,  706. 


très  dont  il  est  [inié  au\  articles  de  ces  dil- 
férents  no:iis. 

La  c.Higrégatiou  des  Prêtres  de  la  Mission 
a  eu  pour  fondateur  M.  Vincent  de  Paul.  Il 
naquit  au  village  de  Poui  près  de  Dax,  petite 
ville  èpiscopale  située  aux  confins  des  Lan- 
des de  Bordeaux,  vers  les  monts  Pyrénées.  Ses 
parents  vivaient  de  leur  travail.  Son  père  se 
nommait  Jean  de  Paul,  et  sa  mère  B  rtrande 
de  Aloras.  Us  avaient  une  maison  et  quel- 
ques petits  héritages,  qu'ils  lais;iient  valoir 
par  leurs  mains,  étant  aidés  par  leurs  enlanls, 
qui  furent  six,  savoir:  quatregarçonset  deux 
filles.  Vincent,  qui  était  le  troisième,  fui  dès. 
son  enfance  employé  comme  les  autres  à 
travailler,  et  particulièrement  à  mener  paî- 
tre et  garder  les  lioupeaux  de  son  père,  qui, 
jugeant  par  la  vivacité  dcspril  que  Vincent 
faisait  paraître  dans  toutes  ses  paroles  et  ses 
actions,  qu'il  pourrait  faire  quelque  chose 
de  meilleur  que  de  mener  paître  des  bes- 
tiaux, prit  la  résolution  de  le  f.iire  étudier, 
dans  l'espérance  d'en  tirer  un  jour  quelque 
avantiigepoursa  famille. Pourcet  elTet  il  lemil 
en  pension,  vers  l'an  1588,  chez  les  Pères  Cor- 
deliersdcDax,  moyennant  suixanle  livres  p,.r 
an.  11  y  fit  un  tel  progrès  dans  la  langue  latine, 
que,  quaire  ans  après,  le  sieur  Co.nmel,  avo- 
cat de  Dax  et  juge  de  Poui,  l'ayant  rctré  du 
couvent  des  Cordeliers,  h;  reçut  en  sa  mai- 
son pour  être  précepteur  de  ses  enfants,  afin 
que,  prenant  soin  de  leur  instruction  et  du 
leur  (onduite,il  pût  continuer  ses  études 
sans  être  à  charge  à  son  père  :  ce  ((ui  lui 
donna  le  moyen  de  se  perfectionner  dans  la 
connaissance  des  belles-leilres,  auxquelles 
il  employa  neuf  ans,  au  bout  desquels  le- 
sieur  Commet,  ([ui  était  une  personne  de 
piété,  satisfait  du  service  qu'il  lui  avait  rendu^ 
en  la  personne  de  ses  enfants  et  jugeant  qu'il 
serait  un  jour  utile  à  l'Eglise,  lui  fit  prendre 
la  tonsure  et  les  quatre  mineurs  le  19  se[)- 
lembre  159G,  étant  alors  âgé  de  vingt  ans. 

Se   voyant  ainsi   engagé  au   minitère  dq. 
FEglise,  et  ayant  pris  Dieu  pour  son  partage, 
il  quitta  son    pays  du  consentement   de   son 
père,   qui  lui   donna   quelque    petit  secours, 
pour  aller  étudier  en  théologie  à  Toulouse, 
où  il    prit  les  ordres   de   diacre   <  l  de  sous- 
diacre  en  1598,  et  la  prêtrise  en  IGOO.  Peu  da 
temps  après  on  lui  donna  la  cure  de  Tilh  au 
diocèse  de  Dax  ;  mais,  lui  ayant  été  contestée 
par  un  compélileur,  il  ne  voulut  point  avoir 
de  procès  cl  lui  en  laissa  la  p'.ssessiou,  Dieu 
le  permetlant  ainsi  afin  qu'il   ne  fiit   point 
obligé   d'abandonner  ses  éludes.  Il  employa' 
sept  ans   à  celle  de   la   théologie,  après  les- 
quels ayant   éié  reçu   bachelier  dans   l'uni- 
versité de  Toulouse,  il  lui  fut  permis  d'ensei- 
gner publiquement  dans  la  môuic  université, 
.îusque-là  tout  avail  réusii  selon  les  souhaits- 
de  M.  V'iiicenl;  mais   une   personne    l'ayant 
institué  son   héritier  l'an   ItiOiJ,  et  ayant  é!é. 
obligé  d'aller  a  .Marseille  pour  se  faire  payer 
une   dette  de  cinq  cents  écus  qui  élait  de  la 
succession,  il  tomba  dans  une  disgrâce  daus 
laiiueile  il  ne  put  pas  douter  de  la  protection. 

(2)  Yoij.,  à  la  On  Ju  vol.,  rr"  Igfi  et  197, 


:.=;5  nicrioNNvim:  i>r.s  ouDiiLS  iiEi.ic.U-ix.  7r>c 

de  Dieu  sur  lui  pnr  la  manière  dont  il  s'en     ville  le  jour  de  la  conversion  de  saint  Paal 
nlira.  Car,  comme  aprè'^  avoir   terminé  son      de  l'an  1G17,  pour  exhorter   li  s  habitants  à 
niTaire  à  Marseille  il  se  disposait  à  roiourncr      faire  une  confession  générale.  Il  le  fil,  cl  leur 
p.ir  terre  à  Toulouse,  un    gcniilhomine   du     en  représenta   l'iniportance   et  l'uliliic  avec; 
Lan"ueloc   l'ayant  engagé   de  s'cnibaniuer     des  paroles  si  efficaces,  (]ue  ces  l)i)nncs  gens 
avec"  lui  jusqu'à  Narbonne  ,  ils    remontré-      vinrent  tous  à  lui  pour  leur  confession  génè- 
rent trois  brigantins  turcs  qui  les  prirent  et     raie;  et  la  presse  fut  si  grande,  qu'il  fut  obligé 
les   menèrent  en    Barbarii- .  où    Vincent   de     d'appeler  à  son  secours  les  Jésuites  d'Amiens, 
l'aul   fut  vendu  à    un   pécheur,  qui   n'ayant      qui  conjointement  avec  lui  firent  un  si  graïul 
pu  se  servir  de  lui  à  cause  qu'il  ne   pouv./it      profit  dans  cette  première  mission,  que  ce  zélé 
souffrir  la  mer,  le   revendit  à   un  médecin;      l'oiidatcur  l'a  toujours  regardée  comme  la  se- 
rt, ccliii-ci  étant  mort,  il  de»  int  esclave  d'un      mencc  de  toutes  les  autres  qu'il  a  faites   de- 
renégat  de  Niceeiirrnvencc,qui, bien  loin  d'i-     puis,  et  par  conséquent   comme  l'origine  de 
miter  ses  semblables,  qui  ordinairement  per-     sa  congrégation;  et  tous  les  ans,  le  même  jour 
^écutenl  le  plus  Jésus-Christ  dans  ses  meni-     23  janvier,  il  en  ren  lait  grâces  à  Dieu  et  re- 
tires qui  ont  le  malheur  de  tomber  dans  l'es-     commandait  à  ses  disciples  de  faire  la  nu^'iiie 
clavage,  fut  au  conlraire  l'instrument   dont     chose  :  c'est  pourquoi  les  prêtres  de  cet  ins- 
Dieu  se    servit  pour  rendre  la  liberté  à  soa      tilut  célèbrent   avec  une   dévotio:i    particu- 
scrvitcur  en  lui  rend  int  à  lui-même  celle  de     lière  la  fête  de   la  Conversion  de  saint  l'aul, 
l'âme;  car,  se  repentait  de   son  apostasie,  il     en  mémoire  de  ce  que  leur    fondateur  com- 
se  sauva   avec   lui    d'une  manière   d'autant     mença  heureusement  en  ce  jour  sa  première 
plus  admirable  et  miraculeuse,  qu'ils  passé-     mission  qui  a  été  suivie  de  tant  d'aulres,  (jui 
rent  toule  la  mrr  Méditerranée  dans    un   es-     ont  causé  la  conversion  d'un  très-grand  nom- 
quif  que  la  moindre  vague  était  capable  d'à-     bre  de  personnes. 

bimer;mais    Dieu  ,  qui  les   conduisait  ,  leur         Madame  la  comlesse  de  Joigny,  ayant  rc- 
.lyant  fait   éviter  ies  dangers  auxquels   les     connu  par  ce  premier  essai  qui  réussit  avec 
plus  gros  vaisseaus.  sont  exposés,  ils  arrivé-      t. ml  de  succès,  la  nécessité  des  missions,  par- 
rent  à  Aiguesmorles  le  28  juin  11)07,  d'où  ils      ticulièremcnt  pour  le  peuple  de  la  canip:igue, 
furent  à  Avignon,  où  le  vice-légal  reçut  l'ab-      conçut  dès  lors  le  dessein  de  donner  un  fonds 
juration  du  renégat.  M.  de  Paul,  élaiit  allé  à     de  seize  mille  livres  à  quelque  eoîiununauté 
l'aris  l'année  suivante,  y  lia  amitié  avec  M.      qui   voudrait   se  charger  d'en  faire  de   cinq 
de  Bérulle,  qui,  songeant  pour  lors  à  établir     ans  en  cinq  ans  dans   toutes  ses  terres.  Kilo 
sa  congre-galion,  le  s(dlicila  de  se  cil  rger  de     eu  fit  parler  aux  Jésuites   et  aux  Prêtres  do 
la   cure  de  Cliclii,  dont  M.  liourgoiu  vouljiil     l'Oratoire,  qui,  ne  voulant  pas  s'en  charger, 
se  def  ;ire  pour  cnirer  dans  la  congrégation     lui  firent  prendre  la  résolution  d'insérer  dans 
des  Prêtres  de    l'Oraloire,  et  de  prendre  le     sou  testament  un  article  par  lequel  après  sa 
soin  des  enfants  du  coin  c  de  Joigiiy,  Kmma-     mort  elle  donnait  ces  seize  mille  livres  pour 
nuel  de  Gondy,  général  des  galères  de  France,      fonder  cette  mission,  au  lieu  et  en  la  manière 
et  cet  1  en  qualité  d'  précepteur,  dont  il  s'ac-     que  M.  de  Paul  le  jugerait  à  propos. 
quit:a  si  bien,  que  Françoise  de  Sitly,  épouse         <Juo:que  ce  serviteur  île   Dieu  fût  dans  la 
de  ce  comte  et  mère  dé  ces  enfants,  dame      maison  de  M.  de  Condy  comme  dans  un   sé- 
d'uiic  piété  singulière,  édifiée  de  sa  modes-     miuaire,  tint  par  rapport  à  la  liberté  qu'il  y 
lie,  de  sa  discret. ou   et  de  sa  cliariié,  jugea     avait  de   pratiquer  les  exercices  de.   la  plus 
à    propos   de  lui   conlicr  la  conduite  de  son      grande  piété,  que  par  rapport  à  la   régula- 
âme,  rite  avec  l"(iuelle  on  y  vivait  p  ;r  les  joins  cl 
Le  séjour  qu'il  fil  dans  la  maison  d'i  comte      l'exaelitude   de    madame   de    dondy,   iiéan- 
de  Joigiiy  l'ut  cuise  de   l'élablisseinenl  de  la      moins  le  grand  désir  qu'il  avait  de  se  donner 
coiigrcg.ilioii  de  la  Mission.  Car,  environ  l'an      plus  p  irfaitement  au    service  de    Dieu    et  à 
ItilG,  él.inl  allé  avec  la  comtesse  dans  une  do      l'instiuctiou  du  prochain  lui  ayant  l'ait  prer.. 
ses  terres,  qu'on  nommel'olleville.audiocèse      dre  l,i    résolution   d'eu   sortir,  il  prit  le   pré- 
d'Amiens,  où  il  s'occupait  pemlaiit  son  séjour      texte  d'un  peiit  voyage  qu'il  avait  à  faire,  cl 
odes  oMiviesde  miséricorde, on  levinl  un  jour      sorlit  de  Paris  au  mois  de  juillet  1G17,  sans 
pr.er  d'aller  au  village  de  (iaiiue.  éloigné  de      avoir  détermine  aucan  lieu  où  il  dût  s'arrê- 
Follcvi  le  de  deux  l  mes,  pour   confesser  u  i      1er.  M. lis  M.  de  HéruUe,  qui  le  voyait  résolu 
paysan    qui    élut   dangereusement    malad.!.      de  sortir,  lui  ayar.l  |iropose  d'aller  Iravaillcr 
Cet   homme  avail    toujours  vécu   en  ie|)iit,i-      en  que  que   lieu    de  la    Dresse  où   il   y  avait 
lion  d'un  homme  de   bien  ;  néanmoins  M.  de      disette  d'ouvriers   évangé  iques,    et  p.irlicu- 
Panl,  l'étanl  aile   voir,  et  lui  avant   fail  faire      lièrement  dans  la   parois>e  de  Châlillou-les - 
une   confession    génér.ile,   trouva   si  cous-      Demlus,  il  suivit  cet  avis  et  alla  en  ce  lieu  , 
cience  chargée  de  plusieurs  péchés  mortels      où  étant  arrivé,  une  des   premières  chose» 
ipi'il    avait  toujours   retenus   par   home,   et      qu'il  lit  l'ut  de  porter  cinq  ou  six  ecclésiasti- 
duiil  il  ne  s'élait  jamais  accusé  en  confession,      ques  qu'il  y  trouva   à  se  mctlrc   ensemble  et 
eomiiic  il  le  déclara  lui-mêiiie  en  présence  de      l'onner   une  espèce  de  communauté  pour  so 
jilusieurs  personnes,  et  mêoie  de  la  comiesse      donner  p'us  parfaitement  à  Dieu    el  au  ser- 
de  Joigny,  qui,  cpouvau'éc  de  lanl  de  confes-      vice  de  sou  l.glise  :  ce  qu'ils  firent  à  sa  per- 
si  >ns  bacriléges  et  des  péchés  énormes  de  sa      suasion,  s'eslimant  trop  heureux   d'vMre  as- 
vie  passée,  et  appreheiid.iut  qu'il  n'eu   lut  de      soeiés  à   un  si   saint   prélro   pour  nu  sujet 
même  de  la  plu   art  de  ses  vassaux,  exhorta      aussi    louable   el  aussi    utile.    Mais   la  joie 
M.  lie  Paul  a  pieclier  dans  l'Ctjlise  de  Fo  le-      qu'ils  avaier.l  de  le  posséder  ne  dura  que  for! 


7d7 


LAZ 


LAZ 


7!5g 


peu  lie  temps  ;  car  madame  du  Gondy,  qui, 
comme  nous  l'avons  déjà  dit,  avait  mis  la 
condui'e  de  sa  conscience  entre  les  mains  de 
M.  de  Paul,  soulTrant  avec  peine  son  éloi- 
gncnienl,  fil  loul  ce  qu'elle  put  pour  !e  faire 
revenir,  employant  l'autorité  du  cardinal  de 
llelz,  pour  lors  cvéque  de  Paris,  qui,  étant 
Bon  beuu-IVère,    voulut  bien  écrire  pour  ce 
sujet.  M.   de  Béiulle  s'intéressa  aussi  pour 
cela  ;  on  lui  envoya  même  exprès  un  de  ses 
plus  intimes  amis,  qui,  apjiuyant  les  lettres 
par  lesquelles  on  le   priait  de  donner  celte 
consolation  à  madame  de  Gondy,  le  déter- 
mina à  revenir  à  Paris,  où  il  arriva  au  mois 
de  décembre  de  la   même  année   1617,  et  la 
veille  de  Noël   il  rrntra  dans  la  maison  de 
Gondy.  Il  y  fut    reçu  comme  un  ange   venu 
du    ciel ,   particulièrement    de    mailame    de 
Gondy,  qui,  daiis  la  crainte  (ju'il  ne  la  quit- 
tât une  seconde  fois,  lui  fit  promellre  qu'il 
l'assisteriiit  jusqu'à  la  mort,  comme  il  le  fit, 
Dieu  l'ayant  voulu  ainsi  pour  donner  com- 
mencement à  la  congrégation  de  la  mission, 
par  le  moyen  de  celle  sainte  dame,  qui,  per- 
sistant toujours   dans  la    résolution   qu'elle 
avait  prise  de  faire  une  fondation  puur  l'en- 
Irelieu  et  la  subsistance  de  quehiues   bons 
prêtres  ou   rcligieus  qui  allassenl  de  temps 
en  temps  faire  des  missions  d.ins  sfs  terres, 
et  ayant  cherché  par  le  moyen  de  M.  de  Paul 
tous  les  moyens  pour  exécuter  son  dessein 
sans  avoir  pu  réussir,  par  le  refus  qu'en  fi- 
rent plusieurs   supérieurs  de  communautés 
auxquels  on  en  parla,  fit  enfin  réfiision  que 
plusieurs  docteurs  et  autres  vertueux  ecclé- 
siastiques qui  se  joignaient  ordinairement  à 
M.  de  Paul  pour  travailler  aux  missions  qu'il 
n'avait   pas  discontinué  de  faire  depuis  son 
retour,  n'auraient  peul-étre  point  de  difficulté 
de  faire  une   congrégation  particulière  dont 
l'obligation  principale  serait  de  fiire  les  mis- 
sions, si  elle  leur  fondait  une  m  lison  à   Pa- 
ris dans  laquelle  ils  pussent  se  retirer  et  vi- 
vre en  comnmuauté  :  ce  qui  serait  justement 
l'exécution  de   son    piius  dessein,    lîlle    en 
pai  la  au  comte  de  Joigny,  son  mari,  qui  non- 
seulement  approuva  son  dessein,  mais  aussi 
voulut  s'en  rendre  fondateur  conjointement 
avec  elle.  Ils  en  communiquèrent  tous  deux 
avec  Jean-François  de   Gondy,   leur  frère, 
premier  archevèiiue  de  Paris,  q  li  non-seule- 
ment approuva  leur  zèle,  mais,  consiJéranl 
([ue    son    diocèse    e:i   pourrait    recevoir    de 
grands  biens,  voulut  aussi  coutriLiuer  à  celte 
londation  en  destinant  le  collège  des  Bons- 
lùifanls,  qui  était  à  sa  disposition,  pour  le 
loyement  de   ces  prêtres.  Ils   en  parlèrent  à 
M.  de  Paul,   qui   consentit  à  la   proposition 
qu'on   lui   lit,  premièrement,  de  recevoir  ce 
collège  avec  la  direction   des  prêtres  qui   s'y 
rclireraicnl  avec   lui,  el  des  missions  aus- 
(|ueles    ils    s'appliqueraient;    secondenjent, 
(l'accepter  la  foudalion  au   nom  de  ces   prê- 
tres; el  en  troisième  lieu,  de  choisir  lui-même 
ceux    qu'il    trouverait   propres    et    disposés 
pour  ce  pieux  dessein.  La  chose  aiusi  réso- 
lue fut  exécutée  le  1"'  mars  lG2'i,  cl  l'arche- 
vêqu(!  de  Paris   fit  expédier,  le  17  avril  de 
l'année  luivanic  1(>2j,  les  provisions  de  prin- 


cipal de  ce  collège  en  faveur  de  M.  de  Paul, 
auquel  M.    et  madame  de  Gondy  donnèrent 
quarante  mille  livres  en  argwit  comptant  pou  r 
commencer  la   fondation,    avec   pouvoir   de 
choisir   tel  nombre  d'ecclésiastiques  (]ue  le 
revenu  de  la  fondation  pourrait  entretenir,  et 
qui  seraient  sous  sa  direction  sa  vie  durant  : 
à  condition  néanmoins  que  nonobstant  cette 
direction  il  resterait  dans  leur  m;iison   pour 
leur  continuer  el  à  leur  famille  l'assistance 
spirituelle  qu'il   leur  avait  rendue  jusqu'a- 
lors.  Après    cette  fondation,  comme  sM  ne 
restait  plus    riea  à   madame  de   Gondy  que 
d'aller  au  ciel  recevoir  la  couronne  qui  lui 
était  préparée  pour  tous  les  services  qu'elle 
avait  tâché  de  rendre  à  Dieu,  étant  tout  at- 
ténuée par  les  maladies,  les  peines  et  les  fa- 
ligues  que  son  zèle  et  sa  ch.irité  lui  avaient 
fait  entreprendre,  elle  mourut  la  veille  de 
Sainl-Jean-Baptiste  de  1 1  môme  année.  Après 
que  son  corps  eul  élé  porté  aux  Garraélites 
lie  la  rue  Chapon,  où  elle  avait  choisi  sa  sé- 
piiture,  M.  de  Paul  sortit  de  Paris  pour  al- 
ler porter  cette  triste  nouvelle  à  son  mari, 
qui  élait  en  Provence,   et  afin  de  lui  deman- 
der son   agrément  pour  qu'il  se  retirât  au 
collège  des   Bons-Enfants  :  ce  qui  lui  ayant 
été  accordé,  il  revint  à  Paris,  où  il   mit  la 
dernière    main  à   l'élablissement  de  la  con- 
grégation de  la  Mission,  qui  fut  approuvée 
par  l'archevêque   de  Paris  le  2i  avril  1G2G. 
M.  Portail,  qui  avait  déjà  demeuré  quinze 
ans  avec   lui,  ne  le  voulut  point  quitter  en 
une  si  belle  occasion.  Deux  bons  prêtres  de 
Picardie,  nommés  l'un  du  Coudrey  et  l'autre 
de  la  Salle,  s'offrirent  ensuilL'  à  ce  saint  Ion- 
dateur,  qui  les  associa  tous  trois  à  lui,  en 
exécution  de  la  fondation  par  un  acie  passé 
par-devant   notaires   le    4   septemlire  de   la 
même  année.  Quatre  autres  prêtiesles  sui- 
virent peu  de  leinps  après,  et  leur   omiiiu- 
naulé  s'étant    augmentée  considérabK'minl 
dans  la  suite,  le  pape  Urbain  VII!,  par  une 
bulle  du  mois  de  juivier  de  l'an  îij  12,  éri^^ea 
cette  compa-^nie  en   congrégation  sous  le  ti- 
tre de  la  Mission,  et  permit  ;iu  fondateur  do 
dresser  des  règlements  pour  le  bon  onire  dj 
colle  même  congrégation.  Pour  autoiiser  da- 
vantage   cet  institut,    le    roi   Louis  Xlll  fit 
expédier  des    lettres    patentes    au   mois    do 
mai  164'2,  et  elles  furent  vérifiées  au   parle- 
inent  de  Paris  au  mois  de  septembre  de  la 
même  année. 

Dans  le  temps  que  l'on  poursuivait  la  bulle 
dont  nous  venons  de  parler,  les  prêtres  du 
cette  cougréga'.ion  entrèrent  dans  le  prieuré 
de  Saint-Lazare  à  Paris  ,  (jui  appai  tenait 
pour  lors  aux  Chanoines  lléguliers  de  la 
c  iiigrégaliou  de  Saiut-Viclor,  qui  voulurent 
bien  consentir  à  la  cession  qui  en  fut  faite 
par  leur  prieur  aux  conditions  portées  par 
k- concordat  lait  entre  eux  le  7  janvier  1G32. 
Cn  suile  lie  ce  concordat  et  de  la  démission 
du  prieur,  l'archcvoqi;e  de  P,;;is  (il  l'isnion 
(le  ce  [jrieuré  comme  d'un  bénéfice  cjui  était 
à  sa  collatioii,  à  la  congrégation  de  la  Mis- 
sion, iiiiisi  (ju'il  i)arait  par  ses  let  res  du  dcr» 
l'.ier  décembre  IG.'l.'j,  cl  elle  fut  confirmée  par 
1;:  pape  Urbain  \'lll  par  une  bulle  du  mois- 


759                                        ACTIONNAIRE  DES  ORDRES  RELIGIEUX.  loo 

de  mars  (Je  l'an  lG3a,  Ccllf»  maison,  par  sa  main  à  se»  rùijli's  d  consl  liilion^,  piF  los- 
vi-lc  éleiulup,  1,1  Rrnn  leur  tlp  ".os  hâ'imonls,  (|iiplio<  il  obllsjoa  ses  (liscijilcs  à  cmi  i  uor 
le  iiombri-  ilos  piôlios  cl  il  s  soiniiiai  iscs  qm  pour  le  saliil  des  ânios  c  ■  qu'il  leur  avait  cii- 
y  ilomeureiil  cl  la  rrsiiloiic.'  que  le  (;;énéral  y  soigné  par  son  evomplc  :  c'e?!  poiiniuoi  il  (it 
l'ait,  csl  devenue  ciief  de  telle  ron^'ré£;.ilion,  assembler  en  KioS  la  communauté  de  S.ii  il- 
qui,  se  remlaiit  de  plu>  en  plus  néee^s.iire  à  Lazare,  cl,  aprrs  avoir  fait  à  tous  ceux  qui 
ri'-j;lise.  a  l'ait  dans  la  suite  de  fort  grands  la  compasaienl  un  discours  furt  all'i'eliicnx  et 
proférés  tant  dans  celte  iièoie  ville  de  Paris,  paternel,  sur  le  sujet  des  ol)servanies  de  ces 
où  elle  a  obtenu  le  séminaire  de  Sainl-Cbar-  rè^'les,  il  les  lit  aiiprorbcr  tous,  el  leur  don- 
Ics,  que  d.ins  le  reste  du  royaume  aussi  bien  na  à  chacun  un  petit  livre  imprimé,  conle- 
quc  d;ins  1rs  pays  ctr;ingcrs.  Le  premier  de  liant  ces  règles,  qu'ils  reçurent  avec  beau- 
ces  établissiMiienls  fui  à  Toul  en  IIJ^JI).  On  coup  de  respect  et  une  dévotion  sincère. 
leur  donna  en  Ki.'tT  la  maison  de  Noire-Dame  (Juoi(]ue  ses  grands  travaux  l'eussent  ré- 
de  la  Rose  en  (iuiennc.  Le  cardinal  de  Hicbc-  duil  dans  un  grand  aballoment  et  lui  eussent 
lieu  les  établit  l'an  1018  à  Richelieu  et  à  Lu-  causé  une  longue  maladie,  il  ne  laissaii  pas 
çon.  Ils  obtinrent  un  autre  établissement  à  toujours  de  s'occuper  non-seulcmeni  au  bien 
Annecy  en  Savoie  l'année  suivante.  Ils  pas-  et  à  l'avancement  de  sa  congrég.ition,  mais 
fèrenl  l'an  lt)i2  en  Halle,  où  la  duchesse  encore  au  salut  dii  prochain,  sans  oublier  le 
d'.\iguillon  Marie  de  \'igner()d  leur  finula  sien  propre,  dans  la  crainte  qu'après  avoir 
une  maison  à  Rome;  elle  en  fonda  aussi  prêché  el  enseigné  les  autres,  il  ne  fût  Ini- 
dans  son  duché  d'Aignil'on  et  dans  son  comté  même  réprouvé.  C'est  pourquoi,  afin  d'é- 
d'Agenais  aussi  bien  qu'il  .'\Lirscille.  Ils  f.i-  viter  ce  malheur  dont  il  avait  retiré  tant  d'à- 
rcnt  appelés  à  riénes  l'an  1I:4j  par  le  cardi-  «nés,  plus  il  avançait  en  âge,  plus  il  se  rcn- 
nal  Durazzo,  qui  leur  fonda  une  maison  dait  exact  à  l'observance  de  ses  rè;;les,  et 
en  celle  ville.  Ils  furent  reçus  eu  Pologee  particulièrcnvnt  à  satisfaire  à  l'obligation  de 
l'an  1051,  où  la  reine  .Marie  de  (ionzague  les  son  office  :  ce  qui  obligea  le  pape  .\lex;m- 
élablit  à  Varsovie  ;  enfin  elle  fit  un  si  grand  <lre  \l\,  qui  connaissait  combien  la  conser- 
progrès  et  en  si  peu  de  temps,  que  .M.  de  Paul  vaiion  de  (c  grand  serviteur  de  Dieu  était 
eut  la  satisfaclion  pendant  sun  géncralat  de  iniportantc  à  tonte  l'lv;^lise,  à  lui  faire  cxpé- 
voir  cl.iblir  vingt-cinc)  maisons  de  son  insM-  dicr  un  bref  à  son  insu  pour  le  dispenser 
tut,  dont  la  d(rnicre  fut  fondée  à  Turin  de  l'office  ilivin  ;  el  en  même  tein[is  les  car- 
l'an  IGoi.  dinaux    Durazzo,    archciéiue    de     Gènes; 

Oulre  le    bien   que  ce  saint  instiUitenr   a  Ludovisio,  grand  pénilencier,  el  Bagni,   qui 

procuré  à  rF.glisc  en  lui  donnant  tant  d'où-  avait    été   nonce   en   France,    lui    écrivirent 

vriers   évangéliqucs    par  l'èlablissemenl  de  pour  l'exhorter  à  se  soulager  el  à  se  cnnser- 

sa  congrègiilion,  il  s'est  encore  distingué  par  ver.  Mais  le  temps  auquel  Dieu   avait  déter- 

plusi'urs  autres  saintes  institutions  tant  pour  miné  de  lui  donner   la   récom|  ensc   de   tous 

le    soulagement    cor()orel  des    pauvres   que  ses  travaux  6l:int  venu,  il  mourut  le  :i7  sep- 

pour  le  saint  de  leurs  àuies.  (]ar,  ont  o   les  tembre  do  l'année  IdJO,  âgé  de  83  ans,  après 

confréries  de  lacharilé  dans  clia<|uc  I  aroisse,  s'être  disposé  à  ce  dernier   passage  parmi 

qui  lui  sont  redevables    de   leur  commence-  renouvellement  de  ferveur  et  de  piété.  Il  fut 

jnenl,  il  a  encore  établi  les  filles  de    l.i  (J)a-  enterré  au  milieu  du  clnuurde  Saint-Lazare, 

rite,  servantes  des  pauvres  malades,   et"  con-  où   ses    obsè(iues  se   firent   avec    un    grand 

Iribiié  à  réiablissemenl  lie  celles  de  la  t]roix,  concours  de  plusieurs   seigneurs  et  d.ime>, 

dont  nous  avons  parlé  à  letirs  articles.  C'est  mais    parliculièremenl  du    prince  de  Conti  , 

lui  ()ui   a    donné    origine  aux    compagnies  du  nonce  du  pa|)e  M.  Picolomini,  et  de  la  du- 

<les  dames  pour  le  service  de  l'Holel-Uieu  de  chcssc  d'Aiguillon.  (hiel([ues  jours  ajirès  l'on 

l'aris,  aux  exercices  de  ceux  qui  doi\cnt  re-  fil  pour  lui  un  service  solennel  dans   l'église 

ceioir  les   ordres  ,  aux  retraites  spirituelles  de  Saint-rierinain-l'.Vnxerrois  ,   on  revè(|ue 

de  toules  sortes  de   |iersonnes   qui    veuIcMit,  du  Puy  prononça  s  m  oraisoa  funèbre.  On  a 

ou  choisir  un  état  de  vie  ou  faire  des  ('(Uifes-  depuis  f.iil  les  informations  jiiridi([ues  d;'   sa 

sions  générales  ;  aux  conférences,  ecclés  as-  vie,  de  ses   vertus  el    de  ses   miracles,    pour 

tiques,    à  plusieurs    séminaires,    et  enfin   à  poursuivre    à  Konij   le  procès  de  sa  béati- 

quanlil  •  d'iiopitaux,  comme  à  c  ux   des   en-  liciiion. 

lanls  tro'.ivés,  des  pauvres  vieillaids  d.' Paris,  Otle  congrégation  a   été   beaucoup    atig- 

ft  des  galériens  de  Marseille.  menlée  après  l.i  mort  de  ce  saint  fondaleiir  , 

11  assista  Louis  XIII  à  la  mort,  el  fut  in-  étant  préseniement  conposé  •  d  envii  on  (jua- 

suile  nommé  par  la    reine    régente    pour   in\  Ire-vingl-qualre   maisons,    divisées   en  neuf 

de  ceux  qui  composèient  le  conseil  roy;il  des  provinces,  qui  sont  celles  de  l'"r.inee.  Ciiain- 

aiïairi's  ecclésiasiiques  cl  bénélici.iles,  ilonl  il  pigne.    .Vquilaine,    Poitou,   Lyon,    l'icanlie, 

cul  lui  seul  presque  tout  le  poids  pcndani  ili\  de  Rome,  Lombardie  et  Pologne.  O.ilre  ces 

ans.  Au  milieu  de  ces  emplois  el  des  fondions  maisons,   ma'lame    la  duchesse    d'.\iguilloit 

ind'Spensables  de  sa  cliarge  de  général,    il  leur  fit    une    fondation   pour  l'enlrelien    de 

tut  se  conserver  dans  une  égaillé  peu  corn-  (luelques    missionnaires    en    Afri  |nc,    pour 

munc  ;  toujours  uni  à  Dieu,  il  marcha  en  sa  l'assislance  spirituelle  el  corporelle  des  |).ui- 

présence  |)lein  d'un  esprit  de  zèle    pour   sa  vres  esclaves  de  liarbarie,  ou  ils  sont  établis 

gloire  el  de  diarité  pour  le  prochain  auiiuel  depuis  l'an  lOVIl,  el  le  pape  Innocent  XII  eu 

il  voulut  assurer  les   secmirs   qu'il  lui  avait  envoya  l'an  Ui'.)7  à  la  Chine  pour  travailler  à 

l'jujours    donnés,   en    mcllatil    l.i    dernière  li  conversion  de  cette  nation. 


7U1  LAZ 

L'on  pcul  juger  do  l'oxaclîiudo  dn  M.  Hcr- 
liiaiit  dans  le  déno.iibi-eiiio  il  qu'il  f  lil,  d.ins 
son  lïisloirc  dos  Oid;  es  icligiL'ux,  dos  mai- 
sons régulières  et  dos  {-oinmiinaulés  séculiè- 
res, par  ce  qu'il  y  dit  des  Pères  de  la  Mission, 
auxquels  il  reiranche  non-seulcincnt  d /ux 
du  leurs  provinces,  qui  sont  celles  de  Picar- 
die et  de  Lombardie,  mais  encore  plusieurs 
maisons  considérables,  comme  Nolre-Oame 
do  Huglosse,  dans  la  paroisse  de  Poui,  li  u 
«Je  la  niissance  de  M.  Vincenl  de  Paul,  qui 
fut  donnée  aux  missionnaires  de  l.i  province 
d'Aquitaine,  Tan  1708,  par  M.  Bertrand  d'A- 
badie  d'Arbocave,  évoque  de  Dax,  et  par  M. 
l'abbé  de  Belbeder,  curé  de  Poui,  qui  unirent 
celle  cure  à  la  congré{,'alion  ;  le  pelit  sémi- 
naire de  Saint-Charles  dans  la  ville  de  Poi- 
tiers, où  il  aétéélabli  l'aiiniO,  par  M.  Jean- 
Claude  de  la  Poype  de  Vertrieu  ;  la  iiiaisoa 
de  Florence,  fondée  l'an  1703  par  le  pape 
Clément  XI  et  le  grand-duc  de  Toscane;  c  Ile 
de  Ferm!>,  fondée  la  même  année  par  le  car- 
dinal Ciiiei  ;  celle  de  Barcelone,  f  mdée  en 
1704  par  deux  cliano  nés  du  la  c.ithédraic  ; 
et  celle  do  Forli,  fondée  p.ir  le  cardinal  Pau- 
lucci  l'an  1709,  toutes  quatre  de  la  province 
de  Rome;  celle  de  Fi  rrare,  fondée  par  la 
marquise  de  Villa-Camille  lîevila  lua,  l'an 
IG'Ji;  colle  de  Crémone,  fondée  l'an  1702 
par  M.  iMalossi,  chanoine  de  la  cilliédrale  et 
grand  vicaire  de  l'cvéque  de  celte  même 
ville  ;  et  celle  de  Casai,  fondée  par  plusieurs 
personnes  de  pié;é  l'an  1710,  toules  trois  de 
la  province  de  Lombardie;  et  cnlin  dans  la 
province  de  Pologne,  la  m;iisoa  de  Xôwicz  , 
iiu  diocèse  di'  Cnesne,  fondée  l'an  1G89  par 
le  cardinal  UaJziewousIii. 

Le  roi  Louis  XIV  les  a  établis  aussi  en 
IGCl  à  Fontainebleau  pour  avoir  soin  de  sa 
paroisse;  à  Versailles  l'an  1G7V  p  ur  desser- 
vir pareillement  la  paroise  et  avoir  soin  de 
la  chapelle  du  château  ;  à  l'hôiel  royal  des 
Invalides  à  Paris,  l'an  IG7j,  pour  y  desser- 
vir aussi  la  cure,  qui  comme  les  deux  précé- 
dentes est  unie  à  la  congrégation  ;  el  eniiu  Sa 
Pilajeslé  les  a  établis  à  Saini-Cyr  l'an  1G90,  à 
la  sollicitation  de  madame  la  marquise  de 
l^lain'.enon,  pour  être  dire(I.'urs  des  dames 
el  deuioiselles  de  Sainl-Louis  et  faiie  (les  niis- 
sions  dans  les  terres  de  la  mense  abbatiale 
de  Saint-Denis  en  France,  unie  à  la  commu- 
nauté de  ces  dames.  Ils  furent  aussi  appelés 
a  Saint-Cloud  l'an  1G8S,  par  M.  le  duc  d'Or- 
léans, frère  unique  du  roi,  pour  y  avoir  soin 
de  la  chapelle  de  son  châleau  et  do  l'Iiôpilal 
de  ce  bourg. 

Ils  (ireni  un  second  établissement  dans 
l\ume  l'an  1G97,  qui  est  encoie  un  de  ceux 
omis  dans  le  Calalogue  de  M.  Hermant, 
(pioiquo  la  secunde  édition  de  son  llisloi  c. 
n'ait  paru  qu'en  1710.  Le  pape  Innocenl  XII 
leur  accorda  le  rnonaslèrc  île  San  -Ica.i  et, 
Saint-Paul,  sur  le  mont  Célio ,  qui  avail 
autrefois  appartenu  aux  religieux  jésuiiles 
avant  leur  suppression.  Les  religieuses  Phi- 
lippines [Voy.  ce  mot)  l'avaient  ensuite  oc- 
cupé ;  et  ces  religiouses  ayant  été  transférées 
en  un  aulre  lieu,  Clémeni  X  l'avait  donné  à 
dfs  religieux  an^jlais  de  l'ordre  Je  Sainl-Do- 


LAZ 


702 


mini()nc.  Alexandre  Mil  !'éri,'»ca  en  abbaye 
l'an  1689,  et  la  conféra  à  sun  neveu  le  cardi- 
nal Olloboni,  en  y  conservant  ces  religieux 
anglais,  qui,  ayant  élé  obligés  de  l'abaiidiMi- 
ner,  furent  cause  que  le  cardinal  Otioboni  se 
déterriiina  à  remettre  cette  abbaye  entre  les 
mains  du  pape  Innocent  XII,  qui  suppri-na 
le  titre  abbatial  et  donna  ce  tnonaslère  aux 
Prêtres  de  la  Mission,  ciui  y  ont  élabli  lo  sé- 
minaire interne  el  les  études  de  la  province 
romaine. 

Oulre  l'approbation  que  cette  congréga- 
tion a  reçue  du  pape  Urbain  VIII,  elle  a 
élé  encore  confirmée  par  les  papes  Alexan- 
dre \'II  et  Cl'mcnl  X.  Les  prêtres  qui  la 
composent  ont  pour  lin  principale  de  Ira- 
vailler  à  leur  propre  pci  foclion  ,  de  s'em- 
ployer au  salut  dos  pauvres  gens  de  la 
campagne  par  le  moyen  des  missions,  et 
de  s'appliquer  à  procurer  l'avancemenl  spi- 
rituel des  personnes  ecclésiastiques. 

Pour  parvenir  à  la  première  fin,  la  con- 
grégation a  un  règlement  qui  prescrit  enlre 
autres  choses  une  heure  d'oraison  nicnla'e 
le  malin,  trois  e\aiiens  de  cnnscienca  cha- 
que j  >ur,  la  lecture  spiriluelle  aussi  chai|ue 
jour,  quelques  conférences  spiriluelfs  ch  i- 
que  semaine,  la  re'raile  annuelle  de  huit 
jours,  cl  l'observance  du  silen.e  hors  le 
lem[)s  de  la  conversation. 

Pour  la  seconde  fin  ,  elle  vaque  huit  mois 
de  l'année  aux  missions  de  la  campagne. 
Les  missionnaires  demeurent  quinze  jours, 
trois  semaines  ou  un  mois,  (t  quelquefois 
plus  en  chaque  lieu,  selon  qu'il  est  à  pro- 
pos, pendant  lequel  temps  ils  instruisent 
tous  les  jours  le  peuple  par  des  calecliistnes 
et  des  prédicalions  familières,  entendent  les 
confessions  générales,  a;commodent  les  pro- 
cès ou  autres  dilTérends,  réconcilient  les  cn- 
nrmis,  cl  procurent  aux  nécossileux,  pârli- 
culièremenl  à  cous  qui  sont  malados,  tous 
les  soulagements  possibles,  s'elTorçant  d'éia- 
blir  où  cela  se  pi-ut  les  confréries  de  la  Cha- 
rité,  et  terminent  enfin  toules  ces  bonnes 
œuvres  par  la  communion  générale,  à  la- 
quelle ils  invitent  tout  le  monde. 

Pour  la  Iroisiôrne  fin,  cette  congrégiliou 
s'applique  à  la  direction  des  séminaires,  dans 
lesquels  ceux  qui  se  disposent  aux  saints  or- 
dres ou  qui  les  ont  déjà  reçus  demeurent  re- 
tirés pendant  un  temps  notab'e  pour  cire  for- 
més dans  les  vertus  et  les  fonctions  de  leur 
vocation  par  les  exercices  suivanis.  Ils  font 
chaque  jour  en  ce  lieu  l'oraison  m  'utale  eu 
commun,  récilenl  ensemble  l'office  divin  , 
enlondent  la  sainte  messe,  ou  la  célèbrcnl 
s'ils  sont  prêtres,  font  l'examen  particulier 
sur  chaque  vertu  avant  le  repas,  el  en  font 
un  autre  général  le  soir.  0.\  leur  fait  des  le- 
çons de  théologie  deux  fois  le  jour,  et  une 
lois  l'exercice  du  plain-chant.  Ils  font  à  leur 
tour  la  lecUire  durant  lo  repas,  et  à  la  sortie 
de  lible  ils  ont  environ  une  heure  de  conver- 
salion  snr  divers  sujets  utiles,  comme  de  cas 
de  conscience, de  quelques  passages  de  l'Ecri- 
ture sainte,  eic,  mais  d'une  manière  à  dé- 
lasser honnêtemenl  l'esprit.  Chaque  seuiaine 
ils  escrconl  à  certains  jours  les  tcrémonk's 


7C3  DlCTIONNAinii  DES  OUPHES  UKLICIEUX.  TCl 

tlî  rc-'Ilsc,  lanl  de  la  messe  basse  que  de  la  missionnaires    est    scaiblable    à    celui    des 

incjsé'  hauie,  cl  des  aulres  offices  divins,  ecclcsiasliques ,   n'élant  distingués  que  par 

roninie  aussi  la   manière   d'adniinisirer  les  un   collcl   de   toile    large   de    quatre    d,(i<{ls 

sacrements.   On  les  exerce  pareillciiient  de  cl    par    un    petit    toupol    de    barbe    qu'ils 

toii,ps  en  temps  à  la  prédication ,  au  prône,  portent  (1).  Ils   ont  pour    armes  No'.îc-Sci- 

aa   .;itécliisme,  etc.   Les   dimanciics   cl   les  giieur   préchant. 

félis  ils  chanienl  la  misse  el  les  vcpns  ,  ou  Louis   Abelly,   évéque  de  Uodez,  Vie   de 
ils  sont  e[:i|iloj6s  lour  à  tour  en  quclt)ue  of-  M.  Vincent  de  j'iiul.  Giry.  Vies  des  Sa  nts, 
fice  .  selon  leurs  ordres:  ils  se  toufesscnl  cl  toin.  Il,  aux   a'Idiliuns  27  septunli.  Ilernian, 
comiiiuTiiinl  li'S  même- jours.  llist.   des  Ord.  relig.,  lom.lV.    Carlo  Hnr- 
La  même  conuréjiatiiin  s'applique  à  dis-  tliol.   Piazza  ,   Eusetolog.    Roman,   part,   i, 
poser  dans   ses  maisons  les  ordinaiids  à  rc-  Irait.   5,   cap.   29,    el   part,   ii ,    Trait.    11, 
ti'voir  dipniMiienl  les  saints  ordres,  par  une  cap.  13.  lief/ulv  Communes  ejnsd.  coiuj  ega- 
rctraitc  de  huit,  de  dix  ou  de  douze  jours,  tionis  ;  cl  Mémoires   maniifcriis  donnes  pur 
avant     l'onliiiation     générale,    l'cnilant    ce  les   prêtres   de  celte  cons^réjialion. 
temps-là,    outre    la    plupart    des    exercices  Le  P.  lléljol  dit  ci-dessus   que  depuis   la 
coMiniuns   aux   séminaristes  ,    on    leur    fait  mort  du    sainl   fondateur  des   l'rétrcs  de  la 
deux  entretiens  chaque  jour,  l'un  de  la  tliéo-  Mission,  on  a  fait  les  informations  juriiiii|ues 
loijie  morale,  qu'o:i  leur  explique  toute  en  de  sa  ne,  de  ses    vertus  et  de  ses   miracles, 
abrégé   durant    leur    retraite,   cl  l'autre   en  pour  poursuivr;- à  Komc  le  procès  de  >-a  béa- 
forme  d'exhortation  sur  1rs  sujets  les  plus  lificalion.  On   sait    aujourd'hui   quelle  a  été 
importants  à  leur  état.  Llle  fait  encore  pour  l'issue  de  ces  poursuites.  Tout  ayani  étéesa- 
la  même  fin  des  conférences  spirituelles  avec  miné   rigoureusement  à  Uonie,  \  inccni  (ut 
Il  s  ecclésiastiques,  qui  s'assemblent  chaque  béatifié, en  1"'29,  j'ar  Benoit  Xlll.  D  eu  conti- 
semainedans  ses  maisons,  pour  y  traiter  des  ni;a  de  manifisier  la  gloire  de  son  serviteur 
vertus  el  des  fondions  propres  à   leur  étal,  par  les  miracles  qu'il  accordait  à  son  inter- 
Enfin  celte  congrégalion  employé  encore  un  cession,  et,  eu    1737,  Clémenl  Xll  mil  Viu- 
autre  moyen  tant  pour  la  sanclificalion  et  la  cent  au  rang  des  saints.  La  fêl  ■  de  la  cano- 
pei  fcction  des  personnes  ecclésiastiques  que  nisalion  de  saint  Vinceul  de  Paul  fut  célébrée 
ces   liiiques  :  savoir,  les  retraites  spirituelles  partout  avec  pompe  cl  solennité.  Sans  entrer 
rie  cinq  ,  six  ou  huit  jours  qu'elle  accorde  à  dans  les  détails,  nous  devons  ilu  moins  râp- 
ions ceux  qui,  sous  la  conduite  d'un  direc-  pe'.cr  ici  le  dépit  que  manifesla  le  jansénisme 
leur,  veulent  s'ap[iliquer  à  l'oraison   men-  en  cette  occasion.  Un  gran  I  nombre  de  cures 
taie  el  vocale,  à  la  lecluic  spirituelle,  à  une  de  Paris  metlaicnl  opposition  à  la   verilica- 
confcssion  générale  ou  annuelle,  et  à  dres-  lion  de  toutes   lettres  latentes  surprises  ou 
ser  un  règkmenl  de  vie,  etc.  Alexandre  Vil  à  surprendre  en  faveur  delà  bulle   de  cano-- 
ordonna  par  un  bref  de  l'an  1GG2  que  tous  msation.et  parmi  eux  nous  voulons  nommer 
ceux    ((ui    recevraient    les   ordres    à    Itome  l'abbé   Goy,  curé  de    Saiutc-Margiierilc,  qui 
et  dans  les  six  évêchés  suffragants  seraie  it  mourut  avant  d'avoir  la  salisf  c  ion   de    se 
obligés  de  faire  les  exercices   spiritu  Is  de  joindre  à  ces  zélés   confières ,  mais  qui  dé- 
dix  j^iurs    chez    les    Piètres   de  c  tte   coa-  dara  s'unir  à  leurs  eiïorts.  ï^ui>anl  les  j  in- 
gregation  ,   sur  peine   <le  suspension,  dont  séaistes,  en  un  mot,  nioîiiiVur  Vincent  avait 
ils  ne  pourraient  être  relevés  (jue  par  lui  été  canonisé   à   force  de   calomnies.   Leurs 
ou    ses    successeurs;    cl    Clémenl    l\,    en  diatribes  furent  inutiles,  cl  ils  curent  surtool 
considération    de    ces    exercices    que    (ct  e  le  dépit  de  voir  installer  avec  grandes  cêré- 
congrégation    fait    faire,    lui    accorda   plu-  monies  les  reliques  de  sainl   V  inceal  dans 
sieurs   grâces   el   privilèges.  l'égl'se  de  Saint-Mcdard,  où  elles  lurent  ex- 
il  est  à   remarquer  que  celte  congréga-  posées  à  l'une  des   chapi  Iles  de  cette   é.;lise 
lion  est  du   corps   du  clergé  séculier,  quoi-  ()ui  donnaient  sur  le  petit  cimetière  du  diacre 
que  les  particuliers  qui  y  eutrcnl    y  fassent  Paris  (2).  La  fêle  de  saint  Vincent  de  Paul  a 
après  deux  ans  de  prohalion  quafre  \œus  été  fixée  au  1'.)  de  juillet,  ct  son  culte  est  au- 
simples,  de  pauvreté,  de  (haste'.é,  d'obèis-  jourd'hui  plus  répandu  que  jamais. 
Fance  el    de  stabilité,  dont  ils   ne  ])cuvent  (Jui  le  (roirait  aujourd'hui,  si  l'histoire  ne 
être  dispensés  que   par  le   p^pe  ou  par  le  l'attestait,  ct  qui   l'aurait  cru    alors,  si  des 
supérieur  général.  Lile  fait  toutes  ses  fonc-  faits  nombreux  ne  l'avaient  prouvé!  La  cri- 
lions    /i    l'égard    du    piochaiu  ,    avec    l'ap-  tique   ct    la    persécution    qu''éprouv>  rent  la 
jirobation  cl    la    permission   des  ordinaires  bulle  de  la  canonisation  el    même  la  béatifi- 
■les    l.eux,   cl    ne   lait    r'cn    dans    les    mis-  cation  de  sainl  \incenl  de  la  part  des  jansé- 
sions  sans   ragrémeiil  des  curés.  Knfin  elle  nisles   n'empêehèreiil    pas   l'esprit    de   iiou- 
exerce   ces   mêmes    fiMicMom   gratuitement;  veanté  de  s'minii-cer  dans  cette  congrégation 
c'est   pourquoi  elle   n'accc]. te  aucun  établis-  cl  de  ga   n  r  un  grand  nombre  de  ses  mem- 
seiiienl   s'il    n'y   a    une   l'oiilalion   sullisante  bics  .luv  erreurs  d'une  secte   qui  élail  son 
pour    l'entretien    des    ouvriers    qu'elle    en-  cm  e.i.ie  aehnrné,'.  Crilees  A  Dieu,  la  sociéic 
voye.    Llle    est   gouvernée    par    un    général  des  La/.arisles  fut  pendant  le  x>  m' siècle  gou- 
qui    est    perpétuel.    Lhabillcment    de    ces  veruee  par  des  supérieurs  qui  ne  négligèrent 

(1)  t'ny  ,  h  l:i  On  lin  vcl.,  Il»  11)8.  Vieigc   ciiuvrc    iiiie    |iorli(>ii   du    Icrr.iia  oij  cuit  l.i 

(2)  .NiiiiiiiMl'iiiii  !c  pei  i  tiiiiiiiiéro  ex  sic  en  p.iilie;       loiiiliC  du  di.icro. 
il  e^l   changé  eu  paiicrre,  cl  l'autel   de  la  sainte 


7CS 


LAZ 


l.\Z 


TOG 


rien  pour  maintenir  dans  son  sein  la  doc- 
trine caHiolique.  En  1714-,  M.  Jean  Bonnet 
fut  élu  général.  Quoique  d'une  santé  délicate 
et  frêle,  il  déploya  le  plus  grand   zèle  dans 
son   adminislralion,  qui   dura    vingt-quatre 
ans.  C'est  un  des  successeurs  de  saint  Vin- 
cent de  l'aul  qui  ait  le  plus  travaillé  à  con- 
solider  et  développer  les  œuvres    du    pieux 
fondateur.  Il  eut  surtout  à  cœur  de  préserver 
la  compagnie  dont  il  était  le  chef  et  l'organe, 
des  atteintes  funestes  de  l'hérésie  qui  s'insi- 
nuait alors  partout  et  qui  y  fit  pourtant  plu- 
sieurs Conquêtes.  Le  zèle,  quand  il  est  véri- 
table, donne    à"  la   charité   des  conseils   de 
rigueur,  et  M.  Bonnet,  en  homme  cliarit;ibîe 
et  prudent,  ne  recula  pas  devant  des  mesures 
extrêmes,  quand   il  les  crut  nécessaires  ou 
avantageuses  au  corps  tout  entier.  Il  retran- 
cha plusieurs  meiiibres,  très-capables  d'ail-- 
leurs   par  leurs  taleils  et  leur  instruction  de 
rendre  des  services  sensibles.  Entre  ceux  qui 
durent  céder  à   la   vigilance  et  à  la  fermeté 
de  leur  supérieur,  nous  nommerons  un  abbé 
Lévrcit,  sous-diacre,  et  l'abbé  Gloris,  assis- 
tant du   séminaire  des  Bons-Enfants  ,  tous 
deux  opposés  formellement  à  la  bullo  Uni- 
genilus.   Le  séminaire  de  Bayeux  fut  deux 
ans   fermé,  et  M.  Bonnet  y  iil  introduire  un 
autre  enseignement   en   y   faisant  suivre  la 
Théologie  de  Poitiers.  A  l'autre  extrémité  du 
royaume,  il  se  voyait  dans  le  même  temps 
(1730)  obligé  à  destituer  et  placer  dans  une 
aiitre  maison  l'abbé  Heniiont,  supéiieur  du 
séminaire  de  Toulouse.  Dans  les  peines  qu'il 
éprouvait,  M.  Bonnet   trouvait  des  consola- 
lions,  non-seulemeiil  dans  lo  lémoigiuige  de 
sa  consci'  nce,  mais  aussi  dans  la  coopération 
de  SCS  vcnérabics  confrères,  et  nous  citerons 
les  abbés   Phigniirl,   Jacquemart  et   Ortau, 
entre  autres,  qui   attestèrent    de  leur   zèle 
pour  la  saine  doctrine  dans  une  mission  qu'ils 
(lonnaienl  à  Esclaron,  au  diocèse  de  Châlons- 
stir-.Marne.    A   M.    Bonnet,   qui  mourut  en 
1735,  succéda  M.  Jean  Conty,  élu  en  1736, 
lequel  gouverna  jusqu'à   l'année   17i6;son 
adminislralion  ne  fut  pas  non   plus  à  l'abri 
des  orages  que  lui  occasionnèrent  les  nova- 
teurs cachés  dans  le  sein  de  l'institut.  Il  lui 
fallut  bientôt,  et  dès  l'année  de-  son  élection, 
expulser  l'abbé  Bary,  qui,  entré  dans  la  con- 
grcgïilion   en  1707,  ayant  été  professeur  de 
théologie  ,  successi\emeiit  à   Sarlat  et  a  An- 
gouléme,  missionnaire,  curé  de  Richelieu,  ne 
fut  reconnu  pour  jan  éniste  dangereux  que 
par  l'abbé   liourrel,  e\ccllent  catholique  et 
curé  de  Fontainebleau,  où  lîarry  était  alors. 
Il  faut  se  rappeler  que  i  resque  tous  les  or- 
dres   religieux   éiaient  à  la   même  époque 
es|.osés  aux  mêmes  désagréments.  La  coi:- 
grégalion  de  la  Mission  en  sentait  plus  vive- 
ment les  coups  depuis   l'année  172'i- ,  à  la 
suite  d'une  assemblée  générale  dans  laquelle 
M.  Bonni  t  avait  donné   des   preuves   de  ce 
zèle  dont  nous  avons  parlé,  et  employé  ses 
soins  pour  faire  accepter  la  bulle  et  préparer 
l.i  c;ino:iisalion  de  saint  Vincent.   L'upiiosi- 
liun  qu'il  avait  éprouvée  l'avait  .porté  dès  ce 
temps   à    faire  (les    expulsions    dont    furent 
fra|ij)és    les  abbés    Lelèvre,  liimhertj  Philo- 


pold,  etc.  La  rclaiion  de  celle  asseoiblée  fut 
publiée  dans  le  temps.  M.  Conty  mourut  en 
1740, et  eut  pour  successe!ir,rannéesuivante, 
M.  Louis  Debras  ,  qui  mourut  en  17G1. 
M.  Debras  fut  lui-même  amené  à  des  mesu- 
res de  rigueur  et  forcé  d'expulser  l'abbé 
Cliarmet  et  peut-être  d'autres  confrères  ; 
mais  hâltins-nous  de  dire  ((ue  la  C'ngréga- 
lion  de  Saint-Lazare  se  distinguait  alors  par 
son  zèle  pour  la  docirine  orl'odoxett  par 
les  épreuves  qu'elle  subissait  en  consé- 
quence, par  exemple  à  Anxerro,  où  tous  Ie3 
directeurs  dii  séminaire  fni'ciit  interdits  par 
lo  fongueux  évêque  de  Caylus,  et  rétablis 
par  M.  de  Condorcel,  son  successeur.  Dans 
les  missions  (;u"ils  donnaient  sur  d  vers 
points  de  la  France,  les  Lazaristes  s'appli- 
quaient aussi  à  dissiper  les  erreurs  jansé- 
niennes  et  à  faire  disp.jraitro  les  livres  du 
pani. 

M.  Antoine  Jacquier  fut  élu  général  en 
17C2,  et  mourut  en  1787.  Ce  fut  durant  son 
administration  que  le  souverain  pontife,  de 
concert  avec  le  gouvernemcnl  français,  con- 
fia à  sa  congrégation  le-,  missions  de  l,i 
Chine  et  du  Levant,  que  la  suppression  des 
Jisuites  rendait  vacantes.  A  Al.  Jacquier 
succéda  M.  Jean -Féli^-Joseph  Cayla  de  ta 
Garde,  élu  en  17fc8. 

Dès  cette  année,  les  élections  pour  les  étals 
géncrauN.  ayunt  eu  lieu,  il  ne  s'en  fallu',  qun 
de  quelques  suffrages  pour  que  M.  de  Cayla 
fût  nomme  un  des  députés  du  clergé  de  l'a- 
ris;il  liit  du  moins  nonuné  premier  sup- 
pléant. 

En  1789,  la  mais  )n  de  Sainl-Lazarc  fut 
une  [>re  i.ière  fois  pillée  par  la  populace,  que 
les  lactieux  avaient  excitée.  La  perte  et  les 
dommages  s'élevèrent  à  plus  d'un  million. 
M.  de  Cayla,  qui  se  trouvait  à  la  maison  en 
ce  moment  critique,  fut  admirable  de  sang- 
froid,  de  calme  et  de  dignité. 

Lorsque  les  états  généraux  furent  conver- 
tis en  assemblée  nationale,  un  député  du 
clergé  de  Paris  s'étant  retiré,  M.  Cayla  n'hé- 
sita pas,  malgré  les  alarmes  et  les  repré-en- 
talions  de  ses  amis,  à  prendre  sa  place  et  à 
assister  aux  séances  de  l'assemblée,  où  il 
déléndit  coura;;eusement  les  droits  de  la  re- 
ligion. Il  voulut  aussi  être  présent  au  jour 
fixé  pour  prêter  serment  à  la  constitution 
civile  du  clergé,  et  on  sait  qu'il  se  rangea 
du  côté  des  prêtres  fidèles  qui  refusèrent  co 
serment  impie.  Cet  exemple  du  chef  de  la 
congrégation  fut  généralemcni  suivi  par  les 
confrères  de  Paris  et  de  la  province.  Sur 
plusieurs  mille  prêtres  de  la  Missii>n  qui 
étaient  alors  en  France,  il  n'y  eut  qu'un  petit 
nombre  à  trahir  leur  conscience,  il  y  eut 
donc  en  elïet  quelques  défections,  et  ce  corps 
vénérable  eut  la  douleur  de  voir  deux  évo- 
ques constitutionnels  sortis  de  son  sein:  lu» 
était  Jean-Haptisle-(iuillaume  Gratien,  Pié- 
monlais, supérieur  du  séminaire  de  Chartres, 
qui  fut  sacré  en  1792  pour  le  siège  métropo- 
liiain  de  la  Seine-lnl'erienrc  (Kouen),  cl 
mourut  en  1799;  l'autre  lut  Adrien  Lamoii- 
relle,  supérieur  du  séminaire  de  Tours,  cl 
dirccicur  de   rolraile  à  Saint-Lazare,  sacié 


7G7                                            PICTIONN.MUE  DKS  (mDP.ES  UKUGIKUX.  7C8 

i-n    1791  (■•ïrqMc  nutropoliiain  de  lihône  et  Nojon,  Pamiprs,  la  Hocliolle,  Rodez,  Siiinles, 

Loin-  (l.ydiij,  et  ijuilloliné  à  Taiis  vn  ITOV,  Sailat,  Sens.  Sisloroii  (d(  ii\  séminaires  dans 

apris  avoir   ri-tr.iclo  son   sormcnl  vi  ses  ei-  ce  diocùse,  à  Manos(iiu>  il  à   I.iirsl  ;  Soissons 

ii'lirs.  Kii  coiiiiiciisalioii.  la  conjiri'^^alion  vil  (•iraiid  cl  pdil  séiiiinairi'),  Toiil,  Tours,  Tré- 

pliislours    (le    SOS    memlircs    scrilrr    de  leur  iinii-r,  Tioycs  cl  \aiiiics  ;  ci)  loul  (|iiaraiile - 

sanB  li'ur  aM.Èrliomrnl  à  la  f  li  ilo  l'Ki^lise.  sept  grands  séminaires  el  deux  pelits.  Auctino 

Eu  17i':i,  le  2  sei)leiiil)rc,  eul  lieu  en  même  autre  con|jrénation,  pas  même  relie  de  Saint- 
temps  qu'aux  Carmes  le  f.imeuv  massacre  Sulpice,  lie  dirifieai;  alors  aulanl  de  maisons 
au  fêniiiiaire  de  Sainl-Finni  i ,  rue  S^iiiil-  d>tc  gei-.re.  I.e~  L.izarisles  (le\  aient  celle  co;)- 
A'ielor,  dans  Iciiuol  saint  \  inceiil  'C  l'aul  fiance  au  res()ect  porté  à  leur  sainl  fonda- 
:i\:\H  jolé  lis  piemii  rs  fondemeiils  de  sa  cou-  leur,  (|ni  a  h',  premier  établi  lis  séminaires 
gréi;alio!i.  M.  l'raneois  ,  supérieur  de  cvtlc  si;rle  pied  où  ils  sonl  aujourd'hui, 
iiiaisuii,  I  éril  dans  celle  journée.  La  maison  de  Sainl-Lazare,  dont  la  nation 

Dans  la  même  année  cul  lieu  la  seconde  s'est  emparée,  est  arluellemenl  une  prison 
spolia'.ion  de  Sainl-I-.iza  e.  Tous  les  meoi-  de  femmes,  (".e  fut  fidnic  Joly,  Iroisiè.ne  {Re- 
lues de  la  c<ingrég;alion  qui  te  Irouvaienl  néral  de  l,i  ron<»réL;alion,  qui  (il  construire  la 
tians  celle  maison  lurent  dispersés.  -M.  C.ij  la  pluparldes  vastes  édifices  (jui  composent  eet!c 
fut  forcé  de  fuir;  il  passa  d'abord  en  Aile-  maison  et  ((u'on  voil  encore  de  nos  jnurs. 
ni  ic;ne  et  de  là  à  Uome ,  où  le  pape  l'ie  ^  I  L'enclos  de  celle  communaulé  était  le  plus 
lui  oftrii  un  asile.  C'est  là  qu'il  niourut  au  frr.ind  (]u'il  y  eût  à  Paris  el  dans  les  fau- 
niois  de  lévrier  1800,  iilcuranl  sur  la  disper-  bourgs.  On  y  a  bàli  l'é^^lise  de  Sainl-Vinecnl 
sion  des  membres  de  sa  coii;;réj;ation,  et  d<î  Paul,  qui  a  été  placée  sous  ce  vocable,  à 
n'osant  espérer  sans  doute  l'état  prospère  cause  di  raiiciennedcslinationdc  ceslieu\;ou 
que  la  Proiidenre  lui  a  ri'udu.  y  a  construit  aussi   l'embarcadère  du  cbeniiu 

L'insiiint  de  la  Mission  a  de  tout  temps  de  fer  du  Nord,  cl  on  y  bâtit  (ii  ce  moment  ui\ 
compté  lies  11  imuies  distingues  par  leur  sa-  vaste  hôpital  ou  h  >spice.  Nous  croyons  de- 
voir IbéolDj;  que.  Nous  indi(]uerons,  à  l'épu-  voir  cons.icrer  ces  souvenirs,  qui  s'elTace- 
(jue  li\éc  pour  ces  additions  liisloriiiu -s  ,  raient  bientôt,  lorsque  ces  lieux,  encore  si 
M.  \"lclor-Anu'dée  Soardi,  né  à  Turin,  mais  solitaires  de  nos  jours,  deviendront,  ce  qui 
professeur  au  séminaire  Saint-Firmiii ,  à  sera  en  peu  d'années,  couverts  d'édili.es 
Paris.  Il  publia  quelques  ouvrages  très-  comme  les  autres  quartiers  de  Paris.  On 
estimés,  entre  autres  celui  qui  est  intitulé  :  voyait  dans  l'église  plusieurs  be.^ux  tableaux 
Jie  rotn(tni  panlificis  nuctarilalc,  im;  rimé  à  représentant  quebjues  traits  de  11  vie  do 
A»ignon  en  \~\1.  L'auteur  y  veut  prou\cr  saint  Vincent  de  l'aul.  Nous  rroyons  quo 
(|iic  le  clergé  de  France  reconnaissait  l'in-  plusieurs  de  (es  tableaux  sont  ceux  (ju'on 
laillibilité  ilu  paie.  Son  livre  lut  supprimé  vcit  aujourd'hui  dans  les  deux  cbape'.les  la- 
par  arrél  du  parlement  de  Paris  en  date  du  térales  de  l'église  Sainti-M.irguerlle,  au  fan- 
2  )  juin  17'i8  (1  .  11  y  a  eu  ui'.e  seconde  édilion  bourg  Saint-.\nloine,  où  M.  Dubois,  ancien 
lie  cet  ouvrage  à  Hcilelberg  en  1793.  Lazariste,  a  été  cnré.  Au  fond  du  réfecUiire, 

.Nous  citerons  aussi  .M.  ("rançois,  supé-  où  le  général  delà  congrégation  mangeait 
rieur  de  Saint-Firmin ,  auteur  d'un  ouvrage  toujours  au  milieu  de  deux  p  luvres,  qui  par- 
tie discussion  pliilosopiiiquc  remarquable,  tageaient  les  mets  qu'on  lui  serv.iil,  était  un 
dit-on,  [jar  sa  logique  el  sa  clarlé.  Nous  grand  tableau  representanl  le  déluge  uniier- 
ra[ipcllerons  surtout  Pierre  Collel,  conliiuia-  sel.  Ce  relecloiie  pomall  contenir  plus  de 
leur  lie  Tournely.  Les  ouvrages  de  ce  céblrre  deux  cents  personnes. 

lliéologicn  sont  connus  et  estimés  de  tout  le  A  Saint-L;izare  on  gardait  des  personnes 
monde;  mais  on  le  connaît  peu  lui-même,  el  ecclésiasti  [U"  s  ou  laïques  (|ui  y  éiaienl  ren- 
iions recueillons  sur  sa  vie  des  renseigne-  fermées  par  lettres  de  c.ichel  ou  condamnées 
inenls  qui  puissent  suppléer  au  laconisme  à  un  temps  de  retraite.  On  y  reiifermail  aussi, 
lies  diclionnaires  historiques  à  l'article  de  croyons-nous,  i|uelques  aliénée, 
cet  homme  si  laborieux  et  si  instruit.  A  la  Lorsque  les  rois  voulaient  f.ire  aiilrefois 
nomenclature  des  élablissemenls  de  Laza-  leur  entrée  dans  Paris  avec  solennité,  ils  se 
risles,  donnée  par  Hélyot,  nous  joignons  nndaienl  à  Saint-Lazare,  où  ih  recevaienl 
ici  la  liste  alphabétiiiue  des  séminaires  diii-  le  serment  de  (iiléiilé  et  d'obéissance  de  tous 
gés  par  celle  congrégation:  Agen  ,  .\lbi,  le>  ordres  de  la  ville.  L'u-age  était  aussi  de 
Amiens,  Angouléme,  Arles,  .\rras.  Ai  ignoii,  déposer  dans  celle  maison  les  corps  des  rois 
AuX'Tre,  Haycux,  lieauvais,  lielley,  lîrziers,  el  des  reines  de  France  lorsqu'on  les  condiii- 
I^ordcaux,  Boulogne,  Saint-Itrieiic,  C  ihors,  s.iil  à  Sainl-Denis  pour  èlre  inhumés.  L'ar- 
Cainhrai  ,  (^hàlons  -  sur- .Marne  ,  Chartres  (lievéque  de  Paris  recevait  leioiiNoi  eiilre 
I  grand  el  petit  séminaire),  Sainl-Flour.  Saint-  les  deux  portes  du  prieuré,  cl,  après  les  cé- 
lol-de-Leon,  P.iu  (poir  le  dincése  de  l.escar],  réuioiiies  accoutumées,  le  corps  était  portij 
Liiçun,  Saiiit-.Malo  (deux  séminaires  d.ins  ce  a  Saint-Denis  par  les  nauiioiutr.i  ou  vingl- 
diocèse,  l'un  à  Samt-AIeen,  Faut  e  à  Saint-  (luaiie  jinrteurs  de  sil  jurés  de  la  ville. 
Servaii);  le  Mans,  Mar-eille,  ,Met/  (deux  se-  D'après  le  ciociis  du  dernier  siècle,  les 
iiiiiiaircs,  celui  de  Sainle-Anne  et  celui  de  Préires  delà  .Mission  av, lient  à  Uome,  et  Hc- 
t^aiut-Simuii), Muntaubau, Nancy,  Narbonue,  lyot  le   rapporte,  deux  élablissemeiits,   celui 

(I)  En  date  du  20  juin  i"!9,  suivant  les  reiiîC'giicniciits  cpii  nous  oui  clé  foiiriiis  pai  .M.  l'abbé  Salvaire, 
L.i/Arls(e. 


709 


LER 


LEU 


770 


de  Sainte-Tiinilé  à  Monic-Cilorio,  et  celui  île 
Sninl-Jcnn  et  Sainl-l'.iul. 

l'oiir  entrer  à  Saint- Laznro,  il  f;ill,iit,  au 
(icrnier  siècle,  accéder  aux  comlilions  sui- 
vantes :  \a  poslulance  durait  autant  qu'on  le 
jufreail  couven;ible  pour  le  sujet.  Ou  prcn.iil 
pour  le  noviciat  et  rfialiillement  cinq  à  s  x 
cents  livres.  On  faisait,  dit  de  Ijcaurnonl,  in 
cela  différent  de  Hélyoi,  deux  ans  de  sémi- 
naire av.iiil  d'être  admis  ;;ux  vepux,  et  on  de- 
vait cire,  pour  l'admission  aux  ordres,  pourvu 
d'un  titre  clérical  de  la  valeur  prescrite  dans 
le  diocè-e  où  l'on  était  né. 

A  l'extrémité  de  l'enclos  de  Saint-Lazare 
et  siir  la  rue  du  faubourg,  était  une  «jrande 
maison  appelée  le  séminaire  de  Saint-Char- 
les ;  c'était  une  dépendance  de  colle  des  Prê- 
tres de  la  Mission  destinée  pour  les  membres 
convalescents  et  pour  Ici  retraites  de  quel- 
ques ecclésiastiques. 

La  dénomination  de  Lazaristes  n'a  point 
é  é  employée  par  Hélyol,  qui  ne  l'a  peut- 
être  [;a.s  connue,  et  qui  a  donné  à  l'Institut 
dont  nous  parlons  son  nom  réel  de  congré- 
gation des  Prêtres  de  la  Mission.  Néanmoins 
l'autre  avait  prévalu;  et  il  est  tellement  .-it- 
taclié  anjourd  hui  à  la  société  de  Saint-Viii- 
cent  de  Paul,  que  c'est  sous  ce  nom  seul 
qu'elle  est  connue,  el  c'est  aussi  sous  ce  nom 
que  dans  notre  dernier  volume  nous  plu- 
cerins  l'histoire  du  ré'.ablisscniint  et  des 
progrès  de  cette  société  vénérable,  dont  nous 
ferons  connaître  l'étal  actuel,  voyez  Laza- 
HiSTEs,  au  Supplément. 

Etat  ou  Tableau  de  la  VlUe  de  Paris,  par 
de  Beaumonl,  m-8°,  ViGi.  Tablenu  historicjite 
cl  pittoresque  de  Paris,  par  J.-B.  de  Suint- 
Victor,  2"  édition,  tome  11,  première  parti  ■. 
Niiuvelles  ecclésiastiques,  in-ï",  p.issim.  L'Ami 
de  la  Religion,  tome  XVIII.  Mémoires  pour 
sertir  à  l'histoire  ecclésiastique,  par  Picoi, 
tome  IV.  Notes  manuscrites  dues  à  l'exquise 
obligcanc  de  M.  l'abbé  Snliaire,  prêtre,  se- 
crrtaire  général  de  la  congrégation  des  La- 
zaristes. B-D-K. 

LÉANDRE  (Saint-).  Foî/.  Césaire  (Sâi\r-). 

LLIUNS  (Congrégation  de). 

De  la  congrégation  de  Lérins ,  où  il  est  parlé 
des  religieuses  de  Saint-Honorat  de  Tunis- 
con  et  de  celles  de  Mavmunsler  ou  Moise- 
vaux. 

L'abbaye  de  Lérins  ,  l'une  des  plus  célè- 
bres et  des  [dus  anciennes  de  France,  qui  a 
Blé  un  séminaire  de  saints  prélats  et  d'abbés, 
ijui  ont  gouverné  la  plupart  des  églises  et 
d(!s  monastères  de  ce  royaume  ,  ne  reçut  la 
règle  de  saint  Benoit  que  dans  le  \  ii'  siècle  ; 
ei.core  y  fut-elle  observée  d'abord  conjointe- 
ment avec  celle  de  siint  Colomban.  Celte 
fameuse  abbaye,  autrefois  chef  de  congréga- 
tion ,  fui  fondée  ,  non  pas  l'an  373  ,  connue 
quelques-uns  l'onl  avancé,  mais  l'an  4-10, 
par  sainl  Honorai,  qui  lut  d ms  la  suite  évê- 
que  d'Arles.  On  ignore  le  beu  de  la  nais- 
sance de  ce  saint  fondateur;  on  croit  qu'il 
était  d'une  famille  noble  et  qu'il  avait  !!iéme 
eu  l'honneur  du  consulat.  Quoique  sou  père 


s'opposât  à  s.i  conversion  ,  il  reçut  le  bap- 
tême aussi  bi  n  que  son  frère  Venint  ,  qni 
se  joijjnit  à  lui;  et  ,  ayant  résolu  tous  dent 
de  ne  vivre  que  jiour  Dieu,  ils  embrassèrent 
la  p  ofes  ion  moiasliqiie  sous  la  conduite 
de  saint  C.îpraise  ,  qui  étaii  ermite  dans  une 
île  proche  de  Marseille.  Ils  allèrent  ensuite 
dans  l'Ac'iaïi';  mais  Venant  étant  mort  à 
Moudon,  saint  Honorai  revint  en  Provence, 
où  étant  attiré  par  Léonce,  cvêque  de  Fré- 
jus  ,  il  s'établit  dans  son  dincèse  et  choisit 
pour  sa  retraite  l'ili-  de  Lérins,  qui  était  dé- 
serte et  où  per.<onuc  n'abordait  à  cause  de 
la  quantité  de  serpents  dont  elle  était  rem- 
plie. M.iis  Honorai ,  ayant  chassé  ces  ani- 
maux ,  y  bâtit  un  mo  ■astèro  qui  fut  bientôt 
habité  p.,r  un  grand  nombre  do  religieux  d(! 
toutes  sorîes  de  nations.  II  était  d'abord 
composé  de  cénobites  el  d'anachorètes,  seni- 
b'able  ;'i  une  laure  où  l'on  voyait  une  infi- 
nité de  cellules  séparées  les  unes  des  autres. 
L'île  de  Léro  ,  qu'en  appelle  présentement 
Sainte-Marguerite,  qui  touche  presque  à 
celle  de  Lérins  ,  était  aussi  habilce  par  de 
saints  solitaires  qui  ne  faisaient  avec  ceux 
de  Lérins  qu'une  môme  congrégation,  gar- 
dant les  mêmes  observances.  11  ne  faut  point, 
dit  le  P.  Mabillon,  recourir  aux  Institutions 
de  Cassien  et  dire  qu'elles  servaient  de  rè- 
gle à  ces  solitaires  ,  puisqu'elles  n'étaient 
pas  encore  écrites.  11  est  vrai  qu'on  ne  peut 
parler  que  par  conjecture  ,  mais  il  est  plus 
probable  qu'i's  observaient  la  règle  de  saint 
Macaire. 

Saint  Honorai  ayant  été  élevé  sur  le  siège 
épiscopai  d'.Arles,  Maxime  lui  succéda  daiis 
le  gouvernement  de  Lérins  ,  el  Fausle  à 
Maxime,  qui  furent  tous  deux  éicques  de 
Ri.'z.  Fausle,  étant  encore  abbé,  eut  un  dif- 
férend avec  Théodore  ,  cvêque  de  FréjU'i, 
au  sujet  de  la  juridiction  que  ce  prélat  pré- 
tendait a^oir  sur  celle  abbaye,  (|ui  él.ilt 
encore  pour  lors  du  diocèse  de  Fréjns,  el 
qui  n'a  clé  que  dans  la  suite  de  celui  do 
Grasse.  Saint  Honorât,  en  jetant  les  fonde- 
nicnts  de  ce  monastère  ,  était  convenu  avec 
l'évéque  Léonce  que  les  clercs  et  ceux  qui 
approchaient  des  autels  ne  seraient  ordon- 
nés que  par  l'évéque  ou  par  celui  à  qui  il 
en  aurait  donné  la  permission  ,  et  que  lui 
seul  donnerait  le  saint  chrême;  mais  que 
tout  le  corps  des  autres  moines  laïques  seront 
sous  la  dépendance  de  l'abbé  qu'ils  auraient 
élu.  Théodore  cependant  prétendait  avoir 
une  juridiction  absolue  sur  tout  le  monas- 
tère. Pour  remédier  au  scandale  que  ce  dif- 
férend causait,  Ravennius  ,  évêine  d'Arles  , 
convoiiua  un  concile  de  treize  évê;ues,  dans 
lequel  il  fut  résolu  que  Théodore  serait  prié 
de  recevoir  la  satisfaction  de  Fauste,  qu'il 
oublierait  le  passé  ,  qu'il  lui  rendrait  son 
amiiié,  qu'il  cuntinuerait  à  lui  donner  les  se- 
cours qu'il  avait  promis,  et  qu'il  ne  pourrait 
s'attribuer  sur  ce  monastère  que  ce  que 
Léon  son  prédécesseur  s'était  atlribué,  c'est- 
à-dire  que  les  clercs  el  les  ministres  de  l'au- 
tel ne  seraient  ordonnés  que  par  lui  ou  par 
celui  auquel  il  en  aurait  donné  commission; 
que   lui   seul  donnerait   le  saint   chrême  et 


77i 


coiifiriuorail  les  nôophylcs,  s'il  y  en  avait  ; 
((uc  les  elerrs  ••lriiii;;cis  ou  passants  ne  se- 
raient point  admis  sans  son  eonsenlenienl 
ni  à  la  conininnion  ni  au  ministère  ,  mais 
que  la  mnliiiuilo  ili's  laïiines  (t'cst-à-dire  le 
reste  îles  moines)  serait  sous  la  conduiic  de 
l'abbé  .  sans  ((ue  l'cvèquc  s'y  aliribuàl 
aucun  droit  ,  ni  'ju'il  pût  eu  ordonner  au- 
I  un  pour  clerc  ,  si  ce  n'était  à  la  prière  de 
l'abbé. 

i;est  au  sujet  de  ce   concile,  qui  se  tint 
l'an  VoO,  selon  qneliiues-uns,  ou,  selon  d'au- 
IriS,  l'an  'io.J  ,  et  qui  ,  selon  M.  Flcury,  ne 
peut  pas  avoir  été  lenu  plus  tard  que  l'an 
ii61  ,  que  le  P.  Mabillon  f.iit  remarquer  que 
pour  lors  les  cercs  n'élaienl  pas  ainsi  appe- 
lés à  cause  de   leur  tons.ure  ,   mais  à  cause 
des  oflices  ecclésiastiiiues  qu'ils  cxerç.iieni, 
comme  de  »  hantre,  de  sacrislain,  d'économe, 
de  noiaire  ou  de  défenseur  ;  et  qu'ils  étaient 
appelée  ministres  de  l'autel  lorsqu'ils  avaient 
reçu   les  ordres   majeurs  ou  mineurs;   qu'à 
ré;.'ard  des  simples  moines,  qui  n'avaient  ni 
ordres  ni  offices,  ils  étaient  appelés  laïi]ues  , 
et  que  pour  les  distinguer  des  séculiers  ou  les 
appelait  quelquefois  laici  majoris  proposili. 
U  ajoute  (jue  ce  concile  d'Arles,  parlant  de 
ces  moine»  ,  les  avait  appelés  une  mulliludc 
de   laïques,    parce    que    leur   nombre   était 
beaucoup  plus  grand  à  Lérins  que  celui  des 
clercs  ;  mais  que  dans  la  suiic  le  nombre  des 
clercs  engagés  dans  les  ordres  majeurs  sur- 
passa celui   des  simples  moines  ,  comme  il 
paraît  par  la   lettre   e,ue  saint  Grégoire   le 
Grand   écrivit  à  l'abbé  Etienne  ,  où  il  le  con- 
gratule de  ce  que  les  prétrea  ,  les  diacres  et 
loiite  la  communauté  vivaient  dans  une  grande 
union.  Sailli  l'i  uctueux  ,  évéque  de  Prague  , 
distingue  dans  le  dernier  chapitre  de  sa  ré- 
gie les  moines  de  son  monastère   d'avec  les 
laïques;  mais  ces  sortes  de  laïqu  s  n'étaii  nt 
pas  des  séculiers  ,  ils  étaient  de  véritables 
moines  tels  (]ue  ceux  que  l'on   nomme  pré- 
sentement coiuers.  Ainsi,  conclut  ce  savant 
homme  ,  lorsque  le  concile  d'Arles   |  arle   de 
celte  muliitude  de  l.iïques  qui  étaient  à  Lé- 
rins, il  n'entendait  [las  [larler  de  séeuliers  , 
mais    de    moines   qui    n'étaient    pas   clercs, 
puisque  c'était  à  eux  que  l'élection  de  l'abbé 
apparlenail.  (Juant  aux    néophytes  {  dont   il 
est  aussi  parlé  dans  ce  concile)  qui  étaient  a 
l.éiiiis.il  fuit  remarquer  (ju'autrefois  les  ca- 
téchumènes étaient  instruits  dans  les  monas- 
tères avant  (pie  de  recevoir  le  baptême. 

A()rès  ()uc  Fausta  eut  été  fait  évéque  de 
Itiez,  Nazare  fut  a.  bé  de  Lérins.  (]e  fut  lui 
qui  fit  baiir  pour  des  (ilbsle  monastère  d'Ar- 
luç,  l'an  k"r2.  Les  autres  abbés  qui  succédè- 
rent à  Nazare  curent  soin  de  maintenir  l'ob- 
servance léguliére;  mais  il  y  a  bien  de  l'ap- 
parence qu'elle  s'alTaiblil  dans  la  suite  sur 
la  fin  du  M  siècle,  du  temps  môme  de  labbé 
lùienne,  que  saint  (Jrégoire  avait  félicité  par 
une  lettre  de  la  grande  union  qui  était  dans 
son  monastère  ,  puisque  ,  4)ar  une  autre  let- 
tre (Te  ce  pajie  écrite  à  Conon  ,  successeur 
d'Iitienne,  il  l'esliorte  de  corriger  les  mœurs 
de  ses  religieux. 

Le  rclûilicmcut  augmenta  dans  l.i  su. te  et 


DlCriONNAlhE  DES  OnDHES  nF.UGIF.lX.  772 

produisit  une  grande  division  entre  les  reli- 
gieux, qui,  ne  pouvant  s'accorder  sur  l'élcc- 
liiin  d'un  ablié,  deiiiandèren',  l'an  COI,  Ai- 
gulfe,  moine  de  ."^aint-ltenoil-sur-Loire  ,  qui 
y  avait  apporté  du  Mont-Cassin  le  corps  do 
saint  Itenoit,  et  l'élurent  pour  abbé.  Aigulfe, 
ayant  acreplé  celte  dignité,  travailla  aussitôt 
à  rétablir  dans  ce  monastère  la  paix  et  l'ob- 
servance. Les  exhortations  jointes  au  bon 
exemple  qu'il  donna  furent  si  clficaces  ,  que 
les  esprits  se  réunirent  cnlin  .  et  ceux  qui 
étaient  sortis  du  monastère  y  revinrent  et 
reprirent  les  observances  régulières.  Il  s'en 
trouva  néanmoins  deux  ,  Arcade  et  lloloinb  , 
qui  conçurent  une  si  grande  aversion  contre 
le  saint  abbé  et  contre  ceux  qui  sui\aienl 
ses  maximes  ,  qu'ils  cherchèrent  les  moyens 
de  leur  ("ilcr  la  vie.  Ouelques-uns  s'etant 
aperçus  de  K'ur  mauvaise  volonté,  voulurent 
échapper  à  leur  fureur  en  se  rcliraiil  dans 
l'église  de  Saint-Jean;  mais  les  autres  ne 
voulurent  point  abandonner  leur  alibé  ,  qui 
représenta  aux  rebelles  l'énormilé  de  leur 
crime  ,  dont   ils  se  repentirent  et  demandè- 


rent   pardon.  Mais  un   an   après,  craignant 
(\ue  le  bruit  l'e  leur  conspiration  n'allât  jus- 
qu'aux oieilli  s  du  roi  et  qu'il  ne  les  fît  pu- 
nir, .\rcade  sortit  du   monastère  pour  aller 
chercher  de  la  protection  au  dehors  ,  et  Co- 
lomb  resta  pour  cabaler  au  dedans.  Arcade 
voulut  ensuite  rentrer,  feignant  de  se  repen- 
tir, mais  Aigulfe  lui  fil  fermer  la  porte.  Ce 
méchant  homme  eut  pour  lors  recours  à  un 
seigneur  voisin  nommé  .Moinmol,  et  lui  per- 
suada d'aller  à   Lérins  ,    l'assurant   qu'il    y 
trouverait  de  grands  trésors.   Il  y  vint,  con- 
duit par  cet  Arcade,  qui  prit  l'abbé,  le  char- 
gea de  coups  de  bâton  ,   et  le  mil  en  prison 
avec  les  r(  ligieux  qui  lui  étaient  le  plus  sou- 
mis. Le  leiKlemain  Arcade  les  alla  voir  ,  et  , 
feignant  (ju  il  n'étaii  point  l'auteur  de  cette 
violence,   leur  fil  ajiporler  à  manger.  Mais, 
quoi(iue  dans  L's  liens,  ils  ne   crurent  pas 
pouvoir  transgresser  la  règle:  et,  comme  c'é- 
tait ua  jour  déjeune  et   qu'il  n'étjiil  encore 
()ue  l'heure  de  tierce,  ils  différèrent  à  man- 
ger jusqu'à  none. 

Après  que  Mommol  eut  emporté  ce  qu'il 
put  du  monastère  ,  .\rcade  fit  sortir  les  pri- 
sonniers au  bout  de  dix  jours  et  les  mit  sur 
un  vaisseau.  Colomb  les  voulut  accompagner 
après  leur  avoir  fait  coujier  la  langue  et 
creȎ  les  >eux  ,  de  ])eur  qu'ils  ne  lissent 
connaitre  les  auteurs  d'une  telle  cruauté,  et 
leur  donna  de  méchants  habits  afin  qu'ils  no 
lussent  pas  reconnus  pour  religieux.  Ils 
abordèrent  à  l'île  ('apraria.où  il  y  avait  une 
grande  multitude  de  moines  ,  avec  lesquels 
ils  célébrèrent  la  cène  du  Seigneur  ,  y  étant 
arrivés  le  jeudi  saint  :  le  jour  de  Pâques  , 
Colomb  eut  la  hardiesse  de  faire  l'oflice  de 
diacre  à  la  messe,  et  avant  la  i'oinmunion,de 
donner  le  baiser  de  |)aix  à  ses  frères  qui  por- 
taient des  marques  de  sa  cruauté,  et  dont  les 
plaies  étaient  encore  toutes  saignantes.  Il 
sortit  ensuite  de  ce  mona>tère  ,  y  laiss.mt 
saint  Aigulfe  avec  ses  compagnons,  et  s'en 
alla  à  Lplièse  )iour  quelques  affaires  sécu- 
lières ({u'il  y  avait.  Il   retourna    à  Capraria 


77.- 


LER 


LER 


774 


<len\  ans  après,  où  il  fil  rembarquer  les  sainls 
iiidilyrs  Aigiilfe  et  ses  frères;  et,  les  ayant 
conduits  dans  une  île  qui  est  entre  celles  de 
Corse  el  de  Sardaigne,  il  les  y  fil  massacrer 
l'an  67o.  L'on  dil  que  le  roi  Ttiierri  fit  porter 
à  ce  niJillieureux  la  peine  quo  méritait  un  si 
1  gr.ind  criiiie. 

\  La  réforme  quo  saint  Aigulfe  avait  élablle 
'  à  Lérins  ayant  été  comuii!  arrosée  de  son 
sang  ,  redeurit  el  porta  une  abondance  de 
fruits  en  pieté  et  en  vertus.  Ce  monastère 
fut  si  célèbre  et  l'observance  y  était  gardée 
si  exactement ,  que  l'on  y  venait  de  toutes 
paris  s'y  consacrer  à  Dieu  :  l'on  dit  même 
que  le  bienheureux  Amand ,  qui  pouvait 
gouvernT  cette  abbaye  vers  le  commence- 
ment du  viir  siècle,  eut  sous  sa  conduite 
jusqu'à  trois  mille  sept  cents  religieux.  Sil- 
vainl  i  succéda,  et  saint  Porcaire  à  Silvain. 
Ce  fiit  du  temps  de  saint  Porcaire  que  les 
S;irrdsins  aMa^Uî'rent  c  ttc  île.  Ce  saint, 
ayint  connu  par  ré\  élation  qu'ils  devaient 
venir,  caclia  dans  un  lieu  secret  les  reliques 
des  saints  qui  étaient  dans  son  église, et  per- 
suada à  trente-six  religieux  qui  étaient  à  la 
fleur  de  leur  âge  et  à  seize  enl'anis  qu'on  éle- 
vait dans  ce  monastère  de  sauver  leur  vie 
par  la  fuile  en  se  réfugiant  en  Italie. 

11  parla  ensuite  à  sa  communiuté,  compo- 
sée d'environ  cinq  cluIs  religieux,  et  les  ex- 
horta à  mourir  généreusement  pour  Jésus- 
Clirist.  Mais  ses  exhortations  ne  pouvant 
rassurer  deuK  religieux  :  l'un  nommé  Co- 
lomb ,  l'autre  Eleutiière  ,  il  leur  commanda 
de  s'aller  cacher  dans  une  grotte  voisine. 
Les  barbares  élanl  descendus  dans  l'île  l'an 
730  ou  731  ,  renversèrent  les  églises  cl  tous 
les  bâtiments,  tuèrent  tous  les  religieux,  du 
nombre  dcs;iuels  fut  Colomb  ,  iiui  ,  condam- 
nant s.i  timidité  ,  sortit  de  sa  gi  olte  ,  et ,  se 
rejoignant  à  ses  frères,  cul  le  bonheur  de 
mourir  avec  eux.  Ces  barbares  épargnèrent 
néanmoins  quatre  jeunes  religieux  (ju'ils  se 
conlentèrenl  de  faire  prisonniers.  Ils  les  fi- 
rent monter  sur  un  de  leurs  vaisseaux  qui 
aborda  au  port  d'Agal  en  Provence  ,  où  on 
leur  permit  de  descendre  à  terre  pour  un 
peu  de  temps  :  mais  ,  voyant  qu'on  ne  les 
observait  pas  el  qu'ils  éiaient  proche  d'une 
forêt ,  ils  s'y  caclièrenl  jusqu'à  ce  que  les 
barbares  eussent  mis  à  la  voile.  Alors  ces 
religieux  vinrent  à  Arlue,  où,  ayant  trouvé 
une  petite  barque  ,  ils  s'en  servirent  pour 
repasser  à  Lérins,  où  ils  aidèrent  lik  ulhère 
à  donner  la  sépulture  aux  corps  des  sainis 
mari) ri.  ils  alièrenl  ensuite  trouver  en  Ita- 
lie les  jeunes  religieux  que  saint  Porcaire  y 
avait  envoyés  ,•  et ,  lorsqu'on  n'eut  plus  rien 
à  craindre  de  la  pan  des  Sarrasins  ,  ils  re- 
tournèrent à  Lérins  sous  la  conduite  d'Eleu- 
Ihère ,  qui  répara  l'abbaye  dont  il  fut  fait 
abbé. 

11  y  a  de  l'apparence  qu'elle  eut  encore  be- 
soin de  réforme  lorsque  saint  Odilon  ,  abbé 
de  Cluni,  qui  réforma  tant  de  monastères  en 
France  ,  en  fut  abbé,  en  997.  Mais  celle  ab- 
baye ne  fut  jamais  plus  florissante  que  sous 

(1)  Yoy.,  à  la  lin  du  vol.,  u"  1S9. 


le  gouvernement  de  l'abbé  Adrlbert,  qui  fut 
élu  l'an  1066  et  qui  gouverna  cette  abbaye 
pendant  trente-six  ans;  car  l'auteur  du  Cata- 
logue des  abbés,  rapporté parVincenlRarale, 
dit  que  du  temps  de  cet  abbé  il  n'y  avait  pas 
un  seul  jour  que  l'on  n'enrichit  cette  maison 
par  quelques  donations.  Ce  fut  de  son  temps 
que  Raymond,  comte  de  Barcelone,  cl  sa 
femme,  donnèrent  à  ceLle  abbaye  le  monastère 
de  Saint-Barlhélemi  en  Catalogne.  Elle  en 
availaussi  d'autres,  non-seulement  en  France, 
mais  encore  en  Italie  dans  l'évéché  de  Reg- 
gio,  dans  l'Etat  de  Gènes  et  dans  l'île  de  Cor- 
se ,  qui  tous  étainnl  soumis  à  la  correction 
de  l'abbé  de  Lérins;  cardans  ce  Catalogue 
des  abbés  l'on  voit  que  l'abbé  Tourneforl,  qui 
fut  élu  l'an  1305,  ordonna  au  prieur  de  Saint- 
Antoine  de  Gènes,  qui  était  de  sa  dépendan- 
ce ,  de  défendre  par  sainte  obédience  à  ses 
religieux  de  sortir  hors  du  monastère  sans 
sa  permission  el  sans  être  revêtus  de  leur 
coule  ou  flacs  (I);  et  que, si  quelqu'un  ne 
voulait  pas  obéir,  que  l'on  en  donnât  aussi- 
lôt  avis  à  l'abbé  de  Lérins.  Il  semble  que  re 
prieuré  ait  étéchangédans  la  suite  enabbaye; 
car  dans  un  chapiire  général  qu'André  de 
Fonlana  tint  l'an  i'iSl,  tous  les  moines  de 
Lérins  y  as'^islèrenl  avec  les  prieurs  des 
prieurés  de  la  dépendance  de  l'abb.iye  ;  et 
Rcnoît  Négroni,  abbé  de  Saint-Antoine  de 
Gènes,  n'ayant  pas  pu  y  venir,  y  envoya  un 
procureur  pour  tenir  sa  place.  Celait  la  cou- 
tume de  cette  abbaye  de  tenir  ainsi  des  cha- 
pitres généraux  ,  où  l'on  faisait  des  ordon- 
nances pour  maintenir  la  disripline  régulière. 
Il  y  avait  encore  des  monastères  de  filles  qui 
en  dépendaient,  comme  ceux  d'Arlue,  do 
Saint-Honorat,  deTarascon,  etc. 

Ce  monastère  de  ïarascon  fut  fonde  l'an 
1358  par  Jean  Gantelmi,  originaire  de  Naples, 
grand  sénéchal  de  Provence.  Il  fixa  le  nom- 
bre des  filles  à  trente,  toutes  demoiselles,  sous 
l'autorité  d'une  abbcsse.  Il  doîa  richement  ce 
monastère,  lui  ayant  donné  beaucoup  de  re- 
venus, tant  dans  la  ville  de  Tarascon  el  aux 
environs,  que  dans  celle  d'Arles,  outre  trois 
lerres  seigneuriales,  avec  toule  juridiction  et 
plusieurs  droits  et  ])riviléges,  dont  l'abbesse 
jouit  encore  présentement.  Ce  monastère  est 
sous  la  juridiction  de  l'.ibbé  de  Lérins  el  ne 
dépend  point  de  l'ordinaire.  L'abbesse  est  do 
numinalion  royale,  el  Sa  Majesté  choisit  or- 
dinairement des  filles  de  grande  qualité.  Celle 
qui  est  abbesse  aujourd'hui  est  de  l'illustre 
maison  de  la  Baume  de  Suze  en  Dauphiné. 
Nous  donnons  ici  l'habillement  de  ces  reli- 
gieuses, que  nous  avons  fait  graver  sur  le 
dessin  qui  nous  a  été  envoyé  en  1714-  (2). 

Outre  ces  monastères   de  l'ordre ,  il  y  en 
avait  encore  un  de  Chanoines  Réguliers  qui 
lui  était  soumis.  Giraud,  étant  abbé  en  1226, 
donna,  du  consentement  de  sa  communauté, 
à  des  Chanoines  Réguliers  vivant  sous  la  rè-  .' 
gle  de  saint  Augustin  ,  les  églises  de  Saiat-j 
Mamerl  et  de  Sainte-Marie  de  Fontaine-Vi-| 
neuse,  avec  leurs  dépendances,  à  condition! 
qu'ils  reconnaîtraient  Lérins  pour  leur  chef; 

(2)  Yoij.,  ibid.,  n"  ICO. 


775 


mCTIONNAlUE  DES  ORDRES  IIELIGIF.LX. 


-Tf, 


et  que  pour  maiquc  quilslui  cl.iicni  soumis, 
ils  porlpraiciil  (les  cnparcs  noirs  sur  leurs  sur- 
plis; q  l'oiilre  n-la  ils  pnyeiaiciil  à  l'.ibbé  de 
{.crins  cl  ;i  ses  successeurs  ileus  besans  (J"or, 
't  (jui"  le  prirur  as^islcrnil  (ous  les  deux  ai)s 
nu  (  liaillre  général  de  l'iilibiyc  de  Lérins. 

liiiliu  Augustin  (iriiua'di,  év('i]iii!  de  (îra?- 
sc,  élanl  ablié  do  Lcrins  eu  lIJOo.  voyant  que 
la  discipline  uiouasliquc  u'etait  plus  en  v  i- 
p^tieurdaus  en  luonas'.èrc,  le  souuiil  à  la  con- 
(«répaliou  des  I?cucdiclius  de  la  reforme  du 
S'ionl-Cassin  cl  de  Sainte-Jusliue  de  l'adoue. 
filic  en  prit  possessioi  l'an  1515,  et  depuis 
ce  Icinps-là  les  abbés  n'ont  plus  été  perpé- 
tuels. Le  pape  Léon  X  approuva  celli-  union 
la  mémo  année;  le  roi  l'ranrois  I"^  y  consen- 
tit par  SCS  Icfrcs  du  IV  avril  aussi  de  1 1  mê- 
me année,  qui  furent  vériliées  au  parlement 
d'.Vix.  Celle  union  fut  dans  la  suite  onfir- 
méc  par  la  reine  Louise,  mère  de  François I", 
réçcule  du  royaume  en  son  absence.  !e  7  août 
1523;  par  le  roi  Henri  11  l'an  loi?,  par  le 
pape  Cléiue  .t  Vlll  l'an  loTl  ,  et  par  le  roi 
Henri  IV  r.,n  1597.  (Juuique  d  .ns  le  Catalo- 
gue des  abbés  dont  uius  avons  parL-  il 
.«oit  marqué  que  la  congrégation  du  Slonl- 
Cassiu  a  depuis  celle  union  établi  les  abbés 
dans  ce  monastère  ,  il  paraît  néanmolBS  que 
les  re'it;ienx  se  soiil  toujours  conservé  le 
droit  de  les  élire  et  de  les  choisir  du  corps  de 
la  cniumunaulé.  Chopin  rapporte  à  ce  sujet 
un  procès  qu'il  y  eut  au  conseil  privé  entre 
dom  Hilaire  d'.Vnlilies,  religieux  de  ci  lie  ab- 
baye (qui  avait  clé  élu  abbé  d'un  commun 
consentement  de  la  comniunnuté,  et  pour  le- 
quel le  même  Chopin  plaidiit),  <t  un  Italien 
qui  en  avait  été  pourvu  par  le  roi,  qui  avait 
interjeté  appel  conunc  d'abus  de  ci'llc  union 
de  Lérins  a>ec  la  congr,  galion  du  Moul-Cas- 
sln.  Par  l'arrèl  qui  fut  rendu  le  8  iiovem'ire 
1599,  celte  ablia\c  fui  adjugée  au  religieux 
ijui  avait  clé  élu  par  la  communauté,  et  ce 
en  conséquence  de  runinn  faite  avec  la  con- 
grégation du  Moni-Cassin. 

Nous  a^ons  dit  ci- levant  que  cette  abbaye 
était  un  -émin.;ire  d'évéqucs.  Klle  a  donné  à 
l'Eglise  douze  atchevéqucs, aillant  d'évôqucs, 
dix  abbés  ,  qu.itre  moines  ,  mis  au  nombre 
des  saints  confesseur^  ,  et  une  inrinilé  de 
martyrs,  sans  parler  d'un  très-grand  uoinbre 
«rii  lûmes  illustres  qui  eu  s.)nt  sortis.  Tou  c 
l'ile  est  de  la  dépeutlance  du  monaslère.  Les 
Espagnols  la  surprirent  au  mois  de  septem- 
bre 1033  et  en  funnl  chassés  en  lt)37.  Ce  sont 
cm  qui  désolèrent  ce  lieu, coupant  des  forêts 
de  pins  ,  qui  y  fournissaient  une  ombre 
agréable  conire  les  ardeurs  du  so'eil,  que  la 
nature  a\ail  dis|iosés  en  allées,  au  boni  des- 
quclb  s  on  trouvait  des  oratoires  bùlis  m  riiou. 
iicur  <les  sai'its  abbés  ou  religieux  de  cette 
Ile.  Cette  forêt  si  agréable  lui  avait  fait  don- 
ner le  n(un  >\'Aiijietle  de  la  mer. 

Les  mémiiircs  que  nous  avons  du  monas- 
lère de  Masmur.ster  sont  si  succincts,  que, 
ne  suffisant  pas  pour  en  faire  un  article 
I  artiriilier,  nous  l'avons  inséré  à  la  lin  de 
ccUii-ii,  snivani   le    temps  et   l'année  de  sa 


fiudaiion,  qui  fut  en  720.  Ce  monastère  e<t 
si'ué  à  Moi~evau\,  dans  leSunl;aw,  à  ciiii^ 
lieues  de  Malhanson.  Il  fui  foidé  par  Masoii, 
duc  de  Suève  ,  i|ui,  avant  perdu  son  fils  uni- 
que, qui  s'était  iMyè  d  ins  la  rivière  de  To!- 
der,  qui  passe  à  Moisevaux,  y  lit  bàiir  celle 
abbaye,  dans  la(|uel!e  il  mit  des  religieuses 
de  l'ordre  de  Saint- lïenoîl,  qui,  quoi(|ue  dé- 
chues de  leur  premier  inîtitul  cl  de  la  pun-- 
té  de  la  règle  de  ce  saint  fondateur,  n'ont 
pas  laissé  de  le  conserver  jusqu'à  présen'. 
Ce  sont  présentement  toutes  lilles  nobU's, 
cl  pour  y  être  reçue  il  faut  faire  preuve  de 
seize  quartiers  de  noblesse  tant  du  côté  pa- 
ternel i\n(i  du  côté  niaternel.  Leur  église  est 
dédiée  en  riionneur  de  saint  Léger,  niarlyr, 
cvériucd'.Xulun.  E^les  sont  sotis  la  juridiction 
de  l'évéque  de  Bâie,  et  sont  collatrices  d'en- 
viron quinze  cures,  dont  elles  tirent  de  gros- 
ses décimes,  tant  en  grain  qu'en  vin.  Leur 
habillement,  qui  est  noir,  est  semblable  à 
celui  drs  séculières.  Elles  on'  au  diccur  un 
luauleau  traînant  à  terre,  et  leur  coilTurc  c>t 
particulière,  comme  on  le  peut  voir  dans  la 
iigurc  que  nous  eu  avons  fait  graver  sur  le 
dessin  qu'elles  nous  ont  envoyé  avec  les  mé- 
moires concernant  leur  abbaye  (1).  11  y  a  en- 
rore  quelques  autres  monastères  de  iîénéJic- 
tines,  fondés  environ  dans  le  mé.ue  temps  et 
dans  le  même  pays;  mais,  comme  elles  ont 
secoué  le  joug  de  la  règle  de  saint  llenojt 
pour  se  séculariser  ,  nous  en  parlerons  aux 
articles  qui  portent  les  différents  noms  sous 
lesquels  elles  sont  présenleeicut  désignées, 
tant  de  celles  qui  ont  conservé  la  foi  que  do 
celles  qui  ont  embrassé  l'hérésie. 

Voyez  ^'incenl  liaral.  Chronol.  insul.  Liri- 
nenfis.  Saine  .Marlhe,  Gull.  Ckri^l.,  loin.  \V. 
Dulleau,  llist.  de  Vord.^de  Saint- Renoll.  Ma- 
billoii.  Annal.  Bened.  Fleury,  Ilist.  ccclés., 
tom.  V  el  VI  ;  cl  le  Uicl.  hist.  de  .Moréry. 

Xola.  Il  y  a  quobiues  années,  il  fut  qu'  s- 
lion  de  raiheler  l'ile  célèbre  de  Lérins,  qui 
fut  mise  en  Vv-iite.  L'évé(iue  do  Fréjus,  iio- 
nobslant  la  modicité  du  prix  demandé  (30,000 
francs, ilil-on)  el  ses  bous  désirs,  ne  put  fai:e, 
racq.iisiiion  do  ce  li>'u  donl  le  souvenir  est 
si  cher  à  la  religion  el  aux  lettres,  et  qu'il 
eût  probablemeul  enrichi  de  (juelque  élablis- 
sement  pieux.  B-d-e. 

LÉ\  IllEil  (Ckevaliers  m)  nu  duché  de  Bar. 

L'an  l'ilti,  plusieurs  seigneurs  du  duché  do 
Bar  s'uiiireul  (useinble  el  formèrent  une  so- 
ciété dont  la  marque  était  un  lévrier  ayant  à 
son  cou  un  collier  où  étaient  érrils  ces  mois 
tout  un,  qu'ils  devaient  porter.  Ils  priimireiil 
de  s'aimer  les  uns  Us  autres  ,  de  garder  leur 
parob',  de  defiiidre  celui  d'entre  eux  donl  ils 
ent'ndraieui  dire  du  mal,  et  de  l'en  avertir. 
Tous  les  ans  ils  élis  lient  entre  eux  un  rni,  (  t 
s'assemblaient  au  ino  s  de  novembre,  le  jour 
de  saint  .Martin,  el  au  mois  d'.ivril,  le  jour  ilo 
saint  tieorges  ;  et,  si  qudcpi'un  avait  fait 
(luelque  faute  ,  il  eu  était  repris  pir  le  mi  et 
par  cinq  ou  six  autres  de  1 1  société.  Ils  de- 
vaient se  trouver  à  ces  assemblées  sous  peine 


(«)  Vuy.,!.  la  (i-dii  vo'.,  n"  l'JI 


777 


LFV 


!.EV 


"7S 


d'un  marc  d'nrgonl,  à  moins  qu'ils  n'eXjsscnt 
une  cxcust!  légitime.  Personne  ne  pouvait 
(■Ire  reçu  dans  i.i  compagnie  que  par  le  roi  cl 
huU  oii'dix  (les  plus  dislinpués,  ri  avec  r.iRré- 
inenl  du  duc  de  Bar,  qui  promit  de  |)rolcgcr 
et  d'aider  ces  chevaliers  du  toutes  ses  forces. 
Si  quelqu'un  faisait  tort  ou  causait  quelque 
donima;;e  à  l'un  de  ces  cheva'iers  ,  celui  qui 
avait  élé  offensé  devait  en  demander  ju^licc 
;iu  duc  de  lîar,  s'il  élail  son  sujet,  cl,  ^'i\  ne 
l'était  pas,  il  dtv..i'  la  demander  à  son  sei- 
{jneur  naturel,  avant  que  de  venir  aux  voies 
de  fait  ;  et,  en  cas  de  refus,  ils  étaient  obliges 
de  prendre  la  défense  de  celui  cjui  avait  reçu 
(!u  dommage,  comme  il  est  plus  amplement 
spécifié  d-uis  les  letires  de  l'établissement  de 
cette  société,  dont  voici  la  teneur  : 

A  lotis  ceux  qui  res   présentes  lettres  ver- 
ront. Nous  TInbaul  de  Btumont,  PliUberl,sci- 
(jneitr  l'e  Bejlroynv  nt,  Eustaclie  de  Conpans, 
hichnrd  de  llernioises,  Pierre  de  lieffrotjmont, 
feigneur  de   Jiuf/în,    Régnant   dti   Chastelcl , 
f.vrard  du  Chaslelct  son   fîls,    Mansart  de 
Sus,  Jeun,  seigneur  d'Orne,  Phili/ipes  de  No- 
reroy,  Ovy  de  tendes,  Jean  de  Laire,  Jean  de 
Scroncou!  t,  lùiarl  d'Oultcngcr,Jcan  de  Bef- 
iroymont ,  seigneur  de  Sonloi<,  Jean  de  Ma- 
ineiz,   et  Joffroij  de  JUtssompiire,  chevaliers, 
Jean,  seigneur  de  Tlodemnrs,   Robert  de  Sar- 
rebruche,  seigneur  de  Commercy,  Edouard  de 
drandprey,  Henry  de  Breul,  Mery  de  la  Vaux, 
Jeaffroy  d'Aspremont ,  Jean  des  llernioises  , 
Robert  des  Ilermoises,  Simon  des  Uermoises, 
Frangue  de  Leuze,  Aubry  de  Boulanges,  Hen- 
ry Despeneaut,  François  de  Xorbey,  Jean  de 
Lou,   Hugues  de  Mandres,  Ilnarl  de  Mun- 
dres,  Philibert  de  Doncourt,  Jeun  de  Sampi- 
gny.  Colin  de  Sampigny,  Arnoul  de  Sampi- 
gny,  Alardin  de  Monsey,   Hanse  de  NcU'lin, 
tedrand  Richard  d'Aspremont,  Thierry  d'An- 
nols,  Thomas  d'Ouiunges,  Juguenin  de  Nicty, 
et  Jagueninde  Villars,  e.<CH!/(rs,s  dut.  Sçavoir 
faisons  gue,nous ngnrdans  cl  désirons  vivre  c7i 
honneur  et  en  paix,  avons  avi'C  que  nous  fe- 
rons ensemble  une  comjiagnie  durant   l'espace 
de  cinq  ans  entiers,  comincvçnns  <)  la  dalle  ds 
présentes  :  c'est  à  scacoir  que  nous  lous  dessus 
nommez  avons  juré  aux  saints  Evangiles  de 
Dirti,  et  sur  nos  lionnrurs,  que  nous  nous  ai- 
merons et  porterons  fuy  et  loyauté  les  uns  en- 
vers les  autres,  et  se  nous  sçarons  le  mal  ou, 
domcge  l'un  de  l'autre,  que  nous  le  détourbe- 
rons  à  nos  pouvoirs,  et  le  ferons  sçavoir  les 
uns  aux  autres,   ledit    lems  durant,   et  cette 
priseiite  alliance  et  compagnie  avi:ns  jwc  en- 
vêts  tous  cl  contre  tous,  excepté  nos  seigneurs 
naturels  et  nos  amis  charnels,  et  durera  cinq 
ans  entiers,  comme  dit    est,   et    se   nul   cou- 
lait quelque  chose  demander  et  re.jucrir,  nous 
en  venriDUs  à  jour  cl  à  droit  pardevani  notre 
Ires  R.  P.  en  Dieu,  nuire  trcs  redouté seigne  ir 
le  cardinal  duc  de  Bar,  7narquis  du  Pont,  se- 
gneur  de  Cassel,  lequel  notredil  seigneur  n^ius 
u  promis  loyaumenl  en  parole  de  principie  de 
nous  ailler  et  conforter  de  toute  sa  puissance 
et  de  son  pays  et  de  toutes  les  choses  dessus, 
envers  cl  contre  tous  ceux  qui  à  jour  et  à  droit 
ne  voulront    vinir  là  où   il  apport ienldroit 
par  raison,  et  frons  un  roi  de  cette  eompa- 
Dicr.'ONNAinE  de*  Orores  rf.i.igifux.  U 


gnie,  qui  durera  tm  an  entier,    et  nous  tous 
qui  serons  de  cette  compagnie,  porterons  un 
Lévrier  qui  aura  en  son  col  un  collet,  auquel 
sera  escript,  Tout  ung,   it   tous  les  ans  lien' 
rons   deux  journées,  la  première  à  la  Saint- 
Martin  d'yvcr,   et  l'autre  à  la  Saint-Georges 
en  avril,  pour  sratoir  s'il  y  aurait  aucune 
foule  en  ladite  compagnie  ;  et  se  aucune  faute 
il  y  aroit,  elle  seroil  anmndée  par  le  roy  et  par 
six  des  autres  alliez,  et  conveni  a  que  chacun 
soit  auxdilcs  journées,  sous  paine  de  payer  un 
marc  d'argent,  auxquelles  journées  on  devrait 
envoyer  se  on  avait  excusation  ,   soy  excuser 
et  payer  sa  part  des  dépens,  et  se  tenra  la  pre- 
mière journée  à  Suint-Michel ,   cl  ne  peut  on 
mettre  aucun  en  cette  compagnie  que  ce  ne  soit 
p.r  l'ordonnance  de  mondit  seigneur,  et  par 
le  roi  d'icelle,  ensemble  huit   ou  dix  des  plus 
grands  d'icelle,  lesqttels  seront  nommez  es  let- 
tres de  celuy  qui  sera  commis  pour   sçavoir 
ceux  qu'ils  auroient  élu.  lit  se  aucun  faisait 
tort  ou  domage  à  l'un  de  cette  compagnie ,   il 
devrait  requérir  notredil  seigneur  qu'il  l'eul 
à  jour  et   à  droit   s'il   estait  son  sujet,  et  s'il 
v'esioit  son  sujet  ,  devra  re/uerir  le  seigneur 
de  qu'il  serot  sujet  qu'il  l'eul  à  jour  et  A  droit 
devant  que  on  fit  œuvre  de  fuit,  et  en  cas  de 
refus,  notredil  i-eigninir  dcvr<dt  aller  la  com- 
pagnie jus:^xies  à  droit,  lit  nous  tous  serons 
lenuf  de  servir  à  nos  dépens  celui  à  qui  en  fe- 
rait domajc,   gui  ainsi  aurait  requis  tant  que 
le  pays  du  duché  de  Bar  et  marquisat  du  Pont 
durant  et  pour  le  lems  avenir:  car  se  para- 
vent la  dalle  des  p'  esentes,  ou  paravent  ce  que 
aucun   fui    mis  de  celle  compagnie   aucune 
guerre  esloil  commencée,  nous  ne  serons  point 
tenus   d'en   aider  l'un  l'autre,  comme  dit  est 
par  la  manière  qui  s'ensuit  :  c'est  à  sçavoir  un 
bannerct  à  tr  is  hon.mes  d'armes  ,    un  simple 
chevalier  <)  deux  ,    et  tin  escttger  à  ung  ,   huit 
jours  après  que  celui  à  qui  on  ferait  domage 
l'auroil  fit  sçavoir  au  roy  de  celte  compa- 
gnie, et  que  ledit  roi  en  aurait   recjuis  ;  et  se 
plus  grand  force  y  convenait   ou    se  devioit 
renforcer  au  regard  du  roy  et  de  six  de  ladite 
compagnie,  et  tîntes  ces  dites  alliincvs,  nous 
tous  avons  faites  et  pissées  p  ir  le  cousenlc- 
ment  dudit  seigneur  cl  en  sa  présence  ,  et  ice- 
luy  notredil  seigneur   nous  a  promis  qtte  se 
nous  avions  delml  les  uns  aux  autres  de  nous 
oir  et  garder  te  droit  de  chacune  partie  sans 
Inngs  procès,  comme  bon  seigneur  doit  faire 
à  ses  sujets,  et   nous   lui   devons  garder  son 
bien,  étal  et  honneur  et  proffil  de  taules  nos 
ptiissarices,  comme  bons  vassaux  doivent  faire 
à  leurs  bous  seigneurs ,  sans  feinlise  ne  enlre- 
pos  aucun,  et  ne  p  ttrra  aucun  de  celle  com- 
pagnie prendre  ne  accepter  aucune  autre  com- 
jiagnie ou  alliance  au  préjudice  de  cette  roi/i- 
pagnie  Icellc  durant,  sinon  pur  la  volonté  et 
consentement    de  notredil  seigneur.    L'n   le- 
moing  de  ce  nous  tous  avons  mis  nos  scels  à 
res  présentes,  et  avons  i-upplié  et  requis  notre 
dit  seigneur  gue  pour  plus  grande  approba- 
tion de  celle  luy  plut  mettre  son  scel  à  ces 
présentes.   El  nous  Loys  par  la  grâce  de  Dieu 
cardinal  duc  de  Bar,  marquis  de  Pont ,  sei^ 
gneur  de  Cassel,  èi  la  requesie  des  dessus  nom» 
mcz,  avons  fut  mettre  notre  scel  à  ces  pr»?- 

23 


770 


Mr.TiONNMRF.  tiF.s  or.ruF.s  r.F.i.ir.iri'x. 


781 


unies.   Donnt'  ù  Bnr  le  derraiit  jour  de  mny 
l'on  UIG. 

(.'ommunic/H-!  pnr  M.  de  Clc'rambaul. 

LIND.WV.  Voij.  Cologne. 

LION    (CllEVALIEI-.S     Dl) 

Des  chevaliers   dis    or.hrs  du  Lion  et  de  la 
Couronne  eu  France. 

Engucrrnnd  !"■,  seigneur  de  Coiicy,  qiii 
vivait  en  lOSO,  ajcinllué  un  lion  dans  la  fo- 
icl  d'î  Coucy  qui  Taisait  beaui-nup  de  ravasics 
aux  envir.ms ,  pour  en  ((msuivcr  la  nirtuoire 
l'on  fil  faire  en  pierre  la  fi;;iiic  de  ce  lion, 
«inc  Ton  pla  a  dans  i.i  eour  du  i-li.Uraii  de 
Coucy,  cl  Ton  institua  des  fêles el  des  réjouis- 
sances (|ui  se  renouvelaient  tous  les  ans;  et 
les  fondateurs  de  l'al(ba\e  de  Nogeni ,  qui 
éiaient  de  la  maison  de  Coecy  ,  obligèrent 
l'abbé  de  ce  monastère  d'ollVirclu  pain  et  des 
l'.ssub  s  nu  seigneur  de  Coucy  dans  la  cour 
où  ce  lion  était  placé  ;  ce  qui  se  faisait  de  la 
manière  suivante.  Avant  que  do  présenter  ce 
pain  et  ces  rissoles,  l'abbé  était  oliligé,  re- 
vêlud'un  liab  t  de  la!)oureur,a\en  un  srmnir, 
et  monté  sur  un  cheva!  liarnaciié  comme 
pour  aller  au  labour,  de  fairi'  plusieurs  tours 
dans  la  cour,  en  faisjat  cla(|ucr  un  fouet 
qii'il  tenait  à  la  main  On  viitait  ensuite  son 
équipiîge  pour  voir  s'il  était  ci  bon  étal,  cl 
si  l'un  trouvait  qu'il  manquât  se  iletnent  un 
clou  aux  fers  du  cheval,  il  était  confisqué  , 
après  quoi  l'ablié  é:a  l  reçu  à  faire  ses  pré- 
sents :  ce  qui  se  léilérait  trois  (ois  l'an,  aut 
fêtes  de  Noél ,  de  l'aqiies,  et  de  la  Sain'-.lean- 
Haptiste.  Lalouèle,  qui  a  fait  en  lo76  l'his- 
toire {;énéa!ogi(|ue  de  la  mai.-.oa  de  Coucy  , 
ilu  avoir  vu  celte  cérémonie,  qui  s'observe 
encore  à  présent  avec  d'autres  circonstances, 
que  cet  auteur  a  omises,  et  qui  consislent 
en  ce  que  ce  n'est  plus  l'aiibé  qui  rend  (et 
h'inimage  en  personne  ,  se  contentant  d'y 
(Mnoyer  un  des  officiers  de  l'abbaye,  (]ui  a 
dans  son!Cmoir  une  certaine  quantité  de  blé, 
et  qui  mène  avec  lui  un  chien  (|ui  a  deux  ris- 
soles à  son  cou.  S'il  les  £;àte  ou  les  mange, 
i]uil  fasse  ses  ordures  dans  1 1  place  et  le 
cheval  aus-i,  l'abbé  est  condamné  cà  une 
amende.  Celui  qui  rend  l'hommage  embras  e 
aussi  deux  lions  de  pierre  (jui  sont  à  la  poile 
de  riiô'cl  de  ville  ,  où  l'on  a  transiiorlé  celui 
qui  étaitdans  la  cour  da  château. Cet  homma};e 
se  rend  présentement  dans  la  place  de  la 
ville. 

Lalouèle  ajoute  que  ce  fut  à  l'occasion  de 
celle  action  d'Iùiguerraiid  I"'  qu."  fut  institué 
l'ordre  du  Lion,  (lu'lùiguerrand  il  renouvela 
au  commencement  du  règne  de  saint  l^ouis, 
rommc  Itellefurél  l'a  remarqué  dans  son  His- 
toire de  France;  ce  qu'il  fil  avec  une  magni- 
ficence royale,  mais  il  y  a  plus  d'apparence 
que  ce  seigneur  a  été  l'instituteur  de  cet 
ordre.  L'on  donnail  pour  niari]uc  à  ceux  qui 
y  entraient  une  médaille  d'or  où  était  repre- 
senic  un  lion. 

Il  y  a  eu  encore  un  autre  ordre  sous  le 
nom  de  la  l>)uronne,  (lui  a  été  institué  par 
Knguerrand  Vil,  seigneur  de  Coucy  et  comte 
de  SoissoDSj  dont  il  est  fait  nienliun  dans  des 


lettres  de  conlirmalion  que  Louis,  duc  d'Or- 
léans, accorda  aux  l'éres  Célestins  de  Ville- 
neuve, après  qu'il  cul  acheté  la  terre  de 
Coucy  et  le  comté  de  Soissons.  (les  lettre  , 
qui  sont  insérées  dans  un  cartulairc  de  la 
Chambre  des  Comptes  de  Ulois  de  l'an  139J, 
fol.  '3ï  v°,  comnii'ncent  ainsi  : 

Loys  fils  de  roi  de  France,  duc  d'Orléans, 
comle  de  lllois,  de  lieuumont  il  de  Soissons 
et  seigneur  de  Cuuci/,  sçaioir  faisons  à  tons 
présents  et  avenr.  Nous  avons  ru  tes  hitr.t 
de  notre  cher  aine  coustn  tnessire  Enyuerrand, 
jadis  seigneur  de  Coucy  et  comte  de  Soissons, 
contenant  la  forme  ifui  s'ensuit.  Enguerrain, 
sire  de  Cuun/,  comte  de  Soissons  et  baron  de 
Marie,  sçavoir  faisons  el  tous  pre.^ens  et  ave- 
nir, qu"  nous  considérons  que  le  p'icrinnge  et 
les  biens  temporels  et  mondains  de  cette  vie 
transitoire,  sont  ordonnés  à  un  cliaruin  qui 
bien  en  veut  et  sccl  user,  à  édifier  it  faite 
trésor  envers  Dieu  qui  tous  biens  apprrstrz 
mius  par  vrai/e  dévotion  en  honneur  de  Dieu 
le  Père,  le  Fils  et  le  Sainl-Esj)rit,  un  Dieu 
vrnyt^  et  sainte  Trinité,  île  1 1  glorieuse  \'icrye 
Marie,  de  tous  les  saints  et  saintes  de  paradis, 
et  pour  avoir  prières  perpeiuelli s  pour  »io«<, 
vos  devanciirs  et  successeurs  de  notre  1res 
dure  et  eimce  compagne  Isabel  de  Lorraine  à 
présent  notre  femme,  pour  tous  les  checnlie's 
et  dames  les  ecuiers  el  damoiselles  qui  uni 
(Sic,  sont  el  seront  de  noire  ordre  de  la  ("ou- 
ronne,  pour  la  singulière  awour  el  affection 
que  nous  avons  envers  la  dévale  et  tainte  ordre 
des  Celeslins  cl  Inccroissement  et  augmenta- 
tion du  service  dii  in,  pour  consacrer  le  corj  s 
de  Xoire  Seigneur  en  suint  sucrement  de  l'au- 
tel, que  il  par  su  grwe  ordonna  à  faire  en  la 
remembrance  el  commémoration  de  lui.  de  sa 
sainte  digne  mort  el  passion  qu'il  voult  so  of- 
frir pour  tous  les  chrétiens,  et  pour  eslre  ac- 
compagnez à  tous  les  Lien  faits  de  charité,  de 
prière,  el  de  dévotion  ijui  ont  esté,  sont  et  se- 
ront faits  pur  lesdils  religieux  de  ladite  ordre 
des  Ccleslin-^,  eslre  fait  et  construit,  édifié  ci 
islulliaa  lieu  el  en  la  place  de  nolie  ma  s  lU 
de  Villeneuve  auprez  Soissoiis,  i  te.  (!elle  loii- 
dution  est  du  2;!  avril  liJ'JO,  et  les  lettres  du 
duc  d'Orléans  sont  données  à  lieauté-sur- 
.Mariie,  au  mois  de  noveaibre  l'iO'i.  Il  si; 
trouve  un  sceau  d(î  ce  prince  a  la  Chanlire 
d;^s  C-  mptes  (le  lîlois,  où  il  est  représenté  à 
cheval  ayant  une  couronne  renversée  atta- 
chée au  bras  droit  à  une  courroie  passée  dans 
une  boucle.  L'tm  voit  aussi  ses  armes  an 
château  de  lilois  et  à  l'hôtel  de  ville,  au 
b.is  desquelles  il  y  a  aussi  une  couronne  ren- 
versée. Cette  couronne  pourrait  être  la  mar- 
iiue  de  l'ordre  de  la  Couronne  insiiiué  |iar 
l.nguerranil  de  Coui  y,  que  le  duc  d'Orle.ms 
aurait  conservé  élant  devi  nu  seigneur  do 
Coucy  et  de  Soissons. 

Mémoires  communiqués  par  M.  de  Clai- 
ramliaud. 

LIONNÎÎ  (  Ctii;vALii;iis  ne  i.a).  Vog.  Ciiois- 

SANT. 

LIS  (CuKVAi.iBiis  nu),  dans  les   royaumes  de 
Mavari  e  el  d'Aragon, 

Si   nous   voulons  ajouter  foi    à    l'avili,  à 


781                                  LIO  MO                                   7f?? 

l'abbé  Giustininni  cl  à  quelques  aulres  au-  finicias  él.iit  mnl.iile  lorsque  coltc  image  (ut 
leurs,   Garcias  VI,   roi  de  Navarre,    inslilua  trouvée.  Il   y   a   il'aulrcs  auleurs  qui  disent 
l'onire   du  Lis.   Ce  prince,  selon  ce  que  di-  encore  (lue  ce  no  fut   point  ce  prince  qui  in- 
seiil  CCS  auleurs,  cUint  tombé  dangereuse-  slilna  cet  OMlre,   mais  son  père,   Sauclie  le 
meut  malade  l'an  10V8,  envoya  à  Sainl-S;iu-  Grand,  l'un  I02o.  ils    ne  conviennent  point 
veur  di-  Lcira  et  à  quol(|uo3  autres  lieux  de  non  plus  sur  la  marque  qui  distingu.iit  ces 
dévotion  faire  îles  prières  cl  des  vœux  ]iour  chevaliers.    Favin,   (ommu    nous  avons  dil, 
le  recouvrement  de  sa  sanlé.  En  effet,  il  la  prétend  qu'ils    portaient  un  lis  d'argent  on 
recouvra,  el  ce  qu'il  crut  y  avoir  le  plus  roii-  broilerie,  cl  que  le  cdlier  était  c  niposé  d'un(! 
Iribué  fut  la  dévotion  qu'il  eut  à  une  imago  double  chiiue  cnirelacée  d'iM  gothiques,  au 
iiiiracuieiise  de  la  saiule  Vierge,  sf.rl.uU  d'un  bout  duquel   pendait   une   mcdaillo  dius  la- 
lis  et  tenant  son  Fils  entre  ses  bras,  qui  fut  quelle  il  y  avait  un  l's  siirniontô  d'une  M  go- 
Irouvéodans  le  tnéme  tem|is   à    Nagera,  où  tliiqui-  couronnée.  Yépèz   dit  que   ce  collier 
il  lenait  ordinairement  sa  cour  et  où  il  avait  était  composé  de  chaînes  d'or  el  d'argeni,  au 
toujours   demeuré  dès   sa  jeunesse  :  ce  qui  bout  du(iucl  il  y  avait  un  vase  p'ein   de  lis, 
lui  fit  donner  le  surnom  de    Xagern.   C'e.t  cl   que  Von  nomma  cet  ortirc  de  la  Tennçn 
ponr(|Uoi,  la  rncnie  année  !0i8,  il  fit  bâlii  en  ou  du  Vase  de  Lis,  à  cause  (jne  1-  roi  de  Na- 
aclion  de  giàccs  une  église  iriagnifi  lue  q'se  varrc  trouva  aussi  uii  va<e  plein  de  lis  à  cô'é 
l'on    appelle    aujourd'hui    Sainte-Marie- la-  di!  l'imjge  de  la  sai^ite  Vierge.  Michieli  et  Ij 
lioyale  de  Nagera,  qu'il  accompagna  d'unsu-  I'.  Mcudo,  (jui  sont  deux^utres  auteurs  es- 
perhc  monastère,    où   il  mit  dss  moines  de  pagnols,   ilisent  que  ces  chevaliers  portaient 
l'ordre  de  Saint-Heniil.  Non  content  de  cela,  sur  un  habit  blanc  l'imnge  de  l'.Vnnonciation 
etpour  lémoignerdavaiitagc  la  ilcvotioii  qu'il  du  la  sainte    Vierge   entre  dcu\    lis.   Vépèz 
i;ortail  à  la  j.ainlc  X'ierge,  il  institua  en  son  aj  mie  ijue  cet  ordre  fui  éteint  après  la  mort 
lionneur  un   ordre   militaire  sous  le  nom  de  de  Gircias  ^"I,  son  inslitiiteur,  et  Favin  pré- 
Sninle-Maric  du  Lis,   dont  il  retint  pour  lui  lend  qu'il  fui   beaucoup  lloriss.inl    sous  ses 
(t  pour  ses  successeurs  la  qualité  de  chef  et  successeurs.  Ces  coiil  rai  iéti^s  qui  setiouveiit 
de  grand  maître.  Cet  onlre  éiait  composé  dj  entre  ces  auteurs,  qui  n'apportent  aucun  li- 
Ireiite-huit  chevaliers,  tous  genlilhomuies  ti-  Ire  ni  aucun  témoignage  pour  appuyer  Icuis 
rés  de  rancienn('  nolilss"  de  liiscaye,  de  la  sentiments,  nous  portent  à  ne  rien  croire  de  c<', 
Vieille-Caslilie  et  de  la  Navarre,  qui  en  le  re-  (lu'ils  disent,  clanl  persuadés  d'ailleurs  qu'il 
cevani  faisaient  vœu  cl  serment  solennel  en-  n'y  a  eu  aucun  ordre  militaire  avant  le  xir 
Ire  les  mains  du   roi  d'exposer  leurs  vies  cl  s'ècle.  Aiusi,ni  Sanche  let^rand  ni  Garcias\  1 
leurs  personnes  pour  la  conservation   de   la  n'ont  point  été  les  ins:i  ulcurs  de  cet  ordre  : 
couronne    de    Naviirre    et    l'expulsion    des  et,  s'il  a  subsisté,    il  ne  peut  avoir  éié  fon  lé 
Maures.  Chaque  chevalier  portail   sur  l'es-  que  par  quelques-uns  do  leurs  successeurs, 
tomac   un    lis   d'atgerit  en   hroderio,  cl  aux  tans  (ju'on   sache   en  quel  temps  il  a  com- 
jours  solennels  une  chaîne  d'or  entrelacée  moiué.    il  a  eu  le   même  sort  de   plusieurs 
de  lettres  M  golhi(|ues,   au   bas  de   l.iquelle  aulres  qui  ont  été  abolis:  ce  qui  n'a  pas  cni- 
pendait  une  médaille  d'or  en   ovale  où  était  péché   l'abbé    (iiusiîniani  el  Shoonebecii  du 
un  lis  ém.iillé  de  blanc  sortini  d'une  terrasse  dire  que  les  rois  de  France  et  d  Espagne  s'at- 
el  surmonté  d'une  M    gothique  couronnée,  tribnent  chacun  la  qualité  de  grand  maîlr.i 
ils  étaient  tenus  de  dire  lous  les  jours  cer-  de  cet  ordre  ;    el  Giustiniani  a  même  donné 
laines   prières    (jui    leur    furent    prescrites,  une  chronologie  de  ses  grands  maîtres,   qui 
a\ec   une  règle,   parles  moines  <lu  monas-  commence  à  Garcias  VI,    roi  de  Navarre,    et 
1ère  de  Sainle-Maric-la-ltoyale  de  Nagera,  finit  à  Louis  XIV,  roi  de  France,  ronjointc- 
Selon  le  même  Favin,  cet  ordre   a  clé  lloris-  ment  avec  Chai  les  il,  roi  d'Espagne, 
saiit  sous  les  successeursdeGarcias  VI,  et  on  II  y  a  bien  de  l'apparence  que  cet  ordre  du 
voit  encore  leurs  effigies,  aussi  bien  que  celles  Lis,  qur  l'on  prétend  avoir  été  institué  dans 
de  [ilusieurs  chevaliers  de  cet  ordre,  lant  au-  le  royaume  de  Navarre,  est  le  même  que  c(;- 
dit  Nagera  qu'à   Saint-Sauveur  de  Leira,    à  lui  du  Vase  de  Lis  de  la  sainie  V  ierge  insti- 
Saint  Je  in-IJai'tiste  de  1,1  Hoche,  au  monas-  tué  pir  Ferdinand,   infant  de  Ca=lille  sur- 
lère  de  Bonc  vaux,  en  ré.;;lise  cathédrale  de  nommé  d'Anliguera,  pour  avoirconquiscelle 
Pampeluue,  et  en  d'aulres  lieux,  avec  le  col-  [race  sur   les    Maures   !'an  1410.   Il  y  a  des 
lier  de  l'ordre.  écrivains  espagnols    t|ui   prélendenl  que   ce 
il  est  vrai  qu'Yépèz,  dans  sa  Ciironique  de  prince  ne  fil  que  renouveler  celui  ilu  Lis,  qui. 
l'Ordre  do  Saint-Benoît,  parlant  du  monas-  selon  eus,  avait  élé  institué  (lar  Garcias  \  I 
1ère  de  Sainte-Marie-la-Koyale   de  N.igcra,  et  qui  fui  éteint  par  sa  mort.  Jérôme  Komau, 
dit  aussi  que  Garci  is  VI,  après  avoir  fait  bâ-  cilé  par  Yépèz,  est  de  ic  nombre,  et  met  l'in- 
lir  ce  monasière,  institua  un  ordre  militaire;  siluliou  de  celui  du  Vase  de  Lis  par  rinlaut 
mais    il  dit  que  ce  fui  l'oidre  de  la  Terrant,  de  Caslille  l'an  iW.i,    prétendant  que  le  mo- 
(lu  du  Vase  du  Lis,  el  en  n)ct  la  fondation,  t.f  qui  porta  ce  prince  à  l'iiisliiuer  fut  la  dc- 
aussî  bien  que  celle  du  monastère,  l'an  10o2.  volion  qu'il  portait  à  la  sainte  Vierge,  el  que 
Le  motif  qui  porta  ce  prince  à  faire  ces  deux  ci'  fut  le  jour  de  son  assomption  qu'il  fit  des 
fondations,  selon  cet  auteur,   fut  la  dceou-  chevaliers  do  cet   ordre  dans  la  ville  de  iMe- 
verte  qu'il  fit  dans  ce  temps-là  d'une  image  dîna  del  Cauipo.  .Mais  le  titre  de  roi  que  cet 
de  la  Vierge;   mais  ce  fut  étant  ait  chasse  auteur   attribue   à  ce  prince  donne  lieu   de 
qu'il  trouva  celle   image,   circonslance  qui  croire  que  cet  ordre  ne   pool   pas  avoir   été 
ue  convient  point  à  ce  que  dit  Favin,  que  iuslilué  l'an  ÎVO'J,   puisqii'il  ne    fut  élu  roi 


TS5                                           niC.TlONNAIRF.  DES  ORDRES  REI.If.lElX.                                          7S* 

«l'Arngon  qu'en  lilO.  Ceux   qui  ont  ilil  que  pico,  cl  cmnniil  M.  Paquior  Bourré,  préiro, 

iT  fut  l'an  l'tl.l  se  sont  aussi  liomiés,  \im<-  nailf    de    Saiiil-Cicrniain-siir-Indrc    proche 

que  Miviiiia  (Ici  Campo,  dû  se  fil  celle  iiisli-  !.(>(  lies  ,     pour   adiuiiiislr.ileiir    spiriliiol    cl 

luIiiMi,  csl  de  la  Nieille-Ca'^tille.  qui  appar-  temporel  de  rel  liôpilal  naissant.  Ce  bon  pré- 

lenail  à  Henri  III  ,    roi  de  Ca^tilll•,    frère  de  tre  y  dimna  ccnl  sols  de  rente,  el,    pour   le 

Ferdinand.  Ainsi,  il  y  a  hien  de  rapparencc  surplus  de  lenlrelien  di-s  rel  pieuses  et  îles 

que  re  dernier,   ayant   ét^  élu  roi  d"Arag<in  pauvres,    il    se  donnait   lui-inèmc  la  poiiic 

en  IVIO,  lit  la  réreinnnie  de   l'iuslilulion   do  d'aller  quélcr  de  maison  en  maison, 

e.  I  ordre  dans  la  ^  ille  de  .Médina  del  Canipo,  j/q,,  fit  ^^^i^  y^^  1C20  une  religieuse   de 

..n  II  a»a.t  p;  is  nnissiinre  etfaisa.l  son  séjour  l'Hôtel-Dieu  de  Paris  pour  elal.lir  la  réi-ula- 

ordmaire.lorsqu  .1  fui  fa.l  roi.  Ara;;on.  Quoi  ,(,5  d;,,,^  ^^^  |,opit,.|.  K!le  y  donna   ri.ab.(  a 

.|ni|ensou.l,.npret,ndquelccollicrdecrt  ,r„is  fiUps  ;    mais  étant  n.orle  a>anl  quelles 

ordre  était  compose  de  vases  remplis  de   lis  rus,enl  lini  leur  année  de   nrobaliou.    Tar- 

.•nircl.ice  de  priiïoMS.  au  bout    duquel  pea-  chevèquc  de  Tours  y  envoNa  do  i'b.Mel-Dieu 

da.l  une  médaille  du  elail  I  image  de  la  sainte  ,|,,  (.,1,^  .j  ^^  „„y  .,,^1^^  ,-,ii;,Mouse  qui  recul 

'C-^"*^,  '   '/.,        •      j   ,    ^,    ,      .    ,        „     .  ït'ur   profession,  el  s'en  retourna  ensuile  à 

j  epez,  (  lironica  de  la  Orclcn  ne  Snu-Beniln.  'fours 

ra>  iu.  llistoire  de  \m<irre  et  Thédlre  d'hon-  Lc  zèle  de  ces  nouvelles  professes  à  sen  ir 

"enretde  chcialcne.  Le  P.  Anse  me.   Le  Pa~  i^,  pauvres  alliranl  une  inlinilé  de  malades 

Inn  de  t  honneur  Mcnnen.us,  Helinœ  e/uesl.  ,,.,„s  ^^j  ,,5  ji,.,,     ,  j  j^.y^  p,.i,i  nombre  n'e- 

'''■.''••^'=''.!:.-^''^"'^^''  ^;:  ^'f-  ""'";  ^o^^P'i  ^'':  lanl  pas  sulfisanl  pour  résister  au  travail  el 

einelli,    y^«or.    m   ,1.  de  carnier    Bernaid  .,    ,3    f.iii.uc,    l'arclievéque  de  Tours,    qui 

(..u.l.n:ani    //,^^  ,/,  /„^/.  ^/.  0,Y/.  mi/,/.  et  av.iit    permis  col    élabiisscmenl,    consenlil 

Sfdooucbeck,  Ihst.  des  Ord.  nulitairts.  n,,^,;  ,j„p  ^..^  religieuses  reçussent  un  p'iis 

LIVONIE  f  Chevaliers  de).   Voy.  Tivro-  f^""'"»')    "ombre    de   fille*.  Il   s'en    prés  nlail 

MQi  E.  beaucoup,  mais  li;  terrain  trop  resserre  qu'el- 

les  occupaient  élail   un  obstacle  à  la  réce|)- 

LOCIlI.i?  (UEiiGiELSiis  UosriTALu'-nES  Dic}  lion    .les    filles    qui    se    présenlaient  ;  c'est 

et  attlies  du  mène  insliiul.  pourquoi  le  roi  accorda  deux  arpenis  de  pré 

I.a  ville  (le  I.nclies  en  Touraine,  située  sur  d.sns  la  prairie  qu  on  luimme  encore  aujoin- 
rindre  ,  à  sept  lieues  d'Amboise  cl  dix  de  dhui  la  pr.iirie  du  Roi,  afin  de  pouvoir 
Tours,  a  donné  nais'^aiire  à  dis  icligienses  agrandir  les  bâlimenls  ;  el  parce  moyen  celle 
liospilalières  qui  ont  f.iil  p'usieurs  établisse-  maison  ayant  été  augmeniée  (st  devenue 
iiieiiîs  en  France.  L'iiôpital  ou  liôlel-Uxu  plus  coniniode,  ayant  une  église,  un  cbœur 
<I<;  1,01  lies  doit  en  quelijue  manière  son  é:a-  cl  tous  Ics'ieux  réguliers  qui  ron  viennent  aux 
biisscment  à  la  sœur  Susanne  l)uboi<,  reli-  maisons  religieuses,  principalemenl  à  celles 
i;ieusc  de  riiotel-Dieii  de  Seulis.  Nous  ne  où  l'on  exerce  Ibospilalitc. 
sa\ons  point  les  raisons  <iui  l'olilicèrenl  d'al-  L'exacliliide  avec  laquelle  elles  observè- 
ler  à  Loches;  mais,  y  éi.ml  arri\ée,  elle  se  mil  ia  règh  de  saint  Augustin  et  les  consii- 
r.  lira  dans  un  hospice  proche  les  Cordciicrs,  lulions  qui  leur  furent  presciiles  leur  ac- 
tuelle recevait  les  pauvres,  qu'elle  faisait  quirenl  b  aucoup  île  ié,:ulation,  ce  qui  les 
coucher  sur  la  paille  el  auxquels  elle  don-  (il  sonl:ailiT  dans  plusieurs  villes  du  rojau- 
ii.iit  senlemenl  le  couverl,  ne  vivant  elle-  me.  Les  premières  qui  eu  demandèrent  fu- 
inéme  qu'avec  beaucoup  de  peine  <les  aum(5-  renl  celles  de  t'Iermonl  el  de  Uiom  en  Au- 
nes queUs  personnes  dévoies  lui  envoyaient  vergue,  oij  .M.  Itiurrc  mena  des  religieuses 
(liaque  •cinaine.  pour  y  faire  d(  s  élablissen-.enls.  Il  sortit  eii- 

l.e  maire  el  les  éclievins  de  la  ville,  éd  fiés  suile    d'antres    religieuses    de    l'hôpilal    de 

delà  cliariié  que  ccl!c  bonne  sœur  exerça  t  (.'criiioul   pour   fomler    ceux   d'Arles  el  do 

envers  les  pauvr.s,    prièrent  le  cardnal  de  (îuérel.  L'uôpital  di'  Kiom  fonda  aussi  celui 

ta  lUicbefoucaull ,  évéque  de  ï^enlis.  de  per-  de  la  Palisse,  et  l'hôpital  de  la  Palisse  c<lui  de 

mettre  à  la  sœur  Susannc  de  s'établir  à  Lo-  (Irenoble.  Il  se  fit  enc  re  d'autres  éialdi.sse- 

I  lies.  Ce  prélat  y  (onseiilil, à  condiiion  qu'elle  inenls   à  Amboise,    à  Cliinon,   à  P>iitiers,    .1 

V  iviail  en  coinn.uiiau;é  avec  d'autres  lilles  Niort,  à  \'ierzon,à  Aubigny,à  Heauciire  et  on 

qui  f,>raient  comme  elle  piofession  de  la  ré-  d'autres  lieux,  jusqu'au  iiombri-  de  dix-huit, 

pic  de  saint  Augustin,   ainsi  qu'il  csl  porté  Ces  religieuses,   outre  les  Vicui  de   p.iu- 

i)ar  l'obédience  que  celle  Linincnce  lui  en-  vrclé,  de  cliaslelé  cl  d'obéissance,  en    font 

voya  le  li  juillet  lOU.  un  iiualrièmede  ser»ir  les  pauvres  sous  clô- 

La  "■friir  Susanne   étant  jnoric   l'an  1G2G,  lure.  Files  disent  tous  les  jnurs  au  clnrur  lo 

le  iluc  d'Iîpernon  ,    gouverneur   cl   seigneur  pelil  office  de  la  ^"ierge,  cl  font  mémoire  des 

engagisle  de  Loches.  >e  joignit  au  maire  el  létes  qui  arrivent  selon  lOrdre  du  bréviaire 

;iin  cchcvins  de  celle  ville  pour  demander  à  romain.  Aux  fêles  annuelles,  à  celles  île  No- 

'jcrirand  Dcsdiaud,   archevêque  de  Tours,  Ire-Seigneur,  de  1 1  sainte  Vierge,  et  de  pln- 

i'élaldissemeiii  d'un  monaslcrc  de  religiru-  ^ieurs  autres  de   l'ordre  de  Saint-Augustin, 

ses  liospilalières  dans  Ihospicc  où  la  sœ   r  (ommc  aussi  à  celles  des  patrons   parlicu- 

Snsaniie    avait  demeuré.  (>e  prélat  accocila  liers  de  leurs  hôpitaux,  elles  disent  le  grand 

i<'iir  demande  ,   il  ruiisentil  que  le  s  lint  sa-  oflie  du  bréviaire  romain, 

crenient  fùl  gardé  dans  la  chapelle  de  l'ho;-  i:i!is  font  abstinence  tons  le;  mi  rcrcdif  et 

II)  Vty.,  à  la  lui  du  vol.,  n'  |!I2. 


pctiil.iiii  l'avciil,  qu'iPos  commciK  ciil  ;iu  2* 
novembre,  iillcsjcûneni  tous  les  vciiiiredis  do 
l'année,  les  veilles  dC'i  foies  de  Notre-Sei- 
giicur  eldc  leurs  p.Urons.  Elles  prennent  la 
disripline  une  fois  li  sciii;iiiie,  font  oraison 
mentale  soir  et  malin,  et  tous  les  ans  elles 
renouvellent  leurs  vœux  le  jour  de  la  Pré- 
sentation de  la  sainte  Vierge  au  temple, 
après  s'y  être  préparées  par  une  retraite  de 
trois  jours,  qu'elles  l'ont  aussi  pendant  la  se- 
maine sainte,  trois  jours  avant  les  fêtes  de 
la  p.  ntecôte  et  quelques  autres  jours  de 
l'année. 

Leur  habillement  ordinaire  consiste  en 
une  robe  de  scr^e  blanciie  serrée  d'une  ceiu- 
lure  de  tuir,  et  un  scapulaire  blanc.  Les 
jours  des  grandes  fêtes,  auxque's  on  dit  le 
bréviaire  romain,  elles  portent  une  robe 
noire,  et  encore  les  jours  de  rcrémonies, 
comme  de  véturcs  et  de  professiDns,  avec  la 
«einturedecuirsans  scapulaire  et  un  crucifix 
au  côté  gauche  passé  d  ins  la  ceinture  de 
fuir  (1).  Llles  sont  enterrées  ave  une  robe 
noiie,  et  on  leur  met  la  couronne  d'épines 
qu'elles  ont  portée  le  jour  de  leur  profession. 
Leur  coilTurc  est  à  peu  près  semblable  à 
telle  des  au  res  religieuses,  si  ce  n'i  si  qu'el- 
les ont  un  double  b.indeau  et  une  guimpe 
carrée,  et  que  les  jours  de  communion,  du 
cli.ipiire  des  coulpcs,  de  l'élection  de  la  su- 
périeure et  au'rcs  cérémonies,  elles  portent 
des  voiles  de  deux  aunes  cl  demie  de  long 
qui  traînent  jusiju'à  terre  (2).  La  vélure  et 
la  profession  se  font  avec  1  habit  noir  ,  et  le 
lendemain  elles  prennent  le  blanc.  Les  sœurs 
converses  portent  des  voiles  de  toile  nuire, 
des  rochels  pcniiaiil  l'été,  et  pendant  l'hiver 
la  robe  blaiiclu-  (3).  Elles  ne  portent  jamuis 
l'habit  noir  qu'à  leur  vèture  et  à  leur  pro- 
fession, el  elles  sont  enterrées  aussi  av>  c 
l'habit  noir  et  la  couronne  U'épines,  tomme 
les  religieuses  du  chœur. 

Il  y  a  néanmoins  des  hôpitaux,  comme 
dans  ceux  de  Cicrmont,  de  Iliom,  et  les  au- 
tres du  d;orèse  de  Clermont,  où  les  religieu- 
ses portent  des  rochels  sur  leurs  habits  blancs 
pendant  l'été,  el  oîi  les  sœurs  converses 
sonl  ha'.iillées  comme  les  religieuses  du 
tliipur,  n'étant  dislini;uées  que  par  un 
voile  lilanc  qu'elles  portent  toiljour-i.  Les 
religieuses  de  ce  diocèse  ont  des  constitu- 
tions jiarticulières,  qui  ont  été  approuvées 
l'an  UDl,  par  M.  François  Bochart,  cvcque 
do  Clermont,  et  imprimées  à  Paris  la  même 
année. 

Mémoires  envoyés  de  Loches  en  1712,  et 
li's  constilulions  de  la  cungrégution  des  reli- 
gieuses Hospitalières  de  l'ordre  de  Saint-Au- 
g  us  lin. 

LOMBAUDIE.  Voy.  Augustins. 

LOMBAllDIE.    Voy.  JiiiiÙME  (Ermites  de 

Saint-). 

LOMBARDIE  (Dominicains  de  i.a  congiiÉga- 
TioN  DK  )  et  de  plusieurs  réformes  faites 
dans  l'ordre  des  Frères  Prêcheurs,  sous  le 

(1)  Vuij.,  à  1.1  lin  (lu  vul.,  u"»  lyû  et  19i. 
l'i)  Voy.,  ibid.,  Il"  l'Jo. 


LOM 


730 


nom  de  congrégations,  gouvernées  par  des 
vicaires  généraux. 

L'ordre  de  Saint-Dominique,  non  plus  que 
la  plupart  des  autres  ordres,  n'a  pas  pu  se 
garantir  du  relâchement.  Quelques  couvents 
s'étant  éloignés  de  l'observance  régulière,  les 
généraux  ont  employé  leur  autorité  pour  la 
rétablir  et  la  faire  observer.  Mais  le  premier 
de  ces  généraux  à  qui  l'on  peut  donner  le  ti- 
tre de  réformateur  de  cet  ordre  est  le  bien- 
heureux Conrad  de  Prusse  ,qui  vers  l'an  138!) 
fut  le  réparateur  de  l'obseï  v.incc  régulièri; 
dans  tous  les  couvents  d'Allemagne,  d'où  elle, 
avait  été  bannie  dès  l'an  13i'J,  lorsque  la 
peste  fil  de  si  grands  ravages  dans  la  plupart 
dos  provinces,  que  presque  toutes  les  villes 
étaient  désertes  el  inhabitées.  .\  son  imitation, 
le  bienheureux  Barihé'pmy  de  Saint-Domi- 
nique de  Sienne,  qni  fut  dans  la  suite  évo- 
que dcCorlonne,  fut  le  réformateur  des  cou- 
vents d'Italie  vers  l'an  l'i02.  Le  P.  Barthélé- 
my Texier,  Français,  général  de  cet  ordre, 
animé  du  même  zèle,  employa  son  autorité 
pour  maintenir  l'observance  régulière  dans 
tous  les  couvcnls,  el  y  portait  le^  religieux 
par  son  exemple;  ce  fut  lui  qui  inslitua  l;i 
tongrégaliou  d'Aragon,  (jui  a  subsisté  pen- 
dant 01  ans. 

Une  des   plus   considérabK'S   rérormes   fut 
celle  de  la  congrégation   de  Lomb  .rdic,  qui 
fut    commencée    vers    l'an    l'ilS    par    le   1*. 
Matthieu    Boniparti  de  N  ivare,  qui  pour  la 
sainteté  de  sa  vie  fui  choisi  par  le  p;ipo  pour 
remjjlir   le  siège  épiscopal    de  Manloue.  Lo 
P.  Joachim  Turriani,  trente  ciiuiuiJme  géné- 
ral, lui  accorda   beaucoup  de  privilèges  ;  ello 
fut  néanmoins  démembrée  sous  sou  gouver- 
nement, el   on  lui  ôla  les  couvents  de  Rome, 
de  Pise,  de  Saint-Géaiii:ien  ,   de    Vilerbe,  do 
Sienne  et   Saint-Marc  de   Florence,  pour  les 
unir  à  u.'ic  nouvelle  reforme  sous  le  nom  de 
congrégaliou   de  Toscane,  commencée    l'an 
ri-93  par  les  soins  do  Jérôme  Savonarollo, 
dont  la  fin  a  été  si  malhi  un-usc.  11  naquit  à 
Ferrare  sur  la  fin  du  xv^  siècle;  il  avait  Le m- 
coup  d'éloquence  et  de  piété,  et  fui  l'un  d's 
plus  habiles  prédicateurs  de  si;ii  temps.  Il  prê- 
cha avec  trop  de  véhémence  contre  la  con- 
duite du  papii  Alexandre  VI,  la  chaire  lui  fut 
interdite,  mais  il  ne  laissa  pas  de  parler  avec; 
la  même  liberté;  de  sorte  qu'ajant  été  pris  a 
ràgedequaraii!c-sisans,il  fut  pendu  et  brûlcî 
avec  doux  de  ses  compagnons  à   Florence, 
dans   une  sédition  suscitée  par  ses   ennemis 
le  23  mai  1W8.  Cette  congrégation  ne  dura 
que  cinq  ans  séparée  de  colle  de  Lombardie  ; 
car  après  la  mort  de  SavonaroUe  cUo  se  réu- 
nit à  celle  de  Lombardie,  qui  subsista  jus- 
qu'en l'an  1531 ,  que  ,  sous  le  généralal  d« 
Paul  Boltigella  de   Pavie,  qui   en   avait  clé 
deux  fois  vicaire  général,  elle  fut  éteinte  ei. 
érigée  en  province  par  autorité  du  papo  Clé- 
ment  VII,  qui  abolit  aussi  la  congrégation 
de  Calabre  el  l'érigea  pareilleinenî  en  pro- 
vince. 

Une    aulrc   réforme  avait  commencé  en 

(i)  Voy.,  ibid.,  u"  l'JO. 


7;7                                            DlCTIONNAinF,  Dl-S  OUDIiES  UEi.IClIllJX.                                            788 

HoUamJi'  sons  le  premier  uéncralal  de  Mar-  o  i  ilc  I!reln;;ne,  dans   la  province  de  Paris, 

liai    Auribcllc  de  ProvcHie,  cl    coniiircnail  qui   a   ijualorze   coiiveii(s;   la    coiifçréijaliou 

Yiiipt-liuil    niaisoMs,    doiil    ihk'I  (lies- unes  des  \nges  en  Provence,  qui  a  si\  tduveiits  ; 

avaieiit  élc  «ousliaiics  de  la  c  iigrégalion  de  la  eon;;réLralioii  d'Al.saio,  qui  a  (|ualre  cou- 

Loinbardie,  qui  avaient  fornic  une  Cdiigréîa-  vents  d'hommes  et  iiuit  monastères  île  filles; 

(ion  (ju'on  appel  :il  de  Ilollandv-,  à  qui  les  pa-  la  eonf^réKatlon   du  SainiNom  de  Jésus  aux 

pes  avaient  aceordé  l)caucoup  de  privilét:e-i.  îles   Antilles   de  l'Atneiiqne,  (;ui  a  un   cou- 

SI;iis,  l'an  loi 4,  le  pape  l.t'ou  X,  sur  les  in-  vent  et  vin^t  cures  ;  la  congrégation  de  S. linl- 

slances  du  roi  di-  France  L"uis  XII,  orlonna  Dominique  dans  l'iie  de  Sainl-l)omini;ue,  qui 

au  Rénéral  Thonias  Cajelan  de  séparer   les  a  deu\   couvents  et  dix  cures;  la  conu;réH;;i- 

touvents  réformés  en  France  de  la  congre-  lion    de   Sainle-SaWinc   à   Home  ,  (jui  a    huit 

galion  de  Ilollani''',  de  laquelle   ils  dépen-  couvents;  la  conççrégalion  de  ï-'aint-Marc  de 

ilaienl.  cl  d'en  faire  une   ioii;;réL'alion  non-  Florence,  <iui   a  six    couvenis  ;  la  coofjrépa- 

lelle  qui  s'appelli'raii  la  congré|;alion  Galli-  lion   de  Saint-JacquCM  de  Salonion  à  \'enise, 

caiic,  voulant  qu'elle  jouît  Hcs  n^ènii'S  privi-  (jui  .1  sept  couven'.s  ;  la  con|.'ré};alion  de  No- 

léges,  |;r;u'i's  cl  exemption-,  ijuc  celle  di- llol-  tre-Damc  de  la  santé  à  Naples,  qui  a    treize 

lande  ;  et,  par  nu  autre  bref  de  l'an  1518,  en  rouvenls  ;  la  coiii;r6;.'alion  de  Saml-Domini- 

renou>  elanl  c  t  en  augmcnl  inl  les  mêmes  pri-  que  de  i>oriano  en  Sardaisïiie,  qui  a  di\  cou- 

vilégi's  à  la  ciingiégation  de  Hollaude,  il  dé-  veols  et  un  monastère  de  lilles ,  et  la  congre- 

clari!  qu'il  les  octroie  di'  nouveau  à  la  con-  p;..ti(m  de  Saint-Marc  de  (lavoli  au  royaume 

;;ré|:alion    Gallicane,  et   ai-promc  l'autorité  de  Naples,  qui  a  treize  couvenls. 

(lu  vicaire  généial.  Les  religieux  de  France  Dans  les  congrc;;alioiis  d  •  France,  de  Hre- 

avaienl   iiéanmiins  des  statuts  |)lus  austères  lay;ne,  des  Anges  cl  de  Saint-Marc  de  liavoii, 

que  ceux  d,'  HoUaadi".  les   prieurs  des  couvents  qui    eu  dépendent 

\'ers    la  fin  du  même  siècle,  le  P.  Paulin  onl  voix  aux  chapitres  provinciaux  des  [>ro- 

lîeinaidiiii  de  l.ucques  commença  une  autre  vinces    dont   ils    portent   le   nom,  et,  après 

réforin  '  dar.s  le  royaume  de  Naples,  sous  le  qu'ils  ont  donné  leurs  suffrages  |)our  l'elec- 

liire  de  con;',régation  de  l'Aliruzzc  de  Sainte-  tiou  d'un  provincial ,  ils  s'assemblent  le  len- 

(lallicriue  de  Sienne,  qui  a  prodail  plusieurs  deaiain  cl  élisent  ejiire  eux  leur  vicaire   gc- 

religieux  d'une  émiuente   vertu,  et  qui  soiU  néral.  La   congrégation  de  Sainle-Sabi  le  no 

morts  en  odeur  de  sainteté,  comme  le  P.  Pau?  ^a  p  dut  au  chapitre  de  la  province  de  L  im- 

lin  BiTiiardini,  auiei.r  de  celte  réforme,  <lont  hardie,  dont   elle   dé()cndait  autrefois .  et   le 

la   vie  a  été  écrite  par  un  religieux  de  cet  or-  provinciiil  de  cette  province  n'a  aucun  droit 

dre.  11  mourut  en  IbSo,  a|)rès  avoir    beau-  de  visite  dans  cette  congrégation.  Le  vicaire 

coup   éleodu  sa  congrégation.  Le  P.  Nicoai  général   d'Alsace  ne   dépend  d'aiicune  pro- 

Masiode  l'érouse  lui  aida  beauciup  dans  l'é-  vince,  ncu  plus  (juc  celui  de  Said  ligne  ;  ils 

lai  lissemrnt  de   (Cite  réforme,  et,  lui  ayant  sont  inslii-.iés  tous  deax  par  le   généial,  qui 

survécu  de  plusieurs  années,  il  travailla  aussi  nomme  ai-ssi  ceux  de  l'Amériq  le.  La  congre- 

heuucoup  ;;  l'etendie  cl  à  la  mainlcnir   dans  gatioo  de  \'enise  ne  va  iioint  au  cli.ip^lre  pro- 

l'obsirvance   régulière.  Il   mourut  virs  l'an  viicial ,  nais  )c  provincial  de  la  province  de 

JGtl,cn  répulaliou  de  sainteté,  dans  le  cou-  A'enise  a  droit  de  visite  honoraire  dans  celle 

vent  de  Saint-Dominique  de  Cliiési,  et  l'ut  vi-  coiigrégalioii.  Tous    ces    vicaires   généraux 

Caire  général  de  celle  congrég.ili  )u.  n'ont   auvune  aulorilé    qu'après    qu'ils   onl 

Le  i'.  Sébastien  Miihaélis  introduisil  pns-  été  conlirmés  par  le   général  de  tout  l'ordre, 

que  datis    le  uièmc   icmps    une  sctondc  ré-  Les  rérormcs  de  ces  congrégations  ne  coi-.- 

lorme  en  F'rauic  sous  le  nom  île  congiéga-  sislenl   guère   que   dans   l'abstinence  de   lu 

tiou  Occiliine,  doni  il  l'ut  le  (ircmicr  vicaire  viande,  qu'ils  observent   fort  régulièrement 

génc.al.  11  av.iil  pris   l'Iiabil  de  l'ordre  de  dans  leurs  couvents,  mais    elles    n'onl  point 

Saint-Dominique  au   couvent  do  .Marseille,  renoncé  aux  rentes  el  aux  possessions, 
où,  après  avoir  mené  une  vi  ■  exemplaire,  il 

fit  un  1. 1  progrès  dans  l'élude  de  la  tlicologie,  LO.MIÎARDIE  (Teiitiaiuf.s  oe  S»i>t  Fkamjois, 

qu'il  reçut  avec  beaucoup   de  réputation  et  i>:ts  diî  la  cONGnic.jATi.iN  dk) 

d'ai.plaiidissenuMU  le    deg^é   de    docieur     11  ^  ,,,    ^,  ■    .„^  ^^^  ,^  congrdrjaHon 

commença  sa  reforme  a  loulouse  1  an  l.i'.);>,  .^              j                       j    j 

qui    fut   api)rouvé.:  par  le  jiape  Paul  \',  l'an  .'-"i  le  tiers  ordre  de  Saint-François,  inslitué 

ItiOS  ;  de  la  il  \int  à  Paris,  où,  sous  l'autorité  d'abord  pour  des  séculiers,    fil  tant  de  pro- 

du  roi  Henri  1\  ,  il  bâtit  le  couvent  de  V\n-  grès,  qu'il   n'y  eut  presque  poinl  de  provin- 

iioncialiuu  delà    sainte    \'ieigfi  dans  la    rue  ces    où   il  ne  s'étendit  el  où    on    ne  vit  des 

Saint-IIonoré,  où  il    mourut  le  o  mai  I(il8,  personnes  engagées  dans  le  mari  igc  se  sou- 

ilge  de  "iï  ans.  Ce  le  congrégation   ne   sub-  iiiellre  aux  lois  que  le  sain!  instituteur  avait 

siste  plus,  ayant  élé  érigée  en    province  l'an  iirescrites   à  ceux   qui  voudraient   praiii|uer 

IGO'J  par  le  pipe  Clémcnl  l.\,sous  le  litre  de  la  péiiilence,  ilnefil  pasnioinsile  pmgrèslors- 

Saiul-Louis,  ([ui   est  la  qu  iranle-cin(]uièiiie  qu'il  se  trouva  de  ces  ponilcnts  qui,   aspirant 

cl  dernière  de  l'ordre.  Los  congrégations   di;  a  une  plus  haute  peifecliou,   s'eiigagérenl  a 

l'aguze,  de  l'.Vhruzze  et  (juelques  autres,  onl  cet  etai  par  des  Vieux  sidennels.  Les  ililléreii- 

aussi  été  érigées  eu  |)ro\iiices;   il  ne  reste  les  con;^régatioiis  religieuses  qu'il  y  a  eu  de 

plus  i|ue  les  suivantes  qui  subsistent,  et  qui  cet  ordre,  eu  France,   en  Allemagne,  en  Fs- 

onl  des  vic.iires  généraux ,  savoir  :  pagne,    eu    Flandre,   en   lialic   el   dans    U  î 

La  congrégation  de  Saint-^  imcul  Feriicr  aulicsprovinccs,  cl  qui  avaient  chacune  leur 


789 


LOM 


L05I 


19C 


génér;il ,  en  sont  une  preuve  incnnloslaliîc  ; 
el  il  y  a  lieu  de  s'éloiincr  qii';(|;iôs  les  per- 
scculions  qui  lui  ont  été  suscitées,  lant  de 
la  part  de  quelques  catholiques  jaloux  de  son 
progrès,  que  par  les  hérétiques,  iiui  oiit 
renversé  el  ruiné  enlièremenl  un  grand  iioni- 
hre  de  ses  monastèns,  il  soit  encore  aussi 
(lorissanl  qu'ill'esl.  L'on  ne  voit  plus  à  la 
vérité  toutes  ces  congrégations  qui  étaient 
gouvernccs  chacune  par  un  général,  dont 
quelques-unes  ont  été  enliéreurient  éleintis 
dans  le  sang  de  leurs  religieux,  i|ue  la  fu- 
reur des  hérétiques  sacrifiait  à  l'erreur  et  au 
mensonge;  d'à;. très  réunies  à  celé  de  Loin- 
h.irdie,  qui  a  conservé  le  droit  d'avoir  un 
f  énéral ,  el  les  autres  (  nfiii  soumises  au 
(-énéral  de  tout  l'ordre  de  Saint-François; 
mais  cela  n'empêche  pas  qu'il  ne  soil  encore 
l'oit  étendu  cl  fort  recoiniiiand.il)le  parla 
science  et  par  la  piélé  de  ses  sectateurs. 

La  province  de  Lombardie,  dont  nous  trai- 
tons d  ins  cet  article  préferablement  à  lo;ites 
les  autres,  tant  à  laisonde  sonanti(iuilé  que 
du  généralat  qu'elle  a  consené  juscju'à  pré- 
sent, commença  de  la  ninnière  suivante.  Les 
premiers  religieux  d'Italie'  demeurant  dans 
le  désert,  avaient  plusieurs  maisons  éloi- 
t;nées  du  commerce  du  monde,  qui,  bien  que 
régulières,  ne  formaient  point  de  congréga- 
tion et  n'étaicul  point  unies  ensemble;  eilcs 
;,v.iient  seulement  quelquefois  des  visiteurs, 
.•^elon  le  conseil  de  ISicol.is  IV,  cl  elles  avaient 
(  liucuiie  un  supérieur  local.  Ce  manquement 
de  chef  pour  les  unir  venait  de  leurs  adver- 
saires, qui,  n'.ijant  pu  empêct.er  la  proIVs- 
sion  solennelle  de  i  et  ordre,  s'efforçaient  d'en 
arrêter  le  progrès  par  la  désunion  des  nn  in- 
bres.  Mais  le  |  ape  Mcolas  V,  par  une  huile 
de  l'an  l4V7,  le  voulant  aiîermir  et  ampliiier, 
accorda  à  ces  religieux  d'ilaiie  la  permis- 
sion de  conser\er  les  couvents  qui  étaient 
déjà  bâtis,  d'en  fonder  de  nouveaux,  d'y  ad- 
ministrer les  saercmenis,  de  célélircr  dis 
chapitres  généraux,  et  d'y  élire  de  Icurco^ps 
un  vicaire  général  cl  quatre  définiteurs  pour 
dresser  des  sta  uls,  avec  pouvoir  de  changer 
leur  habit  érémilique  et  d'en  prendre  un  au- 
tre tel  qu'ils  jugeraient  à  [.ropos,  afin  qu'ils 
pussent  èire  distingués  des  iirmiles;  et  Sa 
Sainteté  nomma,  pour  faire  exécuter  cette 
bu. le,  les  évèques  d'Eugubio  et  de  Crémone, 
avec  l'abbé  de  Saint-Paul  hors  des  murs  de 
Home.  L'évcqued'liugubio,  en  conséquence 
de  sa  commission,  fit  assembler  le  premier 
cli.ipitre  générai  à  .MonSef.iIco  l'an  li'i-8,  où 
le  !'.  H.irtliélemy  de  Bonamaiis  fut  élu  pour 
premier  vicaire  ;;énéra!.  Celle  congrégation 
n'avait  pas  eu  encore  le  pouvoir  d'élire  un 
général,  ce  qui  ne  se  fit  que  dans  le  chapitre 
([ui  se  li..l  à  Culisbulano,  au  diocèse  de  Cré- 
mone, l'an  1458,  où  on  eut  pour  [ireiuier 
général  le  P.  Ugolin  de  Plaisance  :  ce  qui 
continua  jusqu'en  l'an  i'iGS,  que  le  pape  Pie 
V,  sous  prétexte  de  réfoiMer  le  tiers  ordre  de 
Saint-François,  soumit  tous  les  religieux  et 
religieuses  de  cet  ordre  à  la  juridiction  du 
ministre  général  des  Frères  Mineurs  de  l'Ol)- 
servancc  et  de  ses  commissaires  généraux. 
ta  laai),   le  cardinal  Ferdinand  de  .liédicis, 


qui  était  |ir(4eiicnr  du  Iroisiemo  ordre,  ay.inî 
assen)!)le  un  chapitre  général  à  Komc  dans 
le  couvent  de  Saini-Côinc  et  de  Saint-Damion, 
afin  que  les  religieux  tertiaires  |  rocéda  sent 
à  l'élection  d'unsupérieurgénéral  tirode  le  r 
corps,  suivant  la  permission  qu'il  eu  avait 
obtenue  du  pape,  ils  ne  purent  s'accorder 
entre  eux,  ce  qui  fit  que  Grégoire  XII!  leur 
donna  pour  commissaire  ou  visiteur  aposto- 
1  que  un  religieux  du  même  ordre.  Enfin, l'an 
l.i8G,  Sixte  V  les  rétablit  dans  le  même  état 
qu'ils  étaient  avant  la  suppression  de  leur 
général,  faite  par  autorité  de  Pie  V,  et  leur 
permit  d'en  élire  un  :  ce  qu'ils  ont  toujours 
fait  jusqu'à  présent.  U'abord  ce  général 
n'exerçait  son  office  que  pendant  trois  ans; 
mais  dans  le  chapitre  général  qui  se  tint  à 
Bologne  l'an  ICïl,  il  fut  ordonné  ((u'à  l'a- 
venir les  généraux,  exercer, lient  leur  office 
peniJaiil  six  ans  :  ceiiui  fut  approuvé  par  le 
pape  'nnocent  X. 

Les  religirux  de  cette  congrégation  sui- 
vaient d'abord  la  règle  que  Nicolas  IV  avait 
confirmée,  y  ajoutantlcs  statuts  et  règlements 
que  Jean  XXll  avait  accordés  aux  relgieux 
du  même  ordre  en  Flande,  el  qui  lurent 
confirmés  dans  la  suite  par  Martin  V.  Ils  en 
firent  ensuite  de  particuliers  pour  leur  con- 
grégation, qui  furent  dressés  dans  le  chapi- 
tre général  qui  se  tiiit  à  Florence  l'an  ih&J, 
et  ils  les  confirmèrent  dans  celui  qui  se  tint 
l'an  l'i-TS  daui  le  couvent  delà  Forêt  du  Ma- 
tin, au  diocèse  de  Spolelte  ;  mais  l'an  l.j'f9, 
le  P.  Bonaventurc  de  Vicenzc  élanl  général, 
en  dressa  de  nouveaux,  qui  contiennent  en 
subsumce  la  ro;:le  lonCrmée  par  Nicolas  IV, 
dont  il  retrancha  ce  ([ui  ne  coiivenait  qu'aux 
séculiers  et  aux  personnes  engagées  dans  lu 
monde.  Ces  statuts  furent  d'abord  ajiprouvés 
par  le  cardinal  del  Carpiu,  proleeteur  do 
l'ordre; cl  le  pape  Pie  V  ordonna  ensuite,  l'an 
I.jOS,  que  cette  règle  ou  statuts  ainsi  ap;  rou- 
ves  par  ce  cardinal  seraient  observes  dans 
l'ordre  :  ce  qui  a  toujours  été  exécuté  par 
celte  coi;grégalion,  qui  dans  la  suile  y  a  f.nt 
(juelques  additions,  qui  n'ont  pas  été  moins 
fidèlement  observées;  et  c'est  conformément 
à  ces  statuts  et  à  la  règle  de  Nicolas  IV,  qm 
y  est  insérée  en  substance,  qu'ils  prononcent 
leurs  vœux  en  cette  manière  : 

Moi  N.  voue  et  promets  à  Dieu  toiil-puis- 
sant,  à  la  bienheureuse  Vierge  Marie,  à  saint 
i'rançoiff  à  tous  les  saints,  el  à  vous,  tiwn 
II.  P.  N.,  de  garder  toiii  le  temps  do  ma  vie 
les  commandements  de  Dieu  et  de  satisfai:  e 
selon  la  volonté  de  mes  supérieurs,  comme  il 
convient,  aux  iransfjrcssions  el  aux  fautes 
que  je  commettrai  contre  les  constitutions  et 
les  statuts  du  troisième  ordre  de  Sainl-Fian- 
çois  dit  de  la  Pénitence  et  de  la  Régulière 
Observance,  et  contre  la  rètjle  de  Nicolas  IV, 
de  la  manière  qu'elle  se  trouve  insérée  dans  ces 
statuts  et  constitutions,  vivant  en  obédience, 
sans  propre  et  en  chasteté  confurmémenl  aux 
privilèges  aposlolifjues  de  cet  ordre. 

Cette  congrégation  était  autrefois  divisée 
en  vingt  provinces,  mais  les  guerres  surve- 
nues en  Italie  ayant  ruiné  entièrement  plu- 
sieurs monastères,  el  quelques-uns  où  il  v 


791                                           niCTlONNAmE  ItES  OIISW.LS  IllXiGIEUX.  7!1ï 

nvait  peu  de  leligirus  ajanl  clé  supprimés,  d'arircnt  à  ces  Irois  Icllies  d'.izur  O.  f.  C, 

ivle  n'a  plus  présc  hUmicmI  que  qualorzc  |iro-  qui  \iu('iil  dire  Opiis  Passiouis  Christ»,  cl 

vinces,  j  compris  «clic  de  Fl.indre,  qui  for-  les  trois  clous  de  la  passion  en  pointe  ,  I  ccu 

mail  auircfois  1.1  conuri't,Mlioii  (le  Zepperen ,  timlué  d'une   couronne   ducale,    entielaré.'* 

donl  nous  parlerons   dans  la  suite,  el  qui  y  d'une  couronne  d'épines,  av<c  i elte  dcv. se  : 

fut  unie   par  autori  é  du   pape  Innocent  X.  l'oK\n  i:ntia  coronat. 

Ces  reli|;icux  ont  deux  maisons  à  Kome,  l'une  Anton,  de  Sillis,  Stiiilid  orir/in.  proveclion 

de  la  province  de  Uome  sous  le  titre  de  Saint-  et  complcmenl.  terl.   ortl.  S.  Francisci  con- 

Come  cl  de  Saint-Daniien ,    et   l'autre  de  la  Cfr/icnrif/.  Francise.  liordon, r/irono/o(/. /"/(iJ 

ITOvince  de  Sicile  sous  le  titre  de  Saint  Paul  et  Sorur.  tcrt.  ord.  S.  l'runcisc.  .loan.  Maria 

au  quartier  de  la  lief/ula.  L'Hy;lis('  de  Saint-  \'ernun,  Annal,  ej'i.id.  oiiliiiis  ;  el  lilzcarl  do 

(lome  et  de  S.iinl-Dauiien  était  autrefois  un  Dombcs,  Acadé. nie  de  perfection. 

temple  dédié  à  Uémus  et  à  llomulus,  d'autres  ..un          i-   •            <•.,!.■           j 

disent  à  Castor  et  à  l'ollux.  Le  pape  Félix  II  ^  "•  ^P'.'  /f.''.7"«"^  puimlsdHljersordre 

consacra  ce  temple   en   l'honneur  des  saints  de  Smnl-t  nmçois  de  la  liegj.lHre  Obser- 

martvrs  Côme  et  D  ,inien.  Saint  Grégoire  le  "'"^^  descnuregnlioiK  de  Smie,  de  bal- 

Grand,  voyant  qu'il  toml.iil  en   rulifc,  le  fil  "'''V^  '\  '^  'f."'''  P'cseulement  urnes  <)  celle 

réparer.   Le  pape  Adrien  \'  y  fil   apporter  de  LomOirdie. 

de  Pérouse  les  portes  d'airain  (]u'on  y  voit.  Il  Les  monastères  des  Tlelijïieux  Pcnilcnls  du 

y  a  deux  églises,  l'une  est  souterraine  el  très-  tiers  ordre  de  Saint-François  en  Sicile,  qui 

ancienne;    celle    qui    esl  supérieure  a   été  préseiilcmcnl   ne   forment  qu'une   province 

mise,   l'an   1633,  en  l'état  où  on  la  voit,  nar  unie  à  la   co!)gré;;atiun  de  Loniliardie  ,  ont 

Il  niagnilicence   du    pape  Urb;in\'ll!.  Elle  formé  aussi  une  congrégation  séparée  avant 

esl  titre  de  cardinal  ei  une  des  plus  grandes  celle  union.  Dés  l'an  lo-20,  ces  religi<'ux,  qui 

dévolions  de  Uome,  a  cause  du  grand  nombre  lui    donnèicnt  commeiiccnient,  eurent  deux 

lie  corps  saints  qui   s'y   trouvent.   Les  reli-  cou\enU  en  Sicile,  l'un  au    bourg  de  Sicio, 

gieux  de  ce  couvi  ni  portent  par  privi  cge  le  l'autre  dans  la  ville  de  Salémi.  Ils  en  obiin- 

d.iis  sur  la  crèche  de  Noire-Seigneur  Jésus-  renl  encore  un  à  Gergenli,  l'an  io23,  où,  si; 

lllirist,  lorscjue  les  chanoines  de  Sainlc-Ma-  conien'.anl  de  pratiqui  r  exactement  la  règle 

1  le-Majeurc  la  transfèrent   lous    les    ans   la  de  Nicolas  l\  yans  y  ajouter  d'.iulres  austé- 

ruil  de  Noél,  de  la  sacristie  où  elle  esl  gar-  rilés  ,   ils   demeurèrent  dans   cel  étal   sans 

liée,  sur  le  maître  autel  de  cette  même  ég  ise,  s'agrandir  davantage,  jusqu'à  ce  que  ,  quel- 

où    elle    reste    exposée   à    la    dévotion    des  ques  années  a[)r(S,  ces  trois  couvents  s'uiii- 

liJélcs  ce  jour-là   et   les   deux   lèles  (jui  le  renl  à  ceux  qui  furent   fondés  par  le  P.  Jac- 

suivenl.  ques  d'Iùigubio,  religieux  du  premier  ordre. 

Celte  congrégation  a  produit  plusieurs  per-  qui  établit  en  ce  loyaume  une  réforme  très- 

sonnes  recomm;ind,it)!es  par  la  sainteté  de  austère  du   lies   ordre   de   Saint-François, 

leur  vie,  doiu  qurlqu>s-ui'.s   ont   mérité    le  Ce  P.  .lacques  d'Iùigubio   avait  l'ail  profes- 

tilre  de  bienlicureux,  comme  le  bienheureux  sion  parmi  les  Pères  de  l'Observance;  mais, 

Jérémie  de  Germe,  donl  le  corjis  s'est  con-  dans  le  désir  d'une   plus  gran  le  perfection 

serté  jusqu'à   présent  sans  aucune  con  up-  cl  d'une  pius  exacte  praiinue  de  la  règle  do 

lion  dans  le  couvent  de  Forli ,  et  le  bieulnii-  sainl  François,   il  se  joignit  aux  |ireniiiis 

reux  Mire  de  Canzo.  Il  en  esl  sorti  aussi  de  fondateurs  de  la  congiegation  des  Capucins. 

célèbres  écrivains,  dont  1rs  principaux  sont,  Les   persécutions  qui  furent  suscitées  à  ces 

le  P.  Antoine   Collon   de   Mcosia    en   Sirile,  derniers  par  le  provincial  des  I-"ières  .Miiieuis 

professeur  dans  l'université  de   Padoiie  ;  le  de  la  province  de  la  Marche  d'.Vncone,  pour 

P.  François  liordon  de    Parme,  qui  a  donné  cnipéclier  le  progrès  de  i  cite  réforme,  oblige- 

^u    pulilic  pins  de  vingt  volumes,  la  plupart  renl  plusieurs  religieux  de  1  ()bscrvance  ijui  y 

lie  droit  canon,  et  une  chronologie  du  tiers  élaienl  entrés  de  l'abindouniT,   du  nombre 

ordre  de  Saint-Fr.ine<  is  :  Je.Jii  Altierghin  de  desquels  fui  le  P.  J.icques  d'I'^ugubio,  qui  ren- 

Palernie  ;  Jean  Antoine  lirandi  de  Saleuii  eu  Ira  |iarini  les  Pères  de  rO!)s<'rvance.  Leur  vie 

Sicile,  et  plusieurs  autres.  ne   lui  paraissant  pis  assez  austère,  et  peu 

L'habilleinriii  d,-  ers  religieux  consiste  en  conforme   au  grand  désir  qu'il  avait   de  la 

une  robe  de   serge  gri>e  serrée  d'une  coide  pénitence  et  des  ii.oitilic  liions,  il  obliut  piu 

Idanclie,    avec    i.n    capuce   attaché    à    une  de  temps  après  du  pape  Paul  111  et  du  cardi- 

grande  moze  te  ou   cainail.  se  terminant  en  nal    François  Ou  giioiuz,   pour  lors  protec- 

jioinle   par  devant  el  par  derrière  (!,'.  Lors-  leur  de  l'ordre  de  Saïuï-François  ci  (jui  en 

'lu'ils  .sortent  du  monaslère  par  un  mauvais  avait  clé  génér.il,  la  pei mission  d'aller  prè^ 

temps,  ou  qu'ils  tout  en  campagne,  ils   ont  cher  parmi  les  intidèles,  où  il  espérait  rein- 

iiii    luanteau  de  même  couleur,  à  la  manière  porter  la  couronne  du  martyre  ;    mais    Dieu 

lies  ccclesi.istiques ,  avec  un  chapeau   noir,  en  ayant  dis|)  isé  autrement,  il  s'arrêta  en 

Us  portent  pour  armes  fascé  de  trois  pièces,  Sicile,  où  il  prêcha  dans  la  ville  de  Trepani 

la  première  aux  armes  de  l'ordre  de  Sainl-  avec  tant  de  lerveur  et  de  zèle,  que  plusieurs 

l'rançois,  ()ui  est  d'.izur  à  une  croix  de  bois  personnes,   touchées  de  ses  discours,  »ou- 

ei  deux   br.is  croisant  sur  l<i  croix,  l'un  nu,  lant    renoncer    aux    vanités    du    siècle,    lu 

l'autre  vêtu  d'une  m  inche  grise  ;  la  secoiiile  pnèienl    de   leur    mari|uer    rinslilul   (|u'il> 

d'or  à  une  couronne  d  épines  ;    la   troisième  dctaient  embrasser,  pour  y  scr>  ir  Dieu  loiu 

(I)  Vey.,  a  b  lin  du  vul.,  n"  l'J7. 


795  LOM 

de  tout  commerce  avec  le  monde.  Ce  zélé 
prèdicaleur  de  la  pénitence  leur  proposa 
celui  du  tiers  ordre  de  Saint-François,  dont 
il  n'y  avait  que  l  ois  couvents  en  Sicile,  et, 
pour  leur  servir  d'exemple,  il  fil  lui-même 
prolession  de  cet  ordre  ,  auquel  il  ajouta 
plusieurs  ausiérilés,  après  en  avoir  obtenu 
la  permission  de  ses  supérieurs. 

Après  celte  profession,   que  ce   nouveau 
]>ropa;;ateur  du   troisième  ordre  ne  voulut 
pas  faire  sans  l'agrément  de  ses  supérieurs, 
il  jeta   les  fondements  de  sa  réforme  dans 
une  solitude  appelée  la  Trope,  sur  une  mon- 
tagne  escarpée   proche   de   l'ancienne   ville 
d'Kyriv,  dans  la  vallée  de  Mazara,  où  entre 
autres  il  fit  prendre  à  ses  disciples  tin  habit 
rude  et  grossier,  dont  il  se  revêtit  aussi,  et 
et  les  lit  aller  nu-pieds,  ce  qui  fui  cause  qu'oii 
les  appela  gli  Sralzi  ou  les  Déchaussés  du 
tiers    ordre  de    ?ainl-François.    Après    que 
cette  réforme  eût  été  approuvée  par  le  pape 
l'aul  111,  l'an  laiO,   ils   demeurèrent  encore 
cinq  ou  six  ans  dans  ce  lieu  champêtre;  miis 
ayant   été   obligés   de   l'abandonner,  tant  à 
cause  du  mauvtiis  air  qu'à  c;.use  que  le  con- 
■  veut  était  trop  petit  pour  recevoir  tous  ceux 
qui  se  présentaient  pour  embrasser  ce  genre 
de  vie  et  faire  des   fruits  d  •   pénitence  dans 
la  compagnie  de  ces   saints  religieux  ,  qui 
étaient  la  bunne  odeur  de  Jésus-Christ  ,  ils 
obtinrent   la  permissinn  du   même   pontife, 
en  13VC,  de  se  retirer  au  pied  du  mont  Saiiit- 
.lulien,   proche  la  ville  de  Trapani,  dans  un 
lieu  appelé  Marlogna,  où  le  chevalier  André 
de  Fradelle,  de  la  même  ville,  leur  lit  bâtir 
un  couvent  dont  les  bâtiments  ont  été  depuis 
augmentes  avec  beaucoup  de  magnificence. 
La  lieaulé  de  ses  jardins,  sa  vue,  qui  s'étend 
sur  la  mer,  le  voisinage  d'une  forêt  et  l'éloi- 
gncmeiU  de  la  >ille,  rendent  celle  solitude  si 
;igréablc  et  si  commode  pour  ceux  qui  veu- 
lent s'adonner  à  la   contemplation,  que    le 
pape  Clément  Vlll  ordonna,  l'an  ItJOO,  que 
l'on  y  établirait  le  no^iciat. 

Le  P.  Jacques  d'Euguhio,  après  avoir  soli- 
dement fondé  ce  monastère,  alla  coiUinuer 
ses  prédications  dans  la  ville  de  Trapani  , 
où,  avec  les  aumônes  qui  lui  furent  données 
par  les  bourgeois  de  cette  ville,  il  fonda, 
.vous  le  nom  de  la  Sainte-Trini  é,  un  mo- 
nastère de  religieuses  du  même  ordre.  Ce 
même  monastçre  est  devenu  si  con-idérable, 
(lu'on  l'appelle  préscnlemeot  la  Grande- 
Abbaye.  Quoiqu'il  n'y  eût  rien  que  de  Irès- 
!,aint  dans  la  conduite  de  ce  zélé  fondateur, 
cl  (|ue  le  seul  motif  de  la  gloire  de  Dieu  l'eût 
poi  lé  à  fonder  ce  monastère  et  à  entre-- 
prendre  la  direction  des  filles  qui  s'y  éiaienl 
consaciées  au  service  de  Dieu,  cependant  il 
ne  fut  pas  à  l'abri  de  la  calomnie  et  des  per- 
sécutions ((ue  les  eniie  ois  de  la  refornje  lui 
Suscitèrent  ;  mais  le  cardinal  dcl  Cir[)io, 
protecteur  de  l'ordre,  qui  connaissait  son 
mérite  et  la  pureté  de  ses  intentions,  prit 
toujours  sa  défense.  Ce  cardinal  étant  mort 
l'an  15ljl,  le  cardinal  saint  Charles  Borro- 
mée  lui  ayant  succédé  ilans  celte  protection  , 
le  l*.  Jacques  d'Iiugubio  alla  à  lUmie,  où  il 
obtint  du  pape  Pie  i\  que  tous  les  mona  - 


LOM 


70  i 


stères  de   sa    congrégation,  tant  d'hommes 
que  de  filles,  seraient   toujours   souo)is  an 
cardinal  protecteur,  et  qu'ils  ne  pourraient 
cire  visités  que  par  le  provincial  des   con- 
ventuels. Pie  IV  étant  mort  l'an  1565,  et  sou 
successeur  saint  Pie  V  ayant  ordonné  que 
tous    les   religieux   et    religieuses   du    tiers 
ordre   de  Saint-François  par  tout  le    monde 
seraient  soumis  aux   religieux  de  l'Obser- 
vance, le  provincial  de  Sicile  voulut,  en  vei  tu 
de  la  bulle  de  ce  ponlilé,  réduire  les  reli- 
gieux du  tiers  ordre  de  Saint-François  de  ce 
royaume    sous    son    obéissance  ;    mais    le 
P.  Jacques  d'Euguhio  s'y  étant  opposé,  pré- 
tendant que   cette  bulle  ne  dérogiNiit   [)oinl 
à  celle  que   Pie  IV  lui  avait  a  cordée,   par 
laquelle  ce  ponlife  les   mettait   immédiate- 
ment sous  la  juridiction  du  cardinal  prolec- 
teur, ce  provincial,   irrité,   fit  mettre  le  ré- 
ft)rmatcur  en  prison  et  excommunia  les  reli- 
gieux el  les  religieuses  de  cet  ordre  q  'i  ne 
voudraient   pas  se  soumettre   à  son  obéis- 
sance. Mais  ceux-ci  ayant  eu  recours  au  tri- 
bunal de   la   justice,  l'excommnnicition  fut 
déclaré(!  nulle  :  on  leur  envoya   néanmoins 
pour  visiteur  un  religieux  de  l'Observani  <•, 
qui  fut  délégué  comme  commissaire  aposto- 
lique, en  vertu  de  1 1  bulle  de  Pie  V  ;  mais 
c-    visiienr,    n'ayant    rien    trouvé   de    ré- 
préllen^i!llc  dans  la   conduite  des  religieux 
cl  des  rel  gieuses  de  cet  ordre,  fit  délivrer  do 
prison  le  I'.  Jacques  d'Euguhio.  Il  fut  seule- 
ment ordonné  dans  cette   \isile  que,   pour 
ôter  tout  sujet  de  soupçon,  les  religieux  du 
troisiènie  ordre  oui  demeuraient  dans  l'hos- 
pice   pour   administrer    les    sacrements    et 
rendre  les  scrvKCS   spirituels  dont  les  reli- 
gieuses avaient  besciin,  ne  pourraient  pas  y 
coucher,  quoiqu'il  fût  assez  éloigné  du  mo- 
nastère ,   cl  iraient    coucher  tons  les  jours 
dans  leur   couvent,   qui  était  hors  de>  murs 
de  la  ville.   Mais  Dieu,  dont  les  jugements 
sont  bien   différents   de  ceux  des   hommes, 
confondit  la    mal'ce  de    leurs   ennemis,    se 
servant  pour  cet  elïel  des  bourgeois  de  cette 
ville,  qui,   convaincus  de  la  sainteté  de  ces 
bons  religieux,  leur  donnèrent,  en  laVY,  un 
(duvenl    dans  cette  même    ville,   où  ils   no 
furent  pas  pluiôt  établis  ([u'ils  y  donnèrent 
une    preuve    sii;nalée  de   leur  détachement 
pour  les  biens  de  la  terre;  car,  voulant  imi- 
ter la  pauvreté  de  saint  François  en  renon- 
çant à    toutes  Icuis  possessions,   ils  firent  à 
ces    religieuses    une    donation   de  tous    les 
biens  el  revenus    qu'ils   avaient.   Mais  saint 
Charles    liorroiiiée  ,  leur  protecteur,   cassa 
cette  donation  et  modéra  leur  zèle,  les  obli- 
geant à  reprendre  leurs  biens,  dont   ils  pou- 
vaient jouir  en  sûreté  de  conscience,  puisiiuo 
le  tiers  ordre  de  Saint-François  peul  possé- 
der eu  com  nun. 

Le  cardinal  de  la  Homère,  qui  fut  protec- 
teur de  l'ordre  après  saint  Charles  Borro- 
mée,  étant  persuadé  de  la  vie  exemplaire 
que  ces  religieux  menaient  s/us  la  conduite 
(lu  P.  Jacques  d'Euguhio,  el  voyant  qu'il  y 
en  avait  plusieurs  qui  élaie  .1  venus  à  Homo 
|)0ur  fuir  la  persécution  des  religieux  de 
robbcrv.aicc   cl  implorer  la   iiroleclion  du 


DlCTIONNAinE  DES  OUDRKS  RI.'UGIF.LX. 


795 

s-iiiil-siépe  contre  ceux  qui  les  inquiclaii'iit 
iDUibanl  leur  iiis  itnt.  les  lenvoya  e.i  lour 
pijs  el  leur  accorda  la  permission  do  tenir 
u«  chapitre  à  .Mario-na  |  our  y  éliri-  un 
provincial  :  <e  qu'ils  lirenl  en  élis  inl  pour 
premier  provincial  le  1'.  Jérôme  Uicci,  des 
premières  >  l  des  plus  nobles  familles  de  la 
ville  de  Trapani,  el  qui  était  un  religieux 
li'une  émiiienle  verlii. 

^■l)nol)^l.lnl  tnutes  ces  traverses,  le  Iroi- 
s:énie  ordic  ne  l.ii^sa  pas  de  faire  beaucoup 
de  prtifirès  d.ins  ce  royaume,  tant  par  la  vie 
idifianle  de  ses  religieux,  qui  délruisail  la 
Malice  el  l'envie  de  s.  s  adversaires,  que  par 
le  zèle  el  la  |iiclé  du  l'.  Jacques  d'Kugubio, 
(jiii,a[rès  y  avoir  demeuré  plus  de  ireiile- 
iiois  ans,  pendant  les  luels  il  travailla  non- 
si'ulcmenl  à  mainienir  l'olisorvaiuc  r6-;u- 
lière  dans  sa  congrégatiDii,  mais  encore  à 
procurer  aux  habitants  de  Tranani  et  des 
I  eux  circonvoisins  toulcs  sortes  de  secours 
spirituels,  recul  enfin  ordre  du  pape  l'ie  V 
lie  quiUer  l'Iiahit  du  liers  ordre  de  Saint- 
François  pour  rcprcmirc  ce'ui  desCapucms, 
dont  il  avait  d'abord  cnilirassé  la  rélorme,  el 
parmi  lesquels  il  iiioiirut  à  Rome. 

Apre- que  les  relgicux  du  lie  rs  ordre  eu- 
rent perdu  leur  saint  fond.aeur,  ils  ne  la  s- 
ièrenl  pas  de  fonder  de  nouveaux  monas- 
tères en  plusieurs  en.iroils,  comme  à  l'a- 
Icrme,  où  ils  en  on'  (rois;  à  Calane,  à  'l'er- 
m  ni,  à  Uifîusc,  a  M  usala,  à  CalaUigiror.c, 
a  Trapano  ilcl  monte  et  en  d'aulres  lieux, 
i.'ont  il  1  n  reste  encore  à  f  résent  trenle-cinq, 
>  compris  celui  de  Uome  aii  quartier  de  la 
llegola,  qu'ils  olilinrciil  l'an  lUlO,  où  ils  s'é- 
lablirenl  avic  la  pcniiission  du  pape  Paul  V. 
IJnoiquc  le  pap-  Clénnnl  \Illcûl  réuni  tous 
leurs  monastères  à  la  CDiigrégalioii  de  Loin- 
bardie,  ils  letinrinl  iiéanm<iins  l'hal  it  de 
leur  reforme  après  celle  union  ;  ma  s  le  car- 
dinal prolecleur  ordoana  preaiièrcment  à 
ceux  qui  demeuraient  à  Home  au  quartier 
de  /il  lîeydlu,  de  scccnformer  pour  Ibabille- 
inriil  aux  religieux  de  la  pr"\ii!ccde  Rome, 
qui  aN  aient  aussi  un  couvent  en  celle  ville, 
ce  qu'ils  liii  ni  ;  cl  les  autres  couvants  suivi- 
icnl  dans  la  suite  leur  exemple.  Leur  Iinbit 
n'est  pas  néanmoins  si  ample  que  celui  des 
religieux  des  autres  provinces.  La  disci;iliiie 
régulière  ne  s'est  poinl  relâchée  jiaiini  eux, 
U  ils  sunl  en  grande  e-liiiic  parmi  le  peuple. 

Le  pape  Clemenl  \  111,  qui  av.iil  uni  les 
moiiasieics  de  Sicile  a  la  congrégation  de 
l.ombaidlc  et  les  avait  souu.is  a  la  jnridic- 
l.on  du  général  de  cet  ordre  en  llalie,  y  unit 
ausM  ceux  de  iJalmaiic  el  d'isiiie  i'an  lliO:2. 
Ces  monastères  elaienl  au  noin;^re  de  qua- 
torze, el  dépendaient  immédiatemenl  du 
saiiil-sicge.  Wading,  parlant  de  celui  de 
Zara,  qui  lui  donne  aux  religieux  du  liers 
ordre  l'an  iVli'»,  les  appela  les  premiers  Lr- 
iiiilcs  de  l'ordre  de  Saïut-François  de  la  l'e- 
mleiice. 

Francise,  liordon.  Chronolog.  FF.  el  So- 
ror.  terl.  ord.  S.  Fiuncisc.  Joann.  .Maria 
Vemoncns.,  Annal,  rjusd.  ord:  el  Ll/earl.  de 
liomlics,  Acddcmie  de  pcr[eclUn. 

(J)  Voij.,  h  1.1  lin  du  vol.,  ii"  \'J'i. 


TtWi 

§  III.  Congrcyalion  des  Beij/liaid^  unieà 
celle  de  I.ombardie.  N'oy.  lii-uciiAnus. 

LOUETTE  (CiiEVAiieus  de  NoTni>DAMK 
de).  Voy.  Bethléem. 

LOlIS  f  Chevaliers  DE   l'orohe   de   Saint) 
en  France. 

Le  roi  «le  France  Louis  XIV,  qui  pirsrs 
aclioiis  glnrieuses  cl  cclalaiili  s  s'est  acquis 
a»ec  ju>tice  le  surnom  de  Grand,  ne  croyanl 
pas  que  les  récompenses  ordinaires  fussent 
suffis.inles  pour  témoigner  sa  reionnaissanci; 
envers  les  officiers  (lèses  armées  qui  s'é- 
l^ient  signalés  dans  les  victoires  el  les  con- 
(luètes,  chercba  de  nouveaux  moyens  pour 
récompenser  le;ir  zèle  et  leur  (idélilé  ;  el, 
(l.iiH  dite  vue,  ce  (|ui  lui  pariil  le  plus  con- 
venable pour  cela  fol  rinsliiuiion  qu'il  lil  en 
l{i'.)'3  d'un  ordre  militaire  si.us  le  nom  do 
S.i  nl-Louis  ;  au(iuel,  oulre  les  marques 
d'honneur  extérieures  q  :i  y  sonl  allachées, 
il  assura  en  faveur  de  ceu\  (;ui  y  seraient 
admis  des  revenus  el  des  pensions  (jui  aug- 
menleraienl  à  praporlion  qu'ils  s'en  rcii- 
draienl  dignes  par  leur  conduite,  voul  nt 
<lu'oii  ne  reçût  dans  cel  ordre  que  des  offi- 
ciers d.!  SCS  troupes,  et  que  la  vertu,  le  mé- 
rite el  les  services  rendus  avec  dislinclion 
dans  ses  armées,  fussent  les  seuls  litres  pour 
y  entrer. 

Par  l'édit  de  l'inslilulion  de  cet  ordre,  le 
roi  s'en  ceci. ira  chef,  souverain  cl  granil 
mailre.  voulant  que  la  grande  maîtrise  fùl 
pour  toujours  unie  el  incorporée  à  lu  cou- 
ronne. Il  d  lit  èlre  composé  de  la  personne 
de  Sa  .Majesté  cl  de  ses  suecesseurs  en  qua- 
lité de  gianils  mai  Ire;,  du  dauphin  de  France, 
ou  du  prince  hèrilier  présomptif  delà  cou- 
ronne ;  de  huil  grands  croix,  île  vingl-qualre 
commandeurs,  du  noml  re  de  chevaliers  qu'il 
plaira  au  roi  el  à  ses  siicicsseurs  d'y  ad- 
mettre, el  de  trois  ofliei-Ts  qui  sonl  le  tré- 
sorier, le  greffier  el  I  huissier.  Tous  ceux 
qui  coinpo>cni  cel  ordre  poilenl  une  croix 
d'or  sur  l.iquellc  il  y  a  l'image  d.-  saint 
Louis;  les  gr.inds  croix  la  portent  ;il.achee 
à  un  ruban  large  de  quatre  dogls,  de  cou- 
leur de  feu,  qu'ils  metlenl  en  écharpc,  et 
ont  encore  une  croix  en  broderie  d'or  sur  le 
juslauc  irps  cl  sur  le  manleau  (l\  Les  com- 
mandeurs p'irlent  seulement  le  ruban  en 
eeh  irpe  avec  la  croix  qui  y  est  attachée,  el 
les  simples  i  bevaliers  ne  peuvenl  port  r  le 
ruban  eu  échaipe,  mais  seulement  l.i  croix 
d'or  allai  lue  surresloinac  avec  un  pelil  ru- 
ban couleur  de  feu. 

Le  roi,  voulant  honorer  cel  ordn'  le  plus 
qu'il  lui  serait  posMble,  déclara  que  lui, 
iM.le  dauphin,  les  ri'is  ses  successeurs,  les  dau- 
j)bins  ou  iiciiiieis  présomptifs  de  la  cuu- 
louiK!,  porlei  aient  1 1  croix  de  cel  ordre  avec 
celle  de  l'onlre  du  Sainl-lisprit  ;  cl  qu  il  en- 
leiidail  aussi  decori  r  de  l'ordre  de  Sain'- 
Louis  les  maréchaux  de  France,  comme 
principaux  ollieiers  de  ses  armées  de  terre  , 
l'amiral  de  France,  comme  principal  officier 
de  la  marine  ;  le  général  des  galères,  coniino 


-y? 


i.ou 


LOU 


7S8 


principal  ofilcicr  des  galèros,  cl  ceus  (Hii 
leur  succéderaient  dans  tes  eiiarges  :  et  Sa 
M;ijes!c  déclara  aussi  les  ordres  de  Saiiil- 
Micliel,  du  Saint-Espril  et  de  Saiul-Lous 
ccmpnlililes  dans  une  même  p.rsonne,  sans 
que  l'un  pût  ser\ir  d'exclusion  à  l'aulrc,  ni 
les  deux  au  Iroisièine. 

Les  grands-croix  ne  peuvent  élrc  lires 
«lue  du  nombre  îles  commandeurs,  cl  les 
cnmm  indeurs  du  numhre  dos  chevaliers  ;  et 
lanl  les  grands-croix  que  les  comniaiidrui  s 
et  chevaliers  ,  lires  du  nonihre  des  ofli- 
ciers  des  Iroupes  de  terre  cl  de  mer.  Il  y  a 
toujours  un  des  huit  grands-croix,  trois  des 
vingt-quaire  commandeurs,  el  le  huiiième 
du  nombre  des  chevaliers,  employés  dans 
les  états  des  revenus  et  pensions  afl'eclés  à 
l'ori're  et  tirés  du  nombre  des  officiers  de  !a 
mai  lue  et  des  galères. 

Personne  ne  peut  èlrc  reçu  dans  cet  ordre 
s'il  ne  fait  profession  de  la  religion  catholi- 
que, a|iostoliquc  et  romaine,  et  s'il  n'a  servi 
sur  lerre  ou  sur  mer  en  qualité  d'oflicier 
pendint  dix  années.  Le  chevalier  pourvu 
doit  se  prcsenler  devant  le  roi  pour  prêter 
sernienl.  Pour  cet  elTet  ,  il  se  met  à  genoux, 
jure  et  promet  de  vivre  el  mourir  dans  la  re- 
ligion catholique  ,  apostolique  el  romaine  ; 
d'être  fiilèle  au  roi  ;  de  ne  se  déparlir  j;imais 
de  l'obéissance  qui  lui  es!  due  el  à  ceux  qui 
ciimmaiidunt  sous  ses  ordres  ;  de  gardor,  dé- 
lendie  el  soulenir  de  tout  son  pouvoir  l'hoa- 
neur  de  Sa  Majesté  ,  son  autorité,  ses  droils 
cl  Cl  ux  de  la  couronne  envers  et  contre  tous  ; 
de  ne  jamais  quitler  smi  service  ni  passer  à 
celui  (i'aucuu  prince  étranger  sans  sa  pér- 
is, ission;  de  révéler  tout  ce  qui  viendra  à  sa 
ronnais-ance  conlie  la  personne  sacrée  de 
Sa  .Majesté  el  de  l'Klat,  de  garder  exacie- 
inent  (es  staluls  el  orlonnances  de  l'ordre,  il 
(le  s'y  comporter  en  tout  comn>e  un  bon, 
sage  et  veiluenx  chevalier  doit  faire. 

Après  que  le  chevalier  a  prêté  serment 
en  cette  forme,  le  roi  lui  donne  l'accolade  el 
la  croix;  après  quoi  il  est  obligé  de  faire 
présenter  à  l'assenthlée  qui  se  tient  le  jour 
de  s.  inl  Louis  roi  de  Franco,  en  l'honneur 
duquel  cel  ordre  a  clé  inslilué,  ses  provi- 
sions, pour  y  eu  être  fait  leclure,  cire  enre- 
gistrées dans  les  regi;lres  de  l'ordre,  cl  ren- 
dues ensuite  au  roi  [)ar  le  grefllcr.  Les  che- 
valiers qui  oui  obtenu  des  Ictlres  pour  mon- 
ter aux  places  de  eoa'.mandeurs,  et  les  c:Mii- 
mandcurs  cjui  eu  onl  obti'ou  pour  monter  à 
celles  de  grands-croix,  diivcnt  aussi  les  pré- 
senter à  rassemblée.  L'on  procède  dans  la 
mêir.e  assemblée  à  l'élection,  qui  sa  l'ail  à  la 
pluralité  des  vois  de  deus  grands-croix  , 
qualre  cominand  urs  et  sis  chevaliers,  pour 
avoir  la  conduite  et  prendre  soin  des  alTairci 
concernant  l'ordre  pendant  l'année.  Celle 
a^selub!ée,  où  se  Ironvenl  les  grai)ds-;-roix, 
les  commandeurs  et  les  chevaliers  qui  onl 
assisté  le  malin  avec  le  roi  à  la  messe  que 
l'on  dit  puur  demander  à  Dieu  qu'il  lui 
plaise  répandre  ses  bénédictions  sur  la  pr- 
sonne  sacrée  de  Sa  iMajeslé,  sur  la  maison 
royale  cl  sur  le  royaume,  se  tient  le  jour  do 
la  fêle  de  saint  Louis,  après  dincr. 


Cet  ordre  jouit  de  trois  cent  mille  livres  de 
rente,  dont  il  y  a  quarante-huit  mille  livres 
aiïeclées  aux  huit  grands-croix,  à  raisois  d:^ 
six  mille  livres  chacun  ;  Irenle-deux  mille  li- 
vres à  huit  conmiandeiirs,  à  raison  de  qua- 
tre mille  livres  chacun  ;  quaranlc-huil  mille 
livres  aux  seize  antres  cnmmandeurs,  à  rai- 
son de  trois  mille  livres  chacun  ;  pareille 
somme  de  quarante-huit  mille  livres  à  vingt- 
quatre  chevaliers,  à  r.iison  de  deux  mille  li- 
vres chacun  ;  trenlr-si\  mille  livres  à  vingl- 
(luatrc  autres  (hevaliers,  à  raison  de  quinze 
cenls  livres  chacun;  quaratite-huil  mille  li- 
vres à  quarante-huit  .lutres  chevaliers,  à 
raison  de  mille  livres  chacun  ;  et  vingi-cin  | 
mille  six  cenls  livres  à  trente-deux  cheva- 
liers, à  raison  de  huit  cents  livres  chacun. 
(.)uatre  mille  livres  au  liésorier,  trois  mille 
livres  au  greffier,  quatorze  cents  livres  à 
l'huissier  pour  leurs  gages,  frais  de  comptes, 
registres  et  autres,  b-  ioui  par  chacun  au  ; 
l't  les  autres  six  mille  livres  restantes  sont 
destinées  pour  les  croix  el  autres  dépenses 
imprévues. 

Le  dixième  jour  de  mai,  le  roi  noniuic  k-s 
grands-croix,  les  commandeurs  et  les  che- 
valiers de  ce  nouvel  ordre.  Les  grands-crnix 
tirés  des  officiers  des  armées  de  terre  furent 
le  marcjuis  de  la  Hahlière,  le  marquis  de  Ri- 
varol,  le  comte  de  Mor.lchevreuil,  les  sieurs 
de  'V^auban  el  de  Iloscu,  qui  ont  été  depuis 
maréchaux  de  France  ;  le  marquis  de  la 
Fenillée  ,  le  sieur  l'oiaslron,  el  le  sieur  du 
Châleau-r.enai'.d  ,  lieutenanl  général  el  de- 
puis maréchal  de  France,  qui  lut  lire  des 
ofûciers  de  marine.  Les  commandeurs  tirés 
des  officiers  tant  de  terre  que  de  mer  furent 
les  sieurs  de  Vatleville  ,  de  Saint-Sylveslie , 
d'Avejan,  Massol,  de  la  tîrange,  do  Louba-- 
nie,  de  Chamiay  Panelié  ,  Costellas ,  Pres- 
chac,  d'Arbon,  la  Bouch  irdière,  Casleja,  du 
Luc,  Bellegarde,  Guillcrville,  Fourille  ,  Da- 
lou,  Laumont,  Desalleurs,  des  Bordes,  Dam- 
blimunt  et  Bezons. 

La  croix  de  cet  ordre  est  d'or  à  huit  pointes 
comme  celle  de  l'ordre  du  Saint-lîsprit  » 
avec  des  fieurs  de  lis  aux  quatre  angles:  au 
milieu  il  y  a  un  cercle  dans  lequel  est  d'un 
côté  l'image  de  saint  Louis  armé  de  cuira  se, 
ayant  par-dessus  le  manteau  royal ,  tenasit 
dans  sa  main  ilroile  une  couronne  de  laurier 
cl  dans  la  gauche  une  couronne  d'épines  et 
les  clous  de  la  passion,  avec  cette  légende 
tout  autour:  Ludoviius  Mafjnus  instituiC 
IG'J.J  ;  (  t  de  l'autre  côté  du  cercle  il  y  a  une 
épée  dont  la  pointe  perce  une  couronne  dit 
laurier,  et  qui  est  attachée  avec  un  rubai» 
blanc,  avec  celle  légende  tout  autour  :  Bel- 
licie  cirtiilis  piœmium. 

Vouez  VEdil  du  roi  pour  la  création  de  cet 
ordre.  Herman  el  Schoouebeck,  t/ti/i.v  Icwo 
Iliiloircs  des  Ordres  militaires. 

Ju.Miu'aux  premières  annéesdu  xviirsiècle, 
i'oiiire  militaire  de  S.iint-Louis  ne  joui.ssail 
en  eil'et  que  d'un  rc  cnu  de  300,000  livres  , 
ainsi  que  l'a  dit  Hélyot  ci-dessus  ;  mais,  par 
un  élit  du  mois  d'avril  1719,  le  roi  Louis  XV 
attribua  à  cet  ordre  par  supplément,  150,000 
livres  de  rente,  pour  coinplèler  un  rcveisu  do 


703                                           niCTIDNNAlUE  DKS  OKDUKS  ni-I.lClElJX.  R.KJ 

41)0,000  livres.  Le  iiomlirt-  des  gra mis-croix,  KîO't;  quo  le  roi  cl  sis  successeurs  porlo- 
qi/i  C(aii  lixù  à  liuit  l'.'ir  l'éJH  (lu  mois  d';n  ril  r, lient  l;i  croix  iliiilil  «riirc  «le  Sainl-L'Hii» 
lf)93,  fui  nuiimruU'  «le  deux  ,  a»cc  jouis-  n\pc  la  croix  du  S.iiiil-I'-spril;  qui' Sa  MajcsU» 
sauce  dr  (i.OOO  livre*  de  rriilc  chacun.  Celui  eiileiid  décorer  dudil  ordre  de  S  iiit-I.ouis  les 
des  ciiinm.iiideurs  à  'i.O  0  livres,  qui  élait  inarécliaux  de  Fr.iiu  e,  l'aïuir.il  de  l'"rauce,  l<' 
par.  iMeineul  de  liuil ,  fui  aiij;iiuMilé  jusqu'à  général  des  galères  cl  ceux  qui  leur  succédr- 
tlix;  ce  ui  des  coiiuuaiiileurs  à  3,000  livres,  roui  auxdiles  charges;  que  les  ordres  de. 
Cul  de  dix  neuf  au  lieu  dj  seize.  A  l'égard  des  Saiut-Miclicl ,  du  Sainl-Hsp' it  et  de  Sainl- 
peusioiis  des  clievaliers  à  2  000  livres,  le  roi  Louis  seroiil  conipaliliies  dans  une  même 
eu  créa  trente  au  lieu  de  \  ingl-(|Liaire.  L's  persniui' ;  que  d  iiis  les  cérénionies,  ceux  qui 
pensums  de  1 ,0r0  livre  s,  doiil  le  iioinhri'  était  seront  honorés  de  l'otdre  du  Sainl-Kspril  cl 
de  (|uar.inle-lii:i  ,  fut  ai  rèlé  à  soixante-cinq,  de  celui  de  Saint-Louis  précéderont  les 
cl  les  pensions  de  £00  livres,  fi\ées  pour  grands-croix,  commandeurs  et  chevalii-rs 
Irenle-deux  chevaliers,  furent  auguienlées  (|ui  n'auraient  (jue  ce  dernier  ordre  ;  qu'on 
jus(|u'au  nombre  de  cinquante-quatre.  Le  ne  recevra  auciin  chevalier  dans  l'ordre  de 
roi  se  réser>a  à  lui  seul  et  à  ses  succe-seurs  Sainl-Lonis,  (]  l'il  n'ait  si'r\i  sur  terre  ou  sur 
la  nominatiin  des  grands-croix  ,  des  lom-  mer  en  qualité  d'officier  pendant  dix  années, 
mandeurs  cl  des  chevaliers,  pour  cil  e  admis  à  et  qu'il  ne  soil  encore  actuellement  en  acli- 
l'avcnir  en  chacun  de  ses  rangs,  et  ordonna  vite  di;  service  ,  qu'il  ne  professe  la  religion 
qi:c  les  grands-t  rois,  les  coinmandcur^  et  les  cailioliqtie  ,  apostolique  cl  romaine,  et  ne, 
clioalics  seraient  .i  [)erpéluilé  tirés  du  prouve  son  s  rvicc  de  dix  années  actuelles 
non.hre  des  ofliiiers  serv.vnt  aclwcllerneiit  par  les  brevets  el  ccrli!lc;ils  des  comman- 
dans  les  Ironpcs  de  lerre  ou  de  mer.  Il  érigea  d.inis  des  Iroupi  s  de  terre  rt  de  me;  (juc  h'S 
en  titre  d'offices  liéi  é.litaires  un  grani-croix  grands-croix, commandeurs  elclievaliers,  qii 
clianceLcr  et  garde  des  sceaux  du  lit  ordre  ,  auraient  commis  (juclquc  acte  indigne  de 
un  grand-croix  grand  prévôt  clinaitie  des  h'ur  profession  el  de  leur  devoir,  ou  un  crime 
cérémonies,  un  grand-cioix,  serrélairc  el  emporlanl  peine  alllictive  ou  iafumanle,  éga- 
gn  flier,  un  intendant  de  l'ordre  ,  triais  trc-  lewiciit  ceux  qui  s  irliiaienl  du  rojaume  sans 
soiiers  généraux  pour  exercer  jiar  année,  permission  p  ir  écrit, signéedel'un  des  secré- 
Irois  contrôleurs  dcsiils  trésoriers ,  un  au-  laircs  d'Etal,  seraient  privés  el  dégradés  du- 
niônier,  nn  receveur  particulier  el  agent  des  dit  ordre;  et  que  tous  les  grands-croix  ,  etc., 
aiTaires  de  l'ordre,  nn  garde  des  archives  el  qui  ne  seraient  pas  retenus  par  maladie  ou 
deux  liérauts  d'armes.  Il  ordonna  que  le  autrement ,  seraient  tenus  à  se  rendre  loua 
chancelier,  le  grand  prévôt  cl  le  secrétaire  les  ans  au  jour  de  saint  Louis  auprès  de  la 
gri  flier  jouiiaieiit  des  mômes  privilèges  que  personne  du  roi,  pour  accorujiagner  Sa  Ma- 
ies grands  officiers  de  l'ordre  du  Sainl-lisprit,  jesic  à  la  messe  dans  le  palais  où  elle  sera 
l'I  (lue  l'inlendanl  el  les  trésoriers  auraient,  célébrée,  el  pour  se  trouver  à  l'assemlilée 
sans  aucune  exception,  l(!us  les  [irivilégrs  générale  dudil  ordre,  ([ui  se  tiendra  l'après- 
(loni  jouissent  les  commensaux  de  la  maison  midi. 

de  Sa  .Majesté,  qui  ordonna  que  les  tilulaires  j ,.  ^g  :„;„  ,-,,(,  _  l'ass  ■mhléi'  constiluanle 
ne  pourraient  disposer  de  leurs  ofliccs,  (ju  en  supprima  les  ordres  de  chevalerie,  lilres.  li- 
laveur  de  ceux  (|ui  sont  agrées  par  fea  Jla-  ^^^^,^  ^^  ;,r„,oiries.  L'ordre  de  Sainl-Louis 
jcsie  Le  roi  ordonna  aussi  que  la  somme  de  f,,,  .lonc  aboli.  11  faut  remarquer  que  cel 
8,400  livres  serait  dislnl  uee  oulre par-dessus  ,,,,1^,.^  ,^i,„i  .  plusieurs  autres,  élail  sim- 
les  (jmjes  ci-dcssus,  [  arîie  a  I  intendant  ,  au  p,,.,,,,,,,,  ,„iiii,.,ire  cl  honorifique,  n'avant  pas 
trésorier  en  exercice,  au  contrôleur  en  ev.er-  reçu,  comme  quebiues  ordres  dont  n^us  par- 
Cice,  a  l  aunmnier,  au  recevc-ur  particulier  ,,,^-„„^  ^,  J,„,^  „,,^^^  j,^^,,^  j,.-,.,  [.  ,,.  ,_ 
agent,  au  garde  des  archn  es  el  aux  deux  he-  p.o|,y,i„„  j^  souverain  ponlile. 
rauls;  que  1  ordre  de  Saint-Louis  serait  coMi-  ' 
posé  du  roi  ,  de  l'héritier  présomptif  de  la  Les  choses  restèr.nt  sur  ce  pied  jusqu'à  la 
couronne,  de  dix  grands-croix  ,  de  ving'.-iicuf  restauration  des  lîourbons,  eu  ISI'i;  alors 
commandeurs,  du  nombre  de  chevaliers  (jui  l'ordre  des  chevaliers  de  Saint-Louis  reprii 
y  étaient,  et  (lui  y  seraient  admis  dans  la  ses  décorations  ,  son  rang  el  ses  lionnciirs. 
siiile,  el  des  oliiciers  créés  par  cet  édil;  que  Pendant  le  temps  de  l'émigration,  ou  avait 
les  grands-croix  porter.iienl,  oulre  le  ruban,  fait  des  proinolions;  il  n'y  eut  pas,  croyons- 
iinc  croix  en  broderie  d'or  sur  le  justaucorps  nous,  de  solennités  [lour  l'ordre  de  Sainl- 
t'I  sur  le  manteau;  que  les  commandeurs  Louis  romme  il  y  en  eut  pour  les  ordres  do 
porieraie.il  le  rutian  sans  broderie;  que  les  Saint-Mi  lu  I  et  du  Saint-l'.spril  :  tout  se  borna 
sim;iles  chevaliers  porteraient  seulement  la  à  des  nominations  privées.  Plusieurs  furent 
(loix  d'or  a  tachée  avec  un  petit  ruban;  (jue  failes  avec  justice,  en  fa>  eur  de  quel(]ues  ser 
le  chancelier  garde  des  sceaux  de  l'ordre,  le  v  leurs  fidèbs  de  l.i  royauté  dans  les  temps 
grand  prévôt  et  le  secrétaire  grefjier  auraient  d'épreuves.  Nous  avons  vu  nous-mèaie  la 
la  broiJerie  el  le  cordon  rouge;  ((lie  l'inlen-  croix  de  Saint-Louis  sur  la  poitrine  de  ceux 
danl  cl  les  trois  trésoriers  porteraient  la  (|ui  avaient  servi  dans  les  rfiiigs  de  la  chouan- 
croix  pend  mlc  à  leur  coi  el  n'.iuraient  point  iierie ,  basque  les  déparleuieiils  de  l'ouesl 
de  brod  rie;  (juc  les  autres  oliiciers  porte-  étaient  livrés  aux  malh  urs  de  11  guerre 
raient  la  croix  sur  l'eslomac,  el  que,  pour  (ivile.  Ainsi  en  lut-il  pour  b-s  \'eiidecns 
les  01  nemenls  des  armoiries,  lesdils  oliiciers  disliiigues,  les  homoies  i|iii  sélaienl  lait  ro- 
s(î  conforuicraicul  à   l'edil  du  mois  de   mars  ui.irqucr  duui  les  raiiijs  de  l'aruice  de  Cou- 


nO«                                  MAD  M\n                                 802 

tié, etc. ,ol  plusieurs  de  resdf'coraliolis  lurent  savoir  :  les   grnnds-noix  avec  les  grands- 

acfordées  dans  rémi}îralioii.         ,  croix  de    la    légion  :  les  commandeurs  avec 

Les  conseils  de  l'ordri"  «-e  lennieni,  avant  la  les  grands  officiers  de  la  Légion;  les  clieva- 

révolulion  ,  à  l'iiôtol   des  Invalides ,   dans  la  liers    après  les  commandeurs  de  la  Légion  , 

s.illc  des  archives  de   l'ordic.  Le   garde  des  mais  avec  les  offi  i(r>  et  avant  les  chevaliers 

sceaux  de  France  avail  aussi  les  sceaux   de  de  la  Légion.  Le  roi  c'ait  chef  souverain   •  t 

l'ordre  ;  il  en  a  clé  de  mémo  après  l.i  restau-  grand  maitrc  de  l'ordre, 

ration.  Une   ordonnance  du  roi,  du   .'iO  mai  A  la  révolution  do  juillet  1830,  l'ordre  ini- 

181(),  élahlissail  celte  disposition  ;  l'admini-  lilairc  de    Saint-Louis  a  de  nouveau   cessé 

siralion  de  l'ordre  fut  confiée  au  ministre  de  d'exister  en  France. 

la  guerre,  qui  en  dirigeait  et  surveillait  toutes  Dictionnaire  historique  de  M  or  éri ,  VI*  tome, 

les    parties,   la   per.eplion  des  revenus  ,  les  1759;    Dictionnaiie  portatif  (!(":<  Ordres  re'i- 

|)aycnienls  et  les  dépenses.  Dans  les  cérénio-  qieux  et  militaires,  par  !/.  C.  M.  D.  P.  P.  S. 

nies    publiques  ,  les  grands-irois  ,  conunaii-  ./.  D.  M.  E.  (1 .;  l'Art  de  V'rijicr  les  dates  de 

dcurs   et  chevaliers    prenaient  rang  conrur-  la  révolution  ;  Almanach  royal,  iii-8'. 

remment  avec   li'S  membres   de  la   Légion-  I>  d-e. 

(J'Honneur,  par  ancienneté  de  nomination,  LUAN  (Saint-).  Voy.  Iiu-andh. 

m 

MACAIRR  (Kkgi.e  de  Saint-).  Voy.  IsaÏe  firent  des  élablissemen's  en  différents  lieux, 
(Saint-).  c'est  peut-être  ce  qui  .i  donné  lieu  à  qiiel- 
MADKLFINR  (CHEVAi.iEns  DR  i.aj.Toj^.Pas-  ques  écrivains  de  croire  (jue  les  monastères 
sioN  DE  Jksus-Ciihist.  de  l'ordre  de  la  MadeK'ine  en  Allemagne, 
-,  .  r,,.t  r-ixi.-  Il,  'l""t  quel(iucs-uns  onl  même  subsisté  au  mi- 
MADLLEINE  (Heligieux  et  hei.igieises  de  ,i,.„  ^^  l'hérésie,  étaient  de  l'institut  du  bien- 
LORDiiE  DE  LA  Penitenie  DE  l v) ,  tant  en  iieureux  Bertrand.  Il  y  en  a  d'autres  aussi 
France  qu  en  Allemagne.  ^„i  ^^  ^^^j  ,,prsuadc  que  ces  monastères 
Vers  l'an  127-2,  un  bourgeois  de  Marseille  d'.\llemagnc  ont  tiré  leur  orij;ine  de  celui 
nommé  Bertrand  ,  qui  vivait  dans  une  grande  des  filles  Pénitenes  di-  la  Madeleine  à  Pa- 
réputation  de  saimelé  ,  étant  animé  ilu  zèle  ris,  dont  nous  parlerons  dans  la  suiie  , 
de  la  gloire  de  Dieu  et  voyant  que  les  nupurs  peut-être  à  cause  (luo  ces  religieuses  d'Ai- 
de son  temps  étaient  fort  corrompues,  que  lemagnc  sont  habillées  de  blanc  cl  que 
le  libertinage  éiait  arrivé  a.  un  tel  excès,  celles  de  Paris  ont  aussi  porté  un  haliil 
que  la  plupart  des  femt'ies  prostituaient  leur  blanc  avant  leur  réforme, 
honneur,  el  que  relies  qui  avaient  conservé  Mais  les  religieuses  l'énilenles  de  la  Àla- 
quel((ue  res'c  de  pudeur  ne  faisaient  que  de  deleino  en  Allemagne  étaient  établies  plus 
laiblrs  efforts  pour  la  défendre,  entreprit  la  de  cent  cinquante  ans  avant  que  le  bien- 
conversion  de  ces  pécheresses  ;  et  ses  e\hor-  heureux  Bertr.mil  (  ût  commi'nié  son  ius- 
latious,  tout  embrasées  du  feu  do  la  cba-  litut,  et  plus  de  deux  cent  soixante-div  ans 
rilé,  eurent  un  succès  si  heureux,  qu'il  ra-  avilit  la  naissance  des  filles  Pénitentes  de 
mena  dans  le  chemin  de  la  vertu  un  grand  l'aris.  Nous  ne  savons  pas  positivement  en 
l'.ombre  de  brebis  égarées,  qu'il  renferma  quel  temps  cet  ordre  a  (ommcncé  eu  Al- 
«lans  des  monastères.  Plusieurs  personnes,  lemagne,  ni  qui  en  a  été  l'insMluteur  ;  i-.iais 
voyant  le  fruit  que  faisait  le  bienheureux  il  est  au  moins  ceil.iin  (ju'il  y  subsistiiil  dès 
îlerlrand  ,  se  joignirent  à  lui  pour  une  œu-  le  commencement  da  xiii'  siècle,  comme  il 
vre  si  sainte;  leur  nombre  s'augmenta  cou-  paraît  par  les  lettres  d'Otlon,  cardinal  du 
sidéiablenieiit  ,  et  ils  formèrent  ensemble  titre  de  Saint-Nicolas  ia  carcere  Tulliano 
une  société  (jui  fut  érigée  en  ordre  régulier  et  légat  apostolique  en  Allemagne,  de  l'an 
80US  la  ri'gle  de  sai  it  Augustin  par  la  pipe  1:220,  par  lesquelles  il  accorde  des  indul- 
Nicolas  m.  Leur  habillement  (1)  était  s<m-  gencîrs  pténières  à  ceux  qui  voudront  cou- 
blablc  à  celui  que  les  Augustins  Déchaussés  Iribuer  de  leurs  aumôni's  à  la  subsistance 
ont  depuis  porté  en  France  ,  sinon  que  ces  des  sœurs  Pénitentes  de  la  Madeleine  eu 
religieux  de  la  Madeleine  avaient  des  san-  Allemagne,  qui  étaient  dans  une  granité 
(laies  de  bols.  Ils  avaient  aussi  pour  armes  ]iauvreté  et  qui  n'avai  nt  pas  poui-  lor, 
un  vase  plein  de  charbons  ardents,  pour  des  revenus  pour  leur  cntretirn.  Ces  let- 
monlrerle  désir  qu'ils  avaient  d'imiter  la  [ié-  très  se  trouvent  dans  la  Chronique  du  mo- 
niteuce  de  la  Madeleine  et  de  convertir  les  naslèie  de  Frankenberg  à  Goslar,  du  même 
femmes  pécheresses.  Le  P.  Gesnay,  qui  rap-  ordre  ,  et  nous  les  rapporterons  ici  telles 
porte  ainsi  l'établissement  de  cet  ordre,  dit  qu'elles  sont  dans  cette  chronique, 
que  ces  religieux  donnèrent  à  ces  Pénitentes  Oilo  tiiiseralione  divina  Sancti  Nicolai  in 
leurs  mêmes  observances  ,  el  que  les  reli-  carrcre  TuUiano  diaconus  cardinalis,  aposio- 
gieuses  Pénitentes  de  Marseille  sont  du  même  lic.v  scdis  Irgnlas,  universis  C/irisii  fid'libiis 
institut.  El,  comme  il  ajoute  que  le  bien-  présentes  lias  lilteras  inspectaris  salutcin  in 
heureux  Deriranii  envoya  plusieurs  de  ses  Domino,  Quiinlam,  ut  ait  Apostolas,  omnet 
religieux  eu  France  el  en  Allemagne  (jui   y  staOimus   unie   Inbamd    C/iristi,  recepturi , 

(1)  Voy.,  à  la  lin  dn  ïuI.,  w"  IJO. 


«(13 


DlCTIONN.Ur.E  DES  OlîDRES  RELIGIEUX. 


804 


prout  in  corpore  gfssimim,  fivc  fuerii  bonum 
.vire  malnm,  oporlel  nos  diein  im-fxinnis  rx- 
tremc  ntisericordie  oiicrihits  prerniiie,  el  eler- 
iiorum  inlH  In  snninnre  in  lerrii.  q^toil  red- 
ilrnle  Domino  cum  mulliplicalo  fi  urtii  rtcul- 
ligere  dchcumiis  in  Cvlin  ,  jinnam  spem  fidu- 
ciamqur  lenculrs,  t/nod  i/iii  parce  srmiual , 
parce  et  mdet,  e(  qui  seminnt  in  bmrdiclio- 
ttibtis,  de  bcnedicti'  tiilius  melei  ril'iin  etir- 
uam.  Cum  iqitiir  dilrrte  in  (Itrisln  pnitpeies 
soroies  l>cnilent<s  S.  Mnr.  l\la(jd(d.  in  Ale- 
maqni  proprias  non  haleanl  facilitâtes  tind: 
valeant  siislenlari,  rinivcrsilulem  veslram  ro- 
(jnmus ,  m'inemus  et  liorlamur  m  Dominn ,  et 
in  remia.iionein  vohis  injunqimus  peccami- 
num  ,  qnatcnus  de  bonis  a  Deo  vobis  collalis 
pias  elemosina-i  el  grnla  cis  caritalis  siibsidin 
erogatis,  ut  pir  subcencionem  ve-lr.im  earum 
inopic  cousulatur,  ut  vos  per  hcc  cl  <diu  bo- 
nu,  que  Dco  inspirante  frceritis,  ad  elerna 
pvssilis  rjaiidia  perreidre.  Nos  enim  de  omni- 
polcnlis  lici  miaericordia  et  Bll.  Pelri  et 
Paul'  nposlolurum  nirrilis  et  intcrcessione 
coufisi,  omnibus  qui  ud  loca  ipsnruin  acce<se- 
rint  XL  dies  de  injuncta  sibi  penitencia  Inija- 
ci'inis  aucloril'ilc  qua  fingiinur,  niisericar- 
diter  reliixamii.t.  Datam  Constcncie  anno  Do- 
mini  MCCXXIX.  /(((/.  Il ,  XIV  linlend.  Janunr. 

Il  y  a  bien  de  l'apiuirence  que  l'ordre'  de 
la  .MaJeleino  en  Alioninsnc  élail  déjà  inslitué 
avant  le  concle  génér.il  de  Laliaii  qui  se 
tint  l'an  121o,  puisque  le  pape  Gié'j;oire  IX, 
)iar  une  huile  qu'il  accorda  aux  religieu^cs 
(le  cet  ordre  en  .\lleinai;ni\  les  cxciupla  de 
payer  les  dîmes  de  ce  qu'ellos  faisaient  va- 
loir par  leurs  mains,  cl  qu'elles  pos^cdaical 
déjà  avant  1^;  concile  j;énéral.  Le  même 
poiilifo  loir  accorda  beaucoup  de  piiviléf;cs 
qui  furent  confirmés  l'an  i'IkS  par  le  pape 
Innocent  IV,  el  la  plupart  des  monastères  se 
.sont  ItUcmenl  enrichis  dans  la  suite,  qu'ils 
n'ont  plus  eu  besoin  de  recourir  aux  cliaii- 
lés  des  fidèles  pour  avoir  de  quoi  subsisli  r. 

Il  y  avait  aussi  des  religieux  du  même 
ordre  qui  avaient  un  gênerai  et  dos  pro- 
vinciaux, au\(|ucls  les  religieuses  élaii'nt 
soumises  ;  et  oulre  cela  elles  avaii-ut  un 
prévôt  qu'elles  élisaient,  mais  qui  devait 
cire  confirme  par  le  provincial  :  quelque- 
lois  ce  prévôl  élait  un  religieux,  cl  quel- 
quefois c'était  un  sc<ulicr,  comme  il  pa- 
rait par  la  confirmation  du  prévôt  du  mo- 
nastère de  l'ranKeiibcrj;  de  l'an  l'M'3,  que 
nous  rapporterons  aussi  :  Nos  (rater  Con- 
r/idus,  };rior  provincialis  monasleriorum  li. 
Mar.  Maqdal.  ordinis  S.  Augiistini ,  pre- 
posilas  in  Sluleim  ditcctis  suis  in  Chri^lo 
juuibut  M.  prinrisse  tolique  conventui  san- 
(timonialinm  dicii  ordinis  frankenbcrgen- 
sis  ecclesie  in  Goslar  cum  prima  dite- 
cttone  oraciones  in  Domino.  Dominum  Alex- 
andrum ,  ejliiliitorcm  prcscncium  ,  quem 
vos  una  cum  parocliialtbus  vesiris  iinanimi 
covsensu  et  canomcn  electione,  ac  noslro 
arcedcntc  consensu  m  prcposilum  et  pro- 
ti'.sorerfi  concurdiler  clegislis ,  vjbis  irans- 
viitiiiiius  ,  precipiendo  quatcinn  sibi  obe- 
dieiuium  ut   fratri    nosiri   ordinis  ch'Cli  tc- 

(I)  Yotj..  à  la  rnidii  vul.,  n"  iW. 


nerimini  et  reterenciam  debilam  in  vmnihuf 
fiicidtis,  l'y  nomine  Domini  autorilale  ti'i- 
.«.'  rt  eumdem  Alexundriim  in  secuinri  lidiitu, 
qiinmdiu  ipsi  placuerit ,  minenicm  pre-^rn- 
tibiis  confirmam  is.  Dantes  sibi  plrnarium 
])oleslniein  confessiones  audiendi,  exroi!i~ 
municai'di  et  nbsolvendi,  inira  et  extra  ex- 
cessHs  spiritialium  et  i cmparidium  débile 
corriqendi  ,  omnia  cl  sinqiila  faciendi,  que 
per  fralrem  nosiri  ordinis  electum  ouïe- 
cessorem  sunm  rite  fieri  consuen ruitt.  Ni- 
liilomiints  ralns  hnbere  volumus  et  firm'is  o"i- 
nes  sentencias  el  processus  ft  penns ,  quns 
idem  Dn.  Alexander  jiixtaco)islitucionescl  'v- 
gulam  nosiri  ordinis  rite  luti-rit  in  rebel- 
les. Insuper  nolumus  ip<!um  per  nos  nul  per 
nosiros  succcssores  gmeralem  sive  provin- 
ciides ,  sea  per  aliquis  frivolos  o'iasionrs 
vel  accusaliones  indebilas  ,  que  fili:juand<> 
fiant ,  quod  absit ,  allqualiter  destilu: ,  nisi 
inrcniretnr  wanifeslis  atiquibus  deliclis  re- 
cl'isus,  et  quibus  essel  ipso  jure  secundum 
siicros  canones  destitulus.  Noiliimus  eliuin 
pretactnm  Dn.  Alcxandrum  cl  vestrum  hc- 
naslerium  onemrc  per  nos  sive  per  nosiros 
suecessores  idiqua  persona  scu  pm-onis  iio- 
.■î'rî'  ordinis  apud  vos  lorandis,  nisi  de  bonn 
ipsius  Alcxnndri  el  vestri  conventus  unanimi 
volunlale.  Dat.  nnno  Dnmini  .M(",(XIII,  t'i 
oclava   A^sumitlinnis    B.    Mariœ    Virqinis. 

Nosqnoqaefraler  Groldus  B.  Mar.  Slagdat. 
monasleriorum  gencralis  preposilus,  omnio  et 
singnln  priscripla  rata  servamui  et  fiqili 
nosiri  munimine  confirmtimus.  Anno  Do- 
mini MCCCXI  ,  in  die  umtecim  mille  Vir- 
gininn    sigiltum  est  appensitm. 

Il  est  fait  mcnlion  de  ces  généraux  di^ 
l'an  12'i-8;  car  le  pape  Innocent  l\',  ay.in! 
conGrmé  tous  les  priviléi;cs  que  ses  pré- 
décesseurs avaient  accordés  aux  monaslères 
de  l'onlre  de  la  M.idclciue  en  Allcma;;ne, 
llilniar,  i  our  lors  iicnéral  do  cet  ordie  en 
.Ml.  migno,  envoya  des  cojiies  collalionnéos 
do  la  bulli;  de  ce  ponlil'o  à  tons  ces  mo- 
nastères, les(]iielle<  c"i)ios  étaient  datées 
de  Cologne  du  jour  de  ri'ixaltaiion  de  sainte 
Crr,i\  de  la  même  année. 

Tous  ces  lilres  que  nous  avons  rapportés 
prouvent  assez  l'.iniiquilê  de  ci  t  ordre  on 
Allemaiini',  cl  qu'il  él.iit  tliiïoront  de  celui 
que  le  15.  lîeilrand  insùtua  à  .Marseille,  puis- 
qu'il sub  istail  plusieurs  années  avant  II 
nai-saiice  do  ce  ilemior,  el  ces  inoua>tères 
ont  Clic  ire  moins  tiré  leur  origine  de  celui 
des  l'ênilenlcs  de  la  Mideleiiie  à  l'aris,  qui 
ne  parut  que  plus  de  deux  cents  ans  après 
(lue  le  IJ.  lîerlr.ind  cal  insliluc  son  ordre,  il 
y  a  encore  beaucoup  de  monaslcros  de  reli- 
gieuses do  l'ordre  do  la  .Madeleine  en  Allo- 
m.'ignc.  Celui  de  Sir.isbourg  csl  un  do  ceux 
qtii  ont  subsisté  au  milioti  de  riiérésie,  avant 
que  celle  ville  l("il  venue  sous  la  doiiiina- 
lion  do  France.  Aliialiam  liruiii,  Miiliel  Co- 
lyii  et  Josse  Amnianus  imus  ont  ilonné  l'iia- 
billemeiil  d'un  religieux  il(!  cet  ordre  (jui  esl 
cniièrcmenl  blanc,  cl  tel  (jue  nous  l'avons 
lait  graver  (1).  Celui  des  religieuses  él.iil 
blanc  aussi  avec  un  scapu'aire   et  un  m  ut- 


80S  MAO  M\D  !î!)5 

Icjui,  comme  on  poul  voir  dans  la  figure  qui  vicrgca,  et  trilcs  ont  clé  par  vous  irouvérs 

rcpréseiilc  une    religieuse   mailclonnclle  de  combien  qu'à  la  suggrsiion   de  leurs  mere<  et 

Metz  à    la  l6te  de   rarticle  de   ce  nom.  Plu-  pnrrns  qui  ne  demondoicnl  qu'à  s'm  défaire, 

sieurs  moii.i-lèrcs  de  cot  ordre,   qui  élaienl  e  les  eussent  affermé  être  corrumpucs.  lit  dans 

en  Saxe  cl  en  d'autres  pays  héréiiques,  ont  un  aulre  article  il  ajoute  :  Item  en  outre  or- 

été  supprimés.  On   appiliil   ces    religieuses  donnons  que  si  aueure  roulait  entrer  en  vôtre 

en   plusieurs  lieux,  les  Blanches  Dnmef,  ap-  envqreqalion,  qu'elle  soit  interroguée  p(  r  les 

parenimeiil  à  cause  de  leurs   haliits   blaiK  s.  Mère  et  sous-Mere,  présent  vâire  confesseur. 

Mais,  quoi()ue  leur  ordre  ait  été  établi  pour  et  en  la  présence  de  cinq  ou  six,  si  elle  se.  dit 

servir  de  refuge  aux   pé(  heresscs  publi(]ues,  corrnmpuë,  et  que  iille  soit  trouvée,  si  avpu- 

il  y  a  longtemps  que  dans  la  plupart  dcleiiis  ravant  qu'elle   fût  corrumpuë,  elle   avait  en 

ni'inaslèies    l'on    ne    reçoit    que    des    filles  disir  d'entrer  en  rôtre  religion  ;  et  si  afin  d'i/ 

d'iionneiir.  enter  elle  ne  s'est   point  f.it  corrumpre,  et 

Ce  que  dit  aussi  le  P.  Gcsnay,  que  les  re-  se' a  tenue  faire  serment  sur  les  saintes  Evuv- 

ligieuses  de  la   Pénitence  de  la  Madele  ne  à  giles  en  la  miiin  de  vôtre  Père  confesseur,  en 

Paris,  communément  appelées  les  Filles  Pc-  la  présence  de  cinq  on  six,  sur  peine  de  dam- 

nilentes,  embrassèrenl  l'inslitut  du  bi.enlieu-  nation  éternelle,  si  elle  ne  s'est  point  fait  cor- 

reiix  Bertrand,  n'est  pas  conforme  à  la  fon-  rumpre  en  intention   d'entrer  en  rôtre  reli- 

dation  de  ce  moiiastèie;    car,  selon  le  P.  du  gion;  lequel  lui  declunra  que  posé  qu'e'le  fût 

lîreuil  dans  ses  Antiquités    de  Paris,   ce   fut  professe  ou  non,  et  que  l'on  fût   averti  qu'elle 

parles    prédicatiiiis  du  P.Jean    Tisserand,  se  fût  fait  corrumpre  en  cette  inlmtion,  qu'elle 

religieux  de  l'ordn'  de  Sainl-Fiançois,  que,  ne  sera  réputée  leligiense  de  vôtre  monastèie, 

r.in  14.92,  plusieurs  femmes  et  filles  impudi-  quelque  rœu  qu'elfe  ait  fait.  Puis  donc  qu'il 

quus  se  convertirent,  el,   voulant  faire  péni-  fallait   prêter   ces   serments  pour  cire  reli- 

leucede  leurs  di  règlements,  Louis, duc  d'Or-  gieuse  dans   ce   monastère,  il  y    a    bien  de 

lèans,  leur  donna  si>n  liôtil   pour  le  couver-  l'apparence  que  des    personnes   que    l'on  y 

tir  en  monastère  sous  le  titre  de  Filles  Péni-  avaii  renfermées  n)algré  elles  n'auraient  ja- 

îcnle<,  où  elles  lurent  enl'erméi  s  et  oîi   elles  mais  prêté  le  serment  que  l'on  exigeait, 
ont  demeuré  pendant  qualie-\ingls  ans,  jus-         Jl  paraît  encore  p;!r  le  préambule  de  ces 

(lu'en  l'an  1572,    qu'elbs   furc  ni  Iransféiées  constitutions  que  c'est    le  roi   Cliarles    \  U[ 

ilans  la  chapelle  de  S.iinl-Cteorgcs,  en  la  rue  qui  leur   donna    l'Iiôtcl  ajipelc  de  Bocli.iigne 

Saint-Denis,  que  possédaient  les  Bénédictins  (de  Bobêmc),   et  non  pas  le  duc  d'Otléans  : 

(leSaiiil-Magloire,  (jui  furent  denieurer  à  ri.ô-  Jehan  par  la  permission  divine  éréque  de  Pa- 

pital  de  Saiiil-Jacqucs  du  H,iut-Pas,  c;jmme  ris,  à  nos  bien   aimc'es  et  ci  Dieu   données  les 

nous  avons  dii  en  un  aulre  lieu.  religieuses  et  couvent  des  files  Péniten!e'< ,  di- 

Ce  lut    l'an    1497  qui'    Jean-Simon,    ciii-  tes  les  Repenties  de  Paris  ànous  sujettes  sons 

qiiirme   de    ce    nom,   évéque    d-    i'aris,   en  moien,   snhil .  Comme  ])nr  la  grâce  de  Dieu  et 

vertu  d'un  Iref  du   [lape  Alexaiulrc  \' i,  leur  par  viaïe   insp  ration  ,    du    tems    que  avons 

prescrivit  di  s  statuts  et  leur  donna  la  règle  eu  le  lei/ime,  administration  el  joUissance  de 

de  saint  AugustiUj  qu'eIK  s  suivent  encore  à  n'.lreditéréché,  el  par  'e  moiende  qn^s  de  de- 

présent.  Le  P.  du  Breuil  ajoute  que,  lorsque  volion  <pii  ont  eu  l'œil  :ur  vous  plus  que  vous- 

ces   statuts  furent   faits,   elles    étaient   déjà  niâmes,  vous  êtes   assemblées  tellement  qu'êtes 

deux  «eut  vingt   religieuses,  mais  qu'il  n'ose  en  grand  nombre, et  aujourd'hui  environ  onze 

pas  diie  li  utes  pénilinles  ou  converties,  lîu  vingt  et  plus,    et  poinrait  être  chose  frustra- 

elTet  ,  il  y  en  avait   peut-élie   quelques-unes  tv.ire  vôtre    assemblée   et   bon   propos,  sinon 

qui  y  étaient  renfermées  contre  leur  volonté,  qu'elle  fût  pnrdurable  et  perpétuellement  ob- 

à  la  solliciiation  de  leurs  parents,  ou  par  au-  scnée  et  gardée,  qui  ne  se  peut  faire  sans  stn- 

torilé  de  jiislicc  ;  mais  elles  ne  pouvait  nt  pas  tuls,  ordonnances   et  constitutions.  A   cette 

être  admises  à  la  profession  religieuse,  puis-  couse  en  ensuivant  l'obligation   à   laquelle  de 

que,  selon    les  constiluiioas  de  l'évêiiue  de  nôli  e  office  pastoral  sommes  temts  d  obliges, 

Paris,  qui   lurent   dressées   pour    maintenir  du  conseil  de  plusieui s  notables  personnages, 

l'objervanee  régulière   dans   ce   monaslèie,  gens  de  religion  el 'du  consentement  de  vous 

l'on  n'en    devait    recevoir    aucune    malgré  toutes,  tant  pour  vous  que  vos  niccesseresses 

elle,   et  qu'il    fallait    pour  être    religieuses  religieuses  qui  sont  audit  munoslcre  en  l'hôtel 

(lu'elles  eussent  pioslilué    leur    iionneur   et  q  à  fut  appelle  de  Bueliaigne  que  le  roi  nôtre 

(ju'elles  ne  fussent  pas  \iergcs;  car,  par  un  sire  vous  a  donné,  étant  en  nôtre  censive,  jus- 

il 'S  articles  de  ces  statuts,  ce  prélat  ordonne  lice  et  seigneurie  e)  cause  de  noire  dit  éréehé, 

qu'on    ne  recevra   aucune  fille  dan>  ce  mo-  avons  statué  et   ordonné,  statuons  et  ordon- 

naslère    qu'elle   n'ait    commis   le    péché    de  nons  les  choses  que  ci-après  seront   déclarées 

la(bair,  et  quelle    sera    visitée   jiour   voir  être  inviolablemcnt  gardées  et  observées  audit 

si  elle  a  perdu   sa    virginité;  que  celles  qui  monastère. 

seront  nommées  pour  eu  f.iire  la  visite  feront  Nous  avons  dit  (i-dvant  quelles  étaient 
seirnent  sur  les  saints  Fvangiles,  entre  les  les  conditions  requises  pour  entrer  dans  ce 
mains  des  Mère  et  sous-Mère,  et  en  la  pré-  nionaslèrc;  il  y  a  encore  un  article  de  ces 
sencc  des  discrètes,  de  faire  vrai  et  loyal  constitutions,  qui  ordonne  que  l'on  n'eu  re- 
rapport, et  dire  si  elles  sont  corrompues,  el  ccvra  aucunequi  aura  passé  trente-cinq  ans, 
il  ordonne  que  cet  article  sera  inviulable-  de  peur  (dit  l'évéque  de  Paris)  que  sous  om- 
nient  observé;  car  vous  .sfarea  (leur  dit-il)  Ire  d'être  reçues  en  cet  ordre,  el  en  quelqui; 
Cfu'aiiciinc*  sont    venues  à  nous  qui  étoicnt  temiis  que  ce  soit,  il  n'y  en  eût  qui  voulussent 


C07  niCTIONNAlRE  OES  OflDUES  RELIGIEUX.  SOS 

coiiiiiiiicr  dans   leur  péché.  Cos   religieuses  pieux    élaienl  obligés  de  dire   l'office  selon 

su<vaienl  l;i    ré;;li'  d.- snini  Au^'usliu  :  elles  l'usiigc  de  l'Kglisi;  nmi.iiue  ;  ils  le  récir.iicnt 

éliiieiil  oliligi-es  de   dire  l'onice  lie  la  siiinle  ù  \o']\  b.issi-,  el   se   loaicnl  aussi  à  niinuil 

Vierge  au  cliiiMir  :  ell<s  se  levaient  à  iniiuiil  pour  dire  M;iliiii'S. 

pour  dire  m.iiines;  el  il  j  avait  loujours  di'uv  Voil;\  quelle   a  élé  la  vérit.ible  origine  du 

sœurs   qui    veillaient  dans   le  dortoir.  Outre  niouaslére    des   filles    rénilcnlcs    de   la    rue 

les  jeunes  ordonnes    par  rK;;lise,   elles  ji'i'i-  Sainl-Dcnis  à   Paris,  où  l'on  recevait  eneore 

iiaieiil  encore  Inus  les  vendredis  de  l'annce,  des  (îUcs  Kepenlies  vers  le  milieu  ilu  dernier 

et  les  mercredis  e(  vendredis  de  lavent;  elies  siède,  comme  il  parait  par  la  \  ie  de  la  ,\Iére 

ne  mangeaient  de  la  viande  que  quatre  fois  .Marie  Alvcquin,  réformatrice  de  ce   mona» 

l.i  semaine  :  elles  leiiaienl  le  cliapi'.re  les  lini-  trie,  doiince    par  .M.  Blesse   en  IG'iO,  el  par 

dis.  mercredis  et  ^cndredis,el  elles  prena;(  ni  la  relation  de  la   naissance  el  du  progrè-  de 

la  disci|  line    tous  les   vendredis  de  raiinee,  celui  des  .Madclonnelles,  qui  fui  aussi  iinpri- 

et  en  carèiiii'   les  mercredis   et  vendredis,  i  l  niée  en  UiW  ;  mais  depuis  plus  de  cinquante 

tous  les  jours   de  la  semaine  sainlc.  Comme  ans  l'on  n'y  reçoit  plus  que  des  lilles  il'lion- 

elles  ne  vi\aii  nliiue  d'aumoncs  dans  le  com-  neur,  el  nous  ne  croyons  pas  faire  lorl  à  ces 

mencemenl,  (lies   allaient  deux  à  deux  ()ar  cliaslrs  épouses  de  Jesus-(>hrisl  si   nous    ne 

1,1  Mlle  pour  li-s  chercher.  Celles  qui  élaienl  nous  conformons  jias  à   ce  qu'en  a  écrit  de- 

desiinees  pour  cet  emploi  ne  pouvaient  lioire  puis  quelques   années  M.  (le  Marivaux  dans 

ni  manger  en  ville.  Il  n'eiait  pirmis  qu'aux  une  nouvelle  Vie  de  la   même    réformalrice, 

quéliu^esde   sortir,  car  elles  fjisaii'Ut  V(eu  puisque  nous  aurions  cru  aller  contre  la  vé- 

lie   perpétuelle  clôture,  comme  il  est  encore  rilé  de  l'hisloire. 

ordonne  par   lcur>  cunslilulions  el  comme  il         Cet  auleur,  parlant  de  l'origine  de  ce  mo- 

csl   porte    par  la   fornjule   de   leurs    vœux,  na^lère    des    lilles  l'énilenles,  dit  que,  le  I'. 

qu'elles  pronone  ienl  en  celle  manière  :  Je,  Tisserand   prêchant   avec   succès,  un  grand 

A  .,  roue  it  promets  à  Dieu  et  à  ta  Vierge  Ma-  iiomliri'  de  dillérenlcs   personnes  et  de  dilïe- 

1  le,  et  à  monsei(jnciir  l'évéqnc  de  l'arn,  iimn  reiit  se\e,dislinguees  jiar  leur  vei  lu,  vinrent 

prélat  it  pire  spintacl^el  à  vous  mère  ,  sous-  !,■  irouver,  lui  proUslanl  ([u'elles  voul.iieiil 
vure,  et  tint  le  couvent,  slaiiilile  et  fermdé  sei\  ir  Dieu  toute  leur  vie;  qu'elles  s'aban- 
soHs  clùlure  perpétuelle  en  ce  lieu  ici,  la  con-  dunnèreiit  sous  sa  conduile,  qu'il  se  Ir.iuva 
version  de  mes  mœurs,  chasteté,  pauvreté  (t  plus  d  •  deux  cents  demuiselhs  qui  prirent 
obéissance,  selon  larrglc  de  monseigneur  saint  celle  resolulion,  cl  qu'il  les  renlerm:!  dans 
AtKjKslin  et  selon  les  statuts,  réfurmatiun  (t  un  monaslère.  I  our  leter  lillusion  populaire 
inodifualion  fails  et  à  fuii  e  pur  J{.  P.  en  l)ic:i  (à  ce  qu'il  pieliiid  surle  nom  de  rénilenles, 
monseigneur  Jehan,  éiéque  de  Paris,  l'iin  qu'elles  ont  loujnurs  eu,  il  ajoute  ((ue  ce  nom 
l'iOT.lJuant  à  leur  liabillemcnt,  il  élail  blanc,  leur  fut  iinpnsé  parce  l'ère  en  considération 
aussi  bien  que  leur  voile.  des    ch.ingeinenls    qu'elles  (ireni    d'une  vie 

11  y  avait  aus>i  des  religieux  qui  avaient  douce  et  délicieuse,  telle  qu'est  celle  des  lil- 
élé  I  areillcment  inslilués  dansée  monastère  les  de  qualité  dans  le  monde,  (juelque  ver- 
par  le  même  évéque,  desquels  le  P.  du  Ureuil  lueu>es  qu'elles  soient,  à  la  vie  austère  qu'el- 
n'a  point  parlé.  Ce  prélat,  par  ses  conslitu-  les  emlirassèrent  si  généreusement  dans  s.i 
lions,  ordonne  qu'il  y  aura  dans  ce  mon:is-  nouvelle  religion.  M.  de  Marivaux  convient 
1ère  des  religieux  qui  suivront  aussi  la  régie  (|ue  l'éièqnc  de  Paris  Jean-Simon  leiirdonn.i 
de  sa  ni  Augusiin,  (jui  auriiiit  des  chaperons  des  conslilntions  qui  furent  observées  de 
et  des  robrs  grisis,  cl  une  autre  robe  de  toutes  les  religieuses  avec  une  exactitude  el 
laiiie  blanche  par-ilessous.  Us  de\  aient  faire  unr  fnlclilé  iin  lolalibs.  .Mais  ce  prélal  n'ati- 
un  au  de  novicial,  après  letiucl  ils  lais.iienl  rail  il  pas  été  digne  de  lilàme,  si,  voyant  plus 
leur  |)rolessioii  à  la  grande  grille  de  ce  cou-  de  deux  ccnls  lilles  chastes  el  lertueuscs  <|ul 
vcnl,  entre  li'>  mains  de  la  supérieure  el  du  se  niellaient  en  congrégation  pour  y  vivre 
l'ère  conlessi'ur  en  ces  lenii'S  :  Je,  N.,  pro-  séparées  du  moiiile  el  se  donner  pour  épouses 
mets  tt  voue  à  Dieu  et  à  monseigneur  t'évc-  à  Jésus-t^lirisl,  il  les  a^ail  ohligees  d.ins  le 
t/ue  de  Paris,  mon  pié.al .  à  vous  mère,  à  tout  commencemeul  de  leur  retraite  de  ne  rc(c- 
le  coûtent,  et  à  luus,  Leau-père  confisseur,  voir  parmi  elles  1)111!  des  lilles  iirostiluées  ipii 
chasteté,  piuvrelé  et  oludience,  principale-  devaient  faire  serment  s^r  lis  saints  Kvan^i- 
mcnl  à  mou  prdat  monseigneur  réveque  de  les  qu'elles  ne  s'elaienl  point  f.iil  cori'oinpie 
Paris  (t  au  couvent  des  srurs  de  ce  nwnnsure,  en  intention  d'entrer  dans  cri  ordre,  où  l'on 
ce  qui  lait  voir  que  le  P.  Cesnay  s'est  lrom|ié  ne  pouvait  élre  ri  eu  iju'après  avoir  comiii.s 
lorsqu'il  a  dit  que  Icï  teligieuses  Fille  -l'éiii-  iepechédela  ch  ni  ?  Peut-on  croire  Al.  de 
teilles  à  Paris  avaient  embrassé  riuslilnl  du  Marivaux,  lorsqu'il  dit  (]u'il  n'a  rien  avamé 
bienheureux  lierlrand,  puisque  les  religieux  (jue  de  vrai,  et  que  ce  n'est  qu'après  avoir 
di:  son  ordre  élai.  ni  habillés  de  noir,  cl  ([ue  examiné  les  litres  originauv  de  la  bimlalion'.' 
crux  qui  élaienl  au  monastère  deil'il.es-i  é-  cl  a-l-il  pu  s'imaginer  que,  quoiiiue  les  rel- 
nileiles  étaient  babil  es  de  gii<,  et  avaient  gi 'Uses  Pénitentes  aient  peul-élre  su|ipriiiié 
de  instilués  par  l'évê.iue  de  Paris.  Les  reli-  leurs  anci''iin<  s  consiitutions,  il  ne  s'en  Irou- 
gieuses  deiaient  pourvoir  à  toutes  les  iiéces-  x.'it  cneoiedes  exe.iiplaires  dans  queluucs 
Mié>  des  leligieuv,  tant  pour  le»i\re  que  bililiothèqnes,  comme  en  effet  il  s'en  trouve 
pour  riiabillement  el  les  études,  lilles  en  dans  celles  du  roi  et  dans  celle  du  collège 
'  lisaienl  un  pour  conlesseur,  et  il  en  devait  des  II.  P.  de  la  compagnie  de  .lésus  à  Pans 
'-.buisir  d'autres  pour  le    soulager.  Ces  reli-      cl  dans  qm  'qii'  s  antres,  où  l'on  peut  h  s  cun- 


80) 


MAD 


MAD 


8!0 


suller.  Elles  sont  toutes  en  lettres  gothiques, 
ce  qui  fait  voir  qu'elles  sont  des  premières 
éililions  qui  furent  faites  du  temps  de  l'évê- 
que  Simon. 

Ces  dames  de  Saint-Magloire,  comme  elles 
veuli'nt  èlre  appcléesà  présent,  suivant  l'ins- 
cription qu'elles  ont  fait  mettre  depuis  peu 
au-dessus  de  li'ur  porte,  ne  doivent  point 
roufiir  de  porter  le  nom  de  l'cnilenles,  puis- 
qu'elles se  sont  consacrées  à  Dieu  p.tr  la  pé- 
nitence en  entrant  en  religion.  Elles  doivent 
imiter  tant  d'hommes  et  de  filles  qui  ont  pris 
ce  nom,  et  ont  formé  un  ordic  religieux, 
où,  pour  me  servir  des  termes  de  M.  de  Ma- 
rivaux, ces  enf;ints  innocents  se  sont  con- 
sacrés pour  imiter  Jésus-Chrisl,  qui,  tout 
iiiuoccnt  qu'il  était,  a  voulu  être  le  premier 
et  le  plus  illustre  des  pénitents,  établissant 
son  royaume  dans  les  douleurs,  faisant  son 
sceptre  el  son  trône  de  la  croix,  comme  son 
diadème  d'épines.  Quoique  le  public  donne 
encore  le  nom  de  Pénitentes  à  ces  dames  de 
Saint-Magloire,  et  quoiqu'elles  aient  toujours 
conservé  beaucoup  de  dévotion  pour  Made- 
leine pénitente,  on  ne  tire  pas  de  là  une  con- 
séqiience  qu'elles  aient  auparavant  suivi 
Madeleine  pécheresse,  puisqu'elles  ne  sont 
pas  les  seules  dont  les  nrbnasiôres, ayant  été 
bâtis  d'abord  pour  servir  de  refuge  à  des 
pécheresses  publiques,  sont  devenus  dans  la 
jsuite  des  sanctuaires  de  saintes  vierges, 
comme  on  en  voit  un  exemple  dans  l'article 
suivant. 

La  Mère  Marie  Alvéquin,  ayant  été  tirée 
du  monastère  de  Monlmarire  avec  sept  reli- 
gieuses pour  réformer  celui  des  filles  Péni- 
tentes de  Paris,  y  entra  le  2  juillet  IGIG,  et 
mourut,  le  25  janvier  lC48,dans  une  grande 
réputation  de  sainteté,  étant  âgée  de  quatre- 
vingt-deux  ans.  Les  désordres  de  la  guerre 
avaient  causé  dans  ce  monastère  beaucoup 
de  relâchement;  mais  elle  y  rétablit  en  peu 
de  temps  les  observances  régulières,  et  leur 
fit  prendre  un  habillement  diiTérentde  celui 
qu'elles  portaient,  leur  ayant  donné  un  ha- 
bit de  couleur  minime,  avec  un  scapulaire 
de  même,  et  leur  ayant  aussi  donné  un  voile 
noir.  Je  ne  sais  si  l'on  doit  compter  au  nom- 
bre des  réformes  qu'elle  fit  en  ce  monastère 
l'adoucissement  qu'elle  apporta  dans  les  aus- 
térités, si  l'on  doit  ajouter  foi  à  M.  de  Mari- 
vaux ;  car.  selon  cet  auteur,  elle  leur  fit  dire 
matines  à  huit  heures  du  soir,  au  lieu  qu'el- 
les se  levaient  à  minuit  ;  elle  leur  lit  quitter 
les  chemises  de  serge  pour  en  prendre  de 
toile,  et  leur  fit  mangerde  la  viande  le  lundi, 
au  lieu  qu'elles  n'en  mangeaient  pas.  Nous 
voyons  de  pareilles  réformes  s'ériger  tous  les 
jours  dans  les  monastères,  contre  linlention 
des  fondateurs. 

Voyez,  pour  les  Filles  Pénitentes  de  Paris  : 
du  Breuii,  Anliquitis  de  Puris  ;  les  anciennes 
Constitutions  de  ces  religieuses  imprimées  à 
Pans  en  1300;  Biesse,  Vie  de  la  Mère  Marie 
Alvéquin,  leur  réformnlricc  ;  et  de  Marivaux, 
Vie  de  la  mcine  réformatrice.  Pour  les  reli- 
gieux de  la  Pénitence  de  la  .Madeleine  à  Mar- 
Svîille  :  Gosnay,  IJist.  Mnssil.;  et,  pour  l'or- 
dre de  la  Madeleine  en  Allemagne  :  Clironi- 

DlCTlONNAlBE  DES  OhUKES  RELIGIEDX.    11. 


cnn  cœnohii  Monds  Francorum  Goslariœ,  et 
Joann.  Buschius  ,  De  Reformât.  Monast., 
(tpiid  Leibnitz;  Hist.  Bninsvic,  loin.  11. 

M  A  DELONNETTES  (Religieuses  deia  Ma- 

DELEiMî,  ou)  fl  Metz  et  à  Noples. 

Les  religieuses  du  monastère  de  Sainl-Ma- 
gloire  à  Paris,  et  que  le  peuple  apiielle  com- 
munément filles  Pénitentes,  ne  sont  pas  les 
seules  à  qui  le  nom  de  Pénitentes  semble  en 
(luelque  façon  odieux.  Celles  de  la  Made- 
leine à  Metz  étaient  aussi  appelées  sœurs 
Pénitentes,  cooime  il  paraît  par  une  sentence 
de  l'évéqne  Conrad  r,ayer  deBopparl,  rendue 
l'an  1452  en  faveur  îles  chanoines  de  l'église 
collégiale  de  Saint-Thibaut  de  la  même  ville, 
par  laquelle  ce  prélat,  pour  satisfaire  à  un 
bref  du  pape  Nicolas  V,  érigea  le  monastère 
de  Sainte-Madeleine  de  Meiz  des  sœurs  Péni- 
tentes, en  une  église  collégiale  sous  le  titre 
de  la  sainte  Vierge  et  de  saint  Thibaut,  et  la 
chapelle  de  Sainte-Elisabeth  en  un  monas- 
tère de  ces  religieuses  :  Ecvlcsiam  et  monns- 
lerium  B.  Moriœ  Magdalenœ  Melensis  soro- 
luiii  Pœnitenlitim,  in  collegiutam  sab  nomine 
et  vocabiilo  D.  el  ijloriosœ  Virginis  Mariœ  al 
sitncti  Iheobaldi,  et  capellnm  Sanclœ  EUsa- 
beth(nlias  Yet^ris  Ccemeterii)  inmonasterium 
sororum  Pœnitentium  ereximus et  erigimus pcr 
prœsentes,  etc.  Cet  acte  est  rapporté  par  Mû- 
risse ,  évêque  de  Madaure,  dans  son  Histoire 
des  Evéqnes  rie  Metz.  Il  tire  île  là  une  consé- 
quence que  ces  religieuses  de  la  Madeleine, 
à  qui  le  peuple  a  donné  le  nom  de  Madelon- 
nctles,  étaient  déjà  établies  à  Metz,  et  dit  qu'il 
n'a  pu  trouver  précisément  le  temps  de  leur 
établissement. Mais  ces  religieuses  prétendent 
a  voir  été  établies  pi  us  de  quatre  cent  cinquante 
ads  auparavant,  et  font  remonter  leur  origine 
à  l'an  1005,  ce  qu'elles  auraient  sans  doute 
bien  de  la  peine  à  prouver.  11  se  peut  faire 
(sue  cette  chapelle  dédiée  à  sainte  lilisabelh, 
mère  de  saint  Jean-Baptiste,  dans  son  origine, 
et  où  ces  religieuses  ont  été  transférées  en 
li52,  ait  été  bâtie  en  1003  ;  mais  le  nom  de 
s(Eurs  Pénitenles,  qui  leur  est  donné  dans  la 
sentence  de  l'évêque  de  Metz,  les  religieuses 
d'Huys  du  môme  ordre  (selon  les  Mémoires 
qui  m'ont  été  envoyés)  et  qui  vinrent  pour 
rétablir  cette  maison,  qui  avait  été  abandon- 
née pendant  les  guerres,  et  oii  il  n'étaiS 
resté  qu'une  sœur  converse  ;  les  monastères 
de  Tordre  de  la  Madeleine  qui  sont  encore  en 
Allemagne,  et  où  les  religieuses  tout  habil- 
lées de  même  qu'à  Metz,  me  font  uoi.e  que 
celles-ci,  à  qui  le  peuple  a  donné  le  nom  de 
Madelonneltes,  sont  du  même  onlre  que  les 
religieuses  de  la  Madeleine  en  Allemagne,  et 
cette  sentence,  rendue  l'an  1432  par  l'évêque 
(Conrad,  fait  connaître  qu'elles  ne  peuvent  pas 
avoir  tiré  leur  origine  du  monastère  des 
Filles-Penitentes  à  Paris,  qui  ne  furent  éti- 
blies  que  l'an  141)2,  comme  nous  avons  déjà 
dit. 

Cependant  les  Madelonneltes  de  Metz  se 
disent  présentement  chanoineiscs ,  ce  qui 
parait,  disenl-ellcs,  par  les  anciens  monu- 
ments qui  sont  dans  leur  monastère  el  pâl- 
ies figures  des  anciennes  religieuses;  et  ijua 

■lu 


su 


niCriONNAIIlF.  DES  ORDRES  REI.IGIF.rX. 


!M2 


si  elles  portrni  présonlniiciil  une  rnlie  l)lnii- 
rhe  cl  un  sr.ipulaire  di'  mèini-,  Ci"  u'c^l  qu'à 
cause  de  la  dévulinn  que  leurs  iMicieiines 
porlaient  à  s  .inl  Du  i  iuiq  le,  ajanl  voulu 
prendre  Tlialii!  des  religieu-es  de  son  oritie, 
lorsque,  vrr>  l'an  l'22l,  il  élahlil  le  louvenl 
lie  SCS  religieux  à  Metz  ;  el  que  dans  l.i  sulle, 
pour  se  (lisli't!;uer  îles  religieuses  de  tel  <ir- 
(lie,  elics  quillèrenl  le  srapulaire  el  la  chape 
noirs  pour  en  prendre  de  l)ianc«,  le  scapu- 
laire  el  la  (h'penoirs  étanl  restés  à  leurs 
sœurs  converses.  Mais  je  u';ijoule  pris  brau- 
ciiup  de  foi  à  ces  mémoires,  d'auianl  plus 
que  CCS  reli;;ii  uses  Madclorinclles  smil  mal 
iiifiTuiccs  de  l'h  ibilleiiicul  des  religieuses  de 
l'ordre  de  Saiul-l)ouiini(iie,  qui  ne  porlenl 
point  de  srapulaire  noir,  si  ce  u'esl  les  sœurs 
converses;  d'ailleurs,  dans  le  temps  que  ce 
saint  fonda  son  ordre,  ou  plutôt  avant  qu'il 
l'eût  fondé,  il  avait  établi  les  religieuses  du 
Tnona-^'ère  i!i-  l'rouille,  auxquelles  il  donna 
pour  liabilleniiMit  une  robe  blanche  et  un 
inaiiUMU  de  couleur  tannée.  Nous  donnons 
riiabillemcnt  des  re'igieuses  .Madclonnellcs 
de  iMelz  tel  qu'elles  le  portent  présenle- 
ment  (1).  M  est  \in\  qu'il  y  a  quelque  union 
enire  l'o  d  e  de  Saint  Doniinit^uo  el  celui  de 
la  .Madelein', puisque  l'ordredela  .Madeleine 
suit  les  coiistituiions  de  l'ordre  de  Saint-Do- 
niinique  :  au  moins  il  y  avait  en  Allemagne 
plusieurs  mona  léres  qui  suivu'cnl  ces  consii- 
lulions,  ce  qu'ont  pu  faire  aussi  les  Mad.lon- 
neltes  de  Meiz. 

Mémoires  manuscrils  envoyés  eu  1708;  et 
l'on  peut  consuiterMurisse  dans  son  Ilisloire 
des  Eréqncs  de  MeIz. 

Les  monastères  des  religieuses  de  la  Ma- 
deleine et  de  Sainte-Marie-Egjptienne  à  Na- 
plcs  sont  du  nombre  de  ceu\  qui,  ayanl  été 
destinés  d'abord  pour  servir  de  relraile  aux 
pécheres-ics  publiques,  sont  devenus  dans  la 
suite  des  sanctuaires  de  saintes  vierges  pa- 
reils à  ceux  dont  nous  avons  déjà  parle. Cf  lui 
rie  la  .Ma  Icleine  fut  fondé  l'an  13-2't,  et  doté 
par  la  reine  Sanche  d'Aragon,  femme  de  Ro- 
l)ert,  roi  de  Napics,  pour  des  pécheresses 
publiques  qui,  touchées  de  repentir,  avaient 
dessein  do  faire  pénitence. Celle  pieuse  reine 
avait  un  si  grand  zélé  pour  le  salut  de  ces 
pauvres  iréatures,  qu'elle  allait  tous  les 
joursdans  ce  monastèie  avec  son  confesseur, 
le  P.  rhilij.pe  Agueiro,  de  l'ordre  de  Saint- 
Trancois,  pour  leur  faire  faire  des  exhorta- 
lions*  <iui  furent  si  cflieaces,  que  dix  ans 
après  la  fond  ilion  de  ce  nionaslèie,  de  cent 
quitre-vingl-di'ux  de  ces  pécheresses,  iiui.à 
lasolliciliiionde  cette  princesse,  élaicnt  en- 
trées dans  celle  maison,  il  y  en  eut  cent 
soixanie-six  qui  firent  les  vœux  s  -lennels 
entre  1rs  mains  de  l'arclievéque  de  Naples, 
ddul  p'usieiirs  moururent  en  odeur  de  sain- 
teté. Celle  princesse  voulut  aussi  que  ce  mo- 
nastère lïil  soumis  aux  religieux  de  l'ordre 
de  Sainl-l'raiicois  ,  ce  que  l'archevêque  ac- 
corda, l'an  l.J'i'l ,  à  condition  que  les  religicu- 
ies  seraient  oblit;ées  de  donner  tous  b'S  ans  à 
{'église  métropolilainc  un  cierge  d'uue  livre. 


Il  y  avait  déjà  pour  lors  trois  cents  religieu- 
ses dans  ce  mon-istéi'e;  mais  dans  la  suite 
on  n'y  a  plus  reçu  que  des  (illes  d'honneur 
el  vertueuses,  qui  snnl  presiMilemrnl  au  nom- 
bre de  quatre-vingts,  lilles  ont  la  règle  de 
s  ilnt  Augustin  el  un  habit  noir,  el  pour 
ceinture  une  corde  bl  inche,  comme  les  reli- 
gieuses de  l'ordre  de  Sainl-Franeois.  Les  re- 
ligieux conventuels  de  cet  ordr'  en  ont  eu  la 
direction  jusciu'en  l'an  ritiS,  (|ue,  par  ordre 
du  pape  rie  \  ,  les  religieux  de  l'Observanci- 
prirent  leur  place  et  eurent  au-si  la  direetioi\ 
des  religieuses  du  monasiére  deSainle-.Marie- 
I'!gypiienne,  que  les  conventue.s  leur  aban- 
donnèrenl  aussi. 

Ce  monasiére  lui  aussi  fonde  par  la  reine 
Sanche  d'Aragon  pour  des  lilles  et  des  fem- 
mes repenlies,  à  cause  que  celui  de  la  Ma- 
deleine ne  se  lrou\ail  pas  assez  grand  pour 
contenir  le  nombre  de  c 'Iles  qui  ntiillaicnt 
leur  tnauvaise  vie.  L'archevè  ]ui'  de  Naples, 
qui  avait  consenti  que  les  religieuses  de  la 
Madeleine  fussent  sous  la  direction  des  reli- 
gieux de  l'ordre  de  Sainl-l'"rançois,  accorda 
Il  même  grâce  à  celles  deSaiiite-Marie-I'!gyp- 
lieiine,  l'an  13i2,  à  condiiion  qu'elles  donne- 
raieiit  aussi  tous  les  ans  un  cierge  d'une 
livre  à  la  cathédrale.  Klles  furent  soumises 
pareillement  aux  religieux  conventuels  : 
mais  par  ordre  du  pape  Pie  A'  elles  furent 
mises  sous  la  direction  des  l'ércs  de  i'iibser- 
vance  de  Saint-François.  Elles  ont,  ronime 
les  religieuses  du  monaslèie  de  la  Madeleine, 
la  règle  de  saint  Augustin  et  l'habit  de  s  m 
ordre  avec  la  tord  ■  blanche  de  celui  de 
Saint-François. 

Voijrz,  pour  CiS  deux  monastères  :  Franc. 
Gonzag.  De  Origine  Str.iph.  iili<j.;  Wading. 
Annal.  Minor. 

MADELONNF.TTES  (Heugieisks  »k  i.'onoBB 
Diî  LA  Madeleine,  âi-PELiacs  comminl- 
hievt)  (l  Paris,  ù  llouen  ci  à  liordedux. 

Les  religieuses  de  l'ordre  de  la  .Madeleine 
ou  Madi'lonnellcs,  dont  nous  allons  parler, 
sont  dilTérenles  de  celles  dont  nous  avons 
parlé  dans  l'article  précèdent;  elles  o;il 
pris  leur  origine  à  Paris  au  coniiiencemenl 
du  diTiiier  siècle.  Celle  ville  est  si  grande 
et  si  peuplée  ,  qu'il  ne  faut  pas  s'éton- 
ner s'il  y  a  un  si  grand  nombre  de  filles  et 
de  femmes  qui,  s'oub'.ianl  de  leur  devoir, 
prosiiluenl  leur  honneur,  el  s'il  y  a  tant  de 
maisons  [our  les  recevoir  lorsqu'elles  veil- 
le il  se  convi'rtir,  ou  pour  les  enfeiuier  di; 
lorce  lorsquelles  ne  veulent  point  quitter  le 
vice,  telles  que  sont  le  monastère  des  ^Lade- 
lonnetles  el  les  communautés  ilu  Hon-Pasieur, 
du  Sauveur,  de  Sainle-Pel.igie,  de  Sain'e- 
'l'Iiéodore  el  queliiues  autres.  Mais,  connue 
la  plujiarl  de  ces  communautés  ne  sont  que 
séculière-,  nous  ne  |  arlerons  ici  que  des 
Madelonneltos,  dont  la  plus  grande  par  in 
de  la  communauté  est  composée  de  religii'ii- 
scs  qui  forment  un  ordre  particulier,  piii- 
qii'il  y  a  encore  des  ma-sons  ilu  même  insti- 
tut à  Rouen  el  à  Bordeaux  ;  et  que  ces  tiois 


(l)  }:y.,  ii\.<  lin  .In  v..l.,n<'  201. 


813 


M  AD 


nionastf^rfs  suivent  les  mêmes  conslituli^ns, 
qui  ont  été  dressées  par  l'ordre  du  p.ipe  Ur- 
bain vm. 

Ce  fui  i'an  1G18  que  cet  ordre  prit  nais- 
sance à  l'aris,  par  le  moyen  du  R.  1'.  Alha- 
iiascMolé,  capucin,  frère  de  M.  Mole,  pro- 
cureur général  du  pariemetil;  d'un  riche 
marchand  de  vin  de  celle  ville  nommé  de 
Monlry,  el  de  M.  du  Frcsne,  officier  dans 
les  garles  du  corps  du  roi,  qui  tous  trois, 
animés  du  zèle  de  la  gloire  de  Uieu  el  du  sa- 
lut du  prochain,  s'employaient  conllnuelle- 
nienl  à  la  conversion  des  pécheurs  et  des  hé- 
réiiques,  el  au  soulagement  des  pauvres  el 
des  malades.  Ce  fut  donc  l'an  1018  que  ces 
personnes  charitables  ayant  relire  quelques 
filles  du  vice  où  elles  s'élaionl  plongées  p:ir 
leur  prosliluliou,  on  leur  loua  d'abord  des 
thansbres  au  faubourg  Saint-Honoré  ;  mais 
ce  lieu  ne  se  Irouvant  pas  propre  pour  la  re- 
traite qu'elles  embrassaient,  le  sieur  de 
Monlry  leur  céda  sa  propre  maison  située  à 
la  Croix-Uonge,  au  faubourg  Saint-Germain, 
et  en  loua  une  autre  pour  lui  à  côté,  pre- 
nant soin  de  ceà  pauvres  créatures,  tant 
pour  lanourriUiie  que  pour  les  secours  spi- 
riluils  qu'il  leur  procurait;  et  en  peu  de 
temps  elles  se  trouvèrent  jusqu'au  nombre 
de  vingt.  Les  Bénédictins  de;  l'abbaye  de 
Saint-Germain  des  Prés  leur  permirent  d'a- 
voir une  (  bapelle  chez  elles.  La  première 
messe  y  fut  célébrée  le  25  août  de  la  même 
année  1018,  et  peu  de  temps  après  elles  em- 
brjssèrenl  la  clôlure,  ne  parlant  aux  |ier- 
sonues  du  dehors  qu'à  travers  une  grille  à 
la  manière  d,s  religieuses,  et  ne  sortant 
point  de  leur  maison.  Deux  ans  après,  sainl 
Franco  s  de  S. les,  évèque  de  Genève,  ayant 
prêché  dans  leur  chapelle  le  jour  de  sainte 
Madeleine,  donna  à  quel(|ues-uncs  de  ciS 
filles  un  haliit  religieux;  el,  cunnie  le  nom- 
bre de  ces  iilles  augmentait  considérablement, 
un  les  transféra  dans  une  maison  plus  ample 
proche  le  femple.  La  marquise  de  Maii^ne- 
lay  se  déclara  fondatrice  de  celle  nouvelle 
maison,  et  cette  communauté  ayant  été  so- 
lidement établie,  comme  les  personnes  qu'on 
y  recevait  avaient  plus  besoin  d'èire  con- 
duites elies-mêmes  que  de  conduire  les  au- 
tres, n'ayant  ni  l'expérience  ni  les  qualités 
requises, on  leiir  donna,  pour  avoir  soin  d'el- 
les, des  religieuses  de  l'ordre  de  la  Visitation 
de  Notre-Uame.  Il  y  eu  eut  qualre  du  pre- 
mier njoiiaslère  de  l'aris,  qui  l'urenl  desti- 
nées pour  cela.  Klles  entrèrent  l'an  1629 
dans  celui  de  la  Madeleine,  el  remplirent  les 
premières  charges,  comme  de  prieure,  sous- 
prieure,  portière,  tourière;  et  de  lemps  en 
leuips  un  les  changeait  pour  les  soulager  du 
grand  travail  qui  se  rencontrait  ilans  la 
conduite  de  ces  Repenties,  dont  quelques- 
unes  y  étaient  malgré  elles  el  par  auto- 
rité de  justice.  La  conduite  de  ces  religieu- 
ses de  la  Visitation  a  été  accompagnée 
de  tant  de  bénédiction,  qu'elles  ont  éta- 
bli un  très-bon  ordre  dans  cette  commu- 
nauté, qui  est  ordinairement  de  cent  ou 
cent  vingt  personnes.  Mais  enfin  elles  se 
sonl  las^6cs  de  ces  oi  (  ui'aiions.  el  elles  ont 


MAD  SU 

mieux  aimé  resler  dans  leurs  monaslèros. 
Les  religieuses  Ursulines  leur  ont  succédé, 
el  n'ont  pas  fait  moins  de  fruil  pendant  en- 
viron trente  ans  qu'elles  ont  eu  la  direction 
el  la  conduite  de  ce  monastère;  el  enfin  de- 
puis quelques  années  M.  le  cardinal  de  Noail- 
les,  areliiMéque  de  Paris,  a  mis  à  la  place 
des  Ursulines  des  religieuses  hospitalières 
de  l'ordre  de  la  Miséricorde  de  Jésus.  Les 
constitutions  que  l'on  observe  dans  ce  mo- 
naslère  furent  dressées  l'an  tG37  et  approu- 
vées par  Jean-François  de  Gondy,  archevê- 
que de  Paris,  le  7  juillet  16iO,  suivant  le 
pouvoir  (ju'il  eu  avait  reçu  du  pape  Ur- 
bain Vili,  qui  érigea  celle  maison  en  mo- 
nastère, et  elle  en  a  produit  deux  autres, 
l'une  à  Bordeaux,  l'autre  à  Rouen. 

Conformément  à  ces  conslilulions,  l'on  no 
doit  recevoir  dans  les  maisons  de  cet  institut 
que  des  filles  ou  femmes  qui  ont  mené  une 
vie  déréglée;  el  il  est  défendu  sur  peine 
d'excommnnicalion  d'en  admettre  d'autres. 
Si  néanmoins  quelque  fille  se  lrou\aitcii 
danger  de  se  perdre,  ou  ne  laisse  pas  de  la 
recevoir,  étant  présentée  par  ses  parents, 
quoiqu'elle  n'ait  pas  encore  fait  faute,  mais 
elle  ne  peut  demeurer  que  pour  un  temps 
dans  le  monastère  parmi  les  religieuses  pro- 
fesses. 

Trois  sortes  de  congrégations  se  Iroovent 
dans  ces  sortes  de  monastères.  La  première, 
sous  le  titre  de  la  congrégation  de  la  Made- 
leine, est  destinée  pour  celles  qui  sonl  ad- 
mises à  faire  les  vœux  solennels,  après  qu'el- 
les s'en  sonl  rendues  dignes  par  leur  bonne 
conduite.  La  seconde  congrégation,  sous  la 
titre  de  Sainle-Marihe,  e>t  de  celles  que  l'on 
ne  juge  pas  encore  capab'es  d'être  religieu- 
ses, ou  qui,  pour  quel(]ues  considérations, 
coîiime  de  mariage ,  ne  peuvent  préten- 
dre à  faire  les  vœux  solennels.  Enfin  la  troi- 
sième  congrégation,  sous  le  litre  de  Saint- 
Lazare,  est  destinée  pour  celles  qui  ne  sont 
nullement  disposées  au  bien  :  el  toutes  ces 
dilTéreiUes  cougrégations  ont  leur  quartier 
séparé;  nous  allons  >oir  maintenant  quels 
sont  leurs  exercices  et  observances. 

La  clôlure  est  étroitement  girdée,  cl  les 
sorties  interdites  aux  professes  de  la  pre- 
mière et  de  la  seconde  congrégation  (  sinon 
au  cas  permis),  sur  peine  d'excommunica- 
tion; mais  aux  autres  du  troisième  rang,  sur 
peine  de  châlimeut  exemplaire.  Fîtes  ne 
parlent  point  seules  aux  personnes  du  de- 
iiors,  el  jamais  à  personnes  suspectes  ou 
qu'elles  auraient  connues  dans  la  prali(iue 
du  mal  ;  elles  ne  vont  point  aussi  au  parloir 
pendant  l'avent,  le  carême  et  certains  au- 
tres jours  marqués  dans  les  constitutions. 

Celles  du  premier  rang  se  lèvent  en  tout 
lemps  à  cinq  heures,  font  une  heure  d'o- 
raison mentale  chaque  jour,  demi-heure  le 
malin  el  autant  après  compiles  ;  elles  récitent 
tous  les  jours  le  |)etit  oflice  de  la  Vierge,  el 
le  grand  office  de  l'Eglise  à  certains  jours  de 
l'année.  Elles  font  trois  jours  de  retraite  spi- 
rituelle avant  la  fête  de  la  Madeleine,  autant 
avant  celles  de  Pàquis,  de  la  Pentecôte  et  de 
ISoél,  el  un  jour  avant  celles  de  l'Assomplioi) 


SIS 


DICTIO.N-VAIIIK  IiKS  OHDRKS  UELIf.IRUX 


816 


ol  <le  I.i  Puiification  do  Ncilre-D.iino,  "le  s.iint 
Aii(;iisliii  cl  (le  s.iiitle  M^rlIic.  Outre  les 
jeûnes  commandés  par  l'ICglise,  elles  jeûnenl 
encore  r.ivenl  et  Ions  les  vendredis  de  l'an- 
née, cxrepié  depuis  l'àqiies  jusqu'à  la  l'en- 
tecAle.  Klles  font  alislinince  lous  les  mer- 
credi?, à  moins  qu'il  n'arrive  un  jeûne  dans 
la  semaine,  hors  le  vendredi  et  le  samedi. 
Tous  les  vendredis  elles  prennent  la  disci- 
pline, cl  tous  les  m  Tcredis  pendant  l'avenl 
et  le  carême,  <l  les  veilles  des  fêles  de  sainti; 
Madeleine  et  de  saint  Aujjaslin,  cl  ces  deuv 
jours,  aussi  bien  que  celui  du  vendredi  saini, 
elles  n'ont  qu'un  mets  d'hcrbi'S  ou  de  le};i'- 
mes  au  dîner;  on  nu  leur  di)nno  aussi  ces 
jours-là  à  la  collaiion  que  du  pain,  et  elles 
mangent  à  lerre  ces  trois  jours-là.  Après 
avoir  (luillé  la  congrégation  de  Sainte-Alar- 
Ihe,  elles  font  deux  années  de  novieial  dans 
celle-ci,  après  lesquelles  elles  font  leur  pro- 
fession solennelle  en  prononçant  leurs  vœu'i 
selon  celle  formule. 

Au  nom  de  la  Irès-sninte  Trinité,  Père, 
Fils  cl  Saint-Esprit,  et  en  ihonnnir  de  In 
glorieuse  Vierijc  Marie  et  de  sainte  Madeleine, 
vloi,  sœur  A'.,  devant  toute  la  cour  céleste  et 
à  la  face  de  7iotre  mère  sainte  Eglise,  époine 
de  Jésus- Christ,  voue  tt  promets  à  l>ieu  obéis- 
sance, pamrelé  et  chasteté  entre  vos  mains, 
mon  It.  P.  commis  et  dépulé  supérieur  de  cette 
maison,  par  Monseitjncur  l'iluslrissime  et 
révérendissime  A.;  en  présence  de  vous,  ma 
révérende  Mère  prieure,  selon  la  règle  de  saint 
Augustin  cl  les  constitutions  de  cette  mai.^on 
et  monasière  de  Sainte-Mane-Madcleine , 
données  et  approuvées  par  H.  P.  en  Dieu 
M.  Jean  ErançAs  de  Gondtj,  premier  arche- 
vêque de  Paris,  cl  de  l'autorité  du  Saint-Père 
le  pape  Urbain  Y lll,  suivant  lesquella  je 
iniih'.ige  d'aider,  recevoir  et  retenir  enitlie 
maison,  les  filles  et  femmes  de  la  qualità  et 
condition  portée  par  Icsdites  constitutions,  ce 
que  je  garderai  moyennant  la  grâce  de  Aotre- 
Stigneur  jusqu'à  la  mort. 

Après  (|u'ellcs  oui  prononcé  leurs  vœux  et 
r<;çu  le  voile  noir,  elles  se  prosteriicnt  par 
lerre,  on  Us  couvre  d'un  drap  niorluaire; 
l'on  réelle  les  prières  des  morts  avec  l'oiai- 
sow.  Absolve,  quœsumus;  laquelle  étant  finie, 
les  sœurs  jelleul  de  l'eau  bénite  sur  les  pro- 
fesses; et,  lorsqu'elles  sont  relevées,  on  leur 
met  une  cou  ro  il  lie  d'épim  ssur  la  léle..le  ^assc 
sous  silence  tous  les  autres  exercices  qui 
leur  sont  communs  avec  les  religieuses  des 
autres  ordres,  cl  plusieurs  autres  qui  b'ur 
sont  particuliers  et  de  peu  de  consé(iueMce. 
L'on  remarijuera  seulement  que  leur  pau- 
vreté est  très-rigoureuse  il  leur  oliéissance 
très-exacte.  Leur  habillement  consiste  en 
une  robe  cl  scapulaire  de  couleur  minime  . 
serrée  d'une  cortie  blanche,  et  leur  guimpe 
est  pareil, e  à  celle  des  religieuses  de  la  \isi- 
talioii  ;  au  c hieur  et  dans  les  ccrémnnies  elles 
lie  se  servent  point  de  manteau  (Ij. 

Ouaiit  aux  sœurs  de  la  congiégalio»  de 
Sainte-Marthe  ,  elles  se  lèvent  en  tout  lerii|)s 
a  cinq  heures  el   demie.  A  six  heures  elles 


\ont  au  lieu  destine  pour  faire  leurs  prières, 
où  elles  demeurent  enviroi  Irois  (|uarls 
d'Iieure  ,  tant  pour  faire  les  exercices  du 
matin  qui'  pour  l'oraison  meiitale  ei  réciter 
leurs  prières  aecoulumées,  étant  obligées  du 
diie  sur  peine  de  pèche  le  pclil  office  de  la 
Vierge,  el  celles  qui  ne  savent  lire,  cerlaifi 
nombre  de  Pater  et  d'.lic;  el  les  jours  que 
celles  du  premier  rang  disent  le  grand  of- 
fice, outre  l'olfue  de  la  Vierge,  celles-ci  sont 
obligées  de  réciter  encore  un  tiers  du  rosai- 
re, comme  aussi,  lorsque  le-i  autres  disent  le 
grand  ollice  des  morts  ,  el  lors(iu'on  ne  dil 
(lu'un  Nocturne  ,  elles  ne  disent  i|ue  trois 
dizaines.  Au  sortir  des  priéies  elles  vont  re- 
cevoir l'obéissance  de  leur  Mère  maitresse  , 
qui  leur  ordonne  ce  à  quin  elles  doivent 
s'occuper  tout  le  jour,  lilles  dinenlà  la  iiiéme 
heure  que  celles  du  premier  rang,  mais  dans 
un  réiectoirc  séparé  ,  demeurant  aussi  dans 
un  quartier  séparé,  comme  nous  avons  dil. 
Elles  font  les  mêmes  abstinences  de  viande, 
mais  elles  ne  jeûnent  (jue  trois  fois  la  se- 
maine pendant  l'avenl,  el  les  autres  Imu 
jours  elles  n'ont  qu'un  mets  au  souper  , 
comme  aussi  les  vendredis  depuis  l'àqui:. 
jusqu'à  la  saint  .Michel.  Ouaiil  aux  vendredis 
depuis  la  fêle  de  saint  Michel  jus<iu'à  Pâques, 
elles  jeûnent,  mais  la  supérieure  leur  doit 
accorder  aisément  la  dispense  des  jeûnes  el 
des  abstinences.  A  cinq  heures  un  ()uai  telles 
quittent  leurs  ouvrages  pour  aller  faire  l'o- 
raison mentale  pendant  une  demi-heure  , 
après  laquelle  elles  \oiit  au  réfectoire  ponr 
souper;  la  récréation  dure  jusiju'au  premier 
coup  de  matines,  que  commence  le  grand  si- 
lence qui  dure  jusqu'au  lendeiiiaui.  l'endanl 
les  matines  des  sœurs  du  |:remier  rang  , 
celles-ci  se  lienneiit  dans  la  chambre  du  tra- 
vail, où  leur  maîtresse  lit  ou  fait  lire  quelqtin 
bon  livre,  et  elles  travaillent  juscju'au  Te 
Dvum,  qu'elles  vont  au  chieur  pour  dire  leur 
office  et  faire  leur  examen,  api  es  leiiuel  elles 
se  retirent  pour  être  aussitôt  couchées  que 
les  sœurs  du  premier  rang. 

Elles  ne  lonl  que  des  Vieux  simples,  et  si, 
avant  (|ue  de  les  avoir  faits,  el.cs  sont  bien 
alfermies  dans  la  vertu  il  se  trouvent  re- 
cherchées en  mariage  par  quelque  personne 
exempte  de  loul  soupçon,  le  supéiieurel  la 
Mère  piieure  y  peuveiil  consentir,  el  mémo 
fournir  quelque  chose  pour  la  dut,  si  la 
maison  a  reçu  queUjue  chose  pour  cet  effet. 
^'il  se  trouve  aussi  iiuelque  dune  i|ui  eu 
veuille  prendre  à  son  sei  »  ice  el  s'en  charger, 
on  la  Un  peutduniier.  pniiiv  u  qu'elle  ail  quille 
ses  mauvaises  habitudes  au  mal.  Leur  ha- 
billemeiit  est  semblable  à  celui  des  religieu- 
ses du  premier  rang,  sinon  qu'elles  n'ont 
[loint  de  scapulaire,  el  (ju'elles  ne  portent 
qu'un  voile  blanc. 

il  y  a  aussi  des  règlements  pour  celles  de 
la  congrégauou  de  r>aint-Lazare  ,  destinée 
pour  les  lilles  <  t  fcMiiDes  que  l'on  rcnlerme 
malgré  elles  ,  el  ou  l'on  met  pour  un  lemp» 
celles  du  Second  rang  qui  ont  lait  des  faulea 
considérables    uu   donne   quelqui;    iiiau\ai3 


(I)  Votf.,  ii  la  lin  du  vol.,  u'  'i02. 


S17 


MAP 


MAD 


8!S 


çxem|ile  ,  afin  d'y  f;iiri'  la  pénilence  qui  leur 
est  fiijoinlc  ,  soil  pour  y  èlre  reiii'erniéi's 
durant  crrialii  tomps,  soil  pour  y  Caire  quel- 
(•,uos  aulrc-i  iiiorli(icalioiis  pr(>(iorlioniices  à 
leurs  fautes,  (^oiume  celles  iiiii  sont  dans 
celte  congicgaiion  ne  sont  pas  poricfs  au 
I)ien,  aussi  ces  rèjjlemeuls  ne  sciiit  pas  exnc- 
lefiiciil  observés;  eu  leur  fait  l'aire  néanmoins, 
aulanl  qu'il  est  possible,  les  uiêuies  exercices 
qu'à  celles  du  second  rang  qui  n'ont  point 
(ait  de  vœux  ,  conime  sont  les  femmes  ma- 
riées et  .-iiilres,  soil  pour  les  prières,  soit 
pour  les  ouvrages.  Si  elles  ne  sont  point 
soumises,  on  les  renfernie  plus  étroitement, 
on  les  prive  de  vin,  on  leur  reiranclie  leur 
pitance  et  on  leur  ordonne  quehinc  autre 
inorlificalion;  ce  qui  se  doit  enlendre  decelb's 
qui  sont  mises  dans  ce  monastère  contre 
leur  gré;  car,  pour  celles  que  l'on  y  envoiedu 
second  rang.ellcsont  ])oi;r  règlement  la  l'orme 
(le  la  pénilence  qui  leur  est  imposée;  et,  au 
cas  que  par  obstination  elles  témoignent  d'y 
vouloir  toujours  demeurer  et  de  ne  plus  re- 
lourner  à  leur  congrégation,  après  s'élrc 
servi  de  tous  autres  moyens  ,  on  les  traite 
en  sorte  qu'elles  reconnaissent  leur  aveu- 
glement et  qu'elles  demandent  d'en  sortir. 

Sitôt  que  celles  que  l'on  a  niences  de  de- 
hors contre  leur  gré  témoignent  véritablement 
vouloir  embrasser  le  bien,  on  leur  donne 
pour  un  temps  plus  de  liberté  pour  les  éprou- 
ver et  les  riconnaîlre,  et,  voyant  qu'elles 
n'en  abusent  pas  et  qu'elles  téuioignenl  par 
leur  conduite  vouloir  [lersévérer  dans  le 
bien,  on  les  l'ail  passer  au  second  rang;  mais 
généralement  on  les  tient  toutes  renfermées, 
plus  ou  moins,  selon  les  dispositions  qu'elles 
l'ont  paraître,  et  selon  qu'elles  se  rendent 
plus  ou  nidins  dignes  de  quelque  grâce  ,  et 
celles  qui  s'en  rendent  digues  mangent  au 
petit  réfectoire  avec  les  sœurs  qui  les  gou- 
vernent. Elles  se  lèvent  et  se  couchent  à  pa- 
reille heure  que  celles  du  second  rang,  cl 
elles  ont  les  mêmes  prières  et  les  mêmes 
exercices. 

Voyez  les  Conutitiitiuvs  de  cet  ordre;  la 
Vie  de  M.  Vincent  de  Paul  par  M.  Ahelly,  et 
la  relation  de  la  naissance  et  progrès  du  mo- 
nastère des  Madelonnetles  ,  imprimée  à  Paris 
eti  1C49. 

1  II  est  surprenant  que  le  P.  Hélyol  n'ait  pas 
donné  dans  son  admirable  ouvrage  un  cha- 
pitre sur  les  religieuses  de  la  Miséricorde  de 
Jésus,  car  ces  hospitalières  ne  lui  étaient  pas 
inconnues,  puisqu'il  les  uientionnc  ci-dessus 
comme  ayant  dirigé  pendant  quelque  temps 
la  maison  des  Madelonnellei.  Cet  oubli  ne 
peut  être  que  l'eflet  d'une  erreur  de  rédac- 
tion, ou  une  suite  des  iiilluences  qu'aura  su- 
bies cette  rédaction  après  la  mort  d'Hélyol. 
Quoi  qu'il  en  soil,  nous  donnerons  dans  !(.> 
Supplément  un  article  Irès-élendu  sur  cette 
congrégation  importante. 

Les  hospiialièresde  la  Miséricorde  de.Iésus 
ne  conduisirent  pas  longtemps  la  mai'-on  des 
Miidelonncttes  de  Paris. Il  était  diffici'e  qu'une 
communauté  composée  comme  l'était  celle  de 
la  Madeleine  soulTrîten  paix  l'administration 
d'un  institut  étranger,  et  laissât  quchiuc  agré- 


ment humain  aux  religieuses  chargées  de  la 
conduire. 

En  l'année  Î720,  le  cardinal  de  Noailles, 
aichevêque  de  Paris,  devant  changer  les  su- 
périeures qui  gouvernaient  les  filles  péniten- 
tes de  la  Madeleine,  s'adressa  auK  supérieu- 
res de  plusieurs  maisons  de  Paris,  pour  ob- 
tenir cinq  des  meilleurs  sujets  pour  répondre 
à  ses  vues.  Le  cardinal  reçut  partout  un  re- 
lus ;  et  comme  il  s'en  entretenait  avec  l'abbé 
\ivant,  chancelier  de  Nolre-Oamc  et  supé- 
ri  'ur  de  la  Madeleine,  en  présence  de  l'abbé 
de  Robieu  et  de  l'abbé  de  Caumartin,  qui 
était  alors  évê(|ue  nouuné  de  Blois,  ces  ecc  è- 
siastiques  apprirent  au  cardinal  qu'il  y  avait 
tians  l'Eglise  des  religieuses  destinées,  par 
un  quatrième  vœu,  à  travailler  à  l'instruc- 
lioîi  et  à  la  conversion  des  filles  et  femmes 
pénitentes,  et  qu'ils  en  connaissaient  un  à 
\'aiines,  en  IJrelagne,  qui  faisait  de  grands 
fruils.  Le  cardinal  les  pria  de  lui  procurer 
cinq  ou  six  religieuses  de  cette  communauté 
pour  gouverner  la  maison  de  la  Madeleine, 
qui  avait  été  jusqii'abirs  conduite  par  des 
ri'iigieuses  de  différents  ordres.  Les  monas- 
tères de  Vannes,  de  Kenncs,de  Tours,  refu- 
sèrent successivement.  Ce  dernier  indiipia  le 
monastère  de  Guingamp,  au  dincèse  de  Tré- 
guier.  Le  cardinal,  ami  de  l'évêque  de  Tré- 
guicr,  ne  douta  plus  qu'il  obtiendrait  là  l'ef- 
iet  de  ses  désirs.  Il  l'obtint;  mais  les  reli- 
gieuses, répugnant  à  cette  obédience,  ne 
l'acceptèrent  qu'à  la  condition  qu'elles  fe- 
raient un  établissement  à  Paris,  établisse- 
ment qui  fut  la  maison  de  Saint-Michel,  dont 
nous  parlerons  dans  un  article  prochain. 
Les  religieuses  destinées  à  diriger  les  Made- 
lonnettes  arrivèrent  au  nombre  de  cinq  cho- 
ristes et  une  converse,  le  30  avril  1720  au 
soir,  et  furent  aussitôt  installées  à  la  Made- 
leine, où  le  souper  qu'on  leur  servit  leur  lit 
pressemir  tout  ce  qu'elles  auraient  à  soul- 
irir  dans  celte  maison.  Leurs  prévisions  ne 
lurent  pas  trompées;  miiis  elles  y  mireni  du 
zèle  cl  y  firent  beaucoup  de  bien.  Un  grand 
avantage  qu'elles  rn  retirèreitl  lut  leur  éta- 
blissement à  Paris,  où  une  communauté  se 
forma,  rue  des  Postes.  Celles  qui  étaient  à  la 
Madeleine  y  persévérèrent  pendant  quatorze 
années.  Au  bout  de  ce  temps,  victimes  des 
persécutions  et  des  calomnies  dont  elles 
étaient  l'objet,  elles  se  virent  noircies  près  de 
Mgr  de  'Vintimille,  archevêque  de  Paris,  qui 
reconnut  bientôt  pourtant  ce  qu'il  y  avait  de 
faux  dans  les  dénonciations  du  gr.iuil  vicaire 
supérieur  de  cette  maison  (l'abbé  liobinol)  et 
du  confesseur  des  Pénitentes,  cl  surtout  de 
celles-ci.  Mais  les  amies  des  religieuses  de 
Notre-Dame  de  Charité  (car  c'était  cet  ordre, 
fondé  par  le  P.  Euiles,  à  Caen,  dans  le  xvii" 
siècle,  qui  avait  été  appelé  de  (juingamp) 
firent  connaître  la  chose  au  procureur  géné- 
ral,qui  manda  l'abbé  Uobinet  et  lui  reprocha 
l'mjusticc  des  procédés  dont  on  avait  usé  en- 
vers les  religieuses.  Celles-ci  prolHèrent  de 
(elle  occasion  pour  demander  leur  sortie  di; 
celte  maison;  elles  l'obtinrent,  et  elles  allè- 
rent rejoindre  leurs  sœurs  au  monastère  do 
Sainl-]\lichel,  rue  des  Postes.  Une  des  causes 


r.rt 


DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  RELIGIEUX. 


8Ï0 


«jui  anienaipiil  l.inl  de  dosajïrémenls  nux  re- 
ligieuses pouveriianl  les  religieuses  Péiiil<"n- 
Isnlcs  élail  la  né^lipcme  qu'avaient  appor- 
lee  les  N'isilaiidinrs  à  pardcr  une  renie  im- 
porlaiili"  destinée  aux  ri'ligieiises  sariicii- 
I1C9.  et  qu'elles  avaient  laissé  confondre  avec 
le  bien  des  religieuses  Pénitentes. 

Au  bout  de  neuf  ans.  Mgr  de  Vintimillc 
manda  chez  lui  deux  religiensi^s  de  Saiiii- 
Jlicbel,  les  pria  de  l'aider  à  réparer  un  pé- 
<  hé  mortel  qu'il  avait,  disait-il  en  soiirianl, 
eomniis  il  y  avait  neuf  .■ns,  en  étant  Ivop 
crédule  (il  est  bien  à  désirer  que  les  supé- 
rieurs ne  le  soient  ni  trop,  ni  trop  t(')ti  et  en 
les  lais-Mint  partir  tb'  la  Madeb'ine,  où  il  vou- 
lait qu'elles  rentrasseiil.  Il  -joula  que  depuis 
qu'elles  en  étaient  sorties;  il  avait  donné  auv 
religieuses  Pénitentes  deux  gouvernemenls  ; 
que  le  premier  n'avait  pu  durer  que  trois 
ans,  et  qu  il  y  en  avait  six  que  M.  Clianvelin 
y  était,  et  qu'il  en  était  fort  mécontent.  Lui- 
même  reconduisit  ,  en  comi  agnie  de  plu- 
sieurs eiclésiastiques,  les  dames  de  Sainl- 
Michel  aux  Malelonnelles,  le  23  juin  174^!, 
et  le  cortège  arriva  à  la  rue  des  Tontaines  à 
quatre  heures  après  midi.  Les  filles  de  la  mai- 
son, qui  s'étaient  flattées  que  Mgr  venait 
pour  les  nicCre  en  possession  de  leur  propre 
i^ouveinen.eiit,  n';iyant  point  ouï  dire  ou'on 
leur  eu  doiineraii  d'aulr  • ,  s'empressèrent 
d'ouvrir  la  purle.  Mais  qu-  lie  sur|irise  quand 
elles  >ircnl  les  dames  de  Saint-Michel  !  Elles 
se  révoltèrent  toutes  et  avec  un  ton  qui  en- 
iragea  l'archevêque  à  se  fâcher  et  à  les  me- 
nacer de  les  envoyer  en  des  maisons  de  pé- 
iiilcnce.  11  se  rendit  au  chœur,  où  il  les  fit 
appeler  toutes.  OneUiues-unes  des  plus  vio- 
lentes clevèrciit  la  voix  et  s'écrièrent  qu'el- 
les prolcslaienl  contre  Alonscigneur.  Le  pré- 
lat,  reprenant  son  air  i\.'  douceur,  leur  dit  : 
Mais  que  voulez-vous  que  je  vous  Casse?  Elles 
répondirent  avec  arrogance  qu'elles  ne  vou- 
laient pas  les  Mèri  s  blanches  (les  dames  d- 
Saint-Michel  sont  vêtues  de  blanc  et  suivent 
la  règle  de  saint  Augustin).  Mais,  leur  dil-i!, 
je  vous  en  ai  d)nné  île  noires  :  qu'en  ;!vez- 
vous  fait  ?  .aujourd'hui  je  veux  jouer  au 
blanc  avec  vous.  Mais,  ajoutèrent-elles,  nous 
ne  voulons  pas  les  religieuses  de  saint-Mi- 
chel. Eh  bien  !  reprit  le  prélat,  je  vous  don- 
nerai des  sœurs  grises.  Ah!  Monseigneur, di- 
rent-elles,  nous  sommes  religieuses.  (Juc 
vou'cz-vous  doic  ,  dit-il?  Nous  aimerions 
mieux ,  rcprircut-clles,  perdre  quatre  mille 
cinq  cents  livres  de  rente  en  faveur  de  lllôtel- 
i)i;'u,  et  nous  gouverner  nons-inèmes.  Le 
frél.it  réporidit  <iu'il  n'.iirnait  point  à  perdre, 
mais  à  gngncr.  Voyant  leur  révolte  conti- 
nuer, il  paiiil,  plaign.'int  les  religieuses  qu'il 
•'imcnaii,  et  priant  la  su|éiienre  de  lui  faire 
savoir  le  lendemain  les  suites  de  celte 
journée. 

L'abbé  Ueiiaull,  1  ur  supérieur,  resla.  el 
la  supérieure  l'obligea  à  laire  l'inslallatiou 
lircscritc  par  la  lègle,  cérémonie  qu'il  vou- 
lait dilTércr  d(^  deux  ou  trois  jours,  et  le  Te 
Dtum  fut  chante  au  clia|>itre.  I,cs  religieusi-s 
Pénitentes  ne  vouliireiil  point  faire  le  feu  de 
Sainl-Jean,  selon  l'habitude  du  temps,  ni  al- 


ler à  matines.  La  supérieure  obtint  ce  point 
de  la  règle  et  même  l'exécution  de  l'autre  ré- 
création d'usage,  à  la(;uelle  on  chanta  comme 
à  l'ordinaire. 

On  dit  aux  religieuses  arrivantes  qu'on  ne 
les  atti'iulait  pas;  (pi'il  n'y  avait  ri-n  de  prêt 
pour  elles,  pas  uk me  des  lits.  Celles-ci  ré- 
pondirent qu'elles  allaient  volontiers  coucher 
sur  de<  chai-es.  Mais  tout  se  calma,  et  les 
principales  vinrent  lroii\er  les  religieuses  el 
leur  dire  que  tout  él.iit  arrangé  et  qu'elles 
n'auraient  pas  d'autre  gouvernement  que 
C'Iui  des  religieuses  de  Saiiit-.Mi.  bel  ;  qu'el- 
le-; voyaient  bien  que  c'était  la  volonté  de 
Dieu,  puisqu'elles  s'étaient  épuisées  à  faire 
dire  des  nicsses  et  à  faire  prier  Dieu  dans 
toutes  les  communautés  de  Paris  pour  qu'el- 
les n'eussent  pas  les  Mères  blanches.  Ces  lits 
se  trouvèrent  tout  neufs.  Les  religieusrs  blan- 
ches y  sont  en  elTel  restées  jusqu'à  la  disso- 
lution de  la  communauté. 

A  ce  qu'a  dit  le  P.  Ilélyol,  nous  ajouterons 
quelques  n)ots.  Après  les  Vi«itandines ,  eu 
ItiTl  la  direction  de  la  Madeleine  fut  conl'K-e 
à  des  P)énédiciines  de  l'abbaye  de  Bi^aI,  en 
Normandie,  qui  ne  la  gardèrent  que  cinq 
ans,  el  la  quittèrent  1  •  ;il  mars  1077.  Les 
Ursulines,  qui  gouvernèrent  après  elles,  fu- 
rent celles  de  la  maison  de  Sainte-.Vvoie 
(pendant  trente  anO, jusqu'au  18  juillet  1707, 
puis  celles  de  Saint-Denis  en  France,  qui 
s'en  allèrent  au  bout  de  trois  ans.  Les  reli- 
gieuses de  la  ^Iisé^icorde  de  Jésus  demeurè- 
rent dix  ans,  et  s'en  allèrent  le  2  mai  1720, 
l)our  faire  place  aux  religieuses  de  Notre- 
Dame  de  Charité, dont  nous  \  enons  de  |)arler. 

L'église  du  couvent  était  st)us  l'invocation 
do  la  sainte  Vierge  et  avait  clé  ilédiée  le  2 
septembre  KlS.'j.  En  lGi7,  on  avait  construit 
dans  celte  maison  une  cliapellc  semblable  à 
celle  de  Notre-Dame  de  Loreltc,  el  sous  le 
même  titre.  Ce  monastère  était  dans  la  cen- 
sive  du  prieuré  de  Saint-Mailiu  des  Champs, 
cl  payail,  outre  la  redevance  annuelle,  cent 
souD  à  cba(|ue  mutation  de  prieur  de  Saint- 
Marlin  des  Champs,  que  les  religieuses 
avaient  choisi  jour  leur  homme  ricaiit  et 
mouraïU.  La  maison  des  MadelonncUes  sert 
aujourd'hui  di;  prison. 

Annnlcx  )i  aniiscriles  de  la  mnifon  âf  Saint- 
Michel  de  Paris,  coinmiiniqures  par  Miulnme 
la  supc'rieurc  de  ce  monasti-rc.  Tahlenu...  de 
l'firis,  par  M.  de  Saint-Victor,  tome  II,  in-8'. 

lî-n-i:. 

M  \1TI\E  (RÈGLE du). Foy/.  CÉSAinE  (Saint-) 

M.VLIÎUBA.  Voyez  Jérôme  (  Ermites  dk 
Sai.nt-),  5  11. 

MALTE  (Oudue  dï). 
§  L  Orif/ine   des    llospilaliers  de   l'ordre  de 
Saint-Jean  de  Jérusalem,  appelés    dans   la 
suite  chevaliers  de  Ithodes,  et  prdsentemenl 
chevaliers  de  Malte. 

L'ordre  des  Hospitaliers  de  Sainl-Jcan  do 
Jérusalem  a  été  très-faible  dans  ses  coin- 
menceuienls.  Environ  l'an  lO'iS,  des  inar- 
(liands  de  la  > illc  d'Amalfi  au  royaume  de 
Naples  qui  Iraliiiuiient  eu  Syrie  et  vibilaieiil 
urdiniircmciil  les  suints  lieux  de  Jérusalem, 


821  J!AL 

souhaitèrent  d'ivoir  uno  église  où  l'on  pût 
célébrer  l'olfice  divin  selon  le  rite  de  l'iîglise 
romaine  ,  parrc  que  les  églises  des  aulres 
chrétiens  y  étaient  desservies  tant  par  les 
Grecs  que  p  ir  les  différentes  sectes  qui  sont 
encore  dans  le  Levant.  Us  acqnireni  parleur 
adresse  et  leurs  présents  la  fiyeurdelto- 
inensor  de  Moustesapli  ,  qui  élait  pour  lors 
calife  d'Cgjpte.qui  leur  permit  de  bâlir  une 
église  dans  la  ville  de  Jérusalem,  au  quartier 
des  chrétiens,  devant  le  temple  île  la  Uosur- 
reclion.  Ils  la  dédièrent  en  l'honneur  de  la 
sainte  Vierge,  et  y  fondèrent  un  tiion:)Slère 
de  religieux  de  l'oriri-  de  Saint-Iienoît,  qui 
curent  soin  de  recevoir  les  pèlerins.  Celte 
église  fut  appelée  Sainte-Ma:  ic  de  la  Latine, 
pour  la  distinguer  de-;  aulres  églises  où  l'on 
ne  suivait  pas  le  rite  latin. 

Comme  le  nombre  des  pèlerins  augmenta 
dans  la  suile,  et  que  le  plus  souvent  ils  n'ar- 
rivaient à  Jérusalem  (lu'accablés  de  misères 
cl  de  maladies,  tant  pour  les  mauvais  irai- 
Icnicnts  qu'ils  avaient  icçus  des  infidèles 
que  par  les  fatigues  d'un  long  et  pénible 
voyage,  on  bâtit  encore  près  de  l'église  de 
ï-ainte-Marie  de  1 1  Laline  un  hôpital  jiour 
y  rece\oir  les  hommes  ,  tant  sains  que  ma- 
lades ,  sons  la  diredion  d'un  maiire  ou  rec- 
teur qui  ('evail  être  à  la  nomination  de 
l'abbé  de  Sainte-Marie,  et  on  y  fonda  une 
chapelle  en  l'honneur  de  saint  Jean-fîaptisle. 
Un  certain  Gérard,  surnommé  ïoiu,  natif  de 
l'ile  de  Martlgues  en  Provence,  fut  le  pre- 
mier qui  en  eut  la  direction  ;  et,  quelques 
années  après  ,  Godefroi  de  Bouillon,  ayant 
pris  la  ville  de  Jérusalem  le  15  juillet  Hi99  , 
lut  si  édifié  de  la  charité  que  l'on  exerçait 
dans  l'hôpital  de  Sainte- .Marie  de  la  Latine, 
qu'il  lui  donna  quelques  domaines  (ju'il  avait 
en  France.  D'autres  personnes  ayant  imité 
te  prince  dans  ses  libéralités,  et  les  reve- 
nus de  l'hôpital  augmentant,  Gérard,  qui  en 
avait  l'ailmiiiistralion ,  jugea  à  propos,  con- 
jointement avec  les  frères  hospitaliers,  de  se 
séparer  de  l'abbé  et  des  religieux  du  monas- 
tère de  Sainle-.\lai  ie  de  la  Laline,  et  de  faire 
une  congrég.ilion  à  part  sous  la  protection 
et  en  l'honneur  de  saint  Jean-B;iptisle  :  ce 
qui  fut  cause  qu'on  le-^  appela  depuis  Hospi- 
taliers ou  Frères  de  Ihôpilal  de  Siint-Jean  de 
Jérusalem.  Gérard  obtint  du  pape  Pascal  11 
la  confirmation  des  donations  qui  avaient  été 
failes  à  cet  hôpital,  par  une  bulle  de  i'an 
1113,  i)ai-  laquelle  ce  pontife  mit  aussi  sous 
la  protection  du  saint-siège  le  même  h'ipilal, 
et  ordonna  qu'après  lu  mort  de  Gérard  les 
recteurs  seraient  élus  par  le*  frères  hospi- 
taliers. 

Gérard  décéda  l'an  1118.  Son  corps  fut 
Iransporié  dans  la  suite  en  Provence,  et  mis 
dans  la  chapelle  du  bourg  de  Manosque,  qui 
est  une  commandeiie  de  l'ordre.  Il  y  a  des 
auteurs  qui  ont  dit  qu'il  eut  pour  successeur 
un  nommé  Boyant  Uoger,  <à  cause  qu'il  en 
est  fait  mention  dans  une  don.ition  de  l'an 
1120  que  fil  à  cet  ordre  Otion,  comle  de 
1  Abruzze,  où  il  déclare  avoir  fait  ce  Uoger 
gouverneur  de  l'hôiiilal  de  S.iint-Jean  de 
Jérusaicu).    .Mais    lo    com:i:ani!cur  .Maruli, 


MAL  S22 

dans  les  Vies  des  grands  maîtres  de  cet  or- 
dre, prétend  que  l'on  ne  doit  pas  conclure  de 
là  que  ce  Roger  ait  été  recteur  ou  jiréfet  do 
rhô|)ital,  qui  sonl  des  litres  qui  appartien- 
nent à  un  supérieur  plutôt  que  celui  de  gou- 
verneur ,  et  qu'il  se  peut  faire  qu'il  ail  élé 
établi  gouverneur  de  l'hôpital  en  l'absence 
de  Baymond  du  Puy,  qui  succéda  à  Gérard  , 
d'autant  plus  qu'il  n'y  a  aucun  litre  dans  la 
chancellerie  ile  l'ordre  où  il  soit  parlé  de  ce 
frère  Uoger  en  qualité  de  supérieur  ou  do 
maître. 

Ce  fut  donc  Uaymond  du  Puy,  natif  de  Dau- 
phiiié,  qui  succéda  à  Gérard  et  qui  prit  le 
premier  la  qualité  de  maître.  Ju-qne-là  le-i 
Hospitaliers  n'avaient  eu  aucune  règle  par 
écrit  ;  (iérard  s'était  contcnlé  d'inspirer  à  ses 
frères  des  senliinenls  d'humilité  et  de  cha- 
rité; m  lis  Uaymond  du  Puy  leur  donna  une 
règle  par  laqu  Ile  il  les  obligea  de  l'aire  les 
trois  vd'Ui  solennels,  de  pauvreté,  de  chas- 
teté et  d'obéissance.  Il  leur  défemlit  d'aller 
seuls  par  les  villes  et  bourgades,  mais  ils 
devaient  être  deux  o  »  trois  ensemble.  Les 
prêtres  el  les  laïques  ,  allant  chercher  les 
aumônes  pour  les  pauvres,  devaient  dcm.in- 
rier  l'hospilalilé,  se  contenter  de  ce  (lu'oti 
leur  donnait  et  ne  rien  aclielcr.  S'ils  ne 
trouvaient  personne  (lui  les  reçjt  par  cha- 
rité, ils  pouvaient  pour  lors  ach'ler  quelque 
chose  pour  vivre,  mais  ils  devaient  se  con- 
tenter d'un  seul  mets.  Si  quelque  frère  avait 
commis  le  péché  de  la  chair,  si  la  faute  iivail 
été  cachée,  il  devait  recevoir  la  pénitence  eti 
secret;  mais  si  la  faute  avait  clé  publique  , 
le  dimanche  après  ta  masse,  lorsque  le  peu- 
ple élail  sorli  de  l'église,  l'on  dépouillait  le 
coupable  en  présence  de  tous  les  frères,  le 
maître  le  fouettait  rudement  avec  des  verges 
ou  avec  des  courroies,  et  on  le  chassait  de 
l'ordre.  Ils  ne  devaient  point  manger  de 
viande  les  mercredis  el  les  samedis  ,  et  de- 
puis la  Septuagésime  jusqu'à  Pâques.  Si  un 
des  frères,  étant  en  danger  de  n^.orl,  élail 
trouvé  propriélaire  et  avoir  de  ra!genl,s'il 
revenait  en  santé  on  lui  attachait  son  argent 
au  cou,  Î!  devait  être  fouetié  rudement  par 
un  des  f  ères,  faire  pénitence  pendant  ((ua- 
ranle  jours,  et  jeûner  au  pain  el  à  l'eau  les 
mercredis  et  les  >endredis.  Si  un  frère  ava.l 
eu  différend  avec  un  autre,  et  que  les  plaintes 
en  eussent  été  portées  au  procureur  de  l.j 
maison  ,  le  coupable  devait  jeûner  pendanl 
sept  jours,  el  manger  à  terre  au  pain  et  .i 
l'eau,  sans  nappe  ni  serviette,  le  mercredi  et 
le  vendredi.  S'il  avait  irapjié,  il  devait  faire 
la  même  péniience  pendant  (luarante  jours. 
S'il  était  sorti  sans  p-?;inission  du  maître,  ii 
de  vai  t  manger  à  lerre  pendant  quarante  jouis. 
Le  mercredi  el  le  vendredi  il  jeûnait  au  pain 
et  à  l'eau,  el  devait  être  dans  un  lien  sépare 
autant  de  temps  qu'il  avait  élé  deliors  ,  à 
moins  que  le  chapitre  ne  diminuai  le  lemp 
de  sa  pénitence.  Après  la  mort  de  qneliiue 
frère,  les  autres, à  la  première  r.r  sse  que  l'on 
disait  pour  le  défunt,  devaient  olïrir  un  c  crj,'»; 
avec  un  écu,  qui  était  distribué  aux  pauvres 
avec  les  babils  du  dél'unl.  Chaque  préli»' 
devait  dire  une  messe,  les  clercs  le  Psaulicr, 


8i3                                        DICTIONNAIHE  DES  OnORES  RELIGIEUX.  î,Vi 

l'i  les  l.nïqucs  loO  Valer.  VoilA  ce  que  con-  que   lui    avnit   drcss/'PS   (îassi,  prince  lurc, 

tient  on  subslanrc  la  rèule  «(ne  Itaymomi  du  «lnnl  los  troupes    lurent  taillées    en    pièees. 

Puy  prescrivit,   par   latiuolle  il  ordonna  en-  Le  nu-me  li.iiidouin,  jiar  le  moyen   dos  llos- 

rore   que   tous    les    frères    porteraient    des  pitiliers,  mil  au^si  en  fuite,   l'an  1122,   Dol- 

croi^  sur  leurs  haliils  et  sur  leurs  manteaux.  del!-.\vin,  roi  de  Dain.is.  Les  siéj^es  de  l'yr  et 

Celte  règle  fut    proniièremcnt    approuvéi^  d'Asst  lurent  lon;;l>'nips  soutenus    par   leur 

par  le  pape  C.ilixlc  II,  l'an  1120,  ei,  si  on  en  vnlnir;   et,    ay.int  encore   èlc    appelés    par 

veut  croire  (juelques    historiens,  elle   lavait  Haudouin,  (jui  était  en  ixuerre  avec  le  roi  do 

déjà  été  par  son  prèdi'ce'sseur,  (ielise  II,  l'an  Damas,  ils  aliaquèrent  ec  dernier  à  .Masislar, 

1118;  elle  fut    eonfirinée    par    Ilonorius  II,  le  (ielireiit  cl  remportèrent  une   illustre  vic- 

Innocent    II,  lùigène    III,   Lncius    III,   Clé-  loire  l'an  112G. 

ment  ill.  Innocent  III,  Boniface  Vllî  et  plu-  Le  (,'ram]  maître  reçut,  l'an  111.3,  de  Foul- 

sieurs   antres    souverains    pontifes.  Comme  (]ik's  d'Anjou,  la  ville  de  liersahée  pour   ré- 

Raymonil  du  Puy   avait  mis  dans  cette  rèirle  compense  de  ses    services  à   li    delenso  de 

diflérenics  choses  lirées  de  celle  de  saint  Au-  celle  niiuie  place,  et  les  revenus  eu  de\  aient 

uusiin,  c'est  ce  qui    fait  que  l'on  a   toujours  être  appliques  au  profit  de    l'ordre,  .\lplion- 

mis  l'ordre   des   Hespitaliers   de   Sainl-Jean  se  1",  roi  d'Aragon,  étant  mort  sans  enlanis, 

de  Jérusalem  au  nomhre   de  ceux    (pii    sui-  laissa  ses  Klats  aux    Hospitaliers,  aux  Tem- 

vent  la  rcple  de  saint  Augustin.  pliers    el  aux  Chevaliers  du  Saint-Sepulcre; 

Ce  premier  grand  maifre,  voyant    que  les  c'est  ce  qui  obligea  lUiymond  du  Puy  de  faire 

revenus  de  l'hôpital  de   Jérusaleifi    surpas-  un  voyage  en  EspauMie  muni  de  procuration 

salent  de  beaucoup  ce  qui    était    nécessaire  de  ses  religieux  et  de  ceux  des  Templiers  et 

pour  l'entretien  des  pauvres    pèlerins  et  des  du    Sainl-Sépulcre  ;  mais   à    son    arri\ée   il 

malades,  crut  qu'il    ne    pouvait  pas    mieux  trouva   que   le   comte    de   IJarcelone   s'était 

faire  que  d'employer  ce  surplus    cà  la  guerre  enparé  d'une   partie  des    Etals    d'.Mphonse. 

que  l'on  faisait  en  terre  sainte  contre  les  in-  et  le  roi  de  Casiillc  de  l'autre  ;   c'est    pour- 

lidôles.  Il  s'offrit    avec   ses    Hospitaliers  au  quoi,  ne  se  voyant  pas   en  élat  de    soutenir 

roi  de  Jérusalem  pour  combattre  contre  ces  une  guerre  contre  ces    princes,  il  fil  un   ac- 

infidèles.  Il  n'y  ava  l  eu  parmi  ces    Hospila-  cord  avec  le  comte   de  liarcelone  le   10    sep- 

licrs  que  des  clercs  et   des    laïques  ;  niais   il  lembre  ItiO,  par  lequel  il  céda   à  ce    prince 

les  sépara  en  trois  classes  :  l;i  première    fut  toutes  les  prelenlions  (pie  son  ordre  |)ouvait 

des  nobles,  qu'il   destina  à  la  profession  des  avoir  dans  la  succession  d'Alphonse,  à  con- 

nrnies  pour  la  défense  de  l.i    foi  et  pour   la  dilioii  que  si  le  comte  de  Barcelone   mourait 

proicction  des  pèlerins;  la    seconde  fut   des  sans  enfants,  ses    Liais    appartiendraient    à 

{irétres  ou  chapelains   pour  faire    le  service  l'ordre  de   Saint-Jean  de  Jérusalem  ,  el  quo 

divin  dans    l'église    conventuelle,  et  la  iroi-  et  ordre   aurait  à  Saragosse,  à  Uuesca,    à 

siùme  des    frères  servants  qui    n'étaient  pas  liarbastro,  à  Daiiiia,  à  Calalayud,    el  dans 

nobles,  et  qui  furent  aussi  destinés  à  la  pro-  toutes  les  places  que  l'on    pourrait  conqué- 

l'ession  des  armes.  L'on  introduisit  après  dans  rir  sur  les  .Maures,  deux  vassauv  exempts  de 

cet  ordre  la   ujaniére  de  recevoir  les  chcva-  la  juridiction  royale,  qui  seraient  seulement 

Mers  avec    les    cérémonies  ()ui   s'observent  ob.igés  d'aller  à  la  guerre    contre  les    .Mau- 

encore  à  présent,  et  que  nous  décrirons  dans  res,  avec  le  prieur  de    l'ordre,   (lui   y  ferait 

le  paragrajihc  suivant,  t^cla    fut    approuvé  pour  lors   sa    résidence.  Les   Chevaliers   du 

l'an  lloO  par    le   pape   Innocent  II,    <)ui   or-  Temple  et  du  Saint-Sépulcre  firent  un  pareil 

donna  que  ces  clievalier>  auraient  (lour  élen-  accord  du  consentement  de  Fouhiues   d'An- 

dard  à  la  guerre    une  croix   blanche   pleine  jou,  ce  qui  lut  il.ins  la  suile  confirmé  par  le 

en  champ  de  gueules,  qui  sont  présentement  pajie  Adrien  IV.  Raymond  du  Puy   relourna 

les   armes   de  cet  ordre.   Ouoi(]u'iI   eûl    clé  ensuite  à  Jérusalem,  où  il  aid.i  liaudouin  111 

ainsi  érigé  en  ordre   mililaiic  etdechevale-  à  recouvrer  la  Vallée  de    Moïse,  à    delivicr 

rie,   les    Hospitaliers    néanmoins    retinrent  les  chrétiens  de    Mésopotamie   du  joug  des 

toujonrs  leur  nom,  et  on  ne   leur   donna  ce-  infidèles,  et  à  faire    le   siège    d'Ascalon.  Lu 

lui  de  Chevaliers  «pie   lorsqu'ils  eurent  con-  con-ideration  de  ces  services,  le  roi  donna  à 

quis  l'ile  de  Rhodes  :  p'iur  lors  on  les  appela  l'oriiie  plusieurs   terres   el    possessions.  Le 

les  CiRMaliers  de    Rlioles,el   enfin    Chcva-  pape  .^naslase  IV,  imitant  si  s  prédécesseurs, 

liers  de   .Malle,  après  (]ne  celte    dernière    ile  lui  accorda  aussi  beaucoup  de  privilèges  par 

leur  eûl  été  (hjunée  p.ir  l'empereurCharles  \'.  une  bulle  du21  octobre  i\'o\. 

l'.ependaiit  leur   vériiable    nom  csl  celui    de  Le  patriarche  de  Jérusalem  ci   les    autres 

t;hevaliers  de  l'ordre  de   Sainl-Jean  de  Jéru-  évé(iues  de  la  Pabsline    ne   purent   scmffrir 

salem,  el  leur  grand  maître    dans  ses    lilres  que  cet  ordre  fut  sousir.iil  de    leur    juridic- 

prcnd  (  ekii  de  maiire  de   l'hopilal  de    S.iint-  tion  ;  qu'en  un  temps  d'inlerdil,  les  llospila- 

Jcan  de  Jérusalem  el  gardien  des  pauvres  de  tiers    fissent  célébrer  |iublniuement    l'office 

Notre-Seigneur  Jésus-Christ.  di\in  et  sonner  leurs  clo(he«,  el  qu'il  fussent 

La   première  preuve    île    valeur   (|uc    ces  exempts    de   payer   les  dimes.    Ces     prèl.its 

llospilaliers   donnèrent  fut   lors(iue  le  caLfe  s'opposaient  en  toutes  choses   aux    Ilospita- 

d'Lgypte  vint  allaquer,  l'.in  1 1 18,  Baudouin  H,  liers,  cl  ces  dilïerendsallèrent  si  avant,  ((u'ou 

roi  de  Jérusalem.  Us  allèrent  a  son    secours  eut  recours  aux  arnii-s   et  (|u'on  en  vint  aux 

ayant  à  leurléle  leur  gr.iiid  niaitre  Raymond  voies  de  fait.  Guillaume  de  l'yr  (1  i  dit  méu-.o 

du  Puy,  qui  le  garaniil  aussi  des   embûches  avoir  vu  plusieurs  paquets   de   flèches  qu'où 

(I)  GiiilIcl.Tyr.,  Uiil.Udti  saai,  lib,  wiii,  c;ip.  3  et  seij. 


825 


MAL 


MAL 


826 


avait  amassées  de  celles  que  les  Ilospilaliors 
avaient  lirées  sur  les  prélats,  et  que  l'on 
avait  attachées  devant  le  lieu  où  Jésus-Christ 
avait  été  crucifié  :  c'est  ce  qui  fait  que  cel 
historien,  prenant  le  parti  di'S  évèqiies,  dé- 
clame fort  contre  les  Hospitaliers,  Le  pu|)e 
Anaslase  étant  mort  l'an  1153,  et  Adrien  IV 
lui  ayant  succédé,  le  patriarche  de  Jérusa- 
lem, acconi|)agné  de  quelques  évèques,  vint 
trouver  ce  pontife  pour  lui  faire  des  [ilain- 
los  des  Hospitaliers  et  le  prier  de  révoquer 
les  privilèges  qui  leur  avaientélé  arcordés  ; 
mais  ils  ne  purent  rien  obtenir,  cl  s'en  re- 
tournèrent en  Orient  fort  mécontents  de  la 
cour  de  Rome.  Cependant  les  Hospitaliers 
ne  perdaient  aucune  occasion  de  combattre 
contre  les  infidèles.  Le  snlian  Nuradiii  ayant 
assiégé  la  grotte  de  Sentie,  celle  pl.iee  se 
défendit  vigoureusement,  jusqu'à  ce  <iue  les 
chrétiens  ajanl  asscinl)lé  leurs  troupes,  dont 
le  grand  maître  Raymond  commandait  l'a- 
vant-garde,  ils  obligèrent  les  infidèles  de  le- 
ver le  siège,  ce  qui  arriva  l'an  1157.  Ce  fut  la 
dernière  expédition  où  se  trouva  ce  premier 
grand  maître  de  l'ordre  de  Saint-Jean  de 
Jérusalem,  ijui  mourut  l'an  IIGO,  après 
avoir  gouverné  cet  ordre  pendant  k-2  ans. 

Nous  ne  ra|ipi)rterons  point  toutes  les  ac- 
tions de  ces  braves  Hospitaliers,  sous  cha- 
(jue  grand  maître,  dans  les  différentes  guer- 
res où  ils  se  sont  trouvés  en  s'unissanl  auv 
autres  puissances  chréiiennes,  tantôt  à  la 
France,  tantôt  à  l'iispagne  et  à  la  ré()nbli- 
(jue  de  Venise,  puisqu'elles  sontin  Iropgrand 
nomh.e,  et  que  cela  nous  conduirait  trop 
loin;  nous  nous  contenterons  déparier  de 
ce  qui  regarde  plus  pariiculiéremeiil  cet  or- 
dre. Après  que  les  chrétiens  eurent  perdu  la 
ville  de  Je  usalem,  qui  fut  prise  l'an  1187 
par  Saladiii,  caiil'e  d'Egypte,  qui  quelques 
jours  auparavant  s'élait  aussi  emparé  de 
rtoléraaïde  ou  Acre,  belle  et  llorissanle  ville, 
Imengard  Darps,  dixième  grand  maître  des 
Hospitaliers,  transféra  son  couvent  et  l'hôpi- 
tal dans  la  forteresse  de  Margat  en  Phéiiicie, 
qui  leur  appartenait,  et  qu'ils  perdirent  l'an 
1285.  Ils  y  demeurèrent  quatre  ans,  jus- 
qu'à ce  que  la  ville  de  Ptolemaïde  étant  re- 
tournée en  la  puissance  des  chréliens  l'an 
l"iO,!,  après  un  siéi;e  de  trois  ans,  le  grand 
maître  y  iransfeia  de  nouveau  sou  couvent 
et  l'hôpital. 

Comme  celle  ville  était  presque  la  seule 
qui  restait  aux  chréliens  dans  la  Palestine, 
elle  devint  commune  à  toutes  les  nations 
dilîérentes  qui  avaient  eu  part  dans  les  croi- 
sades, et  qui  y  avaient  chacune  leur  quar- 
tier, où  elles  étaient  indépendantes  les  unes 
des  autres.  Ainsi  elle  était  habitée  par  le  roi 
de  Jérusalem  et  de  Chypre,  le  roi  de  Naples 
et  de  Sicile,  et  le  roi  d'Arménie,  le  prince 
d'Antioche,  le  comte  de  Jaffa,  le  patriarche 
de  Jérusalem,  les  Chevaliers  du  Saint-Sépul- 
cre, le  légat  du  pape,  le  comte  de  Tripoli,  le 
prince  de  Galilée,  les  Templiers,  les  Hospi- 
taliers, les  Chevaliers  Teuloniques  et  de 
Saint-Lazare,  les  Vénitiens,  les  Génois,  les 
l'isans,  les  Florentins,  le  prince  de  Tarenle 
et  le  duc  d'Athènes.  H  élait   impossible  que 


tant  de  souverains  dans  une  m'me  ville, 
indépendants  les  uns  desautres,  pussents'ac- 
corder:  aussi  formaient-ils  autant  de  partis 
dilTérenls,  qui  la  plupart  du  temps  étaient 
armés  les  uns  contre  les  autres.  Mais  ce 
qui  augmenta  la  division  furent  les  préten- 
tions que  Charles  d'Anjou,  roi  de  N.iples  et 
de  Sicile,  cl  Hugues  III,  roi  de  Chypre, 
avaient  sur  le  royaume  de  Jérusalem.  Cha- 
cun des  princes  (|ui  demeuraient  à  Ptole- 
maïde ayant  pris  parti  pour  l'un  des  pré- 
tendants, le  Soudan  d'Egypte  Flsis, surnommé 
Mclec-Messor,  voulut  profiler  de  ces  divi- 
sions, et,  jugeant  bien  que  celle  qui  élait 
aussi  en  Europe  entre  les  princes  chréliens 
les  empocherait  de  passer  en  Orient,  il  ré- 
solu! de  chasser  les  chrétiens  de  la  Syrie.  Il 
mil  sur  pied  une  armé  •  <le  soixante  mille 
(hevaux,  et  de  cent  soixante  mille  hommes 
d'infanterie;  mais,  sortant  d'Egypte,  il  fut 
empoisonné  par  un  de  ses  émirs  :  ce  (jui 
n'empêcha  pas  l'exécution  de  son  entreprise; 
car  ses  troupes  ayant  proclamé  après  sa 
morl  pour  Soudan  son  fils  Eli,  sous  le  nom 
de  Melec-Séraph,  ce  prince  voulut  poursui- 
vre le  dessein  de  son  père,  qui  l'avait  con- 
juré en  mourant  de  ne  le  point  faire  enter- 
rer avant  que  d'avoir  pris  Ploléma'ide  et  en 
avoir  chassé  tous  les  chrétiens.  Il  assiégea 
cette  ville  le  5  avril  de  l'an  1291,  et  la  bat- 
tit si  vigoureusement,  qu'elle  fut  emportée 
d'assaut  le  18  mai. 

Après  la  perte  de  cette  ville,  les  Hospita- 
liers, avec  leur  grand  maître,  qui  était  pour 
lors  Jean  de  Villiers,  se  retirèrent  dans  l'île 
de  Chypre,  où  le  roi  Henri  de  Lusignan  leur 
donna  pour  retraite  la  ville  de  Limisson, 
dans  laquelle  ils  demeurèrent  environ  dix- 
huit  ans,  jusqu'à  ce  (ju'ils  se  fussent  rendus 
maîtres  de  l'ile  de  Rhodes.  Foulques  de  Vil- 
laret,  ayant  été  élu  grand  maître  eu  1308, 
prit  la  résolution  de  transférer  la  demeure 
des  Hospitaliers  hors  du  royaume  de  Chypre, 
à  cause  que  le  roi  avait  quelque  ombrage 
d'eux  ;  et,  afin  d'être  plus  à  portée  do  com- 
battre contre  les  infidèles,  il  jeta  les  yeux 
sur  l'île  de  Rhodes,  pour  lors  occupée  par 
les  Sarrasins,  qui  y  avaient  été  appelés  par 
la  noblesse  du  pays,  qui  s'était  révoltée  con- 
tre Androuique,  emjjereur  d'Orient  ,  sou 
souverain  ,  à  qui  celte  ville  appartenait. 
Foulques  de  Villarel  alla  trouver  ce  prince 
à  Constanlinople,  qui  lui  accorda  l'investi- 
ture de  l'île  de  Rhodes  pour  lui  et  pour  sou 
ordre,  en  cas  qu'il  pût  s'en  rendre  maître.  Il 
passa  ensuite  en  France,  où  il  obtint  du  pape 
Cièmenl  V,  qui  était  à  Avignon,  la  confirma- 
tion de  la  donation  de  celte  île.  H  lui  donna 
même  les  moyens  et  les  forces  pour  l'aider  à 
exécuter  cette  entreprise,  et  lui  accorda  pour 
toujours  le  droit  de  nomination  à  l'archevê- 
ché de  Rhodes. 

Ce  grand  maître  exécuta  si  heureuse- 
ment son  dessein  ,  qu'il  se  rendit  maître 
de  celte  île  le  13  d'août  1309.  Il  y  en 
a  qui  prétendent  qu'il  joignit  le  stratagè- 
me à  la  bravou:e,  et  que  quelques  Cheva- 
liers, en  marchant  sur  les  pieds  et  les  mains 
couverts  de  peaux  de  muutous  uu   uiilieu 


K7                              nicTioNNAii;!':  m  s  ouorks  iin.iniKLx.  fss 

d'un  troupeau,  claiciil  «Miiros  dan«  la   ville  slattils  de  col  insliiul,  qui  avaient  ^(é  drossés 

de  Kliodes  à   la  faveur  d'un    brouillard,  s'é-  par  lirnoil,  eardiiial  de  Sainîe-Suzaiine,  Ic- 

laienl  >a!sis  d  une  porte,  dont  ils  avaieni  4né  (jat  à  Omsianlinople  ;   cl  l'an   1211    ce  p.ipe 

les    i;ar<les  ,    et    avaient   donné  lieu   par    ce  confirma  la  donalion  qui  leur  avait  été  faiie 

moyen  à  l'ariiiéi'  <lirélicnno  d'y  entrer.   Quoi  par  l'empereur  Henri  du  eliàlean  de  Ciarelle. 

(in'il  en  .-iolt,  rcs  lînspil.iliers  prirent  le   nom  cl  la  possession  de  Ions  l(  s  antres  biens  qui 

de  Chevaliers  de  lUiodes    après  l.i    prise   de  leur  aiipii  tenaient.   L'union  de  ces  Ho«piia- 

cetle  il  •,  ([ni  les  rendit  ma  lires  quelque  temps  liersavic  ceux  de  Saini- Jiaii  de  Je;  usa  le  m  fut 

après  de  sept  autres  îles  \oi>ines.  aussi  conlirmée  par  une  bulle  de  l^lémenl  V 

Les  Turcs,  indi};nés  do  celle  perle  et  vou-  du  8  août    l^OS,   et,    quatre   ans  airès,    le 

lanl  s'en    venijer,    vinrent    l'année  Miiv.inlc  même   pape  unit  encore  à    l'ordre  de  Sainl- 

pour  repieii'lre  celle  i!e  ;et,  comme  les  brè-  Jean  de  Jerusilom  celui  des  'l'cmplers,    qui 

elles  de    la  vi;le   n'elaient   pas  encore   icpa-  l'ut  aboli  dans  le  concile   {général  de  Vienne, 

rées,   ces  infidèles,  pridilanl   di;  celle  occa-  dont  l'ouverture  se  (il  l'an  lîll. 

sion,  l'a-sié^crent  a\ee  une  puissante  armée  Ces  avanla^es  enflèrent   le  cœur  du  prand 

l'an  lyiO.   Mai>    Arnédée    V,    comt'i   de  Sa-  maitre  de  \'illaret,  <)ui.  ayant  voulu  ;;i>uvcr- 

voic,   surnuinmé  le  (îrand,    vint   au  secours  ner  l'ordre  d'une  manière  despol. qui',  se  ren- 

de>    Chevaliers   a\ec    une   autre    armée,   el  dit  odicMix    aux  Chevaliers,  qui  voulurent  se 

obli;^ea  les  l'urcs  de  lever  le  sié;;e  et  de  Caire  saisir  de  sa  personne  ;  mais  il  se  retira  dans 

une   retraite   honteuse,   l'iusieuis    écrivains  \r.  château  de  Lindo,  où  ils  rassiépèicnt.  Ils 

ont  avancé  ([u'en  mémoire  de  celte  victoire  ,  tinrent  ensuite   un  chapitre  ,  ils  y  citèrent  le 

le  comte  de  Su>oie  prit    pour  sa  devise    ces  grand  maiirc  pour  y  venir  rendre  compte  de 

quaire    lellrcs  F.  lî.    R.    T.,   auxquelles    ils  sa  conduite;  mais  il  ne  voulu!  pas  s'y  Irou- 

unl  donné  celle  explication,  ForiUudo  ejus  ver,  et  il  en  appela  au  pape  :  c'i'St  pourquoi 

Jtliuduin  lenuil,    el  que  dans   ses  armes  il  on  le  déposa  ,  el  on  élut  à  sa  place  Maurice 

clian^i'a  l'aigle  de  Savoie  en   la  croix  de  la  de   l'agnac.    Le  pape   envoya  à  Uhoiles  des 

religion  de  Saint-Jean  de  Jérusalem,  qui  est  commissaires  pour  informer  de  ce  différend, 

d'argent  en  champ   de  gueules.    Mais   cetle  et  lit  venir  à  Uomc  les  deux  grands  maitres, 

liisluire   n'est   ()u'une   fable  ;   car    Louis    d  ;  après  avoir  nommé  pour  vic.iire  général  du 

Savoie,  baron  de  Vaux,  qui  miiuruH'an  1301,  l'ordre  Gérard  de  l'ins,  chevalier  d'une  graii- 

nortail  celle   devise    dans   sa   monnaie;    el  de  expérience. 

l'on  voit  encore  aujourd'hui  en  l'église  ca-  Les  infidèles  voulurent  profiler  de  ces 
thedrale  d'.\ousle,  sur  la  sépulture  de  Tho-  brouilleries  ,  el  armèrent  l'an  i;i-21  quairc- 
inas  de  Savoie,  11"  du  nom,  comlc  de  Mau-  vingts  vaisseaux  de  guerre  pour  assiéger 
Tienne  cl  de  Piémont,  père  d'Amédée  le  Rhodes;  mais  le  vicaire  général  ne  jugea  pas 
Grand,  un  chien  aux  pieds  de  ce  prince,  qui  à  propos  d'allen<lre  l'ennemi.  Il  fit  armer  en 
a  un  (olliiT  où  est  ce  mol  FliH  T,  en  earac-  diligence  quatre  galères  et  (iue!qnos  vais- 
lères  gothiques,  sans  ponctuation  ni  sépir.i-  seiiux, qu'il  envoya  avec  six  galères  génoises 
lion,  l'our  la  croix,  les  prédécesseurs  d'A-  qui  se  Irotivaient  dans  le  port  de  Hhodes  au- 
médée  le  Grand  l'ont  portée  aussi  au  lnu  do  devant  de  l'.irmée  ennemie.  Les  t^he»  aliors, 
l'aigle,  ou  en  qualilé  de  comtes  de  l'icmonl,  nonobstant  leur  peut  nombre  .  a!la(]uèrenl 
donl  les  armes  sont  une  croix  ;  ou  à  l'imi-  les  infidèleset  remportèrent  la  vicloire, ayant 
talion  d'.Vmédée  111,  comte  de  Savoie,  qui  so  coulé  à  fond  pres(iue  tous  leurs  vals^eaux. 
croisa  l'an  lli",  cl  qui  garda  la  croix  au  Sur  ces  enlrelaites,  Maurice  «le  Paguac  éiant 
retour  de  la  l'alesine  pour  niar({ue  de  son  mort,  Foul(]ues  de  Villaret  fut  rétabli  duns 
expédition  d'ontrc-mer.  Amédée  le  Grand  sa  dignité  par  le  pape  Clément  ^',  et  deux 
la  portait  lui-même  dès  l'.ui  l:jOV,  ainsi  qu'il  ans  après  il  s'en  démit  entre  les  mains  de 
p  irait  dans  un  traité  que  lil  ce  prince  avec  Jean  XXII,  ()ui  avait  succédé  à  Clément. 
Elieiinc!  de  t^oiigiiy,  seigneur  d'.XndeloI,  donl  L'ile  de  Hliodes  ayant  été  de  nou\  eau  mê- 
le 1'.  liouliours  de  la  compagnie  de  Jésus  ,  nacee  par  les  infidèles,  le  grand  niaîlre  .\u- 
d.iiis  son  Histoire  du  (iraiid  .Maiirc  d'.^ubus-  toine  Flavian  fil  lorlilier  toutes  bs  places,  et 
Bon,  dit  avoir  vu  l'original  scellé  du  sceau  les  ennemi^,  (U  ayant  été  avertis,  abaiidon- 
des  armes  de  ce  prince.  nèrenl  leur  dessein  ;  mais  l'an  li'i-'»,  sous  \t: 
Ce  lut  aussi  s  ais  le  gouverncmenl  du  nié-  grand  m.iilre  Jean  de  L.islic  ,  le  soudin  d'K- 
me  grand  ni. litre  de  \'illarel  que  se  lit  l'union  gypte  assiégea  Uhodes  avec  une  armée  de 
de  l'ordr.'  de  Si:inl-Samson  de  t^onslanlino-  dix'bnil  nulle  hommes,  cl.  après  plusieurs 
(lie  et  de  Corinthe,  (  l  de  tous  les  biens  (]ui  avsauls  qui  fiirmt  donnés  pu  les  inli  .èles  cl 
lui  a|iparlenaient  ,  à  celui  deSaiiil-Jean  de  généreusement  sout('iius  jiar  les  Chevalieis 
Jerusali'iii,  ce  qui  se  lil  du  consenlemenl  du  pendant  cinq  années  de  suite,  ils  furent  cou- 
grand  imiiireetdes  lièiesdel  ordre  de  S.iint-  liaiiils  di;  lever  le  siég(^. 
Samson  ,  (|ui  étaient  aussi  Hospitaliers,  el  .Maiiomcl  11,  empereur  des  Turcs,  crut 
avaient  des  maisons  à  Consi  inii.iople  el  à  i]ue  la  forlune  lui  serait  plus  favorable.  Il 
(^orintlie.  L'on  ne  sait  point  le  temps  de  l'in-  mil  le  siège  devant  Itliode-  l'an  IVSO  avec 
ïlilulion  de  ces  Hospitaliers,  il  y  a  neanoioin'i  une  armée  de  cent  mille  romb  illanis  et  cent 
de  l'apparence  que  ce  fui  sous  le  pontifical  soixante  v(>;les.  La  ville  fut  b.illiie  par  sei^e 
d'iiiiiocenl  111,  (|ui,  l'an  1208(1),  les  mil  sous  canons  d'une  grosseur  extraordinaire,  qui  li- 
la  prolecliun  du  .saiut-siégc  et  approuva   les  rôrenl  des  boulets  proportionnés  à  celle  groi- 

(1)  ICiiiit.  Iiiiiaccnl.   Idi.  M,  ep.    \ij  ,   cl  lib.  Mil,  c,i.   17. 


829  MAL 

ssur,  dont  trois  mille  cina  conis  porlèreiil 
contre  les  murailles,  sans  coinpler  un  nom- 
bre infini  de  pièces  de  bailcries  plus  peiilcs. 
Il  y  eut  en  plusieurs  assauts  0000  Turrs 
tues  et  15,000  blessés;  et  enfin,  par  la  valeur 
(lu  grand  maître  d'Auhusson  et  de  ses  Che- 
vaiicrs,  les  Turcs  furent  aussi  obligés  de  se 
retirer. 

Après  11  mort  de  Maîiomrt  II,  ?es  deux  en- 
fants Hajazctet  Zizime,  ne  se  pouvant  accor- 
der sur  ie  partage  de  l'empire  oUoinan,  se 
firent  la  guene  l'un  à  l'autre.  Zizime,  comme 
le  plus  faible,  cédant  à  la  force,  se  mit  sous 
la  protection  du  grand  matlro  de  Hbodes  et 
de  son  ordre,  et  arriva  à  Hbodes  le  2i  juil- 
let 14-82,  où  il  fui  reçu  comme  roi,  ce  qui 
obligea  Bajazet  de  fiire  la  pai\  avec  l'ordre, 
et  de  se  rendre  comme  son  tributaire  ,  en  lui 
payant  tous  les  ans  trente-cinq  mille  ducats 
pour  la  nourriture  et  l'cntrelien  de  son  frère, 
et  dix  mille  ducats  en  pariiculicr  au  grand 
maîiro  pour  le  dcdiinimager  en  quelque  fa- 
çon des  dépenses  cxrcissives  que  la  dernière 
guerre  l'avait  oldi|'é  de  faire. 

Z.zimc  s'imagina  que  son  frère  ne  faisait 
la  paix  que  [lour  avoir  une  occasion  favora- 
ble de  le  perdre;  que  quand  le  commerce  se- 
rait libre  entre  les  Rbodiens  et  les  Turcs  ,  il 
y  aurait  tous  les  jours  à  craindre  pour  sa  per- 
sonne, et  que  les  (Irecs  renégats,  accoutumés 
aux  Irabisons  et  aux  meurtres,  ne  ménage- 
raient rien  pour  servir  utilement  Bajazet. 
Dans  ce*  pensées  il  demamla  au  grand  maître 
d'aller  trouver  le  roi  de  France,  comme  ce- 
lui qu'il  connaissait  le  plus  capalde  de  le  pro- 
téger conlre  la  tyrannie  de  son  frère.  Sa  de- 
mande lui  fut  accordée;  il  partit  de  lUiodes 
le  !'■'' septembre,  acionipagné  de  plusieurs 
Cbevalieis  qui  furi'nt  nommés  par  le  grand 
maître  pour  lui  servir  d'escorte  ;  mais,  éiant 
arrivé  en  France,  il  fut  reçu  assez  tVoidi-- 
meiit  du  roi  Charles  VIII,  ou  parce  que  les 
Français  ne  voulaient  point  se  lirouilb  r  avec 
la  Porte,  ou  parce  qu'ils  craignaient  qu'une 
réception  bouorable  ne  fût  une  espèce  d'en- 
gagement poLir  l'eiilretien  de  ce  prince.  Ainsi 
il  demeura  fort  fieu  de  lemps  cà  la  cour,  el  les 
Chevaliers  le  conduisirent  dan<  la  toinman- 
derie  de  Huurgneuf,  sur  les  confins  du  Poitou 
et  de  la  Marche,  où  les  grands  prieurs  d'Au- 
vergne faisaient  leur  demeure. 

Malhias,  roi  de  Hongrie;  Ferdinand,  roi 
de  Castiile  et  d'Aragon,  qui  l'était  ausM  de 
.Sicile  ;  et  Ferdinand,  roi  de  Naples,  firent 
tous  trois  dans  la  suite  d'instantes  prières  au 
grand  maître  pour  avoir  Zizime  eu  leur  dis- 
position. Il  ne  leur  accorda  pas  ce  qu'ils  de- 
mandaient, mais  il  leur  |/romit  qnc  ,  tandis 
qu'il  aurait  le  sulîau  entre  ses  uiains,  il  eui- 
pèclierait  le  Grand-Seigneur  de  rien  entre- 
prendre sur  leuis  Etats.  Bajazet  compta  ce 
refus  couime  un  service  si;.',nalé,  et  se  sentit 
si  obligé  au  grand  maître,  que  par  recon- 
naissance il  lui  envoya,  l'an  l'iSï,  la  main 
droite  de  saint  Jean-Baptiste,  qu'il  lit  mettre 
dans  une  |)etite  cassette  de  bois  de  cyprès, 
revêtue  au  dedans  d'un  beau  velours  cra- 
nmisi,et  enrichie  au  dehors  d'une  inHnité  de 
pierreries.  Il  l'iuvoya  par  l'un  de  ses  l'uvoris 


MAL 


830 


avec  une  lettre  dont  l'insi^-iplion  était  en  ces 
termes  :  Bajtizet,  roi  de  l'Asie,  empereur  des 
empereurs,  nu  Irès-sage  et  Irès-ilhislre  grand 
tnaîlic  de  Rhodes,  Plirre  d'Aiihas.'ton ,  prince 
très-généreux  el  père  d'un  Irès-glorieux  em- 
pire. 

Après  la  mort  de  Sixte  IV.  le  cardinal  Cybo, 
(iéuois,  originaire  de  Uhode-,  où  même  son 
père  était  né,  fut  élevé  au  souverain  pouti- 
licat  sous  le  nom  d'Innocent  VIII.  Ce  pape 
acrorda  plusieurs  grâces  et  privilèges  aux 
Chevaliers  de  Rhodes,  et  enlr;-  autres  il  riî- 
nonça  au  droit  (|ue  ses  préilécesscurs  avaient 
de  pourvoir  à  plusieurs  bénéfices  de  la  reli- 
gion de  lîliodes.  Il  y  renonça  par  une  bulle 
consistoriale  ,  signée  de  tous  les  cardinaux 
assemlilés,  étant  au  saint-siége  le  pouvoir  do 
conférer  jamais  aucune  commanderie  de 
l'ordre,  quand  même  le  bénéfice  viendrait  à 
vai|uer  en  cour  de  U(uiie,  et  déclarant  par  la 
même  bulle  que  la  disposition  de  toutes  les 
commanilerii's  appartenait  entièrement  au 
grand  maître, sans  qu'elle,  pussent  ètrecom- 
piises  sous  les  bénéfices  que  les  papes  s'é- 
taient réservés  ou  pourrait'ul  se  réserver 
dans  la  suite,  el  il  honora  le  grand  maître 
d'.\ubusson  du  chapeau  de  car<linal,  avec  la 
qualité  d"  légat  du  sainl-siégc  en  Asie,  en 
considération  des  services  signalé.î  (jne  les 
Cbevaliersde  l'hodesavaienl  rendus  à  l'Fglise, 
et  de  ce  (|ue  \i-  grand  maître  lui  avait  accorde 
le  prince  Zizime. 

Il  y  avait  longtemps  que  ce  pontife  l'en 
sollicitait.  Fenlinaiid,  roi  de  Naples,  lui  avait 
demandé  de  nouveau  ce  prince,  et  rnèine  le 
Soudan  d'Fgypte  le  demandait  aussi.  Mais  le 
grand  maître  se  crut  obligé  de  l'accorder  plu- 
tôt au  pape,  auquel  il  devait  obéir  comme  au 
chef  de  son  ordre,  d'autant  plus  que  ce  pon- 
tife avait  commencé  à  parler  en  maître.  Il 
envoya  donc  à  Borne  le  bailli  de  la  Morée  et 
le  vice-chancelier  de  l'ordre,  avec  un  ample 
pouvoir  pour  terminer  celte  affaire.  Les  am- 
bassadeurs étant  arrivés,  et  ayant  eu  au- 
dience du  pape,  ils  consentirent  à  la  transla- 
tion de  Zizime,  pourvu  que  le  roi  de  France 
ne  s'y  opposât  point,  et  que  les  Chevaliers  de 
Uhodes  demeurassent  toujours  aupiès  du 
suilan.  Charles  VIII,  qui  avait  besoin  du 
pape  pour  la  conquête  du  royaume  de  Na- 
ples, donna  les  mains  à  tout  ce  que  voulut 
Si  bainleié,  et  le  pape  ac<virda  sans  peine 
aux  ambassadeurs  Ci-  qu'ils  demandaient. 
Le  commandeur  de  Blancliel'ort,  auquel  le 
grand  maître  avait  confié  la  personne  de  Zi- 
zime, el  qui  en  son  absence  avait  élé  élu  ma- 
réchal de  l'ordre  et  grand  prieur  d'Aqui- 
taine, fit  partir  ce  princi'  de  la  commanderie 
de  Bourgiieuf  suivant  les  lettres  du  grand 
maître,  et  Zizime  arriva  à  Home  au  mois  do 
mars  ll8J,  où  il  fut  reçu  avec  tous  les  hon- 
neurs dus  à  une  personne  de  son  rang. 

Dès  l'an  l'i85.  Innocent  ¥i!i  avait  suppri- 
mé les  ordres  militaires  du  Saint-Sépulci  e 
et  de  Saint-Lazare  de  Jérusalem  .  el  il  ava  t 
uni  les  biens  qui  eu  dépeuilaient  à  l'ordre  de 
Saint-Jean  di;  Jérusalem,  ceriuil'ut  confirmé 
dans  la  suite  par  le  pape  Jules  II,  l'an  l.'J05; 
mais  cette  su[)i)ressiou  cl  celle  union  n'eu- 


sr.l                                              DICTIONNAmR  DES  OnDUES  RELIGIEUX.  85i 

rcnl  po^nl   de   lieu  m  France,  romnie  nous  son  fut  iloilaré  clief et  (Çcnt-ral,  on  ploin  coii- 

a»on<   rpiii.irqdé  oillciir.-;.   Innoceiil  niuiiriit  sisloirc.  [>ar  le  pipe  Alexandre  \i.  Mais  1rs 

r.iii  I J02,  cl   cul  pour   successeur  ll(iilrii,Mie  fausses  ilémaniics  que  firenl  quelquci  capi- 

Itorcia.   qui   prit    le    nom  (iWlixandre  \'l.  Il  tailles  (les  troupes  li^ui-cs  lirenl  bientôt  éva- 

ava  I  été  prolecleur  de  l'ordre  de  S.iint-Jcan  nouir  les  cspér.Énces  des  grands  avantîip;es 

deJcrusaletnoautrardin.il.  Après  sou  clec-  que    l'on     s'était    proposes,  lie    cette    liiiue. 

lion   nu  soiivorain   |)out  lical  ,    il  térnoiijna  ,  Louis  XII,  roi  de  France,  et  Ferdinand,  roi 

par  ui\   bref  qu'il   envoya  au  taraud  maitre,  det'asiillc,  qui  avaient  fiil  alliance  entre  eux 

avoir  toujours  de  lions  senlinieiits   [lour  les  contre  Frédéric,  roi  de  Naples,  qu'ils  avaient 

(^hevalers  de  Uliodes  ;  mais  les  elVets  ne  ré-  dépouillé  de  ses  l'-lats,  et  qui  les  avaient  par- 

p  ndirent  pas  aux  paroles.  .Mexandre  coin-  laués  entre  eux,  ne  voulurent  plus  avoir  de 

ineiiça  presque  son  pou  ilicit  (lar  se  rendre  concurrent   :   eliacun    voulut    posséder   tout 

iiiaitre   de   la    personne    du    prince   Zizinie,  entier  le  royaume  de  Naples  ,  et  ces  irimes 

coiitr-  le  traité  qui  aviit  é  é  fait  entre  Inno-  se  firent   une   guerre  saiii^lanle  qui  remplit 

cent  \'lll  et  les  Chevaliers.  Il  lit  enfermer  le  l'Italie  de  confusion   et  d "horreur.  Le   pape, 

sultan  dans  le  château  Sainl-Aiipe,  et  otaiit  au  lieu  d,-  travailler  .j  raccoinmndcment  de 

d'aiifirès  de  lui  les  Chevaliers  qui  y  avaient  ces  princes  ,  favorisait  (  uverlement  le  |iarii 

toujours  été  ,  il  le  confia  à  ses  neveux,  dont  d'Espagne,  et  ne  songeait  qu'à  l'aiirandissc- 

l'uii  était  Chevalier  de  Uliodes,  sous  prétexte  ment  de  César  de  Hori;!.!,  duc  de  Valeutinois, 

qu'une  vie  aussi   précieuse  que  celle  de  ce  son   (ils,   qu'il   aimait  passionnément.  I",'esl 

prince  serait  moins  exposée  aux  embûches  pourquoi   les   A'éniliens,  (jui    ne  recovaieiit 

de  ses  ennemis  dans  une  [lace  forie.  Ziziine  point  les  secours  qui  leur  avaient  été  promis 

demeura  ainsi  enfermé  jusqu'à  ce  que  Ch,ir-  de  France  cl  d'Espagne  ,  firent  la   jmix  ave.-. 

les  X'ill ,  «lui  .ivait  enliepiis  la  conquête  du  les   Turcs  sans  consulter  les   Chevaliers  de 

royaume  de   Naples  ,  et  qui    voulait   porter  Uliodes,  et  Ladislas  ,  roi  de  Hongrie,  suivit 

aussi  ses  ;irmes  jusque  d.uis  le  Levant,  de-  bientôt  leur  exemple.  Le  grand  maître  d".\u- 

iiianda  en  passant  à  Unme  le  sultan  Zizime,  busson  fut  pénéiré  de  douleur  en  apprenant 

que  le  pape  lui  accorda  ;  mais  ce  ne  fut  pas  ces  nouvelles;  cl,  pour  comble  d'ariliction.  il 

sans  soupçon  d'avoir  livre  à  (Charles  VIII  ce  apprit  eu  même  temp»  que  le  pape  conféraii 

prince  oiloinan  euipoisoiiné,  cir,  peu  do  jours  les  commanderies  de  l'ordre  à  des  personnes 

après,  ce  prince  se  sentit  lrap[ie  d'un  mal  séculières,  et  qu'il  avait  promis  le  prieuré  de 

il  connu,  (jui  i'em[.orta  en  flirt  peu  de  temps,  ("astille  à  don   Henri  de  Tolède  ,  sans  avoir 

C'est  ainsi  que  te  prince  malheureux  finit  sa  égard  ni  au  privilège  accordé   par  Innocent 

vie,  1  an  l'^'.ilî,  ^'111 ,   ni  ii  la  qualité  de  généralissime  de  la 

Uajazel  et  ses  sujets  n'avaient  osé  rien  en-  ligue  ,   qu'il   lui  avait  lui-même  donnée.  La 

(reprendre  contre  les  chrétiens  du  vivant  de  rupture  de  la  ligue  et  le  procédé  du  papeje- 

Ziziiiie;  mais  après  sa  mort   plusieurs  inli-  tèrenl  le  grand  maitre  dans  une  mélancolie 

déles  qui  habitaient  les  côtes  de  la  Lycie  les  qui  l'abattit  peu  à  peu,  et  (|ui  lui  causa  enfin 

plus  voisines  de  Uliodes   lillèrent  i|uelques  une  maladie  dont  il  mourut  au  mois  de  juin 

îles    qui    appartenaient   aux    Chevaliers    de  loO.'J,  étant  âgé  de  plus  de  qiiatre-vingis  ans; 

Uhodes.  Ils  lirent  môinc  des  courses  da  ^s  la  il    y    en   avait    vingt-sept   qu'il    gouvernait 

Carie  et  allèrent  braver  les  Chevaliers  jus-  l'ordre. 

qu'aux   portes  du   chàie.iu  Saint-Pierre.  Le  Aiméric  d'.Vmboisc,  grand  prieur  de  V  ran- 

gr.ind    maitre   d'Aubusson  fil  armer  contre  ce,  frère  du  grand  cardin.il   Ceorges  d'.Vm- 

ces  pirates.  On  en  prit  queliiue.-.-uns  qui  fu-  boise,  archevêque  de  Ilouen  et  ministre  d"E- 

rent  punis  du  dernier  supplice  ;  mais  les  dés-  Lit  sous  Louis  XH,  roi  de    France  ;  de   Jean 

ordres  ne  laissant   pas  de  continuer,  il  eu  lit  d.\mboise,  évêque    de    Limoges  ;  de   Louis 

SOS  plaintes  à  la   Porte,  et  il  en  recul  salis-  d'Aiiiboise,  évoque   d  .\lbi;  de   Pierre  d'.Vni- 

fac'ion  de  Uajazpl  ,   qui  ne  voul.iit  pas  pour  boise  ,  cvèque   de    Poitiers,    et   de   JaC(|ue» 

lors  se   brouiller  ouvertement  avec  les  Clie-  d'.Vmboise,  éiêque  de  t'Iermoul   et  abbé    do 

valiers.  (Quelque  temps  après,  sur  les  nou-  Cluny  ,  succéda   au   grand  uiailre  d'Aubus- 

velles  que  l'on  eut  à  Uliodes  que  ce   prince  son.  Il  signaLi  son  gouvernement  par  la  ba- 

levait  une  puissante  armée,  le   grand  mailre  taille  qu'il   gagna  contre  le  S'iudim  d'I^gypie 

se  tint  sur  ses  gardes  et  arma  de  son  côté.  11  p  oclie  du  port  i;e  Laiaz/o  dans  la  Carama- 

(leuianda    du    secours    à   plusieurs   princes,  nie,  sur  les  (  onlins  de  la  Syrie,  vers  Monie- 

l.ouis  XII,  roi  de  France,  lui  envoya  vingi-  Négro.  Les    ligv  plions,  dont    l'armée    était 

deux  gros  navires,  cl  l'on  ne  iloiila  {loiiil  que  composée,  furent  presque  tous  défaits,  et  le 

r.irmoe   na>ale    ottomane    n'allât   atiaquer  neveu  du  soudau  y  fut  tué.  Le  grand  maitre 

Uliodes  ,   lorsque,  ayant  jiassé  le  détroit  de  ordonna  que  tous  les  ans,  l.i  veille  de  la  iia- 

Galli|)oli,  elle  prit   sa   route  de   ce  cAté-l;i  ;  tivilé  île  saint  .leau-liaplisie,  en  mémuire  de 

mais  ce  n'était  qu'une  feinte  de  la  jiarl   des  celle  bataille,  on  préparerait  une  collation 

infidèles,  qui  en  voulaient  aux  A'éuitioiis,  et  au  grand  maitre  et  aux  baillis   sous  la  tenle 

dans  le  Iciiips  (|U(;  leur  armée  naiale  passa  ipii   couvrait   la   |ioupe  du    n  ivire  où  avait 

le  dolroit,  le  (jiand-Seigneur  entra  avec  une  combattu  le  neveu  du  soud.ni.  Il  mourut  le 

puissante  armée  dans   la   Uouiaiiie,   et   une  lli  novembre  liil'i,  et   eut   pour   successeur 

partie  de  sa  cavalerie  alla  ravager  la  Dalina-  tîuy  île    lîlaiicherurl  ,  granil  |  rieur    d'Aqui- 

lie.  C'est  ce  (fui  donna  lieu  a  la  ligue  (|ue  li-  taiue,  neveu  du  grand  maitre  d'Aubusson.  H 

ri'iit  les  princes  clnetieus  coiilre   les  Turcs  fut  du  quoique    absent,  étant   pour  lors   en 

l'ait  loUl,  et  dunt  le  grand  uiailre  d  Aubu:>-  Franc ',  it  u:uurut  uu  an  après,  le  13  nuvciu- 


!i-;ô 


MAL 


MAL 


83i 


lire  15S;î,  cil  aManl  à  l'.liodes  pour  prcnJro 
liossi'ssiou  de  sa  dignité.  11  arriva  dans  cet 
iiilorvallc  une  chose  assez  remarquable  :  les 
chefs  des  langues  se  plaignirent  au  conseil 
de  ce  que  le  dtfunt  gr.nul  maître  d'Aniboisc 
avait  lait  mettre  trois  (leurs  de  lis  de  marbre 
sur  la  porte  qu'il  avait  fait  bâiir  au  boule- 
vard proche  son  palais,  ce  qui  semblait  don- 
ner à  la  couronne  de  Fr.ince  quelque  supé- 
riorité sur  la  religion,  et  ils  deniandèreut 
qu'elbs  lussent  ôlées.  Les  Français  sou!e- 
naient  qu'elles  y  devaient  demeurer.  Enfin, 
a|)rès  plusieurs  contestations  ,  les  fleurs  de 
lis  lurent  portées  par  ordre  du  conseil  sur 
la  muraille  du  quartier  des  Français,  et  il 
fut  permis  aux.  autres  langues  d'en  faire  au- 
tant des  armes  de  leur  prince. 

Fabrice  de  Caretto,  chef  de  la  langue  d'I- 
talie et  amiral  de  l'ordre  ,  succéda  à  Guy  de 
IJIanchelbrt.  Il  reçut  l'an  15i;J  une  ambas- 
sade du  soplii  de  Perse,  avec  lequel  il  fit  li- 
gue Contre  Sélim  I",  empereur  des  Turcs. 
L'année  suivante  il  conclut  la  paiv  avec  le 
Soudan  d'Kgypte,  et  fit  les  pré|)aralils  nécessai- 
res pour  résister  au  dessein  du  (îraud-Sei- 
gncur,  qui  semblait  vouloir  assiéger  Uhodes. 
Il  deinanila  du  secours  aux  princes  chrétiens. 
Le  pape  Léon  X  lui  envoya  trois  galères 
bien  armées,  et  François  I",  roi  de  France, 
dix-sept  vai-'Seaux.  Sélimétant  mort, Gazelle, 
gouverneur  de  Syrie,  se  révolta  contre  Soli- 
man 11,  qui  avait  succédé  à  Sélim.  Il  assem- 
bla une  armée  et  demanda  de  l'artillerie  au 
grand  maître,  qui  lui  en  envoya;  mais  l'ar- 
mée de  (jazelle  iul  défaite,  et  il  mourut  dans 
le  combat. 

i^e  grand  maître  de  Careilo  mourut  aussi, 
le  10  j.inviei-  1521,  et  ou  élut  à  sa  place  Phi- 
lippe de  Villiers  de  l'Ile-Adam,  de  la  langue 
de  France,  pair  lors  grand  hospitalier  et 
ambassadeur  de  la  religion  auprès  du  roi  de 
France.  Ua  des  premiers  soins  de  ce  grand 
maître  l'ut  d'ajouter  encore  de  nouvelles  for- 
tifications à  Uliudes  pour  soutenir  le  siège 
dont  cette  ville  était  menacée,  lille  le  fut  en 
elTet  ([ueliiue  temps  apiés;  mais  les  Clieva- 
lipis  ne  furent  pas  si  heureux  dans  ce  siège 
qu'i;s  l'avaient  été  dans  les  précédents.  Soli- 
man n'ignorait  pas  que  le  grand  maître  de 
(Caretto  avait  envoyé  de  l'artillerie  à  Gazelle, 
lorsqu'il  s(!  révolta  contre  lui,  et,  ne  pouvant 
soullrirqu'après  avoir  subjugué  la  Syrie,  une 
petite  place  tenue  par  une  poignée  de  gens 
lui  résistât  au  milieu  de  ses  Ktais,  il  résolut 
de  l.'i  l'orier.  Il  l'attaqua  l'an  lo22  avec  une 
armée  composée  de  tiois  cent  mille  combat- 
l.ints  ,  deux  cent  quatre-vingts  voiles  et  une 
prodigieuse  ai  tilierie. Peut-être  que  les  Turcs 
auraient  encore  élé  contraints  de  lever  le 
siège,  pour  peu  que  les  Chevaliers  eussent 
été  secourus,  et  s'ils  n'avaient  point  élé  tra- 
liis  par  André  d'Amaral,  Poriugais  ,  prieur 
tie  Castille  et  chancelier  de  l'oidre,  qui,  ne 
se  pouvant  consoler  de  n'avoir  pas  élé  grand 
icailre  à  la  dernère  élection,  jeta  dans  le 
cairip  de  Soliman  une  lettre  attachée  à  une 
Hèche,  par  laquelle  il  l'avertissait  qu'il  ne 
pouvait  prendre  la  ville  que  par  un  certain 
endroit  faible  qu'il  lui  indiquait,  à  quoi  il  lui 


serait  aisé  de  réussir  en  comblant  les  fossés 
de  ce  côté-là  avec  la  terre  d'une  montagne 
qui  en  était  proche.  La  trahison  d'Amaral 
fut  découverte,  et  il  eut  la  tête  tranchée  le 
30  octobre;  mais  les  Turcs,  sur  divers  avis 
qu'ils  avaient  reçus  de  lui,  pressèrent  telle- 
ment la  place,  qu'elle  ne  fut  plus  en  état  de 
se  défendre.  Le  grand  maîire  de  Villiers  de 
rile-Adam  la  rendit  à  Soliman  le  2i  décem- 
bre, après  que  l'ordre  eut  possédé  cette  ville 
pendant  213  année-,  depuis  l'an  130'J  jusiiu'à 
la  fin  de  ce  siège,  où  les  Turcs  perdirent  cent 
mille  hommes. 

Après  cette  perte,  le  grand  maître,  avec 
cinquante  bâtiments  qui  portaient  les  Cheva- 
liers et  plusieurs  habitants,  partit  de  Uhodes 
le  1"  janvier  1523,  et  alla  du  côté  de  Candie, 
où  il  prit  terre;  et,  ayant  donné  avis  de  son 
arrivée  au  général  de  l'armée  des  Véni- 
tiens, il  fut  invité  d'aller  à  Castro,  où  il  fut 
reçu  avec  beaucoup  d'honneur.  11  passa  de 
l.'i  à  Messine,  d'où  il  alla  à  Home  trouver  le 
pape  Adrien  \  1,  qui  lui  fit  une  réception  ma- 
;.;Mitique,  et  ce  pontife  étant  mort  peu  de 
jours  après,  on  donna  au  grand  maître  et  à 
ses  Chevaliers  la  garde  du  conclave.  Il  prit 
cependant  conseil  des  ambassadeurs  des  prin- 
ces et  de  ses  Chevaliers  sur  le  lieu  où  l'ordre 
piiurrait  établir  sa  résidence.  Cunime  il  ne 
voulait  point  de  place  en  terre  ferme,  l'île  du 
Malle,  à  cause  de  ses  beaux,  ports  et  de  sa  si- 
tuation sur  les  côtes  d'Afrique,  lui  parut  à 
sa  bienséance.  Il  envoya  vers  l'empereur 
Charles  V  le  prieur  de  Castille,  le  bailli  de 
S.iinte-Fuphémie  et  le  commandeur  Bosio, 
pour  lui  eu  faire  la  demande  et  lui  représen- 
ter qu'il  acquerrait  par  ce  moyen  l'honneur 
d'avoir  préservé  l'ordre  de  sa  perte  et  de  sa 
ruine  entière,  d'en  être  le  principal  protec- 
teur, et  de  l'avoir  comme  foniié  de  nouveau, 
lis  étaient  aussi  chargés  de  lui  demander  Sa- 
ragouse  en  Sicile  pour  y  demeurer  pendant 
les  trois  ou  quatre  ans  que  l'on  bâtirait  à 
Malte  des  logements  et  les  fortifications  né- 
cessaires. 

Pendant  que  les  députés  du  grand  niaîtro 
négociaient  celte  affaire,  le  cardinal  Jules  do 
Médicis ,  Chevalier  de  Khodes  et  grand 
prieur  de  Capoue,  fut  élu  pape  sous  le  nom 
de  Clément  \'ll.  Il  accorda  aux  Chevaliers 
de  Uliodes  la  ville  de  Viterbe  pour  leur  de-» 
meure,  et  le  grand  maître  et  son  couvent  y 
allèrent  faire  leur  résidence.  Les  Chevaliers 
qui  avaient  élé  envoyés  vers  l'empereur  rap- 
portèrent que  ce  prince  voulait  bien  accor^ 
der  l'île  de  Malle  à  l'ordre  ,  mais  à  certaines 
conditions  qui  parurent  trop  onéreuses  :  c'est 
pour(|uoi  le  grand  maître  voulut  temporiser 
jusqu'en  l'an  1530,  qu'il  accepta  avec  ses 
Chevaliers  la  donation  que  l'empereur  leur 
fit  de  cette  île,  do  Gaze  et  de  i  ripoli,  pour 
les  posséder  en  toute  propriété  et  souverai- 
neté, et  le  tenir  eu  (ief,  à  la  charge  d'un  fau- 
con payable  tous  les  ans,  le  jour  de  la  Tous- 
saint, au  vice-roi  de  Naples,  cl  que  l'évéclié 
de  Malle  serait  à  la  nomination  de  Sa  Ma- 
jesté Impériale  et  de  ses  successeurs  au 
royaume  de  N  iples.  Le  grand  maître  de  l'Ile- 
Adam  et  ses  Chevaliers  arrivèrent  à  Malte 


835                                          DICTIONNMRK  DES  OIIDRF.S  RKLIOIEUX.                                            830 

j.oiir  Jcrnièrc  rclrailc  le  îft  ortobrc  1530,  l'oglisc  :  il  n'y  a  que  le  seul  {irand  m.iîlre  qui 
où  les  Chevaliers  tic  lilioJes  oui  toujours  le  lail,  el  c'est  une  erreur  |inpulnirc  de 
resté  jusqu'à  présent,  .'lyani  été  appelés  de-  croire  tiue  quand  1  /s  Ciievalier-  de  Malte  en- 
puis  ce  ti'mps-l'i  Chevaliers  de  Maito.  tendent    la    niisse   en    rcrtiiiotiic   dans    uiio 

Cepend.mt,  l'an  loi",  sous  le  pouvoriie-  egli.se  de  leur  ordre,  ils  tiiiini'iit  j'epée  nue 
ment  du  grand  iiuiitie  Jean  de  Iloinèle-,  l'uri  pendant  l'cvaiigiie  ei  à  relev.itioii  du  corps 
proposa  Uans  un  chapitre  d'établir  la  rési-  di-  JéNUS-Clirist  a|irès  la  coiisccraiion,  pour 
di'uco  de  l'ordre  à  Trlpo!i,  à  cause  que  l'on  laiie  voir  la  di-po-ilion  où  ils  s-out  de  coni- 
serail  plus  à  portée'  de  s'étendre  en  Barbarie,  battre  pour  la  defonse  île  la  loi  1). 
suiv^Mit  les  intentions  du  grand  inaitre  de  Comme,  après  la  levée  du  siège  de  Aîalle, 
Il  c-Adam  :  .Nialte  e:aiit  d'ailletirs  un  lieu  les  '^urc^  menaçaient  d'y  relourner  avec  de 
UL.Isain,  spéeia:en  eut  en  éie,  et  l'url  stérile,  jilus  grandes  lorces.  l'on  furtilia  la  ville  et 
au  lieu  (jue  Tripoli  était  dans  un  lieuagiea-  l'ile;  et  l'an  1500  le  grand  maiire  de  la  Va- 
ille et  fertile.  M.iis  Vou  y  trouv.i  tant  de  dil-  letle  posa  la  première  |àerre  de  la  Cité,  qui 
ncullés,  que  l'ua  aliau'tonua  ce  dessein,  et  porte  encore  son  nom.  Plus  de  huit  mille 
l'ordre  ne  posséda  cette  place  que  jusqu'en  ouvriers  y  l'urenl  employés;  et,  alin  ti'avan- 
l'an  looG,  (jue  ,  sous  le  gouvirncmenl  du  cer  plus  aisément  les  travaux,  le  pape  l'ie  V 
même  grand  maiire  de  llomèdcs,  Soliman  11  commanda  qu'où  y  travaillât  s<ins  diseonti- 
.s'cn  rendit  encore  maitrc,  y  ayant  envoyé  nuer,  même  les  jours  de  fêle.  La  ville  fut 
une  aruiée  commandée  par  ?inaiii  hacha.  achevée   l'an  loTl,  après    la  mon   du  grand 

Ce  prince,  ne  se  croyant  pas  assez  dédom-  miilre  de   la  \  alctle,   qui  arriva   le   21  août 

mage,  par  la  prise  de  cette  p  ace  et  de  l'ile  de  lotiS,  el  le  grand    naiiro   del  Monte,  delà 

Kaodes,  des    perles   que   les   galères   e!  les  langue  d'Italie,  son  successeur,  y  transporta 

vaisseaux  de  l'ordre  causaient  tous  les  jours  le  couvent  et  y  (il  son   entrée  avec   toute  la 

à  ses  sujets  en  leur  enlevant   plusieurs  bâti-  rel'g.on  le  18  mars  de  la  même  année  1371. 

iiienls,  el  ayant  pris  même   tout  récemiiient  Ce  lut  du  temps  de  (e  grand  luallie  que  se 

un  gros  galion  qui  appartenait  au  capigi  ou  donii.i  la  fameuse  bataille  de  Lépan:e,  la  plus 

chef  du  sérail,  sur  lequel  les  sultanes  avaient  célèbre  <iue  les  chrétiens  aient  jamais  gagnée 

lies   elTels    dmil    elles    faisaient   de   grosses  sur  mer,  el  où  l  s  Glievaliers  de  Mal;e  euienl 

plaintes,  il  résolut  d  assiéger  Malte,  espérant  part  el  aciiuirenl  beaucoup  de  gloire.  Klle  fui 

qu'il  serait  plus  heureux  dans  cette  espédi-  ooimee  la  uiême  année  1571,  dans   le  dclroil 

lioii  q.i'il  ne  l'avait  été  douze  ou  treize  ans  qui  est  entre  les  petites  lies  de  Cursolari,  au- 

aupaiavanl,  lorsqu'il   avait    voulu   tenter  la  Irelids  les  Ecliin.ide-,  et  la  terre  ferme,  envi- 

niéine  chose,  y  ay  ni  envovc  une  armée  sous  ron  à  soixante  milles  du  promontoire  .Ic/imw, 

la  conduite  de  Sinam  hacha  ,  qui  fui  obligée  si  reiiomaié   par    la   balaille   qui   décida   de 

de   se  ri  tirer,  (^e  fut  donc    l'an  lotio,  vers  le  l'cmijire  romain      entre    Octave    il     Marc- 

inilieu  du  mois  de  mai ,  que   toute    l'armée  Anioîne.  Les  Turcs,  ayant  mouillé  à  Lépanlo, 

ottomane  se  trouva  à    Navarin  composée  de  apprirent  que  les  chrétiens,  eu  (;uillanl  Cor- 

cenl  cinqujuie-liuil  galères,  onze  grands  na-  fou,  venaient    sur   eux  à  pleines    voiles.    Us 

vires,  el  ilouze  autres    bâlimenls,  avec  plus  avaient  si  mauvaise  opinion  de  la  flotte  chré- 

de  cent  mille  combatlauls.  La  vile  de  Malle  tienne,  qu'ils  ne  crurent  pas  qu'elle  eût  assez 

fut    puissaminenl    attaquée  pendant    quatre  de  liaidiesse  pour  leur  préseuler  le  combat, 

mois,  1 1  encore  plus  vaillauiineni    défendue  La  Uolle  otlomane, commandée  par  llali  ba- 

par  le  grand  maiire  Jean  de  la  Valette  l'ari-  cha,  était  composée  de  deux  cents  galères  et 

sot  el  par  ses  Chevaliers.  Les  infidèles  y  per-  de  près  de  soixaule-dix    ficgales  et  brigan- 

ilirent  pli.s  de  vingl  mille  hommes,  el  après  tins.   Celle    des   chrélieiis,    commandée    par 

avoir  lire  inutileuienl  plus  de    soixante-dix-  don  Juan  d'Autriche,   (rère  naturel  de  l'hi- 

tinit  mille  coups  de  canons,  ils  lureul  cuhu  lij  pe  II,  roi  d'Espagne,  n'avait  que  cent  dix 

contraints  Ile  se  retirer.  galères  cl  vingt-huit  gros  ua  ires  d'équipa- 

Le  pape  lie  IV  écrivit  au  grand  maître  un  ges,avee  six  galéasses  garnies  de  grosse  ar- 

bref  pour  le    feliiitersur  la  délivrance  de  ii.lerie.  Le  7  octobre,  les  deux  armées  elanl 

Malte,  et  lui  offrit  même  un  chapeau  ne  car-  à  la  pi.rlec  du   canon,  o.i  lil  un  si  grand  feu 

dinal,   qu'il    relusa.  L'empereur  trAlleinagno  de  part  et  d'autre,  que  l'air  fut  tout  oliscuici. 

lui  envoja  une  épée  et  un  poignard  à  gardes  Oa  se  battit    pendant  trois  heuies    avec   un 

d'or   emaillécs    cl    enrichies   de    pierreries.  avantage  egai,    mais   la  victoire  se   déclara 

Tous  les  ans, en  aeliunde  grâces  de  celte  v  ie-  ensuite  pour  les  chrétiens.  Les    Turcs  perdi- 

toire,  on   fait  à  Maite   une  pioecssion  solen-  renl  pius  de  trente  mille   hunimes  dans  cette 

nelle  le  jour  de  1.1  nativité  de  la  saillie  Vierge,  bataille.  Les   chieliens   tirent    jilus   de   cinq 

qui  lut  le  jour  de  la  levée  du  siège.  Le  grand  laille  prisonniers,   entre  lesquels  se  irouvè- 

iiiailre  s'y  trouve  a  la  tele  do   lous  les  Che-  lent  les  deux    liis   de  ILiii,  et   se    rendirent 

valiers,  ayant  a    sa  droile  un  Chevalier  qui  maitres  d-   cent   trente   galères   otloiiiaues. 

poile  Teleiidard  de  la  religion,  el   à  sa   g.iu-  l'.us  de  qualre-viiigls,  tant  galéics  qu'autres 

che  un  page  qui  jiorte   celle  épé''  nue.  Lors-  bàlimenls,  se  brisèrent  contre  la  terre  ou  lu- 

qu'on   ciimiiience  l'évangile,  le  grand  maître  rent  coulés   a  fond  ou   consumes   par  le  feu. 

la  prend  des   mans  du  p  ige  el  la  liiut  toute  Près  de  vingl  nulle  esclaves  clirétiens  recou- 

droite    pendint   le  temps  de  l'év  aiigile.  C'est  v  rèreiit  la  lilierte,  et  le  butin  fut  tiès-consi- 

U  seule  occasion  ou   Ton  lient  l'ejiee  nue  à  derable,  [larce  que  ces  iulidèles  vcna'cnt   d« 

(I)  Insiriiclions  sur  les  devuirs  des  Chcv.ilieis  de  M.dlc,  pag.  55a. 


857 


MAL 


(lillrr  Ik's  îles  et  de  prendre  plusieurs   vais- 
seaux marchniids. 

L'aniiéc  suivante,  le  grand  maître  dcl  Mon- 
te élanl  mort,  on  lui  donna  pour  successeur 
Jean   l'Evéque  de  la  Cassièrc,  de  la  lantruo 
d'Auvergne,  qui  quelques   années  ;iprès  lut 
suspendu  de  sa  digniié  par  le  conseil  do  l'or- 
dre, qui  nomma  pour  son  lieutenant  Maurice 
de  l'Escu, surnommé l^ouiégas.  Celui-ci  mou- 
rut l'an  1581,  et  après  sa  uiort  le  grand  maî- 
tre de  la  Cassière  l'ut  réiabli  par  le  pape  Gré- 
goire XIll.  Le  gouvernement  d'Alof  deVign  i- 
court,  de  la  langue  de  France,  qui  l'ut  élu  l'au 
1601,  fui   heureux  en  ce  que,   pendant   plus 
de  vingt  ans  qu'il  tint  la  digniié  magistrale, 
les  Turrs  n'eurent  pas   le  moindte  avantage 
sur  les  Clievaliers  de  Malte,  el  que  ceux-ci  au 
contraire  prirent  les  l'orleresses  de  Lépanle, 
de    Lango ,   de   Châteauroux    en    (îrèce,    et 
quel(|ues  autres  qui  furent  saccagées  et  pil- 
lées, el  où   ils  Crent  un   grand  nombre  d'es- 
claves. Les  insultes  continuelles  que  ces  Che- 
valiers faisaient  aux   infulèlcs    ponèient  le 
Grand-Seigneur  à  entreprendre    (  ncore   la 
conquéle  de  Alalte.  H  lit  équiper  une  armée 
navale  de   quatre-vingt-dix    voiles,   el  l'en- 
voya secrètement  à  Malle,  où  cile  aborda  l.i 
nuit   proche  de  Mar»a  Sirocco.  Dans  ce  dan- 
ger, que   la  surprise  augmenlail,   le  grand 
maitre   do  Vignacourt  ayant  donné   ses  or- 
dres avec  une  présence  d'esprit  et  une  a  li - 
vite  merveilleuse,  tout  se  trouva  bienlôi  en 
étal  de  défense,  el  apiès  diverses  escarmou- 
ches, les  infidèles  furent  repousses  et  obligés 
de  se  rembarquer.  L'an  lOOG,  <  e  grand  maî- 
tre envoya  à  la  faculté  de  théologie  à  Paris  la 
relique  du  pied  gauche  de  sainte  Euphémie, 
vierge  et  martyre,  dont  le  corps  fut  apporté 
de  Glialcédoine  à  Khodes,  puis  à  Malte  uaiis 
l'église  de  Saint-Jean.  Celle  relique  lui  avi.it 
été  demandée   par  l'universiié  et   par  la  fa- 
culté de  théologie  de  Paris,  qui  a  choisi  celte 
sainte  pour  une  de  ses   pationnes.  La  céré- 
monie se  fil  le  28  décembre,  jour  des  saints 
Innocents,   l'an    1606,  en    présence  de    tous 
les  commandeurs  el  des   Clievaliers  qui    se 
trouvèrent  à  Paris. 

Le  grand  maitre  de  VignaCDiirt  étant  mort 
l'an  1622,  Louis  de  Mendès  Vascoiicellos  lui 
succéda  dans  le  gouvernement  de  l'ordre  , 
qu'il  ne  tint  pas  longtemps,  étant  mort  au 
mois  de  mars  de  l'année  1623.  Antoine  de 
Paulo  pril  sa  place,  et  comme  sous  sou  gou- 
veinement  les  ijievaliers  se  trouvaient  fuit 
incommodés  par  les  vaisseaux  des  'l'urcs  de 
Saiuie-Maure,  qui  croisaient  sans  cesse,  ils 
attaquèrent  celte  place  el  s'en  rendirent  mai- 
Ires.  Mais  ils  ne  la  gardèrent  pas  longtemp'*, 
car  les  corsaires  cie  Barbarie,  qui  étaient 
alliés  de  ceux  de  S.iint-Mauie,  se  liguèrent 
ensemble.  Ils  armèrent  six  galères  el  plu- 
sieurs vaisseaux  el  se  mirent  en  mer  pour 
chercher  lesMallais  ;  et,  les  ayant  rencontrés, 
ils  leur  livrèrent  le  combat,  qui  lut  fort  rude 
et  opiniâtre  :  les  Chevaliers,  ayant  perdu  leur 
amiral  et  deux  vaisseaux,  et  en  ayant  eu 
d'autres  hors  de  combat,  furent  contraints  de 
prendre  la  fuite,  et  furent  quelque  temps 
hors  d'étal  de  rien   entreprendre.  Mais  leur 


MAL  S^8 

armée  navale  s'étant  rétablie,  ils  prirent,  l'an 
1G29,  le  baelia  U^aïm,  qui  fut  fait  esclave,  et 
l'an  1G31  ils  enlevèrent  encore  un  gros  na- 
vire et  firent  d'autres  prises  cunsidérables  du 
vivant  de  ce  grand  maîlre. 

Us  se  rendirent  aussi  redout;ib!es  aux  in- 
fidèles sous  le  gouvorniiiient  du  grand  maî- 
tre Paul  de  Lascaris.  Mais  de  toutes  les  prises 
qu'ils  fivent  sur  eux,  celle  qui  fil  le  plus  de 
bruit  fut  le  vaisseau  (pii  al  ait  à  la  Meciiue 
et  qui  portait  une  sultane  avec  son  lils  (|u'elie 
avait  eu  d'Ibrahiml  ",ciiiper"ur  des  Turcs.  Le 
vaisseau  était  si  liebemenl  chargé,  qu'on  l'es- 
timait  deux  millions,  eties  ricliesses  appar- 
tenaient, selon  le  bruit  commun,  à  un  eunu- 
que qui  avait  été  capi-agi  ou  grand  maître 
du  sérail.  La  sultane  mourut  quelques  jours 
après  son  arrivée  à  Malle,  el  son  lils  y  fut 
élevé  comme  un  des  enfants  du  Grand-Sei- 
gneur. .Mais,  sur  le  bruit  qui  se  lépaiidit  dans 
la  suite  i|uc  cet  enfant  n'était  (jue  le  Dis 
adoptif  de  l'eunuque,  l'on  prétend  que  le 
grand  maitre  persuada  à  ce  jeune  homme, 
qui  avait  renoncé  à  la  religion  de  Maiiomet, 
de  se  faire  religieux.  En  effei,  il  prit  l'habil 
de  l'ordre  de  Saint-Dominique  l'an  1G58,  et 
fut  nommé  le  1'.  Ottoman. 

Mais  qu'il  eût  été  vérilablement  fils  d'Ibra- 
him ou  seulement  Gis  adoptif  de  l'eunuque, 
il  est  certain  que  le  Grand-Seigneur  avait 
aimé  cet  enfanl  avec  beaucoup  de  tendresse. 
Il  résolut  d'abord  de  s'en  venger,  et  jura  la 
ruine  de  Malle.  Il  fit  aussi  paraître  beaucoup 
d'emporiement  contre  le»  Vénitiens,  parce 
que,  sui\anl  le  traité  fait  avec  eux,  ils  de- 
vaient garder  la  mer  el  en  chasser  ses  enne- 
mis, ou  du  moins  remettre  ses  vaisseaux  en 
liberté.  Le  grand  maître  pourvut  à  la  sûreté 
de  celle  île.  Les  Vénitiens  se  tinrent  aussi 
sur  la  défensive;  mais  l'orage  tomba  sur  eux, 
et  l'année  suivante  16'i5,  le  Grand-Seigneur 
commença  la  guerre  de  Candie,  qui  ne  finit 
que  l'an  1669,  lorsque  les  infidèles  se  furent 
rendus  maîtres  de  celle  île.  Les  Clievaliers  de 
Malle  n'abaudonnôrenl  point  les  Vénitiens  el 
leur  donnèrent  secours.  L'ordre  entretint 
même  à  ses  frais  une  compagnie  de  cavale- 
rie dans  la  ville,  el  la  défense  du  bastion  de 
Saint-André  fut  commise  aux  Chevaliers. 

Après  la  pi  ise  de  Candie,  Nicolas  Cotloner, 
qui  était  pour  lors  grand  maîlre,  voyant  qu'il 
y  avait  tout  à  craindre  pour  Malle,  lit  réparer 
et  augmenter  les  ouvrages  des  forteresses, 
afin  qu'elles  fussent  plus  en  élat  de  soutenir 
Uii  assaut.  11  fil  même  construire  un  nouveau 
fort,  (jui  fut  apiiele  de  son  nom  la  Cottonière, 
et  qui  ne  fut  mis  dans  sa  (lei  fection  qu'a- 
près sa  mort  ,  qui  arriva  l'an  1680 ,  et 
Grégoire  Caraita,  ISapolilain,  fui  élu  à  sa 
plac  ■. 

La  ligue  que  firent  ensemble  l'Empereur, 
le  roi  de  Pologne  et  les  \  énitiens  contre  les 
'l'urcs,  qui  avaient  porté  la  guerre  en  Hon- 
grie l'an  1683,  fut  une  nouvelle  occasion  aux 
Clievaliers  iJe  donner  des  preuves  de  leur 
valeur.  L'an  1684.,  les  \'énitieiis  firent  la  con- 
quête (le  Sainte-.Maure  avec  les  secours  diis 
Chevaliers,  et  prirent  ensuite  Prévésa.  L'an- 
née suivante,  ils  aidèrent  à  prendre  Coron  : 


839                                           DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  RELIGIEUX.                                           840 

ils  n'nji.indoniu'ronl  point  les  >('Miilii'ns  pon-  ot  (jui  déprndi'nl  du    prond   innîiro,   sont  le 

il.iiU  loak"  l.i   ^uorri-,  i\ui    {\c.  (inil   quo  l'iii»  Ciozi'  et  ("otiiino,  où  il  y   ,-i   aussi   des   forls 

1(>09  par  \t;  traité  do  paiv  de  Carlos  ilz.  cl  dr-  a\  ec  linéiques  hourgs  et  villaj;es. 

puis  ee   tonips-là  les    (".hcvaliers  n'ont  point  l.e  ;;ouveriieineiit  e>l  inonarcliiqiie  el  aris- 

distontinué   de   faire    des   courses    sur    mer  toeralique  ;  car,  pour  re  qui  regarde  la  nio- 

pour  donner  la  citasse    aux   corsaires   inli-  narcliie.  le  i;raiid    m  lîtrn    rsl  souverain   s^jr 

ilèlcs.  le  [ipuple  dans   I  île  de    Malte  el   ses  dépen- 

La   profession   des   armes  n'a    point   eni-  dancs  :  il  fait  liailre  monnaie,  il  accorde  des 

pè(  lié    CCS    Chev.ilieis    d'cxener  riiiisfiita-  grâces  et  des  rémissions  aux  criminels,  et  il 

lité   suivant    leur  première   institution.   \  ers  donne   les   provisions    des    grands    piieurés, 

l'an   lilS,   André,  roi  de  Hongrie,   leur   eu  des  bailliages  el  d>s  comniai;dcrics.  Tous  les 

donna  un  té:iioignago  avant.igeux  dans  <ino  Chevaliers  de  l'ordre,  iiuchiue  autorité  qu'ils 

.  donation  qu'il  lit  à  leur  prolit.  Il  dit  qu'étant  aieiiî,  lui  doivenl  obéir  en   tout  ce  qui  n'esl 

logé   cliez  eux  à    Acre,  il  avait  vu   nourrir  ijoint  <-onlraire  à  la  régie  et  aux  statuts  de  la 

chaque  jour  une   niulli;ude  innombrahle  de  religion.    (JuanI   à    l'arislocralie,  c'est  dans 

pauvres,  les   malades   couches  dans  dos  li  s  les   affaires   imporlanles    qui    regardent    les 

et  Irailcs  avec  soin,  les  morls  enterrés  avec  Chevaliers  et  la  religion,  que  le  grand  mailre 

la  décence  convenable,   en   un  mot,  que  les  et  le  conseil  exercent  ensemble  une  autorité 

Chevaliers  étaient  occupés,  tantôt  .i  la   cou-  absolue,   el  le  grand   maître  y   a   seulement 

templation   comme   M. n  ic,  tantôt   à   l'action  deux  voix   pour    sa  prééminence.  Le  conseil 

comme  .Marthe,  et  surtout  à  combaltrc  cou-  est  ordinaire   ou  complet.    Au  conseil  ordi- 

tre  les  ennemis  de  la  croix.  Ce  prince  donna  n/iire  assisienl  le  grand  maître,  comme  chef, 

à  l'ordre  cinq  ceiils  marcs  d'argent  à  preii-  et    les    gr.nids-croix,    qui   sont    i'évéque   de 

dic  tons  les  ans  sur  ses  saline*  do  Saloch  eu  Malle,  le  prieur  de  l'église,  les  baillis  con- 

llongrie.  l'Itanl  encore  loiié  chez  ces  Cheva-  ventnels,   les  grands   prieurs    cl    les  baillis 

licrs  en   jiassant   àMargai,   il   donna    aussi  capilulaires.  Le  conseil  complet  est  composé 

cent  marcs  d'argent  à  l'erdre  à  prendre  sur  de  grands-croix    el  des    deux    plus  anciens 

les  salines  de  Zolaslha,  tous  les  ans,  pour  la  Chevaliers  de  chaque  langue, 

défense  de  la  forteresse  de  .Mar^'al  ;  cent  an-  Les    langues   sont   les   dilforeulcs   râlions 

lies  marcs  d'argenl  pour  la  <léfense  de  celle  dont  l'ordre  est  composé.  Il  y  en  a  huit,  qui 

de  Ciac,   el  lit  aussi  plusieurs   antres  don  -  sont  :  Provence,   Auvergne,    France,    llaLe, 

lions  à   l'ordre,  qui  furent  conliriiiees  par  le  Aragon,   Allemagne,   Casii.lc  cl  .\iii;le:crre. 

]iape  llonorius  lil.  lùiliii  il  voulut  être  asso-  Ces  huit  langues  ont  leurs  chefs  à  M.ille,  que 

cié  à  l'ordre,   cl  il  en  portait  publiiiucmcnl  l'in   nomme  piliers  el    baillis    convcutueN. 

la  croix.  Le  chef  ou   pilier  do  la   langue   de  Provence 

C'est   toujours  un   Chevalier  giand-croix  à  cause  que  Uaynion  I  du   l'uy,  qui  a  dresse 

qui  est   grand   hospiialier.  el  il  y  a  d'autres  les  règlements  de  l'ordre,  était   Pro\enç,il,  a 

Chevaliers  prud'hommes  pour  Voir  si  les  ma-  la  charge  de   grand    commandeur;    le  pilier 

lades  sont  bien  soignés,   ijui   font  distribuer  de  la  langue  d'Auvergne  esl  grand  marcclial  ; 

les   médiramenls,   qui   .irrélcnl  les  comptes  celui  de    Franco   est   grand    hospitalier.  Le 

de  l'inlirmier  tous  les  mois  ;  el,  afin  d'éviter  chef  de  la  langue  il'llalie  est  grand  amiral  ; 

la  confusion   el  que  les   Chevaliers  n'allas-  la  langue  d'Aragon  a  pour  pilier  le  grand 

sent  pas  tous  ensemble  pour  servir  les  ma-  conservateur  qu'on  uommail  autrefois  dra- 

lades,   le  chapitre  général  de   l'an  1()31  or-  pier  ;    celle   d'Allemagne   a    [loiir    pilier    lo 

donna  que  chaque  langue   tour  à  tour,   par  grand  bailli;  celle  de  C>astiile  le  grand  chan- 

Eemaine,   enverrait  à  1  infirmerio  autant  de  celier;    et  la   langue   d'.Xnglelerre  ,   qui   ne 

(Chevaliers,  de  servants  d'armes    el  de  novi-  subsiste  plus  à   cause   de  I  liéré>ie  dont   ce 

ces  qu'il  en  faudrait  pour  le  service  des  ma-  ro\  aumc  a  élé  infecté,  avait  |iour  chef  le  lur- 

lades,  el  «[ue   tous  les  jours,   matin    el  soir,  copulier  ou  général  d'infanlerie. 

il  ne  pourrait  pas  y  en  avo.r  moins  de   sept.  i).ins    chaque    langue,    il    y    a    plusieurs 

l.e  grand  hospiialier  et  les  |irud'hommes  oui  grands  prieures    et    b.iilliages    capitu'aires, 

aussi  le  soin  des  cnfanls  exposés,  qui  sont  savoir  :  dans    l;i    !an,Mie   de   Provenee  ,    les 

nourris   el  élevés  aux   dépens  du   commun  prieurés   de  Saint-Cilb>s   de   Toulouse  el   le 

trésor,  jusiiu'à   l'âge  de  huit  ans.  baill.age   capitulairo  de  .Manosiiue  ;  dans  la 

.  ,,    ^,   ,  .    ,,      ,      j    cr   ■   ,    i         I    r-  langue  d'Auvergne,  les  prii'urés  d'Auvergne 

§  11.  Elat  de  l  ordre  deSa,nt-Jean  de  Jernsa-  ,.,  ,^  ,,.„„,    ,^,  capilulai.e   de   Lurol.   appela 

km  ou  de  Malte  mi  dernur  surle,  et  la  ma-  ,|.,„^  ,,.,  ^„,j^  ,,^  ,'       ,    ^.,  ^.„,i„  j^  ,j'^,^,4^^,, 

mcre  de  recevoir  les  Cliaulurs.  ,,^,„^  ,.,  ,.,„j^,„^  J  j..^^,,,.^  ^   ,^,^   l,^i,.^,,..^   j,, 

L'ordre  de  M.ilte  ne  pos^èile  pins  présen-  France,  d'.\quilainc  el  de  Chamj)agnc,  aveu 

lemenl  en   tonte    souveraineté  ((ue   lîle   de  le  bailliage  capituiairc  de  la  .Moreo  el  la  Iré- 

Alalle  el  (|uel(|ues  autres  petites  ans   envi-  sorcrie  générale,    aux(|uels   sont   annexés  , 

rons.  File  a  v.ngi  milles  de  longueur  el  douze  savoir,  au  bailliage  de   la  Morée,   la  com- 

de  largeur.  Il  y    a  deux  villes  eonsiileraliles,  manderic  de    Saint-Jean   de  Lalran  à  Paris, 

qui  sont  l,i  \  ieille-\  ille  ou  t,'irWa  Vccchin,  el  el,  à  la  grande  trésorerie,   la  commanderie 

celle  qui  porle  le  nom   de  la  N'.ilelle,  ()ni  esl  de  S.iiiil-.lefln   en   l'île   île  Corlicil  ;  dans  lu 

présenlcmeiil  la   capitale,  el  l'une  des  plus  langue  d'Halie,   les  prieurés   île  Home,    dn 

fortes  places  de  l'univers,  avec  environ   cin-  l.oiiibardie,  de  Venise,  de  Pise,  de  liarlelle, 

quante  bourgs  ou  vill.iges.  Les  plus  cous  dé-  de  Messine   et  de  Capoue,  cl   les    bailli.iges 

rallies  des  autres  i.cs  aux  environs  de  .Malle,  capilulaires  d^  Sainte-liuphémie  el  de  Saint- 


m 


MAL 


Rticnnc  près  de  Monopoli,  de  la  Sainte-Tri- 
allé  de  \  enosa  el  de  Saint-Jean  de  Naples  ; 
dans  la  langue  d'Aragon  ,  qui  comprend 
aussi  la  Catalo^tnc  et  la  Navarre,  la  Châlel- 
lenie  d'Emposte,  les  prieurés  de  Catalogne 
et  de  Navarre,  el  les  bailliages  capitulaires 
de  Majorque  et  de  Caspe  ;  dans  la  langue 
d'Alemagne,  les  prieurés  d'Allemagne,  de 
Bohême,  de  Hongrie,  et  il  y  avait  aussi  celui 
de  Danemark  et  le  bailliage  capiiulaire  de 
Brandebourg,  avant  que  l'hérésie  eût  été 
introduite  dans  ces  provinces  ;  dans  la  lan- 
gue de  Gastille,  qui  comprend  aussi  Léon 
et  Poriugal,  les  prieurés  de  Gastille  et  de 
Léon,  el  celui  de  Poriugal  avec  les  bail- 
liages capitulaires  de  Langu  ou  de  Leza  el  de 
las  Nueves-Villas;  et  dans  la  langue  d'An- 
gleierre  lors(iu'elle  subsistait,  il  y  avait  les 
prieurés  d'Angleterre  et  d'Hibernie,  et  le 
baillia,'e  cai  itulaire  d'Aquila.  Quant  au 
prieuré  de  l'église  de  l'ordre  et  à  la  com- 
manderie  de  Chypre,  tous  deux  bailliages 
capitulaires,  ils  sunt  communs  à  toutes  les 
langues,  et  le  bailliage  de  Nigrcpont  est 
commun  aux  deux  langues  d'Aiagon  et  do 
Castille. 

L'hôiel  de  chaque  langue  est  appelé  au- 
berge, à  cause  que  les  Chevaliers  qui  dépen- 
dent de  ces  langues  y  vont  manger  cl  s'y 
assemblent  d'ordinaire.  Plusieurs  chapitres 
généraux  ont  fait  des  règlements  qui  con- 
cernent la  manière  dont  les  Chevaliers  se 
doivent  co  nporter  dans  ces  auberges,  et  qui 
font  connaître  combien  est  grande  l'obser- 
vance régulière  qui  se  pratique  à  Malte.  Les 
ordonnances  du  chapitre  général  tenu  sous 
le  grand  maître  Antoine  de  Paulo,  Toulou- 
sain, l'an  16il,  portent  que  les  piliers  don- 
neront tous  les  jours  à  chaque  Chevalier  un 
rotolo,  c'est-à-dire  environ  trenle-six  onces 
de  boeuf,  mouton  et  veau,  qui  doil  être  fourni 
par  le  trésor  coaimun,  et  lorsque  l'on  donne 
du  porc  frais  ou  du  salé,  les  deux  tiers  liu 
rotolo;  les  jours  maigres,  du  poisson,  et,  au 
défaut  de  poisson,  (|ualre  œufs  pour  p- 
tance  ;  chaque  jour  six  petits  pains  el  un 
qunrtuccio  de  vin  sans  eau,  c'est-à-dire  la 
valeur  de  trois  thopines.  Et,  afin  qu'on  ne 
fasse  point  de  degàl  et  de  consommation 
inutile,  il  est  détendu  aux  Chevaliers  de  me- 
ner des  chiens  à  l'auberge,  el  si  les  maîtres 
auxquels  ils  appartiennent  voulaient  empê- 
cher qu'on  ne  les  chassât,  ils  seraient  punis  de 
la  septuine,  qui  leur  serait  aussi  imposée,  si 
les  jours  qu'ils  mangent  à  l'auberge  ils  em- 
portaient du  pain,  du  vin  et  autres  choses  à 
nianyer. 

Tro:s  fois  la  semaine,  et  non  davantage, 
encore  faut-il  qu'il  y  ait  de  justes  raisons, 
les  piliers  doivent  fournir  la  pitance  aux 
Chevaliers  hors  de  l'auberge,  lorsqu'ils  la 
demandent  ;  mais  ceux  qui  l'envoient  cher- 
cher ne  doivent  pas  avoir  déjeuné  ce  jour- là 
à  l'auberge,  autrement  la  pitance  leur  peut 
être  refusée,  el  lorsque  le  maître  de  la  salle 
a  mangé,  on  ne  peut  plus  la  demander.  Le 
pilier  doil  donner  à  déjeuner  tous  les  malins 


MAL  842 

entre  les  deux  messes.  Si  les  Chevaliers  ne 
sont  pas  contents  de  la  pitance,  ils  ne  doi- 
vent pas  faire  leurs  plaintes  au  maître  de  la 
salle,  ni  au  cuisinier,  ni  au  dépensier,  mais 
seulement  au  pilier;  el,  si  les  plaintes  sont 
injustes,  ils  sont  punis  de  la  seplaine.  Si  nu 
Chevalier  a  frappé  un  serviteur  du  pilier 
sans  effusion  de  sang,  il  est  condamné  pour 
la  première  fois  à  la  quarantaine,  la  seconda 
à  six  mois  de  prison  dans  la  tour,  et  la  troi- 
isième  à  perdre  deux  ans  d'ancienneté;  et, 
s'il  y  a  du  sang  de  répandu,  il  est  puni  plus 
rigoureusement.  Enfin,  lorsque  le  pilier  fuit 
(|uelques  plaintes  de  quelque  Chevalier,  il 
est  cru  sur  sa  parole,  sans  que  l'on  fasse  des 
informations,  et  le  conseil  procéJe  contre  le 
Chevalier  qui  est  accusé.  La  peine  de  la 
seplaine  consiste  en  ce  que  celui  qui  est  con- 
damné doil  jeûner  sept  jours  de  suite  ,  et,  la 
quatrième  et  la  sixième  férié,  manger  seule- 
ment du  pain  et  boire  de  l'eau,  se  soumet- 
tant  ces  jours-là  à  la  discipline,  c'est-à-dire 
à  recevoir  des  coups  de  houssine  de  la  main 
d'un  prêtre  de  l'ordre  pendant  le  psaume 
Deus  misereatur  nnsiri,  etc.  La  peine  de  la 
quarantaine  est  de  jeûner  quarante  jours  de 
suite,  el  la  quatrième  et  la  sixième  Icrie ,  .uj 
pain  et  à  l'eau  ;  ils  reçoivent  ces  deux  joui  s- 
là  la  discipline  pendant  le  psaume  Miserere, 
mei,  Deus,  cl  pendant  ces  quarante  jours  ils 
ne  doivent  point  porter  d'épée  ni  sortir  que 
pour  aller  à  l'Eglise. 

'Chaque  grand  prieuré  a  un  nombre  de 
commanderies,  dont  les  unes  sont  destinées 
aux  chevaliers  de  justice,  et  les  autres  indif- 
féremment aux  chapelains  et  aux  servants 
d'armes.  Voici  ce  qu'un  savant  homme  (I) 
a  écrit  depuis  peu  louchant  l'origine  dis 
commanderies  de  cet  ordre.  L'origine  des 
commanderies,  dit-il,  vient  de  ce  qu'ancienne- 
ment les  biens  de  l'ordre  étaient  en  commun, 
et  que  pour  les  faire  valoir  on  commeitait  des 
séculiers  qui  en  étaient,  ou  les  fermiers  ou  les 
receveurs,  et  qui  en  rendaient  compte.  Mais 
le  grand  éloignement  faisant  qu'on  était  sou- 
vent trompé  et  que  les  comptes  étaient  peu 
fidèles,  on  donna  l'administration  de  tous  ces 
revenus  aux  grands  prieurs  à  chacun  dans 
son  département.  Ceux-ci  ne  s'en  acquittèrent 
pas  mieux  :  de  sorte  que,  quoique  les  revenus 
de  l'ordre  fussent  Irès-considérahles,  à  peine 
trouvait-on  de  quoi  soutenir  la  dépense  qu'on 
était  obligé  de  faire.  On  eut  donc  recours  â 
un  autre  expédient,  qui  fut  de  commettre  rt 
députer  un  frère  pour  régir  et  administrer 
chaque  commanderie  pour  autant  de  temps 
fia  on  le  jugerait  à  propos,  à  condition  que 
tous  tes  ans  il  payerait  entre  les  muins  d'un 
receveur  de  l'ordre  établi  pour  cela  une  cer- 
taine somme  proportionnée  au  revenu  de  la 
commanderie.  Cette  imposition  fut  nommée 
Itesponsion;  c'est  ce  qui  a  été  pratiqué  jusqu'à 
présent. 

Au  reste,  on  n'envoyait  pas  ces  Chevaliers 
seuls.  On  leur  donnait  pour  aides  quelques 
autres  Ck'valiers,  et  tous  ensemble  avec  quel- 
que prêtre  de  l'ordre  qu'ils  avaient  ordinaire- 


(1)  Inslruciidiis  sur  lis  devoirs   des  Clievalicis  de  Malte,  cli:ip.  4,  p.  65. 

UiCTIONNÀinE   DES  OrDBF.S  liEIIGiKUX.  11. 


27 


M5  DICTlONNAinE  DF.S  ORORF-S  lU.IJGlKl'X.  SJ4 

ment  avec  eux,  formaient    u7ic   comv.unnvtc'.  lii  c  qu.'ind  on  1rs  possi'.lo  par  droit  d'-Tncieii- 
Cetiii  qui  et  it  à  la  l^ie  fui  nomm<<  comman-  iiilc  i.u   par  ;itii(''.iori.sveiiiciiI.    l/aiicionnolé 
deur,  et  In  maison  où  éUut  assemblée  la  com-  se  coinpic  du  Icmps  de  la  réception  ;  mais  il 
viunaulé Commanderiez  nom  qui  signifie  moins  faut  qu    celui  (jui  |ir(''li'iiil  ;i  une  commanderic 
tin  commandetiienl  qu'une  adminisiralion,  et  ail  f.iil  cini|  annéi's  de  résidence  à   Malle,  (  l 
;)iii<r  oiiisi   dire  une  comnuinde.   On  tuulat  qiialre  caravanes  ou  voyage-;  sur  mer  ;  et  l'a- 
faire  comprendre  aux  Chevaliers  par  ce  nom  inéliorissemenl     est    Uirsuu'apri^s   .ivoir  fait 
même  qu'ils  n'étaient  que  les  économes  et  les  des  réparations  dans   une  c  Miinandcric  dont 
administrateurs  de  celle  portion  des  biens  de  l'on  jouit,  on  en  prend    une  audt'   d'un  plus 
l'ordre,  qui  ne  liur  était  confiée  que  pour  au-  praml  revenu.  Karonen  ou  caravanna  est  un 
tint  de  trmpK  qu'on  le  juijerail  à  propos,  et  mol  arabe  qui  sinnifR-  une  asseinbléo  d'Iiom- 
sur  laquelle  i's  devaient  prend' e  une  portion  mes  qui  s'unisiint  p 'ur  faire  (iiieli;ue  trafns 
pour  être  envoyée  atinuellemenl  au  receveur,  ou  quelque    voya(;o(l).  On   se  servait  de  c.,\ 
le  reste  dev  nt  élre  employé  à  nourrir  cl  en-  mot  lorsque  les  Chevaliers  do  Sainl-Jcan  de 
Ireten'r  la   con  mniauté  de  chaque  cominan-  Jerosal.  m,  élanl  dans  la  Syrie,  choisissaient 
drrie  et  à  soulajer  les  pauvres  du  lieu.  Ainsi  les  frères  qui   claicnt  dcslinés  |)0Ui  la  {;aidc 
l'ordre  é.'ait  secouru,  tous  IrsChevaliers  étaient  dis  lorlercsses  ou  pour  servir  sur  hs  galères; 
nourris  et  enirelenus  à  ses  dépens,  el  les  pau-  el  l'on  s'est  tnujours  depuis  ce  temps-là  ser- 
rée- éla'ent  ass  stés.  Mais  la  division  s'étant  vi  du  même  mot    pour  marquer  les  voyages 
mise  dans  la  suite  parvii  ces  ('hcinlirrs  qui  que   les   t^hevaiers  de  Malle  font  sur  les  ga- 
vivaicnl  ensemt'le  dans  une  même  comman  !e-  h  res  ou  sur  les  vai>seau\  au  service  de  leur 
ne,  on  fui  obVijé  de  les  sépanr  et  de  laisser  ordre.   Il  f.iul  qu'ils  fassent  ces  quatre  cara- 
le  soin   de  la   coiumanderie  à  un  seul,    en  le  vane-    par  cux-niénies,  et  il  ne  leur  est  pas 
chargeant  de  payer  d  s  pensions  <]  qurl/ues-  permis   de  les  faire   laire  par  d'à   Ires.  Mais, 
uns  de  .-es  confrères,  nu  lieu  qu'il  les  enlrete-  i|uoiqu'ils  soi.  ntobii^és  à  cinq  années  de  ré- 
nuit  el  nourrissait  intpiravant,  et  c'est  de  là  sidence  el  à  qualrc  caravanes,    néanmoins, 
aussi  qu'est  venue  ioritjinc  des  pensions  que  s'ils  oui  été   ci  ployés   au   service  du   grand 
plus  eurs  Cheialiers  possèdent  sur  des  com-  maître  ou  de   la   rel  gi.m,    ils  ont  (juelques 
inunderies  i  u  sur  d'autres  biens  de  l'ordre.  exemptions,  cl  on  leur  com,  te  pour  uncca- 
Lcs  commanderics   sont  appelées  magis-  ravan:  deux  années  complètes  de  service  en 
Iraies,  de  jnslicc  ou  de  grâce.  Les  masiislrales  personne.    Les  Chrva  iers    qui  sont  esclaves 
sont  celles  qui  sont  annexées  à  la  dignité  de  des  Turcs  ont  aus  i    des   cxempiions,  el  ou 
firand  maître,  iifin  que  celui  (jui  en  est  revéïu  leur  com[ite  ur.c  caravane  pour  chaque  an- 
la  pu  sso  soutenir  avec  plus  d'éclat.  Il  y  en  née  de  caplivilé,    ainsi  qu'il  est  ordonné  par 
a  une  dans  chaque  grand  prieuré,  savoir  :  les  ordonnauLcs   du  chapitre  général  de  l'an 
au  prieure  de  Sainl-Gil  es  la  commanderie  lti3l,   qui    prescrivent  aus>i  l'âge   de   vingt 
ilcl'czénas,  au  prieuré  de    Toulouse  la  com-  aii>  pour  commencer  les  caravanes,  excluaiil 
uiauderie  de  Tuy-Soubran,  au  [  rieuré  d'Au-  de  tous  emplois,  bénéOccs  et    commanderics 
vergnc  la  commanderie  de  S.iliis,  au  prieuré  de  l'onlre  ceux  qui,  ayant  alleint  l'âge  de  £0 
de  France  la  commandeiie  de  Uainaul  ,  au  ans,  n'auiaicnt  pas  fait  les  quatre  caravanes 
prieuréd'Aquitainelacommandcriedu  teiiqile  qui  ne  sont  (|uedesix  inois  chacune, 
delà  Hochelle,  au  prieuré  de  Champagne  la  l-cs  comaiandcnes   de  grâci-    ont   ce  nom 
commanderi.:  de  .Meiz,  au   prieuié  de  Lom-  qu.inJ  elles  sont  données  parle  grand  mai- 
haidio  la  command  rie  d'Inverno, au  prieuré  Ire  ou    par  le-  grands  prieurs   par  un  droit 
de  Uome  la  cumm  inderie  de   Mugnano,  au  qui  app  iriient  à  leurs  dignités,  et  ils  en  don- 
prieuré  de  Venise  la   commanderie  de  Trè-  nent  une  de  cinq  ans   en    cinq    ans.  On  ne 
cuzo,  au  prieuré  de  Fisc  la  commanderie  de  [irend   point  garde    si    la    comm. inderie  va- 
l'ralo,  au  prieuré  de  Gapoue  la  commanderie  canlt  esl  de  celles  (',ui  sont  alTe-lées  aux  Chi*- 
dc  Sieiaiio,  au   pri  uré  de  Harleltc  la  com-  va  iers  ou    de  celles   qui  appaniennent  aux 
luaiidcrie  de  Uriadizi,  au  prieuré  de  Messine  chapelains    ou   servants  d'armes.   Le  grand 
la  commanderie  de   l'ole//i,   au   [.rieuré  do  maître  ou  le  grand    prieur  la  peul  donner  à 
Catalogne  la  commanderie  de  Masdeii,   au  lel  frère  (lu'i!  lui  plail.  de  (|uelque  rang  qu'il 
prieure  de  Navarre  la  commanderic  de  Cal  -  soil,  cela   étant    in  ilïerent,  loixjuc  la   pro- 
c.  clas,  en  la  châtcllcnie  d'KmposIe  la  com-  motion  esl  d  •  grâce. 

inan  lerie  d'Aliaga,   au    prieuré  de   Casiillc         Ouoiqu'à  proprement  parler  il  n'y  ait  que 

les  (  onimanderies    d'Olmos  el  de   \'iso,  au  ceux  qui  sont  lai()ues  el  nobles  d'i'xtraclion 

prieuré  de  Torlngal  la  commanderie  de  \  il-  qui  puissent   porter  la  qualité  de  Chevalier, 

lacova,  au  prieuré  d'Allemagne  la  comman-  parce   qu'il  n'y  a   (lu'eux   à    (|ui    ou    donna 

tlerie  de  Huez,  au  prieuré  de  liohôme  la  com-  l'ordre  de  (  hevalerie,  si  ce  n'est  par  quelqu»; 

n)anderie  de  Wadislau,  et  autrefois  au  pr  curé  grâce   particulière,   néanmoins,  comme  sous 

d'Angleterre  la  commanderic  de  l'esrcns,  au  le  nom  de  C.hevaliers  de  Malle  on  entend  or- 

pricuré  d'ilibernic  les  commanderics  de  Kel-  dinairemenl   tous    eux   qui   composent  cet 

bary,  de  Killi  rye  el  de  Crolie,  et  la  comman-  ordre,   on   peut  dire  qu'il   y  en  a  de  quatre 

dcne  de  S.nica  au  royaume  de  Chypre.  sortes.  Les  premiers  sont  ceux  (ju'on  non)me 

Les  commanderies  du   justice  ou  de  grâce  les  Chevaliers  de  justice  ;  ils  sont  obligés  du 

sont   ainsi   appelées   selon  la  manière  de  les  faire  preuve  de  noblesse,  el  il  n'y  a  que  ceu\- 

oblcnir.  On  les  nomme  commanderics  de  jus-  là  qui  (icuvcnl  p  irvcnir  aux  di;;nilés  de  bail- 
li, liisliuaidns  ilih  Clicvalici.'-  de  Miillc,  p-i^'-  ^0  '• 


845 


MAL 


MAL 


rk; 


lis,  grands  prieurs  et  grands  naîlrcs.  Los 
seconds  sonl  les  Chevaliers  de  grâce,  qui, 
n'étant  pas  nobles  d'extraction,  ont  mérité 
par  quelque  action  de  valeur  ou  par  quelque 
service  considérable  rendu  à  l'ordre,  d'être 
mis  au  rang  des  nobles  et  de  jouir  des  mêmes 
honneurs.  Les  troisièmes  sonl  les  frères  ser- 
vants; il  y  en  a  de  deux  sortes,  les  frères  ser- 
vants d'armes  qui  sont  employés  dans  les 
mêmes  fonctions  que  les  Chevaliers,  tant  à 
la  guerre  qu'au  service  de  l'hôpital,  et  les 
frères  servants  d'église,  dont  toute  l'occupa- 
tion est  de  chanter  les  louani^cs  de  Dieu  dans 
l'église  conventuelle  et  d'aller  chacun  à  son 
tour  servir  d'aumôniers  sur  les  vaisseaux  ou 
sur  les  galères  de  fa  religion.  Les  quatrièmes 
enfin,  qui  sont  nommés  frères  d'obédience, 
sonl  les  prêtres  qui,  sans  être  obligés  d'aller 
jamais  à  Malte,  prennent  l'habit  de  l'ordre, 
en  font  les  vœux,  et  s'attachent  au  service 
de  quelques-unes  des  églises  de  l'ordre  sous 
l'autorité  de  quel(|ue  grand  prieur  ou  de  quel- 
(|ue  commandeur,  auquel  ils  demeurent  sou- 
mis; et  ils  jouissent  de  plusieurs  privilèges 
qui  leur  ont  été  accordés.  11  y  a  aussi  des 
donnés  ou  demi-croix  qui  ne  peuvent  por- 
ter la  croix  d'or  sans  une  permission  es- 
presse;  et,  quand  on  leur  accorde  cette  per- 
mission, ce  ne  doit  être  qu'une  demi-croix 
d'or  à  trois  branihcs;  mais  ils  peuvent  por- 
ter une  demi-croix  de  toile  blanche  cousue 
sur  leurs  habits,  laquelle  ne  doit  pas  passer 
les  deux  tiers  d'un  palme  de  Sicile. 

Personne  ne  dnil  être  présenté  pour  être 
reçu  dans  col  ordre  ni  demander  des  commis- 
saires pour  l'aire  ses  preuves,  qu'il  n'ait  au 
moins  seize  ans  accomplis,  à  l'exccpiion  des 
pages  (iu  grand  maître,  qui  peuvent  être  re- 
çus depuis  douze  ans  jusqu'à  quinze,  et  à 
l'exceplion  iiussi  des  ecclésiastiques,  qui 
peuvent  être  reçus  depuis  dix  ans  jusqu'à 
seize.  Cependant  l'usage  d'ob'enir  des  dis- 
penses du  pape  pour  faire  recevoir  des  en- 
finis  depuis  qu'ils  sont  nés  jusqu'à  dix  ou 
douze  ans,  est  devenu  commun,  et  l'ancien- 
neté de  ces  enfants  commence  du  jour  au- 
quel le  grand-maître  a  reçu  et  approuvé 
celte  dispense,  pourvu  qu'on  paye  ponctuel- 
lement dans  l'année  ce  qu'on  appelle  droit 
de  passage.  Cet  usage  de  recevoir  des  Che- 
valiers de  minorité  est  récent.  Ce  qui  y  donna 
lieu,  c'est  que  dans  le  chapitre  général  t  nu 
ranlt)3l,on  résolut  d'exécuter  ce  que  le 
conseil  avait  ordonné  par  un  décret  du  7 
janvier  1C29,  qui  était  de  faiie  un  collacldo 
ou  cloître  pour  y  mettre  un  noviciat  i)our 
les  Chevaliers  et  servants  d'armes  ,  et  un  sé- 
minaire pour  les  ecclésiastiques;  et,  comme 
il  fallait  un  funds  de  cont  mille  écus  pour 
l'exécution  de  ce  dessein,  le  Trésor  ne  se 
trouva  pas  pour  lors  en  état  de  faire  ce  fonds 
à  cause  des  grandes  dépenses  qui  l'avaient 
épuisé.  C'tsl  pourquoi  on  résolut  pour  y 
[lourvoir  d'accorder  cent  dispenses  pour  re- 
cevoir dans  l'ordre  cent  enfants  en  minorité 
(|ui  donneraient  chacun  mille  écus  pour 
être  admis.  Les  cent  dispenses  furent  liienlôt 
remplies.  Le  Collachio  pour  le  noviciat  et 
pour  le  séminaire  ne  se  lit  pas  néanmoins  : 


on  crut  alors  devoir  employer  la  somme  à 
d'autres  besoins  ;  et.  comme  il  n'y  a  point  eu 
de  chapitre  général  pour  accorder  de  ])areil  - 
les  dispenses,  on  a  eu  recours  au  pape  pour 
les  obtenir  par  son  iintorité  :  ainsi  l'usage 
(le  ces  dispenses  s'est  insensiblement  intro- 
duit, et  est  devenu  très-commun.  D'abord  il 
fallait  avoir  au  moins  huit  ans,  ensuite  six  , 
cl  la  coutume  est  présentement  que  l'on  peut 
êlre  reçu  m  quelque  bas  âge  que  ce  puisse 
être.  Les  derniers  règlements  faits  à  Malte 
sur  le  droit  de  passage  de  ceux  qui  sonl  ainsi 
reçus,  portent  qu'ils  doivent  payer  trois  cent 
trente  p  sloles  el  un  tiers  au  prix  courant 
des  pistoles  d'Esp.igne,  sans  y  comprendre 
quelques  autres  menus  droits.  L'origine  el 
le  nom  du  droit  de  passage  viennent  du  droit 
que  payaient  autrefois  aux  c  ipitaines  des  ga- 
lères ou  des  vaisseaux  de  la  religion  ceux 
qui  se  mettaient  dessus  pour  pisserà  la  terre 
sainte,  et  dans  la  suite  des  temps  à  l'île  du 
Riiodes  pour  y  êtie  reçus  Chevaliers.  Us 
payaient  une  somme  pour  leur  nourriture 
cl  entretien  pendant  le  voyage,  cl  cela  s'ap- 
pelait droit  de  passa(je.  Ce  droit  a  continué 
de  se  payer  jusqu'à  présent  à  l'Ordre  ;  il  a 
tuujouis  retenu  l'ancien  nom,  et  est  confir- 
mé par  des  statuts.  Quoique  ce  droit  de  pas- 
s.igc  doive  être  payé  dans  l'année,  néan- 
moins le  grand  maître  peut  accorder  deux 
ans  au  lieu  d'un  pour  payer  ce  droit ,  mais  il 
ne  peut  pas  accorder  un  terme  plus  long. 
Une  des  conditions  de  la  grâce  de  minorité 
est  que  dès  le  moment  que  le  droit  de  passa- 
ge est  payé,  cet  argent  est  entièrement  ac- 
quis à  l'ordre,  sans  que  sous  quelque  pré- 
texte que  ce  soit  on  puisse  jamais  en  pré- 
tendre la  reslitulion. 

L'on  ne  peut  être  reçu  page  du  grand 
maître  que  depuis  douze  ans  jusqu'à  quinze, 
cl  on  n'y  peut  demeurer  que  trois  ans  au 
plus,  et  souvent  moins,  suivant  l'âge  qu'on 
a  quand  on  y  entre.  Mais  comme  le  granil 
maître  ne  peut  avoir  que  seize  pages,  il  faut 
pour  y  entrer  qu'il  y  ait  une  place  vacante. 
C'est  pourquoi,  avant  qu'on  ail  l'âge  pour  y 
entrer,  on  obtient  du  grand  maître  une  let- 
tre de  pjige,  el  lorsqu'on  a  les  onze  ans  com- 
plets et  qu'il  y  a  une  place  vacante,  le  plus 
ancien.de  ceux  qui  ont  eu  des  lettres  de  pag(i 
est  reçu,  après  avoir  fait  ses  preuves  de  no- 
blesse cl  de  légitimation.  La  différence  qu'il 
y  a  dans  les  formalités  qui  s'observent  dans 
la  réception  de  ceux  qui  sonl  reçus  de  mino. 
rite  cl  de  ceux  qui  sonl  reçus  comme  page< , 
c'est  que  les  premiers  ne  sont  pas  obligés  do 
se  présentera  l'assemblée  de  la  province  ni 
d'aller  à  Malte  qu'à  vingt-cinq  ans,  au  lieu 
que  les  pages  doivent  se  présenier  à  l'assem- 
blée de  la  province  el  aller  à  M.ilte  après 
leur  réception,  el  ne  peuvent  payer  leur  pas- 
sage que  lorsqu'ils  présentent  eux-mêmes 
Icu  s  preuves  à  Malte.  Le  droit  qu'ils  payent 
est  de  deux  cent  cinquante  écus  d'or,  chaque 
écu  d'or  pris  pour  une  denii-pistole,  selon  ce 
qu'elle  vaut,  outre  quel(|ucs  autres  menus 
droits. 

Les  Chevaliers  de  majorité  sont  ceux  qui 
sont  reçus  à  seize  ans  accomplis.  Us  payent 


fi- 


lucTioNNAïuE  nF.s  OHOUES  ur.i.ir.iF.rx. 


le  nu^me  (iiml  que  lt'<  pnjios  du  grnnJ  maî- 
tre, el  ne  sont  pas  olili|iés  de  porlcr  eux-mê- 
mes leurs  preuves  à  Malle.  Autrefois  ils  y 
étaient  olili(;és,  el  sans  cela  leur  ancieniie;é 
ne  courait  point ,  quoique  ces  preuves  eus- 
sent été  reçues  pour  bonnes  au  chapitre  ou 
à  rassemblée  de  la  pri.vinie,  et  qu'ils  eus- 
sent pajc  leur  pass.ige.  .Mais  ,  par  un  décret 
du  conseil  de  1088,  confirmé  par  un  bref  du 
pape  Innocent  XI,  il  a  él6  ordonné  qu'il  suf- 
lîr.iit  à  l'avenir  que  celui  qui  a  présenté  ses 
preuves  au  chapitre  provinci.il  ou  à  l'assem- 
blée les  envoyât  au  couvent  à  1,1  vénérable 
langue  dans  laquelle  il  e^t  né,  el  qu'il  serait 
dispinsé  d'y  venir  en  personne  justju'à  l'âge 
de  vingt  ans,  sans  que  cela  puisse  nuire  à 
B(m  ancienneté  ,  qui  commencera  à  courir 
du  jour  que  ses  preuves  auront  6l6  présen- 
tées en  langue. 

Pour  ce  qui  est  des  frères  servants  d'ar- 
mes, le  chapitre  général  de  l'an  1G31  avait 
seulement  défendu  à  la  langue  d'Italie  d'eu 
recevoir,  comme  il  est  porté  par  l'article 
»inpt-cinquiénie  du  litre  de  la  Ilécrpliondes 
frères.  Depuis  par  un  décret  du  conseil  la 
même  défense  a  été  faite  aux  autres  lan- 
gues, jusqu'à  ce  qu'il  en  eût  éié  auiremenl 
ordonné;  mais  citte  défense  a  été  levée  de- 
puis quelque  Unnps.  Les  chapelains  ne  peu- 
vent être  reçus  ([ue  depuis  dix  ans  jusqu'à 
quinze,  après  quoi  il  faudrait  obtenir  un 
bref  de  Uome;  mais,  jusqu'à  13  ans,  il  suffit 
d'obtenir  du  grand  maître  une  lettre  de  dia- 
cot.  \in  vertu  de  cette  lettre  le  postulant  se 
présente  au  chapitre  provincial  ou  à  l'assem- 
blée; on  lui  donne  d<!s  commissaires  pour 
faire  ses  preuves,  qu'il  doit  porter  lui  niênio 
au  couvent,  après  quoi  on  le  renvoie  pour 
conlinuerses  éludes.  Ils  sont  seulement  obli- 
gés de  faire  voir  qu'i's  sont  nés  de  gens 
iionnéies,  pratiquant  1rs  arts  libéraux,  qu'ils 
n'ont  jamais  exeicé  aucun  art  vil  et  méoni- 
(jue,  ni  servi  personne,  el  (juc  ni  eux  ni 
leurs  pères  el  mères  n'ont  jamais  travaillé  à 
aucune  chose  méprisable;  et  de  plus  qu'eux, 
leurs  pères  el  mères,  leurs  aïeuls  et  aïeules 
paternels  cl  maternels  sont  nés  en  légitime  ma- 
riage. Le  droil  de  passa  ge  des  jeu  ne>diacols  ou 
ecclésiastiques  depuis  dix  ansjusqu'à  quinze 
est  de  cent  écus  d  or.  chaque  ecu  d'or  valant 
une  demi-pislole  d'I'^spagne  en  espèce, "selon 
la  valeur  courant<',  et  autres  menus  droits. 
Les  autres  diacots  ou  ecclésiastiques,  reçus 
par  brefs  dans  un  âge  plus  avancé,  doivent 
payer  douze  cent  cini|uai>le  livres  pour  droit 
de  passage  et  quelqms  autres  droiis,  à  la  lé- 
scrve  néanmoins  de  ceux  (jui  par  leur  capa- 
cité cl  leur  mérite  auraient  elé  honores  du 
bonnet  d  docteur,  les(iuels  p;ir  un  privilège 
]>arliculier  sont  reçus  à  tout  âge  cl  sans 
payer  aucun  droit  de  passage. 

Quoique  la  coutume  dans  l'ordre  soit  de 
faire  les  preuves  de  noblesse  par  l'arbre  de 
consanguinité,  en  remontant  seulement  de- 
puis les  (Chevaliers  jus(|u'à  ses  bisaïeuls  pa- 
lerncls  et  maternels,  neaninoiiis  le  prieuré 
d'Ail  magne  exige  davantage  ;  il  faut  \>  ou- 
vcr  seize  ()uarliers  des  aïeuls.  Ceux  qui  dé- 
pcndenl  de  ce  prieuré  sont   dispensés  d'ail  i' 


3;8 

sulfil    «eule- 


à  Malle  laire  leur  noviciat,  il 
ment  qu'ils  le  fassent  auprès  du  grand  prieur 
d'Allemagne;  el  ceux  du  prieuré  de  liohéme 
ne  sont  obligés  qu'à  six  mois  de  noviciat  à 
Malte,  à  compter  du  jour  qu'ils  y  sonl  arri- 
vés. Les  Chevaliers  du  piieuré  d'Allemagne 
ont  en(  ore  un  autre  privilège,  qui  est  que 
les  deux  tiers  de  l'argenlenc  d'un  comiiKin- 
deur  demeurent  après  sa  mort  au  profit  de 
la  commanderie,  l'autre  liers  seulement  ap- 
partenant à  l'ordre;  en  sorte  que  le  Cheva- 
lier qui  succède  à  la  commanderie  est  obligé 
de  payer  à  l'ordre  la  valeur  de  ceit';  troi- 
sième partie  à  raison  de  huit  florins  p.ir 
marc,  et  de  donner  caution  pour  les  deux 
autres  liers.  Quoique  les  (Chevaliers  des  au- 
tres prieurés  de  l'ordre  ne  fassent  pas  difli- 
cullé  d'admettre  les  enfants  naturels  dis 
rois  el  des  princes  souverains,  néanmoins  le 
prieuré  d'Allemagne  n'en  reçoit  point,  do 
quelque  naissance  distinguée  que  soil  le 
présenté;  il  faut  absolument  qu'il  soit  né  de 
légitime  mariage. 

La  profession  se  faisait  autrefois  d.ins  cet 
ordre  aussitôt  qu'on  avait  fini  l'année  de  no- 
viciat, comme  on  le  fait  dans  tous  les  autres 
ordres  religieux  ;  mais  cette  coutume  u'esl 
plus  en  usage,  et  il  n'y  a  que  ceux  qui  sonl 
reçus  en  minorité  qui  aient  un  temps  fixé 
pour  leur  profession.  Us  doivent  se  rendre 
au  couvent  dans  la  vingt-cinquième  an- 
née pour  faire  leur  année  de  noviciat  , 
et  ensuite  leur  profession  dans  la  vingt- 
sixième  année  ,  à  faute  de  quoi  ils  per- 
dent en  faveur  de  leurs  cadets  l'ancien- 
neté que  leur  minorité  leur  avait  procurée. 
Cependant  il  y  a  beaucoup  de  Chev.iliers  re- 
çus en  minorité  qui  ne  font  profession  que 
plusieurs  années  après  les  vingi-six  ans, 
sans  que  cela  leur  porte  aucun  préjudice; 
mais  il  faut  pour  cela  qu'ils  aient  un  bref  ou 
une  dispense,  qu'on  obtient  aisément  pour 
des  raisons  particulières  qu'on  ex|)0se. 

>'oici  les  céréiiion  es  qui  s'observent  en 
donnant  1  habit  cl  faisant  faire  profession 
aux  Chevaliers.  Le  postulant  ayant  reçu  du 
giand  maître  et  du  conseil  la  permis<iun  do 
prendre  l'habit  et  de  faire  profession,  el  le 
jour  ayant  été  choisi,  il  se  trouve  à  l'église, 
où  étant  à  genoux  devant  l'autel,  velu  d'uin- 
longue  robe  et  d'un  manleau  à  bec,  qui  i-sl 
l'habit  de  l'or. Ire,  et  ayanlà  la  main  un  flam- 
beau allumé,  il  offre  au  prêre  son  épee  nue 
pour  (Ire  bénite.  Le  prêtre  la  tient  toute  nue 
en  disant  quelques  oraisons  ,  et,  après  avoir 
jeté  de  l'eau  bénite  sur  l'épée  et  sur  le  Che- 
valier, il  lui  met  en  main  celle  èpée  nue  eu 
lui  disant  :  Jticevcz  allé  sainte  c'pce  au  nom 
(tu  l'crc,  el  (lu  Fils,  el  du  Sainl-ks/irit,  aiusi 
soil-il,  el  senez-vous-en  pnui  voire  de  fnsr, 
cl  de  1(1  suinte  E(jli^e  de  Dieu,  ù  In  confusi m 
d's  ennemis  de  la  croix  de  Jesus-Clu isl  et  de 
lii  foi  chiét(Cnne ;  cl  prenez  (,(irdc,  aulani  c/u« 
lu  frtujUité  liumnine  li-  pernv  lira,  de  n'en  jU' 
muis  fiapjier  /jcrsanne  iuju^tniicnl.  (,>up  lu 
(jrd  e  d'en  u^er  ainsi  vous  soil  accordée  par 
celui  (jui  V  l  cl  rèijne  avec  le  l'ère  et  le  Suint- 
Lspnl,  dans  tous  tas  siècles  de»  siècles.  Ain.ii 
suit  il.  On  reinel  ensuite  l'épée  dans  le  four- 


Bin 


M\î> 


MAL 


»"0 


t  i-;iu,  cl  le  prêtre  la  mcl  au  f  ôlô  du  Chevalier 
qui  (ioil  laire  profession,  en  lui  disant  :  Met- 
tez vôtre  épce  à  vôtre  calé  nu  nom  de  Nôtre- 
Seigneur  Jesus-Christ,  et  souvenez-vous  que  ce 
n'est  p>is  tant  par  les  armes  que  les  saints  ont 
conquis  des  roiaumes  que  par  leur  grande  foi. 
Cela  étant  fini,  le  prêtre  donne  un  baiser  au 
Chevalier  qui  doit   faire   profession  ,  lequel 
ainsi  orne  de  son  épce  doit  s'y  préparer  avec 
dévotion,  alin  qu'il  puisse  recevoir  la  grâce 
de  cetie  sainte  milice.  l'our  cet  effet,  ayant 
ru  soin  de  faire  une  bonne  confession  de  lnus 
les  péchés  de  sa  vie  passée  ,  après  avoir  en- 
tendu la  messe  et  reçu  la  très-sainte  commu- 
nion, étant  à  genoux  oi  tenant  un  flamheau 
(le  cirt-   blanche  allumé,  au()uel  on  attache 
ordinaireme.l  un  écu  d'or,  lequel  flambeau 
marque  la  charité,  qui  est  un  amour  tout  de 
feu,  se  tenant  ainsi   avec  respect  devant  ce- 
lui qui  doit  recevoir  sa  profession,  il  répond 
humblement  aux  intcrrogatious  qu'il  lui  fait. 
Cependant  le  prêtre  peut  avani  cela,  s'il  le 
juge  à  propos  et  si  le  temps  le  permet,  don- 
ner ao  profès  des  avis;  el,  après  les  lui  avoir 
donnés,  il  lui  demande  s'il  est  dans  la  dispo- 
sition de  promettre  non-seulement  de  bou- 
che, mais  du  fond  du  cœur,  de  suivre  tous  les 
avertissements  qui  viennent  de  lui  être  don- 
nés. Alors  le  Chevalier  qui  doit  faire  profes- 
sion répond  :  Moi,  N. ,  jure  el  provuts  à  Je- 
sus-Christ ,  qui  est  Dieu,  à  la  bienheureuse 
Vierge  Marie,  el  à  suinl  Jean-Baptiste,  que  je 
ferai  tous  mes  efforts  pour  observer  ponctuel- 
lement toutes  ces  choses. 


Manière  de  donner  l'ordre  de  Chevalerie. 

Avant  que  le  prêtre  lise  l'évangile,  le  Che- 
valier qui  doit  recevoir  les  vœux  du  profès 
lui  dil  :  Que  demandez-vous  ?  A  qudi  ayant 
répondu  qu'il  demande  l'ordre  de  Chevalerie, 
le  Chevalier  lui  dit  :  L'uvez-vous  jamais 
reçu  de  prince  catholique  ou  d'antre  qui  eût 
puissance  de  le  pouvoir  donner?  Le  profès 
ayant  répondu  ce  que  bon  lui  semble, le  Che- 
valier continue  de  lui  dire  :  C'est  chose  noble 
et  salutaire,  servir  les  pauvres  de  Jesus-Christ 
el  accomplir  les  auvres  de  miséricorde ,  et  de 
sr  députer  au  service  el  défense  de  la  foi.  Tou- 
tefois vous  demandez  une  chose  que  beaucoup 
d'autres  ont  demandée  el  recherchée  d'avoir, 
el  n'ont  pu.  Pourquoi  cet  ordre  de  Chevalerie 
que  demandez  a  coutume  se  donner  à  ceux 
qui  par  l'antique  noblesse  de  leur  lignage  le 
uierilinl,ou  vei  ilublemenl  à  ceux  qui  par  leurs 
propres  vertus  s'en  sont  faits  dignes.  A  celle 
cause  vous  connaissant  cire  tel  que  requiirl 
l'ordre  de  Chevalerie,  consentons  à  vûiie  de- 
mande, vous  mettant  en  mémoire  que  ceux  qui 
ont  de  recevoir  tel  ordre  ont  d'être  défenseurs 
de  l'Eglise,  des  pauvres  femmes  veuves  et  en- 
fans  orphelins,  l'romeitez-vous  ainsi  faire? 
I.e  profès  ayant  répondu  :  Oui,  Monsieur, 
le  Chevalier  lui  donne  ré(ico  avec  son  four- 
reau en  la  main  ,  lui  disant  :  A  celle  fin  que 
iiiiiinlcniez  tout  ccquuiez  promis,  prenez 
celle  cpéc  (tu  nom  du  l'crc  ,  du  h'ils  ,  it  du 
baintl'sprii.  Aimi  toil-il.  Le  Clic\  aller,  ti- 


rant ensuite  l'épi'e  du  fourreau  et  la  donnant 
en  la  main  du  p'olès,  lui  dit  :  Prenez  celte 
é/iéc.  Par  son  lustre  elle  est  en/lammée  de  lu 
foi;  par  la  pointe,  d'espérance,  et  par  ses 
gardi's,  de  charité  :  de  laquelle  userez  ve.rhiiu- 
.'iemenl  pour  la  défense  vôtre  et  de  la  foi  ca- 
Iholii/ue,  el  ne  craindrez  d'entrer  aux  perih 
el  dangeis  pour  le  nom  de  Dieu,  pour  le  signe 
de  la  croix  et  pour  la  libirté  de  l'Eg'ise; 
maintenant  la  justice  et  la  consolation  des 
femmes  veuves  el  des  pauvres  orph'lins  ,  car 
c'est  la  vraie  foi  el  justification  d'unChevalier. 
C'est  la  vocation  ,  l'él  ction  et  sanctification 
que  d'offrir  l'âme  à  Dieu,  el  le  corps  aux  pé- 
rils et  dangers  pour  son  service. 

Le  Chevalier  fait  nettoyer  l'épéc  au  profès 
sur  sou  bras,  puis  la  niet  au  fourreau,  lui 
disant  :  Tout  ainsi  que  mettez  cette  épée  nette 
et  polie  dans  son  foiirenu  ,  ne  délibérez  aussi 
la  tirer  en  volonté  d'en  fiappcr  personne  in- 
justement ,  ni  la  maculer,  mais  l'emploier 
comme  dessus:donl  Dicuvousenfasselagrace, 
Ainsi  soit-it.  Le  profès  étant  toujours  à  ge- 
noux, tenant  l'épée  dans  son  fourreau  ,  le 
Chevalier  la  prend  et  la  lui  met  au  cùté,  di-' 
sanl  :  Je  vous  ceins  de  celle  epée  ,  la  mettant 
à  vôtre  côté,  au  nom  de  Dieu  tout-puissant  et 
de  la  glorieuse  vierge  Marie  ,  de  monsieur 
saint  Jean-Baptiste,  nôtre  patron,  et  du  glo- 
rieux saint  Georges  ,  à  l'honneur  duquel  rece- 
vrez l'ordre  de  chevalerie.  Tout  ainsi  qu'avec 
patience  cl  vraie  foi  il  fut  victorieux  pour 
nous  impélrer  telle  grâce  envers  Dieu  ,  aussi 
navez-vous  de  la  tirer  sans  antre  espérance 
que  de  vaincre.  Le  profès  se  lève  ensuite  , 
tenant  à  la  main  son  épée  nue,  qu'il  ébranle 
trois  fois  ,  el  le  Chevalier  lui  dit  :  Ces  trois 
fois  qu'avez  ébranlé  l'épce  en  votre  main,  si- 
gnifient qu'au  nom  de  la  sainte  Trinité  ,  avez 
de  défier  tous  les  ennemis  de  la  foi  catholique 
avec  espérance  de  victoire.  Dieu  vous  en  don- 
ne la  grâce.  Ainsi  soit-il.  Le  profès  nettoii? 
après  cela  l'épée  et  la  remet  dans  le  four:  eau; 
le  Chevalier  lui  fait  une  remontrance  sur  les 
vertus  cardinales  ,  el ,  ayant  tiré  l'épée  du 
même  profès,  il  lui  eu  donne  trois  coups  sur 
l'épaule,  et  lui  dit  :  Je  vo'is  fais  Chevalier,  au 
nom  de  Die  i,  de  la  Vierge  Marie,  de  monsieur 
saint  Jean-Baplisle,  et  de  monsieur  saint 
Georges,  rigilanl  el  pacifique  en  l'honneur  de 
chevalerie;  puis  remet  l'épée  dans  le  four- 
reau, et,  regardant  le  profès,  il  lui  donne 
doucement  un  petit  soufflet  en  disant  :  Re- 
veillez-vous,  et  ne  dormez  aux  affaires,  mais 
veillez  en  la  foi  de  Jesus-Christ,  el  faites  que 
ce  vous  soit  le  dernier  affront  et  vergogne 
qu'avez  d'avoir  pour  la  cause  de  Jesiis-Chri^t, 
aiant  la  paix  de  Nôlre-Sc  gneur  en  vous.  Il 
lui  montre  ensuite  les  éperons  dores  ,  et  lui 
dil  :  V oiez-vous  ces  éperons  ;  ils  vou.i  signi- 
fient, tout  ainsi  que  le  cheval  les  craint  se  met- 
tant hors  de  son  devoir ,  ainsi  devez-vous 
craindre  de  sortir  de  vôtre  rang  et  vœux  et  ne 
faire  mal.  On  vous  1rs  met  ainsi  dorés  aux 
pieds,  pour  être  l'or  le  plus  r  che  métal  qui 
se  trouve,  et  comparé  à  l'honneur.  Un  autre 
Chevalier  les  lui  attache  aux  pieds,  el  il  re- 
tourne à  sa  place  continuer  d'cutcndre  le 
reste  de  la  messe. 


8r;!  DICTIONNAir.F.  DES  ORDRES  RELIGIEUX. 

Manière  de  donner  hi  croix  de  l'or. h  e. 
Apr^s   la  dcm.Tndo  que  le   [irufos    n   fiile 


er.ï 


d'c-lre  rcrti  ol  admis  dans  la  rotnpa;;iii(!  di'S 
l'rôri's  do  la  s.icroe  rolij;ion  de  Saiiil-Jea'i  de 
Jérusaletn,  celui  qui  le  reroil  lui  dit  :  l.n  fle- 
vwnde  que  faites  <i  été'  à  plusieurs  refusée 
pour  n'être  iliijnrs  d'é  re  reçus  en  le'li'  Com- 
pngnie  ;  mais  ,  nous  confiant  de  vôtre  pni- 
d'homie  et  suffisance,  sommes  délibères  la  votts 
octoier,  espérant  qu'avec  bon  zcle  et  charité 
vous  vous  exercerez  aux  œuvres  de  miséricor- 
des ,  et  tolallement  au  service  de  l'h(\pital  de 
cette  religion  ,  non  srutemenl  enrichi'  et  am- 
plifiée de  bien  qrantls  privilèges  ,  libertés  , 
franchises  ,  et  immunités  par  le  siinl-sicge 
apostolique,  ains  encore  par  tous  les  princes 
chrétiens  et  autres  saintes  personnes,  afin 
que  tous  nous  autres  servans  au  lit  hôpital 
Si'wni  enflammés  de  vraie  foi  ,  esperawe  et 
charité  envers  Jesus-Cbrisl.  Et  tout  ainsi  que 
l'on  vous  baille  un  cierge  ardent  en  la  main  , 
cela  vous  doit  signifirr  qw  devez  être  ardent 
en  Icelle  ch  irité  ,  qui  est  la  vraie  perfection 
de  cette  rie;  vous  assurant  que  si  l'exerces 
d'un  ardent  caur  pour  la  défense  de  la  foi  de 
Jesiis-Christ,  contre  les  ennemis  d'ictlle,  plus 
facilement  il  vous  appellera  en  son  roiaumr  ; 
et  à  celle  fin  que  vous  ne  puissiez  excuser  d'i- 
gnorance ,  je  suis  tenu  vous  signifier  ici  en 
présence  des  assistons  ,  et  denvinder  si  vous 
are;  parfaite  volonté  d' m  suivie  la  re/le; 
c'est  que  d('s  cette  heure  so'tcz  préparé  d'entrer 
aux  peines  et  fâcheries  qu'avez  de  pâlir  au 
service  de  nôtre  religion,  et  totidlement  vous 
dépouiller  de  vôtre  propre  volonté  ,  la  remet- 
tant iiujonril'hui  entre  l(S  mains  de  tous  supé- 
rieurs élus  en  irelle,  qttels  qu'ils  soient:  vous 
commandant  qu'aez  à  leur  obéir  en  quelque 
manieie  que  ce  soit. 

Le  profè';  ayant  répondu  qu'il  est  contont, 
le  recevant  continue  :  h't  fiuisi/u'éles  con- 
tent vous  dépoiiilicr  de  vôtre  volonté  propre 
et  libir.é,  et  la  remettre  <\  vos  supérieurs,  tout 
ainsi  que  l'on  fait  de  crttc  cire  ,  qui  se  laisse 
maniir  à  ce  que  l'on  veut,  a.'nsi  fcra-t-on  de 
vous  ,  et  vous  advise  que  serez  contraint  de 
jViirier,  quand  aurez  envie  de  manger,  et  veiller 
quand  aurez  envie  de  dormir  ,  ensemble  plu- 
sieurs autres  peines  contraires  aux  jtlaisirs  et 
libertés  ;  et  p  lur  cela  advisez  bien  si  <u  ez  la 
volonté  de  vous  en  dépoiiiller  pour  la  met- 
tre es  mains  des  suprrirurs  de  nôtre  religion. 
i,c  priifi's  ayant  répondu  qu'il  se  sonniel  en- 
liérenicnt  à  la  volonté  des  supérieurs  et  qu'il 
se  dépoui  le  de  sa  liberté,  le  recevant  lui  de- 
mande :  1°  s'il  n'a  poinl  fait  vieu  dans  une 
autre  religion  ;  2°  s'il  n'a  point  cunsoumié 
mariage  ou  s'il  n'csl  jxtinl  fiancé  avec 
aucune  femme  ;  3"  s'il  n'a  point  de  dettes 
considérables  au\(juelies  il  ne  peul  sa- 
ti>rairc  ;  U"  s'il  n  a  poinl  été  homii  ide 
ou  causé  la  mort  de  quelqu'un  ;  .')  s'il 
n'e>.t  point  dccondiliim  servile.  Le  profès  re- 
pond ce  (pie  bon  lui  semble,  et  le  recevant 
l';nertil  (|iie  louics  et  (]iianlis  lois  ()u'll  se 
Iruiivcra  convaim  udeces  rlioses,  on  le  clias- 
gira  de  l'ordre  a  >  e:  confusion  ;  et  (ju'il  y  fasse 
Licnrellexion.  A<{Ui>i  les  piofésayaal  ciicuru 


répondu,  le  recevant  continue  dédire  :  Dun- 
qucs  puisque  vous  nous  dites  et  assurez  être 
tri,  et  qu'êtes  prest  et  délibéré  d'être  défenseur 
de  rt'qlise  de  Jesus-Christ,  et  servir  aux 
pauvres  de  l'hôpital  de  nôtre  religion,  voua 
recevons  bevignemenl  selon  les  formes  de  nos 
établissemens,  et  louable  coutumes  et  non  au- 
trement, et  ne  vous  prome'tons  que  pain  et 
eau,  simple  vêtement,  travail  et  peine.  Pour 
lors  il  commande  au  (irofès  d'.ilier  prendre 
le  missel  sur  l'autel  el  de  le  lui  apporter  ;  el, 
lui  faisant  mettre  les  mains  sur  le  canon  de 
la  messe,  le  profès  prononce  ses  vœux  en  la 
manière  suivante  :  Moi  A',  jure  et  promets, 
el  fait  vfru  à  Tout-Puissant  (d  la  glorieuse 
vierge  Marie,  et  à  77ionsieur  s  int  Jean-Itap- 
tiste  nôtre  patron)  moiennant  sa  giace,  d'ob- 
server et  garder  vraie  obédience  à  celui  qui 
me  sera  commandé  de  par  Dieu  et  ma  religion, 
de  vivre  sons  propre,  et  de  garder  chasteté, 
ainsi  qu'il  convient  à  tous  bons  religieux 
catholiques.  Le  rerev.inl  lui  dit  •ensuite  :  Or 
éi  ce  que  commenciez  par  [obéissance,  je  vous 
commande  de  reporter  ce  messil  sur  l'autel,  et 
qu  après  qu'aurez  baisé  ledii autel,  retourniez 
ici.  Le  proies  obéit,  et  le  rccev.nt  continue  : 
M  intenant  nous  vous  conyioissons  éire  l'un 
des  défenseurs  de  V Eglise  catholique,  et  servi- 
teur des  p:iuvres  de  Jesus-Christ  de  l'hôpitul 
de  saint  Jean  de  Jérusalem. 

Cela  fait,  le  recevant  prend  le  manteau  à 
bec,  et  montre  la  croix  à  buil  pointes  au 
profès,  lui  disant  :  Ce^e  croix  nous  a  éié  or- 
donnée bliinrhe  en  signe  de  p  ireté,  laquel'.e 
devez  porter  autant  dans  le  cicur  comme  de- 
hors, sans  macule  ni  tache.  Les  huit  pointes 
que  vous  votez  en  ice'le,  sont  en  signe  des  huit 
béatitudes  que  devez  toùj  mrs  avoir  en  vous 
qui  sont  :  1°  avoir  le  contentement  sp  rituel, 
2"  vivre  sans  malice,  3"  pleurer  ses  péchés, 
4"  s'humilier  aux  injures,  5'  aimer  la  justice, 
0"  être  miséricordieux.  7"  être  sincère  et  vd 
de  cœur,  8"  endurer  persécution.  Lesquelles 
sont  autant  dr  virtus  que  devez  graver  en  vô- 
tre cœur  pour  la  consolotion  et  conservation 
de  vôtre  ame.  Et  pour  ce  je  vous  commande 
la  porter  nperlemenl  cousue  au  cô:é  senestre 
au  droit  du  cœ  ir,  et  jamais  ne  l'iib  indonner. 

Le  recevant  fait  ensuite  baiser  la  croix  au 
))rorès,  et  lui  metlanl  le  nianteau  sur  les 
épaules,  lui  dit:  Prenez  cette  croix  el  habit 
au  nom  de  la  sainte  Trinité,  auquel  troiiverez 
repos  et  salut  de  vô  re  ame,  en  augmentation 
de  la  foi  catholique,  el  défense  de  tous  bons 
chrétiens,  pour  l'honneur  de  nôtre  Sei- 
gneur Jésus  -  Christ  :  et  pour  ce  je  vous 
mets  cette  croie  au  côté  senestre  près  du  cirur 
]i0ur  la  purfiiitnnrnt  aimer,  et  de  vôtre  main 
dexire  la  dcfndre,  vous  commandant  de  ja- 
mais ne  l'abandonner,  à  cause  que  c'est  le  vrai 
étendarl,  Jlannirre  de  nôtre  religion,  ni  moins 
vous  éloigner  de  lu  compagnie  de  nos  frère» 
qui  l'accompagnent.  Autrement  vous  serez 
dejrttéel  privé  de  nôtre  compagnie  avec  grand 
vitupère,  niminr  membre  puonl  et  transgres' 
seur  de  nos  vaux,  confoi  niémml  à  nos  étn- 
blisseiiiens.  le  manteau  iliK/uel  nous  vous 
avons  vêtu,  est  la  figure  du  vêlement  fait  dt 
poil  de  chameau,   duquel  éloit  têtu  nôtre  pu- 


8r,5 


VAL 


MAL 


SSi 


tron  saint  Jenn-Bciplisle,  étant  nu  désert.  Et 
jiiirintit  prenant  ce  manteau,  vous  renoncez 
intx  pompes  et  vanités  de  ce  monde,  et  vous 
romniande  le  porter  en  tems  requis,  aussi  pro- 
curez que  vôtre  corps  soit  enseveli  en  icelui, 
afin  qu'il  vous  souvienne  d'ensuivre  nôtre  pa- 
tron saint  Jean-Baptiste,  et  que  vous  nielliez 
l'iute  espérance  pour  laremifsion  de  vos  péchés 
à  la  paision  de  nôtre  Seiyneur  Jesus-Chrisl, 
laquelle  est  signi(iée  par  ce  cordon,  duquel  il 
fut  lié  par  les  Juifs.  Ceci  est  la  fiqure  de  la 
colomne  où  il  fut  lié.  Ceci  est  lu  couronne 
d'épines.  Ceci  est  la  lance  de  laquelle  il  eut  le 
ci'ité  percé.  Ceci  sont  les  paniers  pour  donner 
l'aumône  aux  pauvres,  et  dans  lesquels  Virez 
chercher  pour  eux  quand  vôtre  bien  ne  pour- 
ra satisfaire.  Ceci  est  l'éponge  quand  on  l'a- 
breuva de  fiel  et  de  vinaigre.  Ceci  sont  les 
fouets  desquels  il  fut  butta.  Ceci  est  la  croix 
sur  laquelle  il  fut  crucifié.  Je  vous  l'ai  mise 
sur  l'épau'c  en  rememlrance  de  la  passion  sous 
laquelle  trouverez  le  vpos  de  votre  ame.  Ce 
joug  esl  fort  doux  et  suave,  et  par  ainsi  je 
roui  lie  ce  cordon  au  col  en  siijne  de  servitude 
par  vous  promise.  Nousvousf.isons,et  tous  vos 
parens  participons  de  tous  les  biens  spiiituels 
qui  se  lont  et  se  front  en  nôtre  religion  pur 
toute  la  chrétienté.  Vous  serez  obligé  de  dire 
et  reciter  chacun  jour  cent  cinquante  Paler 
nosicr,  Oit  bien  les  heures  de  Nôtre-Dame,  ou 
les  vigil  s  des  morts.  Vous  serez  pareillement 
obligé  reciter  une  des  trois  formes  de  prières 
ci-dessus  pour  chacun  de  nos  frères  trépassés. 
Vous  demeurerez  la  tête  nuëjusques  f)  ce  que 
le  iiiatlre  vous  commande  de  la  couvrir,  et 
après  l'oraison  et  bénédiction  du  prêtre  vous 
embrasserez  tous  les  frères  avec  vôtre  habit. 
Avant  que  de  mangir  irez  faire  l'obédience  à 
l'auberge.  Le  prèlrc  de  l'ordre  qui  a  célébré 
la  lucsse  dil  ensuite  plusieurs  or;iisons  sur 
le  iiouve^iu  profès,  qui  est  à  genoux;  après 
leîiquelles  le  profès  va  faire  l'oliédieiice  à 
l'auberge  avec  du  pain ,  de  l'eau  cl  du 
Bel,  etc. 

Mais  peut-être  qu'il  n'y  a  j.imais  eu  dans 
rcl  ordre  de  réception  plus  solennelle  que 
celle  de  Cés.ir,  duc  de  ^'endôme  ,  fils  naïu- 
rel  d'Henri  IV,  roi  de  France  ,  qui  lu  Gl  re- 
cevoir Chevalier  de  cet  ordre  dans  son  bas 
âjje  (1).  La  cérémonie  se  lit  à  Paris  dans 
l'église  du  Temple, qui  était  magnifiquement 
ornée.  Le  roi ,  1 1  reine  ,  les  princes  et  les 
princesses  ,  les  prélats  et  les  ambassadeurs 
qui  étaient  à  la  cour  s'y  trouvèrent.  L'évé- 
que  de  Nevcrs  célébra  ponlificab  ment  la 
messe,  et  fit  une  exboriation  au  duc  de  Ven- 
dôme sur  l'urdre  qu'il  i  renail.  Il  fut  ensuite 
présenté  au  grand  prieur  de  France,  qui  lui 
lit  les  deniandi'S  oriiinaires  ;  mais  ,  ne  pou- 
vant répondre  à  c;  use  di-  son  b.is  âge,  le 
roi  descend  l  de  son  trône  ,  et  s'appiocha 
pour  l'aidi  r  à  répondre.  La  messe  étant 
achevée  ,  le  nouveau  Chevalier  se  présenta 
pour  faire  sa  profession.  Le  roi  s'avança  et 
promit  que  lorsqu'il  aurait  alieinl  làge  de 


seize  ans,  il  ferait  1rs  voeux  ordinaires  de  pau- 
vreté, de  chasteté  et  d'obéissance;  mais  comme 
il  avait  aiiparmimcnt  une  expectative  di; 
grand  prieuré  de  France,  le  grand  prieur  lui 
attacha  devant  l'estomac  la  grande  croix  de 
l'ordre.  La  cérémonie  se  termina  par  le  son 
d'un  grand  nombre  de  trompettes  et  de  li.iut- 
bois.  Le  duc  de  Vendôme  donna  à  dîner  au 
grand  prieur,  aux  commandeurs  et  aux 
Chevaliers  qui  avaient  assisté  à  sa  réceptioii, 
et  le  roi  alla  diner  chez  M.  Zamet.  Le  duc 
de  Vendôme  ne  fit  pas  néanmoins  sa  profes- 
sion, et  épousa,  l'an  1009,  Françoise  de  Lor- 
raine ,  duchesse  de  Meuceur.  Charles  de 
Valois,  qui  fut  dans  la  suite  ducd'Angon- 
lénie,  fils  naturel  de  Charles  IX  ,  aussi  mi 
de  France  ,  avait  d'abord  pariillcmcnt  été 
drsliné  pour  l'ordre  de  Malte.  Henri  111,  qui 
avait  succédé  à  Charles  IX  ,  obtint  pour  te 
princedu  grand  maître  une  expectative  pour 
le  grand  prieuré  de  France,  qu'il  posséda 
dans  la  suite,  et  qu'il  quitta  pour  épousir 
Charlotte  de  Montm<!renci ,  fille  d'Henri  1", 
duc,  pair  et  connétable  de  France. 

Tous  les  Chevaliers  de  quelque  rang,  qua- 
lité, ou  dignité  qu'ils  soient ,  sont  obligés 
après  leur  profession  de  porter  sur  le  man- 
teau ou  sur  le  justaucorps,  du  côté  gauche, 
la  croix  de  loile  lilanchu  à  huit  pointes,  qui 
est  le  véritable  habit  de  l'ordre,  la  croix  d'or 
n'étant  qu'un  ornement  extérieur,  et  lorsque 
les  Chevaliers  vont  combattre  contre  les  in- 
fidèles, ou  qu'ils  font  leurs  caravanes  (2), 
ils  portent  sur  leur  habit  une  s  pra-veste  ou 
casaque  rouge  en  forme  de  dalmatique,  ornée 
par-devant  et  par  derrière  d'une  grande  croi^t 
blanche  pleine,  qui  esl  celle  des  armes  do  la 
religion.  L'Iiabit  ordinaire  du  grand  maîtro 
(3)  esl  une  soutane  de  labis  ou  de  drap,  ou- 
verte par-devant,  et  serrée  d'une  ceinture 
où  pend  une  bourse  ,  pour  marquer  l,i  clia  - 
I  ité  envers  les  piuvres;  cl  par-dessus  cette 
soutane  il  porte  une  espèce  île  robe  de  vc- 
loi.rs  sur  laquelle  il  y  a  au  côté  gauche  et 
sur  ré|)<iule  la  croix  de  l'ordre,  qu'il  porte 
aussi  sur  la  poitrine.  Le  manteau  à  bec  [h) 
dont  nous  avons  déjà  parlé,  qui  esl  celui 
qu'on  donne  à  la  polession,  est  noir,  et 
s'al'ache  au  cou  avec  le  cordon  de  l'onlre, 
qui  esl  de  soie  blanche  et  noire,  où  sont  re- 
présentés les  mystères  de  lapassion  de  Notre- 
Seigneur  Jésus-Christ,  entrelacés  de  paniers 
qui  représentent,  comme  il  a  été  dit,  la  cha- 
nté qu'ils  doivent  exercer  envers  les  pau- 
vres. Il  y  a  à  ce  manteau  deux  manches 
longues  de  près  d'une  aune,  larges  au  haut 
d'environ  demi-pied,  qui  se  terminent  en 
pointes,  lesquelles  se  rejetaient  autrefois  su? 
les  épaules  et  se  nouaient  ens' iiible  sur  les 
reins.  Il  paraît  par  une  monnaie  d'or  du 
grand  maître  Déodat  Gozon  qui  lut  élu  lau 
1340,  et  par  le  sceau  du  grand  maîire  Phil- 
bert  de  Naillac,  qui  succéda  à  Ferdinand  de 
Hérédi.i  l'an  13%  ,  qu'il  y  avait  ancienne- 
ment à  ce   manteau  à  bec  un  capuce  qui  y 


(1)    ilss.  (le  Uricitm,  à  la  bibliotlicouc  du   roi, 

V  1.  (;cL\xiv. 

il)  VoB.,àla  fin  du  vol.,  n"  2 '5. 


(5)  Voij.,  ibiJ.,  n-aO'i. 
(i)  Vvy.,  djid.,  u"  1.05. 


8:;5 


mCTIONNMRF.  DES  ORDRLS  nELIGiF.LX. 


836 


lit   aMnrIic  ,  cntiin-.c 
;ure  qui   rc|ircspnlc 


I  ciil  voir  (l.ins  la 
jincicii  Chevalier 


grand-croix     2), 
est  line  csfiècc  de 


ai) 
un 
avoc  ce  rnaiiti'aii  à  hor  I) 
l.'lialiil  (les  Chevaliers 
quand  ils  sont  à  l'église  . 
rdlii-  I  oTc  appelée  clociti  ou  rl'n  lio,  ouverte 
par-devant  .  ayant  des  prandcs  manches, 
sur  laqucllp,  du  cô'é  gaui  lie,  sur  l.i  poitrine 
et  sur  l'épaule,  e>l  la  croix  de  l'ordre  a>ec 
II!  grand  cordon  ,  et  une  épée  à  leur  lOlé. 
Quand  ils  vont  au  consi-il  (■'}  ,  ils  ont  une 
pari'ille  robe  noire,  mais  fennec  par-devant, 
n'ayant  que  la  grande  croix  sur  la  poitrine, 
et  ils  n'y  perlent  point  l'épée  ni  le  cordon. 
I  es  frères  chapelains  allant  par  la  ville  {^) 
sont  habillés  comme  les  <cclésiasli(iues, ayant 
srulcincnt  sur  leur  souiane  et  sur  le  man- 
teau au  côté  gauthe  l.i  croix  de  l'ordre  ;  à 
l'église  (5|  i  s  ont  un  rochct  de  toile,  et  par- 
dessus un  c  imail  noir,  où  est  ans^i  la  croix 
lie  l'ordre.  Clément  XI,  à  la  sollicitation  du 
grand  maître  Unymond  de  l'erdlos  de  Uo- 
cafult,  qui  gouverne  présentement  l'ordre, 
a  accordé  à  soixante  chapelains  de  cet  ordre 
la  permi>sion  de  (norter  le  camail  violet  ; 
mais  il  n'y  a  que  ceux  qui  résident  à  Malle 
qui  '■e  «■er>cnt  de  ce  privilège;  quelques-uns 
en  France  a5aiit  voulu  porter  ce  camail  vio- 
let, l'archevêque  d'Aix  fui  le  premier  qui  s'y 
opposa.  Nous  donnons  aussi  l'ancien  habil- 
lement de  ces  chapelains  ,  cl  celui  que  por- 
tail Uaymond  du  Tuy,  piemier  grand  maître 
de  cet  ordre  ,  comme  il  est  représenté  dans 
d'anciennes  peintures  à  Malle  (G). 

Il  y  a  eu  jusqu'à  présent  soixantc-lrois 
glands  m.iîlres,  paru  i  lesquels  il  y  a  eu 
Pierre  d'Aiibus>on  et  Hugues  de  Loubens  de 
Verdnle  qui  ont  été  cardinaux.  Le  pape  Ur- 
b;.in  VIII,  en  donnant  le  titre  d'Kmineiice 
aux  cardinaux  le  donna  aussi  aux  grands 
niaitresde  l'ordre deSaint-Jean  deJéru.-alein. 
Les  ré>ii!cn!s  de  cel  ordre  auprès  des  Ictes 
couronnées  prennent  la  qualité  d'ambassa- 
deurs, et  celui  qui  réside  à  Rome  ajoute  à 
cette  qualité  celle  de  procureur  général  en 
cour  de  Rome. 

Quoique  toutes  les  com:nanderics  de  l'or- 
dre de  Saint-Jean  de  Jérusalem  soient,  ou 
de  justice,  lorsqu'on  les  obtient  par  droit 
d'ancienneté  de  réccplion,  ou  de  grâce,  lors- 
qu'elles sont  accordées  par  le  grand  maîtie 
ou  par  les  grands  prieurs  en  vertu  du  droit 
ailaché  à  leurs  di-nités,  comme  nous  avons 
dit  ci-devant  ,  néanmoins  la  commanderie 
de  r!le-\'crte  à  Sirashmirg,  alïei  tée  à  des 
chapelain»  de  l'ordre,  est  élective,  et  le  coiii- 
niandeur  a  droit  de  porter  la  mitre,  la  crosse 
et  les  aulrPS  ornements  pontificaux.  Hés 
l'an  1150,  Wcrnerus,  maréchal  de  Hune- 
bourg,  qui  était  un  puissant  seigneur  (loi 
avaii  causé  jilusieiirs  maux  aux  liourgeois 
(le  Strasbourg,  louché  de  repentir,  et  vou- 
Iniii  se  convenir  à  Dieu,  se  réconcilia  avec 
ces  bonrveoi^,  et  obtint  d'eux  un  lieu  ap- 
pelé rile-Verte,  hors  des  murs  de  la  ville, 
uù    il  lit  bàlir  une  église  sous  le  nom  du  la 


(«)  Vmi. 
(1,  Vo,j. 


à  1 1  lin  du  vol. 
il.i.l.,  Il"  iil7. 
il)id.,  Il"  i  8. 


2.G. 


Sainte-Trinité.  Pendait  prh  de  deux  siècle», 
le  serv  ce  divin  ne  fut  point  interrompu  dans 
Celle  église;  mais  vers   l'an  131)7,  elle  était 
abandonnée   et  t  mhait  en   ruine  ,   lors(iiii' 
Riismnn    Mcrsv^in,    d'une   famille    noble  de 
Strasbourg,  l'acheta,  'a  fit  rel  âlir,  y  joignil 
(les  bâtiments  et  des  jardins  ,  et  y  mil  p>ur 
la  desservir   quatre  prêtres   séculiers  ,  avec 
la   permission    du  pape   et  de  l'évéque   de 
Str.isbourg.  (Jueliiue  temps  après  il  la  donna 
à  l'ordre  île  S.iint-Jean  de  Jérusalem,  à  (  on- 
dilion  que  des  frères  chapelains  de  cet  ordre 
y  feraient   à   perj  étuité  I Office   divin.   Celte 
donation  fut  acceptée  par  Conra^l  de  Rrtins- 
berg,  grand  prieur  d'Allemagne,  l'an  L'Hl,  et 
coulirmée  dans  la  suite  par  le  granl  maître 
Raymond  Hérenger,  et  par  le  cba|iitre  géné- 
ral.   Ce   grand  pri'  ur,  par  ordre   du   grand 
maître,  donna  l'Iiabit  de  l'ordre  cl  la  croix  ;'i 
Rusman   Merswin  cl  à  ses  compagnons,  qui 
furci;t  reçus  au  nombri'  des  religieux  de  cel 
ordre.  Merswin,  selon   Rosio  dans  son   His- 
toire de  rt^rdrc  de    Malle,  prit  néanmoins 
un  habit  différent  de  celui  des  chapelains  de 
l'ordre;  car  il  dit  que  celui  des   novices  était 
semblable,    quant  à   la    forme,  à  celui   des 
avocats    consistoriaux   et  des    cubiculaircs 
apostoliques  à  Rome,  et  (ju'à  leur  profession 
on  leur  en  donnait  un  semblable  à  la  clocia 
ou  robe  que  portent  les   chevaliers  grands- 
croix  de  l'ordre  ;  que  sur  cette  robe  ils  met- 
taient un  manteau,  et  sur   ce  manteau   une 
mozette.   Rusman  Merswin  ajouta  à  l'église 
de  la  Sa  nie-Trinité   une  autre  é^ilise  qu  il 
fil  bâtir,  et  qui  fui  dédiée  en    l'Iionnenr  de 
saint  Jean-Baplisie.   Il  mourut  l'an  l.'!82.  lu 
18  juillet,  étant  âgé  de  soixante-quatorze 
ans.  Le  grand  priei.r  Conrad   de   lîrunsbeig 
choisit  aussi   sa  demeure  ordinaire  à   l'Ile- 
Ver'.e,  dont  il  est  reconnu  \'  principal  bien- 
faiteur, les  revenus   les  plus  considérables 
dont  jouit  encore  cette  commanderie  prove- 
nant de  ses   libéralités  ;    mais   il   mourut  à 
Cologne  le  10  décembre  l'i'.IO,  et  fut  enterré 
dans  ré;;lie  de  la   commanderie  de  Saint- 
Jean  et  de  Sainle-Cordule. 

La  piété  des  fidèles  angmcnla  les  revenus 
de  la  coiiiniandcrie  de  l'Ile-\'crle,  qui  de- 
vaient être  autrefois  Irès-cons  dérailles,  puis- 
que, noi'Obstanl  les  perles  qu'elle  a  souffer- 
tes par  les  guerres  et  par  l'hérésie  que  la 
villi'  de  Strasbourg  avait  embrassée,  ils  se 
montent  encore  à  présent  à  piôs  de  douze» 
mille  livres.  Ouclques-un^  ayant  \oulu  dé- 
membrer quelque  chose  de  la  fondation  , 
Hugues  de  Sari,  grand  prieur  de  France,  qui 
awTit  élé  iioiiiuiè  avec  queliiues  chevaliers 
par  le  grand  maître  Antoine  Fluviaii  pour 
faire  la  visite  de  l'or-lre  en  Allemagne,  as- 
sembla à  rile-Vcrte  le  rb  iptre  de  la  pro- 
vince l'an  l'iSi,  et  ordonna  que  la  fondation 
lie  celte  cimmaiiderie,  qui  était  du  nombre 
des  m  lisons  exemples,  deineurerail  en  son 
entier,  de  (leur,  dit  ce  grand  ]irieiir  dans  le 
décret  <iu'il  lit,  que  cel  unique  signe  de  l'ob- 
servance de  la  religion  de  Sainl-Jcan  de  J."- 

(.1)  Voi/.,  ibid.,  M"ill9. 
?:>)  Voii;  itii.t..  Il'  2111. 
l6)  Vo'i/.,ibid.,  Il'»  a;»  elili. 


8o7  MAL 

rusalem  ne  fùl  obscurci.  Cet  orag;c  élanl 
dissipé,  la  rcputaUon  dis  rplijrieux  de  celle 
conifiianderic  se  répandit  de  tous  côtés  ;  plu- 
sieurs personnes  ecclésiasli.iues  et  laïques, 
et  même  des  Chevaliers  de  l'ordre  voulurent 
demeurer  avec  eux,  l'on  augmenta  les  bât;- 
nienis,  qui  étaient  irès-spacieux. 

Plusieurs  cardinaux  légats  ,  des  nonces 
apostoliques,  des  archiducs,  des  princes,  t-t 
môme  l'empereur  Maximilieii  I",  qui,  l'an 
1504,  et  dans  les  années  suivantes,  vint  plu- 
sieurs fois  à  Strasbourg  avec  une  suite  nom- 
1  reuse,  y  ont  fait  aussi  leur  séjour  pendant 
le  trmps  qu'ils  ont  demeuré  à  Strasbourg. 
L'empereur  Maxirnihen  confirnia  la  fonda- 
tion de  celle  conunandcrie,  ce  qu'a  fait  aussi 
remper(  ur  Charles  V  et  q  lelqucs-uus  de  ses 
successeurs. 

Le  sénat  de  Strasbourg,  dans  une  Icllre 
qu'il  écrivit  au  grand  maîtrL-  de  l'ordre,  l'an 
1478,  lui  parla  avec  éloge  de  l'observance 
régulière  que  l'on  pratiquait  dans  culte  com- 
manderie,  et  le  pria  de  ne  pas  suufl'r;r  que 
l'on  en  diminuât  rien;  mais  les  magistrats 
qui  composaient  le  même  sénat,  vers  l'an 
1523,  furent  d'un  sentiment  bien  contraire  à 
celui  de  leurs  prédécesseurs.  La  ville  de 
Strasbourg  ayant  embrassé  l'hérésie  de  Lu- 
ther et  les  opinions  des  nouveaux  sectaires, 
ils  voulurent  contraindre  tous  les  ecclésias- 
tiques et  les  religieux  à  suivre  leur  perni- 
cieux exempte.  Pour  y  obliger  les  chapelains 
de  l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  de  la 
cominanderie  de  l'Ile-Vcrte,  ils  les  chargè- 
rent de  grosses  iinpos  lions,  ils  leur  délVndi- 
renl  de  lecevoir  des  novices,  ils  voulurent 
les  cmpêclierde  dire  la  messe  et  de  prêcher; 
cl,  afin  que  les  catholiques  ne  pussent  pas 
entrer  dans  leur  église,  ils  mirent  des  soldats 
aux  portes,  obligeant  les  religieux  de  leur 
payer  leur  solde,  H  de  nourrir  à  leur  laide 
les  officiers.  Nonobstant  ces  persécutions,  ces 
religieux  ne  laissèrent  pas  de  faire  l'oftice 
divin  dans  leuréj^lise;  ils  établirent  le  no- 
viciat à  la  cummanderie  de  Scliélestadt,  qui 
dépend  de  celle  de  l'Ile-Verle,  et  les  anciens 
furent  réduits  à  deux  seulement,  n'y  ayant 
plus  que  le  commandeur  et  le  sacristain  qui 
restèrent  à  l'Ile-V^erle.  Celle  persécution 
fut  modérée  ;  les  catholiques  de  Strasbourg 
et  les  étrangers  eurent  permission  de  faire 
l'exercii  e  de  leur  religion  dans  la  coniman- 
dcrie  de  l'Ile-Vert  -,  n'y  ayant  que  celle  seule 
église  qui  leur  fùl  accordée;  mais  on  limita 
le  pouvoir  des  religieux,  qui  n'y  purent  ad- 
ministrer les  sacrements  de  baptême  et  de 
mari  ige  ;  on  leur  défendit  de  faire  le  caté- 
chisme, et  il  ne  leur  était  pas  permis  do 
porter  le  saint  viatique  aux  mulaiies,  nicmc 
secrètement  ,  sans  s'exposer  à  de  grosses 
peines  et  à  être  mis  en  prison. 

Ils  furent  plus  persécutés  l'un  1G33  :  les 
magistrats  sign. fièrent  le  16  janvier,  vieux 
style,  un  ordre  au  commandeur  d'aller  de- 
meurrr  le  même  jour  avec  les  religieux  et 
les  domestiques  dans  la  maison  de  la  prévôté 
de  Sainl-l'ierre-le-Jeune  ,  avec  pcrmis>ion 
de  faire  l'exercice  de  la  religion  catholique 
dans  réglis«  du  monastère  de  la  Madeleine 


MAL 


Ki8 


des  sœurs  Pénitentes,  qui  étaient  les  seules 
religieuses  ([ue  l'on  avait  tolérées  dans  la 
ville  de  Strasbourg,  et  q  i  étaient  fort  éloi- 
gnées de  Saint-Pierre  le-Jeune.  On  leur  dé- 
fendit de  rien  emporter  de  la  commanderio 
de  rilo-Verte,  et  on  leur  promit  que  loul 
ce  qu'ils  laisseraient  leur  serait  fidèlement 
gardé.  L'iirilre  pour  faire.sorlir  ces  religieux 
le  même  jour,  fut  exécuté  avec  beaucoup  de 
rigueur.  Ils  furent  conduits  à  Saint  Pierre- 
le-Jeune  au  milieu  d"une  troupe  de  soldats 
et  insultés  par  la  populace  ;  mais  la  pro- 
messe qu'on  leur  avait  fiite  de  garder  iidè- 
lement  ce  (ju'ils  laissaient  à  l'I  c-Verte  ne 
fui  pas  tenui-;  car,  le  18  mars  de  la  même 
année,  l'on  commença  à  démolir  la  com- 
inanderie et  le  ciiuveut,  cl  la  veille  de  la  fêle 
de  saint  Jian-Baptisle,  l'église  fut  entière- 
ment abattue,  les  meubles  furent  abandon- 
nés au  pillage,  et  les  magistrats  refusèrent 
aux  religieux  ([uelquis  tuiles  (|u'ils  deman- 
daient pour  réparer  la  couverture  de  quel- 
ques maisons  qu'ils  avaient  hors  leur  com- 
nianderie.  On  ordonna  au  commandeur  de 
remettre  entre  les  mains  des  échevins  les 
ciels  des  archives,  et  on  lui  fil  une  nouvelle 
défense  de  recevoir  des  novices.  Le  comman- 
deur en  porta  ses  plaintes  à  la  cour  impé- 
riale et  à  la  dièle  de  l'Iimpire;  mais  ses 
sollicitations  et  la  recommandai  ion  même 
du  roi  de  France  Louis  XIV,  qui  demandait 
pour  eux  quelque  dédommagement  aux  ma- 
gistrats, furent  inutiles.  Ce  ne  fut  qu'après 
la  paix  de  Wesiphalie  ,  qui  fut  conclue  l'an 
1648,  qu'on  leur  permit  de  retournera  l'Ile- 
Verle,  où  ils  Grenl  réparer  le  peu  de  bâti- 
ments (|ui  y  restait;  mais,  n'ayant  point 
d'église,  ils  furent  toujours  obligés  d'aller 
faire  l'office  divin  dans  celle  du  monaslèro 
de  la  Madeleine,  qui  était  éloignée  d'une 
demi-!ieue. 

Enfin,  l'an  IGSl ,  la  ville  de  Strasbourg 
s'éianl  soumise  à  l'oliéissance  du  roi  do 
France,  le  commandeur  de  l'Ile-Verte  fit  as- 
signer les  magistrats  au  conseil  supérieur 
d'Alsace  pour  être  dédommagés  des  torts 
qu'on  leur  avait  faits,  à  quoi  les  magistrats 
lures^t  condamnés  par  un  arrêt  du  11  juillet 
IGSd.  Mais  ces  magistrats  ayant  eu  recours 
au  conseil  d'étal  du  roi.  Sa  Majesté  porta  les 
uns  et  les  autres  à  un  accommodement  qui 
fut  fait  entre  eux  par  l'entremise  de  M.  de  la 
Grange,  intendant  d'Alsace  ;  et,  par  la  Iran- 
saclion  qui  fut  passée  l'an  1687,  les  magis- 
trats donnèrent  au  commandeur  et  aux  reli- 
gieux de  rile-Verte  l'église  et  le  monastère 
de  Saint-Marc,  qui  avaient  autrefois  appar- 
tenu à  des  religieuses  de  l'ordre  de  Saint- 
Dominique,  situés  dans  un  des  faui)Ourgs  de 
Strasbourg,  et  réciproquement  le  comman- 
deur et  les  religieux  cédèrent  aux  magistrats 
rile-Verte  et  le  reste  des  bâiimcnis  qui  sub- 
sistaient. Celle  transaction  fut  confirmée  par 
le  grand  maître  ,  et  par  ce  moyen  les  reli- 
gieux de  l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem 
sont  en  possession  du  monastère  de  Saiiil- 
Marc,  et  on  leur  a  donné  le  soin  d'une  cura 
pour  tout  le  faubourg  de  la  Porte  de  Saiul- 
Pii  rrc. 


S59 


DICTION^AinE  DES  ORDRES  RELIGIEUX. 


SCO 


Nous  nvons  dit  que  la  coinmaïuloric  de 
Scholesl.idl  dcpciul.iil  de  cclic  de  rile-Ni-rlc. 
C'ol;iil  autrefois  une  comtn  inderie  qui  devait 
être  pi'ssédéc  par  un  clievalier;  mais  elle  se 
trouva  lellcmcnl  cndeltée  dans  le  siv  siècle, 
•lue  le  },'rand-pri('ur  el  le  cliapiire  provincial 
rl'.MIeniau'iic  qui  se  tint  à  lleinibach  proche 
l.audaii,  l'an  l.'t'.t'J,  la  donnc^rcnt  au  couitnan- 
dcur  et  au  comenl  de  l'Ile-N  erte,  à  condi- 
lion  qu'ils  y  entretiendraient  deux  chapelains 
|)(jur  y  faire  l'ofllce  divin  ;  cecpii  fui  ciinfirnié 
par  le  {jrand  iiiiiîlre  i'Iiilhert  de  Naillac  l'an 
1V17.  Le  coniinandiur  et  le  couvent  de  l'ilc- 
Vert<',  après  en  avoir  acquilti-  les  délies,  la 
lirent  rebâtir.  Klle  souffrit  beaucoup  lors- 
que la  ville  fut  assiéfiéc  par  les  Suédois  ,  el 
les  reli|;ieus  en  ont  cédé  depuis  une  partie 
pour  faire  les  nouvelles  f.irtilicalions. 

Le  commandeur  de  l'Ile-Verle  et  élu  par 
les  reli;,'ieux  de  la  coinmandi'rie.  Il  se  sert 
dornemenis  pontificaux  par  un  privilège 
(|ui  lui  a  été  accordé  par  le  l'apc  (élément 
VIII  l'an  139G,  et  il  d.mne  la  tonsure  et  les 
quatre  mineurs  à  ses  religieux.  Il  a  séance 
dans  les  chapitres  provinciaux  d'Allemagne 
immédiatement  après  le  grand-prieur;  el, 
lorsqu'il  n'y  peut  aller  eu  personne,  le  pro- 
cureur qu'il  y  dèiiute  prend  sou  rang  après 
le  dernier  chevalier  au-dessus  des  autres 
chapelains  de  la  province.  Il  y  a  ordinaire- 
ment neuf  chapelains  dans  la  cominanderie 
de  rile-Verle  avi  c  le  commiiidenr  ,  el  deux 
dans  celle  de  Srhélesladt.  ils  sont  prèscnle- 
mcnt  habillés  comme  les  autres  cli.ipel'iins 
de  l'ordre.  Le  grand  prieur  d'.MIema'ne  a 
droit  de  vi>ite  tous  les  dix  ans  dans  ces  deux 
commanderies  :  M.  Kebel  en  est  présente- 
ment commandeur,  et  c'est  lui  (jui  nous  a 
envoyé  les  mémoires  dont  nous  nous  sommes 
servis,  et  qui  nous  ont  été  procurés  par  M. 
de  C.orberon,  premier  président  du  conseil 
d'Alsace. 

Voyez  Giacomo  Bosio.  Ilist.  del  Ord.  di 
S.  Giovanni  Girrosoliinilann,  secund.  edit. 
L'i  même  traduite  par  Maudouin.  Juan  Au- 
gust.  De  Funes  ,  Clironicn  de  la  Heliyion  de 
Saint-Juan  de  Jerusidcm.  Ilenric.  l'eulaleo, 
Hisl.  Milil.  Ord.  Joannitarwn.  Itliod.  tl 
Mflit.  h'qitit.  (jirolamo  Maruli.  Vit.  de 
Grand-Maestri  dt  Mtdia.  Francisco  Abcla. 
Denrittion  di  Malin.  Jacob  Foula  nus.  De 
liillo  Rhodio.  Matthieu  de  (loussancourt, 
Martyrologe  de  Malle.  Nabera! ,  Piivitéges 
octroyés  à  l'ordre  </'•  Malle.  Le  chevalier 
Lambert ,  Recueil  des  mi'tncs  privilèges.  Le 
commandeur  Discluseaux, /{cent  /  des  mi'mes 
l'ritiléijes.  Ijaspar  de  .Monloya,  Stahilimcuta 
MiUluin  facri  ord.  de  Suncio  Joanne  Jci  oso- 
lijm.  De  l'ougé  ,  Instructions  sur  les  devoirs 
(iesChevalieisde  Malle.  Va\iu,Thc(iire  d'hon- 
neur et  de  chtiatcrie.  Bernard  (jiustiniani , 
Jhst.  Cttronolog.  de  gli  Ord.  milit.  Sclioone- 
bcck,  Jlist.  des  Oi  d.  mitilnires. 

Dans  le  cours  du  xviir  siècle,  l'ordre  de 
iMalte  figura  de  plusieurs  façons,  suit  dans  les 
choses  religieuses,  SOI l  en  politique,  etc.  Nous 
filerons  (juelques  traits  <|ue  nous  allons  indi- 
quer, pi  II  tut  i|ue  lietaiiler  :  nous  cummenrons 
par  lus  dcmclv.'s  de  l'ordre  avec  l'inijuisilioii. 


Ces  trouilles  arrivèrent  sous  le  grand  maître 
Uaimond  l'èrellos,  en  1711. 

Le  tribunal  de  l'inquisition,  introduit  dans 
l'Ile  de  Malte  par  le  pape  (ïregoire  XIII,  y 
fut  d'abord  souffert  en  paix,  et  la  commis- 
sion fut,  en  premier  liiu,  confiée  à  l'évèque. 
Ouelque  temps  après,  l'inquisiteur  fut  un 
oflicier  de  la  cour  de  Rome,  auquel  on  avait 
prescrit  de  ne  procéder  que  conjointement 
avec  le  grand  maitre,  rèvi^'ijuc,  le  prieur  de, 
l'église  et  le  viec-ehancelier.  On  ne  prévit 
[las  que  les  in(|uisiieurs  (lourraient  dans  la 
suite  .ce  rendre,  pour  nous  servir  des  termes 
du  Mémoire  présenté  <à  Louis  XIV,  se  rendre 
7ion-seulemrnt  indépenitanls,  mais  innuppor- 
tahles  à  une  milice  formée  du  sang  le  plus  no- 
ble du  monde  chrétien,  et  dont  l'ordre  est  re- 
vêtu du  caractère  de  souverain  sur  ses  s  (jets. 
L'in(|uisiteur  Delei,  qui  avait  porté  ses  pré- 
tentions jusqu'à  deman'ier  que  le  carrosse  du 
grand  maitre  s'arrêtât  à  la  rencontre  du  sien, 
ne  crut  pas  devoir  souffrir  que  l'in^rinerie  de. 
la  religion  fût  plus  longtemps  exempte  de  sa 
juridiction.  Il  faut  que  nous  rappelions  ou 
que  nous  apprenions  au  lecteur  que  l'infir- 
merie de  la  religion  était  le  lieu  le  plus  pri- 
vilégié de  l'ordre;  le  maréchal  de  l'ordre  lui- 
même  n'y  pouvait  entrer  sans  laisser  à  la 
[lorle  son  bâton  de  commandant.  Ce  lieu  pri- 
vilégié et  confie  à  la  garde  des  Chevaliers 
français  les  plus  zélés  pour  leur  liberté,  ne 
reconnaissait  d'autre  aut<iritè  que  celle  du 
granil  hospitalier.  Tout  autre,  de  quelque 
qualité  (|u'il  soit,  ne  peut  y  entrer  sans  lais- 
ser à  la  porte  les  marques  de  sa  dignité.  Les 
officiers  de  l'inquisition  y  entrèrent  par  sur- 
prise, le  7  décembre  1711,  et  conimcncèrent 
à  y  faire  des  actes  de  visite.  Le  comm  indeur 
d'.Vvcrnes  de  Hncage,  infirmier,  averti  de 
celte  enireprise,  vint  proiiiptement  s'y  op- 
poser, les  fit  sortir  sur-'e-cliamp,  cl  prolcs'a 
de  nullité  contre  loul  ce  ijuils  avaient  pu 
faire  eu  son  absence. 

Le  grand  maître  envoya  le  grand  prieur 
Zondondari  en  qualité  d'ambassadeur  de  la 
religion  pour  représenter  au  |)a()e  les  jjrè- 
tentions  de  l'inquisiteur  qu'ils  qualilientd'in- 
jusies.  L'infirmier  lui-même  vint  en  Franco 
pour  instruire  le  roi,  qui  en  écrivit  vivement 
au  pape  pour  l'engager  à  desavouer  les  en- 
treprises du  député  romain.  L'imiuisileur  in- 
culpé ne  parut  pas  Irès-affeclé  de  ces  ru- 
meurs el  de  ces  plainles,  car  dès  l'année 
suivante,  Zondondari,  ambassadeur  exiranr- 
dinaire  à  Home,  renouvela  l'expression  de 
ses  griefs  contre  cet  inquisiteur,  qui  par  des 
patentes  accordées  à  un  grand  noiiibie  do 
Alaltais,  prétendait  les  exempter  de  l'obéis- 
sance due  à  leur  souverain,  chose  en  quoi 
nous  ne  pouvons  l'excuser  couime  dans  la 
première. 

Pendant  le  cours  de  ce  siècle,  la  religion, 
expression  consacrée  pour  désigner  l'ordre 
de  Malte,  montra  son  zèle  accoutumé  pour 
le  service  de  la  chrétienté  et  la  libération  des 
esclaves.  File  en  rendit,  à  diverses  reprises, 
un  gr.iiid  nombre  ,i  leurs  familles,  eut  plu- 
sieurs avantages  sur  les  vaisse.iux  nu  les 
corsaires  algériens,  cl  conclut  avec  Couslcii- 


1161 


MAL 


MAL 


S62 


iiiiople  une  trêve  de  vingt  ans,  b.isec  sur  six 
ariiiles  fort  avantageux  aux  Maltais,  aux 
esclaves  et  à  TEglise. 

En  nu,  Benoît  XIH  voulut  donner  au 
grand  niaîlre  et  à  tout  l'ordre  de  Malle  une 
preuve  éclatante  de  son  affection.  Il  dépêcha 
à  Malte  un  de  ses  camériers  d'honneur  pour 
présenter  au  chef  de  la  religion  Wsioc  et  le 
casque  béniis  solennellement  à  la  léte  de 
Noël.  L'estoc  est  une  épéc  d'argent  doré, 
longue  d'environ  cinq  pieds.  Le  casque  est 
une  espèce  de  bonnet  de  velours-pourpre, 
brodé  d'or,  garni  d'une  figure  du  Saint-Ks- 
prit,  en  perles.  Ce  noble  présent  fut  reçu 
comme  il  le  méritait,  et  le  grand  maître  y  vit 
un  encouragement  à  la  vertu  et  à  l'esprit  do 
son  ordre. 

Quoique  les  chevaliers  de  Malle  eussent 
gardé  en  général  l'esprit  de  leur  ins'itui,  on 
peut  facilement  soupçonner  qu'il  avait  été 
néanmoins  un  peu  altéré  par  l'esprit  du 
temps  au  dernier  siècle.  Ou  en  put  voir  la 
preuve  dans  une  circonstance  quenous  allons 
mentionner  ici.  On  sait  combien  l'archevêque 
de  Paris,  .M.  de  Beaumont,  eut  à  souffrir  des 
entreprises  de  la  philosophie,  de  l'irréligion 
et  du  jansénisme  L'ordre  de  Malte  lui  donna 
un  sujet  de  peins,  en  secondant,  d'une  ma- 
nière indirecte  du  moins,  une  momerie  ou 
singerie  des  céi  émonies  religieuses.  Crébillon 
mourut  en  t7G2:  les  comédiens  français,  en 
dépit  de  l'archevêque,  qui  n'eût  point  donné 
l'aulorisalionqu'ih  auraientvoulue,  firentcé- 
lébrer,  le  G  juillet,  un  service  solennel  pour 
le  défunt,  dans  réj;!isc  de  Saint-Jean  de  La- 
ir.in,  à  Paris,  dont  le  curé  n'était  point  sujet 
de  l'archevêque,  mais  sous  la  juridiction  de 
l'ordre  de  Malte.  Tout  Paris  s'amusa  de  cette 
farce  indécente.  L'archevêque  fit  des  repro- 
ches à  l'ordre  de  Malle  de  ce  scandale  donné 
dans  une  église  de  l'ordre.  U  se  tint,  le  jeudi 
15  juillet,  un  consistoire  chez  l'ambassadeur 
de  l'ordre;  ou  y  dé.ida  que,  pour  éviter  de 
perdre  un  droit  dont  M.  de  Beaumont  faisait 
des  plaintes  amères,  le  curé  de  Saint-Jean  de 
Latran,  quoique  soustrait  à  l'ordinaire,  par 
les  privilèges  de  l'ordre,  recevrait  une  puni- 
lion  du  scandale  donné  à  I  Eglise  de  Paris,  en 
communiquant  avec  des  histrions,  foudroyés 
tous  les  liuit  jours  au  prône  sous  le  bras  ec- 
clésiastique. En  conséquence  ce  curé  fat  con- 
damné à  Irois  mois  de  séminaire  et  à  deux 
cents  francs  d'aïucmie  envers  les  pauvres. 

Nous  avons  dit  à  l'article  des  religieux  de 
Saint-Antoine  de  Viennois  (Voy.  Antonins, 
loine  I",  205),  que  cet  institut,  pour  éviter  la 
ruine  dont  il  était  menacé  au  dernier  siècle, 
s'était  réuni  canoniquemenl  à  l'ordre  de 
Malle,  en  1775.  Celle  réunion  fui  fort  blâmée 
dans  l'assemblée  du  clergé  de  France,  avant 
qu'elle  fùl  effectuée. 

Les  chevaliers  de  Malte  abusèrent  de  leur 
puissance  après  cette  réunion,  en  dépouillant 
l'abbaye  chef-lieu  de  Saint-Antoine.  i..es  An- 
lonins  virent  l'imprudence  qu'ils  avaient 
commise,  s'en  repentirent  et  se  plaignirent, 

(t)  La  crois  des  frères  serv;ints  d'armes  dilTcrait 
lie  I  L'Ile  (les  Cljcv;illcrs  ;  rions  eu  dminerons  hi  figine, 
Jaiis  l'ariitlc  que  notre  vulume  do  supplciiieni  cou- 


le 20  juillel  1780,  au  cl<  rgé  de  France  alorn 
réuni  et  qui  signa  une  réclaitialion  contre  la 
réunion  des  deux  ordres.  Plaintes  et  récla- 
mations, tout  fut  inutile.  L'ordre  de  Malle 
rrsta  pauvrem(;nt  enrichi  des  ijuarante-deux 
maisons  données  par  les  Anionins;  la  révo- 
lution vint  bientôt  tout  engloutir. 

Dès  le  commencement  du  dernier  siècle, 
le  nombre  des  servants  d'armes  était  bien  di- 
minué; il  intervint  même  un  décret  qui,  jus- 
qu'à nouvel  ordre, en  suspendait  la  réception. 
Nous  ignorons  si  ce  nouvel  ordre  fut  j'imais 
donné  (i). 

Au  commencement  de  17G8,  les  Jésuites 
furent  chassés  de  Parme.  Piiilo,  grand  maî- 
tre de  Malle,  était  feudal.iire  du  royaume  de 
Naples.  Les  cours  d'Espagne  et  de  Franco 
obligèrent  celle  des  Deux-Siciles  à  poursui- 
vre l'institut  proscrit  jusque  sur  le  rocher  qui 
servait  de  boulevard  aux  plus  célèbres  che- 
valiers de  la  chrétienté.  Le  lâche  et  miséra- 
ble ministre  napolitain,  Tanucci,  s'empressa 
d'obtempérer.  Le  22  avril  17G8,  le  grand 
maître,  sous  l'influence  de  la  peur,  remlit  un 
décret  pir  lequel,  cédant  aux  sollicitations 
du  ministre  napolitain,  il  bannissait  de  l'île 
la  Compagnie  de  Jésus.  Les  Chevaliers  en  fu- 
rent, hélas!  bienlôl  bannis  eux-mêmes  et 
peut-èlre  pour  toujours.  Voici  en  abrégé 
l'histoire  de  leur  expulsion  due  aux  mesures 
in'qucs  de  Buonaparte  et  à  la  trahison  du 
dernier  grand  maître  qui  ait  régné  à  Malte. 

Ce  grand  maîtie,  Ferdinand  de  Hompcich, 
na(|nit  à  Dusseldorf,  le  9  novembre  17'»V, 
vint  à  Malle  à  l'âge  de  douze  ans,  el  fut  suc- 
cessivement page  du  grand  maître,  granil- 
croix,  min  sire  de  la  cour  de  Vienne  auprès 
de  son  ordre,  et  succéda,  en  1797,  au  su- 
périeur général  de  son  ordre.  II  fut  le  pre- 
mier Allemand  qu'on  eût  vu  à  la  tête  de 
l'ordre  de  Malle.  Les  idées  révolutionnaires 
avaient  fait  irruption  jusque  dans  celle  Ile. 
Uompesch  élail  loin  de  les  approuver,  mais 
la  faiblesse  de  son  caractère  l'empêcha  de  les 
éloigner  des  emplois  que  la  nullité  de  son 
prédécesseur  leur  avait  abandonnés.  Aussi, 
lorsque  Buonaparto,  en  juin  1798,  se  pré- 
senta devant  l'île,  ce  boulevard  de  la  chré- 
tienté était  dans  les  mains  de  Chevaliers  par- 
jures, gouvernant  au  nom  du  souverain  le 
plus  faible  qui  eût  encore  porté  le  liarrctone. 
Des  complots  de  trahison,  que  partageai'  ni 
les  Chevaliers,  et  surtout  le  commandeur  lîos- 
rcdon,  secrétaire  du  trésor,  amenèrent  celui- 
ci  à  se  rendre  auprès  du  général  Buonaparle 
et  à  signer  pour  son  ordre  une  honteuse  ca- 
pitulation. Le  grand  maître,  qui  avait  tout 
laissé  faire,  n'eut  plus  qu'à  se  soumettre. 
Quelques  jours  après  celle  capitulation,  Buo- 
naparle, se  promenant  autour  des  remparis 
de  la  Valetle  ,  en  admirait  la  construction 
et  la  force.  «  Il  faut  convenir,  lui  dit  un  di- 
ses aides  de  camp,  que  nous  avons  été  bien 
heureux  qu'il  se  soit  trouvé  du  monde  dans 
cette  ville  pour  nous  en  ouvrir  les  portes.  » 
On  ne  peut  sefigurerquelle  bassesse  le  grand 

sac  era  aux  Clicvalicrsde  Malle  dans  leur  élaiacluol, 
aiu=i  que  la  liijure  de  la  baiiuiorc  do  l'onUc, 


iimllrc  ilostitiié  mil  ."i  écriro  el  à  UMii(>i|;iicr 
sa  soumission  d  monie  s;i  rrconna'ssance  aa 
c:toyrn  Hiionnp.irlc.  Tout  fui  inutile,  le  vain- 
•(ucur  lit  ilispnraïlro  lous  1rs  insignes  tic  l'or- 
lire;  le  pran  I  maître  partil  el  mourut  mal- 
lieureuxcn  180;}.  Malle,  aujourd'hui  soumise 
.luv  An^'lais,  doil  sa  chute  à  lluonapailc 
I, "ordre  ne  fui  pas  éleinl  par  celte  défection. 
Voici  la  liste  chnino'oi;niue  de  ses  grands 
inailres. 

1.  Gérard  (le  hicnheureux),  natif  de  Mar- 
liiiucs,  en  l'roveiice,  directeur  de  l'hôpital 
éi^ibli  à  Jérusalem,  après  l,i  conqiiél<'  de  celte 
ville  r-T"  Godefnii  de  Rouillon,  en  lO'.t  i,  ist 
regardé  conmiuné  lenl  comme  le  |ireinier 
prand  maître  de  l'ordre  des  lluspiialiers  au- 
jourd'hui nommé  ordre  de  Malte;  il  meurt 
en  lllS. 

2.  Itrocard-Roper,  omis  dans  l'histoire  de 
Malle,  meurl  en  1131. 

.'1.  Kaymond-du-Puy.  ou  Delpuech,  (  ru  du 
Dauphiné,  meurt  en  UGO. 

'».  Auperde  Balben,  aussi  du  Dauphiné, 
meurt  en  1 103. 

5,  Arnaull  de  Coraps,  compatriote,  meurt 

en  1107. 

0.  i;  Iherl  de  Sailly,  ou  selon  d'aures  de 
Sully,  d'une  maison  de  Picardie,  a  ahdiiiuc 
en  1109. 

7.  Gaston  (  inconnu)  n'a  rien  fait  de  re- 
marquable, meurt  à  la  mémea  née,  1109. 

8.  Jouherl,  né  en  Syrie,  meurl  en  1179. 

9.  Uoger  de  Moulins  ou  des  Moulins, 
meurt  en  1187. 

10.  Garnier  de  Napoli,  en  Syrie,  meurl  en 
1188. 

11.  Krmengard  d'Api  ou  de  Paps,  meurt 
cnlIOi. 

\-2.  Geoffroy    de   Duison,    meurt  en   119». 

13.  Alphonse  de  rortiigvil  a  abdique  la 
même  année,  1 19V. 

1'».  Geoffroy  le  Ual,  Français,  meurt  eu 
liOO. 

!.">.  Guérin  de  Monlaigu,  de  l'Auvergne, 
neurt  en  12.50. 

16.  Bertrand  de  Texis  ,  ou  peul-ètre  Le 
1  csicr,  décédé  en  liiO. 

17.  Guérin  ouGuaria  (inconnu),  meurt  en 
1213. 

18.  Bcriraml  de  Comps  ,  du  D.iuphmc  , 
meurt  en  12V'». 

19.  Pierre  de  Willehride,  meurt   en  12')1. 

20.  Guillaume  de  Chaleauneuf,  Français 
d'ori!;iiie,  meurl  en  1200. 

21.  Hugues  doK.  vel.  du  Dauphiné,  meurt 
en  1279,  ou  selon  il'autres  en  1278. 

22.  Nicolas  dePOrpue,  meurt  en  1288. 
2.1.  .loandeVillicrs  ou  de  Villers,  Français, 

meurt  en  129V. 

2V.  Odon,  ou llupues,  ou  Eudc  de  Pins,  Pro 
venc.il,  meurl  en  129S. 

2,1   Guillaume  de    \  illaret,  anc  ennemeol 


OICTIONNMBI'.  DES  OUDUKS  IMXICIEUX.  W"'* 

28.  llcliindeVi  lencuve.  Provençal, meuil 
en  liV8. 

29.  Adeodad    Gozon,  meurt    en   déccmhre 
13;i3. 

30.  Pierre  de  Cornillon,  Provençal ,  meu;l 
en  1355. 

31.  Uoger  de  Pins,  de  la  provin.ode  Lan- 
guedoc, meurt  en  1305. 

32.  Baymond    Béranger.    du    Dauphiné, 
meurl  en  1373. 


(le  \  illeroc,  de  la   Provence,  meurl  en 


1303. 


,4  Ithodef,  nprct  la  conquête  de  l'Ue. 

20.  Touques  de  Villarel,  sous  ijui  se  fait  la 
conquête  de  l'île  de  Bliodes,  le  15  août  1310, 
>ilidii|uc  en  l'l23. 

27.  Maurice  de  Pa;,'nac,  1323  à  1320. 


33.  Bobert  de  Juliac,  Fançais  dorigiue, 
meurl  en  1370. 

3V.  Jean-Ferdinand  de  Ueredia  ,  Arago- 
nais,  meurl  en  1379. 

3o.  Bichard  Caraccioli,  Napolitain,  138^. 

30.  Philibert  de  Naillao,  Gascon,  meurl  eu 
1V21. 

37.  Antoine  Flurian,  ou  de  la  Bivière,  Ca- 
tal.in,  meurl  en  1V31. 

38.  Jean  de  Lassie,  Auverpnai,  meurl  m 
mai  1V5V. 

39.  Jacques  de  Milly,  compatriote,  meurt 
en  1V57. 

iO.  Pierre  Kaymond  Zacosla .  Gasiillan, 
meurt  en  1V70. 

VI.  Jean-Baptiste  Orsini,  Uoinain,  meurl 
le  8  juin  1V80. 

V2.  Pierre  d'Aubusson  de  Ui  maison  de  la 
Feuillade,  et  depuis  cardinal,  meurt  Ie30  juil- 
let 1503. 

IV3.  Kmery  d'Amboise,  frère  du  cardinal, 
meurt  le  3  novembre  1512. 

k'*.  Guy  de  Blimhefort,  Limousin,  meu:l 
le  2V  novembre  1513. 

45.   Fabrice  Carelto,l:alien, meurl  en  1521. 

A  Malle. 

V6.  Philippe  de  Villiers  de  l'Ile-Adam, 
P.irisien,  sous  qui  l'onlrc  per  1  lUiodes  en 
i:i22,  et  s'elablit  à  Malle  en  lo.lO,  meurl  lu 
21  août  de  l'an  153V. 

V7.  Perrin  du  Pont,  Piémoiitais,  meurt  eu 
1535. 

V8.  Didier  de  Sainl-ïaillc,  Toulousain  , 
meurt  en  1530. 

V9.  Jean  de  Homèdes,  Araponais,  meurt  le 
0  septembre  1553. 

50.  Claude  de  la  Sangle,  né  Fi  ançais,  meurt 
en  1557. 

51.  Jean  Vallel  de  Parisol,  appelé  a  tort  de 
la  Valette,  Languedocien,  meurl  le  21  août 
1508.  ,    ,. 

52.  Pierre  Guidalolti  de  Monte,  1  alien, 
meurt  en  1572. 

,53.  Jean  l.'Lviqiie  de  la  Cassière,  Auver- 
gnat, meurt  le  20  décembre  1581. 

5V.  Hupues  de  Loiibeus  de  Verdaie,  Pro- 
vençal, d'^depuis  C...,  meurt  le  12  mai  1.595. 

55.   Martin  de  Garzez,   Aragonais,    nuurl 

en  1001. 
50.   Alphonsede  \Vignacojirt,(.hampenois, 

meurt  le  IV  septembre  1022. 

57.  Louis  Mandes  de  \Vas<  oncelos,  Por- 
limais,  meurl  le  0  mars  1023. 

5S.  Antoine  de  Taule,  Provençal,  meurt  le 
|i»  luin  1030. 

.59.   P.iul  de  Vin^imilleLascaris, Castillan, 

meurl  le  IV  août  1057. 


805 


MAL 


MAL 


f-CD 


GO.  Marlin  de  Rcting,  Navarais,  meurt  le 
6  février  ICCO. 

61.  Annet  de  Cleniionl-Challes  de  Ccssan, 
Dauphinois,  niorl  le  2  juin  ICOO. 

6-2.  Raphaël  Gotoner  (  de  l'He  Mai'Oi-quc  ), 
me u ri  en  octobre  1663. 

63.  Nicolas  C.  Gotoner,  frère  du  précédeni, 
meurt  en  1080. 

64^.  GréRoire  Caraffe,  Napolitain,  meurt  le 
21  juillet  1690. 

65.  Adrien  de  WIgnacourt,  neveu  d'Al- 
phonse, meurt  le  4  février  1697. 

66.  Uemond  l'erellos  de  Rdcalull,  Arago- 
nais.  meurt  en  1720. 

67.  Marc-Antoine  Zondondari,  Si<  nnois, 
meurt  le  16  juin  1722. 

68.  Antoinc-.Vlanuel  de  Vilhena,  Portugais, 
meurt  le  12  décembre  1736. 

69.  Remond  d'Espuig,  de  l'île  Mayorquc, 
meurt  le  18  février  1741. 

70.  Emmanuel  Pinlo,  Portugais,  né  en 
1681,  élu  en  1741,  meurt  en  177i. 

71.  François-Emmanuel  de  Rohan,  de  la 
vénérable  lanp;ue  de  Fr;ince,  né  le  19  avril 
1725,  élu  grand  maître  le  12  novembre  1775. 

72.  Hompesh,  sous  qui  Malte  capitule  en 
1798,  abdique  en  1799. 

Ce  dernier,  arrivé  à  Triesle,  fit  d'inutiles 
protestations  contre  une  capitulation  qu'il 
n'avait  ni  siipulée  ni  ratifiée,  mais  à  laquelle 
il  n'avait  pas  eu  le  courage  de  s"opposer. 
Quelques  mois  plus  tard,  cédant  auv  instan- 
ces de  la  cour  de  Vienne,  pressée  elle- même 
par  la  Russie,  il  abdiqua  en  faveur  de  Paul  l", 
empereur  «cAismat/çue,  comme  si  la  polili(]uu 
pouvait  disposer  ainsi  d'un  ordre  religieux. 

L'ordre  ne  fut  pas  aboli  par  la  mort  obs- 
cure de  Hompesch  ou  Hompesh,  il  eut  un 
successeur  en  Sicile.  Après  la  restaiiraliou 
des  divers  El.its  en  Europe,  à  la  paix  conli- 
nenlale  de  1814,  des  vues,  des  plans,  lurent 
formés  sur  l'ordre  de  Malte.  Nous  lui  consa- 
crerons un  article  dans  notre  supplément  et 
nous  ferons  connaître  son  état  de  régénéra- 
tion, ou,  si  l'on  veut,  d'humiliation  actuelle. 
Vvyez  Maltk  au  Supplément. 

Mémoires  secrets  pour  servir  à  l'histoire  de 
la  république  des  lettres...,  tom.  I";  Mémoire 
sur  l'étal  religieux  et  sur  la  commission  éta- 
blie pour  les  Réguliers.  —  Histoire  des  cheva- 
liers Hospitaliers...  de  Malte,  par  M.  l'abbé 
deVerlot. — Histoire  des  Chevaliers.. .de  M  al  te, 
tome  Vlll,  par  Lefèvre,  avocat,  18J2.      li-o-E. 

MALTE  (Des  Religieuses  Huspitalières 
DE  l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem, 
DITES  de). 

§  I"  Leur  origine. 

L'institution  des  Relig  euses  Hospitalières 
de  l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  est 
aussi  ancienne  que  celle  des  Hospitaliers  du 
même  ordre  dont  nous  avons  parlé  dans  les 
articles  précédents  ;  car  djns  le  même 
temps  que  l'on  bâtit  à  Jérusalem  l'hâpiial 
proche  l'église  de  S.iinle-Marie  la  Latine, 
qui  était  destiné  pour  les  hommes,  et  dont 
Gérard  eut  la  conduiie,  on  en  bàlit  aussi  un 
autre  pour  les  femmes  à  côté  de  la  même 
église,  et  on  le  dédia  en  l'iionneur  de  sainte 


l\îaric-Mad<leinc.  La  bienheureuse  Agnès, 
dame  romaine,  en  était  supérieure,  lorsque 
la  ville  de  Jérusalem  fut  pri^e  par  les  cliie- 
liens  sur  les  infidèles,  l'an  1099,  et  on  y  ob- 
servait les  mêmes  règlements  que  dans  celui 
des  hommes.  Les  historiens  de  cet  ordre 
n'ont  point  marijué  ce  que  devinrent  ces  re- 
ligieuses après  que  la  ville  de  Jérusalem  eu 
été  reprise  par  Saladin,  Soudan  d'Egypte, 
l'an  1187.  Mais  l'année  suivanie  la  reiiW! 
Sanche  ,  fille  d'Alphonse,  roi  di-  Castille  ,  (|ui 
se  dis.iii  empereur  des  Espagnes,  et  fcminc 
d'Alphonse  H,  roi  d'Aragon,  surnommé  lu 
Ghaste,  fonda  à  Sixèni'  un  monastère  de  cet 
ordre  pour  de  pauvres  deinoiseiles  qui  y 
devaient  cire  reçues  sans  do'.  Ge  lieu,  qui  est 
siliié  entre  Saragosseet  Lérida,  appartenait 
à  l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem,  et  dé- 
pendait de  la  châtellenie  d'Emposte.  Getie 
princesse  l'obtint  de  dom  Garcias  de  Lisa 
pour  lors  châtelain  d'Emposte,  à  qui  elle 
donna  en  échange  des  terres  dans  le  terri- 
toire de  ïarragone.  Elle  fit  faire  de  superbes 
bâtiments  qui  furent  achevés  l'an  1190,  et 
les  religieuses  y  ayant  été  établies,  elle  leur 
donna  la  règle  des  Hospitaliers  de  cet  ordre, 
à  laquelle  elle  ajouta  beaucoup  de  choses 
tirées  de  celle  de  saint  Augustin;  ce  qui  fut 
approuvé,  non  sans  beaucoup  de  ditficulté  , 
à  cause  des  additions  qui  avaient  été  faites  à 
la  règle  par  Uajmond  Bérenger  ,  provisi  ur 
de  l'ordre,  et  confirmé,  l'an  1193,  parle 
pape  Gélestiii  ill,  par  une  bulle  dans  laquelle 
il  semble  insinuer  que  ces  religieuses  suivent 
la  règle  de  s.iint  Augustin  ;  car  on  y  lit  ces 
paroles  :  Imprimis  siquidem  statuenles,  ut 
ordo  Cononiius,  qui  secundum  Deum  et  beiiti 
Auguslini  regulam  in  eodem  Inco  noscitur  in- 
slitulus,  perpetuis  ibi  Icmporibus  inviolabili- 
ter  observetiir. 

Ge  monastère  est  comme  une  forteresse  oîi 
il  y  a  un  très  beau  palais  pour  la  prieure.  Il 
y  a  au  fond  de  la  salle  où  elle  donne  ses  au  - 
diences  une  estrade  élevée  sur  plusieurs  de- 
grés et  couverte  de  lapis,  avec  vingt-cinq  ou 
trente  carreaux  de  velours  cramoisi  pour 
asseoir  ses  dames  assistantes.  H  y  a  près  de 
soi&anle  religieuses  dans  ce  monastère,  qui 
ont  chacune  leur  appartement  séparé  pen- 
dant le  jour,  mais  elles  mangent  en  com- 
mun, et  dorment  dans  un  même  dortoir.  II  y 
a  aussi  un  grand  nombre  de  servantes  d'ol- 
fiee  qui  ne  font  point  de  vœux,  et  quinze 
données  qui  portent  la  demi-croix,  à  cause 
des  services  (|u'elles  ont  rendus. 

La  reine  Sanche,  après  la  mort  du  roi  son 
mari,  se  relira  dans  ce  inon.istcrc  avce.  la 
priiuesse  Douce,  sa  fille,  et  elles  y  prirent 
touti'S  deux  l'habit,  avec  quelques  aul.en 
princesseï  du  sang  royal.  La  princesse  lllan- 
che,  fille  de  Jaci|ues  II,  roi  d'Aiago.i,  y  piit 
aussi  l'habit,  et  en  fut  prieure;  et  cojiinie 
elle  était  encore  fort  ji'une  ,  on  lui  donna 
sept  ri  ligieuses  pour  êtr.'  toujours  avec  elle  : 
l'une  était  la  cusiode,  (jui  recevait  les  étran- 
gers ,  et  faisait  les  honneurs  et  les  atTairei 
particulières  de  la  prieure;  une  autre  était 
la  caniérière,  qui  la  servait  dans  sa  cliamlire  ; 
Une  était  coupière,  qui  lui  servait  à  Luire; 


SÙ7 


niCTIONNAlUF,  DKS  OIIDRES  lUXIGIKUX. 


£C8 


une  autre  avait  la  ((iialilé  lio  rcponleria  mi 
sinniiu'lièrc,  cl  los  ;iuirrs  la  servaient  à  table 
il  aux  autres  «Tliccs  de  la  maison  :  ce  qui  a 
ili'jiuis  pas.sé  en  cuutunie,  les  prieures  de 
Si\ène  ajanl  toujours  eu  les  uionies  offi- 
lit^rcs. 

La  sous-prieure  pouvorne  le  «Irrur.lc 
dortoir,  et  a  soin  des  revenus  et  des  distri- 
buMons.  1/efiard  ou  conseil  est  compose  de 
religieuses  que  I  on  appelle  las  seiioras  del 
Hxjuai  le,  et  qui  portent  la  croix  un  peu  plus 
grande  que  les  autres,  Tune  desquelles  est  la 
^ous-p^ieure  ;  ni.iis  la  plu-;  ancienne  y  pré- 
side. Lor^iue  la  prieure  meurt,  on  lui  fait 
des  obsèques  lorl  so  ennclles  pendant  sept 
jours,  après  lesquels  on  rompt  le  sceau  de 
ses  armes,  et  les  religieuses  élisent  une  autre 
prieure.  Le  cliâtelain  d'Iùnposte,  ou  un  coin- 
inaiideur  de  l'ordre  si,"  trouve  au  temps  de 
l'èleciion.  Il  mène  la  nouvelle  prieure  dans 
son  siège,  et  la  met  en  possession  de  l'église 
et  de  son  palai'^.  Les  tilles  qui  sont  reçues 
sont  obligées  de  faire  [ireuves  de  noblesse 
comme  les  Cbevalier»,  ce  qui  se  pratique 
aussi  parmi  les  religieuses  de  qucl(|ues  au- 
tres monastères  de  l'ordre;  mais  il  faut  que 
celles  d'Aragon  el  de  Catalogne  soient  de 
maisons  si  notoirement  nobles  et  illustres  , 
qu'elles  n'aient  pas  besoin  de  faire  de  preu- 
ves. Klles  sont  reçues  par  l'égard  sans  dol, 
et  la  [irieuie,  àson  avènement,  en  reçoit  une 
qui  s'a|)pelle de  grâce.  Les  jeunes  ont  le  nom 
d'écolièies,  et  les  anciennes  celui  de  mai- 
Iresscs.  Elles  ont  dix  prêtres  et  un  prieur, 
€'iux()uels  elles  ilonnenl  l'habit  de  l'ordre. 
I^lles  font  le  service  divin  avec  beaucoup  de 
pompe  et  de  majesté,  particulièrement  les 
jours  de  létes  doubles;  ces  jours-là  elles 
portent  des  rocliets  de  toile  fine,  el  tiennent 
à  la  niain  un  sceptre  d'argenl  :  elles  ont  un 
bréviaire  particulier,  el  se  lèvent  h  minuit 
pour  dire  matines.  La  prieure  pourvoit  aux 
liènefices  vacants,  et  donne  l'habit  d'obé- 
dien<:c  aux  prêtres  qui  les  desservent.  Elle 
visite  ses  terres  avec  ses  danics  assistantes  , 
el  se  trouve  aux  chapitres  provinciaux  de 
l'ordre  en  Aragon,  el  y  a  voix  et  séance  après 
le  châtelain  d'I'^iTiposle,  et  lorsque  le  chapi- 
tre se  lient  à  Saragosse  ,  la  cathédrale  lui 
envoie  sa  portion  canoniale,  comme  pré- 
bendière  de  celle  église. 

\'crs  l'an  rt70,ces  rel  gieusos  s'étanlsous- 
tiaites  à  l'oliéiss.ince  du  grand  m.iî.re,  elles 
reconnurent  iminèdialement  le  saint-siège. 
.Mais  cent  ans  apiès  ,  l'a  i  L'iCi'.t,  l'évéque  de 
Lerida  les  voulant  soumettre  à  sa  juridiction, 
parce  qu'elles  n'avaient  pas  de  supérieur, 
Jèronime  d'Oliho,  qui  était  pour  lors  prieure, 
donna  procuration  au  1'.  AI|ihonse  de  Slu- 
dillo  de  l'ordre  de  la  Uèdemplion  des  captifs 
et  ministre  du  couvent  de  Saint-Sauveur  en 
Ara^on  ,  puui  jirèler  en  son  nom,  en  ceiui 
d('  l'égard,  el  en  celui  du  couvent  de  Sixène, 
le-  sernienl  de  fideliié  et  d'obéissance  au 
grand  iiiaiire  ,  el  sur  (|uelques  demandes 
qu  elle  lit  ,  el  i\m  lui  furent  accordées,  elle 
s'engagea  par  ri  connaiss.ince  île  donner  à 
chaque  ih.ingeineni  de  grand  maitru  un  vase 
ti'aigeni  au  cumuiun  (ré  or. 


Comme  l'air  de  Sixène  est  fort  mauvais, 
le  pape  lîrégoirc  XIII  pcrniil,  l'an  1575,  aux 
religieuses  qui  seraieiil  malades  ,  de  sortir 
du  monastère  pour  aller  chez  leurs  parents 
se  faire  traiter  ,  cl  y  demeurer  jusqu'à  ce 
qu'elles  eussent  recouvré  leur  santé;  el 
coin  ne  il  est  (lorlé  par  leurs  règles  qu'elles 
doivent  être  enterrées  dans  le  cimetière  du 
monastère  ,  si  une  religieuse  meurt  chez  ses 
parenls  ,  on  apporte  son  corps  au  monas- 
tère pour  y  être  enterré  :  pour  lors  toutes  les 
rel  g;euses  sortent  professionnellement  hors 
de  la  clôture  jusqu'à  un  lieu  lixé  pour  le  re- 
cevoir; el  là  on  découvre  le  visage  de  la 
morte,  el  l'on  fail  jurer  ceuxqui  l'ont  portée, 
que  c'est  le  corps  de  la  religieuse  déiélée.  A 
l'exemple  de  ce  monaslère  de  Sixène  il  se  lit 
d'.iutres  èlahlissemenls  en  dillérenls  pays. 
Celui  de  Saini-Jean  de  (]arraria  en  la  vile  de 
Pi  e  fut  fondé  environ  l'an  1:200,  celui  du 
Notre-Dame  d'Algaira  enCalalogne  l'anlili, 
par  Saurine  de  Jorba  el  Eisa  de  Sagardia, 
dames  catalanes;  celui  de  Gènes  l'an  1230; 
celui  de  Elorence  sous  le  nom  de  S.iint-Joan- 
nin  l'an  1392,  par  le  grand  prieur  Caraccioli; 
celui  de  Noire-Dame  de  Caspe  en  Espagne, 
par  le  grand  maître  Ferdinand  d'Hcrédia  ; 
celui  de  Sévillc  l'an  1V'.)0,  par  Isabelle  de 
Léon  qui  y  prit  l'habit  et  en  fut  prieure  ;  ce- 
lui d'Evora  en  Portugal  par  Isabelle  Fernan- 
dez  l'an  1509  ;  celui  de  Civila  de  Penna  par 
Julien  Uidolphi  l'an  1523.  L'an  15'»0,  l'inlant 
de  Porliigal,  dom  Louis  ,  administrateur  du 
grand  prieuré  de  Portugal,  après  avoir  fondé 
un  collège  de  trente  chapelains  de  cel  ordre 
à  Fior-ùe-Hoses  ,  fil  aus.si  bâtir  un  autre 
monastère  du  même  ordre  pour  des  demoi- 
selles en  la  ville  d'Estremos,  el  il  y  a  aussi  à 
Malle  un  monastère  de  religieuses  de  cel  or- 
dre, qui   ne  font  point  preuves  de  noblesse. 

Les  relig'euses  de  cel  ordre  avaient  autre- 
fois cinq  ou  six  maisons  en  .\ngleterrc  ;  mais 
des  chanoines  réguliers  qui  demeuraient  à 
Uukland,  vivant  dans  le  relâchement, el  ayant 
même  assassiné  un  parent  de  leur  fondateur, 
le  roi  Henri  11  les  chassa  de  leur  monastère, 
et  !<;  donna,  l'an  1180,  à  (jarnier  de  Naples 
pour  lors  prieur  de  l'Iiôpital  de  Saint-Jean  à 
Londres,  pour  y  réunir  toutes  les  religieu- 
ses de  cet  ordre,  à  condition  qu'elles  ne 
pu'jrraieni  |ioinl  s'établir  dans  d'autres  mai- 
sons, et  qu'elles  ne  pourraient  avoir  que  celle 
de  Itukiand  qu'elles  ont  aussi  perdue,  lorsquii 
le  schisme  el  l'hérésie  oui  eié  introduits  dans 
ce  royaume.  La  France  possède  aussi  de  ces 
religieuses  ;  mais  comme  elles  sont  réfor- 
mées, nous  en  parlerons  en  particul.er  dans 
le  paragraphe  suivant. 

\'i)ici  les  cérémonies  qui  s'observent  à  la 
vèture  et  à  la  profession  des  religieuses  de 
cel  ordie.  .Vprès  que  le  prêtre  a  dit  l'off.  r- 
loire  de  la  messe,  cl  qu'il  a  béHi  les  habits  do 
celle  qui  doit  faire  profession,  celui  qui  a 
droit  de  la  recevoir,  lui  dit  :  Sœur,  que  de- 
mandez-vuiisY  Elle  répond  :  Je  dimniide  d'e'Ire 
reçue  en  In  compmjnic  dis  saiirs  relK/ieiiseï  dx 
riii)pilal  df  Si.iitl-Jein  de  Jérusalem.  Il  lui 
demande  encore  si  elle  a  reçu  déjà  cet  ordre 
de  quelque  autre  personne,  el  ayant  répondu 


800 


MAL 


MAL 


87/) 


(jiic  non,  il  Ciinlimic  ilc  lui  dire:  Bien  que  ce 
que  vous  demandez  soil  cliose  de  grande  im- 
portance. Il  qui  ne  s'accorde  pas  à  tous;  peut- 
élre  que  cette  votre  demande  viendra  en  ejj'el, 
lorsque  vous  noua  promettrez  observer  tout  ce 
i/ue  par  nous  votis  sera  ordonné,  et  première- 
ment nous  désirons  que  vous  soyez  diligente 
au  service  de  Dieu  et  de  la  religion.  Me  pro- 
mettez-vous cela  t  La  postulanie  .  Oui,  Mon- 
sieur. Le  rccevaiil  :  l'ui.^que  vous  noni  pro- 
mettez cela,  prenez  ce  rosaire  au  nom  de  Die  i. 
Père,  Fils  il  Saint-Esprit,  avec  let/ucl  vous 
prierez  pour  l'aur/n.entnlion  de  celte  sacrée 
religion,  pour  la  prospérité  de  Monseigneur 
l'émincnlissime  grand  maître,  et  de  tous  les 
frères  chevaliers  et  autres  religieux  de  cette  sa- 
crée religion,  pour  la  victoire  contre  les  Turcs 
et  infidèles,  persécuteurs  de  l'Eglise  de  Dieu, 
offrirez  l'âme  à  Dieu,  cl  le  corps  aux  fatigues 
de  ce  monde  pour  le  service  de  Noti  e-Seignew 
Jésus-Clirisl  ;  et  Dieu  vous  en  fasse  la  grâce. 
La  pureté  de  ce  rosaire  signifie  que  la  bonne 
religieuse  doit  être  pure  et  nette  de  tous  vices, 
et  principalement  être  honnête,  car  l'honnê- 
teté est  toujours  accompagnée  de  quatre  ver- 
tus. La  première  est  la  prudence,  par  laquelle 
vous  vous  souvenez  du  passé,  ordiniez  le  pré- 
sent, et  pourvoyez  au  futur.  Lu  seconde  est  la 
justice,  ai  ec  laquelle  vous  conservez  les  choses 
publiqui s.  La  Iroisièmeesl  ta  force,  avec  lai/wlle 
volts  supporterez  les  travaux  de  ce  monde, 
comme  a  fait  suint  .Ican- Baptiste,  sous  le  nom 
et  enseigne  duquel  vous  ornerez  et  décorerez 
voire  vie,  afin  que  comme  il  a  vaincu  le  monde, 
le  diable  cl  la  chair,  ne  ci  algnant  point  de  prê- 
cher la  vérité,  de  même  à  son  imitation  devez 
suive  la  lolonté  divine,  avec  la  jUflle  au  be- 
soin tém  lignerez  cl  démontrerez  votre  cou- 
r  ge  et  magnanimité.  Laquutricme  est  la  tem- 
pérance, avec  laquelle  vous  modéreiez  toutes 
choses,  afin  que  row  puissiez  êire'appelée  par- 
fuite  religieuse,  si  bien  que  vous  vous  munirez 
et  ornerez  ce  ces  vertus,  les  prisant  et  les  te- 
nant toujours  en  la  mémoire.  Itéveillez-vow, 
ma  sccur,  el  ne  dormez  point  aux  vices  ;  mnis 
soyez  vigilante  à  la  foi  de  Jésus-Christ,  en  la 
bonne  et  louable  renommée,  et  ulienttve  aux 
bonnes  prières  et  oraisotis.  Il  lui  donne  ensui  c 
un  lltimbeau  allumé,  en  lui  ^'isaul:  Prenez 
ce  flambeau,  et  avec  la  grâce  du  Sainl-Espril, 
allez  ouïr  le  reste  de  la  messe. 

Le  prêtre  ajant  fini  la  messe  où  celle  q:ii 
doit  fdiie  profession  a  communié,  elle  re- 
tourne vers  celui  qui  la  doit  recevoir,  et  (pii 
lui  dit  encore  :  Sœur,  que  demandez-vous? 
iîlle  répond  :  Je  demande  la  soc  été  et  compa- 
gnie des  sxurs  de  la  sacrée  religion  de  l'hôpi- 
tal de  Saint-Jean  de  Jériisalem.  Le  recevant 
lui  dit  :  Votre  demande  est  de  grande  impor- 
tance, et  qui  ne  s'octroie  pas  à  tous,  el  qui 
peut-être  ne  vous  sera  pas  refusée,  nous  con- 
fiantqu'avec  amour  et  charité  vous  vous  exer- 
cerez aux  œuvres  de  miséricorde,  au  service  de 
l'hôpital  et  de  votre  religion,  à  laquelle  le 
sainl-siége  apostolique  el  les  princes  chré- 
tiens ont  donné  de  très-grandes  libertés,  pri- 
vilèges el  revenus,  afin,  que  les  serviteurs  de 
Dieu  et  de  la  religion,  enflammés  de  vraie  cha- 
rité, mère  de  toutes  les  vertus,  s'elforccnl  avec 


double  service  de  servir  l'hospitalité  et  milice 
pour  la  défense  de  la  sainte  fui  catholique  con- 
tre ses  ennemis,  afin  que  la  servant  avec  affe- 
ction et  fidélité ,  elle  donne  la  récompense  de 
la  vie  éternelle,  ainsi  comme  en  observant  les 
commandements  de  Dieu,  de  l'Eglise  el  de  no- 
tre religion,  vous  sera  appareillé  et  préparé 
le  paradis.  Il  serait  long  à  vous  raconter  les 
travaux  qu'endurent  les  s  lurs  de  notre  reli- 
gion; mais  sculen  ent  en  une  chose  on  conclut 
le  tout  :  c'est  que  vous  avez  à  tous  dépouiller 
de  rot'  e  liberté,  el  la  donner  et  mettre  es  mains 
de  celle  qui  vous  sera  dé/inlre  i  our  siipériew  e, 
laquelle  sera  femme  comme  vans,  et  pourrait 
bien  être  qu'elle  fût  différente  à  votre  condi- 
tion, ci  laquelle  vous  avez  d'obéir  :  en  êtes- 
vnits  contente?  La  novire  répond  :  Oui,  Mon- 
sieur, j'en  suis  contente.  Le  recevant  conli- 
niie  :  Puisque  vous  vous  dépouillez  de  voir» 
liberté,  nou-  voulons  savoir  si  vous  l'avez,  et 
pre  lez  bien  garde  à  répondre  arec  vérité  à  toiil 
ce  que  par  nous  vous  sera  requis  et  demandé. 
Il  lui  demande  si  elle  n'est  point  obligée  par 
quelque  vœu  à  d'autre  religion,  si  elle  n'a 
point  contracté  mariage,  si  elle  n'est  point 
obligi'e  à  de  grandes  sommes,  et  si  clic  n"a 
(loint  commis  d'homicide,  à  quoi  ajant  ré- 
pondu ncg.itivcmeni,  il  lui  dit  :  Ma  sœur,  pre- 
nez bien  garde  ;  car  trouvant  le  contra  rt 
en  que'que  temps  que  ce  soit  de  ce  qu'ai  ez 
nié,  avec  très- grande  infamie  et  déshon- 
neur vous  sera  levé  l'habit,  el  comme  mem'  rc 
pourri  serez  chassée  de  n:  tre  compagnie.  De 
façon,  qu'étant  comme  vous  dites,  vous  rece- 
vons bénignemenl,  et  selon  la  forme  de  nos 
statuts  ne  vous  promettons  autre  que  pain  el 
eau,  et  huml'le  vêtement. 

Les  religieuses  chantent  ensuite  l'.inticnnt» 
Feni,  sponsa  Chrisli,  cl  font  la  procession 
auluur  du  cloître,  conduisant  la  novice  qui 
tient  une  palr^ie  à  la  main,  et  est  à  c()lc  de  la 
prieure.  Au  retour  de  la  procession  cl  en  la 
présence  des  assistants,  on  la  dépouille  d.; 
ses  riches  habits  qui  sont  ordiiinireinent  or- 
nés de  pierreries  ei  autres  bijoux  nu'elliî  tient 
entre  ses  mains  lorsqu'on  lui  a  ôié  ses  beaux 
habits  ;  et  se  tenant  debout,  eile  dit  à  haute 
voix  pardeuK  différentes  fois:  Vatiitas  vani- 
tatum,  cl  à  la  troisième  fois,  haussant  encore 
sa  voix,  cl  disant  :  Vnnilas  ranitatum  et  om' 
nia  lanitas,  elle  les  jette  dans  un  bassin  à  ses 
pieds.  La  prieure  assistée  de  la  sous-prieu  ti 
lui  coupe  ensuite  les  cheveux,  ou  lui  donne 
riinbil  de  religion,  el  la  novice  en  étant  re- 
vêtue prononce  ses  vœux  en  la  manière  sui- 
vante, ayant  les  mains  sur  le  crucifix  du 
canon  de  la  messe  qui  est  dans  le  missel.  Je 
iS'.  promets  et  fais  vœu  à  Dieu  tout-puissant, 
et  à  la  Vierge  Marie,  sa  mère  immaculée,  et  â 
saint  Jeun-Baptiste  notre  patron,  d'obserier 
perpétuellement  obédience  à  quelque  religieuse 
de  l'ordre,  qui  par  la  religion  me  sera  donme 
pour  supérieure,  vivre  sans  propre,  el  être 
chaste,  selon  la  règle  de  ladite  religion. 

Le  recevant  lui  dit  ensuite  :  A  cette  heure 
je  vous  connais  vraiment  reçue  au  nombre  Je 
nos  sœurs  religieuses.  Llle  répond  :  Je  m' es- 
time el  répute  telle.  Le  recevant  continue  de 
dire  :  Dorénavant  nous   vous  faisons  tl  vus 


571 


PICTIONNAIIIE  DES  OUOKES  RELIGIEUX. 


873 


pnrenls  parlicipnnh  de  toutes  les  indiilfienres 
et   yràcet   concédées  à  noire  itUyion  par  le 
*aint-sié(je  aposl(di/ue,  et  par  pri  mure  o'u-- 
dience,je  tous  commande  de  porter  ce  missel 
sur  l'aittel,  puis  me  le  reportez.  HUe  obéit,  et 
le   recevant  lui  dit  après  qu'e  \c  a  re|iorlé 
le  missel  :  \ous  voulans  encure  i/ue  soyez  at- 
tenliie  à  l'oraison,  (I  pour  ce,   diicz   iliaque 
jour  le  grand  office  selon  l'ordie  de  la  sainte 
Ki/ti.-e,  du  concile  de  Trente,  usa(jc  cl  coutume 
de  cr  couvent,  et  cnt  cinquunleVaier  iiosler, 
ou  le  petit  office  de  Sotre-Dame,  ou  des  morts 
pour  chaque  sœur  ou  frère  qui  viendra  à  m  u- 
rir.  En  lui  tnoiitr;inl  le  niaiitcau  :  t'Vsf  votre 
propre  habit,  c'est  la  forme  de  votre  pénitence. 
Ceci  vous  représente  la  tris-dure  et  âpie  vie 
de  notre  patron  saint  Jean-Baptiste.  Ceci  re- 
présente son  hiibil,  lequel  était  de  peau  de 
chameau,  siijni/iant  que  n  ii<<  devons  laisser  le 
temps  de  péché,  el  sans  enip.'c'iemenl  suiv:e  la 
vertu.  Eli  lui  niuntrant  1rs  hraj  du  inaiileau: 
Ce  sont  les  bras  qui  vous  restreindront  et  lie- 
ront, signifiant  que  vous  serez  reslriinte  et  liée 
de  la  vraie  obé licnce  de  rode  supérieure,  et  â 
t'ubservatice  des  auvres  de  l'hospitalité,  et  au- 
tres, comme  vous  a  été  dit.  Eu  lui  montrant 
la  croiv  du  manteau  :  C'est  le  signe  et  l'habit 
de  la  vraie  croix,  leqwl  je  vous  commande  de 
porter   continuellement  sur  vos  habits  toute 
votre  vie  :  cette    croix   I lanclie  signifie  que 
toutes  nos  œuvres  doiv-nt  être  pures,  netle>  cl 
blanches.  Ces  huit  pointes   signifient  ht  huit 
béatitudes  qui  nous  sont  promises,  $i   nous 
portons  ce  sigtjc  au  caur  avec  ardeur  tl  fer- 
veur, à  cet  effet   la  vous  mettons  sur  le  côté 
gauche,  afin  que  l'ayez  toujours  dans  votre 
cœur,  et  avec  icelui  vous  decex  être  ensevelie. 
En  lui  montrant  le  cordon  :  Ce  cordon  repré- 
sente que  sautent  nous  nous  devons  souvenir 
de  la  Irès-ûpre  mort  et  passion  de  i.oire  Sau- 
veur Jésus-Christ.  Ce   qui  .■•erre   le  manteau 
signifie  la  corde  avec  laqwile  Jésus-Christ  fut 
lie.  (e  sont  les  fouets,  ceci  est  lu  colonne,  ceci 
est  l'éponge,  et  ceci  est  la  croix,  en  laquelle 
potir  l'amour  de  vous  il  prit  mort  et  passion. 
En  lui  liant  le  cordon  au  cou  :  Prenez  donc, 
ma  sœur,   le  jouq   de  î\'olre-Seigneur  Jésus- 
Christ,  lequel  est  beaucoup  léger  et  doux,  et  qui 
vous  conduira  à  la  vie  éternelle  au  siècle  des 
siècles.  Ainsi  soit-il.  En  lui  mettant  le  voile 
noir  sur  la  tèle  :  Recevez,  ma  sœur,  le  suint 
voile  de  la  virginité  qui  vous  conduise  à  la  vie 
éternelle  dans  tous  les  siècle*  des  siècles,  .{.nsi 
soit-il.  La  professe  retourne  ensuite  à  l'autil 
pour  recevoir  la   bénédiction  du   prètic  qui 
dit  sur  elle  quelques  oraisons,   après   le^- 
quellcsclle  embrasse  les  religieuses,  et  avant 
que  de  manf^er.  clic   va  faire  olicdicnce  au 
ref<cloire  avec  du  pain,  de  l'eau  el  du  sel. 

Anciennement  ces  religieuses  avaient  pour 
liahilliMiient  une  robe  rouge  avec  un  nian- 
leau  à  bec  qui  élait  no  r,  et  sur  lequel  était 
la  croix  hlantlie  a  huit  pointes  ;  mais  depuis 
l.i  prise  (11-  Itliodes  i  Iles  ont  pris  l'Iiabilli-uient 
eiitièieiiienl  noir  en  signe  de  dtuiil.  Dans 
quelques  monastères  les  religieuses  de  cet 
ordre  purltint  une  robe  noire,  avec  un  sca- 


pulairc;  dans  d'autres  elles  n'ont  que  In  robe 

san^  scapulaire  avec  une  petite  croix  blan- 
clie  à  huit  pointes  sur  le  côte  gauclie.  Pans 
le>  cérémonies  et  au  clueur  queliiucs-i'nes 
portent  le  manteau  à  bec  avec  les  co  d  iis. 
où  sont  représentés  les  mjsières  de  la  pas- 
sion de  Notre-Seigneur  (1).  Elles  ont  eu  qurl- 
qucs  saintes  de  leur  ordre,  comn-e  sainte 
I  11  re  décédéc  au  monastère  de  Beaulieu  en 
Traiice,  sainte  L'baldesque  décc  lée  dans  le 
iiiona:.ière  de  Pisc  en  Italie,  et  sainte  Tosrano 
morte  à  Vérone. 

Giacomo  Hcsio,  llist.di  S.  Giovanni  Gie- 
rosulomit.  tom.  IH,  edil.  de  l  un  1G8V.  Anne 
de  Naberat ,  Privilèges  de  l'ordre  de  Malte. 
Matthieu  de  Goussancourt ,  jl/nr/j/ro/oy.  des 
('hevaliers  de  Malle,  el  l'biiip.  Uonanni  ; 
Catalog.  Ordin.  religius.  part.  ii. 

§  II.  Des  Religieiises  flospitalières  et  Cheva- 
lières Réformées  de  l'ordre  de  Saint-Jean  de 
Jérusalem  en  France,  arec  la  vie  de  la  véné- 
rable Mère  Galliolle  de  Gourdon-Genotiil- 
lacet  Vaillac  dite  de  Sainte-Anne,  leur 
réformatrice. 

Dès  le  treizième  siècle  il  y  avait  en  France 
des  religieuses  Hospitalières  de   l'ordre  de 
Siiiit-Jean  de  Jérusalem  ,  qui  furent  établies 
dans  l'hc^ipital  de  Beaulieu  en  Qucrcy  au  dio- 
cèse de  Cahors.  Cet  hôpital  ne  lut  pas  d'abord 
bâii  pour  ces  religieuses:  ce  n'était    qu'un 
petit  hospice  que  Guiberl  de  Thémines,  che- 
valier, du  consentement  de  l'once  d' Anl  liac, 
évéque  de  Cahors,  londa  vers  l'an  12.!.'i  pour 
y  recevoir  les  pauvres  pèlerins.  Guibert  de 
Thémines,  son  uls,  augmenta  les  revenus  do 
cet  hôpital ,  où  il  exerça  lui-même  l'hospiia- 
lité   avec  son  épouse  Angliiie  de   liaras.  Il 
lui  donna,    l'an  \-2'*^,  du   consentement  de 
Géraud  de  Raras,  évéque  de  Cahors,  la  dtnic 
de  l'église  d'isscndolus  dont  il  était  seigneur: 
cette  paroisse  élanl  située  dans  la  terre  de 
'i'Iiémmes,  qui  a  depuis  été  érigée  en  mar- 
quisat par  le  roi  Louis   \I11   en    faveur   <lii 
l'once  (le  Lauzières  de  Tliemines,  maréchal 
de  France  ,   (lui  descendait  par   les  (emmes 
de  CCS  pieux  fondateurs.  Emeric  de  tîoudour. 
Chevalier,  donna   aussi  à  cet   hôpital,    l'an 
1259,  les  dîmes  de  la  paroisse  de  Uiéges  ,  et 
la  même   année  Guiberl  de  Théinines  céd.i 
cet  bôpil.il  avec  toutes  les  dépendances  aux 
Hospitaliers  de  l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jé- 
rusalem, qui  y  mirent  des  religieuses  de  cet 
ordre,  dont  Angline  de  Haras  ,  épouse  de  (o 
Guiberl  de  Thémines  ,  fut  première  prieure, 
ajant  pris  l'habit  de  cet  ordre  du  consenle- 
meui  de  son  mari.  Ce   ne  fut  pas    la    seule 
mariiue   d'estime   qu'il    fil   paraître    envers 
l'ordre  de  Saint-Jean   de  Jéru>alein  ;   car   il 
fonda  aussi  un  autre  hôpital  à  Kicux  dans  le 
même  diocèse  de  Cahors  ,  où  l'on  mit  encore 
des  religieuses  du  même  ordre,  au(]uel  p.f 
reconnaissance  ce   liuibcrt  fut  associé  l'an 
r2'J8.  Il  mourut   peu  de   temps  après,  et  fut 
enterré  dans  l'église  de  l'hôpital  de  ISeaulieu  , 
Connue  il  l'avait  ordonné  par  son  testament 
de  l'an  1287  ,  par  lequel  il  fonda  une  messo 


(I)   Vu>j.    ï  \t  lin  du  vul.,  les  II" 


!IS. 


875 


M\l, 


MAL 


:-i 


à  pcrpéluilô  dans  celle  (';;li9i;  pi)iir  lo  repos 
lie  son  âme. 

'I"e!Ic  a  clé  l'origine  du  célèbre  liopilnl  de 
Peaulieii,de  l'ordre  de  Sainl-Jean  de  Jérusa- 
lem ,  dont  Angline  de  Baras,  épouse  de  Gui- 
berl  de  Tliémines,  fut  la  première  prieure. 
Elle  le  gouverna  jusqu'en  l'an  12%  ,  qu'Vii- 
glinc  de  Tliémines  ,  sa  fille  ,  lui  succéda,  lil  e 
se  trouva  au  chapitre  provincial  de  l'ordre 
qui  se  tint,  l'an  1298,  dans  la  commanderie 
de  la  Tronquière  ,  où  le  grand  mailrc  Guil- 
laume de  ^  illarcl ,  qui  élail  grand  prieur  de 
Sainl-Gilles,  lorsqu'il  fut  élu  l'an  12'J6,  lui 
présenl.  Il  soumit  les  deux  hôpilaus  de 
Beaulieu  et  de  Fieux  à  la  visite  et  correction 
du  grand  prieur  de  Saint-Gilles  et  de  ses  suc- 
cesseurs. Il  accorda  plusieurs  privilèges  à 
celui  de  lieaulicu  ,  ordonnant  entre  aulres 
que  la  prieure  de  ce  monasîère  serait  grande 
prieuredelous  les  aulres  monastères  defill  'S 
de celordre  en  France  ,  e!  qu'ils  lui  payeraient 
chacun  un  écu  de  ledevaiice.  Il  fixa  le  nom- 
bre des  religieuses  de  cet  hôpital  à  quarante , 
y  compris  la  [rleure,  et  à  douze  celles  de 
Fieux.  Il  ordonna  que  lorsque  la  prieure 
sérail  décédée  ,  les  religieuses  procéderaient 
à  l'élection  d'une  autre  prieuie  dans  le  terme 
de  quarante  jours,  et  que  l'élection  serait 
confirmée  par  le  grand  prieur  de  Saint-Gilles, 
ce  qui  fui  autorisé  dans  la  suite  par  une  dé- 
claration du  roi  Louis  Xlll,  du  Ojuin  lC2o, 
homologuée  au  grand  conseil  la  même  année. 
Ce  grand  maître  étant  à  Limisson  dans  l'île 
de  Chypre,  où  l'ordre  faisait  pour  lors  sa  ré- 
sidence, tint  un  chapitre  général  l'an  1301  , 
dans  lequel  il  confirma  t  ui  ce  qu'il  av  lit 
fail  dans  le  chapitre  provincial  de  la  Tron- 
quière de  l'an  12D8,  louchant  ces  deuxhôpi- 
t. iU\  de  Beaulieu  et  de  Fieux.  Plusieurs  per- 
sonnes ont  dans  la  suite  enrichi  pir  leurs 
libéralités  celui  de  Bejiulieu.  Les  prieurés 
de  Saint-Médurd ,  de  Fonlènes,  de  Marlel  et 
de  Barbaroux,  y  furent  unis,  ci  même  l'hô- 
pital de  Fiiux  y  lut  aussi  uni  au  conimcnce- 
uient  du  dernier  siècle,  avec  tous  les  biens 
qu'il  possédait.  D'ahord  ce  ne  fut  p'.us  qu'une 
annexe  de  celui  de  Beaulieu,  mais  il  fut 
quelques  années  après  enlièrernent  suppri- 
mé ,  et  SCS  biens  unis  à  l'hôpital  de  Beaulieu. 

Ce  fut  dans  cet  hôpital  de  Beaulieu  que  la 
vénérable  mère  Galliotte  de  Gourdon-Ge- 
nouill.ic  et  Vaillac  prit  l'habit  de  l'ordre  de 
Sainl-Jean  de  Jérusalem.  Elle  était  fille  rie 
Louis  de  Gourdon-Genouillac,  comte  de  Vai  - 
Iac,etdesa  première  femme,  Anne  dcMonbe- 
ron,  qui,  étant  enceinte  d'elle,  en  fit  uue  of- 
frande à  Dieu,  et  aussitôt  qu  elle  l'eut  mise 
au  monde,  qui  fut  le  5  novembre  1589,  elle 
renouvela  le  don  qu'elle  en  avait  fait.  Etant 
âjjée  de  cinq  mois  elle  fut  portée  dans  l'hô- 
pital de  Beaulieu  pour  y  être  nourrie;  et  à 
l'âge  de  sept  ans  elle  y  prit  l'Iiabil  denovire. 
Elle  avait  déjà  pratiqué  dans  un  âge  si  ten- 
dre les  vertus  les  plus  excellentes  cl  les  plus 
relevées,  et  entre  autres  l'humilité  en  ren- 
dant des  services  et  des  respects  aux  reli- 
gieuses, comme  si  elle  eût  été  leur  servante; 
mais,  se  voyant  revêtue  de  l'habil  de  religion, 
elle   s'adonna  entièrement  à  la  pratique  des 

OlCliONNAlUF    ll!;S    OrPHES     RELlGil£i;X.     13. 


verlus  convenables  à  l'élal  iiu'cHk  avait  em- 
brassé. Ouatre  ou  ciiHj  ans  apiès  qu'elle  eut 
pris  l'habit,  son  père  voulut  qu'elle  fit  \\i\t- 
fession,  quoiqu'elle  n'eût  pas  encore  douze 
ans  accomplis.  Elle  ne  savait  pas  que  le  con- 
cile de  Trente  avait  déterminé  que  les  pro- 
fessions faites  avant  l'âge  de  seize  ans  se- 
raient nulles,  et  n'auraient  point  de  force 
pour  obliger;  mais  comme  si  elle  en  eût  eu 
connaissance  par  un  mouvement  secret  du 
Saint-Esprit,  elle  s'y  opposa.  Cependant, com- 
me on  lui  reprochait  que  ce  n'était  que  pour 
iiuitter  la  religion  afin  de  se  marier,  elle  fit 
profession  dans  ce  bas  âge,  pour  montrer 
qu'elle  ne  voilait  [)oinl  d'autre  époux  que 
Jésus-Christ. 

Le  monastère  de  l'hôpital  de  R'aulieu  n'c- 
lant  pas  reformé,  comme  il  l'a  été  depuis  par 
son  moyen,  on  n'avait  pas  voulu  lui  couper 
1rs  cheveux  à  cause  de  leur  beauté;  mais 
c'était  un  coup  rie  la  Providence,  qui  voulait 
qu'elle  eût  (Ile-même  le  mérite  de  celle  ac- 
tion généreuse,  carelle  se  les  coupa  elle- 
même  ([uelque  temps  après  sa  profession,  ei 
les  jeta  au  feu  pour  en  (aire  un  sacrifice  à 
Dieu.  Voyant  que  la  règle  de  l'ordre  de  Saint- 
Jean  de  Jérusalem  n'était  point  observée  dans 
son  monastère,  elle  prit  la  résolution  rie  le 
quitter  pour  entrer  dans  celui  des  Feuillan- 
lini.s  nouvelleinentétablics  à  i'oulouse;  mais 
n'ayant  pu  exécuter  son  dessein,  à  cause  que 
le  comte  de  Vaillac  son  père  s'y  opposa,  cl  « 
s'adonna  aux  pratiques  de  l'oraison  et  de  la 
mortification.  E.le  employait  oïdinairemenl 
quatre  heures  par  jour  à  la  méditation,  les 
genoux  en  terre,  et  demeurait  une  demi- 
heure  en  prières,  le  vis.Tge  prosterné  coiitm 
terre.  Elle  récitait  tous  les  jours  le  chapelet 
de  la  sainte  Vierge,  et  n'avait  point  de  plus 
grande  passion  que  de  rendre  quelque  nota- 
ble service  à  celte  reine  des  anges.  Tout  ce 
qu'elle  pouvait  faire  pour  son  honneur  lui 
semblait  peu  de  chose, par  rapporta  l'amont 
qu'elle  lui  portait,  et  le  plus  souvent  elle  al- 
lait nu-pieds  visiter  l'église  de  Bocmadour, 
dédiée  en  son  honneur,  cl  éloignée  de  Beau- 
lieu  de  deux  lieues. 

Avant  la  réforme  de  son  monastère,  la 
coutume  était  que  les  honm)es  qui  rendaient 
visite  aux  religieuses  les  baisaient  en  les  sa- 
luant; mais  elle  ne  voulut  jamais  permettre 
à  aucun  homme  de  la  saluer  de  cette  ma- 
nière ;  et  sa  plus  grande  peine,  après  qu'elle 
eut  établi  sa  réforme,  élail  de  se  voir  obligée, 
en  qualité  de  supérieure,  d'entretenir  des 
hommes  au  parloir.  Elle  jeûnait  tous  les  ven 
dredis  et  les  jeudis  de  l'année,  ce  qu'elle  ob- 
servait avec  une  abstinence  si  sévère  et  une 
austérité  si  grande,  que  l'on  s'étonnait  com- 
ment elle  pouvait  vivre.  Si  avant  la  réformo 
elle  traitait  son  corps  si  rudement,  l'on  peut 
s'imaginer  qu'elle  l'aOligea  encore  davan- 
tage lorsqu'elle  voulut  !  introduire,  aliu  de 
donner  exemple  aux  autres  religieuses. 

A  l'âge  de  quinze  ans  elle  fut  faite  contre 
son  gré  coadjutrice  de  la  prieure  de  Beaulieu. 
Elle  prit  à  celte  occasion  la  grande  croix  de 
l'ordre  que  les  prieures  portent  pour  marque 
de  leur  dignité;  mais  elle  îe  fit  avec  tant  de 

ï8 


875 


mcTioNNAinr,  df.s  onnuRs  nEi.ir.iKux. 


87C 


confusion  (le  se  voir  siip^^riotire,  qu'elle  ne 
voulul  j.imnis  prendre  nuctin  ■■ivantagc  sur 
li:s  autres.  Un  an  après  elle  fui  faile  prieure 
(lu  nionaslérc  île  Ficnx,  cliarp;e  qu'elle  ao 
tepla  Tiilontiers  el  avec  joie,  puisqu'elle  lui 
procurait  le  moyen  de  vivre  en  solitude;  car 
ce  monastère  était  fort  retiré  et  peu  fréquen- 
té. Elle  eut  tout  lieu  d'y  pratiquer  aisément 
si"s  grandes  pénitences,  et  ce  tut  dans  cette 
maison  qu'elle  coininença  à  jrûiicr  les  carê- 
mes îuii  rs  au  pain  et  à  l'eau,  encore  ne 
mangeait-elle  qu'une  fois  le  jour  quelques 
morceaux  de  jiain  d'orge  cuit  sous  la 
cendre. 

A  peine  cul-iUc  demeuré  quatre  ans  dans 
cette  solitude,   qu'elle  fut  obligée  de  retour- 
ner à  Bcaulicu  pour  faire  cesser  les  murmu- 
res de  plusieurs  personnes  qui  s'étonnaient 
qu'une  jeune  fille,  qui  avait  tant  de  beauté, 
accompagnée  de  jeunes    religieuses  comme 
clic,  se  hasardât  de  demeurer  d  ins  une  mai- 
son si  peu  assurée  que  ci'lle  de  Ficus,  située 
au  milieu  d'un  bois.  C  est  ce  ((ui  lui  fit  pren- 
dre la  résolution  d'abandonner  celte  maison, 
cl  d'unir  ses  revenus  à  ceux  de  la  maison  de 
licauliiu.  Elle  cul  pour  lors  le  dessein  d'en- 
trer dans  l'ordre  de  Sainte-Claire;  mais  ses 
directeurs   et    le   visiieur   de  son  ordre  l'en 
détournùient  el    lui  conseillèrent  de  travail- 
ler plu  ôt  à  la  réforme  de  son  monastère.  Elle 
y  consentit  ;   mais  comme    elle    n'était   que 
coadjulrice  de   la  pri  ure  qui  vivait  encore, 
et  ((ui  s'opposail  à  ses  bons  desseins,  elle  eut 
beaucoup  de  peine  à  léussir  dans  son  enlre- 
jirise,  el   de    quarante  religieuses,  il  n'y  en 
eut   que  six    qui   se  joignirent  à  elle.  Elles 
prirent  ensemble  le  voile  noir,  renouvelèrent 
leurs  vœux  et  le  serment   de  clôture  perpé- 
luelle  entre  les  mains  du  visiteur  de  l'ordre, 
qui  leur  donna  la  rè^le  que  les  autres  mo- 
nastères  du    même    ordre    praiiquaieiil    et 
((u'ellcs  suivirent  exactement;  elles  voulurent 
même  renoncer  au  nom  de  leur  famille,  el  la 
mère  de  \aillae  prit    celui  de  Sainle-AniiL'. 
Comme  il  y  avaii  longiemps  que    la  régula- 
rité était  bannie  de  son   monastère,  elle  alla 
avec    la    permission   de  ses  supérieurs  dans 
celui  des  religieuses  de  Sainte-Claire  de  Tul- 
le,  pour  y  apprendre  les  observances  régu- 
lières, l^lle  y  séjourna  quelque  Itmps,  après 
quoi  elle  revint  à  Keaulien,  où  elle  établit  de 
beaux  règlements  pour  celles  qui  voulurent 
praliiiuer  la   régularité.  Elle  donna  des  ins- 
tructions salutaires  aux   reli;;ieuses  qui  s'é- 
taient jetées  un  peu   trop  d  ins  la  liberté,  et 
làclia    par   sa   conduite  et  par  son  excni|)le 
d'attirer  à  ce  cliangemenl  telles  qui  s'y  op- 
posaient le  plus.  Mais  elle  ne  véeut  pas  assez, 
longtemps    pour  donner    la   perfcciion  à  sa 
réforme  et  pour  la  rendre  solide  ;  car  les  [lé- 
nitenees  excessives  qu'elle  avait   praticiuees 
sur  son  corps  dès  son  bas  âge  l'avaient  ren- 
due fort   infirme,   sans    qu'elle    interromj  il 
pour  cela  ses  niorlifirations  continuelles.  Elle 
lui  atiaquée  à  l  Age  de  vingt-neuf  ans  d'une 
violente  maladie,  dont  elle  lutafiligéc  pendant 
dix  mois,  el  à  la(|uelU>   elle  succomba  enfin, 
étant  morte  l'an  IDIS,  le  2^  juin,  jour  (|ue 
l'uu  solennisail  la  1  le  de  saint  Jeau-H  ip'itle, 


patron  et  protecteur  de  son  ordre,   ayant  ii 
peine  atteint  l'âge  de  Irenle  ans. 

Commcla  plupart  des  religieuses  de  ce  mo- 
nastère n'avaient  pas  voulu  embrasser  la  ré- 
forme de  la  mère  de  Vaillae,  et  (lu'elles  étaient 
autorisées  par  l'ancienne  prieure  qui  s'y 
était  toujours  opposée,  celles  qui  s'éiaienl 
soumises  à  la  régularité  se  virent  perséculées 
par  celles  qui  voulurent  vivre  dans  le  relâ- 
chement. Elles  furent  contraintes,  pour  se 
mettre  à  l'abri  île  la  persécution,  de  se  disper- 
ser de  côté  et  d'autre  chez  leurs  parents, 
croyant  y  trouver  un  asile  et  di!  la  protec- 
tion; mais  il  semblait  que  tout  le  monde  les 
abandonnait  :  leurs  pro.ires  parents,  de  con- 
cert avec  les  religieuses  relàcliées ,  em- 
ployèrent toutes  sortes  de  mauvais  iraiic- 
meiits  pour  leur  faire  quitter  la  résolution 
qu'elles  avaient  prises  de  mourir  dans  la  ré- 
forme, et  ils  leur  refusèrent  tous  les  secours 
dont  elles  avaient  besou  :  il  y  en  eut  même 
quelques-unes  qui  furent  enfermées  dans  des 
jjrisons. 

Ces  persécutions  durèrent  penlant  près  de 
quatreans,  jusqu'en  l'an  1023,  qu'elles  trou- 
vèrent le  moyen  d'écrire  toutes  ensemble  au 
grand  maître  Antoine  de  l'aulo,  pour  lui  de-^ 
mander  sa  protection,  el  leur  permettre  do 
persévérer  dans  la  réforme.  Non-seulemenl 
il  approuva  leur  résolution;  mais  il   les  as- 
sura qu'il  contribuerait  à  leur  élablissemenl 
en  ([uelque  lieu  qu'elles   voulussent   alb-r, 
mais  qu'elles   lui  feraient  plaisir  de  ch<ii-ir 
la  vil'.e  de   Toulouse.  Elles  y  vinrent  toutes 
six  l'an  1G2V,  et  choisirent   pour  supérieure 
la   mère   de   Mirandol,   religieuse  qui  avait 
beaucoup  de  capacité  cl  beaucoup  de  zèle 
pour  les  observances  régulières.    Elle  avail 
été  faite  prieure  de  Eieux  après  la  mort  de  l;i 
mèriî  de  Vaillae.  On  ne  sait  si  cette  réforma- 
trice lui  avait  résigné  ce  prieuré;  ce  qui  est 
certain,   c'est  q  e  la  mère   de  Mirandol  en 
était  prieure  depuis  la  mort   de   la   Mère  do 
\  aillac,  el  qu'elle  espérait,  par  le  moyen  des 
revenus  de  ce  prieuré,  venir  plus  facilement 
à  bout  de  leur  él  iblissemcnl  dans  Toulouse. 
A  peine   y    furent-elles  arrivées,    que  lu 
Commandeur   de  Montagu    de    Frumigièrcs 
leurdonnaiin  jaidin,    une  grange   et  toute 
l'étendue   d'une  place    que  l'on  appelait   la 
(Cavalerie  de  Saint-Cyprien.  La  donation  fut 
faite  le  7  septembre  l(i27,    el  fut  approuvée 
par   le  grand  maiire  de   Paulo    le    1"   juil- 
let 11)25.  Non-seulement    il  voulut   se  char- 
ger de  leur  établissement,  en  laisanl  bâtira 
ses  frais  leur  monastère;  mais  il  leur  assigna 
à  chacune  cent  écus  de  rente   pour  leur  en- 
tretien, à  prendre  sur  le  trésor  lommun  do 
l'oidie,  dont   la    Ueligion  s'est  depuis  rédi- 
mée  en  payant  le  fonds  de  celte  rente.  Ainsi 
le   grand  maître  de  l'aulo  est  reeonnn  (lour 
fondateur  de  ce  monastère,  dont  la  mère  de 
Mirandol,  avec  sa  petite  communauté  de  cini| 
religieuses,  fut   mise    en   possession    par  le 
chevalier  de  Tourelle  le  IJ  septembre  1G28. 
Le  grand  maîlre  de  l'aulo,  pour  témoigner 
da»anl;;ge  son  allertion  à  celle  communauté 
nai>sante,  voulut  être  leur  sii|érieur,  et  que 
par  un  privilège   particulier  elles  dellendl^- 


R77 


MAL 


seul  à  l'avenir  des  grands  maîtres  ses  succes- 
seurs, ;iu  lii'u  que  les  autres  monastères  de 
cet  ordre  dépendent  des  gr;inils  prieurs  du 
ressort  des  lieux  où  ils  sont  établis,  et  à  cau- 
se de  l'éloignemenl  qu'il  y  a  de  Toulouse  à 
Malte,  il  leur  nomma  pour  protecteur  le 
commandeur  de  la  Hiilière-Pola^lron,  afin 
qu'elles  pussent  s'adressera  lui  dans  les  af- 
faires qui  ne  pourraient  souffrir  de  délai;  i  e 
qui  a  été  continué  jusqu'à  présent,  qu'elles 
ont  toujours  eu  un  prolccleur  nomme  par  le 
grand  maiire. 

Ces  religieuses  pleines  de  ferveur,  sachant 
(|ue  rtiospitalité  est  l'esprit  de  l'ordre  de 
t'ainl-Jean  de  Jérusalem  aussi  bien  que  la 
défense  de  la  foi  contre  les  ennemis  de  l'IÎ- 
glise,  voulurent  établir  un  hôpital  pour  y  re- 
cevoir les  malades  ;  mais  le  conseil  de  la  Reli- 
gion s'y  opposa,  et  on  leur  répondit  qu'il 
suffisait  qu'elles  participassent  à  la  charité 
que  les  Chevaliers  pratiquaient  avec  tant  d'é- 
dification dans  l'hôpit.il  de  Malte.  Mais  com- 
me elles  n'avaient  point  de  constitutions,  elles 
jugèrent  que  les  règles  qu'elle-  s'étaient 
prescrites  conforniément  aux  instructions 
qu'elles  avaient  reçues  de  la  Mère  de  Viiillac 
pourraient  à  l'avenir  être  facilement  altérées; 
t'est  pourquoi  illes  demandèrent  au  grand 
iiiaitre  des  conslilutions ,  et  le  prièrent  en 
même  temps  d'ordimner  que  les  supérieures, 
qui  étaient  perpétuelles  ,  seraient  à  l'avcnir 
triennalcs,  ce  qui  leur  fut  accordé;  mais  ce 
ne  fut  que  sous  le  grand  maître  Jean-Paul 
de  Lascaris,  qui  succéda  l'an  1636  à  Antoine 
de  Paulo ,  que  leurs  constitutions  furent 
achevées,  et  ce  nouveau  grand  maître  les  ap- 
prouva par  une  bulle  du  14  juin  1644^. 

Cesconitilutions  conliennentdix  chapitres. 
Le  quatrième,  où  il  est  parlé  de  l'élection  des 
prieures,  ordonne  qu'elles  ne  seront  plus  per- 
pétuelles, mais  triennal,  s,  et  qu'elles  seront 
confirmées  par  le  grand  maître  de  l'ordre.  Le 
sixiènii-,  qui  traite  de  la  réception  des  novi- 
ces, parle  de  trois  sorles  de  personnes  que 
l'on  doit  recevoir  dans  cet  ordre,  et  de  condi- 
tions différentes.  Les  unes,  destinées  pour  le 
chœur,  et  qu'on  appelle  sœurs  de  justice,  doi- 
vent faire  leurs  preuves  de  noblesse  comme 
les  Chevaliers,  et  ont  seules  voix  active  et 
passive;  d'autres,  sous  le  nom  de  sœurs  ser- 
vantes d'office,  doivent  faire  les  mêmes  preu- 
ves (jue  les  irères  servants  d'armes  ,  et  les 
troisièmes  sont  les  sœurs  converses,  qui  sont 
destinées  pour  les  plus  bas  offices. 

Avant  que  de  faire  la  relation  des  preuves, 
il  laui  avoir  assurance  de  la  dot  ou  passage 
de  la  prétendante,  qui  doit  être  de  mille  écus 
pour  les  sœurs  de  justice,  et  de  cinq  cents 
écus  pour  les  sœurs  servantes  d'olfice,  dans 
lesquelles  sommes  ne  sont  point  compris  1  a- 
meublemeni  de  la  chambre,  les  linges  ordi- 
naires, les  babils  de  noviciat,  et  le  premier 
habit  de  profession  que  chacune  doit  appor- 
ter aussi.  Les  sœurs  converses,  eu  considé- 
ration du  service  qu'elles  rendent  au  monas- 
tère, sont  dispensées  de  la  dot  ;  mais  elles 
doivent  se  fournir  de>  premiers  habits  cl  de 
l'ameublement ,  et  elles  ne  sont  point  obli- 
gées à  d'autres    preuves   qu'à   donner  une 


MAL  878 

bonne  attestation  de  leurs  vie  et  moeurs,  ci 
qu'elles  sont  nées  d>  légitime  mariage.  La 
prieure  et  le  conseil  peuvent  néanmoins  dis- 
penser les  sœurs  servantes  d'office  de  la 
somme  de  cinq  cents  écus  pour  leur  doi  ou 
passage,  lorsque  l'on  connaît  qu'elles  ont  de 
b  tnnes  qualités  et  qu'elles  peuvent  rendre 
de  b  ms  services  à  la  communaulc  ,  et  en  ce 
cas  on  peut  se  contenter  de  trois  cents  écus 
pour  le  passade. 

Les  sœurs  de  justice  sont  obligées  de  réci- 
ter en  leur  particulier  le  grand  office  selon 
le  bréviaire  romain  ,  lorsqu'elles  ne  peuvent 
assisler  au  chœur,  et  les  autres,  soit  servan- 
tes d'office  ou  converses,  doivent  dire  au  lieu 
des  heures  canoniales  ,  en  une  ou  plusieurs 
fois,  trente  Pater  et  autant  d'.ltc.  Pour  ce 
qui  regarde  les  jeûnes  et  mortifications,  elles 
prennent  toutes  ensemble  la  discipline  tous 
les  vendredis  de  l'année,  s'il  n'arrive  une  fêle 
solennelle  ces  jonrs-là.  Elles  jeûnent  aussi 
tous  les  vendredis,  excepté  dans  le  lempj 
pascal,  les  trois  jours  de»  Rogations, les  veil- 
les des  fêles  de  la  sainte  Vierge,  du  très-saint 
sacrement ,  de  la  Décollation  de  saint  Jean- 
Baptiste,  de  l'Exaltation  de  la  sainte  croi.\, 
et  le  jour  de  saint  Marc.  Pendant  l'avent  et 
tous  les  mercredis  de  l'année,  hors  le  temps 
pascal,  elles  font  seulement  abstinence.  Elles 
ont  leurs  heures  marquées  pour  le  silence  cl 
le  travail  en  commun.  Elles  ne  vont  au  par- 
loir qu'accompagnées  d'une  écoule  et  le  voile 
baissé,  et  elles  doivent  s'abstenir  d'y  aller 
pendant  lavent  et  le  carême  et  aux  fêtes  so- 
lennelles. 

Quant  à  l'habillement,  les  constilulions 
ordonnent  que  leurs  robes  ou  soutanes  se- 
ront de  longueur  couvrant  les  pieds  sans 
traîner  à  terre, que  les  manches  seront  assez 
larges  pour  que  les  mains  y  puissent  entrer 
comniodément,  que  la  matière  en  sera  lé"cro 
pour  l'été,  et  plus  pesante  pour  l'hiver,  pon- 
dant lequel  elles  pourront  porter  par-dessous 
un  habit  plus  fort  d'élofie  blanche,  mais  que 
la  soutane  sera  noire,  si  les  chapitres  géné- 
raux n'en  disposent  autrement  à  l'avenir  et 
que  la  ceinture  sera  de  laine  noire.  La  [)rieu- 
re  porte  la  grande  croix  de  toile  fine  sur 
l'estomac  par-dessus  la  robe,  les  autres  n'en 
ont  qu'une  petite  au  côté  gauche  sur  le  cœur. 
Mais  pour  distinguer  les  sœurs  de  justice  des 
sœurs  servantes  d'oflice ,  les  premières,  à 
l'exemple  des  Chevaliers,  portent  une  croix 
d'or  cmaillée  de  blanc  de  lu  valeur  de  quinze 
crus  ,  sans  qu'il  suit  permis  de  les  eiiricliir 
d'aucunes  pierreries  ;  et  il  est  permis  aux 
sœurs  servantes  d'olfice  de  porter  au  doigi 
aussi  bien  que  les  s;i'Urs  de  justice,  un  petit 
anneau  d'or  de  la  valeur  d'une  demi-pislole, 
où  au  lieu  de  pierreries  il  y  a  une  crois 
émailléc  de  blanc,  et  afin  que  les  sœurs  no 
soient  jamais  sans  leur  habit,  elles  doivent 
c<.ucher  avec  un  pel.t  scapulaire,  sur  lequel 
est  cousue  une  petite  croix.  Les  manteaux  à 
bec  sont  on  la  forme  ordinaire  avec  la  grande 
croix  de  toile  blanche  sur  le  côté  gauche,  et 
le  cordon  où  sont  les  instruments  de  la  pas- 
sion de  Noire-Seigneur.  Les  sœurs  de  justice 
portent  ce  manteau  à  lacomiuuuiua,à  l'oriicu 


!-:o                              nicTioNNAiRE  DES  (tunnF.s  ncur.ir.ux.                              sso 

liivin,  cl  quand  la  prieure  oflicie,  mais  scu-  nommé  par  l'ô^cniic  ilc  Cahors.   I-c  praml 

leiiioiil  à  la  messe  cl  à  vC'pres,  ri  l>  prieure  prieur  ilc  S.iinl-dilli's,  iioiiotisiaul  cN  arrèl, 

t)orle  ces  jours- là  dans   les  cérémonies,   el  ayant  donné  coiiiiiiission  à  un  Chevalier  pour 

orsiju'elle  donne  l'iialiil,  ou  fail  l'aire  profes-  visiter  celle  m.iison  suivant  1rs  anciens  usa- 

sion  à  (|ue'quc  n  ivire,  l,i  cloche,  qui  est  une  [;cs,  sous  prétexte  ((u'il  n'avait  point  de  con- 

cspèie  de  robe  à  grandes  manches,  ouverte  naissance   de  ces  arré  s  ,  M.  de   Uriqneville 

par-devant  avec  la  grande  croix  sur  la  poi-  de  la  Luzerne,  qui  fut  depuis  évcque  de  Ca- 

Irine  cl  le   cordon  de  l'ordre.   Les  sœurs  de  hors,  olilini  un  autre  arrêt  le  30  avril  1703, 

justice  peuvent  aussi  porter  leurs  manteaux  qui  lli  déf.  use  au  grand  [trieur  de  Sainl-llil- 

à  bec  au  clneur  ])cndant  l'hiver,  pour  se  fta-  les  d'user  à  ra>enir  de  pareilles  cntrepiises, 

ranlir  du  fnid,  el  celle  qui  est  liebdomadiére  el  qui  attribua  de  nouveau   loulc  jundiclion 

le  porte  en  loul  temps  ;   les  sœurs  converses  à  l'évéque  de  Cahors  sur  celte  maison, 

ont  un  liabil  plus  grossier,  mais  de  la  même  Ces    religieuses  ont   des    prieures    perpé- 

forme  que  celui  des  autres,  et  soni   dislin-  tuclles  ;   elles  suivi  ni  les   consiilulions  qui 

guces  par  le  voi'e  Idanc.  leur   furent   données   pir    le    grand  maître 

Il  est  permis  à  la  prieure  et  au  chapitre  Guillaume  de  \illaret.  lilllis  portent  sur  leur 

ou  conseil,  de  donner  la  demi-croix  à  des  soutane  une    croi'i   d'or  sur   celle  de    li  ile 

donnés  qui  soient  âgés  de  prés  de  trente  ans.  blanche,  comme  les  religieuses  de  Toulouse, 

Ils  doivent  faire  le  même  serment  que  les  au-  mais  elles  ne  poricnt  point  !c  cordon  de  l'or- 

Ircs  donnés  de  l'ordre,  mais  ils  sont  dispenses  dre  sur  leur  manleau  à  Ix  c  :   il  n'j  a  que  la 

de  donner  acUiellemenl  quelque  chose  ,  en  prieure  seule  qui  ait  droit  de  le  porter  :  leur 

t'unsideration  des  services  qu'ils  doivent  ron-  haliillemenl  est  d'ailleurs  presque  semblable 

dre  ii  la  communauté,  qui  est  obligée  de  les  à  celui   des    religieuses  de  Toulouse.  C'est 

nourrir  el  de  les  entretenir.  Enfin  le   grand  dins  ce  moMaslére  <le  Beaulieu  que   muuiul 

maiire  de  Lnscaris  dans  ces  conslitulicnis  re-  sainie  Flore,   religii  use   de   cet  ordre,    l'an 

commande  à  ces  religieuses  de   se  soaver.ir  12'jy.  Los  anciennes  peintures  la   rcprésen- 

de  la  Mère  Galli'  lie  de  Siinle-.\ni;e  de  l'illus-  tent  avec  une  soutane  rouge,  sur  laquelle  il 

tre  maison  do  \'aillac,  leur  réiormalrire  ;  ce  y  a  une  grande  c  oix  blanche,  avec  un  man- 

qui  fait  voir  qu^'  le  P.  lîonanni,  dans  son  Ca-  leau  noir,   sur  lequel  il  y  a  au  côté  gauche 

laloguc  des  (Jrdres  leigieux,  s'est   trompé,  une  crois   blanche  à  huit   pointes.  Celait  là 

lorsqu'il  dit  qu'elle  élalilil   en   France   une  l'ancien  habillement   des  religieuses    de    ce 

congrégation   particulière  do  pieuses   fi!Ies,  monastère,    et   de    celui  de  Fieux   avant   la 

aux(|uelles  elle  donna  le  nom  d'hospitalièr<  s  prise  de  Rhodes;  mais  dans  la  suite  il  y  a  eu 

de   ^ainl-Jean  de  Jérusalem,  puisqu'elle  n'a  du  changement   dans   cet    habillement,  que 

été  que  la  réformatrice  de  cet  ordre  en  Fran-  la  vanité  avait  sans  doute  introduit,  puisque 

ce,  qui  y   était  déjà  é'abli  dès  le  tre  z.ème  le  manteau  était  aussi  rouge  doublé  d'her- 

siècle.  mine,  comme  on  peut  voir  dans  laOgurc  iino 

Les  religieuses  de  l'hôpital  de  Beaulieu, qui  nous  avons  lait  giaver  d'après  le  portrait  île 

n'ont  pas  voulu  rece\oir   la  réforme  de  la  Gabrielle  de  Tureniie  d'Aynac,    command.i- 

Mère  de  V'aillac  ,  se  sont  soumises  dans  la  trice  ou  prieure  du  monas  ère  de  Fieux,  dé- 

suite  aux  (>bservances  régulières ,  el  ne  dé-  cédée  l'an  lo:2i   (l).Cel   liabilienienl  fut  en- 

pendent  plus  du  grand   prie-ur  de  Saint-liil-  core  changé  après  la  prise  de  l'.hodes  tiuant 

le.'-,  étant  présentement  suus  la  juridiction  de  à   la  couleur  et  à  la  forme,  comme  on  (ieiil 

l'évoque  de  Cahors.  Ce  qui  donna  lieu  à  ce  voir  dans  la  ligure  que  nous  avons  aussi  f.it 

changement ,  lurenl  quelques  désordres  qui  graver    d'après    le   portrait  de   la  .M^re   de 

arrivèrent  dans  celle  maison  pendant  la  visite  \'aillac  (2). 

d'un  Chevalier  de  l'ordre  envoyé  par  le  grand  11  s'est  fait  encore  depuis  quelques  années 

prieur  de  Saint-Gilles.  M.   Sevin  ,  pour  lors  un    autre    établissement  de    religieuses   du 

évéque  de  (Cahors,  en   porta  ses  plaintes  au  même  ordre,  à  Martel  dans   le  tjuercy.  Les 

roi,  qui  nomma  des  commissaires  pour  in-  Mères  de  Mirandol,  religieuses  du  monastère 

foroier  de  cette  allaire,  el,  sur  leur  rapport,  de  Toulouse  et   nièces  de  la  Mère  de  Miran- 

le  grand  prieur  de  Saint-tjilles  cl  la  prieure  dol,   dont   nous    avons  ci-devant  parlé,  ont 

de  iieaulieu  furent  assignés  au  conseil  de  Sa  commencé  cet  établissement.  Ces  reli;;ieuses 

Majesté.  Il  n'y  t  ut  (jue  la  prieure  qui  y  com-  dépendent  immédiatement  du  grand  maiire, 

parut,  et,  par  un  arrêt  du  même  conseil  du  3  de  même  que  celles   de  Toulouse  dont  elles 

septembre    1G7^,   contraciictoirement   rendu  ont   p;  is  aus.si   les  constitutions  et  l'Iiabille- 

cnlre  la  prieure  el  par  délaul  conire  le  grand  ment.  Tuu'c  la  dilTcrence  qu'il  y  a  entre  el- 

prieur.  l'on  ùla  la  juridiction  ordinaire  dans  les,   c'est   (juc   la   supérieure  de  Martel   est 

telle  maison  au  grand  prieur  lie  Saint-Gilles,  perpétuelle,    cl   (juc    celle  de  l'oulouse   est 

cl  elle  fut  attribuée  a  l'évéque  de  Cahors;  on  triennale. 

laissa  seulement  au  grand  prieur  de  Saint-  Mallbieu    de    Goussancourt,  Mnrttjralog. 

Gilles    un    droit   lionorirniue   (|ui   consiste  à  des  cheval,  de  MnUe.  Le  l'ère    Tliomas  d'A- 

|)oiivoir  V  siter  cet  e  maison  une  fois  seule-  quin,    YiC  île  lu  Mrrc  Giillitiltc   de    Sainlr- 

mcnt  à  chaque,  iiinlaiioi)  de  grand  prieur,  ou  .Inhc  llilarion  de  Cosie,    Eloije    des  futimes 

par  lui-ii.ê,iie  ,  nu  par  commission  donnée,  à  tllustics,  loin.  I.  Cun'titiUimis  iirs  rc^iy/fii.xs 

quelque  Chevalier ,  mais  (|ui  ne  peut  faire  la  <lc  Toulouse,     Mânolirs    coinmuniqin's   por 

visite    qu'aec  mipagnc    d'un    ecclésiastique  M.  l'ulibc  de  Turcnnc  dWi/tuic,    {;\.  Mcmoin-i 

(1)  Vnij.,  i.  U  lin  dii  v.jl.,  les  ii<"  21''  ;)  '221.  (2)  Yo-J.  il  id. 


8S) 


MAU 


MAR 


«82 


evroyés  pur  les  rcliijicuscs  de  Toulouse   en 
1713. 

MANTOUE  (Congrégation  de).  Voy.  Car- 
mes  DE    L'IÏTROITE    OBSEtlVANCE. 

MAUBACU  ET  D'AROUAlSE  (Des  Chanoi- 
nes  RÉGULIERS   DES   CONGRÉGATIONS    De). 

Les  différends  que  l'empereur  Henri  IV  eut 
avec  le  pape  Grcgoire  Vil,  cl    auxquels    la 
conduite    tyrannique    et  scandaleuse  de  te 
prince  donna  lieu,  curcnl  des  sniles  é|;alc- 
menl  funestes  pour  l'Eglise  et  ]  our  l'Empire. 
Ce  prince,  méconlenl  du  pape  qui  avait  mal- 
Iraité  ses  ambassadeurs,  et  qui  lui  avait  en- 
voyé un  nonce  qui  lui  avait  parlé  avec  me- 
naces, se  laissa  aiscnicnl  persuader    par  lo 
c  irdinal  Hugurs  et  par  des  évêques  ennemis 
de  (îrégoire,  de  le  faire  déposer  d.ins  une  as- 
semblée qu  il  fit  à  Woruis  l'an  107(5,  où  se 
trouvèrent  un  grand  nombre  d'évèqucs  avec 
ce  cardinal,    qui  peu  de  jours   auparavant 
avait   été  déposé  lui-même  et  excommunié 
par  le   pape.  Ce  fut   lui   qui,  conjointement 
avec  Guibert,   évèque   de  R^ivcnne,   avança 
plusieurs  choses  contre  la  vie,   la  conduite, 
l'élection  et  les  constitutions  de  ce  pontife; 
sur  cette  accusation  l'assemblée  déchira  qu'il 
ne  pouvait  ôtic  reconnu  pour  pape  légitime, 
et  tous  les  évêques  so  iscrivireiit  à  sa  con- 
damnation. Le  pape, de  son  côté,  après  avoir 
cxco(nmuniéSigefroy,  archevêque  dcMayen- 
ce, et  suspendu  les  autres  é\  êques d'Allemagne 
(|ui  avaient  eu  part  à  cette  entreprise  ,    dé- 
car. i  Henri  déchu  des  royaumes  d'Allemagne 
t't  d'Iia'.ie,  cl  ses   sujets  quilles  du  serment 
de  fidél  té,  ei  prononça  anathèine  contre  ce 
piiiiie.  Ce  fut  là  l'origine  du  schisme  (jui  ne 
(in  I  que  par   la  mort  de   cet  empereur,    qui 
jrrivu  Tau  1100,  aprèsavoir  été  dépouillé  de 
l'empire  par  son  propre  fils. 

Ouoique  cette  excommunication  eût  fait 
impression  sur  quelques  esprits,  et  que  la 
[ilupart  dt  s  évoques  d'Allemagne  eussent  re- 
connu leur  faute,  et  se  fussent  réconcilias 
avec  Grégoire,  néanmoins  Otiion,  évèque 
deStrasbourg,  n'entra  pas  d'abord  dans  leurs 
sonti.icnts  ;  il  persista  dans  le  schisme  jus- 
que sous  le  pontificat  d'Urbain  H,  et  les  peu- 
ples deson  diocèse,  suivant  le  mauvais  exem- 
ple (ici  eurpreiuierjjaslour,  ne  rccon  naissaient 
point  non  plus  Grégoire  pour  chef  de  l'E- 
glise. La  rel  gi(;n  en  souffrait,  et  elle  était 
presque  éieinte  dans  l'Alsace,  lorsiiue  Dieu 
suscita  un  saint  homme,  nommé  Manegolde 
de  Lutembacli,  pour  la  faire  revivre  en  ces 
quartiers.  Ce  fut  environ  l'an  10'J3  (lu'il 
commença  à  prêchir  puliliijuemcnl  conire 
le  schisme,  exhortant  le  peuple  à  rentrer 
dans  la  bonne  voie  et  à  se  soumettre  au  chef 
de  l'Eglise. Quoique  ses  discours,  qui  étaient 
animés  d'un  grand  zèle,  fissent  impression 
sur  les  cœurs  des  sc!iismati(|U('s,  une  mor- 
talité qui  arriva  dans  ce  temps-là,  et  qui 
enleva  en  peu  de  temps  une  inlinilé  de 
monde,  les  toucha  plus  sensiblement;  la 
plupart  changèrent  véritablement,  ils  accou- 
laienl  en   foule  pour   recevoir   l'absolution 


de  !'excomrnunicalion,ct  Manegi.lde,  suivanS 
le  pouvoir  qu'il  en  avait  reçu  d'Urbain  M,  la 
leur  donnait  et  leur  enjoignait  une  péni- 
tince  ;  ainsi  on  vit  en  peu  de  temps  de  graml.s 
changomenls,  et  presque  toute  la  province 
se  soumit  à  l'obéissance  du  pape. 

Comme  le  clergé  était  tombé  dans  un  grand 
relâchement  pendant  le  schisme,  il  se  trouva 
plusieurs  préd  es  qui  après  leur  conversion 
se  retirèrent  dans  les  bois  el  les  solilndes, 
tant  pour  y  mener  une  vie  pénitente  cl  reti- 
ré.^, que  pour  ne  point  communiquer  avec 
ceux  qui  persistaient  d'obéir  à  l'empereur. 
Mais  Manegolde  en  rassembla  quelques-uns 
avec  lesquels  il  voulut  vivre  en  commun, 
suivant  l'exemi  le  des  apôtres  et  des  chré- 
tiens de  la  primitive  Eglise  ;  il  fit  à  ce  sujet 
bâtir  un  monastère  à  l\iarbach,  qui  est  uno 
ville  d'Alsace,  ayant  été  aidé  dans  cette 
suinte  entreprise  par  un  gentilhomme  du 
pays,  nommé  Burchard  de  Gcbcluisler,  qui 
contribua  beaucoup  pnr  ses  libéralisés  à  l'é- 
difice de  ce  monastère,  dont  Manegolde  fut 
premier  prévôt. 

Ils  renoncèrent  à  toute  propriété,  ne  man- 
geaient point  de  viande,   ne  portaient  point 
de  linge,   gardaient  un  étroit  silence  et  pra- 
tiquaient beaucoup  de  mortifications  :  ce  qui 
les  rendit  si  rccoramandabics,  que  plusieurs 
autres  monastères  s'étanl  joints  à  celui  do 
Marbach,  il  devint  chef  d'une  congrégation 
Irès-considérable,  qui  commença  à  suivre  la 
règle  de  saint  Augustin  dans  le   douzième 
siècle,  à  l'exemple  des  autres  communautés 
de  chanoines  qui  avaient  embrassé  !a  désap- 
propriaiiou  ;  mais  je  doute  fort  qu'il  y  ait  eu 
près  de  trois  cents  monastères  qui  en  dépen- 
daient, comn-.e  Mauburne  el  que'qncs  autres 
l'ont  avancé;  el  supposé  que  cotte  congréga- 
tion ail  éié  si  llorissanle,  il  ne  reste  plus  de 
mémoire  d'aucun  de  ses  monastères  ;  elle  est 
préscîitement  sur  le  pied  de  celle  de  Saint- 
Victor  à  Paris    el    de   quelques    autres  qui 
sont   désunies  el  dont  il  ne   reste  plus  que 
l'abbaye  qui  eu  était  le  chef,  qui  ail  conserv  é 
les  anciennes  pratiques   el  constitutions  de 
l'ordre,  et  d'où  dépendent  quelques  prieurés 
qui  ne  sont  que  de  simples  cures.  L'abbaye 
deMarbarheu  a  plusieurs,  el  est  en  posses- 
sion, conjointement  avec  les  Chanoines  Ré- 
guliers de   la   congrégation  de  Lorraine,  de 
la  cure  di,-  Saint-Louis  à  Strasbourg.  Ils  sont 
habillés  de  noir  avec  une    banderole    de  liu 
lorsqu'ils  ne  sont  [;oinl  dans  l'abbaye;    mais 
dans  l'abbaye   ils  ont  une   soutane  blani  ha 
avec  un   roclicl  par-dessus.  Ils  portent  l'été 
au  chœur  une  auinusse  noire  sur  les  épau- 
les, qui    pend    en    pointe    derrière  le  dos  et 
descend  un   peu    plus  bas   que  la   ceinture, 
s'attaclianl  par-devant  avec  un  ruban  bleu, 
cl  ils  ont  pour  armes  d'azur  à  un  cœur  do 
gueules  couronne  d'or  (1). 

Quant  à  Maicgoldc  de  Lullcmbach,  après 
avoir  Coni.'é  cette  congrégation,  il  ne  discon- 
tinua pas  ses  prédications  pour  ramener  les 
schismatiques  au  sein  de  l'Eglise  :  ce  qui 
lui  allira  beaucoup  do  persécution,  princi- 


(5)  Voy.,  à  la  fin  du  vol.,  a"  225. 


8A3 


DICTIONNAIRE  DES  ORDRrS  Rri.ICiri'X. 


8Si 


pnlpmcnl  de  li  part  de  l'empereur,  qui  le  fit 
incllre  en  prison  l'an  1098.  C'est  tout  ce  que 
nous  savons  de  In  vie  de  ce  saint  homme  qui, 
iiu  rapport  d'Vves  de  Cliarlrcs,  pa-sail  pinir 
un  (les  plus  savants  liouiuics  du  ouzième 
sièelc. 

Yoi/ex  Francise.  Guilliinan.  Hit.  de  Epi- 
fcopis  Argenlinenlibus  ïn  Vila  Olhonis,  rpi- 
si-iip.  XLiii.  Yv.  Carnot.  epist.  40,  n/)i(r/  Dit 
Chonr,  Yeler.  Hist.  Franc.  loin.W,  pag.Sd. 
fii'iquisiC.  de  ard.  Canoiiicor.  Itrgul.  pag. 
'.VS'.ict  3(i(i.l'enot,  Hist.  tripart.  ('nnon.  licgul. 
Hb.  Il,  Clip.  CG.  Taiiibur.  de  Jitr.  abb.  disp. 
2'f,  qu(p>l.  4,  (irt.  9. 

K^^i  la  coiigrégaiiiin  de  Marbach  eut  pour 
fondateur  un  homme  zélé  pour  la  gloire  du 
sainl-sicge  et  qui  s'opposa  f(irlemi>nt  au 
schisme  causé  par  l'enipiTeur  llciiri  IN',  la 
eongré^alion  d'Arouaise  eut  aussi  pour  un 
de  ses  fijiilatenrs  un  saint  homme  qui  ne 
fut  pas  animé  d'un  moiiulrc  zèle,  et  qui, 
ayant  été  élevé  au  cardinalat  par  le  pape 
Pasi-al  11  et  fait  cvé()ue  de  Palestrine,  fut 
employé  par  ce  ponlifo  en  plusieurs  léga- 
tions pour  soutenir  l'intértl  de  l'Hglise  con- 
Ire  le  même  empereur. 

Arouaisc,  situé  proche  Bapaume  en  Ar- 
tois, était  un  lieu  qui  servait  de  retraite  aux. 
voleurs  ;  mais  environ  l'an  1090  il  fut  sam  ti- 
(ié  par  la  demeure  de  trois  saints  ermites, 
savoir  :  Heldemar  de  ïournay,  Conon  ou 
(Conrad,  qui  fut  depuià  cardinal,  et  Roger 
d'Arras,  qui  bâtirent  en  ce  lieu  une  cellule 
ou  oratoire  qu'ils  dédièrent  en  l'honneur  de 
la  sainteTrinité  et  de  saint  Nicolas.  Lambert, 
évéque  d'Arras,  conûrma  cet  établissemenl 
par  SIS  lettres  du  21  octobre  1097,  adressées 
ù  Conon.  C'est  ce  qui  fait  que  plusieurs  ne 
metlent  le  commencement  de  cette  con2;réga- 
lion  ([u'cn  celte  année  ;  mais  il  paraît  par 
'CS  mêmes  lettres  C|u'HeliJemar  était  déjà 
jnori,  et  il  est  mar(]ué  comme  premier  pré- 
vôt élabli  par  Conon  en  1090  dans  le  catalo- 
gue des  abbés  de  cette;  abbaye, donné  par 
.M.M.  de  Sainte-Marthe,  qui  ont  aussi  rap- 
porté son  épitaphe,  où  il  est  qualifié  de  fon- 
"lateiir  de  (•(  lie  abbaye,  qui  fui  gouvernée 
par  des  prévois  jusqu'au  temps  de  saint  lîci- 
iiard,  <]ue  (icrvais,  qui  était  le  troisième  pré- 
vol,  cl  qui  avait  succédé  en  li2V  à  lUchcr, 
prit  la  qualité  d'abbé,  qui  a  été  aussi  dou- 
iiée  à  ses  successeurs. 

Ce  Gervais  est  qualifié  instituteur  de  la 
«•Diigréiialioii,  peut-être  à  cause  (lue  sous 
son  gouvernement  celte  abbaye  devint  chef 
(le  vingt-huit  riKmasIùres  :  mais  il  y  a  long- 
temps qu'elle  ne  subsiste  plus,  cl  le  dernier 
cliapilre  général  se  tint  l'an  1V70.  Les  ino- 
uasières  de  Hennrin  Ce'ilard  à  trois  lieues 
(le  I)i)nai ,  de  S.iint-Nicolas  à  Tournay,  de 
tihoques  et  de  M.ireles  en  Artois,  en  dépen- 
daienl,  aussi  bien  que  (eux  de  Werncsion, 
Zunebcelv  d  Sietendal  en  l'Mandre,  de  Saint- 
Jean  à  Valencienncs,  de  Sainl-Crépin  et  do 
Saint-!,éger  àSoissons.  Kllc  avait  aussi  qua- 
tre prieurés  eu  Irlande,  deux  à  Dublin,  un 
àHalhoy  dans  le  comté  de  Kéri,et  à  llath'vélc 
dans  le  comté  de  LimériK,  cl  (luebines  au- 
tres en  An;;lelerie. 


Ils  étaient  habillés  de  blanc,  et  au  r.-jpport 
du  caidiaal  de  \'itry  ils  étaient  austères,  ne 
mangeaient  pnint  de  viande,  ne  portaient 
point  de  liiiiie  et  gardaient  un  étroit  silence. 

Voyez  Saminarlb.  (l(dl.  Chrislinn.  lom.  IV, 
/(aç.Oo.  l'enol,  Ilisl.  liii<nrt.  Cnnovic.  Regnl. 
lib.  Il,  rnp.G'J.  Lemire,  Origine  et  instilutinn 
de  diterses  congrég.  sous  In  règle  de  suinl 
August.  Tambur.  de  Jure  (dib.  lom.  II.  i/i.«/iur. 
2i,  quœfC.  k,  nrl.l.  Cardinalis  de  Vilriaco, 
llisl.  Occident,  ctip.  2.'}. 

Quand  la  congrégation  d'Arronaire  s'éta- 
blit, elle  eut  une  particularité  qui  nous  parnit 
semblable  au  droit  liue  les  quatre  premières 
filles  de  Cîteanx  cardaient  sur  le  s;énér;il  de 
leur  ordre  {Voy.  Cîtuxuik).  Ain  i  l'abbé  d'ilé- 
iiin-Liétard,  qu'on  qdalifi.iil  du  prieur  do 
l'ordie,  l'abbé  de  Ituisseauville,  qu'on  aiipe- 
lait  le  sous-prieur,  avaient,  ronjointement 
avec  l'abbé  de  Sainte-Marie  de  Houlogne,  à 
qui  on  aurait  pu  donner  le  litre  de  tiers- 
prieur,  une  sorte  de  juridicliiui  sur  le  géné- 
ral de  loule  la  congrégation.  Hélyot  a  nommé 
neuf  des  monastères  ou  chanoinies  qni  s'ajjré- 
gèrent  à  cet  institut.  Voici  la  nomenclature 
des  principale-i  maisons  qni  entrèrent  dans 
celte  congrégation,  suivant  le  raii;;  de  leur 
agrégation  :  1°  Arrouaise;  2°  Hénin-Lié- 
lard,  diocèse  d'Arras;  2°  Sainle-Maric-au- 
Bois,  ou  Uuisseauville,  diocèse  de  Boulogne; 
3'  Saint-Marie  de  Boulogne;  4°  Sainl-Créj)in- 
en-Chail  ,  sous  les  murs  de  Soiss'ins;  îi" 
Chauny,  dit  plus  lard  Sainl-Kloi-Fonlaine, 
diocèse  de  Noyon;  0°  Sainl-Vulmer  de  Bou- 
logne; 7"Cysoing,  diocèse  de  Tournay;  8  Saint- 
Léger,  àSoissons:0'Saint-.Mard  de  Tournay  ; 
10°  Mazoul,  diocèse  d'Arras;  11'  Beanlieii, 
diocèse  de  Boulogne;  12°  Clairfai,  diocèso 
d'Amiens;  1.3'  Choques,  diocèse  de  Saint- 
Omer;  ik"  de  Warneton  ,  diocèso  d'Ypres; 
la"  Snmbeck,  diocèse  d'Ypres;  10"  Chàtillon, 
diocèse  de  Langrcs;  17'  Chalriees,  diocèse  dn 
Châlons;  18°  Doudcauville,  diocèse  de  Bou- 
logne; 19°  Saint-Je.in  de  A'alenciennes , 
diocèse  de  Cambrai;  20"  Pbalempin,  diocèso 
de  Tournay  ;  2I„  Sainl-Barlhélemy  de  Bruges, 
ou  dli(knul;  22  .Viilrey,  diocèse  de  Toul; 
23°  Soctendael,  diocèse  de  Bruges. 

Eu  peu  de  temps,  uou-seuleuvent  la  Flan- 
dre, mais  l'Angleterre,  l'Kcosse,  la  Bour- 
gogne et  les  pays  les  plus  éloignés,  comme  la 
Pologne,  reçurent  de  l'institut  d'Arrnuaiso 
des  colonies  de  religieux,  les  prélats  de  ces 
nouvelles  maisons  s'obligeanl  à  se  rendre 
chaque  année  dans  celle  d'Arrouaise,  el  d'y 
assister  au  chapitre  général  de  l'ordre. 

Par  une  bulle  datée  de  l.atran,  le  15  d'a- 
vril 1139,  el  adressée  à  tout  l'onlre  d'Ar- 
rooaise,  le  pape  Innocent  11  a[iproiivc  les 
constitutions  de  cet  institut  el  l'ètablissemenl 
de  la  règle  de  saint  Au^^iislin  dans  les  mai- 
sons qui  le  composent.  Cervais,  fondateur  do 
la  congréjialion,  recul  de  saint  Bernard  lo 
plan  (le  sa  réforme  ;  c'est  une  preuve  de  plus 
de  l'influence  de  saint  Bernard,  (]ue  les  his- 
loriens  de  sa  vie  ne  devraient  pas  oublier. 
Ciervais  avait  puisé  h  s  principe»  de  son  gou- 
vernemenl  dans  l'nrdre  de  Ciieaux.  Il  avait 
des  frères  tonvers  qu'il   faisait  Irnvaillcr.  II 


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8H6 


avait  aussi   un  nombre  égal  de  converses 
rc(i,iinlut.'S  dans  les  habitalions  dépendantes 
du  monaslère  ;  car,  comme  le  dit  Gautier,  qui 
a    écrit    l'histoire   des    commencements    de 
l'ordre,  il  recevait  à  la  contersion  presque 
toutes  les  personnes  des  doux  sexes  qui  se 
Iircsentaient  pour  vivre  sous  ses  lois.  C'était 
l'esprit  du  temps,  dit  Gosse,  qui  nous  four- 
nit ces  détails,  et  nous  y  trouvons,  nous,  un 
cx(  mple  de  plus  à  ajouter  à  ceux  de  Fonte- 
\rault,  de  Saint-Sulpice,  etc.,  (ù  il  y  avait 
les   deux   sexes.   ïans   faire  comme  Robert 
d'Arbrissel,  Gervais,  ainsi  que  saint  Norbert, 
reçut  (outcs  les  femmes  qui  se  donnèrent  à 
lui;  il  les  plaçait  d.ins  un  cloître  séparé, 
quoique  dans  un  même  monastère.  Ce  mé- 
lange singulier  occasionna  dans  la  congré- 
palion  d'Arrouaise  les  mêmes  abus  que  dans 
l'ordre  de   Prémonlrc.   On   fut   oliiijjé   dans 
celui-ci, vingt  ans  après  sa  fondation, de  bâtir 
pour  les  religieuses  des  maisons  séparées  : 
les  Arrousiennes  ne  furent  supprimées  que 
dans  le  siècle  suivant.  Un  chapitre  général 
et  un  concile  provincial  en  ordunncrcnt  suc- 
cessivement l'exlinction.  Au    reste,   Hélyol 
n'ayant  pas  connu  ces  religieuses,  nous  leur 
consacrerons  un  article  dans  le  Supplément. 
Les  chapitres    nombreux    des   constitutions 
d'Arrouaise    contiennent     plusieurs    belles 
prescriptions  qui   ont  beaucoup  du  rapport 
aux  usages  monastiques.   Les  psaumes   se 
chantaient  par  cœur,  cl  cet  usage  dura  jus- 
(|u'au  XV ir  siècle.  Tous  les  chanoines  tant 
lettrés  que  non  lettrés  devaient  assister  au 
choeur,  exre;  té  les  infirmes,  qui  se  tenaient 
dans  l'arrière-chœur  in  rétro  choro.  Le  ré- 
formateur, qui  s'attacha  spécialement  à  ré- 
pler  ce  qui  concerne  l'ofiice  divin,  établit 
une  liturgie  particulière,  qui  devint  célèbre, 
mais  qui  n'est  plus  connue  aujourd'hui.  Le 
genre  de  vie  fut  tel  à  Arrouaise,   que   Cara- 
niuel,abbéde  l'ordre  de  Cîteaux, appelant  les 
religieux  de  cette  congrégation  Gei'vusiens, 
(lu  nom  du  réformateur,  prétendait  que  ces 
religieux  n'étaient  ni  moines  ni  chanoines, 
mais  quelque  chose  entre  les  deux,  qu'il  ex- 
primait par  le  mot  Canonico-Cislercii"ns,c\.- 
pressiou   singulière   et    peut-être    ridicule. 
Avant  et  après  la  ré  orme  de  Gervais,  les 
bulles  des  papes,  les  dé  rets  des  éi  êqucs,  etc., 
concernant   les  religieux  d'Arrouaise,   leur 
<>nl   toujours  donné   le  titre  de  chanoines. 
Gervais,  qui  n'avait  pas  été  élu   en   112't, 
comme  le  dit  Hélyot,  mais  en  1121,  donna, 
malgré  la  réclamation  de  tout  l'ordre,  sa  dé- 
mission de  son  abbaye  et  du  généralal,  sur 
la  fin  de  l'année  IIW.  Il  vécut  encore  dans 
l'exercice  de  toutes  les  vertus  jusqu'au   18 
septembre  1171.  Pour  maintenir  l'esprit  re- 
ligieux dans  les  chanoines  qu'il   chargeait 
des  cures,   il  y   mettait   plusieurs  confrères 
ensemble,  avec  l'obligation  d'y  vivre  comme 
dans  la  maison  n.èrc.  Gervais  vil  saint  Ma- 
laehie  d'Armach   et  sain'   Laurent  de  Du- 
blin, embrasser  sa  réforme,   qui  a   produit 
plusieurs    honmies   remarquables,  tels   que 
J{;tuitouin,cvêquodeNoyon;  Milon, deuxième 
du  nom,  cvcque  de  Térouanne,  etc.  Dans  le 
XII'  siècle,  sous  Fulbert,  troisième  abbé,  il 


s'éleva  un  peu  de  trouble  et  un  schisme  dfins 
l'ordre.  Le  général  abdiqua  l'an  Util,  et 
m:^urut  cinq  ans  après,  le  2  ocioî  rc.  C'él.iil 
un  homme  de  mérite.  Lnmbert,  son  succes- 
seur, homme  savant  et  de  mœurs  honnêtes, 
n'avait  point  la  vigilance  nécessaire  à  sa 
position  et  il  laissa  dépérir  la  discipline.  Ce 
fut  dans  la  première  année  de  son  adminis- 
tration que  les  reliques  de  sainte  Monique 
furent  transférées  d'Ostie  à  r;ibba\e  d'Ar- 
rouaise. Ce  supérieur  laissa,  après  treize  ans 
de  gouvernement,  le  temporel  de  son  abbayi; 
dans  un  étatiléplorable.Sous  l'abbé  Pierrcl", 
élu  en  l'an  1227,  il  y  eut  une  réforme  de 
l'ordre. 

Les    religieux    d'Arrouaise ,    sous    l'abbé 
Gervais,  portaient  un  sc.ipulaire  semblable  à 
celui  des  Cisterciens,  pour  le  travail,  mais 
ni  le  travail  des  mains,  ni  le  scapulairc  ne 
furent  en  usage  dans  toutes   les  maisons  de 
l'ordre.  Au  reste,  dans  l'inslitul  d'Arrouaise, 
on  ne  fit  usage  du  scapulaire  qu'autant  que 
dura  la  loi  du  travail   des  mains,  cl  que  le 
plus  grand  nombre  des  religieux  fut  composé 
de  frères  lais.  Lis  cb..noi[ies  arrouaisiens  ne 
portaient  le  surplis   qu'à   certains   jours,  à 
certaines  fêtes,  et  même  à  certaines  heures. 
Ainsi  ils  ne  portaient  pas  le  surplis  à  mati- 
nes, ni  aux  jours  de  travail.  Au  xV  siècle, 
l'abb.iye  d'Arrouaise  fut  léduiîe  en  cendres 
par  une  armée  {probablement  celle  de  Louis 
XI,  qui  ravagea  l'Artois  en  1475).  Les  reli- 
gieux firent  une  quête  pour  la  réparer,  et 
portèrent,  suivant  l'usage  connu,  leurs  re- 
liques de  localités  en  localités,  pour  se  pro- 
curer des  aumônes,  en  excitant  la  piété  des 
fidèles;  mais  les  fidèles  eux-mêmes  étaient 
dans  la  misère,  la  quête  produisit  peu.  Dans 
ce   siècle  les  chapitres   généraux   n'avaient 
plus  lieu,  mais   la  congrégation   subsistait 
encore,  et   l'abbé  d'Arrouaise  conservait  sa 
juridiction,  du  moins  sur  quelques  membres 
de  son  institut.  Au  xvr  siècle,  il  en  coûtait 
beaucoup  pour   être  religie  ix  à  Arrouaise, 
(l  pour  donner    la    preuve  des   exigences, 
n(!us  citerons  un  ou  deux  articles  des  objets 
demandés.  Ainsi  le  novice  devait  fournir  : 
«  à  ung  chacun  religieux,  ung  couteau  ar- 
genté de  la  valeur  de  viii  s.  —  A  M.  l'abbé 
une  paire  de  couteaux  de  la  valeur  d'ung 
noble.  —  Au  prieur  et  au  maître  des  enfaais, 
à  chacun  une  paire  de  xvi  s.  —  An  page  de 
M. l'abbé,  vin  s. — Au  palefrenierdeMonsieur, 
VI  s. Tous  les  valets,  jusqu'au  dernier,  étaient 
couchés  sur  Vétnt  de  ces  dons  à  faire,  et  cet 
élut  se  terminait  par  celte  phrase  d'un  sérieux 
ridicule:  «Avec  loul  cela  il  faut  que  le  no- 
vice soit  bon  enfant.»  Il  y  avait  encore  d'au- 
tres impôts  de  celle  espèce,  un  par  excmplo 
pour  être  assis   sur  le   banc  de  pierre,  au 
cloître  et  en  chapitre.  Ces  usages,  condam- 
nab'es  en  quelques  choses,  et  surtout  dans 
les  monastères   reniés  ,   rcslèren".    pourtant 
dans  quelques  maisons  jusqu'à  la  rérolution 
de  1789. 

Dans  le  même  siècle(en  î5G0],lcs  religieux 
d'Arrouaise  furent,  pour  la  première  fois, 
gênés  dans  l'éleclion  de  leur  abbé,  parle 
gouvernement  espagnol,   maître  alors   îles 


0)7 


MCTIONNAinE  IW-S  OllWiF.S  l!FJ  ir.Ii-.lIX. 


SSS 


r.ijs-Iîas  cl  lîc  I .  FI.Tii(!ri',cl  qui  inipnsôipnl 
le  nom  lie  celui  (ju'ils  voulnicnl  voir  iilil  é. 
Celle  éliclion  iiilhieni-re  cul  lieu  en  ciïel. 
lîienlôl  r.ilili;i}c  (l'Arri.u.iise  olle-iiii^'riie  ro - 
liiiiriii  50US  la  jiiridiciion  de  ItMèiiiie  il'Ar- 
r.is.  cl  pL'ii  à  peu  s'en  .ill.iil  rctle  belle  et 
édllanlc  roiiprépnlidn  !  I.cs  iiiallieurs  de  la 
.guerre  avaient  réduit  les  Cliaiiuines  à  un 
-' petit  noiibie  dans  la  maison;  les  aulres 
._  claicnl,  les  uns  ç.i  et  là  ou  clicz  leurs  p :i- 
ren's.  les  aulres  entrés  dans  quel  ]ue  aulre 
inslilut,  ou  autre  maison  d'Arrouaisiens. 
A  ers  la  (in  du  ww  siècle  et  au  conimence- 
nieiit  du  XTiii  ,  il  y  cul  une  soi  te  de  réforrnc 
ri  de  résurreclion  de  la  conpré2;aiiitn  avec 
un  certain  sucrè<.  Ces  lenlativrs  édifiâmes 
élaicnl  dues  à  l'abhé  Hallé,  nui  exp'ra  dans 
\lS  >enlinK'nls  de  la  plus  vive   pieté  le   27 

i"uillel  1710.  Il  eul  pour  successeur  un  nommé 
>.iuibrinnes,  nommé  par  le  roi,  et  qui  se  fil 
pourvoira  Home,  car  les  reli;;ieu\  relusaienl 
de  le  nommer.  Après  la  mnri  de  Dambrinnc-, 
le  roi  donna  l'ai  biyc  m  conuiiende  au  car- 
dinal lie  Cesvres,  a'clievéque  do  Bourges; 
mais  on  refusa  à  IloniL'  d'accorder  des  bulles 
de  conimcnd.ilairc  pour  une  abbaye  chef 
«l'ordre,  et  en  172">  on  fit  à  Arruuaise  l'é'ec- 
(ion  (iiill:jcncéc  par  la  nomination  du  roi) 
de  Philippe  Lcscounhcnl,  sévère,  économe, 
réfîulier,  niais  iniprudenl.  Sous  lui  finit  la 
juriilclion  d'Arrouaisc  sur  !:i  maison  de 
(^lairfai,  la  dernière  qu'elle  eût  conservée. 
Cel  abbé  vaniteux  filfaire  lui-même  l'épitaphe 
ponijieuse  que  l'on  voyait  sur  sa  tombe  et 
que  nous  avons  lue.  Les  a.  très  abbés,  nom- 
més p.ir  le  roi,  furent  tous  des  abbés  régu- 
liers et  bcnils.  Sous  l'abbé  l'abary,  l'église 
d'Arrouaisc,  en  reconslruclion  depuis  plus 
d'un  siècle,  f.il  enfin  terminée.  La  première 
p'crre  de  la  nef  et  de  la  tour  fut  posée  en 
17-«0.  Talary  était  encore  abbé  en  1788,  et 
vr;iisemb!ablcmenl  l'ut  le  dernier  supérieur 
de  celle  congrégation,  ne  desservant  plus 
alors  que  trois  cures  régulières,  cl  qui  avait 
pour  piieiir  F.  Go-se,  religieux  inslruil  et 
laborieux,  (]ui  a  donné  une  Uisloire  inléres- 
^anle  de  son  abbaye  cl  de  soii  inslilut.  J'elle 
fui  la  ccngrégalion  d'.\rrouaise,  qui  a  éié 
gouvernée  par  cin(iuantc  supérieurs,  dont 
lis  (rois  premiers  porlèrenl  lelilre  de  prévôt, 
cl  donl  le  second,  Conon,  devint  évéiiuc  et 
c.inlinal  ;  congrég.ilion  qu'IIélyol  avail  peu 
connue,  qui  méritait  de  1  élrc  davantage  et  à 
I.  quelle  nous  aurions  dû  léservcr  un  article 
éli  ndu  dans  noire  Supplément,  artii  le  que 
nous  lui  consacrerons  peut-être,  sans  nous 
borner  à  faire  lonnaitre  seulenienl  les  reli- 
gieuses Arrouaisienuos,  dont  aucune  histoire 
lies  ordres  n.oiiastiques  n'avait  parlé  avant 
nous. 

Iliftnire  (h  l'ahhaijc  et  de  rmuiiiinr  con- 
grégtiiiun desCliuuninis  Hàjulicrs d'An  owiisc, 
(iv<  r.  dis  iwlrx  critiiiues,  liist  .riiptrs  cl  diplu- 
iiiut  qnis;  par  M.  (iosse,  prieur  d'.Vrrouaise, 
de  1  ac.iileniie  d'Airas,  1  vol.  in-V'.  Lilli-, 
Danel,  nyO.  b-D-i;. 


MARC  (CiiEVALiKRS  DE  Saint-).  Voyez 
CiiMi'^sr:. 

.MAiu:  m;  FLORRNCE  (  dominicains  i>r 
i.A  coNr.iiKiiATiON  UE  Saint-).    Foi/.  Lomuah- 

DIK,    III. 

MAItC  DE   r.AVOTI  (  Pomimcvin^  ib  la 

CONGIIÉGATION    DE).    Y  OIJ .  LoM  IIAKDIK,    lil. 

MARC  DR,  MANTOUR  ET  DU  SAINT-FS- 
l'ItlT  (Chanoines  Uéglliehs  de  SAiNr  ) 
(1  Venise. 

La  congrégation  des  Ciianoines  Réguliers 
de  Sainl-Marc  de  Manicnic  a  eu  pour  l'oiula- 
teur  un  saint  prêtre  nommé  Albert  Spiiiol.i, 
qui,  ayant  conçu  le  iless'  in  de  fumier  un  mo- 
navtère  de  (Chanoines  Réguliers,  oblint  imur 
cet  elTcl  de  l'abbé  de  Sainl-.\ndré  de  Man- 
toue  une  vigne  proche  de  laquelle  était  une 
cbapcle  dont  quelques  bourgeois  de  celle 
ville  étaienl  patrons.  Non-seulement  ils  cé- 
dèrent leur  droit  de  patronage  en  faveur  de 
cet  et  iblisscment .  mais  ils  tirent  don  à  ces 
nouveaux  Chanoines  de  quelques  terres 
lanl  pour  la  eonstruclion  de  leur  église  et  du 
monastère  que  |  oiir  leur  enlrelien,  ce  qui 
fut  confirme  par  le  pape  ("élcslin  III,  l'an 
li'.)V.  La  même  année,  Henri,  évê;|ue  de  Mao- 
loue,  posa  la  première  jiierre  de  l'église,  qui 
fut  dédiée  sous  le  nom  de  Sainl-ÀIarc  ;  et 
une  dos  princip;iles  conditions  qui  fut  stipu- 
lée jiar  l'acie  do  donation  qui  fut  f.iile  par 
les  bourgeois  de  .Mantoue  des  fonds  et  des 
terres  pour  la  faluique  de  citle  église  fut 
qu'elle  ne  relèverait  d'aucune  au're  église, 
et  serait  chef  d'un  ordre  sous  le  nom  du 
Saint- Ma.-c. 

Quelques  clercs  s'y  élaiil  assemblés  eu- 
rent pour  supérieur  le  même  Spi  lola,  el  il 
leur  prescrivit  une  règle  qui  lui  approuvée 
par  le  pape  Innocent  111 ,  l'an  12()'i.  lille  fui 
confirmée  par  Honorius  III  après  avoir  été 
corrigée,  ce  (jne  fit  aussi  (îré;;oire  1\  par  sa 
bulle  de  l'an  1-228,  où  celte  règle  est  insérée 
dans  loule  sa  teneur. ("irégoirc  X,  Jean  WII, 
C.ilixte  111,  Nicolas  IV'  el  plusieurs  aulres 
souverains  ponlifes  ont  accordé  des  privilè- 
ges à  ces  Chanoines,  iiui,  selon  Penot,  ayant 
clé  réformés  vers  l'an  l'ioi,  n'embrassèrent 
qu'alors  la  règle  de  saint  Augustin. 

Dans  le  commenremcnl  de  leur  instiliilion 
ils  menaienl  une  vie  austère.  Ils  ne  con- 
cliaient  que  sur  des  paillasses  avec  des  lin- 
ceuls de  laine.  Us  jcùnaicnl  depuis  le  diin.iii- 
chc  in  Mbis  jusqu'au  mois  de  se[itembre, 
outre  l'avenl,  les  vendredis  île  l'année,  cl 
les  jrûnes  prescrits  par  l'Fglisc.  Ils  obser- 
vaient un  étroit  silence,  av.iienl  deux  heu- 
ri  s  de  travail  dans  la  journée,  et  n'admet- 
l.iienl  aucun  à  la  profession  qu'il  n'eùl 
dix-sept  ans  accomplis.  I  eur  habillement 
consistait  eu  une  soulane  de  serge  bl.incbe 
el  un  rochet.  Lorsciu'ils  jillaienl  au  rho'ur 
ils  avaient  une  moscl  e  ou  prtil  eamail  el  un 
bonnet  e.irré  blanc  avec  une  auiiiusse  blaii- 
clie  qu'ils  meltaient  sur  le  br.is  il). 
(icllc  coiigrégali  .11  éiaUc  mposéed'cnviroa 


Il    \'«-j.,  iU  lin  du  vol.,  1.»  2-26. 


88!) 


M\n 


MAR 


890 


dix-huit  ou  vingt  mnisims  d'honimps  et  ijud- 

qucs-unes  (le  filles,  qui  élaicnl  silutn-s  dans  la 
Loiiibardic  el  dans  l'Iilal  de  ^'(•nise,  et  aprrs 
avoir  ncuri  pendant  près  de  quatre  cents 
air»,  elle  diminua  peu  à  peu  el  se  vit  réduiie 
à  deux  couvenis  où  la  rcj;ularilc  n'était  pas 
mémo  observée. Leinonaslère  de  Saiiil-Mare, 
qui  en  élait  le  clief,  fui  donné  par  Guillau- 
me, duc  de  Mantone,  aux  moines  Camaldu- 
li'S,  l'an  lo84,  du  consentement  du  pape  Gré- 
goire XIII. 

Quelques-uns  ont  prétendu  que  cet  ordre 
di'S  Chanoines  Uéguliers  de  Sainl-iMarc  de 
IManlouc  n'avait  jamais  eu  plus  de  deux 
maisons  ;  mais  Scipion  Agnelle  Malïei,  cvé- 
<|uc  de  Casai,  dans  ses  Annales  d  ■  M.intoue. 
prouve  le  contraire  par  une  huile  du  pape 
Grégoire  X,  oii  tous  les  prieurs  des  cou- 
vents qu'ils  avaient,  sont  nomin  s,  cl  par 
cette  liulle  le  pape  reconnaît  que  la  règle  de 
CCS  Chanoines  avait  été  reçue  et  corrigéo 
p.ir  les  papes  Honoriusel  Grégoire,  ses  pré- 
décessi  urs,  et  confirmée  par  Innocent  IV 
av.inl  le  concile  général  de  Lyon.  Un  ancien 
registre  qui  est  conservé  encore  dans  celle  ab- 
baye de  Saint-iMarc  qui  était  t!e  l'ordre  des 
Chanoines  Réguliers  de  Saint-Marc  de  Man- 
loue,  cl  qui  contient  les  chapitres  qui  ont  été 
tenus  d.ins  cet  ordre  depuis  l'an  12i-',) jusqu'en 
l'an  13i0,  montre  encore  évidemment  qu'ils 
avaient  plusieurs  maisons,  puisque  dans  le 
chapitre  de  l'an  124^9  il  y  eut  seize  prieurs  qui 
y  assistèrent,  et  que  dès  le  temps  que  le  pape 
Honorius  III  confirma  cet  oidre  en  1220,  il  y 
avait  pour  lors  déjà  cinq  monastères.  (îelie 
bulle  élant  adressée  aux  prieurs  et  couvents 
des  églises  de  Saint-Alarc  de  Manloue,  du 
Sainl-Espril  de  Vérone,  de  la  maison  de  la 
religion  de  l'arme,  de  Sainl-Eus(  be  de  Sara- 
tico  au  diocèse  de  Viccnce,  de  Sainte-Perpc- 
lue  à  Faeiiza  et  à  tous  ciux  qui  à  l'avenir 
voudraient  s'unir  à  cet  ordre. 

Voijez  Scipion  Agnetl.  Maffci.  Annal,  di 
Monluua.  l'enot,  liist.  trijiart.  Canonic.  lie- 
(jul.  Paul  Morigia,  ILst.  de  toutes  les  relig. 
Silvcslr.  Mjurolic.  Mar.  Océan,  di  tut.  (jti 
Jlelig.,  et  Philipp.  Uonanni,  Calalog.  omn. 
relig.  oïd. 

Nous  joindrons  aux  Chanoines  Réguliers 
de  Mantoue  une  autre  congiégalion  qui  prsl 
son  origine  à  Venise  sous  le  nom  du  Saini- 
lîsprit,  el  qui  lut  supp  imée  par  le  pape 
Alexandre  Vil  l'an  165G.  liUe  avait  eu  pour 
fondateurs  quatre  noljles  Vénitiens,  U.  André 
t5ondiméro,  0.  Michel  Maurocini,  D.  Phi- 
lippe l'arula  et  i).  Fr.inçois  Contarini,  qui 
Ions  quatre,  animés  du  même  zèle  et  ayant 
risiilu  d';ibandonner  le  monde,  se  transpor- 
tèrent au  couvent  de  Nazareth  situé  dans  les 
lagunes  de  N'enise,  qui  élait  occupé  par  des 
Inimités  de  l'o.drede  Sainl-Augusiin,  cl  sc- 
iant mis  sous  la  conduite  de  Gabriel  de  Spo- 
lelle,  qui  en  était  prieur,  ils  reçurent  l'habit 
de  cet  ordre  el  en  firent  profession;  mais 
(luebiuc  temps  après,  ayant  obtenu  le  mo- 
nastère de  Sainl-Uaniel  dans  le  l'adouan,  ijui 
leur  avait  clé  donné  par  l'abbé  conimeiida- 


lairo,  ils  y  allèrent  demeurer  cl  l'aliuidon- 
nèrenl  presque  aussilôl,  y  ayant  été  con- 
traints pir  criui  qui  succéda  .1  cet  abbé  (|ui 
les  y  avait  inln  duils:  c'est  pour(|noi  ils  re 
tournèrent  à  Venise,  où  on  leur  donna  le 
monastère  du  Saint-Esprit,  à  trois  milles  de 
celte  ville.  Ce  fut  là  qu'ayant  quitté  leurs 
habilsd'Ermitcs  del'oidrede  Saint-Augustin, 
ils  prirent  celui  de  Chanoines  Uéguliers  avec 
la  permission  de  Martin  V  qui  occupaii  pour 
lors  la  chaire  de  saint  Pierre,  et  ils  firent  de 
nouveau  profession.  Lorsque  le  |inpc  Alexan- 
dre VII  les  supprima,  ils  n'avaient  qu'un 
couvent  et  quelques  hospices  où  il  y  aval' 
peu  de  religieux  et  où  ils  vivaient  dans  un 
grand  relâchement.  Morigia  dit  qu'ils  étaient 
fort  riches,  et  qu'ils  étaient  habillés  comme 
les  Chanoines  Réguliers  de  Latran.  D.  An- 
dré Biindiméro,  l'un  des  fondateurs  de  cello 
congrégation,  a  été  patriarche  de  Venise,  el 
Philippe  Parula,  qui  en  élait  aussi  fondateur, 
a  été  archevêque  de  Crète,  appelé  présente- 
ment Candie.  C'est  dans  cette  abbaye  du 
Saint-Espril,  qui  forme  une  île  proche  do 
Venise,  que  les  ambassadeurs  des  princes 
souverains  reçoivent  les  compliments  de  la 
République,  avant  que  de  faire  leur  entrée, 
un  noble  accompagne  de  soixante  sénateurs 
allant  trouver  ces  ministres  dans  l'église  do 
celle  abbaye  pour  les  conduire  dans  leurs 
hôtols. 

Voyez  Penol,  llisl.  tripart.  Canonic.  /le- 
qul.  Itb.  Il;  Morigia,  Hisl.  de  toutes  les  relig. 
ï.b.  I. 

MARIE  DE  METZ  (Saîntr).  Voij.  Ecinai.. 

MARIE  DU  PORT-ADRIATIQUE  (Sainte). 
Voy.  Latran. 

MARMOUTIERS  ET  DE  FRANCE  (  An- 
ciennes    C0NGKÉG4TI0NS    BÉNÉDICTINES     DE). 

Voy.  France  (Congrégation  de). 
MARMUiNSTER.    Voy.  Lérins. 

MARONITES  (Moines  [l]) 
Quriqu'il  y  ait  une  règle  sous  le  nom 
de  Saint-Antoine,  nous  avons  déjà  dit  que 
tous  les  religieux  qui  se  disent  de  l'ordre  de 
ce  saint  ne  la  suivent  point.  La  plupart  des 
voyageurs  nous  ont  voulu  persuader  dans 
leurs  relations  que  li's  religieux  copies  sont 
de  l'ordre  de  Sainl-Macaire  ;  que  tous  les 
Arméniens  suivent  la  règle  de  saint  Rasile, 
cl  qu'il  se  trouve  aussi  des  religieux  en 
Orient  qui  suivent  celle  de  saint  l'acôine. 
Scliooni'bcck,  dans  son  Histoire  des  Ordres 
religieux,  en  met  même  (luelqucs-uns  di's 
ordres  de  Saint-Sabas  el  de  Sainl-Carilhon. 
Mais  plusieurs  Levantins  dignes  de  loi 
m'ont  assuré  qu'il  n'y  avait  parmi  les  difté- 
rcnles  sedcs  de  chrétiens  en  Orient,  que 
des  religieux  du  l'ordre  de  Sainl-Anioine  cl 
de  celui  de  Saint-Basile  ;  ce  qui  m'a  été  con- 
firmé par  M.  Sapliar,  évéque  de  Mardin  en 
Mésopotamie,  que  je  vis  é'antàRome  en 
1098,  el  qui  me  dil  i\ue  les  religieux  maroni- 
tes, suriens,  copies  cl  quelques  Arméniens 
étaient  de  l'ordre  de  Saint-Antoine,  el  que 
les  Grecs  suivaient  la  règle  de  saint  Basile, 


(!)  Voij.,  à  la  lin  J.i  vul.,  ii"  i2 


¥n 


DICTIONN.MUE  l»F.S  OIU»UF.S  nELIGIF.UX. 


892 


aussi  bien  qnc  tes  Molchilps,   les  CiéorgiL-ns 
cl  la  plus  ^raiidc  [i;iriio  dos  Arméniens. 

C'est  donc  nu  lc:iioit;nn';e  de  ce  prcial,  qui 
c  l  lui-iiH'me  jaiobile  ou  surien,  qucjc  m'en 
rappiirle;  et  je  coriiinenceiai  paries  Maro- 
nites, à  qui  l'on  doit  donner  le  premier  r  :np:  ; 
puisqu'il  n'y  a  aueuti  srhistnaii()iic  parmi 
eux,  et  que  de  tous  eeux  qui  se  sont  séparés 
do  riîsîlise  romaine,  il  n'y  en  a  point  qui  se 
soient  réunis  à  elle  de  tneilleure  fui  el  plus 
sincèren)ont  que  les  .Maronites. 

C'est  un  peuple  de  l'Iiénicie  qui  habile  le 
mont  Liban,    entre  FJiblis  et  Tripoli,   et  qui 
est  encore  répandu  dans  la  Syrie,  la  Syro- 
phénieie,   à  Seyde,    Raru',   Tripoli,  Alep  et 
dans  lilc  de  Chypre.  L'  ur  prinripale  habita- 
lion  est  néanmoins  au  miiil  Liban,  où  ils  ne 
permettent  à  qui  que  ce   soit  de  demeurer, 
s'.l    n'est   catholique.  Plusieurs  auteurs  ont 
prétendu  (jne  le  nom  de  Maronites  leur  a  été 
donné  à  cause  d'un  certain  héréli(iue  mono- 
thélite   nommé   Maron,    qui  les  pervertit  et 
dont  ils  ont  suivi  les   erreurs  pmdant  prés 
de   cinq  cents  ans.  .Mais  ils  n'en  dctucureul 
jias  d'accord,   el   ils    soutiennent  qu'ils  ont 
pris  le  nom  de  Maronites   à    cause  de  saint 
Maron,  abbé.  Fauste  Naironi,  qui  a  fait  une 
dissertation  sur  leur  origine,  dit  (  De  orig.  et 
relig.  Mnronit.)  qu'avant  que  l'hérésie  eût 
infecté  la  ^yric,  il  n'y  a  point  de  doute  que 
•  eux    qui   y    demeuraient   no    s'appiiassent 
Syriens ,    mais  que  la    plupart  des  Syriens 
ayant  suivi   les  erreurs    de  plusieurs  héré- 
siarques,   ils   ont   pris  les  noms  des  sectes 
que  ces  hérésiarques  ont  formées  ;   qu'ainsi 
ceux  qui  ont  suivi  les  erreurs  de  Macédonius 
ont  été  appelés  macédoniens;  ceux  qui  ont 
suivi  Apollinaire,  apollinarisles;  que  de  Nes- 
Jorius  sont  venus  les  ncNtoriens,  d'Kutychés 
les  cutychiens  et  de  J;icob  les  jacobitcs.  Cc- 
P' iiilani,  lorsqu'il  semblait  que  toute  la  Sy- 
rie allait  être  pervertie,  qu'elle  allait  entiè- 
rement  embrasser    l'erreur  et  se  diviser  dcï 
l'Eplise  rom:iine,  Dieu,  dit-il,  apjioi  ta  le  re- 
mède   à  un  si  prand  mal,  jiar  le  moyen  île 
saintMaron,  abbé,  qui  non-seulement  fortifia 
plusieurs  Syriens  dans   la  foi  qu'ils  avaient 
reçue    des    apôtres ,    mais    persuada    à    un 
prand    nombre  d'embrasser  la  vie  monasti- 
que. Ce  saint,  ajoute-t-il,  virait  vers  l'an  400, 
et  SCS  disciples  ayant  bâti  plusieurs  monaslé- 
res  dans  la  Syrie,   dont  le  principal,  auquel 
ils  donnèrent  le  nom  de  Saint-iM.iron  ,    était 
entre  Apamée   el  Kmcsse   sur  l'Oronle,    ils 
suivirent  les  traces  de  leur  maître,    c'esl-à- 
dire  qu'ils  fortifièrent  de  plus  en  plus  quel- 
ques Syriens   dat)s   la   foi  c.ilholi<iuc  ;   c'est 
pourquoi  ceux  d'entre  les  Syriens  qui   n'é- 
i;jient  pas  infectés  du  venin  de  l'hérésie,   el 
qui  suivaient  av<'c  ces  moines  les  dopoies  de 
l'Kglisc   catholique,  furent  appelés  Maroni- 
tes, comme  ayant  persévéré  dans  la  foi  par 
leur  moyen  el  par  celui  de  saint  Maron. 

Mais  comme  Fauste  Naironi  prétend  ap- 
puyer ce  qu'il  avance  par  l'aveu  même  des 
jacobites  et  des  monoihéli'es,  principalement 
d'un'l'hotiias,  arclicvc(iue  de^  fartai),  que  cet 
évoque  n'a  vécu  que  vers  le  onzième  siècle,  et 
^ucd'oillcurs  les  auteurs  que  cite  cncoreNui- 


roni  rapportent  souvent  pour  des  choses  an- 
ciennes ce  qui  se  passaitdeleur  temps  etqn'ils 
ont  même  tiré  des  livres  des  Maronites  de- 
puis leur  réconciliation  avec  Ronie,  c'est  ce 
q\ii  f.iit  que  ce  que  Naironi  a  donné  pour 
preuves  convainc. mies  n'a  pu  encore  per- 
suader plusieurs  savants,  que  les  Maronitis 
aient  toujours  persévéré  dans  la  foi  eallioli- 
((ue,  et  n'aient  jias  tiré  leur  orifjine  de  l'hé- 
réti(]ue  ^L^ron,  (]ui  était  monolhélile.  Il  est 
néanmoins  bien  diflieile  de  croire  qu'ils 
aient  eu  une  telle  orij;inc  ;  el  s'il  était  vrai 
qu'ils  eussent  pris  le  nom  de  Maroniles  à 
cause  de  cet  hérétique,  ils  l'auraient  sans 
iloute  quitte  comme  un  nom  infâme  depuis 
leur  réconciliation  avec  l'Fg'ise  romaine;  de 
même  que  les  nestoriens  qui,  après  avoir  ab- 
juré leurs  erreurs,  prennent  le  nom  de  chal- 
déens,  et  les  jacobites  celui  de  suriens,  com- 
me dit  encore  Fauste  Naironi,  ([ui,  pour 
répondre  à  ceux  qui  prétendent  (|uc  les  Ma- 
ronites ont  pris  le  nom  d'un  village  nommé 
M.ironia,  dil  qu'il  se  peut  faire  (jue  saint 
M  iron  soit  né  dans  ce  lieu,  et  qu'il  en  ail 
jiris  le  nom,  mais  que  pour  eux  ils  ont  pris 
leur  n<mi  de  saint  Maron.  Quoi  qu'il  en  soil, 
ils  célèbrent  la  fêle  de  ce  saint  le  neuvièuio 
janvier,  auquel  jour  il  est  permi>  à  ceux  (jui 
sont  à  liomc  d'officier  selon  leur  rite,  dans 
le  collège  que  lîrégoire  XIII  y  a  fondé  |  our 
ceux  de  cette  nati  m,  laquelle  n'a  pis  imité 
les  aulres  OrienlaMx,  qui  pour  la  |  lupirl 
relombent  aisément  dans  les  mêmes  erreurs 
qu'ils  ont  abjurées.  .Mais  pour  les  Maronites, 
depuis  leur  réunion  avec  l'Kglisc  romaine, 
ils  sont  toujours  demeurés  fermes  dans  la 
foi  calholiqne,  dont  ils  firent  profession  en- 
tre les  mains  d'Aimeric,  patriarche  latin 
d'Anlioclie,  vers  l'an  1182. 

Il  y  a  parmi  ces  Maroniles  des  religieux 
qui  avaient  autrefois  sur  le  mont  Lib-in  en- 
viron (luarante  monastères,  dont  li  plupart 
sont  abandonnés  et  ruinés,  et  qni  étaient 
bâtis  sur  des  croupes  de  rochers  si  escarpés, 
qui-  ces  lieux  paraîtiaienl  n'avoir  jamais  été 
h.ibités,  si  l'on  n'y  voyait  eecore  les  vestiges 
de*  anciens  monastères,  et  si  ceux  qui  sont 
présentement  habiles  n'étaient  aussi  situés 
d.'ins  lies  lieux  déserts,  entre  des  rochers  af- 
freux qui  inspirent  la  pénitencr,  it  où  l'on 
ne  peut  aller  ((u'on  ne  soil  sensiblement 
louché  de  dévotion. 

Les  uns  sont  conuiie  stispeiulus,  spéciale- 
ment celui  (la'on  appelle  Mnrfnlidi,  et  pour 
y  entrer  il  faut  mouler  avec  une  écliellc  de 
vingt-cinq  [lie  's  de  hauteur.  Les  autres  ont 
leur  entrée  comme  celle  des  cavernes.  Celui 
que  saint  llilariun  fil  édifier  en  l'iionneur  de 
s. tint  Antoine  est  de  difficile  abord,  mais  on 
y  trouve  de  beaux  jardin.iges  el  des  vignes. 
(;'esl  l'endroit  où  les  religieux  font  leur  no- 
viiial,  el  lorsqu'ils  sont  profès,  ils  vont  de- 
meurer dans  les  autres  couvents,  qui  s.)nl 
présenli;. lient  au  nombre  di;  dix,  où  dans 
quelques-uns  ils  ont  plus  la  comp.ignic  des 
tigres,  des  ours  f^  auiris  béte.i  féroces,  qno 
celle  des  hommes,  cultivant  la  tcre  et  les 
vignes,  iiourri>sant  des  vers  à  soie,  s'occu- 
paul  à  luire   des   nattes,  |iriuiipaleiniMil  les 


893 


MAR 


MAR 


834 


ifieillai'ils  qui  ne  peuvent  plus  faire  tTo  gros 
tnivail. 

Le  jjlus  affreux  do  tous  ces  couvcnls  csl 
celui  qu'on  appelle  Marsaquin.  11  csl  silué 
dans  les  plus  liaules  montagnes  du  Liban, 
sur  un  rocher  fuit  en  préripice,  dans  un  dé- 
sert <iù  il  n'y  a  que  des  bêles  féroces.  Avant 
que  d'y  enirer,  il  faut  monter  à  une  échelle 
fort  haute,  et  passer  par-dessus  un  échafaud 
de  branchages  d'arbres,  qui  conduit  dans  un 
trou  que  la  n;iture  a  fait  à  ce  rocher,  et  qui 
sort  de  porte  et  de  fenêtre  pour  donner  quel- 
que clarté  à  une  caverne  au  fond  de  laquelle 
il  y  a  quelques  degrés  taillés  dans  le  roc  pour 
monter  dans  une  autre  caverne  qui  sert  d'é- 
fjlise,  et  qui  ne  reçoit  point  d'autre  lumière 
que  celle  que  rend  une  lampe  qui  brûle  de- 
vant l'autel. 

Le  P.  Eugène  Roger,  Récollet,  qui  a  fait 
la  description  de  ces  couvents  dans  son  Voya- 
ge de  la  terre  sainte,  dit  qu'il  fut  en  celui- 
ci,  où  il  trouva  un  religieux  âgé  de  quatre- 
vingts  ans,  dont  il  en  avait  passé  plus  de  (in- 
cluante en  ce  lieu,  et  qui  était  devenu  si  faible 
cl  si  caduc,  qu'il  ne  pouvait  se  remuer  d'un 
lieu  à  un  autre.  C'était  pour  celte  raison  que 
le  patriarche,  son  parent,  voulut  le  faire 
venir  au  monastère  oii  il  faisait  ordinaire- 
ment sa  demeure,  afin  qu'il  y  fût  soulagé 
dans  sa  vieillesse  :  mais  ce  bon  anachorète  le 
pria  de  lui  laisser  finir  ses  Jours  dans  ce  lieu, 
ce  que  le  patriarche  lui  accorda  ;  cependant, 
comme  il  ne  pouvait  pas  aller  chercher  de 
l'eau  au  torrent  qui  passe  au  bas  de  la  mon- 
tagne ,  et  qu'il  faut  descendre  plus  de  deux 
cents  degrés  pour  en  aller  puiser,  il  lui  dun- 
na  pour  l'assister  une  religieuse,  âgée  d'en- 
viron vingt-cinq  ans  ,  qui  avait  déjà  passé 
quelques  années  dans  ce  liéscrl,  où  elle  avait 
mené  une  vie  cxcmilairc,  vi\anl  en  véritable 
Jinachorète.  Celle  religieuse,  pour  régaler  le 
r.  Ro;:er  et  son  compagnon,  tira  d'une  peau 
de  chèvre  du  fromage  un  peu  moins  sec  que 
du  plâtre,  qu'elle  émielta  sur  un  morceau  de 
t:uir  qui  servait  du  nappe  et  d'assiette;  elle 
ajouta  à  ce  mets  deux  poignées  d'olives  salées 
l't  séchées  au  soleil;  et  ayant  fait  chaulTer  de 
l'eau  dans  un  pot,  elle  y  délaya  de  la  farine 
de  froment  qui  avait  trempé  dans  du  verjus  , 
et  fit  cuire  un  peu  de  pain  sous  la  cendre; 
ensuite  elle  leur  donna  du  vin  dans  une  ca- 
lebasse qui  servait  de  verre. 

Les  autres  religieux  maronites  ne  vivent 
pas  partout  avec  tant  d'austérité;  mais  ils  ne 
mangent  jamais  de  viande  sans  une  dispense 
particulière  de  Rome.  Ils  usent  d'œufs,  de 
îaiiage  et  de  diverses  herbes  sauvages,  com- 
me lenouil,  hysope,  colocase,  vwla  insanna, 
et  quelques  espèce.-,  de  chardons,  faisant  con- 
fire toutes  ces  clioses  avec  du  lait  aigre  dans 
des  peaux  de  bouc,  pour  s'en  servir  hors  le 
Icinps  de  leurs  carêmes,  pendant  lesquels  ils 
n'usent  point  de  laitage,  mais  bien  de  pois- 
son, de  légumes,  de  fruits,  de  salades,  d'oli- 
ves et  de  raisiné,  qu'ils  assaisonnent  avec  du 
verjus,  du  miel  ou  suc  de  sumac. 

lis  observent  cinq  carêmes  ,  savoir  :  celui 
de  la  résurrection  de  Noire-Seigneur,  qu'ils 
commencent  le  lundi  de  la  Quiuquagésiuie, 


pendant  lequel  ils  ne  mangent  qu'une  fois  le 
jour,  deux  heures  avant  le  coucher  du  soleil, 
et  s'absliennent  aussi  de  manger  des  œufs, 
du  fromage  et  du  laitage.  Le  second  coiu- 
meiice  quinze  jours  avant  la  fétc  de  saint 
Pierre,  a  laquelle  il  finit;  et  celui  de  l'As- 
somption de  la  sainte  Vierge  commence  aussi 
quinze  jours  avant  cette  fêle.  Le  quatrième, 
qui  n'est  que  de  huit  jours,  est  en  l'Iionnour 
de  riixallation  de  la  sainte  croix  ;  et  le  cin- 
quième est  de  vingt-cinq  jours  avant  la  Na- 
tivité de  Notre-Seigneur,  piMidanl  lcs(;ueN 
carêmes  ils  s'abstiennent  aussi  de  lait  et 
d'œufs,  mais  ils  peuvent  manger  du  froma- 
ge. Ils  jeûnent  aussi  la  veille  de  saint  Maron, 
et  se  conforment  pour  les  autres  jeûnes  à 
l'Kglise  romaine. 

Ils  récitent  leur  office  en  langue  syri  ique; 
matines  cl  laudes  la  nuit,  prime,  tierce  cl 
sexie,à  la  pointe  du  jour  :  la  messe  se  dit 
ensuite,  se  servant  comme  les  Latins  de  pain 
sans  levain  pour  la  consécration.  Après  la 
messe  ils  vont  travailler,  chacun  selon  son 
talent,  jusqu'au  diner  ;  après  quoi  ils  retour- 
nent au  travail.  Avant  souper  ils  disent  noue, 
vêpres  et  compiles  :  îls  vont  ensuite  au  ré- 
fectoire; et  après  le  souper  ils  se  retirent 
tous  pour  prendre  leur  repos. 

Les  novices  sont  en  h.ibil  séculier  pendant 
trois  ou  quatre  mois,  selon  la  volonté  du  su- 
périeur, qui  leur  fait  faire  profession  quand 
bon  lui  semble;  c'est  ordinairement  le  pa- 
triarche qui  I  n  fait  la  cérémonie,  et  en  son 
absence  un  évéque  ou  le  supérieur  du  mo- 
nastère. On  s'assemble  à  l'église,  où  l'on  ré- 
cite un  grand  nombre  de  prières  :  on  deman- 
de au  novice  s'il  veut  faire  profession  et 
s'eng.igpr  dans  la  religion,  et  s'il  répond  (|u'il 
y  cousent,  il  est  dès  ce  moment  véritalilo- 
nient  religieux,  les  Maronites  étant  persuadés 
que  le  consentement  du  novice  renferme  les 
trois  vœux  de  pauvreté,  de  chasteté  et  d'o- 
liéissancc.  On  lui  donne  le  petit  capnce  qui 
le  distingue  des  séculii  rs,  et  la  cérémonie  se 
termine  par  quelques  prières.  Ils  ne  p  uvent 
quitter  l'Iiabit  de  religion  sans  cire  déclarés 
apostats,  et  ils  sont  punis  très-sévèrement 
par  la  prison  ou  p.ir  d'autres  peines,  s'ils 
quilteut  l'habit.  Us  observent  encore  quel- 
ques règlements  qui  leur  ont  été  donnés  par 
le  patriarche  Etienne  Aldoën  ,  natif  d'Aden, 
dont  les  religieux  maronites  poursuivaient 
la  confirmation  en  cour  de  Rome,  lorsque  lo 
P.  Ronauni  donna  son  Catalogue  des  Ordres 
religieux  ,  en  1706.  Il  dit  qu'il  y  avait  ])our 
lors  à  Rome  le  P.  (JabricI  Hœva,  Maronite, 
qui  y  était  venu  pour  ob'.enir  cette  coniirma- 
lion  du  pape  Clément  XI. 

Il  y  a  aussi  des  religieuses  maronites  au 
mont  Liban  ,  où  elles  ont  deux  cnuvents,  et 
gardent  la  clôture;  et  il  y  en  a  d'autres  qui 
vivent  seules  dans  des  solitudes  et  en  ana- 
chorètes. II  s'en  trouve  pareillement  à  Alep, 
mais  elles  ne  gardent  pas  la  clôture  à  caijso 
qu'elles  sont  parmi  les  Turcs;  néanmoins 
elles  demeurent  deux  ou  trois  ensemble  chez 
leurs  parents,  ne  permettant  à  aucun  homme 
d'entrer  dans  leurs  chambres,  d'où  elles  ne 
borlenl  que  pour  aller  ù  l'cglisc  Ks  fêtes  cî 


8'J5                                             DICTIONNAIRE  DES  OnD'.'.KS  Uri.ir.imX.  89ti 

les  dim.inclics.  Kilos  obscrvonl   Irôs-rigou-  criic  priMnUVc,  a  culirpris  \c  nK^mo  ilosspiii 
rfusi'iuciil   cl  à  la    lolde   la    rcfilc    t\c    saiiil  à  un  aulre  (ji  arlior  du  monl  Liban  ;  cl  d'au- 
l'raniois,  s-ms  la  jiiridirlion  des  liH.  l'T.  Ta-  lies  IîIIps  se  sont  retirées   dans  dos  erniila- 
pui  ins,    doiil   elles    porlent   l'Iial  il.  Mais  li  s  po<.  on  elles   proleiidriil  passer   lo  reste   de 
ri'|i"iciisps  du  inonl   l.ihan  sont  de  l'oidro  de  Icirs  jours  dans  la  péniteneo.  )i 
Saint-Anio  ne,  diront    leur  (dCicc  pu  lan^jue  Col  auleiir  pnraii  pou   inriirnic  do  ro   qui 
s\riaiiuo,    aussi  bien    (]no   les    relij;ieux,  cl  rcsiardo  l'Iiisli'ire  niona-liiine  d'OrionI,  puis- 
sônl  habillées  cnmnio  eux,  portant  une  luni-  qu'il   dit  (|ui'  Ton  fait  passer  pour  une  chose 
nue  de  serge  brune,    a\ee    une   ce  iiture   de  admirable,  ei    tout  à  lait   surprenante,  (jue 
cuir  noir  et  une  robe  par-dessus,   qui  o.-l  de  depuis  peu  do  len)|is  il  se  soil  établi  au  mont 
uros  camelnl  do  i'i>il  île  chèvre  de  eonleur  île  IJlian  un  monastère  de  filles,   ce  qui  no  s'é- 
lumée  cl   ayant   Ion  jambes    nues  (1  ).  l'oulc  lail  jamais  vu  en  Orii'ul,  à  ce  qu'il  prétend. 
la  dilTéronro  qu'il  y  a  'iilre  ces  religieux   cl  Les  savants  ne  doineurcronl  pas  sans  doute 
ces  relif^ieusi's  do  Sainl-Aiiloiuo  ,    c'i  si   que  d'aceord  avec  lui,    que  ce  n'e>l  que  depuis 
les  relin'cux  ont  un  eapuce  de   drap  noir  et  peu    que  l'on  voit  des  communanlés  de  filles 
ne  poricnl   point  de  (  hemisrs,  et  que  les  rc-  en  Orient  ;    puisque  l'bisloire  ecclésiastique 
li"ieuses  en   ont  et  mettent  sur  h  ur  lole  un  nous  fournil  une  infinité  d'exemples  du  ron- 
vnile  noir  qui  lov  cou^re  depuis  la  lole  jus-  Ira  ro,  et  qu'il  y  a  encore  plu>iours  monastè. 
qu'aux  pieds,  telles  si'iit  presque  toutes  liilcs  res  do  filles,  tant  grecques  (in'arménionnos, 
dos  plus  qualifiées  et  des  plus  nobles  de  leur  nesloriciincs  el  nielchilcs  en  Orient,  qui  sont 
nation  :  ain>i  elles  no  manquent  de  rien,  leurs  si'us  la  domination  dos  Turcs,  comme  nous 
parenis  fournissant  alionilammonl  h  leurs  bc-  dirons   dans  la  siiile.  ^L  Simon  a  encore  élé. 
Soins.  Llles  s'oeeuj.ent  néanmoins  au  travail  m,,!   infoimétle  la  rèule  que  suivent  les  Ma- 
desinains,  f  niployant  loprolit  qu'ollcsen  roli-  ronilO' ,  !or^qu  il  dil  qu'ils  sent  de  l'ordre  do 
relit  à  roriiomonï  do  leur  o;;liso;  el  elles  oui  Saint-lias  le,    car  il  est  certain  qu'.ls  se  di- 
tes mémos  joi'ines  cl  les  inéiucs  observances  sent  do  l'ordre  de  Sainl-Aiiloino. 
dos  religieux.  Les  roli^iii  u\  et  les  religieuses  qui  y  de- 
1\I.  Simon,    auteur  du  Dictionnaire   de    la  nu  urcnt  dé|ieiub  ni  entièrement  du   patriar- 
liildc   (Toiii.  L  pag.  ai2,  au  mol  C  .noiun  ),  chc,  qui  est  aussi  religieux  et  qui  fail  sa  de- 
impriipé  pour  la  sicondo  fois  à  Lyon  en  171).'},  meure  r.u  inonaslère   de  Canobin   (-2),  siluô 
du  qu'on    fail   passi  r  pour  une  chose  sur-  (i.ms   un  affreux  déscil,  dans  lequel  il    y  a 
prenante  cl  tout  à  fail  admirable,  que  depuis  environ  vingt-cinq  ou   trente  religieux.  Son 
peu  de  leiii[)s  il  se  soil  éiabli  un  couvent  de  revenu  peut  monter  à  vingt  mille  livres  par 
filles  au  mont  Liban  ;  ce  qui  ne  s'était  jamais  .-m,  et  consiste  en  vin,  L'omonl,  huile,  suje  et 
lu  en  Orient.  Il  ajoute  que  la  fondatrice  ou  liét.;il;  il  jiaje  environ  mille  livres  au  paeha 
institulrice  de  ce  nouveau    monastère   était  de  Tripoli,  <'t  a  sons  lui  six  ou  sept  évoques, 
une  paavre  fille  qui  s'occupait  à  l'éducation  ;i\ec  un  ablié  mitre  qui  demeure  au  monas- 
de  la  jeunesse  de  son  se\e,  leur  apprenait  à  1ère  de    Mar-An(onois.  11   prend   lo  titre  do 
lire,  à  écrire  et  toutes  les  autres  choses  qu'ol-  patriarche  d'Anlioclie,  que  plusieurs  papes 
les  sont  obligées  de  savoir.  «  Klle  fut,  dil-il,  [ui    ont   accordé,  el   est   vêtu    d'une   longue 
iiis|)iréc  de  Uiou  d'assembler  les  plus  graii-  veste  ou  snulano  de  bleu  lurquin.  Il  porte  un 
des  el  celles  qui  seraienl  les   plus  |iri,>i'res  à  ^ros  luiban  t\i'  toile  de  mémo  couleur,  aussi 
lascconderdaiissasainleontroiirisejollcu'eul  |;i,.n  que  les  évoques;  mais  quand   ces  pro- 
jias    beaucoup   de    peine   à  les   faire  entrer  |;iis  vont  à  l'egliso  ou  ailleurs,  ils  ont  sur  la 
dans  sa   pensée;   el    quoiqu'elles  n'eussenl  soutane  une  robe  noire  sans  collet,  a\ec  un 
jamais  ouï  parler  de   comir.unaulc,    elles  en  eapuce  de   iiionie   couleur,  comme  on   peut 
lomposèrcut  une  d'environ  trente  filles  qui  voir  dans  la  figure  du   patriarche  qiio  nous 
s  )nl    non-soulemeul    l'éd-ficalioii    des  dire-  avons  fail  graver  (3;.  M.  lUchard  Simon  (au- 
liens  d(^  ce  pays-là,   mais  i  luorc  des  Sarra-  irc  (jne  celui  dont  nous  avons  parlé',  fai.<ant 
sins.  Leur  pauvreté-est  extrême  ;  leurs  cellu-  mention   de   l'éloclion   de  ce   palriarcbo,  dit 
les,  qui  ne  sonl  que  do  chaume,  sont  bàlies  que  lo  peuple  y  a  beaucoup  do  part,  car  elle 
autour    de    leur   clapcllo  ;    et    quoiqu'elles  ilépond  du  corps  de  leur  république,  qui  doit 
n'aient  rien  ((ue  le  travail  de  leurs  mains,  el-  reconnaître  celui   qui   a  été  élu;   m^iis  que, 
les  tiennent  pourlaul  leur  autel  irè  -propre-  comme   les   eci  lésiastiquos   lienncnl  le  jire- 
nicnl   orné,   et  on  ne  peut  rien  voir  de   plus  mier  rang  d.ins   l'I^tat,  aussi  conlribueiit-ils 
décent  que  leur  chapelle.  ICIIes  éprouvent  la  le   plus  à    l'élection.  Douze   des   priinipaux 
vocation  de  celles   (]ui  veulent    entrer  dans  ■  prètns   s'a>sembleiil  dans   le   inon.istère   de 
leur  compagnie  par  un  noviciat  de  trois  ans  ;  ('.;innl  in,  où  ils  procèilonl  à  l'élecliou  du  pa- 
elles  om|iloienl  la  nuit  à  la  prière  el  à  chan-  tiiarrlio  par  la  voie  du  sciiilin;  et  quand  iis 
|:  r   les  louanges  de  Dieu,  et    le  jour  à  lia-  sonl  tous  d'accord,  la  république  qui  osl  as- 
vaillerdes  mains,  pour  faire  valoir  lo  peu  de  semblée,  c'est-à -dire  les  eci  lésiastiquos  cl  lo 
bien  ((u'clies  possèdent  aux  environs  de  leur  peuple,  donnent    leur  coiiscntomcnt   à   cette 
iiiunaslèrc.  Une  autre  Dllc,  à  l'imitation  de  (élection.  Comme  il  est  néanmoins  difficile  que 

(I)   V^i/.,  il  la  lindii  vol.,  11°  2iS  le  principal    mon^slcre  cl  le   plus    coiisiiléi;dile  du 

(•.;)  Tous  les  viiy:ii;eiiis  ilnniicnl  à  ce  niniia'-lère  le  iiiimi    Liban;  cir  C(ti:i>hiit  on    ar.ibe   veiildire  iim- 

iiiiiii  de  rnnofciii  pane  ipi'ils  l'ciilciidciil   ainsi  iiiiiii-  nasliMC  nii  eonveiil.  (.'ctl  ce  qui  a   élé  ICMiarqué  (lar 

nici  ;   mais  il  y  a  de  rapparcncc  que    les   Maroiiiies  M.  l'aiilM' Ueii.iudcii 

lie  le  iiuiniiicnl  mum  ijuc  par  excellence,  cduhiic  étant  (5)  \'oy  ,  à  la  lui  «1ii  vol.,  n'  ~-0. 


fiOT  M  A 15 

toulcs  los  voix  concouri'iil  ensemble  dans  le 
scniliii,  ii  y  a  une  secoiule  inanicic  (Je  pro- 
ci'der ,  ((ui  est  une  esj  èce  de  compromis; 
c'esl-à-dire  tjue  de  ces  douze  prêircs  l'on  en 
choisit  Irois  au  sort,  ei  ce-i  trois  font  le  p,i- 
Iriurclie,  qui  est  inétiie  élu  à  deux  voix  ;  en- 
suite le  peuple  conlirnic  celte  élection  par 
son  consciitemcnl,  el  le  palrinrclic  reçoit  du 
pape  les  bulles  ilc  conlinnation. 

Dans  ce  nionaslère  de  Cuiiobin,  aussi  bien 
que  dans  celui  de  Saint-Aiitoine  et  dans  un 
autre  (]ui  est  au  désert  de  Saint-Elisée,  où 
deriicure  ordinairement  un  évéque,  il  y  a  des 
cloches;  mais  dans  les  autres  couvents,  et 
même  dans  les  paroisses, ils  n'ont  pnur  appe- 
ler le  peuple  (ju'unc  planche  do  bois  su^iicn- 
diie  avec  des  cordes  à  quelques  arbres,  con- 
tre laquelle  ils  frappent  avec  des  massues  de 
bois. 

Ce  fut  sur  le  mont  Liban  que  M.  Galaup 
de  Chastcuil,  gentilriomme  de  l'rovenre,  se 
retira,  vers  l'an  1(;3I,  pour  y  mener  une  v  e 
solitaire  et  [.énilenle.  Les  Turcs  troublèrent 
souvent  le  repos  de  sa  solitude  durant  les 
guerres  contre  l'émir  Fecke-Edin;  mais  son 
mérite  faisait  impression  sur  l'esprit  même 
des  barbares.  Il  était  si  connu  des  i\Iaronites, 
et  ils  en  faisaient  une  si  grande  estime, 
qu'après  la  mori  de  leur  patriarche  Georges 
Ainira,ils  le  prièrent  d'accepter  cette  dignité. 
Il  refusa  cet  honneur,  el  se  retira  ensuite  à 
Mar-Ëlicha  ,  dans  un  monastère  de  Carmes 
Déchaussés,  où  ii  redoubla  ses  austérités, 
qui  lui  causèrent  une  maladie  dont  il  mou- 
rut le  15  mai  de  l'an  IGVi.  11  avait  composé 
dans  sa  soliiudc  (|uel(]ues  ouvrages  sur  la 
Bible,  qui  restèrent  avec  ses  autres  livres 
aux  Carmes  Déchaussés.  Sa  Vie  a  élé  donnée 
au  public  en  1G6(). 

!■  rancisc.  Quarcsm.  Elucidât.  Terr.  Sanct. 
Davily,  Descripl.  de  l'Asie  cl  de  l'Afrique. 
Le  Eèvre,  Théâtre  de  In  Turquie.  La  Croix, 
Turquie  clirclieniie.  Eugène  Uoger,  Y oijaqe 
de  lirrc  sainte.  Maimbouig,  Scliisme  des 
Grecs.  Jérôm.  Dandini,  Voyage  uu  monl  Li- 
ban, avec  Us  remarques  de  M.  llicliurd  Simon; 
cl  l'hilipp.  Bonanni,  CattUog.  Ord.  reliijios., 
\jart.  I. 

Les  moines  maronites  sont  encore  aujour- 
d'hui au  mont  Liban.  On  voit  actnellement  à 
Roiui'  trois  monastères  sous  les  désignât  ons 
suivantes  :  1"  Mtiroiiili  Alepini  di  S.  Antonio 
abaie.  11.  P.  abbé  D.  Genalii)  Zucclii,  général, 
résidant  au  monl  Liban.  I\.  P.  D.  B  isile  Cia- 
babi,  abbé  el  vicaire  général.  2*  Maroniti 
Litninesi  di  S.  Antonio  atiate.  H.  P.  D.  Emnii- 
nuel  Ciababi.  général,  résidant  au  mont  Li- 
ban. U.  P.  D.  Libeo  Mulaiiii,  procureur  géné- 
ral, résidant  à  Borne.  S"  Anneni  (moines  ar- 
Diéiiiens)  di  S.  Antonio  abale.  B.  P.  D.  Timo- 
tbee  Tellal,  abbé  général,  résidant  au  mont 
Liban.  B.  P.  abbé  D.  Ar.-ènc  Angiaiakian, 
procureur  général,  résidant  à  Boiiie,  près  du 
\'aticau.  Voyez  Akméniuns,  tome  1''  de  ce 
piclionnaire,  page  206.  B-d-e. 

MABTHE  (AuGUSTiNES  de  Sainïk-)  Voy. 

AUGtSTlNES. 

MARIHE   (Des    Filles    HosriTALiÈnES    de 


MAR 


Ji;)."» 


Sainte-)  en  Bourgogne,  ttvit  dans  le  duché 

que  dans  le  comté. 

Il  y  a  un  grand  nombre  d'hf'ipilaux,  tant 
dans  le  duché  que  dans  le  comié  de  liour- 
gogne,  desservis  par  des  liospilalières,  qui 
tirent  leur  origine  des  Béguines  de  iMalines, 
dont  nous  avons  parlé  préeédemmenl.  I.c 
plus  ancien  et  le  plus  considérable  de  ces 
liôpilaux  est  celui  de  B.aune,  datis  le  di  ciié 
de  Bourgogne,  fondé  l'an  lVi3  par  Nicolas 
Holin,  ciiancilier  de  Pliilippe  le  IJori,  duc  de 
Bourgogne,  qui  (îl  venir  de  Malincs  six  Bé- 
guines pour  en  avoir  soin.  Pi.  s  ei.rs  person- 
nes, à  rexem|:le  (lu  fondateur,  y  donnèrenl 
di  s  sommes  considérables,  el  le  pape  Nico- 
las V  conlirma  toutes  les  donaiions  (|ui  y 
avaient  été  faites.  Cet  hôpital  fut  bâti  avec 
beaucoup  de  magnilic.ence.  Il  y  a  une  salle 
fort  longue,  commune  pour  Ions  les  pauvres 
malades,  de  quelque  nation  qu'ils  soient, 
qui  y  sont  reçus  avec  btamonp  de  ch.inlé. 
Au  boni  de  cette  salle,  du  côté  de  l'orienl,  il 
y  a  une  chapelle  disposée  de  telle  sorte  que 
tons  les  malades  peuvent  commodément  en- 
tendre la  messe  et  voir  le  saint  sacrement 
lorsqu'il  est  exposé.  Derrière  l'autel  il  y  a 
une  autre  s.illepour  ceux  ()ui  sont  dange- 
reusement mala  les,  laquelle  a  ses  o  lices 
paiticuliers  qui  y  sont  contigus.  Derriè.e 
cell"  salle  est  un  autre  lieu  destiné  pour  les 
corps  morts,  avec  plusieurs  lavoiis  et  gran- 
des tables  de  pierre.  Le  long  de  la  grande 
salle,  du  côté  du  midi,  l'on  trouve  une 
grande  cour  carrée,  bnrdèe  de  galeri  s  hau- 
les  et  basses.  Le  long  des  galènes  hautes,  il 
y  a  plusieurs  appartements  pour  recevoir 
les  personnes  de  condition,  les  gentilshom- 
mes de  quatre  ou  cinq  liiuesàla  ronde  ne 
faisant  point  dil'licullé  (le  se  faire  porter  à 
cet  hôpital,  où  ils  sont  aussi  bien  traités  el 
soignés  qu'ils  le  pourraient  être  dans  leurs 
châteaux.  Chaque  appaitemenl  est  composé 
de  chambre,  antichambre,  caliinel  cl  garde- 
robe.  Us  Sont  ri(  hemrnt  meublés,  et  dans 
chaque  chambre  il  y  a  trois  lits,  pour  chan- 
ger te  malade  selon  les  besoins.  Chaque  ap- 
partement a  son  linge  particulier  ,  ses  usten- 
siles, ses  meubles  ,  et  n'(mpruuie  rien  d'où 
autre.  Chaque  chambre  a  aussi  son  nom, 
comme  celle  du  roi,  celle  des  ducs  de  Bour- 
gogne, el  ainsi  des  autres.  Non-seulement  on 
y  re(;oit  le.>  gentilshommes  ,  mais  encore  les 
bouigeois  les  plus  considérables  de  la  ville. 
Us  font  apporter  de  chez  eux  la  viande,  lo 
|iain  elle  vu;,  et  payent  les  remèdes  qu'on 
leur  donne  :  il  n'y  a  que  les  meut)les  et  le 
service  des  sœurs  dont  on  ne  demande  rien  ; 
mais  il  n'y  en  a  point  qui  en  sortant  ne  laisse 
quelque  aumône  par  reconnaissance.  Il  y  a 
aussi  des  chambres  le  long  des  galeries  bas- 
ses, où  l'on  rei.oit  ceux  qui  sont  de  moindre 
condition,  et  qui  y  sonl  traités  el  médica- 
mentes  aux  dépens  de  l'hôpital,  de  la  même 
manière  que  les  malades  de  la  salle  com- 
mune ;  mais  s'ils  veulent  quelque  chose  de 
plus,  comme  bois,  viande  et  le  service  par- 
ticulier de  quebiues  femmes,  c'est  à  leurs 
dépens.  L'apothieaircrie  est  fort  belle,  el  la 
Bourgeoise,  petite  rivière  qui  a   sa  source  à 


859 


DICTIONNAIRF,  DES  onOUES  «EUGIF.HX. 


»od 


cinq  renls  pas  de  !a  villo,  passe  au  milieu  ilc 
1.1  lour,  iloù  c;ie  se  répaïul  par  plusieurs  ca- 
naux iiaiis  lous  les  orCues  :  ce  (]ui  coiiliibuc 
à  la  proprcli-  Je  col  hop;lal ,  ou  l'on  ne  sent 
piiinl  de  niauvaisc  odrur  comme  dans  les  au- 
lnes. 

Le  plus  célèbre  hôpital  du  même  inslilul, 
après  celui  de  Beauiie,  csl  l'hôpital  de  Cliâ- 
lons-sur-Saônc.  Il  y  en  avait  eu  un  de  tout 
leinps  en  celle  vil'e  ;  mais  ayant  élé  démoli 
par  ordre  du  duc  de  la  Tremoille,  i-ouver- 
neur  de  liourj^ogne,  sous  prétexte  de  (jucl- 
ques  forlificalions  ((ue  l'on  fil  au  n  éine  en- 
droit, les  liouri;('ois  présciiUrenl  une  nquèle 
au  roi  Frani^ois  1",  l'an  1528,  pour  prier  Si 
Majeslé  de  leur  accorder  une  pl.ice  d.ins 
la  ville  pour  y  bàlir  un  autre  liôpilal.  Ce 
prince  leur  en  accorda  une  dans  le  laubouri; 
>aiiil-Aiidré  ;  mais  comme  elle  joignait  ù  un 
closde  vl};ncappartcnanl  àrévéque,  quisuin- 
l)lail\  ou  loir  apporter  quelque  opposition  à  (Cl 
élablissemeiil,  on  leir  en  accorda  une  aulre 
au  f.iubourg  J^aiil-Laurciil,  où  les  fonde- 
mrnis  de  cet  hôpital  furcnl  jelés  la  mèuie 
année,  et  la  première  i)ierrc  posée  par  lus 
éclirvjns  l  •  l'J  août.  Le  roi  accorda  raiinéo 
suivaiilo  des  leilres  d'amorlissemcnl,  vou- 
lant ([ue  1  cl  liôp  lai  fût  loujocirs  sous  la  juri- 
dlciioii  de>  bourgeois  de  la  v.lle,  et  le  pape 
Paul  III accorila,  l'an  1538,  des  indulgences  à 
ceux  qui  le  visilcraicnt  et  qui  eonlribue- 
raienl  de  leurs  biens  pour  l'enlrclcnir.  11  est 
aussi  fort  magnifique  :  il  y  a  plusieurs  salles 
pour  les  maladrs,  et  on  n'y  est  point  ineoiu- 
niodédela  mauvaise  odeur  qui  a  coutume 
d'infcdcr  les  aulres  hôpitaux.  Il  y  a  toujours 
pendant  l'hiver  un  grand  nombre  de  casso- 
lell(setdc  réchauds  parfumes,  cl  pendant 
l'été  on  altaclu-  aux  voûtes  des  vases  qui 
sont  toujours  remplis  de  toutes  sortes  de 
(leurs.  L'on  admire  dans  celle  maison  quatre 
jiraiides  chamlircs  hautes,  tapissées  de  hau- 
tes lisses  et  richement  meublées,  comme  dans 
Ihôpitai  de  l!eaune,  où  des  personnes  de 
qualié  se  font  perler,  étant  traitées  dans 
leurs  maladies  par  les  S.eurs  Hospitalières 
avec  toute  l'adre-so,  la  propreté  et  la  dou- 
ceur que  Ton  pourrait  attendre  de  ceux  que 
le  devoir  et  non  pas  la  charité  obligerait  à 
ces  exercices,  t^es  chambres  oui  la  vue  d'un 
côté  sur  la  rivière  el  de  l'autre  sur  la  prairie. 
Il  y  a  une  cuisine  particulière  pour  ces 
chambres.  Le  dortoir  îles  S(eurs  est  à  côté, 
et  lous  les  ofli  es  de  riii')pilal  sont  dessous, 
jiussi  bien  que  la  cuisine,  le  rèfecloirc  el 
l'inlirmeric  des  Sœur.>.  Il  y  a  aussi  une  belle 
apolliicaircrie.  On  y  voit  un  jardin  où  il  y  a 
lotiles  sortes  de  simples,  cl  uu  puits  place  au 
milieu  d'une  cour  ombragée  dcquanlité  d'ar- 
bres, qui  fournil  par  des  canaux  sullisam- 
iiieiil  d'(,-au  à  toute  la  maison. 

Nous  nu  parlerons  point  en  partit  ulicr  des 
auties  hôiiitaux  que  dcsserveiil  ces  Uospiia- 
lières  dans  le  «liiclie  cl  comté  de  lîourgogne, 
où  ils  sont  en  grand  nouilire,  el  qui  se  mul- 
tiplienl  tous  h'.>  jours  ;  nous  nous  conlenle- 
roiis  de  dire  que   tes  llospilalièies    y  pr.ili- 


quenl  |  arlout  également  la  charité  à  l'égard 
des  personnes  de  l'un  et  l'auire  sexe.  Klles 
ne  font  (pie  dos  vœux  simples  d'obéissance 
cl  dechaslelè,  pour  le  temps seulcmenlqn'cl- 
les  sont  employées  .lU  service  des  p.iuvrcs, 
leur  étant  libre  de  sortir  cl  de  «luilter  lli.ibit 
quand  bon  leur  semble. 

La  diffi'rence  qu  il  y  a  cnlrc  celles  du  du- 
ché et  ceries  du  comté,  c'est  que  celles  du 
duché  sont  exemples  de  la  juridiction  des 
ordinaires,  par  plusieurs  bulles  des  souve- 
rains pontifes  ;(  t  que  celles  du  comté  sont 
soumises  a  l'ordinaire,  A  la  réserve  des  Hos- 
pitalières de  Dole,  qui  se  sont  main  euurs 
dans  leur  exemption,  par  un  procès  qu'elles 
ont  gagné  contre  l'archevêque  de  Resan(,-(in. 
Les  supérieures  des  exemples  sont  p  rjié- 
luellcs,  el  celles  des  soumises  à  l'ordinaire 
ne  sont  que  triennales.  Les  exemples  sont 
habillées  l'été  de  blanc  cl  l'hiver  diî  gris,  et 
les  aulres  sont  en  tout  temps  habillées  de 
gris.  Il  n'y  a  pas  lon!;lcmps  que  l'on  aobli^^é 
celles-(  i  a  porter  en  loul  temps  le  gris;  c:r 
elles  portaient  le  blanc  |  endant  l'été  cooimo 
les  exemptes.  Les  unes  el  les  autres  onl  un 
gr.ind  voile  blanc,  qui  avance  par-du\anl  do 
la  longueur  de  quatre  à  cinq  pouces,  cl  est 
soutenu  par  du  caiton.  Elles  onl  aussi  u» 
bandeau  sur  le  front  cl  une  guimpe  qui  des- 
cend jusqu'à  la  ccin'ure  en  din.iuuanl  et 
fais.'inl  deux  plis  de  tha(|ue  (ôlé.  La  forme 
de  l'un  cl  l'autre  habillement  est  toujours  l.i 
■  même  ;  et  tant  la  jupe  blanche  de  dessus  que 
la  grise,  qui  est  doublée  de  noir,  sonl  tou- 
jours retroussées,  s'atlachant  oar  der  rièro 
avec  un  i-rochet  d'argent  de  la  longueur  do 
cinq  à  six  pouces,  qui  cn'ru  d..iis  deux  agra- 
fes aussi  d'argent  ^Ij. 

Jaci|ucs  Foilere  ,  Ilisl.  (ira  couvents  île 
Sain(-Fr(inço:s  et  de  Salnlc-t'lairc,  de  la  pro- 
vince de  Siiinl-JJonavei  liire,  pny.  '^'M.  //i.<- 
Idiie  icclisiasliriue  de  Cfidlons,  ;,«(/.  18S;  f( 
Mémoires  nuiniisci  its. 

iMAIlTlN  (Chanoim-s  nu  Saitii-)  d'Hpcr^ 
nay.  Voy.  Jevn  ue  GiiAurnEs  (Smvt). 

MAUTVUSUANS  LA  l'ALKSl  iMî.  Voy. 
CÔMK  i:r  Damikm  (Saints). 

.MATIIL'UINES.  Foy  TiUMTi;  (  l'ii-KS  on 
DiiK  DK  i.A  Sainte-) 

Ma  rilLIlUNS.  Voij.  TiiiMTAiiiEs. 

MA  r  niiASUirnvui.i  (iiKi  oiiMEDE).  Toy. 

Amoink  de  I^astel-Saint-Jean. 
MAUltl'UGlî.  Voy.  NivEiLE. 

MAUil    (I)i:s    BiîNÉnicTiNS    lt^:F0R\iÉs  de  i,\ 
C'iNiMiiaiATiON  DE  Saint-)  en  France. 

De  toutes  les  congrégations  de  l'ordre  dO 
."^aiiit-ltjnoit,  il  n'y  en  a  p  'ini  de  plus  illus- 
tre, plus  féconde  en  personnes  savanles,  et 
qui  rende  plus  de  service  à  l'Iîglise  ,  (p  o 
celle  de  Sainl-.Maur  en  France.  Elle  doit  ses 
commencements  à  la  cougrégatlim  de  Siiint- 
\'aiine,  dont  la  ré|iiitaiion,  se  répandant  de 
lous  cô'.és,  invita  plusieurs  abbayes  de 
France  à  embrasser  le  même  genre  de  vi«'. 
La  première  qui  dcm.inda  à  se  soumelire  à 
l'ctroile  ob>civaiice  lut  cellu  de  Saint  Augus» 


(I)   I  uj  ,  ï  la  lin  lin 


901  MAI] 

liti  de  Limoges.  Elle  avîfil  été  fondée  envi- 
ron l'an  542  par  saint  Hurice  le  Jeune,  évo- 
que de  Limoges,  qui  y  avait  établi  des  cha- 
noines; mais  les  Danois  ayant  entièrement 
(lélruit  ce  monastère,  il  fut  rétabli  l'an  93ï 
par  Turpion,  aussi  évéque  de  Limoges,  qui 
au  lieu  de  chanoines  y  mit  des  religieux  de 
l'ordre  de  Saini-Bonoîl.  L'observance  régu- 
lière s'y  maintint  jusqu'à  ce  que  cette  ab- 
baye étant  tornliée  en  commende,  et  les  re- 
venus en  ayant  été  dissipés  par  le  peu  d'éco- 
nomie dis  abbés,  le  relâchement  s'y  intro- 
duisit, et  elle  était  dans  un  état  déplorable, 
lorsque  Jean  Kegnault,  dernier  abbé  com- 
imndalaire,  la  soumit,  l'an  1613,  à  la  con- 
grégation de  Saint-Vanne.  Plusieurs  autres 
abbayes  s'y  soumirent  aussi  ;  comme  celles 
de  Saint-Faron  de  Meaus,  de  Saint-Juiien  de 
Noaillé,  de  Saint-Pierre  d'i  Jumièges  et  de 
lîeinay.  Uom  Didier  de  la  Cour  et  lesaulies 
supérieurs  de  la  Réforme  de  Saint-Vanne  y 
envoyèrent  des  religieux,  qui  travaillèrent 
avec  succès  à  y  établir  la  réforme.  Mais  les 
diilicultés  iiu'iis  trouvèrent  à  réunir  sous  une 
même  congrégation  ces  abbayes  et  d'autres 
plus  éloignées  qui  deiiiandèrenl  aussi  la  ré- 
forme, leur  fil  prendre  la  résolution  d'en 
faire  deux  diiïcrcnles,  dont  l'une  serait  éri- 
gée en  Fiance  et  à  laquelle  les  nionastères 
déjà  reformés  serviraient  comme  de  foude- 
luenl.  Ce  projet  fut  approuvé  dans  le  chapi- 
tre général  (jui  se  tint  à  Sainl-Mansuy  de 
Tout  au  mois  de  mai  1618.  Ils  permirent  d<''s 
lors  aux  religieux  qu'ils  avaient  envoyés  en 
France  de  faire  un  nouveau  Ciirps  de  con- 
grégaiion  composé  des  monastères  où  ils 
avaient  porté  la  réforme  et  de  ceux  qui 
voudiaicnt  l'ejnLrasser  dans  la  suite  ;  et  atin 
d'entretenir  dans  les  deux  congréj^alioas 
une  union  et  une  amitié  inviolable,  ils  dies- 
sèrcnl  un  acte,  par  lequel  ils  se  promirent 
les  uns  aux  autres  la  participation  aux  priè- 
res ei  au'i  autros  bonnes  œuvres,  ce  qui  s'est 
toujours  pratiqué  depuis. 

Dom  Laurent  Bénard,  prieur  du  collège 
de  Clu  y,  et  qui  avait  été  à  Saint- Vanne 
dans  l'intention,  ou  d'unir  son  collège  à  celle 
congrégation  ,  ou  de  s'y  faire  religieux, 
ayani  renouvelé  sa  profession  en  présente 
du  tout  le  chapitre,  conl'orméuienl  à  celle  qui 
se  prati(|uail  déjà  dans  cette  congrégation, 
et  s'élani  soumis  à  l'obéissance  des  supé- 
rieurs qui  la  gouvernaient  ,  retourna  par 
leur  ordre  à  Paris,  afin  d'y  travailler  de  tout 
son  pouvoir  à  l'exècuiion  du  dessein  qu'on 
avait  formé  dans  ce  chapitre  tenu  à  Sainl- 
Mansuy.  Il  était  secondé  par  les  l'P.  dom 
Anselme  Rolle,  dom  Co.omban  Régnier,  dom 
Adrien  Langlois  ,  dom  Maur  Tassin,  dom 
.Martin  Taisnière  et  dom  Alhanase  de  Mon- 
gin,  tous  religieux  de  Sainl-Vanne  et  d'un 
mérite  distingué.  Us  obtinrent  au  mois  d'août 
de  la  tuènte  année  1618  des  lettres  patentes 
du  roi  Louis  Xlli  pour  l'érection  de  la  nou- 
vel e  congrégation,  à  laquelle  ils  donnèrenl 
depuis,  dans  leur  première  assemblée  gêné 
raie,  le  noiu  de  Saint-.Maur,  aimant  mieux 
prendre  pour  patron  ce  bienheureux  disci- 
l>le  de  sain',  lieiioit  que  tout  autre  suinl  tilu- 


MAU 


!;02 


laire  de  qucl(]ue  alii)ayc  particulière,  de  piMir 
de  donner  de  la  jalousie  surtout  aux  plus 
grands  monastères  qui  auraient  voulu  peut- 
être  avoir  la  préférence. 

Sitôt  que  les  lelires  patentes  du  roi  eurent 
été  expédiées,  plusieurs  personnes  du  pre- 
mier rang  s'offrirent  d'elles-mêmes  à  dom 
Laurent  Renard  pouraccélérer  le  succès  d'une 
affaire  qu'elles  prévoyaient  bien  devoir  tour- 
ner à  l'ulilité  de  l'Ivglise  et  à  l'honneur  du 
royaume.  Les  principales  de  ces  personnes 
furent  les  cardinaux  de  Retz  et  de  Sourdis, 
les  présidents  Nicolaï  et  Hennei|iiiii  et  le 
procureur  général  Moié,  qui  fut  dans  la  suite 
premier  président  et  garde  des  sceaux.  Lo 
premier  fruil  de  cette  protection  fut  l'inlro- 
duction  de  la  réforme  dans  le  monastère  des 
Blancs-Manteaux  qui  appartenait  aux  Guil- 
lelmites.  Le  cardinal  de  Relz  le  fit  agréer  au 
roi,  et  les  Bénédictins  en  prirent  possession  la 
5  septembre  1618.  (]omme  dom  Laurent  Bé- 
nard, prieur  du  collège  de  Cluny,  se  mêlait 
de  cette  affaire,  c'est  peul-élre  la  raison  pour 
laquelle  ces  Bénédictins  Réformés,  qu'on  no 
connaissail  pas  encore  pour  être  de  la  con- 
grégation de  Sai!it-.Maur  qui  n'élait  pas  for- 
mée, sont  appelés  de  l'ordre  de  Cluny,  dans 
la  requête  que  le  provincial  des  Guillelmitcs 
prosenia  au  roi  pour  rentrer  dans  la  posses- 
sion de  ce  monastère,  aussi  bien  que  dans 
le  plaidoyer  de  du  Bouchel  pour  l'université 
de  Paris,  qui  prit  la  défense  des  Guillelmites. 
M.  Baillet,  dans  la  Vie  de  saint  Guillaume, 
dit  que  ce  furent  les  religieux  de  Sainl-Van- 
ne qui  établirent  la  réforme  dans  le  monas- 
tère des  Blancs-Manteaux.  11  est  vrai  (|ue  co 
furent  les  religieux  de  cette  congrégation 
qui  y  furent  introduits  ;  mais  c'était  au  nom 
de  la  nouvelle  congrégation  de  Sainl-Maur, 
qui  n'était  pas  encore  tout  à  fait  formée, 
comme  nous  avons  dit,  et  ainsi  ni  les  reli< 
gieux  de  Cluny  ni  ceux  de  Sainl-Vanne  n'oni 
point  été  en  possession  de  ce  monastère, 
mais  bien  ceux  de  la  congrégation  de  SainU 
Maur,  qui  y  ont  toujours  demeuré  depuis 
qu'on  obligea  les  Guillelmitcs  à  I  '  quitter. 

La  réforme  étant  établie  dans  un  monas- 
tère de  la  capitale  du  royaume ,  s'étendit 
bientôt  par  toutes  ses  provinces  ;  on  pour- 
suivit à  Rome  les  bulles  de  confirmation  do 
la  nouvelle  congrégation.  Le  roi  même  vou- 
lut bien  employer  sa  recommandation  au- 
près du  pape  Grégoire  XV,  qui,  à  la  prière 
de  Sa  jMajeslé,  érigea  la  congrégation  de 
Sainl-Maur,  lui  accordant  les  mêmes  |)rivi- 
léges  dont  ses  prédécesseurs  avaient  gratifié 
la  congrégation  du  Mont-Cassin,,  el  la  fai- 
sant aussi  participante  des  grâces  octroyées 
par  Clément  Vlll  à  celle  de  Saint- Vanne. 
Ce  même  pontife  nomma  le  cardinal  de  Relz 
pour  protecteur  do  la  nouvelle  congrégation, 
cl  supprima  les  anciens  offices  claustraux  à 
mesure  qu'ils  viendraient  à  vaquer ,  afin 
qu'ils  fussent  désormais  unis  à  la  mense  con- 
ventuelle. Comme  cette  union  des  oilii.-cs 
claustraux  élailun  point  essentiel  pour  affer- 
mir la  réforme,  elle  fut  encore  confirmée  à 
la  prière  de  Sa  Majesté  par  le  pa|ie  Urbain 
Vlll,  qui  accorda  de  nouvelles  grâces  à  celle 


903                                        DICTIONNMRR  WS  OP.ORKS  UKI-ICIFAIX.  931 

con<;ri''gali«)ii ,  roinmo  il  pnrail  pnr  sa    hiilliî  de    nnil,    mr-iiio    oKiisDn    iiici;talo  .    in'"i)u-« 

ilii -21  j.iiiviiT  li;-27.    I. es  bulles   d"éri'clion  ot  veilles,  iiumiics  jcûni'S  cl  abslinciu'os,  ci  enfin 

(le  eoiiïiriiialioa  do  la  con^iég.ilion  de  S.iiiil-  même  olicissaïu'c. 

Maur  furent  fnliniiu-es  par  roflieial  de   l'ar-  Ceux  qui  oui  été  les  auteurs  de  celle  r('- 
clievèq  le  de  Pans  le  lliinai  1()20.  Si  M  ije>lé  forme  n'oiil  pas  préiendu  Ulleinciil  renfer- 
accorda  des  lettres  p.ilcntes  des  15  juin  Kl.'fl  mer  son  utilité  au  dedans,  qu'ils  aienl  aliso- 
et  l.ï  mars  Hùil  pour  l'exécuiion  de  ces  bul-  lunienl    refusé  de  la  faire  passer  au  dehors 
les,  el  CCS  lettres  |ialenlcs  furent  vériliées  au  pour   le   service   de    l'Iv^lise,    puisque    sans 
parl-menl  de  Paris  le  'H   mars  de   la  même  parler  des  relij;ieux  de  citle  congrégation, 
iinnée.  qui  s'appli(]UCMl  à  la  prédication  cl  au\  au- 
l'endant   qu'on  Iravaillail  ainsi  A  l'aff' r-  très  fondions  du  sareidoee,  dans  l'adininis- 
missemenl  de  la  miutelle  congréf^alion,  elle  Ir.ilion  des  cures  et  autres  j.ridiclioas  ec<lé- 
tais.iil  de  jour  en  jour  du  progrès  :  en   sorte  siasliciues,  donl  jouissent  les   églises  de  plu- 
qu'il    y    avait  déjà    plus    de  quarante    mo-  sieurs  de   leurs   abbayes,  il  y  en   a  qui  sont 
na>téres  qui  avaient  reçu  la  reforme,    lors-  destinés  à  l'instruclinn  de  la  jeunesse ,  mais 
qu'elle   fui    introduite    dans    la   célèbre    ab-  principalement  de  la  noblesse  d.-  c.nnpigne, 
baye  de  Sainl-Deni'i  en  ll);i3.  Elle  augmenta  ne  pouvant  leur  refuser  celte  assistance  (lue 
encore    eu     1C3G  ,   par    l'union    qui    y    fui  saint  Benuil  accorda  de  son  temps  à  di»ers 
faite  de  ct  lie  de  Cliezal-Iienoîl  ;  cl  elle  est  à  seigneurs,  par  une  charité  si  universellement 
présent    co!np:iséc   de    plus  de  cent  quatre-  pratiquée  depuis    dans    l'ordre ,    qu'elle   a 
\ingls   tant  abbayes    que   prieurés  eonven-  passé  en  quelque  façon  pour  une  loi;   et  de 
luel>,  (|ui  sont  di\isé>  en  six  provinces:  sa-  là  se  sont  formés  (  a  l'exemple  des  ancien- 
voir    de    lrniC(!,   Normandie,     Bourgogne,  nos   accadémies  ouvertes  autrefois  dans   1.  s 
Toulouse  ,    lirelagne   et   Chezal-ltenoit.   lin  monastères)  quelques  séminaires  remplis  de 
parlant  de   la  congrégation   di."   Cluny,  nous  jeunes  eiif.ints  de  condition  que  l'on  y  envoie 
avons    déjà    dit    (jue   celle    de   Saint-Maur  de  toules  les  provinces, mêmedes  pays  étran- 
y  fut  unie  en  Iti.'jV,    pour  n'en    faire  qu'une  gers, comme  sont  ceux  qui  sonlélaldis  d.-.us 
sous  le  titre  de  congrégation  de  Saint-lienoit,  les    abbayes    ile 'l'yrun,   de  Pont-le-lloi,  de 
autrelois  de  Cluny  et  île  Saini-Maur,  cl  que  Saint-tiermer  de  Floix,  au  dioc"'se  de  lîeau- 
cellc   union  fut  cassée  en   Iti'ii  par  le  pape  vais    el  de  Sorèzc  en  Laiii^uedoc.  Dans   ces 
Urbain  NUI,    qui  remit   ci'S  deux  congréga-  deux    derniers   ou    y  élève  et  enlrctienl   un 
l.onsaa  mémeélaloù  elles  étaient  aupara-  nombre  de  gentilslioinnies  yraM's,  el  dans  la 
v.inl.  Celle  de  Saint-.Maur   a   été  gouvernée  diète  tenue  l'année  1708  on  en  a  encore  éla- 
depuis  ce  lcmp>-là  par  un  général,  deux  as-  bli   un  troisième  à  N'crlou  en  l'relagne,    par 
sislanls  el  six  visiteurs,  qui   sont   élus  tous  la  libéralité  de  M.  le  cardinal  d'I'istrees,  abbé 
les  trois  ans  dans  un    ciiapiire  général,  où  de  Saint- Ciermain  des  Piés.  Outre   la   pieté 
sont  aussi  nominés  les  supérieurs  de  ihaque  qu'on  inspire  à  ceux  qui  y  étudient,  on  les 
monastère;   mais  le  général   peut  être  tou-  insliuil   encore  dans  les    belles-lelires  ,   et 
jours  coniinué.   Le  P.  I).  Jean-tjrégoire  l'a-  comme  ces  séminaires  on  collèges  sont  situés 
risse  fut   le  |)reniicr  général  de  cette  congre-  dans  des  lieux  fort  retirés,  les  jeunes  gens  y 
galion  ;  il  fut  élu  en  1G3)  et  mourut  en  l()'i8.  sont  d'ordinaire    plus  assidus  à    l'élude   el 
Prèsenlement  la  Congrégation  est  gouvernée  moins  distraits  que  dans  les  villes. 
pardoin  Cliailesdo  l'ilostallerie.  Outre  ces  séminaires  ou  collèges,  il  y  a  en- 
Comme  l'esprit  de  celle  congrégation  dès  core   plusieurs  monastères  de  la   congrè^M- 
son    origine  a  été  de   faire  revivre  celui   de  lion  où   il  y  agiand  nombre  de   jeunes  en. 
saint  IteiKiil  par  la  pratique  de  sa  règle,  oa  fanls    que   l'on   y    instruit    dans  les   |)etiles 
s'est  ;!|ip  iqué  surtout  à  y  former  les  jeunes  classes,  qui  servent  à  l'Mglise  cl  y  assislrnt 
religieux,  el  pour  ce  sujet  on  a  établi  dans  en    surplis    toutes   les    léies    el    dimanches, 
ch.ique  province  un  ou  deux  noviciats,  d'où  sans  parler  des  autres  où  l'on  reçoit  avec  les 
Ceux  qu On  admet  à  la  profess.on  sont  traiis-  religieux  les  jeunes  gens  de  la  ville  dans  les 
l'érès  immédiatement   après    dans   un   autre  cours  de  |)hiiosopliie  et  de  théidogie. 
monastère,  où  lun  continue  de  les  loruicr  à  La  charité  des  premiers   réformateurs   no 
la    piélé    et   aux    cérémonies    pendant  deux  s'est  pas  bornée  à  l'instruction  de  la  jeunessr', 
ans.  Ou  les  applique  ensuite,  pendanl  l'espaïc  car  en  rapiiclant  de  plus  en  plus  les  religieux 
de  cinq  aulies  aimées,  à  l'étude  de  la  philo-  aux  exercices  intérieurs  du  doitre,   comnio 
sopliii!  el  de  la  théologie,  pour  leur  faciliter  à   leur    véritable    centre,    ils    ont  trouvé   le 
rmlelligeuce  de  flicnture  sainte  el  des  saints  moyen  d'en  oecnper  un  gr.iiid  nombre  très- 
Péres.  .Vprès  leurs   éludi-s  ou  leur  l'ail  faire  utilement  pour  le  public,  en  onlonn.inl  dans 
une  année  que   l'on  nomme  de  rciollcctiun,  leurs    con^lilulillns    imprimées  en  IG'iti  que, 
parce  que  ce  temps-la  est  di  stiné  à  les  pre-  outre  les  éludes  de  philosophie  et  de  theolo- 
parer  a    la    réception  du  sacerdoce,  p.ir  un  gie,  on    établira  encore  dans  quelques  mo- 
recueilleinenl  plus  grand  et  par  une  appliea-  naslères  des  écoles  de  posiiive,  de  droit  c.i- 
lion  plus  entière  aux   seuls  exercices  spiii-  non,  de   cas   de  conscience  et  des   langues 
luels    dans  ces    dilïérenls    nionasleres,    par  grecque  ct  hébraïque  ;  et  c'est  dans  ces  savaii- 
l'squels  ils  sont    obligés   de    passer   comme  les  écoles  que  se  sonl  l't)rmés  lanl  de  célèbres 
dans  tous    les  autres  où  ils  sont  ensuite  en-  écrivains  que  cette  coiigreg.ition  a  produiis, 
voyés  par  ordre    dc>    supérieurs.   On  garde  qui  ont  donne  au  public  plus  de  Ireiile  volii- 
une  exacte  uniinrmilé  dans  tous  les  cxcrci-  mes  renfi'rmanl  une    inlinite  île    pièces  nia- 
ce>  :  mêmes  oflices  divins,   t^ail  de  jour  que  nusciitcs  demeurées  ju-qualors   cnsoelics 


00  j                           MMi  M\U                             iior. 

(latis  les  biliHollièques,  et  qui,  p;ir  un  iravail  fui  allaqui-  d'une  paralysie,   dont  il  niourul 
qu'on  ne  saurait  trop  louer,  en  s'appliquaiil  le  19  janvier  1710.  Dom  Tcissier  a  été  chargé 
à  la  révision  des  ouvrages  enli<  rs   des  PP.  d(!  la  cuntinualion  de  cet  ouvrage.  Nous  ne 
grecs  et  latins  et  de  plusieurs  écrivains  ecclé-  parlerons  point  en  particulier  de  tous  les  nn- 
siasliques,  ont  déj'i  donné  de  nouvriles  édi-  vraiJîes  que  nous  avons  des  PP.  dom  Hugues 
lions   (le   saint   Irsnée,   de  saint    Athanaso,  Méiiard,  dom  Luc  d'Achéry,  dom  Jean  Gurct, 
d'Eusèbe  de  f.ésarée,   de  saint  Augustin,  de  doinNicolas  le  Nourri,  dom  ,lcan  Mariianay, 
saint  Amliroise,   d'   saint  Jérôme,   de    s  tint  dom  Denis  de  Sainte-Marthe,   dom  Edmond 
Hilaire,  de  saint  Grégoire  le  Grand,  de  saint  Marlèno,  dom  François  Lanii,  et  de  plusieurs 
Bernard,  de  Grégoire  de  Tou-'S,  de  Viclor  de  auires  éciivains   de   ci;tle    congrégalion  ;  ce 
Vite,  d'Hildobert  et  de  Marbodius.  L'on  verra  que  nous  pouvons  dire  en  géni'ral,  c'est  que 
encore  paraître  incessamment  do  nouvelles  les    rcli;^ieux  de    la  congrégation  de  Saint- 
éiiilions  de  saint  Jean  Chrysostome,  de  saint  Maur   ont  toujours  su  allier  avec  la  science 
Basile,  de  saint  Grégoire  de  Nazianze,    delà  beaucoup  de  piélé,  de  modestie,  d'humilité, 
France  chrétienne  et  de  plusieurs  autres  on-  de   douceur  et  de  simplicité,    et    c'c'.t  là  la 
vrages,    préis  à  meltre   sous   la  presse,  qui  marque  qui  distingue  les  véritables  enfants 
sont  encore  les  fruits  des  études  dos  savanis  de  celte  congrégalion.  Nous  croirions  néan- 
reli'^ieux  de  celle  congrégation ,   aussi  bitn  moins  manqu'-r  de  reconnaissance    si   nous 
((ue  la  paléographie  grecque,  ou  Traité  d<>  passions  sous  silence  le  P.  dom  Michel  Féli- 
rOrigine  el  du  l'rogrt's  des  lettres  grec()ues,  bien,   qui   a    fait  l'Histoire    de  l'abbaye  de 
((ue  nous  a  donné  en  1708  le  P.  dom  Renard  Saint-Denis  en  France,  puisque  nous   nous 
(le  Monlfaucon,  qui  a  aussi  tr;ivaillé  à  l'éili-  sommes   servi   si    uliletnent   de   cet    auteur 
tion  du  saini  Athanasa  el  fait  d'aulrcs  e\cel-  dans  ce  que  nous  avons   dit   de   l'andenne 
lents  ouvrages.  Celle   congrégalion  lit   une  congrégalion   de  Saint-Denis  et   de  la  plus 
perle  considérable,  le  27  décembre  1707,  par  grande  partie  de  celle  de  Siint-Maur. 
la   mort   de   dom   Jean   Mabillon,  académi-  11  ne  nous  reste  plus  qu'à  parler  de  qud- 
cien    honoraire    de    l'académie    royale    des  ques  célèbres  raonaslèics    de  celle  illustre 
Inscriptions  et  Médailles.  Cet  auteur  a  donné  congrégation.   L'abbuye   de    Saint-Germain 
au  public,  pendant  73  ans  qu'il  a  vécu  ,  plus  des  Prés  qui  y  est  agrégée  est   une  des  p\a^ 
de  trenle  volumes  dont  les  plus  considéra-  considérables   du    royaume.  Elle  fut  fondée 
blcs  sont  deux  volumes  in-folio  de   la  nou-  par  Childebert,  fils  du  grand  Clovis,  sous  lo 
velle  édition    du    saint  Bernard,  un   \olumc  nom  de  saint  Vincent,  et  n'a  pris  le  nom  de 
in-folio  de  la  Diplomatique  ,  le  Supplément  saint  Germain,  évéque  de  Paris,  qu'après  la 
de  celle  Diplomatique,  neuf  volumes  in-folio  mort  de  ce   saint,   (jui  y  l'ut   enterré.   Ouoi- 
des  Vies  des    saints  de   l'ordre  de  S,iiiil-Be-  qu'elle  fût  autrefois  hors  de  la  ville,   l'abbé 
noît,  et  quatre  aussi  in-folio  des  An:iales  de  ne  laissait  pas  d'y  avoir  quebjue  juriJiclion 
cet  onire.  Tous  les  savanis  de  Fr.nice  el  des  spirituelle,  qui    s'étendit    bien     divanlago 
pays  étrangers  ont  regretté  avec  justice   la  lorsqu'on  eut  agrandi  le  faubourg  où  elle  est 
perte  d'un  si  grand  homme.  situéi',  et  qu'il  fut  devenu  un  des  plus  grands 
Après  sa  mort,  D.  Thierry  Uuinart,  le  fidèle  quartiers    de  Paris^    pouvant  èlre  comparé 
compagnon  de  ses  études,  de  qui  nous  avons  aux  pi  is  belles  villes  as  Franco.  Nou -seule- 
une  nouvelle  édition   de  Grégoire  de  Tours,  menl    l'abbé    de  Saint-Germain  avait  toute 
les  Actes  sincères  des  mar!yrs,la  Persécution  juridiction  spirituelle   et  presque  épiscop;ile 
des  \'andales,  composée  par  Victor  de  \'ile,  dans  toule  l'étendue  de  ce  f  inliourg,  mais  il 
et  plusieurs  autres  ouvrages,  fut  chargé  par  y  avait  encore  haute,  moyenne  et  basse  jus- 
Bcs  supérieurs  de  coniinuer  les  ouvrages  im-  lice,   el  y  pouvait  donner  des  lettres  de  maî- 
parfails    de  cet  auteur;    en   clïel,  perjonnc  trise  à  toutessortcs  d'ouvriers.  Présentement 
n'était  plus  capable  que  ce  savant  religieux  les  droits  du  celle  abbaye  sont  bien  diminués, 
de  les  continuer,  puisqu'il  ai  ait  eu  la  priu-  et,  par  un  concordat  passé  avec  rar(  bevêquo 
cipale  part  à  l'édition  des  deiiv  derniers  vo-  de  Paris,  on  en  a  cédé  à  ce  [irélat  toute    la 
lûmes  des  Vies  des  saints  de  l'ordre  de  Saint-  juridiction   spirituelle,    à   condition    que   le 
licnoit,  qu'il  était  auteur   des  notes    et   des  prieur  de  l'abbaye  serait  grand  vicaire  iié  do 
observations  qui  sont  dans  le  corps  de  l'ou-  l'archevêque  de  Paris,  et  (|ue  l'abbé  conscr- 
vrage,  qu'il  avait  aussi  eu  part  aux  qualre  verait  sa  juridiction  spirituelle  dans  l'mclos 
volumes   des  Annales   bénédiciiues,  dont    il  de  l'abbaye,  qui  contient  quelques  cours  où 
avait  failles  tables  des  principales  matières,  il  y  a  des  ouvriers  qui   y  peuvent  travailler 
Mais  lamorl  l'ayanl  aussi  enlevé  aux  savanis  librement  sans  cire  maîtres.    L'abbé  est  sei- 
au  mois  deseptembre  170'.), dans  la  cinquante-  gnourde  Villeneuve-Sainl-Georges,  Anlony 
troisième  année  de  son  âge,  dix-neuf  mois  Herny,  elde  plusieursaiitres  villages  aux  en 
après  la  mort  du  P.  Mabillon,  aunud  il  sem-  virons  de  Paris.  Cette  abbaye  a  plus  de  100,000 
ble  qu'il  n'ait  survécu  que  pour  publier  ses  livres  de  revenu.   Casimir,  roi   de  Pologne, 
vertus  dans  la  Vie  qu'il  en  donna  ileux  mois  morl  en  France  en  1G72,  eu  a  été  abbé  et   y 
avant  sa  mort;   le  P.  d  im  Hené  .Massuet,  à  est  enterré:  elle  est  présentement  possédée 
qui  le  public  est   redevable  de   la    nouvelle  par  M.  le  cardinal  de  Bissi. 
eilition  de  saint  Iréuée,   fui  chargé  par   ses  Celle  de  Fécamp,  qui  futaussi  unie  à  la  cou- 
supérieurs  de    travailler  à   la  conlinualion  grégaliun  de  S,nnl-Miiur,csi  une  des  plus  bcl- 
des    ouvrages    de    ces  deux    savants    reli-  les,  des   plus    nobles   et  des   plus  riches  du 
gicux,    et  il  était  sur  le    point    de   donner  royaume,  l'.icbard  11 ,  doc  de  Normandie,   li 
un   nouveau  volume  des  Annales,    lorsqu'il  Ut  élever  sur  un  ancien  édifice   qui  était  bas 
DiCTiONNAiRii  or.s  Okokes  R!  i.iGirux.   IL  2'J 


907 


niCTioNNAiiiu  iu:s  oiiDuns  m  lic.u.i  x. 


906 


et  obscur;  elli-  cl  bj(ie  J;ins  l'cnccinlc  du 
château,  qui  a  ses  fossés  et  pont<-levis.  Ce 
prince  y  mit  tics  Chanoiius  Hégulicrs  en  la 
place  des  religieuses  qu'il  y  Imuva  et  qu'on 
transféra  à  Montivilliers:  il  y  fil  f.iire  un  cer- 
cueil de  pierre  où  il  voulut  Aire  inhumé  aprùs 
sa  mori,  et,  alin  de  mériter  la  prâcc  d'en  faire 
une  qui  fût  a^réal)le  aux  yeux  de  Dieu  en 
rachetant  ses  péchés  par  les  aunirtnes,  il  ne 
manquait  |  a>^,  tous  les  vendredis  de  l'année, 
de  le  faire  emplir  de  froment  que  l'on  dislri- 
huait  aux  pauvres  avec  vinpl  sols  d'argent  , 
ce  qu'il  continua  jusqu'à  la  Un  de  sa  vie.  Uo- 
l.eil  III,  son  successeur,  augmenta  les  biens 
de  celle  abl)aye,  et  fil  venir  des  religieux  de 
Saint  Bénigne  de  Dijon,  auxquels  il  donna 
droit  de  haute,  moyenne  et  basse  justice.  Il 
obtint  même  du  pape  Jean  X>'l  qu'ils  fussent 
indépendants  de  l'an  hevêque  de  Houen.  Celle 
abbaye  possède  dix  baronnics,  dis  hautes 
justices  et  dix  sergenleries,  entre  lesquelles 
la  barounie  de  Fécamp  et  celle  de  Virlleur, 
qui  font  la  mcnsc  abbatiale,  produisent  plus 
de  soixante  mille  livres  de  rente  à  l'iihbé. 
Non-seulcmonl  elle  est  exempte  de  la  juii- 
diclion  épi>copale,  mais  encore  elle  exerce 
une  juridiction  presque  épiscopale  sur  les 
dix  paroi>ses  de  la  ville,  et  sur  seize  autres 
situées  dans  le  diocèse  de  Uouen,  suivant  la 
concession  faite  à  Henti,  abbé  de  Fécamp, 
par  Hugues,  archevêque  de  Uouen.  L'ofiici.il 
de  Fécamp  a  droit  de  visite  sur  toutes  ces 
paroisses,  y  peut  lenir  synode  et  assemblée 
de  curés  el  y  faire  des  rè;;lemenis. 

L'abbaye  de  la  Triiiilé  de  Vendôme  fut 
fondée  l'an  10i2  par  l.eoffroi  ou  Godefroi, 
comte  d'Anjou,  en  mémoire  d'une  vision  di^ 
Irois  étoiles  qui  lui  avaient  paru  tomber 
dans  une  fontaine  voisine.  Il  y  mit  des  reli- 
gieux de  lordic  de  ^aint-Henoîl,  qu'il  fil  ve- 
nir do  .Marmoutiers  ,  el  non-st  uicment  il  la 
gratifia  de  plusieurs  prérogatives,  maisaus.si 
il  l'eniichil  de  \i  pié.  ieuse  larme  que  Noire- 
Seigneur  répandit  >ur  le  Lazare.  Il  l'av.iil 
apporiéi'  d'outre-mer  dans  un  petit  vase  qui 
n'avait  ni  soudure  ni  ouverture,  et  qui  était 
blanc  par  dehors  comme  du  cristal.  Celle  ab- 
baye est  illustre  [  ar  le  privilège  que  le  pape 
innocent  III  lui  a  accordé,  que  (|uiconque 
en  serai!  pourvu  se  pourriil  (jualifier  cardi- 
nal, du  litre  de  Sainle-I'risce.  Nous  avons 
parlé  assez  amplement  des  ahhaycs  de  Saint- 
Denis  en  France,  de  Marmoutiers,  de  Saint- 
Henipne  de  Dijon,  de  la  Chaize-Dicu,  de 
Same- .M.ijour,  duTiron,  toutes  abbayes 
unies  a  la  congré;;alion  de  Saint-Maur,  et 
qui  é  aient  chefs  autrefois  de  congrégations 
.■luxqnelles  elles  avaient  donné  leurs  noms  ; 
nous  nous  étendrions  trop  si  nous  Noulions 
ra;i|orter  l'origine  et  les  prérogatives  des 
.lUtres  nionasières  (|ni  coinposeni  celte  con- 
grégation de  Saini-.Maur.  l'armi  ccn  mo- 
nastères il  y  en  a  qu(lque>-uns  qui  ne  .sont 
point  en  coiiimcnde,  comme  les  aliba\es  de 
S.iini-Autzuslin  do  Limogrs,  de  (^bczal-He- 
ii'ili,  de  Saint-Sulpici'  île  Itourges,  de  Saiiit- 
\  incenl  du  .M. lus  tl  de  Sainl-.M.irlin  de  Séez, 
(lui  sont  gouvernés  par  des  abbes  triennaux, 
uumiués  par  le  tliapitre  général  de  la  con- 


grégation. Celle  de  Saiiit-.Vugusiin  de  Limo- 
ges jouit  de  ce  privilège  à  cause  que  la  ré- 
forme de  France  y  a  pris  naissance.  Il  lui  fut 
accordé  par  le  roi  Louis  XIIL  Chezal-Uenoit 
el  lis  quatre  autres  jouissaient  de  ce  droit  du 
tem[)s  «lU;-  1,\  congrégation  de  Chezal-Benoil 
sulisis'ail.  et  il  a  élé  conservé  à  la  congré- 
gation de  Saiiil-Maur,  qui  a  encore  quelques 
alibayes  où  les  abbés  sont  réguliers,  mais 
perpétuels  et  à  la  nomination  du  roi. 

Les  religieux  de  celti"  congré;:alion  sonl 
habités  co;iime  les  réformés  de  Cluny.  Ils 
ont  une  robe  et  un  siapuluire  noir,  et  par- 
dessus, quand  ils  sonl  ;iu  chœur  ou  qu'ils 
vont  par  la  ville,  ils  mettent  une  coule  qui 
n'est  pas  si  ample  que  celle  des  moines  du 
Monl-Cassin.  ni  de  ceux  de  Saint-N'aniie.  Ils 
reçoivent  parmi  eux  des  frères  convers  qui 
sont  habillés  de  niéiiie,  et  ils  ont  encoie 
des  frères  (ommis  qui  ri  tiennent  leur  habit 
séculirr.  M.  lîulleau,  auteur  de  l'Histoire 
monastique  d'Orient  el  de  l'Histoire  de  l'or- 
dre de  Saint-lienoit,  était  frère  co:nm  s  dans 
celle  congrégation.  File  a  pour  armes  une 
couronne  d'épines  au  milieu  de  laquelle  il  y 
a  le  mot  Pax,  surmonté  d'une  fieur  de  lis,  et 
Irois  clous  de  la  passion  en  pointe. 

Chrunic. générales  ciel  ord.  deSniiil-nenoil , 
lom.  IV,  cent  Jv, chapitre  12.  Doni  Michel  Fé- 
libieii,  Uift.  de  l'abbaije  de  Saint-  Denis. 
Sainte-Marthe,  Gall.  Christ.,  lom.  IV.  Her- 
mant,  EtaHisscmmi  des  ord.  religieux,  pag. 
409. 

La  congrégation  de  Saint-Maur,  qui  con- 
serve encore  aujourd'hui,  dans  l'Fglisc  il 
dans  le  monde  lilléraire,  la  répulatiun  du 
corps  le  plus  laborieux  que  la  lauiille  béné- 
dictine ail  i)rodiiit,  continua  sous  ce  rap[iorl, 
dans  le  x\iii'  siècle,  l'éloge  qu'en  a  fait  ci- 
dessus  le  P.  Helyol.  Néanmoins,  considérée 
sous  le  rapport  religieux,  celte  c  ingrégation 
était  déjà,  lors(;«ie  notre  auteur  mourut,  bien 
lo.n  de  ces  temps  de  ferveur  el  de  simplicité 
qui  l'avaient  distinguée  dans  les  preniièros 
années  de  son  existence,  et  dans  tes  aildi- 
tions  niiu^  n'aurons  guère  à  dire  d'elle  que 
l'histoire  de  ses  luttes  contre  raulorité  de 
l'E;;li-e  et  de  son  relâchement. 

La  bulle  Unigcniius  trouva  un  nombre  in- 
fini d'opposants  d.ins  ses  monastères  sur  les 
divers  points  de  la  Fianee.  Hâlons-nuus 
pourtant  dédire  qu'aiissitôtaprès  l'aiiparition 
de  cc;lc  constitu;iou,  dom  Lhotallerie,  géné- 
ral de  la  congrégation,  quoii|n'il  eût  lui- 
même  étudié  sous  le  f.iineux  P.  (îerberon,  en 
envoya  des  exemplaires  dans  toutes  les  mai- 
sons de  la  reforme  (en  171  i),  avec  ordre  de 
la  faire  recevoir  au  chapitre.  Si  tous  les  su- 
périeurs généraux  qui  lui  succedèrenl  ne 
furent  pas  .lussi  zèles  ([ue  lui  jiour  la  vérité 
el  l'obéissance  au  pape  (tel  d.nn  ;\ayiloii, 
par  exemple),  tous  ne.inmoiiis,  et  quehines- 
uns  avec  giaiid  dévouement  (tels  dnm  Tlii- 
b.iud  el  autres),  se  montrèrent  soumis  el  tra- 
v.iillèrenl  à  propager  parmi  leurs  leligienx 
l'acceptation  de  la  bulle;  et  co<iperèreni , 
plus  <iu  moins,  aux  mesures  prises  par  l'au- 
lorilé  ecclésiastique  et  civile  pour  inainleiiir 
la  paix  dans  la  congiég.ilion,   réi'iiiner  cl 


rm 


M  AU 


MAli 


nio 


punir  ceux  (jui  portaienl  le  scandale  en  pro- 
{)ageanl  la  résislance. 

11  y  eut,  en  effet,  des  scènes  de  scandale, 
et  nombreuses  cl  inconcevables  :àlacclèbro 
abbaye  de  Saint-Denis  en  France,  trente- 
doux  religieux,  gagnés  par  dom  Louvard, 
janséniste  des  plus  fanatiques,  et  mort  depuis 
réfugié  en  Hollande,  signèrent  une  requéle 
au  chapitre  général,  pour  obtenir  la  permis- 
sion d'adhérer  incossammenl  à  l'appel  des 
quatre  évoques.  Dom  Louvard  appel  a,  en  effet, 
avec  la  communauté,  peu  de  jours  après,  et 
cet  exemple  fut  suivi  parla  plus  srande  partie 
de  la  communauté  de  Saint-Germain  des 
Prés.  Près  de  quinze  cents  Bénédictins,  et 
toute  la  communauté  de  Saint-Denis,  adhé- 
rèrent à  l'appel  du  cardinal  de  Noailles, 
quelques-uns  poussèrent  le  fanatisme  jus- 
qu'à écrire  à  l'arclievéque  schismatique  d'U- 
irecht,  ce  qui  était  alors  une  preuve  de  zèle 
à  la  mode  dans  le  parti  janséiiien.  Dan^  plu- 
sieurs lieux  et  en  divers  temps,  plusieurs 
des  jeunes  moines  furent  rejetcs  de  l'admis- 
sion aux  ordres  sacrés  par  refus  d'accepla- 
lion  de  la  bulle.  On  peut  même  citer  des 
communautés  comme  ayant  été  tout  entières 
dans  un  e.spril  de  révolte  :  telles  celles  de 
Saint-Riquier ,  au  diocèse  d'Amiens;  de 
Sainte-Colombe,  à  Sons,  etc.  Il  faudrait  des 
volumes  pour  renfermer  tout  ce  que  le  jan- 
sénisme fit  faire  de  démarches,  de  résistan- 
ces, de  proclamations  ou  déclarations  cou- 
pables dans  ces  temps  malheureux.  Nous  no 
pouvons,  dans  cet  article,  qu'indiquer  rapi- 
dement queli|ucs-uns  des  faits  au  milieu  de 
faits  sans  nombre.  Ainsi  le  chapitre  général, 
tenu  en  1733  à  Marmoutiers,  fut  une  preuve 
des  plus  tristes  du  mauvais  esprit  régnant 
alors  dans  la  congrégiitioa  de  Sainl-Maur  ; 
rar,  les  religieux  soumis  aux  décisions  de 
l'Kglise  ayantété  seuls  admis  aux  opéraiious 
du  chapitre,  le  nombre  des  votants  fut  r.'duil 
extrêmement,  et  les  choses  slaluces  dans 
Cette  asstiinblée  furent  loin  de  iruuverdans 
les  volontés  la  soumission  qu'elles  méritaient. 
Il  y  eut  même  dans  ces  temps,  et  depuis, 
des  religieux  prêtres  df  l'institut  qui  donnè- 
rent dans  les  folies  et  les  sci'nes  ridicules 
ries  convulsions,  et  y  prirent  une  part  ac'ive. 
Cependant  il  ne  faut  pas  omettre  de  rappeler 
ici  qu'il  y  eut  toujours  dans  cette  famille  dé- 
solée des  hommes  qui  cherchaient  à  y  ra- 
mener la  paix  et  y  maintenir  la  soumission 
par  leur  exemple  et  leur  autorité.  C'est  avec 
bonheur  que  nous  citons  des  noms  qui  se 
distinguèrent  par  leur  conduite,  leurs  senli- 
inents  catholiques,  dom  Thibault,  dom  Thuil- 
lier,  dom  Conrude,  dom  Laprade,  dom  Vnl- 
Ktat.dom  laTaste,  etc.,  etc.  Kn  1734ou  1733, 
quarante  et  un  religieux,  tous  do  Saint-Ger- 
main des  Prés,  croyons-nous,  écrivirent  au 
pape  pour  assurer  à  la  constitution  de  Clé- 
ment XI  omnimoilam  obedienliam. 

Néanmoins,  si  les  chefs  et  la  plus  saine 
partie  de  la  congrégation  étaient  restés  sou- 
mis aux  décisions  de  l'Eglise,  l'ospril  philo- 

(1)  Celle  requête  parut  peu  de  jours  après  impri- 
mée en  6  pages  in-i". 

(2)  118  piiges  in-4°. 


sophique,  qui  domina  le  xviii'  siècle,  secon- 
dant l'esprit  de  révolte   né  du  jansénisme, 
altéra  profondément  l'espritreligieuxdeceilc  I 
réforme,  qui  avait   si  fort  édifié  l'Eglise  au  I 
siècle  précédent.  On  a  peine  à  croire,  même  ' 
aujourd'hui,  que  des  Bénédictins  de  la  célèbre 
maison  de  Saint-Germain  des  Prés  en  soient 
venus  au  point  de   faire  la  démarche  que 
nous  allons  faire  conn:iître. 

Le  15  juin  176.T,  fut  signée  une  requête (1) 
par  vingt-huit  Bénédictins  de  l'abbaye  de 
Saint-Germain  des  Prés,  demandant  les  choses 
les  plus  étranges  sous  des  prétextes  spé- 
cieux; peu  de  jours  après,  cette  requête  fut 
présentée  au  roi.  Les  religieux  qui  l'avaient 
signée  demandaient  donc  à  changer  d'habit, 
à  ne  plus  dire  matines  pendant  la  nuit,  à 
n'être  plus  astreints  à  l'usage  du  maigre.  Ces 
moines  relâchés  couvraient  avec  art  l'indé- 
cence de  leurs  propositions.  A  entendre  les 
auteurs  de  la  requête,  ils  ne  désirent  que 
rappeler  l'ordre  à  la  règle  primitive.  L'ha- 
billement est,  selon  euK,  singulier  et  avili 
aux  yeux  du  public,  il  leur  en  faut  un  qui 
soit  reUijieux  tt  ecclésiastique,  modeste  et 
décent.  L'esprit  profane  et  mondain  qui  a 
dicté  la  requête  se  trahit  ici  un  peu  trop  ou- 
vertement :  il  se  cache  mieux  dans  les  deux 
autres  articles.  La  nourriture  est  trop  re- 
cherchée, ils  veulent  qu'elle  soit  simple  et 
commune.  Quant  aux  matines,  qu'elles  soient 
remises  à  une  heure  qui  ne  laisse  à  personne 
aucun  prétexte  pour  s'en  dispenser.  D'ailleurs 
des  austérités  aussi  étrangères  à  l'esprit  qu'à 
la  lettre  de.  la  règle  ferment  la  porte  à  quantité 
de  sujets,  et  empêchent  les  Bénédictins  de 
vaquer,  comme  autrefois,  à  l'éducation  de  la 
jeune  noblesse,  etc.  Le  public,  les  évoques, 
les  bons  religieux  furent  sc;indalisés  d'une 
telle  audace  dans  le  relâchement.  Louis  XV 
chargea  un  de  ses  ministres  de  témoigner 
aux  supérieurs  de  la  c  ingrégation  son  ex- 
trême méconteuleaient  et  son  indignation 
de  la  démarche  des  religieux  de  Saint-Ger- 
main, et  de  prendre  des  mesures  pour  pré- 
venir ou  arrêter  les  troubles  qu'eJle  com- 
mençait à  c.iuser  dans  les  provinces.  Les 
Bénédictins  de  la  maison  des  Blancs-Man- 
teaux firent  une  vigoureuse  réclamation, 
consistant  dans  une  requête  au  roi  el  une 
dissertation  oii  la  discipline  monastique  est 
vingée  des  outrages  de  la  requête  des  religieux 
de  Saint-Germain.  Pour  transmettre  ce  mo- 
nument de  zèle  à  la  postérité,  les  religieux, 
des  Blancs-Manteaux  le  firent  imprimer  (2). 
Quelque  temps  après,  il  parut  une  autre  ré- 
clamation au  nom  du  supérieur  général,  du 
régime  et  de  la  plus  nombreuse  partie  de  la 
congrégation  (3j.  Les  audacieux  ne  se  tinrent 
pas  pour  battus  :  ils  voulurent,  au  premier 
chapitre  général  qui  suivit  leur  requête, 
poursuivre  leurs  projets  et  les  faire  préva- 
loir. Le  roi  les  déconcerta,  en  défendant  au 
chapitre  de  délibérer  sur  aucun  des  points 
qui  étaient  l'objet  de  la  requête. 

Une  innovation  parut  dans   ce   temps  à 

(7))  53  pages  iii-i°,  doiii  près  delà  moitié  esl  rem- 
plie par  les  signatures. 


911 


DICTKI.NNMIIE  DES  OllUUKS  KKMOIF.IX. 


fll^ 


S;iint-Germ;iin  ilps  Pros.  l'.llc  pouv.  il  avoir 
son  ulilitc  rérlle,  romnio  elle  ;ivuil  un  cùlé 
lirillant  ou  s|iocica\.  On  étal)Iil  un  bureau 
lilléraire,  qui  que!quolois  ne  s  liarinoiiisait 
pas  avec  la  \olonle  ili  s  supérieurs.  Hélas! 
rcs  lignalaircs  de  la  roquèle.  qui  ét.iipnl 
nombreux,  suivaient  déjà,  sauf  l'Iiabillo- 
incnl,  les  disposilioiis  de  leur  seandab'uso 
rei|uétc;  ils  allaient  (oui  nu  plus  les  dinian- 
flics  el  fèlcs  à  la  messe  el  à  vêpres.  (Juanl 
,iux  malincs,  on  ne  les  y  voyait  que  la  nuit 
de  Noël.  Ils  étaient  habituellement  à  l'inlir- 
ineiie,  pour  y  fiire  bonne  clii^re.  Le  relà'  be- 
rnent se  répandit  dans  les  couvents  des  pro- 
vinces. Là  on  abolissait  sans  formalité  l'u- 
sage du  maigre;  ici  on  relranch.iit  l'ofiiec  de 
la  nuit;  ailleurs  des  repas,  des  concerts  pro- 
fanaient un  séjour  des  iiié  à  la  pénitence  et 
à  la  prière.  On  |u'Ut  citer  comme  ayant  donné 
les  premiers  le  scandale  d'un  grand  relàcbe- 
mcnt,  les  monaslères  de  Dijon.  d'Auxcrre, 
de  Saint-l.oiner,  au  diocèse  de  Blois,  o!c. 
Dans  celle  dernière  maison  les  choses  allè- 
rent au  |ioinl  (joe  le  roi  y  envoya  des  com- 
missaires cl  donna  des  ordres  pour  disperser 
les  religieux  et  leur  en  sub^tiluer  d'aulres. 
Nous  donnerons  au  reste  une  idée  suffisante 
de  l'étal  auquel  était  réduite  une  ])artio  de  la 
congrégation  deSainl-.Maur,en  disant  qu'une 
lo^c  (i;-  francs  maçons  fui,  en  1775,  établie  à 
Tilanfeui',  lieu  du  di  )cèse  d'Angers,  où  la 
rèiile  «le  saint  lîenoîi  s'éiablit  d'abord  en 
France.  Le  vénérable  de  la  loge  fut  le  prieur 
des  Bénédictins  de  Saint-Maur,  el  vraisem- 
blablement cette  loge  était  dans  l'ahbaye. 
Le  secrétaire  des  francs-maçons  de  cette 
réunion  était  le  P.  prieur  des  Auguslins  de 
la  communauté  d'Angers;  leur  correspon- 
dant à  t'ars  éiait  u  i  nommé  Tlieolon.  qui 
éiafl  en  même  temps  correspondant  de  la 
loge  de  la  ville  de  Fougères  el  auires.  0  tein- 
pora!  0  nicice.v/ 

La  commission  des  réguliers  établie  en 
17G3,  com]iosec  de  cinq  évoques  et  de  cinq 
laïques,  commission  dont  nous  ferons  cou- 
iiailre,  dans  notre  Supplément,  l'occasion,  le 
but  el  les  ravages,  celle  commission  dont 
nous  ne  pouvons  parler  ici  que  somm;iire- 
ment,  fui  fune-leà  la  congrégation  de  Saint- 
Maur  connue  à  la  plupart  des  sociélés  reli- 
gieuses, l'resque  tous  les  corps  en  Fr.ince, 
ii[irès  les  premiéies  opérations  de  celte  com- 
mission bypocrilc,  tinrent  des  assemblées  el 
se  donniTeiil  des  cunstitiitions  nouvelles  ou 
inodiliées.  Dans  leurs  préfaces,  ces  constitu- 
tions paraissent  (luelquefois  avoir  été  rédi- 
gées [)ar  des  religieux  (|ui  croyaient  bonne- 
ment alors  à  une  [lalingéuése  <le  la  vie  du 
«loîirc.  Les  lléuédiclii;s  de  la  congrégation 
de  Saiiit-iMaur  nommèrent,  en  17i>'.),  une 
commission  pour  rédiger  leurs  consiitulions 
sur  un  nouveau  plan.  Ces  eonstitufious  pa- 
niient  en  effet  l'aiiné.?  suivante  en  un  v«i- 
lum  ■  in  8,  sous  ce  lilic-  :  Itf/nhi  S.  /'.  lirne- 
(licli  et  cunstilutiones  contjrcijntii  nis  Sancti 
Mauri.  Os  consiitulions  sont  divisées  en 
deux  parties  généia.es,  dont  la  première  e>t 
MMi.sarree  à  régler  re  ()ui  concerne  le  >eV/iHic 
ou  la  «onduilc  geiiér  île  des  nionaslèrcs.  Klle 


exl  [larlagée  en  trois  sections,  dont  les  lilre» 
rappellenl  dans  leurs  termes  la  marche  qu'on 
suit  ordiuairemenl  en  Irailant  di^s  malièresi 
canoniques,  .\insi,  la  première  section  parle' 
des  exercices  régulieis.  et  par  conséquent 
de  l'Fglise,  de  l'office  divin,  des  vœux,  di-  la 
réce|  lion  des  sujets  et  des  étrangers,  des 
études,  du  travail,  etc.  Le  1i'  el  dernier 
cli;i|)ilre,  qui  traite  des  loulpes  el  des  peines, 
est  composé  de  cinq  articles.  Par  les  nou- 
velles prescriptions  tout  l'uflice  est  chanté 
d.ins  les  monastères  où  il  y  a  vingt-«|ualre 
religieux,  excepté  compli^'s  aux  jours  ordi- 
naires. Dans  les  maisons  de  qu'nze  religieux 
au  moins, on  chan'ail  loul  aux  grandes  fêtes, 
et  pari  ie  des  heures  aux  jours  ordinaires:  dans 
les  cotiveuts  où  il  y  avait  moins  de  quinze 
choristes  ,  on  chantait  eU'  ore  moins  que 
dans  ces  derniers,  etc.  On  conliiiuail  de  réci- 
ter l'oKire  de  la  sainte  \'ierge,  aux  feries  et 
fêles  simples.  Les  matines  sont  maintenues  à 
deux  heures  api  es  minuit.  —  On  peut  encore, 
d'après  ces  consiitulions,  recevoir  les  jeunes 
postulants  de  quinze  ans,  mais  ou  ne  leur 
i'era  prononcer  des  vœux  qu'à  vingt  et  uti 
ans.  Dans  chaque  pro^inee,  des  n:onaslères 
sont  a-sigiiés  par  les  définileurs  du  chapitre 
géuéral,  les  uns  pour  servir  de  premii'r  ou 
second  noviciat,  d'autres  pour  maisons  d'é- 
ludés, etc.  La  seconde  section  traite  des  per- 
sonnes,  par  conséquent  de  tout  ce  qui  regarde 
les  religieux  choristes  ou  convers;  la  troi- 
sième section,  des  cho^s  temporelles  ,  des 
monastères,  c'est-à-dire  du  chapitre  el  de  ce 
qu'on  y  agile,  des  édifices,  des  haliits,  etc. 

La  seconde  partie  des  constilulions  pres- 
crit ce  qui  regarde  le  ré(jimi  général  de  la 
congrégation  ,  el  est  di\isée  en  deux  sections. 
Ouaranle-deux  chapitres  forment  la  première 
section,  Irailant  de  l'assemblée  générale,  des 
élections,  etc.  La  seconde  section  ist  destinée 
à  régler  le  régime  de  la  congrégation  hors 
le  temps  du  chaiiitre  général.  Le  supérieur 
général  doit  être  nécessairement  profès  de  la 
congrégation  de  Saint-.Maur,  Français,  cl  il 
reste  soumis  au  chapitre  géuéral.  Il  ne  peut, 
sous  aucun  iirélexte,  user  des  insignes  ponti- 
ficaux, ni  accepter  un  bénéfic"  dans  le  sein 
de  la  congrégation.  S'il  en  acccf  le  un  hors 
de  sa  corporation,  par  là  même  sa  démission 
est  donnée.  Il  doit  consigner  dans  un  registre 
les  choses  remarquables  qui  se  passent  dans 
l'année  :  disposition  fort  utile  el  qui  aurait 
bien  dû  être  pri^cdans  les  monasicres  dès  leur 
origine.  Il  est  élu  pour  trois  années,  clc,  elc. 
Une  disposition  sage  de  ces  constitutions, 
propre  à  mainlonir  la  discipline,  c'est  que 
les  suj(  Is  ne  sont  point  attachés  à  telle  ou 
(elle  maison;  ils  restent  à  la  discrétion  du 
supérieur,  qui  peul  les  envoyer  d'un  monas- 
tère à  l'autre,  etc.  La  rédaclion  de  ces  consti- 
tutions avait  été  ronliêe  à  dom  Perneiy,  à 
dom  Jauiin.  l'auteur  des  Peu'ées  thêologi- 
qncs,  à  dom  la  llivièrc;  cl  à  dom  ('léniencct. 
On  sait  coniliien  (C  dernier  étail  janséniste. 
Dom  la  llivière  cl  lui  av.iient  été  imposés 
.'lux  capi.ulanis  par  les  cotnmissairrs  du  roi 
(|ui  prèsiilaienl  .lu  chapitre.  Ouanl  à  doiu 
l'trnelv,  après  a\()ir  lenuine  son  travail,  il 


913 


MA  11 


M  AU 


nii 


alla  à  Berlin  el  y  devint  bibliolliécaire  du 
loi  de  Prusse.  Les  conslilutions  fureni  ap- 
|)rouvées  au  chapitre  général  tenu  à  Mar- 
iiiouliers  en  17G0,  puis  autorisées  civilement 
par  lellres  patentes  el  enregislrcmcnl. 

Quoiqur  les  nouveaux  statuts  n'eussent 
rien  décidé  sur  la  composition  d'un  nouveau 
bréviaire,  la  congrcgaiion  ne  laissa  p.is  de 
céder  au  goût  ou  à  la  manie  du  siècle,  et  fit 
un  bréviaire  nouveau  pour  son  usage.  On  en 
confia  la  rédaction  à  ilotn  Fou'on,  jaiisénisle 
ardent,  qui  y  mil  des  preuves  nombreuses  de 
ses  principes.  Le  psautier  y  a  soulTerl  quel- 
que altération  ;  les  prières  les  plus  autorisées 
et  les  plus  anciennes  y  si;nt  changét's.  La 
iio:i!enclature  des  saints  du  calendrier  est  en 
conséquence  des  idées  du  léJai  leur.  Ce  bré- 
viaire parut  en  1787  ,  en  4-  vol.  in  12,  sans 
approbation  du  général,  cl  sans  mandement 
qui  le  prescrive  dans  1 1  congrégation.  Oui 
l'avait  donc  commandé?  ce  n'éiail  pas  I  •  bu- 
reau /in^'rni're.  supprimé  depuis  lnngtemps 
par  l'aulorilé  civile.  Ce  bréviaire  ne  fu:  point 
rc-:ulièrement  adopté.  Un  ancien  prieur  de 
l'abbaye  du  Bec,  Icquelen  faisait  usage,  .ipri  s 
la  révolution,  nous  a  dit  qu'on  ne  le  récilail 
pas  encore  dans  son  monastère.  Il  parait  ce- 
pendant qu'on  coamiençait  à  s'en  servir  dans 
quelques  maisons  quand  la  révolution  frau- 
i;aise  éclat;i. 

Les  six  |iroviiices  dont  parle  ci-dessus  !e  P. 
Hélyot  étaient  toujours  les  mémos.  Entre  les 
180  abbayes  ou  prieurés  qui  les  composaient, 
ou  voyait  [  resque  tous  les  célèbres  monastè- 
res bénédictins  (le  France.  Ainsi,  dans  la  pro- 
vince de  Normandie,  on  comptait  Jumiéges, 
Féeamp,  Sainl-Wandrille,  qu'on  eût  pu  jadis 
appeler  l'asile  des  saints  ;  le  Bec,  jadis  habité 
parLanfrane  el  saint  Anselme,  Saint-Etienne 
de  Caen,  le  Mont-Saint-Michel,  e!c.  Dans  la 
province  di;  Bretagne,  ou  voyait  les  abbayes 
de  Saint-Melaine,  à  Bennes,  de  iîedon  ,  du 
prieuré  de  Lehoii,  à  Dinan  ,  chel'-licu  d'une 
réf'irme  particulière,  avant  son  union  ,  eic. 
Dans  la  provinc(!  de  Fr.ince,  on  trouvait  la 
fan'.euse  abbaye  de  Saint-Denis,  maison  d'é- 
liules  pour  les  religieux,  Marniouliers,  Saint- 
Ormain  des  Prés  ,  Saint  Farou,  etc.  Les  Bé- 
nédictins de  la  congrégation  avaient  la  di- 
rection de]iiesque  toutes  les  écoles  militaires  ; 
ils  avaient  en  outre  plusieurs  collèges  pour 
l'iiislruclion  et  l'éducation  de  la  jeunesse,  par 
exemple  dans  l'abbaye  de  Tirou,  au  Perche, 
où  fut  élevé  l'abbé  de\  illefroy,  savant  orien- 
lalisle;dans  l'abbaye  de  Pont- Levoy,  diocèse 
de  Blois  ;  dans  celles  de  Siiut-Germer ,  au 
pays  de  Bray  ;  de  Beaumont-en-Auge  ;  de 
Sorèze,dans  leLanguedof  ;deSaint  Jeaii-d'.Vn- 
gely,  eu  Sainloiige  ;  de  Bebais  ,  eu  Brie;  de 
Tlioissy,  dans  la  piincipauté  de  D.mibrs  ; 
d'Au\erre....  sans  parler  de  plusieurs  mo- 
nastères, surtout  dans  les  campagnes,  où  les 
religieux  instruisaient  les  enfants. 

Dans  tout  le  courant  du  siècle,  les  Bcne- 
diciins  avaient  conservé,  UMigré  leur-  dissen- 
tions intestines,  l'habitude  de  leurs  travaux 
el  de  leurs  publications  précieuses.  1  savaient 
au  commencement  du  siècle  établi,  dans 
l'abbaye  de  Saïul  Flonut  do  Sauuiur  ,    une 


académie  bien  plus  précieuse  que  le  pré- 
tendu bureau  liilf'rnire.  Celte  académie  , 
toute  composée  ib'  sujets  disliuiiurs  par  leurs 
talents,  el  dirigée  par  un  théologien  habile 
dans  la  science  ecclésiastique,  avait  pour 
objel  l'élude  de  la  théologie,  mais  sans  s'as- 
sujellir  à  la  méthode  de  l'école.  Les  textes 
originaux  de  l'Ecriture,  les  conciles,  les  Pè- 
res, les  histcu'ieus  de  l'Siglise  ,  étaient  les 
^Ollrces  où  ils  puisaient  le  goût  véritable. 
Là  brillèrent  dom  Bivet  et  un  grand  nombre 
d'autres.  Avec  la  science  ecclésiastique  qui 
légnait  réellement  dans  la  congrégation  des 
Mauristes,  nous  croyons  pouvoir  insinuer 
que  ne  se  trouvait  point  la  science  théologi- 
que proprement  dite,  telle  qu'on  la  trouvait 
dans  plusieurs  membres  de  la  congrégation 
de  Saint-Sulpicc ,  de  celle  drs  Lazaristes,  de 
I  institut  des  Jésuites  ,  de  la  société  des  Eu- 
distes,  etc. 

Eu  1770,  on  a  publié  Vllistoire  lillëraire 
(le  la  conqrégalion  de  Sninl-Maur ,  par  doia 
Prosjier  Tassin,  qui  a  mis  dans  ce  livre  des 
preuves  de  ses  préventions  jansénisics,  mais 
qui  fait  bien  connaître  les  travaux  de  sa  cor- 
poration, à  dater  de  IGlSjusqu'à  l'époqueoù 
illivie  son  ouvrage  au  public.  On  peut  con- 
sulter aussi  la  liibUuijrapliic  de  la  eongréga- 
lion  de  Saint-Maur  qui  se  trouve  à  la  fin 
d'une  llisloirc  de  dom  Mabillon,  publiée  jrar 
M.  Chavin  en  18i3,  Celte  nomenclature  , 
toute  dél'ei  tueuse  et  incomplète  qu'elle  est, 
peut  néanmoins  donner  une  idée  juste  des 
travaux  de  la  célèbre  congrégation.  Nous 
croyons  devoir  dire  ici  que  pres(|ue  tous  ces 
travaux  étaient  composés  sous  l'influenee  de 
l'esprit  jansénisie.  Quand  la  révolution  dis- 
persa les  religieux  ,  plusieurs  entreprises 
d'un  gr;ind  pris  demeurèrent  inachevées  : 
telles  l'Histoire  Littéraiie  de  la  France,  l'é- 
dition des  OEuvres  de  suinl  Grégoire  de 
Nazianze,  etc.  — Nous  allons  donner  ici 
quelques  détails  sur  linlérienr  de  la  maison 
des  Blancs-Manteaux,  la  plus  importante  du 
la  congrégation  sous  le  lapport  littéraire, 
après  l'abbaye  Saint-Germain  des  Prés.  C'est 
des  Blancs-Manteaux  que  pari  il  celle  re- 
quête contre  la  demande  scandaleuse  des 
vingt-huit  Bénédictins  dont  nous  avons  parlé. 
Aux  Blancs-Manteaux  b'S  constitutions  l'e  la 
réforme  étaicut  régiil:èremont  gardées.  Le 
maigre  était  continuel,  et  on  couchait  sur 
une  paillasse  piquée.  Dom  llaudiquei  était, 
lors  de  la  suppression,  pi  leur  de  celle  mai- 
son, qui  n'était  pas  abbaye.  Là  se  trouvaient 
plusieurs  religieux  dont  le  nnui  est  connu  : 
tels  dom  Foulon,  l'auicur  du  bréviaire  (|ue 
nous  avons  mentionné  plus  haut  ;  dom  Clé- 
mencet,  auteur  (lu /'J/^  de  vérifier  les  dates. 
Ce  religieux,  qui  ne  manquait  jamais  il'as- 
sister  aux  matines  quoiqu'il  fut  âgé  de  80 
ans  et  qu'il  eût  une  sonde,  jouissait  d'une 
grande  répuialion  ;  il  était  lié  avec  Bailly  , 
depuis  maire  de  Paris,  reçut  la  visite  du 
prince  Henri,  frère  du  roi  de  Prusse,  etc.  ; 
(iorn  Déforis,  qui  avait  commencé  l'édition 
des  oeuvres  de  Bossuet  .  dom  de  Cognac 
(notre  lompalriote),  qui  travaillait  au  lîallin 
Chrtiliana  ;  dom    Labat,    qui   a   duuué  une 


?l- 


niCTIONNAinE  DES  ORDRES  RF.I.iniEUX. 


016 


histoire  de  l'abbaye  de  S.iinl-Polycarpe  ;  dom 
iMalhcrbc,  qui  Irâvaillait  à  une  histoire  du 
bas  Langurdoc  ;  dom  Caffieri  ,  frère  du  scul- 
plcur,  à  qui  sont  durs  les  statues  des  quatre 
Pères  qui  étaient  aux  Invalides  ;  dom  Merle, 
Réiièalopisle  savant,  consulté  par  les  grandes 
familles;  dom  (Juin(|uel,  qui  cultivait  un  pe- 
tit jardin  dans  le  quartier,  s'occupait  des 
fleurs  et  connaissait  moins  les  livres  que  les 
tulipes  et  surtout  les  jacinllips.  Uoiii  Bris  , 
procureur,  n'égalait  aussi  les  autres,  ni  «n 
science  ni  en  ferveur.  On  en  peut  dire  autant 
de  dom  Malvaux,  religieux  minoré,  qui  vi- 
vait pourtant  avec  les  savants  dont  nous 
avons  parle  et  ()ui  nous  a  fourni  ces  détails 
curieux.  Tous  ces  religieux  laborieux  et  en 
apparence  si  réguliers  étaient  malheureu- 
sement imbus  des  ernurs  jansénistes.  Celait 
dans  leur  maison  que  se  faisaient  les  abon- 
nements aux  fameuses  i\ouve!les  eccli'siasti~ 
r/nes ,  auxquelles  Irâvaillait  dom  Déforis. 
Presque  tous  doiinèretit  aussi  dans  les  er- 
reurs de  la  C mslitulion  ci\ilcdu  clergé,  et 
quel(jues-uns  dans  des  scandales  inconce- 
vables, comme  ilom  Foulon,  l'aulcur  du  bré- 
vi.iire,  qui  se  retira  à  Montmorency,  près  de 
Paris,  et  s'y  maria  avec  une  fem  le  qu'il 
avait  séduite  depuis  lon^icmps,  ainsi  qu'il  le 
déclara  <i  la  municipaliié.  Là  vint  aboutir 
l'austérité  qui  avait  sa  base  d.ms  le  jansé- 
nisme. La  mjiison  des  Dlancs-.Manleaux  était 
habitée  par  des  religieux  envoyés  de  toutes 
les  proviuces  de  la  congrégation  ;  les  reli- 
gieux portaient  le  litre  de  conventuels  ou 
modérateurs. 

La  célèbre  ab!)aye  de  Saint-Germain  des 
Près  est  assez  connue;  elle  était  comme  le 
chef-lieu  de  la  congrégation  de  Saint-.Maur. 
Le  revenu  de  la  mense  abbatiale  et  de  la 
maison  val.iit  environ  30(1,000  livres,  dont 
les  deux  tiers  allaient  à  l'abbé,  qui  était 
corameiidalaire.  On  avait  reconstruit,  dans 
le  cours  du  dernier  siècle,  une  partie  du 
clnîirc  de  ce  monastère  et  deux  grands  corps 
de  logis.  La  bibliothèque  de  celle  abbaye, 
qui  était  la  plus  nombreuse  après  celle  du 
roi,  avait  été  commencée  par  le  P.  Uubreul  et 
augmentée  successivement.  Dans  le  xviii' 
siècle,  elle  fut  eni  ichie  des  bibliothèques  de 
l'abbé  Jean  d'issiré.  s  (1718),  de  l'abbé  He- 
nandot  (17:i0),  du  chancelier  Séguier,  7na- 
nuscrits  (en  1732),  du  cardinal  de  (îesvres 
(174i),  de  M.  de  Harlay,  conseiller  d'I'tal  (en 
1762).  Le  tout  donnait  un  cliilïre  de  100,000 
volumes  imprimés  et  quin/e  à  vingt  mille 
manuscrits,  dans  toutes  les  langues.  On  y 
trouvait  le  manuscrit  des  Pensées  de  Pascal, 
qu'on  a  édité  et  dont  on  a  tant  [)arlc  depuis 
peu.  Les  abbés  avaient  autrefois  toute  juri- 
diction lant  «.pirituelle  que  temporelle  .«-ur  le 
f.iubourg  Saint-Germain  ;  le  prieur  de  l'ab- 
baye était  vicaire  général  né  et  perpétuel  de 
l'auhevè'iue  de  Paris,  et  ce,  jus(]u'à  la  dis- 
persion. Le  dernier  général  fut  le  H.  P.  dom 
lihevreux.  Les  sujets  n';ifllu.iient  pas  dans 
les  noviciats  ;  depuis  lonstemps  la  congré- 
gation était  dans  rus;ige  de  secourir  les  pa- 
rents nécessiteux  de  ses  membres,  .^ans  cette 
œuvre  de  ciiarilc,  elle  eût  eu  fort  peu  dciios- 


des    réguliers    lui 


tulanls.  La  commission 
avait  nui,  ainsi  qu'aux  autres  institu's.  Les 
querelles  intestines  de  la  congrégation  de 
Saint-Maur  auraient  peut-être  amené  sa  rui- 
ne, si  la  révolution  n'était  venue  hâicr  sa 
dii-solutiop.  Dos  troubles  avaient  encore  eu 
lieu  peu  d'années  auparavant.  Un  chapitre 
tenu  à  Saint-Denis  avait  été  orageux,  et  les 
di.-senlimenis,  les  plainies  en  étaient  venus 
au  point  que  le  parlement  lui-même  fil  trois 
ItimoirDanrci!  au  roi  sur  ces  malheureuses 
affaires.  La  dernière  est  datée  ilu  1"  février 
ilHi).  Toutes  gémissent  et  crient  sur  les  fu- 
nestes opérations  de  la  commission  des  ré- 
guliers, qui  en  1780  avait  été  dissoute,  mais 
créée  de  nouveau  le  mômej mr,  sous  un  au- 
tre nom.  Celte  fatale  commission  était  alors 
composée  de  cinq  évoques  ,  qui  ne  comp- 
taient plus  avec  eux  que  l'un  des  cinq  laï- 
ques qui  leur  étaient  jadis  adjoints. 

Les  liénédictins  de  Saint-.Maur  ((uittèrent 
leurs  riionaslères  en  1792. 

Dès  l'an:  ée  1815,  après  la  première  ren- 
trée des  Bourbons,  quelques  anciens  reli- 
gieux de  (etle  congrégation  adress.''rent  une 
requête  à  Louis  XA'Ill;  ils  représentaient 
que  SI  on  avait  à  reprocher  à  quelques 
membres  de  leur  corps  l'oubli  de  leur  régie, 
il  y  en  avait  d'autres  qui  n'en  avaient  jamais 
perdu  l'esprit  et  les  sentiments,  et  qui,  au 
milieu  des  orages,  s'étaient  conservés  purs 
et  fidèles.  Ils  demandaient  à  ressusciter  une 
corporation  non  abolie  par  l'Eglise,  qui  pou- 
vait être  encore  si  utile  à  la  société,  aux  let- 
tres, à  l'instruciion  publique.  Dom  tîrou  t 
d'Arcy  avait,  nous  a-l-il  dit,  prié  M.  de 
Montesquiou  d'obtenir  du  roi  une  ordon- 
nance qui  rétablit  la  congrégation.  .M.  de 
Montesquiou  y  consentit,  mais  il  répondit  sa- 
ge nent  qu'il  fallait  (]ue  les  Bénédictins  fus- 
sent reunis  avant  que  le  roi  accordai  l'or- 
doiinan'  e,  laquelle  certainement  ne  sérail 
pas  refusée.  A  la  seconde  rentrée  des  Bour- 
bon'.', le  projet  ayant  pris  plu  <  de  consistance, 
ou  rechercha  par  la  voie  des  journaux 
l'adhésion  des  religieux  dispersés  qui  vou- 
draient contribuer  à  le  mettre  à  exécution. 
Il  le  fut  en  effet  en  1810.  L'association  des 
chevaliers  de  Saint-Louis  faisait  élever  à  ses 
frais  des  enfants.  Les  Bénédictins  furent  au- 
torisés par  le  roi  à  répondre  à  l'invitation 
des  chevaliers  de  Sainl-Louis  qui  leur  pro- 
posaient de  se  charger  de  leur  ceuvre  ;  ils  se 
réiinirenlàSenlis,ilans  l'ancien  monastère  de 
la  Piésentation,  quiavailétéacquis  à  cetelTet, 
et  reçurent  aussi  d'autres  enfants  avec  ceux 
de  l'association.  Une  [lartie  des  religieux  re- 
prit les  exercices  monasti(]ues  et  l'auire  se 
livra  à  l'instruciion.  Mais  nicilheurcusement 
ils  ne  rep;irent  point  leur  habit. 

D,im  M.'ir(|uet,  ancien  [irieur  de  l'abbayo 
et  diiecleur  du  collège  royal  de  Ponl-I.evoy, 
fut  le  premier  «lirecleur  do  celle  uiaiscm, 
(ju'il  n'eut  |ias  le  temps  de  former  au  Rre  do 
ses  désirs.  Il  inourul  le  '2  o 'lobre  1817,  âgé 
de  73  ans.  et  fut  inhumé  dans  le  cimetière  do 
Sentis,  où  l'on  voit  son  épilaphe.  Nous  ne  sa- 
vons s'il  el.iil  propre  à  son  (iMivre;  il  n'avait 
réuni   autour  ilc  lui  que  quelques  vieillards, 


017 


MAU 


MAU 


ni  8 


f|iii  n'avaient  point  cette  ferveur  daction  qui 
ne  se  trouve  gut^rc  (inc  dans  des  jeunes  gens. 
Dom  Groult  succéda  à  dom  Marcjuet,  cl  di- 
rigea létablisî-einent;  il  ii'avail  liendece 
qu'il  fallait  pour  celte  restauration, si  ce  n'est 
du  goût  pour  les  ^'tablisse-nents  religieux, 
goûl  édifiant  qu'il  garda  jusqu'à  sa  morl. 
L'établissement  de  Senlis  ne  fit  point  de  su- 
jets; le  collège,  fort  mal  tenu,  se  soutint 
pendant  dix  ou  douze  ans.  Le  bâiiment,  de- 
venu la  propriété  de  dom  Groult,  a  é'.é  laissé 
par  lui  h  la  respectable  congrégation  de  Pic- 
pus,  qu'il  a  faite  sa  légat  lire  et  qui  l'a  vendu 
à  un  habitant  de  Senlis.  Celui-ci  en  loue  ac- 
luellciiiciit  une  partie  au  pensiunn.it  de 
Saint-Vincent  de  Senlis.  C'est  tout  ce  que 
cette  maison,  témoin  de  si  belles  espérances, 
garde  aujourd'hui  de  son  ancien  ne  destination. 

La  congrégation  de  Saiiit-Maur  avait  pris 
jadis  le  nom  de  Congrégation  Gallicane  ou 
de  France.  C'est  aussi  sous  ce  nom  que  s'est 
formée  la  nouvelle  société  de  Bi'uédiclins  éta- 
blie à  Solcsmes,  que  nous  ferons  connaître 
dans  le  volume  de  Supplément. 

Régula  S.  P.  Benedicti  cl  constitutiones 
congregnlionis  Sancti  Mauri,  in-8",  Paris, 
Desprez,  1770.   Nouvelles  ecclésiastiques.  — 

Ami  de  la  religion.  —  Tableau de  Paris, 

par  M.  de  Saint-Victor.  —  Elut  de  Paris, 
par  de  Beaumont.  —  Notes  prises  passim. 

B-D-E. 

MAURICE  D'AGAUNE  (Des  Chanoines  Ré- 
guliers DE  Sâl.NT-)  [t]. 

L'abbaye  de  Saint-Maurice  en  Valais,  au 
diocèse  de  Sion,  eu  Suisse,  est  très-illustre  et 
très-ancienne.  Le  corps  de  saint  Maurice, 
qui  y  repose  avec  ses  compagnons,  lui  a  fait 
donner  le  n.  m  de  ce  saint  martyr,  et  on  la 
nomme  aussi  d  Agaune,  à  cause  qu'elle  est 
si'.uée  dans  un  bourg  qui  porie  ce  nom.  Si- 
gismond,  roi  de  liourgogne,  fut  le  fondateur 
de  cette  abbaye,  ou  plutôt  il  n'en  fut  que  le 
restaurateur;  car  il  y  avait  déjà  une  église 
dédiée  en  Thonncur  de  saint  Maurice,  qui 
avait  clé  bâtie  vers  la  fin  du  v  siècle,  et  même 
il  y  aurait  eu  un  monastère,  si  l'on  pouvait 
ajouter  foi  à  la  vie  du  saint  Severin,  qui  en 
a  été  abbé,  laquelle  a  été  écrite  par  Fiiusie, 
où  il  est  remarqué  que  le  grand  Clovis  ayant 
été  malade  pendant  deux  ans,  et  sa  maladie 
ayant  commencé  dès  la  vingt-cinquième  an- 
née de  son  règne,  il  ne  fut  guéri  que  par  les 
prières  de  saint  Severin,  que  l'on  fit  venir 
d'Agaune  à  Paris.  Mais  le  doclc  P.  dom  Ma- 
billun  fait  remarque:  que  cela  ne  peut  être, 
puisque,  selon  le  témoignage  de  Grégoire  de 
Tours,  ce  prince  régna  trente  ans,  et  mou- 
rut la  cinquième  année  d'après  la  bataille  de 
Vouillé  (l'an  511),  qui  n'arriva  que  dans  la 
vingt-cinquième  de  son  règne.  Après  cette 
bataille,  où  les  troupes  de  Clovis  rempor- 
tèrent la  victoire  sur  celles  d'Alaric,  roi  des 
Visigoths,  qui  y  lut  tue  par  Clovis  (l'an  507), 
ce  prince,  prolilanl  de  sa  victoire,  (it  plu- 
sieurs actions  qui  n'étaient  pointd'nnhommc 
malade.  Il  passa  l'hiver  suivant  à  Bordeaux, 
dont  il  s'était  emparé.  Au  printemps,  i!    prit 

(i*  Vvij.,  a  h  lin  du  vul.,  11*231. 


Toulouse,  où  étaient  le»  trésors  d'Alaric.  Il 
vint  ensuite  assiéger  Angoulèmc.  De  là  il 
alla  à  Tours,  où,  ayant  reçu  la  robe  consu- 
laire et  les  ornemenis  impériaux  que  lui 
avait  envoyés  l'empereur  Anastase,  il  s'en 
revêtit  dans  l'église  de  Saint-Martin.  A  peine 
fut-il  de  reiour  à  Paris,  qu'ayant  appiis  la 
moit  de  Sigeberl,  roi  de  Cologne,  il  alla 
pour  s'emparer  de  ce  royaume.  Il  songea 
ensuite  à  se  renlre  maître  de  celui  de  Cam- 
brai, dont  Bagnacaire  était  en  possession. 
Toutes  ces  actions  ne  conviennent  point  à 
une  personne  qui  est  retenue  au  lit  à  Paris 
pir  une  fièvre  qui  le  mine  et  le  consume, 
dit  le  savant  bénédictin,  qui  ajoute  que  ce 
saint  Severin  ne  peut  pas  non  plus  avoir 
guéri  en  allant  à  Paris,  Eulalius  ou  Eula- 
dius,  évêque  de  Nevers,  comme  il  est  mar- 
qué dans  quelques  manuscrits  de  la  vie  de 
ce  saint,  |)uisque  cet  Eulalius  n'occupait 
point  pour  lors  le  sié^ie  épiscopal  de  Nevers  : 
ainsi  ce  n'est  point  sur  la  vie  de  saint  Seve- 
rin, étrile  par  Fausle,  que  l'on  doit  s'ap- 
puyer pour  prouver  l'antiquité  du  monastère 
d'Agaune,  et  l'on  n'a  aucune  preuve  que  la 
règle  de  saint  Basile  y  ail  été  observée  dans 
le  v°  siècle,  comme  quelques  auteurs  ont 
avancé.  Il  faudrait  auparavant  prouver  qu'il 
y  eût  ru  un  menastère  dès  ce  temps-là  à 
Agaune;  mais  il  y  a  bien  plus  d'apparence 
que  la  première  fondation  de  ce  monastère 
fut  faite  par  le  roi  Sigisinond,  et  qu'il  joignit 
ce  monastère  à  l'église  de  Saint-Maurice, 
qu'il  fil  réparer. 

Ce  prince,  après  la  mort  de  Gondcliaud, 
son  père,  succéda  au  royaume  de  Bourgogne 
l'an  515,  et  après  avoir  abjuré  l'hérésie  d'A- 
rius,  dont  les  Bourguignons  avaient  été  jus- 
qu'ali  rs  infectés,  il  crut  qu'il  ne  pouvait  pas 
donner  des  marques  plus  signalées  de  son 
attachement  à  la  religion  calh  jlique,  que  de 
réparer  avec  beaucuup  de  magnificence  l'é- 
glise où  reposaient  les  corps  de  saint  Mau- 
rice el  de  ses  compagnons,  et  d'en  confier  la 
garde  à  des  moines  qui  y  chantassent  les 
louanges  de  Dieu.  Quelques-uns  prétendent 
qu'il  lit  celte  fondation  par  un  autre  nsolif, 
el  que  ce  fut  pour  expier  le  crime  qu'il  avait 
commis  en  faisant  mourir  son  fils  Sigeric. 
(>e  prince  avait  épousé  en  premières  noces 
Ostrog.tthe,  l'une  des  filles  dcThéodoric,  roi 
d'Italie;  dont  11  eut,  entre  autres  enfanls,  un 
fils  nommé  S  geric.  Après  la  mort  de  cette 
reine,  tl  épousa  une  de  ses  servantes,  qui, 
ayant  conçu  une  haine  contre  Sigeric,  per- 
suada àSigismond  qu'il  avait  conspiré  con- 
tre lui  pour  se  mettre  la  couronne  sur  la 
tête.  Siuismond,  trop  crédule,  fit  étrangler 
son  fils  avec  une  serviette,  comme  il  était 
endormi  ;  mais  aussitôt,  touché  de  repentir  (à 
ce  que  disent  ces  historiens)  1 1  pénétré  do 
douleur,  il  fit  bâtir  te  monastère  d'Agaune, 
l'an  522.  Mais  ce  monastère  et  l'église  de 
Saint-Maurice  étaient  bâtis  dès  l'an  515,  et 
il  est  vrai  que  Sigismond,  après  le  meurtre 
de  son  Gis,  se  retira  l'an  522  à  Agaune,  où 
il  passa  plusieurs  jours  en  jeûnes  et  en  lar- 
mes, au  tombeau  de  saint  Maurice,  deaian- 


ri3  DICTIONNAIRE  DLS  ORDntS  liLLIGIEUX.  p-ÎO 

«i.iiil  il  Dieu  dï'Ire  puni   en   celle   ^  ie  pliiicM  il.ins  ce  dernier  près  de  trois  cenls  filles,  qui 

qu'en    l'autre.    Sa   prière  fui  exaucée;    lar  élaient  ausM  partagées  par  bandes,  à  l'exem- 

l'annéc  suivante  Ijl'i.  il  fut  attaque  par  ("lo-  pie  des  moines  de  Sainl-Maurice  d'Agaunc  et 

•louiir,  roi  d'Orléans,  et   vaincu.  Il  se  relira  des  reliiricuses  de  Itemireniont.  Les  moines 

«iccrèlenicnt  sur  le  haut  d'une  montagne  in-  de  Saint  -  Maurice   élaient    di\isés,   comme 

iiccessilile,  et  tle  peur  que  ses  gens  ne  le  li-  nous   avons  dit,    en    neuf  bandes;   les  reli- 

^rassenl  entre  les  mains  des  Français,   il  se  gieuses  de  Remireniont  en  sept.  Les  autres 

I  oupa  lui-même  les  cheveux  cl  se  revêtit  de  en  avaient  plus  ou  moins;  mais  ils  ne  for- 
l'Iiabit  lnona^lique,  dans  l'intention  de  pas-  niaicni  tous  qu'un  chœur,  qui  était  relevé 
ser  le  reste  de  ses  jours  dans  le  monastère  par  un  autre.  Ce  qu'il  y  avait  de  plus  singu- 
li'Agaune.  ciinmc  ceux  qu'il  croyait  ses  plus  lier  dans  l'abbaye  de  Saint-lUquier,  c'est  que 
fidèles  servitiurs  lui  av.iient  conseillé.  Mais  la  eoinrnunaulé  était  composée  de  trois  cents 
à  peine  fnl-il  arrivée  la  porte  de  ce  monas-  religieux.  Il  y  avait  outre  cela  cent  enfants 
1ère,  qu'ils  le  livrèrent  entre  les  ma:ns  des  qu'on  y  enseignait,  et  qui  portaient  aus>i 
Français.  Clodomir  l'emmena  revèlu  de  son  l'habit  monasli(iue.  Ces  trois  cenls  rel  gieux 
liabit  monasiique  avec  sa  femtne  el  ses  en-  et  ces  ( niants  étaient  partagés  en  trois 
fants,  et  les  mil   en   prison   près  d'Orléans,  chœurs  qui    psalmodiaient    continuelienienl 

II  les  y  garda  jusqu'à  l'année  suivante  32V,  jour  et  nuit  dans  l'église  de  celle  abh.iye  : 
qu'il  ré-solul  de  les  r.iire  mourir.  Saint  Avil,  cent  à  la  chapelle  de  Sainl-Sau\  eur  avec 
abbé  de  Micy  près  d'Orléans,  dil  à  Clodomir  trente-quatre  enf.ints,  cent  à  la  chapelle  i!c 
•lue  s'il  épargnait  ces  princes  dans  la  vue  de  SainlUiquicr  avec  Irente-lrois  enf.inls,  el 
Dieu,  il  serait  avec  lui  cl  remporlerail  des  aulani  de  religieux  el  d'enfants  à  la  cha- 
>ictoires:  mais  que  s'il  les  faisait  mourir,  il  pelle  de  la  Passion.  Ils  se  Irouvaicnt  tous  :i 
)>crirail  de  même  avec  sa  fenmie  et  ses  en-  loules  les  heures  canoniales;  et  lorsqu'elles 
fants.  Clo  loniir  se  moqua  de  ce  conseil,  el  étaienl  finies,  nn  liers  de  chaiiue  ch(rur  se 
lit  tuer  Sigismond,  avec  sa  femme  et  ses  en-  retirait  pour  aller  à  se<  affaires  cl  à  ses  be- 
f  nls.  les  lit  jeier  dans  un  pu:ls,  et  marcha  s  lins,  pendant  que  les  deux  autres  liers  con- 
çu Dourggne  pour  aller  l'aire  la  guerre  àtîo-  linuaienl  de  psalmodier  à  voix  basse,  ("eux 
domar,  frère  de  Sigismond,  où  il  fut  tué  lui-  (lui  étaient  sortis  étant  retournés  à  l'église, 
mèmedans  uncombat  près  d'Autun,  raii52.).  il  en  sortait  de  chaque   chœur   autant  qu'il 

Il  y  eu  a  qui  onl  aussi   prétendu  (|ue  c'é-  en  était  entré,  ce  qui  se  pratiquait  de  nn'me 

lait  dans  le  nionastèie  d'Agaunc  (]u'on  sui-  lorsqu'il  fallait  aller  au  réfectoire  ou    prcn- 

\  ait  la  règle  de  Taruat  ;  mais  nous  parlerons  dre  le  repos. 

'  n  un  autre  lieu  de  celte  règle    el  de    cel  e  L'abbaye    d'.\;:aune  ,    qui    avait   d'abord 

qu'ensuivait  à  Agaune,    en  rapportant   les  une  règle  particulière,  cl  non  pas  la  règle 

ilifl'érentes  règles  qui  ont  eu  C'>urs  en  Orci-  de  saint  liasile,  comme  quelques-uns  préten- 

«lent  :  nous  nous  contenterons  dédire  à  pré-  dent  ,  embrassa  d.ms  la  suite  celle  de  saitit 

•«ent  que  Tarnat  et  .\gaunc  étaient  deux  mo-  Henoit.    Mais   les  IJénédiclins    en  ayant  êé 

nastères  différents,  el  que  c'est  à  tort  qu'ils  chassés  par  l'empereur  Louis  le  Délionnaire 

ont  él6  confondis  par  quelques  historiens,  l'an    82 't ,   on    î^ubstitua    à    leur    place    des 

puisque  Tarnat  é  ail  situé  dans  le  Lyonnais  Clianoines   sèrnbers.    Trenie  ans   après,  ou 

rroche  N'ieniie,   et  qu'Agaunc  élait  dans  le  environ,  cette   abbaye  ayant  été   donnée    à 

N'alais.  Hubert,    frère    de    Thielbe  ge  ,    femme    de 

Le  premierahbé  d'.Vgaunc  fui  Himncmon-  Lothaire  ,    roi   de    Lorraine  ,    ses    biens    cl 

de,  que  le  roi  Sigismond  avait  fait  venir  du  ses   revenus   furent  dissipés    par    la     mau- 

inonastèra  de  Gl■a^e;   ce  prince  voulut  que  vaise    vie   de    cet    abbé,    l'oflice    divin    fui 

les    religieux    chantassent   cont  nuellemenl  interrompu  ;   ce  (|u'oii   avait  accoulumé   de 

jour  el  nuit  les   louinges    du   Seigneur.    Ils  donner  aux    ministres  des  autels    élait  dis- 

l'taient  divises  en  neuf  bandes,  pour  se  suc-  Iriliué  à  des   courtisanes,  à  des  scélérats, 

céder  les  uns  aux  autres,  el  chanter  les  heu-  et  employé  pour  la  nourriture  d'un    grand 

les     canoniales     ou     nocturnes ,    matines ,  nombre    de   chiens  ;    il    épousa    même    uni; 

prime,  tierce,  scxte,  noue  et  vêpres;   on  ne  femme    déjà    mariée,    qui,    étant    séparée 

parlait   pas  encore  pour  lors  des  compiles,  de  son  mari  .  était  culrce  dans  un  monas- 

donl  on  doit  l'inslilution  à  saint  Hennit.  En-  léie,  d'où    il    l'enleva.  (^h.;rles  le  Chauve, 

viron    cent  ans   aupiiravanl   celte  sorte    de  après  la   mort  de  sa   femme  llerniinlrude  . 

psalmodie  continuelle  avait  été  instituée  en  ayant  épousé,  aussitôt  qu'il  en  eut  reçu  la 

Orient  par  siiint   Alexandre,   fondateur  des  nouvel. e,  Uichil  le,  qu'il  entretenait  (onime 

Acéinètes  (  Loi/.  .\('.i:Mi';TEsi,  mais  le  monas-  concubine,  donna  l'abbaye   de    Sainl-Mau- 

lère  d'Agaune  fut  le  premier  en  Occident  où  rice    au   comte    Itoson  ,    frère   de   Ulcbilde, 

elle  fut  établie;   c'est   ce  qu'un   a  appelé  en  lequel  se  lit  couronner  quelque  temps  après 

latin,  Laus  pereniiis;  plusieurs  autres    mo-  roi   de   Provence  ou   d'Ailes.    .Mais  dans   le 

nastères  non-seulement  d'hommes  mais  aussi  neuv.ème  cl   le   dixième   siècle,  on    n'était 

lie  filles  imitèrent  celui  d'.\gaune.  lintre  les  \)i\<   surpris   de    voir  des  abbayes  entre  les 

hommes,  les  pi  inci(iaiix  lurent  ceuxde  Saint-  mains  des  séculiers  el  de  personnes  !;n(iues 

Kènigne  de  Dijon,  de  Saint-Denis  en  l'iance,  et    mariées.    Souvent    des    hommes    riaient 

de  Saint-Martin  de  Tours,  île  Saiiil-Uiquier,  abbés  de   mon.isières   de  tilles,  et  des  lilles 

de  Luseuil,  et   quelques  autres,    l'ariiii    les  ou   f  mines  avaient  des  monasières   d'Iiom- 

monastères  de  filles,  il  y  eut  ceux  de   Iteiiii-  mes,    avec    le    titre  d'abbés,    et    même   on 

reniont  el  de  Saiul-Jcun  de  Lauiic.  li  y  avail  en  donnait   pour  dol  en  mariage. 


021  MAU 

L'abbaye  de  Sainl-Mnuricc  avait  clé  déjà 
ravagée  par  les  Lombards  dès  le  viii''  siècle. 
L'cmpcrnir  Charlemagne  l'avail  fait  répa- 
rer, mais  pllfi  fut  cncDre  brûlée  par  les  Sar- 
rasins dans  le  \^  siècle;  et  1rs  observances 
n'y  furent  entièrement  rétablies  que  lors- 
qu'on y  eui  mis  des  Chanoines  Réguliers,  ou 
que  les  Chanoines  Soculicrs  qui  y  étaient 
se  furent  soumis  à  la  désapproprialion  et 
cureni  reçu  la  règle  de  saint  Auituslin  ; 
ce  qui  ne  peut  être  arrivé  qu'au  commen- 
cement du  XII"  siècle,  ou  sous  le  gouver- 
nement de  l'abbé  Hugues,  qui  avait  fait 
rebâtir  l'église,  qui  fut  consacrée  par  le 
pape  Euiiène  III  l'an  1146.  Ces  Chanoines 
furent  en  grand  crédit;  on  en  demanda  en 
plusieurs  endroits  ,  et  ils  formèrent  une 
ciingrégalion  dont  l'abbaye  de  Saint-Mau- 
rice fut  chef.  Us  portaient  un  camail  rouge 
sur  le  rochel  ;  c'est  pourquoi  Guillaume, 
comte  de  l'onthiiMi  ,  Tan  1210,  leur  assigna 
tous  les  ans  treize  livres  de  rente  sur 
la  halle  d'Abbevillo ,  pour  acheter  vingt- 
aunos    d'écarlale   pour  leurs   capuces. 

L'on  trouve  dans  le  trésor  des  Charles 
du  roi  {l{egist.iii,rium.83),  des  le'tres  diî 
r.dllaHme  abbé  et  des  religieux  de  cette 
abbaye  ,  de  lan  1261,  qui  portent  que 
l'iiblié,  voulant  satisfaire  la  dévotion  que  le 
roi  saint  Luuis  avait  de  fonder  des  mai- 
sons de  cet  ordre,  et  le  désir  que  ce  prince, 
^tant  dans  son  abbaye,  avait  manifesté  de 
posséder  quelques  reliques  des  saints  mar- 
tyrs de  la  légion  de  saint  Maurice,  il  en 
avait  à  cet  effet  lire  quelques-unes  du  trésor 
ile  sou  église,  et  les  avait  envoyées  à  ce 
prince  ,  qui  les  avait  reçues  solennelle- 
ment en  procession  accompagné  de  plu- 
sieurs prélats  ecelésiastiques  et  séculiers,  et 
les  avait  fait  porter  dans  la  ville  de  Senlis, 
[  our  les  déposer  dans  l'église  ou  chapelle 
qu'il  voulait  fonder  proche  de  son  château  , 
|irétendiint  les  disperser  en  plusieurs  églises 
et  monastères  de  son  royaume,  où  il  ins- 
tituerait des  Chanoines.  El,  de  crainte  que 
dans  la  suite  il  n'arrivât  quelque  dilTérend 
entre  lui  et  l'évèque  de  Senlis  touchant 
l'institution  de  ces  Chanoines,  il  élail  de- 
meuré d'accord  avec  Robert,  évéque  de  Son- 
lis,  que  les  Chanoines  de  son  ordre  que 
le  roi  mettrait  dans  cette  église  ou  cha- 
pelle qui  serait  dédiée  en  l'honneur  de  la 
sainte  Vierge,  de  saint  Maurice  et  de  ses 
compagnons,  oliserveraient  l'usage  et  les 
cérémonies  de  l'Eglise  de  Paris,  en  faisant 
l'office  divin  comme  faisaient  les  chape- 
lains de  la  chapelle  du  roi  ;  que  ces  Cha- 
noines pourraient,  du  consentement  du  ro', 
en  recevoir  d'autres  sans  ea  demander  per- 
mission à  l'évèque,  qui  ne  pourrait  les 
oter  pour  quelque  raison  que  ce  fût  sans 
le  congé  du  roi ,  si  ce  n'était  pour  cause 
de  scandale;  que  ces  Chanoines,  après  la 
mort  de  leur  prieur,  en  pourraient  élire  un 
autre  de  leur  maison  ,  ou  d'une  autre  de 
leur  ordre  sans  sa  permission  ;  que  l'évè- 
que de  Senlis  et  ses  successeurs  y  pour- 
raient prêcher,  confirmer,  donner  les  or- 
dres ci  y  faire  l'office  divin  ,  en  donnant 


MAU 


02"2 


aele  au  prieur  comme  ils  n'entendent  pas 
par  là  préjudicier  aux  libertés  et  privi- 
lèges de  cette  église;  qu'il  n'y  pourrait 
faire  la  visite  qu'une  fois  l'année,  du  con- 
sentement du  roi  ;  que  s'il  y  a  quebine 
chose  à  corriger,  il  en  avertira  le  prieur  ; 
et  si  la  correction  regarde  le  prieur,  il  en 
donnera  avis  à  l'abbé. 

Les  reliques  des  compagnons  de  saint 
Maurice  furent  déposées  d'abord  dans  une 
petite  chapelle  ,  et  saint  Louis  ne  6l  bâlir 
l'église  de  Saint-Maurice  et  le  monasière 
que  l'an  1284,  et  y  mil  treize  Chanoines. 
Il  y  avait  aussi  un  prieuré  de  cet  ordre 
à  Semur,  en  Bourgogne,  sous  le  litre  de 
Saint-Jean  l'Evangéliste.  Il  semble  que  cet 
ordre  n'avait  que  ces  deux  prieurés  en 
Franee  ;  car,  selon  le  raialogue  des  abbés 
de  ce  monastère  que  MM.  de  Sainte-Mar- 
the ont  donné,  Barihélemy  de  Gorlion  , 
soisanle-huilième  abbé,  visila  les  prieu- 
rés de  Semur  et  do  Senlis  qui  étaient  en 
France  ,  et  les  réforma.  L'empereur  Ar- 
noul  est  marqué  dans  le  nombre  des  ab- 
bés au  même  catalogue;  mais  il  n'est  pas 
fidèle  ,  et  on  n'y  peut  pas  ajouter  beau- 
coup  de    foi. 

MAURICE  ET  IIE  SAINT-LAZARE  (Diîs  Chh- 
V4LIERS  DE  l'ordrk  DE  Saint-)  cti  Savoii'. 
La  plupart  des  historiens  qui  ont  parlé  de 
l'ordre  de  Saint-Maurice  en  Savoie  en  attri- 
buent l'institution  à  Amédée,  premier  <luc  de 
Savoie,  qui  fut  ensuite  antipape  sous  le  nom 
de  Félix  V,el  disent  que  ce  prince,  ayant 
aliandonnè  ses  Etats  à  ses  enfants  ,  se  retira 
dans  la  solitude  de  Ripaille  avec  quelques 
seigneurs  de  sa  cour,  où  il  institua  l'ordre  des 
chevaliers  de  Saint-Maurice  ,  voulant  qu'ils 
fussent  vêtus  d'une  soutane  et  d'un  chaperon 
gris  avec  un  bonnet,  et  les  manches  d'un 
camelot  rouge  et  une  ceinture  d'or  avec  un 
manteau  sur  lequel  il  y  avait  une  croix  pom- 
melée de  taffetas  blanc.  Mais  il  est  certain 
que  cet  ordre  n'a  commencé  que  l'an  1572, 
(ju'il  eut  pour  instituteur  le  duc  Emmanuel- 
I  hilbert,  et  que  leur  habit  de  cérémonie  con- 
siste aujourd'hui  en  une  grande  coule  ou 
manteau  rouge  cramoisi,  doublé  de  taffetas 
blanc  ,  sur  lequel  il  y  a  une  croix  aussi  de 
taffetas  blanc  pommelé  et  bordé  de  bandes 
vertes  aux  quatre  angles.  Si  l'abbé  Giusii- 
niani  eût  lu  la  bulle  de  Grégoire  XIII,  lUi  16 
septembre  de  la  même  année,  il  n'aurait  pas 
dit,  dans  son  Histoire  des  Ordres  militaires, 
(ju'on  ne  voyait  point  sur  quel  fondcmenl 
lîarbosa  avait  mis  l'institution  de  cet  ordre 
en  l'an  1572,  sous  Emmanuel-Philhert,  et 
qu'apparemment  il  s'était  trompé,  ayant  pris 
l'union  de  l'ordre  de  Saint-Lazare  qui  fut  faite 
la  même  année  avec  celui  de  Saint-Maurice 
pour  l'institution  même  de  celui  de  Saint- 
Maurice,  llest  vrai  que  le  pape  GrégoireXIII, 
par  une  bulle  du  IJ  novembre  1572,  unit 
l'ordre  de  Saint-Lazare  à  celui  de  Saint-Mau- 
rice; mais  il  n'y  avait  pas  plus  de  deux  mois 
que  l'ordre  de  Saint-Maurice  avait  été  insti- 
tué par  le  duc  Emmanuel-Philhert,  auquel  le 
pape  en  avait  accorde  la  permission  par  un« 


923                                           DICTIONN.Vir.t:  DLS  ORDRES  liELir.lKVX.  Oïl 

«iilrc  bulle  du  Ifi  scpti m'iri'  de  la  m(}me  nn-  le  mnnlenu,  eTceplé  les  prélats  de  l'onlrecjui 

née, où  il  ii'e-l  fa  l  .lu^  une  iiienlion  qu'il  yeùl  .'Craiciil  clirvaliers  de  justice,  et  auraient  fait 

déjà  eu  en  Sa»  oie  un  ordre  de  Sainl-Mauriee.  preuve  de  noblesse  il). 

Le  pape  y  déci  ire  (|uc  ee  (jm  porta  ce  Lorsqu'on  reçoit  ces  Chevaliers  à  la  pro- 
princeà  instituer  ce(  ordre,  c'était  p^urs'op-  f  ssoii,  ils  prorncl'enl  d'(^Ire  (idéles  au  duc 
poser  à  riiérésie  qui  s'inlrodui.vait  en  le  de  Sa>oic  et  à  ses  succc  seurs,  <le  porter 
lemps-là  d;in>  plusieurs  provinces,  et  dont  les  l'Iialiit  et  la  croix  de  l'ordre,  de  venir  au 
frontières  de  Savoie  étaient  meiiai'érs  à  cause  chapitre  lorsqu'il  se  cclétirera,  de  dire  cha- 
du  voi-ina',;e  d<'  (ienéve,  qui  était  le  rentre;  qu''  jour  le  psautier  abrépé  en  l'honneur  de 
de  l'heresie  de  Calvin,  d'où  elle  s'é:a  l  répau-  Jsus-Chri>t,  de  la  sainte  Vierge  et  des  saints 
due  aux  environs,  et  par  la  bulle  d'union  que  Maurice  el  La/arc  ,  de  jeûner  les  ve ndredi< 
ce  pape  fil  do  l'ordre  de  Saint  Lazare  à  celui  ou  sainedi<,  de  garder  la  chasteté  conjugale, 
de  Sainl-Maurii  e,  le  l.'J  novembre  de  la  tiiènie  la  charité  et  l'hospilalilé  envers  les  lépreux, 
.innée,  il  j  répète  l'instilulion  qui  avait  éU';  d'observer  les  statuts  de  l'ordre,  de  m-  point 
faite  depuis  peu  do  celui  de  ."-ainl-Maurice  aliéner  les  biens  dépendants  des  commande- 
sous  la  règle  de  Cileaux  par  le  duc  Emma-  ries,  cl  de  ne  les  point  donner  à  ferme  pour 
iinel-riiilbcri,  el  dit  qu'il  ne  fait  celle  union  uii  long  temps,  ni  à  bail  emphyléoliiiue  sans 
(lu'.iprès  avoir  coiisdèré  que  ce  serait  un  le  consentement  du  duc  de  Savoie, 
grand  avantage  d'unir  l'ancien  ordre  de  Deruard  Ciusliniani,  Ilisl.  Clirnnolotj.  (le 
Saiiit-l,azare,  (|ui  n'avait  plus  de  grand  mai-  (//('  Oïd.  mil.  Silvest.  Maurol.,  l\Iar.  Occan. 
Ire  et  qui  était  beaucoup  déchu  de  son  an  rf. /ll^  7/i /v/jy.  Mennenius,  Herman  et  Schoo- 
«ienre  spicndeu-,  à  celui  de  Saint-Maurice  nebeck  ,  dans  leurs  //i'.vf.  ils  Oïd.  mi'/i'r,  el 
qui  ne  venail  que  (b'  naîlri!  -.Si  haiic  tctcrem  l'.ull.  rooi. 
{imlitiam)  i!li  novœcl  rtunc  nascenti  (nljuuye-  MAVLUL  (SAixr-l.  Vou.  Somasqi  ks. 

T  6  mil  S  I            j 

On  ne  peut  gu.'re  lire  cette  bulle  qu'on   ne  MLLGHI  ILSG/'ORGIENS  et  MINGKÉLIENS 

jette  en  même  temps  les   yeux   sur   celle   de  (Des  Moines  . 

l'iistituiion    de    l'ordre  de    Saint-Maurice  ,  On  appelle  Melcliiies,  dans  le  Levant,  les 

puisqu'eLes  se  Irouvcnl  de  suite  loules  deux,  Syiiens  ou  Snriens,  les  ("optes  ou  Egyptiens, 

dans  le  liullairc  romain,  el  par  conséquent  ci    les  autres  nations  de   l'Eglise   orien'ale, 

liarbusa  ,  Tamburin  et  plusieurs  autres  écri-  qui,    n'étant   pas    de    véritables    Grecs,    ont 

vains  ont  raison  de  dire  que  l'ordre  fie  Sailli-  néanmoins  embrassé  le  sentiment  commun 

Maurice  en  Savoie  ne  fut   irsiitué  que  l'an  des  tîic.s,  el  le  nom  de  Melihilcs  ,  c'esl-à- 

lo72  par  le  duc  lùiimanuel-Philbt  ri.  L'union  dire  royalistes,  leur  a  été  donné  parce  qu'ils 

de  celui  de  Saint-Lazare  à  «et  ordre   ne  fut  ont  obéi  aux  décisions  du  concile  de  Chalcé- 

faite  qu'après  la  mort  <leJannol  deCastillon,  doine  avec  l'emiiereur  IMarcien.Ce  furent  les 

qui   en  était  grand  mailrc,  et  qui   mourut  à  sectaires   du  Lovant  qui  donnèrent   ce   nom 

\erceil  la  même  année  L'S7i  ,  comme   nous  ;iux  orthodoxes  (jui  suivaient  la  religion  de 

avons  dit  ail  curs.  Cet  ordre  a  pris  depuis  (•«  l'emperedr ,    le  mot  de  Mclchite   venant  du 

temps-là  le  i;om  de  Sainl-.Maurici'  et  de  Sain'-  mol  bel  reu  l\li Ircli.  qui  signilic  roi  ou  prin- 

Lazare.  c:'.  Mais  b's  Melchiies  ne  sont  [las  pour  cela 

Ces  Chevaliers  font  vopu  de  pauvreté,  d'o-  présenlemenlorthodoses;carils  onlvmbrasse 
béissance  el  de  chasielé  conjugale.  Ils  sui-  les  erreurs  des  (irecs,ct  il  n'y  a  [loint  de 
vent  la  règle  de  (Mteaux  ,  doivent  combattre  clireliens  qui  soient  si  fort  opposés  à  la  pri- 
pour  la  défense  de  la  foi  catholique,  peuvent  niautédu  pape.  Il  y  a  parmi  eux  des  religieux 
se  m.riiT  une  fois  seulement  à  une  vierge,  el  des  re'igicuscs  qui  suivent  aussi  avec  les 
et  le  pape  Clément  VIII  leur  acroida,  en  moines  grecs  la  règle  de  saint  IJasile.  Les  rc- 
159G,  de  pouvoir  posséder  des  benèficrs  ou  lij'cux  ont  deux  beaux  mon  istères  à  Damas, 
des  pensions  sur  des  bénéfices  jusqu'à  la  elles  religieusi  s  en  ont  aussi  deux  qui  sont 
somme  de  hOO  écus.  L'or. Ire  a  beauc  aip  de  fort  riches  et  éloignés  d'une  journée  de  la 
commanderies  et  a  deux  principales  luaisoiis,  même  ville.  Elles  gantent  la  c'i'ilure  el  ne 
lune  à  Turin  cl  l'autre  à  Nice,  où  les  Chcva-  sortent  point.  Les  Melchites  onicient  en  hui- 
liers viieiitcn  commun.  L'an  lOli),  le  duc  gu(?  arabe.  C'est  ce  que  j'ai  ajipris  do  [ilu- 
(^harles-Emmauuel  ordonna  que  la  croix  do  sieurs  Levantins,  entre  autres  de  M.  Marc- 
l'orilre  serait  blanche  et  pommelée  par  les  Joseph,  pjitriarche  <ies  iicsloriens  ,  el  de  M. 
bouts  avec  des  bandes  verlcs  aux  quatre  an-  Saphar,  évéque  de  .Mardin. 
gles  pour  II  arquer  l'ordre  de  Sa  ni  Lazare.  I.es  Géorgiens  suivent  en  partie  la  scclc 
Mais  les  (Jievaliers  ne  s'élant  pas  mis  en  pri-  des  Arméniens,  el  en  partie  celle  des  Grecs 
ne  d'excciiier  les  ordies  de  ce  prince  .  la  du-  Le  prince  ,  quoique  tnahomélan  de  religion  , 
chesse  Chrisime  de  France,  veuve  do  N'iclor-  nomme  aux  dignités  ecclésiastiques,  cl  y 
Amédée  el  itiliice  de  son  îils,  le  iluc  <  Charles-  c'ève  ordinairement  ses  parenis.  Leur  reli- 
Emmanuel  II  ,  fil  exécuter  rordoiin.'inci'  du  gion  n'est  guère  dilTérenle  de  celle  des  ^Ln- 
duc  Charles-Einmanuel  !",  et  marqua  la  préliens,  el  les  uns  et  les  autres  n'ont  seule- 
grandeur  des  croix  ,  défendant  ans  cleics  <  l  menl  que  le  nom  de  chrétiens,  y  en  ayant  une 
aux  leligieux  chapelains  lir  l'ordre  d'en  por-  grande  partie  qui  ne  sont  pas  baptisés,  par 
1er  d'or  émaillée  de  bl.iiic,  comii.c  les  Clie-  l'ignorance  des  én'iiues  el  des  préiri-s,  qui, 
valu  r^, devant  la  poitrine;  mais  leur  ordonna  la  plupart,  n<'  savent  pas  la  forme  du  baplé- 
d'rn  porter  une  de  laine  blanche  cousue  sur  me.  C'esl  beaucoup  lorsque  IcCaHiolicos,  qui 

(I)  !"!/.,  8  lii  liii(!ii  vol.,  Il"  îi'-Z. 


32.-) 


m  EL 


MIL 


ÛIG 


est  le  fhcfdu  (lergô,  sait  lire,  aussi  bien  que 
li'S  cv(''qiips  qui  n'ont  aucun  soin  des  âmes, 
qui  ne  visitent  ni  leurs  rglises,  ni  leurs  dio- 
cèses ,  et  iloiil  l'occupation  ordinaire  est  d'ê- 
tre dans  des  festins  continuels  elde  s'enivrer 
presque  lous  les  jours.  Leur  principal  revenu 
consiste  rn  ce  qu'ils  retirent  des  femmes  et 
des  enfants  do  leurs  vassaux  qu'ils  vendent 
aux  TurM. 

Ces  peuples  reronnaissaii  nt  autrefois  le  pa- 
triarche d'Antioche  ;  maintenant  ils  obéissent 
à  celui  de  Constantinople,  et  ont  né.inmuins 
chacun  unprimal  de  leur  nation  qu'ilsappcl- 
lent  Calholicos,  et  qui  ont  aussi  chacun  leur 
juridiction  particulière.  Il  y  avait  autrefois 
riouze  évêchés  dans  la  Minjrrélie,  dont  il  n'en 
rcsie  plus  que  six.  Les  autres  ont  été  chan- 
ces en  abhayes,  qui  son\  iChiaggi,  Gippurias, 
Cu])is,  Obhurgi,  Séhastipol,  qui  a  été  ruinée 
par  les  eaux,  et  Annrghia, 

Les  évêiiues  y  sont  fort  riches  ,  surloul  le 
Catholicos,  et  la  simonie  est  ordinaire  parmi 
eux  ;  car  le  Catholicos  ne  consacre  point  un 
évoque,  s'il  ne  lui  donne  cinq  cents  écus.  Il 
ne  confesse  que  pour  une  bonne  si'mme  d'ar- 
pent; et  il  y  en  eut  un  qui,  ayant  été  mécon- 
tent de  ce  qu'un  visir  ne  lui  avait  donné  que 
cinquante  écus  pour  s'être  confessé  à  lui,  ne 
voulut  pas  le  confesser  une  seconde  fois  qu'il 
ne  lui  eût  payé  auparavant  la  première  con- 
fession. 11  ne  célèbre  point  de  messe  qu'il  ne 
soil  assuré  d'avoir  cent  écus,  et  l'on  double 
ordinairement  cette  somme  lorsque  c'est  une 
messe  des  morts.  Comme  parmi  les  évêqucs 
il  y  en  a  qui  ne  savent  pas  lire,  ils  appren- 
nent une  messe  par  cœur,  qu'ils  disent  prin- 
cipalement aux  enterrements,  après  s'en  être 
bien  fait  payer,  à  l'exemple  de  leur  Catholi- 
cos. Il  y  a  quelques  moines  qui  ont  le  liirc 
et  le  re\cnii  d'un  évèché,  qui  leur  est  accordé 
par  le  prince,  sans  être  consiicrés;  mais, 
consacrés  ou  non,  ils  ne  laissent  pas  de  faire 
des  prêtres  |  our  de  l'argent. 

Ces  prélats  prétendent  néanmoins  être  plus 
saints  que  ceux  de  l'Eglise  romaine ,  à 
cause  qu'ils  ne  mangent  point  de  viande,  de 
même  que  les  évêqucs  grecs,  et  ils  observent 
avec  le  peuple  les  mêmes  carêmes  des  Grecs. 
C'est  dans  la  pratique  de  ces  jeûnes,  qu'ils 
observent  très-mal ,  qu'ils  font  consister 
tous  les  devoirs  du  christianisme.  Les  prê- 
tres ne  sont  pas  plus  éclairés  que  leurs  évê- 
ques;  s'ils  savent  lire,  qu'ils  aient  appris 
une  messe  par  creur,  et  qu'ils  puissent  don- 
ner à  l'évêque  la  valeur  d'un  cheval,  ils  sont 
ordonnés  prêtres,  et  se  marient  autant  de 
fois  que  bon  leur  semble.  L'on  peut  juger 
si  le  peuple  est  bien  instruit,  ayant  des  pas- 
ti  urs  si  ignorants  et  si  vicieux  :  aussi  n'a- 
t-il  pas  la  moindre  idée  de  la  foi  et  de  la  re- 
ligion, traitant  de  fables  et  de  rêveries  la 
vie  éternelle,  le  jugement  universel  et  la  ré- 
surrection des  morts. 

Les  Géorgiens  observent  mieux  le  jeûne 
que  les  Mingréliens  et  font  de  plus  longues 
oraisons.  Le  prince  contraint  les  ecclésiasti- 
ques,et  même  les  évêques,  d'aller  à  la  guerre. 
11  donne  son  suflrage  avec  les  évêqucs  dans 

(I)  Voy.,  àla  lindu  vol.,n°  235. 


l'élection  du  primat  ,  et  tous  élisent  celui 
qu'il  leur  recoinoande.  Ce  prélat  ne  tient 
]ioint  le  premier  rang  pour  le  spirituel:  m.iis 
le  prince  est  le  mailre  absolu  pour  le  spi- 
riinel  el  pour  le  temporel,  quoique  maho- 
mélan  ;  car  le  roi  de  l'ei  se  l'oblige  d'embras- 
ser la  religion  de  Mahomet  pour  conserver 
sa  dignité  dans  sa  famille,  et  les  grands  sei- 
gneurs du  pays  se  servent  des  prêtres  comme 
de  valets,  méprisent  les  évêques  et  les  châ- 
tient. Les  Mingréliens  ont  plus  de  respect 
pour  les  évêques, mais  ils  ont  aussi  un  grand 
mépris  pour  les  prèlrcs,  à  cause  de  leur  igno- 
rance et  de  leur  ivrognerie,  et  nn  prêlre  n'est 
respecté  que  quand  il  dit  la  messe. 

Les  religieux  mingréliens  sont  aussi  igno- 
rants que  le  reste  du  clergé,  et  ne  sont  p.is 
mieux  instruits  des  mystères  de  la  religion. 
On  les  appelle  C(Vm,  et  ils  son!  hahil'és  comme 
les  séculiers,  avec  cette  différence  que  les 
séculiers  ont  peu  de  barbe,  et  se  rasent  le 
sommet  de  la  lêle  en  forme  de  couronne, 
coupant  leurs  cheveux  en  rond  au-dessus  des 
oreilles,  et  que  les  religieux  laissent  croire 
leurs  cheveux  et  leur  barbe.  L'iiabillemenl 
des  uns  et  des  autres  consiste  en  une  chemise 
qui  descend  jusqu'aux  genoux  et  qu'ils  ren- 
ferment dans  un  caleçon  ou  pantalon  ;  et 
par-;lcssus  ils  mettent  une  espèce  de  veste 
fort  rourle,  ou  un  feutre  assez  semblable  à 
la  chiamydc  des  anciens,  en  passant  la  lêlc 
dediins,  et  ils  le  tournent  comme  ils  veulent, 
du  côté  que  vient  le  vent  ou  la  pluie;  car  il 
ne  couvre  que  la  moitié  du  corps,  et  ne  des- 
cend que  jusqu'aux  genoux.  Leurs  souliers 
ne  sont  que  d'une  semelle  de  peau  de  bulflc 
qui  n'est  point  pré|iaréc  ,  et  celte  semelle 
s'attache  aux  pieds  avec  une  courroie  do 
même  peau  qu'on  lace  par-dessus  :  que'q'ies- 
uns  disent  qu'il  n'y  a  qu«^  les  religieux  qui 
portent  celte  espèce  de  veste  (1). 

L"on  ne  fait  pas  grande  cérémonie  pour  la 
réception  de  ces  religieux.  Leur  vocation 
vient  de  leurs  parents,  qui  les  consacrent 
dès  L'ur  enfance  en  leur  mettant  sur  la  tête 
une  calotte  noire  qui  leur  couvre  les  oreilles, 
leur  laissant  croître  les  cheveux,  leur  recom- 
mandant  de  s'abstenir  de  manger  de  la  viande, 
el  leur  disant  pour  toute  raison  qu'ils  sonl 
Bères.  C'est  ce  que  les  enfants  observent, 
sans  savoir  ce  que  c'est  que  d'êlre  Bères. 
On  les  donne  ensuite  à  d'autres  Bères  pour 
les  élever,  et  ceux  qui  les  donnent  à  des  moi- 
nes grecs  réussissent  mieux. 

Les  religieux  géorgiens  en  savent  un  peu 
plus  que  les  Mingréliens,  el  la  plupart  des 
chrétiens  de  la  Géorgie  sont  instruits  des 
ni) stères  du  christianisme  dans  les  monastè- 
res,oii  ils  apprennent  aussi  à  lire  el  à  écrire. 
Ces  religieux  sonl  habillés  comme  les  moines 
grecs,  el  se  disent,  aussi  bien  que  les  reli- 
gieux mingréliens,  de  l'ordre  de  Saint-Basile. 

Il  y  a  aussi  dans  la  Géorgie  et  la  Mingrélie 
des  religieuses.  Comme  les  Géorgiennes  sont 
estimées  les  plus  belles  femmes  de  l'Asie, dès 
qu'une  tille  est  un  peu  grande  on  tâche  de  la 
dérober,  et  d'ordinaire  elle  est  enlevée  par 
quelqu'un  de  ses  parcnis  qui  la  va  vendre  en 


f!<i7                                       niCTIONNAlIlE  DES  ORDRES  RELIGItLX.  998 

Turquie  ou  ei\  Perso.  CVsl  ce  qui  f.iil  qtie  mais  celles  qui  soiil  ;i  la  campagne  ne  sont 
les  pères  el mères  roiifcriniMit  (le  lioitne  lu  ure  p.is  plus  propres  que  les  é|;Iises  pnioissi.iUs 
leurs  filles  dans  lies  nuuinslères,  où  1.1  plupart  îles  Miii;;réliens.  Ceux  qui  dcmeurenl  en 
s'appliquent  à  l.i  Icrlurcel  jdenieureul  loulc  icrrc  ^ai^lc  sont  unis  et  obéissent  au  p.ilriar- 
!eur  vie.  L'on  (lit  qu';i(irès  1.1  profession,  lors-  clie  de  Jérusalem.  Us  ont  abandonné  les 
qu'elles  sont  p.ii»eiine>  à  un  certain  â^e,  saints  lieux  qu'ils  possédaient,  savoir  une 
elles  ont  permission  de  baptiser  et  même  des  cliapelles  balies  sur  le  mont  Calv.-iire, 
d'appliquer  les  saintes  bu  les  aus>.i  bien  dans  l'endroit  où  fut  plantée  la  croiv  de 
qu'un  évèque.  Leur  h  ibillement  est  sembla-  Noire-Seigneur  Jesus-Clirisi,  l.iqnellc  dia- 
ble à  celui  des  aulres  femmes  {léorgiennes,  j, elle  ils  jm  aient  oblenui' lorsque  l'empereur 
()ui  sont  loiilrs  liabillée>  à  la  persane.  La  i^olini.in  entra  dans  Jérusalem.  Ils  ont  aussi 
d.lTerelice  qu'il  y  a  enlrr  les  religieuses  et  les  (initié  b'  monastère  de  Sainte-Croix  qui  est  .i 
aulres  femmes ,  c'est  que  l'Iiabiliemenl  des  demi-lieue  de  Jérusalem,  dont  l'église  fut 
religieuses  est  noir,  ei  (|ii'ellcs  ont  un  voile  bàlie  a  l'endroit  où  fut  trouvée  la  vraie  croix, 
et  un  linge  (|im  leur  couvre  |iresqnc  tout  le  Ils  ont  laisse  ces  églises  en  gage  aux  Grecs, 
vis^!ge,  de  sorle  qu'on  ne  leur  \oit  qiie  les  (lui  avaient  payé  pour  eus  aux  Turcs  et  aux 
yenx,  selon  ce  qu' m'a  dit  un  ijrélic  géorgien  Juifs  des  sommes  ton-idérabics.  Parmi  les 
à  qui  je  ni'en  suis  informé;  ce  loile  estau-si  niunaslères  du  mont  .Mbos,  celui  qui  porte 
cunnnun  aux  aulres  femmes  pers mes  qui  en  le  nom  des  (léorgiens  est  destiné  pour  re- 
ontdc  différents  pour  la  uiaisonet  lorsqu'elles  cevoir  les  religieux  de  celle  naiiou,  el  le 
sortent,  y  en  ayant  même  qui  les  couvrent  patriarclie  de  Constantinople  envoie  souvent 
depuis  la  léle  jusqu'aux  pieds.  11  y  a  leau-  en  (îéorgie  des  caloyers  |)our  entretenir  le 
coup  plus  de  monasièrcs  de  lilbs  que  d'Iioni-  peuple  dans  le  scbismc  a\ec  le  pipe, 
mes,  (e  (|ui  f.iii  que  les  femmes  el  les  tilles  Le  cbevalier  Cbardin  et  Tavernier,  Voi/a- 
sonl  mieux  instruites  cl  savent  mieux  leur  ycs  du  l'erse.  \.c  \'.  Lnmheri'i.  dans  le  Recueil 
religion  (]iie  les  hommes.  de  Thrvenol,  et  dom  Joseph  Zampy,  Théalin, 

A   rega:d  des    religieuses   niingréliennes,  licUtlion  de  Miiigrelie. 

il  y  en  a  de  plusieurs  sortes.  Les  unes  sont  des  Au  dernier  siècle,   bs    moines  Melchiles 

(illcs  qui,  ayant   alleinl  l'âge   nubile,  ne  se  orientaux  avaient  à  Uuine  le  monastère  de 

«uucienl  pas  du  m.iriage.  Les  aulres  sont  des  Sainte-.Marie  in  IJumnicu.  Aujourd'hui   ils  y 

servantes  qi.i,  après  la  mort  de  leurs  niailres,  ont  encore  une  maison  gouvernée  par  le  ré- 

se  font  /?('»■£.<  avec  leurs  niailressis.  D'aulres  vérendissiaie  P.   Joseph  Ziegeb,  abbé  géné- 

si>nl  des  veuves  qui  ne  veiib  al  point  se  ma-  rai  et  procureur.                          B-ij-e. 

rier.  D'autres   sont   des  fema.es  qui,   après  MEKCl   (Uemgiel^e  de  ia).  Voyez  Mebci 

avoir  trop  goû;é  du  monde,  l'abandonncnl  (Ordre  de  l\). 

quand  elles  \ienni'nt  sur  l'à^e  et  qu'elles  se  »irc>/-i    ir,        ^  „..  .  .\  m 

^  •     ,       ...        i>.     ,              I    i'    r  Me.RCI    (OnDBE  de  i.a)    1  . 

voient   inej  rise.  s.  D  aulres  sont  des  femmes  i.n.i.^.    ^^v-                      ;  i    i 

répudiée-, cl  d'autres  enfin  se  font  religieuses  §  1".  Origine  de  l'ordre  de  yolre-Damc  de  la 

par  paiivrclé.  Celles-ci  demandent  r..uiiione  Merci  pour  la  rédemption  des  captifs,  avec 

dans  les  églises,  el  on  leur  donne  plus  libe-  la  Vie  de  saint  Pierre  .\olasque,  fondateur 

ralcrnenl,  en    considcralion    de    leur    b.iblt.  de  cet  ordre. 

Toutes  ces  religieuses  sont  vêtues  de  noir  à  11  y  a  deux  ordres  dans  l'Iîiilise  dont  la  (in 

la  jersane,  oui  la  léle  couverte  d'un  voile  de  principiile  est  de  délivrer  des  mains  des  inli- 

la    même  couleur  cl  ne  mangent  jamais  de  .ides    les    chrétiens  qui   gémissenl    sons    le 

viande.  Elles  ne  gardent  (las  la  cb'>lure  et  ne  jo.jg  d'une  dure  captivité  :  l'un  est  celui  des 

sont  pas  engagées  pour  toujours  à  la  vie  mo-  l'rinitaires,  dont  nous  parlerons  en  son  lieu, 

naslMioe,  mais  elles  la  peuvent  4iuii;cr  quand  (;i    l'.iulrc    est   celui   de    Noire-Dame    de    la 

il  leur  pl.iii.  jMerci  ,  dont  nous  allons  parler.  Le  premier 

P.irmi    les   Mingrclicns,  il    n'y   a    que    les  a    l'.ivant.ige    d'avoir    eu   Dieu    même    pour 

églies  c.iihédrales,  celles  des  abbayes  el  cel-  fondateur,  qui  ,  par  des  visions  el  des  signes 

les  des  lièris  ()ui  soient  un  peu  propres,  les  niiraeuleux,  a    fait    connaiire    ses    volontés 

églises  paroissi.iles  étant  plus   sales  que  des  dims   rélaldissemcnl    de   ci'l  ordre  ,   auquel 

.(.■labiés.  Les  ornements  sacerd  ilaux  des  évé-  toutes  It^s  personnes  de  la  sainte  Trinité  oui 

qucs  el  des  Itères  sont  aussi  assez   propres,  eu   part:  c'est  pourquoi  il    a  pris  le  nom  de 

élant  de  soie  el  brodés  d'or;   mais  ceux  des  la   s.iiui.-  Trinité.   Mais   ce  l'ère  des  miséri- 

prères  séculiers,  qu'on  ajipelle  p.ipas,  n'ont  eordes  a  voulu  ausai  qu'il  V  en   eûl  un  sous 

aucuni-  ap|)arence,  le  jilus  souvent,  d'b.ibil-  [^.  nom  de  la  très-sainle   Vierge,  qui   appa- 

Icments  sacerdotaux,  leur  pauvreté  les  obli-  ^ul  à    saint    Pierre    Nolasuue,    Français   de 

geanlà  seservir  de  qiielquegncnilledécbirée  nalioii  ,    |a)ur  lui  faire  exeeuler  celle  (iilre- 

eii  guise  de  pluvial.  Il  y  en  a  inèmeplusii-iirs  pri>e.li'cst  |)Our(|uoi  l.i  France  se  do  t  glori- 

<iui  diseiil  la  messe  avec  une  simple  chemise  li,.,-  (]';,voir  fourni   à  l'Kglise  les  saints  |  er- 

<!e  tuile  (|u'ils  mellcnl  sur  leurs  babils:  aus-i  ionnages  doiil  Dieu  s'est  seivi  pour  exeeuler 

le   peupb;  n'a-l-il  guère  de  dévotion  à  leurs  si:r  la  terre  ce  qui   avait  éle   projeté  dans  le 

i:i.  sses.  On  a  plus  de  respecl  pour  la  messe  <  jfl,  en  dioisissanl  saint  Jean  de  .Mallia,   cl 

des  lières,  (|ni  ont  d.ins  leurs  églises,  en  fort  s.iinl  Félix  de    Valois    pour    l'elablisscnenl 

biin   élal,   les   choses  requises  pour  la  celé-  d,;  l'ordre   des    Trinilaires ,  el  sainl    l'ieir« 

hrer.   Les    (iéorgiens    enlreliennenl    assez  N.dasque  pour   l'établissement  de    celui  de 

bien   leurs  églises  qui  soiil  dans  les  villes  ;  Notre-Dame  de  la  .Merci 

(1;   lui/,    il  U  lin  du  vul.,  Icî  11'     2Ji  à  1^.<. 


«20 


MEIi 


Mf;p. 


^'(^ 


Sainl  Pieiro  ,  suriioinuuî  Nol.isqiio  du  nom 
de  son  père,  iiaquii  au  pays  de  Laiir  iguais, 
en  Languedoc,  vers  l'.m  1189,  dans  un  iioiirg 
dudioièse  de  Saiiil-Papoiil ,  appelé  /e  I\l:is 
lies  santés  Puetles,  à  une  lieue  de  Casleliiau- 
(iary.  Il  fut  élevé  dès  sa  jeunesse  dans  tous 
les  exercices  de  la  noblesse,  étant  sorti 
d'une  des  plus  illustres  fainillcs  de  tou  e  la 
province;  el  ajaiil  perdu  son  père  à  l'âiiedc 
quinze  ans,  il  demeura  sous  la  lulclle  de  sa 
mère,  qui  eût  bien  voulu  l'engager  au  ma- 
riage, en  lui  t'.iisaiil  prendre  un  parti  conve- 
nable à  sa  condition  ,  alin  de  trouver  du 
support  el  de  la  consolation  dans  ce  soutien 
de  sa  famille.  Mais  Pierre,  inspiré  de  Dieu, 
n'avait  déjà  que  du  mépris  pour  les  choses 
do  la  terre  ,  et  avait  pris  la  résolution  de  ne 
s'attacher  qu'à  Dieu.  Il  s'engagea  néanmoins 
à  la  suite  de  Simon,  comte  de  MoiiIVrl, 
d  ins  le  même  ten'ps  que  Pierre  II,  roi  d'A- 
ragon ,  se  voyant  attaqué  de  tous  les  côiés 
par  ses  ennemis,  confia  ie  prince  Jacques  , 
son  fils  et  héritier  presomplil",  à  ce  même 
comte,  afin  (ju'il  lui  donnât  asile  {tendant 
les  troubles  de  la  guerre.  Le  comt:\  s'esti- 
iuani  honoré  de  la  conduite  du  petit  prince, 
jeta  les  yeux  sur  Noiasque  pour  avoir  soin 
lie  son  éducation  et  lui  servir  de  gouverneur. 
Mais  ce  prince,  qui  avait  é!é  d'aiiord  le  gage 
de  l'estime  que  le  roi  d'Aragon  taisait  de  1  i 
personne  du  comte  de  Moutlort,  servit  peu 
de  temps  après  de  sûreté  à  ce  méuie  comt;' , 
contre  la  periidie  du  roi  so:i  père,  qui,  s'é- 
tant  ligué  avec  les  comtis  de  Toulouse,  de 
Foix  et  de  Cominge,  cliels  deshérétiquesal!.!- 
geois,  vint  assiéger,  l'an  1213,  la  petite  ville 
de  Muret  sur  la  Garonne  av;  c  une  armée  de 
cent  mille  hommes,  et  même  de  deux  cent 
mille,  SL'Ion  quelques  hisloriens.  Ce  grand 
nombre  néanmoins  n'étonna  p;is  le  brave 
comte  de  Montlort ,  qui,  n'ayant  au  plus 
que  douze  cents  hommes,  ne  craignit  point 
d'attaquer  ses  ennemis,  qu'il  mit  eu  déruutf, 
et  gagna  cotte  fameuse  l)atailie  de  Muret  où 
le  loi  d'Aragon  fut  tué.  Ainsi  ce  prince,  qui 
quelques  mois  auparavant  avait  lui-même 
remporté  une  victoire  signa'ée  sur  les  Sar- 
rasins, dont  cent  mille  étaient  restés  couchés 
sur  le  champ  de  bataille  ,  et  qui  quelques 
jours  après  en  avait  encore  battu  plus  de 
cinquante  mille,  ne  put  résisler  à  une  peti- 
te armée  de  mille  à  douze  cents  hommes  qui 
combattaient  pour  la  défense  de  l'Eglise. 

Le  comie  de  Aiontfort,  qui  d'ailleurs  avait 
toujours  été  ami  du  roi  d'Aragon  ,  ne  put 
s'empêciier  de  verser  des  larmes  sur  le  corps 
de  ce  prince.  Quelques  historiens  ont  avancé 
(|ue  ce  ne  lut  qu'après  la  mort  de  cet  iolor- 
luné  roi  que  le  comte  de  iMontfort ,  qui  avait 
compassion  de  la  faiblesse  el  de  la  minorité 
du  roi  Jacques  son  (ils,  âgé  de  six  à  s.pt  ..n-, 
qu'il  retenait  prisonnier  à  Carcassonne,  lui 
donna  Pierre  Noiasque  pour  gouverneur. 
Mais  que  ce  soit  avant  ou  après  la  mort  de 
ce  prmci',  il  est  certain  qu'il  eut  la  conduite 
de  ce  jeune  roi,  et  qu'il  le  suivit  à  Barce- 
lone lorsque  le  comte  de  Montlort  lui  eut 
rendu  la  liberté  l'an  1215.  il  tâcha  de  lui  ins- 
pirer la  j)iétc  envers  Dieu   el  son  Kglie, 


l'imour  de  la  justice  et  de  la  vérité,  et  de 
l'accoutumer  à  toutes  les  pratiqurs  convo - 
riables  à  un  prince  chrélien.  P.tur  lui,  ni  les 
divertissements  de  la  cour,  ni  les  fivi'urs  de 
son  prince,  ne  l'empéchèienl  (a^  de  s'appli- 
quer aux  pratiques  de  la  morli(ic;itioii  et  de 
la  prière.  Il  avait  quatre  heures  d'oraison 
ni  irquées  dans  le  jour,  el  deux  la  nuit.  Il 
s'occupait  aussi  à  la  lecture  de  l'Ivcrilura 
sainte,  et  donnait  aux  exercices  de  la  péni- 
tence le  temps  qu'il  n'était  pas  ob  ii;é  d'cni- 
l)'oyer  aupiès  du  roi.  Il  se  senti!  dès  lors  si 
vivement  touché  de  compassion  pour  les 
pauvres  chrétiens  iiui  étaient  captifs  sous  la 
puissance  des  M.iur(!s  el  des  baitiares,  qu'il 
résolut  de  sacrifier  ses  biens  à  leur  déli- 
vrance. 

-Mais  quel  fut  son  étonm  ment  et  sa  sur- 
prise,  lorsque,  dans  le  temps  (lu'il  prenait 
les  mesures  nécessaires  pour  exécuter  cet'e 
œuvre  de  miséricoide,  la  sainte  Vierge  lui 
apparut,  la  nuit  du  prem  er  jour  d'août  1218, 
pour  lui  dire  que  c'était  la  vulonté  de  liieu 
qu'il  Iravaillâl  à  l'élablissemont  d'un  ordre 
dont  les  religieux  s'obligeraient  par  vœu 
particulier  de  s'employer  au  rachat  des  cap- 
tifs 1  (Jomme  il  ne  faisait  rien  sans  consulter 
s;:inl  Uaymond  de  l'égnal'oit,  son  confesseur, 
qui  n'était  encore  que  chanoine  de  Barcelone, 
il  le  fui  trouver  j)our  lui  communii|uer  cetia 
vision.  Sa  surprise  aoginenla  loisiu'il  apprit 
de  ce  sainl  (|u'il  avait  eu  la  même  vision,  et 
que  11  saints  Vierge  lui  avait  ordonné  de  le 
fuiiifier  dans  ce  dessein.  Ainsi,  ne  doutant 
poi:il  (jue  ce  ne  lui  la  volonté  de  Dieu,  il  lui 
ren  il  grâces  de  l'avoir  ch'.isi  po.ir  être  l'ins- 
trumoatile  ce  grand  dessein,  il  le  jiria  d'ôler 
tous  les  obstacles  qui  pourraient  eu  empê- 
cher l'exécution,  el  de  d  uiipter  tout  ce  (]ui 
pov  fiait  y  apporter  de  la  résistance.  Dès 
lars  ces  deux  saints  ne  songèrent  plus  qu'aux 
moyens  d'en  procurer  rcir.t:  mais  comme  il 
fallait  le  constiitemenl  du  roi  et  de  l'évèque, 
ils  allé" eut  trouver  d'abord  le  roi,  qui  !-es 
écoula  avec  joie,  el  ne  pouvant  contenir  la 
satisfaction  qu'il  ressentait  de  voir  l'explica- 
tion de  la  vision  qu'il  avait  eue  comme  eux 
la  même  nuit,  il  offrit  de  contribuer  à  cette 
sainte  entreprise  par  son  au'orité  et  ses  lilié- 
ralités  :  il  se  chargea  même  de  faire  agréer 
ce  nouvel  établissement  à  l'évèque  de  Barce- 
lone, Berenger  de  la  Palu,  qu'il  envoya  eu 
même  temps  prier  de  se  rendre  au  palais. 
Ils  conléièrent  ensemble  sur  l'apparition  de 
la  sainte  Vierge  et  sur  les  ordres  exprès 
qu'elle  leur  avait  donnés  à  tous  trois  sépa- 
I  émeut.  L'évèque  trouva  de  la  diflicullé  dans 
la  fonilal;oii  de  cet  ordr',  à  cause  que  le 
concile  de  Latran  avait  défendu,  il  n'y  avait 
pas  longtemps,  qu'on  n'établit  aucun  ordre  re- 
ligieux sans  l'approbaiion  et  le  consente- 
ment du  sainl-siege;  mais,  prévoyant  d'ail- 
leurs la  grande  utilité  qui  en  rc  viendrait  à 
riîglise,  il  y  consentit,  et  crut  qu'en  celte 
occas.on  on  pourrait  se  servir  d'un  induit 
que  les  papes  tirégoire  Vil  et  Urbain  H 
avaient  accoi  dé  au  roi  dom  Sanche  pour  lui 
et  pour  ses  successeurs,  en  considération  des 
grands  ser\iccs  que  ce  prince  avait  rendus  a 


M 


WCTlON.NAlliF,  DFS  ORDRES  llF.LKilFXX. 


l'Kgliso,  en  vertu  duquel  ils  pouv.iienl  ériger 
dans  luule  l'ctcniiue  de  leurs  l'ilals  des  pa- 
roisses, des  confréries  ,  des  rnoiiaslôres  el 
inéine  des  ordres  religieux,  sans  qu  il  fiil 
besoin  de  ronsuller  le  sainl-siégc. 

Dès  l'an  llD'i,  i)lusieurs  penlilshommes 
dc-i  premières  familles  de  Calalo^ne,  exeilés 
par  rcxemjdi' (11' (]ui"l(]ues  personnes  pieuses 
qui  eniplojaii'iil  leurs  soins  el  leurs  biens  à 
des  œuvres  de  charilc  el  à  raclieler  des  es- 
claves eliréliens  ,  fornièrenl  entre  eux  une 
rongrégalion  que  le  roi  Alphonse  V  appelait 
ordiiiaireuienl  son  ouvrage,  non-seuiein  int 
pour  en  avo  r  permis  rétablissement,  mais 
pour  y  avoir  donné  des  fonds  considérables, 
pour  contribuer  avec  eux  au  secouis  des 
chrétiens  qui  et  lient  capiifs  chez  les  Maures, 
ou  rcduiis  à  la  nécessité.  L'occupation  de 
ces  gentilshommes  était  de  servir  les  malades 
dans  les  hôpitaux,  de  vi^iter  les  prisonniers, 
de  procurer  des  aumônes  pour  le  rachat  des 
chreiiens,  et  de  garder  les  cotes  de  la  Médi- 
terranée pour  s'opposer  aux  descentes  des 
M.iurcs  cl  des  Sarrasins. 

La  [ilus  grande  partie  de  ces  gcntilhom- 
ines  cmbrasscrenl  d'autant  plus  volonlieis 
le  nouvel  ordre  delà  Merci  avec  saint  Pierre 
Noiasque,  qu'ils  se  sentaient  portés  à  conti- 
nuer ces  œuvres  de  miséricorde  qui  en 
étaient  la  lin.  Quelques  prêtres  qui  étaient 
agrégés  à  celle  congrégation,  dans  laquelle 
ilss'eiaient  rendus  recouimand^bles  parleurs 
exercices  de  charité,  sollicitèrent  aussi  saint 
Pierre  Noiasque  de  les  recevoir,  ce  qu'il  lit 
par  le  conseil  de  saint  llajinond  de  l'égna- 
i'orl,  qui  lui  représenta  que  la  perfection  de 
l'état  religieux  consistait  dans  l'union  insé- 
parable des  exercices  de  la  vie  aetive  et  de 
la  contemplative,  l'un  regardant  le  service 
de  Dieu,  l'autre  celui  du  prochain.  Saint 
l'ierre  Noiasque  admit  avec  joie  ces  vertueuv 
prêtres,  qui  composèrent  avec  les  Chevaliers 
l'ordre  de  Notre-Dame  de  la  Merci,  lequel 
fut  d'abord  institué  en  qualité  d'ordre  mili- 
taire; car  les  laïques  qui  s'y  cngageaienl 
taisaient  profession  d  •  delendrc  la  foi  les  ai- 
mes à  la  main,  et  de  s'opposer  aux  courses 
des  Maures. 

Le  jour  de  saint  Laurent  fut  destiné  pour 
faire  la  cérémonie  de  rinslitulion  de  cel  or- 
dre. Le  roi,  accompagné  de  tonte  sa  cour  et 
des  échevins  de  la  ville  de  Itarcelone,  se  ren- 
dit dans  l'église  cathédrale,  appelée  Sainte- 
Croix  (le  Jérusalem.  L'évèijue  itérenger  ofii- 
cia  ponliiiualement.  Saint  Uaymond  monta 
en  chaire,  el  après  l'évangile  il  i)rotesla  de- 
vant tout  le  peuple  que  Dieu  avait  révélé  mi- 
raculeusement au  roi,  à  l'ierre  Noiasque  et  à 
lui-même  sa  volonté  louchant  l'inslitulioii  de 
l'ordre  de  Noire-Uame  tie  la  Merci  pour  la  re- 
dem]ilion  des  captifs.  A  l'issuede  l'ollrande,  le 
roi  et  saint  Uaymond  présentèrent  le  nouveau 
londatetir  à  l'évéque,  qui  le  ie\ élit  de  l'habit 
de  l'oriire.  Saint  l'ierre  Noiasque,  apiès  l'a- 
voir reçu,  le  donna  connie  principal  londa- 
lenrà  treize  genlilsliumme-,  ()ui  fiireiil  (îuil- 
lauiue  de  lias,  seigneur  de  Montpellier  , 
Arn.iud  de  Carcassonne,  lils  de  la  vicomlcs>c 
dcNarbouiie,  son  cousin,  lîernard  de  Corbare, 


Uaymond  de  Montiolou,  Uaymond  île  Mon- 
cada,  Pierre  Ciuillaunie  de  Cervelon,  Domi- 
nique d'Os-o,  Uaymond  d'Ulrecht,  (îuillau- 
me  de  Saint-Julien,  Hugues  de  Mallia.  Uer- 
nard  d'Es'-om.e,  Ponc("sS  .lares,  et  Uaymont^ 
Blancs,  tous  ihcvaLers  ou  confrères  de  la 
congrégation  de  Noire-Datiie  de  Miséricorde, 
qui,  outre  les  trois  vieux  (udinaires,  en  llrent 
aussi  un  qualriènie, aussi  bien  que  saint  Pierre 
Noiasque.  par  lequel  ils  s'obligeaient  d  eiii^a- 
gerleur  propres  per-.onnrs,  et  de  demeureren 
captivité,  s'il  était  nécessaire,  pour  la  déli- 
vrance des  captifs. 

Comme  ils  étaient  six  prêtres  et  sept  che- 
valiers, leurs  babils  furent  dilTèrenls.  Ceui 
des  prêtres  consistait  en  une  tunique  ou  sou- 
tane blanche,  avec  un  scipulaire  et  uni- 
chape  :  celui  des  chevaliers  élail  b'.anc.iussi, 
mais  purement  séculi.  r,  à  la  réserve  d'un 
petit  scapulaire  qu'ils  metiaient  sur  leur  ba- 
bil. Le  roi,  pour  témoigner  son  amitié  à  ces 
nouveaux  religieux,  et  leur  donner  des  mar- 
ques de  sa  proieclion,  voulut  qu'ils  po  las- 
sent sur  leur  scapulaire  l'écusson  de  ses 
armes,  qui  étaient  de  gueules  à  trois  pales 
d'or,  auxquelles  il  ajouta  en  chef  une  croix 
d'argent,  p.iur  marquer  le  lieu  de  la  naissance 
de  ces  religieux,  qui  étaient  presque  tous 
Franc  lis,  à  cause  qu'ils  portaient  aupar.ivant 
cette  croix  dans  leurs  étendards,  selon  la  re- 
marque de  quelques  historiins,  qui  assurent 
quelesFrançais  qui  coinbatlaienl  en  U-p.igno 
contre  les  Maures  portaient  une  iroii 
blanche  dans  leurs  drapeaux,  pour  se  distin- 
guer des  Espagnols.  (Juelques-uns  ont  néan- 
moins prétendu  que  celle  croix  leur  fui  don- 
née par  l'évéque  Uérenger  de  la  Palhi  . 
comme  étant  les  armes  de  son  église  qu'il 
avait  voulu  joindre  à  celles  du  roi. 

La  messe  étant  achevée,  ce  pr.nce  condui- 
sit saint  Pierre  Noiasque  avec  ses  reli- 
gieux à  son  palais,  dans  le  quartier  qu'il 
leur  avait  fait  préparer  pour  leur  servir  de 
monastère,  qui  a  été  le  premier  de  l'ordre,  où 
ils  gardèrent  csactcmenl  l.i  manière  de  vie 
(;ue  saint  Uaymo ..d  leur  prescrivit,  en  atlen  - 
d:;nt  que  le  saint-siège  leur  eût  déterminé 
une  règle  particulière,  et  ils  obéirent  à  sainl 
Pierre  Noiasque,  que  le  bienheureux  Uay- 
mond eiablil  aussi  gr.uid  commandeur.  La 
chapclledu  roi  d'Aragon,  dédiée  à  sainte  liu- 
lalie,  leur  servit  d'église,  qu'ils  possèdent  en- 
core à  présent,  le  supérieur  de  ce  monastèie 
ayant  la  qualité  de  vicaire  de  la  cour,  et  les 
religieux  celle  de  chapelains  du  roi. 

Ces  religieux  s'employèrent  d'abord  à  ra- 
cheter quelques  captifs,  cl  ne  sortaient  pas 
pour  cela  des  terres  sujettes  aux  princes 
chrétiens.  Mais  s;iint  Pierre  Noiasque  leur 
représenta  que,  pour  la  perleeiion  de  leur 
ordre,  il  lallait  encore  p.tsser  chez  les  inlidè- 
les,  et  délivrer  leurs  frères  de  la  cruelle 
servitude  de  leurs  ennemis,  au  danger  même 
d'y  deiniurer  en  esclavage  en  leur  place, 
suivant  le  vieu  qu'ils  en  avaient  fait  au 
pied  des  autels.  Il  ne  s'agissait  pas  d'y  aller 
lous  à  la  lois,  mais  de  dépuli  r  un  d'enlio 
eux  pour  ces  saintes  négociations  ,  (piou 
appela  dès  lors,  conwne  on   les   appelle   eu- 


^-^  Mi:n 

corc  à  présiîiil,  ré  Icinploi'.i's.  Il  fut  liii- 
in<^ine  rhoisi  avec  >iii  s'^cond  pour  fraypr 
;iux  autres  le  chemin  d'un  voyage  si  p;'- 
rillcnx.  1-e  premier  qu'il  fil  nu  royau- 
me de  Valence  ,  occi^pé  pour  lors  par  les 
S.irrasins,  fui  fort  Iicimtux.  Il  en  fit  un  se- 
cond au  royaume  de  Grenade,  (lui  ne  le 
fut  pas  moins,  de  soitc  qu'il  relira  quatie 
cents  esclaves  d'enlre  les  mains  des  inlidcies 
en  ces  deux  expédiiions. 

r,cs  heureux  comm 'ncemcnts  donnèrent 
(|nel(]uc  répulali  n  à  l'ordre  de  la  Merci. 
(Quoique  le  papi;  rîonorius  III  l'eiit  .ipjirouvé 
de  vive  voix,  saint  Pierre  NolaS(iui!  jugea  à 
propos  d'tu  poursuivre  la  confirmation,  et 
pour  l'oblenir  il  employa  le  nédil  de  saint 
Hayniond,  qui  allait  à  Home  où  le  pape  Gré- 
goire l\  l'avait  appelé.  Ce  saint  accepta  vo- 
lontiers celte  commission,  el  trouva  le  pape 
à  Pérouse  le  l"  décembre  1229,  auquel  il 
présenta  les  frères  Arnaud  d'Aymeri  el 
Bernard  de  Corbaro,  que  saint  l'ierre  No- 
lasque  avait  envoyés  pour  solliciter  celle 
confirmation  ;  le  premier  représentait  les 
chevaliers,  el  l'autre  les  prêtres  de  cet  ordre. 
Ils  obtinrent  du  souverain  pontife,  l'an  1230, 
ce  qu'ils  souhaitaient,  après  quoi  ils  se  mi- 
rent en  chimin  pour  retourner  en  Caialogne. 

L'ordre  s'augmenlant  de  jour  en  jour,  et 
les  fréquentes  rédemptions,  jointes  à  la  vie 
exemplaire  des  religieux,  le  rendant  Irès- 
célèhre,  plusieurs  gentilhomin:'S  de  France, 
d'Allemagne,  d'Espagne,  d'Aiiiîielerre  el  de 
Hongrie,  embrassèrent  cet  institut.  Leur 
nombre  fut  si  grand,  que  sainl  Pierre  No- 
lasque,  qui  souhaitait  depuis  longicmps  sor- 
tir du  palais  où  le  roi  lui  avait  fait  l'honneur 
de  le  loger  avec  ses  religieux,  prit  occasion 
de  leur  proposer  la  nécessité  où  ils  étaient 
de  bâtir  un  couvent  régulier  où  ils  pussent 
vivre  dans  une  plus  grande  récolleclion,  et 
vaquer  avec  plus  d'application  à  leur  pro- 
fession. C'est  ce  (jui  fit  qu'ils  bâlireiil,  l'an 
12i2,  un  couvent  magnifique  par  les  libéia- 
lilés  du  roi,  par  les  aumônes  île  quelques 
seigneurs  de  la  cour  el  par  celles  du  peuple 
de  liaicclone;  c'est  ce  couvent  (]ui  est  le  ch'f 
de  leur  ordre  ,  et  qui  fut  dédié  à  sainte 
Eiilalie,  vierge  el  martyre,  patronne  de  la 
ville  de  Barcelone. 

Jusque-là  ils  n'avaient  vécu  que  confor- 
mément aux  règlements  el  aux  statuts  qui 
leur  avaient  été  procrils  par  saint  Raymond 
de  Pégnafort,  qui  peut  passer  pour  le  second 
fondateur  de  cet  ordre,  ce  qui  dura  jusqu'en 
l'an  1235,  que,  souhaitant  joindre  à  ces  règle- 
ments une  des  règles  approuvées  par  riîglise, 
saint  Pierre  Nolasque  envoya  sainl  Kaymond 
Nonat  à  Home  en  qualité  de  procureur  géné- 
ral de  l'ordre,  pour  en  obtenir  une  du  pape 
Grégoire  IX,  que  ce  saint  trouva  encore  à 
Pérouse,  el  qui  leur  accorda  celle  de  saint 
Au;;ustin  par  une  bulle  daiée  du  8  janvier 
1235,  en  confirmant  derechef  cet  ordre. 

Saint-  Pierre  Nolasque,  ayant  reçu  celle 
bulle,  fil  faire  de  nouveau  profession  aut 
relig'eux  qui  se  trouvaient  au  couvent,  eu 
faisant  vœu  de  gauler  la  règle  dt  saint  Au- 
gustin, se  conlenual  de  fLiire  savoir  à  ceux. 


qui  étaienl  dispersés  dans  pliisieiiis  provin- 
ces la  confirttialion   auihciilique  do  l'ordre, 
et  qu'ils  eussent  à  observer  la  règle  de  saint 
Augustin  qui   leur   avait  été   donnée  par  le 
paiie,  avec  les  c  lustiiulions  qui  leur  avaient 
été  prescriles  par  saint  H  lyin  )ad  de  Pégna- 
fort. Mais  deux  ans  après    il  jugea  à  propos 
de  rassembler  tous  les  religieux  à  lî.uceloiifi 
pour  recevoir  la   [irofes^ion   de  (eux   qui  ne 
l'avaient  |)as  renouvelée.  Ce   fui   donc,  dans 
ce   chapitre  général,  qui  se  lint  l'an    1237, 
qu'il  fut  oidonn.'  qu'>»M  recvr.iil  p'us  de  re- 
ligieux   pour   le    chirur  que  de   chevaliers. 
Comme   ces   derniers   et. lient   véritablement 
rel  gieux  et  eiigaés  par  vani,  ils  assistaient 
à  tout  l'office  d  vin,  tant  de  jour  que  de  nuit. 
Lorsqu'ils  restaient  au  couvent,  ils  mettaient 
par-dessus  leur  habit,  qui  était  semblable  à 
celui  des  séculiers,  à  la  réserve  du  scapu- 
lairc,  une  chape  comme  les  religieux  prêtres. 
Les    historiens  de  cet  ordre   prétendent  que 
celle  crdoniance  du  chapiire  donna  lieu  à 
saiit  Pierre  Nolasque  d'exécuter  la  résolu- 
tion qu'il  avait  prise  depuis  longtemps  de  se 
faire    [iréire,   et    qu'il  célébra    sa    première 
messe  à  Murcie,  après   que   le   roi    Jacques 
d'Aragon  en  eut  chassé  les  Maures.  Ce  sen- 
timent a   élé   suivi   par   le  P.  Giry,    Minime 
(  i' les  des  suints  ),  pour  les   raisons  qu'en  a 
données  le  P.  Mue  Salmeron,  général  de  cet 
ordre,  qu'il  a  trouvées  convaincantes  :  c'est 
néanmoins  ce  qui  a  persuadé  M.  Uaillel  (t  les 
(/«<  suintx)  que  ce  saint   n'a  pas  élé  préire, 
parce  que  le  roi  d'Aragon  ne  prit  cette  vil'e 
que  l'an  12IJ6,  c'esl-à-dire  dix  ans  au  moins 
après  II   mort  de   notre   sainl,  qu'il   met   en 
125G.    Mais   cj    n'est  point   celle   raison  de 
M.  H  illet  qui   me  détermine   aussi  à  croire 
que  sailli  P. erre  Notas  lue  n'a  pas  été  prêtre, 
parce  que  ce   saint   aurait   pu   célébrer  la 
mess  •    d.iiis  Murcie   dès   l'an   12'il,   lor-que 
(Ion  Ferdinand,  roi  de  Castille,  par   le  Ir  lité 
(lu'il  fil  avec  Alboaquis,  ou,  sebin  quel(|ues- 
uns,  Aben-Hudiol,  loi  de  Murce,   l'une  des 
coiiditi  MIS  fut  que  ce  prince  maure  demeu- 
rerait v  issal  du  roi  de  Castille,  que  les  re- 
venus de  ce  royaume  seraient  partagés  éga- 
lemeni,  et  que  la  lorleresse  de  Murcie  serait 
livrée  à   l'infant  don   Alphonse,  ce  qui   fut 
exécuté.  Ce  qui  me  convainc  donc  que  sainl 
Pierre   Nolasque   n'a   point    été  prêtre,  c'est 
que,  comme  l'ordre  de  la  Merci  a  élé  un  or- 
dre militaire  dans  le  commencement,  il  a  été 
gouverné  par  des  commandeurs  la'i'qucs,  el 
l'autorité  a  toujours  élé  entre   les  mains  des 
chevaliers  jusqu'en  l'an  1317,  que  le  P.  Kay- 
mond Alberi,  huitième  général,  fut  le  pre- 
mier général  prêtre  :  d'où  je  conclus  que  si 
saint  Pieire  Nolasque  avait   été  p. être,   el 
étant  prêtre  avait  gouverné  l'ordre  en  qua- 
lité do  général,  les  chevaliers  la'jques  n'au- 
raient pas   regarde  comme   une  nouveauté 
l'élection  que  firent  les  prêtres,  dès  l'an  1308, 
après  la  mort  d'Arnaud  d'Aymeri,  sixième 
général,   de  la    personne   de    ce    Kaymond 
Albert  p  ur  lui  succéder,  et   ils    n'auraient 
pas   refusé  de  lui  obéir   en  élisant  de   leur 
côté   Arnaud   P»ossignol ,   chevalier   laïque; 
et  le  [lape  Clémeul  V,  qui   cassa   l'élection 


95r.                             nic.ri;>N.N.viu;.  Dr.s  oiuinKs  m;i,u;ii:L\.  ^^'"' 

(le  ce  dernier,  comnip  n'élanl  pns  cnnoiii-  osrlnvps  chr6liens,  on  le  cliaigea  de  chaînes, 
que  ,  ne  l'oûl  pas  rcl;i'ili  romin.indour  pé-  on  le  lit  coinparaitrc  en  juslic  ,  comme  un 
lierai  de  loul  l'ordre  p.ir  autorité  apo>to-  voleur,  un  séducteur  et  l'auteur  de  la  fuite 
liijue,  s'il  y  a^ail  eu  jusntie-li  un  exemple  dos  esilaves.  Le  cadi  ou  juge,  ne  trouvjint 
de  quel(]ue  piéire  qui  eût  été  général,  et  il  néanmoins  aucune  prouve  contre  lui,  n'osa 
n'aurait  pas  manqué  d'approuver  l'élection  le  conilamner  ;  m  lis  notre  safnt  fondateur, 
d(!  Haymoiiil  Albcrl,  qui  était  faite  selon  les  désirant  de  souffrir  et  craisiianl  qu'on  ne  lit 
formes  par  le  (lus  grand  nombre  des  caiiilu-  quelques  mauvais  traitements  aux  autres 
lanls.  Mais  le  défaut  que  ce  pape  y  trouva  capliN  à  cetle  occasion,  s'offrit  délie  esclave 
apparemment,  c'est  qu'on  avait  choisi  un  à  la  place  des  fugitifs.  Leur  maître,  égale- 
pi  cire  contre  la  c>utnme  de  l'ordre,  et  sans  ment  avare  el  artificieux,  voulant  avoir  do 
en  avoir  consulté  le  sainl-siége;  c'est  pour-  l'aigent  el  se  venger,  aima  mieux  retenir  le 
quoi  il  élablil  pour  gênerai  un  chevalier,  cl  religieux  qui  acionipagiiail  saint  l'iene  No- 
il  ordonna  en  même  temps  que,  comme  les  lasque,  lémoiguaiit  vouloir  envojer  le  sai:  l 
prêtres  claienl  eu  jilus  grand  nombre,  on  en  Lspagne  pour  f.iire  la  somme  qu'il  e\i- 
élirait  à  ra\enir  un  prclre  pour  jiénéral,  geail.  Il  lit  meUre  deux  t;irtanes  en  mer,  dans 
après  la  mort  d'Arnaud  K"Ssi|itiol.  l'une  desquelles  qui  faisait  eau  de  tous  cotes. 
Le  chapitre  généra'  que  saint  Pi  rre  No-  il  le  lit  embarquer,  avec  ordre  aux  matelots 
lasque  avait  coiivi;que  à  IJarcelonc  l'an  1237,  que,  dès  qu'ils  seraieni  en  pleine  mer,  iis 
roMimc  nous  aviins  dit,  ayant  été  termine,  ahandunnassenl  la  larlane  sans  voile  ni  gou- 
il  aurait  bien  voulu  eonlinuer  ses  cliarita-  vernail,  el  qu'au  retour  ils  feignissent  «lui' 
Ides  fonctions  de  lé.lempleur;  mais  comme  la  tempête  avait  perdu  le  bàliment  ou  était  le 
le  roi  d'Aragon,  aiirès  la  conquête  de  .Major-  chrétien.  Ci  l  ordre  fut  cxecuie,  mais  non 
que  sur  les  infidèles,  porta  ses  armes  d.nis  pas  avec  le  même  succès  que  préiendail  le 
le  royaume  de  Valence,  l'interdiction  du  b.irhare;  car  Dieu  garantit  saint  Piei  re  No- 
comnii  rce  et  les  actes  d'hostilités  de  part  et  lasque  du  naufrage,  elle  lil  lieureusemenl 
d'autre  conlraignirenl  saint  P. erre  Nolas ;|i:e  abordi-r  à  Valence,  lui  ayanl  servi  de  guide 
d'interrompre    ces   pieux    exercices    d   rant  dans  le  chemin. 

quelque  leu'ps.  Cependant  cela  ne  laissa  pas  Etant  arrive  à  liareelonc,  il  se  démit  de  l'of- 
d'elre  avantageux  à  la  rcdeniplion  des  cap-  fice  de  rédempeur,  qui,  comme   nous  avons 
lifs,  tanl  par  les   victoires  fréquentes  cl  si-  dit,  était   le  nom   qu  on  donnait  à  ceux   qui 
gnalées  que  le  roi  d'Aragon  remporta  sur  les  élaienl  dépuiés  pour  aller  chez   les   infidèles 
infidèles,  que  par  l.i   fondation  de  plusieurs  racheter  les   capiifs,   cl   ayanl  as.semblé  les 
monastères  de  l'ordre  qu'il  fil  dans  les  pays  principauv. lie  l'ordre,  on  procéda  à  l'éleclion 
conquis,  llluidnnnalecliâteaud'ljiiéza, eu  re-  d'un  autre   rédempteur.   Le  sort   tomba   sur 
connaissante  de  la  vliloire  qu'il  avait  plu  à  Guillaume  de  lias,  qui,  l'an  l:iV),  lui   aussi 
Dieu  de  lui  faire  rem|iorter  sur  les  ie.fidèles,  élu  général  de   l'ordre,   lorsijue  sainl  l'icne 
el  il  y  lit  bàlir  un  beau  îuonaslère,  qui  esi  de-  Noiasque  se  démit  pareillement  de    col  office 
venu   célèbre  d.ius  la  suilc  sou^  le  no::i  de  pour  \ivre  dans   la  retraite  et  l'obèissaiii  e. 
Noire- Dame  de  l'ueh,  pour  la  dévotion  (juc  comme   le   dernier   des    religieux.    Le  saint 
les  peuples  oui  i  ue   pour  une   image  de  la  fondateur,  se  voyant  libre,  se  réduisit  aux  of- 
sainte  \  n-rge  qu'on  a   trouvée  dans  la  terre  fiées  les  plus  bas  cl  les  plus  humiliants  de  la 
en  travai.lant  aux  fondeiiien  s  de  ce  moii.is-  communauté.  Use  chargea  volontiers  de  celui 
1ère.  Le  même  loi  ayanl  pris  ensuile  la  ville  de  faire  ladislribulion  dis  aumônes  à  la  jinrlc 
de  Valence,  avec  le  secours  de   la  noblesse  du  monastère,  parce  quecela  lui  donnailocca- 
fianraise,   la  première  adioii  de  ce   prince,  sionde  s'entretenir  avecles  pauvres  cl  de  les 
après   son  entrée  dans  la  ville,   fui  de  faire  ius'.ruire.  Il  alla  visiter  le  tombeau  de   saint 
consacrer  la  grande  mosquée  par  rarehevê-  Ka)moud  .Nonat,  qui  étailmort  il  y  avait  déjà 
que  de  Narbunne,  pour  servir  d'église  <  athé-  q.  inze  ans,  et  qui    faisait  bcauenup  de   uii- 
drale  sous  le  litre  de  SaiiU-.\ndré;  el  il  dunua  racles.  Les  chanoines  de  Colsonne,  a  qui  ap- 
aux  religieux  de  la  Merci  une  autre  mosquée  parlenait    la   chapelle  où  les  reliques  de  ce 
avec  les  bâtimenls  joi^juanls  pour  en   faire  saint  reposaient,   rolTrirenl  à  saint    Pierre 
un  monastère.  Noiasque  pour  y  bât.r  un  couvent  de  son  or- 
Saint  Pierre  Noiasque,  après  avoir  accom-  dre;  il  accepta  leur  olïre,    prit  possession  de 
mode  cette  maison  et  l'avoir  mise  eu  bon  éial  cette  cliapelle,  el  fil  travailler  à  un   nouveau 
enire   le>  mains  de  quelques   religieux,    re-  bdliment  pour  y  loger  les  religieux. 
l(nirna  a  ll.ircelone  ;  mais  il  n'y  fut  pas  long-  L'éclat  des  vertus  de  ces  religieux  el  la  bé- 
lem|is  sans   se  disposer  à  se  mettre  en  eaui-  nédiclion  que  Dieu  répandit  sur  l'oidre  de  la 
pagne    pour    s'aequilter    de     son   t):fice    de  Merci  portèrent  la  repulalion  du   saint  Ion- 
rédempteur.   Jusque-là   il    avait   racheté  en  date*  r  dans  les  liiux  éloignes.  Il  ne    ul  pas 
divers  voyages  plusieurs  captifs  qui  étaient  seulement  honoré  des    rois  ciiréliens  d'IN- 
cn  re   les    mains   des  Maure»  sur   les  coles  pagne;    saint  Louis,   roi  de  l'rance,   touché 
dlspagne;    mais   comme  il  avait   été    Ir.iite  de  ce  qu  il  avait  appi  is  de  ses  actions  iner- 
parioul   avec  beaucoup   (l'honneur,   el  qu'il  veilleuses  et  de   la  sainteté  de  sa  vie,    lui  lit 
ne  clierchail  )|ne  le  mépris  el  l'humiliation,  savmr  qu'il   soutiailiit  passionnément  de  le 
il  crut  (pi'il  les  trouverait   en    Afrique.  Lu  voir.  Le    saini,  de  son  cote,  (iiii   n'avait  pis 
cffil  les  infidèles  de  ce  p.iys-lù  lureiii  moins  moins  d'ein,  ressèment  de  voir  ce  prinrc   si 
Iraiiables  que  ceux  d'E-iiagne,  et  cumiiie  ou  vertueux,  prit   occasion    de  l'aller  lrou\er, 
l'accusa  d'avoir  facllilé  l'ev  asion  de  quelques  lorsqu'il  vint  dans  le  Languedoc  ;  our  nu  ll<  o 


9j7 


MER 


Sien 


933 


Raymond,  comte  de  Toulouse,  à  la  raison;  cl 
co:nnie  le  roi  méditait  son  voyage  de  terre 
sainte,  il  convia  saint  Pierre Nolasque  de  vou- 
loir raccoiiipa|;ner.  11  reçut  cette  proposition 
avec  d'autant  plus  de  joie,  qu'il  crut  que  c'é- 
tait une  occasion  favorable  pour  retirer  des 
mains  des  infidèles  un  grand  nombre  de  chré- 
tiens qu'ils  retenaient  dans  les  fers,  et  il  se 
disposa  à  ce  voyage,  malgré  son  grand  âge  et 
ses  infirniilés  corporelles.  Mais  son  zèle  fut 
arrêté  par  une  maladie  fâcheuse  qui  le  retint 
au  lit;  de  sorte  que  toute  la  rommunicalion 
qu'il  eut  avec  ce  saint  roi  et  qui  continua 
j(i^(|u'à  sa  mort,  ne  consista  plus  qu'en  priù- 
ri'S  et  en  un  conini;rco  d'amitié  toute  pure  et 
toute  spirituelle,  que  ce  prince  eut  encore 
soin  d'enlreli'nir  par  letlrt's  avec  notre  saint, 
après  son  retour  de  la  Palestine.  Enfin  saint 
Pierre  Noiasque  ne  pouvant  résister  à  ses 
maux,  il  y  succomba  et  mourut  la  nuit  de 
Nuel  de  l'an  125G,  étant  Agé  de  soixante-sept 
ans.  Ceux  qui  oiU  mis  sa  mort  l'an  12'i9  se 
sont  peut-être  f  miiés  sur  ce  que  Guillaume 
de  IJas  fut  élu  général  de  l'ordre  la  n'.ôine 
année,  mais  ce  ne  fut  qu'après  la  démission 
volontaire  du  saint  fondateur.  Son  corps  fut 
mis  dans  la  sépullureordinairo  des  religieux  ; 
mais  il  fut  levé  de  terre  quatre-vingts  ans 
après  par  ordre  du  pape  Kenoil  Xli  et  trans- 
porté dans  une  chapelle  oà  le  peuple  alla  vi- 
siter ses  sainte-  reliques  pour  obtenir  son 
intercession.  I^e  bruit  de  ses  miracles  et  les 
sollicitations  des  religieux  de  son  ordre  por- 
tèrent le  pape  Urhain  \'lll  ei  le  canoniser 
l'an  1628,  et  Alexandre  \  Il  fil  mettre  son 
nom  avec  éloge  dans  le  Martyrologe  romain, 
et  oidonna  qtje  toute  l'Eglise  en  ferait  l'of- 
fice sous  le  titre  de  semi-double,  oflii  e  que 
le  pape  (élément  X,  à  la  sollicitation  de  la 
reine  de  France  Marie-Thérèse  d'Autriche,  a 
rendu  douide  comme  celui  des  autres  fonda- 
teurs d'ordres. 

Voyez  Alphon.  Ftemon.  Ilisf.  (jcneral  délia 
ord.  de  Nosi.  Sù/nora  de  la  Merced,  lieiniird 
de  Vergas,  Cliron.  aacr.  et  milil.  ord.  />'.  M. 
de  Mercedc.  fJist.  de  l'ordre  de  Nod  e-l)inne 
de  la  Merci.  Glo.  Francesc.  Olignano,  Vil.  di 
S.  Pielro  Nolcscn.  Pedro  de  S.  Ceciîia,  An- 
md.  de  N.  S.  de  Cautiros.  L'Atotny,  llistnire 
de  l'ordre  de  Notre-Dame  de  la  Merci.  Filipp. 
de  Guimerai!,  //isr  de  la  ord.  deUa  Mcrred. 
linlhirium  ord.  S.  M.  de  Merc.  et  Constit. 
ejusdem  ord. 

§  II.    Du  progrès  de  l'ordre  de  Noire-D  nm 
de  lu  Merci  après  la  mort  de  saint  l'ierre 
Noiasque,  son  fondateur, 
La  mort  de  saint  Pierre  Noiasque  n'ap- 
porta aucun  changement  dans  l'ordre,  puis- 
quf,  comme  nous  avons  dit,  ce  saint  s'étant 
démis  du  gouvernement  d!>.  l'ordre,  les  reli- 
gieux, qui  s'étaient  assemblés  pour  élire  un 
autre  général,  choisirent  Guillaume  de  Cas, 
'  Français    de    nation  ,    comme    celui    qu'ils 
croyaient  le   pins  propre  pour   exercer  cet 
emplui  :  ainsi   Guillaume  de   Has,  selon  les 
Annales  de  cet  ordre,  en  prit  le  gouverne- 
ment l'an   12W,  en  qualité  de  commandeur 
général.  Il  comincnça  les   fonctions  do  son 

lîICTIOri'NAlnE   I>ES  OrDI'.ES  nELIOlEUX,  II. 


généralat  par  les  visites  des  couvents  de  Per- 
pignan, de  Montpellier,  de  Toulouse,  de  Va- 
lence et  de  quelques  autres,  et  il  fit  élire  dans 
un  chapitre  général,  qu'il  convoqua  à  Barce- 
lone la  môme  année, quatre  dcfinitcurs  géné- 
r.iux,  savoir  :  deux  prêtres  et  deux  cheva- 
liers, afin  que  le  général  les  pût  consulter 
dans  les  affaires  importantes  de  l'ordre.  Le 
roi  d'Aragon  donna  à  ce  général,  tant  pour 
lui  que  pour  ses  successeurs,  le  tilrede  ba" 
ron  d'Algar,  au  royaume  de  Valence,  avec 
voit  délilcralive  dans  rassemblée  des  états 
du  royaume;  et  après  que  les  Maures  eurent 
été  entièrement  expulsés  de  tout  ce  royaume, 
il  lui  fit  don  aussi  du  château  de  Galinara, 
avec  ses  dépendances  et  ses  revenus,  qii 
étaient  considérables  ;  niiis  le  roi  ne  jul  dé- 
cider Guillaume  de  Bas  à  l'accepter.  Il  lep  é- 
scnta  à  ce  prince  que  cette  place  était  de 
trop  grande  importance  pour  être  donnée  à 
des  religie  ix  qui  ne  la  |  ourraieni  pas  gar- 
der. Il  racheta  pendant  son  généralat,  tant 
par  lui  que  par  ses  religi  ux,  quatorze  cents 
esclaves  chrétiens;  et  se  voyant  âgé  de  plus 
de  quatre-vingts  ans,  il  demanda  qu'on  reçût 
sa  démission,  qu'on  ne  voulut  pas  accepter. 
11  gouverna  encore  Tordre  pendant  une  an- 
née, ajirès  quoi  il  mourut  au  mois  de  décem- 
bre 12C9.  H  avait  au,:menté  l'ordre  de  plu- 
sieurs couvents,  dont  les  pr  ncipauv  furent 
\'ich  et  Xativa. 

Le  P.  B  rnard  de  Saint-Romain,  comman- 
deur du  couvent  de  Xativa,  succéda  à  Guil- 
laume de  Bas  l'an  1270.  Ce  général  ayant  vu 
dans  les  visites  de  son  ordre  que  les  cou- 
vents avaient  presque  tous  des  observances 
différentes,  il  fil  faire  un  recueil  de  toutes  les 
ordonnances  qui  avaient  été  faites  dans  les 
chapitres  généraux,  et  les  réduisit  en  forme 
de  constitutions  pour  être  observées  dans 
tous  les  couvents,  afin  d'y  établir  une  unifor- 
mité. 11  mourut  l'an  1272,  et  eut  pour  suc- 
cesseur Pierre  d'Aymeri.  Alphonse  Remon  et 
quelques  autres  écrivains  de  cet  ordre  ont 
cru  que  c'étail  ce  général  qui  avait  dressé 
les  constitutions  de  l'ordre,  et  que  des  an- 
ciennes ordonnances  il  en  avait  fait  un 
corps;  mais  les  Pères  de  France,  dans  les 
Annales  du  même  ordre,  prétendent  qu'il  fit 
seulement  recevoir  et  approuver  celles  qui 
avaient  été  faites  par  les  ordres  de  Guillaume 
de  Saint-Romain.  L'ordre  éi.mt  compo  é  de 
prêtres  et  de  chevaliers,  les  uns  pour  vaquer 
au  service  divin,  et  les  autres  pour  trav.iiller 
au  rachat  des  c.iptifs,  cette  différence  d'em- 
ploi avait  fait  donner  seulement  par  com- 
mission une  autorité  absolue  au  prieur  du 
couvent  de  Barcelone  sur  les  prêtres,  et  pour 
faire  garder  exactement  la  clôture,  le  silence 
et  l'observance  régulière  dans  les  maisons. 
Pierre  d'Aymeri  fit  une  entière  séparation  de 
ces  deux  autorités,  et,  sacrifiant  généreuse- 
ment tous  ses  intérêts  à  la  gloire  de  son  or- 
l'rc,  il  établit  prieur  général  de  tout  l'ordre, 
pour  le  spirituel,  le  bienheureux  Bernard 
Corbarie,  prieur  de  Barcelone.  La  ditlerence 
des  états  avait  aussi  introduit  une  manière 
il'habiis  différents  :  les  prêtres  portaient  l'é- 
cusson  sur  leurs  chapes,  et  les  chevaliers  sur 

30 


039 


niCTI    NNAinF.  DES  OnDRF.S  r.KLICIF.tX. 


VM 


leurs  scapulairps.  Ce  fut  s«)u-<  ce  général 
qu'il  fut  ordonné  que  t.inl  les  pr^-'.rcs  que  les 
chevaliers  porieraieiit  récussoii  sur  le  soapu- 
laire,  conirne  il  avait  été  pratiqué  dans  le 
commencement  de  l'ordre. 

Après  la  mort  de  Pierre  d'Aymeri,  qui  ar- 
riva l'an  1301,  il  y  eut  schisme  dans  l'ordre  : 
car  le  commandeur  do  couvent  de  Barce- 
lone, vicaire  général  établi  par  les  conslitu- 
lions  de  l'ordre,  envoya  des  Ictlres  d'indic- 
lion  aus  vocaux  pour  se  rendre  à  Barcelone, 
aGn  de  procéder  à  l'élection  d'un  nouveau 
général,  cl  le  vicaire  perpétuel  de  Notre- 
Dame  de  Puch  en  envoya  aussi  pour  convo- 
quer le  chapiire  à  l'uch.  Le  P.  Pierre  du 
Fourny  fut  élu  dans  le  couvent  de  Barcelone, 
cl  le  P.  Arnaud  d'Aymeri  à  Notre-Dame  de 
Puch.  Les  religieux  eurent  recours  au  pape 
Boniface  Vill  pour  termi.icr  ce  différend,  le 
priint  de  commetlre  à  ce  sujet  l'archevêque 
de  Tolède  ou  l'évéque  de  Cordoue;  mais  la 
mort  de  Pierre  du  Fourny,  qui  arriva  quatre 
mois  après,  les  mil  d'accord.  Le  P.  Arn;iud 
d'Aymeri  fut  de  nouveau  élu  dans  le  chapitre 
tenu  à  Barcelone,  el  son  élection  fut  confir- 
mée par  le  pape.  Ce  général  Gt  paraître 
beaucoup  de  prudence  par  sa  conduite;  il  fit 
de  beaux  règlements  pour  rétablir  la  disci- 
pline régulière  et  l'étroite  olscrvance,  qui 
avait  déjà  beaucoup  perdu  de  sa  première 
vigueur;  il  dissipa  les  divisions  qui  avaiei;t 
partagé  l'ordre  à  son  cleciion;  mais  après  sa 
mort,  qui  arriva  l'an  1308,  il  y  eut  de  nou- 
veaux troubles  dans  l'ordre. 

Comme  le  nombre  des  pré;res  excédait  ce- 
lui des  chevaliers,  ils  élurent  pour  général 
de  tout  l'ordre  le  P.  Raymond  Albert.  Les 
chevaliers,  surpris  de  celle  élection,  se  reti- 
rèrent du  chapiire  et  allèrent  à  Valence,  où 
ils  élurent  de  leur  cô'.é  Arnaud  Bossignol. 
Le  pape  Cléinenl  V  cassa  l'élection  de  ce  der- 
nier, comme  n'étant  pas  canonique;  néan- 
moins ,  d'autorité  apostolique ,  il  l'établit 
commandeur  général  de  loul  l'ordre  par  une 
bulle  du  mois  de  février  130,S,  qui  portait 
qu'il  n'aurait  qu'une  simple  juridiction  sur 
le  loniporel  de  l'ordre,  et  qu'après  sa  moi  t 
on  n'élirait  plus  pour  général  qu'un  prctrc. 
P.ir  la  même  bulle,  ce  pape  domia  toute  au- 
torité spirituelle  au  P.  U;iym>ind  Aliiert  pour 
gouverner  l'ordre  dans  les  choses  ((ui  regar- 
daient le  service  divin  ,  l'observance  des 
constitutions  el  la  vie  régulière. 

Après  la  mort  d'Arnaud  Rossignol,  Albert 
fui  élu  général  de  tout  l'ordre.  Le  pape  Jean 
XXII  confirma  son  élection  ;  el  pour  étouffer 
toutes  divisions  dans  l'ordre,  il  imposa  si- 
lence perpétuel  aux  chevaliers  :  ce  qui  dé- 
plut tellement  à  ces  dcrni>>rs,  que  la  plupart 
quitlèrent  l'ordre  de  la  Merci  pour  entrer 
dans  celui  de  Montésa,  que  le  roi  d'Aragon 
venait  d'établir  nouvellcnient  dans  ses  Étals 
pour  occuper  les  grands  biens  des  chevaliers 
'j'emplicrs  ,  qui  avaient  été  abolis  daus  le 
concile  de  Vienne,  et  le  pape  approuva  cette 
translation.  Peut-être  que  (  eux  qui  restèrent 
dans  l'ordre  se  séparèrent  enlièremeiit  des 
prêtres  et  quittèrent  1 1  régie  de  sainl  Auifus- 
tin  pourpindre  ciHc  de  s  lint  Benoîiic.ir 


Arnaud  Wion,  qui  vi<vai(  A  la  fin  du  xvr  siè- 
cle el  au  commencement  du  wir.assuie  nufl 
ces  chevaliers  suivaient  en  ce  lemps-là  la 
règle  de  saint  Benoit  :  ce  qu'il  dit  avoir  ap- 
pris de  ces  mémos  chevaliers,  dont  il  rap- 
porte la  formule  de  la  profession  en  ces 
termes  : 

EgoN.,MilfsS.Mariirde  Merccdeel Redein- 
ptione  cnptivorum,  facio  professioncm  el  pro- 
miltoobeJieiiti(i!n,pauperiatcm,  casiitatem  .«er- 
rare,  Deo  vivere,  el  comedere  secundum  legit- 
lain  S.llenedicli,  et  in  Saracenorum  polestulf, 
si  necesse  fuerit,  ad  redemiilionemChristi  fldt- 
lium,  detentiis  inanebo  (Wion,  Lignum  vilœ). 

Ascagne  Tambourin,  de  l'ordre  deVallom- 
breuse,  rapporte  aussi  celle  formule  (/^eii/r. 
Abbat.,  disp.  2'*,  quœst.  5,  n.  80),  après  Ar- 
naud Wion,  et  ajoute  que  l'écusson  qu  ils 
portent  est  différent  de  celui  des  religieux 
de  la  Merci;  en  ce  que  ceux-ci  oui  dans 
l'écusson  une  petite  face  d'or  au  milieu,  sé- 
parant les  paies  d'Aragon  d'avec  la  croix 
d'argent,  el  que  le  même  écu  est  bordé  d'or, 
ce  qui  n'est  point  dans  celui  des  chevaliers  : 
mais  si  cet  écusson  que  Tambourin  a  vu 
était  semblable  à  celui  que  j'ai  vu  aus.si  .i 
un  de  ces  chevaliers  prétendus,  il  fiillait  du 
nécessité  que  dans  cet  écusson  il  y  eût  une 
face  d'or  au  milieu  pour  soutenir  les  pales 
d'Aragon,  et  que  l'ccu  fût  aussi  bordé  d'or, 
puisque  cet  éca  élait  de  métal  percé  à  jour. 
Ceux  qui  préleiidenl  que  les  prêtres  et  les 
véritables  chevaliers,  lorsqu'ils  étaient  unis 
ensemble,  ont  toujours  eu  des  généraux  dil- 
férents,  se  sont  trompés.  Il  esl  vrai  qu  ■  le 
prieur  de  Barcelone  avait  autorité  sur  Inut 
ce  qui  regardait  le  spirituel  d.ins  l'ordre; 
mais  il  y  avait  au-dessus  de  lui  un  che\alier 
laïque  qui  était  commandeur  général  de  tout 
l'ordre.  Aussi  toutes  les  Annales  de  cet  or- 
dre, dans  le  dénombrement  des  généraux, 
ne  mettent  le  P.  Raymond  Albert,  qui  fut  lo 
premier  général  prêtre ,  qu'après  Arnaud 
Rossignol,  ()ui  était  chevalier  el  septième  gc 
néral  de  tout  l'ordre.  L'on  ne  sait  ce  que  vei.t 
dire  Schoonebeck  [Uist.  des  Ord.  milit.,  loni. 
Il,  p.  139),  lorsque,  parlant  d  •  Bern  ird  de 
Coibarie,  il  lui  donne  le  titre  d'iiisliiuteur  de-, 
moines  de  li  .Merci,  puisque  dès  le  commen- 
cemenl  de  l'ordre  il  y  a  toujours  eu  des  jirê- 
1res  et  des  chevaliers.  Il  ne  parail  pas  mieux 
instruit  de  ce  qui  regarde  cet  ordre,  lorsqu'il 
ditque  le  huitième  grand  maître,  après  avoir 
gouverné  l'ordre  pendant  six  ans.  passa  diiis 
l'état  ecclésiastique  sous  le  nom  de  général, 
puisque  le  huitième  grand  maître  ou  coni- 
mamleur  général  fut  le  1'.  Raymond  Albert, 
qui  aval  toujours  été  au  rang  des  prêtres 
avant  son  élection. 

Cet  ordre  tut  cinq  ans  sans  chef  sous  le 
pontifical  de  Pie  V,  qui,  à  la  prière  de  Phi- 
lippe II,  roi  d'K'pajine,  éiablit  des  visiteurs 
pour  réformer  les  couvents  de  l'ordre.  Mais 
pendant  que  ce  pontife  en  rai>ait  expédier 
les  brefs  à  Rome,  le  génér.il  de  cet  ordre 
étant  décédé,  les  religieux  élurent,  en  15C^, 
le  P.  Matliias  Papinl,  dans  un  ch.ipitrequi  si; 
tint  ,'i  Barcelone.  Ce  général,  n'ayant  pu  ob- 
tenir du    pape  la  cunlirmallon  de  son   élcc- 


VA 


v.m 


H!Ef{ 


Ui 


lion,  cil  niDiirul  df  clia^riii  deux  mois  apri^s, 
au  conimciicemeiil  de  l'iuinée  15C9.  Le  p;ipe 
défenilit  aux  religieux  de  procéder  à  une  nou- 
velle élection,  voulant  qu'elle  ne  se  fît  qu'a- 
près que  la  visite  aurait  été  faite  par  des  re- 
ligieux de  l'ordre  de  Saint-Dominique,  qu'il 
nomma  pour  commissaires  apostoliques.  Us 
employèrent  cinq  ans  à  faire  la  \isite  de 
tous  les  couvents  de  l'ordre,  après  lesquels 
ils  convoquèrent  le  chapitre  général  à  Gua- 
dalaxara,  l'an  1574,  ou  le  P.  François  de 
Torres  fui  élu  vingt-neuvième  général.  Los 
commissaires  apostoliques  ordonnèrent  que 
les  généraux,  qui  ;i  valent élé  jusqu'à  ce  temps- 
là  à  vie,  ne  pourraieni  plus  à  l'avenir  exer- 
cer cet  office  que  pendant  siv  ans;  et  que 
les  commandeurs  des  couvenîs  particuliers 
ne  pourraient  exercer  leur  supériorité  que 
pendant  trois  ans  ;  ce  qui  a  été  observé  jus- 
qu'à présent. 

Cet  ordre  s'est  plus  étendu  dans  l'Améri- 
que qu'en  Europe;  il  a  huit  provinces  en 
Amérique,  qui  sont  gouvernées  par  deux  vi- 
caires généraux  sous  l'obéissance  du  géné- 
ral de  tout  l'ordre,  trois  provinces  en  Espa- 
gne, et  une  province  en  France,  sous  le  nom 
de  Province  de  Guienne,  de  laquelle  dépen- 
daient autrefois  le  couvent  et  le  (  ollége  de 
Paris,  et  le  couvent  de  Chcnoisc  en  Brie, 
que  le  cardinal  de  Vendôme  ,  étant  lé- 
gat en  France  ,  sépara,  en  1GG8,  de  celle 
province  de  Guienni;  pour  les  ériger  en 
congrég.ilion  sous  un  vii-aire  général.  Le 
roi  confirma  l'érection  de  cette  congrégation 
par  ses  lettres  patentes  do  la  même  année, 
ce  qui  fut  aussi  confirmé  par  une  bulle  de 
Clément  X  du  2G  novembre  1G72.  11  est  sorti 
de  cet  ordre  trois  cardinaux,  savoir  :  saint 
Itaymoiid  Nouât,  Jean  de  Lato,  et  le  cardi- 
nal de  Salaziir,  qui  fut  promu  à  cette  dignité 
par  le  pape  Innocent  XI.  11  y  a  eu  encore 
dans  c<'l  ordre  un  très-grand  nombre  d'ar- 
chevêques et  d'évêques,  et  il  a  fourni  à  l'E- 
glise plusieurs  siiints  canonisés  et  des  bien- 
heureux, dont  quelques-uns  sont  restés  en 
otage  entre  les  mains  des  infidèles  pour  ra- 
cheter un  plus  grand  nombre  de  captifs,  et 
avoir  lieu  de  travailler  à  la  conversion  de 
ces  barbares.  De  ce  nombre  fut  saint  Ray- 
mond Nonat,  qui  demeura  huit  mois  en  capti- 
vité, ayant  enduré  pendant  tout  ce  temps  des 
tourments  inouïs,  jusque-là  que  les  infidèles, 
ne  pouvant  l'empêcher  de  prêcher  la  parole 
de  Dieu,  lui  percèrent  les  deux  lèvns  avec 
un  fer  chaud,  et  lui  mirent  un  cadenas  à  la 
bouche  pour  l'emiiêcher  de  parler.  Saint 
Pierre-Pascal,  évêque  de  Jaen,  ayant  em- 
ployé tous  ses  revenus  au  soulagement  des 
pauvres  et  au  rai  bat  des  captifs,  entreprit 
aussi  la  conversion  dc-s  mahométans  ,  eu  q>u 
le  fit  charger  de  fers  et  endurer  de  rudes 
traitements.  Le  cleigé  elle  peuple  de  son 
^Eglise  lui  ayant  envoyé  une  somme  d'argent 
'pour  sa  rançon,  il  la  reçut  avec  beaucoup 
de  reconnaissance  ;  mais  au  lieu  de  l'em- 
ployer à  se  procurer  la  liberté,  il  en  racheta 
quantité  de  femmes  et  d'enfants,  dont  la  fai- 
blesse lui  faisait  craindre  qu'ils  n'abandon- 
nassent îa  religion  chrétienne,  et  il  den^eura 


toujours  entre  les  mains  do  ces  barbares,  qui 
lui  procurèrent  la  couronne  du  martyre  l'un 
1300. 

Cet  ordre  a  aussi  eu  pluirurs  ccriva'n'î , 
entre  les(|ucls  il  y  a  eu  Aljihonse  Uemon  . 
François  Salazar,  Nocl  Gravcrius  et  Bernard 
de  Vergas,  qui  ont  donné  h'S  Annales  et  les 
Chroniques  du  même  ordri'.  Les  PP.  Zumel, 
Mérino  ,  Oligna^no  et  Salnicron  ont  donné 
la  Vie  de  saint  Pierre  Nolasque,  leur  fonda- 
teur, et  le  p.  d'Avril  a  aussi  donné  celle  de  la 
Mèie  Marie  du  Secours,  première  lierciaire 
de  cet  ordre ,  dont  nous  parlerons  dans  la 
suite. 

Nous  avons  déjà  décrit  rhab^llement  de 
ces  religieux,  qui  ont  pour  armes  les  mômes 
que  celles  qui  sont  dans  l'écusson  qu'ils  por- 
tent sur  leur  srapulaire  ,  ajoutant  pour 
devise  :  Rcdemplionein  iniait  Doininus  populo 
Sun. 

Outre  lis  auteurs  que  nous  avons  déjà  ci- 
tés, voyez  ceux  qui  ont  parlé  des  ordres  mi- 
litaires, comme  Giustiniani  ,  Sclioonebeck  . 
Mennenius,  Sansunio,  etc.  Jerom.  Curila  , 
lib.  I  de  Rébus  Arag.,  et  Mariana,  de  Rebm 
Jlispaniœ,  lib.  xii ,  cap.  8. 

§  III.  Des  religieux  Déchaussés  de  l'ordre  de 
Notre-Dame  de  la  Merci,  appelés  aussi  de 
la  Récolleclinn  :  avec  la  Vie  du  vénérable 
Père  Jtan-Buptiste  du  Saint-Sacramenl, 
leur  fundalntr. 

Le  P.  Alphonse  de  Monroy,  étant  général 
de  l'ordre  de  la  Merci,  voulut  y  établir  ur.o 
réforme  sur  la  fin  du  xvi*  siècle,  et  destina 
sept  couvents  à  ce  sujet  dans  la  province  du 
Castillc,  afin  que  les  religieux  qui  souhai- 
taient vivre  dans  une  plus  étroite  obser- 
vance que  celle  qui  se  pratiquait  d;ins  tout 
l'ordre,  pussent  la  pratiquer  dans  ces  cou- 
vents; mais  il  ne  leur  accorda  cette  permis- 
sion qu'à  condition  qu'ils  ne  changeraient 
])Oint  l'habit  de  l'ordre,  et  qu'ils  resteraient 
toujourssoumisà  l'ohéissancedes  supérieurs. 
Avec  cette  permission  le  P.  Jean-Baptisio 
Gonzalez,  que  le  générai  avait  choisi  pour 
le  chef  cl  le  directeur  de  cette  réforme,  so 
reiiia  au  couvent  de  Hueta,  qui  était  le  prin- 
cipal dos  sept  qui  avaient  été  destinés  pour 
y  ()raliqiicr  l'étroite  observance.  Mais  on  se 
lassa  bientôt  de  la  ferveur  de  ce  religieux  , 
et  com.me  il  avait  attiré  à  ce  nouveau  genre 
de  vie  un  fumeux  professeur  de  Salainaii- 
qne,  et  qu'on  appréhenda  que  cet  exemple 
d'humilité  n'eût  des  suites  et  n'en  attirât  en- 
core d'autres,  le  général  reléj,'ua  le  P.  Jean- 
Baptiste  au  couvent  de  Itaizes  dans  l'Asturie, 
et  celte  réforme,  qui  avait  été  commencée 
par  les  ordres  du  général,  lut  presque  dans 
le  même  temps  détruite  aussi  par  ses  ordres. 
C'était  au  zèle  seul  et  à  la  ferveur  du  P.  Jeaii- 
Bapliste  que  Dieu  avait  réservé  l'ouvrage 
do  celte  réforme,  ev  pour  la  commencer  et 
l'étendre,  il  n'eut  pas  besoin  des  anciens 
couvents,  mais  il  en  fotida  de  nouveaux, 
comme   nous   verrons  dans   la  suite. 

Il  naquit  à  Huela  d.ans  le  royaume  de  Cas- 
lille,  le  8  février  1533,  de  parents  nobles  de 
l'ancienne  fa.'iiilie  des  Gonzalez.  Il  fut  élcv« 


9i3 


DICTIONNAIRE  DES  OROHES  RELIGIEUX. 


9'.* 


dès  SCS  plos  tendres  années  dans  la  crainte 
de  Dieu,  et  ce  fut  sur  ce  foiidimeiit  solide 
qu'il  élaldit  la  règle  do  s.i  conduite  pour  con- 
server la  pràce  parmi  les  dangers  IVéqiienls 
ou  les  jeunes  {{eus  sont  exposés  à  la  perdre 
avec  l'innoccnco.  Il  s'appliijua  de  bonne 
heure  au\  études  :  on  l'envoya  pour  cet  ef- 
fet à  Madrid,  où  il  apprit  les  premiers  princi- 
pes de  la  langue  laiine.  On  ne  vit  jamais 
d'écolier  plus  enclin  à  la  vertu,  et  ses  maî- 
tres le  proposaient  à  ses  compagnons  comme 
le  modèle  qu'ils  devaient  suivre  cl  imiter. 
Ses  humanités  étant  achevées,  il  obtint  per- 
mission de  ses  parents  d'aller  éludior  en  phi- 
losophie sous  le  P.  C.hrislophe  Gonzalez,  son 
Irère  aîné,  rcli.'icus  de  la  Merci,  que  les  su- 
jiérieurs  de  la  province  de  Cislillc  envoyaient 
enseigner  au  couvinl  d'Olinédo.  (^ommo  il  ne 
se  propiisail d'autre  (in  dans  scséludcs  ijucdc 
s'en  servir  utilement  pour  son  salut,  il  avan- 
çait d'un  pas  égal  dans  la  piélé  et  aux  élu- 
des; il  fréqucnlait  souvent  les  sacrements, 
il  assistait  les  fêtes  cl  dimanches  au  service 
divin,  il  se  rendait  assidu  à  entendre  la  pa- 
role de  Dieu,  et  après  avoir  saiisfnl  à  ces 
obligations,  il  ne  tnanquait  pas  d'aller  ser- 
vir les  malades  dans  riiôpMai. 

Ce  fut  dan-i  ces  saints  exercices  de  piété  et 
de  miséricorde  qu'il  se  senlil  fortement  ap- 
pelé de  Dieu  à  l'élat  religieux.  Il  demanda 
instamment  l'habit  de  l'ordre  de  la  Merci  ai 
commandeur  du  couvent  d'Olmédo,  qui  le  lui 
donna  avec  d'autant  plus  de  joie  qu'il  con- 
naissait ^cs  excellentes  qualités.  Il  le  reçut 
l'an  lo~2,  et  après  l'année  de  noviciat  il  fil 
sa  profession.  Huit  jours  après,  on  l'envoya 
au  couvent  de  Madrid,  d'où  il  sortit  l'an  1575 
pour  aller  gagni;i  le  jubilé  à  Rome,  avec  la 
permission  de  ses  supérieurs.  11  n'entreprit 
ce  voyage  que  par  un  esprit  de  pénitence; 
il  le  fil  à  pied,  en  mendiant  son  pain  de  porte 
en  porte  et  dans  un  si  grand  recueillement 
d'esprit,  qu'il  ne  parla  à  personne  dans  tout 
le  chemin  que  de  clioses  absolument  i.éces- 
saircs.  Etant  de  retour  dans  sa  province, l'an 
1576,  011  l'envoya  étudier  en  théologie  à  To- 
lèd.',  <  ù,  malgré  toutes  ses  résistances  et  son 
humilité,  les  supérieurs  lui  ayant  fait  rece- 
voir les  ordres  sacrés,  il  dit  sa  première 
messe  l'an  1578.  Ce  nouvel  état  lui  fut  un 
nouveau  motil  de  s'avancer  plus  que  j  imais 
dans  la  perfection  ;  on  l'engagi  a  à  prêcher 
tl  à  confesser,  et  il  réussit  si  bien  dans  l'une 
et  dans  l'autre  de  ces  fonctions,  ([u'il  gagna 
un  grand  nomhrc  d'ànies  à  Uieu. 

Ayant  appris  que  les  religieux  de  son  or- 
dre avaient  beaucoup  soullert  pour  la  foi 
dans  les  Indes,  priiK  ipalement  dans  le  IV- 
rou,  et  combi  n  ils  y  avaient  converli  d  infi- 
dèles, animé  d'une  sainte  émulation,  il  de- 
manda à  ses  supérieurs  la  permission  d'y 
passer,  pour  participer  aux  travaux  et  aux 
peines  de  ses  frères.  11  y  fil  uu  si  grand  pro- 
grès d  >ns  le  salut  dis  âmes  par  la  sunlelé 
de  s.'i  vie,  par  son  exemple,  par  ses  rares 
vertus  et  par  ses  prédications  tout  embrasées 
du  fin  de  l'amourdiviii,  qu'il  retira  un  grand 
nitnbic  de  païens  da  culte  des  idoles,  et 
qu'il   les    attira   à   la   connaissance  du  > rai 


Dieu;  mais  ce  qui  est  >!igne  d'admiration, 
c'est  (jue  les  rirlies  es  de  ce  pays-là  ne  Iq 
tentèrent  point,  et  il  ne  fit  pas  comme  un 
graml  nombre  de  religieux  de  différents  or- 
dres qui  en  sont  revenus  chargés  d'or  el 
d'.crjciil.  .\près  avoir  employé  le  temps  do 
sa  mission  Irès-ulilemeiit  au  service  de  Dii'ii 
cl  du  prochain,  il  retourna  en  Espagne,  no 
portant  sous  son  bras  que  son  bréviaire,  cl 
tenaiil  il'une  muin  une  léle  de  mort,  sur  la- 
quelle il  jel.il  continuellement  les  yeux 
pour  se  faire  ressouvenir  de  ce  qu'il  élail  el 
de  ce  qu'il  serait  un  jour. 

Ce  fut  ce  saint  hoiiîme,  si  zélé  pour  la 
gloire  de  Dieu  el  si  amateur  de  la  pauvreté, 
que  le  P.  Alphonse  de  .Monroy,  général  do 
l'ordre  de  la  Merci,  choisit  pour  être  le  chet 
et  le  directeur  de  la  réforme  qu'il  avait  en- 
trepris d'établir  dans  son  ordre  ;  mais  qu  i- 
qu'elle  eùl  été  détruite  dans  son  co  umence- 
ment,  comme  nous  avons  dit  ci-devant,  le 
P.  Jean-Bapiisle  Gonzalez  ne  perdit  point 
l'espérance  de  la  voir  rétablie;  il  chercha 
les  moyens  d'y  parvenir,  il  en  forma  les 
projets,  et  ayant  été  rappelé  du  coment  do 
U./i/es  et  mis  de  famille  au  couvent  de  .Ma- 
drid, il  crut  que  Dieu  lui  présentait  les 
moyens  d'exécuter  son  entreprise.  Comme  il 
était  sacristain  de  ce  couvent,  el  que  son 
emploi  l'obligeait  de  parler  souvent  à  la 
comtesse  de  Caslcllar,  Ueatrix  Ilamirez  de 
Mendoza,  qui  était  une  dame  d'une  grande 
pieté,  il  prit  la  résolution  de  lui  communi- 
quer son  dessein,  dans  l'espérance  qu'elle 
y  contribuerait  par  ses  libéralités.  11  ne  so 
trompa  point:  il  recumiuanJa  celle  affaire  à 
Dieu,  il  olTrit  à  celle  inieulion  le  saint  sacri- 
fice de  la  messe,  il  parla  à  cette  dame  de  la 
réforme  élroite  qu'il  voulait  établir  dans 
son  ordre,  el  elle  le  fortifia  dans  celle  résolu- 
tion, s'olTranl  de  fonder  deux  couveu  s  de 
Celte  reforme  dans  ses  terres. 

Le  général  n'ayant  pas  voulu  donner  sou 
consentement  à  rétablissement  de  ces  deux 
couvents  pour  servir  de  fond.-menl  à  cetls 
reforme,  la  comtesse  de  Castellar  s'adressa, 
à  son  refus,  nu  pape  Cléuii'iil  Vill,  qui  lui 
accorda  deux  brefs.  Parle  premier,  il  la  dis- 
pensait du  vœu  qu'e.le  avait  lait  de  f  mder 
un  couvent  de  religieux  de  l'ordre  de  Saint- 
Jerôme,  d  lui  permettait  d'en  bàlir  deux 
aux  leligieux  de  l'ordre  de  la  Merci  ,  et  par 
le  second  bref,  il  érigeait  une  congrégation 
de  religieux  du  même  ordre,  qui  désire- 
raient vivre  dans  l'elroite  observame,  de 
laquelle  il  établit  pour  général  le  P.  Bar- 
Ihelcmy  d'Alcala,  religieux  de  l'ordre  Ce 
Saiiil-Jcrômc,  à  condition  qu'il  quitterait 
Ihabil  de  son  ordre  pour  prendre  celui  de 
la  .Merci,  avec  une  autorité  absolue  d'y  re- 
cevoir les  religieux  de  cet  ordre,  qui  vou- 
draient embrasser  cette  réforme,  el  les  se - 
culiirs  (|ui  se  présenteraient  pour  recevoir 
l'Iiabil;  qu'il  gouvernerait  cette  congrégalKui 
jusqu'à  ce  qu'elle  eùl  huit  couvents,  >  l  que 
s'il  voulait  persévérer  dans  l'ordre  de  la  Merci, 
il  exercerait  encore  l'office  de  général  pen- 
dant SIX  au». 

Le   P.   Jcan-Bapliste,   ù  l'insu  duquel  la 


9i5 


MER 


MER 


9;u 


comtesse  de  C;is(ellar  avait  obtenu  ces  brefs, 
fui  fort  surpris  (juand  il  eut  appris  ce  qu'ils 
conteiiJiiont.  Il  représenta  à  cette  dame  qu'il 
n'avilit  j.imais  eu  d'autre  dessein  que  d'a- 
voir quelques  couvents,  dans  lesquels  on 
gardât  la  règle  el  les  constitutions  de  l'or- 
dre de  la  Merci  à  la  lettre  et  sans  aucune 
dispense,  sous  l'obéissance  du  général  de  l'or- 
dre, dont  il  ne  se  séparerait  point,  parce  que 
les  religieux  qui  voudraient  embrasser  cette 
observance  ne  voudraient  pas  se  soumettre 
à  la  conduite  d'un  étranger.  La  comtesse 
approuva  scsr;iisons;  elle  fil  voir  au  géié- 
ral  les  brefs  qu'elleavait  obtenus  sur  le  refus 
qu'il  avait  fait  de  consentir  à  l'établissement 
des  couvents  qu'elle  voulait  fonder  pour 
commencer  la  réforme  que  le  P.  Jean-B.ip- 
liste  méditait,  et  l'attachement  que  ce  Père 
avait  à  l'ordre.  Le  général  en  fut  si  touché, 
qu'il  promit  à  la  comtesse  de  favoriser  cet 
élablissomcnl,  ft  pour  lui  témoigner  sa  sin- 
cérité, il  dressa  lui-même  les  constitutions 
<|ui  devaient  être  observées  par  les  religi'eux 
de  celte  réforme. 

La  comiesse,  de  son  rô'é,  pour  avancer  ce 
grand  ouvrage,  lui  promit  de  leur  faire  bâ- 
tir incessamment  deu\  couvents,  et  de  les 
doter  de  revenus  suffisants ,  l'un  dans  sa 
terre  de  Viso,  à  quatre  lieues  de  SévilU-,  et 
l'autre  à  Almorayna,  dans  sa  comté  de  Cas- 
tellar,  à  trois  lieues  de  Gibraltar  et  de  l'évé- 
ché  de  Cadix  ,  s'engageanl  encore  de  les  four- 
nir de  meubles  et  d'ornements  d'église.  Elle 
en  passa  contrat,  qui  fut  ratifié  dans  le  chapi- 
tre provincial  lenu  à  Guadalaxara  le  20 
avril  1603,  où  l'on  approuva  aussi  rétablis- 
sement de  cette  élroite  observance  et  les 
constitutions  que  les  religieux  qui  l'embras- 
seraient devaient  suivre.  A  celle  nouvelle, 
le  P.  Jean-Baptiste  el  cinq  compagnons  aux- 
quels il  avait  inspiré  l'esprit  de  la  réforme, 
en  prirent  publiquement  l'habit  le  jour  de 
l'Ascension,  dans  la  chapelle  de  Noiro-Dame 
du  Remède,  dans  l'église  des  religieux  de  la 
grande  observance  du  môme  ordre,  et  quit- 
tant en  même  temps  le  surnom  de  leurs  fa- 
milles ,  le  J.P.  Jean-Baptiste  prit  celui  du 
Saint-Sacrement  au  lieu  de  Gonzalez. 

Comme  dan<  l'établissement  de  l'ordre,  le 
roid'Aragun,  Jacques  I",  donna  un  apparte- 
ment dans  son  palais  à  saint  Pierre  Nolasque 
cl  à  ses  compagnons,  de  môme  la  comiesse 
de  Castcllar  reçut  d'abord  le  P.  Jean-Bap- 
tiste et  ses  compagnons  dans  son  hôtel  de 
Madrid,  où  ils  firent  leurs  exercices  de  dé- 
votion et  pratiquèrent  les  observances  régu- 
lières, pendant  qu'on  bâtissait  les  deux  pre- 
miers convenis  de  celle  étroite  observance. 
Mais  comme  ces  saints  religii'ux  ne  respi- 
raient qu'.iprôs  la  retraite  cl  la  solitude,  el 
qu'ils  étaient  trop  exposés  au  prand  monde 
dans  la  maison  do  celle  dame,  elle  les  envoya 
d.ms  son  château  de  Ribas,  bourg  distant  de 
Madrid  de  trois  lieues,  et  ils  allaient  tous  les 
jours  célébrer  la  messe  dans  une  chapelle 
dédiée  à  sainte  Cécile,  qui  était  dans  le  même 
bourg. 

Quelques  personnes  trop  attachées  à  leurs 
propres  inléréis,  apprchendaul  que  ces  reli- 


gieux ne  fissent  un  couvent  d'un  lieu  qu'ils 
n'avaient  que  par  emprunt,  leur  firent  d'é- 
tranges vexations  ;  ils  détachèrent  leur  clo- 
che, renversèrent  l'autel  qui  avait  été  dressé 
pour  célébrer  la  messe  :  l'évéque  même  se 
joignit  à  eux,  et  défendit  aux  religieux  de  la 
célébrer,  non-seulement  dans  celle  chapelle 
de  Sainte-Cécile,  mais  même  dans  l'église  de 
la  paroisse,  ce  qui  obligea  ces  religieux  de 
retourner  à  Madrid.  M.iis  les  hiibitants  do 
Ilibas  lurent  si  édifiés  de  leur  vie  exemplaire, 
qu'ils  firent  ce  qu'ils  purent  pour  les  retenir 
dans  leur  bourg,  ils  prièrent  la  comiesse  de 
Caslellar  de  leur  bâtir  un  monastère,  et 
celle  pieuse  dame  leur  accord.»  leur  deman- 
de, promeliantque  sitôt  qu'elle  auraitachcvé 
les  deux  couvents  qu'elle  faisait  bâtir  en 
Andalousie  pour  ces  religieux,  elle  ferait 
aussi  commmcer  un  nouveau  monastère  à 
Ribas. 

Les  bâliments  de  ces  deux  premiers  cou- 
vents ayant  éié  achevés  avec  le  conseute- 
ment  de  l'archevêque  de  Sévilieet  de  l'évéque 
de  Cadix,  la  comtesse  de  Caslellar  alla  en  An- 
dalousie disposer  toutes  choses  pour  recevoir 
les  nouveaux  réformés,  qui,  s'étanl  mis  en 
chemin  pour  aller  prendre  possession  de  ces 
deux  couvenis,  reçurent  de  nouveaux  cha- 
grins à  Séville  de  la  part  des  religieux  de  la 
grande  observance,  qui,  étant  scandalisés  de 
l'habillement  de  ces  religieux  réformés,  leur 
firent  malicieusement  cnlendre  que  le  défini- 
toire  d'Aragon  avait  envoyé  ordre  de  les  ar- 
rêter et  de  les  obliger  à  retournera  la  grande 
observance.  Mais  ces  avis  se  trouvèrent 
faux;  le  P.  Jean-Baptiste  el  quelquis-uns  de 
SCS  compagnons  se  rendirent  à  Almorayna 
pour  prendre  possession  de  ce  nouveau  cou- 
vent, où  ils  entrèrent  l'an  1603;  et  ce  cou- 
vent, qui  fut  dédié  à  Notre-Dame  des  Rois, 
fut  le  premier  de  la  réforme.  Les  autres  com- 
pagnoii.'-.  duP.Jeau-Bapliste,  auxquels  le  géné- 
ral avait  donné  pour  commandeur  le  P.  Jean 
de  Saint-Joseph,  entrèrent  dans  celui  de  Viso 
le  23  janvier  de  l'année  suivante,  1604.  Ces 
deux  nouveaux  couvenis  furent  bientôt  rem- 
plis des  principaux  religieux  de  l'ordre,  qui 
s'y  relirèrenl  pour  y  vivie  dans  l'étroile  ob- 
servance. Le  nombre  s'olanl  augmenté  ,  la 
comtesse  de  Castellir  fonda  un  troisième 
couvent  dans  sa  terre  de  Ribas,  comme  vie. 
l'avait  promis  au\  habitants  de  ce  lieu,  et  la 
même  année  le  P.  Jean-B:ip!i~te  en  fut  pren- 
dre possession.  11  se  fit  encore  d'autres  fonda- 
lions  quelques  mois  après,  l'une  à  Séville, 
l'autre  à  Rola,  et  dans  la  suile  ce  saint  réfor- 
mateur eut  11  consolaliou  de  voir  douze  au- 
tres fondations,  dont  les  plus  considérables 
furent  à  Madrid,  à  Salamau(|ue  et  à  Alcala 
de  Hénarez.  11  s'en  fit  même  jusque  daas  l.i 
Sicile,  où  après  sa  mort  le  nombre  des  cou- 
vents est  devenu  si  considérable,  (ju'on  en  a 
formé  une  province  particulière  sous  le  nom 
de  Saint-Raymond,  el  ceux  d'Espagne  ont  été 
divisés  en  deux  provinces. 

Dieu  fil  connaître  par  plusieurs  miracles  la 
sainlelédu  P.  Jeau-Bapliste,  qui,  apiès  avoir 
vécu  dans  sa  Réforme  quinze  ans,  tnourut  à 
Madrid  dans  le  couvent  de  ceUe  Réforme,  au 


917 


mcTioNNAiiu-:  Di:s  oimiirs  ui.i.if.iiux. 


9  8 


mois  de  nmi  1018.  On  l'enterra  dans  In  sépul- 
lure  ordinaire  des  religieux  ;  mais  l'annc'c 
suivante,  les  supérieurs,  à  la  sollicitation  de 
plusieurs  personnes  qui  avaien'  une  singu- 
lière vénération  pour  ee  scrviieur  de  Dieu,  le 
Jevèrent  de  terre  pour  le  ii  ellrc  dans  un  lieu 
plus  honorable.  L'on  trouva  s^n  corps  aussi 
eniier  et  aussi  (Icxilile  que  s'il  venait  de  mou- 
rir ;  sa  langue  était  encore  \  ei  nieille,  et  Dieu 
permit  que  re  saint  curps  restât  plusieurs  an- 

,  nées  en  cil  étal. 

•  L'Iiabillemi  ni  de  ces  relipieus  esl  sembla- 
blc  à  celui  clés  C:.rn!cs  Décliaussés,  excepté 
que  le  manteau  est  plus  long  (1;.  Ils  portent 
aussi,  comnic'ceux  de  la  grande  oliservance 
de  la  Merci,  l'écusson  des  armes  d'Aragon  sur 
leur  srapulaire,  et  leurs  s:indales  sont  comnie 
ceilcs  des  capucins.  Paul  V  approuva  leur  lié- 
forme  l'an  ll'OG.  Grégoire  \\',  l'an  1G21.  les 
sépara  enlièremcnl  de  ceux  de  la  grande  ob- 
«arvancc.el  Urbain  VIII,  la  même  année,  leur 
donna  un  vicaire  général  de  leur  Héforine, 
qui  fut  le  1'.  Jean  Marolli,  surnommé  de  Saint- 
jiisepb,  qui  a  beaucoup  étendu  celle  Réforme 
par  la  fondation  de  plusieurs  couvents.  Il  y 
a  aus>i  des  religieuses  de  celle  Réforme  dont 
nousall  lis  parlerdans  leparagraphesuivant. 
Le  P.  Pierre  de  Sainte-Cécile  a  fait  l'Histoire 
de  celle  Réforme,  imiir.mée  à  Barcelone  l'an 
IGf.O. 

^'oyez  l'Histoire  d-'  l'ordre  de  Noirr-Dame 
dr  la  Merti.  Bernard  de  Verras.  Chron.  focr. 
et  milil.  ord.  B  M.  (le  Mrrcede,  inni.  Il,  §  5 
et  ().  Pedro  de  S.  Cecilia,  Arinal,  de  l'ord.  de 
J>escalcos  de  N.  S.  de  lu  I\]crced.  Reiicmlion 
de  captivos. 
§  IV.    Des  relif/iewtes   de  /'or7re   de  Nolic- 

Dame  de  la  filtre',  tunl  de  l(i  ijrande  obser- 

rancc  t/ue  Dc'clunusées. 

Si  on  avait  égard  au  lon.ps  do  l'élabliNse- 
menl  du  tiers  ordre  de  la  Merci,  il  devrait  élre 
appelé  le  second  ordre,  puisqu'il  a  été  établi 
avant  les  religieuses  du  même  ordre,  qui  for- 
ment néanmoins  le  second  ordre;  mais  il  esl 
juste  que  des  personnes  séculières,  qui  ne 
sont  engagées  à  un  état  que  par  des  vœux 
simples,  cèilenl  la  pré>éancc  à  celles  qui 
sont  consacrées  à  Dieu  par  des  vœux  solen- 
nels. Les  premières  nligieu^es  de  l'ordre  de 
la  Merci  furent  établies  ;'i  Séville  l'an  1368. 
L'instrument  dont  Dieu  se  s('r\  il  pour  ce  su- 
jet fui  le  P.  Antoine  Vtlasco,  rcligieui  du 
même  ordre.  Plusieurs  personnes  des  pie- 
inières  rjmilies  de  la  ville  de  Séville  s'étant 
mises  sou<  sa  conduite  el  sa  direction,  il  y 
eul  entre  les  autres  Irois  dames,  d.rns  les- 
quelles il  remarqua  un  si  graml  delacbmient 
(les  clioses  de  la  terre,  une  union  si  grande 
a\ec  Dieu  cl  un  si  violent  désir  d'aspirer  à 
une  vie  plus  parfaite,  qu'il  crul  que  Dieu  les 
avait  choisies  pour  être  les  pierres  fonda- 
mentales d'un  miinaslèic  de  lelig'cuses  de 
Notre-Dame  de  la  .Merci,  qu'il  se  sentait  in- 
lérieurcnienl  inspiré  de  li.ilir  pour  servir  de 
retraite  à  quantité  de  lilles  vertueuses  qui 
toujiiraienl  depuis  longtemps  après  celle  Oc- 


casion. Il  reciiii:niai.da  celte  alT.iire  à  Dieu, 
cl  ajirès  avoir  longl<  mps  jeûne,  prié,  cl  pra- 
tiqué de  ng.  ureuses  pénitentes,  el  dans  le 
temps  qu'il  prenait  laiésoluiion  de  commu- 
niquer son  deS'Cin  à  ces  dames,  qui  se  noni- 
mai .ni  Mario  t^.apata,  Béairix  de  las  lloelas 
el  Françoise  Marlel,  un  jour  de  l'.Vssompiiou 
de  la  sainte  Vierge,  elles  le  firent  appeler  à 
l'églisi- ,  el  lui  diie!.l  que  Dieu  leur  avait  in- 
spiré la  pensée  de  lomier  un  inonaslère  pour 
des  religieuses  de  l'ordre  de  Notre-D.imo  de 
la  Merci,  et  de  le  dédier  sous  le  nom  de  l'.Vs- 
somption  de  Nuire-Dame. 

Le  Père  connut  pour  lors  que  le  dessein 
tiu'il  avait  projeté  venait  de  Dieu;  il  leur  de- 
cla  a  ce  qu'il  av.iil  fat  depuis  lonpiemps 
pour  obtenir  cette  grâce  du  C.el,  il  les  fortifia 
dans  leur  résolulion,  et  se  chargea  de  solli- 
citer les  permissions  U'-re^saires.  Les  ajanl 
obtenues,  tant  du  gr.in.l  vicaire  de  rarche>é- 
que  de  Séville,  que  du  provincial  de  t'asMlle  , 
il  crut  que,  pour  rendre  cet  éiablis~enu  ni 
plus  solide,  il  fallait  le  faire  confirmer  par  le 
saint-siège  Ces  dames  dépêchèrent  un  gen- 
tilbomnie  à  Rome  au  bienheureux  Pie  V,  qui 
gouvernail  pour  lors  l'Eglise  universelle, 
pour  le  prier  d'agréer  la  fondation  de  ce  mo- 
nastère.  Le  pape  y  consentit  et  fil  expédier 
une  bulle  au  mois  de  mai  lol)8,  par  l.u|uelli) 
il  l  approuvait  el  y  dunn.iil  son  consenie- 
nienl. 

Sitôt  qu'elles  eurent  reçu  celte  bulle,  elles 
achetèrent  une  grande  place  proche  le  cou- 
vent des  religieux  de  la  Mert  i  pour  la  cnn;- 
modilé  du  confesseur,  et  elles  y  firent  bâtir 
une  église  avec  le  monastère.  Pendant  que  les 
ouvriers  travaillaient  au  bâtimee.t,  I"  P.  \'é- 
lasco  dressa  les  constilulions  que  les  reli- 
gieuses devaient  observer  ;  il  les  cnvoja  au 
chapitre  général  de  duadalaxara,  (ini  se  lini 
l'année  suivante,  1309.  Lcchapilrc  dcnna  une 
couunission  à  ({uebiues  religieux  pour  les 
examiner;  el  le  monastère  étant  achevé,  les 
Irois  dames  fondalrices  y  entrèrent  avec 
quelques  jeunes  dtmoiselles.  Le  P.  Vélasco 
en  fut  établi  vicaire  perpétuel  ;  il  leur  dunna 
publiquement  l'habit  de  l'ordre,  et  deux  ans 
après  le  provincial,  dans  la  visite  qu'il  fit  de 
ce  couvent,  ratifia  et  confirma  les  professions 
de  celles  qui  a\aienl  prononcé  leurs  vœ;:x. 

11  y  a  eu  dans  ce  monastère  plusieurs  reli- 
gieuses d'une  vertu  émiiienie,  dont  les  prin- 
cipales ont  clé,  la  B..\nue  de  l;i  Croi  v,  qui  en 
a  été  première  supérieure;  la  Mère  Anl<iinelle, 
de  l'Assomption  de  la  maison  d'Ai;uilar,  l.i 
Mère  Augusline  Menriquez.  la  Mère  .\iine 
des  Rois,  et  la  B.  sœur  Marie  de  lu  Résurrec- 
tion. 

Comme,  peu  de  temps  après  que  le  P.  Jean- 
Baptiste  eut  cl.'ibli  la  Rérorme  des  religieux 
de  la  Merci,  on  établit  aussi  des  mon  isteri  s 
de  religieuses  de  cette  niême  Rèfiirme,  la 
Mère  Clémence  de  la  Sainte- 'l'riniie  fut  liice 
du  mouaslère  de  r.\ssom|iliou  de  Séville  pour 
aller  londer  le  premier  monastère  des  re  i- 
gieuses  Déchaussées  ou  de  la  RccoUecliun.  II 
fut  élalili  à  Loia,<iui  en  a  produit  plusieois 


(I)  Voij.,  àiafiii  du  \ul.,  n" 


919 


MER 


MKR 


PSO 


autres,  comme  à  Séville,  où  il  y  en  n  encore 
un  de  celle  Réforme,  deux  à  Madrid,  donl  l'un 
a  Hé  fondé  en  1G65,  par  le  roi  d'Espagne 
IMiilIppe  IV,  en  l'honneur  de  l'immaculée 
Conception.  Il  y  en  a  rnrore  d'autres  à  Fuen- 
les,  à  Archos,  à  Marchènc,  à  Ezicha  vn  An- 
dalousie, à  Thoro  et  Sanjago  en  Castille,  el 
en  plusieurs  autres  lieux.  Ces  religieuses 
sont  habillées  comme  les  religieux  (1),  el 
après  avoir  prononcé  les  trois  vœux  essen- 
tiels de  religion,  elles  ajoutent  :  Je  promets, 
en  tant  nue  mon  étal  le  peut  permettre,  de  va- 
quer  aux  choses  qui  regardent  le  rachat  des 
captifs,  et  de  donner  ma  vie  pour  eux,  s'il  est 
iircessaire.  Le  P.  Bonanni,  parlant  des  reli- 
gieuses de  la  Merci  de  la  grande  observance, 
les  a  confondurs  avec  les  filles  du  tiers  ordre, 
dont  nous  allons  parler  dans  l'article  suivant. 

Voyez  les  auteurs  ci-devant  cités,  et  le  P. 
Bonanni,  Catalog.Ord.relig.,  part.  n,pag.87. 

L'ordre  de  la  Merci  avait  pris  une  certaine 
exlension,  mais  fait  peu  de  S'nsution  en 
France  :  il  y  avait  donc  plusieurs  provinces 
où  il  était  presque  inconnu.  M.  Gilles  de  la 
B.Himc  le  Blanc,  évéque  de  Nantes,  les  ap- 
pela clans  sa  ville  épiscopalc,  et  leur  donna, 
en  1G72,  une  maison  nommée  l'Ermitage  de 
Sainl-Similien  sur  les  Hauts-Pavés.  Ce  prélat 
n'avait  fait  que  répondre  au  vren  manifesté 
par  la  province,  et  s'était  assuré  du  conscn- 
lement  des  états  assemblés  à  Nantes,  en 
lt)63;  mais  cet  établissement,  n'ayant  pas  éié 
autorisé  par  lettres  patentes  du  roi,  fui  dis- 
sous au  bout  de  quelques  années. 

Le  jansénisme  pénétrait  partout,  dans  les 
lieux  surtout  où  les  évéques  protégeaient 
cette  erreur.  Quoique  les  Pères*  de  la  Merci 
n'aient  pas  donné  beaucoup  de  scandales 
sous  ce  rapport,  cependant  ceux  de  la  maison 
de  Montpellier,  sous  l'épiscopat  de  Colbert, 
codèrent  à  l'esprit  de  nouveauté  et  donnè- 
rent quelques  preuves  d'entêtement  sous  son 
sureesseur,  M.  de  Charanci,  qui  chi'rcha  à 
réparer  les  maux  causés  par  Colbert. 

L'ordre  de  la  Merci  jouissait,  même  dans 
le  xix°  siècle,  d'une  grande  considération  en 
Espagne.  Néanmoins  il  n'a  point  élé  conservé 
dans  les  suppressions  presque  générales 
f.iites  par  les  révo'ulioiis  qui  ont  suivi  la 
mort  de  Ferdinand  VII,  si  ce  n'est  dans  les 
couvents  de  femmes. 

Au  dernier  siècle,  il  y  avait  à  Rome  trois 
maisons  de  cet  institut  :  l'une  pour  les  reli- 
gieux exhaussés,  nommée  Saint-André  in 
campo  Vaccino;  les  deux  autres,  nommées 
Saint-Jean  m  campo  Mnrzo  et  Sainle-Marie 
inMonterone,  pour  les  religieux  Déchaussés. 
Les  religieuses  de  l'ordre  n'y  avaient  point, 
croyons-nous,  d'établissement,  pas  plus  qu'à 
Paris,  où  les  religieux  avaient  deux  maisons, 
l'une  rue  des  Sept-Vo:es,  ainsi  qu'un  col- 
lège, mais  qu'ils  furent  obligés  d'abandon- 
ner au  dernier  siècle,  pressés  par  la  pau- 
vreté. L'autre  était  située  rues  de  Brac 
el  du  Chaume,  et  l'on  voit  encore  les  ruines 
lie  cet  établissement,  où  l'on  avait  fait,  sur 
les  dessins  de  Culard,  un  portrait  curieux, 


dont  on  peut  voir  la  description  dans  le  Ta- 
bleau de  Paris,  de  M.  de  Saint-Victor.  Les 
religieux  étaient  au  nombre  de  trente-cinq, 
veis  le  milieu  du  dernier  siècle,  dans  cette 
communauté,  où  se  faisait  le  noviciat.  Pour 
ce  noviciat  et  pour  la  prise  d'habit,  les  reli- 
gieux prenaient  500  livres.  Il  fallait,  dans 
celle  maison,  que  chaque  religieux  fournit 
au  moins  150  livres  de  pension  viagère.  Les 
religieux  avaient,  en  reconnaissance  de  leur 
établissement,  l'honneur  de  présenter  à  la 
reine  un  cierge  la  veille  de  la  Purification. 
La  maison  de  la  rue  des  Sept-Voies,  qui  ser- 
vait de  collège  destiné  aux  études  de  la  Sor- 
bonne,  avait  été  fondée,  en  1250,  par  Allain 
d'Albert,  fait  inconnu  à  M.  de  Sainl-Victor. 
Le  général  de  l'ordre  a  toujours  élé  à  Ma- 
drid, mais  probablement,  depuis  la  suppres- 
sion faite  en  Espagne,  la  >ui)ériorité  a  élo 
donnée  an  vicaire  général,  résidant  à  Home, 
qui  était  récemment  le  R.  P.  Thomas  Miquel; 
le  procureur  général  était  le  P.  Michel 
Xianco  ,  vivant  peut-être  encore  l'un  et 
l'autre  aujourd'hui. 

Nouvelles  Ecelésiasi:quef,  année  1738  39. 
—  Tableau  de  Paris,  par  M.  de  Sainl-Victor, 
tome  II.  —  Elat  de  Paris,  par  M.  de  Beau- 
mont.  —  Les  Vies  des  sainis  de  Bretagne, 
tome  VI,  édition  de  M.  l'abbé  Tresvaux. 

B-B-E. 

MERCI   (Du   Tiers   Okdue   de  Notke-Damb 

DE  I,a). 

Vers  l'an  12G5,  deux  femmes  illustres  de 
la  ville  de  Barcelone,  veuves  de  deux  gen- 
tilshommes très-considérables  de  la  pro- 
vince, se  voyant  sans  enfants,  résolurent  de 
triompher  du  monde  en  menant  une  vie  di- 
rectement opposée  à  ses  fausses  maximes  ; 
l'une  s'appelait  Isabelle  Berli,  et  l'autre  Eu- 
lalie  Pins.  Eles  prirent  avec  elles  quelques 
filles  qui  aspiraient  au  même  genre  de  vie, 
et  elles  se  logèrent  dans  une  maison  proche 
le  couvent  des  religieux  delà  .Merci,  où,  après 
avoir  vaqué  aux  exercices  de  la  prière  et  de 
loraison,  elles  employaient  au  travail  tout  le 
temps  qui  leur  restait,  pour  distribuer  aux 
pauvres  le  profit  qu'elUs  en  pouvaient  tirer. 

Pour  marcher  plus  sûrement  dans  les 
voies  du  ciel,  elles  choisirent  pour  leur  père 
spirituel  et  leur  confesseur,  le  bienheureux 
Bernard  de  Corbarie,  religieux  de  l'ordre  de 
la  Merci,  pour  lors  prieur  de  leur  couvent 
de  Barcelone,  et  cl'es  firent  sous  sa  conduite 
des  progrès  si  admirables,  que,  embrasées  du 
désir  d'un  état  plus  parfait,  ces  deux  datnes 
lui  demandèrent,  au  nom  de  toutes  leurs  com- 
pagnes, la  grâce  de  porter  l'habit  du  Tiers 
Ordre  de  la  Mi  rci,  à  l'imitation  des  Tier- 
ciaires  de  l'ordre  de  Saint-François  cl  de 
celui  de  Saint-Dominique.  Le  bienheureux 
Bernard  de  Corbarie,  après  les  avoir  éprou- 
vées pendant  quelque  temps  ,  cl  voyant 
qu'elles  persévéraient  dans  leurs  saintes  ré- 
solutions, regarda  cela  comme  un  moyen 
que  Dieu  lui  Iburnissaii  d'établir  un  Tiers 
Ordre  de  la  Merci;  il  le  proposa  dans  un 
chapitre  général  au  bienheureux  Guillaume 


(1)  Yoij.,  à  la  fin  du  vol.,  u"»  258  el239. 


9r:i 


liIf.TlONNAIIΠ DI.S  OlUiP.F.S  HELICIF.IX. 


9S2 


de  Bns,  deuxième  général  de  l'ordre,  qui,  du 
consenlcmciit  îles  ilodiiileurs.lui  donna  cdiii- 
niission  pour  faire  cel  ét.iblissemenl,  el  re- 
cevoir puHiquonicnt  à  l'habil  ces  ïerluruses 
dames  el  leurs  compagnes,  ri  do  leur  pres- 
rrirc  une  règle  el  une  manière  de  vie,  ce 
qu'il  execula  l'an  l:2G.'i,  le  jour  qnc  rilgiise 
réit'br.iil  la  fêle  de  l'Aniioncialion  de  la 
sainle  Vierge,  en  présence  d'une  inlinité  de 
personnes  de  la  >ille  di'  rarcelone.  A  ri)ITc.- 
,  loire  de  la  messe  qu'il  ci'lé!ir;\  il  fit  un  d.s- 
cours  sur  l'excclli'nce  de  l'ordre  de  la  Merci 
fl  sur  la  persévérance  que  ces  dames  avaient 
•  emoignéc  pour  s'y  consacrer  au  service  de 
Dieu,  et  après  leur  avoir  donné  l'Iialiil  de 
l'ordre,  il  Us  exhorta  d'en  dcnian  lur  l'es- 
prit à  I)iiu  pour  conlriluier  par  leurs  au- 
mônes, leurs  prières  et  leurs  larmes,  au  sou- 
lagenienl  corporel  el  .■■pirituel  des  pauvres 
esclaves  chrétiens,  cl  de  s'exercer  sans  ré- 
serve aux  œuvres  de  miséricorde  pour  se- 
courir les  pauvres,  assister  les  malades,  vi- 
siter les  prisonniers,  cl  pour  soulager  géné- 
ralement tous  ceux  qu'elles  verraient  dans 
la  misère  el  dans  l'indigence.  La  cérémonie 
élanl  achi  vée,  loule  la  ville  les  reconduisit 
de  rég!ise  cher  cllis,  où  elles  menèrent  dans 
les  exercices  de  ce  nouveau  Tiers  Ordre  une 
vie  si  sainte,  que  plusieurs  sont  mortes  e:: 
odeur  de  sainteté. 

lintre  les  autres  fut  s;iin!e  Marie  du  Se- 
cours, qui  fui  la  supérieure  de  celle  pcLlc 
communauté,  el  reçut  la  première  l'Iabit  du 
Tiers  Ordre,  les  auires  lui  ayant  déféré  cet 
lionneur  à  cause  de  son  éminenle  sainUlé. 
l'Ile  n.iquit  à  Barcelone,  l'an  12'J1,  de  pa- 
rens  nohlos  el  riehes,  et  fut  nommée  .Marie, 
l-llle  (ommcnça  dès  son  enfance  à  aimer 
Dieu,  à  le  jirier  avec  fervi  ur,  el  à  châtier 
8i>n  corps  par  des  macérations  près  luc  in- 
croyables. Ivlle  fit  vffu  de  virginilé  de  bonne 
heure  pour  se  dég  ger  de  toutes  les  pour- 
suites du  mariage,  el  par  la  proteciion  de  la 
sacrée  Aicrgc  sa  patronne,  elle  le  garda  jus- 
q'i'à  la  mort.  Ses  parents  l'avant  laissée  hé- 
ritière de  Irès-grands  biens,  elle  n'en  fut  (]uc 
l'ccononic  fiour  les  distribuer  aux  pauvres, 
aux  prisonniers,  aux  malades,  aux  eaplils  cl 
à  toutes  sortes  de  nécessiteux.  Et  celle  cha- 
r.ié  sans  bornes  lui  acquit  une  si  haute  ré- 
putation dans  lîarcelone,  qu'on  lui  donna 
n)mniunémcnl  le  surnom  de  Secours  au  lieu 
de  celui  de  sa  famille  que  les  historiens  ne 
marfjueiil  point. 

Elle  fui  la  pri  mière,  comme  nous  avnns 
(Hl,  qui  reçut  l'hahil  du  Tiers  Ordre  de  la 
Merci,  el  quoique  les  historiens  de  cet  ordre 
donnent  à  celle  sainle  la  qualilc  <le  religieuse 
«lu  Tiers  Ordre,  aussi  b  rn  qu'à  celles  qui 
reçurent  l'habil  avec  elles,  il  y  a  hien  de 
l'apparence  qu'.iyanl  demaiwlé  eel  habit  ù 
rimit.it  on  di's  Tieiciaires  des  ordres  de  Saiiil- 
François  el  de  Sainl-l)oniini(]iie ,  elles  ne 
s'engagèrent  roiiimc  elles  qu'à  des  vœux 
.simples,  el  non  pas  à  des  \wu\  solennels 
qui  font  le  religieux,  et  ([ni  sont  un  cr.ga- 
gemi  ni  indissoluble  qui  le  lie  à  l'ordre  qu'il  a 
embrassé  et  l'enipèi  lie  de  relonrni  r  dans  le 
monde.au   lieu  que   le    véritable  esprit  des 


Tiers  Ordres  établis  dans  l'Eglise  n'a  point 
été  de  lier  ceux  qui  s'y  engageaient,  à  moins 
qu'ils  n'y  fussent  engagés  par  des  vu'ux  so- 
lennels, comme  il  est  arrivé  dans  les  Tiers 
Ordres  de  Saint-François  et  de  Saini-Uomi- 
nique,  <  ù  il  s'est  trouve  des  personnes  qui 
s'y  sont  consacrées  a  Dieu  par  des  vœux  so- 
lennels ;  ce  (|uc  sainle  .Marie  du  Secours  el 
ses  compagnes  ne  peuvent  pas  avoir  fait, 
piiisqu'e'.l  s  auraient  été  véritablement  reli- 
gieuses ;  et  en  ce  cas  on  n'aurait  jias  appe'^ 
leur  ordre  le  Tiers  Ordre,  et  l'on  n'aurait 
pas  donné  le  second  rang  dans  Tordre  de  la 
Al<'rci  à  celles  qui  furi  ni  établies  dans  le 
monastère  do  l'Assomption,  l'au  I0O8,  près 
de  trois  cents  ans  après  rélablisseinenl  de  ce 
Tiers  Ordre.  Il  ne  faut  pas  croire  que  les  re- 
ligieuses du  monastère  de  Séville,  el  celles 
qui  les  ont  imitées  dans  ce  genre  de  vie, 
aient  eu  la  préséance  au-dessus  de  celles  du 
Tiers  Ordre,  à  cause  qu'elles  ont  gardé  li 
ckMure;  car  il  y  a  un  grand  nombre  de  reli- 
gieuses dans  l'ordre  de  Saiul-Friinçois  el  de 
Saiiit-D.imini'|ue  qui  sont  du  second  ordre, 
sans  néanmoins  garder  la  clôture,  se  coit- 
formanl  aux  usages  des  pays  où  elles  s  int 
établies;  et  si  sainte  .Marie  du  Secours  et  ses 
compagnes  ont  vécu  en  commun..Uié,  elles 
ne  doivent  pas  pour  cela  élre  appelées  reli- 
gieuses, puisque  nous  voyous  tous  les  jo;irs 
des  Ticrciaires  vivre  en  communauté,  comme 
les  Dons-i'ils,  qui  sonl  duTiersOrdredeSaii:l- 
François.quiont  des  églises  ouverles,  qui  pra- 
tiquent loutes  lesoliservances  de  la  vie  régu- 
lière, el  qui  néanmoins  ne  sont  pas  religieux. 
Au  reste,  ce  Tiers  Ordre  de  la  Merci  est  peu 
connu  préseiilement;  nous  ne  vojons  pas 
même  que  les  historiens  de  la  Merci  en  aient 
beaucoup  parlé.  Ils  se  sont  conleulés  de 
donner  la  vie  de  sainte Mirie  du  Secours,  qui 
en  a  reçu  l;i  première  l'habit,  et  à  qui  ils  don- 
nent sans  fondement  la  qualité  de  religieuse. 
Celle  sainte  mourut  à  Barcelone,  l'an  l'iSI, 
cl  fut  enierrée  dans  l'égii-e  des  religieux  de 
la  .Merci,  où  il  s'esi  fait  plusieurs  miracles  à 
son  tombeau.  Ce  sacré  corps  est  encore  tout 
enlier,  aussi  bien  que  celui  du  bienheuieux 
Bernard  de  (^orb.irie,  son  direiteur.  Il  csl 
maintenant  dans  une  châsse,  enfermé  sous 
qu.ilri!  clefs,  dont  Tniic  est  entre  les  m.iins 
de  l'évéque,  l'autre  dans  le  dépôt  du  c  uveut, 
la  troisième  est  gardée  par  les  députés  du 
comic  de  <3ataIogne,  cl  la  quatrième  à  la 
disposition  des  consuls  de  la  ville. 

\'oyez  1.1  Vie  de  sainte  Marie  du  secours 
par  le  P.  Atirri,  les  Annales  et  les  Clirvni- 
(/uet  de  l'ordre  de  la  Merci. 

M[:iU<:  UE  DIEU  (CiKiics  Bkgl'i.ikus  nu 
la),  yoy.  l'icoLiiS  riKi'SES. 

MES>INE.  Voij.  Boi  l'.DOLiiG. 

A'o)ez  la  Vie  de  sainle  Marie  du  Secours, 
parie  P.  Aiivri,  les   Annales  cl  les  Chroni- 
qms  de  l'ordre  de  la  Merci. 
MfiTI  O  DE  I.A  PÉNITENCE  DES  MABTYBS 

CiiANoiNi  s  lu  (il  i.iEns  UK  No nu'.-DAM i-.  dk;. 

Il  y  a  des  auti  urs  i)ui  ont  confondu  l'onlrc 
de  Noirc-Dame  de  Méirode  la  l'énilenee  des 
Martyrs,  avec  un  ordr»-  suppose  de  S.iinl- 
Ucmelriub  ;  el  d'autres  en  ont  lait  deux  or- 


yo3 


MET 


MET 


954 


(1res  séparés.  Lp  P.  Louis  Torclii,  relis'i^'iix 
rie  l'ordie  de  Sainl-Angusliii,  dans  rHistoirn 
générale  de  sni  ordre,  qu'il  toirimença  à 
donner  au  public  en  1675,  parle  de  celui  de 
Sainl-Démélrius,  fondé,  à  ce  qu'il  dit,  en 
Pologne  par  quelques  personnes  pieuses, 
vers  l'an  1200,  confirmé  par  le  pape  Alexan- 
dre IV,  el  prélend  que  ces  religieux  portent 
des  habiis  gris,  sur  lesquels  il  y  a  une  crois 
sur  lin  cœur. 

Le  P.  Jérôme  Roman,  aussi  religieux  de 
l'ordre  des  lïrmiles  de  Saint-Aui;utin,  dit 
qu'il  y  en  a  un  sous  le  nom  de  la  Pénitence 
des  Martyrs,  fondé  en  lliilie  sous  le  pontificat 
de  Clément  V,  l'an  1232,  dont  l'inslilut  est 
rie  Ir.giT  les  pèlerins,  cl  que  cet  ordre  s'est 
tellement  agraiiili,  qii'il  a  été  divisé  in  dix- 
liuit  provinces,  ce  qu'il  a  lu,  dil-il,  dans  un 
livre  qui  lui  fut  envoyé  en  Espagne  par  un 
religieux  de  cet  ordre  ;  il  ajoute  qu'il  y  en 
avait  d.  ux  monastères  dans  le  royaume  de 
(jalice,  l'un  à  Sarria  et  l'autre  à  Arzua,  qui, 
par  ordre  du  pape  Pie  V  et  do  l'Iiilippe  11, 
roi  d'Iispagne,  furent  incorporés,  l'an  1507, 
à  l'ordre  dos  Ermites  de  Saint-Augustin. 

Herrera,  qui  est  encore  un  religieux  du 
mémo  ordre,  dit  aussi  que  celui  de  la  Péni- 
tence di's  Martyrs  fui  fondé  en  Italie,  comme 
il  paraît  pur  des  titres  qui  sont  conservés 
d.ins  ces  deux  couvents;  que  ces  religieux 
portaient  un  h.ibit  blanc  avec  une  croix 
rouge;  et  que  d'Italie  cet  ordre  avait  passé 
en  Espagne,  par  le  moyen  do  deux  religieux 
qui  y  étaient  venus  visiter  le  corps  du  l'a- 
pôtre saint  Jacques,  et  y  avaient  Ibiulé  les 
nionaslères  de  Sarria  et  d'Arzua;  et  Pierre 
Crescenze  dislingue  aus^i  l'ordre  de  Saint- 
Déméirius  d'avec  celui  de  la  Pénitence  des 
filyrtyrs. 

Il  est  certain  que  ceux  qui  ont  supposé 
qu'il  y  avait  un  oidre  de  Sainl-Démétrius 
se  sont  trompés,  et  que  celui  qui  a  le  pre- 
mier erré  en  cela  et  fait  tomber  les  autres 
dans  l'erreur,  aura  sans  doute  pris  S.  M .  De 
Melro  pour  saint  Démétrius.  Car  le  vérita- 
ble nom  de  l'ordre  de  la  Pénitence  des  Mar- 
tyrs est  celui  de  Sainte-M.irie  de  Métro  de 
Uome,  de  la  Pénitence  des  Martyrs. 

L'on  ne  peut  ajouter  foi  au  P.  Uoman, 
lorsqu'il  dit  que  cet  ordre  fut  fondé  l'an 
1232,  sous  le  pontificat  de  Clément  V,  puis- 
(juc  le  pape  Grégoire  IX  gouvernait  |)our 
lors  l'Eglise,  et  (lue  Clément  V  ne  succéda  à 
Benoît  que  l'an  130i.  On  ne  peut  pas  croire 
non  plus  que  cet  ordre  ait  été  si  puissant  en 
Italie  et  divisé  en  dix-huit  provinces  ;  (>uis- 
qu'il  a  toujours  été  peu  connu,  et  que  les 
i)istoriens  en  ont  fait  peu  de  mention,  n'y 
ayant  même  préscnfement  aucun  couvent 
de  cet  ordre  en  Italie.  S'il  y  en  avait  eu  tant 
de  maisons  et  qu'elles  eussent  été  divisées  en 
dix-liuil  provinces,  elles  auraient  été  énon- 
cées dans  une  prétendue  bulle  du  pape  Boni- 
face  VIII  de  l'an  1295,  qui  est  le  plus  ancien 
titre  que  les  religieux  de  cet  ordre  puissent 
produire;  et  dans  celte  bulle  il  n'y  est  parlé 
(jue  du  monastère  de  Métro  d»»  la  ville  de 
Kome,  de  Sainte-Elisabeth  d'Ailesphcl,  de 
Saint-Pierre  de  l'île  de ,  de  Saiute-Croix 


de  Prague,  de  Saint-Bartliélemi  de  Podcrabi 
et  de  Sainte-Marie  d'Orlilz  au  diocèse  de 
Prague,  de  Sainl-Marc  à  Cracovie,  cl  de 
Sainle-Marie  au  diocèse  de  Cracovie.  Ils 
n'ont  néanmoins  qu'une  copie  de  celte  bulle, 
dont  ils  disent  que  l'original  a  élé  perdu  ; 
c'est  ce  qui  obligea  le  général  de  cet  ordre, 
l'an  1507,  d'avoir  recours  au  pape  Jules  H, 
duquel  il  obtint  une  bulle  où  celle  de  Boni- 
fiée Vlll  est  insérée,  et  Jules  II  ordonna 
qu'on  y  ajouterait  autant  de  foi  qu'à  l'origi- 
nal :  il  avoue  néanmoins  que  l'on  n'a  au- 
cune connaissance  à  Uome  de  celte  église 
de  Nitre-Darse  de  Métro,  ni  du  lieu  où  clic 
était  située,  et  que  ce  que  l'on  en  sait,  ce 
n'est  que  par  la  copie  de  la  bulle  de  Boni- 
face  :  Licel  de  dicta  ccclesia  liealœ  Mariœ  de 
Métro,  pncleri/uain  pcr  dictum  Iransumptum, 
nulla  penitus  noiitia  hahe:it:ir,  et  locus  ubi 
dicta  ecilesia  fundala  fuerat  non  rcperiatar. 
Cependant  il  confirme  ces  religieux  dans  la 
possession  des  monastères  et  des  biens  énon- 
cés dans  cette  prétendue  bulle  de  Bonifaco 
VIII,  il  dans  la  possession  de  ceux  qu'ils 
avaient  acquis  dcpu  s,  dont  il  fait  le  dénom- 
brement,  qui  n'est  pas  néanmoins  bi<  n 
grand,  car  il  ne  consisie  qiie  dans  les  mo- 
nastères de  Sainle-Croix  de  Bisliyka  en  Li- 
Ihuanie,  de  la  Sain  e-Trinité  de  Miedniki,  cl 
de  la  Sainte-Trinité  de  Twerec  au  diocèse  de 
Vilna. 

Quoique  ce  monastère  de  Noire-Dame  de 
Métro  à  Rome,  qui  était  chef  d'ordre  de  «es 
religieux  ,  fût  inconnu  au  pape  Jules  II,  qui 
avoue  même  qu'on  ne  s.iit  pas  le  lieu  où  il 
était  situé,  le  général  qui  s'adressa  à  lui  ne 
laissa  pas  de  prendre  le  litre  de  prieur  de  ce 
couvent,  comme  il  est  porté  par  la  bulle  de 
ce  ponlife  :  Sane  pro  parte  dilccli  fûii  Jonv- 
ni$  prioris  ecclefiœ  S.  M.  Demetri  de  Vrhe, 
ordinis  S.  Aujustini  el  ejusdem  ordinis  ge- 
ncrnlis,  nobis  niiper  edliibila  pctitio  conti- 
nebat.  On  aura  peine  à  comprendre  comment 
ce  couvent  de  Rome,  chef  d'un  ordre  si  con- 
sidérable, qui  était  divisé  en  dix-buil  pro- 
vinces, selon  quelques  auteurs,  ait  tout  d'un 
coup  disparu,  sans  qu'il  soil  mémo  resté  au- 
cune mémoire  du  litu  où  il  élail  situé,  et 
(jue  Jules  II  ail  cru  si  aisément  ce  que  ce 
général  lui  avait  exposé.  C'est  ce  qui  doit 
rendre  suspecte  celle  bulle  de  Boniface  VIII 
et  celle  de  Jules  II  où  elle  est  insérée,  et 
dont  j'ai  une  copie  qui  m'a  élé  envoyée  de 
Pologne. 

Quoique  ce  soit  le  seul  litre  que  ces  reli- 
gieux puissent  produire,  ils  ont  néanmoins 
bien  d'autres  prétentions  louchant  leur  anti- 
quité. Ils  disent,  aussi  bien  que  les  Croisiers 
ou  Porte-Croix  (  Foi/.  Croisieus),  que  saint 
Ciel,  l'an  78,  a  élé  leur  instituteur;  que  saint 
Cyriaque,  évéque  de  Jérusalem,  a  élé  le  res- 
taurateur de  leur  ordre;  qu'ils  ont  eu  pour 
législateur  saint  Augustin,  dont  la  règle  leur 
a  été  donnée  par  les  souverains  pontifes  ré- 
cents; que  leur  ancien  habillement  était 
celui  des  Chanoines  Réguliers  :  qu'ils  por- 
taient une  croix  d'argent, cl  quenuelqucs  uns 
prétendent  que  cette  croix  leur  avait  été  don- 
née par  saint  Cyriaque,  en   mémoire  de  la 


955 


DICTIO.NNAIHE  DKS  ORDRF.S  RF.IJGIF.IJX. 


955 


vraie  croix  do  Nolrc-Scigiiciiv  Jésus-Chrsl 
qu'il  avait  IrDUvéf  :  hislitutor  nosterS.  Cle- 
(iis  papa,  reftiiuralor  S.  Cyrincu^  «inscopus 
flitro$ohjmilriiius,  et  tandem  legislatur  S. 
Augustinus,  ctijtis  reytilam  a  rccentioribus 
ponlificihiis  susi  epimits.  Cruris  arijenUœ  et 
universi  canonici  habiius  antii/uixsimus  nobis 
usus  :  snnt  eliain  ncnnulli  i/ui  ciucein  nubis  a 
S.  Cyrinco,  in  inciiioriain  invenlœ  par  e\tm 
ciucis  dominicœ,  (latiim  fuisse  asfeieiant. 
r.'esi  .'tiiisi  qu'un  religieiis  de  col  ordre  ilicril 
leur  origine  dans  un  livre  inipriuic-à  \  ilna,  et 
qui  a  pour  litre  :  0//m>-  tnisncniis  Dei. 

Nous  ne  nous  arrè  eroiis  point  à  réfuter 
CCS  fables,  el  on  peut  voir  ce  que  nous  en 
.ivons  (lit  à  l'art.  Ckoisikrs.  Mais  ctl  auteur 
en  ajoule  encore  de  plus  grossières  pour  jus- 
lilier  le  titre  qu'on  leur  donne  de  Chanoines 
Héijulirs  de  Sainte-Marie  de  Mclro  de  Rome, 
de  la  Pénitence  des  iMartyrs.  Il  dit  qu'il»  sont 
appelés  Chanones  Itégaiitrs,  à  la  différence 
des  Moines,  parce  que  leur  ordre  a  paru  le 
premier  dans  1  Kglise  après  !cs  apôircs,  et 
«ju'on  leur  a  donné  la  conduite  des  âmes  ; 
que  l'on  ajoute  de  sainte  Marie  Demelri  (il 
ne  met  pas  de  Mctro)  à  c^iusc  du  scapuîaire 
que  la  sainie  Vierge  donn.i  à  saint  Démé- 
trius,  consul  romain,  qui,  ajanl  été  reçu 
dans  l'ordre  par  saint  Ciel,  l'amplifia  dans 
sa  propre  maison:  (/f  Home,  p;iree  que  Cil 
ordre  fut  le  premier  confirmé  par  le  sainl- 
siése,  el  qu'il  a  été  le  premier  qui  a  ou  des 
monastères  dans  celle  ville  ;dela  Pciiilcnv, 
taiil  à  causu  que  dans  le  temps  de  la  persé- 
cution les  religieux  de  col  ordre  se  cachaient 
liais  les  bois  cl  dans  les  cavernes,  qu'à  cause 
(lue  jusqu'au  temps  de  la  persécution  ils 
avaient  clé  les  Pénilem  icrs  du  pape  ;  el  enfin 
des  un.  Martyrs,  à  cause  du  grand  nombre  de 
ces  religieux  qui  répandirent  leur  sang  pour 
la  défense  de  la  fui.  Ces  religieux  avouent 
néanmoins  que  de  ce  t;raiid  nombre  de  niar- 
Ijrs  ils  n'ont  seuenient  connaissance  que 
de  six,  qui  sont  sainl  Uémétriu<,  consul  ro- 
main, sainl  lilde ,  sainl  Rajnauld,  sainl 
Lilièrc,  sailli  Concessc,  sainl  Ventura  de  Spo- 
lelle.el  sainl  Cyriaque,  évciiue  de  Jérus.ilem. 
C'esl  ce  qui  est  aussi  marqué  dans  ce  livre 
qui  a  pour  litre  :  Opus  misrrcntis  Dci,  que  je 
ii'.ii  point  vu,  mais  dont  on  m'a  envoya  un 
estrail  fidèle,  la  personne  qui  me  l'a  envoyé 
ayant  eu  soin  de  marquer  les  pages,  el  elle 
ajoute  :  Uœc  reliilisse  sulficiat,  super  yuibus 
viri  prudentis  ac  eruditi  eslo  judicium,  regar- 
dant aussi  comme  une  chimère  ces  prelen- 
tioDS. 

«]'esl  apparemmeut  à  ranso  de  ce  saint 
Dtmélrius,  consul  romain,  qui  n'a  j.imais 
exisié,  u'y  ayant  point  eu  de  consul  de  ce 
nom  sous  les  empereurs  Néron,  dalla, 
Othon  cl  les  autres,  sous  l'empire  desquels 
sainl  Ciel  a  pu  vivre,  tant  a\anl  que  pen- 
dant son  pontifical ,  que  ces  religieux  pren- 
nent daas  leurs  qualités  celle  de  Chanoines 
Régulier»  de  Sainte-Marie  Demetri,  au  lieu 
de  de  Métro,  comme  ils  sont  appelés  par  des 
historiens   polonais,  par  l'auteur  du  la   Vie 


du  H.  I.idislas,  de  l'ordre  de  Sainl-Fran(;(>is, 
et  dins  le  procès-verbal  de  la  translation  du 
corps  du  |{.  Mirliel    (iedroc   de    leur  ordre  , 
signé  par  tous  les  religieux    de  leur  couvent       | 
de  Cracovic,   donluous  parlerons    dans   la       ' 
suite. 

L'on  ne  peut  donc  rien  dire  de  certain 
louchant  l'origine  de  ces  Chanoines  que  l'on 
appelle  communément  en  Pologne,  deS^iinl- 
Marc,  à  cause  que  leur  monastère  de  Gra- 
covie,  qui  est  le  principal  de  ceux  qu'ils  onl 
en  ce  royaume,  est  dédié  en  l'honneur  de 
saint  Marc  l'Kvangélisle.  C'esl  pourquoi  l'au- 
leur  de  la  \  ie  du  I?.  Michel  Gedroc  dit  qu'il 
entra  dans  l'ordre  de  Saint-Marc.  Tous  les 
liistui  iens  polonais  qui  ont  parle  de  ces  re- 
ligieux conviennent  qu'ils  furent  reçus  dan» 
ce  royaume  l'an  1-257  ,  et  que  ce  fut  liolcslas 
le  (Chaste  ,  duc  de  Cracovie  el  de  Sandomir, 
qui  les  clab  il  à  Cracovie,  leur  ayant  donné 
l'église  de  Saini-Marc,  qu'il  avail  fondée 
depuis  peu  ;  et  Dugioz  ajoute  que  ces  reli- 
gieux avaient  élé  institués  par  le  p.ipe  Ale- 
xandre l\ ,  qui  surcéda  à  Innocent  IV  l'an 
123'i-.  Alexan  1er  papa  IV  no'-atn  rcliglonnn 
M'ndictin'.ium  de  PœniCentia  Marlyrum  insti- 
lait ,  cujus  fratre.i  el  profe.<sores  Cracoiiam 
advenicnles,  ISuIrslaus  Pudicus  Cracovierisis 
et  Sandomirie/isis  dux  bénigne  appdialos 
sui^cipil  ;  et  ecclesia  in  sancti  Marci  l'vange- 
tislœ  lionurcm  de  noio  fundola  illis  tocum 
Cracoviœ  contalit  aniio  1257. Ily  a  néanmoins 
quelques  autres  auteurs  qui  disent  qMC  cel 
ordre  fui  instlué  l'an  12o0  ,  coiimie  on  lit 
dans  la  seconde  conlinualion  de  la  Chroni- 
que de  Thierry  d  Engeihusen,  r-i|ipi)rlée  par 
M.  de  Leilinitz  dans  le  second  tome  de  son 
Heiueil  des  écrivains  de  Ilrunswick. 

Outre  11'  nionaslcre  de  Saint-Marc  de  Cra- 
covie, CCS  religieux  en  onl  encore  quatre 
autres  en  Pologne  et  un  plus  grand  nombre 
en  I.itliuanie  ,  dont  les  plus  considérables 
sont  ceux  de  .Miedniki,  fondé  par  Jagellon 
dans  le  pahilinat  de  \  ilna,  Widzinieiszki , 
Twcrc  el  Mikaliski.  Ils  en  ont  aussi  qucl- 
(liies-uns  en  Holiéine,  dont  un  à  Prague.  Le 
prcv(it  de  celui  d(!  Widziuieiski  a  dro.t  de  se 
servr  d'ornemcnis  pontificaux. 

Ces  religieux  ont  aussi  des  cures  qu'ils 
desservent.  Leur  habil  consiste  en  une  sou- 
tane blanche  et  un  .scapuîaire  de  même  cou- 
leur, sur  lequel  il  y  a  un  co-ur  surmonté  d'une 
croix  rouge.  Lorsqu'i's  sortent  ils  mettent 
une  soutane  ou  veste  noire  (|ui  cache  leur  ha- 
bil blanc,  et  dans  les  fondions  ecclésiasti- 
ques ils  ont  un  surplis  el  une  mozeltc  blan- 
che ou  camail  par-dessus.  Le  P.  Atlianascde 
Sainle-Agnès,  le  P.  Torclli  et  Crescenzc, 
disent  que  leur  tunique  ou  robe  est  grise. 
Ils  |)cuvenl  en  avoir  porté  autrefois  de  celle 
couleur;  mais,  selon  les  méuioires  q"i  m'ont 
été  envoyés  de  Pologne  en  170'i-  el  1710, 
leur  habit  est  tel  que  je  le  décris  (1). 

Il  y  en  a  qui  doutent  s'ils  sont  véiilab'c- 
menl  Chanoines  llégulicrs.  Penoi  cl  le  Paige 
leur  donnent  néanmoins  ce  litre  ,  el  r'i'sl 
peut-élre    la    qualité    de    mendiants   qu'ils 


(1)   Voij.,  il  la  lin  du  vol.,  ii°'  ^lO    eliJI. 


057 


MIC 


MIC 


9:;8 


prennent ,  ou  du  moins  qu'ils  prenaicnl  aii- 
Irefois,  qui  les  aura  fait  exclure  par  quel- 
ques-uns de  l'ordre  canonique.  Celte  qualité 
de  Chanoines  Héguliers,  conjointonienl  avec 
le  nom  de  mendiants,  leur  est  cependant 
donnée  dans  le  procès-verbal  de  la  transla- 
tion du  corps  du  B.  Michel  Gedroc,  religieux 
de  cet  ordre  ,  faite  l'an  1G24  par  un  évèquc 
(le  Laodicée  sulTraganl  de  Cracovic  :  Thomas 
Ohorsik  epiccopus  Laodicensis  suffraganeus  et 
Canonicus  Cracoviensis  piœ  posterilati.  Ad 
Vei  omnipolends  gloriam  mijorem  et  sanclo- 
rum  ejus  honorem,  nolum  facimus  et  testamur 
nos  rogalos  fuisse  areligiosisPatribtis  ordinis 
Canonicorum  Rigttlariuin  Mcndicnnliwn  S. 
Malice  de  Melro  de  l'œnitenlia  sanclorum 
Marlyrum,  ut  ossa  et  cineies  servi  Dei  B. 
Michaelis  Gedroc  ordinis  prœdicli ,  in  lemplo 
eorumdem  religiosorum  Cracoviœ  S.  Marco 
dicalo  sepulli ,  e  sepulcro  vcleri  ob  inajus 
fidelium  commodum  levaremus,  etc.  {Apud 
Bolland.,  toin.  I  Maii,  in  Vila  B.  Michaelis 
Gedroc]  Ce  15.  iMichcl  Gedroc  descendait  des 
anciens  ducs  de  Lithuanic,  et  mourut  l'an 
l'»83.  Il  se  fait  tous  les  jours  plusieurs  mira- 
cles à  son  tombeau.  Lorsqu'on  fit  la  transla- 
tion de  son  corps,  le  P.  Jean-Baplisie,  llalien, 
religieux  de  l'ordre  de  Saint-François,  élail 
commissaire  général  de  l'ordre  de  la  Péni- 
tence des  Martyrs,  comme  il  est  porté  par  le 
même  procès-verbal  de  cette  translaiion.  Ils 
ont  eu  aussi  le  P.  Jacques  Przirousoieclii, 
qui  est  mort  en  odeur  de  sainicté,  l'an  IGS'J. 
Voyez  Peno',  flist.  Iripart.  Canonic.liegul. 
Le  Paige  ,  iî  6/îoï/i.  Prœmon!<t.  PielroCris- 
cenzi  ,Presid.  roimji.  llb.m,  jiog.  iJo.Crussen. 
Monaslicon  Augns'.  jiarl.  mi,  cap.  1.  Luigi 
Torelli,  Secot.  Agnsliiiian.,  tom.  IV.  Bolland. 
tom.  I  Muii,  in  Vil.  D.  Michaelis  Gedroc. 
Tambur.,  de  jure  AbOnlum,  disput.  2'i-,  quœst. 
h.  Athanasc  dt;  Sainle-Agnès,  le  Chandelier 
d'or,  et  mémoires  envoyés  de  Pologne  en  170i, 
et  1710. 

MICHEL  (Des   Chevaliers    ue   l'ordrk    de 

Saint-)  en  France. 

11  y  a  des  auteurs  qui  prciendent  que 
Charles  VU  ,  ayant  aboli  l'ordre  de  l'Etoile 
par  le  mépris  qu'il  eu  fil  en  metianl  le  col- 
lier decet  ordre  au  cou  du  chevalier  du  guet, 
et  en  ordonnant  que  ses  archers  porteraient 
sur  leurs  hoquetons  des  étoiles  ,  eut  dessein 
d'en  instituer  un  autre  sous  le  nom  de  l'ar- 
change saint  Michel ,  protecteur  du  royaume 
de  France  ,  auquel  il  avait  beaucoup  de  dé- 
votion :  ce  que  n'ayant  pu  exécuter,  à  cause 
qu'il  mourut  qu  Ique  temps  après,  Louis  XI, 
.son  fils  ,  suivant  les  volontés  de  son  père  , 
avait  institué  cet  ordre.  Mais  nous  avons 
fait  remar(iuer,  en  pariant  de  l'onlri'  d  ■  l'E- 
toile, que  Chai  les  Vil  n'avait  point  aboli  cet 
ordre,  qu'il  avait  subsisté  sous  le  règne  en- 
tier de  Louis  \1,  et  qu'il  n'aviiit  été  supprimé 
que  sous  Charles  VIII.  Brantôme  remarque 
que  Louis  XI  n'avail  pas  eu  tant  d'amitié 
pour  Charles  Vil  ,  son  père,  pour  qu'il  i  ût 
voulu  en  garder  le  souvenir  après  sa  mort  , 
])ar  rétablissement  de  l'ordre  de  Saint-Mi- 
thul,   qu'il   n'iiufail  l'ail    que  pour  exécuter 


ses  volontés,  et  d'ailleurs  il  aurait  attendu 
un  peu  tard  à  les  suivre  ,  puisque  ce  ne  fut 
que  l'an  1459,  le  neuvième  de  son  règne, 
qu'il  institua  cet  ordre  dans  le  château  d'Am- 
boise.  Il  ordonna  qu'il  n'y  aurait  que  trente- 
six  chevaliers  :  il  n'en  créa  d'abord  que 
quinze,  s'élanl  réservé  de  nommer  les  autres 
au  premier  chapitre  ;  mais  le  nombre  des 
trente-six  ne  fut  point  rempli  sous  son  règne. 
Les  quinze  pnemiers  qu'il  honora  de  cet  or- 
dre furent  Charles  ,  duc  de  Guyenne  ;  Jean  , 
duc  de  Bourbonnais  et  d'Auvergne  ;  Louis 
de  Luxembourg,  comte  de  Saint-Paul  ,  con- 
nétable de  France  ;  André  de  Laval ,  maié- 
ch  il  de  France  ;  Jean  ,  comte  de  Sanccrre  ; 
Louis  de  Beaumont .  seigneur  de  la  Foréi  et 
du  Plessis  ;  Jean  d'Estouleville ,  seigneur  de 
Torcy  ;  Louis  de  Laval ,  seigneur  de  Chàtil- 
lon  ;  Louis  ,  bâtard  de  Roui  bon  ,  comte  de 
Boussillon  ,  amiral  de  France  ;  Antoine  do 
Chabanncs,  comte  de  Dammartin,  grand  maî- 
tre de  France;  Jean,  bâtard  d'Armagnac , 
comte  de  Cominges,  maréchal  de  France  et 
gouverneur  du  Dauphiné  ;  Georges  de  la  rri- 
moiiille,  seigneur  de  Craon  ;  Gilbert  de  Cha- 
banncs, seigneur  de  Curlon  et  sénéchal  de 
Guyenne  ;  Charles,  sire  de  Crussol ,  sénéchal 
de  Poitou  ,  et  Tanneguy  du  Châtel  ,  gouver» 
neur  de  Boussillon  el  de  Sardaigne.  Il  leur 
donna  un  collier  d'or  fait  de  coquilles  entre- 
lacées d'un  double  lacs,  posées  sur  une  chalno 
d'or  ,  où  pendait  une  médaille  représentant 
l'archange  saint  Michel  terrassant  le  diable. 
Ils  étaient  obligés  de  porter  tous  les  jours  cj 
collier  à  découvert ,  sotis  peine  de  faire  dira 
une  messe  el  de  donner  une  aumône  de  sept 
sols  six  deniers  tournois  ,  excepté  lorsqu'ils 
éiaient  à  l'armée  ,  en  voyage,  dans  leurs  mai. 
sons  ou  à  la  chasse.  Il»  portaient  pour  lors 
seulement  une  médaille  attachée  à  une  chaiiie 
d'or  ou  à  un  cordonnet  de  soie  noire,  et  ils  ne 
|)ouvaient  la  quitter  dans  les  plus  grands 
dangers  ,  même  pour  conserver  leur  vie. 
Brantôme  dit  avoir  été  présent  lorsque  le  roi 
François  I''  Ht  une  sévère  réprimande  à  un 
chevalier  qui  ,  après  avoir  été  pris  dans  un 
combat,  avait  ôtè  la  marque  de  sou  ordre  , 
afin  de  n'être  pas  reconnu  pour  chevalier  do 
cet  ordre  et  ne  pas  payer  une  grande  rançon. 
Conformément  aux  statuts  de  cet  ordre,  lo 
grand  collier  doit  être  du  poids  de  deux  cents 
écus  d'or  el  ne  peut  être  enrichi  de  pierre- 
ries. Les  chevaliers  ne  le  peuvent  vendre  ni 
engager  :  il  appartient  à  l'ordre ,  et  après  la 
mort  d'un  chevalier ,  ses  héritiers  sont  obli- 
gés de  le  renvoyer  dans  l'espace  de  trois 
mois  et  le  mettre  enlre  les  mains  du  tréso- 
rier de  l'ordre.  Ils  ne  peuvent  entreprendre 
aucune  guerre,  ni  s'engager  dans  une  action 
dangereuse  ,  sans  en  avoir  donné  avis  à  la 
plus  grande  partie  des  autres  chevaliers  et 
les  avoir  consultés.  Ceux  qui  sont  Français 
ne  peuvent  s'engager  au  service  d'aucun 
prince  étranger  ,  ni  fjire  de  longs  voyages 
sans  la  permission  du  roi  ;  mais  les  étran- 
gers le  peuvent  en  le  faisant  seulement  sa- 
voir. Si  le  roi  fait  la  guerre  à  quelque  prince, 
un  chevalier  de  l'ordre  ,  sujet  de  ce  prince, 
[icut  prendre  les  armes  pour  sa   délense; 


Oo'J 


DICTIONNAinE  DES  ORDRES  REI.IGIF.UX. 


9C0 


mais  si  c'est  ce  prince  qui  déclare  la  puerrc 
à  la  l-'ranci-,  le  ciievnlicr  son  sujel  doit  s'excu- 
ser lie  servir  contre  la  France,  et  si  son  prince 
ne  veut  |>as  recevoir  son  excuse  el  le  con- 
traint de  servir,  pour  lors  il  peut  prendre  les 
iiru)'  s  contre  la  France,  mais  il  en  doit  donner 
ii\  is  au  chef  de  l'ordre  et  avcriirson  souverain 
que  !.'il  fait  prisonnier  de  guerre  un  chevalier 
de  cet  ordre,  son  confrère,  il  lui  donnera  la  li- 
berté et  fera  son  possible  pour  lui  sauver  la 
vie  ;  que  si  son  prince  n'v  veut  pas  consen- 
tir, il  doit  quitter  son  service.  Le  roi,  de  son 
côl-é,  s'engajjc  envers  les  chevaliers  do  les 
protéger  el  les  maintenir  dans  tous  leurs 
droits  et  privilèges,  de  n'enireprendre  au- 
cune guerre  ni  aucune  aiïairc  de  conséquence 
sans  les  avoir  auparavant  consuHés  et  pris 
leur  avis,  excepté  dans  les  cas  où  les  affaires 
demandent  beaucoupde  secret  et  une  prompte 
exécution  ;  et  les  chevaliers  promettent  et 
jurent  de  ne  point  révéler  les  entreprises  du 
souverain  qui  auraient  été  mises  en  délibé- 
ration devant  eux.  Selon  les  mêmes  statuts, 
les  chevaliers  doivent  être  privés  de  l'ordre 
pour  cause  d'hérésie,  de  trahison  et  de  lû- 
clieté  ,  pour  avoir  pris  la  fuite  dans  le  com- 
bat. Ils  doivent  à  leur  réception  quitter  les 
autres  ordres  qu'ils  peuvent  avoir  reçus 
d'autres  princes,  excepté  les  empereurs,  rois 
el  ducs.  Chaque  chevalier  est  aussi  obligé  , 
à  sa  récepti(m,  de  payer  au  trésorier  qua- 
rante écus  d'or  ou  l,(  valeur,  pour  être  em- 
ployés en  ornements  pour  le  service  de  l'é- 
glise ,  et  à  la  mort  <l'un  confrère  il  doit  faire 
dire  vingt  messes  et  donner  six  écus  d'or  en 
aumônes.  Les  ^laluls  portent  encore  que, 
pour  remplir  la  place  du  chevalier  décédé  , 
ils  doivent  s'assembler  avec  le  souverain  el 
donner  leurs  suffrages  par  écrit ,  mais  cela 
ne  se  |)ratiquc  plus  présentement. 

L'église  du  Mo.it-Saini-Michel  en  Nor- 
mandie fut  destinée  par  Louis  XI  pour  y  cé- 
lébrer les  divins  offices  et  recevoir  les  bien- 
faits et  l'oiidations  qui  seraient  faites  en  fa- 
veur de  l'ordre.  11  semble  ecpenitaiit  que  ce 
prince  changea  de  dessein  et  ()u'il  destina 
pour  les  cérémonies  et  les  fêles  de  l'ordre  la 
chapelle  de  Sainl-.Michel  dans  la  cour  du  1'.;- 
lais  à  Paris  :  car  par  ses  additions  aux  sta- 
tuts faites  aux  licssis-lès- Tours  le  22  dé- 
cembre li7G,  il  déclare  (]u'il  a  fait  vœu  d'é- 
tablir une  collégiale  en  l'hunncur  de  Dieu  , 
de  la  sainte  \iergc  et  de  saint  Michel  ,  et 
ayant  créé  parles  mén.es  additions  aux  sta- 
tuts un  office  de  prévôt  et  maître  des  céré- 
monies de  l'ordre,  il  ordonna'  qu'il  aura  soin, 
entre  autres  choses,  de  poursuivre  l'exécu- 
lion  de  la  fondation  de  celte  collégiale  ;  (|u'il 
en  obtiendra  les  |)eroiissions  ncrcssaires  , 
tant  des  souverains  pontifes  que  de  l'ordi- 
naire ;  qu'il  aura  l'inspection  sur  les  bàli- 
in  iiig  qu'il  prétend  (aire  faire  au  lieu  où 
fiera  fondée  cette  cullé'^iate  ;  qu'il  aura  soin 
des  réparations  et  veillera  a  ce  que  l'ollice 
divin  suit  fait  par  les  chanoines,  tant  de  nuit 
que  de  jour  ;  et  par  ses  lettres  ()alenles  du 
2»  du  même  moii,  il  lit  la  fondation  de  celte 
(ollégrate  pour  dix  chanoines  ,  uo  doyen  et 
on  ehaoïru,  huit  cbaoclains,  six  enfants  de 


chcpur,  un  maitrc  ,  deux  clercs  ,  trois  huis- 
siers ou  bedeaux,  un  receveur  et  un  con- 
trôleur, pour  faire  l'oflice  divin  dans  la  cha- 
pelle de  Saint-.Slichel  du  Palais  à  Paris.  Co 
clia'pitrc  devait  élre  immédiatemcnl  soumis 
au  saiiil-siége  et  île  nomination  royale.  Les 
prébendes  étaient  de  dix  sols  parisis  par 
jour.  Le  doyen  devait  avoir  deux  parts  ,  lo 
chantre  une  part  et  dence,  <t  les  chapelains 
demi-part  chacun.  Tour  ce  sujet  le  roi  leur 
donna  et  céda  dix  deniers  tournois  sur  le. 
droit  ordinaire  des  gabelles  qui  se  lèverait 
sur  chaque  minut  de  sel.  Le  receveur  devait 
avoir  quatre  cents  livres  parisis  de  gages,  el 
le  contrôleur  deux  cents  livres.  Le  receveur 
devait  payer  aussi  au  chancelier  de  l'ordre 
huit  cents  livres  parisis,  au  prévôt  six  cents 
livres,  au  trésorier  six  cents  livres,  au  gref- 
fier quatre  cents  livres,  et  au  héraut  deux 
cent  cinquante  livres.  Sa  Majesté  voulut 
que  ces  chanoines  ,  chapelains  et  officiers 
eussent  leurs  causes  commi>es  par-devant  les 
maîtres  des  requéle-i,  qu'ils  fussent  exempts 
de  toutes  charges  quelconques  et  im|  ositions 
de  la  part  du  roi,  de  la  v  il!e,  et  <'e  tous  autres 
privilégiés  et  non  (trivilégiés,  dont  ils  seraient 
exceptés  el  déchargés.  Mais  cette  fondation 
ne  fut  point  exécutée,  et  il  ne  se  trouve  point 
que  les  assemblées  et  les  fêtes  de  l'ordre  se 
soient  faites  dans  cette  église  ,  ni  même  dans 
l'église  du  Mont-Saint-Michel. 

La  veille  de  la  fête  de  ce  saint,  tous  les 
chevaliers  de  l'ordre  étant  au  lieu  de  l'asscm» 
bice  devaient  se  présenter  devant  le  souve- 
rain en  son  palais,  avant  les  vêpres,  el  aller 
ensemble  à  l'église,  revêtus  de  manteaux  de 
damis  blanc  traînant  à  terre,  bordés  d'or 
avec  des  coquilles  et  lacs  d'amour  en  brode- 
rie, el  fourrés  d'hermine,  la  tête  couverte 
d'un  chaperon  de  velours  ciamoisi.  Le  len- 
demain, ils  retournaient  à  l'éjilise  pour  en- 
tendre la  n<es-c;  à  l'offertoire,  ils  offraient 
une  pièce  d'or,  chacun  selon  sa  dévotion;  et 
après  l'office  ils  allaient  dîner  avec  le  roi. 
Le  même  jour,  ils  allaient  encore  à  l'égliso 
pour  les  vêpres;  mais  ils  étaient  vêtus  de 
maiteaux  iu)irs,a\  ec  des  chaperons  de  même 
couleur,  excepté  le  roi,  qui  avait  un  man- 
teau violet.  Ils  assistaient  <iux  vigiles  des 
morts,  cl  le  lendemain  à  la  messe,  à  l'offer- 
toire de  laquelle  chaque  chevalier  offrait  iiu 
cierge  d'une  livre,  où  ses  armes  étaient  atta- 
chées. Le  jour  suivant,  ils  relournai>'nt  en- 
core à  l'église  pour  enendie  la  messe  que 
l'on  chant.iit  eu  l'honneur  de  la  sainte 
Vierge;  mais  ils  étaient  habillés  comme  bon 
U'Dr  semblait. 

Il  n'y  eut  d'alxird  que  quatre  officiers  do 
l'ordre,  savoir  :  le  chanceiier,  le  greffier,  le 
trésorier  el  le  héraut,  appelé  Mont-Sa'Ul- 
Michel.  Ils  avaient  des  robes  longues  de  ca- 
melot lilaiic,  fourrers  île  menu  vair.  avec  des 
chaperons  d'écarlaie;  et  le  chancelier  devait 
êlre  toujours  ecclésiastique.  Le  prieuré  de 
Grandmont,  dans  le  parc  de  \'inci'nne5,  a  été 
pendant  un  temps  considérable  annexé  à  la 
dignité  de  chancelier  de  l'ordre  de  Saint- 
Michel.  Le  caidiiial  de  Lorraine,  le  cardinal 
Gabriel  le  Veaeur,  évêiiue  d'Fvreux  ,  cl  l'hi- 


961 


MIC 


MIC 


962 


lippe  Huraut,  comlc  de  Chiverni,  chnncelii^r 
de  France,  l'onl  possédé  en  cette  qunlité.  Ci? 
dernier  en  était  prieur  lorsque  le  roi  Honri  1!I 
fit,  l'an  ISSîp,  un  concordat  avec  François  de 
Neuville,  génér.il  de  Tordre  di'  Granilinoni, 
par  lequel  ce  prieuré  fut  distrait  de  cet  ordre 
pour  être  transféré  à  ici  autre  qu'il  pi  lirait 
H  Sa  Majesté, qui  donna  en  éclianf,'e  à  l'ordre 
lie  Grandmoni  le  collège  de  Mignon,  à  Paris  ; 
en  qui  fut  confirmé  par  le  pape  (jrégoire  XII!. 
Le  roi  introduisit  d'ahord,  dans  ce  couvent, 
des  Cordeliers  qui  l'abandonnèrent  la  nu'iniî 
année,  et  il  mit  en  leur  place  des  Minimes 
(|ui  y  sont  restés  jusqu'à  présent.  Ainsi  lo 
liire  de  prieur  fui  supprimé,  et  l'oflice  de 
chancelier  de  l'ordre  de  Sainl-Michul  uni  à 
celui  de  chancelier  do  l'ordre  du  Saint- 
Esprit,  que  ce  prince  avait  institué  en  1578. 
Louis  XI  étant  au  Plessis-lès-Tours,  l'an 
ti76,  avait  ajouté  à  ces  quatre  offices  un 
prévôt  maître  des  cérémonies,  comme  nous 
avons  dit  ci-devant.  Louis  Xli,  ayant  con- 
quis le  royaume  de  Naples  avec  Ferdinand  V, 
roi  d'Araii;on,  qui  devait  se  contenter  pour 
sa  part  de  la  Pouille  et  de  la  G;ilabre,  le 
reste  étant  demeuré  aux  Français,  fit  cheva- 
liers de  l'ordre  de  Saiiil-Michel  :  Troiano 
Caraccioti,  prince  de  Melphi  et  duc  d'Atri, 
grand  sénéchal  de  Naples  ;  Bernardin  de 
Sanseverino,  prince  de  Bisignano  ;  André- 
Matthieu  Aquaviva,  duc  d'Alri  il  prince  de 
Terrane  ;  el  Jean-Antoine  Caraffa  ,  duc  de 
Madaloni.  Mais  les  Espagnols  ayant  ensuite 
chassé  les  Français  de  tout  le  royaume,  dont 
ils  se  rendirent  uiaitres,  ces  seigneurs  napo- 
litains renvoyèrent  le  collier  de  l'ordre  à 
Louis  XII,  l'an  1511. 

François  1"  fil  du  changement  à  ce  collier  : 
il  lit  ôtcr  les  doubles  lacs  pour  mettre  une 
cordelière,  lanl  à  cause  qu'il  s'appelait  Fran- 
çois, que  pour  conserver  la  mémoire  d'Anne 
de  Bretagne,  sa  belle- mère  qui  l'en  avait  [irié 
seloiiledireileFavin.  Le  môme  roi  ayant  en- 
voyé l'ordre  de  Saint-Michel  à  Henri  VIII, 
roi  d'Angleterre,  ce  prince  lui  envoya  aussi 
l'ordre  de  la  Jarretière  ;  et  François  l""', 
l'ayiinl  reçu,  tint  un  chapilre  des  chevaliers 
d,»  l'ordre  de  Sainl-iMichel,  devant  lesquels  il 
fil  lire  les  lettres  d'Henri  Vlll,  par  lesquelles 
ce  prince  déclarait  avoir  accepté  l'ordre  de 
Saint-Michel  et  avoir  associé  à  celui  de  la 
Jarretiire  François  1"  :  c'est  ce  qui  paraît 
par  les  lettres  de  ce  dernier  que  M.  Aslimole 
a  mises  à  la  fin  de  son  Histoire  de  l'ordre  de 
la  Jarretière,  et  que  nous  rapporterons  ici. 

François  par  ia  grâce  de  Dieu  rui  de 
France,  i-eigneur  de  Gennes,  souvifciin  du 
très-noble  ordre  de  Monseigneur  saint  Michel, 
ù  tous  ceux  qui  ces  présent' s  lettres  verront, 
Saluï,  comme  messire  Artus  Planiaginet,  Vi- 
comte de  l'Isle,  chevalier  du  très-digne  ordre 
de  Monseigneur  saint  Genge^,  messire  Jean 
Taillour,  docteur  ez  loix,  archidiacre  de  Buu- 
kiiigam,  vice-chancelier  a'Angletirre,  me: sire 
Nicolas  Corew,  grand  escuier  d'Angleterre , 
mes>ire  Antoine  Ërowne,  clievalier,  et  messire 
Thomas  Wriothes  Jarretière,  chevalier  pre- 
mier roi  d'armes  dadit  ordre,  ambassadeurs 
commis  el  déléguez  de  la  pari  de  très-haut  et 


très-puissant  prince  Henri  par  la  même  grâce 
de  Dieu  roi  d' Angleterre,  seigneur  d'Uyher- 
nir  dejfenseur  de  la  foi,  notre  très-cher  el 
très-amé  frère,  cousin,  perpétuel  allié ,  confé- 
déré, et  bon  compère,  nous  aient  exhibé  el  re- 
présenté certaines  lettres  patentes,  dattées  du 
vingt-deuxième  jour  d'octobre  1527,  signées 
Sarnpson,  et  scellées  en  cire  rouge  du  sceau 
du  collège  et  d'icelai  très-digne  ordre  de  saint 
Georges,  dit  la  Jarretière  par  la  teneur  des- 
quelles qu'avons  fait  lire  parJevant  nous,  et  les 
chevaliers  de  noire  ordre  de  saint  Michel, nous 
apparoissoil  /e<  susd.amb  issadeurs  avoir  plein 
pouvoir,  faculté  et  puissance  de  nous  signifier 
et  présenter  de  la  part  de  notre  dit  très-cher 
fi  ère  et  cousin  souverain  d'icelui  très-digne 
ordre  de  saint  Ge  irges,  et  aussi  de  l'amiable 
association  d'icelui  ,  l'élection  uniquem(nt 
fiite  de  nous,  pur  iccux  souverain  et  cheva- 
liers d'icelui  irès-digne  ordre,  et  de  nous  prier 
et  requérir  icelle  élection  accepter  et  prendre 
le  manteau  et  colli  r  et  autres  insignes  de  che- 
valier dadit  très-digne  ordre,  et  fai  e  le  ser- 
ment selon  les  articles  contenus  au  livre  des 
statuts  dudit  ordre ,  el  que  ont  accoutumé  de 
jurer  el  promettre  les  chevaliers  d'icelui,  et  si 
la  forme  desdils  serments  ne  nous  était  pas 
agréable,  leur  était  donné  pouvoir  de  nous 
dispenser  de  faire  lesd.  sermens  on  partie  d'i- 
ceux  tels  qu'il  apparliendroil ;  soi  contentant 
de  notre  simple  foi  et  parole ,  sçavoir  faisons 
que  nous  aiant  égard  et  considération  à  la 
très-cordiale  el  Irès-entiere  amour,  alliance  et 
indissoluble  et  confédération  perpétuelle,  (jui 
est  entre  noire  dit  très-cher  el  très-amé  frère, 
cousin,  ailié  peipctucl,  et  bon  compère  et 
nous,  et  que  de  sa  part  il  a  accepté  l  élection 
par  nous  et  nos  frères  faite  de  sa  personne  an 
très-digne  ordre  de  saint  Michel  duquel  nous 
sommes  souverains,  avens  pour  ces  causes  et 
autres  à  ce  nous  mouveans,  accepté  el  accep- 
tons icelui  très-digne  ordre  de  sainl  Georges 
dil  la  Jarretière,  et  ce  fait  nous  sommes  revê- 
tus et  affublés  du  manteau  et  autres  insignes 
dudit  ordre  à  nous  présentez  et  livrez  par  les 
susd.  ambassadeurs ,  et  après  les  remercimens 
en  tels  cas  requis,  avons  fait  le  serment  en  la 
forme  el  manière  qui  s'en  suit:  Nous  François 
par  la  grâce  de  Dieu  roi  de  France,  seigneur 
de  Gennes  et  souverain  de  l'ordre  de  saint 
Michel,  promotions  en  parole  de  roi  de  gar- 
der et  observer  et  à  notre  pouvoir  entretenir 
les  statuts  et  ordonnances  du  très-digne 
ordre  S.  (ii  orges  nommé  la  Janeliere  en  ce 
qu'ils  sont  compatibles,  non  contraires,  ne 
derogeans  à  ceux  lie  nolrtf  dit  ordre  de  S. 
Miehel,  et  pareillement  des  ordres  que  par  ci 
devant  pouvions  avoir  pris  des  autres  prin- 
ces, t'n  lémoing  de  ce  nous  avons  fait  mettre 
le  sceau  dudit  ordre  aux  présentes  signées  de 
notre  main.  Donné  à  Paris  le  10'  jour  de  no- 
vembre l'an  de  grâce  mille  cinq  cens  vingt-sept 
et  de  notre  règne  le  treizième. 

Henri  11,  ét.mt  parvenu  à  la  couronne  de 
France,  ordonna,  dans  le  premier  chapilre 
de  l'ordre  de  Saint-.Michel,  qu'il  tint  à  Lyon, 
où  il  fil  son  eniree  l'an  15i8,  que  les  cheva- 
liers de  cet  ordre  porteraient  à  l'avsnir  le 
manteau  de  toile  d'argent,  brodé  à  l'enlour 


ECS                                           MCTUNNAinF.  DKS  OUDRF.S  RF.LIGUIUX.  9GV 

(le  sa  (Ic'viso,  savoir  :  trois  croissants  d'ar-  et   «li-  sorvi,  ps,  et   iiuc  plusieurs  étranpcrs 

genl  t'iitrclarcs   de   Iroplu'es,  semés  de  I m-  avaient  surpris  des  rertilic.its    do  réceplioi» 

g'ies  el  naninics  de  feu,  avec  le  chaperon  de  sans  ses  ordres   parliruliers,  orilonna,  le  li 

vcliiiirs  rouge  cramoisi  couverl  de  l.i  même  juillet  IGIJI,  à  tous  ceux  qui  avai<-nt  été  reçus 

broderie;  «(ue  le  diancclior  porterait  le  man-  dans  cet  ordre,  de  porter  ou  d'envoyer  aux 

teau  de  velours  blanc  el  le  rhaperon  de  ve-  <omniissaircs  que  Sa  Majesté  nomr.ia,  les  ti- 

lours  cramoisi;  quo   le  prévôt  et  maitre  des  très  et   preuves  de  leur  noblesse  cl  de  leurs 

cércniones,  le  trésorier,  le  greffier  el  le  hé-  services,  l'iusieurs  ayant  ohéi,   cl  les  autres 

raut,  auriiienl  un  manteau  de  satin  blanc  et  ayant  iiéglipé  d'y  satisfaite  pjir  la  crainte  do 

le  (baperon  de  satin  rramoisi,  et  qu'ils  por-  faire  connaître   leur  naissance  el  rimpossi- 

Uraicnl  une  chaîne  d'or  au  bout  de  bxiuelle  bililé  où  ils  se  trouvaient  de  donner  des  cer- 

peniirait  sur  l'estomac  une  coquille  d'or  seu-  tilirats  de  leurs  services,  le  roi  fil,  l'.in  1C05, 

lement.  Tous  les  chevaliers  qui  étaient  pré-  un  nouveau  règlement   portant  que  tous  les 

seuls  assistèrent  avec  le  roi,  pour  la  solen-  statuts,  ordonnances  el  rèi;leinenls  faits  los 

n:lé  de  l'ordre,  dans   l'église  cathédrale  de  de  l'établissement  de  l'ordre  de  Saint-Michel 

Sainl-Jean  de  Lyon,  aux  premières  vêpres  de  par  le  roi  Louis  XI  etdcpuis,  ser.iieni  inv  io- 

l.i  fête  de  saint  Micliel,  el  le  lendemain  à  la  lablenient  observés  ;  que  le  nombre  de  cciiv 

grand'messe  et  aux  secondes  vêpres.  qui  seraient  admis  à  l'avenir  dans  cet    ordre 

S  ais  le  règne  des  enfants  de  ce  prince  l'or-  serait  réduit  à  cent,  outre  les  cheialiers  du 
die  coinm  nça  à  s'avilir  par  le  grand  nom-  Saint-Lsprit,  parmi  lesquels  il  y  aurait  six 
bre  de  chevaliers  que  l'on  fit  au  delà  de  celui  ecclésiastiques  prélres  âgés  do  trente  ans  l'I 
porté  p;ir  les  statuts,  qui  n'était  que  de  trente-  constitués  en  dignités  d'ablés  ou  de  c!;ar^es 
six.  François  11  en  fildix-huil  dans  une  seule  principales  des  églises  cathédrales  et  colle- 
ci  éalion  à  l'oissy  l'an  1360,  dont  on  murmura  giates,  et  six  olfiiiers  des  compagnies  souve- 
forl.  L'annéesuivanteCharleslXen  fitquinze  raines  ;  à  condition  toutefois  qu'ils  firaient 
dans  uneproniolion  àSainl'Germain  en  Laye.  les  mêmes  preuves  de  leur  naissance  el  de 
On  ajouta  àcegrandnombrelrente-troischeva-  leurs  services  ((ue  les  chevaliers  militaires, 
tiers  dans  une  autre  promotion,  et,  en  1362  lesquels  auraient  seuls  le  droit  de  porter  l'or- 
et  1367,  on  en  fil  encore  vingt-deux.  Les  dre,  de  s'en  qiia'ilier  chcvaiirrs,  el  de  jouir 
Irouiiles  de  la  France  obligîrent  depuis  le  des  droits,  privilèges  et  avantages  y  atlachés; 
roi  d'en  f.iire  d'autres,  dont  il  y  en  avait  faisant  déleuses  Irès-expresses  à  tous  les  a.  • 
(]uclques-iins  qui  n'étaient  pas  de  naissance  ;  1res,  de  quelque  condition  qu'ils  fussent,  de 
car  liraiilôme  dit  que  le  marquis  de  Trannes  plus  porter  la  qualité  de  chevalier  ni  bdil 
lit  donner  cet  ordre  à  son  maître  d'hôtel.  Ces  ordre,  nonobstanl  tous  les  brevets,  lettres  de 
frè(|uenles  promotions  firent  interrompre  la  cachet  el  certificats  de  réception  qu'ils  au- 
pompe  dos  chapitres  el  des  cérémonies  où  le  raient  obtenus,  lesquels  Sa  M. ijesté  déclara 
roi  assistait  avec  les  chevaliers.  11  se  fit  plu-  nuls  et  de  nul  effet:  qu'à  l'avenir  nul  ne 
sieurs  rece[. lions  dans  les  provinces,  avec  pourrait  être  idmis  à  l'honn.  ur  de  rece- 
peu  d'appareil,  par  les  chevaliers  de  l'ordre  voir  i  el  ordre  qu'il  ne  fut  de  la  religion 
à  qui  la  commission  était  adressée.  Le  der-  catholique,  apostolique  el  roaiaine,  de 
nier  chapitre  où  se  trouva  Charles  iX  lui  ce-  bonnes  mœurs,  âgé  de  trente  ans,  noble  de 
lui  qui  se  tint  dans  l  église  de  Nuire-Dame  à  deux  races,  el  ayant  servi  Sa  Majesté  et  l'E- 
l'aris.  la  veille  de  saint  Miche!  de  l'an  1572:  lat  en  des  emplois  considérables  dans  les  ar- 
le  roi  prit  sa  place  à  main  droite  sous  un  mées,  au  moins  l'espace  de  dix  ans,  et  ceux 
dais  de  drap  d'or,  el  à  la  gauche  il  y  avait  un  de  justice  pendant  le  même  temps,  et  à 
pareil  dais  sous  lequel  étaient  les  armes  des  cette  fin  celui  que  Sa  Majesté  trou*erail  ca- 
rois  d'iispagne, de  Danemark  et  de  Suède,  qui  p;ible  de  recevoir  cet  honneur,  obtiemtrail 
étaient  aussidievalieis  de  celordre.M.lc  La-  ui>c  commission  signée  de  sa  main,  conlre- 
boureur  dit  qu'Henri  III  le  supprima  lacile-  signée  du  secrétaire  des  ordres  et  scellée  du 
nient  en  instituant  Celui  du  .^aint-Fs|iril,  au-  grand  sceau  de  l'ordre  de  Saint -.Michel, 
quel  il  le  reunit. (;ependant  ce  prince,  par  la  adressée  au  chevalier  de  l'ordre  du  Sainl- 
crèalion  de  l'ordre  du  Sainl-Kspril,  déclara  Ksprit  que  Sa  M.ijes  é  commeitrait  pour  in- 
qu'il  voulait  el  entendait  que  l'ordre  de  Saint-  former  des  f.iils  ci-dessus  et  examiner  b  s 
Michel  demeurât  en  sa  force  el  vigueur,  et  preuves  t. int  de  la  noblesse  que  des  scrviees: 
qu'il  fut  observé  comme  il  avait  été  pratiqué  lesquelles  étant  faites  seraient  mises  dans 
de|iuis  sa  première  institution.  Fn  efl'el  tous  un  sac  cacheté  et  scellé  du  cachet  des  armes 
les  chevaliers  de  l'ordre  du  Sainl-lîspril  du  commissaire  avec  son  avis,  cl  délivrées 
rrcnnent  l'ordre  de  Sainl-Micliel  la  veille  du  entreles  mains  du  chancelier  des  deux  ordres, 
jour  qu'ils  doivent  recevoir  celui  du  Sainl-  pour  en  faire  rapport  a  Sa  Majesté,  lai|uelle, 
l^spril;  c'est  pour(|uoi  leurs  armes  sont  en-  par  l'axis  des  confrères  (,u'i'lle  appcllerail. 
tourées  des  deux  co. tiers,  el  ils  sont  appelés  ordonnerait  ce  qui  lui  plairait  sur  la  récep- 
chevaliers  de  l'i  rdrc  ilu  roi.  lion  ou  exclusion  de  celui  qui  aurait  été  pié- 

Le   roi   Louis   XIV,   ayant   reconnu  qu'il  senié  ,  el  qu'à   ré;;ard  de  ceux  que  Sa  .Ma- 

s'é'ail  introduil  une  infinité  d'abus  el  de  co;.-  jestè   jugerait    dignes   de  cet  honneur,   elle 

Iraventions    aux    anciens    statuts    el  règle-  écrirait   au   commissaire   de  leur  donner  le 

ments  de  l'ordre  de  Saint-Mii  bel,  qu'il  èlait  collier  m  la  firine  ordinaire  et  accoutumée: 

avili  en    la   personne  de  plusieurs  parlicu-  ((u'alin  de  m.iintenir  et  ordre  dans  la  règle 

liers  qui  se  qualifiaient  chevaliers  de  cet  or-  cl  dignité  coiven^ible,  tous  les  ans,  au  jour 

dre  saub   avoir    fait  preuves   de    noblesse  cl  fétu  de   saiiil  Michel,  tous  les  chevaliers 


505 


MIC 


MIC 


1366 


s'assembleraient  en  chapitre  dan.s  la  salle  <ii's 
Corcti'liers  de  la  ville  lie  Paris,  à  laquelle  as- 
semblée présiderait  le  commissaire  nommé 
par  Sa  Majesté,  et  en  son  absem  e  le  plus 
ancien  des  chevaliers,  où,  après  avoirassislé 
en  corps  à  la  messe  solennelle  qui  serait  cé- 
lébrée, l'on  proposerait  et  l'on  examinerait 
tous  les  règlements  nécessaires  pour  y»j-éus- 
sir;  que  des  délibérations  il  serait  tenu  re- 
gistre par  celui  qui  serait  commis  par  le  se- 
crétaire des  deux  ordres  ;  et  que  les  fais  qui 
seraient  nécessaires  pour  la  célébriition  des 
messes  et  des  assemblées  seraient  pajcs  sur 
les  deniers  dti  marc  d'or,  par  les  ordoun  m- 
ces  du  chancelier  des  deu\  ordres  ;  qu'aucun 
des  confrères  ne  pourrait  se  dispenser  d'as- 
sister au  chapitre  général,  s'il  n'avait  une 
excuse  légitime,  auquel  cas  il  enverrait  pro- 
curation à  lel  des  confrères  qu'il  aviserait 
pour  consentir  et  signer  les  propositions  et 
délibérations  qui  seraient  prises  au  chapitre, 
à  la  pluralité  des  voix  ;  que  si,  après  avoir 
été  reçu  dans  cet  ordre,  aucun  des  confrères 
changeait  de  religion,  il  serait  obligé  de  re- 
mettre son  ordre  entre  les  mains  du  doyen 
des  chevaliers  sans  qu'il  pût  continuer  à  le 
porter  tant  qu'il  ne  ferait  pas  profession  de 
la  religion  catholique,  apostolique  et  ro- 
maine, sous  peine  d'être  dégradé  de  noblesse; 
comme  aussi  s'il  arrivait  qu'aucun  des  con- 
frères fit  quelque  acte  dérogeant  à  la  no- 
blesse <t  à  la  dignité  de  l'ordre  de  chevalerie, 
il  serait  déchu  de  tous  les  honneurs  et  avan- 
tages qui  y  sont  attachés  et  serait  puai  selon 
la  rigueur  des  ordunnances;  qu'aucun  des 
confrères  ne  pourrait  se  dispenser  de  porter 
la  croix  de  l'ordre,  qui  serait  de  la  même 
forme  et  figure  et  plus  peiite  de  moitié  qiie 
celle  du  Saint-Esprit,  à  l'exception  de  la  co- 
lombe qui  est  au  milieu,  au  lieu  de  laquelle 
seiait  représentée  en  émail  l'image  de  saint 
Michel,  laquelle  serait  portée  en  écbarpc  avec 
un  ruban  noir;  qu'aux  assemblées  des  céré- 
monies et  autres  occasions  où  Sa  Majesté 
voudrait  appeler  des  confrères  de  cet  ordre, 
ils  seraient  tenus  de  se  rendre  auprès  dr  sa 
personne  pour  1 1  servir  où  il  leur  serait  com- 
mandé; que  tous  les  chevaliers  et  confrères 
seraient  obligés  de  porter  l'épce,  excepté  les 
six  ecclésiastiques  et  les  six  qui  seraient  de 
compagnies  souveraines.  Enfin  Sa  Majestéor- 
doiina  a  ses  ambassadeurs  dans  les  royaumes 
et  pays  étrangers,  «ie  s  informer  soigneuse- 
ment du  nom,  des  qualités  et  des  services  de 
ceux  qui  prétendaient  avoir  droit  de  porter 
les  marques  de  cet  ordre,  pour,  sur  les  mé- 
moires qui  lui  en  seraient  envoyés,  confir- 
mer ceux  qu'elle  jugerait  en  être  dignes  ;  et 
cependant  elle  déclara  nulles  et  de  nul  ellet 
cl  valeur  les  expédiions  que  les  étrangi  rs 
en  avaient  obtenues,  et  les  dispensa  de  l'ob- 
servation du  sermeot  qu'ils  pouvaient  avoir 
fait  lorsqu'ils  étaient  entrés  dans  cet  ordre. 
Sa  Majesté  chargea  ses  mêmes  ambassadeurs 
de  faire  les  instances  convenables  auprès  de 
l'ciiipereur,  des  rois,  des  souverains,  répu- 
bliques et  puteiitals,  dont  ceux  qui  avaient 

(1)  Vci/.,àlaDudu  vol.,  n' 242. 


surpris  de  pareils  certificats  de  réception  se 
trouvaient  sujets  ,  pour  leur  défendre  de  se 
qualifier  à  l'avenir  chivaliers  de  cet  ordre, 
jusqu'à  ce  qu'avec  connaissan(e  de  cause 
Sa  Majesté  leur  eût  conféré  celte  qualité, 
comme  supernuméraires  et  non  compris  dans 
le  nombre  réglé  de  cent  pour  ses  sujets,  Sa 
Majesté  se  réservant  d'accorder  ces  grâces 
honoraires  sans  limitation  aux  étrangers 
qui  les  auraient  méritées  par  leur  naissance 
et  par  les  services  qu'ils  auraient  rendus  à 
la  couronne.  Quoique  par  ce  nouveau  règle- 
ment il  soit  porté  que  les  chevaliers  de  l'or- 
dre de  Saint-Michel  doivent  s'assembler  tous 
les  ans  en  chapitre  aux  Cordeliers  de  Paris, 
et  que  leur  croix  doive  être  attachée  à  un  ru- 
b.in  noir  en  écharpe  ,  il  y  a  néanmoins  long- 
temps que  les  chapitres  ne  se  sont  tenus,  et  ils 
portent  présentement  par  tolérance  la  croix 
attachée  à  un  ruban  bleu,  à  la  boutonnière 
du  justaucorps.  Nous  donnons  ici  l'haltille- 
ment  des  chevaliers  de  cet  ordr>',tel  qu'il  est 
représenté  à  la  Sjinte-Chapelle  de  Vincen- 
nes  (Ij. 

Favin,  Théâtre  d'honneur  et  de  chevalerie. 
Le  Laboureur  ,  Additions  aux  Mémoires  de 
Cnstelnau.  HernardGiustiniani,  Hisl.  di  tutt. 
gli  Ord.  milit.  Munneuius,  De  Belloy,  Hermau 
etSchoonebeck,  dam  leurs  llist.  des  Ordres 
mililaires.  Mezcray,  Hiil.  de  France  sous 
Louis  XI.  Elie  Ashmole,  son  Traité  de  C ordre 
de  la  Jarretière.  Francesco  Caraccioli,  7V«- 
poli  sacra  ;  les  statuts  de  l'ordre  de  Saint- 
Michel  ;  et  les  Reihcrches  historiques  de  l'or- 
dre du  Saint-Esprit,  lom.  III. 

Outre  ce  que  fit  Louis  XiV  en  faveur  de 
cet  ordre,  Louis  XV  lui  donna  aussi  un  nou- 
veau lustre,  en  exigeant  que  tous  ceux  qui 
seraient  nommés  chevaliers  du  Saint-Esprit, 
seraient  préalablement  chevaliers  de  Saint- 
Michel  ;  voilà  ce  qui  expliquecette  qualifica- 
tion qu'on  rencontre  de  temps  à  autre  :  che- 
ralier  des  ordres  du  roi,  et  les  statuts  de  (et 
ordrefurentiéimprimésà  l'imprimerie  royale 
en  1723. 

Louis  XIV,  en  16G5,  avait  limité  le  nom- 
bre des  chevaliers  à  cen',  outre  ceux  du 
Saint-Esprit;  Louis  XVIII  fixa  aussi  ce  nom- 
bre par  une  ordonnance  du  16  novembre 
1816. 

Parcelle  ordonnance,  qui  relève  cette  di- 
gnité, abolie  comme  les  autres  chevaleries  en 
juin  1790,  il  est  rappelé  ou  établi  que  l'ordre 
de  Saint-Michel  est  spécialement  destiné  à 
servir  de  récompense  et  d'encouragcmeui 
aux  Français  qui  se  distinguent  dans  les  let- 
tres, les  sciences  et  les  arts,  ou  par  des  dé- 
couvertes, des  ouvrages  ou  des  entreprises 
utiles  à  l'Etat.  Il  est  également  statué  que 
toute  demande  d'admission  dans  l'ordre  est 
adressée  au  ministi  e  de  la  maison  du  roi,  qui 
en  fera  son  rapport  à  Sa  Majesté,  et  propose 
celles  susceptibles  d'être  accueillies. 

Le  grand  collier  de  l'ordre  était  en  or,  et 
se  composait  dccoquillesd'argeutenlrtlacées 
l'une  dans  l'autre  par  des  aiguillettes  d'or. 
Ou  suspendait  au  milieu  une  médaille  re^^ré- 


367 


DICTION.NAint  H..S 


sotil.int  sainl  .Miiliol  riuil.int  nux  picJs  Ip 
ilrai;on.  La  dccitialioii consi^kiil on  une  croix 
d'or  à  liuii  poinU'S  oiiwiillées  de  lilanc  can- 
lonnocs  di'  q'ialrc  lli-urs  di-  lis  d'or,  chargées 
l'ii  cœur  d'un  saiiil  Micli'l  foulanl  aux  pii'ds 
If  dragon,  lo  l'Ul  de  culcur  naturelle.  I.c< 
chevaliers  porl.iient  sur  Ifur  veste  un  grand 
ruban  de  soie  Roir<',  moiré,  passé  de  l'épaule 
droite  au  c6ié  gauclie  ,  auqu.'l  élail  attachée 
la  croix  de  l'ordre. 

L'ordre  de  Sainl-Michel  lenail  comme  le 
milieu  entre  les  ordres  rcliirieux  cl  militai- 
res, comme  celui  de  Notre-Dame  du  Monl- 
Cartnel  et  de  Sainl-1-azare,  et  les  ordres  de 
chevaleri'-  qui  étaient  simplement  n.ililaircs, 
comme  l'élail.  par  exemple,  C'Iui  des  clieya- 
li(  rs  de  Saint-Louis.  On  dislinguail,  dans 
l'ordre  de  Sainl-Michcl,  les  chevaliers  admis 
des  chevaliers  reçus  ;  il  y  avait  au^si  à  la  îin 
des  chev.iliers  hoiiorai-es.  Kn  1789,  rannéo 
qui  précéda  la  ^u|lpression,  il  y  av;.il  soix.in- 
le-di\-huit  chevaliers  reçus,  dont  le  deinier 
(en  1788)  élail  M.  Malhieii,  mailrc  de  musi- 
que de  la  chapelle,  à  Versailles,  cl  le  plus 
ancien  (en  17V2)  était  le  marquis  de  Roux  , 
conseiller  d'Elil,  doyen  de  l'ordre,  el  de- 
meuraiil  a  Marseille.  Il  y  arail  aussi  alors 
douze  chevaliers  siuiplement  admis.  On  re- 
çut, en  178-,  deux  autres  chevaliers,  cl  on 
uv.iil  nrfmi.i,  eu  1788,  le  baron  Chuplal ,  que 
D'^us  ne  voyous  point  au  rang  des  douze  in- 
diqués ici.  Il  y  euldeux  nominalion'î  en  1790, 
cinq  en  1797,  une  l'année  suivanle  el  une 
en  1800,  faites  par  les  Bourbons  en  l'exil.  En 
1815,  au  retour  du  roi,  il  y  cul  une  seule 
iiominalion,  et  on  eu  compta  trente-trois  eu 
18l{),  qui  f'il  l'année  de  la  re>laural  on  de 
l'ordre,  par  l'ordoimancc  dont  nous  avons 
pirlé.  Il  y  cul  des  noininalioMs  les  années 
suivanlrs,  surlnnt  en  1S11>  cl  1821,  m  is  sous 
le  roi  Louis  XN'lll  il  n'y  eul  point  d'admis- 
sions; ce  piinec  nomma  aussi  dès  !810  et  de- 
puis des  chevaliers  bouor;iires  résidant  en 
p.iys  étrangers.  Après  une  interruption  de 
plus  de  Ireulc-cinq  ans,  il  y  eul  a  Iteims  , 
après  le  sacre  de  Charles  X,  une  rcceplion 
solennelle  des  chevaliers  el  cnmniaudeurs 
des  ordres  du  roi.  Elle  se  fil  L-  luuiii  .'iO  mai 
18-2.0,  dans  la  cathédrale.  Avant  lacéiérnonie, 
M.  le  dauphin  recul,  suivant  la  rè^le  et  l'u- 
sage, chevaliers  de  l'ordre  de  Saint-Michel, 
tous  les  chcvalie  s  qui  .illaienl  être  reçus 
chevali<TS  du  Sainl-Esprit.  En  182G,il  y  eut, 
le  2'>  SPpleinbre,  jour  de  saint  M.chel,  ;inni- 
versairc  de  la  naissance  ilu  dur  de  liordeaux, 
convocalion  du  chapitre  de  l'ordre  <le  Sainl- 
Miclicl,  en  la  fête  patronale  de  l'ordre.  Le 
baron  de  ISallainvILiers  recul,  en  qu.ilité  de 
couiniissaire  du  roi,  le  serment  des  chevaliers 
nommés  de[)ui8  la  restauration.  On  comptaii, 
au  commencement  de  l'année  18.'i0,  95  che- 
valiers reçus  el  dix  chevaliers  honoraires. 
A  la  PentecAle,  le  roi  Charles  X,  ayant  tenu 
chapitre  de  l'ordre  du  Saml-Esprit  el  reçu 
des  chevaliers,  admit  aussi  piéalablemcnl  , 
confoi  mément  auxslaiuls,  des  candidats  dans 
l'ordre  de  S  lin'- Michel,  ('et  ordre  ,1  eé  aboli 
de  fait  p.ir  l.i  rcvolutinn  de  juillet  18.'i0. 

Dutionnmrt  dts  Sciences  ecrlesiinliqucs  de 


ORnuES  UEi.iGiEUX.  gcs 

Richard.  —  Ami  de  la  r^lii/ion.    Almanurhs 
royaux.  lî-ii-E. 

MICHEL  (Chevaliers  de  Saint-).  Voy.  Am- 
roi  LK  (Sainte). 

MICUI:L  de  MURANO  (Coxgbégation  uk 
Saint-).  Vojj.  Camaldulks,  §  II. 

MILICE  DE  JÉSUS-CHRIST  (CnKVAUi  rs 
DE  la).  Voy.  PASsmN  de  Jésus-Christ. 

MILICE     DE    JÉSUS-CHRIST    OD    DE    LA 

l'ENM'ENC'^E  (Ordre  de  la'.  Tiers  Ordre 

de  Saint-Dowinique. 

L'on  ne  sait  point  l'année  de  l'élahlisse- 
menl  du  Tiers  Or  Iro  dos  Frères  Prêcheurs, 
qui  est  connu  sous  le  nom  de  I  i  l'énitence  «le 
Saint-Diiminique.  Tons  les  historiens  con- 
vienncnl  que  ce  saint  palriarclie  de  l'oidrc 
des  l'rères  Prêcheurs  établit  un  ordre  mili- 
l.iire  sous  le  nom  de  Milice  de  .léNUs-Chrisl, 
pour  comballrc  les  ennemis  de  la  foi  ;  mais 
les  écrivains  de  son  ordre  n  ■  sont  pas  d'ac- 
cord entre  eux  si  ce  fut  du  vivant  de  ce 
sainl  ou  après  sa  mort  que  cette  milice  mil 
les  armes  bas,  el  que  ceux  qui  y  étaient  en- 
pages,  voulant  se  (•on^erve^  en  société,  pri- 
nnt  le  nom  de  pcnitenls  de  Saint-Dominique 
pour  honorer  la  mémoire  de  li'ur  saint  iiisli- 
luteiir.  C'est  ce  qui  a  forme  le  Tiers  Ordre 
des  Frères  Prêcheurs,  qui  apparemm<'nl  a 
été  si  peu  considérable  pendant  les  deux 
[ircniiers  siècles  de  .^oii  étaMisscmenI,  que 
l'anlV22on  ignorait  même  quelle  éiail  la 
règle  que  suivaient  ceux  el  celles  qui  y 
élaiinl  ei;gigés,  et  qu'on  ne  savait  pcul-él;e 
par,  (|uclle  était  l'origine  de  ce  Tiers  Ordre; 
c'est  pou  quoi  deux  religieux  du  premiir 
oidre,  soit  qu'ils  en  eussent  commission  de 
leurs  supérieurs,  ou  qi'ils  voulussent  reia- 
1  lir  el  l'aire  <onnaitre  ce  Tiers  Ordre,  Tu enl 
une  reclieci  he  exacte,  en  14-22.  de  la  lègU; 
que  suivaient  les  Frères  et  Sœurs  de  l;i  Péni- 
tence de  Saint-Dominique,  el  après  avo  r 
api  orlé  toutes  les  diligences  nécess  lires  pour 
ceia,  ils  ne  purent  rien  trouver  qui  ne  lui 
conforme  à  ce  qu'en  avait  d.  j,i  écrit  le  bien- 
heureux Raymond deCapoue,  >  ingt-deuxième 
gi  ncral  de  cet  ordre,  dans  le  liuilièmc  cha- 
pitre de  la  Vie  de  sainte  ('aiherine,  qui  .iva.l 
et.;  de  ce  Tiers  Ordre,  /'n/e.if,  disent-ils,  7'»  «cf. 
de  Reij.Terl.  Ord.,  in  fine  Cansi.  ord.  l'nrd.}, 
uniteisis  fidelilius,  (/iialilir  ego  F .  Tlionuis 
de  Senis  unu  ctim  M .  F.  Ilarlholunufo  de  Se- 
rtis, (iiubn  de  ordtne  Prwdicntorum,  anno  Do- 
mini  U22  Venetiis  exislentes  et  quandim  vn- 
luimits  diligenliis  inqicirenles  de  régula  sm 
stfilii  Frnlriim  et  Sororiiin  de  Mi  it  a  Jes.i 
Clirisli,  (le  l'œnittnliit  II.  Dominici,  ivreniwus 
(HKinlum  ud  iuilium  ejif^dein  rei;ul(V  Udilei  ne 
lid'irre,  siciil  pntet  in  legenda  li.  Calliarine 
dr  Senis  siii.rnJicld,  cttpilulo  8,  ubi  sic  dici- 
tur,  elc. 

Après  un  tel  témoignage,  je  ne  crois  p;;s 
que  les  religieux  de  Saint-liominique  trou- 
vent mauvais  que  je  me  roiiforme,  louchant 
l'origine  de  leur  'Tiers  Ordre,  à  ce  qu'en  a 
c(  ril  un  de  leurs  généraux,  le  bienlieureux 
Raymoi  d  de  (Papoue;  el  si  je  préfère  sou 
seuiiiucnl  à    celui  d'un  auteur  moderne,  je 


sf:9 


MIL 


MIL 


-870 


veux  diro  l'Anonyme,  religieux  prêtre  du 
prand  couvent  et  roy;il  collège  des  FF.  Prè- 
dieiirsdela  rue  Sainl-j.icuni'sà  Paris,  qui  en 
1680  a  donné  les  règles  de  ce  Tiers  Ordre, 
accompagnées  d'explications  sur  chaiiue 
chapitre  et  de  quelques  observations  conte- 
nant riiisioirc  de  ce  Tiers  Ordre. 

Le  bienheureux  Kayniond  de  (Papoue,  par- 
lant donc  de  l'origine  de  ce  Tiers  Ordre,  dit 
que  saint  Dominique,  tant  par  lui  que  par  ses 
religieux,  triompha  d'un  grand  nombre  d'hé- 
rétiques, tant  en  France  qu'en  Lombardic, 
cl  que  dans  la  Lombardie  seule  il  y  en  eut 
plus  de  cent  mille  qui  furent  convertis  par 
sa  doctrine  et  par  ses  miracles,  comme  on  le 
prouva  en  présence  du  pape  (îrégoire  IX, 
d/ins  le  temps  de  sa  canonisation.  Cet  au- 
teur attribua  la  cause  de  tant  d'hérésies  à  la 
pauvreté  où  étaient  réduits  la  plupirtdes 
prélats  de  l'Eglise,  dont  les  biens  avaient  été 
usurpés  par  des  laïques  et  rendus  héréditai- 
res dans  leurs  familles,  ce  qui  faisait  que  les 
hérétiques  se  souciaient  peu  des  censures 
ecclésiastiques  qui  n'étaient  pas  accompa- 
gnées de  la  force  et  de  la  puissance  pour  les 
faire  exécuter. 

C'était  principalement  en  Italie  que  régnaient 
ces  désordres;  c'est  pourquoi  saint  Domini- 
que, animé  du  zèle  de  la  gloire  de  Dieu,  vou- 
lant conserver  les  droits  de  l'Fglise  et  lui 
faire  rendre  les  bit  ns  qui  lui  avaient  été  en- 
levés par  les  hérétiques,  assembla  quelques 
laïques  pieux  et  dévots,  et,  éiant  persuadé  de 
leur  vertu  et  de  leur  courage,  il  en  forma 
une  milice,  dont  le  principal  soin  devait  êlre 
de  recouvrer  les  droiis  ecclésiasiiques  qui 
avaient  été  usurpés,  de  les  protéger,  et  d'em- 
ployer aussi  leurs  armes  pour  la  destruc- 
tion de  rhérésic.  11  faisait  prêter  scnncnt  à 
ceux  qui  s'engageaient  dans  cet'c  milice,  de 
s'employer  de  toutes  leurs  forces  à  ces  bon- 
nes œuvres  d'exposer  leur  vie  pour  ce  sujet 
et  même  leurs  bien?,  et,  afin  que  leurs  fem- 
mes ne  les  einpéch;:ssenl  pas  d'exécuter  leurs 
promesses,  il  les  faisait  aussi  jurer  qu'elles 
ne  s'oppusL'r.iient  pas  aux  bonnes  inlcnlioiis 
de  leurs  maris,  et  qu'au  contraire  elles  les 
assisteraient  de  tout  leur  pouvoir.  11  donna 
le  nom  de  .Milice  de  Jésus-t]hrist  à  cette  so- 
ciété ;  et,  afin  que  ceux  qui  s'y  engageaient 
fussent  distingués  des  autres  laïques  par 
quelques  mar(iues  extérieures,  il  ordonna 
tant  aux  hommes  qu'aux  femmes  de  porter 
un  habit  noir  et  blanc,  fiit  do  telle  sorte  que 
quelque  forniiî  qu'ils  donnassent  à  leur  ha- 
billement, ces  ileu-i  couleurs  y  parussent 
toujours  (1),  et  il  leur  prescrivit  aussi  certai- 
nes prières  |  our  les  heures  canoniales.  Saint 
Dominique,  ayant  ainsi  établi  cet  ordre  mili- 
taire, li.ourut  que'que  t.  inps  après,  et  le 
grand  nombre  des  miracles  qu'il  fit  après  sa 
mort  le  lit  mettre  au  catalogue  des  sai;its  par 
le  pape  Grégoire  IX,  l'an  123't. 

Les  Frères  et  les  ï?œurs  de  la  .Milice  de  Jé- 
sus-Christ, voul.int  aus.si  honorer  d'une  ma- 
nière particulière  la  mémoire  de  leur  institu- 
teur que,  l'Fg  lise  venait  de  reconnaître  comme 


saint,  résolurent  de  changer  le  nom  de  Mi- 
lice de  Jésus-Christ  en  celui  d-  Pénitence  de 
Saint-DoMiinique.  Ce  qui  les  porta  à  ce  chan- 
gemeiit  fut  que  leur  milice  ayant  été  établie 
pour  combattre  à  main  armée  contre  les 
hérétiques,  et  l'hérésie  étant  presque  éteinte, 
les  armes  matérielles  leur  devenaient  inuti- 
les pour  combattre  à  l'extérieur,  et  ils  ne 
devaient  plus  combattre  qu'avec  la  pénitence 
et  la  mortification  contre  leurs  propres  pas- 
sions ;  ce  fut  donc  la  raison  qui  leur  fit  pren- 
dre le  nom  de  la  Pénitence  de  Saint-Domini- 
que. Leur  no'ubre  s'étant  augmenté,  et  le 
bienheureux  Pierre  Martyr,  qui  fut  tué  par 
les  hérétiques,  étant  entré  dans  cette  société, 
sou  sang,  qu'il  répandit  pour  la  défense  de  la 
foi,  acheva  de  délruirt»  entièrement  l'héré- 
sie; car  ce  saint  martyr  remporta  plus  de 
signalées  vicloin  s  sur  les  ennemis  de  l'Eglise 
après  sa  mort  par  ses  miracles,  qu'il  n'avait 
fait  pendant  sa  vie;  ainsi  celte  Milice  devint 
entièrement  inutile,  la  cause  pour  laquelle 
elle  avait  été  étiblie  ayant  cessé. 

Les  hommes  qui  étaient  entrés  dans  cette 
Milice  étant  décédés,  leurs  femmes  n'osaient 
plus  se  remarier,  et  voulurent  persévérer 
jusqu'à  la  mort  dans  l'éiat  qu'elles  avaient 
embrassé.  Quelques  femmes  veuves  qui  n'é- 
taient pas  de  cette  Milice,  et  qui  avaient 
aussi  résolu  de  persévérer  dans  leur  viduilé, 
se  joignirent  à  ces  Sœurs  de  la  Péniience  de, 
Sainl-Domini(iue,  elles  pratiquèrent  les  mê- 
mes observances  pour  l'expiation  de  leurs 
péchés,  et  se  multiplièrent  peu  à  peu  en 
plusieurs  endroits  d'Italie.  Elles  eurent  re- 
cours aux  FF.  Prêcheurs  pour  1  ur  appren- 
dre la  manière  de  vivre  qui  avait  élé  pres- 
crite par  saint  Dominique;  mais  comme  el'e 
n'avait  pas  été  jusqu'alors  rédigée  par  écrit, 
le  P.  Munio  de  Zamorra,  Espagnol  de  nation, 
septième  général  de  l'ordre  des  Frères  Prê- 
cheurs, mit  par  écrit  la  m.inière  de  vie  que 
les  Frères  et  Sœurs  de  la  Pénitence  de  Saint- 
Dominique  suivent  à  présent,  et  qu'ils  appel- 
lent règle. 

C'est  de  cette  manière  que  le  bienheureux 
Jlaymond  de  C  pouc  décrit  l'origine  et  le 
progrès  de  celte  société  de  la  Milice  de  Jésus- 
Chrisl,  et  de  celle  de  la  Pénitence  de  Saint- 
Dominiquo  à  qui  l'on  a  donné  de[iuis  le  nom 
de  Tiers  Ordre  deSaint-Dom  nique;  et  il  me 
semble  que  l'on  doit  s'en  rapporter  plut<it  à 
un  général  de  cet  ordre  illuslre  des  Frères 
Prêcheurs,  qu'à  un  particulier  du  même  or- 
dre, qui,  pour  donner  au  Tiers  ordre  de  Sainl- 
Duminiquc  la  préséance  au-dessus  de  celui 
de  Saint-François,  dit  que  ce  fut  du  vivant 
de  saint  Dominique  même  que  les  frères  et 
sœurs  de  la  Milice  de  Jésus-Christ  quittèrent 
ce  nom  pour  prendre  celui  de  la  l'énilence 
de  Saint-Dominique,  et  qui  rejette,  et  le  té- 
moignage du  bienheureux  U.iymond  de  Ca- 
poue,  et  celui  de  ces  deux  religieux,  qui, 
après  une  exacte  recherche  qu'ils  Gient  en 
1*22  de  l'origine  de  ce  Tiers  Ordre,  certi- 
fient qu'ils  n'ont  rien  trouvé  qui  ne  fût  con- 
forme à  ce  qu'en  avail  dit  ce  général  danjs  la 


(Ij  Voij.,  à   la  fin  du  vol.,  n"  215. 

DjcrioNNAinE  des  Ordp.p.s  nmr.iEux.  il. 


31 


571                                           DICTIONNAinr.  DES  OPJiRF.S  nELIf.lF.lX.  972 

Vie  de  sainte  Callicrlnc  ilc  Sienne.  Cepcn-  que  celui  de  Saiiil  Fiançois,   parce  que  la 
dant  ces  lémoi^napes  scmhloiU  iîlrp  nutori  ^-s  rcRle   que   suivent   les    Frères  et  Sœurs   do 
de  tout  l'orlredes  FF.  Prêcheurs,  puis  luils  celui  de  Saint-Dominique  est   plus   obscure 
se  trouvent    imprimés  à    la  lin  dis  conslitu-  que  celle  des  Frères  et  Sœurs  du  Tiers  Onlre 
lions  du  i-n  niior    ordre  dans  un  p'  lit  Iriité  de  Saint  François,  comme  le  remarque  cn- 
qui  a  pour  titre  :  Tractnliis  île  iniiio  et  fun-  corc  r.Vnonynic,  qui,  après  avoir  montré  la 
tttilione  Regul.  Frnlrtim  et  Soror:i)n  de  Mili-  ninformilé  de  ces  deux  règles,  tant  dans  I  lia- 
litt  Christi,  d'  Pœnilentia  sancli   Dominici,  bllcment  que  dans  les  jeûnes  et  les  absli- 
sni  Tei  m  Ordi'iis.  ncnces,  ajoute  :  Considcrnnt  ensuite  les  yc  n- 
(>  rcliuieux  anoujme,  parlant  de  plusii^urs  des  obscurités  de  la  ràjle  de  notre  Tiers  Ordre 
personnes  de  le  Tiers  Ordre  qui  ont  soulïert  en  certnin^  endroits   q<ii  se  Irnuvrnt  vettc- 
Ic   m  irtyre  dans  le  Japon  iLa  manière  de  se  7n'-nt   expliquées  en  celle  dit  Ti(rs  Ordre  de 
donner  à   Dieu,  etc.,  p.  'i2(i',  leur  donne  le  Sainl-Franç^'is,  je   ne  doute  point  q^e,  cf>- 
nom  de  Frères  ilu  preniier  T  ers  Ordre  de  11  deux  choses  considérées,   tout  homme  de  bon 
Milice  de  Jésus-Glirisi,  el  dit  qu'il  y  a    lieu  sens  qui  ne  sera  point  prévenu  ne  convienne 
de    croire   (ju  ils  ont   obtenu    l'honneur   du  arec  moi  que  li  rèjle  du  Tiers  Ordre  de  S. lint- 
inartyrc  de  la  foi,    et  la  gloire    d'èire  Frères  François  n'ait  été  fuite  par  lui-même  ou  par 
(lu  premier  'lie:  s    Ordre  de  la  Milice   d.'  Je-  d'autres  sur  le  modile  de  la  nôtre  antéri  ure , 
sus-Christ  par  le  mérite  de    leurs  mortifi'ja-  atec  les   éclaircissements  de  ce   qu'on    y    n 
lions    précétienles    dans    le     second    Tiers  trouvé  d'obscur  pour  les  paroles  ou  de  difjiciU 
Ordre  de  la  l'éni  ence  de    Saint-Doniinique.  pour  ('usaijc  et  li  pratique. 
Il  semble  en  cet  i  ndroit  que  cet  auteur,  cou-  .Mais  où  ctail-ellc  cette  règle  de  Sainl-Do- 
liaiut  parla  frce   de  la  vérité,  reconnaisse  niinique,  po;ir  qu'elle  eût  pu  servir  de  mo- 
l'onlre  de  la  Milice  de  Jé-ns-Clirist  el    celui  dèle  à  saint  F'rançois,   lorsqu'il   a   composé 
delà   Pénitence  de  Siinl-Dominique  comme  la   sienne?  I{st-il  possible  que,  dans  l'ordre 
deux  ordies  différents,  comme  en  eiïet  ils  le  des   Frères   Prêcheurs,    on    n'ait   point  con- 
sonl,  I  uisquc  le  premier  était  un   ordie  mi-  serve  l'original  de  lelle  règl-,  ou  du  moins 
litaire,  1 1  le  second  un  vcritai  le  Tiers  (Irdrc,  qu'il  ne  se  suit  poi.il  trou\é  un  religieux  ijui 
nommé  de  la  l'cnitence,  à  l'imitation  de  CI  lui  en  ait  f  .il  une  cop  e  ?  .Mais  on  n'avait  garde 
de  Sainl-Frnnçois,  qui  était  déjà  établi.  Ce-  d'i  n  faire  des  copies,  puisque,  bien  loin  que 
pendant  cet   auteur  témoigne  en    plusieurs  saint   Dominique  eût  donné  une  règle   par 
endroits  que  ce  n'est  pas  son  intention  d'en  écrit  aux  Frères  et  Soeurs  de  ce  'l'ier-  Ordre, 
faire  deux  ordres  dilTcrenis,  et  c'est  en   quoi  c'est  que  ce  même  ordre  ne  fut  établi  qu'a- 
ie trouve  cet'.e  manière  de  s'expliquer  assez  près   sa   mort,  et   que   les  règ'iinenis  qu'il 
p;.rlicul  ère;  car  on  n'a  jamais  dit,  en  faisant  avait  faits  pour  ceux  qui  s'engageaient  dans 
lin  compte,  un  premier  troisième,  un  second  l'ordre  de  la  Milice  de  Jésus-Christ  n'a>  aient 
tr  isième  :    el  ce  qu'il  appelle  second  Tiers  été  donnés  que  (!c  vive  voix,  et  ne  consis- 
Ordre  devrait  être  appelé  <iuatricme   ordre;  talent,  comme  nous  avons  déjà  dit,  qu'en  un 
car  saint  François  a\anl  fondé  son  Tiers  Or-  certain   nombre  de   prières    q  .'ils   de>aienl 
dre,  on  ne    lui   a  don.  é  ce  nom    que  prcc  dire,  dans  le  serment  qu'ils  devaient   faire, 
(Tu'il  était  le  troisième,  qu'il  était  précédé  de  cl  dans  la  couleur  de  rhabillemenl  qui  dev.iit 
celui  des  Sœur-  Clarisses.  ((ui  était  le  second,  être  ncir  el  bl  inc  ;  cl  lorsque  lo  Tiers  0.  dre 
et  qui   n'avait  été    cta!  li  qu'apiès  celui   des  se  fut  multiplié  par  le  moyen  des  personnes 
Frères    M  iieiirs,  qui  est    le   prenii  r;    c'est  qui   l'embrassèrent,   ces  personnes  dem  m- 
pourquoi    ri'lgli^e  ciiinte  d.ins  l'oHice  de  te  déreni   aax  reli:;ieux  du   premier  ordre  qui 
^n\ni:  Trcs  orilines  hic   ordina!,  primumqie  demeurai"nl  en  Italie,   quelle   était  la  nia- 
Fralriiin  nominat    Minoruni,   Pniiper unique  nère   de    vivre   que   saint   DomiiiiqUi"  a>ail 
l'a   Uomiiiarum  médias,  sed  Pœnitcntiuni  ter-  prescrite   pour  ce  Tiers   Ordre.   .Mais   ils  ne 
lius  scxum  ciipit   nlrumque,  cl  s'il  en    avait  purent  pas  le   leur   dire,   puisqu'il  ne   s'en 
institué  un  quatrième,  on  l'aurait  sans  doute  trouvai  rien  par  écrit  ;  c'est  pourquoi  Mu- 
appcle  le  quatrième  ordre,  el  non  pas  le  s.-  nio  de  Zamorra,  sept. èiiie  généra",  de  l'ordre, 
conil  tiers  ordie.  l'""""  éirivit  nue  règle  qui   est  l,i  même  que 
Ce  n'est  point  la  pratique  de  nommer  des  c  Ile  qu'ils   obseï  vent  aujourd'hui  ;  c'est  ce 
orthcs   militaires   des   tiers   ordies;   si  cela  que  dit  le  bienheureux  Rajniunil  de  Capoue 
(■tait    il  y  aurail  bien  des  tiers  orilics  dans  en  ces  termes  {Vit.  S.  l'alhar.  cap. S)  :  Inde 
l.'s  oVdres  de  Saini-llasilc,  de  Saiut-.\ugii.st.ii  paululim  crcsccmcs  in  dire' sis  Italiœ  parti- 
el  de  Saint-lîenoît,  puisqu'il   y  a   plusieurs  bus,   coeijerunt  Fratrcs  Prwd.cat  ircs  ibirlem 
ordres  militaires  qui   oui  sui>i  leurs  rè'^lcs,  mornnics  ad  infonnandum   cas   de  modo  ci- 
el qnociue  l'ordre  mililaire  de  la  Conception  vendi  e;ui  a   D.    Dominico  fuerat  instilntus  ; 
de  la  sainte   \'icige  ait  été  sous  la  rè;,'le  de  quia  vero  ille  n:odus  scriptus  non  erat,  qui- 
Sainl-François  ,   on   in;  le  qui  ilie  pas  pour  dam   M.  G.  qui  lutins  onlinis  curam  giretut 
cela  de  second  tiers  ordre  de  Saint-François,  s^ptimw,  vocatus  F.  Munio,  natione  flispr- 
Ainsi  le  Tiers  Onlre  de  la  l'cintenee  de  Saint-  nus,   m.dum  illuin  v  vendi  re  In/il  in  scriplis 
Dominique    n'esl    appelé   Tiers    Ordr<!    que  qnrm  hodic  htihent  et  lulijariler  rrgula:ii  vo- 
poiir  avoir  été  étaldi  après  celui  des  Frèies  ninl.   U  est  à   remarquer  que  lîaymond  de 
i'récheuis  cl  cidui  des  religieuses.  Capoue  ne  dit  [las  i]  le  le  eéneral   .Mui.io  rc- 
Jc  ne  crois  pas  qu'au,  un   homme  de  bon  d'gea  p  ir  é-vil   la   manère    de   vivre  cl  le> 
sens  convienne  que  le  1  iers  Ordre  do  la  l'c-  lègleuient^  i|ui  avaici.l  été  observes  jus  |iie- 
iiilcuce  de  Saint-Doniiuiquc  soit  plus  anci.n  là  dans  ce 'l'ii-rs  Ordre,  cl  que  saut  Donii- 


CV3                                   MIL  iMIL                                    07! 

tiique  avait  prescrits,  mais  qu'il  Lui- donna  loncc  de  Saint  -  Doriiiiiiiiuc  l'esomplion   do 

par  écrit  une  manière  de  vivre  qu'elles  ob-  toutes   fliarges    publi(|ues,   comme    tailles, 

servent  à   présent,  iiunlum  illum  vivendi  re-  dîmes,   passages   et   logements   de  gens   di> 

dcgil  in  scriptis  qaem  hodie  fuibcnt  et  vulga-  gu;  rre,  dans  toutes  les  terres  de  l'Iitat  ecclc- 

7iicr  regulam  appcllanl.  siastique,    comme  si   l'Jtalie  ne  comprenait 

Mais    peul-éire  que  c'<  si  inutilement  que  ([uo    l'Eliil   ecclésiastique,    ce   iju'il    enlend 

nous  apporlons  le  témoigiuige  du   bieniieu-  par  ces  mois  ,   per  universam   llalium   con- 

reux   Uayniond  de  Capoue,  pni:.qm'   l'Anu-  itilulis. 

iiyme  le  rejette,  aussi  bien  n'élail-il  pas  re-  Ne  faut-il  pas  avouer  que  les  Frères  et  les 

connu  pour  général  par  les  Français,  puis-  Sœurs  de  ce  Tirrs  Ordre  de  Saint-Dominique 

que  c'était  durant  le  stiiisme  ;  c'est  pourquoi  jouiraient  d'un   beau  privilège  en  Italie,  s'il 

il  lui  en  faut  donner  d'aulras  :  c'est  celui  de  éi;ut  vrai  que  les  pipes  ïîonoiius  lil  et  Gré- 

Slichel  Pio,  qui,  dans  les  Vies  des  hommes  guire  IX  les  eussent  exemptés  de  payer  les 

illustres  de  l'ordre  de  Sainl-DoMiiuique,  par-  laiiics,  les  dîmes  et  toutrs   sortes   d'imposi- 

lant  du  général  Munio,  dit  (]u'il  composa  la  tiens?  Toulcs  les  villes  et  les  villages  d'Italie 

régie   que  le 'liers  Oidre  observe  à  préseni,  auraient   sans  doute  voulu  être  de  ce  Tiers 

compose  la  regola,   cl>anno  il  présente  quilli  Ordre,  pour  jouir  du  même   privilège  et  ne 

del  Tevzo  Oïdine.   Kt  Vincent-Marie  Fon-  rien    payer.    Mais    CiS    souverains    pontifes 

tana,  dans  ses  Moiiumenls  dominicains,  par-  n'avaient  garde   d'accorder  un  tel  privilège 

tant  aussi  du  même  général,  d.t  qu'il  près-  à  ce  Tiers  Ordre  eu   1217  et  J228.  |  uisqu'il 

cri>it,   l'an   1283,  une  règle  aux  F-ôres  du  ne  lut  institué  que  l'an  1234-,  après  la  cano- 

Tiers  Ordre  de  Saint-Dominique  :  Fratribus  nisalion  de  saint  Duminique. 

Tel  ta   Ordinis  S,   Dominici  Munio  regulum  Les  Frères  du  Tiers  Ordre  de  Sainl-Fran- 

prœscripsit.  Ainsi  ce  n'est  piint  saint  Doni-  cois  à  qui  cette  bulle  était  adressée,  Frulri- 

nique  qui  a  donné  au  Tiers  Or 're  (jui  porte  bas  de  Pœnitcnlia  pr  Jtulinm  cunsCilmis, 

son  nom  la  règle  qu'il  suit  à  présent,  c'est  le  n'élaient   pas  de  iiiétne  seatimenl  (jue  ceux 

général  Munio  de  Zaaiorra  qui   la  composa  du  Tiers  Ordre  de  Saini-Dominique,  ils  au- 

l'an  12S5,  et  par  conséquent  elle  n'a  pas  pu  raient  cru  ;ai  contraire  qu'il  y  aurait  eu  de 

servir  de  moiiôle  à  saint  François  pour  cim-  l'injustice  de  demander  de  telles  exemptions, 

poser  l;i  sienne,  puis<iu'il  était  mort  en  122G.  puisqu'ils  étaient  tenus  comme  séculiers  (car 

Les   historiens   de  l'ordre  de  Saint-Domi-  ce   n'était  pas  des  léguliers  qui  étaient  déjà 

nique  ont  même  bien  de  la  peine  à  accorder  établis   qu'il   s'agissaii)   de   loalribuer   aux 

leurs  propres  seniimenls  touchant  l'origine  impositions  et  aux  charges  publiques;  mais 

(le   leur  Tiers  Ordre;   car  Michel  Pio  {Hist.  cuuune  on  les  chargeait  plus  que  les  autres, 

délia  nobiU'  prog.  di  san  Domenico],  après  à  cause   du    nouveau    genre  de    vie    qu'ils 

avoir  rapporté  ro|iiuion  de  Castillo,  (jui  [iré-  avaient   embrassé,    ils   demandèrent,  en  ce 

tend  que  saint  Dominique  ne  l'instiua  qu'a-  qui   regardait  les   iu)posiiions,  de  n'en  pas 

près  son   retour  d'Espagne  à  Home,  ce  qui  payer  plus  que  les  aulies  habitanls  des  lieux 

ne  peut  être  arrivé,  dit-il,  que  l'an  1219  ou  où  ils  doniiuiaienl  :  c'esi  ce  qui  est  maïqué 

1220,  ajoute  que  c'est  aussi  son  seatimenl ,  dans  la  même  bulle,  (jue  i'Auonyine  n'a  pas 

quoiqu'il  ait  parlé  dans  un  autre  endroit  d'un  lue  sans  doute  :  Unde  iivs  humililer  supplica- 

priulége  accordé  par  le  pape  Honorius  111,      s!is,ui  lobis  tnisericordiler  digiiaremiir 

I'anl217,  aux  Frères  du  Tiers  Ordre  de  Saint-  ne  plus  (juain  leslri  cives  impositione  unerum 

Dominique.  H  étail  donc  inutile  après  celte  uggravari  possilis. 

rélractalion  de  rapporter  dans  toute  sa  le-  H  est  donc  inutile  d'alléguer  des  privilèges 

neur  la  bulle  de  (irégoire  SX,  du  m  des  c  ■■-  en  faveur  du  Tiers  Ordre  de  Saint  Dumini- 

lendes  d'avril  1228,  qui  eoniirme  ce  privilège  que  avant  l'an  i2'-i'i-,  puisqu'il  ne  fut  élabli 

accordé  par  Honorius  Hl,  non  p,is  aux  Fr.-i-  qu'après   la  mort  de  saint  Uominiiue,  lors- 

res   du    Tiers   Ordre  de  Saint-Dominique,  que  le  pape  Grégoire  IX  le  canonisa,  et  qu'il 

comme   plusieurs   écrivains  de  cet  orilre  le  a  été  fondé  sur  I  s   débris   de   celui   da   la 

prétendent ,  mais  aux  F'è.es  du  Tiers  O.dre  milice  de  Jésus-Christ  qui  étal  devenu  inu- 

deSaint-François,(iuionl  toujours  eléappelés  t.le,  comme  le  lapporle  le  bienheureux  Kay- 

absolumentparlessouverainspontifes, depuis  mond  de  Capouc.  La  règle  que  le  P.  Munio 

leur  iiremière  inslKulion  jusqu'à  présent,  les  de  Zamorra  é  rivit  pour  les  Frères  et  S:vurs 

Frères   de    la    Pénilence,    et    non    pas    les  de   te   'iiers  Ordre   ne  fut  approuvée  par  le 

Irères  de    la    Pénilence   de  Saint-François,  pape  Innocent  Vil  que  l'an  1403,  et  fut  con- 

comme  il  est  marqué  par  celte  bulle  do  Gré-  firmée  par  Eugène  IV  l'an   143).  Il  y  a  dans 

giiire  IX,  qui  est  aiîressée  Fratribus  de  Pœ-  ce  Tii  rs   Ordre  des  (illes(jui  font  des  vœUK 

nitentta  per  Ituliam  co.isliliiti^:.  Et  les  reli-  solennels,  et  sont  véritablement  religieuses  ; 

gieux   de  la   Pénitence   de  Jésus-l'hiist,  qui  elles   ont   plusieurs   monaslères,  et  leur  ha- 

avaient  plusieurs  maisons  en  Italie,  auraient  billcmenl  est  semhlahle  à  celui  du  S(  conJ  or- 

eu   plus  de  droit  de  s'aliribuer  cole  bulie,  dre;  elles  n'ont  pas  tant  d'auslérilés,  car  elles 

que   n'eu  ont  lu  les  Dominicains  de  l'ailri-  peuvent  i>orter  du  linge  et  maiiger  delà  viande 

lu:  F  aux  Frères  de  leur  Tiers  Ordre,  comme  trois  fois  la  semaine.  Selon  la  règle,  elles  ne 

a  fait    encore   l'Anonyme   du   couvent  de  la  dc^vraient  perler  que  des  voiles  blancs,  mais 

rue  S  aial-Jac(|i!es,  qui    la  met  au  rang  des  il  y  a  plusieurs  monasières  où  elbs  en  porteul 

privilèges  accordés  à  ce  1  iers  Ordre,  et  (lui  de  nous.  Il  y  a  aussi  plusieurs  villes  d'iialie 

dit  que  le  pape  honorius  III  accorda  (lar  ce  où   il  y  a  des   personnes  de  ce  Tiers  Ordre 

privilège   aux    Frères  et  Sœurs  de  la  S'èui-  haliliee  ;  e:i  religicus-s,  (luoiqu'cUes  demcu- 


fi?-!                                        niCïIONNAiriF.  DES  ORDIŒS  UKI.IGIEUX.  97fl 

nul  iljiis  leurs  maisons  particulières.  H  y  o  des  VV.  PP.  Augustin   Adorno.    Frunçon 

«u  dans  ce  Tiers  Ordre  doux  sainli-s  c.ino-  el  Augusiin  Cardccioli,  leurs  futula  etus. 

hisé.^S  savoir,   sainl,-  Cailu-rin..   d.  SuM.ru-  j;j  j^,  ci  rcs  Uésiuliors  Mineur,  ne  pc.vcr.l 

H  sainle  Kose  de   L.m;..   cl  idusi,  ur,   Inc-n-  f  ,j^^  renw.nler  loriBino  de  leur  .  onu-repalion 

heureuses     comme  luj;ride  de  Me,  J  ar-  ,^^,  ,.,  ,-„,  j^  ^,,,  ^j-^,      j,^  pn-lendenl 

Kuer.le  de  Hongrie,  S.hylle  de   IMvie.   M.m-  .,^  ,„„i,„       .^,||^  .,  ^,^^       ■  j^^     ,^^  j^  ,^„j^ 

Kurne    du    Ll.aicau      «,oloml.c    d^    Hiel.  ,  p,  ni   ,  inquanle  ans  auparavanl   ,.ar   lahbé 

Uzanne  de  Mj.utoue,  Maigucilc  de  Savo.e,  .io;ichim,  cl  que  c'esl  d-  1  ur  ordre  qu'il  a 

l.uie  la  tliasle,  clc.  ,.„„ly  parler,  lorsiiue,  d ms  ses  f.ommcnlai- 

Le  r.  ronanni,  de  la  compagnie  de  Jésus,  '"*''  *"•■  i'-Vpocaljpse,  .1  a  du  :  Sur.jet  enim 
dans  Sun  Calalogue  des  Ordres  reiijjieux  .  "''''"  <J>'>y^etur  novus  ,tnon  est,  ,mlut,m. 
parle  de  certaines  relisieuses  T,erciaires  de  »'"'*  tcsi'bus,  et  acctnct,,leu,p>r  zona  Mais 
l'ordre  de  Saint- Uominiiue.  instituées  ;  ar  ^■«'«■"c '.""  "  f.JO"'^  t'^s  h  aucup  de  fm  aux 
le  I'.  Jé.ome  l'iccini.  Vénitien,  religieux  do-  l"-"i'l'f  'es  de  1  abl.,'- Joaehim.  nous  passerons 
n.inicain.  Mais  comme  dans  un  endroit  il  dit  '"V;^  silence  1  app.cMion  que  les  Clercs  Uc- 
quecc  fui  l'an  UIS:!,  et  dans  un  autre  que  ce  P"'""^"  ^  '"«^"'■s  fo"'  .'>ur  or  ire  des  paroles 
fui  Tan  1G:8.  nous  ne  pouvons  rien  dire  de  "^l  'îl;"!''';/  aussi  lue,,  que  ccr  a.ne  aulie 
rcrlain  touchant  le  temps  de  celle  inst.lu-  Pr'.'pl'H'ç  d  un  saml  E.mlien,  prêtre,  qu,  vi- 
lion,  sinon  qu'elle  se  lit  à  Conégliano  dans  la  ''"  f"  J-^P^gne,  a  ce  qu.  l  on  prelcn  I  vers 
Marclie  Trévisane,  cl  que  la  prennère  reli-  ''-'  '  ^'^''^''■'  '!"'•  ^^  »■'  '"S  historiens  de  cet 
IMCuse  fut  la  Mérc  Hj ae inthe  lîosso,  Veni-  ;."';;'  ^.«^  'rcomman  l.ul  en  cspnt  aux  supé- 
iienne.  Elles  eurenl  eneoie  un  m.nlistère  à  l''"''  '^^  °"^'':  '"/";  ^f^  ^''^r'!'  »^7"l;e'S 
Macérala.  l'an  l(ii=0.  dont  l'église  fut  dédiée  ^''■"^"■•«'  "«  {"-'.an  de  le  v^ouloir  admet  re 
sous  le  litre  du  Sainl-Sacreinenl,  ce  qui  a  fZZn^'V  "-^'P""'  T"  T"/-^;'  '"'  " 
fait  donner  aussi  le  même  nom  à  ces  reli-  ^  P^"^""',  'i^  /'"'V  ''.^'^^  '*^"'i  •'«'"11'.'""'"'- 
Uieuses.  quoiqu'elles  n'aienl  que  la  règle  du  tTl  ^^ ^^'.-''.''«  pl"SH-urs  ordres  qu.  prc- 
Tiers  Ordre  de  Saint-Dominique.  Leu.s  con-  ^'"^"'^  ^^ «"^  «'«^  anl.quiles  chimériques. 
sliiu;i  .ns  sont  néanmoins  Irès-ausières.  car  Ce  qui  csl  certain,  c'est  quclean-AuRuslin 
elles  ne  iiorleni  que  des  chemises  de  serge  ,  Adorne,  de  l'-incicnnc  famille  des  Adorno 
ne  dorment  que  sur  des  paillasses ,  le  plus  de  Gènes,  fui  le  l'ondaleiir  do  la  congrégation 
souvent  sur  des  planches  ;  elles  ne  mangciil  des  Clcics  llégiiliers  Mineurs.  Les  particira- 
jainais  de  viande,  sinon  dans  les  maladies  rites  de  la  vie  de  ce  saint  fondateur  de,  uis  sa 
par  ordre  du  mcdcein  ;  elles  jeûnent  sept  naissance  jusqu'à  lélahlissemenl  de  son  or- 
mois  de  l'année,  elles  ont  deux  heures  d'o-  dre  nous  sont  inconnues.  C'est  sans  aucun 
raison  mentale.  Chaque  jour  elles  se  lèvenl  fondement  que  .M.  Ilerinant  a  dil,  dans  son 
la  nuil  pour  dire  matines,  el  il  y  en  a  ton-  Hisloire  de  l'etahlisse.nent  des  ordres  reli- 
jours  quelques-unes  en  prières  devant  le  Rieux.quc.lean-Aiigustin  Adorne, étantenânc 
saint  Sacrement.  Quoiqu'e  les  ne  s'engagent  de  se  consacrer  a  Dieu  d.ms  la  religion,  <  hoisil 
pis  par  vœu  à  la  clôture,  elles  l'olisrrvenl  l'ordre  des  Frères  Mineurs,  dans  lequel  il  en- 
néanmoins  fort  rigoureusement,  el  elles  ne  "'■'»  e'  d'où  il  sortit  depuis.  Les  mémoires  qui 
parlent  jamais  à  la  grille  que  le  voi;e  baissé,  '"'""l  cte  mis  entre  les  mains  avec  I' livre 
J.cur  habit  es!  sembluble  à  celui  des  autres  intitule:  Delhi  venerubile  riUgionede  Cliinict 
reli-ieuses  de  l'ordre  de  Saint-Dominique,  -l/i'iori.  imprimé  à  Lcssc  en  lO'tT,  n'en  font 
sinon  qu'elles  ont  des  saulaies  de  bois.  Quel-  P»i"t  mention,  tl  nous  apprennent  seulement 
qt:cs-une.i  metlcnl  des  bas  il  d'autres  vont  qu'Adornc  retournant  de  la  cour  d  K'^pagne 
les  1)  cds  nus.  ^'  pas--ani  par  Valence,  le  bienheureux  l.ouis- 

IJiTlrand,  de  l'urd  c  de  Saint-Ddimnique,  so 

Voyez  Ilernaiulo  de  Casti'.lo,  Juan  Lopez,  j,.|a  à  genoux  devant  lui,   en   di^ant  à  c  ux 

Anlon.  \\cmcn'\,  Hist.  de  S.  DomiiH/.  y  de  su  qui  étaient  présents  qu'il   devait  être  le   fon- 

onif H.  Thomas  .Maluend, /Jiuu./.  /'ne./.  Gio  diieur  d'un  ordre  qui  sérail  très-utile  à  l'ii- 

Michcl  Pio,  Délia  vcbil.  profien.  de  S.  Domc-  gUse,  ce  qui   pourrait  elre  arriic   vers  l'an 

iiic.    Vincent  Mar.  Font.,  iMunument.  Dnin-  158.').  Adorne  ne  songe;iil  i  on.t  pour  lors  à 

nie.  Tnielnl.   de  inilio  el  fnnd.  Idg.  FF.  et  jirendreriial  it  ecclèjiaslique,  mais  peu  à  peu 

Sor.  de  Mitilin  Cliristi  de  Pœnilcntid  S.  Do-  \■^  g,àcc,  faisant  imiuession  sur  son  cirur.  le 

minifi  seu  Tert.   Ord.   in  pne.   Const.  ord.  porta  à  r.  noiicer  aux  v.iniiéi  du  siè<  le  pour 

Pnrd.    La  tiuiuirrc  de  se  donner  à  Dieu  dons  g',  mplojer  au  service  de  Dieu  cl  au  salut  du 

le  siècle,  ou  Ifs  RUjles  du  Tiers  Ordre  de  lu  prochain  :  il  prit  les  ordres  sacrés  cl  fut  h  >- 

Pénilme  de  Su  nl-Dominiiiue,  pnr  un  rdi-  noré  du  sacerdoce. 

gieux  prêtre  du  grand  couvent,  t  royulc^d-  ^^  f^„           ,                 ^     ,^,,,            ^.^,  , 

eye  t/e././<.yVec/,purs,  de.  Philip,  lionnuni.  ,,^^,^j^^   j^   ^^,,   minisière,  il    travailla   avec 

Uilulog.   omnmm  ord.  rcUyios.   part,   ii,  m  i,,.,,,,^,,,,,,^  j(.i^  p,r  ses  cxhorl:Uions  au  sa- 

*■"    '*■  lut  du  prochain,  cl  se  sentant  inspiré  lie  Dieu 

Nous  dirons  au  Supplément  l'étal  du  TIits  de  l'omler  un  nouvel  ordre  religieux,  dont  le 

Ordre  de  Saiiil-I)iimini(|ue  acliiellemcnl  en  principal  insliiul  fijl  de  mêler    la  vie  active 

France,  où  il  a  cie  modilie  par  le  U.  P.  La-  avec  la  conlemplative,  il  se  retira  vers  le  dé- 

rordairc.                                           H-n-R.  sc.l   di-  \al'omlireusc  en  Toscane,   où  pen- 
dant qnaraiile  jours  il  se  d'sposa  à  exécuter 

KINEUUS  (Ci.BHCS  Uioi'i.iURs),  '.tcc  la  Vie  ce  te   cnl  éprise  p  r   des  jeûnes  continuels, 


077 


MIN 


MIN 


973 


(!cs  péiiilcni'is  cl  des  inorlificalions  siir[ire- 
ii.intes.  KiMiil  ;ill6  ciisuile  à  Naples,  el  pri.iril 
un  jour  avec  ferveur  cl.ins  l'cglise  di's  liicii- 
ivibles  pour  que  Dieu  lui  fil  connaîlrc  plus 
panlciiiièrcmenl  sa  volonlc,  il  se  senlil  iiité- 
ricuremeiil  pressé  d'exéiuler  son  dessein,  et 
il  lui  sembla  même  que  Dieu  lui  commandait 
de  le  faire,  et  qu'il  lui  en  prescrivait  les 
moyens.  Il  ne  doula  plus  que  ce  ne  lui  la 
volonté  de  Dieu,  lorsque  deux  personnes 
d'une  des  plus  illustres  mais  )ns  dts  Naples, 
qui  furent  François  el  Augustin  Caraccioli, 
se  furent  jointes  à  lui  pour  l'aider  dans  sou 
eiilreprisr.  11  alla  à  Kome  avec  François  Ca- 
raccioli  pour  obtenir  du  pape  Sixte  V  la  per- 
mission de  fonder  sa  congrégation.  Plusieurs 
prélats  cl  quelques-uns  de  leurs  parents,  sa- 
chant qu'ils  étaient  proche  de  15ome,  envoyè- 
rent des  carrosses  au-devant  d'eux  ;  mais, 
pour  éviter  ces  honneurs,  ils  se  délourncrent 
el  enlrcrent  ilans  celte  ville  par  nue  autre 
porte;  ils  allèrent  même  demander  l'aumône 
aux  Capucins,  el  lurent  fort  contents  de  se 
trouver  avec  les  pauvres  à  la  porle  de  ce  cou- 
vent el  de  manger  avec  eux. 

Le  crédit  qu'ils  avaient  à  Rome  par  le 
moyen  de  leurs  parents  el  de  leurs  amis  fit 
qu'ils  obtinrent  du  pape  ce  qu'ils  demandaient, 
cl  ce  pontife  leur  accorda,  le  1"  juillet  1588, 
un  bref  par  lequel  il  leur  penncttail  d'ériger 
une  congrégation  de  Clercs  Kégul  ers,  défaire 
des  vœux  solennels,  d'élire  un  supérieur,  el 
de  prescrire  des  règl.'meiits  pour  le  miintien 
de  ce'le  (  ongrcgation.  Il  les  reçut  sous  la 
protection  du  saini-siége,  et  co:iHne  ce  pape 
avait  été  Frère  Mineur,  il  donna  à  ces  Cle.cs 
Itéguliers  le  nom  de  Mineurs,  quoi(iue  lin- 
lenlion  d'Adorue  fût  de  leur  d  .nner  celui  de 
Mariani,  à  cause  de  la  dcvolion  qu'il  por'.ail 
à  la  sainic  Vierge.  Ils  retour,  cent  ensuite 
à  Naples,  où  ils  jelé;enl  la  ii;cme  année  les 
fondements  de  ce',  ordre  dans  l'église  de  Sainte- 
Agnès.  Grégoire  \1\'  leur  accorda,  l'an  15  !1, 
tous  les  privilèges  d  ni  jouissiiienl  les  Théa- 
lins, Clément  Vill  les  confirma  dans  la  suilc. 
Paul  V^  les  (il  pirliiipanls  de  lous  les  privilè- 
ges qui  avjiienl  été  accordes  par  ses  prédé- 
cesseurs aux  autres  ordres  religii'ux,  el  ils 
en  ont  encore  reçu  d'autres  dans  la  suite. 

Adorne,  a|irès  rètablissemeiildcsa  coigé- 
galion,  pratiqua  toutes  les  verius  dans  u:i 
degré  éminent.  Ses  austérités  étaient  grande  s, 
son  humilité  profonde,  son  oraison  presque 
continuelle,  employant  ordinairement  sept 
ou  huit  heures  à  l'oraison  mentale;  mais  où 
il  faisait  paraître  plus  de  dévotion,  c'c'ait 
lorsqu'il  célébrait  la  sainte  messe, employant 
aussi  beaucoup  de  temps  à  s'y  préparer  et  à 
faire  son  aciion  de  grâces.  Il  essuya  beau- 
coup de  falgues  pour  l'agrandissemenl  de 
son  ordre.  Il  fut  en  Espagne  pour  y  faire  des 
établisseu]cnls,maisce  fui  iniiti!emi'nlàcause 
des  contradictions  qui  s'y  trouvèrent  pour 
lors,  el  cène  fut  qu'après  sa  mort  que  ses 
religieux  y  sonl  entrés  el  y  ont  ob'enu  plu- 
sieurs maisons  qui  sont  divisées  en  plusieurs 
provinces.  Comme  il  ne  faisait  ses  voyages 
qu'à  pied  el  en  demandant  l'aumône,  ses  fa- 
ligues  jointes  à  ses  ausièritcs  abrésèreul  ses 


jours;  car,  n'ayant  encore  que  quarante  ans, 
il  mourut  à  Naples,  le  21  septembre  de  l'an 
1591,  après  avoir  vécu  dans  sa  congrégation 
deux  ans  et  demi. 

Après  la  mort  de  Jean-Augustin  Adorne, 
François  Caraccioli  prit  le  gouvernement  de 
l'ordre,  qui  s'agrandit  notablement  par  son 
moyen,  ayant  (ait  plusieurs  fondations  en 
Italie  cl  en  l'Espagne.  Il  avait  un  zèle  infali- 
g  ible,  il  était  toujours  occupé  à  la  prédica- 
tion ou  à  la  confi  ssion,  et  il  fil  un  grand 
nombre  de  conversions.  Quoique  élevé  à  la 
qualité  de  chef  de  son  ordre,  il  se  regardait 
comme  le  moindre  de  ses  frères,  el  ce  fut 
celte  humilité  qui  le  fil  renoncer  à  la  supé- 
rioriié,  quoiciu'il  eût  été  élu  général  perpé- 
tuel. Il  s'exerçait  aux  emplois  les  plus  vils. 
Il  aimait  si  fort  la  pauvreté  que  lorsqu'il 
voyait  quelque  religieux  qui  avait  une  mé- 
chante robe,  il  la  lui  demandait  aussitôt  pour 
s'en  revéïir,  el  il  lui  en  donnait  une  bonne. 
11  invenlait  lous  les  jours  de  nouvelles  aus- 
lérilés  pour  mortifier  son  corps.  Il  demeura 
plusieurs  mois  sous  un  ei-cilier,  où  à  peine 
il  pouvait  s'étendre.  Il  portait  jour  el  nuit 
une  ceinture  de  fer,  il  dormait  sur  des  plan- 
ches, il  jeûnait  trois  fois  la  semaine, etioules 
les  veilles  des  fêtes  de  la  Vierge  au  pain  el  à 
l'eau;  et  il  prenait  la  discipline  toutes  les 
nuils.  p]nfin,  après  avoir  été  en  pèlerinage  à 
Notre-Dame  de  Lorelle,  cl  reloiirnanl  à  Na- 
ples, il  passa  par  Agnone  dans  rAbruzze,où 
on  lui  offrit  un  établissement.  Il  y  tomba  ma- 
lade chez  les  PP.  de  l'Oratoire  el  mourut  le 
i  juin  1608. 

Le  troisième  fondateur,  AiigtisUn  Carac- 
cioli, quitta  une  riche  abbaye  pour  se  join- 
dre aux  deux  autres  londa'.eurs.  Il  les  imita 
dans  toutes  les  vertus,  principalement  dans 
la  pauvreté.  Son  humilité  était  si  grande,  qu'il 
ne  voulut  point  accepter  la  charge  de  général 
de  l'ordre;  et.  sur  la  proposition  que  lui  fil 
un  cardiaal  d'un  évêché  qu'il  lui  voulait 
procurer,  il  se  jeta  aussitôt  à  genoux  et  renou- 
vela le  qualriè. ne  vœu  qui  se  fait  dans  cet 
ordre  do  ne  prétendre  à  aucune  dignité.  Il 
voulait  toujours  dépendre  d'un  supérieur. 
Ce  fut  l'iibèissance  qui  lui  (il  arcepter  l'ofiiee 
de  [)refel  et  les  autres  emplois  dont  les  su- 
périeurs le  cbargèreiit,  et  il  mourut  le  28 
mai  1015,  étant  âgé  de  soixante  ans. 

Cel  ordre  a  présentement  plusieurs  mai- 
sons, qui  sont  divisées  en  (]ualre  provinces, 
dont  il  y  en  a  deux  en  Espagne,  sous  le  titre 
de  provinces  de  Casiille  et  d'Andalousie,  et 
deux  en  lia  ie,  sous  le  litre  de  provinces  de 
Naples  el  de  Rome.  Le  général  était  d'abord 
perpétuel,  ensuite  il  s'élisait  tous  les  six  ans, 
mais  le  pape  Alexandre  \'ll  ordonna  qu'il 
serait  à  l'avenir  perpétuel  coiiirae  il  l'avait 
été  dans  le  commencement.  Ces  religieux  ont 
dans  plusieurs  villes  deux  maisons,  comme 
à  Rome,  à  Gênes  et  à  Palerme  ;  et  dans  d'au- 
tres trois,  comme  à  Naples  et  dans  quelques 
villes  d'Espagne. 

Leur  principal  inslitiil  consiste  dans  les 
exercices  de  la  vie  active  et  contemplative  ; 
comme  nous  avons  dil,  ils  l'ont  quatre  vœux 
solennels,  de  pauvreté,  de  chasteté,  d'obéis- 


373                                          n:CTIONN.\inF:  des  Or»DRES  REUniF.UX.                                          D80 

sanre  cl  de  ne  prélendre  à  aucune  tli^nilé  tl'Urbin,  les  recommanda  au  duc  d'Urbin,  N. 

Iiors  de  la  lelijîioii.    Aces   quatre    vœux    ils  de  la  Itovore  .   qui  noii-soiilcincnlb  s  établit 

ajoutent  un  srrmeiil  (le  u'  incliMidiC  à   au-  à  llastcl-Durantc  cl  à  IVs.iro,  mais  leur  donna 

(•une  di^uilo  d.inS  l'ordre,  et  tous  les  ans,  la  encore  sa  bibliiithcque  composée  de  plus  de 

\  eillc  de  l'Hiiiplianie,   ils  renouvci  enl  leurs  trente  mille  volumes. 

vœux.  Ils  ont  une  InMire  d'oraison  p  ir  jour,  Il  y  a  eu  <lans  cet  ordre  fdusieurs  écrivains 
le  niati  1  et  le  soir,  e;  tour  à  loiir  ils  liint  une  cclètires,  comme  le  P.  Kapliael  Aver-a  de 
heure  d'or,  i-oii  qu  ils  appellint  l'oraison  cir-  Sainl-Si'verin  au  r^iyaunie  de  Naples.qui, 
cul. lire.  Deux  fuis  le  jour  ils  font  l'esamen  sous  le  pontificat  d'inno'enl  X  et  celui  d'A- 
de  conscience,  ils  s'einpl  lienl  à  la  prciiic.i-  lexandre  VII,  fut  consultcur  des  llites  et  de 
lii)ii  et  à  la  confession  dans  leurs  proires  Vltidcx,  ci  qualifh'aleur  du  Saint-Oflice  ;  il 
églises,  el  ils  font  encore  des  missions.  Ils  nfusa  les  é'.  écbés  de  Norcra  il  de  Nardi.  I.e 
visitent  les  piisons  cl  les  iiùpilaux, et,  tant  de  1'.  l'bilippe  Suadagnoli  ensei;.'na  pendant 
jour  que  de  nuit,  i'.  y  en  a  toujours  quelques-  plusieurs  années  l'ariibo  dans  \o.  colléjie  de 
uns  qui  son!  destinés  pour  aler  assister  les  la  Sapience  à  Home  ;  il  laissa  quelques  ou- 
ma'ades,  lorsqu'ils  y  sont  appelés.  Ils  ne  vrages  en  celte  langue,  ([iii  furen!  imprimés 
mangent  de  la  viande  que  trois  fois  la  se-  par  ordre  d'Urbain  Vlil.  Le  V.  Launnt  du 
maine,  et,  outre  les  jeûnes  commandés  par  l'ont,  neveu  du  pape  Léon  XI,  a  fail  des 
riîglise,  ils  jeûnent  encore  l'avcnt,  les  deux  cnmmentaTCs  sur  le  livre  de  la  Sagesse  el 
derniersjoursducarnaval  el  tous  les  vendre-  l'Evangile  de  saint  Mathieu.  Le  P.  Antoine 
di-de  l'année, et  ilspreiinenl  encore  Cî'sjours-  l'ara  a  donné  deux  volumes  de  Ihéologie 
l.'iladisci|  liiie.()ulre(esmortilicalions,ili  onl  scolastiiiuc.  Le  P.  Antoine  Uosendca  travaillé 
encore  une  manière  de  iiénilence  qu'ils  ap-  sur  la  même  matière.  Les  PP.  lîlaise  Vaxen, 
pelleiit  au-si  circulaire.  Tous  les  jours,  hors  Jerdinc  Prado,  Antoine  Vasquez  et  Jércme 
les  fêles  de  précepte,  il  y  en  a  un  qui  porte  Sakedo  ont  donné  qiiel.]ui's  liisloires  ;  le  P. 
le  lilice,  un  autn-  qui  prend  la  discipline,  el  Thomas  Hurlado,  Espagnol,  a  laissé  treize 
un  qui  jeûne  au  pain  el  à  l'eau,  lequel  esl  volumes  do  scolaslique  et  de  morale.  Le  P. 
obligé  de  porter  sa  pit;ince  du  réfectoire  à  Eoimanucl  Felguera  en  a  donné  trois  sur  Uî 
DU  pauvre,  auijuel  il  doil  faire  quelque  ins-  droit  canon  et  la  théologie  mora'e,  le  P.  Be- 
Jrurlion.  fo''  l^emy,  neuf  volumes  sur  dilTérentes  ma- 
ils onl  des  maisons  de  quitre  sortes.  11  y  tières,  le  P.  Jean  de  (luevara  a  aus>>i  laissé 
m  a  (ju'il'»  ap[  client  maisons  d'exercices,  où  plusieurs  volumes  sur  dilTerentes  n)a!ières: 
l'on  s'occupe  à  procurer  au  prochain  loutes  je  passe  sous  silence  les  autres,  qui  sont  en 
les  assistances  spiriluelles  dont  il  a   besoin,  trop  grand  nombre. 

d'autres  qui  son l  des li nées  pour   l'éducation  lly  en  a  eu  aussi  plusieurs  qui  se  sonl  dislin- 

dcs  novices    d'aolres  sous  le  titre  de   collé-  gués  par  la  sainteté  de  leur  vie,  comme  le  P. 

ges,  où  l'on  ensiignc  toutes  sortes  de  scien-  Eugène  Hurtado,    >incenl  Siribella,  Joseph 

ces.  non-seulemcnl  à  leurs  propre-  religieux,  Imperalo,  qui  aida  beaucoup  le  P.   François 

mais  encore  aux   (crsonnes  du   dehors  qui  C.iiMCcioli    dans    la    fondatiun   des  couvents 

veulent  venir  à  leurs  leçons.    Enfin  ils    ont  d'Espagne  et  refusa  rarchevéché  de  Manfre- 

des  ma.sons  (]u'ils  appeilenl   ermitages,  où  donia  ;   Barthélémy    Simonli,    Paul    Masio, 

ils  vivent  dans  une  grande  letrailo  el  dans  la  Laurent  du   Pont,  Benoît  Cappello,  Gouzalo 

pratique  de   l'oraiscn  el   de   la  pénitence  la  Eeniacidez,  Pierre  Sousa  et  plusieurs  autres, 

plus  sévère,  et,  afin  de  n'être  point  troubles  Le  P.  Thomas    Lolii,    confesseur  du  pape 

dans  leurs  exercices,  l'église  de   ces  sortes  Innocent   X,   fut  fait  par  re   pontife  évéque 

d'ermitages  esl  d.;us   liniéneur  de  la   mai-  de  Cérène  i»  ;)nr/i6îis,  prélat  de  la  congréga- 

son,  el  l'enlrée  en  esl  inlerdiie  ;ru\  séculiers,  lion  des  Réguliers,    el  vicaire  de  l'église  de 

Les  supérieurs  ne  pi'uvenl  pas  contraindre  S  rinte-Marie  Majeure  à  llome.  Sons  le  pon- 

aucun  religieux  à  y  aller  demeurer,  il  n'y  a  tilical  d'Innoccnl  XI,    le    pritx'c   Ernest   de 

que  le  zè'e,   la  ferveur  el  le  désir  d'une  plus  Crouy,    voyageant   en   Italie  cl   étant   enlro 

grande  perfeclioii    qui  poi  lent  les  religieux  dins  l'églis  ■  de  Noire-Dame  de   Lorelle,   fui 

à  vivre  dans  ces  soliiudes,    cl   ils  doivent  en  si  louche  de  la  sainlelé  de  ce  lieu,   qu'il  re- 

iibleuir  la   permission  des  su|iérieurs.  11  y  a  nonça  aux  erreurs  de  Lulber,  dont   il  f.iisail 

lie  ces  sortes  d'ermilagos  hors  la  ville  de  .Na-  prulession.  Etant  venu  à  Uomo,  il  lit  abjora- 

pb'S  cl   hors   la  ville  de  Lisboini'^,  el  il  y  a  lion  entre  I  s  mains  du  pajjc  et  cntr.i  dans 

peu  de   bonnes  villes  el  d'nniver>iles  en  lis-  l'ordre  des  Clercs  llégnlicrs  Mineurs,  où,  peu 

pagne  où  ils  n'aient  des  collèges.  de   temps  après  avoir  élé   promu   au   sarer- 

Cetle  congrégation  s'est  augmentée  encore  doce,  il  mourut  dans  de   grands  sentiments 

sous   le    gouvi  rnemeiil  do   P.  P.ix,  qui  eu  a  de  piété,  ayant  beaucoup  cdifié  cesreligi  ii\ 

élé  général  et  (]ui  a   fail  des  élablissem  uls  par  son  humililé  el  par  la  vie  austère  (ju'il 

nouveaux,   deiiv  en   Italie,  à   Pisloie  d.ins  av.iil  menée. 

Il  Toscane,  el  .à  Sai   l-ticnest  dans  la  Marche  Ces  religieux,  entre  antres  privilèges,    oui 

d'Ancône,  el  d'autres  en  lispagne,  comme  à  une  chaire  au  collège  de  laSapie:ice  à  Kome, 

\'alencc  et  en  d'autres  villes  de  ce  royaume  où  ils  enseignent  la  philosojihie,  el  il  y  en  a 

où  ces  religieuv  sont  fort  eslimés.  Le  pape  loijours  un  qui  esl  rousulleur  de  /'/ti'/f.r,  re 

«.lénienl  \'lll   les   reconmiandi  à  l'liilip|)c  II  (|ui  leur  a  été  accordé  par  le  pape    Alc\aii- 

lorsqii'ils  Miulurenl  faire    leur  premier  é!a-  dre  \TI   et  confirmé  [lar   le  pape    .\lexandrc 

blissemeni  dan>  ses  Et. ils, ol  Philippe  III,  sa-  ^■III.  Il  y  en  ;i  cniore  un   qui   est  examina- 

clianl  qu'il,  voulaient  s'établir  dans  le  duché  leur  synodal,   cl  celle  charge  fut  confcréo 


381 


MÎN 


MIN 


fiS2 


p;ir  Innocent  XI  ..u  1'.  Philippe  iiruliior,  fa- 
meux llié;)logien  et  procureur  généivil  de  cet 
ordre. 

Ces  Clercs  Réguliers  sont  habillés  à  peu 
près  comme  les  au' res  Clercs  Kégnliers(1),ox- 
ceplé  que  leur  robe  est  serrée  d'une  ceinture 
de  cuir,  et  que  les  manches  de  celte  robe  ne 
sont  point  serrées  au  poignet,  mais  qu'elles 
sont  un  peu  larsres.  Ils  ont  pour  armes  la 
résurrection  de  Nolre-Seigiicnr,  avec  cette 
devise:  Ad  majorem  Resuif/entis  (/luiinm. 

Voyi'Z  le  livre  intitulé.  Délia  V.  relifiionc 
(h  Pad.  Chierici  Regnlari  Minori.  Ignazio  de 
Vives,  Yiladel  P.  Franc.  Caracciuli.  Auberl 
le  Mire,  de  Confjreg.  Clericorum  in  C(:mmiini 
vivenlium,  et  Regtdœ  et  consliluliones  Cléri- 
cal iim  in  congrcg.  vivenlium.  Pielro  Crescen. 
Prœsidio  Rom.  Silvest.  Maurol.  Mar.  Ocenu. 
di  lui.  le  relig.  Ascag.  Tamhur.  de  .lure  abb. 
August.  fiarbosa,  de  Jure.  Kccle».  Ilcrmaiit, 
SchoonebeketConanni,  Uist.  des  Ordres  Re- 
ligieux. 

Au  dernier  siècle  les  Clercs  Réguliers 
Mineurs  avaient  à  Rime  deui  maisons, 
l'une  à  Saint-Laurent  in  Lucinn,  laulre  à 
?aint-Vincenl  et  Saint-Anastaso  o  Trsvi. 
Aujourd'hui,  ils  existent  encore  et  ils  ont 
pour  procureur  général  le  P.  Joachim  Meli. 
On  attendait  l'élection  du  vicaire  général. 

B-D-E. 

MINEURS  (Fb^resI.  Vo}/.  Phanciscains. 
MINGRÉLIENS (Moines).  Votj.  Nîelcuitis. 
MINIMES  Religieuses.  Voy.  Mi.-vuies  (On- 
DiiE  des],  §  II. 

MINIMES  (Ordise  des). 

§  I  '.  Des  reli(,icux  Minimes,  avec  la  Vie   de 
saint  François  dePaule,  leur  fondateur. 

Les  religieux   Minimes   prétendent  avoir 
quelques  prérogatives  au-dessus   des   auires 
religieux,  et  les   surpasser  par  l'austérité: 
c'est  pourquoi  le  P.  Joseph-Marie  Perimezzi, 
religieux  Minime,  d.ins  la  Aie  qu'il  a  donnée 
de  saint  François  de  l'aule,  fondateur  de  cet 
ordre,  entre  plusieurs  dissertations   qu'il  y 
a  jointes,  tant  sur  l'âiie  de  ce  saint,  son  pays, 
sa   famille,  son   érudition  et  son    voyage  en 
France,  que  sur  d'autres  sujels   qui   regar- 
dent les  actions  de  sa  vie  et  l'ordre  qu'il  a 
fondé,  en  fait  une  pour  prouver   que  le  vœu 
de  la  vie  quadragésimale,  qui  est  le  dislinc- 
lif  de  cet  ordre,  lui  donne  ui:e  supériorité  de 
mnrtificalion  sur  ceux    des  Chaitreus  et  des 
ordres  Mendiants.    Mais  je   crois  que,   pour 
en  juger  sainement,  il  aurait  fallu  que  le  P. 
Perimezzi  ciit   aup'aravant   éprouvé   l'absti- 
nence de  viande  des  Chartreux,  dans  les  plus 
grandes    maladies,    leur   silence   et    l'usage 
continuel  du  ci!;ce,  la   grande  pau\reté  des 
;iulres,   leurs   voyages  à  l'apostolique   et   la 
nudité  des  pieds.  On  ne  peut  pas  nier  néan- 
moins que  ce  vœu  de  la  vie  quadragésimale 
ne  rende  leur  ordre  fort  austère  et  ne  les  as- 
sujelli^se    à  une  morlification    continuelle  ; 
mais  qu'ils  surpassent  en  cela  tous   les   reli- 
gieux, c'est  ce  qu'on   ne  peut  leur  accorder 


sans  faire  tort  à  plusieurs  saints  instituts  et 
réformes,  qui  sont  la  bonne  odeur  de  Jésus- 
Christ,  et  auxquels  on  ne  peut  disputer  une 
pénilence  beaucoup  plus  austère  (jue  n'est 
celle  des  Minimes. 

Cet  ordre  aeu  pour  fondateur  saint  Fran- 
çois de  Paule, ainsi  appelé  du  lipu  de  sa  nais- 
sance dans  la  Calabre  cilérieure  au  royaume 
de  Naples.  11  vint  au  monde   vers   l'an  141(5, 
ses  parents  l'ayant  obtenu  de  Dieu  par  l'inter- 
cession de  saint  François  d'Assise,  aui^uc!  ils 
firent  vœu  et  dont  ils  lui  donnèrent   le    nom 
par   reconnaissance.  Son  père   se   nomm  lit 
Jacques  Marlorille   et    sa    mère   Vienne   de 
Fuse. do,  laciuelle  eui  une  sa'urnomméeîîri- 
gitte,  mariée  à  Ai.toine  d'Alesso,  son  cousin 
germain,  dont  deux  enfants  vinrent  en  France, 
l'un    desquels,   Pierre  d'Alesso,   se  fit   reli- 
gieux dans  l'ordre  des  Mininies,   et  l'autre, 
Antoine  d'Alesso,  épousa  Jacqueline  ou  Jac- 
quetle  Molandrin.   De  ce  mariage  vint  Jean 
d'Ali'sso,  qui  delà  sœurde  l'évéqued'Orlé.ins, 
Mathurin  de  la  Saussaye,  mère  de  l'évéquo 
Jean   de  Morvilliers,    garde   des    sceaux  de 
France,  eut  Michelle,   mariée   à    Nicolas  le 
Clerc  de  Courcelle;  Anne,   femme  d'Olivier 
le  Febvre  d'Ormesson;  François,  qui  épousa 
Marie  de  Vigni  ;  André,  qui  épousa  Marie  d,' 
Longucil  ;  Madeleine,  femme  de  Pierre  Chail- 
lou,  qui  tous  ont  eu   des   descendants,  qui, 
quoique  fort  recommandaMcs  par  leur  pro- 
bité et   les  grandes   charges    auxuuelles    ils 
ont  été  élevés  en  Fra.'.ce,  se  sont  tenus  p'us 
honorés   d'être  jietils  neveux  de;   saint  Fran- 
çois de  P  lule,  que  de  la  qualité  de  présidents, 
de  conseillers  d'Elat,  de  maîtres   des  requê- 
tes et  autres  semblables  (ju'iis    ont  portées  : 
c'est  pourquoi  le  P.  CU'.ude  du  Vivier,  reli- 
gieux Minime,  ayant  écrit  en  1620  que  saint 
François  de  Paule  élait  fils  unique,  il-i  en  fi- 
rent des  plaintes  au   général   de  cet    ordre, 
qui  ordcmna  au  P.  du  Viv  er  de  se  rétracter; 
elle  P.  Cliapat  écrivit  ensuite  pour  prouver 
que   saint  François  de    Paule  avait  eu  une 
sœur  mariée  à  André  d'Alesso. 

Ce  saint,  qui  avait  été  reçu  du  ciel  par  ses 
parents,  étant  regardé  p  r  eux  comme  un 
dépôt  qui  leur  était  confié,  ils  relevèrent 
dans  tous  les  exercices  dedcvoliou  capables 
de  le  rendre  agréable  aux  jeux  do  Dieu, 
auquel,  en  conséquence  de  leur  vœu,  ils  se 
croyaient  obligés  de  le  restituer.  Comme  il 
se  trouva  porté  do  lui-même  à  la  piété,  son 
éducation  leur  coula  peu  ;  cir  dès  sou  en- 
f.inre  il  aima  la  solitude,  l'abslinence  et  l.i 
prière  ;  il  n'eut  poiat  d'autres  maîtres  qu'eux 
jusqu'à  l'ûgo  de  treizeans,  (luils  crurent  qu'il 
était  temps  d'accomplir  le  vœu  qu'ils  a»  aient 
fait  pour  sa  naissance  et  qu'ils  avaient  re- 
nouvelé depuis  pour  sa  conservation  :  pour 
lurs  ils  le  dunnèreni  aux  religieux  de  Saint- 
François,  qui  le  reçurent  dans  leur  couvent 
de  Saint-Marc,  ville  épiscopale  de  la  môme 
province.  Ce  fut  là  que  le  jeune  François, 
animé  par  les  bons  exe  nples  de  ces  saints 
religieux,  et  prévenu  des  grâces  du  ciel,  com- 
mença cette  vie  austère  qu'il  pratiqua  jusqu'à 


(1)   Voij.,  à  la  Cil  du  vol  ,  n' iU. 


'83  DJCTIO.N.NAmE  DES 

1.1  mon.  Il  surpassa  en  \c\i  de  temps  les  re- 
ligieux les  plus  robustes  tt  les  plus  fcTv.'iiis 
dans  l'exacte  observance  d<;  la  rèn!c;  il 
s'interdit  dès  lors  l'us/i^'c  du  linge,  el  s'abstint 
de  manger  de  1 1  viande,  quoiqu'on  en  man- 
geât dans  celle  maison,  selon  l'usasedes  Mi- 
neurs, auxquels  elle  n'est  pas  défendue  par 
leur  rèijie.  Il  y  pissa  un  an  sans  faire  pro- 
fession, et  ayant  été  rendu  à  ses  parents,  ils 
lemcnèrenteiisuitcen  divers  pèlernages, à  As- 
sise à  Ni)tro-[)ime  des  Angos,  àLorctteelA 
Rorn.\  visitant  les  p  us  célèbres  monasièrcs  de 
leur  rou'c, elles  lieux  qui  èl  lient  les  plus  fré- 
quentés par  la  dévotion  des  fidèles.  Elanl 
retournés  à  Taule,  François  se  retira  m  un 
endroit  solitaire,  éloigné'  du  la  ville  de  cinq 
cenis  pas  où  ses  parenls,  qui  avaient  con- 
sen'i  à  sa  retraite,  procurèrent  sa  subsistance 
pendant  quelque  temps,  afin  «lu'élant  dis- 
pensé delà  peine  d'en  aller  chen  her,  il  pût 
vaquer  aux  exercices  de  la  retraite  sans 
distraction.  Mais  ce  linu,  qui  appartenait  A 
ses  parents,  ne  lui  semblani  pas  ass-z  éloigné 
pour  éviter  la  conversation  des  hommes,  à 
cause  des  visites  fréquenies  qu'il  y  recevait, 
il  ne  s'y  arrêta  pas  lonïtimps;  el  cherchant 
une  solitude  plus  écartée,  il  alla  se  cacher 
dans  le  coin  d'un  rocher,  où  il  trouva  moyen 
de  se  creuser  une  loge.  Quoiqu'il  eût  à  peine 
quinze  ans  lorsqu'il  s'y  renferma,  il  n'eut 
pas  besoin  de  la  conduite  d'aucun  maître 
pour  régler  sa  vie  dans  la  pénilenre  et  les 
exercices  spirituels.  Il  n'avait  point  d'autre 
lit  que  la  pierre  même  du  roc,  point  d'aulres 
.alimenîs  que  les  herbes  cl  les  racines  d'un 
petil  bois  voisin,  ou  ce  que  lui  fournissait  la 
iharilcd,.'  ceux  qui  le  visitaient  en  ce  lieu. 
Il  portait  un  rude  ciliée  sous  un  habit  fort 
vil,  el  meiiail  une  vie  semblable  à  celle  des 
solitaires  de  la  Thébaïde. 

Sa  réputali  )n  serépand.t  bienlôldan*  lotile 
la  Calabre  ;  plusieurs  personn  s  voulurent 
être  les  témoins  el  K-siuiilaleursde  ses  vertus, 
et  il  ne  put  résister  huk  instances  (lu'on  lui  fit 
d'en  recevoir  (lu/rjuesuns  et  d'i'n  prendre  la 
conduite,  quoiqu  il  ne  fût  âgé  que  de  dix-nenf 
ans.  (^e  fut  l'an  1V3d  (|u'il  commença  d'avo  r 
des  disciples,  av.-c  lcs:|uels  il  sorlil  do  celte  so- 
litude pour  retourner  auprès  de  P.iu  e  li.ms  un 
lieu  qui  app.irtenail  à  ses  parenls,  où  il  jcla 
les  fondements  de  son  ordre.  Ils  y  liâiireiil 
des  cellules  avec  une  clia|)('llc  où  ils  chan- 
taient ensemble  les  louanges  de  Di  u  ;  et 
comme  celle  cl.apelle  clait  ap;iare:nment  dé- 
diée à  saint  François  d'Ass  se,  on  leur  don- 
n.i  le  nom  t\'h'rmites  de  Sainl-Françoix.  Ils 
Técurent  ensemble  prés  de  dx  ans;  mais  les 
iiabilanis  de  l'ilernc,  ville  siluéc  aussi  dans 
la  Calabre  prache  Cariali  et  du  dioc.'sc  de 
F.ozensa  ,  souliailanl  avoir  part  à  la  béiié- 
ditlion  que  ces  saints  soliiaires  ailiraient 
sur  les  habiianls  de  l'aule,  su(iplièrenl  le 
saint  de  venir  chez  eux,  el  s'oiïrirenl  de  lui 
donner  un  lieu  pour  y  bâtir  un  cnuvent. 
Paul  di^  Kcndac,  gentilhomme  de  ccttV  ville, 
qu'il  avait  reçu  au  nombre  de  ses  enfants, 
joignit  ses  prières  à  celles  de  ses  compatrio- 
tes pour  le  faire  consenlir  à  b  ur  accorder 
celle  grâce.  Il  se  rcudl  enfin  à  leurs  ins'a:!- 


ORD'.IES  KKLIGIEU.X.  OSI 

ces,  el  ayant  pris  quelques  autres  religieux 
ave?  lui,  il  vint  établir  sa  second'»  colonie  à 
l'aiernc  en  \ïï\.  Le  nombre  de  ses  disci- 
ples augmentant  avec  les  charités  des  per- 
sonnes de  pielé  qui  contribuaient  au  sonlie  i 
de  son  nouvel  institut,  il  prit  la  résolution 
en  t'i-52  de  bâtira  l'aule,  avec  la  permission 
de  1*3  rrhos.  son  évé(jue,  un  monastère  d'une 
juste  étendue  et  une  Eglise  [dus  f.pacieuse. 
Hu  (luoi  il  fut  aidé  par  saint  François  d'As- 
sise, qui  lui  appaul  dans  le  temps  i]u'il  com- 
menijait  cet  édifice,  et  lui  Ht  prendre  de  nou- 
veaux ali,'uemenls.  La  même  année  U53,  il 
fit  un  Iroisiè  ne  élablissemenl  à  Spezano-le- 
(irasid,  aussi  du  diocèse  de  Cozensa,  et  jcla 
encore  les  fondements  d'un  nouveau  cou- 
vent à  Cortone  en  IVGO. 

Le  saint  visiiait  ces  couvcn!s,  allant  de 
l'un  à  l'aul'e  tant  pour  l'avancement  de 
leurs  édifices  que  pour  le  gouvernement  de 
ses  religieux,  qui  n'avaii^ni  poinlencore  d'au- 
tres règles  que  celés  qu'il  leur  donnait  do 
vive  VOIX  avec  les  exemples  de  sa  vie  ;  mais 
il  fui  oblige  de  les  qu'ller  pour  un  temps.  Le 
bruit  de  ses  vertus  el  de  ses  miracles  s'était 
tellement  répandu  en  Sicile,  qu'il  n'y  avait 
point  de  ville  dans  tonte  celle  ile  qui  ne  sou- 
liaitât  avec  aideur  jouir  de  sa  présence; 
surtout  les  habitants  de  Milazzo  le  dcman- 
daienl  avec  instance  et  lui  envoyèrent  des 
députes  pour  le  prier  de  venir  établir  chez 
eux  une  comuiunaulé.  .\insi,  après  avoir 
donné  ses  ordres  pour  le  gouvernemenl  de 
ses  maisons  de  Calabre,  il  paitil  en  liG'i- 
avec  deux  de  ses  religieux  pour  aller  en  Si- 
cile, où  il  arriv.i  heureusement  à  la  faveur  de 
son  ma  ni  eau  qu'il  étendit  sur  la  mer  et  qui  lui 
se-vitde  vaisseau  elà  ses  deux  compagnons, 
à  la  lion  le  et  au  grand  élonnement  de  quelques 
mariniers  qui,  voyant  sa  grande  pam  ri-lé, 
lui  avaient  refusé  le  passage  dans  leurs  bar- 
ques. Liant  donc  alionlé  en  Sicile,  il  alla  à 
Milazzo,  où  il  fut  reçu  comme  un  .inge  des- 
cen  lu  du  ciel,  et  où  on  lui  bâtit  en  peu  de 
temps  un  couvent  qui  fut  le  premier  de  son 
ordre  en  ce  royaume,  et  qui  donna  bien- 
tôt naissance  à  d'au  res  qu'on  y  fonda.  Le 
saint  fonla'eur,  .iprès  y  avoir  demeuré  près 
de  quatre  ans,  retourna  en  li08  en  ('a'abre, 
où  il  assista  les  pauvres  dans  une  extrême 
famine  qui  afiligeail  loule  celle  province,  r| 
peu  de  temps  a|irès  il  fut  invite  d'aller  com- 
mencer un  nouveau  monastère  de  son  ordre 
A  Carigliano  dans  le  diocèse  île  Uoss.ine. 

Cependant  les  actions  prodigieuses  qu'il 
faisait  de  lemps  en  temps  faisant  grand  bruil 
par  loule  l'Italie,  le  pape  Paul  II  voulut  en 
avoir  des  nouvelles  assurées,  et  envoya  pour 
cela  un  de  ses  c.imériers  à  l'archevêque  de 
Cozensa,  afin  qu'il  s'en  informât  pli'inemenl. 
L'archevêque,  (|ui  connaissait  la  sainlelc  du 
serviteur  de  Dieu,  parla  avantageusement  do 
lui  à  ce  prélat,  et  lui  conseilla  d'aller  à 
Paule,  afin  de  l'inlerroger  lui  même, de  l'exa- 
miner, cl  de  ne  rapporter  au  pape  que  ce 
qu'il  aurail  vu.  Le  camérier  le  crut,  el  sans 
donner  avis  de  son  voyage,  il  se  rendit  au 
plus  loi  a  l'.iule.  Dèstiu'il  vit  sainl  François, 
il  voulut  lui   baiser  les  mains  par  iespi:cl  ; 


985 


MIN 


M  N 


933 


mais  le  saint  s'en  défendil  avec  beauco«i) 
d'humilité,  lui  disant  qu'il  était  plus  à  pro- 
jos  qu'il  lui  rendît  lui-même  ce  devoir, 
comme  à  celui  qui  élail  honoré  drpuis  (renlc- 
Irois  ans  de  la  difjuilé  sacerdotale  ;  ce  qui 
étant  vrai  surprit  le  camérier,  ijui,  voulant 
exécuter  sa  commission,  l'entrelinl  de  sa  vie 
et  de  celle  de  ses  disciples,  et  commença  à  la 
laser  de  rigueur  indiscrète  el  d'une  siiij;ula- 
rilé  dangercusi^  sur  quoi  il  s'étendit  fort  au 
Jong.  Le  saint  l'écoula  tramiuillement,  mais 
comme  il  s'agissait  de  soutenir  l'établi  sè- 
ment de  la  vie  quadiagésimale  dont  il  avait 
reçu  l'ordre  du  ciel,  il  prit  des  charbons  ar- 
dents entre  ses  mains,  el  les  tenant  long- 
temps sans  se  brûler,  il  dit  au  prélat  que, 
puis()u'il  voyait  ce  qu'il  f.ii  ait  par  la  vertu 
de  Dieu,  il  ne  devait  pas  douter  aussi  qu'é- 
tant assisté  de  cette  vertu  on  ne  pût  supp  )r- 
ter  la  vie  la  plus  austère  el  les  plus  gramies 
rigueurs  de  la  pénitence.  Le  camérier,  ef- 
fr.ij'é  de  ce  prodige,  voulut  se  jeter  à  ses 
pieds  pour  lui  demander  excuse  et  riM-evoir 
sa  bénédiction,  mais  il  en  fut  empi'cliô  par 
le  saint,  qui  lui  demanda  au  contraire  la 
sienne  avec  tant  d'Iiumililé,  que  celui  ci  le 
quilla  autant  cdiTié  de  la  sainteté  de  ses  dis- 
cours el  de  sa  profoiide  humilité,  (lu'étonné 
de  ce  qu'il  lui  avait  vu  faire.  I!  en  informa 
le  pape  et  toute  la  cour  romaine:  ce  qui  fat 
une  grande  disposition  aux  grâces  que  le 
saint-siége  accorda  depuis  à  l'ordre  des  Mi- 
nimes, mais  principalement  à  celle  d;^  son 
approbation  aullienliquo  qu'il  reçut  en  li73, 
sous  le  ponlifioal  de  Sixte  IV  qui  avait  suc- 
cédé à  Paul  11.  Dès  l'an  1471, Pyrrhus,  arche- 
vêque de  Cozcns  I ,  avait  aciordé  à  saint 
François  de  Pauli;  beaucoup  de  privilèges 
pour  son  ordre  dans  toute  l'étendue  de  su:i 
diocèse,  avec  pcrniission  d'y  faire  de  nou- 
veaux établissements.  Geoffrni,  évèque  de 
Saint-Marc  , examina  ces  privilèges  parordre 
du  pape  Sixte  IV,  l'an  li7.3,  et  sur  le  rap- 
port qu'il  en  fit,  ce  pontife  approuva  cet  or- 
dre sous  le  nom  iVEriniles  de.  SuinlFran- 
çois.  Le  même  Sixt ',  ayant  examiné  lui- 
même  ces  pri^iléges,  établit  l'ann/c  suivante 
saint  François  de  Paule  supérieur  général  de 
sa  congrégation,  qu'il  exempta  de  la  juri- 
diction des  ordinaires. 

La  bénédiction  sensible  que  Dieu  répan- 
dait Si.r  cet  ordre,  qui  s'augmentait  i!e  jour 
en  jour  par  les  nouveaux  é'ablis-ements 
qu'on  offrait  à  ce  saint  fondateur,  lui  attirait 
l'amour  el  la  vénération  des  peuples,  qui  ve- 
uaienl  à  lui  de  toutes  parts  comme  au  dépo- 
sitaire des  grâces  et  des  faveurs  célestes.  Le 
souverain  pontife  et  tous  les  prélats  de  Cala- 
bre  n'étaient  pas  moins  persuadés  de  sa  sain- 
teté qui  le  rendait  digne  de  l'admiration  de 
tout  le  monde  ;  mais  cela  n'empêrha  pas 
qu'il  ne  fut  persécuté  par  son  propre  prince 
Ferdinand  I  ^  roi  de  Naples  et  |)ar  ses  deux, 
(ils, le  duc  deCalabre  el  lecardinal  d'Aragon, 
sous  prétexte  de  la  liberté  qu'il  prenait  de 
bâtir  des  monastères  el  de  faire  de  nouveaux 
établissements  dans  le  royaume  sans  permis- 
sion. I/(in  prétend  que  le  saint  avait  choqué 
aussi  le  roi  FerJjnand  par  quelques  avis  im- 


portants qu'il  lui  avait  fait  donner  pour  le 
bien  de  sa  personne  el  de  son  Etat,  el  qui 
plurent  encore  moins  à  ses  enfants,  qui  abu- 
saient de  son  autorité  el  profitaient  de  ses 
exactions.  Ce  prince,  animé  contre  le  saint, 
sachant  qu'il  était  dans  sou  couvent  de  Pa- 
terne, y  envoya  un  capitaine  de  galère  avec 
des  soldais  pour  se  saisir  de  lui  et  l'emme- 
ner prisonnier  à  Naples.  Celle  nouvelle  jeta 
la  consternation  dans  le  pays.  Les  habitants 
de  Paterne  s'employèrent  avec  zèle  auprès 
du  capitaine  pour  le  déto^urner  d'arrêter  le 
saint,  lui  remontrant  que  ce  serait  attirer 
sur  lui  el  sur  toute  la  maison  royale  la  to- 
lère de  Dieu  el  le  fièau  de  son  indignation.  11 
ne  laissa  pas  de  vouloir  exécuter  les  ordres 
qu'il  avait  reçus  ;  mais  lorsqu'il  eut  vu  saint 
François  de  Paule  n  qu'il  lui  eut  signifié  la 
volonté  du  roi,  il  fui  si  louché  de  son  humi- 
lité el  de  lu  d  spo^itiun  où  il  élail  de  le  sui- 
vre, et  surtout  des  discou:s  adajirahles  qa'il 
lui  tint,  qu'il  s'en  retourna  à  Naples  sans 
rien  faire.  Il  dit  au  roi  ce  qu'il  avait  vu  et 
entendu,  el  lui  fil  si  bien  comprendre  le  dan- 
ger qu'il  y  aurait  eu  d'enlever  le  serviteur  de 
Dieu  au  milieu  des  peuples  qui  le  regardaient 
comme  un  saint,  (ju'il  le  fil  résoudre  à  le 
laisser  en  liberté. 

Cependant  le  brun  (le  sa  sainlelé  el  de  ses 
miracles  s'étant  répandu  au  d.'ià  de  l'Italie, 
vin!,  jusqu'à  la  cour  de  France,  où  le  r  ti 
Louis  XI  élail  dang^îreusement  malad;'  dans 
le  châleau  du  Plessis-lez-Tours.  Ce  prince, 
qui  avait  un  grand  attachement  pour  la  vie, 
avait  épuisé  l'art  dos  médecins  el  usé  de  tous 
les  remèdes  imaginables  pour  rétaitlir  sa 
santé  ;  ces  secours  ayant  élé  inutiles,  il  avait 
eu  recours  à  des  moyens  surnaturels  pour 
l'obtcn  r  du  ciel  par  des  vœux,  des  neuvai- 
nes,  des  pèlerin.iges  et  autres  dévolions; 
mais  comme  cela  avait  élé  inutile  jusqu'a- 
lors, il  crut  que  saint  François  de  Paule,  qui 
élail  le  thaumaturge  de  son  temps,  pourrait 
faire  quelque  miracle  en  sa  faveur,  et  obte- 
nir de  Dieu  saguérson  parses  prières.  11  lui 
(il  d'abord  écrire  pour  le  convier  de  le  venir 
trouver  en  Franci',  où  il  lui  promit  lous  les 
avantages  qu'il  pourrait  souhaiter  pour  ré- 
tablissement de  son  ordre  el  pour  lui-même. 
Le  saint,  qui  était  morlau  monde,  ne  se  laissa 
pas  toucher  par  ses  promesses,  auxquelles 
il  préféra  les  douceurs  et  les  biens  célestes 
dont  il  jouissait  dans  sa  solitude,  dont  il  ne 
voulut  point  sortir  malgré  les  instances  d'un 
si  grand  monarque  ;  c'est  pourquoi  Louis  XI 
en  fit  parler  au  roi  de  Naples  par  son  ambas- 
sadeur. Ce  prince  fit  son  possible  pour  per- 
suader à  saint  François  de  Paule  de  donner 
cette  satisf  iclion  au  roi  de  France,  mais  ce 
fut  encore  inuiilemcnt.  Enfin  Louis  XI  s'a- 
dressa au  pape  Sixie  IV,  qui  envoya  deux 
brefs  à  ce  saint  homme,  par  lesquels  il  lui 
ordonnait  de  se  rendre  piomptemonl  à  la 
co'ir  de  France.  Il  n'en  fallut  pas  davantage 
pour  le  délermiaer,  et  la  voii  du  souverain 
pontife  fiil  pour  lui  comme  un  ordre  venu  du 
ciel.  Après  avoir  réglé  ce  qui  lui  parut  plus 
important  pour  l'administrât  on  des  couvents 
de  Galabrc  et  de  Sicile,  il  partit  le  2  février 


"87                                            DICTIONNAIIÎF,  DF.S  OUDUES  riEI.lGIia'X.                                            ms 

li82aTcc  le  inaîlrc  (I'IkUcI  du  mi  qui  IVlail  cntcmirc  que  la  vio  des  rois  aussi  bien  que 
vMiii  quérir.  Il  fut  reçu  à  Nnples  avec  la  <ello  d'S  aiiircs  hommes  i(anl  entre  les 
iii(<mc  pompe  (|uc  <i  c'eùl  élé  un  louai  apo>-  mains  de  Dii-u,  qui  a  complé  lous  nos  jours, 
toliqiie  ou  le  rui  nuMuc.  Feriliiiaïul,  avec  ses  il  falLiit  s'adresser  à  lu'  par  b  priùre  pour 
enfants  et  ce  qu'il  y  avail  de  (jr.mds  sei-  conn.iîire  sa  volonté  ri  s'y  soumetire  aveu- 
pneurs  ;'i  s.i  (oiir,  alla-aii  dov.inl  di!  lui,  cl  la  plémont.  Le  roi  jo  fil  losi'r  dans  la  basse- 
foule  du  monde  élail  si  L-rand'"  que,  sans  la  cour  de  son  cliâleau,  en  uii«'  petite  maison 
diligence  lin  prinre  de  l'arcnte,  lis  d'i  roi,  proc  lie  la  cliapel  c  de  ^aint  MaKiiieu,  atin  do 
qui  l'avait  élé  quérir  jusqu'à  Salcrnc,  il  eùl  pouvoir  ji)i:ir  plus  faiiicmenl  de  son  ciiInMicii 
c:é  inipossiliic  de  le  faire  passer-.  p.ir  le  moyen  d'un    ncininié  Ambroise  Iloni- 

A  Komc  le  pape  lui  lit  rciiflredrs  honiiciirs  baut,  qui  s.ivail  également  le  laiin,  le  frança  s 

que  l'on  n'y  nccordail   pis  mr'ino  aux  prin-  cl  lilalicn,  cl  donu  i  cliariic  à  deux  ofieiers 

es.  Les  cardinaux  le  vsiièrent  en  cérémo-  d'avoir  soin  de  sa  subsistance  et  d'  celle  do 

nie,  et  en  trois  diiï^Mcnlcs  audiences  parlicu-  ses  religieux  (lu'il  avail  amenés  avec  lai.  La 

lières  qu'il  eut  du  p.'pc.  il  !ul  as-is  dans  un  v!>néralion   qne  le  roi,  les  princes  et  les  sei- 

i.iuleuii  égal  à  celui  de  Si  Sainteté,  qui  l'en-  pneurs  de  la  cour  les   mieux  sensés  avaient 

Iretinl  chaque  fois  pend  ni  l'espnci'  l'c  trois  P'iur   ce  grand   servilcur  de   Dieu,  n'empé- 

ou  qnaire  heures,  (le  pontife  voulut  l'élever  cli  i  pas  que  plusieurs  courtisans  plus  versés 

aux   dignités    ci  clésiastiqiies,  mais   le  saint  dans  les  manières  du  uKmde  (pie  dans  celles 

s'en    défendit  avic   beaucoup   d'h  milité,  cl  des  saints  ne  se  moquassent  de  lui  et  ne  Tap- 

n'accepla  .  de  tous  le;  pouvoir,  que  lui  o.Tril  pelassent  par  dérision  le  hon  Itomtiie,  le  lour- 

I  •  pape,  que  celui  de  bénir  d^s  cicrgi'S  et  des  nani  en  ridicule  sur  ses   habiis,  ses  cheveux 

i-   apelets  pour  faire  ses  présents  en  France,  qi'il  ne  coupait  point,  cl  surtout  sur  son  exté- 

co  qui  fui  la  sourie  d  une  iniitii  o  de  niirac'es  rieur  négligé.  Le   médecin  du    roi,  Jacques 

ciu'il  fil  en  ce  roy  lunii'.  Il   parla  à   Sa  Sain-  Coclicr,  ne  fut  pas  des  derniers  à  le  railb-r, 

télé  du  vœu   de  la  vi:'  quidrag' siniale  qu'il  y  6l  ni  c\ci(é  par  sa  jablu^ie;  mais  l'année 

Viiulait  établir  dans  fcn  ordre;  niais  coaime  suivante  il  s;' réunit  avec  le  saint  pour  dispo- 

le  pape  faisait  beaucoup  de  dilficulîé  pour  le  ser  eiiiin  le  roi  à  la  murt  qu'il  a|  préheniiait 

lui  accorder,  le  saint, sans  insister  davanlage,  tant.  Saini  François  fit  sa  principale  alTaire 

[rit  par  la  main  le  cardinal  de  la  Kovère,  et  di- ce  dernier  devoir,  et  il  obtint  par  ses  pric- 

dii  au  pape  qo  ■  celui  ri  ferait  ce  que  Sa  S.iiu-  rcs  aujirès  de  Pieu  et  par  la  force  de  ses  ex- 

lelc  avait  tant  de  peine  à  faire,  lui  prédisant  hortalions  le  changement  du  cieur  du  roi,  qui 

5'ar  là  qu'il  ^erail    pape;    ce   qu'il  confirma  mourut  entre  ses  mains  lei  aoûl  de  l'an  14S.{, 

l'ncore  à  ce  cardinal  lorsqn'il  se  réfu'jia  en  avec  une  soumission  parfaite  à  la  volonté  do 

b'rance  sous  le  (o^  tilicat  d'.Vlexandre  VI;  et  Dieu,  après  lui  avoir  recommandé  ses  trois 

en  effet  il   le  fut  depuis  sous  le  nom  de  Ju-  ci.fanis  et  le  repos  de  son  âme. 

les  11,  el  il  approuva  la  régie  des  Slinimes  Charles  ^  111,  ayant  succède  à   Louis   XI, 

avec  le  quatrième  vœu  de  la  vie  quadragési-  honoi  a    nore    saint   d'une   manière   encore 

inale.  plus  particulière  que  n'avail  fail  le  roi    son 

Peu  de  temps  après,  ce  saint  ambassadeur  père,  ne  voulant  rien  faire  que  par  ses  avis 
alla  s"eiiibar{|uer  à  Ostie  po  :r  prendre  la  dans  toutes  les  choses  qui  regardaient  sa 
route  de  Fran  e,  cl  dans  presque  'ons  les  cimsciene.e  el  môme  celles  de  l'Etal  :  il  le  vi- 
endioits  <.ù  il  pa^sa,  il  laissa  d  s  mariiu  s  du  silail  souvent  el  le  f.iisail  venir  dans  sou  ca- 
pouvoir  qu'il  avait  reçu  de  Dieu,  pnrles  gué-  bincl;  il  lui  fil  tenir  le  dauphin  son  fils  sur 
risons  miraculeuses  (;u  il  lii.  Le  roi  Louis  XI,  les  f mis  de  bapléme,  et  voulut  même  qu'il  le 
apprenant  s(Mi  arc  i\ée  en  France,  en  cul  tant  nommât:  il  lui  fit  bâlir  un  beau  couvent 
lie  joie  qu'il  lit  présent  au  porteur  de  cetio  ilans  le  parc  du  l'Ies  is,  au  lieu  appelé  les 
nouvelle  d'une  liour>e  de  dix  mille  écus,  qui  Monlils,  avec  une  pension  sullisante  pour  lui 
était  la  somme  iiu'il  f  is.iil  donner  lous  les  et  ses  religieux,  et  un  autre  à  Amboise,  sur 
mois  à  son  méilecin  depuis  .-a  dornii're  mala-  la  place  mi-me  où  il  l'avait  reçu  à  son  ani- 
d  e.  Sachant  que  le  s.iint  appro(  hait  de  la  vée  en  France,  lorsqu'il  n'élail  encore  qiio 
Touraine,  il  i  nvoya  or  r^"  au  dauphin  de  dan|  hin,  et  voulut  que  les  religieux  de  ce 
F'.ance,  son  fils,  (|ui  fut  depuis  roi  sous  le  monasière  fussent  eniretenus  sur  les  revenus 
nom  de  (lliarles  \ni,de  l'al!er  recevoir  n  annuels  de  ses  finances.  Son  affection  pour 
Ainboise  :  ce  q  l'il  lit  avec  tous  les  lémoigna-  ce  saint  homme  no  se  borna  joint  à  lui  fure 
ges  possibles  d'estime  el  do  icspect,  et  de-  du  bien  dans  ses  lilals.  Llani  à  Uouieen  IVi).'), 
puis  ce  temps-là  ce  jeune  prince  l'aima  cl  où  il  aiait  fait  une  entrée  Iriomphanle,  et  où 
l'honora  comme  son  propre  père.  Le  loi  ne  le  pape  Alex.indre  \l  l'avait  piorlamé  empe- 
sa conicnla  pas  d'avoir  envoyé  son  lils  le  re-  reur  de  ConslanlinO|)le;  il  y  fonda  un  autre 
revoir  :  sachant  qu'il  était  |  roche  de  Tours,  couvent  do  sou  ordre  sous  le  nom  do  la 
il  voulut  aller  lui-mémo  au-dovant  de  lui  Sainte-Trinité  au  iMont-rincio,  qui,  selon  les 
avec  toute  sa  cour  cl  le  reçut  avec  aui.inl  inlenlions  de  ce  prince,  approuvées  |)ar  no- 
d'bonneiir  cl  de  soumission  ()ue  si  c'eol  été  le  tre  saint  el  conlirmées  par  les  sou>erains 
pape.  Il  se  jeta  à  genoux  devant  lui,  le  con-  poutib's,  n'a  été  jusqu'à  présent  rempli  que 
jurant  lie  faire  en  sorte  que  Dieu  voulût  lui  de  religieux  fiançais,  sans  (|n'aucun  autre, 
prolonger  la  vie.  Le  .^ainl  lui  npondit  ce  de  quelque  nalioii  qu'il  soit,  y  puisse  seule- 
qn'iine  ;  ersonne  au-  si  humlil(!  el  ;ii.l:int  pé-  nu  ni  coucher  une  nuit,  non  pas  même  le  g6- 
ni'iréc  di>  les|irit  de  Dieu  (|n"il  l'était  dev.iil  neral,  s'il  n'est  pas  fianç.iis. 
lepondic  à  une  pareille  dcuiunde,  lui  liisaul  l'eu  de  temps  «près  que  /co  saint  fondateur 


98!) 


MIN 


MIN 


000 


ont  établi  son  ordre  en  Franco,  il  eut  la  con- 
solation de  le  voir  établir  en  Espagne,  sous 
les  rois  catholiques  Forilinand  et  Isabelle,  y 
envoyant  pour  cet  eiïet  des  religieux  du  cou- 
vent du  Plessis- lez-Tours,  auxquels  on 
donna  un  couvent  à  Malaga,  où  ils  furent 
nommés  les  Frères  de  la  Victoire,  à  cause 
de  la  prise  de  cette  ville  sur  les  Maures,  que 
Ferdinand  attribua  aux  prières  de  saint  Fran- 
çois, qui  enfin  (omposa  sa  première  règle  en 
iV93,  et  la  fil  approuver  par  le  pap"  Alexan- 
dre VI  ,  à  !a  recommandation  du  roi  de 
France,  et  ce  ponlife  cbang.-a  le  nom  d'Er- 
iiiiles  de  Saint  François  d'Assise,  (jne  |:or- 
taient  ces  rclig'cux,en  celui  de  Minimes  des 
Frères  Ermites  de  François  de  Paule.  Ce  fut 
aussi  la  même  année  que  l"on  jeta  les  f  mdo- 
ments  du  couvent  de  Nigeon  prôs  Paris,  dont 
la  reine  \niie  de  Bretagne  se  rendit  fonda- 
trice, et  l'on  donna  à  ce  couvent  le  nom  des 
lions  Ilomines,  qui  lui  est  resté  jusqu'à  pré- 
sent, à  cause  du  nom  de  Bon  Homme,  qu'on 
avait  donné  à  leur  fondateur,  comme  nous 
avons  dit  ci-dessus.  Le  même  Alexandre  XI 
confirma  en  l'iOo  toutes  les  grâces  que  ses 
prédécesseurs  avaient  accordées  à  cet  ordre, 
«tlui  communiqua  encore  tous  les  privilèges 
des  religieux  mendiants. 

Deux  ans  après,  c'est-à-dire  en  IVOT,  le 
saint  fondateur  envoya  de  ses  religieux  en 
Allemagne,  à  la  prière  de  l'empereur  Maximi- 
lien.  Ils  y  établirent  d'abord  trois  couvents 
qui  ont  servi  de  pépinière  aux  autres  que 
l'on  a  de|)uis  balisdans  le  même  pays.  L'an- 
née suivante  li98,  Louis  Xll  étant  parvenu 
à  la  couronne  de  Francis  par  la  mort  do 
Charles  VIII,  qui  arriva  à  Amboise,  comn)e 
le  nouveau  roi  avait  toujours  été  éloigné  de 
la  cour,  et  qu'il  ne  connaissait  pas  saint 
François  de  Paule,  il  lui  laissa  d'abord  la  li- 
berté de  s'en  retourner  en  Italie  ;  mais  ayant 
appris  à  cette  occasion  la  valeur  du  trésor 
(ju'il  allait  perdre,  il  révoqua  sa  permission, 
et  voulut  encore  enchérir  sur  ses  préiéres- 
seurs  en  affection  et  en  bienfaits  à  l'égard  du 
saint,  de  ses  religieux  et  de  ses  neveux;  en 
quoi  les  uns  et  les  autres  furent  Iden  servis 
par  l'aichevéque  de  Koiicn,  Georges  d'Am- 
boise,  ministre  d'Etal,  qui  avait  été  fait  c.ir- 
dinal  l'année  de  l'avènement  de  Louis  Xll  à 
1,1  couronne. 

Ce  prince  non-seulement  agréa  comme 
avait  fait  son  prédécesseur  les  bulles  de 
Sixte  IV  et  d'Alexandre  VI  en  faveur  de  l'or - 
(Ire  des  Minimes,  et  en  ordonna  la  publica- 
tion, mais  Fan  loOO,  pour  donner  plus  de 
force  à  cette  ordonnance,  il  la  conlirnia  en- 
core par  d'antres  lettres  patentes  et  donna 
pouvoir  au  saint  homme  de  bâtir  des  cou- 
vents dans  tous  les  lieux  de  son  obéissance, 
les  exemptant  de  toutes  sortes  d'iniposltions, 
de  subventions  et  de  subsides.  L'an  1501, 
saint  François  de  Paule  ayani  [)erfeclionné 
sa  première  règle,  et  ayant  réduit  en  dix  cha- 
pitres les  treize  dont  elle  ét:iit  d'abord  com- 
po  ce,  ayant  aussi  établi  la  vie  quadragé.'-i- 
iiiale  en  vœu,  et  ayant  dressé  une  règle  pour 
les  personnes  de  l'un  et  l'autre  sexe  qui  vi- 
vent dans  le  monde,  il  fit  encore  approuver 


ces  deux  règles  parle  p  ipc  Alexandre  VI,  en 
1302.  Il  retoucha  ensuite  ces  deux  règles. 
auxquelles  il  fit  quelques  changements  ,  et 
les  présenta  au  sacré  cidlége  dos  cardinaux, 
(jui  les  ayant  trouvées  conformes  aux  sacrés 
canons,  elles  furent  confirmées  par  une 
bulle  du  m5aic  Ab  xandre  VI,  qui,  outre  les 
privilégias  des  quatre  ordres  mendiants  dont 
jouissait  celui  des  Minimes,  le  fit  encore  par- 
ticipant de  ceux  qui  avaient  été  accordés  aux 
Ermites  de  Saint  Jérôme  de  la  congrégation 
du  l)i<nheureux  Pierre  de  Pise,  et  tous  ces 
privilèges  furent  confirmés  en  1503  par  le 
p.!pt'  Jules  H,  qui  y  en  ajouta  encore  de 
nouveaux  et  nomma  pour  protecteur  de  cet 
ordre  le  cardinal  Bernardin  de  Garv.ijal,  (luc 
le  saint  fondateur  lui  avait  demande.  Enfin 
l'an  1303,  saint  François  de  Paule  ayant 
mis  la  dernière  main  à  ses  deux  règles,  et  eu 
ayant  fait  une  troisième  pour  des  religieuses, 
le  même  pape  les  ajiprouva  et  les  confirma 
par  une  bulle  du  23  juillet  de  la  même 
année. 

Le  saint  ajouta  encore  à  ces  trois  règles 
d'autres  ouvrages,  savoir  un  Correcloire, 
dans  lequel  il  marque  les  pénitences  qu'il 
faut  imposer  dans  son  ordre  pour  les  trans- 
gressions des  commandements  de  Dieu  et  de 
l'Eglise,  et  les  prévarications  de  la  règle  ; 
un  Cérémonial,  dans  lequel  il  prescrit  ce  que 
l'on  doit  observer  dans  la  récitation  îles  of- 
fices divins  et  dans  les  fonctions  ecclésias- 
tiques. Le  Correcloire  fut  aussi  approuvé  par 
Jules  II,  qui  donna  encore  une  autre  bulle 
l'année  suivante  en  faveur  des  religieux  de 
celordre  contre  ceux  qui  voulaient  les  em- 
pêcher de  jouir  de  leurs  privilèges  ,  et,  pour 
les  y  maintenir,  Sa  Sainteté  leur  donna  des 
conservateurs. 

Peu  de  temps  aprè-.  Dieu  fit  conmîlrc  au 
saint  fondateur  qu'il  ne  tarderait  pas  à  le 
retirer  de  ce  monde,  pour  lui  donner  la  ré- 
compense promise  à  ceux  qui  l'.iimenî  et 
qui  le  servent  fidèlement  jusqu'à  lafin.Quoi- 
qi'il  se  fût  toujours  préparé  à  la  mort  pen- 
dant tout  le  temps  de  sa  vie,  il  voulut  s'y  dis- 
poser d'une  manière  encore  plus  parï'iite, 
car  trois  mois  avant  que  de  mourir,  il  de- 
meura caché  dans  sa  cellule  du  couvenl  du 
Plessis-lez-Tours  sans  se  communiquer  aux 
hommes.  Ce  fut  le  jour  di^s  Uami'aus.  de  l'an 
1307,  ou  sur  la  fin  de  l'an  loOG,  comme  l'on 
comptait  alors  les  années  en  Fiance,  qu'il 
lut  attaqué  d'unL-  fièvre  qui  devait  terminer 
sa  vie  mortelle.  11  ne  \oulutpas  néanmoins 
qu'on  eût  aucun  soin  de  lui,  ni  qu'on  lui 
donnât  aucun  soulagement.  Le  jeudi  saint  il 
asseoibla,  selon  l'ordonnance  de  la  rôg'e,  les 
religieux  dans  la  sacristie,  qui  tenait  lieudj 
chapitre,  pour  leur  recommander  l'aniourdc 
Dieu,  et  la  charité  entre  eux,  la  fidélité  à 
leur  règli',  et  principalement  l'cxaclitudo 
daiij  l'observance  delà  vie  quadragésimale, 
qui  les  distingua. t  il'avecles  autres  religieux. 
De  là  il  se  fil  conduire  à  l'Eglise,  où,  après 
s'èire  eoafessé,  il  recul  la  sainte  em  jiarisliu 
en  la  manière  que  ses  religieux  la  reçoivent 
ce  jour-là,  c'est-à-dire  les  pieds  nus  et  le 
coi  duu  au  cou.  On  le  reconduisit  ensuite  à  sa 


•  cllule.  appuyé  sur  les  brns  df  ses  r(>li;;icux. 
l'n  Flore  lui  ilciirinil.i  s'il  voul.iil  qu'on  lui 
l.ivâl  les  pieds  l'aprosiliiiée,  suiv.iiu  la  coi- 
liiino    de  riî;,'lise,  il  lépondil   ijue  imn,  m.iis 


^!  •                                bicno.N.NAiiu;  Dts  or.ui'.LS  ullu;ii:l'\.                               002 

feu  par  des  calholiiiues  zélés,  qui  se  inêlè- 
reiil  pjniii  les  soldais  rahlnisles  dans  la 
cliambre  où  se    rouiineltait    le  sacrilégo  ;    ol 

r-       ,---,- ,„ „  dans  la  suite  des  lc;iips   ils  furent  distribués 

pie  le  Inidernai  1  on    ferail  de  son  corps  te  à  diverses  églises, 
que  l'on  voudrait.  Kii  eiïel,  il  m  lunil  le  len- 

dcm.iiii,  qui  él.iit  le  vcndr.ili  saint,  deuxième  Le  saint  fondalc'.ir  ayant  nommé,  quelque 

j  )ur  d'avril.  L'uiiinion  commune  o>l  que  ce  temps  avant  sa  mori,  pour  vicaire  général  en 

saint  avait   pour  lors  [)rès    de.   (]u;i;re-vinf;t-  sa   place  jusqu'.iu    pre  uier   chapitre,  lo  P. 

onze  ans.  Le  I'.  (liry,  provincial  de  son  ordre  Uernardin    de  Cropu'ato,    provincial   de     la 

en  la    province  de    France,  a  fait  voir,  dans  province    de   Touraine,    celui-ci    indiqua   le 

une  disserMIion  qu'il  donna  en  1(580,  que  ce  chapitre  général  pour  le  mois  de    déc  nibro 

sentiment  devait  élre.  suivi  plutôt  que  celui  de  la  même  année  l.'iOT.  H   se  tint  à    Rome, 

du   P.  Papebrocli,  qui  dit  (ju'il   n'avait   que  et  le  P.  François  liinet,  pour  lors  correcteur 

soixante-neufans,  l'ayant  fait  nailre  en  r;38.  du  com  cnt  dé  la  Trinité  à  Home,    y    fut  élu 

('e  savant  .lésuile  s'est   ensnile    rendu    aux  {léuéral   le    premier   janvier    1508.    L'ordre 

raisons  du  P.  (îiry,  cl  le  P.  l'érimi'z/i,  aussi  était  pour  lors  divisé  en  linq  provinces,  qui 

de  l'ordre  de<  .Minimes,  qui  a  donné,  comme  étaient  celles  d'Italie,  de  Tours,   de  France, 

nous  avons  dit,  la  \ie  de  ce  saint,  y  a  joint  d'Espagne  et  d'.MIemajine;  mais  co  orne  l'or- 

l.i  disserl.ition  du  p.  (iiry,  cl  n'a  pas  manqué  di'e  s'e^t  si  fort  multi|iiié  dans  la  suite,  qu':l 

il-.>  rapporter  la  rétractât  on  du  P.  Papebrocli.  a   présentement    environ  quatre  cent    cin- 

Lccops  do  saint   François    de   Paule   lut  quante  couvents,  il    est  divisé    en    Irenl  ■    et 

I  orlé  dans  ré|;lise  de  sou  couvent,  où  il  de-  "ne  provinces,  dont  il  y  en  a  douze   en   lla- 

i:ieura  pendant  trois  joars  sans  que  l'on  (lût  lie,  onze  en  France   et    en    Flandre,  sept  en 

l'enterrer,  à  cause  de  la  faraude  afducncc  du  l'-spaijne  et  une  en  .\llemagne.  Ces  religieux 

peuple  qui  venait  pour  le  voir  et  l'honorer;  ont  même  pissé  dans  les   Indes,   où    ils   ont 

el  il  ne  fut  mis  en  trrre  i,ue  le  lundi   de   Pâ-  «luelques  couvents  qui  ne  composent  p.is  de 

qui's.  La  durbesse  de  lio'.irbon,  lille  de  Louis  provinces,    et   qui    relèvent  immédiatement 

XI,   et   la  comtesse  d'Anj;oulénie,    mère  du  du  général,  aussi  bien  (pic   les   couvents   de 

loi  François!",  ayant  appris  qu'on   l'avait      '    " '  ■  —  - 


la  Triiiilé  du  mont  Pincio,  de  Saint-François 
de  Paule,  el  de  Saint-François  delli'  l'raite 
à  Rome.  Dans  ce  premier  chapitre  gé  éral, 

aii.,,i,.l     I, ..>'>,•, i;.«.il      .1..      C..../....r,l.  „       .1..      I* 1^.. 


mis  en  terre,    n'en   farcit   pas  contentes,   à 

cause  principalement   que  ce  lieu   étail   fort  -  -■  ..-  , , ^.    ...... 

humide  et  sujet  aux  inonda'ions  de  fa  rivière  auquel  le  cardinal   de  Senogalia,  de  l'ordre 

du  Cher;   c'est   pour(]uoi  elles  obligèrent,  le  'les  Mineurs,  présidait  en  l'absence  du  car- 

ji'Udi  suivant,  les  religieux    de  le  lever   de  dinal  Carvajal,  protecteur,   il    fut   ordonné, 

terre:  il  fut  encore   exposé   (ilusieurs  jours  sur  la  difficulté  (juc   quehiues-uns  faisaient 

sans  se  corrompre,   et   on    le   plaçi  ensuite  An   recevoir   la   règle   de    saiiil  François  de 

dans  une  grolle  de  maçonnerie,  bien   vofitée  Paule  cl  de  se  soumettre  au    vœu  de   1 1    vie 

et  ornée,  qui  fut  faite  au  fond  de  la  cba|ielle  quadia;;é>imali',  que  ceux  qui  s'y  oppose- 

que  l'on  avait  cho  sie   d'abord    jiour   le  lieu  r.iienl  «-l   ne    voudraient  point  accomplir  ce 

de  sa  sépulture.   L'on  commença    dès   lors  à  V(cu,  seraient  privés  de  tous  droits  de  suf- 

rédanier  son  intercession  el  à  lui    farc  des  frages  dans  les  élections:    ce   (lui  produisit 

viL'ux  pour   obtenir  par   son  moyen    les   fa-  ""  bon  effet,  car  tous  les  vocaux  se  jetèrent 

veuis  du  ciel.   On   travailla    i  eu    de   temps  aux  pieds  du  ca  dmal   et  lircnl   de  nouveau 

après,  même  du  régne  dj  Louis  XII,  et  sous  profession  entre  ses  mains  de  la   quatriènuî 

le  ijonlilicat  d-  Jules  II,  à  faire  des  informa-  règle  de  saint  Fr. niçois  de  P.uile   et  du  vœu 

lions  juridi(|ues  des  .clions  saiiites  de  sa  vie  il':  i-'i  vie  quadragé^imale.  D'abord  les  géné- 

cl  de   ses   miracles.    Qielqnes-uns    veul  ni  raux  ne  lurent   (jue   pour   trois   ans,   et    ils 

que  sa  béatilicalion  ait  été  faite  le  7   juillet  commencèrent  à  i'étre  pour  six  ans  en  IGO.J, 

I.)I3,   mais    on   ne   laissa  pas  de  poursuivre  P"i"  autorité  du  s.iint-siegc.  Le  premier  qui 

depuis  les  mêmes  procédures  en   France,  en  exerça  col  olli  e  pendant  six    ans   fut    le   P. 

Calabre,  et  dans  les  autres   endroits  où   Ion  Etienne  Augi  r,  Franrais,    (jui  fut  élu   dans 

savait  (lue  le  saint  avait  été.  Ce  fut   le  pipe  le  cha|)ilre  général  qui  se  tint  aliènes,  et  (|ui 

Léon    \  qui  le  canonisa  en  1511).  Son  corps  était  le  Irente-lroisième  (pii  s'était  tenu  dans 

fut  conservé  précieusement  dans  l'église  de  l'ordre.    Ceux  qui  ont  droit  d'assister  à  ces 

son  couvent  du  Plessis,  jus(iu'à  ce  que,   l'an  chapitres  généraux  sonl  le  général,  les  col- 

1502,  1.  s  huguenots   (|ui  mettaient  la  Fr.ince  lègues  généraux,  les  provinciaux,  le  zêleur 

en  combustion  y  ét.inl  entrés  les  armes   à  la  ou  procureur  général,  seulement    qu.ind   le 

main  pour  le   saccager,    comme    ils    avjiient  ('h,i|)iire  se  tient  à    Rome  'm  aux   environs. 

lait  en  divers  endro  Is  du  roy.'iuine,  tirèrent  Les  vocaux  des  chapitres  provinciaux  qui  se 

son  corps  du  tumbe.iu    où    ils   le    trouvèrent  tiennent  Ions  les  trois  ans  sonl    les  provin- 

<  iicore  ci.uverl  de  sa   peau,   i|uoiqu'il   y   eût  ci.iux.  les  collègues,    les    correcteurs   cl    un 

!).j  ans  qu'il  fùi  morl,  le  IrainèrenI,  revêtu  de  commis  de  ch  upie  province.  Il  y  avait  autre- 

ses  habits  comme    il    et.iit,    avec  une    corde  fus   (|uatre   vigiles    ou    visiteurs  génér.ius, 

<|u'ils  lui   mirent   au    cou,  dans  la  rhambic  (jui  étaient  élus  dans  les  chapitres  généraux 

'îestinée  pour  rerevoir  les  hôtes    cl  l'y    lirù-  et  (jui'.ivaienl  ilroit  d'y    assister,  aussi    bien 

li'rcnt  avec  le  bois  du  grand  crucifix  de   l'é-  q  le  les  collègues  provinci.iux  el  deux   coin- 

glise  (ju'ils  avaient   .inaché.  Ses    ossements  mis  de  cb.iquc  province,  m  lis  les  vigiles  ont 

furent  né.inuioins  pour  la  [duparl  retirée  du  élc  supprimés,  cl  Icj  collègues  pruvinciaux 


093 


MIN 


n'y  nssislonl  plus,  (Ikkiuo  proviiirp  y  en- 
voyant s(!ulemonl  un  coniiiiis. 

Nous  avons  tlil  qufi  lu  rrylL'  de  saint  Fran- 
çois (!o  Paul-  conlenail  dix  ciia|)ilr<'s;  cl'e 
commence  par  l'observance  des  préceptes 
et  des  vœux.  Ainsi,  tous  les  fièi es  observe- 
ront les  commaniicmcnis  de  Dieu  et  les  pré- 
ceptes de  l'iiplise.  Ils  rendront  obéissance  au 
pape,  cl  prrmKttront  de  garder  jusqu'à  la  lin 
(le  leur  vio  les  vœux  d'obi'issance,  de  cli.is- 
Iclé,  de  pauvreté  et  de  la  vie  quadra^ésimale. 
Ceux  qui  voudront  entrer  dans  l'ordre  ne 
pourront  y  être  reçus  (ju'en  qualité  de  frères 
clercs,  de  frères  lais,  ou  de  fières  oblals, 
et  demeureroMl  tout  le  res.te  de  leur  vie  dans 
l'état  de  leur  prc.fession.  L'habit  des  frères 
clercs  et  des  frères  liis  sera  long  jus- 
(;u'aux  talons,  d'une  éto'.îe  vile,  di-  laine  u  i- 
lurellcnient  noire  et  sans  teinture.  Le  cha- 
peron sera  aussi  de  la  même  couleur,  et  des- 
cendra devant  et  derrière  jus  |u"au  iiiilii  u 
de  la  cuisse  ou  à  peu  près  (Ij.  Ils  auront  ea- 
core  une  ceinture  de  laine  de  scn)blalile  cou- 
leur, nouée  de  cinq  nneuds,  et  ils  ne  pourront 
jamai.  ni  jour  ni  nuit  quitter  le  cordon,  ni 
l'baldt,  ni  le  chaperon.  Ils  se  serviront  à 
leur  choix  do  soc  [ues  on  de  siiidaies,  fa  tes 
de  génois  eu  de  feuilles  de  palniier,  ou  de 
paille,  ou  de  cor  le,  ou  l'e  jonc,  ou  bien  ils 
pourront  se  servir  de  souliers  ouverts  par- 
dessus, si  ce  n'est  qu'une  pressante  iséres- 
silé  ou  la  di.;pense  des  supérieurs  ne  les 
exempte  d'yller  nu-pieds  :  il  y  a  plus  de  cent 
ans  que  cetic  dispense  leur  a  été  accordée, 
it  ils  sont  piésenlemcnl  chaussés. 

Quant  aux  oblats,  ils  auront  un  habit  de 
la  même  couleur,  qui  n'ira  que  jus.iu'au 
gras  de  la  jambe  ou  environ  et  ne  descendra 
pas  plus  bas.  Ils  auront  aussi  un  cordon 
noué  seulemcnl  de  quatre  nœuds.  Ils  seront 
chaussés,  et  porteront  un  ch.ipeion  Isonni'le 
avec  sa  cornette,  ou  bien  un  bonnet  décent 
et  commode,  suivant  que  la  qualité  du  pays 
le  requerra.  U  sera  permis  à  tous  les  frères 
de  porter  sous  leur  habit,  selon  leurs  besoins, 
des  tuni(iues  de  ule  étoffe  et  de  petites  lu- 
ni(]ues  de  serge,  comme  aussi  des  hiuls-de- 
rhausses  et  des  bas-de-ch.iusses  raisonna- 
blement étendus  sur  les  gcmux.  Ils  pourront 
encore  i-e  servir  i  leur  volonté  d'un  man- 
teau qui  sera  de  la  couleur  de  l'ha'jit,  au- 
quel sera  attachée  une  cuculle  propre  à  cou- 
vrir la  tête,  laquelle  cueulie  srra  courue 
par  derrière.  Les  oblats  se  servi,  o  t  à  leur 
discréiion,  tant  au  dedans  qu'au  dehors  du 
couvent,  d'un  petit  manteau  fermé  t!e  la  lon- 
gueur de  leur  habit  ou  environ,  sans  cipui  e 
ni  cuculle.  Us  pourront  tous  dans  les  voya- 
ges se  servir,  avec  la  permission  du  correc- 
teur, d'un  âne  pour  monture,  et  au  défaut 
d'une,  le  correctoire  leur  permet  de  se  servir 
de  mulets  et  même  de  chevaux,  s'ils  ne  trou- 
vent point  de  mulets. 

Les  l'ières  t;ui  auront  été  reçus  pour  le 
chu'ur  suivront  eu  tout  l'ordre  et  le  calen- 
drier de  riiglise  rotnaine,  et  s'acquitteront 
des  ollices   ditins,   eu   observant   toutes  les 

(!)   Vcy  ,  à  h  fin  du  vol.,  ii"^  21,'i  el2.G. 


MIN  9,0.i 

cérémonies,  selon  l'usage  de  la  même  Kglise. 
Les  frJ.es  convers  diront  pour  lo.iiines 
trente  fo's  l'oraison  dominicale  et  la  salu- 
tation angélique,  dix  pour  laudes,  douze 
pour  vêpres,  ajoutan;  aux  dernières  saluia- 
tions  le  Gloria  /'rt^  i  ;  et,  pour  l'olfice  des 
morts,  ils  diront  tous  les  jours  dix  Puler  et 
autant  li'Ave,  ajoutant  à  la  fin  du  dernier  le 
Requiem  atcriumi.  Quant  aux  oblals,  ils  di- 
ront pour  matines  <  iugt  Pater,  et  pour  cha- 
cune des  autres  heures  cin.]  et  autant  A' Ave, 
ajoutant  à  la  fin  du  dernier  le  Gloria  Palri, 
Cl,  pour  l'olficedes  n;orls,ils  diront  cinq  au- 
tres Pater  tous  les  jours  <  t  aul.iul  i\'Ave, 
jijoutant  au  de:  nier  le  Ileijuicm. 

Tous  les  frères  s'.ibiliendr  nt  enlièrenient 
de  viandes  grasses  ou  pasca'es;  el,  pour  faire 
de  dignes  fruits  de  pénitence,  ils  observeront 
la  vie  (luadragésimale  jusqu'à  ce  point  de 
ne  point  manger  de  chair  ni  d'aucune  chose 
qui  tire  son  origine  de  la  chair;  et  ainsi  non- 
seulement  la  ciiair  et  la  graisse,  mais  aussi 
les  œufs,  le  beurre,  le  fromage,  et  loules  sor- 
tes de  laitages,  et  mêm  ■  tout  ce  qui  en  est 
composé  ou  formé,  est  absolument  défendu, 
tant  au  dedans  qu'au  dehors  du  couvent  à 
tous  les  frères,  t.:nl  clercs  que  lais  el 
oblats,  si  ce  n'est  dans  les  gr.indes  maladies: 
car  si  quelqu'un  tombe  malade,  il  doit  être 
conduilpar  l'infirmierdans  l'infirmerie  claus- 
trale, où  on  doit  le  secourir  avec  beaucoup 
de  soin,  le  nourrissant  des  viandes  de  carême 
qui  seront  les  plus  propres  pour  le  soulager  : 
mais  si  la  maladie  augmente,  il  doit  être 
cou-luil  dans  l'infirmerie  extérieure,  bâtie 
dans  la  clôture  du  couvent,  où  on  lui  donne- 
ra tous  les  aliments  propres  pour  rétablir 
sa  santé,  qui  seront  jipportés  par  un  autre 
cndr  lit  que  par  le  cloître  du  couvent,  qui 
doit  être  éloigné  de  l'infirmeiie  pour  le 
moins  de  cinqu;mlc  pas,  et  personne  n'y 
peut  enirersans  la  permission  du  supérieur. 

Quant  aux  jeûnes,  ils  sont  ainsi  prescrits. 
Les  Frères  c  ercs  et  les  lais  jeûneront 
également  depuis  le  lundi  de  la  Quinquagé- 
siuic  jusqu'au  s  imedi  saint  inclusivement  , 
cl  depu  s  la  fêle  de  tous  les  Sa-nls  jusqu'à 
Noël  exclusivemenl.  Us  jeûneront  aussi  tous 
les  autres  jours  or.lonnés  par  l'Eglise,  et 
tous  les  mercredis  et  vemlredis  de  l'année, 
excepté  le  jour  de  Noél ,  quand  il  arrivera 
un  vendredi.  Pour  le,  oblats,  ils  jeûneront 
seulement  tous  les  vendredis  de  l'année, 
et  depuis  la  fête  de  sainte  Catherine  jus- 
qu'à Noël  exelusivement  ,  et  tous  les  jours 
ordonnés  par  l'Eglise.  Aucun  des  Frères 
ni  des  oblats  ctaiil  en  santé  ne  peut  être 
exempt  du  jeûne,  ^inon  dans  les  voyages; 
néanmoins  les  su|iérieurs  peuvent,  [our  de 
j  isles  raisons,  dispenser  les  uns  et  1  s  autres 
de  chacun  de  ces  jeûnes  en  particulier. 

L'exercice  de  l'oraison  leur  est  recom- 
mandé, et,  afin  qu'ils  aient  plus  de  f.icilitc 
])our  b'y  adonner,  ils  doivent  garder  l- 
si  encc  en  tout  temps  d;ins  l'église  ,  dans 
le  cloitre  ,  dans  le  dortoir,  au  réfectoire , 
durant  la  première  et  la  sec  n 'e  table,  el 


V'Vi 


DICTIONNAIRE  DF.S  ORDRES  RELIGIEUX. 


996 


en  lotis  licii\  l'oTiiis  l'heure  de  co.-nplies 
jusqu'à  piliiios  (lu  jour  suivant.  Les  su- 
périeurs o;il  le  noui  de  correeteurs,  afin 
qu'ils  se  ciirriijenl  premièrement  eux-uic- 
ines,  cl  qu'eiisuile  ils  corrisîeiit  les  .lutres. 
Tous  les  ans,  le  j:)ur  de  s.iiiil  Michel,  ces 
forrecicuis  sont  élus  par  les  religieux  de 
eliaque  couvent,  el  ne  peuvent  exercer  eet 
office  que  pendant  un  an  ,  sans  pouvoir 
.sortir  du  couvent  pendant  ce  leuips-là  ,  si 
ce  n'est  pour  de  justes  causes,  après  en 
a>oir  donné  connassa-.ire  au  (■ha[)itre  cl 
demandé  le  consenlemenl  des  anciens  du 
cDiivcnl.  \'oici  la  formule  des  vœux  Oe  cet 
ordre. 

Je  Frère  \.  voue  el  promets  à  Dieu  lotit- 
puissant  ,  à  la  bicnlieiireuse  Vierge  Marie ,  à 
toute  la  cour  céleste,  et  à  vous,  mon  révé- 
rru  l  l'ère  N.  et  à  ccl  ordre  sacré ,  de  demeu- 
rer ferme ,  et  de  l'.ersister  tout  le  temps  de 
ma  vie  sous  la  manière  de  vivre  el  la  règle  des 
Frères  minimes  de  Saint-François  de  faute, 
laquelle  est  approuvée  par  noire  très-saint 
l'ère  le  pape  Jules  II ,  après  Alexandre  ]' l, 
d'iieureuse  mémoire,  aussi  pontife  de  Rome, 
en  virant  avec  persévérance  sous  les  vœux 
de  piiucreté,  de  cU  isttlé  el  d'obéissance ,  et 
de  la  rie  de  carême ,  suivant  les  ddtcrmi- 
iialions  et  les  circonstances  inarquéd  et  pres- 
i  rites  dans  la  même  règle.  Les  ohlals  ajou- 
tent ,  Et  de  plus  je  promets  garder  la  fui 
à  ce  même  ordre,  et  de  représenter  fidèle- 
ment les  aumônes  qui  lui  seront  faites. 

Cet  ordre  a  produit  plusieurs  personnes 
qui  se  sont  ren'ues  recommandables  par 
leur  piété  et  par  leurs  écrits  ;  il  y  en  a  «u 
aussi  plusieurs  qui  ont  clé  élevés  aux  di- 
i;nilés  de  l'Egiisi'.  Les  SI  nimes  de  France 
ont  donné  des  évèqucs  aux  ligliscs  de  .Mar- 
seille, de  Màcon  et  de  Riez.  Louis  d'Allichi, 
évéque  de  Riez,  religieux  du  même  ordre, 
en  a  ilonné  une  Hi^ioire  en  Iran.-ais  ;  le 
P.  di' 1 1  Noue,  une  ClironiqiiC  en  latin;  et 
le  l*.  de  Monloïa  les  .Vnnales  en  espa<;nol. 
Le  1*.  'J'Iiuillier  a  donné  une  Histoire  par- 
ticulière de  la  province  de  France  sous  le 
litre  de  .lonrn.il  des  rolij;ieux  cl  religieu- 
ses de  l'ordre  des  Minimes  de  la  province 
de  France  et  une  trailuciion  lie  la  Règle, 
du  Currcctoire  el  du  (X'rémoni.il,  avec  des 
remarques  liis'.oriijues  sur  ces  trois  o  i- 
V  rages. 

Cet  ordre  a  pour  armes  le  mol  Ciiahitas 
d'or  entouré  de  rajuns  de  mène  en  ch  imp 
d'azur. 

Francise.  Laiiovius,  Chrnnicon  générale 
Ord.  Minlm.  Louis  l)oiii  d'.Miihi,  Hisl. 
<;én'rale  de  l'ordre  des  Min-.m  s.  Luc  de 
.Slon'oi'a,  Clironic.  générale  de  la  orden  de 
!»s  !\liniiiios.  Ilil.irion  d.ïCoste.  Ilist.  Ca- 
tliolique.  liollanil.  .ici.  Stnct.,  lom.  1  Apri- 
/i<.  Giry  cl  Itaillel,  Vies  des  saints,  i2  Avril. 
Ilallazar  d'.Vvila,  Mauiiiahis  Minim.  Uené 
l'Iinillier,  Tra  luction  de  lit  liègle,  duCorrec- 
loire  el  du  Cérém mi  il  des  Hliuimcs,  avec  des 
remarques  historiques. 

Au  dernier  siècle,  les  Minimes  avaient  à 
Home  rini]  maisons,  dont  l'une,  L'i  Trinité 
du    Mont  ,    api>arlcnail    aux    Franç.iis.    Ils 


complaienl  six  provinces  en  Fspngne.  deux 
m  lisons  à  Paris  et  ce  le  du  ito  s  de  \'ineen- 
nes  (dont  les  liâtimenls  et  l'enclos  s  ni  con- 
servés jusqu'à  <  c  jour).  L'ordre  des  .Minimes 
a  donne  en  France  l'exemple  de  la  soumis- 
sion à  la  IJuUe  Unigemlus  et  s'esl  attiré  ca 
conséquence  la  criiique  des  jansénistes  dans 
leur  tia/elte.  Le  réfecioire  de  la  maison  de  la 
Place-Royale,  aujourd'hui  servant  de  caser- 
ne ,  élail  immense,  éclairé  par  neuf  croi- 
sées, décoi-é  de  b;.'lles  pei.ilures.  La  bi- 
bli.jliiéque  (le  ce  monaslère  élail  composée 
d'environ  26,000  vol  unies,  y  compris  plusieurs 
manuscrits.  Les  .Minimes  ont  donne  aux  let- 
tres plusieurs  celebriléi,  el  nous  comptons, 
parmi  les  Français,  les  l'P.  Niceron.  Mer- 
senne,  Plumier,  Avrillon  ,  Le  Clerc  ,  De 
Coslc,  Giry,  Monteynard.  Le  noviciat  se 
faisait  à  Paris,  dans  la  2°  maiso  i  située 
à  Chaillot  el  nommée  des  lions- Hommes.  La 
dot  elail  de  ItiO)  livres.  Le  géncr.il,  à  l.i 
fin  du  dernier  siècle,  était  le  R.  P.  Séraphin 
Delera.  Aujourd'hui  ces  religieux  ont  sept 
maisons  dans  les  Etats  soumis  à  l'empereur 
d'Aulrichi',  «omprenant  environ  3'i0  indiii- 
diis.  L-  général  est  le  P.  Louis  C'inli ,  rési- 
dant à  Rome.  Ce  procureur  général  esl  le 
P.  Gaspird  Monlenero.  Dans  notre  dernier 
voluriie  nous  pailerons  des  elTorts  tentés  par 
le  P.  .Monteynard,  et  du  succès  obtenu  par 
M.  l'alibé  licuf  p"ur  le  rétablissement  des 
Witiimes  français.  Voyez  Minimes  au  Sup- 
plément. D-D-E. 

§  II.  Des  Religieuses  de  l'ordre  des  Minimes. 

Les  historiens  français  de  l'ordre  di's  .Mi- 
nimes se  plaignent  des  historiens  espainoN 
du  même  o:dre,  de  ce  qu'ils  n'ont  donné 
que  for!  peu  de  connaissance  de  l'origine  des 
religieuses  .Minimes  qui  ont  pris  naissa'ice 
en  Espagne.  Tout  ce  que  l'on  en  sait,  c'est 
que  don  Pierre  de  Lucena  Olit ,  ne  s'elanl 
pas  contenté  d'avoir  fondé  un  couvent  de 
Minimes  dans  la  ville  d'.Xndojar,  donna  en- 
core sa  propre  maison  pour  y  liâlir  un  mo- 
naslère de  religieuses  du  même  ordre,  dont 
deux  de  ses  peliles-lilles  furent  les  pre- 
mières qui  y  prirent  l'habit  de  cet  ordre 
en  li95.  Files  le  reçuienl  des  mains  du 
P.  Germain  Lionel,  religieui  français  ,  que 
saint  F'r.inçois  de  Pauie  avait  envoyé  en 
ce  royaume  avec  quel;|ues  autres  pour  y 
établir  son  or. Ire.  H  est  cert.iin  (ju'il  n'y 
avait  point  piur  lors  de  règles  pirlicnlié- 
rcs  pour  ces  religieuses  ,  et  que  ce  ne  fui 
(lu'en  IJiOG,  c'est-à  dire  au  le;nps  que  le 
saint  fondateur  changea  quelque  chose  de 
la  prc;nièrc  règle  pour  les  religieux,  (|u'il 
songea  ù  en  donner  une  aux  religieuses. 
En  efTel,  par  l.i  lettre  qu'il  écrivit  au  pajie 
Jules  II  la  même  année,  il  lui  témoi};na 
qu'outre  la  règle  d.-  ses  religieux  qu'il  a 
beaucoup  perfectionnée  .  el  celle  pour  les 
personnes  de  l'un  et  l'aolrc  sexe  qui  vi- 
veoi  dans  l<'  monde,  il  en  a  comjiosé  une 
troisième   pour  des    religieuses. 

Le  P.   .lean  du   R  >is,  aussi   Français,  qui 
fui  le   premier  directeur  de   ce   monastère, 


901                                M  N  MIN                            9tl>> 

ol  Ifts  autres  qui  lui  succédèrent  ,  les  !ji)U-  tluj.ir,  dont  on  ait  connaissance,  est  celoi 
vernèrenl  apparemment  jusqu'à  ce  temps-  dn  Xérès  de  la  Frontéra ,  (;ni  fui  fondé 
là  sur  la  première  et  la  sccondi»  refile,  l'an  1524.  Il  se  fit  i  nrorc  d'autres  étaldis- 
autant  que  leur  sexe  le  permettait.  Saint  soments  en  Espagne,  comme  à  Archidona, 
Fr.mçois  de  Paule,  pour  marquer  son  al-  Baïza ,  Con'oue,  Séville,  Fnentes  de  Léon, 
feclion  envers  cette  nouvi  Ile  colonie  de  Anleiuera  et  autres  lieux.  Ces  reliy;ieuses 
vierges,  leur  envoya  à  chacune  en  loOii  l'urenl  inlioduiles  en  Sicile  par  Hector  Pi- 
un  chapelet,  qui  était  le  présent  ordinaire  gnateili,  qui  en  élail  vice-roi,  et  qui,  no 
qu'il  fils. lit  à  ses  amis  et  aux  l)ienf.,ilcurs  se  conlLiitiint  pas  d'avoir  fondé  un  cou- 
de l'ordre  ;  il  n'y  av;iit  pas  pour  lors  plus  vent  de  religieux  de  cet  ordre  à  Paler- 
(le  huit  religieuses  dans  ce  monastère.  L  :  me  ,  voulut  être  aussi  fond  iteur  d'un  cou- 
P.  de  la  Noue,  dans  ses  Chroniques  de  l'or-  vent  de  r.  ligieuses  Miniiiies  qu'il  lit  lia  ir 
dre,  reinar(iue  que  ces  chapelets  étaient  do  en  1532  dans  la  môme  ville,  et  qui  dans 
gui  de  cliéne  qui,  élant  travaillé  autour,  la  siiiie  est  devenu  plus  considérable  par 
représente  de  tous  C('>té-.  une  croiv  enioiiree  la  libéralité  et  la  magnificence  de  Plil- 
de  rayons  :  ce  que  les  écrivains  cspagn  Is  lippe  111  ,  roi  d'Iispagne.  Enlin,  en  lu2î, 
de  ce  môane  ordre  ont  publié  comme  une  il  se  fit  un  éUiblissemcnt  de  ces  religieuses 
merveille,  quoiqu'il  n'y  ait  rien  que  de  esi  France  dans  la  ville  d'Abbeville;  la  Mère 
naturel;  il  csl  vrai  qu'ils  produisaient  des  lîabrielle  Fouquart  en  fut  fondatrice.  Elle 
effels  admirables  et  miraculeux,  priiicifja-  était  fille  de  François  Fouquart ,  receveur 
lenienl  dans  la  guérison  des  malades;  niai'i  des  tailles  de  la  même  ville  et  de  Marie 
c'était  en  vertu  de  la  hénédirlion  qut^  le  Gaisier  ;  elle  avait  toujours  eu  dessein  d'être 
saint  leur  donnait  en  conséquence  du  pou-  leligieuse,  mais  après  la  mort  de  sou  père, 
voir  qu'il  en  avait  reçu  du  pape.  Ces  icii-  ayant  été  obligée  d'obéir  à  son  oncle,  qui 
gieuses  avaient  été  jusque-là  sons  l'obéis-  avait  conclu  son  mariage  avec  un  homme 
sance  du  correcteur  des  Minimes  du  cou-  veuf  qui  était  fort  riche,  on  la  maria  à 
vent  d'Andujar,  mais  le  saint  fondateur  les  l'âge  de  vingi-six  ans.  Deux  ans  après,  son 
mit  sous  celle  du   provincial  d'Espagne.  t\\iri    étant    mort,    elle    résolut   du   quitter 

La  règle  qu'il  leur  donna  est  peu  dilTé-  le  momie.  Elle  fut  la  première  qui  reçut 
rente  de  la  quatrième  qu'il  donna  aux  reli-  l'habit  du  Tiers  Ordre  de  Saint-François'de 
gieux  ,  ne  s'y  trouvant  point  d'antres  chan-  Panle  à  Abbeville  en  IGOl,  et  fut  pendant 
gements  que  ceux  que  la  diversité  du  sexe  vingt  ans  correctrice  de  quelques  filles  el 
a  nécessairement  obligé  d'y  faire:  les  mè-  femmes  séculières  de  ce  Tiers  Ordre.  Elle 
mes  vœux  ,  les  mêmes  jeûnes  ,  les  môuies  vécut  quatorze  ans  en  communauté  avec 
observances  du  silence  et  de  la  modesiie  y  quelques  tilles  dévotes  qui  avaient  fait  aussi 
sont  ordonnés,  et  ce  sont  partout  les  mé-  profession  de  ce  Tiers  Ordre,  el  e.le  em- 
lues  termes,  excepté  lorsiiue  ce  sont  des  ploya  ce  temps-là  à  traiter  de  l'élablissc- 
règlemenls  [iropres  pour  des  filles  el  ()ni  luent  de  religieuses  Minimes;  mais  les  re- 
né peuvent  pas  C')nvenir  aux  hommes.  Ou  li^ieux.  s'y  opposaient  toujours,  el  ce  ne 
ne  voit  point  qu'on  ait  parlé  de  celte  rc-  fni  que  l'an  1G21  qu'elle  ob  int  le  con- 
gle  dans  le  piemier  chapitre  général  qui  scnloinent  du  P.  Uivôre,  pour  lors  visi- 
se  tint  à  Home  eu  J507,  elle  y  fut  néan-  teur  général  des  iMinimes  ,  qui  la  reçut 
moins  reçue  avec  celle  des  religieux  ,  puis-  pour  être  religieuse  du  second  ordre,  lui 
((uc  la  même  bulle  approuve  l'une  el  l'an-  d  .nna  le  voile  el  à  treize  autres  fill  s  de 
trc.  Tous  les  m  •na^lères  des  religieuses  sa  communauté,  après  en  av  ir  obtenu 
Minimes  qui  ont  élé  fondes  dciiuis  ce  temps-  la  pcrm  ssion  de  l'èiêque  d'Amiens  :  quel- 
là  ,  tant  en  France  qu'.  n  Lalie  et  en  Espa-  qaes  religieux  du  même  ordre  y  formè- 
gne  ,  l'ont  été  sous  l'obligation  de  celle  reiil  encore  de  nouvelles  oppositions ,  mais 
règle,  qu'on  y  a  toujours  observée  fort  etac-  <'l'es  furenl  enfin  levées  par  le  pape  (îré- 
lement  :  la  différence  qu'il  y  a  enire  les  goire  XV,  {\u\  érigea  celle  maison  en  mo- 
rorreilrlces  de  ces  religieuses  et  les  cor-  nas'.ère  par  Uiie  LiuIIh  du  10  juin  de  l'an 
recteurs  des  rcligi:'ux  ,  c'est  que  les  cor-  1C23.  Elles  fir(nl  profession  en  162'i.  en- 
rectrices  ne  sont  élues  que  tous  les  trois  Ire  les  mains  du  P.  Nicolas  Lesguillier,  qui 
asis,  et  que  les  correcicurs  doivent  être  avait  élé  commis  à  cet  effet  par  le  car- 
élus    tùus    les    ans.  diual    lîippolyle    Aldolirandin  ,    protecteur 

Le   second  monastère    de   religieuses  ^ii-  de    l'ordre,    et    par   le    P.    Cyrille   Gamarl  , 

nimcs  fut  aussi  foinlé  en   Espagne,   à   Gia  ,  pour  lors  général.  La    Mère  Fouquart    fut 

au    diocèse    de    Séville   en    1509;    mais    les  établie  correctrice  de    c'   nouveau    monas- 

(larmes  s'élant  opposés  à  cet  établ  ssemesil ,  tèro  ,  i;ù,    après    avoir    encore    vécu    plu- 

à   cause  que  ce  monastère  élail  trop  procbe  sieurs  années  dans  les    e\erciees   de    pieté 

d(,'    leur   couvent,   cl  que    par  un   de  leurs  et    de    mortificati.n  ,    elle    mourut    sainle- 

[uiulégcs  on  ne  peut  bâtir  des  maisosis  re-  mont  en  1839.  Il  s'est  fui  depuis  un  aulre 

ligieuses  qu'à  une  distance  de  près  de  cent  élablissenient    de    ces    religieuses    dans    la 

quarante  toises  de  leurs  couvenis  ,  ces  reli-  v  lie  de  Soissons. 

pieuses  îMininies  furent  transférées  ailleurs  ;  Comme,  dans  le  temps  que  l'on  faisait  réta- 
mais le;  historiens  espagnols  ne  font  poiut  blisseuient  du  uionaslére  d'Abbeville,  le  P. 
mention  du  lieu  où  elles  forent  tiansié-  Louis  Ojni  d'Aliichi,  depuis  évéïjue  de  liiez, 
rées.  I^e  plus  ancien  inonaslère  de  cet  or-  écrivait  son  Histoire  générale  de  l'ordre  des 
dru  au  même   royaume,  après  celui  d'An-  Aiinimes  .  il  n'a  pas  parlé  des  rcligicnsi  s  de 


!\f)0  mCTIONNAlIlE  DF.S  OUDKKS  lU'Llf.lECX.  1000 

col  or.lic  cil  Franco,  mais  il  adonné  lis  Vies  l'usage  di-  IT-iilisi'  roiii  linc,  rt  ceux  qui   ne 

(li^  (luolques   rcl  pieuses   cs|iai;iio!fs  et   ila-  soiil  pas  obligés  do  rériler  le   hré»  i.iire  doi- 

lii>nn«s  (|iii  sont  niorlis  en  répiilalion  di- sain-  ^  rnl  iliro  pour  malincs  srpl  Putei  a  autant 

lolé.  Il  (iil  (|u'ca  l'année  (lu'il  écrivait ,  ijui  d'Ave,  srjil  pour  laudes,  cinq  pour  vêpres  et 

éiail  en  loâj ,  il  y  ai  ail  trois  cents  religieu-  trois  pour  toniplies  et  pour  i  liacune  di-'*  au- 

>es  de  cet  oidrc  en  onze  couvcnls;  ainsi  a»cc  Ires   heures,  ajoulani  au  dernier   le  (ilorix 

les  deux  d'Ablieville  et  celui  de  Soissons,  il  l'alri,  et  Ions   les  jours   ils  doivent  dire  ea- 

V  aurait  quatorze  nioiiastèri  s  de  relijjienses  corc  tniis  autres  l'a'.er  et  autant  d'.iie  pour 

Minime».  Leur   liali.t  est  semblilile   a   celui  les  défunts,  et  à  la  lin  du  dernier  le  liequiem 

(les  religious  de  cet  ordre  :  nous  eu  donnons  œterimin.  Ils  doivent  s'accuserdc  leurs  péchés 

deux  CNlampes.  dont  l'une  représente  une  de  aux   confesseurs  qui  leur  sont  assignés  par 

ces  religien.>.es   sins   iiKinleaii    et  l'autre  en  le  correc  eur  général  île  l'ordre  des  Minimes, 

inan'.eau  et  en  habit  de  tbieur  (1).  et  communier  le  jeudi  sainl  ,  le  jour  de   Pà- 

l'rancisc.  Lanoiius,  Chronic.  ijeneral.  orcl.  ques  .  à  Noël  ,  à  la  l'enlcc'ite  et  à  la  fête  de 

Miniiii.  Lou'S  Uoni  d'.Ulielii  ,  IJist.  (jéiu'ra'c  l'Assoniplion  de  Nolrc-Dame.  Ils  assisteront 

de  l'ordre   dis   Miitime.t.    Lucas  de  Alontoïa  ,  a  la  messe  avec  beaucoup  de  respect  cl  payc- 

Cronicii  gênerai  de  la  onien  de  lus  Dlinimos.  ronl  les  dimes  ()u'.ls  dniveiil  à  leurs  curés, 

llil.irion  de  Cosle,  Eloijes  des  Dames  illustres,  Ils  d  ivenl  fuir  le  ii.oadL-  et  les  emplois  des- 

lom.   U.  Ignace  de  Jési.s-Marii>,  llist.  d' Ah-  lumnétes,  éviter  les  festins  et   1.  s  vanités  du 

bevxlle,  cl  Kené  Tbuillier,  Tiadiiction  desr'-  siècle.  L'abstinence  de  \  iando  leur  est  oïdjii- 

(y/f.<,  currecloire  el  cnétitonial  des  Minimes,  née  depuis  la  lèic  de  sainte  Luce  jusqu'à  Noél 

ivec  des  rciiifirques  Itisioriques.  escluM»emeni,  cl  Ir  is  jours  avanl  les  qua- 

,         _  ,  Ire  jours  de  communion  prescriis  [)ar  11  règle, 

.MIM.MLS  (1  lEi'.s  Ohdhi:  uks).  .^^^^-  ,,ip„  ^j,,,,  ,y,,^  ^^^  mercrod  s  de  l'année. 

Le  T. ers  Ordre  des  .Minimes  pour  les  pcr-  Les  confesseurs  peu\e:;t  neaamoins  dispen- 
sonnes  de  l'un  el  l'autre  exe  (jui  vivent  dans  si  r  du  jcûi'c  el  île  l'abstinence  ceux  qu'ils 
le  monde  avait  élc  établi  par  sainl  l'rançuis  j"i?cnt  à  [)ropos,  el  peuvent  changer  ces  j  'û- 
ne  l'anle  dans  la  (lalabre,  loiigtemps  av.-uU  ics  en  d'auires  (rn\res  de  piété.  On  accorde 
qu'il  vînt  en  France,  car,  p:'.r  les  piocès  faits  aux  Frères  el  aux  Sicurs  la  Lberlé  d'obser- 
111  Italie  pour  sa  canonisation,  l'on  voit  qu'il  vei-  la  vie  (luadragésimale  ,  s'ils  ont  assez  de 
recevait  des  personnes  séculières  en  cc;le  ferveur  pour  la  pratiquer.  Les  vêlements 
congrégation,  et  qu'il  leur  donnait  le  petit  exiérieurs  seront,  selon  leur  étal  et  1  ur  con- 
c  ir  Ion  ,  qui  est  1 1  mar()ue  de  cet  ordre.  Le  dition  ,  enliéremenl  ou  presque  semblables 
procès  même  qui  fui  fail  à  Aliilie  porte  que,  pour  la  c  .u'eur  aux  habits  des  religieux  .Mi- 
lorsqu'il  y  passa  pour  aller  eu  France,  il  y  ninns.  Les  Frères  el  les  Sœurs  lecevronl 
laissa  une-communauté  de  Tierciaires,  au  avec  dévolion  di  s  correcteurs  de  l'ordre,  ou 
nombre  de  dix-sepl,  qui  avaient  pour  correc-  de  quelqu'un  coniiiiis  (lar  eus,  un  cordoi» 
Iricc  une  S;rur  nommée  i'i'rnc,  et  pour  con-  noue  seulement  de  deux  mpuds.  et  apiès  un 
fesseur  et  directeur  un  prêtre  qui  s'appelait  temps  cunveu.ible  ,  s'ils  désir,  ni  persévérer 
Serr.i,  qui  était  aussi  de  ce  Tieis  Ordre.  Mais  dans  l'observance  «le  celé  règle,  ils  feront 
il  ne  paraît  p.is  que  s.iint  Franeois  de  l'aule  aussi  profession  entre  leurs  mains.  Us  peu- 
ail  dressé  en  Italie  aucune  règle  |)our  le  gou-  veul  dès  le  b,is  âge  recevoir  le  cordon,  mais 
vernemenl  et  la  direction  de  ce  Tiers  Ordre,  la  profession  m'  se  d  il  faire  qu'à  l'âge  de 
Les  buiis  exemples  de  sa  vie  el  les  I  cens  (luinze  ans.  iMilin,  pour  l.i  conduite  de  celic 
spirituelles  que  lui  el  ses  religieux  faisaient  congiégalion  de  fidèles  di'  l'un  el  de  l'autre 
assidiinient  a  ceux  qui  se  rangeaient  sous  sa  sexe,  les  pro»  inciaux  de  l'ordre  des  Minimes 
conduite,  leur  lenanl  lieu  de  règle  cl  de  sta-  ou  les  siipér. cars  m.ijeurs  lui  assigneront  en 
tuls  jusqu'à  ce  (,ucn(in,cn  laOl,  l.irsqu'il  chique  lieu  un  correeleur  ou  une  correctrice 
relouiba  la  règle  qu'il  avait  fai  e  pour  se*  qu'ils  pourront  eux-mêmes  changer  toutes 
religieux  en  1  V'.I.'J ,  il  en  fil  en  même  temps  les  fuis  (ju  ils  le  jugeront  à  propos.  Ces  cor- 
une  pour  son  Tiers  Ordre  dont  il  obtint  l'ap-  recteurs  cl  «orrictrices  doivent  s'appliquer 
probalion  du  pape  Alexandre  \'l ,  l'année  de  tout  leur  pouvoir  à  assou|  ir  les  procès  et 
suivante  lo02.  Cette  aiiprcbalion  fui  reno  i-  les  disputes  qui  peuvent  naire  enlre  les  Frè- 
velée  par  le  même  pape,  de  lavis  el  du  c  mi-  res  1 1  les  Su;  irs,  et  à  les  remetlre  p.ir  ciia- 
sentementdes  cardinaux  en  suite  de  quel(|ues  rite  dans  la  piix  el  dans  l'union  d'une  ami- 
changements  (juc  le  sain!  fit  à  ses  règles,  el,  lié  sincère.  Ils  doivent  tous  avoir  un  grand 
l'.iiinee  loOd,  elle  le  fut  |dus  solennelleuient  aoicur  les  uns  pour  les  autres  et  ne  pont 
par  le  pape  Jules  II,  qui,  joignant  en  emb'c  roujîir  de  s'appeler  muluelleinenl  Frères  et 
Il  règle  des  religieux,  celle  des  relii;ieuse>  et  Scrnrs,  et  comine  tels  ils  doi»eni  se  v  siter  et 
celle  du  Tiers  Ordre,  et  n'en  faisant  qu'un  se  consoler  les  uns  les  auties  d.iiis  leuis  r.f- 
corps,  les  confirma  toutes  par  une  même  fiiclions,  leurs  adversilés  el  leurs  maladies, 
liullc.  \'oilà  en  abrégé  la  règle  que  saint  François 

Celle  règle  du  Tiers    Ordre  des    Minimes  de  1'. iule  prescrivit  aux  iières  el  aux  Sœurs 

•  onlieni   sept  chapitres.    I^lle  ordonne   aux  de  son  Tiers   Ordre.  Nous   avons  dit  que  l.i 

Frères  el  aux  Swînrs  l'oliserviincc  des  com-  marque  de  cet   oïdie  est  un  cordon   noué  île 

mandements  de  Dieu  et  de  l'Fglise.  (^eux  {jui  deux   nieuls.    tjuoique   la  ressenibl  inre  que 

sont  clercs  doivent  réciter  l'ohicc  diuii  selon  leurs  habits  doivent  avoir  avec  ceux  tic»  leli- 

(I)  Vuy.,  i.l5finilu\ol.,ir'  liiV  VI 248. 


<0C1 


MIN 


MIN 


1C02 


gieux  Mimmps  no  soif  que  par  r.ippnrl  à  la 
couli  ur  t't  mm  pas  à  la  form;-,  il  j  a  néan- 
moins (lis  pays  ou  les  Ticiciaires  de  cet  or- 
dre s'Iiabillenl  (li<  nicino  que  les  Frères  el  les 
Sœurs  de  ce  même  ordre.  Ils  fonl  profession 
en  ces  termes  : 

Je,  N-,  promets  à  Dieu  lout-piiisscnl  el  à 
toute  la  c  ur  céleste  el  à  tous,  mon  révérend 
Père  N..  d  amender  de  plus  en  plus  mes  yiK/'urs 
et  ma  vie  et  d'observer  autant  que  je  le  pour- 
rai les  préceptes  salutaires  de  la  rèi/le  des  fidè- 
les de  l'un  et  l'autre  sexe,  lie  l'ordre  des  lili- 
nimes,  confirmée  par  notre  saint-père  le  p:pe 
Jutes  //,  el  d'obéir  mir  successeurs  de  saint 
François  de  l'aule,  les  currectiui's  généraux 
de  cet  ordie  des  Minimes,  et  de  suivre  les  bons 
conseils  et  les  instructions  de  ladite  règle  ,  el 
de  procurer  Vlionnew  et  l'utilité  dudit  ordre. 
J'Jn  foi  de  quoi  foi  signé  et  marqué  de  ma 
main  ce  présent  écrit  pour  témoignage  de  ma 
profession,  en  ce  couvent  des  Frères  Minimes 
de  N.,  elc. 

L'an  1531),  quelques  filles  de  ce  Tiers  Ordre 
qui  vivaient  en  commun  dans  la  ville  de  To- 
lède en  Espagne  depuis  environ  cinq  ans, 
dans  une  maison  particulière  d'où  elles  ne 
sortaient  que  ]  our  aller  à  l'Eglise  entendre 
la  messe  et  recevoir  les  sacrements,  voulu- 
rent changer  leur  maison  en  un  monastère 
et  faire  des  vœux  solennels  sous  la  troisième 
règle  des  Minimes.  Elles  s'adressèrent  pour 
cela  au  cardinal  Pucci,prolecleur  de  l'ordre, 
qui,  approuvant  leur  dessein,  parla  au  papa 
Paul  III,  qui  érigea  celle  maison  de  Tterciai- 
res  en  un  monastère  sous  le  liire  de  Jésus-pl- 
Marie  et  i'obscrvaHce  de  la  troisième  règle 
des  Minimes  de  S.iini-François  de  Panle,  leu^ 
permettant  de  faire  les  vœux  solennels  de 
cliasleté,  pauvreté  et  obéissance,  et  leur  ac- 
cordant tous  les  privilèges  dont  jouissaient 
les  religieux  et  relif;it'uses  du  premier  eldu 
second  ordre.  Ces  religieuses,  quui(|ue  a|)- 
prouvées  parle  pape,  ne  purent  jau)ais  obt'- 
nir  le  consentement  lies  supéricui  s  de  l'orde 
pour  y  être  reçues  sous  leur  juridiclion.  lilles 
présentèrent  d'abord  pour  ce  sujet  tine  re- 
quéle  au  chapitre  général  assemble  à  Frèjus 
rn  1-Ï47;  mais  leur  demande  ne  fut  p  dut  ac- 
cordée non  plus  que  dans  les  (hapiires  gé- 
néraux qui  se  tinrent  encore  à  Fiéjus  en 
1336,  et  à  Valence  en  1561;  quoique  la  reine 
d'Espagne  ,  Isabelle  de  France,  s'intéressa! 
pour  elles,  lout  cela  fut  iîiutiie.  Cette  prin- 
cesse les  faisait  subsister  par  ses  aun  ônes, 
mais  après  sa  mort  la  ville  se  voyanl  cliaigce 
de  ce  soin,  ilcnianda  au  cardinal  do  (Juiroga, 
Jirchevé(iue  de  Tolède  ,  d'en  éire  docliargée. 
Ce  prélat  transféra  ces  lel  gicuses,  do  leur 
coiisenlenient,  dans  nu  aiiirc  uionasièrc  ap- 
pelé Noirc-D.iuie  de  la  SJIanclie.  où  elles  de- 
nirurèrcnl  quelque  Icnips  avec  l'baljit  île  Mi- 
niu:es  ,  et  Cirent  un  si  grand  progiès  dans  la 
verlu  (lUe  quelques-unes  d'enlre  elles  soat 
mortes  en  odeur  de  sainteté.  Ce.  sont  les  seu- 
les rcligieus"s  Tierciaires  qu'il  y  ait  jamais 
ou  dans  cet  ordre,  (jui  ayant  été  abolies  à 
cause  de  leur  grande  pau\relé,  n'onl  jam.iis 
<'lé  rétablies  :  ainsi  le  Tiers  Ordre  des  iMini- 
n;es  ne  comprend  (|ue  des  personnes  sécu- 

f'îCTKlNNAIRE  DE'i  OrDIIES  BF-LIGICUI^.   II. 


lières  de  l'un  et  laulre  sève  parmi  les(jucl!es 
il  y  a  eu  le  bienheureux  Grâce  de  Valence. 
Les  Minimes  prétendent  ((ue  Louis  XI,  Char- 
les VIII  et  Louis  XII,  rois  de  France,  étaient 
de  cet  ordre  aussi  bien  qiC  saint  François 
de  Sales,  évê;jue  do  tjenève. 

Francise.  Lanovius  ,  Chronicun  générale 
M inimomm.  Louis  D(mi  d'Atlicbi,  llist.  Gê- 
ner, de  l'ordre  des  Minimes.  Lucas  de  Mon- 
loïa,  Chronic  Gêner,  de  la  orde  i  de  los  Mini- 
mos.  René  'l'huillier,  Traducli  n  des  règles, 
correctoire  et  cérémonial  des  âlinimes  avec 
des  remarques  listoriqucs.  François  Giry, 
Préface  de  la  règle  du  Tiers  Ordre  des  Mini- 
mes ;  et  Baltazar  d'Avila,  Manipulas  Mini- 
morum. 

MINISTRES  DES  INFllMES  (Hlercs  Uégu- 
i.iERs),  appelés  aussi  du  bien-mourir,  avec 
lu  S'ie  du  vénérable  P.  Camille  de  Lellis, 
leur  fondateur. 

Voici  un  ordre  dont  la  fin,  selon  l'inten- 
lion  du  fondateur,  cla  t  de  rendre  au  pro- 
chain toutes  sortes  d'offices  de  miséiicoide  , 
tant  corporels  que  spirituels.  Les  religieux 
de  cet  ordre  ont  même  jcndanl  quelque 
temps  eu  le  soin  des  hôpitaux,  donnant  aux 
malades  toute  sorle  d'assistances  en  leur 
administrant  leurs  besoins,  leur  donnant  à 
manger,  faisant  leurs  lils,  les  nettoyant  ei 
faisant  à  leur  égard  les  fondions  de  servi- 
teurs. Mais  les  nifîèrends  qu'ils  ont  eus  ave 
les  administrateurs  des  hôpitaux  donT  ils 
avaient  le  soin,  et  dont  le  plus  souvent  ils 
voyaient  employer  bs  revenus  à  d'autres 
usages  qu'aux  besoins  des  malades,  leur  ont 
fait  abandonner  le  soin  des  hôpitaux  pour 
s'appliquer  uniquement  à  la  visite  des  ma- 
lades, s'obli^eanl  p  ir  un  quatrième  vœu  de 
leur  donner  toute  sorle  d'assistances  spi- 
rituelles it  (le  les  assister  à  la  mort,  méuic 
dans  le  teu.ps  de  pete,  ce  qui  leur  a  l'ait 
donner  le  nom  de  Minislrcs  des  infirmes  eu 
du  bisu-mourir ,  comme  on  les  aprc.le  ei; 
Italie. 

Camille  de  Lell  s  fut  l'instiluleur  de  ce 
saint  ordre.  Il  naquit  à  IJuechianicu  ,  petit 
bourg  de  la  proiiaca  de  l'Abruzze  dans  le 
royaume  de  Nap!cs  et  du  diocèse  de  Théate, 
le  -23  mai  1550.  Son  père  qui  était  boiiime 
d'armée  négligea  l'é  iucation  de  son  (Ils,  dont 
la  naissance  avait  été  en  qucb|ue  façon  mi- 
raculeuse, puisque  sa  mère  ne  l'avait  mis  au 
monde  que  dans  une  extrême  vieillesse,  et 
lorsqu'il  n'y  a»ait  aucune  appa  cnee  (ju'elle 
dût  avoir  d'cnfanls,  plusieurs  années  s'ètant 
même  écoalées  depuis  qu'elle  avait  encore 
mit;  au  monde  un  auire  g;iiçon,  (jui  mou- 
rut en  bas  âge.  A  la  \éiité  Camill'  fut  en- 
\oyéauii  écoles,  mais  lout  le  progiès  qu'il 
y  fit  fut  d'apprendre  à  peine  à  lireel  à  écrire, 
ne  s'appliquanl  qu'à  jouer  couliiiuellement 
aux  cartes  et  aux  dés. 

A  l'âge  (le  dix-buil  ans,  il  suivit  la  profes- 
sion des  armes  comme  son  père,  qui  voulu! 
lui  l'aire  faire  sa  première  campagne  au  ser- 
vice des  N'énitiiMis,  qui  étaient  en  guerre 
jiour  lors  avec  les  'l'urcs.  Comme  ils  étaient 
à  Ancônc  sur  le  point  do  s'embarquer  pour 

;:2 


«005                                          DICÏIUNNAIHE  DKS  OKhllES  KELIGIEIX.  Ji  fi; 

I.,i»<pr  à  Venise,  ils  lombèrenl  tous  doux  tirninle  misère.  Les  c.ipucins  de  la  ville  cic 
«i;in^ercuseiiionl  malades,  te  qui  leur  fil  M. iicrédoiiia  auxquels  il  demanda  la  iharili', 
.ibanil 'nner  ce  dessein;  el  lorsqu'ils  eom-  en  ayani  eu  com|iassii)n,  lui  donnèrent  (juel- 
inencèrenl  à  se  mieux  porter,  ils  prirent  la  iincs  morceaux  de  drap  de  la  couleur  de 
lésolnlion  du  relouiiier  chez  eux;  mais  à  h'urs  h  ibils  pour  le  revêtir;  et  comme  ils 
peine  furent-ils  arrivés- à  S.iint-Lupidien  faisaien'  travaillera  la  construction  de  quel- 
|. roche  I.orelle,  que  le  père  de  Gimille  ,  se  ques  édifices,  Camille  s'engagea  à  y  servir 
sentant  iilus  mal,  ne  put  passer  plus  avîinl  et  de  mand-uvi  e,  dans  l'espérance  de  gagner 
mouiul  qni'l(]ues  jours  après,  ne  laissant  ()ur|(|ui'  argent  pour  se  mettre  un  peu  à  Ta- 
peur tout  bien  à  Camille  i|ue  l'épèc  et  la  bri  ile>  rigueurs  de  la  saison  et  retourner 
cape  (  coiiinie  l'on  dit  ordinairement).  Sa  ensuite  à  la  guerre  au  printemps,  si  l'occa- 
mère  é'.ail  morte  aussi  ((uelques  années  au-  sion  s'en  présentait,  sans  perdre  l'inrlinalion 
paiavant,  ce  qui  augmentai!  son  chagrin,  el  du  jeu,  (|ui  éiait  si  forle  qu'il  j  .ua  un  jour 
pour  comble  de  malheur,  il  lui  \inl  un  uleè-  jusqu'à  sa  chemise. 

re  à  la  jambe  gauche,  qui  fut  à  peiin'  ;;ucri.  Le  séjour  que  (Camille  fil  chez   les   capu- 

qu'un  autre   plus  grand  et  qu'il  porla  lonle  cins  fut  un  clïct  de  la  Providence  divine  ()ui 

sa  vie  parut  à  la  jambe  droite.    Il  continua  voulaii  le  f.iire  rentrer  en  lui-nié  liC   el  l'at- 

ncanmoins  son  chemin  el  passa  par  Feimo,  tirer  à  son  sirvice.  L'hiver  ne  se  passa  pas 

«)ù  il  fil  quelque  séjour  à  cause  d'une  petite  sans  qu'il  fil  réllcxion  sur  sa  vie  déréglée,  il 

lièvre  donl  il  fut  travaillé  pendant  quelques  enfui  vivementlou  lié, ellil  \a'u  denlrerdans 

jours.  l'ordre  de  Saint-François,  pour  y  f.iire  péni- 

Ce  fut  dans  celle  ville  que  Dieu  qui  voulait  tence  de  ses  fautes;   il   demanda   avec   tant 

alliicr  Camille   à  lui,   commença  à  lui  faire  d'instiinccs  l'habit  aux  PP.  Capucins  qu'ils  le 

cimrevoir  du  dégoût  pour  le  monde.  La  ren-  lui  accordèrent, et  ils  le  reçurent  en  qualité  do 

contre  qu'il  fit  de  iiuelques  rel  gieux  de  l'or-  Frère  lai;  mais  son  ulcère  s'él  int  rouvei  I,  on 

drc  de  Saiiit-Framois    fui   ce    qui  y  donna  le  renvoya.  Comme  il  avait  été  guéri  de  (elle 

lieu.  11  fut  si  édifié  de  leur  manière  humble,  plaie  à  l'hôpital  do  Saint-Jacques  des  Incura-- 

modeste  et  retenue,  qui  n'inspirait  que  de  la  blés  à  Home,  il  y  retourna  jiour  y  servir  en- 

dévoiion  et  de  la  piété,  qu'il  lésolul  d'en'rer  core  les  maladi's.  Il  s'y  comporta  d'une  autre 

dans   liMir  ordre  cl  de  renoncer  entièrement  manière  qu'il  n'a  tait  l'a  t  la  première  fois  ;  il 

;iu  siècle.  11  fui  pour  ce  sujets  Aquila,où  un  avait  entièrement  changé  de  vie,  il  était  dr- 

de  &es  on.  les  était    gardien   du  couvent  de  venu  un  autre  homme,  et    il    fut  pendant   lu 

Saini-noiiavenlure  ;  il  lui  communi(|ua  sou  séjour  qu'il  fit  dans  cet  hôpital  l'exemple  des 

dessein  <t  lui  demanda  l'habit  de  son  ordre;  aulri  s  serviteurs. 

mais  soit  à  cause  de  ses  incommodités,  soit  Après  y  avoir  demeuré  quatre  mois,  et  sa 
que  ce  Père  ne  lui  trouvât  pas  une  vocation  plaie  s'élanl  refirmèe,  il  retourna  à  .Manfre- 
assez  forte,  il  nc\oulutpas  lui  accorder  sa  doiiia  pour  reprendre  l'habit  chez  les  PP. 
demande;  en  cITet  le  temps  de  sa  conversion  Capucins  (|ui  le  lui  donnèrent  piur  la  seconde 
n'était  pas  encore  arrivé.  fois  et  le  renvoyèrent  aussi  quelque  temps 
Il  demeura  quebiue  temps  à  Aquila  d'où  après,  voyant  ijue  sa  plaie  s'étail  encore 
il  alla  à  Kome,  pour  se  faire  guérir  de  son  rouverte.  Camille  voyant  donc  (lu'il  ne  pou- 
ulcère,  cl  ayant  jippris  que  dans  l'Iiôpital  de  vail  être  reçu  dans  ci  t  ordre,  prit  la  résolu- 
i^aiiitJaciiues  dts  Incurables  il  y  avait  d'ha-  lion  de  se  consacrer  entièrement  au  service 
biles  chirurgiens,  il  se  présenta  pour  y  être  des  malades.  H  retourna  (lour  cet  efl.  l  à 
reçu  au  nombre  de  ceux  (|ui  ont  soin  des  Uome,  il  rentra  dans  l'Hôpital  de  Saint-Jac- 
maladis  ,  dans  l'espcrancc  qu'eu  même  ques,  et  comme  il  n'y  avait  pas  I  'Uglemps 
temps  i;n  aurait  soin  de  sa  plaie  ;  mais  après  que  l'économe  en  était  sorti,  i  l  q;ie  les  ad- 
y  avoir  demeuré  (juclciues  mois,  il  fut  mis  minislraieurs  avaient  cxpèrimenle  quelle 
dehors  jiar  l'éconouie,  a  cause  de  son  humeur  était  I  i  vertu  de  Camille  la  seconde  fois  ((u'il 
(|i.erelleusi'  cl  de  son  inclinatiim  pour  le  était  entre,  iN  lui  donnèrent  cet  emploi, 
jiu,  qui  était  si  grandi',  que,  quittant  sou-  Le  vomi  qu'il  avait  fait  d'être  de  l'ordre  de 
vent  le  service  dis  malalci,  il  soil.iit  de  ^"aint-Fraiiço  s  lui  liomiail  du  scrupule,  son 
riiopilal  pour  aller  jouer.  Il  y  resta  iiéaii-  esprit  n'était  point  en  repos  ;  c'est  pourquoi 
moins  sur  les  promesses  qu'il  lit  de  se  tendre  ii  se  présenta  pour  la  Iroisième  fois  aux  Ca- 
plus  assidu  à  son  dctoir  ;  m.iis  le  maître  de  pucins  afin  d'èlre  reçu  parmi  eux  ;  m  lis  s.  n 
l'hôpital  lui  a\a;it  trouvé  des  caries  sous  le  ucère  fut  encore  un  obstacle  à  sa  dem.iiu.'e. 
(  hcvct  de  son  lit,  il  lut  renvoyé  et  on  n'eut  Du  an  après  il  postula  clu'/.  les  Cordeliers.  au 
plus  d'égard  aux  promesses  qu'il  fil  qu'il  se-  couvinl  d'Aracœli  à  U  iine,  et  la  méaie  rai- 
rait  plus  exact  à  rem[ilir  ses  devoirs.  son  ayant  aussi  empêché  s;i  réception,  il  ne 
Comme  la  giierreqne  les  \'èniliens  avaient  songea  plus  à  Tordre  de  Sainl-1- rançois.  Il 
avec  les  Turcs  n'était  (las  encore  tennincc  ,  lui  vint  en  peiisé<;  de  former  une  congrega- 
el  (lu'ils  faisaient  de  nouvelles  troupes,  Ca-  lion  de  que. ques  personnes  séculières  qui 
mille  s'enrôla  à  leur  service,  l'an  lolU».  .Mais  s'unissent  ensemble  pour  s'employer  au  ser- 
ceite  guerre  étant  (inie  et  les  troupes  ayant  vice  des  malades.  Cv  fut  Tau  lo82  que  cini] 
été  licenciées,  il  eut  le  même  sort  que  les  |iersoiines  se  joignirent  à  lui  pour  cet  effet, 
autres  soldats  i|ui  s'en  retournent  les  mains  Ils  s'asueinblaient  tous  les  jours  dans  un  pe- 
V  ides.  Comme  e'ét. lit  en  hi<er,  (jui!  le  froid  lit  oratoire  qu'ils  avaiiiit  dressé  d..ns  un  lieu 
était  rude,  qu'il  était  presque  nu  et  qu'il  n'a-  rciire  de  cel  hôpital,  où  ils  se  lenilaient  tous 
\jii  point  d'argent,  il  se  v.t  léduil  dans  une  les  jours  (lour   lairc   ciiscmble  leurs  prièies 


W<-->  MIN  MIN  lj.6 

et  leurs  oruisons.    Ils  ne   cli.mgèrenl    point  sauce,    et    un  quatrième  d'a-sisler   les    ina- 

pour  cela  leurs  liahils  séeuliers  ;  mais  le  ilé-  lailes  à   la  mort,  uicmo  au   temps  de   pesic. 

mou  prév()\anl  le  progrès  qu(;  celte  congre-  Il   leur  permit  aussi    d'élire  un  prêtre  entra 

galion  naissa.ile  ferait  un  jour,  et  de  quelle  eux   pour  supérieur  qui  ne  pourr.iit  exercer 

utilité  elle   serait  pour  le   salut  des    âmes,  son  office  que  pour  trois  ans,  et  de  eh  rcher 

lâcha  de  la  détruire  dans  von  couiuienreouMil.  des  aumônes  par  la  ville.  Ce  fut  eu  vi  i- u  de 

Ceux  qui  présiilaient  au  gouvernemiMil  decet  ce  bref  (jue  Ca:iiille,   d'une  commune  voi\ 

liôp  lai,  n'ayant  pa<  assez  examiné  les  iuteii-  l'ut  élu   pour  supérieur  le  vin;,'(icine  avril  de 

tiens  de  Camille  de  Lellis,  et   regardant  ce  la   même   année.  Iinuiédialemeut  après   son 

qu'il  avait  fait  comme  une  nouveauté,  fiiciit  élection,  ayant   pris    un   cooipag-iion,   il   fut 

ôîer   l'oraloire  ;    mais  la  nuit  suivante  Dieu  dans   Rome    pour  y    demander   la    charité- 

consola  ce  saint   fondateur,   l'ayant  evhorié  mais  comme  ils  n'étaient  pas  connus,  on  les 

à  persévéri  r  <lans  son  cntn  prise  et  lui   pro-  prit    pour   des    vigab  inds   el  ils  ne  rappor- 

metfaiit  de  l'aider  en  tiut.  tèrent  «elle  première  fois  qu'un  pain  et  (juel- 

Camille  ayant  été  console  par  celte  vision,  (jues  fruits, 
résolut  déformer  sa   congrégaiion  hirs  <le  Le  cardinal  de  Mondo\  i,  qui  aiailohlcnu 

l'hôpilal;  i    prit  co.iseil  d'un  de  ses  amis  qui  du    pape  la    cmPir  nation   de  leur  congié-'a- 

lui  dit  que  tant  (ju'il  serait  dans  l'étal  séi  u-  lion,  olitint  encore  un  second  bref  du  -Jg  juin 

lier  il  n'auiait  pas  beaucoup  de  disciples,  et  de   la    même  année,  (|ui    leur  permeliaii  de 

qu'il   lui   couseill.iit    de    se   fiif    prêtée.    Il  mettre   sur   leurs    habits    une   croix    tannée 

suivit  cet  avis,  et  Camille  à  l'âge  de  trente-  poor   les  distinguer  de?  autres   cleics  ré"u- 

deux  ans  apprit  les  rudiments  de  la  langue  tiers.  Us  n'avaient  pas   pour  lors  d'église  ni 

I  iline,   et   n'eut    point   de    honte  à   c<'l   âge  d'oraloire  pour  y  pouvoir  celélirer  la  messe 
J'aller  au  collège  des  Jésuiies   pour  y   f.iire  et  ils  étaient  obligés  de  sortir  tous  lc>  jours,* 
ses  études  et  de  commencer  p  .r  la    ixième.  tant  les  prêtres  que  ceux  (]ui  ne  l'étaient  pas. 

II  y  (it  tant  de  progrès  qu'en  peu  de  temps  pour  aller  dire  ou  eniendre  la  messe  aux 
on  l'admit  à  la  prêtrise,  une  personne  de  Jésuites,  où  ils  avaient  choisi  leur  confes 
piété  qui  fut  informée  des  intentions  qu'il  seur.  C'est  pourqu'ii  ils  résolurent  de  quitter 
avait  de  fonder  une  congrégation  lui  ayant  la  miison  qu'ils  ne  tenaient  i|u'à  louage  ans 
f>iit  une  pension  de  trente-six  ccus  romains  lioutiqnes  obscures,  et  ils  obtinrent  à  cer- 
pour  lui  servir  de  titre.  laines  conditions  de  la  sociéié  du  (i  nfaloii 

Peu  de  leoips  après  qu'il  eut  reçu  les  or-  l'église  de  la  Madeleine  proche   la   Uotoude 

dres  sacrés,   les  administrateurs  de   l'hôpital  avec  (juclques  maisons  coniiguës,  où  ils  vin- 

dc  S. linl-Jacques  lui  donnèrent  la  desserte  de  rent    demeurer    au    nombre   de    douze   ou 

l'église  de  Notre-Dame  des  Miracles  proche  (juinze.  Sur  la  fin  d  i  dernier  siècle    (es  re- 

le  Tibre.  Camille  croyant   (ju'il   pomail   li-  ligienx  ont  fait  rcbâir  celte  cg  ise  de  fond  <'u 

hrement  en  ce  lieu   donner  comm   ncement  comble,   et    elle   esl   une  des    plus   belles  d(! 

à  sa  congrégation,   se  démit   de   son  emploi  Kome,   et  mt  aussi   accompagnée  d'un  très- 

li'économe  de  l'bopilal,  et  au  mois  de   sep-  beau   monastère  qui   est   regardé  comme  le 

tembre    1584,    sous    le    pontificat   de    Cié-  c'ief  de  cet  orJre. 

gcre  XIII,  il  prit  possession  de  cette  église  Leur  nombre  s'étanl  beaucoup  augmenté 

el  du  couvent  qui   y  était  coutigu,   et   il   fit  dans  ceUe  nouvelle  demeure,  Camille  fit  un 

prendre  jour  lors  à   ses  compagnons  l'habit  *o}"geàNaples  pour  y  faire  un  établissement, 

long,  tel  que  le  portent  les  ecclésiastiques  ;  el  y  mena  avec  lui   douze  personns  de  s.î 

mais  ils  ne  demeurèrent  pas  longtemps  en  ce  congrégation.   Le  cardinal  Pallolti,    voyant 

lieu.   Ouelques-uns    ont    écrit   qu'ils    furent  de   quelle    utilité   elle   ét.iit,  olîrit  à  Camille 

contraints   d'en   sortir  à  cause    qu  ils   n'en  un    autre   établissement  à   Bologne  dont  il 

avaient  pas   obtenu   la  permission  du  pajie,  était  archevéïjue.  Camille  refusa   ses  olYres, 

et  d'autres    disent,  avec    plus   de   vraisem-  s'excusanl  sur  le  peu  de  prêtres  qu'il  avait 

blauce,    que   Caniille  ne    l'abamionna    (ju'à  la  plupart  de  ceux  qui  composaient  sa  con- 

cause  qu'étant  tombé  ma  ade  avec  ses  com-  grégation  ne  pouvant  cire  promus  aux  or- 

pagnons,  il  cr.it  que  le  voisinaj;e  du   Tibre  y  dres  sacrés    faute    de    tilres    pati  imoni.uix  ; 

avait   pu  contribuer.    Lu   effet   les  religieux  mais  ce  prélat  lui  répondit  qu'on  y  pouvait 

pénitents  du   Tiers  Ordre  de  Saint-François  remédier   en   érigeant    sa   congrégation    eu 

de  la  congrégation  de  France  appelés  Picpiis,  ordre   religieux.    11   en  conféra  avec  le  car- 

qui  ont  aciirié  depuis  ce  couvenl,  oui  expé-  dinal  de  Mondovi  (lui  en  élail   le  protecleur, 

rinieiité  (jne  l'air  y   est  très-mauvais,  ce  qui  et   tous    deux    en    jj,,rlèrcut   au    pape    Cré- 

leur  a  fait  aussi  quitter  ce  lieu  sans  en  aban-  goire   Xlli,  qui   rrnvnya   cctie  affaire   à   li 

donner  la  propiiéié,  et  Camille  de  Leiis  en  congrégation  des  nies.  Ce  lioiitile  étant  moit 

étant  sorti,  loua  une  maison  dans   le  quar-  sur  ces  eniref.iiles,  celte  ougrcgalion  ne  tut 

lier  i\u\)\\  u\)\'ti\U-  des  Iioiiti(ine    ohscui es.  érigée  en   ordre   religieux    que   p;ir  le  pape 

Si  congrég;ition   s'augiuentant  de  jour  en  Grégoire  XIV,  par  un  bref  de  l'an  l.'iOl,  (|u'il 

jour,  il  résolut  de  lui  donner  le  tilie  île  Mi-  signa  quebjues  heures  awuii  (jnede  mourir, 

nistres  des  inlirenes,  au   lieu  qui-  josi|uc-là  Le    bref  approuvait   aussi    leur   maniLM-e  do 

elle    avait  été   a[)pelée   la    congrégation   du  vivre  qui   avait  été   dressée   par  Camille  da 

i'.  Camille.  Le  pape  Sixte  V  rajjprouva   par  Lellis,  et  dont  un  des  principaux  ai  liclesétaii 

un. bref  du  8   mars  lliSli,   el  leur   p  nuit  de  que    leur  pauvreté  devait    être  semblable   a 

vivre   en   coinniunaulé,   de   faire  des   vœux  celle  des  ordres  mendiant»  qui  ne  possèdent 

siaipics  de  pauvrc'.é,  de  tliaslele  et  d'oliéis-  aucun    fonds  ni  revenu,  el  vont  de  parle  eu 


'007                                      mCTIONNAinE  DES  ORDRES  RELIGIEUX.  1008 

porte  rrceioir  les  aumi'mcs  des  ndî-les;  que  maison  avail  coiil»aclé<s  el  qui  se  tnonlaiont 

l'on   éliail   uii    ni-iiéral   doiil  1".  fil  oc  sérail  à  plus  Je  m  uf  mill.' crus  romains.  Ce  qui  lui 

|ier|  élu  I.  el  qu'il  aurait  quatre  cuiisullcurs  laisail  de  la  peine  était  lie  v<  ir  (jue  la  suciéié 

dont  l'offirc  seriiit  ;iu.sï.i    perpéluel  :  qu'aus-  du    Goiifalon  ,    à    qui    apjjarlenait    la    plus 

silôl   qu'il  )  aur.iil   unucncr^il,  il>   feraient  (sraude  pariio  des  maisons  qui  claieni  lonli- 

eiilre  ses  mains  les  Vd-iix  soleunels  de  pau-  gués   à   l'éiçlise  de   la  M.ideleine,  el  doni  ils 

Trelé,  lîe  cliasleic.  li'ol  éissaiire,  el   un  qua-  avaient  faiT  leurd(  ni.  uie.nese  \oy.ini  point 

Irième  d'assister  los  malades  à  la  m   rt,  qui  pajc^'  des  loyeis  qui   lui   étaient  dus,  avait 

est  le   propre  de  rel   institut;  que  le  nonji  re  lait  saisir  ec  qu'ils   pnu>aieiil  avoir,  princi- 

des    Frères   laïques   serait    plus   ^:ranil   que  piilernenl  une  maison  qu'un  de  leurs  liienl'ai- 

relui  des  prêtres  :  qii'ils  (le:neur<r.iieni  jour  leurs  leur  av.iit   aelietee  pour  a-^randir  leur 

el  nuit  dans  le^  liojiitaus  pi>ur  a^oir  soin  d(  s  d.ineure.    Dieu    y    p   urviil    peu    de   temps 

malades  et  qu'ils  n'en  exigeraient  aucune  ré-  après;  car  le  cardinal  d    Monilovi  élanl  mort 

tiibulion,  mais  qu'ils  leeevraient   seulement  au  mois  de  décembre  lo!)2,  il  leur  laissa  t  >u» 

ce  que  les  admii.isiral^  urs  des  hôpitaux  vou-  ses  biens,  les  ayant  faits  ses  légataires  un:- 

draient  leur  donner;  qu'alîn  d'eire  plus  as-  versels.  (Je  cardinal  avail  ordonné  |  ar  son 

sidus   aux    hôpitaux,   ils    seraient    exen)(its  lest;imeul  ((u'il   seriil   enterré  sans  aucune 

d'aller  aux  processions  el  d'assister  aux  au-  pompe:  mai>  les  religi  us  qui  éla.enl  obligés 

1res  fondions  publiques  où  Ic-i  religieux  se-  de   laire  les  frais   funéraires,  voulurent    ic- 

raicnl  appelés,  et  qu'il  y  aurait  une  maison  moigner    leur   reconnaissance   envers    leur 

particulière  destinée  pour  élever  les  novices,  hienlaiieur,  el  ils  ublinienl   pern.ission  du 

Le  pape  les  exempta  par  le  même  bref  de  la  pape   de   lui    laire   d.  s   obsèques  dignes  du 

jiiridicl  on  des  urainair.  s,  les  soumit  immé-  rang  qu'il  ;>vaiî  occupé  dans  l'Eglise, 

diaicmcnt  au  saint-siège,  el  les  lit  partici-  La   congièg.ilion  s'augmenta  ensuite   par 

panls  des  privilèges  ijui  avaient  clé  aicordés  deux  établissements  qui  se  firent  à  .M  lan  et 

aux  ordres  de  Sainl-l'enoit  cl  des  .Mendiants,  à  liènes  l'an  lO'Ji.  Ce  fut  à  Milan  ((uc  (Jamiilo 

à  ceux  de  la  compagnie  de  Jé>us,  des  Cha-  de  l.eilis,   qui  avail   un   désir  ardent  de  se 

noines  tl  des  clercs  réguliers,  leur  défendant  dévouer  en  ièremeiilau  service  des  malades, 

après   leur  profession   siilcnnelle  de  (jasser  vou, ut  se  charger  du  soin  de   tout  .'h.''|ilil 

dans  un  autre  ordre,  excepte  da;is  celui  des  el   y  remplir  avic  ses  rcligiiux  tous  les  em- 

('hartreux.    Inmicenl   IX   ayant   succédé    à  pois  des  serviteurs  et  autres  personnes  qui 

Grégoire  \1V,  coufirnia  (elle  <  onizrcgation,  étaienl  établies  pour  le  service  des  malades; 

cl  comniil    rarchevcque    dlvid;iure,    Paul  mais    ii  y  trouva  de    la  ci  nirad.ctiou  dais 

.Mberi,   pour  recevoir   la   profession  de   Ca-  quelques-unsdcscs  religieuxqui  ne  pouvaient 

mille,  (jui,  ayanl  pronomé  ses  vous   entre  apprQU\ er  ce  changement,  comme  contraire 

les  mains  de  ce  prélat,  prit  sa  place  cl  reçut  à  leur  premier  insiiiut.  qui  ne  les  engageait 

celles  d>;   ses   confrères  le  8  décembre  de  la  qu'à  'a  visite   des   malailes  et  à  les   assister 

même  année.  spirituelleme  l  tant  de    jour   que  de    nuit. 

Après  celle  profession  solennell  •,  Caiviille  Celle  contestation  dura  quelques  années  jus- 

s'employa  au  service  des  mala  lii  a\ec  plus  (ju'en   l'an   IGOO,  (|u'elle    fui   terminée    par 

de  zèle  el  de  ferveur;  et  le  feu  de  sa  charité  (^Iciienl  A'III,  lomiiie  nous  dirons  ci-après, 

s'alluma  davantage,  élanl  oblige  de  faire  par  Ce  pontife  ayanl  envoyé  des  troupes  en  Hon- 

vœu  ce  ((u'il  ne  faisait  anparai  ant  que   par  gi  ie  l'an  io'Jo,  pour  le  rceouvremenl  de  Slri- 

chariié.  Clément  Vill  avant  sr.ccédé  à  Iniio-  gonie  dont  les   Turcs  s'éiaient  em()arcs,  or- 

cenl  IX,  Camille  apprelienda  qu'il  ne  fùl  pas  donna  à  CauiiTe  de  Lellis  de  donner  huit  de 

favoralile  à  sa  congrégation  ,  à  cause  (|u'il  ses  religieux  pour  servir  d'aumôniers   dans 

s'é  ait  opposé,    n"é:ant   que   car',  nal,  à   ce  celte  armée. 

<iu'i  s  fissent  des  vaux  sul.nai  Is.  l'our  sonder  Camille,  nonobstant  l'opposition  de  sa  cou- 
quelles  étaient  les  disj  osilions  de  ce  ponlife,  grégalion,  se  chargea  de  l'hôpital  de  MiLm, 
il  le  supplia  do  vouloir  confirmer  de  nou-  el  avail  dessein  de  faire  la  même  chose  d.ins 
veau  sa  eongrégaiiun  el  les  privilèges  qui  lui  les  autres  villes.  On  assembla,  l'an  loOi),  un 
avaient  été  ac(Oiilés  par  ses  prédécesseurs.  chapitre  général  à  Komr  pour  élire  quatre 
Mais  il  Irouva  le  pajie  dans  d'.iulres  senti-  consiiileurs  auxquels  on  doiin  i  le  so  n  de 
nicnts  (ju'il  n'avait  cru;  iion-seulemiMit  il  dresser  les  consi  niions  qui  do\aieut  servir 
confirma  la  (ongrégalion  des  .NJiiiisires  des  à  l'avenir  de  lèglrments  a  la  congreg  ilion. 
Infirmes  au  mois  d.-  mais  l.>'.!2  el  les  piivi-  (Camille  lit  ce  qu'il  ])Ut  pour  y  persuader  ù 
légcs  que  ses  prédécesseurs  lui  avaient  ac-  ses  religieux  d'aece|)ier  le  soin  des  liôjiil.iux, 
cordés,  mais  il  lui  en  donna  encore  de  nou-  mais  il  ne  put  rien  gagner  sur  leurs  esprits, 
veaux.  et  le  pape  même  lui  imposa  .-ilence  là-d  ssu>, 

Après  que  Camille  de   I.cllis    eul  obtenu  lui  ordonnant  de  vive  voi\  de  no  ri  n  inno- 

cellc  confirmation,  il  retourna  à  Naples  pour  ver.  Celle  même  année  ce  siinl  fonilaleur  ne 

y  recevoir  la  iirofcssioii  de  ceux    qui   y  de-  put  res  sier  au  c.irdinal   l'alottc  qui  lui  de- 

ineuraienl,  el  il  alla  à  son  lourcii  pèlerinage  mandaii  îles  religieux  pour  faire  un  établis- 

a   Loretie    pour  leiiilre    grâces   à    la   sainte  senient  à   Uologne,  el  il  lui  en    envoya    l'an 

Aierge  de  la  firolec;ion  qu'elle  avail  donnée  1j'J7. 

a  sa  congiéL-a'ion,  el  des   fiveiirs  iju'il   en  L'an  lîiOO,  le  sciond  cîiapilre  général  se 

avail  reçues  en  son  particulier,  lùani  de  re-  liiil  aussi  à  Home.  Le  foinlaleiir  proposa  de 

l')ur  à  Rome,  il  el  il  en  p "ine  de  Irouur  lis  nouveau  que  l'on  reçût  la  minière  il'assis'er 

moyens   j-our  acquitter   les  délies  q:  e  Itur  les  malades  qu'il  avait  établie  ù  .MJan  ;  il  y 


lOO 


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i019 


Iripiiva  (le  nouvelles. difQciillés,  mais  se  coii- 
fiaiil  que  Dieu  approuvait  son  dessein,  il 
«ic  se  rebuta  point,  et  après  avoir  patienté 
pendant  cinq  ans,  les  consulleurs  lui  accor- 
dèrent enfin  sa  demande,  on  dressa  de  nou- 
veaux rè|;lements  par  lesquels  il  était  pmnis 
de  prendr.e  le  soin  des  hôpitaux:  le  pape 
Clément  ^'lil  les  apjjiouva  l'an  1600. 

Il  y  eut  celte  année  une  autre  fondation 
à  Mantoue,el  suivant  le  pouvoir  que  les  re- 
lif-ieiix  en  av;iienl  reçu  du  pape,  ils  prirent 
le  soin  de  l'Iiôpital  de  f'errare  l'an  1GU3.  Au 
coiTiniencement  de  l'année  suivanle,  ils  se 
rhargèrent  des  hôpitaux  de  l'Annonciadc  des 
Incurables  et  de  Saini-.lacques  des  Espa- 
gnols d.ins  la  ville  de  Napls  ;  mais  ayant 
quitté  depuis  cet  emploi,  iis  ont  fait  dans  la 
même  ville  irois  élablissements  considéra- 
bles. Il  se  fit  e^icore  la  même  année  plusieurs 
nôtres  fondations,  et  le  pnpe  Paul  V  étant 
monté  sur  la  chaire  de  saint  Pierre  au  mois 
lie  mai  1G05,  il  divisa  cette  congrégation  en 
cioq  provinces,  savoir,  de  Rome,  de  Milan, 
rie  Naples,  de  Bologne  et  de  Sicile.  Camrlle 
de  Lellis  voyant  sa  congrégation  établie  so- 
lidement, se  démit  de  sa  supériorité  dans  un 
chapitre  général  qu'il  convoqua  à  Home  au 
mois  d'octobre  1G07,  et  le  P.  RIaise  Opjierti 
lut  élu  en  sa  place  en  qualiié  de  vicaire  gé- 
néral et  ensuite  de  général  dans  le  chapitre 
qui  se  tint  l'année  suivante.  En  lGl.3,  on 
tint  le  qualrième  chapitre  i;énéral  où  le  P. 
Antoine  de  Nigrellis  prit  le  gouvernement  de 
cet  ordre. 

Cao.ille  de  Lellis  se  voyant  ainsi  délivré 
rie  tout  embarras  jiril  de  nouvelles  forces 
pour  marcher  dans  la  voie  de  perfection.  Il 
tiisait  dans  ce  renouvellenieiil  de  vie  qu'il 
ne  lui  fc^stait  plus  que  de  pleurer  le  teraps 
qu'il  avait  passé  sans  f.iire  aucun  profit,  el 
qu'il  fallait  qu'il  se  remplît  de  bonnes  œu- 
vres, afin  d'eire  toujours  prêt  lorsque  Dieu 
l'apjiellerail  de  ce  monde.  En  effet  il  emiloya 
les  années  qui  lui  restaient  de  vie  à  l'orai- 
son, à  la  contemplation,  aux  exercices  de 
rharitéet  de  mortification,  el  mourut  à  Rome 
plein  de  bonnes  oeuvres  le  ik  juillet  1614. 
Son  corps  fut  mis  dans  trois  cercueils  enfer- 
més l'un  dans  l'autre,  deux  de  bois  et  l'autre 
di'  plomb,  et  fut  enterré  dans  l'église  du  mo- 
tiasière  de  la  Madeleine  qui  est  la  première 
maison  de  cet  ordre. 

A  la  .iiort  du  P.  Camille  de  Lellis,  sa  con- 
grégation était  composée  de  seize  maisons 
en  llalie  et  do  quebjues  autres  en  différents 
jjays  qui  étaient  divisés  en  cinq  provinces, 
comme  nous  avons  dit  ci-dessus.  Il  y  avait 
environ  trois  ceiits  religieux,  el  il  en  était 
mori  plus  de  deux  cent  vinf;t  à  cause  des 
malades  qu'ils  avaient  conlractées  dans  les 
liôpiiaux.  Urbain  Vlil,  l'an  Î637,  sur  cequ'il 
y  en  avail  dans  la  cooijréïali m  qui  préten- 
d.iienl  que  leeiiapitre  général  devait  se  tenir 
tous  les  trois  ans,  el  (|ue  les  au'resau  con- 
traire soutenaient  qu'il  ne  devait  se  tenir  que 
tous  les  six  ans,  jugea  eu  faveur  de  ces  der-. 
Iiiers,  ordonnant  qu'il  se   tiendrait  tous   les 

(I)  Voij.,  il  la  iiii  du  vol.,  ii»  249. 


sixans.InnocentXréduisil  les  cinq  provinces 
à  deux,  savoir,  à  la  province  do  Naples,  qui 
devait  aussi  comprendre  la  Sicile;  cl  la  pro- 
vince de  Rome,  qui  devait  renfermer  toutes 
les  autres  provinces  ;  mais  l'an  1635  Alexan- 
dre \  Il  changea  encore  cet  ordre,  el  divisa 
leurs  nmnastères  en  (luaire  provinces.  Ces 
Clercs  Réguliers  sont  habillés  co.nmc  les  ec- 
clcsiasliques,  et  portent,  pour  se  dislinguer, 
une  grande  croix  tannée  sur  le  côté  gauche 
de  leur  soutane  et  de  leur  manteau  (1),  et 
dans  la  maison  les  Frères  lais,  qui  en- 
trai'nt  aussi  autrefois  dans  les  charges,  por- 
tent le  bonnet  carré  comme  les  prêtres  et  les 
clercs.  Ces  Frères  lais  prétendaient  même 
avoir  le  pas  au-dessus  des  clercs;  mais  le 
pape  Alexandre  VII,  par  un  bref  de  l'an  16i)2, 
ordonna  que,  tant  dans  les  fonctions  publi- 
ques que  dans  les  particulières,  les  clercs 
auraient  toujours  la  préséance. 

Outre  les  quatre  vœux  solennels,  ils  font 
encore  quatre  vœux  simples,  le  premier  de 
ne  rien  changer  ni  consenlir  que  l'on  change 
rien  dans  la  manière  qu'ils  gardent  touchant 
le  service  qu'ils  rendent  aux  malades,  à 
moins  que  ce  ne  soit  pour  un  plus  grand 
bien  ;  le  second,  de  ne  point  consentir  qu'ih 
puissent  jamais  rien  avoir  appartenant  aux 
hôpitaux;  le  troisième,  de  ne  se  procurer  au- 
cune dignité  hors  la  religion,  et  de  n'en  ac- 
cepter aiîcune  sans  dispense  du  pape  ;  le 
quatrième,  d'avertir  les  supérieurs  s'ils  sa- 
vent que  quelqu'un  se  procure  ces  dignités. 
Ils  fout  deux  ans  de  noviciat,  ils  ne  sont 
point  obligés  à  réciter  les  heures  canoniales 
au  chœur,  à  cause  de  leur  occupation,  ni 
d'assister  aux  processions.  Ils  font  une  heure 
d'oraison  le  jour,  et  ils  ne  jeûnent  que  les 
vendredis  de  l'année,  outre  les  jeûnes  pres- 
erils  par  l'Eglise.  Le  général  et  les  quatre 
consulteurs  ou  assistants  élisent  les  provin- 
ciaux, les  préfets,  les  \isiteurs  et  autres  of- 
ficiers. Le  général  el  les  consulleurs  sont 
élus  dans  un  chapitre  général  qui  se  tient, 
comme  nous  avons  dit,  lous  les  six  ans.  Ils 
ont  des  maisons  de  profession,  des  noviciats 
et  des  infirmeries.  Les  maisons  de  noviciat 
et  les  infirmeries  peuvent  posséder  des  ren- 
ies, ce  qui  n'est  pas  permis  aux  maisons 
professes,  qui  ne  peuvent  avoir  qu'une  mai- 
son de  campagne,  aiin  que  les  religieux  puis- 
sent y  aller  prendre  l'air  el  se  récréer.  Il  y 
a  dans  cet  ordre  des  prêires,  des  Frères 
convers  et  des  oblals  ;  les  deux  premiers 
sont  obligés  par  vœux  solennels,  les  oblals 
font  seulement  des  Vieux  simples,  et  sont 
employés  aux  oifices  de  la  maison. 

Cet  ordre  a  passé  d'Italie  en  Espagne,  où 
ces  religieux  ont  quelques  maisnns.  Il  y  a 
quelques  villes  en  llalie  où  ils  en  ont  plu- 
sieurs, comme  Rome  où  ils  en  ont  deux  , 
Naples  où  ils  en  ont  trois  etc.  Ils  ont  aussi 
eu  plusieurs  personnes  parmi  eux  qui  se 
sont  distinguées  par  leur  sainteté  et  par 
leurs  écrits.  Le  P.  Jean-Baptiste  Novati,  qui 
a  élé  général  de  cet  ordre,  a  donné  plusieurs 
ouviagcs  de  piélé  au  public.  Le  P.  François 


♦""  DîCTIONNAIRF  DES  'JP.nr.rS  RF.I.IGIF.LX.  1012 

i!el  Cihi.î'rr,   qui  fol  (lu  p'-iiérnl   m    1G99.  a  pnr  los  rôno\ii>n<  quf  ce  Irisie  sppcl.iclr  lui 

rnrorp  ^Icmlii    ccllp  cnnjirrg  i(ioii  pnr  plu-  f.iisnit    f.iiiT .  rôlloxions  «itii,  suivies  du  cli.i- 

^icu^s  (■l.iMisscmi'n's   qu'il  lui  a  procuras  :  f;rin  (|u'ille  ml  de   la   mort  dp  son  père  qui 

clic   porlp   po<ir  .nrnips   d'nzur  à  une   rroi\  .irriva   pendant   un  voya^je   qu'elle    fil    aux 

tannée    l'am    un    uvale  rayonné  d'or,  l'écu  eaux  de  Furpes  avec  une  de  ses  lanlcs,  arlie- 

linihré  d'une  ruuronup.  vèrent   de   la   déterminer  à  prendre  le  parlj 

Te!.  Flall   ix,   Vil.  Camilli   de    Lcllis.    La  de  la  piéié  et  de  la  dévotion,  dont  elle  roui- 

niéme  par  le  P.  Jean  Rapt  sie  Uos>-i.    Cosme  mcnra  dès  lors  à  faire  ses  prinripales  otcu- 

Lpuzo,   ArvdI.  li'tiri.  Clrr-ir.  lirfjvL  Mivistr.  pa'ions. 

u)firm.  Memorir  Isioriclir,  de  J.  Chierici  llr.  Klle  épousa  en  lGi5  Jean-Jacques  de  Reau- 
iiolnri  Minisiri  de  gli  !n/?rmi.  Ascap;.  Tarn-  harnais,  seigneur  de  Miramion,  conseiller 
l)ur.  de  Jur.  AIjIkiI.,  disp.  21,  qua-sl.  k,  n.  87.  au  parleiiicnt  de  l'ans  qni,  fonrlié  des  pieux 
Itiill.  Rom.  l'iiiijpp.  Ronanni,  Cnlidog.  Ord.  e\ern[)les  de  sa  femme,  voulal  les  imiler  el 
firlig.  el  Dlrwoires  enroyr's  de  Home.  mourut  dans  celle  heureuse  dis]  osilion  à 
Le  pape  Renoît  XI\  héailGa  Camille  de  râf;e  de  vingl-sepl  ans,  la  laissant  pmsse  de 
Le'lis  en  17'»2,  el  le  (  anonisa  en  l"'iG.  C  s  (|uatrc  mois  el  demi,  â'iée  seulement  de  seize 
religieux  avaient  autrefois  A  Rome  les  mai-  ans.  Rtant  malade  à  l'extrémité  dans  ses 
sons  de  Saint' -Marie-Madeleine.  Sainte-Ma-  rourlies,  el'e  fit  un  voeu  à  la  saine  V  erpe. 
rie  in  Treri,  Saint-Jean  dclla  Malvn.  Ils  ont  alln  que  son  enfanl  reçût  le  haptème;  el  elle 
aeluellcment  pour  préfet  général  le  \\.  P.  accoucha  heureusement  d'une  lil'e,  qui  fut 
Antoine  Scalabriui,  et  pour  procureur  pé-  dans  la  suite  mariée  à  M.  de  Ncsmond,  Mai- 
néral  le  P.  Louis  Rofrni.  [^es  prétendus  Frè-  trc  des  requêtes,  et  (]ui  dejiuis  a  été  jirési- 
res  el  Sd'urs  de  Saint-Camille,  qu'on  essaya  «Icnl  à  Morlier.  La  seconde  année  de  son  veu- 
d'élablir  en  Fr  p  e  sous  la  reslauralion,  vage,  on  lui  lit  des  propositions  de  mariage 
n'cnt  jamais  été  canoniip  emeni  institués,  au\.|uelles  c'ie  ne  voulut  point  entendre, 
et  leurs  maisons  n'ont  point  eu  l'approha-  ce  qui  inila  si  fort  la  passion  de  celui  qui  la 
lion  ecrléMa^tiqiic  et  sont  tombées.  Leur  rei  lienhaii,  que  peu  de  temps  après  il  la  lit 
fondateur  éiail  un  homme  marié,  qui  se  fil  enlever  lorsqu'elle  allait  faire  ses  dévotions 
ordonnera  Rome  par  supercherie,  cl  mourut  flu  mont  Valérien,  avec  m  dame  de  Mira- 
rn  France  dans  une  maison  d'aliénés.  R-d-::.  mion,  sa  belle-mère.  Dès  qu'elle  se  vil  entre 
>jir>  4  »»ir.vTi-c7  /r.  c-  ^  les  mains  des  ravisseurs,  elle  demanda  à  Dieu 
MIRAMIONLS  (Des  filles  de  Sunte-Ce-  j^  j^j  conserver  tout  son  jugemeni,  de  lui 
m;v.ève  COMMUNEMENT  APPELEES  LES  ),  donner  du  courage  ei  des  f  ,rccs  pour  se  dé- 
rape In  \  te  de  madame  de  Miramion,  leur  fe„dre,  et  surtout  de  lui  faire  la  (.race  de  ne 
fondatrice.  lepoinloffenser.  File  fut  piusdeqiiaranteheu- 
Quoique  la  communaulé  des  Fi'Ies  do  res  sans  miiiger,  c'e-l-à-dire,  depuis  son  eii- 
Sainlc-fleneviève  à  Paris  ait  été  fondée  dés  lèvemcnt  jusqu'à  ce  qu'elle  lût  arrivée  à 
l'an  lf).'?l),  par  mademoiselle  RIosset,  néan-  Launoy,  à  trois  lieues  de  Sens,  au  (diàieau 
tnoins  l'union  qui  a  élé  faite  de  celle  com-  de  M.  de  Russi-Kabulin,  auteur  de  l'enlève- 
miinaulé  avec  une  autre  <)ui  fut  fondée  par  ment,  à  qui  on  avail  persuadé  qu'el  e  écoii- 
madame  de  .Miramion,  les  grands  biens  que  terail  les  propositions  de  mariage  qu'il  lui 
celle  dame  lui  a  procurés,  cl  les  règlements  feiail  lorsciu'elle  serait  eu  son  pouvoir  : 
qu'elle  lui  a  prescrits  ,  lui  ont  fail  donner  mais  voyant  sa  fermeté,  et  craignant  les  sui- 
.ivec  justice  le  tilre  de  fondalrire  des  Filles  tes  de  son  enireprise,  il  cessa  de  la  sulliciler 
lie  Sainte  Geneviève.  File  naquil  à  Paris  le  cl  l.i  rend  t  maîtresse  de  sou  sort  el  de  sa  li- 
'2  no\embre  KJ-iO,  et  reçnt  le  nom  de  Marie  bcné.  On  lit  des  jioursuilcs  contre  .M.  de 
'^iir  les  fints  de  ba|téme.  l'Mle  eut  pour  père  .  Russi.  m.iis  elle  lui  pardonna  chrétienne- 
Jacques  Ronneiu,  seigneur  de  llubelle,  et  ment,  à  la  prière  de  1\1.  le  Piincc.  à  condi- 
pour  mère  .Marie  d'Yvri.  Dès  l'âge  de  neuf  lion  qu'il  ne  se  présenterait  jamais  dcvaul 
ans  ((u'elle  perdit  sa  mère,  elle  jugea  du  n)al-  elle. 

Iieur   qu'il  y  a  d'être  séparé  de  Dieu  éter-         Au  retour  de  cet  enlèvement,  elle   fut  ma- 

ncllcment,   p,ir  l'affliction   qu'elle  eut  d'èirc  lade  <à   la    mort,  el  reçut   l'exlréme-oiiction 

séparée  de  celle  qu'elle  aimait  le  plus  ici-ba^.  avec  lous   les   sentimenis  de    piété  que  l'on 

C'est  pourquoi,   afin  «le  s'assurer  la  (Misses-  pouvait  attendre    d'une  àme  qui  se  disposait 

sion   de   ce   bien    infini,    toulo  jeune  (in'elle  à  aller  jouir  de  la  |)résenee  de  Jésus-C,lirisl , 

était,  elle  fuyail  les  plaisirs  et  les  divertisse-  (|u'elle  avail  choisi  pour  son  éponv  :  mais  la 

meiits   autant    qu'il    lui  étail   possible,  per-  I'ro>idence    qui    voulait   s'en  serv  ic  pour  le 

siiadéc  (ju'ils   ciaienl   très-préjudiciables   à  bien    spirituel   et  teuiporel  du  proclia  n.  lui 

l'âme.  ayant  renvoyé  l.i  saule,  ellesoiigea  plus(|ue 

A  l'ilge  de  douze  ans  elle  prenait  soin  des  jamais    à    serwr  Dieu,  l'n  jour  de  l'Ilpiph.i- 

malades  de  la  maison  ;  et,  un  jour  des  Rois,  nie,  demandant  à  Dieu  ce  (|u'ellp  pouvait  lui 

un   palefrenier  se  mourant  au  niomenl  (|ue  olïrir,    à   l'exemple  des  rois    (|ui   curent  le 

tout  elaii  en  joie,  elle  se  ileroba  pour  aller  le  bonheur  île  l'adorer  dans  la  crèche,   elle   se 

voir  expirer;  ce  qui  fit  une  telle  impression  seiilil  !out    émue  et  ciui  eiiiendre  une  voix 

sur  sou  esprit  et  sur  ses  sens,   qu'éiant  re-  qui  lui  disait  :  C  est  Ion  rnur  i/nr  je  veux,  el 

lournée   dans    l'assemblée,  plie  se  dispensa  (/u  il  snil  à  moi  sans  j)aria'/e;  ce  (jui  eut  pour 

di'  danser  a  un  bal,  sous  prétexte  qu'elle  no  elle  laiil  d'allrails  et  de  charmes,  qu'elle  re^- 

fC  poi  tait  pas  bien  ;  ce  i)ui  paraissait  \érita-  la    en  méditation    ()u.ilre    heuies,   [lend.inl 

Ijlciiioul  sur  son  vis.ig'  qui  ctait  tout  ciiangé  lesquelles  elle  goûtait  de  si  grandes  consoîa- 


1013 


MIU 


MIR 


MU 


lions,  que  son  Ame  m  é(ait  pénétrée  d'une 
joie  loiite  sainlc  et  salutaire.  Elle  fil  à  râ.L;e 
lie  dix  neuf  ans  une  relraite  chez  les  Sœurs 
•le  ta  Ctiarité,  pendant  laquelle  elle  conçut  le 
dessein  de  se  fiire  Carmélite,  mais  son  con- 
l'i'sseur  l'en  ayant  empêchée  à  cause  de  sa 
(ille  qui  a^ait  bcso  n  de  ses  soins,  elle  se 
contenta  de  faire  vœu  de  chasteté  dans  une 
autre  relraite  qu  elle  fil  peu  de  teinps  après 
celle  dont  nous  venons  de  parler. 

Sacli/irité  pour  le  prochain  élait  si  grande, 
qu'elle  nourrissait  une  vingtaine  de  petites 
filles  orphelines  dans  une  maison  proche 
Saint-Nicola'i-des-Chami)s,  et  leur  fournis- 
sait des  niaîlrcs-es  pour  leur  apprendre  à 
servir  Dieu  oi  à  travailler.  Klle  assistait  sou- 
vint les  malades  de  l'Hôlel-Dieu,  afin  de  se 
mortifier,  é'ant  naturellement  délicate.  Son 
iliiecleur  l'engagia  à  une  retraite  d'un  an, 
pour  vaquer  uniquement  à  sa  perfection  , 
sans  s'adonner  aux  œuvres  de  piété  à  l'égard 
di!  prochain,  dont  on  ne  lui  permit  l'exercice 
qu'à  la  fin  de  l'année.  On  la  fit  Irésorière  des 
pauvres  de  la  paroisse  de  Saint-Nicolas- 
des-Champs;  et  comme  c'était  dans  le  temps 
des  guerres  civiles,  et  que  le  nombre  des  pau- 
vres élait  fort  grand  dans  Paris,  son  zèle 
trouva  de  quoi  s'exercer,  leur  faisant  distri- 
buer plus  de  di'ux  mille  potages  par  jour, 
sans  parier  des  autres  charités  secrètes 
(ju'elle  faisait  aux  pauvres  honteux  avec 
tant  de  générosité,  que  la  misère  augmentant 
et  ses  revenus  n'y  pouvant  pas  suffire,  elle 
vendit  son  collier  de  perles  vingt-quatre  mille 
livies,  et  un  an  après  sa  vaisselle  d'argent, 
dont  le  produit  lui  ervil  à  taire  des  missions, 
à  établir  des  écoles  pour  la  jeunesse,  et  à  des 
charités  pour  les  pauvres  nialad  's  de  la  cain- 
pagno,  dont  elle  voulut  prendre  elle-même 
le  soin,  apprenant  pour  cet  effet  à  saigner, 
à  médicamenter  les  plaies,  et  à  composer 
•les  onguents  et  autres  choses  nécessaires, 
dont  elle  avait  un  cabinet  bien  garni,  pour 
tous  ceux  qui  avaient   recours  à  sa  charité. 

Après  qu'elle  eut  marié  mademoiselle  do 
Miramion  à  M.  deNesmond,  elle  crut  ne  de- 
voir pus  songer  qu'à  sa  propre  perreciinn; 
c'est  pourqnoi  elle  rechercha  avec  empres- 
sement tout  ce  qui  pouvait  y  contribuer. 
Elle  relira  chez  elle  en  1630  vingt  huit  reli- 
gieuses des  froiitièr.  s  de  Picardie,  dont  les 
couvents  avaient  été  ruinés  par  les  guerres  : 
elle  les  nourrit  à  ses  dépens  pendant  plus 
de  six  mois,  et  ne  cessa  cette  héroïque  cha- 
rité qu'après  avoir  trouvé  moyen  de  les  pla- 
cer dans  d'autres  maisons,  ou  de  les  ren- 
voyer chez  elles  lorsqu'elles  purent  y  retour- 
ner sans  aucun  danger. 

Nous  avons  déjà  rapporté  à  l'art.  LiziRis- 
T!  s  de  qui'lle  manière  elle  cimlribua  à  l'éta- 
blissement des  missions  é  rangères  pour  la 
conversion  des  infidèles,  mais  sa  charité  n'en 
demeura  pas  là,  car  les  dé>ordres  de  la 
guerre  et  la  minorité  du  roi  ayant  occasionné 
et  fait  triompher  le  vice,  celle  généreuse 
servante  de  Jésus-Christ  travailla  à  en  dimi- 
nuer le  progrès,  en  faisant  enfermer  dans 
la  communauté  des  Filles  de  Sainte-Pélagie, 
qui  subsiste   encore   aujourd'hui,    quelques 


filles  des  plus  scandaleuses,  dans  Tespéranre 
que  les  autres,  intimidées,  se  contiendraient 
davantage ,  et  même  pourraient  changer 
de  vie. 

Ce  fut  par  un  effet  de  celle  même  charilé 
que,  pour  exécuter  le  projet  qu'elle  avait  fait 
depuis  longtemps  d'établir  une  maison  do 
filles  qui  licndraiMil  des  petites  écoles  à  la 
campagne,  panseraient  les  blessés  et  assiste- 
raient les  malades,  elle  alla  demiurer  en 
IGGl  dans  'a  rue  S  linl-Antoine,  où  avec  quel- 
ques filles  qu'elle  trouva  disposées  à  se  sa- 
crifier pour  le  prochain,  elle  vécut  en  com- 
munauté sous  la  protection  et  le  litre  de  la 
Sainte-Famille,  et  dans  l'observance  de  quel- 
ques règlements  que  M.  de  Festel,son  direc- 
teur, leur  avait  faits  cfuelque  temps  avant  sa 
mort;  ce  qui  dura  jusqu'à  ce  que  ,  étant  al- 
lée demeurer  dans  la  paroisse  de  Saint-Ni- 
colas du  CharJonnet ,  Dieu  ,  qui  par  ses 
inspirations  était  l'auteur  de  ce  pieux  des- 
sein, lui  donna  les  moyens  de  le  perfection- 
ner, ce  qui  arriva  de  la  manière  suivante. 

Dès  l'an  1636  ,  une  communauté  de  Fil'es 
sous  le  titre  de  Sainte-Geneviève  avait  été 
établie  par  Mlle  Blossel,  comme  nous  l'avons 
déjà  dit.  Ces  filles  s'occupaient  au  travail  , 
récitaient  le  petit  offii  e  de  la  Vierge  en  com- 
mun, fréquentaient  les  sacrements  et  étaient 
assidues  aux  offices  divins  de  la  paroisse 
de  Saint-Nicolas  du  Chardonnei  ,  dans  la- 
quelle elles  demeuraient.  Rlb  s  visitaient  les 
malades,  s'exerçaient  dans  la  pratique  de 
toutes  les  vertus,  et  lâchaient  d'inspirer  le 
même  esprit  aux  autres  personnes  de  leur 
sae,  autant  par  les  instructions  charitables 
qu'elles  leur  donnaient,  que  pir  leur  bon 
exemple.  Pour  ce  sujet  elles  pren;iient  des 
pensionnaires,  tenaient  les  petites  écoles, 
faisaient  des  conférences  entre  elles  et  étaient 
dans  le  dessein  de  recevoir  aux  exercices 
spirituels  cellesquidésircraienl  serelirerchez 
elles  lorsqu'elles  auraient  assez  ile  logement 
pour  cela,  comme  aussi  d'aider  les  pauvres 
gens  de  la  campagne,  en  y  allant  enseigner 
et  établir  d 'S  maîtresses  d'école.  Elles  avaient 
pris  sainte  Geneviève  pour  leur  patronne,  à 
cause  qu'elles  demeuraient  au  pied  de  la 
montagne  sur  laquelle  reposent  les  sacrées 
reliques  de  celte  sainte  bergère,  et  elles  étaient 
établies  en  corps  de  communauté  séculière 
sous  l'autorité  de  l'archevêque  de  Paris  et 
par  lettres  patentes  du  roi.  La  conformité 
qu'il  y  avait  entre  celle  communauté  et  celle 
(le  la  Sainte-Famille  établie  par  madame  do 
Miramion  porta  cette  sainte  femme  à  vou- 
loir unir  sa  communauté  avec  celle  de  sainte 
Geneviève  ;  ei  Dieu  ayant  inspiré  à  plusieurs 
des  filles  de  cette  dernière  communauté  un 
grand  désir  de  s'unir  aussi  à  madame  de  Mi- 
ramion et  à  ses  filles  ,  elles  ne  purent  s'em- 
pêclier  de  lui  «>n  faire  la  proposition  et  à  M. 
Fcret  ,  supérieur  des  deux  communautés  , 
qui  fit  plusieurs  assemblées  pour  conférer 
sur  l'utilité  de  cette  union  et  sur  les  moyens 
de  la  faire  réussir;  après  plusieurs  prières  et 
bonnes  œuvres  que  l'on  fit  pour  obtenir  do 
Dieu  des  lumières  et  la  déclaration  de  sa  vo- 
lonté, elle  fut  enfin  conclue  le  ik  août,  veille 


1015                                       DICTIONNAIRE  DES  ORDRES  REUGIELIX.  lOIC 

•le  rAs«omplion  dp  !,i  sniiilc  Virrpr,  en  pré-  rollos  (iiii  nvnicnl  iloiiiniidé  l'union.  Une  .■in- 

>enre  cl  du  consiMUrnuMii  de  M.    l'érct.   Le  tre   com nui  11,111  le    clablie   à    la    Te  lé-soiis- 

contral  fui  r.iil  aM'c    l'aîTréMioiit  de  l'arche-  .louare  ayant  aussi  demandé  vn  KiOj  riinioii 

véque  de  l'aris  ,  Hardouiu  de    Perclivc  ,    le  avi  c  les  filles  de  Sain'e  (îcnevièvc,  madame 

14   sepleinlT,-  KiOo  ,  cl  cel    inslilul    fui  ;:p-  île  Mirainion  les  fil  l(!Ules  venir  à  l'aris  l'une 

prouvé   cl   confirmé  en  ll'OS  fiar  le  cardinal  afirès  l'autre  pour   les  inslruire,  et  alla  en- 

de  N'eiulome,  le;;;!!  a  lulcrr  vn  France.  suiie  à  la  Fcrlé-sous-Joiiae  les   établir  eu 

Ces  deux    couimunaiilés  ayant   élc    ainsi  présiMiie  de  l'cvéquc  de  Meaux,  SI.  licnigne 

réunies,  iiadame  de  .Mir;iuiion  donna  soixaiile  liossuei ,  qui  prêcha  sur  ce  sujet  avec  bcau- 

inille  livres  pour  fonder  plusieurs  places,  et  coup  d'éloqueiu  e. 

\\.  Fcrel  travailla  à  des  conslitulions  qui,  Les  troupes  qui  passèrent  ou  séjournèrent 
outre  qu'elles  renfermaienl  les  règlemenls  à  Melun  l'an  1(173  y  ayant  causé  des  maladies 
de  l'une  cl  de  l'aulre  de  ces  comniunaulés  couia^iruses ,  pi'rsonnc  n'osait  soulager  les 
(excepté  quelques-uns  dans  l'exoculion  des-  malades  qui  y  moiirairnl  au  nonibrc  di-  plus 
quels  l'expérieirc  avail  fait  conn  litre  beau-  di'  cent  par  junr,  ei  la  plupart  dans  les  rues 
coup  de  difiicullé).  éiaient  remplies  de  sain-  abandoiini's  de  l  ail  le  monde  et  privés  de 
les  pr;;liqui\s  capaMes  d'entrcienir  le  bon  tout  secours  humain.  ALidamc  d'  Mirainiun 
ordre  dans  la  maison  et  h-  bon  exemple  au  en  fu!  si  lour.liée  qu'elle  y  alla  elle-niiuie  ac- 
dchors.  Ces  conslitulions  furent  approuvées  compaf;nce  de  cliiruriiiens  et  des  sœurs  de  la 
par  M.  de  ilarliy  de  Ch  invalon.  arilKvèque  Cliariié,  ranima  par  sou  exemple  ceux  q  11, 
de  l'aris,  au  mois  de  lévrier  1074;  on  les  par  leur  condiiiou,  devaient  assister  les  ma- 
présenta  cnsiMte  au  roi,  qui,  par  de  non-  lades ,  en;.'a;;ea  le-;  mipisirals  de  donner  un 
velles  lellres  palcn'es  qui  lureul  ciiref;!--  lietj  pour  faire  un  hôpital  dans  lequel  elle  lit 
lécs  au  parlement  la  même  année,  autorisa  porter  les  nieutdes  de  sa  terre  de  Uulelle  qui 
riinion  qui  avait  été  faite  de  ces  deux  com-  n'était  jas  éloiffuée  de  celte  ville,  y  étaldit 
niuuaulés,  el  les  cliangenienls  qui  avaient  des  sœurs  de  la  Cli.irité,  cl  y  lit  Iransporter 
été  faits  aux  premiers  régleiiicnls.  ÏMadamc  1 -s  malades  qu'elle  pansait  elle-même,  les 
de  .Miramion,  qui  avail  été  élue  supérieure  csliortanl  à  souffrir  patiemment  leurs  maux 
cl  qui  encourageait  les  filles  de  Saiute-Cene-  et  à  recevoir  la  iiiorl  avec  soumissioa  aux 
■»icvc  par  son  exemple  à  la  pratiijue  exacte  ordres  de  la  divine  providence,  qu'elle  les 
lie  leurs  rè);les,  leur  (it  acheter,  l'an  1070,  la  forçait  en  quelque  f-iion  d'adorer  par  les 
maiso  1  où  elles  sont  prc;entemenl,  sur  le  charitables  soins  qu'elle  avait  d'eux  cl  par 
quai  de  la  Tournelle,  el  leur  donna  encore  les  secours  qu'ils  recevaient  de  ses  liberali- 
dix  mille  livres.  Jusque-là  elle  avail  fait  lés.  L'hôpital  pénéral  n'en  ressentit  pas 
toute  la  dépense  de  la  maison;  mais  voyant  moins  les  effets  dans  quelques  années  de  di- 
qU'-  les  filles,  par  leur  économie  et  par  la  selle,  aussi  bien  que  les  pauvres  pour  Ics- 
r'reptiou  de  celles  qui  avaicnl  embrassé  quels  elle  ranima  son  zèle  dans  le  temps  de 
l'inslilul,  étaient  en  état  de  subsister  par  la  famine  dont  la  France  fui  afiligce  eu  I09i. 
«Iles-mêmes,  elle  ne  leur  donna  plus  que  Car.  sans  parler  de  ceux  auxquels  elle  don- 
quiiize  cents  livres  par  an  pour  sa  pension,  nail  l'aumiuie,  elle  s'.ippliqua  avec  une  cha- 
qu'elle  leur  a  lo  jouis  payée  jusqu'à  sa  rite  héroïque  à  soulager  ceux  ijui  étaient 
jnoil,  vivant  comme  les  aulies  Sd'urs  el  ne  malades  à  rnôlel-l)i<u,  dont  le  nombre  se 
vo.ilanl  point  de  dislinclion  ,  quoique  sa  montant  à  six  mille  avail  obligé  les  religieu- 
.-ante  fût  fort  faillie  et  sujeile  à  de  grandes  ses  de  cel  In'ipital  à  en  melire  plusieurs  dans 
inlirmités;  et  elle  leur  déclara  qu'elle  voulait  un  même  lil;  attaqués  de  ilillerenles  mala- 
exéculcr  les  cons'itulioiis  en  se  démcItaiU  dies  iju'ils  se  cnmmuuiiiuaienl,  ils  étaient 
de  la  supériorilé  [lerpéluelle.  Mais  ces  filles,  dans  un  éial  si  déplorable,  que  cette  saintiî 
persuadées  qu'elle  leur  él.it  encore  néces-  femme,  pénétrée  de  coiiipass  on  pour  eux, 
saire,  eurcnl  recours  à  .M.  Féret,  Icursupé-  consei.la  aux  adminislrateurs  de  celle  mai- 
rieur,  el  enlin  à  larclievéque  de  Paris,  qui  son  des  pauvres  d'ouvrir  l'Iiôpilal  Saiul- 
lui  ordonna  de  n'abandonner  la  supériorité  I  ouis  ;  ce  qui  .  yani  élé  ap;irou»e,  et  le  soin 
qu'avec  la  vie.  '"'  a\ant  été  donné  de  préparer  tout  ce  qui 

La    rcpuiaiion   de  ces   filles   a^ant   pas^é  clait  nécessaire  pour  les  y  reccvor,  ou  yen 

dans  les  provinces,  une  conimunauié  élallic  transporta  un.-  parte  ,  qui  ,  en  1  lissanl  plus 

depuis  louglempsà  Amiens  députa,  l'an  1070,  de  place  à  ceux  qui  reslaieul  à  l'ilolel-Dieu, 

•leux  filles  à  madame  de   Miiamion  pour  lui  .s'en  Irouvérent  eux-mêmes  beaucoup  soula- 

ileinander  ses  conseils.  Klle  les  relira  chez  gés  et    moins   en    danger  de   perdre  la  vie, 

file  pendant  un  mois   el  les  renvoya   char-  comme  l'expérience  le  fil  coiinailr,'   par  le 

niées  de  ce  qu'elles  avaient  vu.   il  en   revint  grand  noaibre  de  ceux  qui  en  rechappaienl. 

(l'aiitres  qui  lui  ,:c:iiaudèrent  l'union  de  leur  File    n'ouhliail    pas   pour    cela    les   pauvres 

communaiilé  avec  celle  de  ses  filles,  leur  ha-  lioiil'  ux  de  sa  parois  e.  et  faisait  faire  cbe/ 

lut  et  leurs  coiisliUiiions,  ce  qui  étant  appuyé  elle  de  deux  j'iurs  l'un  du  pola;e  pour  eux. 

«le  la  reco:i.maiidalion   de   M.  l'evéïiue  d'.\-  eaip!«iyaiil  ulileiuent  b  s  charilcs  du  roi,  dont 

miens  et  lie  .M.  Chauvidin ,  iub  ndaul  de   l'i-  Sa  .Majesté  l'avait  chargée  api  es  la  mort  de 

«ardie,   elles    obtinrent   <.e    qu'elles  soiiliai-  m  id.inoiselle   de    Laïuoigiioi    qui   aiait   eu 

laii'ut;  riinion   fut  l'aile  dans   l«'S   hirmc»,  el  aussi   le    même   emploie  L'année   suivante, 

mail  une  de  .Miramion  all.i  à  Amiens,  où  elle  l'bôpilal  général  ne  pouvant  soulcnir  ses  dé- 

biissa  «bux  lilles  lie  sa  coinmuiiaulé,  «|ui   fi-  penses,  les  direcleurs  voulurent  renvoyer  la 

real  (ai  e  le  uoviti.il,  cl  rei.ureut  a   liustitut  plus  grande  lariie  des  pauu-cs,  mais  uiddaïue 


1017 


Min 


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J0!8 


de  Miraniion  trouva  des  rcssonrres  pour 
l'empêcher  aussi  bien  que  pour  inainlcnir 
l'hôpilat  (les  enfaïUs  trouvés,  qui  était  fuit 
embarrassé  de  pourvoir  à  la  subsistance  de 
ces  pauvres  innocen(s. 

Sa  maison  avait  toujours  été  ouvoilc  aux 
pers<innes  de  son  sexe  qui  s'y  présentaient 
pour  ^'>'  retirer  à  des>ein  d'y  faire  cliacune 
en  particulier  les  exer(  ices  spirituels,  mais 
ayant  iniendu  parler  d:i  fruit  ((lie  faisiienl 
en  I{reta{j;ne  les  Maisons  de  retraite  (  Fo!/. 
cet  article),  et  qui  s'étalilissaionl  aussi  pour 
les  homnics  au  n<)vici;it  dis  Jésuites  de  Pa- 
ris ,  elle  entreprit  d'exercer  la  même  (  harité 
pour  les  femmes  ;  elle  en  olilint  l'apréinenl 
du  roi,  quoique  ce  piince  l'eu'  refusé  quel- 
(jues  années  auparavant  à  d is  personnes  de 
I  iélé  qui  avaient  eu  lo  même  de  sein.  Sa  Ma- 
jesté voulut  même  y  conlrihuer  en  lui  en- 
voyant six  mille  livres.  L'archovêqui!  de  l'a- 
ris  approuva  aussi  ce  dessein,  nomma  des 
confesseurs  pour  les  retraiies,  et  voulut  qu'à 
l'avenir  la  maison  de  niadauie  de  Miramion 
lui  honorée  de  la  présence  perpétuelle  du 
saint  sacrement,  et  qu'on  l'exposât  tous  les 
soirs  penilani  le  s.ilul,  tant  que  dureraient 
les  retraiies.  Comme  pour  ces  exercices  pu- 
hUcs  il  fallait  agrandir  la  maison,  on  en 
acheta  une  voisine  qui  coûta  soixante-quinze 
mille  livres,  dont  madame  de  Miramion  en 
donna  quinze,  madame  de  Guise  six,  ma- 
rlame  Voisin  et  ma  lame  Duhoussel  autant, 
et  plusieurs  personnes  inconnues  envoyè- 
rent aussi  des  sommes  eonsidéiables.  La 
maison  fu!  réparée  et  divisée  en  cinquante 
chambres  ou  cellules  séparées.  On  y  lit  un 
réfectoire ,  une  salle  d'exercices  et  autres 
lieux  réguliers,  et  cela  avec  tant  de  propreiê, 
queces  réparations  montèrentencoreàplusde 
vingl mille  livres.  Deuxanss'écoulèreutavant 
que  celle  maison  se  trouvai  prêle.  Madame  de 
Miramion  en  réfjla  le  spirituel  el  le  IcmporcI, 
et  ordonna  que  les  retriiles  des  dames  dure- 
raienlsept  jours  prndant  lesquels  elles  cou- 
cheraient toulesdansla  maison  où  l'on  poisr- 
rait  en  loger  cinquante,  el  que  les  retraites 
des  pauvres  ou  des  femmes  et  des  filles  de 
médiocre  condition  no  dureraient  que  cinq 
jours;  qu'on  en  pourrait  recevoir  jusqu'à 
six-vingts  cliaque  foi^,  mais  qu'on  ne  retien- 
drait à  coucher  que  celles  qui  viennent  île  la 
campagne;  qu'à  l'égard  de  celles  de  Paris, 
elles  relournei  aient  lous  les  soirs  chez  elles 
el  reviendraienl  les  matins, et  qu'on  les  nour- 
rirait touti  s. 

Madame  de  Miramion  paya  toute  seule  les 
premières  retraites  des  pau\res,  et  quelques 
personnes  de  piélé  y  contribuèrent  dans  la 
suite.  Il  n'y  a  emore  qii'une  des  quatre  qui 
se  [ont  par  an  qui  soil  fondée,  mais  enallen- 
dant  qu'elles  le  soient,  le  roi  y  pourvoit  par 
ses  libéralités.  Le^  PP.  Jésuites  et  les  prêtres 
(lu  séminaire  d-cs  Missions  Eirangères  foui  à 
i'allirnative  les  reiraites  des  liâmes  deux 
lois  I  année,  et  (elles  des  pauvres  quatre  l'ois. 
Le  proTiod  respect  que  madame  de  Mir;imiiiu 
cul  toujours  pour  les  prêtres  lui  fit  f  irmcr 
le  dessein  de  travailler  à  rél.ililissemrnt  de 
diverses  maisons  etclésiastiiiucs  :  l'une  pour 


renfermer  ceux  qui  ne  seraient  pns  réglés, 
une  autre  pour  Ci'ux  qui  sont  obligés  de  ve- 
nir à  Paris  solliciler  des  affaires,  el  une  troi- 
sième pour  servir  de  relraite  à  ceux  que  l'àce 
et  le  travail  ont  mis  hors  d'état  de  servir  l'E- 
glise. Mais  le  temps  et  les  moyens  lui  ayarit 
manqué,  .M.  l..-  card:n;:l  de  Noailles,  archevê- 
que I  e  Paris,  y  suppléa  en  élal)lissant  la 
communauté  de  Saiiil-!'"ran(;<)is  de  Sairs,  qui 
pour  cet  effet  jouit  du  prieuré  de  Saint-De- 
liis  de  la  Charte  à  Paris. 

Enfin  madame  de  Miramion,  épuisée  de 
forces  et  succombant  p  )ur  ainsi  dire  sous  le 
p  lids  de  ses  morlinealions,  tomba  malade  le 
il)  mars  1G9G.  Ses  vomisscmcnis  continuels 
l'empêchèrent  d'abord  de  recevoir  le  sairit 
viatique,  mais  en  aynnl  été  délivrée  par  une 
grâce  spéciali'  de  celui  qu'elle  avait  aimé  el 
servi  avec  lant  de  fidébté,  elle  le  reçut  enlin 
el  inournl  le  2'^  mars,  ayant  ordonné  par  son 
testament  qu'on  l'enlerrerait  loinme  une 
simple  fille  de  Sainle-Genevièvc.  Six  piuvres 
portèrent  son  corps  à  la  paroisse,  où  il  fut 
enterré  dans  fe  cimelière,  et  son  creur  fut  m  s 
dans  la  chapelle  de  sa  communauté,  où  tou- 
tes les  bonnes  œuvres  que  l'on  y  taisait  de 
Son  vivant  ont  clé  depuis  rontinuées  et  même 
augmentées  par  le  zèle  et  la  ferveur  de  ses 
filles,  qui,  faisant  leur  possible  pour  imilT 
son  amour  pour  Dieu  et  sa  charité  pour  le 
prochain,  se  sont  toujours  conservé  jusqu'à 
présent  l'estime  de  tout  le  monde  et  la  bonne 
odeur  de  Jésus-Christ  par  la  fidélilé  avec  la- 
quelle elles  s'acquiitent  de  toutes  leurs  obli- 
gaiions  el  praliques  de  piélé,  el  par  la  charilé 
(ju'elles  exercent  envers  le  prochain,  ensei- 
gnant à  lire,  écrire  et  travailler  aux  petites 
filles,  qu'elles  éièvenl  en  même  tem|is  à  la 
connaissanee  des  mystères  de  notre  sainte 
religion  et  aux  praliques  d'une  véritable 
piélé,  en  recevant  d;ins  leurs  maisons  les 
maîtresses  d  école  qui  désirent  éprouver 
leur  vocation  et  se  former  à  cet  emploi,  en 
allant  en  campagne,  lorsque  les  évéqucs  el 
les  curés  le  demandent  pour  établir  et  dres- 
ser des  maîtresses,  en  faisant  dans  leurs  mai- 
sons pour  l'instruction  des  personnes  de  leur 
sexe  une  lecture  ou  conférence  familière  sur 
les  choses  nécessaires  au  salut,  sur  les  ver- 
tus et  sur  les  obligations  de  leur  état  pour 
passer  la  vie  saintement,  en  admettant  chez 
elles  celles  qui  drsirenl  faire  les  exercices 
spirituels,  en  assistant  spiiiluellemenl  el 
corporcllemcnt  les  pauvres  malades  et  les 
blessés  des  paroisses  où  elles  sont  établies, 
liu'elles  soignent  el  pansent,  et  auxquels 
cl  es  fournissent ,  aillant  qu'elles  en  ont  le 
moyen  ,  les  onguents  et  antres  remèdes 
(ju'elles  jugent  nécessaires  pour  leur  gué- 
rison. 

Les  sœurs  ne  sont  reçues  à  la  cninmu- 
n.:uté  qu'à  vingi  ans  accomplis  et  après  deux 
ans  d'épreuve.  [îllos  ne  font  iioint  de  vœux, 
mais  soit  que  la  prctendanle  apporte  quel- 
que chose  en  fonils  ou  en  argent  ou  une 
rente  viagère,  soit  qu'elle  n'aijporle  rien,  on 
passe  un  (oniral  cnlre  elle  et  la  supérieure 
avec  ses  conse:llères,  par  le  juel  il  est  porié 
que,  outre   les    autres  clauses   dont   on  est 


'•in                                nicTioNNAinEDES  onnRKsiiEi.ir.iKLix.                            1020 

conviMui,  I:i  pr('loii(l,)iilo  aynnt    lu    ri   lien  Les  bâtiinenls  sont  aujourd'hui  une  pliarma- 

enl<'n(lu  1  s  coasltuti  ms,  elle  s'y  somm>l  el  cic  ccnlriile.                             IJ  —  u— e. 

s'obline  rie   l'S  nbserver.  cl  (iiie  l.i    romimi-  •n^i'^n.o^n  r^f^   ,r. 

n.iules-o!)li^re  à  l,i  nourrir  et  enlretonir,  lanl  •>">LUICORnE   (Dks  nEi.i,:iEisrs   de  Notre 

rn    s.nlé   no-cn    maladie,    pend.iiil    lo.t    le  l]^yv■.  ve)    nier  h^s  \  ,fs  du  vrucrable  l'.re 

l.-M,ns  q.rell,-  ser;.  .1..    même  corps,  ri  d'oh-  -^"7,"**  *""'''/"':  H'^''";".'"-  f',''';  '"  '"<- 

server  reciproniien.eni  leseoi.slilulions  à  son  »<:>-'>l'le  Mère  M',ne-Madeleine  de  la   Tn~ 

éR.irl.  elpo   rlors..M.journ..iniué,  les  stru  s  ""e ,  nus^i  fondalnce  et  première  religieuse 

asscnihlées  dnns  leur  or.iloire,  le  supérieur  y  ''^    01  aie, 

clanl,  la  préliiidiinle  lui  dcrtiaiideirèlre  reçue  l.e  P.  Antoine  Yvan,  instituteur  de  l'ordre 

au  corfis  de  romaïuiiaulc  poury  vivre  suivant  d  s   religieuses   de    Noire-Dame    de    Miséri- 

les  roiisiiluli'ius.    Le  sunérieur  demande  si  corde,  n.Kjuil  à  llians,   bourir  de   Provence, 

elle  a  les  voi\  de  In  eotnuiunar.té.  cl  I  r   su-  du  diocùse  d'Aix,  le  10  novenilirc   1570.  Ses 

pcrieiire  l'en  ayanlassuré,  il  dé  lare  à  haule  piVe  et  mère  ayant  élé  mieux  pourvus  di's 

voix  qu'elle  est  reçui'.  Tel  esl  leur  enga^je-  bénédictions  de  la  );r;kc  que  îles  bii-ns  de  la 

mcnl  et  la  cérémonie  de  leur  réi'eplion.  l'orlune,  supportaient    leur   iiuliuenrc    avec 

Ces  lilles  dirent  lo  is  les  jours  en  commun  une  gr.inile  rési;;nalion,  nian^^eaut  leur  pa  n 

le  petit  office  de  la  \'ierg;(!  et  font  une  heure  à  la  sueur   de   leur   visag.'',  el  ne  vivant  que 

d'or-ii  on   mentale,  demi-heure   le  tn.itin  el  du  travail   de   leurs  mains.   Anloiiie  n'avjiit 

demi-heure    après   comp'ies.    Tons  les   ans  que  trois  ans  lorsque  son  père  moiirul,  el  le 

elles  font  une  retraite  de  huit  ou  dix  jours  Seicriieur  lemoif^na  dès  lors  qu'il  l'avait  pris 

au  temps  que  la  su[»oricure  juire  le  plus  corn-  sous  sa  |)roleclion,  le  préservant  de  la  ma- 

inode.  Elle  peut  aussi  accorder  à  <iuelques-  ladie  contagieuse  qui  avait  enlevé  son  père, 

unes  des  sœurs  un   jour  de  retraite  chaque  quoique- sans  aucune  préciulioTi    ileùlcou- 

tnois.  Unefoisia  semaineellesiloiveiil  s'assem-  clié  avec  lui  pendant  tout  !e  temps  dosa  nia- 

Ider  pour  s'ac-uscr  devant  la  supérieure  de  ladie.  Il  ne  contracta  rien  de    la  bassesse  de 

Irois  ou  quatre   fautes   (irincipales  cl  esté-  son  exlra(  lion.  Dès  son  enfance  il  ne  fit  pas 

rieures  qu'elles  pourraient  avoir  commises,  nioins  paraître  d'int  linalion   pour  la  verlu, 

"ipécialemenl  contre  les  conslilul  ons.  Leurs  que  d'aversion   pour    le   vice.    Prévenu   des 

habits,  linge  et  ameublements  sont  en  com-  bénédictions  de  la  grâce,  il  faisait  tléjà  con- 

mun.  Leur    iiahil  de   des-us   el   la    seconde  naitrc   ce  (ju'il   serait    un  jour  :  ou    remar- 

jupe  sont  d'élolTe  de  laine  noire,  cl  la   jupe  «itiait  en  lui  un  airde  [jieté  qui  le  faisait  dis- 

de  dessous  de  laine  grise  ou  noire,   le  linge  tinguer  des  autres,  et  un  graudamour  pair 

de  dessus  simple  et  uni,  celui  de  de>sous  de  l'auslérilé  de  la  vie,  les  pénitences  du  corps 

toile  commune   forle  et  de   durée.    Tout    le  et  pour  tout  ce  qui  donne  aux  autres  enfants 

reste  doit  être  simple   et  d'un    prix    médio-  de  l'horreur  pour  la  religion. 

cre(i).   Klles  doivent  avoir  la  gorge  el    les  On  ne  saurait  exprimer  les  soins  quM  prit 

bras  si   modestement  couverts  qu'on   ne  les  et  les  divers  moyens   dont   il   se   servit    dès 

puisse  voir.  Leurs  cheveux  ne  doivent  point  l'âge  di'  six  à  sept  ans  pour  se  porliT  de  lui- 

èlre  abattus,  el  elles  garilent  en   loul  l'uni-  même  à  l'étude.  N'ayant    pu   èlie  reçu   dans 

formilé.  Les  sneurs  domestiques  ou  servant 'S  les  écoles  à  cause  qu'il   n'avait   pas  de  (juoi 


•I' - -- - -  , -1- " -'-  ■. 

meurer  dans  la  maison  el  s'unir  à  la  coin-  il  ur'-éiait  les  mêmes  écoliers  dans  les  rues 
fouiiaulé  pour  servir  Dieu  plus  parfaitcmi'nt  lorsqu'ils  sortaient  de  i'ecole  ou  qu'ils  y  al- 
(I  aidera  plusieurs  bonnes  d'uvn  s  que  les  laient,  et  p:r  le  moyen  de  quebjues  fruits 
so'urs  pratiquent  A  l'égard  du  prochain,  elles  que  si  mère  lui  donnait  |iour  son  diner  el 
les  peuvent  recevoir  en  qualité  d'associées,  dont  il  se  priviit,  il  les  engagent  à  lui  don- 
Ces  associées  ne  sont  obligées  qu'à  une  an-  ner  ((uelquc  leçon.  De  (  e  le  manière  il  com- 
nce  d'épreuve,  elles  n'ont  point  de  voix  ac-  mença  à  ap|;>-,'iulre  h  lire;  mais  ayanl  été 
live  el  passive,  cl  ne  peuvent  être  mises  dans  reçu  au  nomlire  des  enfants  île  (  bœur  dans 
les  charges  qui  sonl  électives.  la  paroisse  du  lieu  de  sa  naissance,  cet  em- 
L'alihè  de  Choisy,  Fie  f/e  madame  de  Mi-  ploi  lui  donna  occasion  d'augmenter  sa  piété, 
raini'on,  et  les  constitutions  des  lilles  de  et  lui  servit  de  motif  pour  se  porter  à  l'élude 
Saiiile-deneviève.  Il  y  avait  dans  la  maison  aicc  plus  de  ferveur  ;  car,  s'acquitlant  de  soi 
des  Miraniioiies  ciiHiuan'e  cellules  destinées  lou' lions  avec  une  modestie  el  une  exacli- 
aux  personnes  du  sexe  qui  disiraienl  pa-ser  Iule  merveilleuses,  il  trav.iillait  sans  re- 
quelques jours  dans  la  reiraiie  et  la  penilon-  lâche  h  .•ipprendre  h  lire,  avec  d'autant  plus 
ce.  luette  maison  n'.i  poiu  été  rétablie,  comme  d'a(  plicalion  iju  il  était  aide  par  (juelques 
le  dit   M.  de  Sain!-\"ictor   dans  la  t'  cdiliun  préires  de  1 1  paro  sse. 

lie  son  TalileiHi  lii^lorif/ue  et  piilnresque  de  .Xprès  qu'il  se  lut  .'ipidiqué  pendant  quel- 

l'iirif.    Les    religieuses    de   la    Miscricord'' ,  ques  .innées  aux  fonctions  ecdési.islques  en 

'font  nous  allons    parler  à   rarilclc  suivant,  qu;ilile  d'enfant  de  clni'ur,  la  divine  l'rovi- 

1  ont  tenue  à  loyer  [leiidant  quelques  années,  drnce  lui  donna  les  moyens  d'apprendre  le» 

(I)   Voij..  iil;.  fin  ilii  Vi.l.,  11"  «.M). 


in:i 


MIS 


praliquos  des  vertus  relia:iPiises,  le  faisniil 
recevoir  ;iu  sprvicedcs  PI'.  Minimes  du  coii- 
venl  de  Pourrii^res,  éloigné  de  deux  liiui's 
du  bourg  de  Uiaus.  On  rcronnut  dans  ce 
couveal  qu'il  étnil  naturellement  porté  à 
praver  et  à  peindre,  et  sans  aucun  maître  il 
apfirit  de  liii-incmc  ces  deux  arts.  Il  se  ca- 
cliait  souvent  pour  s'y  exercer,  et  y  em- 
ployait le  temps  qu'il  pouvait  dérober  à  ses 
autres  occupations.  .Mais  il  lit  m  eux  paraî- 
tre les  allraits  de  son  âme  à  la  solde  piélé, 
commençant  dès  lors  à  fréquenter  les  sac  e- 
menls.  Il  s'adonna  à  l'oraison  mentale,  qui 
fut  depuis  l'exercice  le  plus  ordinaire  de  sa 
vie.  Il  se  perfectionna  dans  la  lecture  cl  dans 
l'écriture,  et  ces  Pères  lui  donnèrent  même 
«les  comiiiencements  de  la  lani^ue  latine. 
Dans  ce  temps-là  la  Provence  ayant  été  af- 
nifjée  d'une  grande  famine,  les  personnes  les 
plus  riclx's  lurent  contraintes  de  renvoyer 
leurs  domcsiiques,  et  les  PP.  Minînvs,  ré- 
duits à  celte  exirémilé,  renvoyèrcnl  aussi 
Antoine  Yvan,  quoiqu'il  leur  fût  très-utile 
et  qu'ils  eussent  beaucoup  d'alTection  pour 
lui.  fl  se  trouva  dans  une  désolation  extrê- 
me, ne  sachant  à  qui  avoir  recours  jour 
pouvoir  subsister  et  continuer  ses  études, 
car  il  n'avait  ni  parents  ni  amis  qui  pussent 
l'assister,  et  sa  mère  qui  était  la  seule  per- 
sonne à  lanuelle  il  eiît  pu  recourir,  avait 
elle-même  beaucoup  de  jieine  à  gagner  sa 
vie. 

Dépourvu  de  toutes  les  commodités  de  la 
vie  cl  abandonné  de  toutes  les  créatures,  il 
se  retira  dans  un  bois,  où  pendant  dix  ou 
douze  jours  il  ne  .vécut  que  d'Iierbes  et  de 
racines,  et  il  était  e\po-é  tant  de  jour  que 
de  nuit  aux  injures  de  l'air  :  mais  enfin  crai- 
gnant de  mourir  de  faim  ou  d'êtie  dévoré 
par  quelque  bêle  s  luvage,  it  résolut  de  quit- 
ter le  bois  et  d'aller  dans  des  lieux  où  il  pût 
trouver  quelque  retraite  plus  favorable,  et 
comme  il  ne  voulait  être  à  charge  à  per- 
sonne, ayant  anras^é  du  bois,  il  eu  lit  un  fa- 
got qu'il  mil  sur  ses  épaules  dans  le  dessein 
de  le  vendre  et  d'employer  l'argent  à  ache- 
ter du  pain.  Enfin  ildescenditdela  montagne, 
tout  exiénué  par  la  faim  et  les  autres  incom- 
modités q'i'il  avait  soulTertes,  il  se  trouva 
même  si  faible,  que,  ne  pouvant  porter  son 
bi)i-.,  il  eu!  de  la  peine  à  loiilinuer  son  che- 
min. Pour  lors,  les  larmes  aux  yeux,  il  se 
p'ai'j;uit  amoureuseiiienl  à  Dieu  de  son  ex- 
liême  m  sère,  le  priant  de  ne  le  point  aban- 
donner. Il  entendit  en  môme  temps  une  voix 
<lans  le  bois,  qui  lui  dit  qu'il  ne  s'attristât 
pas,  que  Dieu  aurait  soin  de  lui.  L'impres- 
sion que  celte  voix  lit  dins  son  cœur  lui  .ser- 
vit comme  de  nourriture  :  il  prit  de  nou- 
velles forces,  et  ne  doutant  point  que  Dieu 
n'en  lût  l'auteur,  il  se  confia  entièrement  à 
sa  divine  providence. 

Il  alla  dans  la  ville  de  Perluis,  où  pendant 
quelques  jours  il  gagna  sa  vie  en  faisant  des 
i-'iiages  qu'il  vendait  aux  écoliers  et  aidant  le 
clerc  de  la  paroisse  à  sonner  les  cloches  el 
à  f.iirc!  les  autres  fondions  de  son  emploi  ; 
ni<iis  il  ne  larda  pas  d'éprouver  ce  que  celle 
voi.v   qu'il  avait  entendue  dans   le  bois    lui 


M's  j.rs 

avait  dit,  car  (in  lui  donna  la  conduite  de 
quelques  jeunes  gen  il  s  hommes  pour  leur  ap- 
prendre à  lire.  Il  eut  le  moyen  dans  cette 
ville  de  frcqurnier  quelques  peinires  et  il  se 
perfectionna  dans  la  peinture.  Il  s'occupait  à 
l'élude  avec  tant  d'ap[)licalion  et  de  zèle  , 
que  ,  ses  autres  etnpiois  ne  lui  permcllanl 
pas  d'y  va(iucr  pendant  le  jour,  il  y  passait 
souvent  les  nuits  eiilifres.  Outre  la  fiéiiiien- 
tation  des  sacrements,  il  récitait  cha(iuc  jour 
le  petit  office  de  la  Vrerge.  Il  prenait  souvent 
la  disci[)line,  jeûnait  lous  les  mercr.  dis  ,  les 
vendredis  et  les  samedis,  et  continuait  exac- 
tement la  praiique  de  ses  oraisons  mentale* 
qu'il  avail  commencée  dans  le  couvent  des 
.Minimes  de  Pourrières. 

Comme  l'on  n'enseignait  que  le  commen- 
cement de  11  grammaire  à  Perluis  ,  c'est  ce 
qui  l'obligea  d'aller  à  Arles  pour  y  appren- 
dre la  philosophie  ;  mais  n'ayant  i  as  iiu  trou- 
ver de  quoi  subsis'.er,  il  fut  contraint  d'en 
sortir  pour  venir  à  Avignon  où  il  s'adn  ssa 
au  P.  César  île  Bus,  fondateur  de  la  congré- 
gatio.i  des  PP.  delà  Doctrine  ch  élieiine,  qui 
connaissanl  sa  piété  ,  le  reçut  au  nomiire  de 
ses  disciples  qui  vivaient  pour  lori  sans  au- 
cune obligation  de  vœu,  comme  nous  avons 
dit  ailleurs.  Mais  il  n'y  resta  pas  longlem|)s, 
parce  iiu'ayant  clé  trouvé  propre  pour  les 
services  domcsiiques  ,  on  ne  lui  permettait 
pis  d'aller  au  collège  pour  y  éiudicr.  Il  en 
Sortit  donc  avec  la  permission  du  P.  César  de 
lîus  et  vint  a  Carpeniras,  où  ii  entra  chez  un 
particulier  en  qualité  de  préci'pteur  de  sou 
lils,  sans  aucun  autre  salaire  que  li  nour- 
riture. 11  était  si  mal  vêtu  et  ses  habits  i  laient 
si  déchirés,  qu'il  n'osait  pre-qne  sortir  de  sa 
chambre  ni  a  1er  au  collège  ;  mais  le  père  de 
sou  écolier  fut  si  content  de  la  bonne  édu- 
cation qu'il  lui  donnait,  (iii'il  le  fi!  haliilleret 
le  pourvut  de  linge  e!  de  toules  les  autres 
choses  qui  lui  étaient  nécessaires. 

De  Carpeniras  il  alla  à  L\on  où  il  subsista 
quelque  temps  enseignant  à  écrire  ;  mais  il 
n'y  resta  pas  longtemps  ,  car  outre  que  son 
occup.ilion  ne  lui  donnait  pas  as^ez  de  loisir 
pour  étudier  ,  l'amour  de  la  pureté  qu'il  ché- 
rissait plus  que  toutes  les  sciences,  le  lit  sor- 
tir bienôt  de  cette  ville.  Il  s'y  était  logé  sans 
y  penser  dans  une  maison  qui  n'éiait  pas  en 
bonne  réputation.  D'abord  il  ne  s'en  aperçut 
pas,  parce  que,  s'appliquanl  sans  relâché  à 
des  choses  sérieuses  et  bien  contraires  au 
vice,  il  ne  prenait  pas  garde  à  ce  «lue  l'on 
f.iisait  dans  cette  maison  ;  miis  enfin  il  eu 
fut  averti  el  il  leconnul  lui-même  par  quel- 
(]ues  réilexions  qu'il  fit ,  qu'en  diverses  ren- 
contres on  avait  dressé  des  pièces  à  sa  pu- 
reté et  qu'il  y  était  en  dangrr  de  la  perdre. 
Il  résolut  d'eu  sortir  à  l'iieuro  même,  etcrai- 
gnanl  de  courir  le  même  dai;ger  dans  une 
vile  qu'il  ne  connaissait  pas,  il  sortit  de 
Lyon  pour  retourner  en  Proveme. 

Dieu  enfin  récompensa  les  peines  du  P. 
Yvan,  le  faisant  admettre  à  la  dignité  du  sa- 
cerdoce, comme  il  l'avail  désiré  dès  les  pre- 
mières années  de  sa  vie  ,  ce  qui  arriva  l'an 
1113(5  ,  dan-,  le  irentième  de  son  âge.  Il  avait 
reçu  les  quatre  mineurs  ,  \e  sou.s-'diaconat  ot 


4023  mCTlONNAinK  DtS  OllMI-S  REIJGIKUX.  I^îl 

le  diflconnt  <lr  ilirTrrnls  é\oqucs  ri  il  fui  ad-  jinsser  Ips  forces  hii  i  ainps.  Mais  los  gens  de 
mis  à  !a  prt'liisc  p  ir  l\\(''(nie  île  Soiifz.  Dès  liicn  eurent  toujours  b(  aucoup  d'eslinie  pour 
qu'il  lui  prèlie  ,   il  leltuirna  à  llinn     dans  le  sa  viTlu.  Le  curé  de  lirijimiles,  qui  ?tait  per- 
dessei'i  d'ii'i-isler  cl  docoii-oler  sa  iiiùre.  qui  suad-^   du  grand    tuionl  qu'il    avait    pour  la 
d   lis  les  infiMnilés  de  son  âne   olanl  i  rivée  conduite  des  âmes,  «oulul   l'avoir  pour   vi- 
.  es  bic!  s  de  la   foruine  soulTrail  de  j;randes  ciire,  et  l'eu   pria  avec  tant  dinsiance,  uu'.l 
inronunoili'é-.ll  P  il  s»'" ''''s«^<"'''sde  Uian«,  yconsenlil:  tuais  ce  ne   lut    qu'à  condilimi 
.■fin  cl'ctn-  plus  en  étal  de  f  urnir  à  sa  mère  qu'il  eonlinuerail  le  genre  de  \ie  qu'il  menait 
li-s  choses  donl  elle  avait  besoin  ,  parla|reant  dans  son  ermitage  ,  à  l'cNcplioii  des  auslé- 
|i>  ri  sie  iii  d.'ii\  paris,  do:il  l'une  elait  pour  rilés  qui  étaient  incompolilde'*  avei-  sa  pro- 
ies pauvres  et  l'autre  i  our  ses  pressantes  né-  fession.  I.e  curé  de   Brignol  s  fut  si  c<lifié  de 
cissiies.   S'S  veriis   élaieni   trop   éclatantes  sa    conduKe  qui)   lui  résigna  S'U  héiiélice  ; 
pour  demeurer  longlemps  cacliéfs  dans    les  mais   comme  il   fui  coiil.  sié  au   I'.  Yvan  ,  il 
liasse).,  ce  qui  fi'  q'-i'il  ne  larda  pas  à  avoir  aima  mieux  l'abandonner  que  de  soutenir  un 
di's  emplois  confoiines  ù  son  zèle.  Ses  suné-  procè».  11  prit  ensuile  la  direction  de  la  clia- 
licurs  lui   I  onnèrenl  la  cure   de  la    Vcrd  rc  pelle  de  Noire-Dame  de  Heauvezet  à   Aix,  et 
qu'il  fui  oblige  de  quillcr  peu  de  temps  après  il  eut  le  soin  de   la  confrérie  d,-  la  Miséri- 
pour  prendre  celle  de  Couiigiac,  et  il  s'ac-  corde.  Ses    pénitences  el  ses   morlilicalions 
quitta  de  cette   cliarg-avec   la   sainteté  ,  le  lui  ayant  causé  une  grande  maladie,    il   les 
zèle  el  la  vigilance  d'un  bon  i-.a-!(eur.  relranclia  pour  obéir  à  sou   prélat;  mais  il 
(juoi<iu'irfr;l  Irès-circonspecl  dans  loules  redoubla  ses  soins  el  ses  travaux  envers  le 
«es  actions  el  qu'il  eût  lonjours  de  grandes  prochain,  el.  la  peste  ajant  infecté  la   \ille 
appréhensions  d'èire   troni|ié  ,  il   succoaiba  d'Aix,  il  s'exposa  au  péril  de   la  mort   pour 
néanmoins  à  une  Icnlalion  de  vaine  gloire  el  le  service  du  peuple.  L  !  m  ilaiie  ajanl  cesse 
d'aoïour-propre  (jue  lui  suggéra  le  démon  iiu  et  lobules  choses  se  rétablissant  dins  leur  pre- 
siiiet  de  ses  prédications.  Il  s'était   contenté  mier  état,  l'église  de  li   Madeleine,  qui  est 
(le  parler  au    peuple   avec  la   siuiplirité  du  une   paroisse  de   la   ville,    se   trouva    sans 
cœur,  cl  ses  discours    pleins  fie  zèle  et  d'à-  pasteur  cl  sans  prêtre,  la  maladie  ajanl  été 
niour'pour  Dieu  lui  avaient  attiré  une  appro-  si  violente  qu'elle  avait  enlevé  la  plus  grande 

I  ation  générale,  ayant  toujours  eu  un  grand  parlie  des  paroissiens  el  les  qu  ilre  vicair.-s 
I. ombre"  d'auJileurs  à  ses  sermons.  Il  se  que  le  chapitre  de  la  cathédrale,  qui  en  est 
trouva  néanmoins  de-;  personnes  qui  lui  per-  curé  primiii  ',  y  avait  établis  :  c'c^it  pouriiuoi 
s'iadcrenlde  s'appliquer  à  la  composilion  de  il  jeta  les  yeux  sur  le  P.  Yvan  pour  en  rem- 
ses  sermons  avec  pins  d'étude  ,  d'y  observer  pitr  la  première  place;  mais  ayant  été  en- 
|.s  règles  de  la  rhétori  iue  et  de  ne  pas  né-  eorc  obligé  de  quitter  cet  emploi  ,  i  pr  t  la 
glif^er  la  politesse  do  langage,  lui  persuadant  résolution  de  se  retirer  chez  les  PI',  de  l'O- 
(jue  par  ce  moven  il  serait  plus  eslioié,  qu'il  raloire,  où  Dieu  l'appelait  pour  un  temps  , 
p  'urrait  subsister  plus  honorablement  et  ob-  afin  de  commencer  son  grand  ouvrage  de  re- 
tenir |  lus  aisén  eut  quelque  bon  bénéfice  qui  tablis^emrnl  de  l'ordre  de  Noire -Dame  île 
lui  donner. lit  de  quoi  f. urnir  à  ses  aumônes.      Miséiicorde.  Il  n'y  avait  pas  longtemps  qu'il 

II  se  laissa  al  er  à  leur  av^s  :  il  se  relâi  h  i  était  chez  ces  l'I'.  ,  lorsque  Dieu  lui  envoya 
dans  ses  exercices  de  chanté  ei  de  dévotion,  la  première  fille  de  cet  ordre.  Cette  fille  so 
parce  que  donnant  trop  de  temps  à  l'élude  de  sentant  appelée  à  une  haute  perfection  de- 
la  prédication  ,  il  n'en  avait  pas  assez  pour  mandait  depuis  lon,;tcmps  un  confesseur  fi- 
les autres  pratiques  qui  regardaient  sa  per-  dèle  qui  fjt  .selon  le  cœur  de  Dieu  et  qui  l'ai- 
(iM-tion  et  la  eoniluitc  de  sa  paroisse.  Mais  il  dàl  à  aceomplir  sa  volonté.  D'un  autre  côté, 
découvrit  bientôt  le  piège  que  lui  avait  len-  il  y  avait  longtemps  que  b-  P.  'Vvan  désirait 
du  l'eniienii  du  genre  humain,  el  pour  répa-  voir  celle  fille  que  Dieu  lui  avait  fait  eon- 
rcr  la  tante  qu'il  avait  faite  d'avoir  donné  en-  naitie  dans  ses  oraisons. 

Irée  en  son  cœur  à  la  vaine  gloire  cl  à  l'am-  lille  se  nommait  Ma  leleine  Martin  et  naquit 

liition,  i!  se  démit  de  sa  cure  et  se  retira  dans  à  Aix  en  Provence  l'au  l(>12..lusqu"à  cequ'elle 

un  ermitage  où  il   demeura  pendant  neuf  ou  connut  le   P.  Yvan  ,  toute  sa  vie  n'avait  été 

dix  ans,  pratiquant  les  ausé.itcs  des  anciens  qu'une  mortiiicaion  conlinuellc  ;   car   étanl 

.inacliorèles.  Il  ne  teangcait  que  des  légu-  encore  enfant,  sou  plus  j;rand  plaisir  était  de 

mes,  d 'S  r.icines  ,  des  herbes  et  des  fruiis  ,  se  faire   atlaclier    à  une   croix  par  ses  com- 

et  jamais  ni  chair,  ni  poisson,  pa?  même  des  pagnes  qu'elle  défiait  de  se  mortifier  de  la 

nufsiiidii  lait  ge;   encore   ne    mangcail-il  manière  qu'elle  le  ferait,  et  ciur.til  iiu-|  ieds 

qu'une  fois  le  jour  après  les  quatre   heures  sur  des  dindons   qui   lui  meltaienl  les  pieds 

du  soir.  Il  laisait  orainairemenl  quatre  ca-  cl  les  jambes  tout  en  sang.  Ses  leùnes  et  ses 

renies  l'année  ,  pendant    lesquels  il  ne  man-  oraisons  ctaienl  jiresqiie  continuels  ,  et  elle 

geaii  que  de  deux  en  deux  jours  et  quelque-  passait  pn  sque  touics  les  nuits  à  prier  Dieu, 

fois   plus  raremenl.   Kiifin  ,  les  viandes  ex-  l'Ile  eut  quelque  amitié  pour  un  jeune  liom- 

iraordinaires  donl  il  se  servait  les  diinanches  lae  qni  la  rediercbail   en  mariag- avec  ein- 

il  les  fêles  solennelles  n'elaienl  que  le  pain,  prcssen  cnt,  mais  lomiiie  Dieu  lavait  desti- 

Ic  vin,  l'huile  Cl  le  s  I.  née  pour  être  la  iiicre  d'un  grand  nombre  de 

Lorsqu'il  était  cure  de  Couli,;iiac,  on  l'ac-  vierges  qne  son  Fi:s  avait  choisies  pour  être 

rusa  d'être  sorcier  el  magicien,  on  fil  la  mê-  ses  épouses  ,  un  jour  qu'elle  priait  avec  Ur- 

rne  chose  lorsque  dus  sa  s(dilude  on  lui  vil  veur   dans  la   chapelle  de   .Sainte-Marthe   à 

pratiquer  drs  ausiéri;  s  qui  ^cmblairnl  sur-  laraHon,  il    lui  donna  un  si  grand  mépriii 


10.25  MIS  MIS  !02(i 

(lu  nionde,  que  colic  siiinle  fille  n'i-ul  plus  à  fiili'i'  do  (ouk-  l;i  ville  l'ill  s  ne  furcnl  p.!» 
raveiiir  r.ucune  aiVeciion  pour  les  créalme-.  MMilciiieiil  allaiiuéos  en  linr  honneur,  files 
Elle  persuada  aussi  le  înépris  du  moîiile  à  ci'-  KtiufiViieiit  aussi  he.mcoup  d'im  oiii;iioditcs, 
lui  qui  la  leclierciiiil  en  mariage,  et  lui  lit  er.  ce  que  !a  p  rsécuti.iii  fui  cans,'  ((u'c  les 
sisr  ce  suj(l  un  discours  si  pi 'in  d'cnciioii  ,  inanqîièreiil  de  ce  qui  cl;iit  néce.-saire  à  la 
<]Ui'  le  jeune  lionuiie  pril  l.i  résohilion  d'ein-  vie.  Les  filles  n'osaient  s'adre>iser  à  leurs 
brasser  la  vie  religieuse  et  enlra  dans  loi-  parent'*,  à  cause  (ju'ellc';  étaient  dau'i  la  cou- 
dre de  Saiiil-Françiiis.  Celte  sainte  fille  ne  {;rég;lioii  coiilre  leur  volonté.  Une  granilc 
donlant  i oint  que  Dieu  ne  l'appelât  à  une  dise  Ite  dans  la  ville  d'Aix  survint  piiur  lor  , 
liaule  perlecliou  ,  iomn)e  nous  avons  dit,  qui  l'ut  tin  nou^  eau  surcroît  de  p(  ine  dans 
(herclia  un  corifessenr  zélé,  et  s'éiant  adres-  leur  indigence,  tout  ce  qui  était  né  essaire  à 
sée  au  P.  Yvan  ,  sans  le  connaître  ,  elle  fut  la  vie  étant  hors  de  piix.  et  ne  recevant  au- 
fort  surprise  l<)rs(ju'il  l'appela  par  son  nom  run  secours,  parce  que  la  calomnie  faisait 
el  qu'il  lui  découvrit  ce  qu'elle  avait  dans  qu'elles  étaient  ahaiiaonnées  de  tout  le 
son  intérieur,  jusqu'à  la  nioindie  de  ses  peu-  monde. 

sces  el  de  ses  alîerlions.  Elle  connut  parla  Comme  la   Sœnr  Madeleine    Martin    était 

que  c'élail  le  confesseur  ijue  Dieu  lui  avait  reconnue  pour  la  foi-.daleiee  ei  la  [derre  fon- 

desliné,  et  dès  lors  ces  deux,  l'crsonnes  furent  damenlale  de   celle  soc:élé,  e'étiit  elle   que 

étroitement  unies  par  h'  lien  de  la  grâce  et  l'on  allaquail  plus  parliciilièreiiîenl.  Les  uns 

de  lacharilé.  l'appelaient   folle,    d'autres   un  -  v;  gabondi-, 

Le  1'.  Yvan  prit  un  soin  parlieulinr  de  la  ceux  ci  une  amliitieuse,  ceux-là  une  posse- 
conduite  de  M  deleine  Martin,  et  il  n'outdia  die,  les  enljints  lui  jeaieni  des  piètres  quand 
ni  peine  ni  travail  pour  la  préparer  à  l'ac-  elle  allait  [lar  la  ville.  On  la  chargeait  din- 
coinplissinient  des  dfsseins  de  la  divine  pro-  jures  ijuand  un  la  renconttait  dans  les  hôpi- 
videiice.  Ouel'liiti^  "i"'"' se  passèreni  pendaiU  taux,  on  s'en  prenait  ncaie  à  sa  mère  eu 
Icscjnels  il  eoulinua  ù  exerci  r  sa  (lénitenle  lui  disant  (|n'elle  devait  l'en  retirer  et  ne  lui 
dans  toute?  les  pratiques  de  la  vi  S(>iriluelle.  pas  permettre  de  voir  le  P.  Yvan  ni  de  lui 
Madeleine  étant  tombée  malade,  tout  le  temps  parler.  Enfin  on  la  sulli(  ita  si  for(ca:eiit  de 
('e  sa  maladie  ne  fut  pn  sqiie  qu'uir  conli-  détourner  sa  fi  le  du  dessein  qu'elle  lémoi- 
nucl  recueillement  oîi  Dieu  l'attira  pour  l'in-  gnait  avoir,  et  que  loul  le  m  -nde  taxait  de 
struire  pleinement  du  dessein  qu'il  avait  que  folie  et  d'extravagance,  qu'elle  alla  dans 
l'on  fondât  l'ordre  de  Nolic-Dame  de  Misé-  celle  m  lisnn  dans  le  dessein  l'en  retirer  sa 
riconle, et  des  moyens  (in'elledevaitemplojer  fille  et  de  l'emmener  avec  elle  dans  sa  m.ii- 
avec  le  P.  Yvan  pour  l'élahlir.  Enlin  le  temps  son,  el  p;!r  ce  nio^en  de  détruire  la  con^ré- 
arriva  que  le  P.  Yvan  s'étanl  trouvé  dans  gition,  i-uisqiie  sa  fille  en  était  le  prinnpal 
une  assemblée  où  l'on  délibérait  sur  les  appui.  Mais,  ô  merveille  surprenanle!  Dieu 
moyens  d'él;ildir  une  congrégation  de  filles  donna  au  contraire  des  forces  -i  la  i^œur  Ma- 
conforme  à  celle  que  Dieu  lui  avait  inspirée,  deleine  pour  retenir  sa  mère  avec  elle.  Dieu 
el  ce  bon  prcire  ayant  dit  qu'il  y  avait  long-  parlant  par  sa  boiiehe,  tiiurha  si  vivement 
temps  qu'il  avait  conçu  ce  dessein  et  que  le  cœur  de  celte  femme,  qu'elle  prit  la  ré- 
Dieu  l'avait  inspiré  à  quelques  filles  qu'il  solution  de  resler  dans  la  congrégation,  où 
dirigeait,  chacun  en  particulier  l'encouragea  e^le  afiporta  loul  le  bien  (|uilui  restait,  el 
à  travailler  à  cet  étab  issemeni,  et  peu  de  elle  fut  depuis  ap[>elée  dans  l'or  ire  Marie'de 
jours  après  il  acheta  une  m  lison  pour  y  as  la  Charité,  à  cause  de  la  ch.irilé  qu'elle 
sembler  les  premières  filles  de  celte  congre-  avait  exercée  toute  sa  vie. 
ga'io"-  L'une  des  plus  grandes  peines   du  l'onda- 

Ce  lut  donc  vers  l'an  (033,  que  la  Mère  leur  fut  de  n'avoir  pu  obtenir  la  permission 
Madeleine  AJartin  avec  une  compagne  entra  de  célébrer  la  messe  dans  la  peiile  chapelle 
dans  celte  maison.  Elles  fiiieni  lU  peu  de  que  ses  filles  avaient  préfiarée  <l;ins  leur  mai- 
temps  suivies  de  sept  ou  huit  autres  filles,  son,  ce  qui  leur  causait  l:e^iucoup  rS'incom- 
On  ne  saurai!  croire  les  austérités  qu'elles  nodités  ;  car  elles  ne  pouvaieirt  p,is  vivre  en- 
praliquèrent  dans  ce  commencement  ;  .e  lièrement  séparées  du  eemirierce  du  rhonde 
jeûne,  le  cilice,  la  retraite,  l'oraison,  le  Ira-  el  garder  une  es(>èie  de  clôiuie,  étant  eon- 
vail  el  les  autres  exertii  es  que  l'on  pratique  tiamtis  de  sortir  tous  les  jours  pour  a  1er 
dans  les  religions  les  plus  léforniées,  étaient  ciiteedre  la  messe.  Un  an  et  demi  s'éiat  déjà 
continuels  dans  cellecongréyation  naissa  te.  é'i  ulé  depuis  l'clahli  semer.l  de  celie  cou- 
Les  vérins  éniinenles  i.ue  le  P.  Yv.m  voyait  grégalion  qui  s'élail  fait  du  coiisenlemenl 
praliijuer  à  Ses  filles  lui  faisaient  espérer  du  cardinal  Alphonse-Louis  de  Hichelieu, 
(lue  Dieu  bénirail  son  entreprise  et  la  ferait  archevêque  d'Aix,  qui  s'ét.iit  déclaré  le  pro- 
heureusement  réussir  à  sa  gloire,  il  avait  lecteur  du  P.  Yvan,  m;iis  ce  |  rélal  ayant  été 
sujet  de  s'en  réjouir,  mis  peu  de  tenij^s  transfère  à  l'ar  clievi  ché  de  Lyon,  son  snc- 
après,  sa  joie  fui  changée  en  tristesse  :  tonte  cesseur  Louis  de  Itrclel  ne  fut  pas  d'abord  si 
la  ville  d'Aix  se  souleva  contre  sa  congrega-  favorable  à  noire  fondaleur,  et  se  rendit 
lion,  ce  fui  un  murmure  universe  .  On  atta-  1res  difficile  à  lui  accorder  les  permissions 
(lua  la  réputation  des  filles,  on  ne  parlait  liécessaires  pour  l'alL'rmissement  de  sa  coi.- 
d'elles  qu'avec  mépris,  on  les  outr;;gca  môirie.  giégalion.  Le  P.  Yvan  lui  ayant  demandé 
Li  s  parents  de  ces  filles  venaient  tous  les  permission  de  célébrer  la  sainte  iiiesse  dans 
ji/urs  '.es  trouver  pour  leur  faire  quitter  leur  la  chapelle  de  ceUe  n:aison,  e  ce  prélil  ayant 
voealioii   sous    prclcite  qu'elles   claient   la  élé  obligé  de  s'absenter  pour  les  aO'ai;ei  de 


1('27                                           niCTÎONNAUii:  |tESOIil>I\KS  UF.I.ICn.LX.  T'ÎS 

son  (lioc(^so,  rCMiil  lo  rcqiièle  du  P.  Vi.iii  de  cdii'-enlir  qu'clps  fissent  ce  \a'u  li  i  ria 
cuire  lis  in.iiiis  de  son  craiid  vicaire,  nui  deux  t'VL'(|iics  île  voir  le  I'.  Vv;in  i-l  m  s  li  les, 
;i>.int  enfin  accordé  celle  penuissi-in  mil  pour  les  dissuader  de  le  fiire.  Mais  ces  pré- 
béiiir  la  cliapi'lle  le  jour  de  saiiil  Thomas  l.its,  après  avoir  croulé  leurs  raisons,  eu  fu- 
ap(')lre,  de  l'iin  tG3i-,  cl  y  célébra  le  premier  renl  si  louches,  qu'au  lieu  de  presser  le  1'. 
1  1  messe.  L'archevè(|ue  à  sou  retour  vint  Yvan  et  lc>  filles  de  sa  congréj^alion,  de  ne 
faire  la  visile  de  celle  maison,  el  fui  si  édiiié  plus  soii<^er  à  ce  vou  el  de  chaii<;er  de  sen- 
de  la  coiidule  que  l'un  l  u.iil  dans  la  cou-  lioicnl,  ils  chan'.;èren:  eux-mêmes  de  scnli 
{;ré;;alion,  qu'il  l'approuva  cl  ratifia  les  per-  nienl,  is  devinrciU  es  inolecleurs  de  In 
inis>ions  que  sou  iiraud  v  icaire  avail  don-  coiig'é  ation,  et  aïireut  de;  iiis  si  puissam- 
nées;  il  en  accorda  iiiétne  de  nouvelles,  nieni  sur  l'espril  de  l'arche» é(|iie  d'Aix  , 
nlTraul  sa  proleciion  au  I'.  Yvan  el  à  ses  qu'mcore  bien  ((u'ils  ne  pussent  pas  liri  per- 
lilles.  Quelque  leuips  après,  comme  on  cher-  siiadir  d'approuver  le  vou  dont  il  ilait  i]ues- 
e  II  a  il  dans  la  \  i  lie  d  Ait  des  personnes  d'une  lion,  ils  lui  persua  lièrent  au  moins  de  laiser 
solide  vertu  el  d'une  piélé  éprouvée  pour  noire  foiulatrur  el  ses  lill-s  dans  la  pratique 
liiir  commeltie  le  soin  el  la  conduite  des  de  leurs  exercices  ordinaires,  el  de  leur  per- 
fiil' s  l'éiiiliiiles  que  l'oi»  avait  nouvellemenl  inellre  la  i  onlinualion  (!■  leur  enlri  prise, 
renfiMinées  dans  une  maison  particulière,  juMiu'à  ce  que  Ir  temps  eût  mii  us  fait  con- 
l'ari  hevéfine  d'Aix  ,  à  la  soUii  italion  de  ii.iî  re  la  volonté  du  ï^eitineur. 
<]ue!qur9  personnes  qui  ne  pouvaient  souf-  Cependant,  le  monasière  étant  achevé.  les 
iVir  la  congrégation  du  P.  Yvan,  fit  la  pro-  filles  de  celle  congiégalion  y  enliérent  le 
I  osilion  aux  filles  de  la  Miséricorde  d'ac-  jour  de  la  sainte  \"ierge  de  l'an  lli.'iH,  y  avant 
ceper  cet  emploi,  et  sur  le  refus  qu'elles  eu  été  londuiles  par  les  principales  dames  île  la 
firent  à  cause  qu'il  élait  conlraire  à  l'esprit  ville.  11  ne  restait  plus  au  P.  Yvan,  pour  Tar- 
de leur  institut,  toute  la  ville  se  souleva  de  compliss  ment  de  son  dessein,  que  d'oMenir 
iiouvrau  contre  elles,  et  l'archevêque  vou-  des  supérieurs  le  pouvoir  de  lier  ses  lil  e^ 
l.iit  élre  oliéi;  mais  jiar  r«iilremise  di-  l'ar-  par  dis  vœux  solennels  et  de  changer  leur 
ihevèque  d'Arles  cl  de  l'évêqui'  de  Fréjus,  congrégation  sécul  ère  en  un  institut  régu- 
la persécution  lessa,  et  l'archevêque  d'Aix  lier.  Célailcc  qui  était  le  plus  difficile  et  ce 
permit  .iux  filles  de  la  Miséricorde  de  vivre  qui  deinandail  de  plus  grands  soins,  car  l'ar- 
ilans  la  pratique  de  leurs  exercices  ordinal-  chcvôque  s'était  assez  déclaré  qu'il  ne  soitl- 
res.  Ce  prélat  les  attaqua  néanmoins  de  nou-  frirait  aucun  nouvel  ordre  rcli;;ieux  dans 
veau,  il  voulut  savoir  si  elles  avaient  dcsse  n  son  diocèse.  lîLes  pass.  renl  un  an  dan-,  leur 
de  rester  dans  léial  séculier,  ou  si  elles  vou-  nouveau  mou:islérc  en  habit  séculier,  mais 
laient  s'engager  par  des  vœux  solennels  cl  menant  une  vie  retirée  el  autant  régulière 
faire  un  nouvel  ordre  :  comme  il  eut  appris  que  les  religieuses  les  plus  réformées  de 
la  résolution  oii  elles  étaient  de  se  faire  reli-  l'Eglise;  et,  lorsqu'elles  s'y  aile  idaicnt  le 
gicuses,  il  les  voulut  ohliirer  à  faire  choix  moins,  elles  oblinrenl  du  vice-légit  d'Avi- 
d'un  ordre  déjà  appri  u»é.  11  (Ma  au  P.  Yvan  gnon  une  bulle  |iar  laqiirlle  il  leur  donna  l 
la  conduite  de  ces  iilles,  quelques  Pères  de  la  pouvoir  de  cho  sir  une  règle  approuvée,  de 
compagnie  de  Jésus  en  furent  chargés  el  en  faire  les  vœux  de  religion  el  de  dresser  d  s 
rendirent  un  si  bon  témoignage  à  l'archcvé-  constitutions. 

(juc,  que  ce  prélat  leur  rendit  son  cslime  et  L'archevêque  d'Aix  fui  forlemenl  sollici'é 
son  alVeclion.  par  les  auiis  de  celle  congrégation  de  rece- 
Le  P.  Yvai»,  pendant  ce  lemps-là,  voyant  voir  celle  bulle;  leais  il  ne  voulut  point  i  n 
que  ses  Filles  étaient  mal  logées,  ache  a  une  entendre  parler,  it  protesta  qu'il  ne  perinci- 
placepoury  bâtir  un  monastère,  et,  pendant  trait  jamais  l'élablissement  de  ce  nouvel  or- 
que lOn  iravaill  lit  à  l'edincc  matérielles  die.  (Cependant  le  lomte  d'.Mais,  gouverneur 
PP.  Jésuites,  (lui  avaient  été  chargés  de  la  de  Prufcnce,  iblint  du  loi  des  lelires  paten- 
conduile  de  ces  Iilles,  s'employaient  à  l'a-  les  du  13  novembre  ll)3',),  qui  permettaient 
vancemenl  de  l'édilice  spirituel.  La  coiifiaice  d'criger  cette  (Oiumunaulé  en  mjiism  reli- 
que ces  filles  •■urent  en  eux  les  encouragea,  gieuse.  L'archevêque  d'Aix,  nonobstant  ces 
par  l'avis  du  P.  Yvan,  a  leur  dci  tarer  le  des-  lettres  paientes,  ne  voulait  point  donner  son 
sein  principal  de  leur  congrègalion  (lu'illes  conseniemeiil  pour  cet  élahlissemenl.  (Juel- 
n'avaienl  encore  osé  dceouviir  aux  supé-  ((ues  ninis  se  passèrent  encore,  et  eiilin  il  se 
rieurs,  qui  était  que,  si  Dieu  leur  faisait  la  laissa  lléchir  et  recul  la  bulle.  Il  donna  l'ha- 
grâce  d'être  religieuses,  elles  s'obligeraienl  bit  de  religion  aux  six  premières  filles  de  la 
par  vd'u  de  recevoir  dans  leur  ordre  !es  congrégation;  la  s(i<ur  M.idileine  Marlin  U'. 
pauvres  ilemoisellcs  et  les  autres  filles  d'une  reçut  la  première,  el  changeanl  son  nom,  on 
condition  honnête ,  avec  la  dot  qu'elli  s  au-  lui  donna  celui  de  Mai  ie-Madeli  lue  de  l.i 
raient,  si  grunde  ou  si  petUe  qu'elle  |)ûlé  re,  Trinité.  La  cérémonie  de  celle  pri>e  d'habit 
pourvu  qu'elles  connussenl  qu'elles  fussent  se  fil  la  seconde  fête  de  la  l'entec("i  e  de  Tau 
bien  ajipelèes.  Ces  Pères  approuvèrent  leur  11)3'.);  quelques  iimis  après,  Taichevêque 
rcMiliiliuii,  quoiqu'ils  prévissent  bien  les  donna  eiicnre  l'habit  de  novice  à  six  ;iulre5 
obstacles  et  les  dilficullés  qu'il  faudrait  filles,  et  Tannée  suivante  elles  lirenl  profe-^- 
vainire.  Lu  eflel,  lor^qu'ils  Teurenl  proposé  sein.  Les  r.onslilulions  furent  dressées  par  le 
h  Tarehevéïiue  de  la  part  ilo  ces  filles,  leurs  P.  Yvan  el  aiprouvées  par  Taiihevéquc 
adversaires  aigrissant  de  (ilus  en  plus  Tes-  d  Aix,  après  que  les  diflicullés  louihaiit  !.■ 
pril  de  ce  I  rélul  contre  c  les,  Tcmiiéchèrcnl  quatrième  vœu  eurent  été  levées.  Le  fonda- 


1090 


MIS 


M!  S 


1(::.0 


leur  aynnl  ciisuilo  eMvu3é  à  Uiuno  pour  faire 
conliniipr  p.ir  le  papi^  Urbain  V'Iîl  ce  que 
l'archevêque  avait  réjilé  Jans  cel  inslilut,  il  y 
eul  encore  do  nouvelles  difficiillés  loiichanl 
11'  quatrième  vœu;  mais  enfin  Sa  Sainteté 
l'approuva  par  un  bref  du  3  juillet  1G'*2  :  ce 
qui  l'ut  confirmé  par  un  aulre  bref  du  pape 
Innocent  X  du  "2  airil  1GV8;  et  le  tout  fut 
auiori-c  par  leltres  pilenles  du  roi,  enregis- 
liées  au  parlement  d'Ais  1 1  ensuite  à  celui 
de  Paris. 

Il  y  avait  environ  dix  ans  que  cet  ordie 
était  établi  à  Aix  sans  qu'il  eût  fait  aucun 
progrès;  mais  le  bruit  des  merveilles  que 
Dieu  y  avait  opérées  et  la  haute  cstinie  des 
vertus  du  P.  Yvan  et  de  ses  religieuses  cxci- 
lèrenl  plusieurs  personnes  à  demander  et  à 
procurer  l'établissement  du  même  ordre  en 
d'autres  villes.  La  première  qui  demanda  de 
ces  religieuses  fut  l'aldiesse  de  Saint-Georges 
d'Avignon  ,  qui  voulut  se  servir  d'elles  pour 
mettre  la  réforme  dans  son  monastère  et 
embrasser  son  institut  :  ce  qui  ne  réussit  pas 
par  l'opposition  des  religieuses  de  ce  tno- 
nasière,  qui  ont  pris  dans  la  suite  l'habit  de 
l'ordre  de  la  Visitation  de  Notre-Dame.  Les 
relij;ieuses  de  la  Miséricorde  furent  deman- 
dées par  les  bourgeois  de  Marseille,  qui  leur 
donnèrent  un  établissement  dans  leur  ville 
l'an  lGi3.  Elles  ntoui  nèrt'nt  la  même  année 
à  Avignon,  où  elles  tirent  une  nouvelle  fon- 
dation; et  l'an  164-8  elles  furent  appelées  à 
Paris,  où  elles  s'établirent  au  faubourg  Saint- 
Germain,  dans  la  rue  du  Colombier;  m  lis 
elles  ne  prirent  possession  de  leur  monastère 
que  l'an  1651.  Ce  lut  là  que  le  fondateur, 
après  avoir  travaillé  si  uiilement  pour  cet 
ordre,  mourut  le  8  octobre  1633.  Il  l'ut  en- 
terré dans  l'épaisseur  du  mur  qui  sépare  le 
chœur  de  l'église,  et  le  P.  Léon,  Canne  des 
lîillelles,  prononça  Siin  oraison  funèbre  eu 
présence  de  la  reine  Anne  d'Autriche,  qui  a 
toujours  protégé  cel  ordre. 

Après  la  mort  du  P.  Yvan,  la  Mère  Marie- 
Madeleine  de  la  Trinité  fit  encore  deux  fon- 
da ions  :  l'une  à  Arles,  l'an  11164,  et  l'autre 
à  Salon,  l'an  1662.  Tout  le  re-te  de  sa  vie  se 
pas-'a  dans  les  souffrances  et  les  persécutions 
domestiques  dont  Diîu  voulut  éprouver  en- 
core sa  vertu.  Etant  de  reinur  à  Paris,  le 
confesseur  de  son  monastère  fit  soulever 
conlre  elle  une  pa-  lie  de  sa  communauié,  et 
on  la  contraignit  de  retnumer  à  Avignon. 
On  l'accusait  entre  autres  choses  d'avoir 
chargé  sa  maison  d'un  t'op  ;;r,ind  nombre  de 
pauvres  lilles  de  qualité  qui  n'avaient  pres- 
que rien  apporté  pour  fouriiir  à  leur  entre- 
tien. Celte  conduite  si  charitable  lui  suscita 
aussi  des  perséculi  'US  dans  quelques  au'res 
de  ses  monastères.  D'un  autre  côté.  Dieu  lui 
envoya  plusieurs  maladies  où  elle  fit  paraî- 
tre une  constance  admirable  cl  une  parfai  e 
résignation  à  sa  volonté;  mais  la  dernière 
diint  il  voulut  encore  l'éprouver  fut  l'an 
1678.  Etant  en  son  inonastèie  d'Avignon,  elle 
fut  attaquée  le  20  janvier  d'une  bydropisie 
gan;;renee  intérieure  et  extérieure,  et  telle 
que  les  chirurgiens  qui  l'ouvrirent  après  sa 
mort,  proteslaical  qu'elle  aurait  dû  uiuurirdo 


ce  mal  dix  ans  plus  tôt.  Sa  patience  fut  néan- 
moins si  grande,  et  elle  s'esliinail  si  heu- 
reu>e  de  soulïrir,  qu'elle  ne  pouvait  assrz 
parler  du  bonheur  des  âmes  qui  souffrent 
avec  amour;  et  si  elle  témoignait  quelque- 
fois de  la  joie  dans  le  moment  qu'on  la 
tournait  ou  (ju'ou  lui  faisait  preu'lre  ui,e 
aulre  posture,  ce  n'était  que  parce  que  si  s 
douleurs  augmentaient  extra  irdinairrmeni  ; 
et  c'était  dans  le  fort  de  ses  douleurs  qu'on 
lui  entendait  dire  nuit  et  jour  (|u'e'le  ne  vou- 
lait que  l'accompissemcnt  de  la  volonté  de 
Dieu. 

L'archevêque  d'Avignon  la  visita  trois  fois 
pendant  sa  maladie;  le  \ice-légit  l'alla  voir 
aussi,  connaissant  sou  mérite  extraordinaire 
et  r  cas  tout  particulier  que  le  pape  Inno- 
c  nt  XI  faisait  d'elle.  Enfin,  après  avoir  reçu 
pour  la  dernière  fois  le  saint  sacrement, 
quelle  av.iit  déjà  reçu  plusieurs  fois  dans 
celle  maladie,  elle  donna  la  bénédi;  tion  a 
ses  filles  et  à  ses  monastères,  ei  rendit  sou 
âme  à  Dieu  dans  celui  d'Avignon,  !e  20  fé- 
vrier 1678.  Son  ciirps  fut  ex|iosé  pendant 
deux  jours  dans  l'église,  pour  sati>faire  à  la 
dévotion  du  peui  le,  et  le  quatorzième  jour 
après  son  décès  le  P.  provincial  des  Pères  da 
la  Doctrine  Chrétienne  prononça  sou  oraison 
funèbre  en  présence  de  l'archovêiiue  ,  du 
vice-légat  et  d'un  grand  concours  du  peuple. 
Elle  a  laissé  des  avis  et  des  instructions  pour 
ses  religieuses,  qui  ont  été  trouvés  parmi  ses 
écrits,  et  qui  ont  été  insérés  d.ins  sa  Vie, 
écrite  par  le  P.  Piny,  Jac  d)in. 

La  fin  [irincipale  pcjur  laquelle  cel  ordre 
de  Notre-Dame  de  Miséricorde  fut  établi  a  été 
pour  servir  d'asile  aux  pauvres  demoiselles 
et  autres  filles  d'une  condition  honnête,  qui, 
étant  appelées  à  l'état  religieux,  n'ont  j),is 
de  quoi  se  l'aire  recevoir  dans  les  autres 
monastères,  ni  assez  de  bien  pour  se  ma- 
rier selon  leur  qualité  :  de  sorte  que  les 
religieu.îes  de  cet  ordre  fout  une  profession 
expresse  de  les  recevoir  avec  eu  qu'elles 
peuveni  apporter,  pourvu  qu'on  reconnaisse 
en  elles  les  qualités  requises,  et  (|ue  le  m;i- 
nastère  ait  de  quoi  subsister,  lA  afin  que  cet 
esprit  de  recevoir  les  pauvres  demoiselles 
avec  le  p  u  qu'elles  ont  persévère  dans  cet 
ordre,  et  qu'il  ne  soit  pas  permis  aux  reli- 
gieuses de  s'en  dispenser  sans  des  causes 
légitimes,  outre  les  trois  vu'ux  essiiitiels  du 
religion,  elles  eu  font  un  quatrième,  par  le- 
quel e  les  s'obligent  de  ne  refuser  jamais 
leur  suffrage  à  une  fille  pour  la  seule  insuffi- 
sance de  sa  dot,  selon  leur  bulle  et  leurs 
constitutions,  c'est-à-dire  selon  les  modéra- 
tions que  les  supérieurs  y  ont  mises. 

Le  travail  est  une  des  principales  obliga- 
tions des  filles  de  cel  ordie,  pour  sujiplee'', 
par  le  gain  qu'elles  en  reçoivenl,  à  rinsnfli- 
sance  du  la  dot  des  pauvres  filles,  et  elles  y 
emploient  tout  le  ti  mps  qui  leur  reste  après 
leurs  exercices  de  nligion.  Cette  obligation 
du  Iraviiil  va  même  plus  loin  ;  car,  enrore 
que  les  maisons  soient  suf.isamment  reniées 
pour  pouvoir  recevoir  un  certain  nombre  de 
religieuses  sans  dot,  elles  ne  sont  p;is  moins 
tenues  de  travailler,  el  pour  lors  le  profil  de 


Ï05I                                         DlfTIONNAlKE  DtS  or.DP.ES  UELIt.IiaX.  1035 

leur  tr;ivail  ili>il  olre  ilislribuc  aux   autres  II   ne  reste  plus  aujourcriiui   des   niona- 

maisoiis  de  l'ordre  qui  eu  oui  besoiu.  ou  au  stères  de  ci'l  institut  que  la  niaisui)  de  l'aris. 

soul.igeiiieul   des    pauvres    inouaslèies   des  ('et  élablisseinciii   de   Paris  était,  avant    l.i 

auires  ordres,  ou  à  des  rmiilles  indi;;entes.  rcvululiou  de   1789,  situé  rue  du  \  ii-us-Co- 

l'our  encourager  les  lilles  à  travailler  avec  loinbier,  sur    la    paroisse  de  Saiul-Sulpice. 

moins  d"iiicouiiiiO'lilc,  le   fondateur,  avec  le  Les  religieuses  ijui  le  composai   nt   lé^lstè- 

Ciiii-enlemenl   des  supérieurs,  a   choisi   une  rent   tcuies  aux    innovations  du   temps,  cl 

régie  forl  douce,  qui  est  celle  de  saint  Au-  d  incurér.iit    lidèles   jusqu'au    mome;il    de 

gU5iin,et  a  Jresscdes  consliluiions  trv's-nio-  leur  soilic  île  la  maison,  sortie  qui  eut  lii'H 

Jerées  loiicliaul  le  vivre,  le  vôiir  et  le  dor-  le  3  sipteiubre   1792.  Il  n'y   avaii,   da:is    la 

iuir,  el  leur  a  même  donné  un  oKlce  fort  cliapelle  du   mona-tère    ab.indiMuié,  qu'un 

court  et  fucile  à  réciter,  (jui  e.'-l  le  petit  oflicc  tableau   de   Noire-Dame   des   Seirl-Douleurs 

de   la  Vierge.  A   la  vérité,  la  clôiurc  y  est  qui    frappât  raiterilion  des  connaisseurs,  cl 

Irès-evaeleaient   gardée   :   elles    vont   rare-  l'on  ignoïc  le  nom  du  peintre  à  (|iii  il  était 

ment  aux  grilles,  et  elles  observent  les  pra-  dû.    0"a"''    'es   religieuses    quiilèrenl   leur 

tiques  de  l'oraison,  du  silence  el  des  autres  cloître,   elles   elai  nt  au   nombre  de  quinze 

V(itus  religieuses  qui    e;ir  sont  nécessaires  cliorisles   et  cin(j   converses   professes.  Il  y 

pour  l'aceomplissenicnt  de  leur  dessein,  qui  ai  ait  li'  même  noinbie  de  religieuses  vers  le 

est  encore  d  imiter  la    vie  que   la   mère  de  milieu  du  d;  rnier  siècle,   d'après   VElat   ou 

Dieu  a  menée  sur  la  terre  après  l'A-scnsion  Tableau  de  Paris,  de  Hcauriiont.  Suivant  cet 

de  son  Fils,  laquelle  a  été  Irès-relirée,  éioi-  auteur,    les    postulantes    fournissaient    300 

gnée  de  la  fréqucniatlon  des  hommes,  el  mé-  livres   pour  les  dix-hu  t  mois  que  durait  le 

lée  d'action  et  de  contemplation.  noviciat,  et  de  plus  yOOO  livres  pour  la  dot  el 

Leur  liabiilemcni  consiste  en  une  robe  de  UlOO  livres  pour  les  frais  d'h.ibillemenl  et  de 

gris  maur  et  un  scapula.re  de  serge  blanche,  profession. 

sur  lequel  elles  portent  un  crucifix  attaché  lin   quittant  la    maison  en  1792,  les  reli- 

à    un   ruban   noir.  Dans   les   cérémonies  el  gicuses   se   lii-persèrent   dans   Paris  ;    mais 

lorsqu'elles  approeiienl  de   la   sainte   table,  quoii)ue  vivant  séparément,  elles  gardaient 

elles  inetlenl  un  manteau  aussi  de  gris-maur  la  soumission  à  la  supérieure,  et,  au  bout 

el  [lortenl  un  voile  noir  el  la  guimpe  comme  de  l'année,  versant  en  commun   le  fruit  du 

les  autres  religieuses  (1).  travail  de  toutes,  on  reversait  ég  ilemenl  sur 

A'ojez  la    Vie  du  P.  Yvan  par  Gilles  Gon-  la  tête  de  chacune  le  |;ro(il  de  touies.  Klles 

doin  ;  son  Eloge  par  le  P.  Léon,  Carme  des  avaient  quitté  leur  habit  nionnsti(iue,  mais 

lîilleltes,  le  Recueil  de  ses  Itltrex,  la  Vie  de  la  elles  portaient  un  uniforme  noir  el  modeste. 

Mire  Murie-Madelcine  de  la  Trinité,  par  le  Ce   genre  de   vie   est,  suivant  nous,  ailmi- 

P.   A'.exandre  Piuy,  Jacobin,  et  celle  qui  a  rable.  Ces  filles  gardaieni  l'esprit  religieux, 

été  composée  par  le  1'.  Gi osez,  de /a  corn-  el  doivent  en  cela  servir  de  modèle  au\  insi- 

pu'/iue  ileJcsus.  tuls  qui  comnieiicenl.  \  ers  la  Gn  du  deini'^r 

L'ordre  ou  congrégation  de  Notro-Dime  siècle,  elles  se  réunirent  dans  une  maison 
de  la  Miséricor.le  ne  s'établit  point  hors  de  tenue  à  loyer,  rue  i;e  la  Chaise.  Alors  elles 
France  ,  el  quoique  nous  disions  nous-  se  décidèrent,  par  mesure  de  prudence  cl 
môme  dans  l'article  de  la  //inyru/j/aj  uni-  pour  subvenir  à  leuis  besoins,  à  prendre  des 
rerse!'.e  consacré  au  P.  Yvan,  que  les  reli-  élèves,  à  iustiuire,  ce  qu'elles  ont  continue 
g'euses  de  cet  inslitul  s'clemlirenl  principa-  jusqu'à  ce  jour,  car  elles  ont  un  pensionnat, 
lement  dans  le  midi,  elU-s  n'eurent  iJOurlant  ce  qui  n'entrait  pas  dans  lis  [remicrps  dis- 
que six  maisons,  qui  étai  iil  celles  d'Aix,  (>osilions  de  leurs  statuts,  ^■raisembl,lble- 
d'Arles,  d'Avignon,  de  Marseille,  de  Paris  et  oient,  elles  contiiiueront  toujours  celte  œu- 
de  Sancerre.  Le  xviii' siècle,'q\ii  suiiil  celui  vre  fructueuse  pour  elles  cl  pour  le  pru- 
de  la    fondation  ,    n'était    malheureusement  cha<n. 

guère  propensioiiné  à  propager  des  liiaisous  En   qiiillanl  leur  loyer  de   la    rue   de   la 

de  ce  genre.  L'esprit  du  jansénisme,  qui  s'in-  Chaise,    les   Religieuses   l'c   la    .Miséricorde 

sinuait  partout,  aura  peut-être  fait  quelques  allèrent  haliiti  r  sur  le  (juai  de  la  Tournello, 

ravages   dans    rinstitut   de    la   iMiséricordc.  paroisse   Saint-Nicolas  du    Chardounet,   où 

Nous  n'en  avons  aucune  preuve  ,  seuleaieat  elles  I. mère  il  la  maison  des  anciennes  Mira- 

noiis  savons  que  par  préeauîion  ou  par  re-  miones  ou  lilles  de  Sainte-;. eneviève,  (|ui  est 

iiiède   on    lit  pendant   quelque  tciinis  signer  aiijouid  hui  la  phariiiaeie  centrale  d.  s  liôpi- 

une  deelaratiiin  de  soumission  el  île  foi  par  taux,  et  (|u'elies  occopèicnl   six  ans.  De  là, 

les  jeunes   professes.   Sans  autre  motif  que  ciles  se  transpoi  lèrent  à  la  i  uc  Neuve-Sainl- 

le  désir  ilu  ciiangemcnt,  dnq    |  rofesses  de  Kii<'nne,   el  y   prirent   en   location    l'ancien 

cbu'ur  et  une  converse  obtinrent  de  Mgr  de  monastère  des  religieuses  de  la  congrégaiion 

Joigne,    en    l'iSti,  des  obédiences  pour  aller  de  N  )tre-Daoie,   et  y  re  tercnl  pemlant  neuf 

de  la  maison  de   Paris  à  celle  de  Saiicerre.  années.  Unlin  la  resta  ^ration  des  ItourUons 

Ce  fait  ,  sans  importance  en  lui-même,  sera  en    F/ance   donnant  à  I  i  rellgiin  des  espé- 

jugé  à  sa  valeur   par  le   lecteur,   qui   aurait  r.inres  (lui,  litlas  !  n'ont  p,i.s  été  cntièremeul 

lorl,   peut-être,   d'y   trouver   d'une  manière  réalisées,  elles  se  déterminèrent  à  acheler  le 

sensible  une  preme  de  l'esiiiil  qui  commcii-  bual  où  est  leur  nionasière  actuel,  qui  était 

^'ait  à  régner  dan5  les  commjuautes.  Une   maison  pariiculière,  rue  Niuve-Saiflle- 

(I)  Voi/.,  à  h  (iii  du  vol.,  les  ii"  251  el  2£i2. 


i033 


»]0L 


MdL 


10"  i 


Geneviève,  paroisse  Saini-Médanl,  au  faii- 
bnurg  Sailli-Marcel.  Eu  ISiS,  elles  compleiit 
leur  vingt-huitième  année  de  séjour  dans  cet 
établissement,  quViles  ont  changé  en  mo- 
nastère, et  où  elles  ont  bâti  une  chapelle,  il  y 
a  dans  cet  ordre,  en  c mséquence  d'une  ap- 
parition faite,  dit-on,  autrefois  à  la  maison 
d'Aix,  une  dévolion  particulière  au  soulage- 
mont  lies  âmes  da  purgatoire.  On  célèbre 
p,!ur  elles  un  salut  tous  les  lundis,  et  le 
preitii  r  lundi  du  mois  l«  saint  saciemenl 
esl  exposé  pendant  la  journée  ;  on  fait  un 
sermon  au  salut  du  soir.  C'esl  la  fèie  de  la 
Compassion  de  la  sainte  Vierge  qui  est  la 
titulaire  ou  vocable  de  l'église  de  celte  con  - 
grégation. 

Les  religieuses  de  la  .Miséricorde  prirent 
(les  aspirantes  dès  le  temps  de  leur  réunion 
dans  leur  première  maison,  mais  elles  ne 
reprirent  l'haliitde  leur  ordre  que  plusieurs 
années  après  le  concordat  entre  Pic  \  il  et  le 
gouvernement  franc  lis. 

La  maison  est  aujourd'hui  gouvernée  par 
ia  révérende  Mère  Saint-Basile,  qui  remplit 
la  place  de  supérieure  depuis  trente  ans  , 
sauf  les  intervalles  nécessités  par  les  consli- 
lutions.  Madame  Saint-Basile  Hubert,  native 
de  Dieppe  en  Normandie,  est  une  îles  an- 
ciennes religieuses  de  la  rue  du  Vi.  ux-Co- 
lombier,  et  aujourd'hui  octogénaire  ;  elle  est 
la  plus  âgée  des  deux  qui  re>lenl.  L'ordre 
lui  doit  en  partie  sa  conservation  cl  l'état  où 
il  est  actuellement.  La  communauté  e>.t  com- 
posée, au  moment  où  nous  écrivons  ceci, 
de  seize  professes  choristes  et  onze  ren- 
verses. Le  régime  esl  absolument  le  mémo 
qu'autrefois,  sinon  qu'elles  ont  des  élèves 
pensionnaires,  comme  nous  l'avons  dit  ci- 
dessus. 

RenseiQiicmenta  fonrn's  par  la  révérende 
Mère  Saint-Basile  Hubert,  supérieure  de  la 

Miséricorde.  — If  tut de  Paris,  in-8",  par 

de  BeauniDiit.  B-l--e. 

MiSJlON  (PuÉTRES  DE  la).  Yoy.  L.VZA- 
KISTES. 

MOCTÉIÎ.  Voi/.  Irlande. 
MODlilSTES.  Voy.  Dijiesses. 
MOLUA.  Voy.  Irlande. 
MOISEVAUX.  Voy.  Lérins. 

MOLCK  ET  D'AUTRICHE  (Des  anciennes 
coNGHÉGAiioNS  i)e),  OU  U  €st  parlé  des  con- 
grégations qui  sulisislent  présentement  en 
Allemagne. 

La  célèbre  abbiye  de  Molck,  appelée  vul- 
gaireniciil  Mdek,  située  en  Autriche  sur  le 
Danube,  el  du  diocèse  de  Passaw,  a  donné 
son  nom  à  une  congrégation  de  Bénédictins 
en  Allemagne.  Léopold  P%  marquis  d'Au- 
triche, fui  le  fondateur  de  cette  abbaye.  Ce 
pr/nie,  après  avoir  pris  possession  de  l'Au- 
triche qui  lui  avait  été  donnée  par  l'empe- 
reur Henri  1°'  l'an  028,  selon  quelques  au- 
teurs, cl  selon  d'autres  l'an  933,  à  condition 
<|u'il  s'opposerait  aux  Hongrois  qui  faisaient 
souvent  des  incursions  dans  l'empire,  se  vit 
i'abord  obligé  de  porter  ses  armes  contre 
S:  s  nouveaux  sujets,  dont  il  y  en  avait  quel- 
ques-uns qui  ne  voulaient  pas  le  reconnaî- 

DlCTIONiH.    DES    Oi'DRES  RELIGIEUX,  il. 


tre  pour  souverain.  Les  habitants  de    Meick, 
qu'on  nonunail  pour  lors  Eisenburg,  furent 
de  ce  nombre  ;  mais  le  marquis  d'Autriche 
les  ayant  obligés  par  la  force  des  armes  à  se 
souineilrc  à  son  obéissance,  il  établit  dans 
ce  lieu  la  capitale  de  ses  Etats  et  y  lit  sa  de- 
meure, aussi  bien  que  ses  successeurs,  jus- 
qu'en  l'an  1110,  que  la  ville  de  Vienne   fut 
reconnue   pour   la    capitale    de    l'Autriche. 
Léopold  fil  bâiir  à  Meleli  une  église  qui  lut 
dédiée  en   l'huniieur  de   saint   Pierre   et   de 
saint  Paul.  Il  y  mil   douze  chanoines  sécu- 
liers qui  y  dunieurèrenl  jusqu'en  l'an   1089, 
que  Léopod  11,  surnommé  le  Bel,  les  en  oli 
el  subslitua  en  leur  place  des   moines  liéné- 
diclius,  qu'il  lit  venir  de  l'abbaye  de  Sahlaf, 
en  Italie,  auxquels  on  donna  pour   premier 
abbé  Sigisbold.il y  en  a  qui   prétendent  qui! 
par  les   soins  de  cet   abbé   il  se  forma    dés 
lors  une  congrégation  de  quelques  monas- 
tères de  l'ordre  de  Sainl-Denoîl  en  Allema- 
gne, qui  reconnurent  pour  chef  l'abbiyc  de 
.Uekk;  mais  on  n'en  apporte  aucun^' preuve  : 
le  P.  Anselme  Schramb,  religieux   de   cette 
abbaye, qui  en  a  donné  la  chronique  en  1702, 
reconnaît  qu'on  ne  trouve  aucun  titre  qui 
puisse  le  justifier  ni  donner  une  connassame 
certaine  de   ceîte   congrégation.  Il  e.4   vrai 
qu'il  dil  qu'il  cioil  qu'elle  a  subsisté;   mais 
il  n'est  fondé  en  cela  que  sur  le  limoignago 
de  quelques  auteurs  modernes,  entre  autres, 
de  Nicolas  Sezygliescki,  qui,  dans  son  Ai/uila 
Polono-Iienedict.na,  a  avancé  que  celle  con- 
grégation avait  clé  instituée  par  l'abbé  Sigis- 
bold  l'an   1122,  tl  qu'elle  avait  fieuri   dans 
plusieurs  monaUèris  d'Allemagne.  Mais   il 
avoue  en  même  temps  que  cet  auteur  s'est 
trompé  en   faisant  Sigisbold  instituteur  de 
celte  congrégation  l'an  lli2,  puisqu'il   était 
mort  dès  l'an   lîlo.  Ascagne  Tambourin   ri 
quelqui  s  autres  ont  dil  aussi  qu'elle  fut  ins- 
liluce  par  Sigisbold  l'an  1122,  et  ils  ont  jijouté 
que  l'église  de  Melek  fut  consacrée   pur   le 
pape  Cilixte  11. C'est  encore  u.ie  erreur  que 
1«  P.  Schramb  rélute,  puisque,  selon  lui,  ce 
fui  Uldaric,  évéquc  de  Passaw,  qui  la  coii-a- 
cra  l'au  109J,  il  que  dans  l'année  1122,  que 
1  on  prétend  que  cette  consécration  se  fit  par 
Calixle  H,  ce  pontife  confirma  à  Home  les 
exemptions  qui  avaient  élé  accordées  à  ccllo 
abbaye.   Toutes   ces   contrariétés   fout  bien 
voir  qu'on  ne  peut  faire  aucun  f  inJ  sur  l'au- 
torité de  ces  écrivains,  et  que  tout  ce  qu'ils 
disent   ne  peut  donner  aucune  corlilude   de 
celte  congréj^ation.  Mais,  supposé  que  l'abbé 
Sigisbold  en  eût  vérilahlemeiu  formé  une  qui 
prit  le  nom  de  Meleli,  elle  ne  subsisia   pas 
longtemps;  celle  dont  nous  parlons  ici  el  qui 
a  porté  ce  nom,  ne  commença  que  plus  de 
trois  cents  ans  après  la  mort  de  cet  abbé,  au 
lemps  du  concile  de  Constance,  qui  fut  oa- 
verl  l'an  !il4,  cl  elle  doit  son  commence- 
menl  au  zèle  el  à  la  piété  d'Albert  V,  archi- 
duc d'Autriche,  qui  fui  ensuite  roi  de  Hon- 
grie et  de  Bohême,  et  enfin  empereur  sous 
le  nom  d'Albert  II.  Ce  prince,  qui  avait  en- 
voyé des  ambassadeurs  au  concile  de  (Cons- 
tance, après  l'élection  qui  y  fut  failc  de  Mar- 
tin V  pour  souverain  ponlife,  leur  ordonna 

33 


1035 


do  lu  féliciter  de  sa  pari  et  de  lui  demander 
dos  coinniissaircs  apostoliques  pour  réfor- 
mer les  monaslèrcs  des  ordres  de  Sainl-Au- 
puslin  et  de  Saint-Bt'iuiîl,  silués  dans  ses 
i;ial8.  Ce  pape  lui  accorda  sa  demande,  et 
nomma,  l'an  lil8,pourcommissaires  aposto- 
liques, Nicoliis  de  Mazen,  auquel  il  joignit 
cinq  religieux  bénédictins,  profèsdu  monas- 
tère de  Sublac  ,  en  Italie.  C^omme  l'alibaye 
de  Mclek  était  la  plus  considérable  de  l'Au- 
triche, ce  fut  par  elle  que  l'on  commença  l:i 
réforme,  dans  l'espérance  que  l'on  eut  que 
les  autres,  à  son  exemple,  la  recevraient  vo- 
lontiers; cl  afin  de  mieux  l'affermir,  le  même 
Nicolas  de  Mazen  fut  élu  abbé  le  Melck  par 
autorité  apostolique,  après  la  démission  vo- 
lontaire de  l'abbé  Jean  de  Flemniing;  les 
cinq  religieux  qui  étaient  venus  avec  lui 
pour  établir  celte  réforme,  furent  incorporés 
à  ce  monastère;  et  comme  ils  étaient  profès 
(lu  monastère  de  Sublac,  et  que  celui  de  Me- 
lck avait  d'abord  été  formé  par  des  reli- 
gieux que  le  marquis  d'Autricbe  Leopold  1" 
avait  fait  aussi  venir  de  cette  abbaye,  le  ré- 
formateur jugea  à  propos  de  faire  observer 
à  Melek  b  s  mêmes  constitutions  que  l'on 
gardait  à  Sublac,  et  elles  furent  reçues  par 
toute  la  communauté,  composée  de  ces  cinq 
religieux  cn\ojés  par  le  pape,  de  huit  an- 
ciens religieux,  et  de  quatre  autres  qui  y 
étaient  entrés  pour  y  vivre  dans  une  obser- 
vance [dus  régulière.  Plusieurs  monaslèrcs 
d'Allemagne  se  soumirent  aux  mêmes  lois, 
cl  qnelqiii'S-uns  eurent  pour  abbés  des  reli- 
5ieu\  qui  furent  tirés  de  celui  de  Mclek,  en- 
tre lesquels  furent  ceux  d'Obemburg,  de 
Cclle-Maiic,  des  lîcossais  de  Vienne,  cl  un 
en  I»trie.  Ils  se  disaient  tous  de  la  congréga- 
tion de  Melek,  quoiqu'ils  ne  dépendissent 
point  de  cette  abbaye,  et  qu'ils  ne  fussent 
point  unis  ensemble  sous  un  (  licf  :  ils  se 
conlenlaicnt  d'avoir  les  mêmes  observances, 
et  s'ils  avaient  besoin  <!e  visite,  ils  avaient 
recours  au  pape  pour  avoir  des  visiteurs,  ou 
bien  les  princes  dans  ks  Ktals  desquels 
étaient  siiués  ces  monastères  en  deman- 
daient eux-mêmes,  lorsque  le  relâchement 
commençait  à  s'y  introduire.  Ceux  de  l'ab- 
baye de  Melck,  p:)ur  mainienir  leur  réforme, 
demandirent  une  visite  apostolique ,  l'an 
liSO,  au  pape  Nicolas  V,  qui  leur  donna 
pour  visiteurs  l'abbé  de  Cclle-Marie,  le  pré- 
vôt de  Saintc-Doroihéede  Vienne  et  le  prieur 
de  la  Chartreuse  de  Maurbach.  Ils  firent  de 
nou\elles  conslitutions,  mais  peu  dilTérentes 
des  premières  qu'ils  avaient  reçues  au  com- 
mcnci ment  de  leur  réforme.  L'on  ne  ch  iii- 
gca  rien  de  tout  ce  qui  regardait  le  cérémo- 
nial et  la  lécilation  de  l'office  divin,  et  les 
unes  cl  les  autres  ne  tendaient  qu'à  fair.'  ob- 
server la  règle  de  saint  lienoîl  dans  lonlc  sa 
pureté,  l'usage  de  manger  de  la  \iande  cer- 
tains jours  de  la  semaine  n'ajanl  pas  été  en- 
core introduit  dans  les  monastères  de  l'Alle- 
magne, qui  n'obtinrent  ce  priwiége  (ju'envi- 
r<in  rcnt  ans  après.  Olle  visite  de  l'abbaye 
de  Mclek  fut  cause  que  le  cardinal  de  Cusa, 
légat  du  même  Nicolas  V  en  Allemagne  , 
vojanl  que  lobscrvance  régulière  élaii  fort 


DICTlONNAIllE  DF.S  ORDRES  RELIGIEUX.  lOM 

relâchée  dans  les  monaslèrcs  do  l'ordre  de 


Sainl-Rcnoit  du  diocèse  de  Saltzbourg,  nomma 
des  rommissaires  l'an  l'»5t  pnurles  réformer. 
Les  visiteurs  députés  parce  légat  lurent  les 
abbés  de  Celte-Sl.irie  et  de  Saint-Marlin  des 
Ec  )ssais  de  Vienne,  avec  un  religieux  de 
l'abbaye  de  Melek.  L'année  suivante  on  fit 
aussi  une  visite  dans  l'abbaye  de  Cclle-Marie, 
qui  fut  faite  par  lesahbés  (Je  Alelek  el  de  Saint- 
Martin  des  Kfossais  de  Vienne. 

L'abbaye  de  Melek  se  maintenant  toujours 
dans  la  ferveur  et  dans  l'observance  exacte 
de  la  réforme  qu'elle  avait  embrassée,  plu- 
sieurs abbés  d'Allemagne  résolurent  de  for- 
mer ensemble  une  congrégation  sous  un 
chef,  d'embrasser  les  observances  de  .Melek, 
et  de  se  conformer  entièrement,  pour  les  cé- 
rémonies el  la  célébration  de  l'olfice  divin,  à 
celles  qui  se  pratiquaient  en  ce  monastère. 
Dès  l'an  IVGO  ils  avaient  fait  quelques  t 'nta- 
tives  pour  procurer  celte  union,  el  ils  turent 
encore  pour  ce  sujet  des  chapitres  provin- 
ciaux en  liGi,  li67  et  liTO.  .Mais  dans  ce 
dernier,  qui  fut  tenu  à  Krphord,  et  où  dix- 
sept  abbés  des  diocèses  de  Saltzbourg,  de  Fri- 
singue,  de  Passaw,  de  Drixen,  d'Augsbourg 
et  de  Constance,  se  trouvèrent  ou  envoyèrent 
leurs  procureurs,  il  fut  résolu  que,  comme  la 
réTorme  avait  commencé  dans  le  monastère 
de  Melek,  tous  les  autres  monastères  s'y  con- 
formeraient pour  le  cérémonial  ecclésiasti- 
que et  la  récitation  de  l'office  divin,  ils  ne 
s'arrêtèrent  qu'à  cet  article,  fiuoiqu'ils  eus- 
sent proposé  d'abord  les  trois  autres  suivants: 
1*  de  tenir  des  chapitres  provinciaux  tous 
les  trois  ans  el  non  pas  tous  les  ans,  comme 
il  se  pratiquait  dans  la  province  de  Mayencc; 
2°queles  Pères  du  chapitre  pourraient  dépo- 
seras abbés  pourdes  fautes  notables  ;  .3"  enfin 
que  l'on  établirait  des  visiteurs  pi)ur  tous 
les  monastères  qui  entreraient  dans  l'union. 
Ils  indiquèrent  un  autre  chapitre  à  Pa>sav»' 
pour  l'année  siiivanie;  mais  le  nombre  des 
abbés  et  des  procureurs  des  absents  ne  fut 
pas  si  grand  que  dans  celui  d  Krphord,  et 
ceux  qui  s'y  trou\èrenl  résolurent  encore  de 
se  conformer  pour  les  cérémonies  de  l'église 
à  l'abbaye  de  .Melek  ;  mais  il  n'y  eut  point 
de  congrégation  formée  et  soumisi*  à  un  chel 
ou  supérieur  général,  cela  n'ayant  été  e\é- 
cué  que  sous  le  ijontilical  du  pape  Ur- 
bain VIII. 

(iaspar,abbé  de  Melck,  avait  invité,  dès  l'nn 
1G18,  les  abbés  d'.Vutriche  à  venir  à  Melek, 
aiin  de  convenir  ensemble  des  moyeis  né- 
cessaires pour  former  une  congrégation  dans 
cet  archiduché.  Lesabbés  de  Kremb—Muns. 
ter,  Garsten,  des  Ecossais  de  Vienne,  d  .\1- 
tembourg,Goll\veii  h  el  Celle-Marie,  s'y  Irnu- 
vèrcnl  et  résolurent  de  s'unir  ensemble  et 
de  former  une  congrégation  sous  un  chef. 
Le  piicur  de  Garsle.n  avait  déjà  dresse  des 
constitutions  pour  être  observées  dans  celte 
nouvelle  congrégation.  Elles  furent  exami- 
nées dans  l'assemblée,  ()ui  trouva  qu'elles 
étaient  trop  générales,  et  qu'elles  ne  pou- 
vaient être  également  observées  dans  les  mo- 
nastères. On  chargea  Ueiiu'r,  prieur  de  Mc- 
lek,  d'en  faire  d'autres  qui   convinssent  à 


1037 


MOL 


MOL 


iOU 


lous  ers  monastères.  Mais  les  Iroublos  que 
les  prolc'slants  avaient  oxcilés  presque  dans 
le  même  temps  dans  la  Bohême  cl  dans  l'Au- 
iriclie,  obliijèri'nl  les  abbés  de  différer  l'éla- 
lilissement  de  leur  congrégation  jusqu'à  l'an 
102  i,  qu'il  fut  fait.  Guspar,  abbé  de  Melek, 
était  mort,  et  Uiiner,  sous-prieur,  qui  avait 
clé  cbargé  de  dresser  les  constitutions  de  la 
congrégation,  lui  avait  succédé.  La  première 
chose  qu'il  fit  après  avoir  reçu  du  souverain 
ponlife  la  confuination  de  son  éloclion,  fut 
d'inviter  les  abbés  d'Autriche  de  se  trouver 
à  Melek  pour  conclure  cet  élablissemenl, 
dont  le  projet  avait  été  dressé  dès  l'an  1C18. 
Il  s'en  trouva  onze  qui  y  donnèrent  les  mains, 
et  qui  reçurent  unanimement  les  conslilti- 
lions  que  l'abbé  llcinér  avait  dressées.  Ils 
écrivirent  à  Constantin,  alibô  de  Saint-Ba- 
voiit,  de  la  congrégation  du  Mont-Cassid,  et 
le  prièrent  d'in  ilcmander  la  confirmalion 
fiu  pape  Urbain  \'III,  qui  l'iiccorda  par  s  m 
bref  de  l'an  1623.  Ces  constitulions  furent 
imprimées  l'année  suivante.  Cette  congiégi- 
lioii  était  pour  lors  composée  des  abbayes  de 
Melek,  Col  twexb,Krcmbs-.M  uns  ter,  Li  ni  bach, 
des  Ecossais  de  Vienne,  de  (îarsten,  d'AI- 
lembourg ,  Monsée,  S<'iUensladen,  Kleinck 
cl  Cellc-Marie.  Elle  devait  être  gouvernée 
par  un  président  ou  supérieur  général,  qui 
devait  élre  élu  tou»  les  deus  ;ins,  et  qui  pen- 
dant ce  lemps-là  devait  fa  ro  une  fois  la  vi- 
site de  tous  le-  monastères.  Jl  devait  aussi  y 
avoir  un  visiteur  dans  chaque  province,  qui 
devait  faire  tous  les  ans  la  visite  des  monas- 
tères de  cette  province,  à  moins  que  le  pré- 
sident ne  \d  fît  lui-même. 

l'eu  de  temps  après  il  se  forma  une  autre 
congrégation  en  Souabe;  mais,  l'an  1(530,1  on 
proposa  de  réunir  toules  les  congrégations 
d'Allemagne  et  de  n'en  faire  qu'une,  et  même 
d'y  faire  entrer  lous  les  monastères  qui  n'é- 
taient d'aucune  congrégation.  L'abbé  d-  Ful- 
des,  qui  était  pour  lors  de  la  congrégation  de 
Bursfeld,  conçu  tic  premier  ce  dessein.  Il  obtint 
permissiDn  du  pape  et  de  l'enifcieur  de  faire 
une  asseniblée  générale  de  tous  les  abhéi 
d''Allei)iagne.  Elle  se  lit  à  Balisbonne  au  mois 
de  mars  IGIJO.  L'abbé  de  Fuldes  y  présida  et 
y  assista  au  nom  de  la  con'^régalion  de  Burs- 
leld  ;  l'abliéde  Ki  cmbs-Munslcr,  au  nom  de 
la  congrégation  d'Autriche;  les  abbés  d'An- 
(lechs  et  de  l'rufeniag,  comme  députés  des 
autres  abbés  de  Bavière,  cl  le  I'.  Boniain 
ILiy,  comme  procureur  de  la  congrégation  de 
Souabe.  On  y  dressa  seulement  les  prélimi- 
naires de  cette  union,  et  l'on  convoqua  une 
auire  assemblée  générale  p  .ur  l'année  sui- 
vante, qui  devait  se  tenir  encore  à  Uaiis- 
bOMue.  L'abbé  de  Fuldes  s'y  trouva  aussi, 
avec  les  abbé^  de  Saint-Maurice  et  d'Iïasla- 
fellpourla  congrégation  de  Bnrsfeld.  L'abbû 
d'Oclilcnbusen,  visiieur  de  la  congrégation 
lie  Soualie,  s'y  trouva  pareillement  au  nom 
de  celle  congrégation.  Les  abliés  de  Garslen 
et  le  pi  leur  de  (îoltwcich  furent  dépulés 
par  la  congrégation  d'Autriche,  et  l'abt)é  de 
Saint-Pierre  de  Sallzbourg  représentait  les 
abbés  de  ces  diocèses,  il  y  lut  résolu  que 
chaque  monastère  garderait  ses  observances 


particulières  ou  qu'ils  feraient  union  avec  11 
congrégation  de  Bursfeld,  jusqu'à  ce  que  l'on 
eût  pris  d'autres  mesures  dans  la  promièro 
assemblée  qui  se  tiendrait  et  où  deux  abbés 
de  chaque  province  se  trouveraient.  On  en- 
voya des  procureurs  à  Rome  et  à  la  cour  im- 
périale pour  infiirmer  le  pape  ,el  l'empereur 
de  ce  qui  s'était  lait  et  avoir  leur  consente- 
ment pour  former  cette  congrégation  géné- 
rale de  tous  les  monastèresd'AlIcmagne.  Mais 
dans  le  lemps  que  l'abbé  de  Saini-l'ierre  de 
Sallzbourg,  qui  avaitéiédépulé  deTassemblée 
pour  aller  dans  tous  les  monastères  solliciter 
les  abbés  d'entrer  dans  cette  union,  se  dis- 
posait à  exécuter  sa  commission,  l'irruption 
que  1rs  Suédois  firent  dans  l'empire  en  rom- 
pit lous  les  projets.  Elle  n'eut  point  lieu,  et 
tout  ce  que  produisirent  les  assemblées  qu'on 
avait  tenues  fut  l'érection  de  la  congrégation 
de  Sallzbourg,  composée  des  monasiô  es  de 
ce  diocèse,  qui  s'unirent  ensemble,  lanl)i'i.l, 
dans  un  chapitre  qui  se  tint  à  Sainl- Pierre 
de  Sallzbourg,  où  se  trouvèrent  l'abbé  Je  ce 
monastère  a\ec  ceux  da  Sainl-\'it  cl  do 
Bourn.  Les  abbés  dO^siak  cl  de  Sainl-Paul 
y  envoyèrent  leurs  procureurs.  Cette  con- 
grégation subsiste  encore,  ayant  présente- 
ment neuf  monastères.  Celle  d'Autriche  se 
maintenait  encore  l'an  1G4-4-,  comme  il  paraît 
par  quelques  bulles  du  pape  Ui  bain  Vlil,  qui 
lui  accorda  cette  année  des  indulgences  : 
mais  II  semble  que  par  la. mort  de  ce  pape, 
qui  l'avait  approuvée,  et  qui  arriva  presque 
dans  le  même  temps,  elle  ail  été  éteinte,  car 
il  n'en  est  plus  fait  mention  depuis  ce  iemps- 
là.  Les  congrégations  qui  subsistent  en  Al- 
lemagne présentement  sont  celles  de  Hursfeid 
dont  nous  avons  rapporté  l'origine  dans  notre 
premier  volume;  de  Suisse, de  Saltzliourg,  qui 
ont  chacune  neuf  monastèr,  s  ;  de  Souabe  au 
diocèse  de  Constance,  qui  a  onze  monastères  • 
de  Souabe  au  diocèse  d'Augsbourg,  qui  ,i  seul 
monastères;  d'Alsace  Brisgaw, quia  cinq  mo- 
nastères, et  de  Bavière,  qui  a  dix-neuf  mo- 
nastères. Cette  dernière  lut  érigée  sous  le 
nom  de  l'Ange  Gardien  oudesExempls, sous 
le  pontifical  d  Innocent  XL  Le  président  ou 
supérieur  général  esl  élu  tous  les  Irois  ans 
et  le  premier  chapitre  su  tint  à  la  fin  de  l'aii 
1686. 

(Quoique  les  monastères  d'Allemagne  qui 
suivaient  les  cérémonies  et  observances  de 
Melek,  ne  fissent  point  un  corps  de  con"ré- 
gation  avant  leur  union,  (|ui  se  fil  en  162J 
(comme  nous  l'avons  dii  ci-devantj,  ils  se  di- 
saient cependant  de  la  congrégation  et  do 
l'union  de  Melek:  car  lorsqu'un  voulut  unir 
ensemble  les  réformes  de  Alelek,  de  Casiel 
cl  de  liursfeiil,  comme  nous  avons  dii  en 
parlant  Je  ces  deax  dernières  congrég. liions 
les  monastères  qui  suivaient  les  dillérenies' 
observances  de  ces  réformes  envoyèrent  des 
députés  au  rhapilre  provincial  qui  se  tjnl, 
l'an  1W6,  à  Salgenslad, où  ceux  delà  réforsne 
de  Melek  prirent  la  qualité  de  députés  de 
l'uinoii  de  iSlelek,  aussi  bien  que  ceux  des 
congrégations  de  Casiel  ei  de  BursfeM,  qui  se 
diieiit  dèj)ulés  de  l'union  de  ces  congréga- 
lians,  comme  il  paraît   par  les  actes  de  ce 


4033 


nicTioNNMnr  nF.soKnJif.s  rkligif.ix 


1;'.:» 


f  hapilrc  :  Depiilali  rcro  Pulrefet  commiffnrii 
vosiri  lii  sunl,  ex  unionc  Mellicensiwn  <e- 
rcrendissimi  ]'a(res  in  Klcliingen  cl  H'iblln- 
t/en,  ex  nnionc  Ccflellensiiim  S.  .¥,<jidii  in 
Morim' erga  et  S.  Cntcis  m  n'erden;  ex 
unione  liuifildensiitm  in  mnnte  S.  Jacobi  ex- 
tra murosMo(junlinosel  S.  Martini  Spnnheim. 
AdscIiihis  Schramb.  (^Iironie.  Mellieense, 
scn  Atinales  Monasl.  Melliceiisis. 

MONS.   Voy.  Niviii.i.E. 
MONT-CAU.MEL.     Yoij.    CAnMÉUTES    et 
Carmes. 

M0NT-CAUMP:L  (Dk  L'ARCHicONFnATKnNnÉ 
DE  Notiu;-I)ame  du)  «  Rome. 

Si  nous  avons  parlé  à  l'.irt.  Carmes  ilc  la 
roiifréric  du  ScapulitiiR  de  la  sainte  ^'icrpc 
('•lahliedans  l'ordre  dos  Carmes,  où  l'on  donne 
a  cens  nui  s'y  font  insiTire  un  petil  scapu- 
laire  composé  de  deux  rubans  auxquels  sont 
allacliés  deux  morceaux  de  drap  do  trois  eu 
quatre  pouces  en  carré,  ce  n'a  été  que  pour 
faire  >oir  l'erreur  où  était  tombé  le  P.  l'ape- 
liroch,  en  croyant  que  les  religieux  de  Saint- 
François  nedonnaicnlàleur  tien  iaircs  qu'un 
cordon,  et  les  Carmes  aussi  à  leurs  lierciuires 
ces  sortes  de  si  apulaires,  notre  dessein  n'é- 
tant pas  de  parler  des  simples  confréries 
dans  cette  histoire.  Mais  comme  nous  y  fai- 
sons aussi  entrer  les  congi  égalions  et  s  ciétés 
séculières,  il  semble  que  l'on  doit  melire  en 
ce  rang  les  confréries  qui  furmenl  des  espè- 
ces de  sociétés  et  qui  sont  distinijuées  par  des 
babils  particuliers,  qui  ont  des  statuts  cl  des 
règles,  des  églises,  des  ciiuelicres,  qui  font 
publiquement  des  processions  sous  leurs 
croix  parti(  ulières,  qui  la  plupart  n'admet- 
tent les  confrères  qu'après  avoir  été  éprou- 
vés pendant  un  certain  temps,  sous  la  con- 
duite d'un  maître  des  novices,  cl  qui  sem- 
blent former  un  corps  dans  l'Eglise. 

Telle  est  l'arcbiconfraternilé  de  Notre- 
Dame  du  Alonl-Carmel  à  lîome.  11  y  en  avait 
aulre^)is  une  sous  ce  nom  dans  l'église  de 
Saint-Chrjso;;one  qui  appartient  aux  Car- 
mes de  la  congrégation,  de  Mantoue;  mais 
ayant  été  presque  abandonnée,  on  en  érigea 
une  au'.re  dans  la  même  église,  l'an  15'i..'J, 
sous  !e  litre  du  Sainl-SacremeiU  et  de  Sainte- 
Marie  mère  de  Uieu  du  Carmcl.  La  confrérie 
de  Nuire  Dame  semblant  avoir  été  supprimée 
jiar  l'union  qui  en  avait  é:é  faite  avec  celle 
du  Sainl-Saercnient,  le  pape  Clément  \'I1I 
l-ermil  (jue  Ion  en  insliluàl  une  autre  sous 
le  nom  de  Noire-D.ime  du  Monl-Carmel  dans 
l'église  de  Sainte-.Marie-dcs-Monis,  qui  ap- 
partient aussi  aux  Carmes,  mais  qui  ne  dé- 
pend d'aucune  congrégation  ni  province, 
étant  immédialemenl  soumise  au  général, 
comme  nous  avons  dit  ailleurs. 

Les  confrères  qui  furent  associés  à  celte 
confrérie  curent  d'aburd  une  chapelle  dans 
celte  église;  mais  alin  d'avoir  plus  de  liberté 
pour  faire  li  urs  exercices,  ils  ont  depuis  fail 
bâtir  un  oratoire  au  mont  Magnanopoli,  où 
ils  s'assemblent  pour  y  réciter  en  commun 
l'ullicc  de  la  Vierge,  et  et  y  faire  célébrer  les 

(I)  y  l'y.,  -i  \.\  fil)  (lii  v.,!.,!!»  2.".. 


di\  ins  oflices.  Leor  h.ibillement  consiste  en 
un  sac  de  couleur  tannée,  auquel  est  atlaclio 
un  rapuce  qui  leur  cotiv  re  le  visage,  descen- 
d.anl  en  pointe  jusqu'à  la  ceinture,  n'y  ayant 
que  deux  petits  trous  à  l'en  Iroit  des  yeux, 
afin  qu'ils  puissent  voir  et  n'être  point  vus. 
Leur  sac  est  lié  d'une  ceinture  de  cuir,  cl  ils 
ont  sur  les  épaules  un  camail  ou  niozellc  de 
serge  blanche  (1).  Quoique  cette  confrérie  ail 
le  lilre  d'archiconfralernilé,  elle  ne  jouit  pas 
néanmoins  du  privilège  ilcs  autres  archicon- 
fralernUes  qui  sont  ainsi  appelées  à  cause 
qu'elles  sont  chefs  et  supérieures  générales 
des  confraternités  qu'elles  agrègent  à  leur 
institut,  qui  doivent  observer  les  mêmes  rè- 
gles cl  les  mêmes  statuts,  et  porter  leur  ha- 
hilli'mcnl  ;  mais  le  général  île  l'ordre  dis 
Carmes,  ou  ceux  à  qui  il  en  donne  commis- 
sion, ont  seuls  le  droit  d'ériger  de<  archicon- 
frjiternités  ou  confraternités  de  Nolre-I)au)e 
du  .Monl-Carmel. 

Carol.  IJarlhol.  l'iazza,  Opère  pie  di  Borna, 
part.  M,  Irait.  6,  cap.  13. 

MONT-CARMRL  ET  DE  SAINT-LAZAUE 
DE  JEIU'SALEM  (Des  (.hevai.iiiis  de  i.'ou- 
ore  royal,  imii.itaire  et  hospitalier  uk 
Notre-Dame  du). 

Nous  avons  dit,  en  parlant  de  l'ordre  de 
Saint-Lazare,  qu'il  avait  toujours  subsisté 
en  France,  quoiqu'il  eut  été  supprimé  par 
Innocent  S'il!,  l'an  1'»'J0;  qu'après  son  ré- 
tablissement par  Léon  X,  il  y  avait  eu  des 
grands  maîtres  de  cet  ordre  en  Dalie.  qui  se 
disaient  grands  uiaflres  de  l'ordre  de  Saint- 
I^azare  de  Jérusalem  par  tout  le  monde  , 
quoi(iu'il  y  eût  de  véritables  et  légitimes 
grands  maîtres  eu  France  <;ui  avaient  ^ue- 
cédé  les  uns  aux  autres  sans  interruption 
depuis  l'èlablissemenl  de  l'ordre  ;  el  qu'enfin 
le  pape  Grégoire  XIII  avait  uni  cet  ordre, 
l'an  lo72,  à  celui  de  Saint-.M.iurice  en  Sa- 
voie, nouvellement  institué  par  le  duc  Em- 
manuel l'Iiilbert.  sans  que  celte  union  ait 
porté  préjudice  à  l'ordre  de  Saint-Lazare  en 
France,  dont  le  roi  Henri  I\"  donna  la  grande 
maîtrise  à  Philberl  de  Nérestang  ,  qui  fui 
aussi  premier  grand  m.iilre  de  l'ordre  de 
Notre  D.ime  du  iMonl-Carmel  que  ce  prince 
institua  dans  son  ro\aum<'.  Le  IV  Toussaint 
de  Sainl-Lue  dit  {Abrcijc  liisl.  de  l'ordre  de 
Sainl-Liiziire,  p.  lli)  que  le  roi  ne  fil  celle 
institution  de  l'ordre  de  Notrc-hame  du 
Mont-Carmel,  que  pour  faire  lleurir  davan- 
tage celui  de  Saint-Lazare  1 1  lui  faire  rc'^ti- 
tuer  les  biens  qu'on  lui  avait  usurpés  en 
unissant  l'ordre  du  Mont-Carmel  à  celui  de 
Sainl-l.azare.  M.  Ilerman  [irélend  qu'.\imar 
de  Chattes,  qui  était  gr.ind  maitre  de  ce  der- 
nier, ((ineiit  ren\ie  de  le  remelire  dans  son 
[ireinier  lustre,  mais  qu'ay;inl  elé  prévenu 
parla  mort,  l'hilbert  de  Néicstang  lui  su  - 
céda  dans  ce  dessein,  el  employ.i  si  heureu- 
sement son  pouvoir  auprès  d'Henri  1\',  que 
ce  monarque  avant  poursuivi  à  Koine  le  ré- 
tablissement de  ccl  ordre,  il  oblinl  du  pape 
l'aul  y  l'ellel  de  sa  demande,  p.ir  une  bulle 
fort  avantageuse  donnée  l'an  1GU7;  mais  que, 


lOil 


MON 


comme  fc  priico  vou'ul,  à  riinilalion  du  duc 
de  Savoie,  juiiidrc  aussi  un  autre  ordre  à 
celui  de  Saint-Lazare  pour  lui  doinier  un 
nouveau  relief,  il  établit  celui  île  Nolrc-Danie 
du  Monl-Carmel.  l-e  P.  iSonanni  a  avancé 
{Calalog.  Ord.  milit.,  n°  G't)  qu'Aimar  de 
^Chattrs,  étant  grand  maître  de  l'ordre  de 
Saint-Lazare  en  France,  conçut  le  dessein  de 
le  rétablir  enllÎMcmerit  et  de  lui  fiiire  resti- 
tuer tous  les  biens  qui  lui  avaient  été  ô!cs, 
mais  qu'étant  mort  avant  que  d'avoir  exé- 
cuté son  dessein,  Pliilberl  de  Nérestang,  qui 
\"\  avait  succédé  dans  la  grande  maîtrise, 
alla  à  Kome,  où  il  obtint  du  pape  Paul  V 
qu'à  l'avenir  son  ordre  serait  appilé  l'ordre 
de  Notre-U.inie  du  Mont-Carmel. 

Mais  tous  ces  auteurs,  sans  paiIer  de  plu- 
sieurs autres,  ont  été  contre  la  vérité  de 
l'histoire.  Henri  lY  n'institua  l'ordre  de  No- 
lie-Dame  du  Mont-Carmel  que  pour  donner 
des  marques  de  sa  piété  ci  de  sa  dévotion 
envers  la  sainte  Vierge.  11  écrivit  à  son  am- 
'la^sadcur  à  Rome  pour  obtenir  du  pape 
i'uul  V  l'érection  de  cet  ordre  et  sa  coufir- 
niation  par  autorité  apostolique:  ce  que  ce 
pontife  accorda  par  une  bu  le  du  IG  février 
i()07,  par  laquelle  il  donna  pouvoir  à  ce 
prince  de  nommer  le  grand  maître  de  cet  or- 
dre, lequel  pourrait  créer  autant  de  cheva- 
liers que  bon  lui  semblerait.  Il  permit  à  ces 
chevaliers  de  se  marier,  cl,  après  la  mort  do 
leur  première  femme, de  passer  à  de  secondes 
noces,  et  d'épouser  même  une  veuve.  11  les 
obligea  à  faire  vœu  d'obéissance  et  de  garder 
la  chasteté  conjugale,  et  leur  accorda  la  per- 
mission de  pouvoir  avoir  des  pensions  sur 
toutes  sortes  de  bénéfices  eu  Franco,  quoi- 
qu'ils fussent  mariés  et  même  bigames,  sa- 
voir, le  grand  maître,  jusqu'à  la  somme  de 
quinze  cents  ducats  d'or,  et  les  chevaliers 
jusqu'à  cinq  cents  ducats  d'or  de  la  chambre 
apostolique,  ces  deux  sommes  évaluées  à  sis 
mille  livres,  monnaie  de  France.  El  dans 
celte  bulle  il  n'est  nullement  fait  mention  de 
l'ordre  de  Saint-Lazare  ,  non  plus  que 
dans  une  seconde  que  le  même  pape  donna 
au  mois  de  février  de  l'an  1G08,  par  laquelle 
il  prescrit  à  ses  chevaliers  leurs  oblig.iliou'i, 
qui  sont  de  faire  leur  profession  de  foi  avant 
leur  réception  à  l'ordre,  de  se  confesser  et 
communier  le  même  jour  qu'ils  recevront 
l'habit,  de  poricr  sur  leurs  manteaux  une 
croix  de  couleurlannée.au  milieu  de  laquelle 
il  y  aura  l'image  de  la  sainte  Vierge,  de  faire 
vœu  d'obéissance  et  de  chasteté  conjugale, 
de  porter  les  armes  contre  les  ennemis  de 
l'Eglise,  lorsqu'ils  en  seront  requis  par  le 
sainl-siége  et  le  roi  très-chiélien  ;  de  réciter 
tous  les  jours  l'office  de  la  sainte  Vierge  ou 
sa  couronne,  d'entendre  la  messe  les  "jours 
de  fête  et  les  samedis,  de  s'abstenir  de  viande 
les  mercredis,  de  se  confesser  et  communier 
le  jour  de  la  fête  de  Notre-Dame  du  Mont- 
Carmel  que  l'on  célèbre  le  19juillet,  des'as- 
sembler  le  même  jour  (our  réiébier  cette 
fête,  et  de  payer  au  trésorier  do  l'ordre  les 
responsions  par  rapport  aux  commanderies 
qu'ils  posséderont. 

Le  toi,  au  mois  de  juillet  1608,  voulant 


MON  10 ',2 

doter  ce  nouvel   ordre   de    Noire-Dame  du 
Mont-Carmel  et  pourvoir  à  son  établissement, 
supprima  par  ses  lettres  patentes   l'office  di- 
grand  maître  de  l'ordre  de  Saint-Lazare,  et 
unit  toutes  les  commanderies,  prieurés  cl  bé- 
néfices  qui    appartenaienl    à   cet   ordre    et 
étaient  en  la  collation  de  ce  grand  maître, 
à  l'ordre  de  Noire-Dame  du  Monl-C;irmcl  ; 
ainsi  ce  ne  fut  point  ce  nouvel  ordre  qui  lut 
uni  à  celui  de  Saint-Lazare,  comme  ont  écrit 
plusieurs  auteurs,  mais  l'ordre  de  Saint-La- 
zare qui  fut  uni  à  celui   de  Notre-Daenc  du 
Monl-Carmel.  V^oici  les  lettres  de  ce  prince. 
Henri,  pur  la  (jrdce  de  Dieu  roi  de  France 
et  de  Navarre,  A  tinis  cnix  qui  ces  présentes 
lettres  verront.  Notre  saint-père  le papeaijant, 
à  notre  supplication  faite  par  notre  iimbassa- 
deiir,  résidant  près  sa  personne,  par  su  bulle 
du  XIV  des  kulendcs  du  mois  de  mars  dernier, 
<rigé  il  institué  en  notre  roijaume   nn   ordre 
à  litre  de  la  Vicrç/e  Marie  ou  Notre-Dame  de 
Mont-Carmel  ,  ainsi  que  le  comicnl  la  bu'le 
dont  copie  est  ci-alt,chi'e  sous  le  conlre-scei, 
savoir  faisons  que  nous  ayanl  bien  agréable  le 
contenu  en  ieelle,  et  désirant  en  ce  qu'il  nous 
sera    possible    pi omouroir    à   l'ctubiissimeul 
d'icelui,  orner  el  eniichir  de  méiites  conve- 
nablrs  à  lu   splendeur   d'icelui,  pour    l'uug- 
mentaiion  de  la  gloire  de  Dieu  m  celui  notre 
dit  royaume,  que  nous  espérons  devoir  réussir 
à  ladite  institution,  avons,  de  notre  certaine 
science,  puissance  et  autorité  royale,  éteint  et 
suiiprimé,  éteignons    et   supprimons  par  ces 
présentes  l'étal  de  grand  maître  de  Saint-La- 
zare,qui  a  eu  ci-devant  lieu  en  notre  dit  royau- 
me, el  en  ce  faisant  avons  toutes  etcliariincs  les 
commanderies,  prieurés  el  bénéfices,  de  quel- 
que qualité  et  condition  qu'ils  snient,  qui  ont 
été  sous  ledit  litre  et  en  la  collation,  provision 
et  autres  dispositions  du  grand  maître,  unie.": 
et  annexées  el  attribuées,  unissons  cl  annexons 
et  attribuons  audit  ordre  el  milice  de  Notre- 
Dame  de  Mont-Carmel,  pour  dorénavant  cire 
tenus, possédés eldcsservis  par  le  grand  maître 
qui  sera  par  nous  établi  ;  et  les  commandeurs, 
chevaliers  et  autres  officier  s,  qui  seront  créé  s  par 
ledit  grand  maître,  en  vertu  du  pouvoir  qui  lui 
sera  donnépour cet  effet,  nonobstant  to:is  sta- 
tuts et  institutions  à  ce  contraires,  et  nonobs- 
tant   oppositions    ou    appellations    quelcon- 
ques, desquelles  si  aucunes  interviennent  nous 
avons  retenu  et  réservé,  retenons  et  réservons 
la  connaissance etjuridiction  à  nous  et  à  noire 
conseil  d'htat,  et  icelle  interdite  et  défindue, 
interdisons  et  défendons  à  toutes  nos  cours  et 
juges  quelconques.  Si  donnons  en  mandement 
à  nos  limés  el  féaux  conseillers,   les  gens  te- 
nant noire  grand    conseil,  que  ladite  bulle  et 
cesdites  présentes  ils  fassent  enregistrer,  cl  le 
contenu  d'icelles  observer  inviolablement,  sans 
permettre  qu'il  y  soit   contrevenu  en  aucune 
sorte  et  manière,  car  tel  est  notre  plaisir,  etc. 
Et  afin,  etc.  Donné  à  Fontainebleau  au  mois 
de  juillet  l'an  de  grâce  1G08,  el  de  notre  règne 
le  dix-neuvième. 

Le  roi  donna  ensuite  la  charge  de  grand 
maître  de  cet  ordre  à  Philberl  do  Nércslant;, 
gentilhomme  do  la  chambre  cl  meslre  do 
camp  d'un  régimcnl  d'infjuteric,  qui  avait 


I0i3                                       DICTIONNAIRE  DES    ORDRES  RELIGIEUX.  10i4 

posstvlé  aui'ara\ant  colle  de  grand  maître  de  pour  l'union  de  ces   deux  ordres,  conPirmaiit 

l'ordre  de  Sainl-Laz/ire.  Il  en  préla  scrmcnl  tous  le»  privilogi'S  qui   avaient   élé  accorda» 

entre  les  mains  de  Sa   Miijfslé,  qui,  par  un  à  celui  de  Sainl-Lazarc  par  les  papes  Pie  IV 

acte  du  dernier  octobre  de  la    même   année,  et  Pic  \'.  La  nièine  année   le   roi  pourvut   lo 

déclara    de  nuuvoiiu  (]ue  les  cotnniandcries,  marquis  de  Néresl.iiiir,  fils  de  Cliarles-Ailiille, 

prieurés    et    autre*  bénéfices   de  l'ordre   de  de  la   charge    de    grand  maître.    Il  en  préla 

Saint-Lazare,  qui  étaieiil  en  France  et  dans  serment   de  fidélilé    enlre    les    mains    de  Sa 

les  terres  et  pays   soumis  à  l'obéissance  de  Majesté,  qui  lui  donna  la  croix  de  cet  ordre. 

Sa    Mtijeslé,    seraient  affectés  et  apparl'en-  Il  partit  ensuite  pour  aller  commander  l'es- 

draient  aux  grand  m;illre,  clievaiiers  et  olfi-  cadre  des  vaissi'anx  destinés  pour   la  Mjreié 

cicrs  de   l'ordre  du   Monl-Garmel,  et  qu'ils  du  commerce  de  l'Océan.  Il  ohlinl.  en   U>72, 

en  jouirai'-nl  de   même  que  s'ils  élaienl  ou  un  édil  du  roi  qui   télablissait  les  cliexaliers 

avaient  élé    faits    chevaliers    de    l'ordre  de  du   Monl-Carmcl   et   de   S.iinl-Laz  ire    dins 

Sainl-L.izare  ;  et  Sa  Majesté  ordonna  aussi  tous  les  droits  (pii  .ivaicnt  a|  parienu  à  leur 

«lu'en  conformilé  de  la  bulle  de  Paul  V  ces  ordre,  et  qu'ils  pouvaient  avoir  perdus,   qui 

chevaliers  jouirùient  des    pensions   dont    il  confirmait    l'union    de   ces    deux  ordres,  et 

lui  plairait  les  gratifier  sur  les  évéchés,  ab-  leur  donnait  l'adminislratiiiu  pcrpéluclle  des 

bayes  ou  autres  bi'uéfices  consistoriaux  qui  nialadreries,  liôpilaux,  maisons-Dieu  et  aii- 

claient  à  sa  collation,  quoiqu'ils  fussent  ma-  très  lieux  dans  le   royaume,  où   l'Iiospilalilé 

r'és.Surquoi  l'archevéquedeliour^es,  André  n'était  pas  observée,  et  qui  unissailà  l'ordre 

Fremiol.porlanllaparoleau  nomduclergéde  de  Notre-Dame   du  Rlont-f'armel    les    biens 

France, dans  la  remontrance  qu'il  fil  au  roi  la  de  quelques  ordres  ii  ililaires  et  hospitaliers. 

inémeannée.priaSaMajeslédcnepas  permet-  qui   par  cet  édil   ét.iienl   réputés   éteints  d 

Ire  que  leschevaliers  de  Notrc-Uamedu  Mont-  supprimés  en  France,  spéiialement    les  or- 

Oarmel  (qu'il  appelaitchevaliers  de  l'Annon-  dres  du  Saiiit-KspritdeMont|)ellier,  de  Sainl- 

cladc),  engagés  dans  le  mariage,  envelo|ipés  Jac(|ues   de   rjipée,    du    Saint-^épiilcre,  de 

dans  les  affaires  du  monde,  et  de  qui  le  bras  Sainle-C.liristine  de  Somporl,  de  Nolrc-Dame 

destinéauferdevail être plutAt couver! desang  dite  Teutonique,  de  Saint-Jacques  du  llaut- 

quedelafumécdesencensetdessacrifices,  mis-  P.is  ou   de   Lucqucs,  et  de    Sainl-Louis  de 

senties  mains  ^urles  labUs  sacrées,  prissent  Bouclieraumoiil;  pour  des  b'ens  et  revenus 

les  pains  de  p' oposition,cl  cnlreirissenl  sur  de  ces  ordres,  nialadreries,  hôpitaux,  ni.ii- 

les  revenus  qui  u'é'aient  voués  que  pour  les  sons-Dieu   et  autres  lieux,   ainsi    réunis   à 

lévites  cl  pour  ceux  qui  o'.lraient  à  l'iiutel.  Le  l'ordre   de  Notre-Dame  du    Mont-Carmel    cl 

roi  ré|ondil  aux  prélals,  pour  ce  qui  regar-  de  Saint-Lazare,  en  élre  formé  jiar  le  roi  dis 

dail  les  chevaliers  de  r.\nnonciadi'  dont   ils  cominanderies,  desquelles  Sa  M;ijeslé   et   les 

parlaient,  qui!  en  avait  institué  l'ordre  sous  rois  ses  successc  urs  auraient,  en  qualité  do 

le  nom  do  la  Vierge  Marie  dite  du  Mont-Car-  chefs  siuveiains  de   cet  ordre,    l'entii're  et 

mel,à  cause  de  la  particulière  confiance  que,  pleine  disposition  en  faveur  des   officiers  de 

à  l'exemple  des  ducs  de  Bourbon  et  Veuilo-  leurs  troupes  qui  se  feraient  admettre  dans 

me,  ses  aïeux,  il  avait  toujours  eue  au   se-  cet  ordre,  et  sur  ces  comniandcries  y  affecter 

cours  cl  aux  prières  di- cette  sainte  \'ierge;  telles   pensions   qu'elles   pourraient   cl    de- 

qu'il  leur  avait  assigne  non  pas  les  revenus  vi  aient  jiorter.  Sa  Majesté  voulut  aus^-i   ((ne 

ecclésiastiques,    mais   seulement   ceux    des  sur  cescommanderies  l'on  prît,  par  forme  de 

hôpitaux  et  comniandcries  qui  avaient  autre-  rc>ponsiou  et  de  contribution,    les  deniers 

lois  appartenu  eu  sou  royaume  à  l'ordre  de  nécessaires  pour  aider  et  subvenir  a  l'enlre- 

Saiiit-Laz,:re,  el  que  s'ils  av.iient  outre  cela  tien  des  hôpitaux   de   ses    armées   et   places 

quelijues   peliles    pensions,    c'était    le   pa[)a  frontières  où  seraient  reçus   les  officiers   et 

qui  les  leur  avait  accordées.  soldais  blessés  et   malades,  ayant  jugé  ci  tlo 

application    plus    conforme    aux   intentions 

(,l,ude,  marquis  de  Nereslang,  fils  de  Phil-  ^^,^  fondateurs  des  lieux  pieux,  à  présent 
beri,  fut  reçu  en  survivance  dans  la  ch.iigo  ^^^,■^^  „j,  ^  presque  plus  de  lé;  reux  dans  le 
de  grand  ùiaiire  en  Kill.  Charles,  marqui.s  de  royaume,  voulant  néaimioiiis  que  ceux  qui 
Nereslang,  fils  de  Claude,  la  posséda  en  1039,  seraient  attaqués  de  ce  mal  fussent  tous  lo- 
après  le  décès  de  son  p.  re.  sur  les  provisions  „^.s  dans  un  même  lieu  aux  dépens  d,'  Tor- 
du roi  Louis  XIII.  Charles-Achille_de  Ne--  dre,  conformément  à  son  institulion.  Et  pour 
reslang,  second  (ils  de  Claude,  en  fut  aussi  iv.xéculion  de  cet  édil  et  connaitro  de  tous 
jiourvu,  en  Uikh,  par  le  roi  Loui'i  \l\  .  Ses  i^^  procès  et  différends  qui  n.iîtraicnt  pour 
provisions  lui  donnaient  la  qualité  de  crand  raison  des  choses  y  contenues  le  roi  réso- 
niailrc  de  l'ordre  de  Notre-Dame  du  Mont-  [^  j-^tahlir  une  chambre  composée  d'offi- 
Carmel  et  de  Saint-Lazare  de  Jciusalem.  Il  ^.^^,^^  j^^  pi„^  considérables  de  son  conseil, 
fut  confirmé  dans  cette  charge  par  une  bulle  ^„  laquelle  chambre  les  procès  cl  différends 
d'Innocent  X,  cl  dejniis  c-  temps  l.i  le  grand  seraient  juijés  en  dernier  ressorl.  lui  doii- 
m.iltre  et  les  chevaliers  prirent  le  nom  de  „.,„,  pouvoir  d'enregisln-r  toutes  déclara- 
<  licvjilicrs  de  Notre-Dame  du  Monl-Carnicl  ,i„„s  ^.^  arrêts,  faire  des  règlements  tels 
et  de  Sainl-Lazarc  do  Jérusalem.  qu'elle  jugcraii  à  jiropos,  et  subléléguer,  en 

Le  roi  confirma  encore  l'institution  de  cet  cas  di;  besoin,  tant  en  matière  civile  que  cri- 
ordre,  au  mois  d'a\ril  lOli'i,  et  le  c.irdinal  de  niinelle;  l;i(|uelle  diamlire  durerait  tout  le 
Vend<'inie,  éianl  légat  a  Litière  en  France  du  temps  que  Sa  M.ijeslé  jii.'erait  luv  essaire  el 
l  ape  Clémeiil  IX,  donna  une  bulle  l'an  itilJS  à  propos  pour  le  bien  d>  s  affaires  do  l'urdrc, 


10  iS 


MON 


MON 


1046 


»e  réservant  de  la   révociuer  et  supprimer 
lorsuue  bon  lui  seniblor.nl. 

Le  grand  mallre  de  Nérestang,  pour  par- 
venir à  l'eséculion  de  cet  édil,  conToqua 
un  chapitre  général  à  lîoigny,  qu'il  indiqua 
au  19  lévrier  1673.  Mais  avanl  qu'il  se  tînt, 
,11  se  démit  volontairement  de  sa  charge  de 
grand  mallre  entre  les  mains  du  roi.  Les 
chevaliers,  en  ayant  eu  avis,  assemblèrent 
leur  chapitre  général  le  il  janvier  1673,  et 
I  réseutèrent  une  requête  au  roi,  parlaqui-lle 
ils  suppliaient  Sa  Majesté  d'unir  la  charge 
de  grand  maître  de  leur  ordre  à  sa  couroiiiio 
et  d'agréer  la  poslulaiion  qu'ils  avaient  fiile 
de  M.  le  marquis  de  Louvois  pour  gouverner 
l'ordre  en  qualité  de  vicaire  général. 

Le  roi  déclara  qu'il  ne  pouvait  alors  unir 
à  sa  couronne  la  grande  maîtrise,  mais  qu'il 
agréait  l'élection  qui  avait  été  faite  par  pos- 
tulation dans  le  thapitre,  du  marquis  de 
Louvois  pour  régir  les  alîaires  de  l'ordre 
sous  son  autorité.  Sa  Majesté  fit  expédier  des 
provisions  de  grand  vicai  e  en  faveur  du 
inarquis  du  Louvois  le  i  février  1673.  Il  fut 
reçu  dans  le  chapitre  de  l'ordre  en  cette  qua- 
lité et  confirmé  dans  le  chapitre  général  qui 
se  tint  le  10  ilu  même  mois  à  Boigny.  On 
poursuivit  en  cour  de  Rome  les  bulles  de  con- 
firmation. M.  Co  iu(iin,  docteur  de  Sorbonno, 
y  (ut  envoyé  pour  les  solliciter,  mais  ce  fut 
inutilement;  car  le  pape  Clément  X  ne  les 
voulut  point  accorder,  ce  qui  n'empêcha  pas 
le  marquis  de  Louvois  de  gouverner  toujours 
l'ordre  et  de  recevoir  les  chevaliers. 

L'édit  de  1G72,  nonobst.int  les  opposilions 
de  Louis-Nicolas  Parnajon,  général  des  Cha- 
noines Hospitaliers  de  l'ordre  du  Sainl-Esprit 
de  Monlpe  lier,  et  celles  des  prétendus  che- 
valiers du  même  ordre,  fui  enregistré  au 
grand  conseil  le  20  lévrier  1673.  Le  roi,  con- 
formémenl  à  cet  édit,  ayant  établi  une  cham- 
bre royale  à  l'arsenal  de  Paris  le  8  janvier 
de  la  môme  année,  ordonna,  par  ses  lettres 
patentes  du  22  février,  qu'il  y  serait  aussi 
enregislié;  ce  qui  fut  fait  le  23  du  même 
mois.  Cette  ch.imbre  était  composée  d'un 
conseiller  d'Etat  ordinaire,  de  huit  conseillers 
au  grand  conseil,  et  d'un  procureur  général. 
Sa  Majesté,  par  ses  lettres  du  2i  mars  167i, 
déclara  que  dans  l'ailminislratioa  des  hôpi- 
taux et  lieux  pieux,  accordée  à  l'ordre  de 
Nolre-Dami!  du  Mont-Carmel  et  de  Saint 
L.izare  par  cet  édit  de  1072,  elle  avait  en- 
tendu comprendre  les  hôpitaux  fondés  pour 
la  réception  des  pèlerins  et  des  pauvres  pas- 
sants, et  par  un  autre  édit  du  mois  d'avril 
1675,  elle  déclar.i  ((ue,  conforniément  à  celui 
de  1672  et  à  sa  déclaration  de  l(i74-,  l'oidre 
de  Notre-Dame  du  Monl-Carmel  et  de  Saint- 
Lazare  de  Jérusalem  serait  mis  en  possession 
et  saisine  de  l'administration  de  tous  les  hô- 
pitaux, maladrrries,  commanderies  et  autres 
lieux  pieux  qui  lui  avaient  été  accordés, 
même  de  ceux  t|ni  avaient  été  ci-devant  con- 
cédés et  accordés  par  Sa  Majesté  ou  autres, 
à  quelques  communautés  ecclésiastiques  ou 
laï(iues,  régul.ères  ou  séculières,  lors  de  leur 
fondation,  premier  établissement  ou  dotation, 
de  (juclquc  qualité  et  ordre  qu'elles  l'uiïeiit. 


Voulant  néanmoins  que  les  hôpitaux,  mala- 
dreries,  commanderies  et  autres  lieux  pieux, 
qui  étaient  actuellement  possédés  par  des 
comumnautés  tant  séculières  que  régulières, 
et  qui  leur  avaient  été  abandonnés  et  unis 
lors  de  leur  fondation,  dotation,  et  pour 
servir  à  leur  premier  établissement,  conti- 
nuassent de  jouir  comme  par  le  passé  de 
leurs  bâtiments,  églises,  chapelles,  lieux  ré- 
guliers, autres  logements,  jardins  et  clôtures 
y  joignant,  soit  que  lesdits  bâtiments  et  clô- 
tures fissent  partie  des  bâtiments  anciens  du 
ces  hôpitaux,  maladreries  et  lieux  pieux,  en- 
semble de  tous  les  autres  fonds  et  revenus 
que  ces  communautés  pouvaient  avoir  ac- 
qi^-is  depuis  leur  établissement,  et  que  sur 
tous  les  biens,  droits  et  revenus  dépendant 
desdits  hôpitaux,  maladreries,  i  ommanderies 
et  autres  lieux  pieux,  distraction  serait  faite 
au  profit  desdites  communaulés  de  la  moitié 
de  ces  fonds  et  revenus  (les  charges  ordi- 
naires préalablement  détruites),  pourvu  tou- 
tefois que  lesdits  revenus  n'excédassent  pas 
la  valeur  de  deux,  mille  livres  par  an;  cl 
qu'au  cas  que  Icsdils  revenus  excédassent 
celle  somme,  il  serait  fait  seulement  distrac- 
tion du  tiers  au  profit  de  ces  communauté» 
pou  rieur  entretien  et  subsistance;  et  à  l'égard 
de  l'hospitalité  pour  laquelle  ces  lieux  pieux 
avaient  été  spécialement  fondés,  Sa  Majesté 
voulut  qu'elle  fût  dorénavant  exercée  par 
l'ordre  de  Notre-Dame  du  .Monl-Carmel  cl  do 
Saint-Lazare. 

11  y  eut,  par  le  moyen  de  ces  édits  et  dé- 
claration,  un  grand  nombre  d'hôpitaux, 
maladreries  et  lieux  pieux  qui  fun  ni  unis  à 
l'ordre  de  Notre-Dame  du  Monl-Carmcl  et 
de  Saint-Lazare,  et  dont  l'on  forma  cinq 
grands  prieurés  et  cent  quarante-cinq  com- 
manderies. Le  roi,  par  ses  lettres  patentes 
du  28  décembre  1680,  fit  l'érection  de  ces  cinq 
grands  prieurés,  et  Sa  Majesté  dressa  encore 
des  règlements  louchant  la  manière  de  par- 
venir aux  commanderies,  tant  anciennes 
que  nouvelles.  Le»  cinq  grands  prieurés  qui 
furent  érigés,  furent  celui  de  Normandie, 
dont  la  résidence  était  au  Mont-aux-iMala- 
des  près  de  Rouen;  celui  de  Bretagne,  dont 
le  chef-lieu  était  à  Auray,  et  avait  pour  an- 
nexe la  commanderie  de  Blois  ;  celui  de  Bour- 
g;»gne,  dont  la  résidence  était  à  Dijon  ;  celui 
de  Flandre,  dont  le  chef-lieu  était  à  Lille; 
et  le  cinquième  était  celui  de  Languedoc.  t)i» 
établit  aussi  un  conseil  de  l'ordre  à  l'Arsenal, 
qui  fut  composé  du  vicaire  général,  du  chan- 
celier, du  procureur  général,  du  grand  maî- 
tre des  cérémonies,  du  trésorier,  du  secré- 
taire et  de  cinq  conseillers  de  l'ordre. 

Mais  après  la  murldu  marquis  de  Louvois, 
arrivée  le  16  juillet  1691,  les  affaires  de  cet 
ordre  changèrent  de  face.  Sur  les  remontran- 
ces que  firent  au  roi  queli|ues  ordres  qui 
a^ aient  été  déclarés  éteints  ou  supprimes  de 
fait  ou  de  droit,  et  dont  les  biens  avaient 
été  unis  à  celui  du  Mont-Carmcl  et  de  Saint- 
Lazare  par  l'édil  de  1672,  Sa  Majesté  nomma 
des  commissaires  pour  l'examen  de  cet  edit; 
et  après  que  les  commissaires  eurent  écouté 
les  raisons  des  parties  et  eu  eurent  fail  rap- 


I«li7                                      DICTIONNAIRE  DES  OUHRES  RELIGIEUX.  10« 

port  au  ri>i.  Sa  M.ijcMo,  par  un  mitre  ôdil  «In  tanné  aniaranle  pl  do  sinopio,  orU-o  d'or,  cl 
in.iis  de  raars  1G;*3,  révoqua  cplui  de  lti7>,  g'é'cndani  par  les  extrémités  jusqu'aux  bord» 
désunissant  de  l'ordre  do.  Notre-D;]iric  du  de  la  dalmaliquc.  Dessus  celle  dalmalique  il 
Monl-Carmelelde  ^ami-Lazare,  les  maisons,  porte  un  manicau  long  de  velours  amarante, 
droil.s  biens  et  revenus,  qui  élaiei;l  possédés,  doublé  de  .«alin  verl,  semé  de  lleurs  de  lis 
avant  le  premier  éilil,  par  leso.dres  du  d'or  el  de  diilTres  de  doubles  M  pour  l'ordre 
Sainl-Esprilde  Monlpsllier.  de  Saint  Jacques  du  Monl-C.im'el,  et  de  doubles  I.  enlrelaeés 
(le  1  Epéc  de  l.ucquis,  du  Saml-Sépulcre,  de  d'un  S  poi:r  l'ordre  de  S;iint-Lazare,  avec 
Sainte-Cbrisline  do  Sompori,  de  Noire-Dame  une  bordure  autour  du  manteau  composée 
dite  Teutonique,  de  Saini-Louis  de  lîouchc-  du  mé;i  e  ebilTre.  posées  entre  trois  eouron- 
raumont,  et  autres  ordres  bospiialiers,  mil!-  nos,  et  un  carioijciie  où  est  le  chilTre  du 
tair  s,  séculiers  et  ré-uliers;  commeaussi  craiid  maître .  de  (leurs  de  lis  avec  deux  pâl- 
ies maladieriesct  léproseries,  bôpitaux,  ho-  mes  en  sautoir  derrière,  et  de  trophées,  le 
tels-Uieu,  maisons-Dieu,  aumôncries,  con-  lout  en  broderie  d'or.  Le  collet  de  ce  man- 
freries,  cliapeles  et  autres  lieux  pieux  du  le;iu  est  de  satin  vert,  sur  lequel  ?ont  les 
royaume,  même  ceux  destinés  pour  les  pè-  némes  ornements  en  broderie  qu'au  bord  du 
lerinset  les  pauvres,  uns  à  l'ordre  de  Notre-  même  manteau,  et  du  côté  gauche  csl  la 
Dame  du  Monl-Carmel  et  «le  Saint-Lazare  croix  de  l'ordre  aussi  en  broderie, 
par  ledit  de  1G7:2  et  déclarations  intervenues  i  .■  .  •■,  .  .  ,  ,.  ,,  ,, 
en  conséquence,  soit  que  ces  hôpitaux  ou  .  L  habillement  des  chevaliers  est  semblable 
lieux  pieux  fussent  possédés  en  titre  de  béné-  ^  "'"'  ''"  f^'"^,'"'  '"■i"re.  excepté  que  le  man- 
ficcs  ou  de  simples  administrations,  et  quoi-  '^^"  ''^^  seulement  bordé  d'un  petit  galon 
que  l'hospilalilé  n'y  fiil  pas  gardée.  Sa  Ma-  °  ""■'  *''"'*  ^"*=""  ^"'"''^  "'  ■'"''"^'^  *''"'"- 
jeslé  voulut  que  les  biens  et  revenus  pos-  n;c"ls  au  bord  el  au  reste  du  manteau,  qui 
sedés  avant  cet  édit  de  1G72  par  les  ordres  "  '1  ''"""  """  P'"*  '^^  '''*"'^'  '  ^^  '^  ^^'"^  "^'^  ''^ 
du  Sainl-Lspritde  Montpellier  et  les  autres  "almatique  n  csl  point  non  plus  orlee  d'or, 
leur  fussent  rendus  et  restitués,  el  maiulint  comme  celle  du  grand  maître.  Les  chapelains 
les  chevaliers  de  Nolrc-Dame  du  Mont-Car-  «"' ""^  soutane  de  moire  amarante,  avec  un 
mol  et  de  Saint-Lazare  dans  la  possession  ••'>< '"'l  P-'ir-dessus;  el  dessus  ce  roehel  un 
des  commandcries.  i.rieurés,  hôpitaux  et  '^'""•■"'  ^""'  '^'^  '"""''  amara»"'.  au  côte 
autres  lieux  qui  leur  appartenaient  avant  Rauch.' duquel  il  y  a  aussi  la  croix  de  l'or- 
j-rt  édit.  "'^  *"'  •"'oderie.  L  habillemeiil  des  f.ères  ser- 

Au  m'ois  de  décembre  de  la  même  année,  ^ants  consiste  pareillement  en  une  dalmati- 
Sa  Majesté  nomma  pour  grand  maître  de  cet  ''"''  ''''  *^'l"  '''^"'-''  **"•"  laquelle  il  y  a  aussi 
ordre  M.  le  marquis  de  Dangeau,  qui  en  ""e  croix  écarlclee  de  lanne  amarante  cl  de 
celle  qualité  lui  prêta  serment  de  fidélité  le  ^'""P'">  '»»'«  q"'  "'''«'  MU  alaisée.  Sur  celte 
18  décembre  1093.  Le  29  janvier  de  l'an-  "almalique  ils  portenl  un  manteau,  seule- 
née  suivante,  1G%.  il  se  rendit  dans  l'église  ""^"J,''^'  "'ap  amarante,  borde  d'uu  peut  ga- 
des  Carmes  des  Billettes,  où  il  jura  sur  les  .  "  ''  "'''*''  ^^  '^^'^  gauche  de  ce  manteau  est 
saints  Evangiles  d'obse.  ver  et  de  faire  ob-  '*"""  '"édaille  en  broderie.  Le  héraut  porte 
server  par  les  chevaliers  les  statuts  de  cet  "'"'  '^''•■"atique  de  velours  amarante,  sur 
ordre.  Ensuite  les  anciens  chevaliers  lui  pré-  'aq"e  'c  par  devant,  par  derrière  el  sur  les 
lèrenl  obéissance,  et  après  la  messe  il  en  (il  '"-'iH-hes,  i  y  a  les  armes  de  I  ordre  en  bro- 
irentc-cinq  nouveaux,  auxquels  il  donna  l'é-  ?,'^'""'.  '^  °'''  '  ^''l'  su'''"""lc  d  une  couronne  a 
pée,  la  croix  et  le  livre  des  règles  I  aniiquc;  sur  la  manche  droite  il  y  a  cent,  en 

■jùsquc-Ià  ces    chevaliers    n'avaient  point  ';'"!;?  "^'"î;''"  broderie  :  Ordre  de\olre-l!(uHe 

en  d'habits  de  cérémonie,  ils  portaient   seu-  d» ^lonl-Carmel  ;  et  sur  la  manche  gauche  : 

IcmenI  à  la  b«iutonnière  du  justaucorps,  com-  *              nt-Laznre. 

me  ils    portenl  encore  à  |)réseul,    une   croix  Les  Uiis  el  les  autres,  à  la  réserve  des  cha- 

d'or  à  huit   raies,  d'un  côté  émaillée  d'ama-  pelains,  «|ui  oui  un  bonnel  carré,  «ml  une  t«)- 

ranle  avec  l'image  de  l,i  Vierge  an  milieu,  el  que  de  velours  n«jir,  ^ur  laquelle  il  y  a  une 

de  l'autre  côté  émaillée  de  sinople   avec   l'i-  aigreltc  noire,  accompagnée  de  deux  plumes, 

mage  de  saint  Lazare  aussi  au  milieu,  elia-  l'une  amarante  cl  l'autre  verte.  Ils  ont  tous 

que  rayon   ])oiumelé  d'or,  avec   une  (leur  de  t'es  bas  «le  soie  amarante  et  des  souliers  de 

lis  aus  i   d'or  d.iiis  chacun  des  aigles  de  la  velours  de  mému  couleur,   dont  les   oreilles 

croix  qu'ils  attachent  à  un  ruban  de  couleur  sont  de  salin  ^erl  en  Irodcrie  d'or.  Les  no>i- 

amaranle;  et  les  fières  servants  ne  portaient,  ces  ont  un  pelil  manteau   de  satin  vert,  au- 

couime  ils  font  encore  à  présent,  qu'une  mé-  Hui  1  il  y  a  une  espèce  de  capuce  attaché  par 

daille   aux  menus    émaux,  aitachée    à   une  derrière;  l'huissier  n'a  qu'un  justaucorps  de 

cli.iîne   sans   ruban.    Mais  M.  le  marquis  de  drap  amarante,  el  précède  dans  les  ceremo- 

Dangeau  a  ordonné  des  liab  ts  p«)ur  les  céré-  "'es  les  chevaliers,  portant  sur  l'épaule    une 

moines,    et  qui  sont  dillércnts  selon  la  qua-  masse  de  vermeil.  11  y  a  encore  l'huissier  tle 

lilé  des  chevaliers.  l'ordre,  qui  a  seulemeul  un  jusiaueoi  ps  vio- 

L'Iiabillement  du  grand  maître  consis!een  Ici  el  porte  une  masse  de  venucil  (IJ. 

une  d.ilmati«iue  de  sailli  bl.iuc,  sur  la«|uelle  Ils   s'assemblent  ordinaircmeni  aux  C:i- 

til  y  a  par  devant   cl  sur    les    manches    uue  mes  des  Itillelles ,  mais  ils  solennisciil  la  fél- 

icroix  large  de  quatre  pouces,   écarlclée  de  de  Nutrc-Dame  du  Moiil-Carmel  el   celle   de 

(:  )  Voy    j  l.i  lin  «lu  v(,l.   1,»»  2i,li  .60.  ^ 


10.:  9 


SÎON 


MON 


iO.^O 


saint  Lazare  dnns  l'église  de  Saint-fjcrm.iln 
lies  Prés,  oii  ils  se  trouvent  tous  en  habit  du 
cérémonie. 

Pour  être  reçu  dans  cet  onire,  il  faut  faire 
preuve  de  nGhlcsse  de  trois  quartiers,  t  lU 
(tu  côté  pati'rnel  que  in.ilenicl.  Le  grand 
maître  peut  néanmoins  dispenser  de  la  ri- 
{,'ueur  d  s  preuves  de  noblesse  ceux  qui  ont 
rendu  des  services  considérables  au  roi  ou  à 
l'ordre,  et  les  recevoir  chevaliers  de  grâc?. 
Los  ccclési.isliques  qui  veulent  faire  preuve 
de  nob'esse  tiennent  rang  parmi  les  cheva- 
liers de  justice,  et  il  y  a  encore  des  chape- 
lains et  des  frères  servants  qui  ne  sont  pas 
nobles.  Les  chevaliers,  tant  ecclésiastiques 
que  laïques,  payent  pour  leur  passage  d.ins 
l'ordri^,  mille  livres,  et  les  chapelains  et  les 
frères  servants,  cinq  cents  livres. 

Voici  <e  qui  se  prati(|ue  à  leur  réception 
et  à  leur  profession,  conformément  au  nou- 
ve.iu  céiémonial  imprimé  en  170:!.  La  messe 
étant  linie  et  le  grand  maître  ou  son  repré- 
sentant étant  assis  dans  un  fiutenil,  l'ofti- 
rianl,  revêtu  d'une  chape,  fait  les  bénédiclions 
de  la  croix  et  de  l'épie,  .iprès  (luoi  le  no- 
vice, <|ui  a  toujours  été  à  genoux,  pendant 
ces  bénédicli'ins,  se  lève  et  va  se  présenter 
devant  le  grand  maître,  <iui  lui  àil:  Que  de- 
mandez-vous?  Le  novice  répond:  Je  vous 
supplie  très-humblement.  Monseigneur,  de  me 
donner  Vi.rdre  de  cheviderie  de  Notre-Dame 
de  Mont-Carmel  et  de  Saint-Lazare  de  Jéru- 
salem. Le  grand  maître  lui  dit  :  Vous  me  de- 
mandez une  grâce  qui  ne  doit  être  accordée 
qu'à  ceux  que  le  mérite  en  rend  dignes  autant 
(fus  la  noblesse  de  leur  naissance,  et  qui  sont 
disposés  à  la  pratique  rfev  œuvres  de  miséri- 
corde envers  les  pauvres  de  Jésus-Christ,  et  à 
rrrser  lew  sang  pour  la  défense  de  la  religion 
chrétienne  et  pour  le  service  du  roi.  Nous 
avons  appris  par  des  prewes  certaines  que 
les  conditions  et  dispositions  nécessaires  à  lu 
grâce  que  vous  nous  demandez  se  trouvent  en 
TOUS,  ce  qui  nous  a  mus  à  vqus  l'acrorder, 
Eles-i  ous  disposé  à  vous  serrir  de  votre  épée 
pour  la  défense  de  l'Eglise,  le  service  du  roi, 
l'honneur  de  l'ordre  et  la  protection  des  mi- 
sérables? Le  novice  répond:  Ou\  Monsei- 
gneur, avec  l'iiidr  de  Dieu.  Ensuite  le  grand 
maiire  lui  dit:  Je  mis  vous  recevoir  dans 
l'ordre  royal,  militaire  et  hospitalier  de  No- 
tre-Dame du  Mont-Carmel  et  de  Saint-Lazare 
de  Jérusalem,  au  nom  du  Père,  et  du  Fils,  et 
du  Saint-Esprit.  Il  f.iit,  en  prononçant  ces 
paroles,  le  signe  de  la  croix  sur  li;  novice, 
il  se  lève  de  son  f.iuleuil,  tire  son  épée  du 
fourreau  cl  en  donne  deux  coups,  l'un  sur 
l'épaule  droite,  l'autre  sur  l'épaule  gauche 
du  novice  en  lui  disant:  Par  Notre-Dame  du 
Mont-Carmel  et  par  sa'nt  Lazare,  je  votis  fais 
chevalier. 

Le  nouveau  rhe\ aller  se  met  ensuite  à 
genoux  devant  le  grand  maître,  ei  leçoil  de 
lui  i'éjjée  en  baisant  la  ma'n  du  grand  maî- 
tre, (jui,  en  lui  donnant  l'épée,  lui  il  il  :  Servez- 
vnus  de  votre  épée  scUin  l'esprit  de  la  religion, 
et  non  pas  selon  le  mouvement  de  vus  pas- 
sions, et  souvenez-vous  que  roii<  n'en  devez 
jamais  frapper  personne  injustement.  Cheva- 


lier, soyez  désormais  vigilnnt  au  service  ds 
D'eu  et  de  la  religion,  obéissant  à  vos  supé- 
rieurs, soumis  ()  lettrs  ordres  et  patienta  leurs- 
corrections.  Sachez  que  les  lois  de  la  reUgion 
où  vous  êtes  entré  vous  obligent  à  l'exercice 
de  toutes  les  vertus  chrétiennes  et  morales,  it 
à  les  porter  à  un  plus  haut  point  que  ne  fuit 
le  commun  des  chrétiens. 

Le  grand  maître,  en  donnant  la  croix  au 
nouveau  chevalier,  lui  dit  encore:  Je  vous 
donne  lu  croix  de  notre  ordre;  vous  la  porte- 
rez toute  votre  rie  nu  nom  de  la  sainte  Tri- 
nité, Père,  Fils  et  Saint-Esprit .  Elle  vous  doit 
faire  souvenir  de  la  passion  de  Noire-Sei- 
gneur, et  vous  engage  à  l'cbserrancedes  saintes 
règles  et  des  statuts  de  la  religion.  Elle  est 
ornée  de  fleurs  de  lis,  pour  vous  enseigner  la 
fidélité  que  vous  devez  avoir  pour  le  service 
du  roi,  dont  In  piété  et  le  zèle  ont  donné  de 
l'appui  et  de  la  gloire  à  notre  ordre.  Il  lui 
donne  ensuite  Je  livre  des  prières  et  statuts 
de  l'ordre,  en  lui  disant  :  Je  vous  donne 
aussi  le  Ivre  des  prières  et  des  statuts  de  no- 
tre ordre  ;  vous  y  apprendrez  quels  sont  vos 
devoirs. 

Après  ces  cérémonies,  le  nouveau  cluv,;- 
lier,  ayant  les  mains  posées  sur  les  saints 
Evangiles  que  lient  le  grand  m.iîlre,  pro- 
nonce à  haute  voix  ses  vœux  en  ces  termes  : 
Moi  N.  promets  et  voue  à  Dieu  tout-puissant, 
à  la  glorieuse  Vierge  Marie,  mère  de  Dieu,  â 
saint  Lazare,  et  à  Monseigneur  le  grand  maî- 
tre,d'observer  toute  ma  vie  les  saints  comman- 
dements de  Dieu  et  ceux  de  la  sainte  Eglise 
catholique,  apostolique  et  romaine  ;  de  servir 
d'an  grand  zèle  à  la  défense  de  la  foi,  lors- 
qu'il me  sera  commandé  par  mes  supérieurs, 
d'exercer  la  charité  et  les  leuvres  de  miséri- 
corde envers  les  pauvres,  et  particulièrement 
les  lépreux  selon  mon  pouvoir,  de  garder  au 
roi  une  inviolable  fidélité;  et  à  Monseigneur 
le  grand  maiire,  de  lui  rendre  une  parfaite 
obéissance,  et  de  garder  toute  ma  vie  la  chas- 
teté  libre  et  conjugale.  Ainsi  Dieu  très-bon, 
très-grand  et  très-puissant  me  soit  en  aide,  et 
les  saints  Evangiles  par  moi  touchés.  Si  l'on 
reçoit  un  étranger  qui  n'est  pas  sujet  du  roi, 
il  dit  seulement,  de  garder  à  Monseitinenr 
le  grand  maître  une  fidélité  inviolable,  de  lui 
rendre  une  parfaite  obéissance,  elc. 

Après  que  le  nouveau  profès  a  prononcé 
ses  vœus,  le  grand  maître  lui  dit  :  i'cnez 
présentement  que  je  vous  embrasse  et  que  je 
vous  reconnaisse  comme  notre  frère  e!  cheva- 
lier de  notre  ordre,  et  en  cette  qualité  défen- 
seur de  la  foi.  fidèle  serviteur  du  roi,  protec- 
teur des  pauvres,  et  sujet  et  soumis  à  nos  rè- 
glements. .Allez  remercier  Dieu  de  la  grâce  qui 
voui  est  faite  et  signer  votre  profession  et 
vos  vaux.  Si  c'est  un  étran;,'cr,  ou  retranche 
aussi  ces  trois  mots  :  Fidèle  serviteur  du  roi. 
Quoique  l'on  voie  des  armes  de  la  pliipail 
de  ces  chevaliers  entourées  d'un  collier,  ils 
ne  le  portent  pas  néanmoins  dans  les  céré- 
monies, c  collier  n'ayant  pas  été  encore  ap- 
prouvé par  le  roi,  comine  l'ont  clé  les  habits 
que  M.  le  marquis  de  Dangeau  a  ordonnés 
pour  les  céréiuonics  aux  l'élcs  sulcnneres  et 
aux  grandes   assemblées  de;   l'ordre   depuis 


!05l                                             DICTIONNAIIIE  DES  ORDRES  IlELICIEUX.                                       Iu52 

«in'il  on  csl  prand  miîlrc.  Ce  collier,  qui  est  un  concordat  avec  les  chevaliers  de  Saint- 

d'iir,  est  (oinposcdi' chiffres  qui  (losii^iicnt  le  Lazare;    le    11    octobre,    ils    ob;iiirenl    de 

lumi  lie  1,1  saillie  N  ierge  par  ces  doux  lellrc»  Louis  W  un  hicvot  qui  perinil  aux  cliaiioi- 

M  el  A,  enlrolacées  l'une  dans  l'autre  :  entre  nés  réguliers  de  S.iiiil-lluf  de  poursuivre  en 

ces  cliilTios  il  y  a  trois  giosses  perles,  el  au  cour  de  Itoiiie    1  ur  séiularisalion,   etc. ,  et 

bas  du  collier  pend  la  crois  telle   ((ue   nous  l'union  de   lours    biens  à  l'ordre  de  Notrc- 

l'avons    deerile.    reiii-élie    que    ce    collier  Dame  du  Mont-Cariiiel   ol   de  Saiiil  Lazare. 

pourra  être  auloriié   par   Sa  Majesté   lors-  L'assemblée  du  cler-é   de  France,   en  1762, 

(lu'clle  approuvera  les  nouveaux  slaUils  de  blâma  el  réprouva   ce   susdit  concordai  qui 

l'ordri'  auxquels  l'on  travaille  actuellement  ;  lui  avait  été  déféré,  et  se  p!ai},Miit  à    Home, 

car  sur  les  dilToreuds  survenus  depuis  quel-  Clément  XIII  ne  voulut  poinl  accorder  aux 

qu -s  années  entre  le  grand  maître  el  lechan-  deux    ordres    ce    qu'ils    deniandaienl.    Clé- 

celier  de  l'or  Ire,  qui  tint  donné    lieu  à   plu-  nient   XiV    fut   moins  difficile,  mais    néan- 

sieurs   faclums   de   part    et  d'autie,    le    roi  moins   n'agit  que    parce  que,   dil-on,   il  se 

ayant  nommé  des  commissaires  pour  en  con-  laissa    surprendre.    11   donna,   le    l'^    iuil- 

naîlre,  il  a   élé   ordonné  que  l'on  tien  Irait  lel  1771,  un    bref  qui  sécularisait  les  mem- 

un  chapitre  général,    où  l'on   dresserait  de  bres  de   l'ordre   de   Sainl-Uuf  supprimé,  el 

i:mneaux  statuts  pour    servir  à   l'avenir  de  les  unissait  à  l'ordre   de  Sainl-Laz:;re.  L'af- 

rè^liiiienls  uniformes  dans  l'ordre,  et  ce  clia-  faire  était  déplorable  sans  doute,   mais  de- 

pi're  s'est  tenu  au  mois  de  décembre  de  l'an-  vail   être   finie,  puiscjuc   le  pape   avait  pro- 

n.'o  dernière.  nonce.  Il  n'en  fut    p:)int   ainsi.  Le  clergé  de 

Bernard  (iiusliniani,  Ilist.  chronuhg.  di  France,   réuni    en  1772,   fil  tous  ses  cITorls 

liitti  (jli  Ordini  miliion'.  V.   a   Sanclo  An-  |  our   empêcher   l'exécution   du    bref.    Dans 

drea,   Ilist.   (jcncral.    Fri:lium   Discalccato-  sou   as  emblée  du   23  juin,  il    entendit   un 

rum  ord.  D.   M.    Yirg.  de  Monte  Carmdo.  rapport  admirable  sur   ce  maliieureux  inci- 

'l'oussa  ni    de    Saint-Luc,    Abrégé  Itisl.   de  dent,  et,  chose  étonnante  I  cet  excellent  rap- 

l'itislitution    de   l'ordre    de  j\olre-Dame  du  port  était  de  IJiienne,   archevèiiue  de  Tou- 

Mont-Citrmel.  Du  môme,  Office  à  rusage  des  louse,  qui  devait  bientôt   contribuer  si  lar- 

cher(diers  de  cet  ordre,  avec  leurs   rèyles  et  gemenl  à   la  de^truclion  de  l'état  religieux 

slatiils,  cérémonial  de  /a  réception  el  proffs-  d.ins  noire  pays.  Le  bref  lui  révoqué  par  une 

s  on  des   mêmes  chevaliers,   et  plusieurs  fac-  bulle  du   10   décembre  1772,  eoulirmée   par 

lums  el  mémoires  conecrnanl  cet  ordre.  lettres  pr.tencs  du  18  janvier  1773,  enregis- 

II  semblerait  qu'après  les  décisions  ou  ar-  liées  le  27  février  suivant.  Celle  bulle  ras- 

réts  de  deux  souv.rains   pontifes,  l'ordre  de  sura  le  clergé  sur  les  projets  d'envahisse- 

Saint-Lazare   eût   dû   élre    regarde   comme  nient  de  l'ordre   de  S, lin -Lazare.  Celui-ci, 

éteint  en  France  ;  loin  de  là,  il  s'y  est  main-  au  moyen  d'un  dédommagement  accordé  par 

tenu,  el  a()rès  sa  renaissance,  dans  son  union  le  clergé,  renonça  pour  toujours  non-seule- 

avrc  l'ordre  du  Mont-Carmel,  il  est  devenu  ment  à    toute   pielention    sur   les   biens   de 

plus   brillant  qu'aupara\ant,  el  mémo,  par  Sainl-Uuf,  des  Célesiius  ou  de  toute  autre 

une  disposilion  toute  contraire  à  c-  (jui  s'est  congré^'ation,  mais  à  toute  espèce  de  répeli- 

vii  dans  les  autres  onlres,  eelui-ci  a  été  (dus  lion  des  biens  qu'il  pouvait  croire  lui  avoir 

uissanl  à  ses    dernières  années    que  dans  apiiarlenii   et  dont  joui.saienl  les  hô,)ilaux, 


l 


es   siècles  précédents.  Il  est   vrii  qu'il    n'é-  et  génèralemeiil  tous  les  établissements  ee 

lait  plus  guère  considéré  (luc  romine  cheva-  clésiasti(]ues  séculiers  ou  réguliers. 

lerie    honorifique,   au    lieu    d'être    regardé  Ce  n'était  pas   sculeinenl   auprès  des  cha- 

comme   ordic  religieux,   ainsi   qu'il    l'avait  noines  de  Sainl-Uuf  que  l'orilre  de  Sainl-La- 

élé  à  son  origine.  zare    avait    fait    des   lentalives    d'invasimi, 

(-0  qu'il  y  a  de  plus  surprenant,  c'est  qu'un  mais   il   avait  été  autorisé  par  un  brevet  ,i 

ordre  entièrement  el  uiiiiiueiiient  religieux,  traiter  avec   les  Céleslins  ;  plusieurs  ordies 

l'oidrc  de  Saint-Uuf,  ait  clierché,  ail  obtenu  avaient  été  tenlés,  cl  spécialement  les  Anlo- 

son  union  canoni()ue  à  l'ordre  des  chevaliers  nins,   (jui  heureusement  résisiéreni,  et  iiui, 

de  Sainl-I^azare  et  du  .Monl-tlarmel.  par   des   molifs    plus   nobles,   s'unirent  a    x 

Les   deux    institiils   Iravaillérenl    à    cette  clie\aliers  de  Malle,  qui  les  firent  bientôt  so 

réunion    par  des    motifs  convenables  dans  repentir  de  celte  union. 

les  chevaliers   du    Mont-Carmel,   mais    peu  ,■.        ,        ,,        /    m      »      i    ^   ■   ,  r 

I            ,1        ,        ,        ,                 1    c   ■    I  I     r  Grands  mal  r es  de  l  ordre  de  Sam  -Lazare  et 

lionorables  dans  les  chanoines  de  Saint-Kuf,  i          i    r,   ■ 

„._i       .      ,        i    •      ,        1                   1          -,  commandeurs  de  ItOKini/. 

car  ils  n  y  cherchaient  ((U  une  voie   honnête  •'   ■' 

pour  quiiter  leur  règle  el  leur  sainte  proies-  Frère  Gérard  (suivant  le  P.  de  Saint-Luc). 

•  ion.    Nous   parlerons   plus   longuement   de  Thomas  de  Semville,  maître  el  procureur 

cette  affaire   à    l'arlii  le   Uuf  ,Saini-),  mais  général   de   l'ordre  el   chevalerie  de  Sainl- 

nous  devons  en  donner   ici  une   idée  sufli-  Luire  de  Jérusalem  el  chapitre  de  Hoigny. 

santé;  cl  cela  se  commença  avant  l'édilqui  Frère  Jean  de   Paris,   mort  en  130';.  —  le 

créa,  en  l'OH,  celte  commission    si   funeste  1*.    de   Sainl-Lue,    |iag.  l'iS,   IV'.t,    cite    cette 

aux  ordres  moiiaslii|iies  en    France,  el  ilonl  inscription  de  la  Sainle-Cliapelle  de  Hiigny  : 

nous  ferons  connaître  1  esprit,  surtout  dans  Ct-(jil  frire  Jvan   de  Paris,   chevalier,  jadis 

iioire  Supplément.  tnniirc  de  l'ordre  de  Sainl-Ltzare  de  Jérusa- 

Le   projet  avait  été   formé    par   l'abbé  de  lem.  qui  trépassa  l'an  de  grâce  i'èKYv,  le  tuniii 

Saint-ltufel   quelques   meiibres  de   sa  con-  dcu.ncmr  jonr  du  mois  de  janv:er.  Pr^cz  Dieu 

grégaliou.  Le  o  jaii>ier  r/LO,   ils  pa.'ièrenl  pour  idiue  du  défunt. 


1053 


MON 


MON 


1054 


Frère  Jean  di!  Gouras,  cliof  maître  de 
tout  l'ordre   de  Saint-Lazare  de  Jérusalem. 

Jean  de  Bennes,  chef  général  et  maître  de 
tout  l'ordre  de  Saint-Lazarr,  tant  deçà  que 
delà  la  mer.  Il  est  enterré  à  Boigny,  et  on 
lit  ce  qui  suit  sur  sa  tombe  :  De  Beîniîs, 
chevalier,  jadis  maître  de  l'ordre  de  Saint-La- 
dre de  Jérusalem.  (Tout  le  reste  est  efTacé 
jusqu'à  ces  mots  :)  Priez  Dieu  pour  l'âme  du 
défunt. 

Pierre  des  Buaulx,  maître  de  tout  l'ordre 
de  Saint-Lazare  de  Jérusalem. 

Frère  Pierre  Le  Cornu. — Diins  son  ou- 
vrage, Saint-Luc  dit  que,  dans  un  acte  capi- 
I ni, lire  du  mardi  des  féiies  de  la  Pente- 
côte 1481,  il  est  l'ait  mention  que  ledit  Le 
Cornu  avait  succédé  au  grand  maître  d.  s 
Kuaulx,  rt  ([u'il  prenait  dans  cet  acte  la  qua- 
lité de  chevalier,  grand  maître  de  tout  l'urdre 
et  noble  chevalerie  de  Saint-Lazare  de  Jéru- 
salem, deçà  et  delà  la  mer. 

1488.  Frère  François  d'Amboise,  maître 
et  chef  général  de  tout  l'ordre  de  Saint-La- 
zare de  Jérusalem. 

I'i94-,  150(1,  1511.  Frère  Agnan  de  Mareuil. 

1521.  Frère  François  de  Bourbon.  — Saiut- 
Luc  cite  un  aveu  du  18  juin  1521. 

154-7.  Fière  Claude  de  Mareuil.  —  Saint- 
Luc  cite  l'arrêt  du  parlement  du  16  fé- 
vrier 1547,  où  ledit  Claude  de  Mareuil  est 
établi  commandeur  de  Boigiiy  et  maître  gé- 
néral de  1  ordre  de  Saint-Lazare  de  Jérusa- 
lem. Cet  arrêt  est  aux  archives.  Il  y  en  a 
d'autres  du  dernier  janvier  1544,  du  20 
août  1547,  18  aoiil  1548,  15  juin  1549, 
18  uillel  1551. 

Frère  Jean  de  Couli.  —  Saint-Luc  cite  un 
acte  capilulairc  d'un  chapitre  général  tenu  à 
Bogny  aux  fériés  de  la  Pentecôte,  dans  le- 
qu.  I  ledit  frère  Jean  de  Conti  est  élab  i  maî- 
tre général  de  tout  l'ordre  de  chevalerie  de 
Saint-Lazare  de  Jérusalem  deç'i  et  delà  la 
mer,  et  donne  à  un  chevalier  natif  de  Cala- 
bre  i'ailministialion  des  biens  dépendant  de 
l'ordre  du  territoire  de  Suessano  dans  la 
Touille,  à  la  charge  de  220  llorins. 

Frère  Jean  de  Lévi.  —  Saint-Lui;  dit  qu'il 
fut  pourvu  de  cette  charge  par  Henri  11, 
iiu'il  obtint  des  bulles  en  cour  de  Home,  et 
(|u'il  se  démit  de  sa  charge  entre  les  mains 
du  roi.  Il  cite  un  arrêt  du  grand  conseil  du 
10  décembre  15G5,  dans  lequel  ledit  de  Lévi 
est  nommé  prieur  et  commandeur  du  prieuré 
et  commanderie  de  Boigny,  grand  maître  et 
administrateur  de  l'ordre   de  Saint-Lazare. 

1567.  Frère  Michel  de  Seure.  —  Aux  ar- 
chives ,  arrêts  du  parlement  du  18  jan- 
vier 1571  et  1574,  où  ledit  de  Seure  est  établi 
chevalier  de  l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusa- 
lem, commandeur  de  la  commanderie  de 
Poigny,  grand  maître  et  administrateur  de 
aaint-Lazare  de  Jérusalem. 

1578.  Frère  François  de  Salviati.  —  Ar- 
rêts du  parlement  de  Paris,  31  août  1584, 
^9  janvier,  8  avril  et  24  mai  1585,  8,  10, 
22  mai,  et  5  août  1586,  9  et  10  mars  loS7, 
cl  4  juin  1597. 

1004.  Philipcrt  de  Nérestang,  grand  maître 
de  l'ordre  de  Saint-Lazare,  sur  lu  déuiiasion 


de  Charles  de  Gayant,  el  grand  maître  de 
l'ordie  de  Nolre-Dann'  de  Monl-Garmcl. 

1(J12.  Claude  de  Nérestang,  grand  maître 
de  Saint-Lazare  et  de  Notre-Dame  de  Monl- 
Carmel.  ? 

1639.  Charles-Achille,  marquis  de  Néres- 
tang, reçu  en  survivance,  le  16  aoiit. 

1645.  Ledit  Charles-Achille,  marquis  de 
Nérestang. 

1673.  François  Le  Tellier,  marquis  do 
Louvois,  granil  vicaire  général  de  l'ordre  do 
Notre-Dame  du  Mont-Carmel  et  de  Saint- 
Lazare  de  Jérusalem,  sur  la  démission  vo- 
lontaire de  M.  Charles-Achille,  marquis  de 
Nérestang. 

1693,  Philippe  de  Conrcillon,  marquis  de 
Dangeau. 

1721.  Louis,  duc  du  Chartres,  puis  duc 
d'Orléans. 

Après  la  mort  de  M.  le  duc  d'Orléans,  ar- 
rivée en  1752,  le  roi  fut  quelques  années 
sans  donner  de  grand  maître  aux  ordres 
royaux,  militaires  et  hospitaliers  de  Notre- 
Dame  de  iMoni-Carmel  et  de  Saint-Lazare  de 
Jérusalem.  Déterminé  enfin  à  en  nommer 
un,  il  lit  choix,  en  1757,  de  M.  le  duc  de 
Berri,  fils  de  France,  et  le  pape  Benoit  XIV, 
mort  en  1758,  accorda  à  ce  prince  les  bulles 
nécessaires,  qui  lurent  enregistrées  la  môme 
année  au  grand  conseil.  Et  attendu  la  trop 
grande  jeunesse  dudit  prince,  Sa  Majesté 
nomma,  au  mois  de  jniii  de  l'année  susdite, 
M.  Louis  Phelypeaux,  comte  de  Saint-Flo- 
rentin, conseiller  en  tous  ses  conseils,  mi- 
nistre el  secrétaire  d'Etat,  pour  régir,  admi- 
nistrer el  gouverner  lesdils  ordres,  jusqu'à 
ce  que  le  nouveau  grand  maître  frit  en  âg<3 
d  en  prendre  par  lui-même  l'administration. 
Le  roi,  voulant  aussi  aviser  aux  moyens  les 
plus  propres  pour  que  lesdils  ordres  pus- 
sent se  soutenir  avec  splendeur  ,  ju[':ea  à 
propos  d'expliqner  par  un  nouveau  règle- 
ment sci  intentions  sur  le  nombre  des  che- 
valiers dont  il  veut  qu'ils  soient  à  I  avenir 
composés,  et  sur  les  qualités  des  personnes 
(|ui  y  seront  admi-es.  Ce  nouveau  règlement, 
daté  du  15  juin  1757,  est  compi  is  en  xv  arti- 
cles, dont  les  principaux  sont  :  Que  nulle 
personne  ne  pourra  être  reçue  et  admise  à 
l'avenir  par  le  grand  maître  desdits  ordres, 
qu'elle  n'ail  fait  ses  preuves  de  la  religion 
catholique,  apostolique  et  romaine,  et  celle 
de  quatre  degrés  de  noblesse  paternelle  seu- 
lement, le  novice  compris  ;qL;e  le  nombre 
des  chevaliers  sera  fixé  à  l'avenir  à  cent,  y 
compris  les  ecclésiastiques,  qui  ne  pourront 
y  occuper  plus  de  huit  places,  et  qui  seront 
obligés  aux  mêmes  preuves  que  1rs  cheva- 
liers laïques  ;  qu'on  recevra,  par  préférence 
à  toutes  autres  considérations,  les  person- 
nes qui  seront  ou  qui  auront  été  employées 
au  service  de  Sa  Majesté  dans  l'intérieur  du 
royaume,  près  de  sa  personne,  dans  les  cours 
étrangères  ou  dans  les  places  ou  emplois 
de  confiance;  qu'il  faudra  avoir  l'âge  du 
30  ans  accomplis  pour  être  reçu,  ou  au 
mi)insde25ans  accomplis, au  cas  que  quelque 
raison  particulière  oblige  à  admettre  quel- 
qu'un au-dcisous  de  l'âije  de  30  ans;  qu'il 


«035                                     nir.TION.NAmE  DES    ORDRES  RELIGIEUX.  10.i6 

ne  sera  plus   rcru   à  l'.ivciiir  dans  Icsdits  or-  nboli,  avait  été  absorbé  par  l'ordre  du  ^lont- 

ilres,  des  clirva'.iers  de  ^ràce.  commaiulcurs,  Carinel.  sous  la  icllre  duquel  nous  les  avDiis 

fondateurs    ni    servants  ;    qiic    le    droit    de  plarés  ici.  Il  est  vraisemblable  que  cet  ordre 

passag''  cl  autres  frais  «jui  seronl  payés  i):ir  religicuv  et  militaire  est  pour  toujours  aboli 

1  liacuH  lies  elievali'rs  qui  seronl   à  l'avenir  en  France,    où  il   a  disparu  par  le  faii,à  la 

a  Imis   dans    lesdils    ordres,  sera   fixé  à    la  révolution    de    juillet    1830.    —    Almanarh 

s. mime  de  1,000  livres,  el  le  droit  des  oflicicrs  Royal.  —  Mémoire  sur  l'état  religieux  et  sur 

à  ce  le   de   120  livres,   pnur   être  distribuée  la  commission  établie  pour  les  Ré(/ulieni,\i\-V2 

1  iilrc  eux    suivant    l'usagi'  jusqu'à  présent  (par   l'abbé    iMej).  —  Dictionnaire   de  Mo- 

t)hservé,  indépenJarn'iient  des  lumoraires  du  réri,  édition  de  1759.  —  Histoire  des  ordres 

généalogiste;  que   les   chevaliers   porteront  roi/aiix,  hospitaliers  el  militaires  de  Saint- 

au  cou  la  croi»  desdits  ordres  attachée  à  un  Lazare  de  Jérusalem  et  de  Motre-l)i:me  du 

ruban   de    couleur   aniarante  ,    et   dans   les  jî/onr-rdcmc/;  Liège  el  Bruxelles,  171."),  in-i", 

occasions    de    céréuionie    ils    porteront    la  par  Gaulliar  de  Sibcrl,  etc.                 B-d-e. 
croix  ainsi  cl  de  la  manière  dont  il  en  a  élc 

usé  iusqu'à  présent  ;  que  ceux  des  gentils-  MON  l'-CVUMEL  (Tiers  Oiidre  du). 
hom'mes  qi-i  ai^ronl  été  élevx's  dans  lécolc  ^^  forigine  du  Tiers  Ordn  des  Carmes  el  des 
royale  militaire  el  que  >a  Ma.csle  jug.ra  a  g^,^^„  ^^  „,^,„^  ^^j,.^_ 
propos  d  adinc  lire  iLins  l.sJits  ordres,  y  se- 
ront reçus,  en  faisant  également  preuves  de  Le  P.  Papebroch  s'est  trompé  lorsqu'il  dit 
la  reliii'idn  et  de  la  noldesse,  co'.mnc  les  an-  {Itespoits.  ad  P.  Sebastianum  a  S.  l'auto,  art. 
1res;  mais  qu'ils  pourront  y  être  admis  (]uoi-  20,  n.  10)  que  la  marque  ()ue  les  religieux 
((u'ils  n'aient  pas  l'âge  prescrit,  el  que  le  de  S.iinl-Frauçois  doiuitnt  à  leurs  lierci.iires 
nombre  de  cent  suit  i empli,  el  aussi  avec  est  un  cordon,  et  que  celle  que  le-,  ("armes 
I  xemp'iion  du  droit  de  passade  el  de  tous  donnent  aussi  à  leurs  tierciaires  est  un  petit 
3'.!  es  droits.  Ces  règlements  ont  éié  laits  seapulaire  en  forme  de  billettes.  C'est  ainsi  , 
et  arrélés  à  Veisailles,  le  roi  y  étant,  le  dit-il  ,  que  les  Français  nomment  de  petits 
13  juin  17."i7,  el  imprimés  à  l'inipriinerie  morceaux  di;  drap  longs  el  carrés;  el  c'est 
royale,  in-'r".  aussi  pourquoi  l'on  a  donn^'  à  Paris  le  nom 
Il  y  tut  encore  une  confirmation  des  or-  de  Hilletles  aux  Carmes  qui  ne  sont  pas  dé- 
dres   du   .Moiit-1'.armel   el   de    Saint-Lazare,  chaussés. 

par  Louis  XV  eu  1770.  Lorsque  la  révolu-  Pre.niércmenl    il  n'est  pas    vrai   que   les 

li(m,  en  1790,  le  20  juin,  abolit  les  ordres  de  Cannes  de  l'Observance  de  llcnnes ,  qui  sont 

cbevaleii  ',   tiins,  etc.,  le   grand   maîlre  el  ciu\   (ju'on   nomme   Dilleltes  à  P.iris,   aient 

chef  général  de  celui-ci  était  .\ioNsi:;i  ii,  de-  été  ainsi  appelés    à    cause  du  sca[)ul.iire  en 

puis  Louis  XVllI.   Le  coaile  d'Agoull  éiail  forme  de  billet  es   qu'ils  donnent   aux    per- 

prevùt  el  maître  des  cérémonies  ;  Gaultier  de  sonnes  qui  ont  dévotion  de   le  recevoir,  car 

Sibert    était  historiographe,   cl  il    a  justifié  il  y  avait  déjà  plus  de  trois  cents  ans  ((uc  ce 

cetli!  fonction  en  doiiniiit  en  eflel  l'Ii.sloire  nom  était  iloiiné  aux    religieux   liospilaliers 

de  l'ordre.  Il  y  eut  un  grand  lUiiubre  declie-  de  la  Charité  de  Notre-Dame,  qui  cédèrent, 

val  ers  nommés  en  17S8;  nous  ignorons  s  il  l'an  1G;!2,  à  ces  religieux  C.irmes  le  couvent 

y  a  eu  des  promo'.ions   po-térieuies  à  celle  des  lUlleltes,  qui  fut  bili  l'an  129'+  eu  la  rue 

d.ite.  D.ins  un  chapitre  tenu  ci  avril  177'i-,  il  des  Jardins,  appelée  dans  la  suiic  des  Hillet- 

fut  ordonné  à   lous  les  clievaiiers  el  com-  tes,  à  la  place  de  la  maison  d'un  juif  (|ui  avait 

inandeurs  de  porter  une  croix  verte  à  huit  fait  plusieurs  outrages  à  la  sainte  liostie,  qui 

pointes,  cousue  sur  l'habit,  et  dans  les  ce-  depuis  ce  Icmps-là  a  été  conservée  avec  beau- 

rémoiiies    sur  le   manteau,    et  depuis    1778  coup  de  vénération  dans    l'église  de  Sainl- 

cetic  croix  était  en  paillons  d'or  vert.  Jean  en   Grève;    et   qiioi(|ue    les    Français 

A  la  restauration,  cet  oïdie  reprit  son  rang  donnassent  autrefois  le  nom  de  billelles  à  des 

ri  ses  digni  es.    Le  roi   fut  toujours  désig.^e  pièecs  d'èlolTc  d'or,  d'argent,  ou  de  c  u'eur, 

comme   [iroteileur,   mais  il   n'y  eut  pas  de  plu.  longues  que    lirges,  ()ui   se   cousais  ni 

grand  maitrc  iioiiuné,   ni  de  promotions  fai-  par  intervalle  sur  les  habits  i  our  leur  servir 

les,  quoique  nous    croyions   (ju'uae  ordun-  d'ornement,  el  qu'on   a  depuis  transportées 

iianci'   royale   ail   été  rendue,    en    iiovem-  surlesécis,  comme   on    peut  voir  ilans  les 

lire  1810,  en  faveur   de  l'ordre  de  Saint-La-  armoirii  s  des  maiso:is  d  •  Clioiseul  ,  de  Heaii- 

lare.  M.    Silvcstre   reprit   les    fonctions   de  manoir   el   de    plusieurs  autres,  néanmoins 

héraut  d'armes,  (lu'il  avait  avant  la  révolu-  ce  mot  a  eu    plusieurs  si^nilicalions,  (  l    se 

lion.  M.   lia'  ier  lut  liisloriogra|)hc;  les  the-  prend  encore  pour  une  enseigne  en  forme  de 

\aliers  eurenl  un  chapelain  en  lilre  à  \'er-  liari  Ici  qu'on    met    aux    lieux    i  ù   l'on  doit 

sailles,   M.  l'abbé    Picot.   Ces  trois  derniers  \iédV,*^  [Dictionnaire  universd  de  Trévoux,  iiu 

vivaient  encore  en  18'Î0,  cl  l'ordre  comptait  mot  ISiiiiiTTic).  Ainsi  il  y  a   bien  de  l'appa- 

alnrs  (juaujrze  chevaliers.  Louis  XVIII,  étant  renée  (|ue  le  nom  de  iîillette,  qui  a  été  donné 

a  Mitlau,  avait  nommé  le  baron  de  Ureisen,  d'alord  au  monastère  q.ic  les  Carmes  occu- 

officier  russe,  à  la  dignité  de  chevalier  d'/iiyn-  peut  à  présent  depuis  l'an  1032,  le>iuel  leur 

neu'  de  l'ordie  de  Sainl-Lizare.  fut  <  éde  cl  qui  a  ele  bàli ,  comme  nous  avons 

Presque   lous   les   historiens,    les   Indien-  dit ,  dès  l'an  12  IV,  vient  de  ce  qu  à  la  maison 

t-urs,  etc.,  éci  ivcnt  Ordres  de  Saint-Lazare  du  juif  i|ui  fut   démolie  il  y  a.  ail  pour  ensei- 

tt  du  Monl-t'armd  léunis....  C'est  mie   er-  gne  trois  ou  quatre  billel'es,  comme  remar- 

rtur  ou  un  oubli.  L'ordre  de  Saint-Lazare,  que  le  !'■  du  lir^uil  dans   les  Au  iquite.<  du 


io:.7 


MON 


SîON 


I  )h^ 


Paris  (liv.  ii.paR.  977),  si  ce  n'e  t  ,(1il  ce  Pèic, 
que  l'on  no  voulût  dériver  ce  nom  du  mol  la  lin 
bilis  aira,  delà  colère  et  fureur  de  ce  juif. 

Il  n'est  pas  vrai  non  plus  que  les  religieux 
de  Saint-François  donnent  à  leurs  liorciaires 
ii«  cordon  ,  cl  les  Carmes  un  petit  scapulaire 
composé  (le  deux,  pelils  morceaux  de  drap 
carrés.  Le  P.  Papctroch  a  sans  doule  con- 
fondu les  confrères  du  cordon  de  Sainl-Fran- 
çois  et  du  scapulaire  des  Garnies  avec  les 
lierciairi's  de  ces  ordres.  1!  y  a  ce|  endanl  une 
fjrande  différence  entre  les  uns  et  les  autres; 
car  quoique  le  mol  deconfrériesoil  fort  liono- 
r.ible,  et  qu'on  entende  par  là  plusieurs 
pcrsiinnes  unies  cnfembic  par  les  liens  de  la 
«  harilé  pour  s'emiilojcr  à  de  bonnes  œu- 
vres, et  que  ces  sortes  do  confréries  aient  été 
approuvées  par  le  sainl-sié;;e  ou  par  les 
évêques  des  lieux  où  elles  sont  établies, 
néanmoins  les  règlements  et  ce  qui  sort  à  y 
maintenir  une  observance  uniforme  ne  sont 
que  sous  le  nom  de  statuts,  et  il  suffit  pour 
y  entrer  do  se  faire  enregistrer  dans  la  liste 
lies  confrères  ;  au  lieu  que  ce  qui  sert  à 
maintenir  l'observance  parmi  les  tierciaires 
es!  sous  le  nom  de  rè^le,  et  qu'il  faut  que 
ces  tierciaires  soient  éprouvés  [lar  un  noviciat 
d'un  an,  au  bout  duquel  ils  font  profession 
avec  des  vœux  simples.  Quoiqu'on  ne  puisse 
pas  dire  qu'ils  soient  religieux,  à  moins 
«ju'ils  ne  soient  engagés  par  des  vœux  so- 
lennels, comme  les  religieux  Pénitents  du 
Tiers  Ordre  de  Saint-François  elles  religieu- 
ses du  Tiers  Ordre  de  Saint-Dominique,  ce- 
pendant leurs  congrégations  sont  de  vérita- 
bles ordres,  parce  que,  dans  le  cas  dont  il 
s'agit,  lo  mot  d'ordre  signilie  une  manière  de 
vivre  ordonnée  sous  certaines  règles  el  céré- 
monies pratiquées  pai'  ceux  qui  s'y  engagent, 
et  celle  manière  de  vivre  a  élé  approuvée 
sous  le  nom  d'ordre  par  plusieurs  souverains 
pontifes,  comme  on  peut  vo  r  par  les  bulles 
doNicolas  IVen  faveurdes  tierciairesde  Sainl- 
François,  d'Innocent  \'iï  pour  ceux  di'  Saint- 
Dominique,  de  Marliii  V  pour  ceux  des 
Servîtes,  d'Iiugène  IV  et  Martin  V  pour  ceux 
des  Âugustins,  de  Sixte  IV  pour  ceux  des 
Carmes,  el  de  Jules  II  pour  ceux  desiMinimos; 
et  lorsque  les  papes  ont  parlé  du  cordon  de 
Sainl-François  ou  du  scapulaire  des  Carmes, 
ce  n'aétéquj  sous  le  nom  de  confiéric. 

Ce  fut  le  pape  Sixte  V  qui  institua  à  Assise 
colle  du  cordon  do  Saint-François  l'an  158G. 
Mais  il  n'est  pas  si  aisé  de  savoir  le  tem[is 
que  la  confrérie  du  Scapulaire  a  été  établie. 
Lezanedil  que  les  p;ipe>  Ftienne  V,  Adrien  M, 
Sergius  III,  Je. in  X,  Jean  XI  el  Sergius  IV , 
ont  remis  la  troisième  partie  de  leurs  péchés 
à  ceux  qui  entreraient  dans  celle  confrérie  : 
de  cette  manière  le  bienheureux  Simon  Sl.'k, 
qui  deux  ans  avant  sa  mort  reçut  des  mains 
de  la  sainte  Vierge  le  scapulaire  qu'elle  lui 
ordonna  de  faire  porlor  aux  religieux  comme 
la  marque  de  leur  ordre,  n'étant  mort  qu'en 
j  12Go,  et  Etienne  V  ayanl  élé  élu  pape  en  81G, 
el  ayant  accordé,  selon  les  Carmes,  des  in- 
dulgences aux  confrères  du  Scapulaire,  il 
s'ensuivrait  que  la  confrérie  du  Scapulaire 
était  établie  plus  de  koO  ans  avant  qu'on  eût 


songé  seulement  à  parler  de  scapulaire  parmi 
les  Carmes. 

Mais  pourquoi  la  confrérie  du  Scapulaire 
n'jurait-elle  pas  élé  établie  plus  de  quatre 
cents  ans  avant  que  les  Carmes  eussent  porté 
le  scapulaire,  puisque  leur  troisième  ordre  a 
été  institué,  selon  quelquos-uns  de  leurs 
écrivains,  plus  de  deux  mille  ans  avant  que 
l'on  eût  connu  le  premier?  Entre  les  autres, 
Didace  Martinez  Coria,  dans  un  traité  parti- 
culier qu'il  a  fait  de  ces  tierciaires,  imprimé  à 
Séville  en  1502,  dit  qu'ils  descendent  immé- 
diatement du  piophète  Elle,  aussi  bien  que 
les  Carmes.  En  effet,  entre  les  grands  hommes 
qui  ont  fait  profession,  à  ce  qu'il  dit,  de  ce  Tiers 
Ordre,  il  met  le  prophète  Abdias  qui  vivait 
huit  cents  ans  avant  la  naissance  do  Jésus- 
Christ,  et  il  a  cru  que  cet  ordre  serait  aussi 
beaucoup  honoré,  si  aux  personnes  de  l'autre 
sexe  qui  en  ont  aussi  fait  profession  il  joi- 
gnait la  bisaïeule  du  Sauveur  du  monde,  sous 
le  nom  emprunté  de  sainte  Eméreniienne. 

Pour  prouver  l'antquiié  prétendue  de  ce 
Tiers  Ordre,  il  rapporte  les  bulles  de  Léon  I\', 
d'Etienne  V,  d'Adrien  II  et  des  autres  papes 
dont  nous  venons  de  parler,  qui  ont  aussi 
accordé,  à  ce  qu'il  prétend,  la  rémission  de  la 
troisième  partie  de  leurs  pochés  à  ceux  de  cet 
ordre  le  jour  qu'ils  prendraient  l'Iiabit:  mais 
nous  avons  assez  réfuté  ces  prétendues  bulles 
à  l'article  Carmes  ;  c'est  pourquoi  nous  n'en 
parlerons  pas  davantage,  et  nous  nous  con- 
lenterons  seulement  de  faire  remarquer  deux 
contradictions  manifestes  dans  lesquelles 
Coria  est  tombé. 

^L'  première,  c'est  quo  col  auteur  parlant 
d'un  Tiers  Ordre  du  temps  des  propholes,  on 
doit  présumer  qu'il  y  en  avait  doux  autn  s 
dilTérenls.  Cependant  il  dit  que  lorsque  les 
Carmes  eurent  reçu  le  baptême  des  mains  des 
apôtres  mêmes,  ils  se  divisèrent  pour  lors  eu 
trois  classes  avec  des  manières  de  vie  dilîé- 
rcntes  :  que  la  première  fut  celle  des  re- 
ligieux qui  vécurent  en  congrégation  ; 
que  la  deuxième  fut  celle  des  religieuses  qui 
vécurent  aussi  eu  coiigrogalioii  avec  vœu 
de  clôture,  et  qu'enfin  la  lioisième  fut  celle 
des  tierciaires,  qui  vécurent  avec  leurs  fem- 
mes el  leurs  parculs  dans  leurs  maisons,  les 
uns  et  les  autres  sous  la  règle  et  les  préceptes 
du  sacré  ordre  du  Aiont-Garinel.  Ainsi  ,  s'ili 
n'ont  commencé  à  se  séparer  el  à  former  trois 
dilïérentos  classes  qu'après  avoir  élé  baptisés 
par  les  apôtres,  il  s'ensuivr.  it  que  le  pro- 
phète Abdias  el  la  bisaïeule  de  Josus-Clirisl 
n  auraient  pas  élé  plutôt  du  Tiers  Ordre  des 
Carmes  que  du  premier  ou  second  ordre, 
supposé  qu'il  y  en  eût  un ,  puisqu'il  n'y  avait 
point  encore  de-séparalion. 

La  seconde  coniradiclion  que  je  trouve 
dans  Coria,  c'est  qu'ayant  dit  qu'il  n'est  pas 
vrai  que  saint  François  soit  le  premier  qi,i 
ait  institué  un  troisième  ordre,  il  conviens 
ensuite  que  le  pape  Sixte  IV,  l'an  147G,  donna 
permission  au  prieur  général,  aux  provin- 
ciaux, aux  prieurs  locaux  de  l'ordre  dos 
Carmes  et  à  ceux  qui  tiendraient  leurs  pla- 
ces ,  de  pou.voir  donner  l'habit  régulier  el  la 
règle  de  leur  ordre  aux  personnes  de  l'un  et 


DSO 


DICTIONNAmK  DKS    OnDHES  RKLIGIKLX. 


lO'iO 


de  l'autre  soxp  qui  se  proscnlcraionl  pour  le 
recevoir,  de  inêini;  que  les  Manlclées  cl  l'in- 
zoclies  (1).  ou  les  Frères  de  la  Pénitence  du 
liers  Ordre  des  .\!iiii'urs,  cl  de  ceux  des  Frè- 
res Prêcheurs  et  «les  Ermites  de  Sainl-Au- 
^usliii,  et  d'admellrc  aussi  au  mémo  lial)it 
les  viirtres,  tiKilroncs,  veuves  el  f<mi»ies  ma- 
riées; (ï  où  l'on  doit  conclure  que  si  le  pape 
Sisle  IV  a  permis  à  l'oidrc  des  Carraes  de 
recevoir  ces  sortes  de  personnes  comme  ceu\ 
qu'on  recevait  dans  l'ordre  de  Saint-Fran- 
çois, c'est  qu'ils  n'en  recevaient  pas  .uipara- 
^ani,  el  par  conséquent  «lue  le  Tiers  Ordre 
de  Sainl  François  est  plus  ancien  que  celui 
des  Carmes. 

Silvera,  fimcux  écrivain  de  cet  ordre,  a 
été,  ce  mi^  semble,  plus  sincère  quet'oria,  el 
sans  faire  remonter  leur  Tiers  Ordre  au 
temps  du  prophète  Elie,  il  avoue  do  bonne 
foi  que  non-seulement  il  n'a  commencé  que 
sons  le  poniilicat  de  Sixte  IV,  en  verlu  de  la 
bulle  de  ce  pape  de  l'an  liTG,  mais  même 
que  saint  Fr.inçois  est  le  premier  qui  a  ins- 
titue un  Tiers  Ordre  en  1221,  pour  des  per- 
sonnes de  l'un  cl  do  l'autre  sexe,  auxquelles 
le  pape  Nicolas  IV  prescrivit  une  règle; 
qu'ensuite  les  autres  ordres,  à  l'imitalion  de 
ce  >craphiquc  Père,  onl  eu  des  Tiers  Ordres 
qu'ils  onl  établis;  et  que  lorsque  l'Eglise 
chante  dans  son  olfice  celle  an  ienne  -.Tresor- 
dine.</4(c  oni<na/,  elle  entend  ()u'il  a  clé  le  prc- 
mierqui  ailélabli  irois  ordres  diflérenls;  voici 
ces  paroles  :  Hnitc  faniltiitem  recipiendi  ac 
admillcndi  Teitiarios  habent  ordines  Mendi- 
Ci!7ites.  et  primo  sanctus  Frnnciscus  hujiis 
Sdcii  (irdinis  patriarclia,  instiluil  Frnlres  el 
Sorores  liujus  ordinis  de  l'œnilentia  anno 
1221.  hjus  leijulnmprœscripsit  Nicolatis  IV, 
anuo  2  iui  poiitificaCus.  l'ostca  lero  aliçe  re- 
li'jionrs  nd  p/its  imilalioncm  eiiam  Teriiurios 
instiiueruni  ne  Itdbuerunt;  et  Ecclesid,  dnin 
cnnil  de  S.  Francisco  :  Très  ordines  hic  ordi- 
nal, inleliig  t  quoi  ipse  fuit  prinais  qui  lios 
très  ordinaiil  ac  inslituit  (Silvera,  Opusc. 
var.  resol.  3S).  Lezana  dit  aussi  la  mémo 
chose;  il  trouve  seulement  à  redrc  que  Ca- 
sarubios  ail  avancé  que  sainl  François  était 
le  seul  qui  eût  établi  un  Tiers  Ordre,  puis- 
que, dil  Lezana,  il  y  en  a  qui  prétendent  que 
saint  Dominique,  à  son  imilali  )n,  en  a  aussi 
insliiue  un.  El  qu  mvis  ipse  Casurub.  in  coni- 
pend.  vcrh.  Teriinri\,  num.  2ï,  §  Sciendum 
est  itl  eriiis.  diciit  quod  solus  S.  /'.  Francis- 
lus  Fralres  <l  Sorores  Teriii  Ordinis  scu  de 
]'(e)iilenli(>  inslitueril,  ul  propler  ca  de  eo  ca- 
unt  Fcclesia,  Très  ordines  hic  ordinal,  etc.. 
(lia  tamcn  eliam  hoc  Inbunnl  S.  Dominiro, 
el  (licHiilsdum  illa  de  fi.  tj-ancisco  iliri  ub 
Fcclesid,  qnia  ipse  prinius'omnium  fait,  et 
S.  Ilomnicus  ad  ipsiits  imilalioiiein  (Lezan.i, 
Suinm.  qn.  Rerjul.  l  1,  cap.  IV,  de  Terlianis, 
num.  8).  Kl  après  avoir  dit  en  un  autre  en- 
droit qne  la  rè;:le  d'S  lierciaires  des  Mineurs 
n'oblige  à  aucun  pèche,  il  ajoute  qu'il  en  esl 
de  même  des  lierciaires  des  Carmes,  parce 
qu'ils   n'ont  été  approuve»  qu'à   l'i.i.ilation 

(1)  On  appelle  Manielécs  cl  Piiizochcs  en  Italie,  cl 
néaies  en  Ksiiagiie,  ccrlaines  fciiinics  Inbillëcs  en 
rcir'icuaci,  'l'ii  suiil  do  ipitlq'ic  Tiers  Ordre  cl  dc- 


de  ceux  de  Saint-François  e!  de  Saint-Domi- 
nique :  Idem  dico  de  Terlinriis  nostri  ordi- 
nis, eo  quod  ad  instar  Tcrtiariorum  Prœdica- 
torum  et  Minurum  npprobanlur  aSixtuH' 
{Ibid.  num.  20  . 

Ce  n'est  donc  que  l'an  1117  que  le  Tiers 
Ordre  des  ("armes  a  romn.encé  i-n  vcrlu  do 
la  bulle  de  Sixie  1\',  qui  esl  le  Mare  magnum 
de  l'ordre  des  Carmes.  Les  frères  el  soeurs 
de  ce  troisième  ordre  n'avaient  point  autrefois 
d'aulrerègleque  cdleqne  le  palriarchC.Mbeil 
avait  donnée  au  premier  ordre  ;  mais  ils  en 
curent  une  dans  la  suite,  cjui  fut  dressée 
par  le  P.  rhé^dore  Stratius  ,  général  des 
Carmes,  vers  l'an  l(i35,  cl  elle  a  été  léforniec 
l'an  jfiTS,  p  ir  le  P.  lùnilc  Jacomelli,  vi- 
caire général  de  cet  ordre,  et  contient  pré- 
sentement dix-nciif  chapitres,  (^oiforménienl 
à  cette  règle,  on  pcul  rece»oir  dans  ce  Tiers 
Ordre  toutes  sortes  de  personnes  de  l'un  et 
de  l'autre  .'■exe,  ecclésiasliques  et  laïques, 
filles,  veuves  ou  fernmes  mariées,  puni  vu 
qu'ils  soient  tous  d'une  vie  exemplaire, 
qu'ils  aient  une  grande  dévotion  envers  la 
sainte  \ierge,  qu'ils  ne  soient  point  déjà  re- 
çus et  profès  dans  un  autre  Tiers  Ordre, 
qu'ils  ne  soient  point  suspects  d'hérésie  ou 
de  désobéissance  à  la  sainte  Eglise  romaine, 
qu'ils  n'aient  point  quelque  notable  diffor- 
mité de  corps, ni  de  maladie  ou  incommodité 
qui  puisse  donner  aux  autres  une  aversion 
naturelle  poureux,  qu'ils  aient  hounèlemenl 
de  quoi  vivre,  ou  au  moins  qu'ils  puissent 
gagner  leur  vie  dans  une  vacation  honnélc. 
Ayanl  été  reçus,  ils  fonl  un  an  de  novui.it, 
après  lequel  i\>  font  profession  en  la  manière 
suivante  :  Moi  pire  \.  ou  stiitr  A',  fais  ma 
prof  ssion,  et  promets  ubédirnce  el  cliastrlé  à 
Dilu  loHt-puissant  et  à  la  li.  Vierge  Marie 
du  Monl-Carmel,  el  au  rëvérendissnne  l'ère 
N.,  f/énc'ral  dudil  ordre,  il  à  ses  successeurs, 
selon  la  règle  du  Tiers  Ordre,  jusi/uù  la  mort. 
Ceux  qui  sont  clercs  doivent  dire  l'.ifnce  di- 
vin selon  l'usage  de  l'Eglise  de  Knnie  ou  de 
leur  propre  diocèse;  Icslaniueslellrésledoi- 
vent  réciter  selon  l'usage  de  l'ordre  des  Carmes, 
ou  bien  le  petit  olfice  de  la  \  ierge,  el  ceux 
et  celles  qui  ne  savent  pas  lire  doivent  diio 
pour  matines  vingt  fois  Pater  nosler,  el  au- 
tant de  {-n^  Ave  Mario,  excepté  qu'aux  di- 
manches el  fêtes  solennelles  ce  nombre  doil 
être  doublé.  Ils  en  disent  sept  pour  piin:e, 
tierce,  sexte,  mine  et  compiles,  cl  pour  vê- 
pres quinze.  Ou'.rc  les  jeunes  qui  soni  iiisli- 
lués  et  commandés  par  l'h^i^lise.  ils  doivent 
s'abstenir  de  liande  et  jcûni^r  durant  l'avcnl 
el  tous  les  vendredis  de  l'année,  exeeplé  ce- 
lui de  l'octive  de  Pâques.  Ils  sont  encore. ibligés 
0  jeûner  les  fêles  de  l'Ascension, de  la  Pente-' 
côte,  du  sainl  sacrement,  de  la  Nativité,  Présen- 
tation, \'isilalion,Parincatioii,  Assompti  'U  et 
Commémoration  de  la  s.iiiitc  Vierge  ;  cl  de 
tous  les  mercredis  et  samedis,  depuis  la  fêle 
de  la  sainte  croix  inclusivemcMil  jusqu'à 
l'avcnl,  cl  depuis  la  N.itivité  de  Noire  Sei- 
gneur jusqu'au  carême.  En  loul  temps  cl  en 

meurenidans  leurs  maisons  particulières,  soil  seuli^s 
ou  avec  lcu''S  parenis. 


lOPl 


MON 


MON 


m2 


tout  lieu,  ils  gardent  l'abstinenco  de  viande 
los  mercredis  cl  samedis,  exceplé  le  jour  de 
la  Nalivllé  de  Nolre-Seigncur.  O'ianl  à  l'ha- 
hillemenl,  les  Frères  et  Sœurs  doive  ni  avoir 
une  robcoulunique  longue  jusqu'aux  lalons, 
liranl  sur  le  noir,  ou  rousse  sans  teinture,  cl 
par-dessus  une  ceinture  de  cuir  noir,  large 
de  deux  doigts,  lis  doivent  porter  par-dessous 
la  tunique,  selon  la  coutume  du  lieu,  le  sca- 
pulaire  de  six  pouces  de  large  et  de  telle  lon- 
gueur qu'il  descende  plus  basque  les  ge- 
noux, ils  doivent  avoir  aussi  une  chiipe 
Iilaiichc  à  la  façon  d'un  manteau  descendant 
jusqu'à  mi-jambe,  et  ils  la  peuvent  m6nie 
porter  en  public  oîi  la  coutume  le  permet. 
Les  Sœurs  ont  un  voile  blanc  sans  guimpe 
ni  linge  au  front  et  à  la  gorge  ;  néanmoins, 
dans  les  pays  où  ces  sort-s  d'habits  ne  sont 
point  en  usage  parmi  les  tierciaires,  ils  peu- 
vent être  habillés  comme  les  séculiers  en  re- 
ten  int  la  couleur  tannée  (1). 

Coria  prétend  que  les  chevaliers  de  Malle 
dans  leur  origine  ont  été  du  Tiers  Ordre  des 
Carmes.  Il  dil  que  le  B.  Gérard,  leur  fonda- 
teur,était  frère conversdel'ordredes  Carmes, 
cl  que  sous  l'autorité  du  général  il  institua 
un  nouvel  ordre  de  religieux  tierciaires  sous 
l'habit  et  la  règle  de  celui  du  Mont-Carmel, 
pour  combattre  contre  les  ennemis  de  la  foi 
cl  gar  1er  la  terre  sainte,  et  qu'on  leur  donna 
un  couvent  qui  appartenait  aux  Carmélites, 
(|ui  demeuraient  dans  le  saint  sépulcre  et 
qui  furent  transférées  dans  un  autre.  Saraceni 
CL  Munoz  sont  aussi  de  ce  sentiment  ;  mais  ils 
confondent  ce  B.  Gérard,  instituteur  des  che- 
valiers de  Malte,  avec  un  autre  saint  Gérard, 
évéque  cl  martyr,  et  premier  apôtre  de  Hon- 
grie. Allègre,  voyant  que  cette  opinion  n'était 
pas  soulenablc,  puisque  cet  apôtre  de  Hongrie 
est  mort,  selon  le  soniimcntde  presque  tous 
les  écrivains,  l'an  lûi2,  èl  que  le  B.  Gérard  n'a 
institué  l'ordie  des  chevaliers  de  Saint-Jean 
de  Jcrus.ileni  que  l'an  1099,  il  en  a  fait  deux 
saints  différents,  et  tous  deux  enfants  du  pro- 
phète Eiie.  Mais  je  ne  crois  pas  que  les  che- 
valiers de  Malte  soient  de  ce  sentiment,  non 
plus  que  les  bénédictins  qui  reconnaissent 
i'apôlre  du  Hongrie  pour  appartenir  à  leur 
ordre, comme  ayant  été  religieux  delà  célèbre 
abbaye  de  Saint  Georges-le-Majcur  àA'enisc. 

MONT-CASSm  (CoNGRÉGATiox  Dc),  appelée 
aussi  de  la  Grutle  el  de  Saint-Benuit. 

Quoique,  dès  les  premières  années  do  l'é- 
tablissemcnl  de  l'ordre  de  Saint-Benoit  ,  il 
semble  qu'il  ait  été  divisé  en  plusieurs  con- 
grégations, elles  ne  formaient  pas  néanmoins 
de  corps  distincts  et  séparés.  La  [première 
q;ii  ait  pour  ainsi  dire  formé  un  ordre  non- 
vcno  sorti  de  la  tige  de  celui  de  Saint-Benoît, 
est  celle  de  Cluny,  qui  ne  fut  fondée  que 
1  an  910.  La  plus  ancienne  de  ces  congré- 
gaiions  est  celle  du  Monl-Cassin ,  ainsi 
appelée  du  nom  de  ce  célèbre  monastère, 
chef  de  tout  l'ordre  de  Saint-Benoît.  On  lui 
a  donné  aussi  le  nom  de  la  Sainte-Grotte,  à 
cause  du  monastère  qui  a  été  bâti  où  était  la 


grotte  ou  caverne  qui  servit  de  premièrt^ 
demeure  à  saint  Benoîl,  lorsqu'il  se  relira  à 
Subiago;  quelques-uns  ont  aussi  donné  a 
cette  congrégation  le  nom  de  saint  licnoîl, 
patriarche  de  cet  ordre.  Il  ne  se  passa  rien 
de  considérable  sous  le  gouvernement  de 
l'iibbc  Constantin,  quisuccôd.ià  saint  Benoit. 
Siinplicius,  qui  prit  la  place  de  Constanlin, 
contribua  beaucoup  à  la  propagation  de  cet 
ordre,  ayant  publié  la  règle  du  saint  fonda- 
teur, qui  n'était  guère  connue  que  dans  les 
monastères  qui  avaient  été  fondés  de  son 
vivant,  cl  il  excita  les  autres  commun  luiés 
religieuses  à  la  recevoir  et  à  s'en  servir 
pour  perfectionner  leurs  observances. 

Vital  et  Bonit  furent  abbés  du  Mont-Cas- 
sin  après  Simpiicius  ;  mais  le  gouvernement 
de  Bonit  ne  fut  pas  tranquille.  Ce  fut  de 
son  temps  que  la  prédiction  de  saint  Benoit 
s'accomplit.  Ce  saint  avait  averti  ses  disci- 
ples que  tous  les  éditices  du  Mont-Cassin 
seraient  renversés  par  les  Lombards.  H  n'a- 
vait pu  détourner  ce  mallieur,  ni  par  ses 
prières,  ni  par  ses  larmes;  il  avait  seule- 
menl  obtenu  de  Dieu  que  tous  les  religieux, 
échapperaient  des  mains  de  ces  barbares.  La 
chose  arriva  comme  il  l'avait  préilile  l'an 
580;  les  Lombards,  conduits  par  un  de  leurs 
chefs,  attaquèrent  de  nuit  les  monastères  et 
s'en  rendirent  les  maîtres.  L'abhé  Bonit  el 
ses  religieux  ne  laissèrent  pas  de  se  sauver  , 
emportant  avec  eux  queli)ues  meubles  et 
quelques  livres,  entre  lesquels  étaii  l'auto- 
graphe de  la  règle  et  le  poids  du  pain,  avec 
la  mesure  du  vin  qu  elle  prescr  t  pour  le  re- 
pas. Ils  vinrent  à  Uome,  où  ils  fuient  favora- 
blement reçus  du  pape  Pelage  II,  qui  leur 
permit  de  bâtir  près  le  palais  de  Latran  un 
monastère  sons  le  titre  de  S.iint-Jean-Bap- 
lisle,  deSainl-Jean  l'Evangéliste  cl  deSainl- 
P.mcrace. 

Il  y  avait  près  de  cent  quarante  ans  que 
les  Bénédictins  demeuraient  dans  ce  monas- 
tère, ayant  presque  perdu  l'espérance  de  re- 
tourner à  celui  du  Mont-Cassin,  qui,  selon 
toutes  les  apparences,  devait  demeurer  en- 
seveli sous  ses  ruines.  11  avait  servi  pendant 
un  temps  de  ret  aite  aux  bêtes  sauvages  ; 
mais  quelque»  soiilaircs  cl  anachorètes  y 
avaient  établi  leur  demeure  l'an  110,  lors- 
que le  pape  Grégoire  II,  qui  appliquait  tous 
ses  soins  à  faiie  lleuiir  I  état  monastique, 
après  avoir  non-seuletnent  lait  rétablir  à 
Borne  plusieurs  monastères  ruinés,  en  avoir 
fondé  de  nouveaux  et  changé  même  sa  mai- 
son en  un  nionastère,  songea  à  relever  les 
bâtiments  de  celui  du  Monl-Cassin.  l'étronax, 
qui  fut  l'instrument  dont  il  se  servit  pour 
exécuter  son  dessein,  étant  venu  à  Rome 
pour  y  visiter  les  saints  lieux,  avait  peu!- 
être  eu  dessein  de  fonder  quelque  monastè- 
re ;  mais  le  pape  Grégoire  lui  persuada  d'al- 
ler au  iMonl-Cassin,  el  l'engagea  de  travailler 
au  létab  issemcnt  de  ce  monastère.  On  ne 
sait  s'il  était  déjà  engagé  dans  la  profession 
monastique,  il  est  sûr  au  moins  qu'il  était 
originaire  de  Bresse,  et  qu'il  joignait  à  une 


(1)  Voij.,  à  la  (in  du  vol.,  n"'  201  el  202. 


10G3                                        DICTIONNAIRE  DES  ORDRLS  RELIGIEUX.  fflf.i 

iiol)ic -Jxlraclion  bcnuriup  lin  piélc^.  Il  alla  régulic tc;;:  Tasie  el  Reirudc  b.'itiiciU,  à  «ua- 
ilonc  an  Miml-r,is>in  1  an  7:20;  Il  cominoiiça  Irt"  mille-,  ilu  Moiil-Cassiii,  le  nioiia-lùrê  di; 
à  le  rcbàlir,  el  forma  u;:e  notnelle  commu-  l'ioinbarole,  où  files  se  relirèrenl  el  vécurrnl 
iMulé  qui  fui  composcn  de  «luelqucs  religieux  dans  l'observanee  d'une  ex.icle  disci|ilinc. 
(]u'il  avait  amènes  de  Rome  et  de  la  plus  La  i  epulal  on  île  l'abbé  Pétronax  s'el.iit  ro- 
{{ranile  p.irlie  lie  ces  solitaires  qu'il  y  trouva  ;  pindue  dans  les  pajs  éloij;nés.  Saint  Boiii- 
il  gouverna  cc'.te  cnniinui.aiite  en  qualité  lace,  arche\équc  de  M.ijence,  ayant  lait  bà- 
d'abbé  :  il  y  balil  deux  monastères,  le  prin-  lir  la  célèbre  abbaye  de  Fuldeen  Allen>agnp, 
lipal  >ur  la  iiionlagne,  à  l'enlroit  mènir  où  dont  le  prince  l'.arïomaii  fut  foiidaleur,  [)uis- 
il  éiait  du  temps  de  saint  Benoit,  l'autre  sous  qu'il  donna  L'  lieu  sur  lequel  elle  fui  I  âtic, 
le  titre  de-  Saint-Sauveur,  proche  le  cliâleau  désigna  pour  premier  abbe  de  ce  niun.istère 
de  Cassin,  au  pied  de  la  mont  igne,  aux  en-  saint  Stunne.  Mais  voulant  que  la  règle  de. 
virons  duquel  l'on  a  bàli  depuis  la  ville  de  saint  benoît  y  fût  exaclement  obser\ce,  il 
Saint-(ierrnain.  Il  restaitd'  l'ancien  monas-  envoya  ce  nouvel  abbé  au  iMonl-C;issin  pour 
tère  une  tour  que  l'on  \oit  encore  aujour-  y  remarquer  soigneusemenl  et  les  ub-crvan- 
d'hui,  el  où,  selon  un  ancien  maiiu-cril,  à  ces  et  les  usages,  afin  de  les  faire  pratiquer 
certaine  fête  de  l'année  (  peut-être  était-ce  ensuite  à  Fulde.  Gisulplie,  duc  île  liénéV'  ni, 
celle  de  saint  Henoll  )  les  Urecs  el  11  s  Laiins  édifié  de  l'exacte  observance  des  reliai  ux 
faisaient  l'ofllce  :  ce  qui  fait  douter  si  l'abbé  'lu  .Mou!-Cas>in,  leur  donna  le  lerri;oire  d'a- 
l'étronax  institua  dos  moines  grecs  dans  le  lentonr.  l.a  duclussc  Seauniperge,  sa  femme, 
monasièrc  de  S.iiut-Sauvcur,  ou  s'il  avait  voulant  imiter  sa  pieté,  convertit  en  une 
établi  des  moines  grecs  et  des  latins  dans  église,  qui  fut  dédiée  en  l'honneur  de  l'apôtre 
celui  d'en  haut,  ou  si  les  grecs  ne  venaient  sainl  Pierre,  un  temple  qui  se  trouvait  dans 
point  d'un  cerl.iin  m maslèrc  voisin  pour  le  chàieau  de  l^assiu,  et  qui  y  avait  élé  bali 
célébrer  l'oflice  dans  celui  du  Mont-Cassin.  p  ir  les  païens  pour  y  honorer  leurs  fausses 
Mais  comi-ic  Léon  d'Ostie  dit  que  les  moi-  divinités.  Un  des  sujets  du  duc  de  Iténévent 
lies  des  deux  monaslères  de  Cassin  se  Irou-  olîril  aussi  au  mo  laslère  de  S  nn(-Benoil  une 
valent  le  mardi  de  Pâiiues  dans  l'église  pa-  église  de  Saint-Cassicn  qu'il  avait  lail  bâtir 
roissiale  de  Sain'-I'ierre  dans  la  ville  de  à  Cingle,  avec  les  lerres  qui  eu  dépend  ient, 
Salnt-Cermain,  que  l'on  appelait  pour  lors  ce  que  ce  prince  confirma,  el  l'abbé  l'étro- 
de  Saint-Pierre,  <>ù  ils  célébraient  la  messe  uax,  de  sou  consenlement,  fil  b.ilir  au  même 
avci:  ui  cliaiit  piiêlé  lie  gec  cl  de  lalin  jus-  lieu  un  monastère  pour  des  religieuses.  Le 
qu'à  la  fin  di;  l'Lvangile  ,  et  que  celle  solen-  pape  Zucharie,  pour  temo  gner  au^si  l'estime 
iiité  subsistait  encore  du  temps  de  l'abb,'  qu'il  faisait  de  cet  abbé  el  de  ces  religieux, 
Tbeodemarc.  comme  il  parail  par  ses  lettres  les  protégn.iit  en  toutes  sortes  de  renconires. 
a  i'empeieur  Cliarlemagne,  il  se  peut  faire  11  leur  envoya  la  icgle  écrite  de  la  main  de 
que  celle  solennité  ait  été  insliluée  par  l'abbé  saint  Benoît  avec  le  poids  du  pain  et  la  me- 
l'étronax.  sure  du  vin  qu'elle  prescrit,  qui  avaient  été 
Dieu  donna  une  grande  bénéiliction  à  ses  autrcfoi.;  portes  à  Home.  H  leur  donna  des 
travaux,  cl  sa  communauté  devint  fort  nom-  livres  de  l'Ecriture  sainte  et  des  ornements 
breiise  en  peu  de  temps  :  il  y  eut  même  des  pour  leur  église.  II  evempta  leur  mona  tère 
princes  qui  voulurent  être  de  ses  di>ciples  ,  cl  les  autres  i;ui  en  dépendaient  de  la  juri- 
coaimeCarloinan, duc  el  prince  des  Français,  diition  des  é>éques,  et  entre  autres  priv  i- 
lils  du  fjmcux  Charles  Alariel,  m  ire  du  p,i-  legcs  il  leur  accorda  la  permission  de  cnan- 
1  lis.  Ce  piince,  (pii  avait  eu  en  partat;e  l'Ai-  ter  a  la  messe  les  dimanches  et  les  fêtes  le 
leniagne  el  la  Thuringe  ,  après  avoir  soumis  (iloiia  in  exccisis,  ce  qui  n'était  pas  pour  lors 
par  la  lorce  de  ses  armes,  avec  le  secours  de  permis  à  toutes  sories  de  prêtres,  comme  on 
Pépin  son  frère,  ces  peuples  qui  s'étaient  ré-  le  peut  voir  par  la  bullo  de  ce  paj)e  du  18 
voilés  en  plusieurs  rencontres,  renonça  à  fe>  rier  7'il,  qui  est  insérée  d  uis  le  Itnllaire 
ses  Ltals  el  »iiit  à  Rome,  où  il  reçut,  l'an  7i7,  de  celle  congrégation.  Lnfin  l'abbo  Pelro- 
la  lonsure  c  éricale  el  l'habil  monastiiiue  des  nax,  après  aM)ir  gouverné  ci  lie  a!  baye  pen- 
m.iins  du  pape  Zicharie.  11  se  retira  ensuite  dant  trente-Jeux  ans,  mouiut  le  30  avril  750. 
sur  le  mont  Soracte,  où  il  joignit  à  une  11  eut  pour  succrsseur  Opial,  qui  crut  que 
église  de  Saint-Silvestre  qui  y  était  déjà,  un  par  le  crédit  du  prince  t^arloman,  religieux 
moiiasti  re  (ju'il  fit  bâtir,  el  où  il  demeura  de  son  abliaye,  il  pourrai!  recouvrer  le  corps 
quelque  temps;  mais  s'y  trouvant  trop  im-  de  sainl  Benoil,  qui  avait  été  porte  en  Frame 
purlune  de  visites,  il  alla  au  Mont-tjassin  avtc  celui  de  sainte  Scidastique  près  de  cent 
pour  y  vivre  sous  l'obéissiinre  de  l'abbé  Pé-  ans  auparavant,  par  saint  Aigniphe,  ()ueMon- 
trona\.  'l'rois  ans  après,  l'an  730,  Rarliis,  mol,  abbé  de  Fleury,  avait  envoyé  au  Mont- 
qui,  otaiil  duc  d'  Frioul,  f.it  choisi  par  les  (bassin  pour  dieiclier  ce  précieux  trésor. 
Lombards  pour  succéder  à  leur  roi  Luit-  (lu'il  trouva  ensevili  sous  les  ruines  de  l'c- 
prand,  conçut  laiil  de  mépris  des  clioses  du  glise  du  monastère.  Optât  envo\a  de;  ses  re- 
monde, ()ue,  suivant  l'exemple  dol>arloman,  ligiciix  au  pape  Zach.iiie  pour  lui  demander 
il  alla  trouver  à  Rome  le  pape  Zacliarie,  des  lettres  de  recommandaliun  auprès  du  roi 
dont  il  recul  la  tonsure  cléricale  el  l'babil  de  France,  et  le  prier  d'employer  sou  auturité 
monastique.  Tasie,  sa  femme,  et  sa  fille  lie-  pour  contraindre  les  religieux  de  Fleury  à 
Irude,  priri'iit  aussi  l'habil  de  religion,  et  le  restituer  le  corps  de  leur  saint  fondateur, 
pepe  les  envoya  tous  au  monastère  du  iMonl-  Mais  ceux  qui  furent  envoyés  en  France  ne 
Cassin,  où  Rai  liis  se  soumit  aux  observances  réussirent   pas  dans   leur   ambassade,  «luoi- 


)W:> 


MON 


MON 


lOCG 


Hu'ils  eussent  la  prnlpciion  du  roi,  qui  en- 
voya (les  personni'S  .i  FIcuiy  pour  enlever 
«le  lorce  le  corps  de  saint  .!{(  noU  ;  car  ceux- 
ei,  nj.int  été  couverts  de  lcnM)res  en  entrant 
ilans  l'église,  en  furent  tellement  tro  iblés, 
'lu'ayani  demandé  pardon  à  l'alibé  et  aux  re- 
ligieux, ils  retiuruèreiil  vers  le  roi  ;  el  l'ar- 
chevcque  de  Rouen,  qui  était  porteur  des  or- 
dres de  ce  prince,  se  conlenUi  de  demander 
(luelque  peu  des  reliques  du  saint,  pour  les 
envoyer  au  Mont-Cassin,arin  que  ce  lieu, qui 
avait  clé  il'uslré  p;ir  sa  présence,  ne  fùl  pas 
privé  tout  à  fait  d'un  si  grand  trésor. 

Les  richesses  de  cctle  abbaye  et  les  monas- 
tères de  sa  dépendance  ausnientaienl  do 
jour  en  jour  ])ar  la  libéral. té  de  ilusieurs 
personnes  qui  y  donnaient  tous  leurs  biens. 
Sous  l'abbé  Thoinichis,  qui  succéda  à  Gra- 
lian  l'an  76G,  un  gentilhomme  de  Béncveut, 
iiiimmé  Léon,  se  donna  avec  tous  ses  bii>ns 
au  monastère  du  Monl-Cassin  :  la  donation 
l'ut  écrite  de  sa  propre  main  el  fut  mise  à 
l'endroit  où  avait  éié  autrefois  le  corps  de 
saint  Benoit.  Elle  contenait  entre  autres  cho- 
ses que  tous  ses  serfs  ou  esclaves,  auxquels 
il  venait  de  donner  la  liberté,  seraient  vas- 
saux de  l'abbaye;  qu'eux  el  tous  leurs  biens 
dépendraient  d'elle,  et  que  tous  les  mois  il  y 
en  aurait  quatre  qui  ne  s'occupera  cnl  qu'au 
servie*  des  religieux  et  leur  oliéiraiont  <n 
tout;  qu'ils  ne  pourraient  vendre  qu'enire 
i!u.x  leurs  biens  et  s'en  faire  donation  l'un  à 
l'autre,  el  que  les  biens  de  ceux  qui  mour- 
raient sans  enfanls  appartiendraient  au  rao- 
naslérc,  mais  que  les  moines  ne  pourraient 
vendre  leurs  enfants  comme  esclaves,  les  de- 
vant regarder  comme  personnes  libres. 

Charlemagne,  étant  en  italie  l'an  787,  alla 
par  dévotion  au  Mont-Cassin,  el  se  reconi- 
manda  aux  prières  des  religieux  :  il  li-ur  ac- 
corda des  letlres  pour  les  maintenir  dans  la 
jouissance  de  leurs  biens;  il  confirma  leurs 
privilèges,  leur  en  accorda  de  nouvearx  cl 
leur  conserva  le  droit  qu'ils  avaient  d'élire 
leur  abbé.  Théodemar  l'était  pour  lors  :  ce 
fut  dans  ce  voyage  qu'il  d  manda  à  Charle- 
magne le  monastère  de  Glanfcuil,  fondé  en 
France  par  saint  Maur,  se  piaigi  ant  à  ce 
prince  et  au  pape  Adrien  1"  d>;  ce  que  c.'  mo- 
nistère  de  Glanfcuil,  qui  dépendait  dans  son 
origine  de  celui  du  Mont  Cassin,  en  avait  élc 
disirait,  et  de  ce  qu'il  ava  t  élé  dépouillé  de 
ses  biens  par  l'abbé  Gaïdull'e,  qui  était  un 
Ircs-méihanI  homme.  Le  pape  et  l'empereur 
eurent  égard  aux  remonlrances  de  l'abbé 
'J'héodemai  ;  Glanfeuil  fut  restitué  au  Mont- 
Cassin;  et  il  fut  ordonné  que  ((uand  l'abbé 
scr.iit  mort,  celui  du  Mont-Cassin  en  nom- 
merait un  autre  qui  recevra. t  de  lui  la  béné- 
diction et  irait  tous  les  cinq  ans  au  .Mont- 
Cassin,  où  il  prendrait  la  place  du  prieur. 
r.,cs  moines  de  Saint-I^laitr-des-Fossés  près 
l'aris,  chez  lesquels  on  porta  le  corps  de 
saint  Maur  l'an  8GS,  par  les  ordres  du  roi 
Charles  le  Chauve,  dans  la  ciainle  des  Nor- 
mands, qui  ravageaient  la  France  depuis  plu- 
sieurs années,  assujettirent  à  leur  monastère 
relui  de  Glanfeuil  ;  mais  ceux  du  Mont-Cas- 
sin le  réclamèrent  une  seconde  fois  cl  porlè- 

DlCTIONHAlBE    DES    ObDIIES    RELIGIEUX.    11. 


rent  leurs  plaintes  au  pape  IJibain  II,  qui, 
ayant  vu  la  bulle  d'Adrien  I",  leur  fil  resti- 
tuer ce  monastère,  qui  a  élé  de  leur  dépen- 
dance pendant  près  de  deux  siècles. 

TanMis  que  les  Normands  ravageaient  la 
France  et  réduis, ;icnt  en  cendre-;  la  plus 
grande  partie  des  monastères,  les  Sarrasins 
en  Italie  ne  causaient  pas  moins  de  maux. 
Ils  pillèrent  le  territoire  de  Rome,  saccagè- 
rent le  bourg  de  Sainl-l'icrrc,  cl  l'église  de 
ce  prince  des  a[iôlres  ne  fut  pas  à  l'ahri  de 
leurs  insultes.  Ils  allèreni  au  Mont-Cassin 
pour  me  Irc  encore  ce  monastère  dans  le 
même  état  de  dé  olalion  où  la  fureur  des 
Lombards  l'avait  aut  efois  ré  luit,  n'y  avant 
pas  laissé  pierre  sur  pierre.  Mais  Dieu  écouta 
les  prières  des  religieux,  qui  se  couvrirent  de 
cendres  et  de  ciliées,  cl  la  nuit  (lue  les  bar- 
bares avaient  choisie  pour  ravager  le  mo- 
naslère  ayant  été  employée  à  la  prière  et  à 
l'oraison,  il  fut  pour  cette  lois  préservé  de 
leurs  insultes;  car,  par  un  miracle  surpre- 
nant, lorsque  les  Sarr  sins  se  disposa  eni  à 
passer  la  rivière  de  Liris  ou  de  Garillan,  lo 
temps,  qui  élail  extrê  ueuicnt  serein,  chan- 
gea tout  d'un  coup  :  il  tomba  une  pluie  si 
prodigieuse,  que  cette  rivière  déborla,  et  les 
Sarrasins  furent  obligés  de  s'en  retourner, 
s'élanl  contentés  d'avoir  brûlé  deux  prieurés 
des  dépendances  du  Mont-Cassin.  Bassace 
était  pour  lors  abbé  de  ce  monastère.  C'était 
!a  couiuinc  de  tenir,  le  dernier  jour  d'août, 
un  chapitre  général,  où  se  trouvaient  les  re- 
ligieux des  monastères  de  la  dépend.mct'  de 
celte  abbaye.  L'abbé  les  entrclena  t  des  de- 
voirs de  l'observaiice,  et  les  exhort.it  à  s'en 
bien  acquiller.  Le  jour  suivant  on  faisait  le 
choix  de  ceux  qui  devaient  demeurur  dans 
chaque  [iri  'uré,  où  on  les  envoyait  pour  y 
exercer  les  l'ouitions  qui  leur  é. aient  com- 
mises. 

Bassace,  qui  avait  gouverné  celle  abbaye 
|)endant  dix-huit  ans,  étant  mort  l'an  856, 
iîcrthaire,  l'un  de  s  s  disciples,  fut  élu  en  sa 
place;  et  comme  il  voulut  mellre  à  couvert 
son  monastère  de  toutes  insultes,  il  l'envi- 
ronna de  tours  et  de  fortes  murailles,  et  com- 
mença à  bâtir  une  vil  e  aux  environs  de  ce- 
lui de  Saint-Sauveur, au  pied  de  l.i  montagne. 
Il  fit  d'autant  plus  aisément  celle  dépense, 
que  son  abbaye  augmentait  chaque  jour  en 
richesses  par  l.'-s  grandes  donations  que  l'on 
y  faisait.  Mais  ces  précautions  furent  inuti- 
les; car  les  Sarrasins  étant  retournés  au 
Mont-Cassin  l'an  8GG,  ils  y  firent  quelque 
dégât  et  jetèrent  des  meubles  el  des  orne- 
ments d'église  dans  le  fleuve,  ou  les  brisè- 
rent; mais  ils  cpargnèrcnt  pour  lors  les  bâti- 
ments, moyennant  une  soin  me  d'argent  qu'on 
leur  olîrit.  Attirés  cependant  p  ir  les  graniles 
richesses  qui  élaient  dans  (C  monastère,  ils  y 
relournôrenipouruiie  troisième  lois, l'a n88i. 
Us  attaquèrent  le  monastère  d'en  haut  le  4 
septembre,  et  le  réduisirent  en  cendres,  et 
six  semaines  après  ils  en  firent  autant  à  ce- 
lui de  Saint-Sauveur  au  bas  de  la  montagne. 
Us  tuèrent  au  pied  de  l'autel  de  saint  Martin 
l'abhé  B«!rlhaire,  qui  comme  un  bon  pasteur 
s'exposa  à  la  mon  pour  conserver  son  trou- 

34 


1(07                                          DICTIONNAIRE  DF.S  ORDRKS  HEUGIEUX.  Kfii 

peau,  car   lous  sps  rcligicus  6rlinppèrc'.:t  à  les  obser»ancp,s   régulières   pour   \\srr  i\  l,i 
la  rage  tic  rcs  l),irl>nn's,   cliarun   ciii|K)iianl  f  ri;oii  des  soculicrs,  te  pape   A);apol    II,   l',;ii 
ce  qu'il  |ioiiv,iil   du  Ircsor  do  leur  é'^lise  cl  O'iO,  à    la   sollicitali m   de    l'ai  be  Baudouin, 
lies  aulri's  meubles.  Us  se  rclirèrciil  à  Tcaiic,  obligi-a  ces  rel!j;ii'uv  de  relouriicr  au  .Minii- 
«lans  le  prii'uri' do  Saini-Uciudl,  où    ils  du-  ('assin,    pour  y  \iMe   dans    les  observances 
reiit    pour    abbo    Aiiizelar,    qui  élail    prieur  ré;;ul  ères.  Ils    n'y    allèronl    nea:m)iiins    qne 
du  Monl-Cassin,  cl  (pie  ^"n  mcrllo  li(  6lc\er  suos  l'alibé  Aligerne.  (jui  fui  élu  l'an  '.IV'.I,  il 
sur   le  sioi;o  épi«ropal  de   Tcaiie.    Douv  ans  ic   ninnastère,  qui     éliil    demeuré    pendani 
après,  il  enirepril  do  rétablir  le  moiiaslére  soixante   el  dix-scpl  ans    (Oiiine  de-erl  cl 
de  Sainl-S.iuveur;  ee  qui  ue  lui  fui  p  is  difli-  ab.indnnné,  depuis   sa    dernére  desir'ie  ion 
cile  à  excculer,  parce  que   es  biens  du  Mont-  par  les  Sarrasins,  fui  t'c  nouveau  habile  par 
Cassin   s'accrurent    beaucoup    pendant   son  une  nombreuse  cornu  uuauie   qui    se   furina 
adminisiralion. L'abbé  l,éon,ran'JDV,lilrebà-  dans  la  suile,  où   l'on  \it    en  (juchiuc  f  ç  n 
tir  celui  du  Monl-Gassiu,  vingl-sepl  ans  après  revivre  l'esprit  de  leur  foudaleur  sous  le  ;;ou- 
sa  deslruclion.  Un  accident  imprévu  réduisit  \erneinenl  d'Ali^ierne,  qui,  comme  un   autre 
en  cendres  celui  de  Tcano,  où  la  pluparl  des  Pélronax,  a  été  le  reslauialeur,  noa- seule- 
livres  du   ,Moni-(]a>sin   furent  biûles,  avec  ment  des  édifices  ma  criels  de  celle  abbaye, 
l'auloiraplie  d.'  la  règle  de  saint  Ueuoil.  Li  s  mais  encore  de  l'observance  régulière.   Il   fit 
reli.ieux    n'abandounèrent    pas    pour   cela  aclie\cr  les  bàlimenls  (;ui   avaient  été  coni- 
Tèane:  ils  y  reslcrcnl  enc  re  jusqu'en  l'au  mencès  par  les  abbés  Léon  el  Jean,    el   rc- 
915,   que  l'abbé  Léon  étant  mort,    el  ne  s-  couvra  la  pluparl  des  biens   qui  avaient   élu 
Irouvanl  personne  |iarmi  les  religieu>L  capa-  usurpés  par  les  comlcs  de  Toaue  el  d'Aqiiino, 
ble  de  lui  succéder,  Landulpbc  el  Anlénul-  ce  qui  lui  attira  beaucoup  de   persécutions, 
plie,  princes  de  Capoue,  prièrent  un   saint  pi  iucipalement     de    la     pa  l   d'Adenulphe, 
homme    nommé  Jean,   qui  él.iil  an  hidiacre  comle  d'Aquino,  qui,   vojaut   qu'il  lui  rede- 
de  IT-glise  de  Capoue,  de  prendre  le  giiuver-  mandait  ce  qu'il  avait  usurpé  à  sou  monas- 
nement  de  cette  (ommunaulé  d-  Téane.   Il  tère,  el    que,  sur  le  refus  qu'il  en  avail  lait, 
l'accepta,  prit  l'habit  monasiique,  el  ayant  cet  abbé  en  avait  porté  ses  plaintes  à   Lan- 
été  élu  abbé  par  les  religieux,  il  les  fit  con-  dulpbe,  prince  de  Capoue,  il  en   fol  si  irrité 
senlir   à    venir    demeurer  à   Capoue.    Mais  qu'il  le   lit  enl.  ver,   et    l'.iyani    fait   couvrir 
comme  il    n'y   ava  t  point  de  monastère  en  d'une  peau  d'ours,  il  l'exposa  à   des  ebiens 
cette  ville,   cet  abbé  acquit,  par  échange  de  pour  servir  de  spectacle   au    leuplo.  Miis   le 
relnide  Saint-Vincent  de  Voltorne, une  petite  prince  de   Capoue,  voulant   venger  raffronl 
6"lise  à  la  porte  Saint-Auge,   où  trois  moi-  l'ail  à  Aligerne,  commanda  à  Aiicuulpbe  do 
ne«  fort  vieux  demeuraient,    dans  une  petite  le  venir  trouver.   Ce   comle  aima  mieux  se 
maison  qui  n'était  bâtie  que  de  bois.   Il  y  fit  révolter  contre  son  prince  que  d'oliéir,  ce  qui 
construire,   par  les  libéralités   de    plusieurs  obligea  Landulphe  de   venir  à   A(iuiiio  avec 
personnes,  une  église  en  !'honne>  r  de  saint  des  troupes.  Adenulpbe,  s'y  voyant  assiégé, 
Benoît,  avec  un   monastère  où   il  assembla  et  ne   pouvant   éviter   de    tomber  entre    le» 
plus  de  cinquante  religieux.  mains  do  son  seigneur,  se  mil  une  corde  au 
Quoique  le  monastère  du   Mont-Cassin  fût  cou  el  se  fil  ensuite  con  luire  par  sa  lemme 
inliabilé,  il  élaitcepcndanl  toujours  reconnu  en  la  présence  du  prince    pour   implorer  sa 
pour  le   chef  de  tout  l'ordre.  Le  pape   Ma-  clémence;  mais  Landulphe  le  livra   ainsi  lie 
rin  11  lui  accorda  plusieurs  privilèges  ran'Jl'*,  entre  les  mains  de  l'abbé  Aligerne,  et  lui  fit 
et  le   main  inl  dans  la  possession  de  tous  ses  restituer  lous  les  biens  qu'il  avait  pris  à  son 
biens  cl  de  tous  les  monastères  tant  d'Iiom-  abbaye. 

mes  que  de  filles  qui  étaient  de  sa  dépen-  11  y  a  de  l'apparence  que  l'observance  ré- 
dame,  et  confirma  le  droit  que  les  religieux  guilère,  qui  avail  été  rétablie  au  .Mont-Cas- 
avaietît  d'élire  leur  ablie.  Le  I'.  Mabillon  dit  sin  par  l'abbé  Aligerne,  so  itlril  queUjue  al-- 
que  ce  pape  accorda  à  col  abbé  la  permission  teinte  sous  le  gduvirneincnl  de  Manso  i,  qui 
déchanter  à  la  m  sse.los  fêles  et  dimanches,  lui  succéda  l'an'JSG.el  qui,  bien  loin  de  suivie 
le  6'/or(a  m  cxcc/si.s;  mais  ions  avons  re-  ses  traces,  mena  au  contraire  une  vie  tout 
marqué  ci-dessus  (|uc  le  papeZacbarie  avail  opposée,  ijui  ressentait  plus  celle  d'un  sécu- 
acconté  aux  religieux  de  celle  abbayo  la  lier  adonné  à  ses  plaisirs,  que  celle  ii'un  suc- 
inèmc  grâce  deux  cenU  ans  auparavant,  ccsseur  de  saint  Benoîi.  Il  se  faisait  suivre 
l'eul-étre  ce  savant  bénédiclin  a-l-il  trouvé  ordinairement  par  un  grand  nombrcile  <lo- 
la  bulle  de  Zacharie  su-pccle,  ce  qui  l'a  pu  mesiiques  vêtus  de  soie  :  il  avait  de  grands 
(•in|iëeber  de  parler  de  ce  privilège  plus  lot  équipages  et  fréquentait  souveiU  la  cour  de 
qu'eu  l'an  OW,  et  il  .n'a  pas  apparemment  l'empereur.  L'envie  de  doiiiincr  lui  fil  cnm- 
rombaltu  celte  bulle  |)<uir  ne  pas  laire  de  mencer  une  forteresse  où  s  tint  Tliom  is  d'A- 
peine  aux  Bénédictins  de  la  i  ougrégation  du  (|uin  a  pris  naissance  dans  la  sute;  ce  qui 
Monl-l'.assin,qui  comptent  fort  sur  toutes  les  donna  île  la  jalousie  aux  princes  de  Capoue, 
bulles  in-érées  dans  leur  Bullaire,  quoique  qui  appréhendaient  qu  il  ne  voulut  se  rendre 
cejiendaiil  il  j  eu  ail  plusieurs  de  douieuscs,  iiiaiire  de  loulc  la  province.  Alberic,  evéqiie 
principalement  celles  du  pape  /acharie.  de  .Mars;co,  qui  av.iit  envie  île  semparei  de 
Comme  li  s  princes  de  t;apouc  avaient  as-  l'abbaye  du  Mont-Cassin  pour  la  donner  a  iin 
sujctli  te  monastère  de  Sami-Henoil  de  Ca-  fi  s  qu  il  avait  eu  d'une  concubine,  pr.iliiant 
puue  à  lur  dominatioii,  ce  qui  avait  clé  de  la  jalousie  des  iirincos  de  Capoue.  con- 
cause  que  hs   religieux    avaient  abandonné  vint  d'une   somme  d'argeul  avec   quelques 


1069 


M,>N 


MON 


Iu7v» 


liKurgfois  (!o  Capoue  i'(  quelnues  mi'-chanls 
iniiiiies.  pour  se  saisir  de  rabi)é  cl  lui  crevur 
l(Sjcux:  (■«■iix-ci  ajaiit  exéculé  leur  pro- 
messe l'an  990,  ils  iniri  ni  les  jeux  de  (et 
abbé  dans  un  lingo  pour  les  porier  à  ccl  in- 
digne prélal,  afin  de  rtcevoir  de  lui  la  ré- 
compense de  leur  crime;  mais,  par  un  juste 
jugement  de  Dieu,  ce  méchanl  évèque  niou- 
rulàla  même  heure  i|ue  Mansoii  avail  été 
privé  de  la  vue. 

Coinoie  il  esl  plus  ai'iéde  tomber  dans  le 
relâcheincnt  que  de  s'en  rcl.  ver,  il  et  à 
croire  que  les  religieux  du  Moiil-Cassin  ne 
profitèrent  point  ni  des  avis  ni  de  l'exemple 
(|ue  leur  donna  leur  abl  c  Jean  11,  successeur 
de  Mansoii,  qui  élail  un  tiès-saint  homme, 
et  que  ce  fut  ce  qui  l'obligea  à  renoncer  à 
celle  dignité,  pour  se  retirer  dans  une  soli- 
tude avec  cinq  ou  ^is  religieux  qui  voulu- 
rent apparc  nmcnt  éviter  le  relâchement. 
Cem  qui  restèrent  au  iMoiit-(]assin  ne  profi- 
lèrent pas  davantage  des  instiuctions  que 
leur  donna  Jeaji  lli,  qui  fut  élu  aprè^  ja  de- 
mission  volontaire  de  Jean  II.  Cet  abbé  fit 
paraiire  beaucoup  de  cousiancc  el  de  gr.in- 
deur  d'âme  dans  toutes  les  adversités  qui  lui 
arrivèrent  pendant  les  douze  années  de  son 
gouvernenienl  :  car  pendant  qu'il  ne  son- 
geait qu'à  embcll.r  l'église,  à  faire  de  noii- 
veaux  bâtiments  et  à  augmenter  le  nombre 
des  monastères  de  sa  dépendance,  un  grand 
Ircmblenienl  de  terre,  qui  dura  pendant 
quinze  jours,  endommagea  noiablement  l'é- 
glise. D'un  aulre  côté,  les  princes  voisins, 
par  les  vexations  qu'ils  lui  firent,  l'obligè- 
rent de  se  retirer  à  Capoue;  et  ses  moines, 
pendant  son  absence,  lui  a^anl  suscité  une 
persécution  d  niestiiiue,  le  déposèrent  et 
élurent  en  sa  place  un  a  >tre  abbé.  Mais  le 
schisme  ne  dura  que  sept  mois,  et  les  Irou- 
liks  ayant  été  apaisés,  l'abbé  retourna  au 
Monl-Cassin,  oîi  il  mourut  l'an  1010.  Ce  que 
l'on  pourrait  condamner  dans  la  conduite 
lie  cet  abbé,  c'est  d'avoir  de  son  vivant  fait 
reconnaître  pour  son  successeur,  par  une 
partie  de  ses  religieux,  un  de  ses  parents, qui 
Il  était  encore  (|uu  novice  ;  ce  qui  causa  un 
nouveau  schisme. 

11  y  eut  un  troisième  schisme  en  112G  et 
un  quatrième  l'an  ji38,  et  de  temps  en  temps 
le  monastère  se  trouvait  vexépar  la  tyrannie 
des  seigneurs  voisins.  L'an  10.J0,  Pandulphe, 
prince  de  Capoue,  s'empara  de  f;resque  tous 
les  bourgs  et  villages  qui  lui  appartenaient, 
(tout  il  mit  en  possession  les  Normands,  qui 
suivaient  son  parti  et  qui  étaient  pour  lors 
répandus  dans  l'Ilalii".  11  enleva  les  vases 
s  icrés  et  les  ornements,  et  donna  le  gouver- 
nement de  la  ville  de  Saint-Germain  et  du 
iiitinasièrc  du  Monl-Cassin  à  Todin,  l'un  des 
serviteurs  de  celte  abbaye,  qui  traita  les 
moines  avec  tant  de  dureté,  qu'il  lit  manger 
les  serviteurs  dans  le  réfectoire,  où  juscpi'a- 
lors  aucun  laïqui'  n'avait  été  a  Imis,  et  qu'un 
jour  de  l'Assomption  de  la  Vierge  ils  ne  pu- 
rent pas  avoir  de  vin  pour  dii'e   la  messe. 

Richer,  qui  fut  abbé  en  10:17,  fut  obligé  de 
lever  des  troupes  pour  recouvrer  les  terres 
oui  avaient  éic  usurpées.  Il  disputa  le  pas- 


sage du  Garill.in  aux  conVe*  d'^iuino  et 
aux  Normands  qui  étaient  avec  eux;  mais 
ayant  été  forcé,  il  fut  fait  prisonn  er,  et  pi-n- 
danl  quinze  jours  tout  le  territoire  de  Cassin 
fut  en  proie  à  l'ennemi.  L'abbé,  ayant  été  mis 
en  liberté,  all.i  en  Allemagne, d'où  il  ramena 
des  troupes  avec  le  secours  disqiie'Ies  il 
contraignit  les  Normands  qui  occupaient 
les  terres  de  l'abbaye  de  lui  prêter  serment 
de  fidélité;  mais  ils  le  violèrent  peu  de  temps 
après,  car  se  voyant  en  grand  nombre,  ils 
bâtirent  le  château  de  Saint-André  pour  leur 
servir  de  place  d'armes  et  de  retraite,  sans 
avoir  ég  ird  aux  dcfen-es  de  l'abbé,  qui  eut 
recours  alors  aux  armes  spirilneres  de  la 
prière,  et  qui,  par  le  secours  de  saint  Renoil, 
fit  plus  qu'il  n'aurait  fait  avec  des  troupes 
réglées:  car  les  Normands  étant  tenus  au 
Mont-I^assin  sous  l;i  (onduite  de  Kitdolphe, 
sous  prétexte  detraiter  de  paix,  mais  en  effet 
dans  le  dessein  de  faire  [irisonnier  l'abbé  ou 
de  le  tuer,  ils  entrèrent  dans  l'église  comme 
piiur  faire  leurs  prières,  ayant  laissé  leurs 
armes  à  la  porte,  suivant  la  coutume  de  ce 
temps-là,  auquel  il  n'était  pas  permis  d'en- 
trer dans  l'église  avec  des  armes.  Les  ser- 
viteurs de  l'abbaye  s'en  étant  aperçus,  se 
saisirent  d«s  armes  et  des  chevaux  des  Nor- 
mands, sonnèrent  le  tocsin  pour  faire  prendre 
les  armes  aux  habitants  des  lieux  c  rconvoi- 
siiis,  et  se  jetèrent  sur  les  ennemis,  en  tuè- 
rent plusieur-  et  firent  prisonnier  Kodolphe, 
leur  chef,  avec  plusieurs  autres  ;  de  sorte 
qu'eu  un  seul  jour  les  moines  du  Monl-Cas- 
sin recouvrèrent  tous  les  lieux  qui  avaient 
été  usurpés,  à  la  réserve  des  châteaux  de 
Saint-Victor  et  de  Saint-André,  dont  ils  chas- 
sèrent aussi, quelques  jours  après,  les  Nor- 
mands ;  après  quoi  l'abbé,  ne  se  fiant  plus  à 
leur  serment,  fil  cntoun  r  de  murs  tous  les 
(  hâleaux  qui  dépendaient  de  l'abbaye,  et  y 
mit  garnison. 

Le  monastère  du  Monl-Cassin  prit  un  non- 
veau  lustre  sous  le  gouvernement  de  l'abbé 
Didier, depuis  pape  sous  le  nom  de  V  icior  III, 
qui  est  regardé  comme  un  des  restaurateurs 
(le  celte  célèbre  abbaye.  Il  fit  abatte  l'an- 
cienne église  l'an  lOGii,  et  en  fii  rebâtir  une 
autre  avec  toute  la  magnilitence  possible, 
ayant  fait  venir  de  Rome,  avec  b(viucoufi  de 
depinse,  des  marbres,  des  colonnes,  des  ba- 
ses et  autres  matériaux.  Il  envoya  inème  jus- 
qu'à Gonstantinople  pour  faire  venir  d'ha- 
biles architectes.  L'église  fut  achevée  au 
bout  de  cinq  ans,  et  la  dédicace  s'en  fit  avec 
beaucoup  de  solennilé  et  un  grand  concours 
de  prélats;  car  il  y  eut  dix  arcbevcqucs  et 
qii.irantc-lrois  évoques  qui  y  assistèrent  avec 
Hichaid,  prince  de  Capoue,  son  fils  et  son 
frère,  Gisulphe,  prince  de  Salerne,  et  Lan- 
dulphe,  prince  de  ISénévent,  et  plusieurs  au- 
tres seigneurs.  L'abbé  Didier  ne  se  contenta 
pas  d'avoir  fait  rcbâiir  l'église,  il  ajouta  en- 
core plusieurs  édifices  au  monastère,  dont 
les  richesses  augmentèrent  dans  la  suite  par 
les  grandes  donations   qui  lui  furent  faites. 

Le  schisme  (jui  arriva  dans  l'Kglise  l'an 
ILJO,  a  près  la  mort  du  pape  Honori  us  II,  pensa 
causer  encore  la  ruine  de  ce  monastère.  Le 


\i:i                                          niCTIONNAIHE  OF.S  OUDRr;S  UELir.lELX.                                          10-2 

même  jour  qu'liiiitifoiil  11  fui  élu  caiioiiii]u.'-  I.i's  évononicnls  1  •«  plus  romarfjiiaMi'S  rjui 

incnl  pour  siincsseur  il'llono.  ius ,  le  cinli-  ariivorciil    dans  la  suite   dan<   «•t'ili-  alih  je 

liai  Pierre  de  Léon,  ay.inl  une  pui -saule  fac-  regardent  le  tioiivei  iieinciil  spirilurl.    I.or.-— 

tain  dans  Koine ,  se  lit  aussi  prnclainer  pape  que  saint  Cclelin  fut  éle>é  sur  la  tbaire   de 

sous  le  nom  d'AnacIcl  11.  La  France,  l'Aile-  sainl  Pierre,  l'an  12'JV.  il  nnl  au  Monl-Cas- 

iiiafcne  cl  l'Anglrlcv  re  reeonn. lissaient  Inno-  siii,  et  \oulant  l'unir  à  la  longrégalion  (ju'il 

lenl.  L'Iialie   suivit   Icpali  d'Aiiailct ,  qui,  a^ail  fondée  et  qui  a  porté  son   nom^  il  prr- 

poury  attirer  Ki'ger,  duc  de  1.1  l'ouill -,  cl  se  suada   aux    religieux    de    quitlir    leur  lialiit 

le  rendre  plus  favoiable,  érigea  ses  Hais  en  pour  |  rendre  celui  de  sa  congrégation,  qui 

royaume  sous  le  nom  de  Sicile.  L'empereur  était  gris  et   d'une  élolT.'  irès-ïrossiére.  Il  y 

J.o  h  lire   elanl  venu  en  Italie  pour  rétablir  le  envoya  près  de  (inquanle  religieux  de  celte 

pape  Iniiocenl  sur  son  siégi'  ,  se  lit  conroii-  coiurcgalion  nouvelle,  et  y  nomma  pour  ab- 

i:cr  parce  |)oiil:fe  dans  le  palais  de  Latran  ,  lé  Aiigelar,  qui  ct.iildc  la  inéine  congréga- 

el  sa  présence  pacilia  tous  1rs  troubles.  .Ma  s  titin  cl  qui  ne  gouverna  que  cinq  mois  ;  car 

à  peine  ce  prince  ful-il  parii ,  que  Uiiger,  s'é-  le  pape  sainl  Celeslin   ayant  renoncé  celle 

lan' mis  en  campagne  avec  une  .armée,  s'em-  même  année  au   poutilical  ,  lîoiiifare  \'I11 , 

parade  presqu.-  toutes  les  l  rrcs  du  sainl-  (|ui   lui  succéda,   cassa   tout  ce    qu'il  avait 

siège.  L'cmpeieur,  qui  n'iivail  rien  diminué  lait,  excepté  les  cardinaux.   Les    Célesllns 

(le  son  affeclio  i   pour  l'Lglise  ,  relourna  en  sortirent  du  .M   iit-Cassin,  cl  i!  fit  rendu  aux 

Ita  ie  avec    une    puissan  e  année.    Pendant  Héni'diclins.quilepos-édèrcnlet  élurenlleur.s 

qu'il  était  en  cliemin  ,  Guarin  ,  cliancelicr  de  abbés  jUM|u'en  l'.m  LUS  .  qu'aprôs  la  mort 

lloger  ,   voulut   coulraiiidre    le^  moines    du  de  l'abbé  Isuard.  le  pape  Jean  XXII  en  don- 

Mont-Cassin  d'abandonner  leur  iiionaslèieen-  na  l'administration  àOdon,  patriarche  d'A- 

Irc  les  mains  de  ses  gens  pours'opposcrà  l'cm-  lexandrie;  et  après  la  mort  de  ce  prélat,  qui 

pereur  ;  mais  ils  n'y  voulu,  eut  pas  consentir  arriva   l'an    l.'J23  ,  le  même    pape    ér  gea   le 

et  déclarèrent  qu'il-,  coinbaltraient  jusiju'à  la  .Munt-l^assin  cl  tout  son  territoire  en  évéclié, 

mort ,  el  (iu'ils  soufTriraicnl  plutôt  d'être  ré-  et  supprima  la  digiii  é  d'abbé.  Il  y  eut  neuf 

diiils  à  iiiangif  la  cbair  des  chevaux,  des  évciiues  de  suite,  el  après    la  mort  d'Ange 

chiens  el  des  rais ,  que  de  consentir  que  leur  des  Ursins,  qui  fut  le  dernier,  el  q  li  mourut 

mon;:stère  lombâl  entre  les  mains  des  sécu-  l'an  1367,  Urbain  \',considéra'il  que,  pendant 

liers.   Sénicrecl,    qui  êiail  pour  lors  abbé,  près  de  quaranle-ijnatre  ans  que  ce  monas- 

crnyant  lléchir  l'fsprit  du  chancelier,  lui  en-  tère  n'.ivail  point  eu  u'ab  es,  l'observance 

voya  douze  de  ses  plus  anciens  religieux  nu-  régulière  en   avaii   clé  presque  bannie  ,  lui 

p.ieds,   pour   le   prier    de  leur   accorder  d  i  resli  iia  le  litre  d'abbaye,  ei  supprima  la  di- 

temjiS,  alin  de  convoquer   'e  chapitre  gêné-  pnilé  épisi  opale  ;  il   iiril  ce  monastère   sous 

rai  pour  prendre  l'avis  des  rel'gieux  qui  de-  sa  protection,  en  fut  lui-niènie  abbé,  et  le  fil 

incuraicnl  dans  les  monastères  de  l.i  dépen-  gouverner  par  ses  p'ocureurs  jusc(u'ei»   l'an 

dance  du  Monl-Cassin.  La  communauté  con  -  l-i70  ,  qu'il  mourui.  AprJ's  sa  mort,  Uarthé» 

duisil  CCS  douze  religii  ux  à  la  porte  du  mo-  lemy  de  Sienne  fut  élu  abl-é   l'an  l.'37l.  Mais 

naslèic,  fon  lant  tous  en    larmes  ;  ils  rentré-  quoique   le  pape  eût  érigé  le  Mon  -Ca>sin  el 

renlcnsuile  dans  l'égliseï  II  frappant  leur  léle  tout  son  territoire  ci  évccbé,  l'on  peut  dire 

contre  le  pavé,  ils  implora  eut  la  miséricorde  qu'il  ne  lit  pas  un  nouvc  au  dioeèse  ,  puisiiuo 

'le  Dieu  el  le  sei  ours  de  saint  Benoit.  Ils  li  -  les  abbés  du    Monl-C.issin  avaient   toujours 

r.  ni  des  proccssioas  où    ils  porlèrenl,  entre  eu  une  juridiction  presqueépisropalcccmmo 

autres  reliques,  du  bois  delà  vraie  croi\  ,  ils  l'ont  encore.  Ce  pontife  ne  démembra  neii 

un  bras  de  l'apôlre  sainl  Mallhieu  et  un  Iras  des  aulreu  diocèses  pour  former  celui  de  Cas- 

dc  sainl  Maur  :  ce  qui  ayant  irrite  davantage  sin  ;    el  lorsque  le  |  ape  Urli.iin  V  supprima 

le  chancelier,  il  menaça  de   faire  couper  le  la  dignité  episcop.ile,   il  ne  diaii^iui  rien  do 

nez  et  les  lèvres  à  Ions  les  religieux,  et  leurs  la  juridiction  de  l'abbé  du  Mant-Cassin,  qui 

habits  jusqu'à  la  moitié  des  cuisses.  assenibic  un  synode,  con  ère  I  s  ordres  mi- 

L'abbé  Scnioreci,  voyant  qu'il  n'y  avait  plus  neurs,  non-seulement  à  ses  religieux,  mais 

d'espérance  de  le  llècliir  .  mil  son  inon.islère  .'iu\  seculii  rs  qui  soni  de  -^a  jui  idicliun,  leur 

sous   la   proleclion   de  Landulplie  de  Sainl-  donne  le  sacrement  de  conlirm  ilion,  el  jouit 

Jean,  qui  tenait  le  parti  de  l'empereur.  Il  y  de     plusieurs     droits    qui    n  apparlicnuenl 

envoya  des   soldais  et   y  vint  Ini-méme  peii  qu'aux  évêques. 

(le  Iciiips  après.  .Mais  dans  le  temps  que  le  Après  qu;-  le  pape   Urbain  V  cul  rendu  le 

chancelier  de  Hoger  mciiac.iil  de  venir  rui-  lilre  d'abbaye  à  ce  monastère,  il  fut  toujours 

lier  le   monas'.ère,   il    inoiirut    suhilcnicnl.  goiivernépardes  abbés  réguliersjusqu'en  lan 

L'ali'.ié  Sèniorecl  étant  mort  aussi  l'an  li;i7,  l't'>'i.    Pyrrhus    Tomacelli,   aj  anl  été  élu  en 

il  y  eut  quelque  division   entre  les  religieux  l 'jlO,  gouverna  celte  abbaye  pendant  dix-huit 

lie  celle    abbaye  au  sujet  de   l'élection   d'un  ans;  mais  ay.inl  voulu  retenir  le  château  do 

nouvel  abbé.  Uaynaud  de  Toscane  ,  selon  ce  Spole  le  coiiire  la  volonté  du  pape  Kiigène  IV, 

que  dit  M.  An','e  lie  la  Noce,  fulelu  lumiiliuai-  ce    ponlile    le   fit  enfiTiner  dans    le    château 

renieiil,  el  rei'unnut  d'abord  l'anlipape  Aiia-  S.iinl-Ange,   oùilmouiul   l'an    l't37,    après 

rlfl.    Il  se  soumit   cependant  à  l'obéissance  avoir  été  privé  de  son  abbaye   peu  de   temps 

d'Innocent  II  par  rei'.lrciiii.-c  île  l'empereur  auparavant.  Llle  demeura  sans  chef  pendant 

l.olhairc,   et    fut   enfin  déposé,  apr.s  que  le  huit  ans  el  demi,  jusqu'en  l'.in  r»'i(j,  qu'An- 

papc  eut  fai!  examiner  sou  élection,  qui  ne  loiue   C  iraffa,  dernier  abbe  régulier  perpé- 

te  Iroma  pas  canonique.  lue!,  lui  élu  pour  la  gou-eriier.   Mais  aprèï 


1073 


MON 


MON 


{0T4 


s.i  inori,  qui  arriva  l'a»  IVo'î,  ce  inonaslèie 
fui  donné  en  commonde  au  cardinal  Louis 
Siara'npi,  patriarche  d'Aquilée.  Le  second 
ablié  coniinendalaire  fui  le  pape  Paul  11,  qui 
le  fil  gouverner  par  ses  légais  depuis  l'an 
l'!65  jusiju'à  sa  mort.  Jt-an  d'Arfigon,  fils  de 
Ferdinand,  roi  de  Naples,  l'obtint  en  uitc. 
Knfin  II-  cardinal  Jean  deMédicis,  qui  fut  en- 
suite pape  sous  le  nom  de  Lé  lû  X,  m  avant 
été  pourvu,  s'en  dcmil  entre  les  m;iiiis  da 
pa(;e  Jules  II,  qui  l'unit,  l'an  loOi,  à  la  con- 
grégation de  Sainle-Ju^line  de  P.idoue,  dont 
nous  par'erons  dans  la  suite.  Mais  avant 
celle  union  il  y  a  de  l'apparenci'  (jne  l'iin- 
cienne  cong  égation  du  .VI  )nt-Casî  in  ne  sub- 
sistait plus,  et  que  lesdilTérent  s  rcvulutions 
arrivées  dar.s  le  gou' ernemenl  spirituel  do 
cette  abbaye  avaient  empêché  la  tenue  des 
chapitres  généraux. 

Si  l'on  veut  ajouter  foi  à  ce  que  d  sent 
\Vion  et  quelques  autres  auteurs,  l'atibé  du 
filonl-Cassin  se  qualifiait  patriarche  de  la 
sainte  r('li;;ion,  duc  et  prince  do  tons  les  at- 
liés  et  religieux,  vice-chancelier  da  l'empire, 
chancelier  des  royaumes  de  l'une  et  l'autre 
Sicile,  de  Jérusaletn  el  de  Hongrie,  comte  et 
recteur  de  la  Champagne,  terre  de  Labour 
et  provinces  maritimes,  vice-emponur  et 
prince  de  la  pais  ;  mais  si  cela  était  vrai, 
M.  Ange  de  la  Noce  n'aurait  pas  manqué 
d'en  parler.  Il  païaît  seulement  par  la  chro- 
nique de  Paul,  diacie  de  celle  abbaye,  (]uq 
l'empereur  Lothaire  donna  à  l'abbé  Gnibalda 
le  litre  de  chancelier  et  de  grand  chapelain 
de  l'empire  et  celui  de  prince  de  la  paix,  et 
M.  Ange  de  la  Noce  dit  qu'il  est  le  premier 
baron  du  roya;:me  do  Naples.  Ponce,  abbé 
de  Cluny,  s'élant  rencontré  à  Rome  avec 
l'abbé  du  Mont-Cassin  dans  un  concile,  et 
ayant  voulu  s'attribuer  la  qnalilc  d'Abbé  d;  s 
abbés,  on  lui  demanda  si  Cluny  avait  co,:,- 
muniqué  la  règle  de  saint  Benoit  au  .Mont- 
Cassin,  ou  le  Mont-Cassin  à  Cluny;  et  ayant 
confessé  ce  qu'il  ne  pouvait  nier,  on  inféra 
que  c'était  avec  justice  ciue  l'abbé  du  Mont- 
Cassin  prenait  ce  titre,  qui  lui  avait  été  ac- 
cordé par  les  souverains  pontifes,  parce  que 
celait  du  Mont-Cassin  que  la  règle  de  saint 
Benoît  s'était  répandue  par  tout  le  monde. 
C'est  pour  celle  raison  que  saint  Odilon,  qui 
était  aussi  abbé  de  Cluny,  s'élant  trouvé  au 
Mont-Cassin  el  ayant  été  prié  d'y  célébrer  la 
messe  solennelle  avec  la  crosse  en  main,  ne 
■voulut  jamais  paraître  avec  t  elle  marque  de- 
vant le  chef  des  abbés,  c'est-à-dire  devant 
l'abbé  du  Mont-Cassin. 

Voy.  Léon  d'Oslie,  Chronic.  mona-lerii 
Cnssin.  cum  notis  Angeli  de  Nuce.  Anton, 
'l'ornamira,  Orig.  e  Prog.  délia  coiig.  Cassi- 
nense.  Arnold  Wion,  Lii/'ium  titœ.  Bulteau, 
llist.  de  l'ord.  de  Saiut-Be.ioil.  D.  Jean  Ma- 
billon.  Annal.  Binedict.  Cornel.  Margarin, 
liullar.  Caunnense  (1). 

JIONT-CASSIN  (CoNGBÉOATioN    du),   autre- 
fois de  Sainte-Justine  de  Padoue. 

Les  Bénédictins  de  Cluny.  dans  le  temps  de 
leur  ferveur,  avaient  rét;ib!i  l'ordre  de  Saint- 

(1)  Voy.,  à  la  (in  Ju  vu!.,  n"'  265  riOi. 


Benoît  en  Italie  dans  son  ancien  lustre;   on 
les  y  avait  appr-'és  de    tontes  (larls  pour  ré- 
former les  plus    célèbres    monastères   et   y 
faire  revivre  lesobservances  régulières;  m;iis 
ils  abandonnèrent  dins  la  suite  ces  obser- 
vances, el  tombèrent  dans  un  si  grand  relâ- 
chement ,  que,  sur  la  fin  du  xiv  siècle  et  au 
commencement  du  xv,  à  peine  Irouvait-on 
en  Italie  un  mona  lèie,  suit  de  la  congréga- 
tion de  Cluny,  soit  des  autres  congrégations 
de  nmines  Noirs,  où  la  règle  de  saint  Benoît 
fût  suivie  et  oti  les  religieux  en  connussent 
même  les  principales  obsevances.  Cette  rè- 
gle n'était  plus  connue  que  dans  les  congré- 
gations   réformées  ,    oii   les    religieux  ,    qui 
étaient  dans  leur  ferveur,  s'cttidiaienl  à   la 
pratiquer  fidèlement;   et  mê  i  e  il  est  proba- 
ble   que    le   grand    relâcliement   où  étaient 
tombés  les  muines   Noirs    en    Italie  obligea 
les  fondateui'S  de  ces  congrégations  à  pren- 
dre dans  leurs  habillements  des  couleurs  qui 
les  dislinguassenl  de   ces  moines  relâchés. 
La  célèbre  abbaye  de  Sainte-Jusline  rie 
Padoue  fut  du  nombre  de  celles  que  les  reli- 
gieux de  Cluny  possédaient.  Dès  l'an  1316, 
elle  avait  é'é  tellement  ruinée  par  les  guer- 
res  qui   désolèrent  l'Italie  ,  qu'il   n'y   restait 
que  trois  religieux  en  l'iO",  lorsque  le  pape 
Grégoire  XII  donna  celle   abbaye  en  cutn- 
mende  au   cardinal  de  Bologne.  Ce    prélat, 
ayant  compassion  de  l'élat  déplorable  de  ce 
monastère,  qui  n'avait  aucune  clôture  et  où 
des  ménages  entiers  d'hommes  et  de  femmes 
demeuraient,   y  Dt    venir  des   religieux    du 
Mont-Olivct  pour  y   réiablir  les  observances 
régulières,  ce  qu'il  fit  approuver  par  le  sou- 
verain pontife, et  les  trois  religieux  de  Cluny 
furent  contraints  d'en  sortir.  Mais  ceux-ci 
eurent  recours  à  l'au'orilé  de  la  république 
de  Venise,  qui  les  rétablit  dans  ce  monastère 
et  renvoya  les  leligieux  du  Moiit-Olivet  dans 
ceux  de  leur  congrégatinn.  Le   cardinal   de 
Bologne,  en  ayant  eu  avis,  se  démit  de  cette 
abbaye  enire  les  mains  du  pape,  et  sollicita 
Sa  Sainteté  de  la  donner  à  un  abbé  réj^ulier 
qu'il  jugerait  piopre  pour  réformer  ce  mo- 
n;istère.  Le  pape  révoqua  la  bulle  qui  unis- 
sait  l'abbaye   de  Sainte-Jusline  à  l'ordre  du 
Mont-Olivet,  et  la  conféra  à  Louis   Barbo, 
noble  Vénitien,  qui   était    potir   lors  prieîir 
des    chanoines   séculiers   de    Saint-Georj^es 
1»  AUjha  à  Venise.    Il  avait  refusé  quelque 
temps  auparavant  l'abbaye  de  Saint-Cypr:eii 
de  Murano,  que  ce  même  pontife  lui  avait  of- 
ferte,  el  cela  par  rattachement  qu'il  avait 
pi'ur  sa  congrégation  qu'il  ne  voulait  point 
quitter  ;  mais  ayant  été  de  nouveau   pourvu 
de  l'abbaye  de  Sainte-Justine  de  Padoue  l'an 
li08,  et  le  pape  lui  ayant  commandé  de  I  ac- 
cepter, dans  l'espérance  qu'il  avait  qu'il  y 
létabliraitlesobservances  régulières,  il  obéit 
aux  ordres  du  souverain  pontife,  prit  l'habit 
(le  l'ordre  de  Saint-Benoît,   et  prononça  ses 
vœux  entre  les  mains  de  l'évêque  lie  Trifern» 
ou  de  Castel,  qui  lui  donna  aussi  la  bénédic- 
tion abbatiale,  le.'î  février  l'iOO,  en  ayant  eu 
coinmissinn  du  pape. 


1075 


niCTIONNAIRR  OKS  OUOriES  REI.if.IF.I  X. 


10-6 


Louis  B.irbo,  ayanl  pris  possession  du  mo- 
nastère de  Sainie-Jusliiie,  commonca  par 
faire  rebâtir  les  lieux  répulicrs  rt  ictiielire 
la  clôlnre  ;  mais  rommo  il  n'y  trouva  que 
ces  trois  religieux  ili-  t^luiiv,  et  qu'il  n'aurait 
[lU  nvec  un  si  petit  noinlirc  prati(|ucr  tout 
ce  qui  est  prrs  rii  d.iiis  la  rè^lc  de  saint  Ue- 
noil,  tant  imur  ce  qui  rci;ardt'  les  offires  di- 
vins que  les  ol'seï  vances  régulières  ,  il  de- 
ni.'inda  deux  autres  religieux  à  l'alibé  de 
Saint-Michel  de  Murano,  de  l'ordre  des  Ca- 
malilulcs,  et  fit  venir  enrore  deux  <  lianomes 
de  la  con^rétration  de  Saint-Georges  in  Al- 
fj'in  :  quoiqu'ils  fussent  lous  di'  dilTérentes 
fongrépations,  et  (ju'ils  eussent  aussi  des 
liabillements  diiïén'nl^,  ilscon\en;!ie  il  néan- 
moins rns'  mbie  dans  les  obsirvanccs  régu- 
1  ères,  qu'ils  pr.ili(juaiciil  coufonnémenl  h  la 
règle  de  saint  Uenoil  et  aux  rcgUinetits  qui 
fuient  dressés  par  Louis  U  irbo,  dont  Dieu 
bénit  les  lionnes  intentions  :  car  il  reçut  dans 
la  su'te  un  si  grand  nombre  de  novices,  que 
le  monastère  de  Sainte-Jusline  ne  lut  pas 
suffisant  pour  loger  Ions  les  ri  ligieux  qui  se 
rangeaient  sons  sa  conduite,  de  sorte  qu'il 
10  ni  obligé  de  faire  de  nouveaux  élablissc- 
menis.  Le  premier  fut  à  Bassano  proche  Pa- 
doue,  où  il  acheta  une  église  dédiée  aux 
saints  martyrs  Ilerningore  et  Fortun  it,  à  la- 
quelle él  it  atlaciié  un  ancien  niomislère  qui 
avait  autrefois  appartenu  à  des  religieuses, 
et  après  en  avoir  fait  reb'ver  les  bâtiments, 
il  destina  ce  lieu  p  uir  y  élever  les  novices. 

Les  bourgeois  de  \'érone  lui  ayiinl  offert 
un  établissement  dans  leur  ville,  il  y  lit  aussi 
réparer  un  ancien  monastère  appelé  Noire- 
Dame  df  Caretta.qui  avait  été  ruiné  par  les 
uuerres  et  par  les  al  bés  conunendalaircs  ; 
mais  l'ayaiii  abandonné  quelquelempsaprès, 
et  celé  aux  religieux  de  Samt-l'rançois,  il 
lil  bâtir  un  aiiire  monastère  sur  le  mont 
Agilano,  proche  une  église  qu'on  avait  con.- 
nicncé  à  bâtir  en  l'honneur  des  apôtres  saint 
Jarijups  et  s  lint  Philippe  ;  et  ce  fut  pour  lors 
qu'il  durma  le  nom  de  Sainte-Jusline  de  l'a- 
doue  à  sa  congrégation. 

Les  habitants  de  Milan,  qui  vou'aient  ré- 
parer l'.ibbaye  de  Saint-Denis,  qui  était  toute 
ruinée,  dcmaudèronl  de-,  religieux  à  Louis 
Barbo  pour  y  rétablir  la  discipline  monisti- 
que,  ce  qu'il  leur  accorda  bien  volontiers, 
l.a  répulalion  dL'  ce  réformateur  se  ré- 
(land.int  p.ir  toute  l'Ila'ic,  il  fut  invité  par 
plusieurs  princes  et  piusie  irs  seigneurs 
do  leur  envoyer  des  religieux  pour  réfor- 
mer les  miiiia>tères  de  moiUi'S  Noirs  situés 
dans  les  terres  de  leurs  dé|)endances  ; 
mais  il  ne  voulu!  point  a(  rcpUr  ceux  qu'on 
lui  offrit,  (ju'à  condilion  ()ue  les  abbés  com- 
memlaiaires  ne  se  mêleraient  plus  <lu  spiri- 
tuel, et  (|u'après  leur  murl  la  congrèg^ition 
aurait  une  entière  aulorilé  ^ur  ces  monas- 
tères, où  elle  mettrait  lel  supérieur  que  bon 
lui  semblerait,  et  <)ue  les  neligieux  (jui  y  fe- 
raient profe>sion  promettraient  oliéis^ance  à 
la  congrégation.  Il  en  aicepta  quelques-uns 
à  ces  ctindilions  ;  le  premier  fut  l'.ibbaye  de 
Sainic-.M.irie  de  Florence,  dont  un  (  ertaiii 
N  coIjs  Vas'on   ilail   abbc  ti:nincuJuta  il'. 


C'était  un  homme  violent  et  emporté,  (ini 
avait  toujours  les  armes  à  l:i  main  et  (jui 
était  à  la  tète  de  plusieurs  scélérats,  compa- 
gnons de  ses  crimes  ;  mais  ayant  clé  toncbé 
par  les  disrours  de  Barbo  dans  nni>  conver- 
s.iti.in  (|u'il  eut  avec  lui,  non-seulemeni  il 
lui  donna  son  abbiye,  mais  il  pi  it  l'iiabit  de 
l'ordre  de  Saini-Benoit  e!  mourut  sainicincnt 
djiis  le  monastère  de  l'adoue. 

La  c<in;:régation  augmentant  tous  les  jours, 
Louis  Barbo  en  demanda  \:i  confirmaiion  au 
pape  Martin  Y,  l'an  l'il",  lorsque  ce  pontife 
passa  par  Milan,  à  son  retour  du  courile  de 
Constance  où  il  avait  été  élu  ;  ce  qui  lui  lut 
accordé  sans  difficulté.   La  congrègalion  fil 
ensuite  de  nouveaux  p  og  es,  on  lui   donna 
la  célèbre  abbaye  de  Saint-Benoit   de   l'oli- 
rone  dans  le  duché  de  .Manlou  -.    Les    reli- 
gieux deCluny  la  pos>éilaient  et  n'y  vivaii  nt 
pas  avecplusde  régulariléque  d  insles  antres 
monastères.  Ciui  de  Gonzague  en  était  abbé 
cominendalaire  ;  il  avait  souvent  exhorté  ces 
religieux   à   réformer  leurs  mœurs  coi  rom- 
pues ,  mais  ses  exhortations  n'ayant  eu  au- 
cun effet,  il  sollicita  .Martin  V  d'unir  C'>  mo- 
nastère à  la  congrégation  de  Sainle-Jusiiniî 
de  Padoue.  L'union  de  eeitc  fameuse  abbaje 
lui  donna  beaucoup  de  lustre,  qui  augmenta 
encore  davan'age  par  l'union  qui  y  fui  faite 
de  la  basilique  de   Sainl-P.iul  à  Home  et  d- 
Saint-Georges   le  .Majeur  à  N'enise,  de  Saint- 
Sixte  à  Plaisance    et  de  plusieurs  autres  fa- 
meux monastères.  Le  nombre  en  étant  beau- 
coup augmenté,  on  lint  le  premier  cb.ipilre 
général,   l'an   l'rii,  dans  ral)lia\e  de  S.iint- 
Itenoit  de  Polirone,  où   Lo  lis   Barbo  fut  du 
pour  premier  président   général  de  la  con- 
grégation, et  tous  les  ans  on   lint  de   pareils 
chapitres   généraux  ;  ce  qui  fut  encore  ap- 
prouvé par  .Martin  V,  qui  ac<ord,i  beaucoup 
de  privilég.'S  à  cette  congrégation  et  permit 
de  faire  de  nouvelles  constitutions.  Eugène  IV 
lui  accorda  d'autres  piiviléges  et  fit   des  rè- 
glements pour  les  chapitres  généraux.  Enfin 
Louis     Barbo ,    appréhendant    (pi'après    sa 
mort  l'abbaye  de  Sainte-Justine  ne  retombât 
encore  en  commende,  se  démit  de  cette  ab- 
baye en  laveur  de  sa  congrégation,  d.ins  le 
chapitre  général    qui  se  tint   à  N'enise  l'an 
l'tS'T.   .\prés    cette   démission,    Louis  Barbo 
voulut  mener  une  vie  privée  ;  mais  le  pape, 
qui  conn.'iissait  son  mérite,    ne  \oiil.'int   pas 
qu'une  ^i  grande  lumière  restât  cacliée  dans 
une  solitude,  Ini  donna  l'évéché  de  Trévisc. 
Après   avoir  gouverné  ce  diocèse    pendant 
l'espace  d'«'n»iron  (jualreans,  ;ivec  tout  le 
zèle  et  la  vigil.ince   d'un   saint    pasteur,    il 
mourut  dans  le  monastère  de  Sainl-Georges 
le  .M.ijeur   à  Venise  l'an    lii.'L   cl  son  corps 
lut  jioité  à  S  lintc-JusIinc  de  Padoue,  comme 
ii  l'avait  ordonné. 

t'.elte  eongregalion  a  porté  le  nom  de 
Sainte-Jusiuie  de  l'adoue  jusqu'en  l'an  \IH)\, 
(|ue  le  monastère  du  Munl-Cassin  y  ayanl 
été  uni  après  la  démission  qu'en  lit  le  cardi- 
n.il  de  .Mé  licis,  qui  en  était  abbé  commenda- 
t.iire,  et  qui  fui  pape  dans  la  suite  sous  le 
nom  de  Léon  X,  le  pape  Jules  II  voulut 
qu'elle  qiiilijl  le  nom  de  Sainte-Justine  p'ur 


ro77 


MON 


MON 


1078 


[ironilre  celui  du  MoiU-Cassin,  qui  é(nil  chif 
lie  tout  l'ixdre,  et  qu'on  l'appelât  à  l'aveiiii- 
la  fongrégatiou  du  Mont-Cassiu  autrefois  de 
Siinlc-Jusliue  :  elle  a  environ  qiialre-viugl- 
quinzc  monastères  célèbres  et  environ  une 
centaine  de  pelits  de  la  dépendance  do  ces 
célèbres,  linlre  ces  p  tils  rnonaslères  il  y  en 
a  environ  une  Irent  >iiic  où  il  n'y  a  que  des 
abbés  titiil.iires  qui  n'y  font  pas  ménie  leur 
résidence.  Tous  ces  mon  l'tères  sont  divisés 
en  sept  provinces,  qui  sont  celles  de  Rome, 
iie  Napiis,  de  fi  cile,  de  '^o^ca^e,  de  Venise, 
de  Lombardie  et  de  Gènes.  Le  monastère  de 
lA'rins  en  Provence  esl  aussi  de  ci  lie  con- 
grégaiion  et  de  la  provin  c  de  Toscane.  Il  y 
a  aussi  des  monastères  de  filles  qui  dépen- 
dent d.' cetle  congrégation.  Tous  les  abbés 
se  serïi-nt  d'ornements  poulilicaux,  même 
les  abbés  titulaires,  et  donnent  les  quatre 
mineurs  à  leurs  religieux. 

r^e  plus  célèbre  monastère  ilo  celte  con- 
grégation est  celui  du  Mont-Cass  n,  dont 
nous  avons  déjà  amplement  parlé  dans  l'ar- 
licle  précédent,  et  qui  surpasse  par  sa  ma- 
gnlficence  tous  les  autres  monastères  d'Ita- 
lie. Celui  de  Sainte-Justine  de  l'adoue  peut 
tenir  le  second  rang.  Il  renferme  six  cloî- 
tres, plusieurs  cours  et  jardins.  L'église,  qui 
I  st  très-grande,  esl  pavée  de  marbre  noir, 
blanc  e.  ronge  ;  l.i  couverture  de  l'église  est 
chargée  de  neuf  dômes.  Il  ne  se  peut  rien 
voir  de  plus  beau  (pie  le  maitro-autel.  Il  y  a 
tians  celle  église  v.ngl-qualre  chapelles  de 
marbre  dont  tous  les  dessins  sonl  dilTérents, 
el  l'on  prétend  que  celle  abbaye  a  soixante 
m;lle  duats  de  revenu.  Celle  de  Saint-Be- 
noît de  Polirone,  à  do  ze  milles  de  Manloue, 
esl  d'une  \asle  étendue.  Il  y  a  un  clos  de 
quatre  milles  de  tour.  Les  religieux  y  sont 
1  )ujour>i  au  nombre  de  cent  prêtres  el  qua- 
ranie  frères.  Us  sont  seigneurs  spirilu>  Is  et 
temporels  de  plusieurs  villages,  el  curés  pri- 
mitifs de  trinte-huil  paroisses,  qu'ils  peu- 
vent tenir  eux-mêmes,  aussi  bien  que  celles 
qui  dépendent  des  autres  nio  laslères  de 
celte  congrégation,  en  vertu  des  privilèges 
qui  lui  ont  été  accordés  par  les  souverains 
pontifes.  Cette  même  abbaye  de  Saint-Be- 
(loil  possède  autant  de  teries  que  trois  mille 
paires  de  bœufs  en  peuvent  labourer.  Celui 
de  S.iinl-Séverin  de  Naples  est  aussi  très- 
magnifique.  Il  y  a  trois  beaux  cloîlres,  donl 
l'un  est  orné  de  piintures  exquises  à  fres- 
que, et  un  autre  est  de  marbre  blanc  de  Car- 
rare, à  colonms  d'ordre  dorique.  Le  dortoir 
répond  à  cetle  magnificence.  L'église  esl 
aussi  très-belle.  Le  niaitre-aulel  est  isolé  et 
entouré  d'une  balustrade  de  marbre.  Le 
pavé  du  chœur  est  aussi  de  marbre;  les 
sinlles  des  religieux,  qui  sont  de  biis  do 
noyer  à  feuillages,  cl  tournée!  cbacune 
(l'une  manière  dilîérente,  oui  coûté  seize 
mille  écus.  Nous  avons  déjà  parlé  du  monas- 
tère de  Cave  et  de  quelques  autres  qui  ont 
été  unis  à  c 'lie  con,'régalioa,  aussi  bien  que 
l'église  de  .Montréal  en  Sicile,  où  les  reli- 
gieux de  celte  congrégation  tiennent  lieu  de 
ch;inoincs. 

Leurs  constitutions  furent  de  nouv^'au  ap- 


prouvées par  le  pape  Urbain  ^'I^  l'an  1IJ4-2. 
Conformément  à  ces  consliiutions,  ils  ne  doi- 
vent  point  manger  de  viande  au  réfectoire; 
mais  les  supérieurs  en  peuvent  manger 
avec,  les  hôtes  de  la  congrégation  et  les  an- 
ciens, Ci  les  prêtres  de  la  maison  dans  la 
chambre  de  l'abbé  :  ils  en  peuvent  aussi  man- 
ger en  voyage  et  hors  le  monastère  avec  per- 
mission. Il  y  a  néanmoins  quelques  monas- 
tères où  on  en  mange  trois  f 'is  li  semaine, 
comme  dans  ceux  de  Sainl-P.iul  à  Home, 
Sainle-Mariedc  FarTe,  Saint-Nicolas  du  Lido 
à  Venise,  et  dans  celui  d'Ast,  à  cause  du 
mauvais  air  :  ce  qui  et  aussi  permis  d.ins 
tous  les  monastères  de  la  congrégation  où 
il  n'y  a  pas  douze  religieux  de  conmunaulé. 
Les  supérieurs  doivent  aus  i  permeltre  d'en 
mangej  pendant  quelques  jours  dans  toute  la 
congrégation,  immédialcmenl  avant  l'avcnt 
el  le  carême.  Ils  doivent  jeûner  tous  les  ven- 
dredis de  l'année,  et  ils  ne  doivent  point 
manger  ces  jours-là  ni  œufs  ni  laitage,  non 
plus  fiu'aux  jeûnes  d'Eglise;  ce  qui  leur  est 
iiéinmoins  permis  aux  autres  jeûnes  de  rè- 
gle, qu'ils  commencent  à  la  fêle  de  l'iixal- 
lalion  de  la  sainte  croix,  et  qu'ils  finissent 
aa  commencement  du  carême,  qu'ils  fi  vent 
au  lundi  d'après  Ij  Quinquagésiine.  Ils  sont 
dispensés  du  jeûne  aux  fêtes  de  saint  I\Iat- 
Ihieu,  de  la  Dédicace,  de  saint  Michel,  de 
.saint  Placide,  de  sainte  Justine,  le  jour  de 
Noèl,  les  trois  fêles  qui  suivent  el  quelques 
autres;  el  les  jours  de  jeûne  deiègle  ils  ont 
le  soir  à  la  collation  du  pain  avec  quelques 
fruits. 

Leur  habillement  consiste  en  une  robe  el 
un  scapulaire  assez  large,  avec  une  coule 
fort  ample,  et  ils  portent  toujours  un  cha- 
peau lorsqu'ils  sortent.  Quoique  l'usage  des 
chemises  de  toile  leur  soit  défendu,  si  eu 
n'est  dans  les  maladies,  on  leurpermet  néan- 
moins de  porter  un  suaire  de  toile  grossière 
sous  leur  tunicelle  de  ser^'e.  Us  donnent  le 
nom  de  pétition  à  ce  qu'on  appelle  profes- 
sion dans  les  autres  ordres,  el  après  leur  an- 
née de  noviciat  ils  prononcent  leurs  vœux 
en  ces  termes  :  In  nomine  Dumini  N.  J.  C. 
Amen.  Anno  Nativitatis  ejasdem  N.,  die  N., 
Ego  domnus  N.,  de  tali  loco,pio)nilto  slabili- 
latein  meam,  el  concersioncm  morum  meorui», 
et  obedientiam  sccundnm  reçjtilain  S.  Benc 
dicti,  corain  Deo  et  omnibus  sanctis  quorum 
reliquiœ  habentur  in  hoc  mona^ilerio  S.  .V. 
de  N-,  in  prœ^entia  II.  P.  />•  N.  ejusd.  mona- 
sterii  abbalis  [lel  prioris)  el  monaclinrum 
ejusd.  monastcrii  sub  coiujregalione  Cassi- 
nensi.  Ad  cajus  rei  fidem  hanc  petitionem 
manu  propria  subscripsi  die  quo  supra.  Leurs 
frères  convers  sonl  appelés  Frères  Commis. 
Il  leur  esl  permis  de  sortir  de  la  con'^réga- 
tion  ;  et,  pendant  qu'ils  y  demeurcnl,  ils  sont 
obligés  de  garder  la  chasteté,  la  pauvreté  et 
l'obéissance.  Us  ont  pour  habillemenluiie  tu- 
nique el  un  manteau  de  bleu  obscur,  qui  esl 
fermé  de  tous  côtés,  à  l'exception  de  deux 
ouvertures  pour  passer  les  bras;  el  ils  por- 
tent sur  l'épaule  un  capuce  en  manière  d,; 
chausse.  Ce  capuce  ne  leur  sert  qu'après  l.i 
mort  pour  les  enterrer.  Dans  l'état   ccclc- 


1079                                        DICTIONNAIRE  1>KS  ORI'UF.S  Ki:l,U;iFAX.  rM 

ïiasliiiuc  ils  onl  ;'i  celle  grande  robe  ou  mnn-  huile  d.^  la  cond.inin.ilion  d.-^s  Templiers,  par 

leaii  ilonl  uotin  \en:)iis  tle  parler  (liu\  tnin-  l.i.niflle  il    imissail  l-ms  leurs  biens  à  l'onlrc 

ches  (le  la  largeur  de  ileu\   pieds  de  ri>i  :  ils  di's    llospilaliers  ;  mai-;  Sa    Saiiilclè,  faisant 

s'en  siTv;ilenlaulrefi);s  pour  aller  rn  ville  ;  alieiiliini  à  la  demande   iti- ce   priiiee,  en   e\- 

inais  prc-enl(Mi!(  ni  ils  si'servenlde  manli'a.i\  eepta  tous  les  biens    qu'ils  possédaient  dans 

laits  eoiiune  ceux  des  séculieis,  n'.-yanl  eou-  les  royaumes   d'Kspajine  ,  et   afin  de  ne   rien 

ser\é'iu  man  eau  monacal  (lue  la  seule  cou-  f,iir(î  sans  connaissance  de  cause,  av  mt  que 

l.'ur;    ils    n'y    portent     point  le    capuce  sur  d'aecordcrau  roi  sa  demande,  clleécrlvilà  tous 

l'iipaiile  CD  !ime  les  antres  (1).  les     princes    (jui    p  .ssi'daienl    les   royaumes 

Le  chapi  re  gêné  al  de  celle  con!;r(>gaii'in  d  Ksiiagne,  qu'ils  lui  envoyasst  ni  des  person- 

«e  t'ent  tous  les  ans,  le  troisième  dimanche  nés  de  pro!iili\  capables  de  lui  bien  expli<ini  r 

ii'apr(^s  Pàiines,  an(iuel  les  suiiéiieiirs  e!  un  les  raisons  qu'i's  avaient  pour  que  ces    biens 

(li'pul(i  de  chaîne  maison  sont  obli}j('S  d"  se  (jnj  (jiaienl  dans   leurs   (lepi'n(lanc(  s  ne  fus - 

irouvi  r,  excei)lc  ceux  des  maisons  éloigix-es,  M-iit  pas  soumis  à  la  loi  geni-rale. 

(jui  n'y  viennent  ()Ui' tous  les  deux  ans.  Ton»  Le  roi  irAra;;on,  qui  n'av  lit  p  dni  d'anUe 

les  sup('Micurs  se  démetleni  de  leurs  ofli»  es  tnotif  ({tie  celui  (juil  avait   dëjà  fait  allégu(  r 

ilans  ce   cliapilre.  cl    après    leur  démission  par  >es  ambassadeurs,  fil   r(  présenter  de  nou- 

on  y  élit  neuf  définit eurs,   dont  il  y  en  a    un  veau  au  pape,  el  d,;ns  des  l'Tines   plus  pres- 

qui  est  pié.-idctit  du  cliapilre.  l'endanl  qu'il  sant<,  li    nécessi'é   (lu'ii  y  avait  d'établir  un 

tliire,  todie  l'aut iirilé  sur  la  cou'^régation  ré-  nouvel  ordre    militaire    pour     résister    aux 

Mde  dans  ces  définiteurs,  et  toutes  les   al-  maures  de  Grenade,  cl  afin  qu''  Sa  Sainlelé 

fiinsquila  concernent    étant   réglées,   les  n'eût  aucun  soupçon    sur  la  sincérité   de  ses 

neuf  di  finileurs  procèdent  à   l'élcclion  d'un  intenlions,  il  ordonna  à   ces    mêmes   ambas- 

présid.nide  1 1  (  ongié^çalion,  qui   doit    è:re  sadeurs  de  lui  dire  que  s'il  voulait  lui  accor- 

aiiisi  élu  Ions  les  ans.  der   sa    demande,   il    donnerait    à  cet   ordre 

Celle  congrégation  a   pour  armes  d'azur  à  M  )ntésa,  dans  le  royaume   de  Valen'-c,  q'ii 

trois  mon  agnesde  sinoplc,  s'irmontecsd'une  était   une   place   forle   et    imprenable;    mais 

croiv  patriarcale,  avec  ce  mot  l'AX.  (jn'cu  cas    (jirils   vissent  qu'il  persistai   dans 

Jaeobus  Cavacius,  llisl.  rirnohii  S.  Justi-  ja  res  dulinn  qu'il  avait  prise  d'unir  les  biens 

tuF  l'nlav  nr.  D.  l'ictro  .\nionio  ïornamira,  des    Templiers    situés  dans    son   royaume   à 

Orijin^.  e  Proqessi  tlclli  congregutione  Cas-  joiilre  des  Hospilalic  s,  ils  lui    déelarassenl 

ainenap.  l}id!(iriii')i  Cassincnse  el  Constitutio-  qu'il  sérail  ibligc,  pour  la  stjrelé  de  ses  litat*. 

nés  ejiis  I.  ordiiiis.  de  s'emparer   de   dix-sepl   placs  fortes   qui 

I.a   congrégation   du   Monl-Cassin    existe  ;ivai<  ni  appartenu  aux  'l'empliers,  el  de  rele- 

loujours,  et  se  livre  à  la    culture  des  Ictlres  nir  les  revenus  qui  en  dépcndaienl  pour  cn- 

el  à    l'érndilion     ecclésiastique.    Elle    avait  (retenir  les  larnisons.  Le  pape  m  urut  sans 

deux    maisons   à   Uomc    au    dernier    siècle,  avoir  rien   déterminé;  mais  son    sui  cesseur 

SaiiU-Citlixle  el   S  dnl-l'aul-hois-des-Mnrs.  Wan  XXll  .ircorda  A  ce   prince  ce   qu'il  (le- 

Celte  dernière  maison  est    toujours    habité»  miiid, ut,  el  l'ordre  d  ■  Monlésa  Inl  inslilué  l'an 

ict  peui-é:rc  l'autre  aussi)  par  ces    Bénédic-  13l(),  sous  le  nom  de  Noire-Dame  de  Monlesa. 

lins  qu'on  appelle  r'j>.'î/Tic3î.  Le  pre'.si'/etU  ac-  On  donna  ;i  cet  ordre  tous  les   biens   que  les 

luel  est   le  U.  1*.  abbé  D.    Maur  liiiii,    et  le  Templiers   possédaient  dans  le   royaume  d(i 

iirocureiir  général  de  la  congrégation  esl  le  X'alencc,  el  même  ceux   (|ui   apparteiiaicni  à 

U.  r.  ai  bé  dom  Vincent  Uini.           B-n-i:.  l'ordre  des  Hospiialiers  de  Saint-Jean  de  Jé- 

MONT    DE     L\  CDUllONNE.    Voy.    C\-  rusalem,  auxquels  on  donna  pour  les  dédom- 

...,„„,,..  mager  les  biens  qui  avaient  aussi  appirtenu 

..^.,..,..  ^/^.^i.iTi^      .r          f-       .,.„  aux      emiiiers  dans  I  Aragon.  (,e  lurent  dix 

MONTK-CORHULO.     \  oy.    Écoi.ieus     i..  ,,„,,,|i,ri    , le  l'ordre  de   ("alalr.iva  qui    pri- 

IJoLOGNE.  renllesprem'ersrhabilde  l'ordrcde  Monlesa: 

MONTE-OUTONO.    Voy.   AiGusrivs.  Alvarez  de  l.uria  el  M'  ndosa,   aussi  cheva- 

MONTES  V    ET     DE     SAINT  -  CKOKOES  licrs  de  Calatrava,  en  dressèrent   les  slalnts, 

D'aLFAMA  (I^hkvu.ieks  oes  onnnics  m:).  ;"t  la  prière  du  roi  d'Aragon  eidu  grand  maîlri< 

Le  pape  Clément  V  ayant  résolu  d'unir  les  de  l'ordre  de  Calatrava,  dom  Carcias   Eopez 

biens  de   l'ordre  des   Templiers    à   celui   des  de  l'adilla  :  ce   qui   laii  qu'il   a   loiijonrs  été 

Hospitaliers    de    Saint- Jean    de   Jérusalem,  de   la  dépendance  de    celui    de  Calatrava  et 

J.icques,  roi  d'Aragon,  supplia  ce  iioniifc,  par  soumis  à  la  juridielion,  visite  el  correclioii 

le    moyen   de  ses   alllhas^adeurs  ([u'il    avait  du  grand  maiire  de  cet  ordre,  conjoinicmeni 

envoyés  an  concile  de  Vienne,  que  les  biens  avec    l'abbé  de  Sainte-Croix,  ou  à  son  refus 


e 


des  Templiers   en    son   rovaume   ne  fussent  avec  celui  de  \  aldégna,  tous  deux  de  l'ordr 

point   unis    àloidredes    Hospiialiers,   niai>  de  Citeaux  ;  et  ces  deux  abliés  ne  voulant  pas 

qu'ils  fussent  assignés  [loiir  la  fondanoii  d'un  accompagner  le   grand  maîlre   de  l^ilalrava 

noiiv(d  ordre  militaire,  dont  le  principal  ins-  dans  celle  visite,  il  la  peut  faire  seul  ou  noiii- 

iiiiil    serait  de  faire  la  guerre  aux    maures;  mer  des  commissaires. 

et  afin  d'exciler  le  pape  a  lui  accorder  sa  de-  Le    premier   grand  maître    de  IMonlésa  fol 

iiiandc,  il  l'informa  de   I  el.il  du   rovaume  de  ('iiiilliiime    Eriili.    Il  y   en    eut   niialorze    de 

«Irciiade,  cl  du  grand  nom'.re  d'inlidèles  qui  s'.iile,  cl    le    dernier    fui    dom    l'ierrc-Louis 

y  élaienl.  Nonobstant  celle  demande  du    roi  Calcerande  Itorga  ;  car  après  sa  mort  l'bilip- 

d'Aragon,  le  pape  ne  l.iihsa  pas  de  donner  1  ;  po  M,  roi  d'E  pagne,  fui  déclaré  par  le  [lapo 
(I)   Vny.,  à  la  lin  du  vol.,  Ictir'  i'i'j  el  206. 


1081                                  MON  MON                                 lorî 

adm'nistrjili'iM-  porpétiiel  de  cet  ordre;  ce  q'ii  Icsiino,  ils  avaient  la  mnrcjuc  de  cet  ordre, 

fui  aussi  accordé  pour  ses  suceesseiirs.  (|iii  était  imc  étoile  à  cinq  rais  (2). 

Ces  ciievaliers  portent  une  croix  de  pneu-  Les   iniidèlcs    s'ct;int  enfin    emparés  de  la 

les  pleine  sur  un  habit  blanc  (1).  Us  olitinrcMt  Terre-Sainte,  les  chevaliers  de    Mont-Joie, 

di' grands  privilèges  cl  immunités  des  papes  aus^i   bien  que  les  autris,  lurent  conirainis 

Alexandre  IV,  Sixie    IV,  Jules  13,    Léon    X,  de  se  retirer  en  Liirope;  et   aliii    de  troiner 

Clément  VII  et   Paul  IIL   mais   particulière-  un  lieu  qui  leur   fût  commode  p'ur   y    faire 

nient  di-  Léon  X,  qui  leur  accorda  les  mêmes  leur  demeure, ils  p;ircounirenl  plusieurs  pro- 

exeiiiplions,    privilèges   cl    immunités   dont  vinces,  et   s'arrétèreni  enfin  d.ns  la  Casiille 

jouissaient  ceux  de  Calatrava.  et  de  Pdul  III,  et  dan  s  le  royjiunii'  dr  V.ilence,  nù  les  princes, 

(lui  leur  permit    de   se  marier   et    de  tester.  (jui  avairnt  connu  leur  valeur,  leur  fir.  ni  de 

Us   reçurent   la  bulle  de  ce  pape   dans  leur  grands  dons.  Al|ilionse  IX  leur  ayant   donné 

ihapilre  général  qui  se  tint  l'an  1572.  le  cbâleaii   de    Mnnifrac,  ils  chaii^^è;  ent  de 

L'ordi  e  de  Saiiil-Cii'orvres  d'AUania  fut  ins-  nom  dans  la   Casiille,   en    preiianl    celui   de 

litué   l'an    1201,  à   Sa:nt-Ccorges   d'Allama,  Moiillrae  ;  mais  à  Vaknce  et  dan-,  les  autres 

dans  le  diocèse   de  Torlose,  et  fut  approuvé  lieux  où  ils  s'éla'eiit  établis,  ils  forent  lou- 

par  le  saint-siége  l'an  I36j;  il  fui  uni  à  ce  ui  jours  appelés  de  Mont-Joi  •.  Knfin,  lan  1221, 

de    Moniésa   l'an    1399    par  l'anlipipe    (Je-  le  roi  Ferdinand,  surnommé  le  Saint,  voyant 

noît   XUI,  qui    était  reconnu    pour    légitime  que  cet  ordre   él.iit   beaucoup   déchu   de   sa 

pontife  en  lispagne,  et  cetie  union  l'ut  conlir-  première  splendeur,    l'incorpora   et  l'unit  à 

i;iéc  dans  le  concile  de  Constance.  celui  de  Calalrava. 

Silvest.  Maurcil.   Mar.  Ocenn.  di  txilt.   gli  11  y  a  plusieurs   auteurs   qui   parlent  des 

relig.  ,  lil).  II.  Du  Poi,  Histoire  de  la  rondain.  chevaliers    de    Truxillo  comme    d'un   ordre 

des  Templ.  Mennenius,  lîernard  Giusiiniani,  séparé  de  celui   de  Mont-Joie,  et  qui   disent 

Merman  et  Sclio  mebecii,  dans  leurs /Vi'ii.  i/fs  la  ménie  chose  de  celui  de  M.mifr.ic;  mais 

O:  d.  inilit.  comme  il  y  en  a  d'autres  q;ii  n'en  font  c[u'un, 

MON'l'-FHAC.  Voyez  Mont-Jcie.  nous  les  jo  gnons  aussi  ensemble.  Les   clie- 

.MONl'-JOIE   (Des    cnr.VALiEKs    de   l'ordiie  valiers  de  ïroxillo  liraient  leur  origine  de 

i>e),  nppelé.i  aussi  de  L'ont  frac  el  de  Truxillo.  ceux  de  Mont-Joie,   cl  ont  été  ainsi  appelés 

Après  (juc  (jodefroy  de   Bouillon  rui  cou-  à  caos  >  que  le  roi    Alphonse  IX  leur  donna 

qnis  la   Terre-Sai;ile,  on   bâtit  aux  environs  aussi  dans  la  C>astille  la   ville  el  le   pays  de 

lie  Jérusalem  deux  villes,  dont   la  première,  'J'ruxillo  avec  Sania-Croce,  Albana,  Cabagna 

qui  n'en   était  pas  fort  éloignée,  était  située  et  Zaferillo.  Ces  places  avaient  éîé  conquises 

sur  le  sommet  d'une  mont  igne,  d'où  les  |  è-  sur  les  maures;  mais  ces  infidèles  les  ayant 

lerins  qui  venaient   visiter  les   saints   lieux  reprises  peu    de   temp'i   après,  et  les   cheva- 

pouvaient  découvrir  cette  sainte  cité.  L'autre  liers  de  Truxillo    n'ayant    plus  de   retraite, 

en   était   éloignée   d'environ  deux   lieues,  et  furent  incorporés  dans  l'ordre  d'AIeantara. 

était  aussi  située  sur  une  montagne  proihe  Qmique  nous  ayons  mis  celui  de  Mont-Joio 

de  Bethléem  el  de  la  Tour  d'Ader,  ou  du  lieu  sous  la  règle  de  saint  Basile, en  suivant  l'o- 

">ù  l'ange  annonça  aux  pasteurs  la  naissance  pinion  la  plus  cionmune,  il  y  en  a  néanmoins 

du  Sauveur  du   monde,  d'oîi  les  pèlerins  qui  quelques-uns    qui  le   mettent   sous  celle  do 

aillent  à  Bethléem  pouvaient  aussi  décou-  saint   Augustin,    et   d'autres  qui  prétendent 

vrir  cette  ville;  et  ces  deux  nouvelles   villes  qu'il  fut  soumis  à  l'ordre  de  Cîleaux. 

furent  appelé'S  Mont-Joie,  peut-être  à  cause  Mennenius,  De/ùiV."  equest.   Ordin.    Chry- 

de  l'allégresse  et  de  la  joie  que  faisaient  pa-  sost.  Henriquez,  Menolog.  Cislert.  Francise, 

rattre  les  pèlerins  en  découvrant  de  ces  mon-  Quaresmo,  Elucid.  Terrœ  snnclœ,  I.  I,  lih.  ii, 

tagnes  les  saints  lieux  où  Jésus-Christ  avait  c.  5G.   Mendo,    De  Ordinibus   Milil.    Franc, 

pris  naissance  et  avait  répandu  son  sang  pré-  Rades,  C/iron.  de  Caiiitrata,   c.    18.  Hernian. 

cieux  pour  notre  ré.leniption.  el   Schoonebeck,  dans  leurs  llisl.   des  Oïd. 

Il  se  forma  dans  le  même  temps   un  ordre  Milit. 

militaire  pour  la  défense  de  ces  saints  lieux  MONT-LUCO  (Ermites    de).  Voyez  Jean- 

ol  des  pèlerins  qui    les  ven;:ient    visiter  ;  el  Baptiste  (Krmites  iie  Saint-). 

comme  ces   deux    villes  avaient  le  nom  de  MDNTMAHTIIK  (Des  Ueligieuses  Bénédic- 

Monl-Joie.  el  que  les   chevaliers  y  établirent  tines  Béeormées  de),  ai-er /n  Fie  rfe /«  rf^Dr'- 

letir  première  detneure,  ils  en  prirent  le  uooi.  rende    mère    Marie    de    Beauiilliers,    leur 

Alexandre  lîl  approuva  cet  ordre  l'.m  1180,  réformatricr. 

à  00  que  l'on  prétend,  el  donna  aux  cheva-  Ce  sérail    trop   entreprendre    de   vouloir 

liers  la  règle   de   saint  Basile.  Us  portaient  parler  de    tous   les  monastères  de   filles    do 

sur  un  habit   blanc  une    étoile  rouge  à  cinq  l'ordre  de    Saint-Benoît  qui  ont   été   réfor- 

rais,   et   il   y  a  quebiues  écrivains  qui   leur  niés;  le  nombrceii  est  trop  grand,  el  ilyasi  peu 

donnent  une  cro  x    rouge   semblable  à  celle  de  différence  dans    les  observances   et  dans 

des    Templiers.    Schoonebeck,  qui  est  de  ce  l'hab  IlemenI,  que  le  réeil  en  serait  plus  eii- 

iiombre,  se  contredit  lorsque,  parlant  de  ces  nuyant    qu'agréable:  c'est    pourquoi   nous 

derniers,    il   dit   qu'ils  portaient    une   croix  nous  contenterons  seulement   de  parler  des 

rouge   pour  marque  de  leur  ordre,  el  qu'en  réformes  établies  par  les  révérendes  iiièrcs 

parlant  des  chevaliers  de  Truxillo  il  dit  aussi  ^  ariede  Beauviiliors,  abbesse  de  Montinar- 

que,    tirant  leur   origine   des  chevaliers    de  ire  ;  Maiieleinc  d'Escoubleau  de  Sourdis,  ab- 

51onl-Joic,  lorsqu'ils  lurent  chassés  de  la  Pa-  besse  de  Noire-Dame  de   Saint-Paul  proche 

(tj  Vpij  ,  a  1,1  lia  du  vol  ,  ii"'i07.  (2)  Voy.,  à  la  fin  du  vol.,  :i°  î(J8. 


K-83                                         DICTiONNAIfUC  UES  OBliUES  UEI.IGIEUX.                                         JOSi 

Pe  iiiv.iig;  cl  Margtiorilc  d'Arhoiizzc,  .ibbcssc  1  :bor  ii'in  ilo  la  m;iison.  l'Ile   fut   l<)n;:l(>nips 

ilii  \',il-iii'-(irâr,",  foiiiMie  les   jiliis   lélèlircs  sous  gri^nctière,  Iravnillaiit  avec  les  sœurs 

ic'foniinlrirrs  de  col  nrdic  en  l-"r.mee.  converses  à  faire  du  p;iin,  qnoitiu'elle  fût  fnrl 

Sur  1,1  lin  du   W  siècle  Ji'an  Simon,  év(5-  delicale  ;  el  ay.inl  un  jour   voulu    porter   un 

que  de  Pari<,  avail  coninieiué  à  iravjiil  er  à  firdeau  Irop  pesant,  elle  se  rompit  une  cote, 

1.1    rifornie  di-s  nionaslères   de    Benedrclines  «lui,  n'ajani  pas  élé  bien  remise,   lui  causa 

dans  Son  diorèse;  l'abtiaye  de  Clielles  fut  l.i  beaicoupdedouleurs  le  resledeses  jours.  I^lle 

premii're  à  >e  sounielire  à  1  i  reforme,  et  la  vivait  ainsi  conl  n'e  sous  la  cou  luilc   de  sa 

<l(\lure  y  fut  établie    (  n  t 'lOD.  Jean  le    de    la  taule,  lors'iucM.  du  l'ri'sne,  conseiller  d'l'"lat, 

Kivièri-,  qui   en    était  abbesse,    pour  donner  s. ^n  beau-frère,  obtint  po   relie  du  loil'ab- 

exemple  à  ses  reli;;ieuses.  fut  la  première  qui  bnje  de  Montmartre  procbc  l'.iris,  dont  il  lui 

lit  v(pu  decloturc,  rllesal)besses  ne  furent  en-  envoya  le  bre>et  pendant  qu'il  f.iisait  sollici- 

suiie  qii  '  triennales:   ce  (jui   dura  jusqu'en  ter  à  Hume  l'expédiiion  de  ses  bulles,  (jui  ne 

l'an  l.")»3.  qu'elles    recommencèrent    à    être  furent  données  que  di'U\  ans  après,  t-omoie 

()<  rpétoel!es.  Ittiennc  l'oiic!ier,  qui  fui  évé-  elle  soubailait    toujours  vivre  dans   l'obéis- 

que  de  Paris   ajirès  la    mort  de  Jean  Simo",  sanie,  elle  fui  ra\ie  du    retardement  qu'il  y 

son  prédécesseur,  voulant  cuniinuer  ce  que  eut  dans   l'expédition  de  ses  bul'cs,   et  i)en- 

Ci'lui-ci  avait  commencé,  élahlil    la  réforme  da;il  ce  temps- là  elle  ne  voulut  poini  érrire 

dans   les  abbayes  de    .Montmartre,  .Malnouc  à  son  beau-frère,  afin  qu'étant  sc.indalisé  de 

et  quelques  autres,   et   dressa   des  constitu-  son  silence  et  clm(iuô  du  peu  de  recounas- 

iions  pour  les  religieuses  béncJiciincs  de  son  .sance   qu'elle  lui    témoignait   de    l'atlenliun 

diocèse.  M  lis  cette  rcform:>  ne  subsista  pas  qu'il  avait  à  lui  faire  plaisir,  il  négliijeâi  la 

I  ingti'm[)s  ;    car    l'abbaye  de     Monlmarlre  poursuite  île  ce  te  affaire  cl  cessât  de  Iravail- 

étanl  tombée  dans  le  reiâcliemeiit,  aussi  bien  Ici'  pour  elle.  Mais  il  ne  se  rebuta   point  de 

que  plusieurs  autres,  on  n'y  gardait  plus  au-  ce  procédé,  étant  persuadé  que  l'éloign 'inent 

cuiie    observance  régulière,   lorsque   Marie  (|u'elle  faisait  paraître  pour  accepter  cetleab- 

de     It' auvilliers    en     fut    nonnnco   abbesse  baye  l'en  rendait  plus  digne  ;  elle  y  consentit 

l'an  la'JC».  à  la  Qn,  quoique  sa  tanleeûl  f.iit  son  possi- 

lîllc  naquit,  l'an  loTi-,  nu  cbàteau  de  la  I  le  pour  l'en  détourner,  àcause  que  l'abhaye 
l''erté-llubeit  en  Sologne,  et  elle  eut  pour  de  Montmartre  était  forl  décriée  par  le  peu  du 
père  C'Iititile  de  lîeauvilliers,  coiiite  de  Saint-  régularité  di'S  religieusesqii  y  denvuraien!. 
Aignan,  et  pour  mère  Marie  Babou  de  la  Les  bulles  ayant  élé  e\(ediees  l'an  1598, 
IJourdaisière.  Elle  fut  mise  dès  l'âge  de  sepl  deux  religieuses  de  Montmarlie  allèrent  à 
ans  dins  l'ai. baye  de  l'erray  auprès  d'une  de  l'eaumout  quérir  leur  nouiclle  abbesse. 
ses  tantes,  sœur  de  sa  mère,  qui  en  était  Etant  arrivée  à  Paris,  elle  eut  Ibonnenr  do 
abbcss '.  Elle  n'y  demeura  que  trois  ans:  car  salurle  roi,  i|ui  lui  donna  deux  mille  érus 
sa  tante  c^ani  iimrte,  e  le  cnira  dans  l'abbaye  pour  commencer  à  réparer  les  ruines  de  sou 
de  Iteaumiint,  où  une  autre  de  ses  tantes  monastère,  où  elle  entra  le  7  février  de  la 
était  aus«i  abbesse.  A  p<'ine  eut-elle  atteint  même  année,  et  elle  fut  mise  en  possession 
l'âge  de  douze  ans,  qu'elle  demanda  l'Iia';  it  par  le  prieur  de  Saint-Victor,  grand  vicaire 
avec  tant  d'insiance.  qu'on  lui  accord.i  sa  du  cardinal  de  fiindy,  évôijuc  de  Paris,  lletle 
demande;  et  étant  arrivée  à  sa  (luinzième  an-  cérémonie  fut  le  cornu  encement  de  ses  in- 
née, elle  commença  sm  noviciat,  et  prononça  quiétudes,  se  voyant  cliargéc  d'une  maison 
SOS  V(rux  à  râi;e  de  seize  ans,  l'an  1390,  en  pauvre  et  déréglée.  l'Hle  y  trouva  trente-trois 
présence  de  plusieurs  pi-rsonnes  d(^  (jualilé,  religieuses  résolues  du  vivre  à  leur  mode  ei 
qui  admiraient  sa  ferveur  elcjui  s'étonn  lienl  de  s'opposer  à  tout  le  bien  qu'elle  voudrait 
qu'une  demoiselle  si  jeune,  et  qui  était  une  procurer,  à  l'exception  de  deux  que  Dieu 
des  pins  belles  personnes  de  son  temps,  mé-  avait  clioisies  pour  être  les  pierres  fonda- 
prisàt  le  monde  si  généreusement  et  avec  mentales  de  la  reforme  qu'elle  y  élablll. 
tant  de  joie  et  de  satisfaction.  Le  mémoire  qu'on  lui  donna  du  revi'uu  de 

A  peine  eut-elle  achevé  son  sacrifice  qu'i  lie  l'abba}  e  était  de  deux  mille  livres,  sur  quoi  il 

prit  une  forte  résolut  on  de  se  rendre  lidè'e  fallait  payer   dix    mille  livres  de  délies.  La 

a  sa  vocation,  ce  f|u'clleexécuta  toute  sa  vie;  grange  était  saisie  pour   ce  sujet,    la  crosse 

y  étant  excitée  d'un  cftié  par  les   bons   avis  engagée  pour   deux   cents  écus,  les   fernici 

de  sa  tante,  qui  l'exhortait  tous  les  jours  de  données  à  vil  prix  à  cause   des  pots    de   vin 

tendre  à  la  perfection  sans  écouler  les  repu-  qu'on  avait  exigés,   et    la   m.ison  tellement 

gnancesdela  nature  ;  elde  l'autre, parl'exein-  dépourvue  de   meubles,    qu'on  n'en   trouva 

pie    de    la    mère    de    Sourdis,    sa    cousine  pas  assez  pour  lui  garnir   une   ibambre.  Il 

germaine,  (|ui  par  son  grand   mérite  et   ses  fillul  que  .M.  du  l'resne  meublât   la  nouvelle 

rares  vertus   fui    depuis   abbesse   de  Notre-  alibesse  di'puis  son  litjusqu'.i  la  baUerie  de 

Dame  de  Saint-Paul,  et  reforma   ce  monas-  cuisine  :  entre  ces  mouilles  il  lit  tendre  dans 

tère.  ("était  une  religieuse  exai  le  aux  obsor-  sa  chambre   une  belle  tapisserie  ;  mais  cette 

vances  régulières,  c   dont  1  s  discours  éiaionl  vertueuse  fille  la  fil  oter,  parce  ()ue  cela  rcs- 

si  pieux  e:  si  fervents,  que  la  mère  de  Iteau-  sentait  trop  l,i  v.inité,  pour  laque. le  elle  avait 

villiers   recherchait  avec  empressement  ses  beaucoup   d'horreur. 

conversations,  dans    lesquelles  elles   s'oxci-  Celle  grande  misère  tompon^llo  n'était  pas 

laicni  mutuellement  à  la  pratique  des  vertus,  ce  qui  inquiétait  la  jeune  abbesse:  sa  grande 

I. 'abbesse  de  He.iumoni  exerçait  sa   nièce  douleur  procéd,iil  des  derèglemiiits  dos  an- 
dans  les  emplois  les  plus  humbles  cl  les  plus  cicnucs  religieuses,  et  son  unique  s  lulagc- 


108Î5 


MON 


MON 


1J8G 


mont  était  dans  la  conversation  de  ces  deux 
religieuses  qu'(ile  voyait  portées  au  bien  el 
qui  étaient  prêtes  à  donner  les  mains  à  la 
réforni.'.  Les  désordres  de  cetie  maison  al- 
laient à  l'escèi.  il  n'y  avaii  ni  clôture,  ni 
pauvrelé  obser\ée;  les  enlrelieiis  de  galan- 
teries y  étaient  fort  fiéquenis  :  s'il  y  en  avait 
q  lelqut's-unes  qui  jeùnaii^nl  conrorinénieiil 
à  la  règle,  c'était  malgré  elles,  parce  qu'elles 
n'avaient  ni  argent  ni  amis,  el  qu'elles  ne 
pouvaient  pas  fairt"  bonne  chère  comn)e  les 
aulrcs.  M.  liu  Fresne  leur  ay.mt  donné  douze 
niuiils  de  vin,  et  leur  envoyant  tnules  les  se- 
tnaini.'S  un  veau  et  un  m  luton,  la  n  >uv(  Ile 
abbesse  établit  p  ir  ce  moyen  le  souper  eu 
conunun,  qui  n'était  (joinl  en  usage,  pirce 
(|ue  cil  ique  religieuse  prenait  sou  repas  à 
l'heure  qu'il  lui  plaisait,  et  que  burs  amis 
h'ur  en  procuraient  le  moyen;  mais  celles 
qui  assistaient  à  ce  souper  ne  voulaient  point 
écouler  de  lecture  ni  garder  le  silence. 

Celles  qui  souhaitaient  la  réforme  ne  man- 
geaient que  du  pain  fort  bis,  cuit  avec  du 
chaume  faute  de  b<)is,  el  les  jours  d'absti- 
nence on  leur  servait  du  potage  sans  beurre 
avec  des  œufs  crus  qu'elles  apprêtaient  au 
réfectoire.  Enfin  la  misère  était  si  grande  que 
M.  du  Fre-ne,  en  ayant  été  averti,  leur  donna 
quatre  mille  cinq  cents  livres  pour  acheti^r 
du  bois  pour  les  chauffer  et  pour  d'autres 
provisions.  Il  leur  envoya  aussi  beaucoup 
de  choses  dont  elles  avaient  besoin,  et  il  ob- 
tint encore  du  roi  pour  elles  quelques  som- 
mes d  argent,  qui.  étant  assez  considérables, 
li'ur  facilitèrent  les  moyens  de  réparer  un 
peu  le  mauvais  ordre  dans  lequel  était  l'e- 
lal  du  monastère,  et  l'on  se  servit  de  l'argent 
que  la  dépositaire  gardait  aux  particulières, 
pour  eiiipècher  la  vente  du  ble  qui  était  sai^i. 
Les  religieuses  en  murmurèrent  beauC'iUp, 
il  y  en  eut  même  quelques-unes  qui  atten- 
tèrent à  la  vie  de  labbesse,  à  laquelle  elles 
donnèrent  d.ux  fois  du  poison,  qui,  par  un 
m  racle  de  la  puissance  de  Dieu,  n'ayant  pas 
eu  son  efff t,  ne  servit  qu'à  les  aveugler  da- 
vantage, en  sorte  qu'elles  résolurent  d'y  em- 
|)loyer  le  fer  en  la  f.iisanl  poignarder  ;  il  y 
eut  pour  cela  des  assassins  apostés  :  ce  qui 
était  fort  facile,  puisi|ue  c'était  l'ordinaire  de 
voir  les  amis  des  religieuses  passer  une  par- 
lie  d(!  la  nuit  avec  elles.  Mais  un  drs  com- 
plices, dont  Dieu  toucha  le  cœur,  en  ayant 
averti  une  des  coiilidenles  de  l'abbesse,  elle 
évita  encore  ce  coup  ;  ce  qui  fil  que  ceux  qui 
avaient  l'adminjstration  de  l'abbaye  l'obligè- 
rent de  sortir  du  dortoir  commun  el  de  se  lo- 
ger dans  une  cbanibre  oii  il  y  avait  double 
porte,  commandant  à  deux  sœurs  converses 
de  probité  d'appiêter  c^'  t|ui  serait  nécessaire 
pour  sa  nourriture,  avec  défense  aux  autres 
d'entrer  dans  la  cuisine.  Et  la  dépositaire, 
qui  était  une  de  ces  anciennes  religieuses  qui 
souhaitaient  la  réforme,  prit  soin  aussi  qu'on 
ne  lui  présentât  rien  qu'elle  n'y  eût  go.ité  la 
première. 

Au  milieu  de  tant  de  fâcheux  accidents. 
Dieu  consola  notre  abbesse  par  la  visite  du 
(  ardiiialdeSourdis,  art  hevéquede  Bordeaux, 
son  cousin  germain,  qui   s'intéressa  beau- 


coup pour  elle  et  lui  servit  à  mettre  la  ré- 
forme d.ins  cotte  abbaye  ;  mais  parce  qu'il 
ne  pouvait  pas  être  si  souvent  auprès  d'elle 
qu'il  eût  été  nécessaire  pour  ce  sujet,  il  lui 
donna  pour  direcle'ir  le  P.  Benoît  de  Caiifeld, 
capui  in,  qui  était  un  religieux  d'une  gramie 
vertu.  Le  cardinal  de  Sourdis  informa  cepen- 
dant l'évéqui;  de  Paris  des  désordres  de  cette 
maison,  el  ce  fut  à  sa  sollicitation  qui;  ce 
prélat  vint  à  Monlmarlre  et  commanda  à  l'ab- 
besse et  à  toutes  les  religieuses  de  ne  plus 
souffrirquclaclôtun-  fût  si  mainbservée  chez 
elles,  comme  étant  le  moyen  le  plus  court 
pour  retrancher  les  scandales  et  commen- 
cer une  vie  conforme  à  leur  état.  Ce  discours 
fut  très-mal  reçu  des  religieuses  :  elles  se  le- 
vèrent toutes  ensemble  el  parlèrent  confusé- 
ment, sans  avoir  aucun  respect  ni  pour  lo 
lieu  où  elles  étaient,  ni  pour  la  dign  té  épis- 
copale,  et  elles  s'emportèrent  en  des  injures 
qui  firent  horreur  à  l'assemblée.  La  conclu- 
sion fut  que  l'évéque  donnerait  ordre  à  son 
grand  vicaire  de  prêter  main  forte  à  l'ab- 
besse; ce  qu'il  n'exécuta  jias  néanmoins, 
D. eu  le  permettant  ai.isi  pour  éprouver  de 
plus  en  plus  la  fidélité  et  la  constance  du  l'ab- 
besse. 

Le  P.  Benoît  Canfeld  fut  d'avis  qu'elle 
déposât  la  prieure  el  les  autres  officières  qui 
ne  voulaient  point  do  réformi'.  Elle  tint  le 
chapitre  pour  cet  effet  ,  elle  établit  prieure 
l'une  des  deux  religieuses  qui  avaient  désiré 
la  réforme,  et  fit  r.mtre  cellerière  et  maî- 
tresse des  novices.  Elle  donna  la  clef  de  la 
porte  à  la  plus  raisonnable  des  autres,  mais 
elle  s'en  réserva  une,  afin  qu'elle  ne  pût  être 
ouverte  sans  sa  permission.  Toutes  les  an- 
ciennes se  levèrent  a»ec  grand  bruit;  elles 
chargèrent  l'abbesse  d'injures ,  protestant 
qu'elles  ne  lui  obéiraient  jamais,  et  peu  s'en 
fallut  qu'elles  ne  la  frappassent. 

Les  choses  étaient  en  cet  état  lorsque  lo 
P.  Benoit  ,  s'en  retournant  en  Angleterre  , 
oii  le  désir  du  martyre  l'appelait ,  après 
avoirprocuré  le  relourdu  P.  Ange  de  Joyeuse 
dans  son  ordre,  il  l'obligea  de  s-rvir  de  pro- 
lecteur à  l'abbesse  de  iMontmarlre  ;  ce  qu'il 
exécuta  avec  beaucoup  de  zèle.  Il  gas-'na  là 
jeunesse  par  sa  douceur,  de  sorte  ()u'il  ne 
demeura  (jue  huit  di'S  plus  anciennes  qui  vé- 
curent en  leur  particulier,  sans  vouloir  se 
soumettre  aux  observances  régulières,  étant 
toujours  opposées  aux  desseins  de  l'abbesse, 
La  clôture  el  le  réfectoire  commun  furent 
les  deux  premiers  articles  do  la  réforme  ; 
peu  à  peu  quelques-unes  des  anciennes  se 
joignirent  à  celles  qui  s'y  étaient  soumises 
les  premières,  el  l'on  commença  à  voir 
beaucoup  de  changement  dans  ce  monas- 
tère. 

Au  mois  de  juillet  139:),  le  roi  accorda  en- 
core à  M.  du  Fresne  l'abbaye  de  Saint-Pierre 
de  Lyon  pour  une  de  ses  sœurs.  Il  l'olTrii  à 
l'abbesse  de  Montmartre,  croyant  lui  rendre 
service,  en  la  tirant  d'une  maison  ruinée 
pour  l'établir  dans  une  autre  riche  et  magni- 
fique ;  mais  après  avoir  consulté  le  Seigneur, 
elle  connut  que  sa  volonté  était  qu'elle  ré- 
faruiàl  le  monastère  de  .Monlmarlre  :  ainsi 


I0S7                                         D;CTION.N.\mE  bKS  OUDUES  RELIGIEUX.  I0S8 

olle  |iréforarox6c!ilion  ilc  la  volonté  ilc  Dieu  Iraiiites  do  rester  à  l'infirmcrip,  où  «-lies  se 
à  sa  propre  satisfaction.    L'année  suivante,  |ini;;ii'iil  avec  de  Icnss  manteaux  de  futaiiie 
ijui  était  relie  du  jjraïul  j  ibilé,  elle  denrin  la  Id.inciie  atlailiés  a^ec  des  rubans  de  c<ni!our, 
au  pape  Clémenl  Vlll    la  permission  d'éliro  n'osant  pis  parait  c  en  cet  éqiipn'^e  en  pré- 
iin   \  i  ileur  pinir  sa  coinnrinanté,  en   roui-  «ence  de    leur  abliessc    et    des    autres    reli- 
pnnirassocialioMconlr.ictéeavccsix  maisons  <;  eu-es.ilonl  la  simplicilé  faisait  honte  à  leur 
loulesenni'mies  delà  reforme,  san>.  le  ronsen-  i.mbilion  et  à  leur  \anilé. 
leiiient  dcsiiueles  on  ue  pouv  lil   rii'n   faire.  I)eu\   des  anciennes   ipii  étaient    les    plus 
\l.  (le  Sil'eri  était    pour  lors  ambassadeur  à  op;i0sé 'S  à  l'abliejse  s'eiant  d  ins  la  suite  ré- 
Kome,  où  il  /lurait  pu  traverser  cette  alTiire ,  comiliées  pai  faileineiil  avec  elle,  les  antre» 
ayant  une  tante  cl  deii\  cousines  germaines  suivirent  bientôt  leur  exoinple,  de  sorle<iu'en 
à   Montmartre  ;  mais  elle   fut  conduite   avec  ileux  aiinées  de  lemjis  li  réforme  fut  pre-que 
tint  de  seiTet  (lu'il  n'en  eut  aucune  connais-  et  ildie  dans  IMontinarlrc.  Il  se  présiM^a   un 
sanre  :  rabbcs>e  obtint  du  pape  un  bref  qui  si  grand  nombre  de  tilles  pour  y  être  ri'cues, 
lui  donnait  pouvoii- de  réformer  sa  maison  cl  ()Me,  i.endani  près  de  soixante  aiiS  que  Ma- 
d'elire  son  \isiicur  en   particulier,  indepen-  rie  de  I!  -.imi  lier>  en  a  été  alibessi',  on  pn- 
dammenl  lies  auli  es  monastères   desquels   il  tend    (ju'elle   a    donné    l'habit  à    deux    cent 
lui   permettait  de  se  séparer.    î  lie   i\'envoya  vingt-sepl    filles:    par   ce    moyen   cl  par   la 
exprès  pers  iUiic  à  I  eb'clion    du  nouvran  vi-  bonne  conduite  des  abbesses  qui  loi  ont  suc- 
«ileur  dos  six  maisons  Associées,  alin  d^'  pcr-  cédé,  dont  il  y  a  eu  des  princsses  d'  la  luai- 
ilre  son  privilège ,  ce  qui  fut  un  nouveau  su-  son  de  Lorraine,  cette  abbaye  est   devenue 
jet  de  murmure  parmi  si'S   lilles  ;  mais   elles  une  des  plus  pui^santes  et  des  plus  riches  du 
furent  lien   surprises   lorsqvi'on    leur  fil  la  royaume.  Enfin,  cette  pieuse  abbesse  cul  la 
lecture  du  bref  du  pape:   elles   enri  ni    pour  consolation  de  voir  tontes  les  anciennes  qui 
I  )ps  un  peu   plus  de   respect  pour  l'autorité  l'av  aienl  tant  fait  souiïrir,  se  prosterner  à  ses 
lie  li'ur  supérieure,  et  l'on  vil  plus  de  dispo-  pieds     pour    lui    demander    d'être    tr.iilées 
sition  à  la  réforme  qu'il  n'y  en  avait  eu  jus-  comme  les  autres,  en  renonçanl  à  toute  pro- 
qu'alors.  priclé,  et   voulant   suivre  la   règle  de  saint 
L'abbesse  n'avait  pas  voulu  se  faire  bénir  IJenoît  exact. ■ment  :  ainsi  elle  n'eut  plus   de 
pendant  tous  les  irou'iles  et  les  inquiétudes  peine  à  poursuivre  la  réforme, 
causés  par  larésislnice  et  l'ob^lioalion  de  L'abbesse  de  lîeaumonl  sa  tante  av.iil  puis- 
ses   rel  gieus'S  ;  mais    prévoyant   qu'ils  s'a-  samin.nt  travaillé  pour  l.i   faire  nommer  sa 
paiseraienl  dans  peu,  elle  s'y  prépara  pai'  la  e  >adjuti'ice  ;  elle  en  obtint  enfin  le  brevi'l  du 
relr;iite,  l'oraison  et  l.i  confc>sioa  générale  roi  l'i  la  conlirmalion  eu   cour    de   Uonie.   Il 
(b' lous  les  p(  c'.iés   de  sa  vie.    La   cérémonie  était  porté  lians  les   bulles  qu'elle  ne    serait 
se  fil  le  dimanche  dans   l'octave    des   Uois  :  point  obligée  de  quitter   l'abbaye   de   Mont- 
elle  fui  bénite  par  le  cardinal  de  Sou  dis,  cl  martre  qu.'  six  mois  après  la   mort  de  Tab- 
le I'.  Ange  de  Joyeuse  y  prêcha.  Depuis  ce  besse    de  licaumonl  ;  de  sorte  qu'elle  porta 
joiir-!à    elle    redoubla    son    zèle  ,    croyant  cnq  ans  ta  quai  lé  de  coadjutrice  avec  cel'e 
qu'elle  était  obligée  plus  que  jamais  d  •  Ira-  d'abhcsse,  et  pendant  c,'  tenu  s-là  elle  fil  tra- 
vailler à    la    réforme  de    son   abliaye.    l'eu  vailK'r    aux  bâtiments   de   Montm.irlre;    en 
après  elle  reçut  trois  filli^s  à   qui  elledonna  quoi   elle    fui  aidée  p.T  Ji.  de    Fièiie,   sou 
l'habit,  dont  l'une  était  pour  le  chœur  et  les  beau-f:ére,  qui  donna  encore  deux  mille  écns 
deux  autres  converses.  pour  fermer  un  clos  di-  vignes  qui  etiil  entre 
Les    religieuses  do  Montmartre   portaicnl  le  Monastère   cl   la    chapelle   des   Martyrs  ; 
pour  lors  des  habits  bl  mes   comme  les  c'ia-  mais  il  n'eut  pas  la    satisfaction  de  voir  cet 
noinesses  (I);  mais  l'abbesse  prit  le  noir  et  ouvrage  achevé,  étant  mort  en  l'année  1010. 
le  donna  à  colles  qui  co'iseniirenl  à  ce  chan-  Il  or''onna  par  son   testament  que  son  corps 
gement  ;  ce  qui  fut  contesté  à  l'ordinaire  par  serait  porte  à  .Montm  irire,  où    il   lassa  en- 
les  anciennes,  qui  en  firent  leurs  plaintes  au  core  trois  cent    irente-iiu.itre    ivres  de  rente, 
cirdinal  de  Ketz  :  ce  qui  obligea  ciitc  émi-  et  deux    mille    li\res    en    argent  comptant, 
ncnco   d'envoyer    son    grand    vicaire    j  our  pour   faire    prier    Dieu  pour  le  repos  de  soi 
apaiser  ces   troubles,   en   ordonnant  à  l'ab-  àmc.  On  trouva  dans  son  cabinet    le  dessin 
bosse  de  ne  rien  f  lire  de  nouveau  contre  l'ii-  d'un  bâtiment  qu'il  voulait  faire  à  la  chapelle 
sage  de  la  communauté,  nesvoul.inl  pas  que  des  Martyrs,  et    qu'il  aur.iil    exécuté,  si    la 
l'habit  fût  (lilTereul  entre  elles.  Klle  répondit  iii()rt  ne   lui  en  eût  p.is  ôté  l»pouvoir;  m.iis 
avecassez  de  fermeté  qu'elle  était  résolue  do-  madame  de  Près  ne,  sa  veuve,  suivit  ses  in  ton- 
héirà  ses  ordres,  pourvu  qu'ils  ne  fus'^eiil  pas  lois  quelques  années  après,  et  contribua  à 
opposés  aux   vœux    isse:itiels.   En  effet  elle  la  fondation  d'un  nouveau   monastère   altc- 
repril  l'habit  blanc,   non  pas  de    la    manière  uaiit  celle  église    des    .Martyrs,    auquel    elle 
que  ses   religieuses  prétendaient;  car  elle  se  donna  deux  mille  sept  cents   livres  de  rente 
revêtit  d'une  grosse  serge  de  liine    blaneh.'  pour  la  nourrituri'  de  dix  religieuses,  à  con- 
natiirclle  sans  avoir  été  blanchie  au  foulon,  diiion  que  l'abbesse,  sa  sœur,  fournirait   le 
avec  un    surplis  de  toile  pareillomeiil  gros-  même    nombre,   et    que    celte    église   serait 
sière;  de  sorte  que  les  autres  qui  chcrch  lient  toujours  desservie  par  vingt  religieuses. 
la  vanité  dans  leurs  élolTes  bien   blanches  et  Jusqu'à  ce  temps-là  on  avait  porté  l'Iialiit 
dans  11  urs  surplis  de  toile  fine  el  empesée,  blanc  dans  la  maison  avec  un  surplis,  lommc 
furent  rem[)lics  de  confusion  el  se  virent  cou-  nous    avons   dit;   niait    l'abbesse    écrivit   à 
(t)  I  01/.,  »  la  lui  Jii  v!,t.,  :i-  2!.'. 


lOSO 


MON 


MON 


1190 


Home  et  olitiiit  du  papp  un  lircT  pour  proii- 
dre  rinbil  noir,  ce  qui  s(>  (il  s;ins  juinme 
coiilriidiclion,  non-sculcnieni  pane  que  Isiu- 
les  les  anciennes  élaienl  décédées,  isiais  en- 
core par  la  profonde  si;Uinission  que  la  coni- 
mun.iulé  avail  pour  ses  ordres.  Klle  s'acquil 
nni'  si  grande  eslinie  au  dehors,  que  plusieurs 
nioiiasïèics  d  •  France  ,  qui  désiraioni  em- 
brasser la  réforme,  lui  demandaient  ses  avis 
et  s'e  limaient  heureux  d'avoir  des  filles  éle- 
vées (le  sa  main  .  pour  les  conduire,  cl  il  est 
>orti  de  Montmartre  ,  du  temps  de  celle  ali- 
besse,  plus  deciiiquniile  relij;ieuses  pour  al- 
ler réfiirmer,  établir  ou  gouverner  des  mai- 
sons de  l'ordre.  Le  prieuré  de  la  Mlle-l'E- 
véque  à  Paris,  sous  le  titre  de  Noire  Daim  de 
Grâces  ,  Cul  un  de  ceux  à  la  fondation  des- 
quels elle  contribua  ;  elle  y  envoja  ,  l'an 
1613,  huit  religieuses  du  clneur  et  ('eus  c -ii- 
vcrses  sous  la  conduite  d'une  su|)érieure  ,  et 
ce  prieuré  a  éié,  pendanl  plu!-i>'ur<  anué.'s  , 
dépendant  de  l'alibaye  de  Montmarlr(!;  mais 
à  présent  il  n'y  est  plus  soumis,  ayant  obtenu 
de  ilomc  des  bulles  de  séparatioi. 

Après  la  mort  de  l'a!  besse  (!.■  HîaumonI, 
Marie  de  lieauvillicrs,  qui  était  sa  coadju- 
trice,  fui  obligée  d'y  ailer:  elle  partit  de  Pa- 
ris le  2  avril  Itili,  el  y  arriva  le  18  du  méuic 
mois;  mais  elle  n'y  deineuia  que  si\  mois, 
el  re  ourna  à  Montmarire  qu'elle  v.e  put  se 
résoudre  d'aliandonner,  sedémellant  de  l'ab- 
baye de  Beaumont  en  laveur  d'Anne  îiabou 
de  la  i'oiir'lais;ère,  sa  nièce,  (ju'elle  emiu'  na 
avec  elle  pour  former  son  espiit  sur  les 
exemples  de  ses  filles,  en  atiendant  cjue  ^es 
bulles  fussent  expédiées. 

Ayant  léglé  loules  choses  dans  son  mo- 
nastère, elle  fit  imprimer  ses  constitutions 
pouraiïermir  la  rélorme,  et  atiii  i\ao  les  filles 
qui  se  présentaient  tous  les  jours  pour  être 
reçues  fussent  informées  d'abord  de  leurs 
oliiigalions.  Elle  sépara  ensuite  sa  commu- 
nauiéen  deux,  afin  (]iic  l'office  divin  fût  cé- 
lébré dans  l'église  des  Martyrs,  comme  il 
l'était  au  monastère  d'en  haul,  el  elle  fit 
faire  une  belle  galerie  [lour  la  communica- 
tion des  deux  monastères;  mais  présente- 
ment les  religieuses  demeurent  toutes  au 
monastère  d'en  bas  et  ni;  vont  clianler  Tof- 
fice  à  l'égl.se  d'en  haut  qu'à  certains  jouis. 
Enfin  Marie  de  Beauvilliers  Sainl-Aignan, 
après  avoir  gouverné  l'abbaye  de  Montmar- 
tre pendant  près  de  soixante  ans,  el  y  avoir 
rétabli  les  observances  régulières,  mourut 
le  21  avril  16o7,  étant  âgée  de  quatre-vingi- 
Irois  ans.  La  princesse  Françoise  de  Lor- 
raine de  (îuise  lui  succéda  et  conserva  dans 
cette  maison  la  régularité,  ce  qu'ont  fait 
aussi  les  auires  abbesses  jusqu'à  pré.^enl. 

Le  village  de  jMontmarire,  où  est  siluée 
l'abbaye  à  laquelle  il  a  donné  son  nom,  se 
nomme  en  latin  Mons  Marii/rum,  à  cause 
(|ue  saint  Denis  et  ses  comiiagiiuns  y  souf- 
frirent le  martyre.  On  l'appelait  an'ienne- 
menl  le  Mont  de  Mercure,  à  cause  qu'il  y 

(i;  Qui  reinpl  ss:iit  les  fonctions  de  diacre,  et  pniir 
sous-ili-icre  le  \i.  Pierre  de  Cluny.  L'église  dos  Ué- 
nédiciiiies  eslaujourd'lnii  régli-.e  paroissiale  de  M.oii- 
uiarire.  Le  uiuaasière  est  prcs'pie  tout  délrtiil;    il 


avail  en  ce  lieu  un  tcm,  le  dédié  à  celle  fausse 
ilisinilé.  On  y  a  bâti  depuis  une  (hapellesur 
le  penchant  de  la  montagne  du  côté  (le  Paris, 
en  mcmoi  e  du  marlyre  de  saint  Denis,  fiille 
fut  donnée  avec  ses  (ié|iendances,  par  Guil- 
laume i',  évéi;uc  de  Paris,  l'an  1098,  aux 
n  ligieiix  du  monastère  de  Saint-Martin  des 
Champs  à  Pars;  mais,  l'an  1133,  ou  1134-, 
Louis  VI  dit  le  Gros,  et  sa  femme  Alix,  leur 
('onnèrent,  en  échange  de  celte  église  et  di  s 
îevenus  qui  y  étaient  affectes,  le  pri'Hiré  de 
8aint-!)eni-'  de  la  Chartre,  el  non-seulement 
fondèrent  l'abbaye  diml  nous  venons  de  par- 
ler, mais  firent  aussi  rétablir  la  chapelle  des 
Martyrs.  Le  pape  Eugène  II!  dédia  l'église 
des  religieuses  le  21  avril,  et  celle  des  Mar- 
tyrs le  1  "  juin  (le  l'année  111G,  ayant  pour 
l'un  de  ses  assistants  dans  cette  cérémonie 
saini  Bernard,  abbé  dt- Clairvaus.  (1).  L'ha- 
billement (ie  ces  religieuses  est  semblable  à 
celui  des  autres  Bénédictines  réformées  dont 
nous  avons  donné  le  dessin  au  tome  pre- 
mier. 

Jacqueline  Boueitc  de  Rlemnr,  Eloges  des 
personnes  illustres  en  piéléde  l'ordre  de  Sainl- 
henoil.  Thomas  Corneille,  Diclionn.ire  yéo- 
graptuijue,  et  Moreri,    Diel.   hiilorique,  au 

mol   MdNTMAUTBt:. 

MONT- OLIVE  r  (De  l'oiidue  de  Notkk- 
Damk  m  ),  avec  la  Vie  du  bienheureux  lier- 
nird  Ptolomde  ou  Toloniei,  [ondaleur  de 
c.  l  ordi  e. 

La  congrégation  des  moines  bénédictins  (2) 
du  Monl-Olivet  en  lialie  reconnaît  pour  son 
fondateur  le  bienbeun  ux  Bernard  Ptoloméu 
ou  Tolomei,  gentilhomme  de  Sienne,  (|ui  re- 
çut au  baptêaïc  le  nom  de  Jean.  11  s'attacha 
à  l'élude  de  la  philoso.hie,  (ju'il  enseigna 
publiquement,  1 1  il  élail  esliuié  un  des  plus 
savants  hommes  de  son  lem[is.  Un  jour  qu'il 
se  préparai!  à  expliquer  une  question  diffi- 
cile, dans  le  teiiij)s  qu'il  demandait  l'alleii- 
lion  à  ses  écoliers,  il  devint  tout  d'un  coup 
aveugle;  mais  ayant  recouvré  la  vue  par 
l'intercession  de  la  sainte  Vierge,  il  fit  vu'U 
de  se  consacrer  à  Si  n  service  et  l'e  renoncer 
au  monde,  lin  (  fl'et,  piur  s'ac(iuilter  de  sa 
promesse,  la  prem  ère  fois  qu'il  remonta 
dans  sa  chaire  après  avoir  indiqué  le  jour 
de  la  dispute,  oiî  il  se  trouva  un  grand  nom- 
bre d'auditeurs,  au  lieu  de  leur  ji  rer  des 
sciences  profanes,  il  ne  les  entretint  que  des 
choses  célestes,  et  leur  fit  un  discours  si  pa- 
lbétii|uc  sur  le  mépris  du  monde  et  sur  le 
bonheur  de  l'élernité,  que  [ilusieiirs  de  sea 
auditeurs  en  furent  vivement  touchés  el  ré- 
solurent de  changer  de  vie  et  de  renoncer  à 
toutes  les  vanités  du  siècle.  Il  leur  en  donna 
lui-même  l'exemple  l'an  1313;  car,  ah.indon- 
naiit  ses  parents  et  ses  amis,  il  se  retira  dans 
la  soliiude,  accompagné  d'Amb.oise  l'icolo- 
mini  el  de  Palricio  Patrici,  tous  deux  séna- 
teurs de  Sienne,  (lui,  ayant  eu  le  bonheur 
de  se  trouver  dans  celle  assaniblée  où  il  ava.l 
prononcé  ce  discours  surle  mépris  du  monde, 

n'en  reste  plus  que  quelques  fragmenls,el  inie  partie 
(ie  la  place  (pi'il  occu|)iiil  esl  aiijoiird'liui  le  Inu  où 
Snht  les  sialioiis  du  Calvaire.  1)-d  ë 

(2)   Votj.,  a  la  fin  du  vol  ,  ii*  i'O. 


»0!ll 


niCTlONNMRE  I»ES  OiiDUKS  IlEI.ICli: L'X. 


1(î>-: 


lui  6laionl  roiii'vnMi-s  i)o  lonr  roiiversion  cl 
le  vouluri'iit  siiivro  d.uis  s.'i  relr.'iile. 

Il  y  av.lit  im  lira  noiiinio  Acnnn,  l'Ioipiié 
d'environ  ((uiiizi'  milles  ili-  la  ville  de  Sienne. 
Ce  lieo.niii  .ipp  irlciiail  à  'l'oloniei,  était  fort 
|)r();)re  à  leur  dessein  :  ear  il  élail  désert  el 
iuh.iliile;  une  nionlapne  s'y  élevai!  au-des- 
sus de  quelcjnes  aulres;  des  |)récipircs  qui 
s'y  Iroiivaiful  en  quelciuos  Pnilri>ils  le  ren- 
daient eu  quidque  farou  affreux;  mais  d'un 
autre  rôle  un  feuillage  épais  d'une  iufinilé 
il'arhres  de  toutes  façons,  qui  en  tout  temps 
t()n->ervn>ent  leur  vi  rdurc,  joint  au  doux 
inurinurc  de  plusieurs  pelits  ruisseaux,  qui, 
eu  se  précipitant  avi'c  impétuosité,  arro- 
s.iicnt  ce  lieu  eliain|iétrc,  lui  donnaient  des 
aitrails  charmants  pour  des  personnes  qui 
voulaient  vivre  dans  la  solitude. 

Ce  fut  au  ni  lii'u  de  ces  rochers  que  Toln- 
mei  se  donna   cniièreinent    à   la  contempla- 
tion des  choses  divines,  macérant  son  corps 
par  des  veilles  el  des  jrùnes  continuels,  por- 
lant  le  ciliée  et  couchant  sur  la  dure.  Ils  de- 
viurent  en  peu  de  temps  un   modèle  de  per- 
fection: ce  qui  lit  que   plusieurs  personnes, 
attirées  par  la  sainteté  de  leur  vie,  renoncè- 
rent aussi  au  monde  pour  se  joindre  à  eux. 
(Juoique  ces  saints  solitaires  vécussent  dans 
une  grande  retraiie  et  s'occupassent  unique- 
ment de'  l'afl'aire  de  leur  salut,  il  y  eut  néan- 
moins des  gens    malintentionnés  qui  formè- 
rent des  accusa' ions  contre  eux  el  les  dénon- 
cèrent au    papo  Jean    XXII  ,    comme    des 
no\ateurs  et  des  personnes  qui  semaient  des 
hérésies.    Le   pape   les    lit    venir   devant    lui 
pour  rendre  compte  de  leur  conduite.  tTétait 
l'an  i;JI9  ;   ce   pontife   tenait   pour  lors  son 
siège  à  Avignon  ;  Tolomei  y  envoya  deux  de 
ses  religieux  po  ir  informer  Si   Saintelc  de 
leurs    senlinients    tonclianl    les   dogmes    de 
l'Kglise  ;  et  ce  pontife,  n'y  ayant  rien  trouvé 
que  de  très-ortliodo\e,   consentit  ((u'ils  de- 
meurassent ensemble  dans  leur  solitudi-,  et 
les    envoya  à    (lui  de    l'ictramala,    évéqne 
d'.\rezzo,  .ilin  qu'.l  leur  donnât  une  des  rè- 
gles déjà  approuvées  p.ir  ri';.;lise.   (^e  prélal 
eut  dans  le  même  temps  une  vision  dans  la- 
quelle il  lui  sembla  voir  la  sainte  Vierge  (lui 
lui  mettait  en  main  l.i  règle  de  saint  lîennît, 
el  lui  ordonnait  de  la  donner   avec  un  habit 
hl;inc  à  des  personnes  ()ui  étaient  devant  lui. 
Il  coiinnt  pi'u  de   temps  après  ce   que  signi- 
tiait   celte    vision,  lorscpic  ces  ermites    qui 
avaient  été  trouver    le  pape  ci    Avigmin  lui 
présentèrent   les    lettres  de  ce  pontile,    par 
les(]ii('lles   il   lui   ordonn  lit  de    leur  donner 
utie  règle.  Il  ne  douta  poiiii  alors  ()ue  la  vo- 
lonté de  Dieu  ne  fût  (pi'ils  suivissent  celle  de 
saint  lîenoit,  et  que  ce  nouvel  ordre  devait  être 
suns  1,1  proiei  lion  de  la  sainte  N'ierge.   Mais 
avant  que  d'ériger  ce  nouvel  institut  en  ordre 
légulier,  co.iformé. lient    .iiix    intiMitions    du 
pape,  il  voulut  encore  coiisult(<r  le  Seigaeiir, 
et  |i)ignit  à  la  prière  un  jeune  de  (rois  jour.s, 
■  iprès  lesquels,  ne  doiil.int  plus  que  C(>  ne  lût 
la  volonté  de  Dieu,  il   alla,  la   même  année 
1310,  au  Val  d'Acona,  où  il  revêtit    d'habits 
blancs    rolomci   et  ses    compagnons ,    leur 
(1)  Voy.,  à  1j  fin  d.i  vol.,  n»  -271. 


ordonnant  de  suivre  la  règle  de  saint  Be- 
noit jl  ).  Il  voulut  que  ceitc;  roiigrèg.ition  fût 
sous  1.1  proteclion  de  la  sainte  \  lege,  el 
comme  il  donna  l-  nom  de  Mout-Ohv  t  à  ce 
Val  d'.Vcona.  peut-être  ,1  cause  des  oliviers 
dont  celle  montagne  était  remplie,  peul-étre 
aussi  pour  faire  ressouvenir  les  religieux  que 
par  1.1  mur(:ricatiun  ils  devaient  être  cruci- 
fiés avec  Jésus-Christ,  qui  la  veille  de  sa 
passion  avait  sué  sang  et  c;iu  dans  le  Jardin 
des  Olives,  cette  congrégntii)n  fut  fondée 
sous  le  litre  de  Notre-Dame  de  .Moiil-Olivet, 
el  Tolomei  prit  le  nom  de  liiTiiiril,  au  lieu 
lie  celui  de  Jeun,  qu'il  avait  reçu  au  bap- 
tême. 

Il  ne  restait  plus  que  de  donner  un  supé- 
rieur à  cette  nomelle  co  igrêgation.  Tous 
les  religieux  jetaient  le>  yeux  sur  leur  digne 
fonil.iieur  ;  mais  son  liuiiii  ile  l'emiiécha  d'ac- 
cepter cette  charge,  aimant  mieux  obéir  <|ue 
de  commander.  A  son  refus,  le  preniiersupe- 
rieur  et  général  de  cet  ordre  fut  le  1'.  l'a- 
Irice  l'alrici,  i]ui  fut  élu  la  même  année. 
Ambroise  l'icolumini  lui  surcéda  l'année  sui- 
vante 1;J20.  Simon  de  'riiure  fut  élu  pour 
troisième  général  en  1321;  mais  après  son 
année  d'exercice,  il  fallut  enfin  que  le  bien- 
heureux Bernard  Tolomei  céd.it  aux  solli- 
cilaliuns  de  ses  frères,  qui  ne  voulurent 
puint  élire  d'autre  supérieur  que  lui  en  13J2, 
cl  il  exerça  cette  charge  pendant  vingt-sejit 
ans,  quoii{u'il  fil  tous  les  ans  de  nouvelles 
tentatives  p  lur  être  déchargé  de  cet  emploi, 
alin  de  se  remettre  sous  le  joug  de  Tobcis- 
s.inre. 

l.es  hisloricnsde  cet  ordre,  parlant  de  la 
ferveur  de  ces  religieux  dans  le  commence- 
ment de  leur  élablisscnienl,  disent  qu'ils  ne 
pralii)uaient  pas  seulement  des  mortifica- 
tions en  secret,  mais  quMs  en  faisaient  plu- 
sieurs en  public.  .\  peine  donnaient-ils  un 
peu  de  repos  à  leurs  corps  ;  ils  se  levaient 
la  nuit  pour  dire  matines,  el  croyaient  que 
c'était  une  chose  indigne  de  leur  eial  et  trop 
sensuelle  que  de  se  rciioser  après  avoir  dit 
leur  office  ;  ils  employaient  à  l'oraison  le 
temps  qui  leur  restait  jusiju'à  prime.  Ils 
eiaii'ut  extrémemeni  sob;cs  dans  leur  inan- 
pcr.  Outre  les  jeûnes  ordonnés  par  riîgliS'i 
el  par  la  règle  de  saint  Benoit,  ils  en  obser- 
vaient encore  beaucoup  d'autres,  ne  se  con- 
tentant ces  jours-ià  iiue  de  pain  et  d'eau.  Ils 
ont  élé  iiicine  plusieurs  années  sans  lioire  de 
Vin  ,  et  pour  n'.ivoir  pas  occasion  d'en 
bi)ire,ils  arrachèrent  leurs  vigne^  el  Atèrenl 
de  leurs  mon  islères  les  tonneaux  el  les  vases 
destinés  pi>ur  meitre  le  vin.  Mais  celte  grande 
rigueur  leurayanl  tellement  épaisé les  forces, 
qu'ils  tombèrent  tous  mala  les,  ils  pratiquè- 
rent le  conseil  que  l'api^tic  saint  Paul  donnait 
à  son  disciple  Timothée,  qui  était  de  jiren- 
dre  un  peu  de  vin  pour  soulager  son  eslo- 
mac  :  on  leur  en  servit  donc,  mais  si  f.iible 
el  si  g.ilé,  (|u'il  ne  pouvait  pas  be.iucoiip 
conlribiier  à  leur  santé.  Ils  ont  néanmoins 
cli.Migé  de  senliinint  dans  la  suite  ;  car  ils 
on;  inséré  d.ins  leurs  coustitulions  que  l'on 
gar.lerail   le  meilleur    vin   cl  que    l'on  ven- 


1(p- 


MON 


MON 


l'jni 


cliail  le  plus  ni.iuvais  ;  que  l'iihlié  n'aurait 
point  (Je  viu  particulier;  qu'il  y  uiellrait  de 
l'eau  aussi  bien  que  ses  religieux;  et  que 
quand  on  serait  obligé  d'acheter  du  vin,  on 
aclièleraii  toujours  le  ineilli-ur  :  Meliora  vi- 
lla pro  moïKichurum  usu  serveniur.  prjora 
veiidanlur.  A'ibns  hwo  eodeim/ue  vino  bene 
w/ua  diluto  utiilnr  ctiin  suis  monacliis,  neque 
ci  liceat  seursum  aliquod  vini  doliwn  pro  se 
(anCurn  servare.  Si  vinum  emenditm  erit,  ema- 
tttr  iliiid  cjiind  iiielius  eril  (l.ouel,  pag.  2,  c.ip. 
30).  Liur  silence  les  faisaii  admirer  de  tout 
le  monde.  Ils  ne  couchaient  que  sur  des 
paillasses  étendues  sur  le  planrher  et  suis 
couvertures  :  leurs  habits  n'étaient  qne  d'é- 
toffes grossières,  et  selon  Morigia  ils  por- 
taient des  sandales  de  bois. 

Une  vie  si  exiraortiinaire  excita  la  curio- 
sité de  plusieurs  personnes  qui  y  venaient 
de  touies  parts  pour  voir  ces  nouveaux  soli- 
tairrs,  qui  par  leur  molestie  et  douceur 
semb  nient  plutôt  des  anges  que  des  hommes 
mortels  ;  les  princes,  les  prélats  et  les  gens 
qui  se  trouvaient  snffisainnient  pourvus  des 
biens  de  la  fortune,  s'eslimant  heureux  de 
contribuer  à  l'iigranilissemcnt  d'un  ordre  si 
saint  et  si  agréable  à  Dieu,  oITrirent  à  Ber- 
nard de  nouveaux  établissements,  dont  il 
en  accepla  quelques-uns.  I^e  premier  fut  à 
SieuTie,  où  un  l)ourgeois  de  cette  ville  fit 
bàtr  un  monastère  qu  il  dota  de  revenus 
suflis;ints  pour  l'enlrctien  de  plusieurs  reli- 
gieux. Gu.  de  l'ielramala,  évcque  d'Arezzo, 
en  fil  bâtir  un  autre  dinssa  v  Ile  épi^copile. 
Le  troisième  l'ut  fondé  à  Florence  l'an  13  ii. 
Le  qnaliiènie  à  Caniprena,  dans  le  terr;li)ire 
de  Sienne.  I.e  cinquième  à  Vollerre ,  par 
Itainnuse,  évéque  de  cette  ville,  l'an  1339. 
Le  sixième  à  S.iinl-Geminien.  Le  septième  à 
Eugubio,  pai  Piirie  Gabrieli,  évciiue  de  cette 
vi'le  ;  et  le  huitième  à  l'oligni.  Ils  en  eurent 
encore  dans  la  suite  à  Kome  et  en  d'autres 
endroits.  Le  saint  londaleur,  après  avoir  ac- 
cepté la  fondation  de  Sli  nne,  avait  fait  de 
nouveau  approuver  son  ordrepar  Jean  XXII, 
l'an  132^,  et  il  fut  coiifirinc  dans  la  suite 
par  le  pape  Clément  \i  et  par  plusieurs 
autres  souverains  pont  fes. 

La  peste  étant  entrée  en  ltalir,ran  13'i8  , 
y  fit  un  grand  ravage.  Elle  enlevait  tou'  les 
jours  un  grand  nombre  de  peisonnes,  qui  la 
plupart  mouraient  sans  assistance.  Bernard, 
animé  du  zèle  de  la  rharilé,  exhorl  i  ses  re- 
li;;ieux  à  secourir  ceux  qui  en  él.iienl  atta- 
qués; et  pour  leur  donner  l'exemple,  il  all.i  à 
Sienne,  où  le  danger  était  plus  évident,  et 
sans  craindre  la  mort,  il  exjiosa  géiiéreu-e- 
menl  sa  vie  pour  le  salut  ri  une  infinité  d'à- 
mes  qui  seraient  péries  faute  d'assistance.  Il 
ne  leur  donnait  pas  seulement  les  seco:irs 
spirituels  dont  ils  avaient  besoin,  il  pansait 
encore  leurs  plaies,  les  portait  en  terre,  el 
s'employait  jour  et  nuit  à  ces  actions  de 
chaiiié.  Ses  religieux  furent  aussi  l'rap[)es 
de  cette  maladie,  comme  il  l'avait  prédit,  el 
plusieurs  en  moururent.  Elle  ne  l'épargna 
pas  lui-même,  et  s'en  voyant  attaqué  il  se 
l'ouciia  sur  un  pauvre  lit,  où  il  se  disposa  à 
la  moil  par  la  receiitijii  des  sacre  acnls  de 


l'Eglise  ;  et  après  avoir  fait  un  disconrs  a 
ses  religieux,  pour  le^  exhorter  à  la  persé- 
vérance, il  éleva  ses  yeux  au  ciel,  recom- 
manda son  âme  à  Dieu,  et  mourut  comblé 
de  mérites  le  2t)  août  de  la  même  année  1348  . 
étant  dans  la  76'  de  son  âge  et  la  35"  de  sa 
conversion.  Sa  fêle  ne  se  lait  néanmoins  que 
le  21  d'août,  au(|iiel  jour  son  nom  se  trouve 
dans  le  martyrologe  romain,  y  ayant  été  in- 
séré par  ordre  du  pape  Innocent  XL  Clé- 
ment X  avait  permis  d'en  réciter  l'office  à 
pareil  jour,  et  Alexandre  VIII  en  a  approuve 
un  office  propre,  pour  être  récite  dans  tout 
l'ordre  de  Saint-Benoit. 

Après  la  monde  ce  saint  fondateur,  Fran- 
ceschini  Tracozzano  d'Arezzo  lui  succéda  la 
môme  année,  et  gouverna  l'ordre  dix-huit 
mois.  Il  eut  pour  successeur  Haynier  de 
Sienne,  l'an  1350,  qui  fut  derechef  élu  l'an 
13G9.  Il  paraît  par  le  catalogue  des  géné- 
raux qu'ils  commencèrent  pour  lors  à  être 
triennaux  ;  ce  qui  dura  jusque  sous  le  gou- 
vernement de  Jérôme  Miraballi,  qu'ils  fu- 
rent élus  tous  les  deux  ans,  et  continués 
j)Our  deux  autres  années  :  ce  ((ui  du  a  encore 
jusqu'en  l'an  1V97,  que  l'on  ordonna  qu'ils 
n'exerceraient  leurolfice  que  pendant  deux 
ans  seulement,  et  qu'ils  ne  pourraient  êiro 
continués  pour  deux  autres  années.  Ils  ob- 
tinrent le  généralat  pour  quatre  ans,  l'an 
1570  ,  sous  le  gouvernement  de  l'rotais 
Canluri  ,  de  Milan.  Il  tut  enfin  réduit  à 
trois  années,  l'an  !58i,  sons  !e  généralat  de 
Mar-  Cappitagerani,  et  on  ordonii  qu'il 
serait  choisi  alternativement  dans  l'une  des 
provinces  de  l'ordre  ;  ce  qui  s'observe  encore 
à  présent  ;  mais  il  y  a  eu  des  généraux  (jui 
ont  été  continués  par  nu  oriié  du  pape  , 
comme  il  arriva  à  l'ég.ird  de  Dominique 
Pueroni  de  Crémone,  qui  fut  continué  pour 
trois  ans  par  Urbain  VIII,  l'an  1630. 

Ces  religietix  ont  élé  appelés  pendant  un 
long  temps  les  frères  erini  es  du  ^lont-Oli»el  ; 
mais  sous  le  généralai  île  Matthieu  d'A versa, 
le  pa(ie  Paul  III  leur  permit  de  preudie  le 
niim  de  Dom,  conformément  à  la  règ'e  de 
saint  Bcnoi  .  l'ie  II,  parlant  de  c  t  ordre  dans 
l'une  de  ses  bulles,  dit  qu'il  a  eu  de  faibles 
commencements,  qu'il  a  clé  augmenté  par 
la  dévotion  des  fidiles,  qu'il  a  l'.iit  un  heu- 
reux progrès  <'t  qu'il  était  répandu  dans 
toute  l'Italie.  En  etïet,  il  se  trouve  encore, 
tant  en  Italie  qu'en  Sicile,  quatre-vingts 
monastères  de  cet  ordre  ,  dans  la  plupart 
desquels  il  y  a  giaud  nombre  de  religieux. 
Ces  monastères  sont  divisés  en  six  provinces, 
dont  trois  sont  au  delà  el  trois  en  deçà  des 
monts  Apennins,  par  rapport  à  la  ville  de 
Kome  el  au  inonaslére  chel  d'ordre  du  Mont- 
Olivel,  qui  était  autrefois  du  diocèse  d'Arezzo 
et  présentement  de  celui  de  Pienzi.  Ce  mo- 
nastère est  si  vaste  et  si  spaci  ;iix,  (|ue  l'em- 
pereur Charles  V  y  logea  avec  p  us  de  deux 
mille  personnes  de  sa  siiile.  Les  jiapes  Pie  lî 
el  Paul  Ili  y  ont  aussi  élé  reçus,  ayant  avec 
eux  plusieurs  cardinaux  el  prélat^;  et  lors- 
que Pie  II  y  alla,  il  déf  ndit  aux  personnes 
de  sa  suite  u'y  manger  de  la  viande,  quoique 
ce  fût  un  jeudi,  par  respect  pour  la  sainteté 


1035                               nir.Ti.  NN\i!;i:  DIS  onniu.s  iiF.i.ir.iiix.                              loio 

de  ce  lion  cl  rmir  '.es  observances  îles  rcli-  coup  plissé  par  (îerrièro.  cl  loisq.iMs  «ont 
uioux.  q:  1  n'en  iiiaiii^eaiiiit  pis  pour  lors.  .'iii  cliccur  iN  iiielleiit  une  coule  ù  la  manière 
Les  i.liiés  généraux  de  cet  ordre  y  font  leur  des  liénédiclics,  la(|iiclle  ils  por:cnl  encore 
résidence,  et  on  y  ticnl  ordinairein 'ni  les  (;u  ind  ils  \onl  en  ville,  avec  un  chapeau 
chapilies  généraux.  Lon  ne  \oil  gi  ère  de  blarc  doublé  de  noir  jusqu'aux  bord-;  leur 
mona^lèics  plus  inagni'iiiues  que  ceux  de  liabil  esl  d'une  serge  trés-line.  L'haliil  de 
Sainle-Marie  du  .Moiil-Ollvel  de  Naples,  el  de  leurs  convcrs  (1)  esl  loul  dilTéreil  de  celui 
Sainl-Micliel  in  lioscu  à  Bologne;  re  ni  de  des  religieux  du  clia-ur  :  ils  oui  un:"  pelile 
Naples  a  plus  de  vuigl  mille  écus  romains  de  srMilanc  qui  leur  tombe  jusqu'aux  genoux, 
revenu,  et  la  ronimuiKiu  é  y  est  coujpciSCB  Ih  portent  d  ms  li-  mou, isière  un  pelil  hon- 
ordinaircmcnl  de  quairo- v  ingis  religieux.  net  f  lit  comme  c  lui  des  prêtres  séculiers  ,  à 
l,c  ri.i  de  Naples  .\l|  hnnse  lit  beaucoup  d-  la  reserve  qu'l  n'cbl  ijui- de  serge  blan-he 
bicu  à  ce  monastère.  Il  demeura;!  souvent  sans  carlo  i  :  ce  qui  (ail  qu'il  n'a  pas  une 
avec  les  religieux  et  I  s  servait  même  quel-  l'orme  trop  régulière.  Lorsqu'ils  sont  dehors, 
qucfo:>  à  table,  par  un  esprit  de  dévotion  et  ils  ont  un  grand  manlrau  sans  colli  l  el  qui 
l'c  respeci  qu'il  .ivait  pour  ces  serviteurs  de  est  tout  froncé  :  il  est  vrai  que.  dans  plu- 
Dieu,  il  y  a  mcorc  beaucoup  d'aulres  mo-  sieurs  maisons,  ils  sor'enl  avc"  un  manlcau 
na^tères,  qui  ai)i.rochcnl  de  ceux  de  Naples  liianc  l'ail  comme  celui  des  sculiers,  mais 
il  de  i'.ologne  pour  la  i  iches^e  el  la  magni-  c'est  un  relàchemcnl  ;  car  dans  les  monaslè- 
liccnce,  comme  ceux  de  Saint- Victor  de  ^L-  i es  où  il  y  a  soixante  religieux  ,  ils  n'en  ont 
lan,  de  Saillie  Mai  ie-aux-Bo  s  en  Sicile,  de  point  d'aulrc»  q;:c  les  |iremiers;  ils  portent 
Saint-l'ierie  (i'iivgiibio,  de  Sainc-.Maiie  du  dehur- un  cha::eau  b'aac  par-dessus  et  noir 
Mont-Olivet  de  Florence,  de  S  .inl- Ponlicu  par-dessous  ;  ils  ont  un  rabat  d'  serje  f.iil 
de  Lucciui's.  l'c  Sainl-l'iuorges  de  Fcrrare.  lie  comme  celui  d'S  prélres  séculieis  .  q  l'ils 
Sainle-M.irie  in  0  gnno  de  Vérone,  de  Saint-  |  orient  tant  au  dedans  qu'au  dch(.rs  du  cou- 
Benoit  de  l'adou  •,  de  Saint-Nicolas  de  Rotin-  vi  ni. 

po,  du   Sainl-Sépuli-ie  de   l'Iaisance,  el  de  Les  religieux  de  cet  ordre  (on!  proTession 

Sainl-Lauienl  de  Crémone.  Ils  avaient  autre-  de  1 1  règle  de  saint  l'cnoî'.  imis  miligée  par 

fois  di  ux  monas'ères  en   Hongrie,  qui  leur  leurs  couslitulions.  Ils  se  lèvent  la  nu  t  pour 

avaient   été    donnes    par    l'einpcriîur  Sigis-  dire  nialines  ;  après  landes   ils  vont  au  cha- 

inond.et  qn'i's  ont  abandonnés  dans  la  suite  pitre,  où  chacun  se   proslerne  devant  le  sn- 

à  c  luse  de  l't  loignemeni.  pcrieur  el  ne  se  relève  point  qu'il  ne  leur  ail 

Ces  ri  ligienx  oui  éié  en  si  grande  estime,  enjoint  une  pénitence  oa  ([u'il  ne  leur  a  t  or- 

qu'on   les   a  souvent  choisis  pour   réformer  donné  de   se    relever.  Tous   les  diuianclies, 

(ks    nnoiastères.    Le    jape    Grégoire    XII,  n[irès  cou  plies,  ils  se  ircuvent  à  une  confé- 

vovanl  que  l'obseï  vaiice   i  égulière  avait  été  rcnce  de  cas  do  conscience  oa   de   la   sainle 

en.ièrcmeiil  bannie  di'  eeli  i  de  Sainlc-Justine  Lcriliire.  Ils  ont,  dan-  q   i  li]ues-uns  de  leurs 

de   l'a. loue,  leur   donna    ce    monastère   l'an  nioiaslèrcs,  des  lecloursd'huuianilés,  de  phi- 

l'iOS,  où  ils  ont  demeuré  jusqu'à   ce  que  la  losophie,  de   Ihéolouie   et  d'Kiriiure   sainle, 

republique  de  Veni-e  bs  obligea  d'eu  sjrtir  qui,  à  raison  de    leurs    empois,  aussi    b\.  n 

I  oiir  le    rendre  aux   Bi'nédiciins,  qui  y  ont  que   dans  les  autres   ordres,  sont  <lispcn-<s 

jeté  les  fondements  de  la  célèbre  réforme  qui  de  l'ollice,  mais  ils  dniveni  toujours  assister 

a  pris  le  nom  de  ce  monaNtèrc.  Les  papes  et  à    l'oraison   menlale.  Ouoi^n'ils  en.seignenl 

les  princes  ont  accorde  beaucoup  île  privilé-  la  doclrinc  de  saint  'l'Iioinis,  ils  ne  soni  pas 

t;es  à  cet  ordre.  L'euipi  reur  Charles  V,  élanl  lrlle'..':ent  .illachés  à  s 'S  senlimi  nls  qu'ils  ne 

a  Vilb  fiancbe  de  Nice,  le  mil  sous  la  prolec-  s',  n  écarlenl  qui  Iquefois,  et  ils   ne   sonl  pas 

lion  de   l'empiri',  par  ses  lelties  palenles  du  d'arC'Td  en   liien  des  choses  avec  les   Iho- 

17  juin  IojS.  Jean  XXII  et  Jules  II  le  mirenl  ni.sti  s. 

sous  cille  du  saint-siége.  (iregoire  XI  Ils  jeûncnl,  pendant  l'au'oainc,  les  lundis, 
exempta  ces  religieux  de  la  juridiction  des  les  mercredis  el  les  vend:  cdi  ,  aussi  bien  que 
cvèqies,  el  voulut  que  bs  abbés  supérirurs  les  ^amellis  (lendant  lou  e  l'année,  à  ciuse 
des  monas'ères  exetças-enl  leur  ofliee  et  lis-  que  leur  ordre  esl  sous  la  proleclion  de  la 
seni  les  fonctions  d'abbés  de  même  que  s'ils  sainle  \iergc.  Ils  mangent  ■  e  la  viande  Iro  s 
avaient  ricu  la  benédiclion  abbatiale.  Les  fuis  la  semaine;  mais  les  novices,  pendanl 
mêmes  Jules  et  l'ie  II  perinirenl  aux  reli-  leur  année  de  probalion  ,  n'rn  m.ingent 
gieux  des  autres  i.rdrc-,  excepte  aux  Char-  point,  el  ils  ne  reçoivent  jiarmi  eux  que  des 
ireux  lie  passer  dans  celui  du  Monl-Olivel.  personnes  nobles  :  ce  qui  semble  ne.inmoins 
l'ie  IV  ap;'rouva  le  piivilége  qui  leur  avait  conlrauc  à  la  règle  de  sainl  Ueiioll,  qui  .id- 
éte  aciordé  d'élire  un  c.irdinal  prutecliur.  nu  t  egalcmeul  les  nolib  s  el  le>  roluriers. 
i'.e  II  les  lit  eiii  ore  jiarlicipants  de  tous  les  L  ordre  e>l  gouverne  ;  ar  un  général,  i|ui 
iiri»ilé|ics  ,  exemptions  el  iiiunnniles  dont  a  pour  .issistanls  un  vicaire  gênerai  el  six 
jouissaient  les  religieux  de  l.i  congrégation  visiteurs.  Il  y  en  avait  .tutrelofs  Ivuil;  mais 
du  Miint-Cas-in  ,  el  il  y  a  peu  de  souverains  sons  le  généralat  de  l'roiais  Canoluri  ,  de 
ponlitesdoni  <\>  n'aient  nçu  quelques  gûc;s  .Milan,  ce  uoiiibre  fui  red  lit  à  six,  pour  ré- 
el quelque^  privilèges.       *  pondre  aux   six  provinces  de  cet  ordre.  Il- 

Ces  religieux  sonl  habillés  de  blanc, et  leur  s'issrmhicnl    tous    lis    ans    el    r.)rmenl    li! 

tiabillemenl  coiisisle  en  une  robe  el  un  sca  ■  d.  (iniioire,  où    on    délibère   ile>;    alTaircs   de 

julaire,  auquel  est  altaclic  un  capucc  beau-  la    tongregalion    el    où    on    élit    les    snpe 

(  U  Voy.,  i  la  iiii  tlu  vol.,  n"'  iTi  èi  2T0. 


«r.DV 


MON 


MON 


IftPS 


rii  urs  ilps  mnisons  ol  les  autres  officiers.  Ces 
assistants  sont  élus  dans  les  chapitres  p;énc- 
i;iiix  par  voix  secrètes,  cl  l'on  observe  dans 
léleclion  du  géncriil  et  du  vicaire  général 
rallernalive  pour  les  provinces  ,  en  sorte 
que  la  provinre  d'où  est  le  général  no  peut 
en  avoir  un  autre  que  dix-huit  ans  après,  et 
on  n'élit  jamais  pour  général  celui  qui  quille 
la  fonclion  de  vicaire  général, ni  pour  vicaiie 
général  un  religieux  de  la  môme  province 
que  le  général. 

Les  monastères  sont  gouvernés  par  des 
supérieurs  (jui  prennent  le  lilre  d'abbés  , 
qu'ils  conservent  toute  leur  vie,  quoiqu'ils 
ne  soient  plus  supérieurs.  Riant  supérieurs 
ils  peuvent  se  servir  d'ornements  pontifi- 
caux, quoiqu'ils  ne  reçuivent  pas  la  bénédic- 
tion abbatiali'.  Ces  abbés  sont  élus  dans  le 
défiiiiloire  :  l'abbé  général  en  propose  Iroi'^, 
cl  lorsqu'ils  ont  été  aii;réés,on  les  ballotte 
avec  des  fèves,  et  celui  qui  a  plus  de  voix 
csl  censé  élu.  Il  faut  qu'ils  aient  clé  aupara- 
vant ou  vicaires,  ou  maîtres  des  nv)viccs,  ou 
lecteurs,  ou  qu'ils  aient  exercé  quelque  em- 
pl.i.  Ils  ne  sont  que  liois  ans  dans  leur  of- 
lice,  aussi  bien  que  le  général  et  les  visi- 
teurs, mais  ils  peuvent  êlre  continués  dans 
la  même  ni;iison  ou  envoyés  pour  sujiérieurs 
dans  (l'aulres.  Clément  X  accorda  à  ces  reli- 
gieux douze  abbés  titulaires  ,  c'est-à-iire 
deux  dans  chaque  province;  mais  ils  n'en- 
trent point  dans  le  gouvernement  de  l'ordre 
ni  des  monastères  pjirliculiers  ;  ils  n'ont  que 
voix  passive  dans  les  chapitres  généraux 
tant  qu'ils  sont  titulaires. 

Le  général  a  toujours  avec  lui  un  ihan- 
cclier  et  un  secréljie  qui  lui  sont  donnés 
p;ir  le  d  fliniloire  ,  qui  lui  pro|.osc  deux 
sujets  pour  chacun  de  ces  offices  ,  aussi 
bien  que  pour  le  procureur  général  en 
cour  de  Uoihe  ,  qui  se  fait  aussi  dans  le 
dilfiniloire ,  en  gardant  aussi  l'alternative 
pour  1rs  provinces.  Le  général  a  dans  le 
diffiniloirc  deux  suffrages.  Il  doit  avoir, 
pour  être  élu,  au  moins  vingt  ans  de  re- 
ligion ,  le  vicaire  général  et  les  visiteurs 
dix-huit,  cl  les  abbés  quinze.  Le  général 
doit  faire  sa  visite  dans  tout  l'ordre  une 
fois  pendant  son  triennal,  et  tous  les  ans 
par  dtux  commissaires  du  nombre  des  vi- 
siteurs ou  des  abbés.  \  la  fin  de  chaque 
triennal,  le  troisième  dimanche  d'après  Pâ- 
ques, le  chapitre  général  se  tient  au  mo- 
nastère du  Mont-Olivel,  chef  d'ordre ,  où 
tous  les  abbés  onl  droit  d'assister,  aussi 
bien  qu'un  discret  de  chaque  maison  ,  qui 
est  élu  sans  avoir  besoin  du  consentement 
du  supérieur,  et,  pendant  tout  le  temps  du 
chapitre,  Il  n'esl  pas  permis  de  manger  de 
la    viande. 

Cet  ordre  a  produit  plusieurs  personnes 
rccommandables  par  la  sainteté  de  leur 
vie,  comme  les  bienheureux  Bernard  To- 
lomcj ,  fondateur,  cl  s^s  deux  compagnons, 
Pairice  Palrici  et  Ambroise  Picoloinini  ;  le 
bienheureux  Bernard  de  Verceil  ,  qui  fut 
en  Hongrie  pour  y  faire  les  deux  établis- 
sements que  cet  ordre  y  a  eus  ;  le  bien- 
heureux   Jérôme    de    Corsica  ,    qui ,    après 

Diction.  oe$  Ordres  REi.itiiFis;.  il. 


avoir  porté  longtemps  les  armes  ,  se  fil 
oblat  de  cet  ordre,  et  mouiul  l'an  IViO; 
le  bienheureux  Jérôme  de  Manloue  ,  (]ui 
vivait  aussi  dans  le  quinzième  siècle  ,  et 
dont  le  corps  fui  trouvé  sans  aucune  cor- 
ruption cent  ans  après  sa  mort  ;  le  bien 
heureux  Jérôme  Mirabelli  de  Napics,  que 
ses  grandes  vertus  firent  élire  pour  f:éné- 
rai  ,  quoiqu'il  n'eût  pas  trente  ans  ;  le 
Père  Jacques  dcl  Carpe,  dont  Bucelin  fait 
mention  dans  son  ménologe  de  l'ordre  de 
Saint-Benoît  ;  les  J'ères  Antoine  de  Bar- 
gue,  Grégoire  Amatisci,  l'abbé  Maure  de 
Pérouse ,  cl  deux  frères  oblats ,  dont  l'un 
est  le  frère  François  de  Vérone,  et  l'au- 
tre   le   frère   Daniel   de    Foligni. 

Ceux  qui  ont  été  élevés  aux  dignités  do 
l'Kglise  sont  en  gr.;nd  nombre  :  il  y  en  a 
eu  qui  onl  rempli  les  sièges  épiscopaux 
de  Todi  ,  d'Iniola,  de  Torlonc,  de  Cluse, 
de  M.irsiiio,  du  Pouzzoles,  d'Aqui  et  do 
quelques  autres.  Nous  nous  contenterons 
d'en  rapporter  les  plus  récents,  comme  doai 
Bomualil  Tancredi  de  Sienne,  qui  fut  fait 
évoque  de  Alontalcino  en  1694;  dom  Jean- 
François  Rigamomi  de  Uome,  fait  évéquu 
do  Cervia,  en  1707,  par  Clément  XI,  qui 
a  encore  donné  les  évéchés  de  Colle  cl  da 
Cluse,  le  premier  à  doni  Dominique  Bal- 
lati  de  Sienne,  (l  le  second  à  don  Caïe- 
tan-Maric  lîargali,  aussi  de  Sienne.  Ils 
onl  eu  aussi  aulrefois  deux  précepteurs  du 
Saint-E-pril  do  îîome  :  le  premier  fui  dom 
Benoît  de  Sienne  ,  nommé  piir  Al'X.indro 
VI,  l'an  150.J,  et  l'autre  fut  dom  Evangé- 
liste  Toriiioli  de  l'érouse,  évéque'  de  Cilla 
di  Casii'llo,  nommé  par  le  pa|  c  Paul  V, 
l'an  1620.  Cet  ordre  prétend  avoir  aussi 
eu  deux  cardinaux  ,  savoir  :  Georges  Mar- 
tinutius,  archevêque  de  Sirigonie,  et  Pierre 
Tartaro;  mais  Ls  Bénédictins  du  Mont- 
Cassin  leur  disputent  celui-ci,  cl  l'autre 
appartient  à  l'ordre  de  Saint-Paul  Ermite, 
comme  nous  avons  fait  voir  en  parlant  do 
cet  ordre.  Les  religieux  du  Rlont-OIivet 
convicnnenl  à  la  vérité  que  le  cardinal 
Tarlaro  a  été  abbé  du  Monl-Cassin.  mais 
ils  prétendent  que  l'abbé  André  demanda, 
l'an  1370,  à  Rainier,  général  du  Moni-O.i- 
vct,  des  religieux  de  cet  ordre  pour  rétablir 
la  discipline  régulière  au  Monl-Cassin,  cl 
qu'entre  les  religieux  qui  y  furent  envoyés 
André  Favenlini  en  fut  abbé  aussi  bien  que 
le  cardinal  Tartaro,  qui  avait  été  aupara- 
vant prieur  du  monastère  de  Notre-Dame- 
la-Neuve  à  Rome,  de  l'ordre  du  Monl- 
Olivct.  Ils  prétendent  aussi  que  le  cardiiial 
Ardicin  de  Porte  de  Novarrc  quitta  la  pour- 
pre pour  prendre  l'habil  de  leur  ordre 
l'an  1495.  Nous  ne  rapporlerons  pas  non 
plus  tous  les  écrivains  de  cet  ordre  qui 
sont  en  trop  grand  nombre.  Dom  Second 
Lancelot  de  Perouse  a  donné  l'Histoire  de 
cet  ordre  qu'il  a  coniinuéc  jusqu'en  1018; 
on  a  encore  de  lui  (luclques  ouvrages,  il 
élail  venu  à  Paris  pour  y  en  faire  impri- 
mer quehtues-uns,  et  il  y  mourut  le  l.'S 
janvier  16i3.  Il  n'esl  pas  vrai  qu'il  ait  été 
général  de  son  ordre,  comme  quelques-uns 

35 


lOOO                                         KICTIONNAIIU-.  l)i:S  OtinRES  RELIGIEUX.  1100 

ont  avancé;  il   n'a    élé  qu'abbé.   Domi   Au-  aShnyc  s  Inéc  près   d'Arras,  a  olc  ainsi    a|i- 

piisliii  Lancelol,  son  frère,  aussi   rclisjioux  pdoà  cansequc  sainlliloi,  suivant  ranriciuic 

du    Monl-Olivi'l,    a    fait    impriinor    pareil-  tiadiiion.  s'y    relirait   quelquefois,   lorsqu'il 

Jemenl   quelques    ouvrages   à    Uome  ,   l'an  se  sé|iarail  du  n:onde  pour  vaqaer  plus  libre- 

1G39.   Cet   ordre  a    pour   armes    irois   mon-  nient  aux  exercices  de  l'orai-nn  (t  de  la  ron- 

laines    d'argrnl ,    surmontées    d'une    croix  lemplation.  Il  y  en  a  qui  pré  endeni  qu'il  y 

de  "ueules  en  champ  d'or,  accompagnée  de  fil  bàlir  une  chapelle.  U'aulres  disent  que  ce 

deux   rameaux   d'oliviers   sortant  des  mon-  fnt  saint    Vindicien,    évéque  de  C.mbrai.à 

j.,r;i,ps,  cause  de   la  dévolion    qu'il    portail  à    saint 

Il    y.  a    aussi    un   monaslère  de"  filles   de  Kloi  ;  mais  Gazel,   dans  son    Histoire  ecclé- 

rel   ordre   à   Hilonto,   au    royaume   de   Na-  siasiique  des  Pays-I!as.  rapporte  ainsi  cc:lo 

pies.    Le  l'ère   Honauui  ,   dans    son    calalo-  fondation.  Il  dit  que  saint  Lloi  lit  dresser  un 

eue  des  ordres   religieux,    avoue   bien  qu'il  oratoire    sur   une   montagne   à  deux    lieues 

y   a   des    religieuses   de   tct   nrdie,    mais   il  d'Arras,  qui   relient  encore  le  nom  de  saint 

dit  qu'il   n'a  trouvé  dans   aucun   aUrur    le  Lioi,  1 1  (]u'il  y  assembla  dix  ou   douze  per- 

lenijjs  de  leur   instilulion.  11   ajou'e  seule-  sonnes  qui  y  vivaient  comme   d<!s   enniles. 

ment  que   Lancelol,  dans  l'Histoire  de  cet  Saint  V  ndicien,   évè  [ue  de  Cambrai,  édilio 

ordre,  rapporte   que   le    bienheureux   .lour-  de  leur  eonversalion.  s'y  retirait  souvent,  1 1 

dain,  qui  en  était  général ,  fonda,  Ta-i  1359,  voulut  même  élre  enterre  dans  celle   église, 

deux   monastères   à    l'adoue,   l'un   pour  des  qui,  ajaul  depuis  élé  brûlée  et  ravagée  avec 

lionimes  ,    l'autre    pour    des    filles.    On    ne  tout  le  pays  par  les  Normands,  environ  l'an 

trouve   point   cependant  le  nom  d-.   ce    gé-  880.  fut   abaudonnéo  ;  en    sorte  que   ce  lieu 

r.éral    dans   le   Catalogne   des    généraux  de  devint  un  dcscri  plein   d'é|>ines  et  de  ronces, 

cet   ordre,   qui,   en    131)9,    avait    pour  gé-  dont  la  sépulture  de  saint  \'in(lliien    fui  cou- 

néral  S  hius  de  Florence,  qui    le  «ouverna  verte,  lîlle  demeura  inconnue  jn-qu'à  ci^iue 

pour   la    première    fois    pendant  douze  ans,  Dieu    l'eut   miraculeusement  découverte  du 

jusqu'en    l'an    1309,   et   {|ui    eut    pour    suc-  temps  de  l'évèque  Fulbert,  l'un  de    ses  siic- 

eesseur  Uainier  de  Sienne,  qui  fui  élu  pour  cesseurs,  qui  y  lit  bàlir  une   nouvelle  église 

la    iroisièmc    fois,    i^a    première    religieuse  qu'il  consacra  eu  l'honneur  des  apoircs  saint 

de   cet    oidre    fut    la    mère    Françoise    Lé-  Pierre  cl   saint  Paul,  ayant  élé  assisté    i  ar 

phanle   de    P.ilerme,   qui   avait  d'abord  élé  les  libéralités  de  l'empereur  Olhon,  son  pa- 

reli'Meuse  de  l'ordre  de  Sainte-Claire,  mais  rcnt.  VA  au  lieu  des  crmiles  qui  y  étaient  par 

qui,   ayant    fait    bâtir   un    m  Miastère,  em-  le  passé,  il  y   mit  huit  chanoines   séculiers, 

brassa    avec    qucbjues    con.pagnes    l'ordre  qui   y  demeurèrent  jusqu'en    l'an    lOtiti,  ou 

(lu   Monl-Olivel,    l'an    151o,    avec   la    pcr-  environ,  (lue  saint  Liellicrt,  aussi  évéque  de 

mission  du   pape  Léon    X,   qui    la    nomma  Cambrai,  voyant  qu'ils  s'arquillaient  mal  de 

abbessc   perpéiuelli!   de  ce   nionisl  re  ,    où  leur  devoir,  les  en  fil  sorlir,  ei  substitua  en 

elle    mourut    en    odeur    de   saiuleté.    L'ha-  leur   place    des   chanoines   qui    vivaient   en 

billemeiit  de  ces  religieuses  consiste  en  une  commun,    auxquels  il  donna  p  ur    premier 

robe  blanche,  un  scapulaire  tie   même  cou-  abbé  Jean. Koberl  le  Frison,  co.nte  de  Flau- 

leur  et  un   voile  noii'.  Au   chœur  elles  ont  dre,  augmenta  la  fondaiion  de    C'iie  église, 

une    coule    blanche   (1).  comme   avaient    fait  l'evéque   Fulbert  et  les 

Second   Lancelol,   Ilisl.  OliveUmn.   Paul,  seigneurs  de   Couey.  L'abbé  Jean  gouverna 

Carpenlarius  .  Vil.  H.  Jlcnwrdi    JHolomwi  ;  celle  abbaye  pendant   quar.inle  an-,  cl,  l'an 

ta  màne  en  italien   par   le   P.    LnmlxirdcUi  ,  1-219,  Kicliard  de  Sassy,  l'un  de  ses   sueces- 

de  lord,  de  Snim-Duminiiixte.   Conslitulio-  seurs,  fil  bâtir  l'cgase  en  l'elal  qu'on  la  voit 

nés  Montis  OlivcH.   Sihesl.   Maund.,  Mar.  préseuleuicnt. 

Occan.  di  tutti  (jli  Rclig.  lib.  iv.  Paolo  Mo-  Ce  monas'ère  devint  c  immc  un  séminaire 
rigia ,    Uist.  di  tnlt.   Itelig.    Ilerman ,  Ilist.  de  sainis   évéïiues   et  de  grands    hommes. 
des  Ofilrcs  religieur.  Vh\\\p.   Itonanni,   Ca-  Hugues,   troisième  abbé,  assista  au  conclu 
Udog.  Ord.  relig.  l'art,  i,  et  H'cmoire.'i  com-  de  Lalran,   tenu  sous   le  pape  Innocent   11. 
tnunigués  pr  les  religieux  de   cet  ordre  du  Uadulplie,  son  successeur,  assisia  à  celui  de 
inonastcre  de  Siiinte-!\l(irie-la-Neuvr  à  Rome,  'l'ours  sous  le  pape  .Mexandre   III.  Jean   11 
Les     religieux     olivctaius     existent    en-  obiiut  du  pape  Lucius  111  la  permission   do 
core,  et  ils   ont  à   Home  cl   en   Ilalie   pour  pouvoir  porier    la  n^ilre  et  les  autres  orne- 
général   le    P.    abbé   dom  HenoU    lielliui,  et  menls  ponlilic.iux,  el  fut  pnurvu  par  le  pape 
pour    procureur    général    le    P.    abbé    dom  Urbain  III  il'nn   évcche   eu  Orient.  Etienne 
Ilcrnard  de  llossi.  Il  y  a  aussi  à  Home  ac-  de    Firmom ml,    seizième   abbé,   assisia    au 
luellemcnl  les  liénédn  lines-Olnclainis,  niais  concile  de  Lyon  cl  i.e  voulut  point   accepier 
que   nous   voyons,   sans   saioir   ponrijuoi,  l'évéché  d'.Vrras  qu'on   lui   ofl'r.l.   Le  pa,'C 
rangées    dans    le    Cracas    au    nombre    des  Adrien  H' fut  élevé  pendant  sa  jeunesse  dans 
Oblote.t  ffinx  cl(>t:(re.                           B-o-s.  celle  abliaye,   d'où  sont  sorlis  Jean,  évéque 
.MON  TPFLLII'.H.    Vot/rz  Fsi  l'ir    (Saint-),  de  'l'érouanne,  Ursion  de  Verdun,  Cérard  de 
M  (NT   SAINT- l'M, 01  (Ciumuni.s   nficui.inus  Tonrnay,  Ciuillaume  de  \aison,  et  Pierre  do 
i>\'.  i.A  co\r,\\ki:.\MO\  mjd'Ai  rus,  el  de  .Sisinl-  Colmicu,  carilinal,  de  Rouen.  Ivlle  avait   des 
Aubcri  de  ('ambrai.  couslitutions  pariiculièrcs  qui  furent  re^'ues 
Le  mont  Saini-E.oi,  qui  est   une   fameuse  par  plusieurs  autres  tonununaulcs  de  cba- 

(!)  \oy.   ^  la  fin  du  vel.,  n'  '  2"4  el  iVo. 


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MON 


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noines  réguliers  des  Pajs-Iîas,  et  on  Fr.infc 
[lar  ceux  tleSaint-Jean  desJumcaux.  Us  soul 
habillés  de  violet,  et  ont  un  rocliel  par-des- 
sus leur  souliine;  au  ciïœur  ils  nietient  une 
aumusse  noire  sur  le  bras  pendant  l'été,  ei 
la  chape  noire  pendant  l'hiver  avec  un  grand 
camail  ilj. Les  novices  de  cetle  alihaye  portent 
encore  la  robe  de  peaux,  qui  était  autrefois 
commnneà  tous  les  chanoines,  et  s'appelait 
pelliceum,  d'où  vient  le  nom  superpelliceum 
ou  surplis,  comme  remaiiiue  le  l'ère  du 
Mouline). 

La  même  année  1066,  que  saint  Lietlierl 
mil  des  chanoines  vivant  en  conmiun  et  dans 
une  entière  désappropriition,  au  inontSaiiil- 
liloi,  il  en  mil  aussi  dans  l'abbaye  de  Saint- 
Aubert,  située  à  Cambrai,  dont  il  ôta  les 
cbanoines  qui  ne  voulurent  point  renoncer 
à  la  propriété  et  vivre  en  commun  :  il 
donna  à  ces  nouveaux  ch.i noines  lîernard 
pour  preijiier  abbé,  et  ses  surcosseurs  de- 
vaient éire  élus  et  tirés  du  corps  du  chapitre 
auquel  il  donna  pouvoir  de  conférer  les  pré- 
bendes. Il  y  a  de  l'apparence  que  ces  cha- 
noines avaient  les  mém  s  constitutions  que 
ceux  (le  Saint  Eloi,  puisqu'ils  étaient  aussi 
habillés  de  violet  et  avaient  le  même  fon- 
dateur. 

Sanmarlh.  Gall.  fliristi<in.  Du  Moulinet, 
Iliib.  (les  cliunoin.  Regul.;clGazcl,  llisl.  Ec- 
cUs.  des  l'ays-Biis. 

MONT-SEGESTRO.  Voyez  Jérôiue  (Ermi- 
tes VK  Saint-). 

MONT-VIEHt'iR  (Iîénéoictinsde  l'ordre  nu), 
avec  la  i  iede  saint  Guillaume  de  Verceil, 
fondateur  de  cet  ordre. 

Saint  Guillaume,  (oiidaleur  de  roidr(!  du 
Miinl-Vierge,  nai|uit  à  \  crci'il  en  l'icinonl, 
de  paients  nobles  et  reconimandubl.  s  par 
leur  vertu.  Les  ayant  perdus  prcsiiue  au 
sortir  du  berceau,  il  fut  élevé  par  un  de  ses 
pioches  parents  jusqu'à  l'âge  de  quinze  ans, 
que,  coiiiniençant  à  senlir  dans  son  cœur 
un  grand  amour  pour  Dieu  et  un  penchant 
pour  la  retraite,  il  résolut,  dans  un  âj,'e  si 
tendre,  de  soumettre  sa  chair  à  l'espril, 
avant  qu'elle  lui  livràtdes  assauis  pi'ur  en- 
gager son  cœur  dans  les  liens  d'un  monde 
ciirrompii,  qu'il  uiéprlsait  avant  iiicme  que 
d'en  connaître  bien  la  vanité,  au  moins  par 
expérience.  C'est  pourquoi,  malgré  les  biens 
<loe  ses  parents  lui  avaient  laissés  en  mou- 
rani,  il  prit  le  parti  d'embrasser  une  vie  pé- 
nitente, de  renoncer  à  toutes  choses,  et  d'a- 
bandonui  r  jusiju'à  son  pays  pour  l'amour 
de  Jé.sus-Chrisl  qui  faisait  tout  l'objet  de  ses 
désirs;  il  se  revêtit  pour  cet  efl'el  d  un  habil 
d'ermite,  et  entreprit  le  voyage  de  Sainl- 
Jac(|ues  en  Galice.  La  longueur  et  la  diffi- 
culté d'un  si  grand  pèlerinage,  la  grossièreté 
de  son  habil,  auquel  il  n'était  p;is  accoutu- 
mé, la  pauvieié  volontaire  (|u'il  exerça  pc  ii- 
d;int  toute  la  route,  étaient  sans  doute  une 
pénitence  bien  rude  pour  un  enfant  qui  avail 
été  élevé  jusqu'alors  d'une  manière  fort  dé- 
licate. Cependanl  toutes  ces  peines  ne  furent 

(1)  Voy.,  Il  la  (in  du  vol..  n'  275. 


pas  suffisanlcs  pour  contenter  son  cœur  déjà 
insatiable  de  mortifications;  car  il  voulut 
faire  ce  chemin  nu-pieds,  portant  sur  sa 
chair  deux  cercles  de  fer  qiii  ne  lui  donnaient 
aucun  relâche  ni  jour  ni  nuit.  Quand  il  fut 
de  retour  à  son  pays,  bien  loin  de  songer  à 
se  procurer  quelque  soulagement  en  quitlml 
ces  cercles,  et  en  se  dédommageant  de  toutes 
les  autres  peines  qu'il  avait  endurées  par  la 
faim,  la  soif  et  les  autres  incommodités,  il 
se  proposa  un  autre  pèlerinage  en  Palestine, 
pour  aller  visiter  le  saint  sépulcre  à  Jérusa- 
lem; mais  Dieu,  qui  l'avait  clioisi  pour  le 
fondateur  d'un  ordre  religieux,  lui  ôla  la 
pensée  de  faire  ce  voyage  lorsqu'il  s'y  pré- 
parait, et  lui  inspira  celle  de  se  retirer  dans 
une  solitude. 

Pour  le  faire  avec  moins  d'obstacles,  il 
passa  au  royaume  de  Naples,  et  y  choisit 
pour  retraite  le  Mont-Laceno,  dans  la  pro- 
vince de  la  Pouille,  où  il  trouva  saint  Jear» 
de  Matera,  dunt  on  parlera  à  l'article  Pul- 
SANo.  Ils  demeurèrent  quelque  temps  en- 
semble, aussi  bien  que  sur  le  Mont-de-Co- 
gno,  où  ils  firent  encore  quelque  séjour. 
Mais  saint  Jean  de  Matera  l'iiyant  quitté 
pour  prêcherdans  lîarri,  et  s'étanl  retiré  en- 
sui.e  au  Mont-Gargan,  où  il  fonda  l'ordre  do 
l'ulsano,  saint  Guillaume  quilla  aussi  le 
Moni-de-Cogno  et  vint  dans  la  prncipaulé 
ultérieure,  où  il  choisit  pour  sa  demeure  le 
Moni-V  irgiien,  qu'on  appelait  ainsi  à  causo 
du  séjour  qu'on  prétend  que  le  poète  Air- 
giie  y  a  lait;  mais  cette  montagne  changea 
de  nom  après  que  notre  saint  y  eut  fuil  bâ- 
tir une  église  en  l'honneur  de  la  sainle  Vierge, 
et  fut  nommée  pour  cet  elïet  le  Mont-yienje. 

11  ne  fut  pas  longtemps  en  ce  lieu  sans  y 
être  visité  d'une  inlinité  de  personnes  (]ui  y 
accoururent  au  bruit  de  sa  sainteté,  les  uns 
pour  lui  demander  des  instructions  saliiîai- 
res,  et  d'autres  pour  se  recommander  à  ses 
prières.  Il  se  trouva  parmi  ce  grand  nombre 
plusieurs  prêtres  séculiers  des  lieux  voisins, 
qui,  touchés  de  ses  entretiens,  se  jetèrent  a 
SCS  pieds  pour  le  supplier  de  leur  permeltru 
de  demeurer  avec  lui,  afin  d'être  les  compa- 
gnons de  sa  pénitence.  Il  ne  pul  refuser  leur 
demande,  et  leur  fil  bâtir  des  cellules  sur  la 
même  montagne;  et  c'est  ce  qui  commença 
la  congrégation  du  Monl-Vierge,  dont  iljcia 
les  fondeiiienls  l'an  1119,  sous  le  pontificat 
de  Calixte  11. 

Ces  ermites  ne  vivaient  d'abord  <]uo  d'au- 
mônes; ils  pratiquaient  une  grande  absti- 
nence: l'oraison  et  l'union  avec  Dieu  étaient 
leur  principale  occupation.  Ils  macéraient 
leur  corps  par  de  grandes  austérités,  le  tra- 
vail des  mains  était  en  usage  parmi  eus; 
mais  queliiues  mois  s'étant  écoulés  dans  ces 
sortes  de  pratiques,  ils  murmurèrent  contre 
le  saint  fondateur  sur  ce  qu'étant  prêtres  il 
les  occupait  à  des  exercices  vils:  ils  voulu- 
rent êlre  employés  aux  loncliims  Me  leur 
n)inislère,  et  obligèrent  le  saint  à  bâtir  unn 
église  où  ils  pussent  célébrer  la  messe  et 
assister  aux  divins  ofûcej. 


1IC3                                         niCTION.NAIRF,  DES  OllDUES  ItELlCIEUX.  liOi 

Le    saint   les    foiitenl.i,    el  fil   bâtir    une  s.iinl  homme  ne  fis'icnl  impression  sur  l'cs- 

église  qui  fut  consacrée  en    l'Iioniiciir  «Je  la  pi  il  de  ce  priiue,  traversèrent  ses  pieux  dos- 

iamle  Vierge  par  l'cièiiue  d'Avellino.  Ce  fui  seins  par  la  calomnie  qn'ils  vuscitèrenl  con- 

pour  lors  que  le  pape  Calixte  11    approuva  Ire  lui,  làclianl    d;'  le    l;;ire   passer  pour  un 

cette    ciingréiialion ,    et    accorda    liraucoup  h)  pocnte,  qui  cacli.iil  sous   un  extérieur  de 

d'iniulgeiices  à  ceux  qui  visileraienl  l'é^ilise  pieté  un  cœur  reinj;!!  lie  passions  et  de  vii  es  ; 

du  ^loul-^'iorge.  Les  grandes  aumônes  qu'on  et  aliu  de  mieux   réussir  dans  leur  tnau^ai< 

y  faisa  t,  et  que  sa. ni  Guillaume,   après  eu  dessein,  ils  firent   venir  une  rourlisane  (lui 

avoT  pris  le   nécessaire,  distritiuail  ensuite  pr  itnil   de    le    faire  tomber   dans   les   IIIl-Is 

aux  p..uvres,  exciiérenl  de   nouveaux    mur-  quelle  lui  tendrait  pour  (Orroinpre  sa  clias- 

nuires  parmi  les  rcli;;ieux,   dmil  le    nombre  lelé:  le  roi  y  consennl,  el  celte  femme  ini- 

éiail    1).  aucou])    auguienié.    Ils     trouvèrent  pudique  alla  trouver  le  saint  avec   tous  1  s 

mauvais  de  ce  qu'il  était  si    liber. il  des   au-  cli,;rmes   qu'elle  crut  capables  pour  lui  ins- 

mônes  (jui  étaient  données  pour  leur   entre-  puer  de  1  amour,  et,  par  des  discours  lascifs, 

lien  cl  leur  subs  siance  ;  ce  qui  pouvait  eau-  elle  le  pressa  de  consentir  à  ses  désirs.  11  fei- 

ser  la  ruine  de  leur  monastère:    ils    .^e  plai-  j;n  t  d'y  acquiescer,    à  cond  tio:i   qu'elle  se 

gnircnt  a   ssi  de  ce  que  les  règles   qu'il  leur  couclier.iil  dans  leméme  lil  «lu'i;  piépûrerait 

prescrivait  étaient  trop  austères  el  imprati-  pour  lui.  Elle  s'imagina  sur  celle    réponse 

cables,  lui  demandant  qu'il  eût  à  se  relâcher  avoir  remporté  la   vicioire  :  elie    alla    bien 

de  la  sévérité  de  son  inslilut.  Ce  -ainl  fonda-  joyeuse  en  porler  la  nouville  au  roi  ;  mais 

leur  fit  ce  qu'il  put  pour  arrêter  leurs   mur-  elleful  bien  surprise,  lorsque  l'Iieuic  durcn- 

mures,  sans  vouloir  |iuurlant    rien  changer  dtz-vous  étant  arrivé  ■  el  étant  entrée  dans 

dans  les   pralii)ucs   de   pénitence   qu'il   leur  le  lieu  destiné   à  sa  prétendue  conquête,  elle 

avait  prescriles;  mais  loyanlque  toutes  ses  n'y  trouva  qu'un  lit  de  charbons  ardent-,  s   r 

remontrances  étaient  inutilis,  il  prit  le  parti  lesquels  le  saint   se  cou.ha,  l'inuiant  à  faire 

de  les  abandonner,  il  leur  (loni;a   pour  su-  la  inoiuc  chose;  el  e.le  fut  eiiiore  piusélonuéi! 

périeur    le    bienheureux    Albcrl,   leli^iicux  de  voir  que  le  fi'u  ne   faisait  aucun  mal  au 

d'une  sainte  vie,  et  ((ui  sut,  tant  par  sa  pié-  serviteur  de  Dieu.  Ce  prodige  la  toui  ha  si  ti- 

té  qui'  par  ses  belles    manières,  ramener  à  vement  ((u'tl'e  res  ihit  de  changer  de  vie,  el 

leur  devoir  Cis  esjirits  inquiits,  el  les   faire  ;iyaul  demandé  pardon  au  saint,  elle  voulul 

vivre  selon  les    règlis  qui   leui    avaient  été  vivre  sous  sa  conduite.  Elle    vendit  tout  ce 

prescriles.   Le   sainl   fond.ileur,   après   élre  qu'elle  avait,  et  du  prix  qu'elle  en  relira,   le 

sotido  .Monl-^ierge  avec  cini]  religieux  qui  sainl  fonda  un  monastère  de  filles  à  \'cnosa, 

ne  vi  ulurenl  |o:iit  le  quiUer,  fonda  de  non-  q'.ii  fut  achevé  par  les  libéra. i  es  du  roi  Uo- 

veaux  monaslères,  duui  le  premier  l'ut  à  !?er-  ger.  Ce. t.;  courlis. ine  y  prii  l'iiabil  de  l'ordre 

ra  (-ognala  ;  il  en  bàtil  ensuite  deux   autres  d.i  sainl  iond.ieur,   el   se  sanciilia   dans  «e 

à  Ciugli.to,  proche  la    vile  de   Nusco,    l'un  uion.i.sière,  dont  cile  fut  ensuite  supérieure, 

pour  des  hoi!  mes,  l'autre  pourdes  filles,  avec  Les  pénitences  cl  les   auslérilé.,  jointes  ;iux 

une  cg:ise  commune   pour   les  deux  nionas-  attes  des  vertus  les   plus   héroïques   <iu'ello 

lèics,  laquelle  fui   dédiée    en  l'honneur   du  pralicjua  depuis  sa  c^uncrsiou,   lui  ont  me- 

Sauveur  du  monde.  11  rassembla    un   grand  li.éapièssa  mort  le  titre  de  l)i''iiliiu:euse, 

nombres  de  vierges  d.ins  le  mon. istère  destiné  éiaiil  co   nue  ^ous  le  nom  de  la  6iea/iei(reu»c 

pour  les  pcrsoniii  s  de  leur  sexe,   qui  y   vi-  Ajti's  de  Venins:!. 

vaiciit  dans  une  grande   abslincnce.  Jamais  Ap^ès  ce  miracle  le  roi  Roger  cul   une  si 

elles  ne  buvaient  de  vin,  non  pas  même  dans  grande   estime  pour  sainl  Cuillaume,   qu'il 

les  maladie-,  et  elles  s'abstenaifiil  en   tout  fil  bâtir  plusieurs  moaastères  de  son  ordre, 

U'inps  de    l'usage  de  la    vianle  et  de  l.'Utes  non-seuleiiienl  dans  le   royaume  de  Naples, 

>orles  de  laitages  ;  trois  fois  la  semaine  elles  mais  encore  dans  celui  de  Sicile.  Le  premier 

niangi'aient  des   herbes  crues  avec  du  pain,  qu'il    fonda  fut   à  l'alerin.'  sous   le    nom    de 

et  les  autrrs  jours  on  ne  leur  servaii   qu'un  :i(ii)it-Jcan  ties  Lritiites.  visa  vis  son  pal.iis. 

seul   mets  acconinodé   à   l'huile:   depuis   la  11  en  fonda  aussi   un    autre  dans    la   nièojc 

fêle  de  tous  les  saints  jusqu'à  la  Nati\ité   de  \  ille  poui  des  vierges,  sous  le  uoiii  de  Suinl- 

Ixolre  Seigneur,  el  depuis   la   Sepiiiagésimc  Snuvcur;  el  li  (iremière  qui  y  prit  riinbilfot 

jusqu'à  l'àques,  elles  jeûnaient  tous  les  jours  la  princesse  Constance,  sa  tille,  laquelle  fut 

iiu  pain  et  à  l'eau.  Les  hommes  ne  vivaient  tirée  dans  la  suite  de  ce  mipiiaslére,  dont  elle 

pas  dans  leur  monastère  d'une  manière  moins  éiait  supérieure,  et  rele\ée  de  ses  vieux  par 

austère;  de  sorte  que  ce  monasière  de  llu-  le  pape  Celesliu  Itl,  pourepousr  Henri  \  I, 

glielo  devint  tiès-considéral.le  dans  la  suite,  fils  de  l'empereur  Fridéric  Ùarbe-Roussc.  (!e 

lanl  par  sa  pietcque  par  ses  grands  rcv(.'.ius  prince  lil  encore  bâtir  un    autre   monastère 

qui  se  iiiuntèiunt  à  plus  de  vingl   mi. le  du-  de  religieuses  à   Messine,   a|)pelc  le  monus- 

,cats.  Ici  e  du  M  ont-V  icrfje.  cl  v.ulrv:  ceux  qu'il  fonda 

La  sainteté  de  Guillaume  se  répandant  de  ilans  le  royaume  de  Naph  s,  il  y  eul  ci  lui  do 

toutes  iiaris,  Hoger,  roi  de  Naples  e;  de  Sicile,  \  enosa  jiourdes  religieuses.  Le  nomlire  dis 

ic  lil  venir  auprès  de  lui  pour  se  servir  de  ses  monastères    de   filles    de    l'insiilul   de  saint 

fo:iseils.  Le  sainl  piolita  de  c  lie  occasion  Cuillaume  fui  si  grand,  qu'il  y  eu  a  qui  pré- 

pour  porter  ce  prince  à  bannir  de  sa  cour  le  lendent  (|u'il   y  en  eut  jusqu'à   cinqua.ile; 

dérég:emenl  el  le  scandale.  Les  couriisansde  mais  à  peine  à  p'cseiil  eu  irouve-l-un  deux 

Hoger,  qui  ne  rcspiraioiit  que  les  plaisirs  el  ou   trois,    dont    les    religieuses   oui    môi  c 

le  luxe,  appréheudaul  que  les  discours  de  ce  quitte  l'hjLil  et  l'iustilul  du  .Monl-Vicrge, 


nos 


MON 


MON 


liOG 


quoi(iuc  celui  (!e  Messine  en  relieiine  encore 
le  nom. 

Sailli  Guiliaump,  apris  avoirdeineuré  quel- 
que temps  d.ins  suii  inoiiasière  de  Païenne, 
où  il  av<iil  fait  venir  d  s  religieux  de  son 
propre  monaslère  du  Mont-A'ierge,  que  le 
i)ienheureux  Albeit  lui  avait  envoyés,  quilia 
la  Sicile  pour  retourner  dans  le  royaume  de 
Naples.  Il  alla  visiler  les  nligieux  du  Monl- 
Vierge,  qui  avaient  été  longtemps  privés  de 
sa  présence:  il  y  fit  quelque  séjour,  e!  sen- 
tant par  l'épuisement  de  ses  iorci'S  et  l'ac- 
croissemenl  de  ses  infirmités  qu'il  ne  pouvait 
vivre  longtemps,  il  se  retira  au  monastère  de 
tli  glielo,  où  il  mourut  le  2o  juin  1142,  lais- 
sant une  nombreuse  postérité,  dont  il  donna 
la  conduite  au  bienheureux  Albert,  qui  ne 
voulut  pas  nér.nmoins  accepter  cet  emploi; 
mais  on  l'.e  voulut  point  en  élire  un  autre 
qu'après  sa  mort  qui  arriva  l'an  1149;  ainsi 
il  est  reconnu  pour  le  second  général  de  cet 
ordre. 

11  eut  pour  sncresseur  le  bienheureux  Ro- 
bert nui  relr;;ncha  quel(|ue  cliose  des  gran- 
des austérités  auxquelles  saint  Guillaume 
avait  obligé  ses  reli;.'ieux  ;  et  comme  ce  saint 
ne  leur  avait  rien  laissé  par  écrit,  il  mit  son 
ordre  sons  la  règle  de  saint  lienoîl  par  auto- 
rité du  pape  Alexai'.dre  II!.  Ce  ponlil'e  l'ap- 
prouva derechef,  et  prit  sous  la  protection 
i!o  sainl-siége  le  mcmastére  du  Mout-Vicrgo. 
.li'an,succes-(  ur  de  Uobeit,  fit  rebâtir  l'église 
d.'  ce  chef  J'ordre  avec  beaucoup  de  magni- 
(idncc,  et  elle  fut  consacrée  par  le  papeLu- 
cius  iV,  eu  présence  de  quinzi'  évéqucs  et  de 
cinq  abbés,  et  lui  accurda  beaucoup  de  pri- 
vilèges, di)iit  le  P.  dom  Gabriel,  quatiiènie 
ab'é,  obtint  la  confirmation  du  p.'pe  Célcslin 
lii.  Jean,  deuxièmedu  nom  et  huitième  abbé, 
ainpl;fi  I  l'ordre  par  la  loiidation  de  plusieurs 
inoiiaslèies,  et  il  alla  toujours  en  .luguieii- 
tanl,  tant  que  les  relij^icux  vécurent  en  paix 
et  en  union,  et  qu'ils  obs<'rvèreiil  invio'able- 
iiieiit  leur  règle.  Mais  étant  loiiibés  dans  le 
relâchement,  l'espiil  de  discorde  se  glissa 
parmi  eux,  e!  après  la  mort  du  gènér<;i  Pb;- 
lipp!',  dix-biiitième  abbé  du  Mo.t-^'ieige,  ne 
pouvantcoiivcnir  pour  l'élection  d'un  succes- 
seur, chaque  monastère  fut  gouverné  pirdis 
doyens  cl  des  prévôts,  qui  étaient  absolus  et 
iii'l('pendanls,  l'ordre  n'ayant  puintde  chef. 
Niais  dom  Pierre,  relig  eux  du  .Mnnl-\'ierge, 
alla  iriiuviT  le  pape  Clément  VI  à  Avignon, 
et  obtint  de  ce  pont.fe,  l'an  1349,  l'abb  lye  du 
Monl-\'iergc  et  le  gou^  ernement  de  l'ordre, 
qu'il  tint  pendant  ijuarante  ans:  ainsi  les  re- 
li;^ieux  perdirent  le  droit  qu'ils  avaient  d'é- 
lir.'  leurs  généraux.  Après  la  mort  du  géné- 
ral dom  Pieir  -,  ai-r  vai'  en  13SI,  Barli.'elemy 
(ut  général  juscju'eu  l'an  l.i'M,  et  eut  pour 
succesyeur  Palamides,  cpii  permuta  l'abbaye 
du  Mont-Vierge  pour  célk'  de  Sainl-Pierre  i.d 
Ara  avec  le  cardinal  Ik'g  ,es ,  deCiiypre,  qui 
fut  le  premier  abbé  couimendalaire  du  Mont- 
Vierge,  et  mourut  l'an  l'i33.  Le  second  fut 
le  cardinal  Guillaume,  de  Chypre;  le  troi- 
sième le  cardinal  J^an  d'Aragon,  fiis  du  roi 
Ferdinand  ;le  quatriènu  le  cardinal  Oiivierf];;- 
rafl'a,  arthcv6(iue  de  Naples,  qui  ôla  à  ce 


nvnaslère  le  riche  trésor  qu'il  conservait  du 
corps  de  saint  Janvier,  dont  ce  cardinal  en- 
richit son  église.  Enfin  le  cinquième  et  der- 
nier abbé  commend.itaire  fut  le  cardinal 
Louis  d'Aragon,  neveu  du  roi  de  Naples,  qui 
ninit  celle  abbaye  entre  les  mains  du  pape 
Léon  X,  à  rond.tion  qu'elle  serait  unie  pour 
toiijoui  s  à  l'hôpital  dd'AnnonciadedeNaples; 
ce  qui  fut  exécuté  l'an  1515,  et  les  gouver- 
neurs de  cet  hôpital  en  prirent  possession  le 
18  décembre  de  la  même  année.  Ces'^gouver- 
neurs,  qui  sont  ordinairement  cinq  genlils- 
hoinmeset  quatre  lîourgeois,  mirenlau  Mont- 
Vierge  un  sacristain,  qui  y  tenait  lieu  d'abbé, 
et  un  de  ces  gentilshommes  disposait  de  tou- 
tes choses,  et  nommait  m^me  te  supérieur, 
qui  n'avait  qi.e  le  litre  de  vicaire  et  peu  d'au- 
torité sur  les  religieux,  n'ayant  pas  même  le 
pouvoir  de  les  envoyer  aux  ordres.  Ce  gen- 
tilhomme donnai!  les  prieurés  de  l'ordre  à 
ceux  (lui  lui  en  offraient  davantage,  et  tout 
se  faisait  au  nom  du  sacristain,  que  les  gou- 
verneurs changeaient  quand  Ion  leur  sem- 
blait: de  sorte  que  le  plus  souvent  c'était  un 
préire  séculier,  sans  science  et  sans  expé- 
rience, et  quelquefois  l'évéque  de  Lésina, 
qui  est  une  ancienne  ville  ruinée  qui  appar- 
tii  ni  présentement  à  l'hôpital  de  l'Annoii- 
cia^le. 

L'ordre  du  Mont-A'ierge  se  vit  par  ce  moyen 
à  deux  doigts  de  sa  perte;  il  ne  fut  pas  seu- 
leiient  dépouillé  de  ses  revenus  qui  étaient 
considérables,  puisque  le  seul  m mastère  du 
ftlont-Vierge  possédait  les  baronies  de  Mer- 
cU'(;liano,Spedaletto,Mugna.;no  et  Quairclle, 
a^ecle  (ief  de  Monle-Fnscoli,  d'où  dépen- 
daient Li-Felici,  San  Jacomo,  FerUilario, 
Terra  Fs'ova,  San  .Martino  et  Pietra(!elli  Fusi; 
mais  élant  sans  chef,  et  pour  ainsi  dire  sans 
supérieur,  les  religieux  tombèrent  dans  un 
grand  reiàchemcnl,  et  les  études  eu  furent 
enlièreiiienl  bannie.-. 

Les  gouverneurs  de  riiôpital  de  l'Annon- 
ci:ide,  pour  faire  consentir  plus  volo  Micrs  le 
pape  léonXà  l'union  qu'ils  d'.iiiandiieiil  du 
monaslère  du  Mont-Vierge  et  de  ses  dépen- 
dances à  cet  bôpiial,  représealèrcnt  à  Sa 
Sainteté  que  tous  ses  revenus  ne  montaient 
au  plu3  qu'à  trois  cents  dueals,  et  qu'ainsi  le 
nombre  des  religieux  ni  l'obseivauce  régu- 
lière ne  diminueraieiil  pas  dans  ce  monas- 
tère ;  c'est  ce  qui  lit  que  ce  ponlii'e  conseniit 
à  cette  union  par  son  bref  de  l'an  1515.  Jiais 
les  religieux  du  Monl-Vierge  appelèent  au 
papL'uiêmede  ce  brei' qu'ils  supposèier.l  sub- 
reptice  et  obrcptice;  puisque  les  revenus 
du  Muni- Vierge  se  montaient  à  des  sommes 
bien  plus  considérables  qu'ils  n'avaient  ex- 
posé au  pape.  Ce  qui  leur  fut  d'autant  plus 
facile  à  prouver,  que,  sans  les  revenus  des 
terres  de  Mercugliano,  Spedalello,  Mugnano 
et  les  autres,  on  vendait  tous  les  ans  pour 
l  ois  cents  ducats  de  châtaignes  qui  se  re- 
cueillaient sur  la  montagne,  et  pour  p'us  de 
quatre  cents  ducats  de  bois  qu'on  coupait  au 
nH'mee:idroit,et  que  les  religieux  a  valent  tou- 
te juridiction  spirituel  le  et  temporel  le  dans  les 
terres  qui  avaient  été  unies  à  l'hôpital  de 
l'Anuonciade,  et  duul  ucuumoius  il  n'était 


ilo7  DICTIO.NNAIUE  DES  OflDRES  RELICIFUX.  1l(i8 

fait  aucune  mention  dans  le  bref.  On  n'eut  bulle  de  Pie  \.  Cependani,  comme  tui  n'y 
«lucun  éffard  à  leurs  rcmontr.iucps,  et  ils  se  avait  pas  rtimpris  les  \a.«saux  des  d-r- 
\ireiil  dans  la  deiiendaiice  des  laïnues,  ce  rc'i  de  .Mercu|^liano,  Spedalello ,  MugraiHi, 
i|ui  dura  jus()ue  sous  le  poiitifirat  do  Pie  V.  dt-llc  Ouaiirelle  et  les  autres,  sinon  qu'on 
!\lais  a»aiit  qu'ils  fussent  délivres  de  cette  les  obi  çcail  à  servir  en  personne  le  ^lo  :t- 
ser>  iliide,  Alphonse  l'iscici'llo,  l'un  des  jjou-  \ieriîe,  demeurant  au  surplus  sous  la  juri- 
verni'urs  de  l'AnMonciade,  s'élant  trouve  à  diition  temporelle  de  rii(\pilal  (juidevait  nom 
un  chapitre  des  re!ij.Meux  de  ce!  ordre,  et  mer  lis  «iflieiers  d^'  justice;  ces  vassaux  ap- 
Toy  ml  l'Ifinoranco  où  il  était  plonge,  la  plu-  jircliendant  depcr.lre  leurspriviléses.s'.idrc^- 
p.irl  des  reli;:ieux  ne  sachant  même  ni  lire  sèrent  à  cr  niéme  pontife  jiour  le  prier  de  leur 
ni  éiiire,  il  leur  donna  piMir  supérieur,  en  permettre  de  rester  toujours  vassaux  du 
«jualilc  de  vicaire  général,  le  P.  doin  Uarbalo  .Mont-Vierge;  ce  que  le  pape  leur  accorda, 
l'errato  dclla  Candida,  qui  était  le  moins  ordonnant  qu'ils  ne  pourraient  jam  is  élre 
>L;norant  de  ces  religieux  et  le  plus  zélé  pour  vendus  ni  échangés,  et  qu'ils  seraient  tou- 
tes observances  régulières.  Ce  vicaire  gêné-  jours  vassaux  du  Mont-Vierge  qui  en  aurait 
rai,  avec  l'assislance  de  ce  gouverneur,  éta-  le  domaine  direct. 

b  il  un  séminaire  et  des  études  au  Mon!-  ,p  pouvoir  que  ce  pape  avait  accordé  au 
V  lerge,  d  ou  il  est  sorti  dans  la  suite  de  très-  sacristain  de  l'Aunon.  iade  sur  1rs  religieux 
hahiles  gens,  qui  se  sont  rendus  recomman-  ^^  Mon'-Vierge  ét.il  d'assislrr  à  leur  cha- 
dabl  s  dans  1  ordre  par  leur  science  et  leur  pj,re  général  pour  l'élecliou  d'un  vicaire  gé- 
'""'."■  .  ■  ^.  ■  ,1  r.  .  .  néral,  et  les  religieux  qui  se  trouvaient  gre- 
Jean-Louis  r.scicello  élan  gouverneur  de  ,.^.^  j^ur  supérieur,  pouvaient  appeler  do 
1  Annoneiade  en  loGo  les  exhorta  a  repren-  i^^^s  ordonnances  à  ce  sacristain,  qui  eu 
dre  les  observances  régulières  et  a  règle  de  ■  ,^  g„  j^rnier  ressort.  Mais  Sixic  V,  qui 
saint  Itenoit.  qu  ils  avaient  abandonnée.  Ils  ^^y.,;,  succédé  à  Pie  V,  croyant  qu'il  ne  cun- 
suivirent  son  avis  ;  mus  ne  pouvant  execu-  y,.„;,jt  ^^  sacristain  de  l'Annor.ciade. 
1er  ce  dessein,  tant  qu  ils  seraient  gouvernes  „„oique  régulier  cl  évé.iue  conformément  à 
par  des  séculiers,  ils  eurent  recours  au  pape  i,^  ^,^^^^^,  ^,^,  ^on  prédécesseur,  se  mélàt  des 
Pie  l\  pour  être  alTiambis  de  cette  servi-  affaires  des  religieux  du  Mont-V.ergc.  el 
lude,  et  depuleient  vers  ce  pontife  le  vicaire  ,.,  .,„i  ,„é,j,eque  lesacrisiainqui  vêtait  pour 
général  duuj  Oarbato,  qu  ils  élurent  dans  i„rs,  n'était  ni  réguli.  r  ni  évèque,  ex.  m,.ta 
leur  chapitre  comme  procureur  pour  aller  a  ^^,^^^  |^.^  religieux  de  cet  ordre  de  sa  luridic- 
Uome  avec  quel  lues  autres  religieux,  cî  ils  i|„„_  ^^^■^  faisant  défense,  sous  peine  d'excom- 
prireni  pour  leur  protecteur  le  cardinal  „u,„icaiion.  par  sa  bulle  de  l'an  i:  88.  de  se 
Sforzr-.  Le  pape  Pic  1\  etanl  mort  comme  ils  i,.„uver  à  l'avenir  à  leurs  chapiires.  ni  de  se 
sollicitaient  la  r,  stitulion  du  Mon!-\  lergc  el  ,„^^:pr  des  affaires  de  l'ordre, 
de  leurs  revenus,  ils  n  obtinrent  ce  (lU  ils  de-  ...  .  j  ■  .•  •  -  .  ■ 
m.indaientque  sous  le  pontificat  de  son  s.  c-  ''^""'e  re,  ululions  arrivées  en  cet  ordre 
ccsseur  Pie  V,  qui,  nonobslant  les  opposi-  ''"  "^•".'«'"'  ,»""""  les  observances  régulières, 
lions  du  procureur  de  l'Annonciade,  délivra  et  quoique  le  pape  Pic  V  eut  fait  aire  quel- 
l'onlredu  Mont-Vierge  du  gouvernement  des  '!"'?  reglemenU  pour  les  y  lelaMir,  il  n  y 
séculi.rs,  défendant  ;;ux  gouverneurs  de  f»^'"'  '1"""  P*^"'  "°'^''î^''  ^^  '-""^ents  qut 
l'Annonciade  de  s'en  n.êler  à  l'avenir,  el  les  avaient  re,.us,  et  ou  la  règle  d;- saint  I5e- 
cassa  l'union  qui  avait  élé  faite  de  ce  mo-  "«'l  e'a't  pratiquée  M.iis,  1  an  lo9G,  le  pape 
nasière  avec  l'hôpital  de  l'Annonciade  ;  il  le  (-lo'.'ent  MU  voulut  inlro.iuTe  une  reforme 
soumii  néanmoins  au  sac.islain  de  cet  hc^pi-  fri'"''"lc  dans  tout  1  ordre  Pour  ce  effet  il 
tal,  (i<;urvu  qu'il  fût  régulier  cl  évéquo,  '-omma  commissaire  apostolique  le  Ptre  Jean 
como.e  il  paraît  par  le  bref  de  ce  poniife  du  l''"''l^"^'\  fondateur  des  clercs  réguliers  de 
7  mars  1.507;  mais  il  ne  rendit  pa'  les  rc»c-  '«  •^'^'^^  <>;'  ^''^"  ''^  l-"cques.  11  lui  donna 
nus  do  Mont-Vierge  aux  religieux.  !1  ordonna  P"''^'"";  ''"^  ^'^""  '""''  1''^  .^•""*''"'s  de  ce 
seulement  que  les  gouverneurs  de  l'Annon-  «""dre.de  supprimer  ceux  ou  on  ne  pouvai 
ciade  donneraient  tous  les  ans.  à  chaque  rc-  P^^*  pratiquer  les  observan,  es  régulières  et 
ligieux  pour  son  entrelien,  vingt  écus  ro-  de  ne  reserver  que  ceux  qu  il  rouverait  les 
mains,  et  que  de  cinquante-trois  prieurés  P'"^  commodes  pour  c.la,  c!  dans  bsquels 
qu'il  y  av.il  alors  dans  l'ordre,  on  les  rédui-  «"  potirraii  mclire  pour  le  n  oins  douze  reli- 
rait au  nombr.  de  dix-huit  aux  frais  de  l'hô-  P."^"V  "  '."'  rccoom.anda  sur  toutes  choses 
pilai,  qui  ferait  toutes  les  dépmses  pour  d  en  bannir  la  propneie  el  de  rétablir  la  vie 
faire  acVonimo.ler  les  lieux  réguliers  ,  ail»  commune  dans  les  monasières  ou  clic  n  était  ^ 
que  les  n  ligieux  y  pussent  vivre  en  commun  p-'s  observée. 

et  y  garder  les  observaneis  régulières.  Mais         Ce  l'ère  exécuta  les  volontés  du  souverain 

les  gouverneurs,  appréhendant  que    la  de-  ponlifi',   et  malgré   les  ofiposiiions  de  qiiel- 

pcnse  des  réparalions  de  ces  monastères  no  ques  religieux,  il  établit  la  réforme  dans  iout 

se  montât  trop  haut,  firent  un  concordai  la  loidre,  «l  dressa  des  eonslitulioiis  (|ui  lurent 

même  année  avec  les  religieux,   par  lequel  api  rouvees  par   Sa  Saintele,  et  qui   y   sont 

crux-ci  abandonnèrrnt  à   riiôpital  de  l'An-  encore  en  pialique.    Le    même   reformaieur 

nonc  ade  environ  tiois  mille  ducats  de  rente,  assigna  à  i  es  religieux  le  IJréviaire    des  l'.i- 

et  riiôpilal  leur  céda  tout  le  reste  des  r.ve-  mil<'s    Camaldnlcs    de    la    rongregalioii    du 

nus  qui  dépendaient  du  monasière  du  .Mont-  Mont-de  la-Couronne,  qu'il  fit  impiimer  l'an 

Vierge,  lequel  accord  fut  couliruié  i^ar  une  1!J'J7,  et  leur  ordonna  (lue,  dans  six  mois,  ils 


1109 


MON 


MON 


1110 


fUisenl  à  réciter  l'office  divin  conformcmenl 
à  co  fîféviairo 

l'aul  V,  confirnicint  co  que  le  Vvrc  L\M)nar(Ji 
fivail  fait  touchant  la  suppression  des  po:ils 
moiiaslèrc's  de  cet  ordre,  fixa,  par  mie  liiil'c 
de  l'an  1611,  le  nombre  descouvcnis  qui  dc- 
vaienl  rester,  et  celui  des  religieux  (jiii  y  de- 
va  eut  denicurcr.  il  ordonna  qu'il  n'y  aurait 
qu(;  vingt-quatre  monaslèi  es  ;  que  dans  celui 
d  1  Monl-Vierge  il  y  aurait  toujours  cent  re- 
ligieux, dont  la  moitié  seraieui  prêlris  ;  lians 
le  mniiastère  de  Naples,  seize  religieux  ;  dans 
celui  de  C  isamaricana,  quitorze,  el  dans 
ceux  de  C.ipoue,  de  T(  rra-l^inla,  de  Terra- 
CandiJ;i,  de  l^lauriliani,  d'Aversa,  de  Home, 
de  Guglieto,  de  la  Touille,  de  Montefalco  et 
d'Arjisnso,  douze  religieux;  et  que  ces  mo- 
nastères seraient  gouvernés  par  des  ahhés. 
Onze  aulrcs  sont  noaimés  dins  l<i  même  bu  le, 
dans  les(|uels  il  ne  pouvait  y  avo  r  que  six 
religieux,  gouvernés  seulemeut  par  des 
prii  urs,  qui  pourraient  succéder  aux  abbés 
des  autres  monastèies  en  cas  de  décèS  ;  que 
ces  onze  prieurs  seraient  amovibles,  et  (ju'on 
en  cliraittrois  pour  aller  au  cli;ipilre  généra!, 
auquel  le  doyen,  les  définileurs,  les  visiteurs, 
le  procureur  général  en  cour  de  Uome,  tous 
les  abbés  et  le  maître  des  novices,  auraient 
voix,  et  que  tous  ces  abbés  jouiraient  des 
mêmes  droits, privilèges, immunilés  elexemp- 
lions,  que  ceux   de  l'o  de  des  Camaldule-. 

Le  même  pontifeordonna  ciuore  que  dans 
vingt-quatre  autres  ma  sons,  nommées  d.ins 
son  bref,  on  n'établirait  aucune  commu- 
nauté, et  qu'on  y  inverrait  seulement  deux 
religieux,  dont  l'un  scnitprére  pour  y  dire 
la  messe,  et  l'autre  couvers,  pour  avoir  son 
des  revenus,  les(iiiels  religieux  seiaicnl  ré- 
pulés  de  la  famille  du  monastère,  auquel  la 
maison  où  ils  demeureraient  serait  annexée. 
Il  coi\sentit  aussi  qu'on  mil  cinq  rrligieux 
dans  les  monas(ères  situés  dans  les  dépen- 
d;inces  du  Mont-Vierge,  et  où  ils  faisaient 
les  fonctions  de  curés,  et  qu'il  y  en  eût  trois 
dans  celui  de  Pouzzoles,  comme  servant 
d'hospice  au  monasléi  e  de  Naples  :  dans  tou- 
tes les  autres  niais(  ns  de  l'ordre,  ou  n'y  de- 
vait envoyer  qu'un  frère  convers  ou  ohiat, 
pour  avoir  soin  des  ornements  de  l'église  et 
des  revenus. 

Il  y  a  aussi  dans  ce  bref  des  règlements 
concernant  le  gouvernement  de  l'ordre  :  au- 
cun abbé,  prieur  ou  cellérier,  ne  peut  exer- 
cer ces  offices  dans  son  pays.  Le  monastère 
du  Mont-Vierge  ,  chef  d'ordre,  et  celui  de 
Sainte-Agathe  à  Kome,  sont  destinés  pour  y 
recevoir  des  nov  tes,  et  il  ne  peut  y  avoir 
dans  tout  l'ordre  plus  de  trois  religieux  du 
iiiême  pays.  On  doit  établir  deux  monastères 
pour  y  élever  les  jeunes  gens,  jusqu'à  ce 
qu'ils  soient  (  rétres,  ou  au  moins  sous-dia- 
cres :  la  forme  de  l'habit  des  convers  cl  des 
oblats  y  est  prescrite. 

L'on  voit  par  ce  bref  qu'il  y  avait  encore 
sous  le  pontiHcai  de  Paul  V  un  grand  nom- 
bre d<i  monasières  de  cet  ordre,  el  quoiqu'il 
y  en  eûi  eu  plusieurs  du  vivant  même  du 
fondateur  dans  le  royaume  de  Sicile,  il  n'en 
restait  alors  que  doux  ou  trois  qm   élaicut 


du  nombre  de  ceux  où  on  ne  devait  envoyer 
qu'un  prêtre  et  un  couicrs  :  tous  les  autres 
en  ce  royaume  avaient  déjà  été  supprimes 
ou  donnés  en  comniende  dès  l'an  1410,  el 
entre  I  s  aulres,  celui  de  S;iint-J«'an  des  Er- 
mit'S  à  Palerme,  qui  était  un  des  plus  con- 
sidérables de  cet  ordre  en  Sicile,  oii  il  n'en 
reste  aucun  à  présent.  L'ordre  du  Mont- 
Vierge  ne  subsiste  plus  à  piésenl  que  dans 
le  royaume  de  Naples  et  dans  (jucbiurs  lieux 
de  l'Etal  ei  clé^iastique,  où  il  a  an  pins  qua- 
rante-sept maisons. 

Le  général  de  cet  ordre  est  triennal  el 
abbé  du  Mont-Vi.rge  ;  il  se  qualifie  seigneur 
spirituel  et  temporel  de  Mercugliano,  Speda- 
letto  el  de  toutes  les  terres  qui  dépendent  do 
son  abbaye.  Il  se  sert  d'orncmcnls  pontifi- 
caux et  donne  les  ordres  mineurs,  non-seu- 
leuicnt  à  ses  religieux  ,  mais  encore  aux 
clercs  séculiers  qui  demeurent  dans  les  ter- 
res de  sa  dépendance. 

Le  Mont-Vierge  est  fort  élevé  e!  couvert  de 
neiges  (  n  tout  temps.  Le  monastère  n'est  pas 
bâti  au  sommet  de  la  montagne,  mais  dans 
le  mil  eu.  il  esl  très-magnifujuc  et  contient 
plusieurs  corps  de  logis.  Les  religieux  n'y 
mangent  jamais  ni  viande,  ni  (va's,  ni  lai- 
tage, ni  fromage,  non  jias  qu'ils  y  soient 
obligés  par  leurs  conslilulions,  mais  parce 
que  Dieu  a  consacré  ce  lieu  à  la  pénitence  : 
ce  qui  esl  si  manifeste,  que  si  l'on  y  i  orle  de 
la  viande,  des  œufs,  du  fromage,  même  du 
suif  de  chandelle  ou  quelque  autre  graisse, 
l'air  s'obscurcit  tout  d'un  coup;  il  s'élèvo 
d  s  tempêtes  et  des  orages  furieux,  mêlés 
d'éclairs  et  de  tonnerre  qui  paraît  prêt  à 
tomber;  ce  que  les  séculiers,  <]ni  ont  voulu 
porter  de  la  viande  ou  de  la  graisse,  soit  par 
curiosité,  soil  par  ignorance,  oui  ex  péri - 
meule  plusieurs  fois.  C'est  ce  que  rappor- 
tent tons  les  historiens  qui  ont  parlé  du 
Muut-\iergi',  et  dont  le  cardinal  des  Ursins, 
aicbeiêque  de  Bénévenl,  rendit  lénioignago 
l'an  17i:8,  par  un  acte  anlhenti(iue  ,  où. 
a;  rès  avoir  parlé  de  l'image  de  la  sainte 
Vierge,  qui  est  révérée  en  ce  lieu,  et  de  la 
manière  qu'elle  y  a  été  portée,  il  finit  par  ces 
paroles  :  Uoc  prœ  cœteris  memoriœ  dignuin 
perhibetur,  qiiod  ad  hoc  asceleriuin  nec  cciro, 
nec  caseum,  riecova,  nec  opis  qnodcunque 
lacterium,  ncque  scbuceœ  candelœ  pcrdccem 
milliaria  undique  versuin  ditci  qwmnt;  slutim 
eniin  cœlum  falgurat  ac  tonat  frangore,  im- 
mensœ  erumpunt  pluviœ;  œsliioque  lempore 
viyere  consuevit  prœfali  popicli  innumeri 
concursus,  kutnmœque  devotionis.  Nos  ipsi 
qui  semel  atjue  ilerum  cunqregationis  Mon- 
tiS'Virginis  visilatorem  egimus  apostolicum 
et  ad  idem  asceterium  aiit  pro  electione  abba- 
luiii  generalium,  suminis  ponlificibus  deman- 
dcntibus,  vel  pro  eoruindem  soUmni  benc- 
dictione  pluries  accessimus ,  oculati  lestes 
faiinus  :  ac  proinde,  in  horum  omnium  et  sin- 
gulorum  fjdem,  pra'senics  nosira  manu  sub- 
sciiptas,  nostroqiie  sigillo  obfirmatas  expe- 
dietulaïf  jnssimus.  Dalnin  Benevnli  ex  noslro 
archie/iiscopio  hac  die  9  viensis  Januarii 
17(îti.  Il  fait  un  froid  extrême  sur  celte  mon- 
tagne ,  et  aux  uiuis  de  juillet  et  d'août  les 


t»5'                                           niCTtO.NNAIHE  HKîj  OÎUmKS  liLLICItUX.                                            1112 

T.li(,'iru\    sont    qMrl(iuofi)is    obli-és    de    se  leur  lélc   cl   ilesciiuliiil  sur  loiir   gorge   en 

I  iMuffcr.  A  iiiMlre  inillcs  au-Jessoui  ilu  forint' de  guimpe,  cl  cllfs  |>orl.iieiil  par  des- 
iiKin.islere.  il  y  .1  un  lieu  forl  agréahic,  où  sus  un  grand  voile  noir  fort  délié;  el  dans 
loules  clioscs  nécessaires  à  ia  »ic  alpondenl.  leurs  cérénionies  elles  avaient  un  manteau 
J.e  lieu  s'appelle  Lniretn;  on  ja  liàli  une  traînant  jusqu'à  lerrc  (i).  Le  principal  me- 
liellc  ludrmerie,  qui  pourrait  passer  pour  nasière  de  ces  (illcs  était  à  Coglirlo,  qui  ct.iil 
un  Ires-beau  monasItTC.  On  n'y  peut  pas  double, comme  nous  avons  dit.  La  supérieure 
non  plus  p.irler  m  viande,  m  œufs,  ni  lai-  y  avait  la  qualité  dahbesso  ,  cl  pouv.iil  por- 
tage Ainsi  les  religieux  el  les  personnes  1  t  la  crosse,  aossi  bien  que  l'abbé  du  ino- 
seculiér.'S,  môme  les  elrangeis,  quand  ils  nasière  des  boinmcs,  qui  se  servait  d  orne- 
sonl  a  lexlrcmiledemalaiie,  n'en  m.ingeiii  nionls  ponlincaux.  Ce  mo.iasièrc  avait  plus 
pmnl.  Leux  qui  y  ineureiil  sont  portés  au  de  vingt  mille  ducats  de  revenu,  dont  l'bo- 
iiioiiasiere  d'en  liaul  pour  y  être  enterrés.  Il  piol  ,1e  l'Annonciade  à  Naples  a  dissipé  une 
ne  laisse  pas  d'y  avoir  beaucoup  de  fontaines  (rrande  partie,  aussi  bien  ijuc  les  abbcs  com- 
Mir  cette  montagne,  nonobstant  sa  hauteur.  incndaiaires  :  il  n'y  a  plus  présciiteincnl  que 

II  s  y  t.ouve  aussi  beaucoup  de  pâturages  ;  douze  reli-ieux.  Ce  moiiasl.rc  porte  le  nom 
il  y  a  même  un  pre  qui  a  trois  miiles  de  de  saint  Ciuill.iuinc,  à  cause  que  ce  saint 
tour,  cl  ou  y  recueille  du  blé  cl  de  l'avoine,  fondateur  v  a  clé  enterré.  Cet  ordre  a  donne 

Les  religieux  de  cet  ordre  sont  babilles  de  qiie!(]ues  pVéîals  à  l'K^lisc  el  quelques  écri- 

Idanc.   Leur  babil  ordinaire  consiste  eu  une  vains. 

r.)l)e   cl    un    s  apulaire,    et    ils    portent    au  Silv'cslr.   Mau-ol.  Mare  Océan,  di  (ut.  gl. 

cliaMir  el  diins  les  villes  où  sonl  situes  leurs  Itelir/.  !ib.    11.  Tbomas  a  Coslo,    Isloria  del 

monastères,    une  coule  euiumc  les  Itenédic-  Sngrdliss.  Iitogo  ,li  Votile  Ver  /ne.  Ciacomo 

lins    ;li.   Silve.slre  .Maurolic   dil  que  de  son  Jonlaiio,    Chronic.   di  Munie  Yer.'iuc    Félix 

lenips  i.s  ne  porta  eut  point  de  c.ul.'S,   mais  Henda,    et  Jaconi.  Jordano,    Vit.  S.  (iiiild. 

s.ulemcnt  un  scapulaire  a^ec  un  capuce  cl  Ihillar.  Rom.  Haillcl,  V!es  des  SS.  el  l/cmoi- 

un  mintcau  blanc  a  la  minière  des  ermites.  res  enrnijr's   jmr  les  rr'ii;inix  de  tel  ordie  di 

Quclquelois,  quand  ils  vont  seuls  par  la  ville,  couvent'de  Sninle-Agallie  à  Home  en  1701). 

Ils  ont  un   mihteau   blanc  a   la  maîiière  de  Les    religieux    de    cel    ordre   a»aient,    X 

celui  des   ecclosiasliques,   avec  un  chapeau  lîonie  ,  le  monastère  de   Siin'e-Agathe  .les 

blancdouble   par  dessous  d'une  toile  noire  (joibs.  Nous  ne  voyous  j.as  qu'ils  ai.iit  au- 

jusqu  aux  bords,  l's  ont  pour  armes  d'or  à  j„urd'liui  de  maisons  dans  cette  ville, 

trois   luoiitagiies    de    sinoples  ,   surmoatées  H-n-E. 

d'une  croix  de  gui  ules,  eiiloiirce  par  le  haut  »in;>[vî"»vr    1^      -    r,.-             e  ■■ 

d'nn  cercle  de  mcn.e  couleur,  el  Jccosiée  de  ''^l^''i^î^>  J  •  '  oyez  Citiîaux.  §  M. 

ces  deux   lettres  M  cl  V.  L'Iiabiileiueiit  des  MOU  I' (Kuluks  du   la).  \  oyrz.    Paui.  (En- 

religieuses    consistait    aussi    en    une    robe  f'tn'i^s  dk  Saiint-J. 

blanche,  serrée  d  une  ceinture  de  (ur  blaiic,  MOUl'AKK.    loiyr:  Latuan,  §  IIL 

avec   uu   scapulairc  ;    uu    lio-e   eulorlillail  MUNSTKU-IJKLISK.  ro//c-  Nivi:i.i.l:. 


NAHBONNE   (Dks    Fhèhf.s    MiMcrns    niî  i.a  cette  rongrégniion  naissante  que  l'on  accusa 

CONCRKGATioN    DE)    tl  des  Sj)  it  tlnels .  de  suivre  ia  doctrine  1 1  1rs  eiTi'u  sdeTerre- 

Dès  l'an  1290,  quelques  religieux  de  l'ro-  Jean    Obie,     ■•ifin     de    l'éioulT.'r    dans   son 

veiicc  el  de   cette    partie  de  la  Fra"ce   que  commcucemi'iil  en  la  rcnlanl  sispeete  d'bé- 

l'oii  nommait  ancie.iiiemeni  Franci' Narbon-  résie. 

iiaise,  voulant  conserver  l'esprit  de  pauvre-  Ce  Pierie-,lcui  Olive  et  lil  un  religieux  de 

lé,   déclamèrent   fortement   contre  ceux  (]ni  l'ordre   de    la    province  do    l'rovcme   el   de 

étaient   tombés    dans  le   relàclicuienl  ;   mais  la  cusio  lie  du   Narboiine.   il   avait   loijours 

lorsipie  la  c  nigrégalion  des  Krmites  Cél(!s-  fait  professi  ui  d'une  grande  pauvrdé,  pour 

tins  eut  éé  supprimée,  comme    nous  avons  latiurlle  il  était  si  zélé,  q:c,  non  content  du 

dil,  et  (ju'uiie  partie  de  ceux  qui  en    étaient  la  pratiijuer,  il  1  éprenait  libroioenl  ceux  i|ui 

i'ul  cl;er(  lie  un  as;le  chez  ces  religieux  zélés  la  Iransgiessaieul,  dont  il  se  (it  par  cet   en- 

de   France,  iioii  contents  de   blâmer  cl   de  droit  auiaiit  il'cuncinis  ;  mais  coiuini'  la  ver- 

cond;ininer  une  conduite  si  contraire  à  l'es-  lu  ne  peut  s'attirer  la  haine  des  vicieux  sans 

prit  de  leur  saint   fondalcur,  se  trouvant  un  en  même    lemps  se  faire   aimer  cl   honorer 

nombre   suriisant  pour  composer  une  cou-  des  verlucux.  ce  sainl  religieux  eut  de  véri- 

grégatioa,  ils  en  conimcncércnt  une  qui  prit  tables  amis  qui    lui    fur. ni  .■itlicliés  par   les 

le  nom   de    Narboiine,    à    laquelle   s'unirent  liiMls  d'une  piété  solide  el  sincère,  el   qui  no 

.'iiis^i  certains  autres    religieux   zélés  de  la  servirent  pas  peu  à  le  consoler  dans  les  cba- 

pro»  iiicc  de  Toscane,  qui   prenaient  le   nom  grins  tiu'il  recul  dans  la  suite,  dml  le   pre- 

<le  F' rères  Spirituels.  Le  reste  de  l'ordre,   qui  iiiier  fut  r.iccusaliuii  qui  fui  faite   contre  lui 

formait  la  plus  grande  partie  cl  que  l'on  ap-  dans  le  cli  .p  tre  général  (ju:  se  tini  à   .Siias- 

pelail   l.i   coaimunaulc  ,    se   souleva   contre  bourg  l'an  IiS2,  de  blâmer  (■oiitiniielleiiieul 

(1)  yo'j.,3  la  fin  dii  T.d.,  n''»i'/7,278,  270ci280  (i)  Ver,.,  b  la  lin  dii  vol.,  n"»  2SI  et  !»82.' 


l.i  communauté,  ri  (i'nvoir  avancé  iilusioiirs  (iii(ii(]u'il  cûl  été  rcnvojé  ahsoiis  e!  déchré 
liérpsirs  dans  ses  ccrils  ;  le  cli.ipilre  ordonna  innoconl  par  ie  chapilrc  f,'oiiéral,  ils  cotili- 
(liic  le  général,  faisant  sa  visite  en  Franco,  nuèrcntà  causer  tant  de  divisioiis  el  de  schis- 
informeraitjuridiquomonlconire  la  conduite  mes  dans  sa  province,  que  sa  ddcirino,  ou 
de  ce  reli2;ieux  et  examinerait  ses  ccrils.  Kn  du  moins  celle  qu'ils  prclcndaienl  avoir  ap- 
effel,  le  général,  étant  en  France,  ordonna  prise  de  lui,  devint  oilieuse  à  toute  la  com- 
qu'on  lui  mît  <n  main  tous  les  écrits  de  munauié  de  l'ordre.  Enfin,  après  avoir  fait 
Pierro-Jcan  d'Olive,  qu'il  donna  à  examiner  encore  une  déilaraMon  publique  sur  ce  qu'il 
à  quatre  docteurs  et  à  trois  bacheliers  do  pensait  de  la  pauvreté  et  de  l'usage  des  clm- 
l'univetsilc  de  Paris,  Ions  religieux  de  l'or-  ses,  qui  était  conforme  à  celle  qu'il  avait 
dre,  qui  jugèrent,  soit  par  prévention  ou  par  faite  dans  le  chapitre  général  de  Paris,  il  mou- 
complaisance  ,  quelques-unes  des  proposi-  rut  dans  le  comenl  de  N.irbonne  l'an  1297. 
lions  que  d'Olive  avait  avancées,  comme  Dieu  voulut  faire  connaître  sa  sainielé  et 
daiigereusci  ,  et  d'autres  comme  j  cuvant  son  iunocence  par  les  miracles  qui  se  firent 
avoir  un  mauvais  sens  :  ce  qui  fit  qu'Olive,  à  son  tombeau  ;  mais  cela  nempccha  pas 
dont  les  intentions  étaient  droites  et  soumi-  que  les  nligieux  de  la  communauté  ne  le 
ses  à  l'Kglise,  se  rétracta  et  acquiesça  à  la  persécutassent  encore  après  sa  mort,  l'accu- 
censure  (jui  avait  été  faite  de  tes  ouvrages  ;  sant  d'hérésie  et  condamnant  sa  doctrine  : 
ce  qui  sans  doute  aurait  apaisé  toutes  clio-  ils  oMinrcnl  môme  du  général  Jean  di-  Muro 
ses,  si  quelques  religieux,  soit  par  zèle  in-  que  l'on  défendrait  aux  religieux  la  lecture 
discret,  soit  par  un  allacliemcnl  outré  à  sa  de  ses  ouvrages, et  que  ceux  qui  en  auraient 
personne,  n'avaient  obligé  par  leurs  plain-  seraient  obligés  de  les  metire  entre  les  mains 
les  réitérées  et  excessives  contre  les  Irans-  des  supérieurs.  C'est  ce  qui  fut  cause  de  la 
grcsseurs  de  la  pauvreté,  le  pape  NicoU'^  IV  persécution  que  l'on  suscita  contre  Ponce 
à  donner  ordre,  en  1290,  à  Raymond  Gau-  C  irbonelle  de  ISottingat,  personnage  illus- 
fredy,  pciur  lois  général,  d'imposer  silence  tre  par  sa  science  et  par  la  sainteté  de  sa 
et  nién;e  d'agir  contre  les  sectateurs  de  vie,  et  qui  avait  clé  le  tn.iîire  de  saint  Louis, 
Pierre-Jean  d'Olive,  comme  pnrturhateurs  de  évcqut' de  Toulouse;  car  sur  ce.qu'il  ne  voulut 
la  paix  par  leur  orgueil  qui  leur  faisait  nié-  pas  donner  quelques  traités  (lu'il  avait  de 
priser  et  blâmer  la  conduite  de  leurs  frères  Pierre-Jean  d  Olive,  qu'on  lui  demandait  poui- 
qu'ils  regardaient  comme  beaucoup  aa-des-  les  mettre  au  leu,  il  fut  mis  en  p'i>on  et 
sous  d'eux  dans  le  cîicniiît  de  la  perlection.  soufl'rit  beaucoup  de  maux  :  il  y  en  eut 
r,n  conséquence  do  cet  ordie,  il  y  en  eut  aussi  plusieurs  autres  qui  furent  ciiargos  de 
plusieurs  qui  furent  arrêtés  cl  envoyés  à  fers  et  enfermés  très-élroitemeut  p'iur  le 
iierlrand  de  Cigotére,  qui  exerçait  l'office  nicme  sujet  ;  ce  qui  causa  encore  des  divi- 
d'inquisitcur  dans  !e  comîat  Venaissin  :  il  sions  eidesschismesJans  d'autres  provinci  s, 
s'en  trouva  à  la  vérité  quebiues-uns  qui,  où  les  religieux,  sous  piélextc  de  rélortnir 
soit  par  enlétenieul,  soit  pour  se  distiiigu>'r  l'ordre,  se  disaient  sectateurs  et  disciples  de. 
des  autres  aux  dépens  de  la  foi  et  de  riio;i-  Pierre-Jean  Olive.  C'est  pourquoi  dans  le 
neur,  avalent  des  sentiments  dangereux  ;  chapitre  général  qui  se  tint  l'a.n  1;î02,  les 
mais  aussi  il  faut  avouer  que  le  plus  griiud  supérieurs,  voulant  remédier  à  ces  iroubb'S 
nombre  de  ces  piisonnitrs  n'étaient  coupa-  et  prévenir  les  suites  fàiheuses  qu'il;  pour- 
blcs  que  par  l'attachement  qu'ils  avaient  raient  apporter  dans  la  suili-,  dél'endir<'nt 
peut-être  eu  avecceux  qui,  sous  un  extérieur  sous  de  grosses  peines  la  lecture  des  om  ra- 
composé  et  zélés  en  apparence,  cachaient  grs  de  l'ierre-Jean  Olive,  et  celle  défense 
un  venin  dont  ceux-ci  ne  s'apercevaient  ])as,  dura  jisque  sous  le  pontificat  de  Sixte  iV , 
ne  (■acliant  pas  même  de  quoi  il  s'agissait,  et  qui,  les  ayae.t  f.iit  exaniner,  déclara  qu',! 
lie  se  défiant  aucunement  de  leur  malice  n'y  avait  rien  dans  ces  écrits  de  contraire  à 
qu'ils  couvraient  d'une  piété  feinte  et  d'un  la  foi  ni  aux  bonnes  i:i(cur>i. 
zèle  apparent  pour  la  régularité.  Cependant,  malgré  toutes  les  précautions 
Pierre-Jeau  Olive  s'élant  trouvé  au  chapi-  et  les  diligences  des  supérieurs,  la  discorde. 
Ire  général  qui  se  tint  à  Paris  l'an  12'J2,  on  qui  s'était  ainsi  glissée  dans  l'ordre,  éi  laia 
lui  demandace  qu'il  pensaitdel'usagedes  clio-  plus  ouvertement  l'an  1310.  Le  nombre  des 
ses  <iui  étaient  accordées  aux  Irères,  et  s'ils  religieux  de  la  communauté  de  l'ordre  était 
et  lent  tenus  à  l'étroit  et  pauvre  usage  de  ces  bien  plus  considérable  (juo  celui  des  Frères 
choses  :  il  reconnut  qu'ils  n'étaient  pas  Spirituels  ,  ou  sectateurs  de  Pierre-Jean 
tenus  à  un  plus  pauvre  usage  ni  à  une  autre  Olive,  et  ceux-ci,  manquant  de  force  et  d'au- 
manière  de  vie  qu'à  cel'e  ijui  élait  énoncée  torilé,  se  trouvaient  tous  1rs  jours  molestés 
dans  la  déclaration  que  le  pape  Nicolas  ill  par  les  autres  qui  les  voulaient  détruire,  ou 
avait  faite  sur  la  règli>,  et  que  la  communau'.é  obliger  de  s'unir  à  eux  ;  mais  les  Spirituels 
de  l'ordre  praticjua.l;  qu'il  n'avait  rien  dit  ni  aimèrent  mieux  endurer  des  traverses  cl  des 
écrit  qui  y  fût  contraire,  et  que  s'il  lui  était  persécutions  qucde  consentiràcette  réunion, 
échappé  quelque  chose  à  ce  sujet(ce  qu'il  ne  prétextant  (ju'il  ne  leur  était  pas  permis  do 
croyait  pas  ),  il  le  révoquait.  Le  chapitre  re-  s'agréger  à  des  personnes  qui  ne  voulaient 
eut  sa  protestation  (jui  semblait  devoir  apai-  pas  observer  la  règle,  et  péchaient  tous  les 
ser  toutes  choses.  Mais  il  y  eut  de  ses  sec  a-  jours  contre  la  pauvreté.  Comme  c'était  en 
leurs  qui,  au  lieu  d'imiter  sa  soumission  et  Provence  (lu'il  y  avait  le  plus  de  division  , 
sa  bonne  foi,  lui  firent  un  tort  considérable  Uaiuiond  de  ^'illeneuve,  Provençal  et  méde- 
liar  leur  culclcuieul  et  leur  imprudence  ;  car  ciu  de  Charles  le  Boilcux,  roi  de   Napics  cl 


1113                                         DICTIONNAIRE  DES  OUnUF.S  UEI.IGIF.LX.  1115 

romie   de   Provence,   poussée  par  l'alTeclion  C('ppn<lant   Gonzaive,   gcréml  ilc  IDnlrp, 

(jn'il  portnil  à  l'ordrn,  etnploya  le  crédit  de  ne  vo\niil  que  Irop  la  vorilé  des  |  lalnli-s  ijue 

son  maître  pour  prier  lo  pape  Clémeni  \'  de  faisaient   les  Spirituels,  el  voulanl  prévenir 

faire  assembler   les   priiieipaiix   el  les  plus  li  s  suiii's  fine  pourrait  avo'r  la  CDiiiiaissanee 

7.1  lésdeciiaiiue  parti,  afin  de  trouver  (juelque  qu'ils  dduiiaicnl  des  désordres  de    la   coni- 

nniédc  à  ces  désordres.   Le  pape  acquiesça  mun'uîc,  indiqua,  la  nièmc  année  13îi>,  un 

à  la  demande  de  ce  prince,  el  l'assenib  ce  fui  chapitre   général  à  l'adoue,  dans  lequel   ou 

iii'liquée  à  Malausanni-,  dans  le  comlal  d'A-  fil  plusieurs   rè'^lcinents  KUilre  les   relàche- 

<ignon,  où  se  trouvèrent,  du  côté  des  Spiri-  nicnls  (jui  s'élaienl  introduits,  pai  ticulièri-- 

ti:els.  Uaiinond  (îaufredy,  qui  avait  été  gêné-  ment  pour  la  réception  de  l'ar^eisl,  pour  la 

rai  ;  Ul  ertin  de  Casai,  ïlaimond  de  Giniac,  trop  grande  cur^o  ilé  des  bàlinienis,  el  pour 

pnivineial  d'Aragon  ;  Guillaume  de  Corné-  l'usage  de  la  vian  le,  qu'on  déteriniiia  au  dî- 

iion,  custode  d'Arles,  et  quelques  autres  ;  et  ncr  seulement.  .Mais  pendant  que  le  chapitre, 

pour  la  eoinmunaulc  de  l'ordre,  Gon/alve,  se  tenait  à  Padoue,  et   (jue  les   conférences 

qui  en  cl.iil  général  ;  Alexandre  d'Aîexan-  continuaient  à   Avignon,   les   Frères   ï^piri- 

drje,  qui  l'a  été  depuis,  el  plusieurs  autres,  lueis,  dont  la  plus  grande  partie   étaient  ea 

L'on  tint  devant  le  pape  plusieurs  confc-  Provence  et  m  Toscane,  étaient  fort  nial- 
rences  à  ce  sujet,  dans  lesquelles  chacun  trailés.  Les  Provençaux  se  pouvaient  plus 
avait  la  liberté  de  défendre  sa  cause.  Uai-  aisément  défendre  de  celle  persécution  quo 
niond  G.iulredy  el  Uhorlin  de  Casil  se  plai-  les  Toscans,  parce  qu'ils  étaient  près  du 
giiaicnt  des  transgressions  évidentes  de  la  pape  :  le  qui  lit  que  Ks  Toscans,  voy.inl  quo 
pauvreté,  qui  étaient  tolérées  par  les  supé-  i'ordonnancc  que  ce  pontif,"  avait  donnée  en 
rieurs,  qui  n'en  faisaient  aucune'corredion.  leur  faveur  ne  les  mettait  pas  à  couvert  des 
Alexandre  d'.Mexandrie,  qni  pari  lil  pour  la  insultes  de  leurs  adversaires,  se  séparèrent 
comnjuiiaulé  de  l'ordre,  disait  que  ceux  qui  de  l'ordre  el  élurent  un  général,  qu'ils  vou- 
prenaient  le  nom  de  Siiirituels  étaient  des  lurent  faire  confirmer  par  le  pajie  ;  mais  leur 
noialeurs,  qui  voulaient  se  distinguer  des  entreprise  fut  regardée  comme  un  ailental 
aulres.  el  qui  suivaient  la  doclrine  de  Pierre-  qu'on  ne  devait  poini  souffrir,  et  qui  doi.nait 
Jean  (Mive,  qu'il  prétendait  avoir  donné  lieu  lieu  par  sa  témciilé  de  croire  ou  au  moins 
à  tous  ces  troubles.  Ils  alléguèrent  plusieurs  de  douter  que  les  crimes  donl  on  les  aecu- 
preuves  jjour  appuyer  ce  qu'ils  avaient  sait  étairiu  véritables,  ce  qui  fut  cause  que 
avancé  ;  mais  ces  conférences  ne  servirent  de  ceux  qui  les  protégeaient  les  abandonnèrent, 
rien,  car  les  choses  parurent  si  brouillées.  Le  général  de  l'ordre  voulant  profi  er  de 
que  le  pape  ordonna  que  les  deux  partis  cette  occasion  pour  m.iinlenir  la  cauve  de  la 
iiiittraient  11  urs  raisons  par  écril,el  nomma  communauté,  fil  la  visite  de  la  province  de 
six  commissaires  puur  examiner  les  prélen-  Toscane,  et  employa  toute  son  autorité  pour 
lions  des  uns  et  des  autres;  el  parce  que  les  réduire  à  l'obéissance  et  à  l'exacte  prali- 
les  frères  qui  se  disaient  de  la  communauté  que  de  cette  p  luvrelé,  dont  les  transgres- 
avaicnt  fort  maltraité  les  Spirituels,  et  qu'ils  sions  leur  étaient  si  sensibles  et  si  insiipiior- 
les  menaçaient  encore  ,  le  pape  les  prit  sous  tables  dans  les  reli,;ieux  da  la  communauté  : 
sa  protection,  exempla  de  la  juridiction  des  c'est  pourquoi  il  écrivit  une  lettre  au  pro- 
supérieurs tous  ceux  qui  avaient  été  appelés  vinci.il,  avec  ordre  de  la  faire  lire  dans  tous 
pour  déf.ndre  cette  cause,  tandis  qu'elle  du-  les  couvents,  par  laquelle  il  lui  commandait 
rerail,  et  délendit  sous  peine  d'excommuni-  de  désappropi  ier  les  religieux  de  toues  les 
caiion  de  leur  faire  aucune  peine,  ni  à  au-  rentes,  vignes,  possessiims,  et  aulres  choses 
cun  autre  de  leur  parli.  «lui  pouvaient  av  dr  été  introduites  contre  la 

Ces  Frères  Spirituels,  après  avoir  consulté  pauvreté,   avec  défense  d'eu  recevoir  à  l'a- 

cnsemble,    composèrent,    conformément    à  venir. 

l'ordre  du  pape,  une  requête  dans  laquelle  Quoique  les  Pères  Spirituels  fussent  beau- 
ils  citaient  toutes  les  transgressions  qui  se  coup  déchus  de  l'estime  que  l'on  avait  pour 
conimctiaicnt  contre  la  règle,  el  la  iirèsentè-  eux,  et  nonobstant  l'avantage  qoe  le  gi'iié- 
renl  à  ce  iiontil'e,  qui  l'envoya  au  cardinal  rai  de  l'ordre  lirait  de  ce  qu'ils  élaiint  aban- 
prolecteur  el  au  iiénèral,  afin  qu'ils  en  pris-  donnés  de  ceux  qui  les  avaient  protégés 
sent  une  cojiie.  L'b'rliii  de  Casai,  qui  était  avant  l'éleelion  inconsidérée  qu'ils  firent 
plus  piqué  que  les  autres  dans  celte  aflaire,  d'un  général  de  leur  corps,  cepend,int  les  af- 
parce  c|u'on  lui  avait  objecté  plusieurs  cri-  faires  n'en  étaient  pas  plus  avancées,  et 
mes,  fit  un  traité  sous  le  nom  de  Ïlaimond  restèrent  toujours  indécises  jusipi'à  l'an- 
(laufredy,  où  il  expliquait  plus  clairement  née  1312,  ([u'elant  rapportées  et  examinées 
*ingl-cini)  Iransgressionsdes  préceptes  de  la  dans  le  concile  général  de  Vienne,  elles 
règ  e,  et  dix  qui  étaienl  contre  la  déclara-  commencèrent  à  changer  de  face  par  les  dé- 
lion  de  Nicolas  III.  Le  général  el  ses  adhé-  cisions  de  ce  concile,  qui  lurent  en  faveur  de 
rcnts  répondirent  à  ces  deux  écrits,  (|u'ils  1;"  communauté;  car  le  pape  ayant  tenu  un 
regardaient  comme  injurieux  à  l'ordre,  consistoire  secrel  le  5  mai.  l'on  y  décréta 
Lber  in  de  Casai  lit  bientôt  après  une  repli-  contre  l'beitin  de  Casai  et  ses  adhérciils, 
(pic  à  cette  ^cpon^e,  sur  laquelle  les  autres  que  la  manière  de  vie  de  la  communauté  de 
ne  demeurèrent  pas  dans  le  silence;  en  sorte  l'ordre  était  permise  et  sulfisaiite  pmir  la 
que  deux  ans  s'ecoulérml  dans  ces  contesta-  vraie;  observance  de  la  règle;  cl  le  lendemain 
lions,  sans  cjuc  les  affaires  en  lussent  en  ce  pontife  fil  publier  dan>  la  Iroisième  ses- 
(uuillcur  étui.  sio.i  du  coiuilc  une    bulle  par  laquelle  il  du- 


Il  17                                    NAR  NAR                                   1H8 

clur.T,  (Milre  autres  choses, qi!e  Ic's  Frrros  Mi-  qui  ciaiirnail  qu'im    ne  lui    fil  l'f   la  poiiu', 

nciirs  par  lur  profession  no   sont    pas  plus  parée  (m'il  avait  jîri-i  le  parti  des  Spirituels 

obliges  aux  ptéeeptes   île  rKvanjjilc  que  les  avec  plus  de  chaleur  que  les  autres,  ayanl 

autres  chieticns  :  il  y  marqua  les  endroits  de  enlciidu  celle  décision  du  souverain  pontife, 

la  rèj{le   qui  olili^ent  ;    il  défendit  de  quêter  s'écria:  Père  saint,  sauvez-moi  selon  voire 

de  l'argent,  d'avoir  rerouis  à  des  amis  spi-  parole;  et  afin  de  se  le  rendre  favorahle,  el 

rilucls  (jour  rn  recevdir,  hors  les  cas  portés  qu'il  lui  accordât  sa  protection,  il  lui  repré- 

parla  règle  ou  la  déclaration  de  Nicolas  III,  serita  qu'il   était  venu  par  ses   ordres,   qu'il 

do  mettre  des  ironcs  d  ins  les  églises,  et  dé-  avait  bcaucouji  souff?rl  de  la  part  de  ses  en- 

clara  que   les  Frères  Mineurs   ne    pouvaient  iKinis,  qu'il  savait  que  la  persécution  aiig- 

pas  hériter.    11  déffiidil   aussi  les  celliers  el  menferail,  s'il    le  livrail  entre  leurs  mains; 

greniers  dans  les  couvents,  où  le<  aumônes  et  qu'ainsi  il   lui   deiiaandait   la  permission 

suffisairnl  pour  l'enlreiien  des  religieux  ;  en-  pour   lui  cl    pour   les  religieux   zélés   pour 

fin  il  résolut  et  termina   la   principale  diffi-  l'observance,  de  se  séparer  d'eux,  afin  d'ob- 

cullé  dont   il  s'agissait,  en  déclarant  que  les  server  plus  commodément  el  sans  être  in- 

religieux,  en  vertu  de  la   rèt;le,  sont  obligés  quiétés  la  règle,  selon  les  déclarations  qu'il 

à  de  (laiivrcs  usages  qiii  sont  conter.us  dans  y  venait  de  faire.  Mais  le  i)ape  lui  refusa  sa 

ce  le  règle,  selon  la  manière  qui  y  est  près-  demande  :  ce  qi:i  acheva  de  déconcerter  les 

crile.  Spirituels,  dont  quelques-uns    relournèrei.t 

(JuanI  à  la  doc'rine  de  Pierre-Jean  0  ivc,  à  l'obéissance  des   supérieurs,  et  les  autres 

sur  b-Kiiulle  il  y  avait  de   grandes  disputes,  se  retirèrent  en  différentes  pro>inces  pour  y 

il  fut  résolu  que  le  pape  censurerait  trois  de  vivre  dans  l'indépendance.  Mais  les  ccn-^u- 

ses  propositions  :  la  première,  que  l'essence  res  que  le  pape  fulmina  con!re  eux  les  firent 

divine   engendre    et    est  engendrée;    la   se-  revenir  à  l'union  de  l'oidre,  et  ils  reconnu- 

condc,   que  l'àinc  de  l'homme,  comme  rai-  rent  leur    faute.    Uberlin    de   Casai    obtint 

sonn.iblc,   n'est  l'as  la  forme  de  son  corps  ;  néanmoins  dans  la  suiiedu  pape  Jean  XXII, 

el  la  troisième,   que  Jésus-Chrisl    reçut  le  l'an  1317,  la  permission  de  passer  dans  l'or- 

coup  de  lance  avant   qu'il  fût  moit  ;  el  p  >ur  drc  de  Saint-Benoît,  donl  il  prit  l'habit  dans 

le  resl<",  l'on  en  remit  l'examen  au  ch:ii)itre  l'abbaye  de  Gcmblours  en  îir;ibant. 

général,   a\cc   pouvoir   d'en    oidonner   ce  A|)rès  la  nvirt  de  Glémenl  V  cl  du  génér.il 

qu'il  j;:gerait  <à  propos.  Les  défenseurs  d'O-  Alexandre  d'Alexandrie,  la  vaeancedu  sainl- 

li\e,  (lui  par  ces  déeisions  se  voyaient  frus-  siège  el  du  généralat  de  l'ordre  donna  lieu 

1res  de  iciirs  espérances,  cherctiai.l  à  cou-  aux  Frères  Spirituels  de  reprendre  leur  prc- 

vrir     ladhérence    el    raltacheinenl    qu'ils  mier  dessein   de  se  séparer  de  la  conimu- 

avaenl  j  o;;r  les  sentiments   de  cet  auteur  naulé  de  l'ordre.  Pour  l'exécu'.er,   ils  s'as- 

sous   un  spécieux  prétexte  de  charité  et  de  semblèrent  au  ncnibre  de  six-\  ingts  dans  la 

justice,   se  ]ilaignireiit  de  ce  qu'on  trailiit  Provence  et  le  Languedoc,    et  avec  le  se- 

avec  trop  de  sévérité  un  homme  qui  s'était  cours  de  plusieurs   séculiers,  ils   s'empaiè- 

loujours  soumis  à  la   correcliftn  de  l'Eglise,  reni  par  force  des  couvents  de  Narbonne  et 

ci  disaient  que  si  quelque   point   de  sa  doc-  de  îiéziers,  élablireni  un  custode  et  des  gar- 

Irine  niérit.iit  la  censure,  il  n'était  pas  juste  diens,  changèrent  la  forme  de  leurs  habits, 

d'en  commettre  le  jugement  des  autre-  aux  et  reçurent   indilTéremment  ceux  des  autres 

supérieurs  de  l'ordre,  qui  s'étaient  déclarés  provinces  qui  se  voulurent  joindre   à  eux. 

ses   parties,   et  qui  l'av^iient  pcisécuié  du-  Les  habilanis  de  Narbonne  cl  de  Béziers  les 

ranl  sa  vie  el  après  sa  mort,  cl  que  pour  sept  appuyaient,  les  regardant  tomme  les  disci- 

cu  huit  articles  que  l'on  n'approuvait  pas,  pies  de  Pierre-Jean  Olive,  qui  avait  été  no- 

il  était  bien  dur  et  extraordinaire  que  l'on  vice  à  Béziers,  el  était  mort  à  Narbonne,  où 

condamnai  tous  les  autres,  puisqu'il  s'était  l'on  dit  qu'il  faisait  alors  beaucoup   de  mi- 

Irouvé   de    célèbres   auteurs    qui,    s'ct.uil  racles;  et  ceux  de  la  province  de  Toscine  se 

trompés  en  quelques  choses,  n'avaient  pont  retirèrent  en  Sicile.  Mais  le  général   Michel 

été  condamnés  dans    tous   leurs  ouvrages,  de  Césène,  qui  ne  fut  élu  que  dans  le  chapi- 

Mais   les   advers:  ires  d'Olive  l'emportèrent  ire  général   cui  se   lint  à  Naples  le  dernier 

sur  ses  défenseurs,  et  empêchèi  eut  qu'on  ne  jour  de  mai  131G,  quoique  son  prédécesseur 

changeât   rien  de   ce   qui  avaii   été    résolu.  Alexanare  d'Alexandrie  fût  mort  dès  le  mois 

Bzovius  atiribue   encore  d'autres  hérésies  à  d'octobre  131!p,   pria   le  pipe  Jean  XXII  de 

ce  religieux,  mais  sans  aucun  fondement.  faire  rentrer  dans  l'union   de  l'ordre  ces  re- 

Lc  pape,  qui  ne  cherchait  (lue  la  paix  el  ligieux  qui   s'en    étaient   ainsi   séparés.  Ce 

l'union,  ne  se  contenta   pas  de  faire  ces  rè-  pontife  écrivit  à  Fridéric,  roi  de  Sii  ile,  pour 

glemenls,  ci  de  recommander  à  tous  les  su-  remettre    entre   les    mains    des    supérieurs 

pér  leurs  de  l'ordre  de  f.iire  observer  exacte-  ceux    qui   étaient  dans  ses   Etals,   qui   n'a- 

nienl  la  règle,  selon  la  déelaralion  qu'il  lei;r  vaieat    pas   voulu    se  soumettre   à   l'ordon- 

avail  donnée;  il  leurordonna  de  plus  de  Irai-  nance  de   son    prédécesseur  Clément  V  ;  et 

1er  avec  un  esprit  de  charité  et  sans  aucune  pour    ceux   de    Languedoc,  il   leur  envoya 

distinction  les  religieux  qui  avaient  été  sous-  Bertrand  de  la  Tour,  provincial  de  Ijuienne, 

Iraits  de  leur  juridiction  pendant  ces  dispu-  afin  qu'il   tâchât  de  les  ramener  à  leur  de- 

les,  et   même    de   Its   élever   a^JX    charges  voir  par  les    voies  de  la  douceur;  mais  ce 

conune  les  autres,  et  à  ceux-ci  de  se  sou-  moyen  ayaul  été   inutile,  Bertrand  leur  si- 

inettre  à  l'obéissance,  et  de  s'unir  à  l'ordre  gnifia  de   la  part   du  pape  qu'ils  eussent  à 

dans  un  esprit  de  paix.  L'bertiu  d  •  Ca^al,  'luitlcr  leurs  babils  courts  et  étroits,   avec 


1K9                                         DICTIONNAIKK  DES  ORDRES  RELIGIEUX.                                         1120 

leurs  pctilc  rapuces  :  ils  r('poii(lircnl  que  ce  jamais  r6us>;ir  dans  leurs  prrlenlioiis,  fil  une 
f|u'il  (Icmand.iil  clail  une  di-s  cliosos  ;iux-  iioim'llc  déiiaralion  qui  se  trouve  parmi  ses 
Hueilcs  ils  m-  devaient  pas  ol-.éir,  puisque  i:\lrava^anles.  De  verl>,^rnm  si<inip:(iiinnp, 
l"liabit  qu'i's  a\aienl  pris  élail  confo:  me  à  où,  après  avor  approuvé  celle,  de  Nico- 
l'cspril  de  saiiil  rr.inçois  et  à  sa  rèf-le,  el  las  )ll  cl  de  Clément  V,  il  ordonna  à  tous  les 
iju'ils  ne  croyaient  pas  airir  en  cela  coulre  r<'lipieu\  de  se  souineilre  pour  ces  deux  ar- 
ia déclaration  de  Cléuieiit  V.  Mais  Bertrand  tii  les  au  jugemen'  de  leur^  supérieurs. 
ji^rsislMUl  à  dire  que  le  pnpe  a>ail  alisolu-  Le  p.ipc  ayant  donc  olili<;c  les  Frères  Spi- 
inenl  desapprouvé  cet  liahillement,  el  qu'il  rituels  de  se  réui.ir  à  l'ordre,  cl  ordonné  A 
avait  ordonné  qu'à  l'é'aril  de  la  qualité  et  la  Michel  de  Monaco,  inquisileur.  défaire  le 
forme  di  s  habits  les  reli^'ieux  devaient  obéir  procès  à  ceux  qui  rcfu<eraieni  d'obéir,  ceux 
à  leurs  supérieurs,  et  leur  ayant  signifié  le  qui  jjurenl  écliapper  à  la  reiherclic  qu'on 
c  mmiandemenl  (|uc  leur  faisait  ce  pontife  (le  eu  fil,  s'enfuirent  en  Sicde,  pour  se  joindre 
se  réunir  à  l'ordre  el  se  soumettre  à  leurs  à  quelques-uns  de  leurs  compagnons  qui  s'y 
supérieurs  ,  ils  eu  appelèrent  au  pape  étaient  retirés  auparavant;  et  persistant  à 
futur.  ne  vouloir  point  reconnaîlie  les  supérieurs 

Jean  XXII,  en  ayant  été  av.-rli,  ordonna  de  l'ordre,  ils  élurent  ponr  cénéral  Henri  de 
aux  ofliciaux  de  Téziers  cl  de  Narb  )nne  de  Ceva.  delà  province  de  fiéncs  qu'ils  crû- 
tes ciler  juridiquement  à  comparaître  en  sa  renl  le  plus  propre  pour  les  soutenir  dans 
présence  dix  jour-,  après  la  sip;nificaliou  qui  leur  rébellion.  Celle  témérité  irrita  leurs 
leur  en  aurait  été  faite,  il  fallut  obéir  à  un  parties  et  les  juges  :  on  ne  se  coTilcnla  pas 
<^rdre  si  précis.  Quarante  six  sorlirenl  du  de  les  piuirsuivre  cumme  désobéissants,  on 
couvent  de  Narbounc,  et  seize  de  celui  de  leur  imputa  encore  des  hérésies,  et  des  vingt- 
[iéziers.  Il  y  en  cul  encore  d'autres  qui  S2  cinq  Sjiiriiuels  qui  avaient  été  arrêtés  à 
j'iii^nirenl  à  eux,  cl  étant  .irrivés  un  peu  Aviu'non,  il  y  en  (  ut  quatre  qui  furent  brû- 
lard  à  ANigno ',  au  lieu  d  aller  au  couvent,  lés  à  Marseille  comme  hérè;iques,  pour 
i  s  passèrent  la  nuit  à  la  porte  du  palais  du  avoir  toujours  soutenu  <iue  les  préc  pies  de 
p;ip<'.  Le  lendemain  ils  furent  inlroiiuits  à  la  règle  étaient  indispensables.  Un  rin- 
iaudienee,  el  écoulés  fort  patiemment  par  le  quième  se  reconnut  et  fut  c  n  amné  .à  uno 
pontife,  qui,  a\ant  jugé  leurs  raisons  frivo-  prison  perpétuelle,  cl  les  autics  vin;;l  désa- 
les,  leur  eomm.inda  de  se  siiumeltrc  à  leurs  vouèrent  pulliquement  ce  (ju'ils  avaient 
su|)éricurs  ;  cl  si:r  ce  qu'ils  refusèrent  de  le  avancé.  Kn'in,  par  une  bulle  du  2'}  jan- 
fiiic,  Sa  Sainteté  les  fil  arîêler,  et  donna  vicr  l.'ilH,  le  pape  cond.imna  les  Spirituels 
commission  de  vive  voix  seulement  à  Mi-  comme  scandaleux,  apostats,  schisma  iques 
chel  de  Mo:ia;o.  religieux  de  l'ordre  et  in-  et  hérétiques,  et  les  supérieurs  de  l'ordre  re- 
q/isiteur  de  la  foi,  de  proiéder  contre  eux,  prirent  encore  l'examen  de  la  do  Irine  ilo 
comme  ctinl  suspects  d'hérésie  cl  rebelles  rierre-.Iean  Olive,  cl  la  firent  condamner  en 
à   l'i-lg'ise.   Quelques-uns   rcronnurenl  leur  plusieurs  chefs. 

faute  ;  mais  il  y  en  eut  vingt-cinq  qui  pcr  é.  f  „,.  Wadini;.,  .l»u)a/.  ;Ui»o,-.,  tom.II  el  III. 

vererenl  dans   leur    opinialreie     soutenant  Dominic.  de  Gubernatis,  Or/).  .S>ra»/,iV.,  lom. 

que  le  p  .pc  oITensa  l  Dieu  |  ar  le  comman-  j^  |,,,^  ^^  „p_  (;    j,.,rc  de  Lisbonr.c.  Chronij. 

.leineni  qu  il  leur  laisait.  Ils  ajoul;iicnl  que  ^j,  l'g,.^,.,  ^^  Sainl-Frauçois,  lom.  il. 
Cieinenl  V  s  ciait  trompe  dans  sa  decl.iration 

au  sujet  de  la  furoie  des  habits,  des  celliers  NAVlî'.E  ou  NEF.  Voijrz  Ciioi.saxt  (Ciie- 

cl  des  greniers  qu'il  avait  permis  dans  quel-  VAi.iiius  du). 
iincs  coiivcnis  ;  (jne  ceux  qui  vivaient  selon 

«elle  déclaration  se  damnaient  ;  eue  la  règle  NESTOP.IENS  (Des  Moïses). 
de  s.iiiit    Fran  oi^  n  élail  pas   dinérenîe  de 

rtîvangile,  el  (pie  le  pa|)e  ne  pouvait  dispcn-  Les  Nesloriens   sont    les  peuples  d'Orienl 

scr  personne  des  obi  galions  ((u'clle  conte-  qui  suivent   encore  aujourd'hui   les  erreurs 

ii.iil.  Le  p.ipe  élai  l  informe  de  ces  e\trava-  (le  Neslorius,  éu'qiic  de  Constanliuople,   qui 

gances  ,    fit    expédier    une    cotnniission    en  (ul  i  ond.imné  dans  le   (oncilo   d'Fpliése.  Do 

forme   à  l'inquisiteur,  |;our  procéder  contre  toutes    les  héré-ies,   c'est   celle   (lui    s'est  le 

eux  comme  hérétiques.  plus  étendue;    car  non-seulement    les  chrc- 

Les   deux    grands   points   de  ce  différend  tiens  (|  .i   habitaient   la    Mésopotamie,  et  un 

consistaient  ij.ms  la  forme  derii.ibii,  eldaus  irès-grand  nombre  d-  ceux  qui  demeuraicnl 

les  pr<)\  is;ons   de  blé   cl  devin;  les    Frères  au  dee.à   de   l'iùiplirale,   en   fuient   inferlés, 

Spiiiluels  préteudaienl  que  ceux  qui  se  di-  mais  elle  se  répandit  au   delà   du  Tigre,   et 

«aient  de  la   communauté  ne  pouvaient  p,:s  même   juqu'aux    Indes  cl   aux    cxtrém  tés 

perler  des    habits  amples   et  longs,   cl   de  de  l'Asie.  Plusieurs  auteurs  ont  écrit  ((ue  les 

lionnes  étoffes,  avec  de  grands  capiu  es,  mais  Nesloriens  sonl  gouvernés  par  deex  patriar- 

K'uleoieiit  d(!  pauvres  habits  cour  ts  el  étroits,  chcs,  dont  l'un  est  le  chef  des  Cb.ildéens  as- 

a^cc  de  petits  capuces  ;  Cl  blâmaient  les  pro-  syriens  oriintaux,   et    l'aulre  de   ceux   (|ue 

visions   de    blé   el  de    vin,  qu-   ceux   de  la  l'on    nomme   absolument    Nesloriens.    Mais 

communauté    l'ais;iient   aussi  dans  le  lem|is  M.  Itenaudul,  dans  sou  (]u;ilrième   tome   de 

de  11  m  lisson  cl  des  vendanges,  (|uoi(|u"elles  \i\  l'ctj)i'tuilv  de  ht  fui.    faii    reman|iier  que 

ne  provinssent  (juc   d'auMK'ines.  C  esl  pour-  l'on  ne  doil  point  ajouter  loi  à  ces   auUiirs, 

quoi  le  pape,  afin  de  leik  humilier  davaniage,  il  (|u'il  n'est  pas  viai   «nie    le    patriarcal  ait 

ij  leur  ùler  loul  suji.'l  d'espérer  de  pouvoir  été    divisé,    parce    (luî   les  pilriarchcs  lies 


H2I  NKS 

Ncsloriens  ont  résidé  tantôt  à  Mosul,  tantôt 
à  Diaibékir. 

Mais  quoiqu'ils  aient  ilpnicuré  qiiel(juc- 
fiiis  à  D  arbéLir,  leur  séjuisr  ordinaire  e.sl 
néanmoins  ;iu  inonas  ère,  d'IFoinioz,  éloijjnj 
de  ia  ville  lie  Mosi'.l  d\-iiviron  Irois  lieue>  : 
c'esi  ce  que  j'ai  appris  du  patriarche  Mar- 
Jiiscph,  ('(lie  j'ai  vu  élant  à  Uoine  en  1098. 
Ce  préial  état  autrefois  1  ■  plus  grand  enne- 
mi ijiie  1'  s  calhoiique^  eussent  en  ces  (]uar- 
tiers.  M>is  Dieu  l'ajanl  iouclié,  il  vint  à 
Rouie  pour  se  faire  instruire  et  s'éclaircir 
sur  quelques  diflîculxs  i;u'il  avait.  On  lui 
(il  uiie  mauvaise  réceplion,  sur  ce  que  l'on 
«royail  sa  conveisi:  n  feinte  et  dissimulée, 
et  on  le  regarda  con;ine  un  espion  ,  ce  qui 
ne  ic  lebula  [.(.inl.  11  reconnut  cniiôrenicnt 
ses  erreurs,  et  étant  retourné  en  son  pays, 
il  lcmuiyn;i  plus  de  zèle  pour  la  dclcni^e  de 
la  relig  on  catholique  qu'il  n'en  avait  fait 
paiaiire  pour  la  coniballre.  La  cour  de  Uonie 
en  ayant  clé  avertie  parles  riiissio:  naires, 
lui  fil  f  ire  excuse  du  mauvais  accueil  qu'on 
lui  avait  fait.  Le  pape  lui  envoya  le  pullium, 
rt  la  proiiaiji^ndn  f^de  lui  assigna  une  pcnsi  ii 
de  cinq  ccnis  é  us.  Les  amt)assadeurs  des 
princes  ca.hoHques  employèrent  leur  crédit 
pour  le  l'aire  cunfiruier  palriarclic  pai-  un 
coinm;  ndi  ment  exprès  liu  Grand  Seiyn;'ur; 
mais  dans  la  suite  ses  travaux  el  ses  taii^çues 
lui  ayant  afi'iiiili  la  vue,  il  Ct  élire  en  sa 
place,  pour  p  ilri.uciie,  un  jeune  homme  très- 
calholique  ei  très-savant,  qui  s'appelle  aussi 
Mar-Joscpli,  et  qui  s'eni|jloye  tous  les  jours 
avec  beaucoup  de  suc  es  à  la  conversion  de 
celle  naimn.  L'ancien  palriarclie  Mar-Jo- 
6Cj)h  revint  à  Uome,  où  il  est  moi  t  depuis 
quelque  temps,  après  avoir  demeuré  [ihi- 
sii  urs  années  i!ans  celle  ville.  H  a^ail  un 
neveu  prèire  à  Paris,  qui  y  est  morl,  après 
y  avoir  demeuré  pendant  près  de  viagt  an- 
nées. H  se  nummail  M.  Dominique  oa  AbJe- 
lahad.  C'est  de  lui  que  j'ai  api  ris  les  parti- 
cularités suivantes,  pour  ce  qui  concerne  les 
Rloincs  Ni-sioriens. 

Ces  reli;;ieux  se  disent  tous  de  l'oid.e  de 
Saint-Antoine,  quoiqu'ils  n'en  suivent  pas 
la  règle,  non  plus  que  les  Maroaiies,  les  Ar- 
méniens, Il  s  Copies  cl  les  autres  doni  nous 
avons  déjà  parlé,  n'ayant  pour  rè^le  que 
certaines  observances  communes  |)our  tous 
les  monaslères,  où  elles  sont  lorl  mai  gar- 
dées, n'y  ayant  dans  la  plupart  de  ces  mo- 
naslères que  fort  peu  de  subordination,  à 
cause  ((ue  les  su  éi  leurs  n'osent  repicndre 
les  religieux  ni  les  cliâlier,  dans  l'appiclien- 
sion  qu'ils  ont  qu'ils  ne  se  fassent  mahomè- 
tans. 

Les  monastères  de  ces  religieux  Ncslo- 
riens sont  en  assez  grand  nombre;  mais  la 
plupart  abandonnés,  pi  incipalemenl  ceux 
qui  sont  le  Ion;;  du  Tigre,  et  il  y  a  fort  peu 
de  relip,ieux  dans  les  autres,  excepté  dans 
celui  d'Hormoz,  qui  est  le  plus  cunsi  iérable, 
d.ins  lequel  il  y  a  environ  cinquanle  reli- 
j;ieux.  Ce  monastère,  qui,  lomme  nous  avoiis 
itil,  est   le    séjour   oniin.iire  du    j  atriarche, 


NES 


1 122 


tire  son  nom  d'Horsmisdas,  l'un  des  saints 
des  Nesloriens.  11  y  a  quelques  autres  mo- 
naslères en  Perse,  donl  le  plus  considérable 
est  proche  de  Tauris.  Il  y  en  a  aussi  dans  le 
pays  de  Karie,  sous  la  domination  des  lurcs, 
dans  lesquels  il  n'y  a  qu'un  ou  deux,  reli- 
gii'ux. 

l'armi  tous  ces  couvents  il  s'en  trouve  en- 
viron une  vingtaine  qui  sont  douilles  pour 
les  religieux  et  les  religieuses,  sépares  néan- 
moins d'habitation,  mais  dont  l'église  <  si 
commune  pour  les  uns  et  les  autres.  Ce  sont 
Tes  religieuses  qui  nourrissent  les  Moines. 
Ils  se  lèvent  à  minuit  pour  réciler  leur  of- 
fice, ct  font  la  prière  le  soir  et  le  matin.  Fen- 
dant le  jour,  ils  vont  travailler  a  la  cam- 
pagne, et  les  religieuses  liur  apprêtent  ■) 
manger  pour  leur  retour.  M.  Abdel.ihad  m'a 
aussi  assuré  qu'il  se  trouve  parmi  les  Nes- 
toriens  des  religieux  de  l'ordre  (l'on  saint 
ermite  qui  élat  n;itif  de  Mésopotami',  dont 
les  couvents  on:  été  ruinés  par  les  Turcs; 
c'est  pourquoi  ils  demeurent  avec  ceux  di; 
l'ordre  de  Saint-AniOine,  (jui  ont  pres(juo 
les  mêmes  observances,  n'y  ayant  de  la  dif- 
férence que  dans  leur  o:Gce,  ceux  de  l'ordre 
de  ce  Siint  crm  te,  dont  il  ne  m'a  pu  dire  le 
nom,  récilant  plus  de  ps  lumes  que  les  au- 
tres. 11  y  en  a  d'autres  léanmoies  qui  m'ont 
aussi  assuré  que  parmi  les  Ncsloriens  il  n'y 
a  qu  ■  des  religieux  de  l'ordre  de  Saint-An- 
lo  ne. 

Quoi  qu'il  en  soit,  tant  les  religieux  Nes- 
loncns  que  les  religieuses,  ils  ne  mangent  ja- 
tn  lis  de  viande,  ni  beurre,  ni  lainage  in  tout 
temps,  et  pendant  leurs  carêmes  ils  ne  man- 
geai poinl  de  poisson  el  ne  boivent  point  de 
vin  ;  ce  qui  li'ur  est  commun  avec  tous  lis 
séculiers  de  cetie  secte,  (jui  jeûnenl  aussi 
tous  les  mercredis  el  les  vendredis  de  l'an- 
née. Ces  carêmes  sont  au  nombre  de  six,  sa- 
vo  r  :1e  grand  carême  de  l'Eglise  univer  elle, 
([u'ils  commencent  le  lundi  d'après  le  di- 
maneho  de  la  Quinqua^csime,  ct  pendant 
le(juel  lis  ne  mangent  qu'au  soleil  i  ouchani  ; 
Cilui  des  Apôtres,  qui  commence  quin/>; 
jours  avant  la  fête  de  saint  i'iene;  celui  de 
l'Assomption  de  Notre  Dam:-,  qui  dure  aussi 
quinze  jours,  aussi  bien  que  celui  de  lExal- 
talion  de  la  sainte  croix  ;  celui  d'Elie  ou  des 
Ninivites,  qui  n'est  que  de  huit  jours  ;  et  ce- 
lui de  la  iNaiivilé  de  Noire-Seigneur,  qui 
dure  vingl-cin(|  jours. 

L'habillement  de  les  religieux  consiste  en 
une  soutane  ou  veste  noire  serrée  d'une 
ceinture  de  cuir,  et  une  robe  par-dessus, 
comme  celle  des  Arméniens,  avec  des  man- 
ches assez  amples:  ils  ne  poiieni  point  du 
capuce,  et  ont  seulement  un  turban  bleu  (Ij. 
Les  religicusessonl  habillées  de  même;  elles 
mettent  seulement  des  linges  noirs  autour 
delà  tête,  qui  leur  couvrent  la  menloc  jus- 
qu'à la  bouche,  cl  ont  par-dessus  ces  linges 
uuii  espèce  de  voile  noir  fort  petit,  <iui  s'at- 
tache sous  le  meiilon,  comme  on  peut  voir 
dans  la  figure  que  nous  en  donnons  (2)  Il 
laut  que  les  religieuses  aient    p.lus   de  ijua- 


(1)  Voij  ,  à  Ij  fin  di;  vol.,  ir  2  ô. 


(2)   Voij.,  à  la  lin  du  vol.,  n"  281. 


4jij5                                         DICTIONNAIKE  DES  OUniiF.S  UEUr.irUX.  1124 

ranio  ans  pour  recevoir  l'hiibil  monasliiinc,  inonlre  (iiio  cVl.iil  la  couliinic  en  ce  Icmps- 

p.irco  qu'on  .ippiolioiide  «(u'elles  ne    sorl.nl  là  que  l'on  coup.1l   les  cheveux  en  forme  de 

pour  se  niaiier  ;  ce  qui  n'cmpèehc  p,is  qu'il  couronne  ;iux  reli;;ieuscs  cl  aux  vierges  qui 

n'y  fin    ail    lrès-sou>enl  qui   ne    le    tiiS!.eiit,  se  consacraienl  à  Dieu,  comme  remarque  le 

aus^i  bien  que  des  Moines,  ((ui  quillenl  au>si  savanl  I'.  Mabillon,  qui  ajoute  que  le  counle 

qml(uuf.)is    leur  haliil    pour    se    marier,  el  de  Lcplines  ordonna,  au  tonlraire,  que   l'on 

même  quoiqu'ils  soirnl  prèlrcs:  cf  que  leurs  raser.iil  enlièrcmeul    les    ilieveux   des    rcli- 

cvèques  lolèrenl  malgré  eux  ;   car  s'il    y   en  gicuses  qui  ser;iicnl  lombées  dans  quelques 

a  nuel-iues-uns  qui  s'opposent   à   cel  abus,  crimes.  Gcrlrude  eul  .lulanl  do  joie  de  voir 

les  relifîieux   qui  veulent  se  marier  en    de-  ses  cheveux  coupés,   que  les  autres  tilles  eu 

mandent  permission  au  paeli  i  ;  el   pour  lors  avaientde  voir  les  leursbien  rrisé>  etarrangés, 

l'évêque  est  obligé  d'y  consenlir,  de  crain  c  cl  se  gloriliail  de  porlrr  une  couronne  pour 

«lue  celui  qui  la  demande  ne    se  lasse  turc,  l'amour  de  Jésus-Chrisl.  Saint  Aniand  solli- 

Vollà  ce  que  cause   l'hcrésie,   le  schisme  et  cita  ensuile  Ille  de  bâtir  un  monastère  pour 

le  peu  de  disripliiie  qu'il  y  a   parmi   la   plu-  s'y  retirer.  Nivelle,  petite   ville  de  liralianl, 

part  des  religieux  d'Orient",  (lui  se  sont  sous-  dans  le  diocèse    de    Namor,   entre    Mo;  s   el 

trails  de  l'Eglise  romaine,  el   qui   soûl  plu-  Bruxelles,  lui  pirul  favorable  à  ce  dessiin. 

tôt  religieux"  de  nom  qu'-  d'effet.  Le  peu  qu'il  llte  y  lîlj.ler  les  fondements  d'un  monastère, 

y  a  de  religieux   Nestoriens  dans  les  mouas-  el  lorsqu'il  lut  achevé,  elle  s'y  relira  a\cc  sa 

teres,  qui"sonl  la  plupart  abandonnés,  fail  fille  qui  en  fui   la  première  nbbcsse,  ayant 

qu'on  ne   leur   fail  po:nl    faire  de   noviciat,  pour  lors  vingt  cl  un  ans;  car  elle  ne  n  cul 

Aiirôs  (ju'ils  ont  resté  quelques  jours  <n  ha-  le  voile  que  sept  ans   après  que  sa  mère  lui 

bit  séculier,  on  leur  donne  l'habil  nionasli-  cul  coupé  les  cheveux,  el  elle  ne  prit  le  gou- 

que,  el  ils  déclarent  en  le  prenant  qu'ils  pré-  vernemenl   du    monaslcre    que  l'.in  O'»'.  La 

tendent  être  de  l'ordre  de  Saiiil-Anloine,  ou  conduite  de  celle  jeune  abbcsse  ju-tilia  fort 

de  ce  saint   crinile   dont  nous  avons    parlé,  avanlageusemeul  le  choix  de  sa   u  ère,  qui 

C'est  eu  quoi  consiste  toute  leur  proCession,  mourut  l'an  Go2,  après  avo  r  élé  sous  la  dis- 

celui  <iui  leur  doiiue  l'habit   niellant  le  nom  ciplinc  de  sa  lille  pendant  cinq  ans,  et  (îer- 

d'un  de  ces  saiiils  d.ins  les   oraisons   qui   se  Irudc  se  démit  de  sa  charge  d'albcsse  trois 

disent  en  ces  sortes  de   cérémonies,   le  tout  ans  avant  sa  mort,  (jui  arriva  le  1"  mars  de 

en  langue  svriaque  ou  (hahléeune,   ((ui   est  lan  Oj'.t. 

la  langue  dans  laquelle  les   Neslonens  ofli-  Le  chapi!re  de    Nivelle    est   cemposé    do 

cicnt.l7esl  ce  que  j'ai  appris   de   M.   Ablt-  quarante  -  deux    cli;.noinesses   qui    doivent 

Lihad  qui  était  lui-même  Neslorien,  ou  plu-  avoir  f.iil  preuves  de  neb'esse  de  quatre  ra- 

lot  Chaldéen,  nom  que  les   Neslori(  ns  cou-  ces,  tant  du  lolé  paternel  que  du  côté  lualer- 

vcrlis  à  la  foi  prémuni,  en  quillanl  celui  do  ntl.  Le  jour  de  leur  réie|ition,    qui    se   lait 

Neslorien  comme  un  niuii  infime.  auc  beaucoup  de  pompe  el  de  magninrcnre, 

NEUTllES.  Voyez  Berlega...  ^'."«  «oui  aussi  reçues  chevalières  de  S.inl- 

•'                          rr       o  Giorges.  On  leur  présente  un  carreau  de  ve- 

MCOLAS  (Saint-)  uArennes.To//.  Sicile,  lours,  sur  lequel  elles   s'agenouilbnl    pen- 

NICOLAS  DE  FOULQUE-I'ALkNK.  Vutjrz  dani  la  messe.  A  l'Evangile  elles  li,  nu.  ni  à 

JÉiiôvii:  (Ervutes  1)E  Svixr-).  la  mam  une  épée  nue,  el  â  la  lin  de  la  messe 

NIDER.MUNSTER.  Voyez  Cologne.  i>"   gi'ulilhomme,   après    leur  avoir    donné 

I  accula. le,  leur  donne  trois  coups  du  plat  de 

NIVELLE   (r.nANOiNESSES  de),    de  Mena,  de  ,-,|,^,y  j,,,^   ic  dos,  et  les  reçoit  ainsi  cheva- 

jymtlmi<je,du  Deiiain  et  de  <iin:tques  aiiliis  |it.,-os  de    Saint-tîeorges.    Leur    liabillcment 

lùiix  en  l'ianlre.  consiste  eu  un  corps  de  jupe  blanc  avec  des 

Il  en  est  de  même  des  chanoinesses  sécu-  bandcsd;;  velours  noir  par-devuUt.  des  nian- 

lières  de   Flandre   que  de   celles  dont   nous  ches  de  loile  fort  ample  s,  un  aulre  morceau 

avons  [larlé,  ayant  élé  aussi  reli;.':ieuses  dans  de  loile  qu'elles  meilenl  depuis  Li  eeiulurejus- 

Icur  origine.  Celles  de  Nivelle  furent  fondées  qu'à  mi-jaiiibes,  et  fait  en  façon  desurplis. Elles 

pr    llle  ou    Idubergc,    femme   de  Pépin  de  ont  par-ilessus  un  manteau  noir  douMedher- 

Landen,  prince  de  Braliant,  mair.'  du  palais  mine.  Elies  ont  aussi  une  fourrure  de  pelil- 

cl  ministre    ib  s  rois   d'Austr.isie.    Après    la  gris  au  bas  de  h  ur  jupe,  une  Iraise  autour  du 

ii.ort  de  sou   luari,  ((ui  arriva  l'an  GiO,  cl.iut  cou,  il  la  lèle  couverte  d'un  voile   blanc,  de 

âgée  de  quaranle-liuil  ans,  elle  se  consacra  soie  (1).  L'abbessc  est  dame  de  Nivelle,  laiil 

à  Uieu  el  rerut  le   voile  des   mains   de   saint  au  spirituel  iju'au  temporel.  Il  y  a    dans    le 

Arnaud,  cvê(iue  de   .M.iestricht.  l-es  enlaiils  mèmech.ipitredeschanoinesiiui  l'uni  ImrM'r- 

qui    lui    restaient   <le    si.n  mariage    élaieiil  v;ce  dans   une    égli^e  voisine,  cl  en  certains 

Grimoald,  qui  lut  aussi    irare  du  |  al.iis  en  jours  de  l'année  ils  viennent  d.ins   le  eluiMir 

Aiisira'iie,  à   la   place  de  srm  père;  Brglic,  des   clianoiuesses,   où  ils  psalmodient  avec 

qui  épousa  Ansigi!'le,li's(le.saint  Aniouhl,  el  elles.  D.ins  le  chapitre  l'abbesse  préside  .aux 

Gerliude  ipii  n'avait  que  (]U.itnr/.e  nus  ;  mais  eli'.nuiiies  el  aux  chanoinesses,  et  ils  poiir- 

apprélicnilniit  que  celle  jeune  firiiiiesseiie  se  v   yen:  tous  eusembleauxbénélicesvac. mis  par 

laissAl  enirjiîiicr  aux  plaisirs  du  iiioiule,. elle  l.iinoilou  i>ar  le  inari.ige  des  chanoinesses. 

lui  coupa  les  cheveux  en  l'orme  dii  couronne,  Ju.in.  Mabill.  A:tn(il.  on/.. S'.  Btncd..  tom.  I. 

pour  lui  faire  recevoir  aprijs  le  voile;  ce  qui  Yep  z,  Cluon.  géucral.  de  l'ordre  de  5ui/U- 

(I)  Vui/.,  il  1.1  (iii  du  volume,  i.»»  iS'J  et  îSU. 


l,I2ï                                 NIV  NIV                                    112G 

iieno'il,  lom.  11.  Modesie  de  Saiiit-Amable,  qui  lui  onl  été  ôlées.  Ce  chapitre  est  composé 
7)/o«a)c/(/e sam(e de  France;  et  Bousaingaul,  dej  trente  chanoiiicssi-s.  Il  y  a  aussi  eu  des 
Voijnfje  des  Pays-lias.  chanoines  dan>  celte  église,  niais  les  chanoi- 
Les  chanoinesses  de  Mons  reconnaissent  nesses  les  en  ont  chassés,  et  ils  n'y  font 
saint?  Vaudru  pour  leur  londairice.  Elle  point  de  service,  si  ce  n'est  quelques  (.rières 
était  fille  du  comte  Walbcrt,  prince  du  sang  qu'ils  sont  obligés  d'y  venir  dire  ions  les  ans. 
royal  de  Franco,  el  de  la  princesse  Bertille,  Nous  donnons  ici  Irois  dlîérentes  fl^ure-i  de 
et  fut  mariée  au  comte  Madelgairo,  plus  l'habillement  de  ces  chanoinesses"  (i)  :  la 
connu  sous  le  num  de  saint  Vincent  des  Soi-  première  représente  l'habillement  qu'elles 
gnies,  qui  se  sépara  d'elle  pour  se  faire  re-  portent  pendant  la  première  année  de  leur 
ligieux  à  Aumont-sur-Sambre.  La  sainte,  réceptiitn  ;  la  seconde,  Ihabillemenl  qu'e  les 
après  cette  séparation,  deuieura  encore  deux  ont  pendant  la  seconde  année;  et  la  troi- 
ou  trois  ans  dans  le  inonde  ;  mais  ayant  pris  siènic,  celui  qu'elles  portent  toujours  après 
la  résolution  d'y  renoncer,  elle  se  retira,  par  ces  deux  premières  années,  pendant  les- 
l'avis  de  saint  Guilaiiv,  son  directeur,  en  uîi  quelles  elles  sont  appelées  écoiières.  I<;iies 
endroit  solit.iire  di;  la  montagne  de  Castril-  sont  obligées  de  faire  jurer  la  véiilé  des 
loc.  Elle  fil  acheter  la  place  par  un  seigneur  preuves  de  leur  noblesse  par  deux  gentils- 
nommé  Hidulpbe,  qui  est  aussi  honoré  hommes  ayanl  l'épée  nue  à  la  main, 
comme  saie.t,  et  qui  avait  épousé  sainte  Aïe,  Sainte  Aldegonde,  sœur  de  sainte  Vaudra, 
sa  parente,  lille  le  pria  d'y  l'aire  préparer  voulant  l'imiter  dans  le  renoncement  qu'elle' 
une  cabane  où  elle  pût  se  renfermer  pour  av.iil  fait  au  monde,  et  éviler  les  poursuiles 
servir  Dieu.  Uivlulphe  fit  plus  qu'on  ne  lui  d'un  seigneur  qui  la  recherchait  en  mariage, 
avait  demandé;  il  hàlil  sur  la  place  qu'il  sortit  seirèlemeiit  du  châleau  de  Courlso"re| 
avait  achetée  un  monastère  magnifi  (ue,  qui  où  sa  mère,  ijui  était  veuve,  demeurait,  et 
ne  convenait  point  à  la  pauvreté  que  sainte  se  relira  dans  un  lieu  solila  ic  appelé  Mel- 
A'audru  voulait  embrasser.  Elle  ne  voulut  bode,  et  aujourd'hui  Maub.'ugc,  sur  la  Sam- 
point  y  loger,  et  le  ciel  favorisant  son  incii-  bre,  où  elle  demeura  quelque  lemps  cachée, 
nation,  il  arriva  peu  de  jours  après  qu'un  Elle  alla  trouver  en-iuile  saint  Atiiand,  qui 
vent  impétueux  renversa  ce  bâtiment.  Saint  était  au  monastère  d'Auinonl,  et  sainl'Au- 
llidulphc,  pour  se  conformer  au  désir  de  la  bert,  de  qui  elle  reçut  le  voile  de  reli  'ieuse 
sainte,  lui  bâtit  une  peiite  cellule  avec  une  cl  l'hahil  monastique.  Etant  reloiii  né;-  à 
chapelle,  où  elle  alla  demeurer  après  avoir  i\laubeuge,  elle  vendit  tout  ce  fju'elle  avait 
reçu  le  voile  sacré  des  mains  de  saint  Au-  de  pierreries  et  de  joyaux,  et  en  distribua  le 
bTl,  évéquede  C:imbrai.  PiUsieurs  femmes  prix  à  diverses  églises  el  à  d'aulres  lieux  do 
nobles  voulurent  se  mettre  sous  sa  conduiie.  piété,  auxquels  elle  donna  les  biens  qu'elle 
Le  liiu  parut  trop  étroit  à  sainte  Aldegonde,  avait  en  fonds  de  terre.  Elle  !it  bâiir  un  mu- 
sa sœur,  pour  y  recevoir  les  personnes  qui  naslère  à  Maubeuge,  el  en  fil  consacrer  l'é- 
se  présentaient  à  sainte  Vaudru;  c'est  pour-  glise  par  saint  Auherl,  sous  l'invocation  de 
quoi  elle  l'exhorta  de  venir  avec  ses  reli-  la  sainte  Vierge.  E!le  y  assembla  un  grand 
gieuses  dans  le  monastère  qu  elle  avait  lait  nombre  de  vierges  el  y  mit  aussi  des  reli- 
bâtir  à  Maubeuge;  mais  Vaudru,  qui  n'ai-  gieux  pour  leur  administrer  les  sacrements, 
ni-ail  que  la  pauvreté,  ne  voulut  pas  quitter  Enfin,  après  avoir  gouverné  sa  communaiiio 
sa  solitude,  qui  devint  en  si  grande  réputa-  pendant  plusieurs  .innées,  elle  mourut  l'.in 
lion  et  si  fréquenlée,  qu'on  y  bâlit  une  vilie  G33.  Celles  qui  sont  venues  après  elle  om 
considérable  qui  est  aujourd'hui  la  capitale  renoncé,  vers  le  douzième  siècle,  aux  vœux 
du  Hainaut,  et  ce  pauvre  monastère  a  été  solennels  pour  se  séculariser  aussi  bien  que 
changé  en  un  riche  chapitre  de  chanoi-  celles  de  Nivelle  et  de  Mons,  et  onl  formé  lo 
nesses.  Sainte  Vaudru  mourut  l'an  1358,  et  se  chapitre  de  Maubeuge.  Ces  chanoinesses  ont 
voyant  proche  de  sa  fin,  en  présence  des  re-  le  gouvernement  de  la  ville  et  de  son  terri- 
ligieux  et  des  religieuses  (car  ce  monastère  toire,  el  la  juridiclion  soit  au  civil,  soit  au 
était  double)  elle  nomma,  pour  lui  succéder,  criminel.  Elles  faisaient  autrefois  battre  tous 
Ulfetrude,  sa  nièce,  qui  n'avait  que  vingt  les  ans  certaines  petites  monnaies  de  plomb 
ans,  mais  qui  avait  toujours  été  élevée  sous  appelées  Miles,  avec  l'effi-ie  de  sainte  Alde- 
ses  yeux  depuis  le  birceau.  gonde.  Douze  de  ces  petites  pièces  reve- 
Les  comtes  de  Hainaut  prenaient  autrefois  naient  à  un  denier  ou  gros  de  Flandre,  et 
la  qualité  dabbés  séculiers,  avoués,  gardes,  avaient  cours  dans  tout  le  Hainaut  jusqu'à 
juges,  prutecieurs  et  défenseurs  tant  de  celte  Bruxelles.il  ne  suffii  pas,  pour  cire  reçue 
église  que  des  bie\is  qui  en  dépendaient,  chanoinesse  de  Maubeuge.  de  faire  preuve 
niellant  en  leur  place  pour  gouverner  les  de  noblesse  de  seize  (|uarliers,  il  faut  que  la 
filles  une  abbesse  qui  avait  une  si  grande  noblesse  soit  si  ancienne  qu'on  n'en  con- 
aulorilé  et  préémineuce,  que  c'élait  elle  qui  naisse  pas  l'origine  :  l'hibillcment  que  ces 
recevait  el  mettait  en  possession  du  comté  chanoinesses  portent  présenleiiient  est  peu 
de  Hainaut  et  de  la  dignité  abbatiale  les  nou-  ou  point  dilîérent  de  celui  des  autres  chanoi- 
V!'aux  comle-^.  Ils  faisaient  serment  demain-  ne-ses  de  Flandre.  Ain>i  nous  nous  conlen- 
fenir  les  privilèges,  iiherlés,  exemptions  et  terons  de  donner  ici  un  dessin  d'un  haliil- 
posscssions  de  cette  abbaye;  mais  elle  a  Icment  que  portaient  autrefois  les  abbesses 
perdu  depuis  plusieurs  terres  et  juridictions  de  Maubeuge,  Ici  qu'il   se    Irouvc   dans   un 

(1)  Yoy.,  à  la  fin  du  vol.,  ii"»  287, 288  cl  289. 


11-2:                                           DÎOTIONNAIUK  Dl  S  OIU)r»i:S  UELRilKL'X.                                        ItQS 

anci<'nmnni!S<Tildc!'alib.iy(>dcS;iinl-.\m.iiul,  il  y  a  aussi   dix  i  liaiiniiics  qui   leur  servent 

qui  cousis  ail  on  un  voili-   b'aiic  obscur,   un  do  cli.ipclaiiis.  ('.os  cb-noiiicsscs  n'onl  jamais 

niaiilcau  violel  parspiiu-  do  flours,   une  mbo  «'U  d'aliliossos  ;  los  conilos  t\:-  Flamlrc  m  oui 

rouge  bo  (Ice  de  peiil-^^ris,  tonibaiil  jusqu'à  toujours  6:0  le*  abbés,  cl  en  cotle  (jiiaiilé  ils 

iiii-janilio,   sous    l.iquol  c  il    y  en   ;ivail    une  dis]iosonl  des  préb-iides  lorsqu'elles  v  .kiuoiiI. 

aulre  bl.iu  lie,  (|ui  drscendail  jusqu'aux  la-  Les  principales  (iigni'.cs  de  ce  cha|iilre  sont 

Idus  (Ij.  Pour  ce  (jiii  refïarde  le  nianlean,  le  celles  de  prévoie  ,  de  do>cnne,   d'escolàlre 

1'.   .Maiiillon   croil  que  les  fleurs  dont    il  e  t  el  de  cbanîrc.  l'illes  ont  la  collai  on  de  plu- 

senié  so   l    de  l'invenlion  du  peintre;  c  r  il  sieurs   bénéfici-s  el  cures.  Ces   (  hanoinesscs 

dilque  I  on  trouve  dans  un  autre  maiiusciil  [lortenl  un  surplis  clam  au   clhrur,  aiec  uii 

du  coniMiciicornenl  ilu   onzième    siècle,    une  lon{{  nianleau  noir  doublé  d'Iierniine. 

autre  abbessequi  a  le  nu'ine  babil  el  le  inéuie  Joan.    ^labi  Ion  ,   Anval.    nrd.   S.Iicneil., 

nianUau,  tuais  sans  ileurs,  el  qu'elle  e>l  ac-  lun.  I.    l'elr.  Coëns,  Disquiait.   Il  islui  ii\  de 

conipagnée  dune  religieuse  qui  n'a  pour  ha-  vrvjine  liefjhinarum  neli/ii.  .Molesle  de  Sainl- 

bilr  uienl  qu'un  voile  el  une  coule  :   ce  (jui  A'.unlûa,  Hlon  ncliie  saiule  de  i'ranrc. 

roiilirinc  ((ue  ces  cbanoinesses  oui  été  oiigi-  F.e  chapitre  des  chanoinessiîs  de  Munsler- 

naircaient  relij.'ieus.cs.  fielise,  au  dioC' se  de  l,ié;;e,  a  élé  aussi  dans 

\oycz  pour  Mon^  cl  Maubcuge,  Joan.  Ma-  snn  ori{;iiie  un  inonasièi-'  de  rellj;ieiisi  s  bàii 

liill.,  .4nN(i/.   orJ.  S.  lieneiL,  loni.  I.  Yèpes,  par  sainte  Landrade.  Mlle  élail  n  lm  c  ou  pe- 

Chroiiir/.  (jvnérnl.  de  l'ord.  de  Saint-Benoît,  lile-(i;le  de  saint  ArnouM  de  Mclz,  el,  selon 

lom.  II.    Slodeste  de  S.iinl-.\niab!e,  Monnr-  (luelques-uns,  tille   d'Ansi^ilde  cl   de   saiiilo 

r/u'e   sainte  de  France.   l'.iiusiuiraul,  Voijn,c  liejjhe,   cl    sciMir  di' l'(''|iiii  d'ilérislal.    Ajanl 

des  Payt-Das;  c\.{jm\c\M\viïin,  llisl.  des  Pays-  passé  ses  preinièies   années  avec  beaucoup 

Bns.  de  piété,  si'S  paicnls   la    voulurent   ir.arer; 

Sainte  Be^he,  qui  éait  ai:ssi  sriMirde  sainte  mais  elle  leur  détlara  qu'elle   \oulail  icsier 

rierlrude,se  voyant  veuve  du  du;;  Ansinille,  vjcr|,'e.(;'esl  pourquoi  ils  lui  donnèrent  toute 

<|ui  avail  clé  assassiné,  el  duquel   elle  avait  la    liberté  qu'elle   souhaitait  pour  se  eonsa- 

eu   l'epin  d'Héi  islal,  i]iii  fui  père  de  Charles  crer  ()lus  parfaitement  au   service  de   Dieu. 

Martel,  ne  voulut  point  écouter  les  proposi-  Klle  se  lit  accommoder  une  pelile  cellule,  et 

lions  qu'on   lui   fil   de  passer  à  de  secondes  mena    une  vie   pénil<iite    et   solitaire,   sans 

noces,    l-ille  alla  à  Rome  et  obtint  du  papu  (luillcr  encore  sa  famille;  elle  se  revèlii  d'un 

Adeodal  des    reli(ii;es   de   quelques    saints,  ciliée,  cl  par-dessus  d'un   habit  forl  simple 

avec  un  morceau  de  la  vraie  croix,  des  pier-  et    scmbl.ible  à   celui    des    servantes.    Son 

res  leinles  du  sang  de  saint  liîienne,  el  une  amour  pour  la  conlemnlalion  la  pressait  fort 

partie  des  chaînes  de  saint  Pierre,  liile  lonrta  de  se  retirer  dans  le  tféscrl;  mais   elle  élail 

à  son   relour.  l'an  G9(),  le  monasière  d'An-  relenuc  par  la  considération  de  sa  jeunesse 

donne,  situé  entre  Naniur  el  Uni,  proche  la  el  par  la  crainte  d'a!:anlonner  des   piuvrcs 

rivière   de    Mcnse  ;  cl   en   mémoire  des   se|)l  «inclle  assistait.  Ouand  elle   fut   plus  âgée, 

principales  églises  de  i\oine  qu'elle  avail  vi-  cile  se  rot  ra  dans  un  bois  <|iii  élaii  si  allreiix 

siléis,  elle  en  fil  bàlir  sept  à  Andenne,  dont  par  la  iniillitude  de  hèles  farourhcs  doni   il 

la  principale   fut  dédiée   en  l'iionneur  de  la  était  remjili,  qu'on  l'apiieîait  liellun,  ou  //<■- 

sainte  Vierge,  el  les  six  autres  sous    l'invo-  Ir^iitc  ds  bi'les.  Apre,  la  vision  d'une  croix 

c.lion   de  saint  Sauveur,  de  saint  l'icrrc,  de  éclatante  qui    lui  aiiparul  dans  ce  bois,  elle 

saint  Jean,  de  saint  Klienne,  de  saint  M.chcl  y  fil  bâtir  une  église  qui  fui  dédiée  par  saint 

el  de  saint   Lambert  ,  cl  elle  [lartagea  à  ces  Lambert  ,   évoque   l'ie    iMaésliicbt.  l'iusieurs 

églises   les  reliiiues  (|u'elle   avail   apportées  filles  cl   veuves   se   icn>iiiont  au;  rès  de  la 

di;  lîome.  Il  ne  Lii  restait  plus  qu'à  peupler  sainlc  pour  iiniler  ses  vertus,  cl  iravai  Lt  à 

ce  monastère  de  religieuses  d'une  -ainle  vie.  lur  salut  sous  sa  direction.   Telle  fui    l'ori- 

II  ne  lui  en  p.irut  point  de  [ilus  parfaites  que  gine  du  mon.rsièi  e  de  liéiise,  (|ui  prit  ce  no'ii 

celles  qui  avaient   etc  formées  par  sa   sœur  après  avoir  quitté  celui  de />'(''/«'i  lU  /{c'/'diVe 

sainte  Ijorlrude.  Kilo  fut  à  Nivelle  pour  ce  d<s  InHv.i,  qu'il  portail  auparavani,  el  l'on  a 

sujet,  cl  Agnè-i,  qui   en  élail  pour  lors  ah-  bàii  une  pelile  ville  du  même  nom  à  un  (juart 

hcssc,  lui  en  accorda  six,  el  pour  comble  de  de  lieue  tie  ce  monasière.  La  morl  de  ci'ltc 

laveur  elle  lui  donna  des  livri^s  et  une  partie  sainte  fondatrice  arriva  vers  l'an  C'JO  ou  (191, 

du  lit  de  saillie  Gertrudc,  (jui  attira  une  nou-  cl  ce  monastère  a  été  changé  en  une  commu- 

vclle  bénedictionsurces  habilantsd'Andenne,  iiaulé  de  filles  nobles,  qui  ont  renoncé  aux 

en   faveur  des(juels  Dieu  fil  pluNicurs  mira-  vceux  solennels,  pour  se  marier  quand  h  ■» 

ries,  lanl  pour  maoirester  la  sainteté  de  sa  leur  semble,  à  l'exemple  des  antres  chaiioi- 

siTvanle  ([ue  pour  rérompenscr  la  dévotion  liesses.  L'on  voit  dans  celle  abbaye   une  li- 

dc  ceux  qui  riiivo([uaienl  dans  leurs  besoins.  corne    i|ui  a   six    pieds  el  demi    de  long  :  on 

Sainte  He^he  en  fui  la  première  supérieure  :  tient   ()u'olle  y  a  éle   apporlée   par   une   fille 

Si's   religieuses  s'cng  igèreiil   au    service    de  d'un  duc  de  llrelagne,  qui  se  (il  chanc)inesse 

Dieu  pour  toujours  et  par  une  staliililo  per-  en  ce  lieu,  el  qu'à  cause  d'elle  celte  abbuyo 

polucile.mais  elle  ne  les  gouverna  pas  long-  lut  nommée  VMtbayi'  itc  Saint- Amour. 

temps,  élinl  morli'  ileux  ans  après,  Ce  mo-  Modeste  de  Saini-Amablo,  l/o/ur  r/ii'f  sninle 

nasière  a  ete  change  en  un  chapitre  de  rha-  dr  l-'ranrc;  cl  Ihouias   Corneille,  Dut.  géo- 

uoincsses  qui   sont  au    nombre  de  Ironie,  cl  (jnijili. 

(il   V(iy.,  a  la  fin  du  vol.,  11'  -l'ii. 


\m 


ivoru 


NOEU 


lITiO 


Le  bourg  de  Duonfininj!;  ou  Dulicns,  qu'on 
nomme  piésonienifiU  Denuin,  et  qui  est  sur 
le  chemiu  de  Vnlenciennes  à  Douai,  est  re- 
comm.'inJablc  par  une  abhaye  de  chanoines- 
ses  séculières,  que  les  IJi'iiédiciins  mettent 
encore  au  nombre  de  celb's  qui  étaient  au- 
trefois di^  leur  ordre  avant  qu'elles  SI'  fussent 
sécnlariséos.  FJIi'  fui  fondée  par  saint  Adel- 
bert,  comie  (fEsIrevan.  et  sa  femme  sainte 
Heine,  nièce  du  roi  Pépin,  vers  l'an  76i,  se- 
lon la  plus  commune  opinion,  et,  selon  d'au- 
tres, l'an  750.  Ils  donnèrent  tous  leurs  biens 
à  dix  lilles  qu'ils  avaient  eues  de  leur  ma- 
riiige;rl  l'aînée,  nommée  Rninfrède,  (al  la 
première  alibesse  de  ce  monastère,  où  ses 
Keuis  firent  vœu  avec  elle  de  chasteté,  et 
ont  toutes  méi  ilé,  par  leur  vie  exemplaire  et 
leurs  grandes  vertus,  d'être  révérées  comme 
saintes.  Après  la  m  irl  de  saint  Adelberl, 
saiuîe  Reine,  n'ayant  plus  rien  qui  la  reiînt 
dans  ie  monde,  se  relira  avec  ses  filles  dans 
le  monastère  ilc  Denain,  et  soit  à  cause  qu'elle 
en  est  la  fondatrice,  ou  qu'elle  en  ait  été  vé- 
ritablement abbesse,  les  peintres  ont  accou- 
tumé de  la  représenter  avec  un  voile  blanc 
sur  la  tète  et  une  crosse  à  la  main.  IJaudery, 
évéque  de  Noyon,  (jui  vivait  au  commence- 
ment du  douzième  siècle,  et  qui  a  écrit  la 
chronique  des  évè(]ues  d'Arras  et  de  Gnm- 
brai,  parlant  de  cette  abbaye,  dit  qu'elle  fut 
fondée  par  sainte  liainfrède,  qui  en  fut  ab- 
besse ;  que  (|uel(|ue  temps  après  ce  monas- 
tère déchut  beaucoup  de  sa  splendeur,  et 
tomba  entre  les  mains  de  certains  chanoines; 
mais  que  le  comte  Baudouin,  par  les  sollici- 
tations de  l'évêque  Gérard  et  de  Leduin, 
abbé  de  Saint-Waast,  le  rétablit  dans  son 
prem  er  état,  y  taisant  revivre  la  discipline 
régulière  sous  la  lèijle  de  saint  Henoîl  et  la 
conduite  de  l'abbesse  Ermentrude. 

Cvs  cbaiioinesses  étaient  autrefois  dames 
du  comté  d'Oslrevan  ;  mais  la  souveraineté 
de  ce  comté  étant  venue  au  roi  comme  comte 
de  Hainaut,  les  chanoinesses  ont  seulement 
conservé  le  titre  de  comtesses  d'Oslrevan. 
Ce  chapitre  est  com|iosé  de  dix-huit  chanoi- 
nesses, qui  doivent  faire  preuves  de  noblesse 
de  huit  quartiers.  Leur  habit  est  assez  sem- 
blable à  celui  des  chanoinesses  de  Nivelle,  à 
l'exception  qu'elles  n'ont  point  de  fr;iise,  et 
qu'elles  ont  seulement  un  mouchoir  de  cou 
attaché  avec  trois  rubans  noirs  (1)  :  elles  ont 
aussi  à  Iturs  corps  de  jupes  quel(|ues  bandes 
(le  velours  noir  de  plus  {|ue  celles  de  Nivelle; 
et  quand  elles  i-ont  hurs  du  chœur,  elles 
mettent  par-dessus  leurs  babils  un  ruban  noir 
brodé  d'or,  auquel  est  "attachée  une  médaille 
d'or  avec  l'image  de  sainte  Hainlrède,  qui  est 
reconnue  pour  patronne  de  cette  abbaye. 

Joan.  Miibill.,  Annal,  ord.  S.  Bened.  Mo- 
deste de  Saint-Amable,  Momtrcidt  sainte  de 
F  lance;  el  Thomas  Corneille,  Diction,  géa- 
(jraphif/ue. 

NOIJLE-MAISON  (  Chevalieiîs  de  l^  ). 
l'oj/cî  Etoile. 

MOûUD  (Chevaliers  du),    ou  du  Snint-Es- 
prit   un  droiC-d.sir,  nu  royaume  de  Nnples. 
Uohcrt  le  Bon  et  le  Sage,  roi  de  Naples,  rjui 
(I)  Voij.,  à  la  fin  du  vol.,  n°  291. 
UlCTlO^'^'AIllE  UFS  Ohdres  nEnuiri.x.  11. 


éiait  de  la  maison  d'Anj  lU,  ayant  perdu 
Charles  de  Sicile,  son  fils  unique,  voulut  don- 
ner un  mari  aussi  de  la  maison  d'Anjou  h 
Jeanne,  (ille  aînée  du  même  Charles.  Itans 
cette  vue  il  lit  venir  à  Naples,  l'an  1333, 
Charles  II,  roi  de  Hongrie,  son  neveu,  et  An- 
dré, fils  puîné  lie  ce  prince,  qui  fut  fiancé, 
le  18  sepiembre,  avec  Jeanne,  sa  cousine 
issue  de  germain.  Cette  princesse  était  fiour 
lors  dans  la  neuvième  année  de  son  âge; 
André  en  avait  sept.  Mais  ce  mariage  ne  fut 
point  heureux,  les  inclinations  d(!  ces  deux 
époux  ne  s'accordanl  point.  Le  roi  llobi-rt 
avait  tâché  lie  leur  inspirer  des  sentiments 
d'uniin,  et  il  avait  par  sa  prudence  contre- 
balancé les  divers  mouvements  de  ces  deux 
e-prils.  Mais  après  sa  mort,  (]ui  arriva  l'an 
loi3,  ils  ne  gardèrent  plu-,  de  mesures; 
Jeanne  ne  voulait  pointqu'André  prit  la  qua- 
lité de  roi  ;  et  ces  contestations  durèrent  jus- 
qu'à ce  qu'Elisabeth,  reine  de  Hongrie,  ayant 
fait  un  voyage  à  Naples,  persuada  à  Jeanne, 
qui  était  sa  belle-fille,  de  se  faire  couronner 
avec  André  son  mari.  Cette  cérémonie  se  fit 
avec  beaucoup  de  magnificence,  en  présence 
de  quatre  cardinaux  que  le  pape  Clément  VI 
envoya  à  Naples.  Cela  ne  réunit  pas  néan- 
moins ces  deux  esprits;  le  malheureux  An- 
dré fut  étrangle  dans  la  ville  d'Aversa  l'an 
ISVo,  et  la  reine  fut  soupçonnée  d'avoir  don- 
né son  consentement  à  ce  meurtre. 

Cette  princesse  épousa,  l'année  suivante, 
en  seconde,  noces,  Louis  de  Tarente,  (jui 
était  aussi  soncousm;  mais  Louis,  roi  do 
Hongrie,  ay.int  passéen  Italie  avec  une  puis- 
sante armée,  pour  venger  la  mort  d'André, 
et  s'étant  emparé  de  la  ville  île  Naples,  Lo'.iis 
de  Tarenle  et  sa  femme  lurent  obliges  de  se 
réfugier  en  Provence,  qui  appartenait  aussi 
à  cette  princesse,  et  ils  ne  retournèrent  à 
Naples  que  l'an  1352,  après  avoir  conclu  la 
paix  avec  le  roi  de  Hongrie,  par  l'entremise 
du  pape.  Ce  fut  pour  lors  que  Louis  de  'iTa- 
renie,  en  mémoire  de  ce  qu'il  avait  été  cou- 
ronné roi  de  Jérusalem  et  de  Sicile  le  jour 
de  la  Pentecôte,  institua  un  ordre  militaire 
sons  le  nom  du  S.iint-Esprit  au  droit-désir, 
plus  communément  connu  sous  le  nom  de 
l'ordre  du  Nœud,  à  cause  que  les  chevaliers 
portaient  pour  marque  de  leur  ordre  un 
nipud  en  forme  de  lacs  d'amour,  ce  piiiice 
ayant  voulu  exprimer  par  ce  nœud,  comme 
disent  quelques  auteurs,  rattachement  (|ue 
les  sujets  devaient  avoir  pour  leur  prince,  et 
réciproquement  le  prince  pour  ses  sujets. 
Cependant  le  véritable  nom  de  cet  ordre  éltît 
relui  du  Saint-Esprit  au  droit-désir,  comme 
il  paraît  par  les  statuts  qui  furent  dressés 
par  l'instituteur,  et  qui  commencent  ainsi  : 
Ce  sont  les  chapitres  faits  et  trouves  pur  le 
très  excellent  prince  monsriijneint'  roy  Loijs, 
par  la  grâce  de  Dieu  roy  de  Jérusalem  et  de 
Sicile,  aile  oniieur  du  Saint-I'.fpril,  trou- 
veur  et  fondiur  de  la  très  noble  compagnie  du 
Saint-Esprit  au  droiL-desir,  commencée  le, 
jour  delà  l'enlhecoitel'andcgrac(  M.CiX'.LlI . 
Nous  Loys  par  la  grâce  de  Dica  roi  de  Jéru- 
salem et  de  Sicile,  aile  onneur  du  Saint-Eê— 


36 


('.31 


DicTioNNMiir:  DES  (MU>ni:5  nr.i.iGMxx. 


i:32 


prit,  Irijui-l  iour  pur  sa  gra.  e  noua  fusmcs 
couronnez  de  rus  royaumes,  en  rss  ncement 
ri  acroissemenl  ti'onnrur,  avons  ordonné  de 
faire  une  Compagnie  de  Chernliers  qui  seronl 
appeliez  les  Cluraliers  du  Snint-Èsprit  au 
druil-desir,  rt  tes  d.  Clirvnliers  seront  m 
nombre  de  trois  cnt;  desquels  nous  comme 
iroureur  rt  fondeur  de  celte  compagnie,  sr- 
mni  princeps:  et  aussi  doivent  Ctre  tous  nos 
successeurs  roy<  de  Jérusalem  et  de  Sicile,  lit 
i)  tous  ceux  que  nous  avons  cslus  et  esliront  à 
esire  de  la  dite  compagnie,  faisons  à  scavoir, 
(/ne  nous  pensons  à  faire,  se  Dieu  plaît.  In 
])reiniere  [este  au  chastel  de  l' lùif  rnrliaiité  du 
merveilltux  pcril,  le  jo}ir  de  la  Pculhecosie 
pmchiiine  venant.  <t  pour  ce  tous  1rs  dessus 
dits  cootpngnons  gui  bonnement  pourront, 
soient  au'ltl  jour,  audit  lieu,  en  telle  manière 
comme  cy  après  sera  det  isé:  et  a  doncques 
sera  plus  a  pluin  à  tous  les  compagnons  parle 
de  celte  malieire. 

Prciiiii'renieiil  ils  devainiil  jurer  qu'ils  don- 
iioraicnl  aide  et  secours  à  ce  prince  de  loul 
leur  pouvoir,  soit  à  la  guerre,  soil  en  toulcs 
aulres  ocrasiori'*.  Tous  les  clievaliers  de- 
vaient porter  un  ncrui  de  telle  coul  irr  qu'ils 
voiilaieni  sur  leurs  habiis,  on  un  endroit  où 
il  ptjl  être  ru,  et  dessus  ou  dessous  le  nœud 
ils  devaient  niottre  ce.-,  paro'es:  se  Dieu  plais. 
Li'  \endredi  ils  devaient  porter  un  cliapcron 
noir  avec  un  nœud  do  soie  blanclie  sans  or, 
argent  ni  perles.  Si  un  chevalier,  s'etanl 
trouvé  dans  quelque  action,  avait  été  hiessc 
o'.i  avait  blessé  son  eniieini,  et  qu'il  eût  rem- 
porté l'avantage,  il  devait  porter  dès  ce  jour- 
l.'i  son  nœud  délié,  jusqu'à  ce  qu'il  eût  été 
au  saint  sépulcre.  Son  nom  devait  être  écrit 
sur  le  nœud,  qu'il  devait  poiler  ensuite  lié 
comme  auparavant  aveo  ces  paroles,  (7  a 
pieu  à  Dieu,  et  dessus  le  nœud  un  ray  ardent 
du  Saint-lîsprit:  ce  qui  était  appaicmmenl 
une  (le  ces  flamines  en  forme  d.-  langue  do 
fi;u  sous  la  figure  desquelles  le  Saint-Esprit 
ilcscendit  sur  les  apôtres  dans  le  cénacle. 
Ils  devaient  porter  aussi  une  épée,  sous  le 
pommeau  do  laquelle  leurs  nom  et  surnom 
élaienl  écrits  avec  ces  ])aroles:5e  Dieu  plnist. 
ils  jeûnaient  tous  les  vendredis  de  l'année, 
ou  bien  il  leur  était  libre  d-  donner  ce  jour- 
là  à  manger  à  trois  pauvres  en  llionneur  de 
Dieu  1 1  du  Saint-Hsprit. 

'l'ous  les  ans  ils  se  trouvaient  à  Naples  le 
jour  de  la  l'entecôte,  au  cbâle.iu  de  l'Oliuf, 
et  comme  les  étrangers  et  cens  qui  6  acnl 
de  pays  éloignes  étaient  obliges  de  faire  des 
déi'.enses  pour  leur  voyage,  le  roi  les  rcm- 
l'Oursail  des  frais  qu'ils  avaient  faits.  Ils 
a\  aient  dans  celle  assemblée  des  li.ibils 
b:anes.  Ils  y  devaient  parler  par  écrit  tous 
les  faits  (l'armes  qu'ils  avaicntaccomplis  dans 
l'année,  et  ceux  que  l'on  tronvail  les  plus 
considérables  él.iient  écrits  dans  un  livre 
(lu'on  appelait  le  livre  des  ai  cnements  aux 
cltcvalieri  de  la  Compagni-  du  Saint-Esprit 
ait  droit  dtsir.  Si  ((ueliiuc  chevalier  avait 
fait  une  action  indigne,  il  devait  se  trouver  à 
pareil  jour  au  château  de  l'Oliuf,  vêtu  de  noir 
avec  une  flamme  sur  le  cœur  el  ces  mots  en 
gros  cararlérc;:  J'ai  es;,érancc  au  Saiul-l's- 


prit  de  mu  grande  honte  amender.  Il  no  man- 
geait point  ce  jour-là  avec  les  chevaliers, 
mais  seul  au  milii-u  de  la  salle  où  le  prince 
et  les  aulres  chevaliers  mange.iienl:  ce  qui 
durail  jus()u'àce  que  le  prince  avec  son  con- 
seil l'eût  rétabli  en  son  honneur.  Il  y  av  it 
aussi  dans  le  même  château  une  table  t|ne 
l'on  appelai!  la  table  désirée,  où  mangeaient, 
le  jour  de  la  l'enlecôte,  tous  les  chevaliers 
qui  pendant  l'année  avaient  délié  le  no-ud. 
Ceijx  qui  avaient  fait  les  plus  belles  actions 
él.iient  assis  à  la  place  la  plus  honorable  de 
la  table  ;  et  s'il  y  en  avait  quelqu'un  qui  per- 
lât son  nœud  relié  avec  une  llainme,  on  lui 
mettait  sur  la  léie  une  couronne  de  laurier. 
La  fêle  étant  finie,  on  tenait  un  chapitre 
dans  lequel  il  élail  permis  de  retrancher  ou 
d'ajouter  aux  statuts  ce  (|ue  l'on  croyait 
plus  convenable  pour  l'honneur  et  l'avance- 
ment  de  l'or. Ire.  Un  chevalier  qui  avait  dé- 
jà reçu  quelque  ordre  avant  que  d'être  admis 
dans  celui  du  Saint-Esprit  au  droit-dé-ir, 
devait  le  quitter,  ou  ne  le  pouvant  pas  faire 
honnêtement,  celui  du  Saint-Esprit  devait 
être  le  premier,  et  dans  la  suite  il  n'en  de- 
vail  recevoir  aucun  sans  la  permission  du 
prince;  mais  on  ne  devait  pas  la  lui  deman- 
der qu'on  n'eût  porté  le  nccnd  relié  avec  l,i 
(lamme.  Après  la  mort  d'un  chevalier  les  pa- 
rents élaienl  obligés  de  porter  son  épée  au 
prince,  qui,  après  l'avoir  reçue,  faisait  dire, 
huit  jours  après,  lit!  office  solenml  pour  le 
repos  de  l'àme  du  chevalier  décédé.  Tous  les 
autres  y  assislaicnl.  Le  plus  proche  parent 
ou  un  ami  du  défunt  prenait  son  épée  par  l,i 
pointe  el  l'olTrait  sur  l'autel,  étant  suivi  du 
prince  cl  des  ;.utres  chevaliers  qui  accom- 
pagnaient celle  épée  jusqu'à  l'autel.  Ils  so 
meltaienl  cnsuilc  à  genoux,  priant  Dieu  pour 
l'àme  du  chevalier  décédé,  et  après  le  ser- 
vice on  attachail  celte  épée  à  la  muraille  do 
la  chapelle  :  un  devait  mettre  dans  l'espace 
de  trois  mois  une  pierre  de  marbre  i>ù 
élaienl  m,;rqucs  le  nom  du  chevalier,  le  lieu 
el  le  jour  de  sa  morl.  S'il  avait  porté  la 
flamme  sur  le  no'ud,  on  ajoutait  sur  celte 
pierre  d-  marbre  une  llanime  d'où  sortaient 
CTS  paroles:  Il  a.heva  sa  partie  du  droit-de- 
sir,  el  chaque  thevalier  était  encore  obligé 
(le  lairc  dire  sept  messes  pnur  le  repos  de 
son  àme. 

Telles  étaient  les  principales  obligations 
des  chevaliers  de  l'ordre  du  Sainl-Espnt 
au  droit-des.ir,  prescrites  par  leurs  statuts 
qui  contenaient  vingt-trois  chapire*,  anx- 
q'jcls  on  ajouta  cet  autre  l'an  i'.i'i'i ,  qui 
marquait  aux  chevalii'rs  en  quelles  occa- 
sions ils  pouvaient  délier  le  nœud  :  J tcm  , 
il  est  déclaré  pur  ce  dernier  chapitre  rjoûiè 
m  la  première  feste  passée  de  la  l'eniecusle 
l'an  de  grâce  l.'J.'i.'},  que  nul  compignon  dn- 
dit  ordre  n'en  pcitsse  deLer  le  nru  ,  .fiiion 
pour  la  manière  qui  s'eu.-iuit  :  l'e.W  à  sca- 
voir que  se  aucun  des  compagnons  dell'ordre 
se  trouvera  en  au'un  fait  d'armes  la  ou  le 
notniire  de  tes  tr.nemis  seront  cintiuaiilc  har- 
bus  ou  uuties  et  la  pari  du  Chevalier  d'il- 
(irdre  n'en  s'eslenlit  plus  que  le  nombre 
d:  ses  adversaires,  se  ledit  CItevulier  .-f  pvu- 


H53 


NOl 


NOl 


voit  pour  son  honneur  tant  uvancirr  qu'il 
put  eslre  le  premier  à  ferir  el  envayr  les 
irinemis ,  ou  se  il  piiuvoil  prendre  le  ca- 
pitaine de  ses  ennemis  ,  et  la  pn  de  la  ba- 
taille sera  honorable  pour  la  part  dudil 
Chevalier  dcU'ordre  ;  il  ptiet  deliir  le  neu. 
Item  se  aucuns  desd.  cumpof/nons  dell'or- 
dre  se  Irouroicnt  en  aucuns  faits  d'aimes  la 
ou  le  nombre  de  leurs  ennemis  fussent  trois 
cent  barbus  on  plus,  et  ta  part  des  Cheva- 
liers dell'ordre  non  g'estendit  outre  le  nom- 
bre des  ennemis  ,  el  les  Chevaliers  ou  Che- 
valier delVordre  fussent  les  premiers  fereous 
en  la  bataille  ou  eschielle  des  ennemis,  et 
que  la  fn  de  la  bataille  sera  honorable  pour  la 
part  desdils  compagnons  dell'ordre  :  eux  pa- 
vent deslicr  le  neu  en  la  manière  susdite  si 
notoirement  que  chacun  soit  tenu  monsirer 
au  prince,  et  à  son  cunseil ,  de  son  bien 
fait   vrayrs   enseignes. 

Louis  lie  Taiciile  n'ayant  poiiil  eu  d'en- 
fants, cet  ordre  fui  aboli  aprôs  sa  mort 
par  les  désordres  el  les  révolutions  qui 
jirrivèrcnt  au  royaume  de  Napics.  L'on 
aurait  ignoré  les  statuts  que  «e  prince 
avait  prtscrits  aux  chevaliers  de  cet  or- 
dre, si  l'original  n'était  tombé  au  pou- 
voir de  la  république  de  Venise,  qui  en 
fit  présent  à  Henri  111,  roi  de  France  et 
de  Pologne,  lorsqu'il  passa  à  Venise  à  son 
retour  de  Pologne.  M.  Le  Laboureur  les 
a  fait  imprimer  dans  ses  additions  aux 
Mémoires  de  M.  de  Castelnau.  La  inc- 
ir.oiie  de  cet  ordre  s'est  toujours  conservée 
à  Naples  par  le  moyen  des  armes  et  des 
tombeaux  de  plusieurs  de  ers  chevaliers, 
que  l'on  voit  en  différents  endroits  de  cette 
ville,  et  paiticulièremenl  dans  l'église  ca- 
thédrale, où  est  le  tombeau  de  Colluîio 
liozzulo,  <iui  avait  délié  le  nœud  et  l'avait 
relié  à  Jérusalem  ,  comme  il  paraît  par 
l'épitaplie  de  ce  chevalier,  au  bas  de  ci  lie 
de  son  père  ,  qui  était  chevalier  de  l'or- 
dre de  l'Etoile.  JJic  jiicet  UreuHus  miles  Col- 
lutius  Buzzulus,  filius  ejus,  qui  fuit  de  socir- 
lalc  Nodi,  illuslris  Ludovici ,  reijis  Siciliœ , 
quein  nodum  in  cuinpali  bello  vicloriose  dis- 
solvil,  cl  diclum  nodum  religavit  in  Jéru- 
salem; qui  ubiti  ann.  Domini  M.  CCC.  LXX, 
die    VIII   Scptembrù,   IX   indictione. 

Cet  Ofdre  était  aussi  sous  la  proiection 
de  saint  Nicolas,  évéquc  de  Mire;  et  sur 
le  tombeau  de  Hubert  de  lîursenza,  qni 
est  dans  l'église  de  Sainte-Claire  à  Naples, 
l'on  voit  les  armes  de  ce  chevalier  du  Nœud 
entourées  d'un  ruban  au  haut  duquel  il 
y  a  le  nœud  de  l'ordre  et  au  bas  l'image 
de  saint  Nicolas.  Les  d.fi'érenis  bablllemenls 
de  ces  chevaliers  (1)  que  nous  donnons 
ici,  sont  ^lirés  de  la  bibliothèque  du  roi, 
où   ils   sont   représeniés   en    miniature. 

IJernard  Giustiniani  ,  Ilisl.  di  tutti  ql% 
Ord.  militari.  Schoonebeck ,  Ilist.  des  Or- 
dres militaires;  et  Le  Laboureur,  Mémoiies 
de  Castelnau,    lom.   11,  pag.   895. 

NOllŒS  (SoEuns).  Voijez  CiiLlites. 
NOLI  (CuANOiNESSES  de),  dans  l'Eial  de  Gé- 
(1)  Vuij.,  n  la  (in  du  vu!.,  n"^  2j2,  ■!<):,  et  'iW. 


nr.» 


nés,  cl  autres  communanlcs   de  filles  sou- 
mises â  l'ordre  île  Suint-l-ranrois. 

Nicolas  des  IJrsins  ,  comte  de  Soleto,  no  se 
content.'»  pas  de  faire  réparer  ,  l'an  13o'^ ,  1« 
monastère  des  reliîiieuses  de  Sainte-Claùo  à 
Noii  ,  dans  l'Ktal  àv.  Gènes,  sous  le  litre  de 
Saint-Jaci|nes  ;  mais  par  une  piété  autant 
particulière  que  sainte,  il  y  fonda  aussi  un 
collège  de  chanoim-sses,  auxquelles  il  donna 
le  soin  d'y  él  ver  de  jeunes  filles  dans  Ii 
piété,  jusqu'à  ce  qu'elles  fus>enl  eu  .i{;e  d'em- 
brasser un  état.  Ce  fondateur  leur  prescri- 
vit une  manière  de  vie  par  des  (ousiitutjons 
qu'il  dressa,  et  qui  contenaient  quarante  et 
un  chapitres,  dont  le  cinqu^ième  fait  mention 
d'une  bulle  de  Boniface  VIII  ,  qui  approuva 
celte  société.  H  divisa  cette  communauté  en 
trois  classes  :  la  première  fut  de  chanoims- 
ses  destinées  au  service  divin  ;  la  seconde  fut 
de  filles  séculières  ,  et  la  troisième  de  sœurs 
converses,  destinées  nu  service  d 'S  autres.  !! 
commit  aux  premières  l'éducation  des  filles  ' 
séculières,  jusqu'à  ce  qu'eLes  eussent  fait  le 
choix,  ou  (le  rester  dans  celle  maison  en  y 
gardant  la  clôture,  ou  de  se  faire  religieuse"^ 
Clai  isses  dans  le  monastère  de  Sainl-.lacques, 
ou  de  se  marier.  Ces  chanoincsses  devaieril 
réciier  l'office  selon  le  bréviaire  des  Frèr.  <* 
Mineurs,  solenuiser  toutes  les  fêles  des  saints 
de  cet  ordre  ,  dont  elles  devaient  avoir  tou- 
jours un  religieux  pour  confesseur.  Leur  ha- 
bit était  aussi  en  quelque  façon  scmblaole  ,i 
celui  des  religieuses  de  Sainte-Claire,  n'eu 
étant  distinguées  que  par  un  surplis  qu'c  lies 
portaient  sur  une  robe  grise,  lice  d'une  corde 
blanche;  el  elles  avaient  pour  chaussure  des 
socques  ou  sandales  de  bois.  Les  filles  sécu- 
lières el  les  sœurs  converses  destinées  pour 
le  service  de  la  maison,  avaient  auisi  une 
roiie  grise  avec  un  manteau  de  même  li); 
les  sœurs  converses  devaient  réciter  jtour 
leur  office  autant  de  Pater  et  d'.4tc  que  saint 
François  en  a  ordonné  par  sa  règle  pour 
les  frères  lais  de  son  ordre.  Cette  maison 
et  le  monaslère  de  Sainl-Jacciues  ont  été  sou- 
mis dans  la  suite  à  la  juridiction  de  révé4|oe 
de  Noli  ;  mais  les  chano.uesses  el  les  reli- 
gieuses Clarisses  ne  quittèrent  point  le  bré- 
viaire, l'habit  ,  ni  la  direction  des  religieux 
de  Saint-François. 

Luc"Wad,ng.'  Annal.  Minor. iom.  VHI,  «</- 
dit.  ad  lom.  IV,  n.  3. 

lintre  les  monuiiienls  de  piélé  qui  ont  été 
érigés  en  Espagne  |iar  les  soins  el  les  libé- 
ralités du  cardinal  Ximenès.  archevêque  de 
Tolède,  et  les  religieux  de  l'ordre  de  Saint- 
François  ,  il  y  a  deux  monastères  de  reli- 
gieuses du  tiers  ordre  du  même  saint  Fran- 
çois, tous  deux  siius  le  litre  de  Saint-Jean  de 
la  Pénitence.  Le  premier  fut  fondé  à  Aicala 
par  ce  cardinal,  l'an  loO'j,  pour  Irente-îrois 
religieuses  ,  dont  le  nombre  ne  peut  être 
augmenté  ,  el  il  y  joignit  une  communaulé 
de  pauvres  demoiselles  ,  sous  le  nom  de 
Sainte-Elisabeth,  qui  devaient  être  soumises 
à  la  conduite  de  ces  religieuses,  jus(|u'à  ce 
qu'elles    fussent  en  étal  d'être  mar.éis   ou 


C-)  V'V 


liii  (lu  vol.,  u"'  2"5  et  ''9j. 


IT15                                        DlCTIONNAmE  DES  ORDHKS  nRl.lCIELX.                                          tl/lG 

li'tMre  ifIii;ioiisc<:,  nvcc  ordre  que  si  elles  f.ii-  Après  que  Ferdinand   Corltz   ml  ci>n(iiits 

s.iienl  cliinx  de  l.i  vie  roli(;ieuse,  le  inonas-  le  Mi'xi(|ii(>  pour   le  roi  d'lisp;i;,'ne  ,  ls.il>c|le 

1ère  scriiil  «)bli(;é  de  les   rcce\oir  ;  el  que  si  de  l'orluii.il,  lemnie  de  l'onipeieur  l.harles  Y, 

elles  voulaii'Ul  se  marier  ,    il  fournirait  leur  >  envoya  des  reli^ieii.ses  Clansses  et  du  lieis 

di)l,   njanl    laissé  pour  cel  effet   des   fonds  ordre  de  Sainl-François  ,   qui  y  firent   plii- 

sufiisdnl'i.  ^ieurs  clablisseincnts ,  roniMie  à  Ziiclntnilci  , 

(Jelle  lonilatian  ayant  réussi,  il  en  fit  une  Tetzeuci,  (Juauslliitlani,  1  elmanaci,  l'apea- 

seinldablc  à  Tolède,  où  il  (il  bàlir,  e  .  1511,  ca,   'l'Iievaraiia  et  autres   lieux.   L'on   fonda 

un  monastère  sous   le  même  litre  de  Saini-  auprès  de  leurs  monastères  di  s  coiiimunau- 

Jian  de  la  l'enilencc,  dans  ieqiid  il  y  a  oidi-  lis  de  jeunes  lilles  indiennes  pour  être  ele - 

naircment  plus  de  qiialre-vingls  relifjieuses  ^ées  sous  leur  conduite  ,  el  pour  y  être  ins- 

(|ui  font  prolVssion,conimerellesd'Alca!a,de  truites  des  mystères  de  la  reliui'U  el  de  tous 

la  troisième  règle  de  saint  François;  el  pro-  les  ouvrages  qui  lonvieiineni  aux  personnes 

ibe  ce  monastère  il  fonda  aussi  une  ccmmu-  de  leur  sexi^.  Ces  communautés  de  lilles  in- 

naulé  de  deux  cents  jeunes  demoiselles,  qu'il  dicniies  sont  si  considérables  ,  qu'elles  sont 

mit  sous   la   coiuluile  de  quelques-unes  de  ordinairement  de  quatre  ou  cinq  (cnts  lilles. 

ces  religieuses.  I.c  pape  Léon  X  lui  accorda  Luc  NN'ading,  Annal.  Minor.  lom.  \\\\,  ad 

un  bref  pour  rcl  effet  en  lolV,  par  leiiucl  il  ann.  Io30,  n.  1. 

lui  permit  qu'onire  les  rentes  ci  les  revenus  Le  même   Wading  ,  de  Gubernatis  ,  le  P. 

considérables  qu'il  i.ffi'Ciailà  celte  maison  ,  Artus  du  Alouslier  it  qurlques  autres  liistu- 

li  y  pût  unir  deux  ou  liois  bénéfices  et  même  r.en>  ,  ont   fait  mention   d'un  ordre  sous   le 

davantage,   soit  qu'ils  fu^sent  .^imples  ou  à  nom  de  l'.\scensioii  de  Nolrr-Scigneur  ,  (jui 

«barge   d'àmes  ;  et  cela  non-seulement  pour  embrassa  la  règle  des  Frères  Mineurs  ;  mais 

rentrelicn  des  religieuses  cl  des  jeunes  de-  comme  ils  n'onl  point  dit  en  quel  lieu,  pour 

moisillcs,  mais  pour  aider  à  marier  ces  der-  quelle  fin  ,  ni  en  ((uelle  aimée  cel  ordic  d  été 

iiiérei  après   qu'elles  auraient  demeuré  six  institué,  nous  n'en  jioiivons  rien  direiion  plus, 

ans  dans  la  comm.naulé,  ou  pour  servir  de  Luc   Wading,   lom.   \  IIL   ad  ann.  Ia2'{, 

liot  à  cel  c.N  (jui  voudraient  être    religieuses  n.  IV.  Dominic.  de  tiubernalis,  Or/>.  iltriz/^/iif. 

dans  le  moiia>tère.  riiilippe  11,  roid'Espagiie,  lom.   IL   Artus    du    Mouslier  ,    Mariynilny, 

angmenia  de  quarante  le  no:i:biede  ces  de-  t'randscaiium.  Mjiioel  da  Esperanca,  UtsI. 

moiselles  ,  voulant  que  ces  quarante  places  Suaficu,  part.  i. 

lussent  remulies  par  les  filles  de  ses  olficiers  L'annaliste   des    Frères    Mineurs  prétend 

du  seiond  rang,  ayant  assigné  pour  chacune  qu'ji  y  ;,  eu  des  recluses  de  l'ordre  de  l'An- 

de  ces  demoiselles  cinq  cents  ecus  d'or,  soit  nonciade    dans   l'église  de  i^aint-I'ierre  du 

pour  élre  religieuses,  soil  pour  être  mariées.  Vatican  ,  à  Home,  se  fondant ,  à  ce  qu'il  dit, 

t:«lte  communauté  de  jeunes  filles  subsisle  sur  une  bulle  du  pape  Léon  X,  de  l'an  1313, 

encore;  mais   celle   d'Abala   fut  trunsfene  par  laquelle  ce  poniifc,  en  accordant  aux  re- 

d.ns  la  suite  à  Madrid,  cl  fut  mise  sous  la  di-  ijgieuses    Annonciades    des    dis    Vertus    les 

lection  des  Augu-lines  Décliaussees  du  mo-  ,„èmes  grâces  qu'il   avait  accordées  aux  re- 

nastèie  de  Sainle-Lli.sabclb  ,  el  soumise  à  la  ligieuses    Clari^ses  ,  déclare  qu'il  veut  que 

juridiction  du  grand  aumônier.  les  quatre  recluses  de  l'église  de  Sainl-l'ierre, 

Luc  Wading,  Annal.  Minur.  lom.  VIII,  ad  qui  y  demeuraient  dan.s  la  eliapclle  de  failli- 

ann.  lîiO'i,  n.  58;   d  Mémoires  manuscrits.  André,  jouisseni  des  mêmes  grâces  pendant 

A  l'imiiation  du  cardinal  Ximenès,  Ferdi-  (^  temps  qu'elles    ^  demeureraient,  ou  dans 

nind  de  Silva  ,  comle   de   Cifuenles  ,  fonda  quelques  autres  lieux  où  elles  garderaient  le 

dans  sa  ville  de  Cifuenles,  l'an  lo2o,  un  cou-  niéine  genre   de  vie.  Cel  auteur  n'ayant  pu 

\ent  de  religieuses  du   tiers  ordre  de  Saint-  tro'jver  à  quel  dessein  elles  avaient  été  reii- 

François,    sous    le  nom   de   Notre-Dame  de  fermées  dans  celte  chapelle ,  quelles  étaient 

llelhleem,  pour  les  demoiselles  et  suivaiiles  |^,„,.s  fonctions,  ni  quand  elles  en  sont  sor- 

d<.  sa  leniine,  qui,  éliiiil  demeurées  sans  mai-  Hes  ^  jc  conlenle  de  dire  qu'elles  étaient  de 

tresse  parla   mort  de  celle  dame,  témoigné-  l'ordre  de  l'AnnonciadeMuaiscomme  Léon  X, 

renl  à  ce  romie  qu'e. les  voulaient  se  coiisa-  i|;,„s    la    même    bulle,    parle  aussi  des  r,  li- 

crer  à  Dieu.  Il  fil  venir  pour  cet  i  ffel  drs  re-  gjeuses  du  lieis  ordre  de  Saint-François  .  il 

ligieuses  ilu  monastère  de  Sainl-Jcan   delà  y  a  plus  d'apparence  que  ces  rerlu>esclnient 

l'enitence  de  Tolède,  qui  demcnrèreni  avei  plutôt  de  celui-ci  que  de  celui  des  Annoncia- 

les  nouvelles  religieuses,  jusqu'à  ce  que  leur  ^\^.s^  puisque  ces  dernières  n'ont  pas   passe 

monastère  fût  achevé  ,  clonl  elles  ne  prirent  en  Italie. 

possission  que  l'an  L'i^lj.  A  coté  de  ce  mo-  Luc  Wading,  ylunn/.  ;Vi»ior.  lom.  Vlll.  ad 

iiaslère  (n'y  ayant  qu'un  mur  de  sép  ar.ilion),  ann.  I,'il3,  n.  il;  cl  Dominic.  de  Gubemalis, 

il   lundi    aussi   une   communauie  de    filles,  ()ib.  Serapliic.  [oin.  l\. 
semblablcà  celle  de  Tolède, qu'ilsoumil  aussi 

à  la  con  luile  des  religieuses  :  leur  église  est  NO.M  DE  jViSUS  (Dominicains  ok  t.*  co\- 

commune  ,  mais  I 'Urs  chœurs  sont  séparés,  ciiKGAriON  du  Saint-).    Vvycz  Louiiaiidik. 
■aussi  bien  que  leur  demeure.  Il  y  a  ordmai- 

le  icnl  dans  ce  inonaslère  plus  de  (luarante  NOTRE-DAME.   Voyez   Charité.  —  Com- 

rrligienses,  (|uisoiit,  aussi  bien  que  la  coin-  pmjmi;.   --  CoNciiùr.  \tion  .  etc.  —  Voyez  la 

itiuilaulé  d<-  lilles  séculières,  sous  la  juridic-  dés  gnalion  particulière  des  lustiluls  consa- 

l.oii  des  religieux  de  l'ordre  de  Saint-l  ran-  crés  à  la  sainle  \  ierge,  sous  le  litre  :  Noirk- 

\'01i. 


D\Mi:. 


1137  NOT 

NOTRE-DAMlî    DE    CHAUITÉ  (   1\ku 

GIIÎUSIÎS    DE    I.'oitDRE    De). 

C'est  avec  justiie  que  In  R.  P.  Eudes  , 
frère  de  M.  Mézcraj  ,  historiographe  do 
France  ,  doii  être  mis  au  nombre  des  fonda- 
teurs d'ordres,  puisque  non-seulement  il  a 
tonde  la  congrégation  des  Prêtres  Mission- 
naires de  Jésus  et  Marie,  rommiinémenl  ap- 
pelés les  Eulisles,  tuais  que  l'ordre  de  Notre- 
Dame  de  Charité  lui  est  aussi  redevable  de 
son  élahlissenienl.  Nous  avons  donné  la  Vie 
(le  ce  grand  serviteur  de  Dieu  {Voy.  Eudes), 
et  nous  allons  rapporter  ici  l'étiiblissern;  iil 
(le  l'ordre  de  INoIre-Dame  de  Charité,  (  oinnie 
étant  soumis  à  la  règle  de  saint  Augustin. 

L'ordre  de  Notre-Dame  de  Chanté  porte 
avec  justice  ce  nom,  puisque  la  charité  même 
cil  a  été  la  fin  principale,  ayant  été  établi 
pour  travailler  à  la  conversion  des  âmes  i)é- 
cheresses  ;  l'on  ptut  dire  que  c'est  un  ou- 
vrage de  la  grâce,  et  le  fruit  des  prédications 
(lu  P.  Eudps;  et  suivant  le  sentiment  de  cet 
homme  aposlolicjue  ,  il  a  pris  son  origine 
dans  les  sacrés  cœurs  de  Nolre-Seigni'ur  et 
de  la  sainte  Vierge,  embrasés  du  zèle  du  sa- 
lut des  âmes.  Ce  lervcnt  ministre  duSeigneur 
travaillant  ùu\  missions  d;jns  les  années 
1038,  1639  et  IG'iO,  avec  un  zèle  infatigable, 
plusieurs  filles  cl  femmes,  d'une  conduite 
peu  réglée,  furent  si  vivement  touchées  de 
ses  discours,  qu'elles  le  vinrent  trouver,  le 
priant  de  leur  donner  un  lieu  de  reluge  pour 
y  faire  pénitence  de  leur  vie  déréglée,  et 
quelques-une>  lui  avouèrent  que  la  néces- 
sité était  la  cause  de  leur  désordre.  Ce  saint 
liomnic  les  ajanl  aidées  par  ses  aumônes  , 
et  n'ayant  point  de  lieu  de  retraite  ,  il  les 
commit  aux  soins  de  quelques  personnes  de 
piéié. 

linlre   autres  personnes  il  y  eng.igca  une 
fi'mnie  fort  simple  appelée  Madeleine  l'Amy, 
qui,  quoicjue    pauvre  des   liieus   temporels  , 
élail  néanmoins  riche  en  piété  et  remplie  de 
chariti'.    V.l.c  les  rc(:ut  dans  sa  maison  ,  les 
iîisiruisail,    leur   apprenait  à  travailler  ,  et 
fournissait  à  tous  leurs  bi-soins  parle  moyen 
(les  aumônes   (|u'ou    lui  faisail.  Un  jour  que 
celle  bonne  femme  était   à  sa  porte,  elle  vit 
passer   le   P.   Eudes   accompagné  de  M.  de 
l!ei  iiières  ,  de  M.  et  de  madame   de  Camilly 
et  di;  (jui'lques  autres  personnes   d'une  piété 
dislingu;'e;elles'écria  daiisun  transport  plein 
«le  zèle  :  Où   allez-vous  ?    sans    doute  vous 
allez  dans  les  éijlises  ij  manijer  lcsitna(jes,aprés 
ijuoivouscroyrz  être  biendévots;  ce  n'est  pas 
là  011.  gii  lelicvre,mais  bien  à  travailler  à  fon- 
der une  maison   pour  ces  jiaitvres  filles  qui  se 
perdent  faute  de   moyens  ei  de  c  nduile.  Ce 
discours  rusli(ii.e,  mais  plein  d'ardeur  ,   qui 
ne  fut  d'abord  qu'un  sujet  de  risée  à  la  com- 
pagnii',  ne   laissa   pas  de   produire  dans  la 
sniti'  de  bons  elTels  ,  particulièrement   dans 
l'espril  du  1'.  Eudes,  q.ii  voyait  depuis  long- 
tetnps  la  nécessité  qu'il  y  avait  d'établir  dans 
la    ville   de   Caen  une  pareille  maison,  il  se 
déiermina   à   y  travailler  tout  de  bon,  après 
que  (  ette  bonne  femme  l'eut  encore  une  fois 


NOT 


tl>8 


exhorté  à  le  faire,  comme  il  passait  encore 
devant  sa  maison  avec  les  mêmes  personnes 
dont  nous  avons  parlé,  et  qui  concertèrent 
dès  lors  ensemble  des  moyens  ((u'il  fallait 
prendre  pour  ce  nouvel  établissement.  L'on 
conclut  qu'il  fallait  prendre  une  mai'^on  à 
louage  :  l'uu  promit  de  payer  le  loyer,  l'au- 
lie  de  la  fournir  de  meubles.  Il  y  en  eut  aussi 
qui  otTrirent  de  donner  du  l)!é  pour  faire 
subsister  ces  pauvres  tilles.  La  nraison  fui 
louée,  et,  le  2o  novembre  Hiit  ,  elles  y  l'u- 
renl  renfermées  sous  la  conduite  de  quelques 
filles  dévoles. 

Le  nombre  des  pénitentes  s'augmenta  en 
peu  de  temps  ;  Le  P.  l^uiics  les  visitait  sou- 
vent, les  consolait,  leur  donnait  de  bonnes 
instructions,  et  ne  négi  geail  rien  de  ce  qu'il 
croyait  nécessaire  à  leur  avancement  spiri- 
tuel et  temporel.  Il  leur  fit  observer  la  clô- 
ture, et  par  la  permissinn  de  .lean  d'AuRen- 
nes,  pour  lors  évêqiie  de  Bayeiix.l'on  érigea 
dans  celle  mai>on  une  petite  chapelle,  où  le 
P.  lîudcs  et  quelques  autres  de  ses  mission- 
nairis  disaient  tous  les  jours  la  sainte  messe 
et  administraient  les  s.icremenis  aux  person- 
nes qui  y  dcincuraienl.  Enfin  les  écbcvins  de 
la  ville,  voyant  l'utilité  de  cet  étahlisscmenl, 
y  donnèrent  leur  consentement. 

Le  P.  Eudes  \oyant  que  les  filles  dévoles 
qui  s'employaient  à  rinslruction  de  ces  pé- 
iiiicnles    se  désistaient   (acilenient  <i  ;  cette 
o'uvre  de  charité,  à  la  réserve  d'une  de  ses 
nièces,  que  ses  parents,  par  inspiration  divi- 
ne, avaient  associée  dès  l'âge  de  onze  ans  à 
ces  pieuses  dames,  il  jugea  à  propos  de  don- 
ner la  direction  de  ces  pénilentes  à  des  per- 
sonnes religieuses,  soit  (]ue  l'on  en  fît  venir 
de  quelque  monastère  ou  que  l'on  établit  un 
nouvel   ordre,  où    les   personnes   qui   y   fe- 
raient profession,  outre   les    trois   vomix   de 
relif;ion,  en    feraient  encore  un   quatrième, 
de  s'employer  à  la  conversion  des   péniten- 
tes. Le  dernier  evpédient  fut  trouvé  le  plus 
avantageux,  et  l'on  obtint  du  roi  Lou  s  XIII 
des   lettres  i)atenles,  au   mois  de   noviMnlirc; 
1(1^2,  par   lesquelles  Sa    Majesté   permettait 
d'établir  dans  la  ville  de  ('aen  une  comiuu- 
naiité  religieuse  où  l'on  ferait  profession  de 
la  règle  de  saint  Augustin  ei  un  vau  parti- 
culier de  travailler  à   l'instruction  des  filles 
et  fenmies  pénitentes  qui  voudraient  s'y  reti- 
ler  pour  un  tein|is.  Il  y  a  bien  de  l'apparence 
(juc    l'on   mit   d'abord   ces    lilles    pénitentes 
sous   la   conduite  des  religieuses   ûf  Noire- 
Danse  du  Refuge;  el  il  semble  que  ce  soit  le 
sentiment  de  M.  liuet  (l),évêque  d'Avran- 
ches.  Voici  ce  qu'il  en  dit   :   «  Celte  «ominu- 
nauté  prit  d'abord  le  tiire  de  Notre-Dame  du 
Kefuge.  Après   la    fondation   de  AL  de   Lau- 
grie,  l'on  reçut  des   religieuses  d'un  institut 
pariitulier,  employées   à   la  conversion  et  à 
la  conduite  des  filles    et    femmes  aspirant  à 
changer  de  mœurs  el  à  faire  péniience  da 
liurs  dérèglements   passés.  Au   mois  de  no- 
vembre  1GV2,  ces   pénitentes   olitinrent   des 
lettres  patentes  qui  leur  permettaient  de  se 
mellrc   sous   la  condaitc  de  celte  comnui- 


(I)  lliici,  Aiiiiiiitiiés  de  lavillede  Caen. 


ii-,:>  DK.Tio.NN.MKF:  DKS  onortES  urLiciiaix.  mn 


n.Ttil/'  rpIijiîeMsc.  "  ('c  n'élMient  p.is  pciil-f'lrc 
li'S  iiilenliciiis  ctii  P.  Kiulcs   :  c'i-sl   i.our(iu  ù 


01  cnrp   qu'on    iili'o.  quVIIo   rôsuhil   do   l'oin- 

_. , ,  brassor.  lillo  on  fui  la  piorrc  ftMid  iinonlalo. 

If»  inéiiloircs  que  j'ai  on  main  disiMilqne  los  ayant  rerii  la  premii^ro  l'Iiahil  de  col  ordro 
lions  disscins  du  V.  lùidos  furonl  li'ahord  au  mois  de  février  1('.'»5,  el  l.i  seconde  qui  le 
Iravirsés,  que  l'un  fil  nailrc  un  grand  nom-  recul  fui  la  nièce  du  P.  Kudes,  de  laquelle 
lire  di'  difficullés  qui  paraissaienl  insurmon-  nous  avons  déjà  parlé.  Elle  prit  le  nom  de 
tailles,  in.iis  que  sa  constance  vainquit  toulcs  sœur  Marie  de  la  Nalivité,  el  vécut  toujours 
ces  oppositions,  ot  qu'ayant  dessein  que  les  dans  une  observance  si  exacte  de  ses  rc;;les 
religieuses  di' rd  insiilut  fussent  formées  se-  el  de  ses  conslilutions,  qu'elle  a  élé  supé- 
liin  l'esprit  de  saint  François  do  Sales,  il  tra-  ricure  pendant  cinq  triennaux. 
valll.i  avec  M.  ot  m;idanie  de  Camilly  à  obte-  Lorsque  l'on  délibéra  sur  la  manière  do 
nir  de  l'évéqui-  de  Hayeux  des  religieuses  do  1  liabillement  (1)  que  los  religieuses  deva  onl 
la  Visilaiion  pour  les  gouverner  d'abord.  En  ]U)rtor.  l'on  convint  qu'il  serait  blanc,  pour 
olTel  ,  la  mère  Françoise-Marguerite  Palin  signifier  la  [uiroté  dont  elles  devaient  f.iire 
futchoisie  (lour  être  supérieure,  et  elle  arriva  profession,  pour  combattre  el  détruire  dans 
m  celte  maison  le  10  août  de  l'année  1C!^'^,  le  cœur  des  pénitentes  le  vice  qui  y  esl  op- 
.iccnmpagnée  de  deux  autres  religieuses  du  posé.  Cet  haliil  consiste  en  une  robe,  un  sca- 
niéme  ordre,  cl  tirées  du  monastère  qu'elles  pulairc  et  un  manteau,  le  tout  de  même  cou- 
oiil  à  Caen.  leur.  Elles  onl  un  voile  noir  pour  couvrir 
Ce  fi;t  pour  lors  que  l'on  commença  à  leur  tète,  ot  portent  sur  le  scaimlairo  un 
exercer  dans  los  pratiques  de  la  vie  reli-  ca*iir  d'argent  où  est  gravée  en  relief  l'image 
giense  plusieurs  personnes  de  piéié  et  de  de  la  sainle  \'ierge  ti>na;il  l'eiifiint  Jésus  en- 
vitIu,  iiui  devaient  ronsaiTcr  leur  vie  à  Dieu  Ire  ses  bras,  le  co'ur  eiivininnè  de  deux 
da  8  col  instilut.  Lo  I'.  l'Eudes  travailla  à  branches,  l'une  de  roses  et  l'autre  de  lis ,  ol 
dresser  les  règles  cl  les  consiiintions  de  ces  elles  ne  quillcnt  point  ce  cœur,  tant  le  jour 
nouvelles  religieuses  cnnforniémenl  à  colles  que  la  nuit,  pour  se  souvenir  qu'elles  doi- 
de  la  \'i!-ilation ,  y  ajoutant  seulcmenl  quel-  veni  avoir  gravées  dans  leurs  cœurs  les  ima- 
«pie  chose  de  propre  à  l'insliiut ,  suivani  la  ges  de  Jésus  cl  de  Marie, 
fin  pour  laquelle  il  élail  établi.  Il  donna  dos  La  persévérance  de  la  première  novice  fut 
règles  pour  les  filles  ot  Us  femmc^  péiiilon-  éprouToc  pendant  plus  de  seiil  années,  per- 
les, voulant  qu'elles  eusienl  un  apparlemi'nl  sonne  ne  s'otant  déclaré  fondateur  de  ce 
enréremenl  séparé,  cl  qu'elles  ne  fussent  ja-  monastère  pendant  ce  Icmps-là.  Mais  .  l'an 
mais  re(,-nes  pour  élre  religieuses,  quoi-  IGoO,  M.  Leroux  de  Langrie,  président  au 
quVlli  s  fussent  |.arf.ii!emenl  converties,  el  parlement  de  Uouen,  s'en  rendit  fmidaleuc, 
'Mie!i|ne  talent  et  capacité  qu'elles  eussent,  el  Edouard  Mole,  évoque  de  Itayoux.  ((iii  s'é- 
II  ordonna  seulement  que  celles  qui  auraient  î.iit  toujours  opposé  à  cet  élablissomeut  de- 
vocilion  pour  la  vie  religieuse  seraient  en-  puis  (lu'il  était  parvenu  à  cetévéché.  donna 
voyécs  en  d'aulres  maisons,  où  l'on  pourrait  enfin  son  consenlement  l'an  IGol,  le  S  fê- 
les recevoir  si  on  les  trouvait  capables  pour  vrier,  jour  dédié  el  consacré  au  sacré  dvur 
«;e!a,  comme  il  est  déjà  arrivé  à  plusieurs,  cl  dc  la  sainte  A'ierec.  C'est  pourquoi  le  S.iinl 
que  les  autres  seraient  remises  entre  les  instituteur  a  voulu  que  l'on  célébrai  tous  les 
niiiins  dc  leurs  parents,  ou  qu'on  leur  cher-  ans,  ce  jour-là,  avec  beaucoup  de  solennité, 
cluîrail  (iuol()ue  honnête  établissement.  l'anniversaire  de  l'établissement,  el  que  colle 

Le  bon  ordre  cl  la  régularité  que  l'on  ob-  léte  fût  aussi  titulaire  de  la  congrégaiion. 
servait  on  celle  maison  faisaient  trouver  à  Se  voyant  assuré  d'un  fondateur  cl  du 
celles  qui  s'y  étaient  retirées  le  joug  du  Sei-  consenlement  de  révé(|ue  ,  il  sollicita  de 
cnour  doux  cl  agréable,  ot  elles  éprouvaient  nouveau  pour  avoir  des  religieuses  de  la 
le  bimbeur  <le  leur  état.  Mais  cette  paix  et  Visilalion,  qu'on  cul  beaucoup  de  peine  à 
celle  Iranquillilé  furent  troublées  par  l'élec-  obtenir;  mais  cnlin  la  mère  Marguerite  l'a- 
lion  que  l'on  lit,  au  couvent  de  la  \'isilat:on,  lin  y  retourna  le  1'»  juin  de  la  mémo  année, 
de  la  mère  Marguerite  Patin  pour  supé-  el,  le  18  de  ce  mois,  les  cérémonies  do  l'éla- 
rieure.  Son  départ  causa  beaucoup  de  don-  hlisseinonl  furent  failes  parlegrand  vicaire  de 
lour,  el  pendant  son  absence  les  dilficullés  lévéque  de  liaycux.  Le  pape  .Mexandre  \ll 
de  rétablisvoment  augoionlèreni  :  ce  qui  érigea  celli'  congrégation  en  ordre  reli- 
obligen  le  s  deux  religieuses  de  la  Visilalion  gieux  par  une  bulle  du  '2  janvier  KKIG,  à  la 
qui  y  ciaionl  restées  de  retourner  en  b-ur  sollicitation  des  abbés  du  Val- lUcher  et  de  la 
monastère.  Mlles  laissèrent  le  gouvernement  Trappe,  qui  étaient  pour  lors  à  Kome  pour 
de  la  in.iisou  à  une  demoiselle  (lui  élal  pour  los  adairos  de  lour  ordre.  L'évêque  de 
lors  novice,  nommée  soiur  Marie  de  l'As-  IJayeux,  François  de  Nesmond,  ayant  reçu 
somption  d  •  'l'aillefi'r ,  qui  avait  eu  la  gêné-  celle  bulle,  témoigna  aux  filles  de  cette  con- 
rosilé  de  quillor  son  pays  et  ses  parents  en  grégation  (lu'ollcs  étaient  libres  de  relourner 
l'année  lO'i.'i,  après  avoir  enleiidu  prêcher  le  dans  le  monde,  les  vceux  (]u'ellos  avaient 
P.  Eudes  el  vu  les  merveilles  que  Dieu  ope-  fuis  jusqu'alors  n'étant  (|ue  situfdes.  Il  leur 
r.iil  par  le  moyen  de  C'  l  homme  apostolique.  ordonna  même  dc  sortir  de  la  clôture  pour 
Ivlle  lui  découvrit  le  dessein  qu'elle  avait  dc  élre  examinées  de  nouveau  sur  leur  voca- 
consai-rer  au  Seigneur;  et  il   ne   lui  eut  lion.  Elles  obéirent  à  leur  prélat .  mais  sans 


se 


pas  pluiol  parlé  d(-  cet  institut ,  i]ui   n'était      ilonncr  aucune  mar<iuc  d'inconstance  dans 
(I)   Vwj..  >  la  lin  du  vol.,  n"  207  Cl  SOS. 


mi 


NOT 


NOT 


1 1  i2 


!e  «^énéroux  dessein  qu'elles  avaient  ciilrc- 
pris  :  fuièles  à  celui  qu'elles  aviiicnt  clioisi 
Iiour  leur  époux,  elles  (icmamlèient  avec 
empressement  de  fiiiie  les  voeux  solennels. 
l.e  jour  (le  l'Ascension  fut  choisi  pour  en 
taire  la  cérémonie,  el  ces  innocentes  victi- 
mes s'esliraèreni  heureuses  de  renoncer  en- 
tièrement à  la  lerre  diins  un  jour  que  Notre- 
Seigncur  1  avait  quillée.  L'évêcjue  de  Bayenx 
ce  élira  la  messe  en  leur  chnpelle;  le  P.  Eu- 
des y  prêcha  en  présence  do  ce  préiil,  (jui 
reçut  les  va;ux  de  ces  nouvelles  religieuses. 
La  mère  Mar^uerile  l'atin  con'.inua  de  les 
gouverner  jusqu'à  sa  mori,  qui  arriva  l'an 
J6(>8,  et  depuis  on  a  élu  pour  supérieures 
des  reli^ieus'  s  de  cet  institut,  qui  s'est  mul- 
tiplié par  l'établissement  que  l'on  fil  à  Ren- 
nes l'ail  167V.  11  s'en  e-t  fait  un  aulre  à  Guin- 
gamp,  d.ms  l'évêché  de  Tréguier,  en  1678,  et 
un  aulre  à  Vannes  en  1G83. 

Le  P.  Eudes  a  voulu  que  dans  cet  ordre  la 
dévotion  aux  Cœurs  de  Jésus  et  de  Marie  fût 
en  particulière  vénération.  La  l'ôlc  tlu  Cœur 
do  la  sainte  Vierge  se  solennise  le  8  février. 
Elle  a  commencé  l'an  16!t3,  et  a  été  approu- 
vée par  quinze  tant  nrchevêiiues  qu'évéques 
de  France,  el  autorisée  par  les  souverains 
pontifes,  qui  ont  accordé  beaucoup  d'indul- 
genies  le  jour  de  cette  fête,  aussi  bien  que 
pour  cel  e  du  Cœur  de  Jésus  ,  qui  se  célèbre 
le  do  octobre.  11  y  a  des  nlfices  propres  pour 
ces  deux  fêles,  qui  ont  été  dressés  par  le  P. 
Eudes.  11  y  a  eu  dans  cet  ordie  plusieurs 
personnes  qui  se  sont  rendues  reconimanda- 
bles  par  la  sainteté  de  hur  vie,  entre  auires 
la  mère  Marie  de  l'Enfant  Jésus  de  Foule- 
bieu,  qui,  après  la  mort  de  son  mari,  Jean 
Simon,  chevalier  stigneur  d;'  Bois-David,  ca- 
pitaine aux  gardes  françaises  du  roi,  se  con- 
sacra au  service  des  pénitentes  dans  le  nio- 
nasière  de  Caen,  où  elle  est  décédéc  en  odeur 
de  sainteté  le  30  janvier  16G0,  avant  qu'il  eût 
été  étal-li  en  ordie  religieux  [lar  le  souverain 
pontife. 

Ces  religieuses  ont  pour  armes  un  cœur, 
sur  lequel  est  l'image  de  la  sainte  Vierge 
tenant  entre  ses  bras  l'enfant  Jésus  et  envi- 
ronnée de  deux  branches,  l'une  de  roses  et 
l'autre  de  lis. 

M.  Huet,  évoque  d'Avranches,  Origines  de 
la  villi'  de  Cavn.  Hermant,  Hlsloire  des  Or- 
dres rel.gicux,  tome  IV;  et  Mémoires  envoyés 
par  In  révérende  mère  Muric-lsidore  Uellouin, 
su'.iériearr  du  monastère  de  Caen. 

Le  P.  Hèlyot  ne  connaissait  que  quaire 
élablisscmenls  de  l'ordre  de  Nutre-l)an)e  de 
Chaiiié,  savoir  :  ceux,  de  Caen,  de  Bennes  , 
«le  Giiingamp  cl  de  Vannes;  mais  cet  ordrj 
s'est  lic;iucoiip  étendu  depuis,  et  il  esi  au- 
jourd'hui plus  brillant  et  plus  répandu  qu'il 
ne  l'a  jamais  été.  ^i  l'on  éprouvait  quelque 
étoiinemenlde  voiruninslitutdecegenre  éta- 
bli aussitôt  dans  une  villeiellequeGuingamp, 
([uiesl  aucentred'un  pays  mor;ilet  religieu'. 
el  tenant  un  rang  peu  important  dans  la  pro- 
vince de  Brel.îtgne,  on  devrait  être  encore 
plus  surpris  de  ne  pas  le  voir  appelé  à  Paris, 
où  l'exercice  de  son  zèle  paraîtrait  si  pré- 
cieux el  si  fjcilemenl  utilisé.  11  y  fut  appelé 


par  le  cardinal  d<'  Nosilles,  ainsi  que  nous 
l'avons  dit  ci-dessus  à  rarlicleM,vDixoNNKT- 
TKS  ;  nous  donnerons  ici  plus  de  détails,  et 
nous  donnerons  aussi  un  précis  historirpic 
de  l'établissement  de  la  capilab'  depuis  son 
ori!,Mne  jiisiiu'à  ce  jour. 

En  1720,  le  cardinal  de  Noaillcs  se  trou- 
vant dans  l'embarras  <!e  changir  les  reli- 
gieuses qui  gouveriiaient  les  filles  pénilentos 
de  la  Madeleine,  près  du  Temple ,  après 
avoir  essuyé  le  refus  de  |)ius:eins  commu- 
nautés de  Paris,  fut  conseillé  de  demander 
d;'s  religieuses  de  Vordre  de  Noire-Dame  de 
Cltariié,  dévoué  spécialement  nu  saint  des 
femmes  pénitentes,  et  d'en  faire  venir  de  la 
ville  de  (juingamp,  où  elles  avaient  un  mo- 
nastère, celles  des  maisons  de  Vannes,  de 
Bennes  et  de  'l'ours  (  fondation  récente  ) 
n'ayant  pu  en  accorder.  Les  liaisons  parti- 
culières qui  exist;  ient  entre  le  cardinal  de 
Noaillcs  et  l'évêque  de  Trèguier  firent  espé- 
rer au  premier  qu'il  réussirait  de  ce  côté-là, 
(îningamp  étant  dans  le  diocèse  de  son 
ami.  En  rlTet,  sans  nième  consulter  la  com- 
niunaué,  l'cvèiiue  de  Trèguier  promit  ce 
qu'on  lui  demandait,  et  écrivit  ensuite  à  ses 
religieuses,  qui  firent  en  vain,  iirès  de  lui  el 
du  cardinal,  de  nombreuses  représentations 
pour  motiver  un  refus.  L'évêque  donna  des 
obédiences  à  c'nq  religieuses  de  chœur,  sa- 
voir :  la  mère  de  L)  lirève,  dite  i\larie  du 
Cœur  de  Jé-us.  supérieure  actuelle  de  Cuin- 
gamp,  pour  être  également  supérieure  à 
Paris  ;  la  mère  Lo>!,  sa  propre  nièce,  dite 
Marie  de  Sainte-Thérèse,  pour  assistante;  la 
mère  Chevalier,  dite  Slarie  de  l'Ascension  ; 
la  mère  Ledu-Uubot,  dilc  Marie  de  l'Enfant 
Jésus;  la  mère  Bossinot,  dite  Mariede  Sainte- 
Céleste  ;  et  à  une  converse,  savoir  la  sœur 
Le  Guiader,  dite  Mari;- de  Saint- Erançois  de 
Sales.  La  supérieure,  en  acceptant,  mil 
pour  condition  qu'on  ferait  à  Paris  rétablis- 
sement d'une  maison  de  son  or.ire.  Les  six 
religieuses  partireni  de  Guingamp  le  9  avril 
1720,  séjournèrent  quelque  temps  chez  leurs 
sœurs  de  Tours  et  arrivèrent  le  dernier  jour 
du  mois  à  Paris,  où  elles  furent  imniédiate- 
nicni  conduites  aux  Madelonnetles.  11  était 
huit  heo^-es  du  ;oir,  les  deux  communautés, 
religieuses  et  agrégées,  les  reçurent  à  la 
fiorle,  les  conduisirent  processionnellemenl 
au  ehœur  et  au  chapitre,  où  l'on  chanla  le 
Te  Deurn.  Cependant  les  religieuses  péniten- 
tes de  celte  maison,  surprises  de  les  voir  au 
nombre  de  six  et  ne  s'attendant  point  à  ta 
réforme  qui  allait  être  mise  dans  leur  mai- 
son pour  le  spirituel  el  le  temporel,  les  tris- 
tes mets  qu'on  leur  servit  au  souper  leur 
firent  deviner  la  dureté  qu'elles  devaient  at- 
tendre de  leurs  hôtesses.  Pour  mieux  com- 
prendre leur  position,  il  faut  se  rappeler  que 
la  maison  des  Madeionnelles,  rue  des  Fou- 
laines,  àParis.élail  composée  dedeux  classes 
(le  pénitentes,  dont  l'une  était  formée  parde  vc- 
riiables  religieusis  professes,  1'. mire  par  des 
filles  agiégécs,  qui  poilaieni  un  cosiume  el 
suivaient  une  règle,  et  qu'il  y  .iv;iit  enoulre  les 
pénitentes  ,  qui  n'éiaient  là  ijue  pour  un 
leuips  limité.  Toutes  ces  femmes  avaient  eu 


Ili5 


DICriO.NNMIlK  DES  OUDItES  UELIGIELX. 


(lil 


peur  Ie.'<  d.r  ii;<'i-  succossi\  ciiifiil,  los  \is  l;tii- 
«Jines,  les  L'rsuliiies,  t-lc.,  iloiil  files  su|'|)()r- 
laiciil  le  j'ius  ■ivcc  grande  peine,  dcsiranl  se 
giiuvcM  lier  flics  ■inêiiK'S. 

La  l'rovicipiice  niéiiappa  anx  religieuses 
de  Notrc-Uanic  de  Cliaiilc  deux  amies  qui 
inérileiil  d'c'.re  connues  îles  leileurs,  car 
<  Iles  devinrent  leurs  iirotcclrices  el  l'inslru- 
nienl  dont  Dieu  se  servit  pour  etalilir  la  mai- 
son de  Sainl-Miclicl  à  Taris.  L'une  ii<'  ces 
femmes  veiliieu-es  était  la  marquise  de 
Cray,  restée  veuve  à  l'âge  de  viiigi-ileus 
ans,  lors(]ue  son  mari,  lieulenanl  général 
d'artillerie,  allait  devenir  maréelial  de  Fran- 
ce. Celle  lenirne  d'un  grand  mérite,  consa- 
crant sa  viduité  à  la  retraite,  était  pension- 
naire en  chambre  .lU  couvent  des  .Madelonnet- 
Jes.  i'.lle  se  lia  bientôt  avec  les  religieuse' arri- 
vées de  Bretagne  el  leur  procura  !a  conna.s- 
sauce  el  l'amitié  de  madem'iiselle  de  Chausse- 
rais. Celle-ci  avail  aussi  au  couvent  des  Made- 
lonneltes  un  apparletnent  avec  issue  hors  la 
l'iiilure,  mais  elle  demeurait  ordinairement 
à  sa  maison  cle  Madiid,  à  une  lieue  et  demie 
<'c  Paris.  Fille  du  niar(|uis  de  (^liaus-erais  , 
douée  d'un  esprit  supérieur,  édilianle  pai-  sa 
condiii:e,  mademoiselle  de  Ciiausserais  s'elail 
concilié  l'estime  de  la  cour  de  Louis  XIV 
el  du  roi  lui-niéme,  qui  lui  fit  liâlir,  (]uand 
elle  >c  relira,  une  jolie  maison  dans  la  cour 
du  château  de  .NLidrid,  et  surtout  de  la  du- 
chesse douairière  d'Orléans,  dont  I  Ile  avail 
été  d.ime  d'iioiuieui-,  el  (lui  lui  l'aisail  irois 
visites  par  semaine  à  Madiiil.  On  regardait 
comme  un  avantage  d'être  protégé  par  ci  lie 
femme  remarquable,  ijui  s'était  donné  lo 
droit  de  remonlranee  au  régent.  Trois  mois 
après  leur  arrivtc,  les  religieuses  de  Notre- 
Dame  de  Charité  \irenl  à  l.i  Madtdeme  celle 
liemoiselle  ple^  enue  eu  leur  faveur  par  la 
nianiulse  de  (>ay.  Le  cardinal  se  tiouvail 
en  même  temps  a  la  maison,  mademoiselle 
de  Chaus.serais  lui  dit  qu'il  fallait  garder 
|iour  loiij  urs  les  nouvelles  religieuses  à 
Paris,  el  (ju'elle  contribuerait  av(cSon  Lmi- 
nence  à  l'  ur  établissement.  La  chose  eut 
lieu  biiniôl,  comme  nous  allons  le  voir; 
mais  il  faut  remarquer  auparavant  tout  ce 
iju'eureni  à  soulfiir  les  mères  «(ui  gouver- 
narenl  la  Madeleine.  Files  rétablirent  l'ordre 
dan.-,  le  mural  el  le  temporel  de  celle  mai- 
son ;  mais  elles  suscilèrenl  (onire  elles  leur 
propr<;  confesseur,  que  les  religieuses  cl 
agiégées  pénitentes  de  la  maison  avaient  fait 
enlrerdans  leur  complot  ;  et  même  la  reli- 
gion de  l'abbé  Dorsanne,  grand  vicaire  cl 
leur  supérieur,  fui  surprise.  L'afl'aire  s'a- 
paisa à  leur  justilicalioii  el  à  leur  avantage. 
In  172),  elles  denianiièrenl  leur  retour  à 
<'iiiingam|).  ]>e  cardinal  les  exiiorta  a  la  pa- 
lieiiic.  rius  laril,  voyant  la  bonne  volonté  ilc 
niadeiiioisille  île  Chausserais  reiroidie,  elles 
deuiandèrent  leur  départ  avec  plus  d'inslau- 
ce,  pinsanl  avec  raison  que  ce  serait  le 
moyen  de  hâter  l'execuiion  de  la  promesse 
pour  rélablissemeiit  de  l'aris.  Il  enarri\a 
«■ouimi'  elles  avairnt  désiré  et  prévu.  On 
Ifuroffiit  de  le^  intioduiic  dans  une  des 
luaisunsde  l'euilenk-sdcjà  éljbUc>,u>aissau$ 


lellres  patentes  ;  elles  refusèrent  (fe  se  ren- 
dre ,'i  ce  proi  édé  indélicat  et  injuste.  M.ide- 
iiioiM'lle  de  Chausserais  chargea  son  inien- 
daiil  el  .M.  Legraiid,  curé  de  la  Sainte-Cha- 
pelle, de  lui  chercher  une  maison  pour 
faire  l'élablissemenl,  l.indis  qu'elle-même 
demanderait  des  Irtlres  patentes.  Tout  réus- 
sit, malgré  de  nombreuses  dilfi' ultés.  On 
a  hela  ,  des  diniers  de  mademoisei:e  do 
Chausserais,  une  maison  bourgeoise  dans  la 
rue  des  l'osles,  près  de  la  rue  de  r.\rbalèle,  à 
gauche  en  quillant  celte  dernière  rue  el 
dans  la  place  ociupèe  drpuis  par  laeiiminu- 
iiaulé  des  dames  de  l'imm  culée  Conception, 
près  ue  en  face  de  la  cominunautc  ac- 
tue.lc  des  religieuses  de  la  .Mi H-rico  de. 
Deux  des  religieuses  venaient  chaque  joui- 
de  la  maison  des  ^^ldelolmetles  faire  tra- 
vailler les  ouviiers  qui  mettaient  le  local  en 
éial  de  recevoir  celles  (|u'ou  attendait  de 
tiuingainp.  Le  2i  juin  1724,  elles  arrivèrent 
au  nombre  de  i.ix.  Dès  le  21),  l'abbé  Dor- 
sanne  avail  béni  la  maison  et  la  ()elite  cha- 
(lelle,  qui  fut  dédiée  sous  rinvocalion  de 
saint  .Michel.  I.e  duc  de  Noailles  voului  lilier 
de  ce  nom  le  hou>eau  monaslère,  parce 
(lu'il  avail  de  la  dévotion  à  saint  Michel,  cl 
surtout  parce  que  sous  le  titre  de  lltli- 
gieuses  de  la  Charité  ou  aurait  pu  confon- 
dre les  Kudistes  avec  des  communautés  ou 
des  Dames  de  la  Charité.  Les  mémoires  ma- 
nuscrits de  la  maison  de  Saint-Michel  rap- 
portent une  prédiction  faile,  en  1(585 ,  à  la 
jeune  de  La  Grève,  (|ui  lui  annonçait  qu'elle 
deviendr.iil  une  pierie  fuiidaiiieiil.ile  dans 
l'inslil  4,  et  fondilr.ce  d'une  maison  de  l'or- 
dre à  l'aris. 

La  m.iison  de  la  rue  des  ^'o^les  n'était  que 
jMovisoire  dans  la  pensée  de  loni  le  moiiile, 
et  la  communauié  lit  toujours  des  reclier- 
clies  pour  s'établir  plus  grandement,  l'ille  lit 
même  successivement  qui  Iqiies  acquisiliuns, 
qui,  résiliées  plus  lard,  lui  uccasionnérenl 
des  délies,  dont  le  malaise  se  lit  toujours  sen- 
tir. Nous  signalerons  Mirtoul  l'achat  irréllc- 
chi  de  l'abbaye  de  Sainte  l'errine,  à  la  \'il- 
leitc,  atiandonnée  par  les  chanoinesses  qui 
se  reliraient  à  Cbaillot. 

L'élablisseiiient  de  l'aris  reçut  plusieurs 
sujets  remarijuables,  entre  autres  la  uiece 
de  mademoiselle  de  Chausserais.  L'inlerêt 
que  celle  demoiselle  avait  porte  à  la  finda- 
tion  des  religieuses  de  Nolie-Daine  de  Cha- 
riti:  était  d'autant  plus  admirable  (|u'elle 
i\\  ait  une  sorte  d'aversion  pour  les  religieux 
el  le.i  reliuieuses,  au  point  ()n'on  n'osait  par- 
loir de  celles-ci  devant  elle.  Cela  venait  sans 
doule  d'un  mélange  do  jansénisme  à  sa  piéle 
|)lus  ou  moins  solide,  cl  nous  le  croirions 
d'aulant  plus  volontiers  que  le  leslament 
avantageux  dont  elle  avail  flallé  ses  pro- 
tégées lut  changé  à  l'epoiiue  de  sa  mort,  el 
cela  par  l'inlluence  du  pièlre  janséniste  qui 
la  confessait. 

Quoique  consolidée,  la  maison  de  Saint-Mi- 
chel. <pii  avait  des  pénilenles  el  remplissait 
son  qualriènie  vœu,  ne  lut  jamais  bien  nom- 
breuse el  éprouva  jusqu'à  liii  la  géiic  causcu 
par  les  délies  duul  nous  avons  parle 


t\K 


NOT 


L"orage  léi  olulionii.iire  vint  fr.ippiT  c<'l 
ordre  comme  Ions  les  nulres  insiituls  reli- 
(lieus.  Les  commissaires  de  l'assenibléu  na- 
lionale,  section  de  l'Observatoire,  posèienl 
les  scellés  dans  la  maison  de  Sainl-Midiel,  et 
signiflèrent  aux  religieuses  d'en  sortir  sous 
huit  jours.  Gelle->-ci  louèrent  une  maison  sur 
la  chaussée  du  Maine,  près  do  la  barrière  , 
et  s'y  réuniren'.  au  nombre  de  seize;  cinij 
prirent  une  autre  détermiiialion  sous  divers 
prétextes.  Les  religieusis  dans  leur  petit 
élablissimentobsci  vèrenlleurièglele  mieux 
possiblf.  lîlles  étaient  si  pauvres,  qu'elles 
manquaient  de  toul  cl  IravaiUairnt  nuit  et 
jour  pour  avoir  de  quoi  subvenir  aux  pre- 
miers besoins  de  la  vie.  Celles  qui  ne  pou- 
vaient coudre,  à  cause  de  leur  grand  âge, 
allaient  dans  la  campagne  ramasser  du  bols 
el  glaner  dans  la  Siii  on.  Un  homme  cliari- 
lable,  voyant  que  c'étaient  dos  religieuses, 
leur  donna  du  blé,  du  pain  et  des  légumes, 
el  leur  dit  de  venir  toutes  les  semaines  en 
chercher  autant. 

il  )  avait  alors  dans  la  communauté  une 
des  mères  nommée  Marie  du  Cœur  de  Jésus 
(le  La  Grève,  vraisemblablement  de  la  même 
famille  que  celle  dont  nous  avons  parlé  au 
commencement  de  la  fondation.  Comme  elle 
clail  de  famille  noble,  l'autorité  l'exila  à 
Montrouge,  où  d'ailleurs  une  gramb-  laiitu- 
do  lui  fut  laissée,  el  ses  sœurs  prirent  soia 
d'elle.  Au  reste  la  petite  communauté  no- 
made avait  a  peu  près  tous  les  secours  spiri- 
tuels qu'elle  lecevail  auparavant  dans  la 
communauté.  Ln  1799,  ayant  perdu  leur 
supérieur,  M.  labbé  Lemoiiie,  elles  deman- 
dèrent M.  Uuclaux  du  l'uget,  qui  leur  a  con- 
tinué ses  soins  jusiu'e.i  1818.  La  même 
année  elles  élurent  pour  supérieure  la 
mère  Duquesne,  dite  Marie  de  l'Enfant  Jé- 
sus, et  Cl  tte  élection  fut  confirmée  au  nom 
de  Mgr  de  Juigné.  Dès  le  21  juillet,  trois 
postulantes  prirent  l'habit  dans  la  petite 
communauté,  qui  portait,  à  ce  (ju'il  paraît  , 
son  costume  nmnastiquc.  L'année  suivante, 
une  autre  postulante  prit  l'habit,  et  depuis 
lors,  des  sujets  lurent  reçus,  mais  les  supé- 
rieurs ne  permettaient  à  la  profession  que  des 
vœux  simples,  peut-être  veut-on  dire  par  ces 
mots  des  vœux  temporaires. 

Nous  citerons  encore  un  fait  qui,  apparle- 
n.intàLCl  ordre  en  parlieulier,  apprend  néan- 
moins ce  qui  se  passait  quelquefois  alors  dans 
les  autres  congrégations, el  fait  épisode  à  l'his- 
toire tlu  temps.  La  mère  Marie  de  l'Enfant  Jé- 
sus allait  à  la  halle,  portant  un  panier.  Les 
marchandes  de  poissons  lui  donnaiein  parcha- 
rilé,  l'une  du  merlan,  l'autre  des  morceaux 
d'anguille; d'autres  marcliandes  lui  lion liaient 
du  beurre,  des  légumes,  et  en  lui  donnant  (  es 
diverses  cliuses,  elles  lui  disaient  toul  bas  : 
«  l'i  iez  pour  nous,  cai'  nous  voyons  bien  ([ue 
vous  êtes  religieuse.  »  Un  jour  la  petite  com- 
munisuté  n'avait  que  liente  sous,  et  la  mai- 
son ne  possédait  ni  pain,  ni  beurre,  ni  ab- 
solument rien  pour  le  diner.  La  sœur  Alarie 
de  l'Enfanl  Jésus,  st:  confiant  en  la  Provi- 
dence, résolut  d'aller  à  la  haie,  el  (|uoi- 
t}u'elle  dûl  à  diverses  macchaudes  el  que  la 


NOT  trif» 

pauvreté  (Vc  SCS  vètemenis  ne  ftil  [las  cajia- 
hle  de  lui  obtenir  un  nouveau  crédit,  ,'i  peine 
les  femmes  de  la  halle  la  virent-elles,  qu'el- 
les lui  crièrent:  «Viens,  ma  cocolle,  il  y 
a  longtemps  que  nous  ne  l'avons  vue.  C'est 
parce  que  tu  n'as  pas  d'argent  pour  nous 
payer,  n'esi-ee  p  :s  ?  Viens  tout  de  même, 
lu  ne  nou<  dois  plus  rien.  I)  pnis  que  nous 
te  donnons,  nous  vendons  mieux.»  En  parlant 
ainsi,  ces  bonnes  femmes  lui  donnèrent 
tant  de  marchandises,  qu'elle  fut  obligée 
d'en  mettre  la  moitié  chez  une  personne  de 
sa  connaissance. 

Pend  int  que  cet  acte  de  charité  bruyante 
avait  lieu  ,  une  personne  charitable  avait  • 
envoyé  à  la  comtnunaulé  du  pain,  de  la 
viande,  du  lait,  de  la  farine,  dis  œufs,  du 
beurre.  Un  marchand  de  vin,  voisin  de  la 
maison,  leur  donna  du  vin.  Une  dame  leur 
donna  500  fr.  pour  p  lyer  un  semestre  de 
leur  loyer.  Ainsi  Dieu  console  quelquefuis 
ses  nmis  avec  abondance  de  faveurs.  l'Ius 
souvent  il  prolonge  leurs  épreuves  sur  la 
terre. 

En  1802,  le  cardinal  Caprara  et  l'archevê- 
que de  Paris  permirent  à  une  des  religieu- 
ses de  porter  iliabil  séculier  el  de  soriir  de 
la  clôture  pour  les  affaires  de  la  maison. 
Quelques  jours  étaient  exceptés  de  cette  dis- 
pense. 

La  mère  Duquesne,  après  trois  ans  passés 
dans  les  fondions  de  supérieure,  fut  élue  de 
nouveau  el  continua  jusqu'à  sa  mort  à  jouir 
d'une  grande  considération  dans  une  mai- 
son qu'elle  avait,  plus  (|uc  toute  autre  peut- 
être,  conli  ibué  à  rétablir  et  consoli^ler.  Elle 
fut  cependan!  impl  quee  dans  une  aflairt; 
fâcheuse,  qui  devait  amener  nécessairement 
des  préventions  funestes  à  son  monastère. 
Une  conspiration  contre  Buonaparte  avait 
compromis  quelques  personnes,  qui  cher- 
chèrent tous  les  moyens  d'échapper  au  dan- 
ger qui  les  menaçait.  Un  des  principaux 
conjurés  connaissait  une  dame  pensionnaire 
de  la  maison  provisoirede  Saint-Michel,  qui 
ne  pouvait  encore  être  souniiiC  à  une  clô- 
ture absolue.  Ce  conjuré  se  cacha  pendant 
vingt-quatre  heures  peut-être  dans  celle 
maison  ,  el  évidemment  la  complaisance 
de  la  mère  Duquesne  se  prêia  à  cet  acte  de 
charité.  La  police  fui  instruite  de  tout.  Plu- 
sieurs des  conspirateurs  furent  arrêtes,  et  la 
mère  Duquesne  elle-même  lut  mise  en  pri- 
son. L'instruction  el  les  débals  du  procès 
prouvèrent  qu'elle  n'avait  rien  fait  d'illégal, 
l'homme  caché  dans  sa  maison  n'y  ayant 
point  demeuré  le  lemps  nécessaiie  pour 
qu'on  fit  légalement  la  déclaration  de  son 
séjour ,  etc.  La  mère  Duquesne  fut  ac- 
(luitlée.  Le  plaidoyer  remarquable  de  son  dé- 
fenseur a  été  imprimé,  ainsi  que  tontes  les 
pièces  de  ce  procès  qu'on  peut  consulter. 

Dieu  permit  que  la  maison  deSaini-Michel 
n'en  soulîrîl  point,  liuonaparle  même  accorda 
son  eslimo  el  une  sorte  (l'attachement  parti- 
culier à  la  mère  Duquesne,  dont  l'élablisse- 
ment  eul  |iart  aux  bienfaits  que  le  gouver- 
nement impérial  accorda,  en  1808,  à  un  grand 
nombre  d'établissemeuls  de  charité.  Les  rc- 


ii:7  DiCTioNNAiu;:  itr.:^  oiinius  i-.ixicikijx.  lus 

li^ietisos  «.'•.•l.iic'iil  iH.iblics  (l:ins  l'ancion  mn-  femme  expùrimeiitéc,  qui    s'.ipciTiil  liipiiiot 

iiasiôrc    di'S  Visilimdiiios   ilo    l.i   rue    Saint-  i|ui'  le  prélal   iic  s'eiileiidait  guère  aux  éta- 

I.iciiues,  où  elles  sont  aujourd'hui  cl  auiiucl  lilisscmenls  do  relii^icusc-;,   el   qui,    pour  no 

elles  oui  pi)rlé  le  noui  de  tnonasière  de  Sailli-  pas  se  roinprouKtlre  avec  lui  cl   fuir  la  sii- 

Miclicl,   Mius  lequel  seul  il  esl  aeluellcuiciit  périorilé  qu'il  senihlail  lui  deslitier,  s'a-rré- 

cniiuu.    I^lles    élaicul  alors  au   nouihre   de  goa.  aiii-i  que  sa   S(Bur,   à   la    l'uniinniiaulé 

viuï:t-neuf 'l  jouissaieiil   déjà   d'un    secours  de  Quiinperlé,    di'ja    rél  iblie.    Néannioius  le 

niiiiuel  de  8  100  fr.  donné    par  le  you\erne-  pr6l  il.  (jui  du  moins  irétait  poinl  impérieux 

jneul  ioi()érial.  cl  conservait  toujours  le  même  désir,  (il  des 

Après  la  révolution  de  juillet  IS^ÎO,  M.  do  tcnl^ilives  du  colu  des  dames   de    rancitMUic 

Qiieleu.en  bulle  à  la  h  lioe  de  l'esprit  iné-  maison  de  Monlhareil.  La  ma  son  des  scrnrs 

Milieux  qui   ré'.Miait  alors,  avuil  vu  le  palais  de  In  t>oix  de  Sainl-ISrienc  avait  é'.é  vendue 

(ircliiépiscop.ii  (letriiii,  et  s'était  vu  lui-mémo  comiîie   pro])riélé    nationale.    U.n  acquéreur 

réduit  à  clienluT  quelque  part  une  demeure,  était  disposé  A  en  revemlre  un  tiers,  (pii  fa - 

(^e  prélat  lo^ea  surtout  en  deux  commuuau-  sait  sa  portinti;  les  auriennes  propriétaires 

lés  religieuses,   celie  du  Saci  é-Cœur,  rue  de  ne  voulaient  el  ne  pouvaient   point  se  cou- 

Vareiines,    cl  celle    de    Saint-Michel.    Dans  tenter  de  celle  porliuu  rétrécie.  Sur  le  refus 

cette  dernière  maison,  où  il  a  séjourné  il'a-  des  ssrursdo  la  CmiK  et  même  sur  leur  invi- 

liord  el  longtemps  (ce  qui  valut  à  l'él.iblisse-  lati   u,  les  religieuses  do  Monlhareil,  de  con- 

ineul  visite  et  ve\;)liou   du   commissaire  de  ccrt  .ivec  M.  Cafarclli,  raclictèrenl  cette  por- 

police  du  ([uartiei  ),  il  élail  accompagné  de  tiou    de    maisou  et    s'y    étahlirenl,    voyant 

son   vicaire  général,  l'abbé  Desjardins,  qui  (|u'ili'S  n'avaient  plus   l'espérauie  de   len- 

y  mourut,  (!t  auprès  diiqtiel  nos  alTiires  nous  Ircr    dans     leur   ancienne    propiiclé  ,    qui 

l'jnt    souvent    appelé  nous-ménic  dans  l'iii-  pourtant    n'avait    point  été    vendue.     Celle 

térieur  du  couvent.  acquisition    n'eut    lieu    qu'ajirès     des  dilli- 

Auj"urd'lii:i    la   maison   de   Saint-Michel,  cillés     nombreuses     et    au     bout   do   plu- 

toujonrs  dans  un  état  (irospère  cl  édifiant,  a  sieurs    années    de    tentatives.     En     atlen- 

ponr  supérieure  la  rcvcrende  mère  '"*,  ap-  dant  l'achat    do  colle  muison  ou    de    toute 

pelée    de    l'établisseme  l    de    Sainl-Bricuc.  autre,    les    religieuses    venues    do  Oninliu 

C'est  à  cotte  dame   pieuse  et   niéritanlc  que  piirsnt  à  loyer  une    maison    où    elles  pas- 

nous  avons  obligalion  d'une  partie  des  fa^ts  seront  deux  ans  il  firt  nt    leurs    premières 

historiques  consignés  dans  c;  t  article  addi-  c'.ecliaiis.  Le   29  scptombro  1808,    clio'i    s'y 

lionnel.  trouvèrent  au  nombr(;  de  douze,  les  proiniè- 

La  maiso  I  lie  Giiinganip,  d'où  était  venue  res  étaient  arri\  ces   rjueiiiiies  jours  aupara- 
la  l'olonii' de  l'aris,  était  connue  sous  le  nom      vaut;  le   11  octobre  leur   oraioire  fut    bénit 

de  Montbaroil,  et  el!e   continua    ses  œuvres  par  M.  Fioyl,  et  on  y  laissa  le  saint  sacre- 
charilables  jusqu'à  l'épocjuc  «le  la  première      ment.   Les  éledions  eurent  lieu  le  (limancho 

révolution    IVaiiçaise.    Les    religieuses    qui  'il  novembre  suiv.inl.  Elles  lurent  précédées 

riiai.ilairiit  furent  expulsées  de  cet  établis-  d,;  (juclques  difiiiullés  élevées   [lar  révé(|ue, 
sèment  le  2   octobre    17:12,    cl  reçurent  dé-     q  ii.  croyanl,  po;ir  ainsi  dire,  aw.ir  alTaiio  à 

fciise  de  se  réunir  ailleurs.  Cependant,  après  des  demoiselles  séculières  pic. ises,  qu'il  au- 
qni'lqucs  années,  oa  permit  à  qu'lques-nncs  rail  à  façoiui' r  à  la  vie  religieuse,  voulait 
lie  se  réunir  à  (Juintin.  Llles  conservaient  leur  donner  un  habil  uniforme,  noir,  avec 
le  désir  et  longlcmps  gardèrent  l'espérance  u:ie  petite  coiffure  comme  ccl'e  des  veuves 
de  ri'iitrcr  dans  la  maison  de  Monlhareil.  du  pays.  l'allés  n'y  voulurent  point  consentir 
Vivant  sans  clôture,  elles  édifiaiint  la  ville  cl  rappelèrent  (|u'elles  avaieiit  un  costume 
iMi  convcriissaiil  (|uelqucs  filles  égarées  et  de  leur  ordre,  (|u'cllis  prendraient  {]uaiid 
ilonnanl  1  insirucliun  aux  petits  enlanls  des  c  les  pourraient  garder  la  cirilurc;  car  elles 
deux  ^e\es  ilans  un  local  spécial  à  chacun,  allaient  aux  ollices  des  églises,  el  le  coslumo 
Les  liabilanis  de  tjuinlin,  ayant  acquis  par  moiias;i(nio  blanc  était  trop  saillant  aux 
souscription  leur  ancien  couvenld'Ursulines,  yeux  des  habitants  de  Saint-lirieuc,  i|iii  n'a- 
l'ollrii  eut  aux  religieuses  de  Monlhareil,  (|ni,  valent  jamais  eu  de  rolgieuses  vêtues  ainsi, 
gardant  leurs  espérances,  refusèrent  el  en-  L'évéïjue  éleva  d'antres  dillieullés  sur  les  rè- 
gagéient  mémo  les  Ursulines  à  le  reprendre,  gles  cl  la  rénovation  des  vo'iix,  el  leur  dc- 
prometlant  do  les  seconder  el  d'aller  même  m  indail  un  abrégédeleurs  con^titutions.  Les 
pr.ndie  leur  demeure  provisoire  dans  leur  seurs  lui  montrereni  le  livre  même  des  con- 
coiivent  restauré,  en  y  louant  des  cellules  ;  sliliilions,  disant  qu'cdlcs  s'y  conformeraient 
ce  que  l'une  fil  ioimédiatemeiil ,  ce  qucî  les  en  tout  ce  qui  serait  possible.  Non,  point  cela, 
autres  auraient  l'ai  ,  si  la  l'rovidenre  n'avait  disait  l'évêque  ;  i  éiliiiscz-lcs  à  un  abrégé; 
roiuluit  ailleurs  leur  exislence  et  l'exercice  diles  quel  sera  l'ordre  cl  montrez-moi  la 
de  leur  zèle,  de  la  manière  que  nous  allons  règle  «luc  vous  vous  prescii c,  et  je  l'ap- 
fjiro  connaître.  prouverai.    Los  Sd'urs  voy.lienl  qu'il  ne  con- 

jM.  Cafarelli,  évéîiue  do  Saint  -  Hrienc ,  coail  pas  ce  que  c'était  ()uo  des  rcligieu- 
voyanl  des  comiiiunau  es  se  restaurer  dans  ses.  .Malgré  la  peine  qu'elles  <'n  re-senlaienl, 
son  diocèse,  était  (leiiié  de  n'en  point  avoir  elles  lireiit  un  certain  règlcmenl  des  exerci- 
d.ins  sa  ville  episeopale,  el  lit,  avec  raison,  ces  selon  les  consliluiions,  le  monlrèrenl  à 
des  efforts  pour  y  en  établir.  Ces  en'oris  se  révé'|iie,  <|ni  s'en  contenlaci  y  lit  ajouter  une 
portèr.-ni  d'abord  du  ci'ité  des  Ursulines,  et  formule  de  renouvellenienl  des  vieux,  quilo 
Il  Iraila  avec  la  U   .M.  .Mélanie  de  KcrvéganI,      rcconnaiss  lil  comme  supérieur  immédiat  el 


ii;o 


NOT 


NOT 


l'.m 


lui  faisail  promesse  li'olx-iss.inro  ;  r,ir  il  voii- 
lait  cctto  obéissance  des  religieuses.  Cellrs- 
ci  y  cunspniireiil,  mais  avec  peine,  craignant 
avec  r.iison  {\uc  l'évêqne,  parlant  de  celle 
aulorilo  excessive  cnUe  ses  maitis,  ne  les 
obligeât  ou  à  quoiqucs  ch:irgts  qui  ne  se- 
raient point  de  leur  profession,  ou  à  demeu- 
rer dans  le  petit  local  qu'elles  occupaient 
()rovisoirenienl. 

Elles  firent  à  leur  tour  des  objections  et 
représentations  fondées,  Dec<in><cnianl  à  faire 
des  vœux  que  pour  un  an,  lesquels  encore 
n'auraient  que  le  sens  donné  par  leurs  con- 
siilutions.  L'évéque,  apaisé  par  la  so-ur 
Sainte-Scolaslique,  consentit,  nialgréla  peine 
qu'il  éprouvait.  A  la  cérémonie  des  éleciions 
le>  religieuses  prirent  leur  CdSiume  monasti- 
que et  se  tinrent  dans  la  salle  attenant  à 
l'oratoire.  L'évéque,  entrant  avec  des  ecclé- 
siastiques, fut  frappédece  si)ec!arleinatlcndu 
qui  lui  causa  de  la  joie  et  une  sorte  de  res- 
pect pour  les  religieuses.  Les  suffrages  se 
réunirent  en  faveur  de  la  mère  Corbel,  dite 
Marie  de  Sainte-Scolastique.  C'était  elle  qui 
avait  eu  le  plus  de  part  aux  soins,  aux  dé- 
marclies  qu'il  avait  fallu  faire  pour  l'étahlis- 
sen)entde  l'institut  à  Sainl-Brieuc,  et  la  re- 
connaissance do  ses  sœurs  lui  donna,  ainsi 
qu'à  l'autre  triennal,  celte  marque  de  con- 
fiance, quoiqu'elle  n'eût  ni  l'Instruclion  ni 
i'espérience  nécessaires  pour  celte  haute 
position,  et  elle  s'acijuilta  fort  bien  de  ses 
obligations.  La  maison  que  la  petite  com- 
munauté tenait  à  loyer  appartenait  <à  l'esti- 
mable famille  Sebcrt,  qui  montra  les  meil- 
leures dispositions  en  faveur  des  religieuses, 
les  secourut  de  ses  services  et  de  ses  au- 
mônes, leur  donna  une  de  S(;s  filles  j)0ur  i)os- 
lulanle  (la  deuxième  du  nouvel  elahlisse- 
iiient),  et  mérite  d'être  signalée  ici  à  la  re- 
connaissance du  diocèce  de  Saint-Iirieuc. 

Cependant  les  religieuses,  logées  étroite- 
ment, soupirant  toujours  aprôs  Montbareil, 
sollicitées  par  leurs  sœurs  des  maisons  de 
Vannes  (à  la  Chartreuse)  et  de  Renne-,  pen- 
saient à  se  réuniraux  premières  et  traaiaient 
seules  liîur  petii  complot,  quand  un  jour  un 
jeune  ecclésiasiique  du  diocèse,  M.  l'abbé 
l'resvaux,  devenu  depuis  grand  vicaire  et 
officiai,  et  acluclleiiienl  chanoine  de  Notre- 
Dame  de  Paris,  ayant  eu  communication  de 
leur  projet,  en  prévint  l'évéque,  qui  se  hâia 
d'ouvrir  une  souscription  dans  son  cha|iitre, 
et  engagea  immédiatement  la  cominunaulé  à 
conclure  l'achat  de  la  maison  des  sœurs  de 
la  Ooix,  où  elles  sont  aujourd'hui,  ainsi  que 
nous  l'avons  dit.  Elles  y  entrèrent  le  lundi 
des  Uogaiions  de  l'année  1810.  Le  29  décem- 
bre 18t"2,  elles  donnèrent  l'habit  à  leur  pre- 
mière postuliinte,  et  ce  jour  est  celui  qu'elles 
prennent  pour  date  île  l'install,  lion  dans 
l'établissement.  La  veille,  I  evcque  av  lit  dit 
la  première  messe  à  l'église  qii'o:i  venait  de 
racheter  d'un  au're  a'quéreiir.  Tout  cejuur, 
le  zélé  prélat  n'avait  cessé  d'y  travailler, 
allant  jusqu'à  prendre  le  rabot  pour  faire 
aviincer  l'ouvrier  qui  mettait  (aux  frais  de 
révè(]ue  lui-ii!criK')  des  baguettes  dorées  aux 
deu3  tablc'iu-i  du  rtlablc. 


La  maison  de  Rennes,  comme  on    l'a   vu 
dans  le  texte    d'Hélyol,   clait  une  des   pre- 
mières fondations  de  l'ordre.    Elle    sera   la 
dernière  dont  nous  rapporlerons  la  restau- 
r.ition  avec  qi.elques  dct  ils.  Celle  restaura- 
tion est  due  au  zèle  de  la  mère  Helliard  d'Au- 
I  erleiiil,   diie  Marie  de  Sainle-Eugénie,    et 
connue  à  Rennes  sous   le  nom  de   la  mère 
Eugénie.    Nous    avons    cniendu    dire   dans 
cette  ville  que  la  maison    de  Saint-Cyr  lui 
avaitété/iccordéeparBuonaparteà  l'occasion 
d'un  berceau  riche  el  précieux,  travaillé  par 
les  soins  et  les  mains  de  la  mère  Eugénie,  et 
envoyé  par  elle  au  roi  de  Home.  Rîais  il  est 
impossible  qu'il  en  ait  été  ainsi,  carie  pré- 
tendu roi  de  Rome  naquit  en  î8ll,  el  la  mère 
Eugénie  h, bitait  dès  lors,  el  depuis  plusieurs 
années,   la   maison  de  Sainl-Cyr.  Celle  mère 
Eugénie,   que    nous  avons  vue  nous-méme, 
n'availpas,diî-on,  tcmt  ce  qu'il  fallaitde pru- 
dence el  de   lad  pour  le  succès  de  l'œuvre  à 
laquelle  son  z.'de  lavait  portée,  etqui  a  pour- 
tant réussi.  L'ancien  é  ablissemenl  des  reli- 
gieuses de  Nolre-Daoïe  de  Cbarilé,;')  Rennes, 
élait  cette  maison  dite  de  laTnnilé,  située  près 
(Je  la  cathédrale,  rue  de  la  Monnaie,  dans  la- 
quelle des    préires  fidèles  furent    incarcérés 
pendant    les  orages  de  la  première  révolu- 
tion, laquelle  fut  depuis,  ju-qu'en    1820,  le 
grand  séminaire  diocésain,  où  nous  avons 
pris  nous-mêiiie  l'habit   ecclési.istique.  Celte 
maison  aujourd'hui  est  entièrement  détruite, 
et  le  lieu  qu'elle  occupait  est  une  rue  et  une 
place   publique.  La  maison  de  Saint-Cyr,  à 
I  exlrémiié  d'un    faubourg,    était    l'un    des 
deux    monastères     r|ue     les     Calvairiennes 
avaient  à  Rennes.  La  ui're  Eugénie  se  pro- 
cura donc  celle  maison;  mais  ses  anciennes 
compagnes,  eiîrayées  d^s  delUs  qu'elle  avait 
contraciées  et  clio  juées   du   litre   de  fonila- 
trice  qu'elle  avait  pris  ou  olilenu,    ne  vou- 
laient point  se  réunir  à  elle.  M.  Enoch,  évé- 
que  de  Rennes,  pour  consolider  l'établisse- 
uieiit,  s'adressa  et  demanda    une    roliyicuse 
à    Madame  -  mère   et    au   cardinal    Eesch. 
Ceux-ci    toulureiit  que   la   religieuse  qu'on 
enverrait  à  Rennes  fût  lirée  de  la  mais  >n  do 
Paris,  à  laquelle  en  conséquence  l'évéque  eu 
fit  la  demande. 

M.  l'abhé  d'Asiros  donna  obédience  pour 
cette  translation  à  la  mère  d'Epry,  dite  mère 
de  Sainte-Pélagie,  qui  reçut  aussi  uik;  aceep- 
laiion  et  permission  de  l'évéque  de  Rennes, 
qui  la  nommait  supérieure  dans  une  ce  Iule 
dont  nous  avons  vu  la  teneur.  La  mèro 
Sainte-Pélagie  trouva  la  maison  dans  le  plus 
grand  dénuement  el  ciidellée  de  32,000  fr. 
Elle  ne  perilit  point  courage,  et  s'adressa  au 
préfet  du  d8|iartement,  qui  lui  alloua  uu  se- 
cours. .Vadauie  -  mère  lui  diiniia  aussi 
une  aumône,  et  Buonaparte,  sur  le  vu  d'une 
re(iuéte,  alloua  sur  le  budget  des  cultes  un 
secours  annuel  de  4,000  fr.  ,  continué  jur- 
qu'à  ce  jour  et  doublé.  Les  sujets  ne  venaient 
point  ai.giiienler  la  communauté;  la  restau- 
ration des  Bourbons,  qui  fut  une  occasiou 
d'élan  à  lant  d'autres  èlablissemeuls,  ne  til 
ai  ruii  mouvement  sensible  ou  st.'.blc  à  celui 
lie  l'iL'ism  s.  Cependant,  lîous  voyons  dau^  ie 


Il  M  DICTONNAmii  DES  ORDRES  RELICIElJX.  IIM 

tableau  des  .is^oc  iations  dccliarilé  qui  dépu-  conslilué  chef-lieu  d'une  nouvelle  branche, 

liToiil  au  rliapiire  pénéral  ciMuoqiié  par  dé-  avec  généralal  ilans  la  personne  de  la  su|ié- 

cret  du  30  se|)l<nilire    1.H17,  que  les  Dames  rieure  d  .\n};ers.  cl  une  légè-^e  niodilicalion 

du    Jiefitgr   de   Hennés    sont    an    nomtirf   de  dans  li-  CdSturMc.  Le  pape  a   approuvé  celle 

douze;  qu'elles  demnndeni  la  mniaon  de  Saint-  conçréjçalion  nouvelle,  qui  a  eu  une  prompte 

Ci/r    pour    lei(r    établissement  ,    ru   qu'elles  extension  el  dont  nous  dirons  rtiisloire  dans 

payent  le   loyer   de   la   maison   qu'elles   huhi-  noire  Supplémrnl  ;  mais  les   anciennes  mai- 

tei'i...    (Juiii'  qu'il    m   soit,  les   sujets   man-  »"ns   licnnenl  à  ce   qu'on  fas^c  bien  la  dis- 

quaienlà  cet  élahlisseinenl.  On  cnfit  venir  de  tini  lion  qu'il    y   a  enire   elli  s    et  la   famille 

la  maison  de  Caen,   en   18IS,  et  nous  vîmes,  d'Angers.    La   nouvelle    fondai  on   du  Mans 

à  Louvi;:né-du- Déserl,  la  colonie  de  quatre  élait  de   la   lillalion   d'Angers;    mais    elle   a 

religieuses  (lu'on  envoyait,  el  qui  se  relire-  (luillé  celle  observance  pailiculièrepour  reu- 

rcnl  au  bout  de  quelque  temps.  D'anciennes  H'c''  dans  la  corporation  des  amienncs  niai- 

religieuses  de  la  maison  de  la   Trinilé  con-  s""»,  avec  lesquelles  elle  a  établi  la  corres- 

senlirent  à  se  réunir  à  S.iinl-f.yr,  el  propo-  pondance  cormnuiie. 

sèrenl  à  la  mère  Sainle-rél.igie  de  faire  une  tlelle  correspondance  est  un  usagf  qui  de- 

éleclion.  Celle-ci  leur  ré|)ondil  qu'elle  était  ^rail  être  établi  enlreles  mai-ions  îles  autres 

supérieure   et  qu'il  n'était  pas  nécessaire  de  ordres.  Les  maisonsdeNolre-Dame  (leChari^o 

faire  une  élection.   L'évèque  de  Rennes,  qui  s'écrivent  les   unes   aux    autres    dos    lettres 

clail  alors  M.  Charles   Mannay,  se   nièla   de  ''""l  ""i"^  avons  vu  un  très-grand  nombre, 

l'alTaire,  el  la  mère  Sainle-Pélagie  demanda  i''  >'  consignent  loul  ce  qui  se  passe  d'inle- 

son  retour  à  Paris,  oii  elle  revint  le  20  jau-  rissant   dans    leurs  maisons.   Le  ncueil  do 

\ier  1821.  On   fil  revenir  à   Saint-Cyr  quel-  *'i'*  lellres,  s'il  était  donné  au  public, forme- 

qnes  mères  de  la  mnison  de  Caen,  quelques  ""ail  un  volume  à  la  fois    édifiant   il  episo- 

anciennes    de  Rennes    se  réunirrnl  à  elles,  dique. 

M.  Mannay  les  installa  solennellement,  re-  '■'•■»'  "n  grand  avantage  pour  l'ordre  de 
cul  la  rénovaiion  de  leursva'ux-,  elM.  l'abbé  ^'<)l^< -Dame  de  Charité  que  d'avoir,  ainsi 
•■.arnier,  son  grand  vicaire,  ilepuis  évèque  de  •l"f  '"»  Kudisles,  propagé  le  premier  la 
Vannes,  fil  un  beau  discours  à  celle  cérémo-  Oevo:ion  au  sacré  Cœur  de  Jésus  et  aopar  i- 
iiie,  dont  nous  fûmes  témoin,  el  dans  la-  *'i"l  I"  dévotion  au  sacré  Cœur  de  .Marie, 
quelle  nous  remarquâmes  que  la  mère  lîu-  aujourd'hui  si  lépandue  parmi  les  fidèles, 
génie  ne  renouvela  point  ses  vœux.  Les  reli-  cl  qui  fait  l'espérance  qu'oui  les  hommes 
gienses  de  Rennes  «lurent  pour  supérieure  •'■enses  el  religieux  de  \oir  la  foi  se  mainte- 
la  mère  Vauourlin.  dite  deSainl-Am-  nir  en  France  au  milieu  de  tant  d'onues. 
broise,  et  depuis  lors  leur  maison,  qui  nous  Annales  manuscrites  de  l'ancienne  maison 
avait  paru  si  dénuée,  a  obtenu  un  état  pros-  ''c  l'avis.  —  Item  de  la  nouvelle.  —  liensei- 
père.  ijnemtnls  fournis  par  la  rétérende  Mt're  "", 

lùifin,    la  quatrième  maison   nommée  par  supérieure  de  la  maison  Saint-HIicli.-l,  à  Pu- 

le  P.  Ileijot  csl.cllc  de  Vannes.    M.  l'abbé  ""«.  professe  de  la  maison  de  Saint-lhieuc 

Dcshayes,     mort    supérieur    des     Mission-  —  ^'^lemoires  de   philosopliie,  d'iùsloire,   dt 

naires  de   Saint  Lannnt-sur- Sèvre  ,    el   si  morale  et  de  liltcralurc.  Uniu-  W.  —  Corns- 

C(;nnu  par  son   zèle  et    ses  bonnes   œuvres,  pondance  de  plusieurs  communautés   de  l'or- 

les   réiinil,  après  la  révolution,    à    la    Char-  «^'e-  —  Histoire  manuscrite  de  la  v>aison  de 

lietise  pr,s  d'Auray,  où  il  éla't  alors   curé.  Sainl-Jirieuc.  R-o-i:. 

Kn  1811,  un  décret   impérial  approuvant  la  NOIKI'-DAME  DE  SAINT-P.VUL  flUi.iGiKU- 
inaison    de   Nunl-Iirieuc    dont    nous    avons  ,,.,    BÈMinicriNES    RiiroiniKEs    i.K)  ,    près 

parle,  (ut    refuse    a  celle  de  la   Chartreuse,  neauvais,  arec  la  Vie  de  de  la  It.  M.  Madc 

qui  se  din.e-serenl  celle  annec-la,  parce  .|ue         ,^,,-,j,,  d  Escoubicau  de  Suurdis,  leur  rcfor- 
M.    Deshayes,    voulant  que    la    maison    prit  matrice 

soinjdes  souids-nuiels,  exigeait  que  les  jeu- 
nes  religieuses    missenl    loul  leur    lemps  à  L'abbaye  de  Notre-Dame  ,  communément 

l'élude  des  sciences  qui  les  rendraieni  aples  ap|)elee  de  Saint-Paul  à  cause  (ju'elle  est  si- 

à  cette  bonne  (Puvre.  Cinq    des    religieuses  tuée  dans  un  village  de  ce  nom  à  une  lieue 

se  reiirérent  à  Saint-Rrieuc.  L'ordre  de  No-  de  lîeaiivais,  est   une  des  plus  anciennes  et 

tre-Dame   de  Charité    est   aujourd'hui    bien  des  plus  célèbres  de  France.  l'^lle  l'ut  fondée 

plus  étendu   (ju'antrefois.  Outre  les  maisons  par  C.hilpéric,  roi  de  France,  vers  l'an   580. 

de  Caen,  de  Rennes  el  de  Cuingamp  {à  Saint-  On  ne  sait   rien  des   premières  abbesses  qui 

!!ricucl,  de  La  Uochelle  el  de  'l'ours.  ()ui  oui  l'ont  gouvernée  jusqu'en  l'an  (i(v2,  si  ce  n'est 

élé    rélaldies,    l'inslilut    a    aujcurd'hui     des  que  sainte    Angadresmc  y  fut   einoyée   p.ir 

eLiblissenienls    à     Toulouse,    à    Nantes,    à  sainl  Oneu,  an  hcvéque  de   Roncn,   pour  eu 

Lyon,  à  \'ers,iill<  s ,  à  .Marseille,  à  N'alcnce,  être  abbesse;  el  on  n'est  pas  mieux  insirnit 

à    lies.in^ou  ,   à    Rlois  ,  à  .Monlauban   (!l  au  de  ce  (|ui  est  arrivé  à  celli!  .ihb.iv  e  depuis  la 

Mans.  mort    de   celle    saiiile,   qui    ai'ii\a  l'an    (07, 

Nous  croyons  ces  trois  ileriiiers  plus  nou-  jusqu'en   l'an  8(i0  ,  qu'elle   fut   enliéreinenl 

veaux  que  ceux  qui  les   prétèdenl.    Le    nu)-  deiruile    par   les    Normands,   doni    les    reli- 

naslèrc!  de  'l'ours   a   envoyé    une   colonie  à  gieuses  évilèrenl  la  luieur  el  la  hailiarie  ru 

Angers  ;  mais    cet  élahlisseinenl    d'Angers,  se  nfugianl  dans  la  ville   de   Heanv.iis  avec 

«  tmiiii  sons  le  nom  de  Maison  du    liim    P.is-  le  corps  de  sa'nle  Angadresme.  (]i>miiuMl  n'y 

ttiii  d'Au^jeis,  s'est  s.é)iaré  des  aulrcs,  s'est  avait  point  d'.ipiiartnce  de  les  voir  hicntùl 


jir; 


NOT 


NOT 


1161 


rétablies,  Rudes  I  ',  cvéqiie  de  Beauvais, 
voyant  que  les  seigneurs  voisins  et  autres 
jiersonnes  séculières  s'emparaient  tous  les 
jours  des  Itiens  de  cotte  abhiiye,  demanda  la 
jouissance  de  ces  biens  au  pape  Nicolas  1"' 
et  au  roi  Charles  le  Cliauve,  afin  qu  ils  fus- 
sent unis  et  incorpoésà  la  niense  épisco- 
pale;  ce  qu'il  oblitil  l'an  8G3,  à  condjiion 
néanmoins  qu'il  Dourrirail  et  entretiendrai! 
les  religieuses  sorties  de  ce  monastère,  et  les 
rétablirait  le  plus  tôt  qu'il  lui  serait  possible. 
L'évèque  de  Beauvais ,  ayant  accepté  ces 
eoiidiliuns,  se  mit  en  possession  du  revenu 
de  cette  abbaye,  sans  aucune  opposition  do 
la  part  des  religieuses.  Il  en  disj^osa  comme 
de  son  propre;  ce  que  firent  ausvi  ses  suc- 
cesseurs, sans  songer  à  la  réparation  ni  au 
rétablissement  de  ce  monastère,  quoiqu'ils  y 
fussent  obligés;  mais  Drogon  étant  monte, 
dans  le  x'  siècle,  sur  ce  siège  épiscopai,  fil 
IravailliT  en  diligence  au  rétahlissemenl  de 
ce  monastère,  et  lui  rendit  tous  ses  biens, 
avec  !e  village  de  Saint-Paul.  La  première 
.•ibbesse  de  ce  nouveau  monastère  fut  une 
saillie  fiile  appelée  lierthe,  qui  y  établit  les 
observances  régulières.  Elles  y  lurent  main- 
tenues par  celles  qui  lui  sutcéilèrent,  et  il 
s'y  présenta  un  si  grand  nombre  de  filles 
dans  la  suite,  pour  y  prendre  l'habit  de 
l'ordre  de  Saint-Benoît,  que  ce  monastère  de 
Saint-l'aul  n'étant  pas  suffisant  pour  les 
contenir  touies,  on  bâtit  quatre  prieurés,  où 
on  envoyait  des  religieuses  qui  élaieiii  tou- 
jours soumises  à  l'abbesse  de  Saint-Paul.  Le 
premier  fut  fondé  à  Potumereux,  b'  second  à 
Ezenuille  près  de  Pans,  le  troisième  à  Sainte- 
Hove-aux-Cbamps,  et  le  quatrième  à  Eplu- 
ques.  La  clôture  l'ut  établie  à  Saint-P.iul  par 
Pernelle  ou  l'clronille  de  Coudiène,  qui  avait 
été  élue  abbesse  l'an  liGO;  elle  dressa  aussi 
des  constitutions  qu'elle  fit  approuver  et  con- 
firmer par  Jean  de  Bar,  évéqtie  de  Beau  vais  ; 
mais  il  y  cul  des  abbesses  ilans  la  suiie  (jui 
négligèrent  de  les  faire  observer.  La  clôture 
ne  fut  plus  gardée,  et  si  de  temps  en  temps 
il  y  avait  quelques  abbesses  qui  rétablis- 
saient les  choses,  il  en  venait  d'autres  qui 
les  détruisaient.  Cependant  les  désordres  ne 
furent  pas  si  grands  dans  celte  abbaye  que 
dans  une  infinité  d'autres,  où  les  religieuses 
menaient  une  vie  toute  séculière.  Mais  sous 
le  gouvernement  d-  Charlotte  dô  Pcllevé, 
nièce  du  cardinal  de  ce  nom,  le  monastère 
ayant  beaucoup  souffert  par  la  famine  ((ui  fut 
presque  universelle  vers  l'an  1586,  et  ayant 
été  brûlé  deux  fois  par  accident  et  une  fois 
p.ir  la  fureur  des  soldats  du  comte  de  Uein- 
grave,  les  religieuses  furent  obligées  d'en 
sortir  pour  aller  chez  leuis  parents,  où  elles 
ne  s'embarrassèrent  guère  des  observances 
régulières.  Mais  Madeleine  d'iiscoubleau  de 
Suurdis,  qui  succéda  à  Charlotte  de  Pellevc 
r.in  1596,  rétablit  dans  ce  monastère  la  par- 
laite  observance  et  remit  cette  abbaye  pres- 
que dans  le  premier  étal  de  sa  fondation. 

Madeleine  d'Escoubleau  était  fille  de  Fran- 
çois d'Escoubîcau,  mar(]uis  d'AUuis,  gou- 
verneur de  Chartres,  premier  écuyer  de  la 
giaude  écuiie  et  chevalier  des  ordres  du  roi, 


et  d'Isabelle  Babou  de  la  Bourdai-ièrc.  Elle 
naquit  comme  par  miracle,  lorsqu'o.i  la 
croyait  étouffée  dans  les  entrailles  de  sa 
mère,  qui,  accouchant  au  septième  mois  de 
sa  grossesse  et  épuisée  de  forces  par  les 
grands  efforts  qu'elle  avait  faits  pour  mettre 
au  monde  une  autre  fille  dont  elle  était 
grosse  en  même  temps,  fit  désesi>érer  que 
celle-ci  pût  venir  à  lion  terme,  d'autant  plus 
qu'il  y  avait  déjà  un  jour  que  la  première 
était  née  sans  qu'il  y  eût  aucune  apparence 
favorable  pour  la  seconde.  Dès  l'âge  de  sept 
ans  elle  fut  envoyée  à  l'abbaye  de  Be^umont, 
sous  la  conduite  de  sa  tante  qui  en  était 
abbesse,  et  qui  l'éleva  jusqu'à  l'âge  de  seize 
ans,  qu'elle  fut  nomméi;  p.ir  le  roi  Henri  IV 
à  l'abbaye  de  Notre-Dame  de  Saint-Paul  près 
de  Beauvais.  11  y  eut  à  ce  sujet  quelques  di- 
visions dans  celle  maison,  où  des  religieuses 
prélendaient  maintenir  le  choix  qu'elles 
avaient  fait  d'une  religieuse  d'entre  elles 
pour  abbesse;  mais  tout  fut  pacifié  à  l'arri- 
vée de  Madeleine  d'EscoubIcau  de  Sourdis. 
qui  prit  possession  de  celte  abbaye  le  11 
avril  1596;  elle  y  fut  reçue  avec  beaucoup 
ile  joie  par  toutes  les  religieuses  qui  étaient 
naturellement  portées  à  la  parfai'e  obser- 
vance et  aux  exercices  de  leur  profession; 
mais  comme  celle  nouvelle  abliesse  n'avait 
encore  que  l'habil  île  novice,  elle  ne  prit 
l'administration  du  temporel  qu'au  mois  de 
septembre  suivant,  qu'elle  fit  sa  profession. 
Quoiqu'elle  n'obtint  ses  bulles  que  cinq  ans 
après,  à  cause  de  son  jeune  âge,  elle  no 
laissa  pas  de  conduire  celle  maison,  tant  pour 
le  spirituel  que  pour  le  temporel,  sous  la  di- 
rection de  l'évéque  de  Beauvais  :  sitôt  qu'elle 
cul  ses  bulles  et  qu'elle  eut  éié  bénie  par 
Henri  d'Escoubleau  de  Sourdis,  évê(jue  de 
Maillczais,  son  oncle,  elle  travailla,  par  le 
conseil  de  ce  prélat  et  du  cardinal  de  Sour- 
dis, son  frère,  à  remettre  en  vigueur  dans 
cette  maison  la  parlaiie  observance  des  rè- 
gles; elle  fut  beaucoup  aidée  dans  celle  en- 
treprise par  les  Pères  Bénédictins  réformés 
de  lacongrég  ition  de  Saiiit-N'annes  et  par  le 
P.  Ange  de  Joyeuse,  capucin,  aussi  bien  que 
par  le  P.  Honoré  de  Champigni,  du  même 
ordre.  La  clôture  y  avait  déjà  clé  réiablio 
par  ses  soins,  malgré  les  oppositions  t. ml  du 
dedans  que  du  dehors;  ainsi  il  ne  restait  plus 
qu'à  réiormer  quelques  abus  qui  s'étaient 
glissés  dans  les  observances  régulières.  Elle 
commença  par  remettre  l'usage  des  chemises 
et  des  draps  de  serge  aussi  bien  que  celui 
de  dormir  avec  l'habit  :  elle  rétablit  le  tra- 
vail en  commun,  qui  coramenç  i  à  se  faire 
dans  sa  chambre  en  silence,  après  lequel 
elle  ne  manquait  pas  de  leur  faire  une  exhor- 
tation pour  les  animer  à  la  pratique  de  la 
rèt;ie.  Elle  établit  les  matines  après  minuit, 
suivant  l'ancienne  pratique  de  cette  maison. 
Elle  s'étudia  surtout  à  faire  célébrer  l'office 
divin  avec  l'tionneur  et  la  majesté  convena- 
bles ;  et  elle  ôta  certains  privilèges  d'exemp- 
tion par  lesquels  les  religieuses  prétendaient 
avoir  droit  de  se  dispenser  certains  jours  de 
matines  et  des  heures  canoniales.  Elle  re-» 
trancha  aussi  les  abus  des  conversations  se- 


Il 


DICTIONNAll'.E  DES  OnDUEÇ  HELlCirci  X. 


l!.':o 


riiliircs  (Inns  les  l'Hirs  et  dans  les  parloirs, 
qu'elle  (il  fermer  le  jour  el  l:i  nuit,  ii!l«i  (juc 
(lersonne  ne  parlai  sans  sa  pernii-si'i<. 
Ouaiil  à  rabslinencf  pcrpéluelic  ite  la  vi  inile, 
l'Ile  avait  (le.sscin  (le  Tiiilroduire;  mais  elle 
en  fui  dissuadée  par  l'évèciue  de  Beaiivais  et 
par  quelques  autres  personnes  qui  lui  con- 
seillèrent d'en  pernieilrc  l'usa^ic  iriis  fois  la 
semaine,  tanl  à  cause  de  la  délicatesse  el  do 
l'iniirtuilé  de  la  plupart  des  religieuses  de  sa 
cnnimunaulé,  qui  souffraient  beaucoup  de 
l'air  incommode  el  malsain  de  leur  monas- 
tère, qu'à  cause  de  la  difliculiè  qu'il  y  avait 
d'avoir  du  poisson  pour  le  grand  nombre 
qu'elles  étaient. 

Il  y  avait  encore  à  réformer  l'habit  que 
l'on  y  portait  depuis  cent  ou  si\-viiij;ls  ans, 
qui  consistait  en  un  surplis  de  toile  noire 
par-dessus  la  robe  (1).  Quelques  religieuses 
s'opposèrent  forlement  ci  ce  changement; 
l'cvéquc  de  Ceiuvais  ne  l'approuvait  pas 
non  plus,  mais  elle  surmonta  enrore  toutes 
<es  diflicullés  et  fit  prendre  à  ses  religieuses 
l'habit  qui  est  commun  a:ix  autres  rc  ligicuses 
de  cet  ordie,  qui  consiste  dans  la  robe,  le 
scapulaire  et  la  roule.  Kniin  elle  n'omit  rien 
piur  faire  revivre  l'esprit  de  sa  nt  Benoît 
•tans  son  ab;aye,  en  en  reiranclianl  les  abiiS 

('.)  Voij.,  à  la  lin  du  vol.,  n»  2a9. 


qui  s'étaient  f{!isscs  dorant  'o  ma'lieiir  des 
guerres.  Elle  fil  dresser  un  formulaire  dî»; 
constitutions  qu'eil''  fil  obscr\cr  à  li  lettre, 
après  les  avoir  tait  recevoir  par  la  roramu- 
naulé,  qui  s'engagea  à  ne  faire  j  imais  aucun 
cbangcmenl  dans  la  pratique  de  luul  ce  qui 
y  était  lontinu.  Celle  acceptation  se  fil  le  10 
février  île  l'année  1600.  La  sainteté  de  ces 
religieuses  se  répandit  de  tous  côtés;  plu- 
sieurs supérieures  de  différents  monastères 
nrièrenl  l'abbessc  de  Saioi-l'aul  de  leur  en- 
voyer de  ses  filles  pour  y  rétablir  la  régula- 
rité :  ce  qu'elle  accorda  à  quelques-unes, 
entre  autres  à  celles  de  Sainle-Austreberle, 
près  de  .Montreuil,  el  de  Saint-.Xniand  de 
huuen.  Elle  envoya  aussi  les  règlements  qui 
avaient  éié  faits  pour  le  bien  de  son  mouiis- 
tère  aux  abbesses  de  Vlllc-Chasson,  de  Neu- 
bourg,  de  ISellefonds  el  de  quelques  autres 
monaslèr<  s  qui  les  avaient  demandés.  Enfin 
labbesse  de  Saint-l'aul,  après  avoir  gouverné 
ce  monastère  pendant  soixante-neuf  ans,  et 
y  avoir  établi  une  parfaite  observance,  mou- 
rut le  10  avril  llitJo,  étant  âgée  de  85  ans. 

Clironiq.  général,  de  l'ordre  de  Salnl-lie- 
iioil,  tom.  \  1. 

>()riU:->ALVEUR.  Voyez  Sauveur. 

NUYS.  Vvyez  Val-Vekd  et  Vindesi;im. 


ARTICLES  ADDITIONNELS. 


BEP.NARDl.NES  .RErjciEisEs). 

Les  religieuses  lîernardines  (1),  suppri- 
mées comme  tous  les  autres  insliiuls  ,  en 
1790,  ont  mis,  généralement  parlant,  peu 
de  zèle  à  se  rétablir  en  France.  iSous 
aurons  à  parler  de  la  conscrvalion  de  l'or- 
dre p.irnii  nous,  puisque  les  religieuses 
de  l'ort-Hoyal  et  celles  de  la  Trappe  en 
font  partie  ;  mais  de  l'observance  commune 
de  Ctleaux,  il  n'y  a  tout  au  plus  que  trois 
ou  r|uatre  maisons,  peul-èlre  moins  encore, 
()iii  se  soient  reeonstiluées.  Nous  citerons 
celle  ipii  existe  à  Saint-I'anl-aux-ISois  ,  dio- 
cèse de  Soissons,  et  une  aulre  au  diocèse 
<!e  Cambrai.  Celle-ci  a  élé  formée  par  les 
anciennes  religieuses,  de  l'abbaye  de  l'Iines. 
i;u  l'année  IHlï ,  elles  firent  qufbiues  tenta- 
tives pour  prendie  l.i  réforme  de  la  Trappe. 
f/évéquc,  (juoique  ancieu  constitutiomiel  , 
ïecondail  leur  désir.  Une  colonie  de  qucl- 
«liies  lra]ipistes  du  monastère  Sainlc-Ca- 
Ihcrine  de  l.awil  ,  s'y  rendit  sous  la  con- 
duite de  la  mère  (iirlrude,  religieuse  el 
.sd'ur  de  la  supérieure  de  celle  dernière 
maison.  Des  raisons  parlieulicres  empé- 
chèrenl  celle  réforme,  cl  les  Dames  Trap- 
pisles  revinrent  à  leur  monastère  de  La- 
val. Les  nernardines  ont  une  maison  à 
Home,  dirigée  p.ir  des  prêtres  séculiers; 
«Iles  e  i  ont  peu,  croyons-nous,  dans  l'Ita- 


lie; quelques-unes  d  ins  les  autres  con- 
trées de  l'Europe ,  el  même  en  Anglcierre. 
puisque  le  monastère  des  Dames  'Ir.ip- 
]  isles  a|ipartieul  à  cet  institut.  Il  doil  en 
conserver  quelques-unes  dans  les  coniréec 
occidentales  de  la  Uussie  .  et  même  dam 
les  Klals  autrichiens  :  cepend.inl  nous  n'en 
trouvons  aucune  indiquée  dans  la  statisti- 
que des  communautés  de  ce  dernier  pays, 
que  nous  avons  acluellemenl  sous  les  jeux. 
Si.'us  terminerons  ces  additions  par  quel- 
qnes  détails  parlieulicrs  sur  la  maison  lUî 
Sainl-l'aul-a  x-Hos.  Celle  maison  fut  for- 
nïéc  quelques  .-innées  après  le  concordat, 
par  le  zèle  d'une  anc  ennc  Rernanline , 
madame  Pauline  du  Castcl ,  qui  s'associa 
plusieurs  de  ses  anciennes  compagnes,  <•! 
qui  gouverna  sigemeul  sa  nouvelle  com- 
munauté jusqu'à  sa  mort,  arrivéi'  en  l'an- 
née 1833.  .Madame  Stéphanie  d'Alineomt 
lui  a  succédé  dans  la  place  de  supérieure. 
Celte  communauté  était,  en  1830,  com- 
posée de  seize  religieuses  de  ch<i'iir,  huit 
S(rurs  converses,  et  cjualre  postulantes,  lilie 
suil,  avec  la  règle  de  saint  Benoit,  mitigée, 
ries  constitutions  appri.u\ees  par  l'evéque 
de  Soissons,  qui   en   est   le   supérieur. 

{Noies  recueillies  passim  ,  cl  d'un  mémoire 
fourni  pur  la  révérende  mère  Stéiihnnie  rf'-J- 
Imcaurt.)  H-D-f. 


(I)  Vt.i/.   r.irl.  l!i  iiN.uuiiNF.s,  loin.  1''',  cil.  U'-'i. 


1137  ARTICLES  A[)D; TiONNF.l.S. 

FXOLES  CHUÉTIENNRS  ,  dtc.  (I^. 

«  Fn  177G,  les  Dames  de  Snint-Mnur 
(  c'est  à-dire  les  s:rurs  de  rKnfaiit-Jésus 
dont  il  est  parlé  dans  cet  article  )  furent 
cliargôcs  du  pensionnat  de  Lévignac ,  au 
diocèse  de  Toulouse,  établi  sur  le  modèle 
de  relui  de  Saiiit-Cyr.  L'ii  stitut  comptait 
environ  cent  maisons  et  six  cents  sujets 
en  exercice  à  lépoque  de  1789  ;  la  mai- 
son clicf-lieu  jouissait  alors  de  vingt  mille 
livres  de  renie.  Mais  nous  ne  devons  pas 
omettre  qi:e  la  congrégalion  primitive  s'é- 
l.'iit  partagée  en  deux,  dont  l'une,  sous 
ce  nom  de  Dames  de  Saint-Maur ,  s'était 
propagée  principalement  dans  le  Midi,  et 
nous  en  avons  donné  pour  exemple  leur 
pensionnat  de  Lévignac  ;  l'autre ,  dite  de 
la  Providence  ,  avait  formé  plusieurs  mai- 
sons en  Normandie  et  en  Picardie.  Mais  , 
en  1791,  les  Uaines  de  l'instruction  chari- 
table furent  L'bassées  de  tous  leurs  élablis- 
fcments.  »  {Ilislvire  des  Ordres  reWiicux  , 
par  M.  Henrion  ,  tom.  II,  p.  303.)  Comme 
c(;tle  utile  congréjialion  a  eu  une  existence 
nouvelle  et  paraît  être  sur  un  nouveau 
pied  depuis  l'année  1896,  nous  lui  con- 
sacrerons un  article  spécial  ,  dans  le  Sup- 
plément, sous  le  liire  de  Dames  de  Sainl- 
Miiur,  qui  lui  semble  plus  convenable 
aujourd'hui,  ou  plus  communément  donné, 
que   le   nom   de  Filles   de   l'Enfant-Jésus. 

Les  sœurs  de  V linfant-Jésus  ,  qui  s'étaient 
fort  répandues  dans  tous  les  quartiers  de 
l'aiis,  étaient  considérées  comme  une  fonda- 
tion de  madame  Dourdin  ,  supérieure  de  tout 
l'inslilut.  Au  milieu  du  dernier  siècle,  l.i 
maison  élail  composée  de  trente  religieu- 
ses, et  elle  servait  de  noviciat  à  tous  les 
établissements  des  provinces.  On  n'exigeait 
point  de  dot  des  sujets  qui  se  présentaient , 
mais  on  leur  demandait  1200  livres  de 
pension  pour  le  noviciat,  qui  durait  deux 
ans  ,  ai  rès  i.ix  mois   de  po--lulût.     B-d-l-. 

FIIANCISCAIISS   EN    GÉNÉRAL  (2J. 

L'état  où  se  trouvait  le  corps  vénérable 
de  saint  François  d'Assise  depuis  sa  mort 
est  resté  longtemps  inconnu.  Une  Iradilion 
erronée  faisait  très-souvent  écrire  que  le 
saint  fondateur  élail  debout  ,  les  yeux  fi- 
xes vers  le  ciel ,  el  dans  l'altitude  de  con- 
templation qu'il  eût  pu  prendre  pendant 
sa  vie.  \'oiii  ce  qu'il  y  a  de  vrai  sur  sou 
inhumation  el  sur  l'état  de  ses  précieuses 
reliques.  Le  corps  de  saint  François  avait 
été  mis  dans  une  urne  de  pierre  el  in- 
humé d:ins  l'église  Saint-George.  En  1230, 
deux  ans  après  sa  canonisation  ,  il  fut 
Iransféré,  par  les  teins  du  P.  Elle,  qui 
iiciait  plus  général  alors,  mais  qui  don- 
nait à  l'ordre  toute  son  inielligence  et  tout 
son  zèle;  il  fut  transféré,  disons-nous, 
dans  l'église  i  euve  bâtie  sous  son  invo- 
cation. Dans  la  crain-'.e  de  voir  son  insiitut 
pri\é  par  une  spoliation  quelconque  de  ce 


(1)  Vo,j. 
C-.  I  l-2i. 


sacré  dépôt  ,  cl  de  dom^er  une  occasion 
d'ètonnement  aux  esprits  faibles,  qui  sa- 
vaient que  le  corps  de  François  était  de- 
tenu  flexible  au  moment  de  son  décès  , 
mais  qui  ignoraient  que  depuis  ce  temps 
il  était  entré  en  putréfaction  ,  le  P.  Elle  , 
par  une  précaution  étrange  ,  fit  transférer 
le  corps  dans  l'urne,  et  le  fit  enlever,  par 
une  violence  simulée  ,  par  les  bourgeois 
d'Assise ,  qui  expulsèrent  tout  le  monfic 
de  l'église  et  l'enlerrèrent  si  seciètemeni, 
qu'un  très-peiit  nombre  connut  la  place 
de  celle  sépulture  dans  l'église  ,  et  ijue, 
ceux  qui  la  connaissaient  étant  morts,  per- 
sonne ne  sut  véritiblement  où  la  cher- 
cher. Le  pape,  qu'on  avait  imprudemment 
laissé  dans  l'ignorance  de  la  précaution 
dont  nous  venons  de  parler,  fulmina  con- 
tre les  prétendus  coupables,  mais  on  l'a- 
paisa bientôt  ,  en  lui  expliquant  les  faits 
et  leurs  mollis.  On  doit  en  juger  ainsi  , 
puisque  les  Frères  Mineurs  ne  quittèrent 
point  celle  église  ,  quoique  le  souverain 
pontife  eût  mis  le  couvent  en  in  erdt  , 
avec  défense  d'y  tenir  le  chapitre  général 
de  l'ordre,  jusqu'à  ce  qu'on  lui  eût  fail 
sa'.isfaclion. 

Ces  précautions  firent  qu'après  la  mort 
du  petit  nombre  <ie  témoins  qui  avaient 
assisté  à  ces  funérailles  jusqu'à  la  fin  , 
on  perdit  bientôt  la  connaissance  exacte 
du  lieu  où  François  avait  élé  inhumé. 
Aussi  les  anciens  historiens  de  sa  ^  ie  se 
contentent  de  dire  en  général  ({u'on  con- 
serve son  corps  dans  l'église  basse  du  cou- 
vent d'Assise ,  sans  rien  désigner  ni  sur 
l'état   ni   sur   le   lieu   où   il  est. 

11  faut  convenir  qu  il  est  bien  surpre- 
nant qu'on  ait  altendu  jus(iu'à  nos  jours, 
dans  l'ordre  puissant  el  fameux  des  Fran- 
ciscains ,  à  recherctier  avec  ardeur  les  reli- 
ques du  saint  fondateur  !  Paul  V,  en  1007, 
voyant  les  discussions  qui  régnaient  entre 
les  religieux  sur  l'état  de  ces  précieuses 
reliques  ,  défendit  de  faire  aucune  fouille 
dans  l'église  et  le  couvent  d'Assise  pour 
les  trouver.  En  1773,  le  P.  Papinio  ,  gé- 
néral des  Conventuels  ,  fit  ,  avec  la  per- 
mission du  saint-siège  ,  des  fouilles  qui 
furent  sans   résultat. 

Après  la  chute  de  lîuonapa-le  ,  en  181V, 
les  fidèles  d'Italie  reprirent  l'habitude  de 
fréquenter  le  pèlerinage  de  Saiiil-Kraneois 
à  Assise,  et  on  y  en  voit  une  foule  considé- 
rable à  l'époque  de  la  fêle  de  Notre-Dame 
des  An^^es,  qui  se  célèbre  le  2  août. 

En  1818,  avec  la  permission  du  sou- 
verain ponlife  Pie  Vil,  le  lî.  P.  Joseph- 
Marie  de  Bonis,  supérieur  général  d(!  soi» 
ordre,  fit  fouiller  de  nouveau;  el  après  un 
travail  opiniâtre,  continué  pendant  ein- 
quanle-deux  nuits  ,  et  ce  en  gardant  le 
(ilus  grand  secret,  dans  la  nuit  du  12  dé- 
cembre 1818  ,  on  découvrit ,  sous  I  auiet 
de  l'église  basse  (  car  il  y  en  a  deux  su- 
perposées ,   el   non  trois,   coir.mc   plusieurs 

l'ait.   Ecoles  chrétiennes,  ci-déssus,  ["i]  Voy.  l'an.  Fiianciscai.ns,  ci-dessus,  coi.  5;Gv 


Hr,?,                                        DICTIONN  VIRE  DES  ORDRES  RELIGIIXX.                                        <1C0 

l'oiii  cru  \  le  ci>rps  du  saint  f.indnloiir.  Il  dr>  sos  branrlios.  A.luollomcnl  encore  los 
tallail  une  reccMUKiisf.anco  aullicniique  de  Clarisses,  1rs  Capucins,  les  n  ligieux  de 
<es  précieux  rc.slcs.  I.e  pape  .  qu'on  in-  la  reforme  de  Sainl  l'ierre  d'Aleanlara,  etc., 
lorina  aussiiol  de  la  dèeouveile,  nomma  rappcllonl  ce  (ju'elait  l'inslilul  des  Frères 
Ml. e  coinriiission  composée  de  Icvéque  d'As-  Mineurs  au  treizième  siècle;  cl  dans  cha- 
siso  et  de  quatre  evéques  voisins  de  cette  que  province  de  l'ordre,  on  tient  à  con- 
ville  ,  jiour  examiner  <  l  iirononcer  sur  l'i-  server,  dit-on  .  au  moina  une  maison  de 
dentité  du  corps  i!e  s.iinl  François.  L'en-  récolleclion  ,  où  la  lègle  est  observée  aiec 
qiiéie  eut  le  résull:il  ilcsiré  et  prévu  ;  deux  plus  de  ponclualilé.  Ainsi,  par  exemi)le  , 
nilIal•le^  opi^rés  par  l'inU-rccssinn  de  .>.aint  jusqu'à  la  suppression  récente  des  ordres 
l'iançois  ,  dans  ces  circonst.inces  ,  vinrent  religieux  en  Espai;ne  ,  sous  le  règne  d'isa- 
oncMC  ajouicr  à  la  cerliludc  qu'on  a\ait  belle  .  des  qnaranli'-sepi  couvents  que  pos- 
constatée  ,  cl  il  ne  put  rester  douteux  séilail  la  province  des  Observantins  de  Mur- 
P'nir  personne  que  les  reliques  qu'on  avait  cie  ou  tlarltiagène,  il  y  avait  sept  ou  huit 
découvertes  sous  l'auiel  d'Assise,  où  la  maisons  de  Kdculleciins ,  c'est-à-dire  de 
ir.idiiion  plaçait  celles  de  sa  Ht  Fr.in.ois  ,  religieux  destinés  à  mener  celte  vie  de  rê- 
ne  fussent   le-i   reliques   de  saint  François,  collection. 

On  publia  à  liome  ,  aussitôt  après  la  fin  II  y  a  encore  dans  la   province  de  Gènes, 

de   lenquète,    un    mémoire,    format   in-l",  en  Italie,  cette  suldivis  on  de  celle  province 

ilenviron  deu\  à  trois  cents  pages.  M.  l'abbé  en  cusiodies,  comme  on  a  vu  dans  le  récit  du 

Tresvaux  ,  aujourii  iiui   chanoine  de  la  nié-  P.    Héljol  que  cela   se  pratiquait  aulrefois 

iropole  de  l'aris,  ayant  reçu  du  P.  de  Bonis  dans  les  provinces  trop  étendues.   Celle  pro- 

un    exemplaire    de    ce    Mémuire  ,    en    corn-  vin  <•  de  Gènes  est  donc  sululivisèe  en  quatre 

posa,  en  l'année  1820,  une  traduction  abré-  custodics:   on   assure  que   cette   distinction 

gée  ,    qui    est    restée    manuscrite.    Il    esl    à  dans  la  même  famille  occ  isionne  des  intérêts 

rcgretier   qu'elle    n'ait    pas   été   donnée   au  de  parti  dans  les  assemblées  prov  inciales,  ce 

public  ;    il   est    vrai    qu'une   relation   de   la  qui  peut  nuire  à  l'esprit  de  charité  el  à  l'in- 

découverte   des   reliques   de  sainl  François  lérèl  général.   11  n'<n   faut  être  ni  sur[)ris  ni 

se  trouve  dans  la  dernière  édition  de   lin-  scandalisé;  tel   est  le  sort  des   choses  que 

léressante    Vie  de  ce  saint ,   composée  par  traitent  les  hommes,  et  souvent  cet  inconve- 

le   P.  (^balippe.  nienl  est  le  Iruil  de  bonnes  intentions. 

L'ordre  de  Saint  -  François  d'Assise  est  Aux  détails  donnes  sur  Tordre  eniier  par 
peut-être  celui  qui  a  reçu  dans  l'Eglise  le  le  P.  Héljol,  nous  pouvons  ajouter  que  les 
plus  d'extension  aiéme  numérique  ;  il  a  Frères  Mineurs  eurent  des  élabli^S'uneiiis 
surpassé,  croyons  -  nous  ,  non  -  seulement  considérables  en  Angleterre.  Saint  François 
tous  les  autres  instituts  d'Occident  ,  niais  y  envoya,  en  121'J,  Ange  de  Pise  avec  huit 
même  ^ill^lllul  connu  eu  Orient  sous  le  nom  autres  doses  religieux.  Ils  arrivèrent  tous  à 
de  Sain -Itasile  ;  car  celui-ci  est  subdivisé  en  Douvres  en  1220,  el  fondèrent  un  couvent  ,i 
plusieurs  société?  qui  n'ont  point  le  même  Cantorbéri  ;  peu  de  temps  après,  ils  en  Ion- 
lien  commun  que   les   Frères   Mineurs.  dèrent  un  autre  à  Norlhamplon,  qui   devint 

Ce  genre  spécial .  connu  sous   le  nom  de  fort  célèbre.  Celui  qu'ils  avaient  à  Londres, 

Mendiants  ,   a    amené    une    phase    nouvelle  près  de  Newgate,  fut  fondé,  en   1306,  par  la 

dans  l.i  vie  monastique  ,  et   semble  ne  pou-  reine     Marguerite,     seconde     femme     d'K- 

voir  être   striclemenl   designé   que    sous    le  douard  !"'.  Il  y  avait  une  magnilique  liiblio- 

noin  de  vie  religieuse,  car  il  lient  une  sorte  llièque,  qui  avait  éié  donnée  aux  religieux, 

lie    rang   mitoyen  entre  les  ordres  tout  à  l'ait  en  li29,   par  sir  lUcbard  N\'hilliiiglon,  alois 

monastiques    et    les    sociétés    régulières    et  inaire  de  Londres.  Lorsqu'on  eut  détruit  les 

séculières  qu'on  vit  surgir  en  Occident  deux  monastères,  ou   (il  de  celui  dont  nous  (lar- 

ou  trois  siècles  après  lui.  Cette   phase  nou-  Ions    un    hôpital   où   étaient    élevés-  giiairc 

velle  esl  due  au   zèle   des   fondateurs,  auv  cents   enfinis,   qu'on    appela. t   les    nifatii.i 

be-oins   des   diverses   épo(]iies,    .lU    mouvc-  bleus.   Nous    ignorons  si   ce  grand    hospice 

ment    particulier   de   l'Lsprit-Sainl,  et   non  existe  incore  sur  le  même  pied, 

pas    uni'iuemenl    à    toutes    les    causes    que  Les   Franciscains   avaient   en    Angleterre 

semble    assigner  ,    en    p.irlant    des    Frères  csiviron    quatre-vingts    couvents  ,    iiidépen- 

.Alincurs,  un    aulcur   estimable  qui   a  é(  ril  damunnl  de  ceux  des  femmes  de  leur  ordie, 

dans  ces  derniers   temps   (1).   Nous    ne    sa-  <|ui,  selon    Tanner,   n'ctaient  pas  fort   nom- 

vons   pourquoi   cet  écrivain  instruit  compte  brcux.    La    principale   maison  des  Clarisses 

au    nombre'  des    réformes   des    Franciscains  était  |rès  d'AIdgale  ;  elle  fui  hàlie  par  lilan- 

la    congrégation    des    Silvcslrins  ,    qui    est  che,  reine  de  Navarre,  cl  par  I^dm  iiid,  son 

une    réioriiie   ou    corporation    dans    I  ordre  mari,  <|ui  était  fils  de  lienri   ill,   Irèri;   d  L- 

de   Saint-T.enoit.  duu.ird  I",  et  comte  de  Lanc.isler  de  Leices- 

Si    Toriire    de  Saint-François   a   subi    les  ter  et  de  Darby.   Ces   (]lari>ses  éiaieni   du 

conséiiuences   n.iturelles  a  la   faiblesse  hu-  noinlire  rie  celles  f|u'on  appelle  Urb.inistcs. 

inaine,   en   dégénerani   de  sa   première   1er-  Outre  le  nom  de  lilarisscs,  on  leur  donnait 

venr,    il    esl    certain    qu'il   a   dans   lous    les  cnc<ue    le  nom  de  Mmores.'<rs.    Ou   ap|ielail 

temps,    et    même    de    nos    jours,    conseive  leurs  couvents  ,l/l;io»ic.<.  Lors  de  la  ihstru,- 

ceile    ferveur    primitive   en    quchiucs   unes  lion  des  monastères,  celui  d.  s  (^l.lrl^scs  d.iut 

(1)  llnluire  dct  Uiilict  religieux,  |i.Tr  M.  Ileiniaiil,  tnni.  l"',  liv.  u. 


1161 
il 


ARTICLES  ADDITIONNELS. 


li!'2 


il  s'agit  fut  changé  en  un  magasin  d'armes. 
Sou  nom  est  resté  à  la  partie  de  la  ville  où  il 
était,  et  on  l'a  donni^!  aux  nouveaux  édifices 
qui  s'étendent  usqu'à  la  campagne. 

Pour  connaître  l'état  (lorissuiil  dont  jouis- 
saient les  Franciscains  en  Angleterre,  et  le 
nombre  des  giands  hommes  qu'y  produisit 
leur  ordre,  on  peut  consulter  la  bonne  his- 
toire de  la  iirovincc  anglaise  de  ces  religieux; 
le  P.  Davenport  dans  son  Supplein.  Hisloriœ 
provinciœ  Afifjlicanœ,  et  Slévens,  iWo»ia«a'- 
con  Anglicanam,  tom.  1.  Celle  ancienne  pro- 
yijice  fut  rétablie  par  le  P.  Jean  Jenpings, 
qui  jeta  les  fondeijienls  du  célèbre  couvent 
des  Franciscains,  à  Douai,  vers  l'an  1617. 
De  tous  les  religieux  de  cet  ordre  qui  ont 
fait  revivre  en  eux  l'esprit  de  saint  François 
dans  les  derniers  siècles,  on  peut  citer  avec 
Godescard  le  P.  Paul  de  Sainte-Madelèno 
(Henri  Heart),  comme  oo  peut  le  voir  dans 
sa  Fie,  qui  a  éié  publiée,  et  dans  ses  écrits. 
On  a  vu  le  chiffre  auquel  le  P.  Hélyot  éle- 
vait la  totalité  des  monastères  de  l'ordre  des 
Franciscains.  Leur  nombre  était  beaucoup 
plus  considérable  avant  la  destruction  des 
jnonastères  en  Angleterre  et  dans  les  con- 
trées du  Nord.  Sabellicus  comptait  en  13^0, 
quinze  cents  maisons  de  Franciscains,  et 
00,000  religiei  x.  11  y  a  ici  éyidemment  une 
erreur  m  moii>s  dans  le  nombre  (|es  uiaispns 
faite  par  le  copiste  de  Sabellicus. 

Aujourd'hui  le  nombre  des  maisons  de 
l'ordre  est  bien  rétinit,  et  à  dater  des  inno- 
vations faites  dans  le  dernier  siècle  et  sur- 
tout des  révolutions  dont  l'Europe  a  été  bou- 
l.eversée  dans  ces  derniers  temps,  l'institut  de 
St-Françoisa  disparu  de  plusieurs  contrées. 
Il  a  pou  de  couvents,  même  en  Italie,  compa- 
f  aliyement  à  ce  qu'il  y  en  possédait  autrefois. 
En  France,  il  était  fort  répandu  et  y  pos- 
sédait les  branches  principales  de  l'ordre. 
Leurs  établissements  étaient  faciles  à  comp- 
ter au  moyen  de  diverses  statistiques  qui 
avaient  été  publiées,  et  M.  HermanI,  dans 
son  Histoire  des  Ordres  religieux,  en  a  fait, 
comme  pour  les  autres  ordres  qu'il  a  pu 
connaître  en  détail  ,  l'énumération  cu- 
rieuse, avec  la  date  de  leur  fondation. 

Le  grand  couvent  de  Paris  n'appartenait  à 
aucune  province,  et  il  dépendait  immédiate- 
ment du  général.  Ce  couyent  avait  été  fondé 
vers  l'année  1217.  C'était,  pojir  la  France,  le 
collège  général  de  l'ordre.  Lps  natiqns  étran- 
gères y  envoyaient  autrefois  des  jeunes  gens 
pour  les  éludes.  Depuis,  il  n'y  avait  plus  que 
les  seuls  Français  d'admis,  mais  ils  y  ve- 
naient (!e  toutes  les  provinces  du  royaume. 
On  y  faisait  prendre  le  grade  de  docteur, 
dans  la  faculté  de  théologie,  à  quatre  sujets 
par  chaque  licence,  et  cette  licence,  comme 
nous  l'avons  dit  imus-même  dans  plusieurs 
articles  publiés  par  les  journaux  ,  durait 
deux  années.  Au  piilieu  du  dernier  siècle,  la 
communauté  était  poinposee  d'envfrou  pcnt 
vingt  religieux  ;  ce  nombre  avait  diminué  à 
l'approche  de  la  révolution.  Cette  célèbre 
maison  est  aujourd'hui  l'hôpital, dit  (ie  la  Cli- 
nique, rue  et  en  face  de  l'Ecole  de  Médecine. 
En  conséquence  des  mesures  que  prit  le 
DicTiONNAïUE  nES  Orubes  religieux,  h. 


gouvernement  trançaîs  sous  Louis  X\',  me- 
sures qu'avait  amenées  et   que   dirii^ea   le 
trop    fameux  lîrienne.  arclievécjue  de  Tou- 
louse et  depuis  cardinal,  avec  quelques  au- 
tres évéques  prasciuc  aussi   malintentionnés 
et  aussi  méprisaliles  que  lui,  piusi  urs  or- 
dres religieux,  menacés  d.iiîs  leur  existence 
(plusieurs  périrent),  firent  de  nouvelles  coii- 
siitutions^  et  les  diverses  branches  do  Fr;in- 
ciscains  subirent  aussi  celle  rôvolulion,  qui 
amena  le  relâchement  dans  les  ordres  qui 
ne  furent  pas  détruits.  I/elîet  le  i)lus  remar- 
quable de  celle  révolution  funesl'  fut,  dans 
l'ordre  de  Saint  François ,   la  réunion  des 
Conventuels  et  des  Observantins  en  un  seul 
corps  ;   union  que  demandèrent  les  Obser- 
vantins eux-mêmes,  quoiqu'elle  les   poriâi 
au    relâchement.    Nous    raconlcrofis    cette 
union  des  deux  observances  avec  quelques 
détails  à  l'article  Oushrvantins  ;  nous  nouç 
bornerons  ici  à  en  consigner  le  résultai.  Les 
Observantins    avaient    huit    irovintes    en 
France,  et  les  j[lonventuels,  trois  seulement. 
Celait  aux  Oliservantins  qu'était  donné  le 
nom  de  Cordeliers;  il  était  général  après  l'u- 
nion. Les  Observantins  se  réunirent  par  dér 
pûtes,  à  Paris,  en  1769,  et  les  Conventuels  à 
Aix,  l'année  suivante.  L'effet  comme  le  buj 
de  ces  chapitres  nationaux  fqt  de  faire  inter- 
venir, le  23  juin  1770,  un  arrêt  du  conseil  dq 
roi,  ordonnant  un  chapitre  national,  cou>- 
posé  d'un  (Jéputé  de  chaque,  province  d^s 
Observantins,   et  de   six  députés  pour  les 
trois  provinces  des  Conventuels.  Ce  chapitre 
se  tint  en  effet,  la  niéme  année,  au  grand 
couvent  de  Paris,  le  17  septembre  et  jours 
suivants.  On  y  adopta,  sauf  quelques  chan- 
gements, les   constitutions  rédigées  à   Aix 
par  les  Conventuels,  et  tirées  des  constitu- 
tions urbaines.  Deux  députés  furent  envoyés 
à    Rome  pour    consommer    l'union  ;    le   P. 
Pourret  de  la  part  des  Conventuels  ,   le   P. 
Husson,  de  la  part  des  Observantins.   Ci's 
deux  députés  furent  parfaitement  reçus  dij 
pape  Clément  XIV,  ancien  conventuel,  cl  du 
général  des   Conventuels,   qui   vit  finir   le 
temps  de  son  gouvernement  précisément  à 
l'époque  de  leur  séjour  à  Rome.  Son  succes- 
seur, le  P.  Marzoni,  auparavant  procureur 
général,  fut  élu  le  18  mai  1771,  et  le  pape 
présid.i  avec  trois  cardinaux  l'asscnitiléc  où 
se  lit  l'élection.  Par  une  faveur  qui  doit  pa- 
raître singulière,  le  souverain  ])ontifc  nomma 
vocaux  dans  cette  élection   le  P.  Husson  et 
son    secrétaire ,    qui  sqffragèrent  en  effet , 
quoiqu'ils    fussent   encore   Observantins    et 
sous  la  dépendance  du  général  de  leur  ob- 
servance.  L'union  fut  consonuiiéc  dans   les 
séances   subséquentes  du  chapitre   général, 
et  le  pape  d(^nna  uq   bref  conûrmatif  le  U 
août   suivant.    Ainsi    fut    consommée    celle 
réunion  des  Observantins  avec  les  Conven- 
tuels, et  ce  n'étaient  pas  ceux-ci  qui  l'avaicnl 
recherchée.  Celle  affaire,  qui  montre  à  quel 
point  de  relâichement  étaient  venus  certains 
insliluls  en  France,  surtout  sous  rinfluence 
de  la  commission  des  malheureux  évéques, 
offrit  plusieurs  incidents  et  détails  curieux  ; 
nous  en  parlerons,  disons-nous,  plus  ioij. 

37 


ItG'i 


DICTIONNAIRE  DRS  ORDRES  RELIGIEUX. 


iiei 


piionicnl  A  l'arlirlo  ()nsi:iiv  antins.  Il  nous 
Millil  de  (lii  (•  ici  c|ut'  l'Iiabil  el  It-s  roulumes  de 
l'ohscrvniice  do  St-rr;in(;<)is.iv;iieiil  disparu  en 
Kr.incc  avant  la  dcslruitioii  dos  monastères. 

Los  conclusions  de  celte  malheureuse  com- 
mission des  rcf;uliers  dans  l'edil  porté  en 
17C8.  et  confirme  dm  ans  plus  tard,  prescri- 
vant (|ue  tous  li's  monastères  libres  ne  ren- 
fermant p.is  seize  religieux  de  cho'ur,  et  les 
moiui'.tères  liés  à  des  congrégalions  n'en 
reufeniiant  pas  huit  ou  neuf,  seraient  sup- 
primés, ces  conclusions  dison:<-nous,  ne  fu- 
runl  pas  rigoureusement  suivies,  car  à  l'é- 
ji()i]ue  de  la  révolution  plusieurs  maisons, 
flans  tous  les  ordres,  n'avaient  que  trois  ou 
ijuatre  i-ujcis.  Les  Franciscains ,  surtout 
idnventuels  ,  et  même  des  Hécollels,  elc, 
étaient  dans  ce  cas. 

Nous  dirons  lout  de  suile  que  l'assemblée 
Tiatioiiale,  ayant  détruit  les  ordres  religieux, 
ilé(  réta,   le  18  lévrier   171)0,   que  la  pension 
des  .Mendiants  serait  dilTérenle  et  au-dessous 
de  celle  des   religieux   non   Mendiants.   Les 
C.ordeliers   du   grand   couvent  de  l'aris  en- 
voyèrent  une  adresse  à   ^as^emblée    natio- 
nale.   Dans   cette  adresse,    qui  a  été  ioipri- 
inée,  ils  avouaient  qu'ils  se  faisaient  gloire, 
il  est  vrai,  d'être  de  celte  classe  de  religieux 
qui,  étalilis  pour  prêcher  l'Kvangi'e  et  sans 
autres    fonds  que   la    Providence,   n'avaient 
jamais  eu  défense,   par  leurs  constitutions, 
tle    posséder  des   immeubles;    qui   au   con- 
traire en    avaient ,    par   la   succession    des 
temps  ,   suflisammenl  amassé   pour  donner 
une   honnête   subsistance   aux    religieux  et 
l'enlrelion  des  couvents.  Mais,  disaient-ils,  si 
l'assemblée  constituante  appelle   Mendiants 
uniquement  les  rdigicux  qui  vivent  de  quê- 
les  journalières,  alors  ils  ne  pouvaieni,  eux 
Conventuels,  se  reconnaître  dans  cette  caté- 
gorie,  puiscjue   chez   eux,  comme   chez  les 
moines,  chaque  religieux,  avant  l'émission 
de  ses  vœux,  est   afiilié  à  une  maison  quel- 
conque,  et   ce,   sous   jjeine  de  nullité  des 
vœux,  chaque  maison  n'en  prenant    que  ce 
qu'elle  en  peut  nourrir.   Leurs  constitutions 
anciennes  et  nmdernes,  surtout  celles  enre- 
gistrées au  parlement,  en  1771,  sont  la  preuve 
de  leur  possession  de  biens  immeubles,  per- 
mise d'ailleurs  au  concile  de  Trente.  Ils  ajou- 
taient que  dans  l.i  déclaration  de  leurs  biens, 
faite  au  mois  de  janvier  à  la  municipalilé  de 
l'aris,   ils  produisaient   plus  de  trente  mille 
livres  de  renies  foncières,  sans   compter  la 
partie  de  leur  local  occupée  depuis  le  mois 
de  septembre  par  le  bataillon  soldé  du  dis- 
trict qui  porte  leur  nom  {District  des  Corde  - 
liers),  et  dont  le  loyer  pourrait  êlrc  évalué 
au  moins  à  six  mille  livres,  et  sans  y  com- 
prendre d'autres  retenus,  éventuels  à  la  vé- 
rité,  mais    qui    n'ont   rien,    disaient-ils,  de 
commun  avec  le  produit  de  la  quéle  et  de  la 
men  licite.  C  est  sur  <e  qu'ils  sont   rentes  cl 
non   Mendiants,    qu'ils  étaient   com.oris  au 
nombre  des  i  ontribuables  dans   les  iinposi- 
lions  du  cierge,  et  que  la  chambre  ecclésias- 
tique du  diocèse  les  a  taxés,  ajoutent-ils.  à 
la  bomiiie  de  iUKi  liv.  15  décimes.  La  maison 
lie  l'uris  ne  doit  rien,  son  avoir  surpassant 


ses  dettes  de  plusieurs  mille  livres,  elc.  Ce 
raisonnement,  bien  que  contestable  au  point 
(le  vue  canonique  peut-être,  avait  pourtant 
son  poids  de\ani  l'assemblée  naiionale. 
Néanmoins  mius  croyons  que  l'assemblée  at- 
tachait au  nom  di^  Mendiants  le  sens  qu'on  y 
attache  commuiiéincnt  dans  1  Kglise.  L'a- 
(Iresse  dont  nous  parlons  était  signée  du 
H.  P.  Claudc-.Agréve  Lacombe,  ganlieii,  qui 
a  survécu  à  la  révolution,  et  n'est  mort  (|u'a- 
près  la  restauraiion  des  liourbons.  Il  avait 
rétabli  à  Paris  l'arçliiconfrerie  du  Saint-Sé- 
pulcre, dont  la  légalité  a  soufl'erl  quelque 
contestation.  Mlle  était  également  signée  du 
sccréairc  du  chapitre,  le  P.  Joseph  Jiour- 
gnde,  que  nous  avons  connu  nous-mème,  et 
qui  n'est  mort  qu'après  la  révolution  de  1830, 
étant  aumônier  de  l'hospice  de  Bicêtre. 

A  l'époque  de  la  révolution ,  plusieurs 
Franciscains  cédèrent  au  mouvement  du 
jour,  et  l'histoire  conservera  le  no  n  scanda- 
leux du  P.  Chabot,  capucin.  En  revanche,  on 
trouve,  à  l'art,  de  ces  religieux,  un  exemphi 
éilifiant.qui  c.impense  largement  ce  fait  isolé. 
Au  dernier  siècle,  les  Franciscains  ont 
continué  les  servies  qu'ils  rendaient  à  l'K- 
glise  dans  le  ministère  de  la  prédication,  de 
la  direction  des  consciences,  des  missions  à 
l'intérieur  et  à  l'étranger,  et  mêaïc  de  l'en- 
seignement. Ils  ont  fourni  aussi  à  l'Eglise 
des  prélats,  des  cardinaux  ;  ils  ont  eu  même 
le  triste  honneur  d'ajouter  un  cin(|uième 
pape  aux  quatre  qui  avaient  été  jadis  tirés 
de  leur  corps,  et  ce  cinquième  pape  est  le 
P.  Canganelli,  portant  le  nom  de  Clément  XIV. 
Il  était  de  la  famille  des  Conventuels,  et  il 
eut  la  faiblesse  de  céder  aux  inslances  qui- 
la  philosophie  cl  l'impiélé  lui  faisaient  faire 
par  l'organe  des  princes,  surtout  de  la  fa- 
mille des  Baurbons,  pour  l'abolition  des  Jé- 
suites. Depuis  l'époque  à  laquele  le  P.  Hc- 
l)ot  s'est  arrêté  dans  leur  histoire,  ils  ont 
continué  de  donner  au  ciel  des  saints  et  des 
bienheureux,  sortis  des  différentes  branches 
de  leurs  familles,  et  à  la  terre  des  exeu)ples 
d'héroïsme  et  de  perfection. 

Ils  avaient  à  Home,  au  dernier  s  ècle, 
trois  maisons  d'Observantins,  cinq  ou  peut- 
êlre  six  maisons  d'Oiiservantins  réformés  ; 
une  maison  de  Capucins  ;  quatre  maisons, 
plus  un  collège  pour  les  missions  d'Orient, 
occupés  par  les  Conventuels  ;  deux  maisons 
de  religieux  du  tiers  ordre;  une  maison  de 
reformés  du  tiers  ordre;  en  somme  dix-sept 
ou  dix-huit  maisons  d'hommes  :  une  d'Ur- 
banistes ;  deux  de  Capucines  ;  quatre  de  re- 
ligieuses du  tiers  ordre;  en  toial,  sept  mai- 
sons de  femmes,  sous  la  direction  de  prêtres 
séculiers  ;  trois  de  Franciscaines  de  l'obser- 
vance, une  de  Capucines  ;  en  tout,  quatre  de 
femmes,  dirigées  par  les  religieux  de  l'ordre. 
Lorsque  le  calme  se  rétaMit  en  Kurope, 
après  les  secousses  révoluiionnaires  arri- 
vées à  la  lin  (lu  dernier  siècle  et  au  comineii- 
cernent  de  celui-ci,  un  grand  nombre  de  mai- 
sons de  Franciscains,  qui  aï.iient  disparu,  se 
rouvrirent  et  reçurent  des  sujets  nouveaux. 
L'indre  a  des  <-ouvenls  actuellement,  non- 
seulement  en  Italie,  mais  en  dtfl'crents  États 


IIGS 


ARTICLES  ADDITIONNELS. 


tlC6 


de  l'Allemagne,  du  Nord,  tels  que  l'Ansle- 
lerrc,  l'Irlande,  la  Holhindo,  la  Belgique,  etc., 
mais  aussi  en  France  el  dans  toutes  les  con- 
trées méridionales.  11  a  des  missionnaires 
partout  el  aussi  dans  les  pays  protestants. 
La  Russie,  dans  ses  actes  brutaux  contre  le 
catholicisme,  sous  l'empereur  actuel,  a  fait 
ressentir  ses  injustices  aux  Franciscains 
comme  aux  autres  ordres  religieux.  Dans  la 
seule  province  de  Mohilow  deux  cent  vingt- 
un  monnsièrcs  furent  supprimés  en  1832; 
sur  ce  nombre,  il  y  en  avait  sejU  de  Capu- 
cins,cinq  restèrent;  trente  undeFranciscains 
de  la  commune  observance,  dix  restèrent  ; 
deux  de   Franciscains  réformés,  un  resta. 

11  y  a  actuellement  706  couvents  dans 
les  Etats  de  l'empereur  d'Autriche,  entre 
lesquels  on  compte  2W  maisons  de  Francis- 
cains ;  98  de  Capucins.  11  y  a  aussi  137  cou- 
vents de  femmes,  au  nombre  desquels  sont 
dix  maisons  d'Elisabéthines,  cinq  maisons 
de  Franciscaines,  six  de  Clarisses  propre^- 
ment  dites,  deux  de  Capucines, 

Nulle  part  l'ordre  de  Saint-François  d'As- 
sise n'avait  été  aussi  florissant  qu'en  Espa- 
gne, et,  après  les  bouleversements  dont  nous 
venons  de  parler,  il  s'était  rétabli  au  point 
qu'on  voyait  dans  ces  derniers  temps  cent 
religieux  dans  le  couvent  de  Barcelone.  Il  y 
avait  dernièrement,  si  nous  sommes  bien  in- 
formé ,  quatre  provinces  d'Observantins , 
distinguées  chacune  par  la  couleur  de  l'habit, 
des  religieux.  Ceux  de  Barcelone,  que  nous 
venons  de  citer,  étaient  vêtus  d'une  tunique 
bleue.  Cette  couleur  parut  nouvelle  en 
France,  lorsque  les  religieux  espagnols  y  fu- 
rent transférés  en  qualité  de  prisonniers, 
sous  le  règne  de  Buonaparte,  car  on  ne  con- 
naissait point  chez  nous  de  Cordeliers  bleus. 

Les  dispositions  insensées  prises  par  Fer- 
dinand VII  mourant  ont  amené  en  Espa- 
gne le  rè^ne  d'Isabelle  et  tous  les  malheurs 
qui  ont  résulté  de  la  régence  tyrannique  et 
impie  de  ia  reine  Christine.  Un  des  coups  les 
plus  sensibles  portés  à  la  religion  a  été  la 
destruction  des  ordres  religieux,  à  l'excep- 
tion des  Ecoles  Pies,  conservées  sans  doute 
])ar  le  motif  que  nous  avons  indiqué  ci-des- 
sus à  l'article  de  cet  institut.  Trois  monastè- 
res d'hommes  on  tété  conservés  pour  pépinière 
ou  séminaire  des  missions  étrangères  ;  or, 
de  ces  trois  monastères,  deux  appartiennent 
à  l'ordre  de  Saint-Augustin,  un  à  l'ordre  de 
Saint-Dominique.  L'ordre  de  Saint-Fran- 
çois n'a  point  été  apprécié.  Quand  on  chassa 
les  religieux  de  leurs  asiles,  il  y  a  quelques 
années ,  le  syndic  ou  maire  de  la  ville  de 
Zehcgin  conserva  encore  pendant  six  ou 
huit  mois  les  Franciscains  de  cette  localité, 
disant  qu'il  répondait  du  mal  qu'ils  pour- 
raient faire.  La  maison  (|u'il  maintenait 
ainsi  était  de  la  province  de  Carthagène  et 
occupée  par  des  Pères  missiannaires;  elle 
était  une  de  ces  maisons  de  récolleclion  que 
nous  avons  mentionnées  ci-dessus.  Les  Mur- 
ciens  vinrent  brutalement  la  faire  évacuer. 

L'ordre  de  Saiiit-François  qui  sert  encore 
l'Eglise  dans  les  deux  Amériques,  dans  les 


Mussions  orientales,  dans  le  Levant,  a  tou- 
jours l'insigne  honneur  de  desservir  l'église 
du  Saint-Sépulcre,  où  le  g.irdien  a  les  insi- 
gnes pontificaux  pour  célébrer.  11  a  aussi 
une  maison  à  Bethléem. 

On  voit  aujourd'hui  à  Rome  les  supérieurs 
desObservantins  dont  le  corps  est  divisé  en 
provinces  ultramontaines  (aujourd'hui  sans 
supérieur,  à  moins  qu'il  n'ait  été  nommé  de- 
puis peu)  el  provinces  cismonlaines,  qui  ont 
pour  ministre  général  le  R.  P.  Joseph-Ma- 
rie d'Alexandrie  de  Sicile,  et  pour  procureur 
général,  le  P.  Louis  de  Lorctte.  —  Le  supé- 
rieur des  Observantins  réformés,  qui  est  le 
II.  P.  Ange  de  Locara,  procureur  général. 
—  Le  P.  N.,  procureur  général  des  Réformés 
de  Saint-Pierre  d'Alcantara.  —  Le  supérieur 
des  Frères  Mineurs  conventuels,  qui  est  le 
11.  P.  Ange  Rigoni  ;  el  leur  procureur  géné- 
ral, qui  est  le  P.  Jean  Ferrini. — Le  ministre 
général  des  C:ipucins,  le  P.  Eugène  de  llu- 
nielly  ou  dellumilli,  et  leur  procureur  gé- 
néral le  P.  Louis  de  Baguaja.  —  Le  général 
des  Franciscains  du  tiers  ordre,  le  P.  Ga- 
briel Conticelli ,  et  leur  procureur  général, 
le  P.  Sauveur  Guerri.  L'ordre  a  aussi  ac- 
tuellement à  Home  quatre  maisons  de  fem- 
mes, dirigées  par  des  prêtres  séculiers;  ce 
sont  les  Clarisses  Urbanistes;  les  Francis- 
caines «lu  tiers  ordre  ;  les  Capucines  ;  les 
religieuses  réformées  du  tiers  ordre,  à  Saint- 
Ambroisc  ;  jet  deux  maisons,  les  Franciscai- 
nes de  l'observance  el  les  Capucines,  diri- 
gées par  les  réguliers. 

En  France,   dans   les  contrées  du  midi, 
quelques  ermites  portent  le  costume  du  tiers 
ordre  régulier   de  Saint-François;   le  ticr^ 
ordre    séculier  est  conserve  à  Paris  et  en 
plusieurs  localités;  il  y  a  aussi  en  plusieurs 
villes  des  maisons  de  Clarisses  ou  de  reli- 
gieuses  du    tiers  ordre  ;    nous   avons    vu   à 
l'article   Capucins  ,   que  cette   édiOanle   ré- 
forme est  aujourd'hui  vivante  parmi  aous. 
On  a  fait  aussi,  depuis  la  restauration  des 
Bourbons,  diverses  tentatives  pour  rétablir 
des  maisons  d'hommes  des  autres  branches 
de  l'ordre.  Vers  1818,  le  P.  Humbcrt,  proje- 
tant ia  résurrection  des  Conventuels,  publia 
un  petit  prospectus,  qui  excita  la  critique 
des   jansénistes    dans    le    premier    volume 
de  la  Chronique  religieuse.   11  n'avait  pas, 
croyons-nous,  ce  qu'il  fallait  pour  ressusci- 
ter l'institut,  non  plus  qu'un  laïque,  M.  Tis- 
sot,  di.l  P.  Hilarion,  qui  vécut,  jusqu'en  1830, 
avec  quelques  personnes  auxquelles  il  fai- 
sait porter  l'habit  des  Récollets. —  Actuelle- 
ment, sous  la  bienveillante  protection   de 
l'un  des  plus  dignes  évêques  de  France,  qui 
comprend  ce  (jue  vaut  l'état  religieux,  Mgr 
Parisis,  évoque  deLangres,  dont  le  nom  est 
héni  dans  toute  l'Eglise,  on  essaye  de  réta- 
blir l'ordre  de  St-François,  à  Monligny.  A  la 
Icte  de   cette  entreprise  inériioirc  est  notre 
pieux  ami, le  R.P.Charles  Pouzzot,  profès  chi^z 
les  Conventuels  de  Rome,  en  184.6.  Si,  comme 
nous  en  avons  l'espérance.  Dieu  bénit  celte 
palingénésiede  l'ordre,  nous  lui  cons.icrerons 
un  article  dans  le  Supplénieiit.        B.-d.-e 


BIBLiOTHECA 
-pNaviensia 


N°  I.  —  Ancien  Pciiéilictin  de  l'ab-      N°  2.  —Ancien  Bénédicliii  de  l"ab 
b:iyi>  de  Salni-Den.is,  en  habil  or-         bayft  de  Saint-Denis,  en  habil  Je 
dinaire  de  la  maison.  cbœur. 


N"  3,  —  llosptalicie  de  Dijon. 


^"  \.  —  Uinicsse. 


N°  5. —   Urli^ii'Mse    lin  ii;iriline   rt'-       N"  0. 
fiiirnoc    de  la  tongiégiillon    tic    la 
Divine-Providence  el  de  Saiiu-Her- 
nard. 


Piêlio  lie  la  lliicliiue  (^l.i' 
tienne,  en  l'ijnco. 


^''  7.—^  Piètre  de  la  Doclrinc  cliié- 
tienne,  en  Italie. 


N»  8.  —  Ueliyiciise  de  l'ordre  de 
Saiiit-Duminique,  en  habit  ordi- 
naire dans  la  maison 


N''  0.  —  Ucliyieiisc  de   l'ordre  de 
Sainl-Doiiiinique,  avec  la  tiiapu. 


N"  10.  —  .\ncienne  rolij^iense  de  lor- 
drc  de  Sa:iil-Doniinl(|iie  non  ré- 
foriiici! ,  du  inoiiastèio  de  Saint- 
liaitliélemy,  à  Aix  en  Provence. 


IS"  II.  —  Rcligiouse  de  l'ordre  de 
Saiiil-Doiniiiiinie  <lii  inoiiaslèrc  de 
Monllleury,  en  habit  d'biver. 


N"  1"2.  —  An<:ien  liaijillement  des  Re- 
liijii'nx  lie  l'orilrc  <le  S.iinl-Doniini- 
iiue,  depuis  biir  é(ablibsein_iil  jus- 
qu'en  l'an  12iy. 


N^  15.   —  Ri'li^'iciix   tic    l'onlre   de        N°  14.  —  Religieux  de  l'ordre  de        N°  15.  —  Frère  Convers  de  l'ordre 
Sainl-I)l)lnillillll^ ,  en  habit   otdi-  Saiiil-Doiniiiiiiue  ,  avec  la  chape  de  3aim-Uoiiiin;(nip. 

iiaire  dans  la  maison.  liOire. 


N'  10.  —  tiii  valirr  du  Dragon  rcn-      N"  1".  —  Giicvali'.T  de  l'Ai-lc  Idanclic. 


N"  18.  —  Chevalier  du  Tusin. 


N"  18  bh.  —  Cheyalierdc  rAii»le 
Noirf, 


N°  19-  —  (t''ligieiix  Iiospiialici-  de        N-  20.  —  Frère  des  Eo'cs  Chréiini- 
Nolie-Damc  de  l'Echelle.  ncs  el  Cliai  ilables. 


N'2t.  — Clerc  Régulier  pauvre  fie  la      N':21  ftis.  —  Clmnoino.  n(!i;iillcr   de      N"  22.  —  Cliaii.'iiio  R.'giilier  i  e  S  ;iiu- 
Mcre  de  Oicu  des  Ecoles  l'ieiiscs.  .  .Moiilo-Corbiilo ,  en  llalic.  Ciisine-lci!  Tuiirs. 


?*•  2S.  —  nïcvaîior  de  l'Kcu  J'or. 


N°  21.  —  ClicvaliiT  il<'  rF.U'|iliaiil  et      N'  2").   —  Aiirioiini'   liospilaliôrc  du 
<lc  Uaiicliiotii,  fil  l*aiieiiiaik.  li'-is  onlre  Je  Suiiii-Fraii(;ois,  diii; 

de  lu  Celle. 


^' 2v.  -•  llu.-.|iila!ieie   du   iiiéMie  or- 
dre, Mile    su;ui' de  la  Kadie. 


^■  -27.  —  Fille  de  1  tid.njl-Jeslls. 


N'  28.  —  rdianniiie  R('giir.cr  de  IVt- 
ilie  de  Sailli  Jaiques  de  rFiiée,  <ii 
liabil  de  ville. 


^'■  ^i). —  (;ii:innino  Uc;uli.r  ilfl  l'or-       IS°  30.    —  Uitli^iinsc  cliOv:ili("'ic    il-       N'âl.  —   Rcligieus"    o!icv;ilit';io    «II- 
(lie  (II-  Saint-Jacques  de  l'Eiiéu,  cii  l'orilio  de  Saiiil  J:i((iiils  de  l'Epcr,  l'oidrede  Saini-Jacqucs  de  l'K|ié.:i 

ttilbil  de  eliœur.  (mi  habit  uidiiialre.  en  liabit  de  chœur. 


N"  52.  —  ClicvaliiT  de  l'ordre  de  N"  5.3.   —  Chevalier  de  l'ordre  de 

Su  iilJari|iics  de  l'Kpée,  en  Espagne.  Saiiit-Jacnucs  de  l'Epée,  en  Tor- 

llli,':d. 


N'  54.  —  Cl;cvulier  de  l'Epeion. 


N"  3S.  —  Moine  df  l'orJre  des 

Eàclnvuns. 


N"  36.  —  Novici>  lie  l'ordre  du  Saini- 
Lspiit. 


N"  57.  —  Clifvnlier  de  l'oidrc  du 
Saiiil-I'.s|iril  in  Fraiite,  iii  lialit  do 
ctii'oiiioiiie. 


M 

\ 

i 

i 

iV  58.  —  r.liaiioiiie  répiilicr  cl  jiospi- 
ulirr  de  rordic  du  S.tiiit  Ks|iril,  m 
lialiil  di;  (lueur,  en  Italie. 


N'  59.  —  riianninc  l('^■n1io^  i-l  lio-.pi- 
lalicr  di'  l'urdie  du  Saint  Kspiil,  en 
|j;<liil  de  \illi',  <  n  II. die. 


N"  .Kl.  —  ('.li.iniiiiic  lépulicr  tu  liefipi- 
laliiT  de  l'oidicdii  Sainl-Kspnl  eu 
France,  en  lialnl  de  ilnenr  i'Iiiïer. 


i^' 


Ueligieux  du  même  orJrc  Cii 
Fiance. 


N'i2. —  Channine  lésnlicr  it  hositi- 
l.-ilicrile  l'onlrH  du  Saiiil-Ksprir  on 
riilogne,  en  habil  de  cliœui-,  iniii 
riiiver  que  Télé. 


N°  ;4^.  —  Reli','iiMise  liospiialirre  de 
l'ordredii  S  liiil-E.spi  il,  on  iiiaiilciui, 
dans  le  comté  de  BourfîognG. 


N"  15.  —  Ri-lisieuso  hospiialicre  de 
l'ordre  du  Saint-Esprit ,  dans  le 
omnic  di'Roursogiic,  en  liabit  or- 
dinaire dans  1.1  maison. 


N"  45.  —  Ri'ligiruse  Imspitalicrc  de 
l'ordri'  du  bainl-Espril ,  en  habit 
ordinaire. 


N°  46.  —  Religieuse  du  même  oïdie 


N°  i7.  —  Rcli^icus  élliiopiiri. 


N"  i8.  —  Roligipiix  éiliiopicn.  de  Tins-  ^"  49. 

lilul  lie  l'iibbé  Euslaclie. 


ndis'euoc  ciliiopioniie. 


N'  50.  —   Chevalier  de   l'ordre  de      N   51   —  Cli.i|)«  iain  du  môme  ordre,      N"  b-2.  —  Frère  sériant  de  l'ordre  di 
hamt  Eiiciiiie  ,  en  habit  de  ccrc-  en  liabii  ordinaire.  Sainl-Elienne. 

nioiiic. 


I 


W°  53.  —  Religieuse  de    l'orJre  île      N°  54.  —  Religiensn   de   l'ordre  de 
Saint- Klieiiiie,   en  liabil  ordinaire  Suiiil  Ëlieniie,  en  habit  de  cliœuir. 

dans  l.i  tnaison. 


N"  55.  —  Chevalier  de  l'Etoile. 


N°  56.  —  Béné.liclin   Exempt,  repré-      N"  57.  —  Même  rell;^i('ux,  représenté      N"  58.  —  Religieux  de  Cilc.iux  de   U 
semé  par  devant.  pardcniérc.  icfornie  de  Feiiillaiis. 


N-  59.  —Religieux  iiil'onné  de  Saint-      N'60.  —  Religieux  coiivcrs,  du  môme  N°  61.  —  Religieuse  Kcuillanie. 


Bei'iiaid,  en  lialie. 


ordre. 


N'  fô.  —  Moine  de  Fonl-Avelano 
avani  lu  1  t'Iàcliciucnl. 


N"  G"i.  —  Miiinc  de  FoniAvclane, 
apics  le  iclàclienienl. 


N"  04.  —  Hclipiouse  do    I  onieiiMiil', 
coninie  elle.',  élaienl  anciennemeiil 


N' 65.  —  Religieux  de   FonievrauU       N"  66.  —  Religieuse   de  FonlevraiiU,      N"  67.  —  Religieuse  de  Fontevrault, 
coinnic  ils  étaient  aiicieMiieincnt.  en  hnWU  ordinaire  dans  la  maison.  en  babit  de  cliœur. 


In»  68.  —  Religieux  de   Fontevrault,      N"  69. 
<:      en  lialiii  ordinaire,  sans  chape. 


Religieux  de  Fontevrault,      N*  70.— Choalicr  de  l'ordre  des  Fous 
avec  la  cliaps. 


ti°1\. — llaliilleniriil  (le  Sailli- l'raii-      N- 7"2. —  Incirii  iKiliillcnnnl  ilcs  Bi  r-       N°  73. —  Chevalier  de  l'ordre  île   la 
Ç'iis,  lii'é  sur  plusieurs  oii^iiiaiuL.  gcis,  du  loiujis  ilc.  S  linl-Kiaiiçiiis.  glorieuse  Vierge  5larie. 


f  "  '<*•  —  Chevalier  supposé  de 
rorJrc  de  Frise. 


N"  75.  —  Al'be  (lu  iiKMiiikleie  do 
rescaia. 


N"  7G.  —  .Ancien  relij?ieii\  de  FiiMoS, 
on  liabil  ordinaire  dans  la  niaisou. 


N' 77:  —  Anciftil  religif  ux  de  Fuldes,      N*  78.— Chanoine  régulier  delà  Con-     ti'  79.  — Clianoine   régulier  de  l.i 
en  liabit  de  cliieur.  grégalion  de  France,  en   habit  de         Congrégation  de  France,  en  habit 

chœur  l'été.  de  chœur  l'hiver. 


N»  80.  — Chevalier  de  l'ordredeSaiiU-      N»  81.- Chevalier  de  l'ordre  de  Saini-      N' 82.  -  Chevalier  couronné  de  l'or- 
Geoiges,  dans  la  Carinthie ,  en  ha-  Georges,  dans  la  Cariniliie.  drc  de  Saint-Georges  ,  en  Allema- 

liil  d'éulisc.  S"f- 


DicriONX,  UES    Ordrks  religieux.    II. 


33 


s*. 85.  —  Cheval  cr  supposé  de  l'orJre 
xle  Siiiiil-Georges,  à  IU)inc. 


84.    —  Chevalier  rie   l'ordre  de 
Saiiil-Gcorgcs,  à  Ravenne. 


N°  85.  —  Chi  v.ilier  supposé  ilc  l'ordre 
dc'SaiiU-Gi'orgps,  à  Céne^. 


.S*  JMÎ  —  Chanoine  séculier  de  h  Con- 
I^M'galion  de  Saiiit-Gcorges  in  Al- 

ç'iii. 


N"  87.  —  Ancien  rhnnniiie  sértilii  r 
de  l'ordre  île  Saint  Cn  r^cs  iii  M- 
glia,  en  Sicile. 


N»  ÎW.  —  Chevalier  de  l'onlrc  de 

S.lillI-CcK'OII. 


N°  89.  —  Olianoine  régtilier  de  l'ordre      N°  90.  —    Religieuse  de   l'onlre  de      N"  91. —  Sœiir  converse   de  l'ordre 
(le  Saint-Gilbert  de  Siiiipiitigliani,  Sainl-Gilberl  de  Siinpringliain,  en  de  Sainl-Gilbert  de  Slitiprin^bani, 

en  Angleterre.  Angleterre.  cm  Aii-;lel(iîre. 


N'92.— Ermite  de  Saint-Jean-Bap-      N-flô.  — Habillement  de  Saiiil-Kiicniie      N°    M.   —   Relig'env   de    l'ordre  de 
tible  de  la  Pénitence.  de  Graniniont.  Grandniom.L'n  lialiilor.iinaire  dans 

la  maison. 


■R*  95.   —   Ri'ligioiix    lie    l'unlrc 
Ginndnionl,  rn  liahit  tie  rliœiir. 


U      N' 


9G.  —   Ri-llt-iciix    (ie   l'orJre   de 
Gi'a>:(lii)»iit  réroriné. 


N"  97.  —  Hospitalière  du  tiers  ordre 
de  Saint-Fraiicois,dite  sœur  Grise. 


N»  98.  —  Hospiialièrc  du  licrs  ordre 
de  Saiiii-l'"iaiiçois,  diteswiir  Grise. 


N"  99.  —  Aiifieiine  liosplulièic  du 
I  iers  ordre  lie  S;ii:il-lr;\!.i;cils,  à.Muiis, 
dilc  sueur  (îr  se. 


^•■  100. —  Ilospimlière  réfomice  du 
liiMS  ordre  de  S;iinl-Fraiiçois,  à 
Miiiis,  dite  sœur  Grise 


N"  10t.  —  ehevalière  de  la  Haehe,         N»  102.—  Chevalière  de  l'Ecliarpe. 


i°  103.  —  Clievaliète   do   l'ordre  du 
Cordon,  ou- de  la  Coriklièio. 


N"  lOi.  —  Chevalière  de  l'ordre  des 
Esclavos  du  la  Verlu; 


N"  lOS.— Chevalière  delà  Vraie  Cl  uix. 


N»  106.  —  Vici  i;e  de  Ihill  ,   c:i  li:i|jii 
ordinaire  ilar.s  la  niai!>0n. 


Viergo  «le  Hall,  ca   bahit 
(le  ville. 


N°  108.  —  Vierge  de  C  isilglione 


N°  ion  —  Kdigiciise  .le  l'orlre  «lo 
i'Assoinpiion  «le  Noire -l>aiih',  en 
Franco. 


N'  110.  —  KilinMiise   «le  lordre  de      N" 
rAssoiniiiJnii    ilo    .Nolie-ltjiiio,   en 
ll.il..-. 


ni 


Ch.-V.IJMT 

roius. 


lie   l'oiJie  de 


N"  I  M.  —  Collier  «le  r,.n"ro  de  nioi 
niini'. 


N«  113 —GoUier  de  Tordre  de  l'Epi.      N°  lU  —  Religieux    liospitalier   de      N"  H5„  —Religieuse  liospiiaiière  d»} 

l'ordre  de  la  Charité  de  Sainl-Hip-  l'Hdtel-Dieu  de  Paris,  cii   liabil  de- 

poiyle.  cérémonie. 


N'  116.  -Ancien  religieux  hospiialior      N»  117.  -  ndigiensf   l>...pi  aiic.v  ,1c      N"  118.  -  Chevalier  de  Sainl-Huberî^ 
de  riIôlcl-Dicu  de  Paris.  Tllold  Dieu  deP-tiis,  e  .  habi  o;J.- 


naucbcn 


uiillcMiialaJcb. 


N"  1 19.  —  Religieux  humilié,  dit  Ber-      N»  120. 
reiiii  de    la  l'éniieiice  du    premier 
ordre. 


Religieux  humilié  du  Irdi-      N"  l£l  — Re!igieiise  liiiniiliéo.cimiiiie 
sicnie  ordre.  c!l  s  étaient  .iiic  ciiiieiiitiit 


N°  m.  —  Religieuse  liuniiliéc.        N°123. — Ancien  moiiicda  la  Palestine.      N°  lâi.  —  Moine  Jacobitc  ou  Syrien. 


N°   12.S.  —  Religieux  hospilalier  de      N°  I2(). —Chevalier de  Sainl- Jacques.      N*  127.— Clievalerde  Sairii-Aiiloine. 
l'orilic  de  Sailli-Jacques  du  Haut- 
Pas. 


N«  128.  —  Chevalier  de  la  Jairclièrc.        N°  120.  — 


Eruiiie  de  Saini-Jcan-       N°  130.  —  Ermite  de  la  Poiic  Ange- 
Baplislc  liqucà  Uon.c. 


N   i;0 /ii.<. —  Eiiii:cs   c  >!oii!e-Liico. 


.N '  13t.  —  Chanoine  r(";jnliir  el  liosiii- 
laliorilc  S^iiiil-Jran  Ba|(lislc  de  Co- 
vontiy,  en  Aiiylolcnc. 


N"  152.  —  Ancien  Clinnoinc  régulier 
«le  l'Abbaye  de  Saint-Jean,  à  tliar- 
lies. 


N'  13")  — Aiirifn  Chanoine  réjjnlier  de 
l'Aljbaye  de  Sainl-Dcnis,  à  Ueinis. 


N"  151.  — Ancien  Chanoine  n'yiilicr 
de  Sainl-Lô,  à  Uoiien. 


13,S.  —  Ancien  chanoine  régulier 
ilii  rticiirc  des  Ociix-.Vnianis. 


N"  156.  —  Ancien  Chanoine  ré(;ulier      N"  137.  —  Ancien  Chanoine  régulier      N°  138.  —Cliannine  régulier  i!e  Klos- 
de  Sainl-Marlin  d'Epernay.  de  la  cathédrale  d'U/.ès.  terneuhurg,  en  Alloniai^MC. 


N-  I39._|{éli^'ieu■<  liospilalior  de  l'or-      N"  1  W.—  RL■Ii^ienx  de  la  Réforme  de      N*  141.— Chanoine  ré^'ulicr  de  Saiul- 
dre  de  Saiiii-Jran  de  Di-c.  Gcnlil  de  Spolètc.  Ican  des  \jg  los. 


• 


N°  m. — Clievalionli'  l'urdrc  île  Saiiil- 
Jeaii  el  Je  Sainl-Tlioncis. 


N'  i  43— Chanoine  scciilicT,  de  la  Coii- 
grégalion  de  Sainl-Jeaii  l'iivaiigé- 
lijle,  en  l'oiUiijal. 


N"  ii-l. — Ri'ligieiix  cniiilc  ilc  Saint- 
Jérôme,  en  Espajine,  en  liabil  oïdi- 
iiaire  dans  la  maison. 


N*  1 15.  —  Religieux  ermite  tic  Saint- 
Jcroiiie,  en  Espagne,  allant  par  la 
ville. 


N"  llli.  —  RcliBicnsc  de   l'ordre  tics 
eiiniicb  de  SaintJcioine,  en  Espa- 


N°  117. — Ancien  lialiillcntont  des  rc- 
ligicuv  ei  miles  de  Saint-J(!iorac,dc 
la  (:onKri'"^;iti(ni  du  bieiil.uiir.  u.v 
l'ierie  de  Pisc. 


N"  148.  —  Religieux  ermite  de  Saint- 
JiMonir,  (l(^  la  Congrégation  du  bicn- 
heiiiciix  ricrie  dcPise.cii  lialiit  or- 
dinaire. 


N*  Ii9.  — Religieux  ermite  de  Saint- 
Jérôme,  (le  la  Congrégation  du  bien- 
heureux Pierre  de  Pise. 


N"  i.'iO. — Religieux  ermite  de  Siint- 
Jérônie  ,  ré'brniéde  la  Congrégation 
du  bienheureux  Pierre  de  Pise  eu 
Allemagne. 


N'ISt.  —  Religieux  ermite  de  Saint- 
Jérôme,  de  la  Congrégation  de  Fie- 
soli. 


N°  IS'l.  —  Moine  de  Saint-Jéiôme  en      N"  153.- 
Ilalie,   en  liabii  ordinaire  dans  la  Italie, 

maison.  vilh'. 


■  Moine  de  Saint-Jérôme  en 
avec  la  coule,  allant  |iar  la 


N"  I5i.  — Religieux  J^siiaïc  de  Saint-      N°  I5i.— Religieuse  Jésuale  deSaiiil-      NM56.  —  Jcsuitp.eD  haliit  ordiiaire 
Jéiome.  Jt;;tlnie.  dans  la  maison. 


N*  167.  —  Jésuilc,  dans  un  autre  lia-        ^  158.  — Jcsuito  en  habit  de  ville.        N«  1.S9.— Missionnaire  JfiRuile,  en  lia- 
billcnienl  de  ma  son.  ''il  •'«-•  n>an,laiin  à  la  (.Iniie. 


N°  160. — Missionnaire  Jésuite,  en  ha-        N°  4C1.  —  Missionnaire  Jésuite,  au 
bit  orilinaire,  à  la  Chine.  royaume  de  Tunquin. 


N°  lC-2. —  Missionnaire  Jésuite,  au 
royaume  de  Madure. 


N°  IC3. —  Sœur  de  la  société  du  Uon- 
Jcsus. 


N"  1C4.  —  Clerc  régulier  du  Bon- 

Jésus. 


^"  ICo.  —Sœur  do  Sii.  l-Jciscpli. 


N°  166.  —  Sœur  de  la  Congrc^galion  de 
Saim-Josi'pli  pour  le  gniiverncment 
des  oi'pholincs,  à  liordeaux.l 


N°  167.  —  Sœur  de  la  Congrég.ilinn 
des  filli's  de  Sainl-Joseph,  diics  de 
la  Providence. 


N*  168.— Ancien  liabillemont  des  re- 
ligieuses delà  (".oiigréij.aioii  deSainl- 
Josepl),  dius  de  la  Trinilc  cicée. 


^•  IG!>.  —  Religieuse  de  la  Congri'ga- 
tioiid.  Saini-.I()M  ididiiedelaTrinilé 
crtce.eii liabil  oi dinaiie. 


N-  170.  —  Ucligicusn  de  I.i  Congréga- 
lion  de  Saiiil-.l  i>cpli,  dile  di;  la  Tii- 
iiilé  crééccnli.iliilde  ilneiir  . 


N*  171. — Sœur  delà  Congrcgaiion  de 
Sainl-.losppli ,  pour  rélncalioii  des 
lillcs  orplieliucs,  a  lluucii. 


N-173. — Ancien  hal)illement  des  re- 
ii;;ieu3es  hospitalières  de  Saint-Ju 
scp!i. 


N»  173.  —  Religieuse  de  l'ordre  des        N°17i.—Cliaiioino régulier  delà  C  in- 
lios|iilalicres  de  Sainl-Joscpli.  grégaiion  de  Lalr.m,  en  liabil  ordi- 

naire. 


N°175  — Clianoiiierégulierdela  Con-      N"  476.  —  Clianoinc  régulier  de  l'an-      N"  177  — Clianoine  régulier  de  Laln.n,, 
grégalion  île  Lalraii ,  en  liabit  de  eienncCongrégatioii  cJe Sainte-Marie  en  PoI(>î;ii«, 

vill(\  du  port  Adriatique. 


Dictions    des     Ordri-s  rci  igiei  \.    II. 


33 


I7S.  —  (;iiaii(iiiic's-ie  léiîulière  lie         N°179. — Chaitoinessc   régulière   de       N-  180.  —  Chanoinesse  régulière  de 
Laii  :iii,  Lii  lialiit  oicliiuiire.  Lalran,  en  uabil  de  cliœur,  l'élé.  Latraii,  en  habit  de  chosur  l'hiver. 


N°  181.  —  Chaiioiiu'sst;  régulière  do      .N"  18-2.— Cliaiioinc  règulii  r  de  hiCnn-      N*  185. — .\ii(ieii  haliilleiucnl  suppose 
l'abliaye  de  Cliaillot,  prés  Paris.  grcgatioii  d.^  Saint-Laiireiil  d'Oiilx.  (l'im  ilievalicr  de  Tordie  de  Sailli- 

Lazare. 


N"  184.— Ancien  liabillcmcnl  ileschn-      N»  IS5.— AtRieii  Iiabillemenl des clie-      N»  186.  —Moine  de  S.iitil-Chaiiton. 
valieis  de  l'ordfe  de  Saiitl-La/.arc,  valiers  do  Tordre  de  Saint-Lazare, 

dans  le  xvi'  sictle.  dans  le  xv'  siècle. 


Bi»  187,  —  Moine  de  Sainl-Salias.  N"  188.  — Prêtre  delà  Mission.  N°  180.— Moine  de  l'abbaye  de  I.érins. 


N»  190.  — Religieuse  de  Tarascon. 


N»  191.  —  Religieuse  de  Masmunsicr, 
ou  Moisevaux. 


N"  192  — Chcvali.r  JuLis. 


^»  193.  -  Religieuse  l.ospilalicre  de      N°  194.  -  Religieuse  hospitalière  de  N-  19.S.  -  Religieuse  hospitalière  .te 

Loches,  en  liahil  ordinaire  des  joui-,           Loches  en  hahitde  chœur,  a  cor-  Loches  avec  au  grand  voih'.  dans, 

ouvrier».                                                          lains  jours  el  dans  iinohjnos  ivre-  les  grandes  icivindiiiis. 

nioiiii'.s. 


N»  190. -Sœur converse  hospitalière      N»  197.  -  Religieux  du  iroisiéme  oi-  N»  198.  -ClievaUei;  gin  -.1  cr 

de  Loches.  dre  de  Sainl-Fiançois,  de  la  (.011-  de  l  ordre  de  baiiil-L  us. 


grégaiiou  de  Louibardie,  cti  liabit 
ordinaire  dans  la  maison. 


N„  ni  -  R,.|;-o.,x  ,1c  r,.nl,c  do  >a      ?i"  200.  -  Religieux  de  Tonlre  de  la      N"  200  /„-s.-ATicien  lial.illemenl  des 
P,    IM.       n,l.„.e.ix(ic  K.i.nc  (it  -.1  Madeleine  en  Alleina^ne.  religieuses  du  mimaslcie  des  (.Les 

pénilentes  à  Paiis ,  avaiil  leur  ru- 
iormc. 


PénileniT  de  la  Madeloino. 


^''  200  ter.  — Ancien  habillement  des 
religiensos  liu  nionasléie  des  filles 
(lénilenlos  à  Paris,  après  leur  ré- 
foniio. 


N°  -201. 


■  Kelinieiise  itïaJelonnellc 
à  McU. 


N"  â02. — Mailelonnctte  de  la  Contre-    ■ 
galion  do  Saiuie-Marie  Madeleine.       f 


K'  iOi  /lis.  — Madelonnel'.n  de  la  Con 
j;iépjiion  de  Sainlc-Marilie. 


N°203. — Chevalier  de  l'ordre  deSaiiiI- 
Jeaii  de  Jcrnsuleni,  faib:iiit  ses  ca- 
ia>an'  s. 


XO',. — Gi  nn  I  cM.iiiii 
S.iiul  J  .\i\  ,!e  Jj 


(II'  l'iiiihe  du 
;;...l  m. 


N«  203.  — Cliftvalier  de  l'ordre  de 
Snin(-Jean  de  Jérusalem  avec  le 
nianicau  à  bec. 


N-iJOO. —  Ancii'ii  cliivalicr  de  l'oidre 
de  Saiiil-Jeaii  de  Joiiisalem.avi  c  le 
iii;iiilean  à  Ijcc,  dans  le  mv  siècle. 


[V'o  207.  —  Clievaller  grand  croix  de 
l'ordre  de  Sainl-Jea:i  do  Jeiiisu- 
lein. 


N*  iOS.  —  Clirvalier  grand  croix  de 
l'ordre  de  Saint-Jean  do  Joiiisaleni. 
allanl  au  conseil. 


p^o  201).  —  Chapelain  de  l'ordre  de 
Sainl-Joan  de  Jérusalem,  en  haliil 
de  ville. 


N'  210.  —  Cliaiirlain  de  l'ordre 
Sainl-Jean  ilc  .iernsalein,  en  linhit 
d'église,  à  Mullr,  avec  le  ciuiiail 
violet. 


N"  21 1.— Ancien  lialiillenicnl  îles  Cliii- 
pçlaiiis  (lo  l'ordre  de  Sainl-J.an  de 
Jûnisuluiii. 


.V  212.  —  L.'  R.  Kaymonil  du  Pny, 
lirfiinifir  grand  inailro  do  l'ordre  de 
Saiiil-Jeaii  do  Jérusalem. 


N' 213. —  Prieure  du  nionaslcie  de 
Sixi'nc,  des  iiligicuses  l'c  l'ordre  île 
Suiiil-Jean  de  Jérusiul m. 


N"  211.  —  Ueli^ic.use  de  l'ordir  do 
Sailli- J<  an  drictusaleni,  du  luonas- 
léie  de  S.xeni',  en  liai  il  d  enlise. 


N"  215.^  Aucun  lialiillenient  îles  re- 
ligieuses lie  roidio  de  Sainl-.lran 
deJcrn>alein,  ilu  uionablèrede  Pis-e. 


N»  2l(i.  —  Religieuse  de  l'ordre  de 
Sainl-.lean  île  Jérusaleiii,  du  inuliab- 
leie  de  I'ibO. 


N"  217.  —  Rclisieirse  de  l'oidre  ilc 
Sailli  .1  an  ileJcnisaliMn,  du  inoiias- 
tcre  iW  Kluronce,  en  liabit  mJiiiaire. 


fit ..  i'  U  T^t^jii 


r  "218.  —  Ri-li;,'ioiisc  l'.e  l'ordie  de 
i^ainl-J''aii  de  Jc'insaVin  du  inimas- 
leie  de  Florence,  en  liabit  de  céré- 
iiioiiic. 


N"  2in. — Ilaldlleinpni  <les  religieuses 
de  Sainl-Jeaii  de  Jérnsalem  de  l'hô- 
pital de  Beaulieu.  dans  le  coniiien- 
ceiiient  de  leur  élalilisseiiienl. 


R'  2i(). —  Haliilleiiient  des  reli^inises 
de  Sainl-Jean  de  Jcritsalcni,de  l'Iin- 
pilai  de  Beaulieu,  avant  la  piiso  de 
llliu.Ics. 


N"  221.  ^  R(!lij;ieuse  de  l'urdre  di' 
Saint  Jean  de.lcrusaleni,  dn  nionas- 
lere  de  Tuuliiuse  ,  eu  lialùt  ordi- 
naire. 


N»  222.— Ancien  liabilleinont  des  re- 
ligieuses de  l'oidre  de  Saiiil-Jian  clo 
•lérnsalein.de  lliopilal  de  Beaulieu, 
après  ia  priso  de  Rhode:-. 


N'  225.  —  RL-licifuse  de  l'ordre  «le 
Saiiit-JiMii  de  Jcriisalcm  du  nioiia- 
slcrc  de  Toulouse  ,  en  liabil  de 
clKJUiir. 


N"  224. — Prieure  du  nionaslcrc  des 
reli;;ieiises  de  l'ordre  de  Siilnl-Jr:iii 
de  Jériisaleui,  à  Toulnu*',  en  liabil 
de  léréuionie. 


N"  223.  —  CliaiioÏMC  régulier  de  Mar- 
bak,  eu  Al>aee. 


N°  22fi.  —  Cliaiioine  n'i;ulicr  do  l'aii- 
(ii'iiiif  Ciiiigrégalioii  do  S:iiiil-Mai( , 
d';  Mauluui'. 


N"  227.  —  Moliic  Maroiiie. 


.^"  .28.—  IVclisi.irse  M;ir  irl- 


K"  221)  —  r;ilriaitlio  il.  s  Maroiiiies. 


M"  iJO.—  Hosiiitalièrc  Je  Sainlc- 
Marllio. 


N'  i'A  — Cliaiioiiic  rédiilier  il,:  Saiiil- 
Mauiicc  ii'A;;aiuio. 


N"  '202.  —  ClievaliiT  île  ronlrc  ilc 
Sjiiil-llauiiuc  cl  Sainl-La7.a!C. 


N"  -235.  —  Moine  Miniçrélicn. 


N"  2ôi. —  .\iiciiii  cIn'NalIfi-  ilr  l'jrilre 
do  Noti-.-l'a:in;  de  lu  .Ho  à. 


^•'  235.  —  Reli^'ieiix  He  l'orilrc  <Ie 
Nolre-Danie  de  \a  Merci,  en  liabil 
unlNiaiic  dans  la  maison. 


N°  23G.  —  Religieux  de  l'ordre  (If. 
Notre-Dame  de  la  Merci,  avec  la 
cliape. 


M»  257. — Religieux  décliaussc  de  l'or- 
dre d«  Nutre-Duuic  de  la  Merci. 


N"  25S.  —  llcligifiisc   de   l'ordii 
iN'olie-Danie  de  la  .Mertj. 


do 


N'  2r.9.  —  Iti'ligieiisc   dé  liai  s  éo  dp 
l'or  :re  de  .Nirirc-Paitii;  di:  la  Mcui. 


N"  2111.  -Clianolir  r  ' 

il'-  l;l  l'i'IliU'Ilii'  i).-, 
Iiil  lie  rlni;iir. 


-iilicr  de  l'ori'rc 
.M;irlvis,en  lia- 


N"  211.  —  Chanoine  régulier  de  la 
Pénitence  des  Martyrs. 


N"  2 i-2.  —Chevalier  de  Sninl-Mitlicl.      N*  243.  —  Cliev;ilier  de  loidie  de  la 

Milice  de  Jésus- Clirist. 


^  tf  243  bis. —  Sœnr  dn  tiers  ordre  de 
Saint-Doini  liiiiie  de  la  Congiéga- 
lioii  de  la  M. lice  de  Jésus  Cliijil. 


N"  244.  —  Clerc  réiiulier  mineur. 


N°  24S.  —  IWli^ieux  M  iiinie,  saii» 
nuinleiiu. 


N"  2l(i.  —  R.'ligicux  Miiiiiii  ',  avec  K;      N"  '2'i7.  —  R.lipieuse  .Minime  avec  1«        N"  24S.  —  I5clii.'i.iise  Miiiin  e,  ^a;ls 
iiiaiilinu.  manteau.  iiiaulrati. 


K'2J9.— Cli-rc  rc);iilicT,  iniiiisiic  lies        N"  2u0.— l'illc  ilc  Saillie -(iriic> lève.       .N   -2  1—  U  li  i,  use  ilc   l'onlrc  de 
iiiliiiiics.  .Niilr. -Dame  de   l.i  M  s.m  coule,  eu 

li.il  i.  iiiil:iiairi'. 


N° '232.  —  U  li-i  use   de  l'oidie  de      N"  253.  — Fièie  do  rarcliiroiifialcr- 
NoiroDaine  de  Miséricorde,  e:i  lia-  niié  de  Notre-Dame  du   Moni-Cai- 

bit  (le  céi'éiiioiiie.  niel. 


N°  251.  —  Grand  maître  de  l'ordre  de 
Notre-Dame  du  M()iii-Cann<;l,  tl  de 
Saint-Lazare  de  Jérusalem. 


N°  255.  —  Chevalier  de   l'ordre  de      N°  250.— Chevalier  ecclésiastique  de      N"  257.  — Frèro  si>rvant  de  l'ordre  do 
Notre-Dame  du  Moiit-Carmel,  et  de         l'ordre  de  Notre-Dame  du  Mont-Car-  Nolre-Daiiie  du  Moiit-Carniel,  et  d3 

Saiiii-l^zare  de  Jérusalem.  mcl  et  de  Sainl-Lazare  de  Jérusalem.  Saini  La/are  do  Jéi  usaient 


N"  2')8.— Novice  de  l'ordre  t\e.  Nulrp- 
0:11)10  du  Moril-Carmel.el  de  Sainl- 
La7.ure  de  Jéiusalem. 


M"  2o0. — Iloraiil  de  l'ordre  de  Nolre- 
Damc  du  MAiii-Carmcl,  et  de  Saint- 
Lazare  de  Jéiusalcin. 


N"  2G(>.— lliiissiorde  l'ordre  de  Notre- 
Dame  du  Monl-Caiincl,  et  ilc  Sain. • 
Lazare  de  Jérusalem. 


fi'  itil.  —  Frc.-e  du   tiers  ordre  des 
Caniii'S. 


N"  Hii.  — Sœiir  du  tiers  ordre  des 
Cannes. 


N"  i65. —  Bcnédiciin  ilii  Monl-Cassin, 
en  liabil  de  eliœnr. 


N"2W.-Boi,r(liclinil.i  Mont-Cassin,       N'  205.—  Frère  convors  .lu    Monl-      N'  2i;r,.  —Frère   coi.vrr^  .lii  Mûnt- 
pii  li;il,ii  onliiiaire  dans  la  maison.  Cassin.  en  habit  ordinaire  dans  la  f  assin,  en  lialiil  de  ville. 


maison. 


N«  267.  -Chevalier  de  l'ordre  de 
Moiitesa. 


N"  i68.  — Chevalier  de  l'ordre  de 
Mont-Joie. 


N"  2(i9.  —  Ancienne  fiéiicdieline  de 
Montmartre,  avant  la  réforme. 


DicioNN.  DES     Okdbics  religieux.  II. 


40 


N   270.  —  lîoïK'iliciin  tld  Moiii-Olivot,      N' 271. —Bénédictin  du  Monl-Olivet      N°  272.  —  Ficro  convers  du   Mont- 
ni  li;il<ii  oiiiiii.iiri'  dans  b  maison.  on  habit  de  chœur  Cl  de  ville.  Olivet,  en   habit  ordinaire  dans  la 

maison. 


N"  275.  —  Ficre  conviis   du    Moi.t-      N' 27i.— Itéiiodicliiie  du  Monl-Olivct      N"  275.— lîénédiciiiic  u  Mont-Olivri 
OllT.  lc:i  biibil  di:  >illo.  fii  iiabil  ordinaire  dans  \.\  ui.usoii.  en  babil  do  nœur 


N"  27G.— Clianoiiic  régulier  de  Saint-      N°  277.  —  Rcligiciu  du  Monl-Vieig.s      N"  -278.— R  lis^'n'iix  du  Mnni-Vioigc, 
Eloi  d'Anas.  couiuic  ils  ctaieiil  anticiiiicmoiil.  ou  liabil  or.Uuairo  dans  la  uiaisoi). 


N"  279.  —  Religieux  du  Miml-Viergo,      N"  280.  —  Religieux  du  Moni- Vierge,      N"  281.    -Religieuse  du  Mont-Vierge, 
en  lialiit  de  elia"ii-.  cji   iialiit   de  ville,  li)rs(|irils    vi,iit        j;,,  i^m  u,'jiiiaiie  dans  la  maisuii. 

sruU. 


N"  2S2.  —  Religieuse  du  Moril-Vieri-'c, 
cil  lialiii  (le  céi'émuiiie 


N'  283.  —  Moine  Nesloricn. 


N"  2;'4.  —  Religieuse  Ncstoricniie. 


N»  485. —  Cliaiioiiiessc  (le.  Nivelle,  en 
Ii3lill  «l'église,  culiliili;  elles  élaieiil 
aiiciciiiieiiieiil. 


N"  280.  —  Cliaiioiiresse  (fc  Nivdl.'  en 
lialiil  (leglise,  cuiiuiie  elles  sont 
piéseiileiiieiil. 


N  287.  —  Clianoincsse  de  .Mans ,  pi 
h.iliil  (le  ('li(i;(ii',  la  |ireiiiiè:r  uiiiiiM 
(le  su  i(''('e|i|i(iii. 


N'>  288.  —  Clinnoiiiesse  île  Mons,  en      N"  289  — Cliaiioiiiessc  ilo  Mous,  on      W°  290.  —  Alibfsse  de   fthuiijengc, 
lial)ii  lie  cliœiir,  la  deuxiènie  aiiiice  liabJt  de  cliionr,  la  lioisicine  année       coniuie  elles  étaient  anciennement, 

de  sa  icccption.  de  sa  réception. 


N»  291.  —  Clianoinessede  Denain,  en      N"  292.  —  Chevalier  de  Saint-Esprit      N"  293. —  Chevalier  Ou  Saint-Esprit 
habit  de  cliœur.  au  Di oit-Désir,  ou  du  Nœud,  en  ha-  au  Droit  Désir,  le  cliaperon  en  léic 

bit  de  l'ordre,  avec  le  Saint-Esprit.  cl  le  nœud  d'or  sur  la  poitrine. 


N"20't. — Olicvalier  du  Saini  /■,'.s|irii 
au  Uioil-Ucsir,  avec  le  luantLau. 


N"  21).').  —  Cliaiioincssc  ilo  Nuli. 


N  2',iii.--  Saur  converse  (le  Noii. 


N"  297.  —  Ucligii-usP.    de    l'ordre  di;       N"  298.  —  Roliftinnso    do  l'ordre    de      N"  299.  —  Ancienne   Bénodiriine   de 
Noire-Oaiiio    di    (^harilii,  eu  liaMl  N.)lr('  Pâme  de  C  a'ilé,  iii  lialiil  de  Ndire-l'ame  de  Saint-Paul  de  liiau- 

'jrdiiiai;:'.  iéié!ii'«iiiv'.  v;iis.  avaiil  la  léloruu'. 

Paris.  —  liniu-iuieric  J.-P.  MICM:. 


La  Bibliothèque The  Library 

Université  d'O^t^S^r^jg^n versity  of  Ottawa 
Echéanc^  ^I^MV      j  Date  Due 


0  4  OCT.  1989 


Il'-!vv  .„  _.^^._. 


CE  BL   0031 

.N5  V021  1863 

CCO      HELYCT,    PIER    DICTICNIMAÎ 

ACC#    1318558