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PUEMIÈPiE
ENCYCLOPEDIE
THÉOLOGIQUE,
ou PREMIÈRE
SÉRIB DE DICTIONNAIRES SUR TOUTES LES PARTIES DE Là SCIENCE RELIGIEUSE,
orraANT en fkançais, et par ordhe alphabétiçob,
LA PLUS CLAIRE, LA PLUS FACILE, LA PLUS COMMODE, LA PLUS VARIÉE
ET LA PLUS COMPLÈTE DES THÉOLOGIES:
CES DICTIONNAIRES SONT, POUR LA PREMIÈRE SÉRIE, CEUX :
D'ÉCRITUnE SAINTE, — DE PHILOLOGIE SACRÉE, — DE LITURGIE, — DE DROIT CANON, —
DES HÉRÉSIES, DES SCHISMES, DES LIVRES JANSÉNISTES, DES rROPOSITIONS ET DES LIVRES CONDAMNÉS,
— DES CONCILES, — DES CÉRÉMONIES ET DES RITES, —
DES CAS DE CONSCIENCE, — DES ORDRES RELIGIEUX (lIOMMES ET FEMMES), — DES DIVERSES RELIGIONS, —
DE GÉOGRAPHIE SACRÉE ET ECCLÉSIASTIQUE, — DE THÉOLOGIE DOGMATIQUE, CANONIQUE,
LITURGIQUE ET POLÉMIQUE, — DE THÉOLOGIE MORALE ET MYSTIQUE,
— DE JURISPRUDENCE CIVILE-ECCLÉSIASTIQUE,
— DES PASSIONS, DES VERTUS ET DES VICES, — d'hAGIOGRAPHIE, — DES PÈLERINAGES RELIGIEUX, —
d'astronomie, de physique ET DE MÉTÉOROLOGIE RELIGIEUSES, —
d'iconographie chrétienne, — DE CHIMIE ET DE MINÉRALOGIE RELIGIEUSES, — DE DIPLOMATIQUE CHRÉTIENNE, -
DES SCIENCES OCCULTES, — DE GÉOLOGIE ET DE CHRONOLOGIE CHRÉTIENNES:
Publication sans laquelle on ne saurait parler, lire et écrire ulilement, n'importe dans quelle situation de la vie:
PUBLIÉE
PAR M. L'ABBÉ MÏGNE,
ÉDITEDB DE LA BIBLIO'E'HÈQIJE UNIVEBSSLLE DO CLEBGÉ,
ou
DES C0VR9 C-OJSÏtEIBâirr. CIU-QL'E mSAÎirJlE DE LA SCIENCE ECCLÉSIASTIQUE.
PRIX : 6 FR. LE VOL. POUR LE SOUSCRIPTEUR A LA COLLECTION ENTIÈRE, OU A 50 VOLUMES CHOISIS DANS LES TROIS
Encyclopédies; 7 fr., 8 fr. et même 9 fr. pour le souscripteurs tel ou tel dictionnaire particulier.
52 VOLUMES, PRIX: 312 FRATO.
TOME VIBîGT ET Ul^IEME.
I I I I 9 ta Tggi
DICTIONNAIRE DES ORDRES RELIGIEUX.
TOME DEUXIÈME.
h- VOL. PRIX : 32 francs.
S'IMPRIME ET SE VEND CHEZ J.-P. MIGNE, EDITEUR,
AUX ATELIERS CATHOLIQUES, RUE D'AMROISE, 20, AU PETIT-MONTROUGE,
AUTREFOIS BARRIÈRE d'eNFER DE PARIS , MAINTENANT DANS PARIS.
18G3
"Ooiversit^i*
BIBLIOTHECA
Oftaviensis
AVIS IMPOIITANT.
rubiicalions, iurciU imprlmi's ou lrr.|. noir ou Irop blanc. Mais , depuis ces lcmpseloii,'ius les mécaniques ont
sons
un
el (l'en conférer une irosièmc avec la seconde, sans avoir préparii en rien le nianuscnl de I aulpur.
Dans les ■itelicrs Ciillioluiui's la dillVrcnce ist presque incommensurable. Au inoven de corre<-tcurs b'anchis si
le harnais eî dont le coup d'ui! hpo^'iapliique csi sans pilié pour les f.ailos, on commence par préparer la copie û
bout à l'autre sans en cxcepIcT iiii seul mot. On lit ensuite en première épreuve avec la copie aiuM pr, parée. On lit
eu seconde de la même manière, mais en col alionnanl avec la premièie. On fait la mime cliose en tierce, eu coll.i-
lionnanl a\cc la seconde. On auil île même en (|uarie, en collationnant avec la tierce. Un renouvelle la même opé-
ration en nuinle, en collaii'miianl auc la quarte, (es coHalionnements ont pour but devoir si aucime des fautes
sicnalées au bureau par MM. les correcleuis, sur la luarfje des épreuves, na échappé h MM. les corrigeiirs sur le
marbre et le mêlai. Après ces cinq lectures cnlièr?s contrôlées l'une par l'autre, cL en dihnrs .le la préparait! n
ri-dessus mentionnée. vient une révision, ci souvent il en vient deux ou trois; puis l'on didie. le clicliat;e opéré, par
r.inséuuent la pure;6 du lexle se trouvant immobilisée, on fait, avec la copie, une nouvelle lecture d'un bout de l'é'-
preuvft h l'autre, on se livre U une nouvelle révision , et le tirage n'.i rive qu'après ces innombraliles précaulions.
.\ussi y a t il îi Houlroui.'e des correcteurs de toutes les nalious et eu (iliis {;rand nombre que dans vinfrl-iinq
imprimerie; de Paris réunies ! Aussi encore, la correction y coùtc-1-elle autan: que la composition, lundis qu'ai leurs
elle ne coille que le dixième ! Aus-i entin, bien que l'assertion puisse paraître téméraire, Texactilude obieniie par
tant de frais et de soins, fait-elle que la plupart des Ivlilions des AUHiers Cnllwli(fues .aissenl bien loin derrière elles
celles même des célèbres liéiuMictius Mabillcn et Moutlaucon et des célèbres Jésuites Petau et Sirmond. (.lue l'on
compare, en elfel, n'inq>i:rle i)uelles leuilies de leurs éditions avec celles des nôtres qui leur correspondent, en grec
comme en latin, on se coiuaincra que l'invraiseiublable est une réalité.
D ailleurs, ces savants émiiienls, plus préoccupés du sens des Icxles que de la partie typographique et n'élant
point correcteurs île prc^fcssioii, lisaient, non ce que portaient les épreuves, mais ce qui devait s'y trouver, leur
haute intelligence suppléant aux faoles de l'édiliiui. De plus les llénéciiclins, comme les Jés'iiles, opéraient presque
toujours sur des nianuscrits, cause pi'rpétueib' île l.i iiiiilli|ilicité des fautes, pemlanl que les McliCis Calliotiqucs,
dont le pn pre est surtout de ressusiitir la 'Iraililien, n'opèrent le plus souvent que sur di s imprimés.
Le 11. P. Ile liucli, .lésuite iloll.nidisle de liruxelles, nous écrivait, il y a quilque Unips, n'avoir pu trouver en
d:ii-liuit mois d'étuilc, H;/c .scii/c /"!((<; dans noire Pulrologie Inliiie. M. Denzinger, professeur de lliéo'.ogieà ILni-
versité de Wur/bmirg, et M. lieissuuiin. Vicaire dénéralde la même ville, nous mandaient, .à la date du 10 juillet,
n'avoir pu égalemcnl surprendre loïc .si'ii/c fiiiitc, soit dans le latin soji dans le grec de noue double l'ulroUifjie. Kiifin,
le savant |l'. l'itra, Béii'dictin de Solcsiee, cl M. lionetty, directeur i]i's Annules (te phi^OiOiihic cliri'licmie, mis au
ilêti de nous couviiniirc il'une seule erreur lypojjraphique, ont été lorcés d'avouer que nous n'avions pas trop
prêsiimê de nolie pirfaite correction. Dans le C erge se irnuvcnt de bons latinistes et de bons lie lénises. el. ce qui
est plus rare, des houimes 1res positifs et tiès-praliqucs, eh bien ! nous leur piometlons une primo de 2S centimes
nar ch que fjute qu'ils découvriront dans n'importe lequel ilo i os volumes, siirtoul d ins les grecs.
M algré ce qui précède, l'Editeur des Cviwscuwplcls. sentant de plus en plus l'iuiportance el même la nécessité
d une correction parfaite pour qu'uu ouvrage soit veritabl-ment utile et estimable, se livre depuis plus d'un an, el
est résolu de se livrer jusqu'il latin il une opér.ilion longue, pénible et coûteuse, savoir, la révision entière et
universelle de ses innomlirables c!ii hés. Ainsi cbaciin de ses volumes, au fur et ."i mesure qu'il les remet sous presse,
est corrigé mot pour mol d un bout à l'autie. yiiaïaiite hommes y sont ou y seront occupés pend.int 10 ans, et une
somme qui n.^ saurait ètie moindre d un iIimui million de francs esl consacrée à cet ini|iorlant contrôle. Pe cette
minière, les Publications des Atiiicrs Ciilltulujuci, qui déj.'i .se distinguaient entre toutes par la supériorité de leur
correclion, n'auront de rivales, Sous ce rapport, dans aucun temps ni dans aucun p.iys; car quel est l'éditeur qui
poiirraii et voudrait .se livrer Al'UliS (01 I' ii des travaux si gigantesques el d'un | rix si exorbilant'? Il laut
«cites èire bien nénétré d'une vocalion divine ;i cet effet, pour ne reculer ni devant la peine ni devant la dépense,
Mirlnut 1 irsque rr.urope savante proclaine que jamais volumes n'ont été édités avec tant d'exactitude que ceux de
Il liiblwVièqnc universelle du Clcryé. Le présent volume est du noiubre de ceux révisés, et tous ceux qui le seront
a l'avenir porterons cette note. ICn conséquence, iiour juger les productions des Ateliers Cutholiques sons le rapfiorl
de la correclion, il ne laiidia prendre que ceux qui porteront en lèle lavis ici tracé. Nous ne reconnaissons qui celle
édition cl celles qui suivront sur nos planclies de ruélal ainsi eocigées. On croyait autrefois que la stéréotvpio
immobilisait les fautes, attendu qu'un cliché de nelal n'est point é. astique; pas du loiil, il iulroduit la perfection,
car on a trouvé le moyen de le corriger jasqu'à exttintion de fautes. 1. 'Hébreu a été revu par M. Dracii, le Gret
par des îlrers, le I.atin et le l'rancais par les premiers correcteurs de la eapilale en ces langues.
Nous avons la consolalion de pouvoir linir tel mis par les réflexions suivanies : Knfin, noire exemple a fini pat
ébranler les gran les publications en Italie, en Allemagne, en Belgique el en l'rance, par les C.inous grecs de Uome,
le Ceriiil de Naples, le .S'iifiil Thomas de l'arme, V Ijiaftinpédie relifiieuse de Munich, le recueil des (li'clardlivns ite
rites de llruxillcs, les tlullnndistes , le Snurez et le sjmiléqe de Paris, .lusqu'ii, on n'avait su réimprimer que Tes
o ivraiics de courte haleine. L^s in-4°, où s'engloutissent les in-folio, f.iisaienl peur, el on n'osait y loi cher, par
crainte de se nover dans ces abîmes sans fond et sans rives; mais on a Uni par se risquer ,à nous imiler. liien [ilus,
•ou» nuire impulsion, d'aulres Kditeiirs se préparent an llniluire universel, aux Déeiswns de loiiles les f.ongrêgations,
a une ltioipa])hie et ii une //is/oirc générale, etc., etc. Maihenreusement, la [iliipart des éditions déjà faites ou qui su
fout, soni sans jiitor.lé, parre qu'elles sont sans cxarliliide ; la correction semble en avoir été lailc par des aveugles,
«o't qu'on n'en ail p«s senti la gravité, soit qu'on ait reculé ilevanl les Irais; mais paliencel nno reproduction
cnrrcrle surgira bienlùt, n« (ùl-ce qu'il la lumière des écoles qui se sont faites ou qui se feront encore.
DICÏIONNAIRE
DKS
ORDRES RELIGIEUX
ou
HISTOIRE
DES ORDRES MONASTIQIES, RELIGIEUX ET MILITAIRES
ET DES CONGRÉGATIONS SÉCULIÈRES DE LUN ET DE L'AUTRE SEXE, QUI ONT
ÉTÉ ÉTABLIES JUSQU'A PRÉSENT;
CONTENANT :
LEUR ORIGINE, LEUR FONDiTlON, LEURS PROGRÈS,
LES ÉVÉNEMENTS LES PLUS CONSIDÉRABLES QUI LEUR SONT ARRIVÉS,
LA DÉCADENCE DES UNS ET LEUR SUPPRESSION,
l'agrandissement des autres par le moi en des différentes RÉFORMES QUI T ONT
ÉTÉ INTRODUITES,
LES VIES DB LEURS FONDATEURS ET DE LEURS RÉFORMATEURS,
AVEC DES FIGURES QUI REPRÉSENTENT LES DIFFÉRENTS HABILLEMENTS DE CES
ORDRES ET DE CES CONGRÉGATIONS,
RELIGIEUX rÉMTENT DU IIEBS OnoRE DE SAINT FRA^Ç01S, DE LA CCMMII>'ACt£ DE PICMIS.
MISE PAR ORDRE ALPHABÉTIQUE
CORRIGÉE ET AUGMENTÉE d'UNE INTRODl'CTION , li'uvE NOTICE SUR l'aUTEUR,
d'v\ gkand nomure d'auticles ou rAUTiF.s d'articles, et d'un SUPPLÉMENT OU l'on TROUVE l'histoir!; res
CutiGRÉGATIlNS OMISE* PAR IIÉLÏIlT,
ET L'HISTOIRE DES SOCIÉTÉS RELIGIEUSES
ÉTABLIES DEPUIS QUE CET AUTEUR A PUBLIÉ SON OUVRAGE,
PAR MAaiE-LÉANDRE BADICHE,
VICAIRE DE 'ilNTE-MAUGlEBlIE A PARIS, LICE>CIÉ EN TlIKnL'lGIK, M~M;mE DE LA SOCIÉTÉ ASIAnQUE, DE l'|>STITOI HlSIOlllQBE,
DE l'aCADÉMIi; IMIÉIIIALE ET RO\ALF, d'auk/./.o, LTG.
Et pas* M. l'abbé TOCKOîr,
ANCIEN CL'BÉ D'aNTIBES, CHANOINE nONORAlRE DE mtJlS, ETC.;
PUBLIÉE PAR M. L'ABBÉ MIGNE,
.DITEOR DB LA BIBLIOTHÈQUE U NI VEnSELLE DU CLERGÉ,
OU DES COURS COMPLETS SIR CHAOUE DRANCHE DE LA SCIENCE ECCLÉSIASTIQUE.
TOMK DEUXIEME.
4 VOL., PRIX : 32 FRANCS.
S'IMPRIME ET SE VEND CHEZ J.-P. MIGNE, EDITEUR,
AUX ATELIERS CATHOLIQUES, RUE D'AMBOISE, 20, AU PETIT-MONTROUGE,
AUTREFOIS CARRIÈRE d'eNFER DE PARIS, MAINTENANT DANS PARIS.
Paris. — Imprimerie J.-P. Mir.NE.
-mt
DICTIONNAIRE
DES
ORDRES RELIGIEUX
D
DALMAÏIE ( Congrégation de). Voyez
AUGUSTl.NS.
UALMATIE (Religieux pémtents de la
CONGRÉGATION De). VoI/CZ SiClLE.
DAMKS PAUVRES. Voyez Clarisses.
DANNEBllOCH. Voyez Eléphant.
DÉCHAUSSÉS (Frères Mineurs de l'É-
troite Observance en Espagne, dits).
Des Frères Mineurs de l'Etroite Observance
en l'.'spagne , appelés \es Décliaussés , et
dans leur origine les Frères du Gapuce ou
du Sainl-Evangile.
Enlie les disciples de Jean de la Piiebla,
!e bienheureux Jean de Guadaloupe fui un
des plus zélés, non-seulemenl pour uiaiiite-
nir l'Etroite Observance qu'il avait établie,
mais encore pour l'étendre d;ins les autres
provinces, souhaitant avoir pour cet effet
quelque élabiissemeiil au royaume de Gre-
nade, afin do l'introduire cliez les Pères do
l'Observance de la province de SainlJac-
ques; et, pour mi. ux réussir dans son des-
sein, il en obtint la pe^mis^ion de François
Sainson, général de l'ordre. Il ne se contenta
pas des austérités que le bienheureux Jean
de la Puebla avait introduites, il eu ajuuta
encore de nouvelles, et fil quelque change-
ment dans l'habit : car, outre qu'il en prit
un fort étroit et rapiécé , il accommoda le
caprice à la façon de celui que saint Fran-
çois avait porté, lui donnant une forme car-
rée, et le rendant pointu, ce qui fit donner
aux religieux de sa réforme le nom de Frè-
res du Capuce ; il quitta les socques ou san-
dales pour marcher nu-pieds , sans avoir
rien aux pieds, ce qui les fil aussi appeler
les Frères Déchaussés ; el comme les pre-
miers couvents de cette réforme furent éri-
gés en custodie sons le nom de la Custodie
du Saint-Evangile, on leur donna encore le
nom de Frère» du, Saint-Evangile ; mais ils
quittèrent ceux du Capuce el du Saint-lwan-
gile lorsque le pape Léon X. eut réuni toutes
les différentes réformes de l'ordre de Siiinl-
François sous le nom d'Observance cl de
Réformés, et conservèrent celui de Dé( haus-
sés, pour se distinguer des religieux de 1 E-
troiie Observance d'Italie, qui avaient piis
celui de Réformés.
Jean de Guadaloupe, ayant pris un habit
tel que nous avons marqué, alla à Rome
pour remontrer au pape Alexandre VI les
abus qui s'éiaient glissés dans l'ordre et
dans l'Observance contre la pureté de la rè-
gle; et, ayant renonié entre les mains de ce
Dictionnaire des Ordres religieux. II.
pontife à tous les privilèges el à toutes les
dispenses (|ui av;neiil donné lieu au relâ-
chement, il en obtint une bulle le 2'i sep-
tembre 1400, par lai|iicllï Sa Sainlelé lui
donnait permission de bâtir un touveiit au
royaume de Gri nado, cl de piendre avec lui
six religieux de l'Oliservance , de quclqiin
province qu'ils fussent , auxquels le pape
accordait la permission de le suivre , même
contre la volonté de leurs supérieurs, poMr\ u
qu'ils la leur eussent demandée, les incitant
sous l'obéissance du général île l'ordre, el
les exemptant de la juridiction des Obser-
vants, qui n'avaient pour lors, comme nous
avons dit ailleurs, que des >if aires géné-
raux, le général étant Conventuel.
Jean de Guadaloupe étant rclonrné en Es-
pagne présenta son bref à l'arcliuv. do Gre-
nade cl au prieur de Nolrc-Damo de (juada-
luupe , que le pape avait nommé pour le
faire e\écuter. IMusieurs religieux zélés eu
ayant eu connaissance se joignirent à ce ré-
formateur, qui leur donna nn habit pareil à
celui qu'il portail, en envoya qnclquc--uiis
dans un ermitage prorlie Oropeza, et d'au-
tres eu un autre eimilage proche Placenza,
en attendant qu'il pliit à Dieu leur procurer
quelques pauvres couvents.
Comme dans le même teujps plusieurs re-
ligieux quittaient l'oidre sous divers prétex-
tes , el que qupl(|ucs-uns même prenaient
des habits d'ermites , avec permission de-
Rome, lesPèrcs de l'Obscrvanct^ <iui voynient
avec peine leurs lueilleurs sujets passer dans
la réforme de Jean de Guadaloupe , voulant
se servir du prétexte de ces abus pour eu
empêcher le progrès , oblinreni du même
Alexandre Vl un bref qui révoquait tous
ceux qu'il pouvait avoir accordés, de quel-
que nature qu'ils fussent , pour pcrmelire
aux religieux de vivre hors de l'ordre. Eu
vertu de ce bref , les Pères de l'Observance
intiuiétèrent Jean de Guadaloupe el ses com-
pagnons pour les obliger de retourner à leur
obéissance el de rentrer dans les couvents
de l'Observance ; mais le saint réformateur
fit un second voyage à Home, cl obtint uif
aulre bref, du i6 juillet l'i'JO, par leipiel ce
pontife déclarait que son inleulion n'avait
point été de comprendre dans celui qu'il
avait accorde aux Observants, Jean de Gua-
daloupe ni ses compagnons. Cette lenlalivu
des Observants contre ces saints religieux.
bien loin de leur être préjudiciable, 1 ui' lut
avantageuse : car non -seulement le pape
confirma son premier bref du 25 scptcm-
H
DICTIONNAIRE OES ORDRES UEI-ÎCIEUX.
12
hro I'i0('i, niai< il nrronla onrore à Jc.iii tlo
(iiiiidalxiip ' hi piTiiiissIoii (le recevoir dans
sa reforme Ions le> relifjieiix qui se présen-
liraienl a lui pour y eiilrer, defeiiilanl sous
«le prosses p im s à qui qvjo co fùl de les in-
quiéter cil aucune l.inci. Oulrc co bref, il
<'l)iinl aussi , av.inl que de partir de Home,
du profureur cl du c<tiiiaMssairc , du Père
l'"ran ois Samson , pcneral , auquel le bref
du pape le souincltail lui et les siens, un am-
ple pouvoir de rei cvoir toutes les maisons
qui lui scraicii! oITertes. Les Pures de l'Oh-
■•ervancc, ayant ou communication de ces
brefs et de ces permissions n'inquiélèreiil
plus les réformés, sur lesquels ils n'avaient
plus aucune aulorilé ni juridicliou.
Jean de Tiuadaloiipe jouissant de la paix
vl de l.i tranquillité, et ne songeant plus qu'à
se jinicurer un couvent pour y jeter les fun-
deuicnts de sa réforme, Dieu suscita un gen-
lillioniiiie de Tiuxillo (jui lui en offrit un
proche celte ville. Ce zélé refirmaleur en
prit possession l'an loOO , et le dédia à la
s linte Vieigc sous Ir noai de Noire-Damc-
de-l-umiére. Ce fut là qu'il dressa ses pre-
mières coiislilulions, et où, après avoir ob-
tenu trois ou quatre autres petits couvents,
il se forma une custodie, à I iqucllc on donna
le nom du Siiinl-l'Jvongile, el qui fut depuis
érigée en province sous le titre de Sainl-Ga-
br:el.
De si lieureuv coinmeiiccinents cncoura-
pircnt le 1ère Jean de (juadaloupe à éten-
dre sa réforme jusqu'en Portugal, où il alla
à cet efîel , el y liâiil quelques couvents,
dont le premier lui fut donné par le duc de
Itragincc, près de la \illc de Viliusa. L'é-
glise de ce premier ctalilissemenl, qui fut
dediec eu l'Iionneur de Notre-Dame-do -
4'iiiè, donna d.iiis la suite le nom à une
[irovince de la inéui!' réforme; le second
couvent qu'il obtint en ce royaume fut pro-
( lie la ville de (iliaves ; le troisième procbc
It.ircclos, et un ermitage dans un village
uiimmé Mérida.
Li;- l'ères de l'Observance, voyant les pro-
pr.-s do cette réforme, que le» plus zélés
d'entre eux emhrassaieni pour y travailler à
la perfeclioii en observant la règle avec plus
de rigueur dans sa pureté, voulurent l'em-
pérlier , cl loi inèrcnl leurs plaintes au T.
M.irli.il liourlier, Trançais de nation et vi-
e lire général de l'Ouservancc de la Famille
Dllraiiiunlainc, qui à leurs solliciia ions as-
sembla un rbapiire général en (bastille l'an
l.'iOJ, où il fut ordonne que dans toutes le-i
provinces d'Kspagne on assignerait certains
couvents à ceux qui voudraient uliscrvii la
règle a*ec plus de rigueur el embrasser les
iiièuies pratiques et les mêmes .lustérilcs
<iue Ion Krèiesilu Saiul-liN angile, à condi-
tion qu'ils siéraient toujours sous l'obéiii-
saiicc des provinciaux de l'Observance,
'l'i Ile fiil la résolution du clia|iilre général,
par l.iquellc ou prétendait arréier le progrès
de 1.1 réforme de Jean A< Ijiiadaloupe, cl eui-
péclier que les re igicux des provinces de
i'Ubservance en sortissent pour y embrasser
celle réforme. .Mais re des'.ein ne réussit
pas : ce qui lit prendre na\ ObscrvtTnts d'au-
tres moyens pour la déiruire. Pour cet elïel
ils curent recours aux rois catlioliques Ter-
dinand cl Isabelle, qui étaient afTcelioiinés à
l'Observ.ince, à laqu. Ile ils avaient fait bâ ir
un coavcnl à 'l'oiède et accordé plusieurs
privilèges. Ils leur rem mirèrent la division
que la réforme du Saint-Evangile caus.iit
dans les différenlcs provini es, cl les priè-
rent d'interposer leur aulorilé pour faire re-
venir les réformes sous l'obéissance des Ob-
servants, qui leur promet'aicnl toute assis-
tance, leur oITranl des couients de récoUec-
tion pour y vivre si ausièremcnt qu'ils vou-
draient. Ces princes, se laissant persuader
par dos raisons si justes en apparence, en
écrivirent au pape Alexandre ^"l, qui à leur
prière accorda un bref, la même année 1502,
par lequel il révoquait ceux qu'il avait don-
nés en faveur de Jean de Guadaloupe el de
sa reforme, el les remellail sous l'oliéissanco
des Observants. Ce bref leur fut signifie, et
ils furent chassés par forée des couvents
qu'ils avaient en Casiille, d'où ils se retirè-
rent dans ceux de Portugal.
Jean de Gu.idaloupe, surpris de- ce chan-
gement, entreprit un troisième voyage à
Kome, où il représenta au pape l'injustice
de la persécution qu'on leur avait suscitée, el
ce pontife donna un nouveau bref par lequel
il déclarait que celui qu'il avait accordé à la
sollicitation des rois catholi(|ue$ était seule-
ment contre ceux ijui étaient sortis de l'or-
dre pour vivre à leur volonté et avec scan-
dale, cl non pas contre le P. Jean de Gua-
daloupe el les autres de la custodie du Sainl-
livangile, qu'il regardait comme vériiables
religieux de Saint-François et observateurs
de sa règle sous l'obéissance du général, el
confirma les deux premiers brefs qu'il avait
accordés en leur faveur. Jean de Guadaloupe,
muni de ce bref, arriva en Portugal, où il
trouva ses religieux sans couvent, aussi
bien qu'en Casiille, el disper^és dans des
montagnes el dans des sulitudes, eu atten-
dant qu'il plût à Dieu de dissiper cet orage.
11 publia son bref, mais il lrou>a tant d'up-
posi'ions de la part dci Observants, que iion-
seuleinenl il ne put réussir, mais que même
il fut obligé de se retirer dans une solitude,
n'ayanl pu avoir une retraite dans leurs
couvents.
Après la mort du pape Pie III, qui ne gou-
verna l'Ivglis;' (|ue viiigl-.sepl jours, et qui
a\ail succède a Alexamlre \ 1, liilles Del-
phiuo, qui avait été élu général en 1500,
ayaiil soilicilé le pajie Jules II de réunir eu-
svmlde lis Couvent lels et les Obseivants, et
ce ].outilc ayant f.iil assembler le cliapilie
généralissime à Home l'an l.'jQt), eoniiini
nous .ivo.is dit ailleurs, Jean de Ciuadaloupo
se résolut d'j aller avec le P. Pierre Melgaro
el q lelques auiics de ses religieux, afia «l'y
faire lever les oppositions qui s'étaient trou-
vées dans l'exèculion de son bref; mais, ac-
cablé (le vieillesse, il mourut en cliemin. Ses
compagnons étant arrives à Home, le géné-
ral leur donna pour custode el supérieur à
la pl.ice de leur iéformatcur,le même rieno
13
DEC
nr:c
il
de iMelgaro, qui n'oublia rien pour m.iin-
lenir \u réforaie , noiiobstanl les Iravrrscs
que les Observants, appuyés par les puis-
sances, leur suscitaient, mais sans aucun elTei:
comme nous le dirons en parlant des
car,
Frères Mineurs de l'Observance , le pape,
voyant que l'union qui avait été projetée
n'avait pu se faire, et ayant ordonné que les
«lilïérenles réformes de l'ordre de Saint-
François, quelque nom qu'elles eussent,
se incliraient dans un coriain temps sous
l'obé ssance des Conventuels ou des Obser-
vants, les Frôns du Capuce ou du Saint-
Evangile se mirent derechef sous l'obéis-
sance des Conventuels, dont le général lès
prit sous sa protection, et leur confirma
Pierre de Melgaro pour leur custode, au!o-
risa leur congrégation sous le nom liu Ca-
puce ou du Saint-Evangile, leur permit de
vivre selon leur manière, cl de pratiquer à
la lettre la règle de Saint-François, et con-
firma toutes les grâces que ses préJcccsseurs
leiiravaient accordées. Le cardinal prolecteur
ratifia ce que le général avait fait, el ces ré-
formés obtinrent un bref du pape, au mois
de juillet de la même année 1505, qui leur
permettait de bâtir de nouveaux couvents
unis en custodie sous l'obéissance du gé-
néral.
Ces religieux étant retournés en Espagne,
et y .lyant trouvé leur couvent de Truxillo
el de Salva-Léon ruinés, se retirèrent dans
quelques autres qu'ils avaient en ce royau-
me; mais ces couvents n'étant pas suflisants
pour contenir tous ceux qui se joignaient à
eux pour embrasser la réforme, ils en bâ-
tirent d'autres qui furent unis à la custodie
du Saint-Evangile , avec l'agrément du pro-
vincial de la province de Saint-Jacques, qu'ils
trouvèrent favorable à leurs desseins. Mais
ils ne jouirent pas longtemps du fruit de leurs
travaux, car les Observants, envieux de
leurs progrès, eurent encore recours aux
rois d'Espagne et de Portugal, etolitinrent à
leur sollicitation un bref du pape qi:i ordon-
nait aux Frères du Capuee ou du Saint-
Evangile de retourner sous l'obéissance des
(.•bservants, ou de sortir des royaumes d'Ks-
pagnc et de Portugal.
Ces s linls religieux aimèrent mieux aban-
donner leur couvent que do retourner sous
l'obéissance des Observants, et se retirèrent
dans des solitudes et des déserts où ils ne
vécurent que d'herbes el de racines, jusqu'à
ce que ce nouvel orage eût été apaisé. A
cet elïet ils envoyèrent à Rome le P. Ange
de V.illadolid pour représenti r à Sa Sainteté
le fâcheux état où ils étaient réduits, et les
injustes motifs des persécutions qu'on leur
avait suscitées au sujet de la réforme, qu'ils
n'avaient embrassée que de son consente-
ment el de celui d'Alexandre VI, son prédé-
cesseur. Jules 11, touché de leurs misères,
révofjua son dernier bref par un aulre du 10
mars 1508, où, rapportant tous les privilèges
que lui et son prédécesseur avaient accordés
au P. Jean de Guadaloupe et au P. Pierre
de Melgaro , non-seulement il les con-
firma de nouveau , mais il les aug-
menta, érigeant leur custodie du Saint-Evan-
gile en province, leur donnant pouvoir d'é-
lire un provincial ; et en attendant l'élection,
il confirma Pierre de Melgaro dans son of-
fice de custode, révoquant tous les brefs qui
pouvaient avoir été accordés contraires à ci;
dernier.
Le P. Ange de Valladoli J élanl retourné en -
Espagne, on rendit aussitôt à ces réformés
tous les couvents qu'ils avaient en ce royau-
me, fil ils en bâtircni de nouveaux en Por-
tugal, où ils liment leur premier chapitre,
dans lequel ils élurent pour provincial le P.
Pierre de Melgaro ; ce qui aig:it tellement
l'esprit des Observants d'Espagne, qu'ayant
formé opposition à l'érection de cette pro-
vince, ils obtinrent des lettres du roi d'Es-
pagne en leur faveur adressées au roi de
Portugal, qu'il priait de protéger les Obser-
vants. Le roi de Portugal, ayant fait venir les
uns el les autres en sa présence, et après
avoir écoulé leurs raisons , les fit conve-
nr que tous les couvents que les Pères du
Saint-Evangile avaient en Portugal seraient
érigés en custodie, sujette seulement au vi-
caire général de l'Observance de la Famille
Ullramonlaine ; que ceux de C;islil!e ren-
draient obéissance an provincial de la pro-
vince de Saint-Jacques, aussi de l'Obsor»
vance, et que les réformés quilteraienl leurs
capuces pointus pour en porter à l'avenir do
ronds, afin de se conformer eu quelque fa-
çon aux Pères de lObservance : ce qui fut
accordé et aussitôt exécuté. Le P. Pierre de
Melgaro renonça au titre de provincial, et
demeura custode comme il était auparavant
de la custodie de la Pitié, el le P.Ange do
Valladolidalla en Casiille, où il fut cus'.odo
de la custodie du Saint-Evangile do ce
royaume.
Les réformés de Casiille, ayant appris ce
qui s'était passé eu Portugal, n'approuvè-
rent point les résolutions que l'on avait pri-
ses dans la conférence qui s'y était lenua :
c'est pourquoi, ne pouvant se résoudre à
quitter le capuce pointu et à se soumettre
à l'obéissance du provincial do la piovincu
de Saint-Jacques, ils eurent recours au gé-
néral Renaud de Catignola, auquel ils s'é-
taient soumis dans le chapitre généralissime
de l'an 1506, le priant de leur accorder sa
protection, et de ne pas permettre qu'ils
fussent soustraits de son obéissance. Le gé-
néral les écouta favorablemeni, et remit la
décision de celle affaire à la congrégalio.i
générale qui dévalise tenir à Valladolid au
mois d'avril de l'an 1509, où il fut ordonné
que les Pères du Capuce auraient terme de
six semaines, pendant lequel temps ils seraient,'
tenu s de déclarer de nouveau sous quelle obéis-
sance ils voulaient vivre, ou sous celle du
général de l'ordre, ou sous celle du vicaire
général de l'Observance ; et qu'en cas qu'ils
choisissent celle du général, il leur sérail
libre de retourner dans les couvents qu'ils
avaient auparavant occupés par autorité
apostolique.
Il y eut par ce moyen division entre les
réformés d'Espagne et ceux de Portugal ;
15
WCTIONNAIRK DES ORDRES RELIGIEUX.
16
car roux-ci reconnurent le viciiiro L'ônèral
tli« l'Observance pour Inir siipèiiciir, ^ui-
vanl l'arcoril i\u'\\s a\airni fail on |ircseiiie
du roi do PorUigal, cl crus d'Espagne re-
conniirenl le général, comme ils iivaiml
fail jusqu'alors. Mais on ne s^rda pis les
conditions qu'on leur avait promises dans la
congrép.ilion générale; car on ne leur voulut
pas rendre leurs couvents ; cl loul ce que put
faire le grné.al de son aulorilé lut de leur
ionncr iroispauvrescouvcnlsilansl'F.slrama-
tlnre, où ils ruieni même si inquiétés «luo,
ilans la crainte <iu'oii ne les en ciiassât, le
P. Argede Valladolid fiil obligé d'aller à
Rome pour s'en assurer la possession, il se
^rou^a pour cet elTcl au chapitre général de
l'an lolO.d.ins lequel on élut pour général
Pliili|ipi' Ragnacavallo, auquel il fit si bien
i-onnaiire la ju.>lico de sa eause et la mau-
vaise intention de ^es advers. lires, qu'il l'en-
gagea à leur confirmer les trois couvents
que S( n prédécesseur leur av;iil donnes; ce
que fit pareillement son successeur, le P.
Hernardin de Pralo, l'an lol2, qui y ajoula
même trois autres couvents, qu'il érigea,
avec Us tro.s premiers, en cuslodie, sous le
litre du Sainl-lvvangile ; ce qui fut ratifié et
approuvé par le pape Léon X, qui avait suc-
cédé à Jules II.
Ce pontife ayant convoqué à Uomc un
cliapilrc généralissime, l'an 1517, comme
nous avons dit ailleurs, d ordonné que dans
ce chapitre il n'y aurait que les réformés
qui ) auraient voix jiour élire un mini-trc
gênerai de tout l'ordre de .Sainl-François,
comprenant sous le nom de réformés les
Observants, Amédéisles , Coletans, Clare-
nins,du Sainl-livaiigile ou du Capuce, et
Déchaussés, qui de>aienl à l'avenir quitter
tous ces noms pour prendre celui de Frères
Mineurs de la régulière Observance, les
l'iércs du Cipucc ou du Saint-Hvangile fu-
rent par ce moyen incorporés dans l'Obs r-
van( e, pr niit le nom de Reformés, cl quit-
tèrent celui de Frères du Capuce ou du
Saini-Fvangile, sans préjudice pourtant à
leur réforme partieulicre, dans laquelle ils
continuèrent. Leur cuslodie fut ensuite éri-
gée en prounce sous le nom de Saint-(îa-
bricl, aus'-i bien que celle de la Pitié, (jui re-
liiit toujours son nom. Celle des Anges, dont
Jean de la l'uebla avait été fondateur, fut
aussi érigée i n piovince, et ces provinces en
ont produit (dusieurs autres, tant eu F-spa-
gne qu'en Portugal, cl dans les Indes, où ils
uni (iresenlenient dou/c provinces, dont les
l'P. François des Anges et Martin de Valence
sont les fondateurs. Ces saints religieux
étant passés dans ce pays en l.')21, en vertu
il un bref de Léon X, et ayant mené avec
eux neuf prêtres et deux frères laïques,
lou» religieux de la province de Sainl-tla-
Iriel, non-scuU inenl ils s'y établirent, mais
encore ils y (irent de si grandes conversions,
quiis furent obligés de. multiplier leurs cou-
vents à proportion qu'ils suumeUaienl de
pays à la loi de I l>angile. Le P. Jean de
/uiiiarraga fut premier archevêque de Mexi-
que, cl un grand nombre de religieux ont re-
çu en ces qunrticrs-lA la couionne du mar-
tyre. Le P. F'raneois des Anges fut dans la
suite général de l'ordre de Saint-François,
cl le pajie Cléineiil VII l'cleva à la dignité de
cardinal. Les religieux de cette réforme onl
toujours observé la règle de Saint-François
dans sa pureté, a l'édification de toute l'Ks-
pagne, où ils sont connus sous le nom de
1). 'Chaussés, à cause que dans le commence-
ment de leur orgine ils ailaieiil nu-pieds,
sans socques ni sandales. Mais [iréscntemenl
ils portent des socques ; il n'y a que ceux du
la provincede la Pitié en Portugal, qui dans :a
maison sonltoujours nu-pieds, ne porl.intdes
socques que quand ils sorient. Ilesidiinciledo
rapporter leurs observances, puisque presque
toutes les provinces ont des constitutions
particulières; mais elles conviennent toutes
dans l'exacte pauvreté dont elles font pro-
fession et dans le renoncement cl toutes les
grâr'cs cl privilèges qui pourraient donner
atteinte à l'Etroite Observance. CrêgoireXV
I)erniit à ces religieux d'Espagne d'avoir un
procureurg'înéral encour deUome; mais Ur-
bainVlll révoqua cette permission. Quanta
l'Iiabilleinent.ilest d'étoffes rudes et gr ssiè-
res.etnediffèredeceluideïC 'sarins.que nous
avons donné à l'article Césakins, qu'en ce
que le capuce est un peu plus pointu; c'est
pounjuoi nous n'en donnons point d'es-
tampe particulière.
Francise. Conzag., De Orig. Scraph. tic-
liij. Luc \Vading,.4»nfl/. Minorum. Oominic.
de tjubernatis, Ori». 5cra/;/(ij. Darezzo Ra-
rezzi, Cont^nuaiion de la Chronique des frè-
res Mineurs, .\lariaii. ab Orscell r. Francise.
Uedivivi, sivv Citron. Oliserv. Slrictioris.
Juan de santa .Maria, C'/troiiic. de la Provin-
cia de San Joscpli de lus Descalzos de ta or-
den de los Menurts. Antonio Panes, Chro-
nicii delà Provinc. de San Juan liaittisla dé
ri'li''iosos Menores Descalzos de la Regular.
Oùscrvanlia. Andr. de Guadaloupe, liislor.
de In Provinc. de los Angelos. Charles Ra(ii-
ne, H si. gdncrale de l'origine et propres des
Frères Hlmeurs, Rccolels, liéform''* ou Dv-
cltausse's.
DElXAN (Saint-). Voyez Irlande.
DENIN. Voyez Nivhi.LE.
DE.MS EN FRANCE (Ancienne conuriga-
Tio.N DE Saint-).
Si l'on a donné le titre de chefs d'ordres cl
de congrégations aux abbayes doni nous ve-
nons de parler dans quelques articles, l'on
ne peut sans injustice refuser le m<MiH' tiire
à celle de Saint-Denis en France, puisiiue,
ouirc qu'elle est l<i plus célèbre du royaume,
et même de l'Europe, elle a non-seulement
été chef d'une véritable congrégation , (jui a
été érigée sur la fin du seizième siècle ; mais
elle a encore eu de tout temps un grand
nombre de monastères et d'églises de sa dé-
pendance. Quoiqu'on attribue la fondation
de cette illustre abbaye au roi Dagoberl l",
il y avait déjà néanmoins un alihé cl des re-
ligieux dans celle église do Saint-Denis avant
que ce prince eût tait jeter les foiidenients
des nouveaux édifices, cocame il parait par
17
DEN
DEN
18
une cliarle datée d(! la quarante-troisième
année du règne de Clolaire 11, c'est-à-dire
l'an 627, d'une donation faite par une dame
nommée Théodetrudc, auquel temps Dodon
cil était abbé. Cependant, quoique Dagobert
n'en ait pas été le premier fond.ilcur, nul
autre que lui n'a mieux mérité ce litre , par
les grands biens dont il a enrichi cette ab-
baye. L'on ne peut dire certainement m
quelle année elle fui fondée pour la première
fois, ni en quel temps Dagobert entreprit de
rebâtir avec une mapinificence royale l'église
de Cl- monastère, où il employa un grand
nombre de colonnes de mai bre cl d'autres or-
nements de même mitière. Elle était même,
selon quelques historiens, tout- pavée de
marbre, et brillait au dedans de l'éclat de ri-
clies tapisseries , toute rehaussée d'or , de
pi-rles et de pierres précieuses. Au milieu
rie toutes ces richesses , il fil construire sur
la sépulture de saint Denis, apôlre des Gau-
les, dont le corps se conserve dans celte
église avec ceux de ses compagnons Rusti-
que et Eleulhère, un magnifi(iue tombeau ,
dont il donna la conduite à saint Eloi,
Comme son dessein était d'établir la psalmo-
die continuelle dans cette éi^lise, à l'exem-
ple des abbayes de Saint-Maurice d'Agaune
cl de Sainl-Martin de Tours, il fit faire des
bâtiments suffisants pour loger les religieux
qui devaient vaquer à ce saint exercice,
auxquels il fit de grands biens; et tant
qu'il vécut, il ne laissa échapper aucune oc-
casion de favoriser ce monastère et de le
combler de nouveaux bienfaits. Enfin , ce
p incc étant !i;ort l'an 638 , dix ans ou en-
viron après la fondation de cette abbaye ,
autant qu'on peut le conjecturer, il voulut y
être enterré : ce (lUi servit d'exemple à nos
rois, qui ont toujours depuis élu leur sé-
pulture dans ce lieu, à la réserve de quel-
ques-uns, qui ont été enterrés en quelques
aulres lieux. Clovis II, fils de Dagobert , re-
gardant l'abbaye de Saint-Denis comme l'ou-
vrage de la piété et de la magnificence de
son père, ne m::nqua pss de lui donner sa
pro:ci'tion, cl confirma toutes les dunaliuns
que ce prince y avait faites. Il lui procura
aussi rallranchisscinenl de la juridiction de
l'évéque de Paris , par le privilège d'exemp-
tion ()u'il demanda à saint Landry , et qu'il
fit confirmer, l'an 6 3, dans un synode ou as-
semblée de plusieurs évolues et des grands
du royaume. Gliarderic en étanlablié en evi,
lit bâtir sur son propre fonds le monastère de
Toussainval dans le Chainbli. Il en fit dédier
l'église sous les noms de saint Denis et de
saint Marcel , et y mil des religieux de Saint-
Denis, qui furent comme le premier essaim
qui sortit de cette maison. Le roi Jhierri 1 "^
aiilo' isa ce nouvel établissement, et lui donna
même avec beaucoup de privilèges la terre
de Noisi, pour l'entretien des religieux ; mais
ce monastère n'est plus connu, et le P. doni
Félibien dans l'Histoire de l'abbaye de Saint-
Denis, dont nous avons tiré la plus grande
partie, de ce que nousdirons dans cet article,
croit que c'est peut-être l'abbaye du Val
Ijfcs Poutoise, possédée par les Feuillants.
La psalmodie continuelle qui avait été
établie dans celte église par le roi Dagobert
avait été interrompue; mais, l'an 723,
Thierri II ordonna qu'elle serait rétablie; et,
pour y engager les religieux, il confirma
leurs anciens privilèges accordés par les
évéqu's de Paris et les rois ses prédéces-
seurs. Une chose digne de remarque qui se
trouve dans les lettres que ce prince en lit ex-
pédier, c'est que l'on y lit que saini Denis et
ses deux compagnons, saint Rustique et
saint Eleulhère, furent les premiers apôtres
des Gaules et qu'ils vinrent à Paris par or-
dre du pape saint Clément, pour y prêcher
l'Evangile. Déjà les biens de ce monastère
avaient été usurpés en partie, lorsque Ful-
rad en fut abbé l'an 750. Un de ses premiers
soins fut de les recouvrer: ce qu'il fit aisé-
ment avec le crédit de Pcpin, qui n'était en-
core que maire du palais, mais qui avait déjà
la souveraine autorité, et qui, é:anl parvenu
à la couronne, protégea cette abbaye comme
auparavant: il honora même l'abbé Fulrad
de la dignité de maître de sa chapelle.
En cette qualité, cet abbé fut obligé de
suivre le roi en Italie lorsqu'il y porta la
guerre pour remettre le pape Etienne III en
possession des terres de l'Eglise, dont A!-
lophe, roi des Lombards, s'était emparé. Ce
pontife, qui était venu en France implorer
le secours du roi, avail sacré de nouveau ce
pr nce et ses deux fils Charles et Carloman
dans l'abbaye de Saint-Denis, où il avail sé-
journé quelque temps; et, comme il avait
besoin du crédit de l'abbé Fulrad auprès de
ce prince, il lui accorda beauco:ip de privi-
lèges. Entre aulres, il lui donna permission
et à ses successeurs de fonder aulant de mo-
nastères qu'il leur plairait, sous la protec-
tion du saint-siége. Il accorda de plus à cet
abbédene pouvoir être fait évêque contre
son gré et sans la volonté du roi Pépin, d'u-
ser de certaines chaussures, et de parer son
cheval d'un ornement particulier qui ne con-
venait, selon les apparences, qu'aux grands
seigneurs ou à quelques cérémonies. Celte
grâce fut accordée par ce pontife au seul
Fulrad, à la prière du roi. Il ordonna même
qu'après la mort de cet abbé, ces ornements
seraient mis avec son corps dans le tom-
beau. Il lui donna encore le pouvoir d'élire
un évêque qui fît les fonctions épiscopales
dans ce monastère et dans les autres qui en
dépendaient, et beaucoup d'autres grâces,
qu'on peut liredans l'iiistoiredeeetteabbayc.
Il y avait de ces sortes d'évêques à Saint-
Martin de Tours et en d'autres célèbres mo-
nastères. M. l'abbé Fleury dit, à la vérité
{ Hist. ecclés. t. IX, liv. xLiv !, que ce u'é-
taieul point des évêques titulaires, comme
si ces monastères et ceux de leur dépen-
dance eussent été des diocèses; mais qu'ils
étaient de ceux qui avaient été ordonnés
sans aucun titre, ou qui, après l'avoir quitté,
se retiraient dans ces monastères et y fai-
saient les fonctions, comme en des lieux
exempts de la juridiction des ordinaires.
Quelquefois c'étaient des chorévêques, qui
avaient leur siège fixe daus les monastères,
J9
DICTIONNAinE PF.S OKnurS RELU;iKUX.
50
v)ii l'abbé, qii- otail on iiu'nie Irnips é>êqiio
de son monasièrc; ol d'aulrcs fois t'ilaii'iil
lie simples prélrcs. à qui on donnai! le litre
dYvéqucs parce qu'ils avaient mission pour
[Tâcher l'Eviinfiilc on rcrlain teniloire.
l'cpin, ayant voulu rendre la liosi!i(|uc de
Saint-Denis plus aupusio, avait fait coniincn-
«er un iiouviau bâlinienl dont la tonslruc-
lion fut inlorrmnpuo par sa mort, qui ar-
riva l'an 708; mais Charlemasnc, son fils,
l'avant f.iil contiiuicr, il fut arliové l'an 775.
Ce prime vint à Sainl-Dtnis et fit faire la cé-
roinonic de la déilicacc avec toulc la | onipc
imaginable. Le inoiiaslc^re se scnlit aussi de
SCS libcraltts, rar il lui fit don de sos mé-
tairies de Luzarebes avec l'cplise du lien,
bàlie sous rinvocali..n de saint Corne et de
saint Damicn, et d'une autre mclairie située
à Mo'si, au dioeèse de Meaux. L'année pré-
cédenlo, il avait confirmé la donation (|U0
Éon père y avait faite des terres de Favcroles
et de Nortm, avec une partie de la forél Ivc-
linc, des rcrfs et dos ( bcvreuils qui y étaient,
ilont les cuirs devaient servir pour couvrir
les livres des religieux, et la cbair pour la
fi'iurriture dos malades : d'où le V. Mabillon
lire une conséquence, qu'en ce temps-là l'abs-
tinence de la viande (tait en usage dans
celte abbaye.
Un différend que l'abbé Fulrad ont avec
l'évéquc de Paris au sujet d'un n.onastèro
Làii au village de Plaisir près de Sainl-Cier-
i)iain-en-Laje fournit un exemple d'une
épreuve qui se faisait dans ce lemp«-là ijour
juger des \ rocès. L'cvéque aPéguait que ce
ijumastèrc avait été donné à son Kgliso; Ful-
rad soutenait que c'était un ('on fait à son
abba3e. Los juges, ne sachant lequel des deux
avait droit, eurent recours à l'épreuve qu'on
appel.iit le jugement de Dieu ddnnt la croijr.
Deux homme*, dont l'un soutenait les ilroits
de l'Kglisc de Paris, l'autre ceux de l'abbayo
de Saint-Denis, allèrent dans la chapelle du
roi, cl, pendant qu'un prêtre récitait des
prières, ils commencèrent tous deux on
même temps à étendre les bras en forme de
croix. Celui do Saint-Denis étant demeuré
ferme dans cet état, cl l'autre ayant chancelé
un peu, il n'en f.illut pas <lavantage pour
faire perdre le procès à l'évêque, qui avoua
lui-même que Dieu s'était déclaré on f.ivour
de l'abbaye de Saint-Denis. Sur quoi le roi,
assisté des comtes ol d> s autres ofin iers de
justice, prononr.i en fa\curdo l'abbé Fulrad,
qu'il maintint en possession du monastère
de Plaisir, par un arrêt du 28 juillet 771.
.Mais (■< tlo soric d'épreuve fut interdite quel-
ques années après par Louis le Débonnaire.
L'iibbé Fulrad, p.ir son testament fiil à
Ilérlslal, se]! ans a\ant sa mort, donna à
son abbavo lous les biens qui lui étaient
oibus on héritage, dont (luelques-uiis étaient
situés on Alsace ol en Urisgan, avec, ceux
qu'il avait OUI par préscnis, soit de nos rois,
»oil de s 8 p.irents ou de quelques-uns de
ut» ami», et les terres (|u'il avait acquises à
litre d'échange ouaulrement.il assujettit à
II) Voy., à la lin JutoI., i,"» | cl 2.
la mémi' a! baye tous les mon.isières qu'il
avait fondés ou rebâtis au diocèse de Metz et
ailleurs, counne ceux de Saione, de Sainl-
llippolyle ou Sainl-Uisl, de Sainl-Cueu|ilias,
d'.Vrberting, d'.Ulalogne. sans eompter ceux
de Lebraha < t de Saint-Alexauilr.', qu'il y
avait déj^'i soun.i<. Outre ces iiunastèics et
ceux dont nous avons ci-devant par é, il y
avait cnrore celui de Saint-Michel, qui osl
présentement une fameuse abbaye proche
\'erdun, qui était aussi de sa dépendance.
Quant au testament de l'abbé Fulrad, il
faut remarquer que les abbés réguliers n'a-
vaient pas plus (le pouvoir que les autres
religieux de donner par testament à leurs
parents ou à d'autres, et que, s'il se trouve
plusieurs testaments de celte nature en fa-
vcurdes monaslèros, c'est qu'ils ne faisaient
que confirmer les donations qu'ils y avaient
faites avant que d'y faire profession, ou
celles qui avaient été faites en leur considé-
ration depuis qu'i's av.Ticnt rmbrassé l'étal
religieux, ne pouvant point disposer de leurs
propres, puisqu'ils n'en avaient point, et ne
pouvant pas non plus d'ailleurs disposer dos
biens du monastère, dont ils n'avaient que
l'économat. Nous donnons ici rhabillement
des religieux qui étaient à Saint-Denis du
temps de l'abbé Fulrad (1), que nous avons
lire sur les figures que le P. Mabillon en
a données dans le dcuxiènie tome de ses .\n.
nales lîénédictincs.
Fulrad étant mort l'an 78V, Mnginaire, l'un
de ses disei|des, lui succéda. Il obtint, entre
autres iirivilégcs du jiape Adrien I ". l'an 78(i,
la confirmation de celui qui avait été accor-
dé à Fulrad par Liiennc lli, d'avoir un
évoque à Saint-Denis pour y faire, selon les
besoins, les fonctions épiscopales, et tl.ins
les autres monastères qui en dépendaient.
Il l'ut envoyé en ambassade on Italie, et à son
retour il obtint d'Offa. roi des Merciens en
Angiclorro, la confirmation des biens situés
au port do Landowic, qui avaient été donnés
par quelques-uns de ses sujets à l'abbaye de
Saint-Denis, à laquelle ce prince donna aussi
ce qui lui appartenait au même lieu, en or,
en argent cl autres revenus, et ratifia on
môme temps le don ((ue le duc llerlwal ava l
au>si fait à celte abbaye d'une autre part.
Ce ne lut pas le seul endroit hors du royaume
où ce monastère avait des birns. Cbarle-
magne lui on donn.i aussi dans la \'altelino;
elle en eut dans la suite en Allemagne, en
Fspagne et en d'autres provinces. Outre les
monastères de sa dépendance qu'elle avait en
France, elle en avait encore dans les pays
étrangers, comme en Angleterre el en Es-
pagne.
Knire les donations qui fuient faites à celle
abbaye sous le gouvernement de l'abbé Far-
dulfe, successeur de M.iginaire .on romar(|uo
que le comte Tlieiidald , qui fut ac< usé de
crime de lèse-majesté , .iprès s'être jiiglifié
parla voie du jugement de Dieu devant la
croix, donna une partie de ses biens à ce mo-
nastère et plusieurs familles de serfs ou d'os-
il
DEN
DEN
52
claves. Ces serfs étaient destinés à la culture
de la terre, et faisaient l'une di s principales
richesses de ce temps-là. Dagobcrt 1", dans
la 10' année de son règne , qui élaii l'an 631
de Jésus-Christ, ordonna que les r nfants des
serfs de celte abbaye , soit qu'ils fussent nés
de légitime mariageou non, appartiendraii-nt
au monastère, sous peine d'amende ou de
punition corporelle contreles contrevenants.
Comme ils étaient en grand nombre, ils vou-
lurent se révolter et secouer le joug de la
servitude, sous le gouvernement d'Eudes fie
Deuil, qui obtint un bref du pape Adrien IV,
adressé aux évêques de France, pour con-
traindre parles voies canoniques les serfsde
cefe abbaye à rendre les services auxquels
ils étaient obligés; et environ cent ans après,
Clémenl IV, l'an 12CG, donna pouvoir aux
abbés de Saint-Di nis de conférer la tonsure
cléricale aux serfs de celle abbaye, après
qu'ils auraient été affranchis , du consente-
ment de la communauté.
Il y avait au-si dans celle abbaye des pau-
vres malriculiers, ainsi appelés parce qu'ils
étaient inscrits dans la matricu'e ou catalo-
gue de l'église. Ils avaient souvent pirl aux
largesses des bienfaiteurs. Ils faisaient les
plus gros ouvrages de la sacristie, comme de
tendre les tapisseries, garder les portes, em-
pêcher le tumulte du peuple, tenir l'église
propre, et veiller à la garde des saintes re-
liques. La plupart étaient des personnes (|ui,
eu reeonnaissance de ce qu'ils avaient été
guéris par l'assistance des saints martyrs,
consacraient le reste de leurs jours au ser-
vice de l'abbaye, portant l'hahit monastique
et la tonsure comme les moines.
Quoique cette abbaye dût selon les appa-
rences servir de modèle aux maisons reli-
gieuses qui étaient de sa juridiction, elle eut
cependant besoin elle-même d'être réformée
sur la On du septième siècle. Le relâchement
s'y était introduit insensibleraenl, ilavailaug-
mente de jour en jour, on n'y reconnaissait
plus ni régularité ni discipline : les religieux
avaient même quille l'habit monastique et
s'étaient transformés en chanoines pour vi-
vieavec plus de licence. Hilduin, qui ou
était abbé en 815, ayant tâché inuiilemenl
de les faire rentrer dans leur devoir, eut
recours à lauloiilé de l'empereur Louis le
Débonnaire, qui l'an 828 y envoya deux
saints abbés, Benoît d'Anianc et Arnonl de
Noirmouticrs; mais leurs remontrances ne
servirent qu'à irriter davantage es préten-
dus chanoines, qui envoyèrent d.ms un pe-
tit monastère de leur dépendance ceux de la
communauléqui n'avaient pas encore qui;ié
l'habit monaslique. Les évêques asscnililés
l'an 829 dans le concile de Paris résolurent
d'employer Icuraulorilé jîour rétablir la dis-
cipline régulière dans celle abiiaye, mais les
troubles excités l'année suivante furent un
obstacle aux ordonnances (lui furent faites
pour cela dans le concile. Hilduin, songeant
toujours aux moyens de réussir dans son
dessein, gagna en 831 Hincmar, l'un de ces
piélendus chanoines, qui fut le premier à
s'offrir de prendre l'habit monastique cl à
suivre les autres prati()nes du cloître ; quoi-
qu'il ne fût pas du nombre de ceux ')ui les
avaient abandonnées, ayant toujours poito
l'habit de chanoine depuis son eulréeen re-
ligion. Us travaillèrent ensemble si elTirace-
ment pour la réforme de ce monastère, qu'é-
tant aidés par les archevêques de Sens et do
Reims, et appuyés de l'autorité t'ereuipcrcur,
la discipline monastique fut enfin par leur
moyen rétablie àSainl-Donis. Hincmar en l'ut
tiré quelques années après pour être élevé à
la dignité d'archevêque de Reims.
Hilduin, pour affermir la règle monastiqus
qu'il avait rétablie dans ce monastère avec
tant de peine, voyant qu'une des principales
causes de sa décadence venait de ce que lis
abbés ne fournissaient pas aux religieux les
choses nécessaires à la subsistance, partagea
les biens de l'abbaye et en assigna une par-
tie pour l'entretien et la nourriture des reli-
gieux. Le grand nombre de terres cl de mai-
sons, qui sont marquées dans l'acte de ce
partage, font connaître qu'elle était dès lors,
comme elle est encore aujourd'hui , la plus
riche du royaume. Chaque terre et chaque
ferme avait sa destinalion parliculière. Le
revenu de quelques-unes devait être employé
pour vêtir les religieux ; celui des autres, ou
pour assister les malades , ou pour la nour-
riture de la communauté , ou pour les réjia-
rations, ou pour lesdépenscs extraordinaires,
tant de l'église que du monastère. 11 y eu
avait que l'abbé cédait entièrement aux reli-
gieux, d'autres sur lesquelles il donnait sim-
plement à prendre en espèces certaine (juan-
tilé de blé, de vin, de fruits, de légumes, do
miel, de volaille, de puissou et autres sem-
blables choses.
Le P. Mabillon rapporte dans sa Diploma-
tique la charle de ce partage , par laiiuelle
il paraît que l'abbé Hilduin ordonna que l'on
donnerait tous les ans aux religieux , tant
pour eux que pour les hôtes qui mangeaient
au réfectoire, deux mille cent muids de blé
fi-onicnt, neuf cents muids de seigle pour ses
domcsliqucs, deux mille cinq cents muids de,
vin pour les relij;ieux , outre la bière pour
les serviteurs ; trois cents muids de légumes,
Ircnle-cinq muids de graisse, trente-cinq ses-
terces de beurre, delà volaille, du bois et
autres choses dont il est inutile de faire ici
le détail. Il y eut un aulre partage qui fui
fait par l'abbé Louis en 862, et confirmé par
le roi Cliarles le Chauve. Il paraît par ce
partage que l'alibé était obligé de fournir
treize cents muids de seigle pour les servi-
teurs, et que pour en deun urer quille, aussi
bien que des trois cents muids de légumes ,
de vingt muids de graisse sur les trente-ciiKi
qu'il donnait, de deux cents muids de sel,
outre uu muid que l'on recevait aux salines,
de cinquante muids de savon et autres den-
rées, de cent masses de fer pour les taux, de
centaulres masses de fer pour les fourclies
et autres choses qui étaient nécessaires pour
les ouvriers, il avait abandonné aux reli-
gieux quelques terres et seigneuries , mais
qu'il était toujours obligé de fournir deii^
mil;e c ni muids de blé froment pour faire
81
niCTIONNAJIlE DF.S ORPRES RELICIF.UX.
ii
liiir p.Tîn, ri qu'il conscnlail que pour lotir
liuivsdn ils JDiiir.iifnl , romino ils fais.iii'iil
(li'puis lonplcnips. de rorl.iinps vignes, à con-
ililion (|iio si ollos rpii(l;iicnt nioitis de deux
iiiillo cinq cents inuids, r.ibbo sor.iil tenu (io
suppléer au reste. Mni-; il ne f.iut pas croire
i;uc le muid de vin fût aussi praïul en ce
temps 1,1 qu'il l'est nujuurirhui , non plus
que le muid de blé; car par les statuts qu'Ad-
iiilard, abbé de Corbie, fit pour son monas-
tère, l'an 822 (1), il pnraîl que le muid de
vin n'élail que de seize seliers et chaque sc-
tier (le six tasses , par conséquent l'hémine
qui coiitenail demi-selier était de trois tasses.
A l'éçrard du muid de blé, l'on n'en dev. it
faire que trente pains. Ces statuts ne mar-
i|iieiil pdinl combien chaque pain pesait ;
mais par la leHreque Théodemare, abbé du
Mont-l'.assin, écrivit à l'empereur Cliarlc-
inaRiie , lorsqu'il lui envoya l'hémine et le
poiils du pain, il est constant que chaque
pain pesait quatre livres et servait h quaire
relipietix : d'où il s'ensuit que le muid de blé
ne devait pas peser plus de s x vingts livres,
■ I qu'.iinsi il élail bien moins qu'un seîier de
l'aris, (|iii en pèse deux cent quarante.
(^es pariages l'ont connaître qu'après cette
réf'irme les religieux de Saint-Denis gar-
(laiint l'.il siini nce de la chair prescrite par
la règle de Saint-lfenuîl ; toutefois , avec les
fldoui issements que le concile d'Aix-la-Cha-
pelle y avait afipoités , juiisiiu'ils usaient
d'Iii.ile de graisse dans leurs mets ordinaires
au diTaiit d'huile d'olive, et qu'ils pouvaient
m.inger de la volaille à certaines félcs de
l'année.
Quelques années avant ce partage, l'abbé
T.ouis ayant éié pris par les Normands , les
religieux ddnnèient [lour sa rançon six cent
<|uatrc-\ ingis livres d'or et trois mille deux
cent einquai-telivrrs d'argent, qui re\ienncnt
à [dus de six cent mille livrer de notre mon-
naie, sans complir plusieurs vassaux et leurs
enfants qu'on fut aussi obligé de leur livrer.
Ces barbares s'emparèrent, pour la première
fois, de cette abbaye l'an 81)5; et, comme il
n'y avait rien (ini s"t)pi)Osàt à eux, i!s la dé-
p'iuillrrent entièreiiienl de tous les dons pré-
cieux (]iie nns rois y avaient faits, ayant été
pendant Irois semaines maîircs de te mona-
sière , d'où les religieux, en se retirant,
avaient emporté benreusemenl avec eux les
saillies reliques. C.liarlis le Clianve, ayant
pris, l'an H'il , l'adminislralion de cette ab-
baye, ajcèsla mort de l'abbé Loui'i, qui était
Ron cliaiieelier et son parent , (it gloire de
Îorter le nom et la (lu.ililé d'abhé de Saint-
>enis, et lit faire aiilotir du monaslèrt! une
enceinte de buis et de pierres en ni;iniére de
fortilicalion , pour enipérber <|ue les Nor-
mands ne vinssent la |iilleriine seconde fois;
mais les religieux ni' crurent pas ces fortili-
r.iliuns assez fortes pour leur résister, puis-
que . dan» le temps que ces inlidéles assié-
geaient Paris, l'an 8K7,ces religieux se réfu-
gièrent à Keirns avec les corps de !■ urs saints
patrons et pliisieuis autres reliques. L'an
012, le monastèrede Saint-Denis .«se voyait en-
core à la veille d'étreen proieaux Normand»,
si le roi Charles le Simple n'eût pris le parti de
s'.iccoromoder avec Itollon, leur duc, qui se
fit baptisera Hnuen, comme nous avons déjà
dit ailleurs. Robert, comte de Paris, qui élait
pour los ablié de Saint-Denis et qui lui roi
de France dans la suite, le tint sur les fonts
de Iraplôme et lui donna son nom. Avant It
comie Hubert, le roi Eudes en avait aussi été
abbé; lingues le Grand, (ils de Robert, le fut
après lui ; et enfin Hugues Ca[iel, qui par un
motif de conscience rendit à ce monastère
ses abbés réguliers , étant persuadé que la
cause dn relâchement des religieux ne ve-
nait que de ce qu'ils n avaient que des laï-
ques pour abbés. Ce prince, après avoir re-
mis en règle cette abbaye, jugea nécessaire
d'\ rétablir le bon ordre. Il en fit parler à
siinl Mayeul, qu'il croyait plus cajiable que
personne d'une tel'e entreprise. Ce saint
avait quit'é la charge d'abbé de Cluny et vi-
vait fort retiré, ne pensant plus qu'à se pré-
parer à la mort. Il crut néanmoins devoir
faire un eiïort pour satisfaire son prince :
c'est pourquoi il se mit en chemin; miis
étant tombé malade à Souvigny, il y mourut.
Ainsi ce fui l'abbé Odilon, qui lui avait suc-
cédé dans le gouvernement do l'ordre de
Cluny, qui fut chargé de celle commission ,
qui, quoique difficile, fol exécutée avec tout
le succès que l'on pouvait attendre de son
zè>.
L'ancienne discipline y était encore fort
r«l,";chée lorsque Suger, en étant abbé,
entreprit l'an 1123 de réformer les abus qui
s'y étaient glissés, et aux(]uels il n'avait pas
peu contribué lui-même : car, n'étant que
simple religieux de Saint-Denis , il avait
gagné ies bimnes grâces du roi Louis '\'I et
s'était abandonné à sa propre fortune, se
iais-anl introduire bien avant dans les af-
faires du siècle. Il suivait ce prince partout,
même à l'armée, et vivait pïuUM en courtisan
(ju'en religieux. Apiès qu'il eutélé fait abbe.
il continua de vivre comme auparavant, et
même avec plus de pompe et do magnificence;
l'on a mémo cru que saint Bernard l'a voulu
marquerlorsqu'il se plainidans son Apologie,
d'un abbé ([ui avaitpour l'ordinaire soixante
clievaux à sa suite. Ce saint l'en reprit avec
une liberté dire tienne, et Suger, louché de
ses remontrances, renonça à sa vanité passée,
travailla à se corriger lui-même et à réfor-
mer les abus qui s'étaient glissés dans son
monastère, (Ommcnçanl par retrancher tout
ce qui ressentait en sa personne la pompe
cl les manières du siècle. Il eût bien souhaité
(juillrr entièrement la cour; mais le roi, qui
avait besoin de ses conseils, n'y put jamais
consentir. Obligé de rester malgré lui d.ins
le miiiislère, il parut à la cour a»ec une
modestie qui édiliait toute la France. De,
celle manière il persuada aisément la re-
forme à ses religieux. La ferveur et l'exar-
liluile avec laquelle ils s'acquillaienl de
tous leurs devoirs les mirent bienlôl en
(I) M.cliil!<iii, Ainiiil. Iiiiiiiticl., tiiiii. II, |Mg. iGG cl
25
DEN
DEN
2C
grande réputation; et celte renommée fut
suivie d'une si grande prospérilé, qu'il srm-
b'ail que toutes sortes de biens vinssent
fondre en abondance sur ce monastère : il ne
fut jamais plus florissant que sons le gou-
vernement de l'abbé Su;;er, qui en soutint
tous les inléréis avec une fermeté tout à fait
noble. Il lui fit restituer le prieuré d'Argcn-
leuil, qui lui avait appartenu originairement.
Il rentra dans plusieurs biens qui avaient
été aliénés. Il rédima de la vexation diffé-
rentes terres opprimées depuis longtemps ;
et l'on compte vingt-deux terres et seigneu-
ries qui furent beaucoup augmentées par les
soins de cet abbé. Pour conserver les droits
de son abbaye, et non par ostentation, comme
quelques-uns l'ont avancé mal à propos, il
fil faire une (basse aux cerfs dans la forêt
Iveline, oîi il passa une semaine entière sous
des tentes, avec Amauri de Montfort, Simon
de Neauphle, Evrardde Villepreux, plusieurs
autres seigneurs de ses amis el quantité de
vassaux. Le gibier fut porté à Saint-Denis :
on le servit aux ref gieux convalescents et
aux étrangers, qui mangeaient au logis des
Hôtes, et le reste fut distribué aux soldats
de la ville. Il fonda aussi le priiuré d'Essone,
où il mit une communauté de religieux; et
celui de Chaumonl en Vexin fut à sa consi-
dération soumis à l'abbaye de Sainl-Ueiiis.
Le crédit qu'il avait en France augmenta
encore davantage lorsque le roi Louis Vil,
étant prêt de partir pour la croisade l'an
1147, le nomma pour régent du roy iunie
pendant son absence. Ce prince avait résolu
avec le pape Eugène 111 de réformer l'abbaji!
de Sainte-Geneviève; mais, n'en ayant pas
eu le temps , l'exécution en fut réservée à
Suger, qui s'en acquitia de la manière que
nous le rapporterons en parlant de celte
abbaye. Le roi étant de retour, cet abbé l'ut
iliar^é d'une nouvelle commission par le
(lape : c'était de mettre des moines dans
l'église de Saint-Corneille de Compiègne ,
desservie alors par des cbanoines d'une vio
peu réglée : ce qu'il exécuta en y établissant
une communauté de religieux tirés de Saint-
Denis. Enfin , après avoir rendu de grands
services à l'État , qui lui firent donner le
tiire de Père de la pairie, et avoir gouverné
son abbaye pendant vingt-neuf ans, il mou-
rut l'an llol. Il n'est pas le seul abbé de
Saint- Denis qui ait été régent du royaume.
L'abbé Matthieu de Vendôme le fut aussi
lorsque saint Louis alla pour la seconde lois
en Orient l'an 12G9. Ce piinre étant mort
dans ce voyage, son lils l'bilippe III , qui
l'avait accompagné, non-seulement continua
la régence à l'atibé Matthieu , mais le fit à
son retour son ministre d'Etat.
Quoique Suger eût assez de crédit pour
obtenir du pajie Eugène III d'user d'orne-
iiicnls poniificaux , cependant, soit par mo-
destie, ou pour quelque autre raison, il ne
s'en scrvil pas : ce ne fut que l'abbé
Cuiliaume II qui l'an 1176 obtint cet hon-
neur du pape Alexandre 111. Du temps
d'Eudes II , qui succéda immédiatemenl à
ëuger, l'abbaye de Saint-Denis acquit plu-
sieurs églises el prieurés , entre antres le
prieuré de Fornalos, qui lui fut donné l'an
115G par le roi dePortugal Alphonse VII, cl
sous le gouvernement d'Henri V. On lui sou-
mit enrore le prieuré de Grand-Puits. Le
P. Félibicn rapporte un pouiilé de ceit(î
abbaye , tiré d'un ancien cartulaire de l'an
l'jll , où il y a dix-huit prieurés et environ
quatre-vingts cures à la nomination de
l'abbé , sans les canonicats et les petits bé-
néfices ; et il paraît par ce même pouiilé que
dès ce lemps-là cette abbaye avait déjà
perdu plusieurs monastères de sa dépen-
dance ; comme ceux de Tousseiival , de Plai-
sir, celui de Saint-Michel, changé depuis en
abbaye, et plusieurs autres, dont il est fait
mention dans I Histoire de Saint-Denis, quoi-
qu'ils ne se trouvent point dans ce pouiilé.
Ces monastères , qui étaient de sa dépen-
dance, et dont les prieurs étaient obligés de
se trouver aux chapitres généraux qui se
tenaient dans celte abbaye, n'étaient (juu
trop suffisants pour lui faire donner le nom
de chef d'ordre el de congrégation ; mai* elle
a mérité ce titre avec pus de fondement par
ce que nous allons dire.
Dès l'an lo80, quelques monastères de né-
nédiclins, pour satisfaire au décret du concile
de Trente qui obligeait les monastères im-
médiatement soumis au saint siège de s'unir
en congrégation , s'ils n'aimaient mieux se
résoudre à la visite de l'ordinaire, s'élanl as-
sociés ensemble sous le lilrede Congrégation
des Exempts, les religieux de Saint-Denis,
qui n'avaient point encore obéi sur ce point
an ciincile de Trente , et se voyaient pressés
d'enlrer en congrégation, aimèrent mieux,
sans s'assujettir à une autre congrégation,
chercher <'ux-;nêmes à en composer une dont
leur monastère pût être le chef, et faire en
sorte par ce moyen de ne changer à leurs
usages (quelque abusifs qu'ils fussent) que
ce qu'ils voudraient. La chose conclue , la
coMiinunauté députa plusieurs religieux pour
aller solliciter divers monastères de s'unir à
celui de Saint-Denis pour faire un même
corps de congrégation. Ils en trouvèrent
jusqu'à neuf, (lui furent ceux de Saint-Pierre
de Corbie , de Saint-Magloire de Paris , de
Saint-Père de Chartres, de Bonneval , de
Couiombs,de Josaphat,deNeauplile-le-Vieux,
de Saint-Lomer de Hlois, et de Monstieren-
der. On dressa des statuts , qui , n'étant la
plupart que des règles ou maximes assez
généralement reçues dans les cloîtres , s ins
déroger aux coutumes de chaque monastère,
furent aisément admis par les procureurs
de toutes ces abbayes , assemblés à Paris b;
G mars 1607 au prieuré de Saint-Lazare, au
faubourg de Saint-Uenis , où se conclut le
traité d'association.
On en poursuivit ensuite les lettres païen-,
tes , et le roi Henri IV les accorda dans le
même mois. Elles furent enregistrées et ho-
mologuées au parlement le 5 septembre de
la môme année, nonobstant l'opiiosition de
l'abbé de Saint-Corneille de Compiègne, dont
les religieux domaud.iicnt d'être associés à
la même congrégation, à laquelle ils fureni
DICTIONN.MUE DF.S ORDUES HEMCIEUX.
28
aussi ngr^-gt'-s. I.n mur Ironvn soulonienl à
pro()04 il'a»;imer le temps des clinpilrrs
f;iMiéraux; cl , au lieu que les slaliits n'en
melaieiil ijuc de six en six ans , elle liéler-
inina qu'ils se lieiidrai ni tous les quatre
an*, l.e premier rh.ipiire général avail été
indiqué à Saint-Denis le 28 juillet ; mais
quelque inciilenl survenu obligea de le dif-
férer jusqu'au -il orlobre suivant , cimmie il
parait par les actes rapitulaires de cette
année-là. Nicolas Hcsselin, qui était prieur
de Saint-Denis, fut élu général de la nouvelle
congrégation. Le pajïC l'aul V la confirma
Tan l(îl4 sous le litre de Con<jré(j(ilion de
Saint-Denif, cl donna à tous les monastères
immédiatement soumis au sainl-siége la li-
herlc de s'y associer, dans l'espérance de
rélahlir par ce moyen la discipline mona-
stique en France.
L'année précédente le général Nicolas
He&sclin élanl mort, Denis de Uubenlel fut
élu en sa place. Il remplit aussi celle de
grand prieur de celle ablia>e, et mourut en
lli20. a|irès s'être dén)is (juelque tmips avant
SI mort du grand prieure entre les mains
de Firmin l'ingré. tlonime par sa mort la
congrégation de Saint-Denis se vit sans gé-
néral, et que dans le même temps Claude
Louvet, prieur de Corbie, qui en était viciire
général, vint à mourir, aussi bien que le
syndic nommé Fran(;i>is WasI, religieux et
ehanibrier de Sainl-Magloire, Firmin l'ingié
convoqua l'année suivan:e le cliapitre géné-
ral dans l'abbaye de Siinl-C.orneille de- Com-
piègne , où l'on (il de nou\eau\ (ifficiers.
Mais celle coiigrcg.iiinn ne subsista pas
longtemps. Le mon.isiérc de Sainl-M.igloiri-,
qui était un de ses membres, fut dimné aux
l'ères de l'Oratoire l'an l(i-28. LUo en perdit
encore d'autres dans la suite, et les IJéné-
diciins réformes de a congrégation de Sainl-
Maur entrèrent dans l'abbaye du Saint-Ueiiis,
chef de cette cnmpagnie, l'an ICJ^J. ll.s eu-
rent aus-i d.ins la suite celle de Sainl-Cor-
neille de Coinj ii'gne, de .Monsiiérender, de
Saint-Père de l^lianres et iiuelques autres.
Nous avons vu ci-dev aiit <|ui; dans le nom-
1 re des aWiés régulii'rs, cette abbaye a pu
compter des régents du loyaiiiiie, des i baii-
Ct'Ii'TS et des ininislre;, d'I-^lat. LorM|u'elle a
clé entre les mains des laniues, clic a eu des
rois mêmes pour abbés; cl, avaiil (lil'elle fùl
lOMibee en commende, [iliLsieurs de eesalibes
régulirrs ont clé élevés à la di^-nile (l'evé-
qiie, d'arclievé'iue et de c.irdaial. Le pre-
mier abbé romineiidaiaire fui le e.inliiial
Louis de Itourbon, l'an l.')2S. Le litre d'abbe
fut supprime, * t la iiiense .ibbatiale unie a la
iiiaiMin royale de Sa'iil-Louis à S.iint-t^jr
tan IG'Jl, comme nous a>ons dit en jiatlant
de cette maison d.ins l'arliclc l>vii.
Sus abties , qu(ii<|uu réguliers, avaient
séance au parlement de i'aris, et avaient
erand nombre d'ollii ii rs religieux el lai()ues.
Lorsque l'ablié de S.iinl-Denis allait en cam-
p.igiie , il était ordinairement aceiimpauné
d'un cbambellan et d'un maréchal, dont les
ullices éiaicnt ( iigés en (iefs, conime il pa-
rait par des actes des aunées llb'J et I2.il.
Ces offices et ces fii fs ont été depuis réunis
au domaine de l'abbaye, aussi bii n que l'of-
fiee de boutillier de l'abbé, qui était pareil-
lement un oKice érigé en fiel et possédé par
un séculier dumeslique de ce même abbé,
qui avail toute juridiition spirituelle et tem-
porelle dans la ville de Saint-Denis ; et plu-
sieurs de nos rois lui avaient attribué la ton-
naissance et la punition de tous les criminels
qui seraient pris dans le château et la vil e
de Saint-Denis, et dans toute l'étendue de
leur juridiction, soit qu'ils fussent usuriers,
faux monnayeurs el même criminels de lèse-
majesté. A certaines fêtes de l'année on
chante dans l'église de cette abbaye la messe
tout entière en langue grecque, el en d'au-
tris seulement l'Epî re el l'Évangile. File a
aussi toujours conservé jusqu'à présent la
communion sous les deux espèces à la
messe solennelle des dimanches el des prin-
cipales fêles de l'année, oii les religieux non
encore prêtres communient de celle sorte,
non par un privilège spécial, comme plu-
sieurs se l'imaginent (selon ce que dit le
I*. Félibien), mais par un usage non inter-
rompu dans cette église aussi bien que dans
celle de Cluny.
A(>rès toutes les iiertes que cette abbayo
a faites, il est éloniianl qu'elle soit encore
aujourd'hui la plus riche el la plus lloris-
saiile du royaume, tant parla beauté de son
trésor, qui est d'un jirix ineslimabb-, (|iie
par ses revenus, qui,(iuoique Irès-gr.mds, le
seraient encore davantage sans les disgrâces
(|u'elle a éprouvées en dilTérents tuicips ,
dont les principales ont éié celles du pillage
qu'elle souffrit en 141 1 , pendant la guerre
civile qui fut causée par les dilTerends qu il
y eut au commencement du xv siècle enlre
les ducs d'Orléans et de Uourgogno : ce<iui
ayant donné occasion aux Anglais de re-
tourner en France, dont ils avaient été
chassés, eilc fut encore pillée en 1419 par
ces peuples fiers et barbai es. Ils s'en ren-
dirent maîtres de nouveau en 1435, après
que la ville de Saint-I)en s, iju'ils assié-
geaient, leur eut é;é rendue par capiti. la-
lion. Les calvini>tes n'eurent |<as plus de
rcspccl pour ce inonaslèri' : car, en l(i2
étant entrés dans la même ville de Saiiil-
Denis, où ils prolanèreiit plusieurs égli-cs,
ils endomm.igèreni la pluf<arl de ses bâli-
iiients, prirent presi|ue tous les ornements
d'église, dépouillèrent les châsses des siiints
de l'or, de l'argent et des pierreries d.pni
elles elaieiit (ouvertes, empoi tèreiit el dis-
persèrent les livres de sa riche bibliollièiiue,
qui était remplie de quantité d'anciens ma-
nuscrits ; et ils n en seraient pas restés là si
le prince de Coiule, l'un de leurs cliels, qui
aiiiiait cette alihave parce qu'il y .ivail clé
eleve, n'eût aircle leur fureur en fais.iiit pu-
nir u edoii/aine des pi incipaux auteurs i!o
cet attentat. Mais (c ne fui pas là ladeii-.ièn;
(le ses di.'-gràccs ; c.ir (sans parler de cello
(ju'ellc nijut de la ligue en I.'jO i par l'inso.
leiice des soldats, (|iii , non cuntenis dy
avoir commis plusieiirs indignités, derobe-
rei.l jusqu'au plouib de l'église) le duc de
23
t)lJ
DU
50t
Nemours, qui manquait d'argent pour défen-
dre Paris, résolu d'en faire aux dépens du
trésor de celte abbaye, qui était gardé chez
les religieux de Sainte-Croix de la Breion-
nerie, en tira, par un arrêt du conseil d'Eiat
rendu le 28 mai 1590, un rubis estimé vingt
mille écus et un crucifix d'or pesant plus do
dix-neuf marcs, que l'abbé Suger y avait
mis. 11 n'y eut pas jusqu'au prévôt des mar-
chands, conjointement avec les échevins de
P.iris,qui, voulant en enlever toute l'argen-
terie, firent rompre les serrures, et empor-
tèrent six lampes d'argent , dont la plus
grosse, qui venait d'Espagne, pesait plus de
quatre-vingt-treize marcs , quatre ligures
d'anges et un bénitier d'argent, le tout pe-
sant deux cent quinze marcs. Mais présen-
tement celle fameuse abbaye s'est remise de
toutes ces pertes aver. lanl d'avantage, qu'il
serait difficile de les croire, si l'histoire ne
nous en assurait. *
Voyez Doublet et le P. Félibien , Histoire
de l'abbaye de Saint- Denit; Sainte-Marthe,
Gall. Christ.; Mabillon , Annal. Benedict.,
etc.
DÉVIDOIR (Chevaliers du). Foyez Crois-
sant.
DIJON ET DE LANGRES (Hospita-
lières de).
Des Hospitalières de Dijon et de Latigres,
avec la vie de M. Joly, prêtre, docteur en
ihéoloqif^ et chanoine de l'éylise de Saint-
Etienne de DijOfii leur fondnteur.
M. Joly, instituteur des Hospilalières de
Dijon et de L;jngies, naquit à Dijon le 22
septembre de l'an 164-4, et eut pour père
Jaci)ues Joly, secrétaire du parlement de
Bourgogne. Le nom de Bénigne lui fut donné
sur les fonts de baptême, et il eut toute sa
vie un grand soin d'honorer ce saint martyr
et apôtre de Dijon, par nmitation de ses
vertus. Ses parents, qui par un principe de
piété et de devoir s'étaient appliqués à éle-
ver tous leurs enfants, dont le nombre était
assez grand, dans Us pratiques de la vérila-
b!e dévotion, rimarquèrent dans le jeune
Bénigne de si heureuses dispositions pour la
vertu, qu'ils redoublèrent leurs soins pour
l'y former de bonne heure; mais surtout à
celle du la charité envers les pauvres, dont
sa mère lui donnait l'exemple en allant de
maison en maison chercher les pauvres les
plus abandonnés, auxquels elle doiiniiit elle-
même tous les secours dont ils avaient he-
so n , jusqu'à exposer sa propre vie pour
conserver la leur, comme il parut assez en
16o2, que la ville de Dijon fut afiligée d'une
Gèvre pourpreuse qui emporta plus de qua-
tre mille personnes. Car cette charitable
dame s'employa avec tant de charité et de
zèle pour le service des pauvres qui étaient
attaqués de cette maladie, et avec si peu de
ménagement pour sa sauté, qu'elle en lut
elle-même attaquée et en mourut le 2 octobre
de la même année. Pour accoutumer de
bonne heure ses enf.uils à faire l'aumône
aux pauvres, «lie leur donnait souvint de
inm Ja faire eux-mêmes ; et jajnais elle n'a-
vait plus de plaisir que quand, après avoir
fait leurs petites libéralité*, ils retournaient
à elle pour avoir de quoi en faire d'autres.
Le petit Bénigne sur tous les autres se si-
gnala si bien dans ces pratiques de charité,
que, dès l'âge de cinq à six ans, ayant un
jour rencontré dans les rues quelques pau-
vres qui languissaient de faim, et n'ayant
rien à leur donner, il les pressa si vivement
de découdre tous les rubans qui ornaient
une robe neuve que sa mère lui venait de
faire faire à la mnde de ce temps-là, que la
nécessité jointe à ses sullicitalions les ayant
obligés de le faire, ils curent de quoi ache-
ter du pain en abondance : ce qui parut à sa
mère une action si héroïcine de charité, que,
bien loin de lui en faire des reproches, elle
augmenta pour lui sa tendresse, louant et
bénissant Dieu de lui avoir donné un enfant
qui donnait de si belles espérances.
Après la mort di* celle dame le jeune Bé-
nigne fut envoyé à Beaune par son père,
qui confia son éJucation aux Pères de l'Ora-
toire, il Ct des progrès dans les lettres, qui
surprirent ses maîtres, et il avança si bien
(Jans la piété, qu'on jugea dés lors qu'il se
consacrerait au service de l'Eglise. On ne
voyait point en lui ces empressements si or-
dinaires aux jeunes gens pour le jeu et le
ilivertissement. 11 avait une grande solidité
d'esprit, beaucoup de discernemenl, une gran-
deur d'âme qui n'était pas commune, et son
inclination était d'obliger ses compagnons
et leur faire plaisir autant que son atiachc-
ment à son devoir le lui pouvait permettre.
Il employa six années à faire ses huma-
nilés; mais son père étant mort au mois do
mai de l'année 1659, son frère aîné, qui so
trouva chargé de la famille, le fit revenir à
Dijon. Un an après il l'envoya à Rennes, où
il le mil en pension chez les Pères Jésuites,
sous lesquels il fit sa rhétorique et com-
mença sa première année de philosophie;
mais quelques-uns de ses amis lui ayant
conseillé d'aller à Paris et d'y recommencer
sa philosophie pour se mettre eu état de
prendre les grades, il les crut, et son frère
y ayant donné les mains, il se rendit à Paris
au commencement du mois de septembre de
l'année 1662. Après avoir fait ses cours do
philosophie et de théologie, il fut reçu ba-
chelier en 1667, et reçut le bonnet de doc-
teur en 1672, après avoir été ordonné prêtre
la même année à l'âge de vingt-sept ans.
Il avait été pourvu d'un canonicat dès l'âge
de quatorze ans dans l'église abbatiale de
Saint-Etienne de Dijon ; mais ses études
l'ayant empêché légitimement de satisfaire
aux devoirs d'un chanoine, elles ne furent
pas plutôt finies, qu'il songea de retourner
dans sa patrie pour remplir ses obligations.
A peine fut-il arrivé à Dijon, que Dieu
éprouva sa patience par une maladie de trois
mois, pendant laquelle il résolut de se dé-
faire de son canonicat afin d'avoir la litierlé
d'aller de village en village pour instruire
les paysans et passer toute sa vie dans une
mission continuelle; mais le P. Charles
Gauterol, provincial des Pères de la Doctrine
SI DICTIONNAIKE OFS
Chrélit-nno, qui nv.iil 6lé son direrlcnr pcn-
il.iiil ((ii'il cl.iil à l'aris cl «niïs l'avi* duquel
il n'cniroi rciiail rien, prï-vnynnl le fruit ([u'il
immail f lirc à Dijon sa |ialrie, rrniprrha
«rcxcctilcr cp ilpsscin, et lui conseilla iln ilc-
inrurcr ilans i'i-lal où Dieu l'avail mis.
M. Jol\ sui\il ilonc cet avis, rt, à peine
rui-il ri't'ouTié ses forces, qu'il se rendit si
assiilu h toutes les heures de l'office divin
de l'église de Saint-Klienne, qu'il en préféra
l'assistance à loules les œuvres de piété
auxquelles il se sentait pnrié de hii-niêine et
auxquelli's d'autres personnes voul lient l'en-
çaiier. M. Fiol, poir lors abbé de relie collé-
piale.qni ét.iilautrefois un célèbre monastère
de r.irdr.' de S;iin!-.\ugusliM,(on(;ul lanl d'es-
time de sa vertu, que, sans avoir égard à son
ap', qui n'était encore que de vingt-neuf ans,
il riioi'ora de la qualité de son grand \icairc
pour liiules 1rs di'|iciidnnfes do l'abbaye, et il
fit la visite de toute» les églis s qui étaient de
sa jiiridiclion, avec le succès qu'on en pou-
vail espérer.
N'ayanl pu exécuter le dessein qu'il avait
forme d'aller dans les missions pour instruire
lis pauvres de la campagne, il trouva les
iniiyens de se dédonunager d'une si sainte
ouirefjfise sans sortir de Dijon. Il y avait
dans celle \ille quaniilé de pauvres inen-
di mis élrvés dans l'oisiveté et dans une; pi-
l(iy:ible ignorance, qui ne se Irom aient dans
les églises que pour interrompre par li'urs
impiirlunilés la dévotion de c: ux dont iU
iinploraiiiil la charité. Pour cmpéclior cet
abus et [irucurrr en même li iiips aux pau-
vns les se(ours spiriluds et leinpoiels dont
ils avaient besoin, il fil publier par toutes
les paroisses de l)ijon que l'on ferait une
lionne aumône à tous les pauvres de quel-
(]ui- fige (ju'ils fussent, qui se trouveraient
les fêles et le s diinanelies aux caleihisnies et
aux exhortations qu'il ferait dans la chapelle
de Saint-^ incent, el celle libéralité étant se-
romlée par celle de plusieurs personnes cha-
ritables, attira un si gran<l nonilire de pau-
vres, qu<! la chapelle se lrou\atr()p petite
dans la suiie.
('e ne furent pas seulement les pauvres
qui \inrcnt écouler ses insiructions, il y eut
aussi un praml nombre de personnes de tout
sexe et de toutes sortes d'élats qui s'y trou-
vèrent. I,es I ersoniirs les plus accomniodées
de la villocrureul qu'elles devaient profiter de
l'ocrasinn pour faire mieux instruire leurs
domesliques qu'elles ne l'auraii'nt pu faire
«liez elles. Il y rui même des ecelesi.isliqiies
d'un mérite et d'une piélé dislinguce (|Ui,
animés par son exemple, s'offiiteiii de par-
tager avec lui le iravail. Plusieurs prelals
que le» aff.iires de leurs églis(-s oMigèrent
de passer à Dijon, ayant oui parler iivanln-
geusemenl <i;i grand fi iiil que pr<iilui>aienl
ces inilruclions, voulurent lilen eux-mêmes
en être Ir» lemoiM'., el entre le» autres M. le
llou\ de la Henliére, archevêque de Nar-
h"nne, qui j»- laisail un plaisir particulier
de Tenir en relie chapelle pour y aulmiser
par sa presenrc i es exhorl.ilions.
Lo zèle ({ue .M. Joly avait puur le service
ORDRES RflI-ICIEUX: 52
de l'Fglisc lui fil aussi entreprendre de
donner de pareilles insiructions aux clercs
qu'on élevait dans le séminaire do la Made-
leine, où il vint faire sa demeure à la prière
du supérieur; ce qui n'empêchait pas que,
noniibstanl l'éloignemenl de l'église de Saint-
Istieune el ses grandes occupations, il n'as-
sistât à matines et aux autres offices, aux-
quels il se rendait exactement dans les temps
même les plus fâcheux, aussi bien qu'aux
assemblées capilulaires et aux autres obli-
gations de son bénéfice; mais toutes ces fa-
ligues jointes aux grandes austérités qu'il
pratiqu.iit épuisèrent tellement ses forces,
qu'il tomba dangereusement malade et fut
obligé d'interrompre ses offices de chari'é
cl de retourner à sa mai>>on can"niale,
après i]u'on rut employé l'aulorilé de sou
directeur pour l'y faire conseniir. A peine
eut-il recouvré sa sauté, (ju'il recommença
avec plus de ferveur ses insiructions dans la
chapelle de Saiiit-Viueeul, où, comme elles
attiraient un grand iiumbre de pauvres, il
crut que pour les y engager davantage il
était à propos d'y établir une confrérie dont
îi's bons r.'glemenls les pussent soutenir
dans les senlimcnts de piele qu'il leur inspi-
rait, el leur faire supporter avec patience
l'ctat de pauvreté où Dieu les avait mis.
Slais plusieurs personnes riches el de piélé,
ayant voulu être de celle confrérie, elle s'est
trouvée dans la suite composée des plus
considérables de !a viil •, sans (jue pour cela
elle ail pi relu le nom de confrérie des pau-
vres, puisejuc c'csl à eux ([ue loul ce que
l'on y lail de bon se rapporte.
Ile sailli homme ne se conienla pas seule-
ment d'exhorlrr les pceheurs à la pénitence
et à ch.inger de vie, il voulut encore leur
nier les occasions du péché; c'est ce qui lui
fi! en.irepieiulre l'établissement de la com-
munauté du IJon-Pasleur, qui non-seulemenl
sert de refuge et d'asile aux filles débauchées
qui ont dessein de (jiiilter leur vie déréglée,
mais encore de retraite et de lieu de correc-
tion à celles que leurs parenis, pour prévenir
le déshonneur de leur famille, jugent à pro-
pos d'y renfermer, el à celles qui sont con-
damnées à y être renfermées pour punllioii
de leur vie scandaleuse, comme il est porlé
par les lettres paleiiles que le roi donna l'an
ll'>87 pour l'élablissemeul de celle conimu-
naulé. Il établit aussi une soeiéié qu'on
nomme la Chambre de la Divine Providence,
eu faveur des pauvres servantes (jui se Irou-
veiil sans condilinn. Sa charité n'él.ait pas
moins grande pour les pauvres malades,
qu'il >isit.iilel cmisolail par ses exhort i-
lions, par les aumi'ines qu'il leur faisait, el
les .services i)u'il leur rendait, avec lant du
douceur cl dassiduilé, ((ue l'évèiuede Laii-
gres lui conna la direciion spirituelle du
grand h^ipital de Dijon, ce qui donna lieu à
réi.'iblissement des Filles llospila ières, dont
il a élé rinsiilnleur, de la manière suivante,
il y ,'ivail dans la ville de Dijnn un biNpilal
fort ancien, sous le nmn du Sainl-Fspril,
(|ui elail desservi parles religieuses de l'oritro
du Sdiiil-Iisiirit de Moutpcllicr sous la di-
55 DU
reclion d'un commandeur et de quelques
autres religieux du même ordre. Mais cet
hôpital ne s'étant pas trouvé sufflsanl pour
le nombre des pauvres malades ou autres
qui avaient besoin d'assistance, on y joignit
dans la suile du temps l'hôpital de Notre-
Dame de l;t Charité, qui, pir la quantité des
pauvres qui y ont été reçus, est devenu l'hô-
piial général. Ces deux hôpitaux furent assiz
Itinglemps administrés par les religieuses de
loidre du Saint-Esprit. Mais cette union
ayant change l'état des choses, et les ma-
gistrats qui en avaient l'inspcclion s'étant
aperçus qu'il y avait quelque chose dans
l'administration qui n'était pas favorable au
public, s'y opposèrent pendant plusieurs
années, jusqu'à ce que, voyant toutes leurs
remontrances et leurs oppositions ne servir
à rien, ils jugèrent que le moyen le plus
convenable pciur remédier aux abus était de
renvoyer les religieuses à l'ancien hôpital
du Saint-Esprit pour y prendre soin des pau-
vres qu'on y recevait, et de confier ceux de
l'hôpiial de Notre-Dame de Charité à des
filles qui dépendraient, pour le tempon 1, des
administrateurs, et, pour le spirituel, des
supérieurs ecclésiastiques qu'il plairait à
l'évéque de Langres de leur donner. Cette
résolution prise, on l'exécuta, nonobstant
les oppositions qu'on y fit, et qui furent le-
vées trois ans après par un arrêt du conseil
d'Etal du 22 septembre 168S. L'évéque de
Langres, informé du bon ordre qu'un gar-
dait dans cette maison depuis qu'il en avait
confié l.i Conduite spirituelle à M. Joly ,
donn;i volontiers son consentement à l'éta-
blissement d'une nouvelle conimunaulé de
filles séculières pour le service des pauvres,
auquel elles seraient attachées par «tes vœux
sous l'obéissance d'une supérieure autant ilc
temps qu'elles demcureraientdans cet hôpital.
La nouvelle de cet établissement ne se fut
pas plutôt répandue , que l'on fut surpris
de voir a Dijon une troupe de filles pieuses
qui y \enaieiit des provinces même les plus
éloignées pour s'y consacrer au service des
pauvres. Il en vint de Paris, de Champagne et
de Flandre, qui, s'étant unies à celles de la
ville, lurent logées dans une maison qui leur
avait été préparée, en attendant qu'on les fît
entrer dans l'hôpital de Notre-Dame de la
Charité, où après quelques muis elles pri-
rent enfin la place des religieuses du Saint-
Esprit , et y demeurèrent en habit séculier
jusqu'à ce que, du consentement de l'évéque
de Langres, .M. Joly donna l'habit de novice
à quinze d'entre elles le 6 janvier 1C85. Cet
iiabillemeni est semblable à celui des filles
de Sainte-Agnès d'Arras et de la Sainte-Fa-
mille de Douai, doni quelques-unes vinrent
à Dijon pour instruire ces nouvelles Hospi-
talières des observances légulières. Trois
ans après, c'est-à-dire en 1G88, le roi accor-
da ses lettres patentes pour l'établissement
de ces filles en corps de communauté sécu-
lière, et en 1G89 elles furent enregistrées au
parlement le 23 mars.
Quoique M. Joly eût été établi supérieur
le cet hôpital pour le spirituel par l'autorité
DU
51
de révêqne, son humilité néanmoins l'empê-
cha d'en accepter et la qualité, et les fonc-
Ijiins ; il pria un autre ecclésiastique de ses
amis d'un mérite distingué el d'une grande
pieté lie vouloir bien s'en charger. M.iis, s'y
étant trouvé des difficnliés, ou conseilla a
ces bonnes filles lîe chuisir clles-tnêines nii
supérieur sous le bon plaisir de l'évéque de
Langres. Elles suivirent ce consi-il comme lo
miiyen le plus sûr pour en avoir un qui leur
fût convenable ; et, s'étant assemblées pour
cet effet, elles élurent AL July, dont elles
avaient déjà expérimenté le zèle. Lorsque ce
saint prêtre en fut averti, il témoigna beau-
coup de répugnance pour cet emploi; mais
il se soumit enfin aux ordres de la Provi-
dence en acceptjint la conduite de ces Hospi-
talières, dont la fidélité à remplir tous leurs
devoirs l'encouragea à leur dresser des rè-
glements, afin qu'il y eût entre elles une
uniformité d'actions et de pratiques.
11 passa plusieurs années à cet ouvrage ,
auquel il s'était disposé par le jeûne et la
prière, afin d'implorer le secours et les lu-
mières du ciel; el, après avoir consulté les
personnes les plus éclairées dans ces matiè-
res, il les fit pratiquer pendant quelques .in-
nées, afin que, l'expérience lui en ayant f it
connaître les défauts et les inconvénients, i(
pût les reloucher, coume il fil elîeclivemcut
en y retranchant plusieurs choses superllues
ou difficiles à observer, et y en ajoutant d'au,
très qui lui semblèrent plus conformes à l'es-
prit de cel institut et plus proportionnées à la
faiblesse de ces filles , auxquelles il les fit
observer jusqu'à la veille de sa dern ère m.i-
ladie, que, lui paraissant sans défiut, il prit
la résolution de les faire approuver el les
présenta pour cel effet à l'évéque de Lan-
gres, qui les fit examiner par sou conseil et
par des personnes spirituelles expérimentées
en ces sortes d'afl'aires, et les iut aussi avec
beaucoup d'attention. Mais M. Joly n'eut pas
la consolation de les voir approuvés de son
vivant, ne l'ayant éié que quelques jours
après sa mort, qui fut causée par une esi èce
de maladie contagieuse qui suivit immédia-
tement la disette des grains dont la Franco
fut allligée en 1G93 et ItiO'f. Car ce saint hom-
me s'employa au secours spirituel et tem-
porel de ceux qui en étaient attaqués avec
tant d'ardeur el si peu de ménagement pour
sa santé, qui n'était pas encore bien rétablie
d'une maladie qu'il avait eue, qu'il ne put
résister à la malignité de ce mal, dont il re-
garda les premières attaques comme un aver-
tissement qu'il devait achever son sacrifice ;
c'est pourquoi il s'y prépara par une con-
fession générale, et reçut le saint viati(|ue
dans des transports d'humilité, de reconnais,
sance et d'amour, qui tirèrent les larmes des
yeux de tous les assistants. Enfin, après
avoir soulTerl pendant dix jours des douleurs
excessives sans qu'il lui échappât aucuni;
plainte, sentant approcher le moment auquel
il devait quitter le monde pour aller jouir de
la présence de son Créateur el de son souve-
rain bien, il demanda l'extrôurie-onction ,
répondit lui-même à toutes les prières mai-
DICTIONNAIRE DES OUDRES RELIGIEUX.
5S
oiiécs dans le UilucI pour la reconimaiiJa-
liui) ilo ràini>. et mourut sur les neuf heures
du soir le It .so|itcinbro Ui9i, étant âgé de
cinquante ans. l'eu de iouis avant sa mala-
ilie, a\ant donné son pro| re lit à des pau-
?ns, il cul la consolation do mourir sur un
lit d'emprunt après avoir prodigué sa vie
pour le soulagement des misérables : aussi
les pauvres le regardant comme leur père ,
le liire lui en e.-l resté après sa morl. 11 y
eul conlcstation entre les chanoines de Saint-
Kiicnne el les filles Hospitalières à qui aurait
son corp<, sur une clause de son leslameiil ;
niais il fol adjugé aux Hospitalières eommc
étant leur fondateur. Il fut enterré dans le
cimetière de l'iiôpit.il, el son cœur fut donné
aux chanoines de Sainl-ttienne.
Uuuze jours après si mort, le 22 seplcm-
brc, l'évéque de Langres appruuva avec
éloge les règlements qu'il avait faits pour les
Hospitalières, auxquels il ajouta quelques
moilificationsqui étaient plutôt des marques
de l'exaclitude avec laquelle il les avait l^us
que des corrections qu'il j eût faites. Ces
liiles élant demeurées en habit de novices
l'es, ace de près de douze ans, firent Uuii
premiers vœux le 23 février IG'.tO, dix-huit
mois après la mort de M. Joly, qu'elles re-
connaissent iiour leur seul cl véritable insti-
tuteur, dont elles imitent encore à prcscnl
la charile pour les pauvres mal idts, aux-
quels elles donnent toutes les assistances
dont ils ont besoin : ce quelles font avec
lant dédilicalioii, que la bonne odeur de leur
pieté et de leur charité a donné lieu à réta-
blissement de leur inslilul dans trois autres
maisons, dont il y en a une à Langres. (Quoi-
que l'écriva n de la Vie do M. Joly donne à
CCS Hospilalières le litre de religieuses, elles
ne font pas néanmoins de vœux solennels.
Elles foui cinq an^ de noviiial, après les-
quels elles loiit seulenicnl trois vœux simples
de chasteté, d'oliéissancc et de charité envers
les malades. l£lles sont sous la conduite de
l'évéque pour le spir.lucl, et des adminislra-
leurs de leurs liôpilaux pour le Icmiiorcl.
Les supérieures sont élues tous les six ans.
L<ur lialiillemcnt , qui e>l i.uir cl tel que
nous l'avons fait graver (I ), csl, comme nous
l'avons dcjà dit, seiiiblahle à celui des lilbs
de Sainle-Agnè> d'Arras, el de la ^ainle-
Famille de Uouai, dont l'institut est d'élever
de petites filles irpheliiies el abandonnées ,
jusqu'à ce (jucllcs soient en âge d'être ma-
riées ou d'entrer en service, liiles font aussi
(rois vti'ui simples, el ont eu |iour fonda-
Irice maileinuiselle Jeanne Riscot, née à Ar-
ras l'an MiOl, cl (|ui mourut le 27 juin IGG'»,
ûgee de (i^l ans.
Le l'ère ISeaugendrc Bénédictin , Fie <le
M. July, imprimée ù Paris l'an 1700, cl M>-
muires ciimyés par cet fillrt llufjiitalicrci ,
ci par tes filles de la Société de Sainte-A(jncs
d'Arra>.
DIMIiSSI'S ou MODKSTKS
((i«M;iiK(iAi'iON des].
Vc ta coiujreijUiiun ilcf luttes el Veuves l'p-
(I) Val/,, i \à lin du v<'|., u* 3
5G
pelées Dimesscs ou Moîcsles dans l'Etat
Yénitien.
La congrégation des Filles el Veuves ap-
pelées Dimesses ou Modislts , dans l'Etal
Vénitien, a eu pour fondatrice Dejanara Val-
niarana, fille d'Aluise Valmarana el d'Isa-
belle Nogarole de ^ érone. Elle naquit à Vi-
cencc l'an loW. litanl en âge d'être mariée,
elle épousa Agrippa Pristrato . jnri^consulie
de la même ville, dont elle cul un fils. La
mort de celui-ci, suivie quelque temps après
de celle d ■ son mari, qui mourut en 1<J73, la
déliant de lout ce qui pouvait l'attacher au
monde, elle jirll l'habil du Tiers-Ordre de
Saint-François d'Assise et se relira avec
quatre pauvres femmes dans une maison qui
lui appartenait, où elles vécurent ensemble
dans la pratique de toutes les vertus chré-
tiennes sous la conduite du P. Antoine
Pagani, religieux de l'ordre de Saint-Fran-
çois de l'Observance. A son exemple, Angéle
Valn;arana, sa cousine, se voyant au-si
veuve, achela une maison joignant celle de
Dejanara Valmarana, où elle alla demeurer
avec quelques fcannes dévotes, cl y pratiqua
lout ce que sa piété lui inspirait de plus par-
fail, jusqu'à ce que le P. Pagani eut dressé
par ecril des règlements communs pour ces
deux maisons, qui furent approuvés par
l'évéque de Vicence el par le caidinal Au-
gustin Valierio, evéque de Vérone el visiteur
ap'is olique dans le diocèse de \'icence l'an
iùSk. (^)ueliiues autres maisims du même
inslilul ayant été fondées en d'autres lieux,
Lejanara Valmarana les gouverna en qua-
lité 1 e supérieure générale pendant vingt-
quatre ans, jusqu'à ce que, pleine de mérites
el de vertus , Dieu la relira de ce inonde
pour lui faire part de sa gloire, le 3 février
de l'an l(iO."{, étant âgée de cinquante-trois
ans. Elle fut enterrée à Vicence dans l'église
•.'0 Notre-Dame-la-Nouvc, cl mise dans lu
sépulture commune des Dimesscs.
I>"on ne roçiil dans Cille coiijjrégalion que
des filles el des veuves libres de tous enga-
gements, qui ne soient point obligées à la
tutelle de leurs enf.inls, ou dont les enfants
pourraient avoir besoin pour leurs établis-
sements. Filles sont éproutées pendant Iru.s
ans avani ()ue d'être reçues, el après leur
réception, elles oni encore deux autres an-
nées d'épreuve, pendant lesquelles on peut
les renvoyer. H ne doit pas y avoir plus do
huit ou neuf Dimesscs dans une même
maison, non comprises les servantes, et il
doit y avoir toujours deux maisuns voisines
l'une de l'autre, afin (|ue I ou puisse plus
commoilément avoir des vieilles pour accom-
pagner les jeunes lorsqu'elles sorleiil. Ions
le-, ans ces deux musons, ou quatre au
plus, élisent ensciiilil • une supérieure, âgée
au mollis (le trente ans, el qui do t en atoir
pas>é ciii'i da.is la congréga'ion. Fllc> élisent
aussi di u\ iijulanles ou majeures pour cli.i-
i|iie iiiai'-on, ({ui doivent avoir demeuré au
iiioins trois ans dans la congrégalion el i|ii'oil
ai'pellc aussi consullrices. Il leur est dé-
3?
niv
DIV
"8
fendu de laisser ontror les hommes dans leurs
maisons. Leurs obliiï'tions principales sonl
d'enseigner le catéchisme aux personnes de
leur sexe, d'assister aux sermons et aux'
dévolions particulières des églises, de fré-
quenter souvent les sacrements, de visiter
et d'assister corporellement les pauvres
femmes dans les hôpitaux. Klles ne s'obligent
par .'lucun vœu envers la congrégation, et
elles en peuvent sortir quand bon leur sem-
ble, même pour se marier. Comme elles font
une profession particulière d'humilité, elles
ne se donnent point les unes aux autres le
titre de Signora ou Madame, mais seulement
celui de Madonna ou Dame. Leur habille-
ment tel qu'on le peut voir dans la figure
que nous avons fait graver (1), doit êlre de
laine noire ou brune, à leur volonté. Celui
des s. rvanles est plus court, et elles portent
un voile blanc, au lieu que les Dimesscs,
lorsqu'elles sortent, ont une grande cape ou
manie de taffetas noir. Il ; a des maisons de
cet institut à Vicence, où il a pris nais-
sance; à Venise, à Padoue, à Udine et en
d'autres lieux de l'Etat Vénitien.
Philippe Bonanni, Catuhg. Ord. religios.
par. Il, pag. 1C6, et Mémoires envoyés de
Venise en 1711.
DISCIPLINES (Chevaiiers des ). Voyez
Dragon renversk.
DIVI.NE PROVIDENCE ET DE SAINT-BER-
NAKD (Congrégation de la).
Des religieuses Bernardines Réformées di-s
eongrégnlions de la Divine Providence et
de Saint-Bernard en France et en Savoie,
avec la vie de la vénérable Mère Loiiise-
Dlanche-Tliércse de Ballon, leur fondatrice.
(> n'était pas seulement dans les mo-
nastères d'hommes de l'ordre de Cîteaux
que le relâchementet le dérèglement s'étaient
introduits ; une pareille licence régnait aussi
dans la plupart des monastères de filles du
même ordre. Mais, comme Dieu avait suscité
de saints religieux pour faire revivre le pre-
mier esprit de CIleaux dans plusieurs mo-
nastères et(tablir dans d'autres des obser-
vances moins austères que les premières,
afin que ceux qui vivaient dans le dérègle-
ment, attirés par leur douceur et par leur
facilité, eussent moins de peine à embrasser
une vie uniforme et réglée, il suscita pareil-
lement de saintes filles pour remettre dans
les observances résîuliires celles qui s'en
étaient écartées, qui embrassèrent toutes les
austérités de l'ordre. Les autres, effrayées
de cette grande austérité, se contentèrent
d'embrasser des observances qui, remplies
de sagesse et de modération, les mettaient à
couvertdu dérèglement et du relâchement qui
s'étaient introduits dans plusieurs mona-
stères, et leur prescrivaient un genre de vie
qui les rendait des sujets d'édification à tout
le monde. Les religieuses Bernardines Ré-
formées des congrégations de France et de
Savoie furent du nombre de ces dernières, et
eurent pour iiislilu'rice la vénérable Mère
de Ballon.
Elle était fille de Charles-Emmanuel de
Ballon, gentilhomme de la chambre du duc
de Savoie Charles-Emmanuel l", et qui fut
dans la suite ambassadeur de ce prince en
France et en Espagne. Elle vint au monde
l'an 1591 dans le château de Vanchi, séjour
ordinaire de ses parents, comme le pins
agréable et le plus commode de leur do-
maine, étant situé au milieu de la baronie
de Ballon, à cinq lieues de Genève, et autant
d'Annecy. Elle reçut le nom de Louise an
baptême, celui de Blanche lui fut donné à lu
confirmation, et elle prit elle-même celui «le
Thérèse, qu'elle ajouta aux deux autres
quand elle commença sa réforme.
A l'âge de sept ans ses parents la mirent
d;ins l'abbaye de Sainte-Catherine de l'ordre
de CIteaux.dont l'abbesse était leur parente.
Suivant la pratique de ce monastère, elle y
reçut l'habit à cet âge, et fut admise au no-
viciat. Elle fit un si grand progrès dans la
vertu, et devint en peu de temps si éclairée
dans les choses spirituelles, que sa mère, se
prévalant de la liberté que les novices et les
professes de ce monastère avaient d'en sor-
tir pour aller voir leurs parents, la faisait
venir souvent à Vanchi pour l'entendre par-
ler de sujets de piété, et pour recevoir d'elle
des avis sur ce qui regardait son propre
salut. Comme les visites qu'elle rendait à ses
parents ne venaient ni de légèreté, ni d'oisi-
veté, que ce n'était ni par ennui de la soli-
tude, ni par recherche des divertissements
qu'elle pouvait trouver au dehors qu'elle
venait à Vanchi, mais seulement par conde-
scendance et même par obéissance à la vo-
lonté de son abbesse et de ses parents, il n'y
avait point de temps plus saintement em-
ployé que celui qu'elle passait chez eux,
étant dans le monde comme si elle n'y était
pas. Ayant atteint l'âge de seize ans, et le
temps étant arrivé qu'elle devait s'engager
plus étroitement par la profession religieuse,
ses parents souhaitèrent que ce fût dans
leur château même qu'elle fil ce grand sa-
crifice. Ils n'eurent pas de peine a obtenir
cette consolation des supérieurs de l'ordre :
car, comme en ce trmps-là on ne gardait
point de clôture dans le monastère de Sainle-
Caiheiine, non plus que dans les autres, is
ne se rendaient pas difficiles à permettre
que les novices allassent faire leur profes-
sion chez leurs parents quand ils le deinan-
d.iient. Le ^i^ mars 1607 ayant été destiné pour
le jour de celte cérémonie, dom Nicolas de
Rhides, abbé régulier de Thamiers et vicaire
général de celui de Cîteaux, s'y trouva pour
recevoir les vœux de celte nouvelle épouse
de Jésus-Christ, qui eut la consolation do
les prononcer en présence d'une de srs
sœurs, novice du monastère de Bonlieu, du
môme ordre , qui s'était aussi rendue au
château de son père pour le même sujet,
avec une autre novice du même monastère.
La sœur Louise de Ballon n'eut pas plutôt
(1) Voï.,àla fin du vol., n* 4.
S9
f.iil sa profession, qu'cUn voulut se rrndrc à
son nionaslère, comme au séjour où elle
vcnail 'le s'all;iclier plus élroilomcnt. Ce fui
en vain que ses pnrcnls la so lirilirent de
rcsIiT quelque leuips aver eux : insensible à
leui» lartnes il inexorable à leurs prières,
plie leur déclara que c'éiail inuliletncuC (ju'ils
Ijeb.iieiil de l'alteiidrir p ir les unes el de la
floibir par les autres; qu'elle était résolue
de s'aller eii'^crmer dans son monastère,
pour ) jouir de la con\crsalioM de sou divin
époux et pour satisfaire à son devoir. Quoi-
que la cldlure n'y fût pas observée, comme
nous avons dit, c'était néanmoins la coutume
qui' chaque religieuse l'iibservail la pre-
ii;ière ;:nnee de sa profession a»ec lanl
dexarlitudc, qu'elle ne sorMit pas une seule
fois, non pas même pour ()rcn'lre l'air à la
campa<;ne autour du monasière, comme fai-
saient les autres professes quand elles le
voulaient, outre que la nouvelle professe
était oi lijiée d'assister au clmur si fidèle-
ment à toutes les heures canoniales pendant
cette année, que la maladi.' même ne sufli-
sait pas pour s'en esruser, car si elle toni-
lait malade dans cette même année, il fallait
qu'elle la recommençât après comme si elle
ueùl rien fait, et on ne la tenait quitte de
celle obligation qu'après avoir assisté régu-
lièrement au chœur pendant toute une année
s.ns interruption. Mais la mère de Kallon
ujoula encore quel(|ue chose de plU'* ; car
elle fut pend.ini ce tcrnps-là si recueillie et
si lelirée dans sa chambre, qu'on ne la
\oyait qu'au clupur el au réfectoire.
Ce fui dans une retraite qu'elle fit sous l<i
conduite de >aiMl François de S.. les, son
piuche parent, que l)ieu lui inspira les pre-
miers désirs d'une réiormo, qu'elle eut le
Lonbcur de voir accomplir quelques années
après, lotsque ce saint preiai fut prié par
l'abbé de (liteaux de réformer le monasière
de Saiute-t^ ttierine, qui était de smi dioi èse.
Nous avons déjà dii (|u'on ne gardait aucune
clôture dans ce monastère, ce (|ui fai'<ail (|uc
l'eiitri'e était au ani permise aux séculiers
que la sort c en était libre aux religieuses.
Les visites fréquentes cl le séjour (ju'elles
allaient faire chez leurs par<-nls et leurs
aniis les faisai- ni rentrer dans l'espril du
monde avec tant d'excès, qu'elles re\enaienl
presque toutes sécolièrcs à leur iiionastérc.
L'ameublement de leurs chambres était loul
mondain. t> eiaii une émulation entre elles à
qui aurait Min app.irtemenl plus riclicment
paie. Les étolTes les plos fines et les plus
apparentes elaienl celles qu'elles recher-
cbaienl pour s'habiller, quel(|ues-uiu-s y
ajouiaieni des parures et des ajuslemenls
qui donnaienl lieud' croire qu'elles avaient
liiinte (le laisser sur elles les moindres mar-
ques de leur éiat. Les séculiers avaient mén)e
I' ur demeure dans l'enceinie du monastère ;
c.ir, outre les servantes que cli.ique religieuse
avait, il y aviiil aus%i îles valeis qui y de-
rin uraieiit, tant pour la culture ilcs terres
que pour la garde des troupeaux qoi appar-
ti-naicnt a di;;, religieuse-, parliculiCre>, en
(cirle que cette maisun ress> lublail en qucl-
niCTtONNAir.E DES OHPUES REI.ICIElîX. 40
que façon à une ferme p'uîi'il qu'à un mo-
nastère, ce qui fut un des principaux moiifs
qui engagèrent celles qui commencèrent la
réforme dont nous allons pirler.
Tel était l'état de cette abbaye lorsque s.ii;it
François de Sales fut prié, l'an l(i08, par
r.ibbé de Citeaux, dom Niiolas iiourherai,
d'employer son autorité et ses soins pour la
réformer. Mais ceux qu'il appoila fur ni
inutiles, de manière qu'il ava:l per u toulc
espérance d'y réussir, croyant même qu'il
serait inutile d'y travailler; mais Uieu, qui
est admirable dans ses saints, voulant con-
soler son serviteur el mettre fin à l'accom-
plissement des désirs de la mère de liallon,
lui en fit naître l'occasion quelques années
après; car cinq religieuses de ce inonas ère,
unies ensemble, ayant formé le dessein de
commencer une nouvelle réforme dans un
autre lieu, prévoyant que les aul.es reli-
gieuses ne voudraient jamais consentir à la
clôture, en parlèrent à saint Françoi-. de
Sales, qui, bénissant le l'ère des miséri-
cordes des grâi es qu'il faisait à ces saintes
filles, les fortifia dans leurs résolutions. Il lit
de nouveaux effoits pour obliger les autres
religieuses de ce monastère a recevoir la
clôture et embrasser la réforme; mais,
voyant que c'était inulilement, il couseniit
que ces cinq religieuses commençassent la
réforme hors le monastère. Llles en obtin-
rent les permissions nécessaires de l'abbé de
Citeaux, à la recommandation du prince
1 humas lie Savoie et de l'abbe de Th.imiers.
M. de Leaz, frère de la mère de Dallon, alla
lui-même ù Cilc.iux pour ee sujet; et lîu-
inilli, petite ville de Savoie, fui le lieu ori
elles jetèrent les premiers l'ondeuieuts de leur
réforme l'an 11122.
Ces cinq religieuses furent les Mères IJer-
n.irdede \ ignol. Louise-lilanclie-Thérèse de
li-TlIon, Lmmanuelle de Monlhoux ,. l'érone
de Uocliette, el Gasparde de Ballon, propre
sœur de la .Mère de Ballon, et la troisième de
ses mêmes sœurs qui avait embrassé l'orilri;
de Citeaux. Ce fut le 8 septembre, fête de la
Nativité de Notre-Dame, qu'elles prirent pos-
session de leur chapelle, el le 21 du même
mois qu'elles y prirent l'habit de la réforme.
à la réserve de la .Mère Gasparde de Ballon,
qui n'était pas encore sortie de l'abbaye de
Sain e-Calherine par les oppositions des reli-
gieuses el de ses parents.
Llles commencèrent dès lors à dire l'office
au chuui , mais sans le chanter , à cause de
leur petit nombre. Klles gardaient un clroil
sileuie, à Icxc 'plion de deux heures p.ir
jour, l'une après le dner, l'autre après lo
souper. Llles disaient tout haut leurs coul-
pes au réfectoire, balayaient la maison, la-
vaient la vaisselle, faisaient la cuisine, ser-
vaient tour à tour au relecl.dre, el le plaisir
qu'elles prenaient d.ins ces bas exerciees
était si granit, qu'il y av.iit une sainte émula-
tion entre elles pour être la première à les
exercer et la dernière a les quitter.
Llle* lurent visitées peu de temps après p.ir
saint l'r, niçois de Sales, iiui leur avait permis
de conserver le saint tacrcmcut daus leur
i\
DIV
DIV
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cliapelle. 11 vit leur nouvelle maison el la
trouva suffisante pour une communauté :
mais le pressentiment qu'il avait de ce que
leur p.iuvrelé leur ferait souffrir le porta par
un esprit de charité à les encourager et à h's
exhorter à la patience, et à se tenir en garde
con(re l'ennemi de leur salut, leur représen-
tant souvent que Dieu, qui par sa provi-
dence a soin des plus petits animaux . n'a-
bandonne jamais ses serviteurs qui ont con-
fiance en lui, leur apportant pour exempi;»
dom Jean de la Barrière, fondateur des Feuil-
lants , qui pendant quelques années ne se
nourrit que de Heurs de grnét et d'hrr'ies
sauvages, et ne ce servait point la nuit d'au-
tre lumière que de celle de la lampe (|ui
brûlait devant le saint sacrement. Jusque-I i
elles avaient obéi à la Mère de ^ ijjiinj ,
conmie l.i plus ancienne; mais celle Ai ère
ayant proposé au saint prélat 1 éleclion d'une
supérieure, tous les suffrages se trouvèrent
p^)ur la Mère Louise- Blanche-Thérèse d;;
Kallon, qui, considérant avec ses religieuses
les ofa igalions singulières qu'elles avaient à
la divine providence, proposa à saint Fra ;-
çois di' Sales, qui élait de retour à Annecy,
d'agréer qu'elles prissent le nom de Filles de
la Divine Providence. La réponse qu'il fit à
la lettre qu'elle lui écrivit au nom de i-a pe-
tite CDinmunauié fut qu'elles devaient encore
altendre un an, pour voir si elles se ren-
draient dignes d'un nom si beau el si glo-
rieux. Elles obirent à ses ordres, et l'an
étant expiré, elles prirent ce nom, (lui leur
fut confirmé par M. Jean-François de Sales,
frère el succes-eur de saint François de Sa-
les, d lus l'approbation qu'il fil de huis con-
stilu'iuns; mais le peuple les a toujours
appelées les religieuses llernardiiies llé-
Ibrinées.
La Mère Gasparde de lîalion , après avoir
surmon é touies les difticultés iiui s op lo-
saienl à sa smlis de l'.ibhajo de Sainte-Ca-
therine, tant (ie li part des re igieuses que
de ^es parents , arriva enfla au mois de no-
vcni'jre à l'«umilli. Ainsi les cin(i religieuses
qui avaieiit projeté la réforme se trouvèrent
pour lors réunies. Quoique leur pauvreté fût
grande, elle leur taisait néanmoins si peu
de peine, et el-les cherchaient si peu les
lu >3ens de s'en délivrer , qu'elles continuè-
rent d'un commun accord de ne s'en plaiu-
drejamais à personne. Mais la divine provi-
dence, dont elles avaient pris le no;», ne les
abandonna pas : elles se tiouvèrent môme
en état d(; faire des charités, el elles donnè-
rent retraite à quatre religieuses de l'abbaje
des Hayes proche Grenoble, qui dans le des-
sein d'une même réforme avaient qiiitiéceUe
abbaye, où l'on ne gardait aucune toinie de
règle, où la clôture n'élait point en usage, et
où les religieuses, qui vivaient à la façon des
séculières, en avaient presque pris l'hab.lle-
iiient.
Ces quatre religieuses furent la Mère de
Paquier, coadjulrice de l'abbaye des Hayes :
les Mères de Ponçonas et de IJuissorond, et
la sœur de Monlenard, encore no\ice. Elles
sollicitaient depuis un au un établissement
LlLTiON.N.ill'.fi DKS (Jtiai.ES UELIGIEUX.
dans Grenoble : elles y avaient même loué
une maison, et, à la sollicitation du vicomte
de Pa(iuier, père de la Mère de Paquier, et de
leurs amis, elles avaient obtenu verbalement
le consentement de l'évéque de Grenoble.
Mais plusieurs difficultés qui se rencontrè-
rent dans cet élablissemeui en ayant empê-
ché l'exécution, el ayant appris pendant te
temps-là que cinq religieuses de l'abbaye de
Sainte-Catherine en étaient sorties pour al-
ler à Kumilli jeter les fondements d'une nou-
velle réfornic, elles résolurent de se joindre
à elles. Le vicomle de Paquier alla lui-même
Irouver saint François de Sales pour lui corn-
muniquer le dessein des religieuses de l'ab-
b lye des Hayes, cl ce prélat porta celles do
Kumilli à les recevoir.
Ces (jiiatre religieuses de l'abbaye des
Hayes arrivèrent donc à lUintilii le premier
janvier 1(523. Elles reconnurent pour supé-
rici^re la Mère Louise de Ballon, (lui, peu da
jours après , ayant fait la distribution des
emplois de sou monasli're, donna la charge
de maîtresse des novices à la Mère Ponçonas.
Quelques espciis malintentionnés leur ayant
persuadé que l'abbé de Cileaux dans le cha-
pitre général de cet ordre avait résolu de
supprimer leur réforme, elles en furent fort
alarmées. îilles redoublèrLMit leurs vœux et
leurs prières, el reconnurent bien;ôt après
que ce n'éiait qu'une fausse alarme iju'osi
leur avait donnée, puisqu'elles reçurent uno
lettre de cet abbé dans iaquelle, bien loin de
désappiouver leur entreprise , il les o.lior-
lait au con'raire fortement à la continuer;
Ci (]ui les dôlerntiua à tenir le premier cha-
pitre de leur congrégation pour la réception
des novices. 11 y en avait déjà cinq qui se
présentaient; mais ell.s ne ponvaieul leur
donner l'iiabit sans la pcrmissiiiU de l'abbà
de Thamiers, qui s'y opposa, sur ce que la
mai;,on où elles demeuraient ne leur appar-
tenait pas, el qu'elles n'avaient aucun re-
venu lixe. .Mais l'abbé de Cheseri , on le do
la Mère de Siallon, ayant eu recours à l'au-
torité du prince Thomas de Savoie, l'aliltiî
de Thamiers ne put résster aux ordies de co
prince, el couscnlil que l'on donnât l'habi:
aux novices. Cependant ces religieuses
ayant aetiCle i.ne maison à Humilli, elLs y
allèrent demeurer le 2i mai 102's.
La même année tous les obstacles qui s'é-
taient trouvés jusqu'alors à l'établissement
de ces religieu es à Grenoble ayant été levés,
la Mère de Ballon y alla accoui(iagnée des
rel gieuses de Dauphiné, qui s'étaient mises
sous sa conduite et l'avaient reconnue pour
supérieure à Kumilli. Elles arrivèrenl dans
C(^tle ville le 22 noveujbre lG2'i'. La Mère du
Ballon fut encore recoiiiioe supérieure de ce
nouveau moiiasière, où l'on dressa les con-
stitutions de celte reforme, qui furent cou-
formes aux avis qu'eu avaii donnés saint
François de Sales, qui étaient que, sans eui-
brasser les grandes au-teriiés de l'ordre de
Cileaux, ce- (ilies devaient s attacher uni-
quement à l'essentiel de la règle et des vu'ux,
s'appliquaut de loules leurs firces à li inoi-
liiicaliou de l'esprit, au leeneiliement inlè-
n. 2
n DICTIO.N.NMUK I)i.S
rimir et ik l'union avoi Dieu. Cfs conslilu-
lioiis élnient néanmoins pou confDrmcs aux
u$a;;cs comniunK do Clleaux. C'ot.iil propre-
iMcnl un Iraiie ou conduile spiriluclle con-
venable à louics séries de personnes, et,
pour les usa:cs parliculiers, ils élnient enliè-
remont conformes à ceux des religieuses de
1.1 \ isilalir>n inslituées par le nir-rne saint, à
la réserve de la couleur de l'habit, ds con-
sliiutions ptirlaiinl qu'elles se serviraient du
bréviaire romain, qu'elles diraient matines
le soir, afin d'avoir la nialinée plus libre
pour employer une heure entière a l'orai-
son niciilale; qu'elles se roueberaicnt à dix
heures, se lèveraient ù c nq. Elles devaient
;iller sept fois le jour au chœur pour y dire
l'oflice divin. Ellcsdevaienl l'aire l'aprùs-dinée
une demi-heure de lerturc spiriluelle, une
autre demi-heure d'oraison inent.ile, et l'cxa-
incn de conscience deux fois le jour. L'u-
sajîe de la viande leur fut permis trois fois
la semaine ; elles portaient du linge et se
sert aient de matelas et de tours de lit. Quant
à l'habillement, elles se conforment pour la
couleur à l'ordre de Citeaux , et pour la
forme à celui des religieuses de la ^'isitation,
excep 6 le bandeau, (|ui est blanc (1). Pour
ce qui regarde les autres us.iges , ils sont
aussi conlormes à ceux des religieuses de la
\°isitalion. La sous -prieure était nommée
sœur assistante , la maîtresse des novices
sœur directrice. Les religieuses ne s'appel-
lent que sœurs, et elle» ne chantent point de
mcssi-s hautes. Eli. s travaillèrent ensuite
à se soustraire de la juridiction des Pères de
l'ordre, qui s'y opposé. ent, mais en vain,
car ces religieuses ohlinrent un bref du pape
Urbain \ III, 1 an 1028, qui les exemptait de
la juridiction des Pères de t]iteau\ , et les
mettait sous celle Jcs ordinaires des lieux où
elles s'établiraient.
La Mère de Hallon ayant séjourné à Gre-
noble jusqu'au mois de décembre H'flo, re-
tourn.i en son premier inonastèreiic Kumilli,
d'où ((uclque teni|is après elle fut obligée de
sortir pour aller faire un nouvel élaldisse-
Mient a Matirienne. l'illc en fil encore un
quatrième a l-aKoche, petite ville de Savoie,
el un cini|uième à Seyssel. Ivllc repassa en
(•ranre en 1G3I, pour y f.iire deux ;iutres
-étaldisseuu'nts, l'un à \ lenne en Dauphliie ,
et l'autre à Lyon, qui lurent suivis peu de
temps après de ceux de Toulon et de .Marseille.
Ce fut la même année lli31 que les rons i-
tuliuns furent imprimées à Pans pour la
premièic fois, a\ec toutes les ap| robntions
uéecssaires, à l'exception de celle de Uome,
que cet religieuses u'obiinrciit que l'an IG.'i^.
La .Mère de Ponronas étant venue a Paris
c-n Itj i'* pour y l.iire un nouvel ctablissemenl,
tit impiimer pour la seconde (ois ces consli-
lulious, ce ipii Inl l.i source de bcau( oup de
troubles el de ilivisions dans celle eongrega-
lioM ; car, soit i|u'il y eut déjà eu i|uel(|ue
bruit entre la .Mère de llallon cl la Mère de
Ponronas, soil que cette dernière fil quelque
l'baiigeioent dans ces cun>liiiiiions, aliii de
ORDUES UELIGIlilLX. (1
s ' donner le lilre d'iiistilutricc d'une nou-
velle rélornie, il est certain qu'à peine relie
seconde impression fut achevée, que la di-
vision cornmi>nça à éclater. En elTei.la Mèrct
de Hallon, voulant souienir sa qualité de
ref irni.itriLe, fjcbée du changeineiit cjuc la
Mère de Ponçonas av.iil fait dan.; ces consti-
tutions, en fil imprimer d'autres à Aix qui
étaient confornres à celles de la première
impression, à la réserve de quelques petits
rhang<'inents qu'elle crut avoir droit de faire,
(•omme inslitulricc : ee qui fut si --ensible à
la .Mère Poiiç mas, tant par l'alTrom qu'elle
eut recevoir en cela (juc par le chagrin
qu'elle eut de se voir cotitrarier daos se*
desseins, qti'el'c engagea les religieuses du
nionaslère de Paris à se révolter confie leur
Mère et fondatrice, et à la pcrsèculer. Elle
réussit selon sou désir : car elles commencè-
rent par solliciter la suppression des consti-
tutions de la Mère de Hallon, qu'elles accusè-
rent di' vouloir usur()cr l'autoriié de géné-
rale et d'en prendre le nom. ( C'est néan-
moins à quoi cette l'on lalriee ne songea ja-
m.iis, comme elle 'e proiesle dans s s écrits,
qui lUl été imprimés à Lyon en l'ICQ. ) Non
contentes de cela, sachant ((u'ellc et lit dans
son monastère de Toulon occupte à y établir
sa réforme , elles envoyèrent un homme
cx[)rès à l'évèquc de Marseille pour lui don-
ner avis de prendre bien garde à la Mère de
Halloii, qui élait allée fonder un couvent
dans sou diocèse; que c'était un esfjrit léger,
inquie', ambitieux, (jui voulait toujours ré-
gner et dominer; qu'elle n'était allée en Pro-
venci' (jue pour y fiire la générale de sa
congrégation, et ((u'il y allait île sou honneur
de ne pas soulTrir que celtiî élran.;ère s'é a-
blit dans son di icèse, si elle ne voulait pas
renoncer à ses con-ililution-. .M.is la .'\lere
de ISallon, soit qu'elle reçût sur cela quelque
avis de l'évéque, soit que d'autres personnes
lui en p.nrlassenl, ne voulut jani;iis consoniir
à cech in.;ement,qui ne pouvait pas manquer
d'in'ruduire le schisme dans ses inon.istèies.
Celle l'remifre démarche n'ayant pas eu le
suciés 'iu'ou en ailendail, on porta la com-
munauté di' Kumilli, dont elle était eue ire
supérieure, à la déposer, el à en élire une
autre en sa place, alin que n'ayant plus
d'autorité, elle ne pût s'opposer au change-
meut. Cette entreprise leur ayant réussi ,
elle supporta celle niortiricalion avec sou-
mission à la volonté de Dieu. .Mais les reli-
gieuses du nouveau mona-tèrc de iM.irseille
ie|),irèrent l'outrage (|u'on lui f.iisait en la
«iioisissaut pour leur supérieure. Son élec-
t.on ayant éé sue dans la ville, ehacun s'eui-
press.i de lui en témoigner su joie ; persouno
ne le fil avec plus de mar(|ues de satisfaction
et d'estime que le. FillesCongrégèes de Sam-
tc-l'rsuie, qui formaient une comuiiiniutc
fori iiooibreiise ; car, non contentes de lui
en f.iire les cunijd.meuts onl inaires dans d.^
pareilles reiirontres, elles lui en doniièreiil
des maripies plu-, sensibles eu se souinoltaot
à sa cou luite et ca euibiassaul sa réformi- ,
llj Ky , a la (lu du vul., li'
-Hf
qui p.ir ce moyen eul un soconJ :iinn.i Urc
très-roiisi'lérahle dans celle même vile.
Mais, pendant que la Mère de IJallon élait
dans ceiic iioui elle maison pour recevoir
ces Ursulines à sa congrégalion et les former
à la vie rel gieuse, elle y eut un sujet d'exer-
cer sa (lalieiice. Celles qui s'étaiint déi l.irécs
les adversaires de ses coustilulioiis , étant
averties (ju'c lie élait sortie de son premier
monastère, employé eut le crédit de quel-
(jues prélats auprès des supérieurs de ce mo-
nastère pour y l'aire recevoir les coustilu-
lions de la Mèie Puueonas, qui avaient été
iiiipiimées à Paris, cl obliger les religieuses
de ce monaslèie de brûler celles de la Mère
de Ballon. L'autoriié de ces supérieurs rem-
porta sur la justice e! li reconnaissance:
ainsi ecs religieuses timides cl ingrat'S, se
laiss ml persuader, brûlèrent les conslilu-
lions de leur Mère, qui, l'ayant su, supporta
cet affront avec tant de vertu et de modéra-
lion, qu'elle n'en lit pas paraître le moindre
resseniimenl; au coniraire, après avoir éta-
bli l'observance régulière dans le second ujo-
nasière, elle retourna dans le pre.')iier pour
y acbever le Icmps de sa supériorité. Les
religieuses quillèrenl quelque temps après
celle maison poar aller demeiirer il. .us une
autre plus grande qu'elles aciietèrent, et la
-Mère de Ballon sortit de Marseille l'an Kid.
Elle eul encore le déplaisir eu sortant de
voir que ces religieuses (ju'eUe quiitait, et
pour ([ui elle avait pris tant de peine, la
laissèieul partir comme une personne indif-
Icren e et inconnue, sans aucun lémoignage
de reconnaissance et sans lui rien présenter
pour sou voyage. Le supérieur même lui dit
que s'.l voulait suivre l'avis de quelques-
unes, il visiicrail ses bardes, parce qu'on
l'accusait d'emporter trois luilîc cens de la
maison. Eile alla de iMarseiUe à Cavailion
pour y voir un nouveau monastère de sa ré-
forme, qui venait d'y èlie fonde par les reli-
gieuses du monastère de seyssel. Elle y fut
il'aliord supérieure; mais elle se démit quel-
que Icmps après de cet cniiloi et retourni
en S.ivoie. Six ans après, dans uu voyage
qu'elle lit eu Pi'ovence, en passant par i-la-
vailluu, elle fui de nouveau élue pouf supé-
rieure. Le temps de sa supériorité élanl
expiré, elle fui eneo e rappelée en Savoie
par l'evcque lie Genève. Elle y lit encore plu-
sieurs fondations, el étant au monastère de
Seyssel, elle y mourut le li décembre IGGS,
dans sa soi\aule-dis.-scptièiiie année.
Quant à la iMère de l'onçoiias, après avoir
établi ce nioiiastère de Paris dont nous avons
parié ci-dessus, elle retourna à GrenoUle,
où elle et lit supérieure, el d'où elle sortit
encore une autre fois sur la fin de l'uimee
1(J37 p|our aller à Aix, où elle était appelée
pour faire un autre établissement ; elle de-
meura toujours dans ce monastère jusqu'à
sa morl, (jui arriva le 7 lévrier 1657. Les
mémoires qui m'ont élé commuiiiqués por-
tent que le» supérieures des autres maisons
de Bernardines Réformées qui sont en Pro-
vence lui demandèrent avec Inslance sus rè-
gleaienls, l'asturanl qu'elles \oiilaieiit vivre
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■iC
avec elle dans une union parfaite el unecii>
tière confor.iiité de ses saintes pratiques ;
que les évèques de Marseille et de Grasse
lui lémoignèrent d'une manière parliculièro
la vénération dont ils étaient prévenus pour
elle, cl le désir qu'ils avaient que les monas-
tères de leurs diocèses eussent communica-
tion avec elle et vécussent sous les mêmes
observances. Mais s'il y en eul quelques-uns
en Provence qui suivirent, ses règlements, il
y en eut d'iulres aussi qui ne quillèrenl
point ceu\ de la Mère de Ballon, qu'ils re-
connurent toujours pour fondatrice de l.i
réforme. Comme en cflel celle qualité lui
ap.iarlienl plutôt qu'à la Mère de Ponçonas,
cl ce n'est même qu'à la suliieitalion des re-
ligieuses du monastère de Marseille au de-
là du port que la vie de cette réformatrice
a élè écrite et donnée au public en 16'Jo.
Ces mêmes mémoires ajoutent que le moiias-
lère de Lyon qu'elle avait fondé tians le
temps du dé oéle qu'elle eul avec la Mère do
Poiiç mas au sujet des coisliluli tns , recul
dan, la suile du temps celle» do celle der-
nière, et oblinlun bref de Bome qui rexem[i-
lait de la dépendance du monastère de llu-
luilli et l'unissait à celui de Grenoble : ainsi
la division qui est survenue entre ces reli-
gieuses Bernardines Héformées en a formé
deux congrégations dilTérenle-, dont l'une
porle le nom de li Divine Providence, (jui
est celle de Savoie, qui compn nd quelques
maisons en France qui en dépendent, et l'au-
tre est som le lilrc de Saint-Beriiaril, qui no
sorl point de France.
Mémoires communiqués p'ir les reliijicusa
Bernardines du Sang -Précieux. Jean Grossi,
Vie de la àlère de Ballon ; vl celle d" la Mère
de Ponçonas par un aaire auteur.
DOCÏBlNxMRES. Voyez Doctriniî Chré-
tienne.
Nota. Quoique Hélyol n'ait point em-
ployé les mots Doct:iiuires, I isilandines.
Trappistes, elc.,elqu"on ne soit pas tenu par
coujéquenl à les en plojer, je crois qu'il
vaut mieiix, vu leur po|ii!lari;é, les indiquer
à leur rang, sauf a faire le renvoi né-
cessaiic. B-i)-E.
DIX VERTUS. Voijez Anxongi4Diîs.
DOCTIUNE CHRÉTIENNE en Fkanci?
( PRÈrilES DE LA ).
Des prêtres de la Doctrine Chrétienne en
France, avec la vie du vénérable Père César
de Bus, leur fondateur.
La congrégation des Prèires de la Doctri-
ne Chrétienne en France a d'aliord élé éta-
blie ou qualité do congrégation sécul èic,
elle devint dans la bui e léLçulière par l'u-
n.ou qu'elle Gt avec celle des Somasjues,
donl nous parlerons à cet article ; mais, après
avoir demeuré dans cet état légulier pendant
près de quarante ans, elle est retournée
dans son premier état par autorité du saint-
siège, comme nous le dirons dans la suile.
Ainsi l'union qu'elle fil avec les Souiasques
cl l'état régulier où elle est demeuré.! pen-
dant un temps considérable nous obligent do
BUTIONNAIUE DES OmmKS UELIGIEUX. *;
n nutlr.- nu n...nl.r. .!ts congrépalions n"* *'.';"' *'\ " "'^ '^''^''•' C'IraSnor ais.nicnl à 1-.
.„., suivi la nglo .!c N,int-.VMR..Mn,. '''ap^Vs Vrois ans de séjour m cC'e ville, il
I.c l.ionlicurou\ Osar il' Lus. lonuiiour ,.^,^,^^^3 à Cavaillon, où ;i peine ful-il ai-
de clic consi^-^'alion • na inil a <>'»Y'' . "r"" rive, que son père monriil, il p.u .le L mps
^iHc episcopale.l.i rouilc \ enai-biu. le ,iw- ,,^^ ^^^^ ,|^. ^^^.^ f^^^^^^, ,|yj ^ .,;, ci,a„oi!u.
irier d6 .'an lo»V. !?oii père, Jcnn-l.apiiMe ^j^ ^^^^^ Comme cclu.-ci laissa par sa mort
.•eBus, ctsn nurc Anm- de la Marc, el.m-iu ,, béncfic< s à simple loiisure, Ccs;ir
leiommandables par leur piele cl par leur j^ ,.„^ ^'en chargea selon la cou unie ou
..oblesse; surloul J.a.i ha.lisle qui (e.>.ceM- ^^,^^ ^^^^^^ j,.^|-^^^ j^, ^^ len-ps-là, sans
,lail «lune fin.ille i lastre de L6nu; "a"s '^ '^^.^^^ pu dessein de s'engaiior dans l'eial
Milan..is, laquelle c.mple au noml.re de ses pp^,ésias,i,,„e, pcnsanl an con r.ire à se.
.ncfir. s sainte Iran.oise """jarnc cuie ^^_.^^.^.^. ^^^ ^,j^^^ ^^.^ „^^^ ,^ ^j^,, ,,„
donl nons aurons sujel de p.irlcr dans la ^^^^ ^ ^^^^.^ ^^ ^,^, ^^^^ ^^^ ^ ^^^^ ,p j^,, relier
tuile romme fou.! .tr.ce des OblUcs qui poi- i„,e,,sii,,e„,pn, des emplois séculiers el faire
itnl son non;. Dieu qui deslinaii César dt ,.^^5^^,, ^„ ,„i pi„,.ii„aiion .,n'il avait eue
Rus à de pran.!es il'<>>fs !« prev^l '^.«•* ^' dans son jeune â-c pour les fonclioas el les
plus un 'r.- J.-u.esse. Des lors il s appliqua,! ^i,,.,^,^^^.^ eeclés.asliq .es. Il snsc.'a aussi
à l'oraison. uK-rlifiail sa chair pai .k^ an- ^^^^ personnes peu consideral.les aux yeux
^tinen<es , ].-uuail des caremc-s f/' le'» t ^^^ i,J,„.,,es, mais Irès-considerées de sa di-
(ous l.'s vendredi, de I année, e 61, , r.iu ^._^^ „,njcsl.>, pour travailler à sa convcr-
lors.p. .1 irou<;-.it occasion . e faire 1" '"' sj,,,, . y^,,^ fm\,„e ,,„„„« veuve de la cam-
aux p,u. res, se irnanl <e son djr» '' ^ ^t l'autre un simple clerc .^c Cavail-
p.,ur le l'".^'l"'''V^*'^"'' 7)''^" •,.,'' ,,•' ion qui servait de sacristain d.us une église
^urloul SI jaloux de la PWrtc, q.i il fuj.. l ^^ ^^^^^ ^.„^ .^.^^^^ ,ç, ^^^^^ j.j^,^, j^p,,^^,
v.>mmo un gr-ind mal U-iit <e qui elail idpd- .^ ramener celle l.r, bis égarée au bercail,
lie dj duanicr que. que allé. nie-. j-^^ cessaient dolTrir à Di.-u leurs vœux el
Après ses éludes, il s'entretint encore |,urs prièits p.)ur .juil amollîi la dureté du
quelque temps dans ces saintes dispositions, cœur de Cos.ir .le l!us.
Son (i. (upal.on la plus agré-iMc était de Insensible à l.iules leurs rci.onlranc. s, il
parer Ifs aultls, el, élaul cniré dans la coin- en fai-ail peu de cas el s'en moquait ; mais,
p;.pnie des l'énilenU-Noirs, il prit le soin de un jour .p/iis lui préseiili'i eut la \ ii' des
lailiapel'.c où les confrères s'assemblaient, Saints, il ouvrit ce livie par complaisance,
iili.i lie pouvoir renibcllir el l'orner. Son cl, en ajani lu <)ui'l<iiic < liose, il lui si tou-
lUMiiur douce, cimplaisanie cl agréable, le d,^ en lisant l.s actions dessiin'.s, où il
fais.iil aiioer et r.'Specler de lout le momie ; uou\a la condanin.ili m de ses débauilics,
on liait ravi de lavoir dans la conve.sa- qu'il résolut de changer de vie el de quiUor
li.iii, où sa modcslie relenail l>s plus licen- cnlièremeul le désordic. Il eut encue lieau-
li-.'ux, q.:i en sa présence n'osaient i^en < oup à comballre .•.vaut .(ue de rtinporlcr
f.iire ni (lire qui tût lioi s de propos. A râ.:c la\icloire sur ses passions ; ma s enfin il
lie div-hiiii an-, s'élaut engagé dans le paiti i,io;opli.i ; il fi! une confession générale el
des armes à l'exemple de deux de ses frè- s'exerça dans l.s prali.jues d'hu.i.ilité, de
irs, qui avai.nld.-s emplois considérables, moilfi alion, cl de m sericorde e.ners les
l'uti dans l'armée du pai.e, l'auire d.iis cille ailliués, v is:tanl souvent le- inalailes de l'Iiô-
iiu roi, il servit comme v.)lontaire dans les pHaJ^ |, s assislant spiriluellcmcnt el corpo-
irouj es .lu comte de Tende, lieutenant |ioiir nllemenl, el faisant de grandes aumônes
le roi en Provence, qui, par ordre de Sa Ma- ^px pauvres.
joslé, levait q. niques compagnies deciva- Comme ses voyages et ses di\ ei liseuienls
leric el d'infanlerie pour s'o; poser aux lié- hii avaient fait oublier ce qu'il a.ait appris
réii.iui s ; el ce fut par une espèce de mira- j^ | ,;;„ dans ses classes, sachant que la
«le ipie César de Itus, nonobstant la licence science lui était nécessaire pour rendre à
de la guerre, sut oiiserver la inéme inno- dic^ j^s services .(u'i; atlen.lail de so.i zèle,
eemc el la même mo'Ieslic qu'il avait g. ir- ^ ^^, ,emit a >x dudes, .1 réussit si bien,
décs dan^ la maison de ses parents. qu'en peu de leiups il fut capable de l.i pbi-
1,'edil de pacifi.ation lui ayant fait n dire lo>opi ie. Il y étudia quel |ues mois et y fit
bas li's armes, il r.'iourna chez lui, où pour di' gr.in.ls progris, a[irès quoi il se donna
éviter l'oisivelé il s'appli.lua à la P'iés e et à entieremei-.l au serv.ce du pr.cliain. S 11
la piinliirc; mais, ne trouvant pas es oc- évé.iue, persuadé .le sa verlu et .le sa capa-
i:upalion> dignes de son c.uir.ige, il en all.i cité, 1.- | ououl d'un c.inonical .le sa rallie-
rlierclnr de plus nibles .1 IS.ii ile.iux. où son drale. D'abord il gagna --ix pers .unes du
frère Alexandre «le lins él.iil arrivé pour chapitre, avec lesquelles il .s'.isseiiibait tous
coii'inander un vai-seaii de l'année uav.ile les dimaii.hes dms la . h.ip.'lle de l'évéquc
qui se disposait pour le siège de La Uo- pour Naquer .1 plusieurs exercices spiril.iels.
.helle. I.a nialailie .jui lui survint l'einpé- Après avoir reçu la préirise el dit sa pre-
<:lia d'exécuter son d.'ssein, el, après ((ue sa inièie in.-sse, il s'appliqua à la prédication,
s.inté fut it'lalilje, il alla à Paris. Mais ce aux confessions el à tous les autr.-s exerci-
voya;;c lui fui f.iial : car la lrè<)uent.iliiiii de ces qui peuvent servir à sauver les âmes.
quciiiuei libertins lui fil p^rdr.- le trésor On ne peut assez admirer l'assi liiil.', la pa-
qii il a»ai' conservé jusque là avec latil de lienc ', la ferveur c: 1 1 génerosilé avec P.'»-
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quelles il s'acquillait ilc tous ces miiiislères.
Uieii n'étail capable de le rebuter; Il passait
quelquefois les jours entiers et une partie
lie la nuit dans les liopilaux à consoler les
malades, snns que ni la pourriture de leurs
plaies ni la puanteur et l'infection de leurs
corps reiiipôthasscnt de s'.i;iprocher d'eus
et de recevoir leurs derniers soujjirs.
Sa charité, toujours .ictivo pour la gloire
de Dieu, le porta à travailler à la réfornic
des religieuses Bénédidines de Cavaillon,
qui vivaient sans clôture, sans régularité
et avec beaucoup de licence. Il en fil les
preniiérf s propositions à la .Mère Catlierine
de la Croix, que l'on reconnaît pour la ré-
formatrice de ce monastère. lille avait des-
sein d'entrer chez les religieuses de Saintc-
("Jaire d'Avignon, où l'observance régulière
était mieux gardée; mais il lui per uada de
prendre l'habit chez les Bénédictines de Ca-
vaillon, et d'y faire profession selon la ri-
gueur de la règle de Saint-Benoît. Elle eut
en peu de temps des compagnes qui suivirent
son exemple : les anciennes religieuses qui
s'étaient le plus o|)posées à la clôture, tou-
chées de l'Esprit divin, embrassèrent aussi
la réforme, et (elle maison s'est toujours
maintenue depuis ce temps-là dans une
grande régularité.
La lecture qu'il fit du Catéchisme du Con-
cile de Tr. nie lui fit concevoir le dessein d'é-
tablir une congrégation de prélres et de
clerrs dont la funclion fût d'enseigner )a
doctrine thrélicnne. Ce Caléchisme du Con-
cile de Tri'nte étant divisé en quatre par-
ties, qui sont le Symbole, l'Oraison domi-
nicale, le Décalogue et les SacreuiL-nts, le
l'ère de Bus réduisit ces (juatre parties à
trois diiïérentes instruclion-j, qu'il appelait,
pelile, r)ioyenue et grande dxtrine. Cinij
ou sis jeunes i cclésiasliques de famille se
joignirent à lui, et, après les a^oir instruits
de la manière de faire la pelile doctrine, il
les envoyait dans les carrefours de la ville
et à la campagne, pour catéchiser tous ceux
qu'ils rencontreraient, l'our lui il enseignait
dans les églises, et en particulier dans lus
maisons, la moyenne doetrinc, et ensuite la
grande, afin d'attirer les savants qui se glo-
rifient dans la science, et ignorent celle du
salut. Celle façon d'enseigner la doctrine
chrétienne étant nouvelle, souffrit au com-
mencement de la conlraJiclion, et ou s'en
moqua d'abord; mais elle fui à la fin ap-
prouvée de tout le monde..
i>ieu envoya, peu de temps après, au Père
de Bus des compagnons, afin qu'ils s'employas-
sent â ce saint exercice. Michel PincUi, cha-
noine de l'église de Saint- Agricole d'A-
vignon; Jean-Baptiste Komillon, chanoine
de l'église collégiale de l'isle; Jacq;ies Iho-
mas et tJabriel Michel, furent les premiers
cjui vinrent se joindre au nouveau corps
que le Père de Bus formait. 11 les assom-
bli tous à risle dans le comté Veuaissin,
l'an 159-2, le 29 septembre, fête de l'ar-
change saint Michel. Le sujet de leur as-
semblée fut pour délibérer dos moyens (ju'il
fallait prendre pour établir l'eicrcicc de la
Doctrine Chrélienne dans le co nié Venais-
sin. Ils conclurent (]u'il fallait joier Ict
premiers fondements de cet institut dans
Avignon, comme dans la ville capitale, et
demander au pape permission d'établir cet
exircice de la Doctrine Chrétienne d;ms
l'église de Sainte-Praxèile, oii il n'y avait
]ioint encorcdc religieuses. Ils cnvayèrent
à Uome pour ccl elTet , et le paie Clé-
ment V'IH, qui gouvernait pour lors i'Eg'ise,
répondit à leur supplique que le nouvel ar-
chevêque d'Ay gnon qui venait d'être nommé
par Si Saintclé et qui était Marie Taurii-
fius, satisferait à leur demande lorsqu'il
serait arrivé à Avignon.
Ce prêtai y étant venu l'an liiOS, envoya
quérir le P. de Bus, et, apréi avoir con-
féré avec lui de l'éLiblissement de la Doctrine
Chrélienne, il lui donna permision de l'en-
seigner dans l'église de Sainte-Praxède. C'est
ainsi que fut érigée celle congrégation, qui
fut confirmée quatre ans après , l'an lo'JT,
par le même pape Clément Vlil. Le P. de
Bus entra le 21 si-plembre de la même an-
née 1593 dans Sainte-Praxèile, et commença
dès le lendemiin ses inslruclions il y ensei-
gna premièrement la petite doctrine , et le
dimanche su vanl la grande. Celte manière
d'enseigner fut reçue avec apj)laudisscment,
cl l'exemple de l'archevêque d'Avignon atti-
rait beaucoup de personnes à ces instruc-
tions familières. Dans le commencement,
c lie congrégation ne fut composée que de
douze personnes, savoir, de quaire prêtres,
de quaire clercs et de quiitre coadjuleurs ; et
le P. (le Bus fut élu supérieur de celle
nouvelle congrégation. Ils qu lièrent peu de
lemps après la maison de Sainte-Praxèd.!
pour aller à Sainl-Jean-le-Vieux, et les re-
ligieuses de S:iint-D()miiii(|ue, qui y demeu-
raient, laissèrent aux Pères Doctrinaires la
maison de Saint-Jean, qu'ils ont toujours
con^eivée depnis.
Le P. de Bus ayant proposé à ses con-
frères dans la suite de se lier par un vœu
siiMjilo d'obéiss:ince, pour attacher en quel-
que façon ceux qui entreraient dans la con-
grégation, le Père Komillon ne fui pas de cet
avis, prétondant que le lien de la charité
sullisait. Le P. de Bus persistant à vou-
loir que l'on fît ce vœu d'obéissance, le P.
Uomillon, avec quelques autres qu'il avait
atùrés de son côé, quitta le fondateur cl
fit un corps à part qui depuis fut uni à ce-
lui de l'Oratoire de France , perdant le nom
de la Doctrine Chrétienne, qui est demeuré
par un bref do Paul V à ceux qui sont des-
cendus du P. César de Bus, et qui ont fiit
avec lui le vœu d'obéissance; et lui-même
déclara par un ac:e public que tous les biens
do ses maisons devaient appartenir à ceux
qui avaient fait vœu avec lui. Celte sépara-
tion lui fut sensible; néanmoins il la soulïrit
avec beaucoup de résigunlion aux ordres de
la divine providence. 11 fii pour la conduite
de sa congrégation quelques règ!e:r.ents
qu'il gardait evactement, étant le premier à
Ions les exercices. 11 avait beaucoup de dou-
ceur pour les autres et beaucoup de sévc-
Pt
OlCTIONNAini; Dl s OnDISF-ii riLLlCIEUX.
5?
rilé pour lui-même, nioi lifi.ml son corps par
dos ieûnps cl des anslérilùs continuels.
Dieu, voulant encore éprouver sa patien-
ce, permit qu'il fût privé de la vue à l'âge de
quaranlc-ncuf ans. Il souffrit cette afiliclion
a\rc une (ons'nnre .tdmiralile; il refusa mù-
mc tous les remèdes que l'on voolul appli-
quer sur ses yeux , él.int très-contenl de
l'élat où Dieu l'avait riduil. 11 lui en ren-
<!ait continu l'emenl des actions de grâces,
.se réjouissant d'être délivré (à ce qu'il di-
sait) (l<< deux de ses plus grands ennemis,
qui l'avaient si souvent engagé dans le pc-
clié, qui étaient si's deux veux. Ce qui lui
pouvait faire de la peine «fans cet état , c'é-
tait d'être privé de la consoialinn de ])ouvoir
célébrer la sainte messe, ce qu'il lâchait de
récompenser en communiant tous les jours.
Cetie affliction ne l'cmiiécliail pas de va -
quer continuellement aux exercices de la
DoctrineChrélicnne. 11 n'y eut (jue les grands
maux qui le rendirent comme un homme de
douleur, à l'iuiilation de son divin Maître, et
qui arrivèrent dix-huit mois a^ant si mort,
qui furent capables d'interrompre ses exer-
cices, lùilin, après avoir élé éprouvé parles
suulfrances pendant plusieurs années , il
mourut le 15 avril de l'an 1607, étant âgé de
63 ans. On l'enterra dans léi^lise de Saint-
lean-le-A'ieux en présence d'une infinité de
monde, qui l'honorait comme un saint. Les
miracles qui se tirent à son tombeau obligè-
rent les D.iclrinaiies , quatorze mois après
sa mon, de le lever de terre, avec la permis-
sion de l'archevêque d'Avignon , pour le
transporter dans la sacristie, re qui se fit
avec l(eauciiU|i de solennité; et son corps fut
trouvé tout entier et sans aucune corrup-
li<in. On l'a mis depuis dans une chapelle ,
où il est exposé à la véné aliim des fidèles;
re qui a sans dculi" obligé M. du Saussny à
insérer son nom dans le martyrologe des
s.iints de France.
Avant que de n cevoir l'extrême-onrlion,
le V. de llus voulut ôlrc déchargé de la
supériorité, el fil de fortes instances aux
l'èrcs pour s'assembler, afin de procéder A
l'éleciiun d'un nouveau sujiérieur, ce (|u'ils
ne firent qu'avec peine, el le sort tomba sur
le P. Sisoine , qui fut élu supérieur en la
pl.icc du saint fondateur. .Mais il ne se passa
rien de considérable de son temps dans la
congrégation. Le I'. Vigier lui ayant suc-
cède, cl la congrég.ition ayant déj.i trois
maisons, une à Avignon, une â Toulouse, el
l'aulr ' à Itrite dan', le Limousin , il obtint
dis lettres patc-nles du roi le 2!) septembre
If'ilO, qui en permitlairnl rLlablissemiiU en
•rance, lesi|ui-ll<'sli'llres furent vérifiées aux
'arb'iniirs de llm ileaux, de Toulouse, d'Aix
■l de Greiwihlc.
Le I'. \ it;ii!r , pnur affermir davantage
la congrégation cl niga^'or ceux qui y cn-
Inraicnl par des vieux solennels, conclut le
dessein de la f.iire ériger en vraie religion :
'•I le iiiniiiiuniqu.i au\ l'ère» l)oclrinairc>,
lui, iiprès plusieurs délibérations , reolu-
reul ileiiilirasser l'éial régulier, el à i et elTel
|'«>bèrcal dans toutes leurs maisons des pro-
curations spéciales au P. Vigier, l'au 1614,
pour demander cet étal au saint-siége, soil
p;ir union, soit par une nouvelle éreciiun ,'
ou par telle autre voie qu'il plairait au pape.
En 1G15, Sa Sainteté ayant fait dire au
P. Vigier qu'il convint avec quelque con-
grégation régulière déjà établie, il eut sur
cela quelquesconfércncesaveclcs PèrcsBar-
nabites ; on donna une seconde procuration
à ce Père par abond.ince de pouvoir, faisant
mention de celle de 161'* el la confirmant de
nouveau, s'il était besoin de cette confirma-
lion pour s'unir avec les llarnabiles. Le
1*. Vigier n'ay;int pu néanmoins s'acror-
der avec eux, traita l'an 1616 avec les Pères
Somasques en vertu des procurations de
1611., qui sul>sistaient toujours. Le pape
Paul V, par un bref de la même année 1616,
confirma ce traité , qui avait été apiirouvé
par la congrégilion des Réguliers, el unit la
congrégation des Pères de la Doctrine Chré-
tienneaveceelle desPèresSomasques, réglant
le noviciat du P. Vigier par dispense à qua-
tre mois sculemi ni.
Il était entre autres choses stipulé par ce
traité que les Pères de France garderaient
toujours leur iiislilul d'enseigner la doctrine
chrétienne , el reconnaîtraient [lOur leur
fondateur le P. César do l!us; qu'ils s'appel-
leraient en France les Pères de la Doctrine
Chrétienne de la congrégation des Somas-
ques; qu'ils vivraient sous l'obéissance du
supérieur général des Somasiiucs, qui les
visiterait, ou par lui , ou par d'autres une
lois tous les trois ans. Le P. Vigier, après ce
traité, fut reçu au noviciat en la maison do
Suinl-Blaise des Pères Somasques à Home.
Le bref d'union fut reçu dans un chapitre
général de cet ordre qui se tint la mémo an-
née, el le P. \ igier étant de retour à Avi-
giio". le 2o juillet, fit sa prof ssion entre les
mains du P. îîoiicl, S miasque, député à cet
elTel [lar lo P. Itoscoli, pour lors général dy
cet o.-dre. Le P. \ igier étant profès, le Iraiié
qu'il avait fail avec les Siimasques , et qui
avait été autorisé par le bref de 1610, lui
ratifié premiérenienl à Avignoii , ensuit- à
Toulouse et à lîrive , par tous les Pères el
les Frères de la congrég;ilioii delà Doilrine
Chrétienne; et, en vertu du bref du pape
Paul V, après être entrés au novicial , ils
firent tous profession au bout de l'an entre
les mains du P. Vigier, i)ui av.iil le litre de
provincial , ou en celles d'autres supérieurs
qu'il avait députés. Les Pères de la maison
de ToiiIounc (ireiil d'abord difficullé de re-
cevoir la ceinture de novice; mais ils firent
rannccde protialion comme les autres, après
laquelle ils (ircnl aussi |>rofessioii solennelle.
Le roi accorda des lettres patentes en IHIT,
par lesquelles il conlirinail leur union avec
l( s Soiiias(|ues, cl les recevait comme reli-
gieux en France, et ces lettres firent véri-
fiées en quatre diffèrenls parleinenls. Les
Doctrinaires firent ensuite plusieurs établis-
sements, et ils furent reçus à Paris en 16-z5,
du consentement do Jean-François de Gon-
dy, pour lors arrlievêque, qui, après avoir
pris commuiiicaliou du bref cl des lettre»
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pali-nlcs (lu roi, les reçut comme rclipiiux
Dans son diocèse el leur permil de s'établir
dans leur maison de Saint-Charles, au fau-
bourg Saint-Marcel, dans laquelle depuis i's
reçurent plusieurs novices à la professiin
relijjii'use.
Les Doctrinaires ne furent jamais bien
d'accord avec les Somasques; ceux-ci ayant
voulu contraindre les Doctrinaires de rece-
voir leurs nouvelles constitutions , qui
avaient été approuvées par le sain'.-siégc on
1026, le chapitre provincial dos Doctrinaires
qui se tint à Gimont l'an 1()27 refusa de les
accepter : il résolut qu'on observerait tou-
jours les anciennes, quoiqu'elles ne fussent
pas approuvées par le pape, et en're autres
rèjj;leiiionls qui y furent faits, il fut ordonné
que l'on ferait un vœu particulier d'ensei-
gner la doctrine chrélienn". Mais le chapi-
tre général des Somasques tenu l'an 1G28
refusa la permissiDn que les Doctrinaires
avaient demandée du faire imprimer du nou-
veau les constitutii>i)S anciennes , au nom
de la province de France , et leur défendit
de faire aucun vœu d'enseigner la doctrine
chrétienne. Il n'y eut guère de chapitre en
France où il ne survînt quelques contesta-
tions touchant celte union entre les Doctri-
naires et les Somasques , ce qui fit prendre
la résolution aux Doctrinaires de s'en sépa-
rer entièrement ; et le P. Vigier, qui le pre-
mier avait foricment solliiiié l'union avec
les Somasques , fut aussi le premier à de-
mander la séparation. Et il se forma trois
partis parmi les Doctrinaires : les uns ne
voulaient point de séparation, les autres la
deman laient, mais prétendaient toujours vi-
vre dans l'état régulier, comme clercs, sous
la règle deSaint-Augustin ; etilyenavaitd'au-
Irt'squi, prétendant qu'il y avait plusieurs
causesdenuiliiédansTacteduniou, voulaient
que la congrégation ne fût point sortie de
l'état séculier où elle avait d'abord été, et
que par conséquent les vœux qu'ils avaient
faits dans la congrégation de la Doctrine
Chrétienne ne les engageaient à rien. De ce
nombre était un gentilhomme de Bretagne
allié aux meilleures maisons de la province ,
qui , étant entré parmi les Doctrinaires en
163C, et y ayant fait un an de noviciat dans
la maison de Saint-Charles à Paris, avait en-
suite fait profession solennelle entre les
mains du P. Vigier comme député du pro-
vincial. L'an 1140, ce gentilhomme, dégoûté
de son état , sortit de la congrégation el se
m;iria en lC'i3 avec une demoiselle de I5ie-
tagne. La cause fut portée au parlement de
Paris en 16U, el il y eut en I6i5 un célèbre
arrêt rendu entre les parents de ce gentil-
homme breton , appelant comme d'abus de
son prétendu mariage ; ce religieux qui s'é-
tait marié, intimé; les religieux clercs do la
Doctrine Chrétienne, ordre de Saint-Augus-
tin (c'est ainsi que porle l'arrêt), défendeurs,
et entre les mémos religieux de la Doctrine
Chrétienne demandeurs en requête par eux
présentée à la tour, pour être reçus parties
intervenantes auxdites appellations avec les
parents de ce religieux marié, pour soutenir
qu'il était leur religieux profès ( l qu'il leur
devait être rendu : le même religieux défen-
deur d'autre part, cl encore le même, appe-
lant comme d'abus du bref portant érection
de la congrégation de la Doctrine Chrétienne
en religion, et son union avec les Somas-
ques, etc.; cl encore entre les Pères clercs
el frères de la congrégation de la Doctrine
Chrélienne des maisons do Paris , deman-
deurs en requête par eux présentée à 'a cour,
tendante à lin d'être reçus parties interve-
nantes auxdites appellations et demander
qu'il leur fût donné acte de ce qu'ils désa-
vouaient la poursuite laite au nom de toute
la congrégation par le provincial de cet or-
dre, de l'enregistrement des lettres patentes
obtenues au nom de leur ordre, en ce qu'el-
les portaient confirmation de l'union el dé-
pendance des Pères Somasques d'Italie; et,
faisant droit sur le tout, ordonner qu'ils se
pourvoiraient par-devant N. S. V. le pape
pour obtenir un bref, pour vivre suivant la
règle des Clercs de Saint-Auguslin , de la-
quelle ils faisaient profession , sous un gé-
néral français, et pour avoir des commis-
saires en France pour l'exécution dudit bref.
Et encore Gabriel de Tregouin, Claude Bou-
cairan , François Vuidot et Laurent Lespe-
rièrcs, ci-devant religieux de ladite congré-
gation des Pères et clercs de la Doctrine
Chrétienne, demandeurs en requête tendante
à fin d'êlre reçus parties intervenantes el
opposantes à l'eiitérinement des lettres pa-
tentes du roi portant établissement de la
maison de la Doctrine Chrétienne à Paris, et
à faire exercice de religion en France, en
vertu du bref de l'union avec les Somas-
ques, etc. Après plusieurs audiences, la cour
déclara le mariage de ce gentilhomme bre-
ton non valablement contracté , ordonna
qu'il rentrerait dans le monastère des reli-
gieux de la Doctrine Chrélienne pour y vi-
vre suivant la règle, et, faisant droit sur les
conclusions du procureur-général du roi,
qu'il sérail incessamment procélé à la véri-
fication des lettres obtenues par les Doctri-
naires, si faire se devait, el cependant leur
fil défense d'admettre aucun à profession el
d'envoyer leurs religieux hors le royaume,
ni de recevoir en leurs maisons des supé-
rieurs étrangers sans permiss^ionda roi.
Peu avant cet arrêl, qui est du 18 mai
1G'|.5, l'archevêque de Paris, Jean-François'
de Gondy, avait déjà ordonné dès le 10 du
même mois que les Doctrinaires se pourvoi-
raient à Rome dans un an, et li'ur avait fait
défense d'ailo'.ellre aucun, ni au noviciat
ni à la profession. Après l'arrêt rendu, le
roi, par un arrêl du conseil du 22 mai Kî'iG,
leur donna des commissaires qui furent les
archeiêques de Toulouse et d'Arli's, le chan-
celier de l'université de Paris, le curé de
Saint-Nicolas-du-Ghardonet, le grand péni-
lencier de Notre-Dame, el le sieur du Val,
docteur di' Sorbonne, pour aviser aux
moyens propres et convenables pour termi-
ner leurs dilïéreads. (>es commissaires, après
avoir vu les actes capilulaires des maisons
de Paris, de Toi'Iouse, de Narbonne, do
'"• nicTioNNAïur: [>f.s ouduks heligiel'X. ur,
^ illpfr.mrho, de I1rivi\ (11- H ■■■iiirnirr, (le Lrc- le passé Cl pour l'avonir; cl, voyant qu'on
i"uro, (IcNcr.ir, de Ttnlcl. de riililhir, nK'iiic avait formé oiiposilion h rcnretjisïremeril de
rciui du cliapitrc provinrial nsscmldc à ces Icllrcs, sur ce que les opposants |iruten-'
Tiiiiloiise II- (i si>] iPtiilirc Ifi'i'l. par Icsquris daieiil nu contraire que le bref ne lui don-
l>'s l'iVes Doct' iti.iins ,!v liciil résolu de de- nait le litre de régulière que pour le passé et
i!i iiidcr cl propiir.T (lar l!)uics les voies lé- non pour l'avenir, ce général, sur sa sini-
piliuici cl raisonnables leur sépar.ilion d'à- pie supplii|ue, els'élant adressé 5 laDalerie,
vcc les Soinasqiips ; après avoir aussi vu au lieu d'avoir rerours à la congrégation des
'.'ordonnance de l'arclicvéque de Paris cl cardinaux qui avait été commise par le Pape
l'arrël du parlemenl dont nou's avons parlé pour connaître des différends de celte con-
« i-des'ii's, cl < n avoir fait le rapport au roi, grégalion, obtint une bulle le 27janvier ICIil
Sa Majesie élanl en son consi il révoqua qui déclarait la congrégation de la Doctrine
kkiIcs les ledres laieiilcs qu'il avait ci-d.?- Chrétienne rcfruliére tant pour le passé que
»ant aecoidce- pour roiiion des Doctrinaires pour l'avenir. KUc fui examinée à Paris par
.nec les Son)as(ines. comme l'aile a^ ce i.'cs ordre di' rarcl;evéi;ue le 17 avril de la nié-
é rangers sans permission de Sa Majesté ; me année dans une assemblée de docteurs
leur litdéfiMise de rcconnaîire le général des q:ii J i déclarèrcnl nulle; et le pape, sur l'a-
Somasques ni recevoir aucun supérieur de vis de la congrégalion des cardinaux qu'il
sa iiarl, roniniuniqucr ni avoir aucune par- avail commise, déclara par nn nouveau br.(
licipalion avec eux; cl ordonna qu'ils ve du .3!) août 1652 que celle l)iil'e du 27 jan-
pourvojraicnt vers le pape pour obtenir la vicr ICol était nulle, comme élanl contraire
décision de leur appel et îles autres différends à son piécédenl bref de 1i'i'i7 et ayant élé ob-
conccrnant la \aliilité de l'érection de leur lenue par fr^iude ; dcclaranl que son inteii-
congrégalion on religi(»n, et des professions tio'i était de réiablir la congrégation de la
ijui avaient été faites; leur enjoignant de vi- Dnrlrine Chrétienne en son premier état se-
vré chacun sous lobéissanec des supérieurs entier, conformément à son institution , cl
de (tiaque maison, selon leurs i.nciennes d'obliger à y demeurer pudant leur vie,
constitutions : et, s'il arrivait quelques diffi- comme véritables religieux et sous l'obéis-
( uHés extraordinaires, d'avoir recours aux s ince des ordinaires, ceux qui avaient lail
évéques dans les diocèses desquels leurs profession peidant l'union .n ce les Sonias-
maisons sont élablies, pour recevoir d'eux (|ues;et déclara séculiers tous ceux qui y
par provision les rè[;lcmciits qui leur se- ealrcraienl à l'avenir, cassant et annulant
raient nécessaires; leur permit l'a semblée en conséquence toutes li'S professions qui
cl lenue de leur chapitre |irovincial ass'gné avaient été faites dans celle congrégation de-
a N'ai bonne au mois de septembre, pour y puis l'c\[)édilion du bref du HO juillet IfiW,
élire un pro\iiicial et des supérieurs qui et l<iules les choses (lui avaient été faites de-
exerceraient leurs charges par |)rovision , puis contre sa forme cl teneur,
jusqu'à ce que Sa Saint lé y i ût pourvu, à 11 y eut de nouvelles contestations sur ce
la charge que l'archevêque de Narbonne et dernier bref. Il y avail des Pérès dans la con-
l'évéque d'Alel y jjrésidcraient : et Sa Majesté grégalion qui ne pouvaient la voir réduite à
leur (jélendil de recevoir au noviciat ni à la l'éli'.l séculier pour ravenir. et d'autres qui
profession, ni même d'envoyer aucun aux 'le pouvaient soulliir iiu'clle lui déclarée ré-
ordres sacrés pour être promu sous le titre gulièie pour le passé. Ainsi, il fallut encore
de pauvreté. retourner à Home, dont l'on n'obtint autre
Les Docirinaires s'élanl donc pour\us à cho<e par un bref de Hi3V que ce qui av.iii
Uonie, le pape Innocent X, après av ir pris été déclaré par le bref précédent do 1052, que
lavis d'une coiigiegation tif cardinaux et le papo voulait que l'on cvéculàl.
de prélats qu'il avait aussi commis pour l,i Kn tli57, les l'ères de la Doetrine Chré-
«onnaissanee de celle affaire, cassa par nn tienne eurent encore recours à Home, en
bref du ;tO juillet ll)'i7 le bref d'union des (Onscqiicnee d'un arrêt de renvoi du parle-
Doctrinaires a\ ec les Somasques, soumit les ment île Paris de Hi5.'J ■ ur renrcgislreincnl
Docirinaires aux ordinaiiss des lieux OÙ sont des lettres patentes qu'ils avaient obtenues
^iluees leurs maisons, cl réiab'it la con;;ré- pour le bref de lGi7. Le pape .Mexandre \ll
galion de la Doctrine Chrélienne en son pre- députa le cardinal lirimaldi , arclicvéquo
micr et II, Ici qu'il avail élé établi par le d'Aix. pour présider au chapitre général de
pipe Clément Vlli , leipiel était |iuremenl toute la congrégalion à Avignon, et conlirma
hcculier; el, pourai commoiler les parties sur le bref de liiV7. Ce chapitre général fut cclé-
leurs différends, Sa Saintclc valida l'union bré ; toutes les contestations y furent réglées
pour le |.assé et les professions (|ui avaient el assoupies , et les brels des années l!i'i7 ,
elé fai.es pendant ce lemps-l.i , cl obligea 1052 cl Id.j'* y furent de nouveau reçus dans
ceux qui les avaient faites ci-devant de per- toute leur lenenr. Ils s'adressèrent encore au
sevércT loule leur \ie dans la congrég.ilion , pape pour ralTermisscmcnt de leur ctmgrc-
»ans poiMoir en soriir deux-mé ncs ni élre galion, d Sa Sainteté, fiar «n bref de l'an
icinoyés (lar les supérieurs. 105!>, conlirmalif de celui de 10V7, pour l'exe
Le P. Hercule Ilaiidilret , qui prcniil le culion duquel l'archevêque de Paris était
littede général de l.i eongrégati n. surprit conimiss.ijro apostolique, leur donna permis-
Ueg lejir.s patentes du roi sur le lirel il'lnno- sion de faire faire après une année de novi-
cenl X , prCiendanl qu'il duiiiiail le lilr.' cl la ciat les ir(ns vœux simples de cbastelé, de
quililé de religion a leur congregalion pour pauvreté et d'obéissance, cl un quatrième do
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perpétuelle stabililc, dispensables seulement
par le souverain ponlife, ou par le chapitre,
ou par le diffiniloirc général de la congré-
gation.
Voilà comme la congrégation des Pères de
la Doctrine Chrétienne . de séculière est de-
Tcnue régulière, et, de régulière, séculière.
Elle est présentement divisée en trois pro-
vinces , savoir : d'Avignon , de Paris et de
Toulouse. La première a sept maisons et dis
collèges; la province de Paris a quatre mai-
sons, dont doux à Paris et trois collèges, et
celle de Toulouse a quatre maisons et treize
collèges. Ces Pères sont habillés comme les
prêtres séculiers et ont seulement un petit
rollet large de deux doigts; ils ont pour
urmes une croix avec la lance , l'éponge et
des I'oubIs (1).
Voyez les PP. deDeauvais etdu Mas, Viedu
P. César de Bus. (1. de Trégouin, Recueil des
nidlités survenues dati s V institution prétendue
régulière de la Doctrine Chrétienne en France.
Constitut. Clericor. Congreg. Doctrinœ Chri-
stianœ, Mémoires, Factums , Arrêts et pièces
concernant cette congrégation.
La vie du P. César de Bus est peu connue
en France, et il serait à propos qu'on en
donnât une nouvelle édition, ou plutôt qu'on
en publiât une suç un plan nouveau, suivie
d'un précis historique sur sa congrégation,
qui a probablement disparu pour toujours
dans ce pays. On ignore presque générale-
ment que lors du voyage que fil à Uome le
P. Jeaume, général, voyage dont nous allons
parler, on lui fit la proposition ou la pro-
messe de canoniser ( et même sans frais de
procès, dit-on) le pieux fondateur de son in-
stitut. Il y a eu peu de congrégations qui
aient subi autant de révolutions et éprouvé
autant de guerres intestines que la société
de la Doctrine Chrétienne. Aux renseigne-
ments si riches que la sagacité du P. Hélyot
a recueillis et consignés ci-dessus, nous en
joindrons ici quelques autres sur cette con-
grégation, contre laquelle était répandue et
ri sle encore une prévention presque géné-
rale, qui l'ace use de jansénisme. Nous justi-
fierons ce sou|)Çon; nous ferons voir qu'il
«lemanile cependant des exceptions plus nom-
breuses que nous ne l'avions cru nous-mê-
nie, soit sur le fait du jansénisme, soit sur
l'adhésion à la constitution civile du clergé,
à l'époque de la révolution française. Aux
deux maisons que compte à Paris le P. Hé-
lyol, il faut en ajouter une troisième, colle
de liercy, qu'habitait un Doctrinaire fameux,
dont nous parlerons dans cet article.
Il y avait en effet trois provinces de Doc-
trinaires en France , comme le dit Hélyot,
celles d'Avignon, de Toulouse et de Paris.
Chaque province élisait tous les trois ans ses
supérieurs, et le général était élu tous les six
ans par les trois provinces réunies. Ce su-
périeur général avait un conseil ou défini-
(I) Voi/., à la lin du vnl., n" G.
("2) Une note niannscriie, jointe à rexemplaire
que nous possédons dil que le P. Vatetle, Oociri-
nnire, fort vené iluns la langue lutine, est celui i/iii a
niif en cet iiwme celle première édition des comiitu-
DOC-
KS
loiro composé de six officiers, deux de cha-
que province, lesquels, avec le général lui-
même, trois provinciaux, six députés, et le
supérieur de la maison où l'on s'assemblait,
composaient le chapitre général, q:ii se te-
nait ordinairement dans la maison de Saint-
Charles, faubourg Saint-Marceau, à Paris.
En 1733, au chapitre général tenu à Paris,
0!i revit les constitutions, qui, l'année sui-
vante, furent traduites en latin par le P. Va-
lette (2) et publiées. Après un chapitre et d"S
observations préliaiinaircs , elles forment
deux parties , dont l'une, composée de 33
chapitres, traite du régime de la congréga-
tion ; l'autre contient quinze chapitres con-
sacrés à traiter de la vie spirituelle. Nous
venons de dire comment la congrégation
était gouvernée. Ajoutons : Les bénéficiers
ne piiuvaient jouir de leurs bénéfices quo
conformément aux dispositions de la con.
grégation , qui voulait avant tout que les
bénéfices fussent unis au corps. Deux pa-
rents au premier ou second degré ne pou-
vaient, dans les élections, se donner leurs
vuix. Si trois parents à ce degré s'y trou-
vaient, le plus jeune ne votait pas du tout.
Pour être élu général, il fallait avoir au
moins kO ans d'âge et vingt années de pro-
fession ; il fallait en outre avoir rempli pen-
dant six ans un emploi important d.ns la
congrégation. Les provinciaux et recteurs
(supérieurs de maison) faisaient serment da
bien conduire leur adftiinislralion. Le chapi-
tre provincial se tenait tous les trois ans, au
mois de septembre ou octobre. 11 y a un
chapitre fort sagement conçu concernant la
garde des archives. Pour être admis au no-
viciat, il fallait avoir fait sa rhétorique, n'a-
voir pas l'ait vœu d'entrer en religion, n'avoir
aucun défaut canonique qui empêchât la
promotion aux ordres. On ne recevait pas
dans l'institut sans une dispense du provin-
cial ceux qui avaient plus de kQ ans ou
moins de lo; ni sans une permission spé-
ciale du général ceux qui avaient porté,
même pour peu de temps , l'habit d'un autre
institut. Avant d'entrer, le prétendant devait
postuler un ou deux mois. Les frères con-
vcr3 devaient postuler pendant six mois, et
ne prenaient l'habit qu'après un an de sé-
jour dans la maison. On n'en recevait point
qui ne possédât ou ne fût apte à apprendre
Un métier utile à la maison, et, autant quo
possible, qui ne sût lire et écrire. Le convers
ne pouvait recevoir la tonsure sans une au-
torisation du chapitre général. On voulut dé-
sormais, sauf exception en faveur des sujets
de riche espérance, que chacun fournît un
titre patrimonial aux ordres. La congiéga-
lion encourageait ses membres à publier
leurs compositions , mais après examen du
deux réviseurs et avec permission du géné-
ral. L'enseigneaientde ladoctrine chrétienne,
premier but de la cougrégalion, y était aussi
lions de sa congrégali n. Cel.i ne peut s'entendre, du
moins, que des consiiiutions revues en 1735, puisc|uo
nous voyons cl-dcsSus les conslilulions latines citées
par le 1'". Hélyot.
ry llu;TIll^^.\IK^. des im-.orrs uf.mcif.i \. lU)
J'oicrcice nréfTo cl on le fai«ail ni.'medans m.mchcs et fèics, les matines de Noël et des
es disses F nlre' 1rs règles i-oiir rins'ruc- iL-riobrcs, auxquelles tous 1rs clercs étaient
lion il re.iu.alion des é.oliers .lan'^ les col - Imus dassisler en surplis. Les clercs qui né-
Irces ond.il dis incuer celles (|ui presrri- laient point dans les ordres sacres étaient
vent" de donner des suiels religieux et nio- exhorics à réciter tous les jours, et surtout
raux pour inaliéres de thèmes, de former les les dimanches cl fêles, le bréviaire romain ;
iêuncs cens à la dévotion à la sainte Vierge, les laïques étaient obliges à dire chaque jour
(te les f lire se confesser lous les mois, etc. ou l'office de la sainte \ lerge, ou le chapelet.
On idmellal aussi des pensionnaires adultes, Les prêtres de\ aient tous les jours célébrer,
niai'sdes mesures étaient prescrites p>ur ne et les au'res entendre la messe. La table
les laisser pas induencer l'esprit ou les per- était de forme oblonguc et tous mangeaient
sonnes de la romnuinaule. Des mesures non du même côté, comme dans les communautés
moins sa-'es reuardaienl aussi ceux qui de- régulières. On servait à chacun séparément
\ aient être employés à la préd cation ou auv sa portion. On ne faisait pas abslinentc de
missions. La soutane des clercs était cousue viande; r.n permettait dirficilcmcnl de man-
à la haute ur de deux pieds, et le reste se hou- ger en ville. Le jour anniversaire de la mort
tcnnail jusqu'en haut. Le manteau était ite de César de Bus se faisait la rénovation des
même lim"uenr. .\ dater de 1733 l'habit des vteux. Les clercs et les frères drvaient com-
convi rs devint une lunicelle et un manteau munier lous les dimanches et fêtes, à moins
de drap noir descendant un peu au-dessous que le confesseur n'en jugeât autrement. Hors
du genou, mais il pou^ait être p'us court le temps de Pâques et deux semaines avant
pour les voyages. Comme la plupart des usa- r.\vcnl et le Carcmc,on faisait abstinence de
ges monastiques ne sont plus connus que viande le mercredi et jeûne le vendredi; on
par une Iradiliin qui saiTa^blit de plus en jeûnait aussi la \eille de la mort du vénér,>
plus . nous affecterons d'en consigner iei hle César de lîns, si elle ne tombait pas dans
quelques-uns de la Doctrine Chrétienne. Les l'oeiave de Tàquos. et trois fois la semaine
lettres adressées au général portaient pour pendant l'Avent. Les exercices religieux
suscriplion : A mon très-révérend l'ère [Admo- étaient lous, en un mot, marqués au coin do
(liim iccroido l'alri meo); :\u\ sniiérieurs l'esprit de prudence cl de sagesse ; l'esprit
majeurs : A inan léiérend Pire; ù un con- jaiiséiiist ■ n'y par.iît en rien.
fière prêtre : .tu révérend Père Lcrivant Néanmoins, à l'époque où les constitutions
à un simple clerc ou â un frère laïque, ils furent de nouveau publiées, le jansénisme
disaient : Mon cher, o'u Ircs-liouuré confrère, dominait une grande partie de la congréga-
ou frère, scion l.i personne. On se disait fils lion. Son histoire serait mal connue si nous
e" Jésus-Christ en Unissant une leliic adres- n'en donnions iei des preuves frappantes par
sée au supérieur pro;)re, et sculcmcnl seivi- des détails curieux et intéressants. L'esprit
rciir en écrivant à un nuire. Ainsi les termes de nouveauté dominait surtout ilans les pru-
de con/'; èr« rn Jésus-Christ ou de scrvilcur vinces de Toulouse et de Paris. Gràc à Dieu,
terminaient les lettres écrites entre simples la province d'Avignon était moins infectée.
Doctrinaires, selon qu'elles sadressaicnl aux cl devait sans doute cet état inei |. iir à des
prêtn-s ou à d'autres, l'.n tête de chaque let- suj^^'ts italiens quelle renfermait dans son
tic él lient ces mois : limediclus Hens; le gé- sein, el qui faisaient partager leurs bons sen-
néral seul inellail : l'ax Chrisli. On portait le timenls à leurs confrères,
bonne t carré à tous les everciccs, etc. La pu- Le chapitre général se tenait o'dinaire--
nition des fautes se faisait à peu prèscouime ment dans la maison de Saint-Charles, à Pa-
ilaiis les nionasièros. Aux liois vœux de ris. Un chapitre devait se tenir en 17'i,'? , el
auvreté, de chasteté et d'obéissance, les l'autorité, comme tous les h mimes judi-
l
loclrinairet ajoutaient le vœu de stabilité, cieux, craignant que le jansénisme n'inlluàl
lies vœux étaient Siinjdes, el, comme l'a dit trop mallieureuseinent sur les opérations de
Ilelvot, l'é'at delà congiégnlion était sim- la congrégation s'il se tenait au lieu ordi-
l'Ieincnt séculier, l^lle prit la mesure de lier n.iire , le fit transférera Ueaucaire. Le I'.
iiinsi ses membres par des engagements, Jeaumc, général, obtint, d'accord avec le dé-
pan e que l'ingrate défection de ceux (jui, finiluire, un bref du pape, cl le chapitre qui
après avoir été nourris par elle, usant de devait se tenir au mois île septembre l"'i3 fnl
leur litierlé, l<i .piiltaienl, lui faisait souffrir remis au mois do mai 17'iSt, non sans la mé-
Irop de perles et d'inconvénients... /s.r miil- dialion de la cour de France, qui intervint
tnrum quos (durarrrnt inçiratn drfrctione mu'- par le crédit de Boyer, ancien évéque de Mi-
tiim lidrimenli pnticlinlur... (élément \ avait repoix, que réclamèreiil les Doctrinaires bien
riéel.iré que la dispense de ce viru de slabi- pensants. On fit venir le P, \alenlin, proeu-
lilé rciilerniait aussi celle des trois auires reur général en cour de Kome, (|ui s'eiiten-
«(TMix, Les Doctrinaires se levaient à quatre dit avec le nonce, le cardinal de Tenein el
lieures, faisaient leur lit et leur cliambi e, et lîoyer, pour éloigner du clia|)itre il des eni-
,i la seconde «loche se rendaient à re>ercice plois les hommes opposés aux décisions du
lie l'oraison. Il la()uelle lis vaquaiint une de- ll''glise, el pour soustraire l'assemlilee à
mi- heure. Le soir avant le, soujer , ils ré- riiilluence qu'elle eût subie à Paris. Il y cul
pétaient le même exercice [lendant le même donc des Icllres de carliet <>\|iediées à ce su-
••np.ice de temps. Les confrères engagé-, dans jet, La première, du 17j.in\ier 17ii'i-, portail :
les ordres ►acres récil.iienl l'ofliee rom.iin, n.... Informés que le chapitre général de vo-
m larti'tulier, si ce n'tot les vêpres des di- ire congrégation doit dtre lenu au mois de
Cl
DUC
DOC
f52
mai prochain, nous vous faisons coUe litire
pour vous dire que noire intention esl qu'il
ne soil pas assemblé à Paris; cl nous vous
ppruieKoiis seulement de le tenir dans quel-
qu'un" des maisons de votre ordre des pro-
vinces d'Avignon ou de Toulouse. Noire in-
tention est aussi qu'il ne soit élu ou nommé
aux charges de supérieurs et autres de voire
congrégation, que des religieux qui aient
donné des preuves suffisantes de leur sou-
mission aux décisions de i'iîglise et aux. bul-
les apostoliques, et qui justilient de leur si-
gnature du formulaire ; et nous vous man-
dons et ordonnons de tenir la miin à l'exé-
cution de ce que nous jugeons à propos de
vous prescrire à ce sujei. Si n'y faites faute,
car tel est notre plaisir. »
Une seconde lettre fut adressée au P. J eau me,
général, en ces tormos : « Cher et bien-amé,
le chapitre général de votre ordre devant se
tenir, à la fin de ce mois, dans la ville de
Beaucaire , noire intention est que tous les
religieux vocaux qui doivent y assister dé-
clarent avant les élcclions leur soumission
aux bulles apostoliques et au formulaire, et
que ceux qui n'auront pas fait ladite soumis-
sion ne puissent être élus dans aucune charge
et dignité de l'ordre. Si n'y faites faute , etc.
Donné à Versailles le deuxième jour du mois
de mai 17V1. » Le môme jour, lettre à M. l'ar-
chevêque d'Arles, nommé commissaire royal
au chapitre, cl conçue en ces termes : « Mon-
sieur l'archevêque d'Arles, Ayant donné mes
ordres pour que le cliaiiitre général de la
Doctrine Chréiienne se tienne dans la ville
de Bancaire, et étant informé qu'il doil s'y
ouvrir incessamment, mon intention est que
vous y assistiez de ma part en qualité de
commissaire, et que vous déclariez que tous
ceux qui ne sont pas soumis aux bulles apo-
stoliques et au formulaire ne pourront élro
élus dans aucune charge et dignité de l'ordre.
Mon intention est au surplus que ceux qui
composeront ledit chapitre général aient à
se conformer sans aucune difficulté à ce que
vous leur ordonnerez de ma part. Sur ce je
prie Dieu qu'il vous ail, Monsieur l'arche-.
véque d'Arles , en sa sainte garde. A Ver-
sailles, elc. »M. de Saint-Florentin, ministre,
écrivait on outre au P. Jeaume: «Mon révé-
rend Père, Je vous adresse les ordres du roi
pour la tenue de votre chapitre général.
Vous ne manquerez pas de vous y confor-
mer. S. M. a chargé M. l'archevêque d'Arles
d'y assister en qualité de son commissaire.
Votre premier soin en arrivant à Beaucaire
sera de voir ce prélat et de vous concerter
avec lui, tant pour l'ouverture que sur les
autres opérations à faire pendant la tenue
de voire chapitre. Je suis , etc. »
Il est évident que des mesures de cette
sorte, prises par l'autorité civile , ne lais-
saient guère de liberlé aux opérations du
chapitre, et elles ne peuvent se justifier ici
que par le concours qui régnait dans ces me-
sures entre l'autorité civile i,t l'autorité ec-
clésiastique , dont celle-là ne f.iisait que
iiiainlenir lis prescriptions. Ce n'est qu'en
procédant ainsi que le prince peut ae uion-
(rer l'évé(iue du dehors : il doit si* borner à
âlre le bras droit et agissant de l'c'v/'que dt
dedans, de l'autorité des chefs des diocèses
et surtout du souverain pontife. Ces mesures
rigoureuses monireni aussi à quel point en
étnil venue une congrégation contre laquelle
il fallait les prendre. Nous avons affecté d'en
parler avec une certaine étendue , et nous
aurons encore à venir sur des faits analo-
gues, par exemple en parlant de VOrnioire ,
et nous voulons par là donner une idée de
l'esprit qui s'était glissé dans un grand nom-
bre de congrégations religieuses au demi t
siècle.
A Beauca re d'antres mesures furent prises
en outre au chapitre général. Nous dirons ,
par exemple, que le P. LafTont, recteur de
Moissac , l'un des capitulaires , eut ordre de
se retirer sans délai en sa maison de Moissar.
Il en demanda la raison ; le serrélaire de M.
Boyer la lui donna et disait dans sa réponse:
« Ceux d'entre vos confrères qui gémis-
sent de voir que votre congrégation ne se
distingue presque plus aujourd'hui (jne par
son opposition aux décisions du chef et liu
corps des premiers pasteurs, ont pris les me-
sures les plus efficaces pour empêcher que le
gouvernement n'en fût confié à des persoi.nes
portées à entretenir parmi vous un esprit
d'indépendance et de rébellion U. Héliot,
secrétaire de M. l'ancien évoque de Mire-
poix. A Paris, ce 1" juin I7'ii. » Pareil ordre
donné au P. Delfour, définitcur de la pro-
vince de Toulouse , secrétaire de la congré-
gation et du chapitre général , pour qu'il se
retirât à Gimon ; pareil ordre au P. Préjean,
député de la province de Paris, pour qu'il se
retirât à la maison de Noyers, en Bourgogne.
Dans l'indiction du chapitre , les récalci-
trants avaient vu , sinon avec surprise , du
moins avec peine , qu'un vicaire général se
trouvât compris au nombre des vocaux. C'é-
tait le député d'une province italienne dont
nous allons parler. La plupart des maisons
des provinces de Paris et de Toulouse signè-
rent des actes d'opposition et de protestation,
dont elles chargèrent leurs députés au cha-
pitre général. Ces protestations étaient contre
l'admission au chapitre du vicaire général de
Rome en qualité de vocal, et contre l'admis-
s'on de la bulle Unigenitus. Elles portaient
trenle-six signatures de la province de Paris,
1,1 moins nombreuse des trois; cinquante et
wne de la province de Toulouse , prêtres,
sous-.liacres et clercs; cinq même de la pro-
vince d'Avignon. La cour avait f urni la
somme de mille écus pour les frais du cha-
pitre, qui s'ouvrit le 30 mai. On lut le brel
(lu pape qui avait prorogé le chapitre , et à
l'occasion de celte pièce le P. de la Molhe,
provincial d'Avignon, présenta une requête
(qui fut a imise , et ce nous semble avec rai-
son) tendante à ce qu'il fût statué que le gé-
néral et son définitoire ne pourraient sollici-
ter aucun bref sans la p.irticipation des trois
provinces. Dans le discours de Mgr d'Arles,
commissaire, on doit remarquer ces paroles :
« Hélas! mes Pères, \ous le savez encore
mieux que moi, et je me fliUle que vous en
07, im.iKiNNAmK ni:s ouiir>Es rvEi-iciEix ci
pemissfz aulanl que inoi-mi'inc: liol.is! il ne nvcc les Doctrinaires il- Trancc. Colle union
reste jilus dans votre lonprcgalion que qnci- lut , à ce qu'il para'l , efTiuluéc , et c'cbi en
qucs étin(el!c< de ce feu primitif, seul capa- conséquence de ce résultat que sera venu an
ble lie 11 perpé'uer. » chapitre général le foiidi^ de pouvoiis du vi-
L.s Pères de la province d'Avijfnon , bcr- caire général de la province de Home; ce
ceau de l'institut, et rons rvanl mieux iiuc (lui lerait compter dans la cony;ré5;a'.ion
les autiC'^ les sentiments de soumission à quatre provinces au lieu de trois. On les y
rivalise cl les étincelles de ce feu priinllif. fi- c •inptail en ciïet , cl même o i eùl dû peul-
rcil tout leur possible pour (jue le résultat être en compter cin(], puisqu'il y avait aussi
du cliapitre fut <à lavanlajie de leur congre- une province de la Doctrine Chrétienne d'ita-
gaiion, et ils y réussirent, l'ool se pas-a as- le au royaume deNaples; unis nous nepou-
sez Iranquilicmcnl , bien qu'on y eùl laissé vous dire si ces mesures furcnl reconnues
quc'<|ues-uns des opposants pour la canoni- par toute la con;;régalion. Nous allons eu
cité des élections. Les Pères qui ne voulu- outre en nommer bientôt une autre,
renl pas sisner et se soumettre furent dé- Les Doctrinaires n'acitirilaienl la voilure
ilarés inhabiles à posséder les charges. La pour les voyages ((u'aux prèlres seuemenl ;
procurati 11 du P. l'eilloni. vicaire çénéial de il est vrais tnlilahle (|;ie l'on aura inodilié
la pro\ince romaine, du 10 m li \'Vy , au P. cel usage dans les derniers temps. Ces Pères
de la .Mothe, prov iiici<.l d"Avi:;non, pour agir dirigoaicnl aussi , c. mime les Oraloriens et
en son nom dans le chapitre, celle procura- suit lulles Jésuites, des eongrégalions d'iiom-
lion, disons-nous, fut [ncscnice cl admise à mes, si propres à maintenir tes habitudes el
la plur;ililé (les \ui\, après une longue dis- le goût de la piété.
cussion. A la placi- liu P. Jeaume , dont le Celle contagion du jansénisme qui avait
temps était csp ré, on élut pour général le fail tant de raviiges dans la socijté de la
P. Mazenc, supérieur du séminaire de Tar- Doctrine Chrélienne , n'y dominait plus sur
lies, ()rovince do Toulouse , iiommo lecoin- la lin, et. dans sa visite au collège d • La Flè-
iiiandable par se- bons senlime.its el son op- clie , le général , ayant culendu un ancien
position au jansèiiiMiii', el qui jouissait d'une parler d.ins le sens de l'opposition à la bulle,
pension de VOO li\rcs sur lévèchè de Corn- le reprit fortement de lenir ainsi devant les
miiige. Le 1'. Miileti fut luiminè assistant de jeunes gens un langage conforme à dos scn-
ia province d'A>igiion ; le P. Valellc fut conli- limeiits qui n'élaiciit pas ceu\ de la corpo-
iiué assistant île la province de Toulouse, et ration. Néaumoiiis il y eut jiisiiu'au dernier
le P. Morean, recteur de la maison de Saint- moment des jansénistes déclarés ; nous eu ci-
Cbarles. assislani de la province de Paris. leroas un exemple l'raiipiiit.
Le P. \'aleiilin fut continué dans sa place La destruction des Jésuites avait porté un
de procureur général en cour de Uome ; le coup funesle aux Dortiinaires coiiiine au\
1*. \au\eray, procureur général en France, autres congrégations ense;gnantes, non-seu-
et le 1'. Itacol s, secrèlaire général. Tous ces leinent sous le rapport ibrclieu, puisiiue
honiiiH'S étaient aciuellement soumis à la toute i'Eglise s'en r. ssen;it, mais sous le riji-
liuile, cl plusieurs avaient toujours montré port de l'intérêt d'e\i>lenrc et île force mo-
de hons seiitimrnts. Dans le chapitre on raie. Us voulurent prendre el prirent eu
porta plusieurs decrels pour remédier aux cflel plusieurs des collèges abamloniics par
dangers du temps. Leurs dispositions gêné- la célèbre compagnie, et la disette ile bous
rail s étaient de s'assurer, avant les chapi- sujets et même de suj.'ls (luelcomiues aurait
très, les nominations aux emplois, remis- dû leur faire envisager celic nouvelle lâche
sinn des voix , elc. , des sentiments de sou- avec clTroi. Ils curent l'honneur d'être char-
mission au foMiiiil lire d'Alexandre Vil el à gés du faueux collège de La Flèche. Nous
la bulle. Le chapitre fut clos par un discours n'avons rien à dire contre leur administra-
<|ue prononça rarche\êque d'Arles, .M. Ci- lion dans celte maison, ni sur leur eiiseigne-
(.aull de liellefoiil. ment. Ils auront lâché sans doute de se tenir
Aux chapitres généraux qui élurent suc- au niveau de leurs illustres devanciers. Les
ressiyeiiiint les prédécesseurs du P. ^^l/cnc, supérieurs mirent à la tête du collège le I*.
c'esl-a-dire le P. (Jriffon, qui fut maintenu Corbin , liouime d'un grand mèiile , qui lut
pendant douze ans; le P. Chaus-ac , le P. enstiile nommé précepteur du dernier dau-
llacrarére el le P. Jeaume. tous soumis aux pliin cl niourul à Meudon. Le P. Corbin fut
décisions de l'Lglisc, il y a\ail eu aussi des remplacé, en qualité de principal à Li Flè-
oragcs qui , sans être aussi \ii. lents qu'à die, par Noèl-tiabriel-Liice Viliar. qui prêta
iJeaucairc , étaient bien luin d(r l'ediliaiite le serment à la constitution civile du clergé,
union qui doit régner dans de telles assem- fui sacré à P.iris, le li mai IT'.II, pour l'esê-
l-lées. Dans quelque^ maisons la soumission ché de la Majenne, donl le siège laclice était
a la bulle ne trouvait aucune résistance; en à Laval ; fut conventionnel , déclara Louis
p'usieurs autres il y eut des interdits nom- \\\ coupable et \ ota sa détention; devint
II; eux lancés par des êvêques. Des supê- membre ilu corps législilif, renonça à su»
nciirs (.u professeurs lurent éloignés , des évêrhe , abdiqua se.s fondions el mourut le
tidlege-, de jeunes gens évacués, etc. -iu août IK2(). C'est , croyons-nous , le >eul
Deux nns avant le (hapiire de lîeaucairc, évêque de celle sorte qu'ail donne la congre.-
le P. Jeaume, général . se rendit à Komc gali m de la Doctrine Chrétienne, .|ui se se-
pour travailler à la béalilicaliou de César de rail volonlieis passée d'une soinblablo dis-
Uu» cl a runioii des Doctrinaires italiens liucliou.
cri
O'JG
DOC
fiG
L'onJonnaiice <ie Louis XV (1708) et la
crc.ilioii (le la coininissioii pour les réniilicîs
produisirent, comme oii s.iil, un elTcl alTreuf
sur toutes les coiigrég.iliiins religieuses; la
Doctrine Ciiréiienne fui une de celles qui en
furent le plus largement aiteinies. Comme
un givind nombre d'instituts , elle réédita et
refondit ses constitutions. Oelte opération
fondamentale se fil ;iu chapitre général qui
eut lieu à Paiis en 1782, et elles furent pu-
M'ées l'iinnée suivante. N^ius ne répéterons
point ce que ir us avons dit ci-ilessus en
l'analyse des règles, qui i estèrent les mêmes
au fond; mais nous ferons connaître ici les
principales modifications qu'elles subirent cl
(jiii peignent bien l'cspiit de l'époijue et de la
ntaliieureusc congrégation. Les frères con-
vcrs ne sont plus obligés à la recitation de
l'o fice de la sainte Vierge ou du cbapclet ;
il reste un chapitre consacré à traiter de la
vertu d'obéissance ; ci'ux qui traitaient de la
chasteté et de la pauvreté ont disparu. On
ne fait plus de vœux, jias même celui de slu-
bitito. Dans le chapitre de 1776, tenu à Paris,
il f.t déi idé qu'on en demanderait l'abolition
à Pie \ 11, qui l'accorda en elîct par un bref
du IV mars 1783. Après deux années de no-
viciat, passées à la maison même du «o-
vii'iat ou dans une autre de l'instiiut, celui
qu'on jugeait propre à c re admis prenait,
chaque année , l'engagement de ne point
abandonner la charge qu'on lui confiait,
avant les grandes vacances suivantes , et
sans en prévenir la congrégation ; et s'il ve-
nait à sortir avec ces forniaJiiés, il était tou-
jours regardé conin:e membre de l'institut,
^qui lui iniliiiuait même une maison connue
maison d'aliilia ion, sM le désirait, et lui ac-
cordait certains privilèges , comme le droit
de voler, de rentrer un jour; mais il fallait
pour cela que le confrère sorti renouvelât sa
demande tous les ans. Les bénéfices ne sont
plus unis nécessairement à la congrég ilion ;
les membres peuvent en jouir sans cela. Par
lettres patentes du 28 juin 1778, Louis X\"5
<lèclarail les menibrcs de la congrégation de
1,1 Doctr ne Chrétienne propies à recueillir
les successions, etc., et aux antres bénelices
des cflels civils. Il paraît (lu'oulre les pro-
vinces (|ue nous avons ci-i es>us indiquées,
la con^^régation avait sur la fin créé ceLe
diie de La l'ièchi', car nous la trouvons dé-
signée avec les autres dans les nouvelles
constitutions.
La Doctrine Chrétienne avait, dans les
derniers temps, accepté la direction des col-
lèges de Hourges et de Moulins. Klle possé-
dait au''Si le collège d'Avallnn, où elle comp-
tait au noaibrc de se^ membres Koyer-Co,-
lard , publicisle ou politique fort renommé
dius ces derniers temps, et qui a été fort nui-
sible à la monarchie des Bourbons. C'est de
IVoyer-Collard, qui fut réellement, non ec-
clésiastique, mais nienibie de la congréga-
tion des Doctrinaires , qu'est venue celte
nuance de parti polit. que qu'on appelait des
/>(Mrr«M(u'res,saas.savoir ni pourquoi ni à quoi;
car on nommait, sans aucun bon sens, des
Doctrinaires certains hommes que l'aïuour-
propre, la modéraiion naturelle, le dépit ou
l'impuissance , retenaicul dans une sorte de
réserve constitutionnelle.
Nous devons citer ici l'exemple fameux de
l'esprit janséniste maintenu dans la congré-
gation, que nous avons promis , c'est celui
du P. Rlinard, l'un des oracles du parti et de
l'Eglise constitutionnelle. Né à Paris en 172i,
Louis-Guillaume .Minard, après sa philoso-
phie, entra au noviciat de la Doctrine Chré-
tienne, qui comptait alors des jansénistes zé-
lés, tels (lue le P. Jard, le P. de Saint-Clenis,
le P. de Convenance , etc., et donna ardem-
ment lui-même dans leurs opinions. Quoique
interdit par M. de Juigué, il fut sur les rangs
de ceux que ses confrères voulaient choisir
pour leur général en 177S. Il vécut retiré
dans la maison du Petit-Bercy, au faubourg
Saint-Antoine, où, toujours interdit, il con-
tinua de diriger un grand nombre de ses ad-
hérents. 11 embrassa avec chaleur le parti
de la constitution civile du clergé et fut le
premier curé constitutionnel de Bercy, qui
n'était pas alors paroisse, mais qui l'est de-
venu depuis. Etant aussi une des colonnes
de la nouvelle Eglise de Paris , il se trouva
encore au nombre des candidats entre les-
quels on devait choisir un successeur à l'évc-
que Gobel. Minard mourut le 22 avril I7'.)8.
Il n'a laissé cjue deux volumes, l'un intitulé:
Avis aux ndèles , 1795; l'autre, Supplé-
ment, etc. 11 y prêche un jansénisnio pres(iue
aussi cru que celui du P. (ierberon dans son
Miroir de la Pieté , et engage à se confesser
aux préties jansénistes, quoique interdits.
Tous les Doctrinaires n'avaient pas, comme
nous l'avions cru , prêté le serment civique,
et il parait que le jansénisme ne dominait
plus dans leur corps, où il avait seulement
laissé les traces et les effets de son action
corrosive. A côté du P. Minard nous avons à
n immer le 1'. llioulx.quia vécu dans le
même temps que lui. Prédicateur célèbre à
Paris, le P. îvaoulx. Doctrinaire, vivait à la
maison de Saint-Charles , dans celte ville.
Les Pères de !a congrégation étaient restés
dans celle maison et ne la quittèrent qu'au
mois d'août 1792, quand on (il la recherche
des prêtres (lui avaient rel'u>é leur adhésiork
à la constitution civile du clergé ; le P.
llaoulx était de ce nombre ; il se cacha chez
deux pcr.'iOiines , et faisait nue course pour
resercice du saint ministère, quand il fut
reconnu cl trahi par un habitant de l'ile
Saint-Louis. Dénoncé, arrêté, incarcéré, puis
interrogé et absous, il était readu à la li-
b rté, ()uand son dènoncialeur, irrité de cet
acquilleinent , imagina d'aller débiter dce
blasphèmes contre Jésus-Christ et la religion
en présence du P. Kaoulx, qui allait sortir de
la salle, mais qui crut roecasion toute natu-
relle de def^endre la vérité, en parlant el
prêchant là sans crainte. H fut arrêté de
nouveau et conduit à Saint-Lazare, où tant
d'eeclesiasli(ines étaient renfermés, il fut
condamné à mort; mais Dieu lui réservait
une épreuve terrible: il reconnut dans la
charrette qui le conduisait à la mort sou
propre frère, qn', la veille, avait été cou-
f.7
dniniic dans une .iiitrc iliainliri'. I ous ileu\
furcnl «'xoiu'é' à la harriôre du rrâiu-, où
poririMil lanl ti-i \irlimos. l'nis pir les liins
do la naluro ri de r.imilié pcndaut la vie, i'i
tnorte (jnuiiitc non sunl divifi.
Le dcriiierucncral des Doctrinaires, loi', de
Il.innefous, homme esliinable el i|iii n'avait
emlirassé ni les erreurs du j insénisme, ni
celles de la révolution, mourut en ISO.i, dans
r.t.ildissemenl de I alibé Sicard, à Paris.
^ous ne connaissons plus aujourd hui
qu'un membre de la congregaiiin delà Uoc-
Irine Clirclienne , r'c>l y\. l'abbé Souquelde
la l'our, cuié de Saint- Tliouias d Aquiii, à
l'aris, (jui a peut être survécu à tous ses con-
frère s, cl qui est comme le leslaniMil laissé
par cette corporation savante, pour nous
donner une idée ilc ses richesses littéraires.
On en jugera par ce que nous allons dii e des
lra\aux de M. l'abbe de la l'our. Ce p:é re
lab iricux élail entré foi l jeune ilans l.i con-
grégation delà Doctiiiie Chrétienne. (] ni l'a-
vait eniplojé a renseignement au collège de
La l lèche! Il y résidait et était déjà nrélre,
qu;ind la révolution vint l'arracher à sa so-
ciété el sa vie paisible. Il n'embrassa puinl
les erreurs du temps et ne quitta point sis
habituiles studieuses. Son attrait parliculiiT
l'a porté vers les poètes latins, et il a publié
les traduet oii< suivantes : 1° La Christiwte
de N'ida ; 2" l'Enfantement delà Vicrije, àc
Siinnazard ; 3" / /;'H/'niH Jc'sus, poémo du l'.
5eva, jésuite ; '»" Saint IJ ijdctntlie, piéme de
(îuillaunieleHIanc.évêque nomme de (jr,ls^e,
mais qui ne prit |)0'.nl |iossessioii. .M. de la
Tour pub;i,i ce poémc en l'honneur de s.iint
]|)acinlhe, par adulation pour .M. Quélen,
arclieTécjue de l'aris, (jui s'a|)pelait Hy.i in-
Ihi!. li'i latdieii. C'est la première iraduciiou
de ce poète qui ail été publiée; M. de la
'l'our la fil éianl encore à La Mèche. C" L'E-
lablit.iement du cliristianismc nit Japon, poé-
nie, p tr . 'million Franck, écolier du collège
de- Jésuites, à Liège, el élève de Fellcr. 7'
Les Silc(S, de ."^lace. 8" Lu guerre dr Tripoli,
poème, jiar Cjzdosa, Portugais. Ccl ou\ rage
est peu ciiiinu en France. M. de II Tour l'cii-
leiidil vanier cl le chercha aussitôt à la Iti-
hl.othèqueilu roi, où il ne le trouva | oint, cl
Il le lit venir de Li>!)iiniie , pour lelraduiie*.
1)' l'u( les t tins : l'c^I le nom (]ue .M. de la
Jour donne à un recueil de traduit uns de
pornics moins volumineux, el ijui sont au
nombre de six ou sept : 6'ra{ms-/''(i//.icius,
Acincsien, Castor, Les Tiavnux d'Hercule,
Anani/nic, Curncliiit Scvcrus : \ii Iraducliun
de ce dernier a été (aile par .M. l'abbé de
L grand «icaireà Kourges, que
M. Ile l.i lour a préparé à sa première com-
iiiiinion. Nous ne coiin.iiisous pas de traduc-
teur qui ail plus ni même auiant publié en ce
i;enr.-, que ,M. l'at^be de la Tour. O, loge-
iiaire a juurd hui, il se soiiviciil qu'il a jadis
passé d.!, nuits à ces éludes di. ries, et quo:-
i|ue plue a la létc d une paroisse el arri\é
an d. la de l'iige du repos . il ne les quitte
jamais. iv.int minuit. Ohl qui rendra .1 l'Lglisc
le* congregaliolis religieuses, lesquelles lour-
iiisiaivul de tels liommes 1 Au tome second
ncTioNNAiiiE id.s ouimES rhligielx.
de son Histoire des Ordres reli(iicux,M. lieii-
rioii, p.irlanl de la /^rK/ri/icr/i/t'/i'fnnc.diiiini)
ipielques liioiièri s sur rétabli-sement en It.v
lio que nous avons mentionné ci-dessus, el
dit ([u'iis avaient, j inle aux Irois frai ça;-
ses, one pro\ inee de Home, foriiiéo dans le
d( rnier siècle de huit mai-ons que la congré-
gation avail en Iialic, el de >ei t antres qui
lui furent données par Hiuoil XIII. Ces mai-
sons étaient des collèges , sciiiinuires on pa-
roisses. Nous ignorons toujours ce qu'elail
celle province de Naples. dont n ais avons
parlé, elsi ces m.iisons elaicni celles de Doc-
trinair:'S italiens qui s'él.ienl, nous a l-oii
dil, unies à celles de Fr.mce, el possédaient
le corps de César de lins.
La maison de S. linl Charles à P. iris èlail
située à l'eslrémilé supérieure de l.i rue des
Fossés-Saint-Victor, et eiail habitée par le.
général, 18 ou 2d prêtres environ, el un eer-
lai.i noinb e de novici's , qui payaient 50;)
livres pour l'année de ])robation. Ci s con-
ditions et le nombre des Pères avaient sans
douleèté modifiés vers la lindu dernier siècle.
On remarque comme une chose singulière
que dans la chapelle d(> la Doctrine Chré-
licnne, il y avait tous les ans sermon et sa-
lu( en l'honneur du bon Larron. En 1705,
M. .Miron, docteur en théologie, d(! la mai-
son de Navarre, légua sa bibiiothèque aux
l'ères de la Doctrine (^hrétieniio. à condition
(ju'elle serait publique, lille était composée
do plus de •20,000 volumes, parmi lesquels
il y avait des éditions rares el le> maiiusi-rits
du savant abbé Le Heuf, auteur de l'Histoire
du Diocèse de Paris. I/étahlissen'.ciit de lîei ey
avait ii'abord été faiià .Vnloni auxviB' siède.
AL de (îondi, qui avait allire les Doctrinaires
dans son dio.èse, esimiiiit ces Pères el se
riîlirail iiuebiuelois ( liez eux; l'auire e(a-
blissemeiit, à Puis, était à S.iiiit-Juli ii-des-
.Ménctriers. Le célèbre Flècliier, evèqiie de
iNîmes , était meîiibrc de la coiigregalion de
la D.>clrii.e Chrétienne.
l\nurcll(s ccclesinstfjues, passim. Tablenn
historique et pillresijue de l'aris. . par J.-l!.
De Saint-\ictor. 8 vol. iu-S. Etat on table 'U
de la tille de l'aris ; par... iii-.'^. Constiiuiio-
nes Conf/reijationis Doctiinœ Christi, 173'j ;
exdem i'iH.Ï. Histoire des Ordres, p-.ir M. Hen-
rion, 2 vol. iii-12. — Description de Paris;
parPiganiol de la Force. — licnsri /ncments
fournis par M. l'abbé delà Tour ; — notes
prises passim, etc. It d-k.
DOCTHINE CHUEriE.NNt;, kn Itu.ie
(CoNGIliiGaTION DK L\}.
L'uniiin qu'il y a eu en re les So:nasqiies
cl les Pères de l.i Docirine (^hrélienue en
France nous a obligé de parier de ces drr-
niers avant h s Pères de la Doctrine Clire-
liennc en Italie, dont l'institution est plus
ancienne cl i|ue l'on peut mettre au noinliic
des réguliers, quoiqu'ils ue fassent pas de
vonix solennels; mais la slabililè à l.iquelle
ils s'engagenl dans celle congrégation le, y
lie de telle manière, «juc le p ipc Url:ain \ | 1
a ordonne que ceux iiul en sortiraient ic-
r.'j
poc
ooc
70
relient traités comme apostats etencourraienl
les mêmes peines que celles qui sont portées
par sa constitution du 20 seplemhre 1G27
contre les fugitifs et apostats des ordres ré-
guliers. Quoique nous les rangions sous la
règle de Saint-Augustin, ils ne la suivent pas
néanmoins; mais nous ne parlons d'eux ici
qu'à cause que nous avons |>arlé dansl'aili-
cle précédent de la congrégation qui porte
le même nom en France, et qui a véritable-
ment suivi la règle de Saint-Augustin pen-
dant un temps assez considérable.
Celte congrégation des Pères de la Doctrine
Chrétienne en Italie commença d'abord par
une espèce de confrérie, dans laquelle quel-
ques prêtres et laïques entrèrent sous le pon-
tificat de Pie IV, et qui s'unirent ensemble
pour enseigner le catéchisme aux cnfan'.s el
aux ignorants, noii-seulemenl les jours ou-
vrables dans les maisons particulières, mais
encore les fclci et dimanches, aGn que les
gens de métier qui ne pouvaient quitter leur
travail les autres jours pussent, les fêtes,
proliterde leurs instructions. Le premier à
qui Dieu insjiira une si sainto œuvre fut un
gentilhomme milanais nommé Marc de Sailis
Cus mi , qui , ayant abandonné ses biens et
sa patrie, vint à Rome l'an 15G0 el s'asso-
cia un nombre de personnes charitabhs
pour travailler avec lui à ces sortes d'ins-
iru( lions.
L'église de Saint-Apollinaire à Rome fut
le lieu où ils commencèrent d'enseigner pu-
bliquement la doctrine chrétienne, et un des
premiers ouvriers qui s'employa à ce saint
exercice fnl le célèbre César Baroiiius, qiù
lu! depuis cardinal. Cette confrérie s'augmen-
lant de jour en jour, le pape Pie V accorda
l'an 15G7 i!es indulgences à ceux qui y en-
treraient, el l'année suivarite le cardinal Sa-
vi'lli nomma pour supérieur de toutes les
érolos de Kome le I'. Henry Pétra de Plai-
sance , l'un des premiers compagnons de
sa. rit Philippe de Néry. Ceux qui s'enga-
geaient à celte œuvre charitable se divisa. ent
p.ir bandes pour aller f.iiic les mêmes (onc-
tions dans les villages qui sont aux environs
de Kome. (Jui'!ques-uns abandonnèrent en-
suite leurs propres maisons pour aller de-
nii'urcr ensc.i^blc dans une maison , vers le
Poiit-Sixte, sous la conduite du P. Mare Cu-
sani, qui l'an 1586 fut ordonné prêtre en
vertu d'un bref du pape Sixte V et à la per-
suasion du P. Henri PéUa. qui lui commanda
d'obéir.
Le p ;pe Pie V, voyant le grand fruit que
ces personnes charitables faisaient, et vou-
lant faire oliserver le décret du concile de
Trente touchant ces soi les d'instructions, or-
donna par une bulle du 0 octobre 1571 que
dans tous les diocèses, les curés de chaque
p;iroisse établiraient de pareilles confréries
de la Doctrine Chrétienne, et accorda beau-
coup d'indulperces à ceux qui y entreraient,
(jregoire XIII augmenta encore ces indul-
gences el donna aux Pères de la Doctrine
Chré.ieniie l'église de Sain;e-Agathe à Home,
au delà du 1 ibre, où la confrérie fut aussi
Iranslérée. Comme les uns cl les autres n'a-
vaient qu'un même esp it et ne (enda.eni
qu'à l'instraclion de la jeunesse el des igno-
rants, el qu'ils faisaient d'abord leurs assem-
blées en commun, ils jugèrent à propos d'é-
lireenlreeux quelques personnes tjuieussenl
noii-seulemenl l'intendance des écoles, mai?
encore le soin de maintenir l'union cl la p.iix
entre eux. C'e-t pourquoi ils en choisirenl
quatre, auxquels ils donnèrent le nom de
déliniteurs, dont il y en eut deux qui furent
choisis entre les Père^, el deux entre les con-
fières.
Les écoles se mullipli int aussi bien que le
nombre des ouvriers, ils demandèrent un
protecteur au pape Clément VllI, (jiii leur
donna le cardinal. Alex;in Ire de Médicis, qui
fut ensuite pape sous le nom de Léon XI ; et
peu de temps après le P. Marc Cusani, fon-
dateur du cette soc été, mourut le 17 se|i-
tembre 1595. Les dériniteurs gouvernèrent la
congrégation et la confrérie pendant un
temps assez considérable, el ils faisaient
leurs assemblées dans l'oratoire de l'église
Saint-Jérôine-de-la-Charilé; mais les Pèics
de la Doctrine Chrétienne et les confrères, so
voyant en grand nombre, élurent chacun un
chef pour leur corps. Les Pères donnèrent à
leur chef le titre de prévôt, el les confrères à
leur chef celui de iirésident, et ils élureiu
aussi d'autres olûciers auxquel." ils donnè-
rent différentes qualités, comme de conseil-
lers, visileuis, etc. C ■ qui se fit l'.ui 1590 du
consenlemeut du ca dinal Delmonte, p lur
lors vice-prolecteur en l'absence du carainal
Médicis, qui était légal en France.
Le pape, afin d'exciter les uns et les au-
tres à se comporter avec encore plus de zèle
dans les fonctions de l'mslitut qu'ils avaient
embrassé, et voyant que l'église de Sainte-
Agathe, (,ui avait été accordée aux Pères de
la Doctrine Chrclienue, était trop [;elite pour
y faire leurs fonctions et pour assembler
leurs confrères, leur donna encore celle de
Sainl-Martin-du-.Monl-de-Piété, au quartier
de la liegola, oà ils ont toujours tenu depuis
ce temps-là leurs assemblées généra;cs et
particulières; et le pape supprima le litre de
paroisse, que celte église avait, afin (ju'eJle
fût plus libre. Ce pontife, souhaitant de plus
que l'.nstruction de la doc'riiie fût partout
uniforme, donna ordre au Père liellarmin de
la Compagnie de Jésus, qui fut ensuite cardi-
nal, de composer un petit catéchisme que l'on
devait enseigner dans toutes les écoles.
Léon XI ayant succédé à Clément VII [,
Antoine Cisoni, qui était pour lors président
de la confraternité et qui fut ensuite évéque
d'Oppidi), el le prévôt des Pères de la Doc-
trine Chrélicane, allèrent trouver ce nou-
ve;iu pontife pour le prier de leur accorder
un protecteur, mais il leur déclara qu'il vou-
lait être lui-même leur prolecteur, ce qui ne
dura pas longtemps, puisque ce pontife mou-
rut vingl-sept jours après son élection. Les
Pères el les confrères se rassemblèrent après
sa mort pour faire élection d'un iiuire pro-
Iccleur, el choisirenl le cardinal Uorghé^e,
alors vicaire de Kome, qui, ayant été lait
pape quelques jours après sous le nom do
71 DICTIONNAlRi: DKS OUDRES UKUGIELX. 72
Paul V, cl ilfsimiil favorisor cetio confrator- prôseiice du généra!, ou, en .-on absenco. du
nile . i'érigci on archicoiifraleniili; dans vicc-prcvôl, ou au moins do dciis dcCmi-
l'ég'.i'so doSaiiil-Picrro, voiilanl que les éuli- leurs; touies les soinaincs dans chaque niai-
ses de SiUiilc-Auallie cl de Sainl-M irlin-du- son il y aune aulre ongrégalion eu prc-
Mont-dc-l ioto resl.issonl loujours aux l'éres scncc ilu rccleur.
de la Docttino Chrétenno cl aui confrères, Dans la congrégalion générale, lous les
cl qu'à ra\cnirlis «ardiiiaux vicaires fus- recteurs des maison; doivent s'y Irouvor
Boni leurs |iro'ecleurs. Il accorda encore à avec un député de chaque maison, lorsqu'on
celle archiconlValornie la p^rniissiou de doil faire élection d'un général ; cl, lorsque
pouvoir agréger lellcs autres confralernilcs l'on n'en doit point faire, la congrégation csl
dans le monde qu'ils voiidraeiil.el, par grâce seulemeni composée des officiers généraux.
spéciale, de pouvoir délivrer lous les ans qui élisent les sulialt mes : le recteur de
di'ux prisonniers pour crines, voulant ce Uome envoie les fêtes l'I dinaiiches les Irèrcs
plus qu'un paiivie confrère <le c tic arclii- dans les écoles pour enseigner le catéchisme,
i-onfralcinile lui l lUjours du nombre des qui est la première lin de cet ins;itut.
douze pauvres auxquels Sa Sainteté lave Ks Toutes choses sont communes dans la con-
pii'ds le jeudi saint. grégal on, personne n ayant rien en propre,
I.cs papes Urb. lin Vin, Innocent X cl Cl.-- elles chambres ne doivent point fermer à
ment X. oui encae ai cordé beaucoup d'in- clef. Lorsque quelqu'un doit élre[)romu aux
dulgcmes à ces conficres, et Innocent \i, or 1res sacrés, les supérieurs obtiennent un
an commenccmenl de son pontiiicai, lit pa- bref du pape pour faire recevoir sous le titre
raltre son zèle pour l'avancemi-nl ilc colin- de la congrégation ceux (|ui en se il jugés
slilul, le regardant comme Ircs-nécessaire capables. Aliu que la vie commune puisse se
pour m:iu;enir et étendre la loi calholi(|ue. malnlenir dans celte congrégation, ele pos-
l'our ce sujet il renouvela les élections de sède des rentes et des fonds pour l'entretien
douze députes de la même con^regUion et des frères : c'est pourquii ils ne reçoivent
arcli:conlraterni;é : savoir , six gentils- aucun élablissemcnl (|u'il n'y ail en même
liomnies et six cccicsiasliques d'une virlu temps des fonds sufllsants pour le pouvoir
cl d'une piété exemplaires, auxquels il donna entretenir, afin qu'iU ne soient poinl délour-
pour président M. Ange de la Noce, aichc- nés des lonrli()ns de leur inslilul, qui est
\éqne de ilo-sane. Il lit réimprimer les con- d'ensciuner 11 doctrine chreli'iine ; ce qui
sliiulions et les statuts de celle .irchiconfra- pourrait arriver s'ils élai.nl obligés d'aller
lernilé qui avaient été aulrifois dressés par mendier les choses nécessaires à la vie. Le
les cardinaux Baronius, Taurugi et lU'llar- Ion Is nécessaire pour conini mic 'r un éla-
niin, par ordre de Clément \'lll : il voulut blisscmenl doil être au moins suffisant pour
que la congrégalion se tint tous les huit entretenir sis personnes. Liiniformilé d •-
jours, et accorda de nouvelles indulgences vaut élre dans toutes leurs maisons, elles
et de nouveaux privilèges aux confréies. doivent être partout, aussi bien que leurs
Quoisiiie les l'ères de la Doctrine Chré- églis 'S, de même structure et de mêiuc gran-
tienne fa^senl une «ongrégalion réparée de ileur, autant que laire se peut.
(.elle ari h confraiernilé, et iju'ils aient neuf Ils ne disent point l'ofiice en cumn.un, si
ma sons en différentes provinces, ils sont ce n'est aux fêles principales de l'année et
loujouis neanuioins unis en>emlile en ce (jui des |)atroiis de leurs é,;lises ; les autres jours,
r. g.irdc rin>lruclion de la jeunesse et jouis- ceux qui sont jirêtres récitent en jiartiiiilier
sont des mêmes grâces et des mêmes priijlé- l'oflice du brévia're roni in; ceux qui ne
ges. Le 1 èi e Jean-liaptisleSéralini d'Or* icte, sont pas dans les orilrcs sacrés cl les Liï(|ues
elanl gênerai de celle congrégalion, dressa sonl seu!c:uenl exhor es à réciter le pelil
l'an loO^J des consiliulions pour y ma nlenir t» (îcc de la \ ierge, cl ceux qui ne savent
l'olservance régulière. Ivllcs furent approu- |)oinl lire doivent dire le chapelet, ils oc.l
vers par le cardinal vicaire, par ordre du deux heures d'oraison par jour, lune le ma-
p.ipc (îrêgoire Xlll, et impr mécs à Uom;î lin cl l'autre le soir; ils prennent la disci-
l'an lljlli. Klles sonl divisées en deux par- pline lous les mercredis e. vendredis de
lies : la première, qui contient ii chapitres, l'année, el encore lous les lundis de I AvenI
regar e les ofliriers el supérieur^ de la t;on- el du Carême, cl tous les jours de la semaine
giegaliun, cl iraile de leurs élections; la sainte; ils jeûnent icndanl l'Avent el lous
seconde, de 4'» chapitres, Iraiic des obser- les vi ndredis de l'année, l'nefois la semaine
vanccs el regarde la congrégalion en par- ils reconnaissent leurs laulcs devant le rec-
liculier. leur, ils font lous les jours une confércn;o
Les (ilfiriers généraux el supérieurs iini de cas de conscience, el il y a un maiire q i
gouv.'inent toute la congrégalion souille enseigne la manière d'enseigner le caie-
prevôl gêner. il, qui en est le (hef;levu«;- cliismc. Ils ne peuvent écrire ni recevoir aii-
ptevol, trois difinilours, un chancelier, deux cune lettre sans l'avoir montrée auparavant
visiteurs cl un ci)m(iotiste. Les suliallcnics au supérieur, qui ne leur doil jamais nci-
sonl : los recteurs des maisons, sacristains, mettre de parler ni d'écrire à aucune iel-
iiifiiiniors, maîtres des novices, deposila res, gieusc, el ils ne peuvent sortir sans sa per-
tomniuiinrs , provcdiU'urs el dépensiers, mission cl sans un compagnon qu'il leur
'lous les an» l'on lient la congrégation gène- doit donner.
raie; tous les mois il s'en lient aussi une OuanI à l'habillemenl , I, s prêtres et les
l'atlKuliére dans la maison do llouie, en ilercs porli ni l'hatal ecclésiastique avec un
-.- DOC
petit ra')al largo d'un doi;;l autour du col-
iet (1), et les clorcs ne peuvont porter le
lionnei tarré que lorsqu'ils sont dans Ifis or-
dres sacrés, les laïqui^s ont un habit plus
( (iurt et portent dans la maison une calotte
au lieu de bonnet e.irré.
11 leur était ;iu refois permis de sorlir de la
congrcgaliuu (inam! bon leurscniblail. Aprè-s
l'annco de m.vic al , le général, à (]ui il ap-
partient de recevoir avec sesdèfiniteurs ceux
(jui se présentciil pour entrer dans la con-
f;régation , demandait à celui qui voulait
s'engager s'il avait connaissance des cousli-
tulions, de leur manière de vivre, de leurs
observances, des fatigues qu'il fallait sup-
porter, et s'il avait dis forces sufûsanics
pour cela ; qu'il lui était permis de sortir,
mais que s'il voulait rester il fallait qu'il ob-
servât la vie commune et enseignât la doc-
trine chélicnne avec un ferme propos de
persévérer toute sa vie dans la congrégation,
et (ju'après cette résolution il ne lui serait
plus permis d'en sortir. Si le novice consen-
tait à rester, le général l'i-verlissail que passé
cin<i ans il aurait voix active el passive
dans le chapitre et même plus tôt s'il se com-
portait bien , s'il vivait régulièrement el s'il
ilonnait des marques d'une plus grande sta-
bilité, comme si voloîilaircmcnt il jurait et
faisait vœu de cette stabilité et de vouloir
persévérer dans citle congrégation. Voilà de
quelle manière se faisait leur engagement;
cependant il y avait des raisons peur les-
quelles on pouvait les renvoyer après s'être
engagés à la congrégation , qui sont mar-
quées dans le chapiire septième des consti-
tutions. Si ceux qui étaient sortis de la con-
grégation , soit qu'ils eussent été renvoyés ,
ou qu'ils fussent sortis volontairement , y
rentraient, ils devaient recommencer l'an-
née de noviciat ; mais l'an 1C09 il fut ordonné
dans leur chapitre général qu'après l'année
de noviciat l'on ferait vœu de demeurer dans
ia congrégation. Le pape Grégoire XV, par
un bref de l'an 1021, réserva aux souverains
pontifes le pouvoir de dispenser de ce vœ'.: ,
el Urbain VllI, comme nous avons dit, or-
donna que ceux qui sortiraient de la congré-
gation seraient traités comme apostats el en-
courraient les mêmes peincsque les apostats
et les fugitifs des ordres religieux, confor-
mément au concile de Trente et à la cons'i-
tution de ce pape du 20 septembre 1027. Le
pape Clément Vlll , dès l'an 1596, avait
exemple de la juridiction des curés, tant
pour les sacrements que pour la sépulture,
les IVres de cette congrégation, et les avait
mis sous celle du cardinal vicaire. Us ont
pourarmes trois montagnes surmontées d'une
croix , avec la lance, l'éponge et des fouels
(jiii ijondent de chaque côté do la croix.
Mémoires envoyés de Home en 1707. Car!.
I5artlio!. Piazza , Eusetolor/. Rom. I. V, c.
■il, et t. VI, c. 19. L'on peut consulter aussi
les Conslilutions de celte congiégalion, celles
de l'archiconfraternité, le ISullaire romain,
et ['hilipp. Uonanni, CaUdorj. uni. reli<].,
part, !ii.
(1) Voij., à la lin du vol., n° 7.
L':r.THjN.\Ai!i!i uku 0;sna!:s r.ELiT.KLv.
IKt.M
74
Le P. Hé'jot ne dit point assez clairemcnl
quelle a été l'origine réelle de la congréga-
tiondela Doctrine Chrétienne, en Italie, et na
fait point assez voir quand et comment elle
a été séparée de l'archiconfraterniié du même
nom el qui a eu.iu^si les méoics fondateurs.
Nous avons entendu dire qui' celle sociélé
s'était réunie , au dernier siècle , à la con-
gié:;ation des Doctrinaires de Fra;ice et avait
embrassé ses règles, et que c'était pour
cela qu'elle s'éiail procuré le corps de César
de Bus.
Il est vraisemblable, sinon certain, qu'elle
formait celte piovinco de Rome qui députa
un vicaire général , en 1744, au chapitre gé-
néral de France , tenu par les Doctrinaires à
Beaucaire , et dont nous avons parié dans
l'article additionnel précédent , et qu'elle
était composée des maisons dont les Doctri-
naires formèrent leur province italienne. U
paraîtrait en outre qu'elle avait aussi une
province au royaume de Naples. Voir ce que
nous avons dil sur cette union aux Doctri-
naires français.
Les Doctrinaires italiens avaient autrefois
dans la ville de Rome les maisons de Sainle-
Agathe in Transleiere, Sainte-Marie a Toire
di buon Viaggio, cl Sainte-Marie in Monli-
celli. Aujourd'hui leur supé. leur général est
le R. P. Pierre-Sylvestre Glanda , appelé vi-
caire général. Le R. P. Victor Bevilacqua
Valklti est leur procureur général.
B-D-E.
DOGE, A Venise. Voyez Ciiaisse.
DOMINICAINES..
De l'origine (lu second ordre de SatnC-Domt-
nique, ou des religieuses Dominicaines , ap-
pelées en quUiues lieux Prêchercsses.
Si l'on avait égard au temps del'instilution
des premières religieuses de l'ordre de Saint-
Dominique, elles devraient tenir le premier
rang entre les trois ordres qui portent le
nom de ce saint , puisqu'il avait déjà fondé
des religieuses à Prouille quelques années
avant que d'avoir institué sou ordre i our les
hommes , mais il est ju-le que les filles don-
nent la préséance à leur Père saint Domini-
que, qui , dans le temps qu'il travaillait
pour la conversion des Albig ois, fut si
louché de voir que quebjucs genilshommes
de Guyenne, conliaints par la nécessité et
n'ayant pas de quoi nourrir et entretenir
leurs filles , les vendaient ou les donnaient à
élever aux hérétiques, qui les pervertis-
saient, qu'il prit la résolution de fonder et de
bâtir un lieu oîi ces pauvres demoiselles
pourraient être élevées et entretenues de
tout ce qui serait nécessaire pour leur sub-
sistance. Il con)muniqua son dessein à Ber-
n-rird, archevêque de Narbonne, et à Foul-
ques, êvêque de Tou ouse , qui non-seule-
ment l'approuvèrent, mais y voulurent con-
tribuer par leurs libéralités ; el saint Domi-
nique , ayanl encore reçu quelques aumônes
de plus eurs peisonnesde piété , jeta les fon-
dements du monastère de l'rouille entre Car-
cassonne et Toulouse, à un cpiart de lieue
IL
niCTîON.NAIRE DES ORD'.ŒS RELIGIEUX.
75
àè Fanjaux. I! fui bali en ppii do Icinps l'an
120G, cl rauiK'L" sjnaiil' larchcvéquc de
Narbonnc donna à ce miiiiaslCre l'église de
S.iiiit-Marl n de Limoux avec tous les droits
cl dîmes qui lui apparlenaicut dans ce bourg
el dans celui de 'l'ax.
11 j eul d'abord onze denioi elles qui se
consacrèrcnl à Diea dans relie maison le
jour de saint Jean 1 livanticlislc, dont il y on
avait nei.f hérétiques albigeoibcs qui avaient
é!c converties par les miracles de saint Do-
inini(iuc, savoir : Aladaicic. Ilaymonde, l'.is-
s.irine , IJcrciigôre , lUchardc , I3arbcjrane ,
Jordanne , riuiilenicite de l.aupuis, r>.i)'-
cionde Clarette el Ciantienne , qui rcrurenl
les premières l'iiabil des mains de saint Do-
minique , el les deux autres se nommaient
SIessjne cl Gui! emelle de Fanjatix. Leur
liabii dans ce temps-là ciuisislail en une robe
blanche, une chape t.innce et un voile
noir(l). Ce saint fondateur les obligeai tra-
vailler à certaines heures du jour pour fuir
l'oisiveté, principalement à (Her de la laine
cl du lin p lur faire leurs h ibits cl le linge
qui leur claii né essaire. 11 leur prescrivit
aussi quelques règlements pour leur con-
duite , el leur donna pour supérieure Guille-
mellc de Fanjaux , quoiqu'elle eût reçu l'ha-
bit la dernière. Elle gouverna jusqu'en l'an
1225 celle communauté , qui s'augmenta si
notablement dans la suite, ()u'il n'y a jamais
eu moins de cent religieuses dans ce nio-
iiaslère, où l'on ne recevait autrefois que des
Ci les nobles. La supérieure est prcsenlc-
inenl à la nomination du roi; el la iircmière
qui fut nommée fut Jeanne d'Amboi?c , à la-
quelle succéda Madeleine do Bourbon, à qui
diMi\ autres piincesses de la môme famille
roy lie ont oussi succédé dans la suile. 11 est
jorti de ce monastère des religieuses pour
en fonder (li\ ou donzeaulres , tint en France
qu'en Hsp igne , et il porte pour armes de
gueules au ihevron d'or, au chef d'azur se-
mé de fleurs de lisd'or, l'écu surmonté d'une
croix pommelée, cl environné d'une paltnc
cl d'un lis.
Depu's que le monastère de l'rouillc fut
fondé, jusqu'en l'an 1218, saint Dominique
ne lit point de nouveaux établissements pour
lies filles , et pcut-élro qu'il n'aur.iit point
songé à en faire , si , étant à Uome oceuito à
I.! iioiiveilec(,)'i!>lruclioii (liicuuvcnl de Sainl-
biH e , que le pape Honoi lus III lui avait
donné pour ses religieux , il n'eût pas reçu
commission de ce |ionlifi' do rassembler en
un seul monastèie plusieurs religieuses (jui
éiaienl dispersées à Uonie dans plusieurs pe-
tites couimunaulés, où elles ne vivaient pas
avec assez de régul.iri é. Sainl l)omini(iue
exécuta d'abord les ordics du pape; mais,
voyant que ses discours é'.aieni inutiles et
qu'il ne poiivail réussir, s'il n'était seiondé
de l'aulorilédu sainl-pèrc, puisqu il ne Irou-
\a:t pas seubnicnl de l'opposilion de la part
dis rcligKuse.*, uiais encore de leurs parents
Pi de leurs amis, elquc le peuple criait hau-
Icincnl contre l'ordre que le souverain j.on-
<I) ''ny-, il 11 fi.l 'lu Ml!., Il"-- :' g| 9.
tife avait donné de renfermer Ci s roligieusi »
dans un même monastère, il le fut trouver
pour le prier do commeltro des personnes
d'autorité pour le seconder. En ( ITcl, le pape
donna cette commission à Irois cardinaux ,
qui furent Ilugolin , évéque d'Ostie, litienno
de Fosse-Neuve , du litre des Douze-Apô-
tres, el Nieolas, évéque de Fraseali.
Les plus opiniâtres étaient les religieuses
de Sainte-Marie au delà du Tibre , el entre
autres r.iisons qu'elles donnaient pour n.^
point se soumettre aux ordres du pape, elles
disaient qu'elles ne pouvaient se résoudre à
abandonner une image miraculeuse de la
sainte \'ierge qui était dans leur église, el
que l'on prétend avoir été peinic par saint
Luc, laquelle élail en grande vénération
parmi le peu[jle. Mais le pape leva cette dif-
ficulté en leur permetianl delà Irauspovter
dans le lieu où l'on voulait les mettre. On vil
tout d'un ( oup un changement merveilleux
dans ces religieuses, que l'on attribua aux
prières de saiiii Dominique, lillesse soumirei.t
au joug de l'obéissance , embrassèrent la
clôiure, s'engagèrent à ne plus sortirde leur
monastère, el de n'y faire entrer personne.
Dès ce mon)eiit saint Dominique se chargea
de leur conduite, el leur [ir scri\ il des rè-
glements pour mainte nir l'observance rcju-
iière. Le pape , a>anl appris ce que ce saint
fondateur avait lait, voulut que le couvent
de Saint- ."^ixle, qu'il avait accorde aux reli-
gieux , (ût donné aux religieuses; il trans-
féra les reli;;ieux à Sainte-Sabine, el leur
donna la u oilié de son propre palais pour
leur demeure. Le bàlimenl du couvent do
Saint-Sixte fut achevé l'an 1219, el loules
les religieuses qui étaient dispersées dans
lîome y furent renfermées le 21 février do
celle année.
Autant que ces religicusi s avaient mal
éJiJié par leur conduite peu religieuse, au-
tant devinrent-elles des esenifdes de vertu
par leur modestie, leur retenue, leurs austé-
rités , leurs moilifiialions cl leur grande
piuvreté, à laquelle elles s'engagèrent vo-
lontairement. Celait une règle parmi elles,
(|ue, le quatrième jour après qu'uiie fille était
reçu-j dans ce monastère , elle était obligée
de r;'i oncer à tous les biens qu'elle possé-
dait el qu'elle pouvait prélcmlre. La première
qui reçut l'haliit de l'ordr.' de Sainl-Domini-
<iue tel ([uc les religieux le portèrent après
la vision du bienheureux llenaud , fut la
bienheureuse Cécile Humaine, de la famille
des Césarini, qui élail supérieure de ce mo-
nastère, el qui, l'an 1223, en sortit parordn;
du papo (îrégoire IX pour aller faire un nou-
vel établissement à Hologne, où elle mourut
sainlcmcnl, l'an 1280, âgée de 89 ans. Ain si,
si les leligieuses do Uome n'ont pas été fon-
dées avant celles do l'rouillc , elles ont e\i
l'avantage de rece\oir les premières l'habil
do l'ordre, que celles de Prouille n'ont icçu
qu'après el es.
Ce monastère do Saint -Si vie élant mal si-
tué, et les rclij^ieuscs y étant toujours ma-
-7 DUM
Ifides à cause du mauvais air, elles furent
iransfciées , par ordre du pape Pie V, au
mont Magnanopoli, qui fait une partie du
Quirinal, où, l'an IGll, sous le pontificat
d'Urbain Vlll, elles ont fait faire une magni-
Dque église et un beau monastère , oîi l'on
ne reçoit que des filles de la première no-
blesse de Home, qui apportent avec elles de
grosses pensions outre leur dot ; et j'en ;ii
vu, du temps que j'étais à Rome, qni avaient
plus de deux, mille écus romains de pension,
c'est-à-dire plus de sept mille livres de notre
monnaie, et d'autres qui avaient cinq cents
écus : ainsi il ne faut pas s'étonner si ce
monastère est un des plus riches de Rome.
Les religii'uses de cet ordre se sont fort
multipliées en Italie , où elles ont plus de
cent trente maisons. Elh s en ont aussi en-
viron quarante-cinq en France, cinquante
en Espagne, quinze en Portugal , quarante
en Allemagne , où les hérétiques en ont dé-
truit un plus grand nombre. Elles en ont
aussi en Pologne, en Russie et dans plusieurs
autres lieux, et mémo dans les Indes. L;i
plupart de ces monastères sont soumis aux
supérieurs de l'ordre ; mais il y en a plu-
sieurs qui dépendent des ordinaires des lieux
où ils sont situés. Parmi le nombre de ces
monastères , il y en a aussi du tiers ordre
de Saint-Dominique. Les religieuses de cet
ordre, tant du second que du troisième, sont
habillées de blanc quani à la robe eî au sca-
pulaire, mais le manteau est noir. Celles du
tiers ordre ne devraient point porter de
voile noir, cependant elles en portent en
plusiurs endroits, comme à Metz, à Toul,cic.
Les rrligieuses du second ordre, conformé-
ment à leurs constitutions, ne doivent man-
ger de la viande que dans les maladies. Outre
les jeûnes prescrits par l'Eglise, elles doivent
jeûner tous les vendredis , depuis Pâques
jusqu'à la fêle de l'Exaltation de la sainte
croix, et tous les jours, depuis cette fête jus-
qu'à Pâques. Elles ne doivent avoir que des
chemises de serge, ne doivent dormir que
sur des paillasses. Mais il y a plusieurs mo-
nastères qui se sont relâchés de ces austéri-
tés. Outre le grand ofûce, elles doivent en-
core réciter au chœur le petit olGce de la
Virrgc.
fuyez Ci.» Michiclc Pio , Prorjen. di S.
Vomenic; Vincent Mar. Font., Monument.
Dominic; Jean de Uéchac , Y iz de S. Dum.
et de ses eomp.
Outre le monastère de Prouille,don! nous
avons parlé, il y a encore en France plu-
sieurs célèbres monastères de cet ordre, où
Ton ne recevait autrefois que des filles no-
bles , comme ceux de Poissy, d'Aiv et de
Monllleury. Le inonaslère de Poissy l'ut fondé
par Constance, fcnsme du roi Robert. E le y
mit d'abord dos religieux de Saint-Augus;in;
mais Philippe le Re', ayant lait refaire l'église,
augmenta le mona?tèrect y mit des religieu-
ses de l'ordre de Saint-Dominique.
DOM
Ï8
Charles II, roi de Sicile et de Napics, et
comte de Provence , fut fondateur de celui
d'Aix. D'abord il fit bâtir le monastère, sous
le titre de No(rc-Dame de Nazareth, dans le
territoire d'Aix, au lieu nommé la Durancc,
et y donna des fonds suffisants pour l'entre-
tien de cent religieuses , qui devaient étro
toutes d'extraction noble. Béatrix , la plus
jeune de ses filles, y prit l'habii, et depuis
il l'en lira pour la marier (1). Ce monastère
a été transféré dans la suite dans la ville
d'Aix et a pris le nom de Saint-Carthélemy.
Les religieuses, étant tombées dans le relâ-
chement, n'abandonnèrent pas seulement
les observances régulières , mais quittèrent
encore leur habit religieux pour se confor-
mer entièrement aux dîmes du monde , à
l'imitation de tant de collèges de chanoines-
ses séculières ; it peut-être qu'elles auraient
pris encore ce litre et renoncé aux vœux
solennels, à l'excmpl.e des chanoinesses, si
l'on n'y avait remédié en introduisant la ré-
forme dans ce monastère sur la fin du der-
nier siècle. Comme il y en eut jJusicurs qui
ne voulurent pas s'y soumet're , on sépara
le monastère en deux, afin que les réformées
ne pussent point avoir de communication
avec celles qui voulaient persister dans la
relâchement , et on appela le quartier de
celles-ci le Vicariat, à cause que celle à qui
elles obéissaient n'avait que le titre de vi-
caire , comme dépendante de la prieure des
réformées. On leur défend. t de recevoir des
novices, et on les laissa vivre dans leur an-
cienne observance , en conservant toujours
leur habillement séculier, qu'elles ont néan-
moins un peu changé de temps en temps, se-
lon que les modes du monde , auxquelles
elles se conforment , ont changé; et il était
l'an 1708 tel qu'il est représenté dans la fi-
gure que nous avons fuit graver d'une de ces
religieuses non réformées [2], Cet habit est
blanc entièrement : elles ont une espèce do
scapulaire qui pourrait passer pour un ta-
blier, ne se mettant que par devant ; et der-
rière leur coi.lure , elles mettent un petit
morceau de gaze i.oire en guise de voile,
mais qui néanmoins ne couvre que leur bon-
net et leur coiOure, et descend jusqu'au mi-
lieu du dos.
Les religieuses de Montfleury furent fon-
dées par Humbert II, dauphin de Viennois,
Tan lii'i2. Ce |)rince, ayant f.iil vœu d'assu-
rer un fonds à perpétuité pour l'entretien do
trois cenis rel gieuses, commença, pour sa-
tisfaire a cette obligation , par la fo::dation
d'un monastère de religieuses de l'ordre de
Saint-Dominique auquel il destina son châ-
teau ei sa terre de Aiontlîeury, éloignes de
drenoble de deux lieues (3). Le nombre de
ces religieuses devait être d'abord de (luatre-
vingts, outre six religieux pour leur admi-
nistrer les sacrements. Deux ans après, il
r.iuginenla de quarante, et eu 13'i-8 il le ré-
duisit à soixante-dix. Ces religieuses ont
(I) Oes Noulys, Hist. des rois de Sicile et de Nn- (51 Mi'moires pour l'histoire du Dauphin^, p. 17!
pics, liv. Mil, I," (j. ^^ i-^i
(•iîj Voij.,'A la lin (lu vol.. Il" 10.
n
DICllONNAir.F. DF.S ORDUF.S RF.I.IGIF.UX.
toujours fait p.iraître une gramic rôçcnlariCé
de mœurs cl «le conduile . accompagnée d'une
lionnéU' lih.ilé. niljnl pas oblitîécs aux lois
éiroilis de la ( loiure, comme dans les autres
moiiaslùics. On voit 1» s noms des plus con-
sidérables f,i milles de la province parmi
ceux des filles dont le inonaslère de Moiil-
llcury a clé rcmiili depuis ïon instiuilion.
Clciiicnl VI approuva ci Ue foiidalio:i, cl ac-
(orda aux religieuses de celle maison tous
les privilèges donl jouissaient celles de
Prouille, qui entre antres avaient obtenu de
Grégoire S. celui d'élire entre e Us leurs
prieures à perpeluilé, et avant r.c fiontife,
Alcsandre IN liur a\ail permis de posséder
les biens qui leur écberraieiit des successions
de leurs pères et n;ères, el tout ce qui pro-
viendrait de la libéraliié do leurs parcnls.
Ces religieuses sont distinguées des autres
pour Ih ibillcmenl, en ce que riiivcr elles
porlenl une robe noire ouverte par devant
sur leur babil blanc; celle robe noire ne
descend que jusqu'à lui-jainbe, et est dou-
blée d'hermine, et elles ont sur le front une
pointe noire comme les neuves en portaient
auircfois (I).
L'ordre de Saint-Dominique a, comme tous
les ancii ns corps religieux, subi sa pan des
épreuves a:i cnées par le dix-liuilièmc siècle.
Il avait coiiliiiué de servir et d'édifier !'£-
g isc; il avait vu aussi en plusieurs contiées
quelques-uns de ses établissements disj a-
railre. La pcrsérulion la plus sensible que
rciureiit les relii^ii'uscs l.'ominiiaiiies lut
peiil-élre (elle que leur li'. éprou» er le trop
fanieux llicii , évèque de l'istoie , en
Toscane. Dans les mémoires de ce prélat, on
voil que des désordres régi'.aicnl dans les
couvents de Sainle-Calhcriue cl de Sainte-
Lucie de l'istoie . el que l;s deux èvèques
qui lavaient précédé sur le siège de celle
ville a\ aient essayé, presque sans succès,
d'y appiirler remède. Ces deux èvèques
étaient Alamanui el Ippoliii ; tous deux
avaient demandé à Uomc que les Domini-
caines dis monastères donl il est ici question
fusî^enl soustraites à la direction des Domi-
nicains, el soumises à leur entière juridic-
tion. lp|)olili re(;ut en jainier 1777 uneld-
Ir.' ilu pape qui noii-seuleineiil refusait
formelleuMul tout ce que le prélat lui avait
demande, ni.is<Miro:e l'accaljl.iit de repro-
ches et le ré(irimandail aigrement de ce qu'il
avail osé rappeler à la mémoire une affaire
que Sa Sainteté croyait entièrement oubliée
depuis la mort de l'èxèque Alain.inni. dn
lrou»ail surioul fort mauvais dans celle Ici-
Ire quippolili eùl conlribué de tetti- m;i-
nèie à re\é:uti(in du plan du graud-due
/,éo|)olil, lequel pi in élail de priver lous les
e.Hnenlsde femmes de la direclion spiri-
luellc dei lèguliers; "plan, y était-il dit,
a oppose aux saints canons, et nui^ilib- à
« I Kglise, à la religion cl à la ré[iula'.ion des
• orilrcs monastiques. ■> Ippoliii eut seule-
iiieiil la permission de Iransiércr les dissi-
d.n!e» (c'est à-dire les opposées à son en-
51
(ri prise ), du lonvcnl de ?ainlc-Cat!ieriue
de l'iitoio à celui de Saint-Clément de Prato,
alors dirigé par les Dominicains, el où elles
furent ri<;ues, disent les Mémuires de Ricci,
comme en triomphe. Sous l'administration
de l'évéque Ricci, vil instrument el peut-être
en partie instigateur des mesures odieuses
pr'ses par le grand-duc Léopold contre la
liberté de l'Eglise, l'affaire des liominicaincs
prit une nouvelle activité. S'il fdlail ru
croire ce prélat, il y aurait eu chez les reli-
gieuses des monaslères que nous avons
nommés , cl cela depuis des siècles, des
sraudiiles affreux, fomentés el amenés par
les Dominicains, sous le rapport de la foi et
des mœurs. Des révélations avaient été fai-
tes par quelques religieuses, et il parait que
les accusations avaient quelques fondemcnls.
Mais il faut savoir que nous n'avons pour
renseignements que les l\li;moires de l'évé-
que Ricci , puisés dans les arch ves de sa
famille et publiés en 1820 par le sieur De
Potier, si connu par son opposition à l'Eglise
catholique, el aujourd'hui si complélement
oublié, nonobslant la fraten.ilé qui s'élail
établie entre lui et le parti Lamennaisien,
après la révolutioa de 1S30. Un grand pré-
jugé contre ce qu'il est dit de fort sur les
Dominicaines el les Dominieains dans ces
AJémoj'e.< plus ou moins véridiqucs , c'est
qu'on y viil que les Dominicains , les Jé-
suites, la cour de Home et le pape, claienl
opposes aux entreprises di' Ricci, et favori-
saient les religieuses. Tant de personnes de
ce poids n'auraient guère soutenu des fem-
mes coupables au point que prétendent
monseigneur rèvéquejansénisle et monsieur
l'éditeur athée et révolutionnaire. Nous
croyons savoir que le monastère de Dijon,
en France, avail été supprimé avant la rèto-
lulion.
Lors dis innovations amenées par celle
révolution, si funeste à l'Eglise et surluul à
l'étal religieux , les Dominicaines , comme
lous les ordres de femmes , montrèrent un
grand exemple de fidélité. Nous cileions en-
tre autres le monasière des Dominicaines de
Calais. Il y avait alors dans ce monasière une
religieuse fori rem .rquable, donl M. l'abbé
Tiron parle dans son Histoire abrégée des or-
dres religieux. Cette religieuse élail madame
lîrey, donl le véritable nom élail liès-proba-
blemenl, Dortpcii UVi^er. Son grand-père était
mort sur l'échafaud en 17'^(), pour l'honora-
l.le c .use du piétendaul Edouard Stuatt.
Cette re igicusc cl les autres Douiinicaincs
expulsées s'él ienl toutes retirées ù Calais.
Elles rendirent de grands srrvices aux émi-
erés par l'in'ieriuédiaire de l'une d'elles, qui
ei;i t une française noininée Daiicl. Les lel-
lie> qu'elle rerevail pour les familles mal-
li ureuses élaie l adressées à la sœur Grey ;
iii.iis c'était la siL'iir Dancl qui les recevait
el allait les prendre des mains des commis-
sionnaires obligeants. Ces lettres élaienl ap-
pui lees dans une vessie attachée à la paiiio
bous mar ne du bàti;iicat. Hw jour la ruse
(1) ('"y., itl.i riiulii v l.,ii' 11.
81
r)i)M
fut découverte, les religieuses coinpromisos
(-1 accusées. Une rivalité édifiante s'établit
entre les sœurs Grey et Danel, à qui prou-
verait le mieux sa culpabilité et l'innocence
de sa compagne. La l\îère Grey fut poursui-
vie et condamnée; mais comme elle avait
atteint l'âge de soixante-quinze ans, au lipu
de la conduire à l'ccliafaud, on l'euvova à
lîledeMé.
Il e>t surprenant qm^ le P. Héljol n'ait pas
dit un mot du monastère des Doininiiaiues
de Paris , qui méritait pourtant quelque
mention, et était situé presque à la porte de
son propre monastère. Nous alloin réparer
cette omission, d'autant phu que ce couvent
es' le seul adjoird'liui à Paris, et le plus re-
in irqoabie du peiil nombre des couvents
lie cet ordre i|ii se voient aujourd'liui en
France.
Los religieuses d.minicaines avaient au-
trefois deu\ monastères à Paris, l'un situé
dans la rue qui porte encore aujiurd'Iiui le
nom des Filies-Saint-Tliomas, ou plutôt rue
Nouve-Saint-Augu: lin, en face d' la rue Vi-
vienne. Celte partie de la rue Neuvc-Saint-
Augustin prit dtpiis le nom de rue dos
Filles-Saint-Tiiomas. Ces religieuses de-
vaient leur établissement à Par s à Anne de
Caumont, femmi; de François d'Orléans de
Longueville , comie de Longueville et de
Saiiil-Paul, et duc de Froi:sae. Celte dame,
ayant obtenu du cardinal Barberin , légat
d'Urbain Vlll, par une bulle datée du 5 oc-
tobre 1623, la permission de fondera Paris
un monastère de religieuses de l'ordre des
Frères Prêcheurs réformés, sous l'invocation
de sainte Catherine de Sienne, fil venir de Tou-
louse la MèreWarguerile de Jésus, dont la vie
se trouve dans l'ouvrage intitulé V Année Do-
minicaine, et six autres religieuses du même
ordre. Arrivées à l\uis, le 27 novembre 1626,
elles furent, le2mnrs suivant, avec la permis-
sion de l'archevêque dj Paris, installées dans
l'hôtel du Bon-Air, i ue Neuve-Sainle-Genc-
vièvc,faubourgSl-Marceau,et y restèrent jus-
qu'en 1632. Alors elles allèrenl se loger rue
Vieille-du-Temple, a;i Marais; et enfin, le 7
mars lG't2 (Le Hœuf, Labane, La Caille, Piga-
niol,diseiitl632), elles s'établirent dans la rue.
Ncuve-S iinl-AugusIin, où elles sont demeu-
rées jusqu'il la suppression. Le 7 mars é'ant
lu jour de la fêle de saint Thomas d'A(iuiti,
les religieuses dominicaines prirent ce nom
illustre pour leur maison. Une partie des re-
ligieuses de la ma son du faubourg Saint-
Marceau , alors trop nombreuse à Saint-
Thomas, s'établit au Marais, rue d'Orléans.
Le 0 mars 1627, la Mère -Marguerite, prieure,
accoitipagna la petite colonie qu'où taisait
sortir d i premier établissement, et en lt;36,
elle les conduisit dans la rue Plâlrière, où
elles restèrent jusqu'à la fin de la même an-
née. De là elles allèrent rue Matignon, où
elles demeurèrent jusqu'en 164-1. Alors elles
allèrenl s'établir rue Charonne, dans la mai-
son qu'elles occupent encore par leurs suc-
cesseurs, et qu'elles durent à la générosité
de mademoiselle Ituzé d'Effiat, fille du maré-
chal (le ce nom , (lui donna tout son bien ù
IU)M Si
ccl'e maison , et s'y fit religieuse, en 1636,
dans la maison de Saint-Thomas.
La première pierre du bâliment fut posée
le 3 août 1639, et on donna au monastère le
nom de la Croix, sous lequel il est encore
connu aujourd'hui. Les religieuses y entrè-
rent le 16 janvier 164-1. Cette date s'accorde
avec celle que nous avons donnée pour épo-
que de l'entrée des religieuses au couvent de
Saint Thomas , d'après M. de Saint-Victor;
mais nous croyons devoir ajouter ici que
les Mémoires qui nous sont fournis par
les religieuses dominicaines elles-n)êmes
portent que leurs Mères , en arrivant de
Toulouse , logèrent d'abord à l'abbaye do
Jouarre, d'où elli'S passèrent dans leur mo-
nastère de la rue Vivienne, le 6 mars 1627,
et y chantèrent les premières vêpres de
saint Thomas d'Aquin ; que ce fut de cette
maison que sortit la Mère Marguerite pour
la seconde fondation , conduisant d'abord la
nouvelle cdonic rue Vieille-du-Temple , et
de là rue Plàtrière dans l'hôtel de madame
de Castille, où mademoiselle d'Effiat fit pro-
fession.
Le monastère de la Croix avait une vaste
clôture, qui lui a été enlevée par la révolu-
tion et le gouvernement de Louis-Philippe,
car une partie de son enclos n'a été définiti-
vement aliénée que depuis la révolution de
juillet 1830; mais il n'était point entièrement
bâii, et forme un carré non fermé. L'église
est prise sur le rez-de-chaussée , du côlé
nord , et sur la partie du cloître qui y est
jointe.
Quand les Frères des Ecoles chrétiennes
vinrent s'établir à Paris, conduits par M. De
la Salle, le monastère de la Croix, alors dans
laisance, subvint à leurs besoins par des se-
cours généreux et abondants.
Vers l'année 1731 ou 1732, le roi envoya
aux religieuses de la Croix une Icllre de ca-
chet qui leur défendait de recevoir des sujeSs
cl de faire faire profession aux novices. Cette
interdiction dura jusqu'au mois de juin 1730;
Il nous a paru, par la lettre de l'archevêque
de Paris, qui annonce à la prieure la ces-
sation lie cette défense, que le j mséuisme ou
le défaut de régularité avaient pu donner
Oicasion à celte rigueur.
En 1782, la communauté obtint de Pie VI
des indulgences en faveur de la dévotion au
sacrwé cœur de Jésus, établie dans son église.
En 1790, il fut signifié à la communauté, par
l'assemblée nationale, d'envoyer à la mon-
naie toute l'argenterie, et même les vases
sacrés dont on pouvait se passer, pour être
fondus, et pour qu'elles se rendissent ainsi
utiles à la patrie. La communauté déclara,
en envoyant l'argenterie, qu'elle n'avait do
vases sacré-^ que ceux qui étaient nécessai-
res. La même année, la municipalité de Pa-
ris fil faire une visite dans le monastère, in-
terroger toutes les religieuses séparément,
et demander L'ur volonté sur leur séjour
personnel dans la maison , et enfin faire l'é'
lection d'une prieure. Toutes déclarèrent
qu'elles nommaient et voulaient la prieure
en charge, révérende Mère Suinlc-'îhé.oja
83
D'.CTIONNMRE PE-
Chardin. Le procùs-vcrbal de la v sHe minu-
lieuso qu'on fii alors, (Sl loiil .1 la louanj^e
de la ruiniiiiiiiauié.
En no-i , la cominunaulé oui ordre d'éva-
cuer le nioiiaslère pour le 20 aoiil, el défense
en iii(?me leuips de former corpTiilion, dans
aucune tnaisun, an nombre de pins de huit.
La Mère prieure laissa auxjeunes religieuses
qui avaient leur famille, le > ii(ii\dc s'y rclirer
ou de re>ler avec qmlques-unes d'elles , el
de se résoudre à une rigoureuse pauvrclé.
Plusieurs furent forcées par Irurs parents à
se retirer chez eux ; une des anciennes fut
demandée |our faire un>' éduotion particu-
lière; les autres s'aliandonnèrcnl à la con-
iluiie de la Mère prieure, à qui elles avaient
voué obéissance.
Elles se divisèrent en trois groupes : la
Mère prieure et sept de ses filles allèrcnl de-
meurer rue de la Cerisaie; la Mère sous-
prieure alla, avec sept autres, den. curer rue
de la Hoquette; la majeure partie des sœurs
converses se retira dans une maison de la
rue de Cliaronne, où il y avait un four el un
j irdin. Là elles cuUivèrent la terre el conli-
iiuèrenl leur (onimerce do bonbons jusqu'en
l'année 181'.), époque à la(itielle elles se réu-
nirent à leurs anciennes îilèrcs. Malf;rc leur
séparation , les reli},'ieuses restèrent toutes
sous l'obéissance de la Mère prieure , qui
condail son auloiiié à une des anciennes
dans les maisons (ju'elie n'Iiabilail pas , el
recevant en audi'nce celles qui voulaient
lui parler. Lors de la séparation, il y avait
>ingl-cinq religieuses de chœur cl treize con-
verses; quelques-unes de celles-ci vivaient
encore quand nous fûmes nommé confes-
seur extraordinaire de celte conimuu.iulé,
en 1831.
La firieure cl celles (lui s'élaicnl réunies
à elle Crent un petit commerce de Heurs,
éventails, jarretières et autres petits ouvra-
[ivs <le celle sorte , (jui leur permetta ent de
suivre leur règle el de faire même des éco-
nomies pour les ten)p5 où elles pourraient
se réunir.
Dès l'année 1807, elles fu eut reconnues
par l'empereur Napoléon , qui leur pro-
■ncllail l'ancien couvent de Saint- Tlionias,
rue Viviennc. Par la protection de M. Poi la-
lis, ministre des cultes , qui s'intéressait à
elles, elles élaienl sur le i)oiiil tl'en prendre
po>^sessiiin lors(iue la mort dt; ce (irolecleur
vint relarder leur bonheur. Les choses
reslérenl en suspens jusi]u'i 11 IHUi.
Leur mon.islére de la Ooiv n'av.iil point
été vendu par la nation; un décret de l'I^ni-
pereur ra\ail concède an\ (illes de la Clia-
rilé de Saint-Vincenl-dc-Paul. pnur leur ser
vir de noviciat el de niaison-mère. (irâcc
à Dieu, celte maison ne |iul lonvenir à ces
snin'es filles , (|u'on élabl t rue du Hac, au
lieu où elles sont arluellemenl , et l'injuslc
spolialion de la maison de la Crois iiu lut
point consommé»'. Eu IHIil, MM. le comte
ilo Wilmanzy tt le mari|iils de (ïrnshois,
pair» de France, oblinrenl de Louis X\ III la
concession du monastère de la Croix à ses
?,ncienucs relitjicu.ses. Cette cunccstion fut
Or.DUES UELIGIEUX. S4
f/iile par une ordonnance d.itée du 2G septem-
bre. La sénalorerie mit aussilol 0; posiiion à
la ciincessiiin des terrains ou marais qui lui
avaient élé concédés, el il ne resta aux reli-
gieuses (|ue le jardin, d'un arpent d'élendue,
qu'elles possclenl actuellement. l'iles ne
purent entrer en jouissance' qu'à la fin du
bail <!e M. lUehard Lenoir, (lui avait loué
les bâtiments. Ce bail ne devait expirer que
le .'îl décembre 18i4-.
Dès l'année 181i, lors des espérances si
belles et malheureusement si trompeuses
que donna la llestauration, les Dominicaines
pensèrent à vivre taules ensemble; mais leurs
bails respectifs ne finissaient qu'en 181C, et
chaque maison était trop petite pour les con-
tenir toutes. Un autre obstacle venait de leur
pamreté, qui ne leur permettait pas d ■ payer
un aumônier. Le P. .NLmteinard, ancien Mi-
nime, directeur d'un ur.md nombre d'entre
elle*, trouva moyen de lever ce;te diinenllé
de la manière édifiante que nous allons dire:
madame de Alazard ét.iil une ancienne reli-
gieuse de Montniarlre qui vivait retirée dans
le Marais, à Paris, avec une sœur converse
qui l'avait suivie à la sortie de son abbaye.
Elle avait un oratoire particulier, où à l'épo-
que dont nous parlons neuf ecclésiastiques
ou religieux disaient la messe. Le P. ftlon-
Icinard en était un, el il se concerta avec
madame do Alazard, qui entra dans ses vues,
el l'un des ccclésiasiiijues de sa maison,
M. l'abbé Leclerc, se dévoua gratuitement à
l'ceuvre des Dominicaines, dont il fut l'aumô-
nier dès 1811-, dans la maison de celles qui
habitaient alors la rue Saint-Denis, les sui-
vit dans leurs diverses liabitalions cl desser-
vit la communauté pendant trente ans. Nous
avons eu le bonheur de nous lier avec ce
s.'iinl e( clésiastiquc, ancien professeur, qui,
non content d'être gratuilemenl au service
de II communauté des Dominicaines, lui a
même fait jiarl de ses bienfaits.
Les religieuses prirent d'abord une maison
à loyer, rue des Arnandiers-Popinc.iurl, y
cnlrèrent au mois de juillet 1810 el y repri-
rent l'h.ibit religieux le i août de celle an-
née; jusqu'alois elles avaient gardé l'habit
séculier. Elles et lient au nombre de 12 clin-
ristes el de 'nonverses. Les aulies conveiscs
de la rue dcCharonne ne s'y réunirent, ainsi
(jue nous l'avons dit, (ju'en l'année 1819.
Nous dirons ici que les Dominicaines de la
Croi\ offrirent aux religieuses <le leur ordre,
(pii n'avaient pas eu comme elles le bonheur
de recouvrer leurs maisons, de veuir se
réunir à elles, (^inq se rendirent à ceJle in-
vilalion ; l'une était madame de la i'rade, du
couvent de Saint-Etienne; Ir. deuxième, du
couvent de Dinan; la Iroisième, madame le
Normand de \ illei s, de l'ancienne maison do
Poissy, cl qui exerça depuis la (hargc de
prieure, pendant onze ans ; lu <)ualrièinu
était une religieuse de la maison de Uo/ny ,
(lu fccuiid ordre, en IJrie; la cinquième était
du couvent de Monlpellier. Nous voyons avec
surprise que celte liste ne contient aucune
religieuse de l'ancienne maison de Saint-
Thomas.
e.j
DOJÎ
no\i
8ii
De la riu' dos Aninndicrs, lis Domiiiirainrs
aîlèrciil demeurer rue de MoïKreuil, n° 37,
au faubour:: S.iinl-Anloiiie, dans un Incal
plus vaijle. Mesdames de Grosbois et de Wil-
innnzy lurent très-utiles par leurs dons cha-
ritables au rétablissement de l'intérieur de
la maison de la rue Ch ronno ; mais un tiers
des bâtiments avait été ahattu, par suite de
vétusté.
La pauvreté de la maison n'a point encore
permis d'y rétablir la clôture rigoureuse,
que les religieuses gardent néanmoins au-
tant que possible. Nous avons donné ces dé-
tails sur cette maison des Dftminicaines,
pirce qu'ils feront voir par analogie ce qui
fut fait dans les autres mon isièrcs à cette
époque, et aussi parce qu'ils sont édiOants et
intéressants pour cet ordre célèbre et pour
les lecteurs.
Depuis la mort de M. Lcclerc , les Pères
de la maison de Piepus l'ont à La Crois les
foncliiins d'aumônier. Les religieuses ne se
lèvent pas actuellement à minuit pour ma-
tines, mais elles font promettre à toutes
celles qui font profession de ne pas mettre
d'obs'acle au rétablissement de ce point de
la règle, quand on pourra le rétablir. Lors-
qu'elles habitaient la rue de Monlieuil, la
prieure et M. l'abbé Leclerc, sans tenir (b.i-
pilre et sans consulter l'autorité, se déter-
minèrent à faire prendre aux religieuses le
bréviaire de Paris. Cette mesure singulière
fut prise pendant le carême. Peu de temps
après l'archevêque de Paris, M. de Quélen,
vint voir la maison. La prieure lui dit qu'elle
avait pris le bréviaire du diocèse. L'arche-
vc.|ue témoigna sa surprise et son mécon-
tentement. « Je n'ai qu'une maison de Domi-
nicaines dans mon diocèse, dit-il, je désire
qu'elle garde son rite et que son bréviaire n'y
soit pas supprimé.» La prieure fit reprendre
lo bréviaire de l'ordre, la veille de s'iint
Dominique, au mois d'août suivant ; ainsi
le bréviaire de Paris ne fut récité que pon-
dant quelques mois. Ceci se passa en 18:24-
ou 1825. Les religieuses ne rentrèrent dans
la maison de la Croix qu'au mois d'octobre
1823. Lorsque nous étions confesseur extra-
ordinaire de cette maison, alors peu nom-
breuse, nous fîmes, de la part d'un supérieur
ccelésiaslique, la triste commission de pro-
poser la récitation de l'office de la sainte
Vierge au lieu du bréviaire de l'ordre. Nous
vîmes avec plaisir et édification la mère
prieure rejeter avec empressement notre pro-
position et tenir à son bréviaire, qu'elle avait
pourtant abandonné, comme nous venons de
le dire, (juelques années auparavant. Les re-
ligieuses ont eu la consolation de voir les
Dominicains rétablis venir plusieurs fois of-
ficier dans leur nsonastère. Elles ont eu suc-
cessivement deux religieuses, venues d'un
monastère de Suisse, pour gouverner la mai-
son en qualité de prieures.
Il reste peu de maisons de cet ordre en
France. La célèbre maison de Prouille est
tout à fait détruite. Colle de Poissy, non
moins illustre, sert aujourd'hui de prison
centrale : ce célèbre inonaslèie avait gardé
jtisqii',1 la fin une partie de son ancienne
sijlendeur. Les religieuses y étaient nom-
breuses ; dix religieux Dominicains la dcs-
ser\aient; la prieure était perpétuelle; la
dernière fut madame de Quélen, de la famille
de l'archevêque de Paris du même nom.
Les religieuses Dominicaines appellent re-
ligieuses du second ordre celles qui ne sont
p;is réformées comme elle*, mais en réalité
elles sont toutes du second ordre de Saint-
Domin'que, hors rc'Ies (|iîi, réellement s ii-
vant la troisième règle, sont du tiers ordre
et appelées Catberioelles en quelques lieux.
La maison de Mauriac, diocèse de Saint-
Flour, a été détruite au mois de mai 1847.
L'esprit de l'ordre ne régnait pas autant qu'il
eût fallu dans ce monastère, et peut-être
pourrions-nous ajouter que l'autorité ecclé-
siastique n'a pas pris les moyens de l'y ré-
tablir. D'autres religieuses occupcsil la mai-
son.
Uesic donc encore la maison de I^angeac,
qui est connue par la célébrité que lui donne
la vénérable mère Agnès, amie de M. Olier,
et qui est, dit-on, actuellement très-pauvre.
Cefe ci est, comme celle de Paris, du grand
oi'dre do Saint-Dominique. Le tiers ordre
compte les maisons de L'ingres, d'où est
sortie celle de Bar-le-Duc et de Châlons-
snr-Saôiic.
L'ordre de Saint-Domini()ue possède au-
jourd'hui des monastères de femmes dans la
plujarl des pays catholiques en Europe; il
y en a aussi en Aniériciuc et même, croyons-
niius, en Asie et en quelques pays prote-
stants. Il y a, dans les Etats soumis à l'em-
pereur d'Autriche, huit maisons, contenant
cent cinquante religieuses. La njaison de
Rome est sous la direction immédiate des
Dominicains, comme l'étaient autrefois celle
de Poissy cl autres. Dans la plupart des au-
tres pays, les Dominicaines sont, comme à
Paris, sous la juridiction de l'ordinaire.
Mémoires de Scipiun Ricci, tom. I". —
Tiihleau historique et pittoresque de Paris,
])ar M. de Saint-V'ic!or. — Mémoires manu~
scrits, fournis p-ir la révérends Mère Saint-
liernarJ,- Dominicaine de Paris, etc., etc.
B— D-E.
DOMINICAINS (Ordre des).
De l'Ordre des Frères Prêcheurs oti Domiiii-
Cdins appelés en France Jacobins, avec la
vie de saint Dominiqui', leur fondateur.
§ I". Inslitulion de l'ordre,
Guillaume de PuysLaurcns, dans son His-
toire des Albigeois, parlant de l'ordre des
Frères Prêcheurs iondé par saint Domi-
nique, dit que l'établissement de cet ordre
est une ];reuvc manifeste t>j ce qu'a dit l'apô-
tre saint Paul, qu'il fallait qu'il y eût des
liérésies [1 Cvr.xi, 19). i n efl'et, s'écrie un
auteur moderne dans une histoire qu'il nous
a donnée aussi de ces mêmes Albigeois, que
de saints, que de martyrs, que de docteurs,
que de lumières de l'ordre de Saint-Domi-
nique qui li'auraieut peut-être jamais éclairé
l'Eglise sans les erreurs de ces hérétiques 1
87
S.iini Do I. inique iiaquil l'an 1170 a Cilalmi'-
la ou Cnlriroga, biiiirp du <iiocc>c d'Osnia
il.ins la >'ieiili'-i:aslil!c. Son père se nominail
Félix (îuzman de l'ancienne el noble laiiiille
lies tîuziiian , qui lient encore un ran ^ con-
ïidérable en l';s|iai:ne; et sa mère, Jeanne
d Aza, laquelle, élant j^rosse île saint Uonii-
niijuc, eut un songn injsicrieux où elle s'iina-
};ina nicltre au m nde un pclil chien qui
d'un llanibeau allunjé qu'il lenailà sa a;neule
eclairail tout le mon.ie : présage évident de
fe qui est arrivé dans la suite, lorsque par
l'ardeur de son zèle et le feu de sa cliariié
ii a éclairé un nombre infini d'hérétiques
qu'.l a lires îles ténèbres de l'erreur pour
leur faire cunnailrc les lumières de la vé-
rité.
On lui donna au baptême le nom de Domi-
nique, à cause de la dévotion que sa mère
portait à saint Dominique de Silos, qui lui
apparut un jour qu'elle priait à son tombeau
dans un monastère proche de Calaroge, et
lui prédit ce que Dieu devait faire par le
iDOjen de son fils. Ce fut ce motif qui porla
ses parents à chercher de b )nnc heure les
moyens les plus propres pour lui procurer
une cducalion qui le rendit di^^ne de devenir
le minislrc des desseins de Dieu. Do.nini juc
répondit aux internions cl aux soins de ses
parents. A peine commcnça-l-il à parler qu'il
demandait d'aller dans les églises pour y
prier Dieu, et qu'il se levait secrètement la
nuit pour dunn r à cette sainte occupation
le temps qu'il otait à son repos. A l'âge de
six ans on le mit sous la conduite d'un de
ses oncles arcliiprèlre de l'église de Gumyel
d'Vssan, pour y apprendre les lettres lui-
maiiit s. Le temps qui lui restait de ses éludes
n'était point employé à des amusements in-
utiles; l'assislance aux dinns offices, le chanl
de 1 lîglise, les exercices de dcvoiiori, la dé-
cor.ition des autels, satisfaisaient sa piélé et
lui tenaient heu de divertissement.
Ayant p.issé sept années dans l'élude des
lettres humaines et dans ces sortes d'occu-
pations, on le relira de la maison de son on-
cle pour l'envoyer à l'alencia, ville episco-
pale du royaume de Léon, où il y avait |)otir
lors une universilé qui l'ut IransTéréc dans
la suite, l'an 1217, par le roi l'erdinand III
dans la ville de Salamanquc. Il y emiiloya
six ans à l'élude de la philosophie cl de la
néologie, joignant toujours à l'élude l'orai-
son el la prière. Il jeûnait dès lors Irès-I'ré-
quemmcnl, dormail peu, et ne se reposait
soun lit que sur le plancher de sa chambre.
11 faisa l paraître un amour tout p.irlii ulier
j>our la relraile. Il ne sortait que iiour aller
aux églises cl aux écoles publiques. Il était
le père des orphelins, le protecteur des veu-
ves, le refugi! des pauvres, pour le snulage-
incnt desquels, ilans une cruelli- famine
qui désola iMule l'Kspagne , il Tendit Ions
SCS livres et ses meubles; il même dans une
autre rcnconlie il >e vouliil vendre lui-
inéme, s'élant oITi-rl pour éir.' la rançaa d'un
jeune homme (jui avait été pris par les
Maur.'S.
Ail charité ne .^c borna jias à soulager son
DICIION.V.UUE ni-.S OUIMirS RKLIGIiaJX.
88
prochain dans les nécessités du corps, il vou-
hil lui procurer des biens spirituels, cl le
zèli' qu'il avait pour le salut de ses frères
lui fit enireprenilrc de rudes pénitences pour
la conversion de ceux qui étaieni endurcis
dans leur péché. Toujours prêt à donner sa
vie pour empêcher que Dieu ne fût offensé,
il sentait au dedans de lui-même une si forle
douleur des péchés d'nuirui, qu'il les pleurait
amèrement, comme s'ils avaient été les siens
propres. Ce fut ce zèle du salut du prochain
qui le fit résoudre à travailler à la conver-
sion des pécheurs par ses discours ; il com-
mença jiourWors à faire paraître les grands
talents que Dieu lui avait donnés. Il les em-
I loya avec lant de succès, que les [ireniiers
fruits ([u'il en relira furent la convcrsi in
d'un seigneur nommé Conrard qui avr.il été
compagnon de ses éludes, et qui, s'élant fiit
dans la suile religieux de l'ordre de Cileaux,
fut élevé à la dignité de cirdinal. Ses dis-
cours épouvantaient les péc/ieurs, conver-
lîssaienl les hérétiques, servaient de guides
aux péiiiteuls, et de confolalion auxaliligés.
De si saints exercices et tant d'exemples de
vertu augmenlèrenl la réputation do D.)mi-
nique, qui. n'ayant pas encore vingl-quatro
ans, était déjà consulté comme le directeur le
plus expérimenté sur les affaires du salut.
Dom Dièguc de Azebez, évoque d'Osma,
voulant reformer les chanoines de sou Egli-
se, el leur faire embrasser la vie régulière
sous la règle deSainl-Auguslin, jela les yeux
sur Dominique pour le faire entrer dans sou
chapitre, le regardant comme celui qui se-
rait le plus cajjable de soutenir par sou
exemple l'établissement de la réforme qu'il
projct.iil. 11 lui en fil la proposition , el Do-
nùni(|ue, ne doutant point que Dieu ne lui
parlai par la bouche de son évêque, quitta
l'alencia pour venir prendre l'habit de cha-
noine et faire professinn de la vie religieuse
dan-, l'Eglise d'Osm.i. Quoiqu'il n'y changeai
(jue son extérieur, Il ne laissa pas de paraître
un honmie tout nouveau parla ferveur avec
laquelle il se porla à la perfection de sou
éiul ; el, croyant que jusque-là il n'avait en-
core rien l'ait jiour son salul, il augmenta
ses jeûues, ses veilles, ses pénilences et se^
mortifications. Les chanoines d'Osnia, sur-
jiris et édifiés de ses vertus, croyaient voir
leur cathédrale changée en un désrrl sem-
blable à ceux de la Tliéb.iïde el de ri''gypte,
tanl élail grande l'Iiumililé, la moriificalion,
l'abstinence et la retraite de Dominique ;
aussi faisait-il son élude particulière des
Conférences de Cassien, uGn d'imiter ces an-
ciens Pères des déserts.
Son évéque, qui connaissait son talent, ne
voulut pas renfermer dans son Eglise le tré-
sor <iu'il possédait; il lui permit d'aller por-
ter la parole de Dieu au\ naliuns, el de prê-
cher la i>énilence aux pécheurs. Aussilùt il
|),ircnui ut iiliisieurs provinces, travaillant à
détruire en même temps les vices et les er-
reurs dont les maliométans et les hérétiques
les avaienl infeitêes. I.a première conver-
sion qu'il fil, el la plus eclalanle, fui celle de
Kcinier, qui, ayant renyucé ù l'hérésie doul
89 ni)M l)O.M ?0
il éinil i'aulcur, fut employé bioiilôl après sioiis, afin de prêcher encore mieux par
par le \)!X\)c innocent 111 contre d'autros hé- leur exemple que par leurs discours, ils de-
rétiques (]ui avaient autant (!e noms dif- vinrent respectables par leur nouveau genre
férents qu ils occupaient de différentes pro- de vie, nu lieu qu'on les avait méprisés dans
vinces, et qui entra depuis dans l'ordre des leurs richesses. L'évêquc d'Osma, qui avait
Frères Prêcheurs. donné ce consi il, l'avait mis le [ircmier en
Quelque temps aptes, Dominique fut or- pratique avec Di:minique. 11 avait clé établi
donné prêtre par l'évèque d'Osm.i, qui le lit chef de la mission, dont le nombre des ou-
sous-prieur de soncliipi re, qui était la pre- vriers s'était augmonlj par l'arrivée de l'abbé
niière dignité après la f.ienne, puisque, après de Cîicaux et de douze a! Lés de son ordre ;
avoir embrassé la régularité qu'il avait pre- mais ces religieux étant retournés dans
scrite aux autreS; il en était devenu prieur, leurs monastères quelque temps après, aussi
Ce prélat ayant encore scrupule de retenir bien que l'évêque d'Osma dans son diocèse,
Dominique, dont la vocation était d'instruire où il mourut dans le temps qu'il se disposait
et de convenir les peuples, l'envoya derc- à retourner dans le Languedoc, le légat
chef pour remplir le ministère de prédicateur Haoul ayant aussi quitté cette province, et
évangélique. 11 parcourut plusieurs provin- Pierre de Gastclnau ayant été assassiné par
ces, la Galice, la Caslille et l'Aragon, où les émissaires de Raymond , comte de Tou-
il fil plusieurs conversions, jusqu'en l'an louse, Dominique se trouva seul cbaru'é de
120i, qu'Alphonse, roi de Caslille, ayant en- tout le poids de la mission. Bien loin de se
A oyé l'évéquedOsma ambassadeur en France laisser intimider à la vue des fali^'ues , des
pour y négocier le mariage de son fils Fer- tourments et des périls dont elle était accom-
dlnand, qui fut son successeur, avec la prin- pagnée, il se sentit animé plus que jamais à
cesse de Lusignan, fille de Hugues, comte de poursuivre son entreprise. Un renfort de sept
la Marche, ce prélat prit Dominique en sa ou huit ouvriers qu'il reçut redoubla son
compagnie. courage, et il les distribua dans les endroits
Ils passèrent parle Languedoc, où ils fu- qui avaient plus de besoin de secours. Le
reil léînoins des ravages que faisaient les nombre se multiplia encore dans la suite;
hérétiques albigeois. Ils ne purent entendre mais, comme il diminuait aussi par inter-
Je récit qu'on leur (il des erreurs et des abo- valle, parce que la plupart ne se joignaient
minalions qu'on leur attribuait sans en être à lui que pour un temps, que souy.'nl après
vivement touchés. L'évèque cependant re- le terme de quelque mission limitée, ils s'en
tourna en Espagne pour rendre compte au retournaient à leurs premiers emplois, et
roi Alphonse de sa négociation ; mais ce que plusieurs même ne faisaient point de
prince, l'ayant renvoyé en France avec un scrupule de l'abandonner dans ses plus
magnifique équipage pour amener la prin- grands besoins, il songea à i xécuter la réso-
cesse promise au prince Ferdinand, il prit lulion qu'il avait déjà formée avant la mort
derechef Dominique avec lui, et, étant arri- du l'évèque d'Osma et celle de Pierre de
vésau château de Gace, lieu de la résidence Caslclnau, louchant l'inslilution d'un ordre
du comte de la Marche, ils trouvèrent toute religieux qui eût pour fin la prédication de
la cour en pleurs pour la mort de cette prin- l'Evangile, la conversion des héréliques, la
cesse, qui venait d'expirer, et assistèrent défense de la loi et la propagation du chri-
cux-mômes à ses funérailles. Frappés de cet slianisme. Il assembla peu à peu des per-
objel qui leur dmnait une si vive idée de la sonnes touchées de l'Esprit de Dieu, qui
fragilité et de l'inconstance des choses de la étaient animées du même zèle do sa gloire
terre, ils résolurent do ne plus retourner en et du salul des âmes. Les premiers furent
leur pays. Us y renvoyèrent leur équipage, Guillaume du Clairet, et Dominique surnom-
et, ayant pris le chemin de Uome, ils oblin- mé l'Espagnol, à cause qu'il était natif d'Es-
renl permission du pape Innocent lll de de- pagne. Cette compagnie s'augmenta juscju'au
meurer dans le Languedoc pour y travailler nombre de seize, dont il y avait huit Fran-
à la conversion des Albigeois ; mais le saint cals , six Espagnols, un Anglais et nn Por-
pontife limita le séjour de Diègue dans cette l'ugais. Les Français étaient Guillaume du
province à deux ans, après lesquels il lui Clairet , dont nous venons de parler, qui
ordonnait de retourner dans son Eglise. quitta l'ordre dans la suite pour entrer dans
" Avec ce pouvoir i!s revinrent en France celuide Gîlcaux ; 53ertrand de Cariga, Etienne
pour liavailler à leur nouvelle mission. Us de Metz, Odier de Bretagne, Riatlhieu de
y trouvèrent les légats du p:ipe, qui, rebutés Paris, Jean de Navarre, et deu< fièresda
du peu de profil qu'ils faisaient parmi ces Toulouse, Pierre et Thomas de Sjllj'.n, qui,
héréliques, étaient sur le point de s'en retour- non-seulemcnl se donnèrent eux-mêmes à
ner et de secouer la poussière de leurs sou- saint Dominique, mais encore leur maison
liers, selon le conseil de l'Evangile. M,uis le située à Toulouse proche la porte de Nar-
sai ni évêqiie d'Osma les arrêta en leur per- bonne, où saint Dominique et ses cofripa-
suadanl qu'ils feraient plus de fruil si , en gnons firent leur première demeure. Entre
luittanl leurs grands équipages, et le faste les Espagnols était Dominique l'Espagnol et
'in'ils avaient cru nécessaire pour relever le trère de notre saint Icndaleur , nommé
leur dignité, ils embrassaient la vie aposto- Menez de Guzman.
lique.CcquiréussitelTcctiveoicnt; car, ayant Ayant ainsi léuni celte sainte troupe l'aii
ijuillé leur train et leur équipage, et mar- 12Io, il résolut, pour assurer les londemcnls
chanl sans argent, sans valais, sans provi- deson institut, d'en aller diuuinderla tculir-
91 PICTIONNMUF. DKS ORDIIES lUXIGIKL'X. nS
inalioii A n.imo, où le pnpp Iminccnl 111 pas do ronliniior son voviipo à Rome, où il
de».iil faire louviTture du coiiciU- {;oiu'r;il lui (■coiili' du iioiivc.iu potilifft plus UM qu'il
de Lalr.ui. H so ml à la tomp.i|;iiio de Toul- lU' l'aurail espéré; il obliiil dès le 22 d(crm-
((ues, o»t'(iu.' de Touioiiso, l'un des approba- lire de la nièiiie année une bulle (lui appron-
Icurs de î-ou d.ss(in, nui aiiail au coneile. \ail et confirmait son institut sous le titre,
r. JiMU de Navarre fut son (Oinpa;;rion in d(! l'ordre des Frères Prêcli'iirs. Comme fon-
ce vojaije, cl il laissa pour gou>cner sa dateur il voulut y être le premier aprépé, ce
petite communauté lieriraml de Cari;:i. (|ui ne se pouvait faire sans une rénovation
Comme ce concile venait d'ordonner qu'i.n de ses vcrux qu'il avait faits auticfois entre
travaillerait pluîot à la réforme des ordres les mains di l'évèciue d'(">sina, et une non-
déjà établis qu'à leur mulli(diealion, le pape velle profession. Il la réitéra et s'obliïrea de
ne voulut pas a^ prou\er c lui de saint Uo- nouveau de vivre selon les slituis particu-
iiiini(|ne , i\\t\ \enait d'être nouvellement liers qu'il avait choisis avec ses frères pour
institué, »iuoi<]ne l'évé(]ue de 'J'oulouse el être à l'avenir les conslitulions de son ordre,
plusieurs prélats eussent parlé en sa faveur. l'.e fut entre les mains du pape qu'il 11; celle
Il fut lui-même rebuté plusieurs fois par ce profession solennelle, el Sa Sainteté l'établit
pontife; mais une »isiun semblable à celle supérieur et maître général de stn nouvel
qu'il avait déjà eue lorsque saint François, odre. lui donnant pouvoir de recevoir à
dés l'an l-O'.t, lui avait diiuandé la confirma- l'habit et à la profession ses eompapinons,
tion de son ordre, le déierniina à accorder à el d'instituer l'S supérieurs et les ollieiers.
llominiqucre qu'il demandail. Il le lit venir, Ktanl retourné à Toulouse, il eut la con-
aj'prouva seulement de vive voix son insti- solalion d'y voir déjà le premier couvent de
lut, el promit de lui donner celte coiilirma- son ordre achevé jiar la diliiîcncc de ses frè-
lion par une bulle lorsque, de concert avec res cl plus encore par les libéralités de
ses compagnons, il aurait choisi une des I évéque de Toulouse et de Simon . comte
règles déjà approu\ées par l'Fi;lise, cl qu'il de .MontforI, Il y établit aussilôl l'écono-
aurail \u le» constitutions et les statuts de mie et la di<cipliiie, et reçut avec les solcn-
!-on institut. nilés prescrites les vœux, de ses religieux,
Il retourna en Languedoc, où il assembla dont le nombre s'était niiirmenlé pen-
ses frères dans le monastère des ri'ligieu-es danl son absence, h'habit do-it il se revêtit
de l'rouille, (ju'il avait établies ; et, s'étant fut celui des chanoines réguliers, td qu'il
mis tous en prières :iiin que Dieu leur insjii- l'avait porté jusqu'à ce temps-là, el iju'il
ràt le choix d'une règle, ils furent d'avis d(! l'avait reçu des mains de lévèque d'Ilsma,
prendre celle de saint .\uguslin, à laiiuellc c'e-t-à-dire, une soutane noire et un roche!
ils ajoutèient des statuts et des consti lu lions par-dessus, comme il parait parles anciennes
l'ont l'usage était en pratique dans un an- peialures où ce saint et ses premiers d.sci-
(icnor re. Oue'ques auteurs veulent (]ue ce pies sont représentés de celle manière (1),
seit l'ordre des IJiarlreux, mais le 1!. Ihiui- selon ce que dit Michel Pio, hi>torien de cet
bi'i l, dans un manusci il ijui est encore con- oiiire. H envoya ensuite de ses religieux en
serve à Toulouse, au rapport du l'ère .lean dilîerents eiulroits pour y travailler au salut
de Kcchac, historien de l'ordre des Domiui- des âmes par la prédication, qui faisait l'cs-
cains, dit que saint Doniinique les lira des sei;tiel de son institut. Le Père Matthieu de
< onstiluliuns de l'ordre de l'remontré. Les Paris el Manez de Cuzman, frère de noire
principaux articles ordonnaient le silence saint, furent destinés pour Paris. Il en eii-
perpéiucl , n'y a^ant aucun temps où il fu! voya d'autres en lispagiie, il en laissa à
permis de parler ensemble sans la permi-- Toulouse, el se réserva pour lui la ville de
sioii du supérieur; les jeûnes presque con- Home (2).
tinuids, au moins depuis le 1 '»■ septembre Comme son dessein, après avoir séjourné
jusciu'à Pâques; l'abstinence de la viande en quelque temps en llalic, était de passer en
tout temps, excepté d..ns les grandes mal..- .Vfriquc pour y annoncer la parole de Dieu
dies; l'usaijc de la laine au lieu de linge; aux infidèles, et que pendant son absence il
une pauvreté rigoureuse et plusieurs autres ne pouvait pas gouverner son ordre, il en
austérités. (Juelquts-uns ajoulenl, le renoii- donna le soin à .>ialtiiieu de Paris, qui, selon
fement aux renies et à toutes possessions; les historiens de cet ordre, eut le litre d'abbé
iiiaiii ce renoncement ne fut ordonné (iui> général, ajant été le seul ijui ait eu celle
d.ini le premier chapitre uéiiéral, l'an 1220. (lualilé, qu'il ne garda pas longtcniis, car
Les résidutions ainsi prises sur le genre saint Doininiiiue ne passa poinl en .Miiqne,
de vie, saint Dnminiiine pirtii pour ret' ur- cl gouverna toujours ^on ordre. Maltliieu
lier à llome alin d'en obtenir la coiilirmation de Paris n'exerça aucune juriilielion ()ue
du saint-siège, pendant «(ue dans 'l'uuloiisc dans la province de France, dont il lut
on jeltcr.iil les fondements de la première provincial. Ce fui lui (jui, avec son comp.i-
maison de l'ordre. Il ajijiril en chemin la gnon, lit la fonlalion du couvent de Paris
mort du pape Innocent ill , arri»ée le 17 l'an 121S, un an après leur arrivée en celle
juillet 1211), à l'érouse, et qu'llonoiius III ville, où ils logèrent d'abord dans une inai-
liii avait succédé. Ouoiqu'il prévît les difli- son qu'ils louèrent auprès de l'evéché; mais,
cultes que les alTaires du nouveau pontific.it en ayant obtenu une autre dans la rueSainl-
dcvaicnt apporter à sesd.sseins, il ne laissa Jacques, on les appela dès lors Jacobins,
(i) Voy., il l.i lin du vol., ii" 12. {i) Vil. de gl. llmim. illun. dcijl. Ord. de S. Dem.
93
DOll
DOM
9;
nom qu'ils onl rcloiui jusqu'à piéscnl par
toute la France.
Qi!clqi)c temps après que saint Domini-
que eut ainsi dispersé ses disciples, il quiila
Toulouse pour aller en Italie, et elioisil pour
compagnon le bienheureux Etienne de Meiz.
11 prit sa roule par Paris, et de là par la Lor-
raine, pour aller à Venise par les frontières
d'Allemagne. En passant à Metz il y bâtit
in couvent de son ordre, dont il donna la
conduite à ^on comp.ignon le bienheureux
Etienne, qui fut peupléen peu de temps d'un
grand nombre de religieux à qui il donna
lui-même l'habit pendant le séjour qu'il fit
en celte ville. Il prit sis de ces religieux,
qu'il mena avec lui en lia ie. II fonda encore
un autre couvent à Venise, où ayant encore
laissé quelques-uns de ses compagnons, il
s'en alla à Kome pour essayer d'y mettre le
centre de son ordre, qui de là pourrait plus
facilement s'étendre dans les autres villes
jusqu'aux extrémités du monde.
Le pape Honorius 111 lui donna d'abord
l'église de Saint-Sixte et ses dépendances
pour en faire un couvent; mais à quelque
temps de là ayant fait donner cette maison
aux religieuses deson ordre, comme nous l'a-
vons dit à ! article Dominicaines, il obtint du
même pape l'église de Sainte-Sabine avec une
partie de son propre palais, pour servir de
demeure à ses religieux, qui se trouvaient
déjà en grand nombre. Ce fut dans ce mo-
nastère que l'an 1219 il quitta son habit et
celui de ses frères, qui avaient été jusque-là
des chanoines réguliers, pour prendre celui
que l'on prétend que la sainte V'ierge montra
au bienheureux Renaud d'Orléans, qui con-
sistait en une robe blanche, un scapulaire
de même couleur, auquel était attaché le
chaperon de la même façon que le portent
encore aujourd'hui les Chartreux, les reli-
gieux de Saint-Dominique de Portugal et
ceux de laCongrégation du Saint-Sacrement
en France; dont nous parlerons aussi dans
la suite. Ils prirent aussi la chape et le cha-
peron noir aboutissant en pointe comme
celui des Chartreux (1).
M avait envoyé l'année précédente de nou-
\ eaux missionnaires à Bologne qui y avaient
fondé un couvent, l'église de Noire-Dame do
la Mascarella leur ayant été accordée pour
ce sujet. Mais cette même année 1219 ils en
obtinrent un second dans la même ville, qui
est devenu si rccommandable dans la suite
des temps, qu'il est l'un des plus beaux et
des plus fameux d'Italie, tant par la magni-
ficence de ses bâtiments, de ses cloîtres et
par le nombre des religieux, qui est ordi-
nairement de cent cinquante, que pour l'a-
vantage qu'il a de posséder les sacrées reli-
ques de ce saint fondateur, qui tint deux
chapitres généraux dans ce couvent en 1220
et 1221. Dans le premier on fit plusieurs
règlements pour maintenir dans l'ordre la
discipline régulièreet la pauvreté, à laquelle
ils s'engagèrent en renonçant dans ce chapi-
tre ù toutes les rentes et possessions. Ce qui
port) Fniul l)(imi:ii(iue à ce renoncowenî
furent les effets admirables de la divine pro-
vidence, dont il avait vu les preuves dans
le chapitre général de l'ordre des Frères
Mineurs que saint François avait tenu l'an-
née précédente à Assise, où se trouvèrent
plus de cinq mille religieux qui ne manquè-
rent de rien, quoiqu'ils ne posséd isseni au-
cun revenu : ce qui toucha si vivement saint
Dominique, qui s'était trouvé pour lors à
Assise pour admirer ces hommes aposlo'i-
ques, qu'il rôsoliit de faire embr:isser la
même pauvreté à ses religieux, et que, au
rapport de saint Antonin, il donna en mou-
rant sa malédiction à ceux qui introdui-
raient dans son ordre les rentes et les pos-
sessions.
J'avoue que la plupart des historiens de
l'ordre de Sainl-Dominiquf» soutiennent que
leur fondateur ne se trouva point à co
chapitre des religieux de l'ordre de Saint-
François, sur ce qu'ils prétendent que saint
Dominique était pour lors en Espagne; et à
cause que ce fait est rapporté par Wadding
et quelques autres historiens de l'ordre des
Mineurs, le P. llechac, Dominicain, par une
fade raillerie , dit que c'est une tradition
grise; mais, sans examiner si elle est grise
ou blanche et noire, il est certain qu'aucun
des écrivains de l'ordre Je Saint-Dnuiiniquo
ne s'accorde sur le temps que demeura ce
saint en Espagne , ni dans quelle année il y
fut et qu'il en revint, le nombre de ceux
qui la mettent en 1218 étant plus grand que
de ceux qui prétendent que ce fut l'an 12li).
Quoi qu'il en soit , c'est une question peu
importante de savoir si ce fut à l'exemple de
saint François, ou de son propre mouvement
que saint Dominique rer.onça à toutes les
rentes et les posses ions dans le premier
chapitre général qu'il tint à Hologno l'an
1220. L'année suivante 1221 il y tint encore
un second chapitre général , où l'on divisa
l'ordre, qui avait déjà soixante couvents, en
huit provinces, qui furent celles d'Espagne,
de Toulouse, de France, de Lombardie, de
Rome, de Provence, d'Allemagne e( d'Angle-
terre, et on élut pour chaque province un
provincial. Le chapitre étant fini , saint
Dominique envoya des religieux en Ecosse,
en Irlande et dans les pays du Nord jus-
qu'en Norvvége , et s us le pôle, et dans le
Levant, jusque dans la Palestine. II alla
ensuite à I\lanloue, à Ferrare, à Venise,
d'où il retourna à Bologne, où, après avoir
travaillé si utilement pour le bien de l'Eglise
et pour rétablissement de son ordre , il
termina heureusement ses jours dans son
second cou\cnt, qu'on appelait pour lors
Saint-Nicolas des Vignes, et rendit son âme
à son créaleiir le sixième jour d'août l'an
1221. Le cardinal Hugolin, légat du saint-
s ége , fit la cérémonie de sa sépulture , ac-
compagné du patria.'che d'Aquilée ; et ce
cardinal ayant été depuis p.Tpe sous le nom
de Giégoire IX le cationisa le 13 juillel
123i.
(1) Yoy., à la fin du vol., n" I", 1 1 cl 15.
95 DICTIONNAIRE DES ORDUES RELIGIEUX. %
Voij. Ili'rnnndo ilo Cnsliulio, Junn l.oiicz, il.ms lo gouvorncmonl de l'ordre , nyanl cli'
ri AiilOTi. (le Rcmi'sel. Uisl. ilc San Domingo, élu dans le rliapiire général qui se linl aussi
t] dtsuordtnde Prrdcn(toris.\-\iAo\.Q..\hcci\s, à i'aris l'an 12.')". 11 rédiiioa par écrit les
Hitt. de San Domingi ». Ihom. Malucnda , ronstilulious ; il leur donna une meilleure
AnvaL ord. l'rœd. Li-and. Aiberl. de Y iris f.inne, et les divisa en deux parlies. Dans le
illiistrib. ord. PrwdAiio. Michel Pio, Vit. de premirr chapitre général qu'il lint, il fit re-
r//i Ifuomini iHuslri di S. Domenico. et llist. cevoir une ordonnance qui portait qu'il serait
deHn nobil. proyeii. de S. Domcnicn. .\nlon. permis au\ p^•néraux de se démettre de leur
Senen*. r/iroHi'c. /•'/'. I'r,rdicaloruw. et Vif. office quand bon leur semblerait , el qu'on
.S.";. PP. ord. Piad. Viiiccnl. Maria Fontana, serait tenu d'accepter leur di'inission : c'est
Monum^iiln Diminic nu, Thentnim Domini- pourquoi, profilant de cette ordonnance, il
cnnitm,tt Cunsiittuion., déclaration, et crdi- renonça au pénéralat dans un autre < hapiire
nation. Capilidorum Gener.l. ord. Pnrdicat. qu'il lint l'année suivante. On lui donna pour
Serapli. Kazzi, Vil. de primi sancli et biai successeur Jean de Waldisusen en Wesl-
del ord. di Predic. el Istoria de (jli lluomini phalic.sous le gouvernement duquel l'ordre
illun.'ri dcl ord. de Prédicat. Je m de Uechac, lit de nouveaux procurés, ayant fomlé Irenle-
Yies de saint Dominique el de sis premiers quatre couvents. Il y eiU cinquanlc-qualrc
compagn. J:\cob Vcrviit, MonumenlaConren- étab'isseniciits sous le çrénéralal du bieii-
lus Tulosavi ord. Prœdicnl. Jean-llaptist'î heureux llumbeil, cent vinjrl-rini] sous celui
reullel el Th mas S:)ué|:es , Année Domi- du bienheureux Jean de \'erreil , et (e nom-
«/fdi'n.. Sllves'r. Maruli.Mar. Ocfan. f/i /«.'f. bre des couvents s'est tellement multiplié
(//• R ligion. l'ieto Grecenz , Presidio Ho- sous les autres géncr.iux , que l'ordre esl
«K/HO. l'auolo .Morigia . Ilst. dcU'origin. di présrnlcmenl divisé en quarante-cinq pro-
luttele Iteligiuni.ci Hi'rmant. Hist. des Ordr. vinces , dont il y en a une sou'i le lilre de
rclit/ieur, /om. 11. Giry el lîaillel, Vies des Sainlc-Goix des lnde> occidenlales . une
saints, 4 août. sous celui de Saint-Jaccjucs de .Mexique dans
l'Amérique, une de Saint-Jean-Iiaptisle du
lU. Du grand progri's de l'ordre des l'rèrrs p^-rou , une de Sainl-Vinccul de Cliiapa
Prêcheurs, et des dignités cl offices alla- jans l'Amérique, une de Sainl-Ar.loniM du
che's à cet ordre. nouveau royaume de Grenade, une de Nak-
Après la mort de saint Dominique, les sivan dans l'.Vrménie , une de Sa nle-Calhe-
religieux de son ordre s'asseiiiblèrent à fine, martyre de Quito, dans l'Amérique;
I'aris l'an l-i-22 dans un chapitre général, une de Saint-Laurent de Chili au royaume
|our lui donner un successeur, cl élurent le d- Chili, aussi dans l'Amérique; une du
liienhenreux Jourdain de Saxe, quoiqu'il Saint - Rosaire des Philippines aux Indes
n'y eût pas plus de deux ans et trois iiiois orientales, une de Saint-Hippolyle, martyr
(|u"il fùl dans cet ordre; mais son insigne d'Oxaca , dans l'.Vmérique , <'l une des îles
piélé el son grand mérite, qui l'avaient déjà Canaries; ce qui fait voir combien cet ordre
éloé à la charge de provincialde Lombar- s'est répandu dans toutes les parties du
de, le firent encore choisir de tous les frères monde. Oulre ces quarante-cinq pro\inces,
piinr les gouverner en (lualilc de général. Il il y a encore douze congrégations ou rél'.ir-
envoya après son élection des religieux en mcsparliculièresgouvernéespar des vicaires
Allcni.igue , où ils fondèrent de nouveau généraui:, desquelles nous parlerons dans la
quatre couvents. Il en envoya d'aulres dans suite.
)a terre sainte , où ils fondèrent en peu de Je crois bien que les religieux de cet ordre
temps ciii'i ;iulris couvents; et, le nombre ont aussi passé eu l'iilliiopie dès l'an l-2iJ3 el
s'augnieniant du jour en jour, on érigea qu'ils y ont travaillé à la conversion des
peuples de ce pays-là, comme quelques au-
- "-r, — j j ? - — r»- —
quatre nouvelles provinces dans le chapitre
général qni fut tenu à l'a:is l'an 1228 :
savoir, les provinces de (irèce, de Pologne,
leurs du méaieordrele prétendent, alléguant
pour cet cITet une huile du pajie Innoccnl IV
de Danemark, el l'e lerre sainie. Il défendit adressée aux religieux qui étaient en Kil.io-
Irès-éiroilemeiit à tons les religieux deman- pie et en d'autres l'ays. .Mais ce que dit le
grr de la viande, ni lien de cuit avec la 1'. Louis dTrreti dans l'Histoire de l'ordre
viande, même dans les m.iladies, sans pcr- de Saint-Doujinique eu Ltliiopie ()u'il a roni-
mission de leurs supérieurs; mais celle posée en espagnol cl r.ubliee l'an tOII,
grande rigueur a clé modelée dans la sullc n'est pas souienable. Il prétend (|ue ces
dans le chapitre qui se tint au.-si à Paris religieux y onl plusieurs couvents, dont les
l'an 12.'lfi. Il déclara la résolution qu il avait principaux sont ceux de Plurimanos et d'AI-
prise de passer en lerre sainte, lîii elTel , il leluya ; que dans le premier il y a toujours
s'embarqua pour ce voyage; mais, à la \ue neuf mille religieux el p'us de trois mille
du pori d .Vcre, comme le vaisseau < tail près ouvriers el serviteurs, cl dans celui d'Alle-
d'y entrer, une grande lempéle s'éleva qui luya sept mille religieux ; (jne le couvent de
le fil submerger, d le bienheureux lourd, lin Plurim.inos a (lualre lieues de circuit; ((u'il
avec ses coiiip ignons y péril après avoir coiilient (inatre-vingts dortoirs, que chaqu.-.
irouverné l'ordre prnd.'int quinze ans. Ce fui dortoir a une grande cour, un cloîire, une
lui (|ui poursuivit la canonis.ition de s.iint bililiolhôiiue, une sacristie el une égli-(? par-
Ifoiiiiniq lie, dont il transféra les | rccieuses ticulière, où tous les religieux de c.! dortoir
rcliqneti dans un tombeau de m.irhre. disi'Ut l'ollicedivin pend'aiit la semaine ; mais
t; ,inl Raymond de Pe^iuafurl lui succéda que lous les dorloirs .'■ont disposés de telle
■'' DU M
sorte, qu'un des bouts répoiul de plain-iiieil
à la grande église où tous les religieux se
trouvent le dimanche pour cliaiitor l'office eu
commun, cl que l'autre bout répond au ré-
fectoire, qui a deux milles de longueur, c'est-
à-dire une lieue, où tous les religieux m;in-
gcnt ensemble tous les jours; que dans re
réfectoire il y a un serviteur pour trois tables,
au bout desquelles il y a un passoir qui ré-
pond cà lacuisioc, qui est aus>i commune
pour tous les religieux ; et qu'il y a un grand
et vaste cloître proche la grande église, qui
sert à faire les processions ; que le sacristain
de la grande église donne le .signal pour aller
à l'ollice, cl qu'en même temps les sacristains
des églises partiiulières de chaiiue dortoir
sonnent aussi , afin que les religieux se
rendent dans leurs églises.
Nous croirions ennuyer le lecteur si nous
voulions rapporter toulcs les fables que le
P. d'Urreta débile louchant ce couvent,
son fondateur saint Thècle-Aymnnol , S.
Thécle-Avarel, sainte îmate, sainte Claire,
cl autres saints de son ordre, à ce qu'il pré-
tend, et louchant les couvents d'Alleluya et
de Heningali. Nous en avons suflisammcnt
parlé dans la préface qui est à la tète du
premier volume de celte Hisioire; de telles
fables ne méritent pas d'être réfutées, mais
nous feruns seulement remarquer que ce
Thèeie-Aymanot que les religi 'ux de l'ord.e
de Saint-Dominique s'attribuent, et dont ils
mettent la mort l'an 13Gj, vivait l'an G20,
c'est-à-dire près de cinq cent cinquante ans
avant la naissance de leur fondateur. C'est
ce même Thècle-Aymanot qui fut le restau-
rateur de la vie monasiique en Ethiopie,
suivant le ténioignago de M. Ludolplie, Irès-
V( rsé diins l'hisloire de ce pays; et le cou-
vent de l'Iuriraanos est sans doute celui de
Dcbra Libanos,qui fut transiéré à iiagendra,
comme nous avons dit ailleurs.
Le P. Séraphim llazzi, qui avant le P.
Louis d'Urreta avait donné les Vies de ce
Thècle-Aymanol et de quelques autres saints
dlilhiopie, avoue que ce qu'il en dit n'est
que sur le rapport de deux Ethiopiens eu
Abyssins, qui se disaient de l'ordre de Sji'it-
Dominique, et qui lurent reçus en celle
qualité l'an lol3 dans le couvent de cet or-
dre à Pise, d'où ils allèrent à lîome, où l'un
d'eux, ayant demeuré près de trois ans, et
ayant appris la langue italienne, laissa par
écrit la des ripiion de ce prétendu couvent
de Plurimanos et de celui de l'Allcluja, avec
les vies de quelques saints de l'urdre de
Saint-Dominique qui sont morts en Ethio-
pie, comme des saints Thècle-Aymanol,
fondateur de ce beau et spacieux monastère
de Plurimanos; Thècle-Avarct , Philippe,
André, Samuel, et des s linles Imate, Claire,
et(iuelques autres. Aliciiel Pio dit aussi la
même chose, et le P. Louis d'Urreta recon-
naît que l'an 1515 il y en eut huit qui furent
reçus dans le couvent de Valence, cl qui vi-
iiaieut de Rome. Apparemment que de ce
nombre était cet Abyssin qui avait laissé à
DOM
ns
Home la description du cotivciil de Plurima-
nos, et qui avait composé les Vies do ces
saints d'Êlhiopie, dont il laissa aussi des
mémoires en Espagne qui ont servi au P.
Louis d'Urreta à com[ioser son Histoire.
Ainsi il y a lieu de s'étonner de ce que sur
la bonne foi de quel [ues Abyssins in(()nnus,
sans crédit cl sans autoiité, les PP. Hazzi,
d'Urreia, Pio el les autres historiens de cet
ordre aient débité de telles fables.
Mais quoique nous n'accordions pas à
l'ordre de Saint-Domi lique Thècle-Ayma-
not, Thècle-Avaret, et les autres saints d'E-
thiopie dont parlent Ie5 historiens do cet or-
dre, ce ne Se-ra lui rien diminuer de lagloiie
qu'il a acquise d'avoir donné un nombre in-
tini de martyrs, de saints ponlifes, de con-
fesseurs et de saintes vierges. Outre les
grands personnnges que leur science, leiii
mérite tt leur vertu ont élevés aux premiè-
res dignités de l'Eglise, on y compte trois
papes, qui sont Innocent V, Benoît iX. cl
saint Pie V, canonisé l'an 1712 par le pape
Clément XI; plus de soixante cardinaux,
plusieurs patriarches, près de cent cinquante
archevêques, et environ huit cents évêques,
oulre les maîtres du sacré palais, dont l'of-
fice a toujours été exercé |)ar un religieux
de cet ordre, depuis que saint Domiiiii|ue en
fut revêtu le premier par le pape Ùono-
rius m l'an 1218.
Ce qui donna lieu à l'éreclion de cet of-
fice fut que saint Dominique, ayant obtenu
du pape Honorius le couvent de Sainle-S.!-
bine avec une parte du palais de ce pontife
pour servir de demeure à ses religieux (1),
comme nous avons dit dans le paragraphe
précédent, il fut sensiblement touché de ce
que, I endant que les cardinaux et les minis-
tres de la cour étaient avec le pape, leurs
domestiques s'amusaient à jouer cl à perdre
leurleiMps; c'est pourquoi il conseilla au
pape de préposer quelqu'un pour leur faire
des instructions. Le pape approuva ce con-
seil et chargea saint Dominique de cet em-
ploi. Ce saint leur expliqua les Epîlres d ;
saint Paul; et ses instructions eurent un
succès si heureux, que le pape voulut qi;e
l'on continuât à l'avenir ces instructions, et
que cet emploi fût donné à un religieux de
l'ordre de Saint-Dominiquo, qui prendr.iit
la qualité de maître du sacré palais, ce qui a
é!é pratiqué jusqu'à présent; mais le maître
du sacré palais ne fait plus ces instructions
aux domestiques des cardinaux, il ne Is
fait qu'aux domestiques du pape, qu'il est
obligé d'instruire dans les choses de la foi,
le carême, l'avenl et les fêtes principales ;
ou bien il le fait faire par ses compagnons.
Les papes ont dans la suite accordé beau-
coup d honneurs et de prééminences aux
maîtres du sacré palais. Eugène IV, ayant
pourvu de cet ofiice Jean de Turrecremata,
(lui fut ensuite cardinal, ordonna par une
bulle de l'an 143(î que les maîtres du sacré
palais auraient place dans la chapelle da
pope immédiatement après le doyen des au-
(1) Vinceiil Mar. Fonlana, Syil.'.bus 'ilajhi. S. Pulmii.
iiicTioNNMP.:: uF.s (iriniiF.s iiLLir.n.LX.
09
Citeur» do Uulo, que lui seul cxamiiiornil les
scrm lis que l'on diM.iil faire dans rclto clia-
|>clle; qiii> personne n'y pourr.iit prêcher, à
moins qu'il n'i'ùt èlé nommé par le maîlic
du sarre palais; qu'au cas qu il fût obligé
de s'aliseulcr de Uonu-, il pourrait avec la
perniissiou du pape suhslituerqui Ique autre
à sa ilace, qui jouiiail des mcMiies honneurs,
elquc personne ne pourrai! èlrc reeu dins
iloine docleur en tliéologii" sans sa permis-
sion. r,ali\le III eonfiiiiia l'an li'JO non-seu-
leincnl h- droil <iue le pipe Eugène avait
aceordé au niailrc du sacré palais de nom-
mer eeu\ (]iii devaient pièclicr dans la cha-
pelle du pape, mais il lui accorda encore ic-
lui de reprendre puhliqucnient ces prédica-
teurs, même en présence du pape, s'il y
avait quehiue chose de répréhcusihle dans
leurs discours.
Léon \ oniuniia (juc l'un ne pourrait rien
iniprinier dans la vilh' de Home ni dans son
district sans lapprobaiion et la permission
du cardinal vicaire et du maître du sacré
[ïal lis, ce qui lut conlirmé l'an 1G20 par le
pape l'aul V, et l'an 102 j Urbain \ 111 défen-
dit à tous c us qui auraient composé dans
riîtal ecclé-iasiiquc queliiues ouvrages sur
quoique matière que ce pût èlre, de les faire
inipriuier en pays étranger sans la même
perinis>ion. Mais iirésenleinenl le maître du
sacré palais ou ses compagnons donnent
seuls la prrmission d'imprimer les livres. H
est juge dans llonii; de tous les imprimeurs,
libraires et graveurs, pour ce (jui regarde
l'impression, la vente, l'achat, l'entrée et la
sortie des livres et des cslam])es. Il est con-
sullcur-né des congrég.itions du Saint-Of-
licc cl des Uiies. Il assiste aussi comme pré-
lat à celle de l'Indix et à celle qui se tiiiit
chez le cadin il vicaire pour le concours des
curés do Koiiie. H nomme des compagnons
qui sont aussi religieux de son ordre, qui
signent les permissions pour l'impression
des livres, 1 1 (ont la visite chez les libraires,
cl il a le litre de réverendissime, que les
cnidinaux mêmes lui dunnenl. Le pape
i'ie V Ion. la pour son entrelien un canouicnt
dans la liasilii|ue de Saiiil-l'ierre, avec le
litre de théologal, par une bul.c de l'an l'iTO,
cl il en pourvut l'homas .Meiirique, pour
lors inaitic du sacré palais;, mais après la
mort d- Mcnri(|ue, Sixte \ , par une autre
liulh- de l'an loSli, révoqua ce. le de l'ie \ ,
voulant que celle prébende lût possédée par
lin eccle.Mas ique; ci p.ir la même bulle il
donna au maître du sacré palais une pen-
sion de trois cents éciis romains sur l'ab-
baje de Sainte-.Maiîe de 'l'errclo de l'ordre
de Saînt-li.isile, au royaume de Naples, (|ue
te caidiiial liusticucci possélail en com-
mcndc ; voulant (|ue cette [leiLsion, dont les
maîtres du s.icré |ialais ont toujours joui,
fui exc.'iipte de toutes charges et iinposi-
li iiis, sous qne'que prétexte que ce lût. Lo
pape lui entretieiii aussi un carrosse.
Nous avons d l ci-dctaiit ()ue le pape ICu-
gènc IV a^ ail ordoiiiié l'an l'iJiqiic le mai-
l.<' du sacré p.ilais aurait place dans la elia-
(lellc ii.'ipa:c inimédialeiucnl afrès le doyen
iOO
des nudileiirs de Ilole ; mais l'an lG5a Alexan-
dre N 11 o donn.i qu'il aurait séance, tant
dans la ch.ipelle du pape (jue dans les céré-
monies, après les auditeurs de Uotc, el (lu'il
aurait le pas devant tous les clercs de la
chambre apostolique, qui sont comme les
conseillers du conseil des finances du pape;
et, afin que l'on voie l'anUnite que le maître
du sacré palais exerce dans Home, nous rap-
porterons ici l'ordonnance <)ue chaque maî-
tre du sacré palais publi.? lorscju'ii est nou-
vellement pourvu de cet office.
Ordonnnnce du mailrc du sacre piiluis. —
I. L'expérience ayant fait connaître la gran-
deur du préjudice et du danger que cau-e
la Lecture des livres défendus, à la pureté de
la foi et aux bonnes iiucurs, non sans of-
fenser la divine majesté, el au détrimenl de
l'àme ; par ordre exprès el commission de
notre lrès-sa:iit père le p.i[)c M. le frère N.,
m.iilre du sacré palais, juge ordinaire, etc.,
commande el défend par la présente ordon-
nance, sous peine de la perte des livris. do
trois cents écus d'amende et autre peine
corporelle, à imposer à s i volonté (outre h s
ceii-uris el peines contenues dans les saints
canons, l'Index dci livres défendus, la buUe
7/1 Cicna Domini , el autres consliluiions
apostolii|ues), que personne n'ait la har-
diesse de porter dans Home el hors de llnme,
de retenir, acheter, vendre, donner el prê-
ter aucun li\rc défendu et suspi'ct, sous
queltiue lilre que ce soit, sans si permission
expresse et par éerit. Kl, au cas (jue qucl-
([u'un porte a un libraire un livre défendu,
Sa Ué>êrcndissimc l'aterni'é oidonnc que le
libraire le retiendra en présence d un autre
libraire son voisin et de deux lénioiiis, cl
que dans le terme de huit jours il le portera
à Sa Uévèrendissime l'aternilé ou à ses com-
pagnons, ce qui s'entend aussi des mêmes
libraires, en quelque autre manière que ce
puisse être, sous la mêii:e peine.
H. De plus, par la présente ordonnance.
Sa llevéret'.dissimc Patcrni:é révoque toutes
les permissions qui ont clé ci-dcvanl don-
nées \>iif les maities du sacré palais, lant de
vive voix que par écrit, en qu' Ique manière
que ic soil, déclarant que ceux ijui vou-
ilraienl s'en servir encourront les mômes
peines quç ceux qui rcticnnei'.t des livres
delendus sans permission.
lil. Que toutes sortes de livres, histoires,
oraisons, almaiiachs, images, ou ligures el
quelque autre chose îm|,rimée , si pelile
quelle puisse êlre, que l'on appirlera à
llome, seront consignés à la douane ou pré-
sentés à Sa Uévèrendissime l'aternilé ou à
ses compagnons pour en avoir la permis-
sion, el que les dialogues des liires qui
sorlironl de llome seront fiits avec lidelile,
en tnellanl le tiire de chaque livre, le nom
de l'auteur, le lieu et 1'. innée de l'impres-
s on, el (|ni en a été 1 imprimeur, sous peine
de confiscation des livres, et de cin<|uanto
ecus d'amende, plus ou moins, selon la ([ua-
lilé des livres el du di'lin(|u.inl.
IN'. (Ju'aiicun ciiailat.iii n'j l la li.irdissc
de iiorUT cl vende à Home aucune chose
roilas
BlBLIOTHECA
i^iifirti'i*
101
noM
noM
1{)-2
avec rccelli's, si aupaiMvanl il n'a inontié
lesdites recclles à Sa Révéïciidissline Pator-
nilé ou à ses compagnons, qui les approu-
veront ou les feront approuver par d'autres,
sous peine de confiscation de tout ce qu'il
aura à vendre, et de vingt-cinq écus d'a-
mende.
V. Que les courriers et postillons qui se-
ront charges de livres, si pelils qu'ils soient,
cl pour (ou(e sorte de personnes de quoique
état, qualité, condition et prééminence qu'el-
les puissent cire, .'oit dedans ou hors de
Home, soient tenus de les montrer iiremiè-
reuient au maître du sarré palais ou à ses
cotnpapinons, ou de les laisser à la douane,
sous peine de cinquante écus d'anundc et (ie
trois traits de corde (1).
VI. Qu'aucun douanier de Rome, soit de
terre, soit de rivière, ne soit assez hardi
pour délivrer les livres qui sont consignera
la douane sans ladite pertniss on, (e qui
doit être aussi observé par les commis des
portes sous les mêmes peint'S.
VII. Qu'aucun batelier, marinier, voilu-
rier, courrier et roulier, ne rende aux 1 brui-
res et autres personnes les livres dont ils
auront été chargés, avant que d'avoir dé-
claré à la douane ce qu'ils portent, sous
peine de cinquante écus d'amende ; s'il se
irouve que l'on ait délivré quelque chose
qui concerne l'orfice du maître du sacré pa-
lais, et autres cinquante icus d'amende et
confiscation de la marchandise pour celui
qui l'aura reçue.
VIII. Que personne ne puisse venJie par
la ville, livrets, histoires, oraisons, alma-
naehs, lettres, iinaj^cs ou figures, ou quel-
que autre chose imiu-imée, si pelile qu'elle
soit, même de la niusique, ou les exposer en
vente sur les bouli(iues ou dans li's places
publiques, ou dans (juclque autre lieu de la
ville, s'il n'est libraire de profession, ou s'il
n'a permission du maître du sacré palais ou
de ses compagnons. Déclarant que les re-
lieurs et papetiers sont compris sous le nom
de libraire, et pour ce sujet ils ne pourront
vendre aucun livre, soit vieux ou nouveau,
cl l< s relieurs rel:er aucun livre imprimé,
s'ils n'en ont permission, et s'ils n'ont fait
le serment ordinaire et la profession de foi,
conf irii;émcnt au décret de l'Index des livres
dél'indus ; cl personne ne pourra ouvrir
boutique d'imprimeur et de libraire, ou exer-
cer celle profession, s'il n'est approuvé et
r;çu, et s'il n'a des patentes signées de Sa
Révéreudissime Paternité ou de ses compa-
gnons, sous peine de confiscation des livres
et de cinquante écus d'amende , plus om
moins, selon la qualité des livres cl du dé-
linquant, lis(iuellcs patentes doivent être
renouvelées à chaque changement de maî-
tre du sacré palais.
IX. Que les héritiers et exécuteurs lesla-
meiilaires des liijraires décédés, ceux qui
voudront vendre leurs propres livres, et au-
tre;, ne puissent vendre aucun livre de
quelque sorte et en tel nombre que ce puisse
être, les montrer, les estimer, ou en traiter
avec d'autres pour les vendre, ou en dispo-
ser en quelque autre manière, s'ils n'en ont
obtenu auparavant la permission du maître
du sacré palais ou de ses compagnons, sous
peine de confiscation des livres et de 203
crus d'amende.
X. Que les ju fs, regratiers, et aulres ar-
tisans ne puissent vendre, emprunter et
prendre en nantissement aucune espèce do
livres, tels qu'ils puissent être, sans la per-
mission du maître du sacré palais ou de ses
compagnons ; et s'ils en ont à présent, qu'ils
aient, dans le terme de huit jours, ta en don-
ner un catalogue fidèle, sous peine de con-
fiscation desdils livres, de cinquante éius
d'amende, et autre peine, môme corporelle,
à la volonté de Sa Révéreudissime Palcrnilé.
Que s'il arrive que dans l'encan des juifs et
de la déposilairerie de la chambre, l'on y
vende des livres, Sa Révéreudissime Pater-
nité ordonne que ceux qui les vendront,
après en avoir obtenu la permission, eu
donneront avis à la communauté des librai-
res, afin qu'ils puissent se trouver à ladite
vente, Sa Rivérendissime l'aternilé ordon-
nant Irès-expressément que hors de l'encan
l'on ne puisse vendre aucun livie mis eu
séquestre ou en nantissement, sans une
nouvelle permission, sous la même peine
ci-di'ssus imposée.
XI. Que tous les libraires et vendeurs de
livres aient, dans le terme de trente jours, à
donner au maître du sacré palais ou à ses
compagnons un inventaire fidèle par ordre
alphabétique de tous les livres, lant vieux
que nouveaux, qu'ils ont, en y marquant le
nom de l'auteur, le titre, l'imprimeur, l'an-
née et le lieu de l'impression, et le nombre
des volumes de chaque sorte, lequel inven-
taire soit signé de leur main, et qu'ils en
reiiennent un doub'e de leur côté; et que
dans ledit terme chaque libraire ait à se
présenter en personne pour se faire écrire
sur le livre que l'on retiendra pour cet elTel
dans l'office du maître du sacré palais, où
siront marqués tous les noms des librains
et vendeurs de livres qui auront la permis-
sion d'exercer ce'lc profession. Passé ce
temps, l'on procédera contre ceux qui ne se
seront pas présentés, comme vendant sans
permission , et ils encourront les peines
portées dans l'article Vlll.
XII. Pareillement, Sa Révérendissime Pa-
ternité ordonne aux graveurs, imprimeurs
et marchands d'estampes en taille douce ou
en bois, de se présenter dans le même tempa
et de donner un catalogue de toutes les es-
tampes qu'ils ont dans leurs boutiques, avec
le nom de l'auteur, de l'imprimeur cl du lieu
où elles ont été imprimées, et de se faire
écrire dans le même livre, sous les mêmes
peines.
XIII. Qu'aucun médailliste, fondeur, gra-
veur de cache's, tant en acier qu'en fer,
bronze ou autre matière, ne soit as-^ez hardi
de graver, fondre et jeter en moule aucune
( ) Esiiècc d'estrapade.
'.(.5
MCTIONNAiUE I)i:S ORDllES RIILIGIKLX.
lui
fleure, soit saciéc ou prof.inc, ai t-c des Icl-
Iros ou sans lettres s'il n'i'n a la permission
du mai:ro du sairé palais ou Je ses compa-
gnons, ce qui se do l entendre aussi de tous
rcHX qui (oi)l des coins, poinrous cl autres
iuslrunicnls pour frapper et marquer Icsdiles
figures ou lettres, sous peine de deux cents
écus d'amende, de trois traits de corde, île
suspeusion de l'exercice de sa proT'Ssion. < 1
autres peines arbitraires, ^clon la faute du
coupald-î; c-l quo dans le terme d'un mois ils
se présentent tous devant le mailredu sacré
palais ou ses compagnons, avec la liste des
ligures et lettres qui s;inl gravées dans leurs
coins, afin que l'on mette au lias la permis-
sion do pouvoir s'en servir dans leur profes-
sion.
Xl\'. Que tous les libraires aient à porter
an maître du sacré palais un exemplaire
relié ou broché de tous les livres nouvelle-
ment imprimés ou réimprimés qui \icndronl
dans Uonie, de manière qu'on les puisse lire
.'lisément, afin qu'ayant été examinés et ap-
prouvés pour bons, on les puisse rendre aus-
sitôt au libraire qui les aura donnés, et qu'il
puisse retirer les autres de la même sorte
(|ui resleiout peu lant ce temps- là à 11
douane, el qui ne pourront élic déli»rés
qu'avec la permission de Sa Uévérendissitnc
i'aternité ou de ses compagnon'*, déclarant
que tous les ordres qui seront donnés par
son conip.ignDU, en pareil cas, aux garrons
des libraires en l'absence de leurs maîtres,
obligiTonl les maitrcs coiiin)c s'ils leur
avaient été sii;nifiés à eux-mêmes.
X\'. Que, dans le même terme d'un mois,
tous les imprimeurs aient à se présenter
aussi en personne pour se faire inscrire
dans le même livre des libraires cl graveurs,
et (lu'aucun ne puisse de nouveau ouvrir
une im|irimerie, s'il n'a fait auparavjint le
même si.'rmcnt que les libraires, sous les
mêmes peines.
X\'l. Qu'aucun imprimeur public ou par-
ticulier n'ai la témérité d'imprimer ou réim-
primer aucun livre, manuscrit, ou quelque
au rc diose, si p> tili; qu'elle soit, sans la
permission par écril de Sa Uévérendissime
i'aternité ou de ses compagnons, ni qu'il soil
as.-ez hardi de changer, ajouter ou diminuer
une seule parole, ni de mettre que l'impres-
sion soil faite en un autre lieu qu'à Home.
Sa Uévérendissime I'aternité veut que l'iin-
presslon soil conforme à la copie (jui lui
aura été donnée signée, cl qu'il ne rende
point publi(|ue l'impression jusqu'à ce que
le mailre du sacré palais ou ses compagnons
ail collalionné ladite impri'ssion sur la copie
signée do l'ui d'eux, laquelle copie restera
toujours dans l'ofliie du sacré pilais, el dol
cire signée de la propre main de 1 .uitcur,
avec la permission de débiter le livre. El en
cas que ce qui aura été signé par le miitre
du sacré palais et qui aura été donné â l'im-
primeur ne lût pas imprimé , limpriimiir
<de»ra. a\anl de rendre la copie à l'auteur.
la ri'domior au m.iitre du sacré (lalais, ;iliii
d'cITacrr la permission qu'il avait donnée,
Ce peur 4':c qiiaml on le voudra imprimer
on n'iijoulc quel;iic diosc, et afin qu'il
puisse cire es.'iniir.é de nouveau avec une
nouvel'e approbation, souc peine de confis-
cation des exemjilaires cl de cinquanle écus
d'or d'amende.
X\'I1. Que 10!!S I s imprimeurs, lihraircs,
graveurs, marchanls de livres ou d'estam-
pes, douaniers, médaillisles, courriers, pos-
lillons, gardes el portiers dos portes de la
ville, afin qu ils ne j uisscnl ignorer ce qoi
est co:ilenu dans la présenie ord.mnance et
qu'ils obéissent |,onclucllemenl à ce qui leur
esl commandé, aient à affii hcr dans leu.s
bout qiies, imprimeries, douanes el autres
lieux où ils exercent leurs ofiiccs publique-
ment, une c ipie de la présente ordoiinaiicc,
sous peine de cinq écus d'amende pour cha-
que fois qu'ils seront trouvés sans ladite
ordonnance; et de plus les libraires sont
obligés sous la même peine d'avoir VJndcx
des ivres défendus.
XVIII. Toutes lesquelles choses sont or-
données et commandées sous lesdites amen-
des, applicTbles partie en œuvres pieuses,
partie aux dénonciateurs, qui ne seront poinl
nommés. Sa HévérendissiiriC Paternité se
réservant de diminuer ou d'augmenter les-
dites piines, el de les éiend e n)diiie jnsi)u'à
punition corporelle, suspension el privation
de la profession, et de bannissement, selon
la qualité du crime et des personne», les-
iiuelles peines seront encore augmentées à
l'égard de ceux qui feionl récidive, et l'on
procéilera contre les tr.insgressi.-urs avec la
dernière rigueur.
Voulant que la présente ordonnance, qui
sera affichée et publiée à Rome aux lieux
accoutumés, oblige un chacun comme si e le
lui avait élé signifiée personnellement. Don-
né au palais apostolique, etc.
11 y a eu plusieurs Français q'ii ont élé
pourvus de cri office. Le premier fut Hugm s
Seguin de ISilloni en Auvergne, qui le fut
par Martin IV l'an 1281. Le pape Nicolas IV,
l'an 1288, le fil cardinal, el il fut ensuite ar-
chevêque de Lyon, (iuillaunic de Bayonno
succéda à Hugues Séguin dans col office,
qu'il exerça sous le pontificat de Nicolas IV
et sous celui de Clément V, qui le fit aussi
cardinal l'an 1312. Guil'aume 'ïavant de
Laou l'exerça sous le pontificat du même
Clément \ ; il lui archevêque de Vienne, en-
suite archevêque de fou ouse. Uaimonil Re-
quin de Toulouse fui pourvu de col office
par le pape Jean XXII; il fut ensuite évêquc
de Nimes cl patriarche de Jérusalem. Jean
de Lemoy, confisseur de Philippe IV, roi
de France, fut aussi pourvu de cet office par
le même Jean XXII, I an 132Î; mais il mou-
rut la inêmi" année, et cul pour successeur
Durand de Saint-l'orlicn, qui fut êvêqiicdu
l'uy et de .Me.iux. Jean XXII conféra encore
cet office à Dominique (irenier de l'ouionse,
qui fut ensuite ê> ê(|ue de P.im ers. Le même
pape pourvut encore <le col office lierre do
Pireto, que ilonoit \ll fil d.ins 11 suite cvê-
qiie de Mirepoix. Uaymoiil Durand l'exerça
sous le ponliliral du même pape. Jean Mor-
laud fui uiailrc du sacré palais sous le pou-
1(5
mu
noM
100
lificat de C'6monl VI; il fu( ensnito général
de son ordre, et mourut cardinal l'an 1358.
Guillaume Sudre, son successeur, exerça
aussi col office sous le poniitiiat du morne
Clémcnl VI. Urbain V le fil cardinal l'an
13G3, cl évéque de Marseille l'an 1369. Ni-
colas de Saint-Saturnin de Clermont fut le
dernier Français qui exerça cet office, dont
il fut pourvu par le pape Grégoire XI l'an
1370, el il mourut l'an 1382. Oulre ces car-
dinaux dont nous venons de parler, qui ont
été maîtres du sacré palais, il y a eu encore
les cardinaux Annibaldi, Slalius de Datis,
de Gaseneuve, de Turrecremala, de Badia,
Galamini, Michel Mazarin, archevêque d'Aix;
Capisucci el Ferrari, qui ont aussi exercé cet
office.
Un office qui est encore exercé par un re-
ligieux de cel ordre en plusieurs provinces,
et qui lui donne beaucoup d'autorité, est ce-
lui d'inquisiteur. Cet emploi élail demeuré
attaché a l'épiscopat jusqu'à 1 1 (in du dou-
zième siècle; mais, comme tnut élail en
trouble dans l'Eglise, où les hérésies se mul-
tipliaient ; que les hérétiques devenaient trop
puissants, et que les discours des prédica-
teurs et des missionnaires qu'on envoyait
pour les cnnverlir étaient inutiles, le pape
Innocent 111 établit (selon quelques-uns) un
nouveau tribunal qui regardait les matières
de la foi, pour punir sévèrement les héréti-
ques, el qui fut appelé l'Office de rin(|nisi-
lion; el comme les hérétiques albigeois fai-
saient de grands désordres dans le Langue-
doc , le pape nomma pour inquisiteur saint
Dominique, qui y travaillait pour lors à la
conversion de ces hérétiques. Mais les his-
toriens de son ordre ne sont point d'accord
louchant l'année que ce trii)unal fut établi;
plusieurs auteurs prétendent que saint Do-
minique n'exerça point cet emploi, et que ce
ne fut que l'an 1:232 que le pape Grégoire IX.
attribua le tribunal de l'inquisiiion de Tou-
louse aux religieux de son ordre, qui est le
premier qui ail été établi.
Quoi qu'il en soit, l'inquisition passa en
Pologne, en Italie et en plusieurs autres
provinces, où les Dominicains exercèrent
l'olfice d'inquisiteurs. Mais ces offices étant
passés en d'autres mains dans la plupart de
ces provinces, ils ne leur sont restés qu'en
quelques lieux d'Italie , où ils l'exercent
avec autorité dans trente-deux tribunaux,
en autant de villes, aussi bien que dans celle
d'Avignon et de Cologne, mais seulemenl en
qualiié d'inquisiteurs provinciaux, etcommc
délégués des cardinaux qui composenl la
congrégation du Samt-Oflice à Komc, el qui
sont inquisiteurs généraux. Autrefois le gé-
néral de l'ordre de Saint-Dominique nom-
m.iit ces inquisiteurs ; mais présentement
ils sont institués j)ar le pape ou par la con-
grégation du Saint-Office. Celle congréga-
tion, par un privilège accoidé à l'ordre l'c
S;iint-Domini(|uc, se tient au couvent de la
Minerve, tous les mercredis, dans l'apparte-
tnent du général de cet ordre, qui y a sisic
avec le maître du sacré palais cl le t oiuniis-
saire du Saint-Office, quiesi aussi religieux
DiCTio:«NA!r.E d:.s Oudues r:;f.ii::if.ix. 11.
du même ordre , et qui fait sa demeure or-
dinaire dans le palais du Saint-Office. Le
secrétaire de la congrégation de Vlndex des
livres défendus , composée de plusieurs car-
dinaux , est toujours aussi de l'ordre de
Saint-Dominique.
Il y a encore à présent deux inquisitions
en France, l'une à Toulouse et l'autre à
Carcassonne, mais sans autorité. Les Domi-
nicains ne laissent pas toujours de se faire
pourvoir par le roi des offices d'inquisiteurs.
Ils ont même quelques appointements, mais
ce sont des titres seulement sans aucune
fonction. L'inquisition de Toulouse est la
première qui ait été établie, comme nous
avons dit ci-dessus. I>es inquisiteurs, après
avoir perdu leur autorité, et que ce tribunal
fut tombé en décadence, ont néanmoins re-
tenu assez longtemps le droit qui leuravait
été donné à leur établissement, qui était de
se faire apporter tous les ans le scrutin de
l'élection des capitouls de Toulouse pour
l'examiner el pour vnir si parmi ceux qui
avaient été élus il n'y en avait point quel-
ques-uns suspects d'hérésie ; mais ce droit
leur fut ôté vers l'.m IC'+C par un arrêt du
conseil, et fut attribué à l'archevêque de
Toulouse Charles de Monchal et à ses suc-
cesseurs.
Je ne m'arrêterai point à parler de toutes
les personnes illustres de cet ordre, puisque
Michel l'io, Léandre Albert cl plusieurs
historiens du même ordre nous en ont donné
des volumes entiers. Personne n'ignore que
saint Thomas d'Aquin, saint Anlonin, samt
Vincent FerriiT, Albert le Grand, Vincent
de Beauvais, Louis de Grenade, ont été des
plus beaux ornements de cel ordre, (jui jus-
qu'à présent a eu soixante généraux qui
sont à vie, et que leur grand mérite et leur
capacité ont élevés à cette dignité. Cependant
il y en a eu deux qui ont été déposés par
autorité du sainl-siego, savoir, Munio de Za-
morra par le pape Nicolas IV, l'an 1292, et
M;irtial Auribcl, Provençal, par le pape
Pie II, l'an li62. L'on ne sait point les rai-
sons que ces souverains pon ifes curent de
déposer ces généraux, qui étaient d'uno
éminente vertu. On leur rendit néanmoins
jus ice dans la suite. Munio de Zamorra,
après avoir refusé l'évêché de Guudix, fut
contraint par le pj'.pe Céleslin V d'accepter
celui de Palencia, el Atari ial de Provence lut
élu une seconde fuis général dans le chapitre
qui s.c tint à Novarre l'an l'iGo.
Le siliisnie qui partagea l'Eglise en 1378,
après la mort du pajio Grégoire XI, el qui
dura quarante ans, divisa aussi cel ordre.
On vit dans le chapitre général tenu à Bo-
logne en 1380 deux généraux. Les provinces
qui reconnurent pour pape Urbain VI élu-
rent le bienheureux llaymond de Capoue
pour général, et déposèrent Elie deToulouse,
qui gouvernait actuellement l'ordre, à qui
les provinces de France, d'Espagne, d'Ara-
gon, de Provence, de Sicile et de delà la
Phare, qui reconnaissaient pour pape GI6-
ment Vil, prêtèrent toujours obéissance.
Celles (lui élui-ent le bicniituroux Raymond
107 DICIIONNUUF. [>ES
de Capouc furent les provinces d'Ilalie, d'.M-
leuiagne, de Hongrie, dAnglelerre, de Po-
logne, de (îri^ce. de Dalnialie. de la lerre
gainle, de Bohômc el de Saxe. Aprè'i la mort
tic ces pcner.iux, cliaquc parli en c^isail un,
ce qui dura jusqu'en l'an l'il8, que le pape
Martin V réunil loul l'ordre sous le P. Léo-
» nard de Florenee, qui avait élé élu par les
provinces d'Ilalie el hs auîres du niènic
parti, ayant donné lévochéde Calane à Jean
» de Popjiio, qui él.iil reconnu par les Fran-
çais, par Us autres provinces qui leur
éta ent unes, cl niénic pur saint N'incent
Ferner. Ce fut sous le ^énéralal du P. Bar-
thélémy Texier, qui succéda au P. Léonard,
que l'ordre commença à posséder des rentes
cl des biens immeubles, par un privilép;e du
même Martin V. Les généraux funt présen-
tement leur séjour ordinaire à Home dans e
couvent de la .Minerve, qui est double, l'un
pour les religieux de la province de Rome,
el l'autre pour les étrangers qui !>e trouvent
à Kome chargés des aff.iires de leurs provin-
ces. C'est dans ce lieu qu'est rapparleincnt
du i;cnéral,qui est fort spacieux. Il y a dans
ce couvent une riche bihlidthùqne qui a élé
rendue publique l'.in 1700 par la magnifi-
cence cl la libéralité du cardinal Casanalle,
qui pour l'augaienter a donné la sienne,
composée de cinquante mille volumes sans
les manuscrits, avec un f.)nds de quatre
mille CCU9 romains de revenu , voulant
qu'une partie de ce revi nu s'employât tous
les ans à l'achat dis livres nouveaux, et
l'autre partie à l'entretien de deux Pères lii-
blio;hecaires et d • deux convers pour le .ser-
vice de la bibliothèque, de deux lecteurs (jui
doivent euMci^^ner la doctrine de saint Tho-
mas, et de six théolo;^i.ns de différentes na-
tions et du même ordre, pour s'ojiposer par
leurs écrits aux nouveautés des dogmes qui
pourraient naître au préjudice de l'unilé el
de la vérité de la loi de l'Eglise calholinuc;
il a fait encore d'autres fondations qui ren-
dront sa mémoire inimorlelle. Outre ce cou-
vent de la Minerve et celui de Sainte-Sabine,
ils en ont encore un sons le nom de Saint-
Niiolas de Perfetti, et deux monastères de
filles; mais il n'y a point de villes où ils en
aient davantage qu'a Naples, puisqu'on y
conipti' > ingl-liuit couveiits de cet ordre, sa-
voir, di\.-liuit d'hommes et dix de filles.
Nous avons parle dans le § précédent de
rhabillcmenl de ces religieux. Les frères
laniues sont distingués des prêtres en ce
qu'ils portent i.n scapul.iirc et un capuic
no rs, cl (lue les prêtres ont un scapulairo
blanc, ne meltant I.' capiiihoii noir pir-des-
sus la cliape qie lorsqu'ils sortent ou <iirils
sont en habit de chœur. Les rtîligicux d'Es-
pagne cl de Portugal avaient toujours porté
des chap s prises, ju'-quc sous le gêneralal
du P. .Martial Auribe le, qui, ayant été élu
l'an liH.'i, les obligea de prendre des chapes
noires. Les armes de l'ordre sont chape d'ar-
gent el de sable à un lis tige, cl une palme
d'or passée en sautoir, lirochanl sur le loul.
Cl une étoile d'or en chef, l'argent clrirgé
d'un livic, sur leqacl est un chien posant sa
onDBES IIF.LIGIEUX.
<«8
patte sur un monde, el tenant à sa gueule un
flambeau allumé; Féru timbré d une cou-
ronne ducale, ayant pour cimier une tiare,
une mitre, un chapeau de cardinal, une
I rosse el une croix patriarcale. Favin pré-
lendque ci't ordre portail anciennement pour
armes, gironé d'argent et de sable à une
croix lleiirdelisêe, partie de l'un en l'autre,
à la bordure cumponée de huit pièces aussi
d'argent, el de sable à huit étoiles de l'un
en l'aulre, el huit besans de même. Cet or-
dre illustre a présentement pour chef le ré-
vérend P. Antonin Cloche, Français, qui fut
élu l'an 1088, du consentement unanime de
tous les vocaux, pour ses excellentes quali-
tés, dans le chapitre général qui se tint à
Home après la mort du K. P. de Monroy.
Nous avons dit dans le § précédent que
l'on nomme en France ces religieux Jaco-
bins à cause que leur première maison à
Paris est située dans la rue Saint-Jacques.
-M. Hermant, ruré de .Maltot, dit qu'on les
appela aussi en Italie Jacobites, parce qu'ils
imitaient la vie apostolique, et que quelques
auteurs les appellent les Prédicateurs de
Saint-Jacques ; mais M. Hermaut ne nomme
point ces auteurs. Cependant s'il éiail vrai
qu'ils eussent eu le nom de Jacobites à
cause qu ils imitaient la vie apostolique, ou
celui de Prédicateurs de Sainl-Jacques,
pourquoi leur a'irail-on donné piiilôl le nom
de Prédicateurs de Saint-Jacques ou de Ja-
cobites, que celui de quelque autre apôtre?
Jls peuvent néanmoins a\oir élé appelés à
Paris Jacobiles; car j'ai des épilres canoni-
ques écrites à la main l'an 1503 par un pro-
fesseur en théologie de l'université de Paris,
qui les appelle ainsi ; mais il y a de l'appa-
rence qu'il ne le faisait que par dérision, et
pour se venger d'en avoir é;é niallrai:c dans
une dispute qu'il avait eue sans doute avec
eux au sujet de l'iinniai uléc conceplim de
la sainte \ierge, comme il paraît par ce qui
est à la lin de ce manuscrit: lùjo Peints lii-
cliardi annos ogens k'i, in aima Iheologorum
Fiuulinle l'arisiensi prufessor indignu<, ncc
non in licclesia Trecensi cnnonictis, has epi-
s/o,'(.'< manu mea propria de<crip,^i, aujiliunte
Domino iV. J. C- et iinmaculdi.a ejui Maire
Maria umni laude diijnissima, nnno salutis
lo i. l'cria .'l posl Invocavil. Kodein anno
fralres Jacubit r swpe cxpugnM-crunl me, sed
liuts Dco el concrptioni Mariœ intemeratœ :
non potuerttnl milii. l'arcal ri$ Alissimus.
Voyez les auteurs cités d:ins le § précé-
dent, el, pour lei provinces jiarticulières de
cet ordre : Louis de L'rrela, llist de la s i-
qnida orden de Predicadores en Eliopi'U An-
lonio de Keniasal, llist. de la l'rovin:ia de
Siinlo-V incnte df Cliijipn y liitiilcm(da. Au-
gust. d'Avil.i, IJisl. de la Prorinria de S.
Jaijn. Dom (ionzalès, Hist. de la Provincin
del It isario de Filipinas Japon y China.
Fn parl.int des missions auxquelles, en
diverses lonlrees, les Dominicains s'em-
p'oienl avec zèle el avec fruit, le P. Ilélyot
n'a point mentionné leur opposition aux Jê-
suite>dans l'alTaire des rits chinois, proscrits
par le cardinal de Tournuu, envoyé dans les
m
ÏTOM
DOM
110
missions d'Orient pour informorde celle im-
portanle affaire, el condamnés ensuite par
le sainl-siégp. On sait que les Jésuites, qui
connaissaient mieux que personne, il est
vrai, ce qu'il pourrait y avoir de supersti-
tieux dans ces cérémonies, ne monlrèrent
pas une obéissance aussi ponctnelle et aussi
prompte qu'il le fallait, et on les en a géné-
ralement blâmés. Néanmoins, il faut bien
rabattre des blâmes qu'on leur a donnés,
quand on voit les mesures de prudence pro-
visoire que Home prescrivit aux mission-
naires qui la consultaient après la suppres-
sion de la Compagnie de Jésus. Les Douiini-
cains ont vu aussi quelques-uns des leurs
donner dans le jansénisme, et le fameux
P. Lambert, mort dans les commencements
du dix-neuvième siècle, a poussé son affe-
ction àcelte erreur jusqu'à un fanatisme ri-
dicule. Ils ont eu des membres de leur ordre
qui ont embrassé les erreurs de la constitu-
tion ciwle du clergé, mais en même temps
ils ont eu également des religieux qui ont
donné l'exemple de la soumission à l'Eglise
et d'une Hik-lité héroïque aux bons princi-
pes. Cet ordre respectable continue aujour-
d hui ses bonnes œuvres dans les missions
lointaines ; nous en donnerons pour exem-
ple celles de l'Amérique du Nord, auxquelles
nous nous -bornerons, sans parler de ses
établissements dans tes missions d'Orient et
ailleurs actuellement en activité. Le premier
évéque de New-York a été le P. Hichard-
Luc Concanen, assistant général do l'ordre
des Frères Prêcheurs ; et c'est d'une lettre du
P. E. D. Fcnwii'k, son confière, que nous
lirons ces détails sur rétablissement des Do-
minicciins aux Etats-Unis. Le P. Fcnwick
avait d'abord conduit les catholiques de
Mataoumen dans l'Etat du Maryland. Il alla
depuis se fixer dans le Kcntucky dès les
premières années du dix-neuvième siècle ,
car il était déjà depuis (jnelque temps à Pis-
catawey en août ISOo. Il était venu d'Angle-
terre s'établir en ces contrées, adressant, en
partant, aux catholiques et à la noblesse de
la Grande-Bretagne une circulaire pour se
procurer leur iniérét et leurs secours. Né
dans le Marjland, Fcnwick était allé se
taire D.iminicain à Bornhem, en Flandre,
dans le dessein d'établir plus lard un sémi-
naire de religieux de son ordre dans sa pa-
trie, et d'y propager la religion parce moyen
puissant. Les révolutions arrivées en lùs-
riipe retardèrent longtemps l'ccèculio:! de
son projet, pour lequel il fut autorisé par
ses supérieurs de Rome et d'Angleterre ; cl
iM.Carri)l, évèque de lîallimore (siège qui ne
lut que plus tard érigé en archevêché), lui
promit la plus ferme assistance. Sa circu-
laire lui procura une somme importante, cl
il arriva au Maryland vers le milieu du mois
de mai, accompagné du P. Antoine Angier.
L'évêque de Ballimnre lui conseilla de lixer
son élalilissemeul dans la province éloignée
duKenlucky, où les catholiques le désiraient,
cl il y projetait réreciion d'un collège. 11 ne
trouva dans le Kcntucky que l'abbé Badin,
prêtre séculier, qui les reçut à bras ouverts,
et qui dans les commencements éprouva
quelques peines causées par le peu de fer-
meté des Dominicains pour le soutien de la
morale dans l'exercice du saint ministère.
Le P. Fenwick s'établit enfin dans le comté
de Washington , près de Spring-Field, et
acheta une propriété de 230 rubi d'étendue,
contenant déjà une maison assez bien bâtie,
etc., et cela du produit de ses biens pater-
nels, dont il retira 5000 piastres. Ce trait
lui mériiail la reconnaissance de ses compa-
triotes, de toute la religion même et snrtnut
des Dominicains, dans l'histoire desquels il
méritait au moins cette mention. Il ét.iit ac-
compagné, quand il commença enfin cette
fondation, des PP. M'", Thomas VVilson, An-
toine Angier, Kaimond Tuile, qui ont donc
été les premiers missionnaires Dominicains
de cette contrée, alors exploitée par les hé-
rétiques, comptant déjà neuf ou dix impri-
meries à leur service, et qui trenle-cinq ans
auparavant n'était qu'une forêt inculte, ha-
bitée seulement par les sauvages, vivant do
chasse et de pêche. Le P. Fenwick fut de-
[luis élevé à l'épiscopat.
L'ordre possédait à Home, au dernier siè-
cle, les maisons suivantes : 1° Sainte-Marie
de la Minerve, 2' Sainte-Sabine, 3° Saint-
Sixte le Vieux, k' Saint-Clément, S" Saint-
Nicolas du' PerfeCti, (," Notre-Dame du Ro-
saire au Monte-Mario, 7° Saint-Cyr et Sainte-
Julitte, 8° la Pénilencerie de Sainte-Marie-
Maji ure. La maison de la Minerve est en-
core aujourd'hui le chef-lieu de l'ordre et la
résidence du généra'.
L'institut possédait autrefois à Paris trois
maisons, celle de Saint-Jacques, rue Saint-
Jaci^ues, d'où leur e>t venu, comme on sait,
le nom de Jacubins, qui était la première
maison de l'ordre en France, et le col égede
cet insliiu!. On y compt.iit, il y a un siècle,
quatre-vingts religieux. Il n'y avait pas de
noviciat, il se faisait en province. La l)iblio-
thèquc de cette maison était de quinze à
seize mille volumes. C'était beaucoup, mais
peu néanmoins comjiarativemenl aux biblio-
thèques des deux autres maisons dont nous
allons parler, et qui n'avaient pas un si haut
rang dans la nomenclature des monasl<^res
de l'ordre ; celle bib'iotlièque contenait plu-
sieurs manuscrits d'ouvrages de piété, lé-
gués par saint Louis à ces religieux, qu'il ai-
miil beaucoup. L'église du couvent, qui
depuis longtemps menaçait ruine, avait été
abandonnée par les religieux avant la Révo-
lution, et l'oliice divin se célébrait dans la
salle des exercice-, connue sous le nom
(VEcolcs de Saint-Thomas. On remarquait
d.ins CCS écoles, situées à côté de l'église et
bâties an seizième siècle, aux frais du P.
Jean Binet, une chaire revêtue de marbre,
dans laquelle était, dit-on, renfermée celle
qui avait servi à saint Thomas d'Aquin. Ce-
pendant la vieille église, vaste < t partagée
en deux dans toule sa longueur, comme
celle des Dominicains de Toulouse, a sub-
sis'é encore après la Révolution et a servi de
magasin. On voit encore les restes de ce
m jnastèrc dans la rue des Grès.
lit
DICTIONNAIHE DES ORDRES RFLICIEUX.
112
I.o rouvonl des D:)ininic.iins de In rue
Sainl-H norc élail situé cnlrc l'église Saint-
Itoili el la place ^'endoiiic. C'est dans la
salle de la biblioilièque de celte maison que
se réunit Cite horde d'élrcs pâles par le gé-
uie du niil el des pasvinns humiliantes, qui
prirent ou reçurint du lieu de leurs séances
cl garderont dans l'hisioire le ni»ni hideux
do Jacobins. L'ejjlise des religieux, les bâti-
ments fort simplis el les j.irdins, qui occu-
paient prcs<iue tout l'espace qui est mire la
rucSainl-Honoré et la rue Neuve-desPelils-
Cbamps , ont di>p iru, et l'on a transporté
sur ce vaste terrain le marché qui s'y voit
acluellement. Celle n aison, où les éludes
étairnt cultivées, possédait un cabinet d'his-
toire naturelle lrès-curieu\ , fornic p.ir les
soins du l*. I.abnt, connu par ses relations
d'Afrique el d'Amérique, l'eu de couvents de
l'ordre avaieni, croyons-nous, une liiblio-
théquc aussi nombreuse, car on y compl.'iit
environ lrenle-dcu\ mille volua.cs, le dou-
ble de celle du célèbre couvent de la rue
Saint-Jacques. Celle riche bibliolhèquc pos-
sédait des éditions rarc< et des manuscrits
précieux. On y conservait soi<!neusement
une chaise qui avait servi, disa^lon, à saiul
Thomas d'Aquin. 11 y avait un noviciat dans
cette maison, et les aspirants payaient deux
cents livres pour leno\iciat el deux cents
livres pour rhabillemenl. Elle renfermait il
y a un siècle soixante \)rélres el cent novi-
ces. Celte maison faisaii partie de la congré-
gation Occilaine, dont nous parlerons en
traitant des réformes dans l'ordre des Frè-
res Prcclieurs (Voyez Lombardie); mais celte
congré;;al:on fui éri.'ée en province sous
l'invocalion de Saint-Louis.
Outre ces deux monaslèrcs mentionnés par
Hélyot, les Dominicains en possédaient à
Paris un troisième, doni il ne parle point, et
qui élail situé au fauliourg Sainl-liermain.
Afin d'assurer le succès de la réforme du
1*. Sébastien .Michaelis, m'irt dans le couvent
de la rue Sa'nl-Honoré, le P. Nicolas Ho-
dol(ihi, général de Tordre, résolut d'établir
en France un noviciat génér :1 pour ceux
qui voudraient embrasser celle réfar.Tie. Il
y fut autori-é par un bref d'Urbain VIII ,
donné en 1C29, par des lettres patentes de
Louis XIII, et trouva en même temps dans
le cardinal Richelieu un protrdeur puis-
sant qui, par ses bienfaits, mérita d'être
considéré comme le fundalenr du nouvel
élablissemenl. Dès 1G31 , quatre religieux
tirés de la maison de la lue S.iinl-Ilonoré
avaient été placés dans cille-ci, siliiéc rue
Saint-Dominique-Sainl Germain el i|ui n é-
tait alors qu'un b.'Uimenl très-simple, avec
un jardin el un clos conîcnaj.t sept arpents
cl demi. Ils s'y firent construire ;iussili4 une
peine ctrapelle, qui fut bénite en iG.i2. Le
nombre des sujets qui se présentaient pour
obtenir leur ailmisslon dans l'ordre, aug-
mentant chaque jour, il fallut penser à h.ilir
lies lieux plus reïtnliers. Ils commencèrent
par l'église, qui fut élevée sur les dessins de
l'archiicctc Pierre Ruilet. La première pierr.'
en fui posée en 16^-2, jiar Ilvicinlhe Serroni,
archevêque d'Aibi, el par madame Anne
Monibaziin, duchesse de Luynes. Elle fut
achevée l'année suivante. Le bâiimenl, dé-,
coré inlérieurcmcnl d'un ordre de pilastres,
corinthiens, offre tous les caractères de l'ar-
chitecture employée à celle époque dans les
édifices sacrés, et du reste n'a rien de remar-
quable. Le portail, rebâti quelques années
avant la révolution par le frère Claude, reli-
gieux de cette maison, se compose de deux
ordres élevés l'un sur l'autre, dans la forme
pyramidale adoptée pour le plus grand
nombre des églises de Paris et de quelques
autres villes, ci n)éine dans la boiserie de
quelques autels. Ces deux ordres, demi l'en-
semble a quelque apparence, sont d'une pro-
portion el surtout d'une maigreur qui peut
( hoquer l'œil le moins exercé. Nous sommes
entré dans ces détails sur celte église parce
qu'elle existe encore aujourd'hui el esl celle
de la paroisse S3int-Ttiomas-d'A(iuin. Le
couvent, qui esl habité on partie pir des
particuliers el en partie occupé par le musée
d'.Vrtillerie, a été le séjour de plusieurs reli-
gieux célèbres, enlre autres du P. Vincent
Karon, docteur de l'universiié de Toulouse
et llu'ologien distingué du dix-septième siè-
cle ; du frère Jean-André, peintre habile, et
dont les tableaux taisaient le iirinci[)al orne-
ment de l'église el du monastère: du frère
François Romain , ingénieur el architecte
très-estimé. On lui doit le plan du pont de
Maëslricht et une partie de sa construction.
Louis XIV. qui l'avait chargé de la conduiie
du Pont-Royal, fut si content de ses travaux,
qu'il lui confia l'inspection des ouvrages des
ponls el chaussées, cl la réparation des bâ-
timents dépendants de son domaine. C'est
ainsi que les monasières renfermaient une
réunion d'hommes ignorants et inutiles.
Celle maison des Dominicains du faubourg
Saint-lîermain était sous la seule d.reclion
du général de l'ordre, et depuis un temps
immémorial les supérieurs claient tirés de la
province de Toulouse. La provinc' occilaine,
à laquelle elle appartenait d'abord, ayant
été érigée en province, elle a\ ait un noviciat
qui n'avait aucun rapport avec celui de la
rue S.iinl-ilonoré. Ce noviciat était d'un an,
et on n'y payait point de pension. La biblio-
thèque (le la maison, composée de plus de
ving-quatre mille \olumes, était ornée ùe
deux globes de Coronelli.
Pour résumer ce que Hélyot a dit de lil-
luslration de cet ordre célèbre, nous rap-
pellerons qu'il a eu plusieurs saints cano-
nisi-s, lies savants illustres, el surtout sa nt
Ihoma^ d'Aquin, quatre papes (InnocciU V,
lîenoil XI, saim Pie Vel, depuis la morld'Ué-
lyol, IJenoil .Mil), un grand nombre de cardi-
naux, de patriarches , d'ar<hevè(|<jes, d'e-
véques, de docteurs el d'écrivains célèliris.
I e P. Jacques Eihard el le P. louron, tous
deux Français, ont écrit l'histoire des hom-
mes célèbres de leur ordre. On a vu dans le
premier article d'Hélyot que l'habit des Do-
minicains avait été dilTerenl .i l'origine do
l'ordre. Comme ils metlaienl sur leur habit
blanc un inauleau cl un capudiuo noirs, ou
113
DRA
DRA
114
les appela jadis en Angleterre les Frères
noirs, tandis qu'on appelait les Carmes
Frères blancs.
Les Dominicains ont des maisons en di-
verses contrées, en Italie, en Angleterre, en
Irlande, à Gand el autres lieux de la Belgi-
que. En l'année 183:2, l'empereur de Russie
a supprimé dans la seule province de Mohi-
luw cinquante-cinq monastères de Domini-
cains; vingt-neuf restent encore ou du
moins restèrent alors. La révolution d'Es-
pagne a détruit tous les couvents de Domi-
nicains; il en reste, d;ins les Etals soumis à
l'empereur d'Autriche, trente-sept contenant
deux cent deux religieux. Les Dominicains
ont actuellement pour supérieur ou maître
généra! le R. P. Ange Ancarani, et pour pro-
cureur général le P. Joseph Alberti , tous
deux résidant à Rome. Quelques lentadves
avaient été faites sans succès aux diocèses
de Rodez et d'Evreux et peut-être ailleurs,
pour rétablir en France l'institut de Saint-
Dominique. M. l'abbé Lacordaire ayant em-
brassé l'ordre des Frères Prêcheurs, sous le
nom de F. Dominique, après avoir fait son no-
viciat à Rome, a été autorisé par le général à
rétablir cet ordre dans sa patrie. Après plu-
sieurs projets d'établissement en divers dio-
cèses, il a pu enfin se Gxer à la maison du
Cholais, appartenant autrefois aux Char-
treux et oriffinairenient à une congrégation
spéciale de Rénéditlins que nous (ferons con-
naître dans le Supplément. C'est donc à Cho-
lais, au diocèse de Grenoble, qu'il a établi le
chef-lieu de celte future el prochaine pro-
vince de France, el qu'il a donné l'habit aux
premiers novices, le k août 1845. Comme
celte province, sans faire une réforme parti-
culière, sera pourtant une sorte de congré-
gation spéciale dans l'ordre, nous consacre-
rons un article exprès à celte palingénésie
des Dominicains en France. Voy. Domini-
cains, au Supplément. B-D-E.
DO.MINIOUE (CoNGBÉGATiONS DIVERSES DE
i.'oBDRE DE Saint-). Voyez Lombard e, etc.
DOMINIQUE {Ordre de Saint-). Voyez
Dominicains.
DONAT (Saint-) Voyez Césaire (Saint-).
DORDRECHT. Voyez Augustins.
DORÉS (Chevaliers). Voyez Constantin
(Chevaliers de).
DRAGON RENVERSÉ, des Disciplines, db
l'Aigle-Blanche, du Tusin , de Notre-
Seigneur et de sa Passion, de la Fidé-
lité, ET DE SaIHT-RupEUT, ElN ALLEMAGNE
(Chevaliers du).
Presque tous les écrivains conviennent que
l'empereur Sigismond a institué un ordre
militaire sous le nom du Dragon renversé
ou vaincu, mais ils ne s'accordent pas sur le
temps auquel se Gt celte institution : les uns,
après Michieli, la mettant l'an l'i^OO, el les
autres, après Favin, prétendant que ce fut
l'an 1418. Michieli ajoute que le motif qui
porta se prince à instituer cet ordre fut afin
que les chevaliers qui le recevraient pussent
combattre les hérésies qui infectaient la Bo-
hême et la Hongrie, el que, pour cet effet, il
sollicita la convocaiion des conciles de Cons-
tance et de Râle, où ces hérésies furent con-
damnées. Sur ce fondement il n'y a point de
doute que Michieli ne se soit trompé en met-
tant l'inslitulion de cet ordre en 1400, puis-
que les conciles de Constance et de Bâie ne
furent tenus, le premier qu'en 1414, et le se-
cond l'an 1431, el que Jean Hus ne com-
mença à semer ses erreurs en Bohême qu'en
1407.
L'abbé Giusliniani fait voir que ceux qui
ont cru que cet ordre n'avait été institué
qu'en 1418, après la tenue du concile de
Constance, se sont pareillement trompés,
prétendant qu'il était établi avant l'an 1397 :
ce qu'il prouve parle testament de François
del-Pozzo, de Vérone, de la même année, où
il est parlé de son lils Victorio del-Pozzo,
chevalier de l'ordre du Dragon, qui était
pour lors auprès de l'empereur Venceslas,
ûùGaleas Visconti, prince de Vérone, l'a-
vait envoyé pour quelques affaires. Voici ce
que porte ce testament, dont l'original est
conservé dans la maison dos seigneurs Poz-
zo de San-Vitale, et dont il est fait aussi men-
tion dans la généalogie de celle maison,
écrite par Jean-Bapliste Merlo et imprimée
à Vérone. In omnibus, et instituit et esse
voliiit sp. et egreg. virum D. Viciorium aPu~
teomilitem Draconis ejus dileclissimum fi-
lium, qui modo, prœcepto magn. et potentiss.
D. Jo. Gulealii, rrperilur apud serenissimwn
Venceslautn imperalorein nostrum, pro ejus
negoliis pertractandis. Ce qui fait croire à
l'abbé Giustiniani que l'empereur Sigismond
avait fondé cet ordre lorsqu'il épousa, en
1385, Marie, reine de Hongrie, ou le jour
qu'il fut couronné roi de Hongrie l'an 1387,
parce que ce jour-là il fil chevalier Panta-
léon Barbo, ambassadeur de Venise. Le mê-
me auteur ajoute que ce prince étant devenu,
dans la suite, empereur el roi de Bohême, et
ayant reçu la couronne impériale à Rome,
l'an 1493, il fit, en passant à Vérone, plu-
sieurs chevaliers, aussi bien qu'à Mantoue,
où il alla ensuite; el que les armes de ces
chevaliers se voient encore dans plusieurs
églises et sur les portes de plusieurs palais
de Vérone, avec deux dragons au-dessous
de ces armes, dont l'un regarde l'écu, leurs
queues passées sous le corps, tortillées au-
tour du cou par le bout, el ayant chacun une
croix sur le dos. Favin a donné la représen-
tation du collier de cet ordre, composé de
deux chaînes d'or, sur lesquelles sont des
croix à double traverse, avec un dragon
renversé au bout du collier (1).
Mennénius, sur l'autorité de Jérôme Ro-
man, historien espagnol, dit que sous les
empereurs Sigismond et Albert 11 il y a eu en
Allemagne trois ordres militaires fort célè-
bres, el qu'un certain Moïse Didace de Va-
lera, espagnol, reçut de l'empereur Albert
ces trois ordres, savoir : celui du Dragou,
(I) Voij.. a la fin du vol., n' 10.
115
DICTIONNAIRE Dh;S ORDRES RELIGIEUX.
lis
donlnous venons de p;irli r, que ce prinrc
lui donna comme roi do Hongrie; ctliii du
Tusin, comme roi do llohémo, ot coiui des
Disciplines vu de l'Aiizle-Hlanclic, comme
archiduc d'Aulrithe. M.iis comme l'Aulriclie
n'a éié crig< e on archiducho q :c par loinpc-
rearMaximilien 1", l'an 1195, Alberl, qui
tnourul l'an lV+0, n'aurail pu donner l'ordre
de l'Aitile-lilanclic à ce Moïse Didace de
Valera en qualité d'archiduc d'Autriche.
Aussi les historiens sonl-il^ parla-és au su-
jet lie 1 institution de cet ordre, que quel-
ques-uns attribuent à Uladislas V. roi de Po-
logne, surnommé Lokier, qui, selon eux,
l'institua au mariage de son û!s Casimir le
Grand avec une fille du duc do Lilhuanic, on
1325, ajoutant qu'un nid d'aiglons qui fut
trouvé par Lechus, premier prime de Polo-
pne, lorsqu'il f.iisait creuser les fondemonls
de la ville de Gnisnc, donna occasion à Lla-
dislas di- prendre pour marque de cet ordre
une aigle blauche couronnée, pendante à un
collier composé de chaîuc^d'or (1). Il se pout
faire qu'il y ait eu aussi on Autriche un ordre
BOUS ce nom et sous celui dos Disciplines,
dont le collier, selon quelques écrivains,
était en forme de baudrier, où étaient atta-
chées des aigles blanches. Quoi qu'il en soit,
l'an 1705, Frédéric-.\uguste, roi de Pologne et
duc de Saxe, renouvela dans ce royaume
l'ordre de l'.Vigle-Hlanohe, et donna à plu-
sieurs seigneurs qui avaient suivi son paili
uneaigle blanche avcccetledevi»e, p'o ^(/c,
lege et rrge.
S'il est vrai que rempereur Albert II don-
na à ce Moïse Uidace de \'alora les trois or-
dres du Driigon, de l'Aiglo-Blanche et du
Tusin, ce dernier aurait été institué avant
l'an 15G2, quoique l'abbé Giustiniani dise
que dans l'incertitude où on est de son ins-
titution on doit conjecturer qu'elle ne peut
avoir élc faite que dans cette année, pui^que
selon lui les archiducs d'.\utriche en ont été
les fondateurs, et que ce ne fut que dans ce
temps-là que l'on donna le titre d'archiducs
à Ferdinand et à Charles, neveux de l'em-
pereur Charles V. Mais cet auteur n'a pas
fait reflexion que ce Ferdinand n'eut que le
litre d'archiduc d'Inspruck, et son frère n'eut
que Celui d'areliidiic de Gratz; que leur
père Ferdinand, frère de l'empereur Charles
\', avait été archiduc d'.Vuiriche dès l'an
1520, et que l'.xulrii lie avait été érigée on
archiduché par l'empereur Mavimilion I ',
comme nous avons déjà dit. Schooncbecli,
qui ne parle qu'après l'abbé Ciusliniani et
qui souvent traduit mal cet auteur, dit que
l'iirdre du Tusin dé|iCiidait des arehi.lucs
d'Auiiicho, et que Ferdinand et Charles, qui
étaient frères, furent les premiers qui reçu-
rent cet ordre, l'an lolJ2. Ce qui e>l certain,
c'est qu'on ne sait point quelle a été l'origi-
ne du cet ordre ni pouniuoi on lui donna le
iiuLU de Tusin. L'abbc Ciustiniaiii dit encore
que ces (hctaliers portaient un manteau
ruugc sur lequel il y avait une croix vertu
[i], (|u'ils faisaient vu>u de i haslctë cl d'o-
béissance au s.nint-siégcet à leur sonverain»
et qu'ils suivaient la règle de Saint-Basile;
mai^ cet auteur a soumis à la même rèule ri
à d'autres tant d'ordres de chevalerie qui
n'en ont ou aucune, que nous n'ajoutons pas
beaccoup de foi à ce qu'il dit de ces cheva-
liers, qu'il confund pout-élre avec les che-
valiers d'un antre ordre qui subsistait en
Hongrie, et qui étaient habillés de cette
sorte, desquels Mennénius fait mention sur
le rapfiort de Jérôme Mégiser, historiogra-
phe de l'archiduc d'Autriche, et dont Josse
.\iiiiunus et quelques autres ont donné l'Iia-
bilii nient sans parler de leur origine, ne
leur donnant seulement que le nom d-.- che-
valiers hongrois. Quoi qu'ilen soit, nousdon-
norons l'habillement de ces chevaliers sous
le nom du Tiisin.
Favin, Thédlre a'honneur et de cheralfiie.
Le P. Anselme, Palais de l'IJonneur. Ber-
nard Giustiniani, Uist. <li luit, gti ordini
militari. .Mennénius, lleliciœ equcst. ordin.
Herman et Schoonebeck, dans leurs Uisloi-
rcs des Ordres rdigieur.
A ces anciens ordres d'.\llemagne nous
joindrons encore trois autres ordres militai-
res qui ont été établis de nos jours par des
princes allemands. Le premier est celui do
Jésus-Christ et de sa Passion, que le prince
Charles, neveu de l'okcteur de Saxe Jean-
Georges IV, institua ; dont Us chevaliers
devaient porter sur leurs manteaux une crois
de salin blanc ou en broderie d'argent, au
milieu de laquelle était l'image de Noire-
Seigneur, et au col un ruban bleu taliisé,
ayant au bout une grande médaille d'or où
la mêiue imago était gravée; et étaienl obli-
gés d'assi^lcr avec dévotion au service qui
se fait le vendredi et le samedi de la semai-
ne sainte. Le 7 février fut choisi pour la cé-
rémonie de l'instilution de cet ordre. L'ar-
chevêque de SalzljoLir^ célébra pontilica-
leraent la messe eu l'église des Uécollels do
la ville de Lolbe, avec la musique de Sun
Altesse cl l'harmonie des timbales cl trom-
pelles; après quoi ce prince donna le collier
de l'ordre à ce piélat, et ensuite au prince
Adolphe, au prince Frédérie, son frère, à
celui de Nuremberg et à plusieurs autres
personnes de la p'us haute qualité.
Frédéric 111, marquis et électeur de Bran-
debourg, ayant pr.s le titre de roi de Piusse,
institua le l't janvier 1701 un ordre militaire
sous le nom de la l'iilililc, cl donn.i aux
chevaliers pour manjuc de cet ordre une
croix d'or émaillée de bleu ayant au milieu
les chilTres de ce prince F. H., et aux angles
l'aigle de Prusse éinailléede noir. Celle croix
est attachée à un ruban do couleur «l'orange
que les chevaliers portent en f.irnie d'écharpc
depuis l'épaule gauche juxju'à la hanche
droite , dessus le just.iuciirps , la couleur
d'orange a' ant été choisie apiiaremmeiit en
ii.émi)ire de la mère du roi, princesse d'O-
range. Ces chevaliers portent encore sur le
cote gauclie de leurs habil> une croix brodée
d'argent, en forme d'étoile, au milieu de la-
it) Vvy., à la liu d ( \ul., ii' 17.
(î) Voij., il la lirulu vul.,n' IS.
in
ECU
ECU
IIS
quelle est une aigle en broderie d'or sur un
fond d'orange , l'aigle tenant dans l'une de
ses serres une couronne de laurier, et dans
l'autre u» foudre avec cetle inscriplion au-
dessus de sa tête , Suum cuique, en broilerie
d'argent. Cet ordre ne se donne qu'à ceux de
la maison royale et aux personnes les plus
considérables de lEtat, en reconnaissance de
leur mérite. Ceux qui reçurent cet ordre les
premiers furent le prince royal, les trois
margraves frères du roi, le margrave d'Ans-
pac, les ducs de Curlande et d'Ifolstein , les
comles de Wartemberg, de Barfons, de Dona
et Lollum ; les quatre conseillers régenls de
Prusse, MM. de BerbanI, Branschke, Creulz,
et Vallenrond ; le grand maîlre de l'artillerie
et le général major , le commissaire général
comte d'Onlioff , le chambellan comle de
Doua et M. Billau , grand maître d'hôlcl de
la reine.
Il y a encore eu un ordre militaire institué
la même année 1701 par l'archevêque de
Salzbourg Jean-Ernest de Tliun, sous le nom
de Saint-Uupert, premier é?éque de cetle
ville. Le prélat , après en avoir obtenu la
confirmation de l'empereurLéopold l", créa,
le 13 novembre, fé e de sa'nt Léopold, douze
chevaliers de cel ordre, qu'il choisit entre la
plus illustre noblesse de ses Etats : la céré-
monie se fit dans l'église de la Trinilé , nou-
vellement conslruiie , et il donna à chacun
de ces chevaliers une médaille d'or, avec
l'imagede saint Rupert d'un côté, etde l'autre
une crois rouge. La cérémonie fut suivie d'un
magiiifiiiuc festin, auquel les chanoines de la
cathédrale et plusieurs personnes de qualité
assistèrent, et deux fontaines de \in coulè-
rent pen'ant le repas dans la place qui est
devant le palais. Le lendemain, le comte Er-
nest de I hun , neveu de l'archevêque , qui
^a^ait fait commandeui de l'ordre, donna
aux chevaliers un autre repas magnifique ,
qui fui suivi d'un combat d'ours et de tau-
reaux.
E
ÉCAILLE. Voy. Bande (Ordbe de la).
ÉCHARPE. Voy. Hache.
ÉCHELLE ( Religieux hospitaliers de
Notbe-Dame della Sc:ala ou de l').
Des religieux hospilnliers de Notre-Dame
della Scala ou iU V Echelle, à Sienne, arec
la vie du bienheureux Soror, leur fonda-
teur.
A'oici des hospitaliers à qui Barbosa, Tam-
burin, Crusenius et quelques autres auteurs
donnent pour fondateur le bienheureux Au-
gustin Novelli, qui, après avoir été chance-
lier de Mainfroi, roi de Sicile, se Ht religieux
de l'ordre des Ermites de Saint-Augustin,
dont il fut ensuite général , étant pour lors
péniicncier el coe.fesseur du pape Boni-
face Vlll; et ils prétendent que ce fut vers
l'an 1300 qu'il fonda celle congrégaiion. Ces
auteurs se sont peut-être fondés sur ce que
dans la vie de ce saint il est dit qu'il per-
suada à un homme riche de la villede Sienne,
nommé Ues'aurus, de donner tout son bien à
l'hô; ital de cetle ville, et que, comme le bien-
heureux Augustin avait beaucoup de crédit à
Rome, il obtint des privilégesel des exemptions
pour cet hôpital et pour ceux qui le desser-
vaient, qui prirent le nom de religieux, et
auxquels il prescrivit une manière de vivre
et quel devait être l'habillement du recleur.
Selon l'auteur de cette vie , qui (à ce que
dil le Père Papebroch) était contemporain de
ce bienheureux Augustin, il n'aurait pres-
crit ces règlements pour les religieux de cet
hôpital de Sienne que vers l'an 1300, puis-
qu'il ne les fit qu'après avoir renoncé au
généralat, qu'il exerça pendant deux ans, et
auquel il avait été élevé le 25 mai 1298,
comme remarque le même Papebroch dans
ses annotations sur cette vie. Par conséquent
ces hospitaliers n'auraient été religieux que
dans le même temps, puisque l'auteur de la
vie du bienheureux Augustin dit qu'il leur
en obtint la permission , ce qu'il a entendu
par ces paroles : Insuper et omnia bona
privilégia quœhabet diclum hospilale, el quod
passent vocari fratres, et deeorumexemptione
a sancta maire Ecclesia, ipse cum esset tna-
gnœ repntalionis in curia , acquisivil. Ce-
pendant il y avait des religieuv dans cel hô-
pital dès l'an 1292, selon Giugurta Tommasi
dans son Histoire de Sienne ; et, si le recteur
et (eux qui desservaient cel hôpital n'eus-
sent pas été religieux , la république do
Sienne, à qui le pape Cclestin III avait remis
le gouvernement de cet hôpital l'an 119i,
en l'ôtant des mains des chanoines de la
cathédrale , aurait pu les changer el en
mettre d'autres en leur place, l'an 1292,
voyant que par leurs malversations les re-
venus se dissipaient, et que les pauvres
étaient privés de secours. Mais comme c'é-
tait dans ce temps-là de véritables religieux
qu'elle ne pouvait pas renvoyer, elle em-
ploya seulement son autorité pour que l'hô-
pital fût mieux gouverné à l'avenir qu'il
n'avait été jusqu'alors. Le sénat (dit Tom-
masi) envoya pour ce sujet six députés à
Orlando , qui en était recleur, el qui le»
rebuta d'abord sans les vouloir entendre ;
mais ils furent dereciief envoyés avec ordre
exprès à ce recteur de réformer avec eux
les abus qui étaient dans cette maison , afin
que les pauvres fussent mieux soulagés à
l'avenir. Le sénat lui défenditenmême temps
de soumettre cel hôpital à aucune église ni
à aucun ecclésiastique, et ût des règlements
pour le bon gouvernement qu'il prétendit
qu'on observerait. Ainsi cela détruit ce que
l'auteur de la vie du bienheureux Augustin
Novelli a avancé ; et n'y ayant eu que huit
ans d'intervalle entre les années 1292 et
1300, il semble que Tommasi aurait dû faire
mention des règlements qui avaient éléfails
par le bienheureux' Augustin Novelli , s'il
est rrai qu'il en ait fait ; mais au contraire il
«19
DICTIONNAIRE DES ORDRES RELIGIEUX.
120
ne parle aucunement de lui, non plus qu'Or-
lando MalaNolli, dans l'Hisloire de Sienne,
iiu'il a failo aussi. Au reste il si' peut faiie
ijue le bii-nheiireux Novelli leur ait seule-
ment procure la ri gle de saint Augustin.
Il se trouve une peinture dans cei hôpital,
de l'an \'-t\-2, laquelle représente le bienheu-
reux Augustin Novelli donnant l'habit au
recteur avec celle inscriplion au b.is. Corne
S. Agostino Noielo die l'abilo a rellore de lo
spedale; mais on ne peut pas tirer de là une
ronséqurnrc (lu'il a clé le fondateur de ces
hospitaliers, l'cul-étre en avait-il commis-
sion, ou bien ce recleur était I ien aise de le
recevoir de sa main par dévotion. D'ailleurs,
il en était de ces recteurs comme de l'admi-
nistraleur de l'Iiôpila! du Saint-Esprit en
Saxe, à Rome, qui est toujours une personne
distinguée, qui n'est jias tirée du corps de la
religion, quoiqu'il en soit général; et il
se pourrai! faire que le bienheureux Augus-
tin ayant persuadé à ce Rostaurus, dont nous
avons parlé, de donner tous ses biens, qui
étaient considérables, à cet hôpital, et cet
homme ayant ^oulu se consacrer au service
des pauvres, on l'aurait par reconnaissance
fait recleur do cet hôpiial, cl qu'il aurait
voulu recevoir l'habit des hospitaliers des
mains du bienheureux Augustin Novelli.
Lombardelli, dans la ne du bienheureux
Soror, qui est le véritable fondateur de ces
hospitaliiTS, après avoir dit qu'il reçut l'ha-
bit des mains de rarchevéque de Sienne, de-
mande grâce au lecteur, et le prie de ne le
point faire passer pour un monteur, si par
hasard il lui tombe entre les mains une vie
du bienheureux Soror écrite par un auteur
anonyme, qui dit que ce fut le bii iiheurcux
Augustin Novelli qui lui donna 1 habit. Il fait
en même temps remarquer que ces deux
bienheureux n'étaient point contemporains,
que le bienheureux Soror mourut l'an 8'J8,
et que le bienheureux Augustin Novelli vi-
vait en 1.30G. Il ajoute qu'il est vrai que le
bienheureux Augustin donna l'habit et le
vole à une sainte femme, nommée Diéla, qui
demeurait dans cet hôjital au service dos
femmes malades. Ainsi, selon cet auteur, ce
serait peut-être le bienheureux Soror qu'on
aurait voulu représenter dans ce tableau re-
cevant l'habit des mains du bienheureux
.Vugustin Njvclîi, el qui aurait donné occa-
sion a cet anonyme auteur de la vie du bien-
heureux Soror de dire qu'il avait reçu l'ha-
bit des mains du bienlieurcu\ Augustin No-
velli, ce qui ne peut pas éire.cl il n'y a
nulle apparence que ce dernier ait institué
les iiospitiiliers de Sienne, à qui nous don-
nons a plus juste titre pour fondateur le
bicnlieurc'ux Soror.
Il naquit .1 Sienne le 25 mars do l'an 832,
de parents qui subsistaient plutôt du travail
de leurs mains ()ue des biens de leur pairi-
nioine, dont ils claierit médiocrement pour-
vus. Ils ne laissèrent pas de donner de si
bonnes instructions à leur fils, et de l'élever
dans des scntiinenls d'une piéié si solide,
qu'il [irés leur mort, se vovunt libre de!< soins
qu'il leur iciiduil, cl des secours qu'il leur
procurait , il se dévoua entièrement au ser-
vice de Dieu dans 1rs exercices de la péni-
tence. Pour cet effet il se presciivil un genre
de vie qu'il ne changea que par raison de
conlormilé lorsqu'il eut établi la congréga-
tion dont nous allons parler. Il portait con-
tinuellement le cilicc, jeîinait trois fois la
semaine au p.iin et à l'eau, et les autres
jours il ne prenait que des v iandes couiiiiu-
iies cl en très-pe'it.- quantité. Je ne sais ;i
l'auteur de l'Histoire des Flagellants ne s'é-
lèvera poini contre moi si je dis que le bien-
heureux Soror, pendant une heure du jour
et autant de la nuit, déchirait son corps avec
des disciplines armées de pointes de fer,
pui>que c'est aller contre son sentiment, et
donner un exemple de cet^e sorte de mar-
tyre dans le neuvième sièc e. Mais comme
je ne parle qu'après Lombardelli, qui rap-
porte ce f.iit dans la vie du bienheureux So-
ror, l'auteur de l'Uistoire des Flagellants
pourra le lui contester s'il le veut, et je passe
aux autres morlincaiions de ce bienheureux,
qui à peine donnait à son corps quelque re-
pos la nuit, et le peu qu'il lui accordait n'é-
tait (|ue sur une planche, employant lo
reste de la nuit à la jirière et à la uiédilation.
Il se levait à minuit pour aller à quelque
porte d'église dans laquelle on disait mati-
nes à cette heure-là. Le jour il assistait à
tous les oflices, et visitait presque toutes
les églises de la ville et les autres lieux du
piété.
Mais, comme Dieu le destinait à secourir
les pauvres, il lui inspira d'alord l,i pensée
de donner un asile aux pauvres pèlerins,
qui, passant à Sienne j our aller à Rome, et
n'y ayant puini de retraite assurée, étaient
obliges de coucher le plus touvent dans les
rues. Il avait une petite maison jo gnant l'é-
glise cathédrale, qu'il destina pour cette oeu-
vre de charité, eu l.i faisant servir d'hospice
pour ces pauvres pèlerins. Il les invitait à y
venir loger, il leur lavait les pieds, leur don-
nait à manger, et raccommodait leurs babil'.
Ses soins ne se terminaient pas à des assis-
tances simplcmenl corporelles ; il s'appliquait
à leur procurer le salul éternel, en leur fa. -
sant des instructions, les entretenant de cho-
ses spirituelles, et les consolant dans Icuis
misères.
Son exemple, joint à ses exhortations,
anima tellement les personnes charitables
de Sienne, qu'il y en eut plusieurs qui vou-
lurent contribuer à son pieux dessein. Les
uns l'assistèrent d'argent, d'autres lui en-
voyèrent des vivres en abondance; de sorte
que par celte assistance il se vil en étal d'aug-
menter sa chambre et d'y mettre un plus
grand nombre de lits. Les étrangers qii
avaient ressenti les effets de sa chanté en
passant à Sienne, étant de retour chez eux,
tirent connaître «c siiint lioinmc, auquel ou
envoya de différents endroits de grosses som-
mes, par le mojcii desquelles il se vit eu
élat d'entreprendre de grands bâtiments ^
afin de pouvoir recevoir un plus grand nom-
bre de pauvres. Pour cet effet il jela les fon-
demeuls de l'hopiUl de Notre-Dame délia
m ECU
Scala ou de l'Echelle, qui fut ainsi nommé à
cause qu'en creusant la terre pour faire les
fondements, on y trou.va trois degrés de mar-
bre que l'on crut être des restes d'un temple
qui était dédié à Minerve. Son hôpital éiant
achevé, et élant ainsi beaucoup augmenté,
sa charilé augmenta aussi en même temps.
Niin content d'y loger les pèlerins, il y reçut
encore les malades de la ville et les étran-
gers ; et voulant que les pauvres prisonniers
se ressentissent aussi des aumônes qu'on lui
faisait, il leur envoyait à manger trois fois
la semaine. Sa charité, qii n'avait point de
bornes, le porta encore à recevoir les en-
fants exposés, et, par le moyen des grands
legs que l'on fit à son hôpital, il se trouva
en état de faire apprendre des métiers à ces
enfants, afin qu'ils pussent gagner leur vie:
et il mariait même les files. Enfin cet hôpi-
tal est devenu si fameux dans la suite, qu'il
a présentement plus de deux cent mille li-
vres de revenu, sans les aumônes, qui sont
considérables.
Le bienheureux Soror, voyant son hôpital
solidement établi, et que plusieurs personnes
qui s'étaient joiiHes à lui pour servir les
pauvres voulaient persévérer le reste de leur
vie dans ce saint exercice de charité, il leur
prescrivit une forme d'habillement pour les
distinguer des séculiers, et des lèglements
tant pour leur manière de vivre que pour
l'ordre du service des malades, la réception
des pèlerins et l'élection des officiers. 11 y
avait des règles qui regardaient le recteur eu
particulier, et d'autres qui ne regardaient
que les frères. 11 y en avait aussi pour les
sœurs; car, comme il y avait daui l'hôpital
des appartements séparés pour les femmes,
elles étaient servies par des personnes de
leur sexe, qui étaient habillées de même que
les frères. Ces règles furent d'abord approu-
vées par l'évêque de Sienne, et confirmées
dans la suite, longtemps après la mort du fon-
dateur, par le pape Célestin III, l'an 1194-, et
par plusieurs de ses successeurs. On y fit
néanmoins des changements en différents
temps, selon qu'on le jugea à propos pour le
plus grand bien de l'Iiôpital. Plusieurs hôpi-
taux d'Italie, voyant le bon ordre qu'on ob-
servait dans celui de Sirnne, y voulurent
être soumis et le reconnaître pour leur chef.
Le recteur de Sienne envoyait des hospita-
liers dans ces hôpitaux, qu'il retirait quand
il le jugeait à propos; et il y faisait la visite
comme général et nommait les recteurs. 11
avait aussi voix à l'élection de l'évéque, et
le droit de patronage dans plusieurs églises.
Les principaux hôpitaux qui dépendaient de
celui de Sienne étaient ceux de Florence,
de Saint-Geminien , d'Aquapendi nte , de
Rieii,deTodi,deSan-Miniato, de Poggibonzi,
de Saint-Savinit, de Barberino, et de Caslel
délia Pieve; mais dans la suite ils se sont
soustraits de l'obéissance du recteur de
Sienne, et même tous ces hospitaliers, qui
eurent dans la suite grand besoin de réforme,
à laquelle ils ne voulurent point entendre.
ECO
»22
ont été entièrement supprimés vers le milieu
du xvr siècle. Quant au bienheureux Soror,
voyant que l'hôpital de Sienne augmentait en
revenus, il ne voulut faire aucune dépense
sans l'avis de deux gentilshommes de la ville,
auxquels il fit donner le nom de Sages de
Notre-Dame delta Scala ; m:n< dans la suite
le nombre de ces gentilshommes a été aug-
menté, et on en élit tous les ans huit le pre-
mier jour de janvier, qui doivent prendre
connaissance de toutes le recettes et de tou-
tes les dépenses de cet hôpital. Le bienheu-
reux Soror y mourut le 15 août de l'an 898.
L'on fut quatre jours sans le pouvoir mettre
en terre, à cause de la grande foule du peu-
ple qui ne le voulait pointquitter. On le leva
de terre l'an 1192 pour le mettre dans la sa-
cristie, et son corps fut trouvé tout entier et
sans corruption.
L'habillement de ces hospitaliers consis-
tait en une soutane noire comme celle des
ecdcsiastiques, sur laquelle ils mettaient une
chape ou manteau, et par-dessus cette chape
une espèce decamail,sur lequel il y avait du
côté gauche une petite échelle à trois éche-
lons surmontée d'une croix en broderie de
soie jaune, et pour couvrir leur têie ils
avaient un béguin de toile noire qu'ils atta-
chaient avec des cordons sous le menton ; et
sur ce béguin ils portai«!nt un bonnet rond
large d'un palme et demi replié de la lar-
geur de quatre doigts (1), et ils n'ôtaient ja-
mais le béguin qu'en présence du pape.
L'habit du recteur n'était pas différent de
celui des hospitaliers, sinon que dans certai-
nes fêtes et cérémonies, sa chipe et son bon-
net étaient de velours, et l'échelle en brode-
rie d'or; mais je crois que la vanité y avait
fait ajouter quelque chose de plus que ce que
le bienheureux Soror avait or.lonné.
Voyez Bolland. tom. IV Mail. Lombardelli,
Vit. dell. B. Soror. ïomm isi et Orlando Ma-
lavolti, Hist. de Sienna. Barbosa, de Jur.
ecclcsiastico lib. i, cap. 41. Ascag./fambur.
de Jur. Abhal. tom. 11, disp. 2i. Crusen, Mo-
vastic. August. Luigi Tortlli, Secoli Agosti-
vinni loin. V ; et Philip. Bonanni, Calalog.
Ord. Relig. tom. I, p. 111.
ECOLES CHRÉTIENNES kt de l'ENFANT
JÉSUS (Frères et Soeurs des).
Le défaut d'élucalion et d'instruction des
enfants de l'un et de l'autre sexe ayant tou-
jours été la source de plusieurs (léré«lements
qu'on voit régner au milieu du christianisme.
Dieu a suscité de temps en temps de saints
fondateurs et autres personnes pieuses, qui,
poussés d'un saint zèle pour la gloire de sa
divine majesté, ont tâché de remédier à ces
dérèglements en établissant des congrégations
de l'un et de l'autre sexe, qui, sous différents
noms et des règles p;irticulières, ont pour fin
principale l'instruction de la jeunesse. Telle
est celle des Ecoles Chrétienues et charita-
bles de l'Enfant Jésus, qui ne diffère des
précédentes qu'en ce qu'elle renferme sous
(1) Vo:y., à ialin Juvol., n" 19.
125
DICTIONNAIRi; DES ORDRES REUGIELX.
tu
un même nom et sous une même règle des
personnes de l'un et de l'auire sexe, dont
les uns sont dcsliiu's pour enseigner les gar-
çons, et les autres pour enseigner les filles.
I.e P. Nicolas Barré, religieux de l'ordre des
Minimes, qu'ils reconnaissent pour leur in-
iiituteur,nai|uitàAmiensvers l'.in lG21,depa-
renls lionuélesel fort vertueux, qui n'omirent
rien pour lui donner une bonne éducalion.
Loriqu'il fut en âge de choisir un étal de vie
dans lequel il pût ser\ir Uieu comme il sou-
haitait, il entra dans l'ordre des Minimes, et
y fil ses vœux l'an 1GV2, âgé de 21 ans. Son
principal caradèic élail de retirer les plus
grands pécheurs dos abîmes du désordre , cl
de porter les âmes déjà gagnées à Dieu et
avancées dans la piélé à de plus hauts de-
grés de perfeclion. Ce fut ce zèle qu'il avait
de gagner des âmes à Dieu qui le porta à
unir ensemble plusieurs filles vertueuses
qui s'employassent à l'instruction des per-
sonnes de leur sexe. Le premier établisse-
ment s'en fit à Paiislan lG78,et le P. Barré,
voyant le succès de cet établissement , enga-
gea aussi des maîtres d'école à faire une
pareillesoi iélé.riui fut commencée l'an 1681.
Les uns et les autres vivent en cominu-
naulé, sans faire de >œiix, sous la conduite
d'un supérieur ou d'une supérieure, auxquels
ils sonl obligés d'obéir. Selon l'esprit de leur
institut, ils doivent travailler sans relâche à
leur propre sanctilicalion, par lacquisiùon
de toutes les vertus. Leur eiii])loi princi|ial
est de tenir les écoles pour des enfants pau-
vres et indi;;enls, et d'instruire des princi-
paux mystères de la foi les grandes person-
nes auxquelles Dieu inspirera d'avoir re-
cours à eux , cl cela sans aucune distinction
ni acception de personnes. Il n'est pas néan-
moins permis aux Frèrcsde recevoir en leurs
écoles des fil les, de quelque âge qu'elles soient,
ni aux Sœurs des garçons, si jeunes qu'ils
puissent être. Les uns et les autres ne peu-
vent pas non plus aller dans les maisons pour
enseigner à lire, écrire ou travailler, sous
ciuelque prétexte que ce soit. Ils doivent être
toujours dispdscs au premier ordre de chan-
ger de demeure pour aller faire l'instruction
aux lieux et aux personnes que les supé-
rieurs jugeront à propos, imiianl en cela
lexeinple de Nolrc-Seigneur Jésus-Christ,
qui elant sur la terre enseignait dans les
bourgs el villages aussi bien que dans les
villes, allant pour cet elTel partout où la
gloire de son l'ère l'aiipelail.
Ces inslruriions se doivent l'aire graluile-
incnl, en .soric que l.int les Frères que les
So'urs ne doivent rien recevoir de ce qui leur
sera oITerl par les parents des enfants qu'ils
instruisent, soii ri( lies soit iiauvres; el à plus
forte raison leur rien deiiiamler, ni directe-
nienl ni inilireclemenl. Les d manches el fê-
tes les Frères font des instructions publiques
et des conférences cliréliennes pour les hom-
mes el les «arçons âgés qui y veulent venir,
el les Sœurs en font aussi pour les filles el
les femmes. Quoiqu'ils ne fassent pninl vœu
d obéissance ni de pau\relé, ils sont néan-
moins dans une si grande dépcnlancc de
leurs supérieurs, qu'ils ne peuvent rieu avoir
à leur insu ni disposer de rien sans leur vo-
lonté ni leur permission. S'il y a des écoles
dans la ville autres (|ue celles qui sonl dans
la maison, et qui dépendent de l'inslitul, le
supérieur des Frères doit visiter celles des
garçons, et la supérieure des Sœurs celles
des ûlles, lous les quinze jours ; el, s'il y en
a auprès des villes, ils sonl obligés d'y aller
au moins une fois lous les trois mois, et y
demeurer loul le lenips qui sera nécessaire
pour examiner de quelle manière les maîtres
et mairesses se comporlenl, el l'édification
que le peuple en retire. Pour ce qui est des
écoles les plus éloignées , ils ne sont obli^iés
d'y aller qu'ime fois l'année. Ces maisons
des Ecoles charilablcs sont sous la protec-
tion du saint Enfant Jésus et de la sainte
Vierge sa mère : c'est pourquoi leurs fêles
principales sonl celles de la Nalivitô d(i
Nolre-Seigncur, la Pentecôte et celle de la
Présculalion de la sainte A'ierge, aux(iucls
jours les Frères el Sœurs doivent faire une
proleslalion nouvelle de ser»ir Dieu sincère-
ment, de se rendre dignes de lui apparienir,
et de suivre sa conduite en telle manière
qu'il voudra, el qu'il leur sera signifié par
leurs supérieurs. Ils doivent réciter en com-
munions Icsdimanches les lilanicsdes saints,
les jeudis celles du saint Nom de Jésus, el le
samedi celles do la Vierge, donl ils doivent
réciter aussi l'office lous les jours. Tous les
ans ils font une retraite de dix jours, ils
prennent chacun à l'alternalive un jour de
leiraile, depuis le premier diman- lie de l'A-
veut, jusqu'à Noël, et depuis le dimaudie du
la Passion jusqu'à Pâques, el en quelques
autres jours de l'année. Ils ne peuvent faire
aucune mortification ni austérité de corps,
sous quelque piélexie que ce soit, sans lo
consentement exprès du directeur général ,
mais au jour de leur association, il leur esl
permis de faire quoique dévotion extraordi-
naire, afin de renouveler l'esprit avec lequel
ils se sont consacrés ce jour-là aux empli js
qui regardent uiii(]uciiieiit la gloire de Dieu
el le service du prochain ; et deux fois la se-
maine ils reconnaissent leurs fautes en pré-
sence de toute la communauté assemblée.
Tels sont les principaux règlements que leur
a prescrilg le P. Barré , leur insliluleur,
qui mourut à Paris le 31 mai 1G86, âgé de
lio ans.
Il y a déjà en France plusieurs maisons
lant d'hommes que de filles de ces Ecoles
chréliennes et cliaritabL s. La principale do
celles des Frères esl à Paris au faubourg
Saint (îennain, el ils en ont en plusieurs pro-
vinces, comme le l'oitoo, l'Auvergne, la Lor-
raine, la Champagne, la Picardie, la Bour-
gogne, le Boulonnais il le Berri. Ce qui esl
lionr.rablc pour les Sœurs, c'i st que madame
de Mainlcnon en choisit quel(|nes-unes [lour
avoir soin de l'éducation des jeunes deinoi-
selles qu'on élève à Saint-Cjr, lorsque le roi
Louis \1V fit cet élalilissemenl, l'an 1(18(5.
Les Frères ont pour habillement une sou-
tane et une houppelande, avec des manclirs
pondantes, le tout d'cloiïe noire et gross;c-
!2§
ECO
ECO
126
re(l). Los Sœurs sont vêtues plus propre-
ment, mais moileslement, à peu près comme
les F. Iles de riliiion Chrélicnne.
Hermnnt, Jlist. des Ordres religieiiT, lom.
]V ; et les Statuts et Règlements des Ecoles
Chrétiennes et tharitahles , imprimés à Paris
l'an 1G85.
ÉCOLES PIEUSES ou ÉCOLES PIES (Clkrcs
RÉGULIERS PAUVBES DE LA MÈHE DE DlEU,
DITS des).
De lu congrégation des Clercs Réguliers Pau-
vres de la Mère de Dieu des Ecoles pieuses,
avec la vie du vénérable P. Joseph Cusa-
lunz, leur fondateur.
Entre les éloges que les souverains pon-
tifes ont donnés à la congrégation des Clercs
Réguliers Pauvres de la Mère de Dieu, ils
l'ont appelée un institut pieux et ncomman-
dable, un inslilul digne de louanp:es, un
institut fort utile à la république chiéli^nne.
et un ouvrage d'une chiriié éprouvée et
d'une éducation rarf;iite. Et l'ordre de Saint-
Dominique, pour montrer l'estime qu'il fai-
sait aussi de cet e congrégation, ordonna,
par un décret du chapitre général de l'an
1G86, à tous les provinciaux de l'ordr-, d'avoir
beaucoup de ri'>pccl et de vénération pour
les Clercs Réguliers de celle congrégation, et
d'en procurer autant qu'ils pourraient le
progrès et l'avanceinent, ce que firent aussi
les religieux conventuels de l'ordre de Saint-
François , dans leur chapitre général de
l'an 1695.
Joseph Casalanz, fondateur de ces Clercs
Réguliers des Ecoles pieuses, naquit à Pé-
ralte de la Sal au royaume d'Aragon, le 11
septembre 1556, de dam Pierre Cas.ilanz el
de Marie Gaston, tous deux également no-
bles , alliés aux premières maisons du
royaume, et qui joignaient encore à leur
noblesse beaucoup de piété. 11 recul îiu
baptême le nom de Joseph, et lit paraître
dès ses plus faibles années les fruits de la
bonne éducation ((u'il avait reçue de ses pa-
rents. Etant (larvenu à un âge plus avancé,
il fut envoyé aux écoles pour y apprendre
les lettres humaines, cl ap.ès avoir fini ses
humanités il fil ses éludes de philosophie el
de droit dans l'université de Lélida, comme
la plus proche de Péialte, et qui n'en était
éloignée que de six lieues. 11 alla ensuite à
Valence pour y faire son cours de théologie ;
mais il ne demeura pas lon;;temps dans celle
université, car une dame de considération
chez laquelle il allait, ayant conçu pour lui
un amour déshonnèle,et ayant voulu donner
atteinte à sa chasteté, il abandonna Valencs
pour éviter ses poursuites, et alla continuer
sa lhéolo;^ie dans l'université d'AUala d'Hcn-
narés, où il reçut le bonnet de docteur.
Dans le temps qu'il étudiait dans cette
université, son frère aine mourut, après avoir
vécu trois ans dans le mariage sans laisser
d'enfants, ce qui avait porté son père à le
solliciter de revenir à Péralle, afin de l'enga-
ger dans le mariage, le regardant comme le
soutien de sa famille, étant le seul enfant
mAle qui lui restât. Mais Joseph Casalanz,
(|ui avait bien d'autres pensées el qui ne
songeait qu'à se donner à Dieu, appréhen-
dant que son père ne le violentât à suivre
ses volontés, auxquelles il avait toujours élé
soumis, ne revint point à Péralle. Après
avoir pris ses degrés dans l'université d'Al-
cala, il alla à Jacca, où il demeura pendant
deux ans avec l'évêqiie de celle ville, dom
Gaspard Jean de la Figuera, en qualité de
son aide d'étude. Comme ce prélat, qui avait
enseigné dans l'université de Sal.imanque,
était un des plus savanis de l'Espagne, Ca-
salanz profila beaucoup de sa conversation ;
il aurait même souhai'é d' meurer plus long-
temps avec lui, mais il ne put enfin résister
aux solliiiiaiions de son père, qui le voulait
avoir auprès de lui.
Il revint donc à Péralte; mais il demeura
toujours constant dans la résolulion qu'il
avait prise de ne point s'engager dans le
mariage. Son père lui en faisait tous les
jours de nouvelles propositions; mais il les
éludait par les difficultés qu'il faisait naître
sur les partis qui se présentaient, es];érant
qu'à la fin il pourrait obtenir le ronsente-
nient de son père pour prendre l'état ecclé-
siastique. Pour cet effet il se recommandait
jour et nuit à la sainte Vierge, qu'il avait
prise pour son avocate auprès de Dieu, afin
qu'il lui plût de loucher le cœur de son
père : il ajouta à ses prières el à ses oraisons
les jeûnes, les veilles el les austérités, afin do
pouvoir plus facilement obtenir de Dieu celle
grâce, qui lui fut enfin accorilée ; car il
tomba dangereusement malade, el se voyant
abandonné des médecins, il pria son père de
lui permettre de recourir aux remèdes di-
vins, puisque les remèdes humains étaient
inutiles. Son père, les larmes aux yeux, y
consentit, el dans le même temps Casalanz
fit vœu à Dien de se faire prêtre s'il lui ren-
dait la santé. Comme Dieu le destinait pour
êlre le fondateur d'une congrégation reli-
gieuse, il lui accorda la santé qu'il deman-
dait ; car à peine eut-il fait son vœu, qu'il
commença à se mieux porter, el, ayant en-
lièrement recouvré ses forces, il se mil en
éial d'exécuter ce vœu. 11 recul les quatre
mineurs el le sous-diaconat au mois de dé-
cembre 1582. Il prit le diaconat le jour du
samedi saint de l'année suivante, et au mois
de décembre de la même année il fut fait
prèlre.
Il ne se vil pas plutôt revêtu de la qualité
de ministre du Seigneur, qu'il redoubia sou
zèle et sa ferveur pour son service, el, fai-
sant réllexion que la dignité du sacerdoce
demandait en lui une plus grande perfecliou,
il s'étudiait de joindre une vie sainte à la
sainteté de son minisière, el il célébrait tous
les jours la sainte messe avec beaucoup de
dévotion. La réputation de sa verlu s'étant
bientôt répandue, l'cvêque de Lérida le vou-
lut avoir auprès do lui ; il le prit pour sou
(1^ Vei/.,i la lin du vol., n* 20.
127
DICTIONNAIHE DES ORDRES RELIGirUX.
1?8
confesseur, et le fit son Ihéologien et son
examinateur synodal. Pou de temps après, ce
prclitl ayani éié commis par le roi d'Kspii};ne
pour visiter le monastère de Notre-Dame de
Monl-Scrrat en vertu d'un bref du pape,
prit avec lui Casalan;: pour seirèliiire de la
visite. L'évèquc de Lérida éianl mort dans
le cours de cette visite, on lui substitua
l'évèque de Viih, qui pria Casalanz de con-
tinuer la même fonction de secrétaire; mais
il s'en excusa et retourna à Pèralte, où il ne
fil pas grand séjour; car dom André Capri-
plia , évèque d'L'rgcl, non-seulemi'nt lui
donna la cure d'Ortoneda, mais il lui donna
encore la charge d'official dans l'èleiidue de
Trcmp, qui comprenait environ trois cents
buur^'s ou villages. Il s'acquitta de cet emploi
pendant l'espace de huit ans; mais se sen-
tant inspiré d'aller à Rome, il remit son bé-
néfice entre les mains de son évèque avec
l'emploi qu'il lui avait confié, et partit pour
aller à Rome, oij il arriva au commencement
(lu. mois de mai lo92. Il y visita avec une
dévotion extraordinaire les sépulcres des
saints maityrs. Pendant quinze ans il alla
tous les jours aux stations des sept églises;
et lorsque quelques affaires le détournaient
de cet exercice de dévotion pendant le jour,
il s'en acquittait pendant la nuit.
A peine fut-il arrivé à Rome, qu'il entra
chez le cardinal .Marc-.\ntoine (iolomnc, en
qualité de son théologien. Ce prélat avait
une si grande vénération pour sa piété et sa
vertu, qu'il le donna pour directeur à ses
neveux, fils du connétable Colomne, qui ne
sortaient jamais du palais sans avoir baisé
la main de ce saint homme. Tous les same-
dis il faisait une exhortation aux domesti-
ques de ce cardinal. Il avait ses heures ré-
glées pour tous SCS exercices sjiirituels, il
portait pres(iue continuellemenl un rude ci-
lice, et il jeûnait plusieurs jours de la se-
maine au pain et à l'eau. On pouvait même
dire que ses jeiiiics étaient continuels, car
les jours qu'il ne jeûnait pas au pain et à
l'eau, il ne faisait qu'un repas le matin, et
il ne prenait rien le soir, ce qu'il a continué
de faire pendant quarante ans, et ce ne fut
que sur la lin de ses jours ([u'étanl fort in-
firme et caduc, les religieux de sa congré-
gation le prièrent de modérer ses grandes
austérités.
Deux ans après son arrivée à Rome, l'an
loi)'», on iui conféra uncanoiiical dans l'église
catlié Irale de lî.uji.islio au royaume d'Ara-
gon, qui était la ville la plus voisine du lieu
de sa naissance ; mais, charmé des exercices
de piété qui se pratiquaient à Rome, il ne
voulut point quitter cette ville, cl il résigna
son bénéfiie au docteur Pierre Navarre, lise
fil inscrire dans plusieurs confraternités,
coniine dans celles di s Douzc-Apùlres, des
Stigmates de saint François, du Suffrage cl
de la Sainte-Trinité, observant exactement
les exercices prescrits par les statuts de ces
compagnies.
Il entra aussi parmi les Confrères de la
Doctrine Chrétienne, et. .onlormcment aux
coiutitulions de telle compagnie, il allait
avec beaucoup de charité dans toutes les
places de la vi le pour enseigner la doctrine
chrétienne aux gens de la campagne qui s'y
trouvaient, et il faisait assembler les enfants
dans les égliacs pour leur faire les mérm's
instructions. Ce fut dans ce saint exercice
qu'il connut par ex|iérience la nécessité
qu'il y avait d'apprendre de bonne heure aux
jeunes enfants les principes du christia-
iiisioe. Il pensa dès lors aux moyens de le
faire avec plus de fruit, et ce qui le Cl ré-
s ludre à s'y employer enlièremenl fut
qu'ayant trouvé [lar les rues plusieurs en-
fants qui ne s'amusaient qu'à jouer ci di-
saient beaucoup de paroles malhonnêtes, il
s'arri'ta à les considérer. Il fut \i\cment
touché de voir le peu d'éducation qu'on leur
donnait, et pour lors ces paroles du prophète-
roi lui vinrent tout d'un coup dans la pen-
sée : C'est à vous que If soin du iinuvre est
réservé, et vous serez le protecteur de rnrphe~
lin. Il y fil réilesion, il crui que Dieu les lui
avait suggérées afin qu'il prit le soin d'in-
struire ces enfants, et il chercha dès lors les
Il oyens de leur donner une boom' éducation,
afin ()u°étant élevés dès bur^ plus tendres
années dans la crainte de Dieu et les maximes
du christianisme, ils ne pussent pas dans la
suite ignorer les choses ilc leur silul. Il en
fit la pro|)osition à plusieurs personnes ;
ni.iis lous les moyens qu'il prit n'ayant jtas
réussi, et ces personnes ne l'ayant fias voulu
seconder, il entreprit de !e faire seul. 11 loua
pour cet elTel, d'Antoine liaudini, curé ilo
Sainte-Dorothée in Ti anslevere proche la porte
Sitlimania, queb|ues chambres où il com-
nieiiça à rassembler tous les enfants de ce
quartier, et par charité il leur apprenait à lire
et à écrire, l'arithmétique, et leur fournissait
aussi gratuitement des livres, de l'encre et
du papier. Tous les jours il leur enseignait la
doctrine chrétienne, leur faisait des exhor-
tations spirituelles, et quoiqu'il demeurât
encore au palais du connétable Colomne,
(lui est fort éloitrué de Sainte-Dorothée, il ne
laissait pas d'jiller deux fois par jour à ses
écoles, où le nombre des enfants s'augmcn-
tant, et ne pouvant suffire seul à leur in-
struction, il s'associa ()uelqnes prêtres qui
étaient aussi Confrères de la Doctrine (Chré-
tienne, i]ui l'aidcrenl dans son entreprise.
L'ordre qu'il avait établi dans ses é. oies
lui donna une si grande réputation , que
plusieurs familles de la ville y envoyèrent
aussi leurs enfants, ce qui fil résoudre (Ca-
salanz de les Iranslèri'r dans la ville pour la
plus grande commodité de ceux ()ui y vou-
draient venir, ce qu'il fit au cominenccnient
de l'année s liiite 1000, ayant loué pour ci l
effet une grande maison proche le lieu (|u'imi
appelait le Paradis. 11 quitta pour lors le pa-
lais Colomne pour venir demeurer dans cette
nouvelle maison avec les maîtresqui s'étaient
joints à lui. Deux ans après ils la quiltèreul
pour en prendre une autre à louage, proche
de Saint -André delta V(i//c : là il commença
à vivre en commun avec ceux qui s'étaient
joints à lui, et il partagea cette école do
[liété en p'usicurs cÎjsscs.
189 ECO
Il arriva à Casalanz un accident dans celte
maison : c.ir voulant allacher une clorhe
dans un lieu assez élevé de la cour, il tomba
de l'échelle où il élail monté, et se rompit
uneja nbe. 11 fut en danger de perdre la vie,
à laquelle il n'ava l aucune attache, et qu'il
aurait quittée sans beaucoup de peine. H n'y
avait que l'apptéhi'nsinn que son ouvrage
ne vînt à manquer s'il mourait, qui lui cau-
sait de l'inquiétude. Mais Dieu pour le con-
soler lui envoya de nouveaux ouvriers, dont
l'un fut le P. Gaspard Dragonelli, qui avait
déjà tenu des éi^oles pendant quarante ans,
et qui persévéra dans la congrégaiion jus-
qu'en l'an 1628, qu'il mourut à l'âge de cent
vingt ans, dans une grande réputation de
siiiiteté ; et l'autre fut le P. Gellius Gheilini,
noble Viceniiii.
Casalanz ayant recouvré la santé au bout
de quelques mois. Dieu le voulut consoler
de nouveau. M. Vestrio, prélat de la cour
romaine, qui lui avait loué sa maison pour
servir d'écoles, assistait souvent aux exer-
cices qui s'y faisaient, et fut si content du
bon ordre qu'on y observait, qu'il en parla
au pape Clément VUI, qui fit venir le P. Ca-
salanz pour être instruit par lui-uiéme de
quelle manière les maîtres se comportaient
dans les instructions qu'ils faisaient aux en-
fants. Ce |)onlife, conicnt des réponses du
fondateur, l'exhorta à persévérer; et, afin
de l'animer à poursuivre son entreprise, il
promit d'iillcr lui-même visiter ces écoles
pieuses, et ordonna que l'on donnât tous les
ans deux cciits ccus pour le louage de celte
maison.
Celle libéralité du pape, jointe au bon ac-
cueil qu'il avait fait à nuire saint fondateur,
donna de la jalousie aux maîtres d'école de
la ville. Ils décrièrent Casalanz auprès de
ce ponlife, et ils lui firent entendre que les
choses n'étaient pas comme on les avait ex-
posées à Sa Sainteté, ce qui porta le pape à
nommer les cardinaux Anioniani et Baro-
nias pour faire la visite des écoles de piété.
Ces cardinaux n'y ay^int trouvé que des su-
jets d'édification, le pape de vive voix ap-
prouva ces écoles et les prit sous sa protec-
tion. Après la mort de Clément VIII, Pau! V
leur donna pour protecteur le cardinal de
Torres, et ce prélat ét;inl mort, il lui substi-
tua le cardinal Giustiniani. ,
Les écoles pieuses augmentant de jour en
jour en écoliers, et la maison que (^,asalanz
avait prise à lou;ige étant trop petite, il
acheta, l'an 1G12, le palais Torres, qui était
coniigu à l'église de Sainl-Panlaléon, située
dans la place qu'on appelait anciennement
de Malerazzari. Le cardinal Giustiniani con-
tribua à cet achat, ayant donné deux mille
écus, cl l'abbé Landriani, noble Milanais,
non-seulemenl donna une somme plus con-
sidérable , mais entra dans la suite dans la
congrégation , et y mourut dans une si
grande réputation de sainteté, qu'on a mé le
travaillé au procès de sa canonisation. Enfin
le palais fut eniièrenieut payé par un legs
de six mille écus que le cardinal Lancelloiti
fil aux écoles pieuses. Casalanz oblinl en-
ECO
lof)
core l'église de Saint-Panlaléon, et le papo
Paul V, considérant combien cet institut
était utile à l'Eglise, l'approuva par un bref
du 6 mars 1617, l'éiigeant en congrégation ,
à laquelle il donna le titre de Congrégation
Pauline, perniettaut à ceux qui y entre-
raient de faire les vœux simples d'obéis-
sance , de chasielé et de pauvreté. Le pape
nomma pour chef ou supérieur de celte con-
grégation, sous le nom de préfet, Joseph
tiasalaiiz , pour gouverner tant les malsons
qui étaient déjà établies que celles qui s'éta-
bliraient dans la suite, avec pouvoir de
dresser des constitutions.
Casalanz consulta ses compagnons, qui
étaient au nombre de quinze, sur la ma-
nière de vie qu'ils devaient pratiquer, et
l'habillement qu'ils devaient prendre; et,
après être convenus ensemble de la forme
de l'habillement, le cardinal Giustiniani fit
faire les habits à ses dépens, et le jour de
l'Annonciation de la sainte Vierge de la
même année, le fondateur fut revêtu de cet
habit par les mains de ce cardinal, dans la
chapelle de son palais, lui ayant donné cet
habit au nom du pape, avec le pouvoir de le
donner à ses compagnons, ce que Casalanz
fil le même jour lorsqu'il fut retourné aux
Ecoles pieuses. Il voulut encore renoncer à
son nom du monde, et il prit celui de la
Mère de Dieu, ce que firent aussi ses com-
pagnons, qui changèrent de nom, et cila sa
pratique encore dans cette congrégation.
Elle fut mise au nombre des ordres reli^
gieux, l'an 1621, par le pape Grégoire XV,
<iui lui donna le nom de Congrégation dea
Clercs Réguliers Pauvres de la Mère de Dieu
des Ecoles pieuses. Par un autre bref do
l'an 1622, il approuva les conslilulions qui
avaient élé faites par le fondateur, qu'il dé-
clara général de celle nouvelle congréga-
tion, à laquelle il accorda, la même année,
tous les privilèges dont jouissent les ordres
mendiants, cl Urbain VIII dispensa ces reli-
gieux d'aller aux processions publiques, par
un bref de l'an 1629.
On ne peut exprimer le progrès que le Père
Joseph de la Mère de Dieu fil dans toutes
sortes de vertus, se voyant engagé dans
l'étal religieux. Tout ce qu'il avait fait jus-
qu'alors, tant pour l'instruction de la jeu-
nesse que pour son avancement spirituel ,
lui semblait peu de chose. Il augmenta ses
mortifications, ses veilles cl ses abstinences.
Il faisait lous ses exercices avec plus de fer-
veur que par le passé; cl l'instruction de la
jeunesse étant la principale fin de son insti-
tut, il s'y appliqua encore avec plus de zèle
((u'il n'avait fait. Il ne se contentait pas de
donner tous ses soins à ce que les maSires
s'acquittassent de leur devoir, il enseignait
encore lui-même les enfants, et il continua
cet exercice jusqu'à la fin de sa vie. Sa cha-
rité le portait à secourir son prochain dans
toutes les occasions. Il était encore le plus
souvent au confessionnal ou dans les hôpi-
taux, il visitait les prisonniers, il secourait
les pauvres et les indigents, et souvent il leur
donnait jusqu'aux choses nécessaires pour
r.l niCTIONNAlRE DES
rcnltclicn de ses relijrieux, auxquels il re-
romin<nml;iit Je se confier en la l'rovidence,
(]ui en elTel ne leur manqua jamais. Il n'en-
seiunail rien â ses religieux qu'il ne prati-
quai lui-niéini'. Il leur recounnamlail sur-
tout riiumiliié ; il leur eu douuail l'exemple,
s'emplojanl aux ofiiics les |ilus b.is île In
maison, quoique pénéral de l'ordre. Il allait
par la ville, la besace sur les épaules, pour
recevoir le< aumônes des (idélcs, et ce fui
celle même litimilié qui lui lit refuser l'ar-
chcvèclié de Hrindisi, qui lui fut olTerl.
L'opinion que l'on avait do sa sainlelc fil
que. de son vivant, on ofîrit à sa coiigréga-
lion plusieurs eiahiisscmenls qu'il accepta,
dans l'étal ecclésiastique, dans la républKiuc
de l'iénes. en Toscane, au royaume de Na-
ples, en Sicile et ci Sardaigne. Le cardinal
Krançois de Diclrichzau, évéque d'Oluius,
lui demanda, l'an IG^Jl, de ses religieux pour
les établir ;i Milmlshoui;;. pi il leur donna
aussi un aulrc établissement à L^pniek, d'où
ils se sont répandus par toute rAllemagnc
rien Hongrie. Le roi de rologuc, Ladi^-
las IV, vojanl les grands fruits qu'ils fai-
saient dans les lieux où ils élairnl établis,
en 01 venir dans son rojaume l'an IGil, et
ils y ont lait aussi [dusieurs établissements ;
ils en ont aussi quelques-uns en E^pugne :
de sorte que le Père Joseph de la Mère de
Dieu oui la consolation de voir sa congréj;a-
lion étendue en plusieurs provinces. Il a\ail
quatre-vingt-douze ans lorsqu'il fat attaqué,
à Home, de sa dernière maladie; ce fui le
deuxième d'août de l'an lO'i-H. Il voulut en-
core dire la messe ce jour là. après quoi il
se mit au l;l et vécut encore jusqu'au 2j du
mémo mois, (ju'il rendil son âme à Dieu.
M fut cnierre au milieu de l'église de Saint-
i'anlaléon, où il esl resté jusqu'en l'an 1()8',
(lu'on le transféra dans la nouvi lie église
tjue ses religieux ont lait bût r. L'on travaille
actuellement à sa canonisalion.
La lin de cet institut, comme nous avons
déjà dit, csl de procurer aux enfants une
bonne éducation, principalement aux pau-
vres, à quoi les religieux a'obligenl par un
quatiième vœu, en leur cnsL'ignanl (par
charité) à lire et à écrire, en commençanl
par r.\, IL C, à jeter, coinider, calculer, cl
même tenir les livres chez les inarcliands
et d.ms les bureaux. Us enseignent encore
non-seulemeiil les liUiitaiiités, la rliéloriiiuc
cl les langues latine et grecque, mais dans
les villes ils liennenl au^si des écoles de
philosophie, de Iheidogie scidaslique el
morale, de iiiailiémati<|ues , de forlirualions
n de géométrie. Les classes durent deux
heurrs ri demie le malin et autant le >oir.
Cl tous les jour-, pendant le dernier quai l
d'heure, chaque légenl Csl obligé de donner
aux rcolurs (|iiel(|iies leçons spirituelles.
Tous les samedis un religieux leur fait aussi
un sermon d'une deiiii-li( ure dans l'e^hsc
ou dans l'or.iloire, ei lorsqu'ils sorlcnl de
classe ils vont p.ir bande chez leurs parents,
où ils sont conduiis par un religieux, de
|ieiir qu'ils nos'amtiseni par 1 s rues à jouer
cl a perdre le temps.
or.nnES rf.licikux. is:
Nous avons dit ci-dessus que ces Ch rcs
Héguliers avaient été mis au nombre des
ordres religieux par le pape drégoire XV,
l'an 1G21, et qu'il leur permit de faire des
vœax solennels ; mais Alexandre Vil, l'an
l()oG, les remit dans leur premier étal sécu-
lier, Toulant qu'à l'avenir ils ne fissent plus
que des vœux s inpies avec un serment do
persévérer dans la congrégation , ce qui ne
dura que jusqu'en l'an lljlj'j, que le pape
Clémenl 1\ les rétablit dans lear étal régu -
lier. Il y en eut néanmoins quelques-uns qui
ne voulurent point s'engager à des vœux
solennels et qui eurent recours au pajie
pour en obtenir la dispense des vo'ux sim-
ples qu'ils avaient faits , el du serment de
persévérer daus la congrégation; c'esl pour-
quoi Clémenl X, par un bref du 18 odobre
lli"0, accorda du lemps à ceux qui n'avaient
fait que des vœux simples, pour se détermi-
ner ou à sortir de la congri'galion , ou à y
demeurer en faisanl les vaux solennels,
donnant pouvoir au général d'absou Ire du
serment et de dispenser des vœu\ simples
ceux qui les auraient fails el qui vou-
draienl sortir de la congrégation , pourvu
qu'ils ne fussent que laïques ou dans les
ordres mineurs ; que s'ils étaicnl dans les
ordres sacrés, el eussent du bien de palri-
moinc sufiisammenl pour vivre, ou qucl-
(jues bénéfices , ils seraient renvoyés sous
l'obéissance de leur évéque; que si, au
contraire, ils élaieiil dans les ordres sacrés,
el s'ils n'avaient p int de bien île palrimoino
ou de bénéfices, il leur sérail libre de rester
dans quelque couvent de la congrégation el
de vivre avec les religieux profès de cet
ordre , sans pouvoir preiendre aucune voix
active cl passive, auquel cas ils pourraient
exercer leurs ordres ; mais que si absolu-
ment ils voulaient sortir de la congrégalion,
n'ayant point de bien de patrimoine ni de
béiiélices, ils seraient renvoyés pour vivre
sous l'obéissance des cvêques, mais qu'ils
seraient suspendus de leurs ordres. Le même
I ontitu approuva derechef leurs conslilu-
lions.
Car un bref du 28 avril ICGO, Alexandre
\\l ordonna qu'ils n'auraient point d'auires
protecenrs que le cardinal vie. lire de Home;
que le général de cette congrégatinn serait
élu tous les six ans , cl qu'il .lurail quatre
assistants. Il approuva par le même bref la
coutume iiiiroiiuite d.ins celle congrégaiion
d'y associer de pamres jeunes i;en<, la nu-
dité des pieds el la grande pauvreté donlces
Clercs r.iisaient profession , princip.ilement
dans les vovages qu'ils faisaient a pied el à
l'Apostolique; mais Alexandre \'lll, par un
bref du '■Il février lO'JO , les obligea i!c se
chausser. S m prédécesseur. Innocent XI,
les avait exemptés, l'an IGSO , de la juridic-
tion des ordinaires, el les avait soumis im-
iiiedialemeiit au s.iinl-siege, en conlirmant
tous leurs privilèges.
Leur liahil esl si mbiabic à celui des Ji'sui-
les, excepte que leur robe s'attache par «le-
vant ,ivcc trois boutons de cuir, et que leur
manteau ne descend que jusqu'aux gc-
»
155 ECO
noux (I). Ils sont au nombre des mendiants,
et font la quête parla ville comme les reli-
gieux (les autres ordres mendianU. Il y a
peu de bonnes villes en Italie où ils ne se
soient établis; il y en a même où ils ont
plusieurs maisons et c dlégcs, comme à Na-
plcs, où ils en onl quatre, et à Komc, où ils
en ont cinq.
Alexis de la Conception, Vie du Prie Jo-
seph de Casalanz. Cari. Barlholom. Piazza,
husevolog. Rom., tract. 3 , cap. 13 et 14.
Asca^. Tainbur. de Jur. Abiat. tom. il,
disput. 2V, quœst. 8, n. C. Bull. liom. tom.
Il'l, IV et V; et Philipp. Bonanni, Catalog.
Ord. Relig. part. i.
Depuis que le P. Hélyot a écrit le chapi-
tre consacré à l'histoire des Ecoles pies, le
fondateur de cette congrégalion a clé canO'
nisé, et la fête de saint Joseph Casalanz a
été lixée au 27 août. 11 y a dans le bréviaire
romain un olfice en son honneur approuvé
en 1769. L'institut des licoies pies n'a jamais
ou d'établissemenls en France, m;iis il a
été et est encore répandu en plusieurs Etats
de l'Europe. Sa conslitutiin populaire le
rendait infiniment utile et a contribué à sa
propagatinn. La fidéliié due à l'histoire nous
oblige à dire ici avec une certaine franchise
que cetîc congrégalion n'a pas , croyons-
nous, gardé l'esprit primilil' de son ctab'is-
sement ni celui do son pieux fondateur. Une
certaine émulation avec les Jésuites a peut-
être pris un caractère qui ne convient point
à des religieu'ï, et même celui de la jalou-
sie, il règne dans celle société un all;i(hc-
ment ou une sorte de prédilection pour les
idées nouvelles qui ont mis le trouble dans
l'Eglise depuis près de deux siècles. Nous ci-
terons l'exemple du P. Jean-Baptiste Mcli-
nelli, prêtre des Ecoles pies au dernier siè-
cle, qui a professé la philosophie dans leur
collège d'Oneille, puis la Ibéidogie dans re-
lui de Gènes, sa patrie. En 17G9, il ri-mplaça,
pour professer la môme seience à Rome, le
P. Nitlali , qui venait d'être nummé proles-
seur à Pavie, et se montra favorable aux
idées jansénistes, il joignit des remarques et
des notes à l'édition de la Théologie de Lyon,
faite à Gênes, par Oizat', en 1788. Molinelii
eut sur ses opinions di s démêlés avec le sa-
vant et pieux Lamhruschirii , a'ors profes-
seur au séminaire de Gênes , et depuis ar-
chevêque de cette ville. 11 était retourné et
professait de nouveau la théologie à Gênes,
il se montra favorable à la révolution de son
pays, cl il faisait partie d'une espèce d'aca-
démie rcclési.islique formée en ce sens à
Gênes. Les principaux membres étaient l'é-
Têque Solari, Pahmeri, Degola et autres pa-
triotes; ils donna. cnt des ouvrages en fa-
veur du système démocr.ilique. Molinelii pu-
blia pour sa part , en langue italienne, le
Préservatif contre la séduction, et Du droit
des propriétés des Eglises sur les biens ecclé-
siastiques. Le sénat de Gênes lavait nommé
liu de ses trois théologiens, et il rédigea, en
celte qualité, des mémoires et des lonsulta-
(l] Voij., 3 la (indu vol., n" 21.
ECO
Î54
lions sur différentes matières. Il mourut à
Gênes au commencement de 1799. Molinelii
n'était pas le seul de son corps à être dans
de tels sentiments, qui pourraient peut-être
expliquer la popularité dont jouit la con-
grégation des l'iarisles , car on lui donne
aussi celle dénomination. Il faut croire que
la recommandation faite par les Dominicains
et les Franciscains à leurs religieux en fa--
veur de la congrégation des Ecoles pies n'a-
vait |)Our motif que les services qu'elle rend,
et nullement , dès ce temps-là , une sorte
d'antagonisme contre les Jésuites. Cet anta-
gonisme règne malheureusement depuis lon-
gues années, et passe des maîtres aux élè-
ves, qui n'aimeni pas les Jésuites, et qui ont
quelquefois affecté de répéter cette épigram-
ine, faite par leurs processeurs : Il tombera,
ce grand arbre, etc. Les Jésuites répondaient
par d'autres vers qui disaient qu'il tomberait,
mais qu'il entraînerait les autres dans sa
chute, elc. ils avaient raison, et nous ose-
rions soupçonner que les Pères des Ecoles
pies n'ont pas vu sans peine ce grand arbre
relevé. En parlant ainsi d'une société esti-
mable en elle-même , mais gâtée eu quel-
ques-uns, peut-être en le grand nombre de
ses membres, dont on accuse le mauvais es-
prit, nous ne prétendons point exprimer lo
désir de sa suppression, ni méconnaître les
exceptions honorables qu'elle renferme. On
dit qu'en Allemagne les Piaristes sont éga-
leiiienl animés de l'esprit janséniste , et
peut-être est-ce à cet esprit favorable au
pouvoir séculier que l'institut des Eco-
les pies doit d'avoir été l'objet des excep-
tions et même des affections des gouverne-
menls révolutionnaires. Quand Rome déso-
lée voyait avec horreur et indignation les
Français et leurs opérations à Rome, sous
Pie Vil , le P. Isai'e , supérieur des Ecoles
pies, était l'objet de l'estime ou de l'affec-
tion du général MioUis , et mangeait frc-
qucniment à sa table. Taudis que l'Espagne,
révolutionnée par les intrigues d'une reine
coupable, expulsait tous les religieu en gé-
néral, elle faisait une exception en faveur
des Ecoles pies, qui môme celte année(1847)
ont reçu une nouvelle preuve d'attachement
et de protection du gouvernement de la
reine Isabelli'. Si cette prélérenee est due à
l'utilité réelle d'un institut qui s'occupe ac-
tivement de l'instruction lie la jeunesse , à
qui elle apprend l'A, B, C, et qu'elle conduit
jusqu'aux sciences élevées, tant mieux, nous
en bénissons la Providence. Nous serions
peiné si cette prédilection était motivée par
les idées qu'on supposerait dominer chez les
Piaristes, qui sans doute n'ignorent pas ce-
pendant que l'Eglise et son gouvernement
doivent trouver des raisons et des armes
pour soutenir la justice de leur cause, dans
le talent et le zèle des religieux. Au dernier
siècle, les Pères des Ecoles pies possédaient
à Rome : 1° l'établissement de Saint-Panla-
léon, qui était leur maison professe; 2" Saint-
Laurent in Borgu, qui était le noviciat; 3*ie
ir.j
DICTIONNAIUE PES
collège dil Xaznreno ; i le «ollrgc tiil, ca
l'honneur du foml;itcur,t'(j:n/(/».<i(( , ou Col-
légc-Ncuf: 5° le collège ecclésiaslique ou in-
finncric des prélres a Putile-Sislo: 6' l'hos-
pice ai ostolique de S;iinl-Michoi. Aujour-
d'hui ils ont encore deux maisons dans celle
»ille el de nombreux clablis^ements en
Italie. On nous a dil que les Jésuites n'ont
nu ôlre admis dans hs lieux où professent
les Piarisles, si ce n'est dans une seule ville ;
nous ne pouvons attester ce fait. Le même
institut a donc rc(,u, comme nous venons de
le diri', la faveur exceptionnelle de survivre
en lispagne au renvers-ement de tous les
couvents de religieux, et il y est seul subsis-
î tant aujourd'hui, avec le célèbre monastère
de .Monl-Scrral,à qui on a aussi permis de se
■relever. Dans le-. Etats autrichiens, ils ont
actuellement soixante-sept établissements,
contenant trois-cent quarant'î religieux. Le
préposé général est aujourd'hui le U. P.
Jean-Baplisle Itosani, el le procureur géné-
ral est le U. P. Janvier Fucile. Tous deux
résident à Uomc.
Extrait de recherches fuites passim, el de
renseignements fournis par M. R., ancien
élève des l'iaristes. B-d-e.
ÉCOLIERS DE BOLOGNE, de Saint-Piehhe
DE .MONTE-COiinULO EN IrALIE , ET DE
Saint-Come-lez-Tolrs en Fhance (Cha-
noines RÉGULIKRS DES CONGnÉGATIONS DEs).
Le cardinal Jacques de Vitry, dans son
Histoire d'Occident, fait menlion d'une co:i-
grég.ition de chanoines réguliers proche
Bologne, établie par quelques écoiieis de
celle ville. Il parle d'eux avec éloge, mais il
ne marque ni le monastère où celle congré-
gation a commencé, ni ceux qui en di^'pcn-
d.iicnt. Penot dil que s'il est permis de devi-
ner, c'éiait peul-étre d.ins le monastère de
Saint-Victor, proche Bologne , p irci' qu'il
parait par plusieurs bulles de -Martin V que
ce monastère é:ait le chef de |)lusicurs au-
tres. .Mais ce niunaslère ayant clé ruiné en-
tièrement, il fut uni à celui de Saint-Jean de
la même ville, qui fut aussi uni dans la suite
à la congrégation des chanoines de Saint-
Sauveur de Lalran l'an l'*1.i. Falconius, (]ui
élait chanoine régulier de Latran aussi bien
que Penot, dil, dans ses .Mémoires histori-
ques de la ville de liol();;nc, pag. 201, que,
quel'jue recherche qu'il ail pu laiie, il n'a pu
découvrir ni le lieu où demeuraient ces éco-
liers, ni le pape qui avait approuve leur
c'ingrcgalion , m à quelle lin e.lc avait été
instituée. Mais le P. Papclirocli a cru avoir
trouvé le nœud de la dillicullé en disant que
c'étaii ni des Frères Prêcheurs fondés parsaiiit
Uoininique, dont le cardinal de \'iiry avait
voulu parler, l'habit des religieux de cet or-
dre ayant beaucoup de rapport à celui que
les Premonlres portent encore à présent en
Allemagne , et qui ne din'èrc qu'en couleur
de celui des Prêcheurs.
Si l'on considère néanmoins les paroles du
cirdin.'il de A itry, on C'ninaiira ()u'il a sans
iloute distingue ces Ecoliers de Bologne d'a-
vec les l'réciieurs; car, après avoir dit qu'il
ORDRES RF.Lir.lF.L'X. 130
y a une autre congrég.ilioii tic chanoines
hors la ville de Bologne, etc. : Est ulia regu-
larium eanonicorum Deo grata el hominiùus
graliosa congrrgatio extra civitalem Bono-
niœ, il ajoute plus bas qu'ils unissent en-
semble l'ordre des Prêcheurs et relui d.s
Chanoines : Prwdicniorum ordinem Canoni-
corum ordini conjungentes. Mais ce qui mon-
tre plus évidemment que ce cardinal n'a
point entendu parler des Frères Prêcheurs,
c'est que, parlant de la manière de vivre aus-
tère de ces chanoines , il dit encore qu'ils
mangeaient de la viande trois fois la se-
maine : Tribus in hebdomade diebus , carnes
si cis apponantur non récusant, in refectorio
manducantes : cependant les Frères Prê-
cheurs n'en mangeaient |)oinl. Eiifin, ce qui
me persuade davantage que cet ordre des
Ecoliers était difTcrenl de celui des Frères
Prêcheurs, c'est que saint Uominique n'ob-
tint une maison à Bologne pour ses reli-
gieux que l'an 1218, et que selon plusieurs
auteurs cette congrégation des Ecoliers était
déjà établie avant l'an \iOQ; mais on ne snil
point quel élait l'habillement de ces chanoi-
nes, cl combien de letniis ils ont subsisté.
Voyez Jacob de Vilr. //('»/. Occid., c. 27.
Penot, Ilist. Iriparl. lib. ii, cap. bï, n. 1.
Tamb. de Jur. Abb. disp. 2V, qurst. iï, n. 21.
Le Pn'ige, Bibliolh. Prumon-l.; et P.ipi broch
Resp. ad P. Sebast. a S. Paulo t. ïl , art. \0,
n. 170, el an. 22, n. 32.
A ces chanoines di- Bclngno nous join-
drons une autre congrégation de chanoines
réguliers qui ont été institué'' en Italie el
qui prirent le nom de .Monte-Corbulo , à
cause que leur premier monastère était si-
tué sur la mont;igiie de Coi bulo, éloignée de
la ville de Sienne de douze milles. Ils eurent
pour instituteur Pierre, surnommé de Reg-
gio parce (]u'il avait pris naissance dans
cette ville. (Juelques-uns néanmoins disenl
qu'il était de .Milan, qu'il avait passé de l'or-
dre des Chartreux ilans celui (tes Chanoines
Réguliers, et qu'il avait mém: pris l'habit
dans le couveiil de Saint-Sauveur de Bolo-
gne. Ce Pierre de Reggio était ami de Fran-
çois Sodcrini , évêqiie de Volterre cl réfé-
rendaire de l'une el de l'autre signature sous
le pape Alexandre M. Il obtint par le crédit
de ce prélat l,i J)ermis^ion de fmder une
congrégation sous le nom de S.iinl-Pierre
daiii l'église de Saint. Michel sur le Mont-
Corbulii, laquelle fut conliriiiéc par Jules II,
selon Raphaël ilc Volterre , ou par le [lape
Léon X, comme assure Hcnoit de Saint (îe-
iiiinien, chanoine de la même congregaiion,
cité p.ir Penot et le P. B nanni. iNlozzagrii-
nus ajoute que ce ne fut poini sur le Monl-
Coibulo que les fiindements lui eut jetés ,
mais au monastère de Sainte-Marie do Bi-
bona, à quelques milles de Pive, du enté de
la mer et du diocèse de >'olterre. Il y a bien
de l'apparence ne.iniiioins que ce fut au
Monl-Corliulo, pni-que la ciin.;régalion en a
pris le nom. Leur habillement cnnsistail en
une luniijue grise, sur laquelle ils niellaient
un rocliet . et sur le roehet une aiiiiiiisse ou
capiice. Le P. Bonanui dit que l'an iozï ils
137
ECO
ECU
153
I
changèronl la couleur grise en noire, paur se
confoiiner à l'habillement des chanoines ré-
guliers de Sainl-Frigdien de Lucques, ce qui
ne pcul éire, puisque dès l'an 1507 ceux-ci
avaient été unis, avec dix monastères qui dé-
pendaient de leur congrégation, aux chanoi-
nes réguliers de Latran, qui ont toujours
été habillés de blanc , et qu'ils convinrent
fieulenient que dans le monastère de Lucques
ils retiendraient la chape noire au chœur. Il
semble que, selon le même auteur, la congré-
gation de Monte-Gorbulo subsiste encore ,
rnr il dit que ces chanoines vivent dans une
grande pauvreté et du travail de leurs mains,
étant beaucoup solitaires.
Voyes Mozzagrunus Narrai, rerum çiest.
Can. Regul. Penot, Uist. tripart. Kaphaël
Voilât, lib. XXI ; et Uonanni, CaCalog. Ord.
relig.
Les chanoines réguliers de Saint-Côrae-
lez-Tours sont du nombre de ceux qui, ayant
trouvé la règle de Saint-Benoît trop austère,
ont secoué le joug de cette sainte règle pour
en suivre une plus douce, qui est celle de
Saint-Augustin, et ont pris le tilre de Cha-
noines Kéguliers. Ils ne sont pas au moins
si blâmables que les clianoines de Saint-
Martin de Tours, dont ils dépendent, et qui
ont quille entièrement la règle de Saint-Be-
noît pour se séculariser. Hervé, qui était
trésorier de cette dernière église au commen-
cement du onzième siècle, se relira dans une
Ile de la Loire proche de Tours, et y bâtit
une petite église sous le nom de Sainl-Gôme,
avec un petit monastère, où il mena une vie
solitaire et retirée. Les chanoines de Tours
l'ayant obligé de retourner chez eux, il les
pria de donner celte île, avec le monastère
qu'il y avait bâti, aux moines de Marmou-
tiers, ce que ces chanoines accordèrent ; et,
comme celle île appartenait à Hugues, ccllé-
rier de Saint-Martin, il y consentit aussi.
Ainsi cctle île, qui prit le nom de Saint-Cô-
me, à cause de l'église dédiée à ce saint, qui
y avait élé bâtie par Hervé, trésorier de
Saint-Martin, fut donnée aux religieux de
Marmouliers, à condition qu'il y en aurait
au moins douze qui y demeureraient cl y fe-
raient l'office divin. Nous ne savons point en
quelle année k-s religieux qui y étaient quit-
tèrent la règle de Saint-Benoît pour prendre
celle de Saint-Augustin et vivre en chanoi-
nes réguliers ; mais ils ont toujours dépen-
du de ceux de Saint-Martin, et n'ont point
reconnu la juridiction des archevêques de
Tours ; et ce n'est que depuis l'an 1708 que
les chanoines de Saiut-Marlin, qui avaient
uie juridiction presque épiscopale dans une
partie de la ville de l'ours, l'ayant perdue et
ayant été soumis à celle de l'archevêque de
Tours, ce prélat a aussi droit de visite chez
lus Chanoines de Saint-Côme. C'est dans leur
«église que l'on prétend que Bérenger, archi-
diacre d'Angers et écolâlre de Saint-Martin
de Tours, fut enterré. 11 fut le premier qui
osa dire que le sacrement de l'autel n'était
que la Qgure du corps de Nolre-St-igiieur,
et il attaqua les mariages légitimes et le bap-
(I) Voi/.,àla (in du vol., n" 22.
DiCTiONNAina des Ordres religieux. H.
lême des enfants. Le pape Léon IX, â qni
l'hérésie de Bérenger avait été déférée, lit
tenir un concile il Rome l'an 1030, où elle
fut condimnée pour la première fois ; elle lo
fut ensuite dans ceux de Brione, de Verceil,
de Plaisance, de 'l'ours ei de Rome, sou* Ni-
colas 11. Dans celui de Tours, tenu l'an 1054,
il avait abjuré ses erreurs, et les légats ihi
pape l'avaient reçu à la communion de l'E-
glise. Il Ht aussi ia même chose dans celui
de Rome, l'an 1039, et le cardinal Humbert
ayant dressé une formule de foi, il la signa
et jeta au feu les livres qui contenaient son
erreur ; mais à peine le concile fut-il termi-
né, qu'il écrivit contre cette profession de
foi, et chargea d'injures le cardinal qui l'a-
vait dressée. Au concile qui se tint encore à
Rome, l'an 1079, sous le pap^î Grégoire VII,
Bérenger reconnut encore sa faute et de-
manda pardon. On lui fit signer une profes-
sion di! foi ; mais à peine fut-il arrivé en
France, qu'il publia un autre écrit contre
cette dernière profession de foi. L'annoe sui-
vante, 1030, l'on tint un concile à B .rdiaux
où assistèrent deux légats du saini-sicge.
Bérenger, amené apparemment par l'arche-
vêque de Tours, y rendit raison de sa foi,
soit pour confirmer la profession qu'il avait
faite à Rome, soit pour rétracter son der-
nier écrit, el depuis ce concile il n'est p'uï
parlé de lui jusqu'à sa mort, qui arriva le 5
janvier 1088. Il mourut ilans la communion
de l'église, et l'on croit qu'il fut enterré dans
l'église de Saint Côme-lez -Tours, où il s'é-
tait retiré, et y avait mené une vie (lénitente.
Ce prieuré appartenait pour iors aux moines
de Marinoutiers, selon le témoignage du sa-
vant Père Mdhillon ; et ainsi il n y a pas
d'apparence que la retraite de Bérenger dans
ce prieuré ait donné lieu à quelques cha-
noines de Saint-Martin de suivre son exem-
ple, et qu'ils aient par ce moyen formé la
communauté des Clianoines Réguliers do
Saint-Gôiiie, l'an 1003, comme a avancé la
Père dom Etienne Badior dans l'Histoire de.
l'Abbaye de Marmoutiers et de l'église do
Saint-Martin de Tours, qu'il donna en 1700.
Ronsard, le prinee des poêles du seizième
siècle, qui avait élé prieur commenilalaire
de Saint-Côme, y est aussi enterré dans un
magnifique tombeau. Il mourut lo 27 décem-
bre 1383. Ces chanoines sont habillés com-
me les ecclésiastiques, el mettent seulement
sur leurs manches une bande de tuile de la
largeur de quatre doigts, qu'ils lâchent de
cacher le plus qu'ils peuvent en retroussant
leurs manches (1). Au chœur ils portent un
surplis avec une aumusse sur le bras, et un
bonnet c.Trré.
Joan. Mabill. Annal, liened. Toin. IV, pag.
133 e/ ieciiient. Fïeurj. Histoire ecclés. l'om.
XII el XIII.
ECU D'OR OU VEUT (Obdbe de i.').
Des Chevaliers des Ordres de I'Ech d'Or ou
Verl, et de Notre-Dame du Chardon en
France.
Louis H, duc de Bourbon, comte de Cler-
130 DICTiON'NAtr.E 1>ES ORDRES REI.IGIECX. 140
inonl en Foroz, sripnour de IJaatijni cl do ses successeurs ducs de Boiirlinnnnis on fu?-
Douilles, pnirot prand eliambrier de France, sent aussi cliels ei souverains, cl que l'on ne
surnomiiK'' leI{oii,;'i son retour d'Anfçleterre, reçût pour chevaliers que des personnes no-
où il avait demeuré prisonnier avec le roi birs et sans reproche. Ils portaient tous les
Jean 1" , assembla les jilus pr;in<ls se.fineurs jours une ceinture de velours bleu doublée
lie ses terres «mi sa ville de Moulins en IJour- de satin roujre bonlce d'or, avec le mut lîf~
bonnals, le iireiiiier jour de janvier de l'an pt'rancc en broJcrie aussi d'or. lîlle ferma t
13C'.), auquel jour, de temps inimémorial, on à boucles et ardillons de (îu or cbarbillou-
donne les i-irennes. il leur dit qu'il avait nés et échitiueiés avec l'éniail vert, comme
dessein de prendre pnur devise une ceinture la lèled'un chardon. Aux i;ran les fêles, cl
dans laquelle il y .lurait en écrit le joycu\ prinrip.ilement à celle de la (]oiiee|)li.>u de
mol ^.•.■;)fr(/jir(>, cl qu'il voulait les étreniior la sainte ^'ier;;e, ce prince tenait table oii-
il un l'rdrc qu'il a\aitfait, et qui s'appelle- verte au\ cboaliers, ((ui étaient couveris
rail l'A'fK dur, dont la mar(|uo était un écu de soutanes de damas incarnat a»(C les mau-
d'or dans lequel il y avait une bande de pcr- clies 'arg;es, ceintes de leur ceinUires bleues,
les, avec ce mot Allen. Les premiers qui re- Leur prand manteau était de bleu ceb-sle
curent cet ordre furent Henri de Montaçru, doublé de satin rouge, et le grand collier do
sci;;niur de la 'Jour; (luicbard, dauphin l'ordre de lin or, du poids de di\ marcs, fcr-
il'Au. cijïiie ; GrilTon de Montajiu, Huiïues niant à boucles cl ardillons d'or par derrière,
de Cbasti Mus, l'aîné lieCbâie'moranl, le sire II éiail composé di' losanjies entières cl do
de l^liaslel de Montagne, l'aîné de la l'aliss'*, demies à diiuble orle, ém.iillécs de vert, pcr-
Guillaume de \"icliy el quelques autres. Le cécs à jour, remplies de lleurs de li> d'or, et
dnc de liourbon dii à ces nouveaux cheva- du mol Jispcrance écrit en lettres capitales à
Jiers qu'il desirait que lous ccm\ qui rece- l'antique. Au bout du collier pendait sur l'cs-
vraicnt cet ordre à l'avenir et ceux qui l'a- loiiiac une ovale, dans laquelle était l'ini.igo
vaienl reçu, vécus'-eiil comme frères, se de la sainte Alerte cniourée d'un soleil d'nr
donnassent secours les uns aux autres, fis- et couronnée de douze étoiles avec un crois-
sent toutes les adioiis d'Iionnenr qui con- saut sous ses pieds, el au bout une létc i!o
viennent à des chevaliers et gentilshommes, chardon émaillee de vert. Leur bonnet é:ail
Cl qu'ils s'absiinsscnl de jurer cl de lilasphc- de velours vert rebrassé de panne cramoisie,
nier le nom de Dieu. Il leur camm:inda sur- sur lequel élail l'écu d'.ir à la ile.ise Mien,
tout de porter honneur aux dames cl aux dont nous avons pari.'. Cet ordie lui rerhei-
demuiselles, de ne pas souffrir que l'on par- clié par plusieurs grands seigneurs, el méuie
lâl d'elles en mauvaise part, et de ne point par des élranj,'ers, qui se faisaient honneur
mal parler les uns dis autres. 1! les exhorta de porter l'ordre du d-ic de liourlion, qui
aussi à se garder réciproquement loi cl passait pour le | lus grand cn|iilainc de son
loynu é, et à se poil r respect, romm- il np- lenips.
par'.icnl à cheialiers de louanges cl de vertu; AL ILM-man, d.iiis son Ili>toire des Ordres
el p';ur les exciler ,î remplir leur devoir il militaires, parlant de celui du (Chardon, dit'
leur dil que le mot A /en, qu'il avait fait mel- que l'abbé (jiusliniani s'est trompé lorsque,
tre snr l'écu. voulait dire : Allons tous en- voulant corriger (luelques auteurs qui oui
femhlr nu senicf dr Dieu, ri demeurons unis fait Louis II, duc de liourgogue, insiiluleur
pour la défense de noire p<iy<, et rhcrchor.s à de cet ordre, vers l'an \W.i, il en altribue
ocqu('rir de l'Iionnrur pur nosnciions glorieu- rétablissement à i'iiilippe II, duc de Boiirgo-
ses. il promit de sa |iarl d'e\éruter tout gnc l'an l'i-^O, el que la raison ()ue l'abbé
cela, cl les chevaliers prêtèrent ensuile ser- (iiustiniani en donne, c'est qu'il n'a point
ment entre ses mains de le servir li.L leuienf. trouvé de Louis li duc de Hourgogne en ik03.
Nous donnons l'habillcmenl de ces cheva- Apparemment que M. Herman n'a p.is lu
liers Ici que nous l'avons trouvé dans la bi- l'Histoire des Ordres inilil ires de cet auteur,
bliolhèque du Uoi (1). Il y en a qui préleu- et qu'il s'en est rapporté à d'autres qui lui
detit que ni n'était poiol un ordre (le the- ont fait un fiux rappo;l; car, bien loin ipie
Valérie qu'il leur donna, mais seulonient une l'abbé liiuslini.ini mette rélalilisscment di"
devire (ju'il prit pour lui, cl qu'il pcniiil cet ordre en 1430, Il d;t positivement que
ausài de | renilre aux seigneurs de sa cour ; l'on en doit mellre rinslitntion en l-'iTO, se-
ct que le véritable ordre de chevalerie de ce Ion l'Histoire des Ordres militaires nnpn-
prii'.cc fut celui du (Chardon o<i de l'I-spéran- niée à Paris en l()7t, à laiiuclle il faut ajou-
re, qu'il institua l'an L'ITO, en l'hiinneur de, ter foi, puisciu elle a été co oposée en France,
Dieu et de ia sainte Vierge immaculée, sous où cet ordre a pris son origine : l'er (/wsln
le nom d'ordre des chevaliers de Nolre-Da- autoriia Itistuncn, clic p<r issere orl/inain
nie, dil autrement du ('Iiardon, lorsqu'il nrlla Francia doue (juesl ordine 7'rasseli prii^-
épousa Anne, (ille de iîéraud, deuxième du cipii, mérita fedc, pare dotcrsi dure i'unuo n
nom, comte de Clermonl el dauphin d'.Vu- talc insiitutione 1370. l]omnie lauieur de
vergue; mais il est jdus probable que ce- cette descriplion des ordres militaires en a
laienldeux onlres dilïéicnls. atlr bue l.i londation à un Charles 11 duc de
(]el ordr- du Chardon élail composé de Itnui bon. l'abtie (Miisiiniani f.iit voir que ce
vingt-six chevaliers, y compris le duc de C*i,irles de Hourbon ne peut | as en avoir été
IJourbon, qui en élail le chef. Il voul'il que le fondateur; cl, bien loin d'en allribuer la
(1) \'otj., à la fin du vol., n'' 2j.
in
ELR
EI.E
142
fondalion à Pliilippe II duc de nouigojrne,
roinnie prétend M. Herman, il dil qtie c'est
Louis II, et non pas Charles de Bourbon qui
en a été l'instiluleur : Ua ta'e essame lien si
vcile che Lndovico II, non Carlo (luca di Hor-
ion l'u iinslilulore di questo ordinc. Kt dans
un aulre endroit, où il corrige aus^i .Micliiili,
qui avait avancé que Louis du Hourgognc
él.iit le fondateur de cet ordre, il dit : /•'» Ln-
dovico duca di Borbone rinslitnlore, el non
di liorgo(jna, corne serive Michieli.W y a loii^'-
Icinps que Cri ordre ne sul)si>.le plus, quoi-
que l'abhé Giustiniaiii ail donné uneclirono-
logie de ses grands tnaîtres depuis Louis II,
duc de Bourbon, jusqu'à Louis le Grand, roi
do France. Si M. Herman avait sculenienl
jeté les yeux sur celle chronologie, il n'au-
rait pas accusé l'abbé Giusliniani d'avoir
fait PbiiippL- II, duc de Bourgogne, inslilu-
leur de cet ordre, puisqu'il a mis à la Icle
de SCS grands maîtres ou clu-fs de l'urdr;!
Louis 11, duc de Bourbon, cii 1370.
Kavin, Théâtre d'honneur et de chevalerie.
Josef Michicii, Te.^oro mililar de cavuleria.
Mcnnénius, De iclœ E'jiici^t. Ord. Bcrnarl
Giusliniani, Ilist. di lait, gli ord. mililar. Le
P. Anselme, Le l'alais d'honnaur. Herman et
Silioonebeck, d mis leurs Uisloireg des ordres
mililaires.
l!:i:UYEUS AU feu D'AIIGENT. Voyez
Feu d'or.
EGYPTIENS (Mo. NES). Voyez Coptes.
ÉLÉPHANT (ordre de l').
Des chevaliers des ordres de VEléphanl cl de
Danebroch en Danemark.
L'ordre de l'Eléphant en Danemark est du
nombre de ceux dont on ne connaît point
l'otigiiic. Les uns la font remonter jusqu'au
temps de Chiisticrn I", d'au'rcs piélendcnt
qu'on ne la doit mettre que sous le rèijiie de
Cliristiern IV, et d'auires enfin ne la lixcnt
que sous celui de Fiédcric II. Mais l'opinion
la plus commune est que Cbristiern I" a clé
l'instiluleur de cet ordre, l'an 14^78, selon
«|uelques-uns, ou l'an 1474, selon d'aufre-.
M. .\sluuole dit avoir vu une lettre écrite l'an
1537 par Avoleide, évêque d'Arhusen, chan-
celier de Jean, roi de Danemark, à Jean Fris,
aussi chancelier de Chrisliern III, dans la-
quelle ce prélat marque que Cbristiern I",
étaut à Rome, demanda au pape Sixte IV la
permission de pouvoir insliluer cet ordre en
l'honneur de la passion de Nolre-Srigneur
Jésua-Christ, et que les rois de Danemark
en fussent toujours chefs ; el il ajoute que
ce prince fonda une cliaielle mai^difique
dans la grande église de Uosth;id, lieu de la
sépulture des rois de Danemark el éloigné de
quatre lieues de Copenhague, où tous les
chevaliers devaient s'assembler. Le même
auteur, décrivant le collier de cet ordre, dit
que ce n'était d'abord qu'une chaîne d'or au
lias de laquelle pendait un éléphant qui av.il
sur le colé une couronne d'épines dans la-
(juelle il y avait trois clous ensanglantés eu
mémoire de la passion de No!re-Seigneur,
que dans la suite ce collier fut com;osé de
croix entrelacées d'éléphants, et qu'au bas
de ce collier il y avait encore un éléphant
qui tenait sous ses pieds une image de la
sainte Vierge, en l'honneur de laquelle il y a
au^si des auteurs qui prétendent que cet
xriWe fui iastilué. Favin cl le P. Anselme,
(|ui sont du nombre de ces auteurs, disent
que les cheval ers de cet ordre portent au
cou une chaîne d'or au bout de laquelle [)cnd
sur l'eslomac un éléphant d'or émaiilé de
blanc, le dos charge d'un château d'argent
maçonn j de sable ; et cet éléphant est porté
sur une terrasse de sinopic émailléede Heurs.
J'ai une ancienne cslampe où le collier de
cet ordre est ainsi représenté, à l'exception
que le collier est do trois chaînes d'or. Mais,
quoique Favin et le P. Anselme décria eut de
celte manière le collier de l'ordre de l'Elé-
phant, néanmoins celui qu'ils ont fait gra-
ver est comj:osé de plusieurs croix entrela-
cées d'éléphants qui portent chacun sur leur
dos une tour, cl au bout de ce collier il y a
une médaille cnlourée de rayons, an milieu
de laquelle est l'image de la sainle Vierge.
J'ai encore une ancienne estampe où ce col-
lier n'est que d'une c'iaîne d'or composée do
plusieurs os qui paraissent dos vcriébrcs, au
bas duquel pend un éléphant ayant sur le
dos une tour, et au-dessus de la tour un I,
qui pourrait signifier le roi Jean ; de même
que le C que les chevaliers qui furent fai s
{;ar Chribliern IV mirent sur le collier, mar-
quait le nom de ce prince. Celui que I\Ien-
nénius a fait graver est semblable à celui
que Favin et le P. Anselme ont donné, avec
celle dilî'érence que la médaille de la sainio
Vierge est attachée à trois peliies boules, et
qu'au bas de cette médaille il y en a encor(î
une autre représcnlant trois cions de la [)as-
sion. Enfin la plupart des auteurs (|ui ont
parlé de cet ordre en ont donné le collier do
dilTérentcs manières. Celui que les ch,;va-
licrs portent présentement est (Ornposé de
plusieurs éléphants entrelacés de louis, clia-
qui! éléphant ayant sur le dos une housse,
bleue, et au bas du collier il y a un éléjjliant
d'or chargé sur le dos de cinij gros diamants ,
en mémoire des cinq plaies de Notie-Sei-
gncur; cet éléphant esi émailié de blanc et
a sur le dos un pelit Maure assis.
Quant à leur habillenieni, ils portcal dans
les jours de cércmonio un grand manu au do
velours cramoisi doublé de salin blanc, dont
la queue traîne de deux aunes, avec un cha-
peron par derrière attaché au manteau : les
cordons qui lient le manteau sont d'argent
et de soie rouge, le haut-de-chausses et In
pourpoint de satin blanc, et les bas de cou-
leur de perle. Ils portent sur le côte gauchi!
du manteau une croix en broderie, entourée
de rayons ; leur ciiapeau est de velours noir
avec un boaquet de plumes rouges et blan-
ches (1). Ce qui distingue le roi, c'est (jiic
les plumes de son chapeau sont blaiK lies
avec une aigrette noire, et que son mantea;;
(!) Vo'j., U la lliidiivol., li" ii.
Itô
DICÏiaXSAinF. DES ORrtlîF.S RKI.ir.lF.l'X.
14i
e>l douldo (riioimiiic. I/hnliillcmont do ces
cliov.ilii'is, (jiie l'iilit <" (îi'.isiiniaiii a failpra-
vcr, a l'ié iltssiné, à ce qu'il dit. sur un por-
Irjil du roi Chrislicrn \', morl l'an JG'J'J. Ce
prince j csl ri'prcsoiilé avec une cuirasse,
ayant un cordon bleu passé en écharpc de-
puis l'épaule gauche jusqu'à la hanche
droite, et un éléphant d'or au bout, avec un
manteau bleu, snné di; couronnes d'or et de
cœurs en broderie ; le nianteiu est doublé
de peaux de loups-ccrviers et a sur le côté
^'auche une croix entourée de rayons. Ainsi
il y a eu souvent du changeinent dans l'ha-
billenienl , ;iussi birn que dans le collier.
Favin , qui a été siii\i par d'autres, s'est
trompé lorsqu'il dit (jue les rois de Dane-
mark ne confèrent cet ordre que le jour de
leur eouronnenienl : car, sans parler des rois
de Danemark qui ont réi;né depuis l'insli-
liilion de cet ordre, Cli; isticr:) V, qui, à son
avénrmeni à li coiironm-, avait fiit des che-
valierv «le l'Eli phanl, fil encore chevalier de
cet ordre, l'an \6~r2, I anib.is-adeur d'Angle-
terre qui résidait aupr.'s de sa personne. 11
y eut une promotion de plusieurs autres che-
valiers l'an 1679. Le marquis de Hadc Dour-
lach. et Chrislicrn. prince d' Osifrise, le fu-
rent au^si l'an 1C82. L'année suivante, Fré-
déric Charles de Koyc de la Hochefoucault ,
comte de Uoye, fut l'ait pareillement ( heva-
lier de 1 Klephanl. Il y eut une autro promo-
tion le lo jui leî IG'Ji , (t le collier de cet
ordre fut donne à livrard Louis , prince de
Wirteinberg; S utlgard Georges, landgrave
de Hesse-Diirms'adt; Philippe, iamlgravc de
Hesse Casscl ; Albert, duc de Saxe-Golha ;
Léopold Evrard, duc de Wirlemberg-.Mont-
belliard. et à d'autres ; et l'an l(i'.)7 le duc
Jean Adolphe de Saxe-Weinsenfelz le re(;ut
aussi.
lilie A'hmole, dans son Traite de In Jnr-
rtlicre; Favin, ïluûtre d'honneur el de che-
valerie ; Bernarl Ciustini:ini , Ili^l. di Ciilli
gli Ordini tni:itiiri ; .Mennénius , Ilerroan et
Schoonebccii, dans leurs Ilisloires des Ordres
iiiilitntres: et le V. Anselme. Le Palais de
l honneur.
O itre l'ordre de l'Eléphant en Danemark ,
il y a encore un autre ordre sous le nom de
Danebroch , <!onl ((uebiues écrivains , ama-
teurs des fables, font remonter l'origine jus-
qu'au temps de Dan, fils du pairiarcbe J.icob,
qui, selon eux, fut le premier roi de Dane-
mark cl donna son nom à ce royaume. Ils
disent que ce roi [rrélendu étant sur le point
de livrer une bataille, l'an du monde 2898,
vil descendre en l'air une grande croi\ blan-
che qui fut le signe de la victoire qu'il rem-
porta : ce qui fut cause qu'il institua un or-
dre au luel il donna son nom et celui de
lîroge, qui, en danois, veut dire peinture.
D'.iuirrs, plus raisonnables, croient que
Waldimar il en a élé l'insUtuteur vers l'an
12I'J. M. Harlholin , qui Cît de ce sentiment
et ((ui a fait une dissertation sur l'origine de
cet ordre, aj')Ule que ce prince donna aux.
che*aliers un*' croix lilaïuhe. Il y en a d'au-
tres (|ui <n alliibui'nl aussi l'instiliition à
Waldemar, el qui prelendeui que celte croix
1.1. m. lie était bordée de rouge, et que le mo-
tif qui porl.i ce roi h instituer cet ordre fut
qu'étant près de donner combat à ses enne-
mis, il avait vu une croix pareille qui des-
cendait du c:el. Ce qui est certain, c'est que,
s'il est vrai que AValJcmar ait institué cet
ordre, il n'était plus connu en Danemark
lorsque Chrisliern V le rétablit l'.in 1672:
mais il y a plus d'np|iarence qu'il en a c!c
plulol l'instituteur qrjc le restaurateur, el ce
fut à l'occasion de la naissance du prince
royal de Da-iemark Chrislicrn Guillaume ,
son nis, qu'il célébra avec beaucouit de; ma-
gnificence. Les chevaliers de cet ordre por-
tèrent alors en échaipe depuis l'épaule gau-
che jusqu'à la hanche droite un ruban blanc
bordé ('c vert , auciuel pendait une croix t!o
diamants , el sur leurs manteaux ces deux
Il ots en broderie , Pelu'e el Juslit a , dans
une conronui' de laurier. Ce prinC'' retran-
cha dans la suite ces paroles, et ayant ré-
formé l'ordre, il ordonna ^\\\c les chevaliers
porteraient un manteau de couleur aurore,
doublé de salin blanc. C" m nteau est à peu
près de la même manière que celui des che-
valiers de l'Elcphanl ; mais le h:iul-de-
chausscs est plus large , semblable à celui
des Suisses. Us doivent paraître devant le
roi avec cet habit de cérémonie trois fois
l'an, le jour de l.i n.iissance de ce prince ,
celui de son couronnement el celui de sou
mariage. Leur nombre n'c-l que de dix-neuf,
le roi en est le chef et ne confère cet ordre
qu'à des officiers d'armée.
Thim. Hartho!., De equest. Ord. Danehro-
giii Dissertai, hislor.; et Schoonebeck, His-
toire des Ordres militaires, loin. IL
ELISABETH [Religielses de Sainte-). '
De l'origine des religieuses du Tiers Ordre de
Saiitt-François , avec la vie de s-tinle t'ii-
snbelh de Hongrie , veuve du landi^rtive île
Thuringe, prentiôre religieuse de cet ordre.
C'e-t avec raison que les religieuses du
Tiers Ordre de Saint- François regardent
sainte Elisabeth de Hongrie comme leur
mère, puis(iu'elle a été la première Tiertiaire
qui ait fait des vœux solennels. Elle était fille
d'André 11, roi l'e Hongrie, et de Gerirude ,
fille du duc de Carinthle. Elle vint au monde
l'un 1207. Ses vertus commencèrent à écla-
ter presque dans le berceau, parlirulière-
ment sa cimpasson envers les pauvres, t|ui,
dès l'âge de trois jins, lui mérita un miracle
signale d.- la [luissance de Dieu ; car ayant
été surprise par le roi, son père, lorsqu'elle
leur portail quelque chose qu'elle ne voulait
pas que l'on v il, el lui ayant ilit que c'étaient
des roses, cela se trouva véritable. Le land-
grave de I huringe l'ayant demandée en ma-
riage pour son lils aine, el ayant envoyé
pour ce sujet une célèbre ambassa<le au roi
de Hongrie , elle fut conduite en Thuringe
dès l'âge de quatre ans avec toute la magni-
ficence possible.
La cour du landgrave la vit encore plus
fervenlc et plus vertueuse que ne l'ava l vue
celle du roi de Hongrie. Sa gouvcrnanle s'i l~
115
ELI
KiX
lie
força de Jiiniinier la longueur <l(!>scs prières
et (le ses aulres pratiques de dcvoVion ; mais
ce fut toujours inulilemenl. Son oraison était
presque continuelle, l'exercice de ses vertus
ti'avait point d'intervalle, même dans ses ré-
créations, qu'elle passait dans des divertisse-
ments saints et pieux. Sa dévotion et sa ten-
dresse étaient si grandes pour les mystères
de la passion de Jésus-Christ, qu'elle répan-
dait une grande abondance de larmes lors-
qu'elle entendait la messe, qui en est la re-
présentation. Le roi de Hongrie, allant à la
conquête de la terre sainte , établit un sei-
gneur de sa cour, nommé lîranebanl , pour
gouverner le royaume pendant son absence;
mais à peine ce prince lut-il parti, que tier-
irude son épouse fut tuée par ce Br.inebant.
Les larmes que ce meurtre fit répandre à
suinte Elisabeth furent les fidèles témoins de
sa douleur il de sa tcndressepour celle prin-
cesse; mais s.i constance n'en lut point ébran-
lée ; elle lâcha même de porter son père et
SCS frères à n'en poinl tirer vengeance.
Après la mort (le la reine sa mère, elle com-
mença à vivre d'une manière d'autant plus
ugré.ible à Dieu, qn'clleélait désagréable à la
cour. Sophie, duchesse de Thuringe, et les
gens de celle cour la méprisaienl ; mais ces
mépris la consolaieiil , dans l'espérance de
celle récompense que Dieu pron«el à ceux
qui souffriront la pcrsécuiion pour la justice.
Le landgrave la défendait contre la malice
des envieux ou des censeurs de sa vertu ;
mais Dieu, qui éprouve ses élus comme l'or
dans la fournaise, la priva de celle protec-
tion par la mon de ce prince , qui arriva
lorsqu'elle n'avait encore que neuf ans.
Quoique les pratiques de la pénitence ne
soient pas ordinaires aux personnes de cet
Âge, celle jeune princesse les embrassait déjà
a»ec tant d'ardeur, que la haire et la disci-
pline lui étaient ordinaires, el elle inventait
tous les jours de nouvelles mortifications.
La couronne qu'elle portait sur sa léle les
jours de fêtes el de dimanche, pendant qu'clie
assistait au saint sacrifice delà messe, selun
la coutume des princesses de Thuringe, lui
paraissait si peu convenable au mystère d'hu-
inililé qui y est représenté , qu'un jour elle
la quilia; mais celle action, qui auiait dû
fiiie l'admiration de toute la cour, déplut
fort à la duchesse Sophie, et procura de
nouvelles humiliations à notre sainte , qui ,
malgré les oppositions de celle princesse il
lie ses courlisans, à qui ses vertus donnaient
de la jalousie, épousa enfin, l'an 1221, à i'âi,'e
de quatorze ans, Louis V, landgrave de Thu-
ringe, (|ui en avait vingt el un. Elle eut de
ce mariage trois enfants, un lils nommé Her-
man, qui posséda la souverainelé de 'i'hu-
ringe après la mort du landgrave son père ;
une princesse qui porta le nom do Sophie,
et fut mariée au duc de Brabanl ; el une au-
tre fille qui fut abbcssc d'un célèbre monas-
tère de Franconie.
Comme le landgrave son époux avait beau-
coup de piété , il lui laissait une entière li-
berté de vaquer à ses exercices de dévotion.
11 l'cDCOurageail même à la persévérance, el
approuvait toutes les aumônes qu'elle distri-
buait aux pauvres. Sitôt que celle princesse,
qui cherchait toutes les occasions d'avancer
de plus en plus dans le chemin de la perfec-
tion, eut nouvelle de l'établissement du troi-
sième ordre de Saint-François, elle demanda
d'y être associée, el elle fut la première en
Allemagne qui le reçut des mnins d'un reli-
gieux du premier ordre, avec la permission
du prince son épou\, qui l'eût pareillement
embrassé, s'il eût eu assez de santé pour en
pratiquer les règles. Saint François, qui \i-
v,:it encore pour lors, ayant appris cet'e nou-
velle, aurait bien souhaite lui faire un pié-
senl digne de sa qualité, pour lui témoigner
la joie qu'il en avait ; mais sa grande pau-
vreté lui en étant les moyens, il lui envoya
le pauvre manteau qu'il portait , comme le
gat;e le plus assuré de son amour paternel
pour une si sainte fille : aussi sainte Elisa-
bclh le reçut comme un riche présent , et
avec le respect d'une véritable fille pour un
père si saint et si ami de Dieu. Le Saint-Es-
prit, (|ui avait toujours été son guide avant
son mariage, ne le fut pas moins lorsqu'elle
fui engagée dans cet état : elle choisit pour
son confesseur le Père llodingerius , dont se
voyant privée à l'âge de dix-sept ans , elle
prit Conrad de .Masburg , à qui elle rendit
une parfaite obéissance, après en avoir fait
le vœu entre ses mains en 1223, y joignant
en même temps celui de chasteté, si elle sur-
vivait au prime son époux.
Les pauvres el les m;ilades étaient les
principaux objets de ses soins el de son af-
fection, leur ayant fait bâtir un hôpital à
Maspuig, afin qu'on leur y administrât
tous leurs besoins , tant spirituels (jue tem-
porels. Dans un temps de famine elle uourr t
pendant deux années de suite neuf cents
pauvres. Ses greniers étant épuisés, elle eut
soin de l'aire venir du blé de touli'S parts , et
employa à cette œuvre de charité non-sen-
Iciuent toute sa dut , (jue son mari lui avait
accordée , mais encore sa vaisselle d'argent,
ses perles, sis diamants , et loul ce qu'elle
avait de plus précieux.
Le landgrave, ayant enti épris le voyage de
la terre sainte, laissa cette princesse pour
régente de ses Etats; mais ayant été saisi
d'une violente fièvre dans la villu de Troïna
en Sicile, il ne laissa pas d'aller à Trente,
où, sa maladie augmentant , il mourut eu
1227. On annonça à la sainte la mort de st>i!
mari , dont elle reçut la nouvelle avec une
parfaite conformité à la volonié de Dieu. En
même temps on la dépouilla do ses Etals,
comme indigne de la régence. Etant sortie la
nu t hors de son palais par la violence de
ses ennemis, qui l'en chassèrent avec mépris,
non-seiilemcnl elle ne trouva aucune mai-
son qui la voulût recevoir, mais encore, pour
surcroîtdcdisgràce.une malheureuse femme
qui en avait reçu de grands secours la jeta
dans la boue au milieu de la rue, et elle fut
obligée de se retirer dans une pauvre étalile
avec ses deumiselles , jusqu'à ce qu'ayant
entendu sonneràminuil la cloche des Frères
Mineurs pour les matines , elle se fit ouvrir
117 ItlCTIONNAlRE DFS ORDRFIS URLIGIRUX. liS
J.1 |)(>r!o (le ri''j;lis(>, fl l'-s prin lîo clianiiT lo trouver; cl sur lo refus r)u'il lui fil de la
7> /'ci/m m aciioude prâ( os des huniilinlions permission qu'elle lui en iIcmaiuLiit , el'n lui
où Dieu l'avail réiluile. répoiidil : Je le ferai , je le ferai, ri roua ne
Tu si pr.iud ehaujiciucnl de fortune, eapa- jionvtz pas m'en empêcher ; el elTectiveuieni ,
hic djilialire loul autre ciiuraire que le sien, élanl euiréc le jour du vendredi saint dans
ne fU(|u'augmentersaconsianceelsouain(iur l'éirlisc des Frères Mineurs, elle mit les
pour Dieu , eonirne il parut assez par la pa- mains sur l'autel , el là , en [irésenec des re-
lience avec laquelle elle snuiïril ce que la ligieux el de son confesseur, elle fit une
pauvrelé a do plus I uile et de plus huiiiilianl, profession solennelle par laquelle elle rc-
puisqu'cllc fut reduile à (iomaiider du paiti nonça à loulcs les vanités du monde, A ses
lie porte en porte pour sa subsistance. 1,'ab- parents , à ses eulanis, à sa propre volonté
l)e>se de Kizingen , sa lanle , en ayant eu et à tout ce que le Sauveur du monde con-
avis, la lit venir chez elle, et l'envoya en- scillo d'abandonner pour <''lrc parfait,
suite à l'evèque de liamlcrf^ , qui éiaii aussi Plusieurs auteurs disent (ju'elle se retira
son oiule, el qui lui proposa do se remarier, ensuite dans un monastère, où elle s'eui-
étanl encore dans la (leur de son âne ; mais ploya à filer la laine el à exercer les plus
elle ne voulut point entendre parler de se- vils ministères : ce qui n'empiîeliail point
londes noces, ajant choisi Jésus-Christ que, comme oilc ne s'étail pas oblij;ce à la
pour époux. clôture , elle u'(ûl soin des pauvres de l'hô-
Conime on portait le corps du prince son pilai qu'elle avait fait bâtir. Il y eut aussi
mari en Thuringe, il pa'-sa par liamberg. trois ou quaire de ses demoiselles qui l'inii-
accompagné des sei;ncursqui l'avaient suivi tèrent , el se revêtirent de l'habit du Tiers
en Sicile. La sainte veuve lc\oulul voir, pour Orilre ; mais la pauvreté de celui de la sainte
lui donner 1rs dernières marques de sa ten- la faisait distinguer des autres. Enfin ses aus-
ilresse en l'arrosant de ses larmes. Ces soi- lérilés et ses niortificaiions ayant abrégé ses
gneurs, ayant appris le mauvais traileu)ent jours , elle mourut à Maspurg le 10 novem-
»|ue l'on avait fait à celle princesse, la vou- bre 1231, u'élant Cr:corc que dans sa ungt-
lurent rétablir dans la régence, mais elle dé- quatrième année.
Clara qu'elle y ri nonçait, et ne prétendait Quelques-uns doutent néanmoinsquecellc
aucune part au gouvernement. Elle demanda sainte ail été du Tiers Ordre de Saint-Fran-
soulemenl que Ion conservât les droits de çois cl véritablement religieuse; mais c'est à
.--es enfants, el qu'on lui donnât son douaire tort, puisque saint lionaventnre assure
en argent , jifin de le pouvoir distribuer aux qu'elle eu a été, et qu'il l'a api)ris de son
pauvres. Uoddlphe , qui tenait le premier confesseur ; el que Vincent de Iteauvais et
r.ing parmi ces seigneurs , la ramena en Thu- saint Anionin, qui oui été suivis par plusieurs
linge , et la remit en possession de son pa- autres écrivains, disent qu'elle se revêtit
lais, où elle fui traitée selon sa dignité; d'un habit gris , el qu'elle fit une profession
mais celle pieuse princesse, appréhendant solennelle : Grisivum hahilum induit , ri ha-
i]ue les honneurs (ju'un luirendaitcl l'ahon- biius sttsceplioium voli emissivnc solrmnizii-
dan( c où elle se lrou^ait ne fussent contrai- r('i . Wading . qui dispute à celle sainte la
reg au va'u de piuvrelc auquel elle s'était qualité île religieuse , dit néanmoins q,ue sa
engagée, renonça à tous ces honneurs et re- profession fui solennelle : Positis super ul-
tourna d'elle-même à cet état d'humiliation turemanilius , soicmni ac magnanima profes-
«jù SCS enneujis l'avaient d'abord réduite sione renuntial pormlibus , etc.; el dans un
îiprès la mort de son uiari. liodolphe el les autre endroit, en rapportant la bulle de ca-
aulres seigneurs de la cour, peu accoulu- nonisalion , où le jiapc (^irégoirc IX marque
mes aux humilialiiins de la croiv de Jésus- (|u'elic se revêtit de l'habit de religion, il
Christ, i)ui leur semblait plutôt une folie n'a pa« manqué de ju.irqucr à la marge
qu'une sagesse . ne sachant à quoi attribuer qu'elle avait été religieuse, fuil reliyiosu.
un si grand mépris de soi-même el si con- Ainsi c'est à lorl qu'il loi dis])uleceltequalilé.
traire aux maximes du monde, ne la regar- Konlinius, dans son llisioire do Hongrie, dit
dèrent plusque conmie une folle, eln'eureni qu'après avoirpris I habit de S.iinl-François,
plus pour elle <|ue du mépris : ce que la elle se retira dans un monastère, où elles'oc-
saiiite souffrit avec une joie qu'il n'est pas cupait à liler cl aux ollices les plus vils. Nous
faille d'exprimer, se reconnaissant à ces pourrions rapporter aussi le témoignage
marques servante de Jésus-Christ, qualité d'un grand nombre d'auteurs, ([ui n'ont point
i|u'elle préférait à toutes les grandeurs de la fait diflicnlie. de la reconnaître pour leli-
lerre. giensc du Tiers Ordre do Saint-François;
l,e pape t'.régoire l\ la prit sous sa pro- nrais ce que nous en avons dit suffira pour
lection, et la recommanda a Ciuirad do ,Slas- faire connaître que les religieuses de cet or-
pur^', son confesseur, entre les mains du- die ont eu raison de la reconnaître pour leur
(|uel elle avait fait , comme nous avons dit , mire el pour leur patronne, yen ayant même
vœu d'obéissance el de i hastelé dèsl'an 122.'). quoIqucN-unes qui prenneul le lilre de reli-
t^e sage directeur voulut modérer son /cle gieuses de Sainlc-Elisabelh. Il est vrai qu'elle
pour la pauvreté , qu'elle voulait pratiquer ne gardait pas la clôture el qu'elle sortait
dans un si ljaulde!:re do perl'ectiun, que, non souveul de smi monasti-re pour aller servir
C'Urlcnle do renoncer à loul ce (|u'elle pou- les pauvres a l'h^tpilal ; mais la clêlure n'est
vail prétendre darrs le monde, elle ne vou- p.rs essentielle à la profession religieuse; et
Uil vivre que des aumônes qu'elle |iourrail il y a cueoie aujuurd'hur plusieurs cuurinu-
liO
EU
ENF
S50
iiaiil6s de religieuses du Tiers Ordre de
Saint-François qui ne s'y engagrnl pas, et
qui, à l'exemple de leur Mère sainte Elisa-
beth, sortent de leurs monastères pour aller
assister les malades, consoler ks mourants,
ensevelir les morts , et qui prennent la qua-
lité de religieuses hospitalières. Il y en a
d'autres qui exercent l'hospitalité sans sor-
tir de leur clôture, d'autres qui gardent seu-
lement la clôture sans exercer l'hospitalité;
et parmi celles qui ne sont point hospitaliè-
res, il y en a de réformées qui prennent le
nom de religieuses du Tiers Ordre de Saint-
François de 1 Etroile Observance , d'autres
de religieuses Kécollcclincs. Lis unes suivent
la règle de Nicolas IV, d'autres celle de
]-éon X. La plupart sont habillées de gtis.
Les unes ont des scapulaires , d'autres n'en
porlciit point. H y en a aussi qui sont habil-
lées de blanc , d'autres de noir et d'autres de
lileu. Nous avons parlé et parlerons encore
(le quelques-unes de ces religieuses plus par-
liculièreiiienl dans d'autres articles, et nous
donnons la ligure d'une des anciennes reli-
gieuses hospitalières de cet orJrc qu'on nom-
mait de la Celle, qui étaient habillées de gris,
et portaient des manteaux noirs lorsqu'elles
sortaient (1). Gomme la règle défend de por-
ter des habits tout à fait blancs ou tout à fait
noirs, ces hospilaiières de la Celle des mo-
nastères di' Saiiit-Oiner, Hesdin , Abbevillc
et Montrcuil , eurent du scrupule de porter
des manteaux noirs, quoiqu'elles en eussent
eu permission du pape Sixle IV. Elles s'a-
dressèrent, l'an 14-89, au pape Innocent VIII,
qui leva leur scrupule et roiifirrai la permis-
sion que son piédéccsseur leurava:t donnée
de porter ces manteaux noirs qui les cou-
vraient depuis la tète jusqu'aux pieds , et ne
portaient point de scapulaire, non plus que
certaines hospitalières dont nous avons lait
aussi graver l'habillement , et qu'on appe-
lait les Sœurs de la Faille, à cause des grands
manteaux ((u'elles portaient aussi, au haut
desquels il y avait un rond de chaperon qui
couvrait leur visage pour n'être point vues
ilu peuple (2) ; elles allaient servir les u)a-
ladcs dans leurs maisons , et avaient soin des
peslileiés; leur habillement était gris.
Vincent. Bellovaccnsis, lib. ssx Spcculi,
Jlist. c. 136. S. Anton., ui part. Ilist., titiil.
19. f. 2; Wading, Annal. Minorum, t. I,
ann. 1228, n. 84. S. Bonavent. Serm. de S.
lîlisab. Conrad de Masporg, EpisI, ad Pa-
pam. Gregor. IX de Vita S. Elhalielh. Joan.
Mar. Vernon , Annal. Tei t. Ord. S. Fran-
6-i«(;i. Franc. Bordon, Chrvnolog. FF.etSo-
ror. Tert. Ord. S. Francisci.
Nous ne partageons point le sentiment
d'Hclyot sur la profession de sainte Elisabeth
de Hongrie, qu'il dit avoir été solennelle , si
le mol solennelle doit être pris à la rigueur.
Néanmoins nous ne décidons pas absolument
que sa profession ne fut point solennelle,
puisqu'elle la faisait dans le Tiers Ordre ,
qui est un ordre véritablement approuvé
comme ordre religieux; mais quelle commu-
nauté habi(ai(-olle, quelles constitutions y
suivait-on ? Ce seraient des points à éclaircir ,
puisque Wading est allé jusqu'à contester
l'état religieux de la sainte, qu'il reionnalt
pourtant à la fin par l'expression rcliginsa.
Quoique les religieuses Tierliaircs de Paris
soient connues aujourd'hui sous (e seul nom
de Religieuses de Sainte-Elisabeth , elles no
sont point néanmoins à placer au rang do
celles qui sont mentionnées dans ce chapitre.
Elles appartiennent à celles qu'on appelle
de l'Etroite Observance ; nous renvoyons les
additions que nous fournirons à leur his-
toire au chapitre où leur élablissemcnl est
raconté parHélyot; c'est là leur place nalu-
relle , c'est-à-dire à l'article de l'ordre de l.'i
Pénitence , ou Tiers Ordre régulier de Saint-
François d'Assise. Nous parlerons en même
temps de deux autres maisons que les Fran-
ciscainsdu Tiers Ordre avaient aussi à Paris,
et sur lesquelles Hélyot a gardé un silence
d'au:ant plus surprenant, que ces deux mo-
nastères étaient du même ordre que lui.
Au dernier siècle les Franciscains du Tiers
Orrfre.ainsi qu'on les appelait à Rome, avaient,
dans celte dernière ville, les quatre établis-
sements suivants, tous quatre gardant la clô-
ture et dirigés par des prêtres séculiers :
Saint-Bernardin de Sienne , Sainle-Cluire, la
l'urification , Sainte-Apolline. Aujourd'hui
les Franciscaines du Tiers Ordre, à Borne,
sont encore sous la direction des prêtres sé-
culiers; nous ignorons si elles y ont plus
d'une maison , mais lous les monabtères dont
nous parlons ici sont plutôt à mentionner
dans le chapitre consacré aux religieuses du
Tiers Ordrevivant eu clôture. Dans les Etals
autrichiens ou compte aujourd'hui dix mo-
nastères de religieuses de Sainte Elisabeth,
diies Elisabéthines, renfermant, en totalité,
319 religieuses. B-d-e.
ENFANCE DE NOTRE-SEIGNEUB (Filles
DE l').
De la congrégation des Filles de l'Enfance de
Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Dans le temps que les Filles de l'Enfant
Jésus à Rome commençaient à former leur
congrégation, comme nous le dirons à l'ar-
licle Enfant Jésis, l'on en établit en France
une autre que l'on nomma de l'Enfance de
Notre-Seigneur Jésus Christ , qui eut pour
fondatrice madame de Mondonville Jeanne
Julliard, veuve de Claude de Turle, seigneur
de Mondonville , conseiller au parlement de
Toulouse. Celte pieuse dame avait déjà éta-
bli, conjointement avec M. l'abbé de Ciron,
chanoine de la cathédrale et chancelier de
l'univcrsilé de Toulouse, quelques maîtres-
ses pour l'éducation et l'instruction des nou-
velles catholiques et des pauvres filles de la
paroisse de Saint-Etienne de la même ville;
mais, voulant changer cet établissement en
une congrégation de vierges chrétiennes qui,
sans porter l'habit de religieuses, pratiquas-
sent les vertus de religion et se donnassent
(i) Voy., à la fin du vul., Il" 2a.
(i) Voy., à la fin du vol., n" 26.
i:>i
DlCTIONNAlKi; DES OUDllES RKLICIELX.
lo2
tout à Dieu el au s> rvicc du prochain, cllo
«0 n-iira en ItioT dans la maison qu'elle avait
aclielée pour l'inslruclion des nouvelles ca-
tholiques. Elle y assembla, par les avis de
Al. de Ciron, un si grand nombre de Pilles, que
cette maison n'étant pas suffisante pour les
•loger toutes , elle en acheta une autre
«l'an ICtil, où, sitôt qu'elle fut logée avec
• J^loule.* celles qui s'étaient mises sous sa con-
■duile, elle demanda pour sa congrégation
naissante des règlements el des constitutions
à l'arche» L-(|uc «Je Toulouse, Pierre de Marca,
«]ui , ne pouvant refuser une demande si
lainte et si juste , commit, par une urdon-
naiicc du 2.'i mai 16G1, M. de Ciron pour tra-
vailler à CCS mêmes constitutions. Elles ne
furent pas plutôt Tinies , que madame de
Mondoiiville el quatre de ses fille» présentè-
rent une requête à ce même prélat au mois
de janvier de l'année suivan'e, pour le prier
«le les approuver et d'ériger liur congréga-
tion sous le litre de \' l'.nfance de Nolre-Sei-
f/neur Jésus-Christ, et le vœu simple de sta-
hilité auquel elles voulaient seiigagrr. Le
grand vicaire de l'archevêque répondit à la
icquêlc, «t érigea les suppliantes et celles
qui se joindraient à elles en société et con-
grégation, sous le titre cl de la manière
qu'elles souliailaicnl, pour vaquer à l'édu-
cation chrétienne des jeunes tilles, à l'in-
sirnction de celles qui étaient nouvellemenl
converties à la foi catholique, au secours el
à l'assistance des pauvres malades honteux
cl autres, avec le vœu simple de staijililé,
sous la conduite de leur fondatrice cl insli-
lulricc. Il approuva les conslilu;ions (]ui
avaient été dressées par M. de Ciron , à
condition néanmuins qu'aucune lille nu
pourrait êlre reçue à fjire le vccu do stabi-
lité dans la congrégation avant qu'il y eùi
un acte public de la donation que la l'on ia-
irice avait promis de faire p' ur l'entretien
de huit filles : ce qu'elle oxécuîa la même
iinnée, et fit la première ce vœu de staliililc
le i mars. Elle envoya ensuite à RoiPiC les
tnêines constitutions, pour en avoir la con-
firmation du sainl-siége, que le papo Alexan-
dre \ Il accorda par un bref du G novem-
bre 1GG2. Le roi donna aussi ses lettres
patentes pour cet élaMissement le 21 octo-
bre 1CG3, et elles furent enregi-trées au par-
lement de Toulouse le 17 novembre suivant.
Tels furent les commencements de la con-
grégation des Filles de l'Enfance, qui ne
sub-isièrcnl pas longtemps, comme nous le
verrons dans la suite.
Les constitutions qui furent dressées par
M. de (jron contenaient cinquante -trois
chapitres. Le premier tr;iilait de la fin de
l'institut, qui était d'honorer tous les états
de l'Enfance de Nulrc-Seigucur Jésus-Christ,
mais particulièrement celui dans lequel il
commença d'in><lruire les honmics el de se
réparer de ses pan nls jiour s'appliquer plus
parliculièreaienl aux aflaircs de son l'ère : ce
ijuc les filles qui embrassaient cet institut
Jevaiinl imiter, en jjroturantau dedans cl au
dehors de leurs maisi us riiislruction et le
ttiours spirituel el temporel du prochain,
autant que la modestie de leur étr-t le pou-
vait permetire. Li- second chapitre déternii-
nail les emplois des filles de cette congréga-
tion , dont le principal était d'élever les
jeunes filles dès leur enfance dans la con-
naissance des obligations de leur baptême,
dans l'estime et la prali(|ue des promesses
qu'elles y ont faites à Dieu, dans la haine du
inoude cl de ses pompes, auxquelles elles ont
renoncé, et daa> l'amour de Jésus-Christ el
des maximes de son l'.vangile. Le troisième
traitait de la manière que les filles de l'En-
fance devaient s'appliquer à celte éducation,
en prenant des pensionnaires dans leurs
maisons el en tenant des écoles publiques.
Le quatrième cl le cinquièmi* regarilaienl le
gouverneinenl des pensionnaires cl des éco-
i.'S. Le sixième enseignait la manière avec
laquelle ces (illcs devaient se comporter dans
la visite des malades et la di^l^il)ulion des
bouillons. Le septième, ce qu'elles devaient
faire à l'égard des nouvelles catholiques. Le
huitième el le neuvième, le soin qu'elles de-
vaient avoir des hôpitaux el des pauvres en
temps de peste. Le dixièiije parlait des re-
traites qu'elles devaient f.iirc pendant huit
jours tous les ans. Les onzième, douzième,
treizième cl quatorzième regardaient la ré-
ception des filles. Il devait y on avoir de
trois sortes : les premières étaient des demoi-
selles de noblesse d'épée ou de robe, qui
pouvaient seules avoir voix délibéralivc dans
toutes les choses qui di-mandaient les suf-
frages de la communauté, comme aussi voix
active et passive dans le-i élections aux char-
ges de supérieure, intenilantc el économe de
la maison. Dans le second rang étaient les
filles d'une condition infeiieure, qui pou-
vaient avoir part à tous les emplois do la
congrégation aussi bien que les premières,
comme de maîtresses des écoh-s, du gouver-
nement des pensionnaires, de la visite des
pauvres, distribution des bouillous, el au-
tres choses semblables : elles étaient seule-
ment exclues des charges de supérieure, in-
lendanle e'. économe. Enfin dans le troisième
rang élaienl les suivantes, femmes de cham-
bre l't servantes du gios emploi, qui de-
vaient toujours demeurer dans la condition
que la naissance leur avait donnée, sans
(]u'ellc$ pussent en éire tirées pour quelque
cause que ce fût. Avant que ces filles fissent
le v«ru de stabilité, elles devaient être éprou-
vées pendant 'eux ans, lesquels expirés, la
fondatrice avait droit de les recevoir elle
seule, cl après sa morl ce droit appartenait
à la communauté. Celles qui étaient admises
devaient faire vœu de stabilité en celti.' ma-
nière : Je pri.meis sincèrement el librement, et
je vuue à t'Itunncur de la sainte et sacrée £n-
f'ince de \otre-Seigneur Jésus-Christ st<tbi-
tilé perpétuelle dans la congré(jation des
l-'illes de i Enfance, pour y vivre le reste de
vies jours conforméinciii à SCS statuts et rè-
glements, fans cl6:ure et sans aucune liaison
de vœu soirniiel, et sans aucune ajl'cctatiun
d'habit sinr/ulier. Dieu me jnssc lu ijrùce d'if
être fidèU. L'épreuve de deux années ^y
nommait l'essai, cl \<i profession la liaisoi).
153
ENF
ENF
154
afin de n'avoir rion de commun avec les au-
l'es congrégations régulières et séculières,
(y est pour cette raison aue le dix-neuvième
cliapiire ordonnait (jue les maisons de cette
congrégation de l'Enfance seraient à la ma-
nière des maisons des bons bour;;eois, et
qu'on ne bâtirait point surtout ni dortoirs,
ni réfectoires, ni cliaufToirs, et que les lieux
(Icsliiics à ces usages n'en devaient avoir ni
1.1 forme ni le nom. Le quinzième défenilait •
de recevoir des veuves. La fondalrice devait
être en cela seule privilégiée; et si quelque
/lutre veuve voulait faire quelque nouvel
établissement, on devait lui permettre seu-
lement de passer huit jours dans la maison
do six mois e-n six mois. Lu seizième exciul
toute singularité. Les maisons ne pouvaient
avoir (le chapelles extérieures, de clocher,
ni de cloche, que de la grosseur nécessaire
pour élre entendue dans toute la maison,
i.es niles ne devaient point changer le nom
de baptême ni celui de leur famille, el \,e
devaient point s'; ppeler sœurs. Conformé-
ment au (lix-septiènj ■ , (lies ne devaient
point affecter d'étoffe particulière, mais de-
vaient se servir iiidiiïéreniinent, suivant les
saisons, de celles qui sobI au-dessous de la
pure soie, simples et unies, sans passements
d'or cl (l'argent, ou de soie. Il ne devait
point non plus y avoir de couleur affeetée;
mais elles pouvaient choisir indilTéremmcnt
le noir, le gris, le blanc, le leuille-morte, ou
au're couleur. Les habits des demoiselles
suivantes et des femmes de chambre ne de-
vaient être t|ue de laine avec quelijue dilïé-
rence, soit dans la nature des étolfes, soit
dans la forme d' s habits. Le dix-huitième
prescrivait quels devaient être les ameul)lc-
menls des filles. Les chipilres dix-neuf et
vingt concernent les liquais, les carrosse-,
les chevaux el les chaises à poricuis. 11
était dit dans le vingtième chapitre' que les
laquais ne pouvaient pas être reçus s'ils
avaient servi des filles dans le uiunde ; et
que les cochers devaient être mariés. Il de-
vait y avoir beaucoup d'union entre les tilles
d'une méiue maison, et cette union devait
être réciproque entre toutes les maisons de
l'institut, comme elle est recommandée ilaus
les chapitres vingt-sept et vingt-huit. La
maison de Toulouse devait élre le centre de
l'union des iiutres, à cause qu'elle avait reçu
les prémices de l'esprit de l'institut : c'est
pourquoi elles devaient avoir une communi-
cation particulière avec elle, la consulter
dans toutes les dilûcullés considérables ((ui
poiivaicn; survenir, el suivre ses décisions
après la mon de 1 1 foudairice, qui était l'o-
racle de toute la congrégation, el qui seule
avec l'économe et nue autre fil!e nommée
par la cumuiunaulé, pouvait recevoir l'ar-
gent, non-seulement de la maison de Tou-
louse, mais encore des autres, comme il est
marqué dans le chapitre quarante-six. Les
trente-trois et irente-einq, où il éiait parlé
de la nourriture, des pénitences et mortifi-
cations des filles, ne les obligeaient ([u'à
celles que l'Eglise impose à tous les chré-
tiens. Elles ne soupaieiit p:is néanmoiiis le
vendredi ni le samedi, exrep'é celles qui vi-
sitaient les malades, qui ne pouvaient s'en
abstenir qu'avec la permission de la supé-
rieure. Leur nourriture ne pouvait être que
de viandes ordinaires, comme bœuf, veau,
mouton, pigeons et volailles, la venaison
leur étant défendue, hors les cas auxquels
les médecins la jugeraient absolument né-
cessaire ; et les filles de service devaient être
traitées conim^^ elles l'auraient été dans les
maisons particulières. Elles ne pouvaient
sorlir qu'avec une compagne. Il ne leur
était pas permis de manger dehors. Elles de-
vaient ordinairement aller les dimanches et
les fêtes à la paroisse pour assister à la
messe, au prône et aux vêpres. On ne pou-
vait dire la messe dans leur chapelle domes-
tique que dans des cas extraordinaires ;
mais madame de Mondonville s'était réservé
la liberté de la faire dire quand elle voulait.
Elles se confessaient toutis dans l'église de
la paroisse, où leur confesseur devait avoir
un confessionnal, avec la permissiim du
curé donnée par écrit ; et ce confesseur ne
pouvait être jamais qu'un prêtre séculier,
libre de tout engagement et liaison à toute
compagnie, congrégation ou communauté.
C'est ce qui est marqué dans les chapitres
trente-six, trente-huit et quaraiile et un.
Nous omettons les aulres, qui ne regardent
que les pratiques des vertus, les élcciionj
des supérieures et oHQcières, et l'économie
des maisons.
Ces constitutions trouvèrent des censeurs,
on écrivit contre, et on voulut persuader à
M. de Ciron d'en changer plusieurs articles ;
mais il ne put s'y résoudre. On y fit néan-
moins quelques changements, l'an lG8'i, par
ordre de M. l'archevêque de Toulouse; mais
ces cliangements ne lurent point considéra-
bles, on retrancha seulement quelques mois
de peu de conséquence et quelques pensées
pieuses : en sorte que ces secondes consiitu-
lions ne diiTéraient en rien des premières
dans l'essentiel: ce qui, selon les .ipparences,
ne fut pas agréable au roi, qui, peu salis-
fait de c-!S filles, ayant voulu voir ces con-
stiluiioiis tant nouvelles qu'anciennes, pour
être iiilormé de leurs coutuuies et usages, fit
défense, le 7 noveuil)re 1685, de recevoir des
filles dans cette congrégation sans nouvel
ordre, et par un arrêt du conseil d'Etat du
12 mai 168G il annula la fundaticn de celte
congrégation, cassa l'institut, et ordonna aux
filles de se retirer chez leurs parents ou ail-
leurs. Elles en appelèrent au saint-siége la
même année ; mais les poursuites qu'elles
firent furent inutiles, et ne servirent qu'à
faire donner une lettre de cachet à madame
de Mondonville leur fondatrice pour se re-
tirer à Goutances, où elle a fini ses jours.
Ainsi la congrégation de l'Eufince fut enliè-
rement supprimée. Elle s'était déjà multi-
pliée el avait des établissements à Toulouse,
à Saint-Félix, à iMontesquiou, à Pézénas, à
Carmang et à Aix en Provence.
Constitutions des Filles de l'Enfance ini'
priinccs en IG'Ji, et Mcinoires du temps.
»5r. rsicTioNNAïui: i)i;s
K.NFANT JÉSUS (Fiilks ou Sûpubs i>k i.').
Voyfz Ivcoi.rs Cniii'.TiENJiEs.
KM'AM Ji-SUS (l'iLi.KS DE 1.').
I>ci Filles de l'Enfant Jésus à Rome,
(.es Filles de l'Enfant Jésus à Homo rccon-
nnissrnl |iour fuiidalrico une sainte nilc,
nommée Anne ^loroni, qui prit n.ilssance
djnsla ville de Lucqucs. Se »o);inl i rphclinc
et s.ins biens, elle »inlà Uoiiio, où elle entra
âu service de t)ucli]U('S ilanu'S de qualité.
Elan( iijjce de quarante ans, elle voulut si'
retirer de l'emharras du monde, donl elle
connaissait la \aniié et rincon>lance par l.i
pratique qu'elle a\ail eue avec lui pendant
le temps de son ser\iie; el Dieu lui inspira
dassemlilcr quelques filles, avec li squcllcs
clleedmmenea à vivieen commun, l'an llilil,
après en avoir obtenu la permission des su-
péri( urs. U'aLord elle les cnlrelenail de ce
qu'elle avait pu amasser élanl en service ;
mais, comme c» la n'était pas sulfisant pour
les maintenir, elle leur demanda une légère
pension |)our aider à leur subsistance. Le
F. Côme berlintani, Clerc Kcgulicr de la con-
grégation de la Mère de Dieu cl curé de
Sainte-Marie ni Cawpiiclli, qui était son di-
recteur, voyant la lerveur de ces saintes
filles, en prit un soin particulier; cl , afin
d'alTcrnilr ce [.ieux tlablisseinent, non-seu-
lement il le fil approuver par le saiiil-siége,
mais il dressa des rèjiicmenis que ces filles
suivirent. Il [lersuada à la foiidulricc de se
c<>nsacr<r entièrement au service de Dieu el
du procbair. avec ces lilles, et de vingt qua-
tre qu'elles étaient pour lors, il en choisit
douze dfS plus fcrvcnies qui, ayant mis en
coiiimun tout ce qu'elles avaient, sans aucun
égard à leur intérêt parliculier, se proposè-
renldc garder inviolablemcnl la chasteté, la
pauvreté el l'obéissance. Néanmoins elles ne
s'y engagèrent par aucun vœu, se conlen-
lant de celui de persévérance jusqu'à la
mort dans la congrégation. Kllis le firent le
2 juillet d(! l'an 1073, jour consacré par l'I'^-
gli«e à lion(ir( r la visite que la sainte Vierge
rendit à sa cousine Elisabeth.
Ces filles ne doivent pas être pl;s de Iren-
le-trois, cn l'bonneur des ircuie-lrois années
que Nolrc-Scigiii ur Jésus-t^hrisl a vécu sur
la terre. .Après lri;is années de probalion,
el élanl âgées de vingt el un ans, elles font
pubiiqunnenl vo'u, comme neus 1 avons dit,
de persévérer jusqu'à la morl dans la cori-
gré;;alion, el un f rme propos de garder la
pauvreté, la eliastelé el l'obéissance. Si pour
de justes raisons elles veulent être relevées
de ce voeu de per.-évtrance, soit pour se ma-
rier ou eniierdans quibiue religion, elles
peuvent redemander ce qu'elles ont apporté
a la (ommunauté sous le litre de dot ou
d'aumône, loul y esl en commun, personne
n'ay.inl rien en propre. Leur baliillcmenl esl
de serge de couleur tannée, cn l'honneur de
Notre-Dame du monl (^armcl, el consiste eu
une robe ceinte d'une ceinture de laine.
Elles ii'onl ni guimpes, ni voil» s, ni coilTcs
OnWlKS nF.LIGHL'X
\r.i,
lorsqu'elles sont dans la maison ; mais quaiid
elles sortent, elles mettent un grand voilo
noir qui descend depuis la léle jusqu'aux ta-
lons (1). Ces sorties sont fort rares, menant
Une vie foil retirée; il n'y a que certains
jours de l'année qu'elles vont toutes ensem-
ble visiter quelques églises. Les jours de
jeûne, tous les vendredis, les dinianches el
fêles, el pendant loul le temps de carême,
elles ne parlent à aucune personne de de-
hors, non pas même à leurs parents au pre-
mier degré. Lllcs oui tous les jours une heure
d'oraison nienlalc; el, onire les prières vo-
cales et plusieurs exercices de pieté qu'elles
Ibnl en conminn, elles disent toutes les fél s
le grand office de l'Eglise. Tous les ans elles
font les exercices spirituels pendant huil
jours, el tous les mois elles ont un jour de
recueillement. Le jour qu'elles rommunirnl
elles portent le cilice pendant la matinée.
Trois l'ois la semaine elles prennent la <lisei-
[dine. Outre les jeûnes de rf'glise, i Iles jeû-
nent encore tous les vendredis, les samedis
el toutes les veilles des fêtes de la sainte
^'ierge. A certains jours elles font publique-
ment des mortifications. Elles s'occupent
I eauconp au tr.ivail manuel, comme à f.iirc
loiiles sortes d'ouvrages à l'aiguille, à dessi-
ner, à peindre, el plu>ieu'S autres, lilles ap-
prennent le plain-chant, à jouer des orgues,
du clavecin, de la basse (!e viole, 't autres
instruments de musiijue, qu'elles enseignent
aussi à d'autres filles qui demeurent chez
elles en qualité de pensionnaires, donl le
nombfi' ne doit pas excéder celui de trente.
Outre cela elles doivent recevoir graluiie-
iiient pendant huit ou dix jours les liiles qui,
voulant (aire leur première communion, leur
demandent à se retirer chez elles pour s'y
préparer cl se faire instruire de ce qu'elles
doivent savoir pour recevoir avec fruil cet
auguste sacrenieut. Elles reçoivent de la
même manière les filles qui veulent embras-
ser l'élal religieux, afin de les exercer dans
les pratiques de la vie religieuse ; cl font
faire pendant biiilou di\ jours les exercices
spiriiuels aux filles et aux femmes, veuves
ou mariées, qui, avec la permission du car-
dinal vicaire el le consinlemenl de leurs ma-
ris ou de leuis parents, se veulent relirer
chea elles. Celle communauié lui d'abord
établie dans une maison qui était à la place
M rgana, proche Sainte-Marie l'n Cainpitilli :
elle fut ensuile transférée à Sainle-l'ra\èdo
el enfin [iroclie Saint- Laurenl inpanis spci-
Vil, où elle subsiste à présent avec beaucoup
d'édification.
t>arlo. liarthulom. Piazzn i'vsevuloi}. Ko-
uwnu. pari, i, iruct. k, cup. 7; et l'hilipp.
Uunanni, Calai. Ord. rcligios.. part. ii.
t.VtE (OuuRE DE Saint JàcyL'Es un t).
§ !•■'. Dis clinnoinrs et des rhnnninrssrs d
l'ordre de Sainl-Juciiues de l' Ejicc en E
paijnc.
La qualité de chanoines ré;;uliersi que
(1) Vov.,àl.i lin du vol. u'ïl.
IS7
EPE
ErE
158
les souverains ponlifcs ont donnée anx clja-
pclains de l'ordre militaire de Sainl-Jacques
de l'Epée en Espagne, nous oblii^e de parler
ici de cet ordre. Mais comme nous ne trai-
tons p,irli(ulièrcnicnl que dos ciianoincs ré-
g;uliers, nous ne parlerons des (hevaliers
de Sainl-Jacquos de l'Epée qu'après avoir
rapporté ce qui concerne leurs chapelains,
puisqu'ils sont chanoines réguliers; et nous
joindrons aussi dans ce chapitre les reli-
gieuses du nicnic ordre, (]u'on peut ausiii re-
garder comme chanoinessos. Il y en a qui
prélendcni que RaiDire 1", roi de Galice,
a fondé l'ordre militaire de Sainl-Jacques
l'an 846, apics avoir remporté une célèbre
victoire sur hs Maures où il en demeura
soixante-dix mille sur le champ de bataille;
parce que l'on en attribua le succès au se-
cours de ce saint apôtre, (|u'on avait vu
rombaltre dans la mêlée, tenant à la main un
étendard hlanc sur lequel II y avail une épéc
rouge en l'orme de croix ; ce qui fit que ce
prince institua, en faveur des g;entilshommes
qui avaient conib;itlu en celle action, une
confrérie sous le tilrc de Saint-Jacques, à la-
quelle il donna pour armes une épée de
gueules en champ d'or avec celte devise :
Itubet eiisis santjuine Aiahum; et ils ajoutent
que dans la suite (Clle confrérie fut érigée
en ordre militaire par les iouvcrains ponti-
fes. Mais pour détruire celle opinion il ne
faut que faire atlenliou à ces armes, qu'on
donne à cet ordre dés le commencement de
son institution, ce qui en marque évidem-
ment la fausseté, puisque les armoiries n'ont
été en usage qu'après le dix ou le onzième
siÈcle.
Ce ne fut que l'an 1170 ([ue cet ordre com-
mença, sous le rè^nc de Ferdinand II, roi de
Léon et de Galice. Et ce qui y donna occa-
sion furent les courses des mêmes Maures,
qui troublaient la dévotion des pèlerins qui
allaient à Composlelle visiter le sépulcre de
saint Jacques. Les chanoines de Sainl-Eloi,
qui avaient un monastère au royaume de
(îalice, bâlircntdes hôpitaux de leurs reve-
nus, qui élaienl fort considérables, sur le
chemin qu'on appelle communément Voie
Française, pour y loger les pèlerins. Le pre-
mier fut celui de Saint-Marc l'évangéliste ,
hors les murs de la ville de Léon; el le se-
cond au détroit deCastille appelé De las Tien-
Uas. Peu de lcm|)s après, treize gentilshom-
mes, à leur imitation, prenant le même apô-
tre pour leur protecteur, s'obligèrent |»ar
vœu de garder el assurer les chemins contre
les incursions des iniidèles. Ils communi-
quèrent leur dessein à ces chanoines de
Sainl-Eloi, leur proposant de ne faire qu'un
corps entre eux, de mettre en commun le re-
venu du monastère el ce qu'ils pouvaient
.•ivoir cl pourraient acquérir dans la suite
par le moyen de ceux «jui se joindraient à
eux. Comme ces chevaiers posbédaienl déjà
plus de vingt châteaux, les chanoines lurent
plus faciles à accorder celte union, cl devin-
rent par ce moyen dans la suite depondanls
de ces chevaliers, dont ils ne sont que lei
t'hjjiclains.
Celle union se fil l'an 1170, et l'accord fut
fait entre don Pierre Ferdinand de Fuenles
Encalada , de la part des cheva iers ; et, d.-
la part des chanoines, entre don Ferdinand,
qui fut ensuite évêqne, comme il paraît par
son épitaphp qui est dans l'église du couvent
d'Uclès : Obiit Ferdinandus rpisco/ms B. Ma-
riœ prinms prior ordinis mililiœ S. Jucobi,
cru CCXI : ce qui répond à l'année 1173,
deux ans avant la confirmation de l'ordre,
qui ne fut accurdéc que l'an 1175, auquel
iimps don André était prieur. Le cardinal
Hyacinthe Bubo, qui a été pape sous le nom
de (^éloslin 111, et qui éiait pour lors légat en
Espagne du pape Alexandre III pour termi-
ner les dilTérends qui étaient entre les rois do
Léon et de Caslille, allant au diocèse d'Osma,
reçut le maîtr.- don Pierre Ferdinand avec
quelques-uns de ce* chevaliers qui le furent
visiter ; et il ajiprouva ce nouvel ordre. Tou-
tes choses y lurent ré,'lées par son conseil,
cl l'an 1175 le même Pierre Ferdinand alla
trouver l(! pape Alexandre III à Home, ac-
compagné de quelques chevaliers dont le
nombre élail augmenté, et oblint la confir-
mation de cet ordre, conformément à ce que
le cardinal Hyacinthe avail ordonnépar une
bulle qui fut expédiée la même aimée. Elle
enjoini, enlreaulres choses, aux clercs de cet
ordre de vivre en communauté sous l'obéis-
sance des supérieurs, d'administrer les sa-
crements aux chevaliers , qui leur doivent
fournir tout ce ((ui esl nécessaire pour leur
entrelien ; et elle contient en substance loul
ce que les uns el les autres doivent faire.
jMais le cardinal Albert, du litre de Saint-Lau-
renlm Lucina , de l'ordre de Saint-Benoît,
el qui fut aussi pape dans la suite sous le
nom de Grégoire VllI, leur écrivit, par or-
dre d'Alexandre l!l, une règle plus ample,
qui contient soixante et onze chapitres, qu'il
approuva el qui fut confirmée [lar Jules II
l'an 1507. Il esl vrai que par la bulle d'A-
lexandie, les chanoines de Sainl-Jac(iues ne
sont appelés que clercs ; mais par deux au-
tres bulles des papes Adrien X[ de l'an 1522,
et de Clément VII de l'an 1531 , il esl parlé
d'eux sous le nom do chanoines réguliers,
soumis à la règle de Saint-Augustin.
Une des premières dignités qui est tou-
jours occupée par un de ces chanoines est
celle de prieur, auquel était confiée li con-
duite de tout l'ordre après la m:jrl du grand
maître, avant que la grande maîtrise eût été
réunie à la couronne d'Espagne ; el il avail
le soin de convoquer ceux (jui devaient pro-
céder à une nouvelle élection. Cette dignité,
qui lut d'abord unique, a éié dépuis divisée
en deux, pour les raisons que nous dirons
au $ suivant ; el il y a |irésentement deux
prieurs, savoir, le prieur d'Uclès, et le prieui
du Sainl-M.irc de Léon, qui, par concession
des souverains ponlifes, porleiil tous deux la
milre et les autres ornemenls pontificaux,
Le prieur d'Uciès a néanmoins retenu quel-
ques prérogatives, comme d'enseigner la rè-
gle à ceux qui veulent être reçus dans l'or-
dre, qui sonl obligés de faire leur année de
probalion dans ce couvent, où il y a des ica-
159
DICTIOÎSNAIUE DES OUimES IIKLIGIEUX.
I«0
les niïccicos pour ce sujet, et c'est aussi dans
ce lieu qu'ils doivent faire profession.
Ces chanoines sont ^ï'ius de noir, comme
les ecclésiasliqucs, el niellent sur leur sou-
tane un surplis sans manclics , appelé giral-
«lèle, elsur le rôle gauche de leur manteau
ime croix rouge en forme d'épée qui est celle
de l'ordre (I). Au chœur ils mettent par des-
^us leur surplis ou giraldt'te . une chape et
un camiil noir avec la croix de l'ordre sur
1 1 poilrino 2) ; et dans le collège d.- S ila-
itiaiique ils -c servent de la chape cl caniail
de violet lirun. Les prieurs portent les sur-
plis avec des manches étroites, c'est-à-dire
dis rocliets, comme les prélats. 11 y a eu
parmi eux plusieurs personnes illustres. < l
qui sont sorties de cet ordre pour remplir des
digniiés e( elésiasliques : comme Julien Ha-
iiiiiez, le docteur Uuraud el Nicolas de Car-
riazo, qui onl été évéques de Cadix ; Martin
Pc irez lie Aïala, archevêque de Valence, Ter-
(liniiid de Azevedo , évèque d Os lia el en-
suite a relie véque de Bruges, Jérôme de Leyna,
archevêque de Montréal en Sicile, Barthélémy
de l'erez, évéquc de Tunis , et plusieurs au-
tres. (Juelques-uns se sonl aussi distingués
par leur sainlclé, comme Alphonse, prieur
d'Uclès, donl .Martin Peirez , archevêque do
Valence, a donné la Vie ; d'auires par leurs
écrits, comme Benoît , Arias Monlanus , du
monastère de ?aint-Mirc de Léon el prieur
de Saint-Jacques de Séville, mort en 1598,
qui a travaillé à la Bible polyglotte d'Anvers.
llpossédiiil parfaileiiient treize langues, et
entre autres l'hébraïque, la chaldécnne, la
grecque el la syriaque. 11 fut chéri du roi
Ihilippell, et a été regardé comme un des
plus graiiils hommes que l'iispj^ne ail pro-
tiuiis. Le Mai re Isla, Didacc de la Moïc ou
Mola. J<an llamircz. oui été aussi écri\ains
de cet ordre, qui a produit plusieurs autres
p. rsouues illusl.'e> par leur piété et par leur
doctrine.
Autrefois le prieur de Saint-Jacques de
t^éville uélail poin( soumis aux supérieurs
de l'ordre, parce que ce cojxenl fut fondé
l'an VM) par don Laurent Suare/ de Figue-
r.a, grand maitre de l'ordre, qui oblinl du
pape des bulles pour exempter ce couvent
de toute juridiction de l'ordre : mais l'an
iVi'.) don Henri d'Aragon , neuvième grand
mailrc el son successeur , Us lit révoquer
par le pape Martin V, qui soumit ce couvent
au grand maitre de l'ordre cl au prieur d'U-
clès ; el don Alphonse de Cardeu.is l'iucor-
pnra à l'ordre dans un chapHre izénér.il, l'an
IWO. Les prieurs d'Uclès étaient perpe ucK;
mais don l'erdiuand de Sanlojo, ayant éié
élu eu r»2<j, renonça volontairement à celle
digmié, comme il parait p.ir la bulle d'A-
lexandre NI de l'an LiOl, qui ordonna qu'a
l'avenir i's seraient élus tous les trois ans.
Alinde lever lesilispules qui pourraient sur-
venir au sujet de l'elecliou de ce prieur, les
religieux lireul un concordil en 1()'»8, par le-
(|uel ils consentirent qu'alteruaiivemenl on
en prit un de la province de lu Manche ou
(I) Yotj., ii la fin ilii vol., ii" '2S.
Ci) Vvij.,» la liu du vul., Il" 2'J.
Mamhn, el un de celiede la liiliera elCnmpo
(le Moniicl, el que de quarante religieux dont
il y en avait huit dans lecoUégede Salaman-
que, il y en aurait la moitié d'une provinco
el la moitié de l'autre, eu sorte néanmoins
qu'il y en aurait toujours quatre de Campo
de MontirI, ce qui fui approuvé par le roi
rhilip|ielVelconlirmé par le pape Urbain VIII.
Ceux du monastère de Saint-Marc de Léon
onl consenti aussi par un concordat que
leurs prieurs seraient allernalivemenl des
provinces de Léon et d'Kslramadure.
l'our les peines que les chanoines onl d'ad-
niiiiislrcr les sacrements aux chevaliers ,
ceux-ci sonl obligés de leur payer les dîmes
de tous leurs troupeaux el animaux, comme
veaux, agneaux, pouleis, i ochons, poulains,
vaches, etc. ; et, comme il y a beaucoiip do
chevaliers an service du roi, il y a toujoi rs
qualre chanoims qui suivent la cour, pour
conlesser el administrer les sacrements aux
chevaliers qui s'y trouvent. Le chevalier ([ui
est éloigné, et qui ne peut se confesser à l'un
de ces chanoines, doit prendre la ])ermissiou
du prieur de sa province pour aller à un
autre confesseur lel que bon lui semblera, le-
quel a pouvoir de l'absoudre de tous pèches,
excepté celui de n'avoir pas payé les dîmes
à l'ordre, qui est un cas léservé parmi les
chevaliers. Les chanoines onl des couvents
à Tolède, à Séville, à Cuença, à Barcelone,
à Grenade, à Salamanque, el en plusieurs
autres endroits de la domination d'Espagne.
Pour élrc reçus dans l'ordre, il faul qu'ils
fassent preuve de qualre races tant du côté
paternel que du c6lé maternel, non jias do
noblesse, qui n'esl que pour les chevaliers,
mais seulement ccni ue Icu'S ancêtres n'ont
point été fadeurs, commissionnaires , cour-
tiers, changeurs, ni exercé aucun arl mé-
canique ou vil, et que les mêmes ancêtres
n'ont point êié juifs, hérétiques, et comme
tels punis par le tribunal de l'inquisilion. 11
y a aussi qualre autres couvents de ces cha-
noines en Portugal, dont un à Lisbonne, qui
est le chef de cet ordre en ce royaume. Le
roi Jean 111 voulut le réunir à la congiéga-
lion de Sainte-Croix de Conimbre avec un
autre de religieuses chevalôres ou cliauoi-
nesses du mêm^ ordre, qui est aussi à Lis-
bonne ; mais la mort de ce prince, qui ar-
riva peu de temps après qu'il eul pris celle
résolution, l'empôeha de l'exécuter.
L'on prétend que le premier monastère ilo
ces chevalières fut fondé à Salamanque, l'an
l.'Il-2, par le chevalier Pelay l'erez et Marie
Mendez, sa femme. Le principal exercice de
ces chanoiiiesses chevalières e>l de loger l'I
de pourvoir à toutes les iiècessilés des pèle-
rins ([iii vont visiter les reli(|ues de saint
Jacques. Mlles sonl, aussi bien i|uc les i lia-
noiiies, habillées de noir, tant (elles ijui sont
destinées pour le clurur que celles (ju'on ap-
pelle converses ou sœurs lai(|ues, les premiè-
res portant une croix rouge en forme d'é-
pée (.'(i semblable à celles des chevaliers, cl
les converses la portant avec quelque dillc-
(3) Yoy., ï la lin du vuJ., ii"' ÔO cl ô[.
161
EPE
EPE
ira
reiice. Ellrs ont sept monastères en Espapne,
qui sont liï Saiiil-Espril de Salamanque ,
Sainle-Foi de Tolède, Notre-Dame de Jun-
queras à Barcelone, Sainte-Croix de Valla-
dolid, Sainle-Eulalie à Mérida, Notre-Dame
de Grenade, et un à Madrid, fondé \cts le mi-
lieu du dernier siècle. Celles de Barcelone ne
sont pas religieuses; mais les autres font les
vœux solennels de pauvreté, de chasteté et
d'obéissance , et dans ce monastère elles
gardent différetnincut la clôture, car à Val-
ludolid, à Mérida et à Grenade, elles obser-
vent une clôture très-exacte, ne permettant
à (jui que ce soit d'entrer dans leurs monas-
tères, et elles n'en sortent point pareille-
ment. A Sainte-Foi de Tolède elles reçoivent
les visites des femmes dans une salle, et n'y
admettent point d'hommes. Dans celui de Sa-
lamanque les hommes et les femmes entrent
indifféremment dans le monastère avec la
permission de la commandatrice. Les reli-
gieuses mêmes sortent à certains jours dans
leur église, et vont jusque sur le porche;
mais elles ne peuvent aller plus avant sans
la permission du conseil des ordres. Celles
de Madrid, ayant été fondées sur le modèle
de celles de Salamanque, ont voulu jouir de
ce même privilège; à quoi le conseil des or-
dres s'est opposé, prétendant qu'elles n'en
doivent pas jouir sur ce qu'elles n'avaient
été fondées que depuis le concile de Trente,
qui ordonna la clôture à toutes les religieu-
ses, ce qui a donné lieu à plusieurs écrits de
part et d'autre en Espagne. Miis à l'égard de
celles de Barcelone . comme elles ne sont
point r<'ligieuses, elles peuvent se marier et
ne sont point tenues à une clôture si exacte.
Elles font seulement vœu, comme les cheva-
liers, de pauvreté, d'obéissance et de chas-
teté conjugale. Kilos sont gouvernées par une
prieure ou coinmanJatrice , et ne diffèrent
un rien des véritables religieuses , soit pour
l'habillement, soit pour les exercices du
t'h iMir et de communauté; et étant mariées
ou veuves elles" [jeuvent toujours porter la
croix (le l'ordre. Celles du monastère de
SanctoK en Portugal sont de même que celles
de Barcelone, et peuvent aussi se marier.
Les religieuses des autres monastères ne
faisaient aussi que des vœux pareils à ceux
que font celles de Barcelone et de Sanctos,
ce qui a duré jusqu'en l'an 1480, que, sous
le grand maître don Alphonse de Cardenas,
le chapitre général de l'ordre ordonna qu'à
l'avenir elles ne pourraient se marier et se-
raient obligés de faire des vœux solennels.
Les anciens statuts obligeaient les femmes et
les filles des commandeurs de se retirer dans
ees monastères pendant qu'ils étaient à la
guerre, et, s'ils y mouraient, le grand maître
fixait le temps pour qu'elles pussent se dé-
terminer ou à prendre l'habit de l'ordre ou
à sortir des monastères; mais cette pratique
a été abolie, à cause que, le nombre des che-
valiers augmentant , plusieurs monastères
n'auraient pas suffi pour recevoir les fem-
mes, les veuves et les filles des chevaliers.
Les religieuses ne peuvent être reçues sans
le consentement de toute la <o i niunaulé, et
les supérieures endonnent avis au conseildos
ordres pour avoir aussi son consentement,
et afin qu'il commette quelqu'un pour faire
les informations nécessaires , qui sont les
mêmes que l'on fait à la réreptiDn des che-
valiers, non pas louchant la noblesse, mais
seulement touchant la religion des pères et
mères, et des aïeux , qui ne doivent point
être soupçonnés d'hérésie, le président nom-
me un clianuinc de l'ordre pour faire les in-
forcnations, qui sont ensuite présentées au
conseil, qui nonne son conscnlemenl si elles
sont approuvées. Les monastères élisent 1 s
supérieurs, qui sont aussi confirmées parle
conseil des or^lres, et le roi leur accorde des
lettres qui ordonnent aux autres religieuses
de lui obéir. Les religieuses de Salamanque
prétendent faire remonter l'antiquité de cet
ordre jusqu'en l'an 1030, par le moyen d'un
privilège qu'elles conservent dans leur mo-
nastère, qui est daté de cette année; mais
nous en avons fait connaître la fausseté eu
parlant des chevaliers du Saint-lîsprit de
Montpellier, qui ont voulu aussi se prévaloir
de ce privilège.
Voyez Francisco Garo de Torres, nis(. de
lo.i Ordines militares de Santiago Culatravay
Alcanlara. Francisco de Uadez , Chronir. de
ias Ordenes y Cavall. de Santiaga. Diego de l.i
Mola, de (a Orden. delà Cavall. de S. Tiayo.
Andr. Mendo, de Ordinibus mitituribus Uis-
quis. Canonic. Joann. Mariana , de Rebm
Hispanicix lib. xi , cap. 13 et 14. Turque!,
Hist. d'Espagne, tom. I, liv. x. Fa vin, llist.
de Navarre, liv. iv. Tambur. de Jur. Abbat.
dsp. 2k, qutest. k. Philijip. Bonauni , Caia-
loy. omn. Ord. riliij. part, i et ii. L'abbé
Giustiniani, Mennénius, Uermant et Schoo-
nelieck, dans leurs Uistoires des Ordres mi-
lilaires.
§ 2. Des chevaliers de Saint -Jacquet de
i Epée en Espagne,
Nous avons suffisamment parlé de l'ori-
gine des chevaliers de Saint-Jacques de l'E-
pée dans le paragraphe précédent, il nous
reste seulement à parler des principaux évé-
nements arrivés dans cet orure. Ces cheva-
liers, s'étant joints d'abord aux chanoines de
Sainl-Eloi , comme nous avons dit, embras-
sèrent la règle de Saiul-Augustiii et firent
les vœux ordinaires de religion. Leur habit
consistait en une robe blanche et un chape-
ron de même couleur ; et, pour marque de
leur ordre, ils portaient sur la poitrine une
épéeruuge.et ils avaient la têle rasée en
forme de couronne (Ij comme les chanoines,
et vivaient en commun.
Cet ordre commençant à se multiplier ,
leur premier grand maître, don Ferdinand
de Fuenles Encalada, entreprit le voyage de
Rome pour en avoir l'approbation du saint-
siége. Alexandre 111, en le confiriiianl par
sa bulle de l'an 1175, dont nous avons fait
metUiun, fil quebiuas règlements qui concer-
(II) loi/., à la lin du vol., ii* 32.
IGÔ
niCTÎONNMRF. DKS ORDRES REI.IGIECX.
164
iinipnl ces clievaliers. cl cnirc autres il lour
|i«'rinil (li> SP marier. Il rép'la 1rs clii^iiités de
cel ordre, dont la jjiiis considérable, a|irès
celle lie graïul maître, est celle des lieize,
qui ont le pas devanl tous les auires com-
inanJcurs. Avant (jue la grande inailri)-e eût
v\c réunie à la couronne . ils l'Usai' iii le
grand iiiailre. le pouv.iient dé| c-er s'il el.i.l
Iciinbé en quehiue fauie, et en élite iiit .lUire.
Us donn.iicnl l ur> conseils dans toutes les
alTains. terminaient les dilTéremts qui pou-
vaient ariiver entre le };rand maître et les
chiïvaliers: mais leur pouvoir est bien dinii-
iiiié prcseiilement, ()uc le conseil dos ordres,
doi:t nous |)arlcr(ins ci-après, csl juge de lu us
les diiïérrnds qui arri^ent dans Tordre. La
seciMjile dignic est celle de jirieur, qui est
aiinoxcc aux chanoines ; et la troisième celle
de grand commandeur.
La première place (|u'ils conquirent sur
les Maures fut Caci rès dans l'Kstramadure.
Ils la prirent l'an 1171 , et le roi don Ferdi-
nand la donna à ces chevaliers, (lui aidèrent
ce prince à coniiuérir liadajoz , lîue\a, Lu-
chena el Monle-.Major, dont il leur lit aussi
présent. iM.iis Ferdinand étant entré en
guerre avec son n( veu Alphonse I\ , roi de
Casiille, surnomnié le Nohle , sur lequel il
avait usur; 0 plusieurs places pendant la mi-
noriié de ce prince, et soupçonnant les i he-
valiers de Saint-Jacques de favoriser son ne-
veu, il les fil sortir de ses Etat«, cl reprit les
biens qu'il leur avait donnés. Ces chevaliers
se réfu;;ièrenl en (>asiille, où le roi Alphonse
leur donna, l'an 1 I7i, le château dTclès, au-
près duq'iel i's hâlireiil un couvent, qu'ils
élahlir( nt p'iir chef de leir ordre, et l'année
suivante 1175 le grand maître alla à Uume,
pour oblenir du pape Alexandre iil la
conrn uialiun de son ordre, c<)nime nous
avons dit.
L'an 117G, ce grand maître et les cheva-
liers prirent les urni s, pou' le service ilu
même .Mphonse, cnnire le roi de Navarre,
Fanchc \'l, dit le Sage, <)ui, profilant pareil-
lement de la minorité de ce pi iiice, i\u\ était
aussi son neveu, prit des places du royaume
de Castille, (|n'A'phonse recouvra par le se-
cours des ciievaliers de Sainl-Jac(ines. La
même année, les Maures ciaiit entrés sur les
terres de la dépendance d'Uclès (jui apparte-
naient aux chevaliers, ils y firent de grands
ravages; mais il» ne i)urenl s'emparer du
château d L'clés, ni de celui d'.VIliiarilla, qtu-
les chevaliers défendirent vigoureusement.
Le roi de (bastille, ayant su le dégât (|ue les
iulidèles avaient fait sur les terres des che-
va i(!rs, mil des troupes sur pied, à la prière
du grand iiiailie. Il lit vetiir aussi les cheva-
liers du Temple el de CaTitrava, el niil le
.'-iége devant (^uei'.ça , donl il s'cmpar.i, et
donna aux chevaliers de Saint-Jacques une
maison dans cette ville avec de gros reve-
nus. Ce prince, rontinuanl la guerre contre
les Maures, prit sur eux les cliàieaux d'A-
larcon et qucli|Ucs auires, cl, pour récom-
penser ces (hev.aliers du secoais qu'ils lut
avaient dcmné, il leur (il don encore de quel-
ques héritages a Alarcoji.
Le grand maître Pierre Ferdinand de T ticn-
tcs , après avoir gouverné l'ordre pendant
treize ans , mourut Tan 118'». Il eut pour
successeur Ferdinand Diaz, et dès lors il y
eut schisme dans Tordre, parce que les che-
valiers qui éiaii'iit retournés dans le royaume
de Léon, el qui étaie:it rcnirés dans Ts bon-
nes grâces de Ferdinand, élurent, par les or-
dres de ce prince don Sanche Fi mandez, et
ceux de Castille, par ordre du roi Alphonse,
don Ferdinand l)iaz ; et, comme cc^ chcv.i-
liers av.iient déjà acquis beaucoup de biens
dans ces deux royaumes, que le couvent >'e
Saiiit-.Marc éiail dans celui de Léon , cl le
couvent d'Uclès dans ci'lui de ("aslile.ces
deux princes prétendirent avoir ( hacun dans
leur royaume le chef de l'ordre. Sous le gou-
vernement du grand maître Ferdinand Uiaz
en Castille, qui était le légitime grand maî-
tre, les chevaliers de Sainl-Jacques cou(|ui-
rent sur les Maures plusieurs places, el ceui
de Léon Gr>'nt aussi la guerre ,à ces infidè es
dans Tlislramadure. Mais Tan 118G, le grand
maître de Castille ayant i énoncé à celte di-
gnité, celui de Léon fut reconnu par les che-
valiers de Castille. La même année le roi
Alphonse donna à Tordr.î le monastère de
Sainte-Fuphérnie de Cocollos dans la vieille
Castille , i)our y meltro des religieuses du
même ordre, i\m furent transférées dans la
suite à Sain'e-Foi de Tolède.
Ce fui du temps de ce grand maître don
Sanche Fernandez , que se donna la bataille
d'Alarcos , Tan 1 193 , où la victoire s'etant
déclarée piur les infidèles, il y cul un grand
nomlire de chrétiens qui y périrent, parmi
lesquels II y avait plusieurs chevaliers des
trois ordres de Saint-Jacques , de l^alatrava
el d'Alcantara. Ce grand maître y fut blesse,
et mourut peu de jours a[)rcs. donzalve Ko-
driguez lui succéda la même année. A peine
ful-il élu, qu'Alphonse, roi de L-.'ou, déclara
la guerre au roi de Castille A'i)honse l\, et
se ligua avec le roi de Cordoue, qui lui en-
voya un grand no^ibre de .Maures, avec 'es-
quels il entra sur les terres du roi de Castille.
Il avait aussi avec lui plusieurs dievaliers
de Saint-Jacques, de ses royaumes de Léon
et de Galice, et il les obligea'd'elire un grand
maître, afin qu'ils ne fu>sent pas soumis à
celui de Castille : ainsi l'on vil encore deux
grands maîtres dans Tordre. Mais un autre
roi maure des .\lmoades, voyant que le roi
de Castille était occupé à la guerre conlru
le î(ii de Ia^ou, vint du lôté île la Manche el
ravagea les terres des enviroiis de Tolède,
de Madrid , d'Alcala , d'Uclès , d'Huète el do
Cuen^-a, jusqu'à Alcarai, et ennnena captifs
un grand nombre de personnes avec un ricli(>
butin. Les deux rois de Léon et de (bastille»
tirent ensuiie la paix, à condilion que celui
de Léon épouserait la fille du roi de Castille;
cl le roi de Léon voyant (]iie quelques che-
v.iliers de Saint-J.ici|ues de ses sujet", avaient
suivi le paiti du roi île ('asiille, s'en)paro
d'une p.iiiie des b ctis (!(• Tordre.
i.eL:r;inil maire (îonzalvcHodriguez, étant
mor^l T.in \-l.i'.\ , (ion/alve Ordonnez, <ioi
avait ele élu par les che>;ilicrs de Léon, fut
165
EPE
EPE
10»
reconnu pnr ceux de Casiille, et p.ir ce
moyen le schisme cessa dans l'ordre. Sucro
Rodriguez, sixième grand maître, voyant les
rois de Léon et de Castille en paix , porta ses
armes contre les Maures ; il entra sur leurs
terres du côté de Campo-de-MoulfuI, et prit
sur eux quelques places, entre auires le châ-
teau de Castil-Segura et celui de Villa-Nneva.
Sous le gouvernement de Ferdinand Gun-
zalve de Maragnon, huitième grand niaîlre ,
le roi de Castille ayant guerre avec celui de
Navarre l'an riOO, les cliev.ilit-rs de Sainl-
Jacques servirent utiiemeiit le roi de Cas.ille,
et le loi d'Aragon étant eniré sur les terres
des Maures par le royaume de Valence, le
grand maître sortit d'Utlès avec les cheva-
liers et les attaqua de l'autre côté. Il prit sur
eux les châteaux de Javaloyas, Villa-Queda
et Soutaner. Ayant joint ensuite le roi d'A-
ragon, ils firent ensemble le siège de Mont.i-
luan, qui fui pris d'assaut et dont ce rui lit
don à l'ordre. On y fonda la grande co:ii-
maiiderie d'Aragon, dont l'ordre a toujours
joui jnsqu'à présent.
l.e graml maître don Pierre Arias, qui
succéda à ferdinand Gonzalve de M.iragnon,
lit aussi la guerre aux Maures, sur lesquels
il lit leaucoup de prisonniers et emporta de
riches dépouilles. Ces mêmes chevaliers fi-
rent j araître encr.re leur courage l'an 1212,
liaii!, 1,1 l'umeuse bataille a])pelée de Meura-
dal ou des Naves de Tolnsa, où les rois de
i;aslille, de Navarre, d'Aragon et plusieurs
prinres «le France, de Provence et d'Italie,
i|(ii étaient joints ensemble, remportèrent
la victoire sur ces infidèles, qui y perdirent
plus do 15') mille hommes d'infanterie et 30
mille chevaux. Le grand maître don Pierre
Arias reçut quelques blessures dans ce com-
bat, doni il mourut. Son successeur, don
Pierre Gonzalve d'Aragon, eut le même sort
au siège d'Alcaiez. Après lui don Garcias
tionzalve de Candaiiio fut élu devant la
même place pour grand maître, l'an 1213, et
peu de temps après la ville fut prise.
Après cette conquèle, le roi de Castille,
ayaal encore lait ligue avec celui d'Arjgou
pour combattre contre les Maures, les che-
valiers de Sain!-Jaci|ucs lurent obligés de
soutenir les intérêts de leur pnnce en lui
donnant du secours, et le servirent utilement
dans celte guerre. Mais ce prince étant mort
l'année suivante, 1214, et Ferdinand 111, sur-
nommé le Saint, et qui en efl'et a été mis au
catalogue des saints l'an 16GI, ayant hérité
du royaume de Castille, par la renonciation
que la reine Berengère sa mère, femme d'Al-
phonse, roi de Léon, en avait faite, le même
Alphonse déclara la guerre à la Castille, pré-
tendant avoir la tutelle ds son fils Ferdi-
nand et le gouvcrncmenl du royaume. I^es
chevaliers de Léon suivirent son parti, et ne
voulurent point reconnaître le grand maître
de Castille; ils élurent même un grand
maître dans le royaume de Léon, qui fut don
Mariiii Pélaez, ce qui causa un lurt cunsi I, -
ruble à l'ordre pendant les trois ans que dura
le schisme. Les chevaliers, bien loin de faire
la siuerre aux Maures, en vinrent souvent
aux mains les uns contre les autres. Mais le
roi (le Léon lit cesser le schisme, ordonnant
à Martin Pélaez de renoncer à la grande
m iîtrise, et aux chevaliers de reconnaître le
grand maître de Castille.
Alphonse, roi de Léon, étant mort en 1230
et ayant laissé ses royaumes de Léon et de
Galice à ses deux filles les infantes Sanche
et iJonce, au préjudice do son fils, saint Fer-
dinand, roi de Castille, ce prince voulut sou-
leiiir ses droits, et vint avec une puissante
armée pour prendre pessessiondt; ces royau-
mes. Les grands se partagèrent, les uns pre-
nant le parti du roi de Castille, que la reine
Uérengère sa mère, veuve du roi de Léon, fa-
vorisait, et les autres, celui des infantes, et
du nombre de ceux-ci furent les chevaliers
de Saint-Jacques avec leur grand maître. Lu
roi de Castille s'accorda avec les infantes
ses sœurs, elles renoncèrent aux prétentions
qu'elles pouvaient avoir sur les royaumes
de Léon et de Galice, et consentirent que
saint Ferdinand leur frère prît possession
de toutes les places de ces deux royaumes,
à la réserve du château de Castroras, que ce
prince leur donna leur vie durant, avec
treille mille maravéïlis d'or tous les ans, jus-
qu'à ce (ju'elles fussent mariées ou religieu-
ses. Ce château appartenait aux chevaliers
de Sainl-Jac(iues. Saint Ferdinand l'avait
donné lui-même auparavant au cardinal Hia-
cynihe pour l'Eglise romaine, et ce cardinal
l'avait donné a l'ordre de Saint-Jacques eu
fief : c'est pourquoi le pape Grégoire IX
ayant su que le grand maître avait consenti
que te château fût donné aux infantes, il
l'exco/nmunia pour avoir consenti à l'alié-
nation d'un bien «lui appartenait à l'Eglise,
et il ne lui donna l'absolution iju'après avoir
déclaré que les infantes n'avaient ni la pro-
priété, ni l'usufruit de ce château, ni de ses
revenus, mais qu'elles y pouvaient seule-
ment demeurer, l'e grand maître fit encnro
la guerre aux Maures; et il y eut de son
temps de grands dilTérends entre les cheva-
liers et les chanoines de cet ordre, qui fu-
rent terminés par les évêqucs de lîurgos et
de Placencia, commissaires du pape, et le
grand maitre renonça à cette dignité l'an
122'^. ^-'es successeurs tirent aussi de temps
en temps de nouvelles conquêtes, cl rcmpoi-
tèrenl des victoires sur les infiièles, n'y
ayanl quelquefois que les chevaliers seuls
qui les comljatlissent, et d'autres Ibis étant
joints aux troupes des rois de Castille,
comme il arriva dans la bataille de Bellama-
riii, l'un 1340, sous le roi Alphonse XI, où
il y eut plus de deux cent mille de ces infi-
dèles qui y périrent. On y lit un si grand
nombre de prisonniers, cl le butin y fut si
gr.-.nd, quu le prix de l'or en baissa d'une
sixième partie. Don Alphonse Mendez de
(jusman était pour lors grand maître, cl,
étant mort en 13i2, le roi Alphonse lit élire
en sa jd .ce don Frédéric, l'un de ses enfants
naturels, fïère du coinle de Tristemare, qui
succéda à la couronne de Castille après la
murt de Pierre lo Cruel. Comme ce nouveau
grand maitre n'avait que dix ans et élail bà-
1C7
l.irtl, on ohiiiit une ilisponso du pnpc, ol For-
ilinanil Koilri(;uoz ilp \ illalohos. {»ran<l cmn-
inandeur ilc Léon, gouverna l'ordre pondant
sa minorilé. Alphonse, roi de l>a>.lillf, clanl
mon l'an 1350, don Pierre, son fiU, auquel
on donna avec jusllce le nom de Cruel, mou-
la sur le trAne, et une de ses premières ac-
tions de cruauté fut de faire trancher l;i lèic
à F.léonore de (iusman. mère du grand
m.ittre. Ce roi avait épousé Itl.inche de Bour-
bon, princesse qui avait autant d'esprit que
de vertu et de beaulé, et qui n'était alors
que dans la qu.ilorzième année de son âge.
Il la traita de la manière du monde la plus
cruelle; trois jours après son mariage il II
quitta, la relégua à Valladolid, cl l'ayant
longtemps retenue en prison, la fit enfin em-
poisonner à Medina-Sidonia, l'an 1.3lil. Toute
l'aulorilé du royaume était ropendaiil entre
les mains des oncles de .Marie de Palilla,
maitress.e de ce prince; ce que les grands
du royaume ne pouvant supporter, ils se li-
guèrent contre lui, et le gr.ind maître se
joignit à eux. C'est pour<|uoi le roi en fit
élire un autre, qui fut don Jean Garcias de
Villagera, frère de sa maîtresse, ce qui cau-
sa un nouveau schisme dans l'ordre. Mais
les choses se pacifièrent dans la suite, et le
grand maître Frédéric servit le mi son frère
dans la guerre qu'il eut a\ec le loi d'.Vragon
l'an i;jo7; néanmoins, sur un f.iux rapport
que Ton lit à ce prince que le grand mjître
avait agi contre ses intérêts, il le fit venir
l'année 1.3a8. Frédéric, se liant trop à la
bonne foi de son frère, et n'ay.int pas voulu
croire les avis qu'on lui donnait, que l'on
ne le faisait venir que | our le faire mourir,
vint trouver le roi à Séville, et ce prince le
fit assassiner en sa présence par ses arbalé-
triers. Ils l'assommèrent à coups de massue,
et le roi, voyant qu'il reypirait encore, donna
son poignard pour l'achever.
Frédéric étant mort n'ayant encore que
vingt-six ans, après avoir été grand maitr.;
pendant seize ans, l'on vit encore deux
grands maîtres dans l'ordre de Saint-Jacques,
l'un ayant été élu par les chevaliers qui te-
naient le p^irti du roi de Caslille, et l'autre
par ceux qui s'étaient joints au comte de
l'r.TiisInninre, frèriMio Frèilèrii-, qui voulait se
nirtire la couronne de (bastille sur la tête.
La grande miiîirisc fut aussi contestée en
138() entre don Pierre Ituys de Sandoval, et
Kuys lionzalve Mexia, qui avaient été luus
deux élus. Mais la division cessa peu de
temps après par la mort de Uuys de Sandu-
val.
Le gouvernement de l'infant d',\ragon don
Henry, trente-sixième g^and m.iitre, ne l'ut
pas tranquille. Il épousa l'iiifanle Catherine,
sœur du roi de Casiille Jean li, a laquelle ce
prince donna en dot le duché de Villena;
mais le grand maiire et sa femme en ayant
voulu prendre posses>ion, ils y trouvèrent
des oppositions de la part du roi, ce <|ui lit
que le grand niailrc s'en (ni|>ar.'i par iorce
au nom de sa femme. Le ro le lit arrêter et
enfermer dans une prison à Mailrid, d'où il
fut irausfuré peu de jours après au cliàloau
nif.TIONNMRK PF.S ORDRES RELIGIF.LX.
de Mora. H en sortit deux ans et demi après,
par l'entremisi' de Jean, roi de Navarre, son
f ère, i)ui le demanda au roi de Caslille, lui
promettant de s'assurer de sa personne. Le
roi de Navarre le réconcilia quelque temps
après avec le roi de ('asiillc, qui lui donna
les villes de l'ruxillo et d'.Mcaraz, avec d'au-
Ires terre§. pour le dédommager du duché de
\illena. Les infants d'Ara^ion sciant hrouillè»
dans la suite avec le roi de Caslille, et 1.-,
grand maître les favorisant, ce prince le pri-
va une seconde fois de tnus ses biens, qu'il
distribua à plusieurs seigneurs. Le grand
maître se retira vers le roi d'.Vragon, qui
était son frère, avec lequel il se trouva dans
le combat naval que le roi de Navarre donna
contre les Génois, dans lequel les trois fières
furent faits prisonniers et envoyés à Savone,
et de là transférés à Milan, où le duc leur
donna la libirtè. Peu de temps après, le
grand maître et le roi de Navarre entrèrent
avec de> troupes dans le royaumede Caslille,
pour contraindre le roi Jean ill à rétablir
le grand malIre dans sa dignité, dont il avait
donné l'administration à don Alvarez du
Luna, connétable de ce royaume. Ces primes
en vinrent aux mains, et dans la bataille qui
se donna l'an liio, proche de la ville d'O!-
niedo, le grand maître y fui blessé; et, étant
mort quelque temps après, il eut pour suc-
C( sseur le connèlalile de Caslille, qui fut élu
par une partie des chevaliers, et les autri s
élurent aussi don Uodriguc .Menriquez, com-
mandeur de Ségura, qui prit aussi le titre
de grand maître. 11 y eut une guerre san-
glante entre les chevaliers au sujet de ces
deux grands maîtres, qui avaient chacun
leur fat tîon. Le roi de Caslille appuyait le
coniiélal>le, son favori, et le prince d'Aragon,
don Hodiigue; mais le connétable, abusant
de son pouvoir, alluma la guerre dans le
royaume, persécuta les grands, s'enrichit du
bien d'autrui, et rei;ul même de l'argent des
Maures pour empêcher la prise de la ville de
Grenade. Ay.int été conv.iincu de ces cri-
mes, 1(! roi le lit mettre en prison, enleva ses
trésors, et lui fit trancher la léle à Vallado-
lid. l'an l'»5J. Ille fut exposée plusiems
jours avec un bassin pr>ur trouver de quoi
enterrer son corps, ce qui p.irut d'aulant
plus étonnant, que cet homme avait acquis,
par une faveur de plus de trente années, des
biens qui égalaient presque les richesses
d'un roi.
Après sa mort, le roi fut admioistrateur
de l'ordre par auliirilè du (lape Nicolas V, à
cause du bus âge de l'imani don Alphonse,
son lils, auquel il avait Lut conlèrer la
grande maîtrise; et Jean III étant mort l'an-
née suivante, liai, le roi Henri IV, son suc-
cesseur , en eut aussi radininislralion. Il
avait épousé Blanche, fille de Jean II, roi de
Navarre, et ce mar:age ayant été dissous
l'an l'i-.'j.'J . il épousa en secondes noces
Jeanne, fille d'I.douard , roi de Portugal.
(>omme il n'avait point d'enfants, et qu'il
était incapable n'en avoir, l'on dit qu'il pria
sa l'i'mme de permettre (inc Hertrand de la
Cucva , son la\oii, snpj)léàl à son défaut.
1G9
r:pi':
EPE
178
La leino (Icvinl grosse el mit au momie une
lill(! (|Lii l'iil mariée à Alphonse V. r(;i de
Portugal, el que le roi de Caslille déclara
héritière de sps Etats, ce qui causa une
guerre entre elle et Isabelle, sœur d'Henri,
inariéeà Ferdin.iiid d'Aragon, laquelle fut
terminée à l'avantage d'Isabelle. Bertrand
de la Cufva eut pour récompense, entre au-
tres choses, la grande maîtrise de l'ordre de
Saint-Jacques, dont l'infant don Alphonse,
Ir.'re du roi Henri, se démit en sa faveur, ce
qui fut confîriiié par le pape Pie II l'an 14-62;
mais les chevaliers s'élanl plaints de v.c
qu'on leur ôtait le droit d'élection, el qu'il
n'était pas raisonnable que l'infant quittât
la grande maîtrise pour la donner de lui-
même à un autre, le roi, voyant leurs oppo-
sitions, porta Ik'rirand à y renoncer en le
récompensant de plusieurs belles terres, et
don Alphonse y fut rétabli, en venu d'une
bulle de Paul 11. Après sa mort, don Jean
Pacheco, marquis de Villena, fut élu grand
maître l'an 1469, el, ayant gouverné l'ordre
pendant quelques années, il se démit de la
grande maîtrise, en faveur de sou lils, don
l)ldacc Lopez Pacheco. Le roi Henri IV fil
solliciter le pape pour en avoir la confirma-
tion ; mais, n'ayant pu l'obtenir, ce prince
mil Didace de Pacheco en possession de la
grande maîtrise, en vertu de la renonciation
du marquis de Villena, qui s'étail faite du
conseiilcmcnt de la plus grande partie des
treize. Mais, apiès la mort de ce marquis,
qui arriva l'an 1474, don Jean de Velasco,
prieur dUclès, convoqua le chapitre et les
treize électeurs, ce que fit aussi celui de
8aiiil-Marc de Léon : de sorte qu'il y eut
trois grands maîtres dans le même temps :
don llodrigue Maniiquez, comte de Parède,
élu par ceux dUclès ; don Alphonse de Car-
donas par ceux de Saint-Marc, el le mar-
quis de Villena, don Didas Lopez de Pa-
checo, en laveur duquel D. Jean l'achec",
marquis de Villena, son père, s'était démis
de celle dignité, et (jui en était en posses-
sion. Ce dernier prélendit se ir.ainlenir par
la voie des aimes, et chasser ses deux com-
pétiteurs qui avaient été élus à Uclès et à
Saint-Marc. Il s'empara du château d'Uclès
étant protégé par le roi, mais il ne put s'y
maintenir, ni être reconnu comme grand
maître, car, après la ii;ort du comte de Pa-
rède, qui arriva l'an 1476, les chevaliers qui
dépendaient du prieuré d'Uclès élurent aussi
pour grand maîire don Alphonse de Carde-
nas : ainsi le sdiisme cessa après que les
chevaliers se lurent réunis. Mais ces divi-
sions ayant déplu à Ferdinand et Isabelle,
rois de Castille, qui craignaient qu'elles ne
causassent quelque guerre dans le royaume
à cause de la puissance de ces chevalier>,
ils demandèrent puur eux et pour leurs suc-
cesseurs l'admiulslra ion de cet ordre, qui
leur fut accordée par le pape Alexandre VI,
l'an 1493, après la mort du grand maître
don Alphonse de Cardenas, cl pour lors la
grande autorité des chevaliers commença à
diminuer. L'empereur Charles V eut au.-.si
l'administration de l'ordre, qui lui avait été ac-
DlCrlONNAIRE DES Oi;DUI'.S l;tL!(JlliUX. IL
cordée l'an 1515 par le pape Léon X, et
l'an 1523 le pape Adrien VI annexa pour
toujours à la couronne d'Kspagne les gran-
des maîtrises des trois ordres de Sainl-Jac-
ques, de Calairava rt d'Alcanlara.
L'ordre de Saint -Jacques s'était aussi
étendu en Portugal, où il avait reçu de
grands biens par la libéralité des souverains
de ce royaume. Les chevaliirs dépendaient
du couvent d'Uclès ; mais le roi don Denis
voulut avoir en so!i royaume un grand maî-
tre indépendant de celui d'Espagne; il éta-
blit le chef de cet ordre à Alcazar d'OzaI, et
depuis il fut transféré à Palmella. Les rois
(le Portugal ont élc les premiers qui obtin-
rent l'administration de cet ordre. Elle fut
accoriléc au roi Jean II après la mort du
prince (ieorges, duc de Conimbrc, son fils,
qui en a éié le dernier grand maître en Por-
tugal, et le pape Jubs il l'annexa à la cou-
ronne en la personne du roi Jean 111.
Comme nous avons déjà parlé du conseil
des ordres, el que nous aurons encore lieu
d'en parler dans la suite de cette histoire, il
est à propos de rapporter l'origine de ce
conseil, qui est maintenant comme le supé-
rieur général non-seulement de l'ordre de
Saint-Jacques, mais encore de ceux de Cala-
trava el d'Alcanlara. Le pape Adrien VI ne
réunit les grandes maîtrises de ces ordres
à la couronne d'Espagne qu'à condition
qu'en ce qui regardait le spirituel, le roi
n'agirait point par lui-même, mais commet-
trait pour cela des personnes des mêmes
ordres: c'est pourquoi l'empereur Charles V,
roi d'Espagne, établit un conseil, qu'il ap-
pela le conseil des ordres, lequel doit être
composé d'un président el de six chevaliers
(dont deux de chacun de ces trois ordres),
qui ont le même pouvoir et la même aulo-
riié que le roi peut avoir sur ces ordres en
iiuaiité d'administrateur perpétuel, tant eu
ce qui concerne la juridiction temporelle ou
sécu.ière que la juridiction ecclésiastique,
pourvu qu'elle ne soit pas purement spiri-
tuelle, comme de conférer les ordres, ad-
minislier les sacrements, fulminer des ceii>
sures rt autres choses semblables, dont les
fondions sont exercées par des personne^
ecclésiastiques de l'ordre, et qui sont dépu-
tées par le conseil, qui connaît des causes
civiles et criminel'es des chevaliers et di-
leurs vassaux, el qui fait exécuter les or-
donnances laites aux chapitres généraux.
Il donne avis au roi des coinmanderies ,
dignilés , prieurés, bénéfices, gouverne
ment» et charges (jui vaquent, alin qu'il v
pourvoie. Cette |uridiclion , qui ne forn.o
qu'un tribunal avec le roi, est ecclésiastique
et légulière, quoique exercée par des per-
sonnes laïques. Klle est souveraine, juge eu
dernier ressort , et on n'en peut appeler
qu'au sainl-siége. Clément Vil l'approuva
par des bulles des années 1524 et 1525, et
ajouta à son pouvoir celui de connaître des
decnues, des bénéfices, des mariages et au-
tres choses semblables dont la connaissance
appartenait aux évêques comme ordinaires.
Elle lui aussi approuvée par le pape Paul lil,
n
nr.TioNNAir.i: itFS
en lî)'»2, il ilan> la siiilc par lo papo IMc V.
le pouvoir de ci' Irilniiial s'élpiii sur doux
> illes, deux coiil vin;:i bourps cl soix.inle-
i]iiiiue \illapi's, doiil il j a deux villes cl
l'ciil soixaiito-dix-huil tanl bourgs (jue
villages qui apparlioiiDonl à l'ordre de Siiut-
J.irques, soivaiile-iiunlre à celui (le (^■lla-
liava, el riuquanle-lrois à celui (rAlcaii-
lara. Noii-seuleuient les chevalier», les clia-
noiiies, les cliapeiaiiis et les religieuse» de
ces ordres, sonl soumis à l'obéissaiirc cl
correction du conseil des ordres; mais la
juridiction de ce conseil, lant pour le lerii-
porel que pour le spirituel, s'clend aussi
sur lous les prêtres séculiers qui onl des
Iténéfices, el les reli{;ieuses des autres or-
ilres qui ont des monastères situés ilans les
lieux qui apparliennciit à ceux de SaiiU-
.lac(iucs, de Calatrava et d'Alcanlara. Le
président de ce conseil est ordinairement un
des [dus LMands seigneurs d'Espagne. Il y a
encore plusieurs ofiices qui dépendent de ce
conseil, dont les plus considérables sonl ce-
lui de sccrélair»! des ordres, le conlador
uiai/ur, ou çrand trésorier des ordres, le
i;rand huissier des ordres, trois procureurs
(;énéraux , trois chevaliers fiscaux et un
t^rand trésorier du conseil, qui dans les ac-
tes pub'.ics ont lous séance dans ce tribunal.
Ia's autres offices, qui sonl en grand nombre,
sont moins considérables, cooiine l'agent, le
liscal, Tavocit cl le procureur des pauvres,
les trésoriers de cba'in de ces ordres en
jiarticiilier, leurs chanceliers, les huissiers
cl (luelqiies autres.
Nous avons vu, par ic nombre des villes,
liourgs et vilbiges (lui appartiennent à l'or-
dre de Saint- ac(|iies, qu'il possède lui seul
plus de biens que les deux autres. A l'égard
(les comniander.c.», il y en a quatre-vingt-
quatre, dont il y en a tiois grandes, qui sont
les grandes conimanderies de CaslilIc.deLéon
et de .Montaluan en .\r,igon. Ces qualie-
vingt-quatre commanderics onl •i.'JO.OOO du-
cats de rcienu, outre deux cents prieurés,
rurcs cl autres bénélices simples qu'on peut
donner avec disl)cn^e du pape à des person-
nes qui ne sont pas de l'ordre. Il y u treize
bourgs qui sont des \i(ari,ils avec des jurr-
dictions spirituelles , s.ivoir: \ illa-Nueva de
Ids Infantes. \'illa-Uoilri;z;uo, \ illalua, Ls-
Iriana, Xercs, Enicri a, 'ludia, Jesle. Gara-
vacca, \ cas, Segura de la Sierra. Aledo cl
Tolana. Il a encore (juaire ermitages,
cinq iKJpitaux et un i o'.lége ;'i Salamaniiue.
r,el ordre est di\isé(n (|uaire provinces,
(jul sont Casiille, Léon, la \'ieiile-(^astille el
1 Aragon, où hî roi, comme administrateur,
cl le chapitre général envoient des visiteurs.
Celui de la province de Léon est élu par le
prieur el le ch.ipiire du couvent de Sainl-
Marc de Léim, el doit cire conlinné |)ar le
1 onscil des ordres. Outre ces visiteurs géné-
raux, le roi en députe encore d'autres pour
■ 'informer si les chevaliers, les chapelains
• lis ariires observent leur règle el les sia-
l'ils de l'ordre, '".es viiileurs sont toujours
< hcvaliiTs el sonl accoinpagnes île quci(|nes
cJjajielaius ; b ur pouvoir ne s'élcnd pas scu-
leiuenl sur li's chevaliers, mai* aussi sur
«eux qui po-sèdenl des bénélices dans les
Irenx qrii appartiennent à l'ordre. Les che
laliers doivent (rliéir au conseil des ordre;
et aux supérieurs des monastères lorsqu'ils >
demeurent, ou qu'ils y font leur novrciat, ou
lorsqu'on les a obligés de s'y renfermer pour
<l(rel(iues fautes
l'our être reçu chevalier, il faut faire
preuve de noblesse de i|uatre races, lant du
c lie paternel que du (('ite maliTnel ; el quoi-
((iie anciennement la noble-se maternelle ne
fi'il pas rer\nise. clie ( si néanmoins présen-
lement nécessaire depuis ((n'plle a été or-
donnée dans le chapitre général de l'an 1(');>:{.
Il faut encore faire preuve que les iriémes
ancêtres n'ont point été juifs, .Sarrasins, hé-
rétit|ues, el qu'ils n'ont point éié imnis
comme tels pirle tribunal de rin(|uisitio i .
(^es preuve» se doivent faire devant un che-
valier el un chanoine de cet ordre ; cl si el-
les sont approuvées par le conseil des or-
dres, le roi co.Tinet quelqu'un pour donner
riialril à celui (|ui doit être rei;u. Les no»i-
ces sonl obligés de servir sur les galères
p.^ndant six mois, el de demeurer pendant
un mois dans un raonaslèr.- pour y appren-
dre la règb' ; mais on les dispense aiséirrent
de ces obligalions moyennant une somme
d'argent; le roi et le conseil des ordres ac-
cordent ces dispenses.
Us él;ri(Mit aulrefiis vérilablcmenl reli-
gieux cl fais-rierit vteu de chasteté ; mais le
pape Alexandre III 1 .ur ayant permis de se
marier, ils ne le peuvent faire sans la |)er-
niission du roi, qu ils doivent avoir par écrit.
Un leur impose un an de pénitence s'ils so
marient sans celte permission ; et si c'esl un
des treize, il est privé de cette dignité. La
raison de celte défense, c'est que les femmes
des chevaliers doivent faire les mêmes preu-
ves que leurs maris, el que le conseil des or-
dres doit nommer des commissaires pour en
fiire les informations. Ils étaient obliges de
s'abstenir de leurs femmes à certaines fêtes
de l'année, comme à celles de la Vierge, de
sa ni Jean-liaptiste , des saints ap(jtres et
quelques .lutres, cl les veilles de ces fêtes,
comme aussi les jours d > jeûne prescrits par
la rèi;le, (|ui étaient, oulre le carême de l'ii-
glise uiiiv.Tselle, de|)Uis le huit no\emlir(>
jusqu'à la .Nativité de Noire-Seigneur, et
lous les vendr.'dis depuis le premier septem-
bre jusqu'à la Penlerôte. Le pape Inno-
cent l\ dispens I du jeûne, deimis le huit n;)-
vembre jusqu'au iir.inier dimanche de l'a-
\eni, les cli(;valiers qui étaient à la guerre.
Martin V les dispensa entièrement de la
règle el de l'oblig-ilion de se retirer dans des
munaslères aux jours qu ils devaient se sé-
parer lie leurs femmes, laiss.inl cela ta leur
volonté. Innocent \\\\, ayant été consulté
pour savoir si les chevaliers qui n'étaient
pas à la guerre étaient obliges aux jeunes
de la règle, déclara, l'an liSli, (|ue les uns el
les autres n'y étaient pas obliges; el, sur ce
(|iie l'ordre représenta eiiror<' à ce ponlile
(in'il ) avait (iliisienrs points de l.i règle ijiii
oiiii^eaictit à pcclic inoitel, comme de s'ab>-
173 EPE
tenir des fommos à ccrlains lemps, de réci-
Icr certaines prières, et .mires choses sem-
blables, ce p;ipe déclara encore In même
année que la transgression de la règle n'o-
bligeait point à péché mortel.
Ces chevaliers m- font pins prcsenlcmonl
que les voeux do pauvreté, d'obéissance et
de chasteté conjugale, auxquels ils en ajou-
tent nn quatrième, de défendre et de soule-
nir l'ininiaculée concepiion de la sainte
A'iergc. Les trois ordres de Saint-Jacques,
de Calatrava et d'Alcanl.ira prirent celte ré-
solution dans leur:! chipitres généraux,
({u'ils tinrent l'an 1052. Ils consullèrent à ce
sujet le roi Philippe IV, comme administra-
teur perpétuel de leurs ordres ; et ce prince,
qui avait une grande dévotion à la sainte
\ ierge approuva la résolution que ces or-
dres avaient prise. Ils voulurent s'engager
à ce dernier vœu [ubliqucmenl et par une
cérémonie éilat nte. Ils indi(iuèrent des neu-
vaines (ini se liront à Madrid, dans trois
églises dilTérenti's, qui élaii'iit magniil(|ûe-
ment parées, el dans iesqurlles il y eut tous
les jours prédication sur le mystère de la
conception, et une messe célébrée poiitiiica-
lement par les prieurs de ces ordres et par
des abbés de ceux de Saint-Benoît el de Cî-
leaux ; ce qui se fit dans différents temps,
afin qu'une cérémonie n'empéciiât pas l'au-
tre. L'ordre de Sainl-.Iacques conaniença le
preiiiier dans ré;;lise du collège de Saint Au-
gustin appelée de Dona Maria de Araçjon.
L'ordre de Calalrava fit la sienne dans l'é-
glise de Saint-Wariin de l'ordre de Sainl-lîe-
noît ; et celui d'Alcantaia dans l'église de
Sainl-Iîernard de l'ordre de Cîteaux. Dans
ihacune de ces églises, les chevaliers de
clia(|uc ordre assistèrent en habit de céré-
monie. Après l'évangile de la messe, un che-
valier prononça, au nom de tout l'ordre à
haute voix, la formule du vœu, et ensuite
chacun, en présence du célébrant, fil la
même chose en mettant la main sur la croix
et sur les Evangile.», et l'on fil un lèglenient
dans les chapitres généraux, que lous ceux
que l'on recevrait à la profession feraient le
même vœu. t^'est pourquoi, dans la formule
de la profession de ces ordres, ap' es les trois
vœux de pauvreté, d'obéissance eldeclias-
telé conjugale , celui qui fait profession
ajoute : y asimesmo liago voto de tener, de-
fendcr, y guardar en publicu ij en secrelo que
ta y irgen Maria madré de Bios, y Sehora
nuestra, fue concebida sin muncha de pecado
original.
Il y a aussi plusieurs commanderies de
rct ordre en Portugal, el il y en avail aussi
une en France dans la villed'lilampes. L'ha-
bit de cérémonie des chevaliers, tant d'Es-
pagne que de Portugal, consiste en un nian-
leau blanc avec une croix rouge sur la poi-
trine, avec cette difl'érence que les cbcvaiicrs
d'Espagne la portent en forme d'épée, fleur-
delisée par le pommeau cl les croisons, d
que celle des Portugais n'est pas en forme
(l'ipée, mais est aussi lleurdelisée par le
EPf:
171
bas (1). Lorsqu'un chevalier de cet ordre
meurt, le commandeur de la (oannamicrie
la |)Iu8 proche de la demeure du chevalier
est obligé, outre les prières ordinaires, de
nourrir un pauvre pendant quarante jours.
Voyez les auteurs cités au paragraphe
précédeni.
liPÉES (Ordre dks). Votiez Sp.nAPniîvs.
EPEUNAY (SArNT-MARTiN n). Voyez Jcan
DE Chartres (Saint-).
ÉPERON DOR (Chevaliers de i.'}.
Anciennement c'était la coutume do créer
des chevaliers avant le combai, afin qu'ils y
allassent avec plus d'ardeur, ou après le
combat pour récompenser sur-le-champ
ceux qui avaient eu plus de part à la vic-
toire. Les cérémonies que l'on a pratiquées
pour faire ces sortes de chevaliers ont été
diilérentes selon 1rs lemps ; car d'aboid on
se contenta de les frapper légèrement d'une
épée nue sur le dos, et de leur mettre l'èpée
dans le baudrier; on y ajoulii ensuite l'acco-
lade, et enfin on leur permit de porter des
éperons dorés , (ju'o;! leur aitachait aux
pieds, ce qui leur fil prendre le Uom de
Chevaliers Dorés. C'est encore aujourd'hui
une coutume pratiquée par plusieurs prin»
ces d'honorer ainsi, le Jour de leur couron-
nement, ((uelques seigneurs de leur cour en
les faisant chevalieis avec les mêmes céré-
monies. L'empereur Ferdinand I",ni le jour
de son couronnement, des chevaliers de l'E-
peron, qui furent ainsi nommes apparem-
ment à cause dos éperons d'or qu'un leur
attacha aux pieds. Mais ce qui n'était autie-
fois que la récompense de la valeur es! au-
jourd'hui fort commun en Angleterre, el se
donne indillérenimenl ans gens d épée cl de
robe, et môme à des marchands, (jui sont
ainsi reçus en ce royaume : ils se metient ;i
genoux devant le roi, qui les touche avec
une épée nue sur l'épaule, eu disant ces pa-
roles : Sois chevalier aa nom de Dieu, cl à
cause des éperons doré-; qu'ils porlent le
jour de leur réeeplioii, on les appelle Che-
valiers Dorés, équités aurali ; mais, comme
ces chevaliers ne forment point de société
particulière, ils ne portent aucune marque
qui les dislingue, et sont compris dans ce
(ju'on appelle en général l'ordre de cheva-
lerie.
Il n'en esl pas de même des chevaliers Ai-
l'Eperon d'Or, dont nous allons parler el qui
portent pour marque de leur ordre um-
croix d'or à huit pointes émaillée de rouge,
au bas de laquelle pend un éperon d'or [•!) •
on les doit regarder comme lurmant un or-
dre militaire dislincl et séparé de cet ordre;
général de chevali ne et de tous ces cheva-
liers qui prennent le lilre de Chevaliers Do-
res el do l'Eperon, dont nous venons de par-
ler. L'on préleiid (|ue ce lut le pape l^ie IV
(|ui institua col ordre à Home, l'an 1559.
Mais il ne paraît pas (|ue ce ponl.fe ail donné
a (eiui (ju'il insliiia le nom de l'Eperon
d'or, au cun!raire il lui donna son nom ; el
(I) Voy., à 1.1 lin du vol., n" 55.
(2) Voy., à la fin du vol., n" 5'*.
175 mr.TiONN.Mr.F: nr.s onnars nri.ir.ii rx. i:.-
Ton Ironie il ms le nnllairc nminiii iiiio bulle nrc»rdri à r<s rlievalicrs lipauroup de pri»i-
de Pie V, de l'an lilGl), . ù les clievaliors de le-res. el qu'entre autres il voulut que tous
cet oidre sont appelés chevaliers Pics. II est ceux qui veraicul nuMi-jés à cet ordre fussent
vrai que Pierre de Hilloy, dans sou Traité do réputés noliles et leurs descendants. Il leur
rOriuine do ciievalerie, dit que res clieva- donna le titre ilc comtes de Lalrau, avec
liers~Pies sont faits par mcMie moyen elieva- pouvoir de déléjîuer des juges ccclésiastiqaes
Hors de l'Eperon d'or. Favin dit aussi (|u'ils el séculiers, créer des docteurs el des notai-
soiil appelés Cl)e\alicrs Dorés à cause des res, de lé.:itimer des bâtards el les élèvera
éperons dorés qu'ils ont permission de por- des di^nité>. Il onionn.i de plus que les ( hc-
lcr;et dans les lettres que l'on donne nu\ valiers clercs si'r.iienl notaires aposloliqii.'s.
chevaliers de l'Eperon, ils sont appelés Che- que les laïques ser.iiecil chevaliers dores, et
valiers Dorés cl comtes du sacre pala s de que, cessant d'élre parlieipants, c'est-à-dir.-
Lalran , sacri palulii el auhc L'iteranensis de jouir du revenu alî< de à loidre, ils au -
comiie.i] nuliles , d equiirs Aurali Mais raient toujours l;> litre de cumlos de Lalran,
cette cruix avec cet épi ron qu'ils porlenl de ni>taires apostoliques el de Chevaliers l)o-
pour marque de leur ordre n'est point la rés. Il leur permit aussi de posséder plu-
marque que le pap;> Pi^- IV donna aux che - sieurs béuélices, iiuoiquc maries, el d'exercer
valiers qu'il fil, puisque ce fut une nié- en même temps plusieurs ofiiees de einquante
daille d'or, lù d'un c6lé il y avait l'iinapc de écus d'or de revenu, les dispensant de ce qui
•iainl Amliioise, el de l'autre ses armes, serait dû ,'i la componende pour les pensions
qu'ils pouvaient c hanger sous chaque pon- ou pour les bénclices qui leur seraient don-
lilicat pour mettre les armes du pape qui nés. Il l'ur élail permis, dcu\ ans après leur
4;ouvernait pour lors ri''.gli>e. L'ahlic Giusli- réceplion dans l'ordre, de céder à qui bon
iiiani rapporte à ce sujet les paroles de ce leur semblait la pension qu'iiscn recevaient,
pontife dans la bulle de l'institution de l'or- et de lister de ce qu'ils avaient acquis do
<lre de ces clievali'TS Pies : Infijniaiiite col- biens ecclésiastiques, jusqu'à la somme de
Irijii dictonim viililum Pioriim esse roltimus mille ducats pour ( haque office qu'ils aii-
imnginem bctili Ambrosii epsntpi ab una raient exercé. IN furent déclares commen-
pnrie aliciJHS peiidenlis aurei cl nb allerii in- saux du pape, scriptcurs el cameriers apos-
sifjnid }ws:ra, vel pro tnnpore exislmlis pon- toliqucs. Le pape leur accorda encore la
n/icj.--, cum r.latibu'< lirsitper el liara puniifi- préséance sur les autres chevaliers, et les
cia. .\insi il y a bien de l'app irence que le exempta de la juridiction des ordinaires, le-;
pape I ie W n'a [ciint été l'instiiiileur des mellanl sous la protection jr.imédialc du
cheviliers de l'Epercn, cl que ceux aux- sainl-siégc. Leur obli;;alion était d'exécuter
<]uels il don:. a son nom ont eu le même sort les ordres du pape dans les croisades el dans
que ceux de Saint-Pierre, de Saiul-Paul, du les conciles généraux sans aucun émolu-
Lis, et de Noire-Dame de Lurette, qui ont ment, eu égard aux pensions qu'i's recc-
eté su(iprimés, et sont ilevenus simples ofii- valent de l'ordre; et ils devaient aussi veiller
tiers de la Chancellerie ; car pa-mi ces offi- à la défense des côles de la Marche dWncônc,
cicrs il se trouve aussi cinq cent trente-cinq cl principalement de la ville de Lorelte.
chevaliers Pies , dont les charges coûtent Mais, soit que Ion veuille attribuer ces
chacune mille écus. privilèges aux chevaliers Pies ou au\ che-
L'abbL- (îiustiniani dit que Pie IV créa d'à- valiers de l'Eperon, les chevaliers Pies n'en
bord irois cent soix.inte-quinze chevaliers, jouissent plus, ayant été supprimés, comme
.-luxquels il assigna un icveiiii de soixante- nous avons dit; et tout ce que lev chevaliers
treize mille écus, pi qu.' l'aiiiiée suivante, de l'I-'peron en ont conservé soni les titres
ay;inl augmenté le ncmilirc de ces chev;;- de comtes du sacré palais de Lalran et de
lieis jusqu'à quinz • cent lienle-cinq, il aug- Chevaliers Dorés, qui leur sont donnes dans
inenla aussi leurs re»enus jusqu'à la somme leurs lettres de rcre(>tioii. Oi ordre môme
de Cent quatre mille écus. Ma'S il peut y s'avilit tons les jours ; car, quoique ks pa-
jivoir de l'erreur dans le calcul de cet au- | es le confèrent quel(|iierois à des ainbassa-
leur, ou bien il se peut laiie que, couinu- Il deurs, comiKe lil le pape Innocent XI, l'an
;i mis le nombre de ces chevaliers en cbif- Ki"", à un amb.issadeur de ^'enise. l'on
fres, l'imprimeur aurait mis un mille de donne aisément à Uome la croix de cet ordre
Irop, et qu'en le rctranihanl il ne .'■e trou- à tons ceux qui ont cinquante ou soixat:te
vcrait plus que cinq cent trente-cinq cliev.i- livres pour payer lenrs leitres de réception,
lit rs, qui e^t jn-lemenl le nombre de ces of- Le pape Paul 111, par une bulle de l'an I.t' 9,
ficiers de chancellerie qui | rennenl encore à .ici orcla à Charles, Mario, .Mexandrc, et P. ml
présent le titre de che»aliers Pies Ce ciui Sfurze des comtes de Sainte-Flore, ses ne-
pronve que c'est une laule qui s'est glissée veux, pour eux et leurs descendants de lègi-
d.Mis l'impression, l'esl que, si le pa(ie ai ail lime mariai;!' en ligne masculine, le droit de
.4nccté un revenu de soixante-treize milice créer des chevaliers de l'Eperon , comme!
cous pour trois cent soi\ante-i|uinzo clieva- aussi de faire des dicteurs en théologie, en
liers, il n'y aurait pas eu de propori on gar- l'un el l'autre droit et en médecine, el des
.lec, si en atigmoni.int le nombre des clieva- abbes titulaires : ce (]ni fui confirmé par ses
liers jusqu'à quinze cent trente-cinq, il n'a- successeurs Jules 111, Crégoire Xlll et
vait augmente leurs revenus que ju-^qn'à la Sixte \' . Le duc: de Sl'orze jouit présentement
somme de cent quatre mille ecus. de ce droit, et accorde aisément des Icllres
Le même auteur jijoule ijnc ce jinntife de chevalerie de l'I-'-j'cron. dont l'expédilioii
«77
e:e
EPI
<78
lie coule qu'une pislole : ce qui l.iil que l'ou
regarde avec mépris ces sortes de civevaliers.
Les nonces, les auditeurs de l'oie et quelques
autres prclais de la cour romaine oui aussi
le privilège de créer chacun deux chevaliers
«le l'Eperon dor; c'est pourquoi l'on voit eu
France quelques-uns de ces chevaliers qui
onl clé reçus en cet ordre par des nonces, et
j'ai eu en main les lettres d'un d(î ces chev i-
liers, de l'an 1702, que M. Fii'schi, pour lors
nonce en ce royaume, accorda, et (|u.' nous
rapporterons ici.
Lnurentiiis Fliscus, Dci et sanctœ sedis
aposlolicie (jralia arcltiepiscopus Aienioncn-
sis, sanclissimi D. ^' . papœ pnriatus doinr-
sticiis et assislens, ejusdem et snnrtœ sedis
apnd rrgein Cliristianissimwn nuntius apo~
stolinii ertrnordindriua. Dilecto nobis in
ClirUin domino Ludovico filio domini Yincvn-
tii rie Marlenne, domini de Puvigné, ne sucri
paliiiii et aida; Latemvensis comitis, mililis,
(l rqiirstris Aureati, salntcm in Domino. Sin-
f/nlai e.i animi lui dotes eximiœi/ite drvoliouis
iijjvvtus, (/uein nd scmctissimiini dominum no-
sfrwn piipam sanclamque aposlolicam sedem
cl nos qerere comprobaris, vilœqite ac mo-
nim honestas, oliaque lattdahilia probilalis et
virtutitm mérita, quee iltaniia largilor altis-
simus in persona luu exubérante gralia cumu-
lavit, merito nos inducunt ut persomun cam-
dem dignioris nominis liliilo extollamus et
singulaii prœrogatira decoremns. Ilinc est
(/uoil nos volentes te, pi-wmissorum tuorum
intuitu, specialis exccUentice dignilntc subli-
ma) e et cum dignis proseqni favoribns, te Lu-
dovieum de iMarlenne, domiimm de l'uvi};nc,
(nslrali adoptione plium altissimi polcnlissi-
mique principis Ludovici Delphini Franciœ,
fimul et al:is.<imœ ac polentissitnw pvincipix
Maria Tlieresiœ Auslriarte Galliurum rcginœ,
sacri putalii et aulœ Lateranrnns comitem,
militcm et equilem Aureaium , auctoritale
(ipostolita nobis uli prœsuli assifteiiti a san-
cla sede aposlolira loncessa, ipia [unijimiir in
hac parle, tenore prœsentium, facimus, créa-
mus, insliluimus, deputatnns, ac aliortini co-
mititm, niiiiium et equilum Aurentornm sacri
pnlatii et aidœ Latcranen'is hiijiismodi, 7iu-
inero, urdini et consortio [avoriibdiler aiigre-
qamus : decernenles qiiod lu ex nunc deinceps
veslibiis, cin(/ulo, ense et cakaribus aure ilis,
turque et aliis insignibus militaribus ,ne en on et
omnibus et singulis priviligiis, immunitaii-
bus, exeD'ptionibiis, ho)ioribus, prweminentiis
et antelationihus, qui'ius ulii sucri palatii et
aulœ Lateranensis comités, milites et ei/uiles
Aureati ab endem sancta sedeapostolica i rcali,
de jure, usu, eonsuetudine, privilegio, aut
alias, quomodolibet ittuntur, potiunlitr et
gaudcnt, uti, potiri et gaudere possis et va-
i'os, non obstantilms constitutionibus et or-
dinationibus aposlolicis cœterisque contrariis
quibusciinque. In quorum omnium et singu-
lorum fidem et lestimoniiim, hoc nostrum
privilcgium, manu propria firmalum et per
infra scriplum secretaritim nostrum suliscribi,
.'•iglllique nosiri quo in talibus tttimur, jussi-
iiitis iinpn ssione iiitniiii. Valum l'arisiis in
palatio nostro, die 28 mensis Novembris anno
1702. L. archiep. ^icnîonen.; et plus bas: Jo-
seph. Ragm. Alcorambonus srcret. et scellé.
Vogez, pour cet ordre, Favin , Théâtre
d'honneur et de (hevalirie; Bernard Giusti-
nirini, llisl. di tutti gli Ord. militari; de
Bellay, Mennénius, HiTinan et Schooncbeck,
dans leurs llisl. des ordres militaires.
Il y a eu aussi à Naples un ordre de l'Eperon
institué par Ch.irles d'Anjou, roi de Naples
el (le Sicile. Ce prince, ayant été couronné à
Rome l'an 12()G, eu partit pour aller prendre
possession du royaume de Naples. Mainfroy,
qui le lui disputait, ayant succomhé dans
une bataille, tout le royaume se soumit an
comte d'Anjou, qui, pour avoir [>lns do
moyen de récompenser la nob'esse qui s'élail
«léclaréo pour lui, él.ihlit l'ordre de l'Eperon.
Voici de quelle manière ou y était reçu. Lo
chevalier se présentait au jour marqué dans
l'église calhédr.ile de Naples, et là, sur un
théâtreélevé oùétaicnl le roi, la riine cl toute
la cour, il prenait place dans une chaise
couvcrfe de drap de soie verte. L'archevêque»
en habit de diacre, accompagné de ses suf-
l'ra'jianls, le faisait jurer sur les saints Evan-
giles qu'il ne porterait jaii'.ais les armes con-
tre le roi, s'il n'y él.iit obligé par son légilime
seigneur, el qu'en ce cas il rendrait au roi
la marque de l'ordre, sous peine d'éire ré-
puté infâme el mis à mort, s'il était pri ou-
nier de guerre; qu'il défoudrail de toutes ses
forces, quand il serait rei|uis, les dames tant
veuves qtie mariées et les orphelins abrui-
diinnés, si leur cause était juste. Deux che-
valiers des plus anciens le présentaient en-
suite au roi, qui de son épée lui touchait
l'épaule en lui disant : Dieu te fasse bon che-
valier; puis sept demoiselles de la reine, ve-
lues de blanc, venaient lui ceindre l'épée;
(juatrc chevaliers des plus considérables lui
attachaient les éperons dorés, el la reine lo
prena l [lar I;! main droite et une autre
dame la plus considérable p:r la gauche,
el'es le conduisaient sur un autre siège ri-
cheiiicnl paré. Abirs le roi, se pbiçanl à sa
(l)oite, la reine à sa gauche, toute leur coia*
dans des sièges au-dessous, on servait un-
collation de sucreries, par où linissail la
cérémonie. On ne sait point quelle était la
marque de cet ordre.
Des Noulis, Histoire des rois de Sicile et
de Nnples, des maisons d'Anjou, pag. 138.
DOMINIQUE (Congrégations diveiises dh
Saint-). Voy. Lombardie.
EPINAL, DE PoussAY ET DE BouxifenE E\
Lorraine, de Saint-Pierre et de,Sainte-
Mar:e a iMetz (Chanoinesses d').
Les chanoinesses d'Kpinal n'ont pas clé
moins religieuses dans leur origine que cel-
les de llemiremonl leurs voisines, (|u'elles
ont imitées en secouant le joug de la régie
de Saint-Benoît; el il en est de même de
toutes les autres dont nous |!arlerons dans la
suite. Elles eurent pour fondateur Thierri 1",
évèqiie do Metz. Mûrisse, évèque de Ma-
d:iure, s'est troinpé lorsqu'il a dit (juc saint
Guérie, trentième évèque de Metz, qui mou-
170 niCTIONN.MRF. PES OniiURS nrLioiF.ux m\
rui i';iii Goi, fondi un iiKinasliTC à Iviin.il il y a une copie .'i hi liihliolhôuuo du Roi (1).
011 I lionneur ilo s.iiiit M;uiiice c\ en faveur Primo quidum rlericortim coirentum ad om-
des(»ideu>i filles, donl l'ainoe, nom:iiée l'ré- nipatenlis Dei lionorrm coadunainl ; poft.
«ie, fut la iMeiiiière supérieure; e; que coIIl- filoriam t/ivinilalis , guunliim in Itomine esc
ahhuye, ^ilul•e sur le liord de la Moselle, tufis viribus onmir/U!^ coiiamine gesliens, a»-
*'est rendue recouimaridable par la niullilu>lc cillas Chrisli siib regiihiri tiln et suh instilii-
des il.iuies ou des rolii;ieuses qui s"y sont lioiie l'alris noslri, benli sridcel Benedicti,
retirées, par sa pranJeur, son elenl^u■^ et les Orne rdoctna, lieo et snitcl) (îoerico pontifici
i;r.'inds biens ([u'elle possédait : ce qui y a servire ilesiimivit , d(ins pradia ri possrssio-
atliré tant de nioiide, (|u'iin y a hûli une ville nés, qiiibns si» ■ inopia et sine iiidifienlia vi-
à l'enliiur (lui se nuininc l'pinal, et que vere possciit. Le< papes Alexandre III, Ho-
tjuelques liisloriens tiennent que c'i'Sl de là norius III, F.iKius III, et plusieurs autres
que le te ville ;i()parler:ait au refois aux évé- pomiles , prirent ce monastère sous leur
ques de Metz. Il donne assez à connaitre protection.
qu'il reeoniiail aussi ce saint pour le fonda- • harles \'II, roi de Trance ayant pris i os-
(eur de cette ville, pnisijue dans la laide des session de la ville d Epiiial, en IWi, con-
n?alières, parlant d'I^pinal. il dil po-itive- finna à ces religieuses tous leurs privilé-^es,
ment (|ue celte \ille fut bâlic par saint Goë- franchises, libertés, droits el préroi^alives,
ric. Cependant il e-l certain (jue non-seule- dont elles joui-saient, par ses lettres don-
meiit la ville d'Kjiie.al, mais même l'abbaye nées à lipinal la même année; el pr.r d'au-
qui porte présentement le nom de ce saint, 1res lelties il les prit sous sa protection cl
n'ont été fondées que plus de trois cents ans sauvegirde, aussi bien que leurs chanoines,
après. Ce fut Dcuderic ou Thicrri 1", évé(|uc chapelains , el autres personnes de leur
dc.Melz.qniloiida runecU'aulreversran'JdS. éL-lise, el tous leurs officiers, serviteurs el
«^eqnc révêijuedeMadaiire reconiiaitcnquel- vassaux, leur départant pour gardiens spé-
qiic façon : ç.ir, lorsqu'il dit qu'il y a des ciaux les baillis et prévôts de t>ens, de Cliau-
iiiémoires qui portent que Tliicrri , outre mont el d'Epinal.
l'abbaye de ^'ainl-Vincnt, qu'il avait fundée Leur église avait le li re de collépiale.
à M(tz, en f. iida encoïc une autre à Chau- C'(St ce ()ui se prouve par un acte (2) de la
nmni, cette fondation ne peut être antre prise de possession de la ville dEpinal et ne
chose (|ue celle dij l'abbaye d'Iîpinal, puis- ses dépendances, par Nicolas, mai'i|uis de
(|u'ell • fui bâtie au territoire de Chaumonl Pont-à-.Monsson, au nom de Jean, duc de
dans le diocèse de 'l'oul. Ce qui prouve que Calabre et de Lorraine, son père, el du scr-
saiiil Goëric n'a point été le fondateur ni de menl de lidcliié el d obéissance prêté enlro
la ville ni de l'abb lye d'Epinal, c'est que, ses mains par h-s bourgeois d'K|)iiial (3),
lorsque les bourgeois d'Epinal, las de la do- qui s'élaienl donnés au duc de Lorraine,
mination des evêqucs de Metz, se donnèrent, après que le roi de France Louis XI eut
l'an li'ci, à Charl. s \\l, roi de France, et cédé leur ville à Ihibaul, seigneur de Neul-
Ini prêlèreil serment de lidélilé, Conrard château, ileCh;1tel-sur- .Muselle, et maréchal de
llayer (h; Poppait, évéque de .Met/, ayant I?ourg>gnc, qu'ils ne voulurent point re-
demandé au roi la reslitiilion d'Iipinaî, cl connaître pour souverain; lequel acio est
voiil.inl prouver qu'elle avait toujours ap- p issé | ar-devanl quatre notaires, ()ui pren-
parlenu aux évêques de .Metz, qui en av.iieiil "enl la qualité de noiaires apo^toli;lues et
clé les fondateurs, ne remoiila point au impériaux en I église collégiale de Sa;nl-
Icinps de saint Coéric pour prouver son an- liooric d'Fpinal. Mais quoi()ue leur église eût
tiqiiilé, mais bien au temps de Thicrri 1", le li re de collégia'e, ces rhanoinesses se di-
qui en était le premier fondateur, aussi bien saient loujours religieuses, car l'an li7'i-,
•ine de l'abbaye. liené, duc de Lorr.iine, suivant le droit qu'il
'l'Iiicrri I" ayant donc fondé la ville et avait d son /oi/eux avènement à son duche(i),
'.'abbaye d'Epinal vers l'an 'J8-J, coniiiK! nous de pouvoir placer en ihaque monastère de
l'avons dil, lit transporter de .Metz le corps ses Etats une rrli;;icuse, présenta à l'abbesse
di; saint (îoëi ic, qui avait tonjours reposé d'Epinal, ,\lix, lille de Louis, seigneur de
dans l'église de Saini Sym|diorien, et le mit Dommarliu et d'Isabelle du ChàU'Iel S'in
dins le nouveau moiiaslère d'Epinal, auquel épouse, pour être reçue dame et religieuse
il donna le mmi de ce sainl. Ce prélat éianl en ce monastère, «n l'uisani pur elle les droits
mort a\ant d'avoir mis dans ce monastère oppiirleinnti à celle cijlise, cl lui donner et
des personnes qui y cliantassent le^ louanges délivrer tons les lii us, profits, honneurs et
ilu Sri|;neur, sainl Ad.ilbéroii M y assembla émolHmrnls que tes dames présentes par ses
d'abord des clercs, et donna ensuite ce mo- pridccesseui s y amient pris el reça<. Mais
nasière à des religieuses de l'ordre de Saint- dans la suite elles • ni pris le nom île clia-
Itenoil. C'est ce qui paraît par la \ ie de ce noinesses. Elles sont au nombre de vingl.
saint, écrite par Uicher, abbé de Sainl-Sym- Leur habillement de chov r est semblable i
phurien de Metz, auteur conlem|iorain, donl ci lui des chanoinesNCs de Uemir mont; l'ab-
l'original est chez les l'ère. Carmes Dé- bi'sse, la doyenne, el la secretle, au lieu de
chaussés de CIcrmont en Auvergne, et dont couvre-chcr, ont une espèce de guimpe, et
v'I) Maiiiisi rils de du Cliéne, ii l:i liiblioil.é<|ue du clmnes du rni. I.nyclte, Fn!ii:il n. 147.
Roi. vol. XII. {V im.. n. II;).
(tj liivcuiairc d» (jfrcs (/<■ tcrifliii.' au Trésor de (i) llul., », S'-i.
Itfl
EPI
KSG
182
I abhc's^e, aussi Imimi que les ,•^lt!(•^ cliaiioi-
liesses, porlciU <mi loul lenips et en (ou! lieu
un ni'.iaii bleu tic la larijcui- de (iii.ilre dorL-l',
par-dc'ssus l'ép^iule droite jusciu'à la haiiclie
gauclu', .-ivcc un nœud ;iu bout.
Joan. iMabil!., Annal. Oril. S- Henni, tom.
IV, pag. 21. iMurisso, lîisloire (les ct-rt/rteK île
Metz; ci Inventaire des litres de Lorraine,
au 'J'résor des chartes du roi.
Il y a encore en Lorraine deux auties
chapitres de tli.inoinesses sccnlièies, l'un
à l'oussay, proche la ville de MirecourI,
l'autre à lîousieres, à une lieue de Nancy.
Hernian, évêquc de Toul, avait jeté les fon-
dements du nionaslère de Pnussay dans
un lieu api)elc /-"o/f-Suove, qu'on a depuis
iionimé Poussai/: mais ce prélat étant mort
en 102(), son successeur, saint Brunon, qui
fut depuis pape sous le nom de Léon IX,
le fil achever, el y mil des religieuses, qui
dans la suite ont vécu en séculières, sous le
nom de clianoinesses. Celles de Bouxières
furent aussi fondées par un évéque de Toul,
iiommé Gozelin, au commcncemeni du dou-
zième siècle. Elles étaient autrefois rrli-
f^ieuses de l'ordre de Sainl-Benoîl ; mais elles
ont secoué le joug de cette règle pour se sé-
culariser sous le nom de clianoinesses.
Les ch;inoiursses de Saint-Pierre et do
Sainle-.Marie à Metz ne peuvent p.is nier
qu'elles n'aient été filles de Sainl-15tnoî(,
puisque ce n'esl que de nos jours qu'elles
ont piis le nom de cbanoinesses, el qu'elles
ont renoncé aux vtrux solennels. L'abbaye
iii' Saint-Pierre est très-ancienne; l'on pré-
tend qu'elle fui fondée par Eleutlière, duc du
palais des Français , sous les règnes de
1 bicrry el de Tliéodcberl, enfanls de Cbilde-
berl, et qu'il assigna à ce monastère des
fonds sulfisants pour l'entretien de trois
cents religieuses, auxquelles il donna saiule
Waldrée pour abbesse. Ce monastère fut
d'abord appelé Haut- M ou lier ou Marnwii-
tiir, el les relig-euses y vécurent avec be;iu-
coup de régularité; mais elles avaient déjà
quitté la lègle de Saint - Benoît dans le
dixième siècle, lorsqu'Adalbéron l", évéque
de Metz, employa, l'an 960, l'autorité dei'em-
percur Olhon pour obliger ces religieuses à
reprendre leur règle. Elles tombèieiil eu-
cure dans le re âchen.ent (juelques années
après : ce (lui obligea l'évéque Adalbéron II,
vers lan 10 0, d'y apporter la réforme. Et
comme le grand nombre de religieuses (jui
elaient dans ce nionaslère pouvait causer de
la confusion, il lit bâtir un autre monastère
à côté de celui de Saint-Pierre pour y mettre
une partie de ces religieuses, et servir de
noviciat à celles qui y voudraient faire pro-
cession de la vie niona?tique. Il fit bâiir d'a-
bord un oratoire, (]u'il dédia en l'Iionueur
de la sainte \ierge, et y fit mettre un cru-
cifix, devant lequel les novices Caisaienl leurs
vœux solennels : ce qui fil doniier le nom
de Bénil-Vœu à la rue où ce monastère était
situé; et les gens simples appelèrent ce cri;-
(1) Franc. Mod. dcOid. Kcclcs. Oriij.
(-) ^'-"J-t à la lin du vol., ii* ob.
cifix s.iint Uénit-Vo;u, ce nom lui étant resté
jus(iu'à présent. Lors(|ue l'on bâtit la cita-
delle de Metz, en 15G0, ce monastère fn'.
ruiné, el les religieuses furent (rausférées en
une mai-oi) qui appartenait aux chevaliers
(le .Malle, appelée le Pi tit-Saint-Jean. Jus-
que-là elles avaient été soumises au monas-
tère de Saint-Pierre, qui fut aussi transféré
dans la ville; mais elles se sont soustraites
de son obéissance. Plusieurs évèqucs ont
tâché inutilement de rétablir la discipline ré-
guli;''re dans ces deux abbayes; mais les re-
ligieuses, bien loin d'observer la clôture, ei
de reprendre les observance> régulières, oui
voulu vivre en séculières el en porter l'habit.
lîlli'S ont au chœur, comme les chanoincsses
de liemiremonl , de Poussay et de iinuxiè-
res, un grand manteau doublé d'hermine :
d'Iles do Saint-Pierre vont à certains jours
tu procession avec les chanoines de la ca-
thédrale.
Joan. Mabillon, Annal. Bened. t. III et IV.
Antoine Yepez, CInon. génér. de l'Ord. de
Saint-Benoît, t. Il et V. Mûrisse, Histoire
des évi'ques de Metz.
El{MITi''S. Voyez leurs noms spéciaux,
par exemple: Augustin (Ekmites de Saint-);
Jiîan-Bai'Usïiî (Kkmitks oe SAl^T-) , etc.
i'ui/rz aussi la Dissertation préliminaire, cl
le Suiiplément.
EUMl lES SERVITES. Voijez Servitiîs.
ESCLAVES DE LA VERTU. Voyez Hache.
ESCLAVONS (Moines).
Quelques auteurs, comme Modius et Dam-
man (1), ont parlé d'un ordre de moines
Esclavous dont l'habillement, à ce qu'ils pré-
tendent, était rouge, mais ils n'ont rien dit
de son origine; et Abraham Bruin, Joss(!
Ammanus Michel Colyn el Schoonebeck, ont
donné riiabillemcnl d'un de ces moines tel
que nous l'avons fait aussi graver (2). Ce
qui est certain, c'est qu'il y avait en Bohême
el en Pologne des moines (jui cékbraient
l'office divin en langue esclavone. Leur
monastère de Pologne était situé hors les
murs de Cracovie, au faubourg de Cléparz,
et fut fondé, sous le litre de Sainie-Groix, par
Ladislas IV, roi de Pologne, l'an 138J ou
1.J90. Ces moines furent tirés d'un monaslèro
qu'ils avaient à Prague, et par leur fonda-
l on ils étaient obligés de célébrer les divins
offices eu langue esclavone. C'est ce que
nous apprenons de Dugloz, de Miechovita et
deCromcrius, historiens poloiiai-^.
Uuglez, qui écrivait vers le milieu du sei-
zième siècle, et qui met la fondation de ce
monastère de Cléparz en l'an 138!), dit (3) que
de son temps les moines qui y demeuraient
faisaient encore l'office divin en langue escb-
vone: Wludislans secnndns Poloniœrex eum
consorte sun Ilediv'gi excitait exemplnri si-
mi'li quod in civitute Pragensi habetur monn-
sleriiim Sluvoruin ordinis S. Bmedicti, et tnb
ejus regulari ohservuniia duraturum, sub ho-
nore el titulo Sanctœ Crucis extra mitroé
(5) iMisldz, llist. Polmi. , lib. x, pag. tll.
»83
DICTIONNAmE DES ORDRES REI.IC.IF.UX.
Ï8l
t'rucoviense.'! m oppido CL'pnrz, non lonqe u
fjiimine Hudawa fub pontificatu l'elri Vilz
episcopi Cracoiieiisis, fundant et condnnt et
dotant, et pulcherrimo muro latericio. circtii-
litm Fratresqite ex monasterio Praijensi
tumplos ad iltam intruducuni n qnibus us-
qiie ad mea trmpnra et sub oculis meis ceclesia
illa SnnctcB Crucis, et in re divina, et in ma-
lutinis, horisque canonici^, cœleris/ue cccle-
ilnslicis cœreinoniis, sonoro cnnlu et leclione
idinmate slaionico per monachos fralresque
S. lienedieli officittbatiir et admifiistrabatiir.
Micchoïila, qui érrivail plusieurs années
après Dugloz. dit (1) aussi que ces reli'jicux
suivaient la rôijle de Saint-Benoit, quil lurent
fondés l'an 13Ji), et que dans sa jeunesse il
n'y avait plus qu'un prêtre qui célébrait dans
ce monastère la messe en laniiue csilavone :
Anno Domini 1390, fcria quinla post frsium
sancti Jacobi apustoti, rex Wladislaus r,itm
sua consurie lledtcigi vtonasteriitm Slavoruin
ord. S. Benedicti ex Praga sumptorum tituU
S. Criicis exIrnmurosCraeotienses in oppido
Cleparz fundavcrunt Ut voce, sonora lam
horas canoriicas quam missas in idiomate Sla-
vonico celelirannt et expièrent termn in
diebits pueritiœ meœ, prcfbylcr Slavus idio-
mate Slavonico cuntinuabnt.
J'ai éiril en l'oUigiie pour savoir s'il ne
serait point reste dans cette éplisi; de Sainle-
Croix du f.iuliourg de Cléparz à Cracovie,
quelques ani ieiis monuments i^ui jjussent
donner une plus ample connaissance de res
moines l'^sclavon*; et les ménioi es ((ui m'ont
été env'ijés de ce pays eu 1712 marquent
que celle église ayant été rebâtie nouvelle-
ment, il ne s'y trouve plus auitin tableau ni
écrit csclavon <iui fasse mention des moines
qui Tont \ ossédce. Il est encore marqué dans
ces mémoires qu'il y a à Cracovie des per-
sonnes âgées qui di-ent que devant la pre-
mière fiuerre des Suédois on faisait dans
cette église des prédications en langue cscla-
vone, et qu'il y a des act s qui portent
qu'elle a été desservie par des moines de
Saint-I5asile qui suivaient le rite grec. Il se
peut faire que quelques moines Moscov.tes,
qui sont tous de l'ordre de Saint-Basile,
ayant embrassé la religion ralho!i()ue, aient
•loillé leur pays pour s'élabiir en IJoliéme ,
où ils ont eu la pernùssion de suivre le riic
grec et de célébrer l'office divin en langue
Cïciavonc scion l'usage de Moscovie , et
(ju'il aient passé ensuite en Pologne, où ils
ont été appelés et établis à Oacovie par le
roi Ladislas IV. (jue quelques-uns disent
n'avoir été que le deuxième du nom.
(^e qui me fait croire que ces inoine^ l'.scla-
vons, ainsi appelés apparemment à cause
qu'ils célébraient leurofliec et sseen lan-
gue csclavone , pouvaient être sortis do
Moscovie, est la couleur de leur batiilleineiil,
qui était rouge ; car les moines Moscovites
étaient ainsi habillés anciennement; c'est
puur(]uoi j'ai mis ces moines Ksclavons au
rang des religieux de Saint-Basile, quoii|Uc
Dugloz, Miccbovila et quelques autres bisto-
riens polonais disent qu'ils suivaient la règle
de S.iinl-Benoit. Le motif qui peut avoir porté
le roi Ladislas à établir ces moines en Polo-
gne, et à les obliger à célébrer leur office en
langue esclavone, est pcul-èlre à cause que
la langue i olonaise, de même que la bohé-
mienne et la moscovite, tire son origine de
l'esclavone. Nous avons dit ci-devant à l'ar-
ticle B.vsii.k que les moines de Sai;il- Basile
dans la Bussie-Blanclie ou petite Unssie,
province de Pologne qui appartenait autre-
lois aux Moscovites, disent encore h ur office
en langue esclavone, en suivant toujours
le rite grec, et qu'ils ne renoncèrent à leurs
erreurs que l'an lo'J'i. C'est ce qui nous con-
firme dans l'opinion que nous avons que ces
moines Esclavons qui s'établirent en Bohème
el en Pologne pouvaient avoir été des moi-
nes Moscovites ou Itussiens qui avaient aussi
renoncé à leurs erreurs
ESPRIT (CiiANOiNKS nÉGiLiF.ns Associi;s db
l'ordre uu Saint-)
On sait qu il y a eu des chanoines régu-
liers sous le nom d'Associés de l'ordre du
Saint-Ksprit ; m lis on ignore, et l'annccî et
le lien de leur établissement, et ce qu'ils sont
devenus. Il y a néanmoins bien de l'app;»-
vence qu'ils ont subsisté, puisque l'on trouve
plusieurs éditions de leurs consliiulions ,
dont lieux se trouvent à la bibliothèiiuedu lloi,
l'une de Paris, in-li", de l'année 158"^. et l'au-
tre aussi de Paris, in-i% de l'année Ki'iO. Ces
constilulions furent approuvées par l'arche-
vêque de Bouen, les evéques de Bayeux et
de (]outance, et par plusieurs docteurs ,
comme il paraît par l'épîlre dedicat'jire de
ces constitutions.
C'isl d.ins cette épîlre dédicaloire. adres-
sée le '•• novembre 1588 au pape Sixte V,
que le fondateur de ces ch. moines se fait
connaître, lise nommaii Jean llerbetet était
Lorrain ; il dit au pape que sa mère, étant en-
ceinte de lui, le consacra à Dieu; qui- dans
sa jeunesse Dieu lui inspira un grand zèli;
pour son service, el qu'il eut toujours beau-
coup d'aversion pour tout ce qui élait con-
traire à ses cnnimandemeiils et à ceux de
l'Kglise ; que de|puis vingt -six ans, ou envi-
ron, il avait fait serment de s'o|)poser forte-
ment jus(ju'à la mort aux héréli()ues, aux
méchanis catholiques, aux ecclésiastiques
im()udii|ues, ivrognes, avares, et qui négli-
geaient le service divin; que depuis vingt-
deux ans il avait tous les jours célébré la
sainte messe, excepté seulement trois jours
qu'il en avait été empêché par des personnes
qui s'opposaient à son institut, et qu'il aimait
mieux miiurir que d'être privé pendant un
seul jour d'offrir le sacrifiée adorable de nos
autels ; i)u'ciifin il avait été inspiré de Dieu
d'instituer sa congrégation, qui est divisée
en une «onfratcrnité et en un ordre de cha-
noines du Saint-Ksprit ; que la confraternité
est pour tous les catholiques de l'un et de
r.iulrc sexe; qu'elle éijit déjà fort étendue
en Normandie, principalcmeut dans le dio-
(l)Malli. uc Mietbjvila, C/iro». l'vhn., lit» x, rap. 19.
18.-)
ESP
ESP
186
cèse de Coiilaiirc, cl que les sl.iluti en
avaient élé approuvés pir le cardin.il de
lîourbon, arclievêque de Ilouen, par le« évo-
ques de Coulaiice et de lîayeui et par plu-
sieurs docteurs en théologie des universités
de Paris et de Caen; et il présente ces sta-
tuts au pape, avec ceux qu'il avait dressés
pour les cliaiioini's, pour en avoir la coiifir-
nialion de ce pontife; niais nous ne savons
pas s'il la lui donna.
Conformément à ce> conslilulions , ces
chanoines, s'ils étaient prêtres, devaient cé-
lébrer la messe tous les jours; et s'ils ne
l'élaienl pas, ils devaient en enlendrc une
tous le< jours, et plutôt deux les fêtes et les
dimanches. Ils s'employaient à l'inslruction
de la jeunesse; c'est pourquoi ils avaient des
colléfçes, et dans ceux où ils n'avaient pas
beaucoup d'écoliers, ils pouvaient clianter
tous les jours l'office divin àléglise, si quel-
que fondateur le demandait, et seulement les
fêles et dimanches dans les collèges où ils
avaient beaucoup d'occupation. Les reli-
gieux delà communauté, (H rnênie les do-
mestinne-i, devaient laire absiinence tous les
mercredis de l'année. Si l'on ne trouvaii p;s
de poisson, ils devaient se conlenler de lé-
gumes, lîii mémoire de la passion de Nutre-
Srigucur. ils jeûnaient tous les vendriMlis, à
moins qu'il ne se rencontrât unjeùned'Kglisc
dans la semaine, et il était libre à unchacm
de s'abstcnirdu vin le vendredi, par morlifica-
lion, et de jeiJner pendant l'avent : personne
n'était aussi obligé au jeûne depuis Pâques
jusqu'à la Pentecôle; et si, étant en voyage
ou pour quelque autre raison, ils ne pou-
vaient satisfaire au jeûne du vendredi et à
rab>liiience du mercredi, ils devaient dire
ou les sept psaumes avec les litanies, ou
trois fois le cbapeltl, ou donner cin(| sols
aux pauvres de re qu'on leur accordait pour
leur usage, et dans ce nombre étaient com-
pris les curés et les »icaires qui étaient oc-
cupés à administrer les sacrements aux fi-
dèles. T>)us les dimanches ils se confessaient
à un prélie de la congrégation, et, hors le
collège, à un aulre prêt e approuve par l'é-
véque, ( t au moins lous les ans ils devaient
faire une confession générale à leur prov n-
cia! ou <i son vicaire. Ceux qui n'étaient [las
dans les ordres sacrés communiaient seuli-
nienl une fois le mois ; ceux qui étaient dans
les ordres sacrés, toutes les semaines, [irin-
cipalemenl les dimanches et les fêles, alin de
s'accoutumer à s'approcher de la sainte ta-
ble, où ils devaient, étant prêtres, tous les
jours célébior la messe. Tous les prêtres,
diacres, sous-diacres et bénéficiers, étaient
obligés de réciter ou ch.inter les heures ca-
nonialc-i ; et ceux qui n'avaient pas les or-
dres sacrés , seulei it l'olfice du Saint-
Esprit, ou de la sainte A'ierge, ou les sept
psaumes de la jiéniteiice. Il y avait des
heures destinées pour l'oraison mentale, et
lexamen de conscience se faisait soir et
malin. Leur habilicmenl devait être honnête,
semblable à celui des chanoines, des doc-
teurs, ou des régents des universités, sans
aucune supcrfluité; ils avaient toujours le
bonnet carré dans la maison, et ne portaient
le chapeau que quand ils sortaient , et ils
mettaient à leur cnu une croix d'or ou d'ar-
gent, selon la qualité des personnes, et ils
la pouvaient attacher sur leur habit exté-
rieur, avec la figure du Saint-Msprit en forme
de colombe descendant sur les apôlres. Voilà
tout ce que nous savons de ces chanoines ;
nous donnons seulement encore ici la fur-
mule de leurs vœux.
l'Jgu N., licet non sim (liinns conspectu Dci
optimi marimi, iiinini in/inila fjus bonitale
et cleme.ntia,hodie jjTofcsfii ii'm farin in or-
(line Siiiriliis Snncti, ei'ine in co vulum ptcio
fol''miie (ic p/rptiliiuin ohrdienliœ et ca:itil(ilis
e! abdicationis prnprielntis lionorum lenipo-
rnlinm coram cœl'sti euriti etniililanli Eccle-
sid inler manus luas [II. domine) eiiiue et tihi
et toti asiociiilioni Spirilim Sancli, sancic
prnmilto et jiiro et vooco me perpétua in ea
vicluriini, servienu Deo cl Eeclesiœ Cliristintiic
cl cathulicœ, aposlolieœ et Ilomanœ, itsjue nd
mortem, omnia intellif/mdo, fid'nvjue, elpie-
tntcm, et mores, et studia nien dirigendo juxtn
eJHs (issociiitionis eonslitulionis a M . Jonnne
llerbetio pcr graliam Dei ivntlulure prœscri-
ptds, et a summo ponlifice probnlns aut per-
mifsas. A tua ergo imtnensa bonitale et de-
mcntia humililer pelo (opiiinc et clemmtis-
sime Deus) m( gui milii dedisti hoc sanctum
desiderium, sic etiam ail id uwlius et io'jtfo-
rius, inlegrius et protnpHus ndimplendum,
gratin Spiritus sancli, ubcrior(S inilii bénigne
largiaris ad majorem , sancttoi cm et clarioreiii
Di i Patris,et filii, (t Spiritus sancli gloriam,
et popuii Chrisdani , polissimum association s
Spiritus Sancli, sanctam institut ionem, incre-
mentum acdignil'ilem et meampluriniorwngue
sidiitem. Anien. On peut consulter les Constitu-
tions de celle congrégation, qui sont sous lo
litre de Liliri très de Legibus CiUegiurum
Ordinis Canoiiicorum S. Spiritus, instilu-
tore Joanne llerbetio.
iiSPUIT (Chevaliehs diî l'ordue du Saiî(t-),
en France.
H<'nri 111, roi de France cl de Pologne, pis-
s.int par Venise à son retour de Pologne
]:our venir prendre possession de la cou-
ronne (!e France, la république de Venise
lui lit présent de l'original des sta'uls de
r<irdre i.u Saint-Espnt-au-Droil-Desir, ap-
pelé aussi du Nipud, dont Louis de 'farenle,
roi de Jérusalem et deSieile, époux de Jeanne
I", reine de Naples, avait été l'insiluleur,
et lui avait donné le nom du Saint-Esi^rit, à
cause que le jour de la Pentecôte il avait élé
couronné roi de Jérusalem et de Sicile. C'est
ce qui (il nnîlie la pensée à Henri lli d'ins'i-
luer aussi un ordre inilit lire suus le nom du
Saint-l'lspril, à i au>e que le jour de la Penie-
côle de l'année lo7.'J il avait été élu roi de Po-
logne, et qu'il avait succédé au royaume de
France à pareil jour de l'année suivante
157'i., après la mortde Charles IX, son frère.
Le Laboureur, dans ses Additions aux Mé-
moires de Castelnau, dit que ce prince, ayant
reçu d(! la république de Venise les staluli
de l'ordre du SainlLspril au-ltroil Dési' , ius-
IS7
DlCTlONNAlUt': DES ORDRES RKLIGII'LX.
m
lituc par Louis de Tarciili', rôsolul de s'dp-
l'iiipriiT rel ordre, comme s'il avail do do
!-oii iiiveiilion, cl qu'.iprès avoir copié e'
iiDiiiiiiciilc les slaluts, il donna ordre au
cli.incclicr de Chivoriiy de les biùlcr ; m lis
ijuc ce ministre se (il une conscience de laire
périr un si rare manuscrit, le<)iiel, outre le
mérite île son sujet et d(! son antiquité, él.iit
encore fort estwnalile pour les helles rninia-
lur.'S en »élin où l'on voit ce qui e--t contenu
en cliaouc rliapitre deces statuts ; (|ue ce li-
vre eilinl ensuite en paita^e à l'Iiilippc Hu-
riu(, év((iue de Chartrc-:, fils du sieur de
(".liiverny, cl qu'il lomlia enlinenlre les mains
de .M. le président de Maisons. Ainsi, se on
cet auteur, l'ordre du Sainl-I>;spril de Fiance
n'est antre cliose que celui de Naples ; ce
i|ui ne parait pas viaiseinhiabic : car si l'on
compare les statuts de l'un avec ceux de
l'autre, il est facile de juger, par la dilîé-
reiicc (|iii s'y trouve, que ces deux ordres
ont été faits iudépendanimcnl l'un de l'autre,
la conronnitc (jui s'y renconlre ne consis-
tant uiii(iuenient qu'en ce qiic Louis de Ta-
renle et H. uri jll eurent le même nxilifen
les inï-litiiani, le prcmiurnc l'ayant l'ail qu'à
ciuse (|u'il av.iii clé couronné roi de Jéiusa-
lem cl lie Sicile le jour de la i'enlecote, cl
((lie Henri III à paicil jour avail été élu roi
de roIi);.Mie, et qu'il avaiisurcédé au royaume
de Fr.uice, ce (jui n'était pas une r.iison assez
forte pour l'obliger à supprimer les statuts
de l'ordre du Saint-Espril-au-Droit-l>ésir
afin d'en abolir la mémoire, (|ui d'ailleurs
se serai conservée par les monuments qui
sont encore aujourd'hui dans Naples, et par
le témoignage de plusieurs écrivains.
(Juoi ()u'il eu soit, ce ne fut ()ue plus de
quatre ans apu's que Henri lli cul reçu l'o-
riginal des statuts de l'oidre du Sainl-Lsprit-
au-I)roit-Uésir ((u'il institua, au mois de
décembre de l'an lo7S, un onire militaire en
l'honneur et sous le nom du Saint-Lsprit.
Son intention ne fut point d'abolir lacitc-
meiil celui de Sainl-.Michel, comme (|uclques
auteurs ont avancé, puiscjue, par ses lettres
patentes pour lin lilutiun de l'ordre du Saint-
Kspril, il déclare (ju'il veut et entend que
relui de Sainl-.Michel demeure en sa force et
viijucur et soil oliservede la même manière
qu'il l'a clé depuis son institution. Nous
iivuns misé, dit ce prince, iiirc nuire très-
lunioi ce diime el ni^re, ô Ini/urlle noim ricon-
nuissuns uvoir, (iprès Dieu, noire principale el
entière obliijalion , lei princes de noire sany,
el aitir s princes el uf/iciers de noire cou-
ronne, et fegnrurs de norc conseil, étant
prés de nous , d'éri/cr un ordre niili'aire en
cellutj iKili e dit roi/uume, onli e celui de l\lon-
neur saint Michel, hi/ttel nnus voulons el i n-
leiidons demeurer en sa force el vigueur cl
être olisi-rré tout ainsi r/u'il a clé pralii/uc de-
puis sa première inftiinlion jusr/ucs à présent.
l'.t 1 aji>u!c cn>uil(; : l.e/uel ordre nous créons
cl itlsiiiunns en riioiineur et sous le nom el li-
tre du bnitit Sainl-li>pril, pur l'inspiration
duffufl, comme il a plu à iJ.eu ci-devant dt-
ri'/(r nos meilleures et plus hearcu.-es actions,
nous le supplions aussi (/u'i! j tins fasse la
i/rilie que now voyions liientôl lous ras su-
jets réunis en la foi el religion cahniique et
vivre d l'avenir en bonne amitié cl concorde
les ttns avec les aufr s, sous l'oliservation en-
tière de nos lois tl l'ohéissanc de nous et de
nos successeurs roii, à son lioi nnir el gloire,
à la louange des lions el confusion des mau-
vais, qui esl le but auquel iende:il nos pensées
et actions, comme au comble de notre plus
grand heur et félicité.
(>elle prière el les désirs de ce prince té-
moignent assez quelle élai! sa piété, cl (|u'il
n'y a rien eu que de saint dans l'instilu ion
de son ordre, ce qu'il a\ ail plus cxpressé-
menl déclaré un peu auparavant d.ms ses
mcnics lettres palcnles. où il dit encore
qu'ayant adressé ses v(i>ux et mis louie sa
conliaiice dans la bonté de Dieu, dont il re-
connaît avoir el tenir tout le bonheur de
celle vie, il est raisonnable qu'il s'en res-
souvienne, qu'il s'efTorce de lui en rendre
des grâces iminorlelles, cl qu'il témoigne ei
toute l.i postérité les grands bienfaits qu'il
en a reçus, particulièrement en ce qu'au
niiiieu de lant de dilTérentes opinions au
sujet de la religion, (|ui avaient partagé la
France, il l'a conservée en la connaissance
de son saint nom dans la profession d'une-
seule foi calboliquc et en l'union d'une seule
Kglise, apostolique, et romaine. De ce qu'il
lui a plu par l'inspiration du Sainl-Ksprit W.
j'Uir de la Penlecôlo, réunir tous les cœurs
c. les voloislés de la noblesse polonaise, c!
porter tous les lîlats de ce royaume Cl du
duché de Li liuanie à l'é ire pour roi, el de-
puis à pareil jour l'appeler au gouvernemcnl
du royaume <lc France; au mo\cn de quoi,
ajoute-l-il, tant pour conserver la mémoiredu
toutes ces choses que |)Our fortifier et main-
tenir ilavaotage la foi el la religion calboli-
quc, cl |)0ur décorer et honorer de plus en
plus la noblesse de sou royaume, il institue
l'ordre militaire du Sa!nl-lîs[iril.
Des expressions si pieuses ne sonl que
trop suffisantes pour faire voir les bonnes
inteiilions de c^' prince. Cependant, comme il
y a ••erlains caractères d'esprit qui ne peu-
vent s'cmpècher de donner un mauvais sens
aux actions les plus saintes el les plus jus-
tes, I institution de l'ordre du Saint-Esprit
n'a pas ir.anqué d'interprétations anlanl in-
justes que cliiméii(iues, puisqu'on l'a pluli')l
ailnbuée à des mystères d'amouretics que
de reli;;ion. Le vert naiss ni, dil le Labou-
reur,/cjum/ei/o/c', hbleuet Ichianc, élaicnttcs
couleurs de la maîtresse d'Henri III : les dou-
bles MM qu'il fil mettre au collier de l'ordre
ilésiijnaiciil son nom, el Irs itcux lettres grec-
ques qu'on appelle lilta entrelacées ensemble,
i/iii dans la rencontre du cercle formaient un
phi grec pour signifier fidrlla, devaient ser-
vir d'assurance dt celte fidélité qu'il lui ara l
jurée, el qu'il ne continua pas longtemps. Les
Il qui furent ajoutées aur chiffres des double»
MM, miirquaiiul le nom du roi, el les fleurs
de lis dans les flammes rcpréseniaienl le feu
de son amour. Ce <|ui est donner ainsi une
mauvai.->o interprétation aux intenli<uis de eu
[iiincc. .\ la vente il ne s'est puinl expliqua
IK9
ESP
ESP
VJO
sur la signilicalion des cliilïrcs qu'il fil mot-
lie au collier ; mais ne peul-on pas croire
qtie les d(5ul>les delta entrelacés ensemble
qui, par la rencontre du centre, comme dit
le Laboureur, formaient un phi grec pour
signifier pdeitu, marquaient la fidélité que
les sujets doivent à iiur prince? Les doubles
lambda, qui, selon Favin, désignaient le nom
de la reine, qui s'appelait Louise, ne pou-
vaient-ils pas plutôt signifier la loyaulé et
riiommage que les cbevaliers doivent à leur
souverain? Les doubles MM, la magnanimilé,
qui est la vertu des héros dont un chevalier
doit faire profession? El les flammes, ces
lani;ues de feu sous la figure desquelles le
Sainl-Espril descendit sur les apôtres dans
le saint cénacle le jour de la Pentecôte? Ce
qui semble une inlerprélalion beaucoup plus
naturelle (lue celle des mystères d'amouret-
tes, et qui est entièremenl conforme aux
termes de ces lettres patentes, par lesquelles
les chevaliers sont excités à demeurer fer-
mes dans la religion catholique, dans l'a-
mour de Dieu, dans la fidélité à leur roi et
dans la pratique de toutes les vertus, dont
les lettres et les flammes qui composaient le
colliir (le l'ordre étaient le symbole.
il se irouve plusieurs exeinplaii es des sta-
tuts de cet ordre, diiîérenls li's uns des au-
tres, et qui ont été tous siii\is chacun dans
leur temps. Les derniers qui ont été impri-
înés en 1703 et qui sont les plus corrects,
conlienni ni (]ualre-vingl-qu nze articles, qui
porleui , ei)lie autres those.s, qu'il y aura
dans cet ordre un snuverain chef et grand
maître qin aura toute autorité sur tous les
confrères, commandeurs et officiers, et à qui
seul il .-ippariiendra de recevoir ceux qui en-
treront dans cet ordre. Henri III s'en déclara
chef et souverain grand maî're, et unit la
grande maîtrise à la couronne de France,
sans qu'elle puisse en être séparée. Les rois
S(•ssucce^seurs ne peuvent disposer en façon
quelconque de cet ordre, des deniers qui y
sont alïoclé-, ni ilis|i0Sfr d'aucune commcn-
ile, quoiqu'elle soi! vacante, qu'après avoir
été saires et couronnés; et le jour de leur
sacre et couronnemenl, ils iloivent être re-
quis par l'archevêque de Reims, ou celui qui
lait la cérémonie du sacre, eu présence des
douze pairs ( t officiers de la couronne, de
jurer l'observation des statuts de l'ordre, se-
lon la forme prescrite par les mêmes sta-
tuts, ce qu'ils sont tenus de faire sans en
pouvoir être dispensés pour quelque cause
que ce soit; cl le lendemain du sacre, le roi
reçoit l'habit cl le collier de l'ordre par les
mains de celui qui le sacre, en présence des
(MCil naux, prélats, commandeurs et ofiiciers
de l'ordre. C'est pourquoi Henri III ordonna
c.ue la lorme du serment serait insérée et
tryuscrile au livre du sacre, avec les autres
serments que les rois sont tenus de laire
avant que d'étie couionnés ; et comme ce
pri;ice avait déjà été sacré et couronné, il se
réserva la liberté de prêter serment enire les
i:i;iins de l'archevêque de Ueims ou d'un au-
tre évéïjue qu'il lui plairait en la première
assemblée de l'ordre du'il liendrail.
Des mémoires portent que colle assem-
plée se Uni pour la première fois le dernier
décembre de l'an 1578, dans l'église des Au-
gustins de Paris. Sa Majesté s'y rendit sur
les deux heures, tous les évêques et abbés
qui avaient été mandés s'y trouvèrent, et pa-
reillement les princes et seigneurs qui de-
vaient être reçus dans l'ordre, tous revêtus
de chausses et pourpoints de toile d'argent
sous leurs habits ordinaires. Dans le chœur
de l'église, à main droite, on avait dressé un
Irône pour le roi, couvert de drai) d'or et
d'arijenl, semé de fleurs de lis, avec un dais
au-dessus de pareille étoffe; au bas du trône
il y aval! des bancs pour les officiers, en la
manière que l'on avait accoulumé d'obser-
ver aux térémonies des fêtes de l'ordre de
Saint-Michel. A l'entrée du chœur, à main gau-
che de Sa Majesié, étaient placés les prin-
ces et seifjneurs qui devaient être faits che-
valiers, selon leur rang; et il y avait d'autres
bancs pour les ambassadeurs et les sei-
gneurs de la cour. Après ((ue les vêpres eu-
ronl été chantées par la musi(iue du roi, ce
prince se leva, descendit de son trône, et, ac-
compagné des olficiers de l'ordre, alla de-
vant le grand autel, où s'étanl mis à genoux,
le grand aumônier, assisté de cinq évêques
et alibés en habiis pontifie aux, l'un lenanl la
vraie croix, et un autre le livre des Evangi-
les, présentèrent à ï^a Majesté son vœu et
serment de chef et grand maître souverain
de l'ordre du Saint-Esprit, qu'il prononça
en cette manièie : Nous Henri, par la grâce
de Dieu roi de France et de Pologne, jurons
el voiiuns suleinm lleihent en vos viains à Dieu
le Créateur, de vivre et mourir en la sainte
foy el religion cafholigue opostoliqne et ?o-
ini>te,ci)tmne à un roi Ires clinstten appar-
limt, et plustost mourir que d'y faillir : de
maintenir à jamais l'ordre da Saint-Esprit,
fondé et institué par notis, sans jamais le luis-
ser declieoir, amoindrir, ne diininutr, tant
nu' il sera en nustre pouvoir: observer Us sla-~
luis et ordonnances dudit ordre, entièrement
selon leur forme et teneur, el les faire exac-
tement observer pur tous ceux qui sont et se-
ront cy-aprés receus audit ordre, et pur exprés
ne contrevenir jamais ni dispenser, ou essayer
de chanqer, ou innover les statuts irrévoca-
bles d'iceluy. Sçavoir est le statut parlant de
l'union de la grande-maistrise à la couronne
de France : celuy contenant le nombre des car-
dinaux, prélats , commandeurs et ofjiciers :
celuy de ne pouvoir transférer lu provision
des commandes , en tout ou en partie, à au-
cun autre sous couleur d'appaniije ou con-
cess on, qui puisse estre. Item celiiy par le-
quel nous nous obligeons en lanl qu'à nous est,
de ne pouvoir dispenser jamais les comman^
deurs et ofjiciers receas en l'ordre, de com-
munier el lecevoir le précieux corps de jVos-
Ire-Seigneur Jesus-Christ, aux jours ordon-
nez, qui sont le premier jour de l'an, et le
j.iur de la Penlecosie. Comme semblablemenl
celmj pur lequel il est dit , que nous et tous
coinmandeurs el ifficiers ne pourront estre au-
ires que caliioliques el gentilshommes de trois
races paleriielles, ceux qui le doivent estre.
1M mCTIONNAinC DESOKimES ril'LIGIEUX. lilj
Jtcm C'Iuy par le.jui-l nnHx ostunx lont pou- comme souverain de l'ordre des commamleur.'t
voir d'emidoyer aillfurs les denien u/fecliz du Saint-Kspril, duquel il vous plai( prc-
nii revenu el enirelrneiniiit dcsdiis comiiiau- ienleinent m honorer : qarderuy et ohservrrny
deurs et of/iciirs, pour quelque lause et occa- lestoix. statuts cl ordoiiiianres dudit ordre,
tion que ce soii, ni admettre nudit ordre nu- sans en rien contrevenir: en porlerny Us
cuns etranqers, s'ils ne sont naturalisez et re- marques, et en diray tous les jours te service,
'jnicoles ; et pareillement celaq auquel est con- autant qu'un homme ccclcsiastique de ma qua-
lenti la forme des vœujc, et l'obliqation de por- lite peut el doit faire : que je comi>aroiiri:y
1er toujours la croix aux habits ordinaires, personnellement aux jours des silemnitez, s'il
avec cille d'or au cou, pendante A un ruban « // a empescherrent legiiime q.tim'm qnrde ;
de soye couleur bit ui' céleste, el l'hahit aux comme je donneraq aris à Y astre Majesté', et
jours destinez. Ainsi le jurons, ro'dons, el ino- ne reveleraq jamais chose qui soit traitée ni
mettons sur 'a sainte vraye croix, et les saints conduit a ix chapilns d'iceluy : que je ferny ,
Evantjilcs touchez. \.c roi, .-ipiùs avoir |iro- conseilleray, el procureray tout ce qui win
nonci^ fc viL'u, cl l'nvoir siiiiic do sa miiiii, semblera en ma conscience r.ppartrnir à la ma-
ful revi'iu du riiaiiicati , ijui lui fui donne iiutenlion, grandeur et auqmenlation dudil
par celui qui siTvail de premier tieiililliomuic ordre , prieray toujours Dieu pour le salut,
de sa rliarnlire, et le uratul aumoiiier lui mil tant de V ostre Majesté que des commandeurs et
le ctillicr au cou, cl rcciia quelques prières, supports d'iceluy, vivans et trépassez. Ainsi
après lesquelles le roi se leva cl dfscendit Dnu me soit en aide et ses saints Hravgiles.
un peu plus lias où élail un sioRc, sur lequel Ouant aux aulies clievaliers et commaii-
il s'assii. Le tliam elier de Cliiveruy se pré- (leurs, nul ne peut èlrc admis dans l'onlrc ,
scnla devant Sa Majesté pour cire fait tlie- s'il ne fail profession do la religion calholi-
valicr de ccl ordre; il se lail à genouv cl que, apostoli(]ue et romaine, s'il n'est !;ciiMI-
ajaiil les mains sur les saints Mvaniii es, il homme de nom cl d'armes de Irois rares p.i-
•ii le scrmcnl, cl après avuir clcre\èludu lernclics pour le moins, et n'ait iwiur le re-
grand manteau, le roi lui mil au cou le collier, j;ard des princes vingt-cinq ans accomplis,
et ainsi des autres ofliciers el des cardinaux ; cl trenic-cinq pour les aulris. D'.Miord il
le cli.inceli' r de ('.liivernv reçut aussi les suflisait ((uc lous les chevaliers eussi'nt vinat
sceaux di' l'ordre, qui lui furent donnés par ans, cl c'est un des cliaigcnicnls qui ont élc
Sa Majesté. Les olficiers étant créés, le pré- faits aux slaluls. Le roi, ayant fail choix des
*6t m.'îlre des céién.onics, le héraut el sujets qu'il veut honorer de ccl ordre, les
l'huissier, allèrent (juerir le plus ancien des propose dans le chapitre ans prélats, com-
princcs et seigneurs qui devaient élrt; faits maudeurs cl ofliciers, afin ()ue chacun donne
chevaliers, et après qu'il eut reçu l'ordre, is son avis sur leur recrption, el dise en con-
allèrcnt prendre les autres de mômi; à leur science à Sa Majesté les raisons qui pour-
rang. Il y eut d.ins cette pi emièrc promotion raient cm[)ècher (]ue quelqu'un des prélen-
vingl-huil clie\aliers de rcrus. danls ne fut reçu. S'ils sont trouvés diijncs
Les rois de France su<-(csspurs d'Henri III d'entrer dans l'ordre, on les fail avertir qu'ils
ont l'ait après leur sacre le même serinent quii siml reçus, cl on leur envoie les commis-
'■eprincelit lorsqu'il reçutleprcmierlecollier sions nécessaires, luit pour faire faire les
de l'ordre qu'il avait iiisliluè, ou <'i peu près preuves de leur religion, de leur vie cl do
semhlahle, et ont tâchede donner un nouveau leurs mœurs, que de leur noblesse cl extrac-
lustrc à cet oïdie, dans lequel il doit y avoir lion ; et les procès-vcrhaux en ayant élc
quatre cardinaux cl quatre archevêque» , remis entre les mains du chancelier, ils
l'véquis ou prélats, outre le grand au-i.ônicr doivent faire faire à leurs dépens les hahits
de rr.mce, (]ui est cummaudeur de cet ordre de l'ordre, sans être obligés d'eu emprunter
aus>ilôl qu'il est puuivu de lacliaige de pour assisli-r aux céréiiioiiies. Le dernier
grand anumnier, sans être oblige de (aire jour de décembre est marqué dans les sta-
preu»es de noblesse comme les autres. Tous uits pour donner l'habit et le collier de l'or-
ccs prel.ils purleul la croix pendante à leur dre, et la cérémonie s'en doit faire après vê-
«ou, avec un ruban bleu. Ils sont obliges |;res dans l'église des Augusliiis de Paris,
d'assister aux fi'tes el cérémonies de l'ordre, lorsque le ri i est ilans celle ville. Aiiciiii
les cardinaux avec leurs grandes chapes rou- elnvalier commandeur n'est admis à l'ordre
ges, cl les é\éqiies et prélats velus de sou- du Sainl-I'!sprit, qu'il ne soit aussi chevalier
l.inrs de couleur violetie, avec un mantelil de celui de saint Michel : c'est pourquoi, l;i
de même couleur, un rochet et un camail, et veille qu'il doit recevoir l'habit et le l'ollier
sur le manlelel il y a aussi une croix de jn Sainl-lCsprit, il est fait chevalier de l'or-
1 ordre en broderie. Au jour (jue l'o fice se die de Sainl-Mirhel. Il se ni' t à genoux dc-
f.iit pour les chevaliers decéiles, les cardi- v..nt le roi, qui le fiapjje légèrement sur hs
naux porleiil les ih.ipcs violettes, «l les pré- épaules avec une cpéc nue, en lui disant : De
lais sont velus de noir. Chacun de ces carUi- p ,,• .uiint (îeorqrs et de jiur .•■aint Michel je
naux et prélats est obligé, le jour de sa re- vous fiis chevalier. Le lendemain il se Irouvn
ception, de faire ciilrc les mains du roi ce à l'église avec les antres chevaliers, ayant
nTii\eu\: Je jure à Dieu el mus promets. Su e, rh.ibil de novice, qui est un habit blanc de
qu je vous srray luyal et fidèle toute ma vie, lojle d'argent, avi-c la cape cl la loque noi-
toii.i rcconnoilray, honoreray ei serviray , re ' H. Il se met encore à genoux devant lo
(I) Voy., à |j tiii du vul., Il" jt'.
10"
ESP
toi, à qui le cliancelier présente le livre îles
livangiles, sur lesquels le novice tenant les
mains fait son v eu et serment en celle ma-
nière : Je jure et roue à Dieu en ta face de son
Hglise, et vous promets. Sire, sur ma foi et
honneur, que Je vivrai et mourrai en li foi
cl riiigion t-alliolique, sans jamnis m'en dépar-
tir, ni de l'union de notre mère sainte lùjlise
(ipostolii/ite et romaine : que je vous porterai
entière et parfaite obéissance, sans jamais y
mnnijuer, comme an bon et loyal siij."'. doit
faire: je tjarderai, deffendi ai et soutiendrai
de tout mon pouvoir l honneur, les querelles,
cl droits de Votre Majesté royale, envers et
contre tous : (jit'en temps de guerre je me ren-
drai à votre suite enréijuipa/e tel qu'il appar-
tient à personne de ma qualité, et <n paix,
quand il se présentera quelque occasion d'im-
portance, Coûtes et quantes fois qu'il vous plai-
ra me mander pour vous servir contre quelque
personne qui puisse vivre et mourir, sans nul
excepter, et cejusqaà la mort: qu'en telles
occasions je n'abnulonnerai jamais votre per-
sonne,ou le lieu oà vous m' aurez ordonné de ser-
vir, sans votre exprés congé et commandement,
signé de votre propre main, ou de celui auprès
duquel vous m'aurez ordonné d'estre , sinon
quand je lui aurai fait apparoir d'une juste et
légitime occasion: que je ne sortirai jamais de
votre royaume spécialement pour aller 'lu sei-
vicc d'aucun prince étranger sons votre dit
commandement, et ne piendrai pension, ga-
ges, ou estât d'autre roi, prince, ou potentat
et seigneur que ce soit, ni m'oblige ai au ser-
vice d'autre personne vivante que de Votre
Majesté seule, sans votre expresse per.nission :
queje vous révélerai fidellemenl tout ce que je
saurai ci-aprés importer à votre service, à l'é-
tal et conservation du présent ordre du Saint-
Esprit, duquel il vous plail m'Iionorer, et ne
consentirai ni permettrai jamais, en tant qu'à
moi sera, t/u'il soit rien innové ou attenté con-
tre le service de Dieu, vi contre votre autorité
royale, et au préjudice dudit ordre, lequet je
mettrai peine d'entretenir et augmenter de tout
mon pouvoir. Je garderai el observerai très
religieusement tous les statuts et ordonnances
d'iceliii : je porterai à jamais la croix cousue :
et celle d'or au rott, comme il m'est ordonné
par lesdils statuts ; et me trouverai à toutes
les assemblées des chapitres généraux, toutes
les fois qu'il vous plaira me le commander . ou
bien vous jerai présenter mes excuses, les /iiel-
les je ne tiendrai pour bonnes , si elles ne
sont approuvées et autorisées de Vostre Ma-
jesté, avec l'avis de la plus gronde part des
commandeurs qui seront jjrés d'elle, signé de
votre main, et scellé du scel de l'ordre, dont je
serai tenu de retirer acte.
Après que le chevalier a prononcé ce vœu
et serment, le prévôt et maître des lércnio-
nies présente au roi le manlelet de l'ordre,
qui en le donnant au chevalier lui dit : L'or-
dre vous revêt et couvre du mant,au de son
amiable compagnie et union fraternelle , à
l'exaltation de notre foi et religion catholique:
au nom du Père, du Fils, et duSaint-Espril. Le
grai d li'ésorier présente ensuite à Sa Majes-
té le collier, (juVlle iiiel au cou du chevalier,
ESP |î>!',
en lui disant : Recevez de notre main le coi-
lier de notre ordre du benoist Saint-f'Jsprii,
auquel nous, comme souverain grand mniirc,
vous recevons, et ayez en perpétuelle souve-
nance la mort et passioii de Notre-Seiqneur
et Rédempteur Jésus-Christ. En signe de quoi
nous vous ordonnons de porter û jamais cousue
en Vos habiss extérieurs la croix d'icelni,et la
croix d'or au cou, avec un ruban de couleur
bleue céleste, et Dieu vous fasse la grâce de ne
conire venir jamais aux vauix et serment que
vous Venez de faire, lesquels ayez perpétuelle-
ment en votre cœur, éiani certain que si voiis
y conlrev 'nez en aucune sorte, vous serez pri'
vé de cette compagnie, et encourrez les peines
portées par les Ualuts de l'ordre. Au nom du
Père, du Fils, el du Saint-Esprii. A ((uoi le
chevalier répond : Sire, Dieu m'en donne la
grâce, el plutôt la mort que jamais y faillir ,
remerciant 1res humblement Vostre Majesté de
l'honneur et bien qu'il vous a plu me faire ; el
en achevant il liaisc la main du roi.
G imme j)nr le serment il est expres-.émeiit
porlé que le> chevaliers commandeurs ne
s'ohligeronl au service d'aucun prinrc étran-
{,'er, ce qui ne pouvait élre ohservé par ceux
qui n'étaient pas sujets du roi de France ,
c'est ce qui lit qu'Henri lli déclara par lo
37° article des statuts qu'aucun étranger,
s'il n'était regnicole et naturalisé flans lo
royaume, ne pourrait être reçu dans l'or^lre,
ni pareillement les Français qui auraieni
déjà quelque autre ordre, excepté celui do
Sainl-Mictiel. il execpla aussi les cardinaux ,
archevêques et évoques, et pareillement tou-s
ses sujets (]ui avec sa permission, ou des
rois ses prédécesseurs, auraient élé ou pour-i
raient être dans la suite reçus aux ordres de
la Toison d'Or el de la Jarretière.
Mais Henri IV, considérant comliicn il
était avantageux pour la réputation de
l'ordre du Saint-Iîspril el pour le bien du
ro)aume de î'ranee, que les rois , les princes
souverains cl les seiyneurs étrangers, non
regnicoles , fussent agrégés à cet ordre ,
ordonna, par une déclaration du dernier dé-
cembre 1607, dans l'assemblée générale de
l'ordre qui se tint à Paris, que les rois, les
princes souverains et les seigneurs étrangers
non regnicoles, étant de la qualité ])rescrilfl
par les statuts , pourraient élre à l'aveniv-
clievaliers de cet ordre; qu'à cet effet ou
enverrait un commandeur et chevalier vers
le roi ou prince souverain qui serait élu et
associé à l'ordre, pour lui donner le collier
et la croix et le revêtir du manteau en la
niauière qui serait prescrite par les mé-
moires el instruclious qui lui seraient don-
nes; (]ue le roi ou prince souverain ayant
accepte l'ordre, serait tenu d'en remercier le
souverain et grand maitre par une persoMno
qu'il enverrait exprès dans l'année ie sa ré-
ception, et qu'à l'égard des seigneurs étran-
gers non souverains, ils seraient obligés de
venir trouver eu personne Sa Majesté dans
r.innée de leur élection pour recevoir de sa
main le collier el la croix de l'ordre el prêter
lo serment ordonné par les staluls, à moins
qu'ils n'en lussent dispensés. L'an 1G08, ce
191
prince fil chevaliers de l'onlrc du Saiiii-Kspril
(Ion Jcan-Anloinc Drsin , duc de Sanso-(îc-
iniui, prince de Scandn^lia i-Uojile d'Krcoii".
ol don Alexandre Sforze-Conli. duc de Segni.
prince de Valnuinlaiie. Louis XIV a honoré
de cet ordi-e plusieurs seigneurs rspa^nols
ol il.ilirns; il rcnv()>a aussi en l()7(i à Jean
Sotiii'ski, roi de l'olôgne, cl depuis aux «Unix
princes Alexandre cl Conslanlin , ses fils
Pour cnrelenir cri ordre cl donner nio\cn
aux cardin:iux, prélals et ronirnaiulcurs de
se mainlenir honorablcincnt selon leur c al.
Henri 111 vuulul qu'il y eùl un fonds de six
vingl mille ecus pour être partagés el payés
tous les ans en plein chapitre, selon l'clal
qu'il en ferait. II voulut aussi (lUc cet ordre
ne fût compose que de <ent personnes outre
le souverain, auquil nombre seraient com-
])ris les quatre cardinaux el les cinq prélals,
le chancelier, le prévôt maître des cérémo-
nies , le grand trésorier el le ;:reilier, sans
que ce I, ombre put être auumenle , ni qu'à
la mort du (juclques-uns drs |piélals ou
tifliciers l'on pût rem; lir leurs places que
par d'autres de li même qualité. Outre c. s
quatre officiers, qui sont ciicvalier.s ou com-
mandeurs, el qui porUiil la croix cousue sur
leurs habits el une autre d'or attachée à un
ruban bleu connue les autres thevaliors, il
y en a encore quatre autres, qui sont un
intendant, un génealogi>te, un héraut el un
liuissior , qui perlent seulement la croit
attachée à un ruban bleu à la boutonnière
(le leur justaucorps. Ces olûccs d intendant,
de héraut el d'huissier sont du temps de
l'institution de l'ordre, et il eu est fait men-
tion dans les statuts; mais l'oflice de généa-
logiste pour dresser toutes les preuves et les
généalogies des chevaliers fut créé l'an loJa.
(jlairambaul, qui fui pour\ u de cette charge,
a fait un recueil de plus de cent cinqu.mte
volumes in-folio manuscrits concernant
l'Histoire de l'ordre el les généalogies de
tous les chevaliers , depuis leur inslilulion
jusqu'à présent, cl plusieurs autres volumes
concernant les autres ordres militaires.
Outre ces olliciers, il y a les trésoriers el
contrôleurs généraux du marc d'or, ciéés à
l'instar du héraut; ils en portent la croix el
jouissent des mêmes privilèges. Le droit du
iuarc d'or est uno espèce il hommage cl de
reconnaiss.incc que les oflii icrs du royaume
rendent au roi lorsqu'ils sont pourvus de
leurs offices. Henri 111 fut le premier qui ,
par une déclaration du 7 décembre lo82,
urdunna que les deniers (|ui proviendraicnl
de ce droit seraient affectes cl hypothéqués
au payemenl des frais de l'ordre, auquel, par
une autre déclaration du 7 décembre de
l'année précédente , il avait encore accorde
le cinquièuii' des dons el aubaines , ronlisci-
lions, amendes, lots el ventes, rachats el
autres droils sciuneuriaux. Ce prince avait
ulTi'Clé ces deniers à l'oidie pour remplir en
partie les six vingl niilli' écus par an qu'il
lui avait assignes (l'abord. Les trésoriers des
p.irii. » casuellcs mettaient entre les mains
ilu griind trésorier de l'ordre ce qui pouvait
retenir do linquièmc des dous cl aubain'S,
niC.TlDNNMRE DES OIIDRES HLLIGIEUS. 196
amende:! el autres droits seigneuriaux, et le
commis du même trésorier de l'ordre fut
chargé de la n celle du droit du mare d'or.
Mais i.oiiis Xlll . l'an 1028. créa trois rece-
veurs généraux du marc d'or, qui devaient
jouir des mêmes honneur- , prééminences ,
privilèges, franchi es vl imiiiunit s, que le
héraut ell'huissier de l'ordre du Saint-Esprit.
Ce prince, par un arrêt du conseil du mois
d'octobre de la même année, augmenta en
faveur de l'ordre le droit du marc d'or, cl
ordonna que tous ceux qui obtiendraient
des dons de Sa Majesté à l'avenir, seraient
tenus d'en payer le dixirmi' denier entre les
mains des receveurs du marc d'or. Par une
déclaralion du 't décembre IG3'(, il ordonna
que, sur la recette du marc d'or, les cardinaux,
prélals, chevaLcrs et officiers de l'ordre se-
raient payés de la somme de trois mille li\res
de |iension par chacun an sur leurs simples
quittances a la fin de l'année, nonobstant
«lue, par le 38* article des statuts , il fût dit
«lu ils devaient é;re payés tous les ans en
plein cha[iitre, auqii.l article Sa Majt-slc
dérogeait, allendu que les chapitres ne se
tenaient p,is régulièrement sur la lin du mois
de décembre, comme il est porté par le 17'
article desdils sialuis, el imuie (lu'il ne s'en
éiail point tenu depuis plusieurs années tn.l
sous le rr'giie d'Henri 1\ , son préilécesseur,
que sous le sien, sinon pour les promotions
qu'on avait faites pour remplir les places
des chevaliers décédés. Louis XH' augmenta
du double le droit du marc d'or l'an îOoii, et
le céda pour toujours et à i^erpétiirlè à
l'ordre du Saint-Ksprit pour lui tenir lieu du
fonds qui lui avait été | romis dès le temps de
sa fondation. Il supprima les offices de rece-
veurs générau'c du marc d'or, permit à
l'ordre d'établir pour la recette de ce dioit
tels receveurs , contrôleurs el officiers qu'il
jugerait à propos, et ordonna que le même
ordre loucherait par an, sur la recette de ta
généralité de Paris, \ingi mi. le livres, pour
les inlérêls de deux cent mille livres d'une
part qu'il avait prêtées à Sa Majesté, et deux
cen; mille livres d'autre qu'il avait fournies
à Louis Xlll pour les besoins de l'Klat. Par
un autre édil do la même année, le roi. sui-
vant ce qui avait été résolu au chapitre lenu
au Louvre, ordonna l'aliénation de la moitié
du droit du marc d'or, avec faculté à l'ordre
de racheter celle moitié aliénée en rend mt
le jirix de l'aliénalion, el qu'après le rachat
elle demeurerait réunie à l'ordre sans m
pouvoir être démembrée ni employée ailb urs
qu'a renlrelien de l'ordre; cl par le même
édil Sa Majesté créa deux trésoriers généraux
el deux contrôleurs généraux du marc d'or,
auxquels il accorda les mêmes honneurs ,
privilèges, franchises el immuiiil-s, dont
Joui^sail le héraut, et jusqu'à présent ils ont
été maintenus dans leurs droits par plu-ieurs
arrêts du conseil. Ils prêtent serment entre
les mains du chancelier de l'ordre et rendent
compte au grand trésorier.
Quant aux privilèges dont jouissent les
cardinaux, prélats, chevaliers cl ofliciers de
cet or.lre, Henri 111, p,ir les statuts . les
I')7
rsp
ESP
lO-S
cxcinpla lie coniribuci- un b.in el arrière-ban
(lu royaume, de payer aucun rachat, lot,
veiUe, quint et requini, tant îles (erres qu'ils
vendraient que de celles qu'ils pourraient
acheter, et voulut qu'ils eussent leurs causes
commises aux requêtes du palais à Paris; et,
I)ar un édit du mois de décembre 1580, il
ordonna qu'ils seraient francs et exempts de
tous emprunts, s ubsiiles,i m pcisit ions, p6;igi's,
travers, passages, fortifications, f,'ar(jes il
giiels de villes, cliâleanx et iorleresscs : ce
iiui a été confirmé dans la suile par les décla-
rations d Henri IV l'an lo9!), et de Louis XIV
l'an IGoS, en vertu desquelles les chevaliers
ont été maintenus el conservés dans les
mêmes privilèges, dont leurs veuves jouis-
sent pareillement. Un des privilèges dont les
prélats, chevaliers el commandeurs jouissent
aussi , est d'avoir l'honneur de manger avec
le roi à la même table aux jours de cérémo-
nies de l'ordre. Henri m, par l'arlicle 7V'
des statuts, avait ordonné (lUe ces jours-là le
prévôt, le grand trésorier el le grellier dîni;-
raienl à une lalile à part; mais Henri 1\',
considérant que ces trois officiers sont aussi
chevaliers et qu'ils ont les mêmes marques
d'honneur que les autres, ordonna l'an lliO.J
<]u"ils mangeraient aussi à sa table et se-
raient assis immédiatement après le chance-
lier, ce qui fut exccuié à toutes les promo-
tions; mais à celle qui se fit l'an ttitil il y
eut de la conteslalioii sur ce sujet. Les che-
valiers se plaignirent au roi de ce que les
officiers prétendaient mangera sa tabie con-
tre les slaluls, qui le défindcnt et qui ordon-
nent qu'ils mangeront en un lieu à part avec
le héraut et l'huissier. Les olficiers en de-
meuraient d'accord , mais ils prétendaient
m inger à la table du roi en consé (uence de
la déclaration d'Henri IV. Le roi ordonna
qu'avant la prochaine eérémonie les olficiers
lui représenteraient l'original de la décl ira-
tion d'Henri lV,fuule de quoi il voulait que le
statut lût observé. El cet original n'ayant pu
être représenté, il n'y eut que le chancelier
qui dîna à la table du roi avec les chevaliers.
Henri 111 ne se contenta pas de distinguer
ainsi par ces marques d'honneur et ces pri-
vilèges les chevaliers de l'ordre du Saint-
Esprit, il voulut aussi qu'ils se dislinguas-
.sent par la piété. C'est pourquoi il les exiiorta
d'assister tous les jours à la messe et les
jours de fête à la célébration de l'oflicc
divin. 11 les obligea à dire chaque jour un
chapelet d'un dixain, qu'ils doivent porter
sur eux ; l'office du Saint-Esprit avec les
hymnes et oraisons comme il est marcjnè
dans le livre qu'on leur donne à leur récep-
libn , ou bien les sept psaumes de la péni-
tencej avec les oraisons qui sont dans le
même livre; el, n'y satisfaisant pas, de don-
ner une aumône aux pauvres. Il leur or-
donna de plus de se confesser au moins deux
fois l'an et de recevoir le précieux corps de
Noire-Seigneur Jésus-Christ le premier jour
Ile janvier et à la fête de l,i Pentecôte, vou-
lant que les jours qu'ils commuiiicraienl, en
quelque lieu qu'ils se trouvassent, ils por-
tassent le collier de l'ordre pendant la uiessc
et la communion : ce qu'ils doivent faire
aussi .lux quairo (êtes annuelles, quand Sa
Majesté va à la messe, aux processions gé-
nérales, et .iux actes publics qui se font aux
églises.
Celle des Augusiins de Paris fut choisie
par ce prince pour y célèhrer le premier jour
di- janvier la tcte de l'ordre, à moins c|ue le
roi ne soit absent de cette ville. Celle céré-
monie commence la veille de ce jour-là à
vêpres, où les cardinaux, prélats, chevaliers
et ol'liciers de l'ordre doivent accompagner le
souverain depuis son palais jusqu'à l'église.
L'huissier niarcho devaiit, le héraut après;
ensuite le prévôt, ayant à sa droite le grand
trésorier, et à sa gauche le grellier, et le
chancelier seul jiprès eux. Puis marchent
les chevaliers, deux à deux, selon le rang de
leur réception, el ensuile le souverain et
grand maître, qui est suivi par les cardinaux
et prélats de l'ordre. Les chevaliers sont
vêtus de longs manteaux de velours noir
semés de llainmes d'or et bordés tout autour
du collier de l'ordre. Ce manteau es! garni
d'un mantelcl de toile il'argent verte, entouré
aussi du collier de l'ordre en broderie. Le
minle.iu < l le manlelel sont doublés lie salin
jaune orangé. Les manteaux se portent re-
troussés du coté gauclie, et l'ouverlnre est
du côté droit. Sous ces manteaux ils oui des
chausses et pourpoints de salin blanc, e|
piur couvrir leur tête une loque de velours
noir avec une plume blinche (1) ; à l'ég iril
des officiers, le chancelier est velu comme
les chevaliers. Le prévôt, le grand trésorier
et le grelfier ont aussi des manteaux de
velours noir el le mantelet de toile d'argent
verte; mais ils sont seulement bordés de
fiammes et d'une petite frange d'or, et por-
tent la croix cousue sur leurs manteaux ej
une autre croix d'or pendue au cou. Le hé-
raut et l'huissier ont des manteaux de salin
noir et le mantelet de velours vert. Ils ont
la croix de l'ordre pendue au cou; mais
celle de l'huissier est plus petite que celle du
héraut.
Le lendemain de leur réception ils vont
entendre la messe revêtus des mêmes habits,
el le roi à l'olTerioire ofl're un cierge où il y
a autant d'écus d'or qu'il a d'années. Après
la messe les chevaliers accompagnent Sa
Majesté dans le lieu où il doit dîner et man-<
gent avec lui. Ils retournent l'après-dînée à
l'église ])our assister aux vêpres des morls,
el pour lors ils ont des manteaux elm.inte-
lets de drap noir, et le roi un manteau violet.
Le troisième jour ils vont encore à l'église
pour y assister au service que l'on y f.iil
pour les chevaliers décédés. A l'ofl'erloire da
la messe le roi et lesche-valiers offrent cha-
cun nu cierge d'une livre. Mais on n'a pas
vu de cérémonie complète depuis l'an 1G62.
Il se fait tous les ans, le jour de la Purifica-
tion et le jour de la Pentecôte, une procession
où le roi assiste avec tous Us prélats el
(I) Yoij., à la fin du vol., n° 37.
JH9 DICTION.N.MUF. DHS OnURI-S lU-Lh^lEliX îw
chevaliers, cl li mosso cstcnsuilr» céléhréo il av;iit donné l,i «Uilaralion donl nous avon<;
p;ir un prclal il i- l'ordre. Henri III doslitia p.irlé, pour adnicllre les rois, princes cl st-i-
los oiïrandis «lui se loiit dans les fjiaiulcs ^netirs cir;mî;ers, avait fail ôler, l'an Î597, les
réreinnnifs pour les religieux dii couvent cliilTrc s qui étaient sur les grands colliers, et
lies Augustins. et obligea cli.i()iie chevalier, à y avait fait nieilre à la pliec des trophées
sa réceplinn , de donner «iix. cens d'or pour d'armes; avait déclaré qu'aucun bâtard ne
eu\ au «raiid trestnier de i'onirc. Ce prince pourrait èlre reçu d.iiis l'urdre, sinon ceux
leur doiina aussi mille livres de rente pour des rois nconnus et léviiirnc'^. I/an lliOl, à
ilire tous les jours deux messes, l'une pour la naissance du dauphin de l'rance, qui lui
la prosperilé et saute du souverain et des succéda sous le nom de Louis Mil, il lui
iirélais, clievalieis et olliciers de l'ordre, et a ait donné l.i croix île l'ordre, et le cordon
l'autre '|«"'" '•'* difunU; et, dans le cliapi- bleu; et l'.in U)07 il ,ivait f.iit assembler les
Ire qui >e tint à I'. iris l'an I08O, il fut arrêté prel.ils, chevaliers et ofliciers de l'ordre,
que chaque chevalier ((r.i >ei;iit trouvé sans pour leur dédarer ciu'il voulait donner la
sa croix paverait (lour chaque fois dix écus, croix et le cordon bien à son fils le duc
cl, si c'était un jour de chapitre, cinquante d'Orléans, coinnie il av.iU fait au dauphin,
écus, (jui seraieni aussi donnés par aumône et é'i l'.ivenir à tous ses enfants mâles qui
,TUX .Au-'ustins. naîtraient en lé^iliine mariage, étant en bis
Cette cérémonie de l'onlre, (pii. selon les âj^e, pour les faire connaitic à tout le monde
statuts, sediiil faire dans l'eglisc des .\u;;u-- par celle marque d'honneur : ce qui a été
lins, esl peut-élre ce qui a donné lieu à praliquéjusiu':» présent i)ar ses successeurs,
l'abbé (îiu>tiniani lie dire que cet ordre aval Quanta ce i;ue Schooneheck dit encore,
éé soumis à la rè^^le de S ii il-Aujrusiin (lar qu tlenri IV obtint ilu pipe que toutes les
le pape tjréi;oire XIII, qui, selon lui , l'ap- rentes et les revenus de l'ordre seraient
prouva : en quoi il a elé suivi par Schoone- convertis en commanderies, il y a plusieurs
liecii, qui ajoute qu'Henri IV obtint du pape écrivains ()ui disent au contraire que ce fat
que toules les rentes et les revenus de l'ordre Henri III qui voulut attribuer aux prélats,
seraieni converlis en commanderies, et qu'il chevaliers et of.lciers, des commanderies sur
envoya même un ambassadeur à Uome pour les bénéfices; mais que le pape et le clergé
rc-monirer à Sa S liii été sue cet ordre a>ait n'y ayant pas voulu consentir, ce prince leur
été insiitué pour la pii paga ion de la foi assigna à chacun une pension, qui a été ré-
catboliiiue et i)our l'exlirpaiioii des hérésies, diiile à mille t'eus, tomme nous avons dit,
et ()ue les clievaliers s'y engageaient par et le roi reçoit sa disiribulion sur l'évalua-
scrmenl. Il est vrai (jue ce prnee fil repré- lion des anciens écus d'or, qui monte à siM
senler au |)ape Paul \', l'an l(i08. que les mille livres.
chevaliers cl officiers de l'ordre s'engageant On peut excuser le même Schoonebeck,
]iar \uu et serment d'en observer les sialuts, comme éiranger, d'avoir avancé qu'au lieu
el que CCS statuts défendant d'y admellre les des II qu'Henri 111 fil mettre au collier,
élraiigers non regnicoles, et ordonnant a l'on voit aujourd'hui dis L, qui signifient
Ions les chevaliers de con)inunier aux jours Louis : mais Ileiinan, (|uiilit la même chose,
de cérémonies et à la réccpiioii des cheva- ne pouvait p.is ignorer qu'il n'y a point d'L
licis, il pi iait SaSaiiilelé de dispenser en ces au tollicr, el que les H n'en ont point été
deux points de ce vœu el sermenl, en ce que ôtées : au contraire, dans le chapitre qui se
l'ontre étant établi pour l'exallation cl l.i linl le •'31 décembre ItilO, où Louis XIII était
propagalion de la loi catholique, il élail prêseul, il fut arrêté que les 11 demeure-
avaniageux de l'étendre dans li!s pays élran- raiei.l à perpéluiié sur les broderies des
(,'( rs ; et (ju'à l'égard de la coinmuuiun que manteaux et manlelels,el sur les colliers d'or
les chevaliers doivent faire les jours de ce- <les i hevaliers, en mémoire d'Henri III, fon-
rémonies et à la réception des autres che- dateur de l'ordre, el du roi Henri l\", second
valiers, il était p!us convenable de la reinel- chef et souverain grand maître du même or-
tre à un autre jour, à cause que dansées dre. Ce tollicr doit être du poidsde deux cents
jours de fêle el de cérémonies l'embarras écus ou environ, el ne peut être jamais orné
el le tumulte leur | ouvail cmser plus de de pierreries. Lorsqu'un chevalier iiieurl,
dislraclion que de dévotion : c'esl pouri|ui>i ses héritiers le doivent renvoyer au roi. Il n'y
ce pontife, par un bref du l(i février I(i08, a presenlemeiit que les cardinaux, les prc-
dlspensa les clievalieis de leur vitu el sei- lals cl les uflicicrs qui sonl de robe, (|ui
ineiil, pour ces deux articles seulement, en porlenl la croix pendue au cou, attachée à
permetlanl de recevoir des étrangers non un ruban bleu large de quatre doigts; tous
regnicolcs, el en déclarant que les chevaliers les chevaliers la porlenl aussi attachée .i un
salisferaicnt aux sialuts, pourvu qu'ils com- ruban bleu eu é. li,ir()e, depuis l'épaule droite
muni. issent un des jours de l'oit ive qui pré- jusiju'à la garde de l'epée. Celte croHx esl
céderait les cérémonies de l'ordre «u la d'or émail ée île blanc, chaiiue rayon pmnmelé
léceplion des chevaliers; el, par un .autre d'or; une lleur de lis d'or d.ms chacun des
bref, du 17 avril de la nu-me année, il | er- angles de la cioiv, el dans le milieu d'un
mil à Henri l\ de fane tel changement aux côte une colombe, el de l'anlre un saint Mi-
hialuls qu'il tiouverail à propos pour le bien chel. Les cardin.iux et prêtais porlenl la
el l'avaniage de l'ordic : ce ijui aulorisa ce colombe des deux coles do ia croix, n'étant
prince dans quelques changemenls qu'il y seulement que commandeurs de l'ordre du
iivait dej.i f.iiis : i.ir dès raiincc prcccdcnte Saint Lsprit. l'uules bs e\|,edilioiis ei pio-
iOl
ESP
ESP
202
visions coiircrnnnt col orilro sont scellées par
le chancelier en cire blanche.
Le Laboureur, Addillnns aux Mémoires de
Caslelnau. Favin, Théâtre d'honneur it de
chevalerie. Hernanl Giiislini mi , Hiat. di
luit, gli Ord. milit. Schoonebeck, llist. des
Ordres Militaires. Hernian, Uist. drs Ordres
de Chevalerie. Du Chêne el Hauilicquer, lie-
cherches historiques de l'Ordre du Saint-Es-
l)rit. Les Statuts de cet ordre imprimés in
1703, et Manuscrits de Brienne à la biblio-
thèque (Im roi, roi. 21k.
En 1708, le roi Louis XV fit réviser par nn
des préals (le l'ordre du Sainl-Espril l'olfico
à l'uragc des chi'valiers, el soumit le travail
à tous les prélats dudil ordre, qui l'approu-
vèrent, el cet olfice fui réimprimé avec luxe.
Les chevaliers du Saint-Esprit le récitent
tous les jours, ou bien les sept psaumes de
la pénitence. Nous supposons , ea parlant
ainsi , que les membres vi'ant encore rrm-
p'issent une obligation (ju'ils ont contractée
devanl Dieu et leur roi, en recevant les insi-
gnes de cet ordre aujourd'hui siipprinié par
le fait. A la reslauraiion des liourbons ,
Louis XVIU ne fit pas lout ce qu'il aurait
dû prudemment faire pou: ramener les usa-
ges des temps d'hcinncur (t de loyauté. Sous
ce rapport, les choses prirent une face exté-
rieure plus consolante ou plus animée sous
Charles X.
Le hin;li 30 mai 1825, lendemain du sa-
cre de ce monarque, il y eut dans la cathé-
drale de r.einis une réception solennelle des
chevaliers et commandeurs des ordres du
roi, ce qui n'avait pas eu lieu depuis plus de
trente-cinq ans. Deux trônes étaient élevés,
l'un dans le sanctuaire , l'autre dans le
chopur. A^aiit la cérémonie, M. le dauphin
reçut d'abord chevaliers de l'ordre de Saint-
Michel , cnformément aux statuts, tous les
chevaliers qui allaient être reçus membres
de l'ordre du Saint-Esprit. Celle réce|)lion
faite, le roi Charles X arriva processionnel-
lement à la cathédrale pour tenir chapitre
des ordres. S. M. poriail la dalmnlique , le
nianican et le grand co lier de l'o.die di
Saint-hsprit. Les chevaliers qui devaient
être reçus marihaient sur deux ranj^s, pui,
les chev.ihers reçus, les princes , le loi en-
touré des grands officiers de sa miiison el
des commandeurs ecclésiastiques, !\LM. la
cardinaux de la Fare, de Croï et de Cler-
inonl-Tonnerrc , l'archevêque de Keims et
l'ai bé de Alonlesquiou (l'archevêque de Bor-
de.ius était absent, mais il était néanmoins
comniaiid ur de l'ordre). Le roi assista aux
vêpres assis sur son trône du chœur. Après
les vêpres il se rendit à s jn trône du sanc-
tuaire. Un fauteuil y avait été aussi préparé
pour l'archevêque de Reims oiQcianI, (]ui
entonna le Veni, Creator. Les commamlcurs
cccicsia-tiquei furent reçus les premiers;
ils prêtèrent le serment, à genoux devant le
roi , furent revêlus par lui du cordon bleu,
reçurent de ses mains le liwe d'ufliee et le
dizain ; ils baisèrent ensuite la main île Sa Ma-
jesté. Les chevaliers laïques furent reçus en-
juiteavec le même cérémonial. Ils éluienl au
D:CÏ10\XA1RE DES OrDBES nELIGIEUX. II.
nombre de trente-six, dont deux étrangers,
le prince de CasIel-Cicala cl le duc de San-
Carlos; ces deux-ci prêtèrent un serment
parliculier. On chanta alors Compiles, pen-
ilant lesquelles le roi cl tous les membres de
l'ordre restèrent assis et couverts. H n'y
avait eu jusqu'alors de reçus dans l'ordre du
Saint-Esprit que les trois princes existant à
relie époque, savoir : M. le dau| hin, M. le
duc d'Orléans et M. le duc de Bourbon; et
encore le duc de la Ilochefoueault el le duc
de la Vauguyon. Le dimanche de M Pentecôte
de l'année suivante (182G), le roi fit une nou-
velle réception de serments et de chevaliers
dans la chapelle des Tuileries. Le duc de
Chartres (mort depuis si misérablement dans
la rue de la Révolte) <^lait le premier. Ce
jour-là il prêta solennellement le serment do
fidélité à Charles X, comme l'avait tait pré-
cédemment le duc d'Orléans, son père, à
Louis XVllI. En 1827, à pareil jour, il y eut
an>si chapitre de l'ordre et réceptions nou.
s elles. Le roi, dans le cours de l'année, nom-
mait quelquefois aux dignités de l'ordre, et
les rècept ons se faisaient le jour de la Pen-
tecôte. Ainsi eurent-elles lieu le dimancha
de la Peiitecôie, 30 mai 1830. Comme cette
cérémoiiie a été la dernière, nous en parle-
rons ici avec quelque^ détails. Le roi t;har-
les X , comme grand maître de l'ordre du
Sainl-Lspril, tint , à 11 heures du matin,
dans son cabinet , un chapitre dudil ordie.
M. de Quélen , an he êque de Paris, qui, à
l'occasion du sacre, 'n'avait reçu aucune la-
veur, et M. rarchevê.|ue de Bordeaux y fu-
rent nommés commandeurs ecclésiastiques.
S. .M. sortit ensuite de ses appartements, el
la procession qui se fait ce jour-là eut lien.
Le roi était précédé des chevaliers de ses
ordres et des chevaliers non reçus qui de-
vaient recevoir les insignes; ceux-ci étaient
.MM. les princes de Politrnac el de Broglie
(M. de Polignac e>l resté fidèle à son souve-
rain), les marquis d Ecqucvilly, de Vérac cl
de Conllaiis, et les comtes de Durl'ort, Uoy,
Heille, Bordesoulle et de Cossé. Tous accom-
|iagnèrenl le roi jusqu'au trône qui avait
été érigé dans la chapelle. M. révê.|ue de
Metz olticia. Après la messe, le roi se plai, a
sur un trône, à ganehe de l'autel. Le chan-
celier de l'ordre lut la formule ilii serment.
Leduc de Nemours, lils du duc d'Oiléans ,
que la bonté de Charles X avait élevé au
rang d'altesse royale, et qui , quelques se-
maines plus lard, prenait, avec le litre de
loi des Français, la couronne des mains des
députés, le duc de Nemours, après s'être mis
à genoux au pied du trône, prêta le serment
enire les mains du roi, qui le revêtit des in-
signes do l'o.-dre. Le même cérémonial fut
observé pour les chevaliers nou reçus, el le
roi fut ensuite reeoiuliiil à ses apparlenients
avec le même cortège. Onavaii fait pour
celle solennité, au château des Tuileries,
des prépara ils qac nous avons vus nous-
inême. B-d-e
ESPRIT (Obdbe du Saint-).
§ 1". De l'ordre du Suint-Esprit, appelé di
1
2113
DICTIONNAIRE DFS OUOnES KELICIEL'X.
Afonlpellier en France , et in Sassia en
Italie.
I.a plupart des anciens liislorirns (|ui nous
«ml donne la »ic de sainte Marthe l'onl ac-
coinpasînce de tant de faits apocrjijlios cl
contraires à la vérité dp l'histoire, (ju'ils se
sont rendus suspects et n'ont mérité aucune
créance. On peut dire la même chose d'Oli-
vier de la Trau, sieur de la Terrade, qui se
qualifie an hihospitalicr général et grand
^ 'jiaitre de l'ordre, milice et religion du Saint-
^ Ssprit, qu'il prétend avoir été fondé p.ir
:ctle sainte, et qui , dans un discours tou-
chant la fondation de cet ordre, qu'il adressa
en 1629 à la reine de France .Marie de iMcdi-
cis, qu'il appelle la resliurairire de cet or-
dre, y a inséré un abrégé de In vie de sainte
Marthe, où il a enchéri sur tout ce que l'on
en avait avancé de Tibueus, en y ajoutant
des circonstances qui le sont encore davan-
tage.
Il a cru que ce n'éîait pns .isscz d'avoir
f.iit remonter l'antiquité de cet ordre jusqu'à
sainte Marthe, mais qu'il lallait encore mon-
trer comme il a\a\l toujours subsisté de|)uis
ce temps-là. Il ciic pour cet effet une bulle
de Léon X du lOjanucr 1519, jar laquelle
te I ape reconnaît qu'il subsi^t.iit du temps
•le Jean III , l'un de ses prédécesseurs. Il
suppose qu'un certain Guillaume de Foii-
laine-Clairc, général et grand maître de cet
ordre, étant allé de Monîpellier en Kspagnc
pour y faire sa visite, s'attira l'cslime de
Ferdinand I", roi de Casiille, qui, ayant ob-
tenu par ses prières et pir celles des reli-
gieuses du Saint-lisprit de Salaraanque, u:ic
victoire complète sur les .Maures, donna à
ces religieuses la coiiimandcrie d'.'^taiaîa et
de Palomera, appartenant à l'ordre de Saint-
Jacques, suivant le vœu qu'il en avait fait,
et il rai porte tout au long en langue cas-
tillane la ilonation qui en fut faite par te
prince en d ,tc du 15 nuvembrc ÎOJO.
11 fait ensuite tenir un chapitre général à
Montpellier au mois d'août 1032, indiqué
parce Guillaume de Fonlaiuc-Claire, à la
sollieitalion d'Antoine Perez, son vicaiie gé-
néral et officiai , et de Jean de Rocheforl,
gr;ind prieur d • la province d'.Vquilaine, où
I on cita personnellement don Ferdinand de
Gordoue, grand prieur de la province de
(lalice, pour y venir rendre compte de ce qui
s'était passé au chapitre [roviuci.il de cet
ordre Kmui à Salamanque .lU mois d'août
lO.Jl. Knfin il cite des lettres p itenles ac or-
•lées par Henri 11, roi de France, à l'iiopi;, I
de .>;ontpellier, par les(ioelles il paraît <|ii,:
eet hûpilal est le premier de la cliréiienlé;
qu'il a été fondé par un de nos rois ()iii alla
il ltome,où,à la sollicitation ilu jiape quig-u-
verii.iit pour lors l'Fglise, il fonda en Tctte
»ille un autre hôpital sous le nom du ^aiiil-
iispril.
Voilà les [priiitip.il s preuves que la Trau
de l.i l'errade apporte pour prouver l'anii-
quilé et la continu. it.on de son ordre. Mais
Mari.ina et j'urquet. dans leurs Histoires
0 i'.spagnc , prcteuJint que le privilège ic-
£01
cordé aux religieuses du monaMèrc du Saint-
lispritde Salamanque, l'an 103V, par le roi
F( rdinand , et non pas l'an 1030. comme lo
dit la Terrade, e>t faux et contrefait, parce
qu'il est écrit en langue castillane moderne,
et que l'on y compte l'année depui^ la nais-
sance de Noirc-Seigneur , ce qui ne peut
être puisque tous les actes, tous les titres et
les lettres se faisaient en latin , et que l'on
comptait depuis l'ère de César; outre qu'on
y donne à don Ferdinand le tilre de grand
seigneur de Biscaye et de roi de Léon, ce qui
en montre plus évidemment la fausseté,
parce qu'il n a jamais été roi de Léon, et
par conséquent ne pouvait accorder aucun
privilège à ce monastère de Salamanque, qui
a été sous la juridiction de Léon, où en l'an
103i , qui est la véritable date déco pré-
tendu privilège , régnait don Bcrmond III.
Les autres preuves queceux nui prenaient
la qualité de chevaliers de cet ordre ont ap-
portées pour en faire voir l'anliquilé, et que
dans son origine i. éiait militaire (lo.-squ'ou
leur a disputé c ■Ile qualité) . ne sont pas
mnilourcs; car ils ont prétendu que s.iint
Lazare, frère de sainte Marthe et de sainte
Marii -Madeleine , en avait été le premier
général ou grand maître. Ils sesom imagi-
né que sainte Mario-.M;ideleine avait aujsi
fonJé plusieurs maisons de cet ordre ; de
sorte que Lazare et ses sœurs, occupés aux
saints exercices de l'hospitalité, recevaient
graliiiloment les pèlerins qui venaient à Jé-
rusalem pour y adorer les sacrés vestiges
du Sauveur du mon le , et que cette société
s et.int augmentée par un grand noa.bre de
personnes qui en y entrant consacrainii
leurs biens au service des hi'ipilaux. il
s'en forma un ordre militaire pour assurer
1. s chemins aux pèlerins qui venaient à Jé-
ru-alcm.
Mais sur que'le aulorité appuyaienl-ils
leurs pièleoiions'? Sur celle d un ancien
bréviaire de l'an 1553, où, dans l'une des le-
çons de la fête de sainte Mar he , il est dit
que pendant que Madeieine s'appliquait en -
tierenieiil à la dévo:ion et à la tontempia-
l ou, Lazare s'adonnait davant.ige à l'exer-
cicedela guerre, et que Marthe, qui étaitfori
priidente, prenait lo soin des alT.iires de son
frère et fournissait aux sold.its et aux do-
mesiiques ce qu'ils avaient besoin : Dum
aiilem Magdairnn decotioni et contemplationi
se t'.liim ixponciet, Lazurns (/uoque plus mi-
lilte lacarcl, Martha prudens cl sororis et
frariis parles ftrrnuc gubernnbiit et militibu^
ac puniihs scdiilc mini!.trabnt. ,\iiisi ils
av.ii, nt cru trouver dans les mots de nilliliœ
cl >;:iltnb!is l'origine de leur milice. M .is les
histoires qui se trouvent dans les bréviaires,
prineip.ilcineiit dans les anrieiis , onl-ellc»
louiesde la certitude? et les changements
qui ont ele faits tant de fois dans Ks légen-
des coiileiiues dans les bréviaires, ne soiit-
ce p.is des preuves (iiic l'on y recevait an-
ceiinoiiient le vrai comii;c le faux, et que
ces légendes étai ni pleines de quantité de
<.ib es -lui av.icnl comme étouffé la sinccritt'
de l hiblo re?
235
ESP
ESP
206
M. de Blégny, qui prend la qualité do
commandeur el d'administrateur général de
cet ordre, dans un projet d'Histoire des re-
ligions militaires qu'il donna en 16 i4 et qui
n'est proprement que pour faire voir l'anti-
quité de l'ordre militaire du Saint-Esprit,
cite aussi pour preuve de son antiquité un
de ces anciens brévi.iires de l'an 1514- où il
est parlé de Lazare comme chef d'une milice;
et , après avoir fixé la première époque de
l'établissement de cet ordre sur l'auloriîé de
ce bréviaire : Lazare, dit-il, étant arrivé en
France , se proposa de ) émettre sur pied le
corps de milice (/u',l avait commandé à Jérti-
salem, et fit prendre les armes à ceur de sa
congrégation qui portaient sur leurs habits
une croix blanche de truis parties, dont la
principale, qui était V arbre ou le tronc, re-
présentait Lazare comme chef de leur compa-
gnie, et les deux autres , qui étaient Irs tra-
verses ou croisons, désignaient les deux sœurs
comme personnes subordonnées. Les pèlerins
exposés par de longs voyngrs devaient à leur
vigilance la sûreté qu'ils trouvaient sur les
chemins et le secours qu'ils trouvaient dans
les hôpitaux. Cet ordre devint si célèbre, qu'il
g'étendit bientôt dans les pays étrangers. Il
passa premièrement dans le royaume de Na-
ples, où ces hospitaliers s'établirent à Pouz-
soles, et ensuite à Rome.
Les titres de l'ordre n'ont pas apparen)-
nient conservé à M. de Blégnj tous les noms
des premiers généraux successeurs <le La-
zare, car il passe tout d'un coup à l'anuce
493, en laquelle il dit que Luc de Rri^cjuil
était général ; qu'il eut pour successeur eu
498 Cécile de Mondiagon; qu'à celui-ci suc-
céda Lucale feiral, el (pie ce fui à Jérôme de
Tiécis, qui fut établi général en 573, que le
pape Jean III adressa une bulle. L'on est
déjà asstz convaincu que toule l'antiquité
que prétendaient les chevaliers était iiujigi-
naire ; mais cette bulle, adressée par Jean III
à ce prétendu grand maître en 573, en est
une preuve , puisque ce pape était mort en
572. Nous ne suivr(jns pas les chevaliers
dans toutes leurs autres prétentions sur cette
aniiquilé, cjui nous conduiraient trop loin,
lîlli's étaient si peu raisonnables < t les litres
dont ils se prévaiuient élaicnl si manifeste-
ment taux , qu'il y a Heu de s'ctonner qu'ils
les aient même produits, lursqu'eii 1093 les
Chanoines Keguiiers de cet ordre leur dispu-
tèrent celte qualité de chevaliers, tomme
nous dirons dans la suite.
En eH'cl ces Chanoines Réguliers ont tou-
jours considéré cet(e antiquité de Lur ordre
comme imaginaire, et n'ont jaiiiais recinnu
d'autre londaleur que Guy île Montpellier.
It était fils de Guillaume, seigneur de Aloiil-
pellicr et de Sibylle, ei il bâtit dans cette viile,
hur la fin du douzième siècle, un célèbre hô-
p.lal pour y recevoir les pauvres malades,
ton insigne charité le rendit très-ncom-
niandable: il procura de grands biens à son
nouvel établissement; il associa avec lui
u'aulres personnes pour en avoir soin et
âissister les pauvres de leurs biens. Son
ordre s'ctcudit'en peu de temps en plusieurs
endriils, comme il parait par la bulle du
p.ipe Innocent III du 23 avril 1198, qui, en
confirmant cet ordre, fait le déuombreinenl
des maisons qu'il avait déjà, dont il y en
avait deux à Konie, l'une au delà du Tibre,
el l'autre à I'. nirée de la ville sous le nom
de Sainte-Agatho ; une autre à Perg'rac,
une à Troyes, et d'auiresen différents lieux.
Comme ils étaient tous laïqi!i,s, et qu'il n'y
avait aucun ecclésiastique parmi eux, lu
même pontife avait le jour précédent écrit à
tous les archevêques, évéques el prélats de
l'église, pour les prier que s'il se trouvait
quelques pei sonnes pieuses de leurs diocèse»
qui voulussent faiie quelques donations à
ces Hospitaliers, ils ne les empêchasse t
pas. 11 exhortait aussi ces prélats d'accoiJer
à (es Hospitaliers la permission de bâtir des
églises el des cimetières, de faire la dédi-
cace de ces églises, de bénir les cimetières
lorsqu'ils seraient bâtis, et de soulîrir (jne
le fondateur et les autres frères de cet ordre
choisissent des prêtres séculiers pour leur
adminisirer les sacrements et aux pauvres
dans leurs églises. Six ans après, l'an 120'i',
ce pape fit Venir à Home le (ondaleur pour
lui donner le soin de l'hôpital de Sainle-
iMarie in Sassia, ou en Saxe, qui s'appelle
présentement le Saint-Esprit ; el, comme il
e^l le chef de cet ordre et l'un des pins cé-
lèbres de l'Italie, nous rapporterons son ori-
gine el sa fondation.
L'éjlise fui fondée par Ina, roi des Saxons
Orientaux, l'an 715, sous le lilre de Sainte-
Marie in Sassia, ou de Saxe, et le même roi
étant venu à Rome l'an 718, ajouta à celta
église un hôpital pour les pèlerins de sa na-
tion, (ju'il donna à gouverner à quel(|ues
personnes séculières, ayant assigné sur son
(loiiiaine un revenu annuel pour la sub«
sistance des pauvres el l'entretien de l'hô-
pilai.
OlTa, roi des Merciens, à son imitation,
amidifia le même hôpital et en augmenta les
revenus ; mais il fut brû'é en 817 par un in-
cendie qui ne put être arrêté que par une
image de la sainte Vierge, que le papg
Pascal 1 y porta en procession. Un pâte 1
incendie acheva de le désoler en S'H, auquel
le pape Léon IV remédia aussitôt le mieux
qu'il put, ayant été aidé par les libéralités
des successeurs des rois fondateurs. Sliis
les guerres des Guelfes et des Gibelins, du-
laul les o:ize et douzième siècles, ruinèroi t
tellement le quartier de la ville où l'hôpital
est situé, qu'ils en aboli, eut même jusqu'à la
mémoire. Enfin Innocent Ll, étant monte
sur la chaire de saint Pi rre, fit bâtir de l'on i
en comble cet hùpilal à ses dépens l'an 1198,
pour y recevoir les malades et les pauvres
de Rouie, ci en augniciila de beaucoup I. s
bâtiments, les posses^i.jiis, les revenus et les
privilèges , en l'année 12U4, après que des
pêcheurs eorent tiré du Tibre dans leuis
filets une grande quantité d'enfants nouvel-
lement nés qu'on y avait jetés ; car ce pap{i
en fut tellement touché, qu'il desiina pr.nci-
palemeui cet hôpital piur rect'fuir les en-
lànts exposés el abanJonnés par leurs pa»
5(17
DICTIONNAIRC DKS
rcnls. A la véiiU' il n'en est poinl fail nion-
lion (Inns sa liillp. mais tiit-n dans relies de
l'iusieurs de si"; Miree-iseurs, comme de Ni-
colas IV, de S xle W cl de quelques aulre > ;
1 1 l'on Miil encore dans ccl IJopiiai une pcin-
lureàfresque,(iui rcpréscntodes pécheurs qui
portent. lin no enl III ces enfants quils a v.iieni
.rouv6s.ct une inscription au lias, qui fait foi
|ue ce lonlife fut averti p.ir un aiificd') re-
ini'dirr; c'est pourquoi l'on prétend (|u'il fil
en même temps làtir Cette église, qu'.l dédia
en riionneur du Sainl-Kspril, tant à cause
qu'il lui avait inspiré une si bonne œuvre,
(|u'à cause des reli{;ieu\ du Saint-Ksprit de
Montpellier, auxquels il donna le soin de cet
hôpital ; mais il y en a beaucoup qui regar-
dent cette histoire comme une fable.
Ce qui ist vrai, c'est qu'il n'y avait pas
longtemps que le comte (luy avait fondé son
ordre, dont le principal soin des Hospitaliers
était d'exercer l'h'ispitalité envers les ma-
lades, comnie nous avons dit ci- dessus. Ce
saint pape, (t.mt bien informé de leur clia-
liié qui les rendait alors fort célèbres, en fit
venir six à Itomc avec leur fo:idateur pour
leur donner la direct on de cet hôpital, que
les papes huccesseurs d'Innocent 111 ont en-
richi dans la sui!e |iar plusieurs donations
(|u'il$ lui ont f.iites, en quoi ils oui é c imités
par plusieurs peisi)nnes laeuscs et chari-
tables.
L'an l'*Ti, Sisie IV, voyant que les bâli-
luent- de cet hô; ital tombaient en ruine, e
lit rebâtir avec la ma<;nificence (|u'on voit
encore aujourd'hui. 11 contient plusieuis
corps de logis avec une salle fort longue et
élevée à proportion, capable de tenir mi le
lits, et un grand corridor à côté de celte saile
qui en contient bien encore deux cents, les-
((uels sont tout remplis en été. Oa est mèaie
souvent contraint d'en dresser d'autres dans
le» greniers de ce', hôpital, qui sont au b.is
de !?aint-t)nuphie, outre une grande salle
de traverse où l'on mot les blesse*, l-cs pré-
Ires cl les nobles sont dans des cliamli.es
]iariiculières, où il y a quatre lits dans cha-
cune, et seul servi> en vaisselle d'argent. Il
y a encore d'autres charirbres pour les fré-
iicliques et pour ceux >iui ont des maux con-
tagieux.
Dans un appartement qui est derrière
l'hùpilal, on y entreiienl grand nombre de
nourrice» [ our all.riler les enfants exposés,
outre plus de d(ux mille de la ville et d.s
villagci circoirvoisins A qui on les donne à
nourrir. 'Tout proche est l'appartement des
g.'iri'orrs qu'on y met à l'âge de trois <iu
<|ualre ans, ap:6s qu'on les a retires dis
nourrices. Ils sont toujours au noiirbrc de
cinq cents, et ils y demeureul jusi)ii'à ce
qu'ris soient en état de, g;rgner leur vie à
<|ue!(iiie métier ou autre exercice qu'on leur
apprend.
I.es filles, qui sont en pareil nombre, soirl
élevées dans un autre appariemenl lerine
jusqu'à ce qu'elles soient en étal d'être ma-
rrées uu religieuses; et qu.ind elles sont
pourvues, clk's reçoivent de l'iiopilal cin-
quante écus rom;:ins de dot. lilks sont sous
ORDRES RF.UCIF.tX. S«8
la direction des religieuses (le cet ordre, dont
le monastère est renfermé dans l'hôpital. Il
fut birti l'an lliuOpar le pape Clément VIII,
(|ui dédia leur église sous le nom de Sainte-
Thécle.
I^rifin il y a le palais du précepteur ou cum-
mandeur et chef de cet ordre, qui est très-
beau, entre lequel et cet hô| i!al il y a un
grand cloître où logent les médecins, les
chirurgiens et bs serviteurs de l'hôpital, <|rii
sont toujours plus de cent, et à côté est l'afi-
parlement des religieux. C'est toujours un
prélat distingué qui rem|ilit cette charge «le
commandeur, qui est présentement à la no-
mination du p.'ipe.
La dépense tant pour les enfants que pour
les malades monte par année, lune portarM
l'autre, à près de cinq cent mille livres, et
le revenu serait une fois aussi considérable
sans la fainéantise des Italiens, qui laissent
la plupart des terres sans être culli.vées,
principalement dans la campagne de Home,
où cet hôpital est seigneur de plusieurs bourgs
et villages, comme la Tolfa, San-Severo, l'o-
lidoro, Caslelguido et plusieurs autres sur le
chemin de Civita-Aecchia, dont il y en a
(juclques-uns qui sont princi|iaulés. Au de-
hors de cet hôpital, il y a un tour avec uu
[ictil matelas dedans pour recevoir les < n-
i.inls exposés. L'on peut hardiment les mettre
en plein jour, car il est défendu sous de
très-grosses peines, et même de punition
corporelle, de s'informer qui sont ceux qui
les apportent, ni de les suivre.
A oilà quel est ce fameux li6pil;il du Paint-
F.sprit de liome, dont le pape Innocent III
c'onna la direction, comme nous avons dit.
au comte Guy et à ses Hospitaliers. Les prê-
tres (|ui ailministraierii les sacrements dai s
les hôpitaux n'éiaicrit pas du corps de l'or-
dre, puisqu'ils élaieril amovibles ; ils n'étaienl
pjs sujets à la correction du maître, et dé-
pendaient seulement des évéques dans lis
diocèses desquels les hôpitaux étaient situés.
.Mais Innocent III, par sa bulle de l'an 120i,
voulut que dans l'hôpital de Home il y eût <>u
moiiis quatre clercs qui en y entrant feraient
profession de la règle que suivaient les
Hospitaliers; et, afin d'être moins à charge-
ai hôpital, ils devaient se (onlenter de l.r
simple noiiriituie et du vêtcmenl. H leur
était défendu de se mêler des afl'aires tempo-
relles, et ils étaient soumis <à la correction
du pape : .linsi il commença à y avoir parmi
les llosjiitaliers du Saintl'lsprit des jier-
sonnes ecelésiastiiiues et des laïiiues, avec
celle dilïérence que les ecdési.istiques s'en-
g.igeaicnl à une étroite p.iuvrelé cl au ser-
vice des malades par des vœux solennels, et
()ue les lau|ues n'étaienl engages sculonvcnt
que par des vœux simples. (!ar, q'Uui(|ue le
ji.ipe obligeât ceux-ci a faire profession ré-
gulière, a(>rès avoir clé éprouves pendant un
■rrr, et à ne point (juitler l'ordre que pour
p.isser dans un autre plus austère, on ne
doil pas conclure tle là qu'ils fussent pour
cri.i nligieux, puisqu'on appelait en ce
temps-là religion et ordre toute société dans
laquelle on s'engageait plus étroitement à
Zl'9
ESP
ES!'
o*'i
fcrvir Dieu sous l'obéissance J'un supérieur.
Enfin, par la niôme bullo, le râpe uiiil les
lieux hôpitaux du Sainl-Esiirit de iMonlpel-
iier cl de Rome, voulant qu'ils fussent guu-
vernés par un mémo maître, et que celle
union ne pût préjudicier aux droits do l'évc-
i|ue de Maguelone, à la juridiction duquel
l'hôpital de Montpellier était soumis. 11 or-
donna aussi entre autres choses que ceux
s;ui seraient commis pour chercher ie.i au-
mônes pour ces hôpitaux auraient cha 'un
h ur déparlemenl, que les quêteurs de celui
de Home se contenteraientdesaumônesqu'ils
recevraient en Italie, en Sicile, en Anijlc-
lerre et en Hongrie, et que ceu\ de l'hôpiial
de Montpellier pourraient aller dans toutes
les autres provinces de la chrétienté.
Plusieurs hôpitaux s'unirent ensuite à
celui de Montpellier , auquel l'on Gl de
grandes donations. Celui de Uonie se mit
dans la même répulation, et plusieurs hôpi-
taux s'unirent à lui; c'est pourquoi, l'an
1217, Honorius 111 voyant que l'union de
ces deux hôpitaux de Uonie et de Montpel-
lier pouvait préjudicier à celui de Uome en
particulier, les démembra, ordonnant qu'ils
n'auraient rien de commun ensemble ; que
les aumônes qui seraient reçues en Italie et
dans les royaumes de Sicile, de Hongrie et
d'Angleterre, seraient portées à rhô|;ital de
Hume, et que celles qui seraient reçues
d^ins toutes les autres provinces de la ciiré-
lienlé appartiendraient à celui de Mont-
pellier.
L'ordre du Saint-Esprit a donc d'abord été
mixte, composé de personnes ecclésiasti-
ques faisant profession de la vie religieuse,
engagées par des vœux solennels, et de per-
sonnes la'iqucs qui ne faisaient que des vœux
«impies. On regarda dans la suite cet urdre
comme militaire ; le nom de maîlre que pre-
naient ceux qui gouvernaient les hôpitaux
et ([ui en étaient supéi leurs, fut changé en
celui de précepteur ou commandeur, et l'on
se servit du terme de respou-^ion pour mar-
quer les charges que les conimanderics de-
vaient au grand maître ou générai, ce terme
de responsion n'étant en usage que dans les
ordres miliiaires. Il n'y a néanmoins aucune
preuve que ces llospilaliers aient poi lé les
armes et aient été employés dans les croi-
sades comme les autres hospitaliers, mais
l'on trouve que le nom de commandeur leur
e,4 donné dans une bulle d'Alexandre IV de
l'an 1-251) : Cum içjilar miujistri commcnda-
turcs et omnes ulii frnlres noslri hospiculis.
On Irouvc aussi la même chose dans d'au-
tres bulles do dilTéicnts pontifes. Le même
Alexandre IV, dans celle dont nous venons
de parler, et le pape Nicolas IV, par une
autre bulle de l'an 1291, après avoir dit que
le commandeur de Montpellier et les mai-
S')nj do sa dépendance se sont soumis à
i'Iiôpilal du Saint-Esprit de Home, ajoute
que c'est afin que l'hôpital de Montpellier
soit soumis et sujet à celui de Home de la
même manière que les n)aisons qui dépen-
dent de l'hôpital de Jérusalem, qui est une
Qiilicc temporelle, sont suuuiises et sujettes
à cet hôpital de Jérusalem. C'est apparem-
ment pourquoi Bzovius, le P. Mendo, Cres-
cenze, l'abbé (jiusiiniani et quelques autres
auteurs, parlant de l'ordre du Saint-Esprit,
l'ont qualiûé ordre militaire.
§ 2. Continuation de l'histoire de l'ordre du
Saint-Esprit de Montpellier, et suppres-
sion de la milice de cet ordre.
La première atteinte qui fut faite à l'au-
torité du grand maître ou commandeur de
l'hôpital du Saint-Esprit de Montpellier, qui,
en cette qualité, é'ait général de tout l'or-
dre, fut quand le pajjc Honorius III sépara
cet hôpital de celui de Uome. 11 lui laissa
néanmoins toute juridiction sur les hôpitaux
qui se trouvaient dans toutes les provinces
de la chrétienté, excepté en Ha'ie et dans
les royaunirs de Sicile, de Hongrie et d'Aîi-
glelerrc. Grégoire X. lui ôla encore relie ju-
ridiction, qu'il donna au maîlre de l'Hùpilal
de Uome, voulant que celui de Montpellier
lui obéît comme à son supérieur. Nicolas IV
dit néanmoins, dans une bulle de l'an 1291,
que ce fut du consontenienl du mai re do
l'hôpital de Montpellier et de ses hospita-
liers, qui s'y soumirent volontairement ; et
il ordonna que le maître de Montpellier
payerait tous les ans à celui de Rome iroii
ilurins d'or. 11 y en a qui prétendent que le
pape Grégoire XI remit les choses en l'étal
qu'elles étaient du temps d'Honorius III, en
séparant de nouveau ces hôpiiaux ; mais
le Saunier, religieux de l'ordre du Sainl-
Esjirit, et sous-prieur de l'hôpital de Rome,
fait voir que la bulle de ce pape, de r.in
i;J72, qui se trouve dans le Kullairc de cet
ordre, est fausse et supposée, en ce qu'ell •
est adressée à Cérenger (^iron , général et
grand m lîlro de l'archihôpital et m lice dn
l'ordre du Saint-Esprit, et que ce Uérengcr
mourut l'an 14-87 ou l'i88, outre que celte
bulle, qui est datée «lu trois des calendes de
septembre 1372, et de la troi-ième année du
pontificat de Grégoire XI, ne peut pas être
de celte année, puisqu'il ne fut élu que le
39 décembre 1370. Celait pi'Ut-être au sujet
de ce Bérenger Giron que Sixte IV se plai-
gnit de ce qu'il y en avait au del.'i des monis
qui prenaient la qualité de généraux, et il
les soumit à celui de Rome, comme au seul
général de l'ordre. Le généralat fut néan-
moins restitué au commandeur de Montpel-
lier par les papes Paul V et Grégoire XV,
mais à condition qu'il dépendrait encore de
celui de Uome. Celle dignité lui fut enfin ac-
cordée sans aucune dépendance par le pape
Urbain VIII, et enc 'TC contestée, comaie
nous dirons dans la suite.
Mais la milice de cet ordre reçut un plus
grand échec en 1439, car le pape Pie II la
supprima entièremeiil. On découvrait quel-
ques traces de chevaliers depuis la bulle
d Alexandre IV de l'an 12o(>, dont nous avons
l)arlé , jusqu'à ce temps-là. L'ordre était
composé do personnes ecclésiastii|ucs véri-
lablement religieuses , el de laïques qui
n'élaient poinl engages à la profession reli-
gieuse, et on était en peine de ce qu'claieui
m
Dir.TIO.VNAllŒ Di:S ORDRES nELIGIEUX.
iï2
Jevrnns ces laïques liopiiis le milieu <i i
ijuiiizième sièrle jusqu'au coimncnfcmcnl
Hu ili\-sop!i^me , qu'on ne voii dans cA
ordre que de véritables reli«»ieus ; et ce
n'est qu • vers ec temps-là qu'on y voit re-
naître des laïques ou séeulicrs qui sont
ni<?nie en-j.igt'S dans le mariage. Mais M. de
L' ibnilz nous a appris quel avait élc leur
sort, en nous conservant dans son Codex
iwis ijendiiiii la huile de Pie II de l'an lioî),
par laque Ile il ériiïc l'ordre mil. taire de
Nolrc-Uame de nelhlécm , et en supprime
qui'lqu(S ai'trcs, du noihbre desquels est la
milice du Saint-Kspril in Sussia à Home,
dont il np liqu(^ les revenus à son nouvel
ordre île Nolri'-Dame de l'etbléenj : Pro ftin-
damento anlrm oc sxbstnnl n dicta' reHiionis
uovcF, aliiis rdlf/ion.s sue mililiits ac lio^jii-
talia infra scrip'a, vidclicet S. Laznri, ubili-
let consislenlia, S. M. dedislitlo lirilonum
de D lo';na, ac S. S''piilcri, vec non S- Spi-
ritiis in Saxia de Urtic, d omnia ni) eo dcfien-
deiiliii aut tllius hahituin seii rrucem duplicetn
defvrentia, et 11. M. Criicifrrvrum, cic. On
pourrait rire que c'est Tiui l'orilre du Saint-
llsprit in Sassia que ce pape avait supprimé,
mais il n'a >culement entendu parb-r que de
la milice, religioues su militias. Et, bien
loin d'.iViiir supprimé rhôiiit.il du Saint-
Esprit de Uo:i;e, c'est qu'il liii accorda beau-
coup de pri\iléges au-si bleu que son suc-
cesseur l'aul 11, comme il est marqué dans
une bulle de Sixte IV du 2î mars H78.
Après la suppression de celle milice, il
n'y eut plus dans l'ordre du Saint-Esp'it de
inel.mge de religieux et de laïques. Cei or-
dre lui p»re;t;ent réjfulier, et, s'il y eut des
la'iques (]ui possédèrent encore des comiii.in-
délies sous le tilre de chevaliers de cet or-
dre, ce tilre n'éliiil point léfjitime. C'est ce
que nous ajiprenuns d'une autre bulle ce
Si\lc 1\' de l'an li'G, <iui ordonne que les
liô|iilaux de cet or.lroct les conimanderie-,
aussi bien que leurs liépemiances, ne pour-
ront être donnée , soit en litre, soit en com-
meiide , qu'à des reliuieux procès de cet
ordre, qui seront ohl'gés d»- retourner dans
leurs doit! es toutes lois et (juaiid il plaira au
;;rand maître de l'hôpilal de Kouie de les f.iire
Ceveu r ; Slitluivtes ac etiam dccerncnles ,
ipiod ipsius ordinis liospiolia, prœcrptoiir,
inembni cl toca, nulti ciijttfcutiqtie diijnitatis,
niatuii, f/ialus, vel ronililionis fuent^ prœ-
t rr/Kim iiitius nosiri ltuspit(dis frnliibus, il
oïdinem ijisiim exprisse profcssis, cis tainni
pro solo nitiu dicii prwcepturis existcnlis cl
pro limporc wl clauslrum r/uo/ifs cxpedirrit
I evocdiidif, in lilnlum iil comiuend'nn c,»-
feiii luliniil «lie ji'jssiiit. \'o là qui est bien
tort contre les chevaliers qui ont paru au
ciiniiienccment du diN-scpliùmc siècle, qui,
bien loin de vivre en commun dans un cbii-
tre sous l'obelssancn d'un supérieur, ou du
ii.oiiis d'y pouvoir être rappelés à la volonté
des supérieurs, lors()u'ils auraieui des com-
luanderics, étaient au contraire la p'upail
maries. l'eut-étre, dira-ton (juc les hôpitaux
de Uomc cl de Montpellier .ly.int été désunis
|'.ir \<î piipc tirég ire XI, r.iii rJ"i, le paj)C
no pnrlail qu'à ceux qui élaiefit suunis à
Ihôpilal de Home ; niais, outre que la Iule
tic f'iregoire XI est fausse ci suiiposée, c'est
(jue Sixte IV s'adresse plus particulièremet.l
aux Français qui avaient usurpé des com-
niandcries et qui prenaient la qualité de gé-
néraux de l'ordre ; Cum iitu/ue. ficul itcce-
pimus displicenter. tiunnttlli in ipsiiis liospi^
tidis fralres etiam prœceptoriait , fiospitcdin,
V eiubra, et loca pia ab ipso hospiiali in Saxia
dpcndenlia, obtinrntrs, am'nliove et cupidi-
laie cœcainducli, et sub terminis non conirnii
lemeritate propria se générales prœceplores
dicti ordinis prœripue in panilnis ii/framon-
lanis nominare, etc. Il déclare ensuite que
tous les hôpitaux, les comm.inderies et les
lieux pieux de l'ordre et qui portent le nom
du Saint-Esprit, dépendront de l'hôpital du
Saint-Esprit en Saxe, etiamsi longœva con-
suetudo aul submissio aligna repwjnarint ; et
il défend à aucun religieux posséd^int une
ccmmandcrie de l'ordre de prenlre la qui-
lité de général en deçà ou eu delà les monls,
ni de prétendre aucune autorité sur les au-
tres lelig eux, qui doivent être tous soumis
au précepteur de l'hôpilal de Uome : Quin-
imo , onines et sin(,uli dcli ordinis prcecep-
tores, liospilularii el relii/io^i quos eidcnt prœ-
cepturi nostri hospi:a!is in Saxia pleno jure
subesse volumus et tani/wim suo superiori
obedienliani et revercnuam cungrunm exlii-
bere, ne salta hujus sedis auloritute, in om-
nibus sicuti un:co eornm praceptori ob'.etn-
periire leneantur et dcbeant.
En effet II n'y eut point de généraux en
France depuis ce lemps-là jusqu'en l'an 1G)9,
que l'aul \' rendit celle (inalite pour la Fran e
cl toutes les autres provinces delà chrétienté,
cxceplé rilalie. la Sicile, la Hongrie et l'An-
gleterre, au commandeur de Montpellier: ce
que fil aussi (Jrégoire XV l'an 1(J2I; m.iis
ce ne fit qu'à condilion qu'ils dépendraient
encore de celui de l'hôpital de Uome; et L.i
'J'errade, qui fut pourvu de celle comman-
derie, av.iit été fa.t par le grand maîlic ilc
Uomc le i septembre 1()17 vicaire et vi>iteur
gér.ér.il dans les royaumes de France el de
Navarre, à la charge de se la re reigieux
proies de l'ordre dans l'année. Ce fut lui qui
lut f.iit pemier général en France dépend.nit
de celui de Uomc, el ce ne fut qu'à la prii^re
de Louis XllI que le pape l'ibain A III ren-
dit ce général ce France indépendant de ce-
lui de Uome, l'an lG2o. Ce fut donc an com-
mencement du dii;-se[)ticme siècle que l'on
commença à songer au rétablissement de cet
ordre en France, ((ui y était presque anéanti ;
in;iis, au lieu de !e remettre dans son ancien
luslie el dans sa splendeur, ce ne fut au con-
liaire qu'une confusion et qu'un chaos de-
puis l'an l(i02 jusqu'en 1700, que le roi dé«
brouilla ce chaos en déclarant cet ordic pu-
rement régulier et iiul'cmenl militaire.
Antoine I'ons,(|ui prenait l.r qualilé de
commandeur de I bôpit.il de S.iin'-Germaiu
et <le procureur général de l'oidre , >()iilut
cumtrieiic r ce rélaldissement en KiOi, m.irs
ce fut en f ilsiliani des bulli s et <les imlnlgcu-
ces j ceux (lui voulaient conlribner à la rcs-
215
ESP
E'^P
21 i
lauralion des comniandcries; et, son impos-
ture ayant été dccouverle, il fut condamné
par arrêt du parlement de Toulouse du 21
janvier 1G03 à faire amende honorable , nu
en tlicmise, et banni à pcrpétuilé hors da
royaume. Il ne laissa pas de surprendre en
la niôrne i]i>nli[é des lellrcs paten'es d'Hen-
ri IV et de Louis Xlll, des années 1C08, 1009
cl 1010, qui lui pcrmcltaient de faire ses di-
ligences poiirré'ablir cet ordre; mais en 1012
on lui lit défense de faire négoce d'indulgen-
res à peine d'amende arbitraire; le sénéchal
de Moissac déi réta prise de corps contre lui,
et le pai leinenl de Toulouse ordonna que en
décret serait exécuté.
Olivier de la Tr^u, sieur l'c la Terrado, pa-
rut ensuite sur les rangs. Il obtint des papes
Paul V et tlrégoire XV la (jualité de général
aux conditions que nous avons dit, cl fut in-
dépendant do celui de Rome, par une bulle
d'Urbain Vlil l'an 1025. En celte qualité il
créa des chevaliers |,uiement laïques el
inênie engagés dans le niaria;;e. On ne laissa
pas iiéanmuins de voir d.ins le uième temjis
un prélendant à la commanderic générale
de Montpellier, qui de son côlé faisait des
chevaliers. C'élail un apostat de 1 ordre des
Gapocius, que la Terrade fit enfermer dans
les prisons de l'ofliciailé. La Terrade y fut à
.Sun (our, et, après sa mort, M. Désécures,
l'un des comtes de Lyon, qui prit la qualité
de vicaire général, fit aussi des chevaliers,
aussi bien que plusieurs aulres qui se di-
saient officiers de l'ordre. Le roi , par un
arrêt du conseil d'Etat de l'an 1035, ordonna
que les pouvoirs, privilèges, possessions et
translations des prétendus officiers de l'urdre
du ?aint-Espril, seraient examinés p ir l'ol-
fiiial de Paris assisté de quatre doclenrs
nommés par l'arrêt. Par un autre de la même
année, Sa Majesté fit défense à qui <iue ce
fût de prendre la qualité de général de l'or-
dre du Suint-Esprii ; et au mois de janvier
1030, DésLCures obtint un brevet de la com-
manderie ou préceptnrei ie de Moiilpellier.
Au mois de mai, le roi nomma des commis-
saires pour examiner les titres, bulles et pro-
visions de ceux qui se prétendaient généraux,
commandeurs , olfi(iers et religieux de cet
ordre. L'oCficial de Paris, par une sentence
de la même année, fait défense à Désécun s
de prendre la qualité de vicaire général,
coadjuteur, supérieur, commandeur ou reli-
gieux de l'ordre du Saint-Esprit, d'en port r
les marques ni d'en faire aucune fonclion à
peine d'excommunication ipso facto. Nonob-
stant celte senlence, il lui est permis par un
arrêt du grand conseil du 3 septembre 1053
de prendre possession de la commanderie de
Montpellier, à condition d'obtenir des bulles
dans SIX mds. Il les obtint du pape Alexan-
dre Vil et prit possession de cette comman-
derie en 1059 avec la qualité de grand maî-
tre de l'ordre. Par sentence du 16 octobre de
la même année, l'official le déclara excom-
munié pour avoir pris la qualité de supérieur
de cet ordre, et lui fit itératives défenses de
se qualifiera l'avenir grand vicaire ou reli-
giuui de cet ordre; déclara les professions
f.iites entre ses mains , nuPcs; le condamna
<i 100 livres d'amende , à tenir prison pen-
dant six ntois, el à dire les sept psaumes têle
nue el à genoux. Par une autre sentence du
CluKelel de Paris du 29 août 1007, il fui con-
damné d'è're mandé, b'âmé nu-lé(e et à ge-
noux, et défeiises lui furent faites de prendre
la qualité de général ; el, par arrêt du parle-
ment du 2;) mai 1008, il fui banni pou rneu fans.
Le roi, par son brevet du 21 septembre do
la rncme année, dojina la commanderie de
Montpellier à M. Rousseau de Bazoche, évê-
que de Césarée , conseiller au parlement de
Paris. Un liomnréCompanse prélendit pourvu
de celle commanderie; Désécures eut aussi
toujours les mêmes prélenlions, mais , par
arrêt du conseil d'Etat du 9 septembre 1009,
l'évéque de Césarée fut maintenu dans la
possession de cette commanderie contre Com-
pan el Désécures. Par arrêl du grand conseil
du 27 avril 1071, il fut ordonné qu'on tien-
drait le chapitre général de cet ordre. Le roi,
par un autre arrêl de son conseil d'Elat du
mois de mai de la même année, confirma ce-
lui du grand conseil, et ordonna que, no-
nobslani le refus qu'on avait fait à Rome de
donner des bulles à l'évéque de Césarée, ce
prélat serait reconnu pour général de l'ordre
par tous les religieux et religiei^ses, cheva-
liers, commandeurs el aulres personnes de
l'ordre, et qu'on assemblerait le chapitre gé-
néral. L'évéque de Césarée mourut la mêmii
année sans avoir obtenu de bulles, elMprès
ï.,1 mort 55. Morin du Columbier, aimônier
du roi, se fit pourvoir pur bref du pape Clé-
ment X du mois de février 1072, de la cons-
manderie i!e Montpellier (vacante dci)uis
quarante ans, à ce qu'il avait exposé), à la
charge de prendre l'iiabil et de faire proies-
sien dans l'ordre régulier du Saint-E-pril.
Celle commanderie lui fut conlesiéc, el il y
a de l'apparence que toutes ces divisions ar-
rivées parmi ceux qui se prétendaient supé-
rieurs, commandeurs et ofliciers de cet or-
dre, qni la pluiiart n'avaient ;iucun tiire légi-
time, el qui, bien loin do rétablir cet ordre
en France dans sou ancien lustre, le (létris-
saicnl au contraire par leur conduite et les
al us qu'ils coinmetlaiei'.t dans la réception
des prétendus chevaliers, admettant indiffé-
reinmenl tous ceux qui leur donnaient le
plus d'argent, portèrent ia roi à metire l'or-
dre du Saint-Esprit de MonlpoUier au nom-
bre de ceux que Sa Slajcbté dé -lara éteinîs
de fait et supprimés de droit par son édit du
mois de déccaibre d ■ l'an 1072, cl qu'il unil
à celui de Saint-Lazare. Nonobslanl cet édil,
M. du Colombier obtint au Enois dejainier
1073 des lettres de Fr.niçuis-M.irie Pluebus ,
archevêque de Tarse, commandeur de l'hô-
pital do Rome el général de l'ordre du Saini-
Esprit, par lesquelles il rétablissait son vi-
caire général et visiteur en France et d.ins
les provinces adjacentes , ce qui lui procura
un séjour de huit années à la Rasllle.
Les au'res chevaliers du S imi-Ksprit for-
mèrent opposition au grand conseil à l'enrc-
gislremenl de cet édil. Ils continuèroni à
s'assembler et même à rccevjir des theva-
215 DICTIONNAIRE DLS ORDRES RELICIEUX. 2J6
licrs. Le sieur de l;i Cosie se liisail grand de nouveaux chtvalicrs. Ils élaicnl divises
inaiire de cet ordre comme ay-'inl élé canoni- en plusieurs bandes. Il y en avait qui pre-
qui nicnl clu par 1rs chevaliers. Mais Sa M.i- liaient le lilre d'anciens chevaliers, et qui ne
jeslé. par deux arr^'-ts du conseil d'iîtal des repanlaienl les autres (pie roninie des intrus
années lG8i) el IGflO, fil défense à ce grand d,:ns l'ordre. Parmi (c ilie\aliers anciens il
maître de prendre celte qu;ilité à l'avenir, ni y en avait qui se disaient premiers officiers
de porter la croix et ré[iée lui et les siens ; el fi'c()éc. On y voyait des chc\aliers de grâce,
dérl.ira toutes les réci plions f t prétendues des chevaliers d'obédience . des chevaliers
lettres de provisi^ins par eux expédiées de- servants et de petits olficiers.
puis l'édit de 1G72. nulles el de nul eiïel ; el, Dés le 15 février 1G92 ils avaient lenu un
sans avoir égard à leurs oppositions , or- chapitre aux firands-Auguslins à Paris, où
donna que son édil serait exécuté. entre autres cho^es ils av.iienl délibère qu'on
I.cs rhevaliesde Saint-Lazare, qui jti«- ncrecevraitaucunschcvaliersqu'ilsne payas-
qu'alors av.iiunt trouvé beaucoup de laii- seul rliacun à l'ordre pour le moins la somme
lilé à obtenir ce qu'ils avaient souhaite, de 600 livres, leschevaliers de grâce celle de
trouvèrent néanmoins dae.sla suite de grau- 1200 livres, les chevaliers d'obédience, mer-
des difficultés pour l'exécution de cet édil; vanis et autres petits officiers 'lOO livres,
car les religieux profès de Tordre du Saint- Mais les religieux rompirent toutes leurs me-
Lspril se joignirent aux chevaliers de cet or- sures; car, à peine le rui eut-il prononcé le
dre pour interrompre le cours des entrepri- rétablissement de l'ordre e;i 109.'}, qiiis ré-
ses de ceux de Sa nl-Lazare. Les chevaliers clamèrent la maison magistrale de Monlpel-
du Saint-Esprit oiïrirenl à Sa Majesté de le- lier, qu'ils avaient auparavant désavouée,
ver el d'cnlre|enir à leurs dépens un régi- Ils soulinrenl que l'ordre du Saint-l^sprit
ment pour agir contre les ennemis de l'Etat; était purement régulier, et que la milice était
et les religieux p'ofès. qui étaient en pos- une nouveauté du siècle (ini ne s'él.iit inge-
session de plusieurs maisons conventuelles rée que par usurpation dans l'adminisiration
dans le royaume, où ils n'avaient point dis- des biens de l'ordre. C'est pourquoi le roi
cmilini c de recevoir les enfants exposés. n''mraa encore des conimissaiies pour l'esé-
preiendirenl que l'état de leur élablisseme. l culion de son dernier èdit. Les chevaliers ne
su. lisait pour détruire ce qui avait été sup- nuinquèrent pas de faire valoir 1. ur antiquité
pose I our l'obieiilion de cet èdit , alléguai.t prétendue, qu'ils faisaient remonter jusqu'au
au surplus qu'ils n'avaient jamais dépendu temps de sainte Marthe, cl de rapporter le
de 1 hôpital de Montpellier, mais qu'ils préiendii chapitre général tenu à Monipellier
avaient clé toujours soumis à la juridiction l'an 10.(2. Le roi, le 10 mai ITOO, décida eu
du précepteur de celui de Home, el qu'ainsi fi\eurdes religieux. L'ordre du Saint-Esprit
le roi n'avait pas eu dessein de donner al- lui déclaré purement régulier cl liuspilalier
teinte a Icurs-droits, Sa Majesté n'ayant pro- par un arrètdu conseil d'Etal ; el Sa Majesté
nonce par son édil que la suppression d'un (it défense à tous ceux qui avaient pris des
ordre qu'elle avait cru èleinl de fait el qui qualités de supérieurs, officiers et chevaliers
e;ail sous le litre de Montpellier. du prétendu ordie mililairedu Saint-Espril
Ils furent favurablemenl écoutés. Le roi de Montpellier, de prendre à l'avenir ces
leur donna des commissaires en 1091 pour (pialilés, ni de porter aucune marque de
1 examen de son édil, el accepta en 1C!)2 le celte prétendue chcvaleiie, et de donner des
régiment offert par les chevaliers. M. du lettres ou provisions de commandeurs, clie-
Jîoulay, vicaire général de cet ordre au spi- valicrs ou officiers de e< t ordre. Sa Majesté
rituel, cl M. Gra'idvoynel. commandeur de ordonna de plus que le bre\et de gr.ind mai-
la maison conu-nluelle de Slé| hanfeld en .M- Ire accordé à M. l'abbé de Luxembourg sc-
sa.e, furent députés pour solliciter coiijoin- rait rapporté comme nul et de nul elTel, el
leii.enl le lélablissemeiil de cet ordre, le pie- qu'il serait sursis à faire droit sur les demaii-
mier par le clergé séculier, le second par les des des religieux pour éire remis en posses-
religieux proies, et M. de lilégny coniman- sion des maisons de cet ordre et des biens
deur et adminislrau-ur général, j ar les che- qui avaient elé unis à celui de Saint-Lazare ,
valicrs. Leurs sdlii iialions curent un heu- jusqu'à ce que Sa Majesté cul jiourvu au ré-
reux succès , car le roi en 1093 révoqua S'. n lablissemenl de cet ordre cl de la grande
cdit de 1072, rétablit cet ordre, lui rendil maîtrise régulière du Saiul-Esprit de Monl-
lous les biens qui avaient é é un s à celui de pellier.
Saint-I.azarc, el nomma pour gr ndmiihc Après la mort de M. l'abbé de Luxeni-
*I. l'alibe d • I.uxeiiibourg, Pierre Hcnri-Thi- biurg, qui, conformémei.t à cet arrél du con
biiull de .Moiilinorency , alilié commenda- seil d'Etal , avait remis entre les mains du
taire des abbayes d'Orcamp cl de Sainl- ci son brevet de grand miilre de l'ordre du
'^'"'"'l- Saint-Esprit de Montpellier, on fit de nou-
H scnihlait qu'après cela les chevaliers ne vellcs tentatives auprès du ri.i pour le réta-
Hevaieiil plus craindre qu'on les inqiiiéiàl blissemenl de cet ordre , it Sa Majesté, par
touchant leur élablissemciit ; déjà leur nom- un arrêt du conseil d'Elal du 10 jan\ ier 1701 ,
hre grossissait tous les jours ; des |)ersonues nomma Mgr le cardinal de Noaillcs, arche-
i|ui n'av.iieiii aucun drol lég. lime, sous pié- vèque de Paris ; Mgr llossiiet , évéque de
le»tc des titres de vicaire général, de clian- Meaux ; le révérend Père de la Chaise, Mcs-
• elicr.de vice-( hancelier et même 00 \iiaire sieurs l'abbé Itignoii , do l'oiiimereu de la
gér;éralibsiiiie, qu'ils s'attribuaient, créaient Keynic , de Manllac cl d'Agucsscuu, pour
2!7
ESP
rsp
8iS
(!snmiiicr les buMos, lettres patentes, (ié<I.i-
rations, arrêts et antres titres concernant
cet ordre ; et voir sur leurs avis s'il conve-
nait et s'il était possible de rétablir la com-
niandcrie générale du Saint-Esprit de Mont-
pellier et ses dépendances, et quelles pré-
cautions l'on pourrait prendre en ce cas pour
le rcglcnienl tant du spirituel (lue du tem-
porel de cet ordre, ou s'il ne serait pas plus
a propos d'en employer les biens elles reve-
nus à quelque autre usage p eux ; et , par
deux autres arrêts des 2ï novembre 170i et
1" juin 1707, Sa Majesté nomma pour rap-
porteur M. Lauiicois d'Inibcicourt, maître
des requêtes.
En 1707, M. le duc de Ciiâiiilon, Paul-Si-
gismond de Honhiiorency, ayant dcinaïuié
au roi la grande maîlrise de cet ordre, et Sa
Majesté lui ayant permis d'eu faire connaî-
tre le véritable caractère cl la milice, il con-
sulta plusieurs docteurs de Sorbonne, neuf
célèbres avocats et quelques autres person-
nes, ijui furent tous d'avis que l'ordre dans
sou 01 igine avait été laïque et séculier, cl
que ce n'a été qnc dans la suite qu'il a été
mixte, composé de personnes laïques pour
l'administration du temporel, cl de clercs
réguliers pour l'administration spirilueile;
et on ne trouvait point d'inconvénient qu'un
laïque fût grand maître de cet ordre , à
l'exemple de plusieurs ordres niilitaircs,
qui, quoique composés de chevaliers laïques
et (le religieux, ne laissaient pas d'être gou-
vernés par des grands maîtres laïques.
Les religieux de l'ordre du Iraint-Esprit,
qui semblaient avoir intérêt que celte milice
ne se rétablît point, puisqu'ils l'avaient dis |iu-
lée en 1693, et que ce ne (ut que sur leurs
remontrances que le roi par son arrêt du
10 mai 1700 avait déclaré leur onlre pure-
ment r<gulieret nullement militaire, se joi-
gnirent néanmoins à M. le duc de Ghâtiltou,
et, dans une requête qu'ils présentèrent au
ro', ils demandèrent acte à Sa iVîajesié de ce
qu'ils n'entendaient point se prévaloir ni se
servir de l'arrêt du 10 mai 1700, au chef qui
ava'.t réputé l'ordre du Saint-Esprit de Mont-
pellier purement régulier, mais seulement
en ce qu'il avait exclu de cet ordre les pré-
tendus commanileurs, officiers et chevaliers,
qui paraissaient pour lors sans caractère et
sans titres légiliines , et dont la plupart
étaient plus propres à le déshonorer qu'à le
rétablir ; et de ce qu'ils consentaient que cet
ordre fût, comme il avait été dans son insti-
tution, composé de religieux de deux sorles
de conditions, lis uns laïques pour l'admi-
nistration du tempo: cl ^euIement, engagés
à l'ordre par les vœux d'obéissance et d'hos-
pitalité à un chef ou grand maiire de l'or-
Jre laïque, et les autres, clercs, pour l'admi-
nistration du spirituel, engagés à l'ordre par
les vœux de pauvreté, de chas'cié, d'obéis-
sance et du service des pauvres ; et priaieiit
aussi Sa Majesté de conserver les comman-
Jenrs proies de cet ordre dans l'exercice de
la juridiction spirituelle sur les religieux
hospitaliers cl les religieuses hospitalières
de l'ordre ; et qu'à cet effet le granJ maître
serait chargé par le brevet de Sa Majesté
d'établir un grand prieur d'église et visiteur
général, qui ne pourrait être qu'un prêtre
religieux de l'ordre, qui serait confirmé par
le pape.
Il semblait qu'après ce consentement des
religieux qui demandaient le rétablissement
de la milice et d'un grand maître laïque, le
roi allait révoquer son arrêt du 10 mai 1700,
qui déclarait l'ordre pnrenient régulier, et
qu'il allait aussi reconniitre la milice de cet
ordre; ccpenilanl , par un autre arrêt du
conseil d'Etal du k janvier 17().S, Sa Majesté
Confirma celui du 10 mai 17i 0 et ordonna
qu'il serait exécuté selon sa forme et teneur,
et en conéquence que l'hospilalité scrjiil
rétablie et observée dans la conimanderie
générale, grande niaîtrise régulière de l'or-
dre du Saint-Espril de Monlpellier, par le
commandeur général, grand maître régu-
lier, qui y serait incessamment établi. On ne
saurait en ce jugement trop admirer la jus-
lice et l'équité du roi, qui prononce et dé-
cide que l'ordre est régulier ; parce que
c'est le dernier état où l'on le Irouve, et quo
c'est un princijie de l'un et l' lUlre droit, que
dans ces matières le dernier état décide,
uHimus statKS ntleniiitur.
L'ordre à la vérité avait été dans son ori-
gine laïque et séculier. Il était devenu en-
suite mixte, c'est-à-dire composé de clercs
ou prêtres religieux et de laïques. Les ter-
mes de commandeurs, de responsion et au-
tres dont on se servait dans cet ordre, et qui
ne sont en usage que dans les ordres mili-
taiies, prouvent assez qu'on le reconnais-
sait comme une milice; mais cette milice
avait été supprimée par Pie II l'an l'tSO, et
l'ordre était devenu purement régulier,
coumie il paraîl par les termes de la bulle de
Sixte IV de l'an 1470, que nous avons ci-de-
vant rapportés, et par la règle de cel ordre
imprimée en 1564 par ordre du général Ber-
nardin Cyrilli, qui, en l'adressant à tous les
frères de l'ordre, fait assez connaître qu'ils
sont tous véritablement religieux, par ces
paroles : Sponte nos ipsos ubiulimus et saii^
cto Dci Spiriiui, beatœ Virijini et dominis
infirmis, ut perpctui essemus eoruin servi,
ra^lilalem, paujicrlalem, obedient am ri hit-
vnlem palicntium, aclu libero iiemine co'ienie,
jurejurando, solemni voto, sumus polliciti.
Il est néanmoins parlé dans cette règle de
religieux lais, c'est-à-dire de personnes vé-
ritablement religieuses, et qui ne sont paa
destinées aux fonctions ecclésiastiques : le
terme de lai étant en usage dans presque
tous les ordres pour désigner ces so les de
personnes ; et même ils peuvent être com-
mandeurs dans celui du Saint-Esprit, car il
est dit [Cup. 26 îleg.i que lorsque le com-
mandeur sera lai, il ne pourra pas faire la
correction à un clerc ; mais qu'elle appar-
tiendra aux cardinaux qui seront nommés
pour cet effet par le pape : Correclio vero
ilericorum et specialium aliorum ad prw'
ccplorem lalcum non pcriineat, sed ad (ardi~
nules quibus a domino papa ipsa domus fuerit
commcnduta. Ouc si dans le couimencemenl
ÏID DICTIONNAIRE DES OUDRES RELIGIEUX. 220
ilu dit-^cplii^mp siècle les souverains p.on- sons, ou que les papes ne les en dispensent,
tifes ont rendu à la maison (le Monlpollicr le Ils portent néanmoins sur leurs habits I.i
pi néral il qu'on lui avait ùlé, ils n'ont pas crois de l'onlre. Le prieur de la maison et
prétendu que ces généraux réliblissent la hôpital du Saint-Espril de Home lient la se-
niilice de cet ordre en créant des chevaliers conde place dans l'ordre, cl en est vicairo
purement laïques et même engagés dans le général.
niari.ige. Ils ont toujours au contraire re- Les religieux de cet ordre s-.^nl habillés
{;ardé cet ordre C' mine régulu r, puisi|u'ils comme les ecclésiasiiqurs, ils portent seu-
ont obligé les commandeurs de Moiilpeliicr, Icmenl une croix de loile blanche à douze
auxquels ils ont accordé des bulles, de [ireii- [lointes sur le côté gauche de leur soutane
drc l'habit religieux de cet ordre, et d'y (aire et de leur manteau, cl lorsqu'ils sont au
profession ; et de tous les commandeurs du chœur, ils ont l'été un surpls a\ec une au-
S.iinl-Ksprit de .Mont|icllier qui ont élé de- musse de drap noiriloublce de drap bleu , i't
puis l'an 1(119, que la Tcrrade prit le prc- sur le bleu une croi\ de l'ordre. L hiver ils
inier la qualité de général de cet onlre en ont un grand cumnil avec la chape noire
l'ranre, ni lui, ni aucun autre n'ont exéculé doublée d'une etolTc bleue, et les boulons
en cela l'intention des p.ipcs, qui oui même c!u grand camail son' aus-^i bleus (1'. Kn
refusé des bulles à quelques-uns. Aii:si (oui l'r.iuce il mettent toujours l'aumusse sur le
ce que ces commandeurs oui fait en qualité bras. Celte aum'issc est de drap noir dou-
di! généraux était nul, n'étant pas revêtus blie et bordée d'une f.urrurc noire (:i). Kn
de pouvoirs légitimes, et ayant niénie été li.ilie ils l:i poricnl quelquefois sur les
contre la volonté des papes, en rétablissant cp iules, et en l'oldgne (•'!) ils ne se servent
la milice qui avait été supprimée par l'ie II. | oint d'aumu>se, mais ils nictlenl sur leurs
(;'e>l pourquoi, quoiqu'il y eiil eu 170.) des surplis une espèce de mosetle de couleur
chevaliers la'iques el des prêtres religieux, v;olelte, qui n'a point de capuce et n'est
ce n'elail point son véritable état, el le der- point ronde comme le'i autres, mais descend
nier auquel on devait avoir égard. Il avait eu pointe par derrière. Les commandeurs
toujours été purement religieux depuis l.i ont à la 1 outoiinière de leur soutane une
suppression do la milice, c'étiiit là son der- croix d'or émailléc d(> blanc, et au chœur
nier état et auquel le roi cul égard : Ulli- une aumusse de moiie violette, si c'est l'été,
mus status (iKcndilur. oa un camail de même couleur l'hiver.
Les prêtres de cet ordre sont qualifiés II n'y a que les religieuses de Koine qui
( hanoines réguliers dans i)lusieurs tiu les gardent l.i clôture ; la plupart demeurent
(b s souverains jioniifes. Le Saunier prétend dans les mêmes hôpit inx que les reli:;ieu\,
que ce fui le pape Eugène IV qui les soumit comme à Besançon et en il'autres cmlroil-.
à la règle de Sjiiit-.\ugus;in, outre ce le de l'Mes sont aussi qui Iquel'ois seules d.iiis
Gui, leur foiuiatiur. Le cardinal Pierre d'autres mais:ns, comaie à liar-sur-Aubc,
ISarbo. neveu de ce pape, fui le premier (jui Neulchâleau cl autres lieux. Llles di>enl le
n'étant point lie I ordre fut fait commandi'iir grand oflice selon l'usage de l'Lglise ro-
ou précepîeur de l'Iiôpitul du Saint-Esprit maiiie. La plupart ont au chœur un grand
de Rome, el eu cet;c qualité général de tout manteau noir où il y a une croix bbiiichc!
l'ordre, ce qui a continué jusim'à présent, iiussi bien (jue sur leur robe, avec un voie
que les commandeurs de cet hôpital ont élé noir ou espèce! de cape; el dans la maison
des personnes distingu'es par leur nais- elles ont un voile blanc (4). Celles de Uar-
sance, à qui les papes ont aecordé celte di- siir-.\ube ont dans les cérémonies et au
gnité pour lécompenser leur mérite. L'ordre chœur un voile noir d'èlamine, sur lequel il
de Saint-Iîenoil en a fourni un, celui de y a aussi la croix de l'ordre. 11 y a d s mai-
Sainl-Augustin un, celui des Servîtes aussi sons de cet ordre à Rome, à Ti»oli, Fnr-
un, celui du .Monl-l)li»cl deux, et celui des nielli, Tolenlin, Viterbe, Ancone, Kugubio,
Chartreux un. Il y en a eu jusqu'à présent Floicnce, Ferrare, Alexandrie , Nureie el
environ soi\anle-dix, depuis le comte Gui de plusieurs autres villes d'Italie. Les princi-
IMontpellier, fond.iteur de l'ordre, parmi les- pales de Fiance sont à Montpellier, à Di-
()uels il y a eu un paiie. sept ou huit cardi- jon (5), lte>aiiçon, l'oligny, Rar-sur-.^uiie,
naux, deux archevêques et douze évêques. et Stéphanfeld en Alsace. Il n'y en a (luu
Alexandre Néroni , qui était commandeur trois en l'iilogne. dont la prinripale est à
général en 1515, fut le premierà qui le p.iie Cracovie, qui lut fondée d'abord à l'radnilv
accurila l'habit violet avec la mosetle el lu par Yves, évê(iue do Cracovie, l'an 1221
mantelel à la manière des prélats de Rome, (Ouglosz, llist. Polo», lib. vi, pag. (j2());
ce (]u'ils ont toujours porte, à moins ()u'i s mais, comme cette maison, qui ctail aussi
n'aient élé tirés de quelques autres ordres, un hôpital, ne pouvait être souvent visitée
au(|uel cas ils retiennent aussi, comme les des personnes pieuses, que la cump.issiuii
prélats religieux, la couleur de l'habit de jiouvail 4iorter à soulager les pauvres, à
I ordre dont ils sont sortis. Ces cumman- cause qu'elle était trop éloignée de Cracovie,
deurs ne font ordinairement | rolession de il la transféra dans celte »iile l'an 12V'». il y
cet onlre qu'au bout de l'an, à moins qii'is a aussi iiii monastère du reli.ieuses à côté
ne dilTeieiit à la faire pour quelques rai- de cet hôpital, cl il s'en trouve quelqucs-
(1) l'oy., à la (in du vol., n"« 3S cl T.». ('■) Voij., i l.i (in du vol., ii"* ij cl II.
(i) Yoy., il la (Ih du vol.. n" iO cl il {'o) Vvy., il la Un du vol., n»> io cl IS,
('■) \ uij , ià lu lui du vul., 11° 4.!.
221
ESP
ETfl
2?2
unes en Allemagne, en Espagne et même
dans les Indes. (Juoique la ville de Memmin-
genen Souabe ail reçu la confession d'Augs-
bourg, et que la plus fîi-ande partie de ses
habitants soienl hérétiques, il y a néan-
moins un liôpital de l'ordre du Saint-Esprit
où les religieux ont une église ouverte; et
ils portent publiquenieiil le saint sacrement
aux malades, même dans les maisons des
éréliques, où il y a des catholiques. L'ad -
minisiraiion des biens de cet hôpital est en-
tre les m:iins des magistrats de la ville, et
les relit;ieux ont seulement soin des mala-
des. Cet bôpil;il fournit à Tenlrelien de ce-
lui de WiuiplTeu du même ordre, qui est
aussi dans la Souabe, et au milieu de l'hé-
résie.
Cette croix à douze po'nles, que ces cha-
noines hospitaliers portent sur leurs babils,
n'est qu'une nouveauté; ils la portaient an-
cieniiement toute simple à peu près comme
la croix de Lorraine, et comme la portent
les religieux hospitaliers de l'Hôtel-Dieu de
Coulanci s, qui, à cause de celle croix, qui
Cil aussi de toile blanche, et que cet Hôtel-
Dieu est dédié au Saint-Esprit, ont fait des
tentatives ponr être iticorporés dans l'ordre
do Saint-Esprit de Montpellier, et par ce
moyen se soustraire de la jiiridictiou de l'é-
voque de Coulances, auquel ils sont soi;-
mis ; mais il y a eu plusieurs arrêts du con-
seil du roi et du parlement de Norman, lie
qui leur ont fait défense de prendre la qua-
lité de chanoines réguliers de l'ordre du
Saint-Esprit et de porter des aumusses. Ces
bespitaliers de C<>utances furent institués
sous le titre de clercs réguliers de l'ordre de
Sainl-Augusiin par Hugues de Morville ,
évêque de Coulances, l'an 1209, pour des-
servir l'Hôtel-Uieu de celle ville, et ce pré-
lat leur donna l'an 1224 des règlements qui
ont toujours été observés jusqu'à présent ;
ces religieux sont toujours au nombre de
douze, dont il y en a six qui demeurent dans
l'hôpiial ; les autres desservent des cures qui
en dépendent. L'ordre du Saint-Esprit a
pour armes de sable à une croix d'argent à
douze pointes, et en chef un Saint-Espiil
d'argent en champ d'or dans une nuée
d'azur.
Pierre le Saunier, de Cap. orcl. S. Spirit.
Dissert. lîarbosa, de Jur. Ecdes. cap. 41,
num. 113. Tambur. de Jur. Abbat. tom. Il,
disp. 24, nnm. 35. La Terrade, Discours sur
l'vrdre du Saint-Esprit. De ISlégny, Projet de
l'Histoire des Religions militaires. Sylvesl.
MaruI, Mar. Océan di lut. gl. Relig. Pietr.
Crescenze , Presid. lîoni. Bernard Ciusl.
Citron, de gl. ord. milit. Hermanl, Ilist. des
Ord. de chevalerie, et plusieurs factums et
mémoires concernant cet ordre.
Ces religieux , chanoines et liospitaTers,
n'existaient peut-être plus qu'à Kome, où
ils étaient comptés les premiers dans le dé-
nombrement des réguliers, ils avaient, il y
a peu, pour commandeur, Mgr Antoine Cioja,
et pour vicaire général, le U. P. dom Pierre
Zeocbini. Le pape Pie IX a supprimé cette
corporation à Rome, en 1847.
B-D-E.
ÉTHIOPIENS ou ABYSSINS (Religieux).
§ 1". Des religieux et religieuses Ethio-
piens.
Comme rEthiopie est divisée en haute et
basse, nous entendons parler de la haute,
qui nous est connue sous le nom d'empire
des Abyssins, et gouvernée par un prince
que la plupart des historiens nomment com-
munément Prète-.rean, qui se qn;ililie quel-
quefois de Colonne de la foi. de la lignée de
Juda, fils de David, fils de Salomnn, fils du
la Colonne de Sion, fils de la Colonne de .la-
cob, fils de Marie, fils de Nahod selon ly
rhair, fils de saint Pierre et de saint Paul se-
lon la grâce, empereur do la haute et basse
Etliiopie, ele., qui sont les titres que prit
l'empereur David écrivant au pape Clément
VII en 1533. Mais la foi et la créance des
peuples de ce vaste empire ne correspon-
dent guère à ces beaux litres, puisqu'elles
sont corrompues par plusieurs erreurs; et si
lis Abyssins ont quelquefois écoulé les mis-
sionnaires qui leur ont élé envoyés pour les
faire rentrer dans le sein de l'Eglise catholi-
que, et qu'ils en aient reconnu le souverain
chef et pasleur, ce n'a élé que pour un
temps, car ils n'ont pas persévéré dan.** la
loi orthodoxe.
Quelques-uns ont prétendu que le chris-
tianisme avait élé introduit en Ethiopie par
l'eunuque de la reine de Candace ; ce que
d'autres révoquent en doute, parce que cette
reine ne régnait pas l'ans l'Abyssinie, mais
seulement dans l'ile de Méroé. D'autres aussi
rapportent la conversion de l'Ethiopie à
saint Barthélemi ou à saint Matthieu ; mais
les Ethiopiens le nient et reconnaissent
(ju'ils ont été convertis à la foi chrétienne
(lu temps de saint Alesandi'e, évêque d'A-
lexandrie, environ l'an 320. En elTet nous
apprenons de l'Histoire ecclésiastique (i),
(]ue Frumentius ayant été emmené aux Indes
par un marchand de Tyr, fut conduit à la
cour du roi d'Ethiopie, qu 'il y annonça la
fui de Jésus-Christ; el qu'ayant eu permis-
sion de retourner à Alexandrie pour rendre
compte de l'état de ces nouveaux chrétiens, il
y arriva peu de lems après l'ordination ds
saint Atlianase, qui l'ordonna évêque du
pays et l'y renvoya.
Le christianisme y fil un très-grand pro-
grès ; cl, conmie les Ethiopiens ou Abyssins
oui toujours eu un métropolitain, que IVju
nomme communément patriarche, qui est
envoyé par celui d'Alexandrie, les Egyp-
tiens étant tombés dans les erreurs de Dms-
core et d'antres hérésiarques, ils les onuom-
muniquéesaux Abyssins par le moyen de ce
patriarche, aussi bien que quelques obser-
vations judaïques que l'Eglise d'Alexandrie
avait relenucs. Les Abyssins ont même ajou(à
à leurs rites d'autres superstitions juJaï-
(Ij Sucrai., Wisi. ccd., l,b. i, c. 20; Tlicoduroi.
iTj Dl( TiONNAIUE DES ORDRES UF.LIGIEUX. 254
qucs, el aiiKi 01)1 l'ait iiii mélange de lAii- qui lui sont soumis, ou bien il envoie îles
lien cl du Nouveau Te<tamenl, so S' rvanl conimissairrs qui les visitent pour les cor-
delà rirconeisioiiau liuiliùnx; jour envers riger el pour punir ceux qui ont commis
les tilles auss! bien qu'envers les iiareons, ob- quelques fautes. Avant que les llallcs se fiis-
servant le j >ur ilu sabbat cl le ilimandie, seul emparés du royaume de Shcwa.que
s'absti'iianl .lussi de vi;iiides immondes cl quelques-uns appellent \oa ou Xao.i, ce su-
dcfenducs dans rancicniie loi. Je (lasse sous p-rieur ou abbé général des moines de l'Ins-
siletiee leurs auîres abus comme n'étant litul de 'récl.i-IFaïnianot faisait sa résidence
poi'il de mon suj t , n'aj.int touclié en pas- au monas'ère de Debra-Lilianus , ou Moiit-
»aal la rclit;ion des peuples d'KMiiopie que Liban, qu'il a transféré^' ensuile à lingendra ;
p.ir rafiport aux religieux, qiii ) sont en ce qui faii.dil.M. l,udolf,(|u"un certain moine
trc<-gtan(l nombre et qoi cnlrt lieniient ces nommé 'reifa-Tiion, qui a inipr uié en l.in-
neuples dans leurs erreurs. yue éthiopienne le Nou>eau 'l'eslamenl, par-
La vie monasliiiue y fut iniroduite presque tant de lui et des autres n.oines, à la fin
eu même temps (lue le { bristianisme , cl, d'un discours qu'il a fait sur saint Mallliieu,
sous le règne du roi Amiamidas, lils de Sa- dit f|u'ils sont tous enfants du P. Téela-Ilaï-
ladobas, elle y fut portée par un graml nom- manol du moiiaslére appelé le Mont-Liban ;
bre de moines de riigypte et d s autres pro- c'est pouriiuoi, continue M. Ludoll', quel-
vinccs voisines de l'empire roiuaii», ( nire (jues savants otil mal à prop s nommé ces
lesquels les plus célèbres furent ceux cjui moines Maronites. (>c Téi li-ILiïmanol csl
cboisireiit leur demeure dans le royaume de en très-grande vénéraliou chez les Llliio-
'l'igré, cl qui y bâtirent, des cellules. .\Lns piens, qui eu font la léle K' "i'i décembre, ils
les Abyssins ont cliangé les noms de ces ins- en font aussi meulion dans leurs dipty(iues,
tituteursdela vicmonastiquedans celempirc, eu d sanl : Suuecncz-VdU.'s, Seigneur, de l'ilme
à la réserve de celui de l'anlaléon. Les neuf de votre scrvUenr cl notre PcrcTccla-Uiiimu'
principaux furent, selon eux, abba Arogavi, nul el de Ions ses die plrs.
abba Pantaléon, i.bba Garima, abba Alef, L<' .«econd inslilut des moines ilTiibiopic
abba Sahani, abba Afe, abba Likanos, abba est celui de l'abbé liuslase, qui n'est pas
Adimala , <t abba Oz, appelé au^si abba moins recommandable dans tout l'empire
Cuba, qu'ils reconnaissent pour saints, ayant iiue Técla-IIaïmanot ; les Abyssins en font
même bûli des églises en l'honneur de quel- aussi mention dans leurs diptyques en ces
(lues-uiis de ces premiers solitaires de l'E- termes: Souvmez-vous, Sciiiiieur, de notre
Ibiopie. J'ère Eustase el de tousses enfants. Si fétc se
.\t)ba Arogavi, qui avait été dise'ple de célèbre Ie21 juillet. L a eu beaucoup de dis-
saint l'acôme, fui le premier supérieur d; ciples, à qui il a aussi prescrit des lois ; mais
ces moines. Il cul pour successeur abba il ne leur a pas donné de supérieur gcnér.il
Chrislos-Iîesana , abba MesUel-.Moa, abb.i doul ils dépendent, et ils ne se mcttciil pas
Joanni, etc. Leur ;jus;érilé était si grande, beaucoup eu peine d'en avoir un , sous pré-
qu'il s'en est trouvé qui se conlenlaicnl texte, à ce qu'ils disent, qu'Eustase étant
pour un repas do trois dalles seulement, allé en Arménie sans avoir nommé un suc-
d'aulres d'un petit morceau de pain. Les cesscur, il ne leur est pas permis d'en eta-
Abyssius leur attiibueiil beaucoup de mira-' blir un : c'est pourquoi l'abbé tic chaque
clés, aussi bien iju'aux autres saints qu'ils monastère de cet inslilutcsl le maitrc absolu
ont eu vénération : leur poêles, dans les ver> chez lui, cl peut corriger ses inféri' urs, sans
qu'ils oui faits à leur loi' auge, leur font Ira us- (|u'ils puissent en appeler; el lors(]u'il meurt,
porter des munlagm s d'un lieu à un autre, les religieux du mcinc monastère eu élisent
passer les rivières el les torrents sur leurs un autre.
iiabils, qui leur servaient de barques. ]\Liis, L'on trou^e parmi les Lettres édifiantes
entre ces premiers solitaires de l'Lthiojiie, cl curieuses CLTitcs des missions étrangères,
celui qui, selon eux, a 1 lus excellé en sain- par les missionnaires delà Compagnu; de
Ictc, csl tJabra-.Menfes-ivcd, doul ils font ;a Jésus (1), la relation d'un vo\a;.re lail eu
fête tous les mois. Llh opieen 1U!)8, IG'j'Jct 1700, par >L l'omet, ,
Tous les religieux d'Ethiopie se disent de médecin français, qui parait avoir été mal in-
l'ordre de Saint-.\nloirie ; mais ils ii'oiil pas formé de ce ((ui concerne le clergé séculier
lous les mêmes observances, étant di> isés en et régulier de cet empire ; car il dil (ju'il n'y
deux ou trois congrég. liions ou instiluts par- a [loiiit de prêtre en Llhiopic ()ui ne soit re-
liculieis. Le premier est celui de 'l'éela-llaï- ligieux; que l'empereur Aii-Ilasili. aïeul du
maiio', (]ui vers l'an (»20 fut le restauralrur prince qui régnait pour li.rs, en lit précipi-
dc la vie mouasiique en lithiopie : il près- ter sept mille du haut de la monl.igue de
crivll des b.is particulières aux moinc> qui /lalbnu, pour s'être révoltés contre lui ; el
se raiigèrcnl .-■ous sa conduite, el voulut en- <iu<> l'on peut juger de la multiliule ((u'il y
Irc autres choses qu'ils fussent soumis à un en a par ce (]ue lui dit le palriarcbe pré le-
superieur généial, appelé Icègue, qui, après cesscur de celui qui goinerne présentement
l'abuna ou patriarche d'Llhiopie, a loiijouis l'I^g'isc d'i;ihio|)ie, ((u'eii une seule ordina-
ele celui de luiit rem|)ire (|ui a été le plus lion il avait f.iitJiv mille préircs cl six millu
(onsidcTC p.ir rapport à sa dignité el a sou di.icres.
autorité. Il fait la visite de tous les religicii"w François Alvarez, auuioiiicr de don Eu»-
(Ij Le Gobicu, Letlnt idifiuiiui, 4° recueil, p-ig. '2jI.
2-25 ETIi
manuel, roi de Portugal, qui ncrompagna
l'ambassadeur que ce prince envoya l'an
1520 à l'empereur des Abyssins, cl qui a
donné la relation de celle ambassade, nous
assure néanmoins qu'il y a di s prêtres sé-
culiers en Ethiopie; que depuis qu'ils ont
clé ordonnés diacres ju>qu"à ce qu'ils soient
prêtres, ils peuvent se marier une fois seu-
lement ; qu'ils ne peuvent pas entrer dans la
iléricalure s'ils ont été mariés ; et que si
étant prêtres ils se remarient, ils sont dégra-
dés et réduits à l'état la'rcal, ne pouvant plus
entrer dans l'église, ce qui n'est permis
qu'aux prêtres et aux clercs. Sous la qua-
lité de clerc est renfermé aussi l'ordre de
lous-diacre aussi bien que celui de diace,
liue ceux que l'on fait clercs reçoivent en
même temps et sans aucun cxam n ; car il
y a un grand nombre de ces ordinands q i
ne pourraient répondre aux demandes qu'on
leur ferait, puisque la plupart sont encore à
la mamelle. L'on peut ajouter foi à cet au-
teur, qui s'élait liouvé à plusieurs de ces
ordinations. Dans la première qu'il vit, le
patriarche ordonna deux tnille trois cent
cinquante-six prêlrts , parmi lesquels il y
avait di'S religieux aveugles, d'autres qui
n'.ivaient qu'un bras, et d'autres qui n'.i-
viiienl qu'une jambe ; et le p itri.irclin lui dit
qu'il y iivail eu peu (le prêtres dans cetleor-
dinaiion, p.rcc que tous ces prêtres n'é-
taient que des environs du lieu où il était
pour lors, qu'ordinaircmenl il n'en ordon-
nait pas moins de cinq à sis mille à la fois,
et que l'on ne faisait pas l'ordination des
clercs dans le même leinps. En effet le lende-
main celle lies clercs se lit et dura depuis le
malin jusqu'au soir, non pas à cause de la
longueur des cérémonies qui se pratiqueni
à l'égard du chaque ordinand , mais à cause
du grand nombre des personuL's qui rci,urent
la cléricatuie.
Comme il n'y a point d'autres évcques eu
Etliiipie que le patriarche, il fait souvent de
ces sortes d'ordinations; et jamais abus n'a
été porté jilus loin que celui-là, ncevaiit in-
difforemmenl toutes sortes de personnes,
sans aucine attention aux qualités requi-
ses. Ainsi jM. Poiicet n'a peut-être point trop
avancé en disant qu'il avait appris du pa-
triarche que son prédécesseur avait fait d.ins
une seule ordination dix mille prëlres et
six mille diacres, ce (jui a pu se faireendeux
dfférenis jours , car toute la cérémonie que
l'on observe dans l'ordination des prêtres
consiste en ce que le patriarche met la m;iin
sur la tête de chaque prêtre en disant quel-
ques prières, et enbuile, après avoir lu quel-
que temps dans un :ivre, il leur donne à
tous plusieurs bénédictions avec une croix
de fer.
(Quoiqu'il ne soit pas vrai iju'il n'y ait
point d'autres prêtres en Eihio;iie que les
religieux, cela n'empêche pas qu'il n'y ait
un si grand nombre de ces derniers dans c;'t
empire, qu'Alvarez assure encore que tout
en est rempli ; qu'oa ne voit que moines
dans les monastères, dans les églises, dans les
rues, dans les marchés; qu'il n'a vu aucune
ET»
22fi
église desservie par des prêtres séculiers où
il n'y eût aussi des leligieux; et qu'il n'a
trouvé aucun monastère où il y eût des prê-
tres séculiers.
M. Ludolf confirme celle multitude de
moines en Ethiopie ; mais il ne semb'c pas
être d'accord avec les relations de quelques
voyageurs louchant les monastères de ces
religieux, car il prétend qu'ils demeur nt
ordinairement auprès des éslises dans de
pauvres cabanes dispersées çà et là dans un
enclos; qu'ils ne portent point l'habit mona-
c.il; qu'on ne les distinirue des séculiers que
par une crois qu'ils portent toujours à la
main; que leurs demeures ne peuvent pas
être appelées des cloîtres ; qu'ils ne méritent
pas le nom de mo nés, et qu'on ne les doit regar-
der que consme des colonies de gens qui ne
sont point mariés.
Cependant Alvarez doit être cru, puisqu'il
a demeuré six ans eu Ethiopie, qu'il allait
presque tous les jours au monastère de la
Vision de Jésus, dont il ne demeurait pas
loin, et qu'il assistait avec les moines à tou-
tcsleursprincipales fêles et cérémonies, aux-
quelles il était souvent invité. Cet auteur, f li-
sant la description de ce monastère, situé
dans la province de Tigré, sur une haute
montagne au milieu d'une forêt et dans une
alïri use sol.tude, dit qu'ordinairement il y a
cent religieux qui y demeurent el qui man-
g nt ensemble dans un même réfectoire, ex-
cepte les vieillards, qui en sont dispensés, à
qui l'on porte à manger en particulier; que
les revenas de ce monastère sont très-consi-
dérables ; que la montagne où il est situé lui
appartient entièrement , et qu'elle a plus de
dis lieues d'étendue ; qu'au bas de cette
montagne il y a plusieurs fermes qui dépen-
dent du monastère, outre plusieurs antres
que l'on Irouv jusqu'à trois journées au delà,
ijiii s'appellent Gultus, c'esl-à-dire les fran-
chises de 1 1 N'ision ; qu'il y a encore plus do
cent villages qui lui payent tous les trois
ans chacun un cheval, mais qucle procureur
du monastère prend des vaches à raison de
cinquante pour chaque cheval ; de sorte qu'il
reçoit bien par an dix sept cents vaches,
dont les religieux tirent du beurre pour ré-
galer les étrangers qui les viennent voir, et
pour en mettre dans leurs lampes au lieu
d'huile. ^1
Comme il y a des auteurs qui ont écrit que
dansée irionastère il y avait ordinairement
trois mille religieux, el que l'on avait dit la
même chose à Alvarez, il y alla le jour d.;
l'Assoiu] tion (le la sainte Vierge, auquel
jour les religieux font une procession géné-
rale ; i! n'y vit néanmoins que trois cents re-
ligieux ou environ ; et en ayant demandé la
raison, on lui dit que les autres étaient dis-
pe:sés dans d'autres monastères ou églises
particulières et aux foires el marchés, pour
gagner leur vie pendant qu'ils étaient jeunes^
à cause que le monastère de la Vision n'était
pas en état d'en nourrir un si grand nombre,
et qiie quand ils étaient hors d'élal de ga-
gner leur vie, ils venaient passer le reste (!e
leurs jours au couvent. En etT«t le même au-
227
DICTIONNAIRE DES ORDRES RELIGIEUX.
2Î8
leur nssiirc cn'"orc que dans toutes les foires
il dans tous les marchés l'on ne voit que re-
ligieux cl religieuses qui V IrarKiuenl.
M. l'oncol lOiilirnic ce "que dii Alvarez de
l'iuslérilé de ces religieux et de la beauié
lie quelques monastères en ce pays, et dit
aussi qu'il y a plusieurs autres monastères
qui dépendent de celui de la Vision, nom-
mant entre autres celui d'ilcleni, qui est
très-beau , et où il y a une mat;ni(iqiic
église. Il ajoute que les cellules de ces reli-
pîeux sont si élroiles, qu'un homme a de la
peine à s'y étendre, qu'ils ne mangent point
de vian le non plus que les autres religieux
d'Ktliiopie, qu'ils sont toujours appliqués à
Dieu et à la médilation des choses saintes,
et que c'est là toute leur occupation.
L'abbé du monastère de la Vision le reçut
avec beaucoup de cliaiilé aussi bien que
cens de sa suite. Il leur lava les pieds et les
baisa pendant que les religieux récitaient
des prières. Après cette cérémonie, ils fu-
ient conduits processionnellemcnl à l'église,
les religieux clianlaiit toujours. Ils allèrent
ensuite dans une chambre où on leur ap-
porta à manger. Tout le régal consista en liu
pain trempe dans du beurre; el pour l.ur
tioisson on leur donaa de la bière, car l'on
ne boit ni vin ni hydromel dans ce monas-
tère; et labbé leur tint toujours compagnie,
mais il ne mangea pont avec eux.
Le mcinc viyageur a cru apparemment
embellir la relation de son voyage |iar le
récit d'un prodige qu'il a vu, à ce qu'il dit,
dans l'église de ce monastère de la Vision.
On l'avait assuré que d ms l'église, du côté
de l'Epîtrc, on voyait en l'air, sans aucun
appui ni soutien, une baguette d'or, ronde,
long ;e de quatre pie.ls, el aussi grosse qu'un
bâton. Croyant qu il y aval quelque arti-
lice, il plia l'abbé de vouloir i icu lui per-
mettre 0'c\aminer s'il n'y avait point quel-
que apjiui qu'on ne vit poi.il. Tour s'ea
assurer dune manière à n'eu pouvoir pis
dou'.er, il | assa un bâton pai-dessus, par-
dessous cl de tous les côtés, el il trouva que
la ba"uel.c était vèritablenenl suspendue en
l'air. Les religieux lui dirent qu'il y avait
environ 33:j ans qu'un solitaire noiiuné Abba
Pliilippos se relira dans ce désert, où il ne
se nourrissait que d'herbes et ne buvait que
de l'eau; et qu'un jour Jésus-Chi isl se (il
voir .1 lui, et lui onloiina de bâtir un mo-
nastère dans l'eiidnil du bois où il iroiiv -
rail une baguette d'or suspendue en l'air; cl
que l'ayant trouvée et vu ce prodige, il obéit,
et bâtit ce mon isière qui se nomme ISihen
Jcsiis, \ ision de Jésus. Cependant Aharez,
qui a demeuré six ans en Ethiopie et qui
allait pnsqiie tous les jours à ce monastère,
comme il le dit lui-même, ne parle point de
ce prétendu prodige, quoiqu'il ait eu soin l'.e
marquer tout ce qu'il y avait de plus parti
culier dans ce monastère. Il n'ignorait pis
que cet alibe Philippe était non-seulcineiil
révéré comuie saim p ir les religieux de c
monastère, mai> encore par les habitants
des environs, qui cèlèlrenl tous les ans une
fêle en son honneur; el il rapporte même le
sujet pour lequel ils l'ont toujours regardé
comme saint. Ce fut, dit cet auteur, à l'oc-
casion de ce qu'un roi d'l<"thiopie ayaiil dc-
fi'iidu qu'on observât le jour du sabbat daii!
tons les lieux de son obéissance, l'abbé l'iii-
lip:ie ol ses religieux vinrent trouver «
piiiicc, et lui firent voir que Dieu avait or-
donné que l'on garderait le jour du sabba',
et que ceux qui ne le garderaient pas se-
raient lapidés. Il ajoute que les religieux de
ce monastère et les peuples des environs
.«ont les plus attachés à cette superstition
judaïque; que lui-nièmc a vu plusieurs fois
que les religieux cuisaient le pain et ])rèpa-
raient leur manger le vendredi pour le sa-
medi ; qu'ils n'allumaient pas même du feu
le samedi ; et qu'ils n'étaient pas si scrupu-
leux le dimanche, puisqu'ils préparaient à
manger ce jour-là. Sur quoi il y a lieu de
s'elonner de ce que quelques personnes ,
principalement M. Ludoll', aient regardé
comme une chose innocente l'observation du
sabbat parmi les Ethiopiens, après que le
concile de Laodicée a prononcé analbèmo
contre ceux qui s'abstiennent pir supersti-
tion des viandes que Dieu a créées, et con-
tre ceux qui obse. vent le sabbat à la manière
des Juifs.
Ce que disent plusieurs écrivains que les
religieux d'Elhiojiie sont habillés de peaux
jaunes, se confirme par la relation d'Alva-
rez, qui dit la même <h()se ; il ajoute qu'il y
a quelques monastères où ils sont au^si b.i-
biliés de toile de cotoa jaune, el que ces re-
ligieux bibillés de jaune ont tous dei
chapes de la même couleur, fai es comme
celles des Dominicains. .\ini cela ne s'ac-
corde pas encore avec ce ((ue dit M. Ludolf,
que tous les religieux d'Ethiopie sont ha-
billés comme les séculiers, et ne sont distin-
gués que par une croix qu'ils portent lou-
jours à la main (1). A la vérité M. Poneei,
qui demeure aussi d'accord avec jMvari-z
que les religieux des monastères de la Vi-
sion et d'IIèlèni sont habillés de peaux jau-
nes, parlant aussi de <iuelqiies autres icli-
gieux (jui sont en grand nombre dans la
ville de (iondar (séjour ordinaire «les empe-
reurs), puisque, outre ((iialre chapelles im-
périales qui sont dans l'enceinte du palais
de l'empereur, et qui sont desservies par
cent religieux qui ont aussi soin du collège,
où l'on enseigne à lire l'Ecriture s liiite aux
ollkiers de ce prince, il } a environ cent
églises dans cette ville; il dit iiue ces reli-
gieux sont buliillés lie même que les sécu-
liers, cl n'en sont distingues que pa une
calollo jaune ou violette, el que ces <liver-
ses couleurs distinguent leur ordre. .Mais il
y a bien de l'app.irence que ceux qui oui
une calotte jaune, et qui pour habilleinciil
portent, comme les séculiers, une \esleou
soutane noire, sont de rinstitut de l'abbe
lùistase (2), et les antres qui ont uiu- calollo
violclle pouiraienl bleu élic ceux (lu'Alva-
(1) Yi'ij., j 1.1 lin 'lu Vol., Il" 17.
(J) Voy., il la lin du vol., n' 48.
229 ETn ETII 2-0
ppz, Mjirmol, M. Luclolf et quelques autres l'on ne les ordonnait prêtres qu afin qu'ils
appellent des chanoines. Ceux-ci peuvent pussmt vivre des aumônes de l'Eglise saiss
(ilre mariés ; leurs enfants leur succèdent quoi ils ne pourraient subsister.
j;ms leurs i>rébendes ; et quoique la plupirt On peut ju|,'er par la multitude des moinra
vivent en leur parliculier, Alvarez dit né.in- de ce pays qu'il doit y avoir aussi beaucoup
moins qu'il a vu quelques rommun.iulés de de mon.istères, n'y ayant guère de ville où
cos sortes de chanoines. Ces moines, qui, il n'y en ail plusieurs, outre ceux qui ^onl a
selon M. Ludolf, sont dispersés (à et là dans la campi^^Mieet dans les l)ois. Les plus fa-
de pauvres cabanes, et dont il dit que la de- nieux sont premi'remen! celui de la Vision
nieure no peut pas être appelée inon.istôre, de Jésus, celui de Sainte-Anne, situé sur une
sont sans doute ceux que les couvcnis où i!s nion(ai;ne entre Gondar et Eml'ras, qui est
ont pris l'hahil envoient pour gagner leur un lieu de dévotion où il vient de bien loin
vie : et ainsi M. Ludolf ne s'est peut-être pas un grand nombre de personnes en pèlerinage;
• rompe Icrsqu'il a dit que chacun de ces celui de Tzemba, sur la rivière de Reb, à
moinPs cultive son héritage, qu'il vit de ce une denii-iieue d • Gondar, qui est très-
qu'il produil, en pouvant disposer à sa vo- beau et très-grand, aussi bien que celui
lunté, ayant pouvoir d'aller où bon lui seni- d'HcIcni et celui û' Alléluia. Ce dernier fut
ble et de revenir quand il le juge à propos, ainsi nommé, à ce qne disent cos moines,
Il pouvait même ajouter (jue ces moines Ira- par celui qui en fut le premier abbé, sur le
fiquaient, et que les marchés en étaient rem- rapport d'un ermite qui, étant en oraison,
plis, comme nousavons dit.Cepcndantquai.d vit en extase et entendit des anges qui th.m-
ils sont retournés dans leurs couvents, ils y laient Alléluia dans ce lieu,
vivent en commun cl très-ausièrement, sous II y a aussi un grand nombre de relig'eu-
la conduite d'un supérieur dont ils dépen- ses en î'^lhiopio, qui sont pareillement ha-
denl entièrement. billées de toile de coton ou de peaux jaunes,
H y a de l'apparence que ce monistère de cl ne portent ni manteau ni capuce. Elles
la Vision et les auires qui y sont unis sont ont la télé risée, autour de laquelle elles
de 1 institut de Tecla-Ha'imanot , puisque ont un bandeau de cuir lar;,'e de doux doigt ,
l'abbé de ce monastère en est non-seulemont qui, passant par-dessous le menton, se^lio
le supérieur, mais qu il a aussi une juridic- sur le froni, et dont les deux bouts pendent
tion sur les autres qui en dépendent, dans sur les épaules (1). Il y en a qui croieni que
lesquels il n'y a poi.it d'abbés, mais seule- ce n'est (]u • ihabilloment dos novices, et
oient des supérieurs qu'il nomme; et cet que les professes peuvent mettre un voile
abbé de la Vision pourrait bien être le même ci un mantiîau. D'aiiires disent que cela n'e>l
qui a eu autrefois sa résidence au monaslôie permis qu'ans vieilles. Elles ne sont point
de Debra-Libanos, et ensuite à Bagendra, ronfemiécs dans des monasièrcs, mais elles
qu'il aurait encore transférée au nionaslèic dcnjeurenl dans les fermes et les villages qîii
do la Vision. A l'éi^ard des monastères de dépendent et obéissent au monastère (,ù
l'île de Saint-Claude, de Sainlc-Annc, do elles ont pris l'Iiabil. Alvarez dit avoir vu
Tzemba et des autres dont parle AI. Poncel, quehiues communautés de religieuses qui
qui ont chacun un abbé, ils sont sans doute ont néanmoins la liberté de sortir de leurs
de l'institut de l'abbé Eust.ise, pour les rai- maisons pour aller où bon leur semble. Il y
sons que noiis avons dites ci-dessus en par- a de ces religieuses qui mènent une vie as-
lant de ces doux restaurateurs de la vie mo- sez réglée, mais il y en a beaucoup qui ne
nastique en Eihiopio. croient pas que ce soit un déshonneur pour
Tous ces moines, selon M. Ludolf, peu- elles d'avoir des cnf.inls. Schojnebeck met
vent exercer des ofiiccs civils, et mémo avoir leur iiistiinlion vers l'an 1325, par 1 1 véné-
des gouvernements de province, ma s il n'est rable mère Iniala; mais c'est apparemment
permis à qui que ce soit d'entre eux de ro- sur Ja relation du P. Louis d Ureta do l'or Ire
noncer à la vie monastitiue ; et, s'ils sema- de Saint- Dominique, qui, dans l'iiislojre
rient, ils sont regardes comme des infâmes, qu'il a donnée d'une province supposée da
et leurs enfints ne peuvent jamais parvenir son ordre en Ethiopie, a prétenlu que pres-
à la c'éricai.urc, n'y ayant rien tani que les que tous les religieux de ce pays étaient da
Ethiopiens souliailent avec plus de passion Tordre de Saini-Doniiniquo, ei que la mère
(]ue d'être prêtres, allu d'avoir la vie asu:- linata fonda un monastère du même ordre
rce, ce qui l'ait iju'il y en a un si grand pour d s religieuses à Bcdenagli, où il u'y
nombre; en elTol, Alvarez s'élonnant de la- en eut d'.ibord que cin(|uante, mais doiil le
bus que le p.îlriarche d'Ethiopie cûmme.tait ii aibre angmeuia jusi|u'à cinq mi le après
en ordonnant un si grand nombre de pic- la mort de celte prétendue fondairice : ce (jui
très, quoi(iue parmi ces prêtres il s'en trou- n'est pas moins fabuleux que ce qu'il rap-
vài plusieurs qui étaient aveugles, d',;ulres porie des couvents de P.urimanos et de !'A!-
qui n'avaient qu'un bras, el d'autres qui leiiia, où il met neuf mille r. ligieux de son
n'avaient qu'une jambe ; ce grand nombre crJre dans lu premier, el sept mille dans
de prêtres parai-sant d'ailleurs inutile, puis- l'autre, sans compter les doniosti{|uos qui
que l'on ne dit qu'une messe par jour dans suut au nombre de plus de tro s nulle dans
chaque église, il en témoigna sa surprise à celui de Plurimanos, comme nous l'avons dit
celui qui faisait la louciion de grand vicaire au long à l'article Dominicains.
du patriarche. Cet homme lui répondit q le \ oyez Job Ludolf, llist. Etidop. el #'.«
[t) Fi^y., à la fin du vol., u" 4'J.
2iJ
Commrnlaire sur lu mnne Histoire; Franr.
Wvurcz, sm yoi/niie en lîthinpic: Maniml.
nescription de l'Afri'iiie : Louis d L'rcl.i, llisi.
lie la sngrada orden de l'rrdic. et) Klliiopm:
pl le 1'. le (johion. '*■ Ilecueil des Lettres Edi-
fiantes des missions étrangères.
§ 2. D:s jeûnes et ahstinenccs des moines et
des religieuses en Ethiopie.
Los jeûnes cl abliiienrcs >les moines nia-
roniU's,aruién eus, jacobiles et copies, sdiU
l'.rn lie clmse en coinparaisou des jeûnes ol
morlilicalioiis des moines élliiopiens, qui
coiiimciuenl avec les séculiers le carcîme île
l'Eglise universelle à la Sexagéiime, el qu'ils
■ ibservcnt lrc>-rigoureuseinent , ne inaii-
geanl. pendant tout le l 'iiips qu'il dure, que
du p:iin el ne buvant que de l'eau. Il est
vrai qu'ils trempent leur pain dans une es-
père de sauce qu'ils font avec de la graine
decauiïa, qui est fort cuisante à la bouche.
Ils se servent eneore d'une aulre graine
qu'ils nomment lehtia, qu'ils accommoilenl
eu manière de moutarde. Il se trouve beau-
coup de ces nligicux qui par dévotion ne
mangent poinl de pain pendant lout le c.i-
léme; quelques-uns même s'absiicnr.ent
d'en manger toute leur vie, et mangent seu-
lement de l'agrinos, qui est une herlie qu'ils
font cuire dans de l'eau, sans sel ni beurre,
et sans autre assaisonnement. Quand ils
n'en peuvcni pas trouver, ils usent de qU' I-
(jiies légumes, comme fèves, lentilles cl a .-
1res semblables, qu'ils fonl seulement an);)l-
lir dans de l'eau. Ouelques-uns portent uu
liabit de cuir sans manelies, ayant les bras
lout nus ; plusieurs oui sur leur chair une
rcinlure de fer large de quatic doigis, avec
des poiii(es qui entrent bien avant dans la
ihair; d'autres ne s'asscjcnl point pendant
lout le temps du cart'mc, mais demeurent
toujours debout. Il y on a aussi qui pendant
ce tcnips-là se vont leniinner dans des ca-
vernes, où ils vivent d'herbes et de lentilles
seu'cUK'nl. Il y a cnc.irc beiucoup de reli-
gieux il de religieuses qui tous les niercre-
ilis et vendredis du c.iréiue passent II nuit
dans I eau. François .\lvarez dit qu'il avait
do la peine à le croire; mais qu'ayant été
avec plusieurs personnes sur le bord d'un
lac, ils virent qu'il y en avait une inlinilé
d.iiis ce lae. et que quelques-uns étaient
dans de petite; loges d • | ierres bàlics e\-
prés. Il y a do ra|)par(iiee que les nuils sont
iiien friiiiles en ce pays-la ; autrement ce ne
serait pas une nmrtilicalion de rester dans
l'eau iniidanl la nuit dins le temps du ca-
rême, dans un p.iys où le soleil e>l très-ar-
dent en ce tcin|)s-là, il où niéme les fruits
d'automne de nos quartiers sont en matu-
rité, l'.nfin il y en a qui se retirent dans d s
solitudes le. plus affreuses cl des foré s les
plus épaisses, où ils ne voient aucun homme,
lai-anl pénitence dans ces lieux écartes.
«.Itioiqu'il y ail près de deux cents ans
qn Alvarez ail écrit sa rel ition où il l'ail un
détail d>" ces pénitences et de ces niorlifiea-
tions des religieux d'Ivthiopie, il stinblc
iiéamiioiiis qu'ils n'en aient rien diminue
PlCTIONNAirîE DES OUDRES RELIGIEIX. 5r.2
jus^iu'à [irésont : car M. Poncct, qui y était
en 171)0, dit aMiir vu dans le monastère de
la Vision de Jésusun vieillard âgé d'envii oit
soixante-six ans, frère du gouverneur de
ligré, qui n'avait \ écu pendant sept ans que
de feuilles d'olivier sauvage, rt que ceile
morlilicalion lui avait causé un crachement
de s;ing qui rincomn.odail beaucoup ; c'e^t
pourquoi il lui ordonna quelques remèdes
el lui prescrivit un régime de vie.
La snanlère la plus ordinaire i!e j ûner
pirmi ces religieux est de ne manger sou-
ieinent que de deux jours en deux ji:urs, el
toujours le soir ipiand le soleil est couche ;
mais le samedi ni le dimanche ils ne jeûnent
point ; et comme dans chaque église il ne s'y
dit qu'une messe par jour, ils ne la cclé-
brenl que le soir les jo irs qu'il.s jeûnent, el
tous y communient, après quoi ils vont man-
ger. La raisin qo'ils en donnent, c'est c;u'ils
disent que Noire-Seigneur Jésus-Christ fil la
cène le soir un jour de j une. Aux aulri's
jours qu'on ne jeûne point, ils la disent le
matin.
Ces religieux se lèvent deux heu-.es avant
le jour pour dire leurs malinrs cl ne man-
gent jamais de viande dans I;' couvent. Mais
Alvarez remarque que lorsqu'ils se trou-
vaient avec les Portugais . ils ne laissaient
pas d'en manger 1 1 de boire du vin, pourvu
qu'ils n'eussent point de compagnon, de peur
qu'il n'en ave lit le supérieur, qui les au-
rait eliâiiés sé\èremcnl pour celle transgres-
sion. M. l'oncet dit qu'il en a vu qui se le-
vaient deux fois la nuit pour chanter d^-s
psaumes : peut-être que c'est selon les dilTé-
rcnis insllluls qu'il y a en ce pays, soit de
l'abbéTécla-Haïmanot,soilde l'ablieKuslase.
Outre le carénii' dont n-ms avons parle,
qui dure cinquante jours, .^i. Poucet dit qu'i s
en ont emore trois autres, de même qu' le
reste du peujde : savoir, celui de saint Pierre
tl de saint Paul, qui dure queli)uer,)is qua-
rante jours et quelquefois moins, sebiu que
la fcle de Pâques eslpUis ou moins avanree ;
celui de r.\ssomptio I de Notre-Dame, qui
est de quinze jours ; el celui de t'Avent, qui
est de trois semaines. François Alvarez mar-
que néanmoins ces carêmes d'une aulre ma-
nière que M. Poncct. Duire le carême de la
llésuriection de Noire-Seigneur , qui com-
mence à la Sexagcsiiiie, il dit qu'ils jeûnent
depuis le lundi de la Trinité jusqu'au jour
de la Nativité de Noire-Seigneur ; que de-
puis ce jour-là jusqu'à la Purification de
Notie-Uame, ils ne jeûnent point, m .is que,
les trois jours qui suivent celte f..'le, ils ne
mangent qu'une f. is en ces trois jours, ce
qu'ils appellent la pénitencede Ninive. Nous
aimons mieux ajouter foi à Alv.irez, qui était
|)lus insiruil que M. Poucet de ce qui regar-
dai! la religion el les impurs des Ltbiopien.;.
Dans tousces carêmes on ne se sert ni d'ieufs,
ni de beurre, ni de fromage ; ou |eùne avec
la même rigueur lous les vendredis de l'an-
née. On ne dispense personne du jeûne, les
jeunes gens, les vieillards et même les ma-
l.ldes y sont obligés.
.Mais, a\cc tant d'auslcrilés ri de morlifi-
353
ETI
ET/
23J
calions, ces relip;icux son! si attachés à leurs
erreurs, qu'ils n'écoutent point les mission-
naires qui vont chez eux pour les faire ren-
trer au sein de l'Eglise. Ils se sont toujours
opposés à leurs bons desseins en empêchant
que les peuples ne se ronvertissent. Ils leur
inspirent tant d'aversion pour les Europé-
ens, qui sont blanes par rapport à eux, qu'ils
leur font mépriser et même haïr tout ce qui
est blanc ; c'est pourquoi, s'ils représentent
saint Michel terrassant le diable, saint Mi-
chel est de couleur olivâtre, qui est celle des
Abyssins, et le diable est blanc.
Le pape Clément VII, aQn d'attirer ces
peuples à la foi orthodoxe et les ramener au
sein de l'Eglise, leur accorda en 1525 l'é-
(rlise de Saint-Etienne qu'on nomme des In-
diens ou des Maures (1), à côté de laquelle
il y a un hôpital oiî ceux qui viennent à Rome
sont logés et entretenus aux dépens du pape.
Grégoire XIII ordonna que lorsqu'il y aurait
des Abyssins à Rome, on leur fournirait du
palais tout ce qui leur serait nécessaire (2).
Innocent XII, imitant la piété de ses prédé-
cesseurs, a établi un fonds decinquante mille
écus romains de revenu pour envoyer des
missionnaires en Ethiopie et dans les autres
provinces de l'Afrique.'
ils ont une chapelle à Jérusalem dans l'é-
glise du Saint-Sépulcre, oii ils font l'office
suivant leur rite ; et , selon les relations de
plusieurs voyageurs, ils le font avec tant
J'indévolion et d'irrévérence, qu'ils s'attirent
le mépris de tous les étrangers. Mais, comme
il y a peu de voyageurs qui s'accordent en-
semble, M. Poncet, parlant de leurs céré-
monies de la messe, dit qu'elles sont majes-
tueuses. 11 y avait autrefois plusieurs moi-
nes Ethiopiens qui allaient tous les ans eu
grand nombre en pèlerinage à Jérusalem, et
faisaient en sorte de s'y trouver la semaine
sainte. Alvarez dit qu'étant à Barua dans le
gouvernement du Bernagas , il y eut une ca-
ravane composée de trois cent trente-six.
moines et de quinze religieuses, qui partit
pour ce voyage, mais qu ils furent pris par
les Arabes ; que les vieux furent tués, les
jeunes vendus pour esclaves, et qu'il n'y eu
eut pas plus de quinze qui se sauvèrent. De-
puis ce temps-là ils n'ont point été à Jérusa-
lem en caravane; il y en a seulement quel-
ques-uns qui y vont comme passagers. Nouà
donnonsl'habillementde ces religieuxet reli-
gieuses tel que ledécriventAlvarezelM. Pou-
cet.
Voy. Fran. Alvarez , Yoyaqe d'Elhiopu.
Le Gobien, Lettres édifiantes des missions
JV' vol. Le Monde de Davity ; et Morigia,
Jlist. de toutes les religions, c. 10.
ETIENNE PAPE ET MARTYR (Ordre mi-
litaire DE Saint-), en Toscane.
Pendant que l'on travaillait en Espjigne et
en Portugal à la réforme des monastùres de
l'ordre de Saint-Benoît, ce môme ordre ac-
quit un nouveau lustre en Italie par l'insti-
tution de celui de Saint-Etienne, qui com-
. prend des chevaliers et des chapelains, des
religieux et religieuses , qui sont l(.us sou-
mis à la règle de Saint-Benoît. Ce qui donna
lieu à l'institution de cet ordre militaire, fut
la victoire que Côme de Mélicis, qui fut pre-
mier grand-duc de Toscane, remporta pro-
che Marciano, l'an 1554, lii deuxième jour
d'août, fête de saint Etienne pape et martyr,
sur le mnréchal de Strozzi, qui commainlail
les troupes de France. Ce prince, pour con-
server la mémoire de cette viitoire, qui lui
assurait la souver.iineté de la Toscane, ob-
tint du pape Pie IV, l'an 1561, une bulle qui
lui permettait de fonder cet ordre militaire
sous la règle de Saint-Benoît, dont la princi-
pale fin serait de défendre la foi catholiqueet
de faire la guerre auxcorsaiiesqui par leurs
pirateries empêchaient le commerce de la
Méditerranée. Côme de Médicis ayant ins-
titué cet ordre et dressé des statuts , que les
chevaliers devaient observer, le même pon-
tife l'approuva par une autre bulle de l'an
1562, et déclara ce duc de Toscane et ses
successeurs grands maîtres et chefs de cet or-
dre, auquel il accorda plusieurs privilèges,
affranchissant de la juridiction desordinaircs
non-seulement la personne des chevaliers,
mais même leurs biens , en ce qui regardait
les commanderies et bénéfices, les exemptant
de toutes sortes de décimes, leur permettant
de se marier et de pouvoir posséder des pen-
sions sur des bénéfices jusqu'à la somme de
deux cents écus (même ceuxqui auraient été
mariés deux fois), ce qui fat augmenté jus-
qu'à la somme de quatre cents écus d'or par
les papes Sixte et Paul V.
Comme le duc de Toscane fonda cet ordre
à Pise, il voulut que la résidence ordinaire
des chevaliers se fît en celle ville, où il leur
fit bâtir deux maisons conventuelles, aux-
quelles il joignit une magnifique église, que
ses successeurs ont eu soin d'embellir. Ces
deux maisons sont les principales de l'or-
dre; il y a toujours un grand nombre de
chevaliers qui y demeurent, avec des cha-
pelains pour fiire l'office divin, lesquels
chapelains sont aussi chevaliers et religieux
de cet ordre, et vivent en commun sous l'o-
béissance d'un grand prieur, qui est grand'-
croix de l'ordre, et qui se sert d'ornements
pontificaux dans les fonctions ecclésiastiques.
A peine cet ordre eut-il été établi, que les
chevaliers se mirent en mer l'an 1563 et con-
tinuèrent pendant plus d'un siècle à donner
des preuves d'une valeur peu commune;
car cette même année 1563 ils s'emparèrent,
avec leurs galères, de quelques vaisseaux
turcs, et donnèrent la chasse aux galères de
Rhodes. Ils se joignirent, l'an 1564, aux ga-
1ères d'Espagne, qu'i's aidèrent à prendre la
forteresse de Pignon. Ils donnèrent secours
l'an 1563 aux chevaliers de Malte, lors-
que les Turcs assiégèrent leur île. Ils atta-
quèrent en 1368 deux vaisseaux d'un fa-
meux corsaire nommé Carasceli, et s'en ren-
dirent maîtres. Ils armèrent en 1571 douze
galères, avec lesquelles ils se joignirent à
(1) Abb. Piazza, Uper. piedU(oma, Irait. 2, cap. 5. (i) Ibid., Tratt. 5, cup. 5.
Dictionnaire des Ordres religieux. H.
S35
l'armôc des
DCTIONNAIIIK DKSOnURES nrUClfLX.
23«
rhrôlirns qui rcinporl.'i la Ti-
iiiousc victoire de Lépiiiile. Le corsaire l!ar-
beroU'isc éprouva !cur vylcur en 1572 lors-
qu'ils lui (irirenl sa ca|)iiaiic ; ol , après
avoir rcmpinlé plusieurs atanlagcs sur les
iiifidùlcs, ils obligèrent le (iraiid Seii;neur à
demaiuler la paix. Les arlicli s (■ronl dres-
ses de part et d'autre ; mais le chevalier
lluoii;;iaiini Gianfiliazzi avant élu envoyé à
Constanlinop e pour la faire r.ililior, il trou-
va que les Turcs avaient changé de senti-
ment , el retourna en Italie sans avoir exé-
cuté sa commission. Ainsi la puerre recom-
mença entre les infidèles et Cômedc Méd.cis,
ijui avait été lait {;rand-duc par le pape Pie
V, l'an loC9, malgré les oppositions do l'em-
pereur Maxiinilien et de Philippe 11 , roi
cl Espnsnc.
François de Médicis ayant succédé à son
père Côme l", fit armer les galères, qui rem-
poilôrcntde nouveaux avantages. Les che-
valiers de Sainl-Elicnne s'emparèrent du
Cole en Uarbaric, en 1582, de Monaslero et
de quelques autres places en 1583, de Chio
en lo'JO, de Preveza, sur les frontières d'Al-
banie, en 160i. Ferdinand 1", qui hérita des
Etats de son frère François, renforça l'esca-
dre des chevaliers de Saint-Etienne de huit
galères et six gallions. En 1607 ils saccagè-
rent la forteresse de l'one en Barbarie, et
voulurent s'emparer de Famagosle en Chy-
pre ; mais ils furent repoussés par les Turcs,
qui, croyant vaincre encore ces chevaliers,
mirent en mer l'an IGOS une armée de qua-
rante-cinq galères. Les chevaliers ne lais-
sèrent pas de les attaquer, quoiqu'ils n'eus-
sent que six galères et onze gallions, et les
obligèrent de prendre la fuite. Côme II ayant
rejeté les propositions do paix que la Porte
îui avait faites, arma de nouveau ses cheva-
liers, qui prirent l'an 1610 Hischieri en U.ir-
barie, Disto en Négrepont, l'an 1611, Chier-
mon l'année suivante, et la forteresse d'Eli-
m in. dans la Caramanie, l'an 1613, d'où ils
icniporlèrent de riche» butins.
Après la mort de Côme II, Ferdinand II
lui a.» uni succédé, il ue lémoigna pas moms
d'.irdeurà faire agir les chevaliers de Sainl-
Eti<iine, qui, après s'être encore emparés de
liischieri, prirent en 162'v vingt-cinq galères
turques et un grand nombre de petits bâti-
ments, dont on voit encore les dépouilles
dans les couvents de cet ordre à Pise cl à
Livourne. Le long siégo de Candie fut en-
core une occasion à ces chevaliers pour faire
preuve de leur valeur, et, ciuoiquc la paix se
lit l'an 1670 entre les \ éniticns et le Grand
Seigneur, ils ne laissèrent pas de poursui-
vre leurs avantages sur Us tioupes ottoma-
nes. On compte plus de, cini mille siv cents
chrétiens qu'ils ont délivrés des fers, et qua-
torze mille huit rent-soixante et onze escla-
ves ()u'ils ont faits jusqu'en 1678. Depuis ce
temps- 1.1 on n'a guère parlé de leurs expé-
ditions, si ce n'est qu'en 168't, la république
de Venise ct.inl entrée encore en guerre .ivec
les Turrs, les galères du graml-duc se joi-
Vo;/., a la lin du vol., ii" .' 0.
Vo'i: à b lin du \ol., n° 61,
gnirent à l'armée des Vénitiens comme trou-
pes auxiliaires. Les figures de bronze de Côme
l'^ctdc son fils I''crdinaiid 1", qui sonlà Flo-
rence dans la place Dui aie et dans celle de
l'Annonciadc, ont été faites des canons pris
sur les inridclos, comme il parait par l'ins-
cription qui est sur le piéilest il de la pre-
mière, où on lit ces paroles : Di métallo
rapilo al ficro Trace.
Il y a dans cet ordre des chevaliers de
justice, des chapelains et des frères ser-
vants. Parmi les chevaliers de justice, qui
sont obligés de faire preuves de noblesse de
quatre races, il y a aussi des ecclésiastiques
obliges aux mêmes preuves, et les uns et les
autres portent la croix rouge à huit angles
criée d'or, tant sur le c6ié gauche de leiir
habit que sur le manteau. Les chapelains ou
prêtres d'obédience sont véritablement reli-
gieuxet portent du tôle gauche la croix ron-
georlée seulement de soie jauni', et les frè-
res servants la portent de même, au côiêdrnii.
Il y a aussi, comme dans l'ordre de Malle, des
demi-croix. L'habit do eéréinonio des che-
valiers consiste en un grand manteau de ca-
melot blanc doublé de lafTetas incarnat , avec
des cordons de même couleur pendant jus
qu'à terre (1). Celui des chapelains consiste
en une soutane blanche doublée de louge, un
camail aussi de camelot, sur le(|uel est la
croixdel'ordrectun roi het (2). Leur habit or-
dinaire pour le chœur consiste en une soutane
noire, un surplis et une aumusse noire sur
le bras, sur laquelle aumusse est la croix de
l'ordre (3j. Et l'Iiabil des frères servants n'est
que de serge ou rase blanche avec dos man-
chesêiroites, doublées de taffetas rouge et la
croix du côte ilroii.
Le conseil de l'ordre est composé de douze
chevaliers, qui s'assemblent à Pise dans
l'un des deux palais où sont la chancellerie
et les archives, pour y traiter de toutes les
affaires qui cuncerneui l'ordre, tant pour le
spirituel que pour le tein|.iorel. Les cheva-
liers grdii'i'troiï et ceux qui sont obliges de
servir sur les galères pour faire leurs cara-
vanes, doivent résider dans 1 un dos dcu\
palais, où ils sont nourris et entretenus aux
dépens de l'ordre, et les novices y sont ins-
truits de tous les exercices quiconvionnenlà
la noblesse.
Les principales dignités de l'ordre sont
les grands commandeurs, dont l'ofiice dure
pendant la vie du grand maitre; le grand
eonnét.ible , l'amiral, le grand prieur du
l'ouveal, le grand chancelier, le trésorier gé-
néral, le conservateur général et le prieur
de l'église, qui s'élisent tous les trois ans
dans le chapitre général, où se trouve le
grand-duc comme grand maître, cl où on
elit aussi les chevaliers à la grand'croix et
les douze qui doivent roniposer le conseil.
Ce chapitro se lient le dimanche in Albis :
tous les chevaliers qui sont en Toscane
sont obligés de s'y trouver. Il y en a tou-
jours plus de trois cents. Les frais de leur
voyage leur sont payés, et ils sont nourris
(■) Y(iy , il la fin du vul., n*52.
237
ETO
Pi logés avec leurs seivileurs pendant le
temps du chapitre. L'ordre possède vingt-
trois prieurés, Ireiile-cinq bailliages, et an
très-grand nombre de commanderies. Lors-
que les chevaliers font profession, ils font
vœu de pauvreté, de charité et d'obéissance;
et les chapelains, comme religieux, de pau-
vreté, de chasteté et d'obéissance. Le grand
maitre donne l'habit aux chevaliers, et leur
fait faire pofession ; et les chapelains ne la
font qu'entre les mains du grand prieur, qui
leur donne aiis^i l'habit.
Bernard Giusiiniani, Hisl. Chronol, de gli
Ord. milit. et relig. caval., tum. II. Fran-
cise. Mennenius, de Ord. milit. Silvestr.
Maurol. Mar. Océan, di tult. gl. Religion,
Ascag. Taniburin., (/eyiir. Abbat. lom. Il,
disp. 24. qiiœsl. 5, n. 85. Bullarium Roma-
num, ei Slatuli et Constitulioni deW Ordine
dis. Stefano.
Après que Côme I", duc de Toscane, eut
institué l'ordre militaire de Saint-Etienne,
l'an 1582, pour des chevaliers, des chape-
lains et des frères servants, comme nous
avons dit, il voulut encore y joindre des re-
ligieuses, pour imiter davantage l'ordre de
Malle, qui lui avait servi de modèle pour
former celui de Saint-Etienne. C'est pourquoi
les religieuses Bénédictines qui desservaient
l'abbaye de Saint-Benoît de Pise, quiav.il
été donnée à l'ordre de Saint-Etienne par le
pape Pie IV l'an 1565, furent incorporées à
cet ordre, et en prirent l'habit. Le second
monastère de ces religieuses fut fondé à Flo-
rence l'an 1588 sous le litre de l'Immaculée
Conception, et le pape Clément VIII approuva
cet établissement l'an 1592. Le P. Bonanni,
Jésuite, dit que ce fut Eléonore de Tolède,
femme de Côme I"', qui fonda ce monastère;
mais cette princesse ne peut pas en avoir été
la fondatrice, puisque Côme 1^' mourut en
1574 et qu'il n'avait épousé Eléonore de To-
lède qu'en premières noces.
Les religieuses de cet ordre doivrnt faire
prouve de noblesse; elles ont pour habille-
ment une tunique ou robe de laine blanche,
avec un scapulaire de même étoffe, et sur le
côté gauche une croix rouge comme celle
dos chevaliers (1) : celles de Florence y ajou-
tent une tresse de soie jaune à l'entour. Au
chœur et dans les cérémonies elles ont une
coule blanche avec de grandes manches dou-
blées de talîetas incarnat [■>). Les abbesses
portent la crois plus grande, de velours rou-
ge ; les sœurs servantes ou converses la
portent de serge rouge, mais plus petite que
celle des sœurs du chreur.
Philippe Bonanni, Cutnlogus Ordinum re-
ligios. in Eccles. milit., pari. ii.
ETIENNE DE STRASBOURG (Saint-). Voyez
Cologne.
ETOILE DU MIÎSSINE. Voyez Ampoule
(Sainte-).
ÉTOILE DE NOTRE-DAME {Cuevaliers
DE l'). Voyez Ampoule (Sainte-).
ETO 23»
ÉTOILE en France (Ordre db l').
Des chevaliers de l'ordre de Notre-Dame de
ta Noble Maison, communément appelé
l'Ordre de l'Etoile, en Franre.
Favin attribue l'institution de l'ordre do
l'Etoile à Robert, roi de France, et prétend
que ce prince ayant pris la sainte Vierge
pour la protectrice de cet ordre, lui donna
le nom de l'Etoile, parce qu'il regardait cette
reine des anges comme l'étoile de la mer et
la guide de son royaume. Il ajoute que cet
ordre était composé de trente chevaliers, y
compris le roi, qui était le chef et le souve-
rain grand maître; que les cérémonies de
l'institution en furent faiies le jour de la na-
tivité de la sainte Vierge au mois de septem-
bre de l'an 102-2, dans la chapelle du Palais,
dite Notre-Dame de l'Etoile, qui est la basse
Sainte-Chapelle, et que les premiers qui fu-
rent honorés de cet ordre .iprès le roi furent
ses trois fils, Hugues le Grand, Henri l""^ et
Robert, duc de Bourgogne; Richard H, duc
de Normandie el de Bretagne, Guillaume III
dit Tête d'Eloupes, duc d'Aquitaine, comte
d'Auvergne et de Poitou; Guillaume Jll,
comte de Toulouse; Baudouin à la Belle-
Barbe, comte de Flandre; Hébert le Vieux,
comte de Troyes ; Odom, comte de Beauvais ;
Geoffroy Grise-Gonelle , comte d'Angers;
Amaury, comte de Noy on, et Baudouin de l'Ile,
comte de Hainaut, Gis de Baudouin ù laBelle-
Barbe. 11 fait même la description de l'habil-
lement que portaient ces chevaliers. Leur
manteau, à ce qu'il dit, était de damas blanc,
le maatelet et les doublures de damas incar-
nat, et la cotte ou gonelle de même, sur
laquelle était une étoile d'or en broderie; le
grand collier était aussi d'or à trois chaînes,
entrelacées de roses de même émaillées al-
tern;ilivement de blanc et de rouge (3). 11
ajoule que ces chevaliers étaient obligés de
dire (eus les jours en l'honneur de la Vierge
la couronne ou chapelet de cinq dizaines ,
avec quelques autres prières pour le roi cl
l'Etat, et il rapporte une oraison qu'il pré-
tend que ce prince avait composée lui-
même.
Si nous voulions encore ajouter foi à cet au-
teur, Philippe-Auguste avait reçu de Louis VII,
son père, dans l'abbaye de Saint-Denis en
France, le collier de cet ordre l'an 1180, le
jour de son couronnement. Le même Phi-
lipi>e le donna en la ville de Gournay en
Normandie, à Artur, en lui donnant l'inve-
stiture des comtés de Bretagne, d'Anjou et
de Poitou. Louis VIII fut fait aussi chevalier
de cet ordre le jour de son sacre, l'an 122V,
dans l'église de Reims. Saint Louis, son fils,
le fut aussi l'an 1226. Le même saint Louis
donna cet ordre à Robert de France l'an
1227, à Corbeil, et l'an 1246 à d'autres; mais
tout ce discoins de Faviu i\'cA que fable et
fiction. Outre que nous sommes persuadés
qu'il n'y a point eu d'ordres mililaires el de
chevalerie avant le douzième siècle, cl par
(I) Votj., à la fin du vol., n" 53.
l'I) Voy., à In fin du vol., n" 54.
(5) Voy., à la lin du vol., ii" 55
eaa
nicTioNNAinr pes ordres religieux.
liO
consôqupnl que le roi Robert n'n pas pu
avoir in^liltu- lorJro «le l'Kloile, il osl Irès-
coiislaiU que tel ordre a élé inslilué par le
roi Jean I ' l'an t3jl : ce qui est facile à
jrouverpar la lellre circul.iire que ec prince
écrivit aux seigneurs qu'il vnulul lioiiorcrde
cet ordre, qui se trouve dan> li ehanibre
des Comptes à Paris, Mémorial C, et qui;
nous rapporterons ici.
Ilitiu ci/u>in, "Oiij! d l'honneur de Dieu et
en assaucemenl de chevalerie et accroissement
d'honneur, avons ordonné de faire une compa-
gnie de chevaliers, qui seront appeliez t'he-
viliersde Noire-Dame de la Noble Maison,
yni porteront la robe cy apris divisiéc ; c'est
assavoir une coite blanche, un serret cl un
chaperon tcrmcil quand ils seront sans man-
Icl ; et qunnd ils tcslironl mantel, qui sera
fait à (j'iise de chevalier nouvel ù entrer et
demeurer en l'église de la Noble Maison, il
sera vermeil cl fourré de vert non pasd'her-
tnines, de cendail ou samist blanc, et faudra
qu'ils aient sous le dit mantel scrrel blanc ou
cotte hardie blanche, chausses noires et soû-
liez dorez, et porteront conlinuellcmcnl un
annel en tour la verge duquel sera escriplleur
nom et surnotn, auquel annel aura un esmail
plus vermeil, en t'esmail une étoile blanche,
au tnilicH de l'étoile une rondeur d'azur, un
petit soleil d'or, et au muntelu sur l'épaule au
devant en leur chaperon un fermnil auquel
aura une étoile toute belle comme en l'annel,
est divisée, et tous les sabtnedis quelque part
ils seront ils porteront ternuil it blanc en
cotte et serret et chaperons comme dessus, se
faire se peut bonnement, et se ils veulent por-
ter mantel, il sera vermeil et fendu à l'un des
castes el toujours blnnc dessous ; et si tous les
jours de la semaine ils veullenl porter fermait
faire le pourront el sur quel robe il leur plai-
ra. En l'urmeure pour guerre ils porteront
le dit fermait en leur camail ou en leur colle
à armes, ou la ou Inir plaira apparemment.
Et seront tenus de jeûner tous Us sabmcdis
s'ils peuvent bonnement, et se bonnement ne
peitvenl iceux ou ne veullcril, ils donront ce
jour quinze deniers pour Dieu en l'honneur
des quinze joyes de Notre Dame. Jureront qu'à
liur pouvoir ils donront loyal conseil au
prince de ce qu'il leur demandera soit d'armes
et d'autres choses. Et se il y a aucun que avant
celte compagnie nient emprise aucun ordre ,
ils le devront laisser, se ils peuvent bonne-
ment, et se bonnement ne le peuvent laisser si
srra celle compagnie devant. Et si en avant
n'en pourront aucune autre entreprendre sans
le congé du ])rince. Et seront tenus venir tous
les ans en In Noble Maison assise entre l'aris
el Saint-Denis en France à la veille de la fcste
de .\otre Dame de la my aoust dedans primes
cl y demeurer tout le jour et le lendemain ,
jour de la feste jusques après vespres. Et se
Ijonnrmcnt ils n'y peuvent venir ils tn seront
crus par leur propre parole. El en tous les
lieux ou ils se ircverons, i enir ensemble, au
plus, à ta veille et au jour de ladite mye nous',
(l que bonnnnrnt ils n'auront pu venir à ce
jour au lieu de la Noble Maison ; ils porteront
Utdites lobbes cl orront vcsprcs cl ta messe
ensemble se ils peuvent bonnement. El jioiir-
ront tesd. chevaliers se il leur p'ait lever ban-
nière vermeil s.'mé d'éloilles ordonnées et une
image de .\olre Dame btiinche, especiutement
sur les ennrmys de la foi ou pour la guerre
de leur droiturier seigneur, el nu jour ite leur
tiepasscmmt, is envoiront à la Noble Maison
se ils peuvent bonnement leur annel et leur
fermait tes meilleurs qu'ils auront faits pour
ladite compagnie, po ir m ordonner au profit
de leurs âmes et en l'hnnneur de t'éijtise de Li
Noble Maison en laquelle sera fait leur ser-
tice solemnellemcnl. El sera tenu chacun de
faire dire ime messe pour te trépassé au plus-
tosl que ih pourront bonnement depuis qu'i's
l'auront seeu. Et ist ordonné que tes armes et
timbres de tous les seigneurs chevaliers de ta
Noble Maison seront peints en ta salle d'icdle
au dessiiiis d'un chacun ta ou il sera. Et se il
y a auctiu que honteusiinent que ( Diex ne
Noire Dame ne veullenl) se parient de tn bi-
taille ou besogne a donnée, il sera suspendu
de la compagnie, et ne pourra porter tel habit
et H tournera en la Noble Maison ses armes et
son timbre sans dessus dessous, sans effactcr
jusques à temps qu'il fut restitué par le prince
ou son conseil et tenus pour relevez par ton
bienfait. Et est encore ordonné qu'en la No-
ble Maison aura une table oppetlée la table
d'honneur en laquelle seront assista veille et
le jour de la feste les trois plus suffisions bn-
cheliers qui seront de ladite fcste, de ceux qui
seront reccus enladite compagniceten chacune
teille de feste de la mye aoust chacun an après
en suivant seront assis à ladite table d'hon-
neur les trois princes, trois bironnets et trois
bacheliers qui l'année auraient plus fait en
armrs de guerre; car nuls faits d'armes du
pays ne sera mis en compte. Et est encore or-
donné que nut^d'iceux de ladite comp/igniene
pourra entreprendre el aller en aucun votage
loingtain sans le dire ou faire scavoir un
prince. Lesfuiex chevaliers seront uu nombre
de cinq cens, et desquiex nous comme inven-
teur et fondateur d'iccite compagnie seront
prince, ainsi t'en devront esirc nos succes-
seurs roys, el nous avons du es'.re du nombre
di ladite compagnie el pensons à faire se Dieu
plait ta première fcste cl entrée de ladite rom-
pngnie èi S. Ouyn le jour et la veille l'appa-
rition prochaine. Si soyez aux d. jours et
lieux se le pouvez bonnentent <) tout vostre
habit annel it fermait, et adoncqucs sera vous
et aux autres ])tus à plain parlé sur celle ma-
lierre. Et est encore oi donné que chacun ap-
portera ses armes et son timbre peins en un
feuillet de papier ou de parchemin afin que
tes piinties les puissent m lire plustot et plus
proprcnirnl la ou ils devront eslre mis à la
Noble Maison. Donne à s lins Christhop'ile en
Jlnlnttc le (j. jour de novembre l'an de grâce
lliol.
Il y a des auteurs qui prétendent (|ue
Ciiarlcs \\ï, vovaiil ses fmauces épuisées,
ne trouva point d'autres niojens pour ré-
compenser les rapilaines de son ariiiec (|uc
de leur donner le collier île cet ordre, qui ne
se duiinait auparavaiil qu'aux princes el au\
grands seigneurs de Iraiice; «juc pour ce
Ml
KTO
KTO
515
sujet ceux-ci firent 'eiir rciiioiilraiiec ;iii roi,
i|ue c'était avilir l'ordre que de le donner
indilTéremment à toutes sortes do personnes,
sans avoir égard à la noblesse; et que ce
prince, ayant assemblé le chapitre nu palais
de Clichy, l'an 153^, Ala le collier qu'il por-
tait cl lé mil au cou du cnpiiaine du guet de
nuit, ri l'appela chevalier du guel, ordon-
nant qu'à l'avenir il porterait celte marque
de l'ordre de l'Ktoile, et que sur les hoque-
tons des archers du guet il y aurait deviiiit
et derrière une éioile blanche en brodere :
ce qui donna lieu aux princes et aux sei-
gneurs de quitter aussi le collier de l'ordre.
Mais les chevaliers ne portaient point de
Collier, comme on a pu voir dans les lettres
de Jean l" , londateur de cet ordre. Aiu>i le
roi Charles VU ne pouvait pas avoir ôté son
collier pour le mettre au cou du chevalier
du guet. Du temps de saint Louis, cet officier
avait déjà la qualité de chevalier du guet, et,
s'il était vrai que Charles VU lui eût donné
l'ordre de l'Etoile, il n'aurait pas pour cela
avili cet ordre, puisque le chevalier du guet
était toujours gentilhomme et avait même le
litre de chevalier, comme il p;iraît par plu-
sieurs titres; nous nous contenterons seule-
ment de rapporter des lettres de Louis XI
données à Heynes en Hainaut le 3 août l'ttSI,
par lesquelles il ôte l'office de chevalier du
guel à Philip|;c de la Tour, chev.ilier, pour
en revêtir Jean de Harlay, qui, était aussi
chevalier. LoijS par la yrace de Dieu Roi/ de
France, à Inus ceux qui ces présentes lettres
verront, salut. Comme par le trépas de notre
très cher seiyneicr et père à cui D.en pardoint,
la couronne et seigneurie de notre dit royau-
me nous soient par la dite grâce de Dieu ad-
venuz et escheuz, et par ce nous appartiengne
pouivoir aux offices d'icelui nostre royaume,
de personnes ydoines et suffisantes à notre
bon plaisir, gçavoir faisons que par la bonne
relation qui faite nous a esté de notre bien
amé Jehan de llarluij escuyer el de ses vail-
lances, proi esses, preudomie, et bonnes dili-
gences, à icelui pour ces causes et autres à ce
nous mouvons, avons donné et octroyé, don-
nons et octroyons de grâce especiule par ces
présentes l'office de chevalier du guet de nuit
de nostre bonne ville et cité de Paris, pour
icelui office avoir et tenir, et dorennavant
exercer aux droits, gaiges, honneurs, préro-
gatives, prouffils et émoluments accoutumez,
el qui y appartiennent, tant comme il nous
plaira, s'il est à ce suffisant. Si donnons en
mandement au prevost de Paris qui pour nous
sera ou à son lieutenant, que prins et receu
dudit Jean de Harlay le serinent en tel cas
accoutumé, icelui mette et institue ou face
mettre et instituer de par nous en possession
et saisine dudit office, et d'iceluy ensemble des
droits, gaiges, honneurs, prérogatives, prouf-
fitz et einolumens dessusdits, le face, souffre
et laisse jouir et user plaineinent et paisible-
ment, et à luy obéir et entendre de tous ceux
et ainsi qu'il appartiendra, es choses touchant
et regardant ledit office, osté et débouté d'i-
celuy nostre amé et féal Phiiippes de la Tour
chevalier, cl tout autre illicite détenteur, non
ayant sur ce nos lettres de don précèdent en
date de es présentes, etc. Pour preuve que
ce Jean de Harlay était chev.ilier avant que
d'être pourvu de 1 office de chevalier du
guel, nous rapporterons encore les lettres
suivantes du (on>te de Clermont, fils du duc
de Bourbon. Nous Jehan, ainsné fils du duc
de Bourbonnais et d' Auvergne, comte de Cler-
mont, lieutenant général et gouverneur pour
monseigneur le rny de ses pays el duché de
Guyenne, certifions à tous qu'il appartiendra
que au voyage dernièrement fait an pays de
Normandie pour la réduction d'iceluy à l'o-
beissance de mondit seigneur le roy et au com-
mencement d'iceluy voyage, preismes et meis-
mes en nnslre charge, retenue et compagnie
nostre amé et féal chevalier messire Jehan de
Harlay, lequel bien et honnorablemenl monté
et armé, servit moniit seigneur durant ledit
voyage en nosiredite compagnie sans départir,
tant en sièges, rencontres el courses, qu'en
autres affaires de guerre, esquelles il s'est
trouvé comme bon, vaillant et comme doit
faire. Et nous tenant siège devant la ville de
Vire, audit pays de Normandie, durant iceluy
voyage, luy donnâmes l'ordre de chevalerie
acec taule solemnité deiics, et ce certifions
eslre vray par ces nos lettres, lesquelles en
lemoing de ce avons signé de nostre main, et
fait sceller du petit signet à nos armes en
l'absence de nostre grand scel. Donné au Ho-
chet en Bourbonnais le 22. jour de janvier
1455. Il y a encore d'autres lettres de
Louis XI, données à Bordeaux le 20 mars
l'iG2, par lesquelles il paraît que ce Jean de
Harlay avait une compagnie d'ordonnance
sous le titre de Crussol, chevalier et sénéchal
de Poitou : ce qui l'empêchant d'exercer son
office de chevalier du guet, le roi lui permit
de ie faire exercer pendant un an. Ces let-
tres sont des preuves suffisantes que le che-
valier du guet était assez distingué pour no
pas faire déshonneur à l'onlre de l'Etoile en
le portant; et c'est une erreur de dire qu'il
ne se donnait qu'aux princes e( aux gr;inds
seigneurs, puisque le roi Jean I", ((ui l'in-
stitua, voulut qu'il y eût cinq cents cheva-
liers, el que, l'an 1358, il le donna à Jac-
ques Bozzut, qui n'était que (oUatéral ou
conseiller de Louis, duc de Duras, comme il
paraît par l'épitaphe de ce Bozzut que l'on
voit dans l'église cathédrale de Nnple^. S'il
était vrai aussi que Charles VII l'eût donné
par mépris au chevalier du guet, il n'y a pas
d'apparence que Louis XI l'eût donne, l'an
i'j-58, à son gendre G^iston do Foix, prince
de Navarre; et il n'aurait pas mandé, eu
lilO, aux prévôt des marchands et échevins
de Paris qu'il voulait veniren celte ville pour
célébrer la fêle de l'ordre de l'Etoile, el qu'il
entendait que les princes et les grands sei-
gneurs qu'il mènerait avi c lui fussent logés
liar fourrière. Cet ordre subsista jusque sous
le règne de Charles ^ H!, qui l'abolit à cause
de l'ordre de Saint-Michel que Louis XI, sou
père, avait institué.
Favin, Théâtre d'honneur el de chevalerie.
Giusiiniani, Jlist. di tutti gli ordini militari.
Archii.es de lu chambre des comptes de Paris,
iiZ
DICTIONNAIRE DES OROHES REUGIEllX.
!IJ
flîemortal C, fol. lOS , cl mfinufcritf: de Du
Chi^nc, à 1(1 bibliothèque dti fiai.
KTOLK. I (fi/f: IIande iOnnHE i»k i.a).
ETOLE DOk (i Vrnise. Voi/e: CnAUSSE.
ETKOITK OBSERVANCE. Voyez les divers
titres spéciaux des observances slricles cl
réformées.
ETROITE OBSERVANCE DE CMI'AUX
(Religieux, de l'). Voyez Cîteaux, § 3'.
EUDISTES.
Des praires wissionnairi's communément ap-
pelés les Eudisles, avec la vie de 31. Eudes,
leur insliiulntr.
Les Endisles forment une compagnie de
prêtres séculiers élablie en France sous le
nom et litre de Jésus et Marie; ils sont
employés à la direction des séminaires, cl à
faire des missions. On les appelle Iiudisles,
parce que M. Eudes a été leur instituteur.
M. Eudes , connu sous le nom de Père
Eudes, vint au monde le H décembre de
l'année ItiOl, dans l,i paroisse de Rie proche
Argcnlan , diocèse de Séez , en Normandie.
Son père cl sa mère furent trois ans sans
avoir de fruits de leur maria^'C; mais, ayant
fait un vœu à Dieu sous l'inyocalion de la
sainte A'icrge , ils obtinrent un fils qui fut
nommé Jean sur les fonts de baptême, et
plusieurs autres, parmi lesquels se distingua
le célèbre M. deMézeray, liistoriographe de
France. Comme Jean Eudes , dont nous
parlons ici, était destiné à devenir l'instru-
ment des grands desseins que Dieu avail sur
lui, il fut prévenu de tant de bénédi( lions du
ciel, qu'il ne fil rien paraître de puéril dans
son enfance. Dès qu'il fut en état de recevoir
des instructions , il 1rs rechercha avec em-
pressement ; et, comme elles éiaient négli-
gées dans sa paroisse, il fit tant auprès de
son père et de sa mère, qu'ils lui permirent
de les aller chercher chez les curés et 1rs
pré'res du voisinage. Ce fut parce mo>en
•lu'il apporia de grandes dispositions à faire
"a première communion. Il en retira de si
grands fruils, et des instructions qu'il rece-
vait de ses m.iitres, que sa piété croissait à
proportion qu'il avançait en âge. Le Saint-
Esprit alluma dès lors dans son cœur un si
grand amour pour Dieu et lui donna une
connaissance si parfaite des faux plaisirs du
monde, que pour y mieux renoncer il fit vœu
de cliastelô à l'âge de ik ans.
Dès qu'il se fut ainsi consacré à Dieu, il
alla faire ses études à (^aen, où. craignant
la contagion du libcrlinagc ordinaire aux
écoliers, il n'y eut point de précautions qu'il
ne (irîl pour conserver son innociMice; et,
«omme les l'ères Jésuites n'élèvent pas moins
la jeunesse dans la piété que dans les sciences
humaines, il se fit recevoir à la congrégation
établie dans leur collège, où il faisait ses
études, pour être sous la protection spéciale
«le la sainte Vierge. Ayant été admis dans
cette congrégation , il devint le modèle des
autres écoliers , non- seulement par son as-
siduité aux assemblées et à fré(|uenler les
sacrements, mais encore par son ai'i'lii alion
à l'élude, dans l.iquelle il fil un progrès mer-
V eilleux.
Sur la fin de son cours de philosophie,
étant âgé de 18 ans , il pensa a choisir un
état. Ses parents, qui le regardaient comme
l'appui de leur famille, ne manquèrent pas
de lui proposer un parti avantageux; mais
M. Eudes leur répondit qu'il les suppliait de
ne point penser <à lui pour aucun établisse-
ment dans le monde, et qu'il av.iit fait un
choix [ilus noble. Il balança quelque temps
s'il se ferait religieux; mais, après de fer-
ventes prières et des jeûnes réilérés , il se
détermina au sacerdoce, seulement ])ar lo
conseil d'un sage directeur : et Dieu voulant
en faire un saint prêtre et un digne ministre
de l'Evangile, il lui donna dans la cérémonie
de la tonsure, qu'il reçut alors, tout le dégoût
du monde qui dispose à la vie apostolique,
dont il devait faire profession. Etant persuadé
qu'on ne consulte et qu'on n'écoule Dieu
parf.iitcmcnt que dans la retraite, il regarda
la maison des prêtres de l'Oratoire comme i
un lieu propre poursepréparerau sacerdoce, "
auquel il aspirait. Néanmoins il ne voulut y
entrer qu'après en avoir obtenu la permission
de son père , qu'il ne lui accorda qu'au bout
de trois ans , qu'il employa à l'élude de la
théologie scolastique, ;\ laquelle il se donna
tout entier. Si l'humble serviteur de Dieu
avait suivi le conseil de ses amis, il aurait
pris ses degrés ; mais son père lui ayant enfin
laissé la liberté d'exécuter son dessein, il
aima mieux entrer dans l'Oratoire. Ce fut le
25 mars de l'an 1C2.'} qu'il y fut reçu, à l'âge
de 2.3 ans. Les instructions qu'il y reçut et
les pieux exercices auxquels il s'appliqua
augmentèrent encore son zèle et sa ferveur
pour son jiropre salut et celui du prochain.
M. le cardinal de Bérulle remarqua en lui
de grands talents pour la prédicatioo : c'est
pourquoi il lui fit faire quelques discours ,
avant même (|u'il fût dans les ordres sacrés:
en quoi il réussit si avantageusement au
goût de ce digne supérieur, que pour en
tirer tout le fruit qu'on en devait attendre,
tiyanl dessein de l'engager au ministère de la
paro'e , il lui fit recevoir les saints ordres;
et enfin le P. Eudes célébrasa première messs
le jour de Noi'l de l'année IG'ifi.
Dès qu'il fut revêtu du caractère auguste
du sacerdoce, il n'épargna rien pour s'ac-
quitter dignement du ministère de la prédi-
cation ; mais Dieu arrêta pendant quelque
temps les effets de son zèle, en lui envoyant
une maladie qui dura deux ans entiers, et
qui lui interilil l'exercice de ce ministère
pendant ce temps-là, qui ne laissa pas de lui
être utile pour l'étude de l'Ecriture sainte,
dont il faisait le sujet de ses méditations , et
dans la(|uelle il trouva des sources inépui-
sables de science et de sainteté.
Il ne fut pas plulAt rétabli de cette maladie,
qu'il commença ses travaux apostoliques par
une action héroïque de charité : car étant
touché des ravages que la peste faisait dans
le diocèse de Séez , plein de confiance en
Dieu, il y courut avec la permission de ses
supérieurs , afin de secourir ces pauvres af-
'2(5
ElD
LVD
'245
Iligcs, (i'aulanl plus à plaimlie, qu'ils étaionl
nljandonnés (le k'urs propres pasteurs. Quand
il y fui arrivé, il se relira chez un buu prèlre,
qui voulut être le compagnon de ses peines
et de ses fatigues, lesquelles élaicnl très-
prandes et trè-dangereuses pour leurs pro-
pres personnes, puisque, durant quatre mois
que dura la peste, après avoir célébré la
sainte messe de grand matin, et consacré
plusieurs hosties qu'ils portaient dans une
boîte d'argent , ils allaient de maison en
maison pour instuire, exhorter, confesser,
donner le saint viatique , et administrer
rextréme-onction à ceux que la contagion
avait fait abandonner par les personnes
mêmes auxquelles ils devaient être le plus
chers. Les plus infectés étaient ceux que le
P. Eudes recherchait avec plus d'empresse-
ment et soulageait avec plus de tendresse.
La peste ayant cessé au diocèse de Séez, il
retourna à Paris, d'où il fut envoyé à Caen.
Il y trouva encore une autre occasion de
s'immoler pour ses frères : car le supérieur
de II maison de l'Oratoire de cette ville ayant
été frappé de peste avec deux autres prêtres
de la même maison, il les assista tous trois
jusqu'au ilernior soupir; mais avec tant de
charité, que ses vertus jointes aux autres
talents dont il était doué ne permirent pas
qu'on jetât la vue sur d'autres que sur lui
pour remplir la place de ce supérieur. Ce fut
alors que se voyant chargé de ce nouvel
emploi , il redoubla son zèle pour s'en ac-
quitter dignement ; et, s'appliquant à la pré-
dication, non par le désir de plaire, mais de
convertir les pécheurs, il se mil |)eu en peine
de llatter les oreilles, pourvu qu'il touchât
leurs cœurs. 11 reprenait hardiment le vice,
el persuadait la vertu avec tant de force et
d'onction, que sa répulalion se rép:indit dans
les plus grandes villes du royaume, <t même
jusqu'à la cour, où la reine régente, Anne
(i Autriche, mère de Louis XIV, l'entendit
plusieurs fois avec beaucoup de satisfaclioiî;
mais il n'était jamais plus content que quand
il annonçait la parole de Dieu aux pauvres
et aux gens de la campagne, comme il arriva
en plusieurs missions qu'il fit , étant encore
diins la congrégation de l'Oratoire. Dieu lé-
paiidit de si grandes bénédictions sur celles
(|u'il entreprit, que les plus grands pécheurs,
touchés par la force de ses discours, se con-
vertissaient et entreprenaient les plus au-
sières pratiques de la pénitence. De si heu-
reux succès attiraient un si grand nombre
de personnes à l'entendre, que dans une
mission qu'il fit dans l'église de l'abbaye de
Saint-Etienne de Caen, elle se trouva trop pe-
j tite pour contenir l'afduence extraordinaire
1 du peuple qui y accourait de toutes parts,
: quoique ce temple soit un des plus grands
vaisseaux du royaume.
Ce fut alors quelc P. Eudes connutdansles
missions le grand besoin qu'on avait de bons^
pasteurs et de prêtres zélés pour en conser-
ver les fruits et soutenir les peuples dans les
bons sentiments qu'ils y avaient conçus.
Dans celte vue il médita l'établissement des
séminaires pour en former; mais comme il
se défiait de ses propres lumières, il ne crut
pas devoir se déterminer de soi même à une
telle entreprise. Il en consulta donc les per-
sonnes les plus distinguées par leur science
et leur piété, qui approuvèrent le projet
qu'il en avait fait, el crurent qu'il devait se
priver des douceurs qu'on trouve dans des
communautés formées, pour se livrer avec
confiance à toutes les peines qui sont insé-
parables des nouveaux établissemenls. Le
P. Eudes, qui n'envis^igeait que la gloire de
Dieu, déféra donc à leurs sentiments.
Après être sorti de l'Oratoire, il travailla à
l'éreclion d'un séminaire dans la ville d^-
Caen. Les premières lettres patentes ayanl
été obtenues du roi le 2G mars de l'année
1613, et s'étanl associé huit prêtres, tous
remplis de l'esprit ecclésiastique, il jeta les
fondements de la première maison de sa
compagnie. Un de ses associés fut M. Blouet
de Than, connu par sa grande piété et par
le rang que sa famille occupe dans la ville,
et qui fut le fondateur de celle maison. Co
ne fut pas sans beaucoup de contradictions
que se fit cet élablissement ; mais M. Eudes^
et ses associés les surmontèrent [>ar le si-
lence, la douceur et la patience. Piu>.ieur*
cvêques, instruits des grands fruits que fai-
saient ces hommes de Dieu dans le séminaire
de Caen, en voulurent avoir chacun dans
leur diocèse ; et leur compagnie augmentant
tous les jours en sujets distingués par leur
vertu et leur mérite, M. Eudes en envoya à
Coulances, à Lisieux, à Uouen et à Evreux -,
et les communautés qu'on érigea dans ces
quatre villes, avec celle de Caen, pour éle-
ver les jeunes clercs et faire aux peuples des
missions, furent autorisées sous le nom e! lo
titre de Jésus el Marie, par les lettres des
prélats, les patentes du roi et les arrêts d'eii-
registremenl du parlement, po ir être unies
cl agrécées ensemble, ne faire qu'un iné(ne
corps et une même congrégation, qui était
gouvernée par M. Eudes.
On vit eu peu de temps un si grand chan-
gement dans le clergé de ^ormandie, que
plusieurs prélais l'ayant fait conuiiîire à
l'assemblée générale du clergé tenue en
l'année lGi6, elle approuva le zèle de M. Eu-
des, l'exhorta à continuer ses travaux apo-
stoliques, et à se tenir prêt d'aller dans les
autres diocèses où il pourrait être appelé
par les évêiiues.
Ouoique ce zélé instituteur et ses associés
s'employassent avec beaucoup de ferveur à
l'éducation des clercs, ils ne négligeaient
pas pour cela l'autre fin de leur institut, qui
est de faire des missions. L'on en compte
jusqu'à cent dix où JL Eui'es a travaillé
lui-même, sans parler de plusieurs autres
qu'on fit sous ses ordres dans les principales
villes du royaume. Cet abrégé ne permet pas
d'en fiire le détail, ni de rapporter le nom-
bre infini de conversions, de restitutions et
de réconciliations que ces missiunsproduisi-
reiii, princip.ilement à Paris, où ce grand
serviteur de Dieu fit en différents temps des
missions à Saint-Sulpice.auxQuinze-Vingls.
à Sjiul Gcrmain-des Prés, à Versailles el u
017
niCTIONNAinE DES ORDRES RF.I.ICIF.UX.
248
Saiii'-riprmnin-on-I.ayo. Soincnl cc! Iicurcnx
succô» furent traverses par des ronTadic-
lions ; mais r'rlait pour lors (|uc le zèle et
le eourage Je ces dignes ouvriers s'auffinen-
tait et safTcrmissail davanlape, n'espérant
jamais plus di' froit d'une mission, d'une re-
traite, d'un avent ou d'un car<^me, que quand
Dieu perraellail qu'ils fussent rebutes.
M. Eudes, croyant devoir laisser par écrit
ce que lui et ses compagnons avaient long-
temps pratiqué dans les missions, composa
deu\ livres ; l'un, .nuque! il a donné le nom
de lion Confesseur, instruit les missionnaires
de tout ce qui concerne le minisîère de la
confession ; l'autre, qui est intitulé le Predi-
rateur aposloliqiir , njarque à tous ceux qui
ont l'honneur d'annoncer la parole de Dieu
les règles cl les moyens de le faire utilement
pour le proch.iin, ci d'éviter ce qui faisait le
sujet de la crainte de saint Paul, c'est-à-dire,
qit'apris avoir prêché les autres, ils ne soient
nux-m^mes réprouvés. Ces deux livres sont
trés-uliles pour former des confesseurs fi.iè-
les, exads et prudents, et des prédicateurs
évangéliques, qui doivent autant instruire
d'exemple que de paroles ; mais principale-
ment le premier, i^ui a été si universellement
estime, qu'avant la mort de son auteur on eu
avait fait plus de neuf éditions, et qu'un des
plus illustres archevêques de France en or-
donna la lecture à Ions les prêtres de son
diocèse par un statut particulier. On passe
sous silence plusieurs au'res livres que le
même auteur a composés pour apprendre au
peuple à bien prier, à s'approcher des sacre-
inenls, etc.. et (eux qu'il a faits en l'honneur
du cœur de Jésus et de celui de Marie, aux-
auels il avait une singulière dévotion, qu'il
a si vivement exprimée dans les offices qu'il
a composés et qu'on chante le jour de leurs
fêles, dont il a obtcuu l'ét.iblissemcnt dans
quelques diocèses.
Non conleni d'cdifipr rK|*lise et les lidèles
en lou'es ces manières, M. Eudes entreprit
encore un établissement dont le succès fut
une preuve d'une ch.iriic sans bornes et d'un
zèle qui l'avait rendu capable di; poursuivre
les plus hautes entreprises. C'est l'ordre des
Filles de Notre-Dame de Cb.inlé, qu'il com-
mença en l'an 16'*5 et qui fut approuvé du
sainl-siége l'année lOGfi. Après ce grand ou-
vrage, ce digne fondjitciir n'atiendait plus
que la mort précieuse qui devait terminer le
rours de sa vie, comme il le dit lui-mémo
dans un serintm qu'il fil ;'i ses religieuses. Il
elait pour lors iigé de soi\anle-dix-neuf ans
et Use de iravaux. .\yanl éié obligé de se ser-
vird'iine voiture incommode dans un voyage,
et en ayant élé blessé ilangereusemenl. les
remèdes qu'il (il ne servireni qu'.i aigrir son
mal: rn sorle que s.i mort en fut accélérée.
Il véi ul néanmoins encore cinq à six mois
dans des douleurs aigué» et continuelles,
qu'il supporla avec une palienre admiral)le,
■•n ranimant sa fui, sa constance, son espé-
rance et son amour pour Dieu. Il avait eu la
prévoyance de conviuiuer une assemblée
dans laquelle on établit en s.i place au gou-
vernement de sa congrégalinn, M. Hlouet de
r.amilly, recommandahle à ton! le monde jiar
sa douceur, el cher aux siens par le grand
amour qu'il a loujours eu pour eux, el par
les services qu'il a rendus à sa congrégation.
Il était oncle de M. de Camiily, évéquc de
Toul.
Enfin M. Eudes mourut à Cacn, où il fut
regrelié généralement de tout le monde. Ce
fui le 19 août 16S0. Dès qu'on en eut appris
la nouvelle dans l.i ville, le concours du
peuple à venir voir ce fidèle serviteur de
Dieu fui si grand, qu'on eut beaucoup de
peine d'avoir la liberté de l'enlerrer. L'em-
pressement de tout le monde à lui rendre les
derniers devoirs, les louanges qu'on lui don-
nait el qui retentissaient de toutes parts, fi-
rent assez voir que Dieu honore dans le
ciel celui à qui tant de monde rendait par
avance tant d'honneur sur la terre.
C'était un hemme doué de toutes les ver-
tus chrétiennes cl ecclésiastiques. Sa foi
était si pure, si vive et si ferme, qu'il dc-
nnndait souvent à Dieu la grâce de la scel-
ler de son sang. Il avait une telle expérience
de la providence de Dieu sur lui, qu'il espé-
rait dans les choses mêmes où il semblait
qu'il y eût moins à espérer. Son amour pour
Dieu élait si ardent que son cœur poussait
des aspirations continuelles vers le ciel.
Deux vertus qui lui furent singulières le fai-
saient aimer de Dieu el des hommes, son hu-
milité cl sa simplicité. Toul prêchait en lui ;
sa modestie dans le public, son recueille-
fiient à la prière et à l'autel lui attiraient une
vénération profonde de ceux qui le voyaient.
Quoiqu'il prêchât avec tant de force que les
plus grands liberlins se sentaient portés à
quitter leurs vices par la crainte qu'il impri-
mait dans leurs cœurs , néanmoins, au tri-
bunal, il avait beaucoup de douceur, surlout
envers ceux qu'il trouvait disposés à profi-
ter des grandes vérités qu'il leur avait an-
noncées, il se conduisait en cela selon l'es-
prit de Dieu, qui sait mortifier el vivifier à
propos. Personne ne lui a jamais reproché
une douceur mondaine et complaisante. Il
conservait en toutes occasions la fermeté
évangélique ; cl souvent, plein de charilé
pour les pauvres pécheurs qui s'adressaient
à lui, il se punissait lui-même pour obtenir
de Dieu les grâces dont ils avaient besoin.
Tous ceux qui l'ont connu ont élé les témoins
de sa morlificalion et de ses austérités. En-
fin comme son principal soin avait élé de
former les prêlres qui étaient de sa compa-
gnie, il y avait employé tous les moyens que
son zèle lui avait suggérés, et il y réussit si
bien, qu'il les laissa remplis de son esprit cl
héritiers de ses vertus.
\'oilà en peu d<' mots le caractère de M.
Eudes, instituteur des prêtres qui portent son
iKimel qu'on appelle communément Eudistes.
M. Rlouet de Camiily, grand vicaire de ('^ou-
taiiccs, son successeur, a suivi son dessein
ri ses exemples, jusqu'à ce que son grand
Age el ses infirmités l'obligèrent à convo-
quer une a;<emblée en l'année 1711, eu la-
quelle fut élu eu sa place, un peu avant sa
mori, M. (le Fontaines de Neuilly, grand
249
EUD
EUD
250
vicaire rie Bayeux, qui est présenlcment su-
périeur de cette congrégation.
Les Eudisles ne font aucun vœu. La cha-
rité est le seul lien qui les unit ensetnb'e; et
presque tous ceux qui sont incorporés dans
la congrégation y restent toute Irur vie.
quoique chacun ait toujours la liberté d'en
sortir, et qu'on puisse aussi les renvoyer
s'ils tombaient dans quelque déréjïlenienl.
Leur habit n'est point distingué de celui des
autres prêtres, et, comme ils sont membres
du clergé, ils font professinn de suivre les
règles qui sont prescrites par les saints ca-
nons. Ils ont pour maxime d'employer le re-
venu de leurs patrimoines et des bénéfices
qu'ils peuvent avoir en œuvres pieuses, et
plusieurs ont beaucoup contribué à fonder
et bâtir leurs maisons et à y fournir les
choses nécessaires. Ils ont pour principe
que, lorsqu'ils demeurent dans la congréga-
tion, ils sont obliges d'obéir au supérieur,
et ils s'acquittent de ce devoir avec la même
fidélité que s'ils en avaient f lit vœu. Ils en-
seignent ordinairement la théologie dans
chacune de leurs maisons et la philosophie
en plusieurs; et on fait prendre à grand
nombre d'entre eux les degrés de docteurs
et de bacheliers. Les fins de leur institut
sont de former les clercs aux Ibiulions de
la cléiiciiture, et de travailler à faire des
missions dans les villes et à la c;impagne. Ls
en fijiit partout où ils sont appelés, et Dieu
rép.ind de si grandes bénédiilions sur leurs
travaux, qu'il est aisé de juger combien ils
sont agréables à sa divine majeslé.
Le supérieur de cetle congrégalion est
chargé de mettre de lemiis en temps un nou-
veau supérieur particulier dans chaque mai-
son, qui soit agréé par l'évêque diocésain,
et ils regardent ce changement comme une
règle fondamentale de leur société, ils font
des assemblées pour y traiter des moyens de
perfectionner leur institut cl retrancher tous
les abus qui pourraient s'y glisser.
M. Eudes avait encore établi sa congréga-
lion à Rennes avant sa mort, et depuis,
M. Bluuel a aussi envoyé de ses associés en
d'autres diocèses, et toutes ces maisons et
communautés ont été unies et agrégées aux
premièies sous le même nom i t le même
titre de Jésus et ]\l;irie par les lettres d'éta-
blissements des évêques des lieux, les pa-
tentes du roi et les arrêts d'enregistrement
des parlements de leur ressort: eu sorte que
toutes ces maisons et communautés forment
une espèce de congrégation, par rapport à
l'Eglise et à l'Etat. Elle a un supérieur qui
la gouverne: il est élu dans une assemblée
générale à la pluralité des voix. Le gouver-
nement canonique en est fondé sur les pou-
voirs accordés par chaque évêque des dio-
cèses où elle est établie, qui ont été autori-
sés etconfirmés pur les patentes du roi. C'est
pourquoi les évêques sont les protecteurs
de cette congrégation; ei on s'y fait un de-
voir essentiel d'être entièrement sous leur
juridiction.
L'Histoire des Ordres religieux de M. Hcr-
niant parle des Eudistes.
Eu 1810, lors de la démolition du sémi-
naire de l'aen, les corps du P. Eudes et do
ses successeurs dans le gouvernement de sa
congrégation furent transférés dans l'église
paroissiale de Notre-Dame, et le tombeau
du P. Eudes fut alors couvert d'une table do
marbre blanc. Les religieuses de la Charité
de Notre-Dame, de la même ville, obtinrent
alors le chef et un ossement du serviteur do
Dieu. Elles ont fait embaumer ce précieux
dépôt, l'ont placé sous la grille de leur chœur
et y ont mis une inscription.
Une autre œuvre liée à l'établissement des
Eudisles, que le P. Hélyot passe sous silence,
mais à laquelle nous consacrerons un ar-
ticle dans le Supplément, est celle de la con-
grégation séculière du Sacré-Cœur de Marie,
connue surtout en quelques cantons delà
Bretagne. L'opposition que témoigna la con-
grégation de ÏOraloire à celle des Eudistes
n'a point été non plus mentionnée par Hé-
lyot, mais elle n'en fut pas moins réelle, et
cetle opposition, qu'on peut concevoir sans
peine, était basée sur le regret d'avoir perdu
le P. Eudes, et un peu aussi sur une petite
jalousie de corps. La société de Jésus et Ma-
rie eut le bonheur, quand tant d'autres in-
stituts, et nommément l'Ornloire, se lais-
saient prendre à l'esprit d'innovation qui a
tant cau^é de ravages en l'Eglise depuis deux
siècles, de se garantir du jansénisme. Après
M. Guy de Fontaines de Neuilly, supérieur
eénérjil. lorsque le P. Hélyot composait
l'Histoire des Ordres monastiques, la con-
grégalion des Eudisles fut gouvernée par M.
Pierre Cousin, prêtre du diocèse de Cou-
lances, (jui mourut à Caen le 14 mars 1751,
à l'âge de 96 ans. Les sucecsseurs de celui-ci
dans le généralat furent M. Jean-Prosper Au-
vray de Saint-André, du diocèse de Bayeux,
mort à Caen le 20 janvier 1770; Michel Le-
fèvre, mort à Rennes, dans le cours de ses
visites, le 6 décembre 1775; Pierre Lccoq,
mort à Caen le 1"' septembre 1777; Pierre
Dumont, supérieur du séminaire de Cou-
tances et vicaire général de ce diocèse, mort
en 1793 ou 1794-, dans la ville de Caen, où il
avait trouvé un asile après la dispersion de
son séminaire et durant les cruelles persé-
cutions de cetle époque malheureuse. Une
paralysie l'avait mis depuis plusieurs années
dans la nécessité d'avoir un coadjuteur. On
avait choiai, pour cetle fonclmn nouvelle de
coadjuteur du général, M. Hébert, supérieur
de la maison de Paris, où il continua de ré-
sider, et qui s'acquitta dignement de la nou-
velle fonction qui lui était confiée. Ce saint
prêtre était né dans la paroisse de la Croupie,
diocèse de Lisieux, vers l'an 1738, et fut
massacré aux Carmes de Paris, le 2 sep-
lembre 1792.
Les Eudistes ont donné à l'Eglise et aux
fidèles plusieurs modèles de vertus, entre
lesquels nous devons signaler M. Beurier,
prédicateur et missionnaire célèbre, vers la
lin du dernier siècle, et dont M. l'abbé Car-
ron a publié la vie dans le recueil intitulé.
Modèles du clergé. Nous devons aussi eu in-
diquer queltiues autres, tels que M. Michel
on
Lpfi^rre, mori à Rennes, ainsi que nous l'a-
vons (lit ci-dcssiis. t'M 1"7j. Il fui enterré
•laiis l'éplise du praïui séiniiinirc tic celle
ville, el son corps y fui relrouvc en entier
en 1799: ses lialiils sacerdotaux n'élaienl
pas niénic cndommapés. Le médecin qui l'a-
vait trailé d.ins sa dernière maladif fut ap-
pelé pour examiner le cadavre el le recon-
uul. Nou< ajouterons néanmoins ici que M.
I.ffèvrc avait cru devoir, pendant son ad-
iiiinistralioii, écrire en faveur du prêta in-
térêt. La cony;ro(jation, indij;née de ce qu'il
eût publie un ouvrage si opposé aux prin-
cipes qu'elle avait toujours professés, lui fil
les plus vives remonirances clans une assem-
Mée générale, el voulait même le déposer,
>'il ne se fût ré'racté. (".eus que nous VdU-
lons encore nommer, sont .MM. Lelranc,
Iteaulieu, lilamin, Dardai). Duperroii, Durvé,
Grasset de Saint-Sauveur cl l,c liis, qui tous
furent massacrés aux Carmes; M. Poiier,
qui avait si pénéreusement rélraclé son ser-
ment, et fut immolé aux Carmes le ,3 sep-
Icmbrc 1792. La congrégation de Jésus-Ma-
rie a proiluit aussi plusieurs écrivains utiles,
lels que le I'. Eud<'s lui-même, dont une
partie des ouvrages ont été mentionnés ci-
dessus par le P. lléljot; ,M, Beurier, dont un
volume de Conférencs jouit d'une certaine
vogue quand il parui ; M. Le Co(i, général
aptes M. Lcfèvre, dont il réfula le livre dans
une di-scrialion remarquable par la nellelc
cl la précision qui y règneni ; il eslégale-
nienl auteur de plusieurs ouvrages de droit
qui ont éle fort estimés, surtout celui c|ui a
pour lilre: DcCélal d( s personnes et des biens.
M. Se\o\, ntorl à Ucnnes en ITIi.'i, et auleur
des Devoirs rcclésiastii|uc'S, ouvrage esliiné
du clergé; M. Daon, auleur de la Conduite
des confesseurs el de la Conduite des àmcs.
L'n des plus célèbres cl des plus remarqua-
bles de tous ces bonimes niodesles fut .sans
contredit .M. Hébert, sur leciuel nous vnu-
loiis revenir en terminant cette nomencla-
ture. Il habitait Paris lorsque la révolution
éclata. M. Poupart, curé de Sainl-Eustacbe,
ayant, par sa |iroslalion du serment à l;i
consniulion civile du clergé en 1791, perdu
la conliancc de Louis W'I, dont il élail le
confesseur, M. Hébert fut choisi pour le rem-
placer. Le sage su| érieur prévit tout ce
qu'avait de périlleux pour lui celte charge
honorable, el il s'en expliijua devant des
personnes cjui lui étaient chères ; cependant
il ne halanc;a pas ,'i l'accejiler. On dit qu'à
sa sollicitation, l'infortuné tnon.ir(|Uc lit un
vci'u au S.icié Ccriir de Jésus pour le réia-
Silisscmcnt de la paix, mais ce fait ne parait
pas liiin prouvé. Néanmoins la formule de
te vcru réel ou prétendu a élé rendue pu-
blique, el nous la possédons nous-méme.
La fureur des impies contre les prêtres
fidèles augineiilant chaque jour davantage,
M. Hébert fut arrélé à répoc|ue du 10 août
1792 cl renfermé avec c|iiel<iiies-uns de ses
conirères clans le couvent cies Carmes Dé-
chaussés, rue de \'augir.ird ; celle maison,
ronimc ou sait, avait élé, ainsi c|iie c|uelc|ucs
autres, Iransformcc en ]irisuu. t'est dans ce
DICTIONNAIRE PKS OnOllES tlELIGIEUX. l'«
lieu que ce digne ministre de Jésns-Chrisl
finit sa vie, dans les massacres qui y eurent
lieu le 2 septembre suivant. Il fut frappé
l'un des premiers dans l'oratoire du jardin,
et renversé sur le marchepied de l'aulel,
devant une slalue de la sainte Vierge. « Prête
le serment, » lui dit un des assassins, en
levant sur lui son sabre. « Non, lui répondit
le généreux confesseur; je ne veux pas renier
la foi. » Celte noble réponse lui valut la
mort , et le meurtrier lui donna quatorze
coups de sabre.
Aux villes citées par le P. Héljot, il faut
ajouter les suivantes, où les Rudistes avaient
aussi un ^éminaire ou une communauté :
Avranches, où les Eudisles furent appelés en
l(i9;î par le célèbre Huet; niois,oi"i ilsallèrent
en l(i09, époque de rérccticm du siège épi-
scopal de celte ville; Dol, où leur séminaire
fut établi en 1701; Sentis, où ils occupèrent
le séminaire en 1700; Dotufront , au diocèse
de Séez actuellement, mais alors du diocèse
du Mans , où la congrégation de Jésus-
Marie entra en possession du séminaire en
1727, en s'associanl les directeurs qui y
étaient alors et qui embrassèrent son régime;
enfin la ville de Séez , où ils furent chargés
du séminaire en 1702, à la dispersion des
Jésuites , qui le dirigeaient auparavant.
Ajoutons aussi qu'à Houen, à Lisieux et à
Hennés, ils avaient un second élablissemciit,
car ils y dirigeaient le petit séminaire.
La m.iison de Paris n'était point un sémi-
naire , mais un hospice destiné surtout aux
jeunes sujets de la congrégation qui faisaient
leurs études à Paris. On y recevait aussi
d'autres ecclésiastiques en qualité de pen-
sionnaires. Cette maison, établie en 170.'i, ne
put voir enregistrer ses lettres patentes du
roi qu'en 1770, par le crédit de M. de I?eau-
mont, archevêque de Paris , qui protégeait
les Eudisles. Elle était située rue des Postes,
et formait une partie de rétablissement ac-
tuel des Jésuites. La maison de la darlière,
diocèse d' Avranches, était occupée seulement
par des missionnaires de l'institut.
Nous croyons pouvoir insinuer que les
lùidisles avaient commencé cl même formé
un troisième établissement au diocèse de
Uennes, sur la roule de cette ville à Fougères
et sur le territoire de la paroisse de lloma-
gnè. Ils y occupèrent une petite maison at-
tenante à une chapelle sous l'invocation do
sainle Anne, pèlerinage célèbre dans ces
(luartiers, el bâtie au village de la lîosserie.
Le supérieur s'appelait Fontaines, selon uno
noie i{ui nous nomme ainsi le supérieur des
Eudisles de la maison de Sainte-Anne. Ne
serait-i e pas le même que M. de Fontaines
de Neuilly, troisième supérieur génér.il ,
mentionné ci-dessus ? L'établissement de
Sainte-Anne s'était fait précisément à l'é-
poi)ue où celui-ci pouvait le diriger el fut
dissous, nous a dit le directeur de Uomagné
(M. Delaunay), par .M. de llreteuil, évéque
de Iteiines , au commencement du dernier
siècle. (]e même prélat, qui n'était |ias nc-
commodani, à ce qu'il parait, cl était peut-
être de ces liurnuics qui ne connaissent pas
2r5
EXE
EXE
S54
en ([Hoi consisle le véritable avantage rie
leurs diocèses, supprima aussi les formes de
rollégiale qu'av;iieiit prises les obitiers de
l'éolise paroissiale Sainl-Léonard à Fou-
gères. La tradition des anciens parle encore
des séminaristes de Normandie , établis à
Sainte-Anne; néanmoins cet établissement,
situé à une demi-lieue de Fougères, n'a pas
dû avoir une longue durée ; car la maison
provisoire, qui se voit encore , était trop pe-
tite pourunecommunaiitc,etcelle qu'on vou-
lait bâtir n'avait été conduite que jusqu'aux
fenêtres du rez-de-chaussée. Ces murs ainsi
élevésn'ontétédémolisqucvers l'année 1825.
Nous tenions à sauver par cette noie les
souvenirs de cet établissement qui, vraisem-
blablement n'est point mentionné dans les
mémoires des Eudistes. Hélyot dit que les
membres de la congrégation de Jésiis-M;irie,
ne portent pas de costume particulier et sont
habillés comme les ecclésiastiques sérulii-rs.
CeTi n'est pas rigoureusement exact. Les
Eudistes ne portaient point le rabat noir
qu'ont aujourd'hui les prêtres en France;
le leur était tout blanc, comme celui que
prennent les ecclcsiasl ques en deuil , dans
quelques pays, par exemple, au diocèse de
Kennes. Ils avaient, en outre, une sorte de
manchette en toile qui se rdeviil sur les
manches de leurs soutanes , à peu près ou
même absolument comme ces poir/ncis ana-
logues que portent les femmes dans le deuil,
lesquels poignets ou manchettes étaient
autrefois appelés dans le monde d.s ptcti-
reuses.
Plus heureuse que bien d'autres, dont les
membres, contents peut-être d'une liberté
jadis forcée, n'ont pas eu le courage de se
réunir, la congrégation de Jésus-Marie a été
rétablie en 182G, sous la direction de M. l'abbé
Blanchard, ancien supérieur du petit sémi-
naire de Rennes, et pro\iseur du collège roj al
de cette ville. Elle est aujourd'hui gouver-
née par \L l'abbé Louis, et sa maison mère
est à Rennes. Cette résurrection ou organi-
sation nouvelle des Kudistes, mérite un ar-
ticle spécial que nous lui consacrerons.
Voyez liuDiSTEs.au Supplément.
Notes recueillies passim. Vie du P. Jean
Eudes, missionnaire apostolique, instituteur
de la congrégation de Jésus-iVlarie et de l'or-
dre de J\ cire Dame de la Charité , ouvrage
posthume du P. de Montigny, de la compagnie
de Jésus, revu et publié par un prêtre du
clergé de Paris. (Ce prêtre est M. l'abbé
Tresvaus, chanoine de la métropole.)
B-D-E.
EUGIPPR (Saint-). Vny. Césaire (Saint-).
EVANGILE (Frèkes du Saint-). Voy. Dé-
chaussés.
EXEMPTS (Bénédictins).
Des Bénédictins Exempts, tant en Flandre
qu'en France, où il est parlé en particulier
de l'abbaye de Saint-Vaust d'Arras.
Après que le concile de Trente eut été
heureusement terminé, en 15G3,à l'avantage
de la religion catholique et de la discipline
ecclésiastique, tant pour l'état régulier que
séculier ; après qu'il eut été publié et accepté
dans les provinces de Flandre el d'Artois en
15G4, par les ordres de Philippe II, roi d'Es-
pagne, qui en était pour lors souverain, il
se forma plusieurs congrégations en consé-
quence du décret de ce même concile qui
obligeait les monastères indépendants à s'u-
nir en congrégation, ou à subir la visite des
évêques. La première de ces congrégations
fut composée des monastères de Sainl-Vaasi
d'Arras, de Saint-Pierre-Ies-Gands; de Saint-
Berlin, à Saini-Omer; de Saint-Pierre do
Loblies, au pays de Liège, diocèse de Cam-
brai , cl de celle du Saint-Sépulcre de Cam-
brai; mais cette dernière abbaye ayant été
obligée de se soumettre à l'archevêque de
Cambrai , cette congrégation se trouva ré-
duite aux quatre premières abbayes jusqu'en
l'année 1627, que celle de Saint-Amand au
diocèse de Tournai, et de Saint-Sauveur Dee-
name près d'Oudenarde, y furent agrégées
pnr ordre d'Albert , archiduc d'Autriche , el
d'Isabelle, princes des Pays-Bas.
Quoi(iue les supérieurs des premiers mo-
nastères <|ui composèrent d'abord celte con-
grégation se fussent mis en devoir de se sou-
mettre au décret du concile aussitôt après sa
publication, cependant ils ne purent exécu-
ter la résolution qu'ils avaient prise de faire
à ce sujet une assemblée générale , que l'an
15C9, qu'elle fut tenue dans l'abbaye royale
de Saint- Vaast d'Arras avec toute la solen-
nité possible. Cette fameuse abbaye, qui est
comme le chef de cette congrégation, doit
son établissement à saint Vaast , dont elle
|)orle le nom, et eile est redevable de son ac-
croissement à saint Aubert, un de ses siic-
resseurs. Elle eut pour fondateur, en 080,
Thierri, roi de France, qui la dota pour cent
vingt-deux religieux de l'ordre de Saint-Be-
noît, qui devaient être de famille noble et rr>
commandable dans le royaume, personne n'y
étant ri eu qu'il n'eu ait fait les preuves.
Cette abbaye est exempte de la juridiction
de l'évêque et jouit de plusieurs droits spiri-
tuels et temporels; ce qui lui fut accordé par
une assemblée d'archevêques el d'évéques,
qui se tint dans la ville de Compiègne, la
septième année du règne du même roi Thierri,
comme il se voit dans son épitaphc, qui est
dans l'église de cette abbaye, où on lit ces
deux vers :
Régis larga nianus et prsesul Yioiliciaiius
Nobis regale danl jus et ponlilicate.
Les principaux de ces droits consistent,
1° en plusieurs cures de la ville d'Arras,
dont les curés, les vicaires et les autres prê-
tres ne reconnaissent point l'évêque, elsonl
soumis immédiatement à l'abbé et à son of-
ficiai. 2" En ce qu'elle jouitde tous les droits
royaux, conformément au titre de sa fonda-
lion , entre lesquels droits il y a celui de
main-morte, qui défend les mariages et la fa-
brique des églises, chapelles ou oratoires,
sans la permission de l'abbé, et sans payer
certains droits qui sont présentement éva-
lués. Ce droit pour la construction des égli-
ses , chapelles cl oratoires , se voit par une
2;.5
niCTIONNAinE DES f ROHES HELICIEUX.
956
inscription qui csl sur une pyrainidn élcvfc
dans le Pclil-M.irché d'Arrns; on y 'il rps
paroles : Anno Dominicœ Incarnahonis 1200,
hirc pi/tamis rrrcla d in fundo Snncti Ve-
dasti prr consenutm alihatis el rapiiuli, sine
quo assertfu nrc allnre hic potrsl erigi. nrc
dirinn celebiari, nrc nliud firri. 3" Les douze
échevins de la ïillc sonl oblii; s de jurer,
tous les nns , qu'ils pnnlcroiil les droits du
roi el de Ta!)' .-ne, veiiaiil pour cet effet dans
l'éu'lise de la Madrleine, qui est une de celles
(|ui depiMidciit alisolunu'iil de l'abbaye , tant
pour le spirituel que pour le temporel. 4"
Celte abbnye jouit du droit de ton-lieu , qui
est ce qu'on appelle à Paris droit de iirand
voyer. 5* L'abbé de Siinl-N'aast el ses reli-
picux ont droit d'occuper toutes les hautes
slalles du côlé pauchc rie la cathédrale, lors-
qu'ils y vont pour les processions cl les as-
seiiiblées, conforméuienl au concordai passé
entre les parties en l'année lo08, par lequel
il esl dit qu" les religieux de l'abbaye de
Sainl->"dast marcheront a\cc les cliaiioiiies,
en telle sorte (|n'un chanoine aura la droite
el un religieux la gauche, cl cela dans les
processions générales.
(k'Ke abliaye était anciennement d'une
congrégation qui comprenait généralement
tons les niunastcres de l'ordre de Saint-Be-
noîl, qui se trouvaient dans les provinces de
Flandre , Sens et Reims, exempts et non
exempts, qui faisaient pour lnrs leurs assem-
blées, sans préjudice au droit des évèques,
comme il est facile de le voir dans li- \i cha-
pitre du concile de Latran sous Innocent MI,
cnp. In fin(/itlifcle Siatn vwnarhorum, où on
lit ces paroles : Siilvo jure diœcesnnornm pon-
tificum. Mais les guerres qui sont arrivées
entre les rois de France, les comtes de Flan-
dre cl les ducs de Bourgogne, divisèrent tel-
lement ce grand corps, où chaque abbaye,
étant devenue Indépendante , tomba dans le
relâchement : ce qui dura jusqu'à la conclu-
sion du concile de Trente , que ces monas-
tères, étant obligés à se remettre en congré-
gaiioiis, reprirent en même tfin(is les obsiT-
vanres regu iéres, mais parliculièremcnl ce-
lui d'Arras, où la discipline nion;islique com-
mença à revivre par la piélc cl la vigilance
de dom Sarrasin, qui fut chargé du soin de
remédier aux abus qui s'élairni glissés dans
les monastères de celte nouvelle congréga-
tion, où il est regardé comme le reslaura-
teur de l'observance ré;;uliére et comme un
sujet qui lui a fail plus d'honneur par son
grand génie, sa piéie solide, son zèle pour
la religion catholiciue , les emplois dont il a
éié honore, les ch.irgrs el dignités auxquelles
il a été élevé par sou gi au'i o:érile.
Il naquit à Arras le -10 juillcl lo.'iO. Ses pa-
rents, qui étaient rcciiinniandaldcs d.ins la
bourgeoisie do celle > il le, lui Tirent a|)prcndre
Il langue latine, l'ayant mis pour cet eiïet
entre les mains d'un bon maître qui, con-
naissanl bs pranles dispnsiiions <le son éco-
lier, le présenta à l'ablie de Sainl-\ aast, qui
éiflil pour lors Jér(^me Uurfant. L'esprit et les
manières solides de Sarrasin lui allirèrent
l'cklimc de cet abbi-, qui lui donna l'habit <lc
son ordre à I âge de dix-sept ans. Apiès son
année de probation, pendant laquelle il ga-
gna le cœur cl l'estime de toute la commu-
nauté, dans laquelle il fut reçu avec tout
l'applaudissement possible, il fut envoyé a
l'Université de Paris pour y étudier la rbéto-
rinue. Il y fil de si grands progrès, qu'en
l'absence de ses maîtres il donnait les leçons
aux écoliers. Ensuite il fut rappelé à son mo-
nastère, où il fil ses vcrux, et peu de temps
après il y reçut les ordres mineurs cl les or-
dres sacrés de sous-diaconat et de diaconat;
après quoi il fut envoyé à Luuvain pour y
étudier en théologie. Il y fut ordonné prêtre
el il se fil recevoir bachelier dans cette Uni-
versité à la sollicit;ition de ses maitres cl
avec la permission de Hoger de Momoranci ,
qui avait succédé à Jérôme Huiïaul à l'ab-
baye de Saint-Vaast.
À peine eut-il fini ses études que ce même
abbé, connaissant son mérite, le (il son cha-
pel.iin, lui donna le soin d'une partie des af-
faires de son monastère, el le fil enfin dans
la suite grand prévôt de son abbaye, dignité
vacante par la mort de dom Jacques Taffe.
Cet emploi, qui semble si oppose à la piété et
à l'observance régulière par robligatiou
presijue continuelle où il met celui qui en
est pourvu de songer aux procès cl de s'ap-
pliquer à la conservation des droits, des pri-
vilèges et immunités du monastère, ne l'ein-
pécha point de pratiquer ces deux vertus qui
sonl le f indemcnl de la vie religieuse. Aussi
cela parut si extraorilioaire aux Pères qui
élnienl dans celle première assemblée qui so
tint au sujet de l'établissement de la congré-
gation, que, dans le dessein qu'ils avaient de
réformer en même temps les nueurs et de ré-
tablir la discipline régulière, ils le deman-
dèrent à son abbé pour remplir la charge de
grand prieur, dont il fut revêtu parce même
alihe qui, ne pouvant assez lui témoigner
r<slime qu'il faisait de son niéril-, le lit,
quelque temps après , son vicaire général
dans le spirituel, avec pouvoir de disposer
des bénélices.
I.ii supériorité de son génie lui rend lit
toutes choses si f.iciles, que, plus on lui
donnait d'emplois, plus il donnait de preuves
de son étendue par la manière dont il s'en
aci|uitt.iit. Cela parut principalement dans In
soulèvement de la ville d'Arras, qui était du
nombre de celles qui par la faction des héré-
tiques qui avaient à leur léle le prince d'O-
range, s'était révoltée contre son sou\erain,
et dans biquellc la religion catholi(|ue était
en si grand danger par le nombre des liéré-
liques, qui surpassait de beaucoup celui des
catholiques , que l'évêquc de cette mêmH
ville fut obligé d'abandonner ses ouailles et
d'en sorlir avec tout ce <iu'il y avait d'hon-
nêtes gens, afin d'éviti r la persécution, lais-
sanl ainsi le soin de son troupeiu à dom
Sarrasin, qui, se trouvant en même temps
ch.ii gé de tout le goiivernement de son mo.-
nastère par la mort de Thomas Pareusi, qui
en elail ,»libé, remplit parfaitement les de-
voirs d'un supérieur vigilant et d'un zélé
[laslcur, animant par sou e\eni|>le ses reli-
2:i7
EXE
gicux à l'observance régulière, et exliorlant
les peuples par ses fréquentes prédicalioiis
à (léleiiilrc la vérital)lc foi de Jésus-Christ au
prix de leur sang et à être fernies dans la fi-
délllé à leur roi ; ce qui lui réussit hcureuse-
iiienl. Mais ce ne fut pas sans peine et sans
lieaucoup d(! souffrances : c.ir les liéréli<]u(S
et leurs adliérenls, enragés de ce qu'il soule-
nait les intérêts de ])ieu et de la religion
avec tant de zèlo, lejelèrotil dans une obs-
cure prison, où il soutTrii la faim et la soif
pend.inl quinze jours, n'attend;int que le
nioriienl d'uiie mort ignominieuse selon le
inonde, mais précieuse au\ yeux de Dieu,
qui, en ayant déterminé autrement, suscita
des gens de probité qui les déiouriièrent de
leur mauvais dessein, diint ils ne se désistèrent
qu'à condition qu'on leur donnerait l'argen-
terie du monastère pour l'envoyer au prince
d'Orange.
Dans le temps que ce grand homme était
dans la persécution, les IClats généraux d'Ar-
tois, qui gouverna eut pour le roi, voulant
récompenser son niérite elles traviiux qu'il
avait endurés pour le soutien de la foi catho-
lique et le service de son roi, le nommèrent
à l'abbaye de Saint-Vaasl , dont il obtint la
conQrmalion de Pliilippell. Il serait dllficile
d'exprimer les grands talents et les vertus
héroïques qu'il lit paraître dans sa nouvelle
dignité : son zèle pour le bien de son monas-
tère tant pour l'observance régulière que
pour la défense de ses privilèges; son ap-
plication et ses travaux pour la paix, qu'il
procura enfin aux Pays-Bas au grand con-
tentement de tous les bons catholiques; sa
charité envers les pauvres, auxquels il servit
de père dans une laminu qui fut pies;iue gé-
nérale dans t.)uie l'Europe en 15ii7, ayant fait
ouvrir pour cet efl'et les gieniers de son ab-
baye; son amour pour les gens savants, aux-
quels il faisait tous les biens qui étaient en
son pouvoir, fondant plusieurs collèges où
les éluiiiants pauvres étaient reçus, donnant
des pensions aux couvents des religieux
mendiants afiii qu'ils pussent plus comcno-
dément avancer leurs religieux dans les
s.ieiices, et faisant de grandes aumônes aux
écoliers pauvres à proportion des disposi-
tions qu'ils avaient pour les sciences; sa
pieté envers le |irochain en faisant cons-
truire un jiôpitiil pour les pauvres et en fai-
sant liàlir un couvent aux capucins nouvel-
lement arrivés d'Italie dan^ la ville d'Arras;
cnlin sonadressedans les négociations les plus
épineuses, desquelles il sortait toujours avec
honneur à l'avantage de ceux dont il prenait
les intérêts et avec la satisfaction des parties
intéressées, qui ne pouvaient assez louer ses
belles qualités et son bel esprit, tant dans
le manieriient des alTaires que dans les con-
versations particulières, qui lui firent aussi
mériter l'estime de Philippe II, roi d'Espa-
gne, qui pour récompenser son mérite le dé-
clara conseiller d'Etat avec tous les honneurs
ci prérogatives appartenant à celle charge,
el quelque temps après lui donna l'archevê-
ché de Cambrai, vacant par le décès de M.
de Burlemoni, qui luourul le 15 février 1590,
EXE 25J
et dont il obtint les bulles et prit possession
le 1'* septembre de la même année.
Lorsqu'il se vit revêtu de cille nouvelle
dignité, il crut qu'il était de son devoir de
travailler à ramener au bercail de Jésus-
Christ les âmes ijui s'en étaient écartées.
C'est pourquoi il s'appliqua à l'extirpation de
l'hérésie et à l'augmentation de la religionca-
tholique. Sa vigilance el son zèle ne lui per-
niettaieiit pas de prendre aucun repos, récon-
ciliant lui-même à l'Eglise les hérétiques, ré
parant les églises ruinées par les guerres, et
s'appliquant continuellement au soulage-
ment (lu public; ce qu'il continua jusqu'à la
mort : car, sentant diminuer ses forces el
prévoyant que sa fin approchaii, il ne laissa
pas pour l(! bien du prochain, denlrepren-
dre contre l'avis des médecins le voyag- de
Bruxelles, où, élanl arrivé il mourut le
troisième jour de mars de l'année 1598,
après avoir reçu lous les sacrements de l'E-
glise.
Le bon ordre el la tranquillité que ce
grand h imme avait établie dans son monas-
tère ne dura que pendant la vie de son suc-
cesseur, qui fut dom Philippe de Caverel,
qui, pendant Irenle-six ans qu'il fut abbé
de Saint-Vaast, fut presque toujours prési-
dent de la congrégation et y mainlint l'ob-
servance régulière; mais depuis sa uiori,
qui arriva le premier décembre 1036, elle
éprouva toutes sortes de disgrâces par la
gueire qui commença en 1633, enire la
France et rE<pagne. L'abbaye de Saint-
Vaasl fut celle qui en souffrit le plus, puis-
qu'elle resli jusqu'en lO't^l sans gouverne-
ment ni spirituel ni leiniiorel. Car les Fran-
çais s'élant emparés d'Arras, tout l'Artois
se trouva tellement divisé entre la France et
l'Espagne elsiruinépar les deuxarmées, que
les religieux de ce monastère ne pouvaient
rcievoirle revenu de leurs biens, el furent
réduits a n'avoir pas même de pain pour se
nourrir.
Louis Xlll, voulant se servir de son droit,
donna celle abbaye en lOil à dom Maximi-
lien de Bourgogne, qui nomma dom Jean de
Nizar pour gouverner ce monastère quant
au spirituel. Mais ce fut une autre source
de désordres : car, Claude Haccart ayant
été élu pour supérieur de la congrégation
par les autres monastères qui étaient en-
core sous la domination d'Espagne, el ayant
été nommé ensuite à cette abb.iye par l'Iii-
li|)pe IV, roi d'Espagne, l'an 1051, aucun de
ces deux abbés n'ayant pu obtenir ses bulles
du pape, cela causa un schisme si grand,
que le monastère de Sainl-Vaast étant di-
visé, les revcmus partagés, et les moines
désunis el dispersés, tout fut renversé tant
pour le spirituel que pour le temporel jus-
qu'en l'aimée 1000, que la paix fut conclue
en!re les deux couronnes, par laquelle paix
la nomination appartenant au roi, et dom
Maximilien de Bourgogne étant mort , ce
prince la donna au cardinal Jules Mazarin,
qui, elanl mort avant que d'en recevoir les
bulles , eut pour successeur le cardinal
René d'Est, qui ne se fit jamais connaître à
••»
DICTIONNMnE DES ORDRES RKLICIF.UX.
Pour le chœur
celle abbaye que par le soin qu'il cul d'en
recevoir les revenus. Il eul pour successeur
le cardin.ll Emmanucl-Théoilose de llouillon
de la Tour d'Auvergne, qui eu oblinl les
bulles de Cléuienl X au mois de février
1G7.Î. Ce cardinal élanl morl à Home le 2
mars 1713. le cardinal de Uohan fui pourvu
de celle abbaye.
Il y a dans ce monastère qualre supé-
rieurs pour le spirituel, qui sonl le gran I
prieur, le sous-prieur, le liers-prieur el le
«|uarl-prieur. Le grand prieur, qui passe
pour le premier officier de la maison, n'est
point sujet à la clôture du dortoir, ayant un
quartier a part, d'où il peut veiller à la con-
duite des olliciers. el en mémo temps au bon
ordre du monastère. H se fait par scrutin, et
il esl perpétuel ; il esl aussi oflicial de l'abbe
dans kl p.iroisse de la Madeleine, el d'au-
tres qui ea dépendent, el il a un chapelain
religieux.
Le premier oITicier pour le temporel est
le grand prévôt, qui est chef de la justice,
el préside au siège de la cour abbatiale pour
le civil, el est gardien des titres et autres pa-
piers de r»")baye. Gel emploi esl aussi an-
cien que l'abbaye. Le çrand bailli, avec les
barons el hommes de hef, servent pour le
criminel.
Le grènetier reçoit les grains, el a soin
du bo:s et du charbon ; il est aussi chape-
lain de l'abbé.
Le cellérier a soin de la cuisine conven-
tuelle el du rcfecloire.
Le receveur général lient la caisse el re-
çoit la finance de l'abbaye des mains des fer-
miers el des autres receveurs particuliers ;
sou bureau s'appelle communément le buf-
fet.
Le trésorier a »oin de la cire, du linge,
des ornements de l'église el de la sonnerie.
Le rentier est juge du ton-lieu, et reçoit
les rentes foncières de la ville et de la ban-
lieue.
L'hôtelier avait autrefois la direelion de
l'hôpital; mais depuis l'érection d • l'hôpital
général d'.Vrras, el même peut-être avant
ce temps-là, ce n'est plus qu'un ofGce sans
exercice.
Le théologal fait sa leçon certains jours de
la semaine.
Le viiiier a soin de la cave au vin el de
celle de la bière.
Le réfectorier a l'inspection sur la bou-
langerie, el fait cuire le pain.
Le cutnmis aux ouvrages esl chargé de la
fabrique, tant au dedans qu'au dehors du
monastère.
Le bibliothécaire a la clef de la biblio-
thèque, qui est très -vaste el très -nom-
breuse.
L'aumônier distribue aux pauvres les au-
mônes accouiuiiiées, el entre autres tout ce
(jui vient du réfectoire comiiiiin.
Le sacristain a soin des reli<|ues el de l'ar-
genterie de l'église.
Le Diallre de l'ordre est direc!eur des no-
vices, cl il y en a un autre l'our les jeunes
profès.
2C0
sous-
il y a chantre et
à l'inGrmerie, et a
receveurs forains.
chantre.
Le sous-prieur préside
sous lui des infirmiers.
il y a deux ou trois
qui reçoivent les renies à la campagne.
Il y a dans le monastère des professeurs
de la théologie morale , el des langues
orientale , grecque , hébraïque , syria-
que, etc.
Outre le sacristain, il y a deux prêtres
séculiers, qu'on appelle sénéchaux ou tar-
des d'église, qui éveillent les religieux
pour aller à matines, préparent les autels el
les ornements, et servent de massiers les
jours solennels, auxquels jours, les prêtres
habitues des paroisses de la Madeleine, de
Sainte-Croix, de la Chapelle-au-Jardin, el
de la Itasècle, et tous les officiers de justice
sonl obligés d'assister à l'office.
11 y a qualre principales prévôtés forai-
nes, qui dépendent de cette abbaye; la plus
considérable esl celle de Haspres, cnire Cam-
brai el Valencieunes, où il y a ordinaire-
ment dix. ou douze religieux, dont il y en a
un qui esl prieur, el un autre trésorier. Le
prévôl est membre des Etais de Hainaul. La
seconde est celle de Herclau près la Uassée,
où il y a ordinairement trois religieux sous
le prévôt. La troisième, de Uorres près de
llélhune, qui esl semblable à la seconde. La
quatrième, de Bœurières, de laulre côte de
ISelhune, qui esl aussi de même. 11 y en a
encore d'aulres moins considérables que ces
quatre premières. La première esl celle de
Sainl-Michel près d'Arras, où il n'y a ordi-
nairement qu'un religieux. Cet endroit sert
pour les religieux convalescents. La prévôté
d'Angicourt dans le diocèse de Beauvais,
près de Chantilly , celle de Sailli sur la Lis,
dans le pays de Lalloëne, qui e»t entièrement
du domaine de l'abbaye, avec quatre gros
bourgs ou villages ; el enfin celle du Maisnie-
les-Artoises, entre Bapaume et Péronne. Les
prévois de ce^ deux dernières sonl ordinai-
rement seuls, et ne sonl là que pour veiller
aux intérêts de l'abbaye Uans les terres
quelle y possède.
Le grand collège de Saint-Vaast à Douai,
fonde par D. Philippe de Caverel, dont nous
avons parlé ci -dessus, contient trois grands
quartiers, savoir : celui des bénédielins an-
glais, qui sont goHvernés |)ar un prieur, et
qui font l'office dans l'église, comme on fait
à Arras dans le monastère; celui de la par-
lie conventuello des religieux de Saiiil-
\ aasl, où il y a un président el un vice-pré-
sident pour veiller >ur les religieux, tant
enseignants qu'étudiants ; et enlin le quai -
lier des pensionnaires séculiers, qui sont
sous la conduite d'un principal ou régeiH,
d'un siius-regeiit et d'un préfet. Dans le
même quartier sonl la grande salle des dis-
putes, el les classes de théologie, de philoso-
phie el de rhétorique. L'abbaye a aussi un
collège à Paris nomme le collège d'Airuf,
proche Saint-Victor.
Ces emplois, olfices, prévôté, el principa-
lilcs, sont des aduiinistraliuns régulières,
3G1
EXE
EXE
2i;2
l>«res cl simples, coinplables cl révocables,
à la voloulc des supérieurs réguliers, et cela
de tout lemps, n'ayant jamais pas^é pour
des vrais litres de bénéfices, comme il pa-
rait par plusieurs arrêts du parlement.
Cette abbaye a toujours été , comme les
autres de Flandre , régulière et déclive,
comme il parait par les tilres de sa fonda-
lion cl par une inTmité de bulles des papes,
aussi bien que par la lellre de nomination de
Louis XIII en 1641. L'abbé est comie de
Lalloëve, porte milre et crosse , et, outre la
seigneurie qu'il a dans la ville et banlieue
d'Arras, il est haut justicier dans toutes les
terres dépendantes de son abbaye , qui sont
de fandalion et amortissement royal.
Les principaux exercices de celle abbaye
consistent à se lever à onze heures du soir
pour aller à matines. On leur porlc pour cet
cITet de la lumière dans leurs chambres ,
d'où ils ne sortent qu'après en avoir reçu
ordre du supérieur, qui leur ouvre la porte
du dortoir , dont il garde la clef. Ils disent
tous les jours l'office de la Vierge avant que
de dire le grand office, et souvent ils disent
aussi l'office des morts; ce qui étant fini ils
retournent à leurs chambres en disant le
psaume De profundis. Ils se lèvent à six
heures et demie pour chanter une messe de
la Vierge aux jours qu'on doit selon les ru-
briques en chanter deux , uu bien du saint
sacrement ou des morts. Ils chantent prime
à sept heures, puis l'office de la Vierge, en-
suite Is martyrologe , lequel étant fini, ils
vont au chapitre reconnaître leurs fautes el
retournent au chœur pour dire tierce, sexie
et noue, cl l'office de la Vierge. Quand on
ne doit pas dire deus grandes messes , ils
disent prime à huit heures et demie. Après
prime, ils vont à leurs chambres, où ils de-
meurent jusqu'à dix heures, que l'on dit
tierce, après quoi on chante la grand'mes-
se , qui est suivie de sexle et de noue, ex-
cepté depuis l'Exallation de la sainte Croix
jusqu'à Pâques , et tous les jours de jeûne
d'Eglise; mais aux autres temps, none ne se
dit qu'après les grâces, que l'on dit après le
diner, qui suit immédiatement l'oflîce. Après
le diner ils prennent une heure de récréa-
tion , et ils se retirent ensuite à leurs cham-
bres jusqu'à trois heures , que l'on chante
vêpres. Avant le souper, on fait une demi-
heure d'oraison mentale, el après le souper,
qui se fa>l à sept heures el demie, ou après
la collation pour les jours de jeûne, qui se
f.iit à six heures , on chante les compiles,
qui sont suivies d'une action de grâce qui
se fait devant le grand autel pour tous les
bienfaits qu'on a reçus de Dieu , el pour
lors chacun se relire à sa chambre en si-
lence.
Personne ne peut se dispenser des offices
divins ; ceux même qui ont des offices ou
des bénéfices claustraux sont obligés de se
trouver à vêpres, à matines et aux messes
i|ue l'on chante. Il ne leur est pas permis de
manger en particulier, el ils doivent servir à
table les uns après les autres sans aucune
(1) Vo'j., à la fin du vol., n°'' 56 el 57.
distinction. Ils observent l'avent de l'Eglise,
pendant lequel on ne mange point de vian-
de, non plus que tous les mercredis de l'an-
née , non pas même à la table de l'abbé. Ils
jeûnent en tous temps le vendredi, excepié
pendant le temps p.iscal , aussi bien que lu
mercredi, depuis la fête de l'Exaltation de la
sainte Croix jusqu'au carême. Ils sont obli-
gés de rendre compte une fois l'an de tous
les meubles qu'ils possèdent, et toutes cl
quautes fois que le supérieur le requiert. Il
leur est défendu d'avoir rien hors du cou-
vent. Ils doivent se servir de chemises de
serge , et ils ne doivent rien avoir d'affecté
ni d'immodeste dans leurs liabits, qui con-
sistent, dans la maison et au chœur, en une
grande coule noire, et en un fort grand capucc
ou froc qui leur tombe presque jusqu'aux
talons; une aumusse noiie qu'ils portent eu
forme d'étolc, el un bonnet e ai ré à trois cor-
nes, avec un petit rabal ou collet large de
trois doigts , el qui est fendu par derrière,
comme on le voit dans la seconde figure.
Afin qu'on puisse voir la forme de l'habit ,
nous donnons deux estampes du même ha-
billement : l'une le représente par devant el
l'autre par derrière (1). Hors du monastère
ils sont habillés comme les prêtres séculiers,
à l'exception d'un scapuluire large d'un bon
demi-pied, qu'ils portent par-dessus leur ha-
bit. Les habillements des autres monastères
de celle congrégation , aussi bien que les
pratiques, sont peu différents. Les religieux
des monastères de Saint-Berlin , de Sainl-
Pierre-les-tiands eld'Ename ontdesaumus-
ses de dr.ip el onl des bonnets à quatre cor-
nes, et ceux de Lobbes et de Saint-Amand
n'ont (joint d'aumusses. dite congrégation a
élé confirmée par Grégoire XUl en 1575, et
Innocent XI accorda à l'abbaye de Sainl-
Vaast, par une bulle de 11376, la jouissance
de l'ius les privilèges dont jouit le Moiil-
Cassin. Celte abbaye porte pour armes uu
château d'or à fond de gueuks, avec ces pa-
roles : Caalrum nobiliacuin , ce qui lui lui
donne par son fondateur.
Il se lorma aussi en France l'an 1380 une
congrégation de Bénédictins sous le nom
d'Exempts , el cela en conséquence des dé-
crets du concile de Trenie el de l'ordonnance
de lilois, sous Henri III. Les principaux mo-
nastères qui formèrent d'abord celle con-
grégation lurent les abbayes de Marmoulier,
de Vendôme, de Khédon, Sainl-Benoîl-sur-
Loire, le Bourg-Dieu et quelques autres. Ces
monastères dressèrent des statuts, le k sep-
tembre 1581, qui furent confirmés au mois
de lévrier 1588 par le pape Sixte V, et au
mois de décembre 1590 par le pape Grégoire
XIV. Plusieurs autres abbayes firent union
dans la suite avec ces premières et observè-
rent les mêmes slatuti, entre autres celle do
Saint - Maur-sur-Loire y fut unie dans )«
chapitre général qui se tint à Marmoulier
l'an 16-23, el Claude de Saiiit-OITange, qui eu
ét.iil abbe, y lut élu général de la congréga-
tion.
L'abbaye de Saint-Denis n'avait pas eu-
i(,5 niCTIONNAinF. DES
corc ob6i sur ee poiiil au ronrilc ni à l'or-
iloiinance de Hlois ; les relisiii'us H"' y dc-
iiicuraicnl ne pouvant se résouiire à piilrer
daiij une des coniire^alions di-jà el.iblics, el
-i se souini'llre à leur chof, se di-termint"'rc-iit
eiilin, après hcaurotip df delilifraiions, a
donner loniineniemenl à une nouville con-
f;réf:aliiin, afin do pou\oir s'excnipler de la
visile des év(*i|ues d'une inaniiTe qui fût
honorable à celte fameuse abliave ; ils for-
luèreiil celle de Sainl-Diiiis, dont nous avons
parle à l'article Dkn\s (Saint-), et l'abbaye
dont elle prit le nom fut reconnue pour clief
de toute la con^regalion. I.e ])ape l'aul V
[approuva el permit aus monastères immé-
di.'itcnu-nl soumis au sainl-siége (ie s'unir à
elle; mais la rérorme de la congré{;alion ilc
Saint-Maur ayant elé introduite dans cette
cèltUtre abbaye en lO.'J.J, les m lisons qui
formaient la coiigré{;alioii de S;iinl-Ucnis
ayant perdu leur clu'f en clioisirenl un au-
tre, qui fut l'alibaye de Saint-Ouen de Kouen,
el prirent le nom des Exempts, qu'ils étaient
bien aises de faire revivre, el qu'ils clioisi-
renl prcférablemenl à celui du Saint-Denis et
à celui de l'abb.iyi' de Saint-Ouen , quoi-
qu'elle fut leur chef. Ils y lireiil leurs diètes
cl chapitres généraux , il dans celui qui se
célébra en 1043, où se trouvèrent les prieurs
cl députés de (ha(|ue monastère, el où pré-
sida doin Claude de It^uidri de Picncourt,
abbé de la Croix de Sainl-Leufroi , général
de celle congrégation , on revit les statuts,
r,ui y furent augmeiilés de nouveau, cl im-
primés ensuite a Kouen en IGi^i.
I,a réforme de la congrei^alion de Sainl-
Waur faisant de jour en jnur de nouveaux
progrès, et ayant été introduite dans les ab-
bayes de Saini-Ouen de Kouen, de Corbie et
en quelques autres (jui dépendaieiil de la
congrégation des Kxempls, celle-ci diminua
de jour en jour au lieu d'augiiientiT, et de-
vint peu de chose, principalemeiil après la
Diort du général dom Kaudri, La plupart des
monastères reconnurent Ifs évêi|ues pour
^upéricurs cl se soumirent à leur visite.
1) autres qui ctaicnl imiuédialemcnt soumis
OKDRF.S RELlCIF.rX.
204
au sainl-siéiie lâchèrent à secouer le joug de
toute snpériorilé, el un petit nombre resta
toii|ours uni el élut un chef ou supérieur
géncr;il, des defiiiiileurs, des visiieurs, <iui
linreiit des assemblées triennales et conser-
vèrent le litre de congrégation des Exempts
en France sous l'obéissance d'un général,
qui , en 1707, était le K. I*. dom Jean-Kap-
tistc du Verdicr , religieux du Sauveur de
Ktajc.
L abbaye de Cerisi dans le diocèse de
Bayi ux , ipii avait toujours été soumise au
saint-siège , ne voulant poinl reconnaître
pour supérieur l'évé.jue, qui y voulait faire
la visile, s'unit à la congrégation des Kéné-
diclins lilxcmpis, mais elle n'en est que plus
indépendante : car elle n'a jamais vu depuis
ce leuips-l i de supérieur général , qui se
contente d'y envoyer tous les trois ans une
commission en blanc pour y faire la visite,
et les religieux la remplissent du nom de tel
visiteur que bon leur semble. Le prieur de
celle abbaye reçoit aussi lus lettres d'indic-
lion pour assister aux chapitres gcnéraus :
mais il s'en excuse toujours, cl l'on se con-
tente de meilre la lettre d'indiclion dans les
archives. 11 y a de l'apparence que la même
chose se prati(iue dans d'autres maisons de
cette coiigrégalion , où le général n'a pas
grande autorité sur ses religieux , qui i.e
sont pour la plupart que des religieux sortis
des ordres réfoimésqui ont secoué le joug
de l'obéissance pour vivre avec plus de li-
berté, si on excepte néanmoins le prieuré de
Peireci en Bourgogne , qui est membre do
celle congrégation, et où on a introduit une
étroite observance, dont nous parlerons dans
la suite.
Le l'elletier. Histoire et descriptiim des
ordres rcliijieux. Lettre écrite de Cerisi en
1707, par le K. 1'. de Metz, ancien prieur de
cette abb.iye. Dom .Michel Fclibien, Ilist. de
l'abbaye de Sainl-Denys, et Mcuioires coin-
munit/iic-i par te grand prévôt de l'abbaye de
Stiint-] aust.
EXEMPTS. Voyez Molck.
F
F.XILLE (SoEuns de la). Voyez Cuises
(SoF.l RS).
l'AISEUKS DE PONTS, Voyez Pontikks.
FAJE KEN FKATI'LLl. Voyez Jean de
Dieu (OnnuE dk Saint-).
FEK DOK Ll DES ECUVEKS DU FEU
D'AKtiE.NT (OllUllE DES CIIEVALIEIIS l>l ) , ( »l
l'rance.
Jean, duc de liouriion, lils de Louis II , iii-
ttilulriir des ordr( s du Chardon el de l'Ecu
d'or, dont nous avons parié aux articles qui
portent ces noms , institua d;ins l'église de
.Notre-Dame di- Paris, l'an L'*I4, l'ordre? des
chevaliers du Fer d'or el des écuyers du Fer
d'argent, 1 1 lit savoir qu'il l'éiablissail, tant
pour éviter l'oisiveté cl se signaler par des
faits d'armea, que pour aciiuerir la gloire cl
les bonnes grâces d'une très-belle dame qu'il
servait. Seize uentilshommes seulement, par-
lie chevaliers cl partie écuyers, y devaient
être reçus. Ces chevaliers aussi bien que
le duc de Bourbon , ((ui en était le chef ,
él;iienl obligés de porter tous les dimanches
à 1.1 jambe gauclic un fer de prisonnier
pendaiil à une cliainc ; et y manquant, i s
devaient donner quatre sols parisis aux
pauvres. Le fer des i hevaliers était d'or i t
celui des eeuyers d'argent. Les premiers
chevaliers (jui leçurent cet ordre furent les
sieurs Barbazan, du Cliàli'l, Caucourt, de
la lluze, tlamaclies , Sainl-Kemy, de Mous-
siire>, Bataille, d'.Asniorcs, La Fayette el
l'oulargues. Les premiers écuyers lurent les
bicurs Cannulct, Cochcl el du PuiiL
9IC3
FKR
FEU
200
Ils faisniont sormcnt de s'cntr'aimor
Comme frères, de se procurer du liicn , de
ne point souffrir que l'on parlai mal d'eux,
et de défendre leur honneur à quelque pris
que ce fû(. Leurs armes surtout étant dé-
diées au service des dainrs qui imporcralenl
leurs secours, ils étaient résolus de se battre
ensemble dans deux ans pour l'amour d'elles
soit à pied, ou à outrance, armés de haches,
de lances, d'épécs, de daguis cl même de
bâtons, le tout au choix drs adversaires; ce
terme de deux ans n'étant pris pour le com-
bat qu'à condition qu'ils ne pourraient pas
plus tôt trouver dix - sept chevaliers ou
écuyers sans reproche qui voulussent en
venir aux mains et s'éprouver contre eux;
qui" s'ils y étaient outrés (c'est le terme de
la fondât on ) , ils demeureraient <nlre les
mains des victorieux et deviendraient leurs
prisonniers, ou bien donneraient pour ran-
çon un fer avec sa chaîne semblable à celui
de leur ordro, les clievaliers un fer d'or, et
les écujers un fer d'argent ; ou que, s'ils se
rachetaient par quelque présent, les écuyers
leur donneraient un bracelet daigent et
les chevaliers un bracelet d'or ; que s'ils y
étaient assommés, ou bien que par maladie
DU autrement ils vinssent à mourir, en ce
cas leurs fers aussi bien que les chaînes
seraient envoyés à la chapelle de l'ordre
et \à attachés devant l'imiige <le la sainte
Vierge ;qu'alors les confrères pour l'âme de
chaque défunt feraient dire un service et dix-
sipl messes chacun, où ils assisteraient en
haliil de deuil ; et qu'enfin quiconque tom-
berait dans quelque faute serait chassé de
la compagnie. Quoique le duc de Bourbon
fût l'instituteur de l'ordre , il ne se réserva
pas néanmoins la nomination des chevaliers;
une place vacante devait être remplie par
l'avis de la meilleure partie ou de tous les
chevaliers ensemble. 11 ne conserva d'autre
supériorité ni d'autre droit que celui de con-
tribuer plus largement qu'eux aux dépenses
qui se devaient faire à frais communs, de
leur fournir les lettres du roi dont ils avaient
besoin, et de leur faire savoir le jour qu'il
partirait, quand il faudrait aller en Angle-
terre. Mais il ordonna qu'aucun des cheva-
liers sans son congé ne pourrait entrepren-
dre de voyage ni faire autre chose qui pût
l'empêcher (le se trouver au rendez - vous
au temps du combat.
Il paraît que cet ordre, à proprement par-
ler, n'était qu'un combat à outrance de dix-
sept contre dix-sept, où les duellistes sa-
crifiaient leur vie et leur honneur pour des
femmes et peut-être pour des concubines ;
et iiéanmo'ns il fut fondé dans l'église de
Notre-Dame de Paris, en une chapelle ap-
pelée Notre-Dame de Grâce, au nom de la
sainte Trinité el de saint Michel. Ils s'obli-
gèrent de plus de faire peindre dans cette
chapelle une image de Notre-Dame avec les
armes de leurs maisons, et y mettre un 1er
d'or semblable à celui qu'ils portaient, mais
f.iil en chandelier, afin d'y placer un cierge
allumé qui brûlât continuellement jusqu'au
jour du combat. Ils s'obligèrent encore de
DICTIONNAIKE DES OrDRES RELIGIEUX. H.
faire dire à neuf heures tous les dimniiches
une messe h.nute de la sainte Vierge, et une
basse à pareille heure les autres jours, et
pour cela, de fournir de calices, chasubles
el autres ornements nécessaires ; et que si
c'é'ait le bon plaisir de Dieu qu'au combat
général ils battissent leurs adversaires, cha-
cun d'eux en par iculier, non-seulement y
fonderait sa messe et un cierge à pi rpcluilé,
mais encore s'y ferait représenter avec sa
colle d'armes et les autres armes qu'il avait
en combattant , el même y donnerait les
bracelets des vaincus que Dieu leur aurait
donnés ce jour-là, ou autres de pareille va-
leur. Cet ordre dura peu, et même les cheva-
liers ne se battirent point au jour fixé. A la
vérité le duc de Bourbon passa en Angleterre
au temps porté, ou à peu près, par les let-
tres de la fondation , mais en (jualilé de pri-
sonnier de guerre, el n m pas de chevalier
du Fer d'or, et il y mourut api es di.x-neul
ans de prison.
Mémoires communiqués par M. de Clai-
rambaut.
FERÉOL (Saint-). Voyez Césaiiie (Saint-).
FEllTÉ (La,. Voyez Gîteaux, § 2.
FEUILLANTS, et eti Italie les RÉFORMÉS DE
SAINT-BERNARD ( Religieux iiéioumks
DE l'ordre de CiTEAUX appelés en France).
Des r.ligieux réformés de l'ordre de CHenux,
appeler! e.i France Feuillants, et en Italie
les Réformés de Saint-Rernard , avec la
vie de doin Jean de la Barrière, leur ré^
formateur et instituteur.
De loules les réformes de l'ordre de Gî-
teaux , il n'y en a point de plus eonsidéralile
que celle de Notre-Dame de Fcuillans, jiuis-
qu'elle a formé un ordre distinct et séparé ,
qui est une branche de celui de Cîieaux , et
qui est présentement divisé en deux congré-
gations, gouvernées chacune par un général
particulier. Dom Ji an de la Barrière en a été
l'instituteur. Il était d'une famille illuslre
du vicomte de Turenne en Querci. Son père,
s'appelait Barthélémy de la Barrière , el sa
mère Léonarde de Amadon , fille de M. de
Amadou , conseiller au grand conseil. Il
naquit à Saint-Geré, petite ville de celti;
province, le 23 avril loii. 11 fut élevé avec
grand soin , et reçut de ses parents non-
seulement l'éducation qui était convenable
à sa condition, mais encore les premières
teintures d'une piété plus qu'ordinaire. Il
commença ses éludes à Bordeaux et à Tou-
louse, et les acheva à Paris, où il eut pour
maître le savaut Arnaud d'Ossat, qui de-
puis a été évêque de Rennes et de Bayeux ,
et ensuite cardinal.
A l'âge de dix-huit ans, Gharles de Grus-
sol , ûis du comte de Grussol, grand pano-
tier «le France , ayant embrassé l'hérésie ,
lui résigna l'abbaye de Feuillans en 1362 ,
el il en prit possession en 1565. Il la tint
onze ans en commende, sans prendre d'au-
tres soins pour les fruits qu'il en recevait ,
que de dire son bréviaire, et d'en procurer
les avantages temporels. Mais, en 1573,
9
5 7 DlCTIONNAmF. DES OnDURS RELIGIEUX. 2fi.S
,n)ir^s plusieurs combnls inti'ri.uir* , il fut lôrpnt l'anrionnc fcrvonr des rc1i?irnx ilo
si ïi\cmoni Imiolié do Dion, (lu'il almii- Cilonu\ , uns niûme la stiipass'i^ronl : c;ir
iloniia oui oroinoni lo mnudo pour entrer telle é'ail Iriir miniôro de \ic.
Jaiis Tordre dos rovcmis diiqiiol il jouis- Dnin Jean do la Harrit^re, outre ruafio des
i.îil. Il en oblint à cet effet les iicrmissions liaires, dos disriplinos ri des autres niorlili-
uccessaires, el , ap;t^s l'année do probation calions ordinaire-, a^ail encore (t.ilili col-
dans le nninasl^rc d'Aiino, du luêtne or- les-ci. Les religieux allaient nu-|'iods sans
drc , au dioct^so ilo Toulouse, où il >'i'lait sandales, avaient toujours 'a léio nue, dor-
retiro à cet cfTot , il fil sa profession solon- niaient tout votiis sur «les planches, et prc-
nellc avec beaucoup ib- piclé el de ferveur, naient leur réfc< t on <à pcnoux sur le plan-
II alla riisuilo ri^sider à son abbaye , où cher. 11 y en avait même qni, pour se nior-
sa première occupalon fut de réformer les lificr davanta!;e, ne buvaient que dans des
abus qui s'y élaionl plisses par le relâ- crànos do n cris, aci-nmnii^dos en forme de
(hcinent de la discipline ré;;uli( ro ; mais lasses. Ils ne se sorva ont que do vais;ellc de
il y trouva tanl d'oppositions de la part terre. Ils élaiml si Icrvenls, ((u'ils ne vou-
dos rolisioiix cl do quelques personnes laionl manger ni œufs, ni poisson, ni b'^iirro,
socnlii'Tos qui entraient d.ins leurs inté- ni liuile, ni même du sel, se contentant pour
réis , qu il résolut de quitter son abbaye loulc nonrriure do potase fait avec d s lier-
pour se ri tirer dans une soli'ud.- , afin bos cuites seulement à l'eau, et arec du pain
d'y vivre seul el séparé dos hommes, à d'oigo pétri avec le son : encore était-il si
l'exemple des anciens anachorôli s. Comme noir, que les botes refusaient d'en m inger.
il ilail sage el prudonl , il ne voulut pas Leur nombre augmentant, 'cur fer» our de-
se croire lui-même, ni entreprendre une vint plus grande: c'est pourquoi afin de se
vio SI difficilo cl exposée à tant di- dangers mortifier davani.'go el d'assujettir avec plus
sans prendre conseil : c'est pourquoi il en do facilité la chair à l'esprit, ils retrandii^-
écrivil à M. d'Ossal , son am ien maître, rent l'usage du vin. Dom Join de la lîarri.^-
qui, étant à li suite de M. de Foix , ar- rc iniroduisit aussi dans son abbaye un clianl
rhevèquo de Toiilousc, eu qa ilité de se- (ont particulier appelé do son nom léchant
crctairc dans l'ambassade dont ce prélat dtM.de /VuiV/nns- ; mais ayant appiis qiic
fut honoré à la cour de Rome , lui fil une plusieurs personnes le pr()fanai(nl, | rimi-
réponse ircs-judicieuse , que l'on trouve paiement les gens de métier, qui lo clian-
d.ins SCS leitres d'Ktiil , par laquelle louant taicnl en leurs boutiques pour s'en divoriir,
son zùle , il lui conseille de ne pas cher- il le (juilla deux ans apiès pour reprendre
cher la solitude dans les bois et les ca- relui de Citoaux. 11 employa aussi sos reli-
vcrnes de la lorro , où il ne pourrait ni gieux à divers motiei s, non-seulcnienl pour
secourir le proi bain, ni accomplir les coin- g.ign;T leur vie du travail de leurs mains
riiandomcnls de l'Kglisc, ni s'acquitter des (p.irce que leur nombre augmcnlanl tous
devoirs du saoordo( e , où il avait été pro- les jours, il n'avait pas grami rev^^nu ])our
niu , mais qu'il pouvait être solilaire au les cnlrclcnir), mais encore pour éviter l'oi-
milicu de ses fiéresen gardant le silence siveié, qui est la mèie de tous les vices et la
et observant exa<temont sa règle. Il reçut ruine des .'imes religieuses. Los uns cardaient
cet avis comme venant de la part de Dieu , de la laine, les autres la filaient, cl d'ai.tres
cl i s'arrêta à sa première résolution , qui étaient occupés à faire du d^ap.
était de réformer soi mon stère. Telle élail la vie de dom Jean de la Car-
Ce grand dessoin fut d'abord combattu riôro et de ses disciples dans les commonce-
par des ol si clos qui paraissaient invinci- mcnts de ccHc réforme : ce qui leur attira
blos : il fui abandonné de tons ses roli- braucimp do traverses, principalomont de la
j;ieux ; il y en eut même qui attentèrent part dos religieux de Citoaux, qui chcrcbc-
à sa vie. Il d' meura pondant ()uatro ans rent Ions les moyens qu'ils [inront l'our eni-
sans trouver d'imitateurs do l'auslérifé qu'il pécher son progrès, la rcgaidanl comme
prali(iuait , qui était si grande, que peu- une singularité incommode, et ijui condani-
danl tout ce temps-là il ne vécut que de nait le relâchement dans lc(iuel presque tous
fleurs de genêt el d'herbes sauvages, ou les monastères de l'ordre éiaioiil tomoés.
de qudques fruils, sans pain ni vin. Cotte C'est pourquoi dom Jean de la Harrièrc, vou-
vie parut si extraordinane , qu'il fut dé- lant prévenir les empêchements qU' l'on
féré au chapitre général de Cîloaux comme pouvait apporter à la continuation de sa ré-
nn inno>atcur qui, pif son nouveau genre forme, eut recours au pape Sixte V, qui ap-
(le vie qu'il voulait faire embrasser aux ]irouva leur manière de vie l'an laStî, défon-
aulros , troublait le repos cl la Iranqnil- dant aux religieux de Cîteaux de les troubler
lilé de son ablayo. Il reçut celle mortili- dans leur observance, oidoiinant néanmoins
cation avec tant de [latien e, el répondit que les Feuillants seraient soumis à bur \ i-
à ces accusations avec tanl d'humilité, ijuc site el correction dans les choses seulement
plusieurs religieux, concevant une haute (;ui ne seraient pas contraires à l'étroite ob-
idéc de ses vertus, \inronl se soumeliro à sorvance qu'ils avaient embrassée, et que,
sa condiiiie. Lo nombre en était si grand s'il arrivait de la dilfioullé au sujet de ces
en \'.)~~, <iuc l'on peut dire qu'il somhiait mêmes observances, pour sa^oir si elles
qu'il avait atiré la bénédiction du ciel sur étaient contraires à la ri gle de Sainl Honoil,
son nouvel Institut ; ses religieux élaionl ],■ connaissance en apparliendiail aux sou-
ci iîélés , que non seulomcnt ils rcnouvc- vcrains pontifes. L'année suivaitc l!ib7, le
21.9
Fr.u
FEU
271
inoinp pnpe npprouvn de nnnvcnu rpito ré-
forme, qui n'était pas encore «((iIIr (ie l'ab-
bayi' (le Feuillaiis, dans la(|ii('lif il y avait
pour lors, selon le lémoigiiage île ce pontife,
cent quarante rcli;;ieux pr ifès et plusieurs
nov ces, comme il le déclare dans sa huile. Il
leur donna aussi periuission de liàlir des
monastères de celle réfurnie, tant pour des
religieux que poar des religieuses. Il (il
même rester à Home deux religieux qui y
ataieiitélé envoyés par dom Jean de la B.ir-
rière pour obtenir ces huiles, et il ordonna
à ce réformateur d'y en envoyer un plus
grand nombre, parce qu'il voulait leur don-
ner un éiablissemeiit. il accepta cet ordre
de Sa Sainteté avec beaucoup de jiiie, et i! y
CM envoya un nombre sulOsanl pour faire
communauté. On les logea d'abord dans une
petite maison de l'ordre appelée San-Vito,
et le pape leur doiina quelque temps après
celle de Sainte-Prudcntienne, à laquelle ils
ont joint depuis un beau monastère.
Le roi Ilenii lil en voulut aussi avoir à
Paris. Il pria le saint abbé de lui en envoyer
soixante, auxquels il Ht bâiir un magnifique
couveni dans la rue Saint-Honoré. Dom Jean
de la Barrière les accompagna lui-même. Ils
cntrpritcnt te long voyage nu-pieds sans
sandales, nonobstant la faiblesse où les jeû-
nes et les veilles les avaient réduits, ils fai-
saient tous leurs exercices par le chemin,
comme s'ils eussent été dans leurs monastè-
rrs, sans que cinquante cuirassiers, qui h s
accompagnaient de la part du roi, les dé-
tournassent de leur attention cl de leur dé-
votion. Ce monarque, qui était au couvent
des IJons-Homaies dans le bois de Vincen-
nes, les envoya recevoir à Cbarenlon, où ils
arrivèrent le 11 juillet 1588. Il alla lui-même
à leur rencontre pour leur témoigner sa
bienveillance. Ils se prosternèrent luus en
terre, et le roi, liur ayant (ail donner la bé-
Dédiclion par le cardinal de Bourbon, qui
l'accompagnait , b s releva et les conduisit
en ce couveni, où il les logea e! les enirelini
jusqu'à ce que leur couvent de la rue Saint-
Honoré étant achevé, ils en prirent posses-
sion le 8 septembre de la même année.
Pendant les troubles dont le royaume fut
agité dans ce temps-là, dom Jean de la Bar-
rière demeura toujours Odèle au roi, malgré
les complots de la Ligue ; el s'étanl trouve à
Bordeaux dans le temps de la mort funeste
de ee prince, il iui ût de magnifiques funé-
railles, dans lesquelles il prononça son orai-
son funèbre. Ses religieux ne l'imitôient pas
d.ins sa fidélité envers leur souvei'ain : plu-
sieurs se laissèrent en traîner par la fureur de la
Ligue, oùilsenlrèrent(l). Undes plusséditieux
fui dom Bernard de Monlgaillard, appelé le
Pt lit Feuillant, qui, après l'entrée triom-
phanle d'Henri IV dans la ville de Paris, qui
s'éiail volontairement soumise à son obéis-
sance , ne cioyanl pas que les excès dans
lesquels il était tombé pussent lui être par-
donnes, sortit de celte ville avec la garnison
espagnole, el se retira imi Fl.mdre ■inpiès di>
l'achiduc Albert, qui lui donni r,i!ibay<;
d'Orval,dans la province de Luxcinbourg,
(lù, pour réparer ses fautes, il éiablit la ré-
farme qui subsiste encore el iiui approche
de (elle de la Trappe cl de Seplfonds , dont
nous parlerons dans leur li u.
Pendant que les relgieux Feiiillanis
élaienl ainsi malheureusement engagés dans
cette Ligu^, ils devinrent les persécuteurs de
leur sailli instituteur, qui cundamnait leurs
f.iusses démarches par sa lidélilé el son at-
tachement à son prince; ils ne le rcg,:rd?~
rcnl plus que comme un homme qui avait
des si-ntimenls contraires aux intérêts de l.t
religion, et ils obiinrent du pape Sixlc V U
convocation d'une congrégation générale en
Italie. Dom Jean de !a Barrière, infoiniédcs
inleations de Sa Sainteté, se rendit à pied à
Turin, el après y avoir tenu une assemblée
composée seulement des supérieurs des
maisons d'Italie, il alla à Home, tandis qu'on
(enait en France contre lui un chapitre gé-
néral à Cîleaux. Le P. Alexandre de Francis,
dominicain el depuis évêque de Forli, pré-
sidant à ce premier chapitre général des
Fciiillanls en Italie, qui ne se tint que l'an
la02, sous le pontificat de Clément VllI, in-
terrogea l'abbé de Feuillans sur les crimes
do:>t il était accusé, auquel quoique innuceil
il ne répondit qu'en disant qu'il était un
grand pécheur, ce qui étant regardé comme
un aveu de ces mêmes crimes, il fui suspendu
de l'adminislralion de son abbaye avec dé-
fense de dire la messe, et ordre de se présen-
ter une fois le mois au tribunal de l'imiuisi-
lion.
Ce fut dans ce chapitre (juc do:!i Jean
Gualléron, Français, né à Chàions en Cham-
pagne, lut élu pour premier vicaire général
de la cungrégaiion. Les religieux y quittè-
rent leurs noms de famille pour prendre
ceux de quelques saints. Ainsi , dom Jean
Cuaitéron ajouta à sou nom de baptême ce-
lui de Sa nt-Jérôme , el dom Jean de la Bar-
rière celui de Saint-Benoît. Un des premiers
soins du vicaire général fut de faire exempter
sa congrégation de la juridiction des supé-
rieurs de Cîleaux. C'est ce qu'il obtint la
même année du pape Clément VllI , qui la
soumit iiMmédialemenl au saint-siège, et qui
accorda à ces religieux la permission da
dresser des constitutions particulières. Six
religieux furent noma es pour y iravailler,
qui furent dom Jean de Saint-Jérôme, d(mi
Pierre de Saint-Bernard , dom Philbert de
Sainle-Prudentienne , dom Pantaléon de
Saint-Placide , dom Jean de Saint-M.iur cl
dom Alexandre de Saint-Michel ; le pape, de
son coté, nomma aussi le P. Alexandre de
Francis, dont nous avons parlé, qui lui dans
la suite évêque de Forli, el Cônie d'Ossone,
religieux barnabile, qui fui aussi évêque de
Torione.
Ces constitutions ayant été dressées, elles
furent présentées au th;ipilre gcncial, qui se
(I) Ils le firent par auacliemeiit à la foicaihuliiiue, ne voulant passe déclarer pour le prince huguenot.
EniT.
Î71
niCTIONNAIRE HES ORDRES UF.LIGirrx.
572
tint l'an l.'iO."), où, a\anl rt«'' rcrups, le pn])e
les ai'prou\a, ft clii's fiirpnl iinpriiiiéos à
Ui)nic la mémo année. Ces consliiulions mo-
iliTiTcni leur (jranilo rij;neiir. le souverain
poiilifc l'ayant ainsi ordonné à rausc (|iic
«luatorze rciiuioux étaient morts d'ins l'ab-
It.ije de Fcuillans en une semaine, il leur
fut permis de se cou^rir la tête, de porter
des sandales ike liois, de mander des œufs, du
poisson, de lliuile, du licurre et du sel. et
lie boire du vin ; il y a seulement corlains
jours marques auxquels il ne leur est pas
permis do mander des œufs et ilu poisson,
car ils doivent s'en abstenir les mercredis et
lc> vendredi-^, à moins qu«' dans ces jours-là
il ii'arri>c une fèlc de première rlasse , et
pour lors l'abstinence des oMifs et du poisson
est r«misc à un autre jour. Les jours de
jeûne d'Kglise, et pendant .l'Avcnt elle ca-
rême , ils ne doivent mander ni œufs , ni
beurre, ni laitage. Le beurre csl .seulement
permis où l'huile ci'est pas commune; mais
ils ne le doivent manger que d.ins les sauces.
Outre les jeunes prescrits par l'Eglise, ils
jrûnent encore tous les mercredis et les ven-
dredis, cl tous les jours, d. puis la l'été de
I Exaltation de la sainte croix ju-qu'à Pâ-
(|ues. Ils se lèvent à d> ux heures après mi-
nuit pour dire nialiiips , suivant l'us;igc
prescrit dans les congrégaions reformées
qui suivent la régie de Saini-Henoîl. Ils dor-
ment sur (les paillasses , et il est permis à
ceux qui le \eulenl de prendre leur repos
sur des pl.inclies. €eu\ qui. [lareillemcnl,
veulent s'absienir de vin le peuvent, à moins
que le supérieur ne le défende express6aici>l.
Les piètres et les clercs doivent tour à toi;r
servir à la cuisine, cl ils ne se servent que
de vaisselle de terre. Ces ol)servances sont
enrore en pratique dans cet ordre, exce. té
qu'ils se sonl chaussés depuis peu, en vertu
d'un bref qu'ils ont obtenu du pape Clc-
nienl XI.
(Juelque temps après la tenue de ce cha-
pitre génér.il, ils obtinrent un autre établis-
sement dans Home, aux Thermes de Dioclé-
tien. où ia comtesse de Santafiure, Catherine
Sforce, leur lit bâùr un beau mona^lère et
une église, sous le titre de Saint-Bernard,
qui fut tiiiic l'an lotlS. La même année, ils
tinr( ni un autre chapitre , où le I'. dom
(iuillaumc de Saint-Claude ctunt élu général,
on demanda le rétablissement de demi Jean
de la Uarrière, ce que l'évéquc de Forli ayant
empêché par ses intrigues , le cardinal de
Joyeuse eut envie d'enlever ce saint abbe et
de remmener à l'aris ; mais il s'y opposa et
n'y voulut jamais consentir. Catherine de
Nobilis , duchesse de Sforce , s'adressa au
cardinal Itellarmin, qui parla au p ipc en fa-
veur de l'innocence opprimée par la ca-
I innic. Clément \ III chargea ce cardinal de
revoir le procès. Il le revit , interrogea les
religieux séparément, s'entretint plusieurs
fois avec Jean de l,i Itarrière sans lui parler
du pi ocès , fit rapport do tout au (lapc , cl
l'abjura que cet abbé était un saint (|ii'on
tenait dan» l'oppression. Le pa|>e, détrompé,
rei'ruclia a l'cvèquc de l'urli l'injustice de
sa senli'nce , et lui défendit do par.itlre ja-
mais devant lui. L'évéque , fr;ippé de cette
disgrâce , alla faire satisfai lion à l'abbé, cl
mourut trois jours après , accablé de honte
et de douleur. Le pape , après que le procès
eut été revu en sa présence et en celle de
plusieurs cardinaux , ordonna au cardinal
Itellarmin d aller prononcer la sentence d'ab-
solution, avec ordre de retenir dom Jean de
la liarrièrc à Rome ; mais ayant reçu son
absolution, il mourut dans son monasière île
Saint-Rernard , à Rome , le 25 avril KiOO,
entre les bras du cardinal d'Ossal, étant dans
la cini|uanle-sixièiiic année de son âge. La
comtesse de Santaliore, fondatrice de ce mo-
nastère, voulut que ses obsèiiues fussent des
plus magn fiques que l'on eùl vues depuis
ïunglemps à Rome. Son coîur, ayant été cn-
f.Tmé dans une boite en argent, fut envoyé
à l'abbaye de 1-euillans; el l'an lG2li, comme
on transportait ses ossements dans un sé-
pulcre de marbre, au milieu de la même
église de Sainl-liernard, on en donna la tête
et les pieds à M. Sponde, évèque de Pamicrs,
pour les porter aussi a Fouillans, où la lêic
est seulement restée, les pieds ayant été
porté.s à l'aris dans le premier des deux mo-
uaslères de son ordre qui sont en celte ville.
Après la mort de dom Jean de la Rarrière,
le pape Clément ^'lll, qui était en droit, par
cette vacance en cour de Rome, de donner
l'abbaye do Feuillans , la conféra à Jean
liall.ide , qui , deux ans après, l'an 1G02 , la
remit à cette congrégation dans un chapitre
général. Le roi Henri 1\ céda pour toujours
son droit de nomination à cette abbaye, et
consentit qu'un abbé triennal fût élu par les
i:h,ipitres généraux, ce qui lut confirmé par
le pape, ei depuis ce temps-là cette abbaye
est devenue chef d'ordre. Le premier abbé
régulier triennal fut le R. dom Jean de Sainl-
.Maur, qui élait général de la congrégation,
cl depuis ce lomps-là les généraux en France
ont toujours pris le titre d'abbé de Feuil-
lans, et se servent pendant le triennal d'or-
nements pontificaux.
Cet ordre avait fait du progrès du vivant
de son fondateur : cir, nuire l'abbaye de
Feuillans, qui en était le chef, il avait cn-
co.e un célèbre monastère à l'aris, deux à
Rome, un à Rordcaux et quelques-uns en
l'iémont. Mais après sa mort il fit de plus
grands progrès; car les religieux Feuill.ints
tirent des éiablissements à Lyon, à Saint-
Ouillein Normandie, à Soissons, à Rouen,
un second à l'aris, au l'iessis- Piquet, à Fon-
taines, lieu do la naissance de saint Bernard,
cl en plusieurs autres lieux de France, où
ils curent aussi les abbayes de Sainl-Memin
de .Mici près d Orléans, qui appartenait aux
Rénodictins, et celle du Val au diocèse de
IJeauvais, qri elail do l'ordre de Cîteaux.
Celle dernière fut donnée à celle loagiéga-
lion, ou |duti»l au inonaslère de Sainl-Rer-
nard de Pans, par Henri III. Il ne la possé-
da que deux ans, après lesquels elle retour-
na en comuiciide. Mais Louis XIII et Marie
de Mediii-, sa iiicic , la ren.lirenl à ce
munuslcre, qui en prit possession lan IGIG,
273
FED
FEU
271
el depuis ce temps-là le titre abbatial a été
supprimé. Il se fit aussi des établissements
considérables en Italie, de sorto que le pape
Urbain VIII, voyant le sçrand nombre de mo-
iiasières qu'ils avaient tant m Fr.ince qu'en
lialie, et appréhendant que l'observance ré-
pulière ne souffrît quelque atteinte par la
loii^ue absence des supérieurs, qui étaient
oliligés (le se trouver aux rhapitres géné-
raux qui se lenaient qucbiuefois en France,
quelquefois en Italie, divisa, l'an 1G30, les
Français et les Italiens en deux congrépia-
lions diflériMiles, celle de France sous le litre
de Notre-Dame de Feuillans, et celle d'Italie
sous celui des réformés de S lint-Hernard.
Ces deux congrégations sont gouvernées
chacune par un génér.il de leur nation. Ainsi
les lieux maisons de Konie, qui avaient été
fondées par les Français, restèrent aux Ita-
liens , cl le pape accorda sèulemcjit aux
Français un ho-pice dans la mênie ville pour
leur procureur général, au(|uel les Italiens
sont obligés de ilonncr tous les ans cinq
cents livres. Cet hospice a une petile cha-
pelle dédiée à sainte Marie Mère de Dieu, qui
n'est ouvcric que lorsi|u'on y dit la niesse.
(lette séparation des Français d'avec les Ita-
liens n'a pas empêché que les Français ne
soient restés à F'iorence, où ils avaient été
établis dès l'an 1016 par le grand-duc Côme
Il et Catherine de Lorraine, son épouse, qui
leur firent bâtir un couvent, dont les fonde-
ments furent jetés le trente septembre de la
même année, et dont celle princesse posa la
première pierre.
Le premier général do la congrégation
de France fui le V. dom Charles de Saint-
Paul, qui fut ensuite évêque d'Avranches; et
celui de la congrégation d'Italie fui le P.
dom Philippe de Saint-Jean-Baptiste. Les
Français dans leur chapitre général de l'an
l()3'i- tirent quelques ch ingemems dans leurs
constitutions qui furent imprimées à Paris la
même année, et les Italiens en firent aussi
quelques-uns dans les leurs, dans leur cha-
pitre général de l'an 1067, et firent impri-
mer ces constitutions à Kome l'année sui-
vante. Les uns et les autres sont habillés de
même, excepté que les Italiens ont des habits
d'une serge fort fine, cl beaucoup plus amples
que ceux de France, mais principalement le
capuce, qui est beaucoup plus large et plus
profond, et que la permission de se chausser
leur a élé accordée des l'an 1070. Leur liabil-
lemenl consiste en une robe ou coule blanche
sans scapulain», avec un grand capuce de la
môme couleur, se terminant en rond par-
devant jusqu'à la ceinture, el en pointe par
derrière jusqu'au gras des janibes. Leur robe
est ceinte d'une ceinture f.iile de la même
étoffe que l'habit (1) : ils n'ont puint d'habil-
lement particulier pour le chœur. Ils peuvent
porter des chapeaux quand ils sortent pour
aller en campagne. Les convers sont habil-
lés comme les prêtres, à l'exception que leur
ceinture doit être de corde. Ils ont aussi des
doiiués ou oblats qui n'ont point de capuce ,
mais ui> chapeau. Leur robe ne vient que
jusqu'à mi-jambe, et (|uand ils sortent, ils
portent un manteau (2) : les uns et les autres
se servent pour le travail d'un scapulaire de
toile. Les oblats ne sont pas religieux , ils
promettent seulement de garder la chasteté,
la pauvreté et l'obéissance tanl qu'ils demeu-
reront dans la congrégation.
Cet ordre a donné à l'Eglise des cardinaux
et plusieurs autres prélats; les cardinaux,
sont le P. Bona, qui fut fait cardinal par lo
pape Clément IX ; el le P. Gabrieli, par le
pape Innocent XI. Le P. Charles de Saint-
Paul fut évôciue d'Avranches, comnie nous
avons dil. Il a donné au public la Géogra-
phie sacrée, qui fail connaître les diocèses
des patriarches, des métropolitains et des
évéïiues de l'ancienne Eglise. Cet ouvrage
fut imprimé pour la première fois en lOVl ,
à Paris ; mais cette édition étant devenue
rare, un en a fait une nouvelle en Hollande
l'an 170'i-. Le P. dom Côme Roger, qui avait
été aussi général de la congrégation de
France, ell'un des plus célèbres prédicateurs
de son leiiips, fut fait évê(pie de Lombez l'an
1071, et est mort l'an 1711, âgé de quatre-
vingt-quinze ans. La congrégation d'Ilalie a
donné aussi à l'Eglise d'auires prélats. Clé-
ment VIII commit les religieux Feuillants des
monastères de Sainte-Prudenlienne el de
Saint-Bern.Til à Borne, pour jeter en moule
les Afjntts Dei, lorsque le p.ipe en doit faire
la bénédiction; et ce privilège leur a été con-
firmé par Léon XI et Paul V, qui ont lail
défense à toute autre personne de s'ingérer
dans cet ouvrage. Nous ne parlons point des
personnes illustres par leur piété et des écri-
vains célèbre s de celle réforme, parce qu'ils
sont en trop grand nombre; les ouvrages du
caidinal lîona, l'un des plus célèbres écri-
vains de la congrégation d'Italie, sont assez
connus. Le P. Joseph Morolio de la même
congrégation a donné l'histoire de celle ré-
forme, sous le titre lieCistertii reflurescentis,
seti congrer/Alionum Cislcrtio-Monaslicariim
B. M. Fuliensis in Gallia, et reformntorwn
S. Birnardi in llulia CItronologica Historia,
Il a aussi donné le Théàlre chronologique
de l'ordre des Chartreux, imprimé en 1681.
Il promettait celui de la congrégalion des
Clercs Uéguliers de la Mère de Dieu, el celui
de l'ordre de Saint-Jérôme en Espagne; mais
ils n'ont pas encore été imprimés. Il y a
aussi [ilusieurs autres ouvrages de ce mémo
auteur.
Chrysoslome Henriquez, Menolog.CisterC.
et ejufd. fascicul. sanclor. ord. Cistert. Dom
Pierre de Saint-Komuald, Hist. Chronotog.
Joseph. .Morotius, Cislertii re/lorescentis seu.
Cong.B- M ■ Fuliensis Cltronolog.Uistor.vom~
pend, privileg. et constilut. ejusd. Congru],
La conduite de dom Jean de la Barrière, pre~
tnier abbé il instituteur des FeuilLarUs.
FEUILLANTES, dites incorrectement Feuil-
lantines.
Les religieuses Fcuillanles ont aussi eu
{l) Vol/.,» la fin du vol., n" 58 et [)9.
(2) Yoy., ibid., n" CO.
«TS
niC.TIONNAlliE OI'S OUDRI.S HKl.liilKliX.
97(i
jinur in^l liilcurdom J.an de l.i R.irrii^rt'. La
V4'rlii (le l'o sa ut ablié coiiiaifnçnnt à è'.ve
couimc, plusieurs persoiinos le voulun iit
a\uir pour In ;;uide et le dircclour de le r
ronsciciice.DiH' pieuse da ne.doiil la demeure
n'elail eluigiice de l'aliba^e ilc Feiiilluns
nue de quatre lieues, fut des pr niières à
rimlr ricr une liaison spirituelle avic lui.
i;ilc s'appelait Anne de l'olastrou de la llil-
lièro, el était feimne de Jean de ("ir.mdmimt ,
seigneur de Sauvciis. Klle denvurail nrili-
naireinent au château de Sauveiis. près de la
I élite ville de Muret; et li)-.itc> les fois (|ue
l'abbé de Feuilians allait prêcher à Tou-
louse, la piété de «cite dame l'cngage.iil à
I asser par sa maison pour s'y entretenir
avec elle des choses de Dieu, l'animer à la
vertu, augmenter en elle le mépris des van -
lés ilu monde, et l'amour de celui qni seul
pi ut faire le bonheiir de l'iiomme en cette vie
el m l'autre.
D'autres dames qui, malgré les altachc-
Diciils qu'ell s avaient au monde, se plai-
saient à entendre parler de spiritualité ,
poussées par un secret mouvement de la
grâce de Dieu, s'y trouvaient aussi pour
avoir le pl.ii^ir d'entendre les discours spi-
rituels de Jean de la Biriière. Mais Dieu, qui,
p.ir un effet de sa bonté et de sa miséricorde,
avait choisi ce» âmes mondaines pour en
faire de saintes pén lenles, donna tant de
forc" aux paroles de ci't instituteur, qu'ou-
Maiit leurs cœurs à la grâce, elles changè-
rent l'estime qu'elles avaient eue jusqu'alors
pour le monde en un si grand mépris, ()ue
leur devenant odieux, elles i»rircnt la réso-
lution de le quitter, et pensèrent au\ nmycns
de se consacrer entièrement à Jésus-Christ.
.Mais ne pouvant encore exécuter ce pieux
dessein, et profitant de la facilité que leur
di.nnait madame de Sauvcns, elles se con-
tentèrent pour lors de rendre leurs entre-
tiens spirituels plus fré(|ucnts, et com-
mencèrent à imiter la solitude el les aus-
térités des Feuillants autant qu'il leur dtait
possible. Madame de Sauvens animait et
Eoulcnait de si bea^i\ commencements par
ses pieuses exhortations et par les services
spirituels et corporels qu'elle rendait à celte
sainte trou(>e. lille prévoyait fort bien i|Uc
tous CCS services ne serviraient qu'à la pri-
ver plus IM de leur compagnie, puisqu'i Iles
ne faisnieiil que solliciter leur entrée en reli-
gion, où elle ne pou\ait les suivre à cause
de son engagement d.ins le marwrge. Miis sa
charité pour ces nouvelles épouses de .lésns-
riuist l'emporl^nt sur le plaisir dont elle
jouissait dans leur sainte compagnie, elli^ ne
fégligea rien pour mettre la dernière n)ain à
Ce pieux ouvr.'gi", résilue pour lois de lais-
ser cette sainte troupe sous la conduite de
.Marguerite de l'olastrou sa scpur, qui, se
trouvant veuve du seigneur de Margestand,
était en liberté de se consacrer en religion ;
Cl- qu'elle fil en effet, accompagnée d'une de
ses filles, (|ui lui était très-chère à cause de
SCS grandes vertus.
Cette illustre vecive entreprit d'obtenir de
Uoui Jean de la Harrièru du Tivrc sous sa di-
rection cl «l;ins 1rs nii^mes ohspfvanros que
l'abbaye ite Feuilians. Klle lui fil connaître
son sentiment et celui de ses compagnes.
l"ne telle iiroposition étonna autant le s.iinl
;ibl)é qu'elle le réjouit. .Après en avoir rendu
grâces à Dieu, Il loua leur zèle; mais afin do
leur faire voir riiii|iortaMce de ce qu'elles
deiiiandaienl, il leur fii une desi ription de
toutes les ausiériies qu'on pialiinait à Feuil-
ians. Ce tienrede vie, qui aurait clé cap.ihle
de rebuter des cœurs moins animés de l'es-
prit de Dieu, ne servit «ju'â eiicour iger ces
amaates de la croix de Jésus-Christ et à leur
faire demander avec plus d'instance ce qu'el-
les soubailaieiit avec tant d'anleiir. Doni
Jean de la Ilarrière voulut cepind;inl les
éprouver, rnignanl que le temps ne ralen-
lit leur Zv'Ie. Il les laissa dans cette ^oloIlté
pendant deux ou trois ans, les visitant quel-
quefois, les animant par ses dise urs, et les
exhortant à ne point aband nner leur en -
Ireprise; el comine ses prédications lui atti-
raient un grand nombre de personnes i|ul
se mettaient sous sa direction, entre le--
quelles il y eu ;ivait qni voulaient embrasser
l'état religieux, il eut le mojen d'auf;inenier
le nombre de celles qui voulaient embrasser
la vie des Feuillants.
Ayant envoyé à Uome doux de ses reli-
gieux pour y faire a;i| rouvcr sa réforme, et
ie pape Sixte V, comme nous avons dit dans
Farlicle précédent, ayant lait rester dans
celte ville ces religieux, et donné orilre à
l'abbé de Feuilians d'y en envoyer un plus
grand nombre, ils furent logés dans une pe-
tite maison de l'ordre de Cîieaux appelée
San-Vilo. Durant le séjour qu'ils y firent, ils
remarquèrent que sept ou huit filles vêtues
de blanc et portant sur la tète un voile de
même couleur, à la manière des religieuses
de Cilcaux, venaient tous les jours prier
dans l'église de ce monastère. Celte nou-
veauté les surprit, el s'en étant informés, on
leur dit que ces bonnes filles avaient la vo-
lonté d'être religieuses, mais que, faute d'ar-
gent pour entrer en religion, elles vivaient
ensemble snus la protection de saint Ber-
nard.
Dom Jacques de la Rochcmoiison, l'un de
CCS religieux, voulut aider ces bonnes filles
dans leurs saints désirs, et, tout étr.inger
(]u'il était, sans biens, sans appui el pri-squc
sans aucune connaissance à Uome, dans le
temps même qu'il ne devait songer qu'à l'é-
lahlissemenl de sa congrégation, il entreprit
lie leur procurer une maison. Il était d'une
famille noble d'Auvergne, el il avait f;iit
firofession dans l'abbaye de l.i Chaise-Dieu.
Sa naissance, son mérite et sa granile capa-
cité le firent connaîlre ;iu roi ("barles IX,
qui voulut qu'il exerçât la charge de vicaire
général au spiiitiiel el au temporel det'.har-
les de N'alois, son fils naturel, grand prieur
de France el alibé de la Chaise-Dieu. D.im
Jacques s'acquitta de cet emjjloi avec hon-
neur; mais enfin ayant eu occasion d'aller
à l'abb.iye de Feuilians, il fut si l.uehé do
la vie ausière des saints religieux i)ui y de-
meuraient ïuus la cunduile de duiu Jian do
277
FEU
FEU
878
In Barrière, qu'il le pria de le recevoir au
nombre i)c ses disciples. Le saint abbé le
reçut avec joie, et, après qu'il eut f.iit pro-
fession de cette reforme, il alla prêcher quel-
quefois à Sauvens. II eut lieu par ce moyeu
de counaîlre la ferveur de ces dames qui s'y
d S|)0saient pour embrasser aussi la réforme
dis Fcuillaiils. Ayant été ensuite envoyé à
Uome, il entreprit de secourir les saintes
filles dont nous venons de parler, qui s'as-
seiiiblaienl djins l'église de San-Vilo pour y
f.iire leurs prières. Et il s'en présenta peu de
temps après une occa-^ion favorable; car le
cardinal ll'.islicio, proticleur de l'ordre de
Cîle;iux, faisant rebâtir l'cglise de Sainte-
Susaniie, ([ui élail son litre, sans autre des-
sein (pie de satisfaire à robli;j;alion que sa
piété lui avait inspirée; dom Jacques, qui
visit lit souvent ce prélat, comme protecteur
de l'ordre, lui persuada de joindre à cette
ég'isc un monastère de saintes vierges, et lui
pa la de ces filles qui vivaient en commu-
naulé sous la proleclion de saint Bernard, el
qui faute d'argent ne pouvaient être reli-
gieuses. Le cardinal, ravi de trouver une si
l)el!(> occasion de signaler sa piété envers
Dieu el sa cliarilé envers le prochain, écoula
avec plaisir la pioposilion que lui fit dom
Jac(iues, et (it bâtir un mon stère où il ml
ces saintes filles, auxquelles il donna pour
supérieure une religieuse tirée du monastère
de Siinle-Cériic, et les mil sous la direction
des Feuillanl-i, qui leur firent embrasser
l'étroite observance de Cileaux. Ainsi on
peu! dire que les religieuses de Sainlc-Su-
s.nne de Home, qui subsistent encore au-
jourd'hui, ont été les premières Feuillaules,
quoiqu'elles n'en aient pas porté le nom, cet
honneur étant réservé pour les autres qui
élaienl à Sauvens. iJom Jean de la Barrière
les avait touJL>urs eulrelenu'es dans leur des-
sein, jusqu'à ce qu'enfin, ayant reçu, l'an
1586, la première bulle du pape Sixte V qui
érigeait la nouvelle congrégalion des Feuil-
lants et leur peniietlait de bâtir des monas-
tères de l'un el de l'autre sexe, il travailla
pour établir celui des Feuillanlcs; et, après
avoir qlilenu les permissions nécessaires et
réglé touies choses pour les mettre à Mon-
lesquiou de Yolvestre, diocèse de Kieux, il
en laissa l'exécution à un de ses religieux,
ayant été obligé, par ordre du roi Henri 111,
d'aller à Paris.
Tout étant disposé et en état de recevoir
cette Hou\elle colonie, elles se rendirent à
Feuillans au nombre de quinze, d'où elles
partirent le 23 mai lo88 sous la conduite de
dom François Rabaudi, leur supérieur, pour
aller premièrement à Hieux, afin d'y rece-
voir ta bénédiction de l'évéque Jean du
Bourg, et ensuite à Montesquiou, où ce pré-
lat se transporta pour leur donner le voile
de religion, dont la cérémonie se fit le 19
juin de la même année; et l'année suivante
elles firent leurs vœux solennels. Dom Jean
de la Barrière ayant destiné pour leur supé-
rieure Marguerite de Polastron de la Hil-
lière, âgée de 58 ans, veuve d'Anne d'Yzal-
quicr de Glcrmont de DieupanlaJe, seii^ncur
de Margeslanil, celte danic ne voulut pas
recevoir l'habi! la première par humilité,
voulant que ce fût sa fille Jacqueline de
Dieupanlale, à cause de sa virginité : elle
accepta néanmoins la supériorité.
La ferveur de ces saintes religieuses devint
l'ailmiralinn de tout le royaume. Comme il
y avait alors peu de monastères de filles où
l'observance régulière fût gardée exacte-
ment, on respectait d'autant p'us le monas-
tère de Montesquiou , qu'on y voyait des
pratiques de vertu cl de mortification qui
paraissaient presque ininitables. F.u effet,
ce genre de vie pratiqué par les Feuillants
et les Feuillanlcs se trouva si au-dessus des
fones humaines, que Clément VIII ayant
a|)pris, comme nous l'avons dit dans l'arti-
cle précédent, que quatorze religieux étaient
morts dans une seiuaine, ordonna, au cha-
pitre général de 'an 1395, de modérer ces
grandes austérités : ce qui fut fait de la m;i-
iiière dont nous l'avons rapporté au même
endroit.
Le nombre des religieuses Feuillanlcs
augmentant de jour en jour, leur maison se
trouva liop petite; el.la ville deMi)nIesquiou
n'étant pas assez consi<lérable pour rcnfei'-
mer une si nombreuse communauté, on ré-
solut de transférer ces religieuses à Tou-
louse. Le cardinal de Joyeuse, archevêque
do celle ville, ayant obtenu une bulle du
pape pour la suppression d'une maison reli-
gieuse où le dérèglement s'était g issé, vou-
lut donner celle maison aux Feuillaules;
mais ces saintes filles, ne voul.uit nuire à
personne ni s'étab'ir sur les ruines d'aucune
autre communauté, refusèrent les oITres de
ce prélat, el trouvèrent moyen de s'établir
dans un autre lieu, dont elles prirent pos-
session le 12 mai 1599, après avoir quitté
a\ec beaucoup de peine Montesquiou, dunl
les habitants, fâchés de perdre de si saintes
filles, prirent les armes pour s'opposer à
leur sortie.
Etant arrivées à Toulouse, on commença
les bâtiments d'un monastère et d'une égli>e
par les libéralités de plusieurs dames qui s'y
retirèrent, et principalement par celles d'An-
toinette d'Orléans, fjllc de Marie de Bourbon
et d'Eléonore d'Orléans, duc de Longueville,
qui, se trouvant veuve de Charles de Gondi,
marquis de Belle-Ile, et n'ayant pu être ad-
mise au nombre des religieuses de l'Ave-
Maria à Paris, qui ne recevaient point de
veuves, alla à Toulouse, où elle fat reçue
par les Feuillaules, dont elle prit l'habit l'an
1599, n'étant âgée que de vingt-six ans.
Quoiqu'elle fût obli;,'ée, sept ans après, de
jrasser dans l'ordre de Fonlevrault par ordre
du pape, pour y être coadjulrice de l'abhesse
Eléonore, sa tante, elle ne quitta pas pour
Cela le souvenir de sa première profession,
car elle fonda un monastère à Poitiers l'an
1017, où, avec quelques religieuses de l'ordre
de Fonlevrault qui la voulurent suivre, elle
reprit l'habit des Feuillanlcs ; et étant morte
quelque temps après, elle voulut que sou
corps fût porté au monastère de Toulouse.
La rclraile de celle priuccsse dans le mo-
270 DICTI'.IN.NAIUK Dl.S OlîItlil.S KKLIGII.UX. ?S(»
iinsUVc des Fcuill.inlcs de Foulnu^e y atlira ;:iierile de Sninle-Marie. File s'appelait dan»
INI grand iiiiiiilne de personnes de distiiic- le monde Mar<;iierjlc de ('l.itisse de Marclinn-
lion : de sorte que, i';in 1002, qu^ilorze ans m ni, el él.iil fille de Henri de Clausse de
après leur fondation, elles se trouvèrent cin- MarchaumonI, seii;neur de Kleury, conseiller
((liante professes, el il y avait eu plus de d'Ktal, et de Denise de Neuville de Viileroi.
deux cents novices qui en él.iient sorties, Kllc épousa en premières nores Henri, sei-
ne pouvant supporter lis grandes nu^térité< jincur de Foui, jjouverneur du Vexin; mais
de cet ordre. La réputation de ces religieuses ce seigneur étant M,ort six mois après leur
s'augmenlant de jour en jour, plusieurs per- mariage, elle épousa en serondes noces Sa-
sonnes voulurent fonder d'autres monastères lomon de lîélliune, seipneur de Uosny, gou-
du iiième ordre pour communiquer aux au- verneur de Mantes et de Meulan, qui, après
lies provinces les exemples d'une vertu si deux ans el demi de mariage, la laissa en-
sainte, et donner aux âmes pieuses des mai- core vemc pour la seconde fois à l'âge de
sons de retraite où elles pussent se consa- vingl-deux ans.
erer à jèsus-Christ et renoncer aux vaniiès Une si grande jeunesse accompagnée d'une
du siècle. Mais les Feuillants, qui étaient les parfaite beauté, soutenue (lar sa noblesse cl
directeurs de ces religieuses el leurs supé- par ses grandes rirhesses. lui attira les cœurs
rieurs, s'oppo-èrent à cette pi ojiagation, et de plusieurs seigneurs de la cour, qui, se
dans le chapitre général de l'an 1592, il fui faisant gloire d'entrer dans son alliance, la
ordonné qu'on ne se cliarg<rail plus de la recherchèrent en mariage; mais ce fut inu-
ilircclion d'aucunes ri ligieuses, à l'excepliDU lilemenl, car, écoutant les inspirations; du
du seul monastère des Feuillanles de Ton- ciel et désabusée des vanités du siècle et des
iuiise : ainsi, eu verlu de ce règlement, on grandeurs i!e la terre, elle forma le dessein
quitta les religieuses de Sainlr-Ï^usanue de de se faire religieuse Feuillanle et de ne plus
Home. Il y a de l'apiareiice que dans ce aimer que .lé^us-Christ, auquel seul elle vou-
leinps-Ià on présenta plusieurs établisse- lait sacrifier son cœur , el, pour accouinm r
meirs pour des Feui lantes, puisque dans le le monde à l'oulilier. elle se retira peu à peu
chapiire général de l'an l'.y.é il fui de nou- de la cour, n'y paraissant que dans le> occa-
veau coiul I (|u'on s'en tiendrait au règle- sions de nécesiité, négligeant celles qui u'e-
riienl du chaiiitre précédent, el qu'on n'ac- taionl que de bienséance. Elle passa quatre
ceplrrait pas les ncuvcaux établissemenls ans dans celle espèce de retraite, s'adonnanl
que Ion offrait. On refisa encore en 1508 à la pratique des vertus, et éloignant d'elle
une foiidalion que M. Sub'.et des Noyers, lout ce qui pouvait s'opposer à ses desseins;
maitre des compies à l'aris, voulait faire en elle fil connaître celui (lu'ellc avait d'entrer
faveur de deux de ses filles, qu'il conduisit en religion, afin d'écarter ceux qui poiir-
lui-mé:iie depuis à Toulouse au monastère raient avoir quelque espérance sur l.i pos-
des Fcuillantcs, où elles [irin ni l'habit el session de son cu-ur.
tirent profession. linlre ceux qui la recherchaienl en ma-
l-an 1C02, le comlc de Sainl-Pol, é'anl à riage , el qui se mirent en étal d'em; ècher
Home, demanda aux [lères Feuillants assem- qu'elle ne se donnât à Jésus-f.hrist , il n'y
blés en leur chapitre général, au nom de en cul point qui lit paraitie plus d'.irdeur
trois princesses ses sœurs, la permission de que le marécb.il de Marillae. Son aulonlé
fonder à l'aris deux maisons de Feuillanles : jointe aux mesures qu'il prenait lui fiisant
ce qu'elles voulaient faire en considération craindre qu'il n'empéchâi, ou tout au moins
de madame .\ntoiiielle d'Orléans, leur sœur, qu'il ne relardât consiilerablement l'exéiu-
religieusc à Toulouse; mais ils s'en excusé- lion de ses bons dess iiis, elle jugea qu'il
rcni sur l.s règlements faits dans les cba- fall^il encore dissimuler qu' Ique temps ,
pitres prccédeiils, el n'accordèrent point pour éviter ses oppositions cl les siiruionler
celle permission. Le cardinal de Sourdis, ar- par adresse , ce qui lui réussit parfailemeiil.
cliocqiie de lîordeaux, recul un semblable lui elTel , lorsqu'elle vit qu'on la croyait bien
refus en ICO't; mais enfin, Mieu, dont les des- éloignée de ses premiers sentiments de re-
seins sonl bi.n dilTérenls de ceux des hom- trailo, feignant l'oliligatinn d'accomplir un
mes, voulant faire connailre la sainteté de vo'U h Notre-Dame du Puy en Auvergne,
ses nouvelles épouses el multiplier ces sanc- elle (larlit pour Toulouse avec M. do Uou-
luaires où on chantait jour et nuit des eau- ranccs , son cousin germain, qu'elle avait
tiques de louanges à la gloire de son nom, enga^^é h l'accompagner dans ce voyage.
p. niiil que la reine Anne d'Autriche, épouse File y arriva le 7 aoûl 11)02, et se retira aux
lie Louis Xlil. voulut avoir des Feuillanles Feuillanles, où, h l'exemple de madame
a l'aris. Le respect qu'on devait à celle prin- Anloiiieile d'Orléans, qui s'y élail consacrée
cesse fil cesser loules les opjiosilions qui "u Seigneur un an auparavant, elle reçut
s'élaieiit trouvées jusiiu'alor- de la pari des l'haliit le 15 .septembre de la môme année
UWi, élant pour lors dans la vingt-sixième
;iiuiée de son âge. Elle fut accompagnéo
jusqu'au pied des autels par M. di; Coii-
..,iu.,. .,...„, „:... ....... ,..., - tances, qui , éiant encore resté six mois à
loiirg Saint-Jaiqiies. Les ileu^ lilles île I ouiouse pour voir si elle ne cliangerc^il point
M. Desni.yers fureiil du ujinlire de ces six de résolution, suivit enlin son exemple, el,
tel (iieuses. méprisant tous les avantages qu'il pouvait
I-.llus curent pour supcii.uic dune iMai- liélciidre dans lomonde,se relira dans l'eli-
hupèrieurs, qui lin ni partir de Toulouse sx
religieuses, le .'{0 judlel l()2-2, pour aller à
l'aris prendre possession d'une iiouveUe di'-
iiieuri! (|ii'oii leur a»ait pre[)aiée au f.iu
^281 FIE
baye de Feuillans, où il reçut lliabil cl y
persévéra jusqu'à sa mort aussi bien que
mlidame de Uosuy, qui inourul à Paris, où
elle était venue pour être supérieure de la
ixiuvelle maison qu'on y avait établie,
tomme nous l'avons dil ci-dessus.
Los religieuses Fcuillantcs ont les mêmes
observances que les religieux de cet ordre,
cl elles ont lonjotirs été sous leur juridic-
tion , ce qui leur fut accordé par le pipe
Clément Ylll par sa bulle du 10 octobre ItOG.
Ce iioiitife les exeinpla de la juridiction de
l'abbé de Cîteaux et des autres Pères de l'or-
dre, elles soumit immédiatement à celle des
Feuillants. Ouant à leur babillement il est
aussi semblable à celui des reli;^ieux (1).
Mémoires communiqués par le K. P. tlom
Moucby , religieux de cet ordre.
FKUILLANIINES. Voyez Feuii.lantes.
FIDÉLITÉ (OnuREDiî Là). FoJ/^z Dragon
RENVERSÉ.
HLLES DE LA SAINTE-VIERGE. Voyez
PliBIFICATlON.
FILLES-DIEU (diveres). Voyez Cuanoi-
NESSES IIOSPITALIÈIIES, FoNTKVR AULT.
FiNlAN (Saint-). Voyez Irlande.
FLi;ur.Y,ouDESAiNT-nENorr-suii-LOiKî<:,
DE SAlNT-lENIGNE-Dlî-DIJON, et de LA
CHAlSE-DlEU ( AnCILNNES CONGKhGâXlOISS
DE ).
Si l'on regarde les abbayes de Marmou-
liiT, de Saint-Bénigne de Dijon, de Saint-
Denis et de la Chaise-Dieu en France; du
monlCassin, de Cave et de Cluze, en lla-
lie; de Fulde, d'Hirsauge, de Bursfeld en
Allemagne, et plusieurs autres, comme au-
tant de chefs d'ordre par rapport aux mo-
naslcrcs qui en dépendaient et qui l'or-
inaicnt avec leur cliei' comme une espèce de
congrég.ition , à [jIus f irte raison on a dû
regarder l'abbaye de Fleury ou de S int-Be-
noît-sur-Loire comme un chef d'ordre ; non-
seulement par rapport aux monastères qui
loi étaient soumis, mais encore à cause de
la prééminence qui lui a été accordée par
les souverains pontifes au-dessus de tous
les autres monastères ; Léon Vil l'ayant ap-
pelé le pn niier et le chef de tous les monas-
tères : Cafiut ac primas omnium cœnobiorum;
el Alexandre 11 ayant donné la qualité de
premier des abbés de France à l'abbé de ce
monastère, qui a en effet l'avantage de pos-
séder les sacrées reliques de saint Benoît,
patriarche des moines d'Occident.
L'on ne peut pas marquer positivement
dans quelle année cette célèbre alibaye fut
bâtie ; il est néanmoins certain que ce fut au
commencement du règne du jeune Clovis,
lils de Dagobcrt, qui donna par échange le
village de Fleury-sur-Loire pour la terre
d'Atligny à Léodebold, évéque d'Orléans,
qui fil bâtir à Fleury deux églises et un mo-
nastère doni il donna le gouvernement à
lligoniar, qui en fut premier abbé. La prc-
rnière et la principale de ces é^^lises fut dé-
diée à sainl Pierre, ce qui lit que ce monas-
FLE
282
1ère en prit le nom; et la seconde fut consr-
crée sous le titre de la Sainte-Vierge; mais
le corps de saint Benoît ayant été transports
du mont Cassin dans cette dernière , elle ile-
vint dans la suite la principale église, et pni
le nom de Saint-Benoît. Nous avons ci-de-
vant parlé de celle translation, qui s ■ fil
l'an 053 par l'abbé IMommol, qui succéda à
Rigomar ; et depuis ce temps-là, la France
a toujours [ ossé -'é ces saintes reliques.
L'oliservance régulière fut longtemps en
vigufur dans ce monastère. On y enseignait
les sciences divines et humaines ; on y for-
mail les enfants à tous les exercices de la
piété la plus exacte ; et celte maison, qui
portait bien loin la lionsie odeur de Jésus-
Christ, était en grande vénération dans tou-
tes les provinces voisines; mais la fureur
des Normands, qui désolaient toutes les cô-
tes de la Loire, obligea les religieux d'en
sortir pour échapper à leur cruauté, et d'em-
]iorler avec ( ux le corps de saint Beiio t,
qui était l'objet le plus sensible de leur
piété el dont hi présence animaii un chacun
à la pratiqiie de tant de vertus qu'il avait
])raliiiuées pendant sa vie. Ces barbares y
vinrent l'an bOS, el, le trouvant abandonné,
i's ne se contenlèrent pas d'emporter ce
qu'ils [lurent, ils niirenl encore le feu aux
bâtiments; presque tout fut renversé; lé-
glise fut réduiie en cendres ; et les flammes
ayant seulement épargné une partie du dor-
toir, les religieux y retournèrent, le firent
servir d'oratoire, el y mirent les reliques du
sainl en attendant que l'on eût rebâti una
autre é;;lise.
Lbs Normands étant retournés à Fleury
l'an 878, les religieux, qui eurent avis do
leur marche, s'cnfuireni à Matrini dins le
Gâlinais, où ils crurent être en siirelé, ayant
emporié avec eux inul ce qu'ils avaient de
plus précieux, dont ils chargèrent quantité
de chariots. tZcs barbares n'ayant trouvé à
Fleury que les qu.itre murailles, suivirent
les religieux à la piste des chariots, dans lu
dessein de les massacrer et d'emporter tout
ce qu'ils avaient sauvé de leur monaslère.
Mais l'abbé Hugues, qui avait été chercher
quelques secours en Bourgogne, étant sur-
venu comme ces barbares se disposaient
pour attaquer les religieux, les charge.i si
brusquement avec Girbord, comte d'Auxerre,
qui s'était joint à lui avec ses troupes, que
les Normands furent tous taillés en pièces.
A peine en rcsta-t-il un pour porter aux
autres la nouvelle de leur déf.iite, el l'abbé
Hugues avoua qu'il avait vu dans le combat
saint Benoit, qui d'une main tenait les rem s
de son chival, el de l'aulre son bâton pasto-
ral, dont il aval lue un grand nombre d'en-
nemis. Diederic, moine d'Hersfetd en Alle-
magne , qui avait demeuré longtemps à
Fleury, nndant comiile à Richard, abbé
d'Amcrbach, de ce qui avait donné lieu do
célébrer, le 4 décembre, la fête de l'Illalion
ou du retour de saint Benoîl, dil que ce fui
le retour solennel de ces reliques qui furent
(1) Vuy., à la lin du vol., n'Gl.
2'.5 niC.TIONNAIftE DF.S (lUI)UES IIEI.ICIKIX. ?};♦
îiip.irljcs il Fliui y, .Tprès avoir él6 quelque Iciiips. I,e coiiiH' Elisinnl, .ly.int pris avec
i«Mii|>s dans l'i'^lis.' di; Syiiit-Ai;;i)an à Or- ui deux autres iciniles cl deux év*^(Hics, ;u-
Icans, pour les iiicllie à i-ouvcrl de la fureur cinnpaL-na s.iinl Odoii à Flcury ; mais les
drs Normands, dont il rapp;irlo une sem- rclijjieux à leur arrivée s'armèriTil romiiif
bl.ihic di'laiie proche d'Anircrs par le cornie s'ils eussent tu encore à c<inibalire les Nor-
(iisUdfe, avoue de celle ahhaye, a(uès (luc rnauds ou des païen». Ils se barricadèreni el
C' s liarliarcs l'eureul eiicoie pillée cl lue moiiléreul sur les lulls, d'où ils jelèienl une
soixaii e religieux; mais il y a lieu d'eu j,Télr de pierres sur ceux qui voulu: enl ap-
douler. proilipr-, d'aulres, armés d'cpées el île liou-
I.cs mêmes Normands eurent plus de rcs- cliers, d( f. ndaieiit les avenues de I alihaxc
pccl p ur ic lieu dans la suiie; car, sous eu proleslaiil qu'ils mourraienl pliilol que
r.ililié Lamlicrl, l'au 90 J , Uajnand, qui de recevoir un abbé d'un aulre m naslère.
<()niniandail une IloUe de ces iieupb's, qui Trois jours se passèrenl ainsi, lorsque sainl
élaicni eniiirc inlidèles panuiuranl tous les Odcii, inS] iré de Diru el contre K' conseil
rivages de ia Loire, où il nu'llail liul à feu des évêquis el des seig' eurs donl il élail
el à sang, éiant arrivé à Flcury, lrou\a accompagné, qui lui persuadaient de ne pas
le niona>tère abandonné de tous les rcli- s'exposer à la fureur de ces mutins, monta
gicux, qui s'étaient retirés, après avilir en- sur son âne cl alla droit au monastère, ou,
core emporte avec eux le corps de s.iint He- par une espèce de miracle, ceux qui s'op-
noll. Comme ce général dormait dans le pusiicnl le plus à son entrée vinrent au-
ilortoir des frèies, l'on prélend que saint devant de lui, el, plus doux i|ue des agneaux,
IJeiinîi s'apparut à lui, el que l'ayant frappé le nçnreiU avec beaucoup de soumission,
de son talon, il le reprit sévè:emenl de ce Ma s li)rs(]iie l'on proposa de retrancher
qu'il inquiétait SCS reliiiiiux, et lui dit qu'en l'usage de la viande el de bannir la pro-
|iunition de ses cruautés il mourrait bien- priélé, les nairmurcs recommencèrent. 11 y
u\[ ; ce qui arriva en elTel peu de temps eut de nuivelles di-pules beaucoup phis for-
aprcs. Uaiiiaud éant évc Hé, fit au plus tôt les et plus aniuiées. Il n'y eut que la con-
soitir ses sold.ils du uuxiaslère; et Uollon, slamc du s.iint abbé qui put mettre à la rai-
duc des Normands, ayant su ce qui était ar- son ces désobéissants ; el Dieu par un niira-
ii»é à son général, non-seulement épargna défit connaître combien l'abslinencc de la
ce monastère lorsque peu de Icmiis après 11 viande lui élail agréable; car un jour de
aMa faire une incursion en lJourgo;,'ne, mais Saint-Benoît iiue le poisson niani|ua, les r.--
encore, en considération de saint Benoit, il ligieiix en liduvèicut abomlammenl dans un
empêcha que ses gens ne fissent aucun tort niarais voisin, où il n'y avait jamais eu que
au pays d'alcniour. des grenouilles. lùifin ils reprirent les ob-
II était impossible, au milieu de tant de scrvances régi Mères, qui furent observées
desordres que les religieux pratiquassent dans ce mouaslère avec tant d'exactitude,
le- observances régulières. Ils lombèrcnl in- que l'on y vint de plusieurs endroits, ci
sensiblemenl dans le nlàchcmenl, qui d.ins même d'.^nglcîcrrc, chcrclier des relig eux
la suite s'augmenta de telle sorte, que l'an pour les enseigner à d'autres rnona>lères,
03 ) on ne trouvait plus à Flcury aucun conimc à S.iintPierre de Chartres, à Saint-
vcslige de ces prali<)ues de religion si sain- N incent de Faon, à Saumur, à Sainl-l'ierre
les el si sages qu'on venait autrefois admi- dépens, à Saint-Fpvredc l'oul , cl à quel-
rer dans ce monastère. Les religieux, que la ques autres, tant en France qu'en Angle-
crainte des Normands avait obliges de fuir et terre. Mais, quoique celle abbaye eut été ré-
d'aller de côté et d'autre, élaienl à la vérité formée par un abbé de Cluny, elle ne lui fui
reloiirnés à Fleury ; mais quoiqu'ils l'os- p ,s pourtant soumise, non plus que plusieurs
sent unis de corps, ils élaienl bien divisés autres qui furent aussi réformées par des
d'esprit el n'avaient rien de commun que le religieux de C uuy. Le comte Klisiard ,
vice. Chacun élail propriétaire, ou ne savait voyant la discipline régulière bien établie à
plus ce que c'était que l'ai slinence de la Fleurv, se mil lui-même sous la conduite do
viande ; on ne connaissait plus le silence ; sa ni Odon l'an !)'tl, i l pril l'habit monasti-
iU voul, lient tous commamler, personne ne que dans ce monastère, auqui 1 il donna une
voulait obéir, el on se mettait peu en peine terre cousiilcrablc qu'il atait dans le Câ-
de la règle de Sainl-lîenoit. linais.
Tel était l'éial déplorable de celle maison. Il parait, par K-s anciennes coutumes qui
liirsque le comte l'^lisiard, animé du zèle de élaienl en pralii|ue dans cette! abbaye, que
la maison de Dieu, obtint cette abbaye du le P. .lean Dubois nous a données dans sa
roi l'iodiilplie ou Itannl, dans 1 iulention de bibliolliéque di; Fleury, que l'un y faisait
la réformer el d'y rétiblir la disci|iline ré- beaucoup d'aumrtnc-. l.e jeudi saint on
giiliére, ne pouvant [ilus so;ilTnr que des cliaiilail une grand'messe à l'autel do
moine-, 'lui ne portaient pas seulement riia- S.iinte-Croix, à laquelle (levai, ni assister
hit de l'ordre de Saiiit-Ilenoit vécussent plus cent pauvres, à chacun desquels on donnait
lun^'lemps dans le iléreglemenl. Mais, ne une hostie non consacrée, et après la messe
pouvant pas de lui-même corriger ces abus, on les fais.iil manger. Ils dcvaienî avoir
il en commit le soin à saint Odon, abbé de deux pitances, l'une de fèves, l'autre do
('.iiiiy, qui élail pour lors au monastère millet. Après le dîner des religieux, l'abbé
d'Aiirillac en Auv(Tv;ne, que le bienheureux l.ivail les pieds cl les mains a dimze pau-
(jérjrU avait lail b.itir il n'y avait pas long- vres, cl leur donnait du pain, du vin, deux
2fi5
FLE
FLR
2SG
harengs, pl douze deniers ; et le niétne jour
ou ilomiail encore du p.iin c( du vin à lnus
ceu's. qui se pic ctilaieul. Ou fais;iit aussi
uu" auuiôiie fjéi'érale le jour de la Pcnlc-
c(Mc ; on doniiail encore à manger à cent
pauvres, qui devaient avoir du pain, du vin
et (le la viande; et, le jour de lu Coniiné-
moraison dos Moris, on faisait aussi une au-
mône générale de blé. La manière d'élire
l'abbé est prescrite dans ces anciennes cou-
tumes, où il est marqué que l'abbé élanl
élu, pouvait se faire bénir par tel évoque
que bon lui semblait, exrepté par l'évêque
d'Orléans et par l'archevêque de Sens. Il y a
de l'apparence qu'ils ne se faisaient pas bé-
nir par révéque d'Orléans, à cause des dif-
féiends qu'ils avaient souvent avec ce pié-
lal, qui prétendait avoir juridiction sur ce
monablère ; ni par l'archevêque de Sens, à
cause «ju'il était le métropolitain. L'on
trouve aussi après ces anciennes couîumes
de Fit ury une taxe faite par l'ahbé Mucaire
sur tous les prieurés et les prévoies de la
dépendance de celle abbaye, pour avoir des
livres pour la bibliolbèque; et il paraît qiie
celle abbaye avait pour lors trente prieurés
et prévoies, du nombre desquels élaient les
prieurés de la Riole, du Saux en Limagne,
de Perrcry en Bourgogne, de Sancorre, de
Vailly-sur-Gien, de Saint-Brisson, de Saint-
Aignan, d'Etampes, d'Anecourt, de la Chèze
en Sologne, de Lauris, et de la Cour de Ma-
rigny. Mais il y a rneuren la date de cette
taxe, que le P. DiiLiois marque être des ca-
lendes de mars 13'i-6, la dixième année de
Louis, nii de France et duc d'Aquitaine;
puisque Philippe de Valois régnait pouriors.
il y avait aussi sans doute des abbayes qui
dépendaient <ie F'ieury, pui.sque le moine Ai-
moin, dans la Vie de saint Abbon, abbé de ce
monastère, (|ui fut tué l'an 1004, dit que la
douleur qu'on eut de sa mort augmenta par
l'arrivc e d'un grand nombre d'abbés, qui ve-
naient pour la tête de saint Benoit, qui se
célébrait au mois de décembre, dont il y en
avait qui avaient été mandés pour pourvoir
au bon ordre de la congrégation, et d'autres
qui étaient venus pour consulter saint Ab-
bon, entre lesquels était saint Odilon, abbé
deCluny; et que le chagrin que ces abbés
(îrent paraître de ne plus trouver saint Ah-
boii, renouvela la douleur de ces religieux
d'être privés d'un tel pasteur.
Les calvinistes, dans le seizième siècle,
n'euT' nt pas pour celte abbaye les mêmes
égards qu'avaient eus les Normands, quoi-
qu'infidèles et païens. Le cardinal Odet de
(iiiâlillon, qui en était abbé commendataire,
y envoya après son apostasie, arrivée l'an
1562, son intendant avec des soldats, pour en
emporter les vases sacrés et tout ce qui était
dans le trésor. Juubert, qui en était prieur,
obtint seulement de l'intendant les reliques
de saiul Benoit; mais la châsse d'or qui les
enfermait fui brisée et emportée, aussi bien
qu'un reliquaire d'argent où était un ossc-
iiient de la cuisse de saint Sébastien, que le
cbantro de cull' abbaye s.iuva hcureuisemeiil
dus iiiaijis sacrilèges de ces, hcrctiques Les
satellites de ce cardinal apislat avaient
laissé les autres rc'iques, qni étaient dans
des châsses de bdis doré; mai- la même année
le prince de Condé, étant à Orléans, envoya
derechef des soldats à Fbury pour enlever
ce que les gens du cardinal avaient épargné.
Les reliques furent profanées et foulées aux
pieils, tous les ornemenis de l'église furent
pillés, et les calvinistes firent le prêche cl la
cène dans l'église. Le corps de saint Benoît
fut néanmoins à couvert de leurs insuit 'S,
aussi bien que la relique de saint Sébastien;
mais la plus considérable perte que souffrit
ce monastère (où l'on enseignait autrefois
les sciences) fut celle des manuscrits, qui
furent brûlés, déchirés ou dispersés, dont le
nombre était très-grand : ce qui n'est pas
difficile à concevoir , puisque ses écoles
étaient en si grande recommandation, (lu'il
s'y o-t trouvé ius(iu'à cinq mille écoliers, 1 1
r,ue chacun d'eux donnait par reconnais-
sance deux volumes à la bibliothèque.
A l'abhaye de Fleury ou de Saint- Benoîl-
sur-Loire, nous joindrons celle de Saint-
liéaignede Dijon, et de la flbaise-Dieu. L'on
ne peut guère refuser le tilrede chef d'ordre
à celle de Saint-Bénigne, puisque outre les
jirieurés qui en déiiendaient, saint Guillau-
me, l'un de ses alibés, présidait sur plus de
quarante abbayes qu'il réforma. Saint-Bé-
nigne de Dijon fut fondé au commencement
du sixième siècle par Grégoire, évêque de
Langrcs, qui, ayant trouvé les reli(iues de
ce saint martyr, en fit la translation, et bâtit
autour de son tombeau une église et un mo-
nastère, qu'il dota de son propre bien et ds
quelques terres de son évêclié. Contran, roi
de Bourgogne, en augmenta consi lérablement
les revenus. Ce prince, ayant fondé l'abbiye
de Saint-Marcel près de Cliâlons, voulut que
celle abbaye et celle de Saint-Bénigne fussent
associées à celle de Saint-Maurice d'Agaune,
dont il voulut qu'elles gardassent les cou-
tumes, tant à l'égard de la psalmodie conti-
nuelle qu'à l'égard des autres observances.
Les moines de Saint-Bénigne tombèrent
dans la suite comme les autres dans le relâ-
chement. A peine dès le neuvième siècle y
restait-il encore quelques traces des obser-
vances régulières qu'on y avait autrefois ad-
mirées. Ils avaient même honte de porter le
nom de moines, et se faisaient ap;)eler clercs,
par un espril de vanité. Herlogaud, (jui en
était abbé, y rétablit pourtant avec beaucoup
de peine la discipline régulière l'an 819, et
fit réparer l'église ; mais sous le règne do
Charles le Chauve, roi de France, ce mo-
nastère se trouvait encore eu si mauvais
ordre, que le grand nombre de religieux qui
y était autrefois était presque réduit à dix,
qui vivaient dans uu étrange dérèglement.
Lsaac, évêque de Langres, le répara une se-
conde fois, et y fit venir des religieux plus
rén-uliers el plus exemplaires, auxquels il
permit d'élire un abbé, conformément à la
règle de Saint-Benoît. Le relâchement s'y
étmt glissé encore dans la suite, Bruno,
évêque de l.angres, n'oublia rien pour faire
rctourn r les religieux dans leur premier
287 l»ICTIONN.\mr, DES OUDRES UELICIEUX. 288
iHal; mais ses elTorls ayanl élé inutiles, il Hrioud.-, dont il fut clore et onsuile chanol-
s-,-..lre^sa à saint M;.veui: nl.L.'- de CIuhv. .im. ..e ; m.M.s voulant renoncer eniuVemenl
iMant en re tenij.s-là le r.->lanrateur .le la n.ond.- il se mil en clirmin p„„r aller ,.„
>ie monasliMue, lui ac.orda douze religie.iY mon.-.ster.Mie Lluny . dans le dessein d y prrn-
,1'un.' (:-.tiinrnie niélé iM.ur re.nellre la n^^-n- dre I l.iibil ; mais sçs ami< et ses domrMiquçs
larilé et le Imn ordro dans elle maison. Us ayant appris son départ, coururent après Im
iirrivèr.-ni ;i Saini-lteiii^Mie le -i.'i novembre et le r.inienèrenl : ce qui lui donna tant de
de l'an 'IK'J iimiurl comme on célébrait la cliajjrin, q .'il en tomba malade, .\yant re-
file de I I I ranslaiion de ce s.iiiit martyr, ils couvre la saule, il .illa à Home, et à son re-
iissisliVcnl a»ec une piété édKianle à l'ollire tour, voulant exécuter le dessein qu'il avait
jc maiiius. Les .inciens reli^'ieux aimèrent toujours cons('r\é de -e retirer, s'élanl asso-
mieux .ihaudoiiner le monastère <iue de se lié deux jeunes KeiHilsIioinmes , ils allèrent
s, uimrtlre aux observances régulières; ceux dans une solitude, et sarrèièrcnl .luprès
de Cluiiy s'y lireiil admirer jiar la sainicléde d'une église à demi-ruince. Ils oblinrenl ce
ieiir vie; Cl celle abbaye, quiavail été désho- li'U de deux clianoims du l'uy en Vélay ,
iiorée par la corruption des mœurs de ceux aux.juels il appartenait, le delrichèrenl et
nui V demeuraient, devint une école de vertu y b.ilireiit de petiles cabanes. Hubert eiicou-
p.ir'la sa-e conduilc de ceux qui y claieut rageait ses deux disciples, et, tandis qu'ils
iiouTellement venus. Irawiillaient de Icuis mains pour avoir do
Saint .Ma>eul y nomma pour abbé saint qi'oi subsister, il s'ai pliquail à la leclure et
(inillanme, ("ijamais celte abbaye ne fut [)lus à l> prière pour avoir de qui^i les inslrnire,
noris^anle que sous son {.'ouvernemenl. Sa Us avaient néanmoins les heures marquées,
repulalion se répandit de tous côtés. Henri, lanl de j )ur que de nuil, pour faire leurs
roi de liour'îi'pne, lui donna la ronduile de prières en commun dans un oratoire. Les
l'abbaye de'SaiiU-Vincent de \ergi, où il ré- babilants îles eiiv irons, s'opposant à leur des-
lablit en peu de lenips la vie ré|»iilière. au-si sein, les incommodaient beaucoup et les
bien qu'a Itèze, à Itéomai, à Saint-.Micbel de chargeaie'it même d'injures ei de menaces :
Tonnerre, à .Molome et dans plusieurs au- >"ais la palience et la charilé de Robert et
Ires monuslères qui le demandéreni pour de ses compagnons adoucirent lelleinenl ces
supérieur; comme ceux de Fecaitip, de Saint- esprits farouches, qu'il y en eut iilusieurs
tJerm.in-des-l'rés à Paris, de Sainl-.Wnoul qui >e joignirent à eux. Leur nombre s'ang-
de Metz, de Sainl-I'iivic de l'oul, de (iorze, menlani, l'observance régulière se pratiquait
du Monl-Saiiil-.Michel. de .luMiié-e.deSainl- avec plus de ler»eiir : en soite que ce lieu
t)uen, de liernav, et plusieurs autres, qu'il acquit en peu de temps beaucoup de répuia-
reforma pareillement, se trouvant en ii.éinc ''O". etqu il i'allnly bàlir un m.inastère. Les
temps supérieur de plus de quarante mo- fondements en furent jetés l'an 10'i();illut
iiaslères, entre lesquels fut aussi celui de promptement aibe\6 par les libéralités de
l'ructuaro en Piémont, qui avait été bâti par plusieurs personnes qui y contribuèrent. L'an
ses pi,r. nts sur leur terre, ce saint étant K'J-, le bienheureux Itobert le lit ériger en
oiimiiairede ce pays. Il est même surpre- abliaje, et il en fut le premier abbé. Cette ab-
iiant qu'il ait eu un si grand nombre de dis- baye devint en peu de temps si rccomman-
'à trois
cin-
II cl 111 IJU II un lu Ull 31 ^lUIllI iH-»IIIUIt VH_ UIJ -"■.'- • ^-- l — ^ .....(,.. .. ...^.r...
ii,.les pour envoyer en tant de monastères, dable, qu'il eut sous sa conduite jusqu'à
voulant «lU'il y en eût toujours dans celui eents religieux; et il répara environ ^...
de Dijon plus de (jualrc-vingis. Celle abbaye «luanle églises abandonnées depuis long-
eul encore besoin de rérurme dans la suite ; temps. Ce monastère, qu'on nommait dès lors
mais à présent que les licnédiclins de la la Chaise-Dieu, en latin Tava Z>fi, c'est-à-dire
congrégation de Siint-Maur la possèdent la maison de Dieu, devint dans la suite chef
depuis l'an 1651, l'on y voit revivre le véri- d'ordre et une congrégation de plusieurs
table esprit de saint ISenoit, aussi bien que monastères qui en dépendaient, d'où sorli-
' — ' ' ,-..':. ,-_■ -Af A... renl plusieurs personnages illustres. Robert
mouriil l'an lUli", et il est honoré comme
dans les autres maisons qu'ils ont rélormées,
du nombre desquelles sont celles de Fleury,
de Saint-Renoît-sur-Loire, dont nous avons
i-devant [larlé, et la Cliaisc-Uieu, dont nous
■ ■•lyuiiii liiti A\/vji,ui II i;ai iiv'iiiiii; ,v»niiiit
saint. liiilre les prieurés qui dépendaient de
te monastère, il y eu avait quehiues-uns en
allons rap()ortcr l'origine. lispagne, donl celui de Saint-Jean de Rurgos,
Celte abbaye, qui a été encore regardée qui lut érige en abbaye, est encore à présent
comme chef d'ordre, eut pour fondateur le un des plus considérables de la congrégation
bienheureux Robert, chanoine de Saint- Ju- de \'alladoli:l, à laquelle il a élé uni, comme
liendc linoude,
ilui ciuii lu iin:iiiv;uuill v;iuil aiiiii n; un.ii"'vu ■.•v,...v»i. • ■ htuil *_i\^ ivii— ivu.x ,»» iti vjii*»..-^
reux Gcraul, comte d'Aurillac. Sa mère. Dieu; il avait toujours conservé beaucoup
éiaiit grosse de lui, ri se trouvant pressée d'alTection pour cette maison, où il avait fait
des douleurs de renfantiiiient, le mit au profession, et il voulut même y être enterré,
inonde dans une solitude, comme par un II fui inhumé au milieu du choeur de l'église,
présage que celui qu'elle venait de mettre au dans un supei be mausolée ; mais les lieiéli-
iiiomle dey, lit un jour ai.iier la soliluile. Il quus, environ l'an I5<i.t, étant emrés dans
lut élève dans l'cg ise de S.nul-Julicii de cette église, où ils coinmirent beaucoup d'un-
9S9
FOI
FOI
2')0
piélés, la ruinArent enlièremcnt cl pillèrent
il' nionasièie, où los Béiié iir lins Uéforinés
de la coiif^régation de Saint-Maur fureiil in-
tioiluits l'an JGW.
Voyez Joanii. à Bosco, Bihliolh. Flnria-
cen. BuKeiiu, llisl. de l'Ordre de Saint-fle-
nnit. Joan. Mabillon, Annal, liénéd. et Act.
SS. Fleury, llist. ecdés. loin, XII; et Yepez,
Chronique rjénérate de V ordre de Sain t-Benoil .
FLOUE (CoxGRÉGATiov de). Voyez Ber-
NABD (Congrégation nu Saint-).
FOI DK JKSUS-CHBIST,i)E LA PAIX, !T
DE L4 FOI, EN France (Ciievalikrs de la).
Nous joindrons ensemble les chevaliers de
la Foi de Jésus-Christ en France et en Italie ,
dont on ne connaît point l'origine. Il y a
bien de l'apparence néanmoins que les uns
el Icj autres ont pris naissance? dans !e temps
des croisades que l'on entreprit contre les
Albigeois. Ceu\ de France nous auraient été
inconnus si nous n'avioiis trouvé dans le
neuvième volume des manusciils de M. Du-
cbêne le père, qui sont à la bibliiUhùque du
roi, des letlrcs du P. Savary , grand maître
de l'ordre di- la Foi de Jésus-Christ, en date
du 5 février 1220, par les(|uelles il s'engage
avec Ii's chevaliers de cet ordre de défendre
la personne et les terres d'Amauri de .Monl-
l'ort, comte de Narbonne et de Toulouse, con-
tre ses ennemis; de faire la guerre aux hé-
ri'tiques et à ceux qui se révollcraient contre
rKglise romaine; et au cas que quelques per-
sonnes, soit calholiques ou autres, fissent la
guerre à ce conile , de lui donner retraite
dans leurs châteaux el sur leurs terres; de
ne favoriser en aucune maiii'rc ses ennemis,
et de ne recevoir aucune leriC (jui pourrait
relever de ce prince sans sa permission, ex-
cepté les aumônes que l'Eglise leur pourrait
accoider. Voici la leneur de ces lettres.
F. P. Savaricus humilis et pauper mngister
militiœ ordinis Fidei Jesu Chrisli tinivcrsis
hominibus ad quns prœsentes litlerœ pervene-
rint, scdutem in Domino. Noverit universilas
vesira quod concilio el assensu fralrum no-
slrorum, nos et omnes fraires noslri concessi-
nius domino Amalrico Oei providunlia duci
Naibonœ, comiti Tolosœ el Leycesiriœ, Mon-
tisfortis domino, el omnibus heredibus suis ,
succursum el adjuvamen noslrum ad defenien-
dum et observandum corpus suum et terram
suam pro posse nosti o, bona fide, et ad gui-
rendum el deslruendum rebelles; el si forte
aliquœ génies, sive sint Christianœ vel aliœ,
contra dominum comilem yuerram aul bel-
lum promoverint, nos ipsum in negoliis suis,
in castris,et villisnosirisfirmilerreciperemus,
et contra ipsum juvamen vel auxilium, aut
consilium alicui personœ nullo modo prœsta-
remus el de cœlero suam terram vel feoda sua
non possumus sumere ahsque sui licentia,
exceptis lielemosinis rationabilibus quns san-
cta Ecclesia concedere el donare poleril.
Qund ut firmum sit et stabile, sigilli noslri
munimine lias lilleras corroboramus anno
M. ce. XX. incarnaliijnis Uomini, nonis Fe-
bruarii. M. Ducbéne, qui a transcrit lui-
iiiôfiie ces lettres sur lorit^inal, dit qu'elles
sont scellées d'un sr-eau de cire jaune où esl
représenté un homme à cheval, lenaul à
la main un écussoa dans lequel il y a une
croix.
Il se peut faire que cet ordre fut uni q:irl
ques années ajirès à un autre ordre sous !c
nom de la Paix, qui fui institué l'an 1229 par
Améneus, archevêque d'Auch , l'évèque de
Goniinge, les autres prélats et seigneurs
de (iascogne, pour réprimer les violences des
brig:;nils nommés roît/fers, les entreprises de;
Albigeois, el ceux qui retenaient les biens
ecclésiasiiqu's. Cet ordre fut aussi nommé
l'ordre delà Fui et de la P(nx,el fui confirmé
par le pipe Grégoire IX l'an 1230. Il subsista
jusqu'en l'an 1261, (jue tiuillaume de Marra,
qui en éiait grand maître, et un autre reli-
gieux de cet ordre, lo voyant réduit à un pe-
tit nombre, et qu'il n'y avait pas d'apparence
de le reformer , passèrent à l'ordri; de Cî-
teaux , firent les vœux dans l'abbaye de
Fc uillaus , et en vertu du pouvoir que le
grand maître avait reçu des autres cheva-
liers, ils consentirent qun la terre de Ko(|ue-
Koquelle , qui appartenait à l'ordre de la
Paix , fût unie à l'abbaye de Feuillans.
FOI Di': JESUS-CHllIS T. et de la CROIX
DE SAINT PII-BRE MARTYR (Chevaliers
de La).
Nous apprenons par le livre qui a pour ti-
tre : Scudo inespugnabile de Cavaglieri di sanla
fedc, délia Croce di san Pielro Martyre, com-
posé par le P. Jean-Marie Cannepano de l'or-
dre de Saint-Dominique, el imprimé à Milan
l'an 1579, qu'il y a eu dans les diocises de
Milan, d'Ivrc' et de Verceil, des personnes
qui prenaient la qualité de chevaliers de la
Foi et de la Croix de saint Pierre martyr.
Mais ce n'était apparemment qu une asso-
ciation de personnes dévoles de l'un et de
l'autre sexe, qui en recevant une croix fai-
saient vœu de porter celle croix en l'hon-
neur de Notre-Seigneur Jé>us-Christ pour
l'exaltation de la foi catholique et la destru-
ction des hérétiques, qui s'engageaient d'ex-
poser leur vie et leurs biens pour la défense
de la même foi, lorsqu'ils en étaient requis,
et d'obéir à l'inquisiteur et à ses vicaires en
tout ce qui concernait l'inquisition, tomme
il esl marqué dans la formule de ce vœu
qu'ils prononçaient en ces termes : Ego fa-
cio votum Vej, B. Mariœ, et B. Petro mar~
tyri, accipicndi el porlandi crucem ad hono-
remJesa (Jhrisli Domini noslri, fidei calholicw
exaltationem , et liœreticorum eorumque fau-
lorum exterminium in tota diacesi Mediola-
nensi; el promitto exponere subslaniiam meo'H
temporalem et vilam propriam pro fidei dcfen-
sione, cum opus fuerit, el fuero requisilus; et
quod ero obediens H. P.inquisilori et sueces-
soribus vel vicariix suis in omnibus quœ per-
tinent ad officium inquisitionis. Ceux d'Ivrée
et de Verceil promeltaienl la même chose
pour ces diocèses.
Le P. Cannepano rapporte les statuts de
ces prétendus chevaliers avec les indulgences
et les privilèges qu'il dit leur avoir été ac-
cordés iiar les souverains pontifes. Mais,
ÎOI
DiCTlONNAinE DF.S ORDUF.S P.RLIf.IELX.
t)(i.)
coiiinir parmi les bulles qu'il ciio il y on a
qucliH;os-uncs qui oui clé .locordécs on f.i-
\iMir (lo roux qui se croisaient pour les guer-
res dos Allii^'cois, ol qui ne f Mil iiulliiniMil
inonlion de ces chevaliers, il y .1 bien de Tap-
parence que dans ce l»iiips-là c \'C préloii-
iluc chevalerie clai'. inconnue. C'est ce qui
m'a obligé d'écrire à .Milan pour en avoir
une connaissance plus parliiulièrc ; et la rc-
I oiise que j'en ai reçue l'an Itl-i esl qu'il y
a dans le .>!ilanais une comp geieile f;enlils-
homnics qui sont uflicicrsde riiiqui>ili()n, cl
qui faisaient aulnfois le >(L'U que iiiuis avons
r.ipporlé ; mais présenlcni nt ils no font plus
qu'un scrnieiil de servir l'inquisiti n.cl de l'a-
ve: tir de ce qu'ils sauront lui éire projiuliiia-
b!e.()n n'a poml de cunn^iissance ((u'ils aient
jamais porte de croi\ sur leurs habits, l'ré-
seiitemciil lorsqu'ils :irrélcnt ou conduisent
un prisonnier par otdre de rinquisiliiin, ils
en poitent une ccarlclée de noir ei de blanc,
et selon le dessin que l'on m'en a envoyé,
elle esl à huit pointes comme celle des che-
valiers de Malle, et non p.is lleurdcliséc,
Comme est ordinairement la croix de l'in-
quisilion. Ainsi ces prétendus chevaliers dont
il est parlé dans le lure du P. Caunopano,
que l'on me marque avoir été défendu p;'.r
l'inquisilion , qu liqu'écril en sa fa\eur . ne
sont que des ofliciers de ci tic même inquisi-
tion, semblables à ceux que l'on iiummc en
Kspagnc/'ajdi/ieci, parmi lesqui'ls il se trouve
des seigneurs des plus qualilics du rO}aume,
qui se (ont honneur d'être du nombre de ces
officiers, et dont la fonction est aussi J'ar-
réier Is prisonniers par ordre de l'inqui-
sition.
FOLKîNI CoNGRÉtiATiON i>e). Vuijez Unsu-
LINES.
FONTAINE-JAILUSS.^N'rE (Chanoines de
LA CONGRÉGATION DE La).
Voici encore une congrégation de chanoi-
nes qui a pris son origine des clcr.s de la
\'ie commuiif, institués par tiérard Grool.
^ous avons dit que ces clercs avaient des
maisons à Munsier, à Cologne et à Wesel.
Ces trois maisons s'unirent ensemble, et,
voulant vivre à la manicie des chanoines,
ils foi nièrent une congrégation qui fut ap-
prouvée l'an i îilJ'J par le piipe liugène IV, cl
à laquelle ce poiilili- dinna le nom de con-
};ri galion des chanoim^s de la Foiilaine-Jail-
lissanle. Ce fut à I i prière d'un saint prêtre
nomme Henri de lliiys, qui avait non-seule-
ment fondé Cil i'rlï la maison des cleics de
la \ ie comiiiune dans la ville de Munsier,
in.'iis était encore entré parmi eux. Après sa
iiiiirt, qui arriva peu de liin[is après l'crec-
t on de celte congrégation , ces chanoines
assciiililércnl leur premier i hapilro général
à Munsier, dans lequel ils drcsséri-nl les
consiitutions pour l'observance régulière en
vertu du pouvoir que le pape Eugène leur
en avait dunné par sa bulle.
Tous les ans ils ilevaieiil tenir ce chapitre
Kèiièr il dans la maison de .Munsier le dunaii-
rlie Juhilalr. Les prévols ou recteuis des
uiaisuiik de .Munster, de (Pologne et de We-
sel, devaient s'y trouver .nver quatre chanoi-
nes députe^ parleurs communautés, les pré-
vôts ou recteurs des autres maisons unies à
ces lroi<, chacun seulement avec un cha-
noine ; les recteurs des aulrcs maisons qui
n'é aient pis de la cong'ègation si ces rec-
teurs on avaient été tirés , et les confesseurs
des reliizieuses qui étaient aussi membres
de la iné ne congrégation.
Ils rcicv ienl trois sories de personnes :
desfrèr. s perpétuels, des chanoines et des
donicsliques. ('eux ((ui devaient être frères
perpétuids claienl reçus de celte manière.
Le supérieur les taisait venir en ch;ipitie, et,
après les avoir instruis des observants de
la congrégation cl des raisons qui pourraient
les obligera élre chassés, il leur disait qu'ils
ne devaient plus rien avoir en propre, cl
qu'ainsi ils devai' ni fiiire cession par-dcvani
notaire ou donation cnlrc-vifs à la ni lison,
de tous II s biens qu'ils possédaieni, soil par
hérilage, soit de leur iravail, ou parquel-
qu'autre voie que ce fût; cl que qii.iiul ils
sortiraient de leur bon gré, ou (ju'il y aurait
d. 'S raisons de lesrtnvoyer, ils ne |iourraienl
rien répéter de ce ((u'ils auraient donné;
mais qui s seraient obligés d'iiitrer dans
une religion approivée par l'Iîglise, et c'est
ce qu'ils promenaient en ces termes : Eijo
fratir N. promillo jidelitatem dumui iiostiœ
N. cl iiuxilianle Deo, castum, c^ncordem, et
coiinminnn vilain serundum slatula capitiili
generiilis, deinccps obscnabj; et, si conlige-
ril quacunqite occasione me de hac dntno re~
cedere (vt fr-ii-ulum prœilicln erpil'i, p cfice
recedam nihil repetendo, et ex tune oblignium
me faciii ad intraiidam relirjionem upproba'i.nx
ubi regulariter vivilur, sic me Dcus luljuvel
cl liœc sancln EraïKjclia. Ceux qui claienl re-
çus pour chaiiDines promcttaienl fidélité au
chapitre général d'obéir à toutes sis ordon-
nances l.int qu'ils seraient meni'.ircs de la
congrcgaiiop , et d'en garJer le secrel aussi
bien que du chapitre local. Voici la formule
de leur promesse. Ego [rater A', canonicus
ccclesiœ N. promillo bona fide, locojurdincnii
cl viyorc ejus, fidclitalrm gencrnli copitulo,
rjusquc ordinntiunU/us, cl slnlutis faciis cl fn
ciendis obedientiam t/uandiu cjii.i tnembniin
fuero, cl scci cta rjiisdtin capiluli generalis tl
parliciilaris celabo ad quemcumiin' flaluiu
pcrvcncro, kiIvu niliilaminus promissiour pri-
(lem pcr me facUt in sito robore et VKjore. On
élisait dans le chapitre général d' u\ chanoi-
nes pour visiteurs des maisons de la congré-
g iliiin.
Voyez Aubcrt le Mire, licgul. et Constitut.
clericA.r. in communi vivenlium.
FONTE-AVLLLVNK ou FC^M'-AVELLANK,
présrulcmrnl tmie à l'ordre dis Camatduli s
(Co.NGBÉiiATION Di;).
Morigia cl Maurolie, parlant de la congrc-
galion lie Fonle-Avellaiie ou F'ont-Avell.me.
di>eiil que son fonda'eiir fui le bienheureux
Liiilolplio, linminn fort nijonné ?i la rnnieni-
plalii)n,inii,avaiit soufrert une gr.imle pcrsT'-
lulinn (l'un sei^;iu'iir li'Onilirio, se relira dans
les Ajieiiniiis entre les monts Carrio et Cor-
S9S
FON
FON
201
vo, où il mena ure vie solitaim ; et qu';iynnl
eu m peu de temps dos disciples qui youki-
reut imiter sa manière de vie, il b;ilil au
même lieu un monaslcie qui fui dédié ;iu
Sauveur du monde, sousle li(re de laSainte-
Croix ; mais qu'après sa mo' t ses disciples
ét.int lombes dans le relâcliemcnt , s;iinl
Pierre Damien, qui étail muiiiede l'abliaye
de Classe de l'ordre des CamaUlules, vint à
Font-Avellane cinquante ans après la fonda-
lion de ce monastère ; que non -seulement il
le réf.irma et y rétablit les observances qui y
é aient prati lUées du temps du bienheureux
Liidolphe, mais qu il obligea ces ermites à
euibrasser la règle deSainl-Uenoîl.
Mais il paraîtque ces auteurs se sont trom-
pés en cela aussi bien qu'on beaucoup d'au-
tres choses; car saint Pierre Damien n'a
point été religieux de l'abbaye de Classe,
puisqu'elle n'était point de l'ordre des Ca-
malilu'es pour lors, et qu'elle ne fut unie à
cet ordre que l'an 1138, comme nous avons
dit à l'article Camaldules. Ce fut dans le mo-
nastère même de Fonl-A'. ellane que s.iiiit
Pierre Damien prit l'habit monastique, vers
l'an lOiO, où les religieux de ce monastère,
qui avait élé fondé il y avait cnviiou qua-
rante et un ans, étaient encore dans leur
ferveur, comme nous allons le montrer. C'est
pourquoi nous pouvons dire avec raison que
saint Pierre Damien n'a point élé le réfor-
mateur de cet ordre, mais seulement le pro-
pagaleur.
Je ne suis pas surpris que le P. Grandi ail
fail u;:e dissertation pour prouver que le
bienheureux Pieire Damien a été Camaldule,
puisque disputer ce saint à cet ordre, c'est
lui enlever un de ses p'us be:iiix orncmenls,
cl lui dérober la gloire du monastère de
Font-Avellane d'où est sorti Pierre Damien
avec les autres cardinaux, pus de quarante
prèl ils et autanl de saints et de bienli -ureiix.
Mais il fallait que le P. Grandi donnât de
bonncsr;iisons pour c'ii.vaiiicre ses lerlcurs :
car de dire que Fonl-Avel aae a été de l'or-
dre des Camaldules à cause que son fonda-
teur Luilolphe a été disciple de saint Uo-
iiiuald , et que l'on pratiquait à Fo:.t-Avel-
laiie à peu près les mêmes observances qu'à
Camalduli, celte raison n'esl pas suflîsanlc,
puisque saint Jean Gualberl élablil aussi à
\ allombreuse les mêmes observances qu'il
avait vuesel q.i'il avail pratiquées lui-même
dans le temps qu'il demeurait à Camaldoli;
qu'il forma le monastère de Vallombreuse
sur li; plan de celui de Camaldoli; que les
cellules y étaient séparées les unes des <iu-
Ires, sans qu'on puisse dire cependant qu'il
fût de l'ordre des Camaldules. Il senilile que
le P. Grandi n'ail différé la mort de saint
llomuald jusqu'en l'an 1037 que pour donner
à connaître que ce saint avait instruit lui-
même saint Jean Gualberl des devoirs de la
vie érémilique lorsqu'il demeurait à Camal-
doli ; cependant le P. Grandi ne dit point
que Vallombreuse ait élé de l'ordre des Ca-
maldules; mais, comme les religieux de Val-
lombreuse auraient pu avec justice lui dis-
(tutcr celte alliance, il a seulement attaqué
les religieux de l'ordre de Fonl-.\vtllane,
(]ui ne pi'uv ni plus défendre leur cause,
ayant été supprimes depuis environ cent
cinquante ans ; cl il les a incorporés dans
son ordre dès le commeiicement de leui in-
stitution, quoique le monastère d.' Font-
Avellane et quelques autres de sa dépen-
dance n'aient été unis à l'ordre des Camal-
dules que l'an ISG'J, comme nous dirons ci-
après.
Nous reconnaissons doncl'ordre de Font-
Avellane comme un ordre distinct et séparé
de celui des CamaMules. Les rondements en
furent jetés dans le monastère de Foiil-Avel-
lanc vers l'an 1 iOi) par le bienheureux Lu-
dolpbe, qui fut dans la suite évêque d'Eugu-
bio. Il est situé dans un lieu solitaire de
1 Ombrie au diocèse de Faeiiza, enire les
monts Calrio et Corno. Ludolphc y cul d'a-
bord plusieurs disciples, avec lesquels il vi-
vait en anachorète. Ils ilemeuraienl dans des
ct'llules séparées les unes des autres, occu-
pés coniiouelleinenl à la psalmodie , à l'orai-
son et à la lecture. Ils vivaient de pain et
d'eau quatre jours de la semaine. Lo mardi
et le jeudi ils mangeaient un peu de légu-
mes qu'ils faisaient cuire eux-mêmes dans
leurs cellules, où ils avaient aussi des ba-
lances pour peser leur pain, ne le pren ml
<iue par mesure les jours de jeûne, ils n'a-
vaient du vin que pour le sacrifice de la
messe ou pour les malades. Ils observaient
trois carêmes, savoir de la Uésuireclion, de
la Nativité de Notre-Seigneur et de saint
Jean-Baptiste. Pendant ce dernier, qui du-
rait depuis l'octave de la Pen'.ecô'e jusqu'à
la Saiiil-Jean, on leur donnait, le mardi
après none, une portion de quelques légu-
mes. Ils mangeaient deux fois le jour le jeudi,
aussi bien que le mardi après la fêle de
saint Jean-Baplisle. Depuis le 13 septembre
jusqu'à Pâques ils jeûnaient tous les jours,
excepté l'octave de Noël ; lous les dimanches,
de l'année on leur donnait deux porlionii,
excepté les diman'hes des carêmes de Pâ-
ques et de Noël, qu'on ne leur en donnait
qu'une ; et aux fêles de saint André, de saint
lienol( et de l'Annonciation de Notre-Dame,
ils ne jeûnaient pas dans toute la perfection.
(Us appelaient jeûner parfaitement, lorsqu'ils
ne prenaient que du pain, de l'eau et du sel.)
Us marcliaienl toujours nu-pieds, prenaient
la discipline, faisaient des génuflexions, se
frappaient la poitrine, demiuraienl les bras
étendus, chacun selon ses forces et sa dévo-
tion, et après l'oflice de la nuit ils disaient
tous le psautier avant le jour.
Telles étaient les obsersances régulières
qui se pratiquaient dans ce monastère , lors-
que saint Pierre Damien y prit l'habit mo-
nastique. 11 avait entendu parler de la fer-
veur de ces ermites; el comme il songeait à
quitter le siècle, il en rencontra deux. S'é-
tant ouvert à eux, ils le fortiiièrcnl dans
son dessein; et comme il témoigna vouloir so
retirer avec eux, ils lui promirent que leur
abbé le recevrait. Il leur offrit un vase d'ar-
gent pour porter à leur abbé; mais ils lo
remercièrent et ne voulurent pas le recevoir,
o;,:; DICTlONNAini: OES OUDar-SRRLIGIELX. 206
SUIS pr^'exlo «lu'il le<: omh.iirnsserait dans nppris relie pratique de sainl Dominiqiif;.
le cli.'Miiii 11 fut fort c.lilie di- Unir dcsinif- J'uii de ses disriplcs, qui fui suriioniiué
rcs-iomcMil cl se reiidilqiioiqup (cmiis .iprôs riinruirnssé, ;i cause d'une cuir.isse qu'il
à l-oui- Vv'ell.inc, cù on lui donii;! Thabil poriail C'.>nlinuellciMcnl sur son corps. Ccl
niiHiislique Sou'supéneur lui donna le soin hoinuie, .ijaul su que sainl l'ierre Daniicn
do faire .!e< e\liorlaliou'i aux frères, cl sa avait écrit de lui qu'il avait récite un jour
rrput.ilion venant à se répandre, (".ui, abbé neuf psautiers avec la disciiiline, en fui
do l'oinposieiMLS de Ferrare, pria l'abbe de lui-niéme eiouné, et voulut en fiire enorc
Konl-\»ellane (\c le lui envoyer pour ius- l'expérience, lise dépouilla donc un iner-
Iruirequelquctcnipssacoiiinuiuauléquiéiait crcdi, cl ayant pris des >er^'es à ses deux
de ceni moines, l'ierre Damien y demeura mains, il ne cessa toute la nuit d'en réciter
deux ans. cl son aldié, l'ay.iul rajipelé, l'en- en se frapi aiil : en sorte que le lendemain il
vo\a quelque temps après faire les mêmes avait d;l douze psautiers el plus. Quelquesau-
fonctioiis au monastère de Saint-Vincenl nées avant sa mirl, il redoulila encore ses
près de l'ierre-Pei luse. Eulin l'abbe le dé- au>^térilés, et ayant trouvé que les lanières
Clara son successeur, du coiisenleinenl de ses de cuir étaient jiius rudes (lue les verges, il
relif;icu\. Ayant pris le gouvernement de s'acouluina à s'en ser\ ir. Il |)orlail toujours
cette coMgrégalion après la morl de l'abbé, avec lui, quand il sortait, un fouei de lanièr. s
il l'auguienla de cinq autres monasiércs, pour se donner la discipline, et se conlen-
qu'il fo'iula, un au diocèse de C/imerino, deux lait même de repasser dans son esprit les
au diocèse de Faenza, un au diocèse de Hi- paroles des psaumes sans les prononcer,
mini, et l'autre proche recouse, on il fil afin de se donner un plus grand nombre de
pratiquer les mêmes observances qu'à Font- coups. Sainl Dominique el saiiil Pierre D.i-
AvcUane. Nous avons dit qu'ils n'avaient du mienne furent pas ncanmoins les auteurs
vin que pour le sacrifice de la messe ; mais de ces séries de flagellations volontaires.
Pierre Uamicn leur permit d'en boire un Gui, abbé de l'omposie, morl en 10V6. el
peu hors les carêmes de l'àques, de la Nati- saint l'oppon, abbé de Slavolo, mort en 10'i8,
vile et de sainl Jean-ltaptisle, où il n'était les avaient mises en pratique avant eux;el
pas permis aux inoim s, ni même aux laï- avant eux Uéginon (1), abhé de Pruin , qui
ques. de boire du vin ni de manuerdii pois- vivait au commenccmeni du dixième siècle,
son. Mais il semble qu'il ne leur permit de avait ordonné de se Irapp r jusqu'à faire des
boire du vin ijue pour avoir plus de force plaies sur son corps pour ac(iuilter lespéni-
à soutenir les di>cipiiiies rigoureuses aux- lenccs.
quelles il b s obligea, le plus souvent pour Cette manière de déchirer sou corps ne
aequitier les péiiilciic s des autres. Car on plut pas à tout le monde, il y en eut qui
était alors persuadé que pour chaque péché condamnèrent la disci|,line volontaire, coin -
on était obligé d accomplir la pénilenic inar- me une nouveauté contraire aux canons,
quee par les canons : en sorte que s'il y avait Pierre Cérébrose cl le cirdinal lilienne, qui
di\ ans pour l'homicide, celui qui en avait avait élé religieux du mont Cassin, furent
commis vingt , devait deux cents ans de pé- en cela les plus grands adversaires de l'ierre
iiilenie; el, comm:; il était impossible de Damien. Le premier ne condamuail pas tout
r.icquit'.er, on avait trouvé des moyens de à fa.t I usage de la discipline, m.iis il regar-
la racheter en accoinplissanl. par exemple, dail comme une folie ces longues fiagella-
ceiit ans de pénitence par vingt psautiers ac- lions; il ne désapprouvait pas non plus que
compagnes de discipline. Trois mille coups l'on récitât un psaujne en sedonuint la disci-
ile discipline valaient un an de pénitence, et plinc, mais il regardait comme quelque
mille coups se donnaient pendant dix psau- chose d'excessif de la prendrQ pendant loul
nies: par conséquent les cent <inquante psau- un psautier. Pour le cardinal lilienne, il
mes valaient cinq ans de |i6iiilence. Sainl croyaii qu'il fallait plulcit macérer son corps
l'ierre Damien leur fa sait souvent faire de par le jeune, el soutenait qu'il n'était pas
ces pénitences pour les autres, cl même honnête de se dépouiller tout nu en pré-
(pielquidois pour les péchés qu'ils avaient seiice d'une communauté. Pierre Uaniieii
commis élanl laïi|ues, ne croyant pas que écrivit contre ceux qui blâmaient ces sortes
. pour les péchés <|u'ils avaient commis il.ins de llagidlations ; mais enfin convaincu, soit
le monde, iU en fussent quittes [tour prati- par les objections de ses adversaires, soit
quir la lommune observance delà règle; par sa propre expérience, qu'il y a\ail de
mais ([u'ils devaient y ajouter des pénitences l'excès dans ces mortifications, il y apporta
proportionnées à h urs péchés. Ils étaient ou- un températnenl , et, écrivant aux religieux
Ire cela obligés par la règle, lorsqu'un reli- de sa congrégation, il leur dit (]ue celle fia-
gieux était mort, de prendre sept disciplines geilalion, sur laquelle ils insistaient si » ive-
ile ni lie coups chacune, de jeûner sept jours, ment, pouvait ''trc; utile, lorsqu'on s'en s<'r-
dediie trente psautiers, et de célébrer trente vail avec modération ; mais qu'en la pous-
iiiesses : et si un novice mourait sans avoir sanl si loin, elle peut être imliscrète, puis-
accompli la pénitence, ils devaii'iil |iarlager qu'elle alTaiblit le corps, le reduilen l.ingiieur,
entre eux ce qui restait pour l'accomplir. elle met souvent hors d'élal de satisfiire
(>es sortes de disciplines étaient lorl en aux autres exercices de la religion, s en
u>age dans ce lem|is-là. P. erre Dimien avait irouvani parmi eux qui prenaient la disci-
(IJ Kcgilio, hb. Il, (.ip. i.i cl seqneiil.
Î97
FON
roN
ÎS^
piine pcnilant un p ailier cnlior, et mi^'me
[ieiidaiil deux psautiers, jusqu'à s'incommo-
lier coiisidérablcmenl, c( se rendre efTeriivo-
inenl malades, et que cela détournail mémo
ceux qui avaieril envie de venir dans leurs
ermilJigi'S. C'est pourquoi il ordonne qic
personne ne sera conlrainl à se donner voi-
inémo la discipline, mais que (eus qui au-
ront assez lie ferveur pour se la donner, l.i
pourront prendre en récilanl seulement qua-
rante psaumes pour chaque discipline, sans
qu'ils puissent passer ce nombre, sinon pen-
dant les dcus carêmes de la Nativité et de la
Uésurreclion de Notre - Seigneur , auquel
temps il leur serait permis de prendre la dis-
cipline pendant soixante psaumes. Nous ne
retranchons pas, dit-il, par ce moyen ce
quiestbun, mais seulement ce qui paraît
excessif.
L'éclat de sa sainteté et de sa doctrine le
fit créer cardinal et évêque d'Oslie par le
pape Etienne IX, en 105'7. On cul à la véiiié
de la peine à lui f.iire accepter cette dignité,
et le pape fut obligé d'employer toute son
iiulorllé pour l'y engager. Il s'y soumit ce-
pendant p ir une pure obéissante ; mais,
entraîné toujours par l'amour de la solitude,
il se retira ()uel(]ucs temps après dans sou
ermitage de Font-Avellanc; où étant arrivé,
il alla premièrement au chapitre, où il s'ac-
<;usa lui-même de ses fautes, et pour les es-
pi(r il demanda qu'on le frappât de coups de
fouet. Il se renferma dans une cellule, où il
affligea cruellement son corps par des jeûnes
et des llagellations fréquentes, se conicnlant
d'eau et d'un peu de pain de son pour sa
nourr.ture. Ses disciples l'ayant prié de cor-
riger ce qu'il y avait do défectueux dans
leurs observances, il retrancha les bonnets
ou chapeaux, dont ils se couvraient la tête,
comme peu conformes à la simplicité et à la
modestie religieuse, et leur ordonna de se
contenter de capuces, qui élaient en usage
parmi les religieux ; de quitter les éloiïcs qui
venaient des pays étrangers, et de ne se
servirque de celles qucporiaienlles paysans.
Il écrivit encore plusieuis ouvrages dans la
solitude, d'où il eut ordre de sortir une se-
conde fois pour terminer des affaires pres-
santes; et revenant d'un voyage qu'il avait
fait à Uome, il mourut à Faénza l'an 1072.
Nous ne savons point si les religieux de
l'ordre de Font - Avellane se maintinrent
longtemps dans ia ferveur et l'observance de
leur institut; mais 11 est certain que dans le
XVI" siècle ils vivaient avec beaucoup de li-
cence, qu'ils ne faisaient plus mémo de pro-
fession religieuse, qu'ils viv.iient plutôt en
séculiers qu'en religieux et en solitaires. Ils
avaient quille l'habit mona^tiq^le, qui é ait
Hel que vous le voyez représenté dans la
première figure (1), et ne portaient plus
qu'une espèce de soulanclle blanche, qui ne
tioscendait qu'aux genoux, avec un manteau
bleu, un bonnet carré blanc au lieu de cap,
comme il est représenté dans la seconde li-
gure (2). Le pape Pic V ayant donné l'ab-
(I) Voy.,k la fin du vol., n* 62.
Dictionnaire des Ordiies religieux. II.
baye de Fonl-A vell.me en commcnde au car»
dinal Jules de la Uovère, frère du duc d'Ur*
bin, ce cardinal voulut y rélablii- la discipline
monastique. Il y Qt venir pour cela l'an 1570
des moines cnmaldules de la congrégation
de Saint-Michel de Murano. Dieu toucha
leurs cœurs, et la plupart des religieux do
Font-Avellane prirent l'habit de cet ordre,
et en firent profession entre les mains du
Père doin Pierre B.ilneoli de Bagnacavalli,
qui en fut élu abbé régulier; et depuis ce
temps les religieux camuldules ont toujours
possédé ce monastère.
Voyez la Vie de Pierre Damien, écrite par
Jean, son disciple; ejtisdem Pétri iJamiun.
Optiscul. 14 et 15, et lib. vi, epist. .33; Joan.
Mabillon, Acla SS. ord. S. Bened. sœcul. vi ;
ejtisd. Annal. Benedict. lom. \V ; et Fleury,
Hist. eccl. lom. XII cl XIII; Morigia, Ilist.
di tulle le reliqioni, cnp. 58 ; Silvestr. Mau-
rolic, Mar. Océan, di lutte le Relig., lib. ii,
pag. 158; Sehoonebeck, Ilist. des Ordr. re-
lig. ; (îuido Grandis, Dissert. Camaldul., dis-
seri. 4.
FONTEVUAULT (Ordru de).
§ 1". De l'ordre de Fontevrault, avec la
vie du B. Boberl d'Arbrissel, fondateur de
cet ordre.
L'on regarde l'ordre de Fontevrault comme
une singularité dans l'Fglise, et on est sur»
pris d'y voir une abbesse commander égale-
ment à des hommes et à des filles sur les-
quelsellea toute autorité; mais pour répon-
dre à ceux qui sont étonnés du procédé de
leur fondateur, d'avoir ainsi renversé en
apparence l'ordre de la nalure en rendant
sujets ceux qui devraient commander, et
maîtresses cellesqui devraient obéir, il suffit
(sans vouloir ap|irofondir dans les raisons
qu'il en a eues) de leur dire que s'ils veulent
chercher dans l'histoire, i's trouveront de quoi
faire cesser ou au moins diminuer de beau-
coup leur élonnrment ; car (sans parler de
Judith, ( ntre les mains de la(|uelleDieu avait
mis le salut de son peuple , et d'une puccllc
d'Orléans, à qui la France est redevable d'ê-
tre préseniement l'Etal le plus florissant
qu'il y ait en Europe, et cela par la soumis-
sion aveugle tant de son prince que de tous
ses peuples, qui s'abandonnèrent cntièrc-
mentà sa conduite) ilsy trouveront beaucoup
d'établissements semblables àcelui deFontc-
vraull. Car, dans l'ordre de Sainte-Brigillc,
princesse de Suède, dont nous avons déjà
parlé, les hommes qui demeurent dans les
monastères doubles sont sous robé:ssance
des abbesses de ces mêmes monastères, ex-
cepté qu'ils sont soumis également, commb
les religieuses, auxévêques dans les diocè-
ses desquels ils sont clublis, comme je l'ai
déjà dit en parlant de cet ordre. Dans l'ab-
baye de Sainl-Sulpice en lireta^ne, le bien-
heureux Uaoul y établit un institut sembla lila
à celui de Fontevrault, imitant en cela plu-
sieurs autres instituteurs qui longtemps
(2; Voy., iliid., n" 63.
10
O'IO niCTIONNAIRi; DF.S OIUiP.F.S nF.LlGIF.l X. 3M
.nvani lui nvniftul donné la nicmo jiirilliflion rili- sur Ir? l'r. rps Hoppilalicrs tîe nurRO<:,
•i des inoii.isl.rcs de fill.'s. Lc9 ri-li-iou\ de pI il y a ou d.- pareils oxcmplos en \n<^\r-
l'oiilcvraiili, pour jiislincr Ipnr iiislilii!, i.np- Icrro. Ain>i ré'finnomcnl don ccssor a l'.>-
porlenl les cvempics de p'iisicurs mon: su- gard ai Tordre do Fonlevr;iiilt, qui ne di.K
^rcs doubles dins lesiuils ils disent que les pis être regardé comme une singularité dans
I religieux élaieiil soumis aux religienves. cl l'Iv^li^c, cl'c espèce de gouveniemenl ayiiil
ils cilciil plus pnrlieulièremcnl celui deSmi- é'é d ailleurs approuvée par un grand noai-
' pegliaiu. Mais je croirais leur faire tort si b:c de souvcrai is poniifos.
i'éablissais mes preuves de réquilé de leur Cet orlreciil pour fond i leur le bie^ilieu-
inslilut sur leur aulori é ; puisque ni dans renx Ilobc: t d'Arbrissel. sur la fiu du on-
Ic niouaslère de Siniprgh un, ni dans les nu- zième siècle. Il niquil de parents pauvres
très, les religieuses n'ont jamais eu aucii e »ers l'anlO'ioou 10i7, dans un >i;iage di;
juridiction sur les religieux, excepté celui liretagnc nommé alors Arbrissel, dont il
de Saint-Sulpice, qu'ils citent avec justice, prit le nom, el qui s'apaelîe à présent Albrc-
p is(]uc, comme je l'ai déjà dit, l'institiil de sec, an diocèse de Hennés, près delà fiiiicr-
cetlc abbaveélait semidable à celui de Fonte- cbe. Son père. Damai nque, qui embrassa
\rault. Le I'. Lubineiu n'a pas mieux ren- dans la -uile l'état ecclésiastique, et sa mère,
rontré lorsque, dans son Misoiri! de lîre- Orvende, qui étaient gens de bien el crai-
lagnc. pariant de l'alibayc d.' Loc Mari,-, qui gnanl I) eu, l'é'.e^èrent dans la piélé, jusqu'à
avait été fondée avant l'ordre de Fontevianll ce qu'étant en âge d étudier, ils lui permi-
par Alain Cagnaril, i ointe de Coinoiiaille. renl d'aller cherch<'r des maîtres où il vou-
dont 11 (ille Hudierne fut cbbesse, et i;ui drail, d ns l'cspéianco que Dieu n • l'ahan-
etai! gou\crnce au ddiors par un abbéet des donueiait point. Fn cffrt, il trouva nioyen
moines, il dit qu'ils él lient soumis aux ab- de vivre et d'étuiiii-r dans quelques \illes de
I esses parce qu i s I ur rendaient co note du iîrelagne, sans être à cbargc à ses parents :
revenu qui apprlenail à I abbaye, à laquelie ce qui lui doana courage de venir à Paris,
S" faisaiinl les dcna'.ions, cl qu'ainsi c'était i.ù il fil tant de progrès dans les éludes,
un inslilnl semblable à celui dj Fonievraull. qu'après s'ôirc distingue en pliilo>opliie et
(]c qui n'est ]ias une eonséquence fort jisic: eu théologie, de pauvre écolier, il fui un
ci\- par la même raison on pourrait dire ci Kbrc docteur en l'université de cette capi-
quc les liénédictins de sa con;;régation qui taie de France, on il leeut le bonnet, après
sont à CluUes sanl soumis à l'abbesso de ce avoir passé par lous les degrés el les cliar-
monaslcre, parce qu'ils lui rendent com|ile ges de ci lie célèbre aradcm;e.
des revenus de l'abbaye dont ils ont la di- En ce temps-là. S. Ivestre de la Gnierclie,
l'i'Ction ; ce qui n'étant pas vrai dans ci u\. qui avait été marié, et clait pour lors chan-
ri, penl aussi élrc laux d,in> les auSres. celier de (Zonon il, duc de Bretagne, fut
.\insi cette preuve de la conformité de l'i;is- placé sur le siège épiscopal de Kennes; cl
lilul de Loc .Maria avec celui de Fonle>rauIt \oulanl se décharger du soin de son évcclié
cl de Saint-Sulpicc, bien loin d'en couvain- sur un ecclcsiasii.iue de gran 1 mérite, il jela
cre, n'est pa; n:éme suffisante pour en f ir- les yeux sur U .berl, qu'il fil son grand vi-
iiier le moindre doute. Ce qui serait le plus caire, lui donnant un pouvoir absolu dans
capable de la lairc croire, c'est la réunio i sou diOcèse. Il s'en servit pour y rétablir la
qui fui faite quelques années après de cette discipline ecclésiasliiiue, y bannir les vices,
abbave de Loc ALiria avec etlle de Saint- laellre la paix où il y avait des dissensiois,
Siilpiie à I ause de cette même ronformité. retirer les biens ecclcsiasliques d'entre les
Ce (|ui est de plus particulier dans l'ordre mains des personnes laï \ues, abolir l'infà.ne
de Fonlevraull, c'est que ses monastères commerce de simonie, qui cliit piibli -, el
sontcxcmpls de la juridiction des ordinaires, rompre les mariages inrestueii\ qui se Irou-
el que toute l'autorité réside dans la personne valent entre les lai(]nes, el les concubinages
derabhessedunionastércdcFonlevraull.com- sc.indaleux de la plupart des prêtres,
me gcnéraleet chef del'ordre; maissi l'on veut Son évéque l'appuyait dans de si pénibles
ciaininer ics chus, s sans prcviMilion, il n'y travaux, < l, par son crédit el son autorité, il
a pas plus d'inconvénient qu'une abbcssc le niellai! à couvert des ailaiiucs des mé-
ail une égale aulorilé sur les religieuses cl chants; mais ce prélat étant mort quatre ans
les religieux de son ordre, que d'avoir une après, lloberl, privé de son proli cteur, s>!
juridiction presque épiscopalr dans plusieurs vil à la meici des ennemis que son zèle lui
lieux, comme l'abbessc de .Montivilliors en avait suscités : c'e^l jiourquoi, alin d'em-
Normanclie, qui est dame et paltonne de pécher i' scandale qui pouvait arriver à
rpiinzc paroisses, qui rcssortisscnt de sa ju- son occasion, il quitta la lîretagne, el vint
ridiction, qu'elle fait exercer par son grand dans la ville d'Angers, où il cnsrigna quel-
vicaire cl ollii'ial , qu'elle élililit île son (jue lemjis la thécdogie. .Mais voulant se c 'ii-
aulorité, il qu'elle révoque quand bon lui sacrer entièrement à Dieu, il [irit la résolii-
senible, cl doni les curés sont obligés de rc- lion d'aliaiidonner le monde pour se retirer
cevoir les approbations et les mnndeincnls, dans une solitude.
aussi bien que les Capucins d'IIarlleur, qui 11 i)uitia doue la ville d'.Vngers, et alla se
est un lieu île sa dcpentl.ince. L'abbessc de c.ichera\ecun compagnon dans la forél de
Conversano en Italie a une pan ille jinidic- Craon en .\njou , vers les fionlières du
lion d.ins II terre de Casicilana. L'abbesse NLiiiie. La vie qu il mena dans celle solilu le
'c las Uucigas ca li!sj;agne exerce un;' au o- fut tout ;\ fait admirable : il ne vivait que
301 FON Fi>N 502
d'heiiios ot li^' r.Tc liOi saiivag.s, cf, pour sainte : co qui fil iiîi'i! se ilémil do sa non-
quelque nécessilé que ce lïit, il ne mangeait vello abbaye <lo la Hoë outre les mains ifii
jamais de viautle et ne buvait jamais de \ in. l'évèque d'Anp;rrs , dans le dincùse diKjuel
il ne portail pas, connue les autres soiilai- elle se (ronvail. Il pourvut à si-s crmitap;i's
res, une luniqui^ de peaux de cli; vros et de la furèi de Craon, et, ayant pris avec lui
d'agneaux, tniiis la sienne étiil lissue do quelques-uns de ses disciples, il ronin\cnça
poil de porc, afin de loiirmcnlcr davanlaje à prèclicr non-sculemoni dans lr>s villes, ukts
son corps. La icrre nue lui servait de lit, el encore diiis les bouri;s et les villages I' s
il ri'y prenait nièaie du repos qu,; lorsqu'il plus pelits, un nouveau baptcme de pcni-
élail arcalilé de souiineil. tenre, qui. en excitant les uns à sacrifier leur
Une \ie.si exiraoidiuaire fit du bruit dans vie pour la conquèle des lieux arroses du
le voisinage. Quoiqu'il eût pris soin de se sang de Jéuis-Cliris!, en?agei't les autres,
cailicr dans celle l'orèt, oa y accourut de qui n'ctaieni pas lapablcs d'un si généreuit
toutes paris pour voir ce nouveau prodifie, dessein, de tout jibaudonner pour le suivre
et la pénilence qu'il prêcha, comme un autre el servir Dieu sous sa ccnduilc. Le nombre
,Ieau-liaptisl", à ceuM qui étaient venus pour de ces derniers fui si grand, que sa cliarilé
le voir, lit une impression si forlc sur leurs ne lui pcrmeltant pas de les renvoyer, il
eprils, que la plupart renoncèrent aux dés- leur chercha uu lieu de retraite où ils pus-
ordres de leur vie passée et se rangèrent sent travailler à leur salut.
sous sa discipline, de sorte que la forêl l'e Sur les confins do i'Anjou et du Poitou, <à
Craon l'ut bientôt i-emplic d'anachorètes. Le nue petite lieue de la ville de Camies, célè-
nombre même eu devint si grand, ((ue Ko- bre par le décès de saint Mailin.il y a de
bcrt fut obligé de les disperser dans les fo- vastes cimpagnes qui étaient .alors toutes
rêls voisines, comme celles de Nid-de-Merlc, couvertes d'épines cl de bui sons, cl ([u'un
de Fougères, de S ivigny, de Com ize et de vallon arrosé d'un pclil ruisseau séparait eu
Mayenne. Ne pouvant plus veiller seul sur un deux parties. Ce lieu, qui s'appelait Fon'e-
si grand nombre de solilaircs, il les séjj.ira en i;r«i(/;, lui p.irut propre à sou dessein. Ce
trois colonies, dont il eu retint luic pour lui, fut l'an 109J que Hobe.t commença à y bâtir
et donna les deux autres à deux de ses dis- quelques cellules ou cabanes , seuleaienl
ciples, qu'il reconnut pour les plus paifaiis. pour mettre à couvert ses disciples des i:i-
L'un fut le bienbcurcux Vital de Mortain, jures du temps. Mais, pour éviter le scandale
(jui l'ut depuis l'inslituteur de l'ordre de Sa- qui pouv.iil arriver de la confusion des doux
vigny, qui pritce nom de l'abbaye dcSavigny sexes, il les sépara djiiis des demeures dif-
en hornjandi', comme nous le dirons ci- férenlcs, ajoutant à celle des femmes une
après, el l'autre fut le bienheureux Raoul de espèce de clôture, qui n'étail qu'un fossé
la Futaye, fondateur de l'abbaje de Saint- revêtu de haies. Il lil dresser doux oratoires,
Bulpice de Hennés en Bretagne. l'un pour les liommes, l'autre poiir les fem-
Le bienheureux Pierre de l'iitoile, et le mes, où chacun allait à son tour faire ses
bienheureux Firmal voulurent aussi de- prières. L'occupation des fournies éiait de
lueurer quoique temps dans la compagnie cbanler conlinuelkmi'nt les louanges de
de ces saints solitaires, el leur exemple fat Dieu; celle des hommes, après leurs e\er-
suivi de plusieurs autres personnes, dont les cices spirituels, était de délricher la terre,
plus célèbres furent les bienheureux Alleau- de travailler de leurs mains à quelques mê-
me, fondateur de l'abbaye d'iistival d isis le tiers pour les besoins de ces esjiècs docom-
iMaine, et le bienheureux Bernard d'Ablie- ir.unaulés. G'étal une dus;' admirable du
ville, fondateur de la congrégation de Ty- voir l'ordre el le règlement qui étaient gar-
ron, dont nous parlerons dans la suite. Tous dés eijtre un si grand nombre de pcrsOiines.
les solitaires qui étaient sous la conduite des La cli rilé, l'union, la mo le lie, et la dou-
bienheureux Koberl, Vital et Raoul, ne vi- ccur s'y observaient inviolablcni nt : i s ne
valent point d'abord en commun, ils demeu- vivaient que de ce que la loire produisait,
raient dans des cellules séparées ; mais Ro- ou des aumônes qu'un leur envoyiiil; ce qui
bert, reconnaissant que plusieurs d'entre lil que le bienheureux Robert leur donna le
eux -étaient [iorlc> pour la Me cénobitique, nom i\e Pauir.'s île Jéstis-Chrisl.
fit bâtir, l'an 1094, un monastère dans la L'exemple de ces nouvc lUX solitaires en
même forêt de Craon, en un lieu appelé la atiira beaucoup d'autres. On voyait des fa-
Roè', du côté do la (Juierclie, et leur donna la miles eniières venir de;riander à vivre sous
règle de Saiat-Augustin. Il lut pendant un la conduite de ce saint fondalour; et il ne
temps leur supérieur, ils n'y vécurentd'abord refusait personne, lorsqu'il reconnais' ait
que d'aumônes, et ne mangeaient que des dans ceux qui s'adressaient à lui i[u'ils
racines; mais après lui cette ma s m, qui étaient attirés pari esprit de Dieu. Il y ad-
p.issait pour la plus pauvre et la pics sain!e mettiiit des gens de tout âge et de toute con-
du royaume, quilla cet esprit de pauvreté et diiion, sans en exclure les invaidcs, les ma-
de mortiiication, et se ren lit eatièremeiit lailes, ni môme les léiircux. t^etie al'iluence
coulornie à celles des Chanoines Réguliers, de tout le monde augme. tint de plus en
dont elle suivait la régie. plus, l'obligea à faire bà ir plusieurs mona-
II lui obligé de les quitler pour aller pré- stères reniermés dans une même clôture. Il
cher la Croisade par ordre du pape Urbain en ordonna irois pour les femmes, l'un pour
11, afin d'exciter les peuples à prendre les les vierges el pour les veuves, qui lut nommé
ariiics ijour le recouvrement de la terre le Gran'l-J\!ou:icr, et dédié en I honneur de
3ii5 DICTIONNAIRE DF.S ORDRCS RRLIGIEUX. W.
In saillie ViiTtic, où il ronrcrrnn trois conls donna tout poiivi.ir d.ins son diocèse, el '
rtliuicu-o-; ; lauli e ilesline pour les lépreu- voynnl les pri>i;rts qu'il faisnil dans les lieiii
^es el les iiilirincs, au noinlue de eenl *insi, où il fiassail, lanl par ses prédirations «jur;
(jui lui appelé de .S'aiiW-Z.'/;arf. • el il milles par d'autres œuvre; de pieté auxquelles il
feuiiiie> péiliercsscs dans le Iroisièine, cl lui s'appliquait sans relâche, il voulut pir re-
donna le nom de la Madeleine. ïas hommes ( oiinaissaucc employer ses sillieltalions au-
eurcîil aussi leur habitation séi)ar6c. leur près du pape P.iseal M pour faire approuver
ayan: lait bâiir un m inastèrc auprès de ce- par ce pontife llnstitul de Fonlevrault. te
liii des relin euses. qu'il dédia à saint Jean qu'il obtint l'an IIOG. Robert retourna à rc
l'i vangélisîe. On liâiit ensuite une grande monastère pour porter à ses filles la bulle
église coinoiune pour les mmalèrcs, la- de ce pape. C^ monaslère, quoique d'une
<|uelle ne lut arluMcc que l'an 1111). Tels grande étendue, ne se trouvant pas siifiisant
forent les roniiinnei'mLMils de la célèbre ab- pour y recevoir toutes les personnes qui se
baye de Fonlevrault, dont les fondements iirésentaient pour prendre l'habit de l'ordie,
furent jetés peu de temps après la célébra- le saint fondateur songea à faire de nouveaux
tion du coiiC le de l'oilieri qui se tint établisscm nl>;. Ooelipics personnes |>ieu^es
lan IICO. lui ay.inl donné la fiirét des Loges el quel-
Jusqu'alors le saint fondateur n'avait ques liérit. g ■« da;:s le diocèse d'Angers, il y
prescrii à sa congrégation aucune formo de lit hâlir un petit couv:'nt, auquel il dunna l-
vie qui lui fût parliculièrc ; mais comme la nom de celle forél ; el comme le revenu qui
( harilé le pressait de sortir du désert pour av;iit été donné pour c(^l éiablissemeul ne
i.ller préi lier, il voulut, avant (juc de partir. sulfi<.,il pys pour entretenir les lilics qu'il y
déclarer l'esp: il de son Institut, qu'il avait renlVrm.i, il ordonna que le monastère de
ii.is sous la pro'.ecli in pariiculière de la Fonteviault doniierail tous les ans quc!(|iic
sainte Verge el de saint Jean l'èvangéFste, aumône à celle petite maison. Elanl aile
\oulanl que la rei omnianila'ion que Jésus- préther dans la Touraine. on lui procura un
Clui^t nuiuranl (il de 1 un à l'autre fût le autre monastère dans un l.cu appelé t'hau-
ii.odèle de Li relation qu'il élablissait entre fournoia, el prés nteiiuMit Cli :nstc)iois , 1 1
les bomiius et les femmes de sa eongiéga- on lui en offrit un autre à Uelay dans la
tion, il que le respect <iue les hommes (rc- mènie province. Fiant n tourne dans le l'oi-
présentanl saint Jean) purleraieiit à la supé- lo;i, Pierre, évéque de Poitiers, lui donna
rieure gêné: aie des femmes (qui lepiéscntait un lieudésirt noinmé la Puy, où il bâtit un
la sainte N'icrgi ) fût accomp.gné d'une sou- monastère, qui devint si ronsidérable par les
iiii.-si ai réelle à son autorité, la dé.larant doualions qu'on y lit, (ju'il se trouva en e al
leur supérieure, lanl pour le spirituel que d'y loger plus de cent religieuses. Cetiiî
pour le iemporil. La piemièrc à (jui il confia m.iison ne l'ut pas sitôt comincucce, que lo
la conduite de ce nouveau peuple choisi fut bruit s'en élinl réi)and;i au\ e.iviroas, l'on
Ucr'anilc de Ch;.mpagiie, proche p.ircnlc du convia le saint d'en venir établir deux au res
Lomte d'.^njou, vcove du seigneur de Monso- dans le même diocèse, l'uue dans la forél
rcaii. Il lui donna pour assisiantc el coadju- de liiron!e, qui s'ajipelie aujouid" hui l'/in-
tricc Péliouille lie ciao:>, (eu\cdu baron de cloître, cl qui fui londee par le vicomle do
Chemillé. Il con'.iuua ensuite ses missions ChàlelUraui, l'auln' dans une soltude écar-
evangéliqucs, y ay.nl associé ses anciens lée qu'on nomme G li su-, à deux lieues do
dsciples. Vital de .Mortain, llaoul de la Fu- Loudun. Ajaiit quitté le Poitou, il passa dans
i.iye, tl lîernaid dAbbcville, qu'il avait le IJerri, ou il reçut le m mas ère d'Orsaii,
l,.i>sés dans l'ermitage de la foi et de Craon ; que lui procura l'arch vOq le de Ho irges. Il
et après que les uns et les autres tur. ni ga- en fonda encore deux autres dans l'evécho
gué Lc.ucoup d'ùmcs à Dieu el rassemblé de Poitiers, l'un d.ins les Lindes de la (Jar-
plusieurs disciples, ils les menèrent dans ce nache, dont ce monastère a pris le nom de
même désert de Cranu. Comme ils avaient la Lande, et l'autre dans la lorét de l uç >n ;
èg.ilcmenl employé leurs soins |)our leur con- el l'évèque d'OrkMus Jean II l'aj.in! fan ve-
veisiun, "Is les p.irlagèrcnt ensemble. U ibeil nir dans son diocèse, lui procura le mo-
d'.Vrbiissel , qui était reconnu comiiie le nastère de la .Madeleine d'tjileans, qui fut
nidilrc cl le chef de tous, cl.oisil isne partie bâti dans une solitude agréable sur la riviè.e
.:e cet c sai.^le troupe (ju'il einuicna à Fou- de Loire.
tevr.;uli. Haoul île la Fut.iye en (irit une .Mais, pendant que Dieu répandait si abon-
aulre, qu'il conduisit en a loi et de Nid-iic- dammcat ses béneilictions sur ses travaux.
Merle ; le reste suivit \ Il I dans la foiéi de il penint qu'il fût humilié par des calomnies
Sa\ igny . Quaiil à llcrnarJ, l'ordre qu'il rc.;ul atroces que ses ennemis in\ enlôrenl, el auv-
de l'eveque de Poitiers dailer au secours (les quelles .Marbodius , evéi|iic de Ueiines, el
religieux de Saini-Cjpricn, pour une allaire ijcolïroi, abbe de N eiidùme, ajouiùreiit loi
qu'i. s avaient a»ec ceusL (!c Claiiy, lui lit rc- trop aise nunt. Le premier lui écrivit une
lariler r>.talilisseiiicut de sa congrégation do leliie pleine d'aigiear el de reproches, dau»
i'yron. la'juelie il lui di>ail ()u'il avait quitté lonlr -
Uoberl, après avoir fait quel.\ue séjour des lihanoiiHS Réguliers pour courir apr-.
d .ut le mona:>tère de Fon evrault, alla dans des le>i mes, lui rc, rocbanl toinmc une mai-
le i'oiluu pour y ronllnuer ses missions. ijuc de rinconliuence de ceux de sa suite, les
l'ierre, evéque de Poil ers, qui cuunaissa l accouclienii iit> de quebiuei lemines, les cns
kuu lué.ile, te fiçu' co.! me un .ij)' Ire : il lui des enf mis uoaveau-ncj, et le repreiianlde
505 FUN
re qu'il donnait l'iiabil rcli;;ioii\ à tons ceux
qui le demandaient, sans les cproiiver, ne se
souciant pas qu'ils lussent bien couverlis,
pourvu que le nombre de ses disciples
augmentât ; et qu'après qu'ils avaient donne
leur nom, il n'en avait point de soin, el les
laissait agir comme ils voulaient. Geoffroi de
Vendôme lui écrivit que l'on disait de lui une
rliose dans le monde qui ne lui faisiiil pas
honneur, e» dont il devait proinptcinenl se
corriger si elle était vraie : savoir, qu'il avait
une si grande familiariié avec, les l'cmiiies,
qu'il leur permettait de demeurer avec lui,
((u'il avait avec ellrs des entretiens secrets,
el qu'il n'avait pas mèii:e de honte de cou-
cher avec elles, sous prétex'e de se niorti-
lier en souffrant les aiguillons de la chair :
ce qui était un nouveau genre de martyre
inouï, très-dangereux el de mauvais exem-
ple. A la vérité ces iellres sont regardées p r
quelques-uns comme des ouvrages supposés.
Le P. Maiiifermc, religieux de son ordre,
dans le Douclier de l'ordre de Fontcvrault,
les rejelle toutes les deux. Un d ■ ses con-
frères, dans une dissertation qu'il fit impri-
mer à Anvers en 1701, reconnail pour véii-
t ible celle de Geoffroi ; mais BoUaiidiis la re-
jelle. Le P. Sirmond l'admet, aussi bien que
le 1'. Alexandre, qui rejelle celle de Marbo-
dius. Mais, quand elles seraient vérilable-
ment de Marbodius et de Geoffroi, cela ne
délruil pas la sainteté du bienheureux lîo-
beit d'Arbrissel; elles font seulement con-
naître que Marbodius et Geoffroi ont cru
trop aisément les ennemis de ce saint fon-
dateur; Geoffroi reconnut dans la siiite la
f.iussolé de celte calomnie, et devint ami de
iSoberl el de l'abbaye de Fonlevraull. Il y ûl
de grandes fondations, el, afin de n'y cire
pas à chaige dans les fréquentes visites qu'il
y faisait, il y fil (à ce que l'on dit) bâtir une
maison pour lui, que l'on a depuis appelée
l'Hôtel de Vendôme.
Après tous les établissements que ce ser-
viteur de Dieu avait faits, il crut qu'il était
néci ssairo d'en demander la conDrmaiion au
saint-siège, et de faire exempter labbaye de
Fonlevraull de la juridiction de l'évêque :
le qu'il obtint par une bulle de l'an 1113
adressée aux religieuses de Fonlevraull,
qu'il avait portées à en faire la demande au
pape. Continuant ses missions apostoliciues
dans le Limousin, il y fit deux nouveaux
établissements, l'un nommé Boubou, l'autre
le Prieuré de la Gusconicre. Ayant passé du
Limousin dans le Périgord, il fonda le cju-
venl de Cadouin, qu'il céda dans la suite au
bienheureux Giraud de Sales. Enfin le der-
nier établissement qu'il fit, el l'un des plus
célèbres de son ordre, fut celui de Haute-
Uruyère, à huit lieues de Paris, au diocèse
de Chartres, qui lui fut donné par Berlrade
de Monlfort, femme de Fouhiues le Uechin,
comie d'Anjou. Le roi l'hilippe I" ayant
scandaleusement épousé celle femme, du vi-
vant même de son mari, elle fui enfin con-
vertie par les exhortations de Robert, et, se
croyant obligée à réparer le scandale qu'elle
0) Yotf., à la lia du vul., ii" Oi.
KON
5(i()
avait donné, elle se retira dans ce temple
qu'elle avait présenté au Sciyneur, où ayant
non-seulement pris l'habit de Fonlevraull,
mais encore toutes les auslcrilés de cet or-
dre, qui pour lois était dans toute sa fer-
veur, elle édifia aiilanl l'Kglise par sa vie
pénitente el mortifiée, qu'elle l'avait scanda-
liséi' par sa vie molle el déréglée. Sou pre-
mier soin fut de pourvoir ce nouveau mo-
nastère de tout ce (lui était nécessaire pour
l'enlrelieii des religieuses, afin que la pau-
vreié, (jui est la ruine ordinaire de la régu-
larité, ne les empêchât [las d'offrir à leur
céleste époux des sacrifices de louange, ni
de méditer ses grandeurs pendant tout le
temps de leur vie : c'est pourquoi, craignant
que le revenu (|ui en dépendait ne fût p.is
suffisant pour l'enlretien des religieuses, elle
ajouta à ce don ce (jne le roi lui avait ass -
gué dans l.i Tourainc pour paitie de son
douaire; ce qu'elle fit agréer par ce prince,
(]ui y donna son consenlemcnl.
Robert, après avoir fait tous ces établis-
sements, prévojaut (ju'il n'avait [)lus encore
beaucoup de temps à vivre, voulut achever
le dessein que Dieu lui ;.vait inspiré pour
son institut. Il fit étabi r pour chef et supé-
rieure de son ordre Péli ouille de Craon Gho-
millé, qui est reconnue pour la première
abhesse de Fonlevraull, el dressa les slalu s
de cet ordre, qu'il mil sous la règle de Sainl-
Benoîl. Il ordonn.i l'abstinence continuelle
de la viande, n'en permetlaul pas môme
rus:ige au\ malades. Les religieuses, entre
autres choses, devaient garder le silence en
tout temps, aller toutes ensemble à l'égliso
et en revenir de même. Leurs voiles devaient
toujours cire abaissés el cacher entièrement
leur visage. Elles ne devaient être velues
que de tuniques faites des plus viles étoffes
du pays, de la couleur naturelle de la laine,
sans être tondues (1). Les surplis blancs
leur étaient défendus aus-i bien que les
gants. Une rrligicuse ne pouvait sortir hors
du cloîlre pour quelque ouvrage que ce fût
sans la permission de l'abbesse. (juaud les
prieures allaient dehors, elles ne devaient
mener avec elles aucune religieuse, et elles
devaient être accompagnées pour le moins
d'un rel gieux et d'un séculier ; nulle autre
que l'abbesse ou !a prieure ne pouvaii parler
d.ins le chemin, jusqu'à ce que l'on fût ar-
rivé dans l'hôtellerie. Le dortoir élaii tou-
jours gardé le jour par une converse, et la
nuit par deux ou quatre. Les malades ne
pouvaient recevoir le viatique ni l'cxlrême-
onclion que dans l'église; cl, quand on les
portait en terre, elles devaient être couvert; s
d'un cilice.
Quant aux religieux, ils devaient dire en
commun l'office canoni^il, vivre en commun
sans avoir rien en propre. Ils ne poriaieut
ni uianteaux , ni cliemiscltes noires ; ils
avaient une ceinture de cuir, à laquelle
élaii attaché un ciiuieau de la valeur de deux
deniers, et une gaine de la valeur d'un
denier [i). Ce que l'on desservail de leur
table devait être rendu aux religieuses, pour
(-2) Voij., ibid., 11° tJJ.
Ï07
nicTioNNAinE DES oiinnES religieux.
308
l'irc riisuilc (lislribuc aux pnuvrrs. Toii< les
;liinaiiclies cl fi'lcs ils <lcvaioiil aller à l'Iia-
liit (c'csl ain*i qu'on nnniinc le iiKHiaslèie
«les religieux) pour y cnlemiri' la messe cl
assister au chapitre , d'où ils ne sorlaifiil
i|u'avec la pirniissoii ilii prieur. Ils ne i!e-
\aipiil point rcievoir d'églises paroissiales,
ni leu'Sdimes, ni ilonner leurs hicns à ferme
à des séculiers ; il ne leur é ait pis permis
de recevoir des femmes dans leur monastère
pour y IraTailler ; il leur élail défendu do
faire des serments, desuhir l'examen du feu,
de servir de cautions et d'elle fermiers. Les
provisions de vin, l<' pitisson, l'arj^enl cl 1rs
autres élu ses nécessaires à la vie élaient
entre Us mains de la cellerière, cl distribuées
par l'avis et l'ordre de l'abbcsse ou de la
(.rienre. Les religieux ne piiu\aieul aussi
lecexoir personne à la religion, ce droit ap-
)iarlenai;t à l'abbesse.
Le bienheureux fondateur fut le premier
à se sounu'tire à l'abbesse, et, pour donner
l'exemple à ses re'igi u\, il vceul sous sou
o'iieissance jus.;u'à sa mort, qui arriva le
2:3 février de lan 11 !7. Il était [icur lors
dans son monastère d'(Jrsan, d'oîi son corps
fui porte à Fonlevraul!, avec une poirpe
exlraordiiiaire, par Léuer , arcbevèiiue de
Bourges, qui i'.t son oraison funèbre, et qui
l'ut aceompagiié dans le convoi par l'arehc-
véquc lie Tours, l\vcque d'Angers, le comte
d'Anjou il plusieurs ^eigiicurs de considé-
ra ion ; sou cœur fut seulement laissé à ses
li.les d'Ursan.
§ 2. Du progrès de l'o'die de Foiilcvrault
nprcf lu mui'l du birnl,eurcux Robert, el de
la n' forme de cet ordre.
Le bienheureux Robert d'Arl rissel avait
vu de Son vivant pl'S de trois luillo reli-
f;icuses dans le seul monastère île Fonle-
vraull; mais après sa nort ce nombre aug-
ineiita ; car, au rapport de l'abbé Sucer,
dans une de ses lettres au pape Eugène III,
au sujet de l'évèque de l'oitiers qui inquié-
tait ce monastère, il y avait à Funlevrault
quatre à cinq mille religieuses. Quoiq e ce
t;rand nombre diminuât dans la suie, il ne
laissa pas d'élre encore considérable l'an
1-iVS, que le pape Innocent IX ayant imposé
nu subside de dix livres louiuuis sur celle
maison, aussi bien que sur les béncfices
(I Anjou et de Poitou, pour l'entnlien d'un
e\é'iue de 'l'ibériade, ce mou stère s'en ex-
, cusa sur ce iju'il a>ail sept cents iiersonncj
à nourrir. Ce nombre se Irouva encore ilimi-
r.ué en li'.)7 ; car, sur lis plaintes que le
pape lionilace \ MI avait reeaes qu'on avait
di>si|:é les revenus de l'oiitevrault, le pon-
tife ayant donné commission .'i (lilles, cveque
de Nevi Ts , de régler le nombre des reli-
gieuses de ce monastère, ce pré al en ayant
trouvé trois cent soixante, les réduisit à
trois cents, sans parler du nombre des reli-
gieux tant prêtre» que conver-. Mais celle
• TiU'niiancc de l'évèque de Nevers ne fut
pas a|>paren)iiicnt evéculée, (luisque l'an
IwOO ce monastère ayant encore élé laxé
; ou; k mcmc iul siile , l'abbLiSe alléf^ua
pour cause de son fifus qu'il y avaii dans
son 11 onastère cinq cents religieuses. Ce
n'ctaii pas sen'ement dans le inonastèr.- ilc
Foiiievraull qu'il y avait un si grand nom-
bre de religieuses de cet ordri', car, à Ries-
sac dans le diocèse de Limoges, on y eu a
vu ju-qu'à neu! cents.
Cet ordre acquit une si grande réput.ilion,
que des monavtères entiers de ililTèrents
ordres embrassaient celui de Foiitevraiill ,
comme le [iriruié de Bragerac, pour lors
du diocèse de Toulouse, à présent appel ■ d.;
Sainl-.\ignan il du diocèse de iMuniaiiban,
qui était de la cnngrégalion du bienlieureiix
Ciiraud de Sales, dont le prieur elles rel gieux
se soumirent l'an 1122, avec tous leurs
bien";, à l'ob; issance de l'abbesse PétroniLo
de Chemillé. On demanda de res religieuses
en Fspagne, fù on en mit dans trois nui-
sons. La première so nommait S.sinte-Mario
de la \'éga au diocèse d'Oviédo, la seconde
Noire-Dame de la Véga de la Cérana, au
diocè'-e de Léon, et la troisième le Parameu
au diocèse de Saragosse, et sous le gouver-
neraeut d'Auileburge, troisième al. lies e de
Fontivraull. Henri II, roi d'Angleterre, lit
venir en son royaume des religieuses d.' cet
ordre, l'an 1177, pour rétablir la discipline
régulière dans l'abbaye d'.Xmbresbéri, qu'il
leur donna après eu avoir ôtc les re igieuses
qui y élaient. Eiies eurent encore deux mai-
sons dans le même royaume, l'une à Ktoiiue,
et l'autre à Wes'uod. Cet ordre fil aussi un
grand progrès eu France; car, outre les
maisons fondées du vivi'.nt du saint fonda-
teur, il y en eut encore quatre eu Norman-
die, l'une au diocèse d'Evreux. et les trois
autres dans celui de Rouen ; deux en Picar-
die, le Charme el Slaureaucourt ; trois dans
la lirie et le pays de N'alois, le Long-Pré,
Fontaine el Colinanee ; Foicy, au diocèse de
'J'royes , cl Longui au, au diocèse de Reims ;
Cousanie, dans le pays du Maine; lielloiucrl
el les Epines, au diocèse de Chartres; Sau-
vement, dans celui de Besancon ; Cubes et
Fotitainc:), dans le Périgord ; \'anassel el
T'ons-Clioles, dans le Limousin; el \ air-
ville, dans le Reauvuisis. Enfin il y in eut
un grand nombre dans la îiretagiie, l'Anj lu,
le lierii , l'Auvergne, la Casco.;ne, le Lan-
guciloc. la Guyenne el quelques autres pro-
vinces. La maison des Filles-Dieu à Paris ,
fondée par le roi saint Louis, cl sutfisauinnni
dotée pour rentrelien de deux cents fi. les,
élaiil extrènieiueiil iléehue, el !e nonib e dis
res tilles réduit à deux ou trois seulement,
Charles \ 111, l'an l'iS'l, la donna à l'ordre
de loe.tevrault, qui en prit possession sous
le gouvernement de l'abbesse Anne d'Or-
léans, sœur du roi Louis \ll. Les ordres do
Cluny, de Saint François el un grand nom-
bre de maisons de chanoines léguliers. firent
aussi société avec l'ordi e de Foute\ rault pour
la pai licijiation des prières.
LU grand n, nibre de souverains pontifes
ont accorde des juivilégcs à cet ordre, et oui
témoigné l'estiuie qu'ils en f.isaienl. (^1-
lixte 11, après a> oir consacré la grasule église
ilu mouabtùre de 1 oiitevraull, tonlirma de-
009
voy
r diof ccl ordre et (oulcs !os don.'ilions qui
y avaiciU éié f.iilcs par iiiie htill»' de l'an
1119. On voit par cfUe bulle combien elles
' avaient déjà été aiigincniécs depuis le pape
l'ascalil. L'an 1143, Eugène 111 alTraiicliit
les religieuses et les relifsieux de cet ordre
des épreuves de l'eau bouillante et de l'eau
Iroidè, du fer chaud et des autres (iui ét.iiont
alors en usage, ordonriant qu'ils ne seraient
plus obligés à justifier leurs prétenlions que
par la voie des témoins. Honore III les
exempta de lu juiidiclion des ordinaires ,
i'an 1^24. Clément VI, l'an 1344, constitua
les archevêques de Tours et les abbés de
Marmoulier et de Saint-Cyprien de l'oilicrs,
pour juges cl conservateurs des biens et des
droits de Fonlevrault. Sixte IV, l'un 1483 ,
donna pouvoir à Anne d'Orléans , vingt-
sept ènie abbesse, cl à celles qui lui suceé-
deraienl, de dispenser ses religieux de l'of-
fice canonial et des jeûnes de riîglise, avec
le conseil du médecin et du confesseur.
Quoique le bienheureux Robert eût mis
son ordre sous la règle de Saint-Binoît, les
religieux se qualifièrent néanmoins dans la
suite clianoincs léguliers, cl prirent la règlj
do Saint-Augustin; mais ils îureul derechef
soumis à la règle de S lint-lîenoit par les sta-
tuts de la réforme ([ui lut faite en 1474 par
le zèle de Marie de lirctagne, vingt-sixième
abbesse. Comme cet ordre était tombé dans
un grand relâi henicnt, celle pieuse abbesse
s'adiessi, l'an 145), au pape Pie II, le priant
de reii édicr aux abus (jui s'y claicnt glissés.
Ce poulife députa Guillaunitï t^hariier, cvè-
que de Paris, et les abbés de Cormerie et
d'Airvau, a\cc le doyen de Notre-Dame de
l'ai is , pour réfoniier cet ordre , avec un
plein pouvoir de dresser des consliliit;ons
selon qu'ils jugeraient être plus à propos.
Ces commissa.res visitèrent la maison de
Fonlevrault et celles de sa dcpendanee, el y
firent quelques ordonnances, ils supprimé-
rent même quelques prieurés (jui étaient
trop ruinés , où il n'y avait aucune espé-
rance d'y pouvoir rét;iblir la discipline ré-
gulière, el ils en appliquèrent les revenus à
la mcnse du grand mona-4èrc , à condition
qu'après la mort des religieuses qui y de-
meuraienl, on y enverrait tiuelqucs religieux
pour y célébrer l'oftice divin , iesiiuels reli-
gieux seraient révocables à la volonté de
l'abbesse de Fonlevrault. Mais, comme dans
la plupart des mais mis les lieux et les per-
sonnes n'éiaienl pas pour lors disposés à
reccNoir une entière el parfuile réforme, ils
ne purent remettre l'ordre dans son pre-
mier espril, el ils usèrent de grandes mo.lé-
ralions. Ils permirent même aux religieuses
de sortir de leur clôture avec la seule per-
mission de la prieure, attendu la pauvreté
, où étaient réduits la plupart des monaslèies,
donl les religieuses ne subsistaieal qu'au-
tant qu'elles se procuraient quelque soula-
gement par leurs sorties.
Quelques religieuses ne furent pas conlen-
tes de celle réforme, et, voulant vivre dans
une observance plus exacte, elles engagè-
rent Marie de Drelagne à se retirer au aso-
nr.sière de la Madeleim
510
.^.. _-. près (Î'0rlé;iti3 ,
dans l'c péranre d'y pouvoir plus ; isément
commencer une rciorme plus p.irfaite. Celle
sainie religieu e, qui ne lesj'iiait que le zèle
de la ii;aison de i)i(u, accepta celle proposi-
tion. Elle se relira dans ce monastère, et y
prit loues les mesures nécessaires pour y
établir une réforme fi"ve el stable. Elle c >m-
mença pour cet effet par faire faire un re-
cueil de divers statuts, tirés en [larlie de re
que les visiteurs apos!oli:iues avaient fait,
et en partie des constitutions du bienheu-
reux Robert , comme aussi des règles de
Saint-Augu-iiu et de Saint-Benoît, et pria
des reliyieux des ordres de Sainl-François,
des Chartreux el des Célostins de les nieitre
en ordre, ce qui fut exécuté en fort peu de
temps; mais avant toutes choses elle fit re-
bâtir de nouveau le monastère de la Made-
leine, et le sépara en deux habitations sépa-
rées , l'une pour les filles, l'autre pour les
hommes. Elle y fil ensuite observer les nou-
veaux staluls , et elle s'adressa au pape
Sixte I\', l'an 14'74, pour en «obtenir la coo-
firmaiion. Sa Sainteté dépula les archevê-
ques de Lyon, de îiourgcs cl de Tours, avec
les abbés de Cormerie cl de Saint-Laumcr,
pour les examiner, avec pouvoir d'y chan-
ger ce qu'ils jugeraient à propos. L'archevê-
que de Lyon subdélégna Jean Perlhelot ,
chanoine et diantre de Sainl- Martin (!•>•
Tours. Ces commissaires , après y avoir fait
quelques chaiigeinents, les publièrent, cl Us
furent acceptés le 23 juillet 1475 par les re-
ligieuses et les religieux du monastère de
la Madeleine d'Orléans, qui fut le seul pour
lors qui reçut la réforme. Mais peu de temps
ajirès, ceux de la Chaise-Dieu el de Fontaine
imitèrent celui de la Madeleine, et ces trois
maisons furent les seules qui furent réfor-
mées du vivant de Marie de Bretagne, qui
mourut l'an 1477 , sous le gouvernemenl
d'Anne d'Orléans , qui lui avait succédé à
l'abbaye de Fonlevrault, lorsqu'elle la quitta
pour se retirer au monastère de la Made-
leine. Il y en eut encore quatre qui se sou-
mirent à la réforme , qui furent celles de
l'Encloître en Gironde, de Foicy en Cham-
pagne, des Filles-Dieu de Paris, el de Var-
ville en Beauvoisis. Ce fut pour lors que l'ar-
chevêque de Bourges et quelques autres des
commissaires qui avaient été députés par le
pape Sixte IV pour examiner les statuts de
la rélurme , avec pouvoir d'y retrancher ou
d'y ajouter, comme ils le jugeraient à |)ro-
pos, lis rendirent communs pour tous l"s
couvents réfurméi, par un acte du mois de
janvier 1479.
Renée de Bourbin ayant succédé à ,\nno
d'Orléans l'an 141(1 , un de ses principaux
soins fol de travailler à faire recevoir la ré-
forme dans tout l'ordre, ce qu'elle fit avec
un si grand succès qu'elle introduisit la ré-
forme dans viiîgl-liuit maisons. Elle com-
menta par le monastère de Fonlevrault, (jui
était le chef de l'ordre; mais elle y trouva de
si grands obstacles de la part des religieux
el lies religieuses qui ne voulaient point de
réforme , qu'elle fut obligée de recourir à
3» DICTIO.NNAIUE DES OIU)RES ItELIGlEUX
l'autorité de Louis XII, ((ui la favorisa dans
'<i^
son |noux dessein ; cl l'an loOi elle y lit venir
jiar ordre de ce prince quarante-deux reli-
gieuses réformées qu'elle lira dis nionasUV
res de la Mad.leine d'Orléans, de la Chaise-
Pieu, de Fontaine, de Foicy, de riùicloître
en (lironde, de Varvilie et des Filles-Dieu de
P.iris, tous couvents réformés par Marie de
lirelaune et Anne d'Orléans, et elle envoya
les relifïieuses qui avaient été les plus op-
posées à la réforme en d'autres monastères.
Comme scion les nouveaux statuts il fal-
lait faire vœu de clôture, elle fui la première
à eu donner l'exemple, <e qu'elle fil l'an lo05
entre les mains de Louis de Bourbon, évé-
que d'Avranclies, son frère naturel, in pré-
sence de la reine de France Anne, duchesse
(le Hrelasjne; de Jeanne d'Orléans, duchesse
do Valois ; de Charlotte de Hourhon , com-
tesse de Nevers, sa sœur, et de plusieurs au-
tres princes et princesses. Deux jours après,
les relifîieuses anciennes qui étaient rcsiées
à Foutevrault firent le même vœu de clô-
ture, cl le décret de la rélormc fut univer-
sellement re(,u dans ce monastère, l'an liiOT,
par toutes les religieuses, au nombre de
(|uatrc-vinRt-deux professes et de dix novi-
ces, cl par plusieurs religieux.
Mais ce ne fut p;is sans peine (lu'elle
réussit dans l'établissement de celle réforme
générale, car elle eut à surmonter des tra-
verses que lui suscitèrent les religieux ((ui
.ivaienl déjà reçu la réforme, qui pour leur
intérêt paniculier ne souhaitaient point celle
réforme générale : car il éiait dit par les sta-
tuts de II réforme dressés par les commis-
saires de Sixte l\', que l'abbesse de Foute-
vrault ne jouirai! point de >a juridiction en
tout l'ordre , (jue lorsque la réforme aurait
élé introiluite dans le monastère de Foute-
vrault; c'est pourquoi les religieux réformés,
voyant (juc quand la réforme serait reçue à
l'onlevraull, le pouvoir qui leur avait éle ac-
cordé par prousioii de visiter les couvents
réformés cesserait, Iraversèrent l'abbesse
dans le dessein de la réforme générale, el
n'y consentirent qu'à condiiion qu'elle leur
continuerait la même autorité, la menaçant
de la faire déclarer tiiennalc si elle ne leur
accordait leur demande. Ce fut pour le bien
de la paix cl pour réussir pins aisément dans
son entreprise que celte princesse fil un con-
cordat avec eux , l'an liiO'i, par lequel elle
leur accorda que les religieuses cl les reli-
gieux des couvents réformés viviaii ni selon
liMir manière accoutumée , sans (ju'ellc eût
aucune puiss.inee sur eux , à raison de la
ri forme (ju'elle venait d'établir à Fonle-
vrault, nonulislant ce (|ui était ronlenti dans
SIS statuts au sujet de la juridiction, dont
elle se démellail en leur faveur, el que quant
à la personne do l'.ibhesse, pour savoir par
<|ui, en quel tem|)s et de iiuelle minière elle
serait visilee , quelle serait son aulnrité el
celle des vi5iteur>, el si celbs qui lui succé-
«leraionl seraient | erpetuelles ou pour un
li-nipg , on s'cu rapporterait à des arbitres
qui seraient nommés de pari el d'autre.
Cette princesse ttanl lombcj ma'ade en
150G, on exigea d'elle dans rexircmilc de s.i
maladie une procuration pour terminer ces
différends; cl, p.ir un concordat qui fut
passé en vertu de celle proruration, elle
devint soumise à ses inrericurs, en ce qu'elle
devait être visitée par ses religieux , qui
avaient même le pouvoir de la su'^pen Ire et
de la déposer. Mais étant revenue en sanlé,
elle révoqua celte procuraiion, el poursuivit
avec zèle la réforme. Elle obtint une bulle
de Léon X,qoi l'approuvait et la confirinail
dans son pouvoir, el des lettres patentes du
roi, qui l'autorisait dans son pieux dessein.
Les religieux réformés voulant se préva-
loir du concordai (]ui avait élé signé en verlu
de cette procuraiion qu'elle avait révoi|oèe,
voulurent le faire homologuer au p.irlemeiii
de Paris. Mais les anciens religieux s'y op-
posèrent, comme étant coniraire aux coutu-
mes el à l'esprit de l'ordre. L'abbesse et le
procureur général se joignireiil à eus ; le
procès fui peniiant à la cour depuis l'.ni I.'IOS
jusiju'en l'an l.'ilS , que le roi évoqua l'af-
faire au grand conseil, qui rendit le 18 mars
1520 un arrêt qui cassa le concordat, el or-
donna que l'abbesse scr.ilt |)erpètuel'e cl ne
ser.iil visitée que d'aulorilé apostolique, par
un religieux d'un autre ordre réformé : ce
()ui fui confirmé par le pape Clément \'ll,
l'an 1523.
Kléonore de Bourbon, qui avait été nom-
mée abbcsse de Foiitevraull en 1573, après
avoir gouverné cet ordre avec beaucouji de
conduite cl de prudence pendant près de
Ircnle ans, se voyant dans un âge fort avan-
cé, demanda une co djnlrice au roi Henri IV,
son neveu , pour souti nir avec elle le f.ir-
deau du gouvernemenl de l'ordre el l'aider û
en déraciner quelques abus qui s'y étaient
glissés par le m.ilheur des guerres civiles.
Elle jeta pour cela les yeux sur la Mère An-
loinettc d'Orléans, sa nièce, qui s'ciait re-
tirée au couvent des Feuillantes de Toulouse,
où elle avait pris l'habii, comme mius avons
dit ailleurs. (a-IIc princesse lui fut accordée
pour coadjutrice, cl les bulles en furent ex-
pédiées à Home l'an KîO'i.. La Mère Antoi-
nette d'Orléans necimsentit à aller à Foute-
vrault qu'à condition (lu'elle n'y demeure-
rait qu'un an. cl qu'elle ne quiltcrail point
l'habit de Feuill.inte , en sorte qu il fallut
obtenir un second bref du pape Paul V pour
l'obliger à prendre l'habit de Foutevrault el
1.1 charge de coadjutrice. Llle obéit, sans
perdre pourtant l'espérance de revoir son
couvenl de loulou e. FI e commença l'cxei-
cice de sa charge par bannir de Foutevrault
la propriété de tout ce que posséJaienl les
religieuses, et les obligea , par son cxenulo
et |)ar le pouvoir qui lui avait élé donné par,
l'abbesse , à vivre dans une obser»;iiice|
exacte de leur règle. Flic procura la même
chose dans les autres maisons ; mais, après
1.1 mort de r.ibliesse, sa taule, elle se démit
de s.i coadjolorerie, et olilint du roi la per-
iiiïssii.n p;)iir pioièdir à l'elcclioii d'une
autre abbcsse.
Il y cul encore de grandes conleslationi
dans l'ordre , sous le gouvi i iicmunl de
SJ3 FON
leanne-Baplislc de lîourbon , nu sujol de
quelques maisons que les religieux prclen-
Jiront avoir pour y demeurer seuls el y re-
cevoir les novices. I>ès l'an 1G21 ils sollkilè-
renl i'abbesse Louise de Bourbon Lavedan
lie fil ire revoir la rè^le. Celle princesse de-
manda pour ce sujel des commissaires au
pape tirégoire W , qui nomma pour celle
révision quelques prélats par sa bulle de l'an
1621; mais on inséra dans la règle qui fut
dressée de nouveau lant de choses qui ten-
daient à la ruine 1 1 à la (îestruclion de l'ur-
dre, qu'elle no fut leçue ni par les religieu-
ses , ni par les religieux. Ce qui fil iiue la
chose resla indécise jusqu'après la mort de
ce pontife, que, ceux-ci [ ersislant toujours
dans leur même demande, I'abbesse Louise de
Bourlion Lavedan, et Jeaiine-Baptisie i\'
Bourbon, sa coaiijulrice, lassées de leur im-
porlunité, supplièrenl le pape Urbain Vlll,
qui avait succédé à (itégoiro XV en 1G23, de
vouloir permettre que )is religieux de l'or-
dre s'établissent dans les liois nionaslères
de l'Kncloîire en Ciironde , de la Pu}e et
d'Orsan, et que les religieuses de ce-i trois
monaslères fussent transl'éiées en d'aures
prieurés de l'ordre. Le molif qu'elles su[)po-
sèrenl jiour (iblenii- plus facilement leur dé-
ni iiide lui (juc les relij;ieux, étant obligés par
leur profession de servir les religieuses pour
la direction de leurs consciences, dans la
naissance de l'ordre les monastères étaient
doubles, l'un |iour les tilles, l'autre pour 1 s
religieux , mais que le revenu des maisons
étant diminué, elles n'étaient plus en état
d'enirelenir un si grand nombre de religieux,
quelques-unes même n'en pouvant entrete-
nir qu'un ou deux au plus; qu'il n'y avait
i| l'un seul ciiuvenl de religieux, qui était à
Fonlevrault, où ils vécus eut en coaimun,
et que ce monastère ne pouvait pas non plus
entretenir le nombre de religi.'ux qu'il fau-
drait |iour plus de cinquante moiiaslèies de
filles dont l'ordre é'ait composé : ce ([ui fai-
sait qu'on était obligé d'avoir recours à des
religieux île dilïérenls ordres pour suppléer
au délaul de ceux de Fonlevrault; qu'ainsi,
pour remédier à cet inconvénient el pour
soulager leurs monastères, elles sup[)liaient
Sa Sainteté de vouloir bien permettre qu'el-
les abandonnassent aux religieux trois mai-
sons de celles tjui étaient occupées par des
filles, pour en faire des séminaires d'où l'on
tireraildes personnes capables pour être in-
vojées dans les couvents de l'ordre; el, alin
de rendre la demande plus aisée à obtenir,
on supposa que I'abbesse ne perdrait rien
de sa juridiction, et que ce serait toujours à
elle d'admettre au noviciat les postulants et
de recevoir les novices à la piofession , du
consentement néanmoins du chapitre du
couvent où ils seraient admis. Le pape ac-
corda l'an 1C36 ce (iu'on lui avait dcman é.
Mais, comme ce dessein n'avait qu'une fausse
apparenced'utililé [lour l'ordre, et que dans
le fond il lui était préjudiciable , soil que
I'abbesse ne crût pas ijuo le pape acrerdàl
celte demande, soil qu'elle se repentît après
de l'avoir faite, ce projet ne lu' [las exéculé.
FON
3f4
cl on n'eut aucun é;;ard à la bulle d Ur-
bain VIlL
Louise de Bourbon Lavedan étant morte,
(t Jeanne-Baptiste de Bourbon ayant pris lu
gimvernement de l'ordre, lis religieux re-
nouvelèrent leurs prétentions l'an 1630.
Après bien des poursuites, le roi Louis X!l!
vtulut prendre connaissance de celte affaire.
Sa Majesté nomma des commissaires. On
écri\il de part et d'anlre, cl les religieux fi-
rent imprimer un Factnm injurit us contre
l'ordre, sous le litre de Fartum pour les rr-
l fjieux de Fontevrault louchant les diffé-
rends dudil oriire, qui est encore conservé
dans quelques biblioihè(]ues do Paris; et en-
fin, sur le r apptirt des commissaires, le roi,
l>ar un arrêt du 8 octobre IGil, ordonna que
la rèçle de l'ordre de Fontevraull confirmée
parle | a|)e Sixie IV, ensemble l'arrêldu grand
conseil de lo20 el la bulle de Clément VU
confirniali^c de «et arrêt, seraient gardés et
observés dans tout l'ordre par les religieu-
ses et religieux selon leur l'orme el loueur,
sans que, sous prétexte dos bulles des an-
nées 1621 el 1636, il |.ût éire apporté aucun
ciiangeiiieiit à l'observance de cette règle et
ans prali(|ues cl usages de l'ordre, ni que
les couvents de l'Encloître en Gironde, Cr-
san et la Puye, ou autres, pussent être cha::-
gés en d'aulics usages que ceux de leur
fondation. Sa Majes'é m liiilint I'abbesse,
les prieures el les leligieuses dansions leurs
|)riviléges, et I'abbesse en parliciilicr dans
toute sa juridiclioii el auiorité sur tout l'or-
dre, lant au spiiiluel iju'au temporel, sans
iine les c.nfesseurs el religieux se pussent
ingérer dans l'administration du temporel,
([u'en tant qu'ils y seraient employés par la
itame abbcsse dans son abbaye et dans tout
l'ordre, ou par les prieures dans leurs mo-
naslères; et Sa Majesté ordonna de plus que
le libelle i:npri!né sous le litre de Factuni
serait lacéré par le greffi r de la commis-
.«■ion; (;i!e les pai'oles injurieuses el scanda-
leuses contenues dans les mémoires qui
avaient été donnes seraient bilTées en pré-
sence des protureurs des religieux, qui se-
raient tenus d'en demander pardon à l'ab-
b; sse, et en sa prés nce à toutes les prieures
el religieuses de l'ordre, en piésence dis
(omiiiissaires ou trois d'entre eus , et ce à
la grande grille du couvent des Filles-Dieu
de i'aris, où I'abbesse était pour lors : ce qui
fut exécuié. Ainsi la paix e! la tranquillité
furent rétabli: s dans l'ordre, el I'abbesse fil
imprimer les statuts (|ui avaient été dressés
par les commissaires députés par le pape
Sixte IV pnur la réforme de cet ordre, les-
quels slaluts y sont encore en pratique, (jeux
qui concernent les religieuses eonlieniieiil
soixante-quatorze chapitres, et ceux des re-
ligieux seize.
Ceux des religieuses concernant l'office
divin renvoient, jiour le nnmbie des psaumes
qu'elles doivent dire à mai i nés el aux heures
canoi.iales, selon l'occunenee des fêtes, et,
pour la manière de le célébrer, au bref de
l'ordre; mais ils ordonnent (]ue pendant l'a -
vcul el le eurcme elles diront lievanl matines
niCiiuNNAïuE Di:s orinnKS Ri:LiGitux.
ÎI5
iiuinze psnuines, cl après matines Ic-s jcpl
tsiiiimos péHiltnIiaux avec les lilancs dos
saints, cl do plus en caroiuc, après chaque
liriiro canoiiialo, un psaumo, étant pros or-
iicos ronlrc lorre. Dans 'os nulr. s ternis,
oxcopté le temps pa-eal. ions les vendredis
ri les jiiuis de jeûnes ordonnés par .'l'^glis'-,
. Ilrs eironl (ininze psaumes, à moins qu'il
n'.irrivo ces jours-là une lé e de neuf leeons
ou quelque oelave. Tous les jours rolliie
ili-s morts C colui de la Vierge, c\eoplé les
foies douli'es majeures, el q;ielqnes anlrrs
jours qui leur sont marques, et une fois la
s niainc vêpres et laudes de l'ofliee de Tous
les Saints.
Ivlles se lèveront à n.innil pour dire mati-
nes, feront l'oraison iiienl. le, pardironl le
siloiice aux heures et dans les lieux mar-
<lués.Tous les vendredis, ei! tout tomps, après
matines, s'il n'est pas fête douhie, et loulcs
les vigiles des grands douhle=, si ce n'est un
<!inianehe ou une fcte douille, comme aus-i
les lundi-i et mercredis pendant l'avcnt et le
earéme, et tous les jours depuis le dimanche
dos Hameaux jusqu'à rù<iues, elles rece-
vront la diseipline de la main de la prieure,
(lui la recevra aus^i des mains d'une autre
sœur.
Tous les luuilis et nicrcroiiis, elles s'als-
lieedront de manger de It viande, si ce
n'est dans les maladies, ou par raison d'une
(irandc vieillesse ou jeuncsïo. li les s'en abs-
liendront ausM depuis la iiepliiagésioie jus-
qu'à la (Juinquagésime, (t depuis l'Ascen-
^ion juscjuà la l'enlccôto. r.ussi liien ([ue
pendant l'avenl. Mais depuis la Quinquage-
sinie jusqu'à lài]ues, elles s'alislienilr((iil Ue
loules choses pioven;;nt de l.i chair. Tant
aux jours do jeûm s qu'à ceux qui ne le sont
pas, on leur donnera deux so les tlo viae.des
luilis, et quelqus fru.ts et légumes pour
troisième portion. Une li»re tie pain leur
sullira I oiif chaque jour, dont elles en ré-
serveront le tiers pour leur souper, r'il n'esl
pas jeune, et une cliopinc de vin, étant à !a
iiherlé de la prieure d'augmenier ou dimi-
nuer, selon (lu'elle le juijera à [iropos. Outre
1rs jCÛnes prescrits i ar riii^iise, elles jeû-
I Cl ont encore tous les vcndieilis depuis Pâ-
ques jusqu'à la Nativilé de la sainte \ ierge,
el depuis celle fêle jusqu'au promier novoui-
lire tous les mercredis et vendredis; depuis
le premier novembre jusiju'à Pâques, les
luiolis et mercredis, et tous les jours pen-
dant l'avenl.
(Juanl à leur hnhillement, on leur permet
deux robes hlanclies avce tinc coule n ire,
un surplis sur leur habit Idanc avec une
ceinture de laine noire ou de lil 1). Selon le
temps et les lieux eiles penveni quiller la
coule. (Jn leur (lermol aus>i des clieioises de
(lianvrc ou de lin, dont elles ne doivent se
servir qu'avec la permission de l.i prieure,
nais ordinaiicnn ni elles soC' iil de lilancliel
ou d'éiamine. Llles coucheront »étiies avec
leurs robes blanches cl leurs surplis dans
des draps de serge.
(I) Vvu., àlj fin du vol.,»'" CG clC7.
51ti
Tous les lundi , mercredis cl veiulrodis,
elles s'as>eml)'eront au chapitre, tant pour
y dire leurs conlpes <ine pour les nécessités
du monaslère. I.e ( ha] ilre du vendredi est
principalement élibli pour les coolpes en
p irlii ul er, les reliuieusos disant leurs conl-
pes en général los lundis et mercredis. Le
premier lundi de carême on lient un chapi-
tre pareil à C'ux des vendre lis, cl chaque
oflicièrr, en disant sa coulpe, lenunce à son
office outre les mains de la prieure, qui peut
l'en liéi liarger et le donner à iiiip aulro.
Quant à la manière de faire los visites
dans l'ot ordre, l'arrêt du grand conseil de
l'an i'.'rlO, dont nous avons parlé, el le bref
de Clément \'I1 do l'.irr Wii'i, ordonnèrenl
que le monnslèie de Fonlevrault, les ab-
liosses (qui seraient perpétuelles el non pas
Irieiin lies), les religieuses cl les religieux
qui denieuroiit seulement dans l'onelos de ce
monaslère, seroni » i^ités d'aulorilé aposto-
lique une fois l'an par un religieux d'un au-
tre ordre, qui sera clu pour trois ans seulo-
mcnl, laquelle élection se fera le mardi de la
Pen!ec:ilo, par chaîne mon.istère, qui ajirès
l'oleclion dépuiera un r( ligieux pour la por-
ter à Fonlevrault, où l'abbesse, le sainedi de
l'octave du Sainl-Sacremcnt, sera obligée de
la puhl er à la grande grille du couvent, en
préscce de tous les députés de ces mêmes
monastères, en choisissant pour visihur ce-
lui (iui aura [ilus de \o'.%; qu'en ca-- d'éga-
lité de voix, il lui sera permis de nommer
relui des deux ((u'elle voudra; que pour la
visite des autres couvents de l'ordre, elle
sera obligée de commellro un ou deux visi-
teurs du même ordre, qui seront aussi liien-
iiaux, et qu'elle ce stiluera !^es grands vi-
caires aux choses spirituelles. Telles sont
les principales observances de ces religieu-
ses, (|ui, après l'annéede probalion. proiuin-
cciu leurs vœux selon celle formule : Je N.
promets stabili(é salis clôture, conversion de
mes miriir.i, diaslelé, pauvreté et ofidissancc,
selon les ftiituts de la réformation de l'ordre
de foiitevraull, ordonnés en ce lieu par le
décret du pape Sixie I V, suivant la règle de
Saint-!lrnni[, en riioiniciir du Sauveur, de sa
mère (t de saint Jean l'évanfiélisle, en votre
présence, Mi're prieure de ce monaslère. Les
religieuses du cliœur prononcent leur» vœux
en lalin cl les S(iHir.> converses en français.
(Juanl aux religieux de col ordre, ils ne
])Cin enl recevoir personne et lui donner I ha-
bit, (c droit a|,; ar cnanl à l'abbesse seule
cl, à son refus, à la (irieure el aux sœurs;
ma s à la prolession les rel gieux y diuineet
leur eonsenioment. I.e conf<'Sseur leur donne
l'habit d.ins la grande église, en présence des
religieuses, ot après l'année de probalion ils
pronouceiit leurs V(enx en c siennes : Je A'.,
de telle conditinn, clc, du diocèse de, etc.,
proposant servir aux servaules de Jésus-
(.'iirist, jusfju'à la vu,rt, arec in réréreme de
soumi.'sion due, prumcis slabil té, conversion
de mes moeurs, chasteté pure, pauvreté nue et
obéissance s Ivn les statuts di /a réformulivn
517 FON ™" 5. S
de l'orihc de Fo'Ui'vrault ordunnés au pié- oniros rclifçirux , où il a ct6 si i:\r.r: :\ re-
seiit monastère par le décrd du pape Sixte I V, iiréscnler les habiilemenls religieux tels que
en l'honneur de Notre- Sauveur, de sa très- Scliooiichock les avait donnés en 1G88, a
di(jne Hière et de saint Jean l'évangélistr, en néaiiinoins abandonné cet auteur à l'égaid
voire présence, Mère prieure de ce mom.stère. des religieux de Fontevrault, pour suivre le
Le vœu des l'rèies ccuners e>l s<iublai.le, P. lîemicr, Céleslin, qui leur donne un sca-
sinon que ceux-ci le ])ioiioni'enl en français pul.iire par-dessus le capuchon ; mais en crt
cl les clercs en latin. Leur pauvre'.é consiste endioit le i'. Boiianni aurait mieux fait de
eu ce qu'ils ne peuvent accepter, eu liur suivre Schoonebeck, qui a représenlé l'ha-
[)roprc nom ni en commun, aucun le{^s, ou billenie; l de ces religieux tel nu'il doit être,
donation, ou autre chose quelconque; (ont ce (lu'il n'a pas fait à l'égard de celui des re-
ce qui leur pourrait être donné ou qu'ils ligieuses, que le P. B naiini a néanmoins
pourraient gagner par leur indnsirie et Ira- fait copier sur les figures qu'en avait dow-
viiil appartenant aux religieuses, qui leur nées Seiiooiicbeck. Nous ferons remarquer
doivent fournir t^us leuis besoins, ils ne à ce sujet que le P. Uonanni, parlant de
peuvent pas même distribuer aux pauvies la fondation de cet ordre , l'attribue vers
ce qui reste de leur tatde, ils le do. vent ren- l'an 1110 à un nommé Evrault, qui, à ce
dre aux reiigieu.'-es, qui en font cUes-mènies qu'il dit, était un f,imeu\ chef de voleurs qui
la distribution. Ils doivent réciter rolfice fut converti par Robert Biésius, natif de Pa-
can^nial à voix basse dans leur cbape.le. Ils ris, et moine bénédictin, que quelques-uns
soiit exemptés des quinze psaumes, dis vê- nomment ArbrisscUe et d'autres Arbrucell
près et landes de Tous les Saints, des psau- C'est ainsi que le P. Bonauni parlait en 170G,
mes qu'on dit étarit prosternés, aussi bien lorsqu'il donna la première partie de son
que des suilrages et commémoraisons , à Catalogue, qui traite seulement des reli-
raison de leurs occupations puur le service gieux. Mais il a parlé d'une autre manière
des religieuses. Ils doivent néanmoins diiC dans la seconde partie, qui parut en 1707,
en c.a'ême tous les j^iurs les sept psaumes et qni contient les religieuses; car il dit
avec les petites litanies, excepté les diman- que l'ordre de Fontevrault fut fondé vers
elles et les lèt'. s de douze leçons, et tous les l'an 1088 par un nommé ilobert, clief de va-
jours auïsi l'ofîJce de la Vierge et celui des leurs, qui fut converti par un célèbre reli-
fllorts, excepte les jours spéciués dans le gieux bénéiidin nommé Arbrisselle. Je ne
bref de l'ordre. Le silence leur est reconi- sais qui peut avoir fait tomber le P. Bonanni
mandé au cloître, au dortoir et au réiec- dans cette erreur, puisque Baronius, du
toire, et depuis le coiiimencenienl de com- Saussay et Gono:i, qu'il cite, ont parlé au-
plies jusqu'à latin déprime, dans toute la tremeiU du fondateur de cet ordre, qu'ils re-
inaison. Ils reçoivent la Ji>cipline des mains connaissent pour Uoberl d'Arbrissel.
du confeseur aux jours qu'on la donne aux Riichaël Cosnier, FoiHis-Ebrakli Eocord.
sœurs. Ils sont obligés aux mômes jeûnes et et Vit. B. lloberii; la Chronique du Fonte-
aux mômes abstinences que les religieuses ; vraull, par Baudri, évoque de Uol, et André,
mars lorsqu'ils sont envoyés par la pieure moine de cet ordre ; Pavillon, Vie du U. Ito-
bors du monastère, ils peuvent manger de la iert d'Arbrissel; Bollandus, 23 Februarii,
viande aux jours défeiufus par la règle et Act. SS; Honoré NiqucI, Jésuite, Jlisl. de
même souper, s'il n'est pas jeûne d'Eglise, l'ordre de Fon'cvraiiH; Factum pour les re-
Leur liabiileraont (1) consiste en une (unique Hgieu.z de FunCvrauU touchant les différends
ou robe noire, unechaiie; et par-dessus un de cet ordre; Joann. a Manw-Firma, C///-
chaperon ou grand capuce auquel sont atla- peus nascentis ordinis Fontis-Ebraldi; Dis-
cliées deux pièces de dr.ip, l'une par-devant, sertation sur la lettre de Geoffrot de Vtn-
l'autre par- derrière : ces pièces de drap, dôme, par un anonyme de l'ordre de Fonic-
qu'ils nomment des robcris, sont de la Ion- vrault ; Baillet, \' ies des Saints, 23 /"eï-ne ;
gueur et de la largeur d'un palme , avec des et les Constitutions de cet ordre imprimées
ceintures de laine pour serrer leur robe, à Paris en 1643.
(Juand ils servent la messe, en tout temps , „ , ,,,
ils portent des surplis; depuis Pâques jus- FOUS, au duchk de Clkves (( hrvalieus oe
qu'au preiuier novembre, aux jours des di- lordue desJ.
inanehes et des fêtes, ils ont aussi des sur- Comme on a donné à plusieurs ordres de-
plis pendant la grand'messe, cl depuis le chevalerie le nom de s;iciété , l'on peut rc-
premier novembre jusqu'à Pâques leurs ciia» tarder comme un ordre de chevalerie la so-
pes. Les frères convers sont habillés de gris ciété qni fut instituée à Clèves sous le nom
avec un chaperon et des roberts , coninie do société des Fons : re qui n'est pas une
vous le voyez a la première ligure, à l'es- chose fort e\traordinaire, puis(iu'il y a phi-
ceptiou que la lê;ière ne paraît pas comme sieurs académies de gens de lettres en Italie
au chaperon des prêtres, parce ((u'elle e-t qui oet piis des noms aussi bizarres, y en
cousue à leurs habits, sur lesquels il y a à ayant une à Péroise sous le nom d'insensés,
la poitrine ces lettres, M. et I. L'on a con- mu' à Pisc sous le nom d'iîxtiavaganis, et
serve dans let ordre l'ancien usage de dire „uu à Pésaro sous celui d'Hétéroclites. L'oi-
lénèbies à minuit. dre ou la société des Fous à Clèves fut insli-
Le P. Bonanni, dans sou Catalogue des uié l'an 1380, le jour de Suinl-Uui.ubcrl, [.«ar
(1) Vq'j., ? la fin du vol., u" 03 et 69.
5l.-«
DICTIONNAIRE DES OHORES ÏIF.LICIEIJX.
3^0
AJulpIic, cotn'.e de Clèvcs, cinjoiiiiemcMit
avec Iroiilc-cinq si'i|;neiirs, qui ilcviiienl por-
ter sur leurs ninnleaux un fou d'argenl eu
liroderie , v(?lu d'un [lelil jiislaucorps et d'un
capuclion tissu de pièces jnunes et rouj;i s,
avec des soiiuetles d'or, des (h.iusses jaunes
ol des souliers noirs, lenanl en sa main une
peiile loupe pleine de Iriiils (1). Ils s'asseni-
blaienl le premier diinarielie après la fêle de
saint .Michel il devaient se trouver tous à
l'assemblée, à moins qu'ils ne fussent ma-
lades ou à plus de si\ journées de Clcves,
comme il est plus ampleincnl porte par les
lettres de cet elablissemeni . dont l'original
se trouve dans les archives de Clèves, au
rapport de Schooncbeck, et qui commence
ainsi : Nous tous qui aïons opposé noire
sceau il ces prési nies, savoir fuisims ù ions
ceux qu'il uppariieudra el rccuyiimissons qu'a-
près une tnùre délibération , et pour l'ajj'cc-
tion particulière que chacun de nous a },our
les autres et qu'il continuel a d'avoir à l'ave-
nir, nous avons établi entre nous u«p société,
laque'le nous somma convinis de nummer la
Société des Fous, dans la ferme et manière qui
suit, savoir : que chacun de nntrc société por-
tera un fou brodé S'.ir son habit, selon qu'il
lui plaira ; que s'il y a quelqu'un qui ne porte
pus tous les jours le fou , les antres confrères
qui s'en apercevront lui feront payer l'amende
de trois grandes livres tournois, lesquelles se-
rtint données aux pauvres pour l'umour de
Dieu. Les confrères feront une asscmhlée gé-
nérale el tiendront leur cour une fuis l'an, et
»e>onl obUijés de s'y trouver tous ; ce qui se
fera à Clèves tous les ans, le dimanche après la
l'été de saint Michel. Ils ne jiourrunt sortir de
la ville ni se séparer et quitter le lieu où ils
seront assrmb'és, que chacun n'ait satisfait
pour les frais et payé sa part de la dépense.
il n'y aura aucun de nous qui puisse se dis-
penser de s'y trouver, à moins qu'il n'y envoie
un bon certificat des affaires importantes qui
l'empêchent, ou d'une maladie, s ins en excep-
ter ceux qui se trouveront être en voyage dans
le temps qu'on les ira avenir et citer au lieu
de leur domicile ordinaire; que s'il an ire
que quelipies-uns des confrères aiei't différend
ensemble, la société fira tous ses efforts pour
les réconcilier depuis le malin du vendredi au
lever du soleil, avant que la cour tienne, jus-
qu'au coucher du soleil du vendredi auquel
la cour aura tenu. Outre cela , tous les ans,
les confrères étant à la cour feront élection de
l'un d'entre eux pour roi el de ceux qui lui
serviront de conseil , lequel roi el son conseil
disposeront, ordonneront île toutes les affaires
de la Société, et porticulièrcmenl de ce q li re-
gardera l'assemblée de l'année suivante, et les
affaires qui y seront mises sur le tapis ou qui
concerneront les frais et la dépense, de qu i
ils rendront compte exact et fidèle, lesquels
frais seront payés par éijales portions par
cliaqiie chevalier pour lui et pour son valel;ifi
comte payera un tiers ;j/ii> qu'un baron. Le
mardi, les confrères, étant et t'hôlel de leur as-
ttmblée à Clèves, iront dés le malin à l'église
(1) Voy., il la lin du vol., ii" 70.
(/(' .\otre-l>ame , afin d'y faire leurs prières
pour ceu r de la société qui seront décédas , et
rltacin ira èi l'offrande, cic. Donné et fait l'un
l.'tSO de notre salut, le jour de saini liumhert.
('es 1 lires sont scellées de Irenle-six sceaux,
tous en cire verle, exci'plé celui du comte de
Clèves , qui est en cire roup;e. Les armes do
ces scifTiieurs son! aussi au haut de la pre-
mière paf;e, et Shoonebcck les a fait graver
dans son Histoire des Ordres mili'aires. Il
ajoute (jue l'on ne peut lire le resic de ce qui
e--! contenu dans ces lettres ; mais il y a de
l'apiiarence que ce n'est qu'une Iraduclion
qu'il nous a donnée de l'orifiinal, puisque lo
style ne se ressent point de l'antiquité.
Scliooiicbcck , Histoire des Ordres mili-
taires, tom. II. pag. 223.
FHANCE (CiiAisoiMïS nÉGir.tEiis ue i.a con-
GiiiîGiTiojr de). Voyez Génovkfains.
IKANt^l"; CoNiiniir. ATioN du tikrs oiiniiic
DE Saint-Kb^nçois dit de). Voy. I'énitiiNck.
FUANCI-: ET DE MAUMOUTIER (anciennes
(;o\GnK:GATioNs hénédictinks de).
Comme il s'est trouvé des critiques (jui ont
comballii la vérité du martyre de saint l'ia-
cide en Sicile, il s'en est trouvé aussi , sur la
lin du dernier siècle , ()ui ont combattu la
vérité de la mission de saint Maur en France.
M. IJaiilet , dans son recueil de vies des
saints, dit, au snji't de celle mission de saint
ISIaur , qu'il ne veut point entrer en dispulf
sur cette matière , et fait assez connaîiri!
d.ins la suite du discours que snn sentiment
n'<st pas que ce saint soit venu en F'rance.
Cet ce qui a donné lieu à la savante disser-
tation que n. Thierry Ituinarl, bénédictin de
la con^rétçation de Sainl-M>iur, a donnée au
public l'an 1702, où il prouve par des argu-
ni nts très-forls (dont M. Haillet n'a pas néan-
moins été convaincu), que saint Maur, fon-
dateur de l'abbaye de (ilanleuil en Anjou,
est le disciple de saint Reniîl, et qu'il fut en-
voyé en l''raiice par ce saint patriarche des
moines d'Ociideul.
(;'est donc ce disciple de saint lienoit qui-
nous reconnaissons pour le fondateur de
l'abbaye de Clanleuil. Il était parti du !\Ionl-
Cassiu avec trois religieux que saint Benoit
lui avait donnés, el il avait été accompagné
par Flodegard , archidiacre de s.iinl Inno-
cciil, évèque du Mans, et par llarderad, son
intendant, qui avaient été les demander à ce
saint latriarchc de li part de ce prélat, qui
voulait les établir dans sou diocèse. Mais
étant ,irii\és à Orléans et y ayant app-is la
niorl de saint Innoc "ni. l't que celui (|ni avait
usuri é son sié^e n'était pas disposé à les re-
cevoir, ils allèrent en .\njou , sur les assu-
r.iiices (((le leur donna llardi'iad qu'ils pour-
raient s'y établir par le crédit d'un seigneur
nommé llore, (]ui était en f.neur auprès de
l'héoileliert, roi d'.Vuslrasie, à qui celle pro-
vince obéi^sail en paitie. Fn effet Flore eut
tant de vénérition pours.iini Maur, i|ue non
cimleni d'avoir fondé pour lui un monaslèie
à Clanfiuil sur la rivière de l.oire , dans
321
FRA
(iioci''Sc d'Angers , il lui oiïiil encore son fil-i
lierlulfc , âgé de iiuit ans, pour être élrvé
sous sa discipline ; el n'élant pas rncore sa-
tisfait d'avoir fait bâtir ce monaslcre et d y
avoii- donné son fiis, il s'y donna lui-même,
après avoir demandé la i»crmission au roi de
se retirer de la conr : ce (]u"il obtint de re
prince, qui, s'y étant trouvé le jour qu'il de-
vait -prendre lliabit pour honorer la cé'-é-
monie de sa présence, lui coupa lui-méino
les cheveux , donna au monastère une terre
considérab'e , et confirma les donations (|: e
Flore y avait faites.
Huit ans après l'arrivée de suint Maiir en
France, l'abbaye de Gianfeuil fut dédiée par
Futrope, évoque diocésain , aecomp.igné de
plusieurs autres évêques de la province. On
y avait bail quatre églises, dont la première
fut consacrée en l'honneur de saint Pierre ;
la seconde, en l'honneur de saint Martin; la
troisième, qui était la plus petite, perla le
nom de saint Séverin , apôtre des Bavarois ,
et la quatrième, qui était en f<)rine de tour
carrée, à l'enlrée du monastère, eut pour
titre Saint-Michi'l-Archaiige. Les religieux,
qui y étaient pour lors au nombre de qua-
rante, se multiplièrent beaucoup dans la
suite, de sorte que, vingt-six ans après la
construction de ce monastère, il y en avait
cent quarante ; lequel nombre fut fixé par
saint Maur, parce que le revenu de l'abhaye
n'en pouvait pas nourrir davantage. Suint
Maur, ayant gouverné ce monastère pendant
plusieurs années, el sentant ses forces dimi-
nuer, résolut de ne plus sortir du monastère
el de se reposer, pour le gouvernement de sa
communauté, sur le prieur et sur les autres
officiers de sa maison. H se démit ensuite de
la charge d'abbé , el ayant l'ail élire en sa
place rtei tulfe, fils de Flore, fondateur de ce
monastère , il se renferma dans une collu'e
proche l'église de Saint-Martin , avec deu\
religieux qui voulurent bien demeurer avec
lui et le soulager dans sa vieillesse. Ce fut
dans ce lieu qu'il eut une révélation que Uieu
(levait bientôt retirer du monde la plupuit
de ses disciples. En effet , il en mourut , en
cinq mois, cent seize; en sorie que la com-
munauté fut réduite à vingt-quatre person-
nes. Ce saint abbé ne survécut pas long-
temps à cette perte, étant mort le la jan-
vier j8'i..
Ce que Bucelin et quelques autres auteurs
oui avancé, que saint Maur avait bâti jus-
qu'à cent soixante monastères eu France, el
réformé encore un plus grand nombre, est
sans aucnn fondement : il n'y a pas non plus
d'apparence que le monastère de Glanf^uuil
ait été le chef d'une congrégation à laquelle
plusieurs écrivains onl donné le nom de
Congrégation de France. Il est bien plus
croyable que pendant que saint Maur vivait,
ce monastère dépendait de celui du Mont-
Cassin, puisqu'il lui a été encore soumis
dans la suite, jusqu'en l'an 755, que le roi
l'epin ayant donné ce monastère de Glan-
leuil avec tous les biens (jni en dépendaient,
a Caidulphe, originaire de Kavenne, homme
Irès-cruel, il le ruina eiitièreu;ent, et pcrsé-
FIIA 5:-2
cula cruellcmcnl les re'igieux, qui y étaient
au nombre de cent (inarunle, comme il avait
été fixe par saint Muiii-. La |)lnpnrl ne pou-
vant siippnrlpr les mauvais traitements de
ce tyran, qui leur refusait jusqu'aux choses
nécessaires pour la vie, abandonnèrent le
monastère. 11 y en cul seulement qnutnrziï
qui y restèrent pour chanter l'oflice ilivin;
mais ù la fin, étant ab illus de faim et de mi-
sère, et ne pouvant observer la règle, ils
prirent l'habit de chanoines.
Gaidulphc se servit de cette occasion pour
les chasser du monastère, cl mit en leur
place cinq chapelains. Il ruina intièrement
les lieux réguliers, commençant par l'église,
qu'il renversa de fond en comble, afin que
les religieux n'y pussent pas revenir. Il brûla
ou jeta dans la rivière de Loire les titres et
les actes de donations qui avaient élé fuites
à cette abbaye, à la réserve de quelques-uns
qu'il mil en dépôt dans Saint-Aubin d'An-
gers, où il furent aussi perdus pendant les
ravages des Normands. Mais il ne jouit pas
longtemps du fruit de ses crimes, car ayant
appelé ses amis pour se réjouir avec lui de
l'esiinetion de l'ordre monastique dans Glan-
leuil, il mourut au milieu du festin. Après
sa mort, tous les biens de cette abbaye furent
en proic à tous les seigneurs de la province :
le comte d'Anjou et plusieurs autres person-
nes s'emparèrent des terres et des revenus
de l'abbaye, qui demeura déserte ( t inhabi-
tée jusque sous le règne de l'empereur Louis
le Débonnuire, quoique dès l'an 781 elle eût
été restituée au Alont-Cassin, comme étant
de sa dépendance, par le pape Adrien I" el
par l'empereur Churlemagne.
L'empereur avuit donné celle abbaye au
comté lîorignon, qui, touché de l'état pitoya-
ble où elle elail réduite, en fit relever les
bâtiments, fit venir des religieux de Marmou-
tier pour ré:ablir les observances régulières
dans ce monastère, qu'il soumit quelques
années après à celui de Saint-Pierre-des -
Fossés, appelé depuis Suint-Maur, et en
obtint la coiilirnialion de l'empereur. Mais
Pépin I", roi d'Aquitaine, ayant donné ce
nninastère de Gianfeuil à Ebroïn, qui fui
ensuite évOque de Poili rs, du vivant même
du comte Uorignon , qui était proche parent
de ce prélat, y laissa les moines de Suinl-
Pierre-des-Fossés tant que le comte vécut;
tnais, après sa mort, leur ayant demandé
par quel titre Gianfeuil leur avait été soumis,
et n'ayant pu représenter les lettres de l'em-
pereur Louis le Débonnaire, qui avaient élé
enlevées ou brûlées malicieusemiMit, Ebroïn
les fil sortir de ce monastère. Ils y rentrè-
rent néanmoins quelque temps après, el il
leur était encore soumis, lorsque l'an 8G8
l'on porta chez eux le corps de sainl Maur,
que l'on avait retiré de Gianfeuil pour le
sauver de la rage des Normund-, ce qui lui
a fait donner dans la suite le nom de ce saint.
Mais, sous le {lontificat d'Urbain II, les moines
du Mont-Cassin ayant encore réclamé Gian-
feuil, il leur fut restitué, et ils l'ont possédé
pendant près de deux siècles. A. la vérité, si
Gianfeuil n'a pas élé chef d'une congrégu-
-ni, niCTlONNUUF, DF.S OUDRES UELICIEL'X. "2*
lion, él.iiil le i^rpiuipr niDn.isuVc île l'ordre prnmie dévolion que Ion portail en France
lie Sainl-licnoit en France, il doit èlre re- à saint Martin, son fomlaieur, qu'à cause de
uardé coaime une soiir.e lécinle qui rn a sainl Dcnoil , pour 1. quel on ii'av.ni pas
1 rodnii une infinilé d'autres, parrappoilà moins de vi-ncralion . et dont la lè^lcélail
!a rè"lc de Sainl-lienoit, qu'il leur a coin- praliiiuéc avec Leaucoiip d'exactitude dms
înuniquce, dont saint Maur avait reçu l'an- c>' niona-tère. Les rois île Fraiicc le priicnt
tocraphe, écrit de la main d-c.' sainl fonda- même sous leur protection. Mais |i(U de
leur, on'partanl du Mont-Cassin, avec un leinps après, Us Normands en ii:lcrroin[,ireiil
poids cl un vase pour iiiieuv o'servcr ce la régularité : car, y étant ^enus l'aiiSoî,
.luVlle prescrit de la quantité du pain cl du ils passèrent au lil de l'epée ccul seize rel;-
^in dans le repas. gieu\. n'y en ayant eu que vin;il-qualr e q: i
l.f inona-tèie de Marinoiitier, qui fol l'un s.iLi\èrenl leur vii- en se cachant dans des
de ceux qui reçurent cet c r.'gl', doit cUe caverne s. Leur aljl)é, Héberne, sciait au-si
re"arilc comuiC le diof de la plus ancienne relire dans un lieu secret; mais ces harha-
con-Mé^alion de l'ordre de Sainl-lîen;iîl en rcs l'y ayant découvcrl et s'ctani saisis de
France avant (U pli^s de deux C'Uls prie.:- lui, ils lui lireut soiilîrir de cruels touruienls
rcs de sa dé|icndance. Celle célèbre abbase pour l'obi per à déclaicr l'endroit où eiail le
eut pour fondateur le grand sainl Marlin, trésor de l'éjjlise cl les grottes où s'éiaient
archevêque de Tours. Il exerça d'ab rd la réfugiés les religieux ; mais ce l'ut inulile-
profesviuu religieuse à Milan, il'où ayant clé meni, il ne voulut rien avouer. Les ennemis
( hassé par les ariens, il passa dans l'ile s'étanl retirés, les chanoines de Sainl-Mar-
d'Albengue, qui est proche la c<ile de Gènes, lin et les bourgeois de Tours allèreni conso-
où il mena pendant quelque temps une vie 1er ces rtl:gicu\, qu'ils reconduisirent avec
solitaire. 11 quifa ensuite celle letraite, sur leur abbo d..ns leur église, et auxquels ils
Favis qu'il eut que saint Hilaire, qui avait procurèrent toutes sortes de secours. Six
élé banni par les hérétiques, rt tournait in muis iiprès, comme ou cul avis que les Nor-
i-on diocèse; et, l'ayant sui^ i en France, il mands relunrnaienl vers la ville de Tours,
tiàlil le monaslère de Ligiigé proche Poitiers, et qu'iis avaient dessein de l'assiéger, doa/e
où après avoi" demeure environ quinze ans, chanoines de l'église de Saint-Mariin, pour
il en lut tiré pour remplir le siège do Tours, soustraire son corps à la fureur de ces bar-
Ftant devenu é\éque, il ne cessa pas pour hares, prirent ces saintes rtlinues, cl èlaiil
cela de vivre en religieux; cl, pour prati- accompagnés de l'abbé Héberne cl des vingl-
<iuer toujours exacli nient h s exercices ino- quatre religieux de .Marmouticr, ils leslrans-
nasliques, il fonda un monaslère proche sa portèrent à Corme ri , à Orléans, à Saint-
vi.le epi^copale, dont la communauté fut en lienoîl surLoire, et enfin à Auxerrc, où elles
peu de temps de quatre-vingts religieux, ont été pendant trenio et un ans : cl, comme
ijui menaient avic lui une vie austère et si ce saint eût voulu procurer de 1 honneur
pénilenle. Personne n'avail rien en propre, à ceux qui avaient en soin de ses s.inles
tout était en commun ; il n'était pas periiis reliques, lous les religieux de Marmouticr
de rien vendre, ni de rien acheter, quoique fiireut e evés à l'èpiscopat ou lureiil élus
ce lui la coutume des moines de ce Icmps-là. abbés dans des mona^lères l'e Bourgogne;
L'unique art que l'on y exerçait était de et l'iibbé Héberne, qui ne (inilta point le
iiaiiscrire des livres; encore n'y avait-il que cerps de saint Martin, eut la joie, vers l'an
les jeunes qui y fussent employés, cl les E8~, de le reporter à Tours, où, après la
anciens ne s'occupaient que de la prière. Il mort de l'archevêque Adalaud, il fut mis à
était rare qu l'on sortit de sa cellule, à .>-a place, et gouverna le diocèse peiidaul
moins que ce r.c lût pour se rendre au lieu v:iigl-sei t ans.
de la |iriére. Ils ne laisiienl qu'un repas |)ar iMarmoulier fut comme dcsi ri cl aban-
jour; l'u-age du vin n'ilat perms qu'aux donné peudant tout ce temps-là, et pendant
malades, quoique le lien où le monaslèie presque luul le dixième siècle il n'y eut que
était silué lut un giand vignoble. La plupart <|uelt|U(S chanoines légulier-i (]ui y firent
n'claienl babilié^ que d'clolles de poil de l'oriice div in, cl des laïques en furent abbés,
«hameau, et c'était un crime parmi eux d'à- Hugues de France, dit lelirand,(ils duroillo-
voir un babil ijui lesscnlit un jeu la mol- berl 111, posséda celle abbaye, aussi bien
lesse, quoiqu'il y eût ilai.s celte couimun.uic que son (ils Hugues Capet ; mais ayant éle
un grand nombre de personnes (Je quaiiic. doiuiee à sainl .Mayeul qui était aussi abbO
lelleéiail la d.sciplinu qui s'observaii dans de Cluny, il la r. ndit aux moines bénédie-
cc niona-lère, qui lut appelé Marim ulier, lins, ce qui paraît être arrivé sur la Un du
après l.i mort de saint Martin, comme ijui règne du roi Lothairc. On y mit d'abord
'lirait, le (/»•««(/ Hionris/(';c, pour le distinguer tiei/e religieux d'une Irès-sainle vie, aux-
dis autres que ce saint avait fait bâtir, priii- ([uels on donna pour ahbe Guilibert ou NVili-
cipalcment lorsque l'on en eulêle>6 un sur berl. Alais, quoique saint .Mayeul eût élé le
Mjn lombcau, qui a porté son nom depuis, restaurateur de celle abbaye, elle ne fui pas
Il qui est présentement un chapitre Ce pour cela soumise à Cluny, non plus que
cliaiioines séculiers. beaucoup d'autres qui furent reroriuées par
Lorsque ce monaslère de .Marmoulier eut les religieux de celle congregaiioii ; car le
dans la suite reçu la rèj;le de Sainl-lienoit, pape (irégoirc V ayant conlirme, à la prière
plusieurs seigneurs l'eni leliirenl par les do- de l'cmptreur Olhôn III, les moiuislères (|tii
nations qu'ils y lircul, lanl ù cause de la dépendaient de Cluny, il n'col iminl fait meii-
525
FIÎA
FilA
320
(lon t)i; Marmouticr dans les IcHies qui en
lurent expédiées.
L'exacte discipline que l'on cbscrv.iil
daiis ce nionaslère lui nllira l'estime de plu-
sicurs personnes qui y (irenl de^ donations
(Oiisidérables ; le nombre des reliiiiciix aug-
liicnla , ils retirèrciil plusieurs tiion.isières
dfs mains des séculiers qui s'en élaienl em-
parés ; I t sous le gouvernement de l'abbé Al-
beit, qui fut élu l'an 103i-, il était devenu
très-illuslre par le grand noiibre do monas-
tères qui lui étaient soumis; cl il le l'ut en-
core bien davantage dans la suie, puisque
sailli Odiliiu , abbé de Cluny , étant mort à
Suuvig.iy dans le Bourbonnais, les religienv
de ce monaslèie écrivirent à Al'ncrl, alibé de
Rlarmoulicr , pour lui en donner avis, et lui
donnèrent le tiire d'abbé des abbés.
L'eslime que l'on avait pour les rcligieut
de Mariiioulier s'augmenta de telle sor.e,
([lie vers l'an lOG'i il n'y avait aucune pro-
vince qui Eie voulût en avoir : c'est pourquoi
quelque pari que l'on allai, l'on trouvait des
m inaslères de la dôpcnda.ice de ccl'c ab-
baye; el même il y en eut jusqu'en Angle-
terre. Entre les exercices de piélc de ces re-
ligieux on loue surtout celle qu'ils faisaient
paraître à l'égard de leurs irércs (jui étaient
à l'agoiiii'. L'' P. Alabillon, dans ses Annales,
parle avec é'.ogc des jpûni's, des prières, des
o.acéialio.is cl des pénitences qu'ils prati -
«juaient pour leur procurer une bonne mort;
el , pailant à ce sujet de li mort d'un t);in
frère de ce monastère, il fait remarquer qu'il
reçut deux jours de suite le siini viatiiiue,
et communia sous les deux espèces, appa-
remmenl suivant l'usage ([.i subsistait pour
lurs dans cette abbaye.
Deux archevêques de Tours, nommes Ro-
d(>l[jlie, inquiétèrciil ces religieux s ;r leurs
privilèges, mais ils furent deiioutés de leurs
prétentions dans plusieurs conciles proviii-
ciaux , oii les religieux lurent niuinlenus
dans leurs privilcges; cl , Oi)mme ces reli-
gieux étaient toujours molestés sur li; même
sujet, le pape Urbain 11, dans le concile de
(ileinionl, après avoir fait la leclurc du pri-
vilège qui les soumettait ir.iniédialcmenl au
saint-siège, ordonna qu il sérail observé, el
confirma le décret du pajje Ciregoiie Vil ()ui
défendait à tous èvéqucs d'inJiiiuer aucune
station publique dans l'église de AJarmoulicr,
afin que les religieux ne fussent point inler-
lompus dans leurs exercices, ni d'exigi rau-
cuiie iiliéissance ou soumission des aljbès,
ni de fulminer aucune excoinmunicalion con-
tre le monastère ou ces religieux , quelque
part qu'ils demeurassent, ce qui était seule-
ment réservé au souverain pontife, sous la
protection duquel ils élaienî.
Gliopin dit que les rois de Franco se quali
fient abbés de ce monastère, et que quand
ils y font leur entrée, ils jurent sur les saints
livangiles, comme les autres abbés qu'ils en
(OUberveront les privilèges el lc-> francbises.
Les comtes d'Anjou se qiialilia.cnt moines
e.e ce monastère; et un archevêque de Tours
ayant voulu excommunier Gokfioi, duc de
Normandie cl comte d'Anjou, ce prince lui
rép indit qu'il ne craignait point son excom-
niuiiicalion, <à cause qu'il était chanoine de
Saint-Martin el moine de Marmouticr. Des
deux cents prieurés ([ui , comme nous l'a-
vons (lit ci-dessus, étaient de li dépendance
de ce célèbre moîiasière, il y en avait vingt-
six dans le seul diocèse de Lh utrcs. Le iîîo-
naslere de .Marmouticr fut un de ceux qui
composèrent la congrégalinn dos livcmpts,
dont nous avons pailé à l'article qui porte ce
nom; mais la réforme y ayant été introduite
par les religieux bénôiticliiis de la congréga-
tion de Sainl-Maur, il fut uni, l'an 10.57, à
celte congrégation, qui a fait rebàlir ce mo-
nastère avec beaucoup de magnificence.
Voxjz Joann. JMabill. Annal. Bened. loin.
1, 11, Ml et IV. Yepez, Chioriii/ue générale
lie l'ordre de Saint -Benoit, tom. 1. IJulleau,
IJistuire de l'orJre de Saint-Benoît, tom. 1.
FRANCISCAINS (Ordre des).
§ T'. Origine de l'ordre des Frères Mineurs,
avec la v'e de Sainl-François d'Assiie, pa-
triarche et fondateur de cet ordre.
Ajjrès toutes les vicloires que l'Eglise ;ivait
r(Mnportèes dans lis premiers siècles de son
établissement sur le paganisme, il sembi lit
(ju'elle n'avait p!us rien à craindre; mais le
douzième ( t le treizième siècle lui furent si
fatals, que si .'èsus-Christ, qui avait promis
au priuLC des apôtres el à ses successeurs
que les puissanc s de l'enfer n'juraient ja-
mais aucun avantage sur c le, ne lui eût en-
voyé un nouveau secours pour la défendre
coatrc les attaques de ses ennemis, elle ciîl
enSin succotnbc à tous les malh.'urs dont elle
fut afiligèe dans ce lemps-là ; car, outre les
Vauiluis, les Alliigeois , les Humiliés el un
grand nombre d'auh\s héréliques, qui la
combatlaient par leur pernicieuse doctrine,
les empereurs chréliens n'oub ièrenl rien
pour contribuer à son affliction, non-seule-
ment par le schisme qu'ils embrassèrent,
m IIS encore par la fureur de la guerre qu'ils
jioi tèrenl en lialic, où l'on vil les temples
dépouillés de leurs plus beaux ornements,
les cardinaux, les piéials de l'Eglise soulTrir
dans des prisons les derniers outrages, el la
iriaioiiie régner impunément, au scandale de
la religion el au mépris de la pauvreté de Jé-
sus-Christ.
Ce fut au milieu de ces misères et de ces
calamités que Dieu, louché de l'af.liction de
son Eglise, suscita riiumbli,' saint François,
pour opposer par son moyen la vérité de l'E-
vangile à l'erreur, la pauvreté au désir des
richesses, el l'humilité à l'ambiiion , qui
avait été la source de tous ces desordres. 11
na(]uit à Assise , ville d'Ombrie , l'an 118:2.
Son père , qui était un riche marchand de
celte ville, se nommait Pierre liernardon, el
sa mère Pique, femme d'une grande piété, et
Irès-recoinniamlabie par ses vertus, qui, se
trouvant au terme de sa grossesse, souiïrit
d'estrêmcs douleurs; et plusieurs jours s'e -
coulèrent sans aucune apparence qu'elle put
accoucher heureusement : ce qui faisait ap-
préhender qu'elle n'en mouriit , cl qu'en
5Î7 mCTiONNAinE DES OUnUES RElJf.lEl'X. 328
mour.inl clic u'Alàl I.i vie à IcufaiU qiiVIIc dans l'un dosqucls Frnnrois fui folt prison-
ik-vail molli c au iiioiuio; mais no an:;.' .'.i ni.T m :r rrn\ rie Pcrouso. Co;le caplivilé dura
f.irnie i\v pèicria s'olanl |)iésenlé à la |.o; lo un an ol n'ola jamais rien a la liberlé de s-ii
lie sa maison , sous prélcxlo de demaiidiT « spril. Les soldais do son | arli qui avaicul
raumono. qu'on lui donna en rcconimamlai-.t éU' pris avo; lui ii ■ soufl'raienl qu'avec rlia-
:i ses prières la délivrance de la inèr.- el de ;. rin les peines de leur prison ; mais François
rcnfanl, il leur conseilla de ia por cr dans les eneoirageail par sc> discours cl par les
une élalilc, les assurant iiu'elle se Irouverail excm|.les de sa palience.
bionliil si)ùla-ee. Son conseil fui suivi, el 11 n'.ul pas pliilôl recouvré ^a liberlé,
l'enfanl vint a^ lude lieureascaienl sur le qu'il loinba malade , dune manière si vio-
foin et parmi I s bêles : ce que l'on a re;;ardé liMile, qu'il se disposa à mourir, croyant sa
roiniiie la prem ère cii coll^l,lllee des conlor- mal :die inorlelle. Ces pieniièrcs afiliclions
miles qi:e sainl Fraiiçois a eues avec JésUs- c ininiencèreiil à disposer son cipiir à écouler
Chrisl dans son luim'ani è. 11 riçul au liap- la voix du Seigmur, à mellre à prolil les
témo le nom de Jean; mais la langue fran- inspirations du ciel et à connaîlre l'inutilité
caisc, que son père, qui lialiqnait eu France, el l'abus de ses vanics passées : rependant
I li Ol J'ppreiidrc , lui devint si l'amilière , l'iieure de son enli>rc cou'.ersioii n'ét.iil pas
qu'on l'appela. t ordinairement /i,' Français, encore venue ; car , quoiq.iC l'on reiiLiniuâl
il ce nom lui csl toujours demeuré. Son père qiiehiue clian;;emenl dans sa conduite, l'in^
lui fit aussi apprendre l<i lan;;ue latine; et clinalion qu'il avait pour la vanile n'étail pas
liuaiid il le vit eu état de s'expliquer en celle enlièremenl eleinte dans son creur; miis la
.iiij;uc, il le relira des écoles pour le mcîlre miséricorde qu'il avait toujours eue pour les
dans la inareliamlisc. Le pèie e". le (ils avaient pauvres acheva ce que rallliclion avail coiii-
d.s inc'inalions bien différentes ; cel.ii-'à iiiencé ; car , ajanl fait faire un habit fort
6. ait avare, et celui-ci libéral et généreux, propre, et le premier jour qu'il le mit s'rii
rien ne lui coû ant pour satisfaire son i.icii- étant dépouille en fav.'ur d'un pauvre gen-
natiou, qui le portail aux passc-lemps el lilhomme lo: l mal velu, auquel il le donna
aux diverli-seuieiits, sans néanmoins que pour l'amour de Dieu, celle aciion de cliarilc
l'amour des plaisirs l'entrainât à la débauche mit la eonsoininaiiou à rou\ragc de sa co i-
el lui fit oublier la loi de Dieu. La miséri- version, par les nouvelles grâces quelle lui
corde semblait être lellcmeit née avec lui, attira, eonlormémeiil à la promesse que Je-
qu'il ne pouvait voir de malheureux .«ans sus-Ciirisl fait dans son Kvangile à ceux qui
cire vivement touché lU- leur misère, et il praliqueront es actes de celle héroïque
Bétail fait une habitude de ne point refuser verta : ce que Dieu lui fil connaître la nuit
l'aumàne à celui qui la lui demandait pour Kiivr.nte par une vision, dans laquelle il lui
l'amour de Dieu. 11 ava.t une douceur el une sembl/iil »oir un palais magnilique rempli
huiinélelé qui gagnaient le cœur de loul e irarmes marquées du signe de la croix, qu'on
momie. Il était si caressant , si officieux, si l'assura cire pour lui el pour ses soldats,
poli el si sincère, que ces bel es (lualités lai- (domine il n'était jias eni ore asse/ éclaire!
saicnl cspérif à ses comiiatrioles ([u'il de- pour pénétrer h' vrai sens de cette vision, il
viendrait un jour l'ornemenl de leur ville ; s'imagina qu'il ne s'agis>aii (|ue dune guerre
et l'on vojail dans sa physionomie qu l(|i:e temporelle. C'est pnureiuoi ayant appris que
chose de si urand et de îi cslraonliiMirc , Ciaulier , comte de lîrieiiue eu Chamiiague ,
qu'il y avait dans Assise un bon liiunme qui, gendre du feu i'oi de Sic! c , T.inci ède, el
toutes les fois (ju'il le renconlrail il ins les frère de Jean, qui fut roi de Jerusaie.ii iju^ I-
ruis, éleiidiit sou manlrau par lerie, aiiii iities années après, étant assiste par le pape
qu'il passât dessus , disant qu'on i;e pouvait Innocent 111 et par Philippe-.\ugusle , roi «le
déjà laire trop d'iionneur a une personne France, était entré avec un > grosse armé'j
(;ui était si visildcmenl destinée à de grandes dans la l'ouille, il alla [lour lui olTrir ses
(hoses. SiTvices ; mais il ne fut pas plutôt airivcà
Cependant comme il était encore plein de Spolelte, son premier gîte, (ju'il fut rappelé
l'esprit du monde « t distrait par les occupa- à Assise par une autre \ isioii où l)ieu l'aver-
lions (lu commcree où son père l'aNail en- lit de ne pas préférer le pauvreau rulif, ni
gagé, il était foil éloigne de comprendre si- le valet au maître, el de n'en point servir
l<it ce que Dieu voulait de lui, el il n'avait d'autre que lui. Il coinmeiie i pour lors à
du guul que pour les chosrs de l.i terre; mais coiiijiiendre ()ue la milice ou il deva l s'en-
li' temps au(|U(l Dieu a\ ail delcniiine l'ese- gager était loute spirituelle. Il revint doiiC
cution des gr.inds desseins <;u'il a\aii sur lui chez son pèri>, mais tout autre i|u'il en elail
canl enfin vcn.i.il penuit i|ue le cours d>; sorti ; car il ne trouva plus de délices que
ses plaisi s fût inlen om{iu par des auiertu- dans la solitude, se lenaiil rrliré dans sa
mes cl des alllieiioiis, alin de D- délacher du maison, el ne s'occupaiit (|irà la prière. Il
monde et de l'aUiiiT à son ^ervicc par d is (leniandail à Dieu avec beaucoup d'instance
voies autant pi iililabli'S à l'àaie que contrai- qu'il lui lit connaître sa vulonié, el il lui
res à la nature el aux sens : ce qui coin- semblait que la réponse du <'icl était qu'il
nxiiça par un dé. nélé qui, étant survenu en- l.illail (]u il méprisai toutes lc< choses <lii
Ire les liatiilanU d Assise cl d.; l'eiouse, iii- monde, el iju'il Irava liât fortement à se eom-
gril de telle sorte l'esprit des uns cl des au- battre ri se vaincre soi-même. Un jour (]iie,
1res, qu'ils priiciil lc> arni.s , et lireiil pin- rempli de ces d 'UX gr.indes ma\imes, il était
r.ieurs acte» ahostilué les uas sur les autres, à cheval dans la plaine d'.\ssise , il eut à sa
529
rnv
FRA
330
reiiconlre un lépreux dont la vue lui (il lior-
rpur. Il avait déjà détourné les youx de dos-
sus un objet si hideux et si découlant, lors-
que, se souvenant qu'il devait travailler à se
vaincre lul-inême s'il voiil.iit être soldat «le
Jésus-Clirisl , il descendit de cheval et alla
einlira'-ser ce lépreux, malgré toute sa répu-
gnance, et, après lui avoir fait une aumône
considérable, il remon'a à cheval. Mais il fut
élonné.un moment après, lorsque, tournant
la tête pour voir ce que faisait ce pauvre mi-
sérable, il ne vit plus personne, quoique la
place fût découverte de lous côtés : ce qui,
au lieu de l'otTrayer, lui donna une joie inté-
rieure qui l'encouragea à marchr^r «ians la
voie de la perfection où il éiait entré, el
dans laquelle il commençait à jouir des con-
solations des âmes qui cherchent vèrilable-
inent Difu.
L'amour qu'il conçut pour la pauvrelc et
les humiliations lui faisait porter envie à
l'état des pauvres et des plus misérables. H
le lit paraître peu de temps après, dans un
voyage de dévotion (ju'il fil à Uome. Car
après avoir visité le tombeau des saints apô-
lies, ayant vu sortir do l'église une grande
qu.inliléde pauvres qui atlendaient les effets
de la miséricorde des passants, il leur distri-
bua tout l'argent qu'il avait, se dépouilla de
son habit pour le donner à celui qui parais-
sait le plus nu, prit ses haillon ', dont il se
couvrit, et passa le reste de la journée au
milieu de ces pauvres, avec beaucoup de sa-
tisfaction de se voir revêtu d'un méchant
habillement plein d'ordure et de vermine,
qu'il avait pris en échange de celui qu'il avait
donné à ce misérable.
Peu de temps après son retour à Assise, so
trouvant dans l'église de Saint-Oamien, et
priant avec beaucoup de ferveur de\ant l'i-
mage du Oucilix, il en sortit une voix, qui
lui dit : Va, François, répare ma tnnison, qui
tombe en l'uine. Notre saint ne comprenant
pas que celle voix céîeste lui ordonnait qu'il
s'appliquât à i'édilication tl au salut des
âmis, qui sont la demeure de Uieu et les
temples de son Saint-I{sprit , et croyant que
c'était celte église de Suint-Datiiien (qui vé-
ritablement tombait en ruine) que Dieu vou-
lait qu'il réparât, il retourna chez son pOre,
prit des étoiles, qu'il alla vendre à l'^oligny
avec le cheval qui les avait portées, et eu
porta l'argent au prêlre qui servait cette
église, le priant qu'il lui fit la charité de le
loger clu'z lui. Le prêlre, (jui d'ailleurs
él, lit fort pauvre , voulut bien le recevoir,
mais non pas sou argent, craignant de se
faire des alîaires avec son père. Ce refus ne
découragea pis François, qui jela sa bourse
sur une fenêtre, el passa <|uelques jouis avec
ce bon prêlre dans la prière, les veilles el
les auslerilés. Son père, n'en ayant point de
nouvelles, s'informa da ce qu'il étail devenu,
cl ayant su qu'il était à Sainl-Damien, il y
vint tout en co ère, accompagné de gens pour
prendre son lils, comme s'il eûtélé question
de poursuivre un voleur. Dieu, qui prenait
la protection de François, le cacha aux yeux
de ce pè.c furieux, qui, n'ayanl point trouvé
DicTiojfNAirtii: i)i;s OnuBiis riciigilux. 11.
ce qu'il cherchait, s'en retourna à Assise, et
François so retira dans une caverne, où il
demeura pendant quarante jours dans lp3
jeûnes et les larmes, exerçant sur son corps
les auslerilés les plus rigoureuses. Mais ,
honteux de sa fuite, qu'il regardait commît
une lâcheté, il sortit de sa retraite déterminé
à supporter pour l'amour de Dieu loul ce
qu'on voudr;iit lui faire souffrir. Il parut
dans les rues d'Assise, dans un équipage si
différent de son premier état, qu'on le re-
garda comme un fou. On lui jela (!c la bouc
et di s pierres, et les cnfanis le poursuivaient
avec de grandes huées. Son père accourut
au bruit de ces clameurs , qui retentissaient
par louie la ville, et, voyant quiî son fils
était le jouet de loule la populace , il le fit
mener chez lui, où, après l'avoir chargé de
coups, il l'enferma dans une espèce de c xhot
où il lui fit souffrir loiiles sortes d'outrages
et de mauvais traitements. Mais, étant obligé
d'aller à la campagne, il en laissa la garde à
saremme,qiii,élinl persuadée des grands des-
seins que Dieu avait sur son fils, lui donna
la liberté.
François se retira aussilôl là l'église de
Sainl-Damien. Son père à son retour l'y al!a
encore trouver ; mais noire saint ne s'enfuit
pas comme la première l'ois, il se prisrnia
hardiment devant lui , et protesta qu'il élait
prêlà souffrir loulcs sortes de supplices plu-
tôt que de changer de résolution. L'.issu-
rince du Dis donna de réloimcment au père,
qui, voyant ses remontrances inutiles , se
contenta de reprendre son argent (|ui élait
encore sur la fenêlre où François l'avait jeté.
Mais, sachant que ce jeune homme était na-
turellement porté à faire des aumônes, cl
qu'il avait dessein de réparer l'église de
Sainl-Damien , craignant qu'il ne ruinât sa
Timi.le par ces dépenses, il lui proposa ou
d'ac'iuiescer à ses xolontés ou de renoncer à
sa succession. François ne dé ibéra point à
choisir le dernier. Le père, indigné de ce
[iroeédé, qui lui semblait trop iiijurieux, l'o-
bligea de lui rendre loul ce qui lui restait
d'argent ; et, pour lui ôter toute espérance
de retour dans la possession de ses biens ei
de ses héritages, il voulut que ce renonce-
ment fût général et accompagné de forma-
lités solennelles. Il le mena pour cosujctà
l'évéque d'Assise , qui voulut bien rccevoir
Icur concordai. François ne fut [las /ilulôt
en présence du prélat, ([u'il se dépouilla (ic
lous ses babils jusqu'à la clicmise, et les re-
mit entre les oaius lie son père, en lui di-
sant que jusque-là il l'avail appelé son père,
mais (jue dorénavant rien ne l'empêciieiait
de rapporter celle qualité à Dieu seul, en quj
élait tout son trésor et son espérance. On
découvrit pour lors qu'il partait sur sa chair
nue un rude cilice, ce qui commença à dé-
couvrir que Dieu seul et l'amour de la j)éni-
lence élaienl le véritable el le seul motif d'un
si granii détachement dos biens de la forlune.
L'évéque, touché d'admiration, embrassant
François, le couvrit du manteau qu'il avait
sur ses épaules, cl lui fil donner l'habit d'iTii
paysan qai se Iroinaii là. François le rcçsll
11
35» .. DiCTlOXNAlUF, DESORDRES RKLIGIEDX. 353
comme l.i première nuniôiic qui lui était fitiic sVinnt rcvi'-iu d'un li.il'ii pnrcil à celui (li-
en l'élnl tif menilMiit. où il voiil lil il< niftiri-r saint François, s'associa à lui le Kîniai \H)0;
le reste do srs jours ; il y lit une ;:raiide croix cl c'est à ce temps-!.i (juc l'on rapporte l'o-
nvcc une pierre, et le disposa inèiiic eu celle rij^iiie de l'ordre des Jlineurs. Le niêuie jour,
forme, s'en revêtant avec satisfaction. l'icrre de Calaue, chanoine d'Assise, anime
11 av;iil pour lops vin;;t-cirii| ans, et, se d un zèle de la gloire de Dieu et d'un aidi ni
Toyant degat^e du tous les biens qui l'avaienl >!ésirdc la pénilenc, imita liernard de (Juin-
relenu dans le Sicile, il prit le . Iii-inlu delà tavalle. Cilles d'Assise, qui elait un saint
soliluile. alin de s'y appliquer uuiciuoinent à homme el craipnanl Dieu, u'élail point dans
raci|uisil on des lertns (jui sont lis verila- letle ville lorsque lîernaid de (Juin avallc el
hies ricliesM's et consolations de l'âme. Mais, l'icrre de Calaue renoncèrent ainsi pènereu-
ilans liHcmps qu'il u'élail occupé que de la sèment au monde ; mais à sou n leur, sepl
joie que lui inspirait l'espérance qu'il avail Jours après, ayant ap|>ris ce ijui s'était passe
(l'y trouver son hien-aiiné, dont il chanlait ru son absence, il en fut si vivement touché,
les louanges en français, il ti inha ciilic les qu'il voulut aus>i les suivre. Saiiii François,
mains de quelques voleurs, qui, ne lui ayant les ayant instruits , ne voulut pas les laisser
rienliou\é el n'ayant pu tirer d'autre rai- oisifs. 11 envoya liernard de (Juiiitavallc el
sonde lui, sinon qu'il étail le héraut du Pierre de Calane dans l'Fmiiie pour ins-
praiiil Roi. le battirent cruellement el le je- Iruire les peuples de l'import nce du salut
tèrent dans une fosse pleine de neige ; d'où et de la nécessité de la pénitence, et pour lui
étant sorti et "ouaiil Dieu de ce qu'il le trou- il alla avec (lilles d'Assise dans la Al.irclie
vail digne de souffrir quelque cliose pour d'.Vncônc, où, manquant île toutes choses,
son amour, il alla à lùiguldo, où un de ses ils s'estimaient heureux d'avoir trouvé lo
anciens amis l'ayant lecouiiu lui donna un trésor évangélique. Onclijues-uns les rece-
hatjil d'crniiie fort court, dont il se servit valent néanmoins avec beauioup de cliariié,
l'espace de deux ans avec une ceinture c'e mais il y en avail d'autres qui se moquaient
t'uii : ce qui a Tiil croire aux ermites de de la nouveauté de leur habillement, et les
Sainl-.\ugjstiu qu'il avail d'abord suivi leur regardaient cnmmc des fous, ce iju'ils souf-
instilul (ee que nous avons réfuté dans un fraient avec beaucoup de joie. Clillos d'As-
auiro eiiilroil). Le désir (ju'il avail de réparer sise témoigna même son thagriii à saint
l'cglise de Sainl-Damien le rappela à Assise François de ce qu'il y en avail quelques-uns
pour satisfaire à cet ordre , (|u'il croyait ((ui leur faisaient des honneurs, ce qu'il re-
avoir reçudu ciel. 11 quéla suffisammcnl pour gardait comme un alTront pour une âme
y fournir, cl travailla lui-même avec les véritablement religieuse, qui ne devait mel-
m.içons. 11 en réjiara encore une .lulre sous tre toute sa gloire ()ue dans le mépris et les
le litre de SaiiU-l'ierrc, el entreprit la même opprobres. Saint F'iançois fut bien aise de
chose à l'ép'ard d'ur.e troisième dédiée sous voir que ses disciples ne S" gloriliaieul point
le uom de iNoîre-Daiiie-des-,\nges, qui était des honneurs iju'on leur faisait, el que les
enlièrement abandonnée. Le heii où se trou- opprobres qu'ils indur. lient ne troublaient
vait celte derii.ère s'appelait l.i l'orlioncule, point la trauiiuilité de leur âme et n'ajipor-
ainsi nommé à cause ()u'il faisait une petiie taiint .lucun obstacle à la persévérance dans
|iartie du bien que les béiiédii tins du mont leur vocation.
Souh;izc|,osscdaienl, et était éloigné d Assise (Juoique ce sainl fondateur ne suivît pas,
d'environ uiiedeini lieue. (]e heu lut si agréa- dans les vérités êvangéliques qu'il prêchait
hie à sailli François, qu',! rêsolul de s'y ar- â ses peuples, la méthode el l'éloquence or-
rêler el d'y lixer sa demeure, et il y jela dinaire des iirédicaleurs, il ne laissait pas de
dans la suite les fondements de son ordre. 11 faire de grands fruits par ses discours qui,
yccul seul en ce lieu pendant di;ux ans. In quoique simples, étaieiil si aiDiués de l'espril
jour, i tant à la messe, il entendit cet endroit divin, qu'il leur inspirait l'amour de Dieu
de riivangile où Jesus-Clirisl recommandait et un ardent dcsir de la pénitence. Enfin,
à ses disciples, qu'il envoyait prêcher, de ne après avoir parcouru quelques villes el quel-
point avoir d'argent el de ne porter ni be- ques bourgs de ces provijiccs, ces quatre
sace ni deux babils, ni chaussure, ni bâton ; hommes apostoliques se retiièrenl dans leur
il le prit pour sa règle el voulut l'observer à pauvre cbaumiiie, où eu peu de jours ils
la leltie. 11 quill.i pour loissa ceinlure de eurent un cinquième compagnon, qui fui lo
luir pour prendre une coi de, el alia prêelii r fière Saliall n, dont on ignore le pays, mais
la pénitence avec tant de lerveur, (|u'il 1:1 iini étail uii homme d'une emineiile vertu,
des conversions admirables. Ouelques-uiis Frère .Morique se joignit bientôt à eux ; el
de ceux que Dieu toucha par ses d.scouis, trère Jean de la tlapella ou du Chapeau fui
ne se conient.inl p.is de ce iju'il prc^cri^all le septième disciple de s.iinl François ; mais
pour bi< n vivre dans l'état ou l'on se Irou- il lut dans l'ordre comme un autre Juil.is
v.iil, voulurent le suivre el s'att.ieher à lui, parmi les apôtres. C'était lui qui avail soin
alin de l'imiter plus parlailemenl. Lèpre- de dislriliuer en commun au i frères ce qu'on
inier fui le bienbeureuv Iternanl de (,)uinla- leur donn.iil par auniAne [lour leur subsis-
»alle, riche bourgeois d'.\ssise, qui, admirant lance. Il lui souvent repris |)ar sainl Fran-
daiis ce sailli londateur un si grand rne|)ris çois de ce qu'il amassait au delà de ce qui
du monde, assembla d.ius l'église de S.iinl- él.iil nécessaire, de ce qu'il avail trop d'al-
lieorges tons les pauvres , les veuves el les tache aux biens et aux alTaires temporelles,
orpliLlms, leur disliibia tous ses biens, c', cl une Iroji grande familiarité avec les séci*
Î^Ttti
FRA
FI\A
551
licrs; mnis il ne voulut point s'en corridor.
il fut le promior (|iii iniroiluinil li; roMclic-
iiicnl (lauR l'onlic; qiipl<|iics-iiiis siiivirriU
son exctiij)!<>, cl introduisiroiU l'usiigc des
chapeaux, ou plutôt des boîuietsou aumusses
pour couvrir la tête, qu'on appelle capelle,
selon le langage du pays : ce qui fit donner
à ce religieux le non) de Jean de ta Capelia.
Saint François lui prédit qu'il aurait une
maladie honteuse et une fin tiiallieureuse ;
et il expérimenta l'une et l'autre : car il l'ut
tout couvert de lèpre, et, bien loin de sruf-
frir ce mal patiemment, il entra dans le
désespoir el s'ctrangla.
Le nomhre des liisciples de saint François
étant donc augraenié, il leur enseigna les
moyens d'acquérir toutes les vertus, mais
Iirincipalcnient celle de la pauvreté, dent il
s'efforçait de leur faire connaître le mérite
et de leur persuader la pratique. C'est pour-
quoi il les conduisit par la villi! d'Assise,
afin de dcniander l'aumône à toutes les por-
tes , et qu'ils apprissent qu'ils n'auraient
point d'autre patrimoine que ce que la cha-
rité des personnes pieuses et dévoles li'ur
procurerait. Outre la honte qu'ils avaient de
demander ainsi l'aumône, ils avaient encore
à soulîrir des paroles piqu.inles et des rail-
leries, les reproches de leurs parents, les ir.-
sultes des enfants qui leur jetaient de la
hoiie, et les rebuts de plusieurs personnes;
m;iis Dieu, qui, outre la béatitude qu'il pro-
met à ceux qui soufirironl les injures, les
mépris cl les persécutions pour son amour,
prévient souvent cette récompense éternelle
par des bénédictions de douceui' qu'il lait
éprouver à ses élus dans le ter.ips de leurs
plus grandes amertumes, voulut, i)ar un eiïet
de sa miséricorde, l'aire connaître à ces nou-
veaux disciples de la Crois quelle était son
attention à la patience el au plaisir avec
lesquels ils soutiraient ces mépris, permet-
tant qu'ils trouvassent des gens de bien qui,
par les libéralités el les bons Iraitemenis
qu'ils leur tirent, modérèrent la rigueur du
leur pauvreté, et adoucirent ramcrluine des
mépris el des humiliations qu'ils avaient en-
durés.
Le saint fondateur voulant ensuite les
exercer parmi les é rangers el h s inconnus,
les mena dans la vallée de l'.iéii, alin qu'us
pussent demander l'aumône avec plus de
confiance de leur pari, et moins de repro-
ches et d'insultes de la pari de ceux auxquels
ils s'adressaienl. Pendant qu'il y demeura, il
y eut plusieurs personnes qui, attirées par sa
réputation, qui commençait déjà à s'étendre,
le venaient trouver pour être instruites par
lui des voies de la perfection, et profiter de
ses exemples. 11 y en eut un entre h s autics
qui, ne se coutentant pas de recevoir des in-
stiuctions, voulut encore être reçu au nom-
bre de ses disciples. Le saint, après avoir
augmente sa petite société jusqu'au nombro
de sept, retourna à Assise, où il instruisit ses
disciples de tous les exercices de la vie spi-
rituelle, leur faisant de fréquents discours
sur le royaume de Dieu, le mépris du monde,
l'iibnégaiion de leur volonté el les morliiici-
Jions du rorps, afin de les mieux disposer a
rexéculion d<j dessein (lu'il avait de les en-
voyer dans les qitaln; parties du inonde, ei
aiin de les piévenir suf toutes les dillicullés
et les perséculions (lu'ils auraient à soulîrir
de la jiart du monde et du démon. Les ex-
horlalions de ce saint patriarche, animées
du feu do l'amour de Dieu, et soutenues par
un zèle ardent du salut des âmes, eurent sur
le cœur de ces disciples do la Croix tout
l'efl'et qu'il en avait espéré : car un jour qu'il
K'ur parlait de ces missions, [loussés d'une
sainte impatience, ils se proslernèTcnt à ses
pieds pour le prier do n^• plus diiférer l'ac-
complissement de ses désirs, iju'ils rcgar-
d. lient cotnme les signes assurés des victoires
qu'ils se flattaient de remporter sur les puis-
sances de l'enfer ; mais, comme il devait être
te jiremier à donner l'eximple, il prit un
compagnon, avec lequel il alla d'un côlé,
après leur avoir accordé leur demande, en
leur assignant d'autres endroits oîi ils pus-
sent annoncer la pénilcncc.
Saint François, ayant employé quelque
temps à la mission qu'il s'éiait proposée, re-
tourna à Assise, oîi il lui vint encore quatre
nouveaux disciples. 11 souhaita revoir les
autres six , qui étaient allés en différents
pays, et, ne pouvant leur faire savoir sa vo-
lonté, faute de savoir où ils étaient, il pria
Dieu de les réunir ensemble ; et en peu de
temps il reconnut que sa prière élait exau-
cée : car, sans avoir été avertis, ils se trou-
vèrent tous au même lieu et dins le môme
temps, comme saint François l'avait sou-
haité. Ce ne fut pas sans un grand étonne-
ment de ces saints religieux, qui admiraient
en cela la providence divine; et le saint re-
çut beaucoup de satisfaction lorsqu'i s lui
racontèrent les travaux qu'ils avaient en-
durés dans leur voyage, et le fruit (ju'ils
avaient l'ait dans le salut des âmes. 11 com-
mença pour lors à leur prescrire nu règle-
ment de vie, cl leur ordonna de réciter pour
chaque heure de l'office trois Paler, Il leur
recommanda aussi d'entendre la messe tous
les jours, vouiant que quand ils y assiste-
raient ils fussent plus appliqués à la con-
templation des diviiis mystères qu'à la prière
vocale. L'année suivante, 1210, ce sainlTon-
daleur ayant assemblé ces onzes disciples,
il leur dit qu'il voyait bien (juc Dieu voulait
augmenter leur congrégation , qu'ainsi ii
était à propos qu'ils se prescrivissent une
manière de vie uniforme, el qu'ils la lissent
approuver par le souverain pontilc. Ils
a^^reèrenl tous sa proposition, et lui dirent
qu'ils étaient prêts à se soumettre à la règle
qu'il leur prescrirait. 11 n'y avait alors au-
cune obligation de demander celle confirma-
lion, et il n'y avait même aucun exemple
que l'on eût déjà contraint quelque ordre
religieux à la demander ; mais saint Fran-
çois le voulut faire pour mieux alTcrmir le
sien, de peur qu'il ne lui arrivât de mémo
qu'aux Vaudois, dont l'insiitut avait été re-
jeté par les papes Lucius el innocenl l\\. 11
écrivit donc la même année sa règle. Elle
était divisée en vingt-trois chapitres, qui cou
DICTIONNMIU:
tPtiaient vinctsppl procpptes, que K>s souve-
rains pontifes oui doilaré ob'iger sous
poiue lie pèrhé morlcl; el c'est de ces vlngi-
sept précep es que los trois \œnx ordinair.s
de reli"ion, qui sont coniniuns à tous les
ordrcs.'isont environnés cnniine de forts rem-
parts qui defenilenl les rc!i!;ieu\ de cet or-
dre de toutes sortes de transgressions. Pre-
inièreinent, poir la défense de la pauvreié,
saint François rejette comme une peste dans
son ordre tout maniement d'argent, s ijt par
soi-même, soit par quelque nuire personne
int rpo^ce. Il prescrit 11 qualité, la quantité
el la valeur des habits. Une tunique avec un
capuce, une autre sans capucc (si la néces-
sité le dcminde), avec une corde ou cein-
Inre, et un caleçon. C'est Tut ce qu'il ac-
corde pour vêtement à iliaque religieux, et
il leur pcruict di: rapiécer leurs rolies avec
des sacs ou quelque autre étoffe vile. Il leur
défend d'aller à cheval et d'avoir des chaus-
sures; el afin que cela puisse élre pratiqué
eiaclemeiil, il que la propriété ne se puisse
introduire sous aucune apparence, il donne
le soin aus miuistr. s cl auK custodes de
pourvoir à la néCLSsilé des infirmes, à l'ha-
billenienl des Frères, et généralement il leur
laisse le soin de pourvoir à tous leurs be-
soins, aulani que la pauvreté cl la charilé
le pounoni permettre.
Pour conserver le précieux trésor de la
chasteté, il défend Irés-rig )ureusen)cnt les
conversations avec les femme-i, l'enlrée dans
les monastères des religieuses , la délicatesse
dans les habits elle manger, les coniinodilés
dans leurs voyages, cl leur ordonne la nu-
dité des pieds, les jeûnes de tous les vendre-
dis de l'année, ceux depuis la Toiissainl
jusqu'à Noél et depuis ri'.|>iphanic jusqu'à
l'àijues, sans parler des autres morti'jcalions
el pcnit" lices capal)les de conlriluicr à l'ac-
quisiiion de celle \erlu el de réprimer les
ardeurs de la concupiscence, leur rccom-
inai danl aussi la pratique de l'oraison (que
ce sainl vrul que l'on prcl'ere à l'étude des
lettres humaines), principalemenl l'olfice di-
vin, doiil il lait un picteple tant pour les
clerc- que pour les f.-ères laïques.
Ce qu'il ordonne pour servir de remparts
el de défenses à l'olieissaiice, c'est le renon-
ccmeiil à sa propre voioulc pour suivre
avcuglcmenl celle de ses supérieurs sans ap-
porter aucune raison, sans réserve et s.ins
aucune limitation dans toutes les choses (|ui
ne sont point contraires à la règle; el, afin
d'ôler lous les scrupules que les religieux
pciirraient avoir au sujet de cette même rè-
gle, il les renvoie aux su;iérieurs pour lever
leurs doutes cl mellre leur conscience en
repos. Il y ajoute encore dix-liiiil avis ou
iustructiuiis <)ui n'obligent point à péché
morlcl, et qui regardent la manière avec la-
quelle les religieux se doivent comporter
dans toutes leuis conversations in'erieures
<i extérieures, soit par rapport à eux, soit à
l'égard ilu prochain, dans la maison ou dans
les vovagrs, avec les religieux ou avec les
kicuhers. A ces préceptes el à ces avis il
joint eucorc douze conlitiuiis nécessaires
DI.S OUDUICS nixiG.r.tx. 536
pour la réception des novices, el six que l'on
appelle les libertés de la règle, qui contient
eu suh^tancc ce que nous venons de dire.
Les disciples de saint Françoi- l'ayant agréée,
il alla avec eux à Rome trouver le p ipe lii-
noi-enl ill, qui ne l'écouta pas d'abord et
qui le rejeta niéaie avec indignation; m lis
Fraiirois, sans se rebuter, se relira avec sa
troupe à l'hôpital deSainlAnlnine, el se con-
tenta de reconiinander son .iffaire à Dieu, en
qui il mettait toute sa conliauce. Ce ne fut
pas en vain, car dès le lendemain le pape
l'envoya chercher et lui donna une audience
lavorable sur un songe qu'il avait eu la nuit,
d'une palme qui était crue à ses pieds et qu'il
avait interprété eu sa favenr, el sur ce qu'il
lui avait semblé voir saint François soutenir
l'église de Lalran, qui était prèle à tomber.
Le pape fil examiner sa règle dans la con-
grégation des cardinaux, et l'approuva de
vivcvoix après que l'on cul levé le- difficullés
qu'on y avait trouvées touciiant celte grainle
pauvreté qu'il y prescrivait cl nu'on croyait
presque impraticable. Il leur ordonna de prê-
cher partout la pénitence, d'elendie la foi
catholique de touies pails. el lit fa rc de pe-
tites couronnes à lous les frères laïqu'S qui
accompagnaicnl le sainl fondateur, afin qii i's
fusseul uistingués davant ige des séculiers ,
et qu'ils pussenl aider les prêtres dans les
roiu'lious de leurs ministèn-s. Wadingue dii
qu'il y aeiicoro clcspays où les frères laïques
portent de ces sortes de couronnes; mais
elles ne sont pas en usage dans le reste d-;
l'ordre, parce que cette grâce que leur avait
accordée ce pontife servit d'occasion dans l.i
suite à quelques-uns de loin pcr d ins l'or-
gueil, cl à leur enfler I ■ rœur en voulant su
iui ces couronnes
I
coinpar"!' ntix prêtres
appartiennent de droit.
Ouoi juc saint François eût écrit sa régie
et l'eut fait approuver par le papi? Inno-
cent m l'ail 1:210, il n'avait pas eucorc ilc
couvent loriiie et n'avai! demeuré jusqu'alors
avec ses co!ii|)agnoiis que dans une pauvre
ch.iumine proche d'Assise. Ayant quille la
ville de Rome, et voulant obéir aux ordres
du pape, qui lui avait ordonne de prêcher la
péuiieiice. il alla du côté de Spoic'.le ; el ,
ctuiimc dar.s le chemin il s'cnlrelenail avec
SOS disciples des moyens de iiiellrc en prati-
que leur règle, étant las cl faiigués el tout
a'ienues (lar la faim, ils s'arrêlèreul dans
une solitude où ils ne trouvèrent rien à
manger; mais la providence divine, qui est
allenlive à fournir la noiirnlure nécessaire
aux anim.iux mêiiie les plus vils et les plus
meprisaliles, irabanduniia pas ses servileurs
dans leur besoin. Car un homme se présenta
à eux qui leur doiuia un pain et disparut
aussitôt, ee (|ui les conlirma dans la résolu-
tion qu'ils avaient prise d'observer exacte-
ment la pauvreté.
Ils arrivërciil à Orli, petite ville do l'Elat
erclesiaïliqiie, sur les fronlières de Toscane,
du ci'ile de i.omliardie. lis trouveront dans
Uii(^ plaine proche de celte ville une églisj
alianduiiiiee, dans laquelle ils entrèrent pour
l'aire leurs prières, el résolurer.l de deuicu-
-.',1
FKA
rcr ijuclqurs jours dans ce lieu, jusqu'à ce
(jue JJiiu leur cûl faii connaître celui où il
Vduljit qu'ils fixassent leur demeure. Ils ne
furent pas oisifs pendant ce temps-là, car
ils allaient continuellement à la ville pour y
instruire le peuple, et y firent beaucoup de
conversions. Le grand concours du monde
(jui les venait trouver, troublant le repos de
ces bons religieux, obligea saint François
d'abandonner ce lieu, qui d'ailleurs lui pa-
raissait trop agréable. Il pnssa dans la vallée
de Spolelle, où, après avoir conféré avec ses
conipeTgnons pour savoir s'il élail plus à pro-
pos qu'ils restassent dans des lieux solitaires
que dans des villes, ils se mirent en prières
l'iiur connaître la volonté de Dru. Ils furent
1 xaiicés, car Dieu man fesia <t ce saint pa-
triarelie qu'ils étaient destinés à la conver-
sion des âuies. Ils retournèrent à leur pre-
mière cbauniine proche d'Assise, qui était si
petite , qu'ils ne pouvaient pas môme s'y
asseoir tous ni étendre leur corps étant cou-
chés ; mais, comme il y avait plusieurs per-
.••onnes qui deiir;nd,!'rnt d'entiL:' d.ins kur
compagnie, et que d'ailleurs ils ii'avaienl
point d'église, saint François chercha un lieu
plus commode et plus ample pour y recevoir
ceux qui voulaient entrer dans son ordre. H
s'adressa à l'évêque et aux chanoines d'As-
s se, pour les prier de lui donner une église ;
mais, comme ils n'en avaient point qu'ils
voulussent quitter, le saint en demanda une
aux béflcdiclins du mont Soubaze, qui lui
accordèrent celle de Notre-Dame-des-Anges,
appelée de la Porlioncule. Il n'en pouvait pas
;ivoir une qui lui fût plus agréable, puisqu'il
avait toujours eu beaucoup de dévoiiou pour
celle église, qu'il avait autrefois réparée, et
où il avûit conçu les premiers desseins d'éta-
tilir son ordre. Saint François n'en voulut
avoir que l'usage, afln que lui et ses enfants
parussent éiraugers sur la terre; et, pour
taire voir qu'elle ne lui appartenait pas et
qu'il ne la tenait que de la litiéralilé des re-
ligieux bénédictins de Soubaze, il leur en-
voyait tous les ans un panier plein de petits
poissons que les Iialiens appellent /asc/ti, et
qui se pèchent dans une rivière voisine, ce
que les bénédictins recevaient agréablement,
estimant plus ce présent que tous les autres
revenus, et ils envoyaient aussi de leur côié
im vase plein d'huile à ces pauvres reli-
gieux.
Ce fut dans ce pauvre lieu que les fonde-
ments de l'ordre des Mineurs furent jetés.
C'est celte pauvre maison qui en a produit
tant de milliers d'autres, et de laquelle sont
sortis tant d'illustres martyrs qui ont com-
battu pour le nom de Jésus-Christ, et qui
l'ont fait connaître par toutes les parties du
inonde, qui a donné tant de docteurs et de
prélais à l'Eglise, qu'ils ont édifiée par la
bainleié de leur vie et soutenue par la pureté
de leur doctrine. Quoique sai^t François eût
dit plusieurs fois que celte petite maison lui
.suflisait, qu'il ne voulût pas qu'on l'augmen-
tât, et (ju'il en eût fait abattre les couvertu-
res, qui lui avaient paru trop somptueuses,
e.le a néanmoins été tellement augraculéc,
FRA r,38
qu'il y a ordinairement plus de deux cents
religieux qui y demeurent de famille. L'on y
voit encore la peUte chapelle de Noire-Dame-
dcs-Anges, qui est comme la maison de Lo-
retle, au milieu d'une vaste et magnifique
é;::ise, qui est un des plus beaux édifices de
toute l'Italie, et qui a été beaucoup embellie
par les libéralités des grands-ducs de Tos-
cane. Vis-à-vis de cette église le grand-duc
Côme de Médicis fit faire une belle fontaine
pour la commodité des i)èlerins qui y abor-
dent de toutes par:s, pour gagner l'indul-
gence dont nous parlerons dans la suite, et
ce prince y fit conduire l'eau par un aiiue-
duc qui a plus d'une lieue et demie de lon-
gueur.
Saint François et sa petite troupe s'étant
établis dans cette maison, ils reçurent la
même année de nouveaux compagnons, dont
les principaux furent Léon , Etienne, Léo-
nard et Simon d'Assise, Massée, Junipère,
Illuminé, et un autre Simon de (Jollozano.
L'année suivante, l'ordre comniença à s'é-
tendre, tant par les couvents que l'on donna
à ce saint fondateur à Cortonc, à Aagheret,
à Piscia, à Pise, à Saint-Geminicn et en d'au-
tres lieux, (|ue par le grand nombre de dis-
ciples qui le venaient trouver de toutes
parts, attirés par ses prédications ou par
celles des autres religieux qu'il avait envoyés
en plusieurs endroits pour l'instruction des
peuples. Ce fut dans le couvent de Cortonc
qu'il donna, la même année, l'habit à frère
Héiie, qui fut son successeur dans le gouver-»
neuienl de l'ordre, mais qui n'imita pas la
sainieléde son maître, comme nous dirons
dans la suite. L'ordre lit encore de grands
progrès eu Italie et dans d'autres provinces.
Le saint entreprit le voyage d'Espagne, dans
le dessein d'aller ensuite en Afrique, où il
es[)érait trouver le martyre parmi les Mau-
res et répandre son sang pour la foi de Jésus-
Christ. 11 fut reçu favorablement d'Alphonse,
père de Blnnche, qui fut reine de France et
mère de saint Louis. Ce prince lui permit de
fonder un couvent de son ordre à liurgos; et,
étant allé par dévotion a Saint-Jacques de
Coinpoitelle, il y fit un autre établissement
et en obtint d'autres en plusieurs endroits de
ce royaume. D'Espagne il alla en Portugal,
d'où étant retourné dans le même royaume,
il y fil encore d,; nouveaux établissemenli.
Partout où il passait, il laissait des marques
du pouvoir que Dieu lui avait donné sur les
maladies, sur les dénions, sur les animaux,
et même sur le cœur de l'homme, par les
conversions extraordinaires qu'il faisait. Mais
il ne put exécuter le dessein qu'il avait pris
d'aller annoncer la foi de Jésus-Christ aux
infidèles du royaume de Maroc, car il fut ar-
rêté par une autre maladie, qui lui fit juger
que Dieu réservait cette conquête à d'autres
et qu'il le rappelait en Italie. Il y revint l'an
1215, dès que sa santé le lui permit, et toute
sa route ne fut qu'une suite de prodiges.
Etant arrivé au couvent de Nolre-Dame-des-
Angcs, il réprimanda Pierre de Calane, son
vicaire, de ce qu'il avait fait faire en son ab-
sence une nouvelle maison pour recevoir les
5Ô3
liiMcs; cl il la \oulait faire aballic, disant
ijUf crus qui y vcn.iipiit ilcvaipiil aussi so'if-
Irir palii'miiiciil los incomnKntili's do la p.m-
vrcié; riini> ■ n lui fil laiil d'invt iikps (xuir
la laisser ciimim' illo l'Iaii, ipi'il y «■onscnlil.
l.c roriilo Oilaiido ilc (^iil.nu- lui .i\.iiil doiiiu!
pendant son aliscni;.- le aïonl Alvenio, et l< s
ri'Iipii'ux qui y dcincuraionl ot tiui rcLiiciit
venus Iroiivtr pour le saluera son retour,
lui ayani fait la description de ce lieu soli-
taire, des douceurs et des consolations s[ii-
ri'uelies que l'on y goûtait par le repos et la
Iranquilliié avec lescjucls on pouvait s'y ap-
pliijuer à la niî'dilalion et à la prii^re, sans y
être disirait par le bruit et l'embarras du
monde, il voulut y aller et fut cbarmé tic la
solitude de ce lieu et de la pauvreté que ses
frères y pratiquaient. Il passa de là dans la
vallée de Fabriano, où il travailla à aiîerniir
divers établivscnienls, et en (il de nouveaux
[>our ses lelii^ieus, qui si; imillipliaienl tous
les jours d'une nianii're prodigieuse.
Cette niécue année 1215, dans laiiucMc s'as-
sembla leconcilc généraldo Lalran.qui se tint
suus le pape Innocent III, Fraiieois alla en-
core à Uotne pour faire ajiprouver sa règle
dans ce cuncile. Ei|e y fut lue et approuvée,
mais il n'( n rerul pas l'approbation par
écrit. Il s'en retourna ensuiO à Assise, où
l'année suivante il assembla un chapitre gé-
néral dans lequel il coainienija à distribuer
des missions à ses frères, pour la France,
l'Angleterre et l'Allemagne, il en envoya
aussi d'autres en Lombardic, dans la Marclic
d'Ancône, dans la Calahre, la Pouille, la
Terre de Labour et en Toscane. Il avait seu-
lement destiné ceux qu'il avait envoyés eu
France, pour iadaule narbonnaise.et il avait
réservé jiour lui la capitale de ce royaume ;
mais il fut détourné de ce voyage par le car-
dinal Hugolin,<|ui fut ensuite pape sous le
nom de Grégoire IX., et il demanda pourpn-
inier prolecteur de son ordre ce cardinal, à
Honorius lit, qui avait succédé à Innocent lii.
C'est une chose surprenante de voir h;
grand progrès (jue ci;l ordre lit en si peu do
ïeinps ; car dans le cliapitrc général qui se
tint l'an 1210 au couvent de Nolre-l)anie-di s-
Anges [irès d'.\ssise (et qui fut nommé le
chapitre dis Naites, à cause (jue, pour loger
les religieux qui s'y rendirent, on fut obligé
de faire en pleine campagne des cellules do
joncs, de roseaux et de nattes) , on y en vit
plusdecini] mille, qui n'étaient que les dé-
putés d'un plus grand nombre (|ui étaient
restes dans les convt-nts. Le cardinal Uugo-
lin, protecteur de l'ordre, y présida ; saint
Franeois nes'élait point mis en peine de laire
aucune provision pour tant de monde;
ma. s la divine providence y pourvut, car les
habitants d'Assise, de Spoletle, de i'érouse,
de Foligny et autres villes voisines, lourni-
rint ;i l'envi tout ce (jui leur était nécessaire.
Le saint fondateur avait souhaité voir les
princip.iux de ses enfants ainsi assemblés
(101. r renouveler son ei-pril , c'est-à-dire les
^entiml'nts de la [lauvrelé, de l'iiumililé et
dis autres verius évangéliques qu'il leur
aMtl iuspirés,crai|juant iiuo la uiuUiluJc
lilCTIONNAlllt: Of.S OUUr.ES KELIGIEUX. 3iO
n'eût produit le relâchement. Mais, loin d'y
trouver ce qu'il opprèhendait, il ne fut pres-
que occupé i|u'à modérer les austérités que
les particuliers avaient ajoutées à la règle. Il
n'y eut (jue le Irère llelie et Jean Stiachia,
ministre de Toscane rt de liologne , avec
quelques autres, qui allèrent trouver le car-
dinal protecteur, pour le prier de persuad r
à saint François de prendre l'avis de ses frè-
res, dont la plupart étaient gens de lettres
et propres jiour le nouvernement, n'étant
pas capable lui seul de gouverner un si
grand nombre de religieux ; d'autant plus
qu'il était simple et sans élude, et ils lui
proposèrent beaucoup de choses des règles
de Saint-Augustin et de Saint-lîenoît, qu'il
aurait été (ilus à propos de suivre, le
cardinal, pour les contenter, en parla à
saint François; mais le saint fondateur ne
voulut rien relâcher des rigueurs de l'ordre.
Il envoya de nouveaux niissionnaires en
(^irèce et en Afrique, et, pour lui, il cboisii
la Syrie et l'Kgyple, où il résolut d'aller
avec douze compagnons ; et, comme il ik;
voulait pas que ses religieux prêchassent
sans en a\oir eu la permission des ordinai •
res, il obtint du pape Honorius 111 des lettres
adressées à lous les archevêques, évéques et
abbés, pir lesquelles il leur recommandait
saint François et ses religieux, qui, ayant
renoncé à toutes les vanités du inonde.
avaient choisi une vie approuvée par le
sainl-siege, et allaient en diverses provin-
ces pour y Semer la parole do l'Fvangile :
c'est pourtiuoi il les priait de les recevoir
comme du fidèles catholiques et de saints
missionnaires zélés pour la foi de Jésus-
Clirisl et le salul des âmes.
Le chapitre étant iiiii, saint Fr.mçois .so
mil en eliemiu avec ses eompagnous pour
aller en Syrie, et, après une navigalion heu-
reuse qui ie mil au port d'Acre en Palestine,
il passa à Damielte, où élait l'armée eliré-
tienne des Croisés, contre le sultan d E;:yp-
te; ces derniers venaient de prendre la ville,
après un siège de vingt-deux jours, lorsqu'il
y arriva. îl y laissa div de ses compagnons, et
aiia hardiment avec le frère Illuminé au
c.imp des infidèles, qui le battirent cruelle-
uient, et après mille oulrages le conduisi-
rent devant le sultan, comme François le sou-
haitait. Ce prince parut disposé à écouler
favoralilemeiU cet homme apostolique il lui
demanda ce qui lameuail en Egypte. Fran-
çois lui répondit que celait le désir de lui
procurer le salut éternel et à tous ses sujets,
et que Dieu l'avait envojé pour le tirer do
l'inlidélité, et lui faire eonnaitre la vérité de
ILvangile. Tout ce qu'il pul dire au sultan
fut inutile, et il voulut persister dans l'erreur.
11 conçut néanmoins une si grande esiiiiie de
la vertu do ce grand saint, qu'il voulut lui eu
donner des marques par les présents qu'il lui
oITrit. Le relus généreux qu'en lit le saint
acheva do lui faire coiin litre le mérite d'un
homme si rare. II insi.-^la à lui f.iire recevoir
au moins une somme d'argent pour les pau-
vres chielieiis ou pour leur église ; mais ses
instances lureui mutiles. Lulin, ne pouvant
Ul
FP.A
rien ailier sur ce cœur insensible à loul
ce (|ui n'é(ait pas du salut des âmes, il lu
iloiJiia perniissiou de prêcher l'Evangile dans
ses Etais, ce qui clail la plus grande mar-
que d'estime qu'il pouvait lui donner, par
rapport à l'opposition que ces infidèles ont
«on-seulemeiii pour l'Evangile, mais même
pour le nom chrétien. Le saint, après y
avoir demeuré quelque temps, voyant qu'il
perdait son temps, eut le déplaisir de s'en
revenir sans avoir pu gagner une âme à
Dieu ou répandre son sang pour Jésus-
Christ, ce qu'il souhaitait ardemment.
Une des raisons qui obligèrent encoresaint
Français de retournercn l(alic,fut qu'il ap-
jiril avec beaucoup de chagrin que le frère
liélie, qu'il avait établi vicaire général en
son absence, avait innové beaucoup de cho-
ses qui tendaient au relâchement, ayant at-
tiré dans son parti plusieurs provinciaux
*)ui blâmaient la simplicité du saint fonda-
teur et taxaient d'imprudence l'austérilé à
laquelle les obligeait sa règle, dont ils re-
tranchèrent quelques points essentiels, et eu
modérèrent d'autres. Saint François, étant de
retour en Italie l'an 1220, ne vit qu'avec
douleur le danger oîi son ordre était exposé
par le relâchement qui y avait été introduit.
Il cassa l'élude que l'on avait établie à Bolo-
gne, il voulut que ses religieux abandonnas-
^ent ou démolissent ce couvent, qui avaitéié
bâti avec trop de magnificence et qui ne se
ressentait point de la pauvreté : néanmoins,
à la sollicitation du cardinal protecteur, il
consentit qu'ils y demeurassent; et, comme
le provincial de cette province, Jean de Siria-
cliia, qui avait ordonné ces bâtiments et (|ui
avait contribué au relâchement, persistait
toujours à soutenir ce qu'il avait fait , il lui
donna sa malédiction. A l'égard du P. Hé-
lii-, i.l «assa tout ce qu'il avait introduit de
nouveautés dans l'ordre en son absence, à la
réserve d'un statut qu'il avait fait de ne point
manger de viande, quoique contre l'esprit
de la règle, qui, conformément à l'Evangile,
permet aux religieux de manger ce qu'on
leur présente, de peur qu'il ne semblât qu'il
voulait favoriser la gourmandise, ce «ju'il
jugea plus à propos de tolérer pendant un
temps.
§ 2. Continuation de l'histoire de l'ordre des
Frères Mineurs, et de la vie de saint Fran-
çois d'Assise leur fondateur.
Toutes choses éiant pacifiées dans l'ordre,
rt saint François ayant écoulé ceux ((ui .ip-
prouvaieiit le gouvernement du P. Hélie
et ceux qui le condamnaient, il assembla le
chapitre générai à Nolie-Dame-des-Auges la
ijiêiue année 1220. Le provincial de lîoloiîue
y fut privé de son oi'iice, et le P. Hélie ayant
clé aussi déchargé du vicariat général, le
.>>aint fondateur uoiiirra à sa place le P.
Pierre de Calane, qui avait élé son second
disciple. Mais celui-ci étant mort l'année sui-
vante 1221, dans une grande répulaliou de
sainteté, saint François indiqua un aulrc
chapitre pour les fêles de la i'enlecùle, où,
j)ar rcvélatiou diviue et selon le comuian-
IHA ZVi
dément qui lui en avait été fait dans une do
© es oraisons, il désigna encore une fuis pour
vicaire général le P. Hélie.
Cet homme élail plein d'ambition ; il rece-
vait à la vérité fort bien les religieux qui
venaient voir saint François ; mais ayant
égard à Id qualité, à la science et à la di-
gnité des personnes, il donnait les premiers
rangs à ceux qui avaient plus de mérite, ne
donnant aux simples que les dernières pla-
ces, et souvent il négligeait ceux-ci pour
accorder toutes les commodités aux autres.
Saint François ne pouvait souffrir celle ac-
ceptation et cette préférence dans des per-
sonnes d'un même ordre; c'est pourquoi, un
jour qu'il en vint de plusieurs conditions, de
doctes et d'ignorants, le saint, après la béné-
diclion de la table , en fit asseoir à ses côlés
deux qui paraissaient les plus simples, et af-
fecta de ne pas regarder les autres qui pa-
raissaientavoirdu mérite. Hélie en fut choqué
et ne put pas s'empêcher d'en murmurer, eu
disant en lui-même: Hélas 1 frère François,
que ta simplicité fera tort à l'ordre 1 Tu meis
à tes lôtés des ignorants, et tu ne fais ])as do
cas des personnes doctes et savantes. Mais
le saint, connaissant sa pensée par révéla-
tion divine, lui répondit qu'il faisait plus de
tort à l'ordre par son orgueil, son faste et sa
prudence humaine. « 0 que les jugements de
Dieu sont impénétrables! s'écria le saint; il
te connaît pour tel, et il a voulu cependant
que tusois supérieur; il a même déjà ordonné
que je le laisse le gouvernement de l'ordre ;
mais que j'appréhende que ce juste juge no
porte un aulre jugement de toi, et n'ait d'au-
tres sentiments que le peuple en a, et qu'il
no donne un pasteur tel qu'il prévoit qu'il
aura un jour des brebis 1 Hélas 1 misérable
que tu es, ton sort est déjà décidé, tu ne
mourras pas dans la religion, tu as déjà élé
pesé dans la balance, et tu as été trouvé trop
léger avec Ion orgueil et ta science mon-
daine. » Ct'lte propliélie du saint fut accom-
plie, car Hélie fui le second général de l'or-
dre après la mort du saint fondateur, et a|)os-
tasia dans la suite, loinme nous lavons dit
à l'article Césarins {Frères Mineurs).
Siinl François obtint, l'an 1222, un privi-
lège du pape Honorius III , qui permettait
aux religieux de son ordre de célébrer les
offices divins les portes fermées dans un
temps d'interdit, et un an après il obtint
cette indulgence si fameuse pour l'église de
la Portioncuie,où il vient de toutes parts une
infinité de pèlerii>s, le second jour du mois
d'août, qui est celui auquel est fixée cette in-
dulgence, à cause que l'on y célèbre ce mêau;
jour la dédicace de celte première église et
beiceau de l'ordre. Cette indulgence a éie
confiruiée par les papes Martin IV , Alexan-
dre lV,l]oniface\iH,ClémenlV,Jean XXlî,
Benoît XI, el SixicIV, qui, l'an l'i81, reten-
dit à toutes les religieuses de l'ordre, vou-
lant qu'elles le pussent gagner dans leurs
monaslères, ce qu'il communiqua aussi à
toutes les maisons d'hommes lanl du pre-
mier que (lu troisième ordre. Léon X con-
firma te que Sixte IV avait accordé, co quo
DICTIONNAIRE DKS OflDRF.S llF.l.ir.lEDX.
313
fireiil aussi Paul V pi Gréiioirc XV ; pt l'an
1C2V. Urliain VIII ayant pulilié |p juliilé uni-
versel, qui (Ipvait comiiipncer le jour de Noi'l
de raiiiicc ■suivante, cl a\anl sjs[ien(lii, se-
lon la couluinc, pcndaiil le leipps qu'il du-
rerait, toutes les autres iiidulscucps , il
donna une bulle par laquelle il exreplait
celledcNotie-D.ime-des-Aiisis ou de la Por-
lionrule. Innocent X déclara la même cliosc
ilans le jubile universel de l'an Kî.'iO, ce
qu'ont fuit aussi ses successeurs, et Inno-
conl XII a éloiidu eelle indulgence à perpé-
luilé pour tous les jours de raniiée en faveur
de ceux qui, ne pou\anl pas s'y trouver le
jour de la dédicace de celle église, < hoisis-
scnt un autre jour dans l'année auquel ils
peuvent jouir de la même indulgence pour
une fois seulement. Le concours des pèle-
rins éiail si grand, le jour de celle fie de
Notrc-Dame-desAnges, qu'il y allait jusqu'à
cenl mille personnes, et, [mur emiêcher le
désordre, les officiers d'Assise et de Pérousc
se mettaient sous les armes; et, quoique la
ferveur des fidèles soil bien diminuée pour
toutes les autres indulgences, ils onl pour
celle-ci une si grande vénération, (jo'ij est
difficile de s'imaginer le nombre des pèlerins
qui s'y trouvent le deuxième du mois
d'août : en sorle qu'il est facile d'y voir l'ac-
complissement delà propliéliede saint Fran-
çois, lorsque, refusant les lettres patentes
que le pape lui oITr.iil pour la publication
de cette indulgence, il répondit à Sa Siiinlelé
qu'étant l'ouvrage de Dieu, il prendrait lui-
inémc le soin de la divulguer.
Nous jivons déjà dit que le pape Inno-
cent III avait seulement approuvé de vive
voi\ la rè:;le de sainl François, et qu'elle
avait été lue cl approin ée aussi de \ ive \ «lix
dans le concile général lic Lalran; mais le
saint fondateur, voulant avoir, la même ;in-
née i-l-2:i. li conlirmalion par écrit du pape
Honorius III(vur une vision qu'il eul), il alla
avec deu\ compagnons dans la vallée de
Uiéii, et monta sur le mont delà Colombe,
éloigné de deux milles de la ville de Kiéli,
pour retoucher sa règle, invoquant pour cet
effet les secours d i ciel par un jeûne au pain
et à l'eau qu'il y pratiqua penilanl ijuaranie
jours, ap es lesquels, ayant fait érrire celle
même règle selon (|ue le Sainl-Fsprit la iiii
avait inspirée, il descendit de la montagne et
«'en retourna à Assise, où il la donna au
P. Hélic, son vicaire, pour la lire et la gar-
der. .M.iis celui-ci la trouva trop austère
])our lui et pour ceux qui étaient ]iortés an
relàclicn)ent. Le saint alla ctisnite à Home
pour en demander la coiifiruiation an pape,
<|ui la lui accorda [lar une bulle clu .'10 octo-
bre (le la niémc année. (]etle règle est plus
rovjrlp pt plus méthodique que celle ijui avait
été approuvée de vive voix par Innocent III,
••I, quoiqu'elle ne renferme (|uc do\l/e clia-
pilrc-i, ils contiennent néanmoins en sub-
Blancc tout en i|tii élail marciué dans les
ving'-troi» cha|>itrcs de la première.
•-e lui l'an \ii\ ipie ce sainl fondateur
connut parlailemenl (|uil devait travailler
à devenir un niodélcaccomivli ii'unDieu cru-
ôi»
cifié. Dieu le lui ayant fiil ronnj'.itre par
l'ouverture du livre des Kvan;;iles , ce qui
arriva de la manière suivante. Ce saint s'é-
latit retiré sur le mont Alverne pour y jeû-
ner quarante jours en l'honneur de saint
Mi( bel, et y priani Dieu avec Ik aucoup d'iii-
sl.iuces de lui fiire connaître sa vcdonlé,
afin de s'y conformer eniièremenl, il eut une
forte pensée ijup Dieu la lui révélerait à
louvrrture du livre des Evangiles. C'est
poir(;uoi il dit h son compagnon de l'ouvrir
en l'iioniipur de la très-sainie Trinité. Ce
fiu'ayanl fait, et ayant trouvé par trois fois
dJlTérenles la Pas»ion de No're-Seigneur .lé-
sus-Chrisl, il comprit que, comme il avait
iuiiié ce divin lïédeniplp'.ir dans toutes les
actions de sa vie, il devait lui élre aussi con-
forme dans les douleurs et les souffrances
avant qu'il mourût : ce qui ranima telleuienl
m lui le feu île l'amour divin et l'ardent dé-
sir qu'il avait d'être crucifié avec .lésus-
Cbrist, qu'il mérita ce qu'il souhaitait avec
tant d';ir.leur : car le jour île la fête de
i'Fxaltation de la sainle C'oix, qu'il priait
a>ec plus (11- ferieurel qu'il était tout péné-
tré de douleur de celui qui par un excès de
chariié a voiilu être crucifié pour nous, il
vit un séraphin descendant du haut des
cieiix, qui, s'approcbanl de lui avec un vol
piécipiié, lui parut non-seulement aie,
mais même crucifié, ayant les pieds et les
mains en forme de croix. Sa létc était cou-
verte de deux ailes, deux lui servaient pour
voler, et ies deux aulics lui couvraient les
pieds.
La vision disparut, et aussitôt ce sainl
[lalriarcbe s.entit son ccrur eiifl imtné d'une
ardeur séraphique, et les marques des plains
du Sauveur p.irurenl sur son corps, par li
représentalii>n îles clous dont les têtes pa-
raissaient très-dislinclcn;cnl r.ii dedans des
mains et sur les (lieds, et les pointes à l'op-
posé, la cicatrice du côté était rouge et ver-
meille, et le sang en coulait souvent en
abondance. On ne peut douter de la vérité «le
ces sliginales après le témoi;;nage du pape
Alexandre IV, qui, dans un sermon qu'il fil
en présence de sainl Honaventure, dil les
av oir vues : ce qui est suflisainmpnl confirmé
par les dépositions do plusieurs autres per-
sonnes, qui assurèrent aussi la même chose,
et ()ui ne tirent point de difficulté d'en faire
leur serment, lorsque le saiol fui canonisé,
aussi bien (]ue par le bref du pape Oé-
goire IX, donné l'an 1-2:57, par lequel, souhai-
tant qu'on le croie fermemenl, il exhorte
tous ks (idoles à ne poiiil écouter le con-
traire. \ tituntuuen grande tic singuinre mi-
riirulttm (jiio ip^Hin sanclorum fplendore et
i/loriii Dominiis Je.ius Clirhlux tnirnliiliierdti-
lornvi!. nnivrrsiiiiii vsirœ tennre jirœsen-
(iiiin u(in i)i.liipie dn.rimu'i cj-;i}-inicii(luin, tt-
delircl i/iiad idem sanrltis rum ndhuc spnliuin
jiiirseniis vilœ pcrciirrrret, et poslguam illud
fcliiiler consummnvil, mavihus, latert ar
prdibits fpccie slirimnlH'n diiiiiiiiis r.TsIilit
insif/nitiis.... Igiliir ci.in id <ib ittiitrrsis fidc-
lihus crcdi firmilcr ciii)iiiiu.i, tlcvoiioncin re-
flrain rognmHS et hmlntuur iti Domino Jcfr,
5i5
ia.\
ra.\
3i6
fhiistn, in remissionem vobia peccaminum in-
iuni/enili), quatenus nb nsseï lione coniraiii
aures de cœtero penitus averlenles confrssorem
cumdem apiid Deum pin rohix reddalls vene-
raliiiiie prcpiliitm. Ce ponlife, qui voyait
souvent saint Françi-is pendant qu'il vivaii,
n'aurait pas parlé <le la soi le, s'il n'avait été
assuré de la vérité de ces siiRmates. Be-
noit XI permit d'en faire l'office publiqiie-
iiienl. Sixte IV en fit insérer la mémoire dans
le l\Iarlyrolo;;e' romain ; et Paul V, à la
prière de Philippe III, roi d'Espagne, sur ce
(lue d.ins quelques lieux on avait ci ssé de
dire l'olfice des Stip;mates de saint François,
en fit une obligation à tous les ecclésia-
stiques.
Ce saint, après avoir demturé encore
(]uinze jours sur le mont Alverne pour finir
son carême, en destendit portant l'image de
Jésus-Christ crucifié, gravée non sur des la-
biés d'airain ou de bois (aillées par la main
de ^ou^ rier, mais écrite sur sa chair avec le
do'gt de Dieu, faveur dont il s'eslimait si
indigne, qu'il faisait son possible pour la
cacher et dérober aux yeux des hommis;
mais inuli emcnt, car Dieu nianif s'a ces
signes de son amour pour François en fai-
sant plusieurs mirac>s qui en firent con-
naîlre la vrrlu et la sainteté à tout le monde.
!\la'gré les douleurs qu'elles lui causaient,
et qui étaient quelquefois si violentes, qu'il
ne pouvait marcher, il ne 1 .issait pus de
continuer ses fonctions aposlo!i(iues, se fai-
sant porter pour cet t ffet sur des charrelt -s
dans les villes et les bourgades, pour animer
tout le monde à porter la croix de Jésus-
Christ. C'était là tou'e sa science ; il f;iisait
profession, comme l'Apôtre, de ne savoir
point d'autre clrnse que Jésus crucifié,
n'ayant poiut fait d'autre étude depuis sa con-
version.
Depuis le jour qu'il reçi t les stigmates
jusqu'à sa mort, sa vie fut toujours laugiiis-
sanle; et il eut tant d'occasions de soulTrir
pour l'amour de Jésus-Christ, qu'il pouv^iii
dire avec ce divin Sauveur qu'il n'y avjit
pas une partie dans son corps qui fût exemple
de souffrance : car, outre les douleurs dont
nous venons de parler, et qui étaient conti-
nuelles, il eut un mal aux yeux, pour lequel
on lui fit un cautère qu'il soulïrit avec au-
tant de patience qu'il était cruel et extraor-
dinaire, puisqu'on lui brûla la peau et les
chairs juscju'aux os, depuis l'oreille jusqu'au
sourcil ; et il eut peu de temps après le corps
tout brisé par une chute violente qu'il fit par
l'inadvertance de l'infirmier, ce qu'il souil'rit
avec tant de patience, que , bien loin de se
plaindre, il baisa plusieurs fois la terre qui
devait bientôt le recevoir dans son sein. En-
fin, Dieu l'ayant voulu éprouver par toutes
sortes de manières, le saint, sentant que sa
fin approchait, se fit transporter du couvent
de Font-Colombe à celui de Notro-Dame-des-
Anges proche Assise, pour mourir dans le
lieu où il avait reçu le premier esprit de dé-
voiion, et qui avait servi de berceau à son
ordre. Y étant arrivé, il se fit mettre nu sur
•a terre, disant (|u'il voulait combattre en
athlète. Le gardien, voyant sa pauvreté, prit
une méch inle robe, avec une corde et un
Cl puce, et lui dit de les recevoir par aumône
comme un pauvre: ce qu'il lui commanda
en vertu de la sainteotiéissance. Le serviteur
de Dieu, ravi de ce qu'on lui donnait par au-
mône un habit pour sa sépulture, le reçut
pour y être enseveli comme un Frère Mi-
neur, à roniiilion qu'il mourrait nu et qu'il
demeurerait quelque temps en cet état après
sa mort. Ayant fait ensuite assembler tous
ses frères, qui se trouvaient pour lors dans
cette maison, il leur donna sa bénédiciion,
et à tous les absents, de la manière que le
patriarche Jacob l'avait donnée aux enfants
lie son fils Joseph, en se faisant croiser les
bras, et mourut tranquillement, le quatrième
jour d'octobre de l'an 1226, dans la qua-
rante-cinquième année de son âge, ayant vu
plus de quatre-vingts maisons de son ordre
établies, presque d ms tous les royauuies de
1 1 chrétienté. Il n'était que diacre, son humi-
lité l'ayant empêché de recevoir la prêtrise.
A peine fu!-il expiré, que l'on vit en son
corps un changement merveilleux : sa peau,
qiii était noire et brûlée du soleil, devint
Manche comme la lieige; les stigmates s'y
découvrirent avec plus d'évidence qu'aupa-
ravant : on eut alors toute la liberté pour
les examiner, et toute la ville d'Assise ac-
courut pour voir ces signes salutaires de no-
Ire rédemption dont Jésus-Christ l'avait fa-
vorisé, et que son humilité lui avait fait ca-
cher pendant sa vie. Le lendemain, de grand
matin, l'on porta dans la ville d'Assise ce sa-
cré dépôt, escorté d'une multitude incroya-
ble de peuples, qui avaient des rameaux ou
des cierges à la main. Il fut porté en passant
dans l'église de Saint-Damien, pour donnera
sainte Claire et à ses religieuses la satisfac-
tion de le voir et de baiser ses stigmates, et on
l'enterra ensuite dans l'église de Saint-Geor-
ges, où Dieu rendit son tombeau glorieux
par le grand nombre des miracles qui s'y fi-
lent.
Le P. Hélie, qui était vicaire général, écri-
vit une lettre circulaire à tous les couvents
lie l'ordre, pour leur donner avis de la mort
du saint fondateur. Grégoire IX, ayant fait
assembler le chapitre général l'an 1227 , y
voulut assister, et le gouvernement de l'or-
dre fut mis entre les mains du P. Hélie, qui,
affectant beaucoup de piété et un grand zèle
pour maintenir la régularité, fit difficulté
d'accepter le généralat, sous préîexte de ses
infirmités et de son peu de capacité; mais il
ne faisait cela que pour en venir à ses fins,
qui étaient de se procurer ses aises et ses com-
modités au préjudice de la régularité, en trom-
pant par ces belles apparences les religieux,
qui, le voyant si humble, l'en crurent plus
digne, cl consentirent que, selon qu'il en au-
rait besoin, il pût se dispenser en quelques
choses des austérités de la règle, et se ser-
vir de montures dans ses voyages. A ces
conditions il accepta l'office de général, et
fut le premier après saint François. Ce qu'il
fit de mieux pendant tout le temps (ju'il gou-
verna l'ordre, fui qu'il procura la canonisa-
517 niCTioNNAintinisoitonES r.r:Li(.ii;ux. sis
lion i\c rc s.iiiil fiMiilaUMir, (juo le | ape »!rc- faniillc osl onrorc divisée en provinces, vi-
Ci'iro I\ lil avec ln-aiirou|i de Sdli-iiiiiii' l'an cair es cl Ciislodies. On eiilcnd par proviii-
12-JS, ol «lonitit son tulle dans lou'e l'église, ces l'union de certain nonihre de cnuvenls
en livanl si fêle au V o(lol>re, par une bulle sous un ciief, qui dépciid du ijenéral. On ap-
qu'il piililia ou iliO. On n'eut pas pliilol pelait au coinnicncfiiuenl de Tordre vicairie
.iclicve la ci-romonic de la lanonisalioii, (lue t|uolquos couvenis unis ensenil)le qui, à
l'on iiav.iilla aux foiideiiieiils d'une éi;lise cause de leur pciil nombre, ne pouvaient pas
inapiiilique, qui devait cire dédiée en son jouir de la di;;nilé et des prérogatives des
lu.niicur pri''S des murs d'Assise. Le pape pro»inces. Sous le pape lùif;ène I\', les con-
v.ului incitrc la première pierre, cl donna };ré^alions provimiales de l'Observance ,
de f;rosses sDUimes pour contribuer à cet é.li- quoiqu;; consiJcrabk'S par le praïul nombre
lice, dont il donna le soin au général Ilélie, des couvents, n'avaient néanmoins queleliiro
qui, par une iransgressioii manifeste à la ré- de vicairies , iiaice qu'elles étaient subor-
j;lc du saint p.itriarehe, lil oicltrc des troncs données au minisire provincial de la cmn-
ilans celle éi;lise, et faire une quéle d'argent iminauté ou des (Conventuels; et l'un appelait
dans toutes les [)rovin(U"S. Nous avons vu vicaires provinciaux ceux qui étaient supé
dans l'ariicle Cksauixs les troubles tjue cela i leurs de ces con;;ré, rations , parce qu'ils
causa dans l'ordre, aussi bien que le rclâ- étaient obliijés de demander leur confiruia-
cliLMiient que i]uelquesaulrcsgénéraux intro- lion au provincial; mais elles ne laissaient
duisircnt dans la suite. Nous nous contente- pas de jouir des prérogatives des provinces :
ions de raj j'orter ici en peu de mots l'clat ce qui dura jusqu'à la bulle d'union de Léon
présent de cet ordre, qui s'est étendu dans X, dont nous parlerons dans la suite,
toutes les parties du momie, où, nonobstant On appelait aussi cuslodies, au commeii-
b s liérésii s dont lAnglelerre, rr.cossc. Tir- cemcnl de l'ordre, quel()i;es couscnls (|iii
lande, le Danemark, la Suède, la Slollande ('.lisaient partie d'une province qui, à cau.-c
et plusieurs autres provinces, tant en Alli- de sa trop grande étemlue, ne [louvant pas
tiiagneque dans d'autres paj's, ont été infcc- être gouvernée par les provinciaux, éiait
lees, et où l'ordre de Saint-François a per<lu divisée eu plusieurs custodies gouvernées
une infinité de monastères de l'un et l'autre par des custodes, dépendant toujours iiéan-
se\e, il ne laisse p is d'avoir encore pins moins du provincial de colle province, qui
desepl mille maisons d'iiommes, tant de l'Ob- était obligé d'y faire la visite tous les ans.
scrrance, Decbaussés, Ivéforinés, HécoLels, l'résenleaiCiit les custodies ont succédé aux
(Conventuels, (Capucins, que du Tiers Ordre, vicairies, et celles qui ne dépendent d'aucun
danslcs(\uellesil y a plus lie cenl(iuinze niilie [iruvincial sont immédiatement sujettes au
religieux ; et plus de neuf cents monastères général. Kllcs tiennent leurs chapitres en
de lilles, lanl Clari^ses et Urbanistes, que du particulier, ont un délinito;rc cusiodial ef
"l'iers Ordre, de la (Con< C|jlion et Annoiuia- se gouvernent d'cllcs-uiémes sou. l'aulorilé
des, toutes soumises aux supérieurs du pre- d'un custode; et les préfectures sont les inis-
miereldu troisième ordre, d.ins lesquels ilj a sions parmi les infidèles,
plus de vii'gt-liuit iiiille trois cents religieu- La Famille Cismontainc a soixnnte-six
ses : ce qui soconiKiit parles cliapilros gêné- provinces, trois custodies et six prélectures;
taux deces dilTerentes congrégations, où l'on j'illtraiiiontaine a quatie-vingl-unc provin-
fail toujours le calcul des maisons ctdesreli- ces et plusieurs custodies ; et toutes ces pro-
j^ieux el religieuses, sais compter les monas- \ inccs et custodies sont soumises à un géiié-
lères de lillcs, qui sont sous la juridiction des rai qui prend la quali é de ministre général
ordinaires des lieux où ils sont silues, et qui de tout l'ordre de Saiiil-Fr. niçois. Il a encore
sont aussi en lrès-;^ranil nom!)re. sous sa juridiction les Clarisses et Urbanis-
Tout l'ordre do Saint-rrar.çois est divisé tes, et les religieux du Tiers Ordre de Saint-
en plusienis hranelies, «lui sont les religieux rrant;ois, (jui oui une pro\ ince eu Portugal,
lie l'Observance, les Déchaussés, Kelormés deux en lispagne, et quatre en France. Les
ri Kécollets, qui se disent de rFtroite Obser- CCouv nluels ont un général qui prend le
vaiice, les r.oin cnluels elles Capucins, qui titre de m.;îlre général des Frères Mineurs
(orincnt Ions le premier onlre. Les Clarisses, (Conventuels; cl les Capucins en ont aussi un
irbanistes et (Capucines, qui sont du second (jui se dit ministre général des Frères Mi-
ordre; et le troisième, qui n'avait été insti- neurs Ca|jucins. Les religieux du Tiers Ordre
tué par saini François que pourdes séculiers, en Italie en ont aussi un parliculiei , que
r.oiii|reiid aussi <les religi;ux el religieuses, c<'ux de Flandre reconnaissenl pour supé-
qui foiineiil diflércntes congrégations. Les rieur, (^eux d'.Vlleniagne sont peu connus,
leligieux du [iremier ordre de l'une el i'au- el font bande à part, l,i plupart étant souuiiii
Ire observaiici! sont di»i-és en Famille (Ci*- aux évéqnes.
moni.'iiiK.' el l.'lramontaine. La Cis<iioiilaine Le gi'iiéral de tout l'ordre de Saint-Fran-
(diiiprcnil les coiivcniï (|ui sont en Italie, rois est à l'aiternniive de 11 Famille Cismon-
ti'iis d'Alli magne su| érii ure, la Hongrie, la tiinc ou de rUllramuntaiiie, et depuis uii
roiogiie, et les autres ()ui sont en S\ricet leinjis considérable on choisit tonjonis un
dans la l'alesliue, L'L'Ilramuntaine est coui- sujet du roi d'I'Cspagne. Comme la rèule ni
piivcc de couvents de France, d'I'Cspagne, de les slaluls de l'ordre ne nianiuent point lu
l'Alleuiagne inférieu e, de S, . xe , jusqu'au temps que iloit durer son office, les premiers
«oiitinenl; les îles de la Méditerranée. i'.\- généraux l'exerçaient jusqu'à leur iiioil, à
Iriquc, rA.sic vt Ici Iiidcs, L'uuc cl l'autre luuiui iiu'ils n'y rcuun<;asscut volunlaire-
ment, comme firent Ips bieiilnuniix Jo.m
!»arei»t f'I Jenn do rariiie; on -iiuili^Té cu-x,
comme firent K.iimoml C.jiufrcdi , (lar ordre
de l5oi)il'a<e \III, ft (lilles Delpliino. Il v en
n iii(''nic i|iii ont été dé; osés, coriitiie Uélio
lie Corloiiiio, Ciesceiiza Esiiis, Miclicl do
(li'sèiic, Antoine de Massa, Kaimond de ('ot-
liiiuala et Paul Pisoli: mais en ôlanl à ce
dernier le goiivernenicnt do l'ordre, on Ini
laissa le lilrc de général. Le |)apo Jules II,
(]ni avait été pendant vingt-sis ans prolec-
U'ur de l'ordre avant (]ue de niontor au sou-
verain pnnliiical, voyant ijuo l'office de j-'é-
nér.il, <|ui était à vie, appoitaii un préju'lice
considérab'e à l'ordre, le réduisit à six ans
seulement, d;ins le sixième chapitre jiénéi a-
lissime qui se linl à Rome l'an loOG, après la
renonciation forcée de Gilles Uclphino. Hai-
mond de Cotlignola fut élu pour le premier
général [lour sis ans, confurn'.ément à celte
réduction de Jules I!. l'ie V, par une bulle
de l'an 1571, ordonna que tes générauK
exerceraient leur olOce pendant huit ans;
mais Sixte V, Tan 1387, le remit à six ans,
comme il avait élé ordonné par Jules II. Si
le général meurt avant que d'avoir fini ce
temps, ou qu'il soit élevé à quelque dignité
de l'Eglise, on lui sulistiUie un vicaire géné-
ral qui est élu par les pères discre's perpé-
tuels de l'ordre, qui sont ceux qui ont exercé
l'office de général ou qui ont été vicaires
généraux pendant deux ans, s'ils sont pré-
sents dans l'une et l'autre famille, c'est-A-
dire Cismontaiiie ou Uliramoiitaine, ne de-
vant point cire appelés s'ils sont abicnls.
Dans la Famille Cismontaine, on doit appeler
à l'élection le procureur iréncral, le commis-
s.iire général en cour de Home, le procureur
général des Uélormés , tous les déiinitours
généraux cismontains et les ullratnonlains
qui se trouvent au lieu de l'élection, aussi
bien que le provincial, le vicaire ou com-
missaire de la piovince dans laquelle se fait
l'élection ; et, dans la Famille Ultramontaine,
le vicaire général est élu par le ccmmissaire
général des Indes, les déiinileurs généraux
de la nal on seulement où se fait réiection,
el les autres, s'ils sont présents, avec six des
provinciaux les plus proches. Si le géiiéial,
aviiit que de mourir, n'a pas fini son pre-
mier triennal, ou qu'il donne sa renoncia-
tion, ou qu'il ioil déposé, ou qu'il soit élevé
à quel([iie dignité do l'Kglise, le vicaire gé-
néral qui lui succède ne peut pas gouverner
l'ordre jusqu'au premier chapitre général,
mais il doit assemider les vocaux de sa fa-
mille et procéder à l'élection non d'un vi-
caire, mais d'un iisinislre général. Que si le
général meurt avant que d'avoir fini son
second triennal, ]v. vicaire générai qui lui
est substitué doit finir ce qui restait de ce
triennal, et il ne peut être de nouveau élu
général qu'après seize ans de vacance. Ce
qui a toujours été observé jusqu'en l'an 1700,
que le révérendissime P. Je. m de Las Torrcs
lut élu général dans le chapitre qui se tint à
Konie. Ce général étant mort l'an 1701, ou
lui substitua le révérendissime P. Alphonse
do liicziud, pour lors touiniissaire ijéiiéiul
Ff.A
5n0
des Tndes, qui fut confirmé en qualité do gé-
néral par II! papeClémenI XI. Mais à la lin
du second triennal, n'ayani pu faire tenir le
cliapiire général à cause de la guerre tloni
l'îùirope a élé affligée depuis l'an 1700, il
fut d'abord continné dans son ofllci' pour
deux ans par le même Ciémeni XI, par un
brefde l'an 170G, el enfin jusi]u'à la conclu-
sion de la paix par un antr<' bref de l'an
1707. Mais, élanl mort en 1710, et les mêmes
r.iisons qui ont empêché l'assemblée d'un
chapitre général depuis 1700 subsistant en-
core par les prétentions do l'emiiereur (^.har-
les ^'1 sur les royaumes d'IîsfiajJîi.ie, nonob-
s'ant la jusle [icissossion de Philippe V, le
révérendissime P. Joseph de tîarcia lui l'ut
substitué par l'élection qui m fui faite selon
la pratique de l'ordre en sensblables cas : ce
(]U! a élé confirmé par un bref de Clément XI,
en vertu duquel il jouit de tous les droits cl
do la qnalitô do général.
On élit aussi dans les chapitres généraux
un commissaire général pour la famille dont
le général n'a point élé lire. Pour conserver
la pais entre les religieux de l'une el l'autre
observance, on déciéta, dans le chapitre gé-
néral tenu à liome en tOGi, que le commis-
saire général sera pris à l'alternative d'entre
les Observants et les Réformés, el qu'ils au-
raient également des définitcurs généraux :
ce qui fut approuvé par le pape Alexan-
dre VII. Il a le même pouvoir dans sa famille
que lo général dans tout l'ordre, cxcepié
qu'il ne peut nommer aux offices dont la
nomination appartient de droit au général.
11 peut même faire valoir S' n autorité en
présence du général, esceplé dans les pi(!-
vinces que le générai s'est réservées. Son
office ne dure que pendant, un triennal. Le
général pouvait autrefois, quand bon lui
semblait, ne pas assembler de chapitre pour
en élire un autre, et il lui était permis de
faire élire un vice-commissaire jns(ju'au
premier chapitre général par les iiéres dis-
crels de la famille dont le commissaire gé-
néral était tiré. Dans le chapitre général do
Rome de l'an 1G76 on fit un décret par lequel
le commissaire général, aussi bien (pie les
déSnilours généraux de la même famille,
exercerait son oflce depuis un chapitre gé-
néral jusqu'à l'autre; mais Innocent XI ne
voulut pas approuver ce décret, el même io
révoqua par une bulle, ayant donné ordre
au général de tenir un chapitre pour l'élec-
tion d'un commissaire général. Ainsi, ou
vertu de la Imlie do ce ponlife, après que lo
commissaire général a fini son triennal, les
vocaux de sa famille en élisent un antre, à
moins que la tenue du chapitre ne soit em-
pêchée p::r la guerre, auquel cas le général
peut continuer lo commissaire jusqu'à ce
(juo le chapitre se puisse tenir, ou bien il
peut de son autorité en nommer un autre
de la même famille. Ce commissaire, après
son triennal, est discret [)orpélael dans ia
même famille, et ne peut être de nouveau
élu couMnissaire général ou ministre général
(ju'après avoir vaqué seize ans, à moins qu'il
ii'tu soit dispoii.é pur le saint siège.
5-, niCTIONNAlIlE DES ORDRES UKLIGIELX. 553
Lrs principntiï offres de l'orJro à In no- anlrcs rcrsonncs de l'un cl l'.a.lre scx- qui
n-ii.nli'.n .lu pen6r.il sonl ceux .le commis- onl répnn.lu l.-ur sanR poijr l.;_nom .le Jesiis-
8.-..re,l.-. l,..i.'sresidnnlàlaco..rduroi.ri'S- Llmsl, ou qui onl mcncdelre regardes
j.apne, le commissaire en cour de ll..me et comme sa.i. s par .a pureté <.o eur v.e.la
le procureur pneral de la r.-puliere ol.ser- n!:.,eur de leur pénitence etlo^don des mi-
vance. q..léiait a.itrefois commun pour lous ra les. Sans parler ues.unl Bonaventure.
les relisieux de l'une et Tauire ohservan.e; qui a me.iié le litre, de D.Kleur Serapii.que ;
mais les H.formcs dltalio en nl.liuienl un de s:i.nl Antoine de Padoue. dosant Rer-
du pnic (^li-ment Ml!, l'an 1(;03. Il fut d'.i- n.irdin de S enne, de saint Jean Cajuslran,
bord iiisliiuépar lespenéraux; maisparun et de saint Louis, evéquc de Toulouse, qui
bref d'I'rb lin VIII de l'an 1(3:2. il est présen- ont fait un des plus l.e.iux ornements de oc
teineni à la nomination du cardin.il protec- '"''me or.lrc, qui se gloiili," d'avoir eu aussi
leur. L'an Iti.'i.i, on accorda au\ Fr.incais Alexandre de Haies, maître de saint Rona-
un aj-eul en courde Home; mais ils ontaûssi venlurc. et Jean Duis, surnomme Scot à
obtenu un procureur pcnéral l'an 170V. 11 cause qu'il était Ecossais. au.]uc on a donné
n'y a néanmoins que le procureur pénéral le nom de Doclcur Sublil, pour avoir défendu
de lobs.'rNance qui ail place dans les <ba- •■'u-c autant de force que d'erud::ion la vé-
polles papales. Le général nomme aussi le «i'^' de l'immainlée coiiceplion de 1 1 sainte
gardien du couvent du Mont-de-Sion àJéru- ^■ie^ge, que l'ordre prit pour patronne sous
^.:Ienl. ou du Sauil-Sépiil.re.l.'quel est coin- relitiC. dans le chapitre péiiéral qui se tint
iiiissaire «-t nonce apostolii|ue dans la terre à Tolède l'an IGio. Nous irions lro|i loin si
.'•ainlc. cl a droit de se servir d Oriieinenls nous voulions parler de tous les céiibres
pontiticaux. Le couvent d'Aracrli à Kome, écrivains qui en sont sortis. Wadiniiue en a
et le graii.l couvenl d s Cnnielieis de l'aris lionné uii talalogue qui contient uii volume
sont aussi -ou mis immédialement ,-iu gêné- in-folio, cl dont le nombre a élé bien aug-
ral, aussi bien que l'hospice des IV'iiilcnciers nienlé depuis l'an IGoO, qu'ii fulimpriméà
de la basilique de Saint-Jean-de-Lairan à Uonie. Les personnes qui onl été cmidojées
lîome, qui sont des religieux l?élormés; le P'T les souverains .lonlifes el les princes do
couvent <Ic Saint-Pierre Îii-Montc-Uno d.- la l'Europe dans les légations ci les aiïaiies i/n-
nirnie ville, oîi l'on enseigne les langues portantes sonl aussi en trop grand nombre
orientales; le gardien de Cousiantinople, pour en faire un détail. Le pape (jrc;.'oire 1\
ijui est commissaire sur les couvenis de Chio donna ordre à Haimon, général de l'ordre,
de Smjriie el quelques autres du Levant; de réformer le Bréviaire et le Missel romain,
les pauvres Claiisses de Madrid .1 de Vienne et les corrections qu'il y Til ne furent pas seu.
<n Aulricbe. les Urbanistes du célèbre nio- lemenl reçuesdans l'oidn de Saint François,
iiaslère du Sainl-Suremenl de Naples, el mus elles le lurei:l aussi dans toute l'Kglise.
celles do Sainle-Marie-I'gyplienne de la t.iémenl Vil d.mna ordre aussi au cardinal
niéuie ville. Quignonez. qui aval' été général ilu même
L'ordre de Saint-François a donné à Î'E- ord e, de composer un Bréviaire par iculicr
g'i>.c quatre papes, qui sont Nicolas IV, pour les personnes de sa cour, e.iii lut aj)-
Al xandre V, Sixic IV. el Sixte \ ; quarante- prouvé par son successeur Paul lil et impri-
ciiiq cardinaux, un nombre infini de pa- nié pour la prcm ère fois à Home en l.'iîlo. La
iriarclies, .l'an hevéqnes cl d'évéqucs . cl commodiié de ce Bréviaire, qui élail lurt
deux de. teuis duSaiiil-Empire; lanl de per- couri, et di posé de li Ile sorte qu'on lisait
Sonnes illustres par leur science el parla l'Ecriluie sainte pendant lonli l'année cl le
s.riniclé de leur vie, ou'il est pres.iue im- Psautier euinr chaque si maine. fil que plu-
possible d'en f.iire le détail; non plus que sieurs personnes voulurent >'en ser»ir; il
des missionnaires que cet ordre a produiis " .V avait (]ue les prclres el les ciercs sécu-
dans les siècles passés, .(ui s.î sont cIimuIus '''TS qni le pussent réciter, cl encore avec
dans tant de pays dirTeieuls, que l'on peut ""c pi rmission particulière du sainl-siége,
dire <iu'i!s oui lail enlciutre leur voix par ce qui dura jusqu'à la réformalion du Bré-
louli- la terre, et qu'ils onl porlé la parole viaire romain, laite l'an l.'JGS p;ir ordre de
de Dieu jusqu'.'i ses exlremili-s les plus re- 1''" ^ . qui supprima tous les aiUres lîre.iai-
culecs. sans parler de ceux .|ui sonl eucore res speci.ileineiil celui .lu cardinal (,)ui;jno-
prcsentemcnl occupés .lans les qu.ilre par- n^z, donl il y a\ait eu un Irès-grand liomhri;
lies du iiioude à la cim>er>ii)n de inn.léles. .l'éditions, mais toutes falsifiées, à l-'î réser»o
lieielii|iies cl fcliismalinues. Il se glorifie des trois premières, qui sonl très-rares,
d'avoir i|uaranli--six martyrs (|ui .)nt été mis Outre la Bible d'AIca a en langue latine,
an < .iialouiie des saints cl donl ou f.iil l'of. grecque, hébraïque el cbaldaïque, que le
fi c d.ins tout l'orilre. il y en a dix-sejit qui cardinal Ximenès fil faire à ses dépens, on
uni ctc canonisés sous le (lire de confesseurs ; lui est aussi obligé .le nous avoir ouservô
plusii'urs auiri's à qui l'Eglise a donné le r.incien f)ffice mo/araliique, donl les cxem-
niirn d.; bienheureux el dont eLe a permis plaiies sont .levenus Irès-rares, principale-
de faire l'i.ffice. L'an !(;28, .lans le chapitre menl le Missel, quoiqu'il en eût fait tiier un
geiicr;il qui se tint à Uome, l'i n en complail liès-grand noml.re d'exemplair, s.
unaire-v liigt> donl .)n poursui\ait l.'i can.ini- L.' vérilalde habillem.'iil de saint Fran-
»..iion, el n- iDiiibre esl angmenlé depuis ce çois consisiait en une robe de mé'li.'inl dr;i|)
Icmps-là jus.)u'à cent quaire, aux.jucis on de couleur de cendre, avec un capuce p.nnlu
puurrail encore ajouter plus de deux mille allaclié ù la niôiiic rcbc faite eu forme du sac<
coiiiiiie on le peul voir dans IVstampc qui est
aucomtnenci'siieiitileceloine (1). Ses inemiers
disciples claieul aussi habillés de la même
manière. De toutes les congrégations qui
subsistent encore sous le nom de Frères
Mineurs, comme Observants, Déchaussés,
Réformés, Récollets, Conventuels et Capu-
cins, il n'y a que l'habit de ces derniers qui
approche le plus de celui de saint François;
ils ont seulement élargi etallon;;é le capuce,
par la forme pyramidale qu'ils lui ont don-
née. La pauvreié de cet habillement ne tanla
pas longtemps à être altérée par la vanité
du P. l'iélie, qui, ayant i-ris un habit plus
ample, en lut repris par saint François d'une
manière aussi sévère qu'elle était humilian-
te ; car ce saint fondateur le lui ayant de-
mandé, s'en revêtit, et, après s'être promené
avec ostentation en présence de ses frères,
du nombre desquels était ce premier infrac-
leur de la pauvreté, il le dépouilla et lejcia
par terre avec indignalion, en disant que les
bâiards de l'ordre étaient ainsi habillés.
Saint Bonavenlure, dans le chapitre général
de Nai bonne, l'an 12t)6, (il du cbangement
dans Ihabillement, premièrement afin que
les religieux fussent distingués des bergers,
et secondement pour ôter un abus que quel-
ques-uns avaient introduit , qui était de
p )rter des capuces amples qui , ne pou-
vant pas bien couvrir leur léte, les obligeaie.it
à y ajouter des aumusses ; c'est pourquoi il
ordonna que les capuces seraient ronds,
attachés à une espèce de mosette aussi ronde
par devant, qui se terminait en pointe par
derrière. La d.lïérence qu'il pouvait y avoir
entre ces sortes de capuces et ceux que por-
taient les bergers de ce temps-là , c'est que
les capuces des bergers étaient pointus et
longs, et ceux que saint Bonavenlure (Il
prendre à ses religieux étaient rondsetcourls;
mais les uns et les autres avaient des moset-
les, et il y a bien de l'apparence que le- ber-
gers les portaient encore de celte forme sur
la lin du quatorzième siècle et le commen-
cement du quinzième, car j"ai vu des Heu-
res en vélin qui étaient à l'usage du cardi-
nal Jean d'Armagnac, mort l'an li09, où,
entre les miniatures qui y sont, il y a un
berger représenté avec un capuce pointu et
une mosette, comme on peut voir dans la
figure que nous avons fait graver (2). U y a
bien de l'apparence que cette forme d'habil-
lement, qui fut ordonnée dans le chapitre de
ISarhonne, ne fut pas introduite tout d'un
Coup dans l'ordre, puisque dans la mosaïque
que le pape Nicolas IV lit faire dans la basi-
lique de Saint- Jean-de-Lalran, saint Fran-
çois y est représenté avec un capuce long et
pointu assez semblable à celui des capucins,
qui ont toujours lait tant d'estime de la dé-
couverte qu'ils avaient faite de ce capuce
Itmg et pointu, qu'ils ont souvent intenté
procès aux autres congrégations de l'ordre
au sujet de l'habillement, particulièrement
aux religieux du troisième ordre de Saint-
Fiançois en Sicile, sur la coulear de leur
F ko: S5i
habit; aux Conventuels Itéfurmés, sur la
forme de l'habit et les sandales de cuir; au».
Récoltels sur leur capuce po ntu, et aux re-
ligieux l'énilents du tiers ordre de saint Fran-
çois en Franix', sur ce qu'ils laissai.nl croî-
tre leur bai be, et (ju'ils portaient comme eux
une corde b anche.
Luc Wading, Annal. Minorum. Francise.
Goiizaga, de origine Seraphicie lieliyionis.
Rodulph. Tussinian. Historia Seraphica.
Dominic. de (iubernatis, Oiùis Seraphicus.
Marc de Lisboa, Cronica de las Menores.
Juanetin Ninno, Cronicas de lus Menores.
J'Vancisco lie Uoyas, Aniud. de la Orden de
los Menores. Michel de la Purification, Vida
Evanijelica de los Frayks Menores. Sanclus
Ronavenlura, Vit. S. Francisci. Itartholom.
de Pisis, Liber Conformitutum vil. S. Fran-
cisci cuin viln J. C. Henricus Sedulius, ///-
sloria Seraphica. Peirus de Alva , NaturcE
prodigiuiri,<jrutiœ poi lenlum, hoc est Seruphi^
ci Francisci viliv acta ad Christi vitan et
mttrlem regulata. Arturiiis à Monasterin ,
Marlijrvloijium Franciscanum. Spéculum Mi-
tiurum. Munumenla Ordinis Minorum, et Fir-
mamenia Irium Ordinutn S. Frandsci.
FRANÇOIS (TiRRS oudbe de Saint-). Vry.
PÉNITENCE et les divers noms qui dilîéren-
cient les congrégations du Tiers Ordre.
FRANÇOIS o'ASSISE (Ohdke de SaINT-).
Voyez FuANCiscAiNS.
FRANÇOIS DE PAULE (Ordre oe Sai.nt-J.
Voyez MiiMMEs.
FRANÇOIS DE SALES (Ordre de Saint-)
Voyez VlSITAND.NES.
FRERES JOYEUX (Chevaliers de l'or-
dre DE LA (jLO:\iEllSE ViERGE MaIUE, AFPELÉS
AUSSI led).
Après avoir rapporté l'Iiistoire des ordres
et congrégations religieuses qui ont suivi la
règle de saint Augustin, aussi bien que quel-
ques ordres militaires dont les chevaliers
sont véritablement religieux ou l'ont été
dans leur origine, ce qui fait (juc nous ne
les avons pus séparés des congrégations
religieuses, il nous reste encore à parler de
quelques ordres militaires dont les cheva-
liers, à ce que l'on prétend, ont été soumis
à la règle de saint Augustin, quoiqu'ils ne
fussent pas religieux. Les premiers sont les
chevaliers de l'ordre de la Glorieuse Vierge
Marie, Mère de Jésus-Clirist, qui furent éta-
blis par le P. Rarihélemy de Vicence, reli-
gieux de l'ordre de Saint-Uoininique, qui fut
ensuite évêque de cette ville. Ce père, voyant
l'Italie en trouble et en confusion par la fac-
tion des Guelfes et des Gibelins, institua
cet ordre l'an 123J. Le principal institut et
l'obligation des chevaliers étaient de prendre
les armes contre les perturbateurs du repus
public, et contre ceux qui violaient impu-
nément la justice. Us Tiisaient aussi vœu de
chasteté conjugale, d'obéissance et de proté-
ger les veuves et les orphelins. Les premiers
qui furent faits chevaliers turent Pélegriis
(jastelli, Castellau Malcuulo, Hugolin Lam-
bertini, Lodérii» Andalo, Giranion, Caccia-
(Ij Voi/., à la un du vol., n*7l.
(2) Voy., à la lin du vol., n" 72.
DiciioNN.viRr> nns ounr.r.s uf.i.icif.ux.
iKMiiiri, loim p iil Islinmnos l!n!onni«, Fc'-la-
iii.i. I.i iz.iiii <lo r.i'jïs'". f' l5.iii>ior A'lc'.ir>lo
lio Miiiiloiic. 1 l il y en n (|ui loiir dimiicnl
pour iiri'iiiiiT lî'niiJ m.'iilrc! Loilorin Aiidalo.
D.ins l.i s-Uilc ils fircnl cunCirmcr leur onln-
l'.ir lp p.ip'' rii.iiii IV, l'ail 12()2, ce qui a
l.iildireà qni'hiu.'S-uiis que col ordre ii'a-
\nn Ole iiiï-tiiuè qii.- celle .nméf-là. (k-silie-
\.ilicrs porta ciil un lialiil blanc et un man-
teau ^ris reiiiltc sur lequel ils niellaioiil une
croix roniTC II y en a qui prétcmleiil qu'ils
m porlaii'nl aussi une orleo il'or sur l> poi-
trine. Nul ne pou\ail cire reçu dans cel
ordre s'il n'ctjil Rcnlilliomme. il leur était
néanmoins défendu de porter des éperons
dorés, et d'avoir les harnais d' leurs che-
vaux dorés. Comme il leur était permis de
se n^arii-r, qu'ils avaient des cominandcrics,
qu'ils jouissaient de plusieurs privilé|;es et
commodiiés (iiii leur donnaient moyen de
subsister honorablement et avec éclat, et que
même dans la suite ils songèrent plutôt à
passer le temps dans les plaisirs, (ju'à s'ac-
qniller des oblig:atiGns de leur orlre, le piu-
ple, par une espèce de raillerie et de mépris,
les a[ pela Frères Joyeux.
Les sentiments sont dilîérenls loucliant la
croix qu'ils portaient; les uns leur donnent
une cieix de yueules à huit an^;!es, orléc
d'or et cantonnée de qualrc étoiles; d'au-
tres ajoutent à celle rrois l'imjige de la
sainte N'ierpe ; <juelqucs-uns prelc.idcnt
qu'elle éta t plus longue que large ct(]u'elle
avait seulement deux éloiles d'or aux deux
angles au-dessus du travers (I). L'abbé
Giustiniani, passant à Holognc en 1G77, vou-
lant s'inloriner de la vérité, trouva d:ins la
maison d'un des successeurs du comte Jé-
rôme lîentivoj;lio une croix en peinture sein-
Mable à celle dernière, quoique le peu de
chevaliers de cel (>rdre qui restent à pré-
sent portent la croix à huit pointes canton-
née de qualrc étiiles. Il y en a encore qui
font nicntioii d'une antre croix Heurdelisee
par les bouts, au milieu de la<iuclle est le
nom de Marie en cliilïre, avec un cercle do
rayons sous les flc^irs de lis. Cet ordre avait
lies commandcries à Dolognc, à Modène, à
Mantone, à 'l'iévise et en divers endroits
d Italie. Le dernier commandeur de l{(diii;ne,
iioiiMiié C iinille \olta, mourut en liiSÙ, cl
les biens de cet ordre furent donnés par le
p.ipe Sixte \ an collège de iMonlaîte. Les
églises de Saint-Matthieu, de Saiiil-l'ierre et
de Saint Paul, à (^as irate hors de lîologne,
él lient autrefois des coininanicrics.de cet
ordre. Lorsiiu'il fut éteint, les clievaliers
qui demeuraient A 'l'révisc conservèrent une
comiiu'inderie sous le nom de Sainte-Marie
de la Tour ; et lorsque le chevalier qui en
est prieur mi'urt, les chevaliers nomment un
d'intie eux pour lui succéder, l'eutétre
qu'au temps de l'extinction de l'ordre, ces
(hcvaiiers s'y opposèrent, et que par acconi-
jiiodemenl on leur laissa cette couimanderie
e»ec pouvmrde- porter la cr.iix.
yuyez Alennénius, de lielloy, l'abbé Gius-
(inlani, Scliotneheck et Ilermant, dans leurs
f/ixloirrs des Ordrfs mililiiirat rt de rhrva-
lerie. Taniburin, de Jiir. Ald>-iltiin disinii.
;?'»■, qu,r%lion. o, n. Oli ; et Carol. Si-;oii:us,
lih. xvii et XIX de Ilcqno Ilaliœ.
rilfcltlvS MlNEUllS. V<»ic: FiivNciscAiNs
cl les titres de leurs diverses branclies; par
exemple : Jtc'rollcls . Ca/nichis , Ob.-eiran~
ti is, Convcnluch. Colletants, etc.
FUÈUKS l'KÈCllliUKS. Voyez Do.y.Ni-
CAINS.
FRÈRIiS UNIS. Voyez Arméniens de Cit.-
Vftir.DIEN DE LUCOIIES ( Congréga-
tion de). Voyez Latran (Saint-Sauveur dk],
§2.
FRISE ou DE la couronne DE FlîR (Che-
VALIKRS de).
Quoique Sclioonebeck, dans son Histoire
des Ordres militaires, dise qu'avant l'ela-
blissement de celui de Saint-J.irques de l'E-
|iéc en lisjjagne, il n'y avait eu encore au-
cune société militaire qui consacrât s s
biens et sa vie à combattre contre les infi-
dèles pour le bien de la cbrélicnté, il ne
laisse pas néanmoins de nous en d )nner
d'autres qu'il prétend avoir élé institués [ilu-
sieurs centaines d'années avant celui de
Saint-Jacques de l'Epéc : tel est entre autri's
l'ordre de Frise ou de la Couronne, dont il
fait remonter l'origine jusqu'en l'an 802 ,
après Mennens. .Michieli, (îiusiiniani et quel-
ques autres, qui disent que ce fut Cliarle-
magne qui en fut le fondateur, et que co
prince donna aux clievaliers, pour marquo
de cel ordre, une couronne qu'i's devaient
porter sur un habit blanc avec cette de-
vise ci) : Coroiinbilur letjilime ccrians. Quel-
ques-uns disent <iue ce fut pour récompen-
ser les Frisons, qui lui avaient été il'un
gr.ind secours dans la guerre qu'il eut con-
tre les Saxons. D'autres prétendent que ce
fut ([uand il eut défait les Lombards cl (]u'il
eut lait prisonnier leur roi Didier. Giusli-
niani rapporte, après Hanconius, historien
de Irise, un prétendu privilège que ce princf!
accorda à Rome à ces nouveaux chevalier-.-
l'an 802, cl il ajoule avec d'autres ((u'il leur
donna la règle de Sainl-liasile. Mais, outre
que nous ne reconnaissons point d'ordre mi-
litaire avant le douzième siècle, quelle ap-
[larence y a-l-il que Ch irlemagnc cùl donné
à ces chevaliers la règle de Saint-liasile, lui
qui était si zélé pour faire observer celle de
Saint -lîenoil , et qui n'en reeonnaissali
point d'autre dans ses Etats? Ainsi je re-
garde cel oidre comme sup-posé. Ces auteurs
ajoulent que les chevaliers de Frise f lisaient
voni d'obéir à leur prince, el de delendre la
religion chrétienne aux dépens de leur sang.
La pi'incipaie cérémonie .qu'on observait a
leur réception, selon ces écrivains, était de
leur attacher le t)audrier et de leur metlic
l'epee ,iu côlé ; on leur donnait un souiflet,
i|ui fut changé depuis en un li.iiser el l'ac-
colade; cl on ne recevait personne qu il
0) Voy., i l;i niiibi V.I., ii' Ij.
{.') V')i;., .i 1,1 fin du vol., n* 'i.
?.;? FIL
n'cûl S'Tvi lin.] ans l'enipprcnr ;"i sns fr.Tis.
Mais cet onire, cohiiih' nous avons ilil, es!
suppose; cl jo ne sais sur ()Ui)i foiulé Sclioo-
iielx-ck dil (|iie les roi- ilo Franco s'en aUri-
Inient toujours la dit;iiilé de grands maîtres,
quoique le pouvoir di- faire des chevaliers
apparlieiine, dil-il, aux empereurs, conime
élai;l attaché à la couronne im; crialc ; car
nous ne voyons pas que les rois de France
ni les empereurs aicni créé de ces sorlrs do
chevaliers; cl ainsi Tabhô Ginsliniani pou-
vait se dispenser de donner une suite cliro-
nologiquc dos {grands m.iîircs de cet ordre
préieiulu, depuis Charlemagiie jusqu'au roi
de FraïKC Louis XIV et l'empereur Léo-
pold I".
Mennénius, Dclirin; Equesl. Oui. L'abbé
r.iusl niani, Uist. di tuti f/li. Ord. miliiuri.
And. Mentio , Ile Ord. milil. Hennan et
Schooncheck dans leurs flist. dr.t Ord.
milil.; cl Joseph Michieli Teroso, M dit. di
Cavul.
FULDE EN Allkmagne (Ancienne congré-
gation de).
L'abbaye de Fulde est sans contredit la
plus noble et la plus illustre d'Allemagne,
non-seulcnicnl à c;!use de ses grandes ri-
chesses et du grand non bre d'abb.iyes et de
prieurés qiii en dépendaient, mais encore à
cause des [)rérogalives accordées à l'abbé de
ce monastère , qui est prin<c de l'Fmiiire,
primat et chef de tous les abbés d'AlIcma-
pne, et chancelier perpétuel de l'impcra-
Irce. S iint IJonirace, archevêque de Mayenco
et apôtre d'Al'emagne, fat le principal fou-
d;ileur de celle fameuse abbaye. O saiiil,
(jui s'était servi de religieux pour élre ses
coadjutcurs dans la convcrsinu d'une infi-
nité de peuples en Allemagne, et qui se ser-
vait aussi d'eux dans d'autres afl'aires, sou-
haitait y liâlir un célélre monaslère pour
les y établir. 11 avait déjà fondé ceux d'(Jr-
doff et (le Frislar, mais ils no suffisaient pas
pour le grand nombre d'ouvriers apostoli-
ques qui le soulageaient dans ses travaux;
fâché de voir que saiiit SUirme, l'un de ses
disciples, s'ctait retiré avec quilques com-
paiinons dans le désert d'Horsfelil, où ils
étaient tous les jours exposés aux insuUcs
des Saxons, il leur ordonna de s'établir
dans un autre lieu. Ils en trouvèrenl un
plus commode proche la rivière de Fuldc
dans le pays de IJuchow, qu'on appelait au-
trefois (.irapfeld, entre la Messe, la Franto-
nie cl la Thuringo.
Ce lieu, qui s'appelait Ei!oha, appartenait
à Carloman, duc et prince des Français, que
sailli l'oniface alla trouver pour le prier de
le lui donner afin d'y établir une commu-
nauté de religieux; ce que personne n'a-
vait encore lait en ce pays. Non-seulement
Carloman le lui accorda avec une étendue
de quatre mille pas aux environs, mais il
exIxTta encore les seigneurs de sa cour de
contribuer ii rétablissement de ce moMas-
lére, ce que la plupart ayant fait , saint
Sluime y conduisit sept religieux l'an Ihk,
et deux mois après saint Boiiilarc y fit bàlir
FUI,
''^
une cglise avec le monastère, qui prit le iiojii
d;> la rivière de Fulde tjni y passait. Sainî
Sturme en fut le (irer; ier abbé. En peu de
temps le nombre des religieux angmeala iIr
telle soile, et les biens (jiio l'on fit à ce mo-
nastère fuient si considérables, qu'il y eut
pliîs de cinq cents religieux qui y demeu-
rèrent du vivant même de saint Slurme.
Saint lioniface, pendant qu'on travaillait
aux édifices de ce monastère, se relira sur
nue montagne voisine depuis appelée pour
ce sujet le Mont de l'Evcque, et y |!ass i lout
U\ temps qu'il y demeura, dans l'oraison et
dans la leclu-e dos saints Pères. Etant re-
tourné à Fulde, il oxhorla les religiiux à,
bien pratiquer leur règle, leur ordonna ih;
no prendre aucune boisson qui pût enivrer,
et de se contenier d'un peu de petit j bière;
mais la communauté s'éiaut auginonlée no-
tablement , colle rignrur fui modérée du
temps du roi l'opin le Bref; ni dans un con-
cile il leur fut permis de boire du vin, à
cause de ceux qui étaient faibles et infirmes.
11 se trouwi néanmoins un grand nombre de
religieux qui, ne voulant point se servir do
cotte permission, ne burent point de viu
lout le temps di! leur vie.
Les bâtiments de Fulde étant achevés,
rixtrèmo désir que les religieux avaient de
bien ob.i rver la règle de Saint-Benoît, les
fil résoudre d'envoyer quohjues-uns d'entre
eux aux grands monisières pour y remar-
qner la discipline réguli.re, et la pia ii|uer
ensuite dans toute son exacliludo. Ils en
parlèrent à saint ISonifacc, qui, apjirouvani
leur dessein, choisit pour ce voyage saint
Sturme, qui alla au mont Cassin, où il de-
meura quoique temps pour s'instruire par-
faitement de toutes leurs pratiques réguliè-
res. Saint Boniface, remarquant que ces re-
ligieux élaienl pauvres et avaient peine à
subsister, leur donna quelques terres pour
subvenir à lou, s besoins ; et ce fut à sa prière
que Carloin m : ugineiiia encore le territoire
de Fulde do trois mille pas, de sorte qu'il
conlonail sept millos de tour. Ce [irélal,
pour alTcrmir davantage cet établissomenl,
ob!iut un privilège du pape Zachario qui
soumeltait ce monastère iminédiatement au
Suinl-sicge; et, pour marque de sou alTcc-
tion, il y voulut élre enterré. Ce sain! fut
martyrisé par les Frisons l'an 75."). Son
corps fut d'abord enterré à Uliecbt; mais les
religieux de Fulde l'allèrent chercher pour
le transporter dans leur abbaye, comme ce
saint l'avait souhaité.
Après la mort de saint Boniface, saint
Stuinie ne put éviter la malignité do la ca-
lomnie. Saint Liillo avait succédé à saint
Boniface dans l'archevêché de Mayonce. Ou
prévint ce prélat contre ce saint abbé; il se
trouva de faux frères dans sa communauté
qui l'accusèrent de n'être pas alïecliunné au
service du roi, qui était alors Pépin le Bref,
ce qui le fit reléguer dans le monastère
d'Unnedice, ou plutôt Jum:ége, au diocèse
do Uouen. Saint Lulle en son absence obtint
du roi que le monaslère de Fulde lui sérail
soumis, et y nomma pour abbé un de ses
;iussit(M
retour dt! son
-S9
doinpsliqucs, nppelt- Mire. Mais les rn'i-
uiciix, refusiinl ilo se souincltre à ce pas-
leur, qui ét:iil i-trangcr et qui pnorait leurs
usages cl I" urs lois, sorlimU du moiiasli"'re
|.(iur en all( r porter leurs plaintes au roi,
qui leur perniil de choisir un abbé. Celui
.;u'ils éhiniil fui !.■ véiwrahle l'reszoldc,
qui, ayaiil été «lisciple di- saiul Sturuie dès
sa plus tendre jeunesse, chercha
les moyens de procurer
riKillrc, qui fui rappelé d'exil deux ans après
par Pépin. Ce prince ne se co ileiila pas
incinc de le renvoyer avec honneur à Kulde,
il \oulul encore «juil fûl réiabli d;!ns sa di-
giiilé d'abbé; il retira aussi ce inonastèro de-
là juridiction de l'èvéque de Mayence, el
conlirma le privilé<:e que !e pape Zarharie,
lui avait accordé, en le soumeltaril imnic-
diatemcnl au sainl-sié;;e. 11 le prit de plus
sous sa protection, el lui donna OiusMl avec
SCS dépendances.
Le V. Maiiillon (I) r.ipporte tout au long
ce privilège du pape Zaïharie, aliii que per-
sonne n"en puisse douter, el l'ail observer
ensuite, après le P. Tliomassin , qu'avanl ce
pape il n'y avait aucune alibaye qui lui sou-
mise imtnédialenient au saiiil-siége. Elles
élaienl pour lors réputées ou excinplcsde la
juridiclion de l'évéquc diocésain, ou soumi-
ses au mclropolilain ou aux assemblées des
évoques, qui élaienl fréquentes ci ce temps-
là ; ou au palri.iiche pir une condilioii ta-
cite, quoique cela ne fùl pas marqué prcci-
séinenl par le privilège. Nous en rapporte-
rons quelques exemples. Siiiil Tlieoilore Si-
ceote,évéque d'Anastasiopole, ayant renoncé
à l'épiscopat, reprit la conduite des motias-
lères qu'il avait fondés, cl dont il avait été
tiré quelque temps après sa retraite. N'ers
l'an 5'.)", elanl venu à Constanlinople, il ob-
linl de grands privilèges pour ses iiionas-
tens, qui lurent exemptés de la juridiction de
tout autre évoque, tl soumis seulement à
riîglise de (>onst;inliuop'e. Le pape saint
Ciregoire accorda, l'an 598, un priviléL'e à
l'abbaye de Classe dans le diocèse de Ka-
venne, par lequel, en're autres choses, il dé-
fendit a l'èvéque de prerdre connalssaïKi;
des revenus de ce monastère el d'en rien di-
minuer, de soustraire ai:cun titre, d'ordon-
ner aucun clerc sans le consenlemeiil de
l'aDbé, tl d'eu tirer aucun religieux malgré
lui pour gouverner d'autres m 'uaslèrcs.
'l'roi> ans après, le même [lapo, dans le con-
cile de Konie, où souscrivirent vingt el un
cvéques cl treize prêtres, fit une ronstitulioii
en faveur de lous les moines , qui n'est
qu'une conlirm.ilion el une extension du
privilège accordé à l'abbiiye de Classe: car
il défendit de jdiis aux évè(|ucs de célèlircr
des messes pulili()ues daiu les monasières,
d'y niellrc leurs chaires, ou d'y f.iirc le moin-
dre règlement, à moins qu<' ce ne fûl à la
prière de l'alibé, ()ui devait toujours avoir les
inoincs en sa puissance.
(1) Miliillon, Atinnl. linirdid., Inm. II, |i. 15'».
Tlioiiiass. biicipl. Eccles., pari, i, lib. m, c.qi. 51),
n. 8.
(2) .Mab.!lr)n, Aiiinl. Itm-iUct., loni lll, p. I "2.
Di(:TioNN.\im'; ni:s unniiES r.Ki.ioii i;x. nr.u
Les nionastèri'S fondés par les empereurs
tant d'iirieni que d'Occident étaient enùère-
menl exempts de la jurilictiou des cvéques
el des arehevètiucs. Nous avons un exemple
de celte exemption in Occident dans le mo-
nastère de Pescara , au royaume de Naples,
qui a clé aulrefois le plus célèbre an Italie,
qui fut même apfielé la Maison' d'Or, taul à
cause de la magnili;ence de ses bâlimi nts
(|;ic de ses revenus iinmenses('2|. il fut fondé
par l'empereur Louis 11 l'an 8ii(j, et lui fut
enlière. lient soumis , el les évêques de la
l'enna n'y prclen lirent Jamais aucune juri-
diction spirituelle avant l'an Itol, que Je, m,
évéquc lie la l'enna, lenia, mais inulilemeul,
de le soumellre à soa auloiité ; el même les
religieux de ce monastère, avnnl le pontifical
de Léon IX, ne s't talent point adressés à
Home pour avoir des privil.'ges, croyant que
l'auloctc de l'empereur suffis-iit pour main-
tenir leurs immunités. Une des prérogatives
dont jouissait l'iibbé de ce monastère, c'est
«lu'il se servait du sceptre de l'empeieiir
Louis an lieu de bâion pasl' rai, comme ou
le peut voir dans la ligure (3) que nous don-
nons d'un de ses anciiiis abbés , ijue nous
avons fait graver d'après celle que le P. .M.i-
billcii a donnée dans le cinquième loine de
Si s Annales Uenédictines. Le. rois de France
ont pré'.endu aussi avoir le même pouvoir
sur les monasières de leurs fondations, et le
doge de Venise est encore aujourd'hui pro-
lecleur du monastère des religieuses iliiis
Belle Vergini (4), qui n'ont pdini d'autie juge
que lui, non pas même le patriarche ; en
sorte que, s'il arrive quelque désordre parmi
ces dames, c'est au dope seul d'y pourvoir,
comme s'il élait leur è\éque, le patri.irclie
de \'enise n'ayant aucune juridiclion sur
elles. Le lecteur nous pardonnera cet. ■di-
gression, à laquelle le privilège d'exemption
accordé à l'abbaye de Fulde a donné 1 eu.
Saint Slurme ayant reçu ordre du r.ii Pé-
pin de reprendre le goiivernenicnl de son
abbave, les religieux ail renl au-devant de
loi avec leur croix d or et leurs reliques , el
le reçurent avec beaucoup de joie. Sa pre-
mière application fut dtv'den régler sa com-
munauté et de corriger ce qu'il y avait de
défectueux dans la vie cl les mœurs de ses
disciples. 11 embcliit ensuite l'église ; il chan-
gea le cours de la rivière de Fulde et la lit
entrer dans le monastère, alin que l'on y pût
avoir plus ab>)nd<lmm(>nl de l'eau pour ever-
cer li's arts nécessaiics à la vie, el que les
religieux qui y seraient occupés ne fussent
p.is obligés de sortir hors du monastère.
C'est une chose surprenante de voir com-
bien les richesses de celte abbaye au^oieu-
lèrent sous le gouvernement de ce saint abbé,
aussi bien que le nombre des religieux, qui
èlail de ()lus de cinq cents. Les quatre èvê-
ches de Ifavièrc, qui avaient élé fondés par
sainl lioniface, eu reconnaissance cl pour
mémoire de leur fondateur, oflrirent, iuime-
(")) Yoij., à la lin du v«l.. n* 7.">.
(l) \iii. de la llyii'S-.yi;, Iliitoire du ijuuvern. Je
Vfiiiic.
50!
r'i'L
(liaU'menl après la moil de ce saint, ci l'ab-
haye de Fuldc, comme à leur mère, cliacun
lin don. Premièrement , celui do Salzhonrg
lui donna une saline qui lui appartenait dans
!e bourg d'Hall , qui pouvait produire tous
les ans douze talents. L'église de Ralisboniie
lui donna quatre vignes et quatre métairies
royales avec tous les serfs qui y étaient, qui
(levaient envoyer, tous les ans, à Fulde un
esturgeon et la charge de deux cliev.tux
d'huile. L'église de l*assa\v s'obligea de don-
ner tous les ans de l'huile et du poisson.
Celle de Freisingue promit de donner tous
les ans de grands Irosnagcs, cl il n'y avait
presque point t!e fidèle qui ne doiiniil quel-
ques métairies à celti' abbaye. VA e en avait
trois mille dans la Thuringe, auianldans 11
provins e de Hesse et du Wcslph-alie, autant
dans celle du llhin et le pajs du Worins , et
un p.;rcil nombre en lîavière et dans la
Souabe , qui faisaient en tout quinze mille
mélaiiies. Les Français iniitèrenl aussi les
Allemands cl augmentèreiil considciable-
menl par leurs libéralités les revenus de
cette abbaye ; car, culte que le prince ('ar-
b^man donna le lieu où les fondements en fu-
rent jetés avec sej'l mille pas de tour, le roi
Pepiii lui donna Omstat , et Cliarlemagne
Amelembure avec leurs dépendances, ce qui
servit à la subsistance non-seulement de
. cette abbaye, mais encore des monastères de
Hoitzkirchen et de Soinhofen, qui furent bâ-
tis par la permission de cet empereur. Enfin
saint Slurme, après avoir gouverné cette ab-
baye pendant près de trente-sis ans, mourut
le 17 décembre 779.
Après sa mort, IJaugulfe, que d'autres ap-
pellent Gangulfe ou Landulphc, lui succéda.
L'empereur Cliarlemagne lui écrivit , aussi
bien qu'à tous les évoques et les abbés, pour
les exciter à faire fleurir les sciences dans
leurs communaulés, afin que les religieux
])usscnl plus aisément pénétrer les mystères
de l'Eiriture sainte. Jîaiidulfe Qtbalir le mo-
nastère de Wolfniunsler, où, après s'être
démis, l'an 802, de sa dignité d'abbé de Fulde
entre les mains de Ualgar, il se relira pour
mener une vie privée le reste de ses jours.
Le P. Mabilton appelle ce monastère de
Woli'munsler, qui ne subsi le plus, Baugolf-
?jinnst r, comaie ayant pris le nom de son
fondaieu'r, qùiavaii aussi jeté les fondements
il'un autre monastère sur le mont Saint-
Pierre, pioche Fuldc.
llatgar avait été airssi disciple de saint
Slurme; mais c'était un homme dur et in-
llexiblc, (|ui ne savait pas allier la charité et
la douceur avec une jusic fermeté. Pour une
petite parole que lui disait un religieux,
même par nécessité, il le maltraitait, et, sans
asoir égard ni à l'âge ni à la qualité, il le
reléguait dans quelque prieuré de la dépen-
dance de l'abbaye, sous prétexte d'en faire
valoir le bien. Cette grande sévérité causa
beaucoup de Irouldes dans ce monastère : ce
qui lit que, sur les plaintes des religieux,
l'empereur Louis le Débonnaire le lit déposer
(le sa charge et l'envoya en exil. 11 fomla in\
aalie monastère proche Fulde, au Mont de
DictIiDnnaikl: des 0;idiii;s ntLi^iEi s,
FIL 362
l'Fvèquc, qui dans la suite fut appelé le
Mont de Noire-Uame, à cause de l'église qui
fut dédiée à la sainte Vierge.
Ey gil , successeur de llatgar, Gl aussi bâlir
sur une haute montagne un monastère dédié
à saint Michel. Le célèbre i'aban-Maur, qui
succéda à Eygil, en fit aussi bâtir un sur le
mont Sainl-Jean. Ainsi Fulde se trouvait
entre quatre monastères , sur autant de
montagnes qui environnaient celte abbaye.
Rabau-Maur y fit fleurir les belles-lettres;
l'école de Fulde devint très-fameuse : on y
venait do toutes parts; on y voyait non-seu-
lement des moines de divers monastères,
mais encore des chanoines de plusieurs
cat lédrales. Raban y avait enseigné n'étant
que sim[)le religieux; mais, étant devenu
ab!:é , il eut un grand soin d'y entretenir
d'excellents maîtres : l'on y en comptait
mê:i e douze des plus doctes et des plus
habiles de ce temps-!.'!. H fit encore bâtir le
monastère de Saint-Sol ou Solenhosl. Ces
nouveaux monasières , qui étaient de la
dépendance de Fulde et dans lesquels il fal-
lait envoyer des religieux, avaient diminué
ce grand nombre qui y était du temps de saint
Slurme, car il n'y avait pas plus de cent
soixante ou soixante et dix religieux à Fulde
du Icmpsdel\aban-Maur. lien envoya encore
quinze pour peupler le monasièred'Hirsauge,
et leur donna pour abbé Luilberl, l'un de ces
savants maiircs de Fulde, lequel établit aussi
une école à Hirsauge qui devint très-célèbrt!
dans la suie. Uaban-Maur, ayant gouverné
F'ulde pendant vingt ans, se démit de sa
charge l'an 8^2. Il y en a qui ont prétendu
que c'étaii à cause du peu d'union qui était
parmi les religieux , les uns tenant le part!
de l'empereur lytbaire, les autres celui de
Louis, roi de Germanie, ces deux frères étant
puur lors en guerre, parce queLothaire,
après la mort de son père, Louis le Débon-
naire, ne s'était pas voulu contenter du par-
tage que ce prince avait fait entre lui et ses
deux fières, Louis, roideGeruiatiie,ctCh,irles,
roi de France. Quoique Raban eût tenu le
parti de Lothaire, cela n'empêcha pas le roi
Louis d'agréer son élection lorsqu'il fut choisi
pour être archevêque de Maycncc : ce princo
assista même à son sacre.
Raban-Maur eut des successeurs qui eu-
rent soin d'entretenir à Fulde la régularité ,
et d'y faire fleurir les belles-lettres et les
beaux-Trts , entre autres furent Sigheard ,
qui, comme il était fort habile architecte ,
selon Bruschius, fit faire de t^è^-beaux bâti-
ments et un pont de pierre à Fulde de six-
vingts couilées de long; Helmfride , qui par
son exemple excitai: les religieux à observer
exactement leur règle, et Hildebrand , que
l'on prétend avoir eu le d m de prophétie ,
et qui fut aussi archevêque de Mayenee.
Mais sous Hademar, successeur d'Helmfri le
dans le gouvernement de l'abbaye de Fulde,
il y eut une très-grande division et un désor-
dre excessif et scandaleux , dont on attribue
la cause à Fridcric, archevêque de Mayenee,
qui fut obligé de s'y retirer par l'inrideni
(jui suit.
II. 12
.-,.J3 HXTIONN.MHE DF.S OUHRES URIJCIEUX. 7Gi
L'an 030, Henri, fri^rc puînt' ilc IVmporour autre, rn avaa ilfj;\ parlé dans sa Clirono
()lh(m I", croj:inl qu'il avait plus lie «iroil A li)j;ic des nionaslères d'Alleniaiînt" , qu'il
1.1 couronne que so!i frère, par. e qu'il élail donna en i;>5(), cinq ans avant que ceux de.
né depuis l'élcvalion de leur père ll.nrià .M,ii,'del<ourg eussent coinniencé leurs ccntu-
Tempire, voulu! maintenir sa prétention par ries. Au re>le , aucun auteur contemporain
les arntes. Hvcrard . Iièrc du defunl empc- île ce prélat n'a parlé de ce fait,
reur Conrad, cl dislelnit. due de Lorraine , La discipline réc;ulièrc était encore beau-
sc lipuèrenl avec lui contre Oïhon , qui , les coup relâchée lorsque Hii liard prit le çou-
ajaiU défaits , obligea son frèie à \enir im- verncmenl de l'abbaye de Fnldern 1021;
plorcr sa clémence. Ce prince, cnijant que mai», par le moyen des religieux liibernois,
l'rideric, archevêque de Mayencc, avait fi- i. reforma ce monastère, d, selon Urusrliius,
vorisé les rcbi Iles , le relégua dans l'abbaje il obligea les religieux à prendre I habit
de l'ulde, quoiqu'il se fùl purgé de ce soup- monastique et la ù n.uire , qu'ils avaient
çon par la réce,.lion du corps cl du sang de quilles pour en prendre d'antres qui n'a-
Jésus-Christ.Iîruschius s'est trompé lorsqu'il v.iient jamais été en usage. Il fil bâtir le mo-
a dit que ce prélat é:ail fils du roi de France, nastére d'.Vnierbak dans le diocèse (l( >N'iii(z-
rl qu'on le fit revêtir de l'habit monac;il pour bourg, et celui de Sainl-André sur la rivière
rcnfernier dans ci'lte abbaye : car, outre de FuUle, et eut un grand soin d'entretenir
qu'il n'était point du sang royal de France, les éludes dans son abbaye, où il y eut ce-
c'esl qu'il avait été religieux à Fulde avai l pendant de grands désor.lres sous le gouver-
que d'être élevé sur le siège archiépiscopal ne menl de l'abhé NViderad l'an lOG.'J. L"
de Majcnce, et parcor.stqueni il devailavoir dilTercnd qui suit fut ce qui y donna lieu,
toujours censer\é lliabil religieux, conf ir- C'était la coutume depuis un long temps que
mémenl au huitième concile général leiui à les abbés de Fu'de, dans les assemblées d'évê-
l'(in>l,iiilino|ilc c!i 81)9, qui dérendail aux ques, avaient pl:ic« imnié liatement aprèsl'ar-
éïéqucs de" quitter l'habit religieux, sur clic\6que de Miiyence. L'em;)ereiir Henri l\'
peine d'circ déposés, lorsqu'ils avaient été étant à Goslar l'an I0(;2, et devant assister
lires du cbitic pour monter à l'éiiicopat. à l'olficc du jour de Noél , comme on plaçait
Frideric, ayantélé relégué;» Fulde, comme dans l'église pour les premières vé,jres L s
nous venons de le dire, suscita , à ce que sièges des évéquos , il y eut querelle entre
l'on croit, une cruelle persécution dans tous les officiers de l'évéque de llildesheini et
les monastères qui élaieal de sa dépendance ceux de l'abbé de Fulde, l'évèiiue prétendant
conlre les rcligii'U\ , sous préiexte de les avoir le pas au-dessus de l'abbé, à cause que
reformer. Ils avaient à la vérilc grand besoin Goslar était de son diocèse. Des parobs on
de l'être , et plusieurs évéques témoignaient en vint aux mains , et on courait déjà aux
qu'il valait micuxqu'il n'j eùlqu'un pet t nom- armes, lorsque Oihon, du • de Ila^ière, qui
iirc dcrtligicux sanslaclic, qued'in voir un soutenait l'aidié, fil cesser la quere le.
Irès-grand nombre mener une vie mond.iinc L année suivante, l'empereur voulant as-
el rel;kliée : ce qui lit que plusieurs, se scn- sisler à l'oflice du jo.ir de la Penlccdle , il y
tant coupables et ne voulant pas arriver à eut une nouvelle dispute lorsqu'il fallut en-
une si grande perfection que celle à laquelle core placer les siéjes. L'évéque d'ilildeslieini,
on le« voulait obliger, aimèrent mieux quil- se ressouvcnanl de l'alTront qu'il avait reç-i
1er riiab;l et sorlir du monasière; quelques- l'année précédente, fit cacher d rrière l'auti l
unsmëmcscmaiièienl, commcdit iinischius. des gens armés qui se jilèrent sur les ofli-
Hademar était pour lors abl;é de Fulilc; il cicrs de l'abbé de Fulde lorsqu'ils voulurcnl
traita d'abord avec assez d'iionnètelé l'ar- placer le siège de leur maître. Ci'ux-ri ayant
chevéque de .Mayencc; mais, ayant iiiterfe|ilé été secourus par di s soldais de l'abbé qui
des lettres qu'il écrivait secrètement, il usa entrèrent dans l'église, il se lit de pari et
de rigueur envers lui : ce (jui lut cau«e que d'autre un grand carnage, dont on jela toute
ce prélat, [ our s'en venger, lorsqu'il fui en la faute sur l'abbé, qui, iiui)ii|uc innocent de
liberté, pcisécula les pelils mon isléres avec ce désordre, fut obligé , pour se rédirner de
violence; cepcnd.int il ne put rien faire à la vexation, de donner de grosses sommes à
Fulde, à cause d'Hademar. qui avait les l'empereur, .à lévèque, et à leurs officiers:
bonnes grâces de l'empereur. de sorle qu'il fallu^ pour cela engager uin-
Ha'.iun surnommé bonose, (^ui succéda grande partie des biens de l'abbaye : ce qui
dans le gouvernement de l'ulde a llidemar, irrita tellcnuMit les religieux, que, lorsque
fui aussi archevêque de Mayencc. ISru-chius l'abbé reiourn i à Fulde, la plupart, iiriiui-
(l:t i|ue dans une famine il fit assembler une paiement les jeunes, se soulevèrent contre
(grande ()uaiiliié de pauvres dans un grenier, lui, et les plaintes qu'ils lui firent de ce qu'il
sous prétexte de leur faire donner du blé; avait ruiné leur monaslè e liégénérèrent en
niais qu'il y fit mclire le feu, et qu'en puni- une sédiiion ouverte. L'.ibbé ayanl eu ordre
lioii il fut mangé des rats, quoiqu'il se fût d'.iiler trouver l'empereur , son absence
ftauvé dans une île au milieu du lUiin pour échaufTa encore de plus en plus ces esprits
éviter ces animaux , qui passèrent ce fleuve muliiis, doiil seize prirent la résolution d'al-
a la nage pour l'y aller trouver. Quelques 1er trouver ce prince pour se plai..drc de
auteurs piélcmlcnl i)ue c'est une calomnie leur abbé. Pour cet elTet ils s.)rtireiit du inu-
iiiventée contre ce preial par bs cenluria- n.istère en piocession, portant :a croix éle-
teurs de Magdebourg : néanmoins Uruschius, vée, cl, alin do prévenir l'empereur sur leur
qui iip|iari.'U)U)ent l'.na l appris- de tiuelque iléinaichc, ils eu»o_ièreiit Ion d'eux à clie-
5(i5
ruL
Fur.
5G6
val avoc une lettre pour ce prince, liais
l'empereur fui si Indigné de ce procédé, que,
sans attendre leur arrivée, par le ronsoil de
rarclievcque de Cologne et du duc de Bavière,
il fil arrêter le porteur de la lellre avec trois
autres qui étaient les auteurs de la sédition,
qu'il envoya en divers monastères pour y
être enfermés dans des prisons , et ordonna
à l'iibbé d'user do main-forte pour contrain-
dre les autres de se soumetlre à l'obéissance.
Widerad envoya des soldats qui obirgcrcnt
les relifrieux mutins de retournera Fulde; il
fil mettre des gardes aux environs du mo-
nastère, et, ayant f.iit assembler les séililieux,
il en fit fusliiçcr deux , dont l'un était prêtre
et l'autic diacre, ri les chassa tous deux du
monastère. A i'égar.l des autres , il usa de
plus grande sévérilé ou de plus grande dou-
ceur, selon leur naissance et leurs fautes.
Le gouvcmemonl de Gottard ou (îoltfiiil,
successeur de WideraJ , ne fut pas plus
trauqnillc. La guerre qui survint entre l'em-
pereur Henri IV et son fils Henri V, I anlIO^i,
causa de nouveaux troubles à Fulde. L'abbé
avait pris le parti d'Henri IV, après la mort
duquel on porta des plaintes conlre lui à
Henri V de ce qu'il avait dissipé les bier.s de
l'abbaye. Ce prince les écouta et priva Col-
lard de son abbaye. La firtunc de son suc-
cesseur Woiiïliem ne fut pas meilleure; il
assiégea le cbâteaude Haselsleim ; et, comme
il faisait le sieste de Wartemburgavec l'abbé
d'Hersfeld, il l'ut pris et relenu pri.sounier
jicndant liois ans dans le château de Mul-
semburg.el, ayant clé encore accusé d'avoir
dissipé les biens dont il n'avaii que l'écono-
mat, il fal aussi déposé l'an 1114.
Les abbés de Fulde ne s'étaient pas mis en
peine jusqu'alors de pouvoir se servir d'or-
nemcnls ponlilicaux; mais Berih Schliz, qui
fut élu l'an 1133, les obtint du pape Hono-
rius M. Cet abbé cul un grand dilTérend avec
l'archevêque de Magdebourg an sujet de la
préséance. La cause fut plaiJée devant l'eni-
periur, qui ordonna que l'abbé de Fulde
prendrait sa place au-dessus de l'archevêque
ue Magdebourg. L'abbé .Marquard fil entou-
rer de murailles le bourg de Fulde, et en fit
une ville l'an lioO; mais l'an 1331, les bçur-
geuis, oubliant que les abbés ctaieul les fon-
dateurs de cette ville, se rcvollèrenl, démo-
lirent la citadelle qui joignail Tabbaye, rui-
nèrent les lieux réguliers, pillèrent tous les
meubles, et enlevèrent ce qu'il y avait de
jilus précieux. Henri de Hombourg, qui ea
etaU pour lors abbé, ayant porté ses plain-
tes àrempercui Henri VU, ce princeordonna
à l'aichevêque de Trêves de réduire les re-
belles à la raison el do les soumetlre à l'o-
béib^Saiice de leur seigneur. Il ramena l'abbé
cl les religieux à Fulde, el obligea les bour-
geois de recevoir avec soumission l'abbé,
q.ii en fil mourir douze, et en envoya aulant
en exil. Les paysans de la dépendance de
Fulde se révoltèrent aussi vers l'an lo2o el
ruinèrent tous les moiiastcrcs, lorsque Jean,
comte d'Hemerberg, de la maison de Bran-
debourg, en était abbé.
Ce u'elail pas seulement c )ntrc leurs su-
jets que les abbés de Fulde avaient à com-
battre, ils avaient encore à soutenir par la
force des armes leursdroits contre leurs voi-
sins, et à défendre leurs terres contre des
troupes de bandits et de voleurs qui s'étaient
fortifiés dans plusieurs châteaux. Conrad de
Malk, ayant été abbé en 1220, fil entourer de
murs ikimelburg e! y fil faire des forliHca-
tions; mais Hennan do Lodembourg, évêtiu '.
deWiirtzbourg, ayant voulu l'euipêchcr, el
s'élant avancé pour ce sujet avec des trou-
pes, fut mis en fuite par celles de l'abbé, qui
lit prisonniers plusieurs seigneurs du parti (hi
révéque, qui fut libli >,é ilc payer leur ran-
çon, ilmri de Este!, successeur de Gon ad
de Malks, l'an 1248 ajiuta de nouvelles for-
tifications à Haiiîrburg , et fortifia aussi
Aîaciilieiizell, Bruckneau, Ncugenhoffen, et
Sioltzberg, et rasa les cliâlcaux de Witters-
perg, Trunberg, Kralak el plusieurs autres,
qui servaienlde retraite aux voleurs el aux
b indits qui ravageaient le pays, licrihold.qui
f itabbécnl2t31,aclietalechâteaud'Haselte;n,
fil bàlir Lutlerbak et Bridcnbalk, changea lu
château de Blaukual, qui était une retraite
de voleurs, en un munaslôr'de saintes vier-
ges, et ruina plusieurs châteaux qui ser-
vaient de retraites à ces bandits. Mais, pen-
dant qu'il travaillait ainsi pour le bien pu-
blic et à assurer le pays, des personnes aux-
quelles il avait fait le plus de bien conspirè-
rent contre lui cl l'assassinèrent l'an 1270.
Bcrlhold de Mackencell , son successeur,
vengea sa mort, fil mourir trente des com-
pilées, cl brûler la citadelle de Sleiuaw, où
ils s'étaient réfugiés.
Les limites que nous nous sommes pres-
crites ne nous permettent pas de nous éten-
dre davantage sur les événements (Jiiîérenls
arrivés en cette abbaye, dont nous croyons
avoir rapporté les plus singuliers. Nous
ajouterons seulement que l'abbaye d'Hirs-
feld, qui était aussi chef d'une congrégaliou
eu Allemagne, fut unie à celle de Fulde sous
le pontificat de Léon X. Nous avons déjà dit
en parlant de la fondation de Fuhie, qua
s.iiul Slurmc , son fondateur, s'était d abord
retiré à Hirsfeld, qu'il abandonna à la persua-
sion de saint Boni l'ace archevêque de May encc,
à cause que ce l:eu était trop désert ; mais,
après la mort de saint Boniface, saint Lulle,
son successeur dans cet archevéeiié, fit
achever, l'an 75a, le monastère que saint
Sturme avait commencé à Hirsfeld. Le corps
de saint Wirgberl, abbé de Fritziar, qu'on
y transporta l'an 780, rendit ce lieu si célè-
bre, qu'on y bâtit une ville. 11 y avait ordi-
nairemenl cent cinquante religieux dans le
monastère. Pepiu el Cbarlemagni- lui don-
nèrent de grands biens, et Louis le Oébon-
naire y ajouta de grands privilèges. Mais ses
richesses furent la cause de sa perte, par la
cupidité et l'ambition de ses abbés, qui, ayant
eu le titre de princes de l'empire, la ruinè-
rent presque entièrement par des dépenses
sufcrliues. KUc était aussi bien que Fulde
itnmédialemcnt soumise au saiiU-siége. Vol-
pert en étant abbé, voyant lapauvrciéoù
clic était réduite, cl voulant punir les ha' i-
niCTIONNAIIlE DES OROHES IIEI.ICIEUX.
5(;7
Iniils de 1.1 ville donl il avnil roçu du mécoii-
Ifiiloinpiii, s'i-n dé^nil cuire les mains d;i
linpc l.eon X lan 15l;i. Uannaiil de Ivirc-
lnTg. qui ctJil pour lors abbi' de Fuldc ,
l'oluiiu à la prière de l'empereur M ixiini-
licn, pour l'unir à son abbaye, et le pipe
supprima ce lilrc pour celle d'UirsfL-Ul. Har-
inanl y envoya, la même année, son chance-
lier a\cc le pri.ur du n)onl Sainl-Jeaii et
quelques religieux, accompagnés de plu-
sieurs gens à c.'icval. Us dé|)osiT.nl le
doven, et en mirent un autre du monastère
de' FulJe, qui rerut 1 obéissance des rdi-
^-ieux.
Peu de jours après, l'abbé y alla lui-même,
accompagne d'un grand nombre de person-
nes, cl se mit en possession d'un château où
l'abbé d'Hirsfold faisait ordinairement sa ré-
sideme, et fil piclcr serment de (iJélilé à
quelques paysans; mais, ayant voulu exi-
ger la même chose des habilanls d'IIirsfel.l,
ils fermèrent leurs perles et se mirent eu
étal de défense, ayan! renvoyé sans aucune
réponse à l'abbé de Fulde la personne qu'il
leur avait envoyée pour savoir leur volonté.
Anne de Meclulbourg, veuve de Guillaume,
.surnommé le Puiné. Iandgra\e de llcssc-
Casscl, et tutrice de Pliilippe l" dit le .Magna-
nime, son lils, prit les intérêts des habiian s
«i'Hirsfeld, et fit mettre un autre abbé dans
le monastère, ayant obligé l'abbé de Ful.le
«le relourn. r dans le sien. .Mais le landgrave
Philippe ayani introduit dans la suite la reli-
fzioii protestante dans ses Etats, l'abbaye
d'Hirsfeld fut ru i née par les licré tiques ;el,éia lit
devenue principauté séculière par les Ir.ii-
lés de Westphalie, elle a été cédée au land-
f;rave de Hessc-Cas-el. Les principaux vil-
agrscl cliàlcaux (jui dépendaicntdc cette ab-
baye, cl (jui font [iréscnlemenl p:irtie de la
(irincipauté, sont Friling, haute et basse,
Gcila.Ulcrsdorf, Kerpeshauss, Mcngshauss,
Nedersula, llarlenbacli, Wergfarl el Noder-
Jossc.
Quaiil à l'abbaye dL' Fulde, elle est sou-
mise, comme nous avons dit, imiuédi itc-
incnt au saiiit-siégc, auquel l'abbé paye uno
rL'di'vance de quatre cents florins aussil(>l
qu'il est élu. Elle a été longtemps un sémi-
naire d'évéques: et, entre ses privilèges,
clic avait celui do fournira l'allernalive uu
arcbevcquL' à l'Eglise de .Mayence; en sorlc
que de trois il devait y en avoir un lire de
l'abbaye de Fulde. On n'y rero l que dos
personnes nobles, aussi bien que dans plu-
sieurs autres monastères d'.Mlemagne, donl
les abbés sont pareillement princes de l'em-
pire, cl ont aussi voix el séance dans les
diètes de l'empire et dans le collège des
princes, tels que sont les abbés de Kemp-
len, de l'rume, de Stavclo el de Corwey, tous
(le l'ordre de Saint-B, noil. Les abbayes de
Murbach el de Lure en Alsace avaient aussi
le même droit avant que le roi fiit maître
de celle province. Il 3 en a encore plusieurs
autres donl les abbés sont aussi princes de
l'empire. Outre les monastères d'h.immi's
qui dépendaient de l'abbaye de Fulde, il y
en avait aussi plusieurs de Gllos. Les reli-
gieux ont toujours conservé le droil d'élire
leur abbé. Nous donnons ici l'ancien habil-
lement des religieux de celte abbaye. La pre-
mière figure représente un religieux en ba-
bil ordinaire , la seconde un leligieux en
habit de chx'ur (1). Quant à l'habillement
moderne, ii est couforme à celui des autres
Bénédictins.
Bruvcrius, Antiquit. Fuldens. Bruschiup,
Chronolog. Momisier. Gennaniœ. Slangel,
Monastcriolog. Monast. S. licned. in Giiina-
nia. Trilhème, Annal. Ilirsiiug. Uulteau,
Jlist. de l'ordre de Sainl-Benoit, Joan. Ma-
billon, Annal. Dened. Heiss, llisl, de l'em-
pire.
G
GABRIEL (CoxcnÛGATiON de S.\int-)
Di la congrégation de Suint -Gabriel, avec la
l'i'e du vénérable serriieitr de Dieu César
Iliai^chetli, sénateur de Bologne, fondateur
de cette congi égation.
La congrégation de Saint-Gabi i^l recon-
nail pour fondateur César Hiaiulu'tli. issu
delà f.imille de ce nom, (|ui prelend tir. r
son origine de Robert 111, indu l, neveu du
gran 1 ThéoJoric, dit le Saxon, duc de Hour-
l^ogne, lequel, étant venu s'établir à Bologne
vi rs l'an 80'*, y cul pour fils Cunibcrl Bian-
chctli, el y donna aiusi commencemnnt à
cette illustre el ancienne famille, de laquelle
iiont sortis de grands hommes ()ni, par leurs
écri s cl la force des armes, ont pris la dc-
fen-e de i'Ivglisc romaine. César Bianchetti
eut pour père .Marc-.\n'.oine Bianchetti, sc-
ij.ili'ur de Bologne et chevalier de Calairava,
«•l (ii)ur mère Alessandra deCarminati, d'une
famille distinguée de Milan. Ccj deux illus-
(I) Vojf., a U lui du vol., n"> 70 cl 77.
très personnes vivaient dans une si parfaite
union, que leur bonheur eût élé parfait sans
le ( liagrin qu'ils avaient de voir qu'aucun de
leurs enfants mâles ne pouvait parvenir au
neu\ième mois, ni survivre à l'enfantemenl,
malgré toutes les précautions humaines qu'ils
prenaient pour empéclicr celte disgr.icc. Dans
celle peine, ils curent recours à l'interces-
sion de sainte Catherine de BdIo^uc, pour
ublcnir par son moyen un héritier qui em-
pêchât l'extinction d'une famille si ancienne.
Leurs prières eurent un plus heureux suciès
que tous les auires moyens dont ils s'étaient
servis jusqu'alors : car. ayant été exaucées,
ils curent, le 8 mai 1585, cet enf ml de béné-
diction qui fui nommé César sur les fonts de
baptême. Il lit paraîire dès sa jeunesse do
grandes dispositions à la piété cl aux scien-
ces, cl apprit en très-peu de tem|)S, outre la
langue latine, les langues espagnole, alk--
mandc cl csclavone. Le cardinal Laurent
Bianchetti, son oncle, cliariué du récit qu'un
3C9
CAB
GAB
570
lui tivail fait de ses bonnes qualités, et sur-
lont de sa piété, voulut l'avoir auprès de lui,
e! le fit venir à Rome, où il fonnut par iui-
iiiôine la justice qu'on avait rendue à son
neveu, ne pouvant assez admirer sa sagesse
el sa conduite ; car ilans un âge où on ne
respire que les plaisirs, il f;iisait pariître
tant d'cloignemenl pour les divertissements
(!e la jeunesse et une si grandi) aversion pour
le jeu, qu'il fit vu>u de ne jamais jouer, ce
qu il a iiivioiablement observé jusqu'à la fin
de ses jours.
De justes raisons l'ayant obligé de rotour-
ner cbeï son père après avoir passé quilques
années dans Home auprès du cardinal, son
oncle, il lui donna, en le quitt.int, une nou-
velle preuve de cet esprit de piété et de re-
!i;^ion qui animait toutes ses actions, car
celte Eniinence l'ayant fait entrer dans une
galerie plrine de raretés et de pièces cu-
rieuses (le très-grand prix, le pressa avec de
grandes instances de choisir ce qui lui agréait
le plus; m;iis le jeune Biancbetti, regardant
liiutes ces raretés et ces bijoux comme des
bigatelles, les méprisa toutes, à la réserve
d'un crucifix de simple stuc* qu'il prit, quoi-
qu'à regarJer la matière el le travail, il
n'eût rieu de considérable. Un choix si peu
attendu surprit et édifia extrêmement tous
ceux qui étaient présents, et le cirdinal en
p irliculier, à qui le jeune César dit qu'il le
voulait garder pour l'amour de lui. Il tint sa
promesse el le conserva toujours pi'écicuse-
uient, ne s'en étant détail qu'eu f.veur de la
congrégation de Saint-Gabriel, où on le
garde encore aujourdliui en n.émoire de cet
illustre fondateur.
11 n'avait pas encore vingt ans lor que ses
parents songèrent à le marier. Ce ne lut que
par une soumission aveugle à leurs volontés
qu'il consentit à prendre cet état, tout à fait
opposé à son inclination, qui l'avait porté à
rei-evoir la tonsure et les quatre mineurs,
après ses études, afin de se consacrer au ser-
vice de Dieu dans l'état ecclésiastique. Il
épousa donc en iG02 Erméline de Gamba-
lunga, d'une ancienne famille de Iliniini,
donl il eut neuf enfants, trois garçons et six
filles, cinq desquelles embrassèrent l'état
religieux, et la dernière fut mariée àScipiou
Butrigeri, d'une famille illustre de Bologne.
L'aîné des garçons fut le comte Georges-
Louis, en faveur de qui son père se démit de
sa dignité de sénateur, el qui épousa Aime-
Marie de Lorenzo Ralta. Le second fut le
comte Jules, colonel d'un régiment du pape,
qui fui marié trois fois, et eut de sa dernière
femme, Ma; ine Uiplovalasi, le comle César,
sén.itcur de Bologne, qui a hérité des biens
lie la maison de Gambalunga, qui est éteinte.
Le troisième, nommé Jean, prit le parti de
l'Iïglise, el fut abbé de Monte-Armato et de
Saint-Gaudonne de Bimini , prolonotaire
apostolique et prélat de la sacrée consulte.
Outre les biens de la fortune el de la nais-
sance que ces trois enfants (donl les deux
premiers eurent une nombreuse postérité)
reçurent de leur père, ils eurent l'avantage
de recevoir celui d'une sainte éducation, les
faisant souvent ressouvenir de ce que dit
saint Jérôme, qu'il faut s'appliquer ici- b<is
il des sciences qui puissent passer avec nous
dans le ciel, et ne les laissant jamais sortir
de la maison sans leur dire auparavant iiuel-
que mot d'instruction qui pût leur inspirer
la haine et l'éloignenient du péché, ce qu'il
faisait avec tant de zèle et tant de tendresse,
qu'ils en sortaient toujours extrèmcmeiii
touchés, et avec une résolution vive d'éviter
toute occasion d'offenser Dieu.
Il y avait dix ans qu'il était marié, lors-
qu'il apprit la mort du cardinal Bianchotll,
son oncle, que son mérite encore plus que
sa naissance avait fait parvenir à cette émi-
nente dignité, et qui se vit deux fois sur le
point d'être élu pape. Ce grand personnage
avait pris les degrés de docteur en l'un et
l'autre droit dans l'université de Paris. A
son retour à Rome, Grégoire XIII le fit pré-
lat de la sacrée Consulte et auditeur de Rote.
Pendant cinq ans qu'il exerça celle charge,
il composa trois grands volumes sous le
titre de Décisions de la Rote, qu'on a gardés
longtemps dans la bibliothèque de Rimini,
et qui sont à présent entre les mains du
comte sénateur Bianchelli Gambalunga, soa
arrière-pelil-neveu, qui doit les donner au
public. Sous le pontificat de Sixte V , il fut
envoyé en France avec le cardinal Gaétan,
et depuis en Pologne avec le cardinal Hippo-
Ijle Aldobrandin, qui, ayant été élevé au
souverain pontificat après la mort d'Inno-
cent IX, l'honora de la pourpre à la promo-
tion qu'il fit le 5 juin 15'JG; le mil en même
temps des congrégations de lu Signature du
Concile et du Saint-Office, el le fit protecteur
de l'église de Lauretle à Rome, où, après
s'être distingué dans tous ces différents em-
plois, il mourut l'an 1612 et fiff*enterré dans
l'église du Jésu de celte même ville.
César Bianchelli fut trèi-sensiblc à la
perte d'un oncle de ce mérite, qu'il aimait
très-tendrement; et, la regardint comme un
de ces contre-temps qui, prouvant l'incons-
tance des grandeurs de la lerrc, en doivent
détacher le cœur du véritable chrétien, il
s'en fit un nouveau motif de se consacrer au
service de Dieu. C'est pourquoi, voyant sa
maison assurée par la nombreuse famille
donl il avait plu à la divine Providence do
bénir son mariage, il fit, du consentement de
sa femme, voeu de chasteté pour le reste de
ses jours, quoiqu'il n'eût encore que trente-
cinq ans. Depuis ce temps-là il vécut plus
retiré qu'il n'avait encore fait, et, lorsqu'il
se fut démis en faveur du comte Georges
Louis, son fils, de la dignité de sénateur de
Bologne, il forma le dessein de se retirer une
partie de l'année dans une chartreuse. Ses
directeurs, qui le jugeaient nécessaire au
gouvernement de sa famille, l'empêchèrent
de l'exécuter; mais il se réserva la liberté de
s'y retirer en certains temps, principalement
durant la semaine sainte, qu'il passait avec
ces saints religieux dans un oubli général
de toutes les choses du monde. Lorsqu'il était
à sa terre d'Ozano, il y passait la plus grande
partie du jour à la prière, el faisait presque
S7I
dict:onn.muf- des
la même chosf à Bologno, dans un app;irtc-
rnenl éloigné du bruil. qu'il s'élail priiliqué
pour vaquer plus lihremeiil à ses exercices
de piété cl de dévotion, en sorte qu'il porlait
partout l'cspril do recucillenienl el de soli-
tude.
La mort de sa fi mme, qu'il perdit l'an 1C38,
]ui causa une sensible alfliclion. C'était une
d.ime d'une piété cxiniplaire, avci- laquelle
il av.iit toujours vécu dans une parfaite
union. 11 aurait bien voulu jouvoir se reti-
rer à la campagne dans une si- triste con-
joncture, mais cela ét.iii incon)palible avec
les dignités qu'il posséd.iit encore, dont une
des principales était celle d'elle un des gar-
diens des clefs du palais public, charge d'une
grande dislinclion, qui ne se confère qu'à des
sénateurs, et qui s'ci-t conservée longtemps
dans la famille des liianclii-tti, sans parler
de celle de gonfalonier de la justice, dignité
à laquelle il était é!c\é pour la troisième
fois, et dont l'autorité étail si grande, que
l'on crul devoir la limiter en quelque >orle,
en bornant à deu\ mois l'exercice et la pos-
session de celte charge, dans laquelle il se
comporta, aussi bien que dans tous les au-
tres emplois dont il fut honoré, d'une ma-
nière qui mérita l'approbation universelle de
tous ses ct:ncitoycns,qui l'honoraient comme
le père de la pati ie.
Le zèle dont ce saint homme était animé
pour le salut des Ames ne lui permellail pas
de voir avec indiflérence le pi u de soin (jue
l'on avait d'instruire la jeunesse cl les igno-
lants, en sorte qu'il se liouvail non-seule-
nieiil des enfants, mais même des personnes
il'ilgc cl de toutes sortes de conditions, qui
ne savaient pas les principaux mystères de
la foi ni les obligations du chrétien les plus
nécessaires ausalut. Il y avait eu autrefwis
lies écoles de la Doctrine Chrétienne insii-
luces à cet cff^.-!; mais elles étaient tombées,
à la négligence de ceu\ qui devaient y avoir
l'd'il. On avait réglé que les écoles seraient
gouvernées jiar un sénateur, qui, sous le
litiedc re, leur ou de préfet, en aurait la
>u:intendancc; cependant il ne ^o trou\ail
plus ])crsonne de ce rang qui vi.ulût s'en
iharger. I.cs n blés, à qui on av ail attribué
celte charge [lour donner plus d autorité aux
écoles, l'ayant dcd.iigncp, comme étant au-
dessous d'eux. César < ntrepril de les rétablir,
et, ayant comniuniqué son dessein aux pu;s-
s.inccs ecclésiastiques, il fit nommer pour
présider à celle sainte entreprise le père Cé-
sar .Maruffi de la C!impagnie de Jésus, fcr-
r.iro'S, honnne également liistingné par la
>-.iinl('lé de sa vie et par sa capacité. H oh-
lint (a même temps du sulTraganl du cardi-
nal Horghèic, archevêque de I ologne, l'insli-
lution d'une confrérie de gentilshommes dans
1 église de Sainle-Lucic, pour travailler au
rétablissement des écoles, dont il f:il lai sni--
inlcndant général, nonobsl.int toutes les dif-
ncullés qu'il lit pour acce, ter cet (uipl >i de
chanté, duqiU'l il se croyait incapable, il
«.oiiiniença p.;r d iiiner l'evemple d'une pieié
H duue buinililc véritablement chrétiennes,
unOKES IIF.I.1CIEI.\. S72
allant lui-même le crucifix à la main cher
cher les enfants dans les rues de Hologne
pour les conduire à ces écoles saintes, où on
les instruisait ; et, quand on lui représentait
que pir ces actions basses cl humiliées il
déshonorait en quelque façon sa dignité :
Enseignoz-moi , disait-il , un emploi plus
noble et [dus important que celui d'instruire
les ignorants des choses nécessaires à leur
salul, et je laisserai celui-ci pour prendre
l'autre. Il ne se contenta pas de les instruire
lui-même de vive voix, il le t'~l cm orc par
écrit en composant un pe il livre intitulé :
H'anicre d'instruire les ignoranl», auquel il
joignit un dialogue qu'il traduisit de l'espa-
gnol, où l'on enscicnait la manière de faire
des actes de contrition.
Tour rendre les clTels de son zèle plus du-
rables, il entreprit d'établir une congréga-
tion de gentilshommes qui s'engageassent à
procurer l'avancement de la doctrine chré-
li: nne, et qui, sans demeurer en cominn-
nanlé, s'assemblassent à certains jours dans
un lieu marqué, pour y vaquer aux exer-
cices de piété el picndre des mesures effica-
ces touchant l'exécution de leur dessein. Cette
compagnie fut d'abord établie dans l'église
paroissiale de Saint-Uonat, sous le nom do
Jésus el Marie, et ensuite transférée dans un
autre lieu où les confrères firent bâtir une
chapelle sous l'invocation de saint Gabriel,
dont le nom est demeuré depuis à celte con-
grégation. Outre celte première inslilution,
il en fit dans la suite une seconde, (omposée
de I ers inncs zélées, qui, vivant en commu-
nauté, concouraient au pi ux dessein des
premiers d'auianl plus efficacement, que,
débarr.issées de tout autre soin, elles en fai-
saient leur unique alT.iire. Ces associés furent
a| pelés 6"o(!i'i'te»;j, comme vivant ensemble,
à la différence des premiers, qu'on appela
Conflitenli, comme personnes qui se ren-
daieiil à certains jours ilans un uiênic lieu
destiné pour leurs assemblées. Les Conviicnli
furent d'abord établis dans la maison de
Saint-Gabriel ; ensuite, pour laisser entière-
ment celte maison libre aux Con/Iucnti, ils
furent transférés dans un antre quartier, où
ils acquirent une maison et firenl bâtir une
église sous le nom de Tous-les-Sainls. Cette
instilulion, qui lut approuvée par un bref
exprès du cardinal François Rarberin, légat
a lalcre cl vicaire général dTcbain Vlll. son
oncle, tant au spiriiuil qu'au temporel, dans
tout l'Etat ecclésiastique, a ceci de particulier,
(ju'ellc ne doit être composée <juc de per-
sonnes laïques qui aient un bien boe.nélo et
suffisait pour leur entretien, sans autre con-
formité pour l'habit que la couleur noire,
etinl permis à ceux dont la qualité le de-
mande, de porter des étoffes de soie. Ils
lienvenl entrelenir un ou den\ valets pour
les suivre quand ils vont en ville; mais dans
l'intérieur de la maison ils ne s>:nl pas plus
à eux qu'au reste de la communauté, l-'àge
poury elrc reçu est depuis 18 ans jusqu'à 50.
I.c noviciat est de trois ans partages en deux
probaliuns, dant la [iremièrc dure un au cl
373 CAN
la seconilo les deux aulrcs suivants, au boni
desquels, s'ils ont les deux tiers des vois de
ceux qui ont droit de voter, ils sont ineor-
porés à la congrégation. Us sont encore trois
;ins sans y avoir vois délibcralive, c'est-à-
dire qu'ils ne l'ont que si i ans après leur
entrée. Cette congrégation doit être gouver-
née par un chef sous le litre de supérieur,
assisté de quatre conseillers, qui, aussi bien
que le supérieur, sont élus par la couiniu-
naulé à la pluralité des voix, dont ils doivent
avoir plus de la nioiiié. Tous les ans on pro-
cède à une nouvelle élection ou confirmation
lani du supérieur que des autres, qui dispo-
sent de concert des emplois et des offices de
la maison, lesquels ceux qui y sont nommés
sont tenus d'accepter. Telle est la congréga-
tion de Saint-Gabriel, où, sans être astreint
à aucun vœu, chacun s'emploie, sous l'obéis-
sance du su(;crieur, à procurer le salut du
prochain par tous les moyens conformes à
.son état. ÈWd fut fondée Tau Hikï et établie
à Bologne l'an ICiG, dans le lieu où elle est
encore aujourd'hui. Ce l'ut après ces deux
établissements, qui produisirent dès lors cl
qui produisent encore aujourd'hui de grands
biens, et après une infinité d'autres bonnes
œuvres, que le saint fondateur fut appelé au
ciel pour y recevoir la lécompenso de son
zèle et de ses travaux, l'a n 16 j5, et le soixante •
dixième de son âge; laissant après lui une
fçrande roputatiou de sainteté, auiorisée de-
puis par des miracles. Sa vie a été donnée au
public par M. Uelfrate, docteur en l'un et
l'autre droit, et chanoine de Téglise cathé-
drale de Saint-Pétronne de Bologne, et im-
primée en cette même ville l'an HOï.
Carlo Antonio Delfralc, Viti del Venereh.
fcrvo di Dio Cesare BianclieUi fondiitor. délia
conqreg. di S. Gubriele. Herman, IJist. des
Ordres rclùjieux, lom. IV ; et les mémoires de
Trévoux, juillet 170D.
(jALLICANE (Dominicains de la congré-
gation). Voy. Lombahuie.
GANDERSHEIM (Guanoinesses proiestam-
TES de).
Des chanoinesses de Gandersheim , Quedlim-
boitrej, Herf'Vd et autres chanoinesses pro-
testantes, en Allemafjne.
Au milieu do l'hérésie dont une partie do
l'Allemagne et les provinces du Nord ont été
iiifeclées, les monastères de filles ont eu des
sorts difierents. Les uns ont été tellement dé-
truits , qu il n'en reste plus que la mémoire;
d'autres ont été ch.mgés en des usages pro-
fanes. Il y en a qui ont conservé la pureté
de la foi , et se sont maintenus dans les ob-
servances régulières, et d'autres enfin où les
r;'ligieuses, qui avaient déjà renoncé aux
vœux solennels, pour vivrc.en chanoinesses
séculières, ont dans ce dernier état embrasé
l'héréiie de Luther. Telles sont les chanoi-
nesses de Gandersheim, de Qucdlimbourg,
d'Herford. et quelques autres en AlleiiKig'ne,
dont nousallons rapporter l'origine, n'ayant
dessein de parler que de celles qui pieiinenl
la qualité Je chanoinesses ; c'isl pourquoi
CAN
5-i
je no dirai rien de quelques aulrcs monastè-
res qui se trouvent dans le royaume de Da-
nemark, où les religieuses, ayant renoncé à
la foi catholique, ont toujours vécu en com-
munauté sous l'obéissance d'une supérieure,
et gardé une uniformilé dans l'hahillemcnt,
comme ont fait les religieuses de l'ordre de
Saint-Dominique à Copenhague, qui, après
avoir embrassé l'îicrésie, «mt toujours gardé
la vie commune, et sont habillées de même
que les filles de la communauté de Sainte-
Geneviève à Paris qu'on appelle les Miramio-
nés, dont nous donnerons une estampe à
l'ariicle de ce nom.
L'abbaye de Gandersheim, dans la princi-
pauté de Wolfcrahulel, à trois lieues d'Kym-
bek, et à six de Goslar, dans l'évéché d'Hil-
desheim, a été l'une des plus considérables
d'Allemagne , et Yepez la met au nombre
des quatre abbayes princièrcs, où l'on ne
recevait que des filles de princes. Elle fut
fondée vers l'an 852 par Lutolph le Grand,
duc (le Saxe, ri Ode sa femme, dont Irois de
leurs filles furent successivement abbesses.
La première fut Halmode, l;i seconde Ger-
bcrge et la troisième Christine. La princesse
Sophie, fille de l'empereur Olhon 11, en en-
trant dans ce monastère pour y être reli-
gieuse, y causa de gra-ds Iroubles. Elle fit
bien paraître qu'elle n'y entrait pas dans un
esprit d'humilité : car, croyant que ce serait
un déshonneur | ourdie, comme fille d'em-
pereur, de recevoir le voile des mains d'un
prélat qui n'eût pas le pallium, elle ne vou-
lut pas le recevoir de l'évoque d'IIildesheim,
auquel ce monasièrc avail toujours été sou-
mis depuis sa fondation, cl elle voulut que
ce fut l'archevêque de iUayence qui le lui don-
nât. Osdage, qui était évéquc d'Hildesheim,
s'y opposa, et les évêques, qui étaient venus
pour assistera cette cérémonie avec l'empe-
reur Othon , favorisant i'évêquc d'Hildes-
heim, on convint que ce prélat et l'archevê-
que do Mayence lui donneraient ensemble le
voile, aprèsque, selon la coutume, elle aurait
promis l'obéissance el la soumission à l'évo-
que d'Hildesheim. Les choses demeurèrent
en cet état sous le reste du p ntificat d'Os-
dagc cl de Gerdage, et sous les premières
années de celui de Beniardj qui monta sur
le siège épiscopal d'Hildesheim, l'an 092.
Pour lors le relâchemen!, qui s'était déjà in-
troduit dans l'abbaye de Gandersheim, alla
jusqu'à un tel excès, que les religieuses y
viraient sasis aucune subordination. Le luxe
et la vanité y régnaient, et l'on n'y recon-
naissait plus l'autori'é de l'évcque. La prin-
cesse Soph e, malgré l'abbesse, qui s'y op-
posa fortement, se rendit auprès de l'arche-
vêque de ]\layence, et demeura plus d'un an
dans son palais. L'évêque d'HilJcsheim l'a-;
virtit plusieurs fois de retourner dans son '
monastère, mais ses remontrances furen!
inutiles. Elle anima l'archevêque de Mayence
contre lui, et, oubliant co qu'elle lui avait
promis le jour de sa consécration, elle publia
qu'elle n'avait point reçu le voile de ses
mains, mais bien de cdlcs de l'archevétiuc
de Mayence; que Gandersheim n'était point
r75
(le sn jiiriilitlion, et qu'dlo no devait pas lui
obéir; el, olinl retournée en son monastère,
rllc cxt ita aussi les autres re'i>;ieuses à ne
point reeoniinilre l'évéquc rlHildeslieirn.
Kn effet, le temps appro( li.inl qu'on devait
faire la dé licaee de la nouvelle éplise de ee
nionaslcre.la princesse Sophie, àquil'abbesse
ovait donné le soin de pourvoir à tout ce qui
serait nécessaire pour la cérémonie, invlla
l'archevêque de .Mayencc, et le jour fut (ixé
à la félc de rKxallâlion de la sainte croix.
L'évéqnc dllildi^sheim, qui de son ccUc avait
été prié par rabl)esse de faire ce jour-là la
cérémonie, promit de s'y trouver. Mais l'ar-
chcvéque de Mayence voulut différer jusqu'à
la fêle de saint Malthicu, et le fit signifier à
l'évêque d'ilildeshciiii, (]ui, ne pouvant s'y
trouver ce jour-là, vint à Gandcrsjjcini le
jour de rF.xaltalion de la sainte croix, pour
consacrer l'église, comme il en avait éléprié
parl'alibi'sse ; mais au lieu d'y trouver ce qu'il
fallait pour la cérémonie, il y trouva au con-
traire des personnes aposiées pour l'insulter.
Il dit néanmoins la messe en présence des
religieuses, qui étaient fort animées conire
lui. et les obligea à poi ter leurs offrandi s et
recevoir la bénédiction. Le prélat, au milieu
de la messe, fit une exboilntion pour conso-
ler le peuple, qui murmurait liaulemcnt de
ce qu'on traitait son évéquc si indignement,
cl à la fin du discours il défendit que l'on fit
la consécration de l'église s.ins son consen-
tenieni, ce qui irrita si fort les religieuses,
que lorsqu'elles présentèrent leurs offrandes,
elles les jelèrent par terre avec indignniion,
en disant des injures à leurcvêque. L'arelie-
véque de Mayence vint à Gandershi im le
jour d?. saint Maithieu pour faire la dé. li-
caee. L'cvéque d'Hildeslieim ne s'y trouva
pas, et envoya à sa place lilikéliiird, cvêque
de Si hieswig, que les guerres avaient obligé
d'abaiïiloiiuer son diocèse. Il s'oppusi, au
nom de l'éièque d'Hildeslieim, à toutes les
' nlrcprises de l'archevêque, et la consécra-
tion de l'énIise fut suspendue. Ilcrnard eut
recours à Uome; l'on y tint un synode l'an
10;)l pour (orminer ce différend, et l'on y
donna pain de cause à c^ prélat ; mais à son
retour de Itome, étant allé à Gandersheim, il
y trouva des gens en a' mes, tant de la part
•le la princesse Sophie que de rarclievé(iue
do .Mayence, qui l'obligèrent de se retirer.
L'on tint encore [ilusieurs assemblées d évo-
ques en Allemagne pour le même suji'l, et
celle affaire ne lut terminée i]ue l'an 10 i7.
La juiiditlion de re monasière fut cntiére-
minl adjugée à l'cvéïiuc d'Hildeslieim , qui
(il enfin la dédicace de l'église; cl I ar( lie-
véijiie de Maycme, ayant reconnu sa faute
dans le < oncile de FraiicforI, renonça à tou-
tes les preientions qu'il pouvait avoir sur
(janderslieiiu, et pour témoignage il donna
à l'é^êque d'Hildeslieim une crosse ou bâliui
pasioral. Aribe , an hcvéque de Mayence,
voulant renouveler relie querelle eu 102i,
l'enqiereur Conrad II l'en einfiéclia; mais la
prineessc Sipliie, qui av.iit élé faite abliesse
'le dan ler-InMiu .ipiés l.i mort de (ierburtre,
Mc usii point d'iuqui. 1er les cvéques d Uil
DICTIO.V.NAIUE DES OUDUES RELIGIEUX.
376
dcshrim au sujet de la juridiclion. Elle re-
connut sa fauie avant que de mourir, et elle
alla Irouver l'évèquc saint lioilard, qui le-
n.iil pour lors le siège d'Hildeslieim. lïile lui
l'romil toule sorte de salisfactions ; et ce pré-
lat, qui eiail malade, lui ayant répondu
qu'il examinerait celle affaire, il lui donna
terme jusqu'à la fêle delà Puri.lealion de la
sainic Vierge. S. ipliic , qui appréhendait la
mort, lui dit : l'hu à Pieu que et jour-là nous
Iroivc en bonne santé l'un el l'autre! L'évè-
que à ces paroles lui répliqua : Moire vie est
entre les ma ns île Dieu ; muis quelifue chose
qui arrive , nous discuterons certainement
cette affaire ilevnnt le véritable Ju/e au jour
de la fête delà l'urifii alion de la sainte Vierge.
La chose arriva couime le saint l'avait prédit,
car il niouriil huit jours après, el l'alihesse
Sophie, le jour de la Purificaliou de la sainlo
Vierge, de l'an lO.'iS.
L'on lie put réparer les désordres que
celte ablu'sse avait ca\isés à (îaiideisheim.
Les religieuses, qui à son exemple vivaient
en séculières , s'acioulumèrenl à celle ma-
nière de vie, et, ayant renoncé à la règle do
saint Benoit, aux observances régulières et
aux vœux solennels dès le xr siècle, elles
cmbrassèrcnl facilement l'hérésie de Lullier
lorsque toute la Saxe en fut infectée, ce qui
arriva sous le gouvernement de l'.ibbesse
Claire, fille d'Henri Ili dit le Jeune, duc do
Brunswick, qui épousa dans la suite l'Iii-
lippc de Brunswick, duc de fîubenhagen,
sou cousin, et mourut en l.'JOo. Il y a eu
aussi plusieurs autres princesses de la même
maison qui ont élé abbesses de (landcrs-
heirn : comme I)orolhée-.\ugiiste, morte en
IGil ; Christine-Sophie île lirunswick, qui
épousa en 1G81 Auguste (îuill.uime, son cou-
sin germain. La prineessc Henrielie-Chris-
line de Brunswick Wolfenbutel lui succéda ;
mais, l'an I7li, erllc princesse, après avoir
reiionré à la qualité d'.ibbesse de Ganders-
heim, abjura le luthéranisme en:re les ui.iius
de l'abbe de (]orvey, el reçut le sacrciUi'iU
de (••Mjfirmalion à Burcmonde par les mains
de l'évêque de la même ville. Ce monastère
a élé si considérable, que Bruschius, qui écri-
vait en lool), dit que dans ce temps-là il
avait encore pour vassau\ non-seulemeut
des princes de la maison de Briinswiek, mais
aussi de celle de Saxe et de Brandebourg et
plusieurs barons et seigneurs d'Allemagne.
L'abbesse est princesse de l'empire, mais
r.on pas imméJiatc, cl elle n'envoie pas des
députés aux diètes. La religieuse Uoswid,
qui s'csl rendue célèbre par les ouvrages
qu'elle a composés eu vers et en prose,
était professe de ce monastère. |{|le parlait
le grec et le latin avec faeililé. Islle écrivit
eu vers, à la prière de l'empereur Oihon II el
par ordre de Gerbcrge, son abbesse, un
KIoge historique de la vie d'()tlion premier,
cl, depuis, le M.irlyre de saint Denis et de
s.iint Pelage, avec d'aulres ouvrages. Elle
mourut l'an 1)07.
Joan. Mabill., Annal. Hcnid., lom. IM et
IV; el Gaspar ISruschius, Chronoloij. lU'j-
Hdslei'. Gcrm.
377
G AN
CEN
Z1S
L'abbaye (rErfurlli , sidicc dans la ville
(le C' nom, sur la rivière de Vehra,dans le
comté de Uavensboiirï, a eu le même sorl
que celle de Gandcrshcim. Elle fut fondée
par Louis, roi de Cicrmanio, l'an 822. Ce
prince, ayant fait bâiir pour des bommes
l'abbaye de Corbie-la-Ncuve sur le modèle
de celle de Corbie en France, voulut aussi
avoir un monastère de filb s en Allcmai^ne
semblable à celui de Notre-Dame deSoissons,
d'où il fil venir Telle, qu'il fit première ab-
besse de l'abbaye d'Herfoid, do:it l'église fut
dédiée à sainte Pusine, après que l'on eut
apporté de France en Allemagne le corps de
celle sainte. Ces deux monastères en produi-
sirent beaucoup d'autres non -seulement en
Allemagne, mais encore en d'autres provin-
ces. Celui d'firfuiih fut preinièrenicnt ruiné
par les Huns ou Hongrois, l'an 933, cl, après
qu'il cul été établi , il fut pillé par l'avarice
de Tliiedmarl, frère de Dcrnard , duc de
Saxe, et de Godesle, (]ui en était abbesse : il
en emporla les trésors ; mais INLiinwerc,
évéquede Paderborn, l'ayant fait comparai-
Ire dans un synoiie, le cond;imna à restituer
à ce monastère trente talent'* , el Tliiedmarl,
ne pouvant payer une si grosse somme, cé-
da à ce monastère des Irrrcs qui lui ap|iar-
lenaienl. Celte abbaye fut rctablii- dans sa
première splendeur, et l'abbesse Godestc y
renouvela les observances régulières, que les
religieuses abandonnèrent an commence-
ineril du xir" siècle, et elles ont eu enfin le
mallu'ur de lomber dans l'bérésie. qu'elles
cnibras.^èrent lan 1!J13, n'ayant pas imité
l'abbaye de Corbie-la-Neuve, qui a toujours
conservé la pureié de la foi avec les obser-
vances règulièies sous la règle de saint He-
nnit. L'abbesse d'Erfuilii est princesse de
l'empire et a rang parmi les prélats du cercle
de Weslphalie, envoyant des députés aux
diètes de l'einpire. File fournit pour sou
CdUtingenl, en temps de guerre, six fantas-
sins. File était autrefois dame d'Frfarlli,
mais l'électeur de Brandebourg s'en empara
en 1C4-7, comme étant de la dépendance du
conilc de llavensbourg.
Joan. Mabill. , Annal. Onl. S. BemdicC.,
tom. Hl el IV. Annal, cl Monuimnl. Pa-
derborn. el Annal. Westphal.
L'abbaye de Qucdlirnbourg , située dans
la vile du même nom, qui confine les prin-
cipautés d Anhalt et d'H.;lberslad avec le
comté de Biakembourg, a imité celles d'Her-
foid et (le Gandersbeim. Elle fut fondée l'an
930 par Henri l'Oiseleur, roi de (jerinanie ,
cl sa femme Matbildc, e i l'honneur de saint
Servais. Ils y donnèrent de grands biens et
y choisirent leur sépulture. Ce le abbaye,
dont l'abbesse est princesse immédiate de
l'empiie cl du cercle de la haute Saxe, eu-
voie des députés aux dièli s et fournil pour
son coniingent, en temps de guerre, un cava-
lier et dix laniassins. La ville de (Juedlim-
bourg a été longtemps libri; el impériale ;
mais l'abbesse, avec qui le magistrat se
brouilla, ayant appelé <à son secours Er-
nest , électeur de Saxe , son frère , ce prince
s'en rendit uiaitre en U77, et prit l'abbaye
sous sa protection. Les électeurs de Saxe eu
ont élé les protecteurs depuis ce temps-là et
jouissent de la supériorité tcrritoria'e dans
la ville el dans son territoire , où l'abbesse
n'a que la basse justice. Il y a eu plusieurs
princesses de la maison de Saxe qui ont éié
abbesses de n'i^^l'imbourg , comme Hed-
wige, fille de Frédéric II , dit le Pacifique ,
électeur de Saxe, morte en 1512; Marie,
fille de Jean Guillaume , duc de Saxe-Wei-
mar, morte en IfJlO ; Dorothée , fille do
Christian I , aussi électeur de Saxe, morte
en lfil7 ; Dorothée-Sopliie, fille de Frédéric-
Guillaume, due (le Saxe-Allembourg, morte
en ICiS; el Annc-Dirolhée , fille de Jean
Ernest du Saxe-Weimar. La princesse Anne-
Marguerite de Brunswick en a élé aussi ab-
besse , et ce fut la comtesse Anuo de Stol-
berg qui, en 1339, y fit recevoir la confession
d'Augsbourg.
L'abbaye de Gérenrode, dans la princi-
pauté d'Anhalt , à trois lieues de Quedlim-
bourg, fut fondée aussi pmr des religieuses
de l'ordre de Saint-Benoît par le duc Géron,
mort l'an 9(io. L'abbesse est princesse im-
médiale de l'empire et du cercle de la haute
Saxe, fournissa t peur son contingent, en
temps de guerre, un cavalier et six fantas-
sins. Elisabeth, comtesse de Wied, (^ui en
était abbesse, y fit recevoir la confession
d'Augsbourg en 1521. Les princes d'Anhalt
oui depuis longtenijjs l'avouerie de celte
abbaye, dont ils payent les charges qu'elle
doit à l'empire.
Joiu. Mabil., Annal. Bened., tom. 111 ; et
Audifrel . Geograph. , tom. VA.
GÈNES (AUGUSTINS de la C0M(3nÉGAT10N
de). Voy. AuGUSTiJi (Ermite, vu SAnr-),
§ III •
GENETTE (Orduk de la). Voy. Ampoulk
(Sainte-).
GENEVIÈVE ( CoNRaÉGATtox des cha-
NOINi;S RÉGULIERS OE SaLNTE-). Voy. GÉNO-
VÉFAIN'5.
GENEVIÈVE (FiLLES de Sainte-1. Voy.
MlRASllO\ES.
GÉNOVÉFAINS (Cuanoines réguliers \
Des Gcnovéfains chanoines rrgnliers de la
congrégation de France, vulgairement ap-
pelée de Sainte-Geneviève , avec la vie du
révérend père Charles Fauve, instituteur de
celte congrégation.
Nous étani proposé de donner dans cette
Histoire des Ordres religieux un abrégé des
vies de leurs principaux fondaleurs et rcl'or-
maleurs, il est juste que nous parlions du
II. P. Charles Faure, à qui la France est
redevable de lui avoir procuré la congré-
gation des chanoines réguliers qu'on ap-
pelle de France el plus communément de
Sainte-Geneviève, qui fait l'un des plus
beaux ornements de l'état régulier dans ce
royaume.
Il naquit l'an 1594, à quatre licucs do
Paris, (lans le village de Luciennes , où
ses parents avaient une maison de cam-
])agne. Son père se no>umail Jean Faure,
seigneur de M:!rsinval , commissaire orsii-
070 niCTiONNAir.E DF.S OUPllF-S T.ELICIEL'X. SS»)
nniro lies guerres ; cl sa mi-re , Mailciciiic Ueims cl de Sens. Mais, peu de temps après,
le Rossu. U fui ncii'nmé Charles sur les fonls les guerres que causètcnl les Au^ImIs dans
lie bapti^me , 1 1 d's sa plus lendic jeunesse ce royaume, el qui empêclièrenl la tenue des
il im.iitra beaucoup d'Inclination pour la chapitres pro\inciauK ord mnés par Ite-
\ertu el une grande aversion pour le vice; noîl XII, turent rausc que le relâehemenl
car à peine aval-il cinq ans, qu'.:)anl su «.'introduisit dans la plupart des niai-ons.
que sa nourrice avait été reprise Uo quel- le partage des liiens et la propriété en ban-
ques désordres, il ne voulut plus soulTrir nirent la pauvreté ; les offices, qui devinrent
bcs caresses, et fuyait ir.è;!ic su présence. perpétuels, anéantirent l'ohéissaiice ; el les
Il aimait pa>sionnenienl l" les les choses religieux se plongèrent dans l'oisivelé, ne
qui regnrdenl le culîe des au'els , et il était snngeanl plus aux études et ne s'adonnant
si porté à fa rc l'aunione, qoc souvent il qu'à la b'>nne chère et au déré^lenienl.
se levait exprès de grand nv» ia pour pren- l.c n)alheur des coniniendes fut UU'- suite
dre les fru;ts qui étaient sors 1. s arbres, el une punition de ces desordres, el l'abbaye
afin de Us cacher et de les donner ensuite de Saint-\incenl y fut assujellie des pré-
aux pauvres. Son hunieur était extrême- n)ières; le dérèglement dans lequel on y vi-
mcnt douce, son cirur tendre et généreux; vait en 1V02 fut si grand, que le parieinenl
et , (]uoiquil fût vif et plein de feu , il était de Paris fut obligé d'en prciulrc cimnaissan-
léannioins judici u\ et modéré , palieni et ce. Il était plus grand en laOo. Il y eut des
persé\éranl dans le travail ; enfin il sem- commissaires nomtnés pour y faire une vi-
lilait ((ue Dieu avait mis eu lui tous les site dans les formes; et tous ces désordres
carac ères qui sont propres à former les n'approchaient pas encore de ceux qui y
grands homme;;. régnaient lorsque le It. P. Faure y prit l'ha-
Son père reu\03a à l'âge de dix ans à lit en IGl'i. Ce jour si saint el si heureux
r.ourgcs pour y faire ses études au collège pour lui ne fui pour ainsi dire qu'un jour
des K. r. Jésules , mais l'air du pajs lui d;' débauche el de profanation pour les au-
ayanl é'c cimtrairc, il le rappela auprès de très (lul assistèrent à celle cérémonie. On vit
lui ; et à peine ful-il de retour, qu'il le laissa dans ce saint lieu des festins, des danses, et
orphelin, c ant décdé et ayant laissé à ses J'autresdiverlissemeuts. Les femmes mangè-
enfants plus d'honneur que île biens ; ce qui renl avec les r, ligicux dans le réfectoire;
fit que la mère de n Ire Charles le dcsiiua elles enlrèrcnl partout, jouèrent d.ins les
I our rF.glise ; ei, comme l'abbé de Saint- cloîtres el dans le chapitre; et ce ne fut
\incenl de See.lis était de ses amis , on lui (ju'uu jour de licence et de désordre,
conseilla de le lui donn<r pour être reli- Le jeune noviic était pendant tout ce
gieux dans son abl ave , ce qui était alors Icmjis-là enfermé dans sa cellule. On ne le
considéré comme une esp'ce de bénéfice. y\i pjiraîlre que lors(]u'il fillut a'Ier à l'ol-
II entra dans cille abbaye, suivant en ap- (Ice, et il ne jiarla à ses parents sur le soir
parence les inipressio\is de sa mère, niais (jue [ our leur dire adieu. Ci nime ce n'est ici
coiiduileu I ff'l ynr la divine providence, qui qu'un p.elit abrégé de sa vie, je ne rappor-
!c ch lisissail pour y réta! lir la discipliie lerai point toutes les moriiiicaiions qu'il
régulière ; et, ciimme cette abbaye est rcL'ar- exerça sur sou corps, et civles (ju'il cul à
«lée comme le berceau où la congrégation soulTrir de la pari des religieux, (jui, vivant
des clianoincs réguliers de ?ainle-(îeneMève dans le libertinage, ne pouvaient v>iir sans
a pis naissance , nous rapporterons sou rougir de ho:!le la vie exemplaire rju'il ine-
origine. ii.iit el les ausiéri es qu'il |)ratiquiit; el,
lille fut fondée l'aa lOG) par Anne de sans l'autorité de l'évéque de Itieux, abbe
Hussie, lille de tieorges l'E^clavon, rui des do »elle maison, et do il les religieux dépen-
l'.nr.sicns el des Moscovites, f mmc de lieis- daient à cause de ceriaius avantages tempo-
;i I" cl mère de Philippe \', rois de France. rds qu'ils espéraient pouvoir obtenir de lui,
l'^le y mil des clianoines viv.ml en commun, je jeune novice eût été nnvoyé chei ses
(pii par la sainteté de leur vie se rendirent parents.
•-i leièbreset si recomiMandables, qu'en 118G Knfin, l'année de probalion étant finie, il
'iuillaume de Carlinde, .'éiiéchal cl grand prononça ses vœux le premier jour de mars
naître de France, ayant fonde l'abbaye de IGIÎ). Tout s'y passa à l'égard des religieux
Notre-Dame de Livry à trois lieues de P.iris, comme à la prise d'Iiabil ; mais, à l'égard du
s'adressa à Hugues , abbé de Saint Vincent, iKuneau proies, il redoubla son zèle cl sa
poury envoyer de ses religieux, lis pers.s- f, rveiir. Il ne songea plus qu'à s'acquitter
lèrenliians ce le ferveur jusque sous le pon- de ses obligations, et quelque temps après
lilical de lîenoit MI, qui, ayant formé lu il vini à Paris poury finir ses éludes. Il lit
ilesg.in «le réunir tous les chanoines régii- son cours de philosophie sous François Abra
liers sous une néine règle, et les raïuemr à t\c Haconis, qui fut depuis e\èque de Li-
li même ob>i:rvance cl aux mêmes pr.iti- vaur; et, a; rès ainir reçu à la lin le bonnet
qnes, voulut iiue les i-onstitulions qu'il avait ,|,. maitre-è^-arls, il étudia en théologie sous
dressées à ce sujcl fussent universellement Philippe de t'iamaches et André du \ al. Il fil
ohscrvées. " un iiier»eilleux progrès sous de si habiles
La première assemblée qui se tint en maiires; de soi le qu'au bout de deux ans
France pour les recevoir fui à Saiut-'i iucenl ji^ lc- «■outraigiurenl de prendre le degré de
lie henli^, où i| se trouva soixante cl un ab- bach.-lier. Il lui forlemcnl sollicité de coiili-
lies tl du jiriiuis des seules provinces de nuer tes études, afin d • passer jus'ju'au doc-
5SI ^ t;t-N
loral. ISÎa^s le ilcir de In ivforrnc do «on
iiiouaslèrc de Saiiil-Vinccnl cl les sollirila-
Ijoiis roiiliiiuelies di-. diUA de ses confrères,
(loiil Dieu avaii louché les cœurs, qui le pres-
saient de retourner au plus tôt, !'( mporlè-
rent sur loules les raisons qu'on lui put
donner pour continuer ses l'Uules. Ces s inls
reii^zieux curent d'ahonl beaaicoup à sonHrir
de la part de leurs coufti'-res, qui ne vou-
laient point entenilre p.irlcr de réforme; cl
la protection que le cardinal de la Uoclie-
foucaukl, pour lors cvêque de ScTilis, vou'ut
bien leur donner, servii à les tnellrc à cou-
vert des mauvais traitements que le priein-
de rctie maison leur f.iis.iil. Leurs discours
cl 11 urs bons exemples en atlirèrcnt quel-
ques-' ns; mais les morts funestes et lra;j;i-
ques (te cinq religieux, qui s'opposaient fo:-
Icineiil à leurs bonnes intentions avec le
prieur, cl qui furent suivii-s par celles de ce
inouïe prieur en moins d'un an, furent ce qui
donna cnlièrenient n;ii^sance à la réforme.
On chercha dès lors des mesures pour y par-
venir; et, quoi(jue le P. Faure n'eût encore
aucune charge ni aucun caractère, parce
({ue son âge ne le lui permellail pas, c'élait
néanmoins par ses avis que furent dressés la
pliiparl des rèjilenienls nécessaires et des
jiraliques qui ont depuis servi au grand ou-
vrage de la réforme; et un des principaux
arl'cles fut qu'à l'avenir les pr.eurs seraient
triennaux, au lieu ([u'aup.iravant ils élaienl
perpétuels.
Lorsque ces règlements eurent été dres-
sés, les religieux sollicilèrcnt si fort le P.
Faure pour prendre l'oidre de préirise, qu il
ne put s'en défendre. Ce fui le 22 septembre
de l'année 1G18 qu'il le recul, des mains du
cardinal de la Rocliefoucauld. On lui doi;na
ensuite le gouvernement de telle maison, ( l
Dieu versa une si grande abondance de bé-
nédictions sur ses travaux, que celte abbaye
lépandil partout une odeur de sainielé qui
lui aciiuit aulant d'estime qu'elle s'était at-
tiré de b âme.
11 vint de toutes paris des personnes de
tout âge et de toutes conditions pour em-
brasser la vie reliï;ieuse dans une si i-aiiiie
compagnie. On y voyait s 'Uvent venir des
religieux de plusieuis maisons pour y ob-
server la régiilarllé, s'insiruiredeS véritables
devoirs des chanoines réguliers, et appren-
dre sous la conduite du P. Faure les règles
de lavie spirituelle. Le U. P. Pierre Four;er,
curé de Malaincr.ur!, (rava'llant pour lois à
la rcfo:me des chanoines réguliers de Lor-
raine, y envoya exprès un religieux, qui fui
depuis général de sa congrégaiion, pour s'in-
struire des règlemenls d/ celle nouvelle ré-
forme, et pour consulter ceux qiii l'entre-
prenaient. L'abbaye de Notre-Dame d'Eu y
envoya aussi quatre novices pour y é ra
c evés dans la régularité. Enfin, le cardinal
de la Rochefoucauld ayanl c é l'ail abbé de
Sainle-lieneviève-du-Mont à Paris, en 1G19,
cl ayanl résolu de la léfornier et de la mel-
tre sur le niffuie pied (ju'clait celle de Saint-
Viiiccnl de Senlis, il trul qu'un des moyens
dont il pou» ait se servir iiourcela élail li'o- rtnl en
CEN
Z.i'i
bliger quelques religieux de celte abbaye
d'aller à Saint- Vincent pour voir ce qui s'y
passait, el pour y prendre l'idée d'une vie
régulii re.
Nous dirons, en parlant des chanoines ré-
guliers de Sainl-Viclor, coinmenl ce eaidinai
avait lâché de relever les aniiennes congré-
gations; mais, n'ayant pas réussi d.ins son
dessein, c'e-t ce qui lui fil naître la pensée
d'en ériger une nouvelle, dont son abbaye
de Sainte-Cieneviève a loujours été le chef,
quoiqu'elle ne soit que la troisième (jui re-
çut la réforme, qui ;<\ ai', été auparavant in-
troduite dans celle de Sj.inl-.lean de Chir-
Ires; et nous rapporterons en peu de mots
l'origine de celle célèbre abbaye.
Elle fut fondée par le roi CInvis an com-
mencement du VI' siècle, veis l'an 511, à la
prière de la reine Clotilde, son épouse, qui
avait procuré la conversion de ce prince, cl
à qui toute la France est retievable de la foi
catholique. L'ég'i';e fui consacrée [lar saint
llemi en l'honneur des apôtres saint Pierre
el sainl Paul, doal elle retinl les noms jus-
qu'à ce que saillie Geneviève y ayanl été
enterrée, on ajouta celui de celle sainto à
ceux des saints apôtres. Jlais la ville de Pa-
ris ayanl reconnu celle petite bergère pour
sa patronne, et le royaume de France ayant
ex|)érinienlé, dans plusieurs occasions par
des miracles visibles, la proleci on de celle
sainte vierge, celte église n'est plus connue
présentement que sous le nom de celle il-
lustre [la'ronne de la capitale du royaume de
France.
Clovis y ayant mis d'abord des chanoines
séruliers, ils s'acquittèrent de leurs obliga-
tions pendant nn temps considérable, jusqu'à
ce que les Normands, n'ayant pu prendre
Paris en 8Vo et ii,kG, se conlcnlèrenl de sac-
c.iger les faubourgs. Leur cruauté n'ayant
pas épargné ce saint lieu, ils le pillèrent par
deux fois : de sorte (lue les chanoines ayant
été obligés de prendre la fuite, le si'rvice di-
vin ne s'y fit plus avec lanl d'exactilude. Ils
tombèrent insensiblement dans le relâche-
ment, qui s'augmenta beaucoup dans la
suile, prindpaleuient dans le xii* siècle,
qu'ils en furent chassés, el Von mit en leur
place des chanoines réguliers : y aya\it
donné lieu par le scandai.» qu'ils causèrent
lorsque le pape Eugène III alla dans leur
église l'an 11 'i8. Ce pontife, qui élail reli-
gieux de l'ordre de Cîleaux el disciple do
saint Peinard, avait éié élu pour chef de
l'Eglise uni vei sel le a près la nuirldo Lncius 1(,
l'an llio. Une sédi ion,qui s'éleva aussitôt à
I\ome, l'obligea d'en sortir avec les cardi-
naux, qui le coaronnèrci'.t au monastère do
Farfe, le h- mars de la niènie année. Il revint
à Konic après que la révolte eut été apai<ée;
mais la paix cl la Iranquillilé n'y durèrent
p is longtemps. Le pape, fatigué par les sédi-
tions des Romains, vint en France l'an ll'iS,
cl lu! reçu à Paris par le roi Louis VU, dit
le Jeuni', et l'évéquc Thinaul, auparavar^t
prieur de Saint-Marlin-les (Champs. Ils allè-
rent au-<levanl de ce ponlif.,el l'emmenè-
^rande solennilé à l'éj^lisc l'.c Notre-
-^y^ Dlf.TIONN Uai; l^i s ORDUES RELIGIEUX. 384
D.unc Ouolqncs jours nprès , Kng('>nc voulut président, et Charles de Dnrmnns, runseiller,
iillpr dire la messe à S.iinlp-(;cnovli'>ve. à s'y IransporkVent pour tacher d'y réialilir
r.iuso nue n-lle éiïlise elail immcdialomonl la paix. Leurs bonnes inlonliiins ne fuie r.t
Muimise au saiiiI-SK-u'e. Qinnd il y fularri\c, poiiil secondée'! , an coiiliairc le désordre
les ofliri.rs de rei:li<.e élcmlirenl drvaiil auiimenLi daîis la suite par une cireonslaiire
r.iutel un lapis de "soie, où il se prosicrna qui ne devait pas naturellement produire
iHiur fa-rc son oraison. Hnsuile il entra dans cet effet.
la sarrislie et se revéïit pour la messe. Ce- Joseph Koulon, qui gonvern lit celte ab-
pendant les officiers du i)ape prirent le ta- baye depuis l'an li.ï", voulant empêcher
pis, prétendant qu'il leur appartenait selon qu'elle ne lon-.bit en comni' mie, crut que le
la coniumc; les chanoines, au contraire, meilleur expédient était de resi^mr son litre
prétendirent qu'il devait rester à leur église, à quelque personne de qualité qu'il pût
et |ir;rent (|uerelle avec eux. Des paroles ils faire agréer au roi et à ses religieux, par la
en vinrent aux mains : les ofiiciers du pape considération de sa naissance, l'.iur cet effet
furent si maltraités par les chanoines, qu'il il jcla les yeux sur HenjamiM de lîrirhanteau,
y en eut plusieurs de blessés, cl le roi même fils du marquis de Nangis, qu'il riçut à l.i
pensa l'être aussi, voulant apaiser le désor- profession, et qu'il fil ensuite élire abbé
lire. Le pape cl le roi, pour punir ces clia- coadjuleur peu de temps avant sa mort, qui
noines de Irur insolence, résolurent de met- arriva l'an 1G07, après avoir possédé cette
Ire des Réaédiclins en leur place et de leur abbaye pendant cinquante ans.
<')ter celle église. Néanmoins , comme il y Quelque temps après, ce nouvel abbé fut
avait parmi eux des personnes dislingnécs fait évéque de Laon, de sorte qu'il ne résida
par leur noblesse et leur science, ou ne voi:- point à Saintc-fieneviève, quoiqu'il y soit
lut pas d'abord les priver de leurs prébcn- mort et enterré. Ainsi, les religieux, se
lies, mais seulement leur en laisser le revenu voyant sans chef pour les gouverner, se lais-
penilant leur vie, pour élre réuni après leur sCrenl aller à loules sortes de dérèglements,
niori à la mense conventuelle. L'abbé de et ne gardèrent plus aucune observance.
S linl-^ iitor et ses religieux, en ayant eu Cela dura jusqu'en l'an Kil'.', que l'évéque do
avis, firent tant d'instances auprès de ces Laon étant mort, le roi lui d.mna pour suc-
princes pour leur accorder celte église, allé- cesseuren celle abbaye le cardinal de la Ko-
uuanl pour raisons que les chanoines sécu- chefoucauld, cl Sa Majesté lui témoigna qu'il
liers s'accoutumeraient mieux à leur ma- ne l'avait nommé que parce que , con-
nière de vivre qu'à celle des Bénéiliclins, naissant son zèle, il ne doutait point (]u'il
(ju'ils obtinrent leur demande. On tira de ne Iravailiàl de loules ses forces pour remlre
l'abbaye de Sainl-^'ictor douze chanoines, à celle abbaye son premier lustre, et iiue
qui furent conduits , à Sainle-Cicneviève ; cl son intention élait que les choses fussent
l'un d'eux, nommé Odon, en fut élu premier remises en leur premier état, quant à l'é-
;ibbé. Ainsi , d'un chapitre séculier celle leclion libre d'un abbé régulier, sitôt que le
église fui érigée en abbaye l'an 11 V8. bon ordre y aurait élé rétabli.
C'est ainsi que l'histoire de ce dilTérend est Le cardinal de lallochcfoucauld reçut celte
rapportée dans la vie de saint (îuillaume (Ij. abbaye à ces condiiions, cl, pour seconder
qui. ayant été du nombre des anciens clia- 1 s pieuses intentions du roi, il commença à
noines séculiers, se joignit aux réguliers, et travailler au rélablissemenl de la discipline
fut dans la suite abbé de Koscbildein en l)a- régulière. I! fil assembler en l'année 1li"il ce
nemarli. Néanmoins, Sugcr, abbé de S.iint- qu'il y avait de, reli;^ieux reformés à Paris,
Denis, qui avait eu comuiissiim du jiafie de jour l'assister de leurs conseils sur les
faire ce changement eo celle église, rendant moyens qu'il devait prendre pour exécuter
compte ,1 ce |i()nlife de ce (|u'il avait fail, dit son entreprise, et l'on y convint de certains
que ce fut [)our le bien de la paix qu'il n'y articles de réforme qui furent mis par écrit,
mil pas tlos l'énédictins, comme Sa Sainteté On les rooununiqua aux rcli:;ieux de l'.ib-
l'avail nrdoMué, et que ce fut à la prière des baye; quelques-uns témoignèrent vouloir
«hanoines séculiers (ju'il y mit des religieux s'y soumcllre. Il y eut même d'abord (inel-
de Sainl-\'ictor. que apparence de régularité; mais cela n'eut
Ils y véiurent conformément à leur état aucune suile. Il fallut employer l'auUirilé du
jusqu'aux guerres des Anglais; mais les dés- roi pour faire recevoir la n forme. De dix-
ordres qu'i Iles causèrent donnèrent orca- neuf anciens, il n'y en eut (|ue cinq (;ui s'y
sion au n lâchement, qui s'introduisit encore soumirent; et Sou Kminencc fit venir de
en celte maison aussi bien (juc dans plu- Si'nlis douze religieux en H'flï, qu'il condui-
sieurs auires, comme nous avons dit ail- sil Ini-méme à l'église, au cloître, au cbapi-
li'urs; et il s'augmenta de telle sorte, que Ire et aux dortoirs, pour en prendre p;>sses-
sous le règne de François l ', le parlement sion. Il établit le P. Faure supérieur de celle
fut <ibligé de donner commission à Pierre maison en particulier pour avoir la dire-
Urulard, conseiller, pour informer des désor- clion de tout le spirituel, non-seulenient à
drcs qui y éiaicnt. Mais, bien loin ((ue cela l'égard de ses religieux, mais même à l'égard
servit à réiablir le bon ordre, le relâchement de ceux de l'ancienne observance qui n'e-
alla jusqu'à un Ici point, f|ue, ciuclques an- talent pas encore prêtres, (ju'il obligea de se
iil'cs après, Christophe de Tliou, premier snumeltrc à lui, cl de lui obéir en loules
l)AiMi.l IV.lIand., l.'m. 1, A|Mil , .Ui. SS., p.iij. O-C.
58S
GEN
G EN
SSG
choses. On vil en peu «le loaips la reforme
fjiire un meivi'illcux progiès, ayanl été in-
troduile clans plusieurs maisons, ce qui lit
que la congrégation commençant à s'aug-
menter, on jugea à propos de lui donnei- un
général.
Quelques années après, on poursuivit en
cour de Uome, pour rendre celte abbaye éle-
clive de trois en (rois ans, sur ce que le loi
s'était démis do tout dioit de nomin:iliou à
cette abbaje, et avait (onsenli que non-seu-
lement elle lût élective comme auparavant,
m lis que l'clcclion d'un abbé se fît tous les
trois ans. Le pape l'accorda au mois do
février 1534-, confirmant aussi cette nou\elle
congrégation. L'on assembla ensuite le cha-
pitre général composé des supérieurs «le
quinze maisons qui avaient déjà embrassé la
réforme, et le H. l'. Faure fui élu canonique-
ment pour abbé coadjuleurde Sainlr-Ciene-
viève et général de louie la congrégation.
Autant que les religieux avaient de joie de
son élection, autant lui causa-t-cUe de cha-
grin. Il commença par un acte d'humiliié;
car il voulut senir la communauté ;:U réfe-
ctoire jusqu'à la lin du repas, quelque chose
que l'on pût faire pour l'empêcher; et il con-
serva toujours cette pratique toutes les fois
qu'il ofliciail pontificaieineut. Ce n'élail point
en lui une vaine cérémonie, mais un elTet sin-
cère et une véritable marque de la disposition
de son cœur; car il éiait humble et modeste, et
on ne s'apercevait du rang qu'il tenail parmi
ses frères que par les marques extérieures
attachées ta sa dignité.
Il s'.:cquitta si dignement de cet emploi ,
qu'il fut élu plusieurs fois dans la suite pour
la même dignité, et il était général pour la
troisième fois, lorsqu'il mourut dans le temps
qu'il travaillait le plus pour l'agrandissement
de sa congrégation; car sa pénitence et son
application continuelles ayant épuisé ses fur-
ets, la flèvre le prit dans le cours de ses vi-
sites à Senlis. Il le dissimula d'abord et vint
coucher à N.inlcrre sans rien dire de son
mal, qui, augmcnlani de plus en plus, l'obli-
gea de s'arrêter dans une ferme dépendante
de l'abbaye de Sainte-Geneviève, proche de
Versailles, où le cardinal de la Hochefôucauid
lui envoya son carrosse avec des religieux
pour le ramener à Paris. Mais il les avait déjà
prévenus, et i! était parti pour Chartres lors-
qu'ils arrivèrent, voulant s'y rendre le même
jour et môme prêcher le lendemain à cause
de la l'etc de saint Augustin. Accablé de son
mal, il n'eul pas seulement assez de force
pour célébrer la sainte messe ce jour-là. On
le transporta à Paris avec assez d'incommo-
dité, où, étant arrivé, il voulut saluer et em-
brasser toute la communauté avant de se
mettre au lit.
11 acheva néanmoins pendant sa maladie
V'S constitutions qu'il avait déjà commen-
cées. 11 dressa des mémoires et des instru-
ctions sur quantité de points particuliers qui
ont beaucoup servi pour le bon gouverne-
ment de cette congrégation; après quoi il ne
songea plus qu'a la mort; et, bien loin que
celle pensée lui causât de la frayeur, elle lui
donnait au contraire de la joo et de la con-
solation. On le voyait souvent prosterné au
pied d'un crucifix. Il élait presque toojouis
dans des méilit.ilions continuelles. Il n'ou-
vrait la bouche (|ue pour exprimer des sen-
timents a:lmirables; et, quoique son mal fût
pour lui une assez grande pénitence, il ne >c
croyait pas pour cela exempt de pouvoir
morlilier son corps, lui refusant tous les
s lulagenients superflus. Enfin, dans le temps
(ju'ou commençait d'avoir quelque espérance
de sa gnérison, il lit une confession générale
et demanda le saint vialiqui'.
Comme il semblait se mieux porter, les re-
ligieux qui ét.iient iirésenls en furent extrê-
mement surpris, ils n'en pouvaient compren-
dre la raison; ils le supplièrent de vouloir
é|iurgner celle d ulcur à ses enfants, qui
seraient alarmés (juand i!s entendraient celte
nouvelle; mais il répondit qu'il n'y avait
pointa dilTérer, et que, pour éviter ce qu'on
appréhendait on pouvait faire la cérémonie
])endanl la nuit. L'on fil ce qu'il souhaitait ;
cinq ou six anciens y a^sislércnl, et, silôt
(ju'il vit le Sauveur du monde entrer dans si
chambre, il se jeta à ^;enoux jjour l'adorer
et le reçut avec des transi orts d'amour qui ne
se peuvent exprimer.
Le matin, les religieux, qui ignoraient ce
qui s'était passé la nuit, le viiuenl saluer,
parce que c'était le jour de sa fête. Jam lis il
ne parut jilus joyeuv, il les entretint fami-
lièrement, il leur fit à sou ordinaire quelques
exhortations, donna même l'habit à un po-
stulant, et traita de plusieurs alTaires; mais
sur le soir la fièvre s'étant augmentée, il
touiba en faiblesse, il perdit tout sentiment,
cl on n'eut que le temps de lui donner l'ex-
Irème-onction ; après quoi il rendit son âme
au Seigneur le 4- novembre Hikk, étant âgé
de cinquante ans, ayant eu la satisfaction de
voir sa congrégation augmentée de plus de
cinquante maisons, où par ses soins et ses
travaux la réforme avait élé introduite. Son
co.'ps fut ouvert et enterré à Sainte-Gene-
viève, après qu'on eu eut tiré le cœur, qui
fut porté â Saint-Vincent de Senlis, où la ré-
forme avait commencé, et ses entrailles fu-
rent aussi portées à Sainte-Catherine du Val
des Kcohers à Paris.
Après sa mort, cette congrégation s'est
tellement augmentée , qu'elle cA présente-
ment la plus ample et la plus nombreuse do
toutes celles qui composent Tordre des cha-
noines réguliers, puisqu'elle a plus de cent
monastères, dans une partie desquels les re-
ligieux sont employés à l'administration des
paroisses et des iiôpitaux, et en l'autre à la
célébration de TolUce divin et à l'instruction
des ecclésiastiques et de la jeunesse dans les
séminaires. Klle a en France soixante-sept
abbayes, vingt-huit prieurés conventuels,'
deux prévôtés et trois hôpitaux; et, aux
Pays-lias, trois abbayes et trois prieurés,
outre un très-grand nombre de cures. La
même réforme a subsisté pendant un temps
dans la cathédrale d'Uzès. Ces chanoines ré-
guliers disent matines le soir à huit heures,
immédialcmenl après l'examen de conscieu-
3n
d'.ct;onn.mue bi:s oudp.es Riair.itux.
580
00. ol les lil.iiiioj lie l.i sainte \icrge; et se
It'voiil le innlin à cir.c] liours. Ils jeûnent
lousics vcndroilis, pourvu qu'en cesj lurs-là
il lie se ronronlre p linl de foie solennelle, ou
qu'il n'y ail point de jcùnc d'Eglise le jeudi
iiu le Samedi. Ils jeûnent encore toulcs Is
veilles lies fèl-s de la sainte Vier;;e et de
celles de saint Au<;ustin, pendant l'Avcnl, 1 1
les deux jouis qui précèdent le carême
universel.
Depuis un temps immémorial, l'un i es
chanceliers de l'iiiiiversiie de Paris est tiré
del'alib.ije de Sainle-(iene\ iève. liatre ceux
(|ui oui reuiiiH ceUe charge depuis la réfor-
me, le P. Jean Ironleau e-t celui quia aciiuis
plus de ré|Uiiation. Il était d'Angers, et lut
reçu eu lli^O parmi les religieux d(? celte
congiégalion. Il enseigna pendant plusieurs
aiiiit'os 11 philosophie et la théologie, il ai ait
appris les langues grecque, latine, liéhraï-
(jiie, syriaque cl chaldeenne, et il n'y a point
d'ouvra es en ces cinq sortes de langues qu'il
n'ait lus. Il parlait aussi les langues vivantes
île l'Kurope, et dressa cette lellc bibliotliè(|ue
de Sainte-Geneviève qui a été augmentée de
plus de la moitié, l'an 1711. par celle de feu
M. l'archevêque de Ueims M.cliel le Tclliir,
qui la laissa à celle abbaye par sou lesta-
iiient, ce ([ui la rend une des plus considé-
rables de l'Europe, étant préseiite-nenl com-
posée de plus de soixante mille volumes et
d'un cabinet très-curieux. *
Le P. Fruiiteau avait été fait chancelier
(le l'univerMié en 16V8, et, ayant eu depuis
le prieuré de lîenelz eu Anjou cl ensuite la
cuic de .M<)nlar'.;i-, il en lut |ireiulre jios-
seS'iion sur la lin du carèine de l'an 1G;>2, et
se donna lani di; pcini- durant les lètes de
l'à(|uvs en l'admiiiisualiim des sacrements
et en la visite des malades, qu'il en tomba
malade lui-mèin' le 12 avril de la même an-
née, et mourut le 17 suivant, n'étant qu'on
la quarante-bui' iè.ne année de sou ;!:;c.
Le 1'. LallcioanJ, qui ;. fail un abrégé de
sa vie, lui succéda dans l'oflice de chancelier
de l'université, et a été un des plus illustres
oriiemeiits de ce.te célèbre ac.idemie. Avant
d'être rel gieux, il en avait é'.é plusieurs fois
recteur, cl aprè> la mort du V. Frc^nleau,
elle le demanda pour ch mceliL'r à l'aSbe de
Sainle-deneviève, qui a droit d'y nomincr,
et qui ne pouvait reluser celle dignité au I'.
Lallemand sans quelque sorte d'injustice. Il
mourut le 18 lévrier l(j73, âgé de i iiKiuante
ans, après avoir pindant un long temps mé-
dité la mort et s'y éire préparé. 11 nous en a
laissé des preuves par les livres qu'il a lO i.-
pusés sur se sujet.
Le 1'. du Moulinet s'est aussi rendu trés-
recummandable dans celle congrégation par
sa profonde érudition, surtout par la con-
naissance <|u'il a\ait de l'antiquité et des
médailles. Entre les dilTerenls ouvrages qu'il
a donnés, il y en a un qui traite des cha-
noines réguliers avec la ili'scriplion de leurs
différents habillcmenls. Celui de sacoiigrcga-
lion ciinsiste en une sout.iiie de serge blan-
che avec un collet fort large et un rochet de
loilc. Lorsqu'ils sont a la maison, ils ont,
(t) Vi'i/ , îili Hn ■:« vil., n°« S, T9.
l'été, un bonnet carré, cl pendant l'hiver un
cani.iil noir. Cl lii)rs le monastère ils porter.t
un manlcau noir à la manière des ecclési is-
liques. l'our habit de chœur, ils ont, l'été, un
surplis et une aumtisse n:iire sur le hras.l'hi
VIT un grand camail 1 1 une eh ipe noire (1 ).
Il y a encore eu lie;iuconp de célèbres
écrivains parmi eux, cl entre les autres les
l'èrcs Chapoiicllc et le Large, ()ui ont fat
lies pccIk relies et des dissertations savantes
cl curieuses sur l'histoire des chanoines ré-
guliers. Les ariiif's de celle congrégation
sont d'azur à une main tenant un cœur en-
liainmé, avecce'le devise •.Sapcrcmine-tl Cha-
r(7as. Entre les privilèges dont jouit l'abbavo
(le Sainle-tieneviève, le plus considérable
est que l'abbé cl les religieux, à la descente
dL' 1,1 châsse de celle sainte, palronne de Pa-
ris, dans les calamités publiques, et lorsqu'on
1,1 porte en procession, ont la droite sur l'ar-
cbevéquc de Paris et les chanoines de la ca-
lliédr.ile, cl que l'ablié donne la bénédiilion
dans les rues auisi bien que l'archevêque.
Cette abba\e, suivant les privilèges des pa-
pes et des rois de France, n'est jamais va-
ciule, et, suivant l'us.igc ordinaire, le m irl
saisit le vif. L'abbé étant mort, le premier
et le sec'.nd assistant lui succèdent, en venu
d une bulle d'Alexandre Vil, du 1 aoi'il 1G55,
et letires paîcn:es du roi, le tout confirmé et
enrcg'Slre aux cours souveraines. Un des
privilèges dont jouit cet abbé est de donner
des inoniloires comme Ks évoques, et il .i
clé mainl'HU dans c^ droii p.ir un ariél du
conseil d'Klat.
Voyez la Y >e du P. Fa-.ire imprimée d Pa-
ris en 1G98. Du Moulinet, Hist. des (lijjé
renls habits des chnn. ti'yul. Hei manl,ii'/i(/;/i.-
si'inenl des Ord. reliij. .Malingre, Antiquités
de Paris; et Sammarlh. Gall. Christ., loin.
\y,pn:j. 1001.
ClEOiU'iES (Chlvai.ilrs de Saint-). Voy.
BiiriiLitM.
GEOUGES fCuBVALiERS DE Sài.NT-). Vuy.
Constantin.
GEOlUîES (Ordres divers de chevaliers
DE Saint-)
L'abbé Giustiniani, Sclioonebeck, ]\I. Her-
niant et quebiues aulres auteurs, parlant
dans leurs Ilisloues des Ordres militaires,
de celui de Saiut-Georgi s dans I Autriche
cl la Carinthic, disent qu'il y en a qui en atlri-
buenl l'iiisliluliou à liodofphe d'ILiiisliourg,
jremier empereur de la maison d'.\ulriche,
qui, pour rendre cet ordre plus illustre, ac-
corda au premier grand mailrc, entre au-
tres privilèges, le titre de prince, et lui
ilomia pour lui et pour ses chevaliers la
Ville de Milleslad dans la Carinthie, où il
fonda iiussi un chapitre de chanoines régii-
liei s de l'ordre de Saint- .\ugustin, sous la di-
rection de l'évêiiU'-, (jui devait être choisi de
leur corps, et porter .lussi bien qu'eu s l'habil
de ror,ire.lle8l aise de détruire celle Ojiinion,
puisi|iie remperenr lU)dol|ilie niourul l'an
riHI, et (jue le duché de Carinthie n'appar-
tenait pai encore à la maison d'Autriche,
qui ne le [losséda (lu'aprcs la niorl d'Henri,
.v«-
ÔS9 CF.'J
roi Je Boliôine et diriiicr duc de Carintîiie,
ipii, s'étant rtndu odieux aux peuples de
lidliAnie par ses lyraunies, lut déposé l'an
1309 par les Elais de ce royaume, el ne mou-
rut que l'an ISil.
Quanta lavilledcMillcslad, elle n'a jauia's
été évcehé; mais il se peut faire que l'empe-
reur Frédéric lîl, qui est le vérilahle fonda-
teur de cet ordre, ayant donné une riche ab-
baye de l'ordre île S.iint-Renoît dans celle
ville, pour servir de demeure aux miuvoaux
chevaliers et chapelains de l'ordre de f-aiul-
Georj;es, on ail donsié le nom de ch.inoines
à ces rliapelains, el que l'on aitpiis la ville
de Nt'UslaJ pour Millestad, car cel empereur
Cl aussi ériger en évcché, dans le même
temps, la ville de Ncuslad, dont l'évéque no
fui point soumis pour le temporel au grand
mailrc de l'ordre de Saint-Geoigcs, comme
prélcudent Meniiéus, de ISelloy et quelques
aulres, qui appellenl celle ville de Neuslad,
Cilé Neuve, à cause de son nom lalin civi-
tas nova.
Celle abbaye de Milleslad, autrefois chef
d'ordre des chcvali -rs de Saint-Georges ,
étant préscntcinenl en la possession dc'. Pè-
res de la compagnie de Jésus, le t'. itollan-
dus a parlé de l'origine de cet ordre mili-
taire dans un Irailé particulier qu'il a laissé,
el qu'il avait dessein de faire servir de sup-
plément à la vie de saint Doniilien, fonda-
teur et liuilaire de celte abbaye ; mais le P.
l'apebroch a trouvé plus à propos de le join-
dre à la vie de saint Georges martyr au 23
avril, où il parle aussi de plusieurs aulres
ordres miliiaires qui ont prij ce saint pour
patron el prolecteur. Ainsi nous ne croyons
jias pouvoir nous égarer en suivant les PP.
lîoUandus el Papebroch, d'autant plus que
ce que le P. Bollandus a avancé n'est fondé
(|ue sur les bulles des souverains pontifes et
les lettres de l'empereur Maximilien I".
Ce fut donc l'empereur Frédéric Ml qui
fonda l'ordre mililiire de Sainl-Geoigcs en
Autriche, vers l'an l'iG8. Il voulut qu'il fût
érigé el iiislilué par le sainl-siége aposlo-
li(iue en l'honneur de Dieu el de la sainie
\ierge, jiour l'exallalion de la foi catholi-
que, pour le salut de son âme, et pour don-
ner du lustre à la maison d'Autriche, dont
il sortait. Ce prince, ayant été à Rome la
même année pour accomplir un V(ru qu'il
avait fait, obtint du pape Paul II l'érection
(le (Cl ordre , ce qui se jirouve par la bulle
de ce ponlife qui commence ainsi : Sane
charissiiniis in Christo filius nos ter Fridcri-
cus Rumanorum imperalor semper Auguslns,
qui, ftrvore devolionis accemtis, nuper ad vi-
silcndmn s .cratissima BB. Pclri el Pnuli
upostolorum et alia Deo dicala loca, ud Al-
main urbeM ex vota persona'iter se contulii,
nobis humiliicr cxplicavit, qnod ipse ad tan-
dem et gloriam Omnpulcnlis ac glorios.e
virgiiiis Rlariœ, pro (xallalione quoque ca-
tltûlicœ fulei, aiiiinœ suœ salule, ac doinus
Auslriœ ( o qua originem Iraiil ) commeinu-
ralione et décore, unuin miliîarem ordincin
CEO
5P0
sul) invocntione sanctt Gcorgii marlgris, ^cr
nos erigi alque institui tola mente desidevul.
Quoique le pape Léon X dise aussi la
mênîe tli ise, on ne doit pas néanmoins infé-
rer de là que cet em| creur ne soit pas lo
fondateur do cel ordre; car Jules 11 lui
donne celle qualité dans une autre bulle, où
il dit posiliveuienl qu'il érigea cil ordre et
en fui le premier fondateur : Ordinem Diii
Georgii marlyris errxit et aucluritate sanctie
scdis apustolicœ primus fiindavit. Celles du
pape Paul 11 et de Léon X. nous apprennent
ce()ue ce prinre (il après avoir fondé sou
ordre. Il prit le monastère de Milleslad, du
diocèse de Salzbourg, pour en faire le chef
de cel ordre, et pour servir de demeure lanl
aux chevaliers qu'aux chapelains. H fil re-
bAlir l'ég ise à ses dépens, acrominider les
cloîtres, les dortoirs et les autres lieux ré-
guliers de celle abbaye, qu'il fournit abon-
damment de meubles el d'autres choses né-
cessaires pour l'usage des chevaliers, dont
pour la première l'ois il nomma un pour grand
maîlrc, voulant qu'.à l'avenir il fût élu par
les chevaliers, toutefois de son consente-
meul ou du chef de la maison d'Autriche;
que les chapelains ou ecclésiastiques se-
raient gouvernés par un prévôt qui serait
leur chef; que les chevaliers, le prévôt et
les prêtres seraient soumis au grand maî-
tre; que la première chambre serait desti-
née pc;ur Sun logement, la seconde pour lo
prévôt des prêtres, la troisième pour le plus
a cien chevalier, la (lualrième pour le pins
ancien prêtre, el ainsi des aulres ; de tel H
sorte qu'entre deux (hevaliers il y aurait
un pi'élre, el entre deux p cires un cheva-
lier, et qu'au chœur le grand maîlrc seule-
ment auiait la première place; mais que les
prêtres précéderaient tous les chevaliers.
Le grand maîiie cl les chevaliers, aussi
bien que le prévôt el les prêtres, devaient
L.ire vœu de chasteté et d'obéissance; unis
personne n'était obligé à celui do pauvreté.
ils relenaient seulement la propriété de
leurs biens, tant da patrimoine que d'ac-
quêts, avec la permissim de leur supérieur,
el en recevaient les revenus, qu'ils eonver-
tissaienl à leur propre usage, sans qu'il leur
fût permis de rien vendre de leurs biens
tant meubles qu'immeubles , qui apparte-
naient cnlièrement après leur mort à la mai-
son où ils avaient fait profession, ou à quel-
que autre qui en dépendait. L'habillement
des uns el des aulres consistait en une rohe
ou soulane de quelque couleur que ce fût,
pourvu que ce ne fût point de rouge, de verl
ou (le bliu; el, les vigiles, toutes les fêtes de
la sainie Vierge, et tous les samedis, ils de-
vaient mcltre par-dessus celle soutane, ou
robe, une autre robe blanche de la mêm:-
longueur sur laquelle il y avait une croix
rouge (1).
Le pape, afircs avoir marqué les prières
que les chevalieis devaient dire tous les
jours, parle eiisui'e de toutes les posses-
s ons que rcmpereur leur avait données,
(!) Voy., à la lin du vul., n" 80.
SIU
DICTIONNAIRE DES (IKHRES niXICIEL'^.
Ô02
snvoir : l'jil.hayo do Millcsl.id di- l'urdrc de
Sainl-Hcnoil, la coMim.indcrii' de Morlicj; do
l'tirdro des clio\a!iois de Saiiil-Joan de; Jé-
rus ilern, siliioo dans le dincô^e do l'ass m ;
l'Iiôpilal ol lo monasièrc do Sainl-Mailiii au
iiUMiie dioii^so, cl à prosenl de celui de
Viiiino; la rliapellc de Noire-Damo do nou-
vollo f iiKla'ion , cl l'otilisc paroissiale du
Monl-S ra icn au diocèse de Sai/boiir;;, donl
lo droil de patronage apparlouail à rempe-
rour; et ce piuilife supprima, dans le m'i-
nash're de Milloslad el dans la cnnimaïuiorie
(lo MorliOL', les ordr.s de Sainl-lîonoil ol de
Sainl-!eaii do Jérufialoni. Il y a des auteurs
(jui ajouUiil que l'empiTeur donna encore à
<es clicvaliors lous les biens des soigneurs
de ("ranichorg, donl la maison éliil nouvel-
lotnenl cleinlo, el (ju'ils possédaient aussi
Traulmandorf, Stliarlencli el plusieurs au-
tres biens.
l'aul 11 pcrniil à ral)bé et aux moines de
Millestad de passer, s'ils voulaient , dans
li'autros monaslères de l'ordre de Sainl-He-
iioîl où ils Iroiiveraionl dos récepteurs bé-
tié\o!es, à condiliun nue les chevaliers, sur
les revenus de Millcslad, leur donneraient
de quoi s'cnirelonir pendant leur vie, el que
co monastère aussi bien que les autres égli-
ses donl nous avons parlé ne seraient ja-
mais changés en usages profanes ; mais que
l'on y té:él>rerait les olficos accoutumés, que
l'on ac<iui:t rail les fomlalions, ot ((uc l'on
exercerait toujours riiospilaliié dans l'hôpi-
tal de Saint-Martin, lînlin il apjirouva et
conlirma l'ordre de Sainl-Goorgos ad inslur
de l'ordre 'i cutonique ; et Sixte ï\", qui suc-
céd.t à Taul II, le 10 juillet li71, approuva
aussi cet ord. e.
Jean Sibonhii 1er. qui en était grand maî-
tre en li'J3, voyant qu'il avait soulTirl beau-
coup de I erics, lanl par les incursions fré-
quentes des Turcs que par les guerres que
l'i Mipcrour avait eues à soutenir contre Jla-
Ihias V, roi do Hongrie: que la jiluparl dos
villes el des villages claienl abandonnés,
qu'un grand nombre d'églises avaient été
brûlées, les uioiiaslLTCsd'Iionimes cl de filles
détruits, qu'à peine restail-il du monde pour
cultiver les terres, cl que les chevaliers ne
pouvaient pas résister aux firccs et à la
puissance des Turcs: il institua une confré-
rie ou société sous le nom de Saiiit-lieor-
ges, dans l.iquillo pouvaient entrer des pei-
bonnos de l'un ol de l'autre sexe, sans cire
obligées à aucune oliservance régulière. Les
uns devaient poiulant un an combattre con-
tre les Turcs, à leurs dépens ou il la solde
de l'empereur, ol les autres contribuer par
leurs aum6iios ol leurs libéralités à la con-
fclrucliun d'un forl, el à le pourvoir de mu-
nitions pour SOI vir de rempart contre bs in-
cursions de ces inlidélos. L'empereur Maxi-
niilien 1" approuva celle société par ses lel-
Ires pali-nlos données à Inspruck lo 18 sep-
lembrc W'J',, et le pape Alcxaiulre VI la
cuiilirnia l'an li'J'», ordonnant qu'il y aurait
doux vicaires généraux, savoir : le grand
uiaiire de l'ordre do Sarnt-lieorges et l'cvé-
(1) Yiy., à l:t lin du vol., n' 81.
(|uedc ("lUicIi, (]ui y présideraient, el aux-
quels on s'en raiiporterail pour loui ce i|ul
reu'ardaii le spiiiluel; et que l'empereur
Maximilien et ses suooesseurs dans les du-
chés d'.\utrieho, do Slyrie, de Caiiiilhie et
de Carniole, députeraient deux ou plusieurs
capitaines généraux auxquels on i béir.iil
P'jur les choses qui concernaient la guerre,
ol qu'ils recevraieul le seraient de fiJelilé ol
d'obéissance (1).
L'em|)ereur ordonm que ceux qui sor ient
de celte confrérie auraient, pour les distu-
gucr, une croix d'or avec une couronne e; un
cercle d'or, que chaque chevalier pourrait
enrichir de pierrenes ou autres pierres pié-
cieuses à sa volonlé, cl qu'ils Ii pourraient
porter puliliquement, en présence des rois
et des princes, à leur chajieau ou à leur
bonnet, ou en tel autre lieu que bon li'ur
semblerait. Le m'-mc Maximilien leur ac-
corda beaucouji d,' privilèges par ses lettres
données à Anvers le jour des saints aiôires
Simon ol Judo, do l'an IWV; entre autres il
voulut qu'ils [irécéilassent lous les aulics
chevaliers, qii'on les aiipelàl Chevaliers
Couronnés, cl que leurs enfants porlasseul
('2] couroaiie sur leurs armes. L'évoque.
en les leccvanl chevaliers, leur attacliaii la
croix au bras, leur mettait en iiia:ii un
cierge , cl des gentilshommes leur atta-
chaient les éperons. Kniin le pape Alexan-
dre \'l déclare par sa bulle qu'il a voulu so
faire inscrire dans celle confrérie aussi bien
que plusieurs cardinaux, et il adressa iiu
bref à lous les cvéques d'Allemagne , dans
It'ciuel il leur recommanda celle milice, à
laquelle il accorda beaucoup d'indulgencc' ;
c'est pourquoi il se trouve encore une oi-
doiinance de Jean Sibenhirter, grand maître
(le l'ordre de Sainl-lieorges, où il traite le
pape de confrère : Oreinus pro saiiclifsiinu
vus(ro Alextindro Y I confratre nostiu.
L'empereur Maximiiien dit aussi dans
ses lettres qu'il a voulu élre inscrit au
nombre des confrères, el, dans celles (ju'il
écrivit à Jean . roi de Navarre, le l(j octo-
bre lall , il dit que son père , renipereur
l'riJcric, à cause de la grande déîolion qu'il
portail à saint Georges , avait voulu entrer
dans C(!t ordre: et que, pour lui, suivant Ks
traces de son pore, il a dessein de le conser-
ver el d'augmeuler ses revenus. Le pape Ju-
les Il , parlant de cel empereur, dit qu'il
avait résolu d'entrer dans l'ordre de Saint -
(îeorges, de s'y consacrer pour le reste de
tes jours, de s'opposer aux in idèbs qui vou-
laient ravager la vigne du Seigneur, 1 1 .
avec les Frères de cel ordre, répandre jus-
qu'à la dernière goutte de son sani: pour la
défense el l'auguienlalion de l'Iigli e et do
rKmpire, el de recouvrer, a>ec le secours
du ciel, la ville de Jérusalem, col e de Cons-
tanlinople el les autres lieux qui étaient oi>
cupés par les infidèles. Le niémi' pajie , eu
cunlirmanl cet ordre, lui accor^la lioaucou|.
d'indulgeii' es ; el Léon X, en le conlirmaut
de nouveau aussi bien que la conircrie ou
société qui y a>ail été annexée, lui accorda
encore dos indulgences cl les inéiiics privi-
l^) Vvy , il Ij lin (lu \o\ ii" bi.
55?>
CEO
CEO
39«
lé^cs donl jouissaient les autres ordres inili-
laircs.
Mais l'ordre de Saint-Georges, nonobstant
tout ce que l'empereur Maxlmilicn fit pour
son agrandissement, et les précautions qu'il
prit pour qu'il pût se conserver dans sa
splendeur, a eu le môme soit que plusieurs
autres donl il ne reste plus que la mémoire ;
et les guerres civiles, principalement celles
qui s'élevèrent en Allemagne au sujet de la
religion, ont causé sa ruine. Les ducs d'Au-
triche et les princes s'emparèrent des biens
qui lui appartenaient et se trouvaient sur
leurs terres ; et enfin l'archiduc Ferdinand,
qui fut ensuite empereur sous le nom de
Ferdinandll, donna, avec le consentement du
pape , l'an 1598, aux Pères de la compagnie
de Jésus, le couvent de Milleslad pour la fon-
dation de leur collège de Gralz en Slyrie.
Ceux qui ont dit que l'empereur Frédéric IV
avait institué Tordre mililairede Saint-Geor-
ges, mettent sans doute au nombre des em-
pereurs Frédéric d'Autriche, qui fut le com-
pétiteur de l'empereur Louis V, et qui lui dis-
puta l'empire pendant neuf années; mais,
comme la plupart des écrivains ne le mettent
point au nombre des empereurs, non plus
que Frédéric de Brunsvick, qui fut élu après
la mort de Venceslas, et qui fut tué lorsqu'il
venait pour prendre la couronne impériale
à Francfort , nous avons donné à l'insti-
tuteur de l'ordre militaire de Saint-Georges
le non» de Frédéric 111, et ce que nous avons
dit de cet ordre la t assez connaître que ces
clievaliers étaient véritablement religieux.
L'abbé Giustinlani, de Belloy, Schoone-
beeck, Menneus, Hermant, lionanni et Fa-
vin, dans leurs Uistoires des Ordres militai-
res; et BoUand., tom. 111 ApriL, pig. 155.
11 y a plusieurs auteurs, comme Menneus,
Tambourin, Schoonebeeck, M. Hermant et
quelques autres, qui ont parlé d'un ordre de
Saint-Georges institué par Alexandre VI
pour la dcleuse de l'Eglise contre les enne-
mis de la foi (1); quelques-uns disent que ce
fut l'an 1W2 que ce pape 1 institua. M, Her-
mant prétend que ce ne fut qu'en H98 ;
u)a:s ce pape n'a point institué d'ordre mili-
taire, et celui que ces historiens lui attri-
buent est le même que cette confrérie ou
société que l'empereur Maximilien joignit à
l'ordre do Sainl-Georges dans la Carinlhie,
et qui fut confirme par le pape Alexan-
dre VI, l'an IWi.
L'abbé Giusliniani, Menneus, Schoone-
beeck, Hermant et le P. Bonanni, Hist. des
Ord. milit. ; et Tambur., de Jur, Abb. disp. 24.
Ou attribue encore l'institution d'un ordre
militaire sous le nom de Saint-Georges, au
pape Paul 111, qui assigna la ville de ila-
venncs aux chevaliers pourleurdemeure (2).
Ils devaient veiller à la délense de cetie
ville, et donner la chasse aux corsaires qui
venaient sur les côtes de la Marche d'An-
côue. Cet ordre l'ut aboli dans la suite par le
pape Grégoire Xlll, à ce que dit l'abbé Giu-
sliniani, qui prétend que cela se justifie par
(I) Voij., à la fin du vol., n° 85.
{-1) Yoy., a 1.1 lin ilu vu!., ii" ijl.
l>ltT10.SNàlIlC DES Ouur.ES RELIGIEUX. IL
une bulle de Sixte V qui institua les cheva-
liers de Lorette.
L'abbé Giustiniani, Menneus, Hermant,
Schoonebccck et le P. Bonanni, dans leurs
HiHoires des Ordres mil laires.
Ces auteurs parlent aussi d'un ordre mili-
taire à Gênes, dont ils rapportent l'institution
à l'empereur Frédéric 111. L'abbé Giusti-
ni.ini, le P. Bonanni et Schoonebccck, di-
sent que ce prince , revenant de Borne
l'an 1472, passa p;ir Gènes où il fut reçu
avec beaucoup de magnificence, et que, pour
marquer sa reconnaissance envers cette ré-
publique, il institua un ordre suus le nom et
la protection de suint Georges, et donna pour
marque aux chevaliers une croix rouge (3);
mais que, comme il avait f il le doge de cette
république chef ou grand maitre de cet or-
dre, et que ce doge change tous les deux
ans, l'ordre n'avait pu se maintenir et éiait
entièrement éteint. H est vrai que l'empe-
reur Frédéric 111 alla à Home en U52 pour
s'y faire couronner avec l'impératrice Eléo-
nore son épouse ; mais, comme il y retourna
en 14G8 (comme nous avons dit) et qu'il pria
le pape Paul II d'ériger et approuver l'ordre
de Saint-Georges, auquel il fit unir par co
pontife l'abbaye de Milleslad pour la princi-
pale demeure des chevaliers, il se peut faire
que cet empereur, passante son retour par
Gènes, créa quelques nobles Génois cheva-
liers de ce nouvel ordre, et que l'on a tiré
de là une conséquence qu'il avait institué un
ordre à Gènes sous le nom de saint Georges.
Comme ces auteurs n'apportent point de
preuves solides pour l'existence de cet ordre,
je ne fais point de difficulté de le mettre au
nombre de ceux qui sont supposés, aussi
bien que celui de Saint-Georges à Rome
dont nous avons parlé ci-dessus.
GEORGES AU COMTÉ de Bourgogne (Che-
valiers DE Saint-).
Quoique Gollut, dans ses Mémoires de
Bourgogne, parlant des chevaliers de Saint-
Georges dans le comté de Bourgogne, ne
donne à leur société que le litre de confrérie,
elle n'en doit pas être moins regardée comme
un ordre de chevalerie, puisque, pour y être
reçu, il faut faire preuve de trente-deux
quartiers de noblesse du côté paternel, et
autant du côté maternel; de même que l'or-
dre de la Jarretière en Angleterre ne doit pas
être regardé comme une simple confrérie,
parce que Froissard ne lui donne que ce ti-
tre, qui était donné à presque tous les or-
dres de chevalerie dans leur origine. La so-
ciété des chevaliers de Saint-Georges, dont
nous parlons dans cet article, peut avoir
été instituée, selon le même Gollut, vers
l'an 1390 ou 1400, parce qu'il y avait, dit-il,
en ce temps-là quelques gentilshommes qui
furent du nombre des premiers conirères,
comme Humbert de Rougemont, sieur d'Ut-
sie; Jean de Bye, sieur de Til-Castel ; Etienne
de Monstret, sieur de Villeroy-le-Bois.el Phil-
bert de Miolans, fondateur de la confrérie,
(ô) Voy., à la fin du vol., n" 83.
13
395
flous avons un ronicil ilos nrmoirics ilo Mus
rrsriipvn lier*, ilcpui'* leur inslilulioii jusqu'en
lati iCCt.], qu'elles furonl pravôcs pi données
nu public sous le lilre ii"/;/(jt de la confii'rie
tte .S'<iirif-6>('i.9 .«. nulrenienl dile de ItoïKje-
mtint m Finnchc-Comté. Ces chevaliers por-
tent pour marque do leur ordre un saint
Cioorges d'or massif, et A leur réceplioii ils
font serment de mainlenir d.ins la province
la pureté de la religion caiholiquc el l'obéis-
sance au souverain.
C'est à la devoliuu de Pbililiertde Miolans.
pentilbomme du conilé de l?ourt,'0!;ne, que
l'on doit cet éiablissemcnl, qu'il (il à son
rirlonr d'un voyage d'Orient, d'où, ayant ap-
poit<> quelques reliques de sninl (îeorj^es, il
iil bûlir une chapelle proche l'ésilise parois-
siale de l'ioujîemonl, donl il élail seigneur en
partie: et, les ayant fa.l mettre dans une ri-
che châsse, il convoqua, lan 1309, un grand
nombre de gentilslioninies de ce comté pour
assister à la translation de ces reliques, qui
fui faile avec beaucoup de niugiiificence.
Ces pcnlilslioinines, voulant témoigner la
dévolion particulière qu'ils avaient pour ce
saint martyr, s'unirent dès lors ensemble,
s'cngageant d'assister à tous les services et
onices que Pliilhert de Miolans avait fondés
dans celle chapelle. Ils firent quelques rè-
Cl. ments, et donnèient à leur chef le litre de
ïiàlonnier, qu'on a changé depuis en celui
de gouverneur: et ils élurent pour premier
bâlonnier ce Philberl de Miolans, ipii donna
sa maison de Uougemoni à celle confrérie.
L'an l'iSS.l'on (il des staluls qui portaient
cnlre autres choses que chacun aurait son
rang selon l'ordre de sa réception dans la
confrérie, sans avoir égard à aucune dignité,
richesses, chevalerie, ni autre chose donnant
jirééminence ; que tons les ans ils s'assem-
bleraient la veille de la lélc de s.iiiit (îeor-
ges , audit lieu de Kuugeniont, pour faire le
servii'C divin, accinipagner le bàloiinier, et
traiter d(S affaires qui concerneraient la
confrérie: que celui qui ne pourrait s'y trou-
ver enverrait au bâtonnier les droits dus à
la confrérie el les excuses de son absence ;
qu'ils iraient en la maison du bâlonnier, de-
vant lequel ils marcheraient deux à deux, te-
nant un cierge à In mam; qu'ils demeure-
raient à l'église pendant le service sans en
pouvoir Sortir ; que les ecclésiastiques se-
raient revêtus de surplis et piécéderaienl les
co: frères , que le jour de saint Georges l'on
rh.inlerait les vé|)res, et qu'ensuite l'on di-
rait les vigiles des morts, cl que le lendemain
l'on dirait trois messes hautes, l'une du
Sainl-Hspril , une ;iulre de la \ierge , et la
troisième des moris pour les confrères décè-
des ; que le bâtonnier y offrirait du pain , du
^'^n el l'épéo du dernier confrère qui serait
décédé, dont bs confrères , ses parenis , pre-
scnlcraienl aussi l'eeu de ses armes , et que,
s'il y en avait plusieurs cjni fussent décèdes,
les aulres confrères feraiiiil la même chose;
que si quelques confrères se trouvaient dans
I' lieu aui|ucl l'un des confrères décéderait,
ils porteraient son corps à l'éf^lise , el que ,
u'cljul [Ms en nombre sulii^ant, ils l'acconi-
DICTIONNAIRE OF.S OUnilES RFLIGIEUX. 3%
pagneraient nu moins, cl demeureraient dam
i'ig'ise jusqu'à ce (|up son corps fùl mis en
terre ; que Ions les ans ils (layeraient nu bâ-
tonnier un franc pour les frais de l'ofCice di-
\ in; (lue le b:'ilonnier donnerait à la collation
du p.iiu el du vin seulement , et le jour de
siinl tîcorges , à diner, du bouilli seule-
ment , et à souper du rôti avec deux sortes
de vin pur cl net, sans excès ; autrement ,
que le procureur de la confrérie prendrait le
surplus et le distribuerait aux pauvres: que
le jour de saint G( orges on donnerait la col-
lation comme le jour précédent, elque, pour
supporter les frais, on donnerait au bâton-
nier six gros vieux ; que chaque confrère
payerait aussi au procureur deux gros pour
la rélribulion des chapelains; que le bâton
serait donné par < rdre de réception , el que,
si celui qui devait être bâtonnier refusait
cet emploi , il payerait dix livres ; que son
nom serait raye de la liste des confrères , et
l'écu de SCS armes ôlè de sa p!ac.';quc celui
qui serait reçu dans la confrèiie enverrait
dans l'année l'écu de ses armes blasonnées
1 our élrc mis en sa place, dans la chapelle ;
<iue s'il arrivait dillérend entre les confrères,
et (lue quelqu'un ne voulût pas acquiescer
au jugciiienl qui en serait donné pir les au-
tres , il serait exclu de la confrérie ; qu'ils
ne pourraient soutenir plus d'un an une sen-
tence d'excommunication, cl ne feraient i ien
conire leur honneur, sous peine délre aussi
exclus ; qu'ils poi leraienl toujours l'image
de saint (ieorges , el que , s'ils manquaient
de se trouver deux ans do suite à Hougc-
inonl , leur nom serait biffé de la liste des
confrères : eiiliu que les héritiers des con-
frères décédés s raient tenus de donner Irenlo
sous à la c nfrerie , qui ne pourrait être
composée que de cinquante gentilshommes.
L'an l-VH*?, on ajouta à ces slntuts que le
bâlonnier serait obligé de donner â souper,
outre la collation, la veille de la fête de samt
Georges: cl, sur ce que quelques bâtonniers
inan(|(ièrcnl d'y satisfaire, il fut ordonné,
l'an l'i-i)i, que chai]ue bâtonnier nianquantâ
celte obligaiion payerait quarante livres. Le
nouibre des confrères était augmenté l'an
liiOi jusqu'à cent sepl ; et en 1518 ils ordon-
nèrent que les lieriters du bâlonnier feraient
les repas qu'il n'aurait pu faire, sur peine de
50 livres. L'an lo.iJ , l'on ajouta encore aux
statuts que dans ces sortes de repas il n'y
aurait point d'autre viande que du bœuf, du
mouton, du veau, du cabris, du cochon, des
chapons, des poules et des poulets, sans au-
cune pâtisserie pour le de>serl , el (jue les
Confrères seraient tenus de faire preuve de
noblesse. Mais ces repas ont été retranchés
depuis. Les assemblées se tiennent présente-
ment d.ins l'église des Carmes de Hesançon.
Le baron deChnmplile, gouverneur de la
Franche-Comté, s'ètanl f.iii insi rire au nom-
bre des confrères l'an 15G9, l'on lit un nou-
veau statut par lei)uel l'on recommanda l'ob-
servance des anciens ; cl l'tMi .ijouta que les
confrères feraient serment de vivre et mou-
rir dans la reliL:i(Mi c.'tlliolii)ue , apostolique
cl romaine, cl d'obéir à lMilli{>pe ll.ioid'L,-
5f17
GEO
G KO
r,"s
pagne, vt à ses successeurs nu comté de
Bourgogne ; sur (iiioi le duc tlo TolèJo, gou-
verneur des Pays-Bas, leur icmoigna la re-
connaissance qu'il en avait par une lettre
qu'il leur écrivit , et on élut un gouverneur
de la confrérie. Il paraît que l'on y recevait
aussi quelquefois des femmes; car, dans une
liste de ces confrères, l'on trouve Uenrietlc
de Vienne, darne de Uougemoiit, et Jeanne
deChauvirey, dame de Bevouges. Ces con-
frères prennent présentement la qualité de
chevaliers de l'ordre de Sainl-Ueorges, el
portent pour marque de cet ordre un saint
Georges à cheval, tenant un dragon sous ses
pieds, le tout d'or massif du poids d'une pis-
tole ou plus, à leur volonté, attaché à un ru-
ban bleu.
Gollul, Mémoires de Bourgogne; et VEtat
de la confrérie de Sainl-Georges dite de Rou-
gemonl, imprime en 1CG3.
GEOllGKS d'aLFAMA (Chevaliers de
Saint-). Voy. Montesa.
GEORGES EN Sicile (Congrégation de
Saint-). Voy. Georges in Algiia.
GEORGES IN ALGHA (Chanoines séculiers
DE Saint-).
Des chanoines séculiers de la congrégation de
Suinl-Georges in Alglia à Venise, avec la
vie de saint Laurent Juslinim, patriarche
de Venise et l'un des fondateurs de celte
congrégation.
L'on accordera aisément les différentes
opinions touchant les fondateurs de la con-
grégation de Saint-Georges in Algha, si Ton
considère que ce fut par la force des prédi-
cations du V. P. Barthélémy Colomnc, dunt
nous avons déjà parlé , et par son conseil ,
qu'Antoine Corr.irio et Gabriel Gondclmaire,
tous di'ux neveux de Grégoire XII, et le der-
nier l'un de ses successeurs sous le nom
d'Eugène IV, résolurent de se donner entiè-
rement à Dieu en établissant une commu-
nauté oiî ils menaient une vie apostolique,
vivant en commun , el où plusieuirs nobles
Vénitiens se joignirent à eux , du nombre
desquels fut saint Laurent Justinicn , qui
dans la suite (ut patriarche de Venise. Car
il y en a qui ont prétendu que Barthélémy
Colomnc a été le fondateur de cette congré-
gation ; d'autres ont attribué cet honneur à
Gabriel Gondelmaire, d'autres à Antoine
Corrario el Gabriel Gondelmaire ; d'autres
enfin, et qui ont élé les plus suivis , disent
que c'est saint Laurent Justinicn , apparem-
ment parce qu'il a élé le premier général de
cette congrégation , el qu'il en a dressé les
statuts et règlements. Nous n'avons gaide
de lui refuser ce liirc de fondateur , que les
papes Clément VIII et Paul V lui ont donné,
lorsqu'ils ont accordé, en 1598 et 1605, aux
chanoines de cet ordre de célébrer sa fête et
de réciter son office ; mais on ne peut en
même temps ôter celle qualité de fondateur
à Antoine Corrario, puisque, sur son lom-
beati, qui est dans l'éylise de Sainl-Georges
in Algha, à Venise, on lit celle Inscription :
Scpulcrum piissimi Patris Dom Anionii
Cvrrarii bealx mcmoriœ eoiicopi Ostiensis,
Ctirdinalis Bononiensis, fundaloris hujus...
Congrcgntionis, qui obiit nnno a Nativitnte.
Domini M.CD.XLV. die 19 /an. Orate pro eo
semper.
Ce que l'on voit aussi sur celui d'EugènefV,
qui est à Rome, dans l'église de Saint-Sau-
veur in Lauro, i\u\ appartenait à telle con-
grégation lorsqu'elle fut supprimée, comm«
nous le dirons dans la suite.
Ce fut sous le jiontifical de Donifacc IX,
l'an 1404, qu'Antoine Corrario et Gabriel
Gondelmaire, nobles vénitiens, désirant ser-
vir Dieu plus parfaitement en méprisant les
pompes et les vanités de ce monde, aban-
donnèrent leurs maisons et leurs biens, et
choisirent d'abord pour leur retraite une
église proche Vicencc, sous le tiire de Sainl-
Augiislin. Leur vie exemplaire leur ayant en
ppu de temps attiré plusieurs compagnons,
et le lieu se trouvant trop pelil, ils allèrent à
Venise, oîi ils nsolurent d'établir leur de-
meure au monastère de Saint-Nicolas au
Lido, regardant ce lieu comme retiré el éloi-
gné du bruit du monde , où ils pourraient
plus tranquillement vaijucr a la prière et à
l'oraison ; mais Louis Barbo, prieur du mo-
nastère de Saint-Georges in Algha, de l'ordro
de Saint-Augustin, qui y était resté seul avec
deux frères lais , désirant d'y rétablir la
régularité, el étant persuadé de la vertu cl de
la sainteté de Corrario el de ses compagnons,
les fut trouver, leur offrit son église cl son
monastère, cl les sollicita si fortement, qu'ils
acquiescèrent à sa demande. Us vinrent de-
meurer avec lui , el il sollicita ensuite le
pape Bonifuce IX à les faire chanoines de
cette Eglise.
Ce pape, par une bulle du mois de mars
1404 , donna commission à l'évêque de
Kishame de réformer, ce monasière , d'en
changer tout le gouvernement, et do faire ce
qu'il jugerait à propos pour y élablir l'ob-
servance régulière. Cet évoque, n'y ayant trou-
vé que Louis Barbo et deux frères lais,
qui professaient tacitement la règle de Saint-
Augustin, et ne voyant aucune apparence de
réforme, jugea à propos d'ériger ce monas-
tère en collégiale, qui serait dcsserviio par
des chanoines séculiers qui vivraient en
commun , suivant le premier dessein do
Corrario et de son compagnon , qu'il mit en
possession de celte église, du consentement
de Louis Barbo, à qui il laissa le titre do
prieur sa vie durant.
Us étaient dix-huit, tous dans les ordres
sacrés, savoir : dom Antoine Corrario, doni
Gabriel Gondelmaire, dom Etienne Mauro
cini, dom François Barbo, nobles vénitiens ;
dom Mathieu de Strada, de Pavie; dom Ro-
main de Rodvillo, milanais, el dom Luc Phi-
lippi d'Esté, prêtres; dom Martin Quirino,
dom Michel Gondelmaire, dom Laurent Jus-
tinicn, nobles vénitiens ; dom Jean de Pizzé-
nado, dom Simon de Persico, crémonois, doui
Jérôme de Mussis, de Pavie, diacres; dont
Augustin Gaslaldi, de Pavie ; dom Jean Sar-
donati, de Collri ; dom Marc Gondelmaire et
Dominique Maurocini, nobles vénitiens, sous-
diacres, <[u\, étant tous à genoux aux pieds
V)9
DICTIONNAIRE DES ORDRES REI.ICIIUX.
tM
lie l'cvéqu*', fiiront ilalilis rlianoinos do celle
églisi', cu\ et leurs j^uceesseurs. Ce prélat
leur donna toiile la luruliclion spiriUiille et
leiiipoiolle qui en depiiidail, el leur pres-
crivit des reniements tant pour leur inaiiiùrc
de vi\rc que pour leur h.iliilliinent, laissant
la lilierlé .lU prieur d'en f.iire d'autres, selim
qu'il le jugerait expédient pour le bon ordre
Il le niainl'ien de la régularité, lui donnait
auvsi pomoir de recevoir des frères lais
ixi convers qui \ivraient aussi en commun,
tl dont le nombre ne serait point limité, non
1 lus que celui des chanoines. •
.\n(;e Corrario, ayant été élu pape, l'.m
l'iO(i, sous le nom de Giégoire XII. confirma
cet établissement par un bref du 27 juin
U07, par lequel il approuvait aussi les con-
stitutions qui avaient clé dressées par l'évé-
(juc de Kishamc. 11 fit aussi cardinaux An-
toine Corrario et Gabriel Gondelmairc , et
donna l'abbaye de Sainte-Justine de l'adouo
à Louis lîarbo, qui réforma ce monastère,
lequel devint rluf d'une congrégation fa-
meuse dont nous parlerons dans la suite,
ayant pris pour l'aider dans celte réforme
d<Mn Etienne Maurocini el dom François
Itarhi), chanoines de Saint-Georges in AUjha.
11 y a bien de l'apparence que dans le com-
mencenienl cc s chanoines vivaiinl dans une
très-grande pauvreté el même d'aumônes,
puisque nous lisons dans la Vie de saint
Laurent Juslinien , qu'il la demandait de
porte en porte par la ville de Venise, s'esti-
manl heureux de se voir méprisé où il avait
été honoré, et que sa mère, ayant ordonné
à ses serviteurs de lui emplir sa besace afin
qu'il n'eût pas la peine cl la confusion de
lourir ainsi toute la ville, il la remercia, se
contentant de recevoir de sa main deux pe-
tits pains, pour avoir sujet d'en demander
à d'autres.
Ces chanoines se rendirent si recomman-
dablc- en peu de temps, et vivaient dans une
si grande réputation de sainteté, qu'ils fu-
rent introduits dans plusieurs collégiales,
qui toutes cnsiinble formèrent la conj;réga-
lion de S.iinl-Geurgi s in AIgha, à cause de ce
lieu, où se lit le premier élablis>enienl, et qui
fut rcioniiu pour chef de celle congrégation,
i]ui dans la suite fut composée de treize mai-
sons , dont celle de S.iinl-Sauvcur m Lauro
à Home était du nombre.
Le premier chapitre général se tint l'an
V»2V , dans lequel saint Laurent Justinien
fut élu (ireinier général. 11 augmenta les
constitutions el lit plusieurs règlements, qui
fuient toujours observés dans la suite, ce qui
san.> doute lui aura fat donner par les sou-
verains pontifes le titre de fondateur de lcHo
congtéi;alion, quoique à la vérité il n'ait pas
été le |ircmiir qui en ait jeté les fondements,
comme nous avons montré ci-dessus, puis-
que Antoine Corrario el Gabriel Gondelmairc
lurent les premiers qui conçurent ce dessein.
Le même doiidelmairc, ayant été élevé au
souverain pontificat sous le nom d'Kugènc i\ ,
accorda plusieurs privilèges à cette congré-
gation, qui furent confirmés et même ampli-
Lh» p.ir SIS ^u^^:cssenr^, Sixte IN , Nicolas \ ,
(1) I iiii , -.1 l.i lui liu t»l., n" 80.
Pie 11. l'iul 11, Innocent VIII, AleT.indre VI
el l'nul III. Le pape Pie \, l'an LwO, obligea
ces chanoines à f.iire des vceux solennels en
reienant toujours le nom de chanoines sé-
culiers, afin d'avoir la préséance sur les au-
tres réguliers.
Ils se sont bien éloignés dans la suite do
la pauvreté el de l'humilié dont leurs fon-
dateurs avaient fail profession el dont ils
leur avaient laissé l'exemple. Les grands
biens qu'ils possédaient en plusieurs endroit»
leur firent bannir la régularité de leurs mo-
nastères. La plupart, étant nobles Vénitiens,
se prétendaient indépendants b s uns des
autres; ils ne marihaienl par la ville qu'ac-
comiiagnés de plusieurs bandits et coupe-
jarrets, qui étaient les ministres de leurs dé-
bauches (comme on m'assura étant à Venise),
de sorte que c'est avec iai>on que Clé-
ment IX les supprima en lG(i8 et donna tous
leurs biens à la république de Venise pour
s'en servir dans la guerre qu'elle avait con-
tre les Turcs , qui assiégeaient pour lors
Candie cl dont ces infidèles se sont cmparés.
Ils portaient une soutane blanche, el par-
dessus, une robe à la vénitienne de couleur
bleue, el un chaperon sur l'épaule , qu'ils
prirent à la place d'un capuce qu'ils por-
taient autrefois (!)• La couleur bleue leur fui
ordonnée par Clemenl Vlll comme étant celle
de l'habit que portait saint LaurenlJusIinien,
leur instituteur, ainsi qu'il est marqué dans
le bref de ce pape de l'an 1C()2, et ils avaient
pour armes un saint Georges à cheval tuant
un dragon, avec ces mots pour devise: Super
afpidein it basiliscum nminilabis.
11 parait assez par leurs illustres fondateurs
qu'il y a eu ] armi eux des personnes distin-
guées, puisque Gabriel Gondclmaire a été
pape; qu'Antoine Corrario, Marcel François
Gondclmaire ont élé cardinaux; que saint
Laurent Justinien a été patriarche de Ve-
nise, el qu'il a eu pour successeur dom Ma-
phéc Conlarini, de la niéme congrégation.
Philippe Monticelli fut confesseur des papes
Alexandre VI. Pie III, et Jules IL Ceux qui
se sont rendus célèbres parmi leurs écri-
vains ont été Jean Haptiste Salici, professeur
de l'université de Padoue ; Jacques-Philippe
Thomasini, évéque de Cilla-Nova d'Istrir ;
Eusèbe lîonfanti , Alexandre Conscdenii,
mais surtout saint Laurent Justinien, dont
les ouvrages ont élé imprimés en un vo-
lume in-folio à Lyon, en 15fi8,avecsa vie,
écrite en douze chapitres par son neveu
Uernard Jusiiuien, Chartreux, dont voici un
abrégé.
Il elail de l'illustre famille des Justinien
à A'enisi". qui prétendent descendre de l'em-
pereur Justinien. Son père s'appel.iitlîernard,
el sa mère elail de la famille des Quirino,
laquelle demeura veu\eà l'âge de vingt-qua-
tre ans el chargée de cinq enlanls, dont le
plus illustre fut notre saint, qui naquit lu
premier jour de juillet 1381, lorscjue toute la
ville faisait des feux de joie pour la victoire
obtenue en la journée de Cliioza; ce qui
donna sujet .1 sa mère de demander h Dieu,
au moiiienl de s.) naissance, qu'il lut un jour
I
v\i r.EO
la terreur de ses ennemis et le salut d • ses
citoyens : ce qui est arrivé dans la siiilc ; car
l.i ville de Venise l'a choisi pourundesos pro-
terteurs cl lulélaircs, aussi bien que la ville de
Palerme, depuis qu'elle cul recours à son in-
tercession, l'an 1625, pour être délivrée de
la peste, dont elle clail pour lors affligée.
On reconnut dès son bas âge la forte in-
clination qu'il aurait à s'occuper aux choses
saintes, et ce fut ce qui le porla, à l'exem-
ple de dom Martin Quirino.son oncle mater-
nel, qui s'était associé à Antoine Gorrario
et Gabriel Gondelmaire, d'entrer aussi dans
leur compagnie, ayant été du nombre des
dix-huit qui furent les premiers chanoines
de Saint-Georges in-4/(7Aa, comme nous avons
dii ci-dessus en parlant de cette congréga-
tion, à l'augmentation de laquelle il travailla
avec tant de zèle, que c'est ce qui lui en a
fait donner le litre de fondateur. 11 se pres-
crivit d'abord une rigueur de vivre qu'il a
toujouis observée jusqu'à la fin ; et, un jour
que Iroisdesplus anciens Pères lui comman-
«Ièrenl,dc la part du chapitre, de modérer les
rigueurs excessives qu'il pratiquait, il leur
répondit fort humblement : Je ferai, mes
Pères, ce que vous me commandez, mais
sachez que celui qui a résolu de souffrir
pour Dieu ne manquera pas d'en trouver les
moyens.
11 n'y avait rien de plus humble que lui,
et, quoiqu'avec le temps il fut fait supérieur,
il ne s'en éleva pas davantage, et ne laissa
pas de s'appliquer toujours aux plus vils mi-
nistères. Ses entretiens ordinaires étaient de
ses défauts ou bien de l'humilité jie Noire-
Seigneur Jésus-Christ. On l'accusa deux fois
en plein chapitre d'avoir commis quelques
fautes dont il était innocent. La première fois
il reconnut cette fauie, mais la seconde fois,
pour ne pas fivoriser la malice de ceux qui
l'avaient accusé faussement, il ne répondit
rien et se tint dans le silence.
Toutes ses vertus éclatantes ne purent pas
demeurer cachées ; c'est ce qui fit que le pape
Eugène IV, qui le connaissait plus que les
autres, puisqu'il était aussi l'un des fonda-
teurs de la même congrégation, le nomma à
l'évéché de Venise, et, bien qu'il refusât con-
stamment cet honneur par deux fois, néan-
moins le pape lui ayant commandé une troi-
sième fois de l'accepter, il fut contraint de
se soumettre à l'obéissance. Il était pour lors
âgéde cinquante-un ans; et, durant les vingt-
trois qu'il vécut depuis, il ne changea jamais
sa façon de vivre qu'il avait pratiquée dans
son monastère. Il porta toujours l'habit do
sa congrégation, qui était de couleur bleu
céleste, comme nous avons dit. H ne voulut
point de tapisseries en sa maison, ni d'autres
ornements qui se ressentissent de la vanité
du siècle. Tout son tr/iin consistait en deux
chanoines qu'il prenait du monasière pour
l'aider, l'un à réciier son office, l'autre pour
partager avec lui les fonctions pénibles de sa
charge; et en cinq ofiiciers domestiques:
cm Oie se plaignait-il quelquefois, quoiqu'on
souriant, qu'il avait une trop grande fj'
mille à uourir; mais il entendait parler de
GEO
4-n
fous les pauvres de la ville, dont il prenait
un soin particulier, s'informanl de leur nom-
bre et de leurs nécessités les plus pressantes,
afin de les soulager. Un de ses parents l'ayant
prié de le vouloir aider de quelque argent
afin de pouvoir marier sa fi le, ils'cn excusi,
lui disant que s'il lui donnait une petite
somme, celaluiservirait pcu;elques'il lui en
donnait une plus grosse, il ferait tort à p'u-
sieurs pauvres pour qui les biens de l'Eglise
sont destinés.
Le pnpe Eugène fit ce qu'il p'it pour l'atti-
rer à Rome afin qu'il pût l'assister de son
conseil. Il s'en excusa toujours tant sur (a
longueur du chemin que sur sa faiblesse;
mais ces excuses n'ayant plus de lieu lorsque
le pape, étant contraint de sortir de Konie, se
réfugia à Florence et ensuite à Bologne, il
vint trouver ce pontife, qui en l'embrassant
lui dit : Soyez le bien venu, l'ornement et la
gloire des prélats Mais le saint, qui ne respi-
rait que son diocèse, obtint bientôt la per-
missi m d'y retourner ; et ce fut sous le p«n-
tificat de Nicolas V, successeur d'Eugène, que
le patriarcat de Grade et l'évéché de Venise
furent réunis en sa personne pour terminer
les différends qui étaient entre les prélats ili>
ces deux sièges, car il avait été ordonné ipK!
le survivant de l'un d'eux serait patriarche
et évéque de Venise.
Enfin, étant âgé de 74 ans sans avoir rien
relâché de ses ferveurs ni de ses rigueurs
ordinaires, la fièvre le saisit, causée par la
grand froid qu'il avait enduré pendant l'office
divin, et en peu temps il fut réduit à l'exlré-
mi'é. Il ne voyait qu'à regret les empresse-
ments qu'on témoignait pour le secourir dans
son mal, parce qu'il ne croyait pas qu'on sa
dût mettre si fort en peine de lui ; il ne put
se résoudre à se servir de viandes délicates
pendant sa maladie, et, voyant sa dernière
heure a])prochcr, il leva les yeux au ciel et
dit amoureusement ces paroles : Je viens <ï
vous, 6 bon Je'aus ! et, pour consoli'r ses do-
mestiques qui versaient des larmes, il leur
dit: Arrêtez ces larmes, c'est ici un jour de
joie et non pas de pleurs. Il se fil ensuite por-
ter à la chapelle, où il rendit paisiblement
son âme à Noire-Seigneur le 8 janvier 1433.
Il avait ordonné que son corps serait porté
sans aucune pompe à son monastère de
Sainl-Georges in i4f. y/ta/ mais les chanoines
de sa cathédrale ne le voulurent jamais per-
mettre, et c'est dans leur église ((u'il a tou-
jours reposé depuis ce temps-là, où il a opé-
ré un grand nombre de miracles qui ont
obligé le pape Clément Vil à le déclarer
bienheureux, l'an 132V, et Alexandre VIII à
le canoniser, l'aa IG'JO.
Il y a aussi une congrégation du même
institut en Sicile, fondée pir Henri deSiméoii
de l'alerme, qui, ayant suivi Alphonse, roi
d'Aragon, à Uome l'an 14-33, obtint de vivo
voix du pape Eugène IV la permission de
porter l'habit des chanoines de Saint-Geor-
ges in Alyha, et, étant retourné en .ion pays
cl ayant assein'.ilé quelques prèlr.s avec lui,
doiina commencement à ce te congrégation.
Le même i)ai»e, par Uii bref de l'au 14T7,
iiC,
OiCTIONNAlRE DES
coiifirmn l.i <J«>nalion qui leur fut ''a to l'c
I hofiiial «le Saini-J.ir()iics tie iM.izz.ir.i à Pa-
Icrnic, rt la inèmi' aniii-o il approuva leurs
loiislilulions. Ils avaient encore ((iieltiues
autres monastc rcs , et vivaient Jans une
^;randc pauvreté. Leur hatiil consis'ait en
une suulane de drap blanc cl un manteau ou
rliape de drap bleu fort prossier, avec un
petit eapucc, ei ils allaieiil nu-pitds avec des
sandales de bois, comme on peut »oir dans
la fifîure (jtie nous joiirnons ici (1). C'était
sans doute le vérilaldc iialiillement des dia-
noines séculiers de Saint-tjeorfjcs in AUjtii
il ins leur origine, et la robe à la vénitienne
qu'ils ont portée depuis, aussi bien que ceuv
de Portugal, est apparemment TelTet de quel-
que relâchement ; car Morijjia, de l'ordre
des Jésuales, dans son Histoire des hommes
illustres de son ordre, parlant du cardinal
Antoine Corrario, l'un des fondateurs de celte
eoiigrégatidu, qu'il préiend néanmoins avoir
Clé de l'ordredcs Jrsuates, apparemment pour
faire honneur à son ordre, dit qu'il fit p rier
aux chanoines de Saint-Georges in Ahjha
des sandales de bois, et qu'il 1( s obligea à
faire la (luète par la ville comme il se prati-
<|uail dans l'ordre des Jésuales ; et que liir-.-
qu'il écrivait (c'clail en ItiOV), il n'y avait
}<as liingiemps que ces chanoines faisaient
encore porter des sandales de bois à leurs
novices.
Maurolic et Giesccnzc font aussi mention
de quelques chanoines de Saint-Georges qui
lormaicnl une aulrc petite congrégation,
dont le principal monastère et le chef clail
proche Gènes. !ls avaient encore des monas-
tères à Loili le vieux et le nouveau, cl deux
autres dans le Parmesan et le Plaisantin.
Jean 'i'homassini, èvOque de t^itla-N )va,
l'i qui a fait les annales dt; la congrégation
lie Saint-Georges de \'enisc, dit que les cha-
noines du mont Saint-Eloy près d'Arra-, de
Sainl-Aubert de Cambrai, et quelques autres
aux l*ajs-Iîas, èlaii'nl aussi du même insti-
Mil. Il, se fonde peut-être sur ce (juc la cou-
li'ur di- li'ur hahil était b!eue ou violellc ;
mais il était dilïerenl quant à la forme.
Voyez Jacq. Philipp. Aimai. Cunonicuruin
cccul. S. Gi'urgii in Ah/fin. Francisco Maria,
lliflnriti dos anij rades Cuni/rvciioc.i ilos Cone-
ijo »fcn/(ires de S. Jeurije cm Alqa de V eiie-a
et de S. Jiiau. Kvantjclisld ein Parlugid. Sil-
vcsl. Maurol, Mur. océan, di lui. <jli Itelii/.
tih. V. Moiigia., Oriijinr de toutes les reti-
ijions, liv. I, iliap. hk. l'ciiot, llisl. tiiparl.
<'(inoiiic. Itryul. til). II. cap. 70. Taiiibur., de
Jnr. abhat.. tom. il, dispiil. ii, fiiursl. 4,
iium. 32. iîernard Jus;iii, Vil. S. Laurcnl.
Justin. Vies des S5.du P. Giry. Herm., Lla-
Idi.itement des ordres religieux, cliap. 51. Gio
l'iclr. Crcscenzio , J'residio Rom. lib. ii,
png. -28.
Cf'OHClKNS (.M()iM,s).roy. Mi'.i cuites.
GliltENHODli (Cil >>oiNiiSiES rnoiEsr anti;s
DE). Voy. GlNDEIlSUEIM.
onnuES rtEi.iriix'x. hk
gékéon (clievaijers df loiidre de
Saint-).
(Quoique nous ayons mis sous la régie de
saini It.isile les ordres inililaires dont nous
avons parlé dans quelques arliclos, nous n'o-
son* pas néanmoins assurer qu'ils aient vé-
riiablemcnt suivi cette règle, ou qu'ils y
aient été soumis, excepté celui de C'instan
lin. Il y a si longtemps qu'ils no subsislenl
plus, et il en est resté si peu de mémoire, que
nous nous en sommes rajiporlé à la bonne
foi des écrivains qui ont parlé de ces ordres.
Nous n'avons pas mémo voulu les suivre eu
mettant quantité d'aulrts ordres sous la
même règle. Si nous avons cru devoir donner
place dans cet ouvrage à ceux dnnt nous
avons déjà parlé, c'est qu'ils ont été institués
e.i Orient, ou établis pour la défense des
saillis lieux de la Palestine; et c'est pour la
même raison que nous y joignons aussi les
chevaliers de Saint-Géréon dont on ne con-
naît point l'origine. iMcnnénius parle de col
ordre sur le témoignage d'un voyageur,
Jean de llocvel, qui dit avoir vu, dans la Pa-
lestine, des chevaliers de Saint-Géréon qui
piiriaicnt une croix patriarcale, de la même
manière que ce. le qui c>t dans les armes du
royaume de Hongrie, il y a des auteurs qui
allribiimt l'.nstituiion de cet ordre à l'eni-
pcjeurFrédéric llarberousse, d'autres à Fré-
déric il. Les uns leur donneni pour niari]uo
de cet ordre une croix patriarcale d'argent,
posée sur trois montagnes de sinople en
champ de gueules, d'autres prélcndent qu'ils
avaient sur un habit blanc une croix no rc
en liroiierie sur trois montagnes de sino[ile,
et d'autres leur donnent encore une auirc
croix différente (2). Ainsi on ne peut ricu
(lire de certain touchant cet ordre, que Fa-
vin, sans aucun fondement, prétend a»oir
été soumis à la règle de saint .Vugiistin.
11 y a bien de l'apparence <iue ces chevaliers
de Sainl-ljcrcon étaient les mêmes que ceux
de Hongrie, que le V. Melchior incholTer de
la ciimpagnic de Jésus, dans les annales ec-
clésiastiques de ce royaume, dit iiue l'on ap-
pelait Porte-Croix, à cause qu'ils portaient
pour marque de leur ordre une croix sem-
blable à celle que l'un voit dans les armes
du même royaume, qui e^i une croix patriar-
cale posée sur trois montagne!», t'.et auteur
leur dniine pour fondateur saint lUienne,
premier roi de Hongrie, qui, à ce qu'il pré-
tend, insliiua ces chevaliers en mémoire du
la croix que le pape lui envoya, avec permis-
sion de la faire porter devant lui, à caosc
que ce prince avait travaillé avr c tant de
/élu à é:ablir la religion chr<'tienne dans ses
lt!tats, qu'il a élè considéré comme l'apolre
de Hongrie. Mais, comme les ordres militai-
res n'ont commencé que dans le xii' siècle,
il se peut faire que saint l'Uienne, ay.int
reçu du pape Silvestre H, l'an lOOt), la cou-
riiniie de Hongrii- , avec une croiv qu il
pouvait faire porter devant lui, il établit des
oliiciers pour por;er celte croix, auxquels,
pour ce sujet, l'ou donna le uoin de Puitu-
(l) Vuy., à U lin du vul., n' 87.
(:) Vvy.,lih lia du vol., n' 88.
405 CIL
Croix, cl que dans la suite l'on en ail formé
un ordre militaire qui no subsiste plus.
Mcnncnius, deliciœ Equest. Ord. Favin,
Théâtre d honneur et de cheval., lotn. II.
Scho mebeck, Hist. des Ord. Milil., cl Mel-
chior inchoffer, Annal. Eccles. regni Uung.,
tom. I.
Géiondins. Yoy. Césaike (Saint).
GILBEBT DE SIMPHINGHAM en Angle-
TERnE ( Religieux et Religieuses de
Saint).
Les chanoines réguliers et les Bénédictins
ont raison de mettre au rang des congrép;a-
lions des ordres de Sainl-Auguslin et de
Paint-Benoît celle de Saint-Gilbert de Sim-
pringliam, puisqu'il fit observer la règle de
saint Augustin à ses religieux, qu'il appelle
des ch.inoines, et qu'il donna à ses roligieu-
ses celle de saint Benoit ; et c'est à tort que
les religieux de Cîteaux prétendent que cel
ordre doit appartenir à eux seuls, comme
leur ayant été soumis; car Saint-Gilbert dit
lui-même le contraire dans ses constitu-
tions {Capital, de initio monast,, art. 2),
oîi après avoir rapporté de quelle manière
se fit l'établissement de ses religieuses, il
ajoute que leur nombre se multipliant et qtio
n'ayant point de religieux lettrés pour en
avoir soin aussi bien que des converses, il
avait été au chapitre général de Oiteaux, où
le pape Eugène était en personne, afin de re-
mellre sous la juridiction des religieux de
cet ordre, ses maisons, les servantes de Jésus-
Christ et les frères lais ; mais qu'on ne
tui accorda pas sa demande ; c'est pourquoi
il,avait été contraint par nécessité de s'asso-
cier des clercs pour avoir soin tles religieu-
ses el des frères lais , et qu'il leur avait
donné la règle de saint Augustin.
L'on pourrait néanmoins leur accorder les
frères lais, parce que saint Gilbert dit, dans
un autre endroit des mêmes constitutions
(Scripta de fratribus , art. 1), que dans
le temps que l'ordre des moinesses de
Simpringliam fut commencé , il vint des
religieux de Cîteaux accompagnés de quel-
ques frères lais de cet ordre qui étaient
propres [our le travail, pauvres dans leurs
iiabillements , se contentant de la nour-
riture des pauvres, préférant les herbes et
les légumes aux plus grandes richesses, qui
ne buvaient que de l'eau, qui avaient soin
des fermes el qui n'avaient point d'autres
emplois dans l'ordre. Ce que quelques-uns
des siens du nombre de ceux qui étaient des-
tinés au travail ayant appris, ils désirèrent
vivre de la même manière el avoir les mêmes
observances; c'est pourquoi, voulant satis-
faire à leur désir, et pour le salut de leur
âme, il ordonna que les frères lais de son
ordre, tant en rhabillenicnt qu'en la nour-
riture, suivraient la manière et l'observance
des frères de Cîteaux.
Ainsi il y avait du mélange dans l'ordre
de Saint-tîilberl, et l'on peut dire que les re-
ligieux, les religieuses, les converses et les
frères lais formaient (jualrc ordres uil-
fcreuls, puisqu'ils faisaient quatre couiuiu-
CÎL
406
nautés différentes <iiii avaient chacune un
réfectoire a part où présidait unsupéiiour
ou supérieure tirés de leur corps, et qu'il»
étaient aussi distingués par la forme el la
couleur de leurs habillements, comme nous
ferons voir. Nous mettons néanmoins cet
ordre au rang des chanoines réguliers, puis-
qu'on ne peut pas disputer aux religieux
prêtres cette qualité, que saint Gilbert, leur
fondateur, leur a donnée.
Ce saint naquit en Angleterre vers l'an
1083, du temps de Guillaume le Conquérant.
Son père était un gentilhomme de Norman-
die nommé Jocelin.seigneurde Siinpringham
cl de Tyrington, dans le comté de Lincoln ;
cl sa mère était anglaise, qui, étant grosse do
lui, eut un présage de ce qu'il devait être un
jour, dans un songe qu'elle eut, où il lui
sembla que la lune tombait dans son sein.
Il fut envoyé en France pour y faire ses
études ; lesquelles étant achevées, il retourna
chez lui, où il s'appliqua à instruire gratui-
tement la jeunesse. Mais en enseignant aux
enfants les lettres humaines, il les formait
en même temps à la vertu, leur prescrivant
une manière de vie qui approchait de celle
qu'on pratiquait dans les monastères les
plus réglés.
Il demeura quelque temps dans le sémi-
naire de Robert Bloës, évêque de Lincoln, et
fut promu à la prêtrise par son successeur
Alexandre, qui eut bien de la peine à obte-
nir son consentement ; car il résista long-
temps au désir de son prél.it, se croyant in-
digne du sacerdoce. Depuis ce temps-là, il
aug.iienta ses exercices de piété, fon zèle el
sa ferveur. Il fit paraître un généreux mé-
pris des richesses et des honneurs dans lu
refus (]u'il fit de l'archidiaconé de l'église do
Lincoln, qui avait de gros revenus et beau-
coup de droits honorifiques, disant qu'il no
connaissait point de plus prompte voie pour
se perdre. Quoiqu'il eût de gros biens de pa-
lrimi)ine,il ne se regarda plus comme en étant
le propriétaire, mais seulen^enl l'économe et
le dispensateur, qui devait les répandre sur
les pauvres el les indigents, pour qui il avait
beaucoup de tendresse el de compassion,
principalement pour les filles qui étaient
dans la pauvreté et qui n'osaient la faire
connaître.
Il en choisit sept entre les autres, qu'il
trouva plus portées à la piété. 11 en eut un
soin particulier, et elles se consacrèrent en-
suite à Dieu par le vœu de virginité. Ce fut
ce qui donna commencement à son ordre ;
car, par le conseil el sous l'autorité de l'évê-
que Alexandre, il les renferma dans un mo-
nastère qu'il leur fit bâtir dans sa maison
paternelle de Simpringham,ran 1146. 11 leur
ordonna sur toutes choses un étroit silence,
et, afin qu'elles ne fussent point distrai'tes
dans leurs exercices spirituels, il prit de pau-
vres femmes qui avaient soin de leur pré-
parer à manger hors le monastère, et on leur
passait par une fenêtre tous leurs besoins.
Celles-ci diruandèrent aussi d'être admi-
ses à la profession religieuse en qualité de
sœurs converses, bainl Gilbert les instruisit
i07 l>ICTK)NN\mF, DES ORDUES RF.I.ir.irUX. i 18
lie lous les devoirs de l.i vio rcli;;ieusc. Il resnrdor. Si les religioiix rlaieiil ol)Ii!;i>s
voulu! les éprouver prml.int un an, aprôs (rcnlrer ilans l'habilalioiidi's filles (onr (lucl-
quoi il lour arc >rila lour dcmando, cl c les qucs nécessilés spirituelles, ils ne pouvaient
s'cniiapiVoMl à (cl étal par des VdMix solen- voir le visa;:? découvert de ces vierpcs, <|iii
iicls, avant elc renfermées dans le même ino- devaient toujours avoir le voile liaissé en
nastèrè avec les re!i;;ieuses. Il choisit aussi leur |>résence. Ce saint exi{;eait l'aj^o d«
des hoinines pour avoir soin des affaires du quinze ans pour admettre les fri'res clercs
monastère et faire valoirles lerres qui en dé- au noviciat, et vin^jt ans pour la profession :
pendaient, et ils furent reçus comme frères les frères convers n'y pouvaient èire reçus
convers. avant vinj^t-quairc ans. Les filles, (jui ilemaii-
Cct établissement cul l'agrément du roi daienl d'entrer en cet ordre, devaient avoir
KlitiiiiL', lies princes et lie lous les grands sei- douze ans pour être admises dans le monas-
gnewrs, qui firent de grands dons à ce mo- tère, el quinze pour avoir la qualité de no-
iiaslère. Saini Ciilbert fut contraint par né- vice; et il fallait (ju'clli's sussent le psautier,
cessilc de les accepter eu jinrlie; mais il en les hymnes el les antiennes, avant que de
refusa aussi beaucoup, de peur que les grands faire profession.
biens, comme de nié(hanli'S herbes, nétouf- Lorsque ee saint visitait ses monastères
fassent le bon grain qu il avait semé dans ce il allait toujours accompagné de deux clercs
champ, qui devint si fertile, que des pcrson- et d'un frère lai. Il ne s'entretenait pas do
nés de l'un el de r.iutre sexe se rendaient de discours inutiles, mais il psalmodiait conti -
toutes parts à ce nlona^tèrc pour embrasser nuellement ou priait mentalement, c! por-
cet institut, ce qui l'obligea de f.iirc de nou- lait toujours de quoi donner suffisamnu'nt
veaux établissements. aux pauvres qu'il rencontrait dans les che-
Cesaint fondateur, plein d'humilité, voyant mins. Il ne mangeait point de viande, si ce
un si grand nombre de disciples, crut q:j'i! n'ciaitdaus les grandes inlirmités, et mémo
n'avait pas assez de capacité pour les con- s'abstenait de manger du poisson pendant
duire ; c'est pourquoi il vint en France l'an l'.Vvenlet le Carême. 11 ne se servait ((uc de
1118, trouver les r(digieu\ de Citeaux as- vaisselle de bois; ses austérités et ses mor-
senililés dans leur chapitre général, où le lilicalions étaient très-grandes, et il n'était
pape lùigènc 111 assistait, pour leur mettre pas plus velu en hiver qu'en été, (|ii)i(]uil
entre les mairis le soin de ses maisons. Mais paraisse par ses conslitutions qu'il voulait
ils ne les \'julurenl pas accepter, disant que ses disciples fussent bien vêtus : car, tou-
qu'il ne leur était pis permis d'avoir la chant les habits, il ordonne que les ehanoi-
conduiie des moines d'un autre ordre ((ue le nés aient trois tuniques, une pelisse de pe.iux
leur el encore moins (les religieuses. Le pape, d'agneau, un manteau blanc cl un cap'ico
informé de ses vertus, loin de consentir à s 1 fonnés aussi de peaux d'agneau. Les reli-
prière, l'exhorta à ne point abanilonner son gieuses devaient avoir cinq tuniques, sa-
troiipeau, et lui témoigna le regret (lu'il voir : trois pour le Iravail et deux fort
avait de ne l'avoir pas connu plus l(^t, parce amplc'i , c'e4-à-dire, deux couler blan-
qu'il l'aurait encore chargé de l'arclievéïlié clies qu'eiles portaient au cloître, à l'é-
d'Vork, aii(|uel il avait pourvu depuis peu. glise, au cli.ipitre, au réfectoiie et au dor-
llionsulta ensuite saint lîernard el reçut loir ; une pelsse de peaux d'agneau, une
de lui des aiis touchant la conduite (ju'il de- chemise ou tunique de gros drap, et leur.'»
vait tenir dans le gouvernement de son or- voiles étaient aussi fourrés de peaux d'a-
dro : et, étant retourné en Angleterre, il mit gneau. F.,es sœurs con^ erses étaient habillées
la dernière main pour le rendre parfait. Sur de noir, et, au lieu de coules, elles avaient
le refus (jue les rcli'^ieux de Citeaux avaient des manleaux aussi fourrés de peaux d'a-
fait de prendre 1.1 conduite de ses religieuses, gneau. Hnfiii les frères lais avaient trois
il établit des chanoines <à qui il eu confia la tunii]ues blanches, un manteau de couleur
ilirection. Il leur donna la règle de saint Au- tannée, doublé de grosses peaux, une chape
gustin, et aux religieuses celle de saint Ile- aussi tannée el un capuce.Oii leur permet-
noil. Il dressa ensuite des constitutions pour tail encore pour le Iravail une pelisse faite
le gouvernement des uns et des autres, el les' de quatre peaux de bélier,
envoya au pape lùigène III pour y reIran- (Juanl à leur m inièro de vivre, elle élait
cher ou augmen'crce qu'il jugerait , à propos, aussi très-austère : ils ne mangeaient point
Mais ce pontife n'y trouva rien à redire, cl y de viamie et n'en donnaient pas même aux
donna son ;ipp'iilialic)ii, ce que ses succès- elrangers, sinon aux prélats, aax archidi.i-
s<'iirs Adrien IV et Alexandre III confirmé- cres et au\ malades ; et si ces personnes eu
relit dans la suite. voulaient, ils lesde\aicnt f.iire appièler par
Il semble q ue dans l'établissement (l(> son leurs ilonicstiques el non pas parles reli-
nnlre il ait voulu imiter saint ^orlle^l, dont gieux. Les réfectoires des chanoines cl des
les monastères étaient communs pour les frères convers étaient disposés >le telle ma -
hommes et les lillos, séparés néau'iioins nicre, qu'il y avait des ienélres ou loiirs
d'habiialinn.lLir ceux de saint (iilbcrt étaient qui repomlaieiit à ri)^'il)ilation des s<eurs, par
aussi doubles, el, de même que tians loidre oà elles leur p.iss.iienl à manger. L'vs convers
de l'rcmonlré, ses reiigieuses ne pouvaient gardaient niicvact sileiue pendant le ira
parler à la grille qu'accompagnées ('Il ded.ins vail, coninie tailleurs, tisserands, cord.in-
pai deux aiii eniH's, et au dehors par deux niers, peaussiers : les firgerons pouvaient
rclii;icuii. Les uns cl les autres ii'vsijicul tiC i>arlui'. Ils dctaicut lous faire piioleïsiuu
400
CIL
CON
«<0
dans lecliapilru des religieuses. Il ne leur
éldil pas permis d'avoir iiueiin livre. Ils
ne devaient savoir que le Pnler, lu Cieilo,
le Miserere mei, Deus , el quelques aulrcs
prières ; el ils disaient cerlaiu nombre do
Pater et d'Ave , pi)ur matines , laudes el les
.lulres heures, qu'ils récitaienl dans un ora-
toire parliculicr. La même chose élail obser-
vée à l'égard des sœurs converses.
Saint Gilbert ne prit pas d'abord l'h.ibil
de son ordre ; mais, appréhendant que cela
ne tirai à conséquence dans la suite pour
ceux qui en auraient la conduite, il !<■ |irit ;
mais il ne voulut plus commander el se sou-
mit entièrement à l'obéissante sous la con-
duite de Uoijer, aussi de ?impringham, entre
les mains duquel il se démit de la supério-
rité, après avoir reçu l'habit de son ordre à
liulington.
La sainteté de sa vie et la pureté de ses
mœurs ne purent pas le mcllre à couvert de
la calomnie, dont on lâcha de le noircir et
son insiitut. I^a priniière persécution qu'il
souffrit fut à l'occasion de saint Thomas de
Cantorbéry. On l'iiccusa faussement d'avoir
envojéde l'argoiit à ce sa ni, qui en passant
par les couvents de cet ordre, lorsqu'il sor-
tit il'Angleterre pour passer en France, y fut
reçu avec beaucoup de charité. Comme on
connaissait Gilbert pour un homme d'une
grande vertu, les juges devant lesquels il fut
cité voulurent qu'il alTirmât par serment si
ce q-j'on lui imputait était véritable ; mais il
ne le voulut jamais fjire, quoiqu'on le mena-
çât de renvoyer ses relii;ieux et ses religieu-
srs hors de leurs monastères, et de détruire
son ordre, el que lui-même en souffrit consi-
dérablement pendant un assez long temps, jus-
qu'à ce que le roi Henri 11 eûl ordonné (lu'il
retournât avec ses religieux dans leurs mo-
nastères. Pour lors, il avoua aux juges, sans
prélor serment, que ce qu'on lui avait im-
puté était faux, et qu'il n'avait jamais envoyé
d'argent à saint Thomas.
La seconde persécution lui fut d'autant
plus sensible, qu'elle lui fut susciice par les
frères convers, qui avaient à leur têle un
pauvre tisserand dcmand.mt l'aumône, qu'il
avait admis par charilé dans son ordre, aussi
bien que quel(iues autres misérables à qui il
avait fait apprendre des métiers. Ces frères
convcr.4, qu'il avait établis en plusieurs lieux
pour raduiinislralion du bien de ses monas-
tères, non-seulement s'éleièrenl contre lui
et voulurent le contraindre par force de les
décharger d'une partie de l'observance de
leur règle, comme trop sévère , mais ils le
diffamèrent encore auprès du pape Alexan-
dre 111 par des calomnies atroces, auxquel-
les il ;ijoula foi trop l'acileoiei»!. 11 décréta
contre Glbcrl el ses chanoines ; mais le roi
Henri 11 et les évêques de son royaume ayant
écrit à ce pontife pour lui faire connaître
l'innocence du saint fonilaieiir, il reconnut
la venté, écrivit à Gfliiert en lui donnant
beaucoup de louantes, cl ordonna que ses
constiluliuus ne seraient point changées eu
aucune manière, si ce n'était de l'avis de lu
plus grande et de la plus saine partie de tous
les religieux de l'ordre, auquel il accorda
beaucoup de grâces el de privilèges.
lînfin ce saint homme, accabléde vieillesse,
tomba malade dans un de ses monastères qui
était dans l'île de Kadencia. Il y reçut ses sa-
crements ; mais ses religieux le firent trans-
porter à Simpringham, où il mourut le six fé-
vrier de l'an 1 189, âgé de cent six ans, ayant
vu sept cents religieux dans treize couven's
de son ordre, dont il y en avait neuf qui
étaient doubles de religieux et religieuses, et
quatre seulement de religieux ; cl il y avait
près de douze cents religieuses. Il s'est fait
beaucoup de miracles à son tombeau, qui
obligèrent le pape Innocent III, après plu-
sieurs informations, de le canoniser. Lorsque
les monastères furent ruinés au temps que
la religion catholique fut bannie de l'Angle-
terre, il y avait vingt-un nionastèrcs de cet
ordre dans ce royaume. Simpringham eu
était le chef , on y tenait les chapitres géné-
raux, auxquels deux religieuses, supérieu-
res do chaque maison, l'une des filles du
chteur, el l'aulre des converses, devaient as-
sister; mais les frères convers n'y avaient
aucune voix. M. Allemau, dans son Hisloire
monastique d'Irlande, niarquc encore une
maison de cet ordre à Baltimore, dans la iJio-
viuce de Munster, au comté de Weslhméath ;
mais il se trompe lorsqu'il dit que cet ordre
dépendait de celui de Promonlré. Dodwortli
et Dugdallc, dans l'Histoire monastique
d'Angleterre, ont représenté un chanoine el
une sœur converse de cet ordre dans leur
habillement, el tels que nous les donnons ici,
auxquels nous avons ajouté une religieuse du
chœur, selon leur habillement prescrit par
les constitulion^ (1).
V^oî/. Roger. Dodworlh elGuillel. Dugdalle,
]tIonasticum Anglicanum , tom. II. Nicol.
Harspsfeld, IJist. Angl. stcuL xii, cap. 18.
Holland., Act. SS., 4 Feb. Bailiel, Vies d<.i
5. S'., 4 /ie'yr/cr. Tamb., De Jur.ahb., loin. Il,
disp. 24, quœst. 5, niiin. 3'i-. Ilermant, llisl.
des Ord. relig., tom. Il, ctp. 3o ; el le P. Bo-
nanni, Catalog. omn. Ord. relig., part, i et ii.
GLORIEUSE VIERGE MARIE {CnisvâUERs
DE la). Voy. Fbkres joyeux.
GONZAGUE (Ermites de Notre-Dame de).
Des Ermites de Notre-Dame de Gonzaijue el
des Ermites de Sainl-J ean-Baptiste de la
Pénitence.
Morigia.parlantdesErmites deNotre-Damo'
de Gonzague, dit que François de Gonza-
guc, dernier marquis de Manloue, allant un
jour se promener à une maison de plaisance
aux environs de Manloue, ajipidée la Gon-
zague, son cheval se cjbra el le jeta par
terre, où il fut quelques temps tenu pour
mort; mais qu'un nommé .lérôine Uaigni de
Casielgioffro. s'élanl prosterné devant une
image de la Vierge ((ui se trouva en ce lieu,
il lit vœu à Dieu (|ue, s'il rendait la sauté
(i) Voy., à la lin la vol., 11°= SU, 1)0 el 91.
4lt
à ce princo il (iiiilU-riil lo imnulo pour se
CKUsacrcr à smi service, cl pri.i avec l;iiil «le
ferveur la sainte Vierge diiilcrcéder pour
lai auprès de Dieu, que ses prières furent
exaucées, el le manjuis de Maulouc se re-
leva sans sentir aucune douleur.
Ce prince, ayant su le vœu que Jérôinc
Uaigni a\aitfair. il lui fit bàlir un monastère
au îiiênie lieu, où il mena une vie si sainte et
si exemplaire, que plusieurs pcisonncs se
joicnirent en peu de temps à lui. L'evëquc
de Ueggio leur prescrivit une manière de vie,
qu'ils ohscrvèrenl csaclcaienl et qui fut con-
lirmèe par le | ape Alexan Ire VI ; mais dans
la suite ils priicnt celle de saint Aujinstin.
Morigia ne dit point quel était leur liahiilc-
menl. Leur principal monastère était celui
de (ionzagup, oli demeurait ordinairement
leur général, et ils avaient cui-orc cinq ou
six couvents en Italie; mais l'on ne coiuiait
plus présentement ces ermites.
l'aolo Morigi.i. Jlist. dell. origin. di luit,
(jli liclig. lib. I, cnp. 59.
Silvcstre Maurolic parle aussi d'un ordre
de relii.'ieuv Ermites de Saint-Jean-Iîap!islc
de la rénitcnce, qui subsistait de son temps
dans le royaume de Navarre , cl dont le
principal couvent ou ermitage était éloigné
de sept lieues de la ville de Pampelune. Ils
vivaient sous l'obéissance de l'évèque de
celte ville ; mais leur supérieur ou prévôt vint
àRunnc, sous le pontiOcat de GrégoircXIlI,
dont il obtint la confirmation de son nrJrc,
cl ce pontife approuva aussi leurs constilu-
lions, leur permetlaiit de faire des vécus so-
lennels. Ils avaient cinq ermitages, dans
chacun desinels il n'y avaii pas plus de liuit
ou dix reliirieux. Le premier de ces cou-
vents, qui était clief de la congrégation, s'ap-
pelait Saint- Clément le \ ieux, le second,
S..iut-MiJcaire de Monlscrrat, le Irnisième,
Saint liarilielemy, le quatrième, Sainl-.Mar-
lin, elle cinquième, Sainl-l'ulgence.
Ces ermites étaient Irès-auslèies. Ils mar-
chaient nu-pieds sans sandales, ils étaient
velus de bure ( I ) , ils ne portaient point de
linge, ils couchaient sur des planciies, ayant
pour ebcvel une pierre, el ils portaient jojr
el nuit une grande croix de bois sur la poi-
trine. Ils demeuraicnl seuls dans des cellu-
les séparées les unes des autres, au milieu
d'un b<is, el ils gunlaient un étroit silence.
Ils mangeaient aussi seuls, vivant de légu-
n)es, ne buvaient du vin que rarement, el ne
mangeaient tie la viande que dans les mala-
dies, avec la permission de leur supérieur.
Ils réeitaienl l'oflice divin ru commuu, dans
une église qui était au milieu de leur ermi-
tage, prenaient la diseipliuc trois fois la si-
niaine, el tous les jours co carême, pendant
lequel lemj.s ils jeûnaient trois fois la se-
maine au lain et à l'eau. H y avait (juelqucs
jirôtres p;irmi eux; mais ils ne s'adonnaient
iii à la prédication, ni à la confession M.iu-
rolic ajoute (lue ce qu'il dit de cet «idre
n'esl que sur le rapport d'un certain frère
Jcrôukc ilcuriqucz du Qiéiuc ordre, qu'il vil
DlCTlO.N.N.Vir.E 1)1 S OHnilKS ItEI-lGIEUX.
4IJ
à N.'iples nu commencement du dernier siè-
cle, et ()ui ne put lui dire (|ui avait été lo
fondateur de celte coiigrégalioii, ni dans
(|uel temps elle fut fondée. Leur liabiliemcnt
consisl.iit eu une robe d(> gros drap de
couleur tannée, serrée d'une ceinliirn do
cuir, avec un nianleau el un seaiujlaire de
la même couleur. Ils avaient aussi toujours
sur la poitrine une graude croix de boiK,
comme nous l'avons dii.
Silvestre Maurolic, Mur. Océan, di tult.
gl. llrlig., lib. III, /j. 200.
Il y a eu aussi en France uu ordro sous lo
titre d'Lrmitcs de Saint-Jean, coinino il p.i-
raît par les lollrcs d'un prieur général do
l'ordre des Ivrmiles de Saint-Je.in, par les-
(jnelles, il s'oblige de f.iiredirc tous les jours
trois messes pour Alphouse, comte de Poi-
tiers el de 'roulousc, la comtesse Jc.innu sa
femme, el pour le père el la mère de eo
prince. Ces lettres sont sans date; mai*
comme Alphonse, loinle de l'oilicrs el do
Toulouse, mourut l'an 1270, il y a de l'appa-
reneo que cet ordre subsistait daus lo \iii*
siècle.
Ah Trésor des Chartres du Roi. TohIousi-^
sac. \, n. 49.
GUANDFLUIL. Voy. Marmoutiehs.
GllANDMONT (Ordre de).
§ I. Des religieux de l'Ordre de Grand-
mont, nvrc la Viede saint Etienne de Muret,
leur fond ileur.
Ce n'est pas seulement dans le dernier
siècle que l'on a été en dispute pour savoir
de (|nel insiilul étail l'ordre de ("irandmont,
cl s'il devait èire censé membre de celui le
Sainl-Angu^tin ou de Sainl-Henoîl ; car, du
temps nién)e de saint Etienne de Muret, fon-
dateur de cet ordre, on était dans la mémo
iiicerlilude; c'est pourquoi on s'adressi à lui
pour en éire éclairji, en lui demandant s'il
était moine, chanoine ou ermite. Mais la
curiosité de ceux qui lui tirent celte dem mde
n'en fut pas plus satisfaite, car il leur ré-
poiijil que non, et, comme on le pres-aii do
dire ce qu'il était, puisque tous les religieux
se rapportaient à ces trois espèces, il n piu-
dil que ni lui ni ses religieux ne porl.iieiit
point l'habit de moines ni de chanoines, el
. qu'ils ne s'allribuaient pas de si saints noms;
(jue les clianoiiies, par leur inslilution, oui
le pouvoir de lier elded('lierà rex'iirde des
apotr. s ; ()ue les vrais moines n'ont soin que
d'eux-mêmes el ne s'occupent que de Dieu,
et ((ue les ermites doivent demeurer dans
leurs cellules et ne vaciuer qu'à l'oraison el
au silence. Nonobstant cette réponse de saint
Etienne, les ermites de l'ordre de Sainl-Ai-
gustin n'oiil pas laissé de mettre l'ordre de
(irandmonl au nombre des congrégations qui
ont suivi la règle de saint Augustin. (Jael-
ques-uns d'entre eux, comme Cru>énius, onl
prétendu ()u'il avait seulement ruminencu
sous celte règle l'an 1070. ()ii'il av.iil été ap-
prouvé par lo i>d\>c .Vlexandrc II, cl qu'cu-
(») Voy., a la nu du vol., n* 1)2.
413
CRA
CHA
414
guilc il avail quille la rtîgle de saint Augus-
tin pour pipndre rollo de saint Ocnoil; mais
comment cet ordre, qui n'a commencé
qu'en 1076, aurait-il pu être approuvé par
le jiapo Alexandre 11, qui élail mort dès
l'an 1073. Ainsi, le témoignage de Crusénius
n'est pas roccvable, non plus que celui de
son confrère Ki-ius, qui, en disant abso-
lument que saint Etienne prescrivit à ses
disciples la règle de saint Aupuslin, qu'il
avail pour lors trente ans, et qu'il était atil>é
de Muret, se trompe considérablement, prin-
cipalement dans le dernier article, puis(iue
cet ordre n'a eu pour supérieurs que des
prieurs jusqu'au temps du |iape Jean XXII,
(|ui le premier donna la qualité d'abbé au
prieur de Grandmont.
Le cardinal Jacques de Vitri semble agré-
per cet oidre à celui de Cîteaux plutôt qu'à
celui des ermites de Saint-Augustin, lorsqu'il
dit qu'il observait la règle et les coutumes de
cet ordre; ce qui a fait que Ghrysostome
lienriquez a mis saint Elienne au nombre
des saints. Mais saint Elienne ayant institué
son ordre vingt-deux ans avant que celui de
C.îleaux commençât, on ne iloit avoir aucun
égard ni au témoignage du cardinal de Vitri,
ni à celui d'HenrIquez.
Enfin, plusieurs écrivains de l'ordre de
Saint-Benoît n'ont point fait difficulté de dire
qi:c saint Ktienne avait prescrit la règle de
saint Itenoit à ses religieux, entre les au-
tres, Yépez, qui dit qu'il leur donna celle
règle avec des constitutions particulières. Le
P. Mabillon a été aussi de même senliment,
et dit que le pape Grégoire Vil lui permit
d'établir un ordre monastique suivant la
règle de saint Uenoît, qu'il avail déjà long-
temps pratiquée avec des moines de (ïalabre,
lorsqu'il alla en Italie. C'est ainsi' qu'il eu
parle dans sa préface du Second Siècle des
saints de son ordre; et dans ses Annales du
luéme ordre il dit que celui de Grand:i;oul
n'élait pas tout à fait assujelli à la règle do
saint Benoît, non plusqueccluides Cbartreux:
A tins or do Curlhusunsium alque Grandimon-
tvnsiwn, quorum Instilulores Bruno et Ste-
phiinus lienedictinœ rcgulœ non oinnino ad-
dicli fuere. Cependant la règle qui est aciuel-
lemeul en pratique dans l'ordre de Grand-
mont, el qui fut écrite après la mort de saint
Elienne, son foudaleur, sur te qu'on lui avail
entendu dire ou vu faire, est si dilïércnte de
celle de saint Benoît, qu'il n'y a aucune ap-
parence de vérité dans le senliment de ca
auteurs.
Ou ne doit pas être surpris si les Augus-
tins et les Bénédictins ont agrégé à leurs or-
dres celui de Grandmont, puisqu'il s'est
trouvé aussi des écrivains de cet or;lre dont
les uns ont cru qu'il appartenait aux Béné-
dictins, et les autres aux Augustins. Entre
autres le P. Jean Lévéque, religieux Grand-
tuoutain, avait fait une apologie pour prou-
ver que son ordre était sous la règle de saint
Augustin ; et les raisons qu'il en donnait
étaient que saint Elienne., en fondant sou
ordre, en avait eu un pour modèle (]u'il aviiil
vu en Calabre, cl (fui élail, s<;lyu tel auteui.
de l'ordre de Saint-Augusiin; que ce saint
avait été pendant un temps disciple de Gau-
clier, qui était, à ce qu'il prétend, aussi
chanoine régulier; que les Granduiontains
sont appelés clercs et non pas moines:
que depuis le pape Jean XXII ils se sont
q uni fiés Chanoines Réguliers, Conventuels,
Colléijiaten el Stables; que dans l'assemblée
des grands jours ((ui se lint à Tours, l'on
donna un de leurs monaslères, oii le relâebe-
ment s'él lit introduit, à des religieux réfor-
més de l'ordre de Saint-Augustin ; et enfin
que depuis Pan 12'i5 jusqu'à présent, les
Granduiontains se servent au ibœur de sur-
plis et de bonnets carrés, et même que pen-
dant un temps ils ont porté dis aumusses.
Mais, a|)rès avoir examiné toutes choses avec
plus de réllexion, il se rétracte dans ses An-
nales, en disant que l'ordre de Grandmont
doit élre regardé comme un ordre particulier,
qui, ayant été autrefois érémiliquc, est de-
venu cénobiii'iue, et est maintenant mixte,
ayant une règle qui lui est particulière.
Quoi qu'il en soit, l'ordre de Grandmont
eut pour fondateur saint Etienne, que plu-
sieurs nomment de Muret à cause du lieu de
sa retraite. 1! vint au monde l'an 104(5, dans
le château deTliiers, ville de la Limagne en
Auvergne, appartenant à sa famille en titre
de vicomte. Son père se nommait aussi
lïtienite, et sa mère Candide, tous deux au-
tant illustres par leur noblesse que recom-
ni:indab!es par leur insigne piété. Après avoir
été longtemps sans avoir d'enfants, ils OrenI
des prières, des jeûnes et des aumônes, pour
en obtenir de Dieu, et promirent de lui con-
sacrer le premier qu'il leur donnerail. Leur
vteu fut exaucé, car Candide, quel(|ue temps
ajirès, accoucha d'un fils auquel on donna le
nom de son père. Ses parents, le considcrant
comme le fruit de leurs prières, prirent un
soin tout particulier de l'élever dans la jiiélé.
Ce qui leur réussit d'autant plus fatilemeni,
qu'il s'y portait de lui-mi'me, car il com-
mença dès ses plus faibles anriées à s'adon-
ner à la prière et à la retraite. Son père,
ayant eu dévolion d'aller visiter quelques
r<liques des saints en Italie, y mena avec
lui son fils, qui n'avait que douze ans ; mais,
roinineil revenait en France, le jeune EtieniK!
étant louibé malade à Bénévent, il fut obligé
de l'y laisser sous la conduile de l'archevê-
que de celle ville, appelé Wilon, qui élail
originaire d'Auvergne. Ce prélat en eul brau-
coup de soin, le fit instruire dans les scien-
ces, lui avant donné pour cet elTet d'ixcel-
lenls maîtres, sans parler du soin qu'il vou-
lait bien (ucndre lui-même de lui donner
quelquefois des leçons. Etienne fit de si
grands progrès dans la vertu, dans l'in'elli-
gence des saintes Ecîilures el dans toul ce
qui n garde la vie spirituelle, que ce saint
prélat, qui s'appli luail à le former particu-
lièrement pour le minislèie de l'Eglise, le
jugeant dij;ue de rerevoir les ordres srierés,
lui donna \<- sous-diaconat et enfin le diaco-
nat, le faisant en môme temps, selon quel-
ques-uns, son officiai et archidiacre.
Apiès id mort du bicnbcurcux Milou,
itS
r.icTioNN.MiiF, i)i:s oiinuKS iiia.icii-L'X.
l'.tionnr. iM.iiil ;'i;;i- «le \ in(;l-qiialrp .ins, nlla
à RoiiK-, où il s'arrrla ( hcz un ranliiial l'on-
ilanl qiialroans. s'iiislrui^aiU fori soi|;ncii-
SOiiuMiI lie la (Dnikiilc ilf divers rclif;ieti\ el
du pouierneiiioiil de loiile riij;lisc. Mais,
srnlanl augmenter en lui ilc jilus en plus le
ilé>ir i|u'il aval eu à liénévent de se retirer
tout à fail du monde, il pnl la résolulion
d'iniiicr certains moines de Calabre qui vi-
vaient dpns une Irès-^randc observance,
dont il avait ouï souvent parler avec
prando esiime à rarchev<»que Milon , cl
qu'il avait fréquentés lui-même. Il s'adressa
pour cet cfTet au pape Grégoire VII. qui le
connaissait dans le lemps qu'il était aiclii-
diacre de l'Kjilise romaine, et lui demanda la
permission de vivre quelque part dans la
pénitence, conformément aux coutumes de
celte f'ommunaulé de moines de Calabre. Le
pape dilTéra quelque tetnps de lui accorder
ce qu'il désirait, se défiant de la délicatesse
de son tempérament ; mais enfin, pressé
par ses continuelles instances, il lui permit
de se joindre avec queUiucs autres saints
personnages qui auraient le même dessein de
vivre selon les observances de ces moines ca-
labrais, défendant à toutes personnes laïques
ou ecclésiastiques de le troubler, lui et ses
compagnons, dans le lieu qu'il choisirait pour
faire pénitence, comme étant sous la pro-
tection du saint-siége: ce que Sa Sainteté
lui accorda par une bulle qui fut donnée, à
Itome, en présence de l'impératrice Agnès et
de six cardinaux, le 1'''^ mai de l'année 1073,
et la première de son pontificat.
I'".lienne, bien content de ce que le pape lui
avait accordé sa demande, revint en France
it demeura quel()uc temps à Tbiers proche
de ses jiarents, qui n'oublièrent rien pour
le retenir dans le monde. Mais, dans le temps
qu'ils se n,itt. lient le plus de réussir dans
celle entreprise, Etienne disprirut et, so
laissant conduire par l'Ksprit de Dieu, il alla
d'abord à Aureil ouSoviat, à quelques lieues
de IJmo;;es, où il demeura quelque temps
sous la conduite de saint (jaucher, qui y avait
bâti un monastère, occupé présentement par
des chanoines ré;;uliers, et que l'on appelle
Saint-Jean- d'Aurcille. Mais saint tlauclnT
ayant fait liàlir aussi aux en\ irons un autre
monastère pour des femmes qui avaient été
touchées par ses instructions, cl auxquelles
il prescrivit une règle et une disci|dine pour
mener une vie spirituelle et retirée du mon-
de, l'Miennc appréhendant (jue le voisinage
de ce monastère ne lui fût nuisible, qiiitia
saint (îaiicbcr et se relira a Muret l'an H)7li.
C'était une montagne assez près de Limoges,
où, dans le milieu de quelques rochers ijiii
et, lient couverts de graniK bois, il se lit une
petite loge avec des branches d'arbres entr^ -
lacées les unes ilans les autres. Ce fut là que
noires. lint, âgéd'environ trenicans, commen-
ça une nouvelle vie par un sacrifice de soi-
même, en se vouant à Jcsuv-Christ d'uiu!
inaniérn toute particulière, et en lui coiisa-
ciant la pureté de son rorp> et de son àme ,
qu'il lui ;ivait gardée in> iulalileuieat |u>-
({u'alors : ce qu'il lit en jironaul un aiiucau
(Ij t'o7 , i U liD Ju vol., Il» 1)3.
4t6
qui était la seule chose qu'il s'était réscrTée
de tout le bien de son père, et en prononç.int
ces mois : Moi lilienne, je renonce mi diable
et à toutes ses pompes, et je tn'offrc et me
donne ù Dieu le l'ère, le Fils et le Sfant~f''s—
prit, seul Dieu vrni et virant en trois person-
nes. Puis, mettant cet écrit sur sa tête, il
ajouta : 0 Dieu tout-puissrmt, qui rivez éter-
nellement et régnez seul en trois ])ersi nnes, je
promets de vous servir en crt ermitage en la foi
collioliqur ; en signe de <iuoi je pose celte écri-
ture sur ma tête, et mets cet anneau à mon
doif/i, afin qu'à l'heure de 7na mort cette pro-
tnisseme serv de défense contre mes ennemis.
l'"nsuilc de cela il s'adressa à la sainte ^'iergc
par ces p.irolcs : Sainte Marie, Mère de Dieu,
je. recommande à votre Fils et <] vuus-mémc ,
tnon âme, mon corps et mes sens.
Ce v(i"u étant fait, il résolut de ne plus re-
tourner au monde pour quelque néi essilc
que (e fût ; et, s'enfermant dan'i sa cellule,
il y supportait également les chaleurs de l'été
et les rigueurs de l'hiver, n'étant pas plus vè'u
en une saison qu'en une antre, et se servant
en tout teiniis d'une cotte de m.iilles pour
chemise (1). Sa 1^" nourriture fut d'h rbes
et de racines lel'cs qu'il les trouvait dans
son désert ; mais quelques bergers l'ayant
découvert au bout d'un temps, et s'élant ac-
coutumé à lui apporter du pain, depuis co
temps-là sa nourriture ordinaire fut de jiain
et d'eau, y joignant quebiuefois un bouillon
de farine très-insipide. Son lit ressemblait
plutôt au sépulcre d'un mort ([u'au lit d'un
homme vivant, ne consistant ([u'en deux ais
enfoncés dans la terre, sans matelas ni
paillasse, ni même de couverture. Outre lo
grand ollice de l'Eglise, il récitai! chaque
jour celui de la Vierge et celui des Morts,
aussi bien que celui de la Trinité, à neuf le-
çons ; et si, pour entretenir ceux qui le ve-
naient voir, il avait manqué à quelques-uns de
ces offices, il le disait ensuite avant que de
manger : ce qui était cause qu'il passait
quelquefois les journées entières sans man-
ger, n'y ayant rien qui le pût détourner d'en-
tretenir ceux quivenaientà lui pourenlendro
la paroi;' de Dieu. Sa ferveur ét.iit si grande,
qu'il priait toujours à genoux et la tête nin';
cl il se prosternait si souvent le visage con-
tre terre, ((u'il en était de\cnu tout livide, et
que les calus paraissaient à ses genoux,
à ses coudes, et même à son front el à
so 1 nez.
Il demeur.i seul dans celte solitude pen-
dant la première année, api es laquelle il eut
deux disciples : mais ils ne furent de long-
temps suivis de personne à cause de ses aus-
tér.tés, qui épouvantaieiil tout le monde.
Cependant l'odeur de ses vertus y attira en-
lin un grand nombre de personnes qui se
soumirent à sa conduite, persuadées qu'il les
iiietlr.iit dans le chemin assuré du salut. Le
saint les reçut avec toute la tendresse et
toute 1,1 charité d'un véritable père, m.iis à
Condition (]u'elles ne lui donner.iient jamais
le nom de maître ni d'o'*/;i', mais seulement
riiuiiilile liire de correcteur. Il adoucissail
toujours eu leur faveur ses austciilés, afin
m
CRA
GRA
«!8
«le rc les point obliijer à passor pnr un clio-
niin qu'il ne friiyaii que pour lui. 11 prenait
garde sur toutes choses <Je ne leur point im-
poser un joui^ trop pesant, qu'elles ne pus-
sent point porter. Il était avec elles cotnrae
le dernier de tous, s'exerçant aux offices les
plus vils; et lorsqu'elles étaient assises pour
manger, il se mettait à terre, au lieu de
s'asseoir avec elles. et leur faisait une lecture
spirituelle pendant le repas.
Quoique ce saint Tondaieur voulût élrc ca-
ché aux hommes, sa réputation ne laissa pas
de le faire connaître fort loin; elle lui attira
la visite de deux dos premiers cardinaux de
là cour de Rome, envoyés en France en qua-
lité de légats, dont l'un était Grégoire de Pa-
perescis, qui fut depuis pa[)e sous le nom
d'Innocent II, et l'autre Pierre de Léon, qui,
après l'élection de ce pontife, élu légitime-
ment, fit schisme dans l'Eglise, et se mit sur
la cliaircde saint Pierre, l'an 1130, en prenant
le nom d'Anaclel II. Ce furent ces deux car-
dinaux qui lui demanilèrcnt, comme nous
l'avons dit ci-dessus, s'il était moine, cha-
noine ou ermite, le pressant de leur dire ce
qu'il était. Son humilité, qui l'empêchait de
s'atlritiuer aucune de ces qualités, cédant
pour lors à l'obéissance qu'il devait à ces
princes ecclésiastiques, il leur fit la réponse
suivante :« Un mouvement de la grâce nous
a l'ail chercher dans ces déserts un asile
contre les pièges et les périls de ce monde ,
et la profession de la pauvreté et de l'abais-
semcnl que nous avons embrassée nous a éié
imiosée par le souverain pontife romain en
pénitence de nos péchés, selon la prière que
nous lui en avons faite. Notre faiblesse ne
nous permit pas d'atteindre à la perfection
de ces saints ermites qui passaient autrefois
les semaines entières dans la contcmplaiion
sans manger; mais, en lâchant de suivre
l'exemple de nos frères qui servent Dieu si
purement dans la Calabre, nous attendons
la miséricorilc de Jésus-Christ au jour de son
dernier jugement. Vous voyez aussi que nous
n'a«ons ni l'habit des chanoines ni celui des
miiiiies. Nous n'avons pas la témérité de nous
attribuer la puissance des chanoines, qui
p.'ir leur institut ont le pouvoir de lier et de
délier, à l'exemple des apôtres, ni la sainte-
lé des moines, dont la profession fait voir
l'excellence de leur état. »
Huit jours après le dépari aes cardinaux ,
suint Etienne connut par inspiration di-
vine que sa fin élai! proche : c'est pourquoi il
s'app iqua tout entier à la prière et à 1 in-
struction de ses disciples, qui lui demandant,
quelque temps avant qu'il mourût, de quelle
manière ils pourraient subsister après sa
mort, vu qu'ils n'avaient aucuns b.ens tem-
porels, il leur répondit : « Je ne vous laisse
<iue Dieu, à qui toutappartient,etpûur lequel
vous avez renoncé à tout et à vous-mêmes.
Si vous aimez la pauvreté et vous attachez
à lui constamment, il vous donnera par sa
providence tout ce qui vous sera expéJicni.»
Cinq jours après il se trouva niiil ; on le
porta à la chapelle, où, après avoir entendu
u messe, il recul rextrémc onction cl le
saint viatique, et mourut un vendredi S de
février de l'an ll^'*, étant âgé de près de
quatre-vingts ans.
Son corps lut enterré secrèlcment dan»
ré;;lise de Murel, de peur que les peuples
n'accourussent à son tombeau et ne trou-
blassent le repos des religieux ; mais les mi-
racles que Dieu fil pour manifester la sain-
teté de son serviteur annoncèrent sa mort
de tous côtés. On lui donna pour successeur
Pierre de Limoges, qui était déjà prêtre
avant (jue d'entrer dans l'ordre; mais à peine
(juatre mois fureni-ils écoulés, que les re-
ligieux d'Ambazac (qui, selon quelques au-
teurs, étaient des chanoines réguliers de
l'ordre de Saint-Augustin, contre le senti-
ment de M. l'abbé Châtelain, qui, dans le
premier tome de son Martyrologe, prélend
que c'étaient des Bénédictins qui dépendaient
de l'abbaye de Saint-Augus in de Limoges,
et qui desservaient la prévôté d Ambaz.ic)
inquiétèrent ceux de Muret sur la possession
de ce lieu, quoiqu'il y eût près de cinquante
ans qu'ils y fussent établis, prétendani sans
fondement que Muret leur appartenait, les
menaçant de les en chasser, s'ils n'en sor-
taient de bon gré. Les disciples de saint
Etienne, voulant mettre en prati(|ue les ver<
tus que leur maître leur avait enseignées, ré-
solurent d'abandonner cette montagne, et
cherchèrent effectivement un autre lieu où
ils pussent servir Dieu en paix et sans trou-
ble. Ils en visitèrent beaucoup ; mais, n'eu
trouvant pas de propre, ils jugèrent (|u'ils
le devaient demander à Dieu, qui avait dé-
signé à Abraham celui où il voulait qu'il le
servît. Le prieur fut chargé d'offrir pour cela
le saint sacrifice de la messe, et les prières
des religieux furent si ferventes et si agréa-
bles à Dieu, qu'immédiatement après qu'on
eut enionné trois fois \'Afjnus Det, une voix
se fit entendre qui dit aussi par trois fois, A
Grandmonl. Plusieurs ayant entendu distin-
ctement cette voix, l'assemblée se persuada
aisément que c'était là le lieu que le ciel leur
indiquait. Les religieux y coururent sans
perdre de temps; ils bâtirent à peu de frais
une chapelle ei de petites cellules, après (juoi
ils retournèrent à Muret, où ils avaient
laissé quelques-uns des leurs pour garder le
corps de leur bienheureux père, dont s'éiant
chargés , ils revinrent dans le désert du
Graiidmont, et l'enterrèrent sous le marche-
pied (le l'autel de leur nouvelle cliapelle.
Celle Iranslalion du corps de saint Etienne et
la transmigration de cette sainte famille se
firent le 25 juin de la môme année 112'4'.
Après la mort de Pierre de Limoges, (|ui
arriva l'an 1139, on élut à sa place Pierre
de S.iiiil-Christophe , qui ne gouverna ce
monastère que jusqu'en l'an 1141, qu'il mou-
rut. On lui donna pour successeur Etienne
de Lisiac, qui réduisit par écrit la règle de
l'ordre, sur ce que l'on avait entendu dire
ou vu faire au saint fondateur. Jusque-là on
n'avail presque connu que par conjecture
les austérités extraordinaires de la pénitence
et de la pauvreté de ces saints solitaires et
de leur chef; m:iis , lorsque l'on vil celte
419
niCTIONNAlRK DES OROnES RELIGIEUX.
rt^glc bcrWc, on cessa de s'clomicr pourquoi
le nonitiro ilc ces reli^ieuv péiiiienls ^-lail si
pilit. Sous le pouverneinnil de cet Kliennc
de Lisiac. Dieu réi)aiuiil tant de béiiedicMons
sur cil ordre, qu'm moins de Ireule ans l'on
fonda plus di- siiix.inlc maisons en divers
lieux, prineipalomenl dans l'Aiiuilaine, qui
comprenait le Limousin ; dans l Anjou et dans
la Normandie, qui appartenaient | our lors
à l'An-ilcterre, dont les rois firent de grands
Liens à cet ordre, qui prit le surnom de
(iraixlinont, h cause qu'on soumellail à ce
iiiona>lèrc. qui av.iil titre de prieuré, tous
»eu\ que l'on hfitiss.iil, auxqmls on donnait
le nom de Cellrs; de même qu'on donnait
celui de lions- Noriimes aux religieux de cet
ordre, eomme il par.iîl par les actes des do-
nations de ce temps-là . dans lcsi|Uels les
bienfaiteurs déclarent qu'ils donui ni à Dieu,
à la sainte Vierge, au prieur cl aux frères ou
Bons-Hommes de tîrandmonl.
Le premier monastère de cet ordre, qui fut
liâti en France, fut celui de \ incennes près
Paris, fonde par le roi Louis Vil lan lllii. Il
a toujours été l'une des prin.ipales maisons
de l'ordre, tant ((u'il en a été en possession.
Jean XXII l'engcacn juieuré. I.c corredeur
éliiil le premier visiteur de l'.ibba^e de
(JrandmonI, chef d'ordre, et confirmait aussi
l'élection de l'ablié, avec les prieurs de Bois-
rayer, du Pui-Chévrier et DeiVends; et. lors-
que le roi Louis \1 eut inslilué l'ordre de
Saint-Michel, il voulut que le prieur de ce
monastère de A incennes tùl chancelier-né de
cet ordre imliiaire; ce qui fit qu'il fut bienlot
en commende. Le cardinal de Lorraine fut le
piemier commcndatairc ; (îabiicl le \'cneur,
au>si cardinal, lui sueeéda, et après lui. Michel
de Chiverni, chaneeli. r de France, qui fut
aussi le premier chancelier de l'ordre du
Sainl-Espril et rn niéoïc temps ehaneelierde
relui de Saint-Michel. Knfin, l'an loSi, le roi
Henri III donna ce couvent à des relij;ieux
de l'ordre de Saint-Jer()me, qui le cédèrent
l'année suivante aux .Mmimes, qui en soiil
encore en possession; et le roi, pour dédom-
m.ijîcr les religieux de Gramlmont, leur
donna en échange le collé;;e de Mi;;nun à
Paris, qui porte présentement le nom de col-
lège de liranduiont.
Dans les commenicmenls de cet ordre, le
nombre des frères convers était plus grand
que celui des prêtres ei des clercs, ce qui
causa sourent de la division entie eux. Les
convers poussèrent même si avant leur inso-
lence, qu'ils reliurenl en prison (iuill.iome
de rrc}iiac, sixième prieur de (irantlmont, et
voulurent le déposer. Ce dilTérend dura pi es
de Irois ans, cl ne fui termine i)iie par le pape
liinuuenl 111. Son predéeeseur, Luciuslll,
avail déjà commis celle affaire aux soins de
rew'que de (iharlres cl de l'.ililié de Sainl-
\'iclor à l'iiris, qui rétablirent (luillaiimc de
Irejnac. (^e prieur nnuirul l'an IISS, et eut
pour su< ee>seur (ieranl llhier, qui poursui-
vit la canouisalion de saint F.licnne, fonda-
teur de cet ordre, l rbiin III en avait déjà
iiistiuitle (iroces. à lu sollicilalion du roi
d'AiigleUrre et de quelques seigneurs fran-
420
ç.iis; mais ce fut Clément lli qui publia h
bulle de sa caiKuiisalion, l'an 1180; cl la cé-
rémonie s'en fil à (îiandiuonl,la même année,
par le cardinal deSaint-Man-, légat du pape,
accompagné de vingt-huit prélais du royau-
me. Le même pape confirma, en 1188, la rùi;lc
de cet ordre, qui avait déjà été approuvée
p.ir ses prédécesseurs, AdiienlV en 1150,
Alexandre III en 117'», Lucius III en 1182, et
Urbain III en 118(>. Céleslin III y fit qucli{ue
chaiigcmcnl en ll'.il. aussi bien i|uescssiie-
ccsseurs. Innocent lil en l:i02, Ilonorius III
en 1-218, et (Irégoire IX en 12.'li. Mais Inno-
cenl I\', en 12'»5, y fit plus de changements
que les autres; car il en retrancha plusieurs
chapitres. Clément N' y fil encore quelques
additions cl des changements vers l'an IM'J,
aussi bien que Jean .\XII.
Nous avons dit ()uc sous Guillaume de
Treynac les frères convers avaient couiuien-
cé à mettre la division dans l'ordre, s'i lanl
soulevés contre les cleiC';, cl que même ils
mirent en prison ce prieur, à cau^e «lu'il
prenait leur parti. Casurem, qui fui élu en
1210, souffrit aussi de leur part une .lulre.
persécution, parce qu'il prenait en ore lu
p.irli des clercs; mais il léduisil si bien le-i
convers, qui exerçiiienl l'office de eorre( leur
aussi bien que les clercs, qu'il leur donna
l'exclusion pour toutes les supériorités des
maisons de l'ordre. Ce prieur, ajjrès avoir
gouverné l'ordre pendant douze ans, re-
uonya à son olliee, el Ilélic Arn.iudi fut mis
en sa place en 1228. Sous son gouvernemeui,
le pajie Grégoire IX ordonna que deux reli-
gieux de l'ordre des Chartreux, el autant de
Celui deCiteaux, se trouveraient |)endanl trois
ans consécutifs aux chapitres généraux (jui se
tiendraient à tirandmunl, et qu'ils fer.iient
dans eel ordre telle réforme qu'ils ju^er.iient
à propos, sans que 1 on pût appeler de leurs
urJonnances. Les religieux a^anl dénoncé
leur prieur au saint-siège comme coupable d,)
plusieurs crimes qu'on lui impul.iii, le pai^e
nomma l'évéque de Poitiers, les abbes de
Savigni et un autre de l'ordre de Cîteaux, e|
les prieurs de Ligetz et de Glandière de l'or-
die des Chartreux, pour commissaires apo-
stoliquea. Ceux-ci, ayant examiné celte af-
laire. prononcèrent contre lui une scntenca
de déposition, sous peine d'excommunication
s'il s'in.;éraii dans le gouvernement de l'or-
dre; mais, le jour qu'on devait lui sij^nilier
1.1 sentence, il fit enfermer l'évéque el les
autres commissaires, et alla à Rome liouver
le pape, qui l'envoya à l'abbé de Saint-Lau-
rent cxlra miiros pour élre absous de l'ex-
communiialion qu'il avait encourue pour
être venu à Home sans sa permission ; el ,
comme il poursuiv.iil son rétablissement, il
mourut dans la même ville en 12i.').
Aptes sa déposition. Jean de Laigle fel
mis à sa place, ayant éié élu dans un cbajo-
Ire général qui se tint a \'ineeniies, dans
lequel on publia les statiiis el les règlements
qui avaient ele laits par les commissaires
•ipostoliiiues |)our la relorinc de l'ordre. Ce
prieur reiion(,a aussi à son office pour tnener
Une vie privée, n'ayant {jouverné l'oidiequo
%<i}
cn.v
GKA
422
l.ondant trois ans et domi. Iiicrs de Merlo,
quinzième prieur, se démit aussi de celte su-
|)ériorilc en 12G0. Ce tut de son temps que
lis religieux français voulurent avoir un gé-
lu-rai et transférer le chef d'ordre au mo-
iKislèrc de Vinccnncs. Le roi de France les
f rotégea d'abord, mais il les obligea ensuite
il'obéir au prieur de Grnndraont, après que
Iliers de Merle lui eut fait connaître le tort
que cela causerait à l'ordre, s'il était divisé
«1 soumis à deux généraux. Pierre de Gaussac
lut aussi un de ceux qui, pour mener une
vie plus tranquille, se déniil de la supériorité
«le cet ordre, à laquelle il avait été élu en
1282. Son gouvernement ne fut pas paisible,
car, deux ans après son élection, les visi-
teurs de l'ordre le déposèrent et firent élire
à sa place Bernard lUssé. Pierre de Gaussac
eu appela au pape, qui nomma pour juges
lie ictie affaire et réformateurs de l'oidre,
B rnard de Montaigu, abbé de Moissiac; Gé-
raiid, provincial des Dominicains ; et Uadul-
plie, doyen de l'église de Poitiers, qui, ayant
lait attention à tout ce qui leur fut dit de part
et d'autre, prononcèrent en faveur de Pierre
<le Gaussac, iiui fut rctibli dans son office,
dont il se démit en 1290. Gui de Fouchôrcs
fil aussi la inéine chose après avoir gouverné
l'ordre pendant quinze ans. Ce fut de son
temps que le pape Cément V alla en 1300 à
Grandmoni avec si'i)t cardinaux cl toute la
cour romaine. Il y demeura pendant cinq
jours, cl fit venir devant lui le prieur et les
religieux, auxquels il dit qu'il y avait envi-
ron vingt ans qu'il avait appris les divisions
qui étaient dans l'ordre; qu'il était venu ex-
près pour cela de Lyon à Grandmont, et que,
après avoir examiné leur règle si les privi-
lèges des visiteurs de ce chef d'ordre, le pou-
voir qu'ils avaient après la mort ou la dé-
mission du prieur de nommer douze électeurs
tant clercs que convers, et d'elire tous les
ans avec le prieur neuf definitcurs clercs,
selon le privilé e qu'ils avaient obtenu d In-
nocent IV, il révoquait tout cela , à cause
que les visiteurs, du temps du jirieur Pierre
de Gaussac (qu'il avait connu dès l'enfance
lorsqu'il était correcteur de la maison de
Deffends, dans laquelle il avait clé élevé)
l'avaient déposé injusUment en lui imputant
des crimes (ioiit il était innocent.
Guillaume de Pré Slorelle, après la démis-
sion de Gui de Fouehères, fut éiu dans le
chapitre général pour lui succéder. Le même
Glément V accorda, à la prière de ce prieur,
des dispenses à l'ordre louchant l'abslinence
de la viande, et cita le même prieur pour se
trouver au concile général de Vienne ; ma s,
étant mort en 1312, Jordan de llapistang lui
succéda et fut le dernier prieur de Grand-
mont. Son gouvernement ne lut pas tran-
quiLe; car en l.'Jiii il y eut encore de gran-
des divisions dans l'ordre. La plupart des
religieux, ne voulant plus reconnaSlre ce
prieur, qu'ils accus. lient d'avoir dissipé les
biens du monastère, le déposèrent et mirent
à sa place Hélie Ademart : ce qui causa un
srîiisinc; car il y en eut d'autres qui obéi-
rent 'oujours à Jordan de Uapistung. Cette
division dura jusqu'en 131G, que Jean XXII,
ayant été mis sur la chaire de saint Pierre,
et ayant pris connaissance do ces dilTérends,
réforma encore l'ordre, et changea, comme
nous avons dit, beaucoup de choses à la rè-
gle. De cent quarante celles ou environ qui
dépendaient de Grandmont , il en érigea
trente-neuf en prieurés conventuels, à cha-
cun desquels il unit quelques-unes des au-
tres celles, et divisa ces prieurés en neuf
provinces, savoir : France, Bourgogne, Nor-
mandie, Anjou, Poitou, Saintonge, Gasco-
gne , Provence et Auvergne. Il permit aux re-
ligieux de ces prieurés d'élire leurs prieurs,
et les obligea d'en demander la confirmation
à celui de Grandmont. Il ajouta un quairièmc
visiteur aux trois qui avaient toujours été
dans l'ordre, et quant aux deux prieurs qui
disputaienl ensemble pour le gouvernement
de l'ordre, il les mit d'accord en ne recevant
ni l'un ni l'autre. Il érigea le monastère de
Grandmoni en abbaye, en 1317, et nomma
pour premier abbé Guillaume Pcllicier, qni,
selon la coutume, reçut le bâton pastoral des
mains du cardinal d'Oslie l'an 1318. et gou-
verna l'ordre jusqu'en 1337. Pierre d'Albert
fut son successeur et fut confirmé par le
pape BeniiîtXII. Clément VI lui accorda lo
droit de nommer au\ quatre premiers prieu-
rés de l'ordre qui viendraient à vaquer lors-
qu'il aurait reçu la bénédiction abbatiale; et
les atiliés de Grandmoni ont joui jusqu'à
présent de ce droit. Guillaume de Fumel, qui
fut palriarihe d'Antioche, s'étanl démis do
cette abbaye entre les mains du pape Paul II
en 1471, ce ponlifela donna au cardinal de
Bourbon, archevêque de Lyon, qui en fut le
premier alibé commendatairc. Antoine Alle-
mand, éïéiiue de Cahors, lui succéda. Il y
eut après lui quatre cardinaux de suite qui
la possédèrent, qui furent Guillaume Briçon-
net, Sigismond de Gonzague, Charles de Ca-
retlo cl Nicolas de Fiesque, après la mort
duquel on redonna celte abbaye au cardinal
de Gonzague, qui s'en élail demis en faveur
du cardinal Carello. Le dernier abbé com-
mendatairc fut François de Neuville, qui ré-
signa cette abbaye à son neveu François do
Neuville, religieux de celle maison, et depuis
ce lemps-là les abbés ont toujours été régu-
liers jusqu'à présent.
Il y avait plus de cent trente ans que l'on
n'avait point tenu de chapitres généraux
dans cet ordre, lorsque dom Georges Barny,
abbé de Grandmoni, et quarantcdeuxièmo
général, en convoqua un dans c. ttc abbaye
en 1G43, pour rétablir dans l'ordre l'obser-
vance régulière. A cet elîel on dressa des
statuts qui contiennent douze chapitres, dont
le premier, qui regarde l'office divin, or-
donne que tous les jours les prêtres célébre-
ront la suinte messe, selon la coutume de
l'ord e, et que tous les religieux assisteront
à la messe conventuelle, pendant laquelle
on n'en pourra point dire d'autres, ni chan-
ter aucun office canonial; que dans tous les
irieurés conventuels on chantera aussi tous
les jours une messe haute, pnurvu qu'il y
ait un nombre de religieux sufiisant, et que
ilnns Tabbayc ilc riraïKimoiil on en cliantora
(U'Uf. que tous les «liiiiatK lies, les fêles de
|ireni ère i lasse, el celles de la sainte Vierge,
csceple le jour de Nolre-Daine des Neig' s,
r»in fera la procession auiour du cloilre. Le
pure l.evéïiue, dans les Annales de ccl or-
dre, imprimées en 1003, dil néanmoins que
l'on fail lous les jours trois processions, la
première après prime dans le cinielièrc, et,
où il nj en a point, à l'entrée du cloître; la
seconde après vêpres, de la même minièie;
et que la troisième, que l'on faisait aussi
autrefois dans le cimetière avant complios,
se lait pié^eiitemcnl hors de l'église. Il ajoute
que, dans le cominencemcnl de l'ordre, les
religieux allaient si souvent prier d.ins le
cimctièie, (ju'on ne permellail à aucun ve-
nant de dehors de parler à personne qu'il
n'y eût été prier. Selon ces mêmes statuts,
tous les lundis, hors le temps de l'Avent et
du Carême, l'on doit dire une messe pour
les relii;ieuv ilccédés dans l'ordre; l'on en
doit dire aussi une de la \ iergc tous les jours,
dans l'abliayc de Grandmont, et une fuis la
semaine dans les prieurés, pour la conscrva-
ii<in du même ordre, pourvu que ce ne soient
point des jours de la première el seconde
classe. Ils réciteront l'oilice selon l'usage de
l'Kglisc romaine; personne ne pourra s'ab-
senter des oflices, t^int de jour (]ue de nuit,
sans la permission du supérieur ; el les
clercs, outre le grand oflice, réciteroiit en-
core lous les jours au choîur l'oilice de la
Vierge et celui des morts, sous un nocturne,
i-xcepté les dimanches et les fêtes doubles,
|)endanl les octaves et pnnilant la semaine
sainte; mais pour lors ils seront obligés de
les réciter en leur paiiiculier. Les cimvers,
[lour matines, diront treize l'aler, trois pour
ch icunc des autres heures, et cin<i pour vê-
pres, l'ersonne ne peut rien avoir en propre,
4n sorte que ()uaiid quelqu'un par oliéis-
sance sort d'un couvent jiour alier demeu-
rer dans un autre, il ne pourra emporter ni
livres, ni ses propres écrits, ni chose aucune,
sans le consentement du supérieur, qui est
m. litre di; l'en priver s'il le veut. Les supé-
rieurs exerceront l'hosiiiialile et distrilme-
loni les aumônes selon ce qui aura clé pres-
rrit par les visiteurs. Il est défendu de man-
ger de la viande tous les mercredis et les
^amedisd après Nnc'l, jusipi'à la ['urificaliou
de la sainte \'ierne, quoiqu'iU se trouvent
dansle> lieux où il e>t p;'rmis d'en manger :
ce qu'ils doivent même observer dans les
voyages, comme aussi depuis la fête de l'As-
c. iision jusqu'à la Pcntecùle. Ils jeijnenl
di'puis la fête de tous les Saints jusciu'à la
Nativité de Noire-Seigneur, depuis 1 1 Sej)-
tuaL;csime jusqu'à l'âques, el tons les ven-
dndis de 1 année hors le temps pascal. Us
Ifûnenl aussi le jour de saint Marc, les veil-
l« .s de la féli! du saint sacrement, celles de
l.l saint'- \icrgc, excepté celles de la \ i-
sit.ition et de Notre-Dame des Neiges; les
veilles lies Aprtties, excepté celle de s lint
Jean l'Evangeliste; les trois jours des Koga-
(1) Vuy , a 1j lui ilu vol., ii"' 'j!,'J5 cl Ufi.
wcTioNNAini: m:s oisdkf.s rklicikl'x.
42i
lions, el les jours ordonnés par TTgUse, et
depuis le premier dimanche de l'Avent jus-
qu'à Noël, les quatrc-tenips et lous les ven-
dredis, quand il n'y a point d'office double.
Toutes les veilles des fêtes de la \'ierge el
les autres jeûnes de l'iîglise, ils ne doivent
manger que des viandes quadragésimalcs, au-
tant que cela se peut. Le silence, selon ces
mêmes constitutions, doit éire observé exac-
tement dans l'église, le cloître, le dortoir et
le réfectoire.
Telles sont les principales observances
prescrites par ces staïuts, bien (lifferenli-s
de celles qui se pratiquaicnl avant les miii-
galions de Cette règle par les souverains
pontifes : car ils ne mangeaient jamais de
viande, niêmc dans les maladies, el ils jeû-
naient depuis la fête de l'ExalIalion de la
s.iinle croix jusqu'à l'àques. Le silence était
égal à celui des Chartreux. Ils avaient seu-
lement une conférence une fois le jnur, el,
si quelqu'un y avait parle d'affaires du
monde ou de choses inutiles, il était sévère-
ment puni. Il y avait un porche ou portique
hors le couvent, proche l'église, pour parler
aux séculiers, qui n'entraient jamais ou que
fort rarement dans le couvent. L'on exerçait
riiospilalité envers les étrangers, pour les-
quels il y avait une maison hors le couvent.
Ouanl à l'habillement, il consistait en une
robe el un scapulaire auquel était attaché
un capucc pointu. Clément V ordonna que
les habits seraient noirs. (Juelqucs auteurs
disent que dans ce temps-là ils devaient être
de laine naliirelleracnl noire; elle 1'. l'Evé-
quc dit qu'il a vu dans l'abbaye de Mache-
rets un lilre par lequel Henri, comlc da
Champagne, donna cent aunes de bureau
pour haliillcr les religieux, l'réscntement,
leur habillemrnl cons sle en une robe de
serge noire avec un scapulaire fort large de
même étoffe, auquel et attaché un capuce
ou chaperon assez ample. Ils ont un petit
collet de toile large de diux doigts ; au
chœur ils luettenl un surpUs avec un bonnet
carré (1).
11 y a aussi trois monasièrcs de religieu-
ses de cet or<lre, mais l'on ne sait point par
qui ils ont été fundés ni eu quel temps. Le
1*. Lévêque dit que l'an 13'40 il y eut une
convention entre l'évê'iue de Limo;:cs el
l'abbé de (irandmoMl au sujet du mon.istèrc
de I)rouille-la-lMani:he, par laquelle toute
la juridiction sur ce muna^tèlC l'iil laissée à
l'abbé de lirandiiionl , <|ui en a toujours
joui, aussi bien (|ue sur le monastère de
Drouilie-la-Noire, qui est un autre monas-
tère de religieuses de cet ordre. Krançois de
Ni'uville , abbé de Grandmont , fonda le
prieuré de C istenelle, qui est du nombre
des qu.itre auxquels \ci abbés de Ijrand-
monl ont droit de nommer, après avoir reçu
la bénédiction abbatiale, lorsqu'ils vieniienl
à vai|uer. Les religieuses ont les lucmes
observances que les reli;;ieux. et sont aussi
habillées di; noir.
Juan. LÉvêqiiu, Annal. Ord. Grandmont.
425
CRA
GRA
4*2€
I
BolKindns, '^cr. SS., tom. II Feftr. Sainte-
Miirlhe, GuUia Christ., tom. IV. Henri de la
Marche, Vie de saint Etienne de Muret. Kail-
Ipl el Giry, Vies des Saints. Régula S. Ste-
phani edit. ann. 1C71, et capitul. General,
ejusd. ord. celebr. ann. 1G43.
§ II. Des religieux réformés de l'ordre de
Grandmont, appelés de /'Klroile Obser-
vance, orec la vie du révérend Père Charles
Frémont, leur réformateur.
L'ordre de Grandmont s'élanl beaucoup
relâché de son ancienne observance, comme
on a vu dans le paragraphe précédent, dom
Charles FrémonI, religieux de cet ordre, fut
inspiré de Dieu pour la rétablir. Il naquit
à Tours l'an 1610, de parents distingués
parmi les bourgeois de celte ville, et prit
l'habit de cet ordre à l'âge de dix-huit ans.
11 fit son noviciat avec une exactitude qui
allait au delà de ce qu'on pouvait désirer de
lui; et, étant sur le point de faire profes-
sion, il s'y prépara par un renouvellement do
ferveur, bien résolu d'observer, après la pro-
nonciation de ses vœux, la règle primitive,
dont l'inobservance lui était tout à fait sen-
sible. Ce qu'il exécuta en effet comme il l'a-
vait résolu : car, à peine fut-il engage dans
cet état de péniience, qu'il s'étudia à en pra-
tiquer secrètement toutes les austérités ,
principalement rabslincncc de la viande.
Quelque soin qu'il eûl de se cacher aux yeux
des hommes, l'ennemi du genre humain, ja-
loux de sa sainteté, fit en sorle qu'on les
découvrît et que l'on mît des empêchements
à son zèle; mais Frémont n'en avança pas
moins dans le chemin de la perfection, par
sa parfaite soumission aux ordres de ses
supérieurs et par la pratique de plusieurs
autres vertus et mcriiiications, qu'il substi-
tua à la place de cette inob ervaiice, éludant
ainsi tous les efforts de l'ennemi de son sa-
lut. Tous les jours il servait cinq ou six mes-
ses avec une modeslie angélique; et, après
qu'il eut reçu la prêtrise, dom Georges liarni,
qui fut élu général eu 1G35, le fit prieur de
l'abbaye de Grandmont. H s'acquitta de cet
emploi au contentement de tous les reli-
gieux; mais, voyant qu'il ne pouvait en ce
l)oste entreprendre la réforme, qui occupait
son esprit nuit et jour, il demanda permis-
sion au général de venir à Paris, sous pré-
Icxle d'y éludier en Ibéologie, espérant qu'il
trouverait dans cetie grande ville quelque
moyen de réussir dans son entreprise. 11 ob-
tint celte permission, el le général le fit
prieur du collégii de Grandmont, où en effet
il étudia en théologie , jusiiu'à ce qu'eiitiu,
se croyant suflisainmeiit versé d.ms cette
science pour remplir son ministère, il de-
manda au général la permission de se rcti-
. rer en quelque maison de l'ordre pour y ob-
; server à la lettre la règle que le pape Inno-
cent IV avait mitigée, et qui est regardée
iiaiis l'ordre comme la règle primitive. Ce gé-
néral, bien loin de lui accorder sa deiramle,
s'y opposa fortement; mais Charles, qui n'a-
vait souhaité aller à Paris que dans l'espé-
r;ince d'y trouver quelque protection qui lui
DlCTlO.NXilKE !1E3 Oaur.iiS RELL3SEUX. îl.
pût f;iire surmonter les obstacles qu'il se
doutait bien qu'il trouverait à re\éculion de
son dessein, et principalement le refus de
son abbé, dont il était presque certain, s'a-
dressa au cardinal de Uicheiieu, qui lui fit
obtenir ce qu'il souhaitait : en sorte qu'il
commença sa réforme le 4 août 164-2, no-
nobstant l'opposition de ce même abbé, qui
lui donna enfin une obédience pour se reti-
rer dans le prieuré d'Epoisse près de Dijon,
avec dom Joseph Boboul, religieux du même
ordre, qui fut le premier qui embrassa la
réforme. Cette maison, qui avait été fondée
l'an 1189 par Odon, duc de Bourgogne, était
presque ruinée; mais ces religieux y menè-
rent une vie si sainte et si pénitente, que
leur réputation s'étant étendue par toute la
Bourgogne, celte maison changea en peu de
temps de face par la libéralité de ceux qui
étaient les témoins de leurs vertus el de
leurs austérités.!! serait dilficile d'exprimer
ce que ces religieux eurent à souffrir de la
part de ceux de l'observance mitigée, et p ir-
liculièremenl le P. Charles FrémonI ; mais
ce saint religieux ne fit paraître qu'une pa-
tience et une douceur admirables, pardon-
nant de bon cœur les entreprises de quel-
ques religieux »nalintentionnéi coatrc sa
personne.
Mais, dans le temps que les hommes s'ef-
forçaient de le persécuter et de renverser
ses desseins, Dieu bénissait son travail : car
sa réforme fut augmentée en 1650 par une
nouvelle maison, dont les fondements furent
jetés le 2i mars dans la ville de Thiers en
Auvergne, où saint Etienne, fondateur do
cet ordre, avait pris naissance. Celle maison
fut bâlie par les libéralités des habilanis, à
cause de la dévotion qu'ils portaient à co
saint fondateur, dont les parenls étaient
vicomtes de ce lieu. Le roi Louis XIV, p;ir
les lettres patentes qu'il accorda pour cet
établissement, permit à ces religieux réfor-
més de recevoir des novices dans cette mai-
son. Celte même réforme fut introduite eu
1668 dans le couvent de Chavanon, au do-
cèse de Clermont ; dans celui de Saint-Michel
de Grandmont, au diocèse de Lodève, en 1679;
dans celui de Louyes, au diocèse de Chartres,
en 1681 ; dans celui de Vieux-Pont, au dio-
cèse de Sens, en 1683, et dans l'abbaye do
Macherets, au diocèse de Troycs, en 168".
Ce fut dans la maison de Tbiers, qui est la
plus considérable de celte étroite obser-
vance, quoiciu'elle ne soit pas la plus riche,
que dom Charles Fréniuiil dressa les sialuts
propres à celle réioriiie et à l'observance de
la règle, (ju'il voulait rétablir dans sa pureté.
Les points principaux et auxquels tous les
autres se réduisent, sont l'assiduité à l'office
el à l'oraison, aux(|uels ou emploie plus de
huit heures par jour; l'abblinciict! delà viande
tant au dedans qu'au dehors de la maison,
excepté dans les maladies, selon la règle
modifiée par Innocent IV; les jeûnes de près
de huit mois de l'année, l'usage des viandes
quadragésimales, depuis la fête de tous les
saints jusqu'à Noél, et depuis la Sepluigé-
siiac jusqu'à Pâiiuosj el !a solitude, les reli-
li
427
DICTIONNAIRE DES OUDRES UELIGIEUX.
4-28
giouv ne sortant que Irès-raremcnt, cl jnmais
pour voir leurs parciUs cl leur rendre visilc.
La fonimuiiaulé de la maison dcTIiicrs,
où le P. Frémont fiiisail sa résidence ordi-
naire, était si bien réi:lée, que toute la pro-
vince, édifiée de la sainteté de ces religieux,
ne pouvait s'enipèiher île donner des louan-
tes et des bénédictions A ce saint réforma-
teur, qui y exerça pendant trente ans l'of-
liec de supérieur, animant ses inférieurs et
les autres religieux de la réforme, par ses
exemples et ses exhortations, à maintenir
cette réfiirme. Enfin, dans ses dernières an-
nées, il était si rempli de la pensée de sa der-
nière fin. que, pour s'y disposer plus parti-
culièrement, quoique toute sa vie eût éié une
préparation presciue continuelle à la mort,
on le vil plus assidu à l'oraison el à ses au-
tres exercices de piété el de mortification. Ne
se eonlentanl pas des instructions qu'il avait
faites à ses religieux, il voulut encore leur
en donner par écrit, en composant un livre
(le piété qu'il leur adressa, dans lequel entre
autres avis qti'il leur donne pour bien rem-
plir les devoirs de leur solitude, il les cx-
iiorte à être dans une continuelle médi:ation
des mystères de la Trinité cl de Jésus-Chrisl
on sa vie cachée à Nazareth : mystère qui le
ravissai!, ei qu'il disait souvent devoir èlrc
lin objet particulier aux religieux do la ré-
firrmc de tîrandmont, qui, par leur état pau-
vre, caché, humble, pénilcnl, cl uniquement
altnelié à Dieu, devaient représenter celui
de Jésus-Christ à Na/arcth, souhaitant qu'ils
y fussent sans cesse unis. Enfin il inspire
dans ce livre une dévotion singulière à la
s.iinte famille de Jésus, Marie el Joicph, pour
laquelle il avait une si grande dévotion et
un amour si parfait, qu'il en faisait les dé-
lices de son âme : ce qu'il conserva jusqu'à
la fin de sa vie, qu'il termina dans la prière
eU'oraison.ct avec une parfaite soumission à
la volonté de L'ieu,en 1G89, étanl âiié de près
de 79 ans. Sa mort ayant été divulguée dans
la ville de 1 hiers, il y eut une si grande foule
(le peuple qui accourut an monastère, que
l'on rompait tout pour le voir et pour en ap-
[irocher.
Cette réforme s'est maintenue ju^^u'à pré-
sent dans l< s maisons où elle fui introduite
du vivant (lu réformateur; mais depuis sa
ii.ori elle n'a fait aucun progrès. Avant que
t Mlles ces maisons fussent réformées, elles
étaient en désordre : il n'y avait dans cha-
cune qu'un ou deux religieux, qui y vi\aieiil
à leur liberté, sans aucune régularité, et
sans télélirer l'iifiice divin. I'ré>entcinent il
y a au moins dans chacune de ces maisons
liuil ou dix rcli-'icux, ri méinc dans quel-
(]urs-unes il y en a jusqu'à vingt. Les reli-
gieux de celle étioite observance dépend, ni
du généra', rer, i\ eut de lui leurs obédiences,
cl ne font point de corps séparé.
Ils ont éti' longtemps on possession de
toutes les maisons dont nous venons de (lar-
ler, sans qu'un les inquiétât; mais l'abbé do
Madierets, qui les avail appelés dans sou
abbiycen l(iiS7, se repentant de les avor
fait venir, voulut les en chasser, sous pré-
texte qu'ils y avaient été introduits s.ins
lettres patentes du roi, contre l'édit de S.i
Majesté, du mois de juin lG7i,qui défend aux
réformés de s'introduire dans des monastères
sans lettres patentes ; mais, par un arrcl du
conseil d'Etat du 27 juin 17(i0, le roi con-
firma et autorisa cet établi sèment , peniiet-
lanl aux réformés d'y vivre en conimunauté
religieuse sous la juridiction de leur général,
suivant leur institution, Sa Majesté ayant re-
connu que celle réforme n'était on aucune
manière contraire à son édit de l'an 11J7I,
dont les motifs ne regardent que les monas-
tères indépendants, et qu'un assujettit à un
nouveau chef; cl (|ue l'inconvénient auquel
clic avail voulu remédier par le même édit
regarde seulement les nouvelles congréga-
tions exemples, cl les élablissemenis nou-
veaux des maisons religieuses. L'abbaye de
Macherets était autrefois prieuré, et fut éri-
gée en abbaye par le pape Innocent X en
1650. Ces religieux réformés ont pris l'ancien
habillement de l'ordre, ijui consistait en une
robe de drap noir, avec un scapulairc auquel
esl attaché un ca] uce qui se termine en
pointe, aussi de couleur noire, avec une
ceinture de cuir.
Mémoires manuscrils.
GRANDMONÏAINS. Voy. Gbandmont.
GIUGNANS (RÈGLE des). Voy. Césauie
(Sai.nt-) ad calcem.
GRISES (SoEUus\
Des relifjietises hospitalières du Tics Ordre
de Sninl-François dites les Sœurs Grises.
Peu après la naissance du Tiers Ordre de
Saint-François, l'on C'nfiaaux frères elaiix
sœurs qui en faisaient profession la conduite
des hôpitaux el des maisons les plus cél>'-
bres, pour les exercices de charité : ce qui a
été cause que d.ins la suite ou a formé des
congrci^ations particulières d'hospitaliers et
d'hospitalières do cet ordre. Gui de Joinville
ayant fondé sur la fin du xiii* siècle l'ordru
des HosiiitaLcrs delà Charité de Nolre-Uame,
ils prirent de leur propre autorité la règle
du Tiers Ordre, qu'ils ont suivie jusque sou.n
le pontifical de Clément VI, qui leur ordonna
de la quitter pour prendre celle de saint Au-
gus'in ; el ils conimcncèrenl pour lors A
faire des vœux solennels. Sur la lin du svr
siècle, les Obregons furent institués aussi
bien que les Hons-Fieux, qui comincncèrcnt
vers l'an lOlo, < l qui, sans laire de vaux
solennels, non plus que ces anciens hospita-
liers du mèine ordre, observent la Iruisièuie
règle de saint François avec beaucoup de
fidélité. Il n'en a pas été de mémo des Hospi-
talières, qui sous dilTérents noms sont répan-
dues en grand nombre en (Jiffercnles pro-
vinces de France, d'/Mlemagne et de Flandre,
puisque (lès leur institution elles ont fait des
vtiMix solennels, t'cllcs qui n'avaient point
de rentes cl vivaient des aumônes qu'elles
allaient chercher, furent appclcis les Sœurs
de la Celle, et elles allaient ser\ ir les malades
liors leurs monastères ; le* autres furent ;ip-
pelécs les Saurs de ta Faille, à caus.- qu'elles
m
GRI
Clîl
«0
i
porl.iioni sur leurs habits, quanJ elles sor-
laienl, de grands manlcaux ou chapes qui
avaient au haut une espèce de chaperon,
dont elles se couvraient le visage pour n'être
lioint vues aisément, comme ou a pu remar-
«luer dans la figure que nous eu avons ci-
devant donnée. Celles qui exerç;iic .t dans
leurs hôpitaux la charité envers les maladis
ou les pèlerins, furent appelées simplomcut
llospilalières; elles vivaient de leurs renies
et ne mendiaient point. Enfin il y eu a eu
d'autres qu'on a appelées tes Sœurs Grises, à
cause qu'elles étaient habillées de gris hlanc.
Celles-ci sont encore en grand nombre, el ont
toujours retenu le nnm de Sœurs Grises,
quoique la plupart soient présenienieiil ha-
billées de blanc, quelques-unes de noir, et
d'autres de bleu obscur.
Les Sœurs dises de Flandre et de France
avaient li;ujours été sous la juridiciion cl
l'obéissance du provincial des Frères-Mi-
neurs de a province de France parisienne;
mais depuis que la réforme des llècoliets a
été introduite en ces quarliers, quehiiics-
unes de ces Sœurs Grises se sont soumises
à leur obéissance. L'an 1483, le P. Jean
Cbrochin, vuaire provincial de la province
de France parisienne, el le P. Jacques Sloe-
tl:n, visiteur de ces hospitalières, ayanl
dressé des statuts pour elles, les supérieures
et (jnelques religieuses députées des couvcnis
de ï-ainl-()mi r, Uunkerque, Boulogne, Bour-
bourg, l'Ecluse, Wissebecq, Vianne, Nieu-
port, Ostende, Mons, Douai, Avesnes, l*o-
puringues, Bergucs Saiiit-Mnoc, Beaumont,
Ardre, Bray-sur-Somme, Nivelle, Amiens,
Bruges, Tournai et autres, se trouvèrent à
Wissebecq, où tes statuts furent reçus par
Ces leligieuscs.llscontiennent sept chapitres,
dont le premier traite de la réception des
sœurs ; le second, du service divin ; le troi-
sième, de ce que les sœurs doivent faire étant
à la maison ; le quatrième, de ce qu'elles
doivent observer étant auprès des malades ;
le cinquième, do la manière qu'elles se doi-
vent comporter hors le couvent; ic sixième,
de la correction des sœurs quand elles font
quelques fautes ; et le septième, des prières el
sutlrages pour celles qui seraient décédées.
Elles doivent se lever à minuit pour dire les
inalines du petit office de la sainte Vierge,
el demeurer ensuite en récolleciion et à
l'oraison jusqu'à deux lïpures, qu'elles re-
tournent au dortoir pour reposer jusqu'à cin.f
heuresdu matin en été, et à six en hiver,
qu'elles disent primes, tierce cl sexle, qui
sont suivies de la messe conventuelle, après
laquelle elles vont travailler eu commun eu
gardant le silence, jusqu'à diner. Depuis le
dîner jusqu'à trois heures, elles relourneiil
au travail, et disent ensuite vêpres, après
lesquelles elles vont encore travail 1er jusqu'au
souper. Quand elles sont envoyées dehors
pour le service des malades, elles vont tou-
jours deux ensemble ; elles ne doivent point
se séparer, mais aller directement où elles
sont envoyées, et, afin d'éviter la fainiliarilé
avec les séculiers, elles ne doivent pas veil-
ler [ilus (le trois jours dans une même mai-
son. Quand elles sont envoyées par la supé-
rieure pour d'autres alTaires, elles ne doi-
vent ni lioiie ni manger hors le couvent
qu'avec une permission expresse. Toutes les
seaiaines on tient le ehapit c au moins une
fois, et deux ou trois l'ois s'il est nécessaire,
pour rcco. maître leurs fautes devant la su-
périeure. Les jeûnes et abstinences sont les
mêmes que ceux qui sont ordonnés p.ir la
règle. Voiei la formule de leurs vœux : Je
N. voue et promets à Dieu, à la glorieuse
vierge iMarie, à saint François, à tous les
saints, cl à vous, ma révérende Mère, d'èlre
tous les jours eie ma vie obéissante à notre
saint père te pape et à ses successeurs canoni-
quemtnl élus, el vivre en obéissince el- pau-
vreté sans propre el en chasteté, et garelcr la
troisième règle de saint François confirmée
par le pape Nicolas JV, à lu discrétion de
«tes supérieurs.
Elles tenaient aufrefois des assemldées
générales de toutes les sup'Ticures des nio-
naslèrcs de leur cidre, nia:s cela ne se pra-
tique plus à présent. Plusieurs de ces Hos-
pitalières ont même embrassé la clôture,
comme celles d'Amiens, de Montreuil, de
Dourlens, d;; Rue, de Saint-Qut nlin, de Muii-
didier. de Neufchâlel, de Grandvillicrs , de
Gournai, de Bernai, de Wons, el d'autres dont
quelques-unes n'ont pas po;ir cela abandon-
né l'hospitalité, qu'elles exercent chez elles,
soit à l'égard des pèlerins, soit à l'égard des
malades; cl celles-ci ont des conslilutions
pariiculières. 11 y a aussi des Sœurs de la
Celle qui ont pris la clôture. Les maires et
échevius de Beauvais, voyant que celles (]iii
étaient établies dans leur \ ille, où elles s'em-
ployaient au service des malades, voulaient
prendre la clôture, s'v opposèrent l'an lti27,
el eurent recours à l'autorilé du pailcmeiU
de Paris pour les en empêcher; mais le par-
lement, par un arrêt du 4- août 1029, accor-
da la demande des religieuses, à condilion
qu'elles abandonneraient la maison qui leur
avait été donnée par la ville et qui était au-
trefois un béguinage. Cependant, ces reli-
gieuses ayant fait voir (|u'elles avaient ac-
quis la plus grande pariie du lieu où elle*
demeuraient, elles lurent confirmées dans la
possession de ce béguinage, et la réforn;e fut
introduile dans leur maison avec la clôture,
l'an 1630. L'évêquc de Toul, Henri de Thiard
de Bissi, depuis évéque de Meaux el cardi-
nal de la sainte Eglise romaine, voulut obli-
ger les Sœurs Grises de Nancy à recevoir
aussi la clôture: ce prélat donna pour cet
elîet une ordonnance le 31 octobre Kiat»;
mais ces religieuses en appelèrent comme
d'abus au parlement de Metz, el elles sont
demeurées dans leur premier état.
Quoique ces Hospitalières soient appelées
Sœurs Grises, à cause de leurs habits gris,
qu'elles portaient autrefjis avec un voile
blanc, il y en a néanmoins plusieurs qui sont
habillées de blanc avec un scapulaiie de
même et un voile noir, principalement cellfs
de Lorraine, et il y en a d'autres qui sont ha-
billées de noir, el d'autres de bleu obscur.
Nous donnons sculeuieiiî ici riiabilleineut
r.i
DICTIONNAIRE PF-S ORDRES RF.LIGIEUX.
432
<lo ccllps lie Lorraine et de ces anriennos
Hospilnlii^resqui élaiont liiibilloes ile(:ris(l).
I,uc >V;i(1inj;, AiDitil. Minnr. Facltims im-
primén pour les Sœurs (irises de \iincy. Leurs
ronsliltttions tnanuscriles ; cl Louvci, Anti-
quil. de llenuviiis.
Dt's l'ati I.'ÎOO, un sninl prélre ayant fondé
un liojiiiiil dans la ville de Mons pour do
pauvres femmes, il en donna le soin à des
«éeulièros, et l'adminislration au\ magistrats
de la ville, qui, l'an li7(), peu contents de
res stVuliiTcs, y tirent venir des rclii;icuscs
du Tiers Ordre de Saint-François, 'lu mo-
nastère de liruficlette, à trois lieues de cette
ville, nlln que, comme elles ne pardaienl
point de clôture, elles pussent soii;ner les
malades dans leurs propres maisons. La mère
(Ilairc Ilamliray, en clanl supérieure l'an
1CV8, fil son possible pour réformer ce mo-
nastère, où les religieuses, quoique sous
l'habit de Sainl-François, ne laissaient pas
d'avoir un air assez mondain, comme on
peut voir dans la ligure que nous donnons
d'une de ces anciennes religieuses {-2). Klle
voulut pour cet effet les obliger A la clôture;
mais, les magistrats et les principaux bour-
geois de la ville s'y étant opposés, elle se
contenta d'introduire peu à peu la réforme
par ses bons exemples et par le relranclie-
mcnl des sorties fréquentes, ne permettant
à ses religieuses de sortir du monastère que
rarement elpour des affaires urgentes et ab-
solument nécessaires. Elle obtint la permis-
sion de faire dire le grand office de l'Eglise
selon l'usage de l'Eglise romaine et de l'or-
dre de Saint-Erançiiis, et, outre les trois
vœux ordinaires, ses religieuses en ajoulè-
rcnl un quatrième, de garder la règle du
Tiers Ordre de Sainl-Francois réforn)ce par
Léon X. La mémo année, le V. Marchant,
commissaire général de l'ordre, leur permit
de porter un babil brun au lieu de celui
qu'elles avaient, qui était gris blanc; et cet
habit consiste en une robe, un scapulaire sur
lequel il y a l'image de la sainte ^'ierge, cl
«n manteau descendant jusqu'aux lalons. 11
leur permit aussi de porter le »oile noir en
ayant toujours eu un blanc jusqu'alors,
Enfin, l'an 108S), la mère Jésus-Marie de
Sainlc-llélrne, de l'illustre famille de Hryas,
étant supérieure et désirant voir ses reli-
gieuses cloîtrées, sollicita son frère Jacques
de Dryas,pour lors archevêque de Cambrai,
d'obtenir celle [jcrniission de-, magisirats de
Mons, qui ne |iurcnt refuser à ce prélat une
demande si juste; et ces religieuses embras-
sèrent la clôture et prirent le nom de Sœurs
Grises Ueformées. licite dic^ne sui)érieure
avait été chanoinesse dans l'illustre cha|)ilrc
de Sainte-Vauiiru de la même ville, et était
entrée ensuite dans ce nu)nasière, où peu de
temps après sa profession elle fui élue su-
périeure ; et, pendant \ ingl-neuf ans qu'elle
a exercé celte charge, elle a reçu quaraiile-
sepl filles à la prufes^^'ou, sans avoir jamais
eu en vue aucun intérêt temporel. Elle était
infatigable aux offices divius cl en tout ce
(!) Voy., ï la Un du vol., n"' 97 et 98.
qui regardait le service de Dieu cl la disci-
pline régulière. Elle était douce aux autres,
très-sévère à elle-même; et, après avoir ser-
vi à ses filles de modèle de charil", do p,i-
tience, d'humilité et de toutes les autres ver-
tus chrétiennes, elle mourut l'an IGO'.t. \ oici
les instructions qu'elle laissa à ses filles en
mourant, selon le témoignage du P. Fran-
çois .Mosens, son confesseur. Elle les exhor-
ta d'être toujours fidèles à Dieu, d'observer
inviolablemenl ce qu'elles lui avaient pro-
mis le jour de leur profession, et d'avoir un
grand zèle jiour tout ce qui regarde son ser-
vice et leur institut. Elle leur lecoinmanda
la pauvreté, qui a toujours été le caractère
particulier de celte maison drpuis que la ré-
forme y a été établie, et de ne pas se servir
de la nioiudrc chose sans la permission de
l.i supérieure. Elle leur recommanda aussi
la charité et l'union, sans laquelle Dieu ne
pouvait pas demeurer parmi elles ni régner
dans leurs coeurs, les avertissant que par
cette vertu divin! elles seraient toutes en
Dieu et pour Dieu, et qu'el'cs devaient dissi-
muler el supporter les unes cl les autres
leurs faiblesses. Elle les conjura de n'avoir
jamais d'ijuires désirs ni d'autre ambitiou
(jue de plaire à Dieu, et de faire toutes leurs
actions avec autant de perfection qu'ellrs
voudraient les avoir faites à l'heure de la
uiort. lùifiii elle les pria de ne jamais s'oc-
cuper que de Dieu et d'elles-mêmes, sans
s'arrêter ni aux actions ni à la conduite des
autres. Tels furent les derniers seniiinenis
de cette sainte supérieure, qui mourut àgéo
de soixante-cinq ans.
Mémoires envoyés de Mons en 1711.
CROTTE. Vot/. Mo\t-Cassin.
GUASTALINES. Voy. Anuélkjies. l
GUILLAUME (I'hovince de Saint-). Voy. :
AiGisri.NS (Ermites de Saint-). |
GUILLELMITES (Moines). I
Des moines Guillelmites, avec la vie de saint
Guillaume le Grand, ermite de Mulavul, leur
fondateur.
De tous les auteurs qui ont écrit de l'ordre
des (juillclmites el de leur fondateur, il y rii
a tiès-peu qui l'aient fait conformément à la
vérité, faute apparemment de s'être donné la
)ieine de la ciiereher dans l'Iiistoire, ou de
faire une juste combinaison des lieux, des
temps et des personnes qui faisaient la ma-
tière du sujet qu'ils traitaient. Mais, entre
ces auieurs, M. Hernian, curé de Maltot, est
celui qui a le plus erré dans ce qu'il dit de
cet ordre (dans son livre de rEtablisscmcnl
des ordres religieux) tant au sujel du nom do
lilnncs-Manteaux (([u'il prétend leur avoir
été donné par rapport aux n)anieaux qu'ils
portaient de l'el e couleur qu'au sujel de
leur fondateur. Sa première erreur au sujel
du nom est faille à détruire, puisqu'il n'est
pas vrai (|ue ces religieux aient jamais porlô
(le manteaux lianes, el qu'il est Irès-sùr qu'il
n'y eut que ceux qui demeuraient dans le
(2) Yoy., à la un du vol., ii"' 90 el 100.
i55
GUI
GUI
433
monaslère de Paris qui perlassent ce nom,
par rapport aux religieux qui l'avaient oc-
cupé avant eus, qui, étant servîtes ou serfs,
portaient des manteaux blancs, et laisstVent
le nom de Blancs-Manteaux au monastère,
el non pas à la congrégation qui vint s'y
établir après eux, dont le véritable nom était
celui de Saint-Guillaume du Désert, comme
il est facile de le voir par l'acte de la consé-
cration de l'église des Billettes à Paris, faite
l'an 1408 par un évéque de Nassau, qui de-
meurait pour lors à ce monastère de Saint-
Guillaume : Joannes miseratione divina epi-
scoptts Nassoviensis P. resideris in domo
rcligiosorum Stincti Guillelmi de Dcsertis ,
alins de Albis ManteUis. La seconde erreur
de cet écrivain n'est p.is moins grande, lors-
qu'il dit que les auteurs ont confondu leur
fondateur avec celui du Mont-Vierge. H ne
ciie aucun de ces auteurs ; et il a raison en
cela, car il aurait bien de la peine à en
nommer aucun. Il confond lui-même, puis-
qu'il n'est pas vrai que les auteurs aient
confondu saint Guillaume de Malaval avec
saint Guillaume, fondateur du Mont-Vierge,
mais bien avec un autre saint du même nom,
fondateur du Val-des-Ecoliers, comme le re-
marque fort bien le P. Henschenius dans la
dissertation qu'il a fait ajouter à la vie de
saint Guillaume ermite, qui se trouve dans
le second tome de février des Actes des Saints
de Bollandus, au 10 de ce mois.
Ce n'csl pas seulement avec saint Guil-
laume fondateur du Val-dos-Ecoliors , <|ue
l'on a confondu saint Guillaume fondateur
des Guillelmites, puisque Kraiitius, dans son
Histoire de Saxe, liv. v, dit qu'il croit qu'il
était Guillaume IV, surnommé le Fier à bras.
Quelques-uns l'ont pris pour Guillaume VIII,
duc de Guyenne; quelques autres pour son
fils Guillaume IX, et plusieurs pour Guil-
laume le Débonnaire, fondateur de Cluny :
en sorte qu'il n'y a presque aurun duc do
Guyenne, à commencer depuis Guillaume II,
dit Tête d'Etoupe, qui n'ait é'é pris pour le
fondateur des Guillelmites. Enfin, si l'on
veut croire les religieux de cet ordre, ils
n'ont point eu d'autre fondateur que saint
Guillaume IX, duc de Guyenne, converti par
saint Bernard ; mais ils ne sont pas mieux
instruits que les autres : car ils n'en ont
point eu d'autre que celui du désert de Ma-
laval, surnommé le Grand, comme il paraît
par cet acte de l'évêque de Nassau, que nous
avons rapporté ci-dessus.
Il est vrai qu'il est fort difficile de dé-
brouiller la vérité du grand nombre de fa-
bles dans lesquelles elle se trouve enveli)|>-
pée par la faute de plusieurs auteurs qui,
attribuant les actions de saint Guillauuie 1",
duc d'Aquitaine, el de saint (juillauine IX,
duc de (lUjenne, à saint Guillaume de Ma-
laval, et appropriant réciproquement les ac-
tions de celui-ci à ces deux saints ducs, les
ont tellement confondus, que des trois ils
n'eu ont fait qu'un, aussi bien que l'auteur
des leçons de l'office de saint (îuillaume, qui
se trouve dans le Bréviaire des Ermites de
Baiul-AugUïtiu, qui, ne [louvaul suulTrir les
contrariétés qui s'y trouvent, ont cru être
obligés de les corriger; usai';, dans l'idée
qu'ils ont que c'est saint Guillaume IX qui
est de leur ordre, ils ont corrigé une erreur
par une autre erreur.
H faudrait une trop grande dissertation
pour f ire voir ces erreurs, aussi bien quo
celle des auteurs qui ont écrit sur ces saints.
Bollandus, dans l'endroit que j'ai cité précé-
demment, traite cette matière si amplement,
que le lecteur y trouvera de quoi s'y satis-
faire. Pour moi, il me suffit de croire avec
cet auteur que le fondateur des Guillelmites
est différent de ces deux saints ducs : ce qui
n'est pas difficile à concevoir, si on examine
attentivement quelques traits de l'histoire
qui sont particuliers à chacun de ces saiils,
principalement pour ce qui regarde leur
conversion cl le temps el le lieu de leur
mort. Je les rapporte ici en deux mots, pour
la .«iatisfaclion de ceux qui no voudront pas
se donner la peine de lire tout ce que dit
Bollandus à ce sujet.
Le premier do ces saints est saint Guil-
laume I ^ duc d'Aquitaine, contimporain de
Cbarlemagne, qui mourut dans l'abbaye de
Gcllonc eu Languedoc, où, désabusé des
grandeurs de la terre, il s'était fait moinn
avec l'agrémen! de ce prince, qui crut devoir
son consentement à l'amitié qu'il avait tou-
jours eue pour le duc, aussi bien qu'à la re-
connaissance des grands services qu'il lui
avait rendus et à son Etat par les victoires
qu'il avait remportées sur les Sarrasins, dont
il avait délivré la France en les oiilîgeant do
repasser les Pyrénées.
Le second était Guillaume IX , duc de
Guyenne et d'Aquitaine, (lui, éiani convcrii
par saint B<'rnard, fut si repentant d'avoir
persécuté l'Eglise, et de la vie scandaleuse
qu'il avait menée pendant sa jeunesse, que,
renonçant à toutes choses, il entreprit lo
voyage de Saint-Jacques on Galice, où il
mourut en 1137, après avoir fait son testa-
ment, par lequel il laissait ses Etats à Louis
le Jeune , aNjrs roi de France, mais à
une condition, c'est qu'il épouserait sa lille
Aliénore.
Enfin, le Iroisiènio est celui qui se retira
dans la vallée de Malaval, où il eut pour
disciple et pour compagnon Albert, entre les
bras duqut'l il mourut l'an 1157, après avoir
vécu quatre ans dans ce désert, où il donna
le commencement à l'ordre des Guillclnn'tes,
comme il est facile de le voir par sa vie, que
je rapporte telle que nous l'avons reçue d'Al-
bert, qui, en ayant été témoin, doit nous
convaincre de la différence qu'il y a entro
saint Guillaume de Malaval et tous les au-
tres de ce nom, el que cet ordre n'a point eu
d'autre fondateur que lui.
Nous ne dirons rien de sa naissance; lo
peu de connaissance qu'on en a eu aussi
bien que de sa famille, des occupations do
sa jeunesse et de tout ce qu'il a fait dans le
monde jusqu'à sa conversion, est cause qu'on
lui a attribué une partie des dérèglements de
Guillaume IX, duc do Guyenne. On croit,
mais sans aucuue certitude, (jue ce saiut
435 niCTIONNAlHE OES ORDRES RELICIF.UX. 4ô6
était nn jrciiiillioinmc français qui, apri-s f^tcs ; (rois fois la srniainc il no prcnail qiriii»
avoir vécu avec leaucoup "île licence dans peu do noiirrilurc el buvait un peu de vin,
la priilc-ssion des armes, fui lourlio de Dieu mais si Irempc d'eau, qu'il n'y rcstaii que la
ri se c«n>arra à son service | ar le conseil couleur de vin; et les aulres jours il jeùnail
de quel(iuis solitaires. Il cnlrejir I quelques au pain et à l'iau, y ajoutant qucl(juefois
pèleriMapes, soit à Saint-Jacques en (i.ilice, des lierbes crues. Il avait un petit plat qui
soil dans la lerrc sainte : ce qui est encore lui servait à mesurer son inanirer, et un pciit
traité confusément par les liisinriens de sa vase de hois pour mesurer sa boisson, et
vie, les uns \ retendant que ce fut à Saint- qui Ique api élit ou quelque soif qu'il eût, il
Jacques qu'il alla, et d'aulrcs que ce fut le ne passait jamais ces mesures : encore en
voyape de Jérusalem qu'il entreprit |iar les retrambail-il le plus souvent. Il portait con-
«inlres du (lape liuu'ène III, auquel il sa- linucllenienl un cilicc, el n'avait point d'autre
drc-sa élanl à Rome, où il alla d'abord pour lit que la terre nue. il fut doué sur la fin do
V isilcr les lombeaux des sainis apôtres. Ouoi sa \ ie du don de propbélie. Son compagnon
(|u'il en soil, ce fut au retour de son pcleri- Albert en eut une preuve en sa personne :
nage, vers l'an 1153, qu'il vint en Toscane car, le voyant près de mourir et se plaignant
pour y chercher quelque désert où il put à lui-rnénic de ce qu'il le laissait seul, il lui
si-r\ ir Pieu dans l.i solilude, éloigné du coni- dit do se cons(der, cl (ju'avant qu'il lui r.ndît
tnerce des hommes. 1,'ile de Lupoca\io dans les derniers devoirs. I)icu lui enverrait une
les terres de Pise lui parut f.ivorablc à .'on personne pour remplir sa p'ace et lui Icnir
dessein ; il y fi\a sa demeure, et y commença compagnie dans ccilc solilude. ,\lbcrl avait
un goure de vie si édifiant et si saint, qu'en de la peine à ajouler foi ans paroles du saint;
peu de temps plusieurs personnes se joigui- mais il ne tarda guère à en voir l'accomplis-
renl à lui pour vivre sous sa conduile. Mais scmonl : car, sortant de sa cellule, il vil ar-
leiir ferveur se r.ileiilii peu de Icmps après, river un nommé l'enaud, médecin de pro-
l'I leur piolé se (hangea en un si grand dé- fes>ion, qui apprenant d'.Mbert l'extrémité
goût pour les choses spirituelles, que, ne de la maladie de saiut Guillaume, lui té-
voulanl plus ccou'er ses exhortations ou moigna le chagrin qu'il en avait, |)arce que,
suivre ses avis, ils robligèrcnl par leur in- voulant renoncer au monde, il élait venu
dévotion et leurs mauvaises manières à dans le dessein de vivre sous sa conduile.
«luitter cette preniiè. c solilude et à les al an- Albert, craignant que celle circonstance do
donner. la mort du saint ne fit i|ucl(|ue changement
Il se relira ?nr lo mont Prune, où il bâtit dans son crcur, se jela à ses pieds, le priant
une petite celiulc au milieu d'un bois fort de ne point changer de dessein; et, afin de
épais. La sainlelé de sa vie lui allira encore le mieux engager à persévérer dans son bon
queliiues nouveaux disciples, qui, après désir, il lui dit qu'il se soumettrait à lui, et
avoir demeuré quelque temps avec lui, ne se lui conseilla de se donner au saint avant
g<iuvernèrcnt pas mieux que les autres à qu'il rendit l'àmi'. Guillaume le reçut avec
son égard : car, ayant conçu de l'envie beauctjup de joie, et lui dit de retourner chez
contre lui, ils le chassèrent honleusemenl de lui ( our liiellre ordre à ses affaires, el do ro-
ce lieu, et l'outragèrent de paroles, ce qu'il venir au |;lus lot; mais, pendant (|uc Renaud
souffrit avec une modéraiion véritablement y él.iil a. lé, saint Guillaume mourut entre
chrétienne et religieuse. Il retourna dans les bras d'AlbrrI, le 10 lévrier lto7, après
l'ilc de Lupocavio, où n'ayant pas trouvé ses a\oir reçu les sacrements de l'Eglise, (|ue
premiers disci[iles disposés à le recevoir, il lui apporta un préire de Cliâtillon qui avait
fixa enfin sa demeure dans une vallée dé- été averti de sa maladie,
série, et dont le seul aspect faisait horreur l'.en.iuJ revint à l'i'^lalile de Rhodes ,
aux liontmes. l'.llc s'appelait a\oTS l'Etuble comme il avait promis, et aida ,^ enterrer le
ilr Itliodcs, et on lui a donné dejiuis le nom corps du saint dans son pelit jardin. .\près
de MaldVfil ou Malcifil. Celte vallée est si- la mort de ce saint bomiue, dont ils consor-
luéc d.ins le terriloire de Sienne au dioiè^o vèrenl reS|)rit de pénitence el do morlifiea-
dt; tirosselo, à une lieue et demie ou environ lion iju'il leur avait inspiré liondant sa vie,
•le dislance presque égale, entre les villes ils lâclièrciU de suivre ses maximes et ses
de Chàtillon, l'escaire, de Ruriano cl de exemples, et donnèrent ainsi l'origine à l'or-
Scarino. dre des (juillelmiles. Us bâtirent un petit
Ce fut l'an ll.'io qu'il se renferma d.ins erniilage avec une chapelle sur le tombeau
celte solitude, n'ayant d'abord qu'un trou de saint Guillaume, el ils commencèrent on
d:ins la (erre pour si? mettre à couvert des ce saint lieu une viesi exemplaire et si sainte,
injures do l'air, jusqn'.'i ce que le seigneur qu'ils y attirèrent plusieurs personnes, c|ni
•le Ruriann, .lyant piiié de lui, lui fil faire ab indonn.uit le monde venaient s'y consa-
uneccllule. 11 ne vécut pend.inl ijualre mois crer ;'i Dieu et à la pénitence. La bénédic-
tine d'herbes et de racines, n'ajant point lion que Dieu versa sur celte congrégation
«l'autre compagnie <iuc celle lies hèles; mais, naissanUî fut si grande, qu'elle se Irom a
an commencement de r.mnée ll.'jO, il reçut lépanduepresque par lonle l'Italie, la France,
nn disciple nommé Allerl, qui vint se reii- les l'ays-Iîas et l'Allemagne, dès le sièelo
fermer avec lui cl qui écrivit les dernières suivant. Ils no vécurent (l'abord que selon
< irconst.inccs de »a vie.doiil il fol le témoin. les instiiuls de saint Guillaume, qui étaient
f'i' saint praliqn.iii des ausiérkés surpre- les exemples de ce saint dont Albert avait
iianlcs, il jeûnait tous les jours, même les «lé le iMèle dépositaire. I.cur- jeûnes ciaiert
i57
GUI
GUI
làS
presque conlinuels, el ils allaient nu-pieds.
Mais le pape Grégoire IX modéra leurs
{»randes austérilés, leur permit de se chaus-
ser, et leur donna la règle de saint Benoît.
Innocent IV, l'an 12i8, leur accorda beau-
coup de privilèges par sa bulle adressée au
prieur général et aux autres prieurs des frè-
res Krn)i(es de l'ordre de Saint-Guillaume,
et il ordonna qu'après le décès du général
ou de ses successeurs on n'en élût aucun que
par le commun consentement des frères,
conformément à la règle de saint Bcnnît,
dont ils faisaient profession, aussi bien que
de l'institut de saint Guillaume.
Alexandre IV, l'an 1236, <iyant fait l'u-
iiiou lie plusieurs ermites de différents or-
dres, dont la plupart suivaient la règle de
saint Augustin, pour n'en faire qu'un seul
sous le nom des Ermites de Saint-Augustin,
les religieux Guillelmites furent compris
dans celte union; mais, ayant représenté au
pape qu'ils avaient toujours suivi les insli-
tuis de !-aint Guillaume avec la règle de
saint Benoît, qui leur avait été donnée par
Grégoire IX, ce qui avait été confirmé p.ir
Innocent IV, ils prièrent ce pontife de les
laisser toujours dans le même étal. Le pape
eut égard à leur demande, et leur permit,
l'an i'I'oi), (ie vivre toujours sous la même rè-
gle de saint Benoît et selon l'institut de saint
Guillaume. Cela n'empêcha pas que plusieurs
couvents de l'ordre des Guillelmites ne se
soumissent aux Augustiiis; mais Alexandre
IV, sur les remoiilrances des supérieurs de
l'ordre dos Guillelmites, défendit aux reli-
gieux du même ordre de passer dans un au-
tre sans le consenlenienl du chapilre géné-
ral. Nonobstant Ci's défenses, les Augustins
ne laissèrent pas d'usurper des couvents do
Guillelmites, sous le même prétexte de l'u-
nion générale qui avait été faite par l'auto-
rité de ce pontife. RLiis Urbain IV% par une
bulle de l'an 1263, défendit aux religieux
qui avaient fait iirufession dans l'ordre des
Guillelmiies de passer dans celui des Augu-
stins s.ins la permission du saint-sicge. Cette
dernière bulle donna du scrupule à ((uelques
Guillelmites qui avec leurs couvents entiers
avaient abandonné les instituts de saint Guil-
l.iumc el la règle de saint Benoît pour em-
brasser celle de saint Augustin. Il y avait
entre les autres les monas'èrcs de Semans-
hausem et de Si hoiilall dans le diocèse de
llatisbonne, qui étaient dans ce cus-là.
Les religieux qui y étaient allèrent pour ce
sujet trouver l'cvêque de cette ville pour le
consulter sur ce qu'ils aviiient à faire. Ce
prélat, par ses lettres de la même année
12(33, leva leur scrupule et prétendit qu'ils
étaient obligés île s'unir aux Augustins. Lo
général et le prieur de> Gui.lelmitcs s'en
lilaigniicnt au pape et de ce que quelques
autres monastères dans les diocèses de Ma-
yence, de CoiistanLe., de Prague et plu-
sieurs autres d'Allcma;^ne, avaient fait la
même chose. Ces contestations durèrent
quelques années, et ne furent terminées que
l'an 1266 par sentence du cardinal litienue
de Hont;rie, évcque dePalcstriiic, t^rotecteur
des Guillelmites, qui, comme commissaire
apostolique du pape Clément IV, ordonna
que les monastères d'Ibiseborne du diucfso
de Mayence, de Fuvisen au diocèse de Cons-
tance, et de quelques autres endroits qui
avaient pris la règle de saint Augustin, re-
tourneraient à l'ordre de Saini-Guil'aunic,
et que les religieux seraient obligés de re-
prendre les instituts de ce saint et la règle
de saint Benoît, avec l'habit qu'ils portaiint
avant que d'avoir passé à celui des Augu-
stins, et que les autres maisons (|ui étaient
en contestation, aussi bien que celles qui
étaient en Allemagne el en Hongrie, qui
s'étaient unies aux Augustins, leur reste-
raient : ce qui fut confirmé par le pape.
Les Guillelmites obtinrent du concile de
Bâie l'an H351a confirmation de leurs privi-
lèges. L'ordre était pour lors divisé en trois
provinces. La première de Toscane, la se-
conde d'Allemagne, et la troisième de Flan-
dre et de France, quoiqu'il n'y eût qu'une
maison de cet ordre dans ce royaume, toutes
les autres étant situées dans les Pays-Bas.
Le P. Ilenscheuius a donné le catalogue des
maisons de ces trois provinces, et entre cel-
les d'Allemagne il ne s'en trouve pas une
de religieuses Guillelmites. Cependant il y a
encore à présent un monastère de ces reli-
gieuses à Montpellier , dans le Languedoc.
Ces religieux vinrent s'clablir au villaLçe du
Monlrouge près Paris, l'an 1236, dans le mo-
nastère desMachabées, d'où ils furent trans-
férés à Paris l'an 1298, le roi Philippe le Bel
leur ayant donné le monastère des religieux
Blancs-Manteaux, ainsi appuies à cause de?
manteaux blancs qu'ils purlaienl, mais dont
le véritable nom était celui de Serviteurs ou
Serfs de la sainte Vierge. Comme cet ordre
était un de ceux qui lurent abolis d.ins lu
concile de Lyon, le pape Boniface Vl:l obli-
gea les religieux de cet ordre, on d'entrer
dans celui des Guillelmites, ou de leur cédrr
le monastère qu'ils avaient à Paris. Ces Guil-
lelmites y restèrent jusque vers l'an 1618,
que le prieur de ce monastère y introduisit
les Bénédictins de la congrégation de Saiiil-
Maur, sous prétexte de le rolormcr. Ceux-ci
obligèrent une partie des religieux Guillelmi-
tes qui y étaient d'embrasser leur ordre, et
renvoyèrent ceux qui s'y opposèrent. Les
Guillelmites plaidèrent eoutre les Bénédic-
tins pour rentrer dans la possession de cetio
maison. Les recteurs etsuppois de ruiiivei-
sito de Paris intervinrent pour eus d.ins la
cause contre les Bénédictins, sur ce que les
Guillelmites étaient memlires de leur corps.
Le plniJoyer de ['université est rappoité
tout au longdaiis le secoml tome de la Biblio-
tlièquc c.inouique, ausii bien qu'une longue
requête que le provincial des Guilltluiitis
présenta au mi a ce sujet : mais toutes ces
procédures furent iiuiiiics. Le monastère
des Blancs-Manteaux fut adjugé aux Béné-
dictins de la congrégation de Suint-Maur,
qui étaient encore eu «luclque façon unis eu
ce temps-là avec ceux de la congrégation do
Saiiit-Vanne. C'est pourquoi M. Baillct,
dans la vie de saint Guillaume, au lo lévrier.
459 DICTIONNAIRE DES ORDRES RELIGIEUX. .i\9
dil qu'il fui côiii- aux rollgicus de S.iinl- seul que les Guillelmilcs ont oct'upé à Paris,
Vanne; ceux des (liiillelmiles qui no voulu- ne fut bâli pour ces premiers religieux que
reni point emtirisser la rérirnie des 15é- plus de 120 ;ms aprùs la mort de ce saint,
iiédiclins se relirèrenl à Moulrongp, où c'est-à-dire l'an 12o8, oulre que les reli-
Ic dernier mourut en IGSO. Le P.IIelier, pieux Guillelmites n'y sont entrés que l'ao
dans son Histoire des Ordres religieux, dil r2!)8.
que (It^s l'an Kilo sis religieux Ciuillelmites Cet ordre n'a présentement qu'environ
avaient passé contrat le 29 jan»ier avec le douze maisons en Flandre, ayant perdu
pro\in(ial des Feuillants pour lui renieitre tous les monastères qu'il avait en Allemagne
entre Us mains le monastère <'es Blancs- et en Italie. L'Elalde de Uhocies ou Malaval,
Manteaux, à condition de leur payer une qui en était le chef et où résidait le général,
pension, mais que les aulrcs religieux s'y fui détruit dorant les guerres des Siennois
oppo-èreni, et que l'an 1018 sept autres reli- cl des Florentins. On a rétabli dans la suite
pieux Guillelmiles y introduisirent les René- ce monastère, auquel on a Junné le nom de
dict ns. Chopin dit qu'ils ont encore eu une Sainl-fiuillnume. Il a été érigé en abbaye et
maison en France dans la ville de Reims: donné aux ermites de l'ordre de Saint-Augu-
ninsi ce serait au plus deux maisons qu'ils slin, ci le pipe l'ie IV la donna eu com-
auraienl eues dans ce royaume, ce qui est mcnde l'an ISGià ISarlhélemy Conclii\i lie la
bien dilTéronl de ce qu'a avancé Sylvestre famille des comtes de la Penna.Les religieux
Maurolic, lorsqu'il a dit que sainlGuilIaiime, de ce monastère, par leur travail et leur in-
due de Guyenne, voyant que l'ordre de saint dustrie, ont rendu très-commode et très-
Augustin était presque aboli en France, fil agréable cet affreux désert qui n'inspirait
en sorte par ses prédications que cet ordre auparavant que de la tristesse. Les Guillel-
fiU rétabli dans ce royaume, qu'il y fit plu- mites sont présentement gouvernés par un
sieurs établissements, et qu'il fut le premier supérieur qui ne prend que le litre de pro-
qni par privilège des papes Anastase IV^ et vincial cl qui selit tous les quatre ans. Leur
Adrien IV abandonna la solitude pour se re- habillement est semblable à celui des reli-
lirer avec ses religieux dans les villes, et gieux de Citeaux, dont nous avons donné le
qu'il fit bâtir un magnifique monastère à Pa- dessin à l'article de ce nom. Ils en ont pris
ris, qui fut le premier de sa congrégation et aussi le bréviaire. Le couvent de Grevem-
de la réforme bâli dans une ville, leur de- brok au pays de Juliers se soumit même en-
nteure étant auparavant dans des ermitages, fièrement aux lois de Citeaux vers le milieu
Mais cet auleur se trompe dans tous ces ar- du dernier sièc'e.
ticics : car, premièrcmeni, saint Guill lume, Bollaml., Acl. SS-, tom. IF, Fehr.,pag.h^3
duc de Guyenne, n'a jamais été ni fondateur ef .«cy. Ang. .Manriq., Annal. Ord. Cister.,
ni réformalcur d'aucune religion, puisqu'il tom. I. Clirysostom. Henriquez , Fascicitl.
est mort dans son voyage de Saint-Jacques, Sunct. Cistert., et regul. et conslitut. ejusd.
qu'il entreprit aussitôt qu'il fut convcrli, ord. Uubouchtil, Bihliotli. canonique, tom. U.
c'est-à-dire en 1136 (ce qui fait voir une au- Silvesl. .Maurol., Mar. Ocenn. di tutt. (jl.
Irc erreur de ce même auteur, qui dit qu'il relig., piq. 2~1. iîaillet. Vies des SS., 10 fe-
vivait encore en 1178). Secondement, le mo- trier. Ilerm.in, îli.'t. des Ord. reliy.; et Cbà-
nastèrc des Blancs- Mautcaux , qui est le Main, Martyrologe Romain, tom. ï, p. G02.
H
H.VCHE (CnF.VAî.if:RF:s nr. i.v;, de l'Écharpi;, tr;e,'iu'elles obligèrent les infidèles de se re-
DE LA CoRDRLiKnE , PES Ksci.AVES DE LA tircr. Le comte de Barcelone, ayant été in-
Verti' , ET DE LA ViuiE-Cnoix. foruié de celle action généie-jse, institua en
Outre les ordres mililaires et de chevale- leur faveur un ordre de chevalerie sous lo
rie dflns lesquels plusieurs darnes ont été nom des dames du Passetemps, qu'on a aussi
.'igrégéee, comme dans ceux de Malle, de appelé de la Hache, à cause qu'elles porlaienl
Saint-Jacques de I'F^ik'l', de Calalrava . <lc sur leurs habits une hache rouge. Le P.
Sainl-Flicnnc , de l'Hermine, du Camail et Moiulo, dans son Traité des Ordres militaires,
quelques autres ; il y a eu aussi des ordres dil qu'elles portaient un flambeau; mais l'ab-
|d(ï chevalerie instilués en particulier pour lié Giusliniani, sur le témoignage de UoJri-
les femmes. Le ])remier est celui de la H.iclie gue Mendez Silvi, historien espagn<d, pré-
ou du Passeiemps, (jui fut institué à Toriose leiul <]!ie c'était une hache, et que ce qui a
.lar Uaimond li-, rcng'T, comte de Barcelone, trompé le P. Mendo e>t le mol espagnol ha-
vers l'an 1 l'»n. L(" Maures, ayant iicrdu celte c//(i,qiii signitie également un flambeau et
place, la vciuliirei.t reprendre quelque temps une hache (I).
aiirès, rt lallaquèrenl si vivemen!, que, la Les femmes de la ville de Placenlia en Es-
plupart des chréiiins qui la défen'laienta\anl pa;ne ne firent |)as paraître moins de cou-
été tués , elle était sur le point de retourner rage que celle de Toriose , lorsque les An-
sous la doininaiiitn des barbares, lorsque les glais, qui l'an l.'J.'iS avaient donné secours i
femnies , prenant les armes, combattirent si Jean I ', roi de Portugal, qui était en guerro
vigoureusement pour la défense de leur pa- avec Jean I ', roi deCuslilIc, assiégèrcul P!a-
(I) V.y.,i la fin du vul., Il" lOU
441
IIAC
MAC
44>i
conlia. Ces généreuses femmes, ayant pris
les niniis pour la tiéfense de leur pajs, mi-
rent en fiiile les Anglais dans une sortie
ju'elies ûrenl, et, les ayant oliligés de lever
le siège, elles procurèrent la paix à leur pa-
trie. Le roi de Castille, pour les récomncnser
de leur valeur, leur permit de porter sur
leurs habits une écharpe d'or (1), et leur ac-
corda les mêmes privilèges dont jouissaient
les chevaliers de la Bande, qui avaient été
institués parle roi Alphonse, son aïeul.
Anne de Bretagne, reine de France, épou-
se de Charles VIII, qui commença à régner
l'an 1483, puis de Louis XII, qui lui snccéila
l'an l't98, institua une espèce d'ordre en
riionneur des cordes dont Noire-Seigneur fut
lié en sa Passion ; et, pour la dévoîion qu'elle
avait à saint François d'Assise, dont elle por-
tait le cordon, elle donna à cet ordre le nom
de la Cordelière, et pour marque ou devise un
collier fait d'une corde à plusieurs nœuds en-
trelacés de lacs d'amour (2), dont elle honora
les principales dames do sa cour pour le met-
tre autour de leurs armes. M. Herman, dans
son Histoire des Ordres militaires, dit que
celte princesse institua cet ordre après la
mort de Chai les Vlil, cl qu'elle prit ces pa-
roles pour devise : J'ai le corps délié, faisant
allusion au mot cordelière, parce que la mort
de son mari l'avait affranchie des lois et du
joug du mariage; mais cette cordelière, com-
posée de plusieurs nœuds, et qui devait en-
iourcr les armes, signifiait plutôt un enga-
gement qu'un affranchissement de lois; et il
y a bien de l'apparene que cet auteur s est
trompé, et qu'il a pris Anne de Br. tagne,
reine de France, pour Louise de la Tour-
d'Auvergne, veuve de Claude de Montagu,
de la maison des anciens ducs de Bourgogne,
qui, comme dit le P. Ménestrier, prii pour
devise, après la mort de son mari, une corde-
lière à nœuds déliés et rompus avec ces mois :
J'ai le corps délié. Anne de Bretagne avait
plulôt voulu imiter le duc de Bretagne Fran-
çois II. qui, pour la dévotion qu'il avait à
saint François d'Assise, mit un semblable
cordon autour de ses arm: s vers l'an li-iO, cl
fit sa devise de deux cordelières à nœuds ser-
rés comme les cordoi:s qu'on nomme de saint
François. Aujourd'hui toutes les veuves de
qualité mettent autour do leurs armes une
cordelière semblable à celle d'Anne de Bre-
tagne.
LiinpératriccE!éonoredeGonzague,vouve
fie Ferdinand 111, institua deux ordres à
Vienne en Autriche, l'un sous le nom des Es-
claves de la veitu, et l'autre de la Vraie-
Croix. Le premier fui établi l'an 16C2. Il ne
devait être composéquede trente damesd'unc
nohiesse distinguée, outre les princesses,
dont le nombre n'était point limité. L'impé-
ratrice leur donna pour marque de leur or-
dre uue médaille d'or représentant un soleil
d.ins une couronne de laurier, avec ci tte lé-
gende tout autour : Sola ubique Iriumjihat.
Cette médaille était att;ichée à une chaîne
d'or en forme de bracelet qu'elles portaient
(I) Voy., à la lin du vol., ii° 102.
{ij Vvy., ibiJ., n° IU3.
nu liras an-dcssns du coude. Elles devaient
avoir cette médaille avec la chaîne d.ins les
jours de iéréiiionies ; et les autres jours elles
|)orlaient seulement une médaille plus petite
attachée à un ruban noir (.3). Elles promet-
taient d'observer les règles et les statuts de
cet ordre, qui furent dressés par l'impératri-
ce, qui en était chef; et, en cas de mort d'une
de ces chevalières, ses héritiers devaient ren-
dre à cette princesse la grande médaille, et
pouvaient conserver la petite en mémoire de
l'honneur que leur famille avait reçu d'avoir
eu une chevalière -le cet ordre.
L'ordre de la Vraie-Croix fut institué par
la ir.cme impératrice l'an lUfiS. I,e motif
(lu'elle eut fui à cause qu'au milieu de l'em-
brasement du palais impérial, qui arriva l.i
même année, une croix qu'elle ava't et (|ui
était faite de deux morceaux de la vraie croix,
se trouva miraculeusement préservée des
flammes; et, pour en marquer sa reconnais-
sance à Dieu , e'Ie voulut établir une com-
pagnie de dames sous le litre de dames de la
Vraie-Croix, duntles obligations étaient d'ho-
norer particulièrement la croix où Jésus-
Christ avait été attaché pour nos péchés , de
procurer sa gloire et son service, et de tra-
vailler principalement au salut de leur âme.
Pour les distinguer, elle leur donna une croix
d'or au milieu de laquelle il y avait deux li-
gnes, qui régnaient dans le long et le travers,
qui étaient de couleur de bois pour marquer
la vraie croix ; aux extrémités de celte croix
il y avait quatre étoiles, el aux quatre angles
des aigles noires qui tenaient chacune un rou-
leau, sur lequel il y avait en écrit ces paro-
les : Sulus el glorin. Elles la devaient porter
sur l'estomac au côté gauclie , attachée à un
ruban noir (4). La sainte Vierge et saint Jo-
seph furent choisis pour patrons et protec-
teurs de cet ordre , qui fut approuvé par le
pape Clément X. Ce pontife lui accorda beau-
coup d'indulgences, cl les règles el les statuts
furent dressés par le P. Jean-Baptiste Mani,
de la conipagnie de Jésus. L'impératrice Eléo-
norc, Madeleine-Thérèse de Neubourg, veu-
ve de Léopold , est présentement chef de cel
ordre ; cl le troisième jour de mai , fêle do
l'Invention de la sainte croix de l'an 1709,
elle le donna à l'archiduchesse Marie-Joseph,
fille aînée de l'empereur Josojih, et à trente-
deux dames , dans l'église de la maison pro-
fesse des Jésuites de Vienne.
Bernard Giusiiniani, Ilist.di tutl. gli.Ord.
militari. L'on peut voir aussi, pour les or-
dres de la Vraie-Croix et de la Cordelière,
W. Herman ; et, pour ceux de la Hache et de
l'Echarpe , le P. Mendo, dans sou Traité des
Ordris militaires.
Outre ces ordres particulièrement institués
pour des femmes, il y en a aus^i d'autres qui
se donnent indifféremment aux hommes et
aux femmes , comme celui de l'Amarante,
institué par la reine de Suède, dont nous par-
lerons à l'article Sérapiuv, et celui de la
Mouche à miel, que Louise-Uénédiclinc de
Bourbon, épouse de Louis-Auguste de Bout-
(".) Voy., ibid., n° 101.
(>) Voy., ibid., n* 1115.
;•,-. PICTIOXNAIRF, DF.S
liiiii, duc (lu M.iiiin ol siuivor.iin ilc Dombcs,
iiislilu.-i à Sroaux le k jniii l'/O.t. I.;i rn.iiiine
(le c<l onlro ol une nuvl.iil c d'or qno donne
relti' prinrossc, où d'un râlé il y a son | or-
Iraii.cl de r.iulrc une mouche à miel avec
cilli' devise : Je suis petite; mais mes piqûres
ton! profondes.
HA M. PANS LK Tyrol i;t de CASTH.LIONE
J)K SÏIMKUA DANS LU M ANTOUAN (société
DKS >ii;kgi;s de).
Trois princesses de la maist n d'Aulriclie,
filli'S de l'empereur Ferdiiiaml 1", savoir
madeleine, Marguerite cl Hélène, ne vou-
lant point avoir d'autre époux «ine Jésus-
(MiriNi, prirent la rés ilulion de >ivre dans la
rclrailc, éloi^-nées du tumulie et de l'em-
barras de la cour; mai<, comme elles ne
voulaient point (piitlcr les l'crrs de la
compairnic de Jésus, sous la direclion des-
quels elles s'ét'iiciit mises, cl (]u'e!les app:é-
liendaient qu'elles n'eussent pas celle liberté
vn se renl'ermaiU dans un monasièrc, elles
établirent une eommunaulé de lillcs dans
Hall, ville du Tyidl, pour s'y retirer et y
fivre sous la (llreelio:i et l.i discii linc de ces
Pères, auxquels elles foulèrent aussi un col-
lège dans la ii.émc ville. I Iles écrivirent
d'Inspruck, où elles demeuraient, à saint
François de lîor;;ia, pour lois };énéral de la
compa;;nie de Jésus, afin d'avoir sou consen-
tcmenU qu'il accorda volontiers; et, l'ayant
reçu, elles acbelèront à Hall deux maisons,
l'une pour elles et l'aiilrc pour les Jésuites.
Mais, pendant que l'on disposait leur maison
cl que l'on bâtissait les lieux ré{;iilieis, la
princesse Mar;;ueritc mourut; ainsi il n'y
cul que Ses deux Siiurs Madeleine et Hé-
lène qui, avec quclijues autres demoiselles
de qualité, culrèrent dans celle coniuiunaulé,
le second dimanche di; l'avenl de l'an 150i),
et quelques jours après les Pères de la Com-
pagnie (le Jésus prirent possession du col-
léf,'e que ces princesses leur avaient fonde.
Ces (illes font un V(pu solennel de chasteté
pirpè'ucUe, el promettent à leur supérieure
pau\relé et obéissance, ne pouvant disposer
il'aueuiie chose sans sa permission. Files
«•mploient la matinée à la prière cl à l'o-
raisun, cl l'après-dinoe elles s'occupent au
travail el aux exercices corporels. Files ne
gardent point de clôture, el sorlent pour
alliT entendre la messe, se confesser et coai-
munier dans réj;lise des Jesuiles ; qiH'lqnefuis
il leur est permis de sortir de la ville pour
aller se promener, ou pour visiter les terres
qui leur apparlicnnenl : elles tout toujours
Ueux à deux. Leur liabilleineni (I) dans la
maison lonsiste en une robe on tunique de
laiiK! noiie Irainanle jiar derrière : elles
oui un petit c<illel : el, pour couvrir leur lèlc,
elles mellenl un [lelil voile blanc, avec un
bonnet par-dessus en forme de tO(|iic. Fois-
«lu'elles borteiil, dles 6lenl ce bonnet, et
portent un chapeau pointu, à la manière du
pays, avec un petit manteau i|ui ne vient
que jusqu à la teinliire, ou un peu plus bas.
(1) V !/., à |j Gn da vol , ii"' ll)(i el 10'.
oniMiEs nt:Lir.iKii\. us
Conr.id Jannin;j, npud Ifollnnil. Art. 55.
l'iVK W .Jtinii; et l'bilippe l\ov.aini\,Catalug.
Ord. lielifjios. part. \u,pnq. 3i.
Trente-cinq ans ou environ après cet éta-
blissement, trois autres sœurs princesses de
la maison île t^ionzague, soit à l'exemple de
ces princesses de la maison d'.Vutricbe, ou
par quelque autre molif. établirent une pa-r
reille comniunauié de lillcs dans la ville de
(^a'-li;:lione de Sliviera. Ces trois princesses
furent Cynlhic, Olympie et (iridonie, filles
de Hodolphe, prince de Cislislione, cl nièce.s
du bienheureux Louis de Gonzague , de la
Coni] agnic de Jésus. Leur père étant mort,
l'an l.'i!i2, sans laisser aucun enfant mâle, el
le prince François de (jonzagtic, son frère,
lui ayant succédé dans la principauté de
Casliglione, elles furent en\oyécs à Mantoue
pour y être élevées dans la maison du mar-
quis Aliprandi. sous la conduite de la mar-
quise son épouse, leur aïeule maternelle, et
eilcs y demeurèreiil juyqti'.i ce que le prince
François, leur oncle, qui était à la cour do
l'empereur liodolphc il lorsque son frère
mourut, élanl retourné à (^astiplione, prit
leur liilelle, cl les fit venir auprès de lui.
Dèj.'i Cyntbie cl Olympie, quoique enfants,
avaient pris la résolution (ie vivre dans la
retraite, el n'attendaient que l'îi'j^c nécessaire
pour exécuter ce pieux dessein, lorsqu'elles
apprirent avec beaucoup de chagrin la réso-
lution que l'.'ur oncle (qui ne pensait qu'à
les établir dans le monde) avait prise de les
envoyer à la cour d'Fspagnc el à celle de
Savoie : ce qu'elles lésolurenl d'empêcher
autant qu'il leur ser.iit possible, principale-
ment par 1,1 prière et l'oraison, qui leur pa-
rurent les moyens les plus puissants pour
détourner ce coup , qu'elles regardaient
comme i.n obstacle que le démon mettait à
rexécution de leur projet, qu'elles recom-
maiulèrenl à la sainte Vierge en implorant
sa protection.
La confiance que ces saintes princesses
eiirenl dans le secours du ciel ne fut pas sans
(ff(l; car nonohslanl toutes les mesures que
le prince avait prises pour envoyer les deux
aînéi's à la cour de Savoie, et de mener la
plus jeune à llome, où il était envoyé par le
roi d l';spagne en qualité d'ambassad ur
auprès de l'aul V, pour ensuite la conduire
en Kspagne, tous ces projets n'euient aucun
elTet, par la sollicitation de .Marginritc do
("lonzague, sa-ur de Vincent de Cionzague
duc do Mantoue, cl veuve du duc de Fer-
rare, qui, ayant lotidé à Mantoue un monas-
tère de religieuses de Sainte-Claire, où cljo
se retira, voulut avoir la princesse Olympie
pour élrc élevée auprès d'elle. Cridonie fut
mise d ins le monastère de Saint-Jean de la
même ville, el Cyntbie, qui èlait l'aînée, suivit
le prime à llome, où, d'a'-ord qu'elb' lut ar-
rivée,elle lit va'ii de viri^iiiilé, et prit la réso-
lution de fonder un institut (onfoniie à celui
de la Compagnie di'. Jésus, el de vivre sous
la direction de ces Pères. Celle sainte prin-
cesse élanl r. tournée à Casliglionc au coui-
U5 IIAL
uienccmonl de l'année 1G07, c! y nvnni trouvé
sa sœur Olympie, âsce pour lors do Siize
ans, elle lui découvril la résolution qu'elle
avait prise. Olympie, qui avait voulu em-
brasser Tordre de Sainte-Glaire dans le mo-
nastère qui avait élé fondé à Manloue par la
duchesse de t'errare, mais que ses infirinilcs
^ avaient obligée de quitter avant qu'elle y
1 eût prononcé ses vœux, approuva la réso-
' lution de sa sœur, et voulut lui servir de
compagne. Leur autre sœur Gridonie, qui
était la plus jeune, voulut aussi les suivre,
nonobstant le desein qu'elle avait formé
d'accompagner son oncle, qui était sur son
départ pour aller à la cour d'Espagne. Ainsi
Cl s (rois princesses, d'un commun consen-
tement, cédèrent au prince de Casliglione
tous les biens qui leur pouvaient appartenir,
tant du côlé de leur père que de leur mère, à
condition qu'il fonderait deux maisons, l'une
pour elles, et l'autre pour les Pères de la
compagnie de Jésus : ce qii ayant été ac-
cepté de part et d'au'ri', elles sortirent le
premier juin de l'an 1G07 du |:alais du prince,
où elles avaient p'ris naissance, et allèrent
demeurer dans celui du marquis et de la
marquise Aliprandi, leurs aïeuls maternels,
qui, Après avoir marié leur fille au prince
Uodolphe, étaient venus demeurer à Casli-
glione, où ils avaient fuit bâtir ce palais avec
beaucoup de magnificence. Ce fat là qu'elles
conimcnci^rcnl leur communauté, qui fut d'a-
bord composée de treize filles. Elles y de-
meurèrent pendant quatre mois sans changer
leur habillement , s'occupant pendant ce
temps là à divers exereices de piété pour se
disposer à l'institut qu'elles voulaient em-
brasser sous la direction du V. Ccpaire de la
Compagnie de Jésus, qui était venu pour cet
effet de Rome à Casliglione. Elles quillèrent
ensuite leurs habits mondains pour en
prendre un noir, tel qu'il est représente dans
la figure que nous en donnons (1). Le I'. Cé-
paire dressa leurs constitutions, qu'elles ob-
servèrent exactement ; et cet inslilut, qui prit
le nom de Vierrjes de Jésus, fut approuvé de
vive voix par le pape Paul V. Cynlliie fut la
première supérieure de celle communauté,
jusqu'en l'an îG^V, que ses grandes infirmilés
lobliijèrent à se démettre de celte charge en
faveur do sa sœur Olympie, qui néanmoins
mourut (levant elle l'an 1G45. Cynihie vécut
encore quatre ans, cl mourut l'an IGiO. Elle
fut suivie environ dix-buit mois après par sa
sanir Cridonie, qui qui;la ce monde l'an IGoO.
Dieu, pour maaifesler la sainteté de ces trois
sœurs, a voulu préserver leurs corps de cor-
ruption : car ils fuient trouvés environ Ironie
ans après ton! entiers, quoique leurs cer-
*cucils fus' rni pourris, el que les babils dans
lo'îiinels elles avai. ni clé ensevelies fussent
mangés des vers. Celle commiinauié a pro-
duit aussi plusieurs saintes filles d'une émi-
nenle vertu : comme Olympie Rerîonacci de
Casliglione, Hippolyle Giiigini de .Milan, qui
furent les premières compagnes des fonda-
Iriecs ; Isabelle Fracassani, '\ ictoivc de Guidi-
11 AL
4i6
de-Iîagno, et plusieurs autres. Marie de Gon-
zague, fille du marquis Louis-François de
Gonzaguect de Catherine de Gonzagùe, prit
au^si l'habit de ce! institut l'an 1G45.
Ces Vierges de Jésus ne gardent point de
clôture. Elles font vœu de cliasteté perpé-
tuelle , et promettent par serment qu'elles
vivront et mourront dans cette société do
Vierges. Ellcspromettent enrore à l'abbesse,
et à celles qui lui succédi ront , obéissance
perpétuelle : ce qu'elles font pendant la
messe qui se dit dans leur chapelle domes-
tique, en présence de toute la communauté;
et elles renouvellent ce vœu et ces promes-
ses deux fois l'année; la première le jour
de la Circoncision, et la seconde le jour de
la fête du bienheureux Louis de Gonzaguc ,
après avoir fait auparavant une retraite de
trois jours. Elles se confessent et commu-
nient trois fois la semaine , le dimanche, le
mercredi et le vendredi. Elles jeûnent tons
les samedis el la veille de la lè;e du bien-
heureux Louis de Gonzagne. Le vendredi
elles ne soupent point et prennent la disci-
pline. Le mercredi elles ne mangent point de
viande, el ne font le soir qu'un léger souper.
L'été elles se lèvent à qiiatre heures du ma-
lin, el l'hiver à cinq, et font dans leurs cham-
bres une heure d'oraison mentale. E:ies vont
ensuite à leur chapelle pour dire l'office de
la Vierge; et, après qu'un a lu un chapitre
de l'Imitation de Jésus-Clirist, elles vonl
travailler en commun. V^ers le midi elles font
un quart d'heure d'examen de conscience, et
vont ensuite au réfectoire ; et le dîner étanl
fini, elles ont une heure de récréation, après
laquelle elles récitent les litanies de la sainte
Vierge dans leur chapelle, d'où elles sortent
pour aller chacune dans leur chambre, faire
la méridienne pendant une heure : ensuite
elles disent vêpres et compiles, et vont au
travail comme le malin. Après le travail elles
disent Matines et Laudes pour le lendemain,
en faisant, aussi bien qu'à vêpres, mémoire
du bienheureux Louis de Gonzagne. Après
les matines, elles vont souper, el ont cnsuile
encore une heure de récréation, Uuiuelle
étant finie, elles disent les litanies des saints
et d'autres prières; cl après un quartd'heuro
d'examen de conscience, elles se retirent
dans leur chambre pour se reposer. Ces fil-
les vont se confesser et communier à l'églisQ
des Jésuites, dans laquelle elles ont leur sé-
pulture qui est couverte d'une tombe de mar-
bre, où sont écrits ces mois; Ossa Virginiim
Jc<u. Celles qui veulent être reçues dans
cette société doivent être nobles, ou au
nniins de famille honorable, et apporter une
dot suffisante. La supérieure a le litre d'ab-
bosse ; colle qui gouverne sous elle, le nom
de ministre, et a soin du temporel de la mai-
son. 11 y a une maiiresse des novices et queU
ques autres ollicières.
Pomp. ëavazin , lit, Olympiœ Gonzag^
lîolland. Ad. SS. tom. iy,junii, par/. 1155;
cl Philip. Bonaniii. CaCaloij. Ord. Reliijios,.^
part. III.
(\] yo;/.,à lalÎM du vol. j n' lO.S.
4i7
nif.TIONN.MRF, DF.S ORDUPS r.F.I.If.IF.LX.
.r.3
KArDIîll'.TIKS (Hi-iir.iF.KEs), présenUmcni
appflvfs les FiHei de l'Assumpiion de No-
tre-Dame.
Il ) a i-u à P.iris des rdiçieiiscs hi)«pila-
licrcs sous le nom irHaiidriettes, qui furent
roiidées du leiniis du roi snini Louis par
Klieiine llaudry. Tnii des secrétaires de ce
prince. Il le suivit dans la terre sainte ; el ,
a son retour on Frani;c, il eut la dévotion do
faire encore le voyage de Saint-Jacques en
(îalice. Sa feninie, qui se nomniail Jrannc la
Dalone, ayant éle un temps considérable sans
recevoir de ses nouv elles, se consacra au ser-
vice do Dieu, s'enferniaiil dans une maison
qui lui ap|)ai tenait dans la rue de la Mor-
tcilciie, a»ei' quilques autres l'emnies, et cl!e
y vécut dans les exercices de piélé, d'or;ii-
son et de inoriilicalion. Klles no laissaient
Ciilrer personne dans celle maison, qui élail
liâlie en l'orme de monastère, et elles n'en
sorla eut que les dlm.inches et les fèies pour
aller enleiulie la parole de Dieu el assister
aux oiliies divins.
Ayant ainsi passé quelque temps dans celle
maison, l'Uiennc Haudry, élanl de retour.
Voulut reprendre sa femme ; mais il y trouva
de la difli( ullé de sa pari, sur ce qu'elle avait
fait vœu de cliaslelé, ce qui obligea llaudry
d'aller à Home pour en obtenir dispense du
pape, <]ui ia lui accorda à condiiion qu'en
reprenant sa femme il laisserait un fonds à
celle maison |iOur enlrelenir et nourrir douze
pauvres femmes ; à quoi il salislit ; et di-puis
ce temps-la ou a|)|iel,i ces femmes i/autineHi s,
du nom de leur londaleur.
Leur nombre s'augmenta dans la suile;
car les an( iens statuts de ces religieuses, qui
furent conlirmés par le cardinal de l'ise,
légat du pape Jean XMII, l'an IVlV, sont
adresses, aux hunncs femmes veuves étant au
nomtire de Iretite-dear, île la Maison- Dieu ou
Itiipital et cliapellc fondée par ftn Etienne
llaudry ou ses snccessiurs emprès Grève à
Paris. Ces statuts commencent ainsi : /li«
nom du Père, el du fils, et du Siiinl-p:sprit.
Ci-après s'ensuivenl les ordonnances et con-
slilutiuns de l'Iiôpital des bonnes femmes de la
chapelle fondée par feu li tienne llnudri/, jadis
Oouri/eois de Paris, et Jianne sa femme; les-
quelles ordonnancis fiumaiire d'Ailli/, en son
vivant docteur en thé loyie et amnémier du
roi notre sire, a voulu el mandr flre gardées
par Icsditcs bonnes femmes, et écrites en vn
tableau du dortoir d'icclles, afin que nulle
ne s'en puisse ejcuser pur iijnorancc.
Cet établissement fut conlirmc par plu-
sieurs souverains pontifes, et ces bonnes
femmes pendant plusieurs années vécurent
avec beaucoup d'edilicalion ; mais dans la
suiic du temps leur ferveur se ralenlil, et
jieu A peu elles abandonnèrent leurs obser-
vances; en sorte que le cardinal du rerron
élanl mort, cl le cardinal de 11 Uodiefou-
<aull lui ayant succédé dans la cbarge de
gr.ind auniAnier, (jui est supérieur-né de
telle maison, l'un des [)rcm ers soins de te
prélat, qui était si zélé pour la rcfurmu des
monastères, fut de faire revivre l'observance
régulière chi'z les Haudrietles, où il trouva
un assez bon nombre de femmes el de Glies,
dont il en (il élire une jiour supérieure.
L'on vil en peu de temps un notable chan-
gement dans eetlo maison, el l'observance
régulière y fui parfaitement rétablie par les
soins de ce cardinal el de l'abbé de la Pose ,
son grand vicaire, qui fut dans la suite évé-
que do Lodève. Cette éminence obtint du
papo (ircgoiic XV le pouvoir d'agréger celle
communauté à l'ordre de Sainl-.\nguslin, et
do confirmer les nouveaux statuts ipii avaient
été dressés, el qu'on avait ajoutés aux anciens.
Les religieuses comMieneèrcnl ;i cbanler l'ofli-
ce de la \'ierge. lilles joigiiirciil le vœu de pau-
vreté à ceux decbasleté el d'obéissance qu'el-
les faisaient déjà, et pratiquèrent les autres
exercices des monastères réglés. Leur coin-
munau'.é s'augmenta de lelle sorte, que, se
trouvant trop élroilcmenl logées et en un lieu
malsain à cause du voisinage de la rivière,
elles oblinrent les permissions nécessaires
pour changer dedenu'ure. Elles furent trans-
férées dans la rue Sainl-Honoré cl prirent
possession de leur nouvelle maison lo
7 septembre 10:22, y ayant été conduites
par plusieurs dames de qualité. Kllei ont
depuis b.'ili un très-beau monastère avec une
belle église sous le litre de l'Assomption do
Noire-Dame, dont elles ont retenu le nom,
ayant quitté celui d'IlaudrielU s , qu'elles
avaient conservé jusqu'alors. lilles sont pré-
sentement au nombre de (lu.llre-vingl^ filles.
Klles sont habillées de. noir avec de giandes
manch 'S el une c inlure de laine, el portent
un crucifix sur le ca-ur (I).
(Juaiil à leurs observances, par la bulle du
pape tirégoirc \V, octroyée pour leur .ippro-
bation et conlirni.ilion, il leur élail ordonné
de direl'otfieede la sainte \ ierge tout entier
les jours de fêtes seulement, el elles n'elaienl
tenues, les jours ouvrables, qu'à dire prime,
liercc, vêpres et complies. Mais le cardinal
de la lîochefoucanlt, par les conslilulions
qu'il leur donna, les obligea à dire tous les
jours cet office loul entier, el le grand
officia de riiglise selon le bréviaire romain
pendant les trois ilerniers jours de la semai-
ne sainte. Klles doivent dire outre cela loua
les jours vingt-quatre Pater el autant ti' Ave
pour leurs bienfaiteurs, el par une louable
coutuu«e elles en disiint trente-trois pour
parfaire la couronnede Nolrc-Seigneur. l'illes
ont une demi-heure d'oraison menialo le ma-
tin , et autant après vêpres , l'examen do
conscience avant le diner. el celui du soir
après avoir dit en commun les litanies des
saints.
Outre les jeûnes ordonnés par l'Kgliso el
les abstinences, elles font encore abslinenco
de viande pemiant tout l'.^venl. tous les mer-
credis de l'année, les veilles des fêles de la
sainte \ ierge, le lundi et le mardi do la
(,)uiii((uagé>ime ; el le vendredi saint elles na
mangent rien de cuit avec apprêt. \ oici la
formule de leurs vœux : Au nom de Notre-Sct
(I) Voij , i la Du du vol., n" iO'J cl 1 10.
449
IIEL
riEL
450
gneur Jésus-Christ et de sa très-sainte Mère;
le sœur N. dite de Saint N., voue et promets
ù Dieu stabilité sous clôture, pauvreté, chas-
teté et obéissance, selon la règle du bien-
heureux Père saint Augustin et les constitu-
tium dressées pour le règlement de c tte mai-
son dite de l'Assomption de Notre-Dame, en
présence de monseigneur N., grand aumônier
de France, nore supérieur. El si c'est son
grand vicairo, en présence de N-, grand vi-
C'iire de monseigneur N-, grand aumônier de
France.
Sur la fin du dernier siècle, la Mère Petit,
dite de Sainlc-Tliérèse, religieuse de ce mo-
nastère, fil un second élablissenicnl de cet
ordre dans la même ville de Paris, au fau-
bourg Saiiil-Gerinain, proche le couvent des
Carmes Déchaussés. L'on appela ce nouveau
monastère la pelile Assomption, cl l'on y
gardait les mêmes observances que dans ce-
lui de la rue S.iint-Honoré ; mais comme il
ne se trouva point de fonds sulfisaiits pour
l'enlrelien des religieuses, ce monastère a été
supprime.
Dubreuil el Malingre, Antiquités de Paris,
et les constitutions manuscrites de cet ordre.
11 y a aussi à lléc;inati en Italie, proche
Laurelle , des reli;;ieuses sous le titre de
l'Assomption delà sainle Vierge, dont le mo-
nastère lut fondé l'an 1(526 par le cardinal
Jules Roma, évèque de celle ville. Ce qui
donna lieu à cet établissement fut qu'une
femme de la ville nommée Barbe Martille
Cl donna par son testament, dt- l'an 1593, que
si soi fils mouiait sans enfant, l'on fonde-
rait dans sa propre maison un monastère de
veuves qui y seraiententreleiiuesdes revenus
des biens qu'elle laissa pour cet effet ;mais le fils
éliinl mort sans enfants, et ayant laissé beau-
coup de detles, le cardinal Roma, voyant que
l'o.i ne pouvait esécuter entièremenl la fon-
dation, se détermina à mettre dans cette mai-
son quelques pauvres filles orphelines, dont
six prirent l'habit religieux ; d'autres filles y
étant aussi cntiétsdans la suite, et y ayant
porté des dots, on y établit la clôture l'anlCSi,
et l'an IGSion leur donna des constitutions
particulières qui furent dressées par le I'.
Oratio Patiani de la Compagnie de Jésus^ el
approuvées par le cardinal Roma, Comme
leur église fut dédiée en Ihonneur de l'As-
somption de Notre-Dame, elles en prirent
aussi le nom. Elles disent tous les jours au
chœur l'oifice de la Vierge, observent une
exacte pauvreté, el ont leurs heures d'orai-
son, de silence, de travail, et autres exerci-
ces. Leur habillement consiste en une robe
bleue ceinte d'une ceinlure de laine blanche,
avec un scapulaire blanc; leur voile est blanc
aussi, el leur guimpe est un peu plissée sous
Ja gorge ; au chœur et dans les cérémonies,
elles ont un manteau bleu traînant jusqu'à
terre.
Philip. Bonanni. Calalog. ord. Relig. ,
rari. lii ; et Didace Calcagni. Hist. di
Rccanall.
HELVETIQUE (Gongrkgation Bénsdiotine),
au il est parlé de l'ordremilita,re de l'Ours.
Quoique la congrégation Bénédictine-Hel-
vétique ou de Suisse ne comprenne ()ne
neuf monastères, elle ne laisse pas d'être une
d.'s plus illustres de l'ordre de Saint BenoU
par les prérogatives dont jouissent ce» mô-
mes monastè{es qui sont très-considérables,
y en ayant cinq dont les abbés sont princes
de l'Empire, savoir Saint-Cal, Einsidien ou
Notre-Dame des Ermites, Mûri, Pfers et
Disonlis. Si les quatre autres, qui sont Rlii-
naw, Frischinchcn, Engelberg, el Uhunwil,
ou Notre-Dame-de-la-Pierre, sont obligés de
le céder en dignité aux cinq premiers, ils
ont au moins l'avantage de leur être égaux
par rapport à la sainteté de leurs premiers
abbés, aux personnes illustres qui en sont
sorties el à la magnificence de leurs bâti-
ments. Le relâchement s'était inlroduil dans
la plupart de ces monastères, et il y avait
lieu d'appréhender qu'il n'augmentât encore
dans la suite par le voisinage des provinces
d'Allemagne infectées d'hérésies dont la
Suisse même n'avait pu se garantir. Mais
Bernard, abbé de Saint-Cal; Augustin d'Ein-
sidlen, Josse de Mûri, et Benoît de Fischin-
gen, afin de prévenir le mal qui les menaçait,
s'unirenl ensemble pour taire revivre dans
leurs monastères cette ferveur dont les pre-
miers religieux qui les avaient habités
avaient été animés sous la conduite de leurs
saints fondateurs, et prirent les mesures né-
cessaires pour y rétablir la discipline monas-
tique cl l'économie du temporel, l'une et
l'autre fort délabrées. Pour cet effet ils
firent des règlements qui y sont encore obser-
vés avec beaucoup d'exac iludc, aussi bien
que dans les autres, qui se joignirent à eux
dans la suite. L'union de ces quatre premiers
monastères se fitl'an 1(302, el elle lut approu-
vée par le pape Clément VIII sous le titre de
Congrégation Bénédictine-JIsUélique ; elle
fut augmentée après la mort de ce pontife
par l'union qui y fut faite, l'an 1606, des ab-
bayes de i'fers el de Rhainaw. Celle d'En-
gelberg et de Discntis suivirent leur exem-
ple, el Rhunwil ou Notre-Dame-de-la Pierre
y fut uni l'an 163:J sous l'abbé Finlan, qui,
y étant venu avec quelques religieux de
celte abbaye cl de celle d'EinsidIen, répara
entièrementce monastère, qui avait été ruiné
par les guerres et où il ne resta l plus qu'un
seul religieux. La congrégation Beriédictine-
Hilvéii(iue fut pour lo.s composée de neuf
monastères auxquels les souverains pontifes
el leurs nonces en Suisse accordèreni beau-
coup de grâces elde privilèges. Cette congré-
gation n'a point de supérieur général, les
abbés s'assemblent seulement tous les dix
ans ou lorsque la nécessité le demande. Ils
élisent dans leurs assemblées des visiteurs
généraux pour faire la visite des monastères ;
cet honneur est ordinairement déféré aux
premiers abbés: on nomme aussi des visi-
teurs particuliers pour les monastères, des
visiteurs généraux; le secrétaire est choisi
indifféremment de tous les monastères. Ces
abLés s'assemblèrent l'an 1702 à Sainl-Gal,
pour y célébrer la centième année de l'insti-
tjlion du leur congrégation. Ce monastère
est le plus considérable de la Suisse, l'abbo
451 nr.TIONNMRE DRS OROUES KF.UCIF.LX. J52
est prinrc souverain cl peut incUrc dix à teinciil. Car tlciuis cr Icmps-là il n ]icrilii
•Jouzc mille lionimos sur pii-d. Celle ahlinyc, Appcnzcl, ijni a (loniié son nom à l'un des
qui esl !.iluéo dans lo Tur^ow, à un mille du treize canions ; Schvendy, Brusilow.Cionlés,
lae de Constance, a eu de liùs-faibles corn- Nintk.ilbach, et Hasiem, qui se sonl sous-
lnencenu•nt^ : le nom de Saint ti.il lui a été tiaits de son oliéiséance, ayant fait une
do. né à cause nue ce saint, (jui était irlan- union pourse défendre niuluellemcnt contre
d.iis et disciple de saint C.olomban, se retira cet abbé, qu'ils ne >oulaient plus reconnaître
nu conimi'iuement du vir siècledansce lieu, pour souverain. Cun.', «lui fut clu abiié l'an
q-.ii cia t pour lors une solitude affreuse, cl i;3T."i, lit armer les autres sujets de l'abbaye
y liâiit un petit monastère, où (;uelquis per- pour soumetln- les habilafils d'Appenzcl cl
sonnes, attirées par la vertu de ce saint, vé- les auires (jui s'éiaienl révoltés ; mais ce fui
curent sous sa conduite. .\près sa mort, qui inu ilement: car, après plusieurs tentatives
arriva l'an G'»G, ce lieu fut appelé la Celle quiliii pourrcussirdaui sou enliepr:se, il f .1
d<! Saint-Cal. Le* Franc lis s'etant rendus enfin oblige de faire a\ec euxuntrailé depaix
maîtres de ce pays l'an "10, un certain NVal- par lequel il consentit qu'ils se raclictassenl
liamn, à (|ui appartenait celle solitude, pria delà souveraineté des a'.ibes de Saiiii-Gal
le comte \'ictor> qui était gouverneur du pour une somme d'artçtnt.
piys, de donner telle celle et ses dépendan- Pour mieux alTermir leur liberté, ils se
tis à saint Otbmar: ce que ce comte a '.corda liguèren; avec l''s can ons d'L'ri. île Scliwitz,
l'an 720, et en demanda lu:-niéine la conlir- d'Underval cl de Lucerne. Les abbés de Saint-
mation à Charles Martel maire du ]iaiais, qui Cal ayaul prutesié contre cette alliance,
l'ai'corda, à condition que saint Otlim.ir y Henri de M.imlrolï renouvela ses preten-
eiablirail les observances réjçu'.ièrcs; et ce lions l'an r*2.) à la cour de l'emjicreur Si-
piioi e érigea pour cet effet celte colle en gisniond, et lit mettre au ban de riimpirc
abbaye, dont saint Otbmar fut premier abbé. ceux d'.^ppenzel et les autres. .Mais loin do
Le prince t.arloman, fils de Charles Mar- s'en cionner, ils entrèrent dans lis lùals de
lel, allant en Italie l'an 7i7 pourse reliier cet abbé, démolirent quelques châteaux et
dans l'abbaye du Monl-Cassin, où il prit le forcèrent à f. ire la paix. Qaeique temps
l'h.ibil nionasliqiie, passa par S.iint-Cal, y après, l'abbé de S. lint-Cal s'unit CMitre eux
étant attiré par le.s miracles continuels qui avec la noblesse de Consliiice, mais ses
s'y faisaient par l'iiilercession de ce saiu\ troupes lurent encore del'ailcs. Enlin l'abbé
Il y avait alors peu dereligieux, à cause de Gaspard de Landerberg, ayant reconnu que
la petitesse du monastère. Ce jirince fut si ses prétentions sur Appenzel et les aulres
louche de voir un lieu si célèbre réduit ca lieux qui avaient été aulrelois de son do-
cel étal, qu'il écrivit à réjiin.son frère, roi maine seraient le sujet d'une guerre perpé-
de I'r;.nic. pour lui recoinmander ce inouas- luclle, y renonça par l'alliance (ju'il lit l'an
1ère et le prier de lui faire quelques duns. IVo'* avec les canions de Zurich, de Schwit/,
S.iint Otlimar, sur celte recommandation, de Lucerne et de Claris,
alla trouver i'é[iin, qui asMgna au moiia- Les terres que possèdepréscnleinenl l'abbé
stère de Saint-Cal des revenus considérables de Saint-Cal en souveraineté, outre la xilleih;
pour en aiignieiiler les bâtiments et pour Saint-Cal el son lerritcire, sonl Vil, Coltzliu-
i'enticiien des religieux. fulil et le conilé de Tokcrnljourg, qui renf.r-
Crosberl, qui fut élu abbé l'an SIC, fit ment plusieurs villages, dont les habilan s
exempter par l'empereur Louis le Débonnaire sont pariiecalboli(|ucs et partie proteilanls.
son abbaye de la juridiction des cvéques L'église de Tokembourg esl commune aux uns
de Constance, qui l'avaienl exercée surcllo et aux autres; les protestants y lais. lient
avec une grande autorité, el depuis ce lemps- l'exercice deleur religion après que lesc.itlui-
là ce monastère devint puissant. Le même liqucs avaient liui le leur; mais le jour de
abl é l'embellit par des bâtiments nouveaux l'aques de l'an 1708, les protestants voulu-
qu'il lit f.nre avec beaucoup de magnilicence renl commencer de piéciier avant (jue le
et auxquels les ouvriers furent employéspen- service des catholiques lût achevé: ce qui
liant SI pi ans. .Mais ce beau mun.istère fut excita de grands truubics en SuiSse, où ici
ruiné par les Hongrois lan 0-23 sous le goii- deux partis en \inrent à une rupture ou-
VI rnenieiil de l'abbé Lngelbert 11 ; el, l'an verie. L'abbe de Saiiil-'ial, avei; le secours
1/117, ce qui en restait fut réduit en cendres des cantons catholiques, voulant mainleuir
par le feu. qui s'y attacha par accident. sessujets catholiques dansleurs dmits par la
Ultic d'A.tsan, que l'empereur Philippe force des armes, les canions de Zurich et de
éleva à la diguilc de prince de l'Lmpire, Itirne lirenl la mémo chose pour soutenir
ttendil considerahlcment son domaine, el les protestanls. Cette guerre fui tunesie aux
les abbés de Saiut-Cildivinrcul d.ms la suiio caiholiques par les avanla;:es que les proles-
si puissants, que IlerlhoUI de l'alkenslin as- tanls, qui ciaienl en plus grand nombre,
sisia au sacre Ile Cauiicr, é\èiiii: de Siras- remporièreiil sur eux. Les deux partis se
bourg, avec une suUe de plus de mille gen- réunirent né.inmoins l'an 1712 et liienl cn-
ti:shoiiimrs , la plupart ses vassaux. Les semble un traite de paix, par la medialioii
lerres suumises à l'obéissance de cet abbe de M. le comte du Lue, ambassad; ur de
Claient pour lors plus considérables et l'ii France en Suisse (1). .Mais l'abbé de Saint-
plus grand nombre qu'elles ne le sont présen- Cal n'ayant pas voulu entrer dans ce Iraile,
(i) Joiitnnl 'iii(. sur les imilièra du Ii'ih/'J, Uni. XVU.
t.;3 IIRR
les cantons de Berne et Je Zuricli firent un
grand (légal d.ins son monastère, dont ils en-
levèrent toutes les cloches, au nombre de
vingt-quaire, do dilTérenles grosseurs ; pri-
rent les riches meubles qui y étaient, un
grand nombre de tableaux et une bililiolhè-
que de livres rares et curieux. L'abbé, se
lialtanl du secours qu'il attendait des cours
de Kome et de Vienne, fut trompé dans ses
espérances; car le pape et l'empereur ne
jugeant pas à propos de s'engager dans une
guerre dont les suites auraieiit lire à con-
séquence, il se vil contraint d'aller chercher
un asile dans le duché de Milan, n'ayant plus
ni abbaye ni souveraineté.
Les abbayes d'EinsidIen etdeRhunwil,p!us
connues, la première sous le nom de Nnlrc-
Dame-des-Ermiles, cl l'autre sous celui de
Notre-Dame-de-la-Pierre, qui snnt aussi de
la congrégation Bénédictine-Helvéti(iue, sont
très-célèbies parles miracb's qui s'y font
tous les jours, et il y vient de toutes paris
un gran<l nombre de pèlerins.
Jdœa Congreg. Ilelvet. Benediclinœ- Yso
Pfaw., Cottect. sive summar. privileg. ejusd.
Congreg. Christoph. Hartman., Annal. Éremi
Deiparœ in Helvetiis; et Mémoires envoyés
de Suisse en ITIO.
L'on peutconsuller pour l'abbaye deSaint-
(ial en particulier, Joan. Mabill. Annal. lienc-
dict.. Corn. 1, 11 et IlL Uom Antoine Yepez,
Chroniques générales de l'ordre de Saint-Be-
noit. Gaspar. lirusch, Annal, prcecipuorum
monasteriorum Germaniœ ; et Audilîrel,
(iéograph. anc. et mod., tom. IL
Lcsabbés ileSainl-Gal conféraient autrefois
l'ordre militaire de l'Ours, institué par l'empe-
reur Frédéric II, l'an 1213, en laveur de
l'abbé de Sainl-Gal et de la noblesse du
pays, en reconnaiss mce de ce qu'ils l'avaient
aillé à ciiasser de l'Empire Otiion IV. Le col-
lier de cet ordre était composé de chaînes
d'or entrelacées de leuill'js de chêne aussi
d'or, au bout desquelles pendait un ours
d'or éiiiaillé de sable (1); mais cet ordre
nesubsislc plus.
Favin, Théâtre d'honneur et de chevale-
rii' ; el Bernard Giustiniani, Hist. Clirouol.de
gli Ord. miltt.
HEiU'"01lD Voy. Gandersheim.
HERMLNE ET DE L'ÉPI (OaDftES militai-
KES DE l') en BllETâGNB.
L'ordre de l'Epi institué en Bretagne, et
que quelques auteurs ont mis sous la rèylc
de saint Augustin, quoique peut-être sans
aucun fondement, nous donnera lieu de parler
en même temps de relui de l'Hermine, qui
fut aussi institué dans la mêoie province. Ce
dernier eut pnur fondateur Jean IV, duc de
Bretagne, surnommé le Vaillant ou le Con-
quérant, vers l'an 1381, el non pas l'an 13!33,
comme quebiues-uns ont avancé. Le collier
de cet ordre éiail composé de deux chaînes
dont les deux extrémités étaient attachées à
deux couronnes ducales, chacune desquelles
renfermait une hermine passante (ij. Une
IlER
454
des couronnes pendait sur la poitrine, et
l'aulrc était sur le cou. Les chaînes étaient
composées chacune de quatre fermoirs, et
Cl s fermoirs n'étaient qu'une hermine avec
un rouleau entortillé autour du corps sur
lequel était écrit : à ma vie. Les rouleaux
étaient allcnialivement émaillés de blanc
avec de> lettres noires, et de noir avec des
lettres blanches. Autour du cou de chacune
des dix hermines il y avait un collier où
I)enda il un chaînon de qualre ou cinq au-
ne lUX : les colliers, selon la (|ualité des
personnes à qui les ducs en faisaient présent,
étaient d'or ou d'argent doré, ou d'argent
tnul pur. Ce qu'il y avait de parlirulier dans
cet ordre, c'est que l'on y recevait des fem-
mes qui prenaient le uom de chevalercsses.
Le P. Lobineau, dans son Histoire de Bre-
tagne, rap;)i)rle une liste de ces chevaliers,
parmi lesquels on trouve une duchesse de
Bretagne qui reçut le collier en \h\\\ une
Pélronille d'- Jlaillé, deux demoiselles do
Penlioel et du Plessis Augieren 1133, el une
Jeanne de Laval en l'i-oS. Le même auteur
rapporte aussi une histoire du même duc
Je.in IV eu vieilles rimes, composée pir M"
Guillaume de Saint-André, licencié en décret
scolaslique de Dôle, notaire apostoli(|ue et
impérial, conseiller et ambassadeur du uiênia
duc, où il est parlé de c^l ordre en ces
ternies :
A Nantes ses gens envoya,
.Mais de ta rendre on dtloii
Jusiiu'à la Nativité
De saint Jean, c'est vérité.
Deux jours avant ne plus ne moins
iîntra à Nantes, j'en suis cerlatn.<.
Et fut reçu à grand honneur
Comme leur Prince el vrai Seigneur ;
Ne sembla pas être exil
Quand l'en lit rendit Pîremil;
Toufj'ou assis en la forêt
Se rendit l'en et sans arrél ,
Lors fil mander tous ses prélats
Abbés, et clercs de tous Eiuts,
Barons, chevaliers escuiers.
Qui lors purtoisnt nouveaux colliers
De moult bel port, de belguise;
lit étoit nourelle devise
De deux lîolets brunis et beaux
Couples ensemb'e de deux fermeaux,
Et au dessous êloit l' Ermine
En fijure el en couleur fine
En deur cedules avoit tscript
A ma vie, comme fui dit
L'un mot est blanc l'autre noir
Il est certain; tien le pour voir.
Pour ce qui est des raisons qu'eut le duc
de Bretagne il'iustitucr dt ordre et de choi-
sir la devise d ma «l'c ; c'est une chose, dit
le P. Lobineau, sur quoi chacun peut donner
carrière à ses conjectures, les auteurs n'en
ayant rien dit. Il croit que le duc voulut
marquer par ces deux, couronnes el par celte
devise qu'il avait conquis deux fois la Bre-
tagne, et qu'il avait exposé sa vie pour cou-
(1) Voy.,3L la fin du vol., Il* 111.
(-2) Voy., à la fia du vol., n* 112.
45:;
DICTIONNAIRE DKS OnORES RF.IJCIEIIX.
4:.c
sorvor sa Jigiiilé, et que par les hcriiiincs
et lo rollicr à iliiiîiics piiulaiiti's, il ;iur;iil
pu faire allusinn par l.i au li''\riir b'aiic de
Charles lie Irtois qui .iliamlomia son mailrc
avaul la kuaillc d'Auray.
Ce l'ère ajoute que les ducs de Bretaoïno
ajouliVenl dans la *ultc au collier de I Her-
mine un autre collier de moindre prix, qu'ils
appclèronl le collier de l'Kpi, et qui était
roniposc d'épis de blé et Icrniinc par une
licrmine pendante attachée au collier avec
lieux chaines, lequel collier était ordinairc-
iiuMit (Pargent. Ceux qui ont Irailé des or-
dies militaires ont rappurlé riiistilulion de
rel ordre do l'Kpi au duc François I", qui
l'inslilua vers l'an IV.JO, selon quelques-uns ;
et, selon d'autres, l'an liV8; mais le l\ I.o-
liineau, parlant de ce prince, dit que les An-
glais ayant menacé la lîietauno, il en vint
quelques-uns trouver ce duc l'an 1VV7 pour
séclaircir apparemment avec lui, et que ce
jrimc leur lil de riches présents atin de les
gagner ou de les apaiser, el donna même à
quel()ues-uus le collier de son ordre de
riîpi, et que c'est la première fois qu'il est
parlé de cet ordre. Ainsi il était institué
avant l'an iVtS.
iMais ce que le P. Lobineau ajoute que ce
«lui donne lieu de croire qnc le collier tissu
d'épis de blé peut avoir été invente par le
duc François 1 ' pour être distribue aux
geutilshomnu's nioins dislingues que ceux
à qui l'on donnait des colliers d'or et d'ar-
gent composés d'hcrmiiios, ilc ciiî;ronnes
el de cbainetics. ne nie parait pas juste,
puii-qu'lsabcau d'Ecosse, femme de ce prince,
est r. présentée dans l'église cathédrale de
Vannes avec le collier de l'Hpi, quoiqu'elle
eût n çu aussi en 14-17 le colli; r de l'ordre
de l'Hermine, et que le duc François II por-
tail aussi toujours le cnllier de Tordre de
l'Fpi, au lieu de celui de l'Hermine. Les au-
teurs qui ont traité des ordres de chevalerie
ont eu d'autres sentiments que le P. Lobi-
neau, el même leurs sentiments onl été par-
tagés. Les uns onl cru que le duc François I"'
av.iil institué cet ordre et pris la même de-
vise que celui de l'Hermine pour faire con-
iiailre sa vertu, sa grandeur et jon courage,
ri qu'il se serait plutôt laissé tuer que de
commellic une niéihantc action (jui iiûl ter-
nir sa vertu, désignée par la blancheur de
riieruiiiic, qui, se voyant poursuivie ( t ren-
contrant de la boue, se laisse plulo! prendre
que se souiller. D'autres onl cru qu'il avait
él.ildi cet ordre pour marquer le soin que
lui el ses prédécesseurs avaient pris pour
rendre leur p.iys fertile en toutes sortes de
grains, li'autres enliu ont préicnilu ((u'il
institua rel ordre pour montrer la dévotion
qu'il portail au saint sacrement, <\uc ces e|iis
de ble représeiitinl les espèces du pain sous
lesquelles nmis l'.idorons , et qu'il joignit ,"i
ces epis une ln-rmine (11, pour l'aire souve-
nir les chevaliers qu'ils devaient plutôt mou-
rir que di'. se souiller cl se ploager dans les
ordures du péché. Ainsi chacun a donné car-
rière à ses conjectures, cl c'est sans aucun
ronilemenl <)ue l'un a mis cet ordre sous la
règle de saint Augustin.
l'oy. Favin, Théùtre d'honneur et de che-
valerie. Menuénius, du lîelloy, Ciiusliniani,
Sclioouebek et llermani, dans leurs lits!,
des Ordres tnilitiiires; et le P. Lobineau dans
son llisinirc de llrctague.
HFUMITKS. Voi/. Eumites.
HIÉUONY.\llTliS, Vuy. Iicrome ( EnuiTF.s
DE Saint-).
niPPOLYTE (Ordre de la Charité dk
Saixt-).
Environ l'an loSJ, sous le pontificat de
Grégoire XllI , un saint hiunmc nommé
IJernardin Alvarez , bourgeois de la ville
de Mexi |ue aux Imles occidentales , animé
du même esprit et de la même compassion
envers les pauvres malades que saint Jean
de Dieu, s'associa quelques personnes pieu-
ses et dévoles pour eu avoir soin. Il b)nda
un hôpital hors des murs el à quelque
dislance de relie ville, avec la permission
de l'archevêque, cl le dédia en l'honneur ilo
saint Hippolyte martyr, patron de la ville do
Mexique, en mémoire de ce que le culte des
idoles y fut aboli el qu'elle tomba entre les
mains des chrétiens le 13 août, jour auquel
ri'glise célèbre la fêle de ce saint. Hernardin
dressadcs règlements pour ceux qui s'étaient
consacrés avec lui au service des pauvres
malades , et il en demanda la confirmalion
au papo Grégoire \II1, après qu'ils eurent
été examinés par l'arche» êquc. Le pape les
a|)prouva aussi bien que la fondation el l'é-
rection de cet liôpital ; mais avant que les
lettres en fusscnl expédiées, ce pt^ntife mou-
rut, et elles ne furent signées (|ue p.ir son
successeur Sixte V , qui approuva tout ce
qu'il avait f.iit en faveur de celhôpilal. L'on
bâtit ensuite deux autres hôpitaux dans la
même ville, dont l'un fui dédié au Saint-Es-
prit, el l'autre fut appelé l'hôjjilal royal, à
cause qu'il fut bâii par les libéralilés du roi
d'Espagne. Il y en eut aussi un autre dans
la ville de Pueblesdc Los .Vngelos, sous lo li-
tre de Saint-ltoch, et le nombre de ces hôpi-
taux augmentant, ils s'unirent ensemble cl
formèrent une c mgrégalion sous le litre de
la Charité de Sainl-Iiippolyle, à cause du
premier hôpital qui avait été liâli sous l'in vo-
cation de rc saint martyr, qu'ils rccoiinnrcnl
pour leur chef. Le pape Clément \ 111, ayant
appris le pnigiès (|ne iaisaient ( es hospiia-
liers, et la chariié qu'ils exerçaient einei s
les malailes, leiiraccoida par un bref du 2
avril l.jll'» tous les privilèges, grâces el pré-
rogatives dont jouissaient les Frères de la
Chanté de Sainl-Jcan de Dieu, (|ui étaient
pour lors inconnus aux Indes occidentales,
où ils n'avaient pas encore passé, lcs<|uels
privilèges leur avaient été accordés par
ses prédécesseurs Pic V, Grégoire XIII, el
Sixte V.
Ces hosjjitalicrs de la charité de Saint-IIip-
polytc ne t'aisai.Mii (^uc deux vœux siuiplcj,
(I) Voï ,àb nii d;« vol., n" 1!3.
i57
IIlP
iim
4.5f!
l'un dethasielc il l'aiiiic de pauvreté; mais,
cuiniiic ils ne se crojaieiii p.is pourcelj enga-
ges à la congrégalion, ils en smljiieiil quand
bon leur semblait. C'esi ce qui obliicca leur
{générai (<iui prenait la qualité de frère ma-
jeur) ei les hospitaliers tant de l'hôpital de
SiiirU-Hij)poljte que de sept autres qui en
dépendaient, d'avoir encore recours au pape
Clément VIII pour aviser au^t moyens d'i^m-
[échor les hospitaliers de quiUer l'inslilut.
Le pape crut pouvoir l'empccheron les obli-
geant [)ar une bulle du premier oclobie 1594-
de faire à l'avenir les vœux de perpétuelle
hospitalité et d'obéissance, au lieu de ceut
di; chasteté et de p luvreté qu'ils l'.iisaienl
auparavant, et ordonna que ceux qui les
avaient faits et qui étaient acluellement dans
la eongiégali.Hi reconimenceiaienlainsi leurs
»œiix.
Ma s il est aTivc dans la suite un autre
inconvénient de celte sorte de manière de
s'engager dans celle congrégation ; car il y
en eul qui transgressaient et la chasteté et
la pjiuvrtlé , sous prétexte qu'ils n'étaient
obligés qu'à la perpétuelle hospitalité et à
l'obéissance ; et ils prétendaient même, com-
me n'éianl pas religieux, qu'ils pouvaient
sortir de lacongrégalion quand boa leur sem-
blait. C'est ce que le frère .ean Cabrera, pro-
eureur général de cet nrlre, exposa au pape
Innocent XM l'an 1700, et il supplia aussi ce
pontife de changer la umnière d élire le gé-
néral. Clément V'III avait ordonné que l'élcc-
lions'en ferait par vingt des plus anciens de
la congrégation , et (jue l'on aurait égard à
leur ancien ncté du jiiur qu'ils auraient fait les
deux vœux de perpétuelle hospitalité et d'a-
béissance ; mais, comme parmi ces anciens
il y en avait sans expérience, qui ne con-
naissaient point l'étal de la congrégation, et
que souvent ils élisaient des personnes peu
capables de la gouverner, ce procureur gé-
néral demanda, au nom de ses confrères, la
] erinissionilefa re des vœux solennels sous la
icgie de saint Augustin, afin d'engager par
des lieud indi solutiles les hospitaliers dans
la congrégation, et qu'au lieu des vingt plus
anciens qui devaient élire le général ou ma-
jeur, on en choisirait vingt autres des plus
CApérinientés et plus capables. Le pape eut
seulement égtrJ à la première deaiande, et
par une bulle du 20 mai 1700 il permit à t es
hos|;italiers de la Charité de Suint-Hippoljle
de faire les vœux solennels de chasteté, pau-
vreléfObéissanceeld'hospilalité, sous larégle
de saint Augustin, et érigea leur congréga-
tion en ordre religieux. Il les initsousla pro-
tection du saint-siége, et confirma tous les
privilépes qui leur avaient été accordés par
ses prédécesseurs, et, pour ce qui regardait
l'élection du majeur, le pape n'y voulut rien
changer, laissant les choses comme elles
eiaienl aup .ravanl.
Le fn re Cabrera fil ensuite sa profession
solennelle entre les mains du vice-regent.en
ayant obtenu la permission de la congiéga-
lici! des réguliers, et présenta quelques jours
(1) Vry., à 1;. (indu vol., n' 1 1 i.
Dictionnaire des Ouuues nFuciEUx.
après une supplique au pape, par laquelle il
lui exposait qu'il était sur le po ni de retour-
ner aux Indes, et qu'il pri.iil Sa Sainteté de
lui permettre de recevoir la profession du gé-
néral et des autres hospitaliers de sa congré-
ga ion, à cause que l'on devait dans peu pro-
céder à l'élection d'un général. Le pape ne
lui accorda (las encore entièrement sa de-
mande, car il lui pcriuil de recevoir seule-
ment la profession du général ou du vicaiie
général; mais il ordonna que les autres frères
la ferjient entre les mains du général ou du
vicaire général, ou doceux qui seraient com-
mis par eus pour cet effet, etijue l'éleetion du
général se forait au lieu et en la manière ac-
coutumés par ceux qui avaient droit de la
faire selon leurs constitutions et statuts, qui
seraient observé;, comme il est plus au long
porté parle bref de ce pontife du 3 juille' ito
la même année ; et sa bulle fut reçue en Es-
pagne, le '27 novembre aussi de la niémeiin-
née, par le conseil des Indes, qui e!i ordonna
l'exécution. Clément XI ac(orda, l'an 1701, la
communication des privilèges des orilies
mendiants et de la congrégation des Clercs
Ministres des inlrmes, à ces hospitaliers d«
la Charité deSaint-Hippolyte. Leur habit est
semblable à celui des frères de la Charité do
Saint-Jean de Dieu, et ne diffère que par 1 1
couleur qui est tannéi' (1).
Pliilipp. Bonanni, CaCulog. Ord. religion,
part. I. BuU. Innocent XII et Cléinenl XJ, et
Mémoires envoyés de Rome en 1709.
HîHSAUGE {Congrégation d') en Allemagne.
L'abbaye d'Hirsauge en Allemagne a été
autrefois chef d'une Horissanle congréga-
tion , qui commença vers l'an 1080 par lu
zèle de sa nt Guillaume, qui fut le restaura-
teur de la diseipline monastiijue en ce pays.
IZelte abbaye, située dans le dioi èsc de Spire,
reto;iiiaît pour fondateur le comte lîrlalride.
H était père de Noling, évéque de Vercel ,
qui, ayant apporté dans sa cathédrale le
corps de saint Aurèlius, évé(iue de llediciine
en Arménie , en voulut ensuite enrichir sa
patrie en le porlanl secrètement en Alle-
magne.!! y avait, pas loin du château de s:in
père, un orato're dédié à saint Nazaire : c'é-
tait dans ce lieu que Nor ing voulait faire
reposer ces maintes riiliques ; mais, d ins le
chemin, un aveu:;le ayant recouvré la iu:i
par l'iiitcrie'^sion de saint Aui élius, le comte
lîrlafride, touché do ce miracle, fit bâtir un
monastère au lieu même où le miracle était
arrivé, et en jeta les fondements avec son
flis Ermenfride l'an 830. Mais, comme il
voulait le rendre un des plus superbes et
des plus magnifiques de l'Alemagne, il ne
fut achevé que sejil ans après, l'an 837 ou
83S. Ou y mit douze religieux qui furent
tirés de l'abbaye de Tulde, auxciuels on
donna pour abbe L'iilperd.I'our lors l'église
lut consacrée par Olgar, archevêque de
Mayence, en présence d'un grand nombre d.î
prélals et de seigneurs qui .ivaiLUt été in-
vités à cette cérémonie par le comte Erla-
11.
15
^„ DiCTiONN.\mK ors onnnES ur.Lir.frcx. tno
,. . i.- i-,-» ^iiifiii «iiiip il ne mit voir sans douleur les ruinos
rndo cl l'on trnn.rorn .^"^^ ^ ^''^^^^^ I do e ..', 'nn't' re. ,u.. les .nuèlres .le ce cc.„e
dohée a sa.nl ''•'^ «,' -»;; Vlu^reùn^^ .vaicnModail on cl cial. Ce prince s'.,,)-
corps d- .0 .^•';'^'-' ,^ \"''V^ ■' -^ ;'j'j^, slinV >li,,u,. à chercher le corps de saint Aurélius.
N ::;; r",'""" .:,; I r ..." riU e'n 21 1,^^ ron avni. caché du .e.np. des irruptions
^JZ.ll.e. ''^. '^"'", '''',' ,1,. re inonasl^rm des Normands, qui, entre tous les ( ruuei
,eaM.sdonal,onsolen elle dece .«o..asl^^^^^^ i c.Mnmcttaienl dans toutes sortes d-
..,„re 1rs ma.ns de » f ^« ];"'/''^7i[ \, ^J ^ \.„r,., s'atlacl.aien. p .rliculière.nent à p.o-
""" ""'. et h,! a fa 1 b é a^ rèlig uï faner 'tout ce qnM y ivai. de plus saint et d.
'^'^:uô\?i^T\^ alb^^''^'^ choir.r un pus sacré, les cri.nes ordinai.cs nVla... pas
de P'>"'"'J.f^';''^^,'V -,.,,,,, n^i,, ère. swlfisanls pour contenter les passions bru-
avouc ou défenseur de cl ..u.nasierc. ^ ^^^^ d'une nation si feroee et si barbare. Ce
La discipline rc^iu lere y futinainlcnne ,,,è,.icux dépôt, qui, par la préeaniion d.s
diiis toute sa vigueur jusqu en 1 an J8S, que ^p|i„im,x de ce lenips-là, avait échappé à leur
IMlemasnc, a, rès avoir été afll.gec d une f^yç^^^^ f,ji c.,fi„ trouvé par la dili-once de
f;ra..dc lamine, se trouva dans une plus ^.^ ,„,, ,,i,i ordonna à Adelberl de réparer
{-rande dé-olatiou par u.ie ma adie coala- ,.,. ,„,„asière et son église, tant pour h .iior.r
gieuse qui suivit celle faniin.' et qui enleva j^,^ reliques dccecrand saint que pour expier
u\\ ^rand nouilire de personnes dans luules j^ crime que ses ancélres avaie.it co luuis en
les i-roviuces. Soixante religieux de 1 abbaye jpiruisai.t le temple de Dieu et en persccn-
(iHirsau-een ayant clé attaqués, .nourureiil ,;,„i ses ministres. Le coinle obéit au pape
av.c leur abbé, et il n'en resta q^ie douze , ^^ rebâtit ce monastère, mais non pas avec
qui ne purent s'accorder sur le chois de son ^^^^^ j^ diligence qu'il devait : car il ne fui
suceesscur. Les idus fervents et les plus ^^^ étal d'être habile que l'an lO.io. Il y lit
zélés {lour la régularité élurent Conrad, qui ^.^^^^^ douze religieux de l'a!)baye de Kinsi-
ful confir.né da..s celle dign;té par leveque jj^^^^ ^^^ Suisse, plus connue sous le nom de
de Spire. L s autres, (lus portés au relâche- i^()irc-Daine des Er.nites, aux [ueU on donna
ineni. élurent liberhanl, cellérier de ce mo- .„„„. ^bbé Fridéric. Ils furent rcru^ avec
iiastére. Mais trois religieux de son p.irti [,c^ucaup d'humanité par le comte et s.-i
l'ava.il abandonné pour reconnaître leur le- fg,„„,p Viluude, qui leur fournireul toiil ce
(jifiiue supérieur, il se relira avec deux au- „„; ^.(^'it „ccûssaiic pour leur entretien ; cl
1res vers le comte de CaUe, ennemi de ce ^^^ j^ j^,,„pg ^^^ acii vèreul l'église, qui
m naslèrc, qui, profitant de celé occasion, „-^,aJi p^s encore finie. L'abbé Fridéric eui
y vint à main armée cl en enleva loul ce |,ea„coup à soulTrir de ses religieux, qui,
îju'.l put, qu'il distribua à ses soldats sous ^ .^ ,^j ^^^,1^ f.,H ,„i|ie i„djg„iiés, le dépo-
)r6le\le de conserver les biens du moiias- j^^p^,,! ^j yiur.'ut en sa place sa:nt Guillaume,
1ère pour ensuite les reinellre entre les ^^^^ y^^^^ religieux du monastère de Saiui-
inains d Fberhard, leur légitime abbe, pre- |£„„„çra„ ly Uatisb auie.
tendant que Conrad élait un usurpdleur. j, ^^^^^ originaire de Bavière, et fui oiïerl
Conrad copendanl demeurait à Hirsauge par ses parents, élnil encore jeune, au mo-
avec huit religieux, el y vivait dans des m- nnsiére de Saini-Kinmeran, ou les rel gieux
(luiélud.-s continuelles, appréhendant à tout vivaient avec beaucoup de liberté. M lis ,
luoiiienl quelque cliosc de funesie de la part malgré ( es mauvais exemples, il avançait
de son per-écutcur. Ses craintes n'elaient néanmoins tous les jours dans la perfection :
pas m il fondées; car Fberhard, ne pouvant ce qui fiisail que les méchants religieux,
souffrir de se voir plus long'cmps privé de qui étaient portes au rclâchemenl, le crai-
i'abbaye d'Hirsauge, y vml de nuit la se- {rn.iieiit, cl qu'au contraire les bons et les
1 onde année de son élection, avec des sol- plus p;irl'ails le chérissaient cxtrcoicmenl. Il
dais, dans le dessein d'enlever l'abbé Conrad, apprenait avec beaucoup de facilité tous les
(iui,'cn ayant été averti, s était relire. Eber- arts libéraux, cl il excella entre auires dans
Iiard, f.uhé d'avoir manqué son coup, se le chanl el l'arl de compter, comme e.i fo.il
contc'nta de piller le monastère sans faire foi les ouvrages qu'il a lai-sés sur ces sricn-
aucnn mal aux religieux, et se retira plus ^pj Qq fui Pan 10C9 ((u'il fut élu abbé d'Hir-
c.hargc de crimes que de dépouilles. Conrad sauge. 11 ne refusa pas Ihoniicur qu'on lui
i-jl deux ans crranl de coté et d'autre, jus- faisait, parce qu'il ignorait la dép isition do
qu'à ce (lue, son compé'.i eur éiant mort, il Fridéric et les différends qu'il avait eus avec
retourna à son monaslère, où, avec le peu ses religieux ; mais, les ayani appris lorsqu'il
de religieux qu'il y avait, il vécut dans une fui arrivé à Hirsauge, il alla trouver le comte
};rande régularité, nonobstant les persécu- Adelberl pour l'exhorter à faire rétablir
lions (fue lui suscita le comte de Calve, qui, Fridéric, lui représentant que personne ne
après sa morl, autant par haine que (lar pouvait occiip r sa place tant qu'il vivrait,
.ividilé, s'empara eiiliércmcnl du mo.la^tè^c, n ^.g disposait déjà à retourner dans son mo-
()u'il réduisit dan> une si grande dexil.ilio.i, naslèrc pour ne |ia.s être complice de ce
qu'.l fui abandonné des n jigicux el qu'il crime ; mais les religieux firent tant par
resta ai.isi jusqu'en l'an tOba. leurs prières, qu'ils l'obligèroat à rester. Il y
Dès l'an 10'»'), Je pape Léon IX, étant en consentil, mais à condilion qu'il ne serai
Allemagne cl allant à .viayence, logea, à ce pas béni, cl ne prendrait pas la plac- do
que l'on prelend, chez Adelb ri, son nevc i, Fridéric de son viv,..it : ce t|ui dîna jus.iu a
touilc de Calve; cl ayaai élu avec lui à llir- l'année suivante, qu.', Iridénc clai.t moil,
m
i:m
HIR
■m
(Juillaumc recul publiquement î.i bénédic-
lioii des mains d'Henri, évêque (Je Spire.
Lorsqu'il arriva à Hirsauge, l'ctat de ce
monastère n'était pas encore certain, tant à
cause des brouillerles qui étaient survenues
entre Fridéric et ses reiigit us qu'à cause
de l'inconstance du comte Adi'lherl, qui n'a-
vaii pas encore restitué les biens de ce n)o-
nislère, qu'il retenait depuis un si long
temps ; mais Guillaume sut par sa prudtMice
apporter remède à ces maux 11 fit paraître
tant de grandeur d'âme dans les adversités
(lui lui arrivèient, sa piété et sa dévdi'on
furent si grandes, et son zèle si ardent pour
def ndre et maintenir la discipline mo-
iiasliquc, que c'est avec raison qu'on le met
jiu nombre des plus grands boinmes du
xi"" siècle.
Aussitôt qu'il cul été béni abbé, il com-
mença à sonjjer aux moyens de pDUVoir ré-
tablir la régularité et l'observance dans s m
monastère et remélier aux abus qui s'y
étaient glissés ; il commença par examiner
les revenus dont il jouissait, afin que, s'ils
n étaient pas suffisants pour l'entretien des
rel gieux (comme effectivement ils ne t'é-
taient pas, puisqu'à peine pouvaient-ils suf-
fire pour en entretenir quinze ou seize), il
pût cliercher les moyens d'y suppléer el de
leur fournir leur nécessaire, étant Irès-per-
L'.jadé que la c.;use ordinaire du relâchement
est le manque des choses nécessaires à la
xie. [/aulur.té qui' le comte Adelbrrt s'était
acquise sur les reli;^ eux était si grande,
qu'ils n'osaient rien faire sans sa permission,
en sorte qu'il semblait qu'il lût leur supé-
rieur et qu'ils fussent obligés de lui obéir. Le
saint abbé, ne pouvant sou'Trir cet abus, lit
si bien, qu'il persuada au cemte de se dé-
sister (Je Celle prétendue supériorité, el de
donner une entière liherié à son monastère,
afin qu'élanl indépendant des puissances
séculières, on y pûi observer avec plus de
facilite la discipline régulière et monastique.
El, afin que celte indépen lance lût plus
stable, il la fil cotifirmer par le pape et l'em-
pereur. L'église (jue ce comte avait c)m-
Mieiicée depuis dix aiis étant achevée, elle
lui consacrée, l'an 1071,parrévêquede Spire,
à la solliciialion de ce seigneur. Les richesses
de ce monastère augmentèrent avec le nofu-
bre des religieux, et du temps de saint (juil-
laumo il n'y en eut jamais moins de cent
cinquante, qiioi(iu'il lût souvent obligé d'en
envoyer pour fonder ou pour réformer d'au-
tres monastères; car le nombre était aussitôt
rempli par d'auires, qui prenaient l'habit à
Hirsauge pour cire ses disciples, entre Is-
«juels il y eut plusieurs comtes, marquis,
barons et autres gr-inds se gneurs.
Ces religieux s'occupa eut jour el nuit à
chanter les louanges d,; Dieu, à prier, à mé-
diter, el à l'élude des saintes Ecritures. Ceux
qui n'étaient pas propres jjour la contempla-
lion des choses célestes travaillaient des
mains afin d'éviter l'oisiveté. Ce saint aiibé,
éiarii j;ersuaiié que la lecture de la s.iinte
Eciiliire est la nourriture de l'àme, établit
douze habiles écrivains pour transcrire les
saintes Ecritures el les ouvrages des saints
Pères. Il y en avait aussi d'autres en plus
grand nombre qui étaient occupés à trans-
crire d'autres ouvrages, et il y avait un re-
ligieux habile en toutes sortes de sciences
qui avait l'inspection sur les uns et les au-
tres, qui présidait à leurs ouvrages et corri-
geait les fautes qu'il y trouvait. Mais, quoique
ces religieux aieni tr.iiiscrit un nombre in-
fini de volumes, il en est néanmoins resié
peu dans ce monastère, à cause que saint
fiiiillaume, en reformant ou fiindant d'au-
tres monastères, y envoyait beaucoup de ces
livres. Outre les cenl cin(|uanlc religieux
qui étaient dans ce monastère sois la cori-
duite de ce saint abbé, il y avait aussi des
frères barbus ou convers qui éiaieni des-
tinés pour le travail et pourvoyaient aux
besoins de ceux qui ne s'occupaient qu'à la
contemplation. Il y .'■vail entre eux d'habiles
ouvriers en toutes sortes d'arts et de pro-
fessions, comme architectes, maçons, char-
pentiers, menuisiers, scul[)leurs, forgerons,
tailleurs, corroyeurs, cord )nniers et plu-
sieurs autres. Saint Guillaume fui le [neniier
qui établit ces sortes de convers en Alle-
magne. Ils lui furent d'une grande; ulililé,
car ce furent eux seuls qui firent loi, s les
bâlidienls du nouveau mouaslère d'Hirsauye
cl des autres qu'il f mda. Il fii des règlemenis
particuliers pour eux el propoi lionnes à
leur occupation. Tuules les nuits ils se trou-
vaient à l'égiise p lur chanter matines, mai-i
elles étaient courtes, à cause de la laligue
qu'ils avaient eue pendant le jour. 11 éait
libre ensuite à ces convers de rciournir
dormir, mais plusieurs des plus fervents
restaient à l'église jusqu'à ce que les reii-
(■ieux du chœur eussent achevé leurs mati-
nes. Le l-ndemain de grand malin, ils en-
tendaient la mesS'^ ol allaient ensuite au
chapitre pour y dire leurs coulpes. Tous les
dimanches il y en avait (]ui communiaient,
en sorte que la moitié communiait un di-
manche, et l'auSre inoiiié le dimanche sui-
vant; mais aux fêtes solennelles ils commu-
niaient tous, et si qîjclques-uns allaient en
campagne et qu'ils ne dussent pas revenir
le dimanche suiv.int, ils communiaient U?
jour qu'ils partaient. H établit aussi des
oblats à l'eseuipie de ceux de Cluny; ils
éiaient dilïérenls des frères convers, en ce
que ceux-ci étaeiil religieux el en portaient
l'Iiabit, et que les oblats étaient vêtus en
séculiers. Il lit aussi des règlements pour eux.
Ce saint abhé, n'ometiant rien pour main-
tenir l'observance léguiiàre, voulut l'aire re-
cevoir dans son monastère les coutumes de
Cluny : c'est pourquoi Ulric, qui était proies
de (illuny, ayant été envoyé en Aliemag e par
saint Hugues, el étant revenu voir saint
Guillaume, (]ui éiait son ami ; ce saint, pro-
fit iiii d'une o'ca-.iou si iavorable, le pria de
vouloir mettre par écrit ce» coutumes, ce
qu'il fit volontiers. Il y a à la tète de cci ou-
vr.ig', qui est divisé en trois livres nus
é, lire .îéuiciloirc adressée à saint Guillaume,
où Uiric se plaint d'abord d'un aîius qu'il
dit êire lu principale cause de la ruine des
403 DICTIONNAinK HF.S ORDRES RELIGIEUX. /,'„4
niïinasl rcs. qui p^l île recevoir les oiif.inls tance et légal du saint-siége; saint Théngrr,
iliinl les pères el les mères qui en avaient é\èi|ue de Metz, et GéUeliard, évéque de
uranil nombre ( herchaicnl à se défaire en Spire.
les ulTiant aux riioiiaslèrcs , avant même Ce dernier fut d'abord son successeur dans
()u'ils eussent rusa;;(' de raison, prin( ipali-- le pouvernemeiil d'Hirsauge, avant ijue de
ment s'ils en avaient (luclques-uiis de nian- mouler sur le siège épiscopal de Spire. Il y
cliots, de boiteux, ou (jui eussent quelque maintint l'observance régulière t|uc saint
aiiire inconimodilé.I.a r.iison qu'il apjiorie l'iuiliaumey avait établie, aussi bien que dans
P"ur prouver que c'e>l un abus, esl (]ue les les autres monastères de sa dépendance: ce
maisons remplies de ces invalides ne peuvent <|ue lirenl aussi les abbés Uruiion, Volinar et
fiarder aucune réguLn ito, el ([ue l'obser- Harlwige. Mais, sous le gouvcriiemenl de
v.iiice n'est exacte (lue dans celle où le plus JMancgolde, dix-septièine abbé d'Hirsauge,
grand nombre de religieux esl de ceux qui ()ui lut élu l'an 1157, il veut quelque divi-
y sont entrés en âge mûr, de leur propre sion en're lui et ses religieux. Ceux-ci se
iiioiNcnieiil, et exempts de ces sortes d'in- plaignaient de ce (]u"il usait envers eux d'une
firmiiés ou défauts de nature. trop grande autorité, (]u'il méprisait leurs
Mais, comme saint Cjiiillaunie trouvait des conseils pour suivre ceux de ses domoti-
tliilieultés dans ces coulumcs de Cluny, qui (]ues, (ju il soutenait dans loul ce (ju'ils fai-
ne pouvaient être bien expliquées par écrit, saienl au préjudice même du monastère, ap-
il jugea à propos d'envoyer à Cluny des re- prouvant jusqu'aux insolences excessives
ligieux qui les \issent pratiquer, ou pour (lu'ils commeltaienl tous les jours contre l.i
m eux dire qui les pratiquassent eux-mêmes, comuuin.iutc ou contre les particuliers, <'l
il en enioya premièrement deux, et ensuite qu'au lieu d'y mettre ordre, il mullraitail
deux autres, afin qu'i s en pussent être par- encore les religieux que ces mêmes domes-
r.iitemenl instruits, cl qu'étant plusieurs ils liciues avaijnt insultés. Leurs [ilaintes u'î-
pussenl mieux, les retenir cl lui en faire un laienl pas sans f.)ndeuu'nl : car, un jour (|tm
fidèle rapport. A leur retmr, il fil assembler cet abbé était ab-eni, un de ses domestiques
les anciens, et, après avoir examiné avec ayanl fait quel<iuc chose qui c'ait contraire
eux les coutumes de CUiiiy el entendu les re- au bien du m inaslère, un religieux l'eu le-
ligieux qu'il y avait envoyés il en retr.incba prit; mais le domesliquc recul celte correc-
cc qui ne convenait point aux pratiques du tien a*ec tant d'insolence et île mépris ,
pays, au climat et à la silualinn des lieux, el que, se jetant sur ce religieux, il lui diinna
(,'arda celles qui lui convenaient, sur les- (lu.lques iou;s el le jeta à ses pieds; ce qui
ijuclles il en dressa d'autres qu'il divisa en (il que le prieur lit mettre en prison ccl
lieux livres, qu'il appela les t'uM/i(;/i('j« (/'//(■/•- liomme, (jui y resta jusqu'au retour de
snwje. l'abbé, qui, au lieu de corriger un tel excès.
Le zèle de saint Guillaume ne se renferma lui donna la liberté et lit mettre en sa plare
pas dans le seul monasière d'flirsauge : il le relijticux (]ui avait ele frappé ; ce qui ir-
en fonda cl réforma plusieurs autres, dont rita davantage les religieux contre leur abbe.
les plus considérables sont Uichemliarcb, Un procédé si indigne el si injuste aurait eu
Saint-Georges dans la Forêt-Noire, Saint- sans doute de lâcbeuses suites; mais par
Martin dans la lîavière, lù'pbord dans la l'entreiiiise de saint Hildegarde ils se réuni-
Thiiringe, Zuvifaiten dans la Souabe, Wil- nnt el vécurent dans la suiie en bonne in-
beim et Laven dans la Carintbie, qui furent telligence. Cette division, qui avait altère l.i
fondés ; Schaluse, l'eler>liausem el Campcrg, chanté, avait aussi donné queliiue entrée au
qui furent rétablis; Allof au diocèse de relâthemcut ; mais par les soins de l'abbe,
Strasbi'urg, Isncn au diocèse de Constance, qui, malgré cet amour déréglé qu'il avail
ri Hasung dans la l'huringe, qui furent ré- pour ses domestiques, élail fort zélé pour I. s
l..rmés. 'l'riibème, dans ses Chroniques de observances régulères, les religieux repri-
l'abbaye d'Hirsauge, nomme viiigl-lrois mo- renl leur première ferveur, et s'attaclièrent
naslères ((ue ce saint fonda do nouve.iii, et plus (jue jamais à la pratique de leur règle.
soi\ante-neul (lu'il réforma, dans lesquels il iiupeil cl Conrad, qui lui succédèrent de
lit observer les coutumes d'Hirsauge. Il fit suiic, y maintinrent aussi la régularité;
aussi société avec plusieurs monastères de ma s Henri, leur successeur, qui fut élu
dilTerenls ordres, comme l'église cathédrale Lan 1IS8 après la mon deC wiiad, se mil plus
de l^aniorbery, dc'sseï vie par les Itenedicliiis, en peine du lemjiorcl «[ue du spirituel, en
les abbavcsd;; Cluny, de .Marmmitier, de sorte ()iie pendanl huit années qu'il lut ablie,
Saint-Hénigne de Dijon, de Saiiil-\ iclor de l'observanc" regul.ére lut (iies pu! bannie
Marsiilb'.de Saint-Max min, et de Saint- de ce mouastéie. Il reconnut à la tin la l.iuo
M.ilhiiis à Irèves, de S.jiiil TanLileon à Co- qu'il avail faite, et, voulant en f.iire peui-
logiic, de S,\iiit-Ein,.riin de Katisbonne, et tenu!, il se démit de son abb.iye eu ll'Jti, se
avec les cbaiioincs réguliers de Marb.ic el de cuntciilanl du |irieuré de Uotli, que les rel.-
rranckenlal, etc. Kiilin, après avoir été abbé gi- ux d'Hirsaugi' lui laissèrent pour son en-
d'Ilirs.Migc pendant vingt-deux ans el s'éirc lietii ii, du co,l^enlemenl de l'abbe .Mai quard,
a< qiii.t le litre de Kestiur.iteur île la disri- (|ui fut son successeur.
Iiioe monasiiiiue en Allenuigne, Il mourut Oiui-ci était assez (lorté pour la régula-
le 6 juillet lU'.H.I^cs plus iilu,trcs de ses rite, mais il ne put exécuter le dessiin (|u'il
UiDCiples lurent saint 'Ihiémon, archevêque avait de I,i léiablir dans sou monastère, eu
Ue Salzbeurg ; Gcbéhard, cvéquc de Cons- étant empiîché par les alïaires qu'il eui ù
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soutenir conlre le com(c Adclhf^rl, qui en
^'lail avoué, el qui, au lieu d'en être le pro-
Iccleur, s'érigea en lyran et voulut lui ôter
tous les privilèges cl inimunilés dont il jouis-
sait. Il usa de violence envers les religieux
en plusieurs rencontres ; et, comme il leiuiit
le parti de Philippe de Souabe, qui avait clé
-^ élu pour empereur par quelques-uns de son
parti, et que les religieux ne voulaient point
reconnaître à cause des censures que le pape
Innocent III avaient fulminées contre lui, il
les chassa tous du monastère, et les réduisit
dans une si grande nécessité, qu'ils avaient
à peine du pain et de l'eau.
Il y eut dans la suite qui lijues abbés qui
tâchèrent d'apporter quelque réforme dans
ce monastère; mais ce fut inutilement. Il y
eut d'autres abbés et en plus grand nombre,
qui, par le mauvais excn)ple qu'ils donnaient
eux-mêmes aux religieux, les enlretenaienl
dans le relâchetnent : en sorte que les Cou-
tumes de saint Guillaume, si connues sous
le nomdeCoulwnesd' llirsauge, el qui avaient
servi de règle à tant d'autres monastères, y
étaient entièrement abolies et même incon-
nues, lorsque Wolfram, trente-huit èmeabbc,
introduisit dans ce monastère d'Hirsaiige la
réforme, qui avait commencé dans c>lui de
Molk au temps du concile; et, l'an li57, ce
même abbé voyant que cette congrégation
de Molk ne pourrait pas subsister, il y fit
recevoir la réforme de Bursleld, dont nous
parlerons dans la suite.
Joau Trilh., Chronic. Ilirsnuj. Joaon. Ma-
billon, Acta. SS. ord. S. Bened. s; eut. \],
tom. Il, e/ Annal, ejusd, ord. li>m. lil it W .
Buceliii, Menolog. Bened. el A</uil. Benedict.
HOMBOUKtî. Voy. Cologne.
HONOUAT (SAnr-). Voy. Tarasi:o\.
HOCITAL D\L LA SAINTK-ÏKINITÉ (PuÉ-
TBES-DUVRlEns I)E l'). Voi). C1.OU (SACilÉ-).
HOàPlTALlEKS DE (:LEUM0NT. Voy.
Loches.
HOSPITALIÈUES, etc. Voy. leur désigna-
tion particulière, comme le nom de lieii, de
corporation, etc.
HOSPITALITÉ. Voy. Jea> de Dieu.
HOTEL-DIEU DE PARIS (Heligikuses hos-
pitalières UE l'), et autres du iitcme ins-
titut.
Nous avons vu ailleurs, en parlant de
quelques hôpitaux, qu'ils étaient desservis
coiijoiiiiemeul par des religieux et des reli-
gieuses qui avaient leurs habitations sépa-
rées. C'était la pratique dans tout l'Occident,
du temps du cardinal Jacques di- Vitry, qui
mourut vers le milieu du xiii' siècle, et liiii,
parlant des ordres hospitaliers, dit qu'il y
avait un grand nombre de congrégaiions
d'Iioiiimes el de femmes qui, renoiiçanl au
siècle, derneuraicnl dans les léproseries et
les hôpitaux pour ser\ir les malades el
lespauvies, vivant soui la règle de saint
Augustin, sans propre cl en commun ,
obéissant à un supérieui" , el promettant
à Dieu une continence pei peiuelle. Les hom-
mes demeuraient séparés des femmes , ne
maat:cant pas mêuie cusemble, et vivant
dans une grande retenue et une grande
pureté. Les uns cl les autres assistaient
aux heures canoniales , tant de nuil que
de jour , autant que riiospitalité el le
soin des pauvres le pouvaient permelire.
Dans les grandes maisons, où le nombre des
frères ei des sœurs était plus grand, ils s'as-
semblaient fréquemmenl en chapitre pour
reconnaître publiquement leurs fautes et en
recevoir la correction. Ils se faisaient faire
la lecture pendant qu'ils mangeaient, gar-
daient le silence dans le réfectoire, et dans
d'autres lieux à des heures prescrites, et
avaient plusieurs autres observances.
Tels étaient autrefois une infinité d'hôpi-
taux qui étaient desservis par des religieux
et des religieuses, et le cardinal de Vitry a
voulu sans doute parler des religieuses de
1 Hôtel-Dieu de Paris, lorsqu'il a dit qu'il y
en avait qui, se faisant violence, souffraient
avec joie et sans répugnance les puanteurs,
les ordures et les infections des malades, si
insupportables, qu'il lui semblait qu'aucun
genre de pénitence ne pouvait cire comparé à
cette espèce de martyre. Car il n'y a personne
qui, en voyant les religieuses de l'Hôlel-Dieu
non-seulement panser, nettoyer les malades,
faire leurs lits, mais encore au plus firt do
l'hiver, casser la glace de la rivière qui passe
au milieu de cet hôpital, et y entrer jusqu'à
la moitié du corps pour laver leurs linges
pleins d'ordures et de vilenie, ne les regarde
comme autant de saintes victimes, qui, par
un excès d'amour el de charité pour secou-
rir leur prochain, courent volontiers à la
mort (lu'elles affrontent, pour ainsi dire, au
milieu de tant de puanteurs et d'infections
causées par le i(rand nombre des malades
qui sont quelquefois 3ii nombre de plus do
six mille dans cet hôpital, OÙ l'on reçoit in-
dilTéremment tous les pauvres de queiqtio
pays qu'ils soient et quelques maladies
qu'ils aient, pourvu qu'elles ne soicul pas
conlagieuses.
Saint Landry, vingt-huitième évèquc de
Paris, fil bâtir cet hôpital joignant l'église
Saint-Christophe, et il appartint toujours aux
évéqui s de Paris jusqu'au lempsde Kaynaud,
qui était évê(|ue sous le roi Uoberi. Ce pré-
lat donna la moitié de cet hôpital aux cha-
noines de sa cathédrale; mais l'évéque (jiiil-
laume le donna entièrement à ces chanoines
avec l'église de Saint-Christophe, l'an 1097,
et leur céda tous les droits que les cvô(iues
de Paris pouvaient y prél ndie. Depuis ce
temps-là l'Hôtel-Dieu el l'église de Sainl-
Chnstophe firent gouvernés par le chapitre
de Notre-Dame. 11 y envoyait deux prêtres
qui avaient soin de l'hôpilal, cl préiaient
serment de fidélité au chapitre. Ils desser-
vaient aussi alternativement pendant une
semaine l'église de Sainl-Chrislophe ; et
lors(iue celle église fut érigée en paroisse ,
l'hôpital fut transféré apparemment au lieu
où il est présentement situé ; ce que le P. ■
du Bois, dans son Histoire de l'Eglise de
Paris croit être arjivé sous le règne de Phi-
lippe-Auguste, lorsque l'on uugmeuta la ville
de l'aris.
Wl DICTIONNAIIIE DCS ORDRCS RELIGIEUX. /,C8
Ci'Kc \iIIo s'é(anl ngranilie dans In suite roi aux quatre fôl'-s anntiolles , jusqu'à
ri (-laiit cicvriiiic plus peuplée, le nomlire lies troiile-ijuaire lieues de Paris (Tom. ViJ
laovrrs ina ad s élanl p.ir ce moyen aug- Spic^lcj., /?. 211), où le roi pouvait élre,
imiilé, l'on .iirrnndil l'tiA; ilal, et I • nombre comme il parait par un accord pas<é laii
de ceux qui él.ii. ni destinas pour leur servi- i;{22enlre Charles IV, roi de France, d'une
ce fut aussi auiimcnlé. ttienn-, doyen de la part, et le maiire, les frùres el les sœurs do
calliéilrnle, qui i 0<s6da relie dignité depuis l'Holel-Dieu de Paris do l'autre, par lequel
I an 1217 jusqu'en l'an 1223, dressa des sla- ce prince leur donna à cause de cela cent
luis pour cet liôpilnl qui contiennent soixan- charretées de bois de moulage A prend e
le-ilouze a lii les. et il [ ara I par le prcmirr Ions les ans dans ses bois,
qu il y avait deux chanoines sous le litre de Le roi saint Louis au-înienla les b;Uimen(s
proviseurs, préposes [lar le chapitre pour y do cet hôpital 1'. n 1.58. Antoine da IVal,
maintenir le be.n ordre. Il y avait des ri li- chancelier el depuis cardinal et lé;;at en
piiMix et des riligicuses, savoir : trcnle huit Trance, fil bàlir, l'anlSi.'i, la salle qu'on ap-
reliçieux el vinul-cinq religieuses. Parmi les pelle encore aujiurdhui la salle du légal,
lelinieux, il n'y avait que qiialre prélies, (ly donna de gros revenus ; et le roi [L'uri
«lualre (lires (jui pouvaient élre promis aux H" (il faire la grande ri la petite salle de
ordres sacrés, et irenie laïfiui'S ; et entre ces ^ainl-Tliomas, qui furent commencées l'an
religieux on en élisait un pour avoir soin de KiOiel ne furent finies que l'an KiOli, avec
l'hopilal comme supérieur sous le n un de les Irois gros piliers ijui sont dans la rivi.re.
itiaiire, quia\ec les proviseurs nommait une La chapelle de cet liôpilal fut fondée par un
iii.iîlresse pour les sœurs. Il prclail serment nommé Oudarl de Mocreux, maître cIkiii-
aii chapitre de Nolre-Danie. qia pouvait le geur el bourgeois de Pai is, l'an 13-5, qui
révoquer quand bon lui sem!) ait. Les frères laissa une rente de qii irante-quaire livies
« I les sœurs devaic il faire \(ru de chasielé, pour le vêtement de ceux qui y fi raient l'of-
de pauvreté el d'obéissance, tant au chap- fîce , comme il parait pa une ancienne épi-
Ire de Notie-Damc qu'aux proviseurs cl laphc en vieille rime, .'ilinrhce contre le mur
au maiire. tic celte chapelle, où il est parlé de celle
Ils devaient assister , à la oesse, à vêpres et fondalion, laquelle épiiaphe esl rapporlée
■à matines, à moins qu'ils ne fussent occu- par du lîreuil dans les Anti iui:és de P.irii,
pes au servi e de> malades. Ils disaient pour et que nous joindrons aussi ici pour la cu-
ni.itines sept Poler, pour vêpres cinq, et riosilc du Icileur.
p Mir les autres heures Irois ; 1 1, lorscju'ils Oudarl de iMucrrur en f:uriiom.
eiaicnt absenis pour quelques affaires qui ne Clinngeur, homme de bon imuin,
regardaient pas le service de l'IiAjiiial, ils lïl Ooiirgeiis de Paris jadi-i,
disaient pour malii es vingt-cinq l'nlir, neuf Que Di'u melteddus s:>n p muni s,
|)our vé|ires el ^ept pour les ;iulres heure;. A fait faire celte chapelle,
ils pouvaient manger de la viande le diman- En letlc Uôlel-Diiu bonm el belle,
rhe, le manli el le jeudi; mais ils étaient Bien aorné de verriires,
obligés de faire abstinence les autres jours , Et efl aorné de c'njnires,
à moins qu'il n'arrivât quelque fête solen- El plusieurs aulrcs b^etis notaldes,
iiellc dans ces jours-là. 11 ne leur était pas Lesquels Dieu ail pour ugrenblcs :
permis de sortir seuls pour aller à la ville, et Et avec ce quarante quatre
sans avoir pris la bénédiclion du maille. lU Livres, treize soiUls, cl quatre
n'y pouvaient pas manger, et on leuraccor- Deniers parisis de annuelle
dait s<ulemcnllaper;iiis>ion de boire de l'eau. lienle à totijuurs perpétuelle,
On les < nvoyait ilenienrer dans les fermes A lessié en Paris assise
qui dépendaient do l'brtpiial quand on le ju- A cmpluier i ar buvne quise,
{;eail nécessaire. Une fois la S'.Mnaine, ] our le F^r le cheiecier de ce leu
moins, ils se Ironvaieni ensemble an chapi- Pour icstir pour l'amour de Dira
Ire pour y reconnaitre leurs fautes, el si (juel- Presircs et clercs faisant l'office
qu'un on quelqu'une avait fait une faute con- En l'holel et divin service.
sidérable i]ui méritât la discipline, le maiire Le chevecicr recevra
Li faisait donner sépaiéincnl aux frères en La i cnic, et en achiptcrn
présence des antres frères, el séparénicnl aux Draps pour eux faire vestement
MCtirs en présence di s autres sœurs. Quant El c' re plus lion étetneul,
,1 l( ur habiilemei.l, les uns el les autres Chacun un au jour île Tuuss iuh.
avaient des robes noires et dis b.is blanc Or domt Dieux qu'ils soient loUf '•■tirais
Les frérrs él.inl au chœur portaient par- Car ils saul as ruinls et tenus,
dessus leurs robes des chapes noires, des ^ur- 'l'anl les qratids comme h s menas,
plis > l des peaux d'agneau (1). De chnnler, célébrer et dire,
Le roi ^ainl Louis, t)ui ,'illail souvent vi- Au vendredi, sans escon luire
siler les m.iljides de cet bApit.M, li- prit sous Messe des di jfunis trépassez,
•»a proleclnin cl il est atipele dans ^es lettres .Irrc ce ne soient lassez
IMlcmc», l'hApital de Notre-Dame de l'aris. Chacun jeudi de rendre grâces,
Auircfois les frères el les scurs étaient cbli- El vigiles et coniniendaccs,
pis de porteries reli(|ue9 de la rha|>clle du Chacun en chacun'' snnuiuc,
(Il » VII., « l.i lui ilii \iil,, II"" ll.'i, llti cl 117.
400
IlOT
IICT
/j'O
Par voix de dévotion plaine,
Humblement et solemnellenicnt
A lotijoui s perpétuellement
Pour l'ame de de/funt Oudai I,
Que Vieux te reçoit e à sacurt,
Et pour les (mes de son pcre
El de sa femme et de sa mère
Parens, bienfaicteurs et amis.
Pour ce l'dit Oudart a mis
Ses deniers à celte œuvre faire
Qui est à tous bon exemptai: e
De faire prier peur les morts,
{hie Dieux leur soit misericors
Ceux de l'Iiôlelt/ sontliez
El par lettres bien obligiez.
Du consentement, et au tillre
Des seiipieurs Dian et ehapiire
De Véglne de Notre-Dame
De Paris. Priez / o«r son ame
En ! an de l'incarnation
Mil trois cent quatre-vinfjt-cinquiéme
De decemb e le vingt-se tiéine,
Lors s'en alla de ce monde
En Diiti, à qui tout bien habonde.
Il est parlé dans celle épila, ho du cliapiire
diNûlre-Pame, à cause qu il en est seii;neur,
Coiun e nous avons dil ci-dcvanl, et qu'il y
Il toute juridielion tempo elle et spirituelle ;
cl, lorsqu'un chanoine tneurl, toute la gar-
niture de son lii appartient à cet hôpital, à
moins que les héritiers n'aiment mieux don-
ner une certaine somme d'argent qui a été
fixée par le chapitre.
II y a longtemps qu'il n'y a plus que des
rdigieuses dans cet hôpital. Elles suivent la
règle de saint Augustin, cl elles ne pouvaient
ôire autrefois admises à faire profession
(ju'après un noviciat de douze années; mais
ce terme a été réduit à sept ans depuis cn-
V mil l'an 1C3G. Cent ans auparavant, l'an
l535,enverlu d'un arrêt du parlement du
ÎO septembre de la même an née, cette maison
fui réformée par des commissaires députés
I ar le chapitre de Notre-Dame, qui fixèrent
le nombre des religieuses pour servir les
pauvres à (luaranle sœurs professes, et qua-
rante sœurs blanches, qui étaient les novi-
ces, ayant égard apparemment au nombre des
malades qui y étaient en ce temps-là ; mais,
comme les malades ont toujours élé depuis
en plus grand nombre, et que l'on a bûti
plusieurs salles nouvelle-, le nombre des
leligieuscs a élé aussi augmenté, et l'on y
voit (luelqucfois jusqu'à cinquante novices.
Elles eurent encore besoin de réforme au
comiiiencenient du xv!!"" siècle ; mais la Mère
("leneviève Bouquet, dite du Saint-Nom de
Jésus, sut si bien par ses bons exemples et
ses exhorlalions les ramènera la pratique
des observances régulières, qu'elle peut ètie
ri'garilée comme leur réformatrice. Elle était
fille d'un orfèvre de Paris, qui la mit dès sou
I as âge chez la reine Marguerite. Mais l'a-
mour qu'elle avait dès lors pour Dieu ne lui
[lermeltant pas de demi urcr longtemps dans
le grand monde, elle retourna peu de temps
après (liez ses parents, oij clic prit la réso-
lution de se faire religieuse. Son premier
dessein c'ait d'entrer chez les religieuses de
Sainte-Claire de V.ii-c Maria; mais l'cilinie
et l'affcclion qu'elle conçut [jour l'Hôlel-Dieu
et pour les pauvres malades l'y attira à l'àg*}
de vingt-deux ans, ayant pris l'habit à cet
âge; mais elle ne fil profession que treize
ans après, la coutume étant pour lors,
comme nous avons dil, qui les religieuses
de l'Hôtel-Dieu fissent douze ans de noviciat,
on au moins dix. La mère Cou(iuet voulut
néanmoins encore prolonger ce Icmps-là,
ne croyant pas qu'une novice dût jamais se
presser à l'Hôlel-Dieu de faire profession.
Elle se f lisait d'ailleurs un scrupule de pro-
noncer ses vœux, à cinse qu'il n'y avait
point alors de noviciat élabli; c'est pour-
quoi elle consulta queique.s docteurs de Sor-
honne, si elle poavait faire ses vœux en cet
é'ai, et elle ne voulut point s'engager que
1. s supérieurs ne lui eussent donné espé-
rance qu'on éla'uliraii le noviciat et la vie
commune entre les sœu s.
Enfin éiaut professe, et voyant ce défaut
de noviciat, chaque Môe ancienne élevant
alors un certain nomb e de fiUisqui vivaient
avec elle, elle prit la résolution, après avoir
passé par quelques offices de la maison, do
composer elle-même une espèce de noviciat,
et de mellre ensemble les filles qu'on vou-
drait lui donner pour les instruire, qu'elle
gouverna dès lors et encore depuis, ayant
été deux fois maUresse des nivioes. Son ap-
plication était de faire prendre à ses novi-
ces de bonnes résolutions, pour bien panser
et servir les pauvres. Elle ne ] ouvait souf-
frir qu'une sœur dil, je suis lusse, alléguant
aux sœurs que le travail qu'elles faisaient
pour les pauvres et l'assislaïue qu'elles leur
donnaient, étaient toute leur austérité; cl
qu'au contraire elles devaient être bien
ji)3euses le soir de s'êîre lassées pendant le
jour pour Dieu : ainsi elle appelait un jour
bien rempli un jour où l'on avait bien tra-
vaillé.
La peste étant survenue à Paris, elle fut
tirée de son office de maîtresse des novices
pour iil'.er à l'hôpital de Saint-Louis, où elle
pansa les peslilerés avec une telle charité,
qu'on l'a quelquefois trouvée baisant leurs
plaies. Elle procura qu'il y eût un autd dans
les salles des malades de ol hôpital, elle
procura aussi un réservoir d'eau et une
éluve pour sécher les linges. La peste étant
finie, et étani de retour à l'Hôtel-Dieu, cile
fut mise à l'apoiliicaireric, où elle commença
de faire faire les composilions (pii ne s'y
faisaient point auparavant. Elle eut soin en-
suite des femmes en couche, et (|uelqua
lemps après elle fut élue prieure. Elle refusa
celli- charge avec beaucoup d'instame, et no
l'atccpta que par obéissance, y ayanl élé
conirainte par ses supérieurs. Elle l'exerça
pendant neuf ans, ayant un soin tiiut parti-
culier des malades, et faisant auprès d'eux
les actions les plus viles 1 1 les plus basses.
Ce fut elle qui procura les tours do lits qui
sont pré^enlement au noviciat et en la sallo
du Légal, où auparavant il n'y avait <iue des
coui lu lies à bis piliers. Elle fil donner des
sandalcî de bois aux malades, qui aupara-
47»
DICTIONNAmF, [>£S ORDRES RF.Ur.lF.UX.
v.inl élnieiit coniraiiils de se lever et de mnr-
«lier nii-pi" ds, tl elle pn^pos.n une su-ur
(l'Uir en avoir boin, ce qui s'ubscrve i ncore
à pn•^e^ll. l-l!c (il clablir par les supciieiirs
la réiio»alii>ii di's vtpux en coinnmn. K'.ie
aholil Us plissures des rubes et ce qui pou-
v.iii re>senlir la vaiiilc ; elli; preniil pour
el'e lc< plus usées et les plus méchanles.
i;ilc établit la (oinmunaulé du noviciat, et le
vivre en conieniin des doiiK siiqucs. Ce fut
aus^i à sa solli(italion que les religieuses
quillérent leur nom de lainille pour en pren-
dre un (le quelque saint. Ivll' (il elle-même,
ou (il f.iirr par les supérieurs, plusieurs au-
tres règlements, tant pour les religieuses
que pour les malades, qui la peuvent faire
regaidcr avec justice conimp réi'orraatrice de
cette maison. Enlln elle mourut subitement
la veille de Saint-Jean de l'an KiGo, allant à
l'oraison avec la communauté, étant âgée de
soixanie-qu itorze ans.
Outre riloIcl-Dieu, les religieuses ont en-
core soin des m:ilades qui sont à l'bôpital de
Saint-Louis, fondé par le roi Henri IV pour
ciu\ qui sont attaqués de la peste. Cet hô-
pital est très-beau ; il est composé de (lualie
grands pavillons aux quatre coins, avec au-
tant de portes pour y entrer. Ces pavillons
sont ac ouîpagnés d'oTices, et dan» leur sé-
paration i: j a quatre salles et d'autres lieux
pour la commodité des malades. Dans la
becoiide cour est une fontaine av( c un grand
bassin de pierre, d'où l'eau roule dans l.i
cour de derr ère et va se rendre dans deux
lavoirs faits de pieires fort larges pour y la-
ver la lessive. Ùu côté de la ville sont les
offices, les cuisines, les appartements des
oTiciers de la m.iiscm, et les lngeinrnls des
icligi uses. Du ci'ité du septentrion, hors de
l'hôpital, est un timclière fermé de murailles,
où l'on enterre h s corps de ceux qui y meu-
reiil. La première pierre fut posée à l'église
le 13 juillet 1607, et l'édifice lut continué
jusqu'en l'an KitO. On envoie aujourd'hui
les convalescents de l'Holi l-Dieu dans cet
hopi'.al, pour y prendre l'air pendant quel-
que tem[is , ou bien ceu\ qui sont attaqués
«lu scorbut, lorsqu'il y en a un grand nom-
bre. Pour ce qui est des liAlimenls de l'Hô-
Icl-Dieu, ils sont très spacieux ; on les a
éleiulus sur la rivière de S. ine sur une voûte
foil longue, siuis laque le coule l'eau ; il y
a aussi d'aut es salles de l'autre coté de
l'eau, iiuxquelles on va par un pont de
pierre, en sorte que l'un des bras delà ri-
vière pa'-se au milieu de cet bôpiial.
Le temporel est goivirné par des adnii-
nislralcurs, cl b s dépenses se montent tous
les ans à plus de six cent mille livres. Les
religieuses pr. fesses sont au nombre de
cent, et il y a ordinairement près de cin-
quante novices. Oulri? les religieuses, il y a
encoie lies (illes et des feintncs au nombre de
cinquante ou soixante, qui se donnent à
riinpital pour servir le^ malades, outre un
prand nombre de servantes et Jilus de cent
kerviti urs. L'habillement ilcs religieuses eon-
8 sie CM une lobe noiie, sur laquelle ell(.>i
ijielteut , loisqu'ellcs urvent les malades,
un sarrau de toile blamiie fait on forme
d'aube descendant jusqu'.iux talons : dans
les cérémonies, et lorsqu'elles vont en pro-
cession à certains jours dans les salles, cil s
n'tuit que des robi's noires avec on grand
manie.iu : leur guimpe est carrée et furt
grande, descendant jusijue sur l'estomac, et
leur voile est fort ample, étant soutenu par
un carton. Les sreurs données sont habillées
de gris, avec un mouchoir en pointe sur le
cou, aussi bien que les servantes, et les
données ne sont dislinguécs (|ue par une
coiffe noire. Les religieuses de l'Ili'itel-Dieii
ont fait d'autres établissements en France
comme à Moulins en linurbonnais, et en
d'autres lieux. L'on voit souvent dan^ l'IIn-
tel-Dieu de l'.iris des princesses et des per-
sonnes de qualité exercer leur charité envers
les malades, en s'abaissanl ju-qu'aux em-
plois les pins vils; et ce fut dans ce même
hôpital que la baronne d'.MIemagne M.irthii
d'Oraison, fille du marquis d'Oraison, des
plus illu-tres maisons de Provence, mou-
rut l'an 1027, s'élant donnée au service des
niiladcs. Voici la formule des >œux de ces
religieuses.
Je sœur N. voue et promets à Dieu, à ta
lienoiste Vierge Marie , au tjlorieux saint
Jean- linplifte , à notre bienheureux l'ère
saint Augustin, nos patron', et généralement
à tous les saints et tainles de paradis, ei à
vous mes très-révérends Pères, jiauvietr,
chasteté, obédience, et servir aux pau>r(S
malades toxts les jours de ma rie m / llôtcl-
fficu de Paris ou ailleurs, si par vous il tu'est
enjoint, gardant la règle de saint Aagustin,
accommodée èi notre saint état par les statuts
et constitutions faites de l'autorité de vous
mesieiirs les révérends (lo:en et chapitre de
l' Eq'iye de Paris, sujiéricurs de celte maison.
Témoin mon seing manuel, etc.
("ouiiiie il n'y a point de bornes à la cha-
rité qu'on exerce dans cet liô] ital, toutes
sortes de personnes y étant reçues sans dis-
llnclion d'âge, de sexe, de nation et d' reli-
gion, et que le nombre des malade», qui s'est
monté quelquefois jusiiu'à plus de six mille,
obligeait de temps en temps de les mettre
jusqu'à six ou huit dans un même lit; c'est
ce qui a porté les administrateurs à augmen-
ter les bâtiments auxcjuels on travaille pré-
senlcuient. Les bnurgeois de l'aris el plu-
sieurs personi\es de considération j ont con-
triliuô par leurs aumônes, y ayant été exci-
tés tant par leur piété et leur compassion
ea\ers les (lauvres (lue par un maidemenl
((ue Mgr le cardinal Louis-.Xnto ne de
Noaille-. aichevéque de Paris, a donné à cet
effet le -ii) marsili; la présene année ITIii.
(îéranl du Hois, IJist. ecchs. l'aris. lom. Il,
lib. xvi, cap. 1. Du llreuil et .'\lalingre, Anti-
gui tés de l'aris, et -lus aux religieuses d«
rUôtcl-Diiu.
Eu annoni ant <]u'il va traiter des religieu-
srs hospitalières de l' IIùtd-Dim de l'aris, le
P. Ilelyot promettait d'en mentionner d'au-
tres du même institut; néanmoins il n'en
parle point et se bornir à dire que cis reli-
gicasiS ont fait d'autres établiiscincnts en
«73
HOT
IIOT
474
France, cl à ajoulor : comme à Moulins et
en (raulrcs lieux. Il aurait dû les nninmer,
s'il les connaissait: il amail dû aussi nom-
mer les daines de l'Hôlel-Dieu de Mraiix. Il
est jircl)..l)le qu'il manquait da rcnseii;nc-
mcnls. On ne peut donc savoir, et vraisem-
blablement on ne saura jamais, quelles sont
les maisons hospitalières de la filiation de
l'Hôtel-Dieu de Paiis. Quoi qu'il en soit, ces
maisons deiiicurèreni indépendantes et vrai-
semblablement modifièrenl leurs constitu-
tions et leur costume suivant les localités.
Ainsi, à Mcaux, la cilonii' garde toujours
l'habit noir, cl ne porte point re sarrau de
toile blanche, dont parle Ililvot, et qu'ont
en effet leurs Mères de Paris, pour le travail
des jours ouvriers. Vers l'année 18V5, un
hôpital général ayant été établi à M' aux, les
religieuses dont nous pailons ont quitté leur
maison (détruite) et ont fondé une maison
pan culière qui est appelée, de la rue qu'elles
liabilent, la maison des religieuses de la
Paix.
Depuis longtemps et jusqu'à la révolu-
tion, il y avait douze prêtres chapelains à
i'Hôtcl-Dicu.Ces ecclé'-iastiqucs y chantaient
tous les jours les heures canoniales, aux-
quelles les religieuses devaient assisier au-
tant que possible. Aujourd'hui ces dames
récitent eres-mémes l'olfice canonial du rite
parisien, mais en français.
Grâces à Dieu, toutes ne quittèrent pas
l'Hôtcl-Dicu lors des troubles de la révo-
lution. Plusieurs partirent voloniairemcnt,
ni.iis le corps do la communauté resta tou-
jours dans la maison, au service d s mala-
des. Mais elles furent longues années rédui-
tes à porter l'habit séculier et à souffrir les
duretés et la grossièreté des hommes de ces
circonstances.
Malheur à ces citoyennes si, par distrac-
lion, par crainte ou par habitude, elles (lua-
1 fiaient du nom de monsieur les hommes du
temps qui savaient bien leur pailer suivant
les habitudes de l'époque. Aucune néanmoins
n'a été guillotinée. Il ne reste plus, au mo-
ment où nous écrivons ceci, qu'une seule des
rclig cuscs qui avaient survécu à ce- malheu-
reuses et cruelles épreuves. Celte Mère a été
menacée alors de la prison et sur le point
d'éire rcnlermée. — Apri's le concordai, les
choses repr rent peu à peu les formes régu-
lières dans la direciion de la communauté;
mais on conçoit qu'il y eut des usages qu'on
ne put reprendre, et qu'il resta, même dans
ce qu'on (il, beaucoup à désirer. Nous avons
vu dans Hélyot comment la rommunaulé
avait éié réformée, il y a deux siècles, ])arle
zèle d'une pieuse religieuse. Le même zèle,
peu après la révolution de 18J0, porla aussi
(|uelques religieuses à essajer d'introduire
plus de régularité dans le régime de l'insti-
tut. Elles n'eurent pas tout le succès désira-
ble, peut-être n'y mirent-elles pas toute la
prudence nécessaire.
Par suite peut-être des projets déjà nour-
ris [lour la réforme, les élei lions avaient
mis à la place de prieure !a il. M. des An-
ges, et à la place imporlaiule de maîtresse
des novices, la R. JI. Sainte-Cécile. Ces don ^
dames, avec quelques autres religieuses, fu-
rent l'âme du pieux complot qu'elles nour-
rissaient dans l'esprit de toutes les novices,
et qui était partagé par plusieurs filles de
l'institut de Saint-N inren!-de-Paul, par Tau-
mônier, M. l'abbé le Clère, etc. Les réunions,
([u'on ne put tenir assez secrètement, pi-
(|uaient la curiosité, et excitèrent peut-être
aussi l'émulation de celles qui n'étaient
p lint dans le projet. Nous prenons ici l'ex-
pression la plus douce. Une des religieuses
entrées dans les assemblccs proviso res (la
M. Saint-Landry, morte depuis (C temps-là)
trahit les autres el alla découvrir ce qu'elle
avait entendu à l'ex-prieur, qui aussitôt fit
appeler le supérieur ecclésiastique de la
maison. (C'était alors M. l'abbé Salandre,
vicaire général de Paris.) Celui-ci, au lieu
de rélléchirct de mûrir l'alTairc, alla promp-
Icment demander compte de cette intrigue à
la Mère des Anges, ([ui eut la faiblesse de
man(|ucr de franchise. Le plus grand nom-
bre des religieuses fui doni- contre le projet
nouveau, qui n'a jamais été bien connu, et
vil l'autorité ccclésiaslique de son bord. Les
choses en vinrent au point que le promo-
teur du diocèse fit une enquéle, et inter-
rogea toutes les Mères. Ce promoteur était
alors M. l'ablic Quanlin. Le récit que nous
avions à faire était nécessaire ici. Nous n'o-
sons dire tout ce que nous savons.
Il est difficile de ne pas blesser l'amour-
propre en nommant (juelques personnes qui
vivent encore, ou la susceptibilité de quel-
ques autres en parlant de celles qui ne sont
plus aujourd'hui, telles que le respectable
abbé Salandre et l'abbé Quanlin. Nous n'a-
vons pourtant l'envie de blesser personne,
el no're unique désir comme notre but est
de servir la vérité de l'hisloire. Nous nous
bornerons donc à dire que les nligieuses do
l'Hôtel-Dieu, môme les plus cap:ibles,el nous
pailons de celles qui n'étaient pas dans le
projet de réforme, ont blâmé el condamné
la manière d'agir du piomulcur, qui, au lieu
de les interroger simjjlement, excitait leurs
répunses contre les religieuses en cause. La
révérende Mère"* osa lui faire remarquer ce
[ rocédé. Les choses se terminèrent par la
sortie et peul-ôlie l'expulsion des religieuses
qui avaient nourri el fonicnlô le projet de
reforme. Ces religieuses étaient la révérende
Mèi'e des Auges, prieure ; la révérende Mère
Sainie-Cécile, maîtresse des novices; la révé-
rende Mère de la Trinité; la révérende Mère
Saint-Lazare, et une ou deux autres avec
toutes les novices qui se trouvaient alors à
l'Hôiel-Dieu, au nombre de douze, n'en lais-
sant qu'une dont les moyens bornés ne pou-
vaient leur convenir el ijue les autres eu
effet n'ont point gardée. Grâces à Dieu, cette
affaire n'eut point d'éclat dans le public et no
fut appréciée que par les personnes qui com-
prennent combien il est di'ficile de s'enten-
dre à la supériorité et au gouverncnicnl
d une maison religieuse. Les Mères qui sor-
tirent se retirèrent momcnlauémeut à Ver-
sailles. Ceci se passait au miliiu de l'année
175 DICTIONNAIRE OF.S CRORES nF.I.lCIF.UX. 475
1S35. I,a More La Trinil(^ et la M're drs fil une Irôvc avec lui pour dix ans. .\(lo!|i!if
Aii';es sont reslccs à la maison de (îiand- él.uil morl sans enfants, et Gorard V, son
(^liaiiip à \'ersaiile<. I.os autres sont allées, neveu, ayant sncrédé au diulic de Jiilier>i
a»cc leurs novices ei l>' pii-iix auo'ônier de l'an l'i.l", Arnould dK^mond, renouvelant
Il romnuinauli* de l'Holel-Diiu, M. l'alibc ses prélenlions sur ce duclié, y rentra avec
l.e Clère, diri;;er un iKii'ilal à Anvers, en une année l'an llV'i ; mais il fut dcTait par
!!cl;;i(|ui', d'où elles ont iléjà envoyé une co- Gér.ird, qui remporta sur lui une céièi)re
lonie à un hôpital de I.i<"p'e. Ainsi la religion victoire le jour de Saiiit-Uulierl de la même
a trouvé son profit,! ces divisions apparen- année. Cest en mémoire de celte victoire que
les, où avec de bons desseins de part et d'au- qnel.|iios histuriens, comme Sciioonobec!» et
Ire on sert ceux de Dieu sans c;i connaître le P. Ilonanni, disent que ce prince inslitua,
les voies. Les novices resté- s dans les deux l'an l'i'io, un ordrcde chevalerie sous le non»
.iiitres maisons de Paris, celles qu'on reçut et la protection de saint Hubert; d'autres,
bientôt à l'Ilotel-Dieu, firent que le départ comme AubcrI le Mire et l'abbé Ciiiistiuiani,
des anciennes fui iires(|ue insensible. 11 exis- ne meltent linstilulion de cet ordre cpie
tait autrefois des préventions contre le jusé- l'an H7.'l ou 1477. Mais il ne peut pas aveir
nismedes idigiense^ de rilolel-Dicu de Paris, été institue l'an li77, pU!S(]ue Gérard mou-
tlesprévcntionsélaientpcul-élretropgénérali- rut l'an li7o ; et il y a plus d'apparence (luo
sées, maiselles étaicnlfoiidécs". nousen pour- ce prince, qui avait vaincu le duc de Guel-
rions fouinii- des i)reuves. Aujoi:rd liui celte dres l'an l'i'tl, le jour de Saint-Hubert, in-
prévenlion existe encore en quelques per- stitiia son ordre la même année ou l'année
-sonnes. Elle est une injustice d'autant plus suivante.
toupable, que ceux qui produisent à cet Ces auteurs ne s'accordent point non plus
égard leurs | ensé-'s, parlent sans avoir ap- sur la forme du collier de cet ordre. Schoo-
I rufondi les choses, et blessent les intérêts neîcckdit qu'il était composé de plusieurs
«l'une communauté respectable qui se ver- cors de clia-^sc oîi pendait une médaille avec
rail privée qu. Iqucfois de sujets aptes à l'image de saint Hub ri. Le P. Fîonanni dit
l'augmenter, par l'iiMprudencc de quelques seulement que ce collier était d'or, où pen-
hiunnes irrénéchis. dail cctle médaille. L'alibé (îiust niani prc-
On ne voit plus à l'Hôlel-Dicu de ces tend qu'on ne sait point quelle élail la mar-
sieui-s données, dont parle HJI30I. Les rcli- que de cet ordre, et Aubcit le Mire assure
giiuses de celle maison ont toujours eu la que les statuts de cet ordre sont écrits en
iliiection de l'hôpital Saint-Louis, et elles langue allemande et qu'on les trouve ma-
n'avaient autrefois que ces deux maisons-là. nusrrils dans la maison des Cortembachs et
Depuis la révululion, elles ont desservi peu- chez d'autres, avec le catalngne des clieva-
dml queitiue temps rhô|iilal ue /a l'ilié, liers jusqu'en l'an LV87, iiarini les(]iieN l'on
(lu'elles quitlèreni en 1S18, et celui de /a6'/in- veilles comtes de Limbourg, de Tciilem-
I i/r, qu'elles quiltér'-nt en 1816. Depuis une bourg cl de .Nassaw, les barons di- Mi-rod,
douzaine d'. innées, elles sont rentrées au ser- i!e Pallence, de SombrfF, de liirgel, de Wla-
vicedece dernier cl dessc.venl égilcnient Iimi, de Hlungart et d'autres; mais il ne
l'diincxe (/« /'//-;/f/-i*('ei(, située au faubou' g marque point ce qui distinguait ces chc-
Saint-Anloine. Ces quatre maison'* de Pans valicrs.
ont bien chacune une supérieuie locale, Q'ioi qu'il en soit, aj rôs la morl do Jean-
mais elles ne fvut néanmoins qu'une seule Guillaume, duc, de Jaliers, sur les dilTér nds
f.imille. Les religieuses ont obé.iience d'une qui survinrent au suji't de sa suc. e-si' n
maison à l'autre, cl les novices doivent être entre l'éiccieur de Brandebourg et Wolfang-
cnvoyces à louies avant d'être a Imises à la Guillaume, duc de Neubourg. ces princes
prufess on, qui n'est accordée que sur le firent un accord entre eux, par lequel le dû-
suffrage des .Mères de touti s les maisons, ché de Juliers échut au duc de Neubourg.
Dans ces quatre établissenienls , il y a Cli.irles, comte palatin du Itliin, et liuitièn:e
en totalité, au moment où nous ccrivo is, électeur de riwn|)ire, étant mort suis enf mis
soixante. cin(] |ir(ifis-es et vingt-six novices. I an 1G8'), Philippe-Guillaume, duc de Neu-
Kensrifjncmrnls fournis par la rctéremie bourg et de Juliers, (lar la faveur de l'eni-
Mi're A'.. rclirjicu>e de cet iiifiitul depuis perenr Léopold-Ignace, qui avait épousé une
l'année 181G. 15 n-ii. de ses filles succéda au palalinat du Rhin cl
...,...<.. -n/^ . c , à la dignité d'éleclenr. 01 élcctorat avait été
HUBLUl^CnEVAUKnsDni.ORDnEnESA.NT.). créé en faveur de Cbarles-Louis, comte pa-
Raynaul 111, duc de Juliers cl de Guel- latin du Rhin, confoiniémenl au traité de
d;es, étant mort l'an lV2:t, A(lnl|>lH'lI, romie Munster de l'an IfiVS, quoique par la Rullo
lie Mors, lui succéda, et re«;ul l'inveslilure d'Or il ne doive y a\ oir que sopt électeurs de
des duchés de Juliers et de Gueidres de l'em- l'iMiipire ; mais ce fut l'expédient (]iie l'on
pcreur Sigismond, l'an l'*2"). Mais Arnould trouva pour parifi-r les deux branches pal.i-
d Lgmond, qui avait des prétcnti ns sur ces lines, l'une que l'on ajipelle Rod Ipliine, (]ui
provinces, s empara du dm hé deGueldres, et est celle des comtes palatins, et l'antre qu'on
intra avee des Iroiipes dans le pays de Ja- nomme Guillelmine, qui est celle des ducs
liers: ce qui obli;ie.i Adolphe de laire un ac- de Itaviére, qui avait clé mise en possession
lord aicc lui, par bquci il lui céda pour d' la dignité d'électeur, do .1 Ferdinand V,
loojnurs le dnche de tlue!dre<, loi donna dix comte p.ilalin du Rhin, avait été pri^é par
uulle llor.ns i)our so autres prélenlions, cl l'empereur rerdiiiaiid II, l'an Iti^'l, pour
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HUM
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avoir accepté la couronne de lioliêmo, qui
lui avait été offerte par les rebelles de ic
royaume.
En créant ce huitième électoral, on avait
au- si en même temps créé la charge de
grand trésorier de l'Empire pour y être al-
lacliée, afin de dédommager cet électeur de
la charge d'archimaîlre d "hôtel attachée à
l'électoral, possédée par le duc de Havière.
Ma's Maxiiiiilien-Maric , duc de Bavière,
ayant été privé de son élector.it contre les
lois de l'Empiie, par l'empereur Joseph, à
cause que ce prince avait soutenu les droits
et les libertés du môme Empire et (ju'il avait
reconnu pour roi d'Espagne Philippe V
(peîit-fils de Louis XIV, roi de Fr.mce), qu;;
(Charles II avait appelé à la succession de 1 1
monarchie d'Espagne par un les aincnl iiu'il
(il quelque temps avant sa mort, la charge
d'archimaîlre d'hôtel de l'Empire, aUachée
à l'électorat du duc de Bavière, fut rendue
|)ar le même empereur à l'électeur palatin
Jean-Guillaume, ducdeNeubourg, ((ui, pour
en conserver la mémoire, voulut, comme
duc de Julicrs, rétablir l'ordre de Saint-
Hubert, qui était depuis longtemps aboli. Ce
prince conféra cet ordre à plusieurs seigneurs
de sa cour, auxquels il assigna des pensions
cunslilérablcs, à condition que de ces pensions
ils seraient obligés d'en donner la dixième
p;\rtic pour l'entrelien des pautres de l'hô-
pital, 61 qu'ils donneraient aussi le jour de
leur réception dans l'ordre cent hongres
d'or. Ces chevaliers aux jours solennels sont
habillés de noir à l'espagnole, excepté qu'ils
nout point de gor.ile. Ils ont sur cet habit
une chaîne d'or pendue au cou à laquelle est
attachée une croix d'or large de quaire doigts
et ornée de di.imants, au milieu de laquelle
est l'image de saint Hubert à genoux, priant
devant un crucifix qui est entre le bois d'un
< erf ; el au côté gauche de leur pourpoint ils
ont en brodi rie d'or un ccicle entouré de
rayons, au milieu duquel, sur un fond rouge,
sont ces paroles eu langue allemande : De-
meurez ferme dans la foi (1). Hors les céré-
monies el les fêles solennelles, ils ne portent
point le collier et ont sur leurs babils ordi-
l'aires un ruban rouge en écharpe, passant
ilepiiis l'épaule gauche jusiju'à la hanehe
ilroile, auquel rubau est altai bée la croix,
el au côlé gauche de leurs justaucorps,
1 ovile dont nous avons parlé.
Wernher Teschen jMacher, .4Hi'?fi/. Clivhv,
Julifinœ, etc., pcuj. 403 et 515. Schoonebeck,
Histoire dis Oidres militaires, tum. II. Bo-
lianni, Ta^a/of/. Ord. militur. Aubert le Jîire,
Oriyo e/uest. Ord. Bernard tjiustiniaui, llisl.
CliruiioL de (jli Ord. militari.
HUMILIÉS (Ordre des).
j I. Des religieux de l'ordre des [fumiliés et
de leur suppression.
Les différents sentiments que les écrivains
qui oui parlé de l'ordre des Humiliés ont eus
louchant son origine, les uns la mettant
en 1190, sous l'empire de Frédéric Barhe-
rousse, d'antres en 1180, quelqnes-uus i ii
ll'JG. el plusieurs enfin la f.iis;inl remou'er
jusqu'en l'an 1017, sous l'empire d'Henri H
surnommé le Saint, m'ont obligé d'avoir re-
cours aux religieuses de cet ordre pour sa-
voir si elles n'auraient point d'anciens titres
qui pussent lever ces diffieultés. Si je n'en ai
point été tout à fjiléclairci p.ir les mémoires
qui m'ont été envoyés en 1709 par l'abbesse
du monastère de Saint-Erasme de Milan, j'.ii
au moins appiis beaucoup de pai licularilés
concernant cet ordre qui ont été inconnues
jusqu'à preseiil. )îl, comme dans ces mémoi-
res on cite souvent une chronique de cet
ordre composée en latin, l'an l'il'J, par lo
P. Jérôme Toreccbio (prévôt du couvent que
les Humiliés avaient à la Porte-Neuve à Mi-
lan), el que l'on me marque qu'elle se trouve
dans la fameuse bibliothèque Ambrosienne
de la même ville, dans le désir que j'avais
de découvrir la vérité, je me suis adressé à
d'autres personnes desquelles j'espérais de
p'us grands éclaircissements; mais je n'ai
pas eu un succès plus heureux dans celte se-
conde lenlalive, puisque les mémoires que
j'en ai reçus en 1710 ne ililîcrenl des pre-
miers qu'en ce qu'ils m'ont appris de plus
qu'il y avait dans la même biblioihèque une
a;itre chronique de cet ordre composée aussi
en latin, en i'^dS, par le P. Marc Boslo, avec
des ordonnances des chapitres généraux do
celte congrég.itijn, la règle de saint Benoit
adapfée pour les religieux Humiliés, leurs
constitulions, un catalogue de leurs saints et
de leurs bienheureux, avec un abrégé de
leur vie, et quantité d'autres pièces qui l'ont
qua're volumes in-folio , el que Pierre Puri-
ce li (qui donna eu 163.'J les monuments de
I Eglise ambrosienne) avaittraduit en italien
ces d(ux chroniques et toutes ces autres piè-
ces, qu'il avait ramassées el éeriles de sa
main, dms le dessein de donner au public
une histoire de cet ordre, (\ue le P. Pape-
broeh dit avoir vue entre les mains de si s
héritiers.
Ce qui llaltait le plus mes espérances, < 'est
que |e m'attendais que celle cbroniiiue du
P. Toreccbio, qui est le plus ancien original
que l'on m'indiquait dansées mémoires, me
donnerait quelque connaissance de ce quo
je cherchais ; mais ce que cet auteur met sur
i'élablissement de cet ordre est si peu proba'
ble et s'accorde si mal avec la chronologie,
que nous ne pouvons pas adhérer à son sen-
timent. Voici ce qu'il en dit.
Les villes de Pavie, de Lodi, de Crémone,
et queli]ues autres de Lo nbardic, principa-
lement celle de Milan, s'élanl révoltées cou-'
Ire l'empereur Henti, ce prince, étant passé
en Italie, remit ces villes sous sou obéis-
sance, el, pour châtier les chefs des rebelles,
qui étaient les personnes les plus considéra-
bles d'entre la noblesse, il les mena prison-
niers en Allemagne. Ces gentilshommes se
lassant de leur captivité, le bienheureux
Gui, qui s'était ac(iuis beaucoup de crcUit
(I) Vo-j.^ [>. la li I du vol , II" i lis.
j:') DICTKJNNAIUE DES OnuUES IlELIGi; l!X. 480
p.irrai eus, les exhorta à profiler de leur de sps armes pliisiiur-i villes de I ombardic
ni.iMicur el de fiiire un viriiable retour vers qui ne voulaient pas le retonnaîlre pour
Dieu, en méprisant toutes les vanités de ce souverain après l,i mort de la comtesse Ma-
«iion'ie, dont l'inconsianee leur était connue lliilde, dont il était héritier, aurait pu avoir
par leur propie expei ience, et on s'exereanl envoyé en Allemagne, on comme prisonniers
dans la pratique des >eitus. Ces grniilsliom- de guerre, ou comme rebelles, des genlils-
III. s avant suiu S' n a\is, se revélirenl, l'an hommes de Lombardie, qui, enfin lassés île
1017 , d'hal) ts de couleur cendrée, qui cou- leur captivité, se seraient revêtus d'haliiis de
si-'laienl eu une robe de gros diap , cciulc péuilcnie pour implorer la miséricorde do
d une ceinture de morne étofle , avec un l'empereur el en obtenir la permission de re-
grand nianleau qui descendait jusqu'à terre, tourner en leur pays.
el des bonnets de même étolTe pour couvrir Quoi qu'il eu so;l, Tordre des Humiliés doit
leur léte (I). Les exercices de |)iété,de cha- être regardé eu trois élals dlITeients, qui ont
rite cl de monilicalion qu'ils prati(|uaienl, clé afipelés dans cel ordre même, premier,
étant venus à la c^)nnai^sance de l'empereur, second et troisième ordre. Le premier est
il les fil venir en sa prc-ence , où s'étanl celui (/e* /;errc.'Ù!.< (/e /a /'c'inVrnre, (]ui a pris
prosternés à ses pieds les larmes aux yeux, son origine eu AUemigne, lorsque ces gén-
ies premières paroles que ce prince leur dit lilsliommes lombard*, qui avaient été (i>n-
furent celles qui suivent : vous voilà donc duits prisonniers embrassèient sous un ha-
ù la pn huniilirs; cl, après avoir continué à bit de couleur de cendre une vie pénitente, cl
leur dire quel jue chose de leur rébellion formèrent mire eux une société pour prali-
p.issée,sur les assurantes (lu'ils lui donné- qucr les niémes exercices de p été, d'orai-
reiil de leur lidélité à son service et de la ré- sons el de mortificalion, et rélablirent à leur
S()!u ion où ils étaient de continuer le genre retour en Italie ks manuraclurcs de; laine,
de vie qu'ils avaient entrepris, il leur accorda donnant à li aval lier à une infinité de pau-
la liberté, leur permettant de relourner eu vres artisans, s'occupanl eux-mêmes à f.nrc
leur pays. des draps, vivant du travail de leurs mains.
Etant arrivés en Lombardie, leurs femmes el distribuant aux pauvres ce qui leur res-
les voulurent imiter dans leurs exercices de lait de leur gain, après en avoir pris te qui
piété et dans li praique des vertus ; elles se était nécissaire pour la vie.
revêtirent aussi d'habils de même couleur, Le second commença lors(iue, l'an 1I3V,
el, comn)e leurs maris introduisirent la fa- par le conseil de saint IJernard , ils se sépa-
brique des élolTes de laine , auxquelles ils rèrenl de leurs femmes pour vivre dans la
lra> ail'aieiit eux-mêmes, el'es s'enipliiyaient conlinence, prirent dis habits blancs |iour
aussi àlilerla l.iino. Mais, dans le séjour (luo marquer la pureté de leur âme, s'engagèrent
saint l'crnard lit à Milan, les Humiliés (que à un nouveau genre de vie el jetèrent les
l'on nutnmait les Itti retins de lu Pénitence, à fondements de leur premier monaslèie à Mi-
cans • qu'ils portaient un gr s bonnet que les lau au quartier de Brcra. Ils ne changèrent
Italiens appellent boretlino, oulre «lu'ils se rien à la forme de leur habillement : il con-
servent tiuelquefois de ce terme [lour signi- sislail en une robe el un m.inleau ne draji
lier le ^ris brun (|ui était la couleur de leur blanc, avec de gros bonnets bl mes pour cou-
habit; prièrent ce saint de leur prescrire vrir leur tète au lieu de ceux, de drap gris
quelques règlemenls pour leur conduite. Il (ju ils porlaionl auparav.ml. Ils rccitaienl
leur conseilla de se séparer de leurs femmes toutes les scm liucs le l'saulier, s'excrçiienl
et de vivre en coiiimiiu. Il les exhorta aussi à b/aucoup d'autres œuvres pieuses, et tanl à
de se mettre sous la proteciiou de la saiule cause de l'humililé de la sainte \'ierge, A
\'ierge, cl pour cet elTct de i hanger leurs laqnel'e ils avaient beaucoup de dévotion et
babils cendrés en babils blancs, puur mar- qu'ils prirent pour leur protectrice , qu'à
uuer la pureté de leur âme. cause que l'empereur, lorsqu'ils se prosliT-
l'els fu eut les commencements de l'ordre nèrent à ses pieds, leur avait dit qu'ils
des Humiliés selon le I'. Toreccliio, le plus élaient enfin liuiiiiliés, ils prireni le nom
ancien historien de cet ordre : mais, si Ton li' llitmilics et quillérenl celui de Jlerrelins.
ci'iisiiière (|iie saint Bernard n'alla à Milan îinlin le troisième ordre , el celui qui a
que l'an 1 l.'j'», el qu'il y aurait déjà eu près subsiste jiis(iu'à leur suppression, commença
de six-vingts années d'écoulées deituis le re- lorsqu'ils embr.is»èrenl la règle de .saint Ue-
lour de ces genlilsbommcs en Lombardie. ou noîi et qu'ils apportèrent eu'.ore du cliange-
iroiiM-ra que cela ne peut pas être arri\é mentdans leur babillemenl : lar ils prirent! un
sous Ti mpereur Henri 11, n'y ayant pis d'ap- scapulaire auquel était allaclié un pe il ea-
parincc qu'ils eussent de sans règlements iiuce, et portaient par-de-sus le manteau
pour leur «(induile depuis Tan 1017 |usqu'en long, ou chape, une moselte blanc lie (2). Ce
U.'T», d'.nil.inl plus que le 1'. Toreci liio parle fui à l.i persuasion de sainl Jeau de Meda
comme s'il n'y avait (jUc quelques années qu'ils suivirent la règle de s.iinl Iteiidît il
qu ils eussenl einlirassé ce noH\Cau genre de étail de la famille des Oldrati de Milan, qui.
Me lorsque s.iinl liernard alla à Milan. Ainsi selon Morigia, a diuné à TKglise deux car-
11 parait plus vraisemldab'e (juc cet ordre n'a dinaux, qiialre archevêques de .Milan, deux
'OU nié que Tan 1117, sous l'empereur èvêques de Novare, et un général à Tordre de
Henri \', (juj, apri > avoir soumis par la forte Saint-Uumini(|ue. Le surnom de Mvda lui fui
U) Voj/., il |j lin (lu vul., Il* II:». (ï) Voij.,a l.i lin du vol., n 120.
481 IIUM
donne, parce qu'il naquit dans ce lieu , qui
es( éloigné de dis milles de la ville de Gôine
en Italie, dont même il était seigneur ; mais
il renonça à toutes les richesses de la terre,
cl se reiiri dans la solitude de Kondenario,
sur la Tivière de Coscia, à quelque dislance
(le la ville de Côme, où l'on prétend qu'étant
lin jour en oraison, li sainte Vierge s'appa-
rut à lui, et que lui montrant un habit hianc,
e!le lui ordonna d'aller se joind eaux Hu-
miliés à Milan. Il fut reçu dans le couieni
de Brera , et comme il était déjà prêtre, et le
seul de cet ordre, qui n'était pour lors com-
|iosc que de frères lais, la dignité de son
caraclère, jointe à ses grandes vertus et à la
sainteté de sa vie, lui attira tellement l'amour
et le respect de tous les religieux, qu'ils se
soumirent à sa conduite.
Ce fut pour lors qu'il leur fit prendre la
règle de saint Benoît, avec riiahillement
dont nous avons parlé. Il leur drc ssa un bré-
viaire particulier sinis le litre d'ollîce des
cliauoinos. En effet ils prirent ce nim, et,
dansia règle de sainlBenoîl qu'ils suivaient,
et qui leur était adaptée, les noms de moines
et de frères sont changés en cel.ii de cliaiio.-
nes. Il les obligea aussi à dire tous les jours
l'office de la Vierge (ce que quelques monas-
tères de religieuses du même ordre obser-
vent encore à présent), et il fit prendre les
ordres sacrés à ceux qu'il jugea avoir assez:
de piété et de science pour s'en rendre capa-
bles. Pour lui, il s'adonna à la prédication,
et fit tant de conversions, qu'un giand nom-
bre de personnes, autant touchées de ses pa-
roles qu'édifiées par sa conduite, entrèrent
dans cet ordre. U y en eut plusieurs qui y
donnèrent leurs biens , ce qui donna le
anoyen à saint Jean de Meda de faire plu-
sieurs établissements dans la Lombardie ;
de sorte qu'en peu de temps cet ordre Ht
beaucoup de progrès sous sa conduite : ce
■{jui lui a acquis W. iWie de Propagaleur de
l'ordre des Huxiliés. U acheta Kondenario,
qui était le lieu de sa première retraite. Il y
lit bâtir une église, qui fut dédiée en l'Iion-
neurde l.i sainte Vierge et de tous le-, saints,
cl il y joignit plusieurs cellules. Dieu fil pa-
raître par plusieurs miracles combien les
charités que ce saint faisait aux pauvres lui
étaient agréables : car, dans une cherté
d'huile, ajant ordonné à ses religieux dj
n'en point refuser aux pauvres qui en de-
manderaient, le vaisseau où on la conservait
se trouva toujours plein, nonobstant la
grande distiibuiion que l'on eu faisait. En-
lin, après avoir gouverné cet ordre pendant
plusi' urs années, il mourut le -2(5 septembre
1 ISO. Les miracles qu'il avait faits pendinl
sa vie, et qui continuèrenl après sa mort, le
tirent mettre au catalogue d( s saints par le
pape Alexandre lil. On voit son tombeau
d.iiis l'église de Kondenario, où il fut enterré.
Celte égl.se est présentement occupée par les
clercs réguliers Somasques.
Alexandre 111 avait succédé à Adrien iV,
qui était morl aussi au mois de si'piemlue
1)59. Il avait clé élu pirla plus grande par-
tie des carlinaux; mais les autres lui duu-
II L M ^,82
nèrent un compétiteur, qui fui l'antipape
Viclor IV, que l'empereur Frédciic Barbe-
rousse reconnut comme légitime, ce (|ui
causa un schisme dans l'Eglise. D'abord les
Milanais et le reste de la Lon)bardie recon -
mirent aussi Viclor; mais, la cause d'Alexan-
dre ayant été examinée cl trouvée bonne par
les rois de France et d'Angleterre, qui le pri-
rent sous leur proleciion, les Milanais se
rangèrent de leur côté, et chassèrent les
partisans de l'empereur et de Victor : ce (jui
obligea Frédéric de venir encore assiéger
cette ville, qu'il avait déjà soumise une fois
à son obéissance. Ce dernier siège fui si opi-
niâtre, que l'emiereur après s'être rendu
maître de celte ville l'an 11G2, la fit entière-
ment démolir, hors les églises. Il la fil même
labourer avec une charrue, y fit semer du
sel, en mémoire de sa rébellion , et envoya
prisonniers en Allemagne ceux qui en
avaient été les principaux auteurs. Ces pri-
sonniers, qui se ressouvinrent de ce qui
était autrefois arrivé aux Humiliés dans une
pareille captivité, firent vœu d'entrer parmi
eux, et de f.iire bâtir une église à Milan, s'ils
pouvaient obtenir leur liberté. Ils se revêti-
rent d'habits blancs comme les Humiliés, et
allèi enl se prosterner aux pieds de l'enipe-
ri nr, dont ils implorèrent la misôricoide, et
lui demandèrent la permission de retourner
en leur pays ; ce qu'il leur accorda. A leur
retour, ils accomplirent leur vœu, et firent
bâtir une église magnifique à Milan, au
quartier de Brera, qui subsiste encore au-
jourd'hui, et qui a été donnée aux Jésuites
après la suppression des Humiliés.
La paix ayantélé rendue à l'Italie, leur or-
dre se mulliplia beaucoup. Il fut approuvé
l'an 1200 par le pape Innocenl III, cl con-
firmé par ses successeurs, Honorius III, l'an
12i>tj; Grégoire IX, l'an 1227; Nicolas IV,
l'an 1289, et par plusieurs autres souverains
pontifes, qui lui accordèrent beaucoup de
privilèges. Le supérieur de cet ordre ne prit
le litre de général que l'an 1246. Le premier
fut Bertrand de Brescia. Il y en a eu trente-
quatre de suite jusqu'en l'an 1570, que l'or-
dre lut supprimé par le pape Pie V.
Tandis qu'il se conserva dans la ferveur
cl dans l'esprit de son fondateur, et que la
règle de saint Benoît y fut fidèlement obser-
vée, sa réputation se répandit de toutes
paris. Il en sortit un grand nombre d'excel-
lents religieux, dont quelques-uns ont mé-
rité le litre de saints et de bienheureux, et
d'autres ont été élevés aux premières digni-
tés de l'Eglise : ses biens et ses revenus
augmentèrent de jour en jour par la piété
des fidèles; mais le temps cl les richesses y
produisirent le relâchement, et la propriété
s'y éleva sur les ruines de la discipline ré-
gulière. Les supérieurs, qu'on appelait pré-
vôts, se rendirent maîtres du revenu des
monastères, et s'en allrihuèrent enfin la
jouissance, de même que s'ils en avaient été
les titulaires; et les prévois, devenus perpé-
tuels, ne donnaient que ce qu'ils voulaient
h leurs religieux, qui avaient. 'i peine de quoi
vivre. Ils résignèrent ensuite ces places
<33
niCTlONNAinC DKS OnDUES heugieux.
iM
ctiinino Ac vérilabliS bcmTices «lonl ils ,nii-
iniciil ou le pouvoir de disposer; rc qui ('l.iit
l.i source d'uiio iiiliiiilé d'abus : car o'.i vcr.c-
»nil lr('s-pcii «le rclifiicux dans .'os m lisons
dei'or.lic ; Il s prévois, par avarice, en re-
Iraiuliaieiii lo nomlirc auianl qu'ils pou-
v.iicnl.afiii d'avoirplusd'ocrasions d' grossir
Iturs revenus, nilovaiil ainsi à Die idos re\c-
nusque leurs foiidatours avaieiu consacrés à
rentroticn du lomple do sa majoslè divine et de
ceuvqui dov.iiciily ch.iiiler ses louaii^i S jour
el huil. Mais c'esl ce qui neles ombairassail
puèrc : ;:u conlrairc on n'y recevait ordinaire-
menl que des sujets indignes cl is;noraiits, et
pour la plupart adonnés à toutes soi tci de vi-
ces, afin quiis ne fussent pas en clat par leur
lionne cDnJuile et leur capacité de dépossé-
der ceux qui s'étaient emparés des supério-
rités, qui, enrichis de tant d'injustes dépouil-
les, menaient une vie. si licencieuse, (lu'ils
ne refusaient rien à leuf sensualité : ils ne
marcliaieut ([u'avec de grands équipages ;
ils allaient à la chisse, el élaic-nt continuel-
lement dans les jeux et dans les plaisirs, se
souciant forl peu de ce qui regardait la con-
duite de leurs monastères, où les religieux, à
leur exemple, faisaient lionle aux séculiers
les plus débauchés, qu'ils surpassaient dans
leurs excès.
Tclélail l'état (lé,)lorable de cet ordre, lors-
que saint Cli irles, (jui en était protecteur,
forma le dessein d'j f.iiie revivre les observan-
ces régulières qui en étaient hannics. 11 avait
déjà cbauclié cette entreprise par un cotn-
ini>sairc qui y fui envové sous le pontincat
de rie IV, avec ordre d'y travailler, aussi
Mcn que j.ar divers règlements qu'il lit faire
dans un chapitre général qui se tint à Mi-
lan ; mais le peu d'effet qu'eurent les remon-
trances du commissaire et les règleaiewls de
ce < ha|iitre, lui ayant fait cuniiaître qu'.l
était nécessaire d'em[iloycr l'autorité du
(lape, il en parla à l'ie V, qui ordonna qu'à
l'avenir le. prévôts ne seraient plus pcipé-
luels, mais pour un temps, et qu'on établi-
rait nu noviciat pour y élever les j<!unes gens
dans l'esprit de rinslilul et la veritalle ob-
servance de la discipline régulière. Sa Sain-
teté accorda pour cet cVet au saisit cardinal
deux brefs : l'un par lequel il lui donnait
I ou\ oir de lever la dixième partie des reve-
nus de toutes les [irevotés pour contribuer à
l'etablssement et à l'entretien du noviciat,
et l'autre par h-quel il le déléguait commecom-
inissaire ap sloiique, piiiir faire toul ce qu'il
jugera t à propns pour la reforme de cet or-
dre. En vertu de ces biefs, il conTO(|iia le
(bap^lre (général, qui se luit à Créni me l'a:!
1o(i8, où il ùla a\i\ religieux tout ce qu'ils
avaient en propre, el les obligea de niellie
en coiiiiiiuii tous les biens de clia<|ue iiioiia-
»lére, dans les<iuels il établit pour cela un
Irésiiiier. II ordonna qu'on changerait tous
les trois a,.» les p.evôls d iiis le cliapitie gé-
néral, où ils 'ciaiiiil é us à la p iirjlite des
Voix, et que nul d'eux ne pourr.iit jamais
porter cette qualité eu liin- et pour l> u-
Juurs ; el eu même temps il (il élire le i-éné-
ral, qui fut le P. Louis de la Basllicitc, pré-
vit de Sainle-f^atlicrine de Crémone.
La plupart des religieux particuliers re-
çurent avec beaucoup de joie les ordonnan-
ces de saint Charles, et lémoignèren! d'abord
de s'y vouloir soumetlre ; mais les prévôts au
contraire nepeiisèrenl qu'à s'opposer à leur
exécution et à se maintenir dans la supério-
rité. Ils tâchèrent par toutes sortes de voies
de faire condescendre le pape à les appui er
daiw leurs piélcnlioiis , mais ce fut inutile-
ment ; car ce pontile ayant renvoyé celle
all'airc <à saint Charles, ce cardinal demeura
ferme dans ce qu'il avait ordonné, el voulut
(|ue ses ( rdounaiiccs fussent puucluellemciil
execjtées.
La grande autorité de ce saint, jointe à si
fermeté inébr.inlablo, leur fil tellement per-
dre l'espérance de réussir dans leur entre-
prise, qu'ils ne s'attendaient à rien inoiii'.
que de se voir obligés à embrasser la refor-
me : ce qui leur étant la chose du monde la
plus sensible cl la plus opposée à leurs pl.ii-
sirs, les mettait dans des transports exces-
sifs de colère contre le saint cardinal, à qiw
ils souhaitaient tous les maux imaginablev :
mais irois d'entre eux, qui furent les prévôt,
de \'erccil, de Caravage et de \érone, plos
passionnés que les autres, non c mtenls d •
lui souhaiter mille morls, cunvinrenl par
une entreprise la plus impie et la plus bar-
bare qu'on ait jamais pu concevoir, de le
faire tuer. Ils communiiiuèrent leur dessein
à linéiques autres compagnons de leurs dé-
règlements, qui étaientdu méineordre. Ceux-
ci ap;irouvèrenl cet attentat comme le moyen
le plus sur el le plus court pour s'exempte r
de recevoir larelorine, mais principalemeiil
un certain Jérôme Doaat, s;irnom;ne Fiirinn.
Ce mallieuroDX, toul prélre qu'il étail. s'y
oiTrit de lui-même, sans qu'on lui en parlai,
pourvu qu'on voulûl lui donner quelqu ■
somine d'argent ponr récompense. Les pre-
\ot> étanl convenus avec lui pour quarante
écus, songèrent où ils prendraient cet ar-
gent ; et ne trouvant poi.it d'autres moyens
pour en avoir sans s'incommoder, ou plu-
tôt sans letirerde leurs bourses, ils ver. dirent
[lour cet clîet i'argenlerc el les ornements
de l'église de Brera, qui élail la principale
maison de l'ordre à Milan. Farina, apiès
a\oir dépensé son argent dans les ca'.aiets,
voulant exécuter l'assassinat dont il était
convenu, trouva le moyen un mercredi iS i
octobre de l'an liiti'.), de s'iulro luire secrèie-
menl dans la cha|)elle du saint cardinal,
et lui lira un coup d'a^quebu^e peiiJa.il
qu'il faisait la prière du soir avec ses doiiie>-
(i(|ues. Mais que peut la malice lies liomiiie>
contrôla puissance de Dieu? Par un etïe;
de celle |)roteclion divine, qi.i veille tou-
j;)ursà la conservation de ses sa n's, la balle
ayant frap|)é lecardiii.il à l'epuie du dos, ne
lu que noircir sonroclil el tomba à ses
pieds. Il n'y eui qu'un carreau .lui perça s s
h.ibils jusfic'a la chair sans la.io autre clio.-e
qu'une peli.e tumeur.
(Juehjiies diligences que les ofliciers i!?
la justice lissc'ii puur découvrir les uuluurs
as
iîl'M
IIUM
4»6
(!e cet attentat, elles furent inutiles; mrJs le
jiape, peu satisf:iit qu'un crime de celte im-
portance reslâlim|iuni, crut ne devoir pis
s'en rapporter enlièro.'iiont aux poursuites
que la jusiice en avait faites, et qu'il élait
(ie soii devoir d'employer loule l'autorité (jue
Dieu lui avait conliee pour venger l'injure
faite au sacerdoce et à la dignilé du cardina-
lat. C'esl pourquoi il envoya exprès à Mil.m
un délégué apostolique pour en infoniicr.
Ce fut Antoine Scarampa, évéquc de Lo'ii,
qui fui chargé de celle commission. Sitôt
qu'il y fui arrivé, il fit publer une ordon-
nance purlanlde tiès-grandes censures con-
tre ceux qui , ayant eu connaissance du l'al-
ti-ntat commis contre la personne de sainl
Charles, ne viendrairnt | as le révéler.
Deux prévôts dos Humiliés, dont l'un était
(■on)plice de l'assassinat et l'autre en avait
été seulement averti, autant p:r la crainte
des censures que par les remords du leur
conscience criniinelh', qui leur rcprdcliait
l'énormité d'un attentai si sacrilège, vinrent
trouver le délégué apostolique, et lui en dé-
couvrir, ni quelque chose. Il les fil arrêter ,
t'I dans leurs interroj;aloires ils no purent
«"empêcher d'avour le crime détestable
qu'ils avaient voulu commettre. Les autres
c-oinplices lurent aussi arrêtés, et Farina,
auteur de l'assassina', fut pris dans les trou-
pes du duc de Savoie, où il s'était fait soldat,
le pape ayant écrit à ce prince pour le taire
saisir sur ses terres. Les plus coupables fu-
rent exécutés à mort le iS juillet 15"0. 11
s'en trouva parmi eus qui étaient g(Mitils-
liomiucs, parmi les(îuels étaient les prévôts
de Virce;! et de Gaiavage, qui curent la
lèti' tranchée, et les autres furent pendus
avi'C Farina.
Lepapevoyant la difficulléqu'il y avait de
réformer l'ordre des Humiliés, prit la réso-
lution de le suppri ner. Cette nouvelle ayant
été portée à Milan, ce fut une affliction très-
grande non-seulement pour les religieux de
cet otdre, mais encore pour les haliilantsde
<:etie ville. Us s'adressèrent à saint Charles
pour prendre son conseil, et savoir de lui
l>ar quelle voie on pouvait empêcher ce coup.
il fut d'avis que le général allât à Kome se
jeter aux pieds du pape ; qu'il promît à Sa
Sainteté de recevoir telle reforme qu'elle
voudrait Lu jjiescrirc ; que la ville de Milan
écrivit au pape en faveur do cet ordre, et
qu'il écrirait aussi de son côté, pour porter
le pape à accorder la grâce qu'on lui deman-
dait, et l'assurer qu'il avait ( onçu de gran-
des espérances que ces religieux accepte-
raient sans aucune difficulté la réforme,
pour \ ivre à l'avenir avec plus de régularité.
Le général, selon l'avis du sainl cardinal,
alla à itome se jeter aux pieds du pape, et
le supplia les larmes aux j eux de conserver
son ordre ; mais ni ses prièies ni les so.lici-
lations de saint Charles et de la ville de Mi-
tau ne purent fléchir l'esprit de Pie V, tant
il avait horreur du crime qu'on avait com-
mis; en sorte que par une bulle du 8 février
VSii il supprima cet orJre, qui était com-
posé pour lors de quatre-vingl-qualorzeimi-
naslôrcs, dans lesquels il n'y avait en tout
que ceul soixante cl dix religieux.
Le même jour, le pape par une autre bulle
réunit ensemble plusieurs prévôtés, et en
donna quelques-unes à sainl Charles, pour
les appliquer à tels usages pieux qu'il juge-
rail a propos, lien donna d'autres à dilTe-
rents ordres, comme aux Chartreux, aux
religieux de Saint-François el de Sainl-Do-
iniiiique, et à d'autres communautés. Quant
au\ religieux Humiliés, il voulut qu'il res-
tât vin:t-huit préires et sept frères convcrs
dans la prévoie de Brera à Milan, seize prê-
tres el qualre convers à Sainte-Abonde de
Crèm:)ne ; liuit prêtres el (;uatre convcrs
dans la prévôté de Sainte-Catherine de l;i
même ville ; dans la prévôté de Vérone, hu:t
prêtres et doux convers, et ainsi de quelques
autres prévolés, où il les dislril>ua pour cé-
lébrer l'office divin, voulant qu'ils vécussent
lincouimun dans les prévôtés, où ilsdemeure-
raient plusieurs ensemble, leur ayant assi-
gné pour c*t effet des revenus sullisants, qui
devaient diminueràmesure que quelques-uns
d'eux décéderaient.
Le P. Torecchio dit que ces religieux
étaient les receveurs des enirées et des péa-
ges, qu'ils éiaieul cummiisaires du peuple,
qu'ils exerçaient quelques offices dans la
justice, el qu'a cause du grand crédit qu'ils
avaient, ils exerçaient encore l'office de la
canevaria dans toute la Lombaidie, et que
chaque supérieur des monastères de cet
ordre, dans les villes où il y avait un maga-
sin de uiuBitions,en avait une clef. Peu;-tlra
leur uvail-on accordé quelquesdroiis sur les
marchandises, à cause que c étaient eux (]ui,
comme nous avons dit, avaient non-seulc-
uienl introduit dans la Lomhaidie les manu-
factures de laine , mais a'issi les fabriques
d'élolTes d'or cl d'argent, lorsqu'ils n'avaient
encore que le nom de Berretins.
Nous avons dit ci-devant quels étaient
leurs habilh mcnts , tant dans le premier el
le second oidre que dans le troisième. Celui
du premier, dont nous avousdonné ci-dessus
la représentation, se Irouvecncore représenté
dans un ancien tableau qui se conserve
chez les religieuses du même ordre de cainle-
Calherine de Brera à Milan, où l'on voit
quelles étaient aussi les armes de cet ordre ,
savuir : un agneau couché sur une terrasse
avec un rouleau de | ajier sortant de sa
gueule, sur lequel soat écrits ces mots:
Oiimia vincil humilitas. Silvestre Maurolic
a pris appaiemment cet agneau pour un
chien , et il donne pour devise à cet ordre,
Tuta fides ; mais no:is aimons mieux nous
en rapportera cet aneien tableau.
L'habit du secind ordre n'étant différent
de celui du premier que dans la couleur,
nous n'eu donnons point d'estampe ; mais
bien de ceiui du troisième , que nous avons
représenté conlormément à des mémoires
qui nous siiul venus d'ilalie.
Nous ne [.'ouvond rien dire de la vie du
bienheureux Gui , que le P. Torecehio re-
connaît pour fondateur de cet ordre, et après
lui saint Anloiiin , Silvestre Maurolic, Ar-
487
PICTIONNAÏKF, DF.S OnDRES RIXIGILUX.
48S
iioulJ Wiiin rt quelques autres; nous avons
ifcii à la \('rile de Milan un cxlrait «l'un
Abrfj;o lies \'ics dos saiiils iii' TorJic disUu-
iiiilfos , que Piirici'lli a compose , cl qui se
Iroine dans la l.ibliolh.'quc Anibiosuiine
parmi 1rs maiiusrrils dont nous avons parlo.
(;.'l oxir.iii contient le iroisitnic cliapilicdo
r«'l Aliri'iii- d<'S \'iL'S des saints l'e Tordre,
lequil cli.ipitro ne re},'arde que le bienlieu-
ri'us tjiii, l'I a piiur litre Ctipilulo 'i" det H.
(iuidoilii MHano, fotidalore deU'ordine ddli
JLiiiiiliati ; mais «m ne trouve rien dans ce
cliapilre ni de sa naissance, ni de ses ac-
tions, ni de !-a niorl : tout ce qui y est con-
li liu ne tend (lu'à faire cunnailrc qu'il a clé
reconnu pour fondateur de ce l ordre, cl cela
fondé sur un vieux missel du même ordre
i;i.i lui donne ce titre; parce que, selon Pu-
riiclli, Gni s'éianl acquis beaucoup de cré-
dit sur l'esprit de ce» gentilsliomnies lom-
bards que leuipereur Conrad III envoya
prisonniers eu Alleinaj;ne , il leur persuada
de rcnonicr au monde et de mener une vie
pénitente. A la marge de ce chapitre il y a
une pi litc apostille par laquelle l'auteur dit
(ju'il s'est trompé, et que ce qui a fait don-
ner le litre do fondateur au bienheureux Gui,
c'est que, i'.m 113i, il recul de saint Bernard
quehiucs règles pour cet ordre, et qu'il les
fit confirmer par le pape Innocent 111 l'an
lit)".), \oici SCS paroles : Arinyannaio, queslo
li. Gttido ntU' unno 11 Ji riceveile da S. lier-
nardo Alcune Jicyole per D. Ordine /^' quali
ftce confirmai e da Innocenzo PP. Jll neli'
anno 11!j9, et percio ne fu uddimcnlato fon-
dai or c.
l'our moi , je crois que Puricelli s'est
trompé et dans le corps du chapitre et dans
l'aposhlie ; car l'empereur Conrad dont il
parle ne doit pas élrc le Iruiséme du no n,
qui ne parvint à l'empire que l'an 1139,
quatre ou cinq ans après que si.inl Bi'rnard
fut retourné en France, cl qui d'uilleuis
ti'cul point de guerres à souleiiir en Lom-
liardie pendant son règne. Il esi plus pro-
bable qu'il veut parler de Conrad II, puis(|uc
ce prince fui en Italie en 102" pour reluire
les Lombanls . qui s'étaient révoltes conirc
lui; mais il n'y a pas moins de dilfi ulté à
accorder cela avec l'arrivée de saint liernaid
en llalie. Car, si ('onrad lil ne régna (ju'a-
près que saint lleru.ird fut retourne en Iran-
ce, cl qu'il eul par couse (ucnl don. é ces
règlements à Gui, qui était déjà revenu
d'Allemagne en Loinbardie, Conrad II ré-
gna si longtemps avant l'arrivée de saint
licrnard à Milan, qu'il serait inq)ussilile que
liui eût ri\'u de lui ces mêmes règlcmenls
en 113'» , et qu il les eût lail approuver par
Innocent Ml en lliiU, coniiii'' le dit cet au-
teur, a ni();ns qu'il ne donne i'rl ans de vie
à ce fuiidaleur ; ainsi il est plus |)rolia!ile,
tomii.c nous l'avons dij i dil ci-dessus, qUi:
ci'l ctablisscnicnt est arrué sous l'cmieri ur
llrnri V, pui>que pour 1 rs, s'il est dillicile
d'accorder que (iui ail fait approuver ces
rèi;leincnls en 1111'.), au inoins cela n'esi pas
impossible. (Julie qu'il sera Irès-f .cile oe
cujicctuir que saint licinurd lui a pu donner
ces mêmes rèalemcnls eu 113'*, d'autant
piu.s que Cl l empereur vivait en ce temps-là
cl avait eu guérie avec les Lombards.
S. .\ntiinin. part, ii IlisC, lit. lo, cap. 23.
Sil»e-lre .Maurolic, Mur. Océan, di tu: t. U
lidiij. Pliilipjie Bonaani, ('atido(j Oïd. rclùj.,
p. 1. Uermau, Jlist. des Urd. relii;., loin. ïl.
(jio Bapi. Jussiino, Vit. di. S. Carolo Bor-
rumeo, 153, lib. ii, cap. li-: et Mémoires cn-
toyés de AJilan en 17U9 et 1710.
§ II. Des religieuses de l'ordre des JIu-
iniliés.
Les religieuses de l'ordre dis IlumiCés ne
furent point comprises dans la suppression
des religieux de cet ordre, et il en resie en-
core à présent treize ou quatorze monastè-
res en llalie. Nous avons dit dans le para-
graphe précédent que ces gcnliishommos de
Lombardie qui avaient été menés prisonniers
en Allemagne, étant de retour en leur pays,
s'étaient occupés à divers exercices de pié-
té, vivant du travail de leurs mains; qu'ils
avaient formé entre eus une société sous le
nom des Berrclins de la Pénitence, que leurs
femmes avaient embrassé le même génie
de vie; et enCiii que sa'nt Bernard , étant A
.Milan l'an 113i , leur avait prescrit des rè-
glements, et leur avait conseillé de se sépa-
rer de leurs femmes et de vivre dans la con-
tinence. Il y eu eut plusieurs qui consenti-
rent à celte séparation avec l'agrément de
leurs femmes, qui se relirèrenlà Miian dans
une maison appelée les Prisons, au quanicr
de Brcra , cl y jetèrent les fondements du
monastère qui subsiste aujourd'hui sous le
litre de Sainte-Calherinc de Brera; et, com-
me les premières fondatrices de ce mona-
stère étaient de la famille des lilassoni , on
appela d'abord ces religieuses les religieuses
de DIassoni.
Comme la plupart de ces nouvelles ser-
vantes de Jcsus-tJhrist étaient des plus dis-
tinguées de la ville, il y eut un grand nom-
bre de demoiselles qui, I énonçant à la vanité
et aux faux plaisirs du monde , suivirent
leur exemple; niais celle maison ne se trou-
vant pas assez grande pour y recevoir tou-
tes celles qui se prescnlaienl pour embrasser
ce nouvel institut, elles achetèrent une aulic
maison d.ins le quartier appelé Borgo \oco,
et donnèrent encore le nom de Sainle-Ca-
Ihennc à ce nouveau monastère. LUes quit-
tèrent néanmoins qiicUiue temps après ce
nom, parce (ju'ayanl fonJé à cote de ce cou-
vent un hopilal pour les pauvres teigneux,
afin d'avoir lieu d'exercer la charité cl de
pratiquer riiuinili é. on les appela les reli-
gieuses de illopilal de l'Oliser tance. .Mais
préseniement ce monastère n'est connu que
sons le nom de S.tinl-Krasme, qui en e>l ti-
tulaire; (t il n'y a (juc la rue qui est à coté
du monastère qui a retenu le nom tivTcgno-
si, à cause de cet ancien hôpital.
Plusieurs villes il'Iialie li ur oITrirenl des
élablissemenls, qu'elles acceptèrenl : ce qui
Gt que le nombre de leurs luonaslères devint
treb-coiisidcrable ; mais présentement il n'iii
roïlu plus (lue treize ou quatorze, ((ui sont
m
litM
HUM
^90
(eux de Sainle-Callioriiie de Brera, de Saint-
Erasme de J{ors;o Novo el de Sainlc-Made-
U'iiie al Ci'ichio, à iMilan; de Saiiil-BoiioU à
Lodi , de Sainle-Ursule à Corne, de S linle-
A'jalheà Novarre, de Sainte-Marthe de Mou-
le Ugo à Florence, de Saiiile-Agalhe à Ver-
ceil, de Sainle-Margucrite, el de Saiiite-Ma-
(icieiiieà Mouza, diocèse de Milan; de Saiiit-
MartiiiàVarè.se,au mêmediotèse; de Saiiile-
Catherine à Graiiedona , au diocèse d.' Cô-
iiie; de Sainte-Marie-Madeleine à Lugaiio,
ville appartenant aux Suisses el aussi du
diocèse de Cônie; et de Sainie-Cccile à Uu-
iiie. Mais quoique les religieuses de ce dei-
nier inonaslère soient de l'ordre des Humi-
liées, conitne elles le reconnaissent par les
mémoiresqu'ellesm'ont envoyés, elles n'ont
pas néanmoins toutes les observances des
autres Humiliées. Ce monastùre appartenait
autrefois aux religieux de cet ordre , qui
l'abandonnèrent , et le p;ipe Clément Vil y
mit, l'an 1527, quelques filles devoirs, aux-
quelles il donna la règle de saint Benoit et
l'habit des Humiliés. Maure M.igalotti , qui
était religieuse de l'ordre de Saint-Benoit
au couvent de Campo-Marzo , en fut tirée
pour gouverner celte communauté et for-
mer ces fi les à la vie religieuse: et il pa-
raît par l'inscription qui est au-dessus de
leur porte , et qne nous rapporterons ici,
qu'elles étaient véritablement de l'ordre des
Humiliés, comme elles le prétendent encore.
Maura Magalutla abbalissa a Clemenle sep-
timo et Franciotla cardindi Ursino prœposi-
to hue accila, œdem haiic , divœ Cœciliœ sa-
crum, quam monachi Humiliatorum Sancti
Benedicli anlea oblinebant , m prœsentis tno-
nasterii ejusdem ordinis monialum formam
redegit, eumqtie pêne collabcnlem rcitituii ,
adjeclis insuper hortis, quorum eliam ut ho-
nestior usus esset, claustrali eus muro cinxil,
anno a partu Virg. MDXXXX.
H semble cependant que celles de Milan
U8 veulent pas les reconnaître pour leurs
sœurs : car, par les mémoires que j'ai reçus
de l'abbesse de Saint-Erasme de la même
ville, et qui sont écrits de sa main, elle
avoue que le monastère de Sainle-Cécile de
Rome était aussi de religieuses de son ordre,
mais que depuis quelques années, à, la solli-
citation de quelques personnes, elles ont
abandonné l'ordre des Humiliés pour se faire
Bénédictines. H est pourtant certain que les
religieuses de Sainte-Cécile de Ki me portent
encore l'habit des Humiliées, el qu'elles se
reconnaissent toujours pour religieuses de
cet ordre. Une dilïérence qu'il y a entre les
observances de celles de Rome et celles des
autres Humiliées, c'est que celles de Itome
ne mangent de la viande que trois fois la se-
maine, et que les autres en mangent quatre
fois, en quoi celles de Rome paraissent plus
austères. Tous les monastères de cet ordre,
à la réserve de celui de Rome, étaient sou-
mis à la juridiction des religieux Humiliés,
qui avaient soin aussi de leurs affaires tem-
porelles : ce qui causa la ruine de quelques-
uns de ces monastères, qui, dans la suppres-
sion qui fut faite de l'ordre des Humiliés
Dictionnaire des Ordres relu ieux. II
(ayant perdu tous leurs litres, qui étaient
enfie les mains de ces religieux), lurent ré-
duits dans une si grande pauvreté, que, so
trouvant hors d'état de fournir à la subsis-
tance des religieuses , elles se trouvèrent
obligées de se procurer des pensions, doni
elles ont toujours joui en particulier jusqu'à
présent, cl sur lesquelles elles donnent une
certaine somme à leur monastère. Mais d'ail-
leurs, quoique la vie commune n'y soit pas
observée, les religieuses ne laissent pas d'y
vivre avec beaucoup d'édification.
Elles se lèvent la nuit pour dire matines.
Landes et primes, qu'elles disent le malin,
sont suivies d'une demi-heure d'oraisou
mentale; elles en font encore une autre de-
mi-heure après compiles. Quatre fois la se-
maine, il leur est permis de manger de la
viande; mais l'abstinence du mercredi e-l
inviolable. Elles jeûnent tous les vendredi^
de l'année, toutes les veilles des fêtes de la
Vierge, de plusieurs saints, et encore l'aveni,
outre les jeûnes ordonnés par l'Eglise, aux-
quels elles ne mangent aucun laitage. Elles
prennent la discipline trois fois la semaine
en carême. Elles ont beaucoup de dévotion
à la sainte Vierge, leur proicctrirc, et il y a
quelques monastères où les religieuses di-
sent tous les jours son ofiice, le chapelet et
ses litanies. Quelques-unes ont retenu l'an-
cien Iréviaire de l'ordre, comme dans les
deux monastères de Sainte-Catherine de
Rreia et de Sainle-.Madelcine al Cerchio à
Milan; les autres l'ont quitté pour prendre
le b.'éviaire romain, mais aj)p;iremment avec
répugnance, car il y a eu plusieurs écrits
qui ont été laits à ce sujet ; et de ces recueils
de manuscrits concernant l'orJrc des Humi-
liés, qui se trouvent dans la bihliolhèquc
Ambrosienne, dont nous avons parlé dans le
paragraphe précédent, il y en a deux qui ne
regardent presque que ce bréviaire, doiil
l'un a pour titre : Joannis Pétri Puricelli
Mediotuni coHegialœ S. Tliomœ theologi doc-
loris, responsto ad Italicum quoddam scri-
plum sub hoc titulo, nuper edilum, Rugioni
per le quati le monacite ddl' Ordine de gti.
Ilumiliali lasciato l'antico breviario deiT
anno 1548, devono pigliare il Rotnano ; et an
commencement de l'autre l'on trouve écrit
de la main de l'eu M. Bosca , bibliothécaire :
In hoc libro conlinentur : Joannis Pétri Pu-
ricelli Laurentianœ Mediul .ni basiticœ archi-
presbiteri argumenta quœ cogunt moniales
ordinis llumiliatorum psallire more liomuno.
H y a encore dans un antre recueil une con-
sultation du même Puricelli au sujet de m
bréviaire, qui est sous ce litre : Consulta
del Puricelli pcr le nionache inlorno ull' uf/i-
cio , avec uu traiïe particulier de l'ofUn;
divin.
L'habillement de ces religieuses consiste
en une robe et un scapulaire de drap blanc;
et, pour conserver quelque chose de l'ancien
liabillenient, elles portent par-dessous une
petite tunique de couleur de tendre. H y a
même un des (rois monastères de Alilan uu
elles mènent, l'hiver, par-dessus l'Iiabit blai-.o
une tunique de couleur cendrée. Leurs voi-
10
m
niCTIONNMRE DES
les sont titanes dans la plupart des monaslù-
rcs, et ils doivent l'être, selon l'espril de
l'ordre; n)ais dans quelques nion;isi(^ies ,
comme dans ceux de lUimc el de N'erceil, ils
SiMil noirs. On |i ur en donne (lour in profes-
sion un de suie, qu'elles portent aussi à la
roinniunion et d.ms les grandes Cf^'rénionics.
Leurs pniitOLifles sonl Manches aussi, et elles
ne porienl i oint de manteau; il n'y a que le
seul monastère de Sainte-Marthe, à Florence,
où les rclipicuses en perlent. Les saurs con-
»<'rscs ont retenu le nom de Berrctines, el
elles sont encore habil'ées de couleur cen-
drée, ayant, connno les reliijicuses, une tu-
nique, un scapulnire el un voile de loilc
lilanclie (I). Elles disent pour Itur office cer-
tain nombre de l'ater il d .4ic.
Il y a encore dans le Milanais d'autres rc-
LiRieusis du môme ordre qui observent la
même règle; mais leur habillement, leurs
constitutions cl leurs pratiques sont dilîé-
renls, principalement dans lo bourg de Va-
OlUifltS RELIGIEUX. 495
rèse, situé sur les confins de l'Etat de Milan,
où il se trouve un monastère fort ancien
appelé Saint-Martin, parce que apparem-
ment l'église est consacrée à l'Iionncurde co
saint. Leur habillemenl consiste en une
robe, une cdnlnre cl un scapulnire fort lar-
ge, (|ui tombe depuis les épaules presque
jusqu'au bord de la robe, l'illcs ont deux
voiles pour couvrir leur léic. Tout cet li.ibil-
lemcnl est blanc, aussi bien que le-, deux
voiles. Nous en donnons ici un desj-in (2) Itl
que nous l'avons trouvé dans le P. Bon.mni,
Jésuite. Ce monastère de Sainl-Marlin a été
soumis au général de l'ordre; mais dans la
suite les religieuses en furenlsouslrailes, et
se gouvernèrent par elles-mêmes.
Mémoires envoyés de Milan par l'ablies.<e
(hi monastère de SainC-Erasme en 1709, it
])ar d'aulrcs personnes en 1710, tant de Romr.
que de Milan. Phil. Bonanni , Calai, de (jli
Urdini rcligiosi, parte ii.
INDIENS. Yoij. Carmks de l'Etroite Ob-
si;nvANCE.
INFIIIMIERS MINIMES. Voy. Omucr.oNS.
IRLANDE (Anciens ordhes d') unis à celui
des Chanoines lldguliers.
La vie monastique est aussi ancienne en
Irlande que la religion chrétienne, puisque
ceux qui ont travaillé à y planter la foi
étaient engagés dans la vie monastique, et
qu'ils bâtirent un grand nombre de monas-
lèrcs qui furent remplis d'un si grand nom-
bre de religieux qui se sont rendus recom-
mandables [lar la sainteté de leur vie, que
l'on a donné par excellence à l'Irlande le
nom d'Ile des S„ints. Les (hanuincs Régu-
liers prétendent ;iVoir fourni les premiers
Pères de la vie monastique; mais c'est sans
;iucun fondement qu'ils ont mis au nombre
des saints de leur ordre saint Patrice, patron
ri apôtre de l'Irl.inde, puisque ce sainl avait
appris les observances régulières dans h s
inon.islèrcs de Marn oulicr et de Lérins
avant que de passi r en Irlande, cl que ces
monastères n'ont jamais appartenu aux
C^hancincs Urgulicrs, qu'on ne connaissait
pas même du l< mps île sainl Patrice. Il en
est de même des autres fondaieurs de la vie
monastique en cette île, dont il y a (iuel(|ues-
iins (|ue les lléncdiclins réclament; mais ils
n'ont jamais été ni ISéncdictins ni Chanoines
lUgulicrs; cl, si nous en parlons ici, ce
n'e>t qu'à cause que ers ordres diflérents
il'lrbnde, au moins la plus grande partie,
ont été confondus dans la suite dans celui
des Chanoines Réguliers, et que ces anciens
monastères, au temps du malheureux schisnie
dont nous avons parlé à l'article Anote-
11 iinK, élaient possédés par des Chanoines
Réguliers.
Ussérius, arclievêquc d'Armaih, dans son
Histoire de l'Antiquité des Eglises de la
Grande-Bretagne, fait mention d'un ancien
7nanuscrit où l'on voit que les anciens sainis
d'Irlande élaient partagés dès le commence-
ment en trois ordres réguliers; que le pre-
mier était appelé très-saint el était du lemfis
de saint Patrice, qui en était reconnu cimime
chef; que cet ordre était composé de trois
cent cinquante évêques de dillérentes no-
tions, tous saints, qui n'avaient tous qu'une
même tonsure et une même liturgie; qu'ils
convenaient dans le temps de la célébration
de la pâ(iue; (ju'ils parlaient aux femmes, el
que C( l ordre dura sous le lègne de quatie
rois d'Irlande.
-Le second ordre n'était pas si sainl que
le )iremier. Les moines qui en dépen-
daient élaient presque tous prêtres, au
rombre d'environ trois cents. Il y avait peu
dévéques dans cet ordre, où il ya»ail dil-
férenlcs liturgies; ainsi ils célébraient l.i
messe et l'olficc divin dilTéremment les uns
des autres; c'est-à-dire (selon le sentiment
de M. Alleman) qu'ils suivaient dilTerentcs
règles ou qu'ils formaient plusieurs congré-
gations. Il les compare aux différenles con-
grégations de l'ordre de Saint-Augustin ou
de Saint-Benoît, qui, par la diversité l'c
leurs babils el la difléience de leurs maniè-
res de uvre, semblent être des ordres sépa-
rés, quoiqu'il soit vrai de dire qu'ils sonl do
l'ordre do Saint-Benoît ou de Saint-Au-
gustin.
Ce second ordre avait cela de commun
qu'il célébrait la p'iquc comme le premier.
I! y avait une môme tonsure, on n'y parl.iil
jamais aux femmes, et il dura encore pen-
dant quatre règnes.
l'jilin le troisième ordre était sainl aussi,
(I) Voy., iln fin du vol., n' 121.
Ci) Voy., à la l.n .lu vul., ii" 12"2.
493
IflL
IRL
494
mais il l'élail moins que les dent autres. H
comprenait encore plusieurs saints moines,
au nombre de cent, qui étaient presque tous
•prêtres, dont il y en avait aussi quelques-uns
d'évêques. Leurs couvents étaient bâtis dans
des bois et dans des déserts. Us ne buvaient
que de l'eau et ne mangaienl que des hi rba-
gi'S qu'ils cultivaient eux-mêmes. Us sui-
vaient encore des règles différentes qui
aryiept chacune leur liturgie et leur ton-
sure; car les uns avaient des couronnes, et
les autres laissaient croître leurs cbeveux.
Ils différaient encore dans la pâque; car les
uns la célébraient le quatorzième jour de la
lune, les autres le treizième, et les autres
le seizième. Les uns la célébraient en tris-
tesse et les autres en joie. Cet ordre dura en-
core sous le règne de quatre rois.
La différence qu'il y avait donc entre ces
trois ordres est ainsi rapportée par Ussériu< :
Primus ordo erat sanclissimns , secundus
ganclior, lertius sanctus : primus sicui sol
oriens , secundus sicut tuna, terlius sicitt
stellœ; et le temps di^ ces douze règnes a éié
depuis 433 jusqu'en GG'*.
Les saints dont nous allons parler sont
reconnus pour les fondateurs de ces ordres
par.iculiers, (jui avaient dts règles, et nous
suivrons le rang que M. AU iiian leur a
donné, à l'excepliou île saint Patrice, qui
doit passer le piem er pour avoir é:é l'apô-
tre d'Irlande, n'éiant pas certain que suint
Ailbe, saint Moctée, saint Kieran et quel-
ques autres y aient prédié l Evangile avant
lui, comme ont prétendu quelques histo-
riens irland lis.
Tous les auteurs ne reconnaissent pas
saint Patrice pour être le fonJaleur d'un or-
dre particulier, quoiqu'il le soit de plusieurs
monastères; mais ce qui a fait peut-être que
(juelquesuns lui ont donné cette (jualité,
c'est à cause de ce manuscrit rapporté par
U^sérius, où il est qualiûé chef de cel ordre
Irès-sainl dont nous avons parlé. M. Alle-
nuin prétend qu'il est l'instituteur d'un or-
dre particulier dont la principale abbaye
était à Sabal. M. BuUcau semble être aussi
(le cet avis, lorsqu'il dit qu'outre Sabal, il
fonda plusieurs autres monastères el y éta-
blit une sainte observance; que les novices
faisaient leurs vœux à l'âge de vingt ans;
qu'il introduisit parmi eux la tonsure ro-
maine en forme de cercle; qu'il portail un
scapulaire blanc, et qu'à son imitation les
antres religieux irlandais se revêtaient de
robe de laine de couleur naturelle et sans
teinture, et qu'enfin il mourut dans son mo-
nastère de Sabal vers l'an 460.
L'ordre de Saint-Colomb, que Bède appelle
aussi Colomban, éluit un des plus étendus,
car il avait plus de cent abb:iyes ou monas-
tères qui en dépendaient dans t lUtes les lies
Itritanniques. La principale maison ou chef
de l'ordre était, selon quelques-uns, à Dair-
mag; Selon d'autres, à Derry, aujourd'hui
Loudondéry; el, selon la plus coiiiiuune opi-
nion, dans l'iie de Hu, Hi, ou de Juna, qui
depuis a été appelée du nom de ce sainl
Ycolmlàl, cl csl située au liord de l'irlan le.
et peu distante d'Ecosse. Ce saint, ayant été
préi her la loi aux l'icles, en convertit un
grand nombre et b.'ilit des églises. 11 fut en
si grande vénération comme apôlrc de ce
pays, que, du temps de Bède, c'evt-à-dire
vers l'an 731, par une discipline tout extra-
ordinaire, tous les évoques de la province
des Picles étaient sous la juridiction el la
dépendance du prêtre qui était abbé du mo-
nastère d'Ycolmkil, à cause que saint Co-
lomb, apôlre de la nation, avait été seule-
ment prêtre et religieux. Sa mort arriva
vers l'an 598. Il se trouve une règle en vers
hibernois qu'il avait dictée, et qui fui en
usage non-seulement dans l'ile de H', mais
dans les autres monnstères d'Ecosse qu'il
fonda ou qui furent bâtis par ses discipliis.
Saint Colomb portait une tunique blanche
et une tonsure faite en demi-cercle. Gel ordre
était compris dans celui qu'on appelait Sane-
tior, dont nous avons parlé ci-dessus; mais
le nombre des moines de Saint-Colomb de-
vait excéder celui du second ordre en géné-
ral, puisqu'il est marqué dans ce manuscrit
que le nombre des moines de ce second or-
dre n'était ((ue de trois cents, presque tous
prêtres. Il y avait plus de cent mon istères
de celui de Sainl-Colomb, et nous verrons
dans la suite plus de trois mille moines sous
la conduite de sain' Congall. C'est une diffi-
culté qu'Ussérius, Colgan el les autres his-
toriens d'Irlande n'ont point expliquée lors-
qu'ils en ont parlé. L'on pourrait dire que
ce manuscrit n'a seulement entendu parler,
par ce nombre do trois cents, que des abbés
ou supérieurs des monastères qui conipo-
s:iienl ce second ordre, qu'il appelle Sanc-
tior.
Après l'ordre particulier de Saint-Colomb
suit celui dj Saint-Albéc ou Ailbo, au moins
selon le rang que lui donnent Ussérius et
M. Alleman, lorsqu'ils ont parlé de ces or-
dres, quoique saint Albéj soit compris dans
le premier r.iiig des saints d'Irlande, c'est-
à-dire dans le premier ordre appelé Sanctis'
simus; aussi bien que saint Ueclan, saint
Moclée el saint Kieran, dont nous parlerons
ci-après. Quoi qu'il en soit, l'ordre de Saint-
Albee, quoique des plus anciens, était le
moins étendu. Sa principale abbaye était
celle d'Emely dans le comté de Tiperari
en Momon e, et cette abbaye a été depuis
érigée en évêché qui est uni à l'archevccho
de Cassiiel. Ussérius fait mention d'une rè-
gle en vers irlandais qu'il composa pour ses
diîC-ples.
Saint Declan , selon Golgan , avait aussi
fondé un ordre particulier dont la principale
abbaye était à Ardimore, sur les côtes de
Mouionie, et il était peu étendu. j
L'ordre de Saint-Congall était plus consi-,
dérable. Ce saint menait une vie si austère
avec ses disciples, qu'il y en eut sept qui
moururent de faim el de froi I. Ou lui con-
seilla de modérer celle austérité; il suivit
cet avis, pcrmeliaiU à ses disciples de vivre
couiiiie le commun des religieux; mais pour lui
il ne diminua rien de sa pénitence. 11 bâtil
le célèbre monaslèro de Bcncîior dans le
i%
nif.TIONNMRE DRS OIÎDRES ULI.IGIEUX.
l'oiiilc de Dounc, cl on dit qu'il cul sous sa
cuiiduile jusqu'à trois mille religieux. Il
inourul dans celle iiblinje l'un COI. Il com-
posa aussi une rè^lc pour ses disciples, qui
se trouve en vers liibernois.
Saint Mochude, qui a été appelé C.irlage,
ricrlla en sainteté et liàtit le monastère de
Hatlien dans la Médie occidentale ou West-
me:iili. où il eut plus du huit cents religieux
(|ui >i\ aient fort austèrciiient. Il fonda aussi
l'église de Lismor en Momonie, donl il fut
le premier évéque. Sa règle se trouve encore
ccriie en très-ancien langage liiheniois.
Tnc des prati(iues de ses religieux élail
([ue ceux qui avaient élc envoyés hors le
monastère allaient à leur retour se nietlre
à genoux devant l'abbé, el lui marquaient
qu'ils avaient laihé d'exécuter ses ordres.
Saint Luan, ou, comme (luelciues autres
l'appellent, saint Molu.i, avait été disciple
de saint Congall. Il élail si exact à obser-
ver les deviiirs do l'obéissance, qu'elle lut
souvent honorée de plusieurs miracles pour
relever le mérite de ce saint religieux; car
pour exéeuler plus promptcnient les ordres
de saint Congall, il mania un fer ardent
sans se brûler, el s'étant prosterné le long
de la mer, parce (]u'on lavait repris d'une
faute, l'eau, montant dans le temps du rc-
llux, n'inonda point la place où il élail. Il
fonda un grand nombie de moiiaslèies, el
même jusqu'à cent, selon le témoignage des
Irlan 'ais rapporté par sainl IJernard^l'ir
S- Miilach. Cdp. II). Le principal fui celui de
Cluainfei t dans la Lagenie, ou, selon d'au-
tres, Clonfeil dans le comté de Galway en
("onnacie, qui est aujourd'hui un évéchc.
On dit que l'abbé Dagan, allant à Itoaie,
jirésenta à saint Grégoire la règle qu'il avait
•ioniiée à ses disciides, cl que ce sainl pape,
l'aj a ni lue.d il en présence de tout le monde que
lesaini abbéqui l'avait composéeavail envi-
ronné sa communauié dune haie qui s'éle-
vait jusi]U au ciel. Il ne laissait point entrer
de femmes dans son monastère ; et, se voyant
près 1 e mourir, il exhorta ses disciples à la
I)crsé^él■ance dans le service de Dieu, leur
recommandant entre au'.res choses la stabi-
lité el le silence; el, après avoir reçu la
sainte comiuuniun des mains de saint i>o-
iian, qui l'étail venu voir, il mourut proche
de la cellule de saint Stellan, son d.sciple,
l'an G2>.
L'ordre de Sa inl-.Moclée n'était pas des moins
considérables, au rapport de t^olgan.t^e saint
foiiila plUNieurs abliajes, dont la principale
était celle de Fcrnes, où il résidail, et dont
il fut en^uiie évé(iue, lorsque Férues lut
érigée en évéché.
Saint l'inian ou l' inncn naquit dans la La-
génie el fut bajilisé par sainl Albaii. Klant
en âge d'étudier, il ^e retira auprès ite saint
Korcliène, ablié de Itoscur, qui lui ajiprit
les devo.rs de l'elat religieux. A l'âge de
trente ans, il passa en l'r.inte et alla à Toîts
pour ) continuer ses eiuiles. l-itantde retour
eu Iriande, il enseigna Us lettres saintes
49P
dans une des maisons donl il fut le fonda-
teur, cl ensuite dans l'abbaye de Clonard,
(jui est reconnue pour avoir été le chef de
cet oidre. 11 eut plusieurs disciples qui fu-
rent depuis illustres par leurs venus et par
leurs emplois. Sa nourriture ordinaire n'e-
tail que du pain, des légumes el de l'eau.
Aux jours de fêles, il mangeait un peu de
poisson et buvail du petit lait ou de la bière.
La terre lui servait de lit, et une pierre de
chevet. Hnlin une mal.idie contagieuse qui
aflligea le pays l'an 5'i8 l'emporta avec plu-
sieurs autres, el le fit passer dans la gloire
des bienheureux.
Sainl Ki.iran ou Keran avait eu ponr maî-
tre dans l'élude des leitres saint Finiaii
Ussérius dit que son ordre reçut l'approba-
tion des papes. Les deux principales mai-
sons de cet ordre étaient Seir-Keiran en Esl-
m alh ou Médie orientale, cl Cluan Xlicnois,
Cluiies ou Kiloom en Westmeath ou Médie
ocrideiitale, qui a été érigé en évéché et est
présenlcmcni uni à celui de Médie. Colgan
dit que cette abbaye fut comblée de bienfails
par les princes d'Irlande, el qu'elle eut
(|uantité d'autres églises ou prieures sous sa
dépendance. Ce saint mourui l'an 5'i9, étant
âge seulement de trente-trois ans. Il est dif-
lérent d'un autre sainl Keiran, évéque de Sa-
gir, qui mourut vers l'an 5120.
liiifin l'ordre de Sainl-Hreiidan avait pour
sa (iriiicipale maison l'abbaye de l'ort-Pur
dans la ville de Cloiiferl, au comté de (ial-
way en Connacie, qui depuis a été érigée en
cathédrale. On dit qu'un ange lui dicta la
règle qu'il prcscrivii à ses disciples et qu'il
en eut deux ou trois mille sous sa conduite.
Il mourui fort âgé, selon quelques-uns vers
l'an 577; d'autres mettent sa moi t dix ans
après.
Les historiens irlandais mettent encore
l'ordre de Saiul-Colomban et celui de Sainte-
Itirgitle; mais, comm« le |iremier regarde
l'onlrc de Sainl-Benoît, dans lequel il a clé
incorporé, nous n'en dirons rien ici, en ayant
parle à l'artiele Coi.omban, outre qu'il n'a
p.iinl fondé de maison-, en Irlande. L'. rdro
de Sainte-Birgitte a eu aussi son article spé-
cial.
Voyez U>sérius, de Anliquit. Ecchs. Bri-
taniair. Colgan, I il. SS. Ilibernur. Bulleau,
llis!. de l'ordre de Suint- llcnoit. .\lleniiin,
Ilist. monistiqur d'irlattde; cl Joan. Mabill.
AniKtl. Ord. S. lieti'd. loin. I.
ISAII'^ (Dks UiV.i.es t)E SAI^T), dk saint M »-
CàiuK el de quilqurs autres l'ères de la ti'e
monastique en Orienl.
Après avoir parlé des ordres de Sainl-.\n-
toirre et de Sainl-ltasiie, et avant que de dé-
crire l'origine et le progrès de celui tle Sairit-
racbome, nous dirons un mol de (inchpies
anlns l'ères de la vie nioni.sli(|ue d't)iienl,
dont (|ueli)ues-uirs ont de disciples de saint
Antoine el île saint i'aclionie, cl doiil les rè-
gles ont été reeueil ies par saint Itenoit d'A-
nianc (t . Il s'en trouve une sous le nom de
(I) C«d. Ilegul.; el Uulleau, Ilist. Monatl. d'Ciiini.
m ISA
l'abbé Isaïe qui est propre pour les Krmiles,
principalement pour les novices, mais on ne
sail quel était son monastère; l'on conjec-
lure que cet abbé pourrait bien avoir vécu
dans l'Egypte ou la Thébaïde. 11 y en a en-
core une dans le Code des Règles composée
, par deux saints Macaire, par saint Sérapion,
par saint Paphnuce et par trcnte-quaire au-
tres abbés. Cet abbé Sérapion est Sérapion
de Nilrie, ou Sérapion d'Arsinoé. Saint
Paphnuce était celui qui gouvernait un mo-
nastère situé près d'Hérai lée , ville de la
basse Thébaïde, ou plutôt Paphnuce Bubale,
prêtre du désert de Scélis. Les deux !\Iacaire
sont sans doute les disciples de saint An-
toine, et l'Ancien ou l'Egyptien, et sont dif-
fcrents d'un autre Macaire l'Alex^andrin ou
le Jeune, dont on voit aussi une règle. Celui-
ci était d'Alexandrie, lequel, ayant quitté
l'emploi qu'il exerçait, embrassa la vie reli-
gieuse, et fut un prodige de uior.ification cl
d'abstinence. Pour repousser les attaques de
la volupté, il s'exposa nu dans un lieu plein
de mouches, et y demeura pendant six mois,
de sorte qu'il en sortit tout défiguré comme
un lépreux. Il alla une fois à Tabeune vêtu
comme un ariisan ; et, ^ans se faire connai-
Ire, il fut admis dans la communauté. Mais
ensuite saiui Pachome le reconnut i)ar ré-
vélation, (t fut surpris de la rigueur de sa
pénitence; car il se tint debout pei:dant lu
carême, mangea seulement, ou plutôt il fit
s.enjblant de manger un peu de légumes
chaque dimanche, il retourna en Egypte et
continua d'y servir Dieu. Il avait Uivirscs
cellules cl demeurait tantôt dans le désert d.^
Mlrio, tantôt dans celui du Scétis et enco.e
ailleurs. Enfin sa lîiorl arriva vers le com-
mencement du V" siècle, et l'on prétend qu'il
utait sous sa conduite cinq mille moines.
(Juelques-uns croient que la règle qui est
suus son nom n'a point été écrite ni dictée
par lui , mais que c'est seulement un recueil
(le ses maximts et de l'observance régulière
qui se pratiquait dans ses monastères, et
que l'auteur de cette règle n'a vécu qu'après
saint Jérôme. On allribue encore une règle
monastiqueà saint Posthume, abbé dePisper,
qui succéda à saint Macaire dans le gouver-
nement des moines dont saint Antoine lui
avait laissé la conduite; et le diacre Vigile
fil une collection des maximes et des coutu-
mes des anciens m<ùnes sous le nom de Règle
Orientale.
il y a eu sans doute d'aulres règles dout
on n'a point du connaissance; car en Onenl
aussi bien qu'en Occident, il y avait presijue
autant de règles que de monastères, selon ce
queditCasb.! ii [lib. ii Institut., c, 2j. La plu-
pari en avaient d'écrites, quelques-uns obser-
vaient seulement ce qu'ils avaient appris de
leurs anciens et qu'une suite de temps sans
interruption y avait fait recevoir comme loi;
d'aulres n'avaient pour règles que la volon-
té de leurs supérieurs (1). Comme toutes
ces règles, soit écrites ou verbales, tendaient
toutes à une môme fin, qui était de ne songer
ISA
Vïi
uniquemonl qu'à Dieu et de ne s'occuper
qu'aux choses spirituelles en se débarrassant
de lout ce qui pouvait y apporter quelque ob-
stacle, c'est ce qui fai.-ait que clinque mo-
nastère n'était pas si aitaché à une règle,
qu il n'en observât encore quelques autres,
selon que l'abbé le jui^eail à pro|ios : de sorte
que dans un même monastère l'on observait
plusieurs règles écrites, auxquelles on re-
tranchait ou l'on ajoutait ce qui semblait
plus convenable à ce monasièrc, eu égard
au lieu où il était siluô et au temps au(iuel
on introduisait celte règle. Cependant, parmi
une si grande diversité de règles, il y avait
une si grande union entre les moines, qu'ils
semblaient ne former <iu'une même congré-
gation par rapport aux observances et aux
vêtements, qui étaient uniformes ; c'est pour-
quoi on passait aisément d'un monastère
en un autre, non-seulement des L ilins aux
Latins, des Grecs aux Grecs, mais encore
des Latins aux Greis, et des Grecs aux
Latins.
De ces règles orientales dont nous avons
parlé ci-dessus, celle de saint Macaire fut
introduite dans le monastère de Lérins en
ProveiKC, et dans celui de Réomay ou
Moiistier-Saint-Jean en Bourgogne, aussi
bien que dans celui de Saint-Seine. Le mo-
naslèie de Saint-Mémin, proche d'Orléans,
reçut celle de saint Antoine, ou du moins
cefle qui se trouve sous son nom, qui lut
observée aussi avec celle de saint Paeliome
et relie de saint Benoit, dans un monastère
de filles fondé sous le lilre de Sainte-Colombe
et de Sainie-Agalhc [IbicL, lib. \iii, el inap-
pendice), comme il paraît par les lettres
apostoliques du pape Jean IV, qui confirment
celle fondation à la recommandation de Clo-
vis II, roi de Erance. Celle du diacre Vigile
sous le titre de Règle Orientale ^C'ot/. RctjuL),
fut reçue dans queh|ucs monasières du dio-
cèse de Trêves. Enfin celle de saint Basile
dont nous avons parlé à l'article de ce nom,
fut reçue dans presque tous les monasières
d'Italie, après qu'elle eut été traduite en la-
tin par Ruûn {Annal. Beneilict. lib. i et vi).
Elle fut aussi introduite en France dans quel-
ques monastères, entre les auircs dans l'ab-
baye bâtie par saint Yrier, proche de Limo-
ges, qu'on appelle pré^enleraent de son nom
Saint-Yrier-la-Perciie. Ce saint y fil obser-
ver cette règle, conjointement avec les Insli-
tuliDUS de Cassien et les règles de tous les
abbés qui avaient été les fondateurs de la
vie monastique, selon le témoignage de Gré-
goire de Tours (lib. x, c. 2'.)).
L'on doit mettre au nombre des règles
d'Orient les Instilulions de Cassien, puisqu'il
ne les rédigea par écril qu'à la prière do
Castor, évcque d'Apt, qui avait fonde un
monastère dans le diocèse de Mines, dans
lequel il souliailait faire observer les mêmes
manières de vivre que celés que (jassien
avait vu praiiquer aux moines d'Orient, el
qu'il avait établies dans les deux maisons
qu'il avait fondées à Marseille. Ce ne lui pas
(l) Joanii. ALb;ll., Anial. Uciiedici., tuin. I, lib. i.
tas
DlCTIONNAinE DES ORDRES RELIGIEUX.
r;oo
sculeiiiciil en France que ces Inslilutinns ,
auxquelles plusieurs écri»€iins oui donné le
n-im (Je règli-, furoiil observées, mais elles
le furenl encore en plusieurs inoniislc^ns
il'EspaL'ne (I), où, dans l'abbaye tie Sainl-
l'iorre d'Ariane, il se Irouve un inantisi ril
Rous le litre de lUgulœ Pulitim, qui renferme
les règles desainlMaraire, de sainl Fachoine,
de sainl Rasi:e, de sainl Cassicn, de sainl
Beniiîl,dc s.iinl Isidore et dcsainl Fniclueux,
qui se Irouvcnl encore avec celle île sainl
Poslhunie dans un autre manuscrit sous le
même litre de Rrgulœ Patrum, d.ins le mo-
nastère de Saint-Pierre de Cardapnc au tlio-
côsc de Bui gos. D'où l'on doil conclure qn"a-
\anl que la" règle de sainl Benoit fut reçue
en Kspagne, on y ob^ervail les règles de ^ainl
Basile ou de Cassicn, et pcul-étre les deux
ensemble.
A la vérité les écrits de Ca'sien, cl surioul
ses Conférences, qui contie'ineiil les maxi-
mes cl les instructions (ju'il avait apprises
de la bouche d s plus célèbres dciiirc les
Pères ou abbés des déserts d'Egypte, ne fu-
rent pas exempts d'erreurs. Il y avait quel-
quessi'nlimenls qui ne s'accordaient pas avec
la foi touchant le libre arbitre cl la grâce.
Siint Prosp( r ùcrivil contre lui, et ne laisse
pas de reconnaître sa sainlelé, quoiqu'il com-
i)alte SCS erreurs, qu'il ne défendit pas avec
opiniâtreté. Victor, é» èiiue de .Marlyril en
Afrique, et quelques antres, ont purgé cei
ouvrages de Cassen des ei rem s qu'il ^ avait;
t'csl pourquoi le célèbre Cassiodre , ayant
bâ'.i lo monastère de Viviers dans la Caiabrc,
près de .*»qnilace, ordonna à ses religieux de
garder la règle îles Pères el de s'appliquer
avec grand soin à la leclurc des iraites de
Cas'-ien pour rinsiruclion des moines: mais
il les avertit de les lire avec précaution et
d"y j( iîidre les rorre lions qu'y avait faites
A'irlor. évèque de Marlyi il.
C'est dans la règle de Cassicn ou ses Insli-
lulions monastiques qu'on apprend quel
était riiabillemei l des anciens moines d'O-
r cnl. Ils avaient de peliies luniqurs de lin
dont les manches ne venaient que jusqu'a'ix
coudes. Ils portaient un capuchon ou fioc
qui leur descendait de la tète sur le hanl des
épaules. Ils avaient deux bandes de laine
qui, descendant du haut des épaules, se sé-
paraient et venaient se joindre sur reslomac
< n serrant l'habit et le pressant sur le corps,
Jifin qu'ils eussent les bras libres pour s'a-
donner plus facilement à toute sorte de tra-
vail. Leur manteau était d'une matière fort
grossière qui leur couvrait le cou et les
épaules. Ils portaient une robe de peau de
chèvre ou de brebis el marchaient loujcurs
nu-[)ieds ; mais dans le besoin ils se serv. icnt
de sandales, qu'ils quitlaient lorsqu'ils s'ap-
proihaient des S. S. mjsterrs [-I]. La célèbre
al)baye de Sainl-Viclor à Marsei le nous
donnera encore occasion de parler deCassicn
à l'ariiclo Victor.
ISIDORE (Saint-). Voy. Césaire (Sunt),
ISTBIK (Congrégation nu Tieus-Oudrk
ne Saint-Fbasçois en). Voy. Sicile (Congkk-
GATiuN de).
J.VCOBINS. Voy. Domimcains.
JACOBITES (Moines).
Les Jacobiles, que l'on devrait plutôt np-
yeU'T Monoiihysilef, puisque ce nom convient
particulièn-menl à ceux qui croient qu'il n'y
a qu'une nature en Jésus-Chri>t, (ont pro-
fe>sr6n de suivre la doctrine de Dioscore,
patriarche d'Alexandrie , de Sévère d'Antio-
che, il de Jacques surnommé Zanzale (.t). Ils
disent anathèmc à saint Léon el au concile
de (^halcèdoinc, el ne reconnaissent qu'une
nature en Jésus-Christ . comme une seule
pcrsonic el une seule volonié. Ils ont pris
leur nom de ce Jacques dont nous venons de
parler, parce qu'il a le plus contribué à
maintenir cette hérésie el à l'éieidre eu
Orienl. Le surnom de Zanzale, ou de Bardai,
selon les Arabes, el que les Grecs expriinenl
par celui de liariuUil , lui fut donné ci cause
qu'il n'était ordinairement habillé que de
haillons ou de pièces de ces grosses clorfcs
• liint on c Mivrc lis cliameaux. Il fut serrè-
ti-mcnl ordonné arrluvèquc par les évéqucs
de sa secte, qui étaient en [irisnn en exécu-
tion des édits des empereurs contre les hé-
rétiques; el, après avoir reçu d'eux uni> en-
tière autorité, il alla dans toute la Syrie, la
(1) Riify, Ilis'. lie }lars,ilU. Jn.nnn. Mal.illon., An-
rMl. Diitiùict., Iib. m.
Mésopotamie cl d'autres provinces. Partout où
il ne trouvait point d'évèque, il en ordonnait
ainsi que des prêtres el des diacres, ei il en or-
donna un si grand nombre , que le nom de
Jacobiles demeura à ceux de sa communion,
qui l'ont toujours eu en si grande vénération,
qu'ils l'ont même inséré dans leur calendrier.
-Mais, comme il y a quelques auteurs qui
disent qu'il cl il disciple et contemporain do
Sévère, patriarche d'Antiochc, qui vivait à
la fin du \» siècle, 1 1 qui sotitenait, à ce qu'ils
prétendent , les erreurs d'Eutychès et de
Dioscore, le P. Du Solier, de la compagnie de
Jésus, dans son Traiié historique des Pa-
triarches d'Alexandrie, prétend que ce no
fui que dans le vii« siècle que ce Jacques
Zanzale employa tous ses soins à rassembler
et <i réunir les restes dispersés des sectalcnrs
d'Iiulycliès el de Dioscore, divisés en plu-
sieurs branches connues sous les noms de
Sévériens . de ïhéodosiens , de (iaïnailcs el
de Julianistes, cl fort affaiblis par les persé-
cutions qu'avaient excitées contre eux les
Melchites ou orthodoxes , sous l'empire de
Jusiinii'i), de Justin dit le Jeune, de Tibère
et de Maurice, et que des débris île ces héré-
tiques il forma un nouveau parti sous son
nom. Il avoue que ce Jacques Zanzale peut
(2) Vnji , h la lin <lii \ol., ir li".
(5) Heuaud'ii, iV ()<'(«,(/ rfi /« foi, l. IV, liv.i, c. 7.
SOI
JAC
JAC
502
élre appelé disciple de Sévère, palriarclic
d'Anliochc , qui certainement vivait à la fin
du V siècle, mais seulement en ce sens, qu'il
était un des plus zélés défenseurs des dogmes
soutenus parce patriarche, et qu'il ne s'en-
suit nullement de là qu'ils aient été contem-
porains.
Comme il y en a qui prétendent encore
que Sévère et Jacques Zanzale commencè-
rent à brouiller en Orient sous l'empire
d'AnasIase, et que ce sentiment est appuyé
sur l'autorité d'AnasIase le Sinaïle, qui, dans
le livre intitulé Le Guide ou Le Conducteur,
on spécifiant les divers sectateurs d'Euiychès
et de Dioscore , n'oublie pas Jacques et ses
Jacobiles, le P. Du Solicr répond que c'est
à tort qu'on a fixé l'époque ite ce livre à
l'année 550, auquel temps vivait à la vérité
un Anastase, patriarche d'Anlioche ; mais
qu'il y a en trois Anastase qu'on a confon-
dus ensemble pour n'en faire qu'un seul ;
qu'il y en a eu deux patriarches d'Anlioche,
tt que le dernier et le plus jeune des trois
était moine du mont Sinaï et auteur de ce
livre, (lù il raconte des faits arrives depuis
l'an G04 et vers l'an 630, après les commen-
cements du niahomélisme ; d'où leP. Du Sulier
conclut que ce moine, n'ayant parlé de Jac-
ques et des Jacobiles que dans un livre écrit
vers le milieu du vu* siècle, on ne peut pas
tirer de là un avantage pour prouver que les
Jacobiles aient été avant le vu* siècle.
Quoique le P. Du Solier prétende que Jac-
ques Zanzale ait rassemblé les restes disprr-
sés des sectateurs d'Eutychès et do Dioscore,
itivisés en plusieurs branches connues sous
les noms de Sévériens, de Théoilosiens , de
Gaïnailes et de Jnlianistes, ce sentiment n'est
|ias approuvé par M. l'a bbéKenaudol, pu isi) lie,
selon cet illustre écrivain, les Jacoliilcs di-
,sent anathème à Eutychès ; qu'ils reganleiit
comme héréliqurs les disciples de Julien
d'Halicarnassc, qui disiil (jue le corps dans
lequel Jésus-Ciiri^l avait pris cliair était in-
corruptible; et (lue (iftns leurs prières, ils
louent Sévère d'Anlioche d'avoir détruit les
imaginations de Julien.
La principale erreur des Jacobiles est
donc de n'admettre qu'une nature en Jésus-
Christ. On leur en a imputé d'autres dont ils
lie sont nullement coupablfs, comme de nier
la Trinilé, et, par celle raison, de ne faire le
signe de la croix qu'avec un do'gl. Le peu
d'erreurs où ils sont présentement engagés a
beaucoup contribué à la réunion de plusieurs
personnes decelie sccteàl'Eglise roinaine(l).
L'an 1662, Andic, arclievéque d'Alep, qui
était déjà caiholique, et avait envoyé sa
profession de foi au pape Alexandre VU,
après avoir abjuré ses erreurs, fiit élevé au
patriarcat d'Anlioche pour la nation jaco-
iiile. Il n'accepta celte dignité que pour tra-
vailler plus tfficaceinent à ri-unir les Jaco-
biles à l'Eglise romaine, et y réussit en par-
lie, malgré les persécutions que lui suscitè-
rent les hérétiques. Mais, ajjrès la nio;tde
ce patriarche, qui arriva le 28 juillet 1677,
un nommé Abd-Elmésich se mit en possession
du patriarcat à force d'argent, et persécuta
fort les catholiques ; ce qui fil que les plus
fervents et lespluszélésfirent si bien par leur
adresse, qu'ils trouvèrent moyen de le faire
dé| oser et de mctlre en sa place levéquc de
Jérusalem, Ignace-Pierre, zélé catholique. On
employa le crédit de l'ambassadeur de France
à la Porte pour avoir un commandement du
Grand-Seigneur, qui confirma son élection,
avec ordre à lous ceux de sa nation de lui
obéir. Il fut installé dans son siège patriar-
cal par huit archevêques et évêques. savor:
un Maronite, trois Jacobiles calhoIi<iues,
deux Grecs et deux Arméniens. 11 envoya
ensuite sa profession de foi au pape Inno-
cent XI, qui lui envoya le pallium. Cepen-
dant les hérétiques jacobiles ayant employa
beaucoup de fourberies pour faire confirmer
par le grand visir et le mufli d'Alep l'élcc-
tiou qu'ils firent en 1687 d'un patriarche de
leur cabale, leur faisant accroire que le pa-
triarche Ignace-Pierre était mort, ils réussi-
rent dans leur entreprise. Mais, en 1693, le
patriarche catholique fut rétabli dans son
siège à la soUieitalion du roi de France, et le
patiiarche Ignare-Pierre choisit pour coad--
julcur un archevêque jacobile catholique, qui
fut reconnu en cette qualiié par les catholi-
ques de celle nation.
Cepenilanl une furieuse persécution s'éleva
en 1701 contre le patriarche Ignate-Pierre
(•2). Le Grand-Seigneur Mustapha II, pressé
par le mufli, grand ennemi des catholiques,
qui en éta.l sollicité par les hérétiques, en-
voya un eoiiimandcment pour obliger les
Jacobiles, qui fai-aient profession de 1 1 reli-
gion catholique, de retourner à l'hérésie de
leurs ancêtres. Le patriarche, l'archevêque
d'Alep et les principaux du clergé de la na-
tion surienne ou jacobite, n'ayant jias obéi
à cet ordre, après avoir reçu plusieurs mau-
vais Iraiîements et une rude bastonnaile,
furent condamnéâ à êlrc renfermés, le reste
de leurs jours, dans le ihâteau de la ville
d'Adané. Le patriarche et l'archevêque d'Alep
eurent le bonheur d'y mourir pour la défeiiso
de la foi. Mais les révolutions arrivées dans
l'empire ottoman, en 1703, le Grand-Seigneur
Muslapha ayant été déposé, et le mufti ajant
subi une mort houleuse, ramenèrent pour un
temps la paix dans les Eglises jacobiles ca-
tholiques, ou plutôt dans les Eglises surien-
nes, car les Jacobiles , après avoir abjuré
leurs erreurs, prennent le nom de Suneiis,
et quittent celui de Jacobiles comme un nom
infâme. Celui qui succéda au mufti se mon-
tra plus favorable à leur égard ; mais le< per-
sécutions ont été renouvelées quelque temps
après, ce qui est cause que la religion ca'.ho-
lique ne fait pas parmi les Jacobiles schisma-
liques lout le progrès qu'on pourrait atten-
dre du zèle des prélats qui sont toujours de-
meures fermes dans la loi catlinl.que malgré
les pcrscculions.
(I) Le!lre du P. Verz'^nn an P. Fleiirinn, dans le
IV* Kccueil (li!S Lcltres editian es des Missions de la
Coirip. de Jésii., et l'épi.'rc dédie, du inènie Recueil.
(-2j IL<:d. Lellrc du P. Vcrz •au au l\ de la Cliaise.
805 DlCTlONNAinE DES ORDRES RELIGIEUX- ;i04
Quoique pnrmi les séruliors il y ait grand ris, donne le nom de chevaliers aux cla-
iionihrc de calholi(iui-s, la plus gr.inde partie iiolncs hospitaliers dont nous allons parler,
ties religi.'u\ .-ont luMiinio ns toujours dans De tous les ailleurs néanmoins qui ont tr.iité
l'erreur. Leur principal monastère est à D<r- dos ordres militaires, il n'y en a aucun qui
zaphar.im, firoche la ulle de .M.irdin en Mé- ait fait memion d.» celui de Saint-Jacques du
sopotamie, dans lequel le patriarelic fait sa Haut-Pas: peul-ëire aussi ont-ils cru qu'il
résidence lorsqu'il est schismatique. Il y en élait le même que celui de Sainl-Jacqucs de
a encore un autre proche de la même ville; l'iipée. Il y en a d'autres qui leur donnent
cleiix ,i une journée de la ville de Damas ; le nom de chanoines réguliers; mais aucun
deux à une journée de la ville de Ninive ; un ne rapporte rori|;ine de cet ordre. Il est cer-
à l'iiiiris, sur le chemin de Mardin ; un autre tain cependant qu'il y a eu un ordre de Sainl-
à Kilesse, et quelques autres en différents Jacques du Haut Pas, dont il y a une pa-
|ieux;mais presque tous abandonnés, et où roisse à Paris, qui en a rel<'nu le nom à cause
il y a peu de religieux. Ils ne mangent ja- que tluillaunie Violle, évèqui; de Paris, du
mais de viande, non pas même à l'extrémité consentement du commandeur d'un Ix^pital
de maladie, aussi bien que le patriarche et dépendant de cet ordre, et qui était situé au
Icsévèques, et ils observent les mémos ca- faubourg Saint-Jacques, érigea la chapelle
rémcs et les mêmes jeûnes que les Maroni- à- cet hôpital en église succursale pour le
les, excepté la veille de saint Maron, qu'ils secours des paroisses de Sainl-lienoîi, de
ne reconnaissent point, et auquel ils snb- Saint-Hippolytc eldeSaint-.Médard.l'an 156U;
slituent Jacques Zanzale, qui les a pervcr- ce qui dura jusqu'en l'an lo12, que les reli-
tis. Je parle seulement des schismatiques; gieux bénédictins de Saint-.Magloire, qui
car il y a de l'apparence que les catholiques demeuraient où sont présentemefil les filles
jeûnent la veille de saint Kplirem, qu'ils ont Pénitentes en la rue Saint-Denis, furent Irans-
pi i> p.iur pa!rou de leur Eglise de Home. férés par ordre du roi Charles IX en cet hô-
t^nfôrmément au rite que suit cette na- pilai. Ils se trouvèrent incommodés d'avoir
ton, ilschanienl l'ofrwe en 1 ingue syriaque, une paroisse dans leur église, et les parois-
oiil les mêmes inslriimints de niusi(iue que siens, d'un autre côlé, étant bien aises d'a-
les Annéiiicns, et consacrent avec du pain voir une église dont ils fussent les maîtres,
kvé, (le n)émc que les (in es, contre la pra- en firent bâiir une à côlé de cet hôpiial, la-
ilque lies Maronites et des .\rméniens ; luais quelle fut achevée l'an i'Slk et a toujours
lisent ceci de particulier qu'ils mettent de retenu le nom de Saint-Jacques du Haut-Pas,
l'huile et du sel dans leur hostie, qui est si que l'hôpiial quitta pour prendre celui do
griinde et si épaisse, qu'on en peut facile- Siint-.Magloire, à cause du corps de ce saint
ment communier plus de cent personnes, que les iJénédictins y apportèrent avec eux.
J,'habiilcmeiil(t) des religieusest assez sem- |,e P. du Rreuil, faisant mention de cet
blable à celui des Maruniles. Il n'y a point |,ôpil;il qui fut fondé par le roi Philippe le
d£ mon, islères de rcligieusesde cette nation, Bel, qui commença à régner l'an 1-28G, dit
et celles qui se consacrent à Dieu pir la pro- qu'ji fut nommé'di Haut-Pas, non pas à
fession reiigijusc demeurent chez leur- pa- cause de la situation du lieu, ni parce qu'il
rents. fai.le monter des degrés pour y cinrer, mais
M. 'Saphar,évêquedeXIardin,(iui demeure parce qu'il était membre et dépendant du
depuis quelques années à P.ume, où il ét.iit grand hôpital de Sainl-Jacqucs du Haut-Pas
>cnu recom.ailre le souverain pontife comme j^ Luques en Italie, aux de[iens duquel ou
chef de l'Kgli-e universelle de la part dis entretenait un pas-age sur la rivière d'.\r-
Kglises catholiques surienncs, a acheté un gue-le-Hlanc dans TElat de Florence, sur le
hospice dans cette capitale de l'univers pour grand chemin de Home, où l'on avait accou-
Ics evéciueset les auires personnes de sa na- luiiié de payer de grands iributs et exactions,
lion. lien prit possession le 18décembrel(59G, q„j furent alTraiichis par ceux de cet hôpi-
a^aiit aussi obtenu la permission de célébrer jal cl des auhes qui y étaient unis, de sorte
H ceitaiiis jours de l'année dans l'église de que les [èlennsy passaient librement sans
.et hospi.e, conformément i\ leur rite; ce ri,<n payi r. lia voulu sans doute parler de
q (il fit pour la première fuis le 9fevrierlG'J7, l'Ariio, ny ayant point de rivière qui porto
|uur de saint Kphiein de S} rie, dont la fête \^. „om d'.\rgne-lc-l!lanc.
avait été transférée à ce jour. Outre le grand maître général de cet or-
i'rances. Quaresm. Ehici-I. Terr. Saiiclw. (),e.qui résidait en Italie, il y n\ivl un com-
Jiiaiin. liapt. Du Solicr, Tractât. hixl. de pa- „.andiur généialponr le royaumede France,
iiuiici. Alexand. Le Ferre, Tliéùtre de ta ,.„inmc il paraît par l'épitaphe d'un com-
y 11/7. ic /.'' ,)/oH/r de D-jvit). Kugènc Roger, mandeur qui était contre le mur de l'église
»'oj/'i,e (/c /(( Terre Sainte; et M éinuii es ma- ,1,; l'hôpital de ce nom à Paris, avant que
«^■criis. les Pères de l'Oratoire, qui le fiossèdent prè-
JACtjLKS ni: SALOMON A Vf.msf. (DoMi- sentement sous le nom (V Saint-.Magloire,
nu:ains du la congiiicgaTiON 01;). \ uy. Losi- ,,1 qui ont sureédé aux Bénédictins, eussent
•'Ai«i»iE. fait embellir le chœur. Nous la rapportc-
JACtJL'KS DU HAUT-PAS ou di: LUQUIiS rons ici.
(i:u*>oiNKS iiusi-nALiKiis DK Saint-). I.'an mil rirt'] cei}'! vinqt-sir ddvanliige
Le P du Breuil, dans ses Antiquités de Pa- l'ar m fil crtinneati ilvnuer hertluyc,
(I) Voy., ;. 1.1 lin .lu V..I ,1," \ll.
505
JAC
JAC
SOG
Fut mis et clos en ce dévot séjour
D'octobre prins le quinzième jour,
llalifjieuse ethonneste personne
Dont renommée en plusieurs places sonne.
Publiquement, frère Antoine Cann
Qui par bon droit lui vivant advenu,
Fut commandeur de ce ne doute pas
En gênerai, Saint-Jacques du Haut-Pas,
Et pur mérite exempt de maléfices
Il posséda inctres trois bénéfices.
Sens naturel montra en tout endroit
Par sens acquis il fut en chacun druit
Licencié, et après tous ses titres
Vertu en lui déclara par registres.
Que riiospital en très-belh devise
Fit faire neuf, et qrand part de l'église,
Semblablement comme on a etidence
Le. corps d'hostel estant en décadence
De charité fut le vrai exemplaire
Pauvre, repeul pour à Jésus complaire,
Et sans cesser prenait la cure et soin
De tes panser quand il eslo't besoin,
Priez pourlw, dites dessus sn lame
Ci (jistle corps, en paradis suit l'ame.Amcn.
Au bas de ce mur il y a une tombe sur
laquelle il y a cet autre épilupbc du môme
commandeur:
Ci gist vénérable religieux et discrète per-
sonne F. Antoine Canuen son vivant licentié
en chacim droit et commandeur gênerai de
l'hospital de Saint-Jacques du Haut-pas en
roiaume de France, qui trépassa lel^ jour d oc-
tobre l'un 1526. Priez Dieu pour son ame.
L'on voit encore celle-ci surune aulru tombe:
('i gist noble homme Reveiend Père en Lieu,
F. Jean Dimanche de Lucques autrement De-
pesse, jadis grand maistre général de l'ordre
de Saint-Jacques du Haut-pas qui trépassa
l'an de (;race l'i0.3, le qu triéme jour du mois
de janvier. Dieu en ail l'ame.
Il paraît par l'épitaphe di- ce grand maî-
tre Dimanche, qui y est qualifié de Révérend
Pt-re en Dieu, et par ce'.lc du commandeur
Canu licencié en l'un el l'autre droit et qui
possédait trois bénéfices, aussi bien que par
les figures qui sont représentées sur les
lombes quel'on voilencore dans elle église,
el qui ont toutes la tète rasée en fiirnie de
couronne comme la portent les reclésiasti-
ques.queces hospitaliers se firent ordonner
prêtres dans la suite, quoique dans 1 ur
urigincils ne; fussent que des frères lais qui
faisaient eux-mêmes les bacsoùils passaient
les pèlerins sur les rivières, se'cin leur pre-
mier insliUil, au moins ceux ([ui avaient des
élablissements sur les boids des rivières oîi
il n'y avait point de ponts. Cai', pour reux
qui demeuraienlà Paris, ils éiaicnt bien éloi-
gnés de la rivière, el n'avaient été élalilis
dans cette vile que pour exercer Ihospita-
lilé envers les pèlerins. Mais, comme les au
très religieux de cet ordre, ils porta enl sur
leurs manteaux des marteaux (lui avaient le
manche po nlu par le bas, con.me pour faire
des trous, afin de faireentrerplusaisémeni les
clous dans le buis. Ces religieux portaient
CCS ntarteaux de différentes formes, comme
(1) Voy., à la llii du vol., n" ISo
l'on remarque aussi .sur les tombes qui sont
restées dans l'église de Sainl-Magloire, où
l'on voit de ces hospitaliers, dont les uns oui
le marteau en furme de maillet de tonnelier,
d'autres dont les marteaux ont deux pointes
à chaque côté, d'autres qui ont des marteaux
dont les travers sont en forme de haches,
tous ces marteaux ayant le manche pointu.
Quanta la couleur de leur habillement ()),
elle était blanche, el non pas noire, comme
dit le P. Alhanase de Saint-Agnès dans >oii
Chandelier d'Or, qui prétend que cet halil-
lement consistait en une tunique et un man-
teau noirs, avec un capuce rouge. Le P. du
Breuil donne la qua'ité de chevaliers à ces
hospitaliers ; il y en a d'autres qui leur
donnent celle de chanoines réguliers. Il se
peut faire qu'ils étaient chanoines hospita-
liers comme ceux du Saint-Esprit de Mont-
pellier ou in sassia, et ceux de Saint-An-
toine de Viennois, qui, quoique chanoines,
sont aussi hospitaliers, et à qui quelques-
uns donnent aussi sans aucun fondement le
titre de chevaliers.
L'ordre de Saint-Jacques du Haut-Pas fui
du nombre de ceux que le pape Pie II suppri-
ma, et dont il appliqua les revenus à l'ordre
de Notre-Dame de Bethléem, qu'il institua par
sa bulle de l'an l'i59, d.mt nous avons parlé
à lariicle Bethléem. Il subsista néanmoins
longtemps en France depuis celte suppres-
sion, comme fait foi l'épitaphe du comman-
deur Canu mort en lo2G ; et il y avait même
encore que'ques-uns de ces religieux dans
le mêmeliôpilil de Paris lorsque les Béné-
dictins de Saint-Magloirc y fureni transférés,
l'an 157:2, par ordre du roi Charles IX. Cet
ordre est aussi énoncé dans l'édit de Louis
XIV de l'an 1(]72, par lequel Sa Majesté
avait uni à l'ordre de Saint-Lazare les biens
de plusieurs ordres militaires et hospilaliers,
(]ue l'on regarda comme supprimés, du
nombre desquels était celui de Saint-Jacques
du Haut -Pas.
Voyez Du Breuil, Théâtre des Antiquités de
Paris, lie. il, paq. 579, et les mêmes par
Malingre, liv. ii, paq. V.»7.
JACQUES DE L'Èl'ÉE (Moines de Sâiisi-).
Voy. Épée.
JACQUES EN Hollande et de SAINT-
ANTOINE EN HaINAUT (CUEVALIEIIS DK
Saint-).
Auberl le Mire, dans ses Origines des Or-
dres militaires, dit que Florent V, comte do
Hollande, Zélande et Frise, institua à la
Haye, l'an 1290, un ordre militaire sous le
nom de l'apôtre samt Jacqu s. SchoonebecL:,
qui, clanl hollandais, devrait avoir mieux
êié instruit de cet ordre que les écrivains
étrangers, s'en rapporte néanmoins au lé-
ino gnage d'Auberl le Mire et à celui de M.
Ashuiole, qui discal que l'on trouve dans les
arehisesde Hollande un manuscrit authen-
tique de rinslitutiun de cet ordre. H y a bien
de l'apparence que M. Ashmole et l'abbé
Ciustiniani, ((ui ilii encore la même chose, uo
parlent aussi qu'après Auberl le Mire, qui
.',07 DICTIONNAIIIE DES OUDUES nF.LIGlEL'X. S08
a«sure avoir lire fiJùlcmpul ci' qu'il dil <lc des personnes Je I.i première noblesse qui en
(el «inlrc d'un ancien registre en liingue aile- auraient fait preuves, cl les duclcurs qui se
maniie, nDuinié Reiiister der lUddersap, cl seraient rendus nob'cs p ir leur science; el
l'avoT triduil enlalin. (}uoi qu'il en soil, ce que les rhevaliers porteraient un collier d'or
coinle lie lîollanile, selon Aubert le Mire, (Il auiiuel divail pendre un T d'or ou d'arjii-nt,
rlievali'-rs de cet ordre douze sei-jneurs, en- selun leur noblesse, avec une clochette d'ar-
Irc lesquels furent l.aurelol. comte d'IIamil- genl (2).
Ion, aiiibassaili'ur du mi (rKcos«c; fiod.ird Ces ailleurs ajoutent que le duc Albert, in-
deHoi>ihols, envojé de Wesiplialie, et Hen- stiluleur de ces chevaliers df Saint-Antoino
ri, comle d'Ilenneber.', envoyé de l^idognc, dans I.' Ilainaul, ayant résolu d'envoyer une
ri leur donna pour marque de leur ordre une armée en Prusse au secours des chevaliers
rliaine d'nr sur laquelle il y avait six cnquil- Teuloniques, établit dans l'ordre des che.va-
Ics, avec une méda lie pendante au bas du liers de S liiit-Anloine un connétable et un
loliier, où était l'iniafic de l'apiilrc saini Jac- iiiaiéchal de camp ; que les seigneurs d'An-
(liies (Ij, le tout pesant un mire cl demi ; et loin, de Lii;ne, d'IIauré, de Lonuucval cl de
chaque chevalier, après avoir fait serinent lîossu, s'enj:a:;èrent dans celle milice: que
sur les saints Evangiles entre les mains de fiérardd'Enghien, seigneur d'Hauré, elJeni,
l'évéquc d'L'Irceht. donna à Jean PayporI, seigneur de Ligne, chevaliirs de cet oriiro,
héraut de ir Taiide, son cru, cù ét.iienl les élanl allés, l'an 1390, à la guerre d'Afrique
armes di' sa maison, iiiu' l'on al lâcha dans la avec plusieurs seigneurs du coin lé dii Haiuaul,
salle du p liais de la Haye |iour en conserver cl se Irouvaiil la même année à lihodes avec
l.i mémoire. quelques seigneurs français qui étaient aussi
Florent V, instituteur de cel ordre, ayant chevaliers de l'ordre de Sainl-Antoine, ils
(■orrom|iula fimiiicd'un genl il homme nommé leur firent un récit si avantageux des miracles
llérard de \'elsen, ce genlilhomme cl sou que ce saint faisait dans la chapelle déJ ée
heau-pèrc conspirèrent contre lui l'an 129o, en son honneur dans le bois d'Haurc, (juc
le prirent el le menèrent au chàieau de ces seigneurs français leur conseUèrenl de
Mude. Ayant appris qu'on levait contre eux faire venir en ce lieu des rc'igienx de l'ordre
une armée en Hollande, ils mirent ce comle de Sainl-Anloine ; ce qu'ils exécutèrent dans
sur un cheval, croyant l'emmener en Angle- la suite, le comle d'Os Ire va ni enayant obleuu
terre ; mais Gérard, se voyant pressé de Irop sept de l'abbaye de Saint-Antoine en Dau-
prés,lui donna vingt coups d'epée et le laissa pliiné, qui furent établis, l'an l'tlo, dans celle
mort dans un fossé. Ce qu'il paya bien chè- chapelle, et auxquels on fit bâtir un monas-
remeiil peu de temps après, car quelques 1ère el un hiipital pour y loger les pauvres
auieurs r.ipporient qu'il fut exécuté à Ley- pèlerins ; qu'enfin les clievaliers de Saint-
den, ayant été mis dans un lonneau |)lein Antoine en Hainaut choiMrent ce monasiére
de clous, dans lequel ou le roula par toute la pour le lieu de leur assemblée, qu'ils y met-
\ille. laienl leurs portraits avec leurs armes en-
l-'oidrc militaire de Sainl-Antoine fut in- tourées d'un collier d'or failde corde à nœuds
slitué en l.'i82 par Albert de Bav ière, qui, par avecIcTetuneclochetlc, comme l'on en voyait
la mort de Guillaume dit l'ins^'usé, son frère, encore de leur temps. Auherl le .Mire, parlant
hérita des comtes du Hainaut, de Hollande, de cel ordre (Orig. ord. equ. cap. 12), dit
Zélande et Frise, qu'il avait gouvernés en aussi que le collier était f.iit eu forme de
qualité de tuteur pendant 1 1 delenlion de ce corde d'ermite, auquel pendait un hâiou à
même tiuillaume, ((uc ses stiels avaient été s'appuyer el une clochette. Tous les auteurs
obligés d'enfermer à cause de ses frénésies , qui ont Irai lé des ordres militaires disent aussi
qui éta eut qiieli|uefois si excessives, qu'il (jue le collier de l'ordredeSaint-.Vntoine était
tua de sang froid un gentilhomme d'un mai- composé d'une ceinture d'ermite, qu'ils ont
son très- illustre. représentée comme unuccinlure i!e cuir avec
Vinchenl, (|ui a f.iit les annales du liai- une boucle; mais nous aimons mieux nous
naul, el le P. Uuleau de l'ordre des Minimes, en rapporter aux auteurs des annales du
qui les a aui;meulèes, disent (chip. 2-'l) que Hainauiel à Auberl le .Mire, qui o:ilèlé mieux
le motif qui porta ce prime ;i instituer cet instruits de ce qui concernait cet ordre,
ordre fut ()uc le Hainaut étant affligé de la (Juant ;'i son institution, dont ces aiinali>li s
mal.idie que l'on appelait feu sacré ou feu de du Hainaut font auteur le pape lioniface \'1II
S.iiiit-.\iituine, il icux qui en étaient alt.i- en citant sa bulle de l'an 1298, je n'aitrouiù
qués ne trouvant point d' meilleur remède /incun autre hisloricu (jui en ait parle,
cl plus assuré que de vi-iter une i hanelle ,, „„,-,-,;-,>!- /r. • i
dcdiee a cesainl, située dans le bois d'IIauré, JARRLliLllL (Chevaliers de la; EN Arclb-
proche Mons, Albert de Kav.ère inslilna un TKnRE.
ordre de chevalerie en l'honneur de ic saint Presque tous les historiens conviennenl
pour lémoiLiner la dévolion qu'il lui p irlait, qu'lvlouard III, roi d'Aiiglelerro, n'iiislilu i
el lit cette iiistiluliou de ch.-v.iliers eonfor- l'ordre de la Jarret ère (|n'à l'orcasion de
méineni à celle qui en avait clé fa. te par le celle que la comtcsso de S.ilisbiiry , qu'il
pape Uonifacc \ 111, dès l'an 129S, par une aimait, laissa tomber dans un bal, cl que ce
liulle qui poilail entre autres choses qua prince releva ; ce qui ayant donné occasion
l'on ne recevrait dans crlle chevaic ie que de rire aux courtisans bÏ causé du chagrin à
(Il Voj , il jj lin .lu Md.,ii' UO. (~) Voy., à la lin du vol., n" 11'.
eQ3
JAIjL
JAR
510
la comtesse, le roi, pour Icmoijtncr qu'il n'.i-
vail poiiileu de mauvais dessein, liil, en lan-
gage de ce temps-là, Ilonnij soil qui mal y
pense, le mol hoiiny sigiiiflanl maudit ; et lit
un serment que lel qui s'était moqué de celte
jarretière s'estimerait heureux d'en porler
une semblable. Cet ordre lui institué dans le
châleau de Windsor et fut mis sous la pro-
tection de saint Georges. Mais ces historiens
ne s'accordent point sur le temps de celte
inslilulion. Les uns prélendenl que ce fut
l'an 1344, el les aulres l'an 1350.
Froissard donne à connaître qu'il fut In-
stitué l'an 1347, on disant qu'après qu'E-
douard m eu' chois-i quarante chevaliers de
cet ordre, dont la léte se devait célébrer tous
les ans, et auquel il donna le nom du bleu
jarretière, et qu'ils se furent engages par ser-
ment d'observer les statuts qui en avaient
éié dressés, ce prince envoya publier une
fête par ses hérauts, en France, en Ecosse,
en Bourgogne, en Hainaut, en Flandre, en
Brabantel en Allemagne, pour le jour deSaint-
Georges suivant de l'an 13't8. Mais, quoique
cet auteur parle de l'amour qu'il avait pour
la comlesse de Salisbury etqu'il fasse la des-
cripiion d'un tournois qu'il fil faire à Lon-
dres à sa considération et où elle se trouva,
il ne dit point quelle laissa lomber sa jar-
retière ni que ce fut le motif qui porta ce
prince à instituer cet ordre.
tluker, dans sa description du royaume
d'Angleterre, d'Ecosse el d'Irlande, attribue
l'institution de ci t ordre au rétablissement
de Pierre le Cruel sur le trône de Castille par
les troupes auxiliaires d'Angleterre, com-
mandées par le prince de Galles ; mais il s'est
iiompé, puisque cela n'arriva que l'an 13GG,
seize uns après l'instilulion de l'ordre. Cet
auteur ne laisse pus de dire que la marque
de cet ordre fut une jarretière lileue, à cause
de celle que la reine avait perdue; sur quoi
leroil'ayanlrailléeet luiayantdit qu'il l'avait
donnée aux chevaliers, elle lui répondit,
Ilonny soit qui mal y pense, ce que ce prince
fit ajouter en lelires d'or sur la jarretière.
Le peu J'intelligence que Joseph Miciiicli
avait apparenmiL'nt de la langue latine lui a
fait croire que quelques auteurs avaiinl
irouvé un autre motif de l'institution de
l'ordre de la jarretière, car il dit que quel-
(jups-uns prétendent qu'Edouard institua cet
ordre en considération de Périssélide , reine
dt; la Jarretière : Algunos dizen haver insli-
luido esta ordena contemplacionde Perisclidc
reyna de la Giuirliera, ayant pris le mol pc-
riscelis, qui signifie jarietière pour le nom
d'une reine, cl la jarret icre pour le nom d'un
royaume. Enfin il y eu a qui onl fait remon-
ter l'origine de cet ordre jusqu'au temps de
lUchardl", roi d'Angleterre, et qui prétendent
qu'Edouard n'en a éléii ne le restau râleur. Tels
ont été les différents seniiments des écrivains
sur l'origine et rinslitution de l'ord.c de la
Jai retière.
M. Ashmole, héraut de cet ordre, qui en a
donné une ample histoire, en attribue l'insti-
lulion àEilouard III ; mais, regardant comme
fable l'histoire de la i irrelière de la com-
tesse de Salisbury, relevée par ce prince, il
prétend qu'il l'insliliia par un autre motif,
el que ce fui la vingt-troisième année de son
règne : ce qui revient à l'an 13'i.9, puisqu'K-
douard monta sur le trône d'Angleterre l'a:»
13i(5. En effet, au coinmcncemcnt des statuts
de cet ordre , qui furent dressés par ce
prince, et même dans ceus qui furent réfor-
més par ses successeurs, il est marqué qu'il
avait institué un ordre militaire en l'honneur
de Dieu, de la sainte Vierge el de saint Geor-
ges, martyr, la vingt-troisième année de son
règne :i4f/ honoiein omnipolenlis Dei, sfinctœ
Mariœ Yirginis gluriosœ et :ancti Georgii
marlyris,Uominns noster supremus Edunrdus
Icrtius rex Angtice unno rerjni siii post con~
guestum xxiii, ordinavit, slabitivil, cl funda-
vlt qnamdam societalem sive ordincm mili-
tarrin.
Le roi , avant que d'instiiuer cet ordre,
avait fait achever l'église de Windsor, com-
mencée par ses prédécesseurs , comme il
paraît par ses lettres du G août de la vingt-
deuxième année de son règne, c'est-à-dire de
l'an 1348, par lesquelles il déclare que ses pré-
dé -esseurs ayant commencé à Windsor une
églisesoas le titre de Saint-Eilouard, dans la-
quelle il avait été régénéré par les eaux du
baptême, et où ils avaient établi huit cha-
noines, il avait fait achever celte église eu
l'honni'ur de Dieu, de la sainte Vierge, de
saint Georges, martyr, el de saint Edouard,
confesseur; et que, voulant augmenler le
nombre des chanoines et des autres minisires
de celte église, il ordonnait qu'on ajouterait
encore aux huit chanoines qui y étaient déjà,
un custode pour être leur chef,quinzeaulies
chanoines el vingl-qualre pauvres chevaliers
qui n'avaient pas de quoi vivre, avec des
chapelains qui obéiraient au cuslode et qui
seraient entretenus sur les revenus qu'il
assigna à cette église.
Le pape Clément VI, par une bulle du 30
novembre do la même année, donna pouvoir
aux évéqnes de Salisbury el de Winchester
d'ériger l'église de Windsor en une collé-
giale de chanoines, de prêtres, de clercs, de
])auvres chevaliers du royaume, el d'autres
iiiinislns qui devaient y faire le service di^
vin, el d'en fixer le nombre conformément
aux revenus qui leur avaient été assignés;
et, par une autre bulle du 12 février de l'an-
née suivante, il exempta cette collégiale do
toute juridiction de l'ordinaire, la mettant
sous la protection du saint-siig', voulant
que le custode eût tout juridiction sur les
clianoines, les prêtres, les clercs, les pauvres
chevaliers, et les autres ministres de l'église •
et que, pour ce qui regardait la conilui e des
âmes, il reconnût l'autoriiéde l'évcqne de
S ilisbury, dont il recevrait le pouvoir. Ce
ciislxleet celle colléf;iatc étaient obligés, eu
vertu de celle même bulle, à payer tous les
ans au sainl-siége un marc de sterling, le
jour de la fêle de saint Georges, en l'Iioii-
licur duquel cette église avait été fondée.
Il paraît par le quatrième article des sta-
tuts de cet ordre qu'il ne devait y avoir quo
treize chanoines dans celle cgiiic, cl autant
on DICTIONNAinF. DES OROUES RELIGIEUX. 512
lit' vic.nires, f.iisaul on loiil le noinlir.! do deux roses ; que dnns une jnrrctii'rc la rose
vliif;l-six. aiiqiirl fui aussi lixé le nombre des de dessus sera blanche, el celle de dessous
i lie\nli(TS de la Jarreiirn», el non pas à celui rouge, el (lue dans une aulre jarrelière In
de quarante, connne Frois-ard a avancé; rose île dessus sera rougi', et celle de dessous
lesquels \ini;l-six chevaliers , y compris le blani lie ; qu'au bas du collier il y aura une
roi, qui éla.l (hefd souverain de l'ordre, ima^e de saint Georf^cs; que ce collier sera
devaiiiil présenter chacun, ponria première porté dans les grandes solennités; mais
fciis seulement, un de ces Ir. izc chanoines qu'aux autres jours on portera seulement
et un de ces lieize vicaires, dont la noniina- l'image de saini (u'orges attachée à une pe-
(ion devait apparlenir dans la suite au clicl' lile chaîne d'or, à moins <iu'oii ne soit oblijié
de l'ordre, aussi bien que celle des pauvres d'aller à la guerre, que I on soit malade, ou
( hevaliers, qui, par les inémes statuts, ayant que l'on entreprenne un grand voyage, aux-
< le anumentés ju-qu'au nombre de vingt-six, quels cas il s'.iffira de poi 1er l'image de saint
•levaient aiis-i être [ résenlés [ ar chaque deoriies attachée à un peiit cordon de soie,
chevalier de l'ordre, pour la première l^is l'ar les mêmes statuts, le r.ii Henri > 111 ré-
.si'uli'ment. L' s Ir ize chanoines devaient <luisit à treize le nombre des pauvres chcva-
purter un manleande pourjire, .ivcc un rond liers de l'église de Windsor, donl il au;,'min-
Mir le cTiié gauche, dans lequel élaienl les la le nombre des ecclésiastiques, ordonnant
.irnies de sa lui (leoiges, savoir, une croix de qi'il y aurait à pcrpélnilé un doyen el douze
gueules m chmip d'argent; et les vingl-six chanoines, treize auires prêtres , dont une
I auvres chevaliers dcvaii iil aussi porter un p;irlie serait appelée /jcfi/v chnnoin''f, el l'au*
manteau rouge, el sur le côté gauihc un Ire ficaires, cl que s'ils n'étaient pas prétns
écusson aux armes de saint Georges, sans en entrant, ils fussent au moins en ûge de
jarretière suiour. Ch.ique chevalier de la l'être dans l'annie ; qn'ily aurait outre cela
Jarrelière, à ^a réception dans l'ordre, devait lieizc clercs et aul;int de choristes, qui, avec
«loriner en aumône | our Icntrelicn des cha- les petits chanoines et les vicaires, chantc-
iioines cl des [lauvres elievaliets, savoir : le raient au chœur et feraient l'oflicc d vin. Le
roi, quarante man s d'argeiil, un roi clranger nombre des pauvres chevaliers a été aug-
vingi livres, le prince de Galles vuigt marcs, mente dans la suile jusqu'à dix-huii.
I liaque duc di\ livres, chaque coniie dix Ce prince par ses statuts n'avait rien
marcs, chaque bannerel cent sous, el chaque changé louchant les prières auxquelles les-
bachelier cin(i marcs. chevaliers de l'ordre ctaienl obligés envers
Quant à l'Iiabillement des chevaliers de ceux qui étaient décédés. Il y est encore
l'oj'dre, il consist lil en un manteau bleu, sur niaïqué, aussi bien que dans les anciens, ()U0
letiuel il y avait du colé gauche une croix le roi d'Angleterre devait faire dire (lour
rouge (iitouric d'une jarrelière : ils devaient chaque chevalier défunt mille mes es, un roi
aussi porter toujours a !a juniie gauche une étranger huii cents, le prince de Galles sept
jarrelière bleue, où ces mois étaient en hro- cents, un ducsix cen^s.un m.irquisqiialrecent
derie d'or: llonnij soit riai vtal y pense, el (inquanle, un comte trois (enis,un vicumle
ceux qui élaienl trouvés sans celte jarretière deux cent cinquante, un baron deux cenis,
ilevaiciil payer un demi-marc. Il y a des st i- et un écuyer cent. Mais, après que ce prince
tuls en français ([ui poitenl qu'un chevalier eut introduit l'Iiérésie dans son royaume, il
("lait dispensé de la porter, quand il estai! changea cet article des statuts, cl ordonna
liousé pour chei (uicliier, il i\ue: pour lors il que lorsqu'un chevalier décéderait, tous les
elait oblige de [lork'r ■soit.'' son ftyuicfiu en Al- autres donneraient de l'argent pour être
(jnifiance du jin relier, un fil bleu de soye. Les employé en œuvres pieuses : savoir, le roi
t hevaliers devaient avoir ce manteau bleu d'Angleterre 8 liv. ti sous H den., un roi
depuis les premières vêpres de la fête de saint étranger G liv. 13 s. '»■ d., un prince 5 1. Ifi s.
Georges jusqu'après le souper; le jour de la H d., un duc .'i I., un marquis .'t I. l.'i s., un
lê:c en enlranl dans la cliapeTe jusiju'au dî- comte 2 1. 10 s., un vicomle 2 1. 1 s. 8 d.,
ner, cl depuis les secondes vêpres jusqu'au un baron 1 1. 1.') s. V d., et un écuyer lli s. 8 d.
souper, el cela en quehiue lieu qu'ils fus- Il y a eu dans la suite du cliangemenl à
sent, comme s'ils avaient été présents à la l'habit et au collier, l'résenlemenl, le maii-
IV'lc. Ilsn'avaiinl point pour lors de colliers, tcau, qui d'abord n'élail que de drap bleu,
n'ayant (ommemé ,i en porter ((uc sous le est de velours; l'on a changé la robe en un
règne d'Henri \ III, n'y ayant (|iie les slaluls, justaucorps de velours cram 'isi ; el les che-
qui turent réformes par ce prince en l.'ri2, valicrs portent un bonnel de velours noir
qui en fassent mention ; et cela dans le Iroi- autour du(]uel il y a un cercle d'or garni de
sième article, où il est iiiarciué que depuis les pierreries, avec des plumes b'anchi's el une
premières vêpres de la lêle de saint (ieorges aigrette noire. Sur le côté gauche du man-
jusqu'.jprès les secondes, el même jusi]u'au teau, il y a une croix rouge cntouiée d'une
souper, tous les chevaliers porteront le jarrelière au milieu d'uiie étoile, donl les
iiianleau, la robe, l'iiuinéral el le collier; cl rayons sorlenl toui ;iulour de la jarrelière.
d.'ins le Irenlc-huil et liernier article de ces L'abbé Giusiiniaiii dit que les chevaliers ne
statuts, ce prin<:e déclare que du conseille- portent celle éloile que depuis l'an l(J2t>, par
ment des chevaliers il a ordonné qu';'i l'ave- une ordonnance de Charles 1" ; mais il y .i
iiir tous les chevaliers porteront un collier bien de l'appaienec qu'ils la portaienl déjà
d'or du poids de Irenlc; onces, qui s la cum- auparavant, comme il parait par le lombe.iu
pOoc de j.irreliércs, dans lesiiuelles il y aur.t de Guillauuie llalloii, co.inceiier d'Angle-
513
JAR
JAR
514
lerrc el chevalier de col ordre, décédé l'an
1591, qui est dans l'église du Saint-Paul de
Londres, où il est représenté avec le man-
teau de cérémonie, avant sur le côté gauclie
la crois entourée délia jarretière au milieu
de celte étoile : ce que Ion peut voir dans la
di scriplion de celte église que Dugdale a
donnée en 1658.
Les chevaliers portent encore sur l'épaule
droite un chaperon d'écarlalo comme 1rs
présidents et les conseillers de nos parle-
ments de France. Le collier est présentement
composé de jarretières au milieu desi|uellcs
H y a une rose, et ces jarretières sonl entre-
lacées de nœuds faits de cordons d'or avec
des houppes, quequelques-uns prennent pour
des chardons, el au bas du collier il y a l'i-
mage de saint Georges, armé de (oulcs
pièces, sur un cheval émaillé de blanc. Cette
image est ordinairement garnie de diamants.
La jarretière est de velours bleu garnie de
perles qui forment les paroles qui sont des-
.sus. La boucle et le fermait sont garnis de
diamants (1). Tel est l'habit de cérémonie
*]u'ils portent dans les solennités; mais, aux
autres jours, outre la jarretière, ils portent
un cordon bleu en forme d'écharpe, depuis
l'épaule gauche jusqu'à la hanche droite, et
au bas de ce ruban il y a une médaille d'or
où d'un côté est l'image de saint Georgej
dans un cercle d'or garni de diamants, el du
l'autre quelques ornements au milieu d'un
cercle d'or garni aussi de diamants : c'est ce
qu'on appelle le Georges. Celle médaille est
néanmoins comme une petite boite qui s'ou-
vre et où quelques chevaliers conservent le
portrait de leurs maîtresses, selon la repré-
sentation de celte médaille que nous a don-
née M. Ashmole, el qu'il a lait graver avec
les habits cl les ornements de cet ordre.
Lorsque les roi^ d'Angleterre donnent cet
ordre à (jueliiue prince étranger, ils loi en-
voient tous ces ornements, selon qu'il est
ordonné par les statuts et qu'il paraît par
celte lettre du roi Charles 11 à Fridéric- Guil-
laume, marquis de Brandebourg, lorsqu'il
lui envoya l'ordre de la Jarretière l'an 105i :
Mon Frire, l'assurance que j'ai de voire ami-
tié pc.r plusieurs témoignages que vous m'a-
rez donnez, m'oblige à rechercher tous les
mc>ïens qui seront capables de l'entretenir et
de la conserver. Pour ce sujet j'ay trouvée
propos comme souverain du très ancien et du
très noble ordre de la Jarretière, de vous élire
l un des chevaliers, pairs cl compagnons dudit
ordre, estimant par là de faire une plus étroite
amitié avec vou<, et d'augmenter le bien el la
prospérité de celle très noble société, laquelle
par plusieurs siédes a eu non seulement Ls
rois d'Angleterre nos prédécesseurs pour sou-
verains, mais aussi l'honneur d'avoir plu-
sieurs empereurs, rois el princes étrangers
pour compagnons ; comme aussi de vous don-
ner par là une marque évidente de mon affec-
tion et de la haute eslime que j'ay de vos mé-
rites et de voire personne ; et, pour confirma-
lion de ladite élection, je vous envoyé pur le
sieur chevalier de Walher jarretière roi d'ar-
mes, la médaille dite le Georgis, la jat reiiere
el l'étoile, pour les porter à la manière accou-
tumée, à sçatoir la mednille autour du corps,
la jarretière à la jambe gauche, el l'étoile sur
le côté gauche de la casaque ou du manteau.
Ledit sieur de ]]'(dl;er vous assurera de ma
part que je désire avec passion de vous témoi-
gner que je suis, mon frère, votre bien affec-
tionné frère el cousin C. />'. Celte L'ilre fut
éciile de Paris l'an llJSi. Mais les babils rie
l'ordre ne furent cnvojés au marquis dii
IJrandebourg que l'an l(i(J3, comme il paraît
p.ir la let'.re suivante d;i chevalier Walker,
écrite de Londres au prince d'O. ange : Mon-
seigneur, j'ay reçu avec les Ictlr's de Sa Ma -
jcsté le roi mon maUre, tout l'habit du très
noble ordre de la Jarretière pour Son Altesse
le prince électeur de Brandebourg, avec ordre
de les envoier à Votre Altesse, que par vos
mo'iens soi^nt adressez à Son Altesse Electo-
rale. Cda contient un juste-au-corps de ve-
lours tr<imoii, un manteau de velows bleu,
le grand collier du très noble ordre, d'or, arec
l'image de saint Georges émaillé poisanl «JO
onces, el un bonnet de velours nutr. Co urne
on se diiil porter, le papier donra pla> de su ■
tisfaition à Son Altesse électorale, quoique
l'habit n'est jamai'i porté sinon qu'à la fêle de
saint Georijes; mais le grand collier est porté
par le souverain et compagnons pendant les
prières du malin, sur tous les jours menlionez
dans le papier. Pour le ivre des statuts de
l'ordre, quand ils seront reformez, je tâcherai
avec tout soin de les envoier, en attendant
j'ai envoie tout l'habit à mon cher ami le che-
valier Guillaume Davison , de les envoier à
Votre Altesse, de qui vous recevrez cela el la
lettre de Sa Majesté ; el je n'en double point
bien-tôt tout le reste, el puis je prie humble-
ment Votre Allesse de les adresser à Son Al-
tesse électorale avec les très humbles el obéis-
sons services de celui qui sera toute sa vie de
Sa Sercnissime Allesse électorale, el de votre.
Monseigneur, le très humble el obéissant ser-
viteur Ed. Walker. Garter. Chaque prince
étranger, après avoir reçu (es marques el
ornements de l'ordre, est obligé d'envoyer
un procureur au château de Windsor pour
être reçu cl installé à sa place avec les so-
lennités requises, el doit donner un manteau
de l'ordre, son heaume, timbre et épée, pour
demeurer toujours dans l'église de Windsor.
Lorsque ce procureur est installé, le souve-
rain de l'ordre ou celui à qui il en a donné
commission, lui allache le manteau sur le
bras droit, el après celte installation il ne le
doit plus porter en aucun temps pour celui
qui l'a envoyé. Henri IV, roi de France,
iiyanl reçu l'ordre de la Jarretière de la reine
Elisabeth, l'an 1596,envoja,ran lti(X),à Wind-
sor le sieur de Chastres, chevalier d;; l'ordr;-
de Saint-Jean de Jérusalem, gouverneur de
Dieppe et l'un de ses lieutenants généraux
en Normandie, comme son procureur pour
être installé à sa pl.ice, ce qui fut lait après
que le dit sieur de Chaslres eut promis au
(\) Vûy.,àL. ûii du vol., n" 128.
5ir, DICTIONNAIRE DKSOIUHU.S RlXIGIEl'X. E16
nuiii tlu roi Je. France d'observer les stauils rcmc qu'ils porl^nl sur le côté gau.he l'é-
(If roritre, -eloii la forme cl leiiour que Sa cusson de l'ordre sans jarretière. Le liéraiil
Maie.ste l'.i'vail déjà juré l'an lo'.Ki. lorsqu'il porle sur leslomac une médaille entourée
rerul l'ordre, et duni voici la teneur : Aoi(.< d'une jarretière, sur laquelle médaille ( si un
Ilèiiri, pur Ui (jrdcc de Diru roi de l'i mice et éeusson parti aux armes de l'ordre el aux ar-
le .So'riii re, jurons, rouons et proniriions so- mes d'Angleterre, surmonté d'une couroni;e
/.■nnellentint sur noire honneur en parole de royale d'or, (•! il lient un liàlon d'argent dore
r,t\, que nous observerons cl m ini.i.ndruns les aux exirémilés el au haut ducjuel il y a les
flatutset ordonnnnce<, du liès-noble ordre de armes ilel'oidre et d'An|;leterie. L'huissier
Monsieur satnl Georges, nommé la Jan etière, à la vci'^e noire a une médaille aussi entourée
en ce qu'ils ne se troutcrunt conlraires à no- d'une jarretière au milieu de laquelle il y a un
tre r;li(jion callwlique , (jrandcur el majcsié ncend pareil a ceux du collier de l'ordre, el
roiale, ni aux staluls el ordonnances de nos tient à la main une verge noire garnie d'ivoi-
d ux ordres du hcnvil Sainl-Espril el Mon- re, au milieu el aux exirémilés de laquelle
sieur siinl Micitel. lîn léinoin de quoi nous il y a un lion. L'office de greffier est annexé
avons signe la présenlc de noire iwiin il icrlle depuis longtemps à la dignité de doj en do
juit sceller de noire scelsevrel. A Rouen, le 2 Windsor, cl Alarc- Anioine de Dominis, ar-
oilobrc LiiîG. Franeois 1", Henri 11, Cliar- chévéque de Spalilro, si eonnu par son ap.i-
li s IX. el Henri III, aussi rois de France, onl stasie, ses éerits et sa fin lragi(|uc , a eié
reçu pareillement cet ordre, qui a été encore greffier de cel ordre, en celle qualili du
dmiiie à cinq empereurs, à plusieurs rois doyen de Windsor.
d'Espagne, de Portugal, de Pologne, de Na- Elias Ashmole , The Inslilulion Latcs et
pics, de Danemark, el de Suède, à des ducs céninonies of The Most noble Order of ihe
(le Bourgogne de Savoie, de Milan, de Fer- Parler. liolland , Acl. SS. lom. III Ap'ilis,
r.ire, d'Crbm cl à plusieurs princes souve- pog. 158. Mondon lîelvalel , Cn/rrAiii/i. Ord.
rains d'AHeniagne, dont il y en a cinq ou six l'eriscelidis. Froissard , Chronique de Fran-
delà maison Palatine. ce, d'A'xjlelcrre cl d'Ecosse, liernard (liu!,ii-
Le nombre des chevaliers n'a poi.it èlé niani, ïlisl. di Util. <jli. Ord. milil. Jo-epli
ai:gmenté depuis l'iiislilutiun de l'ordre , Michieli, Tesoro tnilil. di Ciivaleria.
ayant toujours élé fixe à vingt-six y co.n- j^aN - BAPTISTF ex Fuance (Fu.uites ..e
pris e souverain et chcfde I ordre. La reine c > n » / i>
lilisaheth lit sous son régne vingt-trois che- ^^^^^-) »« ^ * '"''■'■- An^^éliqie a Uom.:,
valiers, parmi lesquels ils y eut trois rois de ''' "^ Mo.\r-LU(.o.
France, deux empereurs el un roi de Dane- La congrégation des Ermites de Sainl-
niark. M. Aslimole a fait graver l'ordre de la Jean-lîap isie en France reconnaît pourfon-
tnaichc d'une procession de ces chevaliers dateur le lïcre Michel de Sainte-Sabine,
qui se fil à une lélc de saint Georges, sous qui en jeta les fondeuienls vers l'an 1630.
le règne de celte princesse, au commence- C'était un prêtre d'une grande piété el d'une
menl da dernier siècle, où elle est rc|irésen- vie fort austère , à ((ui U.eu avait donné un
lec avec l'habilel le grand collier de l'ordre, zèle tout particulier pour la vie solitaire.
I. y a cinq ofliciers de cet ordre , savoir : le H s'y consacra tout entier dès son bas âge,
1 relal , le chncelier, le grefiier, le héraut cl s'y rendit si parfait, que, voyant les
appelé .larretière roi d armes d'Angleterre, grands abus qui s'y étaient glissés el le [leu
et l'liui>sier appelé de la Vrrgc noire, à cause de rapport qui élail entre les Frmites des
qu'il en lient toujours une à la main. Levé- premiers siècles et ceux île son temps, il
i|ue de Wincesler est prélal-iié de l'ordre, entreprit de les réformer. II lit pour cela
L'office de chancelier lui crée par le roi penùant quinze ou seize ans plusieurs voya-
lidouard IV en laveur de Uichard de Beau- ges, consulla k-s plus habiles maitrC'. en la
champ, évéque de Salisbury, et ce prince vie ércmllique, el, après avoir surmonté par
ordonna (jue les su ccsscurs de ce jirélal sa patience tous les obstacles qui s opposè-
exeiceraienl toujours cet office. Cependant re.il à l'exécution de son dessein , il dressa
il n'y en cul qnr six de suite qui l'exercé- des statuts [)Our cette rélorine à laquelle il
leni, ayant etc donné après cela à d'aulrcs. d.inna le non de Sainl-Jean-lta|)tiste. Ces
Les evequcs de Salisbury nrcnt de temps en statuts contiennent vingl-dcux articles, aux-
temps des tenlatives i)Our rentrer dans la quels il ajouta des annotations également
possession de cel office , mais ce fut inuti- doctes cl judicieuses, qu'il avait Urées des
lement : cepemlani Sethward , évéïjue de conciles, des Pères et des plussavantsautcurs,
Salisbury, fil de nou\ei;e5 poursuites auprès el iU furent aiqirouvés du vivant do ce ré-
du roi Cliarles 11 el oltiint sa demande. Ces formateur par l'évéque de Madaure, Martin
deux ofticiers, c'esl-à-dire le prélat et le Mûrisse, sulTragant d'Henri ite Bourliou,
chancelier, ont un manteau de satin hb u évé lue de Metz, l'an IG'I.J, cl par l'arehevè-
douldé de taffetas blanc, sur le côté droit du- que de Cambrai, François de Wandcrburch,
quel il y a la croix de l'ordre .Milourec d'une l'an lG3i, (|iii in ordonnèrent la pratique a
jarretière; cl le cbanrclicr porte ouire cela tous les Frm.les des d.oc>''>i\s de Cambrai el
sur l'esloiiiac une médaille d'or entourée de Metz; el apiès sa murt ils furent i ncore
d'une jai retiere au milieu de la(]iielle il y a approuvés par revèqne du l'uy en \'clay
une ruse. Le greffier, le héraut el l'huissier Henri de Maiipea> du Tour, l'an 1Cj3, el i)ar
ont aussi ch icun i;n manteau de même que plusieurs docteurs,
ceux du prélat cl du chancelier, ù la dilTe- Ce rélonnateur les obligea cnlrc autres
817 JE.\
choses de s'assembler loiiS les ans cii cha-
que diocèse pour conférer ensemble des
choses qui regardent l'inslitul et procéder à
rélcclion d'un visiteur, de quatre majeurs
ci d'un secrétaire, auxquels il appartient
d'examiner ceux qui se présentent pour en-
trer dans la congréiialion. Ceux qui ont élé
examinés et trouvés capables doivent rece-
voir l'habil de l'évôiiue diocésain sous la
juridiction duquel sont ces ErmiUs, ou de
celui qu'il ;iura commis ; et après avoir reçu
l'habit ils doivent être sous la conduite d'un
maître (jui les instruise des observances de
l'instilul. L'ofûce du visiteur est de faire
les \isiies des Ermites , les corriger, leur
donner des avis salutaires , et lui seul peut
leur donner la permission de faire des voya-
{^cs et de changer de demeure. Les majeurs
sont les assesseurs du visiteur, qui lui ser-
vent de conseillers dans toutes les affaires
(jui concernent l'institut; et ce qu'ils ont dé-
terminé doit être inviolablement observé,
(les visiteurs et majeurs peuvent aussi chas-
ser les incorrigibles, vagabonds et desobéis-
sants. Si quelqu'un quitle l'habit de l'institut
ou sort du diocèse pour aller dans un autre
cl y demeurer, il ne peut retourner ni être
de nouveau reçu dans celui d'où il est sorti,
sans le consentement du visiteur et des ma-
jeurs. Quand ils ont atteint la quarante-
cinquième année de leur âge, et qu'ils ont
demeuré vingt-cinq ans dans l'instiiut , ils
doivent faire profession entre les mains des
évoques et en présence des visiteurs, du
secrélaire et de deux témoins, en ces termes :
Je N. en présence de toute la cour céleste et
de. vous, Mesiieurs , voue et promets à Dieu,
à lu bienheureuse Vierge, à suint Jian-Bapti-
ele notre patron , il tous les saints, et à vous.
Monseigneur, perpétuelle chasteté, pauvreté,
obéissance et stabilité en rinslitul des Ermi-
tes, re.^tauré sous l'invocation de Saint-Jcun-
Baptisle.
L'habillement que le F. Michel de Sainte-
Sabine prescrivit à ces ermites consistait en
une tunique, une cuculle ou chaperon et un
manteau de couleur tannée avec un scapu-
laire noir et une ceinture de cuir (1).
Le F. Jean-Jacques, qui prit dans la suite
le nom de Jean-Baptiste, et dont on a donné
la vie au public en 1C99 sous le nom d'un
soliliiire inconnu mort en Anjou, a été le
propagateur de cette réforme, qu'il embrassa
l'an 1C32. l'eu après qu'il eut pris l'habit, il
se retira dans leimitage de Saint-Bodille au
diocèse de Vienne en Daupliiné, d'oii il fut
tiré pour aller établir un ermitage dans le
diocèse du Puy; où ayant demeuré un an, il
retourna dans celui de Saint-Bodille, qu'il
quitta encore vers l'an 1633 pour aller à
Annecy, où il fut appelé par l'évéque de Ge-
nève, Charh s-Augusie de Sales, qui le char-
gea du soin de réformer les Ernutes de son
diocèse. Il reçut ensuite counnission, l'an
1057, des archevêques de Lyon et de Vienne,
et de l'évéque du Puy, puur visiler les ermi-
tages de leurs diocèses, cl dans le cours de
JE.V
5!S
ses visites il donna l'haliit à plusieurs no-
vices et établit de nouveaux ermitages. Les
Ermites de ces trois diocèses, voyant que la
régularité commençait à fleurir parmi eux,
furent tentés de se souslraire à la juridul.ou
de ces prélats; mais frère Jean-l>a()lisle, qui
en prévoyait les conséquences, s'y étant op-
posé inuliieiiieul, se démit de sa chaige de
visiteur.
il fil ensuite un voyage en Italie, et à son
retour il alla en Lorraine, où, après avoir
demeuré quelque temps, il bâtit un nouvel
ermitage à Oisilly dans le diocèse de Lan-
gres. Il en établit encore d'jiulrcs en Bour-
gogne et dans le même diocèse, et fit quitter
a ses Ermites leur habit tanné, qu'il changea
en un bhinc, pour les dislingner de cerlains
ermites vagabonds qui, vivant d'une manière
scandaleuse, faisaient la quêle dans les vil-
lages du diocèse de Langres, s us le nom et
l'habit des Ermites réformés de Saiiit-Jean-
Baptiste, qu'ils savaient être en grande
estime dans le monde. 11 fut élu visiteur ou
vicaire général de tous les Ermites du dio-
cèse de Langres l'an 1G73, et son élection lut
confirmée par l'évéque du même dioeèse
Lnuis-Armand de Simiane de Gcrdcs, qui
l'obligea d'accepter cet emploi, dont il s'ac-
quitta si dignemeni, qu'il allait tous les ans
visiter les ermitages de sou district, qui
étiiient au nombre de quatre-vingts. Ce
même prélat fit, l'an 16S0, des règlements
p.iur tous les solitaires de son diocèse, qui
sont à peu près les mêmes que ceux qui
avaient élé dressés par le P. Michel de
Sainte-Sabine, ordonnant de plus qu'ils au-
raient un visiteur ou vicaire général trien-
nal, qui aurait la direction de tous les Er-
mites de cet institut, et qui visiterait tous les
ans les ermitages; qu'il y aurait encore
quatre visiteurs particuliers qui auraient
soin de veiller sur les quatre déiroits ou
cantons du diocèse, savoir le Langrois, Di-
jonnais, Tonnerrois et Chaumoiiois, lesquels
visiteurs seraient élus par les Ermites dans
leurs synodes généraux, qu'ils liendraient
tous les trois ans, et que le visileur géné-
ral, conjointement avec le visiteur du canton,
nommerait un surveillant dans chaque er-
mitage, dont il aurait la conduite et le gou-
v<!rnement, sans avoir égard à l'âge, aux an-
nées de réception, ni même à la prêtrise,
mais seulement à la prudence, à l'expérience
et à la bonne conduite; el l'an 1687 le même
prélat approuva le ch.mgement d'habit qui
avait été fait, de tanné en blanc.
Dès l'an 1676, le frère Jean-Bapliste avait
quitté le diocèse de Langres pour deux rai-
sons : la première fut le bruit qui se répan-
dit qu'il était le comte de .Morel, fils naturel
d'Henry IV, roi de France, que l'on avait
cru tué à la t)aiaille de Castelnaudary ; ce
qui était appuyé sur ce qu'il ressemblait
parf litemeut à Henri IV et sur ce qu'il avait
avoué qu'il s'était trouvé à la bataille de
Castelnaudary, et qu'il avait été élevé dès sa
jeunesse au château de Pau, en Béarn; lu
(1) Vcy., à la lUi du vol., n° i;9.
t.\'J
seconde raison furent lo> (iiiorrcs du (•«ni^
de r.oiir(;o;:iu\ qui, Iroiili'aiil l;i lr>;ii(juillil.!
di- sa suliludi', ri)lilii;èrriit de se retirer en
Anjou, où il biUil i'erinii.if:»' ''i-' (lar.lelles,
pruclie l'alibave d'Aiiières, oîi il donna en
peu de lein; s Vliab I à sis l'.Qiiees. Son à^e
el ses inlirinités ne lui perniellanl plus d'as-
sister à t'ius les exenires de sa coiuinu-
nanté, il se démit de sa eli.uije de supérieur,
el pria l'evèque d'Angers d'en mettre un au-
tre . n sa place. Enfin, au coniuiencemenl de
l'aient de l'année lO'JI, éiant allé avec ses
novices à la paroisse, il en rev ni avec une
nusion sur la poitrine. Averti par celle ma-
ladie de se préparer à la mort, il rcrut les
sacrenicnts avec de ç;rands sentiments de
pielc, cl U- 24 décembre, veille de II fêle do
Noél, il rendit son âne à Dieu avec une
grande Iranciuilliié d'esprit et une pnrf.itc
soumission à la volonté de Dieu. Ai)rès sa
mort, cet ermitage des Ciardcllcs fui presque
abandonne, jusqu'en 1()'J3 , que l'évéque
d'Angers y lil venir deux saints solitaires de
Hourgogne, auxquels Dieu envoya, en 16'JS,
un truisiènie comiiagnon natif de Sens. Les
limites qui demeurent en ce lieu mènent
une vie Irès-édilianle el très-austère.
Gran Ici, Vie d'un solitaire inconnu mort
tn AnjiiH.
A cci lirmiles de la eongrégnlion de Saint-
Jenn-ltaptiste, en France, nous enjoindrons
quelques-uns qui sont aussi en grande estime
en Italie. Les premiers sonl ceux qui de-
meurent à Uome à l.i |)orle Antrcliquc (1). Ils
oni l'U pcuir foiidatiur un ceiiain Albenze,
Cal.ibrois, qui, uyanl servi longtemps de
qnéliur au inon:isière de Sainle-Citherinc
de la Itosc ou des (^ordicrs, et à l'arcbicon-
fra'icrnilé des Courtisans, et ne croyant pas
faire son salul dans cet étal, se rc ira, vers
l'an 1588, dans ce lieu, proche la Porte An-
géli(iue à Home, où, avec les aumùnes qu il
rciut de plusieurs personnes cliaritabics, il
jeta les loiidemcnts d'un hôpital jioury loger
les Lrmites (|ui »enaieiil à Kome x isiler les
tombeaux des saints apôtres, et y faire trai-
ter ceux qui tombaient maladi's. Il cul en
jieu de temps plusieurs compagnons qui se
joigiiireiila lui, cl i\u\ \ivaicnlees aumônes
qu'ils allaient clierclier par la \ill'', en criant
tout haut: l-'i.ilcs du bien piés'nlcmnil que
tous (H uiez le temps, ils étaient vélos d'une
toile blancbc, n avaient rien pour rouvrir
leur tétc el marchaient les pieds nus sans
sandales. Leur vie était si cxem|dair('. (;ue
plusieurs personnes, touchées de l'esprit de
Duii, ayant embrassé leur institut, accru-
rent leur communauté, qui devint lorl con-
sidc'rable. Ils bàiirenl dans la suite une pe-
tite église sou- le tilre de l'Ascension de
Notrc-Seigneur, où ils faisaient célébrer tous
les ji'urs un grand nombre de messes; mais,
en lois, une iiii.ige di- la saiiilc Vierge que
le fundaleur de ces Lrmites avait apportée
de la terre sainte et i|u'il avait mise dans
leur ebai'clle, ayant c 'Uimencé à faire des
miracles, y attira un si grand concours de
Dlf-TIONNAIRE DES OIIDRES UEI.ICinUX. bîO
pcnpli', que, par le moyiMi des grandes au-
mùnes qu'on leur Ht, ils riienl li.ltir une
belle église el augmenièrent considérable-
ment les bâtiments di! leur maison et do
l'hôpital, où ils vivent sous la prutcctiuii
d'un cardinal qu'ils élisent.
Celle maison a servi de retraite aux nou-
veaux convertis à la f d, jus(|u'à ce (|u°ayant
été transférés en un autre lieu sous le poii-
tilicat de Clément X, on laissa aux Hrinites
leur maison libre. Ils soi l pré^cnlemcnl ha-
b.llés de drap blanc sans capuce, ayani pour
coiiviir leur léle un eliapeiu blanc. Le r
robe est ceinte d'une ceinture do cuir sans
seapulaire , el ils vont nu-pi ds avec des
sandales de cuir.
l'roche la ville de Spidetti" en Ombri?, il
y a une congrégation d'Krmites sur le monl
Luco, qui prétendent faire remonter leur
origine jusqu'au commencement du iv' siè-
cle, el avoir été établis par saint Jean d'.\n-
tioclie, évoque deSpolelle, qui fut martyrise
sous l'empire de Maxiraicn. Ces Ermites
vivent dans des cellules séparées les unes des
autres, coinnic celles des Camaldules. Ils
font un au de noviciat, après lequel ils sont
reçus dans la congrégation, sans néanmoins
faire de vu'ux. Us font leurs exercices spiri-
tuels en commun, après le-quels chacun
travaille en sou pariiculier selon son lalcnl.
Ils peuvent posséder des fonds el des reve-
nus, et sonl libres de sortir de la congréga-
tion quand bon leur semble. Ils élisent tous
les ans un supérieur. Leur habit est presque
semblable à celui des Minimes, el la plupart
portent des sandales.
Pnilij)p. Boiianni , Catalog. Ord. relig.
pari. m.
JEAN-HAPTISTE DE COVENTKY as X\-
ULETEUBE (CUANOINES UOSPITALI. KS DB
Saint-), el de (jUitijues autres Ito^pitalicn
duns ce roijaume.
Les religieux Porte-Croix des P.iys-Iî.is el
de France ne reconnaissant point ceux d'Ir-
lande pour avoir été de leur ordre , ce qui a
fait que M. Alleman les a attribués à ceux
d'îtalic; mais, comme la plupart des maisons
que les religieux Porie - Croix d'Irlande
avaient étaient aussi des hôpitaux dédiés
à saint Jean-Hapiiste, je crois qu'ils pour-
raient avoir été semblables aux chanoines
hospitaliers de Saint-Jeaii-Haptisle de Coven-
try, en Angleterre, dont Dodsworlh el Dug-
dale ont fait mention dans leur Histoire mo-
nastique d'Angleterre, et que la crois noire
«lu'ils portent sur leurs robes el leurs man-
teaux leur a fait pcut-élre donner le nom de
Porle-Croix.
(Juoi (|u'il en soit, Dodsworth et Diigdale
nous ont dMiiné rhabillement d'un de ces
chanoines hospitaliers deSainl-Jean-ltaptiste
de Coveniry, tel(|uc nous le donnons aussi (•2).
Us n'ont point mar(]ue le temps de leur éta-
blissement ; in,'iis cet hôpital était desservi
par des religieux et des religieuses, cl avail
été fondé par le p>ieur el les moines de la ca-
(I) yoy., 3 la lin du vol., n'' IjIJ.
(2) l'dj/., à 1.1 fin du vol., 11* IjI.
£21 JEA
tlièJrale de Covs! Iry de l'ordre de Sainl-
Jtenoît, qui y tenaient lieu de chanoines
comme dans plusieurs autres cathédrales des
royaumes d'Angleterre, d'Ecosscel d'irlandc.
il y a une bulle d'Honorius III de l'an llH
adressée au recteur et aux frères de cet hô-
|iilal, par laquelle ce pape les reçoit sous sa
protection, leur accorde des privilèges et con-
iiruie toutes les donations qui leur avaient
été fuites. Une semblable protection leur fut
aussi accordée par le roi Henri III; mais il
y a bien de rapparenee que celte bulle causa
un procès entre les moines de Coveniry et
les hospitaliers, qui dura piès de deux cents
ans, puisque ce ne fut que le 29 tnars d<' l'an
142Ï (lu'il fui termii'.é par des arbi'res qu'ils
avaient clioi^is, et qui ordonnèrent que celte
bulle d'Huuorius 111 n'aurait aucun elTet et
serai! de nulle valeur, à cause des divisioiis
qu'elle avait causée-i ; que le prieur et le eha-
pitic de Coveniry étaient les véritables fon-
dateurs de cet hôpital, et seraient reconnus
à l'avenir pour t.ds; que pour ce sujet le
uiaiire ou recteur, siiot qu'il serait élu et
installé, leur prêterait obéissance el Gdélité,
2t leur payerait les dî.nes des champs seule-
ment, et non de leurs jardins et des animaux,
dont ils étaient exempts coainie religieux ;
i|ue le prieur accoiii[)agné de huil personnes
xisi erail tous les ans. s'il le trouvait à pro-
pos, le reeleur, les frères et les su'urs de
l'hôpital, qui seraient tenus de faire piofes-
sion entre ses m lins, selon la formule énon-
cée par cet acte, qui conlieni plusieurs rè-
gle . enls el statuts pour ces hospitaliers,
comme aussi la manière dont ils doivent être
habillés : savoir, tant les frères que les
sœurs, d'une robe, d'un scapulairc juir-dcs-
sous la robe, el d'un manteau de couleur
biuiie, sur lesquels devait cire allaehoc une
croix noire. Les religieuses avaient an voile
blanc. Apparemment qu'elles assistaient au
chapitre avec les fières, puisqu'il y est aussi
marqué que le maître ou recteur tiendrait
tous les vendredis le chapitre, pour punir les
fautes des frères et des sœurs, qui se de-
vaient aussi trouver aux processions géné-
rales et aux enterrements des prieurs et des
moines de la lailiédrale.
Il y avait grand noaibrc de ces sortes
d'hospitaliers en Angleterre; cl, quoique
Dodsworlh et Dugdale les aient rais au nom-
bre de ceux qui suivaient la règle de saint
Augustin, il parait néanmoins qu'ils avaient
des règles particulières, et qu'ils dépendaient
des évcques des lieux où leurs hôpitaux
étaient situés, comme on peut voir dans les
règlements de quelques-uns de ces hôpitaux,
qui sont rapportés par ces auteurs, et qui
font assez connailre que ces hospitaliers
étaient véritablement religieux; car les frè-
res et les sa'urs de l'hôpital de Saint-Léonard
d'York, s'ils avaient commis ijuclque péché
contre la chasteté et la pauvreté, ne pouvaient
être absous que par le m lître de l'hôpital, si
ee n'était à l'article de la mort ; auquel cas
ils pouvaient recevoir l'absolution de quel-
que |>rètre que ce fût; mais, s'ils retournaient
un sanlé, ils devaient se [ircsentcr au maître
DlCTIU.NNAlKE D£S Of.DIlES rtELIGIKUX . Il,
pour la recevoir, et si qutilqn'un d'eux nmu-
rat propriitaire, il était privé de sépulture.
Vautier de Grey , archevêque d'York ,
dressa aus<i une règle, l'an 12'^l, pour les
frères et les sœurs de l'hôpital de Sain!-Jean-
Baptiste de Dotingham, adressée à AIwin, qui
en était maître ou recteur. Il ordonna entre
autres choses que la propriété serait bannie
entre eux, et que si, sept jours après la pu-
blication de son ordonnincc, il se tiouvalt
quelqu'un qui fût propriétaire, il serait ex-
communié, el mourant en cet état, qu'on ne
lui donnerait pas la sépulture en terre sainte.
Les frères et les sœurs de cet hôpital
avaient des tuni jues grises tirant sur le
roux, avec des manteaux noirs, ne man-
gcaieutdela viande que trois fois la semaine,
gard.iient un étroit silence au réfectoire, s'as-
semblaient toutes les semaines au chapitre
pour s'accuser de leurs fautes et en recevoir
la correction ; ils y devaient lire une fois le
mois le règlement de cet archcvê(iue en lan-
gue anglaise ou française, et les frères
laïques el les sœurs récitaient un certain
nombre de Pater, pour chaque heure de leur
office.
lly avaitcn Angleterre plusieurs hôpitaux
destinés pourles lépreux, et qui s'engageaient
par vœu à la pauvreté, à l'obéissance et à la
chasteté. L'on trouve à la fin des œuvres de
Mattliieu l'àris les statuts de l'hôpital de
Saint-Julien, où il est dit que les frères
qu'on recevra dans cl hôpital ne seront
point mariés, et que, s'il s'en présente quel-
qu'un qui le sot, il fera vœu solennel de
chasteté entre les mains de l'archidiacre de
l'abbaye de Saint-Alban, dont cet hôpital dé-
pendait ; que, si, après sa réci ption et après
avoir fait ce vœu, il le transgresse, il sera
chassé de l'hôpital, selon l'ancienne pratique
de celte maison, et renvoyé à sa femme, si elle
est encore en vie, comme étant pour lors li-
bres tous les deux ; el que si elle est morte, il
sera puni sévèrement.
Ils ne s'engageaient pas à une pauvreté
fort exacte, car, par un des articles des mê-
mes statuts, il est dit que, comme ce qu'on
leur donnait dans l'hôpital ne suffisait pas
pour leur entretien, il leur était permis d a-
voir des effets mobiliers qui se pouvaient
acquérir honnêtement, à condition que, ve-
nant à mourir ou à sortir, les biens appar-
tiendraient à l'hôpital pour être distribués en
commun. Ils pouvaient néanmoins disposer
par testament de la troisième pai tiède ces
effets, pourvu que ce fût avec la permission
du maître ou recteur, autrement le testa-
ment était nul.
On éprouvait pendant un temps celui qui
devait faire profession, et, s'il avait fait pa-
raître une conduite réglée et qu'il eût été di
bon exemple, on le recevait en chapitre
après quoi il faisait profession entre le
mains de l'archidiacre de Saint-Al .an. Fa-
cette profession il proiuettait et jurait su
les saints Evangiles d'obéir en toutes cliosei,
pendant tout le temps de sa vie, à l'abbé de
Saint-Alban, pourvu qu'il ne lui commandât
rieu contre U loi de Dieu; de ne comuicllr»
17
t.?ô DICTIO.NN.vmE DES ORDRES [lELIGlEUX. - ^îi
(loiiil Je vol, lie no Imllrc point aucun frère, (Chartres suivil hieiiliMson exemple il s'iiniià
île ne l'oinl violer le vu-u ilc cli.islel«', de ne elle, nj.int elé la première à euilirasscr la
point s'approprier cl do ne laisser par tes- réforme par les soins de Lconorc dKlamprs,
iani<iil que drs clinses dont les frères pou- évèque de Chartres, qui y fit venir des nli'
vaimt disposer, d'eviler toute sorte d'usure, gieux de Sainl-\iiuenl, l'an ItiîiV. Ce mo-
de ne proeuriT par aucune »oie qu'aucun naslère de Sainl-Jean eut pour fundaieur le
iTiitrc que celui qui aurait clé nommé | ar bienheureux Yves, prevôl de Sanl-thiciilin
l'allié de Sainl-Alban fut mailie ou recleur de Iie,:uvais, qui, ay.int été eu évéïiuc i!e
de riiôpilal ; de se contenter de ce (|iie ce Chartres, lit venir en ^a ville épiseopah- des
niaîlic lui donnerait, sans mu; murer, et de chanoines île son njonasière de Sainl-tjuen-
iic point sorilr des bornes qui éiaient près- tin, l'an 1097, qu'il tlabht en ré;;lise do
crites. Que, s'il transgressait aucune de ces Saint-Jean en \allée. Il leur donna des re-
chos';s, il consentait qu'on le punit sévère- venus considérables [tour leur subsistance,
m n. .ielon la qualité ou la prandeur du entre autres le pr curé de Saint-!]ticnne, qui
crime, cl même qu'on le chass;"'l de la cou- était dans l'enceinte de la ville, et les anna-
grégalion coninic apostat, sans aucune espi'- tes des prébendes des chanuines qui vien-
rance de retour, à moins que ce ni: l'ûl par draienl à décéder, qui est un droit dont les
une grâce spéciale de l'abbe. chanoines réguliers (selon le l'.Du Moulinet)
'^eur habillement cons .«lait en une robe jouissent enpiusieurscalliédralcs de France.
et capuce de couleur tannée, et lorscju'ils Celte abbaye ayant été ruinée l'an 15(12 par
allaient au chœur ou parla ville, ils avaient les 1 érétiiiues, elle fut depuis transportée au
une ch.:pe en forme de manteau et un ca- prieuré de Saint-Kiienne dans l'enceinte do
puc" d;' tlrap noir. Leurs robes et capuces la ville, où eTe a élé rebâtie i)ar les cliaiioi-
pouvaicnl être fourrés de peau d'agneau, nés réguliers de la Congrégation di; France,
L'habillement des prélres était noir et sem- lorsqu'ils y furent établ.s. L'habillement de
blalile, quant à la forme, à celui (les lépreux, ces thanoines consistait en une soutane de
Cet h(j|iital de Saint-Julien fut fondé vers serge blancheavee un rocbet et un cbapi ron
l'an ll'iO, sons le règne d'Henri 1", par noir sur l'épaulcau lieud'aumusse(l),ce qui
Gcoffroi, seizième ubbe de Sainl-Alban, qui leur était commun avec les chanoines régu-
élait Français et avait pris naissance dans le liers de Sainl-Acheul d'Amiens, de Sainte-
|)ays du Jlaine ; et les statuts cl règlements Barbe en Auge et quelques autres qui ont
dont nous venons de p irler avaient été dres- été aussi unis danj Id suile à la Congréga-
sés par l'abbé .Miehel l'an 13'iV. tien de France.
Dodsuorth cl Dugdalc ont aussi inséré, L'abbaye de Saint-Denis de Ilcims, à la
fl.'.ns li'ur Histoire monastique d'Angleterre, réquisition d'Henri de Maupas, évèque do
les règ'ements de l'hôpital des lépreux d hl- Lavaur, qui en était albé, reçut aussi la ré-
leford dans le comlé d'Fsscx, qui avait au- forme et lut unie à la même congrégation lo
irelois clé fondé par l'abbi sse cl les religieu- 13 août U'ùVA. Celte abbaye avait été fondée
ses (In monastère de lierkyng.Ces règlemenls par le gr.iml lliiicmar, archevêque de Keuns,
lurent dressés l'an l.'iVli par Uadulphe de sous le règne de Charles le Chauve ; mais ce
liabloli, évèque dcLondres, du consentement monastère, (]ui était hors l'enceinie de la
de Malhildede Montaigu, pour lors abbesse ville, ayant été ruine par les gu 'rres. Cer-
cle rcrkyng, cl on y lemarque que ces lé- vaise, (jui élait arihe>éque en 101)7, voulut
preux p.omeliaient et juraient sur les saints le rétablir en sa première splendeur, et lo
lOvangiles i!e garder la rlristelé, di! n'a\oir transférer dans la ville, où il y mil des cli.i-
rien en profire, et d'obéir à l'abbesse du nio- noines réguliers sons la règ'e de saint Au-
nastère de l>(M Ivjng. pusiin, qui ont retenu les derniers l'ancien
(domine il } a\ait d'antres lir)pitaux de ces habit des chanoines, savoir le gr.ind surplis
lépreux, sous c litre de Sainte-Marie-Mad,- descendant jusqu'à terre, etlhi^er la chape
leine et de Saint- Lazaie, c'est ce (pii a peut- par-dessus sans aucune ouverture pour pas-
';trc donné lieu à .\ilrien Damnan et à quel- scr les mains (i), ce (jui était incommode ;
qucs autresd'avuir supioséun ortirede sainte aus>i les anciens (|ui s'en ^ervaienl oni-ils
Madeleine cl de saint Lazare. quitté ces habits pour se conformer auxcha-
Voyez Itoger Dodsvvorlb, it Cuillelm. noines de la (Aingrégalion de Fiance lors-
Dngdale, Mnnuslicon AtKjlic mnin. Imii. II. qu'ils fnrenl introduits ilaus cel'c abbaye.
JFAN-HAI'Il.SIK Dli LA l'/iNlTLNCK ^Fn- l/an lO.îli, le parlement de Kouen ob.igea
MiiKS i)K Saint-). Voy. (îonzacle. les <liani incs réguliers du prieure de Saiiit-
JKAN UF lîICLAlU'^ loi/. CÉSAiim {Sain!-]. Lô di- Houen d'embrasser aussi la rérorme
miv i.i-n«i lo ini-..- /,- - ^'^ ''1 l^iiigrégxiion de France; et, ajant l'ail
JEAN DL CIlAlt I \ h> (CuANoiMS u.çr.i i.n.i.s ,,,„, ^ ,,^, ,,,t,i ,|es religieux de l'ans, il les
m: S VINT-), I.KS Diu X Am.nis, nii Sum-Lo „„t ^.„ ,,„ssession de et" prieuré, qui avait
«K UoiiiN, 1.T i.K SAiNT-MAim.M lFc..»- éic autrefois bâti par saint Mellon, arclic^è-
^xy prcevicuent unis à la (.ongre<juUou ,,^. ^,„^ ,,,|,,^ ,„„, ,'i„v„caIion de la
tlehumeoudeSninU-Grvciicvc. ,.,i,„^. T,i„i,,.. Mais, les Normands s'elant
Après que la reforme eut étéintroduitedans établis dans laNeu'.lrie, a laquelle ils don-
l'abbaje de Sainl-^'in(•cnl de Senlis par les nèrenl leur nom, laisant de grands ravajies
(uins du It. 1*. Faure, celle de Sainl-Jeaii de dans cette i)rovinci', principalement dans la
(1} Voy., à 1.1 fin du vol., ii" »>i. (1) Vuy., ii la fin du vnl., ii" lôr>.
52". JE A
haiso Normandie, !i's reliques de saint Lô cl
de saint Uoniphard, évê(iue de Contanrcs,
furent apporléfs à Uoucn et déposées dans
colle église de la Trini é, qui depuis ce temps
a retenu le nom de Sainl-Lô. Rollo. duc des
Normands, s'clant (ail chrétien, accorda en
leur cons déralion l'église où ces saints re-
posaient, à Thierry, évêquede Goulances, et
à ses chanoines pour leur servir de calhé-
dialc et y faire le service divin jusqu'à ce
(ju'ils fussent rétablis dans leur propre ville.
Quatre évéques de Goulances conséculi's y
tinrent leur siège pendant plus de cent vingt
ans, et ils y laissèrent, en se rclirant en hasse
Normandie, un collège de chanoines, les-
quels, étant tombés dans le dérèglement, fu-
rent remplacés par des chanoines réguliers
qu'Algare, évé(iue de Goulances fit venir do
Sainte- Barlic en Auge en 11V4; qui, ayant
aussi ah.'in lonné la vie régulière, furent unis
à la Gongrégalion de l'raiice, l'an 1G39,
comme nous avons dit ci- dessus. Ils étaient
en possession de porter, l'hiver à l'église, la
cliapc violette, elen été l'aumusse d'étoffe de
même couleur doublée et bordée de fourrure
blanche (1).
Lo prieuré des Deux Amants, au même
diocèse de Kouen, embrassa aussi la môme
rcibrme le 24 mai 1G48. 11 y a eu plusieurs
opin ons touchant l'orig ne de ce nom. La
Iradilion du pays est qu'un jeune gentil-
homme ayant recherché en mariage une de-
moiselle dos (iivirons de ce lieu, ses parents
ne crurent pas ce pnrli avant.igeux pour elle
et refusèrent sou alliance. Go gentilhomme
ne se rebuta point de ce refus, au contraire
il icdouhla ses poursuiles jusqu'à se rendre
importun, desoile que le père de la (ille,
croyant se défaire de lui en lui demandant
quelque chose d'impossible, lui promit sa
lille s'il la p uva l porter jusqu'.iu haut de
ia monlagnc où l.- monastère est présenlc-
nient siiué, laquelle csl fort roide et do diiTi-
ciic accès. Il accepta la condition et la porta
hcurcusemenl jusqu'au Iiaui de celle mon-
tagne, mais si las 1 1 si épuisé, qu'il expira
siir-le-chanip. Gel aci ident toucha si sensi-
! lemcnl la fi le, qu'elle mourut aussi de de-
plaisir, de sorte que les parenis de l'un et de
l'autre les tirent inhumer ensemble au même
lieu , qui a gardé depuis le nom des Deut
Amants.
Gomme celle hisloire approche du roman,
c'csl pour cela que d'autres ont cru que ce
nom avait cié donné à ce monastère en cou-
sidéraiion d'un mari et d'une femme d'Au-
vergne dont parle Grégoire de Tours au li-
vre xxxii De (ïloria Con/essorum. Lesquels
ajanl gardé loute leur vie la virginité dans le
mai iage,etayanl élc<nterrés aprèslcurmort
l'un après l'autre dans deux sépulcres dilïe-
reulsdf pierre, on trouva le lendemain qu'ils
éiiiicnt si bien joinlsenscmblr', qu'il n'en pa-
raissait qu'un : c'est pourquoi ils furent hono-
rés dans loul le pays sous le nom des Deux
Amans. Mais il y en a d'autres qui ont estimé
qu'il ne fallail point chercher d'autre ori-
(I) Voij., i\ la fin du vol., n* l.ïi.
(.;) Voi) , ù la lin du vol., n' 1.">5.
.ÏF.S
.'M
gine que l'amour saiai et réciproque de N'o^
Ire-Seigneur envers la .Madeleine, qui egl la
patronne de cette église. Les chanoines ré-
guliers de ce lieu avant la réforme portaient
l'aumusse sur la tête et avaient un rochet
par-dessus leur robe (-2).
L'abbaye de Saint-Marliu d'Epermy en
Ghampagne fui du nombre de celles qui,
étant tombées dans le relâchement, voulu-
rent embrasser la vie régulière en s'unis-ianl
à la Gongrégation de France ou de S.iiiste-
Geneviève. Llle avait été fondée dès le com-
niencemenl du xii' siècle par les comtes de
Ghampagne, et fut toujours desseri ie par des
chanoines séculiers jusqu'en l'an ll'^8, que
Gallerand ou ValleranI, quatrième alibé,
ayant été louché par les prédications de
saint Bernard, réolut de quitter le monde
pour se faire religieux à Clairvaux ; mais
avant d'exécuier son dessein, il fit venir, par
le conseil de ce saint, cl du consenteniint do
Thibaut, comte de Ghampagne, des chanoi-
nes réguliers a Sainl-Marlin d'Lp. rnay.
Foulques, religieux de Saint-Léon de Tmij,
fut élu abbé et fui béni par llenaud, arch —
véque de Keiins, en prèseiiice de saint lier-
nard, du comte de Ghampagne, et de Josse-
lin , évoque de Soissons. Ges ihanoines,
avant leur union avec la Gongré|,'atioii de
France, portaient une robe blanche à l'an-
liiiue, et, i)ar-dessus , une espèce île peiit
rochet que quelquci-uns appelIcLl (selon la
P. Du .Moulinet) sarrociuin ou scoi iiciuin (3).
Les chanoines réguliers de la prévôté do
Beaumont, au diocèse de Vabres, en ont un
qui consiste en une pièce ou bande de linge
à l'enlour du cou, qui descend en poinic sur
l'eslomac.
Les chanoines réguliers de la Congréga-
tion de France ont aussi réformé ceux de la
cathédrale d'Uzès, qui est une des plus an-
ciennej de Fcuice, puisque le catalogue de
ses évéques remonte jusqu'au V siècle. Il y
a de l'apparence que le clergé ou chapitre do
celle église lut d'abord comme celui ilc tou-
tes les auires églises épiscopales de France,
où le.s chanuines pratiquaient la vie com-
mune selon les règles des canons. Depuis il
devint régulier et suivit la règle de saint
Augustin, lorsque la plupart des chanoines
qui vivaient en commun prirent le nom de
réguliers, et se glorifièrent d'avoir eu saint
Augustin pour l'ère. Les églises épiscopalei
de Languedoc et de Provence, qui firent la
même cimse, formèrent avec celle d'Uzès une
espèce de congrégation. File avait des sta-
tuts communs. Ou y tenait des chapitres gé-
néraux, et on y élisait des visiteurs ; muis
l'on ne peut dire le temps que cette congré-
gation fut détruite, et que toutes ces églises
lurent sécularisées. Il n'y a eu que celles
d Uzès et de Pamiers qui jusqu'à présent
onl été légulières, et les désordres des guer-
res, joints à l'hérésie qui a dominé si long-
temps en ce pays, ayant fait souvent aban-
donner aux chanoines les observances régu-
lières, elles ont eu besoin de temps en teH^JlS
(') Voy., à la lin du vol., u° lôO.
:27 • DICTIONNAIRE DES ORDRES RELIGIEUX. ^19
<lc réforme. Nicolns Grillcl, évi^quc iITzi^, Icnd l'aumusse on camal!, à c,ii;sp qu'il cou-
til vonir, l'an IGiO, les clianoincs r6i;ulicrs rie vrait non-scuicmcnl la ItUc, mais aussi li's
h Congrcpalion de France pour nnnavclcr épaules.
dans son liplise le premier esprit de l'ordre II ajoute que la raison qu'on peut donner
canonique. Ils y ont demeuré pendant quel- pour laquelle les chanoines nient li-urs cha-
ques années, et vivaient sel. m les obsrrvan- pcs aux jours des grandes fêtes, c'csl que la
ces delà Conprépalion de France, dépendant cliape noire clanl un habit de deuil et d.- p6-
(lu pénéral de cette congré(!;alion, qui y en- nilcnce, il est convenable qu'ils la quittent
voyait des religieux et les rappelait lorsqu'il aii\ jours que l'Fglise destine aux solennités
le jugea l ;\ propos ; mais le concordat qui et aux réjouissances.
a\a l été passé entre l'évéque d'Uzès et les Voyez Du Moulinet, Figures des diffrrents
chanoines réguliers de la Congrégation de habits des chanoines réijut. ; ?i.\mm»rlU, (înll.
l'rance a été cassé, il y a environ quarante christiana: Scliooiiebok, llisl. des Oidres r«-.
nns. par un arrêt coniradicluire du conseil lig., et Philipp. lionanni, 6'u((i/o^. omit. OjJ.
d'Ftat du roi, qui a remis celte Fglise.dans reliy.
l'étal où elle est aujourd'hui. M.Michel ron-
cetdcla Uiviére, qui est prcsentemenl évé- JE.\N DE DIEU (Hospitaliers de Saint-).
que (l'Uzès , donna des constilulions parti- p^, religieux hospitaliers de l'ordre de Snint-
cnliéres à ses chanoines ; mais il n a pu les j,„„ ^/g ^,v„_ appelés en France les Frères
obliger a vivre en commun, ce que prali- ^g /„ cuarité, en Espagne de l'Ilospialilv,
qucnl ceux de Pamiers. L habillement des g, j„ y,„//g pa,^ i,p„ Pralelli; arec la vie
(hanoincs d'Uzès couMstc eu une soutane de saint Jean de Dieu, Uiir fundalcur.
Maiulie avec un rabat coiiimc les ecc'e las-
liqurs, et lorsqu'ils sortcnl, ils onl un man- I-cs religieux dont nous allons jiarler ont
Icau noir (li. Ceux de l'amiers sont habiles dilTérents noms selon les dilîérents pays où
lie noir, et onl une banderole de lin (ju'ils ils sont établis; car en Kspagne, où ils onl
portent en échariie, el Us uns et ks autres pris leur origine, on ne les connaît que sous
uni au chieiir un surplis avec une aumusse le nom de Frères de l'Hospilalilé, à cause
grise sur le bras. Anciennement, ceux do riiospitalilé qu'Us exercent envers les
d'Uzès portaient un surplis tout fermé sans malades, et qui est le propre de leur institut ;
manches, à la manière des anciennes clia- en Italie ils ne sont connus que sous celui
subies, et qui était communaux chanoines des Frères F(/<e ben Fraldli, ou par abré-
ile Saint-I.aon de louars, et ils avaient sur viaiion Bon Fratclli, à cause qu'autrefois i's
l'épau'e une espèce de chaperon noir. avaient coulumc dodemander ainsi l'aumône,
Le P. Du Moulinet, entre les différents ha- comme ils l'avaient appris de leur fond ileur,
bilU-mcnls de. chanoines réguliers qu'il a <t qu'en traitant de frères ceux à qui ils de-
donnés, a mis celui d'un chanoine leguli-r mandaient l'aumône, ils les cxhorlaient à
de Closlerneubnrg en Allemagne, qui a hien faire et à avoir compassion pour les
aussi un surplis à la manière des anciennes pauvres malades; el enfin ils sont appelés
chasubles, cl une aumusse .sur la lête, mais en France les Frères de la Chanté, à cause
carrée par le haut, ciunme on peut voir dans que le roi Henri IV, voyant ([ue les malades
la figure d'un de ces cliam.ines que nous étaient traités avec un soin extraordinaire
avons la t graver (2). Le monasièrc de Clos- dans leur hôiiital du faubourg Sainl-Cer-
tcrneuburg fut fondé à huit lieues de Vienne main, donna à celle maison le nom de Cha-
cn Autriche, et bâti avec beaucoup de ma- >ilé de Jean de Dieu, et ce noir, est demeuré
gnificence en l'honneur de la sainte Vierge, en France à tous les religieux de cet or.lrc
par Léopold, marquis d'Autriche, qui y mit et à tous leurs hôpitaux, quoique le veri-
des(hanoines réguliers du tem| s d liino- table nom de celle congrégation soit celui de
cent 11, environ lan 1140. Ordi airemenl ils la congrégation de Saint-Jean de Dieu, ainsi
portent la chape A l'église, mais aux jours qu'il a élé déterminé par le pape Sixte V.
des grandes Icies ils la quitlenl et mctu ni Saint Jean surnommé de Dieu, fondateur
sur la tête une aumusse grie pour se cou- de cet ordre, naquit â .Monte-Major-el-Novo,
former à la caihéd.ale. P<'l''c ville du royaume do Portugal, de l'ar-
■ Celle façon de qu.tter la chaiic aux jours tlievéchéd'lîvora, le 8 mars li'.Ki, de parents
des grandes fêles nest pas nouvelle (selon d'une mé.lioire fortune et peu distingués
ce que dil le P. Du .Moulinet), puisque dans parmi le peuiile. Soa père, André Ciudad, et
l'ordre romain, qu'on lient avoir élé fait il s.i mère iloiit on ne sait point le nom, l'éle-
y a pus lie huit lents ans, il est dil, par- vèrent il'abord dans tous les exercices do
lant du service qui se fait par l'évéïpie au\ P'éié dont son enfance était susrepl b'e.
jours solennels cl de la m.mière q ce les Leurs soins ne fuient loial inutiles, car leur
chanoines y doivent assister, que ceux-,i lils prolila de jo ir en j .ur de leui s inslruc-
vi.ndronl au chœur à l'heure de lierre, re- lion>, et recul sans peine L s sinlimenls de
velus d'aubes et d'.iumusses : Cum liiiliiina- pielé qu'ils \oulnrenl lui inspirer.
buliim ad trriiam sonurrii, oiniirs siinul in A peine eut-il atleinl l'agi! de neuf ans,
c.horum ordiualim conrrnirr dclicnl, litttnera- qu'ils le perdirent par un accident imprévu.
libus et albtt induli; le P. Du Moulinet pré- (Sommeils étaient portes l'un et 1 autre à
tendant que par le mol d'/iumerfi/ii l'on en- l'hospitalité, ils roçurcal el logèrent chez
(I) Voij., :. la lin du vol., i,* 157. (i) Ycy., ;i la fin du vul., ii" 138.
£23 jrA
eux un prôlro qui voyagoail ctallail du cMc
de Ma.lrid. 11 parla dans la conversalioii île
la i> élé qui r^'^nait dans celto ville capil.ile
de riîspagne, pI dos églises crlèbres qu'on y
voyait, ce qui fit une si foric impression sur
l'esprit du jeune Jtan, qu'il voulut suivre ce
prèire. Il se démba à son pire cl à sa mire,
et, étant sorti à leur insu de leur logis, il se
mil aussitôt en chemin i our aller droit à
Madrid. Sa mère, après be.iucoup de perqui-
sitions inutiles, ne l'ayant pu trouver, en
mourut de regret au bout de vingt jours, et
son père, n'ayant ;ias moins é é touché de
son absence, se relira à Lisbonne, où il se
(ît religieux de l'ordre de Sainl-François.
Le prêtre qui s'claU chargé de Jean ne le
conduisit pas jusqu'à Madrid, car, étant ar-
rivé à Oropesa, ville de Castille, il se sépara
de lui et l'abamlonna ( nlicremcut. Jean, se
voyant seul dans un pays étranger, fut se-
«ouru par quelques personnes de pieté qui,
ayant compassion de sa misère, lui donnè-
rent retraite. Il s'adressa à un berger nouiiné
François, que Ton appelait simplement le
nwijoral , c'est-à-dire le maître berger,
mnyoral dt ganado en espagnol signifiant
un berger qui a intendance sur les autres
bergers. Jean passa une partie de sa jeu-
nesse à son service. Il fut d'abord employé à
ta garde des troupeaux, et il avait le soin de
porter à manger aux autres bergers. Le
niayoral, ayant quitté sa profession pour se
faire geôlier de la prison d'Oropesa , ne
voulut pas se défaire de Jean, dont il avait
éprouvé la fidélité. 11 l'envoya à une maison
de campagne pour avoir le soin des trou-
peaux, et au bout de quelque temps il lui
donna la charge de veiller sur les domesti-
ques de cette maison, et l'établit l'économe
de ses biens.
Dieu bénit les soins et le travail de Jean, car
les biens de son maitre s'augmentèrent entre
ses mains, les troupeaux se multiplièrenl, et
la prospérité régna dans la maison ; ce qui lit
que son maître, pour l'attacher davantage
dans ses intérêts et lui ôter la pensée de se
reliier et de s'engager ailleurs, lui offrit sa lille
en mariage; mais il n'y voulut point consentir,
cl, comme son mafirc le pressait d'accepter
ce parti, il se relira de chez lui et s'engagea
parmi les troupes que l'empereur Charles-
Quint levait. Il s'enrôla dans une comp;ignie
d'infanteiie que faisait don Jean Feiuz, qui
était un gentilhomme dont son maiire avait
élé le mayoral avant qu'il fût geôlier, et qui
avait eu ordre du comle d'Oiopesa Ferdi-
nand Alvarès de Tolède, de marcher au siège
de Fonlarabie, ville de IJiscaye, sur les con-
fins de France. Elle avait été prise en dix
jours sur les Espagnols l'année précédente,
par le roi François 1"^ ; et l'empereur Charles-
(Jninl, ayant entrepris de la reprendre, y
faisait venir des troupes de tous côtés pour
en couvrir le siège et pour empéclicr le se-
cours que les Français y envoyaient.
Le tumulte des armes, les mauvais exem-
ples des soldats et la vie licencieuse que l'on
mène ordinairement à la guerre, firent ou-
blier à Jcau SCS exercices de pieté, il s'ac-
c luluiiia iiisensililemcnl à faire comme les
autres; el, perdant peu à peu la crainte ipi'il
avait eue d'ofl'enser Dieu, il cul honte do
paraître meilleur que les autres soldats. Mais
Dieu, qui veille sans cesse sur ses élus, el
qui ne pern)et qu'ils tombent dans quelques
I échés qu'afin que la manière dont ils se re-
lèvent serve à édifier les fidèles el à leur ap-
prendre à faire pénitence , ne laissa pas
longtemps Jean dans le désordre, et lui fil
bientôt connaître sa f.iute. Il arriva un jour
que lui et ses compagnons manquant de
vivies cl n'étant pas éloignés d'un village
où ils espéraient en trouver, Jean, comme,
le plus jeune de la bande, fut destiné pour
y aller. Il monta sur une jument (|ni avait
élé nouvellement prise sur les Français, cl
s'avança du côté où ils ét:iient occupés à
lenler le secours des assiégés. La jument su
reconnut dans les lieux où les F'rançais l'a-
vaient souvent menée, elle courut à toute
bride comme pour retourner à leur camp.
Jean la voulut retenir, elle se cabra el le
précipita avec \ iolence sur des pierres el d(!s
roches, el lui froissa tellement le corps, ((u'il
demeura longtemps sans mouvement el sans
paroles. Mais enfin, élanl un peu revenu à
lui el voyant le danger où il étail de perdre
la vie, parce qu'il était sur le point de tomber
entre les mains des ennemis, qui étaient
proches, il se releva avec beaucoup de peina
et se jeta à genoux, implorant le secours de
la sainte Vierge et la priant de le délivrer do
ce péril et de ne pas permcllre (ju'il tombât
entre les mains des ennemis. Sa prière étant
finie, il sentit revenir ses forces, rentra en
lui-nicmc et regarda cet aciidenl comme
une punition de ses péchés. Il se traîna le
mieux qu'il put vers le camp des Espagnols,
où il pleura ses désordres et proinit à Dieu
d'être plus fidèle à son service. De cet acci-
dent il tomba dans un autre malheur. Son
capitaine lui ayant confié la garde de quel-
que butin qu'il avait fait sur l'ennemi, des
voleurs l'enlevèrent, et le capitaine l'accu-
sanl d'infidélité et d'avoir eu part au larcin,
le voulut mettre entre les mains de la justice,
après l'avoir maltraité extraordinairement.
Plu-ieurs personnes s'intéressèrent pour lui,
el obtinrent sa grâce, à condition qu'il le-
noncerait à la profession des armes.
Il retourna à Oropesa, où il alla truirer
son ancien maître, qui le reçut avec beau-
coup (le tendresse. Il lui rendit son premier
emploi, lui confiant de nouveau le soin de
tous ses biens. Il s'acquitta de cette commis-
sion avec encore plus d'exactitude, et sn
comporta de telle sorte, que son maîlrc,
ayant toujours dessein de le choisir pour son
gendre, lui en fil encore la proposition. Il
n'y voulut point consentir, cl, pour se déli-
vrer de ses poursuites, il prit une seconde
fois, en se retirant , le ])arti des armes ,
croyant que la guerre que l'empereur Cbarles-
Ouint soutenait alors contre le Turc était
sainte cl qu'il y pouvait souffrir quelque
chose pour Jésus-Christ. Il évita tous les
désordres où il étail tombé dans la première
guerre, il s'y comporta avec toulc sorte de
631 lUCTIONNAmE DKS OUPRES r.ELIGIEtX. S32
rplenuc et do modcsiip, cl, liiin loin diiilcr- l.iiil Cfinliniidlemenl ceux qui en éinient
rompre se.'cxritici's de pirlé, il les .inj,'!!!!'!!!;!. les exériiU-urs, le mil à deux doigts du loiii-
I.;i ptitrre ol.iiii Itiiic et les lioi;pi's ;i>.Mit lienii. .\\ iln en fut nvorti, et, l'étant venu voir,
été licenriéfs. Jc.in \iiil en l'orlMi.',!! et »oii- il lui dit qu'il éinil ternis de nietlrc fin à ses
lut aller ri'voir ses pareiiis à Moule-Major. fol es volonl.iires et d:' s'apiiliqucr désoiinais
Il )■ apprit d'un de ses ourles que son pérc àdes elnses plus iililrs pourlui el pour le pro-
tl sa mèieélalenl niorls, cl, ajanl su que eliain. Jean oliéil, les ;idiiiiuislrateurs fureul
sa fuite avait clé la nu'^e des malheurs de sur[iris d'un eliani;einenl si soudain ; ils le
sa famille, il viiiilul enlièienienl ahaiulonner firent traiter avec beaucoup d- soin, et
son pays pour aller suvir Dieu d.ius un au- en peu de tcni; s il recouvra la santé cl les
Ire emlroil. 1' passa pour cet cfTet ilans l'An- forces. 11 demeura <iMclque lemps à servir
•iaiousic, où il se mit au service d'une dame les malades du même li(ji)ilal ; il en sortit au
rielic du lerri'oirc de S; ville, cl entra chez mois d'octobre de l'an loJlt, qu'il voulut
elle en qualité debericr. 11 comnienra à exécuter le vœu (ju'il avait fait de servir
passer les jours d les nuits dans les exerci- Dieu dans -es pauvre*. Il forma le plan du
ces de la pénitence et à pleurer sa vie pas- dessein qu'il av.ut de leur procurer des ali-
sée, à prier et à implorer la iiiiséricorde de nicnls, des habits, et des lelriilcs assurées,
Dieu. Croyant faire quelque chose qui lui à son retour d'un pèlerinage qu'il fit à No-
serail plus ajjré ihlc, il passa en Afri(|ueafin Ire-Dame de Guadaloupc pour remercier la
il'y lrou\er l'occasion d'y s(;ulTrir le martyre, sainte Aieri^e do sa protection et lui recoin-
11 fut pour ce sujet à (^'ula; mais, jiar l'avis mander le succès de ses onlrepiises. Il coin-
ile son confesseur, il repass.i en Kspagne, et niença par nourrir quel jues pauvre^, du tra-
ayant tlél'ar(|u6 à (îibi altar, il s'occupa à vail de ses main^ ; il allait pour cet efTel rou-
veiulre lies images et des | etils livres de de- jier du bois dans la forêt, et le vei\dait à la
Vol on. ville pour les faire sulisistir; et sou exem-
De G b.aitar il passa à f.renade, où il c!a- P'^^ J«''-^ "^ ^^ exhortations anima tellement
Mit d'abord une peiiie boutique sous la porte li'S personnes chaniables de la yi le de Grc-
d'I' Ivirc, cl. sachant qu'où avait couluu.e de "'".','; v1"^; P^"" !f '"",5,'^" ']? luelnu^s quêtes
célébrer la fétc de saint Sébastien à Grenade, 1" " «'; '' '^'^ ^" ^" '^^'■".' ' •'" ^^'^'•' ^'« '"""
dans l'ermilaiic de son ncm, qui était au U'.c maison pour y rel.rcr les pauvres ma-
quarlicr le plus élevé de la ville, il y fut cl ^^i':^':^ '"'' '';' / "ssusler.
y entendit p.écher le do.leur .lean Avila, le ...V ^ '',"'" ' ''"■'''," '" f'""'"<'"C("'"'^"''* ''^
■plus célèbre prédicateur d'iispasne et sur- ' *!'^1"'''' '';" ^T' "a> e, cl proprenient les pre-
' ommé l'apôtre de l'Andalousie.' Il en fut si "".'■'« fondcuenls de son ordre, ^on pnmier
louché, que, fondant en larmes, il remplit «ûtn, après avoir oue celte maison, lu de la
IVgliscde cris cl de lamenlalious qui le fourn r des meubles qu il crut et: c absolu-
firent prendre pour un homme forcené il se ""^'.V n.'cessaires ; el sans perdre de temps,
frai.paitla poiirine, se dédirait le visage, i alla dans toute la ville chercher des mala-
s'arrachail la barbe el les cheveux, se rou- ^f.*- ''" '^,'^l'""P'f ', ''«^=* '"'l'olouls. pour rrm-
lait dans la boue, cour.iit d'une manière ex- p!"" «"" l!<>l"lal. La plupart de ceux qui lo
Iravaganie par les lues, ne faisant aulro \\]''''^ '"'ST ^'''S' le blâmèrent, 1 accusant
chose que crier à Dieu de t.:ule sa force : d ""''scdion , le regardant comme un
jl/i..c;ùon/c. Chacun jugea nu'ilavaiHespril ''""""« entr.prenant et qui son- geait a
troublé. La populace s'attroupa autour de ""c chose qui lui elail absolument impossi-
lui, hs eufanls, la canail'c le poursuivinnt 1"'; "^ais sa fenueie les donna, sa foi les
a coups de pieres. Il ani^a chez lui tout en ch n-gea de confusion, d I ardeur de sa clia-
sang, et avani continué le lendemain à (aire '"'"^ '" ••' r. ntrer en eux-mêmes. Ils voulu-
la n.éme'diose. on le ccnduisit au dod.ur ri>nt avoir part a 1 établissement qu il fiisail,
Avila afin de \oir s'il ne pouirail lias guérir ''=* '"' '""■'^'" 'l"':l'I"es aumoius ciilie les
cd esprit que sou sermon avait si étrange- n.ains pour fournir aux besoins h s plus pres-
inenl blessé. Ce saint prêtre, après a^oir s'inlsde ses pauvres, d leur exemple en attira
écouté Jean dans la confession, leeonnut ^,'"";-es a lui faire aussi quelques libeiali-
IVsprit de Dieu dans 1. s mouvements du l<-'^- >'•'« pauvres ne manquaient de rieu ;
cœur de ce pénileni qui ne contrefaisait l'in- "''P'"'^,'' T'f •'.''■'" ' '' I'"'" ^'^ avait assistes
sensé (|ue pour se procurer des humiliations; P^^'" ant le jour et leur avait procure tous
Il l'encouragea dans ses sainte, résoluiions. '•''' '"^'"f si";>luels dont ils | ouvaient avoir
d lui promit de l'assislcr dans toutes les len- ^''■-""'' '''"'• '-"sanl venir des con esseurs d
contres autres personnes pieuses qui leur lais.iienl
souvent des insliuciions famili.'rcs, il allait
Jean, consolé par un si saint homme, lo soir vers les huit à neuf heures (luèter
crut qu'il ne pouv.iil pas assez s'huirii ier. pour eux : il marchait dans les rues avec
Jl recommença ses extravagances d ses to- une hotte sur son dos et deux marmites ;i
lies app.'irentrs. Ou l'enfirma dans l'hôpital ses bras. La pluie, |c vent et les aulres io-
des insensé', où, après les rrmèdes (jii'on jures du temps ne l'an élaieul poiiil, d, lors-
lui lit prendr<> et (|ni furent inutiles, on crut qu'il voulait demander l'aumône pour les
que li; plus efficace pour le guérir dail do le malades, il criait à haute voix : J/p.« c^fr.v
louellor lous les jouis jusqu'au sang, jus- frrrrs, Inilcs-vaiis du bien pour l'amour d»
i|ii 'à ce que son esprit lui re\ enti. (>c sup- y^i'cii. Celle m.inière exiraordinaire de dc-
l'Iicc, (ju'il u\ iiit 50 u d'augmenter eu ini- mander l'aumouc alliiuil luul le looiidc aux
l
î;33 jea
feiiôlrcs, et on lui donnait abondamment de
quoi nourrir ses pauvrc«..
Le siège épiscopal de Grenade était oc-
cupé pour lors par dom Pierre Guerrero.
Ce prélat rrul qu'il était de sa charge pas-
torale de prendre connaissance de ce nou-
vel élablissement cl d'examiner comme tou-
tes choses s'y passaient. Il en fui si satisfait,
que, non content de lui donner sa protec-
tion, il donna dis sommes considérables
pour fournir aux frais de cet hôpital, ce que
plusieurs personnes de la ville firentà l'exem-
ple de leur pasteur. L'approbation que l'ar-
chevêque de tîrenade venait de donner à
cet hôpilal le mit en grand crédit, les pau-
vres y accouraient de toutes parts, de sorte
que la maison qu'il avait d'aboid prise se
trouvant trop petite , il fut obligé d'en
louer une plus grande et plus com-
mode, afin d'y pouvoir admettre tous ceux
qui se présenteraient. Tout y était admiré,
Li propreté des lieux, l'ordre du service, l'a-
bondance des vivres cl des meubles, la cha-
rité, la modestie, la patience des ministres
qui travaillaient sous noire saint ; et on s'é-
tonnait comment un homme sans crédit et
sans autorité, n'ayant ni biens ni revenus,
avait pu établir un si bel hôpital.
Comme notre saint était enlièremenl mort
au monde, il ne désira t point de lui plaire,
et paraissait toujours avec des habits très-
méchants et tout déchirés; car, s'il rencon-
trait un pauvre dans la rue qui fût plus mal vêtu
que lui, il prenait son habit et lui donnait
le sien. Mais l'extérieur méprisable et
dégoûtant que les gens du monde trou-
vaient dans sa mine et dans ses babils n'em-
pêchait pas quelques personnes de considé-
ration de marquer toujours beaucoup d'em-
pressement pour l'avoir chez elles dans le
cours de ses quêtes. L'évèquc de Tuy, pré-
sident de la chambre royale de Grenade,
l'ayant un jour retenu à dincr, et lui ayant
deman lé son nom, notre saint lui répondit
qu'il s'appelait Jean : Vous vous appellerez
à l'avenir Jean de Dieu (dit le prélat); et de-
puis ce temps-là ce surnom lui demeura.
François de Castro, adininistralcur de son
hôpital de Grenade, qui rapporte ainsi la
cause de ce surnom, et qui le premier écri-
vit la vie de saint Jean de Dii'u, environ
vingt-cinq ans après sa mort, doit être plu-
tôt cru qu'Antoine Goëva, évêque de Cyr,
qui n'écrivit la même vie que qualie-vingls
ans après, et qui dit que ci- fui Noire-Sei-
gneur qui, s'élantappa u à lui sous la forme
d'un enfant, comme il se reposait sous un
arbre, lui montra une grenade ouverte, du
milieu de Liquelle formait une croix, et qui
lui dit : Jean de Dieu, grenade sera la croix,
ce qui serait arrivé, selm cet auteur, dans
le temps que notre saint demeurait à G.bral-
tar, et qu'il s'était mis en chemin pour al-
ler dans les lieux des environs de cette
ville pour y vendre ses images et ses livres.
L'éyôque de Tuy lui dit encore (|ue, puis-
qu'il lui avait donné son surnom, il voulait
aussi !ui donner un habit, lui représentant
que l'humilité et la simplicité dont il faisait
JEA
S54
profession ne le dispensaient pas de garder
une bienséance lionnêle, et qui' celui (ju'il
portail était dégoûtant et empéihait (lue
plusieurs honnêtes gens ne le fréquentas-
sent : c'est pourquoi il envoya sur l'heure
acheter de l'étoile pour lui faire un habit
dont il prescrivit lui-même la firme, et il
l'en revêtit lui-même de sa main, lui ordon-
nant d'en donner un semblable à ceux qui
s'uniraient avec lui.
Le saint ni le prélat n'avaient aucune in-
tention d'éiablir un nouvel ordre religieux
dans l'Eglise; mais il y a bien de l'apparence
qu'ils avaient dessein de former une société
ou congrégation de. personnes séculières
pour avoir soin de l'hôpital de Grenade, et
que CCS personnes devaient être distinguées
des autres séculiers par des habillements dif-
férents.
Jean ne fut pas plutôt revêtu de cet habit,
que plusieurs personnes s'offrirent à lui pour
être de ses disciples. Les premiers furent
Antoine Martin et Pierre Velasco, qui se
portaient une haine mortelle. Le premier
accusait l'autre d'avoir tué son frère, et était
venu exprès à Grenade pour le poursuivra
en justicci mais Jean de Dieu les réconcilia
si bien ensemble que, pour vivre dans une
plus grande union, ils voulurent être disci-
ples de notre saint, et furent les premiers à
qui il donna l'habit de sa congrégation, selon
la forme qui lui avait été prescrite par l'évo-
que de Tuy.
Son hôpital se trouva encore trop petit ,
et il fallut le transférer pour la troisième
fois. L'archevêque de Grenade, dom Pierre
tjuerrero, sollicita les principaux de la ville
à contribuer à l'achat d'une maison fort
vaste, qui avait été autrefois occupée par
des religieux, cl, pour donner l'exemple,
il fournit pour sa part quinze cents ducats.
Ce fut encore à la sollicitation de ce prélat
que notre saint entreprit un voyage à Val-
ladolid, où la cour d'Espagne était pour lors,
afin d'obtenir un secours pour ses pauvres.
U y fut favorablement reçu de Phi ippe 11,
qui n'avait pas encore le litre de loi , et
qu'on nommait le prince des Espagnes ,
parce que l'empereur Charles V ne lui avait
pas cnrore cédé ses Ktals, ce qu'il ne fit (]ue
l'an 1553. Jean de Dieu reçut de grandes
libérables de ce prince et des srigneurs do
sa cour.
Sa charité ne se bornait pas scnle.ner.t aux
malades et aux pauvres de son hôpital, il se-
courait encore les pauvres honteusde la ville,
retirait une infii\ité de femmes et de lillcs de
la débauche, et non-seulement pourvoyait a
leur snbsitanc', mais en mari;iil encore
quelques-unes, linfin ses forces se trouvè-
rent enlièremunl épuisées pir sa charilé et
sa pénitence; et, dans le temps (]ue l'on se
promettait qu'il travaillerait plus que jamais
pour les pauvres, il se trouva presque hors
d'état d'agir. U ne laissait pas néanmoins
de continuer ses exercices «rdinaircs, de
faire ses quêtes, de veiller et de s'occuper
au dedans de la maison ; mais enfin un acci-
dent imprévu lui causa, l'an loaO, la aula-
5Û5 DICTIONNAIRE DES OROUF-S RELIGIF.UX
iHe clonl il nv'urul. I-os caus du Xonil
6inirnl cxiraordiiinircmcnl grosses celle an-
53G
i>ve-là, cl ciilrainaieiil .nvoc elles quantité
de buis. Noire saint fondateur, voulanl en
retirer pour l'usage de son hôpital, cl étant
entré dans ce lurrenl, le froid le siisil lellc-
iiienl, qu'il fut d'.iliord attaque d'une vio-
lente nial.'idic qui s'.iusmenla lorsque, par
lin excès de sa charité, il se jeta encore dans
le fleuve pour s courir un jeune homme
<iui y était entré trop a>ant. et que 1 1 rapi-
ililé des eau^ emrainait. Il se mit au lit, où
il fut visité par larchciéque et les plus
i|uaiillés de- la ville, du nombre desquels fut
la dauic Anne Osoria, épouse de dom G.ir-
cias de IMse , qui fil tant d'instances pour
qu'on l'amenât à son logis, afin qu'il fût
mieux assisté dans sa maladie, que l'on ne
put lui refuser celte grâce ; et ce fut dans la
maison do celle dame qu'il mourut , le 8
mars 1350, âgé de 55 ans.
(^omme il n'y avait qu'une petite cha-
pelle dans son liôpila', on ne put pas l'on-
lerrer dans ce lieu. 11 fut inhumé dans l'é-
glise des Minimes, et enseveli dans l'habit
des religieux de cet ordre avec une pompe
funèbre où la magnificence se trouva jointe
à la piété publique ; l'archevêque môme y
officia pontificalement. Ces religieux pos-
sédèrent les précieuses reliques de ce saint
jusqu'en l'an IGGi, qu'ils les rendirent à ses
enfants pour les tiausfcrrr à l'hôpilnl de
(ircnade. Les grands miracles qui se firent
à son tombeau porteront le pnpe Urb.iin \'ll!
à le béatifier par une bulle du 21 septembre
1630. Innocent XI, par un décret du 13 juin
1G79, déclara qu'on pou>ail procédera sa
canonisation ; mais il se pa^si encore quel-
ques années sans qu'on en fit la cérémonie;
ce ne fut que sous le pcnlificat d'Alexan-
dre \]\, l'an lOrfO, le 10 octobre, qu'on lui
rendit (Cl honneur.
Saint Jean de Dieu ne donna point de son
<ivant d'autre règle à ses disciples que
l'exemple de ses vertus avec l'ordic qu'il
leur prescrivit pour l'assistance (orporcllc
et spirituelle des malades. Après sa ir.oii,
ils obéirent à un supéi leur (]u'ils nommaient
majeur; ce fut en cct'.e (|u:ililé qu'ils re-
connurent le frère Antoine Mirtin, à qui
saint Jean de Dieu av.iil donné en mourant
1 adininisiralion de sim hôpital. Conimc ce
saint fondateur avait reçu de grandes au-
mônes de Philippe 11 lor.^qll'il était à \'alla-
dolid, le frère Aii'.oinc fut trouver, pour le
même sujet, ce prince, qui était pour lors à
Madrid, à qui il pcr>uada aussi de faire bâ-
tir dans C( lio capitale d'Kspagnc un hôpital
sur le modèle de celui qui a^ait été bâti à
Grenadi; par saii;l Jean «le Dieu ; ce que ce
prince exécuta , cl (Ct hôpital a été appelé
rendant un long temps l'Ii |>ilal d'Anloiiic
Martin, à cause de ce frère, qui en avait
procuré l'élablissemi ni , cl qui, .'iprès avoir
reçu des nuii ônes considérables de ce prince
pour l'hôpital de (ireiiade, y lelourn.i pour
rendre compte à l'arci evè jue de ce ipiil
a\ait fait a Madriil, oii il alla encore qiicl-
ijuc li.mps (i['rcs, avec la iiciuiis:>iun de ce
prélai, pour prendre radminislralion de ce
nouvel hôpital, dans le(iu;'l il mourut le 2V
décembre de l'année 135'}. n'ayant survécu
que trois ans au saint fondateur.
A l'exemple de ces deux hôpitaux, on en
établit d'autres en Espagne, comme à ("or-
doue, à Lucane et en d'autres endroits. Celui
de Grenade était le plus fameux, il était
gouverné par le frère Uodrigue de Sigucnça,
qui s'acquit une si grande réputation, que
les comiiiunautès de ces autres hôpitaux
voulurent être unies à la sienne ct le recon-
naître pour supérieur. Si:.^uen(;a les reçut et
les incorpora à sa société, qui se trouva par
ce moyen assez nombreuse. Il crut qu'avant
lout'S choses il fallait faire approuver par
le saint-siége leur institut ; il en conféra avec
dom Pierre lîuerrero, qui loua son dessoin ;
c'est pourquoi il choisit le frère Sébastien
Arias pour aller à Rome avec une supplique
adressée au pape, qui contenait ce qui s'était
passé dans la société depuis son établisse-
ment. Sébastien Arias, élanl à Naples, y ren-
contra dom Juan d'Autriche , qui allait à
Kome comme en triomphe , après la vic-
toire de Lépanle, qu'il avait remportée sur
les Turcs. Ce prince s'engagea de l'itilro-
duire auprès de Sa Sainteté , do présenter
lui-même la supplique, et d'en solliciter
l'expédition. Pie V, qui était pour lors assis
sur la chiirc de saint Pierre, approuva cet
ordre par une bulle du premier janvier 1372,
ct donna à ces religieux la règle de saint
Augustin. Il leur prescrivit de plus la forme
('e l ur habillement, leur donna p <uvoir
d'élire un supérieur, sous le nom de ma-
jeur, dans chaque hôpital, et leur permit do
faire promouvoir aux ordres sacrés un
d'entre eux aussi dans chaque hôpital, pour
leur administrer les sacrements aussi liii-n
()u'aux malados, les soumettant à la juri-
diction des évoques des lieux où leurs mai-
sons seraient situées.
Le frère Sébastien .\rias, qui avait logé,
pendant son séjour à Home, dans le palais do
dom Juan d'.\utriclie, reçut en parlante!.^
nouvelles faveurs de ce prince, qui lui mit
entre les m;iins cinq mil e ducats, afin qu'eu
passant à Naples il y fon iàl un hôpital sous
le nom de Notre-Dame de la \ictoire. Pen-
dant qu'il était occupé à la consiruciion da
cet hôpital, les bourgeois d»; .Mi!an le pliè-
rent de venir faire aussi un élablissement
dans leur ville. 11 ne put alors saiisi'airc à
leur dcmindc, parce qu'il était pressé de
retourner en Lsiiagne pour y rendre (ompto
de ce qu'il avait fait; mais, élanl relouiiiù
une secon le fuis à Uomc, il fonda à Milan
un grand hô| ital, qui est aujourd hui Irès-
célèiire ct irès-magninque.
tîrégoirc XIII ayant succédé à Pic V, le
frère Sebastien .\rias lit un troisième voyage
à Home par le (•(immandemcnt de ses sujie-
rieurs, afin d'obtenir du pape la confirma-
lion de leur ordre ; non-seulement il le con-
firma et lui donna plusieurs |)iitiléges, mais
il choisit Sebastien Arias pour aller secou-
rir les Klam.in Is qui claicnt afiligcs de lua-
ladic cuuiagicusc. Il voulut uicuic fonder à
657 JtA
Rome une maison pour y élabîir des reli-
pieux de cel ordre : c'est |;ourquoi il lil
éi-rirc au frère Uodrigue de Si;;ucnça afin
(le lui en envoyer. 11 leur doiiiin, l'an 158-2,
l'église de Saint-Jean Caiibile, et fit con-
struire à ses frais l'hôpiial joignant, où il y
a ordinairement soisanle lils.
Le notiibre des hôpitaux s'éiaut augmenté
jusqu'au nombre de dix-huit, tant en Kspagne
qu'en Italie, le pape Sixte V, l'an lo8J, leur
permit de tenir un chapitre général à Rome
et de dresser des constitutions, érigeant leur
ordre sous le titre de Congrégation de Jean
de Dieu. Et Grégoire XIV, en confirmant
leurs privilèges, leur donna pour prolecteur,
l'an 1391, le cardinal Rusticucci, du titre do
Sainîe-Susannc cl vicaire de Rome. Jusque-
là toutrs choses avaient heureusement pros-
péré dans ci'l ordre ; mais, comme le pape
Grégoire XIV leur avait accordé la con)mu-
nication des privilèges de l'hôpital du S.iinl-
Esprit en Saxe, qui avait été oxemi.l de la
juiidiction des ordinaires par le pape Nico-
las V, l'an 1436, et que ces relii;ieux de la
congrégalion de Sainl Jean de Uieu préten-
daient jouir du même privilège : le pape
Clènienl VllI, sous prétexte qu ils s'étaient
relâchés de leurs observances, et que, ne
songeant qu'à parvenir aux ordres sacrés,
ils s'occupaient à l'élude cl négligeaient le
soin des malades, soumit cntièremenl i elle
congrégation à l'aulori é et juridiction des
évoques , ordonna qu'ils ne seraient plus
gouvernés à l'avenir par un majeur, leur
défendit do ])rendre les ordres sacrés et de
f.iire profession solennelle , voulant qu'à
l'avenir ils ne fissent qu'un seul vœu de
(lauvrelé et d'hospitalité, ainsi qu'il est porté
par le bref de ce pape du 13 février l.)92.
Cependant ce pontife, à la prière du cardinal
Rusticucci , leur prolecteur, (jui lui repré-
senta que les hôpiiaux d'Italie, ainsi séparés
cl sans chef, souffraient considérablemeul
de celle désunion, remit ces religieux dans
le droit «ju'ils avaient d'élire un géiièral, par
son bref de l'an 159G. 11 y en a qui oui cru
qu'il leur avait permis aussi de faire pro-
mouvoir aux ordres sacrés un de leurs frères
dans chaque hôpilal, pour aJminisirer aux
malades les secours spirituels dont ils avaient
besoin.
Le 1*. Hensclionius {Apiid Boll. lom. l,
Aprilis, p. 812, n. 12), qui est de ce nombre,
n'avait pas vu sans dnute la bulle de Clé-
ment vin, puisqu'il s'étonne que le pape
Paul V ail été prié par ces religieux de leur
permettre de faire promouvoir quelques-uns
de leurs frères aux ordres sacrés, pour ad-
ministrer dans chaque hôpital les bcsoii's
spiritueis tant aux religieux qu'aux mala-
des, comme si, dit ce savant houmie, le pape
(.lémeiil Vlll ne s'élait pas exjdiqué assez
formellement en leur fjveur en 1-ur accor-
dant cotte permission, et pour cet effet il
rapporte l'endroit de la bulle où il veut que
celte permission leur est accordée, et qui est,
à ce qu'il prétend , énoncée en ces termes:
Ut cuiifi (lires ad sacerdolium socris ordini-
bui iniliari possint, modo juxla piiinum co-
JEA 533
rum inslilulum in simplicitule pauperibus in-
firinis interviant. On lit néanmoins loiil le
contraire dans cette bulle, où il est expressé-
ment défendu à ces religieux de prendre les
ordres sacrés. Voici en quels termes ce pape
s'est expli(iué iQuadve confralrcs luiju^ con-
grcgationis, saccrdoUs, aut savrix ordinibus
conslituti esse non possint, nec ail hujusmodi
sacros ordines promoieri vateant, sed juxta
primœium eoruni institulam in simplicilalc
pauperibus infinnis, ut prœfertur, inscivire
debennt { Bull. Roman., lom. III. Consl.
Clem. Vlll, kk, § 10 ).
Les religieux de cet ordre curenl donc rai-
son de s'adresser l'an 1G09 au pape l'aul V ,
et de lui représenter que le pape Clément \ III
leur avait défendu de faire promouvoir aux
ordres sacrés aucun de leurs frères, et de lo
prier de leur accorder celle grâce, puisque
lis prêtres séculiers dont ils se servaient sj
contentaient le plus souvent de dire la messe^
ne parnissaicnl plus le reste du jour dans les
hôpitaux, cl qu'ils n'y demeuraient pas aussi
le plus souvent la nuil; ce qui faisait que
les pauvres manquaient de secours spirituels.
Paul V leur percnil donc de faire prendre les
ordres sacrés à quelques-uns de leurs frères,
qui ne pourraient exercer aucune charge
afin d être plus en étal de vaqueraux besoins
spirilueis des malades. Le mêuic pape, par
un autre bref du 7 juiliel IGU, sur la repré-
senlalion que lui firent les religieux de cel
ordreen Espagne, que le bref de Clément Vill
du 13 février 1392, qui défendait aux reli-
gieux de cet ordre de faire à l'avenir la pro-
fession solennelle des trois vœux de pauvre-
lé, de chasteté et d'obéissance, n'avait eu
aucun lieu dans leurs hôpitaux d'Espagne,
et <iu'ils y avaient toujours fait ces trois
vœux, en y ajouliint un quatrième, de servir
les malades, leur permit de faire ainsi leur
profession après l'année de probation ; il leur
permit de plus d'avoir deux prèires de leur
ordre dans cliaquc hôpital, el déclara qu'ils
étaient véritablement religieux. Il aceorda l;i
même gràc.' à ceux de France, d'Allemagne,
de Pologne cl d'Italie par un autre bref du
13 février l(jl7, el il les déclara eucoro
cxem, ts de la juridiction des évoques par
un autre bref du 10 mars IGID ; mais le pape
Urbain Vlll modéra cette exemption l'an
1G3S, cl déclara que les évéques auraient
droit de visite dans les hôpitaux où il n'y
aurait pas douze religieux, el qu'ils esami-
ueraienl les reccltes el les dépenses conjoin-,
leincnl avec les provinciaux et les autres
supérieurs de cel ordre. Cela n'empêcha pas.
l'archevciue de Cagliari, en 1G39, de préleu- ]
dre le droit de visite dans tous les hôpitaux qui \
él, lient dans son diocèse, quoiqu'il y eût plus
de douze religieux ; mais le pape Alexandre
Vil, par un bref du 3 novembre de la même
année, ordonna que celui d'Urbain Vlll sera.l
exécuté, et que Ion s'en tiendrait à ce que ce
pontife avait décidé.
Depuis le bref de ClémennUI de l'an 1592,
dont nous avons parlé ci-dessus, les religieux
d'IIspagne ont toujours été séparés des reli-
gieux des autres hôpitaux situés hors dcco
559 DICTIONNAinE DES ORDRES UELICIF.IX. 540
ro\auiiie;ile sorlo qu'il v nru doptiisrclwips les lro:s ,iiis lo chnpitre provin<ia), dans le-
ili'iiv généraux, riiiipdurl'Ivsi'.Tjiipfili'sliKli's <|iicl (li.'<]iic province élil son provinri.il.
«trculcnlalcs, c\ l'iUiTc pourl.i Frnnio. l'AlIc- ilonl rofiice ne ilure (]uo trois ans, cl celui
iii;ii;nc,liiroii>L;ne«l i Italie, qui f.iilordin.iin- du péneialsix ans. (Jiiaiil à leur linlMllc-
iiienl sa résidence. 1 Uonio.l.es luipil'Hix d'Iis- PK-nl, il tonsisie en une robe de dr.ip hruu
p.ii;n'' sont divisés on (iini\ rri)>inccs, lune aviciin scapulaire c'e n èine et un ciii ucc
soiîs le nom d'Andalou'ie, l'autre sous celui rond, la tunique ou robe Clanl serrée d'une
(le Caslille ; et comme l'ordre a lait de plus eeiiiliirc de cuir noir (1). Ils n'ont que
firands prO';rés dans les Indes, il y est divisé d. s i hemises de ser|;e, et ne courbnnl aussi
eu quatre {;ran(les provinces, qui sont celle que dans des linc -nls de serge. Les arnus
du l'erou.de la Nouvelle-Espagne, delà Terre- de cet ordre sont d'azur à une grenade d'or
Ferme, cl des I'iiilip|pinf s. surmontée d'une croix de méuic, l'ccu timbré
Les autres liopilaux (jui reconnaissent le d'une couronne,
général de Rome sont l'ivisés en sis provin- .le m'étonne que M. Herinant, dans son
ces. Ce ne fut que l'an ItiOl que ces religieuv Histoire de rLtablissemenl des ordres reli -
passèrent en France par Ieni03en de la reine pieux, parlant de saint Jean de Dieu, ait ilit
Marie de Médicis, qui y mena avec elle le que c'est le pape Innocent \II qui l'a mis au
frère Jean Donclli et quelques autres reli- calalo^-uc des saints, puisque sa canonisa-
gieux d'une piélé exemplaire, à qui elle tion s'est faite de nos jours, el que personne
donna une maison au faubourj; Saint-Ger- n'ignore qu'elle a été faite par le pape
main , où ils ont bâti un bôpiial qui s'esl Alexandre Vlll ; et qu'il ait encore mis que
rendu célèbre dans la suite par la ma;;nifi- ce fut Léon X qui approuva sou ordre C(.m;nc
cence de ses bâtiments. Au mois de mars de une société, l'an lo20, el qui donna la rè|;le
l'année 1002, Henri l\ leur accorda des Ici- de sainl Augustin pour lis sœurs converses,
très patentes pour leur é ablissement, avec puisque, l'an 1520, sainl Jean de Dieu n'a-
permission de faire bâtir et construire des vail pas encore songé à prendre soin des pau-
Iiopitaux dans toutes les villes el les lieux de vres malades ; qu'il s'enrrtia dans l'armée de
son royaume où ils seraient appelés. Lou'S l'empereur l'an lb22, qu'il rttourna peu de
Xlll, l'an 1017, leur en accorda d'autres qui temps après au service de son premier maî-
conlirmenl rétablisseincnl de leur ordre en lie, où ayant encore demeuré environ dix
France, érigé en vraie religion par le pape ans, il alla pour la seconde fois à la guenc
rie V, et qui veut que ces religieux soient l'an lo.'52 ; qu'il ne commei-ça à se couver ir
reconnus pour tels. Ils oui un vicaire gêné- qu'en 15 JO, que son parfait renonremcnl
rai lésidaut à Paris, lequel a droit de visiter au monde n'arriva qu'eu l.')30, el qu'enfin il
tous les liôpilaux du royaume, qui sont au ne commença s n premier bôpilal iiu'en
nombre de vingt-quatre. Ces religieux fran- 15iU. (Juant aux rel gieuses converses, à cpii
çais ont aussi traversé les mers, et onl éla- le mèu;e pape donna la règle de sainl Au-
iili trois hôpiiaux considérables, un dans guslin (selon .M. Heimant), elles n'élaienl
l'Amérique, uu dans l'ilc de la Guadeloupe, lias sans doule de l'ordre de Saint-.!ean de
nie troisième dans celle de Saiiit-Chrisioplic. Dieu, puisqu'il n'y a jamais eu de religieu-
Lcs religieux de Pologne onlaussi un vicaire ses de cet ordie. Il a suivi apparemment
général. Schooneb.k, qui dit la même chose ; mais on
Leurs constitutions furent approuvées par s'égare souvent eu le prenant pour guide.
le pape Paul V l'an 1C17. Ils se lèvent deux François de Castro, Antoine (ïieva, de
heures avant le jour depuis la fête de tous Loyac, de Ville-Tliiery, liaillil et Giry, dans
les saints jus(iu'à Pâques, pour aller à l'ora- la Vie de siiinl Jean île Dieu. Henscben.,
toire ou à l'église, où, après leur office, qui apud (lollaïut. loin. III, Aprilis. Silvesir.
consi-le pour ceux qui ne sont pas prêtres Maurol. Mnr. ovean di tiill. gl. Relig., lib.
en un certain nombre de Pater cl d'Ave, i's v, pag. k'.iO. lîarbosa, de Jur. ccclrs. Ascag.
font oraisonmentale deux foispar jour, l'une Tambur., rfr yur. aObal. Ronanni, Cnlaloy.
le matin et l'autre avant le souper; mais Oïd. relig. llt:Tm;in[, L Idl'liss. des Ord. rcliij.
depuis Pâques jusqu'à la Toussaint, l'o- Scboonelnli, JlisC. des Ord. rclig.; et les
raison du malin est remise <à une heure après Cousliluiiutis de cet ordre.
dii'.er. Le uialin au S'rlir de l'oraison, et le A l'époque où le P. Hélyol écrivait l'his-
soirà l'issue du réfectoire, ils vont à l'bopilal toire de l'oidre de la (Ibaritê, cet institut
pour y visiter les pauvres et les consoler, et pouvait se glorilier d'un avantage cjne noire
ils y restent le matin jusqu'à la messe, cl le auteur n'aurait pas mantiué de signaler sans
soir jusqu'à l'heure du silence. Oulre les doule, s'il l'avait connu. Les PI'. Norbert,
jeûnes prescrits par ITÎglisc, ils jeûnent en- Ilippolyte, Anselme et lùislache, avec dis-
corc Pavent, les vendredis, la veille de la huit confrères, tous religieux de l'ordre de
Nativité de la sainte Vierge, de Saint-.\ugus- Sainl-.leau de Dieu, soulïrirenl le martyre
tin, el du patron de leur église. Ils prennent eu Iti.'jli, les uns à ^'a^sovic, les autres à
la discipline tous les vendredis ( excepté le Lublin.et les autres à Lovilz. Un artiste bo-
teuips pascal ; el pendant l'avenl cl le caré- louais, J. l''abl)rl, a consa< ré son burin à re-
ine, les lundis, mercredis el vendredis. Tous présenter celle scène louchante cl précieusn
les six ans ils lienn ni le chapitre général, à Tordre de la Charilé dans une gravure nui
ilans lequel on élit le majeur général, cl tous porte cette inscri[iliun : VcncraliiliS servi Dei
(l) luy., j la lin Ou vul., a" loi*.
Norherttis, Ifippolylti.i, Anse'ivus et Fnstn- ilispi-.sn l;i cour sur ttii nnuvpan plan et dé-
chius u'diris S Jo'atuu's de Ho, qui hnn mm rora rciilrcc <!c l'hôpila! d'un pclit porclie à
ucloiliciin soihdibus ul Cliristi fv'.c.m liierev- colonne >nns bases, (J"un Irè^-bon slyle. Ce
tur,(inno 1655, ab liwrclicis pnrlim Ungriris, poicho a clé gravé, el préservera ainsi de
pni tint Surcis, parlim Mosci^, qui Yorsoviœ, Irmber, ;:ii hou! lie (|uel(]ues années, dans
qui Lublini,qui Loticii diverso loriniiilorum l'erreur qui e(infonilr;.it ce porliiiiie avcr,
(jeiiere ad moitem acii, uUvvniv. in Uumiiio celui (]i]'oii vient de lerniiner rcretninenl à
cbicrutH f//')n.Nous ignorons si i'ordri^ a fail l'entrée du même élablissement, rue J.icob.
des (l( inartiies pour auencr la constat lion Au portail de M. Antoine, cet arclii ecle vou-
de leur mariyre el rauloiisalion de kur lui faire un es>;ai de l'ordre iloriiiut» grec, el
culte. tlonner une légère idée de ces propylées cé-
Au ilernirr siècle, l'inslilul des FF. de lèbres (lu'alors les professeurs d'arcliitrc-
Sainl-Jean de Dieu continua de se rendre turc comineiiç lent à faire connaître dans
utile cl de s'étendre. Les souverains roniifes, les Irçuns académiques. Les connaisseurs
depuis saint Pic V jusqu'à Léon XII (peut- trouvèrent qu'il avait :rop francisé son genre
être jusqu'à ses deux sucresseurs), l'ont en- grec. Au resl: ces propylées sont mis de nos
riclii p.ir des bulles, brefs et décreis nom- jours presque à tous les étabiisseui'nîs [lu-
breux (le plusieurs privilèges el des Iréoors bliis.
de ri'glise. La maison de Paris était le cbef-lieii de
Le P. liernard, si connu par ses o?uvrrs toutes celles du même ordre établies dans 1h
de charité, fut inhumé (et après lui M.M. Le- royaume et dans les colonies. Celai: aussi le
gauffre el Lejuifs très-dignes prêtres, ses seul noviciat et la reiraile des religieux hors
discipli's) dans l'église de l'hôpital de laClia- de service. Cet hôpital royal était admiuisiré
rite de la rue des Saints-l'ères, à Paris. Cet!e non comme les autres hôpilaus de malades,
maison, si importante par le nombre di' s /s par des séculiers, mais par l'ordre même des
religieux el de ses tnaladcs, le fût devenue religieux qui s'y cons:icraient. Le bien ii'y
bien davantage si elle eût vu réaliser tous souffrait donc point les entraves ap[)orlces
les projets (ju'avail formés sur elle le cardi- trop souvent au zèle des aun.ôniers et des
nal de Uicbelieu, qui la protégeait tout par- religieuses dans les èlablisseniculs du même
ticulièremenl. C'est lui qui fit cor.struire la genre. On avait mal à propos répandu dans
salle dite de la \'ieri;e, où étaient les blés- le UJOnde, par une erreur populaire qui s'é-
sés, du temps des Frères. 11 voulait en con- tait inlroduite jusque chez les personnes de
slruire d'autres pour y contenir jusqu'à cinq condition, qu'il y avait dans celle maison des
cents lils. La mort arrêta ses proje s. chambres particulières dans lesquelles ou
Au milieu du derniersiècle, il y avait deux était reçu en payant. La cho-e n'élail pas
cents lils pour les pauvres malades, qui y vraie; mais les /'oH(/a/r'ii»s et \es bienfaiteurs
élaienl parfiiement soignés, sans compler avaient, par rapport à ceux pour qui ils s'in-
les secours qu'ils recevaient dans lu maison Icressaienl, des préféicnces el des fieilités
des convaleaccnls, rue du lîae. que leurs libéralités leur avaient ae([ui-es.
Celle maison des convalesrents, où l'on Lors de l'expulsion des Irères de Saiiil-Jean
consolidait la santé d'un ceriain nombre de de Dieu, Ihôpital pouvait recevoir environ
malades sortant de l'hôpital de la (Mi:irilé deux cent trente malades (1), « (jui y étaient
(on en recevait douze chaciue semaine), élail soignes, dl un hihtorien distingué, avec un
due aux bienfai'.s (îe dame Angéli(iue de soin, un zèle et une cli.'rité qu'on ne pouvait
Faure, veuve de Claude de îîullion, niar- tiop admirer. « I^es infirmei les, tenues par
quis de Gallardon, et garde des sceaux. Elle les religieux de France, passaient pour des
datait de l'année 1G52 cl était desservie par modèles dans l'ordre. Quand on voulut bàlir
quatre religieux. l'Iiopiial de Milan, c'est en France qu'on vint
L'église de l'hôpital de la Charité, que l'on en eiTel se modeler. Les religieux de l'hôpi-
voil encore rue des Saints-Pères, el (lui sert lai de la Charité de Paris possédaient une
aujourd'hui de vcsiibule, fut entièrement pharmacie, un jardin botanique el un cabi-
teruiinèe en 1733, el on y mil la dernière net d'histi>iie nalurelle. (!n reui,iri|uail dans
main en y faisant construire le portail leurs salies et dans leur église plusieurs la-
d'assez bon goût cju'on y \oil encore, el (jui bleaux et monuments bien exécutés. Nous
fut élevé sur les dessins de Cotte, archilcete. citerons seulement la statue du Pauvre Prc'-
lîn 17;i8, les religieux acquirent une portion Ire (le P. IJernard), en terre cuite, qui avait
de terrain aliénée peu de temps auparavant été faite par un sculpteur nommé IJenoît. Ils
par l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, cl avaient chez eux un religieux Inrl habile, le
sur cet emplaccmeni ils lirent bâlir des salles P. Corne, qui était surtout très adroit dans
plus vastes pour y recevoir un plus grand l'art d'extraire la pierre, avant que la lilho-
nouibrc de malades. M. Antoine, architecte trilie moderne fût connue. Ailleurs, qael(|ucs
de l'hôlel des oionuaies, donna le dessin et confrères se f.iisaieni remarquer par leurs
dirigea la construction d'une de ces salles, connaissances chirurgicales, el nous p-jU'
(I) L'hospice des convalescents av.iit aussi pris de (pie celle maison avait en pour propriétaire l'ami de
rexleiisiuii, el, vers les derniers temps, on roniptiiit S. FraïKjnis de Siles, Le CaiiuK, évè |ue de IJelley,
dans celle maison viiigl-tni lils poiii' les eoiivalecenls, ipu la vendit an Liérantde li (oiidalriro. Elle esl dc-
(lui [Kiiiv.deiil y lesier liiiil jouis. [Suus dirons iei venue depuis une fabr (pic d'ouviages en cuivfd»
; eut ceux ijuc ce i;en.c de iciisti;;i;euicuts inlciesie.
543
KCTioN.N.MH!-: rn:s oi'.onr.s nri I!T!F,i;x.
•MV
vous ciliT siirtiiul lit» r,-l j»ii'ux de la m.iis'>n
«II» Sciilis, i|iii a suivécu à la lourmiMite rc-
vohilioiinairi'.
I.(»r<<iut; to P. Ili'Ijol écrivait , «ii pi'u
ir.-iniircs •ipri^'i. l'onlrc de Saiiil-Jonn de Dieu
niinpUiil en Frniire el d ms nos rohmies
irtMile-qi'.'i're élahlissomenis, dnnl voici la
li^te ,-il|>li.'ib(!>liqiie : Avon pr^s de Fonl:iinc-
lilfflu, Ilrest. Cadillac, Celles, Cli;irenlon,
Cli.ileau-'riiierry. Clernionl, Comloin, la mai-
son des Coiivalesrcnls (à I'aii>), l'iflial, Fon-
l.iinehleau on Avon, Fiirt-Uoyal à la Marli-
nii|ue, rorl-Sainl-Pierre à la Marlinique,
Gavclle, (îraim illc-la-rcinluiièrc (diocèse
de Houen), drenolde, la riuadclou;ie, le Cap-
l'iançais , ile Sainl-Domingiii') , La Hoclielic,
Lesler (ijuarli.T de I.cofiani'', île Saint-Domin-
piie) , l.oiiis-liour'^ (î'.e Uojalc, au Cina.la),
.Mcl/, Moulins, Niort, l'aris, Poiiers, Pontor-
siin , Itunians, Roye, Saint-Martin, Saintes,
Senlis , \'esins, Vitry-le-Français, Vizilles.
Ma:s d ^ns le rours du dernier siècle le nom-
Itre en élail anirmenlé; car, suivant un cal-
cul que nous croyons basé sur des ri>nsei-
giienierits cxaris, Finstitut de Sainl-Jeaii do
JJii'u desservait, dans le royaume et ses co-
lonies, environ quarante IiAjiilaux contenant
Iroi< ccnis religieux et quatre niillu lits. Le
«lernier éialiFssenicnt qu'il eût formé clait
sans douie l'hospice (]ui se voit encore près
ih- la barrière d'Enfer, à Paris. Le di:c de la
Itoclii foticaull , désireux d'acquérir deux
inaisons ((ue b s r.'lii^ieus île la Cliarilc pos-
séilairnl dans la rue de A'arennes, al linl
celle acquisition de leur complaisance. Par
re.i>nn;iissance et par un clTct de la bienfai-
sance h.ibiluelle de celle généreuse finiilb',
il contribua aux frais de la fondation (|ue
fireni, en conséjuciue de la vent'- de leurs
maison--, el de burs propres deniers, les rc-
liïicux d:' Il Charilé, d'un hos|i<e destiné
flux malaib's d'une classe élevée. Par <;ra;i-
luile, ces reli^'ieux donnèrent au nouvel é(a-
biisscncnt le nom lï'liofpire de la Hucl^rf^u-
ifintlt, ([ui lui est res!é. Cet boypiee, fondé
«juebiues années seulement avaîil la révolu-
lion fiai r lise, éiait tiesliné à recevoir, en
payant, des malades à qui le séjour de Paris
liait nécessaire it qui ne pouvaient déeem-
inenl lo;;er(lans les b(')pilaux, car c'étaient d( s
prélals. des milil.iires en f^i aile, etc., etc. Un
«'lablisscment analo;;ue, tenu par les mêmes
reliiîieux, existe aujourd'hui, mais sur de
niiiiiulres propoilions peiit-éire, dans la rue
Plumet , à Paris. Noos en parlerons dans no-
Ire quatrième volume.
L'ordre avait au dernier s èrle deux mai-
sons à Home : l'hop lai de Sainl-.lean-Cali-
bite cl l'hospice de Spaj;nuoli ou des Fspa-
pnols. l-;i, m 178:), le snpérienr Relierai, ou,
|>lus régulièrement pari ml, le vieaTe géné-
ral, en France, ctaii le P. liomuald Niuccnl,
résidant ;'i Paris.
Comme cet ordre vénérable a eu une snric
de rrcalioii nou\clle en se rétablissant en
t'ranre, où d'ai leurs un bref de Léoii \1I
lui a lionne une le;,'ère modifKalion adai)téc
^ l.i li'gislalion de notre pays, nous consa-
trcruiis un article spécial à'i'liibloirc de sa
ren;ii>-sancc en France. Foi/. Ji;vn oii Dieu
(Oiilrc (le Sain'-), :\u Srpri.::MiNr.
Ilrriiril des huile' ri des Irrfs i/iii conrcr-
iirnl l'ordre de lu Chnriic n\ Frniicr , vol.
iii-V", 1723. .Silice du Recueil des biillis et des
brefs qui concernent l'ordre de In Charité en
Fiance^ 17'i7, Tableau historir/uc ri pillorrs-
g'ie de l'aris. 8 vol. in-8°, par J.-li. de Snint-
Vlctiir. Htnt ou Tableau de la ville de Paris,
P'ir de IJcaumonI, in-8", 17(i2. \oles fournira
par les rrlitjieux de la mciisun de l'aris. .Votes
recH'illics passim. Iî-d-e.
JKAN DF LA PI'NIÏFNCE ( Ueligiluses
DE Saix't-K Voi/. Noli.
JFAN DF JÉUUSALEM (Saint-). Voy.
Malte.
JFAN DE LA PUftltLA (Ukkorme des Fbax-
CISCAINS DU IllEN'UKl'Unrx).
Le bienheureux Jean de la Puébla est re-
connu pour le premier auteur de ce le étroite
observance, que tant de relijjieux de l'ordre
de Saint-François ont embrassée ,i son exem-
ple. Il était comlc de lîellacazar, tils d'Al-
plions.- de So'o-M ijor et d'Flvire de Zimiiia,
l'un et l'autre di s plus nobles maisons d'Ks-
pa2;ne et alliés à la maison royale. Jean de
la Puébla, méprisant tous ces avantages, so
fit religieux de l'ordre des iMtnites de Sainl-
Jèrônie. vers l'an l'i-'fi, dans le couvent do
Notre-D me de Cuad iloupe ; mais, quatre
ans après, voulant embrasser une vie plus
austère, il a!a à Uome, où ayant été reçu
f.ivorablemeiil du pape Sixie i\', il lui de-
manda permission de passer dans l'ordre des
Fières Mineurs de l'Observance, ce (|ue ce
pon'ife non-seulement lui accorda, mais il
voulut lui donner lui-même l'habit de cet
ordre, et après lui avoir fait faire profession,
il l'envoya proche Assise, au couvent des
prisons, au mont Subaze , delà province do
Saint-l'raiiçois, ayant à cet effet adressé un
bref au vicaire de cette province, daté du '24
janvier l'iSO, par lequel il lui ordonnait do
le recevoir.
Jean de la Puébla y demeura pendant sept
ans, a[;rès lesquels il fut oiilipè de le ()iiitler
par ordre du pape Innocent \lll, qui, à la
sollicit.'^lion de ses parents, lui ordonna de
re'ourner en l'spa|;ne pour prendre la con-
du'îe el 1 1 tnlellc de son neveu, le jeune
comlc de Rellacazar, devenu orphelin par la
mort de «on père, qui avait été lue dans la
bala lie de (î-enade. 11 obéit aux ordres du
piinlife . et arriva en ICspagne l'an l'i87;
mais l'ol éissance (|ul lui avait fait laisser la
province de Saint-François ne lui Ata pas
i'eslime el l'amour qu'il avait pour les ob-
servances qu'il y avait pratiquées; car, ;'i
peine fut-il arr.vé en Fspafrne, qu'il songea
à y élali'ir une pareille reforme cl même
(lins austère au sujet de la pauvreté, ayant
obtenu (lo'ir cet elTet quatre relii^ieux de la
même province de Sa nt-Franrois , qui lui
furent envoyés par le pape en li.*-'8, afin qu'ils
lui aidassent dans rétablissement de sa ré-
forme , (]u'il coumiença l'année suivante,
sous la protection de la reine Isabelle, avec
aulaut (l'cdilicaliou |iuur le public iiuc de
un
JFA
jr.\
ua
jalousie pour les Conventuels et les Ohser-
vanls dlîspngne, qui ne inanquèronl pas de
le Iraverscr dans ses pieux desseins. Mais,
ayant eu recours au ciiapilre général de
l'Observance, qui se tenait l'an 1489 à La
llochclle, il obtint du vicaire général Jean
Croïn et des Pères du < hapilre la permission
de fonder deux couvents sous le litre de cus-
lodie, au mont de Moréna, communément
apjielé Sierra de Moréna. Muni de cette per-
mission, il se relira dans celte solitude, où il
jeia les fondements de sa reforme sous le
iilie (le l'Elroiie Observance, et y bâtit un
pauvre couvent fait de branches d'arbros et
de joncs, dont les murailles étaient revêtues
de boue et de paille mêlées ensemble.
Noiiolistant cette grande pauvreté, tant dans
ce bâtiuirnt que dans les autres choses de la
vie, les religieux (lui y demeuraient étaient
très-contents; mais le démon, jaloux de leur
repos cl envieux du bonhaur do il i!s jouis-
saient dans cette solitude, ayant exciié un
embrasement dans un bois toisin du mona-
stère, y poussa les flammes avec tant de
violence, que ces saints religieux eurent
bien de la peine à en retirer le saint sacre-
ment, tout le reste ayant été réduil en cen-
dres en un moment. Mais ils ne perdirent pas
courage pour cet accident, et en peu de temps
ils rebâtiienl un autre cou^ent aussi pauvre,
qui fui dédié en l'honneur de Notre-Dame
d"s Anges, comme le pretuier l'avait été.
Jean de la Puébla eut eu li93 un second
couvent à Bellicazar, dont Alphonse , son
pupille, le mit en possession , afin qu'il fut
plus (irès de lui, ayant obligé d'autres reli-
gieux de l'ordre, qui y avaient été établis
dos l'an 1474, de le leur céder. La vie que ce
saint réformat ur mcn;!it était si austère,
qu'il allait toujours nu-pieds sans sandales.
Il n"élail velu que de pauvres habits tout ra-
piécés ; sa nourriture n'était que de IcSguuies
insi|iides, et quoique son c rps fût tout atté-
nué |iar les mort licalions , il en inventait
liius les jours de nouvelles. EiiQn, tout atté-
nué par la pcniicnee , il mourut dans son
couvent de Itellacazar, l'an 1493. Soixante
ais ap:ès sa mort , un ouvrit son lonibea:i,
d.ins lequel on trouva son corps enrorc tout
entier, qui rendait une odeur agréable. L'on
porta sa tête à son pieuiii r couvent de ?'Jotre-
bame des Anges; les religieuses Claiisses de
Kellacazar, ou ses deux sœurs tlisabelh et
Eléonore de Solo-Major avaient piis l'h ibil,
eurent pour partage de ses sainte- dépouilles
sa pauvre tunique cl son ciliée. Sou neveu,
le couUe Al[)bonse, après avoir perdu sa
femme, Philippe de Portugal, se fil religieux
de celte rélorme, et [nourul en odeur de sain-
teté dans ce couvent, qui fut a^^randi l'ai
1510, cl bàli de pierres par les soins du Père
Franrois des Anges, qui a été dans la suite
général, et à quelque dislance du couvent,
il fit faire quatre ermitages, où les religieux
se retirent tour à tour. Ils n'y peuvent pas
demeurer plus d'une semaine. Le samedi, on
nomme les quatre religieux qui doivent aller
dans CCS solitudes. Le dimanche matin, après
avoir cnicndu la messe au couvent, ils de-
mandent la b:'nédic!ion au supérieur, el vont
en silence à l'ermitage qui leur a été destine.
Ceux qui en reviennent après avoir euleudu
la messe à l'ermitage, entendent encore au
couvnt la conventuelle, et lorsque l'on a
sonné le dîuer,ils se prosternent à la porte du
réfectoire pour baiser les piedsàtous les reli-
gieux qui y entrent. Ils gardent toujours un
étroil silence dans leurs solitudes. Jamais ils
n'y mangent rien de cuit ni qui ail eu vie, el
ils se conlenient de racines, d'herbes, de
fruits, de pain et d'eau, s'abstcnanl même de
laitage. Ils peuvent néanmoins, s'ils veulent,
assaisonner leurs herbes d'huile et de vinai-
gre. Ils prenneut trois fois la discipline eu
vingt-quatre heures, tant de jour que de
nuit, lis ne sont point obliges au travail ma-
nuel , afin de vaquer plus longtemps à la
méditation, ( t, hors le temps d.- l'oraison el
de l'olfice divin, ils doivent s'appliquer à la
lecture spirituelle.
Ce cou\eul fut encore brûlé en Io4j ; il
n'y resta pas pierre sur pierre; les arbres
mêmes qui étaient aux environs furent aussi
ronsumés, en sorte que ce lieu fut réduit en
un désert. Mais les religieux ne voulant point
pour cela l'abandonner, un novice, frère du
duc de Véjar, qui n'avait pas encore renon-
cé à son patrimoine, le fit rebâiir plus soli-
dement qu'il n'était auparavant. 1 h. lippe I!,
roi d'I'^spigne, augmenta la dévotion et lu
beauté de ce lieu lorsqu'il y passa en a'iaiil
faire la guerre contre les Maures. I! y laissa
une grosse aumône pour faire un dortoir il
euibellir ré.;lise, et donna à ces religieux un
bois i|ui était dans leur voisinage, avec uu
grand pâturage de deux milles de tour.
(Ju.iiorze couvents s'étant joints à celui-ci,
on en a formé une ]:rovince sous le ti re des
Anges, qui fui érigée l'an 1518 el qui fut in-
corporée dans la suite avec la Hé,;u!iire Ob-
servance. Leur habillement est icmblabîe à
celui que nous avons donné à cet article.
Francise. Gonzag., de Orig. Seroph. relig.;
Luc Wading. , Anncl, Muwr. , imn. VU ;
Dnminic. de tîubcrnatis, Orb. Seraph. Ub. v ;
Marian., Citron. O serv. striclior. el refoim.,
Ub. 1, cap. 1 ; et And. de Guadaloupe, Ilist.
de lu l'rovinc. de lus Atujelos.
JEAN DES VALLÉES ET DE GiiNTlL DE
.'t l'OLE 1 TE f KÙFOUME Diis Franciscains
Dli).
S JUS le généra'at de GérauJ de OJonis, qui
fut élu dans le chapitre général qui se liiitj'i
Paris l'an i;J29, les religieux de l'ordre du
S lint-François, iiui étaient portés au relâ-
chement , Irouvèreat un proti cleur en la
personne de ce général, qui, loin de icfornier
les abus qui s étaient glissés dans l'ordre
cl de maiuienir les règlements qui avaient
été faits par ses prédécesseurs pour l'obser-
vance de la règle, porta au conlrairo le pape
Benoît XI! à faire, l'an LiiSG, d'autres rôgle-
mcn'.s, qui tendaient, selon son inclin iiion,
au relâehemenl de la pauvreté et des autres
ausléri.és de l'ordre, les fit recevoir l'année
suivante dans le ch ipitre général qui tv tiul
547 Dir.T!ONNAiaE DF.S onnUF-S REI.ICIF.UX. 543
il Ciihors, cl les envoya ensuilo dans Imilrs sdlUcil.Hioii do qiidi|iics <;oisnours, i|iiaiio
1rs proviii((>s ; cl c'o.A ci> (jui iloiina lii-ii à polils ccmm oiils île la |U(i\iiu-i' de Sainl-I'ran-
r<'l;ilillssriiu"iil lie la reforme de Jean des çiis , iini ruieiil ecax des IVisims . do Moiil-
A allées, c.ir (leraiid de Odoiiis, dès l'an l i.f», laici, de l'I^rint i!,'e elde Jani, où il demeura
avant d'eiilreprendre le dessein qu'il avail a>cc ses reli^'ieus, et cù il eut |icrinission de
d'alTranrliir l'ordre de (oiiles ses auslérilés, recevoir (les novices cl les autres reli;;ieux
jii;:i'.inl, par une pidilimie nionilaine et une qui si'raient p irles à roi)seiv;incc cx.icte de
prudenee de la chair, qu'il était néci'ssairc la règle, et ce poniil'e lit dèlensi' an\ supè-
dc sedefaire de ceux qui pourr.iiinl apporli r neuis de l'ordre de les Irouliler en .iiuumc
quel lUC olisiaile à l'executio i de son projet. manière.
donna permission à ce réiornialeur, dont il Les supérieurs ne purent néanmoins sonf-
ciai;;nait le zèle cl la piété, d.' se retirer dans frir celle séparation. Ils appréhen lèreni quo
quelque lieu solitaire avec quelques autres celle coiifjrejîalion naissante n'auginenlai cl
relii^ieux qui désiraient eouiin- lui d'obser- qu'elle ne causât une plus grmde division
ver la rè^le dans toute sa pureté. Le frère que celles qui avaient été piiciliécs sous les
Jean des N'allées, muni de celte permission, papes t'iémenl \' clJeanWll; c'est pour-
sc retira à Itruliano, proche le mmil Klori le, (pioi ils pensèrent aux mojens de la détruire
entre Camérino et Foli^ni , < ù il liâlil un avani (ju elle lil un plus grand pro|.'rès. Ce
petit c<iu>cnt qui ;iv,iit plus l'air d'une pau- «lui les y excita encore d,ivanlaL;c fui que
vre chanmine ((ue d'une maison relii;ieuse, ces religieux prenaient des haliils différents
cl là. avec ces religieux zélés, il vécut d.ins d("s autres et semlilables à ceux des premiers
une grande pauvreié et dans la prali(|ue des rclormaleiirs deNarhonnc, qu'ils ne vou-
austeritè- de sa réi;le et de toules les vertus l.iienl avoir rien de commun avoe le reste
év.ingél ques , ce (ju'il conlinua jusqu'à sa de l'ordre, et qu'ils s'élaienl presque enliè-
morl. qui arriva l'an l.'îil. rement soaslraits de son obéissance. L'alTairc
Fori;;iiier \assal , qui, d.nis le chapitre fut proposée d:nis le chapitre général qui se
général icnu à .'\larsei:ie l'an KJilJ , avail luil l'iin l3oi à Assise: la plupart des vocaux
succédé à (léraud de Odonis (que le pape furent d'avis (lu'oii exposât au pape, en plein
(ilémenl \'l avait lait palri.irelie d'Anliochc consistoire, que la condiiile de ces solitaires
l'année prècédeiiic) , se montra favorjible à nienaçiil l'ordre d'un nouveau schisme, et
ces réformes, leur accordant toutes les urà- qu'on. suppliât Sa Sainteté d'ordonner qu'on
ces qui dépend licnt de lui ; miis l'envie et la les traitai comme on avait fait des scctaienrs
jalousie ne lardèrent guère à s'y Ojjposer, en de l'ierrc-Jcan Olive; m;iis le général (iuil-
excitant les murmures des non-réformés, ou launic l'arinier. qui dès l'an l.'Jia a* ait suc-
pour mieux dire d s relâchés , (lui se plai- cédé à Fortanier Vassal (que le pape avait
pnirent ouverNup.ent de la conduite d du l.iil arclievéqne de U.ivenne) , s'onposa à ce
gouverncmeiii du général , sous prelexleiiue, dessein, leur faisant connaître que si l'on
/avorisanl ces s iiils religieux et leur accor- f.iisail éclater cotte alTaire, le peujile en pour-
djiil tant de grâces et de privilèges, il li-ur rail cire scandalisé, et (luc cela exciterait
<lonnait les inojcns de se séparer de l'ordre, plus de bruit parmi le; religieux. L'on défc-
Le piipe, rra giian! que ce ne fût une. occa- r.i à sou avis cl l'on remit à sa prudence h;
sion de faiic lenaitre l.i division dans l'ordre, soin de diss per cette nouvelle congrégation,
défendit ;iu général de leur accorder aucune H était de son honneur, après une defe.encc
cxenqition ou grâce p;irlicu ière jusqu'à ce si soumise, de réussir dans celle alTaire ; ainsi
(pie le s.iint-siegc fût mieux inlornu' île leur il coniinenea à en reclierclier les moyens,
m.inière île vie, et qu'il i ùl ordonné ce qu'il mais le frère Gentil lui en fournit l'occasion
jugerait à (irojjos sur ce sujet. peu de temps a, rès par son imprudence ; car
(;etle défense ayant été publiée, ces s.iinls ce gé:iéral ayant voulu coni nander qu< Iquo
religieux ne perdirent pis j)our cela l'espril chose à un de ses religieux, le frère lientil
de 11 ur vocation, et, s'abandonnanl entière- lil retii'er le religieux et dit hardiment au
mentaux dispositions de la ^li^ iiie providence général qu'il n'avait aucune juridiction sur
sur eux, ils n'en furent pas moi:. s fidèles ceux (lui étaient sous sa conduite. Les rcli-
à l'obsenaïuc de leur règle et à la p aiique gieux (|ul accompagn.iient le général le por-
«les vertus cap.iMes de les rendre agiealdes i;ient à punir ce lemiraire qui mè|iris.iit
a l)ici>, qui, voulant recomijeaser celle eon- ainsi son autorité; mais il aima niieu\ lem-
liaiicc cl celle conlorinité à sa sainU- volonté, porixer enc ne iiuelqne temps pendant lequel
leur donna la consula'ion de voir croître leur il lit examiner secièlemeni l,i con.lnite que le-
petite congrégation , non-seulement par l'ar- naieol (îenlil et ses religieux. Il trouva qu'ils
rivée de plusieurs icligieux i)ni, quillant les avaient retenu chezcuxduraniquelqne leinps
iion-réf innés, où le désordie auumenlail de des hérétiques ; cl, quoique ce fût dans le des-
jour en jour, venaient se joindre à eux dans sein de les convertir, iieannuiin;, comme ils
leur solitude pour y observer la règle ilans n'y avaient pas réussi, il se servit de cela
loute ^a pureté, in.iis encore par l'augmcn- pour les rendre oïli^-iix au pai'e en les accu-
t.ition de quel>|iies rouvenis (|ui leur fiireid sanl d'avoir comniunique avec ci s hérétiques
donnés par les soins du frère (ienlil de Spo- dans leurs propres maisons en m tngeanl en-
lelu;, qui , après la morl di- Jean des \ allées, semble et en leur donnant reiraile, comme
elanl ri'g.ir le ci.ni'ne ehi'l de celle même cou- aussi <le les avoir lais>e échapper sans correc-
gre^'.'iliuii , quoiqu'il ne f.it ijue frère laïijui* , lion ni chàlimenl, fauie d'en avoir donné ai i'i
ubtinl, l'an JJ.jI, du pape iJcmcnl \ I , a la aax ii.quiiilcur.>. 11 n'en l.iUul pai da\au-
S40
JEA
lagc que c lie ncciis.iiioii, qui, lonti! fausse
qu'elle éiail, cul loiit le succès qu'il pouvait
m allendrc : car le pape, qui élail pour lors
Inuocent VI, sans autre examen de cause,
révoqua par une bulle de la même année
nSS celle nue Clément VI k'ur avait accor-
dée; les quâlre couvenis qui leur avaient éié
donnés furent remis sous l'obéissance des
supérieurs de l'ordre, avec un commando-
mcnt exprès à frère Gentil et ses religieux
de se conformer aux autres pour l'habille-
ment (1). Le cardinal Albornoz, légat du
saint-siége en Italie, pressé par les sollici!a-
lions du général, fit mettre en prison frère
Gentil dans Orviélo, avec deux de ses com-
pagnons qu'il menait à Rome. Ainsi le chef
é aiit arrêté, et le frère Marlin, aussi frère
laïiiue, son principal coadjuteur et religieux
d'une émineute vertu, reconnue même par
des miracles, étant mort l'année suivante, la
congrégation fut aisément dissipée.
LucWading, Annal. Miiior. lom. III et IV.
Dominic. de Gubernalis , Orb. Seraphic. ,
tom. II.
JEAN DES VIGNES (Gh4noinf,s réguliers
UE Saint-), à Soissons.
L'abbaye de Saint-Jean des Vignes à Sois-
sons fui fondée p.ir Hugues, seigneur de Châ-
teau-Thierry, l'an 1076, suus le règne de
Philippe I", roi de France. Ce Hugues,
ayant usurpé plusieurs églises avec les biens
qui en dépendaient, louché de repentir, alla
trouver Tliibaud, évêque de Soissons, pour
les lui rcinellre entre les mains, à condition
que l'église de Saint-Jean, qu'on appelait
pour lors du Mont, située dans la ville de
Soissons, cl qui élail celle qu'il avait injus-
tement relonue, serait desservie par des cha-
noines vivant en cummun, et que les autres
églises avec les biens qui en dépendairnl, cl
dont il avait aussi eu la jouissance, y seraient
unis. Le roi approuva celle fondation la
même année; cl, l'an 1088, Hugues, croyant
n'avoir pis assez satisfait à sa conscience
louchant son usurpa' ion simoiiia(|ue, fit don
au monastère de Siinl-Jcaa de trente ar-
pents dj vignes qui étaient aux environs,
d"où est venu le nom de Saint-Jean des Vi-
gnes que ce monaslère a porté jusqu'à jiré-
seiit. (jellc fondaliou fui approuvée par l'é-
vôqiie Henri, qui, voulant encore favoriser
ces chanoines réguliers, leur donna une pré-
bende dans l'église calliédrale, du consente-
ment de ses chanoines.
Odon fut le premier abbé; après avoir
gouverné ce monaslère pendant treize ans, il
mourut l'an 1088, et eui pour successeur Ko-
ger, auquel Urbain H adressa l'année sui-
vante un bref par lequel il le reçut lui et ses
chanoines sous la protection nu saint-siége,
et a;'prouva les couslilulions qui avaient clé
dicssées p'iur celle abbaye, ordonnant
qu'elles y seraient inviolahlemenl observées.
H confirma toutes les donations qui leur
avaient été faiies, et on leur en fit plusieurs
dans la suite. Hugues, seigneur de la Ferlé-
Milun, et Helmide, sa lenune, leur donnèrent
(i) Vuy., à la fin du vol., m" iiU.
JtlA 550
la fliapeUc de Saiiil-Vulgis dans leur cliA-
leau, à condition qu'il y aurait loujours pour
le moins trois chanoines pour la desservir,
Thibaut, comte de Champagne, leur fit don
aussi, l'an 1122, du prieuré d'Ouchy, après
eu avoir fait soi tir les chanoines séiuliors.
lîucbard, évêtiue de Meaux, fil aussi sortir
des chanoines séculiers du (u-ieuré de la Fcr-
té-Gaucher pour le donurr à l'abbaye do
Saint-Jean dos V^ignes. Ils ont encore deux
autres prieurés, savoir Montmirail etla Fer-
lé-sous-Jouarre, et plus de trente paroisses;
cl, quoique les béuifices qui sont possédé;
par les chanoines réguliers soient appelés
prieurés, il n'en est pas de même parmi les
chanoines de Saint-Jean des Vignes, qui, se-
lon l'ancienne tradition de l'abbaye, n'ont
que cinq prieurés qui lui soient annexes, et
auxquels ils donnent ce nom à cause qu'an-
ciennement ils étaient possédés par des cha-
noines séculiers. On ne laisse pas néanmoins
de donner le litre de prieurs aux cuiés qui
desservent les paroisses.
Le pape Lucius III, par un breT adressé ^
l'abbé Hugues, leur permit de mettre dans
chacune île ces paroisses troii ou quatro
chanoines pour le moins; le mcaïc abbé Hu-
gues ayant voulu révoquer à sa volonté les
chanoines qui étaient pourvus de cures, et
en ayant fait revenir quelques-uns dans lu
cloître, l'évêquc do Soissons, Nivellon, s'y
^opposa, à cause ([u'en qualité d'évêijue dio-
césain, il leur avait confié le soin des âmes
dont ils devaient lui rendre compte. Ils re-
mirent leurdifTérend entre les mains du p.iiie,
(l firent tous deux à cet elTet le voyage de
Home. Urbain M, qui gouvernait pour los
1 Eglise Universelle, leur donna des commis-
saires qui déci'lèreiil en faveur de l'ablié:
mais les chanoines de Saint-J an des Vigiico
appe èrenl de leur jugement au pape, disant
que leur abbé n'avait pu sans leur coiiseii-
li'menl faire celle innovation, qui était coi-
traire aux privilèges qui leur avaient été ac-
cordés |iar plusieurs souverains poulifes qui
leur avaient permis de rester l;ois ou qualru
reli;^icux. dans ces cures, dont l'un .serait
seulement présenté à l'évê!]U(! [iour avoir ta
conduite des âmes, et lui en rendrait coinple,
et qu'à l'égard de la discipline réguiière. ils
de\ aient l'obéissance à l'abbé. Hugues élail
ami d'Etienne de Tournai, (|ui, étant de
niêmc sentiment, érriviten sa faveura Home.
Mais la recomuiandalon de ce savant hooiiiio
n'eut aucun eiîet, et les elianuiiiiS furent
maintenus dans leurs droits, el ou ne peul
les faire sortir de leurs bénéfices, ni les rap-
peler dans le cloilro, que pour de grands
crimes. Ce qui est de singulier dans celle
congrégation, c'est que ces mêmes bénéli-
ciers assistent à l'élection du grand prieur
de l'abbaye de Saint-Jean des Vignes, n'y
ayant plusprèsenlemmiqu'un abbe commen.
dalaire, el qu'ils peineal mônu' être élus;
mais cette supériorité ne duri; que trois aii^,
après lesquels ils retournent à leurs béné-
fices.
Les peines qu'on imposait aux apostats,
SfA niCTJON.NAmF. DES ORDRES flEI.IOlRUX. 5*2
nui sont r.ippnrli'<-s d MU les cliroiiinucs de ville, clioisil douze curés, l.inl do Kl villo
(Otto .iblinj'i', foiil tiieii coiiiiaitio (incllc ol.iit que des cm Irons pour lui sor\ir d'jissisl.inls,
robscrvanci' o:roili! (|ui! Vow ij.iiilail dans cl q^c ili''< ce lomps-Ià ils corniiu-iu-i^rpiil à
celle con?ré;;alii>n. Sous le goin itiumiiciiI s'appeler caniiiiaux. Ils s'asseniblaiciil le
de l'iblic Mallliieu ilo (]uizv, un religieux jour de Sainl-Tlionias pour clioisir un d'en-
aposlal s'ctant prcsonlé pour subir 1 i peine Ire eux pour super eur, el l'inslallaieiil dus
de si:r) trime, il vint à la porle de l'e^^lise celle digni é le jour de Sainl-Mlieiiiie, aliu
dans rii.ibit qu'il aval porle d ins le monde; que pend. ml celle année-là il présidai à !• urs
l'ajanl (l.'|)oullie jus lu'.i la rli.'niivc, il niar- assemblées, qui se faisa enl pour le moins
cha nu-pieds, la lè.c ilécouverlc, el lenanl aux (luaire-liuips de r.innee dans (|U(di|ue
une b.i'r'ueiie .^ la main, traversa loule la église, où l'uu cliaiilail l'oniie des défiinis,
cour, cl, élanl ariive au cliapiUe, il se mil } ayanl des revenus annexés à cel elTei,
à genoux, d.iuandanl, les larmes au\ yeux, do'.l ces douze curés ou cardinaux jous-
pardon à l'ai)! é en iirésenee des religieux, saieni, lîeilin, (l'.ii a fail les Anlii|iiilés de
ol suppiianl iju'ou lui donnai la discipline. Soissuns, dil que ces cardinaux avaient élé
Ce qui ayail clé fail par le prieur, on lui en- ainsi crées afin d'assister ré»éi]ue de Suis-
ioi;»nil pour 1 énilence qu'il rcccvrail lous sons aux fêles soleniulles, ce qui est bien
les jours la tliscipline, cl (ju'il se | réscnle- vraisemblable. Dans lancicu poulilical écrit
rail à cel elïel; que pour loujours il serait à la uiain, qui bcrvail aux évè(iues do
privé de VOIX dans le cliapilie ; (ju'il u'.iurail 'rroyes(i), il y a plus de (jualre cent clii-
place, soil au ilneur ou ailleurs, qu'après (juanle ans, il esl aussi fait uifi.liou île prè-
les novices, cl au dernier lieu: qu'il ne ce- 1res cardinaux, qui ne sont autres ([ne les
lébrcrail point la luesso; qu'il inangerail à treize curés dénommés au lliiui I m.inuscnt
penoux sur un petit banc au réfectoire; de l.i nièmo éi;lise, lesi|uc'.s doivent encore
qu'im ne lui présenterait ()uc du pain noir aujouririuii assister l'é\éque iiuind il coii-
ci du vin rouj^e, avec un p dage, à moins sacre le clirème el les saintes liuil s l' jeu li
qui- le prieur ne voulut bien lui envoyer saint, cl à la bénéd;tlion solennelle d.'S
que'qiie cliose do ce qu'on lui aurait présen- foiils, les veilles de l'aques et de l'entecole.
lé. Il fut dispensé au bout de six mois de l'aquier rapporte sur ce sujtl qu'en un coii-
maa;;er à terre; mais, tant qu'il vécut, il i\ii cile tenu à .Metz sous Cli irlem ii;ne, il e-l
ni;M)i;ea qu'à la troisième table, (jui était ordonné que les évè |Ui'S di-poseront cano-
celle des ron\ ers. .Vu bout de deux ans, ou uiquemcui des titres de carlinaux établis
lui permii de d.re la messe en parliiulicr, dans les villes et dans les faubourgs, c'esl-à-
iiiais jamais en pub'.ic, cl les autres peines dire des cures; et, dans l'abbaye de Sainl-
liii fu: enl imp isécs pour toujours. Kiuii de Ueiins, il y a eu do tout temps quatre
Celle abbaye 'ouffrit beaucoup de donima- religieux cardinaux appelés princiiianx,
pes par lis liér<liqaes calvinistes, l'an loG8, parce que ce sont ceux qui oflicicnl au grai;'J
lorsqu'ils prirent la ville dcSoissoiis: ils rui- aulel dans les léles solennelles,
nèreiit cniièrement le monastère el l'églse. Les clnuoines de Saint-Jean des \ ign s
cuiporlèrcnl les vases sacrés et lous les a*aienl autrefois la direction d'un collège à
meubles, el contraignirent les religieux de Soissons, qui avait été fondé par .Viiberi,
sauver leur vie parla fuite. Ces Ciaiioiiies doyen de la c iili.drale ; mais cette maison
vendirent ensuite beaucoup de biens pour fut cédée aui Minimes l'an 1583. Le collège
rebâtir l'église. Le parlement de l'aris or- de lîcauvais à l'avis a elé londé |)arlecardi-
donna que la quatrième partie du revenu de ual Jean de Doruian, à coiuli ion que l'abbé
l'abbé serait employée à cet eiïel : elle fut de Saint-Jean des Vignes au ail soin de ce
aelievée l'an loMi. Duiant cette guerre, un collège el aurait droit d'y noinincr les bour-
des cbanoiues nommé S ivreux s'etant retiré siers^ de les corriger, de les oter, d'avoir
de celle abbaye, ayant élé cliercber un asile soin que la fondation fût exécutée ; et parmi
cnLspagnc, lui ilans la suite cliapc l.iin du les \ingt-quatic boiirsier> il peut y avoir un
roi, qui le pourvut d'une abbaye en Mclle. cbano ne. Il y a eu trente et un abbés régu-
Cel abbé lit bàlir un biipital à .Madrid pour liers. .\|irèi la morl de l'ierie lîazin, qui fut
les l''r.inçais, doiil il donna le gouvei iiement le dernier, le cardinal Cliarles de H luibon
aux ( liaiioine.' deSaini-Jean d. s \ ignés, qui, lui noininé jiar le roi; depuis ce temps-là il
ù sa réquisition, cnvoyèreni deux clianoines. y a tiaijours eu îles abbés coinmendalaires.
Ils ont élé longtem|is eu possession de cel L'an llilid, la mensc abiiatialc fil se; arci- do
<ii"i|iital. la conventuelle ; l'abbé est premier clianoiuo
Dans les litres de la fonJalion de Sainl- do l'egliso calliediale de S.iiiit-'îer» ais do
le.Mi des \'ignes, et dans les lettres du roi Soissous. Celle maiion a toujours regaidé
riiil.ppe I' et de Tévéquc de Soissons Tlii- les cvéques de Soissons comme supérie\irs;
baul, qui confirment celle fonda ion, il esl l'He n'a jamais été unie à aucune congréga-
inarq'iè (|iie le pré re cardinal du lieu esl linu, el n a poinl soullei l de réliu'ii o élran-
<enu de rendre raison du soia qu'il aura cj gère- elle lut enfermée dans la ville en L:til,
doses paroissiens ù l'évêque de Soissons el ^ous le régne d'Henri 11; elle a donné un
-i seu arcliidiarre, comme il faisait aujiara- sulVciganl a l'évèi lie do Soissons cl treize
vaut. L'origine de ces cardinaux , selon abbes réguliers a d'aulrcs abbayes, laiil en
J'icrre 11! (iris, cbanoine ilo celle abbaje, l-Lmce qu'eu llandre et en Sicile,
vient de ce (|u'un pi, c étant venu eu celte Le conseil de ta maison esl composé de
(t) UUt. Uiilor. lioiiun- iilii., loin. Il, )' :o UI--
l,M JEA
quatre anciens ou semeurs, qui snnl élus
(liius les cliapiiros généraux; ils sont pris
l.ml du corps dos bénclkiers que de ceux
qui composent la coiiinitinaiité. Tous les ans
à la Saint-Martin d hiver, ils se irouveiil à
Saint-Jean des Vignes pour y recevoir les
comptes du procureur, tant des rcceltes que
des mises de tous les revenus de la maison,
connue aussi ceux du trésorier des receltes
et mises du revenu do l'église, et dan^ cette
assemblée ils reniôdiciit aux abus qui peu-
vent s cire glissés dans les observances ré-
giilière-'.
Matines se disent louj mrs à minuit dans
cette abbaje , et l'ofàce canonial s'y l'ail
pendant tout le jour avec beaucoup d'éilifi-
cation ; on n y mange do la viande que tiois
fois la semiinc, le dinianclie, le mardi et le
jeudi; l'abstinence y est observée depuis ie
jour de Saint-Martin, 11 novembre, jusqu'à
i'AvenI, et depuis i'Avenl jusqu'à Noël on
jetiie ; l'abstinence recommence à la Sep:ua-
gésime, el le jeûne le lundi d'après la Ouin-
quagésime jiisiu'à Pâques. Le. jours de
jeûne, laiil de l'Iiglise que de la règle sont
égaux pour Li collation. Autrefois ou ne
preuait rii n le ^oi^, à présent on va au ré-
lecioire, après avoir entendu lire aux pupi-
tres qui sont dans le cloître un chapitre de
l'Imitation de Jé^us-Cbrist ; oa y enire en
habit de chœur ; chacun se met selon sou
rang, et le dernier novice, après avoir lait
une prol'oude inclin.ilion au grand prieur,
lui demande en laliii la permission, au nom
lie toute la comuiuiiaulé, de manger du pain;
on en sert à cli icun.et on boit un peu devin
une fois seulement ; on ne sert ni nappes
ni serviettes, ni portion de vin à ces colla-
lions, et en quelque temps que ce soit il n'y
a jamais de recrealion.
On lient tous les liois ans le chapitra gé-
néral vers la léte de la Penlecôie. (^)uand le
temps approche, le grand prieur deSaint-Jean
envoie un mandement à tous les bénélkierset
>icaires de la campagne pour se trouver au
chapilre. Ils s'y rendriit la veille du jour in li-
qué pour les premières vêpres ; ils se trouvent
tous à matines à minuit. Le lendemain ils
assistent à la procession eu chapes ; la m sse
du Saint-Es[)i it est ensuile chaulée soleu-
nell menl, a latin de laquelle on se trouve au
chapitre où, après les prières accoutumées,
un chanoine fait un discours eu latin sur un
point de la règle. Le grand prieur parle en-
suite sur le sujet du chapitre, après quoi
l'on procède à l'élection d'un nouveau grand
prieur, qui est ensuite conduit au palais
épiscopal pour avoir la confi.matioa de l'é-
vêque de Soissons. Ce grand prieur est
triennal, et fait régui èrement la visite, pen-
dant ces trois ans, dans loui les béncQees
réguliers qui (iépendenl de l'abbaye. 11 y en
a trente-trois dans l'évêché de Soissons, et
ili ux dans celui de Meaux, qui ne peuvent
tire possédés que par des chanoines régu-
liers proies de cette maison , et qui ne sont
point sujets aux induits et aux grades,
cumule il a été jugé jiar arrêt du grand con-
seil du dernier décembre ltj83.
Dictionnaire des Orukes religieux. II.
lEA
HU
Quant à l'habillement de ces chanoines,
l'on verra les changements ^\m ont été fjiis
(le temps eu temps dans cet habillement ei
celui qu'ils portent présciitcmciil, dans !a
Icllre (|ui su:i, qui m'est loiubée entre; les
mains, et quej'.ii insérée tout au long dan-
cette hisîoiic, puisque celte lettre est une
espèce de dissertation sur l'habillement tic
tous les chanoines réguliers en général: elle
est de M. di; Louen, chanoine de celte abbaye,
el prieur curé de Latiily, de qui j'ai reçu
des mémoires louclianl les obser/ances ré-
g liôres qui se pi„li(|nciit à Saint-Jeaii
des Vignes, dont j ai pailé ci-dessus.
Lettiif. de m. de louen, chanoine régulier
de Saint-Jean des Vignes el prieur curé de.
Latiily, sur l'habit des chanoines réguliers
de cette abbaye, écrite eu 1708.
MoNsiEun,
Pour m'aciiiitter de la parole que je vous
i.i donnée de vous faire voir, 1" quel est l'ha-
bit que nous devons parler dans lu miisun ds
Sainl-Jean; :i" dans nos bénéfices ; 3" lorsque
nous sommes en voyage, et résoudre en pei
de mots les scrupules que vous aiez pu avoir
sur cette matière, je vous dirai que l'Iiubit que
nous portons dans la inaison et partout
uilleus e<l par-dessous un hubil noir, c'est-
à-dire des bas noirs vu b uns, une culotte et
une veste de même couleur , et por-des.Ms
nous portons une soutane blanche. Celte sou-
tane n'était point fermée autrefois par-devant ,
el c'est pour cette raison que quelques-uns de
710S confrères bénéficiers lu purlenl encore
fe méeavec des boutons; mais l'usuf/e d'aujour-
d'hui le plus régulier, c'est de la porter fermée
sans boutons.
Cette soutane a toujours été de couleur
blanche, car nous n'avons aucune preuve d<t
contraire. Il e<t vrai que les chanoines réij.i-
liers ont droit de porter des soutanes rowjes,
comme ta purtenl ceux de Saint-Maurice en
Suisse, et commp en ], criaient autrefois ceux
de l'ahbaije de Saint-Vincent de Sentis, fondée
en lOiJl par Anne, reine de France, femme
d'Henri 1" qui y mit des chanoines, et ordonna
qu'à la différence des autres ils portassent des
robes et capuchons routjes de couleur de sung,
en mémoire de saint Yincenl martyr; d'autres
portent la soutane violette, comme ce-.ix de
Saint -Auberl de Cambray el de Saint- Eloy
d'Arras, et comme la portaient les frères con-
vers d .ns notre maison de Saiil-Jean, lorsque
l'usage était d'y en recevoir. D'autres :a por-
tent noire co rtne les chanoines réguliers de
Cantipré en flanare, et, en Lorraine, ceux de
ta congrégation de Saint-Sauveur, instituée
par le B. Pierre Fotinicr, curé de Malin-
c.iurt, et confirmée par une bulle du pape Ur-
bain Vin de /'oh 11)28. Mais, t/ev qu'une com-
munauté a pris une cbuUur d'habit, il ne lui
est pus permis de changer une couleur en une
autre, à moins que de prendre la blanche, que
les anciens thanoints réguliers ont portée
plus qu'aucune autre. Cettevérité est inconles-
table, puisque B no.t XII, qui, après avoir
été moine de Ciieuux, fut élu à la dignité de
18
55.';
icc.TioNNAïKi: i»i:s 01! i;i:s uv.i,i(;iEi x.
r.T.
cariiir.iil. tl riisit.le ù c lie tle ioiivrruin pon-
tife l'ii 133i. dans tes conslilulitns ijt'il /il en
i;i:jl pour la réforme des clintioines régulier.^
de Soini J-o,i de l.iilr(in,iini urait ciimiiict>cr
à s\liiblir Ci Ilalie < n 10>'3, sous Alexandre
11, dit ces paroles : (Juilibci col r sl-idcI as-
sumpîus non pulcsl imil;iri iiisi in al uin.
Pir-desms celle soutane Olmiclie nous
port ms un ruche;. Le rochel ni un s trilis à
iiianilies ilroiles comme ccll s d'une nuhe ; ./
est plus court aujou'd'htii qu'il ne l'étail au-
trefois; car le rocli'l'Sl ce qu'on appeU.it
luiiic.i lalari' liuca; «7 tombai! jusqu'aux la-
Ion^, comme les nn6.\s- que v'/us portons A
laulel. Cervch't ou ctteaube éUiit Vurue-
mrnt que portaient aitrefuii les prêtres par-
dissuf le irs soutanes, comme ion va t encore
dans icaucoup de cnthéaraks, rt particulic-
rnitenl dans ce''e de So'ssons, où es chanoi-
nes m n:'urs cl les enfants dj clia.ir en por-
tent un''.
.\o:is roi/ons dans /«< conciles de France
qu'an évéqùc de Soissons nommi Uiculphe or-
ilonn'i dans ses statuls synodaux de l'an 8S0,
ù tous les pri'ires de son diocîse, d'avoir deux
anb-^, une qu'il' ne devaient jamnif quitter,
et une autre de toilf pLts fine qui's menaient
par-dessus quand ih célébraient lis divins
mystêics: l'r. hibcmusprcsb Icris iioslris u'.i
eadcm alha in sairs nijbleriis qua iilunlur
foii» in quo!i;iiano et cxlerioii eu, lu; e( c'est
upparemmenl peur garder et observer cet an-
cien slalul du diocèse qu'il est ordonné anx
dùyens ruraux île se trouver au synode de /V-
véque reci'lus d'une aube, comme il est mir-
qué dans un ancien cérémonial imprimé en
1532 par ordre de Sympliurien de Bullion,
ttéque de Soissons.
Celle aube dur.t nous p .rions a été dimi-
nuée de sa Idnijucur, et on l'appelle rochel,
que les évoques purlenl encore dans toutes les
fondions ép.scopules, niissi bien que U-s abbés,
les anmôniers du roi et es doyins des cathé-
drales de Noyon et d'Auxerre, qui le portent
pur-desfusle surplis qnand ils vont <) l'église,
comme nu'ifi tous les chanoines des mlludra-
les de France dasous l urs chapes pndavt
l'hirer.
La plupart des c':anf>inrs ont retenu lu--
taqe d ce rochel, el on t'en est toujours fervi
dans notre maison. Fn effet le rochel est le
propre el véritable hibii des chanoines régu-
liers, comme le montre fort bien M. de Saiule-
Jieuie lans ses Itésolutions morales, cas ')■»,
i.I;et Benoit XI i était tellement persuadé
que le rochel était l'habit essentiel de.< cha-
noines réguliers, qu'au chapitre VO îles cons-
lilulii.ns qu'il a faites pour la ré fui me des
ch.nui es du Saint- Jean de Lalron, il or-
donne que si queliin'un d'eux est wsez hardi
de paruUri en public sans cet habit de lin, ou
s'il c>< asftz téméraire de le cacher ; si après
ariiir été arcrli ./ ne se corrige fias, qu'il soit
su'jiendu de son bénéfice pendant quatre mois,
$'ii est bénéficier, et s'il ne l'est pas, qu'il toit
déclaré inhabi e pendant le mime temps d'en
posséder aucun : Qui auicMii se cxliibcns in
jinblino, habituin (supdiiiilninenla s.iliicl
liuca) liniorc ocrullavi-iil, si inonilus enitii
ilaïc tiolueril, jiixla prii':ii'ssain pcrsonarijni
(lis incliu.ioin. ilicl.is susjX'nsionis el inlials-
lilati-. pœnas por i Iimii leinjui" incurr.it.
Api es vous avoir parlé des habits que
nous portons pour couvrir 1,^ corps, il faut
vous p irter. Monsieur, de celui que nous por-
tons sur la télf. Mous n'iivi ns point autre-
fois d'à., tic couverture de tête que notre au-
m isse. Celte aumusse, comme celi que p n-
lénl enco e aujourd'hui nos novices improfès,
Moi(..< rvail de couvrlur-- df tête pendant
l hiver dans la maison, el pen.lani l'été au
c.'œ-ir et ailleurs.
Nous jiurlons aujourd'hui dans la mais in
un camail pendant Ihiicr, c'cs!-à dire i.'cjiuis
la veille de lu Toussa ni après vêpres, jusq iM
lu veille de l'dques à coinjUcs exclusicemenl.
('e camail ou mozeile est un orn. m: ni fait d é-
lofl'e > oire, qui sei t j.our couvr r la lêle et
les épaules. Lis évêques s'en rerven encore
aijourd hui, ù la réserve que ce c.nnnil ne
le ir couvre pliis la tête, depuis que l'on u
trouvi: l usage (/<;.< bonn Is carrJs. Un ne pre-
nait autrefiiS le camail à SarUjean t/ryiis la
Toussaint jusqu'à Pâques, qu'a;jrès les .secon-
des vêpres de la Toussaint ; on le quitta t le
malin tous lis autret j lurs, et on p rt.iit le
bon lel carré jusqu'à lêprcs.
Voilà quel est l'habit que nous porlor.i
dans la ma son; nous allons montrer à pré-
sent quel est celui que nous port.nis au chcruc
P'mlant l'éié et pendant l'I.iver. l'cndunt iclc.
c'est-à-dire depuis la veille de Pu /aes d corn-
plie <, jusqu'aux premières vêpres de la Tous-
siint exclusivement, nous poi Ions ai dœ r
sur l , soutane blanche el le rocket, un su plis
à m tnches longues, une aumusse noire sur le
bras (j:iuche, el un bonnet cari é hc la tête (J).
Le surplis avail autrefois les manches rondes,
comme les portent encore aujomd hui les cliu-
nuines de Notre-Dame de Heims. Nous n n-
vons changé celte forme de surplis qu'en IGOT,
pour nous conformer aux chanoines delaculbé-
drale de Soissuns, comme nous aviinsfatl
pour nos chipes d'hiver en 1070.
Le surplis s'appelle en latin su;urpt'lli-
ccnin, (1 (!iiii5e que les chanoines le portaient
par- dessus i.es raies fourrées apjieLes
pi'lliciuin, pour se garantir du foid pendant
t hiver, particulièrement dans les pays septen-
trionaux. Ou voit encore un reste de cette an-
cienne coutume dans l'abt.aye d S lint-Floi
d'.lrras , <;« les novices por'.ent des robes
fourrées pendant leur noviciw. On en portail
aussi dans notre maison de Sainl-Jean, puis-
qu'il est dit dais nos consiiiuiinns que nous
aurons des habits fourrés p lur aller à miii-
nes à minuit.
Les :urplis dont nous pariims avaient In
même firme que Us aubes, puis lu'is él. ient
de pareiil longueur ,et descendaient jusqu'aux
talons, Ts ont été raccourcis par Ueno'it XII
dans les constitutions qu'il ftt pour lu reforme
des chano.nes de Suinl-Jcun de Lulrun en 133i(,
dans lesquelles il ordonne que le surplis ne
(I) V«y., ^ b (in du vol., n» 111.
5:.7
iVA
JIF.V
K"S
passera pas pr:r an onqwur la moitié ilc la
idinlie : ulira nicciiam libiam vel circa.
Le surplis (iu:-si bien que h rocket nu les
aubes qui servaient pour l'autel , néuiirnt
point ptifsés autour du cou. On a re!e>in cet
usage à Notre- L'ame de Paris, on les viinis-
tres de l'autel portent des aubes qui n- snnt
peint plissées autour du cou, non plus que
celles des enfants de chœur de cette mrtropule.
Dans notre maison de Saint-Jean, nos novi-
ces portent encore des rockets qui ne sont
point plisse's autour du c n.
Pendant l'été, nous portons au chtrur r.ne
<ium%isse noire sur le bras gauche. Nous derons
regardir cet habit, dans notre maison de Sair.t-
Jean, comme ttn ha'jit que l'on y portait en
été et en hiver, puisqu'avant l'usage drs bon-
nets carrés on le portait toujours sur la téie ,
tt, quand on le mettait sur le bras, l'exlré-
milé d'en haut, qui serrait à couvrir la té'e,
se mettait toujours en dehors, comme le por-
taient les chanoinesrégutiers de Saint- Rcmi de
lieims, ainsi qu'on le peut voir dans la fiq (re
qu'en adonnée ai public le li. P. du Mouli-
net, channine régulier de Sainte-Genevièie de
Paris, en ICCli.
Nous avons gardé long'emns à Saint-
Jean l'usage de porter l'aumufse sur le bras
dans la maison, même pendant l'hiver ; car on
ne prenait le camail que le soir après rcpri$ ,
comme nous avons dit ci-dessus. Le change-
ment du contraire ne s'est fuit qu'en 1670.
Aujourd'hui, pend mt l'été, nous portons l'au-
musse s.xr le bras gauche , non-seulement au
chœur, mais encore pai tout dans la maison ,
tant la nuit que le jour.
L'aumusse que nous portons est noire au
dehors et blanche en dedans , c'est-ù-dire
qu'elle est faite de pattes d'agneau de Lom-
hardie de couleur noire au dehors et fourrée
de peaux d'aqneau blanc en dedans. Nos no-
vices la portent encore noire, mais d'étoffe
fourrée de peaux d'agneau blanc en dedans,
et ils la mettmt sur la télé à l'église et ailleurs,
Il semble que les aumusses noires soient celles
qui aient été te plus en vogue dans l'antiquité,
et dont l'usage a été plus universellement reçu,
méoie dans les cathédrales, c'est ce qm nous
apprenons d'un concile tenu à Paris , où
il est dit : Statuiinus, ce sont les Pères du con-
cile qui parlent, et provisione concilii (iixi-
iniis slatuenduin, quod canoiiici calhcdra-
liuiu et collcgialarum ecclcsiaruiu uiantur
alinuliis nigris.
Aujourd'hui que l'aumusse n'est plus en
usage pour couvrir la tête, mais que les cha-
noines la portent, les uns sur le bras gauche,
qui est l'usage le plus unitcrscUement reçu, et
Us autres sur les épaules, l'on se sert du bon-
net carré pour couvrir la tête pendant l'été.
Le bonnet était fait d'abord en forme de ca-
liilte, à la réserve qu'il état plui large en ha t
qu'en bas. La coutume est venue ensuite de les
fu'ire encore plus amples, mais ronds et plu^
petits, prestjue semblables à ceux que portent
encore aujourd'hui les novices des Rli. PP.
Jésuites. On appelait autrefois ces bonnets du
mot latin liirrelum, et c'est encore aujourd'hui
l'usage en France de dire que le pape a en-
ragé la barrette à quelqu'un de ses noncs- vu
autre:, lorsqu'il lui envoie h bonnet de car-
dinal. Enfin on a donné, il g a plus de deii r
cents ans, â ces bonnets lu figure carrée, étant
tous ;iss s de laine, et ayant quatre espèris
de cornes qui paraissaient fort pnt au-i'essus.
Pour ce qui est de ceux qui sont faits de
carte, rouverts d'étoffe, et qui sont tout car-
rés, l'inxwntion en est assez moderne.
Voilà, Monsieur, quel est l'habit qw nous
portons au chœur pendant fêlé ; rot/ons pré-
s:'ntement celui dont 7ious sommes ntélus au,
chœur pnidant l'hiier. Nous portons an cloî-
tre en hiver, pur-dessus la soutane I tanche et
le rochet , une chape d'it' ffe noiye. Cette
chape dont nous allons parter est aussi un
habit essentiel aux chanoines comme le rochet.
La chape cH un rêtemenl qui prend à lu télt
et va jusqu'aux pieds. Ce vêterienl a toujou'S
été en usage parmi hs chanoines, et nous ap-
prenons d'un ancien onlinnire ou cérémoni l
de Notre-Dame de Paris que l'on ne recevait
aucun chanoine au chapitre qui ve fût revc.u
(l'un habit canonique, c'est-à-dire d'une
chipe, ainsi qu'il est marqué dans ce c'rémo-
nial, ot'i il est dit que, qwind un chanoine se
présentera en chapitre pour être reçu, il sera
revêtu d'une aubj sur la soutane, et aura une
chape d'étaffe noire par-dessus arec le capu-
chon. Le même ordinaire porte qu'on n'enter-
rera pas un chanoine sans chape. Nou.<
voyons même encore aujourd'hui que le doyea
des enfants de chœur de cette métropole porte
une aube sans plis autour du cou sur su sou-
tane, et tine chap- noire en été et en hiver à
tous les offices du jour et de la nuit.
On commençait autre fo$ à prendre celte
chape dans notre maison de Saint-Jean le
premier jour d'oclobie, comme il est marqué
dans MM ancien ordinaire écrit du tenijis de
nos abbés réqu'iers. Elle était différer- te pour
la figure de celle que nous portons aujourd'hui ;
car le chaperon et le manteau tena'eut ensem-
ble, et elle était sentblable à celle que portent
les chanoines de Notre-Dame de lieims , <l la
réserve que le manteau descendait plus tav et
n'était point fourré. Nuits avons changé la fi-
gure de celte chape en IC7(), et nous en avons
pris de semblables à celles que pi.r ent les
chanoines de la cathédrale de Soissons.
Après vous avoir fait voir, Monsieur, quel
est l'habit que nous portons dans la maison et
au chœur en été cl en hiver, il faut tous par-
ler de celui que nous devons porter à la cam-
pagne lorsque nous sommes en voyage. On n
vu dans les siècles passés plusieurs chanoines
réguliers d'ailleurs très- réglés dans leur con-
duite, porter l habit noir tout simple, c'est-à-
dire sans aucune marque de chanoine régulier,
lorsqu'ils étaient hors de leur maison. U e^i
trai que les chanoines régidiers gui sont élevés
à l'épiscopat peurent quitter l ha'iit de leur
profession qu'ils portaient dans le cloître, et
prendre l'h Mt noir ou violet, comme le por-
tent nos seigneurs les évêques, à la différence
des moines, qui, quoiqu'ékvés à cette haute et
sublime dignité de l'Eglise, même à lapourpre,
ne peuvent quitter l'habit de leur profession,
ainsi qu'Innocent III l'a défini dans le coii-
5,vi IHC.TION.NAlUEnF.S 1>I'.1M;ES KKI.IMKL'N. fm
cil'' (It l.atii'nlni 1213. Voici comme parle emprrfsemeiit , et i/ue sun hahil blunc Ht.
ce concile : Mmuiclios ad ppiscopiiuni evac- commoilnil, il ('criii/ an supérieur de son mo-
ins prrrrc (lehoro smun li.ibiluin moii.uli.i- nalcre, qui troitvnit mauvais de ce im' il por-
lem. M lis le meute piipe un pusjiujé de màue lait un luibil noir, el lui manda qu'il en aialt
iil'éyttrd lies cAonoi;i« ri'guli'rs, quin rcmi - oblmit la permission de Jules II, qui la lui
\x iii^crviiMil Inxiori, iil proiuiiri.n il liuio- avait accordée à conditian .,iri' garderait
conl. m, tap. Oiiod Dfi limorem in causa toujours dans ses habits quclqu- marque de
Zachjriié ShA- Cette decisioji duconiilede celai de .«a jirofession : lî( pro ai bitrio
Latran, nti/ticl jtrésidait Innocent IH . ne se qunilc iinciuc sigiium iiislituli vcre gcsla-
nrnti/ue i.li-.s en l-'raneeà l'égard des moines rem. L'n eU'et il n'est pas pnmis à un cha-
eicics ù l'ipiscopal , depuis que le clertjc de noine régulier de cw h' r de telle manière son
France, m Kiôo, les en a dispens'fs , co ime Itafit, qu'd ne iiaraisse point du tout : c'e t
ritnnique M. Godcau diiis son Hiftifie lie r fi- pour celle raismi et dans ctflefue que nos
ijlis-fen exposant le règlement du huitième Pères assrml/lès dans un chapiti e gèjiéral au
concile œc'imènique. niuis de juin de l'an H)2.3, pirrlant de l'ha' it
La difficulté est de savoir si les ch naines que m us deions porter quand nous (i//on>- en
réguliers pourvus île bénéfices, ou les cloitriers rnmpi gne, ordonnent que nnus aurons des bas
mêmes, lorsqu'ils sont envoyés pur leurs suié- noirs ou bruns, un' culotte, une ves:e noire,
rieurs dan* les unitersilés pour y étudier, oit el par-dc sus un pi lit io:liit de toile avec une
en campagne p>)ur se promener, peurenl qnit- soutan ie noire par-dessus. Ce stutut et cet e
ter tout à fuit iUah.t de c.'oitre. et s'habi'Irr ordonminre, ptits peinint que le siège épisco-
tout de noir eom ne font /<■« séculiers. .\ous pal de Sois-oas était vac:inl pir la mort (/«
ne voyons point non plus de statut dans notre Mgr Charles de llaqueville, furent ensuite
maison qui l'aut .1 ise, ni de décision d'aucun confirmés par Mgr Sim lU le Gr s. son suce s-
docteur qui l approuve. Il est vrai que l'on seur,en Itiiii, dans une visje qu l fit pour
garde, dans le carlutaire de l'abbaye des clin- exercer les droit< que les évéques de Soissuns
noines régul ers de Saint-liarthélmiy de ont sur notre maison. On dira peut-être qu'un
Noyon. un privdége de Martin IV , qui virait préire ni un clerc ne doivcnl jamais quitter
en iidij, par le /i el , sur la requé.e de l'abbé la soutane, el que quand ils tout en cimpagne
et de sa communauté, il leur accorde la p>r- ils la doivent trousser, mais jamais li
mission de porter l'habit noir hors de la mai- quitter.
son, et mime aux bénéficiers qui en dépendent. Il est vrai que les souverains pontifes el les
Voci ce privilège : concilts obligent tous tes clercs à porter tou-
Marlimis cpi-copiis, «icrMis scrvorum Dci, jours l'habit clérical; mais il est aussi à rc-
(lilitli;, li iis abbali cl canonicis innnasterii marquer q te les clercs doivent avoir trois
Saiuli B.iilholoina'i pr>pe No\ ioJuiium, or- sortes d'habits, l'un pour le ministère, l'autre
diiiis Sanc:i Auguslini, salulcni cl aposioli- pour l'usage ordinaire, et le iroisicme pour la
oain bcnniictiiiiiem. Sintcraj dévotion s af- campagne. Celui-ci peut être porté plus eoui t
fetlus, (iiiom ad nos cl lÀomanam frcrilis que les autres , selon qw saint Charles Bor-
Kccloïiam, protnerelur ul pciilionibus vc- romée l'a décidé (/(.n- i«n île ses conciles de
siris, (luaiiluiii cuni Dco possuinus, favora- Milan, dont il était archevêque, en I5(i8, où
biliier annuainus. Hinc tsl (|uo,I nos vi- il est dit : CIcricis ilcr li.ihcnlilius (|uovis
slris siipplicalioiiibus iiicliiiali, ul alibas el vcsiilu tonlracliori uli liccbil, cl doccnlcm
reli iosi monaslerii ve Iri, eliain p.irroc lii.i- lamoii illum alqiic hujusnndi C'SC opurlcl,
liiiiii ecclc>iarum redores, (jui ex dicii onl - <\ quo eos esse tcclcsiaslici ordinis liomiiiei
nis inslilulis, \e>lcm supcriorem alb.iiii facile po sinl a^çncsii. ('um vcro en Vriicriiil
(:;eslare consueveriinl, quolies ipsos pro irac- qno perveui c conleiulunl , lalarem logmi
landi», procuraulis el pcrageirlis mon isle- iiiduant.
rii €l parocliialiUMi fcc'.esiarum iiego;iis, Celte soulanclle est aussi npprouicc par
aliisque rationabi'ibiis el lion' sliscaiisis mo- Son Lminnce Mgr le cardinal le Camus,
nasleriuiii pra-falum (\ire cuiiligcril, vesle évéque de Grenoble, dans ses slaïu's sym-
■supcriitri iii;;ri coloria, doncc in iTa-faluin daux, èi la page '.i'*, article 'i. D'où l'on peut
riion..slei iniii sinl reversi, libère el licile uli conclure, 1° que ce n'est i,ue dans les voyages
valcaiil. eoiislitulion bus cl ordinalioiiibus qu'il isl permis de porter un habit cnwl, et
nposiolicis, iicc non sialulis el (onsueUidi- m second lieu que celle sonlanelle ne doit rim
lubus inonaslerii elordiiiis jtra'dicli, cœleris- avoir que de modeste. Il est aisé de conclure
i\uc coiilrarii^ ne ;u iquain olisl.mlibus, au- de tout ce que nous vcn'tis de diie, i^ue nous
clunialc aposlolica lenore puesenlinni m- devons dans nos v^ya, es tous tenir èi l'ordoii-
dulgeiiius. Ualnin (jincsiani l'r;enrslineiisis iinîice de notre chapitre de l'an Kii.'J, oii li est
Dia'ies. iv id. Augusli, pwnlilicaUis nosiri d t ijue nous aurons toujO'rs un rochet, qii
aniio scrunilo. est noire habit (sscnliel, urtc une souianelle
Lriitme , qui était chanoine régulier de nuire par-d' ssus.
l'abbaye de Sion, et qui n'ignorait pas le pri- Je suis, ce.
filé ;e accordé aux chanoines léguliers de ("elle décision en faieur du rocliel seul,
Sainl-llarthélemy de t\oy un, se fit néanmoins que M. de Louen rrganle coiimie la seule
un icrupu'e de t'en servir. En effet, comme il marque csstnlielle de l'Iiabil des elianoiiies
étaii obligé d'être foavenl <\ la cour des pria- ié;;uliers, n'a jiiis plu ;'i loiis ses lonfrôres ;
ces et parmi les personnes de distinction de car j'ai iinelellie d'un ilianoincde Siiul-
tun temps, qui cherchaient jo compagnie avec Jean des ^ igiies, qui,ajai:l lu celle disserta-
•,c,ï
JE A
JEA
SCÎ
Jiou, marque quil n'ypprouve iiulleuicnt
celle décision, cl que la soulane csl encore
riiabil essenlicl de-i chanoines réguliers ; m
effcl ils ne doivent pas se conformer aux ec-
clésiastiques en toules choses, cl si ceuv-ci
portent d*s soutaneiles, ce n'es! pas une
conséquence que les chanoines réguliers eu
doivent porler, on du moins en porter par-
dessus le rochet sans avoir encore, leur sou-
l.ine sous le mcwe rocliel : c'est ce (|ue pr;i-
tquenl les religieux de la Congrég.iUon de
Fr.ii ce et Ls plus réformés d'entre les cha-
noines réguliers. Nous ajouterons encore que
M. de Louen s'isl trompé lorsqu'il dit que la
réfiirmc que fil le pape Benoît XII ne regar-
dait que les chanoines léguliersde Lalran,
I iiisqu'il n'y avait point de congrégalion de
I.alran en 1339, ( l qu'elle n'a commencé
que plu-i de cent ans aprè«, ou plutôt que
celle de Siinte Marie de Frisonaire fut éta-
blie à Saiiil-Jcan de Lalran, dont elle pi il
pour lors le nom, qui lui fut donné pnr Eu-
gène IV l'an 14i5. Celle réforme de Benoît
XII regardait tout l'ordre canonique, puis-
<);ie ce pape ordonna à tous les cliaiioiiies,
en quelque lieu qu'ils fussent, (le tenir des
chapitres provinciaux tous les (|ualre ans.
Voi/fz le P. leGi is, Chronic. abb. S. Joann.
nd Vineas. Sammarlh. Gall. Christian.
JEAN ET DE SAINT-THOAI.AS ( Oudue mi-
LiTAiHE DE Saint-).
M. Hermar.t, curé di; Maltol, (larlanl de
cet ordre, dit que la noble ville d'Ancôno,
ville épiscopale et port de mer en lialie, si-
tuée dans l'Etat ( cclé.siaslique, vante parmi
ses antiquités d'avoir donné naissance à un
ordre militaire qui portail le nom de Saint-
Jean Bai tisie et de Saint-Tlioinus, et que le
zèle cl la pié'é de quelques genlilshontmes
de cette ville en commencèrent l'élablisse-
n;cnt par le secours qu'ils donnèrent aux
pauvres malades, qu'ils reçurent charila-
hlcmenl, cl a'ixi;uels on bâtit des hôpitaux
(jui se changèrenl bientôt en comiiianderies
par les biens qu'on y fit et les privilèges que
leur accoidèrenl les souveiains pontifes,
()ni, les ayant élevés à la dignité d'ordre
militaire dans rEjjlise, sous les heiireuv
auspices de sainl Jcan-Baptisle cl de saint
Thomas, les obi gèrent de faire la guerre
aux bandits, pour faciliter le passage aux
pèlerins que la dévotion portait à visiter les
saints lieux.
D'un autre coté, l'abbé Giustiniani et
Schoonebek, parlant aussi de cet ordre, di-
sent qu'entre les monuments d'antiquité dont
la ville d'Acre en Syrie, aneieiincmenl Plu-
lémaïde, se glorifie, on compte l'insliluiion
des chevaliers de Sainl-Jean et de Sai .1-
Thoinas. Il s'agit de voir qui de ces auteurs
a raison. Il est certain que W. Hi rmaiil sesl
trompé, puisque les papes Alexandre IV cl
Jean XXIi, qui ont approuvé cet ordre,
comme il en convient, oui adressé leurs
bulles au grand maître de l'onlrc de Sainl-
(I) TobUl, in /osiie, cap. xv, el \\\\\b.\S i\aj.,
Thomas d'Acre el non pas d'Aucône, Mugi-
stro et fralribus militiœ hospilalis S. Thoma
martyr. Cunluarien. Aecon. C'est ain.si que
parle celle d'Alexandre, et celle de Jean est
conçue aussi en ces termes : S. Thomœ ma-
gislro et fialribus hospilalis S. Thomœ mar-
lyris Acconen.; el c'est ce qui fait croire à
AJennénius que l'ordre de Saint -Thomas
pourrait être séparé d'un autre sous le nom
de Saint-Jean d'Acie, puisque ces papos ne
parlent que de l'ordre de Saint-Thomas ; H
le laisse pas néanmoins de les joindre en-
semble sous le nom de Saint-Jean d'Acre et
de Saint-Tliouias : Ordo cqticilris S. Joan-
nis Acconensis et S. Thomœ.
Toslat, dans ses commentaires sur Josué,
parlant de la ville d'Accaron, où le roi Oehn-
sias envoya consulter Beelsébub, dit que l'on
appelle présenlemenl celle ville Acre , et
qu'elle a donné son nom à un ordre de che-
valiers appelés de Saint-Jean d'Acre : Isla
civilas vocalur nunc vnlijariler Acre
et tib hoc loco nominaiitr quidam ordo mili-
tum qui fuit in Ecclesia, cum oblinucruni
Tcrram Sanclam, sciticet ordo Beati Joann.
de Acre, vel de Acharon. Il dit encore la
même cliosc dans ses Commentaires sur te
quatrième livre dis Rois : lîst autem Acca-
r.jfi famosa civilas in terra Philistiiiorum
circa mare Mediterrnneum, in qua poslea fuit
ordo quorumdam militum qui vocanlur de S.
Joanne, el illa dvilas vucatur vulgnritcr de
Acre, Accaron (1).
Ce n'est point ici le lieu d'examiner si
Toslat a eu raison de croire que la ville
d'Acre ou Ptolémaïde fût l'ancienne ville
d'Accaron, que plusieurs auteurs prétendent
n'être qu'un méchant village ruiné; mais au
moins Toslat cl tous les écrivains qui oui
parlé de cet ordre militaire, à l'exception de
M. Hermant, disent qu'il a pris son origine
dans la ville d'Acre. L'on ne sait point l'an-
née de son institution, mais plusieurs au-
teurs conviennent qu'il fut approuvé par le
pape Alexandre iV, qu'il lui donna la icgic
de saint Augusl n, el ([u'il fut dans la suite
confirmé par le pape Jean XXII. Alpiioiise
le Sage, roi de Ca tille, ayant fait venir de
ces chevaliers dans ses Etals pour les dé-
fendre contre les incursions des Maures, les
combla de bienfaits, cl leur laissa encore
par son testament do grandes richesses;
mais rel ordre ayant été beaucoup affaibli
par les |iertes qu'il fil dans la Syrie, il fut
uni à celui de Alalte. Ceux qui s'opposèrent
à cette union prirent toujours le nom de
clievaliers de Sainl-Tliomas, el con.ervèrcHi
la croix rouge au milieu de laiiuelle était un
ovale où était l'image seule de saint Thomas,
au lieu qu'auparavant ils y joignaient cdlt
d(; sainl Jean Baptiste (2).
Voyez Mennénius, Gius'inlani , Schoone-
bek ti Hermant, dans leur Usl. des Ordres
inililains; et Ascag. Tambur. UeJur. Abbal.
d sp.
{■!) Vcj.
la fia (lu vol., Il" IS-2.
jrr, nir.TKiNiSAmE kes orhkes religieux. .-ini
JKAN L ftVAN(î/:i.lSTîi (Ciunoi:xf.s sixi- ironttc, et qui sr souciail jifii où il demeurât,
i.iKRS DE Saint-). pourvu iju'il y pût s rvir Dieu, acccpl.i aTrC|
, . , SOS rotnpncnoiiii l'onrc lîo rarrhpvrijno de
/)« chanoines fcculicr.i de In cmujrrgahon (le jt^a.^,,,.. |/(,blR. ,lu monasUVc ilo S,iinl-Sau-
Sainl-Jtan rEvongéhsieen P, rujjal, aiec ^,,-,j. ^^ yi„y j^. p.adcs, rie l'ordre de S .int-
h yiededowJ'an de Ucenzr ivique de ,{,,„„(, ^ ^,,^„i n^o^l, c! la répularilé clant
f.nwKffo cl emuHe de T isfu, / ur lomln- j.„| èn-mrnt lianiiie do ro n onnsliTC, il était
'""'• toml)6 en lonnnendo. Cisl pourquoi cet ar-
Coiiunc la roiicri'gal'on (lc< rliniioincs se- chov(?quc, de son auldiitc. leur donna re
rulicrs <lp Saint-Jean rKvancolisie en Purlu- monastère, et ils en (jrinnt possession l'an
cal stilisisin encore avec c:l.it (l.ms ce royaii- l'»2o. Martin Laurent revint joindre Jean
me, n'ayant pas eu le même sort que celle Vicenze, et leur société se multiplia en ] eu
île Sii'.l-("ieori;es in Alghn, quoiqu'elle suive de temps.
le n émc institut , et qno ces i li.;noiiies re- Pend.mt ce temps-là, Alphonse. q»ii était
crnnaissent aussi saint Laurent Jusiinicn allé à Uonie, y entendit parler de la vie
pour leur p.itriaidie et leu'' Père, .linsi (iti'il exemplaire des chanoines sécul cr-i de Saint-
est porté jiar le bref lie Clément VIII, du 27 (ieorges l't» Alfjha, dont la réputation se
seplembre 1598, dont nous avons déjà parlé répandait par toute l'Italie, et qui au^impii-
à l'arliclc (îi:(inr.i;s n Ai.i^in, par lc(iucl il tait davantage par les vertus éd.. taules qu'on
leur pcimet d'en lé'itcr riiffire, c'est ce qui voyait liriller dans les personnes des cardi-
fail que nous traiterons d ; leur origine en nau\ Corrario et ("lOiideiinaire, qui étaient
particulier. des principaux fondateurs de cotte congré-
Sous le règne de Jean I". roi de Portugal, Ration. Il alla exprès à Venise pour vir ces
il y a\ ail à Lislionne un f.imeux médeciti et hommes aposloliques, et fut si louché di- leur
professeur de belle^- Icilres , nommé Jean conversation ri de la vio qu'ils menaient,
Vicenze, natif de celle ville, qui, dé},oûté des qu'il résolut d'embrasser leur institut. C'est
vanités du uionde «t désirant se (loiiner à puurquei, ayant appris i'|UC l'archevêque de
Dieu, s'associa avec Martin Laurrni, eélèlire nra^u- avait donné un monastère à Jean
prédicateur, et Alphonse Nogueyr.i, gentil- Vicenze et à ses compagnons, il transcrivit
iKtmuie et fis du praiid prévôt de Lisbonne, la règle et les constitutions de ces ch.inoines
qui avaient conçu le même dessein. Ils réso- de Saint-Ceorges, qu'il porl.i avec lui en
lurent de vi»re enscml.li' en commun, ot l'orluç; I. S'élaiit ren<l;i au uona^tère de
pour cet liïel ils se rel'rèrcnl pour f,iire Saiiil-t:< u;vi;ur de \"i!Iar d- Frades , il (il
leurs exercices spiiiliiels et leurs prières ré< it à Jean <'t à ses ci inp gnons tle la ina-
<!ans l'église de Sainte-Marie des Olives. ])ri- n ère de vivre de> channines séculiers du
clie Lisbonne, avec le conseutenient du curé Saint-Ccorgcs in Alfjha, cî les ) ersuad>i
de ce leu, qui ."pprouva leur sainte résolu- d'cmbra'^scr cet insliiut ; ce qu'ils Hreut et
li .n. Mais dum Vaquez, évéque de Porto, et (hanpèreut leurs habits, qui étaient n irs,
qui I tait auii de Jean Vicenze, ayant appris en d'autres de couleur céleste et conformes à
sa relr.-iite, l'eng.igea de venir avec ses coin- ceuv des chan lines de Sainl-lîcoigcs, cx-
p.ignons dans son diocèse, et leur oiïrit l'é- cepté qu'ils ont un caniail (I).
;ili>e de Sainte-Marie de Comp;mhaan (éloi- Leur téputalion se répmdit bicnlôl par
gnéc de Cl lie ville d'environ deux lieues), tout le royaume, cl ils furent en si grande
«^juiine un endroii retiré du monde, où ils estime auprès du roi que ce pri;iee confia à
pourraient tranquillement vaquer à I urs .lean Vicenze et à Martin Laurent l'infanlc
excreices et songer à l'èternilé bienheu- Isabelle, sa (ille, pour la remettre euire les
reuse. Ce prélat, à quelque temps de là, mains de Philippe, duc de Mourjjogne, à ijui
ayant été transféré à l'évéché d'iîvora, ils elle avait été promi«c en n)aria!.^e, ei ils par-
ne Irouvèrenl pas dans son successeur des lireol avec cette princesse l'.in li'ÎO, ay .ni
inclinations aussi favorab'es à leur égard, laissé pour supérieur au monastère de Sainl-
«•l il? lurent même oMigés d'abaiidonnei' ce Sauveur llodrigue Arnaud.
Ijfu. Alphonse alla à Itome, et les autres Après avoir e\écuté leur rommissioi, ils
retournèrent dans leur jiays. .'lUèrent à l'.ome pour oMenir la confirma-
Jean ne se rebuta poinl pour cela; il souf- lion de leur coii;'regation. Le caidinal (îon-
frit patiemment cette disgrâ e, et persévé- dclmairc se trouvant pour lors fort m.iiadc
ranl toujours d.iiis le de sein de iieser»ir et abindonnè des médecins, Jean, qui, com-
nniquement <)ue Dieu, il distribua tout son me nous avons dit, avait excrré cette pro-
bien auxpauvres, cl, ayant pris avec luiJe.in fission et s'y était rendu très-habile, rendit
'lodriguez et l'ierre Alvarez, ils se rcvêli- la santé au cardinal, ce qui aui;menta beau-
ent dhaliils noirs fort simples, et p.ireou- cou|.> l'eslinie qu'on avait conçue de lui; et le
urenl eomoie pèlerins tout le Portugal. Ils pape .Martin V conlirma leur congrégation
irrivèrent à Urague, où dom Ferdinand de sous le lilro des llons-llommes de Villar de
fîucrra, qui m était archevêque, les reçut Frades, et l.i donal on qui leur a>ail été faite
très-humainement; et, y ayant demeuré du mon is'ère de Saint-Sauveur, ayant coni-
i|uelques jours, il fut si iharmé de leurs mis celte affaire à l'évêque de \ iseu el à
I ntretiens, qu'il résolut de ne les point lais- Loup d'Olmedo, général de l'ordre de Saint-
«.er sortir de son diocùse. Jean , qui av.iit Jérôme.
rcnoneé volontairement à tous lus bi«ns du Leur congrégation ayant pris le nuai cUi
(t) Voij., à la fin du vol., n* 143.
5Gri
JEA
JEA
W,
ec inoiîaslèrp, op. 1c> np(iel.i les Bi;i>^-Ilt>n>-
iiios (:C S iiil-S;uivfiir de Vill;ir d • Fradii-.
Miiis la reiiip Isni'pllc, fcmiop d'AlpliDiise V,
leur ;ij;inl fait bûlir un nionjisttip luir. Ii's
murs de Lislionin', snus le lilre de ï^aiii -
Jean rEvan^iélislc. celle ) rincesse, qui ava l
praïuîe d; volion à ce sainl apôlrc, olilinl du
|)aj)e Fugèiic iV que crllc con'^rcKalinn iic
s'apprlleriit ()l:)s à l'avenir de Saint-Sau-
veur (le Villar de Frailes, mais de Saini Jean
ri'^vaiigélislc.
Ils «ni qualoize monastères en Porli!!;;il,
ilont l'nn des plus considérables est C( lui de
Sa'nl-Eloi à Lisbonne, qui a été autrefois un
hôfiilal cl oratoire fondé par Isard , évè<iiic
de celte > ill(>, sous Tinvocalion de sainl l'.iul,
de saint Clément et de saint Eloi , nyani re-
t< nu le nom de ce dernier. Ce prélat avait in-
séré une clause dans la fondation , qui po:-
tail qu'eu cas qu'il s'établit une cunsrégatiou
de personnes pieuses qui vécussent en com-
mun, on leur pourrait donner cet hôpital
pour avoir soin des malades et leur adminis-
trer les sacrements. C'est pourquoi l'infant
doni Pierre, qui jjouvernait le royaume pen-
dant la minor lé d'Alphonse \, son neveu,
obtint une bul'e d'iusèno lY , l'an l'iiO, qui
accorda cet hôpital à ces clianolnes, cl, à
cause (ju'il porte le tilrc de Saiul-Eloi, le
peuple ai i elle aussi ces chanoines, <"« ce
royaume, Loijos, (leoiquc leur vérilablc nom
Boil celui de Saint-Jean l'Evan^élisle.
Jean Vicenze , (;u'on a toujours reconnu
pour fondateur de celte congrogalion, fut
év^^quc de Laïueso, cl, en faisant la visiîo de
Ci' diocèse, voyant qu'il n'y a\ait pUjs de ré-
tiulaMié dans le ukui islère de Saiii(-lieor.;es
de Llécia, à cause du peu de religieux qui y
élaienl, il I<js dispeisa dans d'auires iiiunas-
lére', et donna C; In ~v\ aux ciianoiiies <ie sa
congrégaliou. Il lut en^uile lian-.|'é;é à ) évé-
cbé de A'iscu , où II n oiirul t'au 14... Al-
phonse Noguera fjl aussi év,<iuc de Coniju-
brc et ensuile de l.:slio:.ne. Ces chanoin s
avaieot aulri fois le soin de lo s les hôpitaux
du royaume de PorUii;al ; ;\iais Thouiassioi
4ii; <;u'ils ont quiilé cet em|)loi pour se dou-
j cr à l'élude cl à la iiréditalion.
Il y a aussi des clianoinesses de cet insti-
tut. I (laime à Redordella, dans le royaume
de daliie ; maii elles ne sont poul soumises
.-.ux chanoines, parce qu'il leur est défendu
par leurs consliluljons de prendre la diiec-
lioii dC' religieuses. Quoiciuc Pic Vail obligé
ceu'i d'ilalie à faire des vœux solennels,
ceux de Portugal ne s'y sont point soumis.
Après deux aus de nov.ciat, ils font scuL-
inenl enîre les mains du supériear une sim-
pK> projnosse (i'oi)ser\er la règle el les cons
tituiions de la congrégation, et vœu de clias-
leié, de pauvreté et d'obéissasiee, tant qu'ils
t'emeureronl dans la congrégation , dont ils
peuvent sortir quar.d lion leur seuîble , cl on
les renvoie aussi s'ils foni (îuelfjucs l'anles,
mais cela est arrivé raremenl. Ils sont l,;rt
riches et ont plui de soixai\te miile écus de
revenu.
Leur vie est (rès-ai!sl'>rc. Ils se lèvenî à
Une hcuic iq^rès iwinuit pour dire H!alJ:ies,
ne portent que des chemises de laine , font
l'oraison mentale pendant certaines heur' s
du jour, el pers.iuiie n'en est cxcn)pi. Ils
commciiccnl le caiém • au lundi de I,i (, ui-.;-
quagésime, et. outre les jeûni s cou:niaudcs
par l'Eglise , ils jeûnent encore l'avcnt tr; s-
élroi'ement, cl lous les iiercicdis et vendre-
dis de l'année, excepté depuis Pâques jusi] Ta
la î'ciilrcôle, qu'ils ne jeûnent que le ven-
dredi. Tous les mercredis <l vendredis de l'an-
née elles lundis pendant le carême, ils pren-
nent la discipline, comme aussi tous les jour;
de la semaine sainte, elils j.ûiienlaupainetà
l'e/iu le jour du vendredi saiul.Lcs noiices ne
sont point reçus avant l'àgc de dixhuil aus,
et sont iiabillés de noir en méiii.;i: c de i'ha-
bil que portaient les preniiei's fo alaleurs.
Le roi Jean III leur ddima le soin de tous
les hôpitaux de Portugal qui étaient de fou-
dation royale, le | re:uier fut ceWii de 'l'ous-
les-Sain's à Lisbonne, qui est très-considé-
rable, cl dans lennel il y a une vingt :ine de
salles qui peuvent conlinir six mile malades;
le Second, celui de Jésus-Chri Ide Sanlarem;
I ■ troisième, de .Mor.(e-Mor-o-Novo, et le qiia.-
trièiiie, du Sai'.t-Es|)ril d Evora.
Le roi D. Emmanuel se servit d'eus poir
aller prêcher aux Indes et en Eih.opie. L'é-
véque de V'iseu , leur fondateur , reft)ruia
l'ordre de Christ. Didace Gonzalve , confes-
seur de 1:j reine Eléonore, femme de Jean li,
réforma l'ordie de Saint Paul, j/rcniier er-
mite, en P'ortugal, el b s chanoines de Saiu'-
(ieo;gtfs in Al<j!ia en Italie , dont ils avaieiil
a iprjs les observances réguliéri s , les ay..nt
eus-jnéiiies abandounées, le pape Pie V or-
donna , l'an i'idi , au général dis chanoines
de Saiul-Jean l'Iîvaugéliste , «l'en envoyer
sept ou bu t pour réforuver ceux, de Sa.nt-
Georges. Teules les grâeeset privilèges que
CCS <leiiK coiigrég. liions ont obtenus des sou-
verains pontifes oui été impri nés à Lisbonne
en IS.il'i-, et les papes l'inoeeut XI et Ale.^an-
d.e \ 113 eu ont encore accordé eu particulier
à la congrégation d(! Portugal , depuis que
celle d'Italie a été supprimée.
Ceux de Portugal ont aussi eu parmi eus
des personnes qui se sont distinguées ])ar
leur science, ronmio Fran(;ois de Sainle-Ma-
rie, évcque suffragautde Brague ; Vincent de
la îtésurreclion, qui mourut étant général tu
i(J3G; iMichel du Saint-Ksprit , miri en Iti't'i,
;iprè> avoir élé aussi génér.il ; î'-mmanuel de
S«iut-Paul, mort en lGi3 ; Emmanuel de la
Résurrection, et plusieurs aulies.
Le nom de Bous-ilianmes de Saint-Sau-
veur de Villar de Frades qu'on dunua à ces
chanoines est p ut-clre ce qui a donné lieu
à Cresccnze de d.r ■ que Uiebard, cojiile de
('ornouaille, frère d'Henri III , roi d'Augîe-
lerre, avait fondé ccrlains religieux sous le
nom de Bons Hommes, et qu'ils avaient été
lie celle cougrég ition ; mais .M. Huel, évé(jue
d'Avrai'.ciies, dans ses Origines de la ville de
(]ae!!, dit que c'étaient des religieux Sachets,
dont nous parlerons à l'article do ce nom, cl
qui étaient aussi habillés de bleu.
Voijez Francisco de S.Muna, Uist. das sti-
(jiaclas Conijreijacou:s dos conegos seculares
\lr s. Jrorge em AIgn de Vcnela, cl de S. .ïono
Hvmrf/rlh'a rm Portugal. Jncqurs-Pliilippiî
Tiioinasini, Annnl. Cotuireg. Canonir. Senti.
S. (ieorg. in Mglia. I). Nicol.i. ilc S. Marin rtc
Lisboa , Chronic <ln Ordni dos Conrgos Ur-
. rnnlc.x, lih. i. (îio Prli-o Cro ron/i, j'resiilin
Uomuno hb. ii, pag. 2S. iMiimanucl Hodi ig.,
Quirst. Rrgul., fom. I, quœst. 3, art. 1.
JEAN PASCHASli; RT DE JÉIIOME DE
lANZA (Fui-iiKS M M.i us de).
Jean Paschasc , snriif tnmé d'-l/itiVi , qui
avait é. 6 di ciplc du liii'nlieiircux Jean de
('■iiadaloiipe , cl l'avait braucoiip aidé dans
léialilissotncnl dr sa réforim- , voyaiil apiès
sa iiHirl toutes Irs oiipositioiis que l'on con-
linuail à faire contre la pro\in'e de Saint-
Gabriel, que l'on voulait supprimer dans sa
naissance, cnlreprit le vo\age de Rome pour
les faire lever dans li- ch.ipilrc généralissime
qui s'y lut l'an loi". Mais , y ayant trouvé
pi is de difliculté qu il ne croyait , et crai-
L'iiant (juc l'autorité de ses adversaires ne
remportât enfin sur l.i justice, il résolut
d'enli éprendre une nouvelle réforme avec
le consentement du péiié al de< conventuels,
qui lui afcorila la permission d'ériger des
cou»euls , de recevoir des novices , et même,
les ronvciitiieN qui voudraient se niellre sous
sa conduite. Ce fui en vertu de cette [lermis-
sion , qui fui confirmée par le pape I.éon X,
qu'il (oaiinenea la cusiodie qui fut appelée,
de son nom , des Pasclinsites. Son premier
couvent , qui était situé dans une île proche
Uedoudella , fut dédié aus ap.^itres saint Si;-
iMon el sainl .lude, La réi'Ulaliun de Jean
P.isiliase ronmiençani à se répandre, 1(>
nombre di- ses dii^riples ;uif;ii',ciila : ce qui
lui donnani bonne esp riince pour l'iigran-
dissement de sa réforme , il alla à Kome en
lo.'J'i, pour deni inder au pape Pau! III la [i r-
niission de recevoir des 1 rères de l'Obscr-
v,jnce, afin que, inuitipliani le nombre de ses
disciples, il eût le moyen d'étendre davan-
tage ret:e même réforme. Mais il ne trouva
pas le pape disposé en sa faveur : ce qui
n'empêcha pas , malgré le refus (jn'il en re-
ç!:l, de persister dans son dessein peiidanl
sept ans, au bout desquels il obtint enfin un
bref du même | ape, le 10 iiiai lo'il . par le-
quel il lui fut permis de recevoir tous ccuv
<iui voudraient embrasser sa rél'orme , soil
qu'ils fussent de l'Observanceou de quelque
autre ordre, quand même ils n'auraient pat
la permission de leurs supérieurs , pourvu
qu'ils l'eussent demandée ; mais, comme cela
lii ait à consC(iuenrc, cl qu'il en arrivail tous
les jours des inconvénieuls, sur re que ceux
lies Obscrvanis qui étaient tombés en faute
passaient dans la réfomie de Pascliase pour
éviter la eurrcrlion que leurs supérieurs leur
pouvaient faire , !e pape , en étant in'ormé .
rcvocpia son bref cl délend t aux ()liser\aiils
(le passer chez les Pasi basiles, à moins qu'ils
n'en eussent (bieiiii l.i permission de leurs
supérieurs ou du sainl-siege,
l^e zélé réfornialeur (il un second élabiis-
M'uicnl à llayoïine, biinrg de Oaslllle, el un
£iiireà N'igo l'an 1551. Dans le leuips-là Al-
niiillO.N.NAIIÎI. IdCi OUDliLS ntLlGltUV. 5ii3
plion-c de Mazanelte, qui faisait aus<-iune ré-
forme lai liculière au couvent de Mazanelte,
lieu :!e sa naiss 'nre.elqui en avait aussi ob-
tenu la permission du ^'énéral des conven-
tuels, ayant entendu parlerdu P. Paschase, le
fui voir, el trouva sa manière île vivre si con-
forme à «elle qu'il faisait pratiquer à ses re-
ligi'Ux, qu'il unit le couvent de M.iznuette
à ci'U\ du P. Paschasc, fl le reroniiul pour su-
pé leur. Paschasc cl.iul mort ((uelijuc lemps
aprè<,les conventuels firent ce qu'ils purent
|)our s'emparer de ses couvents, et s'opp i-
ïèreiil à ce que cette réforme s'augmentât ;
mais, nonobstant leurs opp isitions , on en
fil une custod e sous le nom de Sainl-Joscph,
el ils furent ensuite unis avec les pauvres
couvents de la réforme de S lin'.-Pierri' d'.\l-
cantara, comme nous le dirons à l'article de
ce nom.
Dominic. de Oubermlis , Orb. Seraphic,
tom. I, lib. V, rnp.'.'>, § 9. Franci c.ljonzag,,
De Oiig. Srraph. lielig.
A celte réforme des Pascliasiles nous jo'n-
drons celle du P. Jérrtme I.aiiza , qui, vou-
lant iiniler les l'ércs des déserts, se relira
dans une solitude, où ayant assemblé, l'an
lois, quelques personnes qui voulurent vi-
vre avec lui, ils le reconnurent pour maître
el supérieur. Ayant tenu conseil enlre eux
sur le genre de vie qu'ils embr.isseraienl, i's
prirent la résolution de former une congré-
gation particulière, dans laquelle on obser-
verait à la lelire el sans glose ni iulerpré-
lalion la règle de saint François, dans do
pauvres (■rmila;,;es séparés les uns d s au-
tres, au milieu desquels ils bâtirent une
église. Ils s'enga:;èrenl à observer conti-
nuellement la vie quadragésimale, à jeûner
tous les mercredis el jrudis de l'année , et
convinrent enlre eux qu'ils recevraieiii tous
les frères el les leligieux de l'ordre de Saint-
Domiiiiiiue qui voudraient eiilrcr dans leur
congrégation , el (lue ceux qui y seraient
reçus seraient obligés de reronnaitie Jé-
rôme Lanz.i pour supérieur. Ils obtinrent à
ce sujet une bulle du pi\,>c Jules 11! l'an
l'iaù. Le bienlieureiix lîenoil de Palernie,
suruouimé te Noir, dont on poursul la ca-
nouisalion en cour de llonic, fut un des [ire-
miers qui entra dans celle congrégation :
elle fui suppriméiî l'.n loG2 par le pape
Pie IV.
Doiniiiic. de (iubernatis , Urb. Scaphic,
tum. I, lib.v, § 9 et 10.
jiMlOME (Ouniii: di; Saint-).
SIXTIOX PUKMlliRK.
KUMITES l)K SAI.N'I'-JKHOMK.
§ 1 ■^ iJcn religieux L'niiilc.^ (le Sdinf-Jcrômeen
Jïsp(i'/iir, appelés eomiimucmenl Jcroni/mi-
ti.i, mer la rie du rrnrrnble l'ère l'iirre
l'crdiihin t de iiuudiitnjdra, leur [onduleur.
Outre les Jésuales d' Sainl-JérAine donl
nouH parlerons à 1'. ilicle de ce nom, il y a
eiirore quatre ordres rel gieux, ou difléieii-
les congrégations, qui se sont mis sous la
protection de ce l'ère de l'I'^glise el qui ont
pris les noms d'Ermilcs de Saiiil-Jérôiuc de
fifiî) JF.P.
rOhservaacc ou de Lombardic, d'Ki miles do
Sainl-Jérôniedcla coiisiégalion du li.l'ierrc
de Pise, el d'Eriiiiles de Saint-Jérôme de la
congrcgalion de Fiésoly ; el quoique ces
quatre ordres soient entièrement différents
les uns des autres, ceux d Espagne, de Loni-
barilic et du B. Pierre de l'ise, oui été néan-
moins confondus ensemble par M. Hcrmant,
qui n'en fait qu'une seule coni;régation.
Cette congrécjalion, dit- il (Uisl. des Uni. re-
li<j. tom. II, pag.3J2) est assez céU'bre en lln-
lie et en Espaijne. Le li. Pierre de Pise,dit
(j'aiitbacurla, y travailla avec un zèle exlré.i e
en Italie, et un certain 'l'honuis en Eapmjne,
vu il était passé avec (jneliiues-uns de ses cum-
pngni,ns vers l'un 1380. Quelques liisluriens
les appellent les Ei mites de Suint-Jéiô:iie :
ils portent une tunique, un scaiiulairc et un
cnpuce minime, avec une ceinture de cuir.
Dans leur premier éla'dissement, ils ne fni-
saient point de vœux, et, vivant du travail de
leurs mains, leur but principal é ait de s'em-
ployer au soulagement des p:uvres. Le ixipe
Grégoire XI confirma cet institut en 1373 un
137Î , sous la règle de suint Augustin. Le
chef de l'ordre est à Lupiana, dans le diocèse
de l'olède.La congrégation de Saint-Isidore,
dont le monastère i si à Sécille,lui appartient,
avrt celui de Saint-Laurent à Lescurial, b:Hi
p(.r les li éralités de Philippe II; et celui de
Saint-Just, I « Cliarles-Quint se relira sur ta
fin de sis jou:s. Il y en a plusieurs en Italie
sous divers noms. Lupo d'Olmedu , religieux
espagnol, avait composé tme règle tirée des
écrits desLnt Ji'iôme qu'il voulut faire re-
cevoir à son ordre, mais cela n'eut point de
suite. Il fonda la congrégation de Saint-Isi-
dore, qui se sépara du reste de l'ordre; mais
enfin, p:.r les soins de Philippe II, ils se réu-
nirent pour ne faire qu'un seul corps. Lupo
d'Olmédo mourut à Roms en 1433. Pie Y
obligea ces religieux de faire des vœux solen-
Ik/v, et, s'élant adonnés à l'étude, ils ont tra-
vaillé comme les autres congrégations de l'E-
glise à l'instruction des fidèles, et à la prédi-
cation de l'Evangile.
M. Hermant ^e trompe, premièrement en
ce que ces trois différentes congrégations
n'ont jamais été unes ensemble, et ont tou-
jours eu des observances différentes et des
habillements différents dès le coainiencenicnt
de leur institution. Ce que cet auteur dit
qu'un certain Thomas travailla beaueoup
à la fondation de cet ordre en Espagne, où
il ét;iit passé avec quelquis-uns de ses com-
pagnons vers l'an 1380, ne peut pas avoir
été, puisque ce même Thomas, qui par la
sainteté de sa vie a acquis le titre de bien-
heureux, mourut à Foligny l'an 1377, sclun
Juste Roseo, le premier écrivain de sa vie;
Jacques Jacubilli, qui l'a insérée dans sc^
Vies des Saints de Foligny ; Wadingh, dans
ses Annales des Mineurs; le P. Jean-Marie
deVernon, dans ses Annales du Tiers Onire
de Saint-François; le P. Arlhus du Mous-
licr, dans le Martyrologe des Saints des trois
ordres de Saint-François, au 15 septembre,
et généraleuunt tous ceux qui ont f.iii mcn-
îiou de ce bienheureux Tlium :s, outre tiue
i\:\K
37(3
M. Hcrmant reconnail que l'ordre de Sainl-
Jcrônie (n Esp.igne, aui)uel à la vérité !«■!
disciples du bienheureux Thomas doimè-
rcnl commencement, fut confirmé en 1373
ou 137V.
Ce qu'il ajoute, qi:e Loup d'Olmédo com-
pcs! une règle tirée des écrits de s.ii it Jé-
rôme qu'il voulait faire recevoir à son or-
dre, mais que cela n'eut point de suite, n'est
pas conforme à l'histoire; car, comme nous
le prouverons dans la suile, Loup d'Olmédo
ne composa cette règle tirée des ccri's de
saint Jéiôme que pour les religieux île sa
coiigrégali,in, qui élait celle des Moines Jir-
miles de lObscrvance «u de LombarJie; et
il ne pouvait pas obliger ceux d'Espagne à
la recevoir, puisqu'il n'avait plus pour lors
jiucune juridiclioo sur eux. Il est vriii que
celle congrégation de Lombardie a élé ap-
pelée par quelques-uns la congrégation de
Saint-Lsidore.cl que, par les ordres de Phi-
lippe H, les couvents que les religieux de
celte congrégation avaient en Espagne ont
clé unis à celle des Ermites de Saint-Jérôme,
plus connus sous le nom de Jéronymites ;
mais relte congrégation des Moines Ermites
de rObservance a toujours su!)sislé en Ita-
lie, où elle a encore à présent dix-.->ept cou-
vents. Enfin ce que dit .M. Hernianl, que tous
les religieux de Saint-Jérôme ne faisaient
point de vœux, el que ce fut le pape Pie V
qui les obligea à faire des vœux solennels,
ne doit regarder que ceux de la congrégalioa
du bienheureux Pierre de Pise, qui, à la vé-
rité, n'onl commencé à en faire qu'en loG'J,
(]uoiqu'ils eussent été élablis dès l'an 1380.
Miiis les autres congrégations d'Espagne et
de Lombardie en ont toujours l'ait dès leur
origine. Peut-être que eel établissement des
Ermites de Saint-Jérôme de la congrégation
du bienheureux Pierre de Pise, fait eu 1380,
a fait croire à M. Hermant que le P. Thomas
ét^iil passé cette année en Espagne pour faire
l'établssement des Jéronymites de ce royaume.
M. Hermant, parlant de ces Jéronymites,
n'a rapporté presque que ce qu'en avait déjà
dit M<iréri dans son Dictionnaire. Ceux qui
l'ont augmenté ont ajouté que les Jéronymi-
tes suivirent d'abjrd la règle de saint Augus-
tin; m;iis que Loup d'Olmédo, leur général,
dressa uue règle composée des sentiments de
saint Jérôme, laquelle lui approuvée par le
pape Jlartin V, qui dispensa les Jéronymites
de garder celle de saint Augustin; el qu'où
doit observer que les Ermites de la congré-
gation de Siiinl-Jéiôme en Italie suivent au-
jourd'hui la règle de saint Augustin. Comme
il y a eu encore deux différentes congréga-
tions de Saint-Jérôuie en Italie, ces conti-
nuateurs de Moréri devaient faire observer
eux-mêmes que ce sont les Moines de Saint-
Jérôme en Italie qui ont autrelois suivi la
règle que Loup d'Olmédo avait dressé-, et
qu'ils suivent présentement (uUe de saint
Augustin. M.BuUeau(//('5/. de iord.de Saint'
Bmoit, liv. I, ch. 6, p. 72j s'est aussi troiu-
pé lorsqu'il prétend que ce sont les Ermites
de Siinl-Jérôme en Espagne qui prirent
cette règle que Loup d'Olmédo avait compo-
571
se
ser, puisque, roinmc nous nvons dit ri-ilc-
\M\i, il «e pouvait oliIi;;er les Eruiilcs d'Ks-
paçn-j ;"i larcccvnii, cl qu'iiu ( oulrairc ils
^■v oppo èrciil rirleiiiciil. Lnfm nois i!i)nni>-
r iiis des preuves conv.ilncaiilis dans la sui(c,
«iiuimo il V a eu ] lusieurs e(in;;répalioiis de
lUrdrc deSainl-Jcrôuic qui n'oiU eu aucune
rrlaiioii les unes avec les autres, et qui oui
luujours élé difforenles, cl uous allons coui-
iticnrer par la congrégatiou des Jcroujmiles
d'Iisi a-^uo.
Le Iroisii^mc ordre de Saint-Fram ois se
filorific avec raison d'avoir donné naissance
à celui des Kruiiles de Salnl Jérotne eu K -
pa^ne, puisque ce furent quelques disciples
t;u liieiiiicureux l'Iionias de Sienne ou Tlio-
iiiasuciio, proies (lu Tiers Ordre de Saint-
Iraneois, qui passèrent eu i:spr.f,'ne et s'y
lelirèrenl d'aburd dans divers ermitages qui
furent en p< u de temps peuplés d'un grand
nombre de per>onnis qui les voulurent imi-
ter, et qui tous ensemble formèrent quebiwe
trmps après un ordre religieux (jui fut ap-
prouvé parle pape Gréj^oire Xlsous le noni
«le saiul Jeiôme, (lu'ils avaient choisi pour
leur protecteur el leur modèle, ayant voi-.lu
imiter la vie péuilcnîe cl retirée que ce sa ni
docteur pr.Jiijua dans le u;onas'.ère de lietli-
iéein.
On ne peut pas di^co:»venir que ces pre-
miers enu.tes qui passèrent en Kspagnc ne
fussent du Iroisicmu ordie dcSalut-François,
puisque le bienlieureus Thomas de Sienne,
leur !n,.ilrc, ené'.ail, sc'nn ce que disent nou-
>eulenicnl tous le< historiens de l'ordre de
Sainl-rrauço'.s, mais encore saiul Anli niii,
archevêque de Moreuce, Jacobil'i, et pl;i-
>icurs autres. Jos p!i Sig; cnça, qui a lait
riiistoirc de l'ordre de Saint-JcrôniO, en de-
meure même d'ac ord, s'iii rapportant au
(én»o g-.iage de saint Anionin, loisqu'il lil:
Aqiiien Unma S. Antonio de h'iorencia en m
Hisloria Tliomas Sucriu, y dize que rr.i de lu
Ivrccra rcjla de S. /'laïKisro, y que tenian
es]/irilu prophilno. Mais Cresccr.ze, ijui,
rouime n.ms avor.s dit dans 1 1 préface, se
qiialilie de iiairiiicu de Pliisanee, et se fait
nc.Tumoins a«si k coi^nallie pour religieux
de i'oidic de Sainl-Jéromc, n'est pas de ce
s<ntim''iit. Il prélen.l au contraire que ee
liieiilieurcux 1 iiomas cl ses liiscijjles élaienl
de l'ordre uième de ^a nt-Jérùme, qui, selon
lui, a pMS son origine au temps des piopiiè-
Ics, a été établi par saint Aniuine, dilate j'ar
saint Jéiôuie, étendu par tout l'univers, tan-
tôt se mainlenant.de lui-même, tantôt chan-
geant <lc nom, el s'uniss.int à d'autres sans
cesser d'étr^' toujours l'oidrciie J-ainl-.lè-
rôiue. /:rco rordincGierunimiuiio, dit-il dans
nu endroit (/')iM(/. ruindnv, pari, i, pnij.
'ÔG'.i], oriijiiiiito (In proplieli, ristorulo da S.
Auionio, dil'itdio da S. Gironawo, dijfnso
nell unii crsoj har de fc stesso ninlirnsi, tinr
viuta minic ri nd (diri si uni-ce senzn militri
d'isserc- Ou (/cut bien s'imaginer ipi'il dis-
[lUle aux Carnn s l'antiquité et la préséance :
en efT"'!, il met non-senicmcul au nomliredes
religieux de l'ordre de Saint-Jérôme le bien-
lieuitux Allicrl, législateur des (Jarmes, cl
DICTIONNAllli: DES Ulll)IU,S UEI.RiltUX. [.72
lois ceux qui (ni haliiic le monl Cirmel ;
mais il y mel aussi saint l'aul preniicr ci tuit<-,
saint Antoine , saiul Pacénie, les premiers
l'èies de la vie solitaire, cl les aiities f 'lula-
leurs des ordres religieux qui les oui suivis,
coiumc saint It.tsile, saint Augusiin, sa nt
i!euoî!, et par conséquent leurs disciples. r,e4
aiileur, ne croyant pas que le grand nou>bre
tie religieux qui sont sortis de ces ordres fût
suflisaul pour former l'ordre de Saint-Jé-
rôme, y a encore fait entrer une infinité de
saints qui n'ont jamais été disciples de ces
saints fondateurs u'ordros, et qui la plupart
même n'ont jamais élé religieux. Il eu a été
chercher dans tous les |iays,il il a eiu trou-
ver eu France (sans parler des autres royau-
mes) saint Martin, évêque de Tours ; saint
lieiiii , arciicvêque de lleims; s.iint l.loi,
évé(|uc de Noyou; saint Loup, évêque île
'l'royes ; saiiit Fiacre et plusieurs autres.
Ainsi il ne faul pas s'é:onner s'il dit que le
bienheureux Thomas de ?ieniie était de
ror<lie de Saint-„'érômc, avant méoie qu'il
fûi é\'ibli.
Sigueuea se trom|>e lorsqu'il d.miu' <à ce
saint le surnom de Surho ou Sueeo, cl qu'il
dit (juc saint Aniouin lui a doiuié ( elui de
Succio. Cii saint archevêque à la vérité l'a
appelé Tbom.isueci s, coumic tous les histo-
riens <juf eu 1 u! pairie; mais ce n'est qu'un
seul mot, qui vctit diie en it.ilien Tiu)m isuc-
eio ou le petit Tlioiiias, parce qu'il voulu'
prcniire ce nom par huuiilité. Il eut un gniiuî
nombre de discijil s, ((ui denu uiaieul en
divers ermitages sur un- monlagne des Al-
l'cs; el, si ou eu vcal croire les hisloricns
de l or.de de Saiut-Jér<îiue, ce bienheureux
Thomas, qui ;ivait le don de propliélie, dis-
courant plu^ieuT' fo s avec ses discples des
cliotes qui devaient arriver, leur disait tou-
jours qu'il voyait dcseemlre le Sainl-lîsjirit
sur rhspague ; t'est ee qui donna lieu à
quelques-uns d'eulrc eux de quitter l'Italie
p>;ur passer eu Iv pague. Siguenea dit «(u'ils
é aient sept ou huit, et n'en nomme qu'un,
(jui était un frère \'asco de Portugal, qui
av.iil demeuré prés de trente ans avec le
bii nheureux Thomas. Us airi\è;eiil <u Ks-
p .gne sous le règne d.\l|)îionse W, père de
Pu ire dit l-Ouil. Ils se re'.irèrent d'aliord
en deux dilTerenis ermilagi-s, les uns à Nolre-
l'ame de \ illaescua, iiroebe d un lieu appelé
Oiuseo. sur la rivière de T.ixunna, el les
aulres à Nolie-Dame de f]astinnal, dans les
montagnes de rob''(Ic. Leur nombre augmen-
tant, ils inulliplièreiil leurs ermitages : il y
eu eut qui allèrent dans le royaume de Va-
lence, pioche de la ville de tjau'lia, cl d'au-
lies |iassè:enl en Poriugal , n'ayant lou»
qu'un même dessein, d'imiler saint Jérôme ,
((u'ils prirent dès l^rs pour leur proleeleur.
Knlro les personnes qui se joignirent A
eux, il y en eut tiuelquesunesde dislini lion,
tloiii les principa es furent l'.erre-Ferilinauil
l'eeha, chambellan ilu roi dom Pierre ; son
Irère Alphonse l'eeha, évêque de Jaeii, qui
ri no. ça à celle digoiié pour le suivre dans
la solitude, et doiii Ker.lmand Y.iuez de Fi
gucra, ihauoiue de Tolède el ciiapclain ma-
î,73
JER
JER
574
jcur de la chapelle des anck-ns rois. C'csî ce
l'ivire -Ferdinand Pccha qui est reconnu
p iir le fondateur des Ermites de S.iint-.lé-
roine, tant pour avoir obtenu la contirniatioii
de cet orJre et y avoir presnil des règie-
n-.ents, que pour avoir fait le pieiuicr les
vreux solennels enîre les m.ins du pape. Il
était lils de Ferdinand llodriiiucz Pécha ,
ciianibellan du roi Alphonse Xi, cl d'Elvire
Martinez. il sucrcla à so.i père dans la
charfÇi" de chanibell m du roi, et, après Ja
mort de ce prince, il eut le a;ême einplui
aujiiès du roi doni Pierri', qui, à cause de
son esprit farouche, qui n'aiinait que ie sang
cl le desordre, fut suriioinmé le Cruel. Les
irtiautés que ce prince exerçait tous les
jours sur les personnes mêmes qui le tou-
ciiaicnl ilc plus près, obligèrent Pierre-Ferdi-
nand à quiller la cour el à renoncer à toutes
les vanités du monde, pour se retirer d.sns
l'cimilage lic Nolre-D,unc: d^ ^'iKaescua.
Ferdinand Yanez.qui n'eut p^s moins d'hor-
reur que lui des cruaulf s du roi, dont son
pro(ire frère le prince Frédéric et deux in-
faiils d'Ara;çnn n'avaient pu élre à l'abri,
suivit bientôt Ferdinand i'eclia dans sa soli-
tude ; el, peu de temps après, le frère de Fer-
dinand Pécha, djni Alphonse Pécha, évoque
de Jaen, s'élant dém s de son é>èché, se vint
joindre à eux.
Il y avait procl;,; de cet ermitage une
église sous le nom de Sain'.-Baiihéleioy, qui
avait éic bâiie depuis (Muiron qu.iraiiie ans
par dom IMdac' Aiaitincz, qui était aussi
chambellan du roi Aiplio sl- XI et oncle des
deux Pécha, ils y allaient .vouvenl faire leurs
priires, cl même t niendre ia messe, à cause
qu'ils n'avaient jias de chapelle à Villaesciia.
La situation de tcite église, qui clail dans
un lieu retiré, el où lou pouvail bâtir îles
ermitagi's aux environs, leur fit concevoir le
dessein d'y demeuicr. Comme c'était un de
leurs oncles qui en avaii été le fondateur , ils
crurer.l qu'ils pourraient en obtc-nir facile-
ment la permission. En effet, les consuls et
le conseil de Lupiana, à qui le fondateur
avait donné le droit de nommer aux chapel-
lenics, y consnntiienl, aussi bien que l'ar-
chevêque de Tolède, qui était pour lors dom
Gotnez Menrique. Non-seulement ils leur
donnèrent cette église, mais encore les cha-
pcllenics et les revenus qui en dépendaient,
et ils en prirent possession l'an 1370. Ils hâ-
tirenl plusieurs cellules aux environs de;
celte église, où ils dem^ uraient séparés les
uns des autres ; el ce fut pour lors qu'ils tà-
ch"èrent d'imiter la vie solitaire et retirée que
saint Jérôme, qu'i's prirent pour modèle ,
avait pratiquée dans la Palestine. Mais quel-
ques personnes malintentionnées, jalouses
4e ce que les saints Fruiites commençaient à
éli"c eu réputation, el que le peuple des en-
virons avait de l'estime pour eux, les décriè-
rent, en publiant qu'ils étaient infectés des
erreurs des IJéghanls, el que leur manière
(le vie n'était pus approuvée par le sainl-
siége. C'est pourquoi ces Ermites convinrent
entre eux que, pour se mettre à couvert de
ces calomnies, il fallait aller trouver le pape
et obtenir ia confirmation de leur nouvel
ordre, en approuvant aussi le résoluliou
((u'ils prirent pour lors de changer la \ieso-
lilairc et érémitiquc en cénohilique, romm(?
étant la plus assurée ol celle où ou est moins
exposé aux périls el aux tentations, se re-
niellanl à la volonté du pape pour leur pre-
scrire telle règle qu'il voudrait leur donner.
Ilsjolèrent pour ce sujet les yeux sur Pierre-
Ferdinand Peclia, à qui ils donnèrent pour
compagnon Pierre de Uome, <iui était nn
des premiers Ermites qui avaisnt passé d'I-
talie en Espagne. Ils allèrent à Avignon, où
11! pape faisait pour lors sa résidence. C'était
Grégoire X! , qui leur accorda ce qu'ils sou-
h lilaienl par une bulle du 18 octobre 1373,
ayant cor.lirmé leur ordre sous le titre de
S.iint-Jerônie, el, outre la règle de saint Au-
gustin, qu'il leur prescrivit, il leur donna
encore les constitutions que l'on o!)ser\,iit
dans le monastère de Sainte-.Marie du Sépul-
cre, hors des murs de Florence, qui était du
l'ordre de Saint-Auguslin.
Le P. Hermcncgilde de Saint- Paul, reli-
gieux de l'ordre de Saint-Jérô:i!e, fâehc de
ce que Siguença n'avait pas sagement donné
dans les opininns pu raisonnables de crux
qui prèiemlcnl que tous les ordres de S :ini-
l{asile,de Saint-lîenoît el de Saint-Augustin,
ne sont que des braeches de celui de Saint-
Jérôme, a fail uu volume eniier pour p. cu-
ver que l'ordre de S.iiut-Jérôme, fou lé, à
ce qu'il prélend, par re l'ère de l'Eglise à
lielhlcem , a toujours subsisté jusqu'à p é-
sent. Ainsi, parlant de ce monastère de
Sainte-Àîurie du t^épulcre, près de Florence,
dont les religieux de S.ilnl-Jérôme prirent
les constilutiois par les ordres du pape
Grégoire XI, il avance hardiment qu'il ajj-
partenail à des religieux de l'i^rdre de Sainl-
Jérônie, el que, coaitue le B. Thomas de
Sienne, dont nous avons déjà parlé, avait
beaucoup de disciples, c'était sans doute l'un
des couvents où ils demeuraient. Pour prou-
ver ce qu'il avance, il dit que c'est à lort
que l'on prétend que ce bienheureux Tho-
mas a été du Tiers Ordre de Saint-François,
el que si Jacobilli ea a p^irlé, ce n'a été qu'à
cause qu'il a dédié ia vie de ce lî. à l'évéquc
de Foligny, qui était religieux de l'ordre <lo
Saint-F'rançois, et que, du temps du bien-
heureux i humas , les religieux du Tiers
Ordre de Saint-François ne pouvaient pas
avoir des couvents, puisqu'ils n'ont com-
mencé à ea avoir que l'an l''«.21. Ceci se dé-
truit par ce que nous avons dit en parlant
de l'ordre des Hospitaliers de la Charité de
Notre-Dame, où nous avons rapporlé une
bulle de Clément VI de l'au 1346, qui, en
leur per.iiellani de quitter la règle du Tiers
Ordre de Saint-François, qu'ils avaient sui-
vie jusqu'alors, pour prendre celle de saint
Augustin, fait mention de plusieurs de leurs
monastères et hôpitaux, et entre autres de
ceux de la Cliirilc sur la rivière d>' Koignon,
des Billetles à Paris, el de Saint-Louis à
Seulis. Avant l'an 1323, il y avait des reli-
gieux du Tiers Ordre dans le diocèse do
Liège, puisque l'on trouve des lettres de
573 niCTlONNAllŒ DES OIUH'.LS UKI.KMKUX. iîVj
l'tMéquo Ailol|.hc, (jui leur ortloiinont il'ôlirc Jir«)inr, (ie les unir à celui de Sainl-Hor-
nilre i'U\ un siipiriour qui les corrige il' Uiélomy de l.upiaiia , cl de rrccToir à l,i
leurs fautes seuliniciil des légères les plu* pnfission solenaeile 1rs jiulres cniiile» de
j;rièves cl.iiil re«c.-vées au visHeur, cl qui sa coiig;ré;;iilioii qui claieul ro.sîcs eu lîs-
ieur dcfeiidiiil ilc sorl r sans sa peruiiss dm pa^ne.
cl tans nM)ir u\ coiiipapu'in, de nianpe: hors V> rdiuand de (lua 'a'ajara, niiiui dp loiilrs
ilu réfecioiie. île coudicr hors ilu l'oiloir. <ie ces perniissi()n<, s'en re:oi:riia eu Es|ia!;ne
pailer à îles roniiiies eu particulier cl à des avec sou compagaou l'ierre de Uorue, cl ar-
l.einr> in lui s, ric. Nous pourr.ons eu ii!cr rita à Sainl-Itarlliéleuiy de I.upiaua le pre-
cucorc de plus ancicn> au V. llerincueuililc niier février I37'»-. li reçut à la profosion
de Saiiil-l'aul, si nous viuiiions parcourir les les autres liiuiiles, lit travaillera la rou-
pro\ iiicis ; niais, bieu Iiiin que ce mnnislèie s ruclion d'un nionastère, et prescrivit des
de Saiule-.Marie du S.'pulire ail éic de l'or- rrgleuicnls pour le maintien de rohser>ince
dr- de Saiiit-Jen ine. et qu'il ail appartenu iéi;ulière, tels qu'ils ont toujours élé obser-
au biculieiireuv lliouias et à ses disci(>les, le »cs dans la suite. V.n moins d'un au, le> hk-
p.ipe dil positivcuieiil qu'il était de l'ordre de tiui' u^s furent achevés, .1 quoi conlribuirenl
Saint-Augustin, ne pouvant pas faire uicn- beaucoup les parents de Fcrd uand, qui,
lion d -• cc'ui de Saiiil-Jérônie, qui était eu- pour les grands biens qu'ils y (irciit, en ont
I ore inconnu ; d'ailleurs le bienheureux toujours été reconnus comme principaux
Tiiumas u'.i jamais de^ieuré avec ses dis; i- bienfaiteurs. .\près cel 1 Ferdinand de (iua-
jiles dans aucun n;onastère,ces Krmite.s ayant dalajara, «jui n'avait accepté roffiie de prieur
l'iujoui s vécu dispersés dans diflcrenls ernr- q.ie pour obéir au pape, ijui lui avait en
lai;es, comme lireul ceu\ qui passèrent en même lemps permis de s'en démellre qu ind
Espagne, où ils allèieiit d'abord dans ceux il le ju;;crait à pro|)os, rcuoiiça à celte di-
«le Nolre-Dan.c de Villacscua et de Notre- gui é, et lit élire en sa place Ferdinand Ya-
Dame de (>aslaunal, que les religieux de nez de Caceres, ijui ét.iit pour lors le seol
S.iint-Jéromc ne regardent jias sans i!oule prélie qui fût dans l'ordre : car, avant l.i
ciimir.e des couvents, puisqu'ils couvienueut c mlirmaloii du pape (iregoire \l, A'phonse
que le premier fut celui de Saiut-Harthélemy l'eclia, évéque de Jaen, av lil quilté l'F.spa-
de I.upiaua, (jui est encore aujourd'hui le p:ie pour aller en pèlerinage à Kume, m'i il
(liof de ccl ordre, et où le général :ait sa ré- iii une cession de tous ses biens eu f.iveur
s:ilence. du monaslèredeSaiui-îîarlhéleiny lii: l.upiau.i.
I>e pape firégoirc \1, ayant donc donne à Après cei;e élection, Ferdinand de (iuada-
ccs religieux de Sain'-Jero:iic les (onslilu- l.ijara alla fou 1er d'autres umnaslères. l,c
lions du couvent de Sainie M.irie du Sépul- premier fut celui d' Notr -Dauu' de la Syss,!.
cre, avec la règle de saint Augustin, leur pioche de l.i ville ih; Tolède ; cl, pendant
pris; rivil encore (]uel!e serait la forme et la qu'il l'.iisait Iravailier aux bâtiments, il se
louleur de li ur lialiillcmenl, qui consistait lit encore deux ou trois éliblisseineuts à
en une tunique de drap blanc, un scapulaire duil nJ -, F,iirral. l'.uccio el Sainte-.\iiiie de
coulci.r laniiée, un petit capure et un man- la Oliva; el, ne piiuv;iut y aller en personne,
leau de même couleur, le loul de couleur na- il envoya les pouvoirs nécessaires pour les
lurclle et non teinte, el d'un pii\ «il et incorporer a l'ordre en vertu de la bulle de
médiocre. Ce pontife ne se conleiiia p,is d'à- (Iregoire XI qui lui (lermetail do luuder
loir ainsi prescrit riiabilleineul de ces 1:011- cinj monastères de cel ordre,
veaux Frmites de Saint-JérOme, il le \oulut (les premiers lùiuiles venus d'Italie , qui,
encore donner de ses propres manu à ciuume nous .ivou-i dit, av.iieul passé dans
l'ierri -Ferdinand l'ccba et à Pierre de Home; le ri.'yaume de Valence, voyant que ceux qui
el, loiiimc il. furent les premiers roêlus de claieul restés eu (bastille avaient pris i.i vie
l'habit de la re.igion, iU rirent aussi Icspre- commune et qu'ils avaient fondé l'ordre de
iniers les \rpux solennels eiilri- les mains du .'*ain-Jérôuie, voulurent aussi les imiter eu
pape, i)ui ordonna de plus que l'église de quillaut la vie solil.iiie jour pieudi e la vie
Sainl-lf.irihelemy de Lupiana avec les crmi- c.iiohilique selon leurs mêmes nbsi rvaiiccs.
Ia::es qui cl.iieut aux environs serait éiigée Ils ru obtinrent aussi la permission du |>.^pc
I II mou.istète de cet ordre, doiit illit pi cmiir (iregoire XI, qu'Us f.ir.ni trouver a .\vi-
prieur Ferdinand l'echa, que nous appePe- gnon l'.in I.'ITV; cl, après av o:r fait les vn'u\
roiis doien.ivant Ferdinaïul de (îuailal.ij ir.i, s ilennels, ils soudèrent de leur rô'é à fou-
ay.int quitté le nom de sa f.imille jiour pren- der des niiiuaslères dans le rovauuic de Va-
dre Celui du li u de sa naissance, ce qui Iciice. l.e premier fut à t'iandia ; mais, ayant
s'est toujours |)ralique dans cel ordre, où les clé obliges peu de temps apièsde l'abaii-
nligieiiN, aussi bli II (|uc dans plusieurs cou- donner, ils lirent une autre lond.iliun à Ca-
gregal.ons, quiileiit leurs noms pour pren- tiniia. Icrdinaid V.inez, prieur «le Saiiil-
dre celui de qm Ique saint, ou du lieu où ils liai theicmy de l.upi.iiia, obliut, 1'.!!» l.'iyi), le
Miiil nés. Le pape voulut encore que l'on le- célèbre monastère de ISotic-Dame de (luada-
{ût dans ce miiii.isièe ;iul,iiil de religieux loii|ie dans rFslrama'liiie . qui, à cause de
que les revenus sei aienl siifiisanls pour les la s.iiiilele de ce lieu, où les pèlerins .ibor-
riitretenir, et (lue les prieurs ; ci aient Irien- dent de Ions cotés pour v révérer une imago
iiaiix. Il accunifl encore à l'i rd.n.iud deliii.!- miraiuleuse de l.i s.iiiiU; \'ier^;e, lient le m -
«ial'ipir.i la I ermissioii de fonder qu.itre ,iu- rond i.iiig d.ins cel oïdic, qu<>ii|u'ii v eu ail
lies inuiias'tcrcii du imiuie ordre de î^jiiil- d'.iiircs de plus am icunc fuidaliou.
£77
J!;r
jEn
578
§ II. Coiilinuation de l'origine et progrès
de l'ordre des Ermites de Saint-Jérôme.
Nous avons p.irlé dans ic parni^raphe pro-
cèdent d'un frère Vasco. lo seul que Si-
guenen nomme des lîrmiics venus d'Ilalie en
Espagne. A peine y ful-il arrivé, qu'il passa
en l'orlugal, où il avait pris naissanc, et il
fll sa deni'ure .ivee quelques autres d.ms un
ermitage nommé Penalonga; mais, voyant
que ses compagnons avaient embrasse en
Espagne la vie cénobitiquo, il en voulut faire
de même uvec ceux qui s'éiaient jo nls à lui
en Portugal. Il s'adressa pour cet efl'el à IJo-
niface IX, qui était r connu j) lur pape légi-
time en ce rojaume dans le temps du
schisme, et il en obtint l.i permission d'éri-
ger son ermitage de Penaiongacn monastère
de l'ordre de Saint-Jérôme sous la règle de
saint Augustin, et de jouir di s mêmes pri-
vilèges qui avaient été accordés par le pape
Grégoire XI à ceux de Castillc et deValcm e.
Dans le même temps, d'autres Ermites qui
demeuraient en Galalogne firent la mc.i:e
chose en l.'J93, avec la permission de l'anti-
pape Clément VII, qui y é^ait reconnu \to\xv
souverain pontife, et (jui en avait été ^olli-
cilé par la reine Yolande d'Aragon, qui lit
hâlir à ces relig eux lo monastère de Valhe-
liron. L'an 1300, cet ordre fut augmenté par
le don qui lui fat fait du monastère de Saint-
lilaise de Villaviciosa, qui apparlenaii à des
ciianoines ié;;aiiers qui, ne portant quj
le nom de réguliers et vivant dans un
gi and désordre, en furent chassés par l'ar-
clievcque de 'folide dom l'ierre Tenorio.
Gomme le Tiers Ordre de Saint-François
avait donné commencement à l'ordre de
Saint-Jérôme, il lui donna aussi un nouvel
accroissement, les religieux du monastère de
la Mejorada, qui étaient du Tiers Ordre de
Saint-l'rançois , ayant embrassé celui do
Saint Jérôme. Leur supérieur Ferdinand de
Villalobos avec deux antres religieux furent
trouver Ferdinand de Guadalajara, qui était
regardé comme premier fondateur de l'ordre
de Saint-Jérôme, pour recevoir de ses mains
Ihab t de son ordre ; et, apr.'S l'avoir reçu,
ils retournèrent à la Mejorada, où ils donnè-
rent le même habit à ceux qui le voulurent
recevoir, et obi gèrent d'en sortir ceux qui
s'opposaient à ce changement; ce qui arriva,
selon SigUL'uça, vers l'an 1397, ayant obtenu
la conQrmatioii de cette translation d'ordre
de l'autipaiie lienoît XIII, qui é ail reconnu
pour lors comme légitime en E-pagnc. Ainsi
les religieux du Tiers Ordre de Saint-Fran-
çois avaient des couvents longtemps avant
lan l'til, contre lesentiment du l'.Hermene-
gilde de Saint-Paul, de l'avi u même des his-
toriens de son ordre. Ferdinand de Guada-
lajara eut encore part à l'ét iblissenuiii d'un
autre monastère qui se fit la même au ée à
Talavera, qui est le dernier ijui se lit de sou
vivant.
Il avait é:é fait prieur du couvent de Notre-
Dame de la Sysla après sa fondation, et il
exerça cet emploi pendant vin^t-den\ ans,
Son humilité clait si grande que, quoiqu'il
fut très-versé dans la langue laline et dans
la science de l'Erriiure .<;ainte, il ne voulut
jamais prendre les ordres sarrés, quelques
instaures qu'on lui en fil. Ses austérités
étaient liôs-grandes, il ne dormait jamais
qu'à terre sur un jieu de; paille, il portait
continuellement la h ire et le < ilice, et ses
abstinences et ses jeûnes étaient presfiuu
continuels. Sa sicur .Mayor Ferdiiiande l'e-
clia, qui avait épousé Arias Gonsalve de
\'old(s, seigneur de A'elena, éiaul veuve,
prit la ré>olutioii d'exéiuler le dcssem
([u'elle avait pris depuis longtemps de se
consacrer eiilièremenl au servire de Dieu.
Elle avait une sin^iulièrc dévoiion à Notre-
Dame de Guadaloupc ; c'est pourquoi elle
voulut se retirer dans cette sainte maison,
pour y servir Dieu eu (|ualité d'oblate, et y
iinir ses jours. Elle vint pour cet effet trou-
ver son frère à Sotrc-Dame de la SNSia, qui
non-seulement la fortiOa dans son dessein,
mais voulut encore l'imiter. Ce fut pour lors
qu'il se démit de son office de prieur de ce
monastère pour aller finir au^si ses jours
dans celui de Notre-Dame de (inadaloupe,
dans la compagnie de Fer inand Yaiiez, son
ancien ami, qui en était prieur. Il y fut reçu
avec sa sœur, et y demeura eiicore quelques
années. Nonobstant ses grandes inlirmilés et
son grand âge, il et.il toujours le premier à
tous les exercices réguliers, tant de jour quo
de nuit ; et ce fut dans ces saints exereieej
qu'il termina sa \ie par une mort glorieuse
l'an 1402. Sa sœur le suivit peu de lemps
après, et fut enterrée avec lui revêtue de
l'habit de l'ordre de Saint-Jérome, comme
oblale et comme principale bienfaitrice,
ayant beaucoup cont.ibué à léJifice du cou-
vent do Sainl-îjarthélemy de Lupiana.
Après la mort de Ferdinand de Guadala-
jara , l'ordre fit encore de nouveaux établis-
sements; de sorte que, l'an 1415, lorsque l'on
tint le premier chapitre général , il y avait
vingt-cinq m jnastères tant en Espagnequ'en
Portugal. Jusque-là ils avaient toujours été
soumis à la juridiction des évoques des
lieux où les monastères étaient situés; et
s'ils avaient eu recours quelquefois au prieur
de Saint-Barthélémy de Lupiana, ce n'était
pas pour lui obéir en qualité de supérieur,
mais seulement pour le i onsulicr et prendre
ses avis, reconnaissant ce monastère comme
le premier de l'ordre. Ils n'avaient point en-
core tenu d'assemblées générales , les cou-
vents avaient élu leurs sujériears, et les
coutumes et les observances commençaient
déjà à être différentes en {(uelques-uns de
ces monastères : c'est pourquoi, pour main-
tenir u e uniformité et une même obser-
vance partout, ils priienl la résoluiion da
s'unir tous ensemble sous un seul chef, et
de f.ire des assemblées générales, où l'un
ferait des règlements pour le mainlien de la
discipline régulière à l'exemple des autres
congrégations régulières. Le schisme liiv-
jait encore l'Eglise, on y » oyait trois papes,
deux faux et un véritable : les deux faux
étaient Grégoire XII et lienoii Xlll, et le vé-
ritable était Jean XXIll ; mais les royaumes
?^''9 i.ir.TioNN.vira: df.s or.itUKS l'.F.ur.ir.ix. 5rc
iJe fn^lillc el d Ar.ipon obpissnnt .-^ Hennîl, l'aulre ilc ces rojauiiics, où ils ont de ririu-s
Io>i ri'Ii;;icii\ di' S.iiiit-.U'ri'imc ciirciil recours cl suporbcs nionasliTos. Ci-liii (lui esl le plus
a lui peur <i|)liMiir l'union qu'ils souliiilaionl, fréi]uenl6 pour la dovoiion cl iiui licnl le.
el la poruiission d'iliie un général. Cul an- premier ran;; d;ins l'ordre après celui de
lip.ipp, par sa huile du IcS oclobre lill, don- Sainl-narlliéiemy de Lupiani, esl Nolre-
nee à Sa nl-.Ma(liieu au dincô-c de Torlose, Daine de Guadaloup •, qui ne le cèd,; en rii-n
urdoiMi'i (jue tous les [iricurs cl les procii- aux aulres pour les rirlicsses. I,a inaisun
rnirs ilcs monastères s'assernbleraienl à l'a- esl si grande el si spacieuse, que l'iiilippc II,
venir dans un lieu convenalde pour Icnir le y passant l'an 15G0 pour lier à la guerre de
rbaiiiire {.'éner.il ; mais que pjur la premiôrc Grenade avec rarciiidue l!odol|Wie , qui fui
fois il> le tiendraient au nsonastère de Notre- eisuitc cm|.ereur, cl l'arcliiduc lirnesl, ces
Drime ^ie (itiadalonijc , donnant p luvnii' an princes y demeurèrent a\ec toute leur cour
(iTiCur de ce moriaslère d'envoyer des Icllris pendant vingt jours, sans une les religieux,
circniaires au\ aulres prieurs pDur lenr in- qui sont au nombre de six vingts, en lussent
diquer Icj'urque se licndrail celle asseii- incommodés. Le raé:i:e rui lit don à l'au'.el
Idée générale, a latiuelle dcu\ religicu\ de de la sainte Vierge d'une lampe d'or. î,a sa-
l'ordre des Cbartreux ileva enl présider p mr crislic de ce monaslè.e esl une des plus li-
ccllc fois-!i"( senlemenl. Il e\.eiiipia en mèaie elles lic l'iîuropc. Les aumônes (lu'uii y re-
teinps tons les prieurs et les nionaslère> de çoil sont Iràs-consiiléraldes, el c'est en par-
cet ordre de la juridiction des évèques. lie ce quiserlà rcnticlien de ce grand iioin-
iiii leriu de celle bu le, i!s l.nr.eni leur bre de religieux, d'un se. ninaiic de qu ranle
chapitre a Nolre-Danie de (îuadalonpe le jeunes clercs, à qui Ton apprend les lin ua-
'2() juillet l'*15, où se trouvèrent les prieurs niiés e les exercices de la vie clé.ieale; de
et les procureurs di- vingl-ciiui nionasicres, deux liôpiiaux joignant le inoiust re, l'un
qui élurent pour premier général le 1'. Ui- pour les hommes, l'autre pour l.s feinines,
(lace (le Alcaron, preur (le Saint-Barlliélemy et d'un grand nombre de domesliqu>'S el
(le Lep ana, etdejui* ce lemis-là les pr eurs d'ouvriers de toutes sortes de méùers. L'Iii^-
de le niona tère ont toujour> élé généraux, pital des hommes csi servi par plus de qua-
lls y l'ont leur résidence, et, s'ils en sortent rante serviteurs, el ce'.ui des femmes par
(lueliu.fo^s, ils ne peuvent i-as s'en éloigner des Oblates qui -0111 en pan il nombre ; cl,
plu^decill(l lieues. Ils tinrent le second clia- sans compter le grand nonilirc de pèlerins,
pilrc général en liKi, le lioisième en 1418: ()Ui y arri.eni queliiuefois par jour jusqu'.ai
dans la suite Us les «ml tenus lous les trois comlire de deux m:lie, el qui sont reçus
ans. Co 1 me en 14-17 l'antipape lienoîl Xill pendanl trois jo iis dans ce couvent, il noue-
;ivail élé déposé pour la seconde fus dans le rit tous les jours plus de sept cen;s person-
concile de (Joiisiauce, el (jue Mariin V v l'ut nés. Les aunicmes qu on distribue aux pau-
olu et reconnu pour siuveiaiu poniifi' par vres à la porte sont considérables. On y dis-
toule l.i cliretii'iilé , ils firent approuver par Iribue |iar an plus de diux cents nn>utons ,
ce nio3en tout ce (jne l'antipape iSeiioîl avait oulre le pa nquc l'on y donne tous les jours,
lait; ce qui lut conlii nié linéiques années et un giand nombre de souliers : l'on dit que
après [lar le pape lunocent VIII. le 8 septembre, fêle de la Nativité de la
Le papi' Nicolas V eut quelque de-sein, sainte Vierge, on en distribue ordinaircme l
l'an IV'iTde réunir en un seul corps tons les jusqu'à huit cents paires. Dn y fait des le-
dilTeienls ordres religieux qui portaient le tons (Mibliques de médecine et de chirurgie,
tioin de S.iinl-Jcri'nne, tant celui des Jésua- Ce monastère a élé quclquefo s d'un grand
les de Sai .t-Jértime [Voyez Jésuates), que secours aux rois d'Lspagne, auxquels il a
ceux dont nous parleioiis dans la suite. Il lit souvent donné de grosses sommes pour sub-
jiour ce sujet défense aux religieux de Saint- venir aux besoins de riiiat.
Jérôme d'Espagne d'y tenir leur clKipitre gé- Sainl-Laurent de I Kscurial, célèbre pour
neral, cl leur ordonna de venir à Home, où être la sépulture des rois d'Espagne, n'a pas
il convoqua ce ch pitre pour L- jour de l.i lint de revenu que celui de Nolre-Daïue de
l'en'et(jle de l'an l'»'i-S. .Mais tous les monas- (îuadaloupe, nuis il le surpasse par la m i-
lèrcs d'Espagne ne députèrent que douze re- gnilicence de ses bâtimenls, qui furent coni-
ligieux pour laire en leur nom loul ce qu'ils mencés l'an lao7 par l'hilippe II. il qui, jus-
trouveraienl de plu> à pro|)os , bur recoin- qu'à sa m irt . (jui arriva l'an Ij'JJ, y cin-
iiiand.iiit sur lonles t lio^es d'empêcher celte ploya cini| millions deux ciiit soix.inle-dix
niiion. En elT'l , i s lireiil si bien parleurs mil. e ducats, tant en bâtimenls qu'en pein-
rem niranci's, que le pape laissa les cli oses turcs el sculptures, el plus d'un iiilllon en
«laiii Tel, il où elles élaieni. Sous le règne de oriienienls d'I'glise. IMiilippe l\ fit fiire la
doiii LiiiiianucI , roi de t'ortug.l, les reli- (h.ipelle des lomlieanx, nommée le l'.in-
gicnx de ci; rojaume se séparèrent des \: - lliéon, à cause (jUe sa sli uclure esl prise sur
pagnols, et lo. nièrent une congrég.ilion q il le desein du l'anlbcon de Home, ;',pp.dé aii-
claii gouveMiéepar un p.ovimial ; inai>riii- Ireineiil Nolrc-Dime de la llotoiub'. l'oiii le
lippi! Il, mi (l'Espagne ri de Portugal, solll- delans de cet e chapelle rst de m.irbre noir,
cil. 1 auprès du pape ('.lenicni \lll la réuni >n à la réserve de qnelque.i oinrinents de jaspe,
(le Ces deux naiions; cec)iie le pape accord. i de marbre ronge cl de bronze doré. L'église
(an lo'Ji), ordonnant nn'il n'y aurait qu'un est d'une belle slrncluic, ornée de qiianlilc
lîiéine -général pour les Espagnols el les l'or- de ligures de bron/e doré d'un travail admi-
tuyais. Ils soui Irùs-puisïanls d.iiis l'un cl rable; l'aulel, qui fait l'un des plus beaux
■;si iMî J' !"« r.<!-2
ornenicnls de ci lie égliso, est cslimé un (iiielijiio^-uiis, si\ lioissenns di- Pjiris, oA
tnilli n; il est élevé de seize degrés nudes- selon d';iiitres, un boisseau el demi, re qui
si:s du pavé de l'ciilise ; CCS degrés sont de csl plus vraisembl.ihle. l.orsinio c'est d;iiis
porphyie, cl l'autel est embelli d.» quatre des année-- de tlicrlé.oiiewdoniie mille,et on
ran"S de rolonncs de jaspe; l'on voit dans lu en a vu lionnir jusqu'.i quinze ceiils. I.ejour
l.ibernaele, (pu ist esliuié plus de deux mil- de Noël un en donne cinqu inlemesurrs à dfs
lions, briller l'or de Idutes p.irts aus-i bien pauvres lion'.cux ; le jour de l'àques, qualio
que les pierreries, qui soni si transparentes, moutons; le prieur peut doiin>'r à qui bon
qu'on voit au travers le saint sacrement lui semlile, ponivii que ce sot à des pcrsou-
qui repose dans un vase d'agale. Le dessus ncs qui sont dans la nécessité, trente raesu-
de la cusiodc où l'on tient le saint sarrcmei'.t res de blé, six mesures d'buile, et douze
est euricbi d'une émeraude de la (grosseur l'ucals en .irirenl; et, lorsiju' il y a iiuelpie
(l'unoMiICt d'un prix inestimable. La eus- p.iiivre malade, on lui envi.ie cliai]ue joui"
Iode est de la bauieur d'un homme, el de te don! il a besoin.
rcpniss''ur de deux brasses : elle c^t fai e Le couvent de Madrid distribue rii\ p.Tu-
d'une |iicrre p'us riche que le porphyre, es- vres par mois douze mille maravéïlis, cl uiia
limée cinq cent mille écus. La sacristie esl grande (pi-inlilé de pa n Ions les jours, outre
l'une d. s plus riches de l'Iîurope; l'on y ce qui soit de la table des religieux ; ildonne
voit une iolini'.é d'ornements en broderio au prieur vingt ducats pour distribuer aux
d'oret deperlcs dont la plupart lint été donnés pauvres, comme ille juge à propos, et c-
par leroi I liilipiio SV, aussi bien que des ca'.i- prieur jouit de(|uanlilé <le beaux dr-its. Il
ces d'un grand prix, dis vaseietdes chaude- est mailre avec son couveat de l'hopital de
liers d'oretd'argenl. A côté de ce le sarrislie il S.iintc-daliierne t/e lus I) iii:idijs. l\ t'.iitdis-
y a une chambre oùl'on voit deux vases: l'un Iribiier par an, à six pai;vres de la parusse
est d'un seul saphir enrichi d • perles et de de Saint André, douze mesures de froment
pierres précieuses , au iiiilieu desquelles et quairo mille maravéïlis. Il nomme co;i-
iirilîe un gros rubis ; l'autre est de fonte en- joinîemi-nl avec un gouverneur de poliee
rii'hi aussi de piei-rerics, qu'on dl avoir été (juclques filles qui doiveul receior des dots
lait tie la propre main de l'empereur ?,] im- pourse marier, selon l'inlenlion de <]uclqiies
milien !î. Ces deux vases servent à porter h foiuia'eurs qui lui en ont doun^ la no m-
faint sacrement. Généra'ement tout ce qui nation.
sert à la décoration et au service de l'église Le priee.r deSéville jouit aussi ile plusieurs
a ciûlé de grosses sommes ; car les formes oa droits : il est maître lonj >iiite iCiil avec le
stalles du chœur où s'as-eyent les religieux pri.'ur de la t-li irlr. use do 1 hôp l.il Ju car-
sout d'un b.iis venu des Indes, et ont coûté dina! dom Jaui Cerv ;nlès, et de cilui des
I lus de ving -quatre mille écus, el l'archi- lilessés, fonilé p.ir la ma; qui»e de Tarifa et
lecture drs orgues, vingt-sept mille ducats. Ii duch s-.o de Alcala. li est proleciiurde
II y a (tans le chœur deux cent seize livres l'université de celte ville; il donne de qua-
poiir l'usa.'e des religieux, qui onl coulé Ire ans en quatre ans une dot de treize cents
tliiar. nte-cinq mille écus, el l'armoire où ou ducats pour une pamre demoiselle qui veut
les enferme sept mille écus. Ce monastère, y .se faire religieuse dms le mona-lere do
compris le quartier du loi el celui des éco- Saint-Clément ou de S linte-Paule. Il dislri-
licrs, contient dix-sept cloîtres, vingt-deux bue tous les ans d'autres dois de quatre
cours on/c mille fenèlres, huit cents co- cents réaies chacune , et cinquante milte
lunnes, cl plus do cent vingt religieux, qui niaravédis pour les pauvres, les captifs cl
onl plus ('e quarante mille écus de revenu, les prisonniers; douze mil e maravé .is à de
Il y a toujours jour el nuit deux religieux pauvres orphelins qui sont dans la iiéces-
devant le saint sacrement ; ils cntrelienneut sité; el le jeudi saint il lave le. pieds à
un séniinaiie décent quatre-vingts jeunes dix neuf pauvres, auxiiuels 1 donne des ha-
eeclésia-tiques, aux(juels ils apprennent lis bits et à dîner. Le couvent, outre irs aii-
humanilés et la philosophie, el ces clercs inôncs qu'il l'ait à toute heure, donne au-si à
assistent avec eux au chaur en surplis. Ou mangera dix-neuf pauvres dans un rélVc-
voit. aussi dans ce monastère une riche bi- loire desliné pour ce sujcl. Il donne encore
bliotbèque qui contenait plus de cent mille tous b's ans au môme prieur cinquante me-
volumes, tant manuscrits qu'imprimés, mais sures de fromcui. douze mesures d'huil.»,
une p;:rtie de celle bibliothèque fut cousu- chaque mesure d'huile pesant vingt-iinq
niée par un incindie l'an 1(371. livres, et douze mille niaravédis pour dis-
Le couvent de Saial-Jérôuic de Juste, que Iribuer aux pauvres selon qu'il le juge à pni-
pliisieurs de nos écrivains français appellriit pos. Les aulres louvenlsde cet ordre eu
Saial-.!usl, a été célèbre à cause que rem|)e- Espagn- foula ssi de grandes auniôues.
reur Charles-tjuint le choisit pour le lieu de Ceux ds l'ortugaluesoi.li)asmoius cousidé-
sa retraite, lorsqu'ilcut ce :é ses Elalsd'Alle- râbles. Celui de Belcm, sépulture ord nairo
magne à l'erdinrind, son frère, el qu'il eut des rois de ce roy.iume, esl le plus < élèbre.
rea;is les aulres à Philippe II, son fils, le 23 II fut fondé par le roi dom iiiuimanuel, laa
octobre 1355, à Î5ruxclies. L'on peut juger de IW". L'église est bâtie en forme do croi'c
ses grands revenus par les aumônes qu'il fait sur une longueur et largeur Irès-cousidérn-
aux pauvres des environs ; car oa distribue b.'es. E le reçoit la clarté du sulcll parbeass-
par an à la porte du couvent six cents mcsu- coup de fenêtres, ce qui est contraire aux
res de frouiciit, chaque mesure valant, selon autres églises qu'on bàlit en Tortugal , un
,•;,;,•, lUCilONNAlllK ItKS Dl'.DKIvS UKI.lGll l\. .'ISi
l'on en f.iil fo:l peu, iilin d'olic nuiiiis ex- I! , en Rspn-^nc, les .ioroiij min s furcnl aussi
posé à l.'i chnleur. C'-lle éj-lise reroil une ilipuiés par le nonce .ipololi jne poiirla rii-
ollramlo bien singulière, car à cliJKiue jour I Tmcilesl'rcoionlrés, cl le preinier hôpital iiuc
«lui >e passe sans que le so'ii! paraisse dans fonda sainl Jean de Dieu fui des aumônes des
la »illo de Lisbonne, la \ille de Toniar esl ri'li|;icux jéron3niiles, (jui oui eu aussi parmi
oldiu'éo d'envoyer une brebis à la reine, qui, eux plusieurs peisonnes distinguées par b ur
par un pieux saeriiice, ren\oic à ré;;lise de science el par les dii;niles qu'elles onl oe-
liideni {|i. Le maîlre aulcl esl au bout de rupécs; el, sans reinonler aux temps les plus
l'enronceiiienl de ^e^lise, dans une grande reculés, Anloiiic Augustin éla.l évêque il Al-
(bapelle ijui lienl lion de chœur. A i- aquc barazin en IGOj ; Ballazar de los Heyes,
(Ole de l'aulel il y a dans le gros mur trois évé<iue d'Oi enee en IGjS ; .M inuel de Naci-
l'iifoucemenls ou pcliies retrailes donl ledes- mienlo, évèque de S. Thomé ;;ux Indes orien-
sns esl tourné en cinlre, el sous cliaque laies eu 1()T8 ; et, l'an 17(),'j, Jean de Saint -
cintre il j a un tombeau de niarbrf- blanr el Islevan, prieur de l'ICscurial, fui nominé à
noir all.iclié contre la muraille. Les loui- l'évéché de Mondonédo par le roi d'Kspagm-
beaux sont soutenus par des éléphants de Philippe V. Les religieux de Saiiil-Jérômo
marbre noir, cl sont séparés le- uns de-, au- éiaient gouverneurs de l'ile de Saiiit-Dn-
Ires par de petites C(donnes. A cliai|uc ex- mingue, lorsuuc Coriez lit la conquête du
Irémité de la traverse ou cioisée de l'église, Mexique {Hist. du Mcjcii/iic, liv. m, ch. 1).
il V a aussi une représentation de l mibeaux Ces ieli;;ieux, comme noui avons dit,
laite de meiuiisirieet couverled'uu dais noir élaieiil autrefois habllé'i de Idanc avec un
cl blanc, (jue l'on ne change que lorsqu'on S('apulairect une chape de couleur tannée. Ils
ciitirrc un roi ou iiuebju'un delà mai>on onl conscr\é la robe blauilu', mais ils ont
royale. Lo tour du c'oîlrc de ce monastère esl pris un scaiiulaire noir fort élro l avec un
composé d'un double portique l'un au-Jcs- ca]iuce, dont la mozeltee-t ronde pir-ilevanl
sus de l'autre ; ce portique environne un el en |)oinle par derrière. LorS(in"ils sorlcnl
parterre coupé par des canaux d'eau ^i^e, ils mettenl une chapi^ aussi noire, iraîuanl
où l'on nourrit quantité de poisso:is. jusqu'à terre et lort pliisee, el leur robe est
Les nligieux jeronymites, lanlen Kspagnc ceinte d'une ceinture de cuirl'2]. Quant à
qu'en Portugal, ont toujours été en si ^;rande lenrs observances, ils se lèvent a minuitpour
estime, que l'on s'est servi d'eux p»ur la ré- dire malfncs, cl ont tons les jours une heure
fornie de plusieurs rongi égalions religieu- d'oraison, demi-heure avant vêpres et autant
se-, et de plusieurs ordres militaires. Le P. après les con)pl:es. Outre les jeûnes ordou-
Lonp d'Olmédo, fondateur des .Moines de nés par l'i'^glise, ils jeûnent pemlanl l'.ivenl
Saint Jérôme, dont nous parlerons dans la entier, le lundi el le m.irli d'après la (Juin-
suite, el qui a été troisième général des Lr- (luagésime, tous les vendredis de l'année, et
mite» de Saint-Jérôme enLs|iagne, dressa les même li^ jour de Noél , s'il arrive à pareil
1 remiers règleiaen's de la congrégaliou des jour; les trois joursdes Kogalions.avec celte
ihauoincs séculiers de Saint-Jean l'Evangé- dilTérence que le lundi iis peuvent manger
liste en Portugal; c'est pourquoi le pape des (rui's, du lait, du fromage, el le mardi ils
Pic II, l'an I 'i(Jl, leurcommuniqua les privi- doivent s'en abstenir. Ils jeûnent aussi les
lége» dont jouissaient les religieux de Saint- veilles des fêles de la Nativité et de la l'uri-
Jerôme dans le xm* siècle. Le P. Hector fication de la s.iintc \ ierge et de saint Jé-
Piiito,qui était aussi religieux de Sainl-Jé- rôme. Le vendredi sainl ils jiûnenl au pain
rônie, fut fait visiteur de cette congrégation, el à l'eau, cl ils ne mangent jain.iisd \i inde
et y aiiporla queUiue réforme. Sous le règne le mercredi, même hors le moiias;ére. Tons
des rois catholique s Ferdinand, et Isabelle les irois an- ils tiennent leur chajjilre gené-
en F.spague, I s ibevaliers et les chanoiors rai le troisième dimanihe d'ajjrès Pà|ues.
de Saint-Jac lues de l'Epco furent réformes 'l'uns les prieurs s'y trouvent avec un dCiUité
par le P. Jean de Suria. Jean II, roi de de clia(iue mason, et le général el b s autres
l'orliîgal, cl les députés apostoliques pour la sn|iérieurs dcmandenl d'être absous de leurs
réforme deschanoines réguliers en ce royau- o^liees. Ils onl des donnés et desdoimees, dont
me, se servirent pour cela du P. Alphonse l'Iiabil consi.-te en une lobe blanche, avec
de Léon, qui était pour lois frère con\ers un manie.iu tanné sans scapulaire.
d.iiis l'ordre de Saint-Jèrôine, mais (jui dans l'oyc: Jose|)h de Siguenea el Lraïuisco de
le monde était dicteur, el avait rempli pilu- los Sanios, // si. de lu ordcn dr S. Gcroiiimo.
sieuis emplois distingués. Souble roi Jean lit, Ilermcnegildo de S. P.iblo, Orii/cn y Conti-
(11 Portugal, les ehcvalieis de l'or. Ire de immion de il lusliUilu y lelig. (ierunimiana.
Christ leçurenl pour réforinatenr aumonas- Co/islilulioues ij ixlrnviii/iinlcs de la ordcn
1ère de 'i'omar le P. Antoine Monni/. , pro- dcl (/lurioso l'adr. S. (icroiiynui. Sil\csl.
\in(ial des Jéronjniilesde Poituual. Sous le iMaurol. Mar. Oceitii. di lull.gl. rcliy., lib. lu.
mi'mc roi, lil lise de Barros réforma les iha- l'iel. (irescenz. l'iesid liumano.ltb. i. Ascag.
noines régn ier> de la congrégation de l'.o- Tainliur., de Jur. ALInil. mm. Il, Disp. -i'i-.
niinl)re,cts'aci|nilta si bien de cet emploi, que iju ift. \, iium. 'M. Ilei inant, Uist. des oiilie»
ce prince lui lit encore donner la commiss. on rcUyiCux; c\. le P. lîouanni , C'o/d/oy. Oi'd.
pour réformer les l'riuitaire.-.. Sous Philij)pe rd (jios.parl. i.
(I) Hinincss. Ma'cl. /«.'j.ri/if. île l'niiivert, ton). IV, (2) Vny., ù l.i lin du vul., ii'^ I 1 1 el U5.
';s3
JF.R
§ ni. Des rirlifiiciifrs de l'odre de S int -
Jérôme, avec la vie de f^iar.e Gardas, leur
fondatrice.
Les religiruscs (lo l'ordre Je S;iiinl-.Iérôma
^lanl soumises aux religieux lîrii.iles de
S.iinl-Jcrôme en Espagne . où elles onl j)r,s
naissance, et n'cianl point sorties de ce
royaume, nous parlerons d'elles dnns ce i)a-
r.igraphe avant q ede passer en Italie, où il
V a eu Iroi' différents ordres qui onl porté
ie nom de Saint-Jérôme, et dont il eu reste
encore deux. Crs ri'ligieuscs reroniiais^ent
pour leur fondatrice une sainte fille nonnv.ée
M.iiie darcias, qui eut pour père doni Did.i-
ce G.ircia'- de Toi: de, et pour mère Gonslanco
(le Tolède. N'étant encore qu'enfant, t/l!e l'ai-
.sait déjà [laraître tant d'amour pour Dieu,
(jne SCS paients d'un commun consentement
la lui offrirent, en faisant vœu de la consa-
crer à son service. Ils eurent un si grand
soin di; l'entretenir dans celte dévotion, (jui
lui était tomme naturelle, qu'ayant atteint
V;'.-;e de raison, et sachant le vœu que ses
iiartnls avaient fait, et qui aurait été nul
siins son consentement, elle le renouvela et
jiril la résolution de demeurer toujours vier-
ge, et de n';ivoir jamais d'autre époux que
Jésus-Christ. Klle n'avait que du mépris pour
le monde. Li's honneurs, les richesses, les
pompes, les vanités, les divcrlissenienis et
tout ce que les personnes de son sexe rccher-
chrnt avec tant d'empressement, n'étaient
pour elle que de vains objets qui lui faisaient
au contraire désirer avec plus d'empresse-
ment 1.1 relraiie ei la solitude. Et, pour évi-
ter ces objets fiitals qui causent la perte de
tant de filles mond.iiiies, elle se ntira dans
un monas ère appelé Saint-Paul de lus Duea-
iias, où sa soeur était prieure, et où II y avait
lie.iucoup de religieuses d'une éminenle ver-
tu. Sj sœur crut qu'elle n'y venait que pour
en au-;iiieiiler le nombre; mais Dieu, (ini
avait d'autres desseins sur cetlo sainte fiile,
ne ])erniil pas qu'elle prît l'habil dans ce
monastère, elle y apprit seulement toutes les
observances régulières qu'elle fit praliqu r
dans 1,1 suite ù d'autres saintes vierges, et
elle les pr.iliqua da^is ce monasière avec tant
d'exactitude et tant d'édification, que sa ré-
piil.ttion ne se répandit pas seulement dans
la ville de Tolède, mais qu'elle pénétra en-
Ciire dans le mimastère iie Sainle-Ciaire da
'J'orilesillas, d'où les religieuses lui écrivirent
pour la prier de vouloir embrasser leur règle,
il les venir gouverner en qualité de supé-
rieure. Mais t'était a sez d,^ lui proposer la
suj)crii)rilé pour qu'elle ne consentît pas au
uéjirde ces leligieu^es.
Après avoir demeuré quehiues années à
Sainl-l'aul de lus Ùuennas , elle retourna
dans la maison de ses parents, où à peine
fui-elle arrivée, qu'une sainte veuve iioin-
niée MayorGomez se joignit à elle pour i)ra-
liquer ensemble plusieurs œuvres de piété.
Tour montr< r le mépris qu'elles fais. lient du
mimde, elles sortaient tous les jours ayant
chacune une besace sur l'épaule, pour aller
de porte en porte par la ville demander l'au-
DlCTIONiVAlRE DES OrOIU'S !i Kl.îr. iki; X .
.IRU 886
inône pour les p.'iiivroi prisonniers et lo'i
pauvres houleux ; et l.>rsijue leurs besaces
él.iieiit pleines de p.iin, elles allaient le dis-
tribuer aux pauvies prisonniers et à ceux
qu'elles savaient cire dans la nécessité. Celte
manière de vivre déplut for; à ses parents, ce
qui lui allira quelques reproches. Mais cela
ne l'empéclia p.is de coniinuer: elle allait
même les dimanches et les fèies dans l'église
c.itliédrale, et y demeurait pendant tout le
jour, en dcmamJant l'aumône pour les mômes
pauvres, et comme ses parents virent que
leurs remontrances étaient inutiles, touchés
de l'esprit de Dieu, ils laissèrent leur fille
dans la liberté de continuer celte œuvre cha-
ritable, et ils tirèienl dans la suite une gloire
de ce qu'ils avaient d'aburd regardé comme
un affront.
Dans le même temps, le roi dom Pierre vint
A Tolède, et comme ce prince n'était pas
moins impudique que cruel, Marie Garcias .
qui était aussi belle qu'elle était vertueuse
et chas e, voulant éviter les amours déshon-
nêtes du roi, qui avait jeté les yeux sur elle
pour contenter ses désirs, se relira secrète-
ment avec sa comiiagne à Talavera dans i;n
bien qui apparlenait à ses parents. Elles y
demeurèrent quelques jours, mais elles n'y
lurent pas si bien cachées que le roi n'en eût
av;s. Il y envoya des gens pour les enlever, et
elles évilèrcnl ses poursuites, étant sorties de
Talavera par un chemin délourné (]ui les c in-
duis t dans l'ermitage de la Sysia, où elles de-
iiieurèreal encore tachées jus(iu'à ce que le
roi eût quitté la ville de Tolède; et ainsi eibs
s'échappèrent de ses mains. Elles trouvèrent
cette solitude si agréable, qu'elles y firent un
plus lung séjour; elles tâchèrent d'imiler dans
«e lieu les anciens solitaires d.: l'Egypte, et
elles y restèrent jusqu'à la mort du roi dom
Pierre, qai rassura une infinité d'âmes chas-
tes qui fuyaient ses impudicilés.
Ces deux saintes compagnes ayant su que
pendant leur absence il s'était formé à TolèJe
une coiigrégalion de filles pieuses qui étaient
en grande réputation, et qui étaient gouver-
nées par une supérieure (|ui menait une trcs-
siinte vie, elles prirent l.i resoluiion d'en-
irer dans cette eommunaulé, c.les y furent
reçues, et y vécurent quelque leiiips dans
les exercices de I humilité e; de l'obéissance;
mais la su|)éricure, (|ui était runique appui
et le soutien de celle communauié naissante,
et les pire il mère de Marie G.Hcias étant
morts en même lemps, cette sainte fille, qui
avait hérité des biens coiisider.ibles, acheta
une grande maison dans Tolède, où elle alla
demeurer avec sa couipag .e Mayor (jomez
et quelques autres filles de celle première
communauté, qui avait été dissipée par la
mort de la supérieure, et elles prirent la réso-
lution de n'en point sortir de leur vie. Une
dame de la même ville, qui depuis quelques
jours avait auhsi assemblé dans sa maison
sept ou huit personnes de son sexe, avec
k'ïqueiles elle vivait d.ins une gr.inde ré-
tollei lion, ayant appris le nouvel ctalilisse-
ment de .Marie Gartias, entra dans sa com-
iiuin.iDle avec ses cump.ignes : ainsi celle
II. li>
SS7 DICTIONNAIRK DF.S
fiiiii.-nuiiniili' il.\in( J'.ibord .nssoz consiJcra-
lilr, ri elles |ir.ilinUL«rfnt los nbs rvaiic-s rc-
pulières. Pour élre cntièrcin'-nl (liOinguôcs
lies so(Miliore«, elles prirent un h.ibit rcli-
u'ieux lil que le porlaicnl les religieux de
Saint-Jérôme, savoir : une robe lilanchecl un
scapulnirc de couleur lanuce (1), après ijuoi
elles élurent d'un commun consentement
pour supérieure Marie Garcias qui n'accep^i
cette chaifîc qu'avec beaucoup de difli-
rulté. Tel fut lo commencement du célèbre
monastère de Saint-l'aul de Tolè le, qui est
le premier des religieuses jéronymites, cl où
elles ont pris naissance.
Pierre-Ferdinand Pécha ou deGuadalajara
é'anl venu presque dans le même temps pour
fondir le seco:iil monastère de son ordre à
Notre-Dame de la Sysla, où Marie darcias et
sa compagne, MayorGomcz, avaie;'.tdemeui6
quelque temps, elles se soumirent à lui
comme à leur supérieur, et elles ne faisaient
rien q<ie par ses avis et ses conseils, et dès
lors elles t.kbèicnt d'imiter les religieux de
>olrc-I)ami' de la ^\ s'a dans toutes leurs ob-
siTvanciS. Klles ne furent néanmoins vérita-
lilemcnl religieuses et ne firent des vœux
solennels que longtemps après, l'in clTet, ce
inonascrc a été appelé pm !ant un temps
onsidérable Saint-Paul des Béates de Marie
Ciarcias, S. Publo (h las riedtas de Maria
Gi.rcia , le nom de béate signifiant une fem-
me ou liile dcYole qui porte un habit de re-
ligieuse.
Cette communauté s'augmenta de jour en
jour et devint considérable, plusieuci per-
sonnes y étant entrées, attirées par la sain-
telé de vie de i.i fondatrice, qui éla t l.i pre-
mière dans toutes les occasions qui se | ré-
srnt:;icDt pour pr;>.liqu: r quelque vertu , et
surtout celle de l'iinmilité. Elles récitèrent le
grand offiie par ordre de FcrJinan I de (îua-
(lalajara, prieur d • la Sysla. Kiles se l.vaient
à minuit pour dire mal:nes, aiircs liSjuelles
Marie île (îarfias ne retournait point à sa
<h:imbre, emplojant le reste de la nuit en
orisoii, coutume qu'elle a mémo pratiquée
lians de grandes niriirnitcs où r,;v,iienl ré-
duite sui l<i (iu de ses jours ses grandes aus-
tcrilés cl ses moriilications ; et lorsqu'.'llo
prenait un peu de rr pos, ce n'était que sur la
lirrenue. Klle ne laissa pas malgré ses aus-
térité» de parvenir à un âge fm l avancé ; et,
voyant sa fin approcher, rllo fit un excellent
d scours ;\ ses sœurs pour les exhorter à la
petsévérance. Elle p.édil à plusieurs ce qui
devait leur arriver, el, après avoir reru les
s.icrcmrnls de l'Egide, elle renlil son .'imc
à Dieu le 10 février IViO. Kllc avait ordonne
que son corps fût (>orté au monastère de
^olrc-Damc de la Sysla, [larcc quelles n'a-
vaie;it pas encore d'église ; ses parents vou-
1, lient iiéaniiiojns qu'elle lui enterrée dans
la grande église; m iis les religieuses, voulant
e\éciiter IC'' dernières volontés de leur Mère,
duiinèrcnt son corps aux religieux île Sainl-
Jeiùine, (jiii le reçurent avec beaucoup de
rcjpcci, el l'eiilerràrcnt avec beauciuii de
(l) Voy., .1 lu lin ilu \ul , II' 1 .(>.
(iRniiEs KKi.toiiux. srs
pompe dans leur égli>e proche le pranJ au-
tel, l's lui firent élever un timlicaii ih' mar-
bre, où elle était représentée rn relii f aTec
ses haliiis de reliu'ieuse.
Quoique les religiei:scs de ce momstère
eussent été d'.ihord sous la juridiriion de
Ferdinand de Guadalajar;i, aui|ui>l elle» s'é-
taienl soumises, il y a de l'apparence qu'elles
n'obéirent pas aux aulr.s prieurs de l:i
Sjsia, puisque ce ne fut que l'ai 1510
qu'elles furent in.orporées ,à l'ordre de
Saint-,lèrAme dans le chapitre général où
le P. Michel d'Ocanna fil élu général, el
qu'elles demandèrent à quitter le nom de
béates poiir prendre celui de relgieus.'S , en
embrassant la clôture el faisant les vœux
solennels. On recul aus-i dans le méiiic cha-
pitre un autre monasière de filb'S du méim^
ordre qui avait été fond • à .Madrid sous lo
nom de la Conception jéronyme par B 'alrix
Galindo , en loOi. Le second n onastère de
ces religieuses avait été fondé dès l'an 117:{
par une certaine femme de la ville de Se-
Tillc noiiimée Anne de Sautilla, veuve do
Pierre do Ortiz, l'un des consuls de retle
ville, il avait été dédié à sainte Paule. Le;
pape Sixle IV, qui eu avait permis la fonda-
tion, a*.îil mis les nli'.jieiises sous la juri-
diction des religieux de S,iint-Jéi ôme , cl
leur avait donné les conslittitions d'un mo-
nastère de Sainte-Marthe à Cordoue : mais le
pape l.éon X les en dispensa en loi'*, et
leur orlonnade prendre celles de l'ordre de
Saint-Jérô ne. L'an 1321, il y eut encore
une autre fomlalion de religieuses de cet
ordre à Grena le sous le nom de Saiiile-
Paule. On fit sortir des reli;;ieuses de Madrid
pour faire ce nouvel établisscinenl ; il s'en
est encore fait quelques autres dans la suite ;
et il y a plusic ;rs religieuses de cet ordre
qui sont mortes en odeur de sainteté. .Snne
de Zuiiiga, religieuse du monastère de To-
lède, a donné les vies d • soixante-quatorze
religieuses de ce même monastère, où le
corps de la bieiiheareu^o Marie d'Aj ifin esl
en grande vénération. Les religii'uses de
Sailli-Jérôme ont , comme les religieux ,
quitté le scapulaiic el la chape de couleur
tannée pour en prendre de noirs.
Voi/cz Joseph Sigucnça cl Francisco de
los Santos, Histor. de l'Ordrn de S. Gero-
niino ; el Pior. Crescenz., l'reiid. Ilom.
SECTION DF.USU'lMIi.
DIVERSES co.ngué<;atio s des IUMITES
DE L'OKuIlE UE SAl-M-JEllO-ME.
§ 1er. /yf.« ICrmites de Saiiit-Jci ôme de la ron-
yi éfjiili 'H du biin/icuieiix Pierre de l'isr,
(iiec la vie de ce saint fondateur.
Les religieux dont nous allons parler ont
été apielés dans le co«nmencenien( , Lrs
pauvres l-'r ères pour l'amour de Jésus-Christ,
ensuite. Les pnHirrs Ermites de. Saint Je
rom : et ce n'a éle qu'après la mort du bieii-
hriiniix Pii'rre de l'ise, leur fondateur, que
l'o.i a donne sou noiu aux religieux de .sa
530
JF.P,
JF.P.
59;)
rongr6p;nlion, pour les di'^liii'rncr ds autres,
qui prcnnciil aussi le lilied'Krmilcs de Saiiil-
Jcrôme. Ce saint fondateur naquit à Pise le
IG février de l'an 1355, dans le temps que
si>n père , lierre fiambacorli, avait la sou-
veraine autorilo à Fisc cl à Lucques ; et sa
mère se nonim.iit Niève Gualandi. A peine
cul-il en naissant fait connaîtic par ses lar-
mes que nous ne soninies ici-bas que dans
une vallée de misères , qu'il espérimenla
aussi presque en même temps que nous n'y
avons aucune ville (lerma'iiiilc ; car ses pa-
rrnis, ayant été (sbiigés de celer à la for-
tune qui leur était contraire, se retirèrent
di' Pise, y ayant été contraints p'ir la vio-
l' nce de leurs ennemis , et cmnierièrent
avec eux le petit Pierre, qui n'avait rncorc
que trois mois, l'fi u l'accouium/int de bonne
li.'ure à la croix et aux souffrances.
Il fut élevé dans tons les exercices de la
noblesse. Il s'en acquittait à la satisfaction
de SCS parents; mais en même temps il pra-
liquait ceux (;ui conviennent à un véritable
'.hrétlen, et ne résista po'iil aux mounmenls
intérieurs que lui dictait le Saint-Ksprit , cl
qui lui faisaient concevoir du dégoût et du
mépris pour les vanités de la terre. Comme
lin navire prêt à nicttre à la voile, il n'allen-
dail (ju'un venl favorable pour sortir du tu-
multe et de l'emb.irras du monde, et pour
abandonner sa pairie et ses parents. Dieu
ne l'appela point à la soliiude dès l'enfance,
(omiiie saint .lean-Baptistc, ni au coinmon-
cemcnl de l'adolescence, comme saint Paul,
le père des solitaires ; mais il attendit qu'il
fût dans un âp;e mûr et avancé. Ce fut la
mort de s,i mère qui le détermina à d re un
dernier adieu au monde: à l'âge de vingt-
cinq ans, il renonça aux grandes esiiérantes
(]u'il pouvait avoir pour suivre Jésus-Christ :
et, dans le temps que son père avait plus de
pouvoir d;ins Pise, où il était reîourné pour
repremlre le «iouvernement de la république,
il le qui la cl se revêtit d'un habit pauvre et
méprisable pour aller chertlier quelque soli-
lu:ic où il pût, inconnu aux hommes, me-
ner une vie austère et pénitente.
C'i si ainsi ()u'un religieux de la congréga-
tion du bienheureux Pierre de Pisedéciil les
premières annéisde la vie de ce saint fonda-
teur, dans l'histoire qu'il en a donnée en
1695 ; mais !e P. Papebroch ne prétend pas
qu'il se donna sitôt à la piélé, il dil au con-
traire que, l'an 1377, avec le secours de son
frère aîné André Gambacorli, il enleva pir
force sa sœur, la bienheureuse Claire, d'un
monastère où elle s'élait retirée pour y ser-
vir Dieu ; et qu'ajirès l'avoir retenue dans
iine espèce de prison [icnJanl cinq mois, ce
fut peut-être la persévérance de colle sainte
fille qui le toucha viveuienl et lui (it conce-
voir le dessein de se donner aussi à Dieu.
Quoi qu'il en soit, ce fut vers l'an 1375 ou
1377 que, s'etant revêlu d'un habit de péni-
tent, cl ayant abandonne sa patrie. Dieu le
conduisit dans l'Oiibrie, où il trouva sur
les confins de Cessana une montagne nom-
mée Monlébello, belle à la vérité, tant pour
sou agréable situation, (lui fait découvrir une
grande éiendiiedc payset toute la m^r Adn.i-
iique, que pour un vallon qu'on y t ouvc
environné d'une multitude de chênes et de
sapins qui forment une charmante solitude.
Ce fut ce lieu que notre bienheureux choisit
pour sa demeure. Il était obligé de descen-
dre tous les jours de cette mont igné pour
aller dans les villages circonvoi<ins demm-
der l'auujône pour si subsisl;ince : nin-seii-
Icmcnt on lui donnait du pain , m lis encore
de l'argent, de sorte qu'il amassa une somme
assez considérable pour bâtir d ins sa soli-
tude une église qui fut achevée l'an 1380 et
dédiée eu l'honneur de la S linle-Trinié ; et,
joignant celle église, il fil faire des bâiimcnts
pour contenir plusieurs ermites, prévoyant
bien qu'il devait êlre fo'.idaleur d'une nou-
vel'e congrégation. En effet, peu de temps
après il eut douze compagnons, que l'on
prétend avoirôléaulantde voleurs qui élaient
venus dans sa solitude dans le dessein de lui
prendre tout ce qu'il avait et pour le mal-
traiter; mais il sut les gagner a .Jésus-Christ
par ses discours et par ses remontrances , et
ils suivirent si bien l'exemple de leur maître,
et profilèrenl de ses instruclions avec lanl de
fruil, que quelques uns ont eu le don des mi-
racles, et ont été honorés comme bienheu-
reux après leur mort, tels que les bieniieu-
reux Pierre Gualcerano et Barthélémy Sla-
Icrba do Césène , qui étaient de ce nombre.
Noire saint fondateur, qui avait un grand
mépris de lui-même, et qui, pour éviter tout
ce qui pouvait lui donner()uelquevainegloiro
et le faire ressouvenir de la grandeur de sa
famille, avait voulu être appelé seulement
Pierre de Pise, cl non pas Gambacorli, ne
voulut pas aussi que sa congrégation portai
son nom ; mais il donna à si s ermites celui
de saint Jérôme, qu'il prit pour patron et
protecteur, parce que ce saint, ayant visité
tous les saints ermites et anachorètes de la
Syrie, de l'Egypte et de la Thébaïde, avait
pratiqué l'austérité des uns, le silence des
autres, avail appris de ceux-ci à être doux
et humble, de ceux-là à être patient cl chaste;
et, comme Pierre tendait au plus haut degré
de la perfection, il le choisit pour son maître
et son guide ; et Siirlout il imita tellement son
humiliié cl sa pauvrelé, que, se confiant en
la seule Providence, il ne possédait rien cl
ne souhaitait rien, et mérita par ce moyen
que souvent, lorsque les charités des fidèles
manquaient, des anges lui apporlassi iil ce
qui était nécessaire pour faire vivre sa com-
munauté, qui devint dans la suite fort nom-
breuse. Il fuyait pareilleinenl les honneurs,
et en avait un si grand mépris, que ce fut ce
qui lui fil choisir saint Jérôme pour patron,
dont il voulut que ses ermites portassent le
nom, afin qu'ils ne prissent pas le sien; mais
ce qu'il a voulu empêcher pendant sa vie est
arrivé après sa mort, puisque sa congréga-
tion n'est connue que sous le nom du B.
Pierre de Pise.
Après avoir ainsi donné commer.cement à
sa congrégalion, le démon lui livra on furieux
comlial. Il avait (lejà été vaincu par ce saiul
liominc, lorsqu'il lui avait repi éventé Icf
DICTIONNAIRE DE? ORDUES RF.I.'CIEUX.
501
lioiiiicurs, les liions <l les rinliosscs qu'il
avail quilles , il lorsqu'il l'av.iil solii-
rité il'ali.imloiinor sa soliliide pour li'S rc-
|irendro. Il (il un nnuvtl cIToil en sollicil.inl
tlcrrchcf iiolrc saiol crmiic d'aller venger la
mort de sou père el de deux de ses (rèrcs,
(|ui furent assassines le 21 octobre 139i j-ar
Jacques Appiani, secrclairc de sou père;
mais il fui inchraiilabic coulri' (elle nouvelle
secousse, il .'econteuli di prier Oicu el il'a-
dorer les ordres de sa providence, et, pour
lira\er le démon, il afllis;ca son corps par de
rudrs pcuilcuces cl de grandes auslériics. Il
mi! eu usage les liaires, lesciliccs, les dis-
ciplines, il r( d ubia ses jeûnes el ses veilles,
et, lorsqu'il était accable de sommeil, il se
jelail sur un peu de pai'le. le plus souvent
sur la terre nu •. Outre quatre carêuies qu'il
observait dans l'aiinéc, savoir depuis le jour
d s Cendres jusqu'à Pâques, depuis le lundi
lies Uogali ms jusqu'à la fête de la l'enlccôle,
depuis le premier jour d'août jusqu'à l'As-
-omplion de la sainte \'ierge, et depuis k-
premier novembre jusqu'à Noël, il jeûnait
tous ks lundis, mercredis el vendredis de
l'année, el il observa toujours celte pratique
jusqu'à la mort. Celait aussi une partie des
observances qu'il ordonna à ses ermites,
auxquels il prcscrivil encore de prendre la
discipline tous les jours pendant le carême,
et pendant le reste de raonée seclenienl les
lundis, mcrcrLdis et vendredis, afin, disait-
il, d'imiter Jésui-Clirisl, qui avail été lla-
gellé pi:ur leurs pécbés. Il défendit par les
constitutions de recevoir ceux qui se présen-
leraicnl pour prendre l'iiabil, s'ils avaient
moins de dix-liuit ans et plus de cinquante,
de peur qu'ils ne fussent pas en elat de sup-
port.r les austérités cl les rigueurs de la pé-
nitenc qui soat prescriUs par ces constitu-
tions. Ils se levaient à minuit pour réciter
matines, apiès lesquelles ils restaient deux
liiures au iliœur i)our faire oraison I été, cl
l'hiver ils y emplojaient trois heures. Ils
faisaient encore une heure d'oraison pen-
dant lété, et deux heures pendant l'hiver
après compiles. C etail la règle générale pour
lous ses criinles ; mais l'on pouvait dire que
le bienheureux fondateur était continuelle-
ment en oraison, car il y cinploy:iii irès-
so ivent le temps (jui i esta.l dejiuis les deux.
ou trois heures d'oraison commune d'après
matines jus(iu'au jour, el une bonne p;irlie
lie la journée. Leur nourriture ordinaire
e:ail un peu de pain avec des fruits ou des
herUes cuites en petite quantité, à la volonté
du supérieur. Us devaient reconnaître lous
les jours leurs fautes dans le réfectoire
,ivant (juc de se ni tire à table, el accomplir
(idèicmenl les pénilences ijui leur élaient en-
juiiiles. Si au milieu du ri'jias quelqu'un
couimellait quelque faille, il devait se lever
pour s'en accuser, el devait demeurer liu-
jours debout jusqu'à ce qu'on lui eût fait si-
gni; de s'asseoir, yiiant à la pauvielé, elle
elail e\aclonicnl observée : tout était en
r.otniiiiin, el le supérieur a« ait soin d(; dlslii-
buei a un ihacui> ce dunl il av.iit besoin (I).
(Ij Yoij., i) la fin dii vol., n' 147.
.195
Une vie si austère leur attira l'estime deq
personnes verlueuses ; mais les libertins
s'en scandai sèreiil. Ils répamlireiit de fanir.
bru;is coiitie la réputation de ces saints la- -
miles , et publièrent (jue ce qu'ils faisaient
n'était «lue pour abiis' r de la simplicité du
peuple; que c'étaieiil des loups ciuvcrls de
peaux d'agnciux; qu'ils faisaient à l'exté-
rieur profession d'être austères et de mé-
priser les honneurs el les richesses , mais
(jue ce n'étaient que des ruses cl des stratagè-
mes dont ils se servaient pour s'attirer de
l'estime cl de la i;loire. Ces libcitins, croyant
Cjue de si grandes austérités étaient au-des-
sus dis forces humaines, accusèrent aussi ces
saints Ermites de sortilège, attribuant à l'art
magique cette grâce surnalurelle de Dieu
(]ui les soiitinail cl leur donnait la force et
le courage pour supporter ce genre de vie ,
qu'ils avaient embrassé pour sa gloire. Sur
tes faux rapports , les inquisiteurs firent
des informations. Les Ermilcs furent con-
traints do sortir de temps en temps de leur
solitude : c'est pourquoi le bienhenrcui
Pierre de Pise , pour faire cesser celle per-
sécution, cul recours au pape Martin V, (jui,
I ersuade de la sainteté de ce fondateur el
de la vie excmp'aire de ses disciples , leur
accorda une bulle le 21 juin ^^21 qui les
exemplail de la jur.diciion des inquisiteurs,
déclarant nulles les sentences d'excommuni-
cation qui pouvaient avoir clé données , cl
toutes les procédures qui pouvaient avo réiô
laites contre eux. De celte manière la persé-
cution cessa, ce saint cl ses disciples furent
en plus grande estime, et on leur offrit des
élalilisseiiK nls en idusicurs endroits.
Ils avaient déjà des couvents à \"cnisc , à
Pcsaro, à Talachio, Fano, Trévise, Crispano
et i adoue; mais l'an l'f22 ils furent reçus à
l'rl iii, et firent un nouvel établissement à
\enisc. Comme le lieu qu'ils avaient déjà
dans celte ville était trop petit pour conte-
nir le grand nombre d'Lrmilcs qui y demeu-
raient , Luce Conlarini , femme du iiiblo
Henri Dciphino, accorda au bienheureux
l'ieire de Pise et à ses compagnons l'IiApital
de Saint-Job, qu'elle avait fait bâtir, ce qui
se fit du consentement d'Henri l)el[iliiiu), iiui
se rendit lui-même disciple du bienbcureux
Pierre de Pise, à qui cet elablisscment servit
de nouveau motif pour exercer s;i charité ,
servant les malades cl leur donnant tous les
secours spirituels el corporels dont ils
avaient besoin. On lui donna en \k2\ l'égliso
«le Saint-Marc de lîarocio. L'an li^^i , il alla
à Uonic, où il lit amitié avec le bienheureux
rîicolas de Founiue-Palènc , qui était ehel
d'un»! congrégation d'Krmites qui fol unie a
la sienne, comme nous dirons dans la suite ,
aussi bien que ccl e du fière Ange de Corse,
qui d'.mna a noire saint fund.iteur quatre ou
cini| couvents qu'il avait, linlin ce s. nul fnn-
d.iteur , ayant de appelé à \ enise pour les
aflaies de sa congicgalion , y mourut âgé
de quatre-vingts ans, le 1' juin de l'an
Le P. Pierre lionnaeioli, général de ccl
5'J3 JEU
ordre , d.ins un petit livre intitulé Pisana
Iiremus , etc., imprimé à Venise en 1692 , et
qui contient les vies en aiirégé des princi-
paux saints de celte congrésation , parlant
(lu bienheureux Pierre de Pise , dit qu'il fut
enterré dans le même liApilal de Saint-Job ,
qui fut depuis cédé à des religieuses de l'or-
dre de Saint-Ausustin. Cela semble contraire
à ce que dit le P. Papebroch , que le bien-
heureux Pierre de Pise , étant retourné de
Home à Venise, abandonna ce lieu, les amé-
liorations qu'il y avait faites ayant été i sli-
mées afin que le prix lui fût rendu pour
l'employer aux bâtiments qu'il faisait faire
au premier couvent qu'il av;iil eu à Venise
dans la paroisse de Saint-Uaphaël , lequel
couvent s'afipelle aujourd'hui Saint-Sélias-
lien. Peut-être aussi que, quoique les Er-
mites de Saint-Jérôme aient eu des raisons
pour abandonner cet hôpital, notre saint
fondateur ne laissait pas d'y aller pour y
continuer ses services cbariinbles envers les
malades, et qu'étant t'imbé lui-même mala-
de , il voulut y mourir et y être enterré ,
parce que les religieux decetie congrégation
n'avaient pas encore d'église ouverte à Ve-
nise en 1V35 , s'il est vrai, comme le dit l'a-
nonyme qui a écrit la vie de ce bienheureux
en 1()9o , que ce fut le pape Calixte III qui
leur accorda la permission d'en avoir une
publique, sur l'appel qu'ils avaient interjoté
à ce pontife d'une sentence rendue par saint
Laurent Juslinien, pour lors patriarche de
Venise , qui leur défendait d'en avoir. Cet
auteur s'est néanmoins trompé en citant
«•etie sentence de saint L:iurent Justini< n de
l'an 1414, puisqu'il ne fut évê(iuc de V^enise
que l'an 1433 , et premier patriarche de lu
même ville que l'an 1431 ; mais il se peut
faire que ce fut sur la fin de l'année 1454
qu'il donna cette sentence, puisqu'il mourut
le 7 janvier 14S5; ces religieux ont pu avoir
appelé de sa sentence, non pas à Calixte III,
mais au pape Nicolas V, qui vivait au cotii-
inenccment de la même année 1455; et,
cimime il mourut au>si au mois de mars, et
qn'jiu mois d'avril de la même année Ca-
lixte lii lui succéda, rien n'empêche de croire
qi;e ce fut ce pape qui leur jiccorda cette
permission d'avoir une église publique, que
Nicolas V, auquel ils avaient ;ippclé d'abord
de la sentence de saint Laurent Juslinien ,
n'av&it pu leur accorder, ayant été prévenu
par la mort.
Le P. Papebroch dit qu'il peut avoir été
pnlerré dans le monasière de ces re igienses,
l'ayant ainsi désiré , ou peut-être par ordre
du sénat, et qu'il y en a aussi qui prélen-
denl qu'il est enterré dans l'église de Saint-
Marc ; mais qu'il croit qu'on y fit plutôt la
cérémonie de ses obsèques. Ce qui est cer-
tain, c'est que les religieux de son ordre
n'ont pu jusqu'à présent découvrir l'endroit
où il a été enterré , soit à S inl-Marc , s-oit
dans ce monastère des religieuses de l'ordre
de Saint-Augustin, qui demeurent d.ins cet
ancien hôpital de Saint-Job , cl, quelques di-
ligences que le cardinal Delci , qui était
uonce du pape auprès de la répubi que de
JEn
E3.5
Venise en I55C, y apportât pour le décou-
vrir, elles funnt inutiles, (vmime plusieurs
papes, principalement Pie V el Clément VHl,
ont donné à ce foiulateur le litre de bieniieu-
reux, les religieux de son ordre poursuivirent
auprès du pape Alexandre Vlll la permis-
sion d'en faire l'office ou d'en célébrer la
messe dans tout l'ordre. Le pape souscrivit
la commission pour sa béatification et sa ca-
nonisalion. et nomma pour ponent le cardi-
nal Casanate, protecteur de cet ordre; mais,
comme les affaires vont fort lentement en
( () r de Rome, ils n'ont pu encore oblenir ce
qu'ils souhaitaient.
Après la mort du bienheureux Pierre de
Pise, le bienheureux Barthélémy Malerba de
Césène fut le premier général ijui prit h; gou-
ver ncment de sa congrégation, comme il pa-
raît par une bulle d'Eugène IV du 22 février
1437. Il avait été du nombre des douze pre-
miers disciples de ce saint fondateur , et ,
pendant près de quinze ans qu'il fut général,
il fit plusieurs établissements, dont les prin-
cipaux furent ceux de Vicence et de Man-
to e. De son temps , la congrégation des Er-
mites du bienheureux Nicolas de Fourque-
Palène fut unie à celle du bienheureux Pierre
de Pise , el , outre les privilèges qu'il obtint
du pape Eugène IV pour cet ordre, ils eurent
permission de pouvoir piendre les ordres
sacres , et de tenir tous les ans le chapitre
général. Nicolas V ordonna l'an 1453 qu'il
se tiendrait à l'avenir tous les trois ans , et
leur permit d'y élire un général, dos provin-
ciaux el quatre définiteurs. L'an 147G ,
Sixte IV confirma ce qui avait été ordonné
par Eugène IV et Nicolas V touchant la te-
nue des chapitres généraux; mais , comme
par les constitutions de l'ordre on élit pre-
mièrement un vicaire général , entre les
mains duquel le général et les prieurs sedé-
metient de leurs offices, et qu'ensuite tout la
chapitre élit quatre Pères qui doivent faire
seuls tous les prieurs , et iioc ces prieurs
nonvellemenl élus par ces quatre députés du
chapitre doivent élire ensuite le général ,
S;xle IV approuva cette manière d'élection ,
ordonnant seuleuie-.it que le chapitre élirait
six députés pour élire les prieurs; mais ce
nombre n'a pas toujours éé fiice, car pir un
autre bref d'Alexandre VI du 14 avril i4':G,
il est permis au chapitre d'en élire six ,
quatre ou cinq , comme il le jugera à pro-
pos.
L'an 1444, sous le géncralat du mêuie Bar-
thélémy de Césène, on y dressa les pnmières
constilutons de l'ordre, qui furenl impii-
mées à Venise en latin et ( n italien l'an 1 iSS,
cl on commença déjà à y retrancher quel-
que chose des grandes austérités que le hieu-
heureux Pierre de Piic avait prescrites. El-
les furent corrigées et mises en meilleure
forme, l'an 1540, par le P. Bernard de Vé-
rone, qui était pour lors général, et reçues
dans le chapitre génér^il qui se tint à iîimiiii
l'an 1549, après que tous ceux qui foriuaient
cette congrégation curent protesté qu'ils ne
prétendaient pas cju'ellos les obligeassent à
aucun péché uio^tel, ni (ju'on les put c'.3!i-
r95 mrTIONNMRE DES ORORES RELIGIEUS. S'IO
trnin.lic ;"i faire iIcs vgpux soUmiikIs. Dhik Ii- ri(|iio, cic. Ia(iinlli' fui iinprinuM- ,\ \"cnisc en
«liapilre pcncral de l'an lO-i'J. on nppidiiva l(io(>, (|iii esl r.miu'o où fiiiil celle cliroiiolo-
ile iiDiivrlIos ((iii>.lituUons nui furent reçues gie. Le 1'. Papebrorli croil que ce fui la rai-
ilans eeiui de l'an 1018 el ileierluf publiées >on pour laquelle cel ordre ne fui pas seu-
dans le diapilre -îeiifr.il i!e l'an lOU; el es leinpiil roin|)rJs dans la bulli" de Clénienl l\
lu eiil iniprinioes'"cn lalin à Tesaro. el on (il de l'an 1008, (|ui supprimait les congréga-
cinorc (|uelciu','s diclaralions el (lUcKiues lions di's chanoines séculiers de SainlGeor-
éclaircis'.enienls sur c- s tonailulions dans pes /« /l/r/ri à Venise, des Jésuates de SaiiU-
le cliaplre de l'an Hi'iV : ic so;il ces demie- Jérôme el des Ermites de Saiut-Jérô'ne de
res < oiisiiluioMs ijui smil présenkinent oli- Fiesoly ; mais qu'il a été encore augmenlé
scrvecs dans cel ordre, où entre aulres clio- dans la suile, el ((u'il a reçu de nouvelles grà-
ses on a relranclié ral'>liueiicc pcrpéluelle. ces el de nouveaux, privilèges, comme il pa-
(Jes reliuieux ne fais. lient que dts vœux rail p,ir un autre spicilégc ci)rri;;é et aug-
si i pies elpouv^iieiit disposer de leurs liiens, mente en 1C'J2 par le l'. l'ierre Honnacioli,
jusqu'en l'an loC8, (lue 11' pape Pie V. par un gi'iiéral de cet ordre, que le 1'. l'apebrocl»
bref du 15 no\embre de la même année, leur n'a p.is voulu joindre à celui du V. liusèbe
orilonna de faire des voux. solennels. Kn Jordan, qu'il a inséré dans le Iroisième tome
verlu (le ce bref, le cardinal i.ouis Corneli, du mois de juin de la conlinnalion des Actes
qui élait protecteur de cet oidre, se trans- des Saints de lîollandus . aliii , dil-il , de no
porla au couvent de S.iint-Onuplire a Rome, (las prévenir l'Iiisioire générale de cet ordre,
qui appai lient à cel ordre, et 3 re(:ul la pro- (ju'il espère qu'on donnera un jour lU pu-
lession des religieux (jui y et .ienl, ce qui se blic. Il esl vrai ((ue l'an lli2() on résolut dans
lit aussi d.ins les autres couvents, laquelle le chapitre général qui se tint à Iljspida au
profession ils tirent selon la règle de s.iiiit territoire de l'adoue , de Irav.iiller à celle
Augustin, ((ue le pa|)e leur donna aussi. Le hisloire, cl pour cet eflel on nomma deux
même l'ie V confirma leur coiigrégalion, el cislodes auxejuels un donna le soin de faiic
leur accorda lan 1507 tous les privilèges des un recueil de ce qui s'étail passé dans l'or-
ordres mendiants. Il conlirma derechef leurs dre;mais depuis ce temps-là l'histoire n'a
privilèges l'an 1571 il liur accorda iudul- point paru, el ces oflices de custodes ont été
gence plèiiièic en forme de jubilé le (lua- supprimes dans la suile comme inutiles. C'est
Irièiue d manche de carême, la(iuelie indul- pourquoi je nie suis servi de ce dernier spi-
geucc le pa|ie Lîiégoire XIU étendit l'an cilége, qui m'a élc envoyé par les rel gieux
15,*'.'J pour toutes h s personnes qui visite- de cel ordre (|iji sont à Home, avec I i vie de
raient leurs églises ce joui-là, ayant aussi leur fondateur imprimée à >'enise en lGi)5,
Confirmé par un autre bref de l'an î.'iSI tous ((ui esl plus .impie que celle que le P. Mer-
les privilèges ijui leur avaient été arcir.ies nardin l'ncci avait donnée el que le P- Pape-
par ses prédécesseurs. Mais Paul ^ leur <)la broch a insérée dans la conliiiualion de Ool-
celui que leur a»ail acordé Martin V qui laiidu; au I ' juin.
les exeiuplait de la jui idiction des inqui-i- détordre est divisé en deux provinces,
leurs, i'ani \' a\aul vnulu (|u'ils y fussent qui sont celles d'.\iic(")ne il de Trèvise, qui
.Miuinis. Innocent X ne leur fut pas favora- cnuiprc .nenl environ (juaranle maisons,
Ide, caril leur défeiidil, l'an IGoO, de recevoir sans compler celle du Tyrol et de liavière,
des novices e d'admettre à la professioii (jui apparlenaieni à certains Krmiles (lui S(!
•■eux q li étaient déjà reçus, ce qui dura jciignirenl en 1095 à ceux du bienheureux
jusiju'eu l'an lOot), que le pape Aiexan- Pinredc Pisc, el donl nous parlerons dans
dre \'ll, a la prière du cardinal Fagn mi, pro- \i- paragraphe suivant. L'habillement d.' ceux
lecteur de l'oidre, leur permit de recevoir d'Italie consiste en une robe el un capuc • de
des novices et de les adnielire à la prop couleur tannée, avec une ceinture de cuir, la
l'cssioii. "r mozelle du capuce étant eu pointe parder-
Le pape .Mexandre VII ayant supprime, rière el descendant jusiiu'.i la ceinture ; mais
l'an 1050, l'ordre des chiinoines lèguliirs du ils ne niellent point le capuce sur l,i îèle,
Saini-Ls|)tit à Venise, qui était réduit à n'a- ayant toujours un bonnet carré dans la mai-
voir qu'un seul monastère, et celui des Croi- snn, et , lorsqu'ils sorenl, il. mcllenl uno
siés ou l'ort -Croix, (jui di- vingi-ciiK] inai- ch.ipe plissée par le haut et (|ui a un co lel
sons n'en avaient plus (lue (lualre, Il s liriiii- assez eleve, el porieul un chapeau iioir(lj.
les de Sailll-Jér(^me delà cungrègation du Leurs armes s. )nl d'a/.ur à six petiies mon-
bii nlienreu\ Pierre de Pise appréhendèrent i gnes surmontées d'une croix, le loul d'or
|inur leur ordre : c'est pimr(|uoi, alin de laire cl accompagné de qualri? étoiles aussi d'or,
coniiaitre que, quoi(in'ils n'eussent i|iie deux I éeu limliré dune couronne,
jirovinces, ils avaient néanmoins p:u> de (Juant à leurs observances, ils se lèvent à
quarante m. lisons, cl (|ue l'observance régii- nniiu l pour dire matines. Ils font absliiienco
lièie y était exaclcmenl observée, le P. l'ii- K s luiuiis el mercredis à la volonlé dti siipé-
sèbe Jurdan de \'icencc, religieux diî cel or- rieur, et outre les jeunes de l'I^glise, ils jeù-
dre , docteur en l'uiiivcrsilé de l'adoue el i.ent depuis le premier dimam-lie di; l'avenl
consulleur du Sainl-Oflice dans la méuie j(isi|ii°à Noël. Ils prennent la discipline tous
ville, (il une espèce de chronologie de ce le> jours pendant le c.irèine , excepte les sa-
iiiéino urdre suus le nom de Spicilégc liislu- iiicdis el les dimanches ; el en avent le luadii
H; Vry., à 1.1 lin du \i.!., u" !i3 et li'J.
597
JER
JEr,
5,! s
iiiercrcili cl v.'iulrcdi, lorsqu'il n'arrive pont
lie fètc iloul)lc CCS joiirs-là. Depuis Pâques
jusqu'à la foie de l'Exallalion de la sainte
croix, ils font l'oriiison après nonc, qui se
dit à midi , el dans un autre temps ils la font
après complies. Tous les trois ans, le troi-
sième dimanche d'après Pâques, ils tiennent
leur chapitre général où ils élii^enl leurs su-
périeurs qui peuvent être cont nues pour
trois autres années dans un autre chapitre.
Si le général meurt, le provincial de la pro-
vince où il demeurait gouverne l'ordre jus-
qu'à l'élection d'un nouveau général , qui se
fait pour lors seulement pai" les prieurs de
Home , de Pesaro , de Venise et de Padoue
avec l'autre provincial. Le chef de cet ordre
csl à Montebcllo. Ils ont une niaisoii consi-
dérable à Naples, et une autre à îlome sous
le nom de Sant-Onupbre au Moni-Janus,
doiil l'église fui érigée par Léon X en une
diacooic cardinale, et que Sixte V changea
en tilre de cardinal prêtre, l^esl dans celle
église que le fameux Torqiiato Tasso est en-
terré, aussi bien que Gwillaume Bardai, gen^
tilhomme anglais auteur de rAri;enis. On
voit dans la même église une épiiaphe assez
pflriiculière, et qui fjil allusion à celui qui
csl efllerré dessous.
D. 0. M.
Jacel hie jacltis, ictus ariele fali , Bartlto-
loinœus Arietes de Subaudia, ab ejus filio Pâ-
tre Cesare, huj us cœnobii vicario, hoc lapide
lectus, suique tegcndi quos fatum sic artelabit.
Vixit annos lxxii, obiil die cxlix, antc arie-
tis siijnum mdcxxii.
Il y a eu dans cet ordre plusieurs person-
nes d'une éminenle sainleic, comme les bien-
heureux Pierre Qualcérano, Nicolas de Four-
que-Palène, Barihélemi de Césène, Laurent
l'Kspagnol, Paul Quirino, Philippe de Sainle-
Agaihe, Marc de Manloue, Bertrand de Fer-
rare el plusieurs autres, dont tes vies se
trouvent dans le livre dont nous avons déjà
parlé , intitulé Pisana Ereintis , e(c. Le P,
François Coccalini , qui fut élu général de
cet ordre en 1647, fut ensuite évêque de
Trau eji Dalmatic el mourut à Vmise l'an
1661.
Bernardin Pucci , Vit. B. Pétri de Pisi<!.
Kusèbe Jordan , Spicilegium historicum Re-
tiij. Prtr. de Pisis. Peir. Bonnacioli, Pisana
Ereiinis et Spicilej. hisloric. Polydur. Virg. ,
JJe Hcrani inventai ibus. lib. vu, cap. 3. Paul
Morigia, Oriy. de Relig., lib. i, cliap. 4-3. Sil-
vestr. Maurol., Mar. Océan, di Cuit. gl. Re~
lig., lib. VII. Thadœus Bongianlinus, clc liea-
tis Pisanis; et Bollandus, tom. 111, Junii 17.
Philip. Boninni. Cnlalog. Ord. relig., tum 1,
png. 121 et 122; et les Cunstitutions de cet
ordre.
§ 11. Des Ermites des congrégations d s bien-
heureux Ange de Corse et Nicolas de l'uur-
gue-Palène, de Pierre Malerba, du Tyiol,
(le II Dière, et aulr£s unies présentement
A celle du bienheureux Pierre de Pise.
Je ne suis pas du sentiment du P. François
Bourdon, rclii^iiux du Tiers Ordre de 3ain;-
François,qui prétend que la congrègaiioii
(les Ermites de Saint-Jérôme du bienheureux
Pierre de Pise a pris son commencement et
reçu les premières instructions des obser-
vances régulières du fière Ange de Corse,
profès du Tiers Ordre de Saint-François, ni
que le bienheureux Pierre de Pise le fut
trouver dans l'ermitage de la Scolea, proche
Ilimini, pour ce sujet, puisqu'il est ceit in
que le bienheureux Pierre de t'ise commença
sa congrégation à Monlebello dès l'an 1;180,
cl que le frère Ange de Corse ne vint demeu-
rer à la Scolea, comme le P. Bourdon en de-
meure d'accord, que l'an 139,'], où il bâtit un
ermitage dans un lieu qui lui fut donné par
Charles de Malalesla, seigneur de Rimiiii.
Mais si ce frère Ange de Corse n'a pas donné
commencement à l'ordre des Ermites de
Saint-Jérôme du bienheureux Pierre de l'ise,
il a au moins procuré l'accroissement de
cette congrégation , ayant remis entre les
mains du seigneur de Uimini rcrmitage de
la Scolea pour le donner au bienheureux
Pierre de Pise et à ses disciples, et ayant
aussi cédé, tant en son nom qu'en celui de
ses disciples (tous du Tiers Ordre de Saint-
François , qui formaient une congrégation
qui portait le nom du frère Ange de Corse )
les autres i ouvents qu'ils avaient au nonibre
de quatre, outre celui de la Scolea, savoir, un
à Venise dans le quariicr de Saint-Baphaël,
un sous le nom de S.iini-Jérôme proche Ur-
bin, un autre appelé Notre-Dame dos Anges
à Noviliara, au diocèse de Pé>aio, et le qua-
trième sous le nom de Notre-Dame de Aiisé-
ricorde dans le diocèse de Ferrare.
L'on ne sait rien de la vie de ce frère Ange
de Corse ; ii paraît par tiiie bulle d'Eugène IV
de l'an 1432 qu'il était déjà mort, et qu'il ne
restait plus aucun de ses disciple s qui sni\ is-
sent la troisième règle de saint François. Se-
lon toutes les apparences, ils avaient tous
embrassé l'institut du bienlieureux Pierre
de Pise, qui, appréhendant qu'on ne l'inquié-
lât à l'avenir dans la possession des cinq
couvenis qui avaient appartenu à la congré-
gation du frère Ange de Corse , à cause que
par les contrats d'acquisition il était dit que
le frère Ange les acquérait pour lui et ses
compagnons, qui étaient du Tiers Ordre de
Saint-François, il eut recours au pape Eu-
gène IV pour approuver la cession qui lui
avait été faite, tant par le comte de UniJni
de celui de la Scolea, que des quaire autres
par le frère Ange de Corse , ce que le (lapo
lui accorda par celte bulle de l'an Î432, at-
tendu qu'il ne restait plus aucun des disci-
ples ilu frère Ange de Corse qui fissent pro-
fession du Tiers Ordre de S iint-Frau: ois,
déclarant que ces maiions appartenaicni au
bienheureux Pierre de Pise et à ses disciples,
cl que les religieux du Tiers Ordre de Saint-
François n'y pouvaient rien prétendre.
La congrégation du bienheureux Nicolas
de Fourque-Palène, qui était aussi du Tiers
Ordre de Samt-Fr.inçois, fut encore ui.io à
celle des Ermites du bienheureux Pierriî de
Pise l'an 14'i6. Ce bienheureux Nicolas do
Fourque-Paiène fut ainsi nomme du lieu du
f;)0 n!C.TION>\ir.E PKS ORDIîES REI.ICIEl'X. CM
sn tiais«<-ince, qui osl un bourg de l'Abru/zc l.iieiit, «luoinuc l'cvéquc de lîrc.innli, <juc le
- du diorèse dp Suliimni'. .m roy.iiime de N.i- pnpc .ivail nommé pour juge de ce dilTorcnd,
pies. 11 él.iil [in'lrc el vcrui plusieurs années cûl piononrc en sa faveur par une seiiten( e
dans son pays, djiis une (!r,inde eslimc;mais, du premier mai li3o. Le pape Iriuva h"u
voulant se donner à Dieu plus parfaitement qu'il retournai à Rome, où on lui donna, l'iiti
el passer le nsle de ses jouis dans la péni- li:JO, l'église de Saint-Onuplire, sur le mont
lencc, il prit l'Iiatiit d;i troisième ordre de Janus, qu'il ré la aux Ermites de la congré-
Siinl-François, et, étant fort âgé. il vint à galion du bienheureux l'ierre de Pise, l'an
Home, où il demeura d'ahord dans une pe- l'tifi, avec le monastère de Notre-Dame des
lile maison avec un compagnon nommé Ue- (îrâces de Naples et les autres ermitages
naud de Piedmoiit. Le pape Eupè.iie W , in- qu'il avait ailleurs. Il >; a de l'apparence (juc
formé de ses vertus, lui donna !e soin d'une te couvent de Nolri-Dame des Grâces n'clail
petite église sous le nom du Sau\eur, qui pas grand'rhosc pour lors ; il y aurait même
était pour lors fort fréquentée par la dévo- à douter .si vérilablcracnt les Ermites de la
lion des fhlèles. Il y eul encore cinq person- congrégaiion du bienheureux l'ierre de Pise
nés de dilTéronles nalioiis qui se joignirent à le prsséJèretil drs ce temps-Li; car l'ompcio
lui dans ce lieu avec les(iueil;^s il s'ijdouna à Sarnelli , évoque de liiseglia , dit (Guid. de
diverses œuvres de pieté, jusqu'à ce que /'orp5/.!/i /Y(I/)o^ p. 1.ï3j que c'était ancienne-
Dominique Zurlo de la noble famille des Ca- ment une petite église qui appartenait à la
péie de Najiles. s'( tant joint <à lui, il fut dins famille des (îrassa, el que l'an 1500 c'Ie fui
ce royaume pour y visiter certains ermites accoriléc au bienheureux Jériimc de lirindi^i,
qui demeuraient dans une solitude de la ^ro- qui fut le premier qui amena de Napl.'s dt s
vince de Labour; mais, ne les y ayant pas religieux de la congiégalion du bienheureux
lrou\ es, pane qu'ils élaieit allés à Naplis, il Pierre de Pise, et que dans ce lieu il (il b.l-
s'y ren lit aussi, où, avec le secours de (es tir un monastère et amplifier l'église (|ui e>l
ermites cl de ses autres compagnons, qui fort belle; mais l'on peut croire qu'il a auff-
viiirenl aussi à Naples, il fonda un monas- mente lo nionaslére avec plus de magnifi-
tère sous le nom de Nolre-Uame des Grâces, cenie qu'il ne l'étail du temps du bienheureux
r|u'il lit bâ ir des aumônes qui furent don- Nicolas de Fourque-Palcne, comme il l'a été
nées au frère Dominique Zurlo, son compa- aussi dans la suilc par les religieux de cet
gnon, par les personnes b s plus illustres de ordre, ainsi que le rapporte pareillement lo
la\ille, qui lui élaient alli( es. Le bionlieu- P. lîonnacioli dans son Spicilt ge, où il mar-
reuv Nil olas en fui le premier supérieur, el, (|uc que, l'an liV7, ce fut le bienheureux
:omine il venait sou\ eut à Home, il j rencon- Ikiioîl t!e Sicile, prieur de ce monastère, qui
Ira le bienheureux Pierre de Pise, avec le- commença à faire liâlir l'église. Le P. Pape-
qiiel il lU amilié. Ce que le P. Pierre Bonna- brodi rapporic dans toute sa teneur le brel
noii dit dans la vie de ce bienlieureux, que que le pape liugène W lit expédier pour l'ii-
l'an \\-2"i il se (il avec ses coiiipagions dis- nioii de ces deux congrégations; mais il j a
ciple du bienheureux Pierre de lise, ne s'.ic- à corriger dans l.i date de ce bref, qui est des
Corde pas a\ ce ce qu'il dit dans son Spicilége, calendes de janvier IVVlî, dans la vinsi-uniè-
qiie ce ne l'ut que l'an H'iti que sa congiéga- me année de son pon.'ificat. puisqu'il fut fait
lion fut unie à celle des Ermites du bienbeu- pijie le 3 mars IV'îl, el qu il ne gcuvern.i
reij\ Pierre de Pise ; ni i areillement avec co l'Eglise que quinze ans; ainsi ce ne pour-
qu'il dit aussi, que le liienlieuieux Nicolas rail être que la quinzième année,
ne fut à Naples qu'après avoir quit é l'éuUse Quant au bienheureux Nicolas de Fourque-
de Saint-Sauveur, ((ue le pape Eugène IV loi Palène, deux ans après l'union de sa con-
a\ail donnée ; (pTil ie retourna à Kome qu'a- gre;'.alion avec (elle du bienlKUrc'ux Pierre
firès avoir fondé le couvent de Noire-Damc de Pise, il mourut à Home le 20 seplembri;
des Grâces, el que c'est d;ins ce temps-là l'iVS, étant âge de cent ans. 11 se fil plusieurs
qu'il se fil ilisci|)le du bienheureux l'ierre de miracles à son tombeau qi.i ohlipùrenl les
Pise, puis(|ue U-, pape Eugène IV ne succéda religieux de son ordre de le Iriinsforer dans
a Martin ^' que l'an H31. un lieu plus décent a\ec la permission de la
Il n'y avait donc seulement qu'une amilié congrégation des Kiles. l'an IGOfi; cl, l'an
rècipro()ue entre les bienheureux Nirobis de lGi7,les babilanls de Fourque-Palènc, lieu
Foiirque-Palène el Pierre de Pise. quiét.iienl de sa naissance, ajaiit souhaité avoir de S' s
tous deux chefs di; deux congrégations dif- reliques, le P. llenii Landau, qui était pour
feien!es, celle du bimbeureux Nicolas f,ii- lors général, leur donna une C(')te, pour
saut profession de la troisième règle de saint re\poser à la vénéralion des fiilèlcs, à ron-
l'rançois, cl celle du bienheureux Pierre de dition que si un jour on Taisait un èlaldisse-
Pise ayant seuleiiienl quelques consliluliuiis ment de religieux à FoUMiue-l'alène, leur
iiu règlemenls particuliers que ce saint fon- ordre serait préféré au\ autres, el que la re-
ilaleur lui avait prescrits. Après que le bien- lii|ue du bienheureux Nicolas serait déposée
heureux Nicolas cul \écu quelques années à dans leur égLse.
Home dans une grande lépiitalion de sain- L'an l.'i-'il, les ermites de Sainl-.Iér(jmc do
tulé, le pape Eugène IV lui donna le couvent la congrégation du frère Pierre de Malerha,
et l'église de Notre- Dame, proche l-'lorencc ; <iui demeuraient dans les couvents de Sainte-
niais, sur ce ()u'on lui en coniesla la posses- l'iliiiléde Itomano du diocèse de P.idoue,
sioii , il aima mieux rab.indonner que d'être et de Saint-f ausiin de la Tour du diocèse do
ex;}oié à l'envie de ceux (jui la lui di.s|iu- \ loiie, expobèrciil au pape Clément ^ H
COI
ir.n
JF.U
602
que leurs coiivciils el les lieux (juils lialii-
Ijiciil , qui claienl gouvernés par un vicaire
{^i'iiér I, dépérissaient tous les jours plulôl
qufi d'aupinicnter ; c'est pourquoi ils dési-
raient embrasser l'ins'itut du bieiilieureux
Pierre de Pise et être unis à sa congré<;ation,
sil voulait y consentir. Le p 'pe accorda leur
demande par un bref du 26 janvier 1531 ;
«insi ils prirent l'habit des Ermites du bien-
heureux Pierre de Pise, et le bienheureux
lîeriranJ de Ferrare fut envoyé par les supé-
I leurs pour leur apprendre les observances
de celte congrégation. On ne sait rien de la
vie de ce Pierre Malerba. Il est fait mention
dans un acte passé l'an 14(55, qui concerne les
reli;;ieiix de la congrégation de î'iesnii, d'un
Pierre Malerba de Venise, qui y servit de té-
moin cl qui y est qualifié prêtre. 11 pourrait
peut-être avoir été le fondateur de cette con-
grégation.
Une autre congrégation, sous le nom des
Krniiies du Moni-Ségcslre, fut aussi unie à
celle du bienheureux Pierre de Pise, l'an
157!). Ces Erinites reconnaissaient pour fon-
dateur le bienheureux Laurent, espagnol de
naissance, qui, voulant imiter les anciens
ermites, s'était retiré en Italie sur le mont
Ségesire, proche Génrs, où il avait bâti plu-
sieurs cellules séparées les unes des autres
pour plusieurs personnes qui voulurent vivre
SDUs sa conduite et qui y n)enaieiit une vie
frs-auslére ; il les gouverna jusqu'à sa
mort, dont on ignore l'année. Il y a de l'iip-
parence qu'elle arriva avant l'an l.'iSl, car
ce fut cette année que les frères Jacques,
aussi espagnols, liaphaël d'Orgio cl .lacques
Galesio, qui étaient du nombre de ses disci-
p'es, firent bâtir au même lieu une égli^e
sous le nom de Nolre-Danie de l'Annoncia-
tion de la Côte de Ségesire de PonenI, avec
un monastère qui fut amplifié l'an 14-50 par
un frère Nicolas , qui en était pour lors
prieur. Quoique les religieux de ce monas-
tère et les autres de la coigrégation du bien-
heureux Laurent eussent été agrégés l'an
1579 à celle du hieiiheureux Pierre de Pise,
ce ne fut néanmoins que l'an 1581 que le
P. Jean-B;iptiste de Monte-Silice, qui en é'ail
génér.il, prit possession de ce monastère au
nom de l'ordre. L'on ne sait autre chose de
la vie du fondateur de celle congrégation du
Mont-Ségestre , sinon qu'il paraît par des
actes pullics de l'an 1520 qu'on lui donnait
le titre de bienheureux. Le marlyrologe rn-
maiii fait mémoire d'un saint Albert de (^lè-
nes, que les religieux de la congrégation du
bienheureux Pierre de Pise prétendent avo r
été de celle du Mont-Ségeslrc, el (jui uiourut
l'an 1450.
Enfin, l'an 1695, plusieurs ermiles du Tyrol
et de Bavière, qui vivaient dans différents
endroits et en commun, demandèrent aux
religieux du bienheureux Pierre de Pise as-
semblés le 2 avril de la même année dans
leur chapitre général à Rome, dans le cou-
vent de Saint-Onuphre, d'être unis à leur
congrégation, de porter le iiiéine habilL'-
menl, quant à la forme, de professer la même
règle, et de jouir de leurs priviléires, pro-
menant obéissance aux supérieurs de cet
ordri'; ce qui leur fut accordé, à la prière de
l'empereur Lêopold 1", qui avait êrril in
leur faveur au cardinal Casanale, protecteur
de l'ordre, ce qui fui confirmé par le p.ipo
Innocent XII. Ls se sonl depuis multipliés
dans ces provinces, où ils ont fait do nou-
veaux établissements. Ils observent les an-
cienms constitutions de l'ordre dans toute la
vigueur, ne mangent jamais de viande, vont
nu-pieds, sont vêtus de gros drap et portent
la barbe, mais non pas longue (1). Quant à
la forme de l'habillement et à la règle, ils se
conforment à ceux d'Italie.
Voyez Vila del lieafo Pieiro Gnmbacnrii,
pat/. 48. Peir. Bonnncioli, Pisim. Erem. Eu-
sei). Jordan., Spicileg. Iiisl.; et BoUaud. tum.
111 Junii.
§ III. Des ermites de Sa'tnl-Jérôme de Fie-
soli, avec la vie da bienheureux Cliiirles de
Montegrari'li, leur fondateur.
Nous avons dit, en parlant des Jéronymiles
d'Espagne, qu'ils avaient lire leur origine
des disciples du bienheureux Thomas de
Sienne, ou Thoinasurcio du Tiers Ordre de
Saint-François; nous avons aussi montré
dans le par.igraphe précédent (jne la congré-
calion des Ermites du bienheureux Pierre de
Pise avait reçu son aci roissemeiit par l'union
des congrégations du frère Ange de Corse el
du bienheureux Nicolas de Fourque-'alène,
qui élairnt pareillement du Tiers Ordre de
Sainl-Franço's. Voici encore un ordre qui a
porté le nomdeSaint-Jérome, qui a (oujours
été dislingué de ceux d'Espagne 1 1 d'Italie,
cl dont le fondateur était aussi du Iroisième
ordre de Saint-François. Il y en a qui ont
cru que, lorsque les disciples du bienheureux
Thomasuccio passèrent en Espagne, l'ordr»
de Saint-Jérôme de Fiesoli, qui est celui dont
nous allons parler, était déjà établi, et le
P. Papebroch a suivi ce sentiment [Ajmdliol-
latid., tom. UIJun., p...), mais cela ne peut
p is être, puisque les disciples du bienheu-
reux Thomasuecio passèrent en Es| agno
sous le régne d'Alphonse XI, roi de Castille,
selon le témoignage de.s historiens de l'ordre
de Saint-Jérôme, lequel Alphonse mourut
l'an 1350, el que l'ordre des Ermiles de Saini-
Jérônie de Fiesoli ne fut commencé, ou plu-
lot que le bienheureux Charles de Moute-
graneli. son fomlaleiir, ne se relira dans la
solitude que l'an 1300.
Quelques-uns ont jirélendu que le bien-
heureux Charles de Montegraneli élait gen-
tilhomme llorcnlin; il est sûr au moins qu'il
élait de la famille îles comtes de Montegra-
neli, qui est une terre dont il ne reste plus
que les vestiges entre Sainte-Sophie de la
liomagne et Saint-Pierre de Bagne, dans les
Etats du grand-duc de Toscane; et il se peut
faire que celte famille ait été agrégée parmi
les citoyens de Florence, comme plusieurs
autres iamilles nobles de cet Etat. Il s'adonna
(!) Voï.,à Uniidu vol., n" ISO.
C'13
nicTioN.N.Miii': ni'is oukres rei.icif.ux.
ROi
;'< In piclé <l(''s ses plus Iciidrcs années, rnr il
fi'équcniait sou>eiii les l'plisoset s'nppliqnnil
à la prière ri à l'oraison; il avait lio.iucoiip
lie compassion p<)ur les pauvres el les niisé-
ralilcs, et aiilanl qu'il le i ouvail il les srctiu-
rait cl leur Junnait lili^ralement l'aunione.
Quand il fui en àpe de choisir l'clal où il
devait passer sa vii', il prit le parti de l'Ii!-
plisi' <l reçut les ordres sacrés de> mains de
i'ciè()ue; mais, tendant toujours de plus en
plus à la perfeclion, il quiita ses [larents, ses
amis, et tout ce qu'il a>ait de plus cher au
inonde pour embrasser le Tiers Ordre de
Saint-François, et, s'étanl associé le bien-
heureux (laulier do Marzo, qui était aussi
du même ordre, il se retira dans la solitude.
Ficsoli, autrefois l'uncdesdouzc iiremièrcs
villes de la Toscane et le séjour des augures
el des devins toscans, élait si puissante,
((u'avec le secours de ses habitants Stilicon
défit Kadagaise, roi des Ooihs, et l'on pré-
tend qu'il resta plus de cent mille de ces bar-
bares sur le ( iiatnp de bataille; mais d;ins la
suite des temps, les Florentins étant devenus
plus puissants que les Fiesolans, ils détrui-
sirent Fiesoli, l'an lOCO, paur accroître Flo-
rence, el il n'en reste plus que les ruines.
Ce fut dans ce lieu que le bienheureux ('liarles
se relira l'an 13G0. Il y en a qui lui diuincnt
d'abord un troisième compagnon , qu'ils ap-
pellent Redon de Montcf^ianeli ; mais d'.juiies
croyenl que ce Redon < t noire saint fonda-
teur ne sont que le môme, et que Redon pou-
vait être son surnom. Ouoi qu'il en so t, à
peine ful-il arrivé à Fiesoli, qu'il conimença
par bâiir une petite église sous le nom de
Notre-Dame du Saint-Sépulcre, que quel-
ques-uns prétendent lui avoir été donni>c
par l'évéque de Fiesoli. Là il commença à
mener une vie très-austère el pénilcnle avec
son compagnon; ils eniployaii'ul presijue
tout le jour cl une partie de la nuit à la
prière el à l'oraison; leurs jeûnes et leurs
abstinences étaient presque continuels, un
peu d'herbes ou de racines avec un peu de
pain faisait toute leur nourriture, el ils ne
buvaient que de l'eau. Ils ne crurent pas ces
ausiérités suflisautes pour chàlier leur corps,
ils y ajoulèrent encore la haire, le cilice, les
discipliims, et ils inventaient tous les jours
de nouvelles mortifications, (jela n'empêcha
pas qu'il n'y eût <'n peu de Icnips plusieurs
personnes qui se joignirent à eux pour les
iniiler dans ce genre de v;c ; de sorte que le
grand (^ome de Médîcis, <|ui fut honoré du
nom de l'èri; du peuple, et de l-ilieratcur de
la jialrie, leur fit bàtir dans un lieu, un peu
au-dessus de celui où ils demeurai ni, un
nÉouasIèrc suffisant pour les loger, avec une
église qui fui dédiée sous le nom t'c Sainl-
Jeronie; el, charme de la be.iulé de c(! lieu,
d'où l'on decDUvie loute la ville de Florence
et une grand*' clcndue de pays, il fil cjicorc
bàlir pour lui un palais au pied de ce mo-
na>lère.
I.e jjreniier élablissemenl que fit f otre
sailli foHdaleur après celui de Fiesoli fui à
Vérone, où ayant été appelé, on lui donna
l'ctjlisL de bjiut-JcdU du M 'ul. 11 y demeura
qnel<)ue temps, el, après l'axcir pourvu d'un
nombre sulfisant de religieux, il alla à Ve-
nise, où il bâtit un content 8'>us le nom de
Nolre-Uanio des lîràccs, et quelque temps
après il en eut un autre à l'adoue sous le
nom de Saiiit-Jérc^me. N'oulanl affermir sa
congrégation, il en demanda l.i confirmation
au pape Innocent VII, l'an IVHO, qui la lui
accordi; mais la mort ra\aot prévenu, il ne
put signer les lellresqui en furent dressées:
c'est ce qu'on ai jirend par un brefdesoH
.successeur, (îiégoire MI, daté de Monte-
F'iore, au di)ièse de Kimini , le 8 juillet
1'»!.'), qui déclare que la confirmaiion de cet
ordre aura lieu du jour (p.ie son |)rédéccs-
seur l'avait accordée , quoique les lellres
n'en eusscnl pas élé ex pé liées à cause de !n
mort qui l'avait prévenu: Ipso /ne i^iœilrres-
sore nosli o, siciit Domino pldcidt, siiprr Im-
jnsinodi concessionis grulia lillfiis von con-
feclis xubicilo de tnedio, dit le pape ("rrégoire
.\ll dans sa bulle, nos divina favcnte clcmen-
lia ad (ipiccm ntnimi (ijioittdiat'is nssiiiii}) i,
ne i'p.s) Caiolus tt socii Itujiismodi conccs-
slonis fruslrarenlur e/fectu, roliiimus et apo-
slolica auclorilale decievinnis (/uod concess^o
ipsa },eiinde a die dutœ ipsius cnncexsionis
viilcrcl cl plennm oblincret roboris ftrmitd-
tnn, ac si super ci c/usden prœdec(Ssoi'is
lillcrœ snb ipi^ius diei 'laid confctœ fuissent.
C'est en venu dt? ce bref, qui se trouve
dans le bullairc de Laerlio Cberubini, (]u'As-
cagne Tamburin, qui l'a rapporLc d.ins toute
s.i icneur, met rétablissement de l'ordre (Je
Sainl-Jérôme de Fiesuli l'an J'iOO, sous le
pouiificat d'Innocent \'II, ce qu'ont failaussi
l'.iul Morigia el Lœlius Zeccliius. Mais le 1*.
(«onon, dans ses Vies des l'èns d'Occident,
n'attaque que ce dernier, el prelcnd qu'il
s'est évidemment lron)pé, par le léinoi;:nage
de (]asarubio<, Philippe de Rergame cl d'iino
infinité d'auteurs qui onl mis cet ét.ihUssc-
miiil l'an iM'6. Ce sont plutôt ces auteurs
( l le I'. Conon qui se sont trompés, puisque
le pape Crégoire XII déclare (jue son prédé-
cesseur liniucenl A II avait accordé la con-
firmation de cet ordre, (ju'il en avait fait e\-
pédierlcs lettres; mais que la mort, qui lo
prévint, l'empêcha de les signer. Or, il esl
certain qu'Innocent ^'II esl mort en l'iOG,
et qu'il ne fut pas même lon;;lemps malade,
|)Uisqu'il fui attaqué d'apoplexie dont il
mourut le 0 novembre de la même année. Il
y a bien de rapp.ucnce que cet ordre, ayant
obtenu ce bref de Crégoire XII, le reconnais-
sait encore pour souverain ponli'c, quoiqu'il
eût élé déposé dans le concile de l'ise le 5
juin VM); mais, comme nous l'avons dit
ailleurs, l'on voyait pour lors trois papos
daus l'Fglise. Il ne faut pas s'étonm r si Ché-
rubin a inséré celle bulle dans le bullairo
romain, (juoique ce p:|(e ail élé déposé;
puis(|ue le concile de Constance apjirouva
et autorisa tout ce (|u'il avail fait, non-seu-
lement jusiju'au jour de sa renonciation au
[lontilicat, qui fut f.iilc dans la qu.ilurziènio
session de ce concile, qui se tint le qiialri-
juillet de l'an l'illl, par ('h.irles de Mala-
lesla, seigneur de Kiinini, au nom de ce i» ir.-
ns
jm
1ER
GOC
tife, en vi'ilu du pouvoir qu'il en .ivail re-
çu , mais encore jusqu'à ce que cette renon-
ciation eût été notifiée à tout le monde, le
con( ile ayant pour ce sujet donné terme d'un
mois.
Après que le bienheureux Charles de Moii-
Icgraneli eut obtenu cette bulle de Grégoire
XII, il travailla à augmenter sa coii^iréga-
lion, à laquelle il donna le nom de Société
de Saint-Jérôme. 11 eut enfin envie d'aller à
Jérusalem pour y visiter le saint sépulcre et
les autres lieux de la terre sainte; mais,
pendant qu'il était à Venise et attendait une
occasion favorable pour f^ire ce voyage, il
tomba malade, et mourut le 5 septembre
IVn, après avoir recommandé sa société au
P. Pierre de Gênes, qui en fui le premier gé-
néral après lui, et au P. Jacques Filibcrli
d'Alexandrie. Il fut enterré dans son couvent
de Venise, et son chef fui transporté plu-
sieurs années après dans celui de Fiesoli,
où il a été en grande vénération.
Innocent VII avait approuvé cet ordre
sous une règle et des constitutions de saint
Jérôme tirées apparemment des écr.ts de ce
Père, et leur avait permis de faire des vœux
solennels, ce que Grégoire XII avait con-
firmé ; mais Eugène IV, l'an l'i4!, leur don-
na la règle de siiiiil Augustin, leur permet-
tant de retenir toujours le nom de Saint-Jé-
rôme et l'habit qu'ils avaient accoutumé de
porter dans leur société, qu'il voulut qu'on
appelât à l'avenir la Congrégation de Saint-
Jérôme de Fiesoli, établissant le couvent de
Fiesoli pour chef de celte congrégation. Il
ordonna aussi qu'ils y tiendraient leurs cha-
pitres généraux tous les ans, où ils éliraient
leurs généraux et les supérieurs des mai-
sons, qui pourraient être continués tant et
si longtemps qu'ils jugeraient à propos; et
(lue dans ces chapitres généraux ils pour-
raient faire des constitutions pour le bon
gouvernement de cet ordre. Il les obligea à
l'aire les vœux solennels d'obéissance, de
ch.isteté et de pauvreté. Il les soumit à la
règle de saint Augustin, et déclara que le
P. Jacques Filiberli d'Alexandrie, pour lors
général de cet ordre, serait tenu de renouve-
ler ainsi sa prolèssion entre les mains do
l'évêque d'Ostie, et les autres religieux de
l'ordre entre les mains de ce général.
L'habit qu'ils portaient dans cet ordre, el
([ue le pape Eugène IV leur avait permis de
retenir, était celui du Tiers Ordre de Saint -
François que le bienheureux Charles de
Montegraneli cl la plupart de ses premiers
disciples, qui étaient de ce Tieis Ordre,
avaient voulu toujours porter pour se res-
souvenir de leur premier état; mais le géné-
ral el queUiues religieux de cet ordre s'a-
dressèrent l'an l'iGO au pape Pie H pour leur
permettre de quitter cet hiibil, afin d'être
distingués des religieux du Tiers Ordre de
Saint-François, ce que le pape leur accorda
par un bref du 20 mars de la même année,
comme il paraît par un autre bref du îiOaoût
suivant, où ce pape fait mention de ce pre-
mier bref : iJudum siquiilem, videlicel siih
Uatum \m calend. A^jr., ponlifcalm nuilri
anno secundo, dileclis filiisJacubo deÀltxun-
dria tiinr priori gênerait el universis frulri-
bus Societalis Sancii llieronymi, ordinis fjug-
dem sancti, et eorum succe'Soribtis ejusdem
Soiieiatis prœsenlihus et futuris, lune nb eo'
rum primœva inslilulione lalem habilum qiia-
lem Fralres Terlii Ordinis Sancii Francisci
de Pœnilentia nuncupali el nunnulli Eremilœ
gerunt deferenlibus, el ob ipsis Eremitis et
Fratribus Terlii Ordinis hujusmodi in hafnia
dl/fcrenliam habere cupientibus differentem
habitum ud caulelam duntaxat ab eisdem
Eremitis et Fratribus Terlii Ordinis ejusdem
coloris recipiendi el receptum perpétua ge-
slandi per aliai nostras concessimus, etc.
Mais il y en eut plusieurs qui ne voulurent
point quitter cet habit, que quel(|ues-uns
d'entre eux portaient depuis plus de quarante
ans : c'est pourquoi ce même pape permit
à ceux-là de retenir toujours cet ancien ba-
bil, et leur accorda deux maisons qui appar-
tenaient à cet ordre pour y demeurer, savoir
Saint-Jérôme de Paiioue el Saint-Pierre de
Vicence, les ayant absous de l'obéissance
qu'ils devaient au général de cet ordre, et
les soumettant aux ordinaires des lieux où
ils auraient des maisons. Il ordonna que les
religieux qui demeureraient avec l'ancien
habit s'appelleraient les Frères de Sainl-
Jérâme de la congréijaUon de Frère Charles
de Montegraneli, leur fondateur, qu'ils joui-
raient des mêmes privilèges de tout l'oidre,
et qu'ils pourraient faire la quête dans les
lieux où ils demeuraient, accordant six mois
de temps à tous les religieux de cet ordre
pour faire choix de cet habit et de la con-
grégation. Ainsi ayant divisé cet ordre en
deux congrégations, il ordonna qu'en cas
que l'une des deux vînl à manquer, soit du
nouveau, ou de l'ancien hahit, les couvents
cl les biens qu'elle posséderail apparlien-
draient à celle qui resterait; ce qui fut con-
firmé par le pape Paul 11 l'an liCo ; et pour
lors les religieux du nouvel habit cédèrent
ces deux couvents de Padoue et de Vicence
à ceux qui retinrent l'habit du Tiers Ordre
de Saint-Fiançois, comme il parait par l'acte
qui en fut passé par-devant Ange de Fasa-
lo, évé lue de Feltri, lequel acte est rap-
porté tout au long dans le bref dePaul II, du
20 juin de la même année 1465. Mais, soit
que la congrégation de ceux de l'ancien ba-
bil à qui !e pape Pie II avait donné le nom
de leur fondateur eût été éteinte, el que les
autres du nouvel habit fussent entrés dans
la possession de leurs biens et de leurs cou-
vents, cet ordre n'était point divisé en deux
congrégalions iliflerenles, lorsqu'il fut sup-
primé l'an 16()8 par le pape Clément IX, qui
accorda aux prêtres, pendant leur vie, qua-
rante érus romains par an, et aux frères
laïques v ingt écus. ils avaient autrefois plus
de quaranle maisons ; mais ce nombre était
bien diminué lorsqu'ils furent supprimés.
Ils en avaient une à Rome, sous le litre do
Sainl-Vinceni el de Sainl-Anastase, paroisse
])apale que Paul V leur avait donnée en 1612,
L'i qui depuis leur suppression a été donnée
aux Clercs Kégulieis Mineurs. Le cardiual
niCTIONNAlUE DES ORDRES UI.LIGIEUX.
cor
Iules Mnzariii, qui avail ^li- liaptisô tl.iiis
cvUc rfilise, I avail f.iil reliàlir avec un Iri^-
ln-aii (lorlail. Si «m eu voui < rnire M. Ili-r-
tiianl dans son llisloire dis Orlrcs religieux,
Cis Kriniles «le Fiesoli subsislenl toujours,
et oui encore treiile ou qn.iranlc maisons;
mais, s'il avait lu la l)ullf de suppression
de l'ordre des Jésuaics, iju il nconn.iil avoir
élé supprimé par le pape Clément IX, il au-
rait vu que ce pontife supprima aussi par la
même bulle les Kriniles de Saint-Jérôme de
la congrégaliou de Fiesoli, et les chanoines
de la congrégation de Saint - lîcorjzes i»
Ah/ha.
Leur habillement consistai! en une tuni-
que giise serrée d'une ceinture de cuir, un
eapuce attaché à une grande mosctie et une
chape plissée par le cou aussi de la même
couleur. Ils avaient aussi autrefois des san-
dales de bois (1). mais ils les quiltèrcnl vers
la tin du xvr siècle.
Voj/ez Silvano IV zzi. Vile de Sauti (la
Tofcàna, pag. t323. Francesco Cattani da Dia-
relto. Vite di SS. di Fiesuli. (îonon, Vil.
PI'. Occident., lib. vi, pay 380. Wading.,
Atiiinl. Minor., toin. V, ann. 1405, num. 18 ;
lum. \'I, ann. l'iCO, n. k'.]; et ann. l'iCo, »i.
7. Francise. liordou., Chronoloq. Fralrvm
'J'ertii Ord. S. Fruncisci. Joau. Mar. Vern.,
Anniil. p/u.irf. OiJ. Silvestr. Maurol., Mar.
Ocenn. di tut. (jl. ReHij. Paul Morigia, llist.
de tontes les lielig. Asca;;. Tanihur., De Jur.
Ahlint.. tom. il, dis/). 2k, f/uw.^t. 4-, n. 72 ;
liuUnr. Rom. l'tdsdor. Vir-iil., De Rnum In-
tenlaribus, lib. vu, rap.S. Philipp. Hergom.,
Siipplem. Clironic. lih. xiv, jkkj. .'545. Bo-
naiini, Calalotj. Ord. relig. part. i.
eo3
SECTION TROISIEME.
DE
MOINES ERMITES DE SAINT - JI-.ROME
L'OIISERVAMCE, OU DE LOMBAUDIE,
Avec la vie de Loup d'Otmédo, leur fondateur.
Siguença, parlant de Loup d'Olmédo, in-
stituteur des moines Ermites de Saint-Jé-
nWne, dit que ce sont des ignorants qui ont
écrit qu'il avait réformé l'ordre de Saint-Jé-
rôme, et qu'ils devaient savoir ce que veut
dire le mot de réformer, qui ne signifie,
selon lui, que remcUrc en son premier état
ce qui avail é é perdu ou corrompu p,r né-
gligence : Los ignoraiilrs que dizcn en sus
escritos que fniy Lojte reforma lu orden de
Son-deriinima, no devrn de super de quiere
dtzir reformur. Hrformar rs reduzir una cosa
à la primera forinn que se ha perdilo. o estra-
gailo por nejligcncia [llist. de ta Orden. de
San-ùeron.). Je veux croire que l'ordre de
Saint-Jérôme était pour lors dans toute sa
frr»eur, et ()ue les religieux étaient de fidè-
les observateurs de leur lègle ; iii.iis, comme
le mot de réformer signifie aussi dunnrr une
meillcuic lorme, on ;iuiait pu iloiinir en ce
sens à Loup d Olmédo le nom de Kèiorma-
tcur, puisqu'il prétendait changer iiuehiucs
anciennes observances drs l'.rmites deSainl-
Jéiome, et leur en donner de nouvelles qu'il
croy.iil plus conven.ibles à leur état, et qu'en
ellel il donna aux religieux de sa congréga-
tioii une règle tirée des écrits de saint Jé-
rôme, parce qu'il ne croyait pas (jue celle de
saint Augustin fût projjre pour des moines
tels qu'il préiendail que les religieux de
Saint-Jérôme devaient être, l'eul-éirc que le
titre de Itesxtscitator ordinis S. Ilieroni/mi
qu'on a joint à celui de lii formator dans l'é-
pilaphe de Loup «l'Olmédo est ce qui a cho-
qué Siguença, et qui lui a fait dire que cette
épitapho n'était pas assez inodesic, non uiug
modesio. .Mais je ne veux point entrer d.ins
leur dispute, et, si quelquefois le mol de lé-
forine m'échappe en parlant dans la suite
des moines de l'observance de Loup d'Ol-
médo, c'est que je suivrai hs historiens de sa
vie et les mémoires qui m'ont été donnés
par le H. P. Antoine lionacioa, moine de l.i
niéine congrégation, ancien ledcur en théo-
logie, et Irès-vcrsé dans l'hisloirc de son
ordre.
Loup d'Olmédo naquil l'an 1370 au bourg
d'Olmédo, au diocèse d'Avila en l'spagne,
d'où il a pris son nom. Les historiens de sa
vie ne sont point d'.iceord touchant ses pa-
rents; les uns le font sortir de la famille des
t'ionzalez, les autres il' s Ferrari de Valence,
et d'autres disent iju'il était frère de saint
Vincent Ferricr, «jui s'appelait Fcrreri. Dès
ses plus tendres années, il méprisa les petits
|ilaisirs qui sont permis aux jeunes gens : il
s'appliijua à former sa vie sur le modèle di'S
plus excellen'es vertus; il s'adonna entière-
ment à l'élude des sciences, et, comme Pè-
rouse ciait pour lors le lieu où llorissaienl
les lielles-lellres en Italie, il y lut et li i une
étroite ainilié avec domOllioii l'.oloiniie, qui
fui élevé dans la suiie au souverain ponlili-
cat sous le nom de .'\lariii> \', et qui y étu-
diait aussi.
Ayant lini ses élude-, il relourna en son
pays, où il s'acquit bientôt l'estime de Fer-
dinand, loi d'.\rag'>n, qui, lejugeanl capable
d'alTaires iinportanles, l'envoya auprès de
l'aniipipc lienoit Xlll, que l'Aragon r<con-
iiaissait pour légitime successeur de saint
Pierre, et ■luprès lU'. la rèpulili(|ue de liéiies
et de quelques princes d'Italie. A son retoui',
il voulut l'élever à de hautes dignités, mais
il les refusa courageusement pour se retirer
dans le nionaslère de Notre-Dame de t!ua-
daloupc de l'ordre <le Saint-Jérôme, dans la
[irovince d'Kstramadure , où il prit l'Iialiit
religieux. Il n'alandonna pas pour cela le
soin de ses études, il les associa de telle
sorte avec la prière et l'oraison, que l'un
surcédail à l'autre, et ces exercices n'étaient
interrompus que par le peu de lemps qui
lui était nécessaire pour prendre un peu de
repos et de nourriture.
Ses vertus le firent en peu de lemps pas-
ser par toutes l 's dignités de l'ordre ju^ju'à
celle de géni rai, où il fui élevé l'an l'i2J,
(|uoic|ue son humilité y apportât beaucoup
(!'• p[)OMlion. t",e fut dans ci't ernjiloi qu'il té-
moigna son grand zèle pour l'observance
(I) Voy , ï la fui duvuL.n" i;.>l.
rm-
JER
JEP.
610
régulière. Selon les hisloricns de sa congré-
gation, quoique ciux des Eriniles d'Espa-
gne disent le cunliaire, il apporta tous ses
soins pour corrigrr des ;ibus qu'il préten-
dait être dans l'ordre. H exhortait les ali-
senls jar lettres, il sollicilail les présents par
ses discours à la pratique des vertus et à
l'oliscrvance de leur règle; et, afin que son
exemple les animât davanl.îge, il se relir.at
de temps en temps dans la solitude, où il
gardait une perpétuelle abstinence. 11 voulut
bannir du rélccîoire l'usage de la viande, 1 1
inspirer au\ religieux l'esprit de retraite cl
de solitude qu'ils s'étaient proposé, cl où ils
vivaient dans les cummenciuients, «omme
nous avons vu dans les pjiragîaphes précé-
dents; mais, voyant les oppositions qu'ils y
apportaient, et qu'ils voulaient toujours per-
sister dans leur manière de vie, il se démit
de 5(11 ollice, et se relira pour quelque leinps
chez les Chartreux, afin de fdrmer sur les
exeicicesde ces salnls rilit;i(ux la réforme
de son ordre qu'il ujcdilait toujours.
Etant assuré de quelques religieux qui
voulaient seconder ses pieuses inienlions, il
vint à Uomc l'an ik2h, sous le pontilical de
Martin V, qui, à eau e de leur ancienne ami-
tié, comme nous avons dit, lui fit un accueil
d'autant plus favorable, qu'il ne venait pas
aux pieds de Sa Sainlelé pour recheiclur sa
propre gloire, mais celle de Uieu, qu'il sou-
haiiail être mieux servi dans son ordre. Il
lui exposa donc le dessein qu'il avait de ra-
mener les religieux à l'étal monacal et à la
solitude, ou d'établir un ordre nouviaude
moines sous le titre de Saint-Jérôme et la
protection de ce Père de l'EgliSe, si les reli-
gieux d'Espagne persisiaient à s'opposer à
ses biins desseins. Le pape fit venir d'Espa-
gne les défiiiiteurs de l'ordre pour écouter
leurs raisons, et ils lui firent de si humbles
remiintrances pour qu'il ne changâl rien de
leur manière de vie, que ce pontiiè le-, ren-
vo)a dans leur monastère en leur accordant
leur demande.
Mais, ne voulant pas q.ue les dcss: ins de
Loup d Olméilo lussent sans effei, il lui ac-
coida une bulle datée de la même an-
née 1424, par laquelle il lui permit de fon-
der une congrcgaiion sous le titre de moines
Ermites de Saint-Jérôme, dans les monta-
gnes de Cazalla, au diocèse de Sévilh , en
Espagne, l'établissant général perpétuel de
celte nouvelle congrégation, avec un pou-
voir absolu sur ses religieux ; il lui aceonla
d'autres bulles qui contiennent plusieurs
privilèges, et la communication de ceux dont
jouiï'Saicnl les autres Ermites de S,iint-Jé-
rôuie, avec la confirmation de ce nouvel or-
dre sous la règle de saint Augustin.
11 retourna donc en Espagne muni de ces
bulles, et jeta les fondements de sa congré-
gation dans le monastère de Saint-Jérôme
(le l'Aeella au mont Cazalla ; et, afin que ce
nouvel édifice, étant bâti sur des fondements
fermes cl solides, pût être élevé plus baui,
il ajouta à la règle de saint Augustin des
(1) Voy., à lu lin du vol., n"" 15-2 ci 153.
constitutions très-austères et très-rigoureu-
ses tirées en partie de celles des Cliarireux.
Kllcs portaient entre autres choses que Ls
religieux ne pourraient étudier dans le cou-
vent, et ne |)ourr.iienl en sortir pour aller
étudier dans les universités, selon la prati-
que des Chartreux, alléguant ce passage de
l'Apôlre, que la science enfle, et que la charité
édifie; que les femmes ne pourraient (las en-
trer dans leurs églises, et encore moins dans
l'enclos du monastère ; qu'on ne inangi rail
jamais de viande; (|u'oii ne porterait du
linge que dans les malailies, et i|u'ils jeûne-
raient depuis la fêle de saint Jérôme jusqu'à
Pâquis. Loup d'Olmédo (hangej encore quel-
que chose de riiabillement des religieux da
Saint-Jérôme ; car. comme il fil porter aux
religieux de sa congrégation le nom de moi-
nes, il vou ut (|u'ils en portassent l'habil,
leur ayant fait prendre une coule à la ma-
nière des moinis bénédiciins, qu'ils portent
au cha-ur et lorsqu'ils sortent (Ij.
Pende leoi|s après qu'il eut fondé son
premier monastère de Saint-Jéiôme de l'A-
eella, l'on en bâtit encore cinq autres dans
ces mêmes montagnes, et ces solitudes so
changèrent en des colonies de moines. Le
pape ra}aut fait venir à Kome, lui donna,
l'an 142o, le monastère de S.unl-Alexis au
mont Avenlin, qui avait été occupé jusque-
là par des Preuiontrés. Ce souverain pon-
tife, voulant enirelenir la paix cl l'union
cnire cette congrégation et celle des Ermi-
tes, dlinna une bu. le, l'an 1428, par laquelle
il onloniiait que Loup d'Olmtdo pourrait ti-
rer (le l'ordre des Ermites d'Espagne les re-
ligieux qui voudraient passer dans le sien,
et ((ue les biens qu'ils avaient apportés en
entrant dans celui des Ermites relourne-
raieni ù celui des moines deLoup d'Olmédu;
que tous les couvents d'Espagne qui vou-
dra eut lecevoir les coiistituiions de Loup
d'Olmédo le pourraient faire après en avoir
demandé et obtenu la permission des supé-
rieurs ; que quand les Ërmiies d'Espagne
iraient dans les couvents de» moines de
Saint-Jérôme, et réciiiroquemenl les moines
dans ceux des Ermites de Saiiil-Jérôme, ils
y seraient reçus et traités, tant en santé
qu'en maladie, coiiiinc s'ils n'étaient tous
que d'un même ordre et d'une même con-
giégation; et qu'eniin dans les deux ordres,
l'on dirait réciproquement des sutVrages
pour les religieux qui y décéderaient. Mais '
cette bulle n'apporta pas ta paix dan;* ces
deux ordres, qui n'euiretinreut pas une
trop bonni: correspondance entre eux.
lies couvents do Loup d'Olmédo se mul-
tiplièrent cependant en Italie. Le second
({u'ils curent lut à Casiellacio, à un niilie
de la ville de Milan, qui avait été fondé par
Jean Galéas, duc de Milan, pour les Ermites
de Sainl-Jerôme d'Espagne, et qui deman-
dèrent d'être unis aux moines de l'Obser-
vance: c'est ainsi qu'ils sont nomniés dans
les bulles de plusieurs papes. L'on ne doit
pas passer sous silence que Philiiipc-Marie,
cil
DlCTlONNAinE DES OUDRES RELIGIEUX.
6«
•lue dcMil;in,fiUdi'Jonn riali-.is. njant odort
à Loiiiid'Oliiicdode gros revi-iius pour l.i sub-
sistance df> religieux do ce luonaslèrc, il les
refu»a, disant que la pauvreté n.> pouvait pas
s'aciordor avec le superflu. Après avoir ré-
glé toutes fliosis dans ce monasièrc, el
après ovdir fait renouveler à ces religieux
II' \a-u de vivre dans Tobscrvance, il alla à
(icnes pour prendre possession d'un autre
monastère, d'où il retourna à Home, où il
forma le dessein décomposer une règle tirée
(les éciils de saint Jér<)mc, ne trouvant pas
celle de saint Augustin propre pour dis
iiioinis. Il y travailla, et, après l'avoir aclie-
\éo, il la préseiit.i au pape pour y donner
son .ipprobation, ce qu'il lui accorda, l'an
li20, avec la permission de la faire observer
à ses religieux, au lieu de celle de saint Au-
gusliii, dont il les dispensait. Ainsi ce ne
lut point parce que Loup d'Olmédo voulut
faire reciîvoir cette règle tirée des écrits de
saint Jérôme, que les Ermites d'iîspagne ne
voulurent point embrasser la réforme,
lonimc quelques-uns ont écrit, puisque
le papc.M.iriin approuva d'abord la coiigrè-
galioii dr Loup d'Oiiiiédo sous la règle de
saint Augustin, et que ce ne fut que l'an
li^iO qu'il permit au\ religieux do cetli' con-
grégation de prendre la icgie qui avait été
tirée des écrits de saint Jérôme par leur fon-
dateur.
Siguença, qui en quelques occasions pa-
rait ] eu favorable à Loup d'Olmé.lo, ne
peut pas néanmoins s'empêcher de louer
celte règle. Il dit qu'elle est écrite avic es-
prit el lidèlcmeiit recueillie, que ce sont les
plus lieaux centoiis qu'il a t tus, et qu'ils
nièrilenl plus de louanges que ceux que
l'roba Falcoaia composa, tirés d'Homère et
du A'Irgile, et qui sont si estimés dans le
inonde ; tslnia ordcnnda cou buen iriymio,
iltltijenriii, y ficlnienle cugida, y los mus bien
(ilados cent unes que yo visto, digiios de mus
(sdma que los que liizo de las obi as de Virgi-
lio 1/ d'ilvmero l'ruba Falcunici, tan utaba-
dvs en cl mundo.
Loup d Dimedo, pour s'acquitter de son
oflire de général, résolu après crla de r. -
tourner en lispa;;ne pour y laire la viitt; de
SOS iiionas ères. Il y av.iit p.uir lors quel-
ques divisions entre les évoques de CastiLc,
l't I Kglisc de Séville éiait aussi sans pasieur.
A|>rès la mort de dom Alphonse de i'Aéca,
(|ui en était archcvèqui', qui arriva l'an
til7, duni Didace Malilonat de Aimay.i lui
avait succède; il gouverna son dioi èse pen-
dant (|uinze ans; mais ajaiit eu diiVerend
avec son clia|iitre au sujet de que. que le-
lorme qu'il voulait introduire parmi sis cha-
noines, ceux-ci richerclièniii sa vie, el eu
lirenl des informations peu lavurables qu ils
envoyèrent au pape M.iriin \ . lis lui npro-
cltalcat entre autres choses qu'étant au con-
cile drdonsianic en qualité d'eutoyé des
rul^ di- Castille et de Léou, il y avait favorise
l'aniipape lieiioit \lll. Le pape en était con-
vaincu, et avait toujours ciinser\é conlre ce
prêtai i|iieii|iie ri'sSi-ntiiiieiit ; de sorte que
ceci jouit a d'autres faits imjiortjnts ilonl
on l'avait informé, fit que ce pontife le
priva de son archevêché, cl iui donna seule-
ment le titre d'archevêque de Tarse, llomme
Loup d't3!médo se disposait à retourner m
l>p.igiie, le pa[ie, qui le connaissait pour un
humilie expérimenté dans les affaires, lui
donna railiiiiiilsiratiou de cet arclicȏche, el
un pouvo r pour arcoiiiiiunler les dilTerends
qui étaient entre les évéqucs de t'asiille. 11
arriva à Séville l'an 14-29; il prit d'abord le
gouvernement de cette Eglise, et, après y
avait fait quelques règlements, il alla en
Cas ille pour s'acquitter de sa commission 11
réussit SI bien par sa sagesse et par sa | ru-
deiice. que tous les évéques se réunirent en
peu du l m|)S, el vécurent dans la suite en
(larfaite intelligence. Etant retourné n Sé-
ville, il lit un autre établissement pour sa
congrégation. 11 y avait proche de la ville
une abbaye sous le nom de Saint-l«idore del
Crtm/)'», (jui était extrêmement riche el de la
fondation des comtes de Gusmaii. Elle avait
élé possédée par les moines de Citc.iux ; mais
l'observance régulière en ayant été bannie,
elle fut olTerle à notre fondateur, qui l'ac-
cepta : ce qui a fait donner à cette congré-
gation, par quelques-uns, le nom de S.jiiil-
Jsidore. Il y lit un plus long séjour que d.iiis
le palais archiépiscopal; 1 1, après avoir fait
la visite de ses autres monastères, il s'adonna
entièrement au gouvernement de ccîtc
Eglise, qu'il quitta pour un temps, ayant été
encore envoyé parle pape pour aller faire
la visite do la nouvelle congrégation des
chanoines séculiers de Saint-Jean l'Evange-
listc eu i'urtiigal, dont nous avous parlé.
Elinlde retour à Séville, i! continua à gou-
verner cette Eglise ; mais le iié>ir qu'il uv .il
de retourner dans sa soliiiide fit qu'il remit
entre les mains d'Eugène IV, qui avait su -
cédé à Martin V, ladministraiion de l'Eglise
d,- Séville. Il vint quelque temps après à
Hume, où en ayant leiidu compte à Sa Sain-
teté, il se relira dans le monastère de Saim-
Alexis, dont il ne sortit plus. Il y mena une
vie irès-austèrc jusqu'à la mort. Il jeûnait
six ou sept mois de l'année, et le plus sou-
vent au ;>ain et à l'eau. Il portail cuntiiu.el-
lemeiit le cilice, cl prenait de singlantes
disciplines. Sou lit était une planche, i)uel-
queluis un pt^u de paille. Il ne vivait plus
que pour Dieu, il soiihailail d'être uni a\ec
lui, il soupir.iil sans cesse après cette union;
et ( iiliii, accable par ses austérités, il lumbi
malailc el lut attaqué dune fiètre violeiiiu
()iii peu de jours après le réduisit à la der-
nière extièmiie; c'est pourquoi, voyant la
moi t approcher, il demanda avec beaucoup
irhuiiiilite les sacrements de l'Eglise, cl,
après en avoir été muni, il rendit sou âme à
son i.rcaleur !• IJ avril l't.'JJ, en préscnco
de tous se» frères, qui fondaient en larmes,
étant âgé de soixante-trois ans. S. in corps
fui enterré dans l'eglise de ce monastère, ou
un lit celle épilaphe sur son tombeau.
Uic j>icei H. iM Clirislo P. /•". Lupus de
Ohnilo fuilionc //i'>//u/iiij, Rcsusciiator il
H' f'iinutor, lie piimus iiencralis t'iic/iosituy
o!d.nis M nuhi.ruin Suncti JJicronymi,
HT,
.IKR
JFR
Gli
l'i-iiiri/uelnijus monasterii, gui obiit die XI 11
Apritis, nnn. M CCCCXXXIII, Ponlificalus
Hoinini Eugenii Papœ !V nnn. III.
l'Iiilippe 11, roi d'Kspagiie, fil réunir les
iiionaslères que cel ordre avait eu Kspagiie
au nombre de sept, à relui des lù-iniies ou
.léronymiles.ran 1595.11 leurcn reslecii Ita-
lie encore dix-sepl, dont le principal, et qui
est chef d'ordre, est celui de Sainl-Picrre de
rOspitalcllo, au diocèse de Lodi; les autres
sont ceux de Saint-Alexis à Rome, où réside
cnlinaircment le procureur général; Suinl-
Paul à Albano, Saint-Jérôme de Caslellacio,
Saint-Côme et Saint-Daniieu à Milan. Saiiit-
Carpolbro proche de Cômc, Saint-Jcrônic
pro.lic de Novare, S iin:-Jérôiiie du Biella,
Sainte-Marie de Carauiagna, Saint-B.ir-
bacien à Bjlogiie, Saiul-Savin à Plai-
sance, Saint-Michel ci IJrcmliio, Sainl-Sigis-
mond à Crémone, Sainle-Marie à IJi.idena,
Sainl-Jcrônic proche de Mantouc, Saint-Mar-
tin à Pavie, el Saints-Gervais et Protais à
Montébelli)„ Le général, qui prend le litre
de comte de l'Ospitaletlo, fait ordinairement
sa résidence dans ce lieu ; il perle le man-
telel elle cainail comme les prélats deKome,
cl se sert d'ornements pontificaux par une
concession du pape Paul V; et Urbain \ 111 lui
permit de donner les ordres mineurs ù s s
religieux.
Ils suivir( nt d'abord la règle de saint Au-
gustin, coninie nous avons dit ; ils prinnl
ensuite celle qui leur avait été prcsi nie par
leur tondalcur Loup d'olniédo, qu'il a\ait
tirée des écrits de saint Ji'rôme; mais, après
sa mori, ils quiltèrent cette règle pour p. en-
dre cfUe di' saint Augustin, qu'ils suivent
encore aujouid'liui. Il y a cependant des au-
teurs qui ont avancé qu'ils suivent celle que
ijoup d'Olmédo leur a donnée: mais le can-
Irairese piouve par l'ordinaire ou lituel de
celtt; congrégation, qui a été rél'ormé dans
le chapitre général tenu l'an 1G14, où, en
pailantdaiis le chapitre deuxième des saints
dont ils doivent faire l'offioe, il e4 maniiié
que le 28 février ils feront l'olfi c double de
la Trans'iation de saint Augusiin, dont ils
suivent la règle: D.e i28 Fcbruarii Trunslu-
lionis sancti Atigusliiii episcopi ne EccUsiœ
(loctoris, duplex, subcitjus régula nos (juoque
viililumus. Il en est aussi fait mention dans
la formule des vœux, tant des moines que des
frères c nvers,qui est conçue en ces termes:
Moi F. N., d'un lel lieu, promets obéissance
à Dieu tout-puissant, à lu glorieuse V terge
Marie, à notre Pire S. Jérôme, et à vous
dum N., prieur de ce monustère du diocèse de
N., et à vas successeurs ( sauf l'obéissance due
au général et au chapitre général), de vivre
sans propre en chasteté, selon la règle de saint
Augustin, et de conformer mes mœurs selon
les statuts apostoliques de l'ordre jusqu'à ma
mort. Donné, etc.
11 y a aussi dans cel ordre, outre les frères
convers, des frères commis et des donnés
qui font des vœuK en cette manière : Moi
F. N , natif de N., pour l'amour de Dieu el le
iidut de mon âme, j'abandonne et donne ma
propre personne et tous mes biens présent." et
à venir, droits et actions qui peuvent m'appar-
tenir présentement ou qui pourront m'uppar-
tenir à l'avenir, à Dieu lout-piAssant, à lii
bonne vierge Marie, à notre Père saml Jérô-
me, et à vius, domi\., qui êtes ici préstiil
pour recevoir mon abandon et mn donation,
et pioniels obi s ince à vous et à vos succis-
scnrs [sauf celle que je dois au chapitre géné-
ral et au général) ; el, s'il arrive (ce qu'à Dieu
ne plaise) que je sorte d'ici sans permission,
il sera permis aux serviteurs de Dieu du même
ordre, de leur pleine autoiité, de me pour-
suivre et de me contraindre par force de re-
tourner à leur service. Il n'y a p int de reli-
gieuses de cet ordre, les statuts défendant
expressémeni d'en recevoir. La rè;;le de Loup
d'Olmédo défendait aussi aux religieux d'é-
tudier, afin d'être plus en état de remplir les
devoirs de leur état, dont un des principaux
était d'être toujours dans la retraite ol dans
la solitude; mais les statuts (|ui ont été dres-
sés après la mort de Loup d'Olmédo ont ré-
tabli les études. Ils tiennent leurs chapitres
généraux tous les trois ans. On y élit le gé-
néral, les définit(yirs, les visiteurs cl les su-
périeurs particuliers des maisons. Ils se lè-
vent à minuit pour dire maiines, et ils no
mangent poiufde viande dans leurs malsons,
si ce n'est dans celle d(î Saint-Alexis à ''.orne,
à cause qu'elle est située en mauvais air.
Outre les jeûnes presrrils par lliglise, li y
en a encore plusieur s qui leur sont ordonnés
par les statuts, et depuis le premier oclobre
jusqu'à Pâques on ne leur donne aucune
pitance le soir, les lundis, les mercredis et
le-, samedis. Leurs constitutions furent ap-
prou\ées par le papï Paul V l'an ICll.
Quant à l'habillement, les moines ont une
luni(|ue blanche serrée d'un ceinture de cuir,
un scapulaire de couleur tannée auquel est
attaché un petit capuce, dont ils ne se ser-
vent point pour se couvrir la tète ; car, lors-
qu'ils n'ont que la robe et le scapulaire, ils
portent un bonnet carré ; mais, lorsqu'ils
sont au chœur, exiepté pendant sextc,
noue et compiles, ils mellent par-dessus la
robe une coule de couleur tannée, qu'ils
porte .1 aussi allant par la viile. Ils n'ont
point les pieds nus, et ne portent point de
sabots, comme dit M. Hermanldans son His-
toire des Ordres religieux; ils n'en ont même
jamais porté. Les frères convers ont pareil-
lement une tunique blanche el un scapulaire
de couleur tannée, et au lieu de coule un,
manteau. Les frères commis ont une luui(|uu
de couleur tannée et un manteau do même,
et les frères donnés ou oblats qui demeurent
dans les monastères ont une petite luniquc
aussi de couleur tannée qui ne desiend que
jusqu'aux genoux; mais ceux qui sont hors
le monastère sont vêtus comme les séculiers.
Celle congrégation a pour armes d'azur à
des nues en chef, un bras issant du côté
gauche de l'écu en partie nu et en partie re-
vêtu d'une manche de couleur tannée, tenant
à la main une pierre, une croix de bois bro-
chaitt sur le tout, et un lion couché aii pied
de la croix sur une terrasse de sinople, l'écu
timbré d'un chapeau de cardinal.
etr, mcTioNN.MUF. dks oudkks ueugieux. ci g
^i'uciira, llisi. di ht Oui. de S. Ctnin. de la lorre de Ccriélo, qui ajjpai leiiail à
Il.TinénogiMc (le S. l'ahlo, Oriyen el (on- celle famille.
liiiuacion de t'Iuft. y irli.j. (icronim. Silu si. La nai.'Jsancc distiiigiici> de .loan . joiiilo à
M.iiirol., Mnr. Océan, di lut. gl. Hclig. l'io'r. .••es graiuls biens, le lit passer par louU-s lis
Orscoii/. , /'»vr»i(/. /{(im. l'ielro Kos,"i, rW. (/i rh.irgos de la répiiiiliijuo , dont il do\iiU
l.up. (/'0/".e(/o. Aseagii. T.iiiiliur., HeJur. même nonlaloiiicr ; ni.iis il n'en élait pis
Abbal., loin. 11. Philip. Iterij.im. >"(//////(»". plus liltéial : au coulriiiri' . son cu'iir élail si
Chroni., lib. xiv, et .Slntitt. et Ord. Muni- allaclic aux richesses, (|u'il él.iit uniquement
c/ior. Ercm. Cong. S. Jeroiii/mi. occupe des moyens de les augmi'iiicr par
J. K()MI<: DK L.\.NZ.\.r<;M.Ji:A>f I'aScuase. t""!*"» «"f'^s ^^ *"'«'* Jus'es <'' i"jus(es. LU
,r...^«vï»iiii.-»; t' I- A ,t\ jour, étant venu chez lui avec un grand ai -
JLUONV.Mllt^>. }oy. J.:uô.«e (Oiu.nK m; j,^,^ ,,, ^^ imuvanl point le dîner prél à
^^"'^ '• i'Iieure ordinaire, il se mit dans une colcii!
j/iSUATES (OnnnE diîs). t'irannc contre son cuisinier, et s'einporl.i
§ I-. De l'ordre des Clercs aposloliqurs ou "H'""- /onlre sa femme, comme vi çeûi clé
Jésuotes de Sainl.Jérôme. avec la vie de f? ■'"'^- '/.'^^ ' a^'.n.e, qui était fort vc, ueuse.
,«mi Jean Colombin, leur f„ml,Ueur. 'j'''^^ ''^' ' ^"lo^cir; et .ilin ,iu i eut de ,|uoi
' s occuper pendiiil qu ou apprêterait le di-
Si les provinces se glorifient d'avoir donné ner, elle lui mil eiilre les mains la Vie des
naissance à des hommes illustres qui se sont Saints; m is Jean la rebuta el jeta brusque-
fait admirer par leur science ou qui ont e^- ment le livre par terre. Sa femme se relira
collé dans quelque art, à plus forte raison se sans lui répondre, et Jean, se trouvant seul,
doivent-elles esiimer heuieuses qunud elles ramassa le livre. Dieu permit qu"eu l'oii-
produisent des personnes ((ui se rendent re- vranl il luiiibâl sur la vie de sainte .Mar.o
cominandables par la s.iinltlé de leur vie, Kgyjilienne; et le plaisir qu'il prit à la lire lui
arcoiiipagnée il'une grande innocence de lit oublier le rf|ias pour le.iuel il avait eu
mœurs, qui leur foui inériler le culte et la lanl dimpatience. Il fut si louché de celli-
vénération des fulèlis. La 'roscane a fourni lecture, qu'il coinmença à méiiriser ce qu'il
des personnes illustres de toutes les façons, avait le plus a'iiié juscju'alors. D'avare i|u'il
et elle a l'avantage qu'entre les saints qu'elle él.iit, il devint fort libéral envers les pau-
a donnés à l'Lglise on y compte plus de fon- vres. il jeûnait presque tous le* jours, Iri;-
daleurs d'ordres que dans les autres provin- queutait les églises, cliâti.iit son corps par
ces. Car, outre le bienheureux Etienne Cioiii des austérités et des mortifications surpre-
dc Sienne, fon lateur des chanoines réguliers nantes ; et sou zèle croissant de jour en jour,
de la Ciingrégation de liidogne, et les sept il fil la proposiiion à sa femme de garder la
fondateurs de l'ordre des Servîtes, dont nous conlinence et de vivre à l'avenir comme frère
ddiiiierons les vies à l'iinicle de ce nom, el sa'ur. Celle dame étail encore jeune; mais,
nous parlerons dans la suie de saint Jean comme elle s'élaitdejà exercée dans toutes le»
Gualbert de Florence, instituteur de l'ordie veilus, elle n'eut pas de p iiie à consentir à
de \'allombreuse; du LiLulieureux Charles une séparation de corps, 1 1 elle n'eut plus
(iranclli de Florence^, qui a donné commun- avec lui d'autre liaison que celle du coMir.
renient à la i oiigrégalion des lîrmiles de Jean quitla pour lors ses riches habits el
Sainl-Jèrôme de Fiesoli ; du bienheureux se revéïil de l'étoffe la plus vile qu'il put
l'ierre fiainbacurli de Pise, père des Ermites trouver, se souciant peu lic ce que le momie
de Saiiil-Jér('une, pi csenteiuent surnommés eu dirail. Il fil di- sa maison un hôpital pour
du bienheureux Pierre de Pis'', leur fonda- y rcievoir les pauvres, les élraiigeis et les
leur; du bii'i, heureux Hernard Plolomei de malades. Il leur lavait les pieds, leur donnait
Sienni-, biudiileur d s moines du Mont-Oli- de bons lits et des nourritures en abondance,
vel; de saint François d'Assise, patriarche les servait lui-même, el n'oubliait rien de ce
des Frères Mineurs, né dans l'Ombrie, que que sa iliarité lui pouvait sui:;;èrer. Il s'as-
les géographes renardeut comme une parlie socia dans ses s.iials exercices un genli!-
de la Toscane; de saint Iternardin de r ieniie, homme sienno s de ses amis, nommé Fran-
propagileur de l'observance du nutne or- cois de Mino \'n\ cuti , qu'il disposa à faire
4lre; et enlin , eu ra|pi;rl,iul l'origine des avec lui un généreux mépris du monde.
Clercs apostoliques ou Jesuales de Saint- Jean, étant tombé malade, el >oyaul(jee
Jérôme, nous allons donner la vie de saint sa femme et sou compagnon le traitaient
Jean Colombin de Sienne, leur fonda:eur. avec trop de délicatesse, se leva de siui lit
Ce saint lirai: son origine, du coté de son lorsqu'ils étaient absents, et alla au plus
père, lie la m.iis' n des (]olombiui, et ilu côté pauvre bôpil.il di; la ville pour s'y f.iirc irai-
de sa mère, des 'l'ommasi, toutes (h'ux des ter avec les pauvres. Sa iemnie et François,
plus nobles et des principales de la ville de le (herchèreul iiiulilciuenl pendant deux^
Sienne, qui elail alors une icpubiique. Il fut jours chez leurs p.irenls el leurs amis; et'
d'.iboril engagé dans le mariage, el épousa ayant ele ensuite dans tous les hôpitaux, ils
uni- demoiselle de qualité nouunce lllaisc furent fort surpris de le trouver dans le plus
li.inilinelli, qui sortait aussi d'une famille pauvre de tous. Ils !■ firent ronsenlir à re-
rneore plus illustre que celle des Culumbini, tourner chez lui, mais ce fut à coudilion
l'iiiir avoir donné à l'i'Iglisc un pape, qui fui i)u'ils ne le Iraileraienl plus avec laiil de de-
Alexjiidre III, el plusiems ( ariliii,iu\ , el licalesse et i|u'ils ne lui douueraieiit que dcs'
«au'ou niimmail ciiiure de Ceiiclaiii; à cause alimciil-> giubsicrs.
C17
/lis
Etnnt retourne en santé, et condiuiaiit ses
pxcic'ces de charité avec son compagnon, ils
trouvèrent à la porte île la grandi; C|i;lise, où
ils allaient pour entendre la mes>G, un pau-
vre lépreux tout couvert de plai s. Jean le
cliaigea sur ses épaules et ne rougit point
de le porter chez lui à travers la place et les
rues, devant tout le tiionde. Sa femme en rut
horreur et ne put souiïrir rinlVclion de si'S
nicéres; elle fit même ce qu'elle put pour
ohl ger son mari à le faire sortir de la mai-
son , m.iis il persista à le vouloir garder. Il
lui lava ses plaies, et hut même de l'eau
dans laquelle il les avait lavées. Il retourna
avec sou compagnon à l'église poury eiileiidre
la messe, priant sa lemine de rrndre quel-
(]ues visi es à ce pauvre pour voir s'il n'ai!-
rail point hesoin de quelque chose pendant
leur aliscnre; mais elle lui déchira qu'elle ne
pouvait pis lui promeltrc ce q l'il souhaitait,
à cause de la grande répugnance qu'elle r?s-
senlail [lour ce pauvre. f!eiiendant elle eut
houle de sa faildesse, et, voulant avoir part
au mérite de celle sainte action, elle voulut
entrei-daus la cfianibre du ni.iladc; m.iis elie
sentit à la porte une odeur agréable au lieu
de l'inferlion et de la puanteur dont elle
avait eu d'aliord de l'horreur, et elle fut sai-
sie d'un si grand respect, qu'elle n'o<a passer
outre. Peu de temps après, Jean et François
revinrent de l'église avec quelques douceurs
qu'on leur avait données pour leur malade.
Cette dame leur dit ce qu'elle avait senti. Ils
res|iirèrent eux-mêmes celte odeur, ei fu-
rent encore plus surpris lorsque, ét'mt en-
trés dans la chambre, ils n'y trouvèrent pus
le malade, qui était Jésus-Christ lui-même
qui avait pris la forme du lépreux : ce que
Noirc-Siigucur confirma à Jean dans une
vision qu'il eut quelque temps après.
Cet evétiemont surprenant fortifia nos
d'-ux saints dans la résolution qu'ils av.iient
prise lie tout abandonner pour su vre Jésus-
Christ pauvre. Il leur restait à chacun une
fille de leur mariage. Celle de Jean était
âgée de treize ans, el celle de François seu-
lement de cinq ans. Ils les mirent dans un
monastère de l'ordre de Saint-Bmoît dédié à
saint .\hundius, el que le vulgaire a toujours
appelé par cnrruplion Sainte-Bonde. Jean,
ayant déjà distribué une granue partie de
son bien aux pauvres, Cl trois parts de ce
qui lui restait. Il en donna une au grand
iiôpilal de Sienne, une autre au monastère
de Sainte-Bonde, et l'autre à l'hôpital de
Niitre-Dame de la Croix, à cond lion qu'ils
donneraient une certaine somme à sa femme
tant qu'elle vivrait. Pour François, il donna
tous ses biens au môme monastère, à condi-
tion que l'ablicsse sirait obligée de recevoir
six pauvres filles qui voudraient embrasser
la vie religieuse, sans qu'elles fussent obli-
gées de donner aucune dot. Il mit ensuite sa
fille sur l'autel pour l'offrir à Dieu, et, s'of-
frant encore lui-même, il fil vœu de chasteté,
de pauvreté et d'obéissance en présence de
tout le monde, en disant qu'il ne prétendait
point que le monastère fiil obligé en aucune
façon à lui rien donner, et qu'il ne voulait
Dictionnaire des Ordres religieux. II.
JF.5 «SI8
rccevo'r de lui qu« quelques morceaux de
pain dans la distribuiijn qu'il avait accou-
hnné d'en fairo au\ pauvres, di)nt il voulut
passer un acte par-devant notaire.
Ces deux serviteurs de Dieu commencè-
rent pour lors à ne plus vivre q^ie d'aumô-
ne , allant de pnrle en porte demander du
pain. Ils se revêlirent d'un habit de bure el
encore tout rapiécé, et tant l'hiver que l'été,
et quelque temps fâcheux qu'il fit, ih allè-
rent toujours nu-picds el ne coiivraienl point
leurs lêtcs.Ont-re les cilices et les discip incs
dont ils déchiraient leur corjjs, ils inven-
taient tous les jours île nouvelle: morlifica-
lions. Piiur être les parfaits imitateurs de
Jésus-Christ, ils voulur,'nt êlre méprisés
dans le lieu même où ils avaient reçu le
plus d'honneur. Ils avaient tous les deux
exercé les principales charges de la républi-
que; cl, comme poniianl les deux mois qu'ils
avaient été du nombre des neuf prieurs de
la \ille, ils avaient été considérés et traités
avec beaucoup de respect et de dcférenco
dans le palais, ausi voulurent-ils pendant
deux mois exercer dans le même lieu les of-
fices les plus viis et les plus méprisibles. Il
n'y avait pas pour lors de fontaine dans le
palais; ils allaient tous les jours à celle de la
place puiser de l'eau (lour y en porter, et
chargeaient encore sur leurs épau'es le bois
et les autres choses nécessaires; ils .lidaient
le cuisinier dan< son office, lavaient les
écuelles, balajaient les salles et la place qui
est devant le palais; el , pendant tout le
temps qu'ils s'employèrent à ces aciions
d'humilité, ils n'y voulurent jamais manger,
mais ils allaient demander l'aumône d,;ns la
ville pour vivre.
Une niau ère de vie si surprenante leur al-
lira beaucoup de railleries. Qicbiues-uns les
regardèrent comme des fous; mais il y eu
eut aussi plusieurs qui en furent vivement
tounliés, et qui, voyant le mépris qu'ils fai-
saient des honneurs el des richesses, voulu-
rent les imiler. Les uns entrèrent dans des
ordres religieux ; d'autres , en demeurant
dans leurs propres maisons, se coutenlaiont
d'y mener une vie chrétienne et relirée ;
d'autres enfin se joignirent à eux. Ce ne l'ut
néanmoins quedoux ans aiirès leur entier rc-
noncenieiit au monde, c'est-à-dire l'an 1365,
qu'ils commencèrent à avoir des compa-
gnons, el on les voyait souvent tous en-
semble aller par les rues chantant des canti-
ques, ayaiit sans cesse le nom de Jésus à la
bouche et exhortant les pécheurs à faire pé -
nilence.
Ils ne recevaient ceux qui voulaient en- ■
irer dans leur société qu'.iprès de rudes
épreuves. Le plus souvent, au rapfiort de
ftiorigia, qui a é'é général de cet ordre. Ht
conduisaient le novice par les rues, ayani
une couronne d'olivier sur la tête, le faisaient
monter sur un âne, quelquefois le visage
tourné vers la queue; el ceux qui l'accoui-
pagnaienl avaient aussi des couronnes d'o-
livier en tête et des rameaux en main, et
criaient sans cesse , Vive Jésus-Clirisl, et
loué soit à Jamais Jésus-Cfiiist. D'aulres fois
20
«ifl nir.TioNNAinF. tes ononKS rclioimix. cso
ils I.' coiidiiis.iipnl nii jusqu'à 1.1 rt'inturc, los qu'ils «levaiciU avoir do quoi couvrir leurs
mains liecr* derrliTC h- dos, en lui dis lut des K-les, cl iiu'il consonlait (juils allassput iiu-
injurcs, cl oxlioraul le peuple à |>rlcr Dieu pieds, mais qu'il voul.iii (|u'ils porlasscnl
pour co uiisérabic |.crheur: mais la plupart des sandales de bois. Le iiapc alla ensuite à
du temps el la manière la plus or.linaire Vilcrbe, où ces bons religieux j'acronipaj^nè-
|i;irmi dix, c"elail de rondiiirc le novice de- renl. Mais à peine y furenl-ils arrivés, i\ua
vanl une imape de la Vierjjc qui é:ail dans <les personnes mniintonlionuées les calum-
l.i grande pl.ice de la ville, el là ils le dé- nièrent auprès de Sa S.iinlclé, les j.cciisanl
fioiiillaienl île ses babils pour le revélir de d'être iiifi'clès des erreurs des fratricelles ;
mécli.inis baillons, el tous avec des couroii- de sorie (lu'Urbain V donna commission au
nés d'olivier en télé et des rameaux en main cardinal (juilliuaic Sodre, évéqui- do Mar-
ilinnlaienl des cantiques spiriluels. (]ette scille, d'examiner leur doctrine. Leur inno-
pratique de porter dos couroiuirs el des ra- cence ayanl été reconnue, le pape ap[iriiuva
incaux d'olivier était particulière à ce saint leur institut l'an 1307, et donna de sa pro-
fondateur, et il s'en servait dans toutes les pre main, à ceux qui étaient pré-cnts, Iha-
cé.'émonies d'éclat, coninie nous \eri'ous dans bit qu'il voulait ()ue l'on portât à ra^cnir
la suite. dans cet ordre, savoir : une lunique blancbe
lanl de mortifications et de si rudes épreu- serrée d'une ceinture de cuir, avec une
ves que s.iint Jean Colombin exerçait envers chausse ou cbaperon bljucpour couvrir leur
ceux qui voulaient être ses disciples, n'em- tète, qu'ils avaient accoutumé de porter sur
péchèrent pas qu'en moins de deux ans il l'épaule lorsqu'ils avaient la lélc dérouverte,
n'en eût plus de -oixante il dis, parmi les- ordonnant de plus qu'ils porteraient des sau-
queis il y en avait qui étaient des principa- dal s de bois (1); el le cardinal Anglic lîri-
les noblesses de la province. Sou zèle pour mo.ird, frère du pipe cl non pas ncM'u,
le salut des âmes ne se bornait pas seule- comme quelques auteurs ont avancé, el qui
ment à la ville de Sienne, il parcourut en- était aussi évé(|ue d'Avignon, leur fil faire des
core les biuirgs et les villages de la Toscane manteaux d- couleur tannée qu'i s oui aussi
pour porter les pécheurs à la pénitence, el toujours portés depuis, il n'est pis vrai que
fit beaucoup de fruits dans tous les lieux où ce pajie leur donna la réj.'ledc saint Augus-
il passa. Comme il allait un jour avec trois tin, comme plusieurs historiens ont dit :
ou ()ualre de ses discipL's à IM lUlichellio, Morigia, qui a été s;èn6ral de cet ordre, doit
dans le territoire de Sienne, et qu'il était é re cru lorsqu'il dit que ces religieux f.ii-
oblige de passer dans une terre i|ui lui avait sai ni Us trois vœu.x essentiels de religion
appartenu cl où il avait commis beaucoup sous la protection de saint Augustin, et
(le vexations, il se dépouilla tout nu jusqu'à qu'ils avaient une règle que leur écrivit un
la ceinture, se fit lier avec des cordes, et religieux de leur ordre qui fut fa t évèque
pria ses compagnons de le tirer avec vio- de Feirarc ; et le même auteur, parlant des
li'nee, en disant tout haut aux habitants de ordres (|ui suivent la règle de saint Augus-
ce lieu : N'oilà celui qui voulait vous faire lin, dit encore que les Jésuales observaient
mourir de faim, cl qui n'avait point de coin- la jirofession de suint Augus'in, mais non
p&ssiou des pauvres, qui vous prêt lil de pas sa règle, parce qu'ils en avaient une
mauvais grain dans la nécessité |iour eu li - qui leur avoit été donnée par un de leurs
rcr de bon au temps de la récolle, el au dou- frères qui fut fait évèque, laque le fut con-
hle de ce qu'il avait prêté, cl qui souhaitait firuiôe i)ar le saint-siège. Ce fut le bienlieu-
<Iuo le blé lût bien cher alin de s'enrichir. reux Jean de Tossignan qui drossa celte rè-
Le nombre des disciples de ce saint fou- gle. il fut fait évé(|ue de Ferrare l'an 14-.'il,
dateur aiigmenl '.ni de jour en jour, il vou- et mourut l'an ik'M. Ils ont néanmoins vé-
liil faire approuver son ordre par le pape ri ahlemenl suivi la règle de saint Augu-tia
Urbain \', qui venait d'Avignon à Home; il dans la suite, cl elle est à la tète de leurs
alla au-devant de ce pontife avec un grand dernières coHstitulions qui furent imprimées
nombre de ses disciples, lis s'arrèlcrent à Ferrare l'an IGVI, après avoir été approu-
quelque lemj'S à \ itcrb'', en attendant sou vèes l'année prècéilente par le papo Urbain
arrivée; cl, sachant qu'il devait débarquer \\\\, (|tii par sa bulle a]ipi'lle leur congre-
à Cornéto, ils s'y rendirent et se trouvèrent galion la congrégation des Jésuales de Saint-
aii |iort avec des cou:ounes d'olivier sur Jérc'ime sous la rè,,'le de saint .\ugustin, et
leurs léles el des r.imeaux.< n main; et lors- ces conslilutions lurent tirées de la règle do
<|ue le pape mit pied à ti rro, ils s'écrièrent : saint Aug-istin, de celle du bienheureux Jean
Loiluto sin (iicsti ('lirislo et viva il sunciis- de Toss.gnan, et des règlements qui avaient
siwo Padre. Ce pontife, les voyant hab.l.éj élé faits dans leurs chainlres généraux,
d'une man ère extraor.linaire, et ayant su Le nom de Jésuales fut donné à ces reli-
ée ([u'ils diinaudiiicnl, admira leur siinpli- giciix, parce qu'ils avaient toujours le nom
cité el les reçut favorablement. Il interrogea de Jésus à la biuche; el, comme dans le
Jean Colombin sur leur manière de vie; el, commencemeni ils eurent une gr.indc devo-
comme ils avaient de méchantes robes toutes lioJi à !>ainl Jèionic, ils résniurent de le
r.ipiécécs, el qn« parmi eux il y avait plu- prendre pour leur pro'i-cteur el avoc.it, cl
sieurs gentilshoiniiies cl personnes lettrées, dédièrent en sou houneur la plus gr.indo
il leur dit qu'il leur donnerait des babils, partie des églises el des oratoires qu'ils pos-
(1) Voit., 'J b lin ilil vid.. Il* l.'ii.
Giil
jitS
JES
62-2
sédaient. Ce ne fut néanmoins que lon^lemps
.•tprcs, l'an 1V.Î2, que le pnpe Alexandre VI
ordonna que les religieux de cet ordre no
s'appelTeraient plus simplement Jésunles,
mais les Jésiialcs de Sainl-Jcrôaio, et défen-
dit à toutes les conprégalions qui bâtir^iieTil
dorénavant des églises de les dédier à l'iion-
ni'ur de saint Jirônic, dans les lieux où il y
en avait déjà de ce nom appartenant aux Jc-
suales, el que dans les processions publiques
où ils avaient droit d'assister, aucune é^ïlise
ne pût poi 1er une bannière avec l'image de
saint Jérôme. Depuis ce lemps-là. cet ordre
a toujours clé appelé les .lesuales de Sair.l-
Jérôoie par les p;ipe< successeurs d'Alexan-
dre VI; le nom de Clercs apostoliques leur
fut aussi donné à cause de la vie apostoli(iue
qu'ils menaient.
SainUean Colombin ne survécut pas long-
temps à la confirmation de son ordre. Comme
il relournail à Sienne avec ses compagnons,
il fui attaqué d'une grosse fièvre à liolsenne.
On le mena à Aquapendentc, où l'on espé-
rait trouver plus de secours qu'à Bolsenne;
il y reçut le saint viatique; et, comme ses
disciples souliaitaicnl qu'il pût mourir dans
l'abbaye de Sainle-P>onde, ils le conduisirent
encofL- plus loin. Ils furent cependant con-
traints, la maliidie augmentant, de s'arrêter
au bourg de l'abbaye Saint-Sauveur, où saint
Jean Colombin, aprèsavoirreçu le sacrement
derestrcme-onclion, mourut un samedi, der-
nier jour de juillet de l'an 13G7. Les reli-
gieux n'exécuièrcnl pas ses dernières vo-
lontés, car il avait ordonné qu'on le portât
après sa mort dans l'abbjiye de Samie-Bonde,
pour y êlie enteiré au pied de la muraille
du monastère, et qu'on l'y conduisit les
mains liées derrière le dos, eusi'veli dans
un lin eul el porté sur un âne; mais ils le
portèrent sur leurs épaules dans une caisse
lie bois avec un grand nombre de llauibeaux,
el les peuples des lieux où ils passaient ac-
couraient en foule pour révéïer ce saint
corps; plusieurs même par dévolion vnuUi-
renl l'aiconipagner jus(iuà l'abbaye de
Sainle-Bonde, où il fui en'erré avec beau-
coup de pompe. 11 fil plusieurs miracles
qui obligèrent dans la suite le jiape Cré-
goirc XIII à insérer son nom dans le Marty-
rologe romain , el le pape Sixte V a .ic-
cordé indulgence plénière à ceux qui le
jour de sa fcte, laciuelle est de précepte à
Sienne, visiteraient l'église de son ordre.
Ce saint avait nomme pour son successeur
dans le gouvernement de son ordre le liien-
beurcux François Mino Viiicenti, son pre-
mier compagnon; mais la mort ne put désu-
nir que pour un peu de temps ces deux ser-
viteurs de Dieu, qui avaient été si unis sur la
icrre du lien de la charité. Le bienheureux
François ne survécut que de quinze jours
à saint Jean Colombin, et alla êlre dans le
ciel le comiiagnon de sa glnire, comme il
avait élé ici-basiecompagnon de scslravaux.
lUomba malade le S(pli(kiie jour après la mort
doce saint fondateur ; el, étant décédé dans
l'abbaye de Sainte-Bonde le 13 août de la
même aunée, il fut enterré à côté de saint
.lean Colombin dans l'église de colle abbaye.
Ainsi il ne prit point le gonvernenient de
l'ordre, puisqu'il fallut bien employer six
jours àijorlcr le corps de saint Jran Co'oui-
bin du lieu où il était mort A Saime-Iîonde,
cl à lui rendre les derniers dovuirs: ainsi
ceux qui ont dit que cet ordre aval: fait de
t'raiids progrès sous le gouvernemc il du B.
François Mino Vincenli se sonl visiblement
trompés.
Ce fut le P. Jérôme Dasciano qui, après la
mort de ces deux serviteurs de Dieu, fut le
chef de ce nouvel ordre, qu'il élondilen plu-
sieurs lieux penilai\l trente. et un ans quM
If gouverna. 11 lit des établissements à San-
Léoiiarilo,à Casb Murante, à Cilla di Cis-
Icllo, à Arezzo, à Florence, à Pistoie, à Luc-
ques, à Pise, à Sambuca cl à Bologne. Cet
ordre fil di; ii .uveaux progrès sous le P. Spi-
ncllo de Sienne, qui succéda au bienheureux
Jérôme l'an 1398, el qui fui général pendant
Irenle-quatre ans, aussi bien que sous le
!'. Antoine de Venise, qui exerçi cello
charge pendant vingt-cinq ans. Ce Lit sous
le général. il du P. Spinello que, l'an 142G,
l'on tint le premier chapitre général de cet
ordre dans le couvent de Bologne, où il fui
résolu ([uc toute l'autorité pour le gouver-
nement de l'ordre S( rail dans la personne du
P. Spine lo, qm élail dé, à chef de toul l'or-
dre, el dans celle de deux autres Pères (ju'on
clul pour définiteurs. Ce fut aussi dans c«
même chapitre qu'on re;ut la rèiile qui avail
clé dressée par le bienheureux Jean de Tos-
signan, qui était pour lors prieur du cou-
vent de Kerrare, et qui fut d ins la suite évê-
que de la même ville, comme nous avons dit.
Le SI cor.d chapitre général ne se tint que
l'an lkk2. Dans la suite, on en tint un tous
les quatre ans ; el dans celui qui se tint l'aa
li58, où le P. iNieolas de Monlépulciaiio fut
élu général, il fui ordonné que le général
ne serait plus à vie, et qu'à chaque chapitre
on en élirait un, ce qui a été observé dans la
suite.
Plusieurs papes ont accordé des privilèges
à cet oïdie, el le bienheureux Pie V, en lo
confirmant derechef, le riiit au nombre des
mendiants, el lui ace 'rda les mêmes [irivi-
léges doiil jouissai' ni ces crd es. Pendant
plus de deux siècles, les religieux jésuales
n'étaient que des frères laiR qui n'étaient
ob i|.és qu'à réciter [lar jour cent soixante-
cinq Palir et aulanl d'.lre. Ils se Irouvaent
trois fois le jour à l'oratoire pour en dire à
chaque f.is un certain nombre. Ils avaient
ciiKj à six heuies d'oraison par jour. Après
la prière du malin, le supérieur leur faisait
une exhortation. Tous les jours, le malin el le
soir, ils prenaieni la discipiiae; ils réeiiaient
aussi l'ofiice de la sainte \ ierge, mais sans
aucune ubl galion; el, après avoir satisfait h
leurs exercices de religion, ils allaienl aux
hôpitaux servir les malades, ou ils travail-
laient mannellemenl. Mais dans la suite lo
pape Paul V, par un bref de l'an 1G06, leur
permit de recevoir les ordres sacrés, et de rc-
ciler le grand office du l'Lgliie, selon l'usago
de l'Eglise romaine. Le pape Urbain \'Al,
«2:^ ■ IiICTlO.NNAIRE DES ORDllES HIXIGILUX. 024
r;in ICiî'i, leur rtl.1 cp'lc clmussc ou (h.npcron ce cnrdinal leur ayanl aussi donné une par-
<l<int ils se «ouvraient la Iclc, cl leur or- rie de son palais, qui était joi<;nanl elle
dniinn de jiorter un pelii cipurc de la cou- église, et dont ils lircnl leur monastère,
leur de l< urs manteaux. Cv fut ce niême pon- Cet ordre a produit beaucoup de' [lerson-
life qui, ronuue nous avons dit, approuva nés illuslres tant parleur sainteté (|uc par
l'an ilîiO leurs nou<ell('S conslilutions, <iui leur science ; ear, quoi ;u'ils ne fusseni pen-
ne dinisnuaienl rien de leurs an( jeunes aus- danl les premiers siècles de leur èlbhsse-
leril»^, car elles les ol)lit;e.iicnl à prendre en- ment que des frères lais, il j avait ce-
rore deuv fuis le jour la (tisci|>line pendant pendant parmi eux |)lusieurs personnes sa-
l'espati- d'un Miserere, li'un De profundis et vantes et que leur nu'rile éleva dans la suite
d"un l'iiter, avec quelques or lifi lis. Depuis aux dignilcs ili- Tl^l'jlisc, comme le bicnlieu-
la fêlede l'Ascension juscju'à Celle de la l'en- reux Jean de Tossignau, qui fut év(''que d,!
leiôle. ils ne devaient a\oir (Tue des vian les Fcrrare, et le bienheureux Anioue de
quadragesimales. Depuis la lèle de Icus les Sienne, évêque de Folipny, qui fut emplové
^ainls jusqu'à celle de saint (îrégoire Thau- en plusieurs ué|.'ociations'par le pape l'ie II.
maiurj;e, ils faisaient le st:ir une plus grande Les bienheureux JérAme de Veni^e etJai-
alisliuince; mais [leudant l'aveiil ils s'absie- nette de Vérone élai.Mil en si graiule esliine,
n lient de viandes permises aux jours ordi- que le doge de \'enisc Nicolas .Marcelle v.)U-
II. lires de l;i règle, et n'usaient que de vian- lut élre couronné ()areu\. La cérémonie de
des quad!ag:siuiales. Ils jeûnaient aussi de ce couronnement se voit encore peinte a
iiiènic tous les vendredis de l'année cl les fresque dans le réfectoire du couvent de
veilles de quelques fêles, et tous les lundis Saint-Iiarlliéleiny de Vérone, qui appartenait
et mei{ redis ils faisaie. l abstinenre, ne nian- auiiefois à cet ordre, et qui est présenle-
peanl ces j<jurs-là à dîner qu'un po'.agc et du ment occupé par les religieux du Tiers Or-
Iromage, et le soir une salade et du fromage ; dre de Sainl-François. Ou lit au-dessous de
quant aux collations des jours de jeûnes, ils cctlc peinture : Sfrenissivius Venctiaruin
pouvaient seulement boire un coup et inaii- primeps Aicoluus Mcrccl'us a D. P. Iliero-
ger un peu de fruit sans pain. 7iymo Vcnetoel aU- I'.Jiinc(o\ eranense.coro-
C.es relij:icux s'occupaient, dans la plupart nari voluit, anno DuminiMCCCC LXXll l {\).
de leurs maisons, à la pharmacie, et disiri- Avant leur abolition, riirchiconfraiernilc
buaieiil gratuilemc.l aux pauvres des inédi- duSauveurau.'>i/»ic/iKS'«n(7orum deriîehclle-
rainei Is. Il y en avait d autres où i'.s faisaient S linie, à Uoii:e, donnait le jeu li saint à dîner i
le métier de di-tillatcurs el f.îsaienl (ralic si\ religieux de cet ordre du couvent des
«l'eaH-{le-\io, ce qui faisait que dans queKjues saints .lean et Paul, el à six autres de l'ordre
lieux on les ap;)e'ail les l'éres de leau-de- de Sainl-Aïubroise a;/ .\eiiius du couvent de
\'\p, 'jli Poilri ddruqua vitii ; luiùsdaus VEiii Sainl-Clcmenl, et après le diuer ou leur
de Venise ils claienl assez riches , ce qui (It dinn^iit à chacun une paire de souliers, un
riue la ré, ubiiquc demanda leur siippre-siou julc (2j el un p.iiu. l'.iul .M.iri.;ia, quia éle
à Clément IX, afin de piolîter de leurs biens, général de ccl ordre a>ant que le pape Paul V
qui furent employés à soulen r la guerre que eût permis à ces religieux de prendre les
Celte république avait contre les Turcs qui ordres saerés, a donne les vies de soixante
assiégeaient jioiir lors Candie; ce que le jiape religieux du incme ordre, morts en odeur de
aci orda l'an 1G()8, ayanl fail subir le même sa nleté. Il a fait encore une histoire des or-
sorl à l'ordre de Saîiil-rieiirges in Alylm, dres religieux, celle de Milan, cl s ùxanle et
dont nous avons parlé à l'arlicle (pii porte un trailés sur différents sujeis, dunl il est f.iit
ce nom, el à celui des Lrmiles de Saini-Jé- mention dans l'épilapheque (îeorge'l'rivulce,
rôiue de Fiesoli, qui furent aussi supprimes comte de Melfe, lui fit ele^er après sa mort,
par la n.éme bulle. Ce p niife accorda aux q'î" arriva l'an l(i(!^, cl qui est dans l'église
prêtres de ces ordres pendant leur \iu qua- de Sainl- Jérôme de iMilan, qui appartenait à
ranle écus romains , et aux frères lais son ordre.
■»iiigl écus. Le général des Jésuates, (jui ("les religieux avaient pour armes un nom
elaii pour lors le P. Crhain d'Aviano, Til de J sus, avec des rayons d'or en champ d'a-
l'ait curé de la paroisse de Saint-Jean de z'r, et au-dessous u.ie coombe blancln- par
Maha, à Rome, ijui était une des église s que ailusion à leur fondateur saint Jean ('olom-
cel ordre possédait dans celle ville. L'aulrr, bin. Sî. de la Faille dans ses .\nnales de l'ou-
ilediée aux s:iints Jean cl Paul, qui est un louse (I, pag Ls"), dil qu'au mois d'atrildo
litre de lardinal. a été donnée da is la suite l'anl^^oil y en eiil cinq qii vinrent dans
aux préircs de la Mission de la congrcga- celle ville, el s'adressèrentauxcapitouls pour
lion de M. Vincent de Paul par le pa|)e lu- avoir la periiiission de s'y établir, ce qu'ils
iiocent \ll,ay,int été occupée au|>di'av.'inl leur accordèreiil de leur aulorîlé cl sans
pendant quel<|ue leiiips par des Jacobins assembler les bourgeois, qui s'y opposèrent ;
anglais que le cardinal de S'orfoick, Anglais, mais que deux c.ipilouls s'élanl pr^l-senlés
y avail fail venir, el qu il euircienail. Les au parlement pour lui demander qu'il lui
Jésuates l'avaicnl possédée (Icjiuis l'an l'i48, plût autoriser leer délibération, cel i teur
que le pa|ic Nicolas V, à la prière du cardi- fol accordé par un arrêt du 18 du même
nal laiiii des L'rsins, la leur avait accordée, mois. Cet auteur ajoute que bs cellules de
(I) tail. ll3!tliid.Pi:u/.:i, 0/xT. pic. di Romn, li:icl. (-) l'eiiLî pièce d'argent v:ilanl te|il sous et demi
f', c»p. 5. de t{ lice.
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CCS religieux élairnl peUlcs cl liasses, et
ilcv.iient élre à rez-ilc-clwiussée, à ccriaincs
(iisiancos les mios dos autres, connue celles
des Camalilules. Cet établissement de Tou-
louse est le seul que je sache qu'ils aient
fait hors de l'Italie.
Voi/. Morigia. Ilist. des Ord. reliq., !iv.
\, chap. 38, '69, M- et Uist. de ijl. Ifuomini
illtist. Giesnali. Jo. B. lîossi, Triumphus di-
vinip gratiœ per B. Jonnn. Colwnhinutn.
Auto. Corlelli, De Paup. Jrsual. confirmât.
Leurs Constitutions Imprimées à Fcrrare en
Itt'i.;. Silvest. Maurol., M((r. Ofcan. di tulC.
ijl. Reiig. Crescenz., Prend. Rom. Philip,
itonanni, Calulog. omn. relit/. Ord. Giri cl
Hailk'l, Vies des Saints, 31 juillet,
§ II. Des religieuses Jésnutrs de Suinl-Jérô-
me, iiree la vie delà bienheureuse (Uiiherine
Colombin de Sienne, premère religieuse de
cet ordre.
Les religieuses Jésuales de Saint-Jcrôinc
n'ont p.is eu lo iiicnie sort que les religieux
du même ordre, car elles ne furent pas com-
prises dans la bulle de Clément IX de l'an
16G8, qui supprimait seulement les reli;;ieux
de ci't ordre, sans faire mention des religieu-
ses ; c'est pourquoi il en reste encore quel-
ques monastères en Ilalie. Elles ont été aussi
instituées par saint Jean Colombin, ce qui
ne peut pas être arrivé l'an i;i57, comme
quehjucs auteurs ont avancé, puisque Mo^
rigia dit que ce ne fut qu'aprt^s que ce saint
fut de retour des missions qu'il lit dans la
Toscane, où il convertit une infinité de per-
sonnes par la force de ses prédications, dont
il y en eut plusieurs qui voulurent être de
ses disciples : ainsi, comme ce sa nt ne se
dépouilla de tous ses biens et qu'il ne com-
mença sa vie apostolique que l'an 1303, et
qu'il ne reçut des disciples ijue deux ans
après, on peut mettre le commencement des
religieuses .lésuates un peu avant la confir-
mation de l'ordre que saint Jean Colombin
obtint du pipe Urbain V, l'an 13ij7.
Comme le zèle de ce saint fondateur pour
le salut des âmes s'étendait indilîén mment
sur toutes sortes de personnes, voyant que
le nombre de ses disciples augmentait, il
Voulut aussi établir une congrégation de
filles qui servissent Dieu dans une pauvreté
aussi grande que celle qu'il faisait pratiquer
à SCS disciples. Il jela les yeux sur une de
ses cousines pour donner commencement à
cette congrégation. Klle s'a()pelait Cathe-
rjie Colombin, et était fille du seigneur
Thomas Colonjbiu, chevalier de l'ordre de
la Saiiile-Viirge mère de Dieu, (|uc le vul-
gaire appelait les Frères Joyeux, à cause
que CCS chevaliers étaient mariés et vivaient
aveu beaucoup de splendeur. Cette sainte
n:!e élaii résolue do g.rdcr sa virginité, et
n'avait jamais voulu" entendre à toutes les
propositions ([u'on lui avait faites du mariage.
Elle voulait bien se consacrer au service de
Dieu, mais la vie pauvre et austère que nie-
nail saint Jean Colombin l'éjouvanta d'a-
bord à la première proposition que le saint
lui fil de l'embrasser; cl, riche qu'elle était,
elle ne pouvait se résoudre à (ou! ahaniiou-
ner pour aller velue pauvrement et iiu-pieds
demander son pain de porle eu poiie, comme
faisaient les disciples de siinl Jean Colom-
bin. Cependant ce saint demanila si forte-
nenl à Dieu qu'il lui plût loucher le cœur
de sa parente, que ses prières furent exau-
cées, et Catherine se soumit à tou! ce qu'il
voulut lui ordonner. Elle commema d'a-
bord par (li^ll ibuer ses biens aux pauvres
sans se réserver auciMU! chose, mettant
toute sa confiance dans la divine providence.
Elle se fil ensuite un gros habit de Imre,
dont elle voulut être revêtue par notre saint
fondateur ; et, cotnme il y avait déjà plu-
sieurs filles cl fiinnu'S veuves qui, touchées
par SCS prédications, menaient en leur par-
ticulie • une vie retirée, il n'eut pas de peine
à leur persuader de suivre l'exemple de la
bienheurcu c CrilhiMini-, et elles voulurent
aussi recevoir le môme habit de ses mains.
Ce saint leur accorda leur demande, et, ajjcès
les avoir revêtues de cet habit pauvre et mé-
prisable au\ yeux des hommes, il leur donna
encore uu voile blanc j)our couvrir leur tôle.
Elles choisirent la maison de la bienheureuse,
C.lheriue pour y faire en commun leurs
cxen iccs, cl elles élurent pour supérieure
colle sainte fille, qui quebiue temps après
fil bâlir le premier monastère de celte con-
grégation à Valpialla, ce qui n'arriva ap
paromment qu après la mort de sainl Jeaa
Colombin.
Il est difficile d'exprimrr avec quel zèle et
quelle ardeur ces saintes religieuses servi-
rent Dieu dans celle communauté naissante.
Elles avaient leurs heures oiarquées pour la
prière, l'oraison et les lectures spirituelles,
auxquelles elles employaient même una
bonne partie de la nuit. Après leurs exer.
cires s(iirilucls, elles s'occuiiaieul au tra-
vail des mains ; et pendant ce temps-là il y
en avait toujours une qui faisait la lecture
ou bien toutes ensemble chantaient quelques
cantiques spirituels, ou s'entretenaient de
■saints discours qui pouvaient les porter à
l'aoïour de Dieu et à l'avancement de leur
salit, etde cette manière leur vie élail une
continuelle oraison. Celait une chose ad-
mirable de voir leur modestie cl leur reie-
nue. On n'entendait jamais chez el es le
moindre bruit, tant était grande leur union.
Tout y était en conuMun, r en ne fernsait a
clef, cl personne n'avait rien en propr<', puis-
(]u'elles n'admettaient aucune fille parmi
elles qui ne se fût auparavant dépouillée de
tout ce qu'elle avait en faveur des pauvres.
Ainsi elles ne vivaient que du travail de
leurs mains; et, si le gain qu'elles en reti-
r.ient n'était pas suffisant pour leur m-
tretien, elles allaient par la ville demander
l'aumône le visage couvert, ne s'arrélant
avec personne pour parler ; et à leur retour
il ne leur était pas permis de s'entretenir
de ce qu'< Iles avaient vu dans a vilie.
Non-seuleiiicnt ces saintes religieuses, qui
étaient la plupart filles ou veuves do geu-
lilsliummes el des plus qualifiés de la Tos-
cane, étaient revêtues de gros habits de
r.n MrTioNNMr.F, r.îs or.imF.s HF.i.ioirL'X. c^g
l>i:ro, mais rllcis m.TrcliHipnl nicore mi-picds Girxvati, m vit. S. Giovan. Culnnih., cap. .'îi,
s.iiis s.iii.!<ilcs. gllcs |)ronaicnl deux IViis l.i el Jlisl. de toutes les IUlig. Thilip. lSoi>;ii)ni
iliscipline pendant lu n'iil, dormnicnt sur Caialug. Ord. riHg.
lies paillasses, i<l la plupart porlaicnl des
liairos, des cilici s, des rciiitures de ftr. l.a JKsUlTIiS (OuDnE des).
bioiiliciircuse Catherine liurriassait iDiilrs les g •., r, ,/.,.„„ ^-«.c . j » f ■■,>
.ulrrs en vertu cl en au. érilés, car clt» ^^oJrn.n il iT '''/" Société ou
leur servait de,en>ple .l'humilité, de pa- £ f?' '. ',' f?';'' ""' '" ''" '^^ '"""
.1 1 •• . 11 i. •. i. 1 Jumne, Ir.ir fonda eur.
tu'iuc cl lie chariie, el elle etiit vctiie plus ■' '
pauvrement que les autres. Klle couvrait sa 11 s'est élevé de temps en temps des hérc-
p.iillasse irun rude cilice, elle faisait de plus sies dans rUi^lis*, et Dieu a loujours suscité
pr.indes alislidi'nees, el loules les fois qu'elle de saints personnniies ren)]ili< de son esprit
eommuniall, elle ne mani^eail rien de toute pour les comliatlre et en arrêter le proj^rès,
la journée. Klle jeun ;it la veille de ces par leurs écrits, leurs prédications « I autres
ji)urs-là au pain et à l'eau, le plus souvent travaux évangéliqucs, et pour maintenir la
elle fiassaii la nuit en jiriérc cl en oraison, foi catholique dans sa pureté. Ainsi il a op-
1-lle avuil encore le, don de toucher les posé saint .Mhanase aux ariens, saint . \ii-
cd'urs par ses discours, el elle persuada à {;ostin aux pél.it;iens el aux manichéens,
plusieuis personnes i!c son .«exe de vouer à saint Cyi ille aux nestnriens, saint Fruiii-uis
Dieu leur virginité, el de finir Ici.rs jours et saini Domiui(iue aux ailii;;eiiis , et eiitiu
dans la retraite et la péni once. saint Ip 'aee de Loyola et ses compagnous
Un jourque le démoH la tenta, et qu'il aux luthériens el aux calvinistes. Un ce -
▼ oulul salir sou imagination par quelques lèbre écrivain de la vi;- de ce saint a remar-
pcnsées d'imiiureté, elle arn>a son bras d'une que que dans le temps que Luther sou-
tlisdpline de fer, el, s'étinl recommandée à tint publiquement son apostasie dans la
Dieu, elle se déchira le corps pendant tonlle diète do Worms, el que. s'étanl retiré dans
temps qu'elle récita les sept psaumes de \n la solitude d'ANlat, il composa un livre
pénitence, et de cette manière elle résista à contre les vœux monastiques, qui lit une in-
la tentation. Le démim l'attaciua encore en finité d'anostats, sainl Ignace se consacrait
plusieurs rencontres, mais il se déclara lou- à Dieu dans l'église de Nlunl-Serrat, el écri-
jours vaincu par notre s linte, qui, le mé()ri- vait dans sa retraite de .Manrèzc les lixerci-
iant, le défiait quelquefois au combat, oîj elle ces spirituels, qui ser\ irenl à former sou
n'employait pour armes que la prière et l'o- ordre <t à repeupler tous les autri-s ; (|ue
raison. lorsque l^alvin commença à dogmatiser el à
Après avoir ainsi persévéré dans le service se l'aire des disciples A l'aris, saint Ignace,
de Uieu |iend,inl vingt-deux ans, sans s'ètfe qui y était venu étudier, assembla de son
jamais relâchée en aucune chose, elle tombi côlé des compagnons p^ur déclarer la guerre
malade, et siinie (lallirrine vierge el mar- aux enieoiis de la foi ; et (i«'enlin dans le
lyre, sa patronne, s'étanl apparue à elle letnps qu'Henri Vlll se fit nommer chef de
pour l'avertir que sa fin était proche, cUe se l'Kglise anglicane el qu'il ordonna sous
prépara à la mort par la ré. eption di-s sacre- peine de mort à ses sujeis d'cflarer le nom
inrnts de l'Kglise. Ulle fil un excellent dis- du p;ipe «le lous les papiers el île tous les li-
cours à ses religieuses pour les exhorter à vres qu'ils avaient entre les mains, saint
la persévérance, el, en prononçant ces paro- Ignace jeta les fondeniei;ls de son ordre, (|ui
les : Ooin/ii-, dikxi decorcm domus tua' et fait profession particulière d'obéissance aux
locum hdijitationis gloriœ luœ, elle rendit ' sniiverains pontifes par rapport aux mis-
son âme au Seignenr le 20 octobre 1387. L'on si!)ns dans les pays étrangers,
fut suri)iis en la dépouillant de lui trouver Ce saiiil naquit l'an li'.ll, au château do
.sur le corps un rude cilice el une ceinture Loyola, dans une partie de la Biscaye espa-
de fer qui elail cnliée si profondément dans guolc qui porte aujourd'hui le nom de (îui-
sa chair, qu'on eut de la peine ù la rc- puscoa , el fut le dernier d'onze enfants
tirer. ((u'eurent dnm Bertrand, son père, seigneur
Après sa mort , la Mère Simone Gallcroni dOgnez el de Loyola, el M irline Saéz de
prit le gouvernement du nionaslère, el par lîalde. Ils l'élcvèrenl dans les sentiments (lue
.son moyen les religieuses se niulliplièrcnt pouvait leur ins[arcr l'ainour du siècle. Son
en plusieurs cndroils. IMos firent d'abord un père, le jugeant propre pour la cour, l'y en-
nouvel élablissem lit à Florence, el ensuite voya de bonne hrure. et le fil page du roi
à l'istoie, à Lucques, à l'ise, à liologne el en catholi(|ue Ferdinand V. JLiis Ignace, ([ui
d'autres lieux. Klles ont le même habille- a»ait une passion ardente pour la gloire, >e
ment (|u'avaient 1rs Jésu.iles, savtiir, une lu- dé. oi'ila bicnti'4 de la cour, et, suivant l'exeni-
nique de drap blanc avec une ceinture de pic de ses frères, qui se signalaient dans
cuir, un inanleau de couleur tannée el un l'armée de Naples, il voulut prendre le parti
voile blanc (1). Il y a de l'appareiiee qu'elles des armes. Il s'en dédira au duc de Najarc
[irirent cet hahilleiueul api es (|ue l'ordre eut dom Antonio M.tnriiiue, s n parent et ami
eié confirmé (i.ir le pape Urbain V, l'an particulier de sa maison, qui approuva sou
l''67. desS! in. Il lui fil apprendre ses exercices,
y'oijez Morig. /Ii>t. de gl. fluoinini illust. s'appliqua lui-niéuie à le former, cl le rendit
M) Voy , i.1.1 niidu vol., n" 155.
I
C'i'J
JES
JES
<m
en peu de trinps capable de servir son prince
dans SCS armées. 11 se signala dans sa pre-
mière caiTi|)agnc au siése de Najire même,
pclile ville située sur la fronlièrc de Biscaye,
dont la prise lut attribuée en partie à sa
bravoure. Quoique celle ville eût été aban-
donnée au pillage, il ne voulut point y avoir
de part, et se coniciita, pour toute récom-
( ense, de la gloire d'avoir fail une belle ac-
tion, jugeant qu'il était indigne d'un grand
cœur de prollter de la disgrâce des mallicu-
rtux. Sa conduite alors n'était pas fort ré-
gulière : plus occupé de la galanterie el de
la vanité que de toute autre chose, il ne sui-
vait guère dans toutes ses actions que les
fausses maximes du monde , et il vécut de
Il sorte jusqu'à l'âge de vingt-neul ans, que
Dieu lui ouvrit les yeux.
Le moyen dont la Providence se servit
pour lui toucber le cœur fui l'accident qui
lui arriva lorsque, défendant en 1521 le cliâ-
icau de Pampelune, capitale de la Navarre,
contre les Français qui l'assiéçoaient , il
fut blessé d'un éclat de pierro a la jambe
(Iroiie et d'un bouk-l de canon à la gauche,
dont elle fui cassée. Les Navarrois, le voyant
l lessé, perdirent courage, cl se rendirent à
discrétion ; mais les Français usant bien de
la victoire, Irauspoitèrenl Ignace au quar-
tier du général, oij ils prirent soin de le faire
panser; el, quand sa jambe eut été remise
et que l'état de sa plaie lui permit de chan-
ger de lieu, ils le firent porter en li;ière au
cliàteau de Loyola, qui n'est pas éloigné de
Tampelune.
A peine y fut-il arrivé, qu'il sentit d(!
grandes douleurs. Les chirurgiens qu'on ap-
pela jugèrent que les os de sa jambe n'étaient
pas remis dans leur situation naturelle, et
lui dirent que pour les remettre, il lui fallait
casser la jambe de nouveau. Ij-Miace les crui,
el, s'élant mis pour cet effet entre leurs
mains, il ne fil paraître aucune faiblesse
dans une si cruelle opération. La douleur
qu'il en ressentit lui causa une fièvre si vio-
lente, qu'elle le réduisit à l'extrémilé. 11 re-
çut ses sacrements la veille de la fête des
apôtres saint Pierre et saint Paul, mais avec
tant de faiblesse el d'abiitlement, qu'on ne
crut pas qu'il piil passer la nuit. Saint Pierre
la mcuie nuit lui apparut en songe, et le
touchant de la main le guérit de la fièvre ;
en sorte qu'à son réveil on trouva ses dou-
leurs cessées, ses forces revenues, el qu'il
èiait hors de danger. Celle guérison mira-
culeuse ne lui fit pas perdre l'esprit du
monde. Sa jambe, qu'on avait cassée une
seconde fois ne fui pas si bien rétablie, qu'il
n'y restât une difformité. C'était un os qui
avançait trop au-dessous du genou, et qui
empêchait que sa botte ue fût bien tirée.
Coniuie il aimait la bonne grâce el la pro-
preté, la vanité le porta à se faire Si ier cet
os, opération qui ne se dX pas sans d'extrc-
II es douleurs. Cela ne l'empêcha pas de su-
bir volontairement une nouvelle torture,
plutôt que d'avoir rien de difforme en sa
personne ; car une de ses cuisses s'élant re-
liiée depuis *a Llessur*, et craignant étran-
gement de paraître boiteux, il se lit tirer
irès-violemment la jamlie durant idusieurs
jours avec une machine de fer; iiiais sa
j ;nibe droite demeura toujours i)lus courte
qie l'autre.
Durant cette longue cure, Ignace, qui était
obligé de garder le lit ou la chambre, avait
tiiul le temps de s'ennuyer. 11 demanda un
roman pour se divertir ; mais, ne s'en Iron-
vaut point dans la mai-on, on lui apporlala
Vie de Jésus Christ et celle des saints. 11 h s
lut, précisément pour s'amuser, el n'y t)ou\a
d'abord aucun plaisir; mais la grâce de Dieu
agissant sur ce cœur mondain, il se laissa
toucher par la douceur de ses attraits, prit
goût insensiblement à cette lecture, et fut si
charmé et si édifié des exemples de veriu
(ju'il y trouva, qu'il f irma au même temps le
dessein de les imiter. Il se proposa pour cela
de visiter les saints lieux et de s'enfermer
dans un ermitage ; n)ais ces bons mouve-
ments duraient peu, étant combattus parla
passion qu'il avait pour la gloire cl par l'a-
iiour qu'il portail à une dame de la cour de
Casiilleeldcs premières maisonsdu royaume.
Ainsi oubliant en un moment les projets
qu'il venait de faire, il n'avait l'esprit oc-
cupé q le de la guerre el de l'amour, se for-
mant des chimères de vanité el de plaisir,
dont les folles idées l'eiichantaienl à un tel
point, qu'il ne compreniit pas qu'on pût
vivre sans une f;rande ambition, ni être heu-
reux sans un grand allacliemenl.
Lorsqu'il étaii las de rêver, il se remettait
à la lecture, qui enfin, par le sicours do lu
grâce, l'éclaira si bien, que, n'estimant plus
que les vériialiles honneurs el les p!aisirs
du ciel, il commença à connaître la vanilé
de la gloire du momie à laquelle il aspirail,
cl le danger où il s'exposait en suivant ses
maximes; c'est pourquoi prenant la résolu-
tion de le quitter eniicremenl cl de se con-
sacrer à Jésus-Christ, il se proposa d'entre-
priudre le pèlerinage de la terre sainte ,
pieds nus et revêtu d'un sac , résolu à son
retour de se cacher dans quelque solitude,
où, inconnu aux hommes, i.l pût penser uni-
quement à son salut, el passer le reste da
ses jours dans les exercices de la pénitence.
Mais, comme sa jambe n'était pas encore
tout à fait guérie, il ne pul pas exécuter si-
tôt ces projets ; et il se con tentait pour lors
de se lever toutes les nuits, cl d'en passer
une partie la face prosterné- contre terre,
pleurant amèrement ses péchés. Lorsqu'il
lut en état de marcher, ne songeant plus
(ju'â suivre la voix qui l'appelait à la per-^
leclion, il sortit de Loyola, résolu d'aller eu
pèlerinage au monastère de Monl-Serral, fa-
meux par la dévotion des pèlerins qui de
tous les endroits du monde y viennent im-
plorer le secours el honorer l'image mira-
culeusi; de la sainte \ierge, dont nous avons
déjà parlé ailleurs. Mais, pour mieux ca-
cher son dessein, il alla à Navarel, sous pré-
texte de rendre visite au duc de INajare, qui
avait souvent envoyé demander des nouvel-
les de sa santé. Sa visite étant faite, il ren-
voya les deux valets qui l'avaicut -jii couipa •
531 niCTIONNAmiC DES OROniCS nEMCIl-LX. CjÏ
pilé JMfqu'alors, ri prit sent le rliemiii de sU'rc Je l'ordre do S.iinl-Doinini [iio el nu
Aîoiil-Sciral. En sctrl.irl de N.ivarel, il fil hc''|jilal pour les pèlerins pI les inalado*. I.e
vipu de cliaslelé peipéluelle, pour .se rende saini enlra dans tel lii'i|iilal, qu'on aj'pelail
plus n;;iéable à la sainte N'ierge, snus la pour lors l'hôpital de Sainle-Luc-, f,. il con-
proIcTlion lie laquelle il allait sr niellre, et lent de se voir au nombre des pauvres, el en
se ilisposa à se rociincilier avec Dieu par une él.it de faire pénitence sans èlre connu. Il
sinei'ie confission cle tous ses poêlés. Doni comim-nça par jeûner toute la semaine au
Jaan Cliaronnes , Français de nation, qui pain et à l'eau, cxceplé le dimanche, qu'il
.ivanl sa rotraile à ]\lont-Sei rat avail été mangeait un peu d'herlies ruilos, encore y
i;rand vicaire de l'evéciue do Mirepoix, fut mcll.iit-il de la cendre. Il ceignit ses reinî
le religioUT anquol Ignaco s'adr<'ssa pour d'une chaîne de fer et prit un cilic sous l'ha-
l'aire une confession générale de ses péchés, billeinoni de loiiei.'onl il était revêtu. Il pre-
«pi'il écrivit avec loue rox.iciitude pos<ihlo. nail la disi ipline trois fois le jour, dormait
Il la fil avec une douleur si vive et nno telle peu et couchait .à terre. O.ilre le servi e di-
.•ibondance de larmes, qu il fut obligé du vin, qu'il entendait tous les jours av c une
l'interrompre souvent; ce qui la fil durer picé cl une dévolion lonic singulière, il
trois jours. Il lui découvrit loulos ses pon- i'aisail sept heures de prières ; il visitai! sou-
sées, cl snrloiit il lui fil le plan do la vie vent l'église de Notre-Dame do ^■illallnrdis,
aus ère qu'il v(.u'ait mener, ("e saini houime, qui n'e l qu'à une dorni-lioue de Manrézo. el
ijui vivait lui-même trôs-ausièrement, le dans es polils pèleriiiagos il ajoulail d'or-
confirnia dans son dessein, en Ini prescri- dinaire au cilico et à la chaîne de for qu'il
vanl néanmoins des règles de prudence pour porlail , une ceinture do cei laines herbes
sa cr)nduilo, el pour éviter les pièges que le iiès-piquanti s.
malin cspril |i<iuvail lui tendre dans ses prc- Le démon, ne pouvant su[)[iorler celle fer-
mières feivcurs. veur, employa tous ses elTorls pour l'en dé-
Ignace Ht présent de son cheval au mo- lournor, en lui reprc-entant la dureté de su
nastère, pendit son épée à un pilirr proche pénitence cl la difficulté qu'il y avail d'y
l'ante! , pour niar(]ue qu'il renonça.t à la persévérer, le ('ésagcén;eni d'éire dans un
milice séculière, el n'emporta avec lui que lioiiilal, la honte qu'il y avait pour un homme
les in.struments de pénitence qu'il avait de- de sa qualité d'être toujours avec des pau-
mandés à son confesseur. Puis, revêiu de vros, el le urand profit qu'il ferait à la cour,
l'habit d'un pauvre, au>|uel il avail donné le où , par la régularité de sa conduite el
sion, jusqu'à sa chemine, il sortit de Mont- l'exemple de ses vertus, servant de modèle
Serrai le bourdon à la main, la calebasse au au\ courtisans, il les attirerait insensible-
côté, la léle elun piod nus car pour l'.iu re, ment au service de Jésus-t^hrisl et à la pra-
qui se sentait de ta blessure, et qui s'enllait tique des vertus chrétiennes. C'était prendre
îoutes les nuits, il jugea à propos de le le nouveau soldat de Josus-Christ par dos en-
chausser), cl il marchait avec une vigueur droits bi(n sensibles; niais, ayant reconnu
qui, surpassant la force d'un homme élevé la malice de l'espiil tenialour, il repoussa
aussi dél catemenl qu'il l'avait été, ne j)iiu- ses suggestions par la pr;;lique des vertu;»
vait venir que d'en haut, fort consolé do ne <l"i leur étaient opposées. Bien loin de fuir
plus p(yicr les livrées du monde et tout glo- les piuvns, il se familiarisa avec eux plus
rieux d'être revêtu de (elles de JêsU'-Chrisi. que jamais. Non content do demeurer dans
A peine eut-il fait une lieue, qu'il entendit cet bopi'al, il s'ait.icha aux malades les plus
ilcrrière lui un cavalier qui cour;ut à bride dégoût, nts; el, au lieu de retourner à la
abattue; c'était un officier de la justice de cour, il résolut de se cacher encore plus au\
Monl-Seiral qui vor.ait lui demander s'il you\ des hommes. Cependant, nonobstant
était vrai qu'il eûl donné do riches habits à toulçs les diligences (ju'il prit pour réussir
un gueux; parce ([u'élani soupçonné de les dans celte dernière résolution, le bruit courut
avoir volés, on l'avait ujis en prison, jusqu'à dans Manrézo que ce pèlerin qu'on ne con-
ce qu'on ( n connût ui vériié. Ignace à ces uiiissait point el;iil un homme de qiialilé qui
paroles fui pênéiré do douleur, et, se repro- faisait | énitence. Ce que l'on lOiijoctur.i par
••.liant à lui-iiu'inc d'avoir été cause de la la nouvelle qui s'y répandit de l'avenlur(!
disgrâce de c« i ativre homme, il le déchar- du pauvre de .Monl-Sorrai, auquel il avail
{jca i!u crime dont on l'accusait, sans nean- di nné ses liai ils : c'est pourquoi on com-
inoins vouloir dire qui il était. Après celle nu nça à le regarder avec d'aulres yeux dans
.aventure il poursuivit son chemin vers .Man- rhê)p,lal et dans la ville. On le venail voir
rèze, où il avait résolu de se cacher, en al- piir curiosité, cl on l'admiriiil d'autant pins,
lend.inl que la pesle cessât à itarcelone, cl qu'on l'avait traité avec mépris. I.e saini
que le port lui ouvert, espérant y trouver s'en aperçut, et. prenant ce ihaiigement (lour
<',uclr|ue bâtimenl sur lequel il pût monter un nouveau pioge (|uc le demun lui tendait,
pour commencer ton vovage de la terre cl qu'il deviiil éviier, il se relira pour cet
fiainle. effet dans uni! caverne qui était au |)ied d'une
Manréze est une petite ville à trois lii ues monlat;ne éloignée, de six cents p,is de la
de Mont-.^erral, fameuse aujourtl'hui par la ville. l'iu degonsconn.iissaieni cotte caverne,
pénitence de s.iint Ignace et par la i iole dos et personne n'avait osé y entrer, tant elle
peuples qui y viennent de tous ci'ilés en pè- paraissait affreuse ; mais Ignace, ju|;eant ()uc
leriii.igc, mais alors de peu de consoiiuonce, ce lieu en élait d'.iiilant plus propre à se ca-
u'dvanl lieu do c iisidérablc qu'un oiuiu- cher au» yeui di s l.ommcs, perça Icj brous-
I
C35 iES JES 034
«ailles qui en fermaient les avenues et, s'y modéra ses auslérilé-, cl prit un li;ii)illoiiieiit
étant coulé au travers des ronces, il y cta- de ((ros dr;ip, moileste et propre. Il pailait
blit sa demeure. L'horreur de ce lieu lui publi(jueincnt dos choses du ciel; el, pour
inspira un nouvel esprit de pénitence, à la- se mieux fiire entendre du peu|)le (|ui l'cn-
quelle il s'adonna avec tant de rigueur, vironnait, il inonlail sur une pierre qu'on
qu'on le trouva un jour évanoui à l'entrée montre encore aujourd'hui dans l'ancien
de sa caverne : ce (jui ayant découvert le hôpital de Sainle-Luco. Quelques personnes
lieu de sa retraite, on le ramena malgré lui furent si touchées de ses estliortations ,
à l'hôpital de Manrèze, où il fut attaqué de qu'elles renoncèrent au siècle pour em-
nouveau par la tentation de changer le brasser une vie pénilcnto. Les léflexions
genre de vie austère (lu'il avait embrassé; fréquentes ((u'il fit sur la force des m;i\inies
mais une lièvre mali;5ne dont il fut attaqué évanïtéliques qu'il enseignait le portèrent à
si violemment que l'on désespérait de sa vie, composer son livre des Exercices spirituels,
le délivra de celte tentation, qui fut imnié- pour le profit des âmes mondaines. Le pape
diatement suivie d'une autre de présomption, Paul 111 l'a approuvé depuis comme un livre
qui le port, lit à se regarder comme un grand auquel on ne saurait donner trop d'éloges,
saint, il se délivra de celle-ci en rappelant et qui renferme une méthode admirable pour
dans sa mémoire les péchés de sa vie passée; retirer les âmes du désordre el pour les
mais il en conçut tant d'horreur, qu'il tomba conduire à la perfection du ehrisliani^me.
dans un état beaucoup plus funeste que celui Après ce travail, se sentant assez fort pour
dont il sortait. A peine eut-il recouvré la entreprendre son voyage de la terre sainte,
santé du corps, qu'il perdit la tranquillité el sachant que la peste était cessée à Barce-
dont son âme avait joui depuis qu'il s'était lone et le commerce rétabli, il quitta Man-
donné à Dieu. Toutes les joies spirituelles rèze, où il était depuis plus de dix mois. 11
qu'il avait goûtées jusqu'alors et les eonso- s'embarqua à Barcelone, sans autre provi-
latioiis dont Dieu l'avait favorisé se changé- sion qu'un peu de pain qu'il avait mendié,
renl en amertume et en tristesse par les et il arriva en cinq jours au port de Ga'iette.
scrupules dont il se sentit accablé. On eut d'où il prit la roule de Home, seul, à pied,
beau lui défendre de s'airéter à ses doutes jeûnant tous les jours, et mendiant à son
el d'écouter ses scrupules, tout cela ne ser- ordinaire. Il y arriva la veille du dimanclio
vait de rien. Plus il s'efforçait de s'en débar- des Rameaux, l'an 1523, et en partit huit
rasser, plus il él. lit accablé d'inquiétudes; et, jours après Pâques pour aller à Venise. Il
s'imaginant qu'il ne recevait plus aucun se- était fort tard lorsqu'il entra dans cette ville;
couis du ciil, iicrui que Dieu l'avait dé- el, ne sachant où se retirer, il alla se mettre
laissé et que sa damn^ition était certaine, souà un portique de la place de Saint-Marc,
Dans cette pensée, il se trouva agité de plu- pour y prendre un peu de repos ; mais Dieu
sieurs mouvements de désespoir, auxquels il ne voulut pas que son serviieur y passât la
aurait infaïllibiemeni. succombé, si Dieu par nuit. Il y avait parmi les sénateurs de la ré-
Un effet de sa miséricorde ne l'eût soutenu publique un homme d'un mérite extraordi-
contre ces aliaques de l'esprit tentateur, qui, naire, nommé JLirc-Antoine Trévis.mi, que
ne pouvant réussir de co côté-là, le tenta sa vertu éleva depuis à la dignité de doge.
avi'C plus de succès du côié de la piésomp- Ce sénateur, qui logeait dans la place da
tion. il lui persuada de ne prendre aucune Saint-Marc, s'élant (ouché et endormi, il lui
nourriture jusqu'à ce qu'il eût recouvré la sembla entendre une \oix qui lui disait que
paix de son âme. 11 jeûna effectivement sept tandis qu'il était à son aise, dans son lit, le
jours entiers, sans boire ni manger : il au- serviteur de Dieu était sous un portique de
rait même poussé ce jeûne plus loin, si son la place. Un songe si extraordinaire l'éveilla
confesseur, qui était un religieux de l'ordre aussitôt, et, ne pouvant s'imaginer que le
de Saint-Dominique, ne lui eût ordonné de hasard en fût la cause, il se leva et alla lui-
l'interrompre. Lnfin ses troul)les se calmé- même chercher celui que la voix du ciel lui
renl, et il ne fut pas seulement délivré de indiquait, le conduisit à son logis avec hon-
tous ses scrupules, mais il obtint encore le nenr, et, après lui avoir rendu tous les de-
d<m de guérir les consciences scrupuleuses, voirs de charité, il lui procura une audience
et r. çut diverses faveurs du ciel, qui le de- du doge André (jritti, dont il obtint une place
doiiimagèrent du passé. dans la Gapitane de la républiiiue, qui allait
Jusque-là il ne s'éiait proposé dans toutes dans lîledeChypre. Ils'y embarqua, el, après
ses pratiques de piété que sa perfection par- quar.inte huit jours de navigation, il arriva
ticulière; mais la Providence, qui le desti- enfin le dernier jour d'août delà même an-
iiait au iiiinislère évangelique, et qui l'y née au port de Jalfa, d'où il prit le chemin
avait d'abord piéparé sans qu'il le sût, par de Jérusalem par lerre, el s'y rendit le 4
jle fnépris du monde qu'elle lui avait inspiré, septembre. Son des<ein était de s'arrêter en
par la retraite et la mortification, lui donna Palestine pour travailler à la conversion des
d'autres vues et d'autres desseins : elle lui peuples de l'Orient; mais le provincial des re- 1
inspir.i de s'appliquer à la conversion et à Iigieux de Sainl-François, qui aval un pou-
la sanctification des âmes : dans ce dessein, voir du sainl-siége de renvoyer les pèlerins
quelque clièie que lui fût sa solitude, il en ou de les retenir, selon qu'il jugerait à pro-
soriii. 11 corrigea ce que son extérieur avait pos, ne le lui permit pas, ce qui l'obligea de
il'affreux el de rebulaui, afin de ne pas éloi- revenir en liaropc. Il arriva heureusement à
gucr ceux qu'il voulait attirer à Dieu. 11 ^enise sur la fin de janvier 152'i-, après une
fi35 nurnoN.NAïuK iii:s onnuKS iir;Li(:ii;ux. rjg
navip;alion de plus ilo iJou\ mois, pendant drc connaissance ; m.iis. voy.inl (iiiil n'était
laquelle il oui loul le Icmp'* de (aire des ré- ni licrélique ni v sionnaiie, ils remirent le
llexion'i. Il rtiiicul tiue. ponr travailler à la reste de rinformation au ^T:\n>\ vicaire, ((ui
conversion des âmes, il fallait avoir dis traita saint Ignare très-favorablement, et lui
connaissances qui lui (nanquaii'iil ; et, ju- permit de continuer ses fonctions pour le
■îcant qu'il ne pourrait jamais rien faire de service du prochain; il l'aiertil ([ue lui et
solide sans le fondement des lellrcs humai- ses compagnons n'él.inl pas reli;:ieu\, on
nés, il prit la résolution de retourner à lîar- n'apjironvail pas qu'ils fussent tous haliillés
celonc pour s'y appliquera l'étude. Il n'eut de la même sorte; ce qui était une dislinc-
poinl de honte, (luoiiiu'à^é de trente-trois tion dans laiiue! e il y avait, selon le senti-
ans, d'étudier les premiers principes de la ment de plusieurs [leisonnes, I eaiicuup d'af-
lani.'iic latine, et de se trouver tous les jouis fe> talion. Le saint, qui ne li- f.iisait que par
en classe avec des entants, sous la conduiic ui\ lion motif, ne voulant point dimner aucun
de Jérrtme Anlebale, qui y enseignait pu- sujet de plainte, s'haf)illa de noir avec un
bliquemenl la grammaire. Il fit un si f;ran I autre, laissa un iiabilgris au Français, et en
progrès dans l'élude de la langue latine (il premlre un de couleur minime aux deux
])cndant deux ans, que son maître lui cou- autres Kspagnols, et prit des souliers, pour
seilla d'aller l'aire son couis de philosophie oliéir au nième grand vicaire, (lui !<■ lui or-
dans l'université d'Alcala, qui avait élé fo:i- donna. L'iiuliscrélioii de deux dévotes riches
dée depuis peu parle cardinal Ximenès.IIsui- et de qualité (jui suivaient ses conseils, et
vil ce conseil, el y mena avec lui trois ilisci- qui entreprirent alors sans sa participation
pies qu'ilavait faitsduranlsonséjour à Bane- quelques pèlerinages, vêtues en pèliTines, à
lone. V élanl arrivé, il y commença ses élu- pied et d> mandant l'auuiôiie, donna lieu à de
des, el y fil un quatrième disciple d'un jeune nouvelles plaintes contre lui, comme étant
Français qui avait été page de dom Martin l'auteur d'un zèle si outré cl si peu conforme
de ("ordoue, vice-roi de Navarre. Quoiqu'ils à leur sexe; on le mil en prison avec ses
ne demeurassent pas ensemble (Kerdinand compagnons, d'uù il ne sortit qu'au retour
de l'ara cl André d'Arzc en logeaient deux deces dévotes, au bout desis semaines, après
par ( hariti", el Ignac e avait une chambre à qu'elles eurent avoué que saint Ignace n'a-
l'hôpilal d'Anlezena), ils étaient néanmoins vait point lu de part à leur jjèlei inagi',
tous (inq habillés de niê'iie façon, perlant qu'au contraire il les en avait détournées.
un habit long de drap gris, avec un chapeau On les crut, el le saint fut élargi par une
de même couleur, et ne vivaiint que d'aumô- sentence du premier juin 1527. Va: jugement,
lies. L'im[)alience qu'il avait de se ilonner à lui rendant sa liberté, ne laissa pas de lui
la conversion des âmes lui lit embr.isser d'inner du chagrin. Il fut ordonné en mémo
l'étude avec une extrême ardeur; et, croyant temps que lui et ses compagnons prendraient
avancer beaucoup en abrégeant les matières, r!ialiillemenl iirdin.iire des écoliers, et (|ue,
à peine eut-il commencé son cours, qu'il se n'i tant ()as théologiens, ils s'absliendr.iient
jeta dans la physique et la théologie scola>- d'expliqurr au peuple les mystères de la
tique. On expli (uail aux écoles la I.ogi- religion , jusqu'à ce (|u'ils eussent élud.é
que de Solo, la l'hysiquc d'.Mberl le Grand quatre ans en théologie,
et la l'héolDgie du Maitre des Sentences ; il Ignace, peu satisfait dece jugement, rendu
prenait ces trois leçons l'une après l'autre, par le grand vicaire d'Alcala, alla trouver
et éludiail sans relâche jour el nuit ; mais l'archevêque de 'l'olède, qui lui conseilla de
ces dilTérenles études lui mirent tani de con- quitter cette université et d'aller étudi -r à
fusion d.ins l'esprit, que lout son Irav.iil ne Salamanque; (I, l'exhoitaiil fortement à
|)ro(lnisit pas ce qu'il en espérait. Kebulé du conl^auer ses fonctions de pié;é envers le
peu de progrès qu'il faisait dans les sciences, prochain, il lui promit sa pioleclion. Notre
il s'appliqua entièrement avec ses quatre saint y alla, et, eu aitendant qu'il pût re-
disciples aux bonnes o-uvres et à l'explica- picn.lie le cours de ses éludes , il commença
lion delà doctrine chrétienne, àscivirlcs par tr,i\ailler au salut des àincs avec d'autaiit
malades de l'hopilal, à soulager les pauvres plu. de ferveur el de liberié, (j-ie sa m ssioii
honteux, et |iarliculière(nenl à réformer les semblait èire autorisée par l'archevêque,
uiii'urs des écolier> dehaïuhés. iMiis on y trouva encore à redire : il lui mis
La (onversiou siirpreiianle qu'il (il d'un derechef en prison avec ses compagnons,
prel.il (|ui corroini)ail les jeunes gens de cl, après y avoir clé retenus peu laiil trois
l'univerhite par ses mauvais exemples, ses semaines, ils fnrent renvoyés absous par
libertés el ses caresses, lit du bruit p.ir tout une sentence qui permet ail A Ignace d'iii-
le pays, surtout lorsqu'on vit (in'iDe lut slruire le peuple, a comijtion (jue, dans ses
suivie de celle d'un grand nombre d'écoliers, catéchismes cl dans ses entretiens, il ne se
que le prélat lui-même entreprit de relircr mêlerait point de vouloir marquer la dilTé^
du liliertinage où il les avait jetés. Le peuple rence qu il y a entre le péché mortel el lo
eut d'etranms idées d'Ignace; quelques-uns péché véniel. Ignace, sur|)ris de ce dernier
le prenaient pour un enclianleur, el disaient arlii le de la sentence, vil bien que c'était un
que sans magie on ne pouvait faire ce qu'il piège qu'on lui tendait, d'autant plus (ju'il
taisait; el d'autres, ()uu c'était un hêrélii]ue sut que ses ennemis l'ivaieiii f.iil mettre
qui, sous prétexte de porter les jeunes gens alin d avoir lieu de le chicaner et de lui faire
a la vertu, leur ins|iirait des erreurs. Les une querelle quand ils voudr. lient : c'est
inquisiU'Uis do Tolède en vouluicnl pren- pourquoi, persuadé de leur malice, «lui lui
C37
JES
JES
r38
fttait les moyens de satisf.iire son zèle, il prit
la résolution de (cuiller Sal.im.innuo , rt
même de sortir de l'Espagne. 11 l'iirma le
dessein d'aller en France, pour continuer ou
pluiôt pour recommencer ses études d;ins
l'université de Paris, qui était depuis long-
temps la plus célèbre de l'Europe.
Ses compagnons n'étant pas disposés à le
suivre, il partit seul sur la fin de dcccnibic,
arriva à Paris au comincnienienl de février
de l'an 1528, cl se logea au quartier de l'U-
niversité avec des écoliers espagnols. Pour
mieux posséder la langue latine, il reprit ses
iiunianilés au collège de Montaigu; mais,
ayant été volé par un de ses compagnons,
auijuel il avait confié une somme d'argent
que ses amis lui avaient donnée en partant
d'Espagne pour la continuation de ses étude;,
il fut contraint de se relirer à Sainl-Jacrjues
de l'Hôpital, où les Espagnols ét^iitnt reçus.
11 n'y avait (jue le couvert, et il lalliiit que
pour vivre il mendiât son pain de porte en
porte. Gomme il demeurait loin du collège
de Alontaigu , perdant du temps à chercher
des aumônes, il aurait bien voulu servir un
des professeurs ;mais, quelque diligence qu'il
lit, il ne put jamais l'obtenir. Quoique sa mi-
sère fût grande, il ne laissait pas d'exciter
les gens de sa connaissance à faire la charité
aux pauvres, auxquels il faisait donner ce
qu'il aurait pu demander pour lui. Ses paro-
les firent tant d'impression sur l'esprit de
trois Espagnols, qu'ils vendirent d'eux-mê-
mes leurs meubles et en donnèrent l'argent
aux pauvres, après quoi ils se retirèrent
aussi a Sainl-Jac(iues de l'Hôpital, où ils vi-
vaieiit d'aumônes comme lui.
Cette nouvelle société rendit encore notre
saint suspect. H fut déféré à l'inquisiteur
Matthieu Ory, religieux de l'ordre te Sainl-
I)oniini(|ue et prieur du grand couvent de la
rue Saint-Jacques. ((Juoique le tribunal de
l'inquisition naît jamais été établi en France
de la manière qu'il l'est en Espagne et en
Italie, il y a eu néanmoins dans de certains
temps des inquisiteurs délégués du- pape
pour y conserver la pureié de la foi et tenir
les peuples dans l'obéissan'e de l'Eglise; et
cette qualité avait été déférée à Matlliieu
Oiy par le pape Clément Vli, à l'ociasioii
des hérésies d'Allemagne.) Cet inquisiteur,
\ayant donc pris connaissance de celte alïaire,
et ayant reconnu l'innocence d'Ignace par
les perquisitions qu'il fit, le renvoya absous.
Ayant étudié les tiumauités près de di\-huit
mois au collège de ftlontaigu, il commença
son cours de philosophie au collège de
Saiute-ISarbe. Le docteur Govea, Esp gnol,
principal de ce collège, prévenu contre
Ignace par les Tiux rapports qu'on lui en
avait faits, voulut d'abord l'en chasser; mais,
ayant examiné avec diligence la conduite de
notre saint, el n'y ayant rien trouvé qui lui
digne de réprchensi n et qui ne mériiàl au
contraire l'estime el l'approbation de tout le
monde, lui fit satisfaction publique devant
tous les écoliers, el rendit justice a sa vertu
par l'éloge qu'il en fit. Le professeur l'egna,
gui avait éie U cause de telle prévention,
voulant aussi réparer l'injure qu'on lui avait
faite, lui lUmna pour répétiteur un garçon
fort capable, nommé Pierre Lefi'vre , sa-
voyard, qui demeurait au même collège avec
François Xavier, gentilhomme navarrois ,
peu accommodé , et presque aussi pauvre
que Lefévre. Ignace si; mil avec eux piur
1.1 commodité de ses études, et avança lelSe-
nient par le soin que Lefèvre prit de loi,
qu'à la fin de son cours, qui fi:l de trois ans
el demi, selon l'usage de ce temps-là, il fut
reçu maître ès-arts, et continua ensuite sa
théologie aux Jacobins. Ce fut alors que,
sentant croître en lui le zèle pour le salut
des âmes à proportion qu'il avançait dans la
connaissance des mystères de la foi et des
vérités évangéliques, il forma le dessein d'é-
lablir une compagnie d'hommes apostoliques
qui pussent l'aider à porter et étendre ce
même zèle jusqu'aux extrémités de la terre.
-Ne doutant point que le penchant qu'il se
senlait pour l'instruction des peuples el la
conversion des infidèfes ne fût un secret
mouvement de la grâce de Dieu, qui le desti-
nait à un si noble emploi et si digne do
l'ambition d'un véritable chrétien , et ne
comptant plus sur ses anciens compagnons
qu'il avait laissés à Barcelone, où ils avaient
pris différents partis, il s'en associa (juel-
ques autres qui étaient de l'université. Lo
premier qui se joignit à lui fut ce Pierre Le-
fèvre, qui avait éié son répétiteur; il gagna
ensuite François Xavier, et peu de temps
après il eut quatre nouveaux compagnons,
qui furent Jacques Lainez, d'.Mmazan, au
diocèse de Siguença; Alphonse Salmeron,
d'auprès de Tolède; Nicolas Alphonse, sur-
nommé Bobadilla, du lieu de sa naissance,
village proche de Paltnze, au royaume du
Léon; el Simon Uodriguez d'Azeudo, gentil-
homme portugais.
Quoique le choix de ces six personnes
parûl venir de la main de Dieu, el qu'I-
gnace, persuadé de leur zèle pour l'agran-
dissemenl du royaume d^' Jésus-Christ, n'eût
aucun lieu de douicr tie leur fidélité el per-
sévérance dans le dessein (ju'ils se propo-
saient ; cependant, se ressouvenant de l'in-
constance de ceux, qui s'étaient joints à lui
en Espagne, et faisant rèllexion sur la lé-
gèreté de l'esprit humain, il se persuada
que, quelque bonne que fût la volonté de
ses nouveaux disciples, il était nécessaire de
les fixer par des engagements indispensa-
bles. Le jour de l'Assomplion de Notre-
Dame de l'an 153i, ap;ès les avoir [iré-
parés sur son dessein, il les mena dans
l'église do l'abbaye de Montmartre près Pa-
ris, où Pierre Lefèvre, qui avait été fait
prêtre depuis peu, leur ayant dit la messe
et les ayant communies dans la chapelle
souterraine, ils firent tous sept ensemble,
d'une voix haute el distincte, vœu d'enlre-
[irendre le voya;re de Jérusalem pour l,i
conversion îles infidèles du Levant ; de quit-
ter tout ce qu'ils avainnl au mofede, hors co
iju'il leur faudrait pour aller en terre sainte;
el, en cas qu'ils ne pussent y entrer ou y
demeurer, de s'aller jeter aux pieds du pape,
c:9 niCTiON.NAiiiK n:.s onDRr:s kf.licielx. (uo
pour lui oiïrir leurs services, et aller sous Le nonce examina l'alTaire avec «on risses-
sesorilrcs p.irtoul où il vouilrail li'S envoyer. seur, et, ne trouvant rien qui pût donner
(",oniinc il _v «n avait parmi eux qui n'a- lieu aux bruits qui couraient, il porli en
valent pas fi il i l<'iir ilieiiIof;ie, il leur laissa faveur du saint uac senlcncc juri(li(iuc ,
continuer celle clmle jusqu'au 2") janvier qui le disculpait de ces fauises accusations.
15.17, cl en lis attendant II travailla à ar- Pierre Cariffo, qui fut élevé au souverain
rcler K- couis et les désonlrcs que eau- ponlificat sous le nom de Paul IV, cl qui
saienl en Francs les nou\clles hérésies. 11 auparavant d'archevêque de Tliéa'e, s'clant
avait coulun\e de se retirer, ou à Noire- fait compagnon de saint (laéian de Tyenne ,
Dame des Cliainps . (jiii él lit le lieu où avait été l'un des fondateurs de l'ordre
l'on a bàii depuis 1(> couvent des ("armé- des Tlicalins, du nom de l'archcvéclié qu'il
liles du faiiboiiri; Sainl-Jacqucs , on dans quilla, ne contribua pas peu à cmifondrc
les c.irriiTcs de .Munlm.irlre , qui, lui rc- ces cal:)mnies, par rcstimo et les liaisons
présentant sa caverne de Manrczo, l'ex- qu'il eut avec Iy;nace dans le séjour qu'il lit
citèrent à reprendre des exercices de pé- à ^'enise, où enlin il eut La consolation de
nitonce ; mais ses nouvelles austérités ayant voir ses compagnons plus lot qu'il ne l'cs-
ruiné ses forces, le réduisirent dans une pérait et qu'ils n'en étaient convenus. La
laiigiicur, qui ne lui permettait pas n.éme de guerre se ralhiinanl plu< ([ue jamais entre
s'ap.pliquer aux exercices de piété. Comme François l", roi de Fran. e , et l'emperc-iir
les remèdes ne le soulageaient pas, les Charles \', par la mort de Françnis Sioize,
niédeciiis lui p» rsuadèrei:t d'aller rcpren- duc de Mil. m, sur l'Etat duquel ces deux
dre l'air de son pays. I! se détemiina à princes avaient des prétentions, au premier
ce vt)yage; mais, avant sun départ, cjui bruit qu;' ces fi ièles disiplos en eurent, ils
fut au cummencemenl de janvier de l'an, se résolurent d'av.incer leur voyage et de
1335, il convint avec ses disciples qu'il sortir du royaume avant que les passai;e8
irait les attendre à Venise , et qu'ils par- fussent formés. Ils partirent de Taris le 1j
liraient le 25 j invier LjST pour l'y \cnir novembre de l'année 1336, trois snois plus UU
trouver. Sa faiblesse ne lui permit pas de qu'ils n'élaientconvenus avec leur saint fon-
faire le voyage à pied; il le lit sur un dateur, sans autre équipage (ju'un bâton à
cheval que ses compagnons lui athotèrcnl; la main et une petite valise sur le d< s, où
et à peine eut-il passé les Pyrénées et res- chacun avait ses écrits. Us prirent leur clie-
piré l'air de Guipuscoa , qu'il recouvra sa min par la Lorraine pour éviter la Provence,
ganté et sentit revenir ses forces. et arrivèrent à ^'euise le 8 janvier de l'an
Pendant le séjour <]u'il fit en Lspagne , 1537. Ignace les reçut avec beaucoup de
ses compagnons, qu'il avait laissés à Pa- j ie, et leur donna un autre compagnon,
ris, poursuivirent leurs études. Lefèvre nommé Jacques llozoz, qui fut le onzième de
les gouvernait en son absence et augmenta la Compagnie. En attendant qu'ils pussent
leur nombre de trois autres théologiens, aller ensemble recevoir la bénédiction du
dont le premier fut Claude le Jay d'An- pape pour le voyage de Jérusalem , le saint
necy , Jean Codure et Paquicr lirouel , fondateur les oceu|)a dans les hôpitaux à
tous deux Fr;.nçais, l'un du diocèse d'iîm- instruire les ignorants, à servir les malades,
brun et l'autre du diocè e d'. Amiens. Ces à assister les mourants cl à ensevelir les
Irois (îerniers firent à .Moulin. irire le même morts. Ils s'occupèrent de la sorte jus(|ue
vœu tiue les autres y avaient fait cl qu'ils vers la mi-carcme, que tous partirent pour
lirent ( ncorc |iour la seconde fois. Ces nenf Home, hors Ignace, qui ne jugea pas à pro-
disciplcs d'Ignace, qui avec lui firent les Ion- po-. de parailie dans un lieu où sa présence
déments de la Cumpagiiie de J 'sus, étaient cûl pu iaire tort à ses compagnons : car (',a-
tcllemeiil unis ensemble , ((ue, quoie,ue dif- raiïe, que Paul III avait fait cardinal , sem-
féienls <l de nation el d'humeur, ils sem- blait alors forl contraire aux desse ns «lu
blaienl iiéaninoins n'avoir qu'un ccrur el saint, soit ])ar resscnlimiul de ce que lui et
qu'une aine; ce qui était d'une grande conse,. Hozez n'avaient pas voulu entrer parmi les
lation pour ce sainl fondateur. Ignace, après Théalins, ou soit qu'il eût ajoute foi aux
avpir demeuré c|u.;si un an en Lspa;;nc, eu bruits qu'on avait semés à Venise. Les coin-
partil pour aller à N cuise, où il arriva sur pignons de notre saint étant arriiés à Ko-
la fin de l'année i'.i'-lo. Son zèle ne lui donna me, furent reçus si favorableoienl tlu pa[>i',
pas de relâche dans celle ville, où il ue fat que, sur le lécil qu'on lui avait fail de leur
pas jilulùl entré , qu'il s'y occupa à gagner savoir cl de leur piété, non-seulement il
des âmes à Dieu. .>Iais ce qui lui devait alti- leur accorda ce qu'ils lui demandèrent,
rer de l'estime fui le sujet d'une nouvelle per- mais même . ajirès leur avoir donné sa bé-
secution. l-.lle lui lut suscitée par les liber- nédielion, il leur donna de l'aigcnt jiour
lins, qui, ne pouvant soulïnr la censure leur voyage, et permit à ceux qui n'étaient
qu'il f lisait de leur vie, firent courir le bruit |ias prêtres, du nombre desquels était Igna-
qu'lgnace était un héréli(]ue déguisé, qui, ce, qui (|iioique absent fut < ompris dans celle
après avoir infeeté la France el l'Espagne, permission, de recevoir les ordres sacres
venait gâter l'ililie. Dès qi>e le s linl sut ce de (|uel(|uc évèquc que ce fût , cl accorda
i|ue l'on (lisait publiquement de lui. il alla une dispense il'àge pour Alphonse Salme-
iriiuver Jerrtine N'eralli , non'C du pape ron , afin qu'il reçût l'ordre de la préirisc
P.iul III vers la république, pour le prier avec les autres dès qu'il entrer. lil dans sa
Je lui faire son procès, s'il étal couiublc. vinglièine auiiée. El.uil rclourncs à Venise,
(iil
JES
JES
042
ils firent vœu de pauvre é cl Je ch.istelé
porpéluelle outre les mains (lu nonce Vc-
ralii , cl le jour de la Nalivilé du saint Jean-
Baplislo, ceux qui n'étaient pas prêlrcs fu-
rent ordonnés par Vincent Ni'iulati, cvê(|ue
d'Aibc. La U'^ue qui fut conclue dans (e
tinips-là entre l'Eniporeur et la républi-
que contre le Turc, ayant rompu le cotu-
luerce du Levant, les empêcha de faire leur
voyage de Jérusalem: c'est pourquoi, après
être restés un an entier sur les terres de la
république, comme ils s'y étaient obligés,
et n'y ayant nulle apparence que la navi-
j^alion fût lilire de longtemps, Ignace les
rassembla tous à Vicenze , où il leur fit
iMitendre que, puisque la porte de la l'aies-
linc leur était fermée, ils ne devaient pas
différer d'accomplir l'autre partie de leur
vœu, qui était d'aller offrir leur service au
[)ape. Il fut résolu que le saint fondateur,
Lei'èvrc et Lainez iraient les [ remiers à
Uonie, pour exposer à Sa Sainteté les in-
tentions de toute la Compagnie. Avant que
de se séparer, ils se prescrivirent une ma-
nière de vie uniforme et des règles qu'ils
s'obli|;érent de suivre. Comme ou leur de-
mandait souvent qui ils étaient et quel était
leur institut, saint Ignace leur dit qu'ils
devaient répondre qu'ils étaient de la Com-
pagnie de Jésus, puisqu'ils étaient unis en-
semble pour combattre les hérésies et les
vices sous la bannière de Jésus-Christ. Le
.•laint fondateur, Lefèvre et Lainez arrivè-
reiii à Home sur la (in de l'année 1537. Ils
eurent dès les premiers jours audience du
pape, qui, recevant avec joie leurs offres,
employa aussitôt Lefèvre et Lainez à en-
seigner la théologie dius le collège de la
Sapience à Uumo, et Ignace à la réforma-
tion des mœurs par la voie îles exercices
spirituels et des exhortations, qu'il faisait
d'une manière si pathétique et si édilianie,
qu'il y eut plusieurs personnes de grand
mérite qui se mirent sous sa conduite.
Pendant que ces trois hommes a|iostoli-
ques travaillaient si utilement dans Home ,
Xavier et liobadilla s'employaient dans Bo-
logne au salut des âmes, le Jay et Rodriguez
f.iisaieut de même dans Ferrare , Brouet et
aalmeion dans Sienne, Codure et Hozez dans
l'adoue ; mais ce dernier étant mort quelque
temps apièi , saint Ignace retrouva presque
aussitôt un autre compagnon, qui fut Fran-
çois Strada. Jusqu'alors Ignace n'avait point
eu d'autre vue que ce, le de travailler au sa-
lut d'js âmes de concert avec ses compa-
gnons, cl cela sans aucun engagement parti-
culier ; mais Dieu , qui l'avait destiné à être
le chef d'un corps qui devait être si utile à
son Eglise , lui donna des notions plus dis-
tinctes de l'institut dont il devait être le fon-
dateur, et une forte pensée de l'établir au
jilus tôt. 11 en communiqua avec Lefèvre et
Lainez , et manda les autres qui étaient dis-
persés en Italie, afin i|ue convenant avec
eux ils pussent faire un établissement solide.
A peine ces ouvriers évangéli-iues eurent-ils
reçu l'ordre du saint , qu'ils quittèrent tout
pour se rendre ù Home, où étant arrivés sur
la lin da carême de l'an 15.'î8 , ils logèrent
tous ensemble chez un genliihoinme romain
nommé Quirino Garzonio , qu'Ignace avait
gagné à Dieu. Le saint leur ayant déclaré le
motif pour lequel il les avait fait venir , ils
l'approuvèrenl et conviiironl qu'il fallait éri-
ger leur société en religion, et que pour cela
il fallait pré|)arer l'esprit du papr; , ()ui sem-
blait fort èloiïiné des nouveaux établsse-
ments ; mais, comme le pape lartaitde Homo
pour aller à Nice, celle affaire fut retardée.
En attendant le retour de Si Sainteté , saint
Ignace et ses rompaj^nons , traitant souvent
du projet de l'institut , résoluient dans une
de leurs assemblées, suivant les propositions
du saint foudateur, qu'ou:re les vœux da
pauvreté et de chasteté qu'ils avaient faits à
Venise, ils en feraient un d'obéissance per-
pétuelle à leurs supérieurs, et déterminè-
rent dans une autre que ceux qui feraient
profession dans leur Compagnie ajouteraient
aux trois vœux de pauvreié, de chasteté et
d'obéi-sance , un \œu exprès d'aller partout
où le vicaire de Jésus-Christ les enverrait ,
pour travailler au salut des âmes , et d'y al-
ler sans viatique et en demandant l'aumône,
s'il le jugeait à propos. Ils eurent encore
d'autres conférences , et ils déterminèrent
(|ue les profès ne posséderaient rien ni eu
particulier ni en commun ; mais que dans
les universilés on pourrait avoir des collèges
avec des revenus et des rentes pour la sub-
sistance de ceux qui y étudieraient.
Au milieu de ces [irojets, il s'éleva conlrn
eux une tempête qui pensa renverser leur
plan et leurs espérances , pour avoir atta-
qué un prédicateur célèbre accusé de luthé-
ranisme. Celui-ci eut l'adresse d;^ rejeter sur
saint Ignace le soupçon d'hérésie , et gagna
trois Espagnols qui avaient un air de sagesse
et de probité tout propre à autoriser une ca-
lomnie.Il COI rompit encore Michel Navarre,
qui avait été à Paris compagnon de François
Xavier, et qui ha'issait saint Ignace à cause
qu'ayant voulu être de ses disciples , il ne
l'en avait pas jugé digne. Saint Ignace fut
dénoncé devant le gouverneur de Kome
comme un liérétique et un sorcier , qui avait
été briilé en effigie à Alcala, à Paris et à Ve-
nise. Sur celte accusation, le peuple se sou-
leva contre lui et ses compagnons ; mais leur
innocence fut reconnue et leurs accusateurs
furent contraints de se dédire et d'avouer
leurs impostures. Le gouverneur, par ordre
du pape , rendit une sentence qui contenait
l'éloge des accusés et les justifiait entière-
ment. Ils parurent do nouveau en public , et
recommencèrent leurs exercices de charité ,
tant en soulaye.int les pauvres dans une fa-
mine (jui alfligea dans ce temps-là la ville de
Home, qu'en les instruisant des devoirs du
christianisme : ce qui leur attira l'estime du •
peuple, qui leur donna autant de béiiédie-
lioiis qu'il leur avnit souhaité de mal au su-
jet des accusations susdites.
Saint Ignace crut qu'il devait profiter d'une
si heureuse conjoncture pour l'exécution do
son dossein. Ayant fait un abrégé de l'insti-
tut, que lui cl ses compagnons avaient cou-
c;r, nif.TiONNMUE nr.s oudues urMCiF.iix. eit
rerlé eiisrml>l<> , il \c |iri'sciila .m pape r;ml § II. Condnualion ilc l'/HHoire île lu C'>m-
111 p;ir ri'iilrnivsc du c.irdiiial (".aspard Cou- paijnie de Jésus el de tu vie de mnit I^nuce
lariiii. Les iiil-pèic rorul cl écrit, clic de Loyola.
donna niissiiùl à examiner au maiirc du sa- j^^^ ^y^ ig saint-siégc cul approuvé la
cré palais. Thomas liadia . qui fui depuis c,,mp;,ir„je de Jc-us, sainl Icnace ju;,'<-a qu'il
cardinal. Badia le reiiiil deux mois, apns (alhni commenrcr par lui donner un chef,
lesquels il le .end.l a ba Nnniele. lui proies- , ^^^ ecl elT.l , il rappela à Uomo , avec la
l.iiil qu'il nj Irouoil ne i que de Ires-loua- permission du pnpe.ceuv 'le ses conipnjrnons
l)le, el le pape I .ijant lu lui-même, ap- ^uj se pou\ aient trouvera lélecliou. Il ne
prouva de vive »oi\ cet iiislilut. Ii;ua.c le j.^ ^^ trouva que sis ; car Xavier el Uodri-
pria de le coiilirmer auilienliqucment ; ma-s, ^^^^^ étaient en l'ortu-al , en allcndanl l'oc-
quoiquc «e sou^eraln ponlile »y seiilil por- ç^^^i^,, .ig ^.^^^cr aux Indes; mais ils avaienl
lé. il ne voulut rien l.mc que par lavis de ,3(^5,,. p,^ parlant de llomc leurs sullVages
trois cardinaux , dont le p.emicr , qui lut .^^j, ,,,.,^,^0 envoya le sien de Worms,
chargé de 1 allairc , se nommait lîarthelemy „-, j, assistait à la diète qui s'y tenait, il
C.uidiCLioni. C.l.i n empêcha pas . en alleu- „. ^,^^^ Hohadilla qui ne concourut
dant, que Sa .Sainteté ne demandai a gnacc p ,^ .-, |Vloction. étant re.le a Naples par or-
quelques-uns de ses disciples pour reformer ^^^^ ,,jj ^.^ „-ayaiil point envoyé son suf-
un monastère de relij;icuses qui_ otail dans f^^ . „,.,ij ■^ c„„iirma à son retour le choix
un -rand désordre , et qii elle n en destinai ,1,.^,,^ ,, ^ .,„,,.y^ ^ ^i ,; ,^,,,,[,3 ^^^^ ^^j^f
d autres a d autres emplois qui ne leur j„„;,cc. Le saini , quoiqu'il eût toutes les
étaient pas moins honorables. Le Jay alla a ^^j^ „p pouvant consentir à accepter celle
Hrescia pour extirper 1 liercMe que des pre- (.i,ar.r,.,les obligea à recommencer l'élection;
dicateurs peu catholiques y av.nenl semée. ,i,;,is.ayantcncorceu toutes les voixdans celle
liobadilla lut envoyé a l ilc d Ischia, vers les se(.„,„|c élection, cl après avoir fait de nou-
côles de Naples , pour accorder les princi- ^,,_,,^,^ ^ly^^i^ ,,. „,. j^ accei.lcr cet eii:^
paux du pays , qui se haïssaient morlelle- ,■ j, ,^,( p„j,„ ,|éu,,.,ni„é par l'avis du I'.
nient. Lainez d Leievre accompasinerent e .,,, ■ ,,1^^^ reli-ieux de Sainl-Fraucois , qui
cardinal de .saïut-Angc dans sa légation de ^.,.„^ ^^,,, confesseur,
rarme. Lainez resta a l'hiisamc. el Lele- ,, , , , ,
vre demeura à l'arme . doù il fut retiré en- " pnl donc le gouvernement de la com-
»uitc pour aller .'i Worms assister à un col- P-'J;""' ''« -"esus le jour de l-Jiqucs de I an
loque qui se devait tenir entre les catholi- l•;'^^.^l •« vendredi suivant, 2/ avril, tous
ques el les proteslanls. Enfin llodrii;uez el ceux de ses discip es qui et.nent a Ko.iie (1-
Xavier partirent pour les Indes , sur la de- «•eut dans la hasi ique de >aiiil Paul, hors
mande que Jean III , roi de Portugal , avait 'es '«""s de la vi le, leur profession solen-
failc de ces nouveaux missiouaaircs. nelle, par laquelle ils s en^'.igerent i„us a
garder une pauvreté, une chaslcie cl une
Il est dilficile d'exprimer la joie que saint obéissance perpétuelles, s 'Ion la forme de
Ignace eut de voir ses coupagnoiis engagés vie contenue dans la bulle de leur inslilu-
dans les emplois de l'apostolat; mais elle lut »'""• "» '""i""' pareillement le vœu d'une
un peu troublée par les opposilions que (i- obcissince spcci.ile au souverain ponti e. a
reui les trois cardinaux à son grand dessein. I"a''"'d des missions marque dans la mène
Il continua ses poursuites auprès du pape huile, el s obligèrent d'enseigner aux cnla. ils
avec plus de chaleur que jamais , el redou- '•' 'loetrine chrétienne. La dilTereuce qu il y
bla ses prières auprès de Dieu avec d'autant '""' «""i' ';' P'olessiou du saint loiid.iteur el
plus de coiiliance , que , ne doutant point du ci'l>i' ''''» ai't^cs, c'est qu'il (il sa promesse
succès de son entreprise , il lui promit trois imu.ediatemeiil au pape, cl (lU- ses compa-
mille messes eu reconnaissance et en action gnons lui lirenl la leur a lui-méuic, comm •
de glaces de celle faveur (ju'il espérait ob- à leur gênerai el a leur cheL
tenir de sa divine majesté. Son espérance ne Ce nouveau général commença sa ch.irgi^
fut pas lroiii|iée , Dieu permit que les hère- par faire le catéchisme dans l'église de Siiii-
sics qui se mullipliaicnl en France, en Aile- ic-.Maric de Sirata, (|ui fut ensuite donnée à
niagnc et en .\ngleterre. et qui avaient mé- sa Com,>agn:e. Il conlinua cet exercice peii-
me pénétré jus(iuen Italie, laisanl juger ;iu\ danl (juaranle-six jours; el c'est à son e\ -m-
iruis cardinaux que cette nouvelle religion pie (|iie les supérieurs de son institut font
serait nécessaire pour en arrêter le cours , qu.iranle jours le catéchisme quand ils eii-
les firent changer de senlimeuls. Le pape, lrcnlencliarge.il dressa eusuile iiticlq'es
a|>prouvanl les conversions merveilleuses règleiiicnl-i pour le gouvernement de celte
que faisaient les disciples d'Ignace dans L's société n lissante, dans laquelle , outre lej
lieux où ils étaient employés hors de Home, six proies qui avaient concouru .'1 son élec-
se déterunna enlin à conlirmer le nouvel in- li<)ii, d>iiize autres personne» étaient entrées,
slilul:ce (ju'il fil par une bulle du "27 sep- el furent snivii>s peu de temps après d'un
teinbre de l'an lo'tO , donnant à ce nouvel plus grand nomlire, entre autres do deu\
ordre le nom de C'o(n/)f/(/nie (/e y(;.«iis, el per- Espagnols, diinl l'un, pareiil d'Ignace, se
inetlanl à saint Ignace el à sis cuiii, agnons, nommait Kmil en di' Loyola. Nous avons dit
iju'il fixa au nombre de soixante proies , de que Xavier el Uodriguez étaient en Portugal,
dresser des constitutions telles qu'ils le juge- Le roi procnr.i au premier, sans qu'il le sût,
raient à propos. un b cf do légal a|'Ostolique aux Indes. Il
61." JES
parlil (le Lisbonne la nicmc année, y ayant
laissé Uiiilrigiicz. Bobadilla el leJay allèrent
prendre à \ ienne el à Hatisbonne la place lia
l.eCèvre, qui fut envoyé à Madrid. Le pape
envoya au-si en Irlande Salmcroii el Broui-!,
avec le caractère de noncrs, pour niainlonir
la foi calliolique parmi ces peuples, qui,
noiiobslanl les édils d'Henri Vill, étaient
d meures fidèhs au sainl-siége , et l'année
suivante 15'*2, la république demanda Lai-
nez. Suint Ignace envoya étudier à Paris
(|iielques-iins di' ses nouveaux disciples, qu'il
joignil à il'aiilres qui y étaienl dès l'année
précédente, et qui demeuraient au collège
(k's Lombards, au nombre de seize. Ce tut
celle uiémc année que le premier collège de
la Compagnie de Jésus fut fondé à Coninibre
par Jean lil, roi de Portugal, pour êlrc le sé-
niiiiaire des apôlres du nouveau monde. Ce
collège se trouva composé de vingt-cinq sujets
dès l'année suivante 154.3, el le P. Rodriguez
écrivit à saint Ignace que l'inlention du roi
clait d'y en entretenir cent.
La nouvelle compagnie était déjà compo-
sée de quatre-vingts, répandus en divers
pays ; et, comme ce nombre surpassait celui
qui avait élé limité par la balle du pape, le
sainl fondateur alla trouver Sa Sainteté pour
lui re|)réseiiler la nécessité qu'il y avait
d'augmenter leur nombre. Paul III, convain-
cu du grand profit que ces hommes apostoli-
ques avaient fait pour le salut des âmes, ô(a
la restriction qu'il avait tnisi; dans sa pre-
mière bulle, permit à cet ordre de s'étendre
sans limitation de personnes et de temps, el
le confirma de nouveau par une autre bulle
le !5 mars de l'an 1543. Ce pontife donna
aussi la même année à ces religieux l'église
de Saint-André de Phraeta, qui n'était pas
éloignée de celle de Sainte-Marie de Slrala,
dont nous avons parlé, où ils jetèrent dès la
même année les fondements de leur maison
professe, qui fut en èlat d'être habitée l'an-
née suivante. C'est celle inéme maison qui a
élé telleirenl agrandie dans la suite, qu'elle
est entourée de quatre rues. L'église, s-)Us le
nom de Jésus, a été bâtie avec beaucoup de
magnificenc •, par les libéralités du cardinal
Alexandre Farnèse, qui en fil jeter les fon-
dements l'an 15G8.
D.ins le temps qu'on travaillait ans bâti-
ments de celle maison, Ignace, dont le zèle
était sans nlàclie pour le salut des âmes,
songea aux m lyens de procurer une relraile
pour des filles el des femmes que la nécessité
avait jetées dans le désordre. Il y avait déjà
un monastère de filles el femmes repen-
ties, sous le litre de Sainte-Madeleine ; mais
on n'y recevait que celles qui voulaient être
religieuses. Noire saint, considérant que la
grâce qui excite les pécheresses à quiiler le
vice ne les porte pas toujours à quitter le
monde, et que l'état du mariage ne s'accorde
pas avec celui de la religion, forma le des-
sein de fonder une autre maison où des per-
sonnes séculières tant femmes que fiU, s fus-
sent admises indifléremment. Il s'en ouvrit à
plusieurs seigneurs romains, qui approuvè-
reut son dessein, el fournirent de grosses
JES
un
sommes pour cel établissement : de soito
qu'en peu de temps on bâtit une maison pour
ces pécheresses , sous le litre de S^iinie-
Marlbc. Il cul encore soin des jeunes lillcs
qui sont exposées à de grands | érils. ou
faute d'éducation ou faute de biens : il fit
fonder pourcllcs un autre munaslère sous b-
nom de Sair.le-Catherine dclli i\initri, où il
y a ordinairement cent filles qui y sont eu-
Irelenues sous la conduite de quelques reli-
gieuses qui suivent la règle de saint Augus-
tin, dont uous avons déjà [ arlé en un autre
lieu.
Pendant que le saint fondateur s'employait
ainsi dans Uome à de bonnes œuvres, el ((u'il
travaillait aux constitutions de son ordre,
plusieurs villes d'Espagne, d'Italie, d'Alle-
magne et des P.iys-15as, lui demandèrent de
ses disciples, et lui olTrirent des collèges ;
suivant en cela l'exemple de Jean III, roi de
Portugal, qui avait fondé le premier collège
de la Compagnie à (]onimbre, et un séminaire
à Goa. Alcala, Valence, Candie, Cologne ,
Louvain et Padouc furent les premières vil-
les qui voulurent en avoir, cl dont l'exem-
ple lut bientôt suivi de plusieurs antres villes
de différents Ktatsel royaumes ; en sorte que
celle compagnie s'étendit en fort peu de
temps dans Ions les pays catholiques, à l'ex-
ception de la Fiance, où, quoiqu'elle y eût
pris naissance, elle ne fui pas reçue dans ses
commencements, soit parce que les béréli-
ques qui commençaienl à s'établir dans co
royaume, la rendaient odieuse, soit parc
que la guerre s'étanl renouvelée entre (ihar-
les-Quinl et François I", on n'aimât pas une
société dont le chef el les principaux mem-
bres étaienl espagnols : de sorte qu', bien
loin d'être reclierchés des villes de France,
ceux de celle compagnie, qui étudiaient à
Paris et qui n'étaient pas Français, lurent
contraints de sortir du royaume, pour obéir
à ledit qui bannissait les sujets de l'Empe-
reur.
De si heureux commencemenls annon-
çaient les progrès de celle société. Plusieurs
savants personnages de toutes sortes de na-
tions, el même des Français, vinrent à Rome
pour se mettre sous la conduite Un saint fon-
dateur, et I our embrasser son instiiul. Il les
reçut avec d'autant plus de joie, qu'il recon-
nut qu'ils élaieul d'un mérite distingué et
d'un caractère à remplir dignement l'esprit
de leur vocation ; en quoi il ne se trompa
pas, excepté en la personne de Guillaume
Postel. Ce dernier, né à Barenton en Nor-
mandie, sur le bruit que faisait la Compagnie
de Jésus dans toule l'Europe, lut exprès à
Rome en 1.345 pour voir le fondateur de ce
nouvel ordre ; et, charmé de ses manières et
de la beauté de son institut, fil vœu d'y en-
trer. Il Sollicita si fortement le saint de l'y re-
cevoir, qu'il ne put le lui refuser; mais ce fut
pour fjrt peu de teuips ; car le saint, recon-
naissant dans son novice un fond d'impiété et
d'erreur, le renvoya, nonobstant les grands
talents dont il était doué, puisque, sans par-
ler de la connaissance qu'il avait de tous les
sccrtls des rabbins et des cabalislcs (ce qui
(47
DK'.TIO.NNAIUE DKS ORDRES UFXIGIEtX.
C48
Hurail l'ié un çrand nvanln;:i" pour los con-
Idiiilro, s'il oui voulu eu fair.' un hou usaiir) :
il savait les lauiiurs l.tlint'. grecque, héliriï-
(|ue, rlialclaïii e el syriaqui- , ei il parlaii et
euleudait si liien relies qui snut vivantes,
qu'il se vantait de pouvoir faire le lour du
nionile sans liucliemeui'i. Il elait bon nialhé-
uialirien, et il po>si'.lait quasi toutes les
sciences. Il sétait tillcmenl acquis l'estime
de François I", qui aimait l<'s bulles-leltres,
ijue ce prince l'envoya en Orient pour y re-
iherclior des m;iiiu>crils, el lui donna une
ih.iire de professeur dans le colléite royal
qu'il avait fondé à Paris, l'ostel s'y distingua
plus ((ue jamais. La rcini- de Navar e, sœur
du roi, re^liniail sinsulièreuieui. Les plus
grands sei;;ni'urs de la cour, cl surtout les
cardinaux de Tournon, de Lorr line et d'Ar-
nia^uac, reclicrth^ient sou entretien. Postal
enfin faisait l'aduiiraiion des plus savants.
Heureux si, doué de taul de science, il se fût
nilaché à celle des saints ; mais la lecture des
ouvrages des rabb ns lui ayant mis des clii-
luères et dos illusions dans la léle, il ne put
si bien cacher ses seniiiiienls au aujet d'un
nouvel avènement de Jésus-Chri^t, qui devait
être, selon lui, dans peu de temps, que le
saint fondateur ne s'en aperçût: ce qui l'o-
bligea à le chasser de la Compagnie, après
avoir tenté toutes sortes de voies pour le le-
lircr de ses erreurs ; mais ce fui toujours si
inulilenicnl, que, dès qu'il fui sorti, il se mit
à dogmatiser dans Uonie. Il se retira ensuite à
Venise, où il se crut plus en sûreté. Ils'y infalua
lelleracnl d'une certaine rc:igieuse appelée la
Ui're yi^nnnp, qu'il osa dire que dans le nouvel
avènement de Jcsus-Ctirist elle serait la ré-
demptrice des femmes, de mêiiie que Jésus-
Christ avait été le rédempteur des h mimes,
ri composa sur ce sujet uu livre ialilale
Vircjo Venetn. On lui attribue aussi d'autres
erreurs gro.ssièrcs, qui l'ont fait metlc' au
nombre iies hereti()ues, et, entre autres, d'a-
voir publié que l'anjie llazicl lui avait révélé
les secrets divms ; qu'il n'y avait que six sa-
crements, cl que ses écrits étaient les écrits de
Jésus-Chrisl même. Il se reconnut néanmoins
sur la fin de ses jours, et mourut dans la
communion de l'Lglise, au monastère de
Saint- .Mariiti dis l^liamps à Paris, l'an 13'-1,
dans un â^'e fort avancé.
La fermeté que le saint fond.iteur Ht pa-
raître en clia'>sant (lUlILiumc Postd de sa
Compagnie lut une preuvesi convainraiite de
son atiachemeiil à la foi ralholi<|ue , que le
pape lui demanda deux de ses tlieolo^iieus
pour assister en sou nom avec ses legits au
concile général qui devait se celélir.T à
'l'iente. Le saint choisit Lainez el Salineron,
el leur donna des invtruetiuiis pour remplir
dignement leur ministère dans une si célè-
bre a'-scmhlée. Le I'. le Jay y vint aussi
il'Allemai^ne, comme théologien de l'evéque
d'Ausliourg, d le P. Lefévre y fut aussi
envoyé d.uis la sui'.c. La première sessi m
du concile commença le l.'t décembre de l'an
Ij'tD, et la dernière ne Huit ()ue dix-huit
an» après. Le V. le Jay y arriva le premier ,
«itfjagna d'abord la bicmeilUiuce cl ^e^iimc
du cardinal de Trente , qui le consulta sur
des alïaires épineuses. Le P. Salineron pro-
nonça un discours l.tin devant les PP. du
concile , qui monta l'applaudissemenl de
l'assemldee. Le P. Lainez se fil admirer dès
la preuiiére fois ((u'il parla , el tous trois
liieiil paraitre une erudiiion si profonde ,
que les légats du pape les chargèrent de re-
cueil.ir toutes les erreurs des hérétiques an-
ciens et modernes, avec li!s autorités de l'Ecri-
ture et des Pères capables de les confondre.
Quoique les Jésuites eussent déjà plusieurs
collèges , ils ne s'employaient pas encore à
l'iustruciion de la jeunesse, excepte dans le
séminaire de (îoa , où le P. Nicolas Lenci-
loti, italien, avait commencé à enseigner aux
enfants les principes de la langue latine;
m. lis l'au 15'»G ils curent des écoles pulili-
(jues pour enseigner toutes sortes de s.icn-
ci s. Le premier collège où ils conimencérent
cet csercice si utile lut celui de (jandic , '\\X".
saiul François de Borgia, duc de Can-
die , leur fonda avant que d'eutrer dans
celte Compagnie, dont il fui le troisième gê-
nerai. Son des^eiu étant que ce collège de-
vint célèbre, il obtint du pap ! el de l'iimpe-
reur qu'on l'èrigerait en université , el que
les écoliers qui y prendraieul les degrés au-
raient tous les pri\ lièges dont jouissaient les
gradués d'Alcala et de Salimanqnc. Ce duc
avait l'ail vœu à Crenade d'embrasser l'clal
religieux, s ins se déli rminer à aucune reli-
gion en particulier ; mais eiiû:i, s'etaut résolu
à exécuter son vœu, il choisit la Compagniu
de Jésus et écrivit à saint Ignace pour lui
demander la grâce d'y être reçu. Le saiul
fondateur la lui accorda avec joie, mais à
condition qu'avaai son entrée il pren-
drait du teuips pour mettre ses enfants en
état de u'atuir plus besoin de sa conduite ni
de ses soins paternels. Le duc, qui av :it uni!
sainte impatience d'entrer dans la Comjia-
guie avant l'exécution des choses ijui lui
avaient été prescrit.-s , écrivit une se on le
Iclire au saint fondateur, dans laquelle il c-
maiidait cette grâce avec tant d'ardeur, qu'il
lui obtint du pape l'an 13'i7 la permission < u
faire les vœux des proies , sans iiuiiter lo
monde, avec le pouvoir de garder ses biens
pendant trois années : en sorte que ce no
lut que l'au 1551, après avoi' cède son ilu-
che de Candie à son fils aîné, qu'il prit l'ha-
bit lie la Compagnie dans le collège d'Ognate,
à ijuatre lieues de Loyola.
LaCom|iagnicavaitdejà fait pour lors beau-
coup de progrès ; elle était divisée en quatre
pioMiucs, (|ui étaient celles d'Itaiic, d'Espa-
gne, de Portugal et (les Indes. Celled'Iispagne
lut même divisé,' en deux r.inuée suivante,
el en troi< l'an loj't 11 n'y avait (|ue la F'rance
où les Jésuites u'avaicnt point encore d'eta-
bli»sements, quoique leur ordre y eût pris
naissance. Ils a> aient toujours été renfermés
dans le collège des Lombards où ils èlaieiil
au iKuiilire de treize , soit en qualité de
pensionnaires, so;t eu qualité de boursiers :
eneore ne se vairaient-ils pas d'être iiieiii-
bres de la Société ; mais ils se déclarèrent
cnliu l'an lo'»'.t. Le P. Viole , qui était leur
GiO
JES
JES
CÏÏO
supérieur, voyant que dans ce colléjîe ils ne
pouvaient pas s'acquiiler des exercices qui
lonviennenl à des religieux, obtint de Guil-
laume Duprat, évéque de Clermont, son liô-
tel pour les loger. Ils y allèrent tous à l'ex-
ception de trois, qui n sièren! au collège des
Lombards jusqu'à l'année suivante , que
saint Ignace leur ordonna d'aller demeurer
avec ceux qui étaient à l'hôtel de Clermont.
Ce saint fondateur fit une sévère réprimande
au P. A iolc de ce qu'il avait accepté la
charge de proviseur du collège des Lom-
bards, et voulut qu'il la quittât incessam-
ment, quoique cet emploi ne l'obligeât pont
d'aller à ce collège. Comme il n'y avait point
(le proies en France, il lui ordonna quelque
temps après de fiiire ses vœux , selon la for-
mule qu'il lui envoya de Uome , cl pria
i'évèque de Clermont de vouloir les rece-
voir.
A peine les .lésuilcs furent-ils entrés dans
l'hôtel de Clermont, qu'ils trouvèrent beau-
coup d'oppositions à leur établissement;
mais ils ne manquèrent pas de protecteurs.
Le cardinal de Guise , qu'on nomma le car-
dinal de Lorraine après la mort de son on-
cle, fut un des principaux. Ce prince fil
connaître au roi Henri II saint Ignace et ses
enfants, et leur fil obtenir des lettres de ré-
ception, qu'on leur avail refusées. Elles fu-
rent expédiées l'an 1550. Le roi leur permet-
tait par ces lettres d'avoir un collège à Paris,
et de s'établir dans son royaume. Le parle-
ment refusa d'enregistrer ces lettres; mais
le roi, persuadé |)ar le cardinal de Lorraine
cl par les commissaires qu il avait lui-même
nommés pour examiner l'institut des Jésui-
tes, qu'il ne contenait rien de contraire au
bien de l'Etat et de l'Eglise, donna de secon-
des lettres avec ordre au parlement de les
enregistrer , sans avi ir égard aux remon-
trances de son procureur général. Le parle-
ment , pressé par des ordres réitérés de la
cour, donna un arrcl le 3 août ISo'i' ponant
que, comme l'affaire des Jésuites reganiail
principalement la religion , les bulles qu'ils
avaient obtenues du saint-siège seraent
communiquées à l'évéque de Paris et au
doyen de la faculté de théologie, et que
l'un et l'autre en rendraient compte à la
cour.
L'évéïiue de Paris, par son rapport, fut
enlièreoient oppusè à leur établissement, et
entre autres choses fit eniendre que leur in-
stitut blessait les dio Is des évêques et les
concordats laits entre les papes et les rois
de France. Le doyen de la faculté de théo-
logie poussa l'afl'aire plus loin ; il assembla
les docteurs, (]ui firent le décret suivant :
Que la nouvelle Sociélé , qui s'attribue le
nom de Jésus, reçoit sans nul choix toutes
sortes de gens, queli/ue crime (/uils aient com-
mis et quelque infâmes qu'ils soient; qu'elle
ne diffère en rien des prêtres séculiers, n'ayant
ni l'habit , ni le chieur , ni le silence , ni les
jeiines , ni les autres observances qui dislin-
(juent et qui maintiennent l'étal rcliijieux ;
qu'elle semble lioUr la modestie de la profes-
sion monastique par tant d'immunités et de
DiCTIONNàlRK DES OrDHES REI.ir.lliL'X.
libellés qu'elle a. dans ses fonctions , snrtouS
dans r administration des sacrements de péni-
tence et d'eucharistie , sans nulle distinction
des lieux ni des personnes , dans le ministère
de la parole de Dieu et dans l'instruction de
la jeunesse, au préjudice de l'ordre hiérarchi-
que, des attires religieux et même des princes
ou des seigneurs temporels, lontre les privilè-
ges des universités et à la charge du peuple ;
qu'elle énerve le suint usage des vertus , des
pénitences et des cérémonies de l'Eglise ;
qu'elli' donne occasion d'aposlasier librement
des autres sociétés religieuses; qu'elle refuse
aux ordinaires l'obéissance qui leur est due ;
qu'elle prive injustement de leurs droits /e.s
seigneurs ecclésiastiques et les seigneurs tem-
porels : qu'elle introduit partout des divisions,
des jalousies, des querelles et des schismes;
enfm que , pour toutes ces raisons , cette So-
ciété semble être périlleuse en matière de foi ,
ennemie de la paix de l'Eglise, fatale à la re-
ligion monastique, et pliUfil née pour la ruine
que pour l'édificalion des fidtles.
Les Pères de Uome, à (jui le général com-
muniqua cet écrit, furent tous d'avis (ju'on
y répondit dans les formes, pour désabuser
la France et pour instruire les docteurs de
Paris, qui semblaient n'avoir nulle connais-
sance de l'institut des Jésuites ; mais le saint
fut d'un autre sentiment. Outre (lu'il hono-
rait la Sorhonne, qu'il regardait comme une
des plus fortes colonnes de l'Eglise, il crut
que ce qu'on leur imposait dans ce décret
était trop outré pour faire aucun mal, et
qu'une réponse [lublique, quelque modeste
qu'elle pût être, ne servirait (ju'à irriter da-
vantage les esprits, les assurant que malgré
tous les obstacles qui semblaient faire déses-
pérer de leur réception en France, la Com-
pagnie s'y établirait, et que le collège de Pa-
ris serait un jour très-célèbre. 11 eut soin
néanmoins de ftire venir de tous les lieux
où sa Compagnie était établie des témoigna-
ges authentiques de la bonne coniluite qu'y
tenaient ses enfants ei des fruits qu'ils y fai-
saient. De plus il permit au P. Martin Ôlave,
qui enseignait la théologie dans le collègn
Romain et qui était docteur de Sorbonne,
d'envoyer à ses confrères une réponse mo-
desle et solide à tous les articles de leur dé -
cret. La publication de ce décret ne laissa pas
d'émouvoir tout Paris contre les Jésuites. Les
professeurs, les prédicateurs et les curés at-
taquèrent publiquemenl leur institut et en
donnèrent d'horribles idées. On afficha aux
carrefours de la ville des papiers Irès-inju-
rieux pour décrier leur doctrine et leur con-
duite, el le peuple leur fit diverses insultes.
11 semblait alors que le meilleur luirti qu'ils
eussent à prendre était celui de se reiirei'
de cette grande ville; mais, dans le temps
qu'il paraissait y avoir le moins à espérer,
l'orage se dissipa, et la Compagnie, restant
tranquille, eut un libre exercice de ses fonc-
tions. Elle commença à enseigner dans la
ville de lîillom, où le même Guillaume Du-
prat, évèque de Clermont, fonda un collège
en attendant qu'on ouvrît celui de Paris.
Ce n'était pus seulement en France que la
II. 21
rri niCTioNNAinR des ordres rf.i.igieux. r.r.a
r.onipniinic l'înit mallrniloo : Jean Silic, nr- l,n p lix dont cclU' sooii'Mo j(Uii<s lil en Iia-
rlicti^qiic (II" 4'iili'di', se déclara ronCre elle, Mo cl priiicipalciiiciil à Ro:iic fui Irouliléc
sous pri'Icxîe qiip li'S Jésuites ci\lrepr<'naieiil par le pape iiiénie, (|iii en l.')53 s'irrita coii-
Mir les droits de l'épiscofal, par la hl>erié ire les Jésuiles. Il cr.it (pic ceux d'I-lspagno,
qu'ils se diiuiiaicni da liniiiislrcr les sacre- ((ui éiaienl à la cour de Castillc, s'elaicnl
iiienls en tous lieux sous urnhre île leurs rangés du côté de Clnrles-Ouinl conlre les
|iriTiléj;e<. Il n'y avait dans son diocèse qu'un intérêts du sainl^siége; mais ces soupçons
collège de ces Pères, qui était celui d'Aliala; se dissipèrent par les l)ons ollices de Ferdi-
i\^ les interdit tous en un jour et fuhnina une nand, roi des Romains, et le pape donna de
scnleme d'cxconimunicaiion contre toutes ii'iuvclles niar(|ues de son aflVrlion à la
les personnes «lui f-e confe-scraient à eux : Compagnie. Son successeur .Marcel II n'eut
ordonnant aux religieux et aux curés de son pas moins de bienveillance pour elle ; mais
diocèse de ne laisser ni prêcher ni dire la son ponlilicai n'ayant duré que trois semai-
messe dans leurs églises à aucun de la nés, les Jésuiles tomhèrenl dans de nouvcl-
(;ompagnie, défendant même la confession à les appréhensions lorsqu'ils virent en sa
tous les prêtres qui auraient fait sous leur place le cardinal CaralTe, qui prit le nom de
conduiie les exercices spirituels. Ce n'était l'aul l\ . Us le croyaient irrité conlre eux.
qu'une suite d^s opposiiioiis qu'ils avaient laiil à cause que saint Ignace avait n fusé
déjà trouvées dans le royaume d'Espagne, d'unir son ordre à celui des Thêalins, dont
où dès l'an 15i8 on avait employé plusieurs CaralTe était l'un des fondateurs, que parce
moyens pour les détruire dans l'esprit du qu'il avait fait casser parle pape Paul III
peuple. Entre les autres, Melchior Canus, de une sentence que le même CarafTe, étant ar-
1 Ordre de Sainl-Dominique et docteur de Sa- clievêciue de Naples, .avait donnée conlre lui
lamanque, y avait iiubliê lanl de choses à ]iour l'obliger de rendre un jeune Napolitain
leur désavantage, que le peuple, qui comp- qui avait été reçu dans sa Compagnie, el
tait beaucoup sur les paroles de ce docteur, que ses parents redemandèrent; mais ils re-
traita d'imposteurs ceux qui lui avaient connurent bientôt qu'ils s'étaient trompés,
paru auparavant des hommes descendus <lu Paul IN leur fui si favorable, que dès les
ciel. On croyait pcul-être en cela faire plai- premiers jours de son pontifical il voulut
sir à l'empereur Cbarlcs-Quint, qui a>ail faire le P. Lainez cardinal, si saint Ignace
chassé de l'Emiiirc le P. Robadilla, parce ne s'y fût oppisé fortemeni, comme il avait
qu'il s'élail opposé à la formule de foi que déjà fait lorsqui- P.iul 111 voulut revêllr
l'on appela \ Intérim, cjuc ce prince, par saint François (le Bc)rgia de la même dignité,
condescendance pour les hérétiques d'Allé- el lorsiiin' Feriiinand, roi des Romains,
magne, avait fait publier dans la diète non)ma le P. Le Jay à l'évèché de Triesle.
d'.Vugsbourg. Ce qui consolait les Jésuiles Le saint fondateur ne consentit jamais que
dansleus peines, était que leur fondateur ses enfants re(;ussenl aucune prélalure, si
n'en avait pas élé eseinpl : car dès l'an 1553 ce n'est dans les pays étranger-, où il man-
il en avait soullVrl beaucoup au sujel de son qu(^ (!e pasteurs capables de retirer les peu-
liire des Exercices spirituels, que l'on taxait |)les des ténèbres de rerieurel de l'idolâtrie;
d'hérétique, noiiobsianl l'apijrobiiion qu'il comme les PP. Nugncz, Carnero et Oviédo,
avait ( uc de Paul III en loiG; en sorte qu'il qui furent envoyés en Ethiopie, le premier
y aurait peut-être succombé, si idusieurs en qualité de patriarche, le second comme
"théologien!;, et entre autres Rarthélemi é\êque de Nicée, et le troisième comme èvê-
■J'orrcs, qui fut dans la suiic évéque dis que de Iliérapolis; aux(iuels on donna dix
•'.anarics, n'eussent pi is sa défense cl celle compagnons pour les ai(Jer dans leurs mis-
du saiiil-siége, (]ue l'on attaquait indirecte- sions. Enfin saint Ignace, ajirès tant de tra-
iiieni, et si les inquisiteurs, enlr.' les mains vaux pour la gloire de Jésus-Christ et pour
desquels on avait mis le livre, n'en fussent le salut des âmes, mounii à Rome le 31 juil-
dcvenus les apologistes, après avoir fait con- lel de l'an looli, âgé de (ij ans, trente -cini
naître la mauvaise foi de l'accusateur. ans après sa conversion, el seize ans après
Tant d'oppositions n'ét.iienl que trop ca- la fondation de sa (compagnie. Il eut la cou-
pables de dégoûter ces nouveaux hommes solatiou de la voir avant sa mort répandue
aposloli(ini>s ; mais Dieu les soutint toujours [lar tout le inonde cl divisée eu douze pro-
dans leurs iieines. Tandis (]u'on s'opposait a viiues, (jui toutes ensemble avaient au
eux en Fr.iiice et dans une partie de l'Es- moins cent collèges ; il la vil même lionoréi;
pagne, ils avaient la consolation de se voir du m irlyre en la personne du P. Anloiiio
taire un grand iirogrès dans l'il.ilic. Outre l.i Criminal et en celles d.s frères Pierre Cor-
iiouvello coiifiriiialioii ()(ie le saint lonilaleir lea el Jean de Foia, qui furent mis à mot
• iblinl lie son iiislitulen l.'ioO, on lui fmda pir les barbares, le premier dans les Indes,
'iffs collèges el des maisons à Rome, à Lo- cl les deux autres au lïiêsil. Le corj s du
l'clle, à Naples, à Florence, à Rologne, à saint fondateur fat enterré à Rome dans l'e-
^'cnisc. à Pérouse, à Modène d en d'autres plise de la m.iisoii prol'ess-, au pied du grand
'-■n.iroits : sans parler de l'eLililisseiiieiil du autel, du côté de l'évangile, ou il demeura
■ollége Geimaiiique, (|u'il procura en 1;)52 jusqu'en l'année 15li.S, (|u'on l'en relira pour
l'our l'èilucatioii des enfants de la pa(nreiio- jeler les foinleiiients de la nouvelle égiise
olessc éirangère. Ignace fil des statuts pour (jue le cardiii.il Farnèse lil bâtir, el ce sacfi"
l 'lie maison, el les Pères de laCoiii|)agn c en dépôt fui porte en un autre endroit de l'an-
•^ureil la conduite. cieniie église. Lorsijuc la nouvelle fut cnliè-
S53
JES
JES
G54
rpmenl bâtie, le P. Aquaviva, l'an lo87, pour
lors général, le transféra dans celte église;
et après que le pape Grégoire XV l'eut cano-
nisé en 1622, on érigea en son honneur une
chapelle, qui a été embellie sur la fin du
dernier siècle avec heaucoupdemagnificenre.
Après la n)orl de saint Ignace, on fut deux
ans sans lui donner de successeur. La guerre
qui survint entre le pape Paul iV et Phi-
lippe 11, roi d'Espagne, ayant fermé les pas-
sages aux Espagnols, on ne tint point la con-
grégation générale. Les Italiens pendant ce
temps-là élurent pour vicaire général le P.
Jacques Lainez ; elles Espagnols, qui igno-
raient ce que les Italiens avaient fait, élurent
de leur côté le P. Natal ; mais celui-ci par
humilité céda ù Lainez la supériorité. Il
n'en fui pas de même du P. Bobadilla, qui,
comme un des premiers compagnons de
saint Ignace, prétendit avoir part au gou-
vernement de l'ordre, mais il l'ut obligé (le
céder à Lainez, qui indiqua la congrégation
générale. Elle se tint l'an 1558, et il y fut élu
général. Après son élection, le cardinal de
"Trana lui déclara de la part du pape que Sa
Sainteté trouvait deux choses à redije dans
l'institut de la Compagnie : la première, de
ce que l'on n'y récitait point l'ofiice canonial
au chœur; la seconde, de ce que le général
n'était point triennal, mais perpétuel. La
coiigrcgalion ajant délibéré sur les difûcul-
lés que le pape proposait, chargea le P. L:ii-
iiez daller trouver Sa Sainteté et de lui pré-
senler une lettre signée de toute l'assemblée,
par laquelle on lui faisait connaître la iié-
cessiié qu'il y avait que le général lût per-
pétuel, sans parler des heures canoniales.
Le pape les reçut Irès-mal, et leur déclara
avec des expressions très-lortes qu'il voulait
que le général fût triennal, et qu'ils chaiilas-
^enl au chœur les heures canoniales, n'en
exceptant que le général et ceux qui seraient
occupés. Le P. Lainez apaisa le pape par un
discours qu'il lui fit; mais le pontife persisli
à vouloir que le général fût triennal el que
l'on récitât au chœur les heures canoniales.
Il fil faire un décret par lequel il fut ordonné
que dans les collèges on chanterait la mebse
et les vêpres, les dimanches et les fêtes, et
que dans les maisons professes on y dirait
toutes les heures canoniales. Les Jésuites
souffrirent avec peine qu'un les assujettit à
ces obligations, si contraires aux missions,
confessions et prédications auxquelles ils
élaient conlinueilemenl occupés ; mais ils se
consolèrent lorsque le cardiu;ildel Pozzo ou
du Puis, qui étaii un savant inierprèle, les
assura que le décret du pape, n'étant qu'un
simple tomiuandement, n'aurait de valeur
que pendant la vie de ce pontife. Pie V les
obligea cncoie l'an 15G7 de réciter l'office
au chœur, et leur défendit de faire promou-
voir au sacerdoce aucun de leurs Pères qui
ne fût profès et n'eût prononcé ses vœux so-
'lennels ; mais Grégoire XIII, par une bulle
de l'an 1573, rétablit la Compagnie dans son
premier élat, dispensant les Jésuites de réci-
ter leur office au chœur et en commun; et
permit à ceux qui n'auraient fait que les
vœux simples de recevoir la préirise. La
Compagnie fil de nouveaux progrès sous ie
gouiernement du P. Lainez. principalement
en Europe, il se trouva en 1561 au colloque
de Poissy, où son ordre obtinl enfin la per-
mission de s'établir en France dans le col-
lège de Glermout. Ce collège s'est beaucoup
augmenlédans la suite par les libéralités des
rois de France Henri IV, Louis XIII, et
principalement de Louis XIV, qui déclara
l'an 1683 ce coWà^e. Ac fondation royale; el
en reconnaissance des grands bienfaits de ce
prince, on lui a donné son nom, élanl pré-
sentement connu sons le litre de Collège de
Louis- le-Grand. Après que le P. Lainez eut
gouverné cet ordre pendant huit ans, il mou-
rut l'an 1564., et eut pour successeur saint
François de Borgia. La Compagnie avait
pour lors cent trente maisons ou collèges,
divisés en dix-huit provinces, qui furent en-
core beaucoup augmentées par les soins de
ce saint, qui fit plusieurs établissements lant
en Europe que dans l'Amérique. Les Jésuites
avaient déjà cinq maisons à Rome, savoir la
maison professe, le noviciat, le collège Ro-
main, le collège Germanique et le séminaire
Romain, lorsque saint François de Borgia
obtint du pape Pie V, Lan 1570, le collège
des Pénitenciers de Saint-Pierre. Les collè-
ges des Grecs, des Maronites, îles Anglais,
des Ecossais et des Irlandais, leur ont c!o
donnés depuis: ce qui marque l'estime que
les souverains pontifes ont eue pour cette
Compagnie.
Après la mort de saint François de Borgia,
qui arriva l'an 1572, le P. Mercurien, Fla-
mand, fut élu général de cet ordre. Il eut
pour successeur l'an 1581 le P. Aquaviva,
de la maison des ducs d'Atri , au royaume
de Naples, qui occupa cette place jusqu'en
l'an 1615, qu'on lui donna pour successeur
après sa mort le P, Vitelleschi, qui mourut
l'an 16I|.5. Ce fut sous ce général qu'on so-
lennisa avec beaucoup de pompe et de ma-
gnificence à Rome, en Allemagne et eu plu-
sieurs provinces, l'année séculaire de l'ordre.
Cette cérémonie fut d'abord commencée à
Rome dans le collège Romain, l'an 1039, le
25 septembre, fête des saints martyrs Côme
ctDamien; auquel jour, cent ans aupara-
vant, l'ordre avait reçu de vive voix sa pre-
mière approbation du pape Paul III. 11 était
pour lors si multiplié par toutes les parties
du monde, (jue, suivant le catalogue des
maisons, qui avait été publié l'an 1626, il
s'en trouvai! plus de huit cents, tant collèges,
maisons professes et de probalion, que rési-
dences ; le tout divisé en trente-six provin-
ces , dans lesquelles il y avait plus de
quinze mille Jésuites. La Conipiignie a fait
depuis ce temps-là de nouveaux progrès
sous les généraux qui ont succédé au P. Vi-
telleschi qui sont les PP. Nickel, Oliva, Gon-
zalès, Taœburin et Carall'i!.
Les constitutions que saint Ignace dressa
pour sa Compagnie sont divisées eu iVm par-
ties, qui sont précédées de l'examen qu'on
doit faire de ceux qui se présentent pour y
èlre reçus, auxquels on doit faire plusieurs
Kv;
DICTIONNAIIŒ DKS ORltHES nF.UCIEUX.
br.6
(Ipiiiaiules. JonI il f.iil un prnnd dolail. Aprt^s
K'ur rocc|ili<>ii, il veut qu'on les éprouve
pcndiinl un mois dans la maison, eu leur
faisant faire lc< pxereices spirituels et une
conlession générale, après laijuelle i's doi-
vent prendre l'Iiahil ordinaire de la Cutnpa-
pnie ; que le iKnicinl soil de deux ans,
pl qu'ils apprennent tous li s jours (luelque
chose par r<pur pour rulli\er la mémoire,
sans néanmoins leur pcrinellre l'étuile. Il or-
donne de plus qu'ils scrviroiil les malades
l'esparc d'un mois dans un liôpilal, e[ que
pendant un autre mois ils feroul un pèleri-
iMpc de dévotion à pied, sans viatique, on
demandant l'aumône. Après les deux années
de noviciat, il veut que les jeunes gens de la
C.ompajinie soient appliqués aux éludes, et
délero ine les scieiires qu'ils étudieront; et,
dans la crainte qu'il avait iiue l'amour do la
science n'aflainlit peu à peu l'esprit de piété,
il a prescrit les pratiques qui peuvent r<ri-
irclinir pendant le temps des études ; après
lesquelles il ordonne un second noviciatd'un
an, où l'on ne s'apidiiiue qu'aux exercices
de la vie spirituelle, pour ap[)rendre à pra-
tiquer ce que l'on doit enseigner aux autres.
Le saint fondateur mitdans sou ordre trois
différents degrés, l'un de profès, l'autre de
coadjutcurs lormé», et l'autre d'écoliers ap-
prouvés, outre les novices. Parmi les profès
il y en a de deux sortes, les uns de quatre
vœux, les autres de trois seulement. 11 y a
aussi de deux sortes de coadjutcurs, les uns
spirituels et les autres temporels. Los vœux
dis priifes sont solennels, ceux des coadju-
leurs sont publics, mais simples. Ceux des
écoliers sont seulement simples , ils ne se
font qu'« n présence des domestiques, et per-
sonne n'est député du géniral pour les rece-
voir; an lieu que ceux des profès el des coad-
juleurs formés se font entre ses mains, ou de
personnes qu'4 a députées pour cet ellet.
Voici la formule des vœux des profès:
Moi N. fais profession cl promets à Dieu
tout-puisfant, en présence de /.i tris-sainte
Vienie, de toute la cour rélesle, et de ions tes
asfislnnls, el à vous. Hévérend Piregénéral de
lu cowpiKjnie de Jésus, tenant ta place de
Dieu, et à vos successeurs, pauvi elé, chasteté
el obéissance, el, selon cette ohéissance, d'avoir
un soin purliculier pour ce qui regarde ce que
l'on doit enseigner aux jeunes gens, selon la
forme de vivre contenue dans les lettres cpo-
stoliques de ta Compagnie de Jésus et dans ses
constitutions. Fait, cic. Ceux qui font les
quatre vœux ajoutent : Et en outre je pro-
mis spécialement ohéissancc au souverain
pontife pour ce gui regarde les missions,
comme il est porté par les mêmes lettres apo-
stoliques et lis constitutions. Les coadjutcurs
ne disent point, je fais profession, m us seu-
lement, je promets éi Dieu; el les coadjutcurs
temporels retranelienl ce qui regarde l'in-
slruttion de la jeuiie>se. Les écoliers approu-
vés, qui font seulement des vœux simples
et non puldics, s'engagent à la Compa;;nie,
riromellaut d'y \ivre et mourir dans l'obser-
vation des vœiix de pauvreté, de chasteté et
d'obéissance ; et s'oidigenl i)ar vœux exprès
d'accepter le degré (|u'on trouvera dans la
suite leur être plus cinvenalile. Comme ces
voMix ne sont que siujples, sous le bon plai-
sir du pape, saint Ignace laissa à la Com-
pagnie le droit d'en dispenser pour de justes
causes, laissant par là aux écoliers le do-
maine et la propriéléde leurs biens, quoiqu'il
leur Ole le pouvoir d'en jouir et d'en disposer
iiidèprnilamment des supérieurs; et c'est un
usage reçu en Italie, en Ivspagne, en Flandre
el on tous les autres pays, excepté en France,
où ces écoliers el ces c >.idjuteiiis ne peuvent
disj oser do leurs biens, tant ()u'ils sont dans
laConipagnie ; m.iis, s'ils en sorteni, ils peo-
voni redemander partage dos bii'us diins leurs
familles. Les profès, avant ()ue de faire pro-
fession, et les coadjutcurs formés, a\ant que
de prononcer leurs vomix, doivent faire l.i
quéle et mendier de porte en porte pendant
trois jours; et il est à la volonté des supé-
rieurs d'y obliger les écoliers avant qu'ils
soient réputés approuvés. Quoique les coad-
jutcurs ne soient pas proies, ils ne laissent
pas d'être recteurs des collèges et rcgonis;
ils peuvent être quelquefois élus pour as-
sister à la congrégation générale; mais ils
n'ont |)oint voix dans l'éleeiion du général,
et ne peuvent précéder les profès de qaat.ro
vœux.
Saint Ignace veut que le général soit per-
pétuel et maître absolu dans toute la Coii-
pagnic ;il veut même que ce soit lui (|ui fasse
les provinciaux, les supérieurs de maisons
])rofesses el de probation elles recteurs des
collèges ; et, afin ((u'il connaisse tons les su-
jets qui sont propres pour remplir les postes.
les provinciaux de toute l'Europe lui écri-
vent une fois lous les mois ; les recteurs, les
supérieurs des maisons et les maîtres des
novices tous les trois mois ; et ceux des Indes,
lorsque la commodité de la navi;zaiioii se
présente, lui rendent compte en général de
leurs inférieurs. Ou lui envoie de trois eu
trois ans les catalogues de chaque province,
dans lesquels on marque l'âge de chaque re-
ligieux, ses forces, ses talents naturels, sou
civancenieni dans les leltrcs cl dans la vertu,
et toutes ses qualités bonnes ou mauvaises.
Saint Ignace donne au général quatre assi-
stants, qui sont comme ses ministres; mais
on en a ajouté de[iiiis un cin(]uième pour la
France : ainsi les cinq assistants du général
sont présentement d'Italie, de France, d'Ls-
pagne, d'Allemagne et de, l'ortn-^al, et sont
élus par la congrégatioa générale , comme
tous les autres supérieurs. Outre ces as-
sistants, il a encore auprès de lui un admo-
niteur, aussi élu par la congrégation géné-
rale , qui est on droit de représenter au
général ce que lui ou les assisl.ints auraient
remarqué d'irrégulier dans son gouverne-
ment ou en sa pirsunne.
(iominc saint Ignace aimait f irt la pau-
vreté, il la recommande en plusieurs endroits
de ses conslilulions. Il ne veut pas que les
maisons professes aient aucun revenu, il n'y
a que les collèges et les maisons de proba-
tion <|iii eu peuvent avoir. Il défend de rece-
voir des fondations pour des messes ù perpé-
cr?
JRS
tuile, ni audinn rétribution, soit pour les
messes, les confessions, les prédications, les
visites des malades, pour enseigner, ou pour
quelque autre emploi de eeu\ que la compa-
},'nie est obligée d'exercer selon son institut.
Il ne donne point d'autre habillement à ses
religieux que celui des ecclésiastiques. Il
ordonne qu'il sera honnête selon l'usage du
pays, sans avoir néanmoins rien de contrai-
re à la pauvreté religieuse. Cet habit con-
siste en une soutane et un manteau long,
comme celui des ecclésiastiques ; mais ils
n'ont point de rabat, parce qu'au temps de
leur établissement les ecclési.istiques n'en
portaient pas (1). Les écoliers approuvés
portent aussi en France le manteau long; et
en Italie, au lieu de manteau, ils ont une
robe à peu près semblable à celle qui est re-
présentée à l'article Jérôme ( en Italie ). Le
dessein que le saint fondateur avait de con-
vertir tous les hommes, s'il était possible ,
lui fit juger que la Ci)mj)agnie ayant à traiter
souvent avec les hérétiques et les libertins,
(jui se moquent de l'habit des religieux, elle
n'en dev.iii point prendre de singulier, pour
avoir plus d'accès partout. On voit ici (2)
l'habit qu'ils ont étéol)ligés de prendre dans
les pays infidèles, où ils annoncent la foi.
Enfin le saint fondateur règle le logement,
la nourriture et le reste, conforniément à
l'habit, selon les lois de la biinséance et de
la pauvreté, et il ne prescrit aucune austérité
d'obligation.
Cette Compignie a eu une infinité d'illus-
tres écrivains en toutes sortes de genres de
science. Le P. Alegambe en a donné le cata-
logue, qui a été augmenté depuis par le P.
Bonanni. Elle aurait fourni un grand nom-
bre de prêtais à l'Eglise, si saint Ignace n'eût
point obligé ses religieux par vœu à renon-
cer aux prélutures et à les refuser quand on
les leur offrirait •. c'est encore un vœu sim-
ple que les profùs font après leur profession.
il y a eu néanmoins (|uelques cardinaux de
cet ordre, qui sont les cardinaux Tolet, lîei-
larmin, de Lugo , Palavicin, Pasmanni , qui
fut aussi archevêque de Slrigonie ; Nilard et
Ptoloméi, nommé pir Clément XI, auxquels
il a fallu un précepte de Sa Sainteté pour ac-
cepter le chapeau. Les Jésuites metteni en-
core au nombre des cardinaux de leur ordre
Alexandre des Ursins , qui fit seulement les
vœux simples de la Compagnie, étant cardi-
nal, sans quitter pour cela sa dignité. Enfin
cet ordre a eu trois saints canonisés, qui sont
saint Ignace, fondateur, saint François Xa-
vier, surnommé l'Apôtre des Indes, et saint
François de Borgia. Trois autres béatifiés, sa-
voir : les bienheureux Stanislas Koske, Louis
de Gonzague, et Jean-François Régis. Trois
martyrs reconnus pour tels par l'Eglise, sa-
voir, les saints Paul Michi, Jean de Gotho, et
Jacques Cliisaï, sans parler d'un grand nom-
bre d'autres qui ont répandu leur sang dans
les différents pays où ils ont porté la foi.
Cet ordre a pour armes un nom de Jésus d'or
entouré du rayons de même en champ d'azur,
avec cette devise : ,4(/ majorem Dci glorium.
(IJ Voy., à \a lin du vol., n"» I5U, lo7 el IjS.
JES 6^8
Orlandin. Sachin. et Possevin. Ilist. So-
ciet. Jrsii. Jmiigo primi sœculi Societ. Jesu.
Jacob Damian. Sijnops. primi sœculi Sorirt.
Jes. Malhias Tanner, Societ. Eurnp. lîarlhe-
lem. Telez, Chronic. de la Companhia de Je^u
tia Provinc. de Porluç/al. P. de Uybadencira,
Vide de S. Ignaùo. Bouhours , Vie de saint
Ignace. Euseb. Nieremberg, Cliros Varones
de la comnannia di Jésus. Philip. Alegambe,
Mortes illustres Societ. Jes. Hcriiian , Ilist.
des Ord. religieux, tom. lll. Haillel et Giri ,
Viedes suints. Regul. Comm. Coiistitut. Liller.
Aposlol. et priviieg. Soc. Jesu.
Le P. ITélyot s'est borné à raconter l'his-
toire de l'origine, de l'extension prodigieuse,
de la Compagnie de Jésus; Il a donné un ex-
posé succinct de son régime et des services
immenses qu'elle a rendus à l'Eglise, mais il
s'est très-peu étendu sur les luttes auxquel-
les (Ile a été exposée, sur les combats qu'cIU;
a dû soutenir contre les novateurs. Nous de-
vons, en continuant son travail, suivre sou
plan; il l'avait d'ailleurs suivi lui-mêm&
dans tout ce qu'il a écrit sur les autres or-
dres religieux. Néanmoins elle s'est trouvée,
après la mort do notre auteur, mêlée de tant
de façons aux maux qu'asouffcrisia religion,
elle a été elle-même en butte à tant d'inju-;-
tes attaques, l'objet de tant de calomnies,
que le peu que nous en allons dire sera sous
certains rapports le récit des combats livres à
l'Eglise même.
(juand le P. Hélyol mourut, la bulle Uni-
genilus venait de paraître. Sollicitée par l'I'l-
glise de France, elle devait être le remède
aux maux que cette Eglise ressentait depuis
l'apparition du jansénisme. L'hérésie sut pa-
ralyser longtemps les effets de ce remède sa ■
lutaire. La philosophie profila des troubles
qu'elle fomeulail pour jeter du ridicule sur
tout ce que la religion el la morale avaient
de plus sérieux. Les parlements se mirent
au service de la philosophie el du jansénis-
me, et tous firent de la Compagnie de Jésus
leur point de mire, cachant sous son nom
celui de la religion catholique, à laquelle ils
en voulaient réellement. Les Jésuites de-
vaient succomber sous le poids de coups si
nombreux et si puissants, car les rois, dans
leur aveuglement, se firent l'écho des cla-
meurs de leurs ennemis, cl hâtèrent leur pro-
pre chute, en sollicitant et extorquant celle
des religieux les plus utiles à l'Iiglise dans
les dures circonstances où elle se trouvait
alors.
Les Jésuites, zélés pour la doctrine catho-
lique, se soumirent aux décisions du sainl-
siége, et propagèrent autant qu'ils purent
l'adhésion auxdécrets vcnusde Rome. Nous
devons avouer ici que quelques membres de
leur Compagnie, alors missionnaires dans les
contrées d'Orient, ne mon traient pas une obéis-
sance aussi ponctuelle aux prescriptions du
souverain pontife. On sait toutes les difficul-
Il's élevées, toutes les disputes occasionnées
par les cérémonies religieuses de la Chine.
Depuis plus d'un demi-siècle, les religieux
de diveis instituts , missionnaires dans ces
(2) Voj/., ix la fin du vol., m" 159, 100, 101 el 102
P59 niCTlONNMRE DES ORDRES RELICIEUX. 660
rontrécs loinlainos, ét.'iionldivisés sur le sons lilé où nous laisse l'espare rétréci ilpsliné à
qu'on atlnrhait à certains mots, sur l'olij'l raconter ses travaux, clo les montrer en ilè-
de certaines cérémonies. La plup.irt cou- l.iil, nous nous liorncrons à dire que si le
damnaient l'oxprcssion par la(|uelle les iiili- eliristianisme a f.iit des proirrès si surpre-
gènes nommaient le ciel, n'y voyant que le nanis dans l'Amérique du Nord depuis un
ciel matériel : le plus prand nombre des Je- sièc!e, ces proi;rés sotii dus en grande partie
suites, et même quelques prélais y reon- aux travaux des Jésuites. Os evéchés noni-
naissaienl l'invocation du Seigneur du riel. breux qui semlilent suri^ir comme par cn-
I.a même division exislall sur le sens moral cliaiilement dans les l'Ua's-Unis, nous ne
des cérémo:.ios dont nous avons parlé. Uo- crai;;noiis pas de le dire, ont leurs bases cl
me, consumée, envoya un loiral, M. de Tour- leurs racines dans celte terre que les Jésui-
non, patriarclio d'.\iitioihe, ipii ne fut pas tes plus qiu' tous les autres missionnaires
reçu de tons les catholiques avec 1^ respect avaient défrichée et arrosée de leurs sueurs,
que lui mérilaent son (araclère cl son titre. Les Puraxis. les Manacicas, les Quiriquieas,
11 est juste de ne pas laisser peser sur les Je- bs Lulles, les Ptiizoeas, les .Morabis, les
suiles seuls le tort de ce manque de respeil Abipones, les Mala;;uvos et vin^t autres
et de s-oumissioli. Nous donnons sur eux un peu|ilades ou tribus sauvages, dans l'autri!
aperçu liisloriiine ; notre impartialité nous pu liedii nouveau monde sont amenés par les
<)blii;e à dire que le plus grand nombre d'en- Jésuites à la connaissance de la vérité et aux
irceux se montra récalcitrant auxordres du usagesde la vie civile. Toutes cesnalions, dont
pape. Le lé-jat condamna les cérémonies clii- les noms étranges ne nous seraient peul-étrc!
noises ; les Jésuites, s'appiiynnl trop sur leurs pas connus si elles n'avaient été l'objet du
connaissances éti-ndues et plus a| pro'"ondies zèle des Jésuites, furent amenées à l'etal do
de [a langue el des usages du pays, sur le W''c/i/c<i9n, c'est-à-dire à ce genre de gouver-
maintien des intérêts du clirislianlsme dans nemenl moitié monarchique, moitié Ihéo-
rcs contrces, ajournèrent leur soumission et cralique, où les établi>saii'nt leurs apôtres
appelèrent au pape mieux informé. (Nous pour les sousiraire aux horreurs de la vie
voulons appnjer sur la dilïérence de cet ap- sauvage. De toutes ces Héductions, celles du
pel d'avec ceiui des appelants français.) Ils Paraguay on' été les plus célèbres : tout le
eurent tort ; mais si le légal cul à se plain- niunde connaît jusqu'à (|uel point les Jésui-
dre de leur conduite, il eut bien plus à se les parvinrent dans celle république chré-
plaindre des vexations des Portugais, de Par- tienne à rendre agréable à des êtres abrutis
chevéque de Goa, de l'évéquc de .Macao. Les le joug de l'obéissance, «lu travail el de la
fautes de ceux-ci n'excusent pas celles des famille. Comme si les dil'licullés sans non)-
autres, sans lioute, mais elles les explique- bre qu'avaient demandées ces conquêtes rue-
raient peut-être un peu, d devraient obli- riioires avaient surexcité le zèle des Jésui-
ger les ennemis des Jc>uiles à plus de discré- 'ps, l'Amérique méridionale vil de nouveaux
lion dans leurs attaques fondées sur ce Pères de l'instilut marcher à la découverte
point. Au reste, le 11 juillet 17V2ctle 12 sep- de U'iuvelles peuplades. On leurdisait qu'elles
lembre 174V, Benoit XIV, par ses bulles étaieni encore plus sanguinaires, plus disso-
Jix quo sittf/ulari el Omnium sollicitiulinum, l-es que celles dont ils avaient comprimé les
trancha toutes les diflicullés en parlant dans insiincls. I]es récits furent pour eux un sli-
le sens de ses préilécesseurs. Les Jésuiics niulanl. On ne peut dissimuler que toutes
cesséicnt leurs lésisiances, qui dans un ces cmiquètes faites aux lumières de la foi,
grand nombre, el peut-être dans lous, n'a- ne fussent aussi à l'avanlai;e de l'Iispagneet
vnienl été (|ue conditionnelles. Ors avant ce du Portugal, qui favorisaient les missionnai-
temp-, en 17;j.ï, les Jésuiles duMaduré;en res;ilfaulen même temps rappeler com-
1741, les Jésuiles de la l>hine cl des Indes bien ces services nombreux et iniporlanis
avaient fait leur soumission, et la ilistance rendus à la mère patrie élaient souvent
des lieux avait retardé l'arrivée de leurs lei- payés d'ingratitude, de calomnies el de pcr-
ires à Rome. Au milieu de ces malheureuses séditions. La France n'était pas moins in-
divisions, les Jésuites de ces contrées loin- téressée aux conquêlt^s spirituelles des Jésui-
lalnes faisaii'nt lionneur à leur Compagnie tes dans l'Améri(|ue du Nord. Les Murons,
cl à la religion, si nn peut parler ainsi, par les K>(|uimaux, les Algonkins, les .\benakis,
l'éclat donl ils brillaient dans les sciences , les Minois et les Miamis aiceplèrenl avec
dans des missions (liplomali(|ocs et délit aies, joie l'I^vangile. De l'étal sauvaue ils étaient
cl les noms des PP. Parrenin, Caubil, etc., peu à peu arrivés à une condition heureuse,
sont restés cliers aux lettres, suivant le té- Ils a(>prenaienl à cont'iinlre dans leur amour
oiuignagc même de ceux i|ui ne semb'eiit pas Jesns-t^lirist el la France. ,\ près leura\oir
faits pour comprendre el pour d rc combien d inné un cnlle, des moMirs, une famille, on
aussi ils .sont d«meure$ cheis à la mémoire leur offrait un- patrie qui les protégeait, el
des hommes de foi. si le nom de rnlies noi es réveille encore de
A la même cpuque, el pendant toullc reste nos jours les sentiments de la reconnaissance
de son existence, la Socieié de Jésus rendait chez le;» sauvages et chez les Canadiens,
a l'autre extrémité du monde des services, si- n'oublions pas ijne ce nom, devenu commun
non aussi éclatants , ilu moins plus étendus à tous les missionnaires catholiques, fut pri-
ct peut-être plus Siliiles et p'us utiles. Nous mitivcmenl donné aux seuls Jésuites. Une
ne faisons point ici un panégyrique, mai'i partie «les œuvres donl nous rappelons ici
suulcuicnl de riiisloirc, et dans l'impossibi- l'ellct miraculeux avait commencé san»
eni
JES
JICS
65?
doule à une époque anlérieuro, à ctlle qui
nous sert de dale dans ces addiiions, mais
elles se coiilinuèrenl cl quelques-unes com-
iiienrèrenl au xviir sit^cle. Il en esi de même
des cBiivres plus difficiles el peiit-cire plus
niériloiies que l;i ch.irilé des Jésuites leur
faisait suivre alirs, eu Giiinéi-, à la Séné-
gambie, au Congo, à Angola el sur (raulres
poinis meurtriers des rôles et des haliilalions
de l'Afrique; et si jamais l'inslilul écrit un
martyrologe de famille, il trouvera dans les
missions que nous avons indiquées, pour en-
richir sa nomenclalure, les noms de Soliios,
RomiTo, de Arcé,de Blende, Baraze , Ki-
chler, (jravier, Uupuissoii, Sénal, douze Pè-
res massacres sur les bords du Xingu, el
cinquanie autres, dont la mort date à peu
près de l'époque sur la(iuelle nous écrivons;
il lous ne périrent pas sous les flèches ou la
hache des sauvages, p!us d'un mourut sous
le fer des protestants anglais.
Nous abandonnons à rcgn l Icsniissionnai-
icsjésiiilcs dans leurs liaviiux du nouveau
monde et des autres coiilrées U)intaines, pour
repr 'ndic leur histoire en Europe, où nous
les voyons en proie à la calomnie el aux per-
sécutions de l'hérésie et de l'impiété, lin
France comme dais le reste du continent,
partout où ils étaient établis, les Jésuilessou-
((Miaicnl avec honneur, continuaient avec zèle
) ■ bien qu'avaient fait leurs devanciers dans
la prédication, la direction des consciences,
des congrég;itions pieuses, etc.; ils soule-
iiaicnl aussi la réputation lillérairc et scien-
tifique de leur ordre, soit en formant toujours
des élèves distintiués, soit par des ouvrages
remarquables dans lous les genres. Comme,
au milieu de tant de richesses intellectuelle-,
nous ne pouvons rien citer dans notre abré-
gé, nous nonniions à peine ici le Journal de
Tréioux cl sou immense action; nous omei-
lons aussi à regret tant de noms que la
France même seule pourrait ici nous four-
nir. Encore une fois, nous n'avons envie de
faire ni dans le fond ni d;ins la forme un
éloge des Jésuites; noire tâche serait pour-
tant alors d'autant plus facile, si l'espace nous
était laissé, que nnus n'aurions (lu'à prendre
les paroles .'irrachées par la force de la vérité
de la bouche de leurs plus célèbres ennemis,
pour les justifier des principaux reproches
qu'on leur a faits. S'agit-il du régicide, par
exemple, dont on n'oserait plus parler au-
jourd'hui, mais qui a servi de thème à tant
d'hypocriies amis du 21 janvier 179.'J, on se
rappelle celle lettre de Voltaire à Damila-
ville : « Vous devez voir que je n'ai pas
ménagé les Jésuites ; mais je soulèverais la
postérité en leur faveur, si je les accusais
d'un crime dont l'Europe et Uamieus les ont
justifiés. » Un hornme dont le nom, la posi-
tion, la patrie (il était de la religieuse pro-
vince de Bretagne), auraienldû arrélerla plu-
me, quand il eût élé capab!e d'écrire de lui-
même, LaChalolais,quis'élail fait par orgueil
le méprisable copisie ou le viléchoded'Alem-
berl, avait porté l'expression de l'ignorance
jusqu'à dire que les Jésuites n'nvnient jias
praduil de mathémaliciens. Et à celle occa-
sion l'aslrononu' l.alaude, ijui ccriv.iii dans
le Bulleiin de l'Europe : « Le noui de Jésuite
intéresse mon cœur, mon espril et ma recon-
naissance. On a beaucoup parlé de leurré-
lablissenieni dans le Nord; ce n'est qu'une
chimère; mais elle m'a rappelé tous nu'S re-
grets sur l'aveuglement des gens en place en
1762... Carvalho et Choiseul ont détruit
sans retour le plus bel ouvrage des hommes,
dont aucun établissement sublunaire n'ap-
prochera jamais..,» l'astronome Lalande ,
qui malheureusement n'était pas incité par
le sentiment icligieux, disait aussi : « L'es-
pèce humaine a perdu pour toujours celle
réunion précieuse et étonnante de vingt milh;
sujets occupés sans relâche cl sans inlérêt,
de l'inslrucliuii, de la prédication , des mis-
sions , des conciliations , des secours aux
mourants, c'est-à-dire des fonctions les plus
chères et les plus utiles à l'humanité... l'ar-
ru' les calomnies absurdes que la rage des
proteslants et des jansénistes exhala contro
eux, je remarquai La Clialotais, qui porla
l'ignorance el l'aveuglement jusqu'à dire que
les Jésuites n'avaient pas produit de mathé-
maliciens. Je faisais alors la table de mon
Astronomie; j'y mis un article surles Jésui-
tes astronomes ; le nombre m'étunna ; j'eus
occasion de voir La Clialotais à Saintes en
1773, je lui reprochai son iiijusl ce, el il en
convint. »
lit ce La Clialotais lui-même n'èiait-il pas
obligé de convenir de bien d'autres avanta-
ges dans la Compagnie de Jésus ? « Si les Jé-
suites, dit-il, n'avaient enseigné que les
maximes d'une morale corrompue et relâ-
chée, loin de se soutenir, ils eussent élé chas-
sés de lous les royaumes ; mais ils joignaient
les arts aux mœurs régulières; il se trouvai!
chez eux du bien el du lual. Leur inslilut n'it
point eu de modèle, et vraisemblablement il
n'en servira jamais à aucun ordre.» (LaCha-
lolais se trompe on cela, comme quand il dit
que les constitutions el les mœurs des Jé-
suites ne peuvent s'accorder avec les lois et
les mœurs des Elals républicains. La règle
des Jésuites, ctimme toutes les règles monas"
tiques, s'accorde avec tons les régimes poli-
tiques possibles , puisqu'elle n'est que l'ex-
pression de la perfection évangélique, possi-
ble partout.) Les évéques réclamèrenl pres-
que tous en faveur de la Compagnie de Jésus.
De Fitz-James, évéquc de Soissons, jansé-
niste connu, fut le seul à s'élever ouverte-
ment contre eux, et néanmoins il déclara
que leurs mœurs étaient pures : « On rend
volontiers aux Jésuites (écrivit-il) la jusliie
de reconnaître qu'il n'y a peut-être point
d'ordre dans l'Eglise dont les religieux soirnt
plus réguliers et plus austères dans leurs
mœurs. » Sur le même sujet, Voltaire a dit
aussi :«l'endanl sept années que j'ai vécu dann
Il maison des Jésuites, qu'ai-je vu chez euxi
La vie la plus hiborieusc cl la plus frugale j
toutes les heures partagées entre les soins
(ju ils nous donnaient el les exercices de leur
profession au;tére : j'en ailcste des millicra
(l'hommes élevés.comme moi. »
Après avoir lu de tels lénioignages, ou es\
603
nicTioNNAini': des onoREs iieugieux.
C54
j)ou surpris lio »oii lo> éM"'(|ui'S ilc France do-
ehirrr à Louis XV que « la sii|iprt's-i(in des
Jpsuilrs potti-rait tin luil/iblc préjudico à
leurs dior«^srs cl à l'iiislniclioii tic l;i jeiinos-
sp.ol qu'il serait Irôs-diflicile de les rouipla-
tpr a»cc 1.1 riiêinc ulililé. n
Ci[)('ndaiU «oUc fuppression eut lieu; il
iiDUS reste à raconter c.oniinenl elle fui défi-
nitivement amenée.
L'oraçe éclata d'aliord contre elle en Por-
luiial, oii elle eut pour ennemi déclaré un
homme ((uelle s'était pourtant atliiché [lar
les liens de la reconnaissance. Cet homme
est le fami'ux Pomlial, comte d'OKjras, né
d'une famille noble mais [lauvre. Deux ma-
riages avantageux ra\aii'nl mis sur la voie
de la fortune, et la iir'itection du P. Morcira,
confesseur du roi Joseph 1', plus que tout
autre soutien peut-être, l'avait fait nommer
uiiDlsIre secrétaire d'Etat des affaires élraii-
pères.Ce P. Moreira était un Jésuite qui fui,
ainsi que quelques-uns de ses confrères,
trompé par l'hypocrisie de Pombal. Pour les
remercier de leur intervention bienveillante
en sa faveur, le. ministre trouva des prétex-
tes de ^exalians contre la Compagnie de Jé-
sus, fit exiler quelques-uns de ses membres,
fitcxpulsir les autres des missions du Para-
guaj', etc. C'est surtout à partir de l'attentat
contre la vie du roi que Pombal se monira
sans rcienue contre les Jésuites, dont la [tré-
•ence, le zèle et les succès l'auraient empê-
ché de parvenir à ses fins. Le ."î se|itenibre
l'ion, le roi Joseph 1" revenait d'un rendez-
vous coupable avec la jeune marquise de i a-
vora, on attenta à ses jours. Plusieurs per-
sonnes delà cour, le duc d'Aveiro, le mar-
quis it la mar(|uise de Tavora, le comie
d'Antognia furcut accusés d'avoir pris jiart à
ce crime et subirent la peine capiiale. On a
dit que cet assassinat était une fiction inven-
tée par Pombal; cela est possible, néanmoins
Li conjuration, ou supposée ou plus proba-
blement vériiable,a éie depuis considérée en
Portugal comme un fait incontestable. Au
milieu des tortures qu'on lui lit scuPTrir, le
duc d'Aveiro compromit ((uelqucs Jésuites
comme iiistigaleurs, et se rétracta dès qu'il
ne fut plus violenté par les tourments. Néan-
moins trois Jésuites turetil impli<)ués dans
le procès; mais Pombil, (;uoique lout-];uis-
saut, n'osa pas les faire juger en même temps
que les autres pré^elllls , el l'un d'eux, le P.
Malagrida, fut déféré trois ans plus tard,
])0ur hérésie, au tribunal de l'inquisition,
présidé par le frère de Pombal, sur le refus
«le l'inquisiteur général , et , condaojne à
mort comme sorcier, (ut hrùlé vif dans un
aulo-(la-fe, le :J1 septembre 17i 1. Un édit du
19 janvier 1759 avait déclaré tous les Jésui-
tes portugais complices de l'.itlentat; en
conséquence, ils furent enfermés, (luis de-
portés par mer eu Italie, et leurs biens fu-
rent séijucstrés. Il est inutile que nous clicr-
c'hions à éiabl.r ici leur innocence en ce
complot; elle est reconnue et avouée par
tous les écrivains sérieux, à qucl(]ue couunu-
iiion qu'ils appartiennent. Les Jésuites m;
doutaient plus depuis lrès-loui5ten)ps des
disposiiions du ministre à leur égard, et au
milieu des persécutions nombreuses dont il
les avait déjà rendus vidimes, ils avaient dû
plus vivement sentir le bref éionnant arra-
ché à la faiblesse de lîenoit Xl\' mour.inl.
Iequ(l bref oidonn.iit visite et reforme de
leur institut eu Portugal, et confiait cette
mission étr.inge et inutile au cardinal Sal-
danh.i, protégé de Pombal. Cette Lmincnce,
qui s'ét.iit entourée des plus violents enne-
mis de l'institut, exécuta sa singulière mis-
sion en 1758. L'année suivante le nouveau
pape, t] émeut Xlll, mû par des sentiments
de justice, avait en janvier donné un bref
d'a|.])robalion et de confirmation des Jésui-
tes. Pombal, qui venait de les chasser du
Portugal, irrité de ce bref, renvoya le nonce
du souverain pontife. D'où venait doue,
dans Pombal, celte haine des Jésuites , qui
allait noii-sculcment à la cruauté mais au
f.inalisine et au ridicule? Imprégné des idées
jansénistes qui régnaient alors en France,
il était en outre le serviteur caché des An-
glais; il voulait chasser le catholicisme du
Portugal, y établir une Eglise nationale el
changer l'ordre de succession au lr<^nc. Ici
noi s ne devons pas omettre uu fait à la louan-
f. e d'une corporation religieuse qui se distin-
gua par ses procédés envers les Jésuiles,
exi)u!scs du Portugal. Embarqués sur le
'Page en 17o9 , ils fuienl contraints de f.iire
relâche en plusieurs villes où on les reçut
avec riîspect. Le 2i octobre 1759, ils débar-
quèrent à Civita A'ecchia, au nombre de cent
trente-trois. Magistrats, corps religieux,
tout dans celle ville tint une conduite
digne d'éloge envers ces nobles exiles ;
mais les Ùominicains surpassèrent tout
le monde en cordialité el en générosité.
Ils \oulurent consacrer, par une inscription
dans leur église , le souvenir du passage de
ces premières victimes d'une attaque qui al-
lait bientôt devenir gêné, aie contre les or-
dres monastiques. Cette conduite est belle
dans une société qui, par sentiment du ta-
lent et du zèle plutôt que par jalousie peut-
élrc, s'était souvent montrée l'émule des Jé-
suites. D'autres navires chargés des Pères de
la Compagnie partirent à différentes époques
})Our les Etats ecclésiastiques. Celle expédi-
tion plaisait iulinimeut aux jansénistes fran-
çais, et, ce qui n'a peut-être été reman|ué
par aucun historien, .'ijoutaul l'ironie à la
ciuautéet à l'insulte, ils consacrèrent par le
burin la mémoire de celle expulsion et de
cette translation en Italie. Nous avons vu
nous-inême des gravuies secrètes faites par
le parti pour s'amuser de cette catastrophe
des Jésuites. Li.' cardinal Salda- ha, il faut le
dire à sa honte, s'arrogeait le pouvoir de
dis(ienser de leurs vo'ux les jeunes Jésuites.
Il y eut quelques défections; m lis les huées
du peuple et dis sold.ils eu lirenl justice. Le
plus grand nombre résista aux flatteries el à
l'intimidation. Ou fil dans les missions les
mêmes expulsions qu'au sein (le la métro-
pole. Itornons ici le récit de la persécution
(le Pombal, qui fut la plus calculée et la pins
cruelle peut-élrc contre les Jésuites. Nous
I
CCj
JES
JF.S
666
lui avons donné une certaine étendue. On
sait qu'avant sa mort, Poinbal, disgracié cl
traduit en justice, vit réliabililer toutes les
victimes qu'il avait chargées du crime «le
ièsc-majesié. A part ses procédés contre les
Jésuites, il n'est aucun historien qui ait pu
dissimuler l'exécration ou si l'on veut la
haine dont le poursuit déjà la poslétilé. Il
éla t un de ces hommes qui" le crime no re-
tient pas quand ils veulent parvenir aux
honneurs et à la fortune. La franchise nous
oblige à ajouter qu'il trouva grand nombre
d'ectlési.isliques et d'évéquos qui le servi-
rent avei: bassesse.
Kn France, les choses se passèrent autre-
ment. On blâmait, sans en excepter Choisrul,
les cruelles prévenlioiis, les procédés do
Tombal ; mais tout le monde sait qu'on ton-
dait au même but et qu'on y parvint par la
calomnie tt le sarcasme. Il nous suffit donc
de le rappeler ici, en rappelant aussi la cir-
constance malheureuse qui porta un coup
si terrible à l'ordre des Jésuites. Nous par-
lons du l'ait du P. Lavaleile, que tant de
gens allèguent sans le connaître. On a quel-
quefois rrproché aux Jésuites leur immix-
tion dans le commerce, conire les disposi-
tions des saints canons qui Tinter lisent aux
clercs et aux religieux ; or, ce n'étaient pas
ceux qui étaient chargés de veiller sur l'ob-
servation des règles ecclésiastiques qui for-
mulaient ce reproche. Chargés des intérêts
de leurs néophytes, les missionnaires jésui-
tes ont qu<.'lquefois, comme l'ont pu faire
d'autres corporations, dirigé l'exploitation
de leurs possessions et l'expurtatiou de leurs
produits : c'était là un acte de chariié, cl non
une profession ni une pratique de commerce
qui consiste à acheter pour revendre. Le P.
,de Lavaleile, doué de zèle pour le prochain
el d'habileté pour le m;iniement des affaires,
étant devenu supérieur des missions de l'A-
mérique du Sud, loin de ses supérieurs ma-
jeurs, alla peu à peu trop loin, conlracla des
emprunts auxquels la guen e et des événe-
ments imprévus rem|jéchèrenl de salisfaire.
A une autre époque que celle où éclata ce
desasire, dans une aulre France que la
France du xviii' siècle, les Jésuites, secon-
dés même de quelques créanciers, auraient
réussi à laire agréer leurs olVres ou à-comp-
les généreux ( ils a\ aient même déjà soldé
près de 800,000 fr. ) ; mais la disposition des
esprits, les animosités de madame de Poin-
padour, les persécutions hypocrites du dus
de Choiseul secondant alors si favorablement
la haine des jansénistes, des philosophes el
des parlements, tout salut était impossible,
parce que l'(jn pouvait employer avec vérité
CCS paroles du livre des Juges : 7/ n'y avait
point en ce temps-là de roi en Israël. On sait
que les Jésuites furent condamnés à solder
les dellesdu P. Lavaleile. Maiscequ'on ignore
généralement, c'est le désaveu de la conduite
du Jésuite coupable, par ses supérieurs, et
sou expulsion de la Compagnie de Jésus. Cet
épisode malheureux de l'hisioire de sa deslrue-
lion se trouve rapporté d'une manière plus
lucide el plus véridique que partout ailleurs
dans le LXX* volume de la Biographie uni-
verselle. Le procès intenté aux Jésuites à l'oc-
casion d(! la faillite du P. de Lavalette ame-
na devant les parlemenls la révision et l'exa-
men de leurs constilulioiis. On blâma l'es-
prit de leur institut el on les accusa eux-
mêmes d'y être trop attachés el trop fidèles.
Kn Portugal, Pombal, dans son hypocrisie, les
accusait de s'en être écartés el pi élexlail vou-
loir les ramener à leur roguljirité |>rimitive.
Mcnlita est iniquilas ,vî7*(. La commission du
conseil que le roi avait chargé de la révision
des constitutions des Jésuites, convoqua une
réunion du clergé, el lui adressa quatre
questions. Le 30 novembre ITlil, cinquante-
un cardinaux, archevêques el évêques, s'as-
semblèrent sous la présidence du cardinal de
Luynes.el, après un mûr examen, tous, moins
six voix, prononcèrent en faveur des Jésui-
tes sur les quatre questions ; et même il n'y
cul que l'évêque de Siiissons qui demanda
l'entière expulsion de la Compagnie de Jésus.
Le premier coup que frappa le parlement
fut un arrêt d'interdiction el de suppression
lancé en 17G0 conire les congrégations, dans
lesquelles depuis deux siècles les Jésuiles
faisaient un bien inappréciable. La faillite du
V. de Lavalette n'avait été qu'un prétexte
heureux pour saisirl'occasion, depuis si long-
temps désirée, de sévir conire la Compagnie
de Jésus tout entière. On examina les consli-
lutions ; l'un des commissaires chargés de
ce soin, l'abbé de Chauvelin, janséniste systé-
matique, se montra plus forcené que les au-
tres peul-élre. Les Jésuites demeurèrent fer-
mes devant les concessions qu'on leur de-
mandait relativement à leurs relies, mais ils
en accordèrent d'autres qui ne devaient pas
plus les sauver, el entre celles-ci il ne faut
pas omettic de remarquer l'acceptation des
quatre articles de 1GS2. Aux évêques qui
avaient donné des déclarations si favorables
à la Compagnie de Jésus, soixante-dix au-
tres se joignirent bientôt en écriv ml dans le
sens de cette manifestalion, elle23mai 1702,
le clergé, par l'organe du cardinal de la
Uoche-Aymon , archevêque de Narbonue,
demanda au roi, en termes pressants et élo-
f,icux, la conservation des Jésuites au nom
des intércis de la religion. Tout fut inutile I
Nous n'avons qu'à constater l'arrêl délinilif,
puisque les delails n'enlrenl ni dans notre
but ni dans noire plan. Mais, si nous avons
omis à dessein do rappeler ces noms, ces
mots alors si calomnieusemenl sonores, D.a-
miens, régicides ; extrait des assenions, etc.,.
nous ne pouvons nous empêcher de signaler
avec douleur, entre les parlenienls qui s'as-
socièrent aux injustes violences du parle-
ment de Paris, celui de Uennes 1 L'arrêl du
parlement de Bretagne renchérit sur l'exa-
gération des autres. Il déclara privés de tou-
tes fonctions civiles el municipales les pa-
rints qui enverraient leurs enfants étudier
^•liez les Jésuites à l'étranger ; ces enfants, à
leur retour, se trouvaient dans la même
exception 1 I Ne croirait-on pas lire par
anticipation l'arrêt porté par quelques ra-
dicaux Irènéliqucs de France ou de Suisse, au
f.fiT
DICTIONNAIRE OFS ORDRES REI.IGIKUX.
CCS
milieu du ii\' siècle? A ()tii oïdil iliic une l'Ile
i'\ngorali()ii ou une Icllo lnlie, si ce n'est siins
iloiile à riiilliieiice (lu'avail ohleiitir- un liom-
iiic iliMit le iimn esl reso liidi-ux en f;ic ■ d'
régule de ^lli^lOlrl•, el qui cause sau» dou'.e
aulanl de r""^'rels qu'il ,i causé de ma heurs à
son hi)niiraliIef;Mnille. Ali! si du tuoliis celle
récrimiiiatiiin iimocenle. arrache' par l'iiidi-
i;nali(iii à In plume d un roinp.ilriole, pouva^l
être un désaveu suffisanl ! Il es! hou cepen-
dant d a|<>iiter qu'il n'y eutdans la décision du
parleinenl hrolon que majorité de trenle-ileuv
voix contre rimit-neuf. La seulence iriiqui!
du parlement, contre laïuelle réclamèrent la
conscience des honnêtes cens, l'inslruclinn
pasioralede M. l'arche» cque de P ijis, le cri de
In reliiîion, amena l'édil du mois de novemhre
171)'», portant s ippression de ta Société des
Jésuites en iraiicc. Cet édit laissait du moins
aux religieuv supprimés la faculté de rester
e.n l'"raiicc >ous la jurididion dC'i éiciues.
Le t" décembre, If parlement mil au bien-
fait de celte disposition les resIricUons les
plus iyranMii]ues conlre ce qu'il appelait, par
une expression aussi inconséqueiiie qu'elle
est solle et ridicule, les ci-devant soi-disant
Jéstiiles.Deu\ serments déshonorants avaient
élé imposés aux religieux ( le fi août 17G2 cl
le 22 février 17G4 ) ; en 17(37, un arrêt de la
même cour expulsa du rojaumi- ceux qui ne
l'auraienl pa-. p élél Cinq tout au plus jurè-
rent, et qua re mille rclijiieux furent réiluils
au sort le plus cruel. On leur avait accordé
une pension ri liiule par son exiguïté; et,
contradiction singulière , si elle n'était pas
dans la nature des procédés libéraux I le pir-
leuienl rcfcsail celte pension aux Jésuiics qui
n'étai."nl (\iie scolusti/^ws , c'est-à-dire qui
n'avaient pas fait les quatre vœux, ne les re-
gardant pas comme véril.ihlement religi ux
apparcmiiienl, et néanmoins on leur enlevait
le droit de rentrer dans leur pairimoine et la
facullc d'hériter! Dans un grand nombre de
diocèses, sinon dans tous, h s Jésuiles coiili-
iiuèrenl néanmoins pend int longtemps , el
queiquelois sous des noms déguisé-, à faire
le bien qui" les véritables fidèbs avaient tou-
jours désiré el re^ ;u d'eux. Terniiiiuiis ce qui
concerne les Jésuiles de France par ce pas-
sage d'une lettre alressée à N'ollaire pard'A-
lemberl , (|ui , sans élrc prophète ni (ils de
prophète, préilisait par ses vœux ce qu'il ne
vil pas , mais ce qui se lit lienlc ans après
I arrêt ilu parlcnienl: Pour moi, qui vois tout
en ce moment coiilrur de rose, je vois d'ici les
jnn.>:énixtes mourant l'année prochaine de leur
belle mort, après avoir fait périr cette année-
ci les Jésuites de mort violente; lu tolérance
s'établir. Us pro'estants ra;tpelé<, les prêtres
mariéi , la confession abolie ei l; k\nai ismk
éiTasé sans (/u'on s'ej} aperçoive. Ou sait quel
esl ici le synonyme de fanatisme.
iin 17(io , la t^ompagine de Jésus recevait
une cniisolalion bien louchante. Le pieux
pape Clément XIII, élevant la toix en sa fa-
veur, disait à l'univers catholique : '/ue fin-
itilut de lu Compagnie de Jésus i espire au
l'Li s HAIT iip.dRi'. la pillé et la sainteté
Dans le méuic Icnips , la catliuliiiuc Lspagnc
se disposait pourtant à lui porter aussi le
dernier coup. «Choiseul, dit le proteslaiit
Si-mondi dans son Histoire des Français,
loue \\l\, f lisait pour lui-même une af-
fiire personnelle de la persécution contre les
Jésuites. Il s'altaebait surtout à lei fiir<!
chasser de tous les lîtais de la maison de
Hourbon, el il profita , dans ce bul , de l'in-
llueiice qu'il avait acquise sur Charles III. »
Ce prince était pourtant vertueux et habile,
dévoué à la Compagnie de Jésus, au point
qu'il fut le premier à llétrir les calomnies of-
licielles de la cour de Lisbonne. Néinuioins ,
parla perfidie île son indigne ministre d'A-
randa, il fut amené, en 17(16, à les regarder
avec suspicion el jalousie dans une circons-
tanie où il ne devait les voir qu'avec recon-
naissance ; ils avaient apaisé une énieule, on
lui lit conclure qu'ils l'avaient donc exci-
tée. (!n aciiewa de l'indisposer contre eux,
en fabriquant et mettant sous ses yeux une
lettre qu'on disait venir du général des Jé-
suites , et où riioiineur de sa propre mèro
était attaqué. Avec des circonslances qui
licniienl plutôt de la folie (|ue de la ven-
geance d'un homme ordinaire, le 2 avril
17ii7, à la même heure, par suite des dispo-
sitions prises par d'Vranda, les Jésuiles,
dans les possessions espagnoles des deux
mondes, furent embarqués. « Si après l'ein-
barqueincdt , ajoutait l'ordre du monarque
aveuglé . il existait encore un seul Jésuite ,
même malade ou moribond, dans voire dépar-
lement, vous serez puni de mort. >> Six uiillo
religieux furent victimes : on les entassa sur
des vaisseaux, on les transporta vers l'ilalie,
où une sage politique de (jlémenl XIII recla-
mait en vain pour eux auprès de Charles 111;
on les débarqua enfui , à la prière du pape ,
d.ins l'iie de Corse, d'où Choiseul les lit bien-
tôt chasser, l'ar suite d'une fascination dont
l'aveugle maison de lîourb;in a été el sera en-
core providentiellement punie, les auteurs de
tant d'injustices réussirent à les faire parta-
ger par les deux princes de celle famille dont
les Klals él lient en Ita'ie. 'fanucci, minisire
de i-"erdinand IV, roi de Naples , Tanucci ,
créature di' (Charles III, dans la nuit du 3 no-
vembre 1707, chas<a le.s Jésuites de la ma-
nière la plus barbare. Le jeune duc de l'arme,
pctil-iils de France el infant d'I'-spagne , fui
sollicité par Choiseul et d'Araida d'entrer
dans la coalition contre les Jésuites. Ils réus-
sirent, cl, au commencement de 17(}S, ces le-
ligieiix furent renvoyés de Panne. l'inlo,
grand maitre de Malte, était feudataire du
royaume de Najdes ; |).ir suite des mêmes in-
trigues, il fui amené, en 17(18, à bannir les
Jésuiles de son ile. L'année suivante, la Coiii-
pa;;iiie tleJésus perdit sou dernii'r et son plus
leriiie appui; le pieux pape Cleinenl XIII
mourut. On sait que Clèiiieni XH' lui -iic-
ceda, et l'Iii^toirc comineitce à éclaircir l'in-
trigue i|ui l'amena à abolir les Jésuiles. Le
21 juillet 177.'1 , il se rendit aux inslance» el
peut-êire aux promesses qui l'obligeaient à
lancer le décret de di-solution de la Compa-
gnie de Jésus. Ce décrel est étendu, et com-
lucnce par rappeler l'cstinctiuu de plusieurii
669 JES
ordres religieux dans les siècles précédents ,
tels que les Franciscjilns de la réforme dos
Conventuels, les Humiliés , les religieux de
Saint-Ambroise ad Nemus ; les Basiliens Ar-
méniens, les Jésuntes, les ch'inoines 'le Sa nt-
Georges in AIr/ha, eic. ]' finit par prononcer
l'extinclion ilè l'ordre de la Ginupagnie de
Jésus , dont il rend les membres à l'elal sé-
culier, les remettant sous 11 juridiction des
ordinaires des lieuv.
L'Institut avait éié gouverné au dernier
siècle par les Pères Mirbel-Ange Tainbiirini ,
l''rançois Retz, Ignace Visconli, Louis Cenlu-
rioni. Le 8 mai 1758, la ilix-neuvième et der-
nière congrégation générale seri'nuilauGésu,
et élut, le 21, pour général de la Compagnie,
le P. Laurent Uicci , né à Florence et alors
âgé de 55 ans. C'éiait un liomnie d'esprit,
rempli de piété, mais qui n'avait poini, dit-
on , ce qu'il eût fallu d'énergie de caractère
dans le cruel combat où se trouvait engagée
sa Compagnie. Il la gouvernait quand elle
fut éti'inte. Dans le bref de dissolution, Clé-
ment XIV, rappelant les extinctions des ins-
tituts dans les siècles précédents, disait : On
leur assigna uti"; pension honnête ; mais il ne
pouvait citer comme précédent ce qu'il crut
devoir faire. Par son ordre , le général Lau-
rent Ricci fut enfermé au cbâteau Saint-Ange,
où il resta ins(iu'à la mort du pape. Pie VI
succéda à Clément XIV; il aimait et estimait
les Jésuites, et pourtant il ne rendit point la
liberté à Uicci, qui mourni dans sa prison, le
2'i novembre 1775 , dans les sentiments de
piété et de résignation dont il n'avait jamais
cessé de donner l'exemple. Tout l'intérêt de
Pie VI se borna donc à accorder des funé-
railles honorables au malheureux général 1
Pourquoi ?
Quand la Compagnie de Jésus fut éteinte,
elle comptait, dit-on, dans VAssislanc' d' Ita-
lie : la province Romaine ayant 848 religieux,
dont 425 prêtres ; la province de Sicile, où il
y avait 775 personnes, dont 317 étaient prê-
tres ; la province de Napics, où sur 6C7 reli-
gieux, 296 étaient prêtres; la province de
Milan, ajant (J25 suj< ts, dont 29ri prêtres ; la
province de Venise , riche de 707 religieux ,
dont 357 prêtres. Dans V Assistance de Por-
iH'/al : la pruvince de Portugal ayant 8C1 Jé-
suites, dont 38'i- prêtres ; la i rovincede Goa,
150 Jésuites, 103 prêtres ; la provincede Ma-
labar, kl relig eux. dont 4(3 prêtres ; la pro-
vince du Japon, 57 religieux , dont 41 prê-
tres ; la vice-province de la (^hine , avec 54
Jésuiies, dont 37 prêtres ; la province du
I5ré^il,445 Jésuites, dont 228 prêtres; la vice-
province du Maragnon, 145 Jésuites, dont 88
prêtres. On a remarque que, lors de l'expul-
siiin, en 1759, l'Assistance ilu Portugal comp-
tait précisément 1759 Jésuites, autant qu'on
comptait d'années depuis la naissance du
Sauveur. Dans V Assistance d'Espai/ne : la
provincede Tolède, où il y avait 059 Jrsuites.
dont 288 prêtres ; la province de C istille, 718
Jésuites, dont 360 prêtres ; la province d'Ara-
gon, 604 Jésuites , dont 272 piètres ; la pro-
vince d'Andalousie , 062 religieux , dont 308
prêtres ; la province de Sardaigne, 300 reli-
JES
670
gieux, dont 114 prêtres ; la province du Pé-
rou, 526 religieux, dont 306 prêtres ; la pro-
vince du Chili, 242 religieux, dont 130 prê-
tres; la province du Nouveau-Royiume, 193
Jésuites, dont 100 prêtres ; la province du
Mexique, 572 Jésuites, dont 330 prêtres ; la
province des Philippines, 12G Jésuites, 97
prêtres ; la province du Paraguay, où il y
avait 303 religieux, dont 20S prêtres ; la pro-
vince de (luito , 209 Jésuites, dont 107 pré-
Ires. Dans l'Assistance de France, on voyait
la province de France , où il y avait 918 Jé-
suites, dont 495 prêtres ; la province de Bor-
deaux, 437 religii'ux. dont 240 prêtres; la
province de Lyon, 773 Jésuites, dont 405
prêtres; la province de Toulouse , 655 Jé-
suites , dont 3'r4 prêtres ; la province de
Champagne, 594 Jésuites, dont 292 prêtres ;
la province d'Outre-Mer (ou vice-province),
en l'Amérique méridionale, 54 Jésuites ; en
l'Amérique septentrionale, 50 Jésuites. Dans
li'S missions d'Orient : 25 Jésuites en Grèce,
17 en Syrie, 7 en Perse ; aux Indes orien-
tales, 23 Jésuites. Dans l'Assistance d'Alle-
magne, on voyait la province d'Allemagne
supérieure, où il y avait lOtiO religieux, dont
496 prêtres ; la province du Bas-Hhin, 772
Jésuites, dont '^98 prêtres ; la province du
Haut-Rhin, 497 Jésuites, dont 240 prêtres ; la
province <rAulriche, 1772 Jésuites, dont 751
pîôlres ; la provincede Bohême, dont nous
ignorons le chilTro ; la province de 1^ Bcl-
giniie flamande, 342 Jésuiies , dont 232 pré-
Ires ; la (irovince de Belgique Walonne, 471
Jésuites, <lont 260 prêtres ; la province de
Pologne, 1050 Jésuites, dont 55? prêtres ; la
province de Liihuanie, 1047 religieux, dont
475 prêtres ; la province d'Angleterre (dont
plusieurs maisons en France, en Flandre, en
.\uiérique) , 299 religieux, dont 208 prêtres.
Il faut plutôt reporter cet étal à l'époque des
diverses suppressions locales, où l'abolition
de tant de noviciats, les suites de tant de per-
sécutions, avaient bien décimé le chiffre que
nous venons de donner d'après Dénisarl, qui
résume ainsi son énuméralion : 39 provinces;
22,589 Jésuites, dont 11,293 prêtres. Nous
croyons que l'Assistance d'Allemagne avait
é é, sur la fin, subdivisée, et qu'on avait for-
mé une province de Pologne.
Par une disposition toute particulière de
la Providence, deux souverains séparés de
riiglise, le roi de Prusse et l'impératrice de
Russie, voulurent garder les Jésuites dan»
leurs Klats, et préparèrent ainsi les voies à
l'exécution des desseins de Dieu sur le réta-
blissement de la Compagnie de Jésus. Des
autorisations sei rètes furent données; les
Jésuites trouvèrent moyen d'accorder les de-
voirs de l'obéissance aux décisions du pape
et les désirs de Frederick et de Catherine , si
conformes aux leurs! Dans l'article consacré
à l'histoire de la Compagnie de Jésus dans
notre volume supplémentaire, nous aurons à
la montrer cachée , mais agissante et fruc-
tueuse dans les contrées du Nord, passant
en Sicile, désirée à Parme (car un mouve-
ment favorable aux Jésuites s'était établi,
uiêiue dans l'esprit du peuple, jusqu'en
c-i
PlCTIONNAinr, DKS ORDRRS RF.I.IGIKUX.
072
Fr.incp), et onfiii routine, par ri'";;Iise déso-
lée, aiii (Icmniulcs des princos délriniipés et
ù loul l'unives, en 181t. Voyez JfcsiiTKS au
Siippli'iiiciil.
IJistnire religieuse, politique et litlérnne
de ta Compagnie de Jc'us. o vol., parj. Ci''-
tin'ai-Johj. A'o/c.< fournies parle It. /'. De
Moiilezon, S.J. Pietioniinire de Droit cano-
nique, por Durand de jMaillaue, Inm. III.
Jlifloire des Ordres religieux , par M. Hen-
rion, tom. II. liiogrnphie universelle, ar-
moires ecclesiasliqucs , par l'icol. tXoles le-
cueillics pjissiin. B-d-e.
JÉSUITESSES (Religikuses).
Des Jésuilesses, et de leur suppression.
Pendant le séjour quesiiiit Ignace fità Har-
celone, il fui enircItMiu par les aun1(^^cs d'une
dame Irés-vcrluiuse iiui se nomuiail Isaix-ilc
Rozel, et «jui lui en procurait aussi d'aulres.
Celte dame ayant appris, (luclqiies annoes
après, que le saint n\n\l fondL' sa f.ornpa-
gnie, elle alla le trouver à Komc l'an loVo, cl,
étant pour lors veuve, elle lornia le dessein
de se retirer du monde et de vivre selon lis
conseils évanf^cliques sous l'obéissance de la
Cotnpagnie. Kllc se joignit à deux dames ro-
maines et obtint du [lape l'aul III la peruiis-
siou d'embrasser ce gi-nre di' vie. (Juoiquc
saint Ignace vil bien que ces sortes de direc-
tions ne convenaient guère à son institut, la
reconnaissance iiu'il avait pour si bienfai-
trice et le petit nombre de ces nouielles reli-
gieuses le delerminèrenl néanmoins à pren-
dre soin d'elles ; mais il s'en re|ientit bientôt,
avouant que le gouvernement de (rois dévo-
les lui doiin.iit plus de peine que toute la
Compagnie; car ce n'elail jamais fait avec
elles, et il (allait è toute lieure résoudre
leurs questions, guérir leurs scrupules,
écouter leurs plaintes et même terminer
leurs différends. C'est ce qui l'obligea de re-
présenter au pape combien une telle charge
nuirait à la Compagnie et de <)uelle imiior-
tance il était que Sa Sainteté l'en délivrât, ju-
geant bien que si cette petite communauté
de lilles, qui n'était ((ue de trois per>onnes,
devenait plus nombreuse dans la suiti- et se
multipliait dans les autres villes, il n'eu se-
rait que plus embarrassé. Le pape lui ;m--
corda sa demande cl délivra en 15't7 la Cmn-
pagnio du gouvernement des nHigieuses.
Aiusi celle communauté, (|Ui vuul.iil uvre
selon les lois prescrites par saint Ignace, fit
delruilc en peu de temps.
Mais, sous le pontilical d'Urbain \111 ou
sur la lin de celui de (îrégoire X\ , son pré-
décesseur, certaines femmes ou lilles en quel-
ques endroits d'Italie et en d'autres provin-
ces prirent Ir nom lif Jt'suilesses, et s'assem-
blcrciit en communauté , sous prétexte de
mener uni; \ii' religieuse , (|ti()iqii'elles n'eu
eussent pas eu la permission do s.iinl-siége.
Mlles prirent on lialiil particulier, avaient
desédiliies accominouésen forme de collèges
el des maisons de probalioii, et élurent une
supérieure géiierab- à qui elles donnaient le
ituiii de préposée, tilles faisaient entre ses
tna'ns les vœux de pauvreté, de chasteté el
d'obei<sance à la manière des vœux solen-
nels de religion, sans êlrc astreintes à au-
cune loi de la clôture. Klles allaient de côté
el d'autre sous prétexte de procurer le salut
des âmes et de faire plusieurs autres choses
qui ne cunvenaiiMil point â la faiblesse de
leur sexe et de leur esprit, enlreprenanl dos
choses que des hommes d'une grande expé-
rience, savants dans les lettres saintes et re-
commandables par l'innocence de leur vie,
n'enlrepiennenl ([ue diflicilcmenl et avec
beaueou|i de circonspcclion. Outre la géné-
rale elles avaient encore des visitalrices, des
re*trices et d'autres noms de dignités selon
les diffèrenls oflices ((u'ellcs exerçaient.
Urbain "NIII les fit avertir par son nonce
dans la basse .MIeinagne cl par qu<-li)ues
évéquos des autres lieux où elles s'èiaienl
établies, de se désister de leur enlreprise.
Mais ces Jésuilesses n'ayant eu aucun égard
<à toutes les remontrances qu'on leur lil,el
ayanl même osé enseigner des choses con-
traires à la saine doctrine, le pape, par un
bref du 21 mai 1C31, supprima celle préten-
due congrégation, priva de leurs offices la gé-
nérale, les visitalrices, les reclrices el les au-
tres officières, les abs(>ut de tous vœux el pro-
messes auxquels les femmes el filles decetlo
congrégation s'étaient engagées, leur or-
donna en verlu de sainte obédience el sous
peine d'excommunication encourue ipso fac-
to, de sortir incessanimcnt des collèges et
des maisons où elles avaient demeuré jus-
(ju'alors, el de vivre séparément les unes
des autres. Il leur commanda aussi de ne
s'assembler jamais pour délibérer ensemble
sur quoi que ce soit, cl de i)uitter leur babil
de Jésuitesses sans pouvoir le re|)rendrc cl
encore moins de le donner ni admeltro au-
cune femme et fille à le recevoir.
Ce pontife déclara encore tous les vieux
qu'elles avaient faits nuls, comme si elles ne
les avaient jamais f.iits, permit à celles qui
eu avaient fait de vivre dans lo monde, sé-
parément toutefois des autres de la même
congrégation, sous l'obéissance de leur évè-
«lue, avec l'usufruit mais non pas li' domaine
de leurs biens, leur accordant la permission
d'en pouvoir disposer pendant leur vie el à
leur mort en a-nvres pieuses, ordonnant que
ces biens retourneraient à leur» parents ou à
ceux qui devaient naturellement leur succé-
der, si elles n'en avaient jias disposé par testa-
ment. 11 leur permit aussi de se maiier en
cas qu'elles le voulussent; mais il les ex-
horta d'entrer plutôt dans quelque ordre ap-
prouvé et de s'y consacrer à Dieu par des
vd'iix solennels, se ressouvenant toujours du
désir sinière ()u'ellcs avaient eu de se faire
reli^ieu-es.
Je m'étonne que M. Uichard Simon dans
sa Iiibliolliè(|ue criliquc- [Inui. I, patj. 2!)S)
ail avancé que c'est inutilement que l'on
cherche dans le bnllaire romain la suppres-
sion (le cet or. Ire, et (|u'il dise qu'on ne peut
pas l'y trouver, parce que le pape rrbain \ III
n'a point donné de bulle sur ce sujet, mais un
simple bref. Scrail-il possible que ce savant
r.73
jr.s
JRS
C74
criliquc n'eût jamais lu le bullairc romain,
cl pouvait-il ignorer que la plus nr.inile par-
tie tl<'S constitutions apostoliques qu'il con-
tient ne sont point (les bulles, m.iis des brefs?
Quiconque voudra se donner la peine de lire
le bulluire, il y trouvera certainement la
suppression de ces Jésuilesses au tome qua-
trième de l'édition de Rome de l'cin 11)38,
pag. 115.
JÉSUS (Chevaliers de la société de). Voij.
lÎETHI.ÉEM.
JÉSUS (Clercs réguliers de la compagnik
de). Voy. JÉSUITES.
JÉSUS (Clercs Réguliehs do Bon-).
Des clercs réguliers du Bon- Jésus, arec Ivs
vies des BB. Marguerite et Genlille de
Bavcnne , leurs fondatrices, et du V. P.
dom Jérôme Maluselli de Mensa , aussi
fondateur et premier religieux du mêine
ordre.
Nous avons fait voir, en parlant des clercs
réguliers Bariiabites , ([ue c'est à tort que
quelques-uns leur ont donné pour fondateur
dom Sérapliim de Ferme, chanoine régulier
de la congrégation de Lairan. Voici encore
un ordre sous le nom du Bon-Jésus, dont on
il prétendu qu'il était aussi fondateur, quoi-
que cet honneur soit allribué aux BIJ. Mar-
guerite el Gentille de Uavenne. et au P. Jé-
rôme Maluselli. Si c'est à cause que le P. Sé-
raphim a dressé les règles de l'ordre du Bon-
Jésus que l'on a cru qu'il en était fondateur,
on s'est trompé, puisque, parle titre de ces
règles, il reconnaît lui-même qu'il n'a fait
que rédiger par écrit ce que Marguerite de
Ravcnne avait prescrit de vive voix à ceux
qui avaient embrassé l'ordre du Bon-Jésus,
qu'e.le avait insiilué : Regulœ aliijuul e du-
cumenlis Margaritœ Ravennatis viryinis, qui-
bus illa ordinna suum tilulo Boni Jesu in-
signitum imtiluit. Et à la un de ces règles il
dit encore qu'il ne les a recueillies que sur
les paroles de cette vierge : lias régulas e
terbis (livinœ hujtis virginis collegi. De
croire aussi que ces règles n'eussent été
dressées par te P. Séraphim que pour les
seuls prêtres de la congrégation du Bon-Jé-
sus, Il n'y a nulle apparence, puisque par le
quinzième arliïle il est marque que ceux de
cet ordre se doivent contenter de leur état ;
(|ue, s'ils sont mariés, ils doivent observer
ce qui convient à ce genre de vie, et que,
s'ils sont prêtres, ils ne doivent désirer au-
cune digniié ni aucun bénéfice, mais se con-
tenter seulement de leurs revenus, sans
chercher les moyens de les augmenter. Le
seizième article ne convient nullement aux
prêtres, car il porte que les filles seront hum-
bles et chastes, non-seulement de corps, mais
eucore d'esprit ; que les veuves demeureront
dans l'état de viduité, et que les femmes ma-
riées conserveront la paix dans leurs famil-
les et obéiront à leurs maris.
Il est vrai aussi que Marguerite de Ra-
venne u"a pas directement institué la con-
grégation desClercs Réguliers du Bon -Jésus,
nui n'a été établie que vingt ans après sa mort ;
mais il est au moins certain qu'elle a institué
une société séculière sous le nom du Bon-
Jésus, et que quelques prêtres qui en étaient
embrassèrent la vie commune l'an 1538,
sous la conduite du V. P. Jérôme Maluselli,
qui dressa des constitutions pour ces prêtres,
tirées des règles de la II. Marguerite, dont il
retrancha ce qui n'était propre que pour
ceux qui vivaient dans le siècle. C'est de
cette manière qu'elle a été la fondatrice des
clercs réguliers du Bon-Jésus; ce qui sem-
ble être conlirmé par le même Séraphim de
Ferme, qui, en parlant de cette sainte vierge
et de la B. Gentille, dont il a écrit le> vies,
dit que le pape Paul 111 nomma des commis-
saires l'an 1537 pour examiner les miracles
qui se faisaient à leurs tombeaux , et qu'il
approuva la société que la B. Marguerite
avait instituée. Jérôme de Rubéis, dans son
Histoire de Ravenne, parle aussi des infor-
mations qui furent faites par ordre de ce
pape, et ajoute qu il approuva aussi la con-
giégatlon des Prêtres du Bon Jésus, que le
P. Seraph m de Ferme a sans doute confon-
due avec cette société séculière. Mais, comme
te n'est pas seulement la B. Marguerite de
Ravenne que les Clercs Réguliers du Bon-
Jésus ont reconnue pour fondatrice, et qu'ils
ont aussi regardé eu la même qualité la B.
Gentille de Ravenne et le P. Jérôme Malu-
selli , dont le P. Simon Marini , général de
cet ordre , donna pour cette raison les vies
en 1017, c'est ce qui fait que nous en donne-
rons aussi un abrégé.
Wari;uerite, à qui Ferrarius, dans son Ca-
talogue des saints d'Italie, donne le nom de
liicntieureuse, fut surnommée de Russi à
cause du lieu de sa naissance, qui est un pe-
tit village entre Faënza et Ravenne, et fut
encore appelée de Uavenne à cause du long
séjour qu'elle fil en ceile ville, et qu'elle y
mourut, lille perdit la vue à l'âge de trois
mois, Dieu ayant permis que celle qui n'é-
tait née que pour contempler les choses cé-
lestes fût privée de la vue des choses terres-
tres. A peine eut-elle atteint l'âge de 5 ans,
que, voulant de bonne heure châtier son
corps, elle s'accoutuma à marcher nu pieds,
ce qu'elle a toujours continué de faire dans
quelque saison fâcheuse que ce fût et quel-
que rigoureux que fût le froid. A sept ans
elle augmenta sa vie pénitente par des jeû-
nes el des abstinences; elle ne prenait son
repos que sur la terre nue ou quelquefois
sur un peu de sarment; et, voulant imiter
la pauvreté de celui qu'elle avait choisi pour
époux, elle renonça à tout ce qu'elle pou-
vait posséder et prétendre , et ne reçut que
sous le titre d'aumône tout ce qui était ué-
cessaire pour l'entretien de la vie.
Après avoir demeuré quelques années à
la campagne, elle vint à Ravinne, où Dieu
voulant éprouver sa patience comme il avait
fait celle du saint homme Job, il l'afiligea
l'espace de quatorze ans par diverses mala-
dies, pendani lesquels elle ne reçut aucune
consolation des hommes ; et , comme les
amis de Job , lé voyant couvert d'ulcères el
couché sur un fumier, venaient insulter à
6TS
DX-TIONNAIRE OF? OHOUFS nF,l,'GlFA'X.
67G
giS maux, II yeul aussi un prand nombre de
porsoniies (jui ne ven.iieiil visiter celle sainte
fille dans ses maladies que pour s'en mo-
quer el lui reiirocher que >cs maus ne lui
étaient arrives que pour ses péchés, el pane
que sous une fausse apparence de saii Iclé
elle lioinp:iil les peupU'S , n'étant dans le
/ond qu'une hypocrite ; mais, au milieu de
ces perséculioiis, son esprit ne perdit point
le calme et la tranquillné : plus on l'olTen-
sait, plus elle téiiioi(;nait de joie, croyant
qu'on la trailail encore doucement el qu'elle
méritait de plus grands • pprobres. Cependant
Dieu, qui avait permis qu'elle fùl ainsi mé-
prisée, permit aus.si que ceux mêmes qui en
étaient les auteurs fussent les premiers à pu-
blier ses louanges. Les discours qu'elle leur
tenait de temps en temps étaient si vifs el si
louchants, qu ils rentrèrent en eus-mêmcs
et se convertirent entièrement, cl il y eut
plus de trois cents personnes de l'un el de
l'autre sexe qui, ilanl persuadées de la sain-
teté de SI vie, la voulurent avoir pour mai-
tresse el pour guide dans les \oes de leur
salut. C'est ce qui lui donna occasion d'ela-
bl.r la société du l$on-Jésus , à laquelle elle
prescrivit des règlements qu'elle ne put ré-
diger par écrit , ayant clé piivéf de la vue
des l'âye de Irois mois , mais qui le furent,
comme nous avuiis dit, par le P. dom Séra-
phin! de Ferme, ihanoine régulier de la
congrégation de Lutian.
Ils sont compris dans vingt-qualie arti-
cles qui font connaître quel éUiil l'esprit de
celle bicnheuieuse, puisque les enseigne-
ments qu'elle y donne à ses disciples ci à
()uniellc les oblige consistent principalement
à avoir sur toutes choses un grand an.our
pour Dieu ; qu elle leur recommande la si.ii-
plicité de cœur, I humilité, le mépris de soi-
même; qu'elle les exhorte à conserver la
paix, l'union, la concorde eilre eux, à fuir
les jugements téméraires, à fréquenter snu-
veni les sacrements el à châtier leur corps
par les jeûnes et les abstinences qui sont
mari|ués dans le vlngl-quatrième article :
saxnr, de jeûner, outre les jouis pre>ciits cl
ordonnés par l'I'.glise, pendant tout l'avent,
tous les mercredis, vendredis el samedis de
l'année, el au pain et à l'eau les veilles des
fêles lie l'Anuoni ialion de la sainte N'ierge el
le vendredi sainl (IJ. lille survécut encore
quelques annéi s à lelalilissemenl de celte
société, et mourut le 23 janvier 1505, étant
âgée de OU ans.
lintre les disciples de celle sainte vierge,
il y eut une veuve nommée Genlille, qui a
acquis aussi, par la sainteté de sa vie, le li-
tre de bienheureuse, lille na()uil à Ua\eiinc
l'an l'i"!. Son (lère, qui était un orlévrc, se
nommait Thomas l'iiusti, ou Juste, el éla t
véiilablemeiit un homme juste et craignant
Dieu , aussi bien (jue sa femme l)ominii)ue.
Ils eurent un grand soin de l'eilucalioii de
leur iille lientilie j et elle profil i si bien des
bonnes instructions qu'ils lui donnèrenl
que, dès sa plut tendre jeuilcs^e, elle lit pa-
raître de grandes mnrques do sainteté. C'est
ce qui l'ai ira de bonne heure dans la so-
ciété de la bienheureuse Marguerite de Ka-
venne, dont elle fut une des (premières disci-
ples, elelle fil sous sa conduite de si grands
progrès d.ins la veriu, qu'après la mort de
cette sainte (ille, elle devint la maîtresse des
autres.
Ses parents l'aynnt eng-'gée dans le ma-
riage , elle épousa un N'énilien nommé Jac-
ques Piaiiella, tailleur d'habils, homme cru -1
el farouche, qui, non-seuloriienl la traitait
comme une esclave, la frappant souvent et
la mallraitant rruelleinent, mais la dénonça
même un jour à l'archevêque de Havenne
comme une sorcière et une magicienne. Son
innocence ayant été reconnue el sou mari
ne pouvant plus supporliT l'éclat de sa sain-
teté, il l'abandunnadans un temps de famine,
ne lui laissant rien pour sa sulisistance;
mais celte sainte femme, ayant mis toute sa
confiance en la divine pro\idence, en res-
sentit souvent les effets merveilleux. Elle
demeura plusieurs années ainsi aliandonnéc
de son mari, qui retourna enfin à sa maison
lont changé, et qui , d'homme cruel el bar-
bare qu'il était auparavant , devint dciux
comme un agneau el n'eut plus que de l'es-
time el de la vénération pour sa femme,
avec laquelle il vécul encore queli]ue temps
et mourut ensuite de la mort des justes,
ayant réj are par les bons exemples (jn'il
donna les scandales qu'il avait causés par
SCS brutalités.
C'est aux prières de cette sainte femma
que l'on peut attribuer la conversion de son
mari ; mais ce ne fut pas la seule qu'elle pro-
cura. 11 y avait dans Havenne un jeune
homme âgé de \ingl-cinq ans qui, après la
mort de ses | ère et mère, s'elail abandonne
à toutes sortes de licences cl était le scandale
de la \ille : il y avait même plusieurs années
qu'il n'avait approché des saciemenis; ma's
ayant été sollicilé par sa sœur d'aller voir
la bienheureuse Gentille, il lui si touché par
ses discours el par les avis qu'elle lui donna,
qu'il se convertit enlièiemeni. ("e fut le V.
I'. Jérôme Maluselli, principal fondateur des
Prêtres de l'ordre du Iton-Jésus, natif de
Mensa au territoire de Céséna, qui, après
avoir été ainsi converti parla bienheureuse
Gentille, devint l'un de ses disciples el mena
dans la suiie une vie si sainte el si exem-
plaire, (|u'ayant pris les ordres sacrés el
étant parvenu au sacerdoce, celte sainte
veuve le prit pour son directeur, t^omme il
lui était reste de son mariage un fils nommé
l.eon, qui était aussi prêtre et qui demeurait
chez elle iivec une de ses cousines, elle en-
gagea Jérôme Maluselli à venir aussi de-
meurer .ivcc eux, et ils praliiiuèrenl ensem-
ble les règles qui avaient été laissées par la
bienheureuse Marguerite, obser>ant exacte-
ment les jeûnes, les absiinenccs el les autres
exercices de pieté qu'elle avait prescrits a
ses disciples.
Le démon, voyant le progrès que celle
(1) ly., a briiidii v<>l.,n' 1<<Â
07?
JES
JKS
G78
saillie comij.'igiiic f.iisail dans la verlu, et
combioii leur exemple lui enlevait tous les
jours de pécheurs qui se converlissaient à
Dieu, suscila des persoiines dans la ville qui
les accusèrent auprès de l'archevêque de
mener une vie pleine de superstitions sous
une fausse apparence de sainteté. Mais la
vérité ayant été reconnue, et le démon
trompé dans ses artifices, il leur suscita une
nouvele persécution et réussit enfin à les
(aire chasser de Ravenne. La peste ayant af-
fligé cette ville l'an 1.312, la bienheureuse
(lentille, Léon son fils, sa parente et Mulu-
sclli, furent envoyés hors di; la ville, quoi-
qu'ils n'eussent aucun mal et qu'ils eussent
été préservés de la contagion, el ils ne retour-
nèrent à Ravenne que lorsque cette ville fut
enlièremeiit délivrée de ce (léau. La sainteté
de la bienheureuse Gentille augmeniait tous
les jours, et l'estime que l'on en faisait était si
grande, que le pape lui permit de faire célébrer
la messe dans sa chambre, ne pouvant aller
l'entendre à l'église à cause de ses iufirmiiés
continuelles. Llle perdit son tils l'an 1528,
mais Jérôme Malusclii lui tint lieu de fils, et
clic le ûl même héritier de ses biens à sa
mon, qui arri\a l'an 1530, le 28 janvier.
lîllo lui laissa entre autres choses une mai-
son qu'elle lui ordonna de changer en une
église, l'assurant que U eu susciierait plu-
sieurs personnes pieuses qui par leurs au-
mônes contribueriiieiit à cet ouvrage.
Jéi'ôme Maluselli exécuta la même année
les dernières volontés de la bienheureuse
Gentille, et, avec la permission de l'arche-
vêque de Ravenne Pierre Ferrelli, il jeta les
fondements de cette église le 23 seplembie
1530, quoiqu'il n'eût en main qu'une somme
fort médiocre; mais ce que Gentille avait
prédit arriva, les aumônes de ceux qui con-
tribuèrent à cet édifice se trouvèrent sulfi-
saiiles pour le conduire à sa perleclion, et il
fut consacré l'an 1531, le premierjour tl'aoùt,
par le même archevêque.
Mais une nouvelle persécution s'i leva
aussitôt contre le saint fondateur : quelques
prêtres, ayant conçu de la jalousie contre
lui, cherchèrent les moyens de lui ôter celte
église. 11 y en eut quelques-uns qui, pour
soulever le peuple contre lui, prêchèrent
publiquement que c'était un hérétique, un
trompeur et un superstitieux, et l'on voyait
déjà accourir le peuple pour raser celle
église, mais il ne s'en trouva aucun assez
hardi pour l'entreprendre; et le pape Clé-
ment VII, en ayant eu a»is, envoya des
commissaires à Ravenne pour prendre con-
naissance de celle aiVairc, qui fui décidée à
l'avantage de Maluselli et à la conlusion de
ses ennemis.
Ce saint fondateur, se voyant paisible
dans la jouissance de son église, dressa les
règlements de la congrégation de prêlres
qu'il projetait d'établir, et il les tira, comme
nous avons dit, de ceux qui avaient été dic-
tés par la bienheureuse Alarguerite, dont il
retrancha ce qui n'était propre que pour
les personnes qui vivaient dans le monde. Ce
lut dans ce même le.nps ijue le duc de Man-
toue Frédéric de Gonz.igue II et la duchesse
Marguerite Paléologue, son épouse, qui
avaient beaucoup de dévoiion pour les Rft.
Marguerite ei Geniille, dont iis avaient fait
écrire les vies par dom Séraphim de Ferme,
demandèrent des commissaires au pape
Paul III pour inform r des miracles qui se
faisaient à leurs tombeaux, alin de travail-
ler à leur canonisation. Le pape accorda leur
demande et envoya commission au gouver-
neur de Ravenne, l'an 1537, pour faire ces
inlormations , et l'année suivante 1538 il ap-
prouva aussi, à la prière du même duc de
Manloue, les règles qui av. lient elé dressées
par le P. Jérôme Maluselli, auquel il permit
(le donner l'habit de son ordre à ceux qui se
présenteraient pour le recevoir. Les premiers
(jui le reçurent furent dom Simon Crespoli
de Ravenne, dom Philippe Solavolo, et dom
Zacharie Perdurcini, qui avait été l'un des
disciples de la bienheureuse Gentille. Malu-
selli fui le premier supérieur de cet ordre,
qu il gouverna jusqu'en l'an 1541, qu'il
mourut le 20 août.
Le nombre des Prêtres du Bon-Jésus, qui
s'étaitdéjà .ugmenlédeson vivant, augmenl.i
encore après sa mort, el les princes de l,i
maison de Gonzague continuant à proléger
cet ordre à cause des iilJ. Marguerite et Gen-
tille, pour les(|uelles ils con^ervèrent tou-
jours beaucoup de vénération, Guillaume,
duc de Mantoue, demanda au pape Jules 111
la confirmation de cet ordre, ce que ce pon-
tife accorda l'an 15ol. Il fut derechef ap-
prouvé par le pape Paul IV, qui permit à ces
Prêtres du Ron-Jésus de faire des vœux so-
lennels. Cet ordre ne Dtpas de grands progrès,
et il fut sujiprimé pur le pape Innocent X l'an
1G51. L'on prétend qu'il n'y avait pas pour
lors plus de dix religieux de cet ordre. Mau-
rolic dit qu'outre leur maison de Ravenne,
ils en avaient encore une à Rome et une au-
tre en Toscane.
Ils suivaient la règle de saint Augustin
avec les règlements qui avaient été dressés
par le fondateur. Us se levaient à minuit
pour dire matines, officiaient selon l'usage
de l'LgIise romaine. Ils étaient assidus au
conf(Ssionnal, assistaient les malades à la
moit, et s'adonnaient à la prédication el aux
autres exercices qui concernent le salut du
prochain. Outre l'avent ( t les jeûnes ordon-
nés par l'Eglise, iis jeûnaient encore toutes
les semaines le mercredi, le vendredi el le
samedi et plusieurs autres jours ordonnés
par leur règle. G'esl ainsi que le P. Simon
iMarini qui a été général de cet ordre, décrit
les observances (lui y éla:enl en pratique, et
il doit être plutôt cru que IVIorigia, qui dit
qu'ils ne confessaient el ne prêchaient point.
Ce qu'il ajoute encore, (ju'ils ne possédaient
aucune chose, n'est pas conforme à ce que
dii aussi le P. Marini, que le duc de Man-
. loue leur donna un palais dans Ravenne;
que Julie Sfondrale leur donna aussi des
maisons, des teires et des rentes ; et qu'An-
gèle Louatelli lut leur principale bienfaitrice,
par les biens considérables qu'elle leur
donna. Quant à leur habjllcmcnt, il était »&-
67?
se» semblable à celui des eoclesi.istiqaos, et
nu lieu tie boniicl carré, ils en porlaiciil un
<iui avait une forme ronlc (I): tous les trois
ans ils linaicnl liur chapitre, ilans lequel
ils élisaionl leur supérieur ;;cnéral.
Aucusiin H.irbo-a parlant de ce< Prêtres
(lu r.oii-Jesus, leur (Idimio pour fo:iil.ilriie la
t)ienlieureuse Marj^uenle <le llavenne: mais
iipe lorsqu'il dit ijuc les premiers
îiil ses rèiî es l'an 150+ ou 1.KI8, et
les' donnèrent aux autres, furent Léon
il se trom
qui recure
i|Ui
cl Jérôme; car elle ne pouvait pas avoir
donné ses rèiïlcs en loOV à Léon qui n'eiail
pas encore prêtre, pui>que sa mère Gentille
n'avait pas pour lors plus de irente-irois ans;
et Marguerite ne pouvait pis non plus avoir
donné ses rèul<s à Jérôme eu 1508, puis-
qu'elle m lurut en 1505.
Scbooiiebeli parlant aussi de ces Prêtres,
dit que ce fut le P. Séraphim de Ferme qui
les fonda environ l'an l.'3itj ; nous croirions
volontiers que c'est une faute d'impression,
s'il ne l'avait ropite de .Maurolic où elle se
trouve aussi: ainsi nous excusons Alaurolir,
mais Sehoonebek ne peut être excusé, et il
devait prendre garde que c'était une faute
d'impression qui s'était sans doute glissci;
dans Maurolic, puisque dom Séraphim de
Ferme vivait en 15:20, et non pas en 1326.
Lorsqu'il donne a ces mêmes Prêtres la bien-
heureuse Marguerite pour fondatrice l'an
1500 il devait faire attention à sa mort qui
arriva l'an 1505, et elle n'a point fondé de
religieuses comme il prétend. (Jet auteur dit
néanmoins dans la piéfacc de sa dernière
édition que l'ou y a reformé [ilusieurs dates
qui n'étaient pas d.ins l'ordre et qu'on les
a corrigées; c'est de quoi on ne s'aperçoit
pas beaucoup, et on n sans doute corrigé des
laules par d'autres fautes (2J.
l{olland.,.4f^.S'S.,er -iae/ iSJon. Simon Ma-
rini. lit. dell. lUi Manjaiil. et (ienlil., et
det P. (iieroniino fundalori délia relig. de Pu-
dri del iSuon Giisu. }iuo\>. Morand., tom. VU
Add. ndSurium 23 Van. Jeronim. de Uubéis,
Jlisl.liavenn.lib.w. Silvettr. M.iurol., Mar.
océan, di lut t. yli Kelig., lib. v, pnq. 398.
Barl)., Ue Jur. ec<tes. i.inibur., JJe Jur. nbb.
Monnia, Ihst.dcll. /{(/i(y.Scht>onebik, Hisl.
de» Urd. relig. l'iiilipp. lionanni, Caliilog.
Ord. ri'Uijios., part, m ; ut Heruiant, llis-
toire des Ordres relig., tom il.
JKSLS-CHKlSr ET Dli S.\ PASSION. Voy.
Du \GON nENVKIlSK.
JKSUS i:r MAIUE (CuEVALiEBS de). Voy.
UkIIII I EM.
JKSIS Er MAUIE (C0NGBÉG*1I0N l>K .
Voy. EiDisTEs.
JOSEPH (CoNfiRKGATios DE Saint-) à Homc.
Voy. Clou (SACnÉ-).
JOSEPH { Conoukc. vTioN ors missionnaibks
DI-; Saint-).
Di$ prélrcê mitsionnaires de la congrégation
DicTioN.vAir.E DES ouDRF.s liEi-ir.iF.ux. e«n
de Soinl-Jdseph avec la vie de M. Crétenet,
leur fondateur.
Il n'est pas extraordinaire que Dieu, qui
dit dans ses saintes Ecritures qu'il penira
la sagesse des saines et qu'il réprouvera la
prudence des prudents, se sirve «luelqucfois
de ce ((u'il y a de plus faible pour enseigner
ses voies à ceux qui se croient les plus spi-
rituels et les plus éclairés. Mais que sa di-
vine majesté confie à des laïques le soin de
conduire dans le chemin de la pcrfeclion
les ministres de ses autels, c'est ce qui serait
sans exemple si elle ne s'était servie dans le
dt'rnier siècle de M. Crétenet, laïque et chi-
rurgien de profession, pour établir une con-
grégation de missioiin.iires cl diriger des
préires dans tout ce que la vie spirituelle a
de plus saint et de plus relevé. Ce serviteur
de hieu naiiuit au bourg de Cliamlitc, dans
le comté de Bourgogne, l'an 1003, et reçut
le nom de Jacques sur les fonts du bapléme.
Ses parents étaient d'une londition niéJiocre,
mais recommandables par leur vertu. Ils
eurent de leur mariage six garçons et trois
filles. Jacques, de nui nous parlons , était le
sixième et le dernier de ces garçons. Ils né-
gligèrent assez son éducation dans le com-
nieiKemcni, mais , l'ayant reconnu dans la
suite d'un bon naturel et porté à la vertu,
ils prirent le dessein de le faire étudier, dans
la pensée que Dieu le destinait au sacerdoce.
Il apprit d un de ses oncles les rudiments
de la grammaire en très-peu de temps et
avec une lacililé qui fil bien voir qu'il n'au-
rait pas été moins éiiiinenl par sa doctrine
qu'il l'a été par sa pieté , si ses [lareats ne
l'avalent enipêclié de poursuivre ses études
pour substituer un de ses fières en sa place:
ce qni ne réussit pas néanmoins comme ils
s'en élaicnl fiatles, Dieu >oulanl par là don-
ner à connaitre le tort qu'ils avaient de
changer les dispositions de sa di»inc provi-
dence , qui réservait l'auguste dignité du
sacer.loce à c>"lui pour qui elle leur en avait
inspiré la première pensée, et cju elle retira
pour cet effet comme un autre Abraham du
sein lie ses parents et du lieu de sa naissance
pour le conduire jieu à peu à l'exécution de
ses desseins. Il sortit donc de son pays à
I il;;e de quinze ans, sans argent et sans sa-
voir où il irait s'établir, mais avec l'espé-
rance (lue Dieu ne raliandomierait pas. Il
s'arrêta à Laiigres, où il apprit la clnriirgie,
et s'y (omport.i toujours avec tant de sa-
gesse et de piéé, tiuc la sainte Vierge, pour
lai|iielle il avait une singulière dévotion, le
préserva de plusieurs dangers où il se trouva
engage, et pour l'àme cl pour le corps, lanl
dans le temps de son apprentissage que
pendant l.i cour-e qu'il lit après, selon la
coutume de ceux qui veulent se rendre par-
faits dans cette prole.ssioii. Avant aihe»e ses
courses , et élanl arrivé à Lyon, il se trouva
sans argent et s ns emploi; mais Dieu , qui
(I) Voy., A la fin du vol.. n" IGV.
\'i) M. Il>-riii.iii(, ruic de M:iUiil, a ciipic aussi
ScliOoiii'bt'.k ni aiinl ii.iiii l;i Inndiilinii île lei ordip il
Oom Scripliini ilc Kmiic, l'an 152C ; n il parli: de
ers clercs réguliers comme s'ils subsisiaicni eiicor<;,
(|uoiqu'ils .lient clé siippiiiiics par le pape hinuccnt )(
laii ig:>i.
fiSl
]0S
J05
(J8î
veillait sur lui, ne l'aba idonna pas, car,
s'élaiU mis on clieinin pour aller de Lyon à
Grenoble, il rencontra le baron de la Roche,
qui, d'aliord qu'il le vit, se sentit louché de
tant daffection pour lui, qu'ayant su dans
la conversation qu'ils eurent ensemble qu'il
était chirurgien, il lui offrit sa maison et de
l'emploi sur ses terres. M. Crélenet admira
la bonté de Dieu sur lui, et, après l'en avoir
remercié intérieurement, il accepta les offres
de ce seigneur, qui dans la suite fut si satis-
f.iil de ses services , qu'il le mena peu de
lemps ;iprès au château d'Amnistie, qui est
( nlre Nînns et Uzès , où il était envoyé par
le roi pour réprimer les huguenots révolté».
Ce fut là que ladouci-'ur et les autres bonnes
qualités de M. Crélenet le firent aimer de
tous ceux qui le conversaient, 1 1 qu'il acheva
de gagner le cœur de son mailrc, qui le fit
manger à sa table, sans que cela donnât la
moindre jalousie à ses compagnons, parce
qu'ils l'aimaient tous tendrement, et qu'ils
admiraient l'humililé et la charité qu'il avait
pour supporter les faiblesses de son prochain,
l'endaiit quelques années qu'il fut dans ce
château, il traitait les malades du voisinage ;
et, comme il avait pour le moins autant de
soin et d'empressement de la santé de leurs
âmes, il ne les quittait jamais sans leur avoir
parlé de D;eu et tâché de leur insinuer quel-
ques maximes de piété.
Ce zèle si rare dans les jeunes gens de sa
profession, non-seulement lui acquit l'estime
de tous ceux qui avaient quelque disposilion
à la verlu, mais même le fit aimer d'une jeune
fille de la meilleure faniilled'Amnislie.llneîul
pasabsolument inseiisibieaus amiliés (]u'elle
lui témoigna. 11 y répondit, et ils s'ainièrenl
tous deux, mais d'une amilié si réglée, qu'il ne
se ])assa rien ni dans leurs entretiens ni dans
leur fréquenlation qui ne lût de la dernière
retenue, et d'une modestie toute chrétienne,
quoiqu'ils s'aimassent dans le dessein de se
marier ensemble. Mais, comme il n'entre-
prenait r;en sans avoir auparavant recours
à Dieu, il fit dire plusieurs messes afin qu'il
lui fit la grâce de lui déclarer sa sainte vo-
lonté. Ce qui ne fut pas sans effet; car,
priant un jour avec ferveur pour ce sujet, il
entendit intérieurement une voix qui lui dit:
Ce n'est pas ici le lieu où je le veux, je te
montrerai où lu iras pour ma gloire.
C'en fut assez pour obliger ce serviteur
de Dieu à suspendre la poursuite de ce ma-
riage, quelque avantage ([u'il y trouvât, et à
renoncera l'incinatiou qu'il avait pour celte
])ersonne , dont il estimait encore plus la
venu que la beauté cl les autres qualités
naturelles dont elle était douée. Néanmoins,
comme ses amis, qui ne savaient encore rien
de ce qui se passait dans son cœur, avaient
pris jour avec les parents de la fille pour
passer le contrai el convenir du jour du
mariage, il se rendit au châleau d'Amnistie
à l'heure assignée; mais à peine y fut-il en-
tré, que, se sentant plus pressé que jamais
de suivre la voix de Dieu qui l'appelait
ailleurs, il remercia la compagnie de l'Iion-
ueur qu'on voulait lui faire, sous prétexte
Dictionnaire des Ordres religieux.
qu'il avait un frère à Paris, el qu'il serait
bien aise de le consulter sur leltc aflaire
avant que de la conclure. Il demanda ensuite
son congé au baron de la Roche, qui n'ou-
blia rien pour le retenir el ne consentit qu'à
regret à son éloignement.
Il arriva à Lyon l'an 1628, dans le lemps
que Dieu y faisait sen:ir la pesanteur de son
bras par la peste, qui y causait des ravages
si funestes, que celte grande ville, autant
célèbre par son commerce que par le grand
nombre de ses habitants , se vit en peu de
jours changée en un déserl, iant par la fuite
de ceux qui l'abandonnèrent que par la mort
d'un grand nombre de personnes, il ne fui
pas plutôt arrivé dans cette ville , qu'il se
mit chez un maître chirurgien , où le démon
lendit des pièges à sa pureté par le moyen
d'un de ses compagnons, qui lui découvrit
que leur maître entretenait une fille dont il
pourrait aussi jouir quand il voudrait, lui
conseillant de profiler de l'occasion. Mais le
saint jeune homme, s'étanl aperçu de la ma-
lice de l'esprit lent;ileur, sortit de cette mai-
son pour s'exposer au service des pestiférés,
ce qui lui procu;a un établissement de la
manière suivante.
La peste était si enllammée à Lyon, que
presque tous les garçons chirurgiens qui
pansaient les pestiférés étaient morts, et la
plupart des maîtres s'étaient retirés à la
campagne pour se mettre à couvert de ce
fléau terrible. Les magistrats , pour obliger
les garçons chirurgiens qui étaient encore
dans la ville à s'exposer au danger, firent
publier partout que ceux qui serviraient les
pestiférés gagneraient 1. ur maîtrise. M. Cré-
lenet, qui avait quille s^^u maître pour évi-
ter le péL-hé, embrassa le parti que Dieu lui
présentait, el se donna de bon cœur au ser-
vice des pauvres malades abandonnés. Ce
fut au mois d'avril de l'année 1029 qu'il
commença cet exercice charitable. La pre-
mière personne qu'il traita de la pesle fut
une jeune veuve, qu'il servit avec tant d'hon-
nêteté el d'affection, que sa mère la lui pro-
mit en mariagi! s'il pouvait la guérir el se
faire recevoir maître chirurgien. Dieu, qui
lui avait destiné celle veuve, bénit tellement
le soin qu'il prit d'elle, qu'ayant été guérie
en peu de lemps, on ne pensait plus <iu'à
l'exécution de la promesse qu'on lui avait
faite. Lorsque la peste cessa, les maîtres
chirurgiens revinrent de la campagne , et
s'opposèrent à rentérinemcnt des lettres que
leurs garçons avaient obtenues des magis-
trats : ce qui étant un obstacle au projet du
mariage de M. Crélenet, lui lu. un nouveau
sujet d'.iilorer les dispositions de Dieu sur
loi et de redoubler ses prières pour obtenir
lu grâce de connaître sa volonté et de s'y
conformer en toutes choses, mais principa-
lement dans ce mariage, qu'il ne souhaitait
qu'autant qu'il serait agréable à sa divine
majesté cl utile au salul de son âme : ce
qu'il demanda avec une si parfaite soumis-
sion aux ordres du ciel, que, nonobstant cet
ob lacle, qui parais.sait invincible, il eu ob-
II. 22
W5
PICTIONNAIFIE OFS ORDRES KF.LICIEUX.
C84
tint 1.1 conclusion de son mariage, cl reçut
la bénédiction nuptiale le 20 novembre.
AjanI obtenu des Icllrcs de maîtrise quel-
que lenip>i après, il régla lellenient sa mai-
son, que l'on y ^ivail comme dans un mo-
nastère le plus régulier, prenant lui-même le
soin de coniluire ses dom stiqucs dans le
clicmin du salut et de les former à la »io
chrétienne par les saintes maximes de l'Isvan-
pile, qu'il leur «nseignaii. Souvent il leur
faisait des cnireliens particuliers pour leur
inspirer Ihorreur «lu péché et l'amour de la
venu. La prière se faisait en commun le soir
et le malin, et il Miulait qu'ils y assistassent,
qu'ils allassent lous les jours à la messe,
qu'ils fisvcnt des leciures spirituelles et qu'ils
fréquenlassi nt sou\enl les sa<remenls. Non
content de bannir de sa maison toutes sortes
de jeux, de débauches, de jurements et de
paroles libres, il lit de sages règlemenls, et
les y lit observer imiispensablenient.
Tour ce qui est de ses enfants, il n'épar-
gna ni son bien ni ses peines pour les élever
dans la pieté. Outre le* inslructioni qu'il
leur donnait lui-même, il leur choisit des
maîtres pour veiller de plus près à leur con-
duite : ce qui leur réussil si heureusement,
que les deux enfants qui lui restèrent, dont
l'un était g rçon d l'.iulre fiile, se consa-
crèrent au service de Dieu : le garçon entra
dans la congrégation des miss onnaires dont
son père fut dans la suite l'instituteur, et la
fille se fil religieuse du Tiers Ordre deSaini-
François de la plus éiroite observance dans
le monastère de Uouane, où elle vécut avec
tant de sainlelé, quelle fui choisie pour faiiC
rétablissement du lroi>ième monastère de
cet orlre à Lyon.
Une (onduite si sainte et si utile au pro-
chain ne pouvait être que f irt agréable à
Dieu, qui, prévenant son serviteur de ses
bénédictions, lui donna un si ardent désir
d'arriver à la perfection, qu'il rechercha
avec empressement la conversation des per-
sonnes capables de lui en enseigner les voies.
Il dem;inda à la divine majesté par de ter-
ventes et continuelles prières quelle voulût
bien lui procurer celte grâce par le moyen
de quelques-unes de ces âmes choisies (pii,
quiiiiiue dans un corps mortel, vivaient dans
le monde comme si elles n'y élaienl pas, et
dont toute la convcrsilion elail dans le ciel.
La Mère Madeleine de Saint-François ,
première supérieure du premier nion.islère
du Troisième Ordre de Saint-François dans
la ville de Lyon, à l.iqnelle plusiems per-
sonnes s'adressaient pour apprendre à f.iire
l'oraison et à pratiquer les autres exercices
de la vie spiriiuelte, fut celle donl Dieu -e
servit pour l'ai < omplissemenl du désir de
M. Crelenct, qui, |iar les suins de celle sainte
fille, lit un si grand progrès dans la prali.iue
de toutes les \crtus qui conduisent a la pi r-
feciion évangéli'iue, que, se trouvant en eiai
de marcher seul dans les voes les plus
étroites du salul, il se lésolut d'y servir de
guide au prochain en enseignant aux igno-
rants les obligations de la vie chrétienne et
eu conduisant ceux qui en étaient instruits
à une vie plus parfaite, selon les règles qu'il
en av.iit reçues de cette charitable maîtresse,
que Dieu récompensa enfin, la faisant pas-
serdeeelte vie à une meilleurele -2.'1 juin 1G'»2.
Après la mort de celle sainte fille, dix ou
douze de ses disciples dans la vie spirituelle,
se joignant à M. Crélenet, se mirent sous la
conduile du II. I*. dom Arnaud, pour lors
lirieur des Feuillants de Lyon, donl Dieu se
servit pour faire connaître le mérite de son
serviteur. Car ce zélé directeur, étant foil
occupé, soit dans son couven' cl dans les
autres de son ordre, dont il était toujours
ou prieur ou provincial, soit à prêcher des
avenls et des carêmes dans la ville de Lyon
et ailleurs, renvoyait à .M. Crélenet les per-
sonnes qui venaient à lui pour le consulter
dans leurs besoins spirituels, comme à celui
qu'il connaissait le plus capable de les sou-
lager dans leurs peines : ce qui établit si
bien sa réputation, que lous ceux qui lui
élaienl ainsi envoyés , non contents de la
consolation qu'ils trouvaient dans ses dis-
cours ( t ses entretiens particuliers, ne man-
quaient pas dans la suite aux conférences
spirituelles qu'il faisait une fois la semaine
dans sa maison ou dans quelque autre, afin
d'allumer dans le cœur de ses auditeurs le
feu de l'amour divin et un ardent désir d'ar-
river à la perfection. Mais dans le temps
qu'il ne soi^geail qu'à continuer ces saints
exercices d'une charité vérilablemenl chré-
tienne. Dieu les interrompit en lui fournis-
sant de nouvelles occasions d'exercer son
zèle et son amour pour le prochain : car la
vilh; de Lyon ayant été allligée une secon le
fois de la peste en 16!i3, sa divine majesté
lui donna de si fortes inspirations de ne
point abandonner les pauvres malheureux
(|ui étaient aliaqués de ce mal, qu'il se ren-
ferma avec eux pour leur administrer les re-
mèdes nécessaires. Il les consolait par des
paroles de piélé el d'édification, les encou-
ragi'ant à souffrir patiemment jiour l'amour
de Jésus-Christ; et, parce que celle maladie
est presque toujours suivie de la mort, il les
disposait par des instructions chrétiennes à
recevoir les sacrements, et n'oubliait rien
de toul ce (|ui pouvait les préparer à bien
mourir. Lorsqu'ils approi liaient de ce der-
nier moment, il redi)ubl.iit son zèle pour
leur salut, les exiiorlani à se confier en la
miséricorde de Dieu et à faire un sacrifice
de leur ve à sa justice. 11 leur enseignait à
faire des acti-s de contrition, d'amour de
Dieu et de résignation à sa volonté. Il fai-
s lit des prières en particulier et en public
pour e ix, et engageai ceux qui étaient pré-
sents à leur donner le même secours.
En s'appliquaiil de la sorte au salul des
moribonds, il ne né;;ligeait pas le soin des
autres malades, qu'il catéchisait lous les
jours, leur ensci ,n.iiit a >>e bien i onfesser el
à manger dignement le (i.iiii îles anges : <-e
qui produisit un tel effcl dans le cœur des
malheureux qui élaienl renf rniés dans ce
lieu de misère, que, changeant de vie, ils
relourn.iicnlà Dieu par une véritable cl sin-
cère pé.iiicuc''.
C8o
JOS
JOS
C80
Le P. dom Arnaud, qui, comme nous
l'avons dit, diri'^e.iil M. Crc(enet el coux des
disciples de la Mère Madeleine de Saint-
François qui avaient fait aveclui une sainte
société, ayant été clioivi d.ins un ciiapilre de
son ordre tenu à Paris pour aile r faire nu
établissement à Marseille, les en a^er:it,afin
qu'ils fissent choix il'uii auiro directeur ou
supérieur qui coniinuâl à 'es conduire dans
la voie de la perfeclion. M. Crélenel, qui
c'ait le plus zélé de (cKe peliie Iroiipe, pria
re Père de recommander celte affaire à Dieu
el de dire à celte intention la messe pendant
n( uf jours, afin que sa majesîé divine leur
fît connaître sa sainte M)!onlc, qui leur fut
enfin manifestée par la boiiche de ce même
religieux, qui, après avoir fini cette neu-
vainc, leur conseilla de rester unis ensemble
el de fhoisir cnlre eux quelqu'un capable de
les gouv(rner. Ils reçurent celte réponse
comme venant de Dieu même , et, ayant
augmenté leurs prières, leui's jeûnes el leurs
mortificalions, ils se .sentirent inspirés de
choisir M. Crélenel, qui dès lors fut rega;dé
comme leiir niaî re et leur supérieur.
Ce choix d'un laïque el même engage d ii:s
le mariage pour conduire celle nouvelle
compagnie de serviteurs de Dieu, dans la-
q iclle il y avait trois ecclésiasiiques, parut
si extraordinaire, que Ion traita d'illusion,
d'ambilion cl de lémérité l'acceptation que
ftl. Crélenel lit de cet emploi. Myis, non-
obstant toutes ces conlradictions, le nombre
de ses disciples augmenta par un grand
nombre d'écoliers, (jui, s'éla;it mis sous sa
conduite, devinrent la bonne odeur de Jé-
sus-Christ el pnitcrent partout les fruits de
sainteté el de grjces que ce sainl m.iître
avait semés dans leur cœur par ses i;isli uc-
tions el ses bons exemples.
Le zèle qu'il avait pour la gloire de Dieu
et le salut des âmes était trop vaste pour
être horiic au seul avancement spirituel de
ceux dont ii .ivnit la conduite. Comme il
poi tait out le inonde dans son cœur, et que
sa charité s'élendall sur tons les hommes,
non-seulement il priait avec ferveur pour la
conversion des intidèles, hérétiques el mau-
vais chrétiens; mais, dans l'impossibilité où
il était, à raison do son étal, d'ail r lui-même
chercher tes brebis égarées, il lâLhait d'en-
gager ceux qui avaient clioisi Jésus-Ghriçt
pour leur pailage d'entreprendre un si saint
exercice : ce qui lui réussit eniin selon ses
désirs. Car, un jour qu'il donnait à mang. r
ta (luelques-uns de ses disciples, la conver-
sation tomba insensiblement sur l'ignorance
des peuples de la campagne, el parliculière-
jnenl du grand besoin d'instruction qu'avait
le village de Marlignat dans le Bugey, dont
un prêlre de la compagnie qui avait dit sa
première messe le même jour était natif.
Ce s.iint homme profita de celle occasion
pour leur découvrir le dessein qu'il avait
depuis plus eurs années de les engager à se
dévouer au service du prochain, et les y ex-
horta d une manière si efficace, que, ne
pouvant ré-ister à la force de ses discours,
ils prirent la résolution d'aller instruire les
pauvres gens de ce lieu sitôt que les vacan-
ces seraient arrivées, la plupart étu ianl
pour lors en théologie. Ce temps étant ar-
rivé, ils allèrent recevoir leur mission du
grand vicaire du cardinal de Richelieu, ar-
chevêque de Lyon, qui, louant leur zèle el
les encourageant à souffrir généreusement
toutes les peiites el les fa'igues qu'ils au-
raienl à Siiuienir, leur donna tout le pouvoir
(i:ii leur était nécessaire. M. Crélenel four-
nil aux frais de leur voyage el do la mission,
à laquelle ils se disposèrent par le pèleri-
nage de Sainl-Claude, qu'ils entreprirent à
pied, jeûnant au pain et à l'eau, afin d'obte-
nir par l'intercession de ce sainl archevêque
les lutnièrcs el les grâces dont ils avaient
besoin dans leur ministère apostolique. Ils
l'exerièrenl enfin dans le village de Marli-
gnat avec tant de satisfaction par rapport aux
grands fruiîs qu'ils y firent , qu'ils réso-
lurent de consacrer à la mission tout le
temps des vacances qu'ils auraient à la fin
de chaque année de théologie, et de s'y em-
ployer entièrement lorsqu'ils auraient achevé
leurs éludes.
M. Crélenel, ayant connu par les fruits
des pieniières missions que ses disciples
avaient fa. tes combien il était important pour
le salut des âmes de les continuer, s'appliqua
avec beaucoup de soin à former les ecclé-
siastiques qu'il croyait être appelés de Dieu
à cel emploi; dont le nombre s'augmenlant
tous les jours, il leur conseilla d'entrepren-
dre toutes les missions qui se présenteraient
et d'aller dans tous les lieux où on les de-
manderait. Le Bugey, la Bresse cl le Dau-
phiné, furent les premiers champs qui eu-
rent le bonheur d'être délri( hés par ces bons
missionnaires, qui, dans une mission qu'ils
firent à Verjon, au mois d'octobre 1648, lou-
chèrent si vivement par leurs prédie^itions
le marquis de Coligni et sa femme, qu'ils ré-
solurent dès lors de se donner entièrement à
Dieu par un généreux renoncement à toutes
les choses de la lerre. Depuis ce temps-là, ce
seigneur s'élant mis sous la conduite de ces
mi&sionaires el ayant réglé sa maison par
leurs avis, il commença de mener une vie si
chrétienne, qu'après avoir fait l'admiration
de tout le monde, il mourut Irès-sainlenient
en 1661. Ce qui ne fut pas le premier ni le
seul fruit de leurs travaux évangéliques :
car, sans parler d'une infinité de personnes
de tous âges, sexes et conditions qui leup
étaient redevables de leur conversion , ils
avaient eu le bonheur, dès l'an 1647, de ga-
gner à Jésus-Christ le baron d'Allignal, qui
mourut en 1650 dans sa quarante-deuxièino
année, après avoir donné des preuves d'une
véritable conversion el d'une singulière
piclé.
De si heureux progrès semblaient devoir
mettre ces zélés missionnaires à couvert
de la persécution ; mais Dieu, qui veut
éprouver les justes, permit qu'il s'élevâl con-
tre eux trois bourrasques en trois dilîéren-
tes années, non- eulemcnt par ia malice des
méchants, dont ils combattaient les vices,
mais même par la trop grande facilité de
CS7
DICTIONNAIIU-. lir.S OROUKS llKLIGIF UX.
WS
qtiplqiios personnes ilc pii^lé, qui, mal infor-
mées «le leor condiiilc l't prévenues contre
M. Créli-nel, sur qui, c.rnnie sur leur chef,
lombail le plus uros de la Icmpéle, crurcnl
qu'ils feraient un grand service à Dieu el à
ri-^îllise, s'ils I ouvaient contribuer à détruire
celle société naissanli' avant qu'elle auj,'m,n-
làt. Dans l'une de cis persécutions, Tarclie-
véque de Lyon publia un mandemenl par le-
quel il déclarait excommunié un ccrt.iin chi-
rurgien qui se mélail de gouverner des prê-
tres, et défemlait h ces mêmes préires de se
conduire à l'avenir par les conseils de ce
laïque, leur ordonnant de comp;iraitre au
plus lôl (levanl lui pnur être inlerrogés sur
ce fait. Mais ce pré'at, après les informa-
tions qu'il fit, ayant été désabusé des mau-
vaises impressions qu'on lui avait données,
révoqua tout ce qu'il avait failionlre les
missionnaires, leur permit de consulter M.
Crélenet ci>mme auparavant, et leur donna
même des pouvoirs beaucoup plus amples
que ceux qu'ils avaient reçus de son grand
»iraire, .ifin qu'ils pussent sans aucun obs-
tacle continuer leurs niissioiis dans son dio-
cèse.
Dans une autre persécution qui s'éleva
contre eux au même diocèse el dins celui
du Puy en Vel.y, on prêcha pub iqnenient
contre leur doctrine; on les traita de caba-
lisles et de sectaires, qu'il fallait éviter
comme hérétiques. L'on distribua partout
des libelles diffamatoires ; l'on fit même gra-
ver à Lyon une estampe qui représentait les
hérétiques vaudois, qui avaient eu pour chef
un niarchand de celle ville, cl au-dessous
deTestimpe on avait mis des discours inju-
rieux contre M. Crélenet et contre ses mis-
sionnaires pour les rendre odieux : ce qui fit
qu'on les insultait partout et qu'on les char-
geait d'injures, principalement M. Crélenet,
contre lequel on fit des vers satiriques, qui
furent imprimés cl affichés ;iu coin des rues,
et qu'on venait insulter jusque dans sa mai-
son. Mais enfin cet orage cessa l'an 1G56 :
la vérité prévalut sur le mensonge, el lama-
liie des ennemis de M. Crélenet cl des mis-
sionnaires fjl confondue par le témoign.ige
aulhenliquequ'une infinité de gens de bien
rendirent en leur faveur : en sorte que l'on
commença à honorer ceux qu'on avait mé-
prisés ;el D;eu, pour réc.nipenscr la patience
de ses serviteurs, leur procura d illustres
protecteurs et de puissants amis. Monsieur
le prince de Conti fut de ce nombre, cl les
employa aux missions qu'il fil faire dans
son gouvernenieni de Languedoc.
(Quelques années après, l'archevêque de
Lyon, persuadé du I ieii qu'ils faisaient dans
son diocèse pour rinstruclion des peuples,
consen'il (|i'ils fissent un établissement à
Lyon. Pour cet elTet, .M. le prince île (^onli
leur obtint des lettres patentes du roi qui
leur permeilaienl de s'établir dans celle
ville, à l'Ile-Adam dans le diocèse de Ite.iii-
\ii'\s, el à Kagnols en L.ingnedor; et le inai-
(juis «le Collgnj, dont nous avons parle, et sa
lemine, foiirnircnl .in\ frais de la fondation
de Lyon avec tanl de ténérosilé cl d'humi-
lité, qu'ils ne voulurent pas même pren-
dre le nom ni la qualité de fondateurs, quoi-
qu'ils en fissent toutes les dépenses. Un si
heureux succès donna bien de la joie à M.
Oélenel, il en remercia Dieu et le pria de
protéger celle communauté naissante, de bé-
nir les sujets qui la devaii'nl composer et de
verser abondamment ses grâces sur tous
leurs travaux. Celle nouvelle maison clant
achevée, ce zélé fondateur proposa aux mis-
sionnaires de faire une retraite spirituelle
avant que d'y aller demeurer, ce qu'ils ac-
ceptèrent avec joie, el voulurent même la
faire l'un après l'autre dans sa maison. Lors-
qu'elle fut finie, ils allèrent dans leur mai-
son, où ils commencèrent leur établisse-
ment et continuèrent à suivre les règlements
qu'ils avaient observés depuis si longtemps
par les conseils de M. Crélenet, ((u'ils ont
toujours reconnu comme leur père et le
véritable insliluteur de leur congrégation,
à laquelle ils donnèrent le nom de Saint-Jo-
seph, quoique dans quelques lieux on les
appelât les Cr('tenisies.
Quelque temps après, ces missionnaires
prièrent leur instituteur de prendre un ap-
parlemen! dans leur maison, mais il ne se
prévalut point de cet avantage, et voulut
payer le loyer des chambres qu'il occupait,
comme s'il eût été un étranger; el son hu-
iinlilé fut si grande, q.u'il ne discontinua
point l'exercice de sa profession, (juelqu'ins-
tanccct quelque sollicitation qu'on lui en fît,
afin qu'il eût plus de fac lilé el de temps pour
continuer à conduire ces missionnaires et
toutes les personnes qui allaient à lui, dont
le concours fut plus grand qu'il n'avait en -
core été.
Sa femme, avec laquelle il y avait plus de
vinut ans qu'il vivait en continence, étant
morte l'an IGiio, il se sentit inspiré de se
consacrer à Dieu dans l'étal du sacerdoce.
11 redoubla ses prières, ses jeûnes et ses
moi lific.ilions, il fit dire plusieurs messes
pour connaître la volonté de Dieu, et con-
sulta ce qu'il y avait de plus habiles gens
dans Lyon, qui tous lui conseillèrent de se
faire pi être, l'assur.inl (]ue Dieu l'appelait in-
failliblement à cet étal. Il commença d'espé-
rer que Dieu lui ferait la grâce d'y arriver,
el cela avec tant d'assurance que loules les
contrariétés du monde ne lurent pas c ipables
de lui faire changer de senlinienl. lin jour,
étant en prières dans l'église de Saint-Ko-
main, où le saint sacrement était exposé
pour 1,1 fête de ce saint, qu'on y solennisait
le 18 novenib e IGfiii . il fol si l'orlement
pressé par des mouvements intérieurs de so
faire prêtre, qu'il re put s'empêcher d'en faire
le vfi'u, <i condiiion que l'archevêque de
Lyon le Iroinerait bon. Ce prélat, qui con-
n.'iissait la sainteté de ce serviteur de Dieu,
y consentit, nonobstant son peu d'étude; il le
dispensa même du séminaire, el lui accorda
un diiiiissoire pour aller prendre les ordres
où il vou liait, ne pouvant les lui donner lui-
même, parce (ju'il éiaii pour lors à l'aris. M.
Crélenet, pourvu de ce dimissoirc el d'une
permission de Itonie jionr recevoir tous les
6S9
JOS
JOS
cm
Krdres hors les (cmps prcscrils parles saints
canons, iiarlil pour les aller riTovoir à lîel-
îcy, où il .irriva le (i août IGGG. L'cvêque,
:]iii connaissait aussi sa vertu, lui donna la
tonsure et les i]' aire mineurs dès le lende-
main, qui était un sanedi ; le dimanche il
lui donna le sous-diaconai ; le mardi, fête
de saint Laurent, le diaconat ; et le jour de
l'Assomption do Notre-Dame, la prêtrise.
l\l. (]rétenet la reçut avec de si saintes et de
si humbles disposiiions, que, quniqu'il lût
>enii à l'église dès cinq heures du matin, il
y resta jusqu'à une heure après midi pour
remercier Pieu de la faveur qu'il lui avait
faite. Etant sorti deBelley, il prit la route de
Lyon pour y retourner; mais , en passant à
Monlluel, où il arriva le 19 du même mois,
il tomba le lendemain en défaillance après
avoir eniendu la messe, à Luiuelle il com-
munia; et cette déf.iillance fut suivie d'une
grosse fièvre, qu', augmentant tous les jours,
l'enleva de ce monde, le | remier jour de
septembre de la mênie année. Son corps fut
inhumé dans une chapelle de l'église collé-
giale de Montluel, dont une partie des cha-
noines avaient été ses disciples. Son ccciir,
une («arlie de son foie et ses poumons furent
cuibaunK s et portés au ttoisicme monastère
lies religieuses du Tiers Ordre de Saint-Fran-
çois à Lyon, où il avait mis sa fille ; et dix
ans après, l'an 1677, les ciiunoines de Moiit-
luet accordèrent encore une partie de ses os-
senients à ces religieuses.
Ce saint homn.e avait prédit sa mort six
ans au( aravant, et il semble que c'était pour
cela qu'il souhaitait de recevoir si prompte-
oirnl les ordres, n'ignorant pas que pour
peu qu'il eût dilîéré, il serait mort sans cette
consolation , après laquelle il soupirait
comme étant la consommation de toutes les
grâces qu'il avait reçues de Dieu diins cette
vie.
Ces missionnaires sont habillés comme les
autres ecclésiastiques et sont gouvernés par
un général.
N. Orame, Vie de M. Crélenet, insliCutcur
de la congréijalion di^s Prêtres Missionnaires
de Saint-Joseph.
JOSEPH ^Congrégation des soeurs de
Saint-).
La congrégati m des soeurs ou filles de
Saint-Joseph a pris son origine dans la ville
du l'uy en V'elay, où elle fut érigée par Henri
de Maupas du Tour, évéque et comte de
cette ville, l'an 1C50, à la sollicitation du
P. Jean-Pierre Médaille de la Compagnie do
Jésus. Ce saint homme, qui a employé sa vie
à faire la utission non-seulement dans le dio-
cèse du Puy, mais encore dans ceux de Saint-
Flonr, de Ûodez et de tienne, ayant trouvé
dans le cours de ses missions plusieurs veu-
ves et filles qui, ne voulant point se marier,
avaient dessein de quitter le m^inde pour va-
quer plus librement au service de Dieu et du
prochain, et ne pouvaient pas entrer dans
lies monastères pour n'avoir pas de quoi
fournir leur dot, propo'^a à révé()iie du l'uy
d'établir une cong^éga ion dans laquell ■ ces
filles cl veuves pourraient se retirer pour y
travailler à leur salut et vaquer à tous les
esercices dont eles seraient capables pour
le service du prochain. Ce prélat, qui avait
beaucoup de zèle pour la gloire de Dieu el
l'avancement du salut du prochain, approuva
ta dessein du P. Médaille, et fil venir auPuy
\('s filles qu'il avait disposées à la retraite.
Ellis logèrent toutes ensemble pendant quel-
ques mois chez un« demoiselle fort vertueuse
nommée Lucrèce de la Planche, femme de
M. de Jous, gentilhomme de Taner, laquelle
demeurait pour lors au Puy, et qui ne con-
tribua pas seulement de tout son pouvoir à
l'élablissemcnl de ces filles, mais travailla en-
core jusqu'à sa mort avec un zèle et une cha-
rité exlraurdinaii es à l'avancement de leur
congrégation. Enfin toutes choses ayant été
disposées par l'évé>|ue du Puy pour l'exécu-
tion d'un si pieux dessein, ce zélé prélat as-
sembla toutes ces filles dans i'hôpilal des
orphelines, dont il leur donna la conduite,
et, le 15 octobre, fêle de sainte Thérèse, do
Pan 1050, après leur avoir fait une exhorta-
lion pour les animer à l'amour de Dieu et à
la plus parfiile charité du prochain, il les
mit sous la protection de saint Joseph, et or-
donna que leur congrégation, qu'il confirma
par ses lettres du 10 mars 1051, porterait le
nom de ce saint patriarche. Il leur prescrivit
des règles pour leur conduite et une forme
d'habillement, et eut pendant toute sa vie un
soin si particulier de l'avancement de cette
congrégation, qu'il en fit plusieurs établisse-
ments dans son diocèse, dont le premier fut
à Moiitferrand. Après sa mort, M. de Bé-
Ihune, qui lui succéda sur le siège épisco-
pal i'e cette ville, ayant été convaincu par
expérience et par plusieurs témoignages d -
gnes de foi des services que les sœurs de
celte congrégation rendaient dans son dio-
cèse, la confirma de nouveau et approuva
leurs cons'ilutions et règlements le ^iS sep-
tembre 1605. Le roi, par ses lettres patentes
de l'an 1666, autorisa ^ous leurs établisse-
ments ; et Dieu a répandu tant de bénédi-
ctions sur celte congrégation, qu'elle s'esl
étendue dans les diocèses de Clermont, da
Vienne, de Lyon , de Grenoble, d'iîmbrun,
de Gap, de Sisteron, de Viviers, d Uzès, et
plusieurs autres. HiMiri de Villars, archevê-
que de Vienne, avait établi ces filles dans le
grand hôpital de c Ue ville l'an 1668, et ce
fut par Ses ordres que leurs constitutions
furent imprimées à Vienne l'an It 9V.
Ces servantes de Jésus-Christ embrassent
tous les exercices de charité et de miséri-
corde; car elles prennent la conduite et h-
soin des pauvres dans les hô|iitaux, la direc-
tion des maisons de refuge, pour ramener à
la pénitence les filles égarées, et le soin des
maisons des pauvres orphelines pour les
élever à la piété et leur apprendre à travail-
ler. Elles tiennent des écoles pour l'instruc-
tion des petites filles dans les lieux où les
religieuses qui y sont établies n'en [irennenl
pas le soin. Elles visitent tous les jours les
m.iiades et li's prisonniers une fois ou deux,
plus ou moins, selon qu'il c^^ néccssaiic,
f:l
DiCTIONNAlia: DES ORDItES UFI.IGIEUX.
692
|.s cxhorlanl à 1 1 ['énilcnco et .i la palicncp-,
illes prient pour eux, leur iTiicurciil ilcs aii-
iiiôncs, les assislonl corpori'llomrnl <'ci fai-
sant leurs houilloas et les remèdes c|u;' les
médecins ordonneiil, selon leur pouvoir, cii-
Ireiciiaiit jour cet effet iluis la pluparl de
leurs maisons une pharmacie où elles tien-
nenl le^ dropui s les plus < omnuii;es cl les
plus née ssaircs. Elles veillent soigneuse-
ment au salut des pauvres tilles qui, pour
n'avoir personne qui les gouverne, eu ])our
lire dans la nécessité, courent risque de per-
dre leur honneur, lâchant de les lofjer ou de
leur procurer du travail pour pa^ner leur
vie. Elles ont aussi un soin parliculier d'at-
lirer les jeunes filles qui comnirnccnl à fré-
quenter le monde et les couip.igiiies où les
hommes se trouvent, afin de leur inspirer
la crainte de Dieu <t leur enseigner la u.o-
destie et les autres verlus qu'elles doivent
pratiquer. Pour cet effet t ll( s leur permil-
leiitde venir travailler chez elles et leur ap-
prennent toutes sortis d'ouvrages propres
au\ personnes de leur sexe. Elles doivent
établir l'es rongrcgalions de la Misérico:de
dans les lieux où il n'y en a point, et y rece-
voir les femmes, les veuves et les filles. Ou-
Ire l'assemblée des dames qui se fait une fois
le mois, pour pourvoir à la visite et au se-
cours des pauvres malades de leurs paroisses,
il y a eu<ore tous les diMianches et les fêles
des assemtdécs particulières, de veuves, de
femmes mariées et de filles, séparées les
une? des autres, pour y traiter non-seulement
des œuvres de miséricorde, mais aussi de
leur direction particulière et de la manière
dont elles doivent vivre en qualité de chré-
tiennes.
Chaque maison est gouvernée par une su-
périeure qui a le titre de prieure, par une
intendante et une coadjulrice. 11 y a encore
une économe, une aduionilricc, une inten-
dante des pauvres, une direcirice de l'assem-
blée de la Miséricorde, tl quehjues autres
officières. Tous les dimanches et fêles, elles
disent en commun le petit olGce de la Vierge
dans leur chapelle, et tous les jours le petit
ullice du Saint-Esprit, les litanies du saint
nom de Jésus, de la sainte N'ierge, de saint
Joseph, et le cl)ap<'li'l. Elhs font deux fois
le jour l'oraisoii n c itile, une fois le matin
cl une fois le soir. Elles jeûnent tous les sa-
mcd s et prennent ce jour-là la discipline.
Elles assistint au chapitre le vendredi, et les
diman;lies à la conlVreiice spirituelle. Elles
font dux ans de no\iciat, après lesquels
elles proïKinceiit leurs v i ux simples cl leurs
promc-scs en celte manière: Mon Dieu tout
jntifsaiit et éternel. Je N., voire itidifjne filte
il sirvanle, désirant de vivre toute pour tons
it dépendre absolument de la conduite de ro-
Ire 'irâce, en présence de Jésus-Clirist rolie
Fils et lie la iilorirnsc V icrrje Marie, dr noire
patriarche saint Joseph et de toute la cour
ivlesle, fais vœu à votre divine majesté, de
p'iuiTrté, de rliasltir et d'ohcissance perpé-
tuelle en la conyrripilion des S'Kurs de Saint-
Joseph, et ce entre vos mains, nfonsienr, qui
tenez la place de Monseigneur noire évéque et
Irès-hnnoré supérieur; et je promets, selon
les rcf/les de ladite congrégation, de professer
moi/ennant votre grâce la p'us profonde hu-
niililé en toutes rltnsts it la plus cordiale cha-
rité envers le prochain, que je désire servir
I ar l'exercice de toute'i les auvres de miséri-
corde, tant spirituelles que corporelles por-
tées par notre institut. Mon Dieu, recevez
ce! te offrande en odeur de suarit''. Mnst
soit-il. Lorsque les sœurs sortent de la con-
erégalion ou qu'elles en sont chassées pour
leur incorrigihiliié, l'évéque du lieu d'où
«Iles sorlent les dis; ense de leurs va-ux ;
mais, conformémcnl aux constitutions, il ne
doit accorder celle dispense qu'après avoir
pendant un loug temps employé les voies de
douc.'ur, et ensuite de rigueur, pour rame-
ner l'cprit faible ou incorrigible de ces
sd'urs, qui s'exposent au malheur de quitler
leur vocation ; et, s'i arrive que quelqu'une
sorte furtivement de la congrégalion , il la
doit faire reconduire à la maison d'où elle
est sortie, ou à une autre où elle doit être
ei! fermée durant quelqucsjours. | endant les-
(;ue's on fera loul ce (jue l'on pourra pour
la f ire rentrer dans son devoir, soit par des
remontrances charitables, soit par des cor-
recli ins sévères ; et si apr.''S cela elle persé-
vère dans son obstination, l'évéque doit ac-
corder la dispense de ses vœux et la renvoyer
dans le monde.
Leur liabillemei'.t est honnête et modeste,
d'une étolTe commune de laine noire, qui ne
doit poini avoir éié pressée ni lustrée ; lo
corps de l'habit doil étresiins tailb', les man-
ches simples et il'uno l.irgeur médiocre, dont
la longueur, quaud elles sont étendues, va
jusqu'au bout delà main; la longueur des
jupes ne doit point toucher à terre, et leurs
souliers doivent élre noirs cl sans faç n.
Elles portent un bandeau de toile blanchi!
sur le front, une coiffe loile simple aussi do
toile blanche qui se joint avec une épingle
sous le menton, une auire petite coiffe do
t.iffelas noir qu'elles ont toujours dans la
maison, en forme do pelil voile; et quand
elles sortent, elles metient une grande coiffe
de taffetas noir comme les dames du monde.
Elles onl sur les épaules un mouchoir sim-
ple de toiie blanche, et porlenl sur la poi-
trine une croix de bois noir avec un christ
de cuivre jaune, et à la ceinture un cliapelit
noir. Les sirurs servantes sont habillées do
même façon, exce; té (juc leurs babils sont
d'une étoffe plus grossière cl tiu'elles ne per-
lent ni coilTcs de taffetas, ni baudeaux, ni
crucifix (I).
G rmuic il y a dans jilusicnrs villages
quanii'.é de piiuvrcs filles qui sont appelées
(le Dieu à une vie pure cl retirée du monde,
1rs s(i>urs de S .int-Joseph, avec la |)ermis-
siou lie l'évéque cl de ra>is du Père spirituel,
peuvent agréger à leur congrégalion ces
sortes de pauvres lilh s, c t en établir d.ins ces
mêmes vlllaijes de [ictilcs cuuiiuuu.iulcs du
(I) Voy., a U lin du vul., n lol^.
613S
JOS
Iroisou qualrc seulement. On les appelle les
sieurs agrégées, et dépendent de la supé-
rieure de la plus prochaine maison des sœurs
(le Saint-Joseph, laquelle doit veiller sur elles
et sur leur cimduile, les corriger et donner
avis, s'il est nécessaire, des choses qui se
passent entre elles, au Père spirituel qui lis
doit visiter au moins une fois l'année, aussi
bien que les sœurs. Ces agrégées sont habil-
lées de la mému façon que les Sd'urs de la
congrégation, à la réserve que tant dedans
que dehors la maison elles ne portent qu'une
simple coiffe de toile blanche et jamais de
noires, et leur crucifix doit être un peu plus
pelil que celui des sœurs de la congrégation.
Avant que de prendre l'hahil, elles demeu-
rent au moins trois mois dans la maison des
sœurs agrégées, après lesquels la supérieure
de celte maison les fait examiner par la su-
périeure des sœurs de la rongrégalioii, et, si
elles sont reçues , on leur donne l'habit de
sœur agrégée sans aucune cérémonie. Elles
font aussi deux ans de noviciat, après les-
quels elles font seulement trois vœux sim-
ples de pauvreté, de chastelé et d'obéissance
perpétuelle, tant qu'elles demeureront parmi
les sœurs agrégées, en sO;te que soit
qu'elles en veuillent sortir, ou qu'elles
en soient expulsées pour quelque faute con-
sidérable, elles sont absolument libres de
Kurs vœux sans autre dispense. Elles doi-
vent observer autant qu'il leur est possible
les règles prescrites par les constitutions des
sœurs de la congrégation ; mais elles ne sont
point obligées comme elles à dire l'office du
Siint-Espril ni celui de la Vierge , non plus
que les litanies de Jésus, de la sainte Vierge
et de saint Joseph. Néanmoins si elles savent
lire, et qu'elles aient le temps, on leur per-
met de dire en commun ou en particulier
l'office de la Vierge. 11 n'y a point dans leurs
communautés d'assistantes; mais en l'ab-
sence des supérieures, les plus anciennes de
profession tiennent le premier rang et gou-
vernent les maisons.
Consliluiions pour la. Congrégation des
Sœurs de Saint-Joseph.
JOSEPH (Filles séculières hospitahèues
DE Saint-).
Des filles séculières Hospitalières de la so-
ciété de Saint-Joseph pour le gouvernement
des filles orphelines, comme aussi des reli-
gieuses de la même société, dites les Filles de
la Triniié-Créée.
Le cardinal François ti'Escoubleau de Sour-
liis, archevêque de Bordeaux, qui non-seu-
lement avait procuré à son diocèse rétablis-
sement dos Uisulines dans sa ville métropo-
litaine, mais avait encore contribué à la
fondation de l'ordre des filles de Notre-Dame,
qui avait pris naissance dans la même ville,
dont l'inslilut, aussi bien que celui des Ur-
sulincs, est d'instruire les jeunes filles^
comme nous dirons à l'article qui porte ce
nom ; voyant que ces religieuses ne pou-
vaient élPnilre leurs exercices et leur tra-
vail jusqu'aux pauvres orphelines de père et
JOS fi9l
do mère, abandonnées et délaissées sans
aucun appui pour être élevées chréiienne-
mcnt, approuva le zèle de quelques filles et
veuves qui, s'étant unies ensemble, s'em-
ployaient à l'instruction de ces filles orphe-
lines, et conçut dès lois la pensée de former
une société de ces filles et de ces veuves,
qui vivraient en commun et recevraient
charitablement les filles orphelines pour les
élever dans la piété chrétienne et dans la
pratique de toute sorte de vertus; mais ce
pieux cardinal étant morl l'an 1628, son
dessein ne put être entièrement exécuté de
son vivant.
Ce fut son frère et son successeur dans
l'archevêché de Bordeaux, Henri d'Escou-
bleau de Sourdis, qui acheva ce qu'il avait
commencé. Une sainte fille nommée Marie
Delpcch de l'Estang était celle qui avait reçu
dans une maison ces filles orphelines, dont
elle prenait soin, avec quelques filles et
quelques veuves qui s'étaient jointes à elle
pour cette œuvre charitable ; mais celte
maison n'étant p.is suffisante pour contenir
le grand nombre d'orphelins qui se présen-
taient, elle acheta trois autres maisons joi-
gnantes pour l'agrandir, et elle en fit dona-
tion aux orphelines le ii avril 1633, par un
contrat qui fut accepté en leur nom par les
grands vicaires de l'archevêque. Ce prélat,
par un acte du 16 juin de la même année,
approuva cette donation, et érigea cette
maison en société ou congrégation de filles
et de veuves sous le titre de Société des sœurt
de Saint-Josephpour le gouvernement des or-
phelines, voulant qu'elles s'employassent
non-seulement à l'instruclion de ces pau-
vres filles, mais qu'elles pourvussent à leur
eniretien et à leur nourriture. Il voulut aussi
que ces sœurs vécussent en commun sous
son autorité et sa direction en faisant un
vœu simple d'obéissance, et il leur prescrivit
des règles et des constitutions (ju'elles sui-
virent jusqu'en l'an 1652 , que, pour l'avan-
cement de cette société, on en dressa de
nouvelles, qui furent encore approuvées
par le même prélat et confirmées par l'un de
ses successeurs, Louis d'Anglure de Bourlc-
moat, l'an 1694.
Cet établissement fut autorisé par lettres
patentes du roi Louis XIII du mois de mai
lG3t), par lesquelles Sa Majesté permit aux
sœurs do celte société de recevoir toutes
sortes de donations, legs et aumônes, tante»
meubles qu'en immeubles, pour être, les
deniers ou revenus en provenant, employés
à l'instruction, nourriture et entretien des
tilles orphelines, comme les autres hôpitauxL
el communautés pourraient faire; ce qui fut
confirmé par le roi Louis XIV par d'autres
lettres patentes du mois de mai 1673, qui fu-
rent enregistrées en l'hôtel de ville de Bor-
deaux par un arrêt du parlement de la même
ville du 27 avril 1674.
D'abord il ne pouvait y avoir dans celte
maison plus de sept sœurs pour l'instructiou
des orphelines ; mais le nombre de ces pau-
vres li les étant augmenté, on a aussi aug-
menté celui des sœurs ; et présentement il y
(;■;:,
IIICTION.NMUF. DLS
PU a douze du clurur cl scpl sœurs domrsli-
HUi-s. I,( s unes soiil doliiiccs .i approndre à
lire cl à écrire aux urphclinos, les autros à
leur a|)prcndrc lous les ouvra;;ps qui cnii-
\ieiiui'iil aux |iors(in;ics de leur sexe, el le
profil i|ue la maison retire de re Irav.ril csl
son r(Mi'nu le plus liquide, n'ayaiU que Irès-
peu de renies fixes, la plupart tnême provc-
nanl des dois que les sœurs onl apportées
en entrant dans celte maison : c'est ce qui
les a aussi obligées à rccrvoir de jeunes fil-
les pensionnaires, qui sont élevées chez elles
dans toutes sortes de vertus.
Présentement ces sœurs de Saint-Joseph
ne reçoivent plus de veuves, et elles ont
ajoute le V(eu de chasteté à celui d'obéissance,
auquel elles étaient seulement obligées dans
le coaimencement de leur établissement;
mais, quoiqu'elles ne fassent pas celui de
pauvreté, aucune sœur néanmoins ne peut
rien avoir en particulier, et ne peut rien
ilonnerà l'insu de la supérieure, qui doit
pourvoira toutes leurs nécessités. Elles di-
sent eu commun tous les jours le petit office
«le la Vierge. Elles onl demi-heure d'or.iison,
le malin avant prime etautant l'après-dinée ;
avant le souper, après la récréation du diiier,
ellc'i vont devant le saint sacrement, où elles
récitent les litanies des saints: elles travail-
lent ensuite en commun jusqu'à trois heu-
res, et elles gardent toutes ensemble le si-
lence pendant une heure. A sept heures
trois quarts du soir, elles disent matines et
laudes pour le jour suivant, et ensuite elles
font l'examen de conscience, et disent les
litanies de saint .loseph. Outre les jeunes
ordonnés par l'Kglise, elles jeûnent encore
lous les samedis el les veilles des fêles so-
Icnn Iles de la sainte >'ierge. Tous les ans
elles font une retraile de huit ou dix jours,
et elles renouvellent aussi une fois l'an
leurs vœux, dont voici la formule : Je .V.
donne d dédie ma personne à la Société de
Saint -Joseph, puur l'inslmclion et poxir Vé-
duculiun des filles orphelines, pour y viirc et
mourir ; el fais vœu à Dieu de cliasieté et d'o-
béissance en icelle, conformément à notre
institut ; lesquels vœur je garderai moyen-
nant sa fainle grâce, suppliant la divine
bonté que ce soit ù sa p/us yiandc gloire et à
mon salut. Ainsi soii-il. {)\\:\n\. à leur ha-
billement, il est noir eu la forme que l'on
peut voirdans la figure qui représente une
de ce? su'urs de Bordeaux (1), qui a éle gra-
vée sur un dessin qui m'a élé envojé par
la sœur Jean lierland, supérieure de ccite
maison. Les sii'urs domestiquas sont liuliil-
lées de même que les sieurs du chœur : ce
qui les distingue seulement, c'est que le
mouchoir de cou des sœurs du chœur csl
rond par-devant el par derrière, el que ce-
lui il( s sœur> domestiques est en pointe par
derrière.
Quoique celle maison de Hordeanx ail
produit celles de Tans, de Itoiieii, de Tou-
l"Use, d'Agen, lie Litnogei el de l.i Ittx hrlle,
qiii reconnaissent aussi pciur (oulairce
oi'.niii.s UF.Lir.iEUx. nos
mademoiselle Delpech de lEslnng, néan-
moins, comme ces maisons sont situées dans
différenls diocèses, elles ont toutes des cons-
tilulions différentes (|iii leur ont été données
par les prêtais de ces dio 'èses. Les sœurs
de cet institut dans ces diiïerenls diocèses
sont distinguées aussi les unes des autres
par des hal>iilemenls difféienis. Celles de la
Uoclielle et de Limoges ont même embrasse
l'état régulier sous la règle de suint Augus-
tin, et celles de Itoucn se sont conlenlécs
d'en prendre l'habit, sans s'eng igcr par des
vœux solennels. Nous ne parlerons ici que
de celles de Paris el de la lUicheile, de qui
nous aïons reçu dos mémoires.
Après que l.i maison de l!orde:iux eut élé
érigée en société, et que cet institut cul élé
autorisé par lettres patentes du roi Louis XIII,
comme nous avons dit ci-dev;ml, mademoi-
selle Delpech fut appelée à Paris pour y
faire un pareil établissenient au faubourg
Saint— Gernijiin, près de I>ellechas«c ; et,
comme elle avait éprouve 'es ellets de la di-
vine providence dans rétablissement de la
maison de Bordeaux, elle donna à la maison
de Paris le litre de Divine l'roiJenee, el les
sœurs de celle maison ont toujours élé ap-
pelées, depuis ce lemps-là jusqu'à prcseni,
les filles de Saint-Joseph, dites de la Provi-
dence. La duchesse de Morlemart, Diane de
Grandseigne, contribua beaucoup par ses
aumônes el par ses libéralités à cet établis-
sement, et la marquise de .Mouiespan sa fille,
ayant choisi cette maison pour retraile, y a
f.iit faire de beaux bâtiments. Ce fut dans ce
lieu que mademoiselle Delpech de l'Eslang
mourut le '21 décembre 1C71, dans un âge
très-.ivaiicé, ajirès avoir eu la consolation
de voir loules les maisons de son institut
solidement établies.
Les sœurs de celle maison suivent pré-
sentement les consiiUiliiins qui onl clé ap-
prouvées par l'archevêque de Paris Fran-
çois de ILirlay de Ch.impvaloa, l'au 1G91.
Conformément à ces consliluiioiis, elles
doivent avoir soin des filles nobles ou d'Iiou-
nète famille qui, ét.int pauvres ou orphe-
lines, n'ont pas le moyen de se donner une
bonne éducation el de se former dans le
travail ; c'est pourquoi en leur apprenant
les principes du christianisme, à lire, à
écrire, et en les élev.int dans la pratique de
loules sortes de vertus, on leur apprend
aussi lous les ouvrages qui conviennent à
leur sexe, afin d'avoir par leur trav.iil une
ressource contre lu pauvreté el une honnête
occupation pendant leur vie. Les sœurs s'en-
gagent à cette iiislruclion par des vœux sim-
ples après deux ans de noviciat. La commu-
nauté peut renvoyer né:inmoins une sœur
après sa profession pour eerliiines failles
niarquées dans les c.mslitutions ; mais cel-
les (]u'ou est obligé do congédier ne peuvent
rien prétendre pir forme Me réioinpeiise ou
de s.'ilaire |iour les seri iees qu'elles ont ren-
dus pendant le temps qu'elles ont été dans
la maison. On leur lit cel article des consli-
(•) 'ej/ , il la (In .lu vol . n IG(>.
r.'jT
JOS
JOS
es
liilions devant leur profession, auquel elles
prouioltenl de se souincltre, el on l'insère
dans l'acle qui csl dressé par-dcyanl notai-
res pour leur .'issncialion à la maison.
Tous les jours elles disent en commun, au
rlireur, le pclil olfice de la Vierge ; elles ont
ilomi-heure d'oraison mentale lo malin el au-
tant l'après-dînce. Avant la me-se de com-
munauté, qui se dit tous les jours à si\ heu-
res , elles cliantont le Veiii Crenlor avec
quelque antienne du saint sacrement à l'élé-
vation et au temps de la communion. Après
la messe, elles chanient Y E xaudial pour le
roi, et elles disent les litanies de saint Jo-
Ecph. Tous les jnurs une des sœurs de la
communauté communie pour madame de
Montespan, leur bienfaitrice; et tous les ans
elles doivent faire tmc retraite de six jours ,
pour le moins. Voici la formule de leurs
vœux : Au nom du Père, du Fils et du Saint-
Esprit, Je N., de la ville et du diocèse de N.,
promet< à Dieu 7non créateur et mon sauveur,
lie garder la chasteté , la pauvreté et l'obéis-
sance, tant que je demeurerai dans cette com-
munauté des Sœurs de Saint-Joseph, établies
flans le faubourg de Saint-Germain des Prés,
à laqu'lle je m'engage selon les constitutions
4e cette commun lulc approuvées par monsei-
gneur notre archevêque , entre les mains de
N. supérieur , et en la présence de ma sœur
2V., supérieure, et de toute la communauté. Ce
fjuej'ai signé de ma main ce N- du mois de N.
de l'an N.
Les sœurs de cette communauté onl voulu
faire approuver leur institut par autorité
apostolique ; elles ont même obtenu à cet
effet une bulle du pape Innocent XII. Mais ,
suit (|ue la bulle ne fût pas confirme à la
supplique qu'elles avaient présentée, ou pour
quelque autre raison , elles n'ont pas reçu
cette bulle, qui jusqu'à présent u'a eu aucun
lieu (l;.
Vers l'an lG6i , les sœurs du même insti-
tut de la maison de La Hochelle, qui avaient
éié établies dans cette ville dès l'an 1G50 ,
voulurent embrasser l'état régulier; et ap-
paremment que ceux qui en avaient la
conduite , en leur inspirant de faire des
vœux solennels, voulurent qu'elles jetassent
les fondements d'un ordre tout particulier
dans l'Eglise dont ils formèrent le projet, et
dn.'ssèrentdes règles et des constitutions, qui
furent imprimées à Paris la même année
1<;G4, sous le titre d'Institut, Règle ou Cons-
titutions des Filles de liTrinilé-Créée, dites
Religieuses de la (Jongrégation de Sainl-Jo-
spph, instituées pour l'éducalion des filles or-
phelines dans la ville de La RochcUe.
Ce qui regarde l'institut est compris dans
cinquante paragraphes. Dans le premier, il
est parlé de la fin de cet institut, qui est
d'avoir soin de l'éducation des pauvres
orphelines et de les élever dans la perfection
ei la praiique de toutes sortes de vertus, de-
puis l'âge dt- huit à neuf ans jusqu'à quinze
l't seize , qu'elles sont placées en service.
Dans le second , il est dit que les filles de
celle con|;rcga(ion seront sous la prolccliou
de .lésus, de Marie, et de Joseph ; que pour
celle raison elles seront nommées les billes
de la Triiiiti -Créée; qu'elles en poiteront les
marques dans leurs habits; que la robe re-
])réseiilera eell' de saint Joseph , et qu'elle
sera violelh? po ir marque de son humilité ;
que le scapulaire sera de pourpre poui' si-
gnifier la rolic de pourpre de Noire-Sei-
gneur, et que le manteau et le voile seront
(le couleur céleste , à cause de la sain e
Vierge, qui es: reine du c el.
Le nombre de trente-trois filles est fixé
pour chaque maison , en l'honneur des
trente-trois ans que Jésus-Christ a vécu sur
la terre. Il ne leur était permis d'avoir que
deux cents livres de rente chacune pour leur
nourriture et pour leur entreli^'u , et sur le
total des pensions, cinq sœurs converses de-
vaient passer pour les offices pénibles do la
maison. On devait faire un fonds solide qui
ne pouvait être emjilojé à autre chose que
pour leur subsistance, quelque besoin et
quelque nécessité qu'il y eût.
Le nombre des trente-trois filles étant
rempli, elles pouvaient recevoir d'autres fil-
les ou veuves sur le pied de quatre cents li-
vres do pension , dont deux cents pour leur
nourriture el leur entretien , et les autres
deux cents pour les orphelines , auxquelles
ell s devaieni en laisser le fonds par don ition
simple trois jours avant de prononcer leurs
vœux, et on les rece.ail ainsi coinmo bien-
faitrices. Il leur était p rmis aussi de rece-
voir des séculières associées à l'ordre, enga-
gées aux mêmes oblig<ilio:i£ que les religieu-
ses, à l'exception des vœux solennels el de la
clôture , et elles devaient faire donation do
la moitié de leurs biens aux orphelines irois
jours avant que de faire leurs vœux simples.
Quoique ces associées ne fissent pas vœu do
clôture, elles ne devaient pas néanmoins
sortir sans la permission de la supérieure ,
elles devaient pratiquer la pauvreté aussi
exactement que les sœurs de la comomnauté,
elles devaient avoir soin de placer en condi-
tion ou en service les oi phelines qui avaient
été élevées dans la maison , cl.es devaient
rei;dre visite aux bienfaiteurs et aux amis ,
et elles ne devaient sortir (|u'avec une com-
pagne. Leur habillement devait être sembla-
ble à celui des séculières, elles devaieni être
reçues comme les sœurs de la communauté
à trois mois de probation et deux ans de no-
viciat, et à l'âge de vingl ans, elles pou-
vaient faire les vœux simples de chasteté, de
pauvreté el d'obéissance.
Toutes les maisons de cet ordre ne de-
vaient faire qu'un même corps, et s'enlr'ai-
der les unes les autres dans les besoins tem-
porels ; et, afin de conserver le même esprit
partout, elles devaient être gouvernées pour
le spirituel (sous la dépendance néanmoins
des ordinaires) par des prêtres qui devaient
aussi former une congrégation du même in-
stitut, qui s'y devaieni donner par vœu el s'y
consacrer en y donnant leurs biens et leurs
(1) Voij., à la fni du vol., n" Uû.
603
DICTION.NAIUE DES OKDiiES RELIGIEUX.
possessions Irois jours avant leur eiigagc-
nifiii. Ils no pouvaient pas aussi être plus
(le Irontc-iruis ilans clia^iue maison ; mais
ils (ouvaiont assoe-er et recevoir à leur con-
çrétî.ilion des liicnraitours autant et lic même
«luo les lilles , el aux inèuies rondilinns.
liiai.l lorniés clans une soiiile vertu , ou de-
vait les «nvover dans les maisons de filles
pour en prendre la conduite en ciualilé de
superii'urs el de confesseurs, et ils ne pou-
vaient pas élre continués plus de six ans
dans la même maison, après lesquels ils de-
vaiint retourner à leur comniunaulé où ils
demeuraient au moins trois ans sous l'obcis-
Miuco, et on pouvait ensuite lesienvo^er
dans la même maison de filles dont ils étiiienl
sortis. Knlin ces pri^lres devaicr.l avoir un
général et !cs lilles une générale dont l'office
aurait été à vie, el ce général et cette géné-
rale pouvaient nommer celui ou celle qui
devait leur succéder. L'un et l'autre devaient
demeurer dans la même ville pour agir tou-
jours de concert dans les alTaires de Tordre ,
e( ils devaient fiiri^ la visite des maisons.
Tels étaient les principaux articles qui re-
gardaient rinstilul en général.
Les cOMStilutions sont divisées en six par-
lies. Il est encore parlé dans la i)rcmiére de
la fin de l'inslilut , de la Mère générale et
des .Mères supérieure , adjulrice , direciricc,
assistantes ou conseillères ; de la maltresse
cl sous-maîtresse des novices et des sœurs
bienfaiiric'S. Dans la seconde, on parle des
vœux en général et en particulier, de la pau-
vreté, de la chasteté , de l'obéissance , de l,i
clôiure , du noviciat , de la profession , des
novices et des jeunes professes. \'oici la for-
mule des vœux : Cinix, écoulez ce que je dis,
que la leire entende le j)ropos de mu bouche ;
c'est à tous , 6 mon aimable Sauveur, à qui
mon ccrur parle, bien que je ne sois que pou-
dre et cendres. Je Sœur ^. donne el drdie ma
personne à la Congrégation des Sœurs de
Siiint-Josepli élablic pour t'inslruclion et
éiluciition dts filles orphelines , piiur y vivie
et mourir, el fuis iwu de pauvreté , de chas-
teté, obéissance, el d'instruire et élever les
pauvres filles orphelines en gardant la clô-
ture, conformément à notre institut. Lesquels
xœux je promets à mon Dieu el à vous iV. de
garder l'^ul le temps de ma vie moi/cnnant sa
sainte grâce, snppliint su divine boulé que ce
soit à sa plus grande gloire 't à mon salul.
Ainsi soit-il.
Dans la Iroisième partie de ces conslitu-
lions, il est p.jrlé des scrurs m généial, île la
eliarilé mutuelle , des j< Unes, des abstinen-
ci s , de la discipline, de l'oraison . de l'of-
fict! divio, des prières vocales, de l'usage des
sacrement-, des conle>seurs cxtraor.iinaircs,
do la retr.iite , de la rénovation des vti-ux ,
du vilenee et des aulrc-< pra i(iues. Les jeû-
nes et 1rs .'ibslinences à ijuci ces constitu-
tions les obli;;eaienl n'étaient pas considera-
l)les : outre les jeûnes ordonnes par I l'"gli«e,
elles devaient encore jeûner les \eilles des
féic» de Nolrc-Scigneur , de la Vierge , de
700
saint Jose|ih, de saint Augustin. Quoiqu'elles
ne fussent pas obligées de jeûner les ven-
dredis , elles ne pouvaient pas néanmoins
avoir de pitance le soir, et ne devaient faire
que coilation.Tous les samedis i Iles devaient
prendre la discipline en com Minaulé, i t tous
les vendredis, les veilles des fêtes de la sainte
Trinité, de saint Joseph, el le vendredi saint,
elles devaient recevoir des mains de la supé-
rieure eu esprit de pènileiiee cin(| coups de
discipline, pour honorer en ces jours la lla-
gellation de Nutrc-Seigneur Jesus-(]hrist.
Ces constitutions ne les obligeaient qu'au
petit office de la Vierge, et les S(eurs conver-
ses devaient récit' r seulement ceri.in nom-
bre de Pater cl ii' Ave. Les dimani lies et les
fèti s, elles divaienl chanter la messe el l'olfi-
ce, et aux autres jours seulement psalmodier.
Dans la quatrième partie, il est parlé des
lieux réguliers, du cha|iilre, de la coulpe, do
la distribution des ouvrages, des cellules, de
riiabillement; dans la cinquième , des offi-
cières en particulier; el dans la sixième, de
l'ordre el de l'emploi de la journée, lanl
pour les sœurs que pour les orpliclines et
les pensionnaires. Telles furent les constitu-
tions de cet ordre, qui n"a fait aucun pro-
grès, n'y ayant que les religieuses de la Ko-
clielle qui suivent présentement ces consti-
lulio is, et qui obtinrent, le 21 juillet IlitJ'i-,
u:i déc:et du card.nal Fahio Cbigi, b'gal en
France , pour avoir permission de faire des
vœux solennels. Mais, comme il fallut que
ce décret fàt autor.sé par lettres patentes du
roi , enregistrées au parlement de Taris et
dans les justices de la Rochelle, el (jue ces
religieuses eurent encore besoin du conseii-
lement de Tcvèque, ce qui ne se fit pas s.ins
oppositions , elles ne firent leurs vœux so«
Icnnels que Tan 1G72.
lilles avaient pris d'abord l'habit prescrit
par les cons'.ilutions , savoir une robe vio-
lette avec un scapulaire de pourpre, un maii-
Icau bleu traînant jusqu'à terre, une guimpe
et un voile blanc , sur lequd eibs eu mct-
laienl un bleu de toile claire (I) ; mais, en
faisani. leurs vœux solennels, elles ont quille
cet habillement pour en prendre un noir,
qui consi>te en une rube, un scapulaire et un
manteau noir, avec un grand voi e (jui est
noir aussi (2). Le projet d'établir une géné-
rale s'est évanoui, aussi bien ()ue I èlaldisse-
inent de I i Congrégation de prêtres et de
leur général. Les filles de Limoges font aussi
des Vieux solennels, et sont habillées comme
les leligieuses de l.i \ isitation ; mais elles
n'ont pi inl de croix.
Telles de K uen ont seulement pris Thabil
religieux, mais elles ne font (jue des vceux
simples. Liles reconnaissent aussi pour lon-
d ilnce mademoiselle iJelpccli de TLstang.
Mad.ime de Hrébion , saur de .M. Il.inivelic
de .Mènevilletle, receveur général du dergé
de l''r,ince, et femme de M. de IJréhion, maî-
tre en la chambre des comptes à Kouen,
donna de grand» b;eus à celte maison, el,
non contente d.; ce. a , elle s y consacra au
UJ Vvij., à la liu du vol., n* 166.
('2) Voij., à h (in Jj vol., n"' WJ cl 17U.
70i
JOS
JOS
702
service des pauvres orphelines du vivant et
du conseiileinenl de son mari. M. de Mène-
viilelle, président à mortier au parlement de
Rouen, en a élo aussi un des principaux l)ien-
fai:curs, et lui a donné la terre et seigneuiie
de Néauville, à une lieue de celle ville, qui
a près de 2,000 livres lie levenu. L'an 1654,
le rni acionla à celîe ma son d'orphelines des
lettres paleiiics où il est parlé des autres
éiahlisscnicnls du même institut faits à Bor-
deaux, à Taris et à Aj;en.
Les sœurs de Saint-Joseph di' Rouen sui-
vent pré>enlement les cousiitu inns qui leur
ont été données l'an 1695 par l'arclievéquc
de cette ville Jacques-Nicolas Colbeil, et,
conformément à ces constilulion'i, outre les
jeûnes ordonnés par l'Eglise, el'es jtûneul
encore tous les samedis de l'année et tnus
les vendredis de l'a veut, les veilles lies fèics
solennelles de Notre-Seigneur, de la sainte
Vierge, d( s apôtres et de saint Michel; n:a;s
cjuand ces fêles arriienl un veuiliedi de l'a-
venl ou un samedi de l'année, elles sont dis-
pensées de jeûner ces jours- à, s'il est jeûne
d'iîglise les veilles de ces lèles. Elles disent
au ehœur le petit office t!e la \iergc. Elles
ne vont poiit aux parloirs pendanl ra\ent
ni pendant le carême; et, dans un autre
temps, elles n'y vont qu'; ccompagnées d'une
écoule. Le nombre des sœurs est limité à
seize, et ne peut élre augmenté, à moins que
le nombre des orphelines n'augmonle. Elles
font, comme nous avons dit, le-' vœux sim-
ples de pauvreté, de chasteté, d'oliéissance
en cette man ère : Je N- sœur, me confiant
en ta grâce de Notre-Seigneur Jésus Christ,
de l:t très-sainie Vierge, de sa:nl Joseph, pa-
tron et prolecteur de cette maison; de toits tes
anges et des saints de païadis, fais vœu à Dieu
de pauvreté , île clins rté et d'obéissance, pour
m' imployer au servite des pauvres or phi Unes,
suivant les constitutions de la Congrégation
de Saint-Joseph, dont je déclare avoir eu une
particulière et parfaite connaissance, en pré-
sence de notre supérieur. En foi de quoi j'ai
écrit et signé le présent acte, etc. Quant à leur
habillement, il cons sie en une robe de griS
obscur, ouverte seulement jusqu'à la cein-
ture, et fermée par des agrafes; elles oui pour
coifl'ure un petit voile blanc, et par-dessus
Un autre voile noir d'élamine. Elles ont aussi
un basideau et une guin)pe carrée, et au bas
de cette guimpe une médaille d'argent où
d'un coté est l'image de saint Joseph tenant
l'enfant Jésus par la main, et de l'autre, l'i-
mage de la suinte Vierge tenant le môme en-
fant entre ses bras (I).
Voyez l'Institution de la Société des Sœurs
de Saint^Josepli pour le gouvernement des fil-
les orphelines de la ville de Bordeaux, impri-
mée en 1708. Constitutions des Filles de Saint-
Jose,M dites de la Providence, imprimées à
Paris en 1(J91. Institut, Règles et Constitu-
tions des Filles de la Trini:é-Créée, imprimées
à Paris en lUti'i . Constitutions des Fillis Hos-
pitalières de la Congrégation de Saint-Joseph
pour l'instruction des orphelines, imprimées à
Rouen en 1C9G; et Mémoires envoyés parles
religieuses de la Rochelle en 1709.
JOSEPH (Hospitalières de Saint-).
L'ordre des Hospitalières da Saint-Joseph
a commencé par une commnnanlô d- filles
séculières établie par les soins de mademoi-
selle de la Ferre, fille d'une grande piété et
d'une famille distinguée de la vi'le de la Flè-
che en Anjou. Gomme elle avail un attrait
singulier pour l'oraison, et que Dieu lui com-
muniquait beaucoup de grâces, ses directeurs
lui conseillèrenl de se retirer dans un mo-
nastère pour y faire profession de la vie re-
ligieuse; mais, étant tombée malade jusqu'à
qualie fis lorsqu'elle avait voulu exécuter
ce dessein, elle connut que Dieu l'appelait
ailleurs. La charité la porta l'an lC4'2à pren-
dre le soin des ])auvres de l'hô; ital de la
Flèche. Dans le même temps, mademoiselle
de Uibère, fille d'honneur de madame la prin-
cesse de Coudé, étant tombée dangereuse-
ment malade à Paris, le P. Bernard, dit le
Pauvre Prêtre, en qui elle avait beaucoup
de confiance, lui dit que si elle fais lil vœu
de quitter le monde, «lie recouvrerait la
santé. Elle le fit et elle fut guérie. Pour exé-
cuter son vœu, elle vint dans un monastère
assez proche de la Flèche pour s'y consacrer
à Dieu; mais, ne se sentant point d'inclina-
lion pour y demeurer, on lui proposa de se
joindre à mademoiselle de la Ferre, dont la
vertu et les emplois lui étaient connus. Elle
ne crut pas pouvoir mieux accomplir son
vœu qu'en suivant son exemple. Une troi-
sième fille s'associa <à elles, et elles allèrent
toutes tiois, le jour de la Sainte-Trinité, de—
uKurer à rhôpilal pour prendre soin des
pauvres. La même année, elles eurent dix
aulres compagnes , et leur communauté
s'auginentant a nsi toi s les jours, l'évêque
d'Angers, Claude de Ru. il, leur donna des
constitutions qu'il approuva le 25 octobre
1Gi3 Leur nombre devait être fixé par ces
conslilulions à trente filles hospitalières et
six sœurs domestiques. Tous les trois ans,
elles devaient élire une supérieure le 22 jan-
vier, fête des Epousaille^ de la sainteVierge.
Après avoir demeuré huit ans dans la con-
grrgation, elles iaisaienl des vœux simples
de ( hasteté, de pauvreté et d'obéissance, et
de s'employer au service des pauvres; mais
elles ne s'engageaient que pour trois ans,
pour un an, ou pour quelque autre espace
de temps, après lequel elles renouvelaient
leurs vœux pour un autre temps. Leurs ha-
l)its étaient simples et modestes, et consis-
taient en une robe fermée par-devant avec
des crochets et des portes, en forme de sou-
tane un peu ample, serrée sur les reins avec
une ceinture de laine, un corset et une jupe
par-dessous, le tout de serge noire. Les filles
hospitalières portaient une coiffe noire avec
un mouchoir de cou, et les sœurs domesti-
(■,ues, un capot tl'étamine avec un mouchoir
de cou, dont la toile était plus grosse que
ceux des filles, et l'ou donnait aux unes et
(IJ Voij., à 1.1 lin du vol , u" 171.
703
.TUS nulrps. lorsqu'elles avaienl prononcé
leurs vtrux, une li.i^uc d'arjîcnl, où il y ■'vail
en éeril autour : Ji'sus.Marie. Joseph, iiu'cl-
les i)i>riaicMl au petit doitit de la main gau-
che (1).
A peine relie coiiprégalion ful-cllc établie,
qu'elle reçut un i^r.mil avantage par la pré-
seiirede la prinfe>se d'Kpiiioy, Aune de Mc-
lun, (ille de Guillaume de Mclun. Celle prin-
cesse avait été pendant plus do vingt ans
chanoines-e de Mons. Kilo se relira après la
niorl de son père et à l'insu de ses parents,
chez les (illes de la Visil.ition de S.iUfiiur,
sous un nom déguisé; tuais elle y fut bien'ot
découverte, el, ci)mmc on pailuil de faire un
etabllsscmcnl du même institut en Flandr>',
el que l'on proposa à mademoiselle de Melun
d'en aller jeter les foiidetneuts, elle regarda
riioniieur qu'on lui f.iisait comme une ten-
tation du denion, qui, jaloux de son bonlicu ,
voîilail dej.à lui faire perdre le fruil de sa
soliiudeeii la retirant de sa vie cai héo. dont
elle commençait à goûter les douceurs ; c'e^t
pourquoi elle pensa aux moyens de sortir de
ce monastère sans que l'on sût où elle devail
aller. Kllc communi(|ua son dessein au V. du
IS.euil, de la compagnie de Jésus, qui lui
ayant proposé les llospitalières de la Flèche,
dont la congrégation ne faisait (jue de naî-
tre, et dont les religieux de celle compagnie
avait ni la dircclion, elle se senlit intérieure-
ment portée à embrasser cet instilul.et,
|iour n'être point connue, elle entra dans
celle congrégation sius le nom de mademoi-
s< Ile de l.i Haye. Mais ces Ilospilaliè; es, qui
étaient pri venues d'estime el de considéra-
tion ]i()ur elle sur le récit que le P. du
lireuil leur avait fail de son mérite, furent
extiémemcnl surprises de la voir entrer
chez elles en équipage de .'crvanle ; car elle
avait un gros babil de bure, un bounel de
laine ^ur sa léte el des clous sous ses sou-
liei s ; el quelqu'une lui ayant demanilé son
nom, elle répondit qu'elle s'apjielait .\nne de
la Terre. Tout cela n'empêchait pas qu'on
n'aperçut à trav( rs cet extérieur si pauvre
un air de grandeur cl des in.inières aisées ,
qui la taisaient distinguer du commun ; et,
i|uoii)u'elle s'eludiâl à se cailler avec beau-
roii[i de soin, elle ne put si I ion f.iire, qu'on
ne vil dans sa val. se qu.inliié de liiigi' de
toile de llullandi' très-fine, qu'elle donna
ensuite à l'église pour f.iirc des nappes d'au-
tel et des aubes, priant la supéiieure de lui
faire ilonniT du linge cl des chemises de la
cumiiiunaulé , comme on faisait ch kjuc
semaine à toutes les sœms , et , lors-
qu'elle pouvait choisir sans i)u'on la vil, elle
prenait toujours les plus grossières el aux-
quelles il y avait le plus de pièces.
.Madenioiscllc de .Melun ayant été reçuiî
dans Cille congrégation d'hospil .l.ères, on rn
demanda quelques années après pour aller
faire de pareil» et il lissernents. La ville de
l.av.il fut la première (]ui en demanda, l'an
Il 52, et la même année elles furent appelées
a baugé. Mademoiselle de Melun fui du
DICTIONNAIRE DES ORDRES RKLIGIEL'.X. 701
nombre de celles qui furent destinées pour
ce dernier élablissetnent ; elles y furent con-
duites par la .Mère Maiie de la Ferre, pre-
mière snpérieiire el fin lalrice de celle ron-
grégalioii, el dans l'obédience qu'elles reçu-
rent de l'cvêque d'.Vngers, Henri .Arnau l ,
m-idemoiselie de Melun est appelée sœur
Anne de la Haye. Mais, quoiqu'elle fût re-
connue pour la princesse d'Fpiuoy quelquci
années après, lorsque son rère le >i omtc
de Gand, s.ichant (ju'elle était à lîaugé, l'y
vint irouver, elle retint toujours le nom de
la Haye ju qu'à sa mort.
.■\pre-. avoir été découverte, cl ne pouvant
plus e. cher sa qualité, le désir qu'elle avait
de faire du bien à son liApilal l'cmport-î sur
celui qu'elle avait de passer le reste de s s
jours dans la solitude. Trois de ses frères
la vinrent prendre à H.iugé pour la conduire
à Paris, afin d'assister au paitage des biens
du piiiiie d'Kpinoy leur prre. File ne demeura
que deux mois dans celte ville, el les biens
qui lui échurent en partage servirent non-
sculemenl à faire faire des bàliments <i son
hôpital de Haugé et à lui assigner des renies
pour son enlreiien ; mais elle fauda encore
dans la suite celui de lîeauforl. Nous ne nous
étendrons pas davantage sur les verlusetirs
actions de celle princesse, qui n'csl pas la
fondatrice de la congrégalion des hos|iitaliè-
res dont nous parlons, et qui ne peut être
regirdée que comme fondatrice et bienfaitri-
ce des hôpitaux de Haugé et de Beaufort du
même institut; l'on peut voir sa Vie qui fut
donnée au public l'an 1C87 ; el nous pas-
sons à re (jui regarde cette congrégation.
Los hôpitaux de Bauge et de Laval ayani
êlé fondés, comme nous venons de dire, ces
hospitalières firent encore d'autres établisse-
ments. Hles furent appelées à Moulins en
liourbonnnis, l'an 10.'JI. Cet établissement se
fit encore par ! i .Mère de la Ferre, qui y mou-
rut ; et en ICo9 elles p:isscrenl les mers pour
aller dans le Canada, où elles s'établirent
dans la ville de .Montréal. Jusque-là elles n'a-
vaient tait que dos vœux simples, el, comme
elles pouvaient sorlirde la congrégation avec
dispense de l'cvêiiue, plusieurs l'avaient de-
mandé cl l'avaient olilonu. Ce qui avait cau-
sé des procès dans leurs familles, lorsqu'elles
avaient voulu entrer en paitage des biens :
c'est pourquoi 1 i plu|iart de ces hospitaliè-
res se déle minèrent à prendre la stabilité et
à s'y engager par des vœux solennels. La
mais m de Laval commença l'an llil'),'}, et lui
la première à prendre l<i slabiliié ; el dans le
même temps elles furent demandées pour
aller fa re un éiablissement à Nimes, où elles
f rent fondées par lévêque de ce lieu N...
Cochon. Les maisons de .Moulins, Bauge el
Montréal dans le C.anada prncnl ensuite la
stabilit ', • t le pa,io .Mex.indrc \ II, par un
bref du 1'.) janvier llilil). vérilie au parlement
de l'ai is le MO août llili", approuva cet iiisli-
lul, el dèclar.i (|ue les liospitaliéios s >ities
de l'hôlel-ilicu de la Flèche pour aller à La-
val, à Nimes, à Baugé, à Moulins el à Monl-
(I) Viiy., à la lin du \ol., a"* 172 cl 175.
70.-1
LAT
LâT
:o'j
ré.il dans le Canmla, étaicnl véritahlcment
religieuses, ayanl fail les (rois vœux solen-
nels el embrassé la clôture sous la règle de
saint Augustin. L'urs consùtuions lurent
dressées l'an 1085, par l'évêquc d'Angers
Henri Arn.iud.
Gete congrégation fit ensuite de nouveaux
progrès. La ville d'Avignon fit venir de ces
religieuses l'an 1670, pour leur donner le
Roiii du grand hôpital. Celui de Beauforl fut
fondé par mademoiselle de Melun en 1671.
Klles furent appelées en 1683 dans la ville de
risle au comté Venaissin, et en 1093, la
Mère des Essarts, première religieuse de la
maison de Laval, et qui avait f.iit rétablisse-
ment de lîeaufort, fut rappelée par un arrêt lu
consi il à la Flèche, couime y ayant fait ses
premiers vœux, l'arrêt portant que les pre-
mières filles qui en étaient sorties y revien-
«Iraient pour y mettre la siabililé. Mais ,
comme les autres étaient mortes, elle mena
avec elle quatre religieuses de Beaufort, qui
établirent la stabilité à la Flèche, el celte
maison, qui avait donné naissance à la con-
grégation, éiant la première de l'institut, fut
la dernière à prendre l'étal régu'icr. Les
hospitalières de Nîmes ont fait encore un
autre établissement à Uivire dans le Lan-
guedoc, en 1700.
Les religieuses de cette congrégation ont
toutes les mêmes observances, elles n'ont
changé que fort peu de choses à leurs pje-
mières constitutions ; elles ont aussi toiiscrvc
le même habillement, sinon qu'au luu do
coiffe, elles ont ])ris le voile noir, et, au lieu
de mouchoir de cou, la guimpe comme 1rs
autres religieuses. L'essentiel de leur insti-
tut, c'est le service des pauvres ; à quoi elles
s'obligent par un quatrième vœu, et t|ue -
ques monastères donnent à la mort de cha-
que religieuse professe trois cents livres.
Elles ne sont obligées qu'aux jeijnes ordin-
nés par l'Eglise el à réciter tous les jours le
petit office de la sainte Vierge. Les diuian-
ches et les fêles, elles chantent seulemenl les
vêpres. Voici la formule de leurs vœuN.:
Dieu tout-puissant, mon créateur el sauver .in
Seigneur, Je, N., quoique indigne de me pré-
senter devant vous , toutefois me confiant en
votre miséricordieuse bonté, et poussée du dé-
sir de vous servir de ma pure, francité et dé-
libérée volonté, en présence de toute la cour
cileste el de cette communauté, fais vœu pour
t mie ma vie à votre divine majesté, de pau-
vret ', lie chasteté el d'obéissance , et de m'ent'
ployer au service des pauvris en uni'.n Je
charité, selon la règle de saint Augustin et les
constitutions de cette congréguliun; vous sup-
pliant t'vs-liumljlement, ù mon Dieu, par les
méritesde Jésus-Christ viitre Fils, de sa sainte
mère, de saint Josep'i et de saint Augustin,
que, comme il vous plaît me faire la grâce de
me consacrer à vous par ces vœux, il vous
plaise me la continuer abondante pour m'en
acquitter fidèlement. Ainsi soit-il.
Tous les ans, le 22 féyrier, fête du Maria-
ge du la sainte Vierge avec saint Joseph,
elles reiiouvelli nt leurs vœux en cet e ma-
nière : Je, N., confirme et renouvelé à mon
Dieu les vœux que je lui ai fuiis pour toute
ma vie, de pauvreté, de chasteté et d'ohéissan"
ce , et de servir les pauvres en union de cha-
rité en cette congi égaiion, r.u nom du Père,
du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.
Si quelque maison de l'institut détient
pauvre el en nécessité, les autres doivent
l'assister, prétérablcment à toute .lUlre cha-
rité, selon leur pouvoir, plutôt ([ue de faire
un établissement nouveau ; et, pour empê-
cher (pie cette union entre les maisons de la
congrégation ne diminue par succession de
temps, toutes les maisons do. vent s'écrire de
temps en temps pour s'exciter à ag r dans un
même esprit et pour la même fin. Ouire les
sœurs destinées pour le chœur el les sœurs
domestiques on converses, chaque maison
peut encore recevoir des sœurs associées , qui
sont des filles ou des veuves qui, par infirmité
ou autrement, ne piuvantêire reçues à l.i
profession rel gieuse , désirent néanmoins
passer le reste de leurs jours dans celte mai-
son, pour y vivre avec les religieuses, sans
être obligées à leurs observai)ces. Ces asso-
ciées doivent f.iire des vœux simples el porter
un habit simple et modeste.
Règle et Constitutions pour les religieuses
hospitalières de Saint-J seph Mémoires en-
voyés par les I eligie .ses de la Flèche ; el l'on
peut consulter la Vie de mademoiselle de Me-
lun, imprimée à Paris en 16S7. Celle prin-
cesse ne fut point religieuse, el, après avoir
demeuré Ireiili! ans dans riiôpilil de liaugé,
elle y mourut le 13 août 1679.
JOYEUX. Voy. Frères Jhyf.ux.
JULIEN DU P'OIKIEK. Votj. Alcantara.
JUSTINE DE PADOUE (SAl^Tu;-). Voij.
Mont-Cassin.
K
KL\RAN (S^iNT-). Voy. Irlande.
L
LANFRANG (Saint-). Voy. Augustin (Com-
GnÉGATioN DE Saint-).
LANGUES ( Hospitalières de )• Voy.
Dijon.
LATRAN (Chanoines DE Saint-Sauveur de).
§ I". Origine des Chanoines Réguliers de Saint-
Sauveur de Latran, avec la vie du V. P.
Barthélémy Colomne, leur réformateur.
Lorsque le grand Constantin eut donné la
paix à rEg!ise el qu'elle commença à jouir
de la liberté, après laquelle elle soupirait de-
puis trois cents ans, il fil bâtir plusieurs
707 mr.TioNNMriF. nr.5 ouorf.s nn.iniErx. rjs
éj'Iisos CI) (li\ors lio::\ , priiK ipaliniipnl à pr-chcs de cp Rinnd homme, déchirôrcnl sa
Jionie, où les é.liscs de S.iitil-.IiMii, de S.iiii!- répulalion p.ir lanl de calomnies et de iinSdi-
l'i. rre, de S.iini-Paul, de S,iintc-Croi\ cl «!c sauces, que, pi)ur céder à leur envie,
SaiiUe-Açnès /lors deg murs, sont encore à il fui o!ili|;é de quillcr Rome pour relourner
piéscnliies marques de la piéle de cet ein- dans la Palesline.
pcreur. Ce fui dimc sous le poulifical de saiiil
lihlre ces éplises, relie qui lient le premier Lé^n l" que les clercs de ré:;lise de Sainl-
r;ing noii-seulement dans retle ville, mais Jean de Lalr,:n véiurent en commun. 1 s ùe-
qui csl encore reconnue pour la mère do meuri'renl | endanl plusieurs années dans
loutes les éi;lises du monde, est ce'.lc qu'il (il l'observance des canons aposloli(iues ; mais
liiVir dans le palais de l'impératrice Fausta, le relàcliemenl s'élanl introduit peu à peu
sa femme, auparavant nommé la maison de parmi o\ix, Aisxandre 11, qui avait été Cha-
Latran, du nom de Plaulius Lateranus , se- noine de la congrégation de Saint-FriLçdien
naknir romain, à qui elle appartenait lues- de; l.ucques, fil venir des Chanoines de celle
que l'empereur Nrcn le fit mourir comme congrégation l'an lOtil , pour réformerl'Ejjlisc
un des chefs de la conjuration qui s'était for- de Lalian, et, ay inl fait assembler un con-
mée contre lui l'an Go. Ses biens ayant élé cile à R(/mc l'an 10G3, où l'on traita de la
confisqués, cel empereur et ses successeurs réforme des Chanoines, il assujellil ceux de
l'ont toujours possédée jusqu'au temps de l.airan à l'observance de ce qui avait élé
Conslanlin, qui la donna à saint Sylvestie. ordonné dans ce concil;'. Il déclara aussi celle
Ce prince y ayant fait bâtir une église, eile Eglise chef de plusieurs maisons de Clianoi-
ful appelée de son nom Conslantinienne, au- nés qui en dépendaient, et qui tous ensem-
Iremenl l'église du Sauveur, à cause que bln fermèrent une congrégation (|ui d,''S ce
lien lanl que s linl Sjlvcsti e en fiisaii la dé- lemps-là prit le nom de Lairan, el élail sépa-
(licace, Pimage du Sauveur du monde appa- rée de celle de Saint-Frigdicn de l.uc()ues.
rul sur la muraile ; et, comme CCI empereur Ils possédèrent cette cj;lise pend ml plus
fit faire proche de celle église un b.i|itislcre, de huit cciils a^ s, d'|iu s >aint Léon I" jus-
el que les baptistères avaient l'image de qu'à Bonifare \'lll, ((ui, ayant élé élevé sur
saint Jean-Bapt sie, on lui donna aussi le la chaire de saint Pierre l'an 129V, les obli-
iiom de Saint-Jran de I.alran, qui lui est gea d'en sortir pour mettre des séculiers à
resté, (|uoiquesou véiitable nom soit celui leur pla.c. Pour lors la congrégation de La-
de Sainl-Sauveur, puisijue c'est sons ce notn Iran commença à diminuer, cl s'éle^gnil peu
que ri<'glise solcnni 'jle 9 noveiiil)re,la dédi- de lemps après, ayant perdu lous les mouas-
cace de cette église. très qu'elle pv).ssédail, les uns ayant été
Les papes l'ont touj' urs reconnue pour sécularisés, les aulies ayant été dv)nnés à
leur ca!hedr;!le,el depiis sainlSylvestrc Cs y d'autres ordres, comme celui de tjrolta-Fer-
ont toujours fait leu; demeure, à l'excei.liou r.ita aux moines de Sainl-liasile.
dedeuN ou trois, jusqu'au lemps que le sailli • Penol dit que les autres actions de Boni-
siége fui Iranslérc à .Avignon. (îrégcire XI face ^'III rapportées par Plaline et lesaulri's
r.iyani transporté à Home après soixante et historiens de sa \ie, font assez coniiaitre les
dix ans d'absence, comme le iialais de La- raisons qui le portèrent à leur ôler l'église
Ir.-in, conligu à celle église, étaii tombé près- de Lalran. Il semble qu'il veuille accuser
que en ru. ne, les souverains pontifes o:,l s n avarice, qui le voulait faire profiter des
f.'iii depuis ce teuips leur lésidence au \'ali- grands biens qu'ils possédaient, et <iui peut-
ran ou à .Monte-Cavllo. être servirent à augmenter ces tre-ors i n-
l)om (jabiicl l'en t, Chanoine Uégulier de menscs qu'on lui trouva lorsque Nogarel ,
la congrégation de Lalran, qui en a fait gentilhomme français, avec quelques che-
riiisloire, [irélendani qu'il y a eu une con- vaux du duc de \'alois, accompagné des Co-
linualioii siins interrupiion de clercs <iui ont lomnes et de quebiues autres gcnl IshonimC'»
Técu en commun depuis les apôtres jusqu'au di- 1 1 faction des Cibelins, se saisit de sa per-
tem(>s de saint Sylvestre, diti)ue ce fui ceu\- sonne a Anagnie. Nous verrons dans un au-
là que ce pape établit dans celte église; mais, tre endroit l'adresse dont il se servit pour
comme celle [iréienlion esl disputée et que parvenir à la papauté, el la manière duit il
la véritah'e origine des communautés de agit envers son prédécesseur, qui s'était dé-
clercs n'est attribuée qu'à saint Augustin, mis île celle dignité, et que l'I'iglise honore
nous croyons plus aisément ce (jii'ajoute cet comme un saint; mais il ne faut pas nous eloi-
autpur. (|ue saint Léon I" se seivil vers l'an pner des Chanoines Kéguliirs, qui furent rela-
ie'lO de (îé ase, qui fut dans II suie un de ses blis cent cinquante ans après dans celle mémo
successeurs, el qui était disciplede saint Au- église de Lalran par Ivngène l\' ; et, comme
gusiin, p'iur réformer les clercsde celle église la congrégalicm Frigdioinennc ou de Sainte-
et les fain- vivre selon les règles que ce grand Marie de I risonaire fui celle sur laquelle ce
docteur de l'I'.glise ava.l prescnles à ceu\ de pajie jela les yeux pour en lirer ces C.bauoi-
son Iv^lise d'Hippone, qui ne contenaient ([ue nés, el qn il voulut qu'elle fut appelée dans la
re que les a;6lres el les premiers fidèles do suite de S.iint-S.iuveur de Latraii, il esl à
ri'glise de Jérusalem nvai'iil pratiqué. propos de r.qipoiler son origine.
lui eflel le clergé de Uonie .avait besoin La congrégation Fr igdioniinne ou de
de riforiiie, puii(|ii(; saint Jérôme se plaignait Sainte Marie de Frisoiiaii e esl differenle de
dès I an :i8.') des deri glemcnls des clercs «le celle de Sainl-Frigdien de Lncques , dont
celle ville, qui, n'ayant pu supporter les re- nous parlerons au S I" > quoniue ce ne soil
709
LAÏ
LAT
710
qu'à eausc de ce saint qu'elle ail clé appelée
I riiçtlionienne ; car l'on prétend qu'étant
évéque de Lucques, il fit bâtir à trois milles
de cette ville une église sous le nom de Noire-
Dame, qui par succession de temps a élé ap-
pelée, à cause de son fondateur, Sainio-Maric
Frijîdionii'nne, et par corruption Frisonaire.
Celte égli-e avait toujours été desservie par
(les clercs vivant en commun, qui devinrent
("lianoines Iléguliers, lorsqu'on eut obligé les
clercs qui vivaient en commun à la désappio-
priiition. Ils se rendirent recommandahles
par la sainteté de leur vie ; mais leurs succes-
seurs au xiv" siècle s'étaient bien éloignés
de leur esprit. A |.eine trouvait-on chez cok
des traces de la discipline régulière, le tem-
porel était aussi mal adminisiré que le spiri-
tuel, et ce qui restait des revenus, qui avaient
été aulr<fois considérables, ne suffisait pas
pour l'cnlietien de trois religieux qui s'y
trouvaient en 1382.
L'évêque de Lucques, y ayant fait la visite
cette même année, avait tâché d'y apporter
quelque réforme. Les religieux y ava'enl
consenti et avaient même tenté plusieurs fois
d'exécuter un si bon dessein ; mais, hien loin
d'y pouvoir réussir, les fréquents jassagcs
des armées et plusieurs partis qui étaient
souvent venus piller le monastère IfS avaient
contraints de l'abandonner pour se réfugier
dans la ville.
Comme ils persistaient toujours dans leurré-
solution. Dieu envoya à leur secours un saint
homme qui a élé le réformateur des Chanoi-
nes Réguliers en Italie, et à qui l'on a donné
le tilre de fonilateur do la congrégation de
Sainte-Marie de Frisonnire. Il s'appe'ait
Barlhéle.i) Colomne.de cette ancienne famille
des Culomncs en Italie si connue par sa no-
blesse, par les grands hommes qu'elle a
donnés à I Egl.se et dans les années, et |iar
la charge de grand connétable du royauiuc
de Naples, qui lui est héréditaire. Parmi ceux
qui en sont sortis, il s'en est trou\é beau-
coup qui ont préféré Ihumiliié et uoe vie
pauvre el relirée à tous ces avantages que les
f;ens du pionde estiment tani. L'ordre de
Saint-François se glorifie d'en avoir eu tro s,
qui s'y sont rendus célèbres par la sainteté de
leur vie, qui sont les bienheureuses Catheri-
ne, Marguerite el Séraphine Colomne ; et,
sans parler des autres ordres, celui d< s Cha-
noines Réguliers a eu dom Barihéleiny Guloin-
ne, qui, étant né de parents si illustres, no
manqua pas d'êire élevé dans tous les exer-
cices qui regardent la noblesse ; mais il ne
s'appliqua qu'à ceux qui conviennent vérita-
blement à un chrétien. La grandeur de sa
maison ne l'éblouil pas. il ne se ilatla pas de
l'espérance de pouvoir possédrr un jour i es
premières dignités dont ses ancétros avaient
élé revêtus ; et, s'il embrassa l'élal ecclé-
siastique, ce ne fui que pour servir Dieu
plus parfaitement. H seconlcnla à cet ciLt
d'un simple canonical, dont il rcni| lit les di-
voirs avec une fidélité irréprochable.
Quoique Dieu lui etit donné de grands ta-
lents pour la prédication, il fut néanmoins
un assez long icmps sans les faire valoir,
pendant lequel il s'appliqua à l'élude de l'o-
raison ( t de la méililalion. Mais, considé-
rant l'élal déplorable où l'I'^glisc était réduite
par le schisme qui la désolait depuis plu-
sieurs années, el qui él.iit conlinné par l'an-
tipape HiMioît XIII contre le vfritable suc-
cesseur de saint Pierre, Boniface IX; et, pour
me servir des mémos termes de Nico'as de
Clémangis dans la remontrance qu'il fit au
r )i Charles VI au nom de l'université de
P;iris touclianl ce schisme, voyant que l'K-
glise était toute défigurée, que les choses sa-
crées élaienl foulées aux pieds, que les vices
«■e multipliaient, que les erinies demeuraient
impunis par la tolérance de ceux qui, pour
se ni.iinli iiir dans !a p'pauté, appréhen-
daient qu'en les punissant leur parti ne di-
minuât ; et enfin que la barque de saint
Pierre au milieu de la lempéle était près de
périr, il quitta son pajs, ses parents, ses
amis, el, s'armanl du zèle de l'amour de
Dieu et du salut des âmes, il entreprit de
combattre les vices qui régnaient si fort, en
prêchant la parole de Dieu, faisant partout
des conversions merveilleuses, el exhortant
tous les fidèles à s'unir ensemble sous un
môme chef.
Il vint premièrement en Toscane; delà
passant par l'Emilie, il s'arrêta longtemps
dans la Marche irév'sano , où il fit un assez
long séjour, aussi bien qu'à Padoue et à Vi-
cenze. Non-seulement plusieurs pécheurs,
touchés vivement par la force de ses prédi-
cations, changeaient entièrement dévie et se
convenissaienl à Dieu par une sincère pé-
niienco; mais même plusieurs eeclésiasti
ques, désirant embrasser un étal de vie plus
parfait, entrèrent d ms des ordres religieux
ou en établirent de nouie.iux.
Kntre les autres, dom Gabriel Condel-
maire, dont nous avons déjà parlé sous le
nom d'Eug'ne IV.qu'.l ()rit loiS(|u'il fut él 'vé
au souverain pontifical, el dom Antoine C»r-
rario, nobles Vénitiens, tous deux neveux
de Grégoire XII, furent du nombre des fon-
dateurs de la congrégation des Chanoines de
Sailli-Georges inAl(/lm;el Louis Barbo, aussi
noble Vénitien, qui fut dans la suite évéque
de Prévise, entra dans l'ordre de Saint-lte-
noîl, où ayant rétabli la discipline monasti-
que, qui avait souffert beaucoup de relâche-
ment en Italie, il fonria la célèbre congréga-
tion de Sainte-Justine de Padoue. Nous ne
devons pas oublier le fameux jurisconsulte
Albéric Avogadri, genlilhonniie deBergame,
qui, renonçant à toutes les vanités du siècle,
se fit religieux dans l'ordre de Saint-Dotni-
nique.et, n'osant pas espérer de pouvoir
parvenir aux ordres sacrés à cause qu'il
élail bigame, il se contenta de l'humble con-
dition de frère lai ; mais, comme il et lit rede-
vable de sa conversion à Barthélémy Co-
lomne, il reçut peu d'années .iprès par ses
mains l'habi't de Chanoine Régulier dans le
monastère de Siinle-Marie de Frisonaire,
aussitôt qu'il y vit la réforme établie par les
soins du P. Barthélémy, qui dans le cours do
sa mission étant venu à Luc(iuos, où il ap-
VA DICTIONNAIRK DICS OKDRES RELIGIEUX. 7l3
pri*. les bonnes inlcnlions do ces ('hanoiiies, La répulalioii quils s'acquirent par Ici
qui, cuinnic nous avons d (, souliailaicnl cni- sainlclé ' c !our vie fil i)u'ou les souhaita dans
brasser une N il- plus rcenlicre, \isiia leur plusieurs endroits, lanl pour y faire de nou-
inmiaslère, dont la situa!ii>n, (|ui se (rouv<iil veaux élablisscnients que | our réformer
au niilieu d un buis, lui pariil si favorable d'aiieiens rnonaslères. L'an liO.j, un b ur-
au dessein qu'ils avaient de \ ivre dans la re- f;eois de M.lan ayant iJossein d'en fonder u'i
traite et dans la soiiiude, qu'il les exlmrta à dans une maison qu'il avait proche de cette
la persévérance, tandis (lue de son coté il ville, en un lieu ap[ielé Caroscite, il y fit ve-
ira l leur chercher des conipaynons pour les nir de ces Chanoines. Le pape Gréiioire XII,
aider dans leur entreprise. l'an 1V07, leur donna l'abbaye de Sainl-Léo-
C'esl pourquoi il retourna dans la Marche nard pro lie de \ érone ; ils eurent en fiO'J
trévisane. ei passa ensuiie dans la Lombar- celle de Notie-Dame de la (Charité ù Venise,
di-, ne cessant point de (irècher partout la et en lili celle de Sainle-.Marie de Treniiti
pénitence. Il liide si ;^rands fruits, que parmi avec toutes ses dépendances, dont les iles qui
ceux qui se convei t reiit à Dieu, il y eut plu- lui ont donné le nom font partie, et qui a| -
sieurs personnes religieuses qui résolurent parliennent à ces Channines, qui y ont toute
d'embrasser la rélorme qu'il s'éiail proposée, j'iridiclion spirituelle et temporelle. Le no'ii-
l)e ce nombre furent Léon de Carat , Mil I- lire des monastères s'auj^mrnla dans ta
nais, et Thadce de Itonasco, tous deux Cha- suite, et il y en avait déjà quinze qui étaient
no nés Uejiulicrs de Saint-Pierre au Ciel-d'Or unis à celle congrégation lorsque D. iiartlié-
de l'avic, (|u'il envoya à Sainle-.Marie de Fri- lemy mourut.
sonaire pour y commencer cette réforme, Ouoiqiic ses fatigues joinicî à ses ausléii-
ce qui a fait dire à quelques auteurs qu'ils tés l'eussent lellement affaibli qu'il en était
étaient les fondateurs de celle con^'régalion. devenu aveugle , il ne discontinua pas pour
Klanl arrivés à Lu ques, ils trouvèrent cela ses prédications. 11 allait toujours a |i ed
d'ab ird de gr.inde^ diliicultés , t'înt à cause dans ses voyages, son coni().ignon le cou. lui-
que ce monastère étail dépourvu de tout ce sani par la main, lùifin, l'an li;JO, élaul
qui était nécessaire pour l'entretien des re- parti de Venise pour aller dans le Monifcr-
lii.icux, que parce qu'clant depuis quelques rat, il tomba malade dans le fameux mona-
années sous la juridicti.in de l'évèque, ils ne slère de Saint-Benoit proche de .Manloue, où
pouvaient y entrer ni rien entreprendre sans il avait demandé rhos|iit.ilité, etla(i\re
sa permission; mais, l'ayant à la fin oblenue, dont 11 avait été attaque l'ayant emporté en
ils jetèrent les [iremiers fundemcnts de cette peu de jours, il alla dans le ciel receioir la
réforme sous le punliûcat de Bouilace IX, récompense de ses travaux,
l'an IVOI. 11 par.iil par réjrilaphe qu'on a mise sur
L'année suivante, Barthélémy vint dansée son tombeau qu'il n'était (jue prêtre séculier
monastère de Frisouaire avec un compa^ et iju'il n'avait pas été religieux, mais il y a
gnon, et y ayanl reçu l'habit, il fut aussitôt bien de l'appa-ence qu'il a élé (Chanoine lié-
élu prieur. Il y eut ensuite plusieurs person- gulier, puisqu'il a élé prieur du mona^lèri!
nesqui reçurent riiabitparsesmains, entre les- de Saiiiie--M.iiie de Frisouaire, qu'il a assisté
quelles l'ut le frère Jacques .\vogadri, nommé à des chapitres généraux et qu'il y a donne
uiip.iravant .Sibérie, dont nous avons parlé; sa voix, ainsi qu il jiarail par les actes au-
qui non-seulement en avait obtenu la per- lhent:ques qui suit cités par l'enol.
mission de son général, mais avait encore ^ n, /- ,■ , i n ■ , ■ i ,-i
été dispensé de son irrégularité par le pape § \] ConUnuaUon de I Instoue desl hanojnes
jusqu'au diaconat. Barihelemv neut pas plu- Réu"liers de la con,jre,jul,on de ^ainC-Sau.
lAUini le temps de sa supériorité, quille prit '"-'*' "* '-'""'"■
avec lui pour être son compagnon dans le Entre les monastères que la congrégation
cours de ses prédications. de Sainte-Marie de Frisouaire a possédés, le
l'endanl son absence , les religieux se plus lecommandable a éle sans doute celui
trouvèrent dans une si grande pauvreté, (|ui ét.iit attaché à l'église de Saint-Sauveur,
que, manquant lie tout ce qui étail nécessaire que l'on appelle plus communément de Saint-
a la V ie, ils avaient résolu d'abandonner ce Jean de Lalran , puisque cette église est la
iiionaslère; mais les Jésuates, (|ui avaient ui\ mèreel le chef de toutes les églises du monde,
couvent à Lucques, en ayanl eu connais- comme nous avons dit dans le paragraj h •
sauce, les exhorièrent à la persévérance, précé lent ; laquelle leur fut accnrdce par le
s'olïrant d'aller chercher l'aumône pour eux |)ape l'Eugène 1\' l'an l'r'i"2.
par la ville cl les lieux circonvoisins ; ce Suit (juc ce pape eût naturellement de l'in-
qu'ils lirenl avec tant de succès en donnant ciination pour les Cha oines Beguliers à
à connaître à tout le monde la sainteté de cau^e qu'il était lui-même l'un d s londa-
ces bons religieux, que non-seulement ils leurs de la congré;;ation des (chanoines de
eurenl abondamment pour leur subsistance, Sainl-Ceorges m Ahjha, ou que, comme dit
mais que par le moyen de ces aumônes ils l'enol, celle église fut dépouillée de tous ses
rétablirent entièrement le monastère, dont ornements, ahaudoiinèe |iar ses ministres,
les bâtiments tombaient en ruine, cl en très- et que le service divin y lill enlièrement
{ eu de temps les revenus, qui n'étaient pas négligé, h peine eut-il surcédé à Marlir. V,
a peine suflisanls pour l'enlrelicn de liois qu'illil venir des Chanoines Uéguliers de la
religieux, s'augmentèrent de telle sorte, congrégation de Frisouaire pour réformer
qu il y en avait assez pour trente, celte liglise; mais il ne jiul e\éculcr pour
Tn LAT
lois son dessein, à cause de la scdilion que
les Coiomne parents de son prédécesseur
exci'.èrent coiilre lui, et des différends qu'il
eut avec le concile de Baie, qui durèrent
quelques années et qui lui donnèrent d'au-
tres occupations.
Une autre séJilion des Romains, qui, sol-
Iic!t<'S par le duc de Milan, voulaient se sai-
sir de sa personne, l'obligea de songer plutôt
à sa sûreté qu'à la réforme de l'Eglise de
Lalran. Il eut mémo de la peine à gagner
l'embouchure du Tibre pour s'embarquera
Oslie sur une galère, d'où il vint première-
ment à Pise, et ensuite à Florence, où il fut
honorablement reçu , lorsque les Romains
pillaient ses biens et emprisonnaient son
neveu le cardinal Gondelmaire.
Enrin.l'an 14't2, après qu'il cul heureu-
sement terminé le concile de Florence, où
assislèrenl Jean Paléologue , empereur de
Conslantinople, son frère Uémétrius et le
patriarche de la même ville, avec plusieurs
éiêques grecs, qui se réunirent à l'Eglise
romaine, aussi bien que les Arméniens et
plusieurs autres scliism;itiques ; étant encore
à Florence, il ordonna aux Ch moines Fri-
sonaires, qui tenaient pour lors leur chapiire
général à Ferrare, d'envoyer à Rome trente-
deux de leurs religieux pour réformer l'E-
glise de Latran. Ils n'en envoyèrent que
cinq, qui logèrent d'abord dans le palais
contigu à l'église même; it, lor qu'ils se
disposaient à bâtir un monastère, ils tom-
bèrent tous malades; il y en eut môme qui
moururent, ce qui fit abandonner aux autres
cell" entreprise pour relourncr dans les cou-
vents de leur congrégation.
Le pape cependant , persistant dans son
dessein, envoya l'année suivante des lettres
adressées à Irur chapiire général, da;ées de
Sienne, où il était pour lors, par lesquelles
il commandait aux supérieurs d'envoyer à
Rome trente Chanoines avec un prieur, lis
obéirent à cet ordre, el lurent encore nçus
dans le méuie palais do Latran, jusijn'à ce
que le monastère fût a; hevé. Mais les cha-
noines séculiers qui desservaient celle église
et qui n'étaient qu'au nombre de douze, pro-
lilanl de l'absence du pape et de la fêle du
saint sacrement , auquel jour on fa:l une
procession solennelle qui allire à Rome tous
les pa}sans des environs, prirent avec eux
une troupe de ces paysans , et quelques-uns
des plus malinienlionués d'enlie le peuple
altaquèrcnl les religieux dans le palais de
Latran, lorsqu'ils y pensaient le moins et
qu'ils rendaient grâces à Dieu à l'issue de
leur dîner; et, ayant rompu les portes, ils
en contraignirent quelques-uns de se jeter
en bas par les fenêtres; ils en prirent d'au-
tres, à qui ils firent mille outrages, donnè-
rent tous leurs meubles à cette canaille pour
les emporter, et il y en aurait eu même
quelques-uns de tués, sans les conservateurs
du peuple romain, qui, élanl accourus à leur
secours, les tirèrent de leurs mains et les
conduisirent au Vatican, où ils restèrent
jusiju'à ce que le tumulte fût apaisé et qu'Us
DicvioNNAïuE Des Ordres uelîgiecx. IL
L\T
7n
pussent en sûreté retourner dans leurs cou-
vents.
Cette nouvelle ayant été portée au pape,
qui était encore à Sienne, il en fut fort ir-
rité. Il attendit à son retour pour punir les
coupables, il avança même son voyage pour
ce sujet; ri, étant arrivé à Home sur la fin
de septembre 1443, il ordonna pour la troi-
sième l'ois à ces religieux de renvoyer à Rome
trente Chanoines avec un prieur. Ils furent
fâchés de cet ordre; ils s'imaginaient que le
pape, après lant de difficullés, se désisterait
pcni-êire de son dessein. Néanmoins, pour
obéir à Sa Sainteté, l'année suivante, dans
leur chapitre général (ju'ils avaient accou-
tumé de tenir tous les ans, ils com|)osèreiit
une famille de trente religi( ux qu'ils desti-
nèrent pour Saint-Jean de Lalran, anxiinels
ils donnèrenl pour prieur I). Nicolas de Bo-
logne, et qui (levaient se mettre en chemin
au piemier ordre qu'ils recevraient du [lape,
auquel cependant ils envoyèrent le prieur
seulement avec deux religieux pour lui faire
d'humbles remontrances sur l'impuissance
où ils étaient de pouvoir surmonter toutes
les difficultés qui se rencontreraient dans
l'exécution du dessein (|u'il avait pris, et
dont ils le suppliaient de vouloir bien se dé-
sister.
Le pape recul Irès-mal ces remontrances,
et fut plus d'un mois sans les vouloir admet-
tre à son audience. Cependant ayant été
lléchi par le moyen de leurs amis, qui avaient
parlé en leur faveur, il les fit venir, et leur
témoigna beaucoup de tendresse lorsqu'il
apprit que la famille de Latran avait été dé-
signée dans leur chapitre, el (ju'il n'y ava t
que le danfjer où ils avaient élô exposes
l'année précédente, qui, les ayant inlim.des,
les avait einjiêché.-i de venir.
Dans cet intervalle, les chanoines séculiers
lâchaient sous maind-; soulever le peuple en
lui faisant accroire que ce pontife voulait
chasser les Romains de Saint-Jean de Lalran
pour introduire en leur place des étrangers
qui n'avaient auire dessein que d'emporter
les têtes des saints apôtres qu'on conserve
dans cette église. Le p ipe, en ayant eu con-
naissance, lei fit venir en sa présence, em-
ploya toutes les voies de douceur pour paci-
fier ces esprits qui étaient si fort animés
contre les Chaïuines Réguliers ; et, voyant
que les caresses el les promesses qu'il leur
faisait étaient inutiles, il assembla les canli-
naux dans un (onsistoirc, auxquels il pro-
posa le dessein qu'il av.iit de réformer l'E-
glise de Saint-Je m de Latran en y n)L'ttant
des Chanoines lîéguliers à la place des sé-
culiers, qui s'acquittaient mal de leur dc\ oir.
Il y en eut quelques-uns qui ne furent pas
de cet avis; mais la plus grande partie ap-
prouva le zèle du pape et consentit qu'il
nommât deux cardinaux pour faire la visile
de cette Eglise, qui furent Thomas, évéque
de Bologne, qui lui succéda sous le nom de
Nicolas V, et Pierre Barbo, \ éailien, qui
succéda à Pie II sous le nom de Paul H,
Ces cardinaux, ayant trouvé parmi ces
chanoines séculiers plus de désordre qu'on
23
'*5 Dir.TION.NAllŒ DRS OIIDUF.S RELIGIF.l'X. • 71(.
ne s't'Inil 'm.i>;int', les crurent loul ;1 fail imli- qui avnil sucroulo à Calixlo III, les cniJi-
gnes (!'< fcupcr relie et;li>e, ijui est la mère iians a\aienl eiioisi lierre Harbo pour son-
ile liiulos lis autres; et ces elianuiiies ne verain poulife, (jui pril le nom de l'.iiil II. Ku
pouvant rien avaiiecr pour leur juslilii'alio:i elTel, cuiiime il avait été l'un des coniinissai-
ioisquMs lunnt en présence du pape, ils se res nommés par lùijîène IV pour l'aire la
«leiiiiienl volontairement entre ses mains de visite de l'église de Latran, et qu'il avait été
tous leurs bénéfices. S.i S.iinte'é fil en même léninin de la nét;l genee des chanoines sécu-
lenips 1 Sjiédier une bulle par laquelle cl'.e liers pour le service divin, il rendit au com-
Jiccordail aux f.lianoines Keguliers la basi- mencemenl de son ponlilical celle église .:ux
ique de Saint-Jean de Lalran avec tous les Clianoines Réguliers , ordonnant à leur gc-
caiion cals, les bénéfices , les chapelles, les néral d'envojer trente relig eux à Home;
biens et les droits teaipoicls et spirituels qui qui, y étant arrivés cl croyant apparemnienl
on dépendaient. Il créa ().ir la même bulle, qu'ils ne devaient plus sortir de l'église de
qui est du mois de j.in\icr li'»5, tous les Lalran, voulurent que tout Home fut témoin
<;bir.oincs de la congrégation l'riglio- de leur prise de possession ; car ils y furenl
iiienne ou de Sainle-.Marie de l'risonaire, en procession, accompagnés des principiux
C.lianoinis de Saint-Sauveur de Latran, vou- officiers du papeel suivis d'une grande foule
ianl quediins la suite ils e^i prissent le nom. de peuple, qui fui aussi témoin de leur sor-
L'annec suivante il leur en accorda une lie sepl ans après, lorsqu'ils y furen' coii-
auire, par laquelle, en leur confirmanl le Iraiiils par la violence des chanoines sécu-
litre de t^lianuines de Saint-Sauveur de La- liers, qui, l'an 1471, immédiatement après
Ir.n, il les déclarait originaires d.' celle le décès de l'aul II, élanl entrés par force
église, en conséquence de leurs anciens dans leur monasièrc avec un grand nombre
litres et privilèges, qu'il avait l'ail exami- de gens armés, les en chassèrent pour la
"cr. dernière fois, pillèrent tous leurs nuu'.iles
Les Chanoines llégulicrs ne furenl pas cl s'emparèrent de luus leurs papiers,
longtem, s paisibles possesseurs de celle Ils prcseiitèreul plusieurs requêtes ;\
église, (ar, deux ans après, le pape Eugène Sixte IV, successeur de l'aul II, pour avoir
étant dccedé, les chanoines séculiers, \oulant justice de ces violences et être rétablis dans
prolitrde la vacance du saint-siège, se li- Saint-Jean de Latran. Mais ce fut inutile-
guèrcnt ensemble pour les en chasser. Les ment, car le pape appréhendait lui-même
caidinaux , qui craignaient les suiics que pour sa personne, après ce (jui lui était ar-
pouvait avoir celte afl'aire p 'ndanl le ron- rivé en allant prendre possession de celte
clave , les apaisèrent en leur promettant même église, qui est le siège des papes
qu'ils y seraient rétablis immcdialemenl coiume évécjues de Kome, lorsqu'il fut eu
après (|u'ils auraient donné un chef à l'K- danger de sa vie par les pierres dont il pensa
gi se. (!e lui Nicolas N' sur qui tomba l'clec- être accablé pur quelques Humains qui
lioii, l'an lï'w ; qui, à la sollicitation des étaient poursuivis par ses gardes achevai,
cardnaux, les remit en possession de cette avec lesquels ils avaient pris querelle. Il se
église conjointemcnl avec les Uéguliers, à contenta seulemenl de leur donner une bulle
condiii'tn néanmoins qu'ils ne se méleraienl au mois de mai lï'rl par laquelle il leur con-
poiiit dans les alTaires de ceux-ci et n'assis- lirmait le tiire de Chanoines Uéguliers de
Icraient point au cha-uravec eux.. M. lisil était Saint-Sauveur de Latran, avec les privilé-
impossible que des esprits (|ui étaient si fort ges qui leur avaient été accordés parsespré-
;:igris les uns contre les autres pussent vitre «lécesscurs lorsqu'ils c!aient en possession
longiemps en bonne intelligence et dans une de cette église, prélendanl .[u'ils en joui-
partaile union. Les dilïérends qu ils avaiciil rair.il comme s'ils et lient encore du corps
loiijours ensemble obligèrent ce pape à don- de ce chapitre. Il leur eu accorda une autre
ner d'autres bénélices aux chanoines sècu- eu liSO par laquelle il érigeait en abbaye
tiers, il y en eut même (juchpies-uns qui plusieurs monastères qui a\aienl perdu ce
liirenl faits èvêqiies, cl il n'en rest i qu'un litre lorsqu'ils emluassèrenl la réforme dont
avec quatre bénéliciers pour la garde des nous avons parlé ; et enlln, l'an l'iS.'J, voyant
reliques, auxquels on assigna un revenu toute l'Iialie en paix, il lit bâtir au milieu de
annuel. l'.oiiie une église sous le nom de Notrc-Manu!
Les choses ne demeurèrent pas longtemps de la l'aix, suivant le \a'u qu'il en avait fait,
en cet étal, car Nicolas \' élanl mort en l'ij.'l, Il y lit mctlie une image de la sainte \. ier^e
cl Alphonse liorgia , Lspagnol de nation, lui qui avait rendu be.iucoup de sang, ayant ele
a)aiil succédé sous le nom de t^.ilixle III : fr.ippeede idusieurs coups de poignard p.ir
comme il était étranger, il voulnl d'abord un soldat impie (|ui av.iit perdu son argent
s'allirer l'amitié des Komains eu reinoj.int au jeu, et donna celte église à ces Clianomes
les Clianoines Uéguliers dans leurs monas- Uéguliers, qui y sonl restés jusiiu'à pré Cul.
U'-res, il rétablit les chanoines séculiers et Lc! ca>-,linal Olivier CaralTe leur fil bâtir un
cassa loul ce qu'Lugèiic l\ avait fait. monastère cl leur laissa par son Icsiaiiient
Il se.nblait après tant de revoliilions sa bibliollièque avec une maison de plaisance
qui étaient arrivées ù ces Chanoines llegii- Iits de Kome.
liers, qu'ils ne devaient pins penser à rentrer Celle église de la Paîx est présentement un
flans la possession de celle église : ne iimoins, lilre de cardinal, cl .VUxandre \ll, l'.iyant
l'an l'ili'j, leurs espérances se renom eéi eut fait réparer sous son pou ilicat, lit meilre sur
lofiqu'ils virent qu'après la inoil de l'ie 11, un des cotés de la façade son portrait avoc
7J7
I..VT
L\T
;i8
ce vrrsel du psaume 71 : Orielur in diebus
ejusjustiliaetabiindiintiaPacis. Mais, comme
ce pape ne manquait pas d'ennemis, on fit
parler Pasquin, on ajouta un M au commen-
cement et on changea le c de Pncis en n :
de sorte qu'on lisait : Morietur in diebus ej us
justilia et abundanlia panis.
A l'égard des chanoines séculiers, ils ont
loujoursétêdepuis ce temps-là paisibles pos-
sesseurs de la basilique de Saint-Jean de La-
tran, qui est depuis plusieurs siècles sous la
protection de nos rois, qui l'ont enrichie de
plusieurs présents ; et Henri IV, surpassant
ses prédécesseur^, a donné l'abbaye de Clé-
rac en Languedoc à ces chanoin. s, qui, pour
léinoigner leur reconnaissani e envers leur
bienfaileur, lui ont érigé une magnifique
statue de bronze qui est sous lo portique de
celte église, et tous les ans le 13 décembre,
fêle desainteLuce, ils fonlchanlcr une messe
avec une superbe musique pour le roi el le
royaume de France, à laquelle l'ambassa-
deur, les cardinaux et les prclals de cette
faction assistent.
Les Chanoines Itéguliers n'ont pas laissé
néanmiiins de faire encore quelques tenta-
ti\es piîury rentrer, l'enol prétend que L'ie IV
les voulait réiablir dans cette église, que
les bulles en av.jient été dressées, mais que
la mort l'cmpécha d'exécuter son dessein.
11 avait aussi érigé seize de leurs prieurés
en abbayes, dont le* lellres ne purent pas
élrc aussi expédiées avant sa mort, et elles
ne le furent ([ue sous le pontifie it de Pie V,
son suicesseur. Ce lut au -si sous celui de
Pie IV, l'un l"Gi-, qu'ils gagnèrent le procès
qu'ils avaient avec les moines du .Mont-Cas-
sin, dont nous parlerons à l'article de ce
nom ; et en reconnaissance des bienfaits
qu'ils avaient reçus de ce pape, ils ordonnè-
rent dans un chapitre général que l'on fe-
rait tous 1rs ans son anniversaire dans tous
les monastèrL's de la congrégation.
Ces Channines 11 'guliors avaient antrcfois
quarante-cinq abbaye-^, cincjuante-six prieu-
rés, viiig'-une prévôtés et deux archipré-
Irises, ouire les monasières des Gbanoines-
ses qui leur ciaicnl soumis. Ils sont sei-
gneurs des îlesd ■ Tremiii dans la mer Adriati-
que,elde^ dépendances du royaume ileNaples.
Ils ont un beau monastère avec une église
déiliée à Notre-Dame, dans la principale de
ces îles, appelée Santa-Marii di Tremiii.
Plusieurs personnes y vont en dévotion h
cause d(!S miracles fréquents qui s'y fon'. Il
n'y a aucun capitaine de vaisseau (jui ose
passer devant sans saluer la Vierge de trois
coups de canon. Celte église et le monas-
tère ont de fort bonnes murailles et une
forme de forteresse. La seconde de ces îles
se nomme San-Domino, el la troisième Ca-
prara.
11 est sorti de celle congrégation quelques
cardinaux, el elle a fourni à l'Eglise des ar-
chevêques el des évcqucs. Barthélémy Co-
lomne, qui est reconnu pour le Père et le
réformaieur de cette congrcgnlion, a acquis
par sa sainteté le titre de bicnheu.reu£, aussi
bien que Léon de CLiralle et Martin de Uer-
game, qui ont été du nombre des Channines
de celle réforme. Penol fait encore mention
des bienheureux Théodore de Plaisance,
Fr inciscain do Casai, Biaise de Vicenze et
André de Novarre: il a fait le calalogue des
écrivains de cette congrégation, dont or»
pourrait retrancher saiulLéon l"p;)pe, saint
Prospcr d'Aquitaine, et quelques-autres qu'il
y a insérés comme ayanl été Chanoines Ué-
guliers de celle congrégation, à ce qu'il
prétend.
Mais si clic a eu l'avantage d'avoir pro-
duit un grand nombre de personnes illustres
par leur science el par leur piété, elle a eu
aussi le chagrin d'avoir nourri dans son seiu
un des plus grands ennemis de l'Iîgli^e,
Pierre Vcrmili, plus connu sous le nom de
Martyr, qu'il avait pris. Il excellait en esprit
el en science, et avait une éloquence natu-
relle qui le fil considérercomme le plus grand
préiicateur Je son temps en Italie. Il fui fait
visiteur général de son ordre en 155i, el en-
suiteprieurde Lucques. Quelquetempsaprès,
la lecture des livres de Zuingle el de Bucer
commença à le pervertir, et, s'étant tout à
fait jeté dans le sentiment des protestanls,
il pervertit aussi quatre religieux de sa con-
grégation, savoir, Emmanuel Tremel, Fcr-
rarais ; Celse Marlingot et Paul Lascio, lous
trois professeurs, le premier en langue hé-
braïque le seconJ en langue grecque, le
troisième en langue latine; el le quatrième
fut Jérôme Lancius de Bergam • , qui le sui-
virent dans son apostasie, aussi bien que
Bernard Ocliin, vicaire général des Capucins,
qui fut aussi perverti par cet impie.
FerranlePalaviciniélaitde la même congré-
gation et est recommand.iblc dans l'hisloire
par ses écrits et par sa fin tragique. Il publia
diverses pièces contre le sainl-siége el la mai-
son des Barberius, en faveur d'Odoarl Far-
nèse, duc de Parme, son souverain, qui était
en guerre avic le pape Urbain VIII: te qui
fit que ce pontife mil sa tête à trois niillo
ducats. Il fut trahi par le fils d'un libraire do
Paris, qui se disait de ses amis, et qui, au lieu
de le conduire à Orange, où il voulait se re-
tirer, le fit passer sur le Pont de Sorgues
dans le Comté Venaissin, pour le faire tom-
ber entre les mains des officiers de justice du
p ipe, qui le conduisirent à Avignon, où ou
lui Iraocha la tête après quatorze mois de
prison, l'an ICi'i-, n'étant que dans la vingt-
neuvième année de sou âge. Celui qui l'avatt
trahi reçut quelque temps après la récom-
pense de sa perfidie, ayant été tué par un des
amis de Palavicini, lo squ'il se croyait en sû-
reté dans Paris.
Les Chanoines de celte congrcgati in de La-
Iran jeûnent pendant l'avcnt et lous les ven-
dredis de l'année, excepté dans le temps pas-
cal. Ils font abstinence tous les mercredis ;
et, depuis la fête de l'Exaltation de la sainte
croix jusqu'à Pâques, ils jeûnent encore les
lundis, les mercredis el les samedis ; mais il
est permis au supérieur de donner quelque
chose le soiravec le pain et le vin. Ils font un
qualrième vœu de ne recevoiraucun bénéfice
sans la permission du chapitre général. Voici
ri9
niCTIONNAlIlF. DES OlUtUES IIKI.ICICIX.
lalormule delpiirs vrru\ : Anno Pomini \'.,die
N.,n>ensis \., Fgndo'hnusiV.. in fwculo rnrn-
liis y., rlitis y , ror-o, con/îlror ri promillo
Deo, Il Miir'nr V irijini rt II. Auntiflino, et libi
J'alii dnmno .\., nlib li { feu priori ) eju^ nio-
r.tiftei li Sdiicii .V., orilinix Cattonicorum Jir-
gnlaniim S. Augtiftini, rnngrrf/nliunis Siil~
riiloris Lntrrdnrvsia, rcripienli nomincrl vice
rei erenilifsiiiii l'alrin \. fjiisdcm conqrega-
lionis nhbiilif f/rticralis. ae furcessorum ejus
rnnoitiiC inimnlium, nbeilicntiam, caslilale»},
et vivere in rommuni sine prnpi io, usque ad
tnorletn, sccutidum rei/u!nni sanrti Augnstini,
(l quod nttnqiKiin nbsi;iie licetilia cnp IhH (je-
nnalis dichr congrfi/alionis, tel ejitn nurtn-
riiatc funf/iiilis, aliqnod cum cu:ti vel sine
cura bencficium accepliibo,iiilHS vel extra or-
dinem nosirum, remintiando omnibus jurihus,
privilegiis et consuctudinib'is, vel quomodo-
libfi cowpelituris. Eijo domnus i\. supradi-
clusmanu pi opria scripsi, et vre proprio pro-
tiuntiavi. Leur li.ilijllcincnt consiste on une
soLiianc (le serge bl.ini ho, avec un rochel
pnr-dcssus fort plissé, et un bonnet carré
lorsqu'ils sont d.ins la maison ; ils ajoutent
un surplis par-dessus lerochet sans aumus-
ses lorsqu'ils vont au clurur tant l'éié que
I hiver; et (|uand ils sortent, ils portent un
inaiiteau noir à la uianièrc des ecclésia?-
ti(iues(l).
Ils ont pour a mes d'azur à l'image de la
sainte \ier};p tenant l'eufanl Jésus entre ses
bias, ayant à sa droite saint Jean l'évangé-
lisle, et à sa gauche saint Augustin, à ses
pieds un aigle de sahie, et au-dessus de sa
tête la sainte face de Notie-Seigncur, l'écu
orne d'une mitre il d'une crosse, dont se ser-
vent les ahliésde ci tte congrégation, qui d.uis
les jours de cérémonie se revêtent d'habiis
IiUMiificaux.
<Juelques auteurs ont avancéquo les fJn-
noiues iiéguliers de l'abbaye de Sainl-Mii bel
proche l'ise, qui sont aussi de la congréga-
tion de Lalraii, étaient déchaussés depuis
i'an I.JOO, qu'ils introduisirent une ré^ormi-
|iarlieulié;e dans celle abbaye; mais ils ont
été mal informés. Il est vrai que dans une
ralaiiiilc publique ces Chanoines tirent une
procession où ils allèrent nu-pieds, et que
•lepuis ce temps-là on les a appelés Scalzi,
II s J)ôchaussés ; mais ils n'ont point pour
cela introduit d'autre réforme dans cette
abbaye que ceitc des l'Iianoiues de Lalran.
auxquels ils furent unis l'an \W.i, et ils ont
les mêmes oi)servances que les autres de la
cimuréL'atiou de l.atran.
l'eiiot , Ilisl. Tripeirt. Cnnonic. Requl.
Jndiiitn et priii'eq. ponlif. Ci:n(inici>r.
cjnsitein Confircg. Ordinniiones et ('atislitat.
eiimd. Le l'aige, llii lii>i!i. l'rirvionsi. lili. i,
STI. r;. Tambur.. Dejnr. n'b tom. 11, di^p.
Ik, qwvsl. k. Ivmmanuel Uodrig., qna'st. .'(,
nrl. 13. Ni( olao de S. Mar a, Chrnnic. de
Ord. dns Conrgos Iteqrautes. Joann. ISaptist.
Sii/n. de Ord. ae slalu cananirn. Mori;;ia,
Hisl. de toutes les Reliq. Sylvest. Marul.,
àlar. Ocian. di tult. ql. Reliq. l'ietro Crc-
T-'ÎO
scenzi, Presidio lionmnn ; et Pbilipp Uonau-
ni, Calaloq. omnium Ordinum, part. i.
§ III. Des rongréqalions de Sainte-Marie du
Port Adri ilique, de Celle-Volanc, de Mor-
Inre, de Creseenzagn et de Saint-Friqdieu
de Lucques, unies à celle de Saint-Sauveur
de Lalran.
Nous avons dit dans le paragraphe I'' que
les Chanoines de Sainle-.Marie de Frisouaire
ay;inl été réformés, s'acquirent une si i;rande
estime, que non-seulement on les appela en
jilus'eurs endroits pour y faire de nouveaux
élahlissemeiils, mais que plusieurs anciens
monastères voulun-nt embrasser leur ré-
forme. Celui de Sainte-Marie au l'ort Adria-
ticiue fut de ce nombre ; il avait été ainsi ap-
pelé à cause qu'il avait^étè bâti sur le bord
de la mer Adriatique auprès de Haveiuie, et
que l'église avait été cimsacrécen l'honneur
de la sainte Vierge. Jérôme de Kubeis, dans
son Histoire de Uavenuc (l.ib. v, /j.Sd.'i), dit
que Pierre de lloneslis surnomme ilo Ha-
vennc, lieu de sa naissance, en fut le fonda-
teur; que, se trouvant dans un naufrage et
jirès de périr, il fit V(eu de faire bàiir une
église en l'honneur de la sainte \"ierge. s'il
échappait de ce péril; et que ce fut pour
exécuter son venu (lu'il lit jiter Is fonde-
ments de ce monastère, qui est devenu dans
la suite chef d'une congrégation de Cha-
noines réguliers; car Pierre de H incsti»
ayant assemblé plusieurs clercs, avec les-
quels il vécut en commun dans ce monastère,
il leur prescrivii des règles ou constitutions
qui furent approuvées i)ar le p.ipe Pascal II.
Elles fuient trou\ées si bonnes, que plu-
sieurs monastères qui s'élablireiit dans la
suite les voulureul observer, et qu Iques-
uns se soumirent h celui du Port Adriatique,
qu'ils reeoiinureni pour leurclief.
(Juelques auteurs ont voulu attribuer ces
conslitiiiions au cardinal Pierre Dainien ;
mais l'enol et d'autres écrivains prouvent
que cet abbé du Port était dItTerent de Pierre
Damien cardinal, ((ui mourut en tOli et s'ap-
p lait aussi de Iloiicstis. Ain>i il ne faut pas
ô:er In gloire à Pierre de Honestis d'eu
avoir été l'auteur, ce qui lui a fiit donner le
titre de réformateur des (;han liiies liéLitiliers.
(^e saint homme, après avoir gouverné le
monastère du Port pendant (luelques années,
y mourut le 2:1 juillet 1 1 l'.l. (le monastère fut
donné dans la suite en commeude à .\nge,
c. rdinal du titre île Saiiite-Putenlienne. que
Crégoire XII priva de cette dignité pour ses
mauvaises uxeurs. Il fut presque détruit et
ruiné, et ses biens vendus et dissipés, ce i|ui
fit que la congrégation de Sainte-Marie du
l'ort. qui consistait en huit couvents, se
voyant sans chef, se désunit.
Cependant Obi/ou I olentaui, seigneur de
Itavenne, obligea ce cardinal de n mettre ce
monastère entre les mains du pape, (]ni ne
peut pas avoir été liinncenl VIII , comnio
élu i|uc 1
avancé, |)uisque ce |)oiitil'e ne fut
'an ViH't ; miùs ce fut ou le même
(1) V't-j., à la fln du vol., n"' 171 et lî.'i.
m
L\T
Grégoire XIJ , ou Alexandre V, ou Jean
XXIII, qui, sur la démi>sion de ce cardinal,
donna le monastère du Porl à Pierre Mini de
lîagna-Cavallo, Chanoine Réïulii r, a(in qu'il
y iclablît l'observance régulière, en conser-
vai les droits et pût rentrer dans les biens
qui avairnt été usurpés. Mais il n'exécuta
pas ce qu'il avait promis au pnpe, el le nom-
bre des religieux de ce monastère ne consis-
tait que dans le seul prieur et son compa-
gnon, lorsque le même Opizon Polenîani et
les bourgeois de Pavenne lui persuadèrent
(le faire vi-nir les Clianoines de SainieMarie
de Frisonaire, auxquels il céda ce monas-
tère l'an H20 ; ce qui fut confirmé la même
année par le pape Martin V, qui leur rendit
les monastères de Saint-Barlhélemy près de
Manloue , de S;iinle Marguerile de Ferrare ,
de Sainlc-Marie de la Slridella proclic de
Faenza, et de Saint-Augusiin de Forly, qi;i
avaient i^pparîenu à la congrégation du Porl.
Mais , l'an li32, la guerre que le p ipe Eu-
gène IV eut avec les Véniliens, qui assié-
gèrent Ravenne, ayant obligé les Chanoines
Itéguliers d'abandonner le monastère de
Sainte-Marie du Porl, ce pontife le donna en
tommeniie à son neveu L.iurent, patriarche
d'Antioche, et les Chanoines Hégulicrs n'y
relournèrcnl qu'après la mort de ce prélat,
qui ne le possé la que pendant deux ans.
Comme ce monastère éiait seul en pleine
campagne, à Irois milles deliavennc,el qu'il
avait élé ruiné plusieurs fois par les guerres,
les Chanoines HéguTers le transférèrent dans
la ville l'an iro:î. Le P. Sylvain Moroceni,
qui ( n était prieur, (il jeter celle année les
fondemenis d'une magnifique église et d'un
monastère, qui ont élé beaucoup enriciiis
par les libéralités et les aumônes des ci-
toyens de Uavenne. Le P. Philippe Bonanni,
dans son Catalogue des Ordres religieux, a
donné l'habil enseiit d'un ancien Clunoine
de la congcégalion du Port Adriatique, tel
qu'il c-t représené dans quelques tableaux
à Ravenne, et que nous avons fait graver
aussi. Cet h,:bil!emenl consistait en une robe
blanche, nu r( chil, un manteai! noir, et ils
avaicn! pour couvrir la lèteune aumusse de
serge giise (1).
La sec' nde congrégation qui fut unie à
celle de Sainte Marie de Frisonaire élail peu
considéiabie par lappori au pelit nombre
de* monasières qu'elle a possédés, el on
ignore même l'année de s;i l'ondalion. File
lui appelée de ^ainl-Jacques de Celle-Vo-
lane, à cause descn premier mon.isière, qui
fui bâli suus le lilie de Saint Jacques dans
un lieu appelé Celle-\ oiane, dont la sitna-
ti^m , se trouvani au milieu d'un bois el en-
toure d'un murais (jui rendait l'air trop mau-
vais, causait des mahidies fréciuenies aux
r> ligieux, qui les obligèrent à r.ibandonner.
Un saint homme nommé Biaise de Novell! y
ciail néanmoins resté en qualité de prieur ;
cl, désirant y établir les observances régu-
lières, il ne trouva point d'autre moyen que
de le céder aux Chanoines Réguliers de
(t) t'cy., à la fin du vul., n' i7(i.
Sainte-Marie de Frisonaire, ce qui se fit l'an
J42i eî fut confirmé par le cardinal Gabriel
Gondelmaire, légat de Bologne.
Les Chanoines Frisonaires, ne pouvant
(las non plus y demeurer à cause du mau-
vais air, le transférèrent dans un des fau-
bourgs de Ferrare, avec ses revenus, dans
une maladrcrie que Nicolas, duc de Fenare,
lenrdonna, du consenlemeni de Martin V. Il
lui ruiné l'an 1505 lorsqu'on voulut agran-
dir la ville et la fortifier, et on le transféra
encore dans la ville, où l'on bâtit une église
en l'honneur de saint Jean-Baptiste, ijui (ut
érigée en abbaye par Pie V l'an lo66.Fugôno
IV, l'an IWi ou 14V7, leur accorda aussi le
monastère de Saint-Laurent à Ravenne, qui
avait élé a'si membre de cette congrégation,
cl qui cul le même sort que son chef, ayant
été aussi abatlu lorsqu'on fortifia celle ville.
Ces Chanoines de Celle-Volane avaient des
habillements différents pour la forme et la
couleur de ceux que portaient les Chanoines
de Frisonaire, comme il paraît par les lettres
d union ; mais on ne trouve pi)int quelle était
la coulei:r de cet habillement. Il est sorti de
celle congrégation quelques évéques, connue
Biaise et l'ile Novelli, qui l'ont élé d'Agria,
et Daniel d'Arnuli de Forli. Thomas et Bar-
thélémy Garzoni, frères, qui ont donné des
écrits au public, étaient de la même congré-
gation.
Les Chanoines de Sainle-Marie de Friso-
naire , ayant pris en l'tlS le litre de Cha-
noines Réguliers de Sainl-S:iuveur de La-
Iran, comme nous avons dit ailleurs, leur
congrégation se vit augnr niée quelques an-
nées après de celle de Mortare, qui y fut
unie. File avait pris le nom de son premier
nmnastère situé à Moriare, qui est un bourg
proche de Pavie.Cc lieu était autrefois très-
agréable à cause des bois et des forêts qui
l'environnaient et qui lui avaient fait donner
le nom de Belle-Forét; mais après que l'em-
P'rcur Charlemagne eut vaincu Didier, roi
lies Lo iibards, qui perdit en ce lieu cl son
royaume et sa liberté, le nom de Moriare lui
est resté.
Un saint homme natif de ce lieu, qui était
fort riche, nommé Adam, à qui les histo-
riens donnent le litre de clerc, fil bû ir sur
ses Icrres, l'an 1180, une église magniliquo
sous le nom de Sainte-Croix, qu'il donna d'a-
bord à des moines (|ui ne la possédéienl que
trois ans; après lesquels les Chanoines Ré-
guliers l'occupèrent. Ils furent gouvernés par
D. Candulpiie de (îarlasco, qui mourut quel-
que lemps après et eut pour successeur doua
Ayralde, qui fut dans la suite archevêque de
Gènes. Ce fut sous son gouvernement que
celte congrégation s'augmenta, el elle devint
même si considérable qu'elle a possédé qua-
rante-deux monastères et plusieurs turcs.
Les Bénédictins avaient possédé l'église de
Saint-Pierre au Ciel d'Or de Pavie depuis le
commencement du viii'' siècle, que Luit-
prand, roi des Lombard;;, y avait l'ail mellro
le corps de sai'ii An^u^lin, docteur de l'K-
75r. DICTIONNAIRE DF.S ORDRES nELICIF.UX. 724
glisc M.iis, aynnl eu bofoin lic réforme au Latran, pour l'union du monasière de Mor-
foinineiicrmiMil ilu xiii' siècle, le jinpe Ho- tare à leur coiigréfralioii , mojennant une
norias III leur ôla celle éirlive l'an \'22i. Il pension annuelle de cenl durais, ce ((tii fut
la donna aux Chanoines Uéjjulicrs de la con- approuvé par le pape Nicolas Y, par SC'S let-
prép.ilion de Morlare; cl, à cause (|ue le 1res du 13 (evrier IV lO. Ce pontife en ilonna
corps de saint Aupnslin y reposait, il voulut d'autres le 26 juillel IVol, par l(Si|uellcs il
«in'à l'avenir ce monastère fût chef de leur leur accordait tous les monastères qui depeii-
coni:réi.'alion et i\\i'on y tint les chapitres daicnt de celle congrégation, ce qui n'a pas
généraux. Les Chanoines Réguliers qui empêché qu'il n'y en ail eu quolques-uus
étaient restés à .Morlare eurent de l.i peine à qui aient passé à quelques autri's ordres,
ronscnlir que le chef de leur congréga'ion Celle congrégation a fourni plusieurs per-
fùi transféré au mona tère de Sainl-l'ierre sonnes illustres par leur sainti lé, leur nais-
au Ciel d'Or; i's préiendirenl retenir ce droit sauce et les digntés qu'el'es oni occupées,
de supériorité après la morl du pape Hono- couimc Guariri, cvêquc de l'alestrine et car-
rius. Mais (irégoire I\, l'an 12-28, leur or- dinal ; Ayrald et Jacques, archcvê !ucs île
donna d'ohéir .i l'ahbé de Saint-Pienc au Gènes; liernard, évé^iue de Pavie ; Obcrt de
Ciel d Or comme ;'i leur chrf; et, sur les Torloiie , Uadole de Plaisance, un autre
plainics que formaient toujours ceux de Obert de Bobio. et Albert, patriarche de
jlorlare, il ordonna, l'an 12.'i8, que les cha- Jérusalem, légis'aleur des Carme-. Penol
pitres généraux se liendraiiiit à l'allernilive met encore un autre .\lbort, évéque de Ver-
à Mortac il à Pavie. Il y a cependant de ceil ; mais il peut s'être trniupé : cet Albert
l'apparence que ceux de MDrtare ne furent est sans doute le même que le patriarche de
pas encore satisfaits, et que dans la suite les Jérusalem, (]ui a été aussi cvéquc de Ver-
couvents qui dépemlaient de la congrégation ceil après avoir été nommé à l'évèché de
«le .Morlare ne furent plus sou:nis à la juri- Bobio, d jut il ne pril pas possession, n'ayant
ilirlion de l'abbé de Saint-Pierre au Ciel pas encore été sacré lorsqu'il fut élu pour
«l'Or de Pavic, et reconnurent le min islère celui de Verceil.
de Morlare pour leur chef ; car, quand les La congrégation de Crescenzago, ainsi ap-
Chanoiucs de Latran en prirenl possession pelée à caus' de son premier monastère, situé
cl qu'on leur cul accordé en lloi tous les dans le bourg do ce nom, à trois milles de
luonaslères qui en dépendaient, celui de Jlilan, a éié autrefois ionsi(lcrable. Ce inona»
Saint-Pierre au Ciel d'Or n'y fol point corn- stère fut bàli l'an ll'kO, et l'église fui dédiée
jjfis, cl ils n'en fuient les maîtres que l'an sous le nom de la sainte \'ierge. Le premier
1583, y ayant élé appelés pour le reformer prieur fut un nob!e Milanais nomiié OUon
par le cardinal Haphaél Uiaire. deMorhi, sous le goui criieoienl duquel et de
Le monastère de Morlare avait en le même ses suce sseurs la discipline régulière fut si
sort que plusieurs autre* i)ui éiaient tombés bien observée, que ce mona-lère devint chef
dans le relâcbenjenl, cl lis guerres qui trou- de plusieurs autres, qui se joignirent à lui
blèrenl le Milanais perdant plusieurs :>n- écs cl formèrent une congrégalion qui avait des
lui caisèrent hraiironi) de douiiiiagc, tant statuts qui lui étaient pariiculicrs : les supé-
dans le spiriluel que dans le lempoid. \crs rieurs s'assemblaienl tous I s ans dans un
l'an li'i8, le P. Uapbai^l Salviali de Calahre, cbapiire général qui se Icnail au monastère
de l'ordre i!c S lint-Dominique, par le loojen do Crescenzago, dont les revenus se mon-
«le son frère, qui éiail secrétaire de Louis de talent à plus de quinze mil'e écus. ("e mona-
Saillt-Sé^ erin, seigneur de Morlare, obiint stère n'avait que le tilre de prévoie, et lo
du pape, à la recouiniandation de ce seigneur, cardinal de San Sévérino le possédait en
la I révêjté de Morlare ; il prit riiabit de Cha- coiuniende , lorsque l'an i'Ml il transigea
iioinc Régulier, cl, profitant du crédit de son avec les Chanoines de La raii pour y inlro-
firc, il rciiîra d.ms la jouissance de plu- diiire leur reforme, n'y ayant ()-)ur lors qu'un
sieurs biens qui avaient appartenu à ce seul chanoine dans ce monasière. Mais il ne
iM' na-,tère et qui a>aiei;i été usurpés jiar des Irur abindoifa pas les revenus, qu'il retint
féculicis. Il fil cnsuilc assembler le chapitre pour lui et pour les prieurs (■ommendalaires
général à Toiione le 10 a\ril de la menu; an- (|ui lui succéderaient, ce qu'avait fai' aussi
née, p lur introduire qiielipic réforme dans trois ,'ins auparavant Antoine «le Stangi,
les monastères i;ui en dépendaient. Mais protonolaire apostolique, en leur celant
Louis de Sainl-Séveriu étant nio'-t sur C'S aussi Ir monastère de Saint-Georges de Hri-
enlrefaites, et Irançias Sforze s'èiant cm- niale, qui avait élé membre de celte congrc-
paré «le .Morlare par la force des armes, le P. g ilion. dmit il ( si sor i il nx rar inaus, qui
Salviali appréheuila pour sa iropr»; per- sont 'l'Iiomas et Alliin de Milan, comme aussi
sonne ; voyant (]ue les habitants avaient plu^^ieurs évéqnes.
chassé son Irère de leur ville, il se retira à Knfin la congrégalion de Sainl-Frigdien t'a
Gênes, dans le monastère <lc Saint-Théo- Lurques, qui av.iit aulrefois servi, ^ou3 le
liore, qui dépendait d • cette congrégalion. poaliniat (l'Alexandre 11, à réformer rb'gliso
Le ilésir iju'il av.nt ,1e r<'toiirnir dans son de Saint Sauveur de Lairan, cul lu-soin elle-
[lays et dans son premier ordre, joint à l'ap- même de réforme dans le \vr' siècle, cl so
préhension qu'il .ivail que la prévrtié de soumit à i elle de Latran. F.llc avait pris le
Morlare ne tomb.at en commende, coiiime nom de saint l'rigilien, e\èque de Lucques,
c'était la C'U:umc de ce ti-mps-là, fit qu'il qui (itbàtircn celle viil-, l'an 5i(), une cgliso
transigea a\ec les Chanoines Réguliers de eu l'honneur des saials diacres lilieiiuc, Lan
-2S L\T
ren) el Vincent. Il y mil des clercs avrc lesquels
ou prélend qu'il vcciil en commun jusqu'à sa
mort; el ayant été enlerré dans cette éclise,
les miracles continuels qui se firent à son
lo:nbeau furent cause qu'on donna à celte
église le nom de son fondalcnr, qu'elle a re-
'^ tenu jusqu'à présent. M;iis la congrés.ilion
dont elle a aussi porté le nom n'a commencé
que sous le p mlilical d'Alexandre il ; car ce
pape, qui avait aussi élé évoque (!<■ Lucque-i,
cl qui connaissait la piélé des Chanoines de
celle Eglise, en fil venir à Rome pour réfor-
mer riîglise de Latraii cl celle de Sainte-
Croix de Jérusalem. Cille de Liilrnn ne fut
pas un des membres de celle congrégation ;
ce pontife voulut qu'elle fût imtnédiatemenl
soumise au saint-siége. Elle devint chef d'une
autre congré;îalion, qui fut éteinte lorsqu'on
les obligea à abandoinur celle église, comme
nous avons dit dans le paragraphe l". Ainsi
l'église de Sainte-Croix de Jérusalem à Rome
fui la première qui fut unie à la congréga-
tion de Saint-Frif^dien de Luc(]ucs, avec le
monastère de Sainte-Mari -la-Neuve , situé
aussi dans l'enceinte de Rome, et douze au-
tres monastères conventuels, sans compter
un Irès-grand nombre de prieurés el de cures.
Mais, l'an 1307, le prieur de Sainl-Frigdien
de Lucques et ses religieux, voyant que leur
congrégation diminuait tous les jours elque
la plupart de leurs monastères avaient élé
donnés en commonde, ils firent union avec
ceux de Saint-Sauveur de Latran, et cédèrent
â cette congrégation le moiuislère de Sain'-
Frigdien de Lucques avec les prieurés qui
en dépendaien(, qui étaient au nombre de
dix , à condition que ceux de Latran (|ui
viendraient demeurer dans le monastère de
Lucques se conformeraient à eux pour l'Iia-
billemeiil, qui consislait en une chapi' noire
avec le capuce par-dessus le surplis; que
l'iincien prieur de Sainl-Frigdien conserve-
rait celle dignité pendant sa vie, el que celui
qui lui succéderait jouirait de ses mêmes
privilège-, qui consislaienl entre autres
choses à se servir d'ornements ])onlificaux
les fêles solennelles et à quelques autres
rondiiions exprimées dans la bulle du pape
Léon X, qui conlirma celle union.
Li; pape Lucius 11 avait élé de celle con-
grégation. Ce fut lui (|ui ordonna qu'aucun
cardieal ne pourrait prétendre au t. Ire de
l'église de Sa ntc-Crois de Jérusalem , s'il
n'était du corps des Chanoines Réguliers de
la congrégation de Sainl-Frigdien. Le pape
Innocent II avait aussi onlonné la même
chose à légard du litre de Sainte-.Maric-la-
Neuve, ce >\n\ fut confirmé par les papes Cé-
leslm II, Eugène I!!, Adrien IV el Alexan-
dre 111 ; et c'est peul-ctie ce qui a oliligé les
papes qui leur onl succédé dans la suile
d'ôter ces deux églises aux Chanoines l'égu-
liers. Elles sont présentemenl possédées par
les moines de Citeaux el du Mont-Olivel.
Penot , Hisl. Tripar(. Cnnonicor. Rcr/ul.;
Silveslr. Maurol., Mnr. Océan, di luti. yt.
tlclig.; le Pai^e, Bblioth. PrœmunH. iib.
I. tccl. 15; '\nm\nxv. , De Jur. Abbal. , lom.
li, dtsiiut. 4,
LAT
72G
Nota. Ici nous voyons les Chanoioos do
I^alran appelés par le P. Ilélyot Chanoines
de Silint-Sau^eur de Latran. Néanmoins,
dans le Crncax (almanach ol'liciel de Rome)
du dernier siècle, on trouve désignés d'iibord :
les Clifinoines Uéguliem de Ijilian, à S.iinte-
Marie de la Paix ; puis les Chanoines Régu-
liers de Saint-Sauveur, aux trois élablissc-
menls suivants : Sainl-Pierre-ès -Liens ;
Sainle-Agiiès-hors-d( s-Murs ; Suinl-Lauri ni-
hors-iles-.VIurs. Dans le Cracas actuel, on ne
trouve point celle disiinclion, m;;is seulement
l'indication des Chanoines Réguliers tieSaint-
Sauveur de Latran, ayant pour abbé gé-
néral le R. P. Alexandre Gozzi, et pour vice-
procureur général le P. Vincent 'lizzani.
B-U-H.
LATUAN (Chanoines RÉr.ui.iKRS de) en Po-
logne et en Moravie.
Pei'.ot, pari mt des Chanoines Régulicr> de
Pologne, dit (]u'il semble que du temps (la
Benoît XII cet ordre élait peu considéra,
ble en ce royaume , puisque par la bulle de
ce pape de l'an 1339 pour la réformalion gé-
nérale des Chanoines Réguliers, il y est parlé
de toutes les provinces où il y avait des Cha-
noines Réguliers, el qu'il n'y est fait men-
tion d'aucune province en Pologne. Le P. du
Moulinet dit au contraire , sur la rela'ion du
P. Hyacinthe Libéri, prévôt du mona-tère du
Saint-Sacremeni de Cracovic , que la ]jrc-
mière abbaye fut fondée l'an 970 au bourg
deTremesse, au diocèse de Gnesne, par Mie-
cislas , roi de Pologne. Ainsi cet ordre y
serait aussi ancien que la religion chréiienne,
puisque Miecislas fut le premier prince polo-
nais qui fut éclairé des lumières de la foi. Le
P. du Moulinet dit encore qu'il fil venir des
Chanoines Réguliers de Vérone en llalie;
mais il devait retrancher le mol de régulier
cl ajouter seulement que ces chanoines vi-
vaient en commun , puisque l'on ne com-
mença à parler des Chanoines Réguliers que
dans le XI" siècle, et les Chanoines que le roi
Miecislas fit venir de Vérone vivaient appa-
remment selon les règles qui avaient été
prescriles au concile d'Aix-la-Chapelle.
Ce qui est vrai, c'est qu'on ne sait pas le
temps ([ue l'ordre" canoni:]ue lui iniroduitcn
Pologne ; mais il y est présentemenl floris-
sant. Il y a cinq sortes de Chanoines Régu-
lier-, savoir : de Lalr.m, du Suiiil-Sé;iulcrc,
des Prémonirés, du Saint-Esprii in Saiia et
de 1,1 Péiiilcnce des Martyrs. Nous parierons
des quatre derniers selon leur ordie alph i-
béii(!ue,e! nous traiierons dans cet ar iclu
des Chanoines de Lalran ap:ès avoir p.irléilu
ceux d'Italie , suivant ce que nous nous
sommes proposé, de mellre de suile toutes
les congrégations qui portent le même non»
el qui suivent la même rè^iie , ou qui ont
rap['orl les unes avec les autres.
Les Chanoines de Lalran en Pologne sont
di»isés en trois congrég.itions ou provinces.
La première el la plus ancienne est colle do
Trzemeszno ou ïreniesse aa diocèse de
(jnesne. L'abbaje dont nous avons parlé ci-
dessus , el qui lui a donné son noai , eu est
T-' MCTlONNAinE DES OUDHES IlELICIEUX. 723
rhrf. Elle rsl li As noble cl Irôs-riclic , mais rut pendant ce temps A se< concitoyens au
rlle est en coiiimiMicle et a quelques mon.is- milieu des nues. Les F!B. Nicolas de Hiecz,
lùres qui en dépendent , . us^i hien que que!- Jean de Leslilin. Je.in de Nis<ia, Eiicnne Sino-
ques cures. C'est dans Ci lie alibayc que re- lenslii et plusieurs aulrcs , se sont aussi ren-
posc le corps de s.iiut Ailalliei t mari) r , ar- dus célèbres par leur s.iiiitelc. Enfin D. Jac-
ilievéque lie Gncsiie. ques Mrovinï.ki , sous-diacre, cl Jcan-15 p-
La seconde congrégation se nomme Czer- liste Malonouski , prévôt de Kranislaw , ont
kénène, au (lioeése de l'osnan . et non i)as ré(andu leur sang pour la défen-o des biens
l'Iozko, coiiiiiie dit le P. du Moulinet ; l'ab- de ce monastère , le premier ayant clé tué par
baje qui lui donne aus>i sou nom est pareil- les Suédois , et l'autre par les Cosaques.
Imienl en roir.mende, et était possédée l'an II y a aussi eu dans cette congrég .lion
1704 par I). ÎSicnlas Nyzyki , évéq-ic de plusieurs personnes qui se sont rendues re-
Chclin, ClitUioirte Kéjiu ierde la congréga- commandal/les par leur science, et que leur
lion deCracovie dont nous allons p.irler. Ce mérite a lail choisir par d'autres monastères
piélal fut ncmiiié à cet évèché et à celte ah- qui n'étaient pas de la même consrégation ,
liaye par le roi de Pologne Jean Sobieski , et pour les gouverner , comme D. Nicolas Ny-
<ei:e alibaye a ;;ussi quelques monastères zyki , dont nous avons [>arlé ci-dessus, qui,
q >i en dépendent. avant que d'avoir été nommé à lévéclié do
La troisième coni^iégation est celli' de Cra- Cheimno, fut demandé pourprévolparlesCha-
• ovir« , qui reconnaît pour fondateur U. .Mar- noines Kéguliers de Msliono, aussi bien que
i:n KIoezjnski, docteur en l'un et l'autre D.André Strembosk. Ceux de la prévoté de
'iro !t, qui a été prévôt de Cracovie et qui a Semberg en Moravie , dont le prévôt a droit
tloniié de gros biens à celte congrégation, de se servir d'ornements pontific.iux , appe-
lle est gouvernée par un prévôt claustral iérent D. Maltiias Caszynski pour remplir
»jui| rend la ijualilé de général des Chanoines cette dignité; les Chanoines Réguliers do
Itéguliers dans le royaume de Pologne et Clodaviensko choisirent D. Martin Ciecierski
dans le grand duché de Lithuanie. Cette pré- pour leur prévôt , et ceuK de Louxbranic ,
^ôlé ne cède point en dignité aux deux ab- D. Paul Nolenski. Enfin il y en a plusieurs
bayes dont nous avons parlé, elle a même autres qui ont été considérés par leur insigne
plus de ()rérogalives , pui>qu\lle conserve le piété jointe à leur noblesse, comme D. Jac-
«Iroit d'elcdion que Us autres ont perdu, qu. s Bleniski, I). Jean Chrysoslome Korsale,
Cetlecongr( galion devrait plutôt s'appeler de D. DersIas de lioiznisko, chanoine et archi-
Cazimir , puisque son princi|ial monastère diacre de l'église cathédrale de Cracovie;
est situé à Cazitnir, qui est une des quatre Martin KIoezynski, fondateur de cette con-
villes qui divisnil Cracovie , dont Cazimir grégalion, et U.Hyacinhe Librorius, docteur
n'est s( parée que par la Vistule. Ce monas- en l'un el l'autre droit , tenseur des livres du
tère fut fondé parle roi Ladislas II l'an l'*02, diocèse de Cracovie el prévôt du mouaslèro
sous le litre du Saint-Sacrement. C'est pour- de la mèiue ville.
quoi ces Chanoines ont pour armes un calice L'hahit de ces chanoines con^is'e en une
iiurmonté d'une hostie. Il y a cinq autres soutane blanche avec une espèce de rocliet
monastères en Pologne qui en dépendent , cl sans manches , en forme de se:ipulaire des-
plusieurs djns la I-iihuanie, doni les princi- cendanl jusque sur les reins , où il s'élargit
p.iu\ sont celui de Vilna, qui est 1res magiii- el en'oure le corps. Par-dessus ce rochel ,
(ique , et fui bâli par le grand général de (ju'on noirme farracium , ils milleul un
I.ilhuanic Michel Paiz, el celui de Bichou par manlelet noir descendant jusqu'aux genoux,
Charles Kolievicz , qui éiail aussi grand gé- à la manière des prélats de Home; el dans
néial du même duché. les fjnctions publiques , à Cracovie, ils se
Celte congrégation a produit beaucoup de servent du surplis, qu'ils mettent par-des<U9
siints personnages. Ceui qui tient le premier le 4«rrncii'»i , avec une mosetle ou cainail
r.ing est le lî. S:anislas surn.mmc de Caz-- noir : en d'autres lieux, au lieu tiu surplis
mil-, à cause du lii u de sa naissance. Il avait ils mettent un rocliel » 1). Il se peut faire qu'ils
élé religieux du mona-lèredu Saint-Sacre- poriaicnlautrefois une aumussesur les epau-
inenl de cette ville , où il mourut l'an l'»89 , les , comme il paiait p;ir la figure de l'h bil-
le 3 mai; cl depuis ce temps-là , il y a lou- leineiitd'un de ces Chanoines qu'a donnée le
jours eu une grande afiluence de peuple à son P. du Moulinet sur la relation, à ce qu'il
lonibeau , où il se fa l encore tous les jours Oit, des [ier>onnes (]ui ont voyagé en ce pays,
plusieurs m racles. Le corps du I!. .\dam d'autant plus que l'enol dil que ceux du nio-
Siboiiius , qui a élé autrefois prieur du naslère du Sainl-Saerement à Cracovie por-
inéme monastère , repose aussi dans celte talent des surplis et des aumusses violetlrs ;
église, où Dieu a fait connailre sa sainteté mais ils ont sans doute quille cethabilleinent
par la vertu qu'il a accordée à ses saintes pour prendre celui dont nois avons l'oniic la
reliques de chasser les démons des corps des desiription, conrormemenl aux mémuires
possédés. L"S corpt des I5IJ. Nicolas Siekicrki qui nous ont élé envoyés de Poloi;n<' dates du
el tielase y.orauski se sont conservés jusqu'à 17 août 170'» et attestés par le 11 P. I). .\gui-
1 résent sans coiruption. Le bienheureux lin Michel Corczyiiski , docteur en théologie
Nicolas de lladoiiisco deliira sa pairie d'un cl en droit canon , commissaire général des
incendie qui la nienaçail de ruine , et iippa- ChaQuincs Réguliers dans la petite Pologne
(1) Voij., ù l.i lin d 1 vol., »" 177,
7?a
LAT
L\T
73or
el le grand duché de Liihuanie. On peut con-
siiltci- Penol , H si. Tripart. Cannnicor. Ré-
git'., lib. II , et du Moulinet, Habillement des
Chanoines R'-gtiliers.
La ronsroK.ilion de Tous les Saints d'Ol-
niuiz en Moravie fut fondée au rommonrc-
iiient du XVI" siècle, el le monastère d'OI-
iiiutz sous le liire de Tous les Saints, qui en
est le chef, fut fonde pir les Cluiiioincs Ré-
guliers sur les ruines de celui de Langstron,
(|ui avait été ravagé par les liérétiques peu
lie temps avant ((ue le pape Alexandre Vi
parvint au souverain ponlficat, l'an l'i-9-2.
Jean Sliakoka, qui en fut le premier prévôt,
el les autres Chanoines, le firent bâtir à leurs
propres frais. Ce monastère étant liàti, la pré-
vôté de Stemherg et quelques autres monas-
tères firent union ensemble el reconnurent
celui d'Oliniilz pour leur chef, ce qui fut ap-
prouvé par le pape, qui accorda à ces Clia-
noines le lilrc de Chanoi es Réguliers de La-
Iran el l!'S privilèges dont jouissaient ceux
d'Italie. 11 les exempta du la juridiction des
ordinaires el les reçut sous la proleclion iiii-
inédiale du saint-siége. Le roi Uladislas leur
accorda beaucoup de privilèges , et les mit
aussi sous sa protection l'an 1510. Le jjrè-
vôt d'Olmuiz se s ri d'habits pontificaux et a
voix et séance diins les Etals de Moravie.
Le prévôt de Siemberg a aussi l'usage de la
mitre et de la crosse. Mais il y a apparence
que cette congrégalion ne subsiste plus,
puisque les Ch^inoines Réguliers de Sk^nberg
cl de quelques autres monastères de la con-
grégation d'Olmutz ont eu recours plusieurs
lois aux Chanoines Réguliers de Pologne
pour les gouverner, et que l'évéque de
Cheim , qui vivait encore l'an 1704, a été
prévôt de Siemberg , quoiqu'il fiJl Chanoine
Régulier de la congrégation de Cracovie : le
prévôt du monastère d'Olmutz était autre-
fois général de la cougi égal ion de ce nom
lorsqu'elle subsis ail.
Penot, llisL Tripart. Canonic. Regul. lib.
Il, cap. 40 el 6G.
LATBAN (CuANoiNESSES Régulières , et en
PàRTICULIEK CELLES DE).
Avant que de parler dis Chano-nesses Ré-
gulières de Lalran, il e^t à propos de rappor-
ter l'origine de toutes les Chaiioinesses Ré-
gulières en général. Nou> reconnaissons bien
que saint Augustin a été l'instituteur des
Chanoines Réguliers , puisqu'il est le pre-
mier qui ait fait vivre les clercs en commun
selon la règle des canons et l'exemple des
apôtres; mais nous ne pouvons pas dire
qu'il ait étalili des (^hanoinesses telles que
nous en voyons à présent. Il est vrai que les
religieuses tiu'il établit à Hippone peuvent
avoir été appelées Chanoinesses aussi bien
que cel es qui étaient avant lui répandues
dans plusieurs provinces , tant chez les Grecs
que chez les Latins ; mais les noms de Cha-
noines et de Chanoinesses , conmie nous
avons dit en parlant de l'origine des Chanoi-
nes, étaient donnés iiidifféreminent autrefois
aux ecclùsiasiiques , aux moines , aux reli-
gieuses cl aux vierges , aux plus bas officiers
de l'EgHse, aux domestiques des monastères,
el généralement à tous ceux qui é' aient em-
ployés dans la matricule ou calalo;;ue, in ca-
ri.nne. Le P. le Large , Chanoine Régulier de
la congrégalio I de France, avoue (]ue c'était
l'usage parmi les Crées; mais il soutient que
depuis le VI' s ècle il y a eu en Occident des
Chanoinesses qui ont été dilîérenles des moi-
nesses, cl il apporte pour preuve la fonda-
lion d'un monastère faite par saint Kiiilolia
d MIS rîlc<JeSL'kiiiL;on.suiluiUiin,près de Râle,
où il mit des Chanoinesses. Comme il ne
parle que sur le lémoignaïe de Ra'Ier, moine
deSL'kiiigeii,i|uiiraéeritque dansle %' siè<'le,
en partie sur ce qu'il se souvenait d'avoir
lu dans une Vie de ce saint, el en p irtie sur
ce que l'on eiis;ivait;iSokiiiy;eii par Irad tiou.
Celle preuve n'est pas sufiisante.
Les Chanoinesses n'étaient po'nt connues
au commencement du Mir siècle, puisiiuc lo
concile assemblé en Allemagne l'an 742 or-
donna que les religieux el les religieuses se
conl'ormeraieiit i\ la règle de saint Benoît
pour la conduite de leurs mtcurs el le gou-
vernement des monaslèies et des hôpitaux :
car dansée temps-là il n'y avait aucun mo-
nastère, soit d'hommes, soit ctc filles, qui
n'eût un hôpital, ou pour y recevoir les pè-
lerins , ou pour y avoir soin des pauvres ma-
lades. Les décrets de ce concile furent confir-
més dans celui qui se tint à Lesline l'aiinéo
suivante 740. Le cinquième canon de celui
de \ erneuil , se'on le P. Mabillon [Tom. 111
Annal, Bcned., p. 117), et que dauires nom-
ment de Vernon, li nu sous le roi Pépin l'an
733, ordonne que dans les monastères de l'un
et de l'autre sexe on vivra régulièrement se-
lon l'ordre, c'est-à-dire selon la règle de saint
Renoîl, cl je ne crois pas que les Chanoines-
ses voulussent appliquer pour elles ce qua
dit le sixième canon du même concile, lors-
qu'il défend à une abbesse d'avoir deux mo-
nastères, el de sortir du sien à moins que ce
ne soit pour cause d'hostililé ou étant man-
dée par le roi , et que la môme défense do
soriir est pour les autres religieuse/ qu'il
appelle moir.esses : Monachœ vero extra viO'
n:islcrium non cxeanl, puisque ce serait faire
une grosse injure aux (Chanoinesses Réguliè-
res de les appe.'er moinesscs.
Elles ne trouveront pas qu'il soil parlé
d'elles dans le capilulaire (|ue fit l'empereur
Charlem.'gne à Héristal l'an 779. 11 y est seu-
lement ordonné [CapiluL, tom, 1, p. 193) que
les moines y vivront selon la règle, et les
religieuses selon le saint ordre , c'est-à-dire
la règle et l'ordre de Saint-Benoît ; que cha-
que abbesse demeurera dans son monastère,
el qu'elle n'en pourra avoir deux. A la Cu du
ca|iilulaiie il y a une ordonnance pour des
prières publiques et des aumônes à causa
de la sécheresse et de la famine de celle an-
née 779. Chaque évè<iue devaii chanter trois
messes et trois psautiers , pour le roi , pour
l'armée de France et pour la calamité pibli-
que; les prêtres, trois messes; les moines,
les moinesses el les Chanoines, trois psau-
tiers ; el tous devaient jefinur trois jours de
suite. Chaque évèiue, abbé ou abbesse, de-
7.-i| nCTIONNMUE DLS ORDIIKS UELlf.lEL'X. 732
V;iil aussi nourrir jusqu'au lomps de la mois- 13' il onlonne que les rcligiousos qui fai-
M.ii qcalre pauvres, on nu nioins Iro s , s.iicnt profession de la r(^K'« Je S'iiul Ik-noîl
diux ou un, <t'lon Sfs l'acuilc-i ; el dans ce vivraient réfçulièninenl, elqueiellcs qui n'eu
c.ipitnliire il n'esl fal aiu une menlion des f.iisnienl pas profession \ ivraienl canonique-
Clianoinessis , pane qu'il n'j eu a\ail poiul nienl : Qiiœ vcro profcssioiicm fmicUe Kgulw
d.Mis ce Irinps-I.'i. Jlcuedicli fcccrunt, irguluiitcr liiunt: sii»
Ce n'i'sl qu'à la fin ilu iiii^'ine siècle auleiii. canonice vivitni pleniter.
que l'un cooimenre à découvrir ([iirlques Ce u'étaienl pas les Chanoines qui pou-
v.--li;;es (le Cli.iiioiiiesses ; car dans le c.iniiu vaienl les instruire de leurs ohliy:ations,
47 du ron< iic de l^rancTirt. tenu sous le eux qui n'avaient (]ue le nom de Chanoines
rè;.Mie de Ch.irleinai^n-, l'an 7!Vi-, il est porté el neconnaissaieni MuHernenl lescaiions ;c'est
qu'à l'éjrard des alihesse- qui ne vivraient pourquoi l'eniiereur Louis le Déhonnairu
pas cdnoitiijHtiiient on nu/nlicrrmfnt, on en ayant lail asseniMcr le coni ilc d'Ais-la-Cha-
diMinerait a\is au roi, alin qu'elles fussenl pille l'an 8l(i, il y (ît dresser par le diacro
dc|iosces. Ou trouve encore quelipic trice Ainalai ius des rèyles pour ces Chanoines et
de Chanoine ses au co'nuieiicenietil du ix" Chinoinesscs, afin de les ramènera une vio
siècie. !,'■ niéiui' empereur ayant convo jué refilée. Ou ne les connaissait point pour
une asscuihlée di- tous les orJres à Aix-la- enfanls de saint Augustin ; car dans l'une
Chapelle l'.in 802, les cvèques el les ahbcs et l'autre de ces règles ou uc fait point uieu-
s'y trouvèrent, cl on Us séiiara eu deux ban- lion de ce saint doc'eur, au contraire lelle
d<s, ch icune dans u:i lieu différent. Les évê- des ChaTioincsses e.;l tirée des écrits de saint
ques examinèrent en particulier si les clercs Jérôme, de samt Cyprien, de saint Alhanasc
vivaient selon I s canons, el, afin de les ra- et de saint Ccsaire, cl il n'y est poiril parlé
mener à leur devoir, ils firent Lrc les dé- diï la règle que saint Auguslin avait donnée
crcts des souverains pontifes. Les a'obés de aux religieuses dHip])one, et qu'on ne pro-
leur coié se proposi'reut la règle de saint posa point aux Chanoincsses. (]ouime ()ar
Itcnoit [>>)nr modèle, el cxHiniut riiil s'il y celle que leur prescrivit ce concile d'Aix-la-
fl' ait des alibés, qui s'en éluiguasscnt el vé- Chapelle on leur permeitail de garder leur
( ussent eu Chanoines, et si dans les inonaslè- bien, à la charge de passer iirocuratiou par
ri s où on avait promis de la garder, elle acte public à un parent ou à un ami pour
et lit oh^er\ée; car il y avait déjà des luo- l'adfniuislrer el défendre leurs droits en ju-
n.isièns qui avaient secoué le |oug de ce le slice, et qu'on leur peruu'llaii aussi d'a>oir
siinte rèi;le, et où l'on ne connaissait plus des sirvan'es, cet abus fut condamné dans lo
ni cvMc règle, ni même li!s canons. Lnlin an concile de Home où présiilait le pape Nico-
eximina aussi si dans les monastères de lil- lis II, l'an lOUO, ce qui n'avait jamais éié
les o 1 y observai! la règle de saint Benoit, permis à aucune relij;ieuse depuis le temps
ou si on y vivait canoniquemml, c'esl-à-dire de. apôlrrs jusqu'à Louis le Débonnaire, qui
à la uiaïKèrc des Chanom s, dml la plupart, avait fait ass^nih erce concile d'Ais-la-Cha-
commc nous \enons de dire, avairnt (juillé pelle,
la règle de saint lieuoil, (lui n'a>aient que Le concile de Roue (I) reconnaît quejus-
le nom de Chanoines, el qui appareuunrnt qu'à ci'Ite année lOiJO l'instiiut de ces sor-
avaient élc imités par d'S leliji uses, qui de les de Chanoincsses n'avait été reçu dans
lieuédiclines claicnt devenues tout d'un coup aucun endroit de l'Asie, de l'Alriiiue et de
Chanoincsses, sans savoir à quoi elles l'I'^urojje, sinon dans un petit coin de l'Alle-
claienl engagées ni quelles étaient leurs oh- magne, et dit qu'il était ceriain qu'avant cet
?ervar.ces. (i'est pourf|uoi le concile de (]lià- empereur loules Ls religieuses, en i)uelqiio
lous-sur-Saône, l'an .SLi, se crut obligé de endroit qu'elles fussenl, n'avaient point eu
prescrire des règlements à ces filles qui so d'iiutre règle que celle de saint Ri-uoit. Il y
disaient Chanoinesscs : lis sanclimuninlUjus a eu toujours ce; eiulaut des religieuses eu
tjitœ se Cunutiicns vocuiit, ce qui fa t voir que .\sie qui ont suivi la régie de .saini lia si le. Il y
le concile, en se sei vaut de ces leriiKS, re- en avait mèmeeiiOiicidenl du tempsile ce eoii-
gaidait cet iiislilut comme une nou\ea':lé, cile, il y en a eu aussi qui ont suivi d'autres
qui nes'éliil pas iniroiliiil dans les formes, règles; mais il est vrai (]ue les ir.ouaslèies
cl que CCS filles prenaienl le nom de (^liaiMi- qui f.iis.iieui profession de la lègle de saint
nés es sans un pouvoir légitime. Ces règle- Renoit étaient en plus gr.ind nombre, el ap-
inenls regardent prim ipilement la clôture, p.iremmenl (|ue le concile pi il la plus grande
le sib nce, la récilaiiou de l'oKice divin, cl pariic des munaslères pour le loul , ()aico
la règularilédcs abbesses , ruais il n'ordonna qu'en elVel dans (|uel(|ues (irovinces d'Italie
rien pour les autres religieuses, parce qu'el- il n'y avail que des reiigeuses beuediclines,
les Irouvaienl dans la règle de saint R. noit cl le coiici e qui s'èlail leuu à l'avie r..uivo3,
toutes les pratiques saintes de la vie nio- suis l'empereur Louis, lils de l.olliaire, n'ud-
nasliiinc. Ce concile avait été encore asseui- niit que deux régies, l'une de saint Rcnoit
Me par les ordres de Charleinague, qui d.iiis p.iur li'S moines et moiuesses , cl l'autre des
le même leni[is eu fit lenir quatre autres, a caïuuis pour les Clian uines , < t ne p nia
M.iyence, à lieims, à Tours el à Arles, mais point des Chanoinesscs, quoqu'ilycu eût
il n'y a que celui de Mayenee où il soit aussi pour lors,
parle de ClianoiiMsscs ; cardans le cjiiou l\notpréloud faire rcmoulor l'auliiiuilô
(i) MubiW., Muai. Ucittit., unu. Il, pjg. 430.
733 LAT Ï-AT 734
do ces Ch.moincsscs jusqu'au temps de la obligèrent enfin los papes cl les roncilos de
primitive lisiiso aussi bien que celle des leur prescrire une féfi)rm;itii>n qui en fit des
Chanoines Réguliers, et dii ((uedès ce lenips- Cli^inoinesses Régulières, tl les obligeât à la
là, ou au moins du lemps de saim Augustin, désapîiropriation.
les uns et les auires étaient dislingués des Comme d ms le môme temps il se forma
moines par leurs habits blancs, et apporie des congréualions de Clh.inoines HèguliL'rs
pour garant de ce qu il avance la règle de ce qui, poui' se maintenir dans l'tibservance,
saint, qui ordonne à ses religieuses de faire dressèrent des règlements et des coiisiiiu-
laver leurs habits par des foulons, ou de les tions, il y a de l'apparence (jiie quel(|ues
laver elles-mêmes. Mais cette preuve n'est pas Chanoinesses se soumirent à leur direct on
convaincante; car, outre que l'on porte aux el embrassèrent les mêmes règleinejils. Les
foulons toutes sortesdedraps, de quelqnecou- Chnnoinrs de la congréKalion de Latran s'è-
leur qu'ils soient, pour les laver et les ren'Ire t.iient iinposé une loi de ne se point ingérer
plus fermes el plus unis, et que nous voyons d.iiis le gouvernement des rcligieusts et do
encore aujourd'hui des Chanoines Héiiuliers n'en point [irendre la conduiie ; ils ne pu-
cl des Chanoinevses Ucguli:res habiles de rcnt néanmoins résisler aux sollicilaiions
dilTérenles couleurs; c'est que les actes du des souverains pontifes el des seigneurs qui
uiôme concile d'Ais-la-(^bapeIle de l'an 8IG fondèrent des liiona^tères de Chanoinesses.
marquent préciscment [Can. 10) que les ha- Il y en a environ trente qui sont soumis à
b Is des Chanoinesses claient n lirs. Les Bè- des abbés de cette congrégation, dont la plu-
iiédictines des abb.iyes de Saint-Pieire de part sont considérabies. Dans celui deSainie-
Jieims, de Montmartre près de Paris, de Marie de l'Etoile à Spolette, il y a ordinaire-
Xaintes, de la rrinilc de Caeu et quelques ment cent rd'gieuses. Le corps de la lî.
autres, auraient pu à plus juste tiire se (|iia- Marine s'est conservé sans corruption dans
lifier Chanoinesses, si on avait égard à la le monastère de S.iint-Matlli eu de la même
couleur et à la l'orme des habits, car elles ville. Le corps de la bienheureuse lùiplim-
ont piirlc des babils blmcs avec des surplis sine est en vénéraiion à Viceuze dans nii
jusqu'à ce qu'elles aient été rèfurmées \ers monastère de Chanoinesses. La Mère Bap-
le commencement du dernier siècle. Celles li?tc Venace, religieuse professe do celui do
Je Reims assistiiient même aux piocessious Sainle-Marie des Cràces, a donné au public
avec les Chanoines de la cathédrale, les Cha- plusieurs ouvrages de piété qui sont renler-
iioines formant un rang el les religieuses nu niés en quatre volumes imprimés à Venise
autre; et sans rapporter un gr.nd nombre et à ^'éron>^. il y avait autrelois un plus
de religieuses bénédictines (jui ont porté des grand nombre dj ces monastères qui dépcn-
liabils blancs, el mcn e des habits niirs avec daicnt de celle congrégation, et que les CJia-
des surplis, il y a encore l'ordre de Funle- noines Héguliers ont abandonnes, (oinuio
vrault, oii les religieises sont habillées de celui du Sainl-Lsprit <i Home, qui est main-
blanc avec des snrp'is ou des rochets, et tenant sous la protect on des rois de France,
dans les congrégalions du Monl-Olivct, du II était soumis à l'abbé di' Nutre-Daioe de la
Mont-Vierge et dts Camaldules,quoiqu'aussi Paix de la môme ville, qni en remil ladirec-
sous la règle de saint Benoît les religieux tion au cardinal vic.iire l'an 160G. G s Cha-
boiit néanmoins habillés de blinc. noiiiesses de Laîran sont haliillees de serge
Il paraît donc par ce qne nous avons dit blanche avec nu roebet de toile par-dessus
qu'on ne doit mettre l'établissement des Cha- leur robe, et elles mettent encore un surplis
noinesses qu'à la fin du viir siècle on au p.ir-dessus le rocliet quand elles assistent au
cominenceiiie'it du i\', el quoique les Cha- chœur (1). La congrégation de Windeseiiii
noines aient pris le nom de Réguliers el la en Fl.indre a aussi plusieurs monastères de
qualité d'enlants de saint Augustin vers la Chanoinesses qni sont habillées de même. Il
lin du xr siècle, lorsqu'on les eut obligés à y en a au-si en France qni ne soni d'aucune
la tiésap; ropriation, il paraît néanmoins que con;;réga ion,co:iiiiiï ciles do Saiut-liiienna
ce nV'bt que vers le milieu du XII' siècle que de Reims, de INotre-Uaire de la Victoire à
les Chanoinesses furent soumises à la règle Picpus près Paris, de Saiiite-Périne de la
de ce saint docteur de l'Iîglise, puisque le Vilictle et en plusieurs autres lieux, qui oui
d uxième concile de Lalran tinu sous le le même habillement que celui des t^hunoi-
pape liin. cent 11, l'an 1139, défend (Ch». ÎG ) nesses de Latran , aussi bien que celles
au\ religieuses de demeurer dans des mai- d'Espagne, et, s'il y a quelque différence, ce
s.ins sépaiées, sojs prclexle (riDspilalité, n'est que dans les manches delà robe et du
couiiiie élan^ contraire aux règhs ne saint rochei, qni sont ou pins larges ou pins
Basile, de saint Bennît el île saint Augustin ; étroites, el la p'iip;irt de ces Chanoinesses
cl le concile de Reims sous le pape En- portent anssi dans les cérémonies et au
gène 111, l'an 1148, oblige les Chanoinesses chœur pcmlant l'hiver un grand m.inleaii
qui vivent sous la règle de saint Anguslin noir (2). Et Languedoc et eu (iuienue, il y a
de renoncer à toute propriété. C'eU à l'iicca- des Ciianoinesses qui sont habillées de noir
sion de ces deux conciles que le P.Thomas- avec une bande ou b.inderole de toile blan-
siu dit qu'il se peut faire qiie c'élaienl les chc larLie de quatre doi(its qn'el es meitenl
mêmes (Chanoinesses du concile d'Ai\-!a- en éch.irpe ou bandoulière, ce (pii leur set 1
Lhiipeile, dont les dérèglements scandaleux aussi d'habilleinenl de chœur; mais il y en a
(I) Voy.,ii la liiidu vol., u"^ 178 et 179. (i) Yvij., ii h fin du vo'., n* i.;0.
735 DlCTlONNAIIit: PES
quolmics-uncs (|ui incllciit ciicoro dos siir-
l'Iis p.ir-ilrssiis lors(|ii"i'llos y vont. l'hiCm il
V en .1 bc-nuri)ii|) d'iiutres qui ont des li;ilill-
"loninil'* iliiTiTciiU, nous parieioiis ircllos (mi
Irailaiii dis coiijjit'fjjitioiis auxii'icllcs files
smil soiiini-es ou auxquelles elles oui quel-
«]U" rap orl.
On n'esl pas surpris de voir ces Clianoi-
iicsses on n cliel et en surplis, et niènie avec
I ne liaiide ou haiulcrole de toile, puisque,
comme nous avons dit en parl.inl des Cha-
noines lleiiulirrs, ces rorliels, surplis et blin-
des étaieni dans leur ori'.'ine, et avani qu'on
les eût acconrcis el élréeis, une aube qui
liait eouimuue à tout, s sortes de personnes
(le l'un el de l'autre si-xe, même aux laï-
(lui's; mais on csl S'irpris de voir ([ue quel-
ques ('.liaiioine-ises aient pris de< aumusses,
puisqu'il n'y av.iii aulref lis que les liommes
qui s'en s rv.iieul pour couvrir leurs tètes,
el (]ue les reli^'ieuses oit eu toujours des
voiles pour cet usagi-. A la vérité ces sortes
de ('.lianointsses avec des aumusses sont ra-
res. Les religieuses prémontréi's en portent
on (pieliines provinces, cl ou ce trouve que
IcsCli.inoinesses deCJi lillol près Paris (parmi
celles qui se disent pureiiieni et simp'cmenl
('.hanoinesses) ((ui les aient imitées, à la dif-
férence qur les aumusses des religieuses pré-
monlrces sont blanches, et q':e celles des
(^hanoincsse-i de ('.liaillnt sont noires, niou-
thclce< de blanc (1 . Klles s'établirent d'a-
bord à Naulerre en 1C'»7. Ce furent d 'S reli-
gieuses de Saiu'-I'"tienne de Ucims, d'où sont
aussi sorties celles de l'.cpus, qui firent cil
clai lissemenl ; mais les guerres civiles élanl
survenues peu de lemp-> après, cette commu-
nauté naissait e fui o.ihgec de s'approcher
plus jirés de Paris, et vint d( lueurer à (^liai:-
lol, qui est re,'arde coiume un des faiibour;;s
de celle gr.inde ville, et qu'on appelle en
cITet le faubourg de la ("onrércnce.
Aola. Au dernier siècle les Cbanoincsscs
de I>alran avaient à Komc la Cummuniulé
du Saint-I-Jsiii it. lîllcs existenl encore, el
sont aujiiurd'luii, comme autrefois, sous la
direction d'ecclésiastiques séculiers.
K-D-E.
LAUHKN'l' D'OULX (Chanoines Rkgiukiis
DE LA CUiNGIlÉGil 10>' DU tJAlNT-j.
I,c mon.isièrc de Sainl-I.aiircnt situé pro-
che d'Culx, qui est un bourg du I),iii|liiné
dans le lirianc onnais, el du diocèse de l'urin,
a (iouné le i.om a celle congrég.itioii. Selon
l'aniienne Iradilion , on (retend iju'il a élc
l.àii avml la n.:iss.incc de saint lienoit ((
({u'il fui b.iliilé dès ce lemps-l,i par de saints
moines. S I situation, qui se liouve au milieu
de plus curs nu)iilagnes e^ca^pces ijui |.a-
raissi ni in.icces-ibles , a vait donné lieu à
pli.>i' urs lidèlrs de s'y réiugicr pour eviler
la lureur des \andales. Mais ces barb.ires,
après avoir ravagé I lialic, ne laissèrent pas
d'y passer et de faire mourir tous ceux ()ui
se trouvèrent sous'b urs mains ; el, à cause
du gr.ind nuiiiiiru (jui suulTrircnt le uiar-
(I) Vwj., j |j lui du vid., Il' 161.
oitD)ii:s iti:Licii;Lix. 7:.o
lyie en celte occasion, l'église de S.iiiil-
l.aureul lut surnommée, de lu Populace t'es
Mai Ij/rs.
Depuis la relr.iile des A'andalcs, ce lieu
demeura inhabile pemlant jdusieurs sièi les,
jusqu'à >e que Dieu inspira à un saint liom-
i: e nommé (1er, ni (',h:irl)ri rius, natif dOulx^
de s'y relircr. Il bâiil, l'an 1050, une petite
cellule proche de celle église , cl quelques-
uns l'ayant voulu suivre dans sa retraite, ils
rc>olureut d'enibiasser l'ordre canonique,
(lerard fut à cet ellel trou\er Cnnilierl, évè-
ijue de Turin, de (|ui il obtint la permission,
tant pour lui que piur ceux qu'il recevrait
dans Sd connnunaulé, de \ ivre selon cet ius-
tilul.
11 parait par un cartulaire de l'ait 1057,
(•,ui est dans les archives de Turin, cl raii-
porié par Ciuiclienon d.uis son liisloire de la
(îenéalogii! de la maison de .'^.ivoii',qu'()don,
coMile de Savoie cl de Maurit nue, la com-
tesse Adélaïde sa b'mme cl leurs enfants, fi-
rent (hjnaiion à (jér.ird cl à ses Chanoi iCS
(I ■ ladite église de Saint-Laurent, de celle do
Saiut-Just de Suze (que la comtesse Heribe,
mère d'Adélaïde, avait co.mnence à faire bâ-
tir) ; de celle de Sézanue d'Oulx et de Selle-
berlr.iud, avec les dé. ii. es, les prémices cl
les oblalions. Voici les termes de la fonda-
tion, qui prouvent (]ac dans ces commence-
ineiils ils ne suivirent pas l.i règle de samt
Augustin, non plus ijuc ceux de la caihé-
(Irale de Turin, de qui ils avaient pris la
manière de vivre. Huuc dniiilioneni faiinms
(1(1 clciico.i ipti in eo 'cm loco vivitnl ri(jula-
rîler, quorum noiniuii sci iptu vidcnlur adcsse :
numtKa (iiilemliœc sunl : Uiididna et Uldiiri~
eus, Aicnrdiis et Mai lin is et Lunlilmus, c c,
t/ui mudi) ibi sunl d fuluri eruiit in eudem
loco, ut i.iti et lli. h(i'>eanl po!csliUein Ic-
iicndi,liiibeutli d possid.-ndi , sccttndum reiju-
tain cununicam. lit ce le règle était sans
dou c celle qui avait été ordounéu dans le
conc ile d'.\ix-la-('h.i pelle.
Cuniberl, evèquc de Turin , non-seule-
nicnl confirma celle donation Tan lOllii, mais
il d ;nna encore à ces Cbinoines prés d.' qui-
raiite autres églises, dont la plus considéra-
ble fut celle de Sainle-.Marie de Suze, dont la
juriiliction comme èpisiO|iale s'étendait d.iiis
tout le mirquisal de Su/e. Cetévè(iue, pour
lémoiguer l'eslime qu'il f.iisail de celte con-
gregalion , lui donna encore un tanonical
dans sa calbédrale de Tui in, voulut que le
prevol d'Oiilx en lut loujours pourvu, el en-
lin (jue l'église de Saint-Laurent de tu /'o/iu-
tiice (les iMurlijnt, chef de relie con^iég.itii.n,
fût exemple de la juridiction des évèques
de Tuiin tant qu'il y aurait des tibanoines
qui y demeureraienl el v vivraient réguLère-
meiii.
La coinlessc Adélaï<Ie de Suze et la com-
tesse .\giiès sa bru donnèrent aussi à ces
l]|ianoii:es, l'an 10^i't, une autre église avec
liius les revenus (|ui en dèpeiid.iienl ; lo
comte ;\mé ou Amedee imila la piele de sou
père; Tan 1107, llumbcrt III put l'cglise de
757
l.MI
I.\7,
7-3
Sainl-Laurenl sous sa protcitiuii, et dmiua
encore à ces Clianoiiies en 1170 un liopKnl
et une é{;lisc avec les revenus qui y él/iienl
annexés. Les souverains pontifes n'ont pas
moins favorisé cette congrégation, qui a
reçu beaucoup de privilèges des papes
Alexandre II et II!, Urbain II, Kugène III,
Adrien IV et Lucius III. Il y avait environ
trente prieurés qui en dépendaient , dont
qui'lqucs-uns sont possédés préseniem nt
par les Chanoines Héguliers de la congréga-
tion de Latran ; et celui de Saint-Laurent,
qui en était le chef, sulisiste encore sous lo
litre de i)rcvôié. Le prévôt exerce une juri-
diction spirituelle dans l'étendue de sa pré-
vôté. Il ne reconnaît que le pape, dont il re-
lève immédiatement. Il confère les bénéfices
cl fait toutes les fonctions qui ne sont point
attachées au caraclère épisco.ial. L'hahille-
ment de ces Chanoines ne dlITère de celui
des ecclésiastiques que par un petit sca-
pulaire de lin de la largeur de deux doigts,
qu'ils mettent sur leur soutane. Au chœur
ils portent pendant l'été un surplis, et l'hi-
ver un rochet avec un camail noir par-dts-
SlIS (1).
Quant à Gérard Charbrérius, fondateur de
celle congrégation, il fut peu de temps api es
élu évêque de Sisteron dans un synole de
plusieurs évêqucs assemblés à Avignon par
Hugues, légat du pape Nicolas II. Il y avait
|;rès de dix-s;'pt ans que ce siège était va-
cant. Uambaud, qui était un seigneur très-
riche et parent des conVes de Forcalquicr,
ayant achelé cet évôché pour son fils, qui
était encore jeune, en avait dissipé les r. ve-
nus, et même avait vendu loul ce qu'il avait
pu ; de sorte qu'il ne restai! pas seulement
un lieu qui appartînt à l'évéque et où il pût
demeurer une nuit, selon ce que dirent les
anciennes chartes de cette église : ce qui
lit qne le fils de Rambaud , étant devenu
grand , Iriuva encore des simoniaqucs ijui
lai vendirent l'évêché de Vaisoii, dont il pi il
possession l'an 10C0. C'est ce qui donna aussi
lieu à l'assemblée de ces évoques à Avignon,
où Gérard fut élu évéque de Sisleron. Son
iiumilité l'einpécha d'abord d'acieptcr celle
dignité; mais le légat layiinl envoyé au pape
avec des lèraoignagnts de sa probité, il eu
rcçiil un accueil fivorabîe, et ce pontife,
l'ayant obligé de consentir à sou élection, il
le sacra liii-mêine.
lîlant de retour en France , il trouva son
église tellement ruinée, qu'il n'y avait pas
un hospice où il pût se reliier; et, outre les
maux que Uambaud lui avait causés, Pierre
Kostan et l'once, frères et seigneurs de Sis:e-
run, avaient usurpé la plus grande partie des
biens de celle ég ise; mais il sut si bien leur
représenter le crime qu'ils commettaient en
rdenant ainsi les biens d'église, qu'ils re-
connurent leur faute et restituèrent tout ce
qu'ils avaient pris. L'église de Forcalquicr
avilit éié réunie à celle de Sisteron ; mais
Gérard les sépara, transféra son siège à For-
calquicr avec tous les honneurs donl eeiie
de Sisleron avait toujours joui, et autant
qu'il fit de bien à celle de Forcabiuier , an-
t.int fil-il de mal à celle de Sisteron , disent
aussi CCS anciennes cluirles. Après sa mori,
ses successeurs rapporièient le siège èpisco-
pal à Sisteron, et depuis ce temps-là l'église
collégiale (le Forcabiuier a été concathédrale
avec celle de Sisteron.
Penot, llist. liiparl. Cunonicor. licgul.
lib. 11, cap. 33. Siimniarth., Giill. Christ,
lom. 11. (luiclienon, ilist. (jcnéalog. de la
tnuisoii de Savoie ad c.ilceui , puy. 2, 20
et 42. Le Large, de Ord. Canonic. disiju.,
pag. 3\').
LAZAlîE (ClIlîV ALIERS DE S.VINT-). Voij.
Mont-Caiuiiil.
LAZARE DE JÉRUSALEM [chevaliers
110SPITALIEHS DE Saint-).
Onoi(jue l'or. Ire militaire de Saint-Lazare
ait èlé soumis à la règle de saint Augusliii et
qu'il soit encore soumis en Savoie à celle de
sailli Ronoîl, néanmoins, comme il y a plu-
sieurs historiens qui rapportent sou origine
à saint Basile, dont les chevaliers de cet or-
dre (à ce qu'ils prétendent) ont suivi la règle
pendant plu leurs siècles, nous ne pouvons
pas nous empêcher d'en pirleren cet en-
droit, en attendant que nous en parlions en-
core en tialtant de l'origine des ordres mili-
taires de Notre-Dame du Mont-Carmel et de
Sainl-Maurice, auxquels il a été uni dans la
suite. Mais, si nous en parlons présente-
ment, ce ne sera pas pour lui accorder une
origine si éloignée, que de Bclloy a rendue
eiicoie plus chimérique en la faisant remon-
ter jusqu'à l'an 72 de Jésus-Christ , ajou-
tant que < et ordre avait d'al'ord été insti-
tué pour la défoiise des ch éliens persécu-
tés après la mort de .Sésus-Chris', par les
scribes, les pharisiens, les saducéens et les
Romains {2).
Il est certain que saint IJ.isile fil bâtir un
hôpital u>agninque dans l'uu des faubourgs
de Césarèe, qui peut avoir été comsiiciicé
vers l'an 370 ou 371 , et que saint tirègoire
(le Nazianze, après en avoir fait la descrip-
tion [Orat. 20), compare à une ville. 0 01-
qu'on y reçût indilTéreminent loutes sortis
de personnes à qui la faiblesse et les incom-
modités rendaient nécessaire le secours des
autres, et qu'il servît même pour recevoir
les étrangers qui passaient par Césarèe, il
n'y a pas de doute nèamnoiiis qu'il ne fût
spécialement établi pour y recevoir les lé-
preux, puisque le même saml Grégoire do
Nazianze dii aussi que l'on ne voyait plus
dans Césarèe ce triste et misérable spectacle
des lépreux, qui avaient été inlerdits de la
conversation de leurs proches et du com-
merce de tous les liommes , et dont l'abord
causait auparavant plus d'horreur que de
pitié.
C'est ce qui est confirmé par Tliéodorel
{Lib. IV, cap. IG) , qui remarque ([ue saint
{!) \oy.. à la (in du vol., n* 1S2.
(tJj be liclloy, de l'oriijinc de Chevalerie, cliap. 9, pag. liG.
739 niCTIONNAlKE DES OIinnKS ni-.î.ir.lîîL'T. 7'.()
iJasilc pronnil irnix un s lin (ou! particulier. Il parle pnsuilo <l.-> rinslitiitinn des autn-s
il nui? rciiiiicrcur \ aloiis , loul ..rii'ii qu'il onires iiillilniri>s ilii Siiinl-Si'puicrp, ile> Tcni-
élail, donna aux pauvres lépreux dont ce pliers ri (jcNdlrc-Datnedes Alleninnds ouTou-
.saiiil avaJl soin les plus belles terres ((u'il loi!i(]ue ; et. rexeiiaul à relui deSainl-La/are,
tût en ces i|uarlifis. ("eux qui préleuilent \l i\\i : 5Itiis, pendant i/ue ces ordres mililturef
que l'ordre de Sainl-Lyz.ire tire son Drijjiiie comwençniint ainsi prrsqudi même tcnps à
de cet liopilal di.senl que le zole de saint lia- 5 élahlir peu à peu dons Ji-rusalem , relui des
si e fut iniilé par [iliisieurs villes, qui à son liosp'la'iers vcims ei modernes, que l'.npeut
eveniple I alireii! aussi des lirtpitaux ; cl que, dire <n oir été le mudèle des nulres , faisait de
cuuimc les lépreux claitnt foi l communs en grands pro'/rès dans la Palestine et s'attirait
ce lemps-là el pouvaiint communiquer leur beaucoup de cons d 'ratinn par les grands ser-
iiialaiie p.ir la Iréquenlat on, les liopitaux vices qu'il rendait en paix et en guerre. C'est
qu'on li'ur deslina iïircnt nofi\més Icprose- poKrf/noi le nombre des pi'Ierins aussi bien que
rirs el malailrcric s sous le titre d(! Saint- clui des soldats et des gentilshommes qui rn-
Lazarc , el q.ic leux cjui eurent soin de trirent dans cet o>-dre, ci oissunl tous les jours,
tes hcpiliiux eniliras>crcnl la règle de le /]. Gc ard Tung, l'rorcnçal de l'île de Mar-
sainl lîasile et firmèn'iit un instilul difl'é- ligues, //ui et lil maUre des hospitalirrs lors-
rent de son ordre sous le nom de Sainl-La- gne Ji rusa'em fui prise sur 1rs Sarrasins, bd-
zare , qui l'ut approuvi" p.ir le jiape saint til. euriron l'an 1112, un ircisième ltô;ital
Damase. sotts le nom de Saint-Jein-Haptiste, el y lo-
jM. .MaimbDiirp, dans son Histoire des Croi- gen ses nonreau.r chevili^rs , i/ui commencé-
sades [Liv. m, pag. 23i;, conlo.id les clu'- rent peu de temps après à former le dessein de
valiers de Sainl-l.aziirc avec ceux de S.iint- suivre une conduite et une forme de vie plus
Jean de Jérusalem appelés comiMuncmL'ut de sévères encore et p'us parfaites que celles de
Ma t.' ; ou du m iiis il seinlile ins;nui'r que leurs anciens confrères, l'n iff't, comme après
C' ux-ci ont pris leur orii,'ine des chevaliers /(/ nort de Gcr.ird un élut à lu pluralité des
de Saint-Laz.iie, car il dit que les chevaliers voix frère Bayant liogir / oiir grand maiirt
de S. iul-L izare sont les plus iincieas liospi- d'S hospilaliers, les nnaicaux chevaliers de ce
laliCiS (lui s'éliililirent à Jérusalem; que troisième hôpital de Sainl-Jean-B ipliste,per-
lorsque les princes chrétiens coni|uirenl la sislnnt dans leur première résolution de me-
terre sainle. il y avait à Jérusalem dos hos- lur une vie plus parfaite et d ajouter, comme
p.l.iliers dont les uns recevaient les pèlerins, les chev'liers du Tem/ile, à leurs autres vœux
el les antres avaient soin des malades, cl par- celui de ehustelc, se séparèrent (/e> anciens
liculiéremeiit des le| riux ; que ceux (|ui re- hospitaliers el choisirent pour Imr chef frère
cevaii-nl les pèlerins iront con)menec ((ue Jlui/tuoud du Puii.(/enltlltmme de Dauphiné...
loniçlenips après les hospitaliers tle Saiiit-I.a- (Ju ml aur anciins cheialiers qui furent ainsi
2.11e; que ce qui y donna lieu fut que certa ns séparés des nouveaux, avec lesquels ils ne fai-
Jiiaicliaii.ls d'Aiiialphi , au royaume de iNa- salent auparaiant qu'un seul ordre sous un
;)les,(|ui traliiuaienl dans la Syrie, ayant oli- même grand maître, ils retinrent leur unc:eii
tenu d un cilife d'l';;.'yplc la (lermissiou de h;i- nom de .Saint-Lazare.
lir un monastère proche le suint sep ilcre, ils II pirait par ce discours de M. IM.iimhoiiriî
y ajoutèrent iiii hôpital avec un oriitoire dé- que l'Iu'ii.iiial de Saiut-Je;in-lfa. tisic clait dil-
die en l'honneur ue saint Jean l'Auiiiôuier forent de celui île SaintJaii-i'Aumôner, qui
pour y recevoir les pèlerins cl les pauvres av.iit été hàii proche le monastère que ces
malades, et qu'alors il s'y (il une commu- marchands d'Amalphi avaient fail cons'ruirc
Jiauté qui, outre ceux qui s'employaient au- au'c environs du saint sépulcre , et que l'un
p.'uavant à traiter les m. il. ides et les lépreux, nommait de Sainli'-]\I,irie de la Latine. Cc-
coniprenait aussi ceux qui ét;iienl liestiiiés pendant ("luillauine do Tyr, auquel on doit
p.irlicul élément nu service des pèlerins, cl ajouter foi, lé.'iioi^ne que de son temps cl
que 1rs uns (1 les autres s'appelaient indlile- lorsqu'il écrivait son Histoire ( /,//). xvin,
remmi'iit hospitaliers. Il ajoute qu'ils vé- c. 5 et (J,inllt'3, ce meiiasicre s'appelait
cureni longt iiips dans ci t exercice de clia- encore de la L.iline : /•."/ quoui'ivi viri Lntini
rilé sous i.n supérieur que l'on appelait rrant (/ui locuin fund ncrant et i/ui relii/ionem
maître de Ihi^pilal, jusquà ce qu'.ipiès l.i conservahant, id-irco ah ea die usque in prœ-
coiii|néie de la l'alcaline par les priiics sens locus ille mmiasteriuin de Latin 1 diritur.
cioises, ils prirent les aunes, nou-seulemrnl i| m» dislingoe point rhojiital de Saint-J an-
pour la défense des pau»ris pèlerins, mais l'Aumonier d'avec celui de S.iint-Jean-ltap--
aussi pour SCI V ir les rois de Jcrusale.n, aux- liste, que M. .Maiinhouig dit que le I!. (iéiard
quels ils fuient d'un grand secours dans tou- fil liâiir; il ne pa le que d'un seul, dont l'c-
les les guerres. Tour lois,dil-il, ils partagé- glise avait été dédiée à saint Jean l'AuniA-
rent leur communauté eu trois étals dille- ii:er: t'rexcrimt cliam in codcm loro attare
rciils, dont le premier fui celui des tlieva- in hunore IL Joannis l\lvcmos. (;'esl d.insicl
liiTs, qui allaient à la guerre; le second des lu'ipilal qu'il dit que le H. (iér.rd mourui
frères servants, qui avaieni s:)in des mala'les aprc< y avoir s rvi les pauvres peu. tant un
el des pèlerins, cl le troisième était celui des temps considéralde sous les ordres de r.ililH'
ecclésiasliques el des chapelains, qui leur cl des religieux du monastère de la Latim-,
administraient les sacrements; el cette coin- pt que llaymond lui succéda : l'I in xenodu-
pagiii.- fut éiigéeeii ordie u.ilitaire, que 'c chio similitcr rrperlus est quidam (ierardus,
pape Ta»; al 11 conlirm.i. vir prubalœ cuni\rsutiouis, qui paupcnbus i»
71» r'.z
I.\2 T.'i
eodem loco tempore hostililalis de mondain préicnd quo 1 on ne doit pas conclure de U\
nbbath H monachorum, multo tempore d-vulc quo ce Roger ait de rrclcur ou prcin ,1c Vh(,,
serriehrJ ■ cui poslea successif Itai/miindus \Al:i\, qui sont des litres qui no <onv ei.nont
|s7e de quo nobis Si-rmo in prasmli. !i se qu'à un sui.eiier.r, et non pas celui de g u-
piaint ensuite que ce Raymond et ses lio pi- vcrn-ur, et (ju ,1 se peut laire (ju'il ail été
laliers nui n'avaient eu que de f;iil)les cutu- étal)li ;,MiUverni'ur dr I hôpital en l'absence
mencements, se voyant exlrêinenient iichcs, de Hayuiond du l'uy, qui succéda à (iérard,
s'étaient d'abord soustraits à la juiidiition d'autant plus qu'il n'y a aucun tiire djiis la
de l'abbédu monastère de la Lat ne, et av.iieiit chancellei ie de l'ordre où il soit parlé de ce
tenu des bulles du pape , qui les cxemp- Uoger en qualité de supérieur ou de inaîire.
»i>
talent aussi de celle du patriarche de Jéru- D'ailleurs, s'il é ait vrai que les cli- val ers
salem : Sic eryo de lam modico incrementinn de Saint-Jean de Jérusalem et de Saint-La-
hahinles piœ Hclœ domiis fratres, prius a ju- zare ne se fi.s-ent séparés qu'après l'eleclinn
risdiclione ss suhtraxerunt ahbo.t.s ; dvinde de ce frère Doyaiit Roger, il s'cnsuivrai qu'î
vi'dàpiicalis in immensum divitiis. per Ecclc- cette sépa'aiion n'.iurait clé faite qu'apiès
siam Itomanam a manu et poleslafe domini pu- l'an 1120, puisqu'il esl fait meniion de ce Ko -
triarchœ sunt émancipait. Ce n'est unique- pcr en qualité de gouvemcur de l'IjôpitaJ do
ment que des chevaliers de Siint Jean de Je- Sai;it-Jein de Jérusalem dans la donation
ri:8;Iem do:, t cet auteur pirle ; d'où l'on doit du comte d'Abruzze dont nous avons parlé,
conclure que c'est san-i aucun rondement que ce. i\u\ est contraire aux prétentions de M. dj
M. Maimbourg, qui cite même (iuillaume de Guénégiud , ci-devant chancelier de l'ordre
Tyr, a avancé que les chevaliers de Saint- de Saint-Lazare, qui, dans un de ses faclums
Je'an de Jérusalem et ceux de Saini-La/arc contre M. le marquis de Dangeau, grand
avaient élé unis et n'avaient fait pendant un maître de cet ordre, s'est déjà déclaré e.i fa-
temps qu'un même ordre. veur de l'union des deux ordres de Saint-Jean
Il est vrai que le grand maître Raymond et de Saint-Lazare de Jérusalem, et dit qu'ils
du Puy, de l'ordre de Saint-Jean de Jérusa- fuient séparés dans le xr siècle. P,ut-étre
lem, changea le liire de son hôpiial qui avait que M. de Guénég lud, dans l'Hisloire de son
élé dédié à saint Jean l'Aumànler , « n celui ordre , et qui n'a rien épargné pour recou-
de saint Jeai.-Baptisle, qu'il pr.l [lour prolec- ^rcr les titres de cet ordre, a apporté dis lé-
leur de son ordre, ayant voulu imiter la pé- moJgnagrs plus convaincants que C;ux quo
nitence de ce précurseur du Sauveur du M. Mainihourga donnes, pour prouver l'uni ,n
inonde, et l'ayant proposé pour modèle à ces <'« ces deu\ ordres de Saint-Jean et de Saint-
chevaliers. C'est peut-être ce qui a donné Lazare de Jérusalem.
lieu à M. Maimbourg de croire qu'il avait Ce que l'on peut dire de plus certain tou-
bàtià Jérusalem un trois èine hôpital sous ce chant les chevaliers de Saint-Lazare, c'est
nom, comptant apparemment pour le pre- qu'ils ont commencé d'abord pir exeicer la
niier de ceux qui étaient en celle ville celui charilé envers les pauvres lépreux d ins des
de Sainl-Jean-l'Aumônier proche le menas- hôpitaux dc-tinés pour les recevoir; (|u'ils
(ère de Sainte-Marie de la Latine, et pour le prenaient le nom d'hospitaliers , el que dans
second celui que les Allemands avaient fait 'a suile, à l'exemple des autres hospitalier-,
bâtir sous le titre de Notre-Dame des Aile- '' y en eut une partie qui prit h s arme, pour
mands ou des Tcul ms. le service des princes chrétiens qui comiui-
(Juanl à ce frère Boyant Roger, que le ''eut la ter;e sainte , sans abandonner | our
même auteur dit qu'on élut à la pluralité cela l'Iio-pitaliié ; ce qui ne peut être arrivé
des voix pour grand maître di's hospitaliers l^e dans le xir siècle.
après la mort Uu B. Gérard, je ne sais si les "s recevaienl même dans leur ordre des
chevaliers de Saint-Lazare le mellent au lépreux, apparemment pour avoir soin des
noinbie de leurs grands maîtres ; mais, quoi- autres lépreux, qui se relii aient volontairc-
qne Bûsio, dans son Histoire de l'Ordre des ment dans leurs hôpitaux, ou (jue i'on obli-
Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, ail geait par force d'y enircr; et ce qui est re-
dit que ce frère Boyant Roecr fut élu pour niarquable, c'est (jii'ils ne pouiaient élire
grand maître de cet ordre après la mort du pour grand maître qu'un chevalier lépreux
B. Gérard, il ne se trouve p is néanmoins au ^le l'Iiôpilal de Jérusalem, ce qui a duré jus-
nomlire des grands maîtres dont le comman- que sous le pontificat d'Innocent IV, c'est-à-
(leur Naberat nous a donné un abrégé des dire vers l'an 1233, qu'ayant élé obligés d'à-
Vies dans les privilèges de cet ordre qu'il a bandonner la Syrie, ils s'adressèrent à ce
recueillis. Le commandeur Maruli , dans les pontife et lui rrmonirèreni (ju'aj aiiUoujours
Vie» des mêmes grands maîtres (1), mais cKi pour leur grand maître depuis leur iiisii-
plus amples que celles que Naberat avait lution un cheviilier lé(>reux, ils se trou-'
données, n'y met point aussi ce Boyant Ro- vaient dans l'impossibilité d en élire un,
ger. Il avoue bien qu'il en est fait mention p irce que les inlidèlcs avaient tué tous les
dans une donation de l'an 1120, que fil à chevaliers lépreux de leur hôpital de Jérusa-
l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem Olton, lem. C'est pourquoi ils prièrent ce pontife
cumle d'Abruzze , où il déclare avoir l'ait ce de leur pL-rmetlrc d'élire à l'avenir pour
Roger gouverneur de l'hôpilal de Saint-Jean grand maître un chevalier qui ne fût pas ai-
de Jérusale.n ; mais le commandeur Maruli laqué du lual de lèpre et qui fût en bonne
et) Geroniiu. Maruli. Yii. de Grand. Miusl. di ilalta.
:;', nicTio.NNAïui: i>F,s ouDur.snF.i.if.ir:i]\. 7*4
saiilo, cl le p.ipc los renvoya à l'cvcquc du cnr, aynnt 6l6 rlmsséj 6v l:i Imc sainte 1 an
FiMScali, l'our nu'il leur ai cordai celle per- 12o3, ils siiivirenl le roi saiiil I,otiis, qui, en
tnissiiin après avuir cxaniinc si cela se pou- rcconiiaissatice des services qu'ils lui avaient
*ail faire selon Dieu. C'csl ce qui esl rap- rendus en Orient, confirma les doiialions
porié par le p ipe Pie IV dans sa bulle de que ses prédécesseurs leur avaient f.iiti»,
l'an lot).'), si étendue et si f.ivurablc à l'ordre les mit en possession de plusii-urs maisons,
de Saini-Lnz.irc. par laiinelle il renouvelle cominanderies cl hipilaux que ce prince
tous les priviléjïi'S et Uiutes les grâces que fond.), et leur accorda plusieurs pr.v lépes.
ses prédécesseurs lui ont accordes et lui en l'our lors ils clab:ireiil le dief de leur ordre
donne de nouveaux. Voici comme il parle à liniguy près d'Orléans, qui leur avait éié
de l'éleclion qne les clievaliers de cet ordre donné dès l'an llo'i- par Louis VU dit la
devaient faire d'un grand mailrcléprenx ( I) : Jeune, et le grand ni.iilrc prit le tilrc do
ISt Innucenliiis IV , per eum acceplo qitoii li- gran I maître de l'ordro de Saint-Lazare,
cet de mili(iHri, fpprohata et ealenii-t paiificc tant deçà (jue delà les mers, sa juridict on
obseriala consuetitdine vblrnlum essrl ut mi- s'éteniianl non-seulement sur les clieva iei s
les leprostis tlomtis Sancli Lnziiri llieroso'ij- qui élaienl eu France, mais uiènie sur tous
vtilani in ejus magisti itin assumcretiir : re- les élrangiTS. C'est pourquoi Jian de Cou-
rum quiii /ère o-imes milites Icprosi dictœ do~ ras, (jui avait été pou vu de celte charge l'aa
mus ni) iniinicis fidei miserabitiler iiitcfcti i'-iVl par l'Iiilipiie do Valois, donna pouvoir
fuernni, et luijusmodi ccnsuctudo iiefjuihat l'an IHoV à frère Jean Ilallidei, Lcoss.iis, de
commode oOfennri , idcirco tune episcopo gouverner en son nom, tant au spirituel
Tuicuiiino per qinsdam commis rut, vt,si qu'au tenipirel, loul ce qui apiiarlenail â
$ibi secundun Deum risum foret expedire, l'ordre en Angleterre et en Liossc, à lu
fialrilju< ipsis ticmliiim a/i/ue;;i mititem sa- cliarge de faire tenir par chacun an à la
niim, et fralribus pr.pilictic damas Sancli L'i- grande co-nmanleric de lîoigny irenle marcs
;inri m ejux waji.tirum (non ob-liinle consn- sterling d'argen'.Le ro; Charles \', surnomn)é
titdine liiijiismodij de cœtcro eligendi auctori- le Sage, ayant pourvu «le la grande enaîtrisc,
late (iposloUcii concedeiet. l'an 1377, Jacquesde licyms.ce grind maître
Les chevaliers qui n'étaient point lépreux donna à frère Doniniquc de Sainl-Koy la
cl qui étaient en élat de porter les armes couimanderic de Seringon en Hongrie, cl
rendirent de signalés services aux princes l'établit son vicaire général dins tout co
chrétiens dansia Palestine, ce qui obligea royaume, avec obligation de se trouver aux
les rois Haudouin II.Koii'.qufs, Amauri lil et chapitres genér.iux à !!oii;ny, et d'y appor-
IV et les reines Melisiiide et Théodore, à 1er quatre marcs d'argent lin. L'on trouve
prendre leur ordre sous leur prole.tion et à un V. V. Potier dit Conilans, prêtre de cet
faire beaucoup de bien aux maisons ((u'ils or. lie, commanilcur de la Lande- Uaron,
avai' ni dans la Syrie. Ils reçurent aussi plu- mort en l'ioO, qui prenait 1 1 qualité de vi-
sieurs privilèges des souverains ponlifs; cairc général du grand tnailre ti. Desmarcs,
et, étant passés en Lurop', les princes leur La grande mai.'risc l'ut encore donnée pir
donnèrent de riches possessions. Clément IV Ch nies Vil à Pierre Hu:iiix l'an UVI. et
oidoiiiM sous peine d'excouicnunication à par Louis XI à Jean Co. nu l'an li81.
tous les ] relais «le l'Eglise, que, lorsque b'S .M.ii.s, comme les lépreux étaient rares et
(hevaliers «le Sainl-L.izarc s'adresse; aient à que l'on voyait peu de personnes attaquées
eux pour ol.liger les lépreux de se retirer de celle ni.iladie, il semble queccscheva-
dans leurs hôpitaux, ils eussent à donner liers hospitaliers, qui d'ailieurs s'étaient
main-lorle a ces chevaliers et à c mlraindre beaucoup relâches de leur premier iusliiul,
les lépreux de se rciirer chez eux aver leurs priacipaiemeal ceux d'Italie, ét.iieni dcve-
liiens meubles et immeulile-. Alexan.lre IN', nus iiiulilcs : c'est ce qui obligea le pape In-
par une Imlle dt; l'an |-i'i5, leur permit de noceat VIII de suppriaicr Icar ordre et d>^
suivie la ré;:le di- saint .Vuuustin, ipiils as- l'unir avec tous les biens «jui lui appa te-
suralenl avoir su vie jus,|u',ilor3, touiine il naieiil à l'ordre de Saiui-Jean de Jérusalem,
est marqué «1 ins la bulle «le ce p«)nlife, où il par une bulle de l'an 1V',)0. Mais celte bulle
n'est point lait m iilion de la rè^le de saint ni- fui point rei-ue en France, où il y a tou-
Itasile, ce «lui l'ait voir «lue c'est s.ins raison jouis eu des grands maîtres de l'.irdie do
que «inelqu«'s uns disent qu'ils ont autrefois Saint - L izare de Jeriis ileui, qui oui reçu
suivi la règle de saint Itisile. Le même pape di'S chevalu rs auxquels ils oui conleié Ls
les mit sous la pro:eclioii «lu saint-siege r.ni co.iimamieries qui en dépen lent, et ont lou-
l-i.'>7, et conlirina 1«'S donali«)ns qne l'emiic- jours et." m.iinlenus dans ce droit. Le grand
reur Friderie 11 leur avait laites «lans la Si- prieur d'.Vquitaine d.- r«)rdre d«' Saiut-Jeaii
«lie, la Puuille, la t^.ilalire et qneliiucs au- de Jérusalem ayant pourvu iii de ses clieva-
Ires provinces. Henri, r«)i d'Angli'terre, duc licrs de l.i couimanderie ili' Saint-l'honias «lo
<rAnjou el de Normandie; Thibaul, comte de Fonti'iiay. apiiarlenanl à l'ordre de Siint-
Itlois , cl plusieurs autres, augmentèrent Lazare, le grand m.iitre de cet onlre et ses
leurs revenus. chevaliers s'y opposèrenl. Il y eut à ce suj -l
Mais de tous les princes chre'.iens il n'y procès an parli'iiienl de Paris, (jui fut déi ulé
<•« a p oini dont ces clnvaliers aient n eu de l'an l.')V7 eu faveur du graml maître de l'or-
plus grands bionla:ls «luedes roi» de France; drc de Saint-Lazare, qui fut maintenu dans
(1) Huit. Hom., tim. Il, c-rnsL 0:< Pii IV, § i.
745
LAZ
LAZ
740
lo droit (le conféicr toutes tes commaiulerics
de son ordre à S8s clievaliers, et les cheva-
liers de Saint-Jean de Jérusalem fuient dé-
boules de leurs prétentions. Le roi Louis
XII donna la grande maîtrise à Aigiian de
MareuiL Sou frère, Ciamle de Mareuil, en fut
aussi pourvu par François i",et Henri II y
nomma Jean de Con(y, qui asseinbla un clia-
pilre général à Boigny, où il donna à biil
emphylcolique, pour deux cent vingt florins
par an, tous les bi ns apparlcnant .à l'or-
dre au territoire de Sussaiio, dans la pro-
vince de la i'ouiile, à un ihevalier d^^ Cala-
bre qui était prés( ni. Le mê:ne roi pourvut
de la grande maîtrise, après la mort de Jean
de Co'nly, Jean de Lévi, qui asscmlda aussi lo
cliapiire général à l'oiyiiy l'an 15iJS, où il
se (rouva un grand nombre de ilicvalicrs
de toutes les parties de l'Europe. Michel
de Seurre fut encore fut grand maître par
le roi Francoii 11, cl François Salviati par
Charles IX.'
S'il est vrai ce que dit le P. Toussaint de
Saint-Luo dans son Abrégé historique de
l'Institution de l'ordre de Saint-Lazare, que
le grand mailre Salviati fil chevalier de cet
ordre Jcannot de CastiMon et Octave Frégiise,
à la recommandation du pape Pie IV' et de la
reine de France Catherine de Méilitis, ce
pontife aurait reconnu le grand maîlre de
l'ordre de Suint-Lazare en France , quoi-
que cet ordre eût élé supprimé par Innocint
V III. Mais ce que le P. Toussaint ajoute en-
suite me rend cette réception à l'ordre de
Jeannot de llaslillon, à la recommaiidation
du [;ape Pie iV, fort suspecte; car il dit en-
core que le griinil maître SalviaU donna à ce
Jeannot de Castillnn l'administration du
grand hôpital de Saint-Lazare de Capoue,
l'ctabi ssanl son vicaire général et grand
maître de l'ordre en Ilalie. Le litre de grand
maître donné [lar ui grand m lîlre à son vi-
caire général, commissaire ou délégué, n'a
jamais élé en pratique dans aucun ordre. Les
grands nsaîtres ou généraux qui sont chefs
d'ordre peuvent bien donner à leurs vicaiies
ou commissaires leur autorité et leur pou-
voir, mais ils ne leur donnent jamais les li-
tres qui ne conviennent qu'à leurs propres
personnes comme chefs. L'intention du P.
Toussaint a été d'insinuer par ce moyen que
Jeanno! de Caslillou, nommé grand maître
de l'oidre de Saiiil-Lazue dans la bulle de
Pie IV de l'an 15Go, dont nous avons parlé,
n'était que le vicaire général du grand maî-
lre de cet ordre en France; n^ais, s'il n'a-
vait été que vie, lire général du grand maître
de France, (omincni ce ponlife, dans cette
bulle si ample et si étendue, aîirait-il pu ou-
blier le grand maître de France, dont il ne
fait aucune menlioi, voulant au contraire
(ju'après la mort du grand niaiire Jeannot
de Caslillin et de ses successeurs, ou sur
leur démission volonlaire, les chevaliers
procéJassenl à l'elcclion d'un autre grand
maître en tel lieu (|ne bon leur semblerait?
JHunnut de Caslillon ne se prélenilait pas
8e;il<'mc!it grand maiire de l'ordre de Sainî-
L.'izare en Italie, mais il se disai! grand mai-
UîCTIO.NNAIBE DES OllDaES RFLIGIEUX. IJ.
Ire de cet ordre par loul ii- mondi>. C'est co.
qu'on lit à la fin des privilé„'rs de cet ordre
qui furent imprimés à Home l'an lo()G, chez
Antoine Blade. imprimeur de la chambre
apostolique, où il y a: Aiipiiis illuslrissimi
et reverendissimi jeannotti Castitlionei Me-
diolaninsis, l'i-lig'unis et mliliœ Sancli La-
zriri nierofoli/milani per lolum orbcin gène-
mlis niagistri, Vincentiiis Mcrenda in luccin
edidit. Ainsi i! est plus vrai de dire que ce
Jeannot de Caslillon qui était commandeur
de riiôp'tal de Capoue avait usurpé le t'.tre
de grand maître, qui n'appartenait qu'au
commandeur de la maison de Boigny ea
France, dont François Salviati était pour
lors pourvu, celle conimanderie étant an-
nexée à la dignité de grand maître.
Mais il n'était pas le premier qui avait
usur|)é ce tilre. Il y avait eu avant lui Mntio
de Azzia, qui se disait aussi grand maîlre
général de l'hôpital de Saint-Lazare de Jéru-
salem, comme il paraît par une antre bulle
du même Pie ÎV de l'an 1561, où ce pontife
lui donne ce tilre : Dilecto filio iMulio de
Aszid, magistro gemmli Iwspilnlis Sancli
Laziri IJierosolymitani ordinis s mit Au'
(luslini [l'rivileg. Ord. S. Lnznri, pag. 28).
L'on Irouve encore (n 1539 un Pyrrhus-
Louis Caraiïa, qui prenait le liire de maître!
ou commandeur général de Saint-Lazare de
Jérusalem, dans l'une et l'autre Sicile deçà
et delà le Phare, ce qui f.iit voir que ceux-
là se sont trompés qui ont é rit que Pie IV
avail rétabli l'ordrq de Saint-Lazare, qui
avait été supprime par Innocent Vlll. et qu'il
en avait accordé la grande maîtrise à Jean-
not de Caslillon par sa bulle de l'an ISlio,
puisque outre les grands maîtres Caraiïa et
d'Azzia, qui avaient précédé de Caslillon.
celui-ci était déjà gr.ind maître lorsqu(=
Pie IV lui accorda cette bulle si ample et si
favorable à cet ordre, l'an 1563. Pour s'en
convaincre, il n'y a qu'à lire celte bulle, où,
parlant de Jeannot de Caslillon, il dit : ISios
igitur volentcs dileclum filium JcannoUnm
Caslillionetim modernum hospitahs d mUitiœ
prccdictwn magnum nuigistrum, ejusque siic-
cessorcs m-.gnos ipsius lioapitalis magislros
P'o lempore existente<, ac iiuffiitale et ):ii~
iitiam hujusmudi eorumque cvnvenlum
eliam amptioribns quam quispiam nustro~
mm prœdecessorum prœdictorum eos jirv
feculi fueriiil , fnvoribtis et gruliis prosM/ui.
Cet hôpital et couvent dont parle ce.
pape était l'hôpital et couvent de Saint-La-
zare de Jérusalem, qui était chef de l'ordru
avant que les chevaliers eussent élé obligés
d'abandonner la lerre saiiile, et ce n'est poinc
ce pape qui transféra ce chef d'ordre à l'iiô-
[lital de Capoue, comme ont écrit aussi plu-
sieurs auteurs. Voici comme ce ponlife s'en
explique dans la même bulle : Motti proprio
non ad Jeannotti nut priorum, piœceptonim,
ndlitum, fialium, vel personnrum seu alio-
rum, pro eis nobis super hoc obltilœ petilionis
instanliam, sedmei a liberalitale, et ex ccrlu
scitnlia noslra, ac de apcstolicn polcslalis
pleniludine, iii.tiilutionem et ercctionenihospi-
talis et mililix hitjiisnio'ji, ejusrjne translaiio-
24
Ti7 DlCTIONNAmE DKS
won oliin ad prœeeptoriam, ici flomwn Cii-
fiuanam piœilirtam fact m appiobamw,
confitmntnns.
Celait le pape I.éon X «(iii .iv.iil f connu
riiôpilal ileCipoiu' pour «lu fil'' l'orlre,
puisqu'à In prit rc de l'eiiipeniir Cliarles V
il avait rei^iiu à l'onlie de SainiLazaie les
iiApitaux de b^aiiit-Jean de l'alennc et de
Saiiite-Açalhe d.> Messine, el les avait !0!:-
iiiis, coiiiiiic au chef, au eoinniai.deur de
rhôpilal de (Papoue, à qui il dniine le litre
(le firand mailie, comme il est eiicore mar-
qué liai'.s la bulle de l'ie IV. Jl i arait donc
parcelle bulle que ce fut Léon X qui réta-
blit l'ordre de s.iinl-Laz:)re, el que l'ie IN le
remit dans tous ses droits d lui accorda de
nouveaux privilèges.
Pie \ , par une aulre bulle de l'an loG7,
révo()i!a quelques-uns des pi ivléges que son
prédécessiur avait acc.irdés, et en modéra
quelques autres. Mais, après la mort de
Jeannol de Casl lion , qui arri\ 3 à Verciil
l'an 1572, Cirégoire Xlll unit l'ordre de Saint-
Lazare à celui de Saiiil-M.iurice 1 1 en ae-
corda la grande maîtrise a Emmanuel I'h;l:-
beil, due de Savoie, sous prêt nIc que celte
grande maîliise était vacante : Ac prrtcrea
cémentes tiiiliiinm hospilatis S. Luznri Hie-
tosolymilmii snb re(jula sancli Aufiiulini jain-
pridem mo(jislri rryiuine desiilutnm..... C'est
ain^i que le pape parle dans la bulle d'union
de ces deux ordres Cependant François Sal-
viali était grand maître en France de l'ordre
de Saint-Lazare; ainsi l'on peut dire que le
pape ne lit celte union que sur un faux ex-
posé. Kn elîet le grand maître ."^alviali fit des
proleslalions el des oppositions à la (lualilé
que le duc de Savoie prenail de grand maître
.<le l'ordre de Saint-Lazare, et au\ bulles du
pape Grégoire XIII ; il lil assembler le chi-
pilrc général à Boigny l'an 1578, el les che-
valiers de France se niainlinrent toujours
dans la possession des commaiuleries qu'ils
avaient en ce royaume. Après la mort de ce
• raiid maître, le roi Henri 111 donna la
(;r.;nd(' mailiise à Aimar de Chaites. Jean de
Oavan lui succéda, el, sur la démission vo-
lontaire qu'il donna de celte charge à Henri
1\ l'an llJO'i,-ce |irincc en pourvut IMiiliberl
de Nrri slang, qui fui aussi premier grand
mailrc de l'ordre Je Notre-Dioïc de Mont-
Carniil, auquel l'ordic de Sainl-La/are fut
aussi uni en France, comme nous dirons à
l'article .Mum-Caumel.
Cille suc ce^sion de grands maîtres de l'or-
dre de Sainl-Lizare en Franc depuis que le
pape Innocent \Ul supprima cet oidre en
Italie l'an IVJO, fait \oir qu.' c'est à tort que
le 1'. lîonanni de la compai;niedc Jésus, dans
son Catalogue des Ordr. s mililaires qu'il
donna au publie l'an 1712, du, (;u'après la
suppression de cet ordre, sa mémoire fut
cbscurcic peu à peu en France : Sic pnihdim
tjUS stiduliiu iiicmorin tuin apud (i<dlos lum
apud Halos ttl obscurata; pui cjuil a lou-
jours subsisté en France, où il n'.i rien di-
minué de 8un ancienne splendeur, qui, bien
toin de s'obscurcir, a iiiénie augmenté.
(1) Vot/., a la lin du \ol., ii" 18">.
Or.nilES RFXIGIF.UX.
7S8
Ces chevaliers faisaient autrefois des vœux
solennels. Il y avait môinc des religi' uses do
cet ordre, et il en reste encore un monastère
eu Suisse. Le P.. lionauni a donné l'habille-
ment d'un de ces chevaliers tel que nous
l'avons f.iil gla^er (I); mais cet li.billeineiil
est supposé, et n'a été dessiné appareminent
ijue sur nue s tnple idée. Les chevaliers de
SaintLaz;ire n'ont commencé à porter la
crois à huit l'oinles qu'à la fin du xv siècle
ou au commeiueineiil du xvr, et cette iroiv
a toujours été verte, à la diffèr. née de cella
des chevaliers de Saiiit-Jcan de J^rus.ilem,
qui est blanche. Le plus ancien iiionument
qui puisse faire connaître quel é ait le véri-
table habillenicnt de ces anciei:5 clicviliers
se trouve dans la commandciie de tïrale-
monl, où, au pied d'une image de saint. \n-
loinc en relief, posée sur une espèce de co-
lonne, l'on voit cinq chev.iliers de Sainl-
Lazarc à genoux, am es de eu rasse, ei un
chapelain du même ordre, ayant tous un
manteau long, sur leijuel il y a une cro!x
.M'i pie, srulemenl un peu pâtée aux c\lré-
niilés. ('elle qu'ils ont sur la poitrine est
néaiii!:oins dilTérenlc en ce qu'elle est un
P'U plus longue par le pied, qui se termine
en pointe. L'on y liliiuece fut Pierre Poli r,
commandeur de cet ordre, qui (il faire celle
image; el, comme elle a quelque chose do
s:ngul cr, c'est peul-etre ce qui a obligé des
curieux de la faire graver: car saint An-
toine est au milieu des fianimes, ayant à ses
pieds plusieurs pourceaux dans le même
leu, qui font des sauls en l'air: et ce saint
n'a I oint un Tau sur son habit comme les
peintres le représentent ordinairement, mais
au lieu du Tau on lui a mis une co ironiie.
J'ai vu deux d.rfcrentcs estampes de celte
im igc, el une autre où est gravé le tombeau
de ce F. l'ieire Poiier avec son épitapli ,
qui fait voir que cette image a pu être la Ij
vers le milieu du xv'siècl.', puisque ce com-
mandeur mourut l'an H50. \ uiei cette épi-
laplie :
Ci devant ce grand autel dit noble homme
et religieuse personne F. Pieire Potier dit
Con/liuis, frère ^^restre en l'Ordre el Chevale-
rie Saint Ladre de Jérusalem, commandeur de
céans el de la Lande Uarun, en son vivant
vicquaire gênerai dr noble et puissant Sei-
gneur F. G. Dcsmaies cbevalirr grand maître
gcnei al de toute la susdite Ordre et ( /icvalcrie
deçà et delà la tner, commandeur de la maison
conventuelle de liuigni prrs Orlcans, qui tré-
passi l'an mil quatre cent L.
Il y a liien de l'apparence que ce ne fui
qu'à la fin de ce siècle ou au commencement
du XVI', après que Léon \ eut rétabli Tordre
de Saint-Lazare en Italie, ijuc les chevaliers
de cel ordre prirent 1.1 (roix à huit pointes
comme la portaient les chevaliers de M,: lie ;
car, dans les (iriviléges de l'ordie de Saint-
Lazare, imprimésà Uome, comme nous avons
dit, en l.jlili, il y a une vignette où l'on voit
plusieurs chevaliers ayant tous la barbe lon-
gue et recevant la croix de l'ordre avec une
vycc, des ma ns d'un pape (peul-élrc a-l-oii
7W
LAU
LAU
750
voulu représenter Léon X, qui rélablil cel
or.dre), el ces chevaliers ont une robe noire
à grandes manches avec la croix à huit
pointes sur la poilrine. 11 y a aussi à la hi-
liliothè |ue du roi une estampe de l'an 1325,
qui représente les différcnls ordres qui sui-
vent la règle de saint Augustin, où Ton
trouve un clievaliiT de Sainl-L;!zare avec
une paicille robe ; c'est pour^iuoi nous avons
fait graver cet habillement et celui que por-
taient les mêmes chevaliers dans le xv siè-
cle (1), tel qu'il est représenté au bas de
l'imago de sain! Antci c dont nous avons
p.irlé.
Voi/. le P. Toussaint de Sainî-Luc, Mé-
moircs en forme d'abrégé liistorii/ue de l'Or-
dre de Noire-Dame de Monl-Carm-'l et de
Sr.inl-Lnzare de Jérusalem. Plusieurs Fac-
tams et ' Mémoires concernant cet ordre.
Bullar. Rom. loin. U et 111. Maimbourg,
nist. f/cs- Croisades. Homard Ginsliniani,
[list. Clironolog. de <j'i Ordini militari. De
lîelloj, de rOriijine de Chevalerie. Philippe
Bonanni, Caialog. Ord. milil. num. 63: et
Srliooni beck. Histoire des Ordres militaires,
toi», prrmier. Voij. Mont-Carmel ci-dessous,
c.)l. lOVO.
LAUUF.S DE LA PALESTINE (Anciknnes).
L'on peut regarder encore comme des in-
stituts particuliers ces anciennes laures qui
otit été si célèbres en Orient. L'on entend
par le mol de laure une demeure de s ;lilaires
qui logeaient dans des cellules éloignées 1rs
unes des autres par une dislance rai-onna-
bie, cl vivaient en société sous l'obéissance
d'un supérieur. La première de ces laures
fut fondée par saint Chariton. Ccuk qui ont
donné la vie de ce saint disent qu'il éiait il'l-
cone, capitale de Lycaonie; qu'ayant em-
brassé le christianisme, il en accomplit si
bien les devoirs, que sa piété le distingua du
commun des fidèles et l'exposa davantage
aux violences des païens, qui se saisirent de
lui pendant la persécution excilée sous l'em-
pire d'Aurélien; qu'il souffrit de cruels
tourments avec beaucoup de constance; et
qu'ayant été jeté en prison, il en sortit après
la mort d'Aurélien, qui fut lue l'an 273;
qu'étant en liberté il alla à Jérus.-ilem, où il
fonda à six milles de celle \ille la laure de
l'haran,dont l'église fut dédiée par saiiil
M.iiaire, évêque de Jérusalem; (ju'il fonda
ensuite deux autres laures, l'une vers Jéri-
cho, cl l'autre dans le désert de Théma, d.ins
les(|uelles il eut plusieurs disciple^ ; et qu'en-
fin il mourut vers l'an 340.
Mais, quoique le cardinal Baronius (2) ,
dans ses Annales ecclésijistiqiies, dise que
les acles de ce saint soient fidèles, néanmoins
M. de Tillemont (;5) ne les croit pas d'une
grande autorité, se persuadant que Méla-
phraste, qui est le premier auteur de celle
vie, et qui déclare que, n'ayant point eu do
mémoires pour l'écrire, il ne l'avait com-
(I) Foi/., à la lin du vol., n"» 184 et 185.
("^I Baronius, ad ann. 275, § U.
(5)ne Tillem., Hist.des Emp., loin. III, p. 718, cl
His(. Kccles., loin. IV, pag. (i82.
posée que sur la simple tradition, avnit con-
fondu, aussi bien que les autres lîrecs, deux
Chaiilon , l'un confesseur ou martyr du
temps des persécuteurs, l'autre fondateur de
jiliisieurs iiKiiiastèrcs.
Une des principales raisons sur lesquelles
ce savant critique s'appuie, c'est que, s'il
était vrai que saint Ghiriton eût fondé ses
laures dans la Palestine après la mort d'Au-
rélien , qui arriva, comme nous avons dit,
l'an 275, cela ne pour. ail s'accorder avec ce
que dit saint Jérôme, (|ue saint Hilarion a
été le premier instiluleur des moines de la
Palestine, où l'on n'en avait aucune connais-
sance avant lui, c'esl-â-dire après la mort
de Dioclélien, qui arriva l'an 313. L'église de
la première lame de saint Chariton, dédiée
par saint Macaire de Jérusalem, qui ne fut
évéquc (ju'en 31!|., quarante ans après la
mort il'Auiélien, fournit une autre difficulté
à cet auteur, ce temps lui paraissant troii
considérable pour croire que saint Chariton
rûl vécu assez pour fonder encore deux au-
tres laures et passer ensuite quelque temps
dans une entière solitude. Ainsi il aimo
mieux distinguer ileux Chariton, l'un qui a
soufiVrl la persécution du temps de l'empe-
reur Aurélien, et l'autre fondateur des pre-
mières laures de la Palestine, après que
saint Hilarion y eul iulroduil la vie monas-
tique.
Quoi qu'il en soil de ces deux Charilon,
Cf'lui qoi fonda les premières laures de la
Palestine fut imité dans le \' s ècle par saint
Euthyme le Grand, qui bâtit aussi une laure.
Elle fut fort renommée, et était éloignée de
quatre ou cinq lieues de la ville de Jérusa-
lem ; mais le saint abbé n'y voulait point re-
cevoir de jeunes gens qui n'eussent point
encore de barbe, c'est pourquoi saint Sabas
cl saint Ouiriace s'étanl présentés pour être
du nombre de ses disciples, il envoya saint
Sabas au monastère de saint Théoctisle, et
saint Quiriace àceluidcsainlGérasime, parce
qu'ils n'avaient point encore de barbe (4) ;
et, à son imitation, saint Sabas ayant bâti la
célèbre laure qui a porté son nom, il n'y re-
cevait point non plus de jeunes gens et les
envoyait d'abord dans d'autres monastères.
Saint Sabas (3) naquit au bourg de Muta-
lasijue en Cappadoce, dans le diocèse de Cé-
s irée, vers l'an l^kO. Dès l'âge de huit ans il
se retira dans le monastère de Flaviane, h
une petite lieue de Mutalasque. Il y demeura
dix ans, alla ensuite à Jérusalem avec la
permission de son abbé, et passa l'hiver
dans le monastère de Saiiit-Passarion, alors
gouverné par Eipidt'. Ensuite il se rendit
auprès de sa ut Euthjme pour vivre sous sa
conduite; mais le saint abbé, le jugeant trop
jeune pour demeurer parmi les erjniL's de sa
laure, l'envoya au monastère d'en bas, dont
était abbé saint Théoctisle.
Le relâcliement s'élant glissé dans ce mo-
nastère, saint Sabas le quitta et s'établit dans
(i) Cyrill. Vit. S. Euih. apud Bolland. 20 janv.,
pag. 503.
(.'i) Cyrill. VU. S. Snb. apud C.olel. monum. Ecà.
Cnvc. loni. III.
la solituiio du désert do sninl fiérasimc. assez
près du Jourdain. Il avait pour lors Ironie -
rinq m s; cl, ;i| rèsen avoir demeure quatre
dans ce désiTl. il quilla le séjour de relie so-
HUide |o r..llir iiabiler une eaveriie dans
les ro(hes d'une monlagnc, au pied de la-
quelle passait le torrent de Cédrun, à trois
lieues de Itetlréeni et à cinq de
.'érusaleni.
H y vécu' seul pendant cinq ans occu|ié
tiniqucnicnl du soin de son salut, lorsqtiC
rieu lui inspira le désir de travailler au<si à
procurer celui des autres. Il y bàlil une fa-
meuse laure, cl y assembla soixante -dis so-
litaires qui se mirent sms sa conduite; le
nombre s'augment i jusqu'à cent cinquante.
.Mais, quelque grandes que fussent l'union,
la cliaritc et h bonne int.'lliiiencc qu'il en-
tretenait parmi eux, il ne put empêcher que
quelques-uns n'y apportassent du troubln, et
ils furent même assez hardis pour entre-
prendre de le priver de sa charge d'abbc. Ils
aliért ni pour cet effet trouver Salluste, pa-
triarche de Jérusalem, cl lui représentèrent
que saint Sabas était un homme d'un- sim-
piiité grossière, impru !enl, inca[iable de
gouverner un si grand nombre do solltair.s,
cl scrupuleux jusqu'au point de ne voulor
pas être prêtre ni perme'ire que l'on con-
férât cet ordre aux rcligeux. Saluste, in-
formé d 1 mérite de saint Sabas, feignit d'c-
cou cr leurs plaintes, mais il ordonna prêtre
le saint, et dit à ces faux frères : \'oilà votre
supérieur ; ce n'est point par le choix dcj
hommes, m is par l'éleciion de Dir u même
qu'il est établi dans cet e cbari^e. Il les ra-
mena tous à la laure, où il c-nsaera l'église
que saint Sabas y avait construite.
Ce saint fonda aussi un monastère sur la
colline de ("aslil, ,i une petite lieue de sa
laure. Il b;itit encore un cloître à une demi-
lieue de celle laure, où il fa. sait instruire
les novices ; et si c'élaienldes jeunes gens,
il les envoyait à une lieue et demie <:c là,
dans le monastère de l'abbé saint Thcodose,
son ami, pour les former cl les mettre un
jour en état d'en'.rcr dans sa laure , (|ui
était le séjour des parfiils. Ayant été fait
exarque ou supérieur général de tous les so-
litaires (jui étaient dans les déserts, les er-
mitages et les laures, il veillait toute l'année
par sa présence avec beaucoup d'.ipplicaliou
sur ces solitaires qui avaient « lé commis à
SCS soins; mais depuis l'épiphanie jusqu'au
dimanche des Rameaux, il se relirait dans le
fond do désert, accompagné d'un seul disci-
ple, et s'y préparait à solenniscr la fêle de
i'âqucs.
Les religieux rebelles do sa laure lui ten-
dirent tant de pièges, que, pour ce ier <i leur
malice, il ré^dul de les (]uilli r et se r( tir.i
dans differenles solitudes ; mais le patrian lie
de Jérusalem ayant obligé les religieux sé-
dilieux de la laure de l'y recevoir, ils aimè-
rent mieux se retirer eux-mêmes. Ils étaient
au noml>re de <|uarantc i|ui all.'renl à la
liiure de Suça dans l'esperaucc qu'on les y
r>cevrait; mais Aiiuilin, qii en était supé-
(I) liiilieiii, Iliii. Mon. d'Onciil, p. Q'j8.
(i) Ibid., pag. H').
DIC.TIUNNAIUE DES OUimES RELIGIEUX. 752
rieur, ne voulut pis seulement qu'ils s'y re-
posassent en (jualilé il'holrs. Quehiues cel-
lules abamlonnees qui étaient près du tor-
renl de 1 béioé leur servirent île retraite. Ils
en firent encore d'autres au même lieu, et
commencèrent ainsi ce qu'un appela depuis
la nouvelle laure.
Le zèle que le saint nbbé avait pour ces
moines révoltés le tenait dans une sainte in-
quiétude. Sachant qu'ils étaient dans la né-
cessité, il leur lit tenir une somme d'argent,
olitinl pour eux la priipriétc des cellules
qu'ils occupaient, entreprit un voyage ex-
près pour leur porter lui-même divei ses cho-
ses dont ils avaient besoin, cl leur bàlit une
é;;lise. P.ir ce moyen il sut les vaincre et ils
se soumirent à son obéissance. Il leur donna
pour ahhè Jean, le premier de tous ses dis-
ciples. Il bàtil encore d'aulrcs monastères, où
il mil des sujiérieurs d'une grande sainteté;
et, comme il n'avait pas moins de zèle pour
la pureté de la foi que pour l'exacte obser-
vance de la discipline régulière, il veillait
sans cesse pour empêcher que le venin diî
l'hérésie ne se glissât dans tous ses monas-
tères. Il convertit même quelques solitair('S
nestoriens et travailla depuis avce le ménie
succès à faire revenir ceux qui suivaient l.s
Cl reurs d'Kulycliès et de Dioscore. Enfin i e
saint iibbé, étant âvéde plus de quatro-vin.;t-
douze ans, mourut dans sa princip.ile laure
le 5 décembre de l'an 531.
L'on prétend que la liturgie qui est au-
jourd'hui en usage parmi les Grecs esl celle
que l'on observait dans les monastères d i
saint Sabas, qui l'avait reçue de ses maitr. 5
saint Luthynie et saint Thooctisle (1). A sou
exemple, il y eut plusieurs de ses disciples
qui fondèrent aus-i des laures, dont les plus
remarquables furent Jacques f2) , qui fomia
auprès du Jourdain la laure des Pyrges, ou
des Tours; le H. l'irmin, qui bàlit la laure
de Malische, ronnu- depuis p ir son nom;
Sé»érien qui eu fonda au^si une dans un lieu
nommé .M, •.riche, < t Julien qui bâtit près du
Jourdain la laure d'iilcérabe.
Nous avons ci-devant parlé du monastè.o
de saint (iérasime, où saint Quiriaie fut en-
voyé par saint liiuthjmo. 11 était au milii u
d'une laure que saint liérasime a\ail bàlie à
un (|uarl de lieue du Jourdain, à peu près
dans le même temps (jue saint Satias vint au
monde. Elle était iomj)osée île >,o.xante-dix
cellules. Les no>ices et les jeunes gens d.-
meuraient dans le monastère, et y prati-
quaient les exercices ordinaires des comur;-
iiaulés, cl 1.1 laure n'était que pour ceux
i]ui. étant .ivanecs cl bien alVermis dans l.i
vertu, pouvaient supporter une plus ex.acie
solitude et unr plus austère pénitence i-^j.
lis se ten.iienl seuls dans leurs celiu'es cinq
joui s de la semaine, u'.iyant pour toute iioiir-
rilurc ((ue du p.iin, de l'e u et quelquis
dattes. Le samedi cl le dimanche, ils >eiKiient
au monaslère, où, après .avoir pariicipè aux
sacrés mystères , ils mangeaient (juclquc
cliose de cuit et buvaient un peu de vm.
(5; Vit- S. Eu:li. a|iuJ liollaiid. 20 jan., p. 51G.
-53
LAZ
LAZ
754
Après les v(5pros du dimanche, ils reloiir-
iiaient dans leurs cellules, ernporlant avec
eus du pain, de l'eau cl des dalles, pour se
imurrir pendant les cinq jours qu'ils y devaient
rester seuls. Ils s'y occupaient au travail et
à la prière. Ils n'y po.ivaient pas allumer
•le feu, non pas même de lampe pour faire
la lecture; et c'éiaii une loi parmi eux que
lorsqu'ils sortaient de leurs cellules, ils en
devaient laisser la porte ouverte pour mar-
quer par là qu'ils n'avaient rien en propre
l'i que les autres pouvaient disposer de leurs
peti's meubles {i). Saint Gérasiine mourut
i an 475. H y eut encore d'autres laures aux
environs du Jourdain , et celle qui fut bâtie
par un saint solitaire nommé Antoine fut
nommée la laurc des Elioles. Nous donnons
ici l'iiabillotnent d'un moine de Saint-Charilon
et celui d'un moine de Saint-Sabas tels que
le P. ISonaiiiii, Odoart Fi ilclli et Schoone-
beck les ont fait graver (2). 11 y a bien de
l'apparence que du temps des fondateurs de
CCS laures, ils n'étaient pas ainsi habillés ;
mais, comme les laures de ces deux saints
ont subsisté pendant plusieurs siècles, ceux
qui ont habité ces laures ont pu prendre
dans la suite de pareils habillements. Quant
à la couleur, il paraît que la robe des moines
de Sainl-Charilon était blanche, la ihape et
le capuce noirs, et que l'habillement des
moims de Saint-Sabas était entièrement noir.
On voit encore aujourd'hui des vestiges de
la laure de ce saint dans un monastère de
moines grecs, qui a toujours retenu le nom
de laure de Sainl-Sabas.
LAURÉTANS PAKTIGIPANTS. Vuij. 1!e-
IHLÉEM.
LAZARISTES,
Des Lazaristes ou de la congréijation des Pré-
Ires de Id niissiun , avec la via de saint
Vincent de Paul, leur inslitutcnr.
Les désoiilreà causés par l'hérésie cl la li-
cen.e des armes durant les guerres civiles
dont la France fut al'lligée sur la (in du xvi"
siècle et au commi'nceinent du xvii% étaient
trop grands pour que les Prêtres de l'Ora-
toire pussent seuls y remédier, soit en fai-
sant relîeurir dans Télal ecclésiastique les
verlus cléricales et sacerdotales, soit en ai-
dant les pasiears à ramener au bercail les
brebis que l'hérésie ou le libertinage eu
avait fait sortir. C'est pourquoi Dieu, qui,
L'onnaissanl les besoins de son Eglise, nu
manque jamais de lui donner les secours
qui lui sont uécessaii es, suscita encoie dans
ce royaume d'autres saints personnages, qui,
animés de son esprit et fortifiés par sa grâce,
luiidèreul, à l'exemple du cardinal de Bérulle,
des congrcgalions dont le princi[)al but est
de travailler aux missions et d'inspirer aux
jeunes clercs l'esprit de piété et de dévotion
qui leur est nécessaire pour s'acquitter di-
gurmenl des fonctions de leur miiiislère. Tel-
les sont les congrégations des Prêtres de la
Mission, des Eudistes du Saint-Sacrement,
des AJissionuaires de Lyon, et quelques au-
(!) Bulicau, lliil. iloimt. (l'Orient, png, 706.
très dont il est [inié au\ articles de ces dil-
férents no:iis.
La c.Higrégatiou des Prêtres de la Mission
a eu pour fondateur M. Vincent de Paul. Il
naquit au village de Poui près de Dax, petite
ville èpiscopale située aux confins des Lan-
des de Bordeaux, vers les monts Pyrénées. Ses
parents vivaient de leur travail. Son père se
nommait Jean de Paul, et sa mère B rtrande
de Aloras. Us avaient une maison et quel-
ques petits héritages, qu'ils lais;iient valoir
par leurs mains, étant aidés par leurs enlanls,
qui furent six, savoir: quatregarçonset deux
filles. Vincent, qui était le troisième, fui dès.
son enfance employé comme les autres à
travailler, et particulièrement à mener paî-
tre et garder les lioupeaux de son père, qui,
jugeant par la vivacité dcspril que Vincent
faisait paraître dans toutes ses paroles et ses
actions, qu'il pourrait faire quelque chose
de meilleur que de mener paître des bes-
tiaux, prit la résolution de le f.iire étudier,
dans l'espérance d'en tirer un jour quelque
avantiigepoursa famille. Pourcet elTet il lemil
en pension, vers l'an 1588, chez les Pères Cor-
deliersdcDax, moyennant suixanle livres p,.r
an. 11 y fit un tel progrès dans la langue latine,
que, quaire ans après, le sieur Co.nmel, avo-
cat de Dax et juge de Poui, l'ayant rctré du
couvent des Cordeliers, h; reçut en sa mai-
son pour être précepteur de ses enfants, afin
que, prenant soin de leur instruction et du
leur (onduite,il pût continuer ses études
sans être à charge à son père : ce ((ui lui
donna le moyen de se perfectionner dans la
connaissance des belles-leilres, auxquelles
il employa neuf ans, au bout desquels le-
sieur Commet, ([ui était une personne de
piété, satisfait du service qu'il lui avait rendu^
en la personne de ses enfants et jugeant qu'il
serait un jour utile à l'Eglise, lui fit prendre
la tonsure et les quatre mineurs le 19 se[)-
lembre 159G, étant alors âgé de vingt ans.
Se voyant ainsi engagé au minitère dq.
FEglise, et ayant pris Dieu pour son partage,
il quitta son pays du consentement de son
père, qui lui donna quelque petit secours,
pour aller étudier en théologie à Toulouse,
où il prit les ordres de diacre < l de sous-
diacre en 1598, et la prêtrise en IGOO. Peu da
temps après on lui donna la cure de Tilh au
diocèse de Dax ; mais, lui ayant été contestée
par un compélileur, il ne voulut point avoir
de procès cl lui en laissa la p'.ssessiou, Dieu
le permetlant ainsi afin qu'il ne fiit point
obligé d'abandonner ses éludes. Il employa'
sept ans à celle de la théologie, après les-
quels ayant éié reçu bachelier dans l'uni-
versité de Toulouse, il lui fut permis d'ensei-
gner publiquement dans la môuic université,
.îusque-là tout avail réusii selon les souhaits-
de M. V'iiicenl; mais une personne l'ayant
institué son héritier l'an ItiOiJ, et ayant é!é.
obligé d'aller a .Marseille pour se faire payer
une dette de cinq cents écus qui élait de la
succession, il tomba dans une disgrâce daus
laiiueile il ne put pas douter de la protection.
(2) Yoij., à la On Ju vol., rr" Igfi et 197,
:.=;5 nicrioNNvim: i>r.s ouDiiLS iiEi.ic.U-ix. 7r>c
de Dieu sur lui pnr la manière dont il s'en ville le jour de la conversion de saint Paal
nlira. Car, comme aprè'^ avoir terminé son de l'an 1G17, pour exhorter li s habitants à
niTaire à Marseille il se disposait à roiourncr faire une confession générale. Il le fil, cl leur
p.ir terre à Toulouse, un gcniilhomine du en représenta l'iniportance et l'uliliic avec;
Lan"ueloc l'ayant engagé de s'cnibaniuer des paroles si efficaces, (]ue ces l)i)nncs gens
avec" lui jusqu'à Narbonne , ils remontré- vinrent tous à lui pour leur confession génè-
rent trois brigantins turcs qui les prirent et raie; et la presse fut si grande, qu'il fut obligé
les menèrent en Barbarii- . où Vincent de d'appeler à son secours les Jésuites d'Amiens,
l'aul fut vendu à un pécheur, qui n'ayant qui conjointement avec lui firent un si graïul
pu se servir de lui à cause qu'il ne pouv./it profit dans cette première mission, que ce zélé
souffrir la mer, le revendit à un médecin; l'oiidatcur l'a toujours regardée comme la se-
rt, ccliii-ci étant mort, il de» int esclave d'un mencc de toutes les autres qu'il a faites de-
renégat de Niceeiirrnvencc,qui, bien loin d'i- puis, et par conséquent comme l'origine de
miter ses semblables, qui ordinairement per- sa congrégation; et tous les ans, le même jour
^écutenl le plus Jésus-Christ dans ses meni- 23 janvier, il en ren lait grâces à Dieu et re-
tires qui ont le malheur de tomber dans l'es- commandait à ses disciples de faire la nu^'iiie
clavage, fut au conlraire l'instrument dont chose : c'est pourquoi les prêtres de cet ins-
Dieu se servit pour rendre la liberté à soa tilut célèbrent avec une dévotio:i particu-
scrvitcur en lui rend int à lui-même celle de lière la fête de la Conversion de saint l'aul,
l'âme; car, se repentait de son apostasie, il en mémoire de ce que leur fondateur com-
se sauva avec lui d'une manière d'autant mença heureusement en ce jour sa première
plus admirable et miraculeuse, qu'ils passé- mission qui a été suivie de tant d'aulres, (jui
rent toule la mrr Méditerranée dans un es- ont causé la conversion d'un très-grand nom-
quif que la moindre vague était capable d'à- bre de personnes.
bimer;mais Dieu , qui les conduisait , leur Madame la comlesse de Joigny, ayant rc-
.lyant fait éviter ies dangers auxquels les connu par ce premier essai qui réussit avec
plus gros vaisseaus. sont exposés, ils arrivé- t. ml de succès, la nécessité des missions, par-
rent à Aiguesmorles le 28 juin 11)07, d'où ils ticulièremcnt pour le peuple de la canip:igue,
furent à Avignon, où le vice-légal reçut l'ab- conçut dès lors le dessein de donner un fonds
juration du renégat. M. de Paul, élaiit allé à de seize mille livres à quelque eoîiununauté
l'aris l'année suivante, y lia amitié avec M. qui voudrait se charger d'en faire de cinq
de Bérulle, qui, songeant pour lors à établir ans en cinq ans dans toutes ses terres. Kilo
sa congre-galion, le s(dlicila de se cil rger de eu fit parler aux Jésuites et aux Prêtres do
la cure de Cliclii, dont M. liourgoiu vouljiil l'Oratoire, qui, ne voulant pas s'en charger,
se def ;ire pour cnirer dans la congrégation lui firent prendre la résolution d'insérer dans
des Prêtres de l'Oraloire, et de prendre le sou testament un article par lequel après sa
soin des enfants du coin c de Joigiiy, Kmma- mort elle donnait ces seize mille livres pour
nuel de Gondy, général des galères de France, fonder cette mission, au lieu et en la manière
et cet 1 en qualité d' précepteur, dont il s'ac- que M. de Paul le jugerait à propos.
quit:a si bien, que Françoise de Sitly, épouse <Juo:que ce serviteur île Dieu fût dans la
de ce comte et mère dé ces enfants, dame maison de M. de Condy comme dans un sé-
d'uiic piété singulière, édifiée de sa modes- miuaire, tint par rapport à la liberté qu'il y
lie, de sa discret. ou et de sa cliariié, jugea avait de pratiquer les exercices de. la plus
à propos de lui conlicr la conduite de son grande piété, que par rapport à la régula-
âme, rite avec l"(iuelle on y vivait p ;r les joins cl
Le séjour qu'il fil dans la maison d'i comte l'exaelitude de madame de dondy, iiéan-
de Joigiiy l'ut cuise de l'élablisseinenl de la moins le grand désir qu'il avait de se donner
coiigrcg.ilioii de la Mission. Car, environ l'an plus p irfaitement au service de Dieu et à
ItilG, él.inl allé avec la comtesse dans une do l'instiuctiou du prochain lui ayant l'ait prer..
ses terres, qu'on nommel'olleville.audiocèse dre l,i résolution d'eu sortir, il prit le pré-
d'Amiens, où il s'occupait pemlaiit son séjour texte d'un peiit voyage qu'il avait à faire, cl
odes oMiviesde miséricorde, on levinl un jour sorlit de Paris au mois de juillet 1G17, sans
pr.er d'aller au village de (iaiiue. éloigné de avoir détermine aucan lieu où il dût s'arrê-
Follcvi le de deux l mes, pour confesser u i 1er. M. lis M. de HéruUe, qui le voyait résolu
paysan qui élut dangereusement malad.!. de sortir, lui ayar.l |iropose d'aller Iravaillcr
Cet homme avail toujours vécu en ie|)iit,i- en que que lieu de la Dresse où il y avait
lion d'un homme de bien ; néanmoins M. de disette d'ouvriers évangé iques, et p.irlicu-
Panl, l'étanl aile voir, et lui avant fail faire lièrement dans la parois>e de Châlillou-les -
une confession génér.ile, trouva si cous- Demlus, il suivit cet avis et alla en ce lieu ,
cience chargée de plusieurs péchés mortels où étant arrivé, une des premières chose»
ipi'il avait toujours retenus par home, et qu'il lit l'ut de porter cinq ou six ecclésiasti-
duiil il ne s'élait jamais accusé en confession, ques qu'il y trouva à se mctlrc ensemble et
eomiiic il le déclara lui-mêiiie en présence de l'onner une espèce de communauté pour so
jilusieurs personnes, et mêoie de la comiesse donner p'us parfaitement à Dieu el au ser-
de Joigny, qui, cpouvau'éc de lanl de confes- vice de sou l.glise : ce qu'ils firent à sa per-
si >ns bacriléges et des péchés énormes de sa suasion, s'eslimant trop heureux d'vMre as-
vie passée, et appreheiid.iut qu'il n'eu lut de soeiés à un si saint prélro pour nu sujet
même de la plu art de ses vassaux, exhorta aussi louable el aussi utile. Mais la joie
M. lie Paul a pieclier dans l'Ctjlise de Fo le- qu'ils avaier.l de le posséder ne dura que for!
7d7
LAZ
LAZ
7!5g
peu lie temps ; car madame du Gondy, qui,
comme nous l'avons déjà dit, avait mis la
condui'e de sa conscience entre les mains de
M. de Paul, soulTrant avec peine son éloi-
gncnienl, fil loul ce qu'elle put pour !e faire
revenir, employant l'autorité du cardinal de
llelz, pour lors cvéque de Paris, qui, étant
Bon beuu-IVère, voulut bien écrire pour ce
sujet. M. de Béiulle s'intéressa aussi pour
cela ; on lui envoya même exprès un de ses
plus intimes amis, qui, apjiuyant les lettres
par lesquelles on le priait de donner celte
consolation à madame de Gondy, le déter-
mina à revenir à Paris, où il arriva au mois
de décembre de la même année 1617, et la
veille de Noël il rrntra dans la maison de
Gondy. Il y fut reçu comme un ange venu
du ciel , particulièrement de mailame de
Gondy, qui, daiis la crainte (ju'il ne la quit-
tât une seconde fois, lui fit promellre qu'il
l'assisteriiit jusqu'à la mort, comme il le fit,
Dieu l'ayant voulu ainsi pour donner com-
mencement à la congrégation de la mission,
par le moyen de celle sainte dame, qui, per-
sistant toujours dans la résolution qu'elle
avait prise de faire une fondation puur l'en-
Irelieu et la subsistance de quehiues bons
prêtres ou rcligieus qui allassenl de temps
en temps faire des missions d.ins sfs terres,
et ayant cherché par le moyen de M. de Paul
tous les moyens pour exécuter son dessein
sans avoir pu réussir, par le refus qu'en fi-
rent plusieurs supérieurs de communautés
auxquels on en parla, fit enfin réfiision que
plusieurs docteurs et autres vertueux ecclé-
siastiques qui se joignaient ordinairement à
M. de Paul pour travailler aux missions qu'il
n'avait pas discontinué de faire depuis son
retour, n'auraient peul-étre point de difficulté
de faire une congrégation particulière dont
l'obligation principale serait de fiire les mis-
sions, si elle leur fondait une m lison à Pa-
ris dans laquelle ils pussent se retirer et vi-
vre en comnmuauté : ce qui serait justement
l'exécution de son piius dessein, lîlle en
pai la au comte de Joigny, son mari, qui non-
seulement approuva son dessein, mais aussi
voulut s'en rendre fondateur conjointement
avec elle. Ils en communiquèrent tous deux
avec Jean-François de Gondy, leur frère,
premier archevèiiue de Paris, q li non-seule-
ment approuva leur zèle, mais, consiJéranl
([ue son diocèse e:i pourrait recevoir de
grands biens, voulut aussi coutriLiuer à celte
londation en destinant le collège des Bons-
lùifanls, qui était à sa disposition, pour le
loyement de ces prêtres. Ils en parlèrent à
M. de Paul, qui consentit à la proposition
qu'on lui lit, premièrement, de recevoir ce
collège avec la direction des prêtres qui s'y
rclireraicnl avec lui, el des missions aus-
(|ueles ils s'appliqueraient; secondenjent,
(l'accepter la foudalion au nom de ces prê-
tres; el en troisième lieu, de choisir lui-même
ceux qu'il trouverait propres et disposés
pour ce pieux dessein. La chose aiusi réso-
lue fut exécutée le 1"' mars lG2'i, cl l'arche-
vêqu(! de Paris fit expédier, le 17 avril de
l'année luivanic 1(>2j, les provisions de prin-
cipal de ce collège en faveur de M. de Paul,
auquel M. et madame de Gondy donnèrent
quarante mille livres en argwit comptant pou r
commencer la fondation, avec pouvoir de
choisir tel nombre d'ecclésiastiques (]ue le
revenu de la fondation pourrait entretenir, et
qui seraient sous sa direction sa vie durant :
à condition néanmoins que nonobstant cette
direction il resterait dans leur m;iison pour
leur continuer el à leur famille l'assistance
spirituelle qu'il leur avait rendue jusqu'a-
lors. Après cette fondation, comme sM ne
restait plus riea à madame de Gondy que
d'aller au ciel recevoir la couronne qui lui
était préparée pour tous les services qu'elle
avait tâché de rendre à Dieu, étant tout at-
ténuée par les maladies, les peines et les fa-
ligues que son zèle et sa ch.irité lui avaient
fait entreprendre, elle mourut la veille de
Sainl-Jean-Baptiste de 1 1 môme année. Après
que son corps eul élé porté aux Garraélites
lie la rue Chapon, où elle avait choisi sa sé-
piiture, M. de Paul sortit de Paris pour al-
ler porter cette triste nouvelle à son mari,
qui élait en Provence, et afin de lui deman-
der son agrément pour qu'il se retirât au
collège des Bons-Enfants : ce qui lui ayant
été accordé, il revint à Paris, où il mit la
dernière main à l'élablissement de la con-
grégation de la Mission, qui fut approuvée
par l'archevêque de Paris le 2i avril 1G2G.
M. Portail, qui avait déjà demeuré quinze
ans avec lui, ne le voulut point quitter en
une si belle occasion. Deux bons prêtres de
Picardie, nommés l'un du Coudrey et l'autre
de la Salle, s'offrirent ensuilL' à ce saint Ion-
dateur, qui les associa tous trois à lui, en
exécution de la fondation par un acie passé
par-devant notaires le 4 septemlire de la
même année. Quatre autres prêtiesles sui-
virent peu de leinps après, et leur omiiiu-
naulé s'étant augmentée considérabK'minl
dans la suite, le pape Urbain VII!, par une
bulle du mois de juivier de l'an îij 12, éri^^ea
cette compa-^nie en congrégation sous le ti-
tre de la Mission, et permit ;iu fondateur do
dresser des règlements pour le bon onire dj
colle même congrégation. Pour autoiiser da-
vantage cet institut, le roi Louis Xlll fit
expédier des lettres patentes au mois do
mai 164'2, et elles furent vérifiées au parle-
inent de Paris au mois de septembre de la
même année.
Dans le temps que l'on poursuivait la bulle
dont nous venons de parler, les prêtres du
cette cougréga'.ion entrèrent dans le prieuré
de Saint-Lazare à Paris , (jui appai tenait
pour lors aux Chanoines lléguliers de la
c iiigrégaliou de Saiut-Viclor, qui voulurent
bien consentir à la cession qui en fut faite
par leur prieur aux conditions portées par
k- concordat lait entre eux le 7 janvier 1G32.
Cn suile lie ce concordat et de la démission
du prieur, l'archcvoqi;e de P,;;is (il l'isnion
(le ce [jrieuré comme d'un bénéfice cjui était
à sa collatioii, à la congrégation de la Mis-
sion, iiiiisi (ju'il i)arait par ses let res du dcr»
l'.ier décembre IG.'l.'j, cl elle fut confirmée par
1;: pape Urbain \'lll par une bulle du mois-
759 ACTIONNAIRE DES ORDRES RELIGIEUX. loo
de mars (Je l'an lG3a, Ccllf» maison, par sa main à se» rùijli's d consl liilion^, piF los-
vi-lc éleiulup, 1,1 Rrnn leur tlp ".os hâ'imonls, (|iiplio< il obllsjoa ses (liscijilcs à cmi i uor
le iiombri- ilos piôlios cl il s soiniiiai iscs qm pour le saliil des ânios c ■ qu'il leur avait cii-
y ilomeureiil cl la rrsiiloiic.' que le (;;énéral y soigné par son evomplc : c'e?! poiiniuoi il (it
l'ait, csl devenue ciief de telle ron^'ré£;.ilion, assembler en KioS la communauté de S.ii il-
qui, se remlaiit de plu> en plus néee^s.iire à Lazare, cl, aprrs avoir fait à tous ceux qui
ri'-j;lise. a l'ait dans la suite de fort grands la compasaienl un discours furt all'i'eliicnx et
proférés tant dans celte iièoie ville de Paris, paternel, sur le sujet des ol)servanies de ces
où elle a obtenu le séminaire de Sainl-Cbar- rè^'les, il les lit aiiprorbcr tous, el leur don-
Ics, que d.ins le reste du royaume aussi bien na à chacun un petit livre imprimé, conle-
quc d;ins 1rs pays ctr;ingcrs. Le premier de liant ces règles, qu'ils reçurent avec beau-
ces établissiMiienls fui à Toul en IIJ^JI). On coup de respect et une dévotion sincère.
leur donna en Ki.'tT la maison de Noire-Dame (Juoi(]ue ses grands travaux l'eussent ré-
de la Rose en (iuiennc. Le cardinal de Hicbc- duil dans un grand aballoment et lui eussent
lieu les établit l'an 1018 à Richelieu et à Lu- causé une longue maladie, il ne laissaii pas
çon. Ils obtinrent un autre établissement à toujours de s'occuper non-seulcmeni au bien
Annecy en Savoie l'année suivante. Ils pas- et à l'avancement de sa congrég.ition, mais
fèrenl l'an lt)i2 en Halle, où la duchesse encore au salut dii prochain, sans oublier le
d'.\iguillon Marie de \'igner()d leur finula sien propre, dans la crainte qu'après avoir
une maison à Rome; elle en fonda aussi prêché el enseigné les autres, il ne fût Ini-
dans son duché d'Aignil'on et dans son comté même réprouvé. C'est pourquoi, afin d'é-
d'Agenais aussi bien qu'il .'\Lirscille. Ils f.i- viter ce malheur dont il avait retiré tant d'à-
rcnt appelés à riénes l'an 1I:4j par le cardi- «nés, plus il avançait en âge, plus il se rcn-
nal Durazzo, qui leur fonda une maison dait exact à l'observance de ses rè;;les, et
en celle ville. Ils furent reçus eu Pologee particulièrcnvnt à satisfaire à l'obligation de
l'an 1051, où la reine .Marie de (ionzague les son office : ce qui obligea le pape .\lex;m-
élablit à Varsovie ; enfin elle fit un si grand <lre \l\, qui connaissait combien la conser-
progrès et en si peu de temps, que .M. de Paul vaiion de (c grand serviteur de Dieu était
eut la satisfaclion pendant sun géncralat de iniportantc à tonte l'lv;^lise, à lui faire cxpé-
voir cl.iblir vingt-cinc) maisons de son insM- dicr un bref à son insu pour le dispenser
tut, dont la d(rnicre fut fondée à Turin de l'office ilivin ; el en même tein[is les car-
l'an IGoi. dinaux Durazzo, archciéiue de Gènes;
Oulre le bien que ce saint instiUitenr a Ludovisio, grand pénilencier, el Bagni, qui
procuré à rF.glisc en lui donnant tant d'où- avait été nonce en France, lui écrivirent
vriers évangéliqucs par l'èlablissemenl de pour l'exhorter à se soulager el à se cnnser-
sa congrègiilion, il s'est encore distingué par ver. Mais le temps auquel Dieu avait déter-
plusi'urs autres saintes institutions tant pour miné de lui donner la récom| ensc de tous
le soulagement cor()orel des pauvres que ses travaux 6l:int venu, il mourut le :i7 sep-
pour le saint de leurs àuies. (]ar, ont o les tembre do l'année IdJO, âgé de 83 ans, après
confréries de lacharilé dans clia<|uc I aroisse, s'être disposé à ce dernier passage parmi
qui lui sont redevables de leur commence- renouvellement de ferveur et de piété. Il fut
jnenl, il a encore établi les filles de l.i (J)a- enterré au milieu du clnuurde Saint-Lazare,
rite, servantes des pauvres malades, et" con- où ses obsè(iues se firent avec un grand
Iribiié à réiablissemenl lie celles de la t]roix, concours de plusieurs seigneurs et d.ime>,
dont nous avons parlé à letirs articles. C'est mais parliculièremenl du prince de Conti ,
lui ()ui a donné origine aux compagnies du nonce du pa|)e M. Picolomini, et de la du-
<les dames pour le service de l'Holel-Uieu de chcssc d'Aiguillon. (hiel([ues jours ajirès l'on
l'aris, aux exercices de ceux qui doi\cnt re- fil pour lui un service solennel dans l'église
ceioir les ordres , aux retraites spirituelles de Saint-rierinain-l'.Vnxerrois , on revè(|ue
de toules sortes de |iersonnes qui veuIcMit, du Puy prononça s m oraisoa funèbre. On a
ou choisir un état de vie ou faire des ('(Uifes- depuis f.iil les informations jiiridi([ues d;' sa
sions générales ; aux conférences, ecclés as- vie, de ses vertus el de ses miracles, pour
tiques, à plusieurs séminaires, et enfin à poursuivre à Konij le procès de sa béati-
quanlil • d'iiopitaux, comme à c ux des en- liciiion.
lanls tro'.ivés, des pauvres vieillaids d.' Paris, Otle congrégation a été beaucoup atig-
ft des galériens de Marseille. menlée après l.i mort de ce saint fondaleiir ,
11 assista Louis XIII à la mort, el fut in- étant préseniement conposé • d envii on (jua-
suile nommé par la reine régente pour in\ Ire-vingl-qualre maisons, divisées en neuf
de ceux qui composèient le conseil roy;il des provinces, qui sont celles de l'"r.inee. Ciiain-
aiïairi's ecclésiasiiques cl bénélici.iles, ilonl il pigne. .Vquilaine, Poitou, Lyon, l'icanlie,
cul lui seul presque tout le poids pcndani ili\ de Rome, Lombardie et Pologne. O.ilre ces
ans. Au milieu de ces emplois el des fondions maisons, ma'lame la duchesse d'.\iguilloit
ind'Spensables de sa cliarge de général, il leur fit une fondation pour l'enlrelien de
tut se conserver dans une égaillé peu corn- (luelques missionnaires en Afri |nc, pour
munc ; toujours uni à Dieu, il marcha en sa l'assislance spirituelle el corporelle des |).ui-
présence |)lein d'un esprit de zèle pour sa vres esclaves de liarbarie, ou ils sont établis
gloire el de diarité pour le prochain auiiuel depuis l'an lOVIl, el le pape Innocent XII eu
il voulut assurer les secmirs qu'il lui avait envoya l'an Ui'.)7 à la Chine pour travailler à
l'jujours donnés, en mcllatil l.i dernière li conversion de cette nation.
7U1 LAZ
L'on pcul juger do l'oxaclîiudo dn M. Hcr-
liiaiit dans le déno.iibi-eiiio il qu'il f lil, d.ins
son lïisloirc dos Oid; es icligiL'ux, dos mai-
sons régulières et dos {-oinmiinaulés séculiè-
res, par ce qu'il y dit des Pères de la Mission,
auxquels il reiranche non-seulcincnt d /ux
du leurs provinces, qui sont celles de Picar-
die et de Lombardie, mais encore plusieurs
maisons considérables, comme Nolre-Oame
do Huglosse, dans la paroisse de Poui, li u
«Je la niissance de M. Vincenl de Paul, qui
fut donnée aux missionnaires de l.i province
d'Aquitaine, Tan 1708, par M. Bertrand d'A-
badie d'Arbocave, évoque de Dax, et par M.
l'abbé de Belbeder, curé de Poui, qui unirent
celle cure à la congré{,'alion ; le pelit sémi-
naire de Saint-Charles dans la ville de Poi-
tiers, où il aétéélabli l'aiiniO, par M. Jean-
Claude de la Poype de Vertrieu ; la iiiaisoa
de Florence, fondée l'an 1703 par le pape
Clément XI et le grand-duc de Toscane; c Ile
de Ferm!>, fondée la même année par le car-
dinal Ciiiei ; celle de Barcelone, f mdée en
1704 par deux cliano nés du la c.ithédraic ;
et celle do Forli, fondée p.ir le cardinal Pau-
lucci l'an 1709, toutes quatre de la province
de Rome; celle de Fi rrare, fondée par la
marquise de Villa-Camille lîevila lua, l'an
IG'Ji; colle de Crémone, fondée l'an 1702
par M. iMalossi, chanoine de la cilliédrale et
grand vicaire de l'cvéque de celte même
ville ; et celle de Casai, fondée par plusieurs
personnes de pié;é l'an 1710, toules trois de
la province de Lombardie; et cnlin dans la
province de Pologne, la m;iisoa de Xôwicz ,
iiu diocèse di' Cnesne, fondée l'an 1G89 par
le cardinal UaJziewousIii.
Le roi Louis XIV les a établis aussi en
IGCl à Fontainebleau pour avoir soin de sa
paroisse; à Versailles l'an 1G7V p ur desser-
vir pareillement la paroise et avoir soin de
la chapelle du château ; à l'hôiel royal des
Invalides à Paris, l'an IG7j, pour y desser-
vir aussi la cure, qui comme les deux précé-
dentes est unie à la congrégation ; el eniiu Sa
Pilajeslé les a établis à Saini-Cyr l'an 1G90, à
la sollicitation de madame la marquise de
l^lain'.enon, pour être dire(I.'urs des dames
el deuioiselles de Sainl-Louis et faiie (les niis-
sions dans les terres de la mense abbatiale
de Saint-Denis en France, unie à la commu-
nauté de ces dames. Ils furent aussi appelés
a Saint-Cloud l'an 1G8S, par M. le duc d'Or-
léans, frère unique du roi, pour y avoir soin
de la chapelle de son châleau et do l'Iiôpilal
de ce bourg.
Ils (ireni un second établissement dans
l\ume l'an 1G97, qui est encoie un de ceux
omis dans le Calalogue de M. Hermant,
(pioiquo la secunde édition de son llisloi c.
n'ait paru qu'en 1710. Le pape Innocenl XII
leur accorda le rnonaslèrc île San -Ica.i et,
Saint-Paul, sur le mont Célio , qui avail
autrefois appartenu aux religieux jésuiiles
avant leur suppression. Les religieuses Phi-
lippines [Voy. ce mot) l'avaient ensuite oc-
cupé ; et ces religiouses ayant été transférées
en un aulre lieu, Clémeni X l'avait donné à
dfs religieux an^jlais de l'ordre Je Sainl-Do-
LAZ
702
mini()nc. Alexandre Mil !'éri,'»ca en abbaye
l'an 1689, et la conféra à sun neveu le cardi-
nal Olloboni, en y conservant ces religieux
anglais, qui, ayant élé obligés de l'abaiidiMi-
ner, furent cause que le cardinal Otioboni se
déterriiina à remettre cette abbaye entre les
mains du pape Innocent XII, qui suppri-na
le titre abbatial et donna ce tnonaslère aux
Prêtres de la Mission, ciui y ont élabli lo sé-
minaire interne el les études de la province
romaine.
Oulre l'approbation que cette congréga-
tion a reçue du pape Urbain VIII, elle a
élé encore confirmée par les papes Alexan-
dre \'II et Cl'mcnl X. Les prêtres qui la
composent ont pour lin principale de Ira-
vailler à leur propre pci foclion , de s'em-
ployer au salut dos pauvres gens de la
campagne par le moyen des missions, et
de s'appliquer à procurer l'avancemenl spi-
rituel des personnes ecclésiastiques.
Pour parvenir à la première fin, la con-
grégation a un règlement qui prescrit enlre
autres choses une heure d'oraison nicnla'e
le malin, trois e\aiiens de cnnscienca cha-
que j >ur, la lecture spiriluelle aussi chai|ue
jour, quelques conférences spiriluelfs ch i-
que semaine, la re'raile annuelle de huit
jours, cl l'observance du silen.e hors le
lem[)s de la conversation.
Pour la seconde fin , elle vaque huit mois
de l'année aux missions de la campagne.
Les missionnaires demeurent quinze jours,
trois semaines ou un mois, (t quelquefois
plus en chaque lieu, selon qu'il est à pro-
pos, pendant lequel temps ils instruisent
tous les jours le peuple par des calecliistnes
et des prédicalions familières, entendent les
confessions générales, a;commodent les pro-
cès ou autres dilTérends, réconcilient les cn-
nrmis, cl procurent aux nécossileux, pârli-
culièremenl à cous qui sont malados, tous
les soulagements possibles, s'elTorçant d'éia-
blir où cela se pi-ut les confréries de la Cha-
rité, et terminent enfin toules ces bonnes
œuvres par la communion générale, à la-
quelle ils invitent tout le monde.
Pour la Iroisiôrne fin, cette congrégiliou
s'applique à la direction des séminaires, dans
lesquels ceux qui se disposent aux saints or-
dres ou qui les ont déjà reçus demeurent re-
tirés pendant un temps notab'e pour cire for-
més dans les vertus et les fonctions de leur
vocation par les exercices suivanis. Ils font
chaque jour en ce lieu l'oraison m 'utale eu
commun, récilenl ensemble l'office divin ,
enlondent la sainte messe, ou la célèbrcnl
s'ils sont prêtres, font l'examen particulier
sur chaque vertu avant le repas, el en font
un autre général le soir. 0.\ leur fait des le-
çons de théologie deux fois le jour, et une
lois l'exercice du plain-chant. Ils font à leur
tour la lecUire durant lo repas, et à la sortie
de lible ils ont environ une heure de conver-
salion snr divers sujets utiles, comme de cas
de conscience, de quelques passages de l'Ecri-
ture sainte, eic, mais d'une manière à dé-
lasser honnêtemenl l'esprit. Chaque seuiaine
ils escrconl à certains jours les tcrémonk's
7C3 DlCTIONNAinii DES OUPHES UKLICIEUX. TCl
tlî rc-'Ilsc, lanl de la messe basse que de la missionnaires est scaiblable à celui des
incjsé' hauie, cl des aulres offices divins, ecclcsiasliques , n'élant distingués que par
roninie aussi la manière d'adniinisirer les un collcl de toile large de quatre d,(i<{ls
sacrements. On les exerce pareillciiient de cl par un petit toupol de barbe qu'ils
toii,ps en temps à la prédication , au prône, portent (1). Ils ont pour armes No'.îc-Sci-
aa .;itécliisme, etc. Les dimanciics cl les giieur préchant.
félis ils chanienl la misse el les vcpns , ou Louis Abelly, évéque de Uodez, Vie de
ils sont e[:i|iloj6s lour à tour en quclt)ue of- M. Vincent de j'iiul. Giry. Vies des Sa nts,
fice . selon leurs ordres: ils se toufesscnl cl toin. Il, aux a'Idiliuns 27 septunli. Ilernian,
comiiiuTiiinl li'S même- jours. llist. des Ord. relig., lom.lV. Carlo Hnr-
La même conuréjiatiiin s'applique à dis- tliol. Piazza , Eusetolog. Roman, part, i,
poser dans ses maisons les ordinaiids à rc- Irait. 5, cap. 29, el part, ii , Trait. 11,
ti'voir dipniMiienl les saints ordres, par une cap. 13. lief/ulv Communes ejnsd. coiuj ega-
rctraitc de huit, de dix ou de douze jours, tionis ; cl Mémoires maniifcriis donnes pur
avant l'onliiiation générale, l'cnilant ce les prêtres de celte cons^réjialion.
temps-là, outre la plupart des exercices Le P. lléljol dit ci-dessus que depuis la
coMiniuns aux séminaristes , on leur fait mort du sainl fondateur des l'rétrcs de la
deux entretiens chaque jour, l'un de la tliéo- Mission, on a fait les informations juriiiii|ues
loijie morale, qu'o:i leur explique toute en de sa ne, de ses vertus et de ses miracles,
abrégé durant leur retraite, cl l'autre en pour poursuivr;- à Komc le procès de >-a béa-
forme d'exhortation sur 1rs sujets les plus lificalion. On sait aujourd'hui quelle a été
importants à leur état. Llle fait encore pour l'issue de ces poursuites. Tout ayani étéesa-
la même fin des conférences spirituelles avec miné rigoureusement à Uonie, \ inccni (ut
Il s ecclésiastiques, qui s'assemblent chaque béatifié, en 1"'29, j'ar Benoit Xlll. D eu conti-
semainedans ses maisons, pour y traiter des ni;a de manifisier la gloire de son serviteur
vertus el des fondions propres à leur étal, par les miracles qu'il accordait à son inter-
Enfin celte congrégalion employé encore un cession, et, eu 1737, Clémenl Xll mil Viu-
autre moyen tant pour la sanclificalion et la cent au rang des saints. La fêl ■ de la cano-
pei fcction des personnes ecclésiastiques que nisalion de saint Vinceul de Paul fut célébrée
ces liiiques : savoir, les retraites spirituelles partout avec pompe cl solennité. Sans entrer
rie cinq , six ou huit jours qu'elle accorde à dans les détails, nous devons ilu moins râp-
ions ceux qui, sous la conduite d'un direc- pe'.cr ici le dépit que manifesla le jansénisme
leur, veulent s'ap[iliquer à l'oraison men- en cette occasion. Un gran I nombre de cures
taie el vocale, à la lecluic spirituelle, à une de Paris metlaicnl opposition à la verilica-
confcssion générale ou annuelle, et à dres- lion de toutes lettres latentes surprises ou
ser un règkmenl de vie, etc. Alexandre Vil à surprendre en faveur delà bulle de cano--
ordonna par un bref de l'an 1GG2 que tous msation.et parmi eux nous voulons nommer
ceux ((ui recevraient les ordres à Itome l'abbé Goy, curé de Saiutc-Margiierilc, qui
et dans les six évêchés suffragants seraie it mourut avant d'avoir la salisf c ion de se
obligés de faire les exercices spiritu Is de joindre à ces zélés confières , mais qui dé-
dix j^iurs chez les Piètres de c tte coa- dara s'unir à leurs eiïorts. ï^ui>anl les j in-
gregation , sur peine <le suspension, dont séaistes, en un mot, nioîiiiVur Vincent avait
ils ne pourraient être relevés (jue par lui été canonisé à force de calomnies. Leurs
ou ses successeurs; cl Clémenl l\, en diatribes furent inutiles, cl ils curent surtool
considération de ces exercices que (ct e le dépit de voir installer avec grandes cêré-
congrégation fait faire, lui accorda plu- monies les reliques de sainl V inceal dans
sieurs grâces el privilèges. l'égl'se de Saint-Mcdard, où elles lurent ex-
il est à remarquer que celte congréga- posées à l'une des chapi Iles de cette é.;lise
lion est du corps du clergé séculier, quoi- ()ui donnaient sur le petit cimetière du diacre
que les particuliers qui y eutrcnl y fassent Paris (2). La fêle de saint Vincent de Paul a
après deux ans de prohalion quafre \œus été fixée au 1'.) de juillet, ct son culte est au-
simples, de pauvreté, de (haste'.é, d'obèis- jourd'hui plus répandu que jamais.
Fance el de stabilité, dont ils ne ])cuvent (Jui le (roirait aujourd'hui, si l'histoire ne
être dispensés que par le p^pe ou par le l'attestait, ct qui l'aurait cru alors, si des
supérieur général. Lile fait toutes ses fonc- faits nombreux ne l'avaient prouvé! La cri-
lions /i l'égard du piochaiu , avec l'ap- tique ct la persécution qu''éprouv> rent la
jirobation cl la permission des ordinaires bulle de la canonisation el même la béatifi-
■les l.eux, cl ne lait r'cn dans les mis- cation de sainl \incenl de la part des jansé-
sions sans ragrémeiil des curés. Knfin elle nisles n'empêehèreiil pas l'esprit de iiou-
exerce ces mêmes fiMicMom gratuitement; veanté de s'minii-cer dans cette congrégation
c'est pourquoi elle n'accc]. te aucun établis- cl de ga n r un grand nombre de ses mem-
seiiienl s'il n'y a une l'oiilalion sullisante bics .luv erreurs d'une secte qui élail son
pour l'entretien des ouvriers qu'elle en- cm e.i.ie aehnrné,'. Crilees A Dieu, la sociéic
voye. Llle est gouvernée par un général des La/.arisles fut pendant le x> m' siècle gou-
qui est perpétuel. Lhabillcment de ces veruee par des supérieurs qui ne négligèrent
(1) t'ny , h l:i On lin vcl., Il» 11)8. Vieigc ciiuvrc iiiie |iorli(>ii du Icrr.iia oij cuit l.i
(2) .NiiiiiiiMl'iiiii !c pei i tiiiiiiiiéro ex sic en p.iilie; loiiiliC du di.icro.
il e^l changé eu paiicrre, cl l'autel de la sainte
7CS
LAZ
l.\Z
TOG
rien pour maintenir dans son sein la doc-
trine caHiolique. En 1714-, M. Jean Bonnet
fut élu général. Quoique d'une santé délicate
et frêle, il déploya le plus grand zèle dans
son adminislralion, qui dura vingt-quatre
ans. C'est un des successeurs de saint Vin-
cent de l'aul qui ait le plus travaillé à con-
solider et développer les œuvres du pieux
fondateur. Il eut surtout à cœur de préserver
la compagnie dont il était le chef et l'organe,
des atteintes funestes de l'hérésie qui s'insi-
nuait alors partout et qui y fit pourtant plu-
sieurs Conquêtes. Le zèle, quand il est véri-
table, donne à" la charité des conseils de
rigueur, et M. Bonnet, en homme cliarit;ibîe
et prudent, ne recula pas devant des mesures
extrêmes, quand il les crut nécessaires ou
avantageuses au corps tout entier. Il retran-
cha plusieurs meiiibres, très-capables d'ail--
leurs par leurs taleils et leur instruction de
rendre des services sensibles. Entre ceux qui
durent céder à la vigilance et à la fermeté
de leur supérieur, nous nommerons un abbé
Lévrcit, sous-diacre, et l'abbé Gloris, assis-
tant du séminaire des Bons-Enfants , tous
deux opposés formellement à la bullo Uni-
genilus. Le séminaire de Bayeux fut deux
ans fermé, et M. Bonnet y iil introduire un
autre enseignement en y faisant suivre la
Théologie de Poitiers. A l'autre extrémité du
royaume, il se voyait dans le même temps
(1730) obligé à destituer et placer dans une
aiitre maison l'abbé Heniiont, supéiieur du
séminaire de Toulouse. Dans les peines qu'il
éprouvait, M. Bonnet trouvait des consola-
lions, non-seulemeiil dans lo lémoigiuige de
sa consci' nce, mais aussi dans la coopération
de SCS vcnérabics confrères, et nous citerons
les abbés Phigniirl, Jacquemart et Ortau,
entre autres, qui attestèrent de leur zèle
pour la saine doctrine dans une mission qu'ils
(lonnaienl à Esclaron, au diocèse de Châlons-
stir-.Marne. A M. Bonnet, qui mourut en
1735, succéda M. Jean Conty, élu en 1736,
lequel gouverna jusqu'à l'année 17i6;son
adminislralion ne fut pas non plus à l'abri
des orages que lui occasionnèrent les nova-
teurs cachés dans le sein de l'institut. Il lui
fallut bientôt, et dès l'année de- son élection,
expulser l'abbé Bary, qui, entré dans la con-
grcgïilion en 1707, ayant été professeur de
théologie , successi\emeiit à Sarlat et a An-
gouléme, missionnaire, curé de Richelieu, ne
fut reconnu pour jan éniste dangereux que
par l'abbé liourrel, e\ccllent catholique et
curé de Fontainebleau, où lîarry était alors.
Il faut se rappeler que i resque tous les or-
dres religieux éiaient à la même époque
es|.osés aux mêmes désagréments. La coi:-
grégalion de la Mission en sentait plus vive-
ment les coups depuis l'année 172'i- , à la
suite d'une assemblée générale dans laquelle
M. Bonni t avait donné des preuves de ce
zèle dont nous avons parlé, et employé ses
soins pour faire accepter la bulle et préparer
l.i c;ino:iisalion de saint Vincent. L'upiiosi-
liun qu'il avait éprouvée l'avait .porté dès ce
temps à faire (les expulsions dont furent
fra|ij)és les abbés Lelèvre, liimhertj Philo-
pold, etc. La rclaiion de celle asseoiblée fut
publiée dans le temps. M. Conty mourut en
1740, et eut pour successe!ir,rannéesuivante,
M. Louis Debras , qui mourut en 17G1.
M. Debras fut lui-même amené à des mesu-
res de rigueur et forcé d'expulser l'abbé
Cliarmet et peut-être d'autres confrères ;
mais hâltins-nous de dire ((ue la C'ngréga-
lion de Saint-Lazare se distinguait alors par
son zèle pour la docirine orl'odoxett par
les épreuves qu'elle subissait en consé-
quence, par exemple à Anxerro, où tous Ie3
directeurs dii séminaire fni'ciit interdits par
lo fongueux évêque de Caylus, et rétablis
par M. de Condorcel, son successeur. Dans
les missions (;u"ils donnaient sur d vers
points de la France, les Lazaristes s'appli-
quaient aussi à dissiper les erreurs jansé-
niennes et à faire disp.jraitro les livres du
pani.
M. Antoine Jacquier fut élu général en
17C2, et mourut en 1787. Ce fut durant son
administration que le souverain pontife, de
concert avec le gouvernemcnl français, con-
fia à sa congrégation le-, missions de l,i
Chine et du Levant, que la suppression des
Jisuites rendait vacantes. A Al. Jacquier
succéda M. Jean -Féli^-Joseph Cayla de ta
Garde, élu en 17fc8.
Dès cette année, les élections pour les étals
géncrauN. ayunt eu lieu, il ne s'en fallu', qun
de quelques suffrages pour que M. de Cayla
fût nomme un des députés du clergé de l'a-
ris;il liit du moins nonuné premier sup-
pléant.
En 1789, la mais )n de Sainl-Lazarc fut
une [>re i.ière fois pillée par la populace, que
les lactieux avaient excitée. La perte et les
dommages s'élevèrent à plus d'un million.
M. de Cayla, qui se trouvait à la maison en
ce moment critique, fut admirable de sang-
froid, de calme et de dignité.
Lorsque les états généraux furent conver-
tis en assemblée nationale, un député du
clergé de Paris s'étant retiré, M. Cayla n'hé-
sita pas, malgré les alarmes et les repré-en-
talions de ses amis, à prendre sa place et à
assister aux séances de l'assemblée, où il
déléndit coura;;eusement les droits de la re-
ligion. Il voulut aussi être présent au jour
fixé pour prêter serment à la constitution
civile du clergé, et on sait qu'il se rangea
du côté des prêtres fidèles qui refusèrent co
serment impie. Cet exemple du chef de la
congrégation fut généralemcni suivi par les
confrères de Paris et de la province. Sur
plusieurs mille prêtres de la Missii>n qui
étaient alors en France, il n'y eut qu'un petit
nombre à trahir leur conscience, il y eut
donc en elïet quelques défections, et ce corps
vénérable eut la douleur de voir deux évo-
ques constitutionnels sortis de son sein: lu»
était Jean-Haptisle-(iuillaume Gratien, Pié-
monlais, supérieur du séminaire de Chartres,
qui fut sacré en 1792 pour le siège métropo-
liiain de la Seine-lnl'erienrc (Kouen), cl
mourut en 1799; l'autre lut Adrien Lamoii-
relle, supérieur du séminaire de Tours, cl
dirccicur de rolraile à Saint-Lazare, sacié
7G7 PICTIONN.MUE DKS (mDP.ES UKUGIKUX. 7C8
i-n 1791 (■•ïrqMc nutropoliiain de lihône et Nojon, Pamiprs, la Hocliolle, Rodez, Siiinles,
Loin- (l.ydiij, et ijuilloliné à Taiis vn ITOV, Sailat, Sens. Sisloroii (d( ii\ séminaires dans
apris avoir ri-tr.iclo son sormcnl vi ses ei- ce diocùse, à Manos(iiu> il à I.iirsl ; Soissons
ii'lirs. Kii coiiiiiciisalioii. la conjiri'^^alion vil (•iraiid cl pdil séiiiinairi'), Toiil, Tours, Tré-
pliislours (le SOS memlircs scrilrr de leur iinii-r, Tioycs cl \aiiiics ; ci) loul (|iiaraiile -
sanB li'ur aM.Èrliomrnl à la f li ilo l'Ki^lise. sept grands séminaires el deux pelits. Auctino
Eu 17i':i, le 2 sei)leiiil)rc, eul lieu en même autre con|jrénation, pas même relie de Saint-
temps qu'aux Carmes le f.imeuv massacre Sulpice, lie dirifieai; alors aulanl de maisons
au fêniiiiaire de Sainl-Finni i , rue S^iiiil- d>tc gei-.re. I.e~ L.izarisles (le\ aient celle co;)-
A'ielor, dans Iciiuol saint \ inceiil 'C l'aul fiance au res()ect porté à leur sainl fonda-
:i\:\H jolé lis piemii rs fondemeiils de sa cou- leur, (|ni a h', premier établi lis séminaires
gréi;alio!i. M. l'raneois , supérieur de cvtlc si;rle pied où ils sonl aujourd'hui,
iiiaisuii, I éril dans celle journée. La maison de Sainl-Lazare, dont la nation
Dans la même année cul lieu la seconde s'est emparée, est arluellemenl une prison
spolia'.ion de Sainl-I-.iza e. Tous les meoi- de femmes, (".e fut fidnic Joly, Iroisiè.ne {Re-
lues de la c<ingrég;alion qui te Irouvaienl néral de l,i ron<»réL;alion, qui (il construire la
tians celle maison lurent dispersés. -M. C.ij la pluparldes vastes édifices (jui composent eet!c
fut forcé de fuir; il passa d'abord en Aile- maison et ((u'on voil encore de nos jnurs.
ni ic;ne et de là à Uome , où le pape l'ie ^ I L'enclos de celle communaulé était le plus
lui oftrii un asile. C'est là qu'il niourut au frr.ind (]u'il y eût à Paris el dans les fau-
niois de lévrier 1800, iilcuranl sur la disper- bourgs. On y a bàli l'é^^lise de Sainl-Vinecnl
sion des membres de sa coii;;réj;ation, et d<î Paul, qui a été placée sous ce vocable, à
n'osant espérer sans doute l'état prospère cause di raiiciennedcslinationdc ceslieu\;ou
que la Proiidenre lui a ri'udu. y a construit aussi l'embarcadère du cbeniiu
L'insiiint de la Mission a de tout temps de fer du Nord, cl on y bâtit (ii ce moment ui\
compté lies 11 imuies distingues par leur sa- vaste hôpital ou h >spice. Nous croyons de-
voir IbéolDj; que. Nous indi(]uerons, à l'épu- voir cons.icrer ces souvenirs, qui s'elTace-
(jue li\éc pour ces additions liisloriiiu -s , raient bientôt, lorsque ces lieux, encore si
M. \"lclor-Anu'dée Soardi, né à Turin, mais solitaires de nos jours, deviendront, ce qui
professeur au séminaire Saint-Firmiii , à sera en peu d'années, couverts d'édili.es
Paris. Il publia quelques ouvrages très- comme les autres quartiers de Paris. On
estimés, entre autres celui qui est intitulé : voyait dans l'église plusieurs be.^ux tableaux
Jie rotn(tni panlificis nuctarilalc, im; rimé à représentant quebjues traits de 11 vie do
A»ignon en \~\1. L'auteur y veut prou\cr saint Vincent de l'aul. Nous rroyons quo
(|iic le clergé de France reconnaissait l'in- plusieurs de (es tableaux sont ceux (ju'on
laillibilité ilu paie. Son livre lut supprimé vcit aujourd'hui dans les deux cbape'.les la-
par arrél du parlement de Paris en date du térales de l'église Sainti-M.irguerlle, au fan-
2 ) juin 17'i8 (1 . 11 y a eu ui'.e seconde édilion bourg Saint-.\nloine, où M. Dubois, ancien
lie cet ouvrage à Hcilelberg en 1793. Lazariste, a été cnré. Au fond du réfecUiire,
.Nous citerons aussi .M. ("rançois, supé- où le général delà congrégation mangeait
rieur de Saint-Firmin , auteur d'un ouvrage toujours au milieu de deux p luvres, qui par-
tie discussion pliilosopiiiquc remarquable, tageaient les mets qu'on lui serv.iil, était un
dit-on, [jar sa logique el sa clarlé. Nous grand tableau representanl le déluge uniier-
ra[ipcllerons surtout Pierre Collel, conliiuia- sel. Ce relecloiie pomall contenir plus de
leur lie Tournely. Les ouvrages de ce céblrre deux cents personnes.
lliéologicn sont connus et estimés de tout le A Saint-L;izare on gardait des personnes
monde; mais on le connaît peu lui-même, el ecclésiasti [U" s ou laïques (|ui y éiaienl ren-
iions recueillons sur sa vie des renseigne- fermées par lettres de c.ichel ou condamnées
inenls qui puissent suppléer au laconisme à un temps de retraite. On y reiifermail aussi,
lies diclionnaires historiques à l'article de croyons-nous, i|uelques aliénée,
cet homme si laborieux et si instruit. A la Lorsque les rois voulaient f.ire aiilrefois
nomenclature des élablissemenls de Laza- leur entrée dans Paris avec solennité, ils se
risles, donnée par Hélyot, nous joignons nndaienl à Saint-Lazare, où ih recevaienl
ici la liste alphabétiiiue des séminaires diii- le serment de (iiléiilé et d'obéissance de tous
gés par celle congrégation: Agen , .\lbi, le> ordres de la ville. L'u-age était aussi de
Amiens, Angouléme, Arles, .\rras. Ai ignoii, déposer dans celle maison les corps des rois
AuX'Tre, Haycux, lieauvais, lielley, lîrziers, el des reines de France lorsqu'on les condiii-
I^ordcaux, Boulogne, Saint-Itrieiic, C ihors, s.iil à Sainl-Denis pour èlre inhumés. L'ar-
Cainhrai , (^hàlons - sur- .Marne , Chartres (lievéque de Paris recevait leioiiNoi eiilre
I grand el petit séminaire), Sainl-Flour. Saint- les deux portes du prieuré, cl, après les cé-
lol-de-Leon, P.iu (poir le dincése de l.escar], réuioiiies accoutumées, le corps était portij
Liiçun, Saiiit-.Malo (deux séminaires d.ins ce a Saint-Denis par les nauiioiutr.i ou vingl-
diocèse, l'un à Samt-AIeen, Faut e à Saint- (luaiie jinrteurs de sil jurés de la ville.
Servaii); le Mans, Mar-eille, ,Met/ (deux se- D'après le ciociis du dernier siècle, les
iiiiiiaircs, celui de Sainle-Anne et celui de Préires delà .Mission av, lient à Uome, et Hc-
t^aiut-Simuii), Muntaubau, Nancy, Narbonue, lyot le rapporte, deux élablissemeiits, celui
(I) En date du 20 juin i"!9, suivant les reiiîC'giicniciits cpii nous oui clé foiiriiis pai .M. l'abbé Salvaire,
L.i/Arls(e.
709
LER
LEU
770
de Sainte-Tiinilé à Monic-Cilorio, et celui île
Sninl-Jcnn et Sainl-l'.iul.
l'oiir entrer à Saint- Laznro, il f;ill,iit, au
(icrnier siècle, accéder aux comlilions sui-
vantes : \a poslulance durait autant qu'on le
jufreail couven;ible pour le sujet. Ou prcn.iil
pour le noviciat et rfialiillement cinq à s x
cents livres. On faisait, dit de Ijcaurnonl, in
cela différent de Hélyoi, deux ans de sémi-
naire av.iiil d'être admis ;;ux vepux, et on de-
vait cire, pour l'admission aux ordres, pourvu
d'un titre clérical de la valeur prescrite dans
le diocè-e où l'on était né.
A l'extrémité de l'enclos de Saint-Lazare
et siir la rue du faubourg, était une «jrande
maison appelée le séminaire de Saint-Char-
les ; c'était une dépendance de colle des Prê-
tres de la Mission destinée pour les membres
convalescents et pour Ici retraites de quel-
ques ecclésiastiques.
La dénomination de Lazaristes n'a point
é é employée par Hélyol, qui ne l'a peut-
être [;a.s connue, et qui a donné à l'Institut
dont nous parlons son nom réel de congré-
gation des Prêtres de la Mission. Néanmoins
l'autre avait prévalu; et il est tellement .-it-
taclié anjourd hui à la société de Saint-Viii-
cent de Paul, que c'est sous ce nom seul
qu'elle est connue, el c'est aussi sous ce nom
que dans notre dernier volume nous plu-
cerins l'histoire du ré'.ablisscniint et des
progrès de cette société vénérable, dont nous
ferons connaître l'étal actuel, voyez Laza-
HiSTEs, au Supplément.
Etat ou Tableau de la VlUe de Paris, par
de Beaumonl, m-8°, ViGi. Tablenu historicjite
cl pittoresque de Paris, par J.-B. de Suint-
Victor, 2" édition, tome 11, première parti ■.
Niiuvelles ecclésiastiques, in-ï", p.issim. L'Ami
de la Religion, tome XVIII. Mémoires pour
sertir à l'histoire ecclésiastique, par Picoi,
tome IV. Notes manuscrites dues à l'exquise
obligcanc de M. l'abbé Snliaire, prêtre, se-
crrtaire général de la congrégation des La-
zaristes. B-D-K.
LÉANDRE (Saint-). Foî/. Césaire (Sâi\r-).
LLIUNS (Congrégation de).
De la congrégation de Lérins , où il est parlé
des religieuses de Saint-Honorat de Tunis-
con et de celles de Mavmunsler ou Moise-
vaux.
L'abbaye de Lérins , l'une des plus célè-
bres et des [dus anciennes de France, qui a
Blé un séminaire de saints prélats et d'abbés,
ijui ont gouverné la plupart des églises et
d(!s monastères de ce royaume , ne reçut la
règle de saint Benoit que dans le \ ii' siècle ;
ei.core y fut-elle observée d'abord conjointe-
ment avec celle de siint Colomban. Celte
fameuse abbaye, autrefois chef de congréga-
tion , fui fondée , non pas l'an 373 , connue
quelques-uns l'onl avancé, mais l'an 4-10,
par sainl Honorai, qui lut d ms la suite évê-
que d'Arles. On ignore le beu de la nais-
sance de ce saint fondateur; on croit qu'il
était d'une famille noble et qu'il avait !!iéme
eu l'honneur du consulat. Quoique sou père
s'opposât à s.i conversion , il reçut le bap-
tême aussi bi n que son frère Venint , qni
se joijjnit à lui; et , ayant résolu tous dent
de ne vivre que jiour Dieu, ils embrassèrent
la p ofes ion moiasliqiie sous la conduite
de saint C.îpraise , qui étaii ermite dans une
île proche de Marseille. Ils allèrent ensuite
dans l'Ac'iaïi'; mais Venant étant mort à
Moudon, saint Honorai revint en Provence,
où étant attiré par Léonce, cvêque de Fré-
jus , il s'établit dans son dincèse et choisit
pour sa retraite l'ili- de Lérins, qui était dé-
serte et où per.<onuc n'abordait à cause de
la quantité de serpents dont elle était rem-
plie. M.iis Honorai , ayant chassé ces ani-
maux , y bâtit un mo ■astèro qui fut bientôt
habité p.,r un grand nombre do religieux d(!
toutes sorîes de nations. II était d'abord
composé de cénobites el d'anachorètes, seni-
b'able ;'i une laure où l'on voyait une infi-
nité de cellules séparées les unes des autres.
L'île de Léro , qu'en appelle présentement
Sainte-Marguerite, qui touche presque à
celle de Lérins , était aussi habilce par de
saints solitaires qui ne faisaient avec ceux
de Lérins qu'une môme congrégation, gar-
dant les mêmes observances. 11 ne faut point,
dit le P. Mabillon, recourir aux Institutions
de Cassien et dire qu'elles servaient de rè-
gle à ces solitaires , puisqu'elles n'étaient
pas encore écrites. 11 est vrai qu'on ne peut
parler que par conjecture , mais il est plus
probable qu'i's observaient la règle de saint
Macaire.
Saint Honorai ayant été élevé sur le siège
épiscopai d'.Arles, Maxime lui succéda daiis
le gouvernement de Lérins , el Fausle à
Maxime, qui furent tous deux éicques de
Ri.'z. Fausle, étant encore abbé, eut un dif-
férend avec Théodore , cvêque de FréjU'i,
au sujet de la juridiction que ce prélat pré-
tendait a^oir sur celle abbaye, (|ui él.ilt
encore pour lors du diocèse de Fréjns, el
qui n'a clé que dans la suite de celui do
Grasse. Saint Honorât, en jetant les fonde-
nicnts de ce monastère , était convenu avec
l'évéque Léonce que les clercs et ceux qui
approchaient des autels ne seraient ordon-
nés que par l'évéque ou par celui à qui il
en aurait donné la permission , et que lui
seul donnerait le saint chrême; mais que
tout le corps des autres moines laïques seront
sous la dépendance de l'abbé qu'ils auraient
élu. Théodore cependant prétendait avoir
une juridiction absolue sur tout le monas-
tère. Pour remédier au scandale que ce dif-
férend causait, Ravennius , évêine d'Arles ,
convoiiua un concile de treize évê;ues, dans
lequel il fut résolu que Théodore serait prié
de recevoir la satisfaction de Fauste, qu'il
oublierait le passé , qu'il lui rendrait son
amiiié, qu'il cuntinuerait à lui donner les se-
cours qu'il avait promis, et qu'il ne pourrait
s'attribuer sur ce monastère que ce que
Léon son prédécesseur s'était atlribué, c'est-
à-dire que les clercs el les ministres de l'au-
tel ne seraient ordonnés que par lui ou par
celui auquel il en aurait donné commission;
que lui seul donnerait le saint chrême et
77i
coiifiriuorail les nôophylcs, s'il y en avait ;
((uc les elerrs ••lriiii;;cis ou passants ne se-
raient point admis sans son eonsenlenienl
ni à la conininnion ni au ministère , mais
que la mnliiiuilo ili's laïiines (t'cst-à-dire le
reste îles moines) serait sous la conduiic de
l'abbé . sans ((ue l'cvèquc s'y aliribuàl
aucun droit , ni 'ju'il pût eu ordonner au-
I un pour clerc , si ce n'était à la prière de
l'abbé.
i;est au sujet de ce concile, qui se tint
l'an VoO, selon qneliiues-uns, ou, selon d'au-
IriS, l'an 'io.J , et qui , selon M. Flcury, ne
peut pas avoir été lenu plus tard que l'an
ii61 , que le P. Mabillon f.iit remarquer que
pour lors les cercs n'élaienl pas ainsi appe-
lés à cause de leur tons.ure , mais à cause
des oflices ecclésiastiiiues qu'ils cxerç.iieni,
comme de » hantre, de sacrislain, d'économe,
de noiaire ou de défenseur ; et qu'ils étaient
appelée ministres de l'autel lorsqu'ils avaient
reçu les ordres majeurs ou mineurs; qu'à
ré;.'ard des simples moines, qui n'avaient ni
ordres ni offices, ils étaient appelés laïi]ues ,
et que pour les distinguer des séculiers ou les
appelait quelquefois laici majoris proposili.
U ajoute (jue ce concile d'Arles, parlant de
ces moine» , les avait appelés une mulliludc
de laïques, parce que leur nombre était
beaucoup plus grand à Lérins que celui des
clercs ; mais que dans la suiic le nombre des
clercs engagés dans les ordres majeurs sur-
passa celui des simples moines , comme il
paraît par la lettre e,ue saint Grégoire le
Grand écrivit à l'abbé Etienne , où il le con-
gratule de ce que les prétrea , les diacres et
loiite la communauté vivaient dans une grande
union. Sailli l'i uctueux , évéque de Prague ,
distingue dans le dernier chapitre de sa ré-
gie les moines de son monastère d'avec les
laïques; mais ces sortes de laïqu s n'étaii nt
pas des séculiers , ils étaient de véritables
moines tels (]ue ceux que l'on nomme pré-
sentement coiuers. Ainsi, conclut ce savant
homme , lorsque le concile d'Arles | arle de
celte muliitude de l.iïques qui étaient à Lé-
rins, il n'entendait [las [larler de séeuliers ,
mais de moines qui n'étaient pas clercs,
puisque c'était à eux que l'élection de l'abbé
apparlenail. (Juant aux néophytes { dont il
est aussi parlé dans ce concile) qui étaient a
l.éiiiis.il fuit remarquer (ju'autrefois les ca-
téchumènes étaient instruits dans les monas-
tères avant (pie de recevoir le baptême.
A()rès ()uc Fausta eut été fait évéque de
Itiez, Nazare fut a. bé de Lérins. (]e fut lui
qui fit baiir pour des (ilbsle monastère d'Ar-
luç, l'an k"r2. Les autres abbés qui succédè-
rent à Nazare curent soin de maintenir l'ob-
servance léguliére; mais il y a bien de l'ap-
parence qu'elle s'alTaiblil dans la suite sur
la fin du M siècle, du temps môme de labbé
lùienne, que saint (Jrégoire avait félicité par
une lettre de la grande union qui était dans
son monastère , puisque , 4)ar une autre let-
tre (Te ce pajie écrite à Conon , successeur
d'Iitienne, il l'esliorte de corriger les mœurs
de ses religieux.
Le rclûilicmcut augmenta dans l.i su. te et
DlCriONNAlhE DES OnDHES nF.UGIF.lX. 772
produisit une grande division entre les reli-
gieux, qui, ne pouvant s'accorder sur l'élcc-
liiin d'un ablié, deiiiandèren', l'an COI, Ai-
gulfe, moine de ."^aint-ltenoil-sur-Loire , qui
y avait apporté du Mont-Cassin le corps do
saint Itenoit, et l'élurent pour abbé. Aigulfe,
ayant acreplé celte dignité, travailla aussitôt
à rétablir dans ce monastère la paix et l'ob-
servance. Les exhortations jointes au bon
exemple qu'il donna furent si clficaces , que
les esprits se réunirent cnlin . et ceux qui
étaient sortis du monastère y revinrent et
reprirent les observances régulières. Il s'en
trouva néanmoins deux , Arcade et lloloinb ,
qui conçurent une si grande aversion contre
le saint abbé et contre ceux qui sui\aienl
ses maximes , qu'ils cherchèrent les moyens
de leur ("ilcr la vie. Ouelques-uns s'etant
aperçus de K'ur mauvaise volonté, voulurent
échapper à leur fureur en se rcliraiil dans
l'église de Saint-Jean; mais les autres ne
voulurent point abandonner leur alibé , qui
représenta aux rebelles l'énormilé de leur
crime , dont ils se repentirent et demandè-
rent pardon. Mais un an après, craignant
(\ue le bruit l'e leur conspiration n'allât jus-
qu'aux oieilli s du roi et qu'il ne les fît pu-
nir, .\rcade sortit du monastère pour aller
chercher de la protection au dehors , et Co-
lomb resta pour cabaler au dedans. Arcade
voulut ensuite rentrer, feignant de se repen-
tir, mais Aigulfe lui fil fermer la porte. Ce
méchant homme eut pour lors recours à un
seigneur voisin nommé .Moinmol, et lui per-
suada d'aller à Lérins , l'assurant qu'il y
trouverait de grands trésors. Il y vint, con-
duit par cet Arcade, qui prit l'abbé, le char-
gea de coups de bâton , et le mil en prison
avec les r( ligieux qui lui étaient le plus sou-
mis. Le leiKlemain Arcade les alla voir , et ,
feignant (ju il n'étaii point l'auteur de cette
violence, leur fil ajiporler à manger. Mais,
quoi(iue dans L's liens, ils ne crurent pas
pouvoir transgresser la règle: et, comme c'é-
tait ua jour déjeune et qu'il n'étjiil encore
()ue l'heure de tierce, ils différèrent à man-
ger jusqu'à none.
Après que Mommol eut emporté ce qu'il
put du monastère , .\rcade fit sortir les pri-
sonniers au bout de dix jours et les mit sur
un vaisseau. Colomb les voulut accompagner
après leur avoir fait coujier la langue et
creȎ les >eux , de ])eur qu'ils ne lissent
connaitre les auteurs d'une telle cruauté, et
leur donna de méchants habits afin qu'ils no
lussent pas reconnus pour religieux. Ils
abordèrent à l'île ('apraria.où il y avait une
grande multitude de moines , avec lesquels
ils célébrèrent la cène du Seigneur , y étant
arrivés le jeudi saint : le jour de Pâques ,
Colomb eut la hardiesse de faire l'oflice de
diacre à la messe, et avant la i'oinmunion,de
donner le baiser de |)aix à ses frères qui por-
taient des marques de sa cruauté, et dont les
plaies étaient encore toutes saignantes. Il
sortit ensuite de ce mona>tère , y laiss.mt
saint Aigulfe avec ses compagnons, et s'en
alla à Lplièse )iour quelques affaires sécu-
lières ({u'il y avait. Il retourna à Capraria
77.-
LER
LER
774
<len\ ans après, où il fil rembarquer les sainls
iiidilyrs Aigiilfe et ses frères; et, les ayant
conduits dans une île qui est entre celles de
Corse el de Sardaigne, il les y fil massacrer
l'an 67o. L'on dil que le roi Ttiierri fit porter
à ce niJillieureux la peine quo méritait un si
1 gr.ind criiiie.
\ La réforme quo saint Aigulfe avait élablle
' à Lérins ayant été comuii! arrosée de son
sang , redeurit el porta une abondance de
fruits en pieté et en vertus. Ce monastère
fut si célèbre et l'observance y était gardée
si exactement , que l'on y venait de toutes
paris s'y consacrer à Dieu : l'on dit même
que le bienheureux Amand , qui pouvait
gouvernT cette abbaye vers le commence-
ment du viir siècle, eut sous sa conduite
jusqu'à trois mille sept cents religieux. Sil-
vainl i succéda, et saint Porcaire à Silvain.
Ce fiit du temps de saint Porcaire que les
S;irrdsins aMa^Uî'rent c ttc île. Ce saint,
ayint connu par ré\ élation qu'ils devaient
venir, caclia dans un lieu secret les reliques
des saints qui étaient dans son église, et per-
suada à trente-six religieux qui étaient à la
fleur de leur âge et à seize enl'anis qu'on éle-
vait dans ce monastère de sauver leur vie
par la fuile en se réfugiant en Italie.
11 parla ensuite à sa communiuté, compo-
sée d'environ cinq cluIs religieux, et les ex-
horta à mourir généreusement pour Jésus-
Clirist. Mais ses exhortations ne pouvant
rassurer deuK religieux : l'un nommé Co-
lomb , l'autre Eleutiière , il leur commanda
de s'aller cacher dans une grotte voisine.
Les barbares élanl descendus dans l'île l'an
730 ou 731 , renversèrent les églises cl tous
les bâtiments, tuèrent tous les religieux, du
nombre dcs;iuels fut Colomb , iiui , condam-
nant s.i timidité , sortit de sa gi olte , et , se
rejoignant à ses frères, cul le bonheur de
mourir avec eux. Ces barbares épargnèrent
néanmoins quatre jeunes religieux (ju'ils se
conlentèrenl de faire prisonniers. Ils les fi-
rent monter sur un de leurs vaisseaux qui
aborda au port d'Agal en Provence , où on
leur permit de descendre à terre pour un
peu de temps : mais , voyant qu'on ne les
observait pas el qu'ils éiaient proche d'une
forêt , ils s'y caclièrenl jusqu'à ce que les
barbares eussent mis à la voile. Alors ces
religieux vinrent à Arlue, où, ayant trouvé
une petite barque , ils s'en servirent pour
repasser à Lérins, où ils aidèrent lik ulhère
à donner la sépulture aux corps des sainis
mari) ri. ils alièrenl ensuite trouver en Ita-
lie les jeunes religieux que saint Porcaire y
avait envoyés ,• et , lorsqu'on n'eut plus rien
à craindre de la pan des Sarrasins , ils re-
tournèrent à Lérins sous la conduite d'Eleu-
Ihère , qui répara l'abbaye dont il fut fait
abbé.
11 y a de l'apparence qu'elle eut encore be-
soin de réforme lorsque saint Odilon , abbé
de Cluni, qui réforma tant de monastères en
France , en fut abbé, en 997. Mais celle ab-
baye ne fut jamais plus florissante que sous
(1) Yoy., à la lin du vol., u" 1S9.
le gouvernement de l'abbé Adrlbert, qui fut
élu l'an 1066 et qui gouverna cette abbaye
pendant trente-six ans; car l'auteur du Cata-
logue des abbés, rapporté parVincenlRarale,
dit que du temps de cet abbé il n'y avait pas
un seul jour que l'on n'enrichit cette maison
par quelques donations. Ce fut de son temps
que Raymond, comte de Barcelone, cl sa
femme, donnèrent à ceLle abbaye le monastère
de Saint-Barlhélemi en Catalogne. Elle en
availaussi d'autres, non-seulement en France,
mais encore en Italie dans l'évéché de Reg-
gio, dans l'Etat de Gènes et dans l'île de Cor-
se , qui tous étainnl soumis à la correction
de l'abbé de Lérins; cardans ce Catalogue
des abbés l'on voit que l'abbé Tourneforl, qui
fut élu l'an 1305, ordonna au prieur de Saint-
Antoine de Gènes, qui était de sa dépendan-
ce , de défendre par sainte obédience à ses
religieux de sortir hors du monastère sans
sa permission el sans être revêtus de leur
coule ou flacs (I); et que, si quelqu'un ne
voulait pas obéir, que l'on en donnât aussi-
lôt avis à l'abbé de Lérins. Il semble que re
prieuré ait étéchangédans la suite enabbaye;
car dans un chapiire général qu'André de
Fonlana tint l'an i'iSl, tous les moines de
Lérins y as'^islèrenl avec les prieurs des
prieurés de la dépendance de l'abb.iye ; et
Rcnoît Négroni, abbé de Saint-Antoine de
Gènes, n'ayant pas pu y venir, y envoya un
procureur pour tenir sa place. Celait la cou-
tume de cette abbaye de tenir ainsi des cha-
pitres généraux , où l'on faisait des ordon-
nances pour maintenir la disripline régulière.
Il y avait encore des monastères de filles qui
en dépendaient, comme ceux d'Arlue, do
Saint-Honorat, deTarascon, etc.
Ce monastère de ïarascon fut fonde l'an
1358 par Jean Gantelmi, originaire de Naples,
grand sénéchal de Provence. Il fixa le nom-
bre des filles à trente, toutes demoiselles, sous
l'autorité d'une abbcsse. Il doîa richement ce
monastère, lui ayant donné beaucoup de re-
venus, tant dans la ville de Tarascon el aux
environs, que dans celle d'Arles, outre trois
lerres seigneuriales, avec toule juridiction et
plusieurs droits et ])riviléges, dont l'abbesse
jouit encore présentement. Ce monastère est
sous la juridiction de l'.ibbé de Lérins el ne
dépend point de l'ordinaire. L'abbesse est do
numinalion royale, el Sa Majesté choisit or-
dinairement des filles de grande qualité. Celle
qui est abbesse aujourd'hui est de l'illustre
maison de la Baume de Suze en Dauphiné.
Nous donnons ici l'habillement de ces reli-
gieuses, que nous avons fait graver sur le
dessin qui nous a été envoyé en 1714- (2).
Outre ces monastères de l'ordre , il y en
avait encore un de Chanoines Réguliers qui
lui était soumis. Giraud, étant abbé en 1226,
donna, du consentement de sa communauté,
à des Chanoines Réguliers vivant sous la rè- .'
gle de saint Augustin , les églises de Saiat-j
Mamerl et de Sainte-Marie de Fontaine-Vi-|
neuse, avec leurs dépendances, à condition!
qu'ils reconnaîtraient Lérins pour leur chef;
(2) Yoij., ibid., n" ICO.
775
mCTIONNAlUE DES ORDRES IIELIGIF.LX.
-Tf,
et que pour maiquc quilslui cl.iicni soumis,
ils porlpraiciil (les cnparcs noirs sur leurs sur-
plis; q l'oiilre n-la ils pnyeiaiciil à l'.ibbé de
{.crins cl ;i ses successeurs ileus besans (J"or,
't (jui" le prirur as^islcrnil (ous les deux ai)s
nu ( liaillre général de l'iilibiyc de Lérins.
liiiliu Augustin (iriiua'di, év('i]iii! de (îra?-
sc, élanl ablié do Lcrins eu lIJOo. voyant que
la discipline uiouasliquc u'etait plus en v i-
p^tieurdaus en luonas'.èrc, le souuiil à la con-
(«répaliou des I?cucdiclius de la reforme du
S'ionl-Cassin cl de Sainte-Jusliue de l'adoue.
filic en prit possessioi l'an 1515, et depuis
ce Icinps-là les abbés n'ont plus été perpé-
tuels. Le pape Léon X approuva celli- union
la mémo année; le roi l'ranrois I"^ y consen-
tit par SCS Icfrcs du IV avril aussi de 1 1 mê-
me année, qui furent vériliées au parlement
d'.Vix. Celle union fut dans la suite onfir-
méc par la reine Louise, mère de François I",
réçcule du royaume en son absence. !e 7 août
1523; par le roi Henri 11 l'an loi?, par le
pape Cléiue .t Vlll l'an loTl , et par le roi
Henri IV r.,n 1597. (Juuique d .ns le Catalo-
gue des abbés dont uius avons parL- il
.«oit marqué que la congrégation du Slonl-
Cassiu a depuis celle union établi les abbés
dans ce monastère , il paraît néanmolBS que
les re'it;ienx se soiil toujours conservé le
droit de les élire et de les choisir du corps de
la cniumunaulé. Chopin rapporte à ce sujet
un procès qu'il y eut au conseil privé entre
dom Hilaire d'.Vnlilies, religieux de ci lie ab-
baye (qui avait clé élu abbé d'un commun
consentement de la comniunnuté, et pour le-
quel le même Chopin plaidiit), <t un Italien
qui en avait été pourvu par le roi, qui avait
interjeté appel conunc d'abus de ci'llc union
de Lérins a>ec la congr, galion du Moul-Cas-
sln. Par l'arrèl qui fut rendu le 8 iiovem'ire
1599, celte ablia\c fui adjugée au religieux
ijui avait clé élu par la communauté, et ce
en conséquence de runinn faite avec la con-
grégation du Moni-Cassin.
Nous a^ons dit ci- levant que cette abbaye
était un -émin.;ire d'évéqucs. Klle a donné à
l'Eglise douze atchevéqucs, aillant d'évôqucs,
dix abbés , qu.itre moines , mis au nombre
des saints confesseur^ , et une inrinilé de
martyrs, sans parler d'un très-grand uoinbre
«rii lûmes illustres qui eu s.)nt sortis. Tou c
l'ile est de la dépeutlance du monaslère. Les
Espagnols la surprirent au mois de septem-
bre 1033 et en funnl chassés en lt)37. Ce sont
cm qui désolèrent ce lieu, coupant des forêts
de pins , qui y fournissaient une ombre
agréable conire les ardeurs du so'eil, que la
nature a\ail dis|iosés en allées, au boni des-
quclb s on trouvait des oratoires bùlis m riiou.
iicur <les sai'its abbés ou religieux de cette
Ile. Cette forêt si agréable lui avait fait don-
ner le n(un >\'Aiijietle de la mer.
Les mémiiircs que nous avons du monas-
lère de Masmur.ster sont si succincts, que,
ne suffisant pas pour en faire un article
I artiriilier, nous l'avons inséré à la lin de
ccUii-ii, snivani le temps et l'année de sa
fiudaiion, qui fut en 720. Ce monastère e<t
si'ué à Moi~evau\, dans leSunl;aw, à ciiii^
lieues de Malhanson. Il fui foidé par Masoii,
duc de Suève , i|ui, avant perdu son fils uni-
que, qui s'était iMyè d ins la rivière de To!-
der, qui passe à Moisevaux, y lit bàiir celle
abbaye, dans la(|uel!e il mit des religieuses
de l'ordre de Saint- lïenoîl, qui, quoi(|ue dé-
chues de leur premier inîtitul cl de la pun--
té de la règle de ce saint fondateur, n'ont
pas laissé de le conserver jusqu'à présen'.
Ce sont présentement toutes lilles nobU's,
cl pour y être reçue il faut faire preuve de
seize quartiers de noblesse tant du côté pa-
ternel i\n(i du côté niaternel. Leur église est
dédiée en riionneur de saint Léger, niarlyr,
cvériucd'.Xulun. E^les sont sotis la juridiction
de l'évéque de Bâie, et sont collatrices d'en-
viron quinze cures, dont elles tirent de gros-
ses décimes, tant en grain qu'en vin. Leur
habillement, qui est noir, est semblable à
celui drs séculières. Elles on' au diccur un
luauleau traînant à terre, et leur coilTurc c>t
particulière, comme on le peut voir dans la
iigurc que nous eu avons fait graver sur le
dessin qu'elles nous ont envoyé avec les mé-
moires concernant leur abbaye (1). 11 y a en-
rore quelques autres monastères de iîénéJic-
tines, fondés environ dans le mé.ue temps et
dans le même pays; mais, comme elles ont
secoué le joug de la règle de saint llenojt
pour se séculariser , nous en parlerons aux
articles qui portent les différents noms sous
lesquels elles sont présenleeicut désignées,
tant de celles qui ont conservé la foi que do
celles qui ont embrassé l'hérésie.
Voyez ^'incenl liaral. Chronol. insul. Liri-
nenfis. Saine .Marlhe, Gull. Ckri^l., loin. \V.
Dulleau, llist. de Vord.^de Saint- Renoll. Ma-
billoii. Annal. Bened. Fleury, Ilist. ccclés.,
tom. V el VI ; cl le Uicl. hist. de .Moréry.
Xola. Il y a quobiues années, il fut qu' s-
lion de raiheler l'ile célèbre de Lérins, qui
fut mise en Vv-iite. L'évé(iue do Fréjus, iio-
nobslant la modicité du prix demandé (30,000
francs, ilil-on) el ses bous désirs, ne put fai:e,
racq.iisiiion do ce li>'u donl le souvenir est
si cher à la religion el aux lettres, et qu'il
eût probablemeul enrichi de (juelque élablis-
sement pieux. B-d-e.
LÉ\ IllEil (Ckevaliers m) nu duché de Bar.
L'an l'ilti, plusieurs seigneurs du duché do
Bar s'uiiireul (useinble el formèrent une so-
ciété dont la marque était un lévrier ayant à
son cou un collier où étaient érrils ces mois
tout un, qu'ils devaient porter. Ils priimireiil
de s'aimer les uns Us autres , de garder leur
parob', de defiiidre celui d'entre eux donl ils
ent'ndraieui dire du mal, et de l'en avertir.
Tous les ans ils élis lient entre eux un rni, ( t
s'assemblaient au ino s de novembre, le jour
de saint .Martin, el au mois d'.ivril, le jour ilo
saint tieorges ; et, si qudcpi'un avait fait
(luelque faute , il eu était repris pir le mi et
par cinq ou six autres de 1 1 société. Ils de-
vaient se trouver à ces assemblées sous peine
(«) Vuy.,!. la (i-dii vo'., n" l'JI
777
LFV
!.EV
"7S
d'un marc d'nrgonl, à moins qu'ils n'eXjsscnt
une cxcust! légitime. Personne ne pouvait
(■Ire reçu dans i.i compagnie que par le roi cl
huU oii'dix (les plus dislinpués, ri avec r.iRré-
inenl du duc de Bar, qui promit de |)rolcgcr
et d'aider ces chevaliers du toutes ses forces.
Si quelqu'un faisait tort ou causait quelque
donima;;e à l'un de ces cheva'iers , celui qui
avait élé offensé devait en demander ju^licc
;iu duc de lîar, s'il élail son sujet, cl, ^'i\ ne
l'était pas, il dtv..i' la demander à son sei-
{jneur naturel, avant que de venir aux voies
de fait ; et, en cas de refus, ils étaient obliges
de prendre la défense de celui cjui avait reçu
(!u dommage, comme il est plus amplement
spécifié d-uis les letires de l'établissement de
cette société, dont voici la teneur :
A lotis ceux qui res présentes lettres ver-
ront. Nous TInbaul de Btumont, PliUberl,sci-
(jneitr l'e Bejlroynv nt, Eustaclie de Conpans,
hichnrd de llernioises, Pierre de lieffrotjmont,
feigneur de Jiuf/în, Régnant dti Chastelcl ,
f.vrard du Chaslelct son fîls, Mansart de
Sus, Jeun, seigneur d'Orne, Phili/ipes de No-
reroy, Ovy de tendes, Jean de Laire, Jean de
Scroncou! t, lùiarl d'Oultcngcr,Jcan de Bef-
iroymont , seigneur de Sonloi<, Jean de Ma-
ineiz, et Joffroij de JUtssompiire, chevaliers,
Jean, seigneur de Tlodemnrs, Robert de Sar-
rebruche, seigneur de Commercy, Edouard de
drandprey, Henry de Breul, Mery de la Vaux,
Jeaffroy d'Aspremont , Jean des llernioises ,
Robert des Ilermoises, Simon des Uermoises,
Frangue de Leuze, Aubry de Boulanges, Hen-
ry Despeneaut, François de Xorbey, Jean de
Lou, Hugues de Mandres, Ilnarl de Mun-
dres, Philibert de Doncourt, Jeun de Sampi-
gny. Colin de Sampigny, Arnoul de Sampi-
gny, Alardin de Monsey, Hanse de NcU'lin,
tedrand Richard d'Aspremont, Thierry d'An-
nols, Thomas d'Ouiunges, Juguenin de Nicty,
et Jagueninde Villars, e.<CH!/(rs,s dut. Sçavoir
faisons gue,nous ngnrdans cl désirons vivre c7i
honneur et en paix, avons avi'C que nous fe-
rons ensemble une comjiagnie durant l'espace
de cinq ans entiers, comincvçnns <) la dalle ds
présentes : c'est à scacoir que nous lous dessus
nommez avons juré aux saints Evangiles de
Dirti, et sur nos lionnrurs, que nous nous ai-
merons et porterons fuy et loyauté les uns en-
vers les autres, et se nous sçarons le mal ou,
domcge l'un de l'autre, que nous le détourbe-
rons à nos pouvoirs, et le ferons sçavoir les
uns aux autres, ledit lems durant, et cette
priseiite alliance et compagnie avi:ns jwc en-
vêts tous cl contre tous, excepté nos seigneurs
naturels et nos amis charnels, et durera cinq
ans entiers, comme dit est, et se nul cou-
lait quelque chose demander et re.jucrir, nous
en venriDUs à jour cl à droit pardevani notre
Ires R. P. en Dieu, nuire trcs redouté seigne ir
le cardinal duc de Bar, 7narquis du Pont, se-
gneur de Cassel, lequel notredil seigneur n^ius
u promis loyaumenl en parole de principie de
nous ailler et conforter de toute sa puissance
et de son pays et de toutes les choses dessus,
envers cl contre tous ceux qui à jour et à droit
ne voulront vinir là où il apport ienldroit
par raison, et frons un roi de cette eompa-
Dicr.'ONNAinE de* Orores rf.i.igifux. U
gnie, qui durera tm an entier, et nous tous
qui serons de cette compagnie, porterons un
Lévrier qui aura en son col un collet, auquel
sera escript, Tout ung, it tous les ans lien'
rons deux journées, la première à la Saint-
Martin d'yvcr, et l'autre à la Saint-Georges
en avril, pour sratoir s'il y aurait aucune
foule en ladite compagnie ; et se aucune faute
il y aroit, elle seroil anmndée par le roy et par
six des autres alliez, et conveni a que chacun
soit auxdilcs journées, sous paine de payer un
marc d'argent, auxquelles journées on devrait
envoyer se on avait excusation , soy excuser
et payer sa part des dépens, et se tenra la pre-
mière journée à Suint-Michel , cl ne peut on
mettre aucun en cette compagnie que ce ne soit
p.r l'ordonnance de mondit seigneur, et par
le roi d'icelle, ensemble huit ou dix des plus
grands d'icelle, lesqttels seront nommez es let-
tres de celuy qui sera commis pour sçavoir
ceux qu'ils auroient élu. lit se aucun faisait
tort ou domage à l'un de cette compagnie , il
devrait requérir notredil seigneur qu'il l'eul
à jour et à droit s'il estait son sujet, et s'il
v'esioit son sujet , devra re/uerir le seigneur
de qu'il serot sujet qu'il l'eul à jour et A droit
devant que on fit œuvre de fuit, et en cas de
refus, notredil i-eigninir dcvr<dt aller la com-
pagnie jus:^xies à droit, lit nous tous serons
lenuf de servir à nos dépens celui à qui en fe-
rait domajc, gui ainsi aurait requis tant que
le pays du duché de Bar et marquisat du Pont
durant et pour le lems avenir: car se para-
vent la dalle des p' esentes, ou paravent ce que
aucun fui mis de celle compagnie aucune
guerre esloil commencée, nous ne serons point
tenus d'en aider l'un l'autre, comme dit est
par la manière qui s'ensuit : c'est à sçavoir un
bannerct à tr is hon.mes d'armes , un simple
chevalier <) deux , et tin escttger à ung , huit
jours après que celui à qui on ferait domage
l'auroil fit sçavoir au roy de celte compa-
gnie, et que ledit roi en aurait recjuis ; et se
plus grand force y convenait ou se devioit
renforcer au regard du roy et de six de ladite
compagnie, et tîntes ces dites alliincvs, nous
tous avons faites et pissées p ir le cousenlc-
ment dudit seigneur cl en sa présence , et ice-
luy notredil seigneur nous a promis qtte se
nous avions delml les uns aux autres de nous
oir et garder te droit de chacune partie sans
Inngs procès, comme bon seigneur doit faire
à ses sujets, et nous lui devons garder son
bien, étal et honneur et proffil de taules nos
ptiissarices, comme bons vassaux doivent faire
à leurs bous seigneurs , sans feinlise ne enlre-
pos aucun, et ne p ttrra aucun de celle com-
pagnie prendre ne accepter aucune autre com-
jiagnie ou alliance au préjudice de cette roi/i-
pagnie Icellc durant, sinon pur la volonté et
consentement de notredil seigneur. L'n le-
moing de ce nous tous avons mis nos scels à
res présentes, et avons i-upplié et requis notre
dit seigneur gue pour plus grande approba-
tion de celle luy plut mettre son scel à ces
présentes. El nous Loys par la grâce de Dieu
cardinal duc de Bar, marquis de Pont , sei^
gneur de Cassel, èi la requesie des dessus nom»
mcz, avons fut mettre notre scel à ces pr»?-
23
770
Mr.TiONNMRF. tiF.s or.ruF.s r.F.i.ir.iri'x.
781
unies. Donnt' ù Bnr le derraiit jour de mny
l'on UIG.
(.'ommunic/H-! pnr M. de Clc'rambaul.
LIND.WV. Voij. Cologne.
LION (CllEVALIEI-.S Dl)
Des chevaliers dis or.hrs du Lion et de la
Couronne eu France.
Engucrrnnd !"■, seigneur de Coiicy, qiii
vivait en lOSO, ajcinllué un lion dans la fo-
icl d'î Coucy qui Taisait beaui-nup de ravasics
aux envir.ms , pour en ((msuivcr la nirtuoire
l'on fil faire en pierre la fi;;iiic de ce lion,
«inc Ton pla a dans i.i eour du i-li.Uraii de
Coucy, cl Ton institua des fêles el des réjouis-
sances (|ui se renouvelaient tous les ans; et
les fondateurs de l'al(ba\e de Nogeni , qui
éiaient de la maison de Coecy , obligèrent
l'abbé de ce monastère d'ollVirclu pain et des
l'.ssub s nu seigneur de Coucy dans la cour
où ce lion était placé ; ce qui se faisait de la
manière suivante. Avant que do présenter ce
pain et ces rissoles, l'abbé était oliligé, re-
vêlud'un liab t de la!)oureur,a\en un srmnir,
et monté sur un cheva! liarnaciié comme
pour aller au labour, de fairi' plusieurs tours
dans la cour, en faisjat cla(|ucr un fouet
qii'il tenait à la main On viitait ensuite son
équipiîge pour voir s'il était ci bon étal, cl
si l'un trouvait qu'il manquât se iletnent un
clou aux fers du cheval, il était confisqué ,
après quoi l'ablié é:a l reçu à faire ses pré-
sents : ce qui se léilérait trois (ois l'an, aut
fêtes de Noél , de l'aqiies, et de la Sain'-.lean-
Haptiste. Lalouèle, qui a fait en lo76 l'his-
toire {;énéa!ogi(|ue de la mai.-.oa de Coucy ,
ilu avoir vu celte cérémonie, qui s'observe
encore à présent avec d'autres circonstances,
que cet auteur a omises, et qui consislent
en ce que ce n'est plus l'aiibé qui rend (et
h'inimage en personne , se contentant d'y
(Mnoyer un des officiers de l'abbaye, (]ui a
dans son!Cmoir une certaine quantité de blé,
et qui mène avec lui un chien (|ui a deux ris-
soles à son cou. S'il les £;àte ou les mange,
i]uil fasse ses ordures dans 1 1 place et le
cheval aus-i, l'abbé est condamné cà une
amende. Celui qui rend l'hommage embras e
aussi deux lions de pierre (jui sont à la poile
de riiô'cl de ville , où l'on a transiiorlé celui
qui étaitdans la cour da château. Cet homma};e
se rend présentement dans la place de la
ville.
Lalouèle ajoute que ce fut à l'occasion de
celle action d'Iùiguerraiid I"' qu." fut institué
l'ordre du Lion, (lu'lùiguerrand il renouvela
au commencement du règne de saint l^ouis,
rommc Itellefurél l'a remarqué dans son His-
toire de France; ce qu'il fil avec une magni-
ficence royale, mais il y a plus d'apparence
que ce seigneur a été l'instituteur de cet
ordre. L'on donnail pour niari]uc à ceux qui
y entraient une médaille d'or où était repre-
senic un lion.
Il y a eu encore un autre ordre sous le
nom de la l>)uronne, (lui a été institué par
Knguerrand Vil, seigneur de Coucy et comte
de SoissoDSj dont il est fait nienliun dans des
lettres de conlirmalion que Louis, duc d'Or-
léans, accorda aux l'éres Célestins de Ville-
neuve, après qu'il cul acheté la terre de
Coucy et le comté de Soissons. (les lettre ,
qui sont insérées dans un cartulairc de la
Chambre des Comptes de Ulois de l'an 139J,
fol. '3ï v°, comnii'ncent ainsi :
Loys fils de roi de France, duc d'Orléans,
comle de lllois, de lieuumont il de Soissons
et seigneur de Cuuci/, sçaioir faisons à tons
présents et avenr. Nous avons ru tes hitr.t
de notre cher aine coustn tnessire Enyuerrand,
jadis seigneur de Coucy et comte de Soissons,
contenant la forme ifui s'ensuit. Enguerrain,
sire de Cuun/, comte de Soissons et baron de
Marie, sçavoir faisons el tous pre.^ens et ave-
nir, qu" nous considérons que le p'icrinnge et
les biens temporels et mondains de cette vie
transitoire, sont ordonnés à un cliaruin qui
bien en veut et sccl user, à édifier it faite
trésor envers Dieu qui tous biens apprrstrz
mius par vrai/e dévotion en honneur de Dieu
le Père, le Fils et le Sainl-Esj)rit, un Dieu
vrnyt^ et sainte Trinité, île 1 1 glorieuse \'icrye
Marie, de tous les saints et saintes de paradis,
et pour avoir prières perpeiuelli s pour »io«<,
vos devanciirs et successeurs de notre 1res
dure et eimce compagne Isabel de Lorraine à
présent notre femme, pour tous les checnlie's
et dames les ecuiers el damoiselles qui uni
(Sic, sont el seront de noire ordre de la ("ou-
ronne, pour la singulière awour el affection
que nous avons envers la dévale et tainte ordre
des Celeslins cl Inccroissement et augmenta-
tion du service dii in, pour consacrer le corj s
de Xoire Seigneur en suint sucrement de l'au-
tel, que il par su grwe ordonna à faire en la
remembrance el commémoration de lui. de sa
sainte digne mort el passion qu'il voult so of-
frir pour tous les chrétiens, et pour eslre ac-
compagnez à tous les Lien faits de charité, de
prière, el de dévotion ijui ont esté, sont et se-
ront faits pur lesdils religieux de ladite ordre
des Ccleslin-^, eslre fait et construit, édifié ci
islulliaa lieu el en la place de nolie ma s lU
de Villeneuve auprez Soissoiis, i te. (!elle loii-
dution est du 2;! avril liJ'JO, et les lettres du
duc d'Orléans sont données à lieauté-sur-
.Mariie, au mois de noveaibre l'iO'i. Il si;
trouve un sceau d(î ce prince a la Chanlire
d;^s C- mptes (le lîlois, où il est représenté à
cheval ayant une couronne renversée atta-
chée au bras droit à une courroie passée dans
une boucle. L'tm voit aussi ses armes an
château de lilois et à l'hôtel de ville, au
b.is desquelles il y a aussi une couronne ren-
versée. Cette couronne pourrait être la mar-
iiue de l'ordre de la Couronne insiiiué |iar
l.nguerranil de Coui y, que le duc d'Orle.ms
aurait conservé élant devi nu seigneur do
Coucy et de Soissons.
Mémoires communiqués par M. de Clai-
ramliaud.
LIONNÎÎ ( Ctii;vALii;iis ne i.a). Vog. Ciiois-
SANT.
LIS (CuKVAi.iBiis nu), dans les royaumes de
Mavari e el d'Aragon,
Si nous voulons ajouter foi à l'avili, à
781 LIO MO 7f??
l'abbé Giustininni cl à quelques aulres au- finicias él.iit mnl.iile lorsque coltc image (ut
leurs, Garcias VI, roi de Navarre, inslilua trouvée. Il y a il'aulrcs auleurs qui disent
l'onire du Lis. Ce prince, selon ce que di- encore (lue ce no fut point ce prince qui in-
seiil CCS auleurs, cUint tombé dangereuse- slilna cet OMlre, mais son père, Sauclie le
meut malade l'an 10V8, envoya à Sainl-S;iu- Grand, l'un I02o. ils ne conviennent point
veur di- Lcira et à quol(|uo3 autres lieux de non plus sur la marque qui distingu.iit ces
dévotion faire îles prières cl des vœux ]iour chevaliers. Favin, (ommu nous avons dil,
le recouvrement de sa sanlé. En effet, il la prétend qu'ils portaient un lis d'argent on
recouvra, el ce qu'il crut y avoir le plus roii- broilerie, cl que le cdlier était c niposé d'un(!
Iribué fut la dévotion qu'il eut à une imago double chiiue cnirelacée d'iM gothiques, au
iiiiracuieiise de la saiule Vierge, sf.rl.uU d'un bout duquel pendait une mcdaillo dius la-
lis et tenant son Fils entre ses bras, qui fut quelle il y avait un l's siirniontô d'une M go-
Irouvéodans le tnéme tem|is à Nagera, où tliiqui- couronnée. Yépèz dit que ce collier
il lenait ordinairement sa cour et où il avait était composé de chaînes d'or el d'argeni, au
toujours demeuré dès sa jeunesse : ce qui bout du(iucl il y avait un vase p'ein de lis,
lui fit donner le surnom de Xagern. C'e.t cl que Von nomma cet ortirc de la Tennçn
ponr(|Uoi, la rncnie année !0i8, il fit bâlii en ou du Vase de Lis, à cause (jne 1- roi de Na-
aclion de giàccs une église iriagnifi lue q'se varrc trouva aussi uii va<e plein de lis à cô'é
l'on appelle aujourd'hui Sainte-Marie- la- di! l'imjge de la sai^ite Vierge. Michieli et Ij
lioyale de Nagera, qu'il accompagna d'unsu- I'. Mcudo, (jui sont deux^utres auteurs es-
perhc monastère, où il mit dss moines de pagnols, ilisent que ces chevaliers portaient
l'ordre de Saint-Heniil. Non content de cela, sur un habit blanc l'imnge de l'.Vnnonciation
etpour lémoignerdavaiitagc la ilcvotioii qu'il du la sainte Vierge entre dcu\ lis. Vépèz
i;ortail à la j.ainlc X'ierge, il institua en son aj mie ijue cet ordre fui éteint après la mort
lionneur un ordre militaire sous le nom de de Gircias ^"I, son inslitiiteur, et Favin pré-
Sninle-Maric du Lis, dont il retint pour lui lend qu'il fui beaucoup lloriss.inl sous ses
(t pour ses successeurs la qualité de chef et successeurs. Ces coiil rai iéti^s qui setiouveiit
de grand maître. Cet onlre éiait composé dj entre ces auteurs, qui n'apportent aucun li-
Ireiite-huit chevaliers, tous genlilhomuies ti- Ire ni aucun témoignage pour appuyer Icuis
rés de rancienn(' nolilss" de liiscaye, de la sentiments, nous portent à ne rien croire de c<',
Vieille-Caslilie et de la Navarre, qui en le re- (lu'ils disent, clanl persuadés d'ailleurs qu'il
cevani faisaient vœu cl serment solennel en- n'y a eu aucun ordre militaire avant le xir
Ire les mains du roi d'exposer leurs vies cl s'ècle. Aiusi,ni Sanche let^rand ni Garcias\ 1
leurs personnes pour la conservation de la n'ont point été les ins:i ulcurs de cet ordre :
couronne de Naviirre et l'expulsion des et, s'il a subsisté, il ne peut avoir éié fon lé
Maures. Chaque chevalier portail sur l'es- que par quelques-uns do leurs successeurs,
tomac un lis d'atgerit en hroderio, cl aux tans (ju'on sache en quel temps il a com-
jours solennels une chaîne d'or entrelacée moiué. il a eu le même sort de plusieurs
de lettres M golhi(|ues, au bas de l.iquelle aulres qui ont été abolis: ce qui n'a pas cni-
pendait une médaille d'or en ovale où était péché l'abbé (iiusiîniani el Shoonebecii du
un lis ém.iillé de blanc sortini d'une terrasse dire que les rois de France et d Espagne s'at-
el surmonté d'une M gothique couronnée, tribnent chacun la qualité de grand maîlr.i
ils étaient tenus de dire lous les jours cer- de cet ordre ; el Giustiniani a même donné
laines prières (jui leur furent prescrites, une chronologie de ses grands maîtres, qui
a\ec une règle, parles moines <lu monas- commence à Garcias VI, roi de Navarre, et
1ère de Sainle-Maric-la-ltoyale de Nagera, finit à Louis XIV, roi de France, ronjointc-
Selon le même Favin, cet ordre a clé lloris- ment avec Chai les il, roi d'Espagne,
saiit sous les successeursdeGarcias VI, et on II y a bien de l'apparence que cet ordre du
voit encore leurs effigies, aussi bien que celles Lis, qur l'on prétend avoir été institué dans
de [ilusieurs chevaliers de cet ordre, lant au- le royaume de Navarre, est le même que c(;-
dit Nagera qu'à Saint-Sauveur de Leira, à lui du Vase de Lis de la sainie V ierge insti-
Saint Je in-IJai'tiste de 1,1 Hoche, au monas- tué pir Ferdinand, infant de Ca=lille sur-
lère de Bonc vaux, en ré.;;lise cathédrale de nommé d'Anliguera, pour avoirconquiscelle
Pampeluue, et en d'aulres lieux, avec le col- [race sur les Maures !'an 1410. Il y a des
lier de l'ordre. écrivains espagnols t|ui prélendenl que ce
il est vrai qu'Yépèz, dans sa Ciironique de prince ne fil que renouveler celui ilu Lis, qui.
l'Ordre do Saint-Benoît, parlant du monas- selon eus, avait élé institué (lar Garcias \ I
1ère de Sainte-Marie-la-Koyale de N.igcra, et qui fui éteint par sa mort. Jérôme Komau,
dit aussi que Garci is VI, après avoir fait bâ- cilé par Yépèz, est de ic nombre, et met l'in-
lir ce monasière, institua un ordre militaire; siluliou de celui du Vase de Lis par rinlaut
mais il dit que ce fui l'oidre de la Terrant, de Caslille l'an iW.i, prétendant que le mo-
(lu du Vase du Lis, el en n)ct la fondation, t.f qui porta ce prince à l'iiisliiuer fut la dc-
aussî bien que celle du monastère, l'an 10o2. volion qu'il portait à la sainte Vierge, el que
Le motif qui porta ce prince à faire ces deux ci' fut le jour de son assomption qu'il fit des
fondations, selon cet auteur, fut la dceou- chevaliers do cet ordre dans la ville de iMe-
verte qu'il fit dans ce temps-là d'une image dîna del Cauipo. .Mais le titre de roi que cet
de la Vierge; mais ce fut étant ait chasse auteur attribue à ce prince donne lieu de
qu'il trouva celle image, circonslance qui croire que cet ordre ne pool pas avoir été
ue convient point à ce que dit Favin, que iuslilué l'an ÎVO'J, puisqii'il ne fut élu roi
TS5 niC.TlONNAIRF. DES ORDRES REI.If.lElX. 7S*
«l'Arngon qu'en lilO. Ceux qui ont ilil que pico, cl cmnniil M. Paquior Bourré, préiro,
iT fut l'an l'tl.l se sont aussi liomiés, \im<- nailf de Saiiil-Cicrniain-siir-Indrc proche
que Miviiiia (Ici Campo, dû se fil celle iiisli- !.(>( lies , pour adiuiiiislr.ileiir spiriliiol cl
luIiiMi, csl de la Nieille-Ca'^tille. qui appar- temporel de rel liôpilal naissant. Ce bon pré-
lenail à Henri III , roi de Ca^tilll•, frère de tre y dimna ccnl sols de rente, el, pour le
Ferdinand. Ainsi, il y a hien de rapparencc surplus de lenlrelien di-s rel pieuses et îles
que re dernier, ayant ét^ élu roi d"Arag<in pauvres, il se donnait lui-inèmc la poiiic
en IVIO, lit la réreinnnie de l'iuslilulion do d'aller quélcr de maison en maison,
e. I ordre dans la ^ ille de .Médina del Canipo, j/q,, fit ^^^i^ y^^ 1C20 une religieuse de
..n II a»a.t p; is nnissiinre etfaisa.l son séjour l'Hôtel-Dieu de Paris pour elal.lir la réi-ula-
ordmaire.lorsqu .1 fui fa.l roi. Ara;;on. Quoi ,(,5 d;,,,^ ^^^ |,opit,.|. K!le y donna ri.ab.( a
.|ni|ensou.l,.npret,ndquelccollicrdecrt ,r„is fiUps ; mais étant n.orle a>anl quelles
ordre était compose de vases remplis de lis rus,enl lini leur année de nrobaliou. Tar-
.•nircl.ice de priiïoMS. au bout duquel pea- chevèquc de Tours y envoNa do i'b.Mel-Dieu
da.l une médaille du elail I image de la sainte ,|,, (.,1,^ .j ^^ „„y .,,^1^^ ,-,ii;,Mouse qui recul
'C-^"*^, ' '/., • j , ^, , . , „ . ït'ur profession, el s'en retourna ensuile à
j epez, ( lironica de la Orclcn ne Snu-Beniln. 'fours
ra> iu. llistoire de \m<irre et Thédlre d'hon- Lc zèle de ces nouvelles professes à sen ir
"enretde chcialcne. Le P. Anse me. Le Pa~ i^, pauvres alliranl une inlinilé de malades
Inn de t honneur Mcnnen.us, Helinœ e/uesl. ,,.,„s ^^j ,,5 ji,.,, , j j^.y^ p,.i,i nombre n'e-
'''■.''••^'=''.!:.-^''^"'^^'' ^;: ^'f- ""'"; ^o^^P'i ^'': lanl pas sulfisanl pour résister au travail el
einelli, y^«or. m ,1. de carnier Bernaid ., ,3 f.iii.uc, l'arclievéque de Tours, qui
(..u.l.n:ani //,^^ ,/, /„^/. ^/. 0,Y/. mi/,/. et av.iit permis col élabiisscmenl, consenlil
Sfdooucbeck, Ihst. des Ord. nulitairts. n,,^,; ,j„p ^..^ religieuses reçussent un p'iis
LIVONIE f Chevaliers de). Voy. Tivro- f^""'"»') "ombre de fille*. Il s'en prés nlail
MQi E. beaucoup, mais li; terrain trop resserre qu'el-
les occupaient élail un obstacle à la réce|)-
LOCIlI.i? (UEiiGiELSiis UosriTALu'-nES Dic} lion .les filles qui se présenlaient ; c'est
et attlies du mène insliiul. pourquoi le roi accorda deux arpenis de pré
I.a ville (le I.nclies en Touraine, située sur d.sns la prairie qu on luimme encore aujoin-
rindre , à sept lieues d'Amboise cl dix de dhui la pr.iirie du Roi, afin de pouvoir
Tours, a donné nais'^aiire à dis icligienses agrandir les bâlimenls ; el parce moyen celle
liospilalières qui ont f.iil p'usieurs établisse- maison ayant été augmeniée (st devenue
iiieiiîs en France. L'iiôpital ou liôlel-Uxu plus coniniode, ayant une église, un cbœur
<I<; 1,01 lies doit en quelijue manière son é:a- cl tous Ics'ieux réguliers qui ron viennent aux
biisscment à la sœur Susanne l)uboi<, reli- maisons religieuses, principalemenl à celles
i;ieusc de riiotel-Dieii de Seulis. Nous ne où l'on exerce Ibospilalitc.
sa\ons point les raisons <iui l'olilicèrenl d'al- L'exacliliide avec laquelle elles observè-
ler à Loches; mais, y éi.ml arri\ée, elle se mil ia règh de saint Augustin et les consii-
r. lira dans un hospice proche les Cordciicrs, lulions qui leur furent presciiles leur ac-
tuelle recevait les pauvres, qu'elle faisait quirenl b aucoup île ié,:ulation, ce qui les
coucher sur la paille el auxquels elle don- (il sonl:ailiT dans plusieurs villes du rojau-
ii.iit senlemenl le couverl, ne vivant elle- me. Les premières qui eu demandèrent fu-
inéme qu'avec beaucoup de peine <les aum(5- renl celles de t'Iermonl el de Uiom en Au-
nes queUs personnes dévoies lui envoyaient vergue, oij .M. Itiurrc mena des religieuses
(liaque •cinaine. pour y faire d( s élablissen-.enls. Il sortit eii-
l.e maire el les éclievins de la ville, éd fiés suile d'antres religieuses de l'hôpilal de
delà cliariié que ccl!c bonne sœur exerça t (.'criiioul pour fomler ceux d'Arles el do
envers les pauvr.s, prièrent le cardnal de (îuérel. L'uôpital di' Kiom fonda aussi celui
ta lUicbefoucaull , évéque de ï^enlis. de per- de la Palisse, et l'hôpital de la Palisse c<lui de
mettre à la sœur Susannc de s'établir à Lo- (Irenoble. Il se fit enc re d'autres éialdi.sse-
I lies. Ce prélat y (onseiilil, à condiiion qu'elle inenls à Amboise, à Cliinon, à P>iitiers, .1
V iviail en coinn.uiiau;é avec d'autres lilles Niort, à \'ierzon,à Aubigny,à Heauciire et on
qui f,>raient comme elle piofession de la ré- d'autres lieux, jusqu'au iiombri- de dix-huit,
pic de saint Augustin, ainsi qu'il csl porté Ces religieuses, outre les Vicui de p.iu-
i)ar l'obédience que celle Linincnce lui en- vrclé, de cliaslelé cl d'obéissance, en font
voya le li juillet lOU. un iiualrièmede ser»ir les pauvres sous clô-
La "■friir Susanne étant jnoric l'an 1G2G, lure. Files disent tous les jnurs au clnrur lo
le iluc d'Iîpernon , gouverneur cl seigneur pelil office de la ^"ierge, cl font mémoire des
engagisle de Loches. >e joignit au maire el létes qui arrivent selon lOrdre du bréviaire
;iin cchcvins de celle ville pour demander à romain. Aux fêles annuelles, à celles île No-
'jcrirand Dcsdiaud, archevêque de Tours, Ire-Seigneur, de 1 1 sainte Vierge, et de pln-
i'élaldissemeiii d'un monaslcrc de religiru- ^ieurs autres de l'ordre de Saint-Augustin,
ses liospilalières dans Ihospicc où la sœ r (ommc aussi à celles des patrons parlicu-
Snsaniie avait demeuré. (>e prélat accocila liers de leurs hôpitaux, elles disent le grand
i<'iir demande , il ruiisentil que le s lint sa- oflie du bréviaire romain,
crenient fùl gardé dans la chapelle de l'ho;- i:i!is font abstinence tons le; mi rcrcdif et
II) Vty., à la lui du vol., n' |!I2.
pctiil.iiii l'avciil, qu'iPos commciK ciil ;iu 2*
novembre, iillcsjcûneni tous les vciiiiredis do
l'année, les veilles dC'i foies de Notre-Sei-
giicur eldc leurs p.Urons. Elles prennent la
disripline une fois li sciii;iiiie, font oraison
mentale soir et malin, et tous les ans elles
renouvellent leurs vœux le jour de la Pré-
sentation de la sainte Vierge au temple,
après s'y être préparées par une retraite de
trois jours, qu'elles l'ont aussi pendant la se-
maine sainte, trois jours avant les fêtes de
la p. ntecôte et quelques autres jours de
l'année.
Leur habillement ordinaire consiste en
une robe de scr^e blanciie serrée d'une ceiu-
lure de tuir, et un scapulaire blanc. Les
jours des grandes fêtes, auxque's on dit le
bréviaire romain, elles portent une robe
noire, et encore les jours de rcrémonies,
comme de véturcs et de professiDns, avec la
«einturedecuirsans scapulaire et un crucifix
au côté gauche passé d ins la ceinture de
fuir (1). Llles sont enterrées ave une robe
noiie, et on leur met la couronne d'épines
qu'elles ont portée le jour de leur profession.
Leur coilTurc est à peu près semblable à
telle des au res religieuses, si ce n'i si qu'el-
les ont un double b.indeau et une guimpe
carrée, et que les jours de communion, du
cli.ipiire des coulpcs, de l'élection de la su-
périeure et au'rcs cérémonies, elles portent
des voiles de deux aunes cl demie de long
qui traînent jusiju'à terre (2). La vélure et
la profession se font avec 1 habit noir , et le
lendemain elles prennent le blanc. Les sœurs
converses portent des voiles de toile nuire,
des rochels pcniiaiil l'été, et pendant l'hiver
la robe blaiiclu- (3). Elles ne portent jamuis
l'habit noir qu'à leur vèture et à leur pro-
fession, el elles sont enterrées aussi av> c
l'habit noir et la couronne U'épines, tomme
les religieuses du chœur.
Il y a néanmoins des hôpitaux, comme
dans ceux de Cicrmont, de Iliom, et les au-
tres du d;orèse de Clermont, où les religieu-
ses portent des rochels sur leurs habits blancs
pendant l'été, el oîi les sœurs converses
sonl ha'.iillées comme les religieuses du
tliipur, n'étant dislini;uées que par un
voile lilanc qu'elles portent toiljour-i. Les
religieuses de ce diocèse ont des constitu-
tions jiarticulières, qui ont été approuvées
l'an UDl, par M. François Bochart, cvcque
do Clermont, et imprimées à Paris la même
année.
Mémoires envoyés de Loches en 1712, et
li's constilulions de la cungrégution des reli-
gieuses Hospitalières de l'ordre de Saint-Au-
g us lin.
LOMBAUDIE. Voy. Augustins.
LOMBAllDIE. Voy. JiiiiÙME (Ermites de
Saint-).
LOMBARDIE (Dominicains de i.a congiiÉga-
TioN DK ) et de plusieurs réformes faites
dans l'ordre des Frères Prêcheurs, sous le
(1) Vuij., à 1.1 lin (lu vul., u"» lyû et 19i.
l'i) Voy., ibid., Il" l'Jo.
LOM
730
nom de congrégations, gouvernées par des
vicaires généraux.
L'ordre de Saint-Dominique, non plus que
la plupart des autres ordres, n'a pas pu se
garantir du relâchement. Quelques couvents
s'étant éloignés de l'observance régulière, les
généraux ont employé leur autorité pour la
rétablir et la faire observer. Mais le premier
de ces généraux à qui l'on peut donner le ti-
tre de réformateur de cet ordre est le bien-
heureux Conrad de Prusse ,qui vers l'an 138!)
fut le réparateur de l'obseï v.incc régulièri;
dans tous les couvents d'Allemagne, d'où elle,
avait été bannie dès l'an 13i'J, lorsque la
peste fil de si grands ravages dans la plupart
dos provinces, que presque toutes les villes
étaient désertes el inhabitées. .\ son imitation,
le bienheureux Barihé'pmy de Saint-Domi-
nique de Sienne, qni fut dans la suite évo-
que dcCorlonne, fut le réformateur des cou-
vents d'Italie vers l'an l'i02. Le P. Barthélé-
my Texier, Français, général de cet ordre,
animé du même zèle, employa son autorité
pour maintenir l'observance régulière dans
tous les couvcnls, el y portait le^ religieux
par son exemple; ce fut lui qui inslitua l;i
tongrégaliou d'Aragon, (jui a subsisté pen-
dant 01 ans.
Une des plus considérabK'S rérormes fut
celle de la congrégation de Lomb .rdic, qui
fut commencée vers l'an l'ilS par le 1*.
Matthieu Boniparti de N ivare, qui pour la
sainteté de sa vie fui choisi par le p;ipo pour
remjjlir le siège épiscopal de Manloue. Lo
P. Joachim Turriani, trente ciiuiuiJme géné-
ral, lui accorda beaucoup de privilèges ; ello
fut néanmoins démembrée sous sou gouver-
nement, el on lui ôla les couvents de Rome,
de Pise, de Saint-Géaiii:ien , de Vilerbe, do
Sienne et Saint-Marc de Florence, pour les
unir à u.'ic nouvelle reforme sous le nom de
congrégaliou de Toscane, commencée l'an
ri-93 par les soins do Jérôme Savonarollo,
dont la fin a été si malhi un-usc. 11 naquit à
Ferrare sur la fin du xv^ siècle; il avait Le m-
coup d'éloquence et de piété, et fui l'un d's
plus habiles prédicateurs de si;ii temps. Il prê-
cha avec trop de véhémence contre la con-
duite du papii Alexandre VI, la chaire lui fut
interdite, mais il ne laissa pas de parler avec;
la même liberté; de sorte qu'ajant été pris a
ràgedequaraii!c-sisans,il fut pendu et brûlcî
avec doux de ses compagnons à Florence,
dans une sédition suscitée par ses ennemis
le 23 mai 1W8. Cette congrégation ne dura
que cinq ans séparée de colle de Lombardie ;
car après la mort de SavonaroUe cUo se réu-
nit à celle de Lombardie, qui subsista jus-
qu'en l'an 1531 , que , sous le généralal d«
Paul Boltigella de Pavie, qui en avait clé
deux fois vicaire général, elle fut éteinte ei.
érigée en province par autorité du papo Clé-
ment VII, qui abolit aussi la congrégation
de Calabre el l'érigea pareilleinenî en pro-
vince.
Une aulrc réforme avait commencé en
(i) Voy., ibid., u" l'JO.
7;7 DlCTIONNAinF, Dl-S OUDIiES UEi.IClIllJX. 788
HoUamJi' sons le premier uéncralal de Mar- o i ilc I!reln;;ne, dans la province de Paris,
liai Auribcllc de ProvcHie, cl coniiircnail qui a ijualorze coiiveii(s; la coiifçréijaliou
Yiiipt-liuil niaisoMs, doiil ihk'I (lies- unes des \nges en Provence, qui a si\ tduveiits ;
avaieiit élc «ousliaiics de la c iigrégalion de la eon;;réLralioii d'Al.saio, qui a (|ualre cou-
Loinbardie, qui avaient fornic une Cdiigréîa- vents d'hommes et iiuit monastères île filles;
(ion (ju'on appel :il de Ilollandv-, à qui les pa- la eonf^réKatlon du SainiNom de Jésus aux
pes avaient aceordé l)caucoup de privilét:e-i. îles Antilles de l'Atneiiqne, (;ui a un cou-
SI;iis, l'an loi 4, le pape l.t'ou X, sur les in- vent et vin^t cures ; la congrégation de S. linl-
slances du roi di- France L"uis XII, orlonna Dominique dans l'iie de Sainl-l)omini;ue, qui
au Rénéral Thonias Cajelan de séparer les a deu\ couvents et dix cures; la conu;réH;;i-
touvents réformés en France de la congre- lion de Sainle-SaWinc à Home , (jui a huit
galion de Ilollani''', de laquelle ils dépen- couvents; la conççrégalion de ï-'aint-Marc de
ilaienl. cl d'en faire une ioii;;réL'alion non- Florence, <iui a six couvenis ; la coofjrépa-
lelle qui s'appelli'raii la congré|;alion Galli- lion de Saint-JacquCM de Salonion à \'enise,
caiic, voulant qu'elle jouît Hcs n^ènii'S privi- (jui .1 sept couven'.s ; la con|.'ré};alion de No-
léges, |;r;u'i's cl exemption-, ijuc celle di- llol- tre-Damc de la santé à Naples, qui a treize
lande ; et, par nu autre bref de l'an 1518, en rouvenls ; la coiii;r6;.'alion de Saml-Domini-
renou> elanl c t en augmcnl inl les mêmes pri- que de i>oriano en Sardaisïiie, qui a di\ cou-
vilégi's à la ciingiégation de Hollaude, il dé- veols et un monastère de lilles , et la congre-
clari! qu'il les octroie di' nouveau à la con- p;..ti(m de Saint-Marc de (lavoli au royaume
;;ré|:alion Gallicane, et ai-promc l'autorité de Naples, qui a treize couvenls.
(lu vicaire généial. Les religieux de France Dans les congrc;;alioiis d • France, de Hre-
avaienl iiéanmiins des statuts |)lus austères lay;ne, des Anges cl de Saint-Marc de liavoii,
que ceux d,' HoUaadi". les prieurs des couvents qui eu dépendent
\'ers la fin du même siècle, le P. Paulin onl voix aux chapitres provinciaux des [>ro-
lîeinaidiiii de l.ucques commença une autre vinces dont ils portent le nom, et, après
réforin ' dar.s le royaume de Naples, sous le qu'ils ont donné leurs suffrages |)our l'elec-
liire de con;',régation de l'Aliruzzc de Sainte- tiou d'un provincial , ils s'assemblent le len-
(lallicriue de Sienne, qui a prodail plusieurs deaiain cl élisent ejiire eux leur vicaire gc-
religieux d'une émiuente vertu, et qui soiU néral. La congrégation de Sainle-Sabi le no
morts en odeur de sainteté, comme le P. Pau? ^a p dut au chapitre de la province de L im-
lin BiTiiardini, auiei.r de celte réforme, <lont hardie, dont elle dé()cndait autrefois . et le
la vie a été écrite par un religieux de cet or- provinciiil de cette province n'a aucun droit
dre. 11 mourut en IbSo, a|)rès avoir beau- de visite dans cette congrégation. Le vicaire
coup éleodu sa congrégation. Le P. Nicoai général d'Alsace ne dépend d'aiicune pro-
Masiode l'érouse lui aida beauciup dans l'é- vince, ncu plus (juc celui de Said ligne ; ils
lai lissemrnt de (Cite réforme, et, lui ayant sont inslii-.iés tous deax par le généial, qui
survécu de plusieurs années, il travailla aussi nomme ai-ssi ceux de l'Amériq le. La congre-
heuucoup ;; l'etendie cl à la mainlcnir dans gatioo de \'enise ne va iioint au cli.ip^lre pro-
l'obsirvance régulière. Il mourut virs l'an viicial , nais )c provincial de la province de
JGtl,cn répulaliou de sainteté, dans le cou- A'enise a droit de visite honoraire dans celle
vent de Saint-Dominique de Cliiési, et l'ut vi- coiigrégalioii. Tous ces vicaires généraux
Caire général de celle congrég.ili )u. n'ont auvune aulorilé qu'après qu'ils onl
Le i'. Sébastien Miihaélis introduisil pns- été conlirmés par le général de tout l'ordre,
que datis le uièmc icmps une sctondc ré- Les rérormcs de ces congrégations ne coi-.-
lorme en F'rauic sous le nom île congiéga- sislenl guère que dans l'abstinence de lu
tiou Occiliine, doni il l'ut le (ircmicr vicaire viande, qu'ils observent fort régulièrement
génc.al. 11 av.iil pris l'Iiabil de l'ordre de dans leurs couvents, mais elles n'onl point
Saint-Dominique au couvent do .Marseille, renoncé aux rentes el aux possessions,
où, après avoir mené une vi ■ exemplaire, il
fit un 1. 1 progrès dans l'élude de la tlicologie, LO.MIÎARDIE (Teiitiaiuf.s oe S»i>t Fkamjois,
qu'il reçut avec beaucoup de réputation et i>:ts diî la cONGnic.jATi.iN dk)
d'ai.plaiidissenuMU le deg^é de docieur 11 ^ ,,, ^, ■ .„^ ^^^ ,^ congrdrjaHon
commença sa reforme a loulouse 1 an l.i'.);>, .^ j j j
qui fut api)rouvé.: par le jiape Paul \', l'an .'-"i le tiers ordre de Saint-François, inslitué
ItiOS ; de la il \int à Paris, où, sous l'autorité d'abord pour des séculiers, fil tant de pro-
du roi Henri 1\ , il bâtit le couvent de V\n- grès, qu'il n'y eut presque poinl de provin-
iioncialiuu delà sainte \'ieigfi dans la rue ces où il ne s'étendit el où on ne vit des
Saint-IIonoré, où il mourut le o mai I(il8, personnes engagées dans le mari igc se sou-
ilge de "iï ans. Ce le congrégation ne sub- iiiellre aux lois que le sain! instituteur avait
siste plus, ayant élé érigée en province l'an iirescrites à ceux qui voudraient praiii|uer
IGO'J par le pipe Clémcnl l.\,sous le litre de la péiiilence, ilnefil pasnioinsile pmgrèslors-
Saiul-Louis, ([ui est la qu iranle-cin(]uièiiie qu'il se trouva de ces ponilcnts qui, aspirant
cl dernière de l'ordre. Los congrégations di; a une plus haute peifecliou, s'eiigagérenl a
l'aguze, de l'.Vhruzze et (juelques autres, onl cet etai par des Vieux sidennels. Les ililléreii-
aussi été érigées eu |)ro\iiices; il ne reste les con;^régatioiis religieuses qu'il y a eu de
plus i|ue les suivantes qui subsistent, et qui cet ordre, eu France, en Allemagne, en Fs-
onl des vic.iires généraux , savoir : pagne, eu Flandre, en lialic el dans U î
La congrégation de Saint-^ imcul Feriicr aulicsprovinccs, cl qui avaient chacune leur
789
LOM
L05I
19C
génér;il , en sont une preuve incnnloslaliîc ;
el il y a lieu de s'éloiincr qii';(|;iôs les per-
scculions qui lui ont été suscitées, lant de
la part de quelques catholiques jaloux de son
progrès, que par les hérétiques, iiui oiit
renversé el ruiné enlièremenl un grand iioni-
hre de ses monastèns, il soit encore aussi
(lorissanl qu'ill'esl. L'on ne voit plus à la
vérité toutes ces congrégations qui étaient
gouvernccs chacune par un général, dont
quelques-unes ont été enliéreurient éleintis
dans le sang de leurs religieux, i|ue la fu-
reur des hérétiques sacrifiait à l'erreur et au
mensonge; d'à;. très réunies à celé de Loin-
h.irdie, qui a conservé le droit d'avoir un
f énéral , el les autres ( nfiii soumises au
(-énéral de tout l'ordre de Saint-François;
mais cela n'empêche pas qu'il ne soil encore
l'oit étendu cl fort recoiniiiand.il)le parla
science et par la piélé de ses sectateurs.
La province de Lombardie, dont nous trai-
tons d ins cet article préferablement à lo;ites
les autres, tant à laisonde sonanti(iuilé que
du généralat qu'elle a consené juscju'à pré-
sent, commença de la ninnière suivante. Les
premiers religieux d'Italie' demeurant dans
le désert, avaient plusieurs maisons éloi-
t;nées du commerce du monde, qui, bien que
régulières, ne formaient point de congréga-
tion et n'étaicul point unies ensemble; eilcs
;,v.iient seulement quelquefois des visiteurs,
.•^elon le conseil de ISicol.is IV, cl elles avaient
( liucuiie un supérieur local. Ce manquement
de chef pour les unir venait de leurs adver-
saires, qui, n'.ijant pu empêct.er la proIVs-
sion solennelle de i et ordre, s'efforçaient d'en
arrêter le progrès par la désunion des nn in-
bres. Mais le | ape Mcolas V, par une huile
de l'an l4V7, le voulant aiîermir et ampliiier,
accorda à ces religieux d'ilaiie la permis-
sion de conser\er les couvents qui étaient
déjà bâtis, d'en fonder de nouveaux, d'y ad-
ministrer les saercmenis, de célélircr dis
chapitres généraux, et d'y élire de Icurco^ps
un vicaire général cl quatre définiteurs pour
dresser des sta uls, avec pouvoir de changer
leur habit érémilique et d'en prendre un au-
tre tel qu'ils jugeraient à [.ropos, afin qu'ils
pussent èire distingués des iirmiles; et Sa
Sainteté nomma, pour faire exécuter cette
bu. le, les évèques d'Eugubio et de Crémone,
avec l'abbé de Saint-Paul hors des murs de
Home. L'évcqued'liugubio, en conséquence
de sa commission, fit assembler le premier
cli.ipitre générai à .MonSef.iIco l'an li'i-8, où
le !'. H.irtliélemy de Bonamaiis fut élu pour
premier vicaire ;;énéra!. Celle congrégation
n'avait pas eu encore le pouvoir d'élire un
général, ce qui ne se fit que dans le chapitre
([ui se li..l à Culisbulano, au diocèse de Cré-
mone, l'an 1458, où on eut pour [ireiuier
général le P. Ugolin de Plaisance : ce qui
continua jusqu'en l'an i'iGS, que le pape Pie
V, sous prétexte de réfoiMer le tiers ordre de
Saint-François, soumit tous les religieux et
religieuses de cet ordre à la juridiction du
ministre général des Frères Mineurs de l'Ol)-
servancc et de ses commissaires généraux.
ta laai), le cardinal Ferdinand de .liédicis,
qui était |ir(4eiicnr du Iroisiemo ordre, ay.inî
assen)!)le un chapitre général à Komc dans
le couvent de Saini-Côinc et de Saint-Damion,
afin que les religieux tertiaires | rocéda sent
à l'élection d'unsupérieurgénéral tirode le r
corps, suivant la permission qu'il eu avait
obtenue du pape, ils ne purent s'accorder
entre eux, ce qui fit que Grégoire XII! leur
donna pour commissaire ou visiteur aposto-
1 que un religieux du même ordre. Enfin, l'an
l.i8G, Sixte V les rétablit dans le même état
qu'ils étaient avant la suppression de leur
général, faite par autorité de Pie V, et leur
permit d'en élire un : ce qu'ils ont toujours
fait jusqu'à présent. U'abord ce général
n'exerçait son office que pendant trois ans;
mais dans le chapitre général qui se tint à
Bologne l'an ICïl, il fut ordonné ((u'à l'a-
venir les généraux, exercer, lient leur office
peniJaiil six ans : ceiiui fut approuvé par le
pape 'nnocent X.
Les religirux de cette congrégation sui-
vaient d'abord la règle que Nicolas IV avait
confirmée, y ajoutantlcs statuts et règlements
que Jean XXll avait accordés aux relgieux
du même ordre en Flande, el qui lurent
confirmés dans la suite par Martin V. Ils en
firent ensuite de particuliers pour leur con-
grégation, qui furent dressés dans le chapi-
tre général qui se tiiit à Florence l'an ih&J,
et ils les confirmèrent dans celui qui se tint
l'an l'i-TS daui le couvent delà Forêt du Ma-
tin, au diocèse de Spolelte ; mais l'an l.j'f9,
le P. Bonaventurc de Vicenzc élanl général,
en dressa de nouveaux, qui contiennent en
subsumce la ro;:le lonCrmée par Nicolas IV,
dont il retrancha ce ([ui ne coiivenait qu'aux
séculiers et aux personnes engagées dans lu
monde. Ces statuts furent d'abord ajiprouvés
par le cardinal del Carpiu, proleeteur do
l'ordre; cl le pape Pie V ordonna ensuite, l'an
I.jOS, que cette règle ou statuts ainsi ap; rou-
ves par ce cardinal seraient observes dans
l'ordre : ce qui a toujours été exécuté par
celte coi;grégalion, qui dans la suile y a f.nt
(juelques additions, qui n'ont pas été moins
fidèlement observées; et c'est conformément
à ces statuts et à la règle de Nicolas IV, qm
y est insérée en substance, qu'ils prononcent
leurs vœux en cette manière :
Moi N. voue et promets à Dieu toiil-puis-
sant, à la bienheureuse Vierge Marie, à saint
i'rançoiff à tous les saints, el à vous, tiwn
II. P. N., de garder toiii le temps do ma vie
les commandements de Dieu et de satisfai: e
selon la volonté de mes supérieurs, comme il
convient, aux iransfjrcssions el aux fautes
que je commettrai contre les constitutions et
les statuts du troisième ordre de Sainl-Fian-
çois dit de la Pénitence et de la Régulière
Observance, et contre la rètjle de Nicolas IV,
de la manière qu'elle se trouve insérée dans ces
statuts et constitutions, vivant en obédience,
sans propre et en chasteté confurmémenl aux
privilèges aposlolifjues de cet ordre.
Cette congrégation était autrefois divisée
en vingt provinces, mais les guerres surve-
nues en Italie ayant ruiné entièrement plu-
sieurs monastères, el quelques-uns où il v
791 niCTlONNAmE ItES OIISW.LS IllXiGIEUX. 7!1ï
nvait peu de leligirus ajanl clé supprimés, d'arircnt à ces Irois Icllies d'.izur O. f. C,
ivle n'a plus présc hUmicmI que qualorzc |iro- qui \iu('iil dire Opiis Passiouis Christ», cl
vinces, j compris «clic de Fl.indre, qui for- les trois clous de la passion en pointe , I ccu
mail auircfois 1.1 conuri't,Mlioii (le Zepperen , timlué d'une couronne ducale, entielaré.'*
donl nous parlerons dans la suite, el qui y d'une couronne d'épines, av<c i elte dcv. se :
fut unie par autori é du pape Innocent X. l'oK\n i:ntia coronat.
Ces reli|;icux ont deux maisons à Kome, l'une Anton, de Sillis, Stiiilid orir/in. proveclion
de la province de Uome sous le titre de Saint- et complcmenl. terl. ortl. S. Francisci con-
Come cl de Saint-Daniien , et l'autre de la Cfr/icnrif/. Francise. liordon, r/irono/o(/. /"/(iJ
ITOvince de Sicile sous le titre de Saint Paul et Sorur. tcrt. ord. S. l'runcisc. .loan. Maria
au quartier de la lief/ula. L'Hy;lis(' de Saint- \'ernun, Annal, ej'i.id. oiiliiiis ; el lilzcarl do
(lome et de S.iinl-Dauiien était autrefois un Dombcs, Acadé. nie de perfection.
temple dédié à Uémus et à llomulus, d'autres ..un i- • <•.,!.■ j
disent à Castor et à l'ollux. Le pape Félix II ^ "• ^P'.' /f.''.7"«"^ puimlsdHljersordre
consacra ce temple en l'honneur des saints de Smnl-t nmçois de la liegj.lHre Obser-
martvrs Côme et D ,inien. Saint Grégoire le "'"^^ descnuregnlioiK de Smie, de bal-
Grand, voyant qu'il toml.iil en rulifc, le fil "'''V^ '\ '^ 'f."''' P'cseulement urnes <) celle
réparer. Le pape Adrien \' y fil apporter de LomOirdie.
de Pérouse les portes d'airain (]u'on y voit. Il Les monastères des Tlelijïieux Pcnilcnls du
y a deux églises, l'une est souterraine el très- tiers ordre de Saint-François en Sicile, qui
ancienne; celle qui esl supérieure a été préseiilcmcnl ne forment qu'une province
mise, l'an 1633, en l'état où on la voit, nar unie à la co!)gré;;atiun de Loniliardie , ont
Il niagnilicence du pape Urb;in\'ll!. Elle formé aussi une congrégation séparée avant
esl titre de cardinal ei une des plus grandes celle union. Dés l'an lo-20, ces religi<'ux, qui
dévolions de Uome, a cause du grand nombre lui donnèicnt commeiiccnient, eurent deux
lie corps saints qui s'y trouvent. Les reli- cou\enU en Sicile, l'un au bourg de Sicio,
gieux de ce couvi ni portent par privi cge le l'autre dans la ville de Salémi. Ils en obiin-
d.iis sur la crèche de Noire-Seigneur Jésus- renl encore un à Gergenli, l'an io23, où, si;
lllirist, lorscjue les chanoines de Sainlc-Ma- conien'.anl de pratiqui r exactement la règle
1 le-Majeurc la transfèrent lous les ans la de Nicolas l\ yans y ajouter d'.iulres austé-
ruil de Noél, de la sacristie où elle esl gar- rilés , ils demeurèrent dans cel étal sans
liée, sur le maître autel de cette même ég ise, s'agrandir davantage, jusqu'à ce que , quel-
où elle reste exposée à la dévotion des ques années a[)r(S, ces trois couvents s'uiii-
liJélcs ce jour-là et les deux lèles (jui le renl à ceux qui furent fondés par le P. Jac-
suivenl. ques d'Iùigubio, religieux du premier ordre.
Celte congrégation a produit plusieurs per- qui établit en ce loyaume une réforme très-
sonnes recomm;ind,it)!es par la sainteté de austère du lies ordre de Saint-François,
leur vie, doiu qurlqu>s-ui'.s ont mérité le Ce P. .lacques d'Iùigubio avait l'ail profes-
tilre de bienlicureux, comme le bienheureux sion parmi les Pères de l'Observance; mais,
Jérémie de Germe, donl le corjis s'est con- dans le désir d'une plus gran le perfection
serté jusqu'à présent sans aucune con up- cl d'une pius exacte praiinue de la règle do
lion dans le couvent de Forli , et le bieulnii- sainl François, il se joignit aux |ireniiiis
reux Mire de Canzo. Il en esl sorti aussi de fondateurs de la congiegation des Capucins.
célèbres écrivains, dont 1rs principaux sont, Les persécutions qui furent suscitées à ces
le P. Antoine Collon de Mcosia en Sirile, derniers par le provincial des I-"ières .Miiieuis
professeur dans l'université de Padoiie ; le de la province de la Marche d'.Vncone, pour
P. François liordon de Parme, qui a donné cnipéclier le progrès de i cite réforme, oblige-
^u pulilic pins de vingt volumes, la plupart renl plusieurs religieux de 1 ()bscrvance ijui y
lie droit canon, et une chronologie du tiers élaienl entrés de l'abindouniT, du nombre
ordre de Saint-Fr.ine< is : Je.Jii Altierghin de desquels fui le P. J.icques d'I'^ugubio, qui ren-
Palernie ; Jean Antoine lirandi de Saleuii eu Ira |iarini les Pères de rO!)s<'rvance. Leur vie
Sicile, et plusieurs autres. ne lui paraissant pis assez austère, et peu
L'habilleinriii d,- ers religieux consiste en conforme au grand désir qu'il avait de la
une robe de serge gri>e serrée d'une coide pénitence et des ii.oitilic liions, il obliut piu
Idanclie, avec i.n capuce attaché à une de temps après du pape Paul 111 et du cardi-
grande moze te ou cainail. se terminant en nal François Ou giioiuz, pour lors protec-
jioinle par devant el par derrière (!,'. Lors- leur de l'ordre de Saïuï-François ci (jui en
'lu'ils .sortent du monaslère par un mauvais avait clé génér.il, la pei mission d'aller prè^
temps, ou qu'ils tout en campagne, ils ont cher parmi les intidèles, où il espérait rein-
iiii luanteau de même couleur, à la manière porter la couronne du martyre ; mais Dieu
lies ccclesi.istiques , avec un chapeau noir, en ayant dis|) isé autrement, il s'arrêta en
Us portent pour armes fascé de trois pièces, Sicile, où il prêcha dans la ville de Trepani
la première aux armes de l'ordre de Sainl- avec tant de lerveur et de zèle, que plusieurs
l'rançois, ()ui est d'.izur à une croix de bois personnes, touchées de ses discours, »ou-
ei deux br.is croisant sur l<i croix, l'un nu, lant renoncer aux vanités du siècle, lu
l'autre vêtu d'une m inche grise ; la secoiiile pnèienl de leur mari|uer rinslilul (|u'il>
d'or à une couronne d épines ; la troisième dctaient embrasser, pour y scr> ir Dieu loiu
(I) Vey., a b lin du vul., n" l'J7.
795 LOM
de tout commerce avec le monde. Ce zélé
prèdicaleur de la pénitence leur proposa
celui du tiers ordre de Saint-François, dont
il n'y avait que l ois couvents en Sicile, et,
pour leur servir d'exemple, il fil lui-même
prolession de cet ordre , auquel il ajouta
plusieurs ausiérilés, après en avoir obtenu
la permission de ses supérieurs.
Après celte profession, que ce nouveau
]>ropa;;ateur du troisième ordre ne voulut
pas faire sans l'agrément de ses supérieurs,
il jeta les fondements de sa réforme dans
une solitude appelée la Trope, sur une mon-
tagne escarpée proche de l'ancienne ville
d'Kyriv, dans la vallée de Mazara, où entre
autres il fit prendre à ses disciples tin habit
rude et grossier, dont il se revêtit aussi, et
et les lit aller nu-pieds, ce qui fui cause qu'oii
les appela gli Sralzi ou les Déchaussés du
tiers ordre de ?ainl-François. Après que
cette réforme eût été approuvée par le pape
l'aul 111, l'an laiO, ils demeurèrent encore
cinq ou six ans dans ce lieu champêtre; miis
ayant été obligés de l'abandonner, tant à
cause du mauvtiis air qu'à c;.use que le con-
■ veut était trop petit pour recevoir tous ceux
qui se présentaient pour embrasser ce genre
de vie et faire des fruits d • pénitence dans
la compagnie de ces saints religieux , qui
étaient la bunne odeur de Jésus-Christ , ils
obtinrent la permissinn du même pontife,
en 13VC, de se retirer au pied du mont Saiiit-
.lulien, proche la ville de Trapani, dans un
lieu appelé Marlogna, où le chevalier André
de Fradelle, de la même ville, leur lit bâtir
un couvent dont les bâtiments ont été depuis
augmentes avec beaucoup de magnificence.
La lieaulé de ses jardins, sa vue, qui s'étend
sur la mer, le voisinage d'une forêt et l'éloi-
gncmeiU de la >ille, rendent celle solitude si
;igréablc et si commode pour ceux qui veu-
lent s'adonner à la contemplation, que le
pape Clément Vlll ordonna, l'an ItJOO, que
l'on y établirait le no^iciat.
Le P. Jacques d'Euguhio, après avoir soli-
dement fondé ce monastère, alla coiUinuer
ses prédications dans la ville de Trapani ,
où, avec les aumônes qui lui furent données
par les bourgeois de cette ville, il fonda,
.vous le nom de la Sainte-Trini é, un mo-
nastère de religieuses du même ordre. Ce
même monastçre est devenu si con-idérable,
(lu'on l'appelle préscnlemeot la Grande-
Abbaye. Quoiqu'il n'y eût rien que de Irès-
!,aint dans la conduite de ce zélé fondateur,
cl (|ue le seul motif de la gloire de Dieu l'eût
poi lé à fonder ce monastère et à entre--
prendre la direction des filles qui s'y éiaienl
consaciées au service de Dieu, cependant il
ne fut pas à l'abri de la calomnie et des per-
sécutions ((ue les eniie ois de la refornje lui
Suscitèrent ; mais le cardinal dcl Cir[)io,
protecteur de l'ordre, qui connaissait son
mérite et la pureté de ses intentions, prit
toujours sa défense. Ce cardinal étant mort
l'an 15ljl, le cardinal saint Charles Borro-
mée lui ayant succédé ilans celte protection ,
le l*. Jacques d'Iiugubio alla à lUmie, où il
obtint du pape Pie i\ que tous les mona -
LOM
70 i
stères de sa congrégation, tant d'hommes
que de filles, seraient toujours souo)is an
cardinal protecteur, et qu'ils ne pourraient
cire visités que par le provincial des con-
ventuels. Pie IV étant mort l'an 1565, et sou
successeur saint Pie V ayant ordonné que
tous les religieux et religieuses du tiers
ordre de Saint-François par tout le monde
seraient soumis aux religieux de l'Obser-
vance, le provincial de Sicile voulut, en vei tu
de la bulle de ce ponlilé, réduire les reli-
gieux du tiers ordre de Saint-François de ce
royaume sous son obéissance ; mais le
P. Jacques d'Euguhio s'y étant opposé, pré-
tendant que cette bulle ne dérogiNiit [)oinl
à celle que Pie IV lui avait a cordée, par
laquelle ce ponlife les mettait immédiate-
ment sous la juridiction du cardinal prolec-
teur, ce provincial, irrité, fit mettre le ré-
ft)rmatcur en prison et excommunia les reli-
gieux el les religieuses de cet ordre q 'i ne
voudraient pas se soumettre à son obéis-
sance. Mais ceux-ci ayant eu recours au tri-
bunal de la justice, l'excommnnicition fut
déclaré(! nulle : on leur envoya néanmoins
pour visiteur un religieux de l'Observani <•,
qui fut délégué comme commissaire aposto-
lique, en vertu de 1 1 bulle de Pie V ; mais
c- visiienr, n'ayant rien trouvé de ré-
préllen^i!llc dans la conduite des religieux
cl des rel gieuses de cet ordre, fit délivrer do
prison le I'. Jacques d'Euguhio. Il fut seule-
ment ordonné dans cette \isile que, pour
ôter tout sujet de soupçon, les religieux du
troisiènie ordre oui demeuraient dans l'hos-
pice pour administrer les sacrements et
rendre les scrvKCS spirituels dont les reli-
gieuses avaient besciin, ne pourraient pas y
coucher, quoiqu'il fût assez éloigné du mo-
nastère , cl iraient coucher tons les jours
dans leur couvent, qui était hors de> murs
de la ville. Mais Dieu, dont les jugements
sont bien différents de ceux des hommes,
confondit la mal'ce de leurs ennemis, se
servant pour cet elïel des bourgeois de cette
ville, qui, convaincus de la sainteté de ces
bons religieux, leur donnèrent, en laVY, un
(duvenl dans cette même ville, où ils no
furent pas pluiôt établis ([u'ils y donnèrent
une preuve sii;nalée de leur détachement
pour les biens de la terre; car, voulant imi-
ter la pauvreté de saint François en renon-
çant à toutes Icuis possessions, ils firent à
ces religieuses une donation de tous les
biens el revenus qu'ils avaient. Mais saint
Charles liorroiiiée , leur protecteur, cassa
cette donation et modéra leur zèle, les obli-
geant à reprendre leurs biens, dont ils pou-
vaient jouir en sûreté de conscience, puisiiuo
le tiers ordre de Saint-François peul possé-
der eu com nun.
Le cardinal de la Homère, qui fut protec-
teur de l'ordre après saint Charles Borro-
mée, étant persuadé de la vie exemplaire
que ces religieux menaient s/us la conduite
(lu P. Jacques d'Euguhio, el voyant qu'il y
en avait plusieurs qui élaie .1 venus à Homo
|)0ur fuir la persécution des religieux de
robbcrv.aicc cl implorer la iiroleclion du
DlCTIONNAinE DES OUDRKS RI.'UGIF.LX.
795
s-iiiil-siépe contre ceux qui les inquiclaii'iit
iDUibanl leur iiis itnt. les lenvoya e.i lour
pijs el leur accorda la permission do tenir
u« chapitre à .Mario-na | our y éliri- un
provincial : <e qu'ils lirenl en élis inl pour
premier provincial le 1'. Jérôme Uicci, des
premières > l des plus nobles familles de la
ville de Trapani, el qui était un religieux
li'une émiiienle verlii.
^■l)nol)^l.lnl tnutes ces traverses, le Iroi-
s:énie ordic ne l.ii^sa pas de faire beaucoup
de prtifirès d.ins ce royaume, tant par la vie
idifianle de ses religieux, qui délruisail la
Malice el l'envie de s. s adversaires, que par
le zèle el la |iiclé du l'. Jacques d'Kugubio,
(jiii,a[rès y avoir demeuré plus de ireiile-
iiois ans, pendant les luels il travailla non-
si'ulcmenl à mainienir l'olisorvaiuc r6-;u-
lière dans sa congrégatiDii, mais encore à
procurer aux habitants de Tranani et des
I eux circonvoisins toulcs sortes de secours
spirituels, recul enfin ordre du pape l'ie V
lie quiUer l'Iiahit du liers ordre de Saint-
François pour rcprcmirc ce'ui desCapucms,
dont il avait d'abord cnilirassé la rélorme, el
parmi lesquels il iiioiirut à Rome.
Apre- que les relgicux du lie rs ordre eu-
rent perdu leur saint fond.aeur, ils ne la s-
ièrenl pas de fonder de nouveaux monas-
tères en plusieurs en.iroils, comme à l'a-
Icrme, où ils en on' (rois; à Calane, à 'l'er-
m ni, à Uifîusc, a M usala, à CalaUigiror.c,
a Trapano ilcl monte et en d'aulres lieux,
i.'ont il 1 n reste encore à f résent trenle-cinq,
> compris celui de Uome aii quartier de la
llegola, qu'ils olilinrciil l'an lUlO, où ils s'é-
lablirenl avic la pcniiission du pape Paul V.
IJnoiquc le pap- Clénnnl \Illcûl réuni tous
leurs monastères à la CDiigrégalioii de Loin-
bardie, ils letinrinl iiéanm<iins l'hal it de
leur reforme après celle union ; ma s le car-
dinal prolecleur ordoana preaiièrcment à
ceux qui demeuraient à Home au quartier
de /il lîeydlu, de scccnformer pour Ibabille-
inriil aux religieux de la pr"\ii!ccde Rome,
qui aN aient aussi un couvent en celle ville,
ce qu'ils liii ni ; cl les autres couvants suivi-
icnl dans la suite leur exemple. Leur Iinbit
n'est pas néanmoins si ample que celui des
religieux des autres provinces. La disci;iliiie
régulière ne s'est poinl relâchée jiaiini eux,
U ils sunl en grande e-liiiic parmi le peuple.
Le pape Clemenl \ 111, qui av.iil uni les
moiiasieics de Sicile a la congrégation de
l.ombaidlc et les avait souu.is a la jnridic-
l.on du général de cet ordre en llalie, y unit
ausM ceux de iJalmaiic el d'isiiie i'an lliO:2.
Ces monastères elaienl au noin;^re de qua-
torze, el dépendaient immédiatemenl du
saiiil-sicge. Wading, parlant de celui de
Zara, qui lui donne aux religieux du liers
ordre l'an iVli'», les appela les premiers Lr-
iiiilcs de l'ordre de Saïut-François de la l'e-
mleiice.
Francise, liordon. Chronolog. FF. el So-
ror. terl. ord. S. Fiuncisc. Joann. .Maria
Vemoncns., Annal, rjusd. ord: el Ll/earl. de
liomlics, Acddcmie de pcr[eclUn.
(J) Voij., h 1.1 lin du vol., ii" \'J'i.
TtWi
§ III. Congrcyalion des Beij/liaid^ unieà
celle de I.ombardie. N'oy. lii-uciiAnus.
LOUETTE (CiiEVAiieus de NoTni>DAMK
de). Voy. Bethléem.
LOlIS f Chevaliers DE l'orohe de Saint)
en France.
Le roi «le France Louis XIV, qui pirsrs
aclioiis glnrieuses cl cclalaiili s s'est acquis
a»ec ju>tice le surnom de Grand, ne croyanl
pas que les récompenses ordinaires fussent
suffis.inles pour témoigner sa reionnaissanci;
envers les officiers (lèses armées qui s'é-
l^ient signalés dans les victoires el les con-
(luètes, chercba de nouveaux moyens pour
récompenser le;ir zèle et leur (idélilé ; el,
(l.iiH dite vue, ce (|ui lui pariil le plus con-
venable pour cela fol rinsliiuiion qu'il lil en
l{i'.)'3 d'un ordre militaire si.us le nom do
S.i nl-Louis ; au(iuel, oulre les marques
d'honneur extérieures q :i y sonl allachées,
il assura en faveur de ceu\ (;ui y seraient
admis des revenus el des pensions (jui aug-
menleraienl à praporlion qu'ils s'en rcii-
draienl dignes par leur conduite, voul nt
<lu'oii ne reçût dans cel ordre que des offi-
ciers d.! SCS troupes, et que la vertu, le mé-
rite el les services rendus avec dislinclion
dans ses armées, fussent les seuls litres pour
y entrer.
Par l'édit de l'inslilulion de cet ordre, le
roi s'en ceci. ira chef, souverain cl granil
mailre. voulant que la grande maîtrise fùl
pour toujours unie el incorporée à lu cou-
ronne. Il d lit èlre composé de la personne
de Sa .Majesté cl de ses suecesseurs en qua-
lité de gianils mai Ire;, du dauphin de France,
ou du prince hèrilier présomptif delà cou-
ronne ; de huil grands croix, île vingl-qualre
commandeurs, du noml re de chevaliers qu'il
plaira au roi el à ses siicicsseurs d'y ad-
mettre, el de trois ofliei-Ts qui sonl le tré-
sorier, le greffier el I huissier. Tous ceux
qui coinpo>cni cel ordre poilenl une croix
d'or sur l.iquellc il y a l'image d.- saint
Louis; les gr.inds croix la portent ;il.achee
à un ruban large de quatre dogls, de cou-
leur de feu, qu'ils metlenl en écharpc, et
ont encore une croix en broderie d'or sur le
juslauc irps cl sur le manleau (l\ Les com-
mandeurs p'irlent seulement le ruban en
eeh irpe avec la croix qui y est attachée, el
les simples i bevaliers ne peuvenl port r le
ruban eu échaipe, mais seulement l.i croix
d'or allai lue surresloinac avec un pelil ru-
ban couleur de feu.
Le roi, voulant honorer cel ordn' le plus
qu'il lui serait posMble, déclara que lui,
iM.le dauphin, les ri'is ses successeurs, les dau-
j)bins ou iiciiiieis présomptifs de la cuu-
louiK!, porlei aient 1 1 croix de cel ordre avec
celle de l'onlre du Sainl-lisprit ; cl qu il en-
leiidail aussi decori r de l'ordre de Sain'-
Louis les maréchaux de France, comme
principaux ollieiers de ses armées de terre ,
l'amiral de France, comme principal officier
de la marine ; le général des galères, coniino
-y?
i.ou
LOU
7S8
principal ofilcicr des galèros, cl ceus (Hii
leur succéderaient dans tes eiiarges : et Sa
M;ijes!c déclara aussi les ordres de Saiiil-
Micliel, du Saint-Espril et de Saiul-Lous
ccmpnlililes dans une même p.rsonne, sans
que l'un pût ser\ir d'exclusion à l'aulrc, ni
les deux au Iroisièine.
Les grands-croix ne peuvent élrc lires
«lue du nombre îles commandeurs, cl les
cnmm indeurs du numhre dos chevaliers ; et
lanl les grands-croix que les comniaiidrui s
et chevaliers , lires du nonihre des ofli-
ciers des Iroupes de terre cl de mer. Il y a
toujours un des huit grands-croix, trois des
vingt-quaire commandeurs, el le huiiième
du nombre des chevaliers, employés dans
les états des revenus et pensions afl'eclés à
l'ori're et tirés du nombre des officiers de !a
mai lue et des galères.
Personne ne peut èlrc reçu dans cet ordre
s'il ne fait profession de la religion catholi-
que, a|iostoliquc et romaine, et s'il n'a servi
sur lerre ou sur mer en qualité d'oflicier
pendint dix années. Le chevalier pourvu
doit se prcsenler devant le roi pour prêter
sernienl. Pour cet elTet , il se met à genoux,
jure et promet de vivre el mourir dans la re-
ligion catholique , apostolique el romaine ;
d'être fiilèle au roi ; de ne se déparlir j;imais
de l'obéissance qui lui es! due el à ceux qui
ciimmaiidunt sous ses ordres ; de gardor, dé-
lendie el soulenir de tout son pouvoir l'hoa-
neur de Sa Majesté , son autorité, ses droils
cl Cl ux de la couronne envers et contre tous ;
de ne jamais quitler smi service ni passer à
celui (i'aucuu prince étranger sans sa pér-
is, ission; de révéler tout ce qui viendra à sa
ronnais-ance conlie la personne sacrée de
Sa .Majesté el de l'Klat, de garder exacie-
inent (es staluls el orlonnances de l'ordre, il
(le s'y comporter en tout comn>e un bon,
sage et veiluenx chevalier doit faire.
Après que le chevalier a prêté serment
en cette forme, le roi lui donne l'accolade el
la croix; après quoi il est obligé de faire
présenter à l'assenthlée qui se tient le jour
de s. inl Louis roi de Franco, en l'honneur
duquel cel ordre a clé inslilué, ses provi-
sions, pour y eu être fait leclure, cire enre-
gistrées dans les regi;lres de l'ordre, cl ren-
dues ensuite au roi [)ar le grefllcr. Les che-
valiers qui oui obtenu des Ictlres pour mon-
ter aux places de eoa'.mandeurs, et les c:Mii-
mandcurs cjui eu onl obti'ou pour monter à
celles de grands-croix, diivcnt aussi les pré-
senter à rassemblée. L'on procède dans la
mêir.e assemblée à l'élection, qui sa l'ail à la
pluralité des vois de deus grands-croix ,
qualre cominand urs et sis chevaliers, pour
avoir la conduite et prendre soin des alTairci
concernant l'ordre pendant l'année. Celle
a^selub!ée, où se Ironvenl les grai)ds-;-roix,
les commandeurs et les chevaliers qui onl
assisté le malin avec le roi à la messe que
l'on dit puur demander à Dieu qu'il lui
plaise répandre ses bénédictions sur la pr-
sonne sacrée de Sa iMajeslé, sur la maison
royale cl sur le royaume, se tient le jour do
la fêle de saint Louis, après dincr.
Cet ordre jouit de trois cent mille livres de
rente, dont il y a quarante-huit mille livres
aiïeclées aux huit grands-croix, à raisois d:^
six mille livres chacun ; Irenle-deux mille li-
vres à huit conmiandeiirs, à raison de qua-
tre mille livres chacun ; quaranlc-huil mille
livres aux seize antres cnmmandeurs, à rai-
son de trois mille livres chacun ; pareille
somme de quarante-huit mille livres à vingt-
quatre chevaliers, à r.iison de deux mille li-
vres chacun ; trenlr-si\ mille livres à vingl-
(luatrc autres (hevaliers, à raison de quinze
cenls livres chacun; quaratite-huil mille li-
vres à quarante-huit .lutres chevaliers, à
raison de mille livres chacun ; et vingi-cin |
mille six cenls livres à trente-deux cheva-
liers, à raison de huit cents livres chacun.
(.)uatre mille livres au liésorier, trois mille
livres au greffier, quatorze cents livres à
l'huissier pour leurs gages, frais de comptes,
registres et autres, b- ioui par chacun au ;
l't les autres six mille livres restantes sont
destinées pour les croix el autres dépenses
imprévues.
Le dixième jour de mai, le roi noniuic k-s
grands-croix, les commandeurs et les che-
valiers de ce nouvel ordre. Les grands-crnix
tirés des officiers des armées de terre furent
le marcjuis de la Hahlière, le marquis de Ri-
varol, le comte de Mor.lchevreuil, les sieurs
de 'V^auban el de Iloscu, qui ont été depuis
maréchaux de France ; le marquis de la
Fenillée , le sieur l'oiaslron, el le sieur du
Châleau-r.enai'.d , lieutenanl général el de-
puis maréchal de France, qui lut lire des
ofûciers de marine. Les commandeurs tirés
des officiers tant de terre que de mer furent
les sieurs de Vatleville , de Saint-Sylveslie ,
d'Avejan, Massol, de la tîrange, do Louba--
nie, de Chamiay Panelié , Costellas , Pres-
chac, d'Arbon, la Bouch irdière, Casleja, du
Luc, Bellegarde, Guillcrville, Fourille , Da-
lou, Laumont, Desalleurs, des Bordes, Dam-
blimunt et Bezons.
La croix de cet ordre est d'or à huit pointes
comme celle de l'ordre du Saint-lîsprit »
avec des fieurs de lis aux quatre angles: au
milieu il y a un cercle dans lequel est d'un
côté l'image de saint Louis armé de cuira se,
ayant par-dessus le manteau royal , tenasit
dans sa main ilroile une couronne de laurier
cl dans la gauche une couronne d'épines et
les clous de la passion, avec cette légende
tout autour: Ludoviius Mafjnus instituiC
IG'J.J ; ( t de l'autre côté du cercle il y a une
épée dont la pointe perce une couronne dit
laurier, et qui est attachée avec un rubai»
blanc, avec celle légende tout autour : Bel-
licie cirtiilis piœmium.
Vouez VEdil du roi pour la création de cet
ordre. Herman el Schoouebeck, t/ti/i.v Icwo
Iliiloircs des Ordres militaires.
Ju.Miu'aux premières annéesdu xviirsiècle,
i'oiiire militaire de S.iint-Louis ne joui.ssail
en eil'et que d'un rc cnu de 300,000 livres ,
ainsi que l'a dit Hélyot ci-dessus ; mais, par
un élit du mois d'avril 1719, le roi Louis XV
attribua à cet ordre par supplément, 150,000
livres de rente, pour coinplèler un rcveisu do
703 niCTIDNNAlUE DKS OKDUKS ni-I.lClElJX. R.KJ
41)0,000 livres. Le iiomlirt- des gra mis-croix, KîO't; quo le roi cl sis successeurs porlo-
qi/i C(aii lixù à liuit l'.'ir l'éJH (lu mois d';n ril r, lient l;i croix iliiilil «riirc «le Sainl-L'Hii»
lf)93, fui nuiimruU' «le deux , a»cc jouis- n\pc la croix du S.iiiil-I'-spril; qui' Sa MajcsU»
sauce dr (i.OOO livre* de rriilc chacun. Celui eiileiid décorer dudil ordre de S iiit-I.ouis les
des ciiinm.iiideurs à 'i.O 0 livres, qui élait inarécliaux de Fr.iiu e, l'aïuir.il de l'"rauce, l<'
par. iMeineul de liuil , fui aiij;iiuMilé jusqu'à général des galères cl ceux qui leur succédr-
tlix; ce ui des coiiuuaiiileurs à 3,000 livres, roui auxdiles charges; que les ordres de.
Cul de dix neuf au lieu dj seize. A l'égard des Saiut-Miclicl , du Sainl-Hsp' it et de Sainl-
peusioiis des clievaliers à 2 000 livres, le roi Louis seroiil conipaliliies dans une même
eu créa trente au lieu de \ ingl-(|Liaire. L's persniui' ; que d iiis les cérénionies, ceux qui
pensums de 1 ,0r0 livre s, doiil le iioinhri' était seront honorés de l'otdre du Sainl-Kspril cl
de (|uar.inle-lii:i , fut ai rèlé à soixante-cinq, de celui de Saint-Louis précéderont les
cl les pensions de £00 livres, fi\ées pour grands-croix, commandeurs et chevalii-rs
Irenle-deux chevaliers, furent auguienlées (|ui n'auraient (jue ce dernier ordre ; qu'on
jus(|u'au nombre de cinquante-quatre. Le ne recevra auciin chevalier dans l'ordre de
roi se réser>a à lui seul et à ses succe-seurs Sainl-Lonis, (] l'il n'ait si'r\i sur terre ou sur
la nominatiin des grands-croix , des lom- mer en qualité d'officier pendant dix années,
mandeurs cl des chevaliers, pour cil e admis à et qu'il ne soil encore actuellement en acli-
l'avcnir en chacun de ses rangs, et ordonna vite di; service , qu'il ne professe la religion
qi:c les grands-t rois, les coinmandcur^ et les cailioliqtie , apostolique cl romaine, et ne,
clioalics seraient .i [)erpéluilé tirés du prouve son s rvicc de dix années actuelles
non.hre des ofliiiers serv.vnt aclwcllerneiit par les brevets el ccrli!lc;ils des comman-
dans les Ironpcs de lerre ou de mer. Il érigea d.inis des Iroupi s de terre rt de me; (juc h'S
en titre d'offices liéi é.litaires un grani-croix grands-croix, commandeurs elclievaliers, qii
clianceLcr et garde des sceaux du lit ordre , auraient commis (juclquc acte indigne de
un grand-croix grand prévôt clinaitie des h'ur profession el de leur devoir, ou un crime
cérémonies, un grand-cioix, serrélairc el emporlanl peine alllictive ou iafumanle, éga-
gn flier, un intendant de l'ordre , triais trc- lewiciit ceux qui s irliiaienl du rojaume sans
soiiers généraux pour exercer jiar année, permission p ir écrit, signéedel'un des secré-
Irois contrôleurs dcsiils trésoriers , un au- laircs d'Etal, seraient privés el dégradés du-
niônier, nn receveur particulier el agent des dit ordre; et que tous les grands-croix , etc.,
aiTaires de l'ordre, nn garde des archives el qui ne seraient pas retenus par maladie ou
deux liérauts d'armes. Il ordonna que le autrement , seraient tenus à se rendre loua
chancelier, le grand prévôt cl le secrétaire les ans au jour de saint Louis auprès de la
gri flier jouiiaieiit des mômes privilèges que personne du roi, pour accorujiagner Sa Ma-
ies grands officiers de l'ordre du Sainl-lisprit, jesic à la messe dans le palais où elle sera
l'I (lue l'inlendanl el les trésoriers auraient, célébrée, el pour se trouver à l'assemlilée
sans aucune exception, l(!us les [irivilégrs générale dudil ordre, ([ui se tiendra l'après-
(loni jouissent les commensaux de la maison midi.
de Sa .Majesté, qui ordonna que les tilulaires j ,. ^g :„;„ ,-,,(, _ l'ass ■mhléi' constiluanle
ne pourraient disposer de leurs ofliccs, (ju en supprima les ordres de chevalerie, lilres. li-
laveur de ceux (|ui sont agrées par fea Jla- ^^^^,^ ^^ ;,r„,oiries. L'ordre de Sainl-Louis
jcsie Le roi ordonna aussi que la somme de f,,, .lonc aboli. 11 faut remarquer que cel
8,400 livres serait dislnl uee oulre par-dessus ,,,,1^,.^ ,^i,„i . plusieurs autres, élail sim-
les (jmjes ci-dcssus, [ arîie a I intendant , au p,,.,,,,,,,, ,„iiii,.,ire cl honorifique, n'avant pas
trésorier en exercice, au contrôleur en ev.er- reçu, comme quebiues ordres dont n^us par-
Cice, a l aunmnier, au recevc-ur particulier ,,,^-„„^ ^, J,„,^ „,,^^^ j,^^,,^ j,.-,., [. ,,. ,_
agent, au garde des archn es el aux deux he- p.o|,y,i„„ j^ souverain ponlile.
rauls; que 1 ordre de Saint-Louis serait coMi- '
posé du roi , de l'héritier présomptif de la Les choses restèr.nt sur ce pied jusqu'à la
couronne, de dix grands-croix , de ving'.-iicuf restauration des lîourbons, eu ISI'i; alors
commandeurs, du nombre de chevaliers (jui l'ordre des chevaliers de Saint-Louis reprii
y étaient, et (lui y seraient admis dans la ses décorations , son rang el ses lionnciirs.
siiile, el des oliiciers créés par cet édil; que Pendant le temps de l'émigration, ou avait
les grands-croix porter.iienl, oulre le ruban, fait des proinolions; il n'y eut pas, croyons-
iinc croix en broderie d'or sur le justaucorps nous, de solennités [lour l'ordre de Sainl-
t'I sur le manteau; que les commandeurs Louis romme il y en eut pour les ordres do
porieraie.il le rutian sans broderie; que les Saint-Mi lu I et du Saint-l'.spril : tout se borna
sim;iles chevaliers porteraient seulement la à des nominations privées. Plusieurs furent
(loix d'or a tachée avec un petit ruban; (jue failes avec justice, en fa> eur de quel(]ues ser
le chancelier garde des sceaux de l'ordre, le v leurs fidèbs de l.i royauté dans les temps
grand prévôt et le secrétaire grefjier auraient d'épreuves. Nous avons vu nous-mèaie la
la broiJerie el le cordon rouge; ((lie l'inlen- croix de Saint-Louis sur la poitrine de ceux
danl cl les trois trésoriers porteraient la (|ui avaient servi dans les rfiiigs de la chouan-
croix pend mlc à leur coi el n'.iuraient point iierie , basque les déparleuieiils de l'ouesl
de brod rie; (juc les autres oliiciers porte- étaient livrés aux malh urs de 11 guerre
raient la croix sur l'eslomac, el que, pour (ivile. Ainsi en lut-il pour b-s \'eiidecns
les 01 nemenls des armoiries, lesdils oliiciers disliiigues, les homoies i|iii sélaienl lait ro-
s(î conforuicraicul à l'edil du mois de mars ui.irqucr duui les raiiijs de l'aruice de Cou-
nO« MAD M\n 802
tié, etc. ,ol plusieurs de resdf'coraliolis lurent savoir : les grnnds-noix avec les grands-
acfordées dans rémi}îralioii. , croix de la légion : les commandeurs avec
Les conseils de l'ordri" «-e lennieni, avant la les grands officiers de la Légion; les clieva-
révolulion , à l'iiôtol des Invalides , dans la liers après les commandeurs de la Légion ,
s.illc des archives de l'ordic. Le garde des mais avec les offi i(r> et avant les chevaliers
sceaux de France avail aussi les sceaux de de la Légion. Le roi c'ait chef souverain • t
l'ordre ; il en a clé de mémo après l.i restau- grand maitrc de l'ordre,
ration. Une ordonnance du roi, du .'iO mai A la révolution do juillet 1830, l'ordre ini-
181(), élahlissail celte disposition ; l'admini- lilairc de Saint-Louis a de nouveau cessé
siralion de l'ordre fut confiée au ministre de d'exister en France.
la guerre, qui en dirigeait et surveillait toutes Dictionnaire historique de M or éri , VI* tome,
les parties, la per.eplion des revenus , les 1759; Dictionnaiie portatif (!(":< Ordres re'i-
|)aycnienls et les dépenses. Dans les cérénio- qieux et militaires, par !/. C. M. D. P. P. S.
nies publiques , les grands-irois , conunaii- ./. D. M. E. (1 .; l'Art de V'rijicr les dates de
dcurs et chevaliers prenaient rang conrur- la révolution ; Almanach royal, iii-8'.
remment avec li'S membres de la Légion- I> d-e.
(J'Honneur, par ancienneté de nomination, LUAN (Saint-). Voy. Iiu-andh.
m
MACAIRR (Kkgi.e de Saint-). Voy. IsaÏe firent des élablissemen's en différents lieux,
(Saint-). c'est peut-être ce qui .i donné lieu à qiiel-
MADKLFINR (CHEVAi.iEns DR i.aj.Toj^.Pas- ques écrivains de croire (jue les monastères
sioN DE Jksus-Ciihist. de l'ordre de la MadeK'ine en Allemagne,
-, . r,,.t r-ixi.- Il, 'l""t quel(iucs-uns onl même subsisté au mi-
MADLLEINE (Heligieux et hei.igieises de ,i,.„ ^^ l'hérésie, étaient de l'institut du bien-
LORDiiE DE LA Penitenie DE l v) , tant en iieureux Bertrand. Il y en a d'autres aussi
France qu en Allemagne. ^„i ^^ ^^^j ,,prsuadc que ces monastères
Vers l'an 127-2, un bourgeois de Marseille d'.\llemagnc ont tiré leur orij;ine de celui
nommé Bertrand , qui vivait dans une grande des filles Pénitenes di- la Madeleine à Pa-
réputation de saimelé , étant animé ilu zèle ris, dont nous parlerons dans la suiie ,
de la gloire de Dieu et voyant que les nupurs peut-être à cause (luo ces religieuses d'Ai-
de son temps étaient fort corrompues, que lemagnc sont habillées de blanc cl que
le libertinage éiait arrivé a. un tel excès, celles de Paris ont aussi porté un haliil
que la plupart des femt'ies prostituaient leur blanc avant leur réforme,
honneur, el que relies qui avaient conservé Mais les religieuses l'énilenles de la Àla-
quel((ue res'c de pudeur ne faisaient que de deleino en Allemagne étaient établies plus
laiblrs efforts pour la défendre, entreprit la de cent cinquante ans avant que le bien-
conversion de ces pécheresses ; et ses e\hor- heureux Bertr.mil ( ût commi'nié son ius-
latious, tout embrasées du feu do la cba- litut, et plus de deux cent soixante-div ans
rilé, eurent un succès si heureux, qu'il ra- avilit la naissance des filles Pénitentes de
mena dans le chemin de la vertu un grand l'aris. Nous ne savons pas positivement en
l'.ombre de brebis égarées, qu'il renferma quel temps cet ordre a (ommcncé eu Al-
«lans des monastères. Plusieurs personnes, lemagne, ni qui en a été l'insMluteur ; i-.iais
voyant le fruit que faisait le bienheureux il est au moins ceil.iin (ju'il y subsistiiil dès
îlerlrand , se joignirent à lui pour une œu- le commencement da xiii' siècle, comme il
vre si sainte; leur nombre s'augmenta cou- paraît par les lettres d'Otlon, cardinal du
sidéiablenieiit , et ils formèrent ensemble titre de Saint-Nicolas ia carcere Tulliano
une société (jui fut érigée en ordre régulier et légat apostolique en Allemagne, de l'an
80US la ri'gle de sai it Augustin par la pipe 1:220, par lesquelles il accorde des indul-
Nicolas m. Leur habillement (1) était s<m- gencîrs pténières à ceux qui voudront cou-
blablc à celui que les Augustins Déchaussés Iribuer de leurs aumôni's à la subsistance
ont depuis porté en France , sinon que ces des sœurs Pénitentes de la Madeleine eu
religieux de la Madeleine avaient des san- Allemagne, qui étaient dans une granité
(laies de bols. Ils avaient aussi pour armes ]iauvreté et qui n'avai nt pas poui- lor,
un vase plein de charbons ardents, pour des revenus pour leur cntretirn. Ces let-
monlrerle désir qu'ils avaient d'imiter la [ié- très se trouvent dans la Chronique du mo-
niteuce de la Madeleine et de convertir les naslèie de Frankenberg à Goslar, du même
femmes pécheresses. Le P. Gesnay, qui rap- ordre , et nous les rapporterons ici telles
porte ainsi l'établissement de cet ordre, dit qu'elles sont dans cette chronique,
que ces religieux donnèrent à ces Pénitentes Oilo tiiiseralione divina Sancti Nicolai in
leurs mêmes observances , el que les reli- carrcre TuUiano diaconus cardinalis, aposio-
gieuses Pénitentes de Marseille sont du même lic.v scdis Irgnlas, universis C/irisii fid'libiis
institut. El, comme il ajoute que le bien- présentes lias lilteras inspectaris salutcin in
heureux Deriranii envoya plusieurs de ses Domino, Quiinlam, ut ait Apostolas, omnet
religieux eu France el en Allemagne (jui y staOimus unie Inbamd C/iristi, recepturi ,
(1) Voy., à la lin dn ïuI., w" IJO.
«(13
DlCTIONN.Ur.E DES OlîDRES RELIGIEUX.
804
prout in corpore gfssimim, fivc fuerii bonum
.vire malnm, oporlel nos diein im-fxinnis rx-
tremc ntisericordie oiicrihits prerniiie, el eler-
iiorum inlH In snninnre in lerrii. q^toil red-
ilrnle Domino cum mulliplicalo fi urtii rtcul-
ligere dchcumiis in Cvlin , jinnam spem fidu-
ciamqur lenculrs, t/nod i/iii parce srmiual ,
parce et mdet, e( qui seminnt in bmrdiclio-
ttibtis, de bcnedicti' tiilius melei ril'iin etir-
uam. Cum iqitiir dilrrte in (Itrisln pnitpeies
soroies l>cnilent<s S. Mnr. l\la(jd(d. in Ale-
maqni proprias non haleanl facilitâtes tind:
valeant siislenlari, rinivcrsilulem veslram ro-
(jnmus , m'inemus et liorlamur m Dominn , et
in remia.iionein vohis injunqimus peccami-
num , qnatcnus de bonis a Deo vobis collalis
pias elemosina-i el grnla cis caritalis siibsidin
erogatis, ut pir subcencionem ve-lr.im earum
inopic cousulatur, ut vos per hcc cl <diu bo-
nu, que Dco inspirante frceritis, ad elerna
pvssilis rjaiidia perreidre. Nos enim de omni-
polcnlis lici miaericordia et Bll. Pelri et
Paul' nposlolurum nirrilis et intcrcessione
coufisi, omnibus qui ud loca ipsnruin acce<se-
rint XL dies de injuncta sibi penitencia Inija-
ci'inis aucloril'ilc qua fingiinur, niisericar-
diter reliixamii.t. Datam Constcncie anno Do-
mini MCCXXIX. /(((/. Il , XIV linlend. Janunr.
Il y a bien de l'apiuirence que l'ordre' de
la .MaJeleino en Alioninsnc élail déjà inslitué
avant le concle génér.il de Laliaii qui se
tint l'an 121o, puisque le pape Gié'j;oire IX,
)iar une huile qu'il accorda aux religieu^cs
(le cet ordre en .\lleinai;ni\ les cxciupla de
payer les dîmes de ce qu'ellos faisaient va-
loir par leurs mains, cl qu'elles pos^cdaical
déjà avant 1^; concile j;énéral. Le même
poiilifo loir accorda beaucoup de piiviléf;cs
qui furent confirmés l'an i'IkS par le pape
Innocent IV, el la plupart des monastères se
.sont ItUcmenl enrichis dans la suite, qu'ils
n'ont plus eu besoin de recourir aux cliaii-
lés des fidèles pour avoir de quoi subsisli r.
Il y avait aussi des religieux du même
ordre qui avaient un gênerai et dos pro-
vinciaux, au\(|ucls les religieuses élaii'nt
soumises ; et oulre cela elles avaii-ut un
prévôt qu'elles élisaient, mais qui devait
cire confirme par le provincial : quelque-
lois ce prévôl élait un religieux, cl quel-
quefois c'était un sc<ulicr, comme il pa-
rait par la confirmation du prévôt du mo-
nastère de l'ranKeiibcrj; de l'an l'M'3, que
nous rapporterons aussi : Nos (rater Con-
r/idus, };rior provincialis monasleriorum li.
Mar. Maqdal. ordinis S. Augiistini , pre-
posilas in Sluleim ditcctis suis in Chri^lo
juuibut M. prinrisse tolique conventui san-
(timonialinm dicii ordinis frankenbcrgen-
sis ecclesie in Goslar cum prima dite-
cttone oraciones in Domino. Dominum Alex-
andrum , ejliiliitorcm prcscncium , quem
vos una cum parocliialtbus vesiris iinanimi
covsensu et canomcn electione, ac noslro
arcedcntc consensu m prcposilum et pro-
ti'.sorerfi concurdiler clegislis , vjbis irans-
viitiiiiius , precipiendo quatcinn sibi obe-
dieiuium ut fratri nosiri ordinis ch'Cli tc-
(I) Yotj.. à la rnidii vul., n" iW.
nerimini et reterenciam debilam in vmnihuf
fiicidtis, l'y nomine Domini autorilale ti'i-
.«.' rt eumdem Alexundriim in secuinri lidiitu,
qiinmdiu ipsi placuerit , minenicm pre-^rn-
tibiis confirmam is. Dantes sibi plrnarium
])oleslniein confessiones audiendi, exroi!i~
municai'di et nbsolvendi, inira et extra ex-
cessHs spiritialium et i cmparidium débile
corriqendi , omnia cl sinqiila faciendi, que
per fralrem nosiri ordinis electum ouïe-
cessorem sunm rite fieri consuen ruitt. Ni-
liilomiints ralns hnbere volumus et firm'is o"i-
nes sentencias el processus ft penns , quns
idem Dn. Alexander jiixtaco)islitucionescl 'v-
gulam nosiri ordinis rite luti-rit in rebel-
les. Insuper nolumus ip<!um per nos nul per
nosiros succcssores gmeralem sive provin-
ciides , sea per aliquis frivolos o'iasionrs
vel accusaliones indebilas , que fili:juand<>
fiant , quod absit , allqualiter destilu: , nisi
inrcniretnr wanifeslis atiquibus deliclis re-
cl'isus, et quibus essel ipso jure secundum
siicros canones destitulus. Noiliimus eliuin
pretactnm Dn. Alcxandrum cl vestrum hc-
naslerium onemrc per nos sive per nosiros
suecessores idiqua persona scu pm-onis iio-
.■î'rî' ordinis apud vos lorandis, nisi de bonn
ipsius Alcxnndri el vestri conventus unanimi
volunlale. Dat. nnno Dnmini .M(",(XIII, t'i
oclava A^sumitlinnis B. Mariœ Virqinis.
Nosqnoqaefraler Groldus B. Mar. Slagdat.
monasleriorum gencralis preposilus, omnio et
singnln priscripla rata servamui et fiqili
nosiri munimine confirmtimus. Anno Do-
mini MCCCXI , in die umtecim mille Vir-
gininn sigiltum est appensitm.
Il est fait mcnlion de ces généraux di^
l'an 12'i-8; car le pape Innocent l\', ay.in!
conGrmé tous les priviléi;cs que ses pré-
décesseurs avaient accordés aux monaslères
de l'onlre de la M.idclciue en Allcma;;ne,
llilniar, i our lors iicnéral do cet ordie en
.Ml. migno, envoya des cojiies collalionnéos
do la bulli; de ce ponlil'o à tons ces mo-
nastères, les(]iielle< c"i)ios étaient datées
de Cologne du jour de ri'ixaltaiion de sainte
Crr,i\ de la même année.
Tous ces lilres que nous avons rapportés
prouvent assez l'.iniiquilê de ci t ordre on
Allemaiini', cl qu'il él.iit tliiïoront de celui
que le 15. lîeilrand insùtua à .Marseille, puis-
qu'il sub istail plusieurs années avant II
nai-saiice do ce ilemior, el ces inoua>tères
ont Clic ire moins tiré leur origine de celui
des l'ênilenlcs de la Mideleiiie à l'aris, qui
ne parut que plus de deux cents ans après
(lue le IJ. lîerlr.ind cal insliluc son ordre, il
y a encore beaucoup de monaslcros de reli-
gieuses do l'ordre do la .Madeleine en Allo-
m.'ignc. Celui de Sir.isbourg csl un do ceux
qtii ont subsisté au milioti de riiérésie, avant
que celle ville l("il venue sous la doiiiina-
lion do France. Aliialiam liruiii, Miiliel Co-
lyii et Josse Amnianus imus ont ilonné l'iia-
billemeiil d'un religieux il(! cet ordre (jui esl
cniièrcmenl blanc, cl tel (jue nous l'avons
lait graver (1). Celui des religieuses él.iil
blanc aussi avec un scapu'aire et un m ut-
80S MAO M\D !î!)5
Icjui, comme on poul voir dans la figure qui vicrgca, et trilcs ont clé par vous irouvérs
rcpréseiilc une religieuse mailclonnclle de combien qu'à la suggrsiion de leurs mere< et
Metz à la l6te de rarticle de ce nom. Plu- pnrrns qui ne demondoicnl qu'à s'm défaire,
sieurs moii.i-lèrcs de cot ordre, qui élaienl e les eussent affermé être corrumpucs. lit dans
en Saxe cl en d'autres pays héréiiques, ont un aulre article il ajoute : Item en outre or-
été supprimés. On appiliil ces religieuses donnons que si aueure roulait entrer en vôtre
en plusieurs lieux, les Blanches Dnmef, ap- envqreqalion, qu'elle soit interroguée p( r les
parenimeiil à cause de leurs haliits blaiK s. Mère et sous-Mere, présent vâire confesseur.
Mais, quoi()ue leur ordre ait été établi pour et en la présence de cinq ou six, si elle se. dit
servir de refuge aux pé( heresscs publi(]ues, corrnmpuë, et que iille soit trouvée, si avpu-
il y a longtemps que dans la plupart dcleiiis ravant qu'elle fût corrumpuë, elle avait en
ni'inaslèies l'on ne reçoit que des filles disir d'entrer en rôtre religion ; et si afin d'i/
d'iionneiir. enter elle ne s'est point f.it corrumpre, et
Ce que dit aussi le P. Gcsnay, que les re- se' a tenue faire serment sur les saintes Evuv-
ligieuses de la Pénitence de la Madele ne à giles en la miiin de vôtre Père confesseur, en
Paris, communément appelées les Filles Pc- la présence de cinq on six, sur peine de dam-
nilentes, embrassèrenl l'inslitut du bi.enlieu- nation éternelle, si elle ne s'est point fait cor-
reiix Bertrand, n'est pas conforme à la fon- rumpre en intention d'entrer en rôtre reli-
dation de ce moiiastèie; car, selon le P. du gion; lequel lui declunra que posé qu'e'le fût
lîreuil dans ses Antiquités de Paris, ce fut professe ou non, et que l'on fût averti qu'elle
parles prédicatiiiis du P.Jean Tisserand, se fût fait corrumpre en cette inlmtion, qu'elle
religieux de l'ordn' de Sainl-Fiançois, que, ne sera réputée leligiense de vôtre monastèie,
r.in 14.92, plusieurs femmes et filles impudi- quelque rœu qu'elfe ait fait. Puis donc qu'il
quus se convertirent, el, voulant faire péni- fallait prêter ces serments pour cire reli-
leucede leurs di règlements, Louis, duc d'Or- gieuse dans ce monastère, il y a bien de
lèans, leur donna si>n liôtil pour le couver- l'apparence que des personnes que l'on y
tir en monastère sous le titre de Filles Péni- avaii renfermées n)algré elles n'auraient ja-
îcnle<, où elles lurent enl'erméi s et oîi elles mais prêté le serment que l'on exigeait,
ont demeuré pendant qualie-\ingls ans, jus- Jl paraît encore p;!r le préambule de ces
(lu'en l'an 1572, qu'elbs furc ni Iransféiées constitutions que c'est le roi Cliarles \ U[
ilans la chapelle de S.iinl-Cteorgcs, en la rue qui leur donna l'Iiôtcl ajipelc de Bocli.iigne
Saint-Denis, que possédaient les Bénédictins (de Bobêmc), et non pas le duc d'Otléans :
(leSaiiil-Magloire, (jui furent denieurer à ri.ô- Jehan par la permission divine éréque de Pa-
pital de Saiiil-Jacqucs du H,iut-Pas, c;jmme ris, à nos bien aimc'es et ci Dieu données les
nous avons dii en un aulre lieu. religieuses et couvent des files Péniten!e'< , di-
Ce lut l'an 1497 qui' Jean-Simon, ciii- tes les Repenties de Paris ànous sujettes sons
qiiirme de ce nom, évéque d- i'aris, en moien, snhil . Comme ])nr la grâce de Dieu et
vertu d'un Iref du [lape Alexaiulrc \' i, leur par viaïe insp ration , du tems que avons
prescrivit di s statuts et leur donna la règle eu le lei/ime, administration el joUissance de
de saint AugustiUj qu'eIK s suivent encore à n'.lreditéréché, el par 'e moiende qn^s de de-
présent. Le P. du Breuil ajoute que, lorsque volion <pii ont eu l'œil :ur vous plus que vous-
ces statuts furent faits, elles étaient déjà niâmes, vous êtes assemblées tellement qu'êtes
deux «eut vingt religieuses, mais qu'il n'ose en grand nombre, et aujourd'hui environ onze
pas diie li utes pénilinles ou converties, lîu vingt et plus, et poinrait être chose frustra-
elTet , il y en avait peut-élie quelques-unes tv.ire vôtre assemblée et bon propos, sinon
qui y étaient renfermées contre leur volonté, qu'elle fût pnrdurable et perpétuellement ob-
à la solliciiation de leurs parents, ou par au- scnée et gardée, qui ne se peut faire sans stn-
torilé de jiislicc ; mais elles ne pouvait nt pas tuls, ordonnances et constitutions. A cette
être admises à la profession religieuse, puis- couse en ensuivant l'obligation à laquelle de
que, selon les constiluiioas de l'évêiiue de nôli e office pastoral sommes temts d obliges,
Paris, qui lurent dressées pour maintenir du conseil de plusieui s notables personnages,
l'objervanee régulière dans ce monaslèie, gens de religion el 'du consentement de vous
l'on n'en devait recevoir aucune malgré toutes, tant pour vous que vos niccesseresses
elle, et qu'il fallait pour être religieuses religieuses qui sont audit munoslcre en l'hôtel
(lu'elles eussent pioslilué leur iionneur et q à fut appelle de Bueliaigne que le roi nôtre
(ju'elles ne fussent pas \iergcs; car, par un sire vous a donné, étant en nôtre censive, jus-
il 'S articles de ces statuts, ce prélat ordonne lice et seigneurie e) cause de noire dit éréehé,
qu'on ne recevra aucune fille dan> ce mo- avons statué et ordonné, statuons et ordon-
naslère qu'elle n'ait commis le péché de nons les choses que ci-après seront déclarées
la(bair, et quelle sera visitée jiour voir être inviolablemcnt gardées et observées audit
si elle a perdu sa virginité; que celles qui monastère.
seront nommées pour eu f.iire la visite feront Nous avons dit (i-dvant quelles étaient
seirnent sur les saints Fvangiles, entre les les conditions requises pour entrer dans ce
mains des Mère et sous-Mère, et en la pré- nionaslèrc; il y a encore un article de ces
sencc des discrètes, de faire vrai et loyal constitutions, qui ordonne que l'on n'eu re-
rapport, et dire si elles sont corrompues, el ccvra aucunequi aura passé trente-cinq ans,
il ordonne que cet article sera inviulable- de peur (dit l'évéque de Paris) que sous om-
nient observé; car vous .sfarea (leur dit-il) Ire d'être reçues en cet ordre, el en quelqui;
Cfu'aiiciinc* sont venues à nous qui étoicnt temiis que ce soit, il n'y en eût qui voulussent
C07 niCTIONNAlRE OES OflDUES RELIGIEUX. SOS
coiiiiiiiicr dans leur péché. Cos religieuses pieux élaienl obligés de dire l'office selon
su<vaienl l;i ré;;li' d.- snini Au^'usliu : elles l'usiigc de l'Kglisi; nmi.iiue ; ils le récir.iicnt
éliiieiil oliligi-es de dire l'onice lie la siiinle ù \o']\ b.issi-, el se loaicnl aussi à niinuil
Vierge au cliiiMir : ell<s se levaient à iniiuiil pour dire M;iliiii'S.
pour dire m.iiines; el il j avait loujours di'uv Voil;\ quelle a élé la vérit.ible origine du
sœurs qui veillaient dans le dortoir. Outre niouaslére des filles rénilcnlcs de la rue
les jeunes ordonnes par rK;;lise, elles ji'i'i- Sainl-Dcnis à Paris, où l'on recevait eneore
iiaieiil encore Inus les vendredis de l'annce, des (îUcs Kepenlies vers le milieu ilu dernier
et les mercredis e( vendredis de lavent; elies siède, comme il parait par la \ ie de la ,\Iére
ne mangeaient de la viande que quatre fois .Marie Alvcquin, réformatrice de ce mona»
l.i semaine : elles leiiaienl le cliapi'.re les lini- trie, doiince par .M. Blesse en IG'iO, el par
dis. mercredis et ^cndredis,el elles prena;( ni la relation de la naissance el du progrè- de
la disci| line tous les vendredis de raiinee, celui des .Madclonnelles, qui fui aussi iinpri-
et en carèiiii' les mercredis et vendredis, i l niée en UiW ; mais depuis plus de cinquante
tous les jours de la semaine sainlc. Comme ans l'on n'y reçoit plus que des lilles il'lion-
elles ne vi\aii nliiue d'aumoncs dans le com- neur, el nous ne croyons pas faire lorl à ces
mencemenl, (lies allaient deux à deux ()ar cliaslrs épouses de Jesus-(>hrisl si nous ne
1,1 Mlle pour li-s chercher. Celles qui élaienl nous conformons jias à ce qu'en a écrit de-
desiinees pour cet emploi ne pouvaient lioire puis quelques années M. (le Marivaux dans
ni manger en ville. Il n'eiait pirmis qu'aux une nouvelle Vie de la même réformalrice,
quéliu^esde sortir, car elles fjisaii'Ut V(eu puisque nous aurions cru aller contre la vé-
lie perpétuelle clôture, comme il est encore rilé de l'hisloire.
ordonne par lcur> cunslilulions el comme il Cet auleur, parlant de l'origine de ce mo-
csl porte par la fornjule de leurs vœux, na^lère des lilles l'énilenles, dit que, le I'.
qu'elles pronone ienl en celle manière : Je, Tisserand prêchant avec succès, un grand
A ., roue it promets à Dieu et à ta Vierge Ma- iiomliri' de dillérenlcs personnes et de dilïe-
1 le, et à monsei(jnciir l'évéqnc de l'arn, iimn reiit se\e,dislinguees jiar leur vei lu, vinrent
prélat it pire spintacl^el à vous mère , sous- !,■ irouver, lui proUslanl ([u'elles voul.iieiil
vure, et tint le couvent, slaiiilile et fermdé sei\ ir Dieu toute leur vie; qu'elles s'aban-
soHs clùlure perpétuelle en ce lieu ici, la con- dunnèreiit sous sa conduile, qu'il se Ir.iuva
version de mes mœurs, chasteté, pauvreté (t plus d • deux cents demuiselhs qui prirent
obéissance, selon larrglc de monseigneur saint celle resolulion, cl qu'il les renlerm:! dans
AtKjKslin et selon les statuts, réfurmatiun (t un monaslère. I our leter lillusion populaire
inodifualion fails et à fuii e pur J{. P. en l)ic:i (à ce qu'il pieliiid surle nom de rénilenles,
monseigneur Jehan, éiéque de Paris, l'iin qu'elles ont loujnurs eu, il ajoute ((ue ce nom
l'iOT.lJuant à leur liabillemcnt, il élail blanc, leur fut iinpnsé parce l'ère en considération
aussi bien que leur voile. des ch.ingeinenls qu'elles (ireni d'une vie
11 y avait aus>i des religieux qui avaient douce et délicieuse, telle qu'est celle des lil-
élé I areillcment inslilués dansée monastère les de qualité dans le monde, (juelque ver-
par le même évéque, desquels le P. du Ureuil lueu>es qu'elles soient, à la vie austère qu'el-
n'a point parlé. Ce prélat, par ses conslitu- les emlirassèrent si généreusement dans s.i
lions, ordonne qu'il y aura dans ce mon:is- nouvelle religion. M. de Marivaux convient
1ère des religieux qui suivront aussi la régie (|ue l'éièqnc de Paris Jean-Simon leiirdonn.i
de sa ni Augusiin, (jui auriiiit des chaperons des conslilntions qui furent observées de
et des robrs grisis, cl une autre robe de toutes les religieuses avec une exactitude el
laiiie blanche par-ilessous. Us de\ aient faire unr fnlclilé iin lolalibs. .Mais ce prélal n'ati-
un au de novicial, après letiucl ils lais.iienl rail il pas été digne de lilàme, si, voyant plus
leur |)rolessioii à la grande grille de ce cou- de deux ccnls lilles chastes el lertueuscs <|ul
vcnl, entre li'> mains de la supérieure el du se niellaient en congrégation pour y vivre
l'ère conlessi'ur en ces lenii'S : Je, N., pro- séparées du moiiile el se donner pour épouses
mets tt voue à Dieu et à monseigneur t'évc- à Jésus-t^lirisl, il les a^ail ohligees d.ins le
t/ue de Paris, mon pié.al . à vous mère, à tout commencemeul de leur retraite de ne rc(c-
le coûtent, et à luus, Leau-père confisseur, voir parmi elles 1)111! des lilles iirostiluées ipii
chasteté, piuvrelé et oludience, principale- devaient faire serment s^r lis saints Kvan^i-
mcnl à mou prdat monseigneur réveque de les qu'elles ne s'elaienl point f.iil cori'oinpie
Paris (t au couvent des srurs de ce nwnnsure, en intention d'entrer dans cri ordre, où l'on
ce qui lait voir que le P. Cesnay s'est lrom|ié ne pouvait élre ri eu iju'après avoir comiii.s
lorsqu'il a dit que Icï teligieuses Fille -l'éiii- iepechédela ch ni ? Peut-on croire Al. de
teilles à Paris avaient embrassé riuslilnl du Marivaux, lorsqu'il dit (]u'il n'a rien avamé
bienheureux lierlrand, puisque les religieux (jue de vrai, et que ce n'est qu'après avoir
di: son ordre élai. ni habillés de noir, cl ([ue examiné les litres originauv de la bimlalion'.'
crux qui élaienl au monastère deil'il.es-i é- cl a-l-il pu s'imaginer que, quoiiiue les rel-
nileiles étaient babil es de gii<, et avaient gi 'Uses Pénitentes aient peul-élre su|ipriiiié
de instilués par l'évê.iue de Paris. Les reli- leurs anci''iin< s consiitutions, il ne s'en Irou-
gieuses deiaient pourvoir à toutes les iiéces- x.'it cneoiedes exe.iiplaires dans queluucs
Mié> des leligieuv, tant pour le»i\re que bililiothèqnes, comme en effet il s'en trouve
pour riiabillement el les études, lilles en dans celles du roi et dans celle du collège
' lisaienl un pour conlesseur, et il en devait des II. P. de la compagnie de .lésus à Pans
'-.buisir d'autres pour le soulager. Ces reli- cl dans qm 'qii' s antres, où l'on peut h s cun-
80)
MAD
MAD
8!0
suller. Elles sont toutes en lettres gothiques,
ce qui fait voir qu'elles sont des premières
éililions qui furent faites du temps de l'évê-
que Simon.
Ces dames de Saint-Magloire, comme elles
veuli'nt èlre appcléesà présent, suivant l'ins-
cription qu'elles ont fait mettre depuis peu
au-dessus de li'ur porte, ne doivent point
roufiir de porter le nom de l'cnilenles, puis-
qu'elles se sont consacrées à Dieu p.tr la pé-
nitence en entrant en religion. Elles doivent
imiter tant d'hommes et de filles qui ont pris
ce nom, et ont formé un ordic religieux,
où, pour me servir des termes de M. de Ma-
rivaux, ces enf;ints innocents se sont con-
sacrés pour imiter Jésus-Chrisl, qui, tout
iiiuoccnt qu'il était, a voulu être le premier
et le plus illustre des pénitents, établissant
son royaume dans les douleurs, faisant son
sceptre el son trône de la croix, comme son
diadème d'épines. Quoique le public donne
encore le nom de Pénitentes à ces dames de
Saint-Magloire, et quoiqu'elles aient toujours
conservé beaucoup de dévotion pour Made-
leine pénitente, on ne tire pas de là une con-
séqiience qu'elles aient auparavant suivi
Madeleine pécheresse, puisqu'elles ne sont
pas les seules dont les nrbnasiôres, ayant été
bâtis d'abord pour servir de refuge à des
pécheresses publiques, sont devenus dans la
jsuite des sanctuaires de saintes vierges,
comme on en voit un exemple dans l'article
suivant.
La Mère Marie Alvéquin, ayant été tirée
du monastère de Monlmarire avec sept reli-
gieuses pour réformer celui des filles Péni-
tentes de Paris, y entra le 2 juillet IGIG, et
mourut, le 25 janvier lC48,dans une grande
réputation de sainteté, étant âgée de quatre-
vingt-deux ans. Les désordres de la guerre
avaient causé dans ce monastère beaucoup
de relâchement; mais elle y rétablit en peu
de temps les observances régulières, et leur
fit prendre un habillement diiTérentde celui
qu'elles portaient, leur ayant donné un ha-
bit de couleur minime, avec un scapulaire
de même, et leur ayant aussi donné un voile
noir. Je ne sais si l'on doit compter au nom-
bre des réformes qu'elle fit en ce monastère
l'adoucissement qu'elle apporta dans les aus-
térités, si l'on doit ajouter foi à M. de Mari-
vaux ; car. selon cet auteur, elle leur fit dire
matines à huit heures du soir, au lieu qu'el-
les se levaient à minuit ; elle leur lit quitter
les chemises de serge pour en prendre de
toile, et leur fit mangerde la viande le lundi,
au lieu qu'elles n'en mangeaient pas. Nous
voyons de pareilles réformes s'ériger tous les
jours dans les monastères, contre linlention
des fondateurs.
Voyez, pour les Filles Pénitentes de Paris :
du Breuii, Anliquitis de Puris ; les anciennes
Constitutions de ces religieuses imprimées à
Pans en 1300; Biesse, Vie de la Mère Marie
Alvéquin, leur réformnlricc ; et de Marivaux,
Vie de la mcine réformatrice. Pour les reli-
gieux de la Pénitence de la .Madeleine à Mar-
Svîille : Gosnay, IJist. Mnssil.; et, pour l'or-
dre de la Madeleine en Allemagne : Clironi-
DlCTlONNAlBE DES OhUKES RELIGIEDX. 11.
cnn cœnohii Monds Francorum Goslariœ, et
Joann. Buschius , De Reformât. Monast.,
(tpiid Leibnitz; Hist. Bninsvic, loin. 11.
M A DELONNETTES (Religieuses deia Ma-
DELEiMî, ou) fl Metz et à Noples.
Les religieuses du monastère de Sainl-Ma-
gloire à Paris, et que le peuple apiielle com-
munément filles Pénitentes, ne sont pas les
seules à qui le nom de Pénitentes semble en
(luelque façon odieux. Celles de la Made-
leine à Metz étaient aussi appelées sœurs
Pénitentes, cooime il paraît par une sentence
de l'évéqne Conrad r,ayer deBopparl, rendue
l'an 1452 en faveur îles chanoines de l'église
collégiale de Saint-Thibaut de la même ville,
par laquelle ce prélat, pour satisfaire à un
bref du pape Nicolas V, érigea le monastère
de Sainte-Madeleine de Meiz des sœurs Péni-
tentes, en une église collégiale sous le titre
de la sainte Vierge et de saint Thibaut, et la
chapelle de Sainte-Elisabeth en un monas-
tère de ces religieuses : Ecvlcsiam et monns-
lerium B. Moriœ Magdalenœ Melensis soro-
luiii Pœnitenlitim, in collegiutam sab nomine
et vocabiilo D. el ijloriosœ Virginis Mariœ al
sitncti Iheobaldi, et capellnm Sanclœ EUsa-
beth(nlias Yet^ris Ccemeterii) inmonasterium
sororum Pœnitentium ereximus et erigimus pcr
prœsentes, etc. Cet acte est rapporté par Mû-
risse , évêque de Madaure, dans son Histoire
des Evéqnes rie Metz. Il tire île là une consé-
quence que ces religieuses de la Madeleine,
à qui le peuple a donné le nom de Madelon-
nctles, étaient déjà établies à Metz, et dit qu'il
n'a pu trouver précisément le temps de leur
établissement. Mais ces religieuses prétendent
a voir été établies pi us de quatre cent cinquante
ads auparavant, et font remonter leur origine
à l'an 1005, ce qu'elles auraient sans doute
bien de la peine à prouver. 11 se peut faire
(sue cette chapelle dédiée à sainte lilisabelh,
mère de saint Jean-Baptiste, dans son origine,
et où ces religieuses ont été transférées en
li52, ait été bâtie en 1003 ; mais le nom de
s(Eurs Pénitenles, qui leur est donné dans la
sentence de l'évêque de Metz, les religieuses
d'Huys du môme ordre (selon les Mémoires
qui m'ont été envoyés) et qui vinrent pour
rétablir cette maison, qui avait été abandon-
née pendant les guerres, et oii il n'étaiS
resté qu'une sœur converse ; les monastères
de Tordre de la Madeleine qui sont encore en
Allemagne, et où les religieuses tout habil-
lées de même qu'à Metz, me font uoi.e que
celles-ci, à qui le peuple a donné le nom de
Madelonneltes, sont du même onlre que les
religieuses de la Madeleine en Allemagne, et
cette sentence, rendue l'an 1432 par l'évêque
(Conrad, fait connaître qu'elles ne peuvent pas
avoir tiré leur origine du monastère des
Filles-Penitentes à Paris, qui ne furent éti-
blies que l'an 141)2, comme nous avons déjà
dit.
Cependant les Madelonneltes de Metz se
disent présentement chanoineiscs , ce qui
parait, disenl-ellcs, par les anciens monu-
ments qui sont dans leur monastère el pâl-
ies figures des anciennes religieuses; et ijua
■lu
su
niCriONNAIIlF. DES ORDRES REI.IGIF.rX.
!M2
si elles portrni présonlniiciil une rnlie l)lnii-
rhe cl un sr.ipulaire di' mèini-, Ci" u'c^l qu'à
cause de la dévulinn que leurs iMicieiines
porlaient à s .inl Du i iuiq le, ajanl voulu
prendre Tlialii! des religieu-es de son oritie,
lorsque, vrr> l'an l'22l, il élahlil le louvenl
lie SCS religieux à Metz ; el que dans l.i sulle,
pour se (lisli't!;uer îles religieuses de tel <ir-
(lie, elics quillèrenl le srapulaire el la chape
noirs pour en prendre de l)ianc«, le scapu-
laire el la (h'penoirs étanl restés à leurs
sœurs converses. Mais je u';ijoule pris brau-
ciiup de foi à ces mémoires, d'auianl plus
que CCS reli;;ii uses Madclorinclles smil mal
iiifiTuiccs de l'h ibilleiiicul des religieuses de
l'ordre de Saiul-l)ouiini(iie, qui ne porlenl
point de srapulaire noir, si ce u'esl les sœurs
converses; d'ailleurs, dans le temps que ce
saint fonda son ordre, ou plutôt avant qu'il
l'eût fondé, il avait établi les religieuses du
Tnona-^'ère i!i- l'rouille, auxquelles il donna
pour liabilleniiMit une robe blanche et un
inaiiUMU de couleur tannée. Nous donnons
riiabillemcnt des re'igieuses .Madclonnellcs
de iMelz tel qu'elles le portent présenle-
ment (1). M est \in\ qu'il y a quelque union
enire l'o d e de Saint Doniinit^uo el celui de
la .Madelein', puisque l'ordredela .Madeleine
suit les coiistituiions de l'ordre de Saint-Do-
niinique : au moins il y avait en Allemagne
plusieurs mona léres qui suivu'cnl ces consii-
lulions, ce qu'ont pu faire aussi les Mad.lon-
neltes de Meiz.
Mémoires manuscrils envoyés eu 1708; et
l'on peut consuiterMurisse dans son Ilisloire
des Eréqncs de MeIz.
Les monastères des religieuses de la Ma-
deleine et de Sainte-Marie-Egjptienne à Na-
plcs sont du nombre de ceu\ qui, ayanl été
destinés d'abord pour servir de relraile aux
pécheres-ics publiques, sont devenus dans la
suite des sanctuaires de saintes vierges pa-
reils à ceux dont nous avons déjà parle. Cf lui
rie la .Ma Icleine fut fondé l'an 13-2't, et doté
par la reine Sanche d'Aragon, femme de Ro-
l)ert, roi de Napics, pour des pécheresses
publiques qui, touchées de repentir, avaient
dessein do faire pénitence. Celle pieuse reine
avait un si grand zélé pour le salut de ces
pauvres iréatures, qu'elle allait tous les
joursdans ce monastèie avec son confesseur,
le P. rhilij.pe Agueiro, de l'ordre de Saint-
Trancois, pour leur faire faire des exhorta-
lions* <iui furent si cflieaces, que dix ans
après la fond ilion de ce nionaslèie, de cent
quitre-vingl-di'ux de ces pécheresses, iiui.à
lasolliciliiionde cette princesse, élaicnt en-
trées dans celle maison, il y en eut cent
soixanie-six qui firent les vœux s -lennels
entre 1rs mains de l'arclievéque de Naples,
ddul p'usieiirs moururent en odeur de sain-
teté. Celle princesse voulut aussi que ce mo-
nastère lïil soumis aux religieux de l'ordre
de Sainl-l'raiicois , ce que l'archevêque ac-
corda, l'an l.J'i'l , à condition que les religicu-
ies seraient oblit;ées de donner tous b'S ans à
{'église métropolilainc un cierge d'uue livre.
Il y avait déjà pour lors trois cents religieu-
ses dans ce mon-istéi'e; mais dans la suite
on n'y a plus reçu que des (illes d'honneur
el vertueuses, qui snnl presiMilemrnl au nom-
bre de quatre-vingts, lilles ont la règle de
s ilnt Augustin el un habit noir, el pour
ceinture une corde bl inche, comme les reli-
gieuses de l'ordre de Sainl-Franeois. Les re-
ligieux conventuels de cet ordr' en ont eu la
direction jusciu'en l'an ritiS, (|ue, par ordre
du pape rie \ , les religieux de l'Observanci-
prirent leur place et eurent au-si la direetioi\
des religieuses du monasiére deSainle-.Marie-
I'!gypiienne, que les conventue.s leur aban-
donnèrenl aussi.
Ce monasiére lui aussi fonde par la reine
Sanche d'Aragon pour des lilles et des fem-
mes repenlies, à cause que celui de la Ma-
deleine ne se lrou\ail pas assez grand pour
contenir le nombre de c 'Iles qui ntiillaicnt
leur tnauvaise vie. L'archevè ]ui' de Naples,
qui avait consenti que les religieuses de la
Madeleine fussent sous la direction des reli-
gieux de l'ordre de Sainl-l'"rançois, accorda
Il même grâce à celles deSaiiite-Marie-I'!gyp-
lieiine, l'an 13i2, à condiiion qu'elles donne-
raieiit aussi tous les ans un cierge d'une
livre à la cathédrale. Klles furent soumises
pareillement aux religieux conventuels :
mais par ordre du pape Pie A' elles furent
mises sous la direction des l'ércs de i'iibser-
vance de Saint-François. Elles ont, ronime
les religieuses du monaslèie de la Madeleine,
la règle de saint Augustin et l'habit de s m
ordre avec la tord ■ blanche de celui de
Saint-François.
Voijrz, pour CiS deux monastères : Franc.
Gonzag. De Origine Str.iph. iili<j.; Wading.
Annal. Minor.
MADELONNF.TTES (Heugieisks »k i.'onoBB
Diî LA Madeleine, âi-PELiacs comminl-
hievt) (l Paris, ù llouen ci à liordedux.
Les religieuses de l'ordre de la .Madeleine
ou Madi'lonnellcs, dont nous allons parler,
sont dilTérenles de celles dont nous avons
parlé dans l'article précèdent; elles o;il
pris leur origine à Paris au coniiiencemenl
du diTiiier siècle. Celle ville est si grande
et si peuplée , qu'il ne faut pas s'éton-
ner s'il y a un si grand nombre de filles et
de femmes qui, s'oub'.ianl de leur devoir,
prosiiluenl leur honneur, el s'il y a tant de
maisons [our les recevoir lorsqu'elles veil-
le il se convi'rtir, ou pour les enfeiuier di;
lorce lorsquelles ne veulent point quitter le
vice, telles que sont le monastère des ^Lade-
lonnetles el les communautés ilu Hon-Pasieur,
du Sauveur, de Sainle-Pel.igie, de Sain'e-
'l'Iiéodore el queliiues autres. Mais, connue
la plujiarl de ces communautés ne sont que
séculière-, nous ne | arlerons ici que des
Madelonneltos, dont la plus grande par in
de la communauté est composée de religii'ii-
scs qui forment un ordre particulier, piii-
qii'il y a encore des ma-sons ilu même insti-
tut à Rouen el à Bordeaux ; et que ces tiois
(l) }:y., ii\.< lin .In v..l.,n<' 201.
813
M AD
nionastf^rfs suivent les mêmes conslituli^ns,
qui ont été dressées par l'ordre du p.ipe Ur-
bain vm.
Ce fui i'an 1G18 que cet ordre prit nais-
sance à l'aris, par le moyen du R. 1'. Alha-
iiascMolé, capucin, frère de M. Mole, pro-
cureur général du pariemetil; d'un riche
marchand de vin de celle ville nommé de
Monlry, el de M. du Frcsne, officier dans
les garles du corps du roi, qui tous trois,
animés du zèle de la gloire de Uieu el du sa-
lut du prochain, s'employaient conllnuelle-
nienl à la conversion des pécheurs et des hé-
réiiques, el au soulagement des pauvres el
des malades. Ce fut donc l'an 1018 que ces
personnes charitables ayant relire quelques
filles du vice où elles s'élaionl plongées p:ir
leur prosliluliou, on leur loua d'abord des
thansbres au faubourg Saint-Honoré ; mais
ce lieu ne se Irouvant pas propre pour la re-
traite qu'elles embrassaient, le sieur de
Monlry leur céda sa propre maison située à
la Croix-Uonge, au faubourg Saint-Germain,
et en loua une autre pour lui à côté, pre-
nant soin de ceà pauvres créatures, tant
pour lanourriUiie que pour les secours spi-
riluils qu'il leur procurait; et en peu de
temps elles se trouvèrent jusqu'au nombre
de vingt. Les Bénédictins de; l'abbaye de
Saint-Germain des Prés leur permirent d'a-
voir une ( bapelle chez elles. La première
messe y fut célébrée le 25 août de la même
année 1018, et peu de temps après elles em-
brjssèrenl la clôlure, ne parlant aux |ier-
sonues du dehors qu'à travers une grille à
la manière d,s religieuses, et ne sortant
point de leur maison. Deux ans après, sainl
Franco s de S. les, évèque de Genève, ayant
prêché dans leur chapelle le jour de sainte
Madeleine, donna à quel(|ues-uncs de ciS
filles un haliit religieux; el, cunnie le nom-
bre de ces iilles augmentait considérablement,
un les transféra dans une maison plus ample
proche le femple. La marquise de Maii^ne-
lay se déclara fondatrice de celle nouvelle
maison, et cette communauté ayant été so-
lidement établie, comme les personnes qu'on
y recevait avaient plus besoin d'èire con-
duites elies-mêmes que de conduire les au-
tres, n'ayant ni l'expérience ni les qualités
requises, on leiir donna, pour avoir soin d'el-
les, des religieuses de l'ordre de la Visitation
de Notre-Uame. Il y eu eut qualre du pre-
mier njoiiaslère de l'aris, qui l'urenl desti-
nées pour cela. Klles entrèrent l'an 1629
dans celui de la Madeleine, el remplirent les
premières charges, comme de prieure, sous-
prieure, portière, tourière; et de lemps en
leuips un les changeait pour les soulager du
grand travail qui se rencontrait ilans la
conduite de ces Repenties, dont quelques-
unes y étaient malgré elles el par auto-
rité de justice. La conduite de ces religieu-
ses de la Visitation a été accompagnée
de tant de bénédiction, qu'elles ont éta-
bli un très-bon ordre dans cette commu-
nauté, qui est ordinairement de cent ou
cent vingt personnes. Mais enfin elles se
sonl las^6cs de ces oi ( ui'aiions. el elles ont
MAD SU
mieux aimé resler dans leurs monaslèros.
Les religieuses Ursulines leur ont succédé,
el n'ont pas fait moins de fruil pendant en-
viron trente ans qu'elles ont eu la direction
el la conduite de ce monastère; el enfin de-
puis quelques années M. le cardinal de Noail-
les, areliiMéque de Paris, a mis à la place
des Ursulines des religieuses hospitalières
de l'ordre de la Miséricorde de Jésus. Les
constitutions que l'on observe dans ce mo-
naslère furent dressées l'an tG37 et approu-
vées par Jean-François de Gondy, archevê-
que de Paris, le 7 juillet 16iO, suivant le
pouvoir (ju'il eu avait reçu du pape Ur-
bain Vili, qui érigea celle maison en mo-
nastère, et elle en a produit deux autres,
l'une à Bordeaux, l'autre à Rouen.
Conformément à ces conslilulions, l'on no
doit recevoir dans les maisons de cet institut
que des filles ou femmes qui ont mené une
vie déréglée; el il est défendu sur peine
d'excommnnicalion d'en admettre d'autres.
Si néanmoins quelque fille se lrou\aitcii
danger de se perdre, ou ne laisse pas de la
recevoir, étant présentée par ses parents,
quoiqu'elle n'ait pas encore fait faute, mais
elle ne peut demeurer que pour un temps
dans le monastère parmi les religieuses pro-
fesses.
Trois sortes de congrégations se Iroovent
dans ces sortes de monastères. La première,
sous le titre de la congrégation de la Made-
leine, est destinée pour celles qui sonl ad-
mises à faire les vœux solennels, après qu'el-
les s'en sonl rendues dignes par leur bonne
conduite. La seconde congrégation, sous la
titre de Sainle-Marihe, e>t de celles que l'on
ne juge pas encore capab'es d'être religieu-
ses, ou qui, pour quel(]ues considérations,
coîiime de mariage , ne peuvent préten-
dre à faire les vœux solennels. Enfin la troi-
sième congrégation, sous le litre de Saint-
Lazare, est destinée pour celles qui ne sont
nullement disposées au bien : el toutes ces
dilTéreiUes cougrégations ont leur quartier
séparé; nous allons >oir maintenant quels
sont leurs exercices et observances.
La clôlure est étroitement girdée, cl les
sorties interdites aux professes de la pre-
mière et de la seconde congrégation ( sinon
au cas permis), sur peine d'excommunica-
tion; mais aux autres du troisième rang, sur
peine de châlimeut exemplaire. Fîtes ne
parlent point seules aux personnes du de-
iiors, el jamais à personnes suspectes ou
qu'elles auraient connues dans la prali(iue
du mal ; elles ne vont point aussi au parloir
pendant l'avent, le carême et certains au-
tres jours marqués dans les constitutions.
Celles du premier rang se lèvent en tout
lemps à cinq heures, font une heure d'o-
raison mentale chaque jour, demi-heure le
malin el autant après compiles ; elles récitent
tous les jours le |)etit oflice de la Vierge, el
le grand office de l'Eglise à certains jours de
l'année. Elles font trois jours de retraite spi-
rituelle avant la fête de la Madeleine, autant
avant celles de Pàquis, de la Pentecôte et de
ISoél, el un jour avant celles de l'Assomplioi)
SIS
DICTIO.N-VAIIIK IiKS OHDRKS UELIf.IRUX
816
ol <le I.i Puiification do Ncilre-D.iino, "le s.iint
Aii(;iisliii cl (le s.iiitle M^rlIic. Outre les
jeûnes commandés par l'ICglise, elles jeûnenl
encore r.ivenl et Ions les vendredis de l'an-
née, cxrepié depuis l'àqiies jusqu'à la l'en-
tecAle. Klles font alislinince lous les mer-
credi?, à moins qu'il n'arrive un jeûne dans
la semaine, hors le vendredi et le samedi.
Tous les vendredis elles prennent la disci-
pline, cl tous les m Tcredis pendant l'avenl
et le carême, <l les veilles des fêles de sainti;
Madeleine et de saint Aujjaslin, cl ces deuv
jours, aussi bien que celui du vendredi saini,
elles n'ont qu'un mets d'hcrbi'S ou de le};i'-
mes au dîner; on nu leur di)nno aussi ces
jours-là à la collaiion que du pain, et elles
mangent à lerre ces trois jours-là. Après
avoir (luillé la congrégation de Sainte-Alar-
Ihe, elles font deux années de novieial dans
celle-ci, après lesquelles elles font leur pro-
fession solennelle en prononçant leurs vœu'i
selon celle formule.
Au nom de la Irès-sninte Trinité, Père,
Fils cl Saint-Esprit, et en ihonnnir de In
glorieuse Vierijc Marie et de sainte Madeleine,
vloi, sœur A'., devant toute la cour céleste et
à la face de 7iotre mère sainte Eglise, époine
de Jésus- Christ, voue tt promets à l>ieu obéis-
sance, pamrelé et chasteté entre vos mains,
mon It. P. commis et dépulé supérieur de cette
maison, par Monseitjncur l'iluslrissime et
révérendissime A.; en présence de vous, ma
révérende Mère prieure, selon la règle de saint
Augustin cl les constitutions de cette mai.^on
et monasière de Sainte-Mane-Madcleine ,
données et approuvées par H. P. en Dieu
M. Jean ErançAs de Gondtj, premier arche-
vêque de Paris, cl de l'autorité du Saint-Père
le pape Urbain Y lll, suivant lesquella je
iniih'.ige d'aider, recevoir et retenir enitlie
maison, les filles et femmes de la qualità et
condition portée par Icsdites constitutions, ce
que je garderai moyennant la grâce de Aotre-
Stigneur jusqu'à la mort.
Après (|u'ellcs oui prononcé leurs vœux et
r<;çu le voile noir, elles se prosteriicnt par
lerre, on Us couvre d'un drap niorluaire;
l'on réelle les prières des morts avec l'oiai-
sow. Absolve, quœsumus; laquelle étant finie,
les sœurs jelleul de l'eau bénite sur les pro-
fesses; et, lorsqu'elles sont relevées, on leur
met une cou ro il lie d'épim ssur la léle..le ^assc
sous silence tous les autres exercices qui
leur sont communs avec les religieuses des
autres ordres, cl plusieurs autres qui b'ur
sont particuliers et de peu de consé(iueMce.
L'on remarijuera seulement que leur pau-
vreté est très-rigoureuse il leur oliéissance
très-exacte. Leur habillement consiste en
une robe cl scapulaire de couleur minime .
serrée d'une cortie blanche, et leur guimpe
est pareil, e à celle des religieuses de la \isi-
talioii ; au c hieur et dans les ccrémnnies elles
lie se servent point de manteau (Ij.
Ouaiit aux sœurs de la congiégalio» de
Sainte-Marthe , elles se lèvent en tout lerii|)s
a cinq heures el demie. A six heures elles
\ont au lieu destine pour faire leurs prières,
où elles demeurent enviroi Irois (|uarls
d'Iieure , tant pour faire les exercices du
matin qui' pour l'oraison meiitale ei réciter
leurs prières aecoulumées, étant obligées du
diie sur peine de pèche le pclil office de la
Vierge, el celles qui ne savent lire, cerlaifi
nombre de Pater et d'.lic; el les jours que
celles du premier rang disent le grand of-
fice, outre l'olfue de la Vierge, celles-ci sont
obligées de réciter encore un tiers du rosai-
re, comme aussi, lorsque le-i autres disent le
grand ollice des morts , el lors(iu'on ne dil
(lu'un Nocturne , elles ne disent i|ue trois
dizaines. Au sortir des priéies elles vont re-
cevoir l'obéissance de leur Mère maitresse ,
qui leur ordonne ce à quin elles doivent
s'occuper tout le jour, lilles dinenlà la iiiéme
heure que celles du premier rang, mais dans
un réiectoirc séparé , demeurant aussi dans
un quartier séparé, comme nous avons dil.
Elles font les mêmes abstinences de viande,
mais elles ne jeûnent (jue trois fois la se-
maine pendant l'avenl, el les autres Imu
jours elles n'ont qu'un mets au souper ,
comme aussi les vendredis depuis l'àqui:.
jusqu'à la saint .Michel. Ouaiil aux vendredis
depuis la fêle de saint Michel jus<iu'à Pâques,
elles jeûnent, mais la supérieure leur doit
accorder aisément la dispense des jeûnes el
des abstinences. A cinq heures un ()uai telles
quittent leurs ouvrages pour aller faire l'o-
raison mentale pendant une demi-heure ,
après laquelle elles \oiit au réfectoire ponr
souper; la récréation dure jusiju'au premier
coup de matines, que commence le grand si-
lence qui dure jusqu'au lendeiiiaui. l'endanl
les matines des sœurs du |:remier rang ,
celles-ci se lienneiit dans la chambre du tra-
vail, où leur maîtresse lit ou fait lire quelqtin
bon livre, et elles travaillent juscju'au Te
Dvum, qu'elles vont au chieur pour dire leur
office et faire leur examen, api es leiiuel elles
se retirent pour être aussitôt couchées que
les sœurs du premier rang.
Elles ne lonl que des Vieux simples, et si,
avant (|ue de les avoir faits, el.cs sont bien
alfermies dans la vertu il se trouvent re-
cherchées en mariage par quelque personne
exempte de loul soupçon, le supéiieurel la
Mère piieure y peuveiil consentir, el mémo
fournir quelque chose pour la dut, si la
maison a reçu queUjue chose pour cet effet.
^'il se trouve aussi iiuelque dune i|ui eu
veuille prendre à son sei » ice el s'en charger,
on la Un peutduniier. pniiiv u qu'elle ail quille
ses mauvaises habitudes au mal. Leur ha-
billemeiit est semblable à celui des religieu-
ses du premier rang, sinon qu'elles n'ont
[loint de scapulaire, el (ju'elles ne portent
qu'un voile blanc.
il y a aussi des règlements pour celles de
la congrégauou de r>aint-Lazare , destinée
pour les lilles < t fcMiiDes que l'on rcnlerme
malgré elles , el ou l'on met pour un lemp»
celles du Second rang qui ont lait des faulea
considérables uu donne quelqui; iiiau\ai3
(I) Votf., ii la lin du vol., u' 'i02.
S17
MAP
MAD
8!S
çxem|ile , afin d'y f;iiri' la pénilence qui leur
est fiijoinlc , soil pour y èlre reiii'erniéi's
durant crrialii tomps, soil pour y Caire quel-
(•,uos aulrc-i iiiorli(icalioiis pr(>(iorlioniices à
leurs fautes, (^oiume celles iiiii sont dans
celte congicgaiion ne sont pas poricfs au
I)ien, aussi ces rèjjlemeuls ne sciiit pas exnc-
lefiiciil observés; eu leur fait l'aire néanmoins,
aulanl qu'il est possible, les uiêuies exercices
qu'à celles du second rang qui n'ont point
(ait de vœux , conime sont les femmes ma-
riées et .-iiilres, soil pour les prières, soit
pour les ouvrages. Si elles ne sont point
soumises, on les renfernie plus étroitement,
on les prive de vin, on leur reiranclie leur
pitance et on leur ordonne quehinc autre
inorlificalion; ce qui se doit enlendre decelb's
qui sont mises dans ce monastère contre
leur gré; car, pour celles que l'on y envoiedu
second rang.ellcsont ])oi;r règlement la l'orme
(le la pénilence qui leur est imposée; et, au
cas que par obstination elles témoignent d'y
vouloir toujours demeurer et de ne plus re-
lourner à leur congrégation, après s'élrc
servi de tous autres moyens , on les traite
en sorte qu'elles reconnaissent leur aveu-
glement et qu'elles demandent d'en sortir.
Sitôt que celles que l'on a niences de de-
hors contre leur gré témoignent véritablement
vouloir embrasser le bien, on leur donne
pour un temps plus de liberté pour les éprou-
ver et les riconnaîlre, et, voyant qu'elles
n'en abusent pas et qu'elles téuioignenl par
leur conduite vouloir [lersévérer dans le
bien, on les l'ail passer au second rang; mais
généralement on les tient toutes renfermées,
plus ou moins, selon les dispositions qu'elles
l'ont paraître, et selon qu'elles se rendent
plus ou nidins dignes de quelque grâce , et
celles qui s'en rendent digues mangent au
petit réfectoire avec les sœurs qui les gou-
vernent. Elles se lèvent et se couchent à pa-
reille heure que celles du second rang, cl
elles ont les mêmes prières et les mêmes
exercices.
Voyez les Conutitiitiuvs de cet ordre; la
Vie de M. Vincent de Paul par M. Ahelly, et
la relation de la naissance et progrès du mo-
nastère des Madelonnetles , imprimée à Paris
eti 1C49.
1 II est surprenant que le P. Hélyol n'ait pas
donné dans son admirable ouvrage un cha-
pitre sur les religieuses de la Miséricorde de
Jésus, car ces hospitalières ne lui étaient pas
inconnues, puisqu'il les uientionnc ci-dessus
comme ayant dirigé pendant quelque temps
la maison des Madelonnellei. Cet oubli ne
peut être que l'eflet d'une erreur de rédac-
tion, ou une suite des iiilluences qu'aura su-
bies cette rédaction après la mort d'Hélyol.
Quoi qu'il en soil, nous donnerons dans !(.>
Supplément un article Irès-élendu sur cette
congrégation importante.
Les hospiialièresde la Miséricorde de.Iésus
ne conduisirent pas longtemps la mai'-on des
Miidelonncttes de Paris. Il était diffici'e qu'une
communauté composée comme l'était celle de
la Madeleine soulTrîten paix l'administration
d'un institut étranger, et laissât quchiuc agré-
ment humain aux religieuses chargées de la
conduire.
En l'année Î720, le cardinal de Noailles,
aichevêque de Paris, devant changer les su-
périeures qui gouvernaient les filles péniten-
tes de la Madeleine, s'adressa auK supérieu-
res de plusieurs maisons de Paris, pour ob-
tenir cinq des meilleurs sujets pour répondre
à ses vues. Le cardinal reçut partout un re-
lus ; et comme il s'en entretenait avec l'abbé
\ivant, chancelier de Nolre-Oamc et supé-
ri 'ur de la Madeleine, en présence de l'abbé
de Robieu et de l'abbé de Caumartin, qui
était alors évê(|ue nouuné de Blois, ces ecc è-
siastiques apprirent au cardinal qu'il y avait
tians l'Eglise des religieuses destinées, par
un quatrième vœu, à travailler à l'instruc-
lioîi et à la conversion des filles et femmes
pénitentes, et qu'ils en connaissaient un à
\'aiines, en IJrelagne, qui faisait de grands
fruils. Le cardinal les pria de lui procurer
cinq ou six religieuses de cette communauté
pour gouverner la maison de la Madeleine,
qui avait été jusqii'abirs conduite par des
ri'iigieuses de différents ordres. Les monas-
tères de Vannes, de Kenncs,de Tours, refu-
sèrent successivement. Ce dernier indiipia le
monastère de Guingamp, au dincèse de Tré-
guier. Le cardinal, ami de l'évêque de Tré-
guicr, ne douta plus qu'il obtiendrait là l'ef-
iet de ses désirs. Il l'obtint; mais les reli-
gieuses, répugnant à cette obédience, ne
l'acceptèrent qu'à la condition qu'elles fe-
raient un établissement à Paris, établisse-
ment qui fut la maison de Saint-Michel, dont
nous parlerons dans un article prochain.
Les religieuses destinées à diriger les Made-
lonnettes arrivèrent au nombre de cinq cho-
ristes et une converse, le 30 avril 1720 au
soir, et furent aussitôt installées à la Made-
leine, où le souper qu'on leur servit leur lit
pressemir tout ce qu'elles auraient à soul-
irir dans celte maison. Leurs prévisions ne
lurent pas trompées; miiis elles y mireni du
zèle cl y firent beaucoup de bien. Un grand
avantage qu'elles rn retirèreitl lut leur éta-
blissement à Paris, où une communauté se
forma, rue des Postes. Celles qui étaient à la
Madeleine y persévérèrent pendant quatorze
années. Au bout de ce temps, victimes des
persécutions et des calomnies dont elles
étaient l'objet, elles se virent noircies près de
Mgr de 'Vintimille, archevêque de Paris, qui
reconnut bientôt pourtant ce qu'il y avait de
faux dans les dénonciations du gr.iuil vicaire
supérieur de cette maison (l'abbé liobinol) et
du confesseur des Pénitentes, cl surtout de
celles-ci. Mais les amies des religieuses de
Notre-Dame de Charité (car c'était cet ordre,
fondé par le P. Euiles, à Caen, dans le xvii"
siècle, qui avait été appelé de (juingamp)
firent connaître la chose au procureur géné-
ral,qui manda l'abbé Uobinet et lui reprocha
l'mjusticc des procédés dont on avait usé en-
vers les religieuses. Celles-ci prolHèrent de
(elle occasion pour demander leur sortie di;
celte maison; elles l'obtinrent, et elles allè-
rent rejoindre leurs sœurs au monastère do
Sainl-]\lichel, rue des Postes. Une des causes
r.rt
DICTIONNAIRE DES ORDRES RELIGIEUX.
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«jui anienaipiil l.inl de dosajïrémenls nux re-
ligieuses pouveriianl les religieuses Péiiil<"n-
Isnlcs élail la né^lipcme qu'avaient appor-
lee les N'isilaiidinrs à pardcr une renie im-
porlaiili" destinée aux ri'ligieiises sariicii-
I1C9. et qu'elles avaient laissé confondre avec
le bien des religieuses Pénitentes.
Au bout de neuf ans. Mgr de Vintimillc
manda chez lui deux religiensi^s de Saiiii-
Jlicbel, les pria de l'aider à réparer un pé-
< hé mortel qu'il avait, disait-il en soiirianl,
eomniis il y avait neuf .■ns, en étant Ivop
crédule (il est bien à désirer que les supé-
rieurs ne le soient ni trop, ni trop t(')ti et en
les lais-Mint partir tb' la Madeb'ine, où il vou-
lait qu'elles rentrasseiil. Il -joula que depuis
qu'elles en étaient sorties; il avait donné auv
religieuses Pénitentes deux gouvernemenls ;
que le premier n'avait pu durer que trois
ans, et qu il y en avait six que M. Clianvelin
y était, et qu'il en était fort mécontent. Lui-
même reconduisit , en comi agnie de plu-
sieurs eiclésiastiques, les dames de Sainl-
Michel aux Malelonnelles, le 23 juin 174^!,
et le cortège arriva à la rue des Tontaines à
quatre heures après midi. Les filles de la mai-
son, qui s'étaient flattées que Mgr venait
pour les nicCre en possession de leur propre
i^ouveinen.eiit, n';iyant point ouï dire ou'on
leur eu doiineraii d'aulr • , s'empressèrent
d'ouvrir la purle. Mais qu- lie sur|irise quand
elles >ircnl les dames de Saint-Michel ! Elles
se révoltèrent toutes et avec un ton qui en-
iragea l'archevêque à se fâcher et à les me-
nacer de les envoyer en des maisons de pé-
iiilcnce. 11 se rendit au chœur, où il les fit
appeler toutes. OneUiues-unes des plus vio-
lentes clevèrciit la voix et s'écrièrent qu'el-
les prolcslaienl contre Alonscigneur. Le pré-
lat, reprenant son air i\.' douceur, leur dit :
Mais que voulez-vous que je vous Casse? Elles
répondirent avec arrogance qu'elles ne vou-
laient pas les Mèri s blanches (les dames d-
Saint-Michel sont vêtues de blanc et suivent
la règle de saint Augustin). Mais, leur dil-i!,
je vous en ai d)nné île noires : qu'en ;!vez-
vous fait ? .aujourd'hui je veux jouer au
blanc avec vous. Mais, ajoutèrent-elles, nous
ne voulons pas les religieuses de saint-Mi-
chel. Eh bien ! reprit le prélat, je vous don-
nerai des sœurs grises. Ah! Monseigneur, di-
rent-elles, nous sommes religieuses. (Juc
vou'cz-vous doic , dit-il? Nous aimerions
mieux , rcprircut-clles, perdre quatre mille
cinq cents livres de rente en faveur de lllôtel-
i)i;'u, et nous gouverner nons-inèmes. Le
frél.it réporidit <iu'il n'.iirnait point à perdre,
mais à gngncr. Voyant leur révolte conti-
nuer, il paiiil, plaign.'int les religieuses qu'il
•'imcnaii, et priant la su|éiienre de lui faire
savoir le lendemain les suites de celte
journée.
L'abbé Ueiiaull, 1 ur supérieur, resla. el
la supérieure l'obligea à laire l'inslallatiou
lircscritc par la lègle, cérémonie qu'il vou-
lait dilTércr d(^ deux ou trois jours, et le Te
Dtum fut chante au clia|>itre. I,cs religieusi-s
Pénitentes ne vouliireiil point faire le feu de
Sainl-Jean, selon l'habitude du temps, ni al-
ler à matines. La supérieure obtint ce point
de la règle et même l'exécution de l'autre ré-
création d'usage, à la(;uelle on chanta comme
à l'ordinaire.
On dit aux religieuses arrivantes qu'on ne
les atti'iulait pas; (pi'il n'y avait ri-n de prêt
pour elles, pas uk me des lits. Celles-ci ré-
pondirent qu'elles allaient volontiers coucher
sur de< chai-es. Mais tout se calma, et les
principales vinrent lroii\er les religieuses el
leur dire que tout él.iit arrangé et qu'elles
n'auraient pas d'autre gouvernement que
C'Iui des religieuses de Saiiit-.Mi. bel ; qu'el-
le-; voyaient bien que c'était la volonté de
Dieu, puisqu'elles s'étaient épuisées à faire
dire des nicsses et à faire prier Dieu dans
toutes les communautés de Paris pour qu'el-
les n'eussent pas les Mères blanches. Ces lits
se trouvèrent tout neufs. Les religieusrs blan-
ches y sont en elTel restées jusqu'à la disso-
lution de la communauté.
A ce qu'a dit le P. Ilélyol, nous ajouterons
quelques n)ots. Après les Vi«itandines , eu
ItiTl la direction de la Madeleine fut conl'K-e
à des P)énédiciines de l'abbaye de Bi^aI, en
Normandie, qui ne la gardèrent que cinq
ans, el la quittèrent 1 • ;il mars 1077. Les
Ursulines, qui gouvernèrent après elles, fu-
rent celles de la maison de Sainte-.Vvoie
(pendant trente anO, jusqu'au 18 juillet 1707,
puis celles de Saint-Denis en France, qui
s'en allèrent au bout de trois ans. Les reli-
gieuses de la ^Iisé^icorde de Jésus demeurè-
rent dix ans, et s'en allèrent le 2 mai 1720,
l)our faire place aux religieuses de Notre-
Dame de Charité, dont nous \ enons de |)arler.
L'église du couvent était st)us l'invocation
do la sainte Vierge et avait clé ilédiée le 2
septembre KlS.'j. En lGi7, on avait construit
dans celte maison une cliapellc semblable à
celle de Notre-Dame de Loreltc, el sous le
même titre. Ce monastère était dans la cen-
sive du prieuré de Saint-Mailiu des Champs,
cl payail, outre la redevance annuelle, cent
souD à cba(|ue mutation de prieur de Saint-
Marlin des Champs, que les religieuses
avaient choisi jour leur homme ricaiit et
mouraïU. La maison des MadelonncUes sert
aujourd'hui di; prison.
Annnlcx )i aniiscriles de la mnifon âf Saint-
Michel de Paris, coinmiiniqures par Miulnme
la supc'rieurc de ce monasti-rc. Tahlenu... de
l'firis, par M. de Saint-Victor, tome II, in-8'.
lî-n-i:.
M \1TI\E (RÈGLE du). Foy/. CÉSAinE (Saint-)
M.VLIÎUBA. Voyez Jérôme ( Ermites dk
Sai.nt-), 5 11.
MALTE (Oudue dï).
§ L Orif/ine des llospilaliers de l'ordre de
Saint-Jean de Jérusalem, appelés dans la
suite chevaliers de Ithodes, et prdsentemenl
chevaliers de Malte.
L'ordre des Hospitaliers de Sainl-Jcan do
Jérusalem a été très-faible dans ses coin-
menceuienls. Environ l'an lO'iS, des inar-
(liands de la > illc d'Amalfi au royaume de
Naples qui Iraliiiuiient eu Syrie et vibilaieiil
urdiniircmciil les suints lieux de Jérusalem,
821 J!AL
souhaitèrent d'ivoir uno église où l'on pût
célébrer l'olfice divin selon le rite de l'iîglise
romaine , parrc que les églises des aulres
chrétiens y étaient desservies tant par les
Grecs que p ir les différentes sectes qui sont
encore dans le Levant. Us acqnireni parleur
adresse et leurs présents la fiyeurdelto-
inensor de Moustesapli , qui élait pour lors
calife d'Cgjpte.qui leur permit de bâlir une
église dans la ville de Jérusalem, au quartier
des chrétiens, devant le temple île la Uosur-
reclion. Ils la dédièrent en l'honneur de la
sainte Vierge, et y fondèrent un tiion:)Slère
de religieux de l'oriri- de Saint-Iienoît, qui
curent soin de recevoir les pèlerins. Celte
église fut appelée Sainte-Ma: ic de la Latine,
pour la distinguer de-; aulres églises où l'on
ne suivait pas le rite latin.
Comme le nombre des pèlerins augmenta
dans la suile, et que le plus souvent ils n'ar-
rivaient à Jérusalem (lu'accablés de misères
cl de maladies, tant pour les mauvais irai-
Icnicnts qu'ils avaient icçus des infidèles
que par les fatigues d'un long et pénible
voyage, on bâtit encore près de l'église de
ï-ainte-Marie de 1 1 Laline un hôpital jiour
y rece\oir les hommes , tant sains que ma-
lades , sons la diredion d'un maiire ou rec-
teur qui ('evail être à la nomination de
l'abbé de Sainte-Marie, et on y fonda une
chapelle en l'honneur de saint Jean-fîaptisle.
Un certain Gérard, surnommé ïoiu, natif de
l'ile de Martlgues en Provence, fut le pre-
mier qui en eut la direction ; et, quelques
années après , Godefroi de Bouillon, ayant
pris la ville de Jérusalem le 15 juillet Hi99 ,
lut si édifié de la charité que l'on exerçait
dans l'hôpital de Sainte- .Marie de la Latine,
qu'il lui donna quelques domaines (ju'il avait
en France. D'autres personnes ayant imité
te prince dans ses libéralités, et les reve-
nus de l'hôpital augmentant, Gérard, qui en
avait l'ailmiiiistralion , jugea à propos, con-
jointement avec les frères hospitaliers, de se
séparer de l'abbé et des religieux du monas-
tère de Sainle-.\lai ie de la Laline, et de faire
une congrég.ilion à part sous la protection
et en l'honneur de saint Jean-B;iptisle : ce
qui fut cause qu'on le-^ appela depuis Hospi-
taliers ou Frères de Ihôpilal de Siint-Jean de
Jérusalem. Gérard obtint du pape Pascal 11
la confirmation des donations qui avaient été
failes à cet hôpital, par une bulle de i'an
1113, i)ai- laquelle ce pontife mit aussi sous
la protection du saint-siège le même h'ipilal,
et ordonna qu'après lu mort de Gérard les
recteurs seraient élus par le* frères hospi-
taliers.
Gérard décéda l'an 1118. Son corps fut
Iransporié dans la suite en Provence, et mis
dans la chapelle du bourg de Manosque, qui
est une commandeiie de l'ordre. Il y a des
auteurs qui ont dit qu'il eut pour successeur
un nommé Boyant Uoger, <à cause qu'il en
est fait mention dans une don.ition de l'an
1120 que fil à cet ordre Otion, comle de
1 Abruzze, où il déclare avoir fait ce Uoger
gouverneur de l'hôiiilal de S.iint-Jean de
Jérusaicu). .Mais lo com:i:ani!cur .Maruli,
MAL S22
dans les Vies des grands maîtres de cet or-
dre, prétend que l'on ne doit pas conclure de
là que ce Roger ait été recteur ou jiréfet do
rhô|)ital, qui sonl des litres qui appartien-
nent à un supérieur plutôt que celui de gou-
verneur , et qu'il se peut faire qu'il ail élé
établi gouverneur de l'hôpital en l'absence
de Baymond du Puy, qui succéda à Gérard ,
d'autant plus qu'il n'y a aucun litre dans la
chancellerie ile l'ordre où il soit parlé de ce
frère Uoger en qualité de supérieur ou do
maître.
Ce fut donc Uaymond du Puy, natif de Dau-
phiiié, qui succéda à Gérard et qui prit le
premier la qualité de maître. Ju-qne-là le-i
Hospitaliers n'avaient eu aucune règle par
écrit ; (iérard s'était contcnlé d'inspirer à ses
frères des senliinenls d'humilité et de cha-
rité; m lis Uaymond du Puy leur donna une
règle par laqu Ile il les obligea de l'aire les
trois vd'Ui solennels, de pauvreté, de chas-
teté et d'obéissance. Il leur défemlit d'aller
seuls par les villes et bourgades, mais ils
devaient être deux o » trois ensemble. Les
prêtres el les laïques , allant chercher les
aumônes pour les pauvres, devaient dcm.in-
rier l'hospilalilé, se contenter de ce (lu'oti
leur donnait et ne rien aclielcr. S'ils ne
trouvaient personne (lui les reçjt par cha-
rité, ils pouvaient pour lors ach'ler quelque
chose pour vivre, mais ils devaient se con-
tenter d'un seul mets. Si quelque frère avait
commis le péché de la chair, si la faute iivail
été cachée, il devait recevoir la pénitence eti
secret; mais si la faute avait clé publique ,
le dimanche après ta masse, lorsque le peu-
ple élail sorli de l'église, l'on dépouillait le
coupable en présence de tous les frères, le
maître le fouettait rudement avec des verges
ou avec des courroies, et on le chassait de
l'ordre. Ils ne devaient point manger de
viande les mercredis el les samedis , et de-
puis la Septuagésime jusqu'à Pâques. Si un
des frères, étant en danger de n^.orl, élail
trouvé propriélaire et avoir de ra!genl,s'il
revenait en santé on lui attachait son argent
au cou, Î! devait être fouetié rudement par
un des f ères, faire pénitence pendant ((ua-
ranle jours, et jeûner au pain el à l'eau les
mercredis et les >endredis. Si un frère ava.l
eu différend avec un autre, et que les plaintes
en eussent été portées au procureur de l.j
maison , le coupable devait jeûner pendanl
sept jours, el manger à terre au pain et .i
l'eau, sans nappe ni serviette, le mercredi et
le vendredi. S'il avait irapjié, il devait faire
la même péniience pendant (luarante jours.
S'il était sorti sans p-?;inission du maître, ii
de vai t manger à lerre pendant quarante jouis.
Le mercredi el le vendredi il jeûnait au pain
et à l'eau, el devait être dans un lien sépare
autant de temps qu'il avait élé deliors , à
moins que le chapitre ne diminuai le lemp
de sa pénitence. Après la mort de qneliiue
frère, les autres, à la première r.r sse que l'on
disait pour le défunt, devaient olïrir un c crj,'»;
avec un écu, qui était distribué aux pauvres
avec les babils du dél'unl. Chaque préli»'
devait dire une messe, les clercs le Psaulicr,
8i3 DICTIONNAIHE DES OnORES RELIGIEUX. î,Vi
l'i les l.nïqucs loO Valer. VoilA ce que con- que lui avnit drcss/'PS (îassi, prince lurc,
tient on subslanrc la rèule «(ne Itaymomi du «lnnl los troupes lurent taillées en pièees.
Puy prescrivit, par latiuolle il ordonna en- Le nu-me li.iiidouin, jiar le moyen dos llos-
rore que tous les frères porteraient des pitiliers, mil au^si en fuite, l'an 1122, Dol-
croi^ sur leurs haliils et sur leurs manteaux. del!-.\vin, roi de Dain.is. Les siéj^es de l'yr et
Celte règle fut proniièremcnt approuvéi^ d'Asst lurent lon;;l>'nips soutenus par leur
par le pape C.ilixlc II, l'an 1120, ei, si on en vnlnir; et, ay.int encore èlc appelés par
veut croire (juelques historiens, elle lavait Haudouin, (jui était en ixuerre avec le roi do
déjà été par son prèdi'ce'sseur, (ielise II, l'an Damas, ils aliaquèrent ec dernier à .Masislar,
1118; elle fut eonfirinée par Ilonorius II, le (ielireiit cl remportèrent une illustre vic-
Innocent II, lùigène III, Lncius III, Clé- loire l'an 112G.
ment ill. Innocent III, Boniface Vllî et plu- Le (,'ram] maître reçut, l'an 111.3, de Foul-
sieurs antres souverains pontifes. Comme (]ik's d'Anjou, la ville de liersahée pour ré-
Raymonil du Puy avait mis dans cette rèirle compense de ses services à li delenso de
diflérenics choses lirées de celle de saint Au- celle niiuie place, et les revenus eu de\ aient
uusiin, c'est ce qui fait que l'on a toujours être appliques au profit de l'ordre, .\lplion-
mis l'ordre des Hespitaliers de Sainl-Jean se 1", roi d'Aragon, étant mort sans enlanis,
de Jérusalem au nomhre de ceux (pii sui- laissa ses Klats aux Hospitaliers, aux Tem-
vent la rcple de saint Augustin. pliers el aux Chevaliers du Saint-Sepulcre;
Ce premier grand maifre, voyant que les c'est ce qui obligea lUiymond du Puy de faire
revenus de l'hôpital de Jérusaleifi surpas- un voyage en EspauMie muni de procuration
salent de beaucoup ce qui était nécessaire de ses religieux et de ceux des Templiers et
pour l'entretien des pauvres pèlerins et des du Sainl-Sépulcre ; mais à son arri\ée il
malades, crut qu'il ne pouvait pas mieux trouva que le comte de IJarcelone s'était
faire que d'employer ce surplus cà la guerre enparé d'une partie des Etals d'.Mphonse.
que l'on faisait en terre sainte contre les in- et le roi de Casiillc de l'autre ; c'est pour-
lidôles. Il s'offrit avec ses Hospitaliers au quoi, ne se voyant pas en élat de soutenir
roi de Jérusalem pour combattre contre ces une guerre contre ces princes, il fil un ac-
infidèles. Il n'y ava l eu parmi ces Hospila- cord avec le comte de liarcelone le 10 sep-
licrs que des clercs et des laïques ; niais il lembre ItiO, par lequel il céda à ce prince
les sépara en trois classes : l;i première fut toutes les prelenlions (pie son ordre |)ouvait
des nobles, qu'il destina à la profession des avoir dans la succession d'Alphonse, à con-
nrnies pour la défense de l.i foi et pour la dilioii que si le comte de Barcelone mourait
proicction des pèlerins; la seconde fut des sans enfants, ses Liais appartiendraient à
{irétres ou chapelains pour faire le service l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem , el quo
divin dans l'église conventuelle, et la iroi- et ordre aurait à Saragosse, à Uuesca, à
siùme des frères servants qui n'étaient pas liarbastro, à Daiiiia, à Calalayud, el dans
nobles, et qui furent aussi destinés à la pro- toutes les places que l'on pourrait conqué-
l'ession des armes. L'on introduisit après dans rir sur les .Maures, deux vassauv exempts de
cet ordre la ujaniére de recevoir les chcva- la juridiction royale, qui seraient seulement
Mers avec les cérémonies ()ui s'observent ob.igés d'aller à la guerre contre les .Mau-
encore à présent, et que nous décrirons dans res, avec le prieur de l'ordre, (lui y ferait
le paragrajihc suivant, t^cla fut approuvé pour lors sa résidence. Les Chevaliers du
l'an lloO par le pape Innocent II, <)ui or- Temple et du Saint-Sépulcre firent un pareil
donna que ces clievalier> auraient (lour élen- accord du consentement de Fouhiues d'An-
dard à la guerre une croix blanche pleine jou, ce qui lut il.ins la suile confirmé par le
en champ de gueules, qui sont présentement pajie Adrien IV. Raymond du Puy relourna
les armes de cet ordre. Ouoi(]u'iI eûl clé ensuite à Jérusalem, où il aid.i liaudouin 111
ainsi érigé en ordre mililaiic etdechevale- à recouvrer la Vallée de Moïse, à delivicr
rie, les Hospitaliers néanmoins retinrent les chrétiens de Mésopotamie du joug des
toujonrs leur nom, et on ne leur donna ce- infidèles, et à faire le siège d'Ascalon. Lu
lui de Chevaliers «pie lorsqu'ils eurent con- con-ideration de ces services, le roi donna à
quis l'ile de Rhodes : p'iur lors on les appela l'oriiie plusieurs terres el possessions. Le
les CiRMaliers de Rlioles,el enfin Chcva- pape .^naslase IV, imitant si s prédécesseurs,
liers de .Malle, après (]ne celte dernière ile lui accorda aussi beaucoup de privilèges par
leur eûl été (hjunée p.ir l'empereurCharles \'. une bulle du21 octobre i\'o\.
l'.ependaiit leur vériiable nom csl celui de Le patriarche de Jérusalem ci les autres
t;hevaliers de l'ordre de Sainl-Jean de Jéru- évé(iues de la Pabsline ne purent scmffrir
salem, el leur grand maître dans ses lilres que cet ordre fut sousir.iil de leur juridic-
prcnd ( ekii de maiire de l'hopilal de S.iint- tion ; qu'en un temps d'inlerdil, les llospila-
Jcan de Jérusalem el gardien des pauvres de tiers fissent célébrer |iublniuement l'office
Notre-Seigneur Jésus-Christ. di\in et sonner leurs clo(he«, el qu'il fussent
La première preuve île valeur (|uc ces exempts de payer les dimes. Ces prèl.its
llospilaliers donnèrent fut lors(iue le caLfe s'opposaient en toutes choses aux Ilospita-
d'Lgypte vint allaquer, l'.in 1 1 18, Baudouin H, liers, cl ces dilïerendsallèrent si avant, ((u'ou
roi de Jérusalem. Us allèrent a son secours eut recours aux arnii-s et (|u'on en vint aux
ayant à leurléle leur gr.iiid niaitre Raymond voies de fait. Guillaume de l'yr (1 i dit méu-.o
du Puy, qui le garaniil aussi des embûches avoir vu plusieurs paquets de flèches qu'où
(I) GiiilIcl.Tyr., Uiil.Udti saai, lib, wiii, c;ip. 3 et seij.
825
MAL
MAL
826
avait amassées de celles que les Ilospilaliors
avaient lirées sur les prélats, et que l'on
avait attachées devant le lieu où Jésus-Christ
avait été crucifié : c'est ce qui fait que cel
historien, prenant le parti di'S évèqiies, dé-
clame fort contre les Hospitaliers, Le pu|)e
Anaslase étant mort l'an 1153, et Adrien IV
lui ayant succédé, le patriarche de Jérusa-
lem, acconi|)agné de quelques évèques, vint
trouver ce pontife pour lui faire des [ilain-
los des Hospitaliers et le prier de révoquer
les privilèges qui leur avaientélé arcordés ;
mais ils ne purent rien obtenir, cl s'en re-
tournèrent en Orient fort mécontents de la
cour de Rome. Cependant les Hospitaliers
ne perdaient aucune occasion de combattre
contre les infidèles. Le snlian Nuradiii ayant
assiégé la grotte de Sentie, celle pl.iee se
défendit vigoureusement, jusqu'à ce <iue les
chrétiens ajanl asscinl)lé leurs troupes, dont
le grand maître Raymond commandait l'a-
vant-garde, ils obligèrent les infidèles de le-
ver le siège, ce qui arriva l'an 1157. Ce fut la
dernière expédition où se trouva ce premier
grand maître de l'ordre de Saint-Jean de
Jérusalem, ijui mourut l'an IIGO, après
avoir gouverné cet ordre pendant k-2 ans.
Nous ne ra|ipi)rterons point toutes les ac-
tions de ces braves Hospitaliers, sous cha-
(jue grand maître, dans les différentes guer-
res où ils se sont trouvés en s'unissanl auv
autres puissances chréiiennes, tantôt à la
France, tantôt à l'iispagne et à la ré()nbli-
(jue de Venise, puisqu'elles sontin Iropgrand
nomh.e, et que cela nous conduirait trop
loin; nous nous contenterons déparier de
ce qui regarde plus pariiculiéremeiil cet or-
dre. Après que les chrétiens eurent perdu la
ville de Je usalem, qui fut prise l'an 1187
par Saladiii, caiil'e d'Egypte, qui quelques
jours auparavant s'élait aussi emparé de
rtoléraaïde ou Acre, belle et llorissanle ville,
Imengard Darps, dixième grand maître des
Hospitaliers, transféra son couvent et l'hôpi-
tal dans la forteresse de Margat en Phéiiicie,
qui leur appartenait, et qu'ils perdirent l'an
1285. Ils y demeurèrent quatre ans, jus-
qu'à ce que la ville de Ptolemaïde étant re-
tournée en la puissance des chréliens l'an
l"iO,!, après un siéi;e de trois ans, le grand
maître y iransfeia de nouveau sou couvent
et l'hôpital.
Comme celle ville était presque la seule
qui restait aux chréliens dans la Palestine,
elle devint commune à toutes les nations
dilîérentes qui avaient eu part dans les croi-
sades, et qui y avaient chacune leur quar-
tier, où elles étaient indépendantes les unes
des autres. Ainsi elle était habitée par le roi
de Jérusalem et de Chypre, le roi de Naples
et de Sicile, et le roi d'Arménie, le prince
d'Antioche, le comte de Jaffa, le patriarche
de Jérusalem, les Chevaliers du Saint-Sépul-
cre, le légat du pape, le comte de Tripoli, le
prince de Galilée, les Templiers, les Hospi-
taliers, les Chevaliers Teuloniques et de
Saint-Lazare, les Vénitiens, les Génois, les
l'isans, les Florentins, le prince de Tarenle
et le duc d'Athènes. H élait impossible que
tant de souverains dans une m'me ville,
indépendants les uns desautres, pussents'ac-
corder: aussi formaient-ils autant de partis
dilTérenls, qui la plupart du temps étaient
armés les uns contre les autres. Mais ce
qui augmenta la division furent les préten-
tions que Charles d'Anjou, roi de N.iples et
de Sicile, cl Hugues III, roi de Chypre,
avaient sur le royaume de Jérusalem. Cha-
cun des princes (|ui demeuraient à Ptole-
maïde ayant pris parti pour l'un des pré-
tendants, le Soudan d'Egypte Flsis, surnommé
Mclec-Messor, voulut profiler de ces divi-
sions, et, jugeant bien que celle qui élait
aussi en Europe entre les princes chréliens
les empocherait de passer en Orient, il ré-
solu! de chasser les chrétiens de la Syrie. Il
mil sur pied une armé • <le soixante mille
(hevaux, et de cent soixante mille hommes
d'infanterie; mais, sortant d'Egypte, il fut
empoisonné par un de ses émirs : ce (jui
n'empêcha pas l'exécution de son entreprise;
car ses troupes ayant proclamé après sa
morl pour Soudan son fils Eli, sous le nom
de Melec-Séraph, ce prince voulut poursui-
vre le dessein de son père, qui l'avait con-
juré en mourant de ne le point faire enter-
rer avant que d'avoir pris Ploléma'ide et en
avoir chassé tous les chrétiens. Il assiégea
cette ville le 5 avril de l'an 1291, et la bat-
tit si vigoureusement, qu'elle fut emportée
d'assaut le 18 mai.
Après la perte de cette ville, les Hospita-
liers, avec leur grand maître, qui était pour
lors Jean de Villiers, se retirèrent dans l'île
de Chypre, où le roi Henri de Lusignan leur
donna pour retraite la ville de Limisson,
dans laquelle ils demeurèrent environ dix-
huit ans, jusqu'à ce (ju'ils se fussent rendus
maîtres de l'ile de Rhodes. Foulques de Vil-
laret, ayant été élu grand maître eu 1308,
prit la résolution de transférer la demeure
des Hospitaliers hors du royaume de Chypre,
à cause que le roi avait quelque ombrage
d'eux ; et, afin d'être plus à portée do com-
battre contre les infidèles, il jeta les yeux
sur l'île de Rhodes, pour lors occupée par
les Sarrasins, qui y avaient été appelés par
la noblesse du pays, qui s'était révoltée con-
tre Androuique, emjjereur d'Orient , sou
souverain , à qui celte ville appartenait.
Foulques de Villarel alla trouver ce prince
à Constanlinople, qui lui accorda l'investi-
ture de l'île de Rhodes pour lui et pour sou
ordre, en cas qu'il pût s'en rendre maître. Il
passa ensuite en France, où il obtint du pape
Cièmenl V, qui était à Avignon, la confirma-
tion de la donation de celte île. H lui donna
même les moyens et les forces pour l'aider à
exécuter cette entreprise, et lui accorda pour
toujours le droit de nomination à l'archevê-
ché de Rhodes.
Ce grand maître exécuta si heureuse-
ment son dessein , qu'il se rendit maître
de celte île le 13 d'août 1309. Il y en
a qui prétendent qu'il joignit le stratagè-
me à la bravou:e, et que quelques Cheva-
liers, en marchant sur les pieds et les mains
couverts de peaux de muutous uu uiilieu
K7 nicTioNNAii;!': m s ouorks iin.iniKLx. fss
d'un troupeau, claiciil «Miiros dan« la ville slattils de col insliiul, qui avaient ^(é drossés
de Kliodes à la faveur d'un brouillard, s'é- par lirnoil, eardiiial de Sainîe-Suzaiine, Ic-
laienl >a!sis d une porte, dont ils avaieni 4né (jat à Omsianlinople ; cl l'an 1211 ce p.ipe
les i;ar<les , et avaient donné lieu par ce confirma la donalion qui leur avait été faiie
moyen à l'ariiiéi' <lirélicnno d'y entrer. Quoi par l'empereur Henri du eliàlean de Ciarelle.
(in'il en .-iolt, rcs lînspil.iliers prirent le nom cl la possession de Ions l( s antres biens qui
de Chevaliers de lUiodes après l.i prise de leur aiipii tenaient. L'union de ces Ho«piia-
cetle il •, ([ni les rendit ma lires quelque temps liersavic ceux de Saini- Jiaii de Je; usa le m fut
après de sept autres îles \oi>ines. aussi conlirmée par une bulle de l^lémenl V
Les Turcs, indi};nés do celle perle et vou- du 8 août l^OS, et, quatre ans airès, le
lanl s'en venijer, vinrent l'année Miiv.inlc même pape unit encore à l'ordre de Sainl-
pour repieii'lre celle i!e ;et, comme les brè- Jean de Jerusilom celui des 'l'cmplers, qui
elles de la vi;le n'elaient pas encore icpa- l'ut aboli dans le concile {général de Vienne,
rées, ces infidèles, pridilanl di; celle occa- dont l'ouverture se (il l'an lîll.
sion, l'a-sié^crent a\ee une puissante armée Ces avanla^es enflèrent le cœur du prand
l'an lyiO. Mai> Arnédée V, comt'i de Sa- maitre de \'illaret, <)ui. ayant voulu ;;i>uvcr-
voic, surnuinmé le (îrand, vint au secours ner l'ordre d'une manière despol. qui', se ren-
de> Chevaliers a\ec une autre armée, el dit odicMix aux Chevaliers, qui voulurent se
obli;^ea les l'urcs de lever le sié;;e et de Caire saisir de sa personne ; mais il se retira dans
une retraite honteuse, l'iusieuis écrivains \r. château de Lindo, où ils rassiépèicnt. Ils
ont avancé ([u'en mémoire de celte victoire , tinrent ensuite un chapitre , ils y citèrent le
le comte de Su>oie prit pour sa devise ces grand maiirc pour y venir rendre compte de
quaire lellrcs F. lî. R. T., auxquelles ils sa conduite; mais il ne voulu! pas s'y Irou-
unl donné celle explication, ForiUudo ejus ver, et il en appela au pape : c'i'St pourquoi
Jtliuduin lenuil, el que dans ses armes il on le déposa , el on élut à sa place Maurice
clian^i'a l'aigle de Savoie en la croix de la de l'agnac. Le pape envoya à Uhoiles des
religion de Saint-Jean de Jérusalem, qui est commissaires pour informer de ce différend,
d'argent en champ de gueules. Mais cetle et lit venir à Uomc les deux grands maitres,
liisluire n'est ()u'une fable ; car Louis d ; après avoir nommé pour vic.iire général du
Savoie, baron de Vaux, qui miiuruH'an 1301, l'ordre Gérard de l'ins, chevalier d'une graii-
nortail celle devise dans sa monnaie; el de expérience.
l'on voit encore aujourd'hui en l'église ca- Les infidèles voulurent profiler de ces
thedrale d'.\ousle, sur la sépulture de Tho- brouilleries , el armèrent l'an i;i-21 quairc-
inas de Savoie, 11" du nom, comlc de Mau- vingts vaisseaux de guerre pour assiéger
Tienne cl de Piémont, père d'Amédée le Rhodes; mais le vicaire général ne jugea pas
Grand, un chien aux pieds de ce prince, qui à propos d'allen<lre l'ennemi. Il fit armer en
a un (olliiT où est ce mol FliH T, en earac- diligence quatre galères et (iue!qnos vais-
lères gothiques, sans ponctuation ni sépir.i- seiiux, qu'il envoya avec six galères génoises
lion, l'our la croix, les prédécesseurs d'A- qui se Irotivaient dans le port de Hhodes au-
médée le Grand l'ont portée aussi au lnu do devant de l'.irmée ennemie. Les t^he» aliors,
l'aigle, ou en qualilé de comtes de l'icmonl, nonobstant leur peut nombre . a!la(]uèrenl
donl les armes sont une croix ; ou à l'imi- les infidèleset remportèrent la vicloire, ayant
talion d'.Vmédée 111, comte de Savoie, qui so coulé à fond pres(iue tous leurs vals^eaux.
croisa l'an lli", cl qui garda la croix au Sur ces enlrelaites, Maurice «le Paguac éiant
retour de la l'alesine pour niar({ue de son mort, Foul(]ues de Villaret fut rétabli duns
expédition d'ontrc-mer. Amédée le Grand sa dignité par le pape Clément ^', et deux
la portait lui-même dès l'.ui l:jOV, ainsi qu'il ans après il s'en démit entre les mains de
p irait dans un traité que lil ce prince avec Jean XXII, ()ui avait succédé à Clément.
Elieiinc! de t^oiigiiy, seigneur d'.XndeloI, donl L'ile de Hliodes ayant été de nou\ eau mê-
le 1'. liouliours de la compagnie de Jésus , nacee par les infidèles, le grand niaîlre .\u-
d.iiis son Histoire du (iraiid .Maiirc d'.^ubus- toine Flavian fil lorlilier toutes bs places, et
Bon, dit avoir vu l'original scellé du sceau les ennemi^, (U ayant été avertis, abaiidon-
des armes de ce prince. nèrenl leur dessein ; mais l'an li'i-'», sous \t:
Ce lut aussi s ais le gouverncmenl du nié- grand m.iilre Jean de L.islic , le soudin d'K-
me grand ni. litre de \'illarel que se lit l'union gypte assiégea Uhodes avec une armée de
de l'ordr.' de Si:inl-Samson de t^onslanlino- dix'bnil nulle hommes, cl. après plusieurs
(lie et de Corinthe, ( l de tous les biens (]ui avsauls qui fiirmt donnés pu les inli .èles cl
lui a|iparlenaient , à celui deSaiiil-Jean de généreusement sout('iius jiar les Chevalieis
Jerusali'iii, ce qui se lil du consenlemenl du pendant cinq années de suite, ils furent cou-
grand imiiireetdes lièiesdel ordre de S.iint- liaiiils di; lever le siég(^.
Samson , (|ui étaient aussi Hospitaliers, el .Maiiomcl 11, empereur des Turcs, crut
avaient des maisons à Consi inii.iople el à i]ue la forlune lui serait plus favorable. Il
(^orintlie. L'on ne sait point le temps de l'in- mil le siège devant Itliode- l'an IVSO avec
ïlilulion de ces Hospitaliers, il y a neanoioin'i une armée de cent mille romb illanis et cent
de l'apparence que ce fui sous le pontifical soixante v(>;les. La ville fut b.illiie par sei^e
d'iiiiiocenl 111, (|ui, l'an 1208(1), les mil sous canons d'une grosseur extraordinaire, qui li-
la prolecliun du .saiut-siégc et approuva les rôrenl des boulets proportionnés à celle groi-
(1) ICiiiit. Iiiiiaccnl. Idi. M, ep. \ij , cl lib. Mil, c,i. 17.
829 MAL
ssur, dont trois mille cina conis porlèreiil
contre les murailles, sans coinpler un nom-
bre infini de pièces de bailcries plus peiilcs.
Il y eut en plusieurs assauts 0000 Turrs
tues et 15,000 blessés; et enfin, par la valeur
(lu grand maître d'Auhusson et de ses Che-
vaiicrs, les Turcs furent aussi obligés de se
retirer.
Après 11 mort de Maîiomrt II, ?es deux en-
fants Hajazctet Zizime, ne se pouvant accor-
der sur ie partage de l'empire oUoinan, se
firent la guene l'un à l'autre. Zizime, comme
le plus faible, cédant à la force, se mit sous
la protection du grand matlro de Hbodes et
de son ordre, et arriva à Hbodes le 2i juil-
let 14-82, où il fui reçu comme roi, ce qui
obligea Bajazet de fiire la pai\ avec l'ordre,
et de se rendre comme son tributaire , en lui
payant tous les ans trente-cinq mille ducats
pour la nourriture et l'cntrelien de son frère,
et dix mille ducats en pariiculicr au grand
maîiro pour le dcdiinimager en quelque fa-
çon des dépenses cxrcissives que la dernière
guerre l'avait oldi|'é de faire.
Z.zimc s'imagina que son frère ne faisait
la paix que [lour avoir une occasion favora-
ble de le perdre; que quand le commerce se-
rait libre entre les Rbodiens et les Turcs , il
y aurait tous les jours à craindre pour sa per-
sonne, et que les (Irecs renégats, accoutumés
aux Irabisons et aux meurtres, ne ménage-
raient rien pour servir utilement Bajazet.
Dans ce* pensées il demamla au grand maître
d'aller trouver le roi de France, comme ce-
lui qu'il connaissait le plus capalde de le pro-
téger conlre la tyrannie de son frère. Sa de-
mande lui fut accordée; il partit de lUiodes
le !'■'' septembre, acionipagné de plusieurs
Cbevalieis qui furi'nt nommés par le grand
maître pour lui servir d'escorte ; mais, éiant
arrivé en France, il fut reçu assez tVoidi--
meiit du roi Charles VIII, ou parce que les
Français ne voulaient point se lirouilb r avec
la Porte, ou parce qu'ils craignaient qu'une
réception bouorable ne fût une espèce d'en-
gagement poLir l'eiilretien de ce prince. Ainsi
il demeura fort fieu de lemps cà la cour, el les
Chevaliers le conduisirent dan< la toinman-
derie de Huurgneuf, sur les confins du Poitou
et de la Marche, où les grands prieurs d'Au-
vergne faisaient leur demeure.
Malhias, roi de Hongrie; Ferdinand, roi
de Castiile et d'Aragon, qui l'était ausM de
.Sicile ; et Ferdinand, roi de Naples, firent
tous trois dans la suite d'instantes prières au
grand maître pour avoir Zizime eu leur dis-
position. Il ne leur accorda pas ce qu'ils de-
mandaient, mais il leur |/romit qnc , tandis
qu'il aurait le sulîau entre ses uiains, il eui-
pèclierait le Grand-Seigneur de rien entre-
prendre sur leuis Etats. Bajazet compta ce
refus couime un service si;.',nalé, et se sentit
si obligé au grand maître, que par recon-
naissance il lui envoya, l'an l'iSï, la main
droite de saint Jean-Baptiste, qu'il lit mettre
dans une |)etite cassette de bois de cyprès,
revêtue au dedans d'un beau velours cra-
nmisi,et enrichie au dehors d'une inHnité de
pierreries. Il l'iuvoya par l'un de ses l'uvoris
MAL
830
avec une lettre dont l'insi^-iplion était en ces
termes : Bajtizet, roi de l'Asie, empereur des
empereurs, nu Irès-sage et Irès-ilhislre grand
tnaîlic de Rhodes, Plirre d'Aiihas.'ton , prince
très-généreux el père d'un Irès-glorieux em-
pire.
Après la mort de Sixte IV. le cardinal Cybo,
(iéuois, originaire de Uhode-, où même son
père était né, fut élevé au souverain pouti-
licat sous le nom d'Innocent VIII. Ce pape
acrorda plusieurs grâces et privilèges aux
Chevaliers de Rhodes, et enlr;- autres il riî-
nonça au droit (|ue ses préilécesscurs avaient
de pourvoir à plusieurs bénéfices de la reli-
gion de lîliodes. Il y renonça par une bulle
consistoriale , signée de tous les cardinaux
assemlilés, étant au saint-siége le pouvoir do
conférer jamais aucune commanderie de
l'ordre, quand même le bénéfice viendrait à
vai|uer en cour de U(uiie, et déclarant par la
même bulle que la disposition de toutes les
commanilerii's appartenait entièrement au
grand maître, sans qu'elle, pussent ètrecom-
piises sous les bénéfices que les papes s'é-
taient réservés ou pourrait'ul se réserver
dans la suite, el il honora le grand maître
d'.\ubusson du chapeau de car<linal, avec la
qualité d" légat du sainl-siégc en Asie, en
considération des services signalé.î (jne les
Cbevaliersde l'hodesavaienl rendus à l'Fglise,
et de ce (|ue \i- grand maître lui avait accorde
le prince Zizime.
Il y avait longtemps que ce pontife l'en
sollicitait. Fenlinaiid, roi de Naples, lui avait
demandé de nouveau ce prince, et rnèine le
Soudan d'Fgypte le demandait aussi. Mais le
grand maître se crut obligé de l'accorder plu-
tôt au pape, auquel il devait obéir comme au
chef de son ordre, d'autant plus que ce pon-
tife avait commencé à parler en maître. Il
envoya donc à Borne le bailli de la Morée et
le vice-chancelier de l'ordre, avec un ample
pouvoir pour terminer celte affaire. Les am-
bassadeurs étant arrivés, et ayant eu au-
dience du pape, ils consentirent à la transla-
tion de Zizime, pourvu que le roi de France
ne s'y opposât point, et que les Chevaliers de
Uhodes demeurassent toujours aupiès du
suilan. Charles VIII, qui avait besoin du
pape pour la conquête du royaume de Na-
ples, donna les mains à tout ce que voulut
Si bainleié, et le pape ac<virda sans peine
aux ambassadeurs Ci- qu'ils demandaient.
Le commandeur de Blancliel'ort, auquel le
grand maître avait confié la personne de Zi-
zime, el qui en son absence avait élé élu ma-
réchal de l'ordre et grand prieur d'Aqui-
taine, fit partir ce princi' de la commanderie
de Bourgiieuf suivant les lettres du grand
maître, et Zizime arriva à Home au mois do
mars ll8J, où il fut reçu avec tous les hon-
neurs dus à une personne de son rang.
Dès l'an l'i85. Innocent ¥i!i avait suppri-
mé les ordres militaires du Saint-Sépulci e
et de Saint-Lazare de Jérusalem . el il ava t
uni les biens qui eu dépeuilaient à l'ordre de
Saint-Jean di; Jérusalem, ceriuil'ut confirmé
dans la suite par le pape Jules II, l'an l.'J05;
mais cette su[)i)ressiou cl celle union n'eu-
sr.l DICTIONNAmR DES OnDUES RELIGIEUX. 85i
rcnl po^nl de lieu m France, romnie nous son fut iloilaré clief et (Çcnt-ral, on ploin coii-
a»on< rpiii.irqdé oillciir.-;. Innoceiil niuiiriit sisloirc. [>ar le pipe Alexandre \i. Mais 1rs
r.iii I J02, cl cul pour successeur ll(iilrii,Mie fausses ilémaniics que firenl quelquci capi-
Itorcia. qui prit le nom (iWlixandre \'l. Il tailles (les troupes li^ui-cs lirenl bientôt éva-
ava I été prolecleur de l'ordre de S.iint-Jcan nouir les cspér.Énces des grands avantîip;es
deJcrusaletnoautrardin.il. Après sou clec- que l'on s'était proposes, lie cette liiiue.
lion nu soiivorain |)out lical , il térnoiijna , Louis XII, roi de France, et Ferdinand, roi
par ui\ bref qu'il envoya au taraud maitre, det'asiillc, qui avaient fiil alliance entre eux
avoir toujours de lions senlinieiits [lour les contre Frédéric, roi de Naples, qu'ils avaient
(^hevalers de Uliodes ; mais les elVets ne ré- dépouillé de ses l'-lats, et qui les avaient par-
p ndirent pas aux paroles. .Mexandre coin- laués entre eux, ne voulurent plus avoir de
ineiiça presque son pou ilicit (lar se rendre concurrent : eliacun voulut posséder tout
iiiaitre de la personne du prince Zizinie, entier le royaume de Naples , et ces irimes
coiitr- le traité qui aviit é é fait entre Inno- se firent une guerre saiii^lanle qui remplit
cent \'lll et les Chevaliers. Il lit enfermer le l'Italie de confusion et d "horreur. Le pape,
sultan dans le château Sainl-Aiipe, et otaiit au lieu d,- travailler .j raccoinmndcment de
d'aiifirès de lui les Chevaliers qui y avaient ces princes , favorisait ( uverlement le |iarii
toujours été , il le confia à ses neveux, dont d'Espagne, et ne songeait qu'à l'aiirandissc-
l'uii était Chevalier de Uliodes, sous prétexte ment de César de Hori;!.!, duc de Valeutinois,
qu'une vie aussi précieuse que celle de ce son (ils, qu'il aimait passionnément. I",'esl
prince serait moins exposée aux embûches pourquoi les A'éniliens, (jui ne recovaieiit
de ses ennemis dans une [lace forie. Ziziine point les secours qui leur avaient été promis
demeura ainsi enfermé jusqu'à ce que Ch,ir- de France cl d'Espagne , firent la jmix ave.-.
les X'ill , «lui .ivait enliepiis la conquête du les Turcs sans consulter les Chevaliers de
royaume de Naples , et qui voulait porter Uliodes, et Ladislas , roi de Hongrie, suivit
aussi ses ;irmes jusque d.uis le Levant, de- bientôt leur exemple. Le grand maître d".\u-
iiianda en passant à Unme le sultan Zizime, busson fut pénéiré de douleur en apprenant
que le pape lui accorda ; mais ce ne fut pas ces nouvelles; cl, pour comble d'ariliction. il
sans soupçon d'avoir livre à (Charles VIII ce apprit eu même temp» que le pape conféraii
prince oiloinan euipoisoiiné, cir, peu do jours les commanderies de l'ordre à des personnes
après, ce prince se sentit lrap[ie d'un mal séculières, et qu'il avait promis le prieuré de
il connu, (jui i'em[.orta en flirt peu de temps, ("astille à don Henri de Tolède , sans avoir
C'est ainsi que te prince malheureux finit sa égard ni au privilège accordé par Innocent
vie, 1 an l'^'.ilî, ^'111 , ni ii la qualité de généralissime de la
Uajazel et ses sujets n'avaient osé rien en- ligue , qu'il lui avait lui-même donnée. La
(reprendre contre les chrétiens du vivant de rupture de la ligue et le procédé du papeje-
Ziziiiie; mais après sa mort plusieurs inli- tèrenl le grand maitre dans une mélancolie
déles qui habitaient les côtes de la Lycie les qui l'abattit peu à peu, et (|ui lui causa enfin
plus voisines de Uliodes lillèrent i|uelques une maladie dont il mourut au mois de juin
îles qui appartenaient aux Chevaliers de loO.'J, étant âgé de plus de qiiatre-vingis ans;
Uhodes. Ils lirent môinc des courses da ^s la il y en avait vingt-sept qu'il gouvernait
Carie et allèrent braver les Chevaliers jus- l'ordre.
qu'aux portes du chàie.iu Saint-Pierre. Le Aiméric d'.Vmboisc, grand prieur de V ran-
gr.ind maitre d'Aubusson fil armer contre ce, frère du grand cardin.il Ceorges d'.Vm-
ces pirates. On en prit queliiue.-.-uns qui fu- boise, archevêque de Ilouen et ministre d"E-
rent punis du dernier supplice ; mais les dés- Lit sous Louis XH, roi de France ; de Jean
ordres ne laissant pas de continuer, il eu lit d.\mboise, évêque de Limoges ; de Louis
SOS plaintes à la Porte, et il en recul salis- d'Aiiiboise, évoque d .\lbi; de Pierre d'.Vni-
fac'ion de Uajazpl , qui ne voul.iit pas pour boise , cvèque de Poitiers, et de JaC(|ue»
lors se brouiller ouvertement avec les Clie- d'.Vmboise, éiêque de t'Iermoul et abbé do
valiers. (Quelque temps après, sur les nou- Cluny , succéda au grand uiailre d'Aubus-
velles que l'on eut à Uliodes que ce prince son. Il signaLi son gouvernement par la ba-
levait une puissante armée, le grand mailre taille qu'il gagna contre le S'iudim d'I^gypie
se tint sur ses gardes et arma de son côté. 11 p oclie du port i;e Laiaz/o dans la Carama-
(leuianda du secours à plusieurs princes, nie, sur les ( onlins de la Syrie, vers Monie-
l.ouis XII, roi de France, lui envoya vingi- Négro. Les ligv plions, dont l'armée était
deux gros navires, cl l'on ne iloiila {loiiil que composée, furent presque tous défaits, et le
r.irmoe na>ale ottomane n'allât atiaquer neveu du soudau y fut tué. Le grand maitre
Uliodes , lorsque, ayant jiassé le détroit de ordonna que tous les ans, l.i veille de la iia-
Galli|)oli, elle prit sa route de ce cAté-l;i ; tivilé île saint .leau-liaplisie, en mémuire de
mais ce n'était qu'une feinte de la jiarl des celle bataille, on préparerait une collation
infidèles, qui en voulaient aux A'éuitioiis, et au grand maitre et aux baillis sous la tenle
dans le Iciiips (|U(; leur armée naiale passa ipii couvrait la |ioupe du n ivire où avait
le dolroit, le (jiand-Seigneur entra avec une combattu le neveu du soud.ni. Il mourut le
puissante armée dans la Uouiaiiie, et une lli novembre liil'i, et eut pour successeur
partie de sa cavalerie alla ravager la Dalina- tîuy île lîlaiicherurl , granil | rieur d'Aqui-
lie. C'est ce (fui donna lieu a la ligue (|ue li- taiue, neveu du grand maitre d'Aubusson. H
ri'iit les princes clnetieus coiilre les Turcs fut du quoique absent, étant pour lors en
l'ait loUl, et dunt le grand uiailre d Aubu:>- Franc ', it u:uurut uu an après, le 13 nuvciu-
!i-;ô
MAL
MAL
83i
lire 15S;î, cil aManl à l'.liodes pour prcnJro
liossi'ssiou de sa dignité. 11 arriva dans cet
iiilorvallc une chose assez remarquable : les
chefs des langues se plaignirent au conseil
de ce que le dtfunt gr.nul maître d'Aniboisc
avait lait mettre trois (leurs de lis de marbre
sur la porte qu'il avait fait bâiir au boule-
vard proche son palais, ce qui semblait don-
ner à la couronne de Fr.ince quelque supé-
riorité sur la religion, et ils deniandèreut
qu'elbs lussent ôlées. Les Français sou!e-
naient qu'elles y devaient demeurer. Enfin,
a|)rès plusieurs contestations , les fleurs de
lis lurent portées par ordre du conseil sur
la muraille du quartier des Français, et il
fut permis aux. autres langues d'en faire au-
tant des armes de leur prince.
Fabrice de Caretto, chef de la langue d'I-
talie et amiral de l'ordre , succéda à Guy de
IJIanchelbrt. Il reçut l'an 15i;J une ambas-
sade du soplii de Perse, avec lequel il fit li-
gue Contre Sélim I", empereur des Turcs.
L'année suivante il conclut la paiv avec le
Soudan d'Kgypte, et fit les pré|)aralils nécessai-
res pour résister au dessein du (îraud-Sei-
gncur, qui semblait vouloir assiéger Uhodes.
Il deinanila du secours aux princes chrétiens.
Le pape Léon X lui envoya trois galères
bien armées, et François I", roi de France,
dix-sept vai-'Seaux. Sélimétant mort, Gazelle,
gouverneur de Syrie, se révolta contre Soli-
man 11, qui avait succédé à Sélim. Il assem-
bla une armée et demanda de l'artillerie au
grand maître, qui lui en envoya; mais l'ar-
mée de (jazelle iul défaite, et il mourut dans
le combat.
i^e grand maître de Careilo mourut aussi,
le 10 j.inviei- 1521, et ou élut à sa place Phi-
lippe de Villiers de l'Ile-Adam, de la langue
de France, pair lors grand hospitalier et
ambassadeur de la religion auprès du roi de
France. Ua des premiers soins de ce grand
maître l'ut d'ajouter encore de nouvelles for-
tifications à Uliudes pour soutenir le siège
dont cette ville était menacée, lille le fut en
elTet ([ueliiue temps apiés; mais les Clieva-
lipis ne furent pas si heureux dans ce siège
qu'i;s l'avaient été dans les précédents. Soli-
man n'ignorait pas que le grand maître de
(Caretto avait envoyé de l'artillerie à Gazelle,
lorsqu'il s(! révolta contre lui, et, ne pouvant
soullrirqu'après avoir subjugué la Syrie, une
petite place tenue par une poignée de gens
lui résistât au milieu de ses Ktais, il résolut
de l.'i l'orier. Il l'attaqua l'an lo22 avec une
armée composée de tiois cent mille combat-
l.ints , deux cent quatre-vingts voiles et une
prodigieuse ai tilierie. Peut-être que les Turcs
auraient encore élé contraints de lever le
siège, pour peu que les Chevaliers eussent
été secourus, et s'ils n'avaient point élé tra-
liis par André d'Amaral, Poriugais , prieur
tie Castille et chancelier de l'oidre, qui, ne
se pouvant consoler de n'avoir pas élé grand
icailre à la dernère élection, jeta dans le
cairip de Soliman une lettre attachée à une
Hèche, par laquelle il l'avertissait qu'il ne
pouvait prendre la ville que par un certain
endroit faible qu'il lui indiquait, à quoi il lui
serait aisé de réussir en comblant les fossés
de ce côté-là avec la terre d'une montagne
qui en était proche. La trahison d'Amaral
fut découverte, et il eut la tête tranchée le
30 octobre; mais les Turcs, sur divers avis
qu'ils avaient reçus de lui, pressèrent telle-
ment la place, qu'elle ne fut plus en état de
se défendre. Le grand maîire de Villiers de
rile-Adam la rendit à Soliman le 2i décem-
bre, après que l'ordre eut possédé cette ville
pendant 213 année-, depuis l'an 130'J jusiiu'à
la fin de ce siège, où les Turcs perdirent cent
mille hommes.
Après cette perte, le grand maître, avec
cinquante bâtiments qui portaient les Cheva-
liers et plusieurs habitants, partit de Uhodes
le 1" janvier 1523, et alla du côté de Candie,
où il prit terre; et, ayant donné avis de son
arrivée au général de l'armée des Véni-
tiens, il fut invité d'aller à Castro, où il fut
reçu avec beaucoup d'honneur. 11 passa de
l.'i à Messine, d'où il alla à Home trouver le
pape Adrien \ 1, qui lui fit une réception ma-
;.;Mitique, et ce pontife étant mort peu de
jours après, on donna au grand maître et à
ses Chevaliers la garde du conclave. Il prit
cependant conseil des ambassadeurs des prin-
ces et de ses Chevaliers sur le lieu où l'ordre
piiurrait établir sa résidence. Cunime il ne
voulait point de place en terre ferme, l'île du
Malle, à cause de ses beaux, ports et de sa si-
tuation sur les côtes d'Afrique, lui parut à
sa bienséance. Il envoya vers l'empereur
Charles V le prieur de Castille, le bailli de
S.iinte-Fuphémie et le commandeur Bosio,
pour lui eu faire la demande et lui représen-
ter qu'il acquerrait par ce moyen l'honneur
d'avoir préservé l'ordre de sa perte et de sa
ruine entière, d'en être le principal protec-
teur, et de l'avoir comme foniié de nouveau,
lis étaient aussi chargés de lui demander Sa-
ragouse en Sicile pour y demeurer pendant
les trois ou quatre ans que l'on bâtirait à
Malte des logements et les fortifications né-
cessaires.
Pendant que les députés du grand niaîtro
négociaient celte affaire, le cardinal Jules do
Médicis , Chevalier de Khodes et grand
prieur de Capoue, fut élu pape sous le nom
de Clément \'ll. Il accorda aux Chevaliers
de Uliodes la ville de Viterbe pour leur de-»
meure, et le grand maître et son couvent y
allèrent faire leur résidence. Les Chevaliers
qui avaient élé envoyés vers l'empereur rap-
portèrent que ce prince voulait bien accor^
der l'île de Malle à l'ordre , mais à certaines
conditions qui parurent trop onéreuses : c'est
pour(|uoi le grand maître voulut temporiser
jusqu'en l'an 1530, qu'il accepta avec ses
Chevaliers la donation que l'empereur leur
fit de cette île, do Gaze et de i ripoli, pour
les posséder en toute propriété et souverai-
neté, et le tenir eu (ief, à la charge d'un fau-
con payable tous les ans, le jour de la Tous-
saint, au vice-roi de Naples, cl que l'évéclié
de Malle serait à la nomination de Sa Ma-
jesté Impériale et de ses successeurs au
royaume de N iples. Le grand maître de l'Ile-
Adam et ses Chevaliers arrivèrent à Malte
835 DICTIONNMRK DES OIIDRF.S RKLIOIEUX. 830
j.oiir Jcrnièrc rclrailc le îft ortobrc 1530, l'oglisc : il n'y a que le seul {irand m.iîlre qui
où les Chevaliers tic lilioJes oui toujours le lail, el c'est une erreur |inpulnirc de
resté jusqu'à présent, .'lyani été appelés de- croire tiue quand 1 /s Ciievalier- de Malte en-
puis ce ti'mps-l'i Chevaliers de Maito. tendent la niisse en rcrtiiiotiic dans uiio
Cepend.mt, l'an loi", sous le pouvoriie- egli.se de leur ordre, ils tiiiini'iit j'epée nue
ment du grand iiuiitie Jean de Iloinèle-, l'uri pendant l'cvaiigiie ei à relev.itioii du corps
proposa Uans un chapitre d'établir la rési- di- JéNUS-Clirist a|irès la coiisccraiion, pour
di'uco de l'ordre à Trlpo!i, à cause que l'on laiie voir la di-po-ilion où ils s-out de coni-
serail plus à portée' de s'étendre en Barbarie, battre pour la defonse île la loi 1).
suiv^Mit les intentions du grand inaitre de Comme, après la levée du siège de Aîalle,
Il c-Adam : .Nialte e:aiit d'ailletirs un lieu les '^urc^ menaçaient d'y relourner avec de
UL.Isain, spéeia:en eut en éie, et l'url stérile, jilus grandes lorces. l'on furtilia la ville et
au lieu (jue Tripoli était dans un lieuagiea- l'ile; et l'an 1500 le grand maiire de la Va-
ille et fertile. M.iis Vou y trouv.i tant de dil- letle posa la première |àerre de la Cité, qui
ncullés, que l'ua aliau'tonua ce dessein, et porte encore son nom. Plus de huit mille
l'ordre ne posséda cette place que jusqu'en ouvriers y l'urenl employés; et, alin ti'avan-
l'an looG, (jue , sous le gouvirncmenl du cer plus aisément les travaux, le pape l'ie V
même grand maiire de llomèdcs, Soliman 11 commanda qu'où y travaillât s<ins diseonti-
.s'cn rendit encore maitrc, y ayant envoyé nuer, même les jours de fêle. La ville fut
une aruiée commandée par ?inaiii hacha. achevée l'an loTl, après la mon du grand
Ce prince, ne se croyant pas assez dédom- miilre de la \ alctle, qui arriva le 21 août
mage, par la prise de cette p ace et de l'ile de lotiS, el le grand naiiro del Monte, delà
Kaodes, des perles que les galères e! les langue d'Italie, son successeur, y transporta
vaisseaux de l'ordre causaient tous les jours le couvent et y (il son entrée avec toute la
à ses sujets en leur enlevant plusieurs bâti- rel'g.on le 18 mars de la même année 1371.
iiienls, el ayant pris même tout récemiiient Ce lut du temps de (e grand luallie que se
un gros galion qui appartenait au capigi ou donii.i la fameuse bataille de Lépan:e, la plus
chef du sérail, sur lequel les sultanes avaient célèbre <iue les chrétiens aient jamais gagnée
lies elTels dmil elles faisaient de grosses sur mer, el où l s Glievaliers de Mal;e euienl
plaintes, il résolut d assiéger Malte, espérant part el aciiuirenl beaucoup de gloire. Klle fui
qu'il serait plus heureux dans cette espédi- ooimee la uiême année 1571, dans le dclroil
lioii q.i'il ne l'avait été douze ou treize ans qui est entre les petites lies de Cursolari, au-
aupaiavanl, lorsqu'il avait voulu tenter la Irelids les Ecliin.ide-, et la terre ferme, envi-
niéine chose, y ay ni envovc une armée sous ron à soixante milles du promontoire .Ic/imw,
la conduite de Sinam hacha , qui fui obligée si reiiomaié par la balaille qui décida de
de se ri tirer, (^e fut donc l'an lotio, vers le l'cmijire romain entre Octave il Marc-
inilieu du mois de mai , que toute l'armée Anioîne. Les Turcs, ayant mouillé à Lépanlo,
ottomane se trouva à Navarin composée de apprirent que les chrétiens, eu (;uillanl Cor-
cenl cinqujuie-liuil galères, onze grands na- fou, venaient sur eux à pleines voiles. Us
vires, el ilouze autres bâlimenls, avec plus avaient si mauvaise opinion de la flotte chré-
de cent mille combatlauls. La vile de Malle tienne, qu'ils ne crurent pas qu'elle eût assez
fut puissaminenl attaquée pendant quatre de liaidiesse pour leur préseuler le combat,
mois, 1 1 encore plus vaillauiineni défendue La Uolle otlomane, commandée par llali ba-
par le grand maiire Jean de la Valette l'ari- cha, était composée de deux cents galères et
sot el par ses Chevaliers. Les infidèles y per- de près de soixaule-dix ficgales et brigan-
ilirent pli.s de vingl mille hommes, el après tins. Celle des chrélieiis, commandée par
avoir lire inutileuienl plus de soixante-dix- don Juan d'Autriche, (rère naturel de l'hi-
tinit mille coups de canons, ils lureul cuhu lij pe II, roi d'Espagne, n'avait que cent dix
contraints Ile se retirer. galères cl vingt-huit gros ua ires d'équipa-
Le pape lie IV écrivit au grand maître un ges,avee six galéasses garnies de grosse ar-
bref pour le feliiitersur la délivrance de ii.lerie. Le 7 octobre, les deux armées elanl
Malte, et lui offrit même un chapeau ne car- à la pi.rlec du canon, o.i lil un si grand feu
dinal, qu'il relusa. L'empereur trAlleinagno de part et d'autre, que l'air fut tout oliscuici.
lui envoja une épée et un poignard à gardes Oa se battit pendant trois heuies avec un
d'or emaillécs cl enrichies de pierreries. avantage egai, mais la victoire se déclara
Tous les ans, en aeliunde grâces de celte v ie- ensuite pour les chrétiens. Les Turcs perdi-
toire, on fait à Maite une pioecssion solen- renl pius de trente mille hunimes dans cette
nelle le jour de 1.1 nativité de la saillie Vierge, bataille. Les chieliens tirent jilus de cinq
qui lut le jour de la levée du siège. Le grand laille prisonniers, entre lesquels se irouvè-
iiiailre s'y trouve a la tele do lous les Che- lent les deux liis de ILiii, et se rendirent
valiers, ayant a sa droile un Chevalier qui maitres d- cent trente galères otloiiiaues.
poile Teleiidard de la religion, el à sa g.iu- l'.us de qualre-viiigls, tant galéics qu'autres
che un page qui jiorte celle épé'' nue. Lors- bàlimenls, se brisèrent contre la terre ou lu-
qu'on ciimiiience l'évangile, le grand maître rent coulés a fond ou consumes par le feu.
la prend des mans du p ige el la liiut toute Près de vingl nulle esclaves clirétiens recou-
droite pendint le temps de l'év aiigile. C'est v rèreiit la lilierte, et le butin fut tiès-consi-
U seule occasion ou Ton lient l'ejiee nue à derable, [larce que ces iulidèles vcna'cnt d«
(I) Insiriiclions sur les devuirs des Chcv.ilieis de M.dlc, pag. 55a.
857
MAL
(lillrr Ik's îles et de prendre plusieurs vais-
seaux marchniids.
L'aniiéc suivante, le grand maître dcl Mon-
te élanl mort, on lui donna pour successeur
Jean l'Evéque de la Cassièrc, de la lantruo
d'Auvergne, qui quelques années ;iprès lut
suspendu de sa digniié par le conseil do l'or-
dre, qui nomma pour son lieutenant Maurice
de l'Escu, surnommé l^ouiégas. Celui-ci mou-
rut l'an 1581, et après sa uiort le grand maî-
tre de la Cassière l'ut réiabli par le pape Gré-
goire XIll. Le gouvernement d'Alof deVign i-
court, de la langue de France, qui l'ut élu l'au
1601, fui heureux en ce que, pendant plus
de vingt ans qu'il tint la digniié magistrale,
les Turrs n'eurent pas le moindte avantage
sur les Clievaliers de Malte, el que ceux-ci au
contraire prirent les l'orleresses de Lépanle,
de Lango , de Châteauroux en (îrèce, et
quel(|ues autres qui furent saccagées et pil-
lées, el où ils Crent un grand nombre d'es-
claves. Les insultes continuelles que ces Che-
valiers faisaient aux infulèlcs ponèient le
Grand-Seigneur à entreprendre ( ncore la
conquéle de Alalte. H lit équiper une armée
navale de quatre-vingt-dix voiles, el l'en-
voya secrètement à Malle, où cile aborda l.i
nuit proche de Mar»a Sirocco. Dans ce dan-
ger, que la surprise augmenlail, le grand
maitre do Vignacourt ayant donné ses or-
dres avec une présence d'esprit et une a li -
vite merveilleuse, tout se trouva bienlôi en
étal de défense, el apiès diverses escarmou-
ches, les infidèles furent repousses et obligés
de se rembarquer. L'an lOOG, < e grand maî-
tre envoya à la faculté de théologie à Paris la
relique du pied gauche de sainte Euphémie,
vierge et martyre, dont le corps fut apporté
de Glialcédoine à Khodes, puis à Malte uaiis
l'église de Saint-Jean. Celle relique lui avi.it
été demandée par l'universiié et par la fa-
culté de théologie de Paris, qui a choisi celte
sainte pour une de ses pationnes. La céré-
monie se fil le 28 décembre, jour des saints
Innocents, l'an 1606, en présence de tous
les commandeurs el des Clievaliers qui se
trouvèrent à Paris.
Le grand maitre de VignaCDiirt étant mort
l'an 1622, Louis de Mendès Vascoiicellos lui
succéda dans le gouvernement de l'ordre ,
qu'il ne tint pas longtemps, étant mort au
mois de mars de l'année 1623. Antoine de
Paulo pril sa place, et comme sous sou gou-
veinement les ijievaliers se trouvaient fuit
incommodés par les vaisseaux des 'l'urcs de
Saiuie-Maure, qui croisaient sans cesse, ils
attaquèrent celte place el s'en rendirent mai-
Ires. Mais ils ne la gardèrent pas longtemp'*,
car les corsaires cie Barbarie, qui étaient
alliés de ceux de S.iint-Mauie, se liguèrent
ensemble. Ils armèrent six galères el plu-
sieurs vaisseaux el se mirent en mer pour
chercher lesMallais ; et, les ayant rencontrés,
ils leur livrèrent le combat, qui lut fort rude
et opiniâtre : les Chevaliers, ayant perdu leur
amiral et deux vaisseaux, et en ayant eu
d'autres hors de combat, furent contraints de
prendre la fuite, et furent quelque temps
hors d'étal de rien entreprendre. Mais leur
MAL S^8
armée navale s'étant rétablie, ils prirent, l'an
1G29, le baelia U^aïm, qui fut fait esclave, et
l'an 1G31 ils enlevèrent encore un gros na-
vire et firent d'autres prises cunsidérables du
vivant de ce grand maîlre.
Us se rendirent aussi redout;ib!es aux in-
fidèles sous le gouvorniiiient du grand maî-
tre Paul de Lascaris. Mais de toutes les prises
qu'ils fivent sur eux, celle qui fil le plus de
bruit fut le vaisseau (pii al ait à la Meciiue
et qui portait une sultane avec son lils (|u'elie
avait eu d'Ibrahiml ",ciiiper"ur des Turcs. Le
vaisseau était si liebemenl chargé, qu'on l'es-
timait deux millions, eties ricliesses appar-
tenaient, selon le bruit commun, à un eunu-
que qui avait été capi-agi ou grand maître
du sérail. La sultane mourut quelques jours
après son arrivée à Malle, el son lils y fut
élevé comme un des enfants du Grand-Sei-
gneur. .Mais, sur le bruit qui se lépaiidit dans
la suite i|uc cet enfant n'était (jue le Dis
adoptif de l'eunuque, l'on prétend que le
grand maitre persuada à ce jeune homme,
qui avait renoncé à la religion de Maiiomet,
de se faire religieux. En effei, il prit l'habil
de l'ordre de Saint-Dominique l'an 1G58, et
fut nommé le 1'. Ottoman.
Mais qu'il eût été vérilablement fils d'Ibra-
him ou seulement Gis adoptif de l'eunuque,
il est certain que le Grand-Seigneur avait
aimé cet enfanl avec beaucoup de tendresse.
Il résolut d'abord de s'en venger, et jura la
ruine de Malle. Il fit aussi paraître beaucoup
d'emporiement contre le» Vénitiens, parce
que, sui\anl le traité fait avec eux, ils de-
vaient garder la mer el en chasser ses enne-
mis, ou du moins remettre ses vaisseaux en
liberté. Le grand maître pourvut à la sûreté
de celle île. Les Vénitiens se tinrent aussi
sur la défensive; mais l'orage tomba sur eux,
et l'année suivante 16'i5, le Grand-Seigneur
commença la guerre de Candie, qui ne finit
que l'an 1669, lorsque les infidèles se furent
rendus maîtres de celle île. Les Clievaliers de
Malle n'abaudonnôrenl point les Vénitiens el
leur donnèrent secours. L'ordre entretint
même à ses frais une compagnie de cavale-
rie dans la ville, el la défense du bastion de
Saint-André fut commise aux Chevaliers.
Après la pi ise de Candie, Nicolas Cotloner,
qui était pour lors grand maîlre, voyant qu'il
y avait tout à craindre pour Malle, lit réparer
et augmenter les ouvrages des forteresses,
afin qu'elles fussent plus en élat de soutenir
Uii assaut. 11 fil même construire un nouveau
fort, (jui fut apiiele de son nom la Cottonière,
et qui ne fut mis dans sa (lei fection qu'a-
près sa mort , qui arriva l'an 1680 , et
Grégoire Caraita, ISapolilain, fui élu à sa
plac ■.
La ligue que firent ensemble l'Empereur,
le roi de Pologne et les \ énitiens contre les
'l'urcs, qui avaient porté la guerre en Hon-
grie l'an 1683, fut une nouvelle occasion aux
Clievaliers iJe donner des preuves de leur
valeur. L'an 1684., les \'énitieiis firent la con-
quête (le Sainte-.Maure avec les secours diis
Chevaliers, et prirent ensuite Prévésa. L'an-
née suivante, ils aidèrent à prendre Coron :
839 DICTIONNAIRE DES ORDRES RELIGIEUX. 840
ils n'nji.indoniu'ronl point les >('Miilii'ns pon- ot (jui déprndi'nl du prond innîiro, sont le
il.iiU loak" l.i ^uorri-, i\ui {\c. (inil quo l'iii» Ciozi' et ("otiiino, où il y ,-i aussi des forls
1(>09 par \t; traité do paiv de Carlos ilz. cl dr- a\ ec linéiques hourgs et villaj;es.
puis ee tonips-là les (".hcvaliers n'ont point l.e ;;ouveriieineiit e>l inonarcliiqiie el aris-
distontinué de faire des courses sur mer toeralique ; car, pour re qui regarde la nio-
pour donner la citasse aux corsaires inli- narcliie. le i;raiid m lîtrn rsl souverain s^jr
ilèlcs. le [ipuple dans I île de Malte el ses dépen-
La profession des armes n'a point eni- dancs : il fait liailre monnaie, il accorde des
pè( lié CCS Chev.ilieis d'cxener riiiisfiita- grâces et des rémissions aux criminels, et il
lité suivant leur première institution. \ ers donne les provisions des grands piieurés,
l'an lilS, André, roi de Hongrie, leur eu des bailliages el d>s comniai;dcrics. Tous les
donna un té:iioignago avant.igeux dans <ino Chevaliers de l'ordre, iiuchiue autorité qu'ils
. donation qu'il lit à leur prolit. Il dit qu'étant aieiiî, lui doivenl obéir en tout ce qui n'esl
logé cliez eux à Acre, il avait vu nourrir ijoint <-onlraire à la régie et aux statuts de la
chaque jour une niulli;ude innombrahle de religion. (JuanI à l'arislocralie, c'est dans
pauvres, les malades couches dans dos li s les affaires imporlanles qui regardent les
et Irailcs avec soin, les morls enterrés avec Chevaliers et la religion, que le grand mailre
la décence convenable, en un mot, que les et le conseil exercent ensemble une autorité
Chevaliers étaient occupés, tantôt .i la cou- absolue, el le grand maître y a seulement
templation comme M. n ic, tantôt à l'action deux voix pour sa prééminence. Le conseil
comme .Marthe, et surtout à combaltrc cou- est ordinaire ou complet. Au conseil ordi-
tre les ennemis de la croix. Ce prince donna n/iire assisienl le grand maître, comme chef,
à l'ordre cinq ceiils marcs d'argent à preii- et les gr.nids-croix, qui sont i'évéque de
dic tons les ans sur ses saline* do Saloch eu Malle, le prieur de l'église, les baillis con-
llongrie. l'Itanl encore loiié chez ces Cheva- ventnels, les grands prieurs cl les baillis
licrs en jiassant àMargai, il donna aussi capilulaires. Le conseil complet est composé
cent marcs d'argent à l'erdre à prendre sur de grands-croix el des deux plus anciens
les salines de Zolaslha, tous les ans, pour la Chevaliers de chaque langue,
défense de la forteresse de .Mar^'al ; cent an- Les langues sont les dilforeulcs râlions
lies marcs d'argenl pour la <léfense de celle dont l'ordre est composé. Il y en a huit, qui
de Ciac, el lit aussi plusieurs antres don - sont : Provence, Auvergne, France, llaLe,
lions à l'ordre, qui furent conliriiiees par le Aragon, Allemagne, Casii.lc cl .\iii;le:crre.
]iape llonorius lil. lùiliii il voulut être asso- Ces huit langues ont leurs chefs à M.ille, que
cié à l'ordre, cl il en portait publiiiucmcnl l'in nomme piliers el baillis convcutueN.
la croix. Le chef ou pilier do la langue de Provence
C'est toujours un Chevalier giand-croix à cause que Uaynion I du l'uy, qui a dresse
qui est grand hospiialier. el il y a d'autres les règlements de l'ordre, était Pro\enç,il, a
Chevaliers prud'hommes pour Voir si les ma- la charge de grand commandeur; le pilier
lades sont bien soignés, ijui font distribuer de la langue d'Auvergne esl grand marcclial ;
les médiramenls, qui .irrélcnl les comptes celui de Franco est grand hospitalier. Le
de l'inlirmier tous les mois ; el, afin d'éviter chef de la langue il'llalie est grand amiral ;
la confusion el que les Chevaliers n'allas- la langue d'Aragon a pour pilier le grand
sent pas tous ensemble pour servir les ma- conservateur qu'on uommail autrefois dra-
lades, le chapitre général de l'an 1()31 or- pier ; celle d'Allemagne a [loiir pilier lo
donna que chaque langue tour à tour, par grand bailli; celle de C>astiile le grand chan-
Eemaine, enverrait à 1 infirmerio autant de celier; et la langue d'.Xnglelerre , qui ne
(Chevaliers, de servants d'armes el de novi- subsiste plus à cause de I liéré>ie dont ce
ces qu'il en faudrait pour le service des ma- ro\ aumc a élé infecté, avait |iour chef le lur-
lades, el «[ue tous les jours, matin el soir, copulier ou général d'infanlerie.
il ne pourrait pas y en avo.r moins de sept. i).ins chaque langue, il y a plusieurs
l.e grand hospiialier et les |irud'hommes oui grands prieures et b.iilliages capitu'aires,
aussi le soin des cnfanls exposés, qui sont savoir : dans l;i !an,Mie de Provenee , les
nourris el élevés aux dépens du commun prieurés de Saint-Cilb>s de Toulouse el le
trésor, jusiiu'à l'âge de huit ans. baill.age capitulairo de .Manosiiue ; dans la
. ,, ^, , . ,, , j cr ■ , i I r- langue d'Auvergne, les prii'urés d'Auvergne
§ 11. Elat de l ordre deSa,nt-Jean de Jernsa- ,., ,^ ,,.„„, ,^, capilulai.e de Lurol. appela
km ou de Malte mi dernur surle, et la ma- ,|.,„^ ,,., ^„,j^ ,,^ ,' , ^., ^.„,i„ j^ ,j'^,^,4^^,,
mcre de recevoir les Cliaulurs. ,,^,„^ ,., ,.,„j^,„^ J j..^^,,,.^ ^ ,^,^ l,^i,.^,,..^ j,,
L'ordre de M.ilte ne pos^èile pins présen- France, d'.\quilainc el de Chamj)agnc, aveu
lemenl en tonte souveraineté ((ue lîle de le bailliage capituiairc de la .Moreo el la Iré-
Alalle el (|uel(|ues autres petites ans envi- sorcrie générale, aux(|uels sont annexés ,
rons. File a v.ngi milles de longueur el douze savoir, au bailliage de la Morée, la com-
de largeur. Il y a deux villes eonsiileraliles, manderic de Saint-Jean de Lalran à Paris,
qui sont l,i \ ieille-\ ille ou t,'irWa Vccchin, el el, à la grande trésorerie, la commanderie
celle qui porle le nom de la N'.ilelle, ()ni esl de S.iiiil-.lefln en l'île île Corlicil ; dans lu
présenlcmeiil la capitale, el l'une des plus langue d'Halie, les prieurés île Home, dn
fortes places de l'univers, avec environ cin- l.oiiibardie, de Venise, de Pise, de liarlelle,
quante bourgs ou vill.iges. Les plus cous dé- de Messine et de Capoue, cl les bailli.iges
rallies des autres i.cs aux environs de .Malle, capilulaires d^ Sainte-liuphémie el de Saint-
m
MAL
Rticnnc près de Monopoli, de la Sainte-Tri-
allé de \ enosa el de Saint-Jean de Naples ;
dans la langue d'Aragon , qui comprend
aussi la Catalo^tnc et la Navarre, la Châlel-
lenie d'Emposte, les prieurés de Catalogne
et de Navarre, el les bailliages capitulaires
de Majorque et de Caspe ; dans la langue
d'Alemagne, les prieurés d'Allemagne, de
Bohême, de Hongrie, et il y avait aussi celui
de Danemark et le bailliage capiiulaire de
Brandebourg, avant que l'hérésie eût été
introduite dans ces provinces ; dans la lan-
gue de Gastille, qui comprend aussi Léon
et Poriugal, les prieurés de Gastille et de
Léon, el celui de Poriugal avec les bail-
liages capitulaires de Langu ou de Leza el de
las Nueves-Villas; et dans la langue d'An-
gleierre lors(iu'elle subsistait, il y avait les
prieurés d'Angleterre et d'Hibernie, et le
baillia,'e cai itulaire d'Aquila. Quant au
prieuré de l'église de l'ordre et à la com-
manderie de Chypre, tous deux bailliages
capitulaires, ils sunt communs à toutes les
langues, et le bailliage de Nigrcpont est
commun aux deux langues d'Aiagon et do
Castille.
L'hôiel de chaque langue est appelé au-
berge, à cause que les Chevaliers qui dépen-
dent de ces langues y vont manger cl s'y
assemblent d'ordinaire. Plusieurs chapitres
généraux ont fait des règlements qui con-
cernent la manière dont les Chevaliers se
doivent co nporter dans ces auberges, et qui
font connaître combien est grande l'obser-
vance régulière qui se pratique à Malte. Les
ordonnances du chapitre général tenu sous
le grand maître Antoine de Paulo, Toulou-
sain, l'an 16il, portent que les piliers don-
neront tous les jours à chaque Chevalier un
rotolo, c'est-à-dire environ trenle-six onces
de boeuf, mouton et veau, qui doil être fourni
par le trésor coaimun, et lorsque l'on donne
du porc frais ou du salé, les deux tiers liu
rotolo; les jours maigres, du poisson, et, au
défaut de poisson, (|ualre œufs pour p-
tance ; chaque jour six petits pains el un
qunrtuccio de vin sans eau, c'est-à-dire la
valeur de trois thopines. Et, afin qu'on ne
fasse point de degàl et de consommation
inutile, il est détendu aux Chevaliers de me-
ner des chiens à l'auberge, el si les maîtres
auxquels ils appartiennent voulaient empê-
cher qu'on ne les chassât, ils seraient punis de
la septuine, qui leur serait aussi imposée, si
les jours qu'ils mangent à l'auberge ils em-
portaient du pain, du vin et autres choses à
nianyer.
Tro:s fois la semaine, et non davantage,
encore faut-il qu'il y ait de justes raisons,
les piliers doivent fournir la pitance aux
Chevaliers hors de l'auberge, lorsqu'ils la
demandent ; mais ceux qui l'envoient cher-
cher ne doivent pas avoir déjeuné ce jour- là
à l'auberge, autrement la pitance leur peut
être refusée, el lorsque le maître de la salle
a mangé, on ne peut plus la demander. Le
pilier doil donner à déjeuner tous les malins
MAL 842
entre les deux messes. Si les Chevaliers ne
sont pas contents de la pitance, ils ne doi-
vent pas faire leurs plaintes au maître de la
salle, ni au cuisinier, ni au dépensier, mais
seulement au pilier; el, si les plaintes sont
injustes, ils sont punis de la seplaine. Si nu
Chevalier a frappé un serviteur du pilier
sans effusion de sang, il est condamné pour
la première fois à la quarantaine, la seconda
à six mois de prison dans la tour, et la troi-
isième à perdre deux ans d'ancienneté; et,
s'il y a du sang de répandu, il est puni plus
rigoureusement. Enfin, lorsque le pilier fuit
(|uelques plaintes de quelque Chevalier, il
est cru sur sa parole, sans que l'on fasse des
informations, et le conseil procéJe contre le
Chevalier qui est accusé. La peine de la
seplaine consiste en ce que celui qui est con-
damné doil jeûner sept jours de suite , et, la
quatrième et la sixième férié, manger seule-
ment du pain et boire de l'eau, se soumet-
tant ces jours-là à la discipline, c'est-à-dire
à recevoir des coups de houssine de la main
d'un prêtre de l'ordre pendant le psaume
Deus misereatur nnsiri, etc. La peine de la
quarantaine est de jeûner quarante jours de
suite, el la quatrième et la sixième Icrie , .uj
pain et à l'eau ; ils reçoivent ces deux joui s-
là la discipline pendant le psaume Miserere,
mei, Deus, cl pendant ces quarante jours ils
ne doivent point porter d'épée ni sortir que
pour aller à l'Eglise.
'Chaque grand prieuré a un nombre de
commanderies, dont les unes sont destinées
aux chevaliers de justice, et les autres indif-
féremment aux chapelains et aux servants
d'armes. Voici ce qu'un savant homme (I)
a écrit depuis peu louchant l'origine dis
commanderies de cet ordre. L'origine des
commanderies, dit-il, vient de ce qu'ancienne-
ment les biens de l'ordre étaient en commun,
et que pour les faire valoir on commeitait des
séculiers qui en étaient, ou les fermiers ou les
receveurs, et qui en rendaient compte. Mais
le grand éloignement faisant qu'on était sou-
vent trompé et que les comptes étaient peu
fidèles, on donna l'administration de tous ces
revenus aux grands prieurs à chacun dans
son département. Ceux-ci ne s'en acquittèrent
pas mieux : de sorte que, quoique les revenus
de l'ordre fussent Irès-considérahles, à peine
trouvait-on de quoi soutenir la dépense qu'on
était obligé de faire. On eut donc recours â
un autre expédient, qui fut de commettre rt
députer un frère pour régir et administrer
chaque commanderie pour autant de temps
fia on le jugerait à propos, à condition que
tous tes ans il payerait entre les muins d'un
receveur de l'ordre établi pour cela une cer-
taine somme proportionnée au revenu de la
commanderie. Cette imposition fut nommée
Itesponsion; c'est ce qui a été pratiqué jusqu'à
présent.
Au reste, on n'envoyait pas ces Chevaliers
seuls. On leur donnait pour aides quelques
autres Ck'valiers, et tous ensemble avec quel-
que prêtre de l'ordre qu'ils avaient ordinaire-
(1) Inslruciidiis sur lis devoirs des Clievalicis de Malte, cli:ip. 4, p. 65.
UiCTIONNÀinE DES OrDBF.S liEIIGiKUX. 11.
27
M5 DICTlONNAinE DF.S ORORF-S lU.IJGlKl'X. SJ4
ment avec eux, formaient u7ic comv.unnvtc'. lii c qu.'ind on 1rs possi'.lo par droit d'-Tncieii-
Cetiii qui et it à la l^ie fui nomm<< comman- iiilc i.u par ;itii(''.iori.sveiiiciiI. l/aiicionnolé
deur, et In maison où éUut assemblée la com- se coinpic du Icmps de la réception ; mais il
viunaulé Commanderiez nom qui signifie moins faut qu celui (jui |ir(''li'iiil ;i une commanderic
tin commandetiienl qu'une adminisiralion, et ail f.iil cini| annéi's de résidence à Malle, ( l
;)iii<r oiiisi dire une comnuinde. On tuulat qiialre caravanes ou voyage-; sur mer ; et l'a-
faire comprendre aux Chevaliers par ce nom inéliorissemenl est Uirsuu'apri^s .ivoir fait
même qu'ils n'étaient que les économes et les des réparations dans une c Miinandcric dont
administrateurs de celle portion des biens de l'on jouit, on en prend une audt' d'un plus
l'ordre, qui ne liur était confiée que pour au- praml revenu. Karonen ou caravanna est un
tint de trmpK qu'on le juijerail à propos, et mol arabe qui sinnifR- une asseinbléo d'Iiom-
sur laquelle i's devaient prend' e une portion mes qui s'unisiint p 'ur faire (iiieli;ue trafns
pour être envoyée atinuellemenl au receveur, ou quelque voya(;o(l). On se servait de c.,\
le reste dev nt élre employé à nourrir cl en- mot lorsque les Chevaliers do Sainl-Jcan de
Ireten'r la con mniauté de chaque cominan- Jerosal. m, élanl dans la Syrie, choisissaient
drrie et à soulajer les pauvres du lieu. Ainsi les frères qui claicnt dcslinés |)0Ui la {;aidc
l'ordre é.'ait secouru, tous IrsChevaliers étaient dis lorlercsses ou pour servir sur hs galères;
nourris et enirelenus à ses dépens, el les pau- el l'on s'est tnujours depuis ce temps-là ser-
rée- éla'ent ass stés. Mais la division s'étant vi du même mot pour marquer les voyages
mise dans la suite parvii ces ('hcinlirrs qui que les t^hevaiers de Malle font sur les ga-
vivaicnl ensemt'le dans une même comman !e- h res ou sur les vai>seau\ au service de leur
ne, on fui obVijé de les sépanr et de laisser ordre. Il f.iul qu'ils fassent ces quatre cara-
le soin de la coiumanderie à un seul, en le vane- par cux-niénies, et il ne leur est pas
chargeant de payer d s pensions <] qurl/ues- permis de les faire laire par d'à Ires. Mais,
uns de .-es confrères, nu lieu qu'il les enlrete- i|uoiqu'ils soi. ntobii^és à cinq années de ré-
nuit el nourrissait intpiravant, et c'est de là sidence el à qualrc caravanes, néanmoins,
aussi qu'est venue ioritjinc des pensions que s'ils oui été ci ployés au service du grand
plus eurs Cheialiers possèdent sur des com- maître ou de la rel gi.m, ils ont (juelques
inunderies i u sur d'autres biens de l'ordre. exemptions, cl on leur com, te pour uncca-
Lcs commanderics sont appelées magis- ravan: deux années complètes de service en
Iraies, de jnslicc ou de grâce. Les masiislrales personne. Les Chrva iers qui sont esclaves
sont celles qui sont annexées à la dignité de des Turcs ont aus i des cxempiions, el ou
firand maître, iifin que celui (jui en est revéïu leur com[ite ur.c caravane pour chaque an-
la pu sso soutenir avec plus d'éclat. Il y en née de caplivilé, ainsi qu'il est ordonné par
a une dans chaque grand prieuré, savoir : les ordonnauLcs du chapitre général de l'an
au prieure de Sainl-Gil es la commanderie lti3l, qui prescrivent aus>i l'âge de vingt
ilcl'czénas, au prieuré de Toulouse la com- aii> pour commencer les caravanes, excluaiil
uiauderie de Tuy-Soubran, au [ rieuré d'Au- de tous emplois, bénéOccs et commanderics
vergnc la commanderie de S.iliis, au prieuré de l'onlre ceux qui, ayant alleint l'âge de £0
de France la commandeiie de Uainaul , au ans, n'auiaicnt pas fait les quatre caravanes
prieuréd'Aquitainelacommandcriedu teiiqile qui ne sont (|uedesix inois chacune,
delà Hochelle, au prieuré de Champagne la l-cs comaiandcnes de grâci- ont ce nom
commanderi.: de .Meiz, au prieuié de Lom- qu.inJ elles sont données parle grand mai-
haidio la command rie d'Inverno, au prieuré Ire ou par le- grands prieurs par un droit
de Uome la cumm inderie de Mugnano, au qui app iriient à leurs dignités, et ils en don-
prieuré de Venise la commanderie de Trè- nent une de cinq ans en cinq ans. On ne
cuzo, au prieuré de Fisc la commanderie de [irend point garde si la comm. inderie va-
l'ralo, au prieuré de Gapoue la commanderie canlt esl de celles (',ui sont alTe-lées aux Chi*-
dc Sieiaiio, au pri uré de Harleltc la com- va iers ou de celles qui appaniennent aux
luaiidcrie de Uriadizi, au prieuré de Messine chapelains ou servants d'armes. Le grand
la commanderie de l'ole//i, au [.rieuré do maître ou le grand prieur la peul donner à
Catalogne la commanderie de Masdeii, au lel frère (lu'i! lui plail. de (|uelque rang qu'il
prieure de Navarre la commanderic de Cal - soil, cela étant in ilïerent, loixjuc la pro-
c. clas, en la châtcllcnie d'KmposIe la com- motion esl d • grâce.
inan lerie d'Aliaga, au prieuré de Casiillc Ouoiqu'à proprement parler il n'y ait que
les ( onimanderies d'Olmos el de \'iso, au ceux qui sont lai()ues el nobles d'i'xtraclion
prieuré de Torlngal la commanderie de \ il- qui puissent porter la qualité de Chevalier,
lacova, au prieuré d'Allemagne la comman- parce qu'il n'y a (lu'eux à (|ui ou donna
tlerie de Huez, au prieuré de liohôme la com- l'ordre de ( hevalerie, si ce n'est par quelqu»;
n)anderie de Wadislau, et autrefois au pr curé grâce particulière, néanmoins, comme sous
d'Angleterre la commanderic de l'esrcns, au le nom de C.hevaliers de Malle on entend or-
pricuré d'ilibernic les commanderics de Kel- dinairemenl tous eux qui composent cet
bary, de Killi rye el de Crolie, et la comman- ordre, on peut dire qu'il y en a de quatre
dcne de S.nica au royaume de Chypre. sortes. Les premiers sont ceux (ju'on non)me
Les commanderies du justice ou de grâce les Chevaliers de justice ; ils sont obligés du
sont ainsi appelées selon la manière de les faire preuve de noblesse, el il n'y a que ceu\-
oblcnir. On les nomme commanderics de jus- là qui (icuvcnl p irvcnir aux di;;nilés de bail-
li, liisliuaidns ilih Clicvalici.'- de Miillc, p-i^'- ^0 '•
845
MAL
MAL
rk;
lis, grands prieurs et grands naîlrcs. Los
seconds sonl les Chevaliers de grâce, qui,
n'étant pas nobles d'extraction, ont mérité
par quelque action de valeur ou par quelque
service considérable rendu à l'ordre, d'être
mis au rang des nobles et de jouir des mêmes
honneurs. Les troisièmes sonl les frères ser-
vants; il y en a de deux sortes, les frères ser-
vants d'armes qui sont employés dans les
mêmes fonctions que les Chevaliers, tant à
la guerre qu'au service de l'hôpital, et les
frères servants d'église, dont toute l'occupa-
tion est de chanter les louani^cs de Dieu dans
l'église conventuelle et d'aller chacun à son
tour servir d'aumôniers sur les vaisseaux ou
sur les galères de fa religion. Les quatrièmes
enfin, qui sont nommés frères d'obédience,
sonl les prêtres qui, sans être obligés d'aller
jamais à Malte, prennent l'habit de l'ordre,
en font les vœux, et s'attachent au service
de quelques-unes des églises de l'ordre sous
l'autorité de quel(|ue grand prieur ou de quel-
(|ue commandeur, auquel ils demeurent sou-
mis; et ils jouissent de plusieurs privilèges
qui leur ont été accordés. 11 y a aussi des
donnés ou demi-croix qui ne peuvent por-
ter la croix d'or sans une permission es-
presse; et, quand on leur accorde cette per-
mission, ce ne doit être qu'une demi-croix
d'or à trois branihcs; mais ils peuvent por-
ter une demi-croix de toile blanche cousue
sur leurs habits, laquelle ne doit pas passer
les deux tiers d'un palme de Sicile.
Personne ne dnil être présenté pour être
reçu dans col ordre ni demander des commis-
saires pour l'aire ses preuves, qu'il n'ait au
moins seize ans accomplis, à l'exccpiion des
pages (iu grand maître, qui peuvent être re-
çus depuis douze ans jusqu'à quinze, et à
l'exceplion iiussi des ecclésiastiques, qui
peuvent être reçus depuis dix ans jusqu'à
seize. Cependant l'usage d'ob'enir des dis-
penses du pape pour faire recevoir des en-
finis depuis qu'ils sont nés jusqu'à dix ou
douze ans, est devenu commun, et l'ancien-
neté de ces enfants commence du jour au-
quel le grand-maître a reçu et approuvé
celte dispense, pourvu qu'on paye ponctuel-
lement dans l'année ce qu'on appelle droit
de passage. Cet usage de recevoir des Che-
valiers de minorité est récent. Ce qui y donna
lieu, c'est que dans le chapitre général t nu
ranlt)3l,on résolut d'exécuter ce que le
conseil avait ordonné par un décret du 7
janvier 1C29, qui était de faiie un collacldo
ou cloître pour y mettre un noviciat i)our
les Chevaliers et servants d'armes , et un sé-
minaire pour les ecclésiastiques; et, comme
il fallait un funds de cont mille écus pour
l'exécution de ce dessein, le Trésor ne se
trouva pas pour lors en état de faire ce fonds
à cause des grandes dépenses qui l'avaient
épuisé. C'tsl pourquoi on résolut pour y
[lourvoir d'accorder cent dispenses pour re-
cevoir dans l'ordre cent enfants en minorité
(|ui donneraient chacun mille écus pour
être admis. Les cent dispenses furent liienlôt
remplies. Le Collachio pour le noviciat et
pour le séminaire ne se lit pas néanmoins :
on crut alors devoir employer la somme à
d'autres besoins ; et. comme il n'y a point eu
de chapitre général pour accorder de ])areil -
les dispenses, on a eu recours au pape pour
les obtenir par son iintorité : ainsi l'usage
(le ces dispenses s'est insensiblement intro-
duit, et est devenu très-commun. D'abord il
fallait avoir au moins huit ans, ensuite six ,
cl la coutume est présentement que l'on peut
êlre reçu m quelque bas âge que ce puisse
être. Les derniers règlements faits à Malte
sur le droit de passage de ceux qui sonl ainsi
reçus, portent qu'ils doivent payer trois cent
trente p sloles el un tiers au prix courant
des pistoles d'Esp.igne, sans y comprendre
quelques autres menus droits. L'origine el
le nom du droit de passage viennent du droit
que payaient autrefois aux c ipitaines des ga-
lères ou des vaisseaux de la religion ceux
qui se mettaient dessus pour pisserà la terre
sainte, et dans la suite des temps à l'île du
Riiodes pour y êtie reçus Chevaliers. Us
payaient une somme pour leur nourriture
cl entretien pendant le voyage, cl cela s'ap-
pelait droit de passa(je. Ce droit a continué
de se payer jusqu'à présent à l'Ordre ; il a
tuujouis retenu l'ancien nom, et est confir-
mé par des statuts. Quoique ce droit de pas-
s.igc doive être payé dans l'année, néan-
moins le grand maître peut accorder deux
ans au lieu d'un pour payer ce droit , mais il
ne peut pas accorder un terme plus long.
Une des conditions de la grâce de minorité
est que dès le moment que le droit de passa-
ge est payé, cet argent est entièrement ac-
quis à l'ordre, sans que sous quelque pré-
texte que ce soit on puisse jamais en pré-
tendre la reslitulion.
L'on ne peut être reçu page du grand
maître que depuis douze ans jusqu'à quinze,
cl on n'y peut demeurer que trois ans au
plus, et souvent moins, suivant l'âge qu'on
a quand on y entre. Mais comme le granil
maître ne peut avoir que seize pages, il faut
pour y entrer qu'il y ait une place vacante.
C'est pourquoi, avant qu'on ail l'âge pour y
entrer, on obtient du grand maître une let-
tre de pjige, el lorsqu'on a les onze ans com-
plets et qu'il y a une place vacante, le plus
ancien.de ceux qui ont eu des lettres de pag(i
est reçu, après avoir fait ses preuves de no-
blesse cl de légitimation. La différence qu'il
y a dans les formalités qui s'observent dans
la réception de ceux qui sonl reçus de mino.
rite cl de ceux qui sonl reçus comme page< ,
c'est que les premiers ne sont pas obligés do
se présentera l'assemblée de la province ni
d'aller à Malte qu'à vingt-cinq ans, au lieu
que les pages doivent se présenier à l'assem-
blée de la province el aller à M.ilte après
leur réception, el ne peuvent payer leur pas-
sage que lorsqu'ils présentent eux-mêmes
Icu s preuves à Malte. Le droit qu'ils payent
est de deux cent cinquante écus d'or, chaque
écu d'or pris pour une denii-pistole, selon ce
qu'elle vaut, outre quel(|ucs autres menus
droits.
Les Chevaliers de majorité sont ceux qui
sont reçus à seize ans accomplis. Us payent
fi-
lucTioNNAïuE nF.s OHOUES ur.i.ir.iF.rx.
le nu^me (iiml que lt'< pnjios du grnnJ maî-
tre, el ne sont pas olili|iés de porlcr eux-mê-
mes leurs preuves à Malle. Autrefois ils y
étaient olili(;és, el sans cela leur ancieniie;é
ne courait point , quoique ces preuves eus-
sent été reçues pour bonnes au chapitre ou
à rassemblée de la pri.vinie, et qu'ils eus-
sent pajc leur pass.ige. .Mais , par un décret
du conseil de 1088, confirmé par un bref du
pape Innocent XI, il a él6 ordonné qu'il suf-
lîr.iit à l'avenir que celui qui a présenté ses
preuves au chapitre provinci.il ou à l'assem-
blée les envoyât au couvent à 1,1 vénérable
langue dans laquelle il e^t né, el qu'il serait
dispinsé d'y venir en personne justju'à l'âge
de vingt ans, sans que cela puisse nuire à
B(m ancienneté , qui commencera à courir
du jour que ses preuves auront 6l6 présen-
tées en langue.
Pour ce qui est des frères servants d'ar-
mes, le chapitre général de l'an 1G31 avait
seulement défendu à la langue d'Italie d'eu
recevoir, comme il est porté par l'article
»inpt-cinquiénie du litre de la Ilécrpliondes
frères. Depuis par un décret du conseil la
même défense a été faite aux autres lan-
gues, jusqu'à ce qu'il en eût éié auiremenl
ordonné; mais citte défense a été levée de-
puis quelque Unnps. Les chapelains ne peu-
vent être reçus ([ue depuis dix ans jusqu'à
quinze, après quoi il faudrait obtenir un
bref de Uome; mais, jusqu'à 13 ans, il suffit
d'obtenir du grand maître une lettre de dia-
cot. \in vertu de cette lettre le postulant se
présente au chapitre provincial ou à l'assem-
blée; on lui donne d<!s commissaires pour
faire ses preuves, qu'il doit porter lui niênio
au couvent, après quoi on le renvoie pour
conlinuerses éludes. Ils sont seulement obli-
gés de faire voir qu'i's sont nés de gens
iionnéies, pratiquant 1rs arts libéraux, qu'ils
n'ont jamais exeicé aucun art vil et méoni-
(jue, ni servi personne, el (juc ni eux ni
leurs pères el mères n'ont jamais travaillé à
aucune chose méprisable; et de plus qu'eux,
leurs pères el mères, leurs aïeuls et aïeules
paternels cl maternels sont nés en légitime ma-
riage. Le droil de passa ge des jeu ne>diacols ou
ecclésiastiques depuis dix ansjusqu'à quinze
est de cent écus d or. chaque ecu d'or valant
une demi-pislole d'I'^spagne en espèce, "selon
la valeur courant<', et autres menus droits.
Les autres diacots ou ecclésiastiques, reçus
par brefs dans un âge plus avancé, doivent
payer douze cent cini|uai>le livres pour droit
de passage et quelqms autres droiis, à la lé-
scrve néanmoins de ceux (jui par leur capa-
cité cl leur mérite auraient elé honores du
bonnet d docteur, les(iuels p;ir un privilège
]>arliculier sont reçus à tout âge cl sans
payer aucun droit de passage.
Quoique la coutume dans l'ordre soit de
faire les preuves de noblesse par l'arbre de
consanguinité, en remontant seulement de-
puis les (Chevaliers jus(|u'à ses bisaïeuls pa-
lerncls et maternels, neaninoiiis le prieuré
d'Ail magne exige davantage ; il faut \> ou-
vcr seize ()uarliers des aïeuls. Ceux qui dé-
pcndenl de ce prieuré sont dispensés d'ail i'
3;8
sulfil «eule-
à Malle laire leur noviciat, il
ment qu'ils le fassent auprès du grand prieur
d'Allemagne; el ceux du prieuré de liohéme
ne sont obligés qu'à six mois de noviciat à
Malte, à compter du jour qu'ils y sonl arri-
vés. Les Chevaliers du piieuré d'Allemagne
ont en( ore un autre privilège, qui est que
les deux tiers de l'argenlenc d'un comiiKin-
deur demeurent après sa mort au profit de
la commanderie, l'autre liers seulement ap-
partenant à l'ordre; en sorte que le Cheva-
lier qui succède à la commanderie est obligé
de payer à l'ordre la valeur de ceit'; troi-
sième partie à raison de huit florins p.ir
marc, et de donner caution pour les deux
autres liers. Quoique les (Chevaliers des au-
tres prieurés de l'ordre ne fassent pas difli-
cullé d'admettre les enfants naturels dis
rois el des princes souverains, néanmoins le
prieuré d'Allemagne n'en reçoit point, do
quelque naissance distinguée que soil le
présenté; il faut absolument qu'il soit né de
légitime mariage.
La profession se faisait autrefois d.ins cet
ordre aussitôt qu'on avait fini l'année de no-
viciat, comme on le fait dans tous les autres
ordres religieux ; mais cette coutume u'esl
plus en usage, et il n'y a que ceux qui sonl
reçus en minorité qui aient un temps fixé
pour leur profession. Us doivent se rendre
au couvent dans la vingt-cinquième an-
née pour faire leur année de noviciat ,
et ensuite leur profession dans la vingt-
sixième année , à faute de quoi ils per-
dent en faveur de leurs cadets l'ancien-
neté que leur minorité leur avait procurée.
Cependant il y a beaucoup de Chev.iliers re-
çus en minorité qui ne font profession que
plusieurs années après les vingi-six ans,
sans que cela leur porte aucun préjudice;
mais il faut pour cela qu'ils aient un bref ou
une dispense, qu'on obtient aisément pour
des raisons particulières qu'on ex|)0se.
>'oici les céréiiion es qui s'observent en
donnant 1 habit cl faisant faire profession
aux Chevaliers. Le postulant ayant reçu du
giand maître et du conseil la permis<iun do
prendre l'habit et de faire profession, el le
jour ayant été choisi, il se trouve à l'église,
où étant à genoux devant l'autel, velu d'uin-
longue robe et d'un manleau à bec, qui i-sl
l'habit de l'or. Ire, et ayanlà la main un flam-
beau allumé, il offre au prêre son épee nue
pour (Ire bénite. Le prêtre la tient toute nue
en disant quelques oraisons , et, après avoir
jeté de l'eau bénite sur l'épée et sur le Che-
valier, il lui met en main celle èpée nue eu
lui disant : Jticevcz allé sainte c'pce au nom
(tu l'crc, el (lu Fils, el du Sainl-ks/irit, aiusi
soil-il, el senez-vous-en pnui voire de fnsr,
cl de 1(1 suinte E(jli^e de Dieu, ù In confusi m
d's ennemis de la croix de Jesus-Clu isl et de
lii foi chiét(Cnne ; cl prenez (,(irdc, aulani c/u«
lu frtujUité liumnine li- pernv lira, de n'en jU'
muis fiapjier /jcrsanne iuju^tniicnl. (,>up lu
(jrd e d'en u^er ainsi vous soil accordée par
celui (jui V l cl rèijne avec le l'ère et le Suint-
Lspnl, dans tous tas siècles de» siècles. Ain.ii
suit il. On reinel ensuite l'épée dans le four-
Bin
M\î>
MAL
»"0
t i-;iu, cl le prêtre la mcl au f ôlô du Chevalier
qui (ioil laire profession, en lui disant : Met-
tez vôtre épce à vôtre calé nu nom de Nôtre-
Seigneur Jesus-Christ, et souvenez-vous que ce
n'est p>is tant par les armes que les saints ont
conquis des roiaumes que par leur grande foi.
Cela étant fini, le prêtre donne un baiser au
Chevalier qui doit faire profession , lequel
ainsi orne de son épce doit s'y préparer avec
dévotion, alin qu'il puisse recevoir la grâce
de cetie sainte milice. l'our cet effet, ayant
ru soin de faire une bonne confession de lnus
les péchés de sa vie passée , après avoir en-
tendu la messe et reçu la très-sainte commu-
nion, étant à genoux oi tenant un flamheau
(le cirt- blanche allumé, au()uel on attache
ordinaireme.l un écu d'or, lequel flambeau
marque la charité, qui est un amour tout de
feu, se tenant ainsi avec respect devant ce-
lui qui doit recevoir sa profession, il répond
humblement aux intcrrogatious qu'il lui fait.
Cependant le prêtre peut avani cela, s'il le
juge à propos et si le temps le permet, don-
ner ao profès des avis; el, après les lui avoir
donnés, il lui demande s'il est dans la dispo-
sition de promettre non-seulement de bou-
che, mais du fond du cœur, de suivre tous les
avertissements qui viennent de lui être don-
nés. Alors le Chevalier qui doit faire profes-
sion répond : Moi, N. , jure el provuts à Je-
sus-Christ , qui est Dieu, à la bienheureuse
Vierge Marie, el à suinl Jean-Baptiste, que je
ferai tous mes efforts pour observer ponctuel-
lement toutes ces choses.
Manière de donner l'ordre de Chevalerie.
Avant que le prêtre lise l'évangile, le Che-
valier qui doit recevoir les vœux du profès
lui dil : Que demandez-vous ? A qudi ayant
répondu qu'il demande l'ordre de Chevalerie,
le Chevalier lui dit : L'uvez-vous jamais
reçu de prince catholique ou d'antre qui eût
puissance de le pouvoir donner? Le profès
ayant répondu ce que bon lui semble, le Che-
valier continue de lui dire : C'est chose noble
et salutaire, servir les pauvres de Jesus-Christ
el accomplir les auvres de miséricorde , et de
sr députer au service el défense de la foi. Tou-
tefois vous demandez une chose que beaucoup
d'autres ont demandée el recherchée d'avoir,
el n'ont pu. Pourquoi cet ordre de Chevalerie
que demandez a coutume se donner à ceux
qui par l'antique noblesse de leur lignage le
uierilinl,ou vei ilublemenl à ceux qui par leurs
propres vertus s'en sont faits dignes. A celle
cause vous connaissant cire tel que requiirl
l'ordre de Chevalerie, consentons à vûiie de-
mande, vous mettant en mémoire que ceux qui
ont de recevoir tel ordre ont d'être défenseurs
de l'Eglise, des pauvres femmes veuves et en-
fans orphelins, l'romeitez-vous ainsi faire?
I.e profès ayant répondu : Oui, Monsieur,
le Chevalier lui donne ré(ico avec son four-
reau en la main , lui disant : A celle fin que
iiiiiinlcniez tout ccquuiez promis, prenez
celle cpéc (tu nom du l'crc , du h'ils , it du
baintl'sprii. Aimi toil-il. Le Clic\ aller, ti-
rant ensuite l'épi'e du fourreau et la donnant
en la main du p'olès, lui dit : Prenez celte
é/iéc. Par son lustre elle est en/lammée de lu
foi; par la pointe, d'espérance, et par ses
gardi's, de charité : de laquelle userez ve.rhiiu-
.'iemenl pour la défense vôtre et de la foi ca-
Iholii/ue, el ne craindrez d'entrer aux perih
el dangeis pour le nom de Dieu, pour le signe
de la croix et pour la libirté de l'Eg'ise;
maintenant la justice et la consolation des
femmes veuves el des pauvres orph'lins , car
c'est la vraie foi el justification d'unChevalier.
C'est la vocation , l'él ction et sanctification
que d'offrir l'âme à Dieu, el le corps aux pé-
rils et dangers pour son service.
Le Chevalier fait nettoyer l'épéc au profès
sur sou bras, puis la niet au fourreau, lui
disant : Tout ainsi que mettez cette épée nette
et polie dans son foiirenu , ne délibérez aussi
la tirer en volonté d'en fiappcr personne in-
justement , ni la maculer, mais l'emploier
comme dessus:donl Dicuvousenfasselagrace,
Ainsi soit-it. Le profès étant toujours à ge-
noux, tenant l'épée dans son fourreau , le
Chevalier la prend et la lui met au cùté, di-'
sanl : Je vous ceins de celle epée , la mettant
à vôtre côté, au nom de Dieu tout-puissant et
de la glorieuse vierge Marie , de monsieur
saint Jean-Baptiste, nôtre patron, et du glo-
rieux saint Georges , à l'honneur duquel rece-
vrez l'ordre de chevalerie. Tout ainsi qu'avec
patience cl vraie foi il fut victorieux pour
nous impélrer telle grâce envers Dieu , aussi
navez-vous de la tirer sans antre espérance
que de vaincre. Le profès se lève ensuite ,
tenant à la main son épée nue, qu'il ébranle
trois fois , el le Chevalier lui dit : Ces trois
fois qu'avez ébranlé l'épce en votre main, si-
gnifient qu'au nom de la sainte Trinité , avez
de défier tous les ennemis de la foi catholique
avec espérance de victoire. Dieu vous en don-
ne la grâce. Ainsi soit-il. Le profès nettoii?
après cela l'épée et la remet dans le four: eau;
le Chevalier lui fait une remontrance sur les
vertus cardinales , el , ayant tiré l'épée du
même profès, il lui eu donne trois coups sur
l'épaule, et lui dit : Je vo'is fais Chevalier, au
nom de Die i, de la Vierge Marie, de monsieur
saint Jean-Baplisle, et de monsieur saint
Georges, rigilanl el pacifique en l'honneur de
chevalerie; puis remet l'épée dans le four-
reau, et, regardant le profès, il lui donne
doucement un petit soufflet en disant : Re-
veillez-vous, et ne dormez aux affaires, mais
veillez en la foi de Jesus-Christ, el faites que
ce vous soit le dernier affront et vergogne
qu'avez d'avoir pour la cause de Jesiis-Chri^t,
aiant la paix de Nôlre-Sc gneur en vous. Il
lui montre ensuite les éperons dores , et lui
dil : V oiez-vous ces éperons ; ils vou.i signi-
fient, tout ainsi que le cheval les craint se met-
tant hors de son devoir , ainsi devez-vous
craindre de sortir de vôtre rang et vœux et ne
faire mal. On vous 1rs met ainsi dorés aux
pieds, pour être l'or le plus r che métal qui
se trouve, et comparé à l'honneur. Un autre
Chevalier les lui attache aux pieds, el il re-
tourne à sa place continuer d'cutcndre le
reste de la messe.
8r;! DICTIONNAir.F. DES ORDRES RELIGIEUX.
Manière de donner hi croix de l'or. h e.
Apr^s la dcm.Tndo que le [irufos n fiile
er.ï
d'c-lre rcrti ol admis dans la rotnpa;;iii(! di'S
l'rôri's do la s.icroe rolij;ion de Saiiil-Jea'i de
Jérusaletn, celui qui le reroil lui dit : l.n fle-
vwnde que faites <i été' à plusieurs refusée
pour n'être iliijnrs d'é re reçus en le'li' Com-
pngnie ; mais , nous confiant de vôtre pni-
d'homie et suffisance, sommes délibères la votts
octoier, espérant qu'avec bon zcle et charité
vous vous exercerez aux œuvres de miséricor-
des , et tolallement au service de l'h(\pital de
cette religion , non srutemenl enrichi' et am-
plifiée de bien qrantls privilèges , libertés ,
franchises , et immunités par le siinl-sicge
apostolique, ains encore par tous les princes
chrétiens et autres saintes personnes, afin
que tous nous autres servans au lit hôpital
Si'wni enflammés de vraie foi , esperawe et
charité envers Jesus-Cbrisl. Et tout ainsi que
l'on vous baille un cierge ardent en la main ,
cela vous doit signifirr qw devez être ardent
en Icelle ch irité , qui est la vraie perfection
de cette rie; vous assurant que si l'exerces
d'un ardent caur pour la défense de la foi de
Jesiis-Christ, contre les ennemis d'ictlle, plus
facilement il vous appellera en son roiaumr ;
et à celle fin que vous ne puissiez excuser d'i-
gnorance , je suis tenu vous signifier ici en
présence des assistons , et denvinder si vous
are; parfaite volonté d' m suivie la re/le;
c'est que d('s cette heure so'tcz préparé d'entrer
aux peines et fâcheries qu'avez de pâlir au
service de nôtre religion, et totidlement vous
dépouiller de vôtre propre volonté , la remet-
tant iiujonril'hui entre l(S mains de tous supé-
rieurs élus en irelle, qttels qu'ils soient: vous
commandant qu'aez à leur obéir en quelque
manieie que ce soit.
Le profè'; ayant répondu qu'il est contont,
le recevant continue : h't fiuisi/u'éles con-
tent vous dépoiiilicr de vôtre volonté propre
et libir.é, et la remettre <\ vos supérieurs, tout
ainsi que l'on fait de crttc cire , qui se laisse
maniir à ce que l'on veut, a.'nsi fcra-t-on de
vous , et vous advise que serez contraint de
jViirier, quand aurez envie de manger, et veiller
quand aurez envie de dormir , ensemble plu-
sieurs autres peines contraires aux jtlaisirs et
libertés ; et p lur cela advisez bien si <u ez la
volonté de vous en dépoiiiller pour la met-
tre es mains des suprrirurs de nôtre religion.
i,c priifi's ayant répondu qu'il se sonniel en-
liérenicnt à la volonté des supérieurs et qu'il
se dépoui le de sa liberté, le recevant lui de-
mande : 1° s'il n'a poinl fait vieu dans une
autre religion ; 2° s'il n'a point cunsoumié
mariage ou s'il n'csl jxtinl fiancé avec
aucune femme ; 3" s'il n'a point de dettes
considérables au\(juelies il ne peul sa-
ti>rairc ; U" s'il n a poinl été homii ide
ou causé la mort de quelqu'un ; .') s'il
n'e>.t point dccondiliim servile. Le profès re-
pond ce (pie bon lui semble, et le recevant
l';nertil (|iie louics et (]iianlis lois ()u'll se
Iruiivcra convaim udeces rlioses, on le clias-
gira de l'ordre a > e: confusion ; et (ju'il y fasse
Licnrellexion. A<{Ui>i les piofésayaal ciicuru
répondu, le recevant continue dédire : Dun-
qucs puisque vous nous dites et assurez être
tri, et qu'êtes prest et délibéré d'être défenseur
de rt'qlise de Jesus-Christ, et servir aux
pauvres de l'hôpital de nôtre religion, voua
recevons bevignemenl selon les formes de nos
établissemens, et louable coutumes et non au-
trement, et ne vous prome'tons que pain et
eau, simple vêtement, travail et peine. Pour
lors il commande au (irofès d'.ilier prendre
le missel sur l'autel el de le lui apporter ; el,
lui faisant mettre les mains sur le canon de
la messe, le profès prononce ses vœux en la
manière suivante : Moi A', jure et promets,
el fait vfru à Tout-Puissant (d la glorieuse
vierge Marie, et à 77ionsieur s int Jean-Itap-
tiste nôtre patron) moiennant sa giace, d'ob-
server et garder vraie obédience à celui qui
me sera commandé de par Dieu et ma religion,
de vivre sons propre, et de garder chasteté,
ainsi qu'il convient à tous bons religieux
catholiques. Le rerev.inl lui dit •ensuite : Or
éi ce que commenciez par [obéissance, je vous
commande de reporter ce messil sur l'autel, et
qu après qu'aurez baisé ledii autel, retourniez
ici. Le proies obéit, et le rccev.nt continue :
M intenant nous vous conyioissons éire l'un
des défenseurs de V Eglise catholique, et servi-
teur des p:iuvres de Jesus-Christ de l'hôpitul
de saint Jean de Jérusalem.
Cela fait, le recevant prend le manteau à
bec, et montre la croix à buil pointes au
profès, lui disant : Ce^e croix nous a éié or-
donnée bliinrhe en signe de p ireté, laquel'.e
devez porter autant dans le cicur comme de-
hors, sans macule ni tache. Les huit pointes
que vous votez en ice'le, sont en signe des huit
béatitudes que devez toùj mrs avoir en vous
qui sont : 1° avoir le contentement sp rituel,
2" vivre sans malice, 3" pleurer ses péchés,
4" s'humilier aux injures, 5' aimer la justice,
0" être miséricordieux. 7" être sincère et vd
de cœur, 8" endurer persécution. Lesquelles
sont autant dr virtus que devez graver en vô-
tre cœur pour la consolotion et conservation
de vôtre ame. Et pour ce je vous commande
la porter nperlemenl cousue au cô:é senestre
au droit du cœ ir, et jamais ne l'iib indonner.
Le recevant fait ensuite baiser la croix au
))rorès, et lui metlanl le nianteau sur les
épaules, lui dit: Prenez cette croix el habit
au nom de la sainte Trinité, auquel troiiverez
repos et salut de vô re ame, en augmentation
de la foi catholique, el défense de tous bons
chrétiens, pour l'honneur de nôtre Sei-
gneur Jésus - Christ : et pour ce je vous
mets cette croie au côté senestre près du cirur
]i0ur la purfiiitnnrnt aimer, et de vôtre main
dexire la dcfndre, vous commandant de ja-
mais ne l'abandonner, à cause que c'est le vrai
étendarl, Jlannirre de nôtre religion, ni moins
vous éloigner de lu compagnie de nos frère»
qui l'accompagnent. Autrement vous serez
dejrttéel privé de nôtre compagnie avec grand
vitupère, niminr membre puonl et transgres'
seur de nos vaux, confoi niémml à nos étn-
blisseiiiens. le manteau iliK/uel nous vous
avons vêtu, est la figure du vêlement fait dt
poil de chameau, duquel éloit têtu nôtre pu-
8r,5
VAL
MAL
SSi
tron saint Jenn-Bciplisle, étant nu désert. Et
jiiirintit prenant ce manteau, vous renoncez
intx pompes et vanités de ce monde, et vous
romniande le porter en tems requis, aussi pro-
curez que vôtre corps soit enseveli en icelui,
afin qu'il vous souvienne d'ensuivre nôtre pa-
tron saint Jean-Baptiste, et que vous nielliez
l'iute espérance pour laremifsion de vos péchés
à la paision de nôtre Seiyneur Jesus-Chrisl,
laquelle est signi(iée par ce cordon, duquel il
fut lié par les Juifs. Ceci est la fiqure de la
colomne où il fut lié. Ceci est lu couronne
d'épines. Ceci est la lance de laquelle il eut le
ci'ité percé. Ceci sont les paniers pour donner
l'aumône aux pauvres, et dans lesquels Virez
chercher pour eux quand vôtre bien ne pour-
ra satisfaire. Ceci est l'éponge quand on l'a-
breuva de fiel et de vinaigre. Ceci sont les
fouets desquels il fut butta. Ceci est la croix
sur laquelle il fut crucifié. Je vous l'ai mise
sur l'épau'c en rememlrance de la passion sous
laquelle trouverez le vpos de votre ame. Ce
joug esl fort doux et suave, et par ainsi je
roui lie ce cordon au col en siijne de servitude
par vous promise. Nousvousf.isons,et tous vos
parens participons de tous les biens spiiituels
qui se lont et se front en nôtre religion pur
toute la chrétienté. Vous serez obligé de dire
et reciter chacun jour cent cinquante Paler
nosicr, Oit bien les heures de Nôtre-Dame, ou
les vigil s des morts. Vous serez pareillement
obligé reciter une des trois formes de prières
ci-dessus pour chacun de nos frères trépassés.
Vous demeurerez la tête nuëjusques f) ce que
le iiiatlre vous commande de la couvrir, et
après l'oraison et bénédiction du prêtre vous
embrasserez tous les frères avec vôtre habit.
Avant que de mangir irez faire l'obédience à
l'auberge. Le prèlrc de l'ordre qui a célébré
la lucsse dil ensuite plusieurs or;iisons sur
le iiouve^iu profès, qui est à genoux; après
leîiquelles le profès va faire l'oliédieiice à
l'auberge avec du pain , de l'eau cl du
Bel, etc.
Mais peut-être qu'il n'y a j.imais eu dans
rcl ordre de réception plus solennelle que
celle de Cés.ir, duc de ^'endôme , fils naïu-
rel d'Henri IV, roi de France , qui lu Gl re-
cevoir Chevalier de cet ordre dans son bas
âjje (1). La cérémonie se lit à Paris dans
l'église du Temple, qui était magnifiquement
ornée. Le roi , 1 1 reine , les princes et les
princesses , les prélats et les ambassadeurs
qui étaient à la cour s'y trouvèrent. L'évé-
que de Nevcrs célébra ponlificab ment la
messe, et fit une exboriation au duc de Ven-
dôme sur l'urdre qu'il i renail. Il fut ensuite
présenté au grand prieur de France, qui lui
lit les deniandi'S oriiinaires ; mais , ne pou-
vant répondre à c; use di- son b.is âge, le
roi descend l de son trône , et s'appiocha
pour l'aidi r à répondre. La messe étant
achevée , le nouveau Chevalier se présenta
pour faire sa profession. Le roi s'avança et
promit que lorsqu'il aurait alieinl làge de
seize ans, il ferait 1rs voeux ordinaires de pau-
vreté, de chasteté et d'obéissance; mais comme
il avait aiiparmimcnt une expectative di;
grand prieuré de France, le grand prieur lui
attacha devant l'estomac la grande croix de
l'ordre. La cérémonie se termina par le son
d'un grand nombre de trompettes et de li.iut-
bois. Le duc de Vendôme donna à dîner au
grand prieur, aux commandeurs et aux
Chevaliers qui avaient assisté à sa réceptioii,
et le roi alla diner chez M. Zamet. Le duc
de Vendôme ne fit pas néanmoins sa profes-
sion, et épousa, l'an 1009, Françoise de Lor-
raine , duchesse de Meuceur. Charles de
Valois, qui fut dans la suite ducd'Angon-
lénie, fils naturel de Charles IX , aussi mi
de France , avait d'abord pariillcmcnt été
drsliné pour l'ordre de Malte. Henri 111, qui
avait succédé à Charles IX , obtint pour te
princedu grand maître une expectative pour
le grand prieuré de France, qu'il posséda
dans la suite, et qu'il quitta pour épousir
Charlotte de Montm<!renci , fille d'Henri 1",
duc, pair et connétable de France.
Tous les Chevaliers de quelque rang, qua-
lité, ou dignité qu'ils soient , sont obligés
après leur profession de porter sur le man-
teau ou sur le justaucorps, du côté gauche,
la croix de loile lilanchu à huit pointes, qui
est le véritable habit de l'ordre, la croix d'or
n'étant qu'un ornement extérieur, et lorsque
les Chevaliers vont combattre contre les in-
fidèles, ou qu'ils font leurs caravanes (2),
ils portent sur leur habit une s pra-veste ou
casaque rouge en forme de dalmatique, ornée
par-devant et par derrière d'une grande croi^t
blanche pleine, qui esl celle des armes do la
religion. L'Iiabit ordinaire du grand maîtro
(3) esl une soutane de labis ou de drap, ou-
verte par-devant, et serrée d'une ceinture
où pend une bourse , pour marquer l,i clia -
I ité envers les piuvres; cl par-dessus cette
soutane il porte une espèce île robe de vc-
loi.rs sur laquelle il y a au côté gauche et
sur ré|)<iule la croix de l'ordre, qu'il porte
aussi sur la poitrine. Le manteau à bec [h)
dont nous avons déjà parlé, qui esl celui
qu'on donne à la polession, est noir, et
s'al'ache au cou avec le cordon de l'onlre,
qui esl de soie blanche et noire, où sont re-
présentés les mystères de lapassion de Notre-
Seigneur Jésus-Christ, entrelacés de paniers
qui représentent, comme il a été dit, la cha-
nté qu'ils doivent exercer envers les pau-
vres. Il y a à ce manteau deux manches
longues de près d'une aune, larges au haut
d'environ demi-pied, qui se terminent en
pointes, lesquelles se rejetaient autrefois su?
les épaules et se nouaient ens' iiible sur les
reins. Il paraît par une monnaie d'or du
grand maître Déodat Gozon qui lut élu lau
1340, et par le sceau du grand maîire Phil-
bert de Naillac, qui succéda à Ferdinand de
Hérédi.i l'an 13% , qu'il y avait ancienne-
ment à ce manteau à bec un capuce qui y
(1) ilss. (le Uricitm, à la bibliotlicouc du roi,
V 1. (;cL\xiv.
il) VoB.,àla fin du vol., n" 2 '5.
(5) Voij., ibiJ., n-aO'i.
(i) Vvy., djid., u" 1.05.
8:;5
mCTIONNMRF. DES ORDRLS nELIGiF.LX.
836
lit aMnrIic , cntiin-.c
;ure qui rc|ircspnlc
I ciil voir (l.ins la
jincicii Chevalier
grand-croix 2),
est line csfiècc de
ai)
un
avoc ce rnaiiti'aii à hor I)
l.'lialiil (les Chevaliers
quand ils sont à l'église .
rdlii- I oTc appelée clociti ou rl'n lio, ouverte
par-devant . ayant des prandcs manches,
sur laqucllp, du cô'é gaui lie, sur l.i poitrine
et sur l'épaule, e>l la croix de l'ordre a>ec
II! grand cordon , et une épée à leur lOlé.
Quand ils vont au consi-il (■'} , ils ont une
pari'ille robe noire, mais fennec par-devant,
n'ayant que la grande croix sur la poitrine,
et ils n'y perlent point l'épée ni le cordon.
I es frères chapelains allant par la ville {^)
sont habillés comme les <cclésiasli(iues, ayant
srulcincnt sur leur souiane et sur le man-
teau au côté gauthe l.i croix de l'ordre ; à
l'église (5| i s ont un rochct de toile, et par-
dessus un c imail noir, où est ans^i la croix
lie l'ordre. Clément XI, à la sollicitation du
grand maître Unymond de l'erdlos de Uo-
cafult, qui gouverne présentement l'ordre,
a accordé à soixante chapelains de cet ordre
la permi>sion de (norter le camail violet ;
mais il n'y a que ceux qui résident à Malle
qui '■e «■er>cnt de ce privilège; quelques-uns
en France a5aiit voulu porter ce camail vio-
let, l'archevêque d'Aix fui le premier qui s'y
opposa. Nous donnons aussi l'ancien habil-
lement de ces chapelains , cl celui que por-
tail Uaymond du Tuy, piemier grand maître
de cet ordre , comme il est représenté dans
d'anciennes peintures à Malle (G).
Il y a eu jusqu'à présent soixantc-lrois
glands m.iîlres, paru i lesquels il y a eu
Pierre d'Aiibus>on et Hugues de Loubens de
Verdnle qui ont été cardinaux. Le pape Ur-
b;.in VIII, en donnant le titre d'Kmineiice
aux cardinaux le donna aussi aux grands
niaitresde l'ordre deSaint-Jean deJéru.-alein.
Les ré>ii!cn!s de cel ordre auprès des Ictes
couronnées prennent la qualité d'ambassa-
deurs, et celui qui réside à Rome ajoute à
cette qualité celle de procureur général en
cour de Rome.
Quoique toutes les com:nanderics de l'or-
dre de Saint-Jean de Jérusalem soient, ou
de justice, lorsqu'on les obtient par droit
d'ancienneté de réccplion, ou de grâce, lors-
qu'elles sont accordées par le grand maîtie
ou par les grands prieurs en vertu du droit
ailaché à leurs di-nités, comme nous avons
dit ci-devant , néanmoins la commanderie
de r!le-\'crte à Sirashmirg, alïei tée à des
chapelain» de l'ordre, est élective, et le coiii-
niandeur a droit de porter la mitre, la crosse
et les aulrPS ornements pontificaux. Hés
l'an 1150, Wcrnerus, maréchal de Hune-
bourg, qui était un puissant seigneur (loi
avaii causé jilusieiirs maux aux liourgeois
(le Strasbourg, louché de repentir, et vou-
Iniii se convenir à Dieu, se réconcilia avec
ces bonrveoi^, et obtint d'eux un lieu ap-
pelé rile-Verte, hors des murs de la ville,
uù il lit bàlir une église sous le nom du la
(«) Vmi.
(1, Vo,j.
à 1 1 lin du vol.
il.i.l., Il" iil7.
il)id., Il" i 8.
2.G.
Sainte-Trinité. Pendait prh de deux siècle»,
le serv ce divin ne fut point interrompu dans
Celle église; mais vers l'an 131)7, elle était
abandonnée et t mhait en ruine , lors(iiii'
Riismnn Mcrsv^in, d'une famille noble de
Strasbourg, l'acheta, 'a fit rel âlir, y joignil
(les bâtiments et des jardins , et y mil p>ur
la desservir quatre prêtres séculiers , avec
la permission du pape et de l'évéque de
Str.isbourg. (Jueliiue temps après il la donna
à l'ordre île S.iint-Jean de Jérusalem, à ( on-
dilion que des frères chapelains de cet ordre
y feraient à perj étuité I Office divin. Celte
donation fut acceptée par Conra^l de Rrtins-
berg, grand prieur d'Allemagne, l'an L'Hl, et
coulirmée dans la suite par le granl maître
Raymond Hérenger, et par le cba|iitre géné-
ral. Ce grand pri' ur, par ordre du grand
maître, donna l'Iiabit de l'ordre cl la croix ;'i
Rusman Merswin cl à ses compagnons, qui
furci;t reçus au nombri' des religieux de cel
ordre. Merswin, selon Rosio dans son His-
toire de rt^rdrc de Malle, prit néanmoins
un habit différent de celui des chapelains de
l'ordre; car il dit que celui des novices était
semblable, quant à la forme, à celui des
avocats consistoriaux et des cubiculaircs
apostoliques à Rome, et (ju'à leur profession
on leur en donnait un semblable à la clocia
ou robe que portent les chevaliers grands-
croix de l'ordre ; que sur cette robe ils met-
taient un manteau, et sur ce manteau une
mozette. Rusman Merswin ajouta à l'église
de la Sa nie-Trinité une autre é^ilise qu il
fil bâtir, et qui fui dédiée en l'Iionnenr de
saint Jean-Baplisie. Il mourut l'an l.'!82. lu
18 juillet, étant âgé de soixante-quatorze
ans. Le grand priei.r Conrad de lîrunsbeig
choisit aussi sa demeure ordinaire à l'Ile-
Ver'.e, dont il est reconnu \' principal bien-
faiteur, les revenus les plus considérables
dont jouit encore cette commanderie prove-
nant de ses libéralités ; mais il mourut à
Cologne le 10 décembre l'i'.IO, et fut enterré
dans ré;;lie de la commanderie de Saint-
Jean et de Sainle-Cordule.
La piété des fidèles angmcnla les revenus
de la coiiiniandcrie de l'Ile-\'crle, qui de-
vaient être autrefois Irès-cons dérailles, puis-
que, noi'Obstanl les perles qu'elle a souffer-
tes par les guerres et par l'hérésie que la
villi' de Strasbourg avait embrassée, ils se
montent encore à présent à piôs de douze»
mille livres. Ouclques-un^ ayant \oulu dé-
membrer quelque chose de la fondation ,
Hugues de Sari, grand prieur de France, qui
awTit élé iioiiiuiè avec queliiues chevaliers
par le grand maître Antoine Fluviaii pour
faire la visite de l'or-lre en Allemagne, as-
sembla à rile-Vcrte le rb iptre de la pro-
vince l'an l'iSi, et ordonna que la fondation
lie celte cimmaiiderie, qui était du nombre
des m lisons exemples, deineurerail en son
entier, de (leur, dit ce grand ]irieiir dans le
décret <iu'il lit, que cel unique signe de l'ob-
servance de la religion de Sainl-Jcan de J."-
(.1) Voi/., ibid., M"ill9.
?:>) Voii; itii.t.. Il' 2111.
l6) Vo'i/.,ibid., Il'» a;» elili.
8o7 MAL
rusalem ne fùl obscurci. Cet orag;c élanl
dissipé, la rcputaUon dis rplijrieux de celle
conifiianderic se répandit de tous côtés ; plu-
sieurs personnes ecclésiasli.iues et laïques,
et même des Chevaliers de l'ordre voulurent
demeurer avec eux, l'on augmenta les bât;-
nienis, qui étaient irès-spacieux.
Plusieurs cardinaux légats , des nonces
apostoliques, des archiducs, des princes, t-t
môme l'empereur Maximilieii I", qui, l'an
1504, et dans les années suivantes, vint plu-
sieurs fois à Strasbourg avec une suite nom-
1 reuse, y ont fait aussi leur séjour pendant
le trmps qu'ils ont demeuré à Strasbourg.
L'empereur Maxirnihen confirnia la fonda-
tion de celle conunandcrie, ce qu'a fait aussi
remper( ur Charles V et q lelqucs-uus de ses
successeurs.
Le sénat de Strasbourg, dans une Icllre
qu'il écrivit au grand maîtrL- de l'ordre, l'an
1478, lui parla avec éloge de l'observance
régulière que l'on pratiquait dans culte com-
manderie, et le pria de ne pas suufl'r;r que
l'on en diminuât rien; mais les magistrats
qui composaient le même sénat, vers l'an
1523, furent d'un sentiment bien contraire à
celui de leurs prédécesseurs. La ville de
Strasbourg ayant embrassé l'hérésie de Lu-
ther et les opinions des nouveaux sectaires,
ils voulurent contraindre tous les ecclésias-
tiques et les religieux à suivre leur perni-
cieux exempte. Pour y obliger les chapelains
de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem de la
cominanderie de l'Ile-Vcrte, ils les chargè-
rent de grosses iinpos lions, ils leur délVndi-
renl de lecevoir des novices, ils voulurent
les cmpêclierde dire la messe et de prêcher;
cl, afin que les catholiques ne pussent pas
entrer dans leur église, ils mirent des soldats
aux portes, obligeant les religieux de leur
payer leur solde, H de nourrir à leur laide
les officiers. Nonobstant ces persécutions, ces
religieux ne laissèrent pas de faire l'oftice
divin dans leuréj^lise; ils établirent le no-
viciat à la cummanderie de Scliélestadt, qui
dépend de celle de l'Ile-Verle, et les anciens
furent réduits à deux seulement, n'y ayant
plus que le commandeur et le sacristain qui
restèrent à l'Ile-V^erle. Celle persécution
fut modérée ; les catholiques de Strasbourg
et les étrangers eurent permission de faire
l'exercii e de leur religion dans la coniman-
dcrie de l'Ile-Vert -, n'y ayant que celle seule
église qui leur fùl accordée; mais on limita
le pouvoir des religieux, qui n'y purent ad-
ministrer les sacrements de baptême et de
mari ige ; on leur défendit de faire le caté-
chisme, et il ne leur était pas permis do
porter le saint viatique aux mulaiies, nicmc
secrètement , sans s'exposer à de grosses
peines et à être mis en prison.
Ils furent plus persécutés l'un 1G33 : les
magistrats sign. fièrent le 16 janvier, vieux
style, un ordre au commandeur d'aller de-
meurrr le même jour avec les religieux et
les domestiques dans la maison de la prévôté
de Sainl-l'ierre-le-Jeune , avec pcrmis>ion
de faire l'exercice de la religion catholique
dans réglis« du monastère de la Madeleine
MAL
Ki8
des sœurs Pénitentes, qui étaient les seules
religieuses ([ue l'on avait tolérées dans la
ville de Strasbourg, et q i étaient fort éloi-
gnées de Saint-Pierre le-Jeune. On leur dé-
fendit de rien emporter de la commanderio
de rilo-Verte, et on leur promit que loul
ce qu'ils laisseraient leur serait fidèlement
gardé. L'iirilre pour faire.sorlir ces religieux
le même jour, fut exécuté avec beaucoup de
rigueur. Ils furent conduits à Saint Pierre-
le-Jeune au milieu d"une troupe de soldats
et insultés par la populace ; mais la pro-
messe qu'on leur avait fiite de garder iidè-
lement ce (ju'ils laissaient à l'I c-Verte ne
fui pas tenui-; car, le 18 mars de la même
année, l'on commença à démolir la com-
inanderie et le ciiuveut, cl la veille de la fêle
de saint Jian-Baptisle, l'église fut entière-
ment abattue, les meubles furent abandon-
nés au pillage, et les magistrats refusèrent
aux religieux ([uelquis tuiles (|u'ils deman-
daient pour réparer la couverture de quel-
ques maisons qu'ils avaient hors leur com-
nianderie. On ordonna au commandeur de
remettre entre les mains des échevins les
ciels des archives, et on lui fil une nouvelle
défense de recevoir des novices. Le comman-
deur en porta ses plaintes à la cour impé-
riale et à la dièle de l'Iimpire; mais ses
sollicitations et la recommandai ion même
du roi de France Louis XIV, qui demandait
pour eux quelque dédommagement aux ma-
gistrats, furent inutiles. Ce ne fut qu'après
la paix de Wesiphalie , qui fut conclue l'an
1648, qu'on leur permit de retournera l'Ile-
Verle, où ils Grenl réparer le peu de bâti-
ments (|ui y restait; mais, n'ayant point
d'église, ils furent toujours obligés d'aller
faire l'office divin dans celle du monaslèro
de la Madeleine, qui était éloignée d'une
demi-!ieue.
Enfin, l'an IGSl , la ville de Strasbourg
s'éianl soumise à l'oliéissance du roi do
France, le commandeur de l'Ile-Verte fit as-
signer les magistrats au conseil supérieur
d'Alsace pour être dédommagés des torts
qu'on leur avait faits, à quoi les magistrats
lures^t condamnés par un arrêt du 11 juillet
IGSd. Mais ces magistrats ayant eu recours
au conseil d'étal du roi. Sa Majesté porta les
uns et les autres à un accommodement qui
fut fait entre eux par l'entremise de M. de la
Grange, intendant d'Alsace ; et, par la Iran-
saclion qui fut passée l'an 1687, les magis-
trats donnèrent au commandeur et aux reli-
gieux de rile-Verte l'église et le monastère
de Saint-Marc, qui avaient autrefois appar-
tenu à des religieuses de l'ordre de Saint-
Dominique, situés dans un des faui)Ourgs de
Strasbourg, et réciproquement le comman-
deur et les religieux cédèrent aux magistrats
rile-Verte et le reste des bâiimcnis qui sub-
sistaient. Celle transaction fut confirmée par
le grand maître , et par ce moyen les reli-
gieux de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem
sont en possession du monastère de Saiiil-
Marc, et on leur a donné le soin d'une cura
pour tout le faubourg de la Porte de Saiul-
Pii rrc.
S59
DICTION^AinE DES ORDRES RELIGIEUX.
SCO
Nous nvons dit que la coinmaïuloric de
Scholesl.idl dcpciul.iil de cclic de rile-Ni-rlc.
C'ol;iil autrefois une comtn inderie qui devait
être pi'ssédéc par un clievalier; mais elle se
trouva lellcmcnl cndeltée dans le siv siècle,
•lue le },'rand-pri('ur el le cliapiire provincial
rl'.MIeniau'iic qui se tint à lleinibach proche
l.audaii, l'an l.'t'.t'J, la donnc^rcnt au couitnan-
dcur et au comenl de l'Ile-N erte, à condi-
lion qu'ils y entretiendraient deux chapelains
|)(jur y faire l'ofllce divin ; cecpii fui ciinfirnié
par le {jrand iiiiiîlre i'Iiilhert de Naillac l'an
1V17. Le coniinandiur et le couvent de l'ilc-
Vert<', après en avoir acquilti- les délies, la
lirent rebâtir. Klle souffrit beaucoup lors-
que la ville fut assiéfiéc par les Suédois , el
les reli|;ieus en ont cédé depuis une partie
pour faire les nouvelles f.irtilicalions.
Le commandeur de l'Ile-Verle et élu par
les reli;,'ieux de la coinmandi'rie. Il se sert
dornemenis pontificaux par un privilège
(|ui lui a été accordé par le l'apc (élément
VIII l'an 139G, et il d.mne la tonsure et les
quatre mineurs à ses religieux. Il a séance
dans les chapitres provinciaux d'Allemagne
immédiatement après le grand-prieur; el,
lorsqu'il n'y peut aller eu personne, le pro-
cureur qu'il y dèiiute prend sou rang après
le dernier chevalier au-dessus des autres
chapelains de la province. Il y a ordinaire-
ment neuf chapelains dans la cominanderie
de rile-Verle avi c le commiiidenr , el deux
dans celle de Srhélesladt. ils sont prèscnle-
mcnt habillés comme les autres cli.ipel'iins
de l'ordre. Le grand prieur d'.MIema'ne a
droit de vi>ite tous les dix ans dans ces deux
commanderies : M. Kebel en est présente-
ment commandeur, et c'est lui (jui nous a
envoyé les mémoires dont nous nous sommes
servis, et qui nous ont été procurés par M.
de C.orberon, premier président du conseil
d'Alsace.
Voyez Giacomo Bosio. Ilist. del Ord. di
S. Giovanni Girrosoliinilann, secund. edit.
L'i même traduite par Maudouin. Juan Au-
gust. De Funes , Clironicn de la Heliyion de
Saint-Juan de Jerusidcm. Ilenric. l'eulaleo,
Hisl. Milil. Ord. Joannitarwn. Itliod. tl
Mflit. h'qitit. (jirolamo Maruli. Vit. de
Grand-Maestri dt Mtdia. Francisco Abcla.
Denrittion di Malin. Jacob Foula nus. De
liillo Rhodio. Matthieu de (loussancourt,
Martyrologe de Malle. Nabera! , Piivitéges
octroyés à l'ordre </'• Malle. Le chevalier
Lambert , Recueil des mi'tncs privilèges. Le
commandeur Discluseaux, /{cent / des mi'mes
l'ritiléijes. Ijaspar de .Monloya, Stahilimcuta
MiUluin facri ord. de Suncio Joanne Jci oso-
lijm. De l'ougé , Instructions sur les devoirs
(iesChevalieisde Malle. Va\iu,Thc(iire d'hon-
neur et de chtiatcrie. Bernard (jiustiniani ,
Jhst. Cttronolog. de gli Ord. milit. Sclioone-
bcck, Jlist. des Oi d. mitilnires.
Dans le cours du xviir siècle, l'ordre de
iMalte figura de plusieurs façons, suit dans les
choses religieuses, SOI l en politique, etc. Nous
filerons (juelques traits <|ue nous allons indi-
quer, pi II tut i|ue lietaiiler : nous cummenrons
par lus dcmclv.'s de l'ordre avec l'inijuisilioii.
Ces trouilles arrivèrent sous le grand maître
Uaimond l'èrellos, en 1711.
Le tribunal de l'inquisition, introduit dans
l'Ile de Malte par le pape (ïregoire XIII, y
fut d'abord souffert en paix, et la commis-
sion fut, en premier liiu, confiée à l'évèque.
Ouelque temps après, l'inquisiteur fut un
oflicier de la cour de Rome, auquel on avait
prescrit de ne procéder que conjointement
avec le grand maitre, rèvi^'ijuc, le prieur de,
l'église et le viec-ehancelier. On ne prévit
[las que les in(|uisiieurs (lourraient dans la
suite .ce rendre, pour nous servir des termes
du Mémoire présenté <à Louis XIV, se rendre
7ion-seulemrnt indépenitanls, mais innuppor-
tahles à une milice formée du sang le plus no-
ble du monde chrétien, et dont l'ordre est re-
vêtu du caractère de souverain sur ses s (jets.
L'in(|uisiteur Delei, qui avait porté ses pré-
tentions jusqu'à deman'ier que le carrosse du
grand maitre s'arrêtât à la rencontre du sien,
ne crut pas devoir souffrir que l'in^rinerie de.
la religion fût plus longtemps exempte de sa
juridiction. Il faut que nous rappelions ou
que nous apprenions au lecteur que l'infir-
merie de la religion était le lieu le plus pri-
vilégié de l'ordre; le maréchal de l'ordre lui-
même n'y pouvait entrer sans laisser à la
[lorle son bâton de commandant. Ce lieu pri-
vilégié et confie à la garde des Chevaliers
français les plus zélés pour leur liberté, ne
reconnaissait d'autre aut<iritè que celle du
granil hospitalier. Tout autre, de quelque
qualité (|u'il soit, ne peut y entrer sans lais-
ser à la porte les marques de sa dignité. Les
officiers de l'inquisition y entrèrent par sur-
prise, le 7 décembre 1711, et conimcncèrent
à y faire des actes de visite. Le comm indeur
d'.Vvcrnes de Hncage, infirmier, averti de
celte enireprise, vint proiiiptement s'y op-
poser, les fit sortir sur-'e-cliamp, cl prolcs'a
de nullité contre loul ce ijuils avaient pu
faire eu son absence.
Le grand maître envoya le grand prieur
Zondondari en qualité d'ambassadeur de la
religion pour représenter au |)a()e les jjrè-
tentions de l'inquisiteur qu'ils qualilientd'in-
jusies. L'infirmier lui-même vint en Franco
pour instruire le roi, qui en écrivit vivement
au pape pour l'engager à desavouer les en-
treprises du député romain. L'imiuisileur in-
culpé ne parut pas Irès-affeclé de ces ru-
meurs el de ces plainles, car dès l'année
suivante, Zondondari, ambassadeur exiranr-
dinaire à Home, renouvela l'expression de
ses griefs contre cet inquisiteur, qui par des
patentes accordées à un grand noiiibie do
Alaltais, prétendait les exempter de l'obéis-
sance due à leur souverain, chose en quoi
nous ne pouvons l'excuser couime dans la
première.
Pendant le cours de ce siècle, la religion,
expression consacrée pour désigner l'ordre
de Malte, montra son zèle accoutumé pour
le service de la chrétienté et la libération des
esclaves. File en rendit, à diverses reprises,
un gr.iiid nombre ,i leurs familles, eut plu-
sieurs avantages sur les vaisse.iux nu les
corsaires algériens, cl conclut avec Couslcii-
1161
MAL
MAL
S62
iiiiople une trêve de vingt ans, b.isec sur six
ariiiles fort avantageux aux Maltais, aux
esclaves et à TEglise.
En nu, Benoît XIH voulut donner au
grand niaîlre et à tout l'ordre de Malle une
preuve éclatante de son affection. Il dépêcha
à Malte un de ses camériers d'honneur pour
présenter au chef de la religion Wsioc et le
casque béniis solennellement à la léte de
Noël. L'estoc est une épéc d'argent doré,
longue d'environ cinq pieds. Le casque est
une espèce de bonnet de velours-pourpre,
brodé d'or, garni d'une figure du Saint-Ks-
prit, en perles. Ce noble présent fut reçu
comme il le méritait, et le grand maître y vit
un encouragement à la vertu et à l'esprit do
son ordre.
Quoique les chevaliers de Malle eussent
gardé en général l'esprit de leur ins'itui, on
peut facilement soupçonner qu'il avait été
néanmoins un peu altéré par l'esprit du
temps au dernier siècle. Ou en put voir la
preuve dans une circonstance quenous allons
mentionner ici. On sait combien l'archevêque
de Paris, .M. de Beaumont, eut à souffrir des
entreprises de la philosophie, de l'irréligion
et du jansénisme L'ordre de Malte lui donna
un sujet de peins, en secondant, d'une ma-
nière indirecte du moins, une momerie ou
singerie des céi émonies religieuses. Crébillon
mourut en t7G2: les comédiens français, en
dépit de l'archevêque, qui n'eût point donné
l'aulorisalionqu'ih auraientvoulue, firentcé-
lébrer, le G juillet, un service solennel pour
le défunt, dans réj;!isc de Saint-Jean de La-
ir.in, à Paris, dont le curé n'était point sujet
de l'archevêque, mais sous la juridiction de
l'ordre de Malte. Tout Paris s'amusa de cette
farce indécente. L'archevêque fit des repro-
ches à l'ordre de Malle de ce scandale donné
dans une église de l'ordre. U se tint, le jeudi
15 juillet, un consistoire chez l'ambassadeur
de l'ordre; ou y dé.ida que, pour éviter de
perdre un droit dont M. de Beaumont faisait
des plaintes amères, le curé de Saint-Jean de
Latran, quoique soustrait à l'ordinaire, par
les privilèges de l'ordre, recevrait une puni-
lion du scandale donné à I Eglise de Paris, en
communiquant avec des histrions, foudroyés
tous les liuit jours au prône sous le bras ec-
clésiastique. En conséquence ce curé fat con-
damné à Irois mois de séminaire et à deux
cents francs d'aïucmie envers les pauvres.
Nous avons dit à l'article des religieux de
Saint-Antoine de Viennois (Voy. Antonins,
loine I", 205), que cet institut, pour éviter la
ruine dont il était menacé au dernier siècle,
s'était réuni canoniquemenl à l'ordre de
Malle, en 1775. Celle réunion fui fort blâmée
dans l'assemblée du clergé de France, avant
qu'elle fùl effectuée.
Les chevaliers de Malte abusèrent de leur
puissance après cette réunion, en dépouillant
l'abbaye chef-lieu de Saint-Antoine. i..es An-
lonins virent l'imprudence qu'ils avaient
commise, s'en repentirent et se plaignirent,
(t) La crois des frères serv;ints d'armes dilTcrait
lie I L'Ile (les Cljcv;illcrs ; rions eu dminerons hi figine,
Jaiis l'ariitlc que notre vulume do supplciiieni cou-
le 20 juillel 1780, au cl< rgé de France alorn
réuni et qui signa une réclaitialion contre la
réunion des deux ordres. Plaintes et récla-
mations, tout fut inutile. L'ordre de Malle
rrsta pauvrem(;nt enrichi des ijuarante-deux
maisons données par les Anionins; la révo-
lution vint bientôt tout engloutir.
Dès le commencement du dernier siècle,
le nombre des servants d'armes était bien di-
minué; il intervint même un décret qui, jus-
qu'à nouvel ordre, en suspendait la réception.
Nous ignorons si ce nouvel ordre fut j'imais
donné (i).
Au commencement de 17G8, les Jésuites
furent chassés de Parme. Piiilo, grand maî-
tre de Malle, était feudal.iire du royaume de
Naples. Les cours d'Espagne et de Franco
obligèrent celle des Deux-Siciles à poursui-
vre l'institut proscrit jusque sur le rocher qui
servait de boulevard aux plus célèbres che-
valiers de la chrétienté. Le lâche et miséra-
ble ministre napolitain, Tanucci, s'empressa
d'obtempérer. Le 22 avril 17G8, le grand
maître, sous l'influence de la peur, remlit un
décret pir lequel, cédant aux sollicitations
du ministre napolitain, il bannissait de l'île
la Compagnie de Jésus. Les Chevaliers en fu-
rent, hélas! bienlôl bannis eux-mêmes et
peut-èlre pour toujours. Voici en abrégé
l'histoire de leur expulsion due aux mesures
in'qucs de Buonaparte et à la trahison du
dernier grand maître qui ait régné à Malte.
Ce grand maîtie, Ferdinand de Hompcich,
na(|nit à Dusseldorf, le 9 novembre 17'»V,
vint à Malle à l'âge de douze ans, el fut suc-
cessivement page du grand maître, granil-
croix, min sire de la cour de Vienne auprès
de son ordre, et succéda, en 1797, au su-
périeur général de son ordre. II fut le pre-
mier Allemand qu'on eût vu à la tête de
l'ordre de Malle. Les idées révolutionnaires
avaient fait irruption jusque dans celle Ile.
Uompesch élail loin de les approuver, mais
la faiblesse de son caractère l'empêcha de les
éloigner des emplois que la nullité de son
prédécesseur leur avait abandonnés. Aussi,
lorsque Buonaparto, en juin 1798, se pré-
senta devant l'île, ce boulevard de la chré-
tienté était dans les mains de Chevaliers par-
jures, gouvernant au nom du souverain le
plus faible qui eût encore porté le liarrctone.
Des complots de trahison, que partageai' ni
les Chevaliers, et surtout le commandeur lîos-
rcdon, secrétaire du trésor, amenèrent celui-
ci à se rendre auprès du général Buonaparle
et à signer pour son ordre une honteuse ca-
pitulation. Le grand maître, qui avait tout
laissé faire, n'eut plus qu'à se soumettre.
Quelques jours après celle capitulation, Buo-
naparle, se promenant autour des remparis
de la Valetle , en admirait la construction
et la force. « Il faut convenir, lui dit un di-
ses aides de camp, que nous avons été bien
heureux qu'il se soit trouvé du monde dans
cette ville pour nous en ouvrir les portes. »
On ne peut sefigurerquelle bassesse le grand
sac era aux Clicvalicrsde Malle dans leur élaiacluol,
aiu=i que la liijure de la baiiuiorc do l'onUc,
iimllrc ilostitiié mil ."i écriro el à UMii(>i|;iicr
sa soumission d monie s;i rrconna'ssance aa
c:toyrn Hiionnp.irlc. Tout fui inutile, le vain-
•(ucur lit ilispnraïlro lous 1rs insignes tic l'or-
lire; le pran I maître partil el mourut mal-
lieureuxcn 180;}. Malle, aujourd'hui soumise
.luv An^'lais, doil sa chute à lluonapailc
I, "ordre ne fui pas éleinl par celte défection.
Voici la liste chnino'oi;niue de ses grands
inailres.
1. Gérard (le hicnheureux), natif de Mar-
liiiucs, en l'roveiice, directeur de l'hôpital
éi^ibli à Jérusalem, après l,i conqiiél<' de celte
ville r-T" Godefnii de Rouillon, en lO'.t i, ist
regardé conmiuné lenl comme le |ireinier
prand maître de l'ordre des lluspiialiers au-
jourd'hui nommé ordre de Malte; il meurt
en lllS.
2. Itrocard-Roper, omis dans l'histoire de
Malle, meurl en 1131.
.'1. Kaymond-du-Puy. ou Delpuech, ( ru du
Dauphiné, meurt en UGO.
'». Auperde Balben, aussi du Dauphiné,
meurt en 1 103.
5, Arnaull de Coraps, compatriote, meurt
en 1107.
0. i; Iherl de Sailly, ou selon d'aures de
Sully, d'une maison de Picardie, a ahdiiiuc
en 1109.
7. Gaston ( inconnu) n'a rien fait de re-
marquable, meurt à la mémea née, 1109.
8. Jouherl, né en Syrie, meurl en 1179.
9. Uoger de Moulins ou des Moulins,
meurt en 1187.
10. Garnier de Napoli, en Syrie, meurl en
1188.
11. Krmengard d'Api ou de Paps, meurt
cnlIOi.
\-2. Geoffroy de Duison, meurt en 119».
13. Alphonse de rortiigvil a abdique la
même année, 1 19V.
1'». Geoffroy le Ual, Français, meurt eu
liOO.
!.">. Guérin de Monlaigu, de l'Auvergne,
neurt en 12.50.
16. Bertrand de Texis , ou peul-ètre Le
1 csicr, décédé en liiO.
17. Guérin ouGuaria (inconnu), meurt en
1213.
18. Bcriraml de Comps , du D.iuphmc ,
meurt en 12V'».
19. Pierre de Willehride, meurt en 12')1.
20. Guillaume de Chaleauneuf, Français
d'ori!;iiie, meurl en 1200.
21. Hugues doK. vel. du Dauphiné, meurt
en 1279, ou selon il'autres en 1278.
22. Nicolas dePOrpue, meurt en 1288.
2.1. .loandeVillicrs ou de Villers, Français,
meurt en 129V.
2V. Odon, ou llupues, ou Eudc de Pins, Pro
venc.il, meurl en 129S.
2,1 Guillaume de \ illaret, anc ennemeol
OICTIONNMBI'. DES OUDUKS IMXICIEUX. W"'*
28. llcliindeVi lencuve. Provençal, meuil
en liV8.
29. Adeodad Gozon, meurt en déccmhre
13;i3.
30. Pierre de Cornillon, Provençal , meu;l
en 1355.
31. Uoger de Pins, de la provin.ode Lan-
guedoc, meurt en 1305.
32. Baymond Béranger. du Dauphiné,
meurl en 1373.
(le \ illeroc, de la Provence, meurl en
1303.
,4 Ithodef, nprct la conquête de l'Ue.
20. Touques de Villarel, sous ijui se fait la
conquête de l'île de Bliodes, le 15 août 1310,
>ilidii|uc en l'l23.
27. Maurice de Pa;,'nac, 1323 à 1320.
33. Bobert de Juliac, Fançais dorigiue,
meurl en 1370.
3V. Jean-Ferdinand de Ueredia , Arago-
nais, meurl en 1379.
3o. Bichard Caraccioli, Napolitain, 138^.
30. Philibert de Naillao, Gascon, meurl eu
1V21.
37. Antoine Flurian, ou de la Bivière, Ca-
tal.in, meurl en 1V31.
38. Jean de Lassie, Auverpnai, meurl m
mai 1V5V.
39. Jacques de Milly, compatriote, meurt
en 1V57.
iO. Pierre Kaymond Zacosla . Gasiillan,
meurt en 1V70.
VI. Jean-Baptiste Orsini, Uoinain, meurl
le 8 juin 1V80.
V2. Pierre d'Aubusson de Ui maison de la
Feuillade, et depuis cardinal, meurt Ie30 juil-
let 1503.
IV3. Kmery d'Amboise, frère du cardinal,
meurt le 3 novembre 1512.
k'*. Guy de Blimhefort, Limousin, meu:l
le 2V novembre 1513.
45. Fabrice Carelto,l:alien, meurl en 1521.
A Malle.
V6. Philippe de Villiers de l'Ile-Adam,
P.irisien, sous qui l'onlrc per 1 lUiodes en
i:i22, et s'elablit à Malle en lo.lO, meurl lu
21 août de l'an 153V.
V7. Perrin du Pont, Piémoiitais, meurt eu
1535.
V8. Didier de Sainl-ïaillc, Toulousain ,
meurt en 1530.
V9. Jean de Homèdes, Araponais, meurt le
0 septembre 1553.
50. Claude de la Sangle, né Fi ançais, meurt
en 1557.
51. Jean Vallel de Parisol, appelé a tort de
la Valette, Languedocien, meurl le 21 août
1508. , ,.
52. Pierre Guidalolti de Monte, 1 alien,
meurt en 1572.
,53. Jean l.'Lviqiie de la Cassière, Auver-
gnat, meurt le 20 décembre 1581.
5V. Hupues de Loiibeus de Verdaie, Pro-
vençal, d'^depuis C..., meurt le 12 mai 1.595.
55. Martin de Garzez, Aragonais, nuurl
en 1001.
50. Alphonsede \Vignacojirt,(.hampenois,
meurt le IV septembre 1022.
57. Louis Mandes de \Vas< oncelos, Por-
limais, meurl le 0 mars 1023.
5S. Antoine de Taule, Provençal, meurt le
|i» luin 1030.
.59. P.iul de Vin^imilleLascaris, Castillan,
meurl le IV août 1057.
805
MAL
MAL
f-CD
GO. Marlin de Rcting, Navarais, meurt le
6 février ICCO.
61. Annet de Cleniionl-Challes de Ccssan,
Dauphinois, niorl le 2 juin ICOO.
6-2. Raphaël Gotoner ( de l'He Mai'Oi-quc ),
me u ri en octobre 1663.
63. Nicolas C. Gotoner, frère du précédeni,
meurt en 1080.
64^. GréRoire Caraffe, Napolitain, meurt le
21 juillet 1690.
65. Adrien de WIgnacourt, neveu d'Al-
phonse, meurt le 4 février 1697.
66. Uemond l'erellos de Rdcalull, Arago-
nais. meurt en 1720.
67. Marc-Antoine Zondondari, Si< nnois,
meurt le 16 juin 1722.
68. Antoinc-.Vlanuel de Vilhena, Portugais,
meurt le 12 décembre 1736.
69. Remond d'Espuig, de l'île Mayorquc,
meurt le 18 février 1741.
70. Emmanuel Pinlo, Portugais, né en
1681, élu en 1741, meurt en 177i.
71. François-Emmanuel de Rohan, de la
vénérable lanp;ue de Fr;ince, né le 19 avril
1725, élu grand maître le 12 novembre 1775.
72. Hompesh, sous qui Malte capitule en
1798, abdique en 1799.
Ce dernier, arrivé à Triesle, fit d'inutiles
protestations contre une capitulation qu'il
n'avait ni siipulée ni ratifiée, mais à laquelle
il n'avait pas eu le courage de s"opposer.
Quelques mois plus tard, cédant auv instan-
ces de la cour de Vienne, pressée elle- même
par la Russie, il abdiqua en faveur de Paul l",
empereur «cAismat/çue, comme si la polili(]uu
pouvait disposer ainsi d'un ordre religieux.
L'ordre ne fut pas aboli par la mort obs-
cure de Hompesch ou Hompesh, il eut un
successeur en Sicile. Après la restaiiraliou
des divers El.its en Europe, à la paix conli-
nenlale de 1814, des vues, des plans, lurent
formés sur l'ordre de Malte. Nous lui consa-
crerons un article dans notre supplément et
nous ferons connaître son état de régénéra-
tion, ou, si l'on veut, d'humiliation actuelle.
Vvyez Maltk au Supplément.
Mémoires secrets pour servir à l'histoire de
la république des lettres..., tom. I"; Mémoire
sur l'étal religieux et sur la commission éta-
blie pour les Réguliers. — Histoire des cheva-
liers Hospitaliers... de Malte, par M. l'abbé
deVerlot. — Histoire des Chevaliers.. .de M al te,
tome Vlll, par Lefèvre, avocat, 18J2. li-o-E.
MALTE (Des Religieuses Huspitalières
DE l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem,
DITES de).
§ I" Leur origine.
L'institution des Relig euses Hospitalières
de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem est
aussi ancienne que celle des Hospitaliers du
même ordre dont nous avons parlé dans les
articles précédents ; car djns le même
temps que l'on bâtit à Jérusalem l'hâpiial
proche l'église de S.iinle-Marie la Latine,
qui était destiné pour les hommes, et dont
Gérard eut la conduiie, on en bàlit aussi un
autre pour les femmes à côté de la même
église, et on le dédia en l'iionneur de sainte
l\îaric-Mad<leinc. La bienheureuse Agnès,
dame romaine, en était supérieure, lorsque
la ville de Jérusalem fut pri^e par les cliie-
liens sur les infidèles, l'an 1099, et on y ob-
servait les mêmes règlements que dans celui
des hommes. Les historiens de cet ordre
n'ont point marijué ce que devinrent ces re-
ligieuses après que la ville de Jérusalem eu
été reprise par Saladin, Soudan d'Egypte,
l'an 1187. Mais l'année suivanie la reiiW!
Sanche , fille d'Alphonse, roi di- Castille , (|ui
se dis.iii empereur des Espagnes, et fcminc
d'Alphonse H, roi d'Aragon, surnommé lu
Ghaste, fonda à Sixèni' un monastère de cet
ordre pour de pauvres deinoiseiles qui y
devaient cire reçues sans do'. Ge lieu, qui est
siliié entre Saragosseet Lérida, appartenait
à l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, et dé-
pendait de la châtellenie d'Emposte. Getie
princesse l'obtint de dom Garcias de Lisa
pour lors châtelain d'Emposte, à qui elle
donna en échange des terres dans le terri-
toire de ïarragone. Elle fit faire de superbes
bâtiments qui furent achevés l'an 1190, et
les religieuses y ayant été établies, elle leur
donna la règle des Hospitaliers de cet ordre,
à laquelle elle ajouta beaucoup de choses
tirées de celle de saint Augustin; ce qui fut
approuvé, non sans beaucoup de ditficulté ,
à cause des additions qui avaient été faites à
la règle par Uajmond Bérenger , provisi ur
de l'ordre, et confirmé, l'an 1193, parle
pape Gélestiii ill, par une bulle dans laquelle
il semble insinuer que ces religieuses suivent
la règle de s.iint Augustin ; car on y lit ces
paroles : Imprimis siquidem statuenles, ut
ordo Cononiius, qui secundum Deum et beiiti
Auguslini regulam in eodem Inco noscitur in-
slitulus, perpetuis ibi Icmporibus inviolabili-
ter observetiir.
Ge monastère est comme une forteresse oîi
il y a un très beau palais pour la prieure. Il
y a au fond de la salle où elle donne ses au -
diences une estrade élevée sur plusieurs de-
grés et couverte de lapis, avec vingt-cinq ou
trente carreaux de velours cramoisi pour
asseoir ses dames assistantes. H y a près de
soi&anle religieuses dans ce monastère, qui
ont chacune leur appartement séparé pen-
dant le jour, mais elles mangent en com-
mun, et dorment dans un même dortoir. II y
a aussi un grand nombre de servantes d'ol-
fiee qui ne font point de vœux, et quinze
données qui portent la demi-croix, à cause
des services (|u'elles ont rendus.
La reine Sanche, après la mort du roi son
mari, se relira dans ce inon.istcrc avce. la
priiuesse Douce, sa fille, et elles y prirent
touti'S deux l'habit, avec quelques aul.en
princesseï du sang royal. La princesse lllan-
che, fille de Jaci|ues II, roi d'Aiago.i, y piit
aussi l'habit, et en fut prieure; et cojiinie
elle était encore fort ji'une , on lui donna
sept ri ligieuses pour êtr.' toujours avec elle :
l'une était la cusiode, (jui recevait les étran-
gers , et faisait les honneurs et les atTairei
particulières de la prieure; une autre était
la caniérière, qui la servait dans sa cliamlire ;
Une était coupière, qui lui servait à Luire;
SÙ7
niCTIONNAlUF, DKS OIIDRES lUXIGIKUX.
£C8
une autre avait la ((iialilé lio rcponleria mi
sinniiu'lièrc, cl los ;iuirrs la servaient à table
il aux autres «Tliccs de la maison : ce qui a
ili'jiuis pas.sé en cuutunie, les prieures de
Si\ène ajanl toujours eu les uionies offi-
lit^rcs.
La sous-prieure pouvorne le «Irrur.lc
dortoir, et a soin des revenus et des distri-
buMons. 1/efiard ou conseil est compose de
religieuses que I on appelle las seiioras del
Hxjuai le, et qui portent la croix un peu plus
grande que les autres, Tune desquelles est la
^ous-p^ieure ; ni.iis la plu-; ancienne y pré-
side. Lor^iue la prieure meurt, on lui fait
des obsèques lorl so ennclles pendant sept
jours, après lesquels on rompt le sceau de
ses armes, et les religieuses élisent une autre
prieure. Le cliâtelain d'Iùnposte, ou un coin-
inaiideur de l'ordre si," trouve au temps de
l'èleciion. Il mène la nouvelle prieure dans
son siège, et la met en possession de l'église
et de son palai'^. Les tilles qui sont reçues
sont obligées de faire [ireuves de noblesse
comme les Cbevalier», ce qui se pratique
aussi parmi les religieuses de qucl(|ues au-
tres monastères de l'ordre; mais il faut que
celles d'Aragon el de Catalogne soient de
maisons si notoirement nobles et illustres ,
qu'elles n'aient pas besoin de faire de preu-
ves. Klles sont reçues par l'égard sans dol,
et la [irieuie, àson avènement, en reçoit une
qui s'a|)pelle de grâce. Les jeunes ont le nom
d'écolièies, et les anciennes celui de mai-
Iresscs. Elles ont dix prêtres et un prieur,
€'iux()uels elles ilonnenl l'habit de l'ordre.
I^lles font le service divin avec beaucoup de
pompe et de majesté, particulièrement les
jours de létes doubles; ces jours-là elles
portent des rocliets de toile fine, el tiennent
à la niain un sceptre d'argenl : elles ont un
bréviaire particulier, el se lèvent h minuit
pour dire matines. La prieure pourvoit aux
liènefices vacants, et donne l'habit d'obé-
dien<:c aux prêtres qui les desservent. Elle
visite ses terres avec ses danics assistantes ,
el se trouve aux chapitres provinciaux de
l'ordre en Aragon, el y a voix et séance après
le châtelain d'I'^iTiposle, et lorsque le chapi-
tre se lient à Saragosse , la cathédrale lui
envoie sa portion canoniale, comme pré-
bendière de celle église.
\'crs l'an rt70,ces rel gieusos s'étanlsous-
tiaites à l'oliéiss.ince du grand m.iî.re, elles
reconnurent iminèdialement le saint-siège.
.Mais cent ans apiès , l'a i L'iCi'.t, l'évéque de
Lerida les voulant soumettre à sa juridiction,
parce qu'elles n'avaient pas de supérieur,
Jèronime d'Oliho, qui était pour lors prieure,
donna procuration au 1'. AI|ihonse de Slu-
dillo de l'ordre de la Uèdemplion des captifs
et ministre du couvent de Saint-Sauveur en
Ara^on , puui jirèler en son nom, en ceiui
d(' l'égard, el en celui du couvent de Sixène,
le- sernienl de fideliié et d'obéissance au
grand iiiaiire , el sur (|uelques demandes
qu elle lit , el i\m lui furent accordées, elle
s'engagea par ri connaiss.ince île donner à
chaque ih.ingeineni de grand maitru un vase
ti'aigeni au cumuiun (ré or.
Comme l'air de Sixène est fort mauvais,
le pape lîrégoirc XIII pcrniil, l'an 1575, aux
religieuses qui seraieiil malades , de sortir
du monastère pour aller chez leurs parents
se faire traiter , cl y demeurer jusqu'à ce
qu'elles eussent recouvré leur santé; el
coin ne il est (lorlé par leurs règles qu'elles
doivent être enterrées dans le cimetière du
monastère , si une religieuse meurt chez ses
parenls , on apporte son corps au monas-
tère pour y être enterré : pour lors toutes les
rel g;euses sortent professionnellement hors
de la clôture jusqu'à un lieu lixé pour le re-
cevoir; el là on découvre le visage de la
morte, el l'on fail jurer ceuxqui l'ont portée,
que c'est le corps de la religieuse déiélée. A
l'exemple de ce monaslère de Sixène il se lit
d'.iutres èlahlissemenls en dillérenls pays.
Celui de Saini-Jean de (]arraria en la vile de
Pi e fut fondé environ l'an 1:200, celui du
Notre-Dame d'Algaira enCalalogne l'anlili,
par Saurine de Jorba el Eisa de Sagardia,
dames catalanes; celui de Gènes l'an 1230;
celui de Elorence sous le nom de S.iint-Joan-
nin l'an 1392, par le grand prieur Caraccioli;
celui de Noire-Dame de Caspe en Espagne,
par le grand maître Ferdinand d'Hcrédia ;
celui de Sévillc l'an 1V'.)0, par Isabelle de
Léon qui y prit l'habit et en fut prieure ; ce-
lui d'Evora en Portugal par Isabelle Fernan-
dez l'an 1509 ; celui de Civila de Penna par
Julien Uidolphi l'an 1523. L'an 15'»0, l'inlant
de Porliigal, dom Louis , administrateur du
grand prieuré de Portugal, après avoir fondé
un collège de trente chapelains de cel ordre
à Fior-ùe-Hoses , fil aus.si bâtir un autre
monastère du même ordre pour des demoi-
selles en la ville d'Estremos, el il y a aussi à
Malle un monastère de religieuses de cel or-
dre, qui ne font point preuves de noblesse.
Les relig'euses de cel ordre avaient autre-
fois cinq ou six maisons en .\ngleterrc ; mais
des chanoines réguliers qui demeuraient à
Uukland, vivant dans le relâchement, el ayant
même assassiné un parent de leur fondateur,
le roi Henri 11 les chassa de leur monastère,
et !<; donna, l'an 1180, à (jarnier de Naples
pour lors prieur de l'Iiôpital de Saint-Jean à
Londres, pour y réunir toutes les religieu-
ses de cet ordre, à condition qu'elles ne
pu'jrraieni |ioinl s'établir dans d'autres mai-
sons, et qu'elles ne pourraient avoir que celle
de Itukiand qu'elles ont aussi perdue, lorsquii
le schisme el l'hérésie oui eié introduits dans
ce royaume. La France possède aussi de ces
religieuses ; mais comme elles sont réfor-
mées, nous en parlerons en particul.er dans
le paragraphe suivant.
\'i)ici les cérémonies qui s'observent à la
vèture et à la profession des religieuses de
cel ordie. .Vprès que le prêtre a dit l'off. r-
loire de la messe, cl qu'il a béHi les habits do
celle qui doit faire profession, celui qui a
droit de la recevoir, lui dit : Sœur, que de-
mandez-vuiisY Elle répond : Je dimniide d'e'Ire
reçue en In compmjnic dis saiirs relK/ieiiseï dx
riii)pilal df Si.iitl-Jein de Jérusalem. Il lui
demande encore si elle a reçu déjà cet ordre
de quelque autre personne, el ayant répondu
800
MAL
MAL
87/)
(jiic non, il Ciinlimic ilc lui dire: Bien que ce
que vous demandez soil cliose de grande im-
portance. Il qui ne s'accorde pas à tous; peut-
élre que cette votre demande viendra en ejj'el,
lorsque vous noua promettrez observer tout ce
i/ue par nous votis sera ordonné, et première-
ment nous désirons que vous soyez diligente
au service de Dieu et de la religion. Me pro-
mettez-vous cela t La postulanie . Oui, Mon-
sieur. Le rccevaiil : l'ui.^que vous noni pro-
mettez cela, prenez ce rosaire au nom de Die i.
Père, Fils il Saint-Esprit, avec let/ucl vous
prierez pour l'aur/n.entnlion de celte sacrée
religion, pour la prospérité de Monseigneur
l'émincnlissime grand maître, et de tous les
frères chevaliers et autres religieux de cette sa-
crée religion, pour la victoire contre les Turcs
et infidèles, persécuteurs de l'Eglise de Dieu,
offrirez l'âme à Dieu, cl le corps aux fatigues
de ce monde pour le service de Noti e-Seignew
Jésus-Clirisl ; et Dieu vous en fasse la grâce.
La pureté de ce rosaire signifie que la bonne
religieuse doit être pure et nette de tous vices,
et principalement être honnête, car l'honnê-
teté est toujours accompagnée de quatre ver-
tus. La première est la prudence, par laquelle
vous vous souvenez du passé, ordiniez le pré-
sent, et pourvoyez au futur. Lu seconde est la
justice, ai ec laquelle vous conservez les choses
publiqui s. La Iroisièmeesl ta force, avec lai/wlle
volts supporterez les travaux de ce monde,
comme a fait suint .Ican- Baptiste, sous le nom
et enseigne duquel vous ornerez et décorerez
voire vie, afin que comme il a vaincu le monde,
le diable cl la chair, ne ci algnant point de prê-
cher la vérité, de même à son imitation devez
suive la lolonté divine, avec la jUflle au be-
soin tém lignerez cl démontrerez votre cou-
r ge et magnanimité. Laquutricme est la tem-
pérance, avec laquelle vous modéreiez toutes
choses, afin que row puissiez êire'appelée par-
fuite religieuse, si bien que vous vous munirez
et ornerez ce ces vertus, les prisant et les te-
nant toujours en la mémoire. Itéveillez-vow,
ma sccur, el ne dormez point aux vices ; mnis
soyez vigilante à la foi de Jésus-Christ, en la
bonne et louable renommée, et ulienttve aux
bonnes prières et oraisotis. Il lui donne ensui c
un lltimbeau allumé, en lui ^'isaul: Prenez
ce flambeau, et avec la grâce du Sainl-Espril,
allez ouïr le reste de la messe.
Le prêtre ajant fini la messe où celle q:ii
doit fdiie profession a communié, elle re-
tourne vers celui qui la doit recevoir, et (pii
lui dit encore : Sœur, que demandez-vous?
iîlle répond : Je demande la soc été et compa-
gnie des sxurs de la sacrée religion de l'hôpi-
tal de Saint-Jean de Jériisalem. Le recevant
lui dit : Votre demande est de grande impor-
tance, et qui ne s'octroie pas à tous, el qui
peut-être ne vous sera pas refusée, nous con-
fiantqu'avec amour et charité vous vous exer-
cerez aux œuvres de miséricorde, au service de
l'hôpital et de votre religion, à laquelle le
sainl-siége apostolique el les princes chré-
tiens ont donné de très-grandes libertés, pri-
vilèges el revenus, afin, que les serviteurs de
Dieu et de la religion, enflammés de vraie cha-
rité, mère de toutes les vertus, s'elforccnl avec
double service de servir l'hospitalité et milice
pour la défense de la sainte fui catholique con-
tre ses ennemis, afin que la servant avec affe-
ction et fidélité , elle donne la récompense de
la vie éternelle, ainsi comme en observant les
commandements de Dieu, de l'Eglise el de no-
tre religion, vous sera appareillé et préparé
le paradis. Il serait long à vous raconter les
travaux qu'endurent les s lurs de notre reli-
gion; mais sculen ent en une chose on conclut
le tout : c'est que vous avez à tous dépouiller
de rot' e liberté, el la donner et mettre es mains
de celle qui vous sera dé/inlre i our siipériew e,
laquelle sera femme comme vans, et pourrait
bien être qu'elle fût différente à votre condi-
tion, ci laquelle vous avez d'obéir : en êtes-
vnits contente? La novire répond : Oui, Mon-
sieur, j'en suis contente. Le recevant conli-
niie : Puisque vous vous dépouillez de voir»
liberté, nou- voulons savoir si vous l'avez, et
pre lez bien garde à répondre arec vérité à toiil
ce que par nous vous sera requis et demandé.
Il lui demande si elle n'est point obligée par
quelque vœu à d'autre religion, si elle n'a
point contracté mariage, si elle n'est point
obligi'e à de grandes sommes, et si clic n"a
(loint commis d'homicide, à quoi ajant ré-
pondu ncg.itivcmeni, il lui dit : Ma sœur, pre-
nez bien garde ; car trouvant le contra rt
en que'que temps que ce soit de ce qu'ai ez
nié, avec très- grande infamie et déshon-
neur vous sera levé l'habit, el comme mem' rc
pourri serez chassée de n: tre compagnie. De
façon, qu'étant comme vous dites, vous rece-
vons bénignemenl, et selon la forme de nos
statuts ne vous promettons autre que pain el
eau, et huml'le vêtement.
Les religieuses chantent ensuite l'.inticnnt»
Feni, sponsa Chrisli, cl font la procession
auluur du cloître, conduisant la novice qui
tient une palr^ie à la main, et est à c()lc de la
prieure. Au retour de la procession cl en la
présence des assistants, on la dépouille d.;
ses riches habits qui sont ordiiinireinent or-
nés de pierreries ei autres bijoux nu'elliî tient
entre ses mains lorsqu'on lui a ôié ses beaux
habits ; et se tenant debout, eile dit à haute
voix pardeuK différentes fois: Vatiitas vani-
tatum, cl à la troisième fois, haussant encore
sa voix, cl disant : Vnnilas ranitatum et om'
nia lanitas, elle les jette dans un bassin à ses
pieds. La prieure assistée de la sous-prieu ti
lui coupe ensuite les cheveux, ou lui donne
riinbil de religion, el la novice en étant re-
vêtue prononce ses vœux en la manière sui-
vante, ayant les mains sur le crucifix du
canon de la messe qui est dans le missel. Je
iS'. promets et fais vœu à Dieu tout-puissant,
et à la Vierge Marie, sa mère immaculée, et â
saint Jeun-Baptiste notre patron, d'obserier
perpétuellement obédience à quelque religieuse
de l'ordre, qui par la religion me sera donme
pour supérieure, vivre sans propre, el être
chaste, selon la règle de ladite religion.
Le recevant lui dit ensuite : A cette heure
je vous connais vraiment reçue au nombre Je
nos sœurs religieuses. Llle répond : Je m' es-
time el répute telle. Le recevant continue de
dire : Dorénavant nous vous faisons tl vus
571
PICTIONNAIIIE DES OUOKES RELIGIEUX.
873
pnrenls parlicipnnh de toutes les indiilfienres
et yràcet concédées à noire itUyion par le
*aint-sié(je aposl(di/ue, et par pri mure o'u--
dience,je tous commande de porter ce missel
sur l'aittel, puis me le reportez. HUe obéit, et
le recevant lui dit après qu'e \c a re|iorlé
le missel : \ous voulans encure i/ue soyez at-
tenliie à l'oraison, (I pour ce, diicz iliaque
jour le grand office selon l'ordie de la sainte
Ki/ti.-e, du concile de Trente, usa(jc cl coutume
de cr couvent, et cnt cinquunleVaier iiosler,
ou le petit office de Sotre-Dame, ou des morts
pour chaque sœur ou frère qui viendra à m u-
rir. En lui tnoiitr;inl le niaiitcau : t'Vsf votre
propre habit, c'est la forme de votre pénitence.
Ceci vous représente la tris-dure et âpie vie
de notre patron saint Jean-Baptiste. Ceci re-
présente son hiibil, lequel était de peau de
chameau, siijni/iant que n ii<< devons laisser le
temps de péché, el sans enip.'c'iemenl suiv:e la
vertu. Eli lui niuntrant 1rs hraj du inaiileau:
Ce sont les bras qui vous restreindront et lie-
ront, signifiant que vous serez reslriinte et liée
de la vraie obé licnce de rode supérieure, et â
t'ubservatice des auvres de l'hospitalité, et au-
tres, comme vous a été dit. Eu lui montrant
la croiv du manteau : C'est le signe et l'habit
de la vraie croix, leqwl je vous commande de
porter continuellement sur vos habits toute
votre vie : cette croix I lanclie signifie que
toutes nos œuvres doiv-nt être pures, netle> cl
blanches. Ces huit pointes signifient ht huit
béatitudes qui nous sont promises, $i nous
portons ce sigtjc au caur avec ardeur tl fer-
veur, à cet effet la vous mettons sur le côté
gauche, afin que l'ayez toujours dans votre
cœur, et avec icelui vous decex être ensevelie.
En lui montrant le cordon : Ce cordon repré-
sente que sautent nous nous devons souvenir
de la Irès-ûpre mort et passion de i.oire Sau-
veur Jésus-Christ. Ce qui .■•erre le manteau
signifie la corde avec laqwile Jésus-Christ fut
lie. (e sont les fouets, ceci est lu colonne, ceci
est l'éponge, et ceci est la croix, en laquelle
potir l'amour de vous il prit mort et passion.
En lui liant le cordon au cou : Prenez donc,
ma sœur, le jouq de î\'olre-Seigneur Jésus-
Christ, lequel est beaucoup léger et doux, et qui
vous conduira à la vie éternelle au siècle des
siècles. Ainsi soit-il. En lui mettant le voile
noir sur la tèle : Recevez, ma sœur, le suint
voile de la virginité qui vous conduise à la vie
éternelle dans tous les siècle* des siècles, .{.nsi
soit-il. La professe retourne ensuite à l'autil
pour recevoir la bénédiction du prètic qui
dit sur elle quelques oraisons, après le^-
quellcsclle embrasse les religieuses, et avant
que de manf^er. clic va faire olicdicnce au
ref<cloire avec du pain, de l'eau el du sel.
Anciennement ces religieuses avaient pour
liahilliMiient une robe rouge avec un nian-
leau à bec qui élait no r, et sur lequel était
la croix hlantlie a huit pointes ; mais depuis
l.i prise (11- Itliodes i Iles ont pris l'Iiabilli-uient
eiitièieiiienl noir en signe de dtuiil. Dans
quelques monastères les religieuses de cet
ordre purltint une robe noire, avec un sca-
pulairc; dans d'autres elles n'ont que In robe
san^ scapulaire avec une petite croix blan-
clie à huit pointes sur le côte gauclie. Pans
le> cérémonies et au clueur queliiucs-i'nes
portent le manteau à bec avec les co d iis.
où sont représentés les mjsières de la pas-
sion de Notre-Seigneur (1). Elles ont eu qurl-
qucs saintes de leur ordre, comn-e sainte
I 11 re décédéc au monastère de Beaulieu en
Traiice, sainte L'baldesque décc lée dans le
iiiona:.ière de Pisc en Italie, et sainte Tosrano
morte à Vérone.
Giacomo Hcsio, llist.di S. Giovanni Gie-
rosulomit. tom. IH, edil. de l un 1G8V. Anne
de Naberat , Privilèges de l'ordre de Malte.
Matthieu de Goussancourt , jl/nr/j/ro/oy. des
('hevaliers de Malle, el l'biiip. Uonanni ;
Catalog. Ordin. religius. part. ii.
§ II. Des Religieiises flospitalières et Cheva-
lières Réformées de l'ordre de Saint-Jean de
Jérusalem en France, arec la vie de la véné-
rable Mère Galliolle de Gourdon-Genotiil-
lacet Vaillac dite de Sainte-Anne, leur
réformatrice.
Dès le treizième siècle il y avait en France
des religieuses Hospitalières de l'ordre de
Siiiit-Jean de Jérusalem , qui furent établies
dans l'hc^ipital de Beaulieu en Qucrcy au dio-
cèse de Cahors. Cet hôpital ne lut pas d'abord
bâii pour ces religieuses: ce n'était qu'un
petit hospice que Guiberl de Thémines, che-
valier, du consentement de l'once d' Anl liac,
évéque de Cahors, londa vers l'an 12.!.'i pour
y recevoir les pauvres pèlerins. Guibert de
Thémines, son uls, augmenta les revenus do
cet hôpital , où il exerça lui-même l'hospiia-
lité avec son épouse Angliiie de liaras. Il
lui donna, l'an \-2'*^, du consentement de
Géraud de Raras, évéque de Cahors, la dtnic
de l'église d'isscndolus dont il était seigneur:
cette paroisse élanl située dans la terre de
'i'Iiémmes, qui a depuis été érigée en mar-
quisat par le roi Louis \I11 en faveur <lii
l'once (le Lauzières de Tliemines, maréchal
de France , (lui descendait par les (emmes
de CCS pieux fondateurs. Emeric de tîoudour.
Chevalier, donna aussi à cet hôpital, l'an
1259, les dîmes de la paroisse de Uiéges , et
la même année Guiberl de Théinines céd.i
cet bôpil.il avec toutes les dépendances aux
Hospitaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jé-
rusalem, qui y mirent des religieuses de cet
ordre, dont Angline de Haras , épouse de (o
Guiberl de Thémines , fut première prieure,
ajant pris l'habit de cet ordre du consenle-
meui de son mari. Ce ne fut pas la seule
mariiue d'estime qu'il fil paraître envers
l'ordre de Saint-Jean de Jéru>alein ; car il
fonda aussi un autre hôpital à Kicux dans le
même diocèse de Cahors , où l'on mit encore
des religieuses du même ordre, au(]uel p.f
reconnaissance ce liuibcrt fut associé l'an
r2'J8. Il mourut peu de temps après, et fut
enterré dans l'église de l'hôpital de ISeaulieu ,
Connue il l'avait ordonné par son testament
de l'an 1287 , par lequel il fonda une messo
(I) Vu>j. ï \t lin du vul., les II"
!IS.
875
M\l,
MAL
:-i
à pcrpéluilô dans celle (';;li9i; pi)iir lo repos
lie son âme.
'I"e!Ic a clé l'origine du célèbre liopilnl de
Peaulieii,de l'ordre de Sainl-Jean de Jérusa-
lem , dont Angline de Baras, épouse de Gui-
berl de Tliémines, fut la première prieure.
Elle le gouverna jusqu'en l'an 12% , qu'Vii-
glinc de Tliémines , sa fille , lui succéda, lil e
se trouva au chapitre provincial de l'ordre
qui se tint, l'an 1298, dans la commanderie
de la Tronquière , où le grand mailrc Guil-
laume de ^ illarcl , qui élail grand prieur de
Sainl-Gilles, lorsqu'il fut élu l'an 12'J6, lui
présenl. Il soumit les deux hôpilaus de
Beaulieu et de Fieux à la visite et correction
du grand prieur de Saint-Gilles et de ses suc-
cesseurs. Il accorda plusieurs privilèges à
celui de lieaulicu , ordonnant entre aulres
que la prieure de ce monasîère serait grande
prieuredelous les aulres monastères defill 'S
de celordre en France , e! qu'ils lui payeraient
chacun un écu de ledevaiice. Il fixa le nom-
bre des religieuses de cet hôpital à quarante ,
y compris la [rleure, et à douze celles de
Fieux. Il ordonna que lorsque la prieure
sérail décédée , les religieuses procéderaient
à l'élection d'une autre prieuie dans le terme
de quarante jours, et que l'élection serait
confirmée par le grand prieur de Saint-Gilles,
ce qui fui autorisé dans la suite par une dé-
claration du roi Louis Xlll, du Ojuin lC2o,
homologuée au grand conseil la même année.
Ce grand maître étant à Limisson dans l'île
de Chypre, où l'ordre faisait pour lors sa ré-
sidence, tint un chapitre général l'an 1301 ,
dans lequel il confirma t ui ce qu'il av lit
fail dans le chapitre provincial de la Tron-
quière de l'an 12D8, louchant ces deuxhôpi-
t. iU\ de Beaulieu et de Fieux. Plusieurs per-
sonnes ont dans la suite enrichi pir leurs
libéralités celui de Bejiulieu. Les prieurés
de Saint-Médurd , de Fonlènes, de Marlel et
de Barbaroux, y furent unis, ci même l'hô-
pital de Fiiux y lut aussi uni au conimcnce-
uient du dernier siècle, avec tous les biens
qu'il possédait. D'ahord ce ne fut p'.us qu'une
annexe de celui de Beaulieu, mais il fut
quelques années après enlièrernent suppri-
mé , et SCS biens unis à l'hôpital de Beaulieu.
Ce fut dans cet hôpital de Beaulieu que la
vénérable mère Galliotte de Gourdon-Ge-
nouill.ic et Vaillac prit l'habit de l'ordre de
Sainl-Jean de Jérusalem. Elle était fille rie
Louis de Gourdon-Genouillac, comte de Vai -
Iac,etdesa première femme, Anne dcMonbe-
ron, qui, étant enceinte d'elle, en fit uue of-
frande à Dieu, et aussitôt qu elle l'eut mise
au monde, qui fut le 5 novembre 1589, elle
renouvela le don qu'elle en avait fait. Etant
âjjée de cinq mois elle fut portée dans l'hô-
pital de Beaulieu pour y être nourrie; et à
l'âge de sept ans elle y prit l'Iiabil denovire.
Elle avait déjà pratiqué dans un âge si ten-
dre les vertus les plus excellentes cl les plus
relevées, et entre autres l'humilité en ren-
dant des services et des respects aux reli-
gieuses, comme si elle eût été leur servante;
mais, se voyant revêtue de l'habil de religion,
elle s'adonna entièrement à la pratique des
OlCliONNAlUF ll!;S OrPHES RELlGil£i;X. 13.
verlus convenables à l'élal iiu'cHk avait em-
brassé. Ouatre ou ciiHj ans apiès qu'elle eut
pris l'habit, son père voulut qu'elle fit \\i\t-
fession, quoiqu'elle n'eût pas encore douze
ans accomplis. Elle ne savait pas que le con-
cile de Trente avait déterminé que les pro-
fessions faites avant l'âge de seize ans se-
raient nulles, et n'auraient point de force
pour obliger; mais comme si elle en eût eu
connaissance par un mouvement secret du
Saint-Esprit, elle s'y opposa. Cependant, com-
me on lui reprochait que ce n'était que pour
iiuitter la religion afin de se marier, elle fit
profession dans ce bas âge, pour montrer
qu'elle ne voilait [)oinl d'autre époux que
Jésus-Christ.
Le monastère de l'hôpital de R'aulieu n'c-
lant pas reformé, comme il l'a été depuis par
son moyen, on n'avait pas voulu lui couper
1rs cheveux à cause de leur beauté; mais
c'était un coup rie la Providence, qui voulait
qu'elle eût (Ile-même le mérite de celle ac-
tion généreuse, carelle se les coupa elle-
même ([uelque temps après sa profession, ei
les jeta au feu pour en (aire un sacrifice à
Dieu. Voyant que la règle de l'ordre de Saint-
Jean de Jérusalem n'était point observée dans
son monastère, elle prit la résolution rie le
quitter pour entrer dans celui des Feuillan-
lini.s nouvelleinentétablics à i'oulouse; mais
n'ayant pu exécuter son dessein, à cause que
le comte de Vaillac son père s'y opposa, cl «
s'adonna aux pratiques de l'oraison et de la
mortification. E.le employait oïdinairemenl
quatre heures par jour à la méditation, les
genoux en terre, et demeurait une demi-
heure en prières, le vis.Tge prosterné coiitm
terre. Elle récitait tous les jours le chapelet
de la sainte Vierge, et n'avait point de plus
grande passion que de rendre quelque nota-
ble service à celte reine des anges. Tout ce
qu'elle pouvait faire pour son honneur lui
semblait peu de chose, par rapporta l'amont
qu'elle lui portait, et le plus souvent elle al-
lait nu-pieds visiter l'église de Bocmadour,
dédiée en son honneur, cl éloignée de Beau-
lieu de deux lieues.
Avant la réforme de son monastère, la
coutume était que les honm)es qui rendaient
visite aux religieuses les baisaient en les sa-
luant; mais elle ne voulut jamais permettre
à aucun homme de la saluer de cette ma-
nière ; et sa plus grande peine, après qu'elle
eut établi sa réforme, élail de se voir obligée,
en qualité de supérieure, d'entretenir des
hommes au parloir. Elle jeûnait tous les ven
dredis et les jeudis de l'année, ce qu'elle ob-
servait avec une abstinence si sévère et une
austérité si grande, que l'on s'étonnait com-
ment elle pouvait vivre. Si avant la réformo
elle traitait son corps si rudement, l'on peut
s'imaginer qu'elle l'aOligea encore davan-
tage lorsqu'elle voulut ! introduire, aliu de
donner exemple aux autres religieuses.
A l'âge de quinze ans elle fut faite contre
son gré coadjutrice de la prieure de Beaulieu.
Elle prit à celte occasion la grande croix de
l'ordre que les prieures portent pour marque
de leur dignité; mais elle îe fit avec tant de
ï8
875
mcTioNNAinr, df.s onnuRs nEi.ir.iKux.
87C
confusion (le se voir siip^^riotire, qu'elle ne
voulul j.imnis prendre nuctin ■■ivantagc sur
li:s autres. Un an après elle fui faile prieure
(lu nionaslérc île Ficnx, cliarp;e qu'elle ao
tepla Tiilontiers el avec joie, puisqu'elle lui
procurait le moyen de vivre en solitude; car
ce monastère était fort retiré et peu fréquen-
té. Elle eut tout lieu d'y pratiquer aisément
si"s grandes pénitences, et ce tut dans cette
maison qu'elle coininença à jrûiicr les carê-
mes îuii rs au pain et à l'eau, encore ne
mangeait-elle qu'une fois le jour quelques
morceaux de jiain d'orge cuit sous la
cendre.
A peine cul-iUc demeuré quatre ans dans
cette solitude, qu'elle fut obligée de retour-
ner à Bcaulicu pour faire cesser les murmu-
res de plusieurs personnes qui s'étonnaient
qu'une jeune fille, qui avait tant de beauté,
accompagnée de jeunes religieuses comme
clic, se hasardât de demeurer d ins une mai-
son si peu assurée que ci'lle de Ficus, située
au milieu d'un bois. C est ce ((ui lui fit pren-
dre la résolution d'abandonner celte maison,
cl d'unir ses revenus à ceux de la maison de
licauliiu. Elle cul pour lors le dessein d'en-
trer dans l'ordre de Sainte-Claire; mais ses
directeurs et le visiieur de son ordre l'en
détournùient el lui conseillèrent de travail-
ler plu ôt à la réforme de son monastère. Elle
y consentit ; mais comme elle n'était que
coadjulrice de la pri ure qui vivait encore,
et ((ui s'opposail à ses bons desseins, elle eut
beaucoup de peine à léussir dans son enlre-
jirise, el de quarante religieuses, il n'y en
eut que six qui se joignirent à elle. Elles
prirent ensemble le voile noir, renouvelèrent
leurs vœux et le serment de clôture perpé-
luelle entre les mains du visiteur de l'ordre,
qui leur donna la rè^le que les autres mo-
nastères du même ordre praiiquaieiil et
((u'ellcs suivirent exactement; elles voulurent
même renoncer au nom de leur famille, el la
mère de \aillae prit celui de Sainle-AniiL'.
Comme il y avaii longiemps que la régula-
rité était bannie de son monastère, elle alla
avec la permission de ses supérieurs dans
celui des religieuses de Sainte-Claire de Tul-
le, pour y apprendre les observances régu-
lières, l^lle y séjourna quelque Itmps, après
quoi elle revint à Keaulien, où elle établit de
beaux règlements pour celles qui voulurent
praliiiuer la régularité. Elle donna des ins-
tructions salutaires aux reli;;ieuses qui s'é-
taient jetées un peu trop d ins la liberté, et
làclia par sa conduite et par son excni|)le
d'attirer à ce cliangemenl telles qui s'y op-
posaient le plus. Mais elle ne véeut pas assez,
longtemps pour donner la perfcciion à sa
réforme et pour la rendre solide ; car les [lé-
nitenees excessives qu'elle avait praticiuees
sur son corps dès son bas âge l'avaient ren-
due fort infirme, sans qu'elle interromj il
pour cela ses niorlifirations continuelles. Elle
lui atiaquée à l Age de vingt-neuf ans d'une
violente maladie, dont elle lutafiligéc pendant
dix mois, el à la(|uelU> elle succomba enfin,
étant morte l'an IDIS, le 2^ juin, jour (|ue
l'uu solennisail la 1 le de saint Jeau-H ip'itle,
patron et protecteur de son ordre, ayant ii
peine atteint l'âge de Irenle ans.
Commcla plupart des religieuses de ce mo-
nastère n'avaient pas voulu embrasser la ré-
forme de la mère de Vaillae, et (lu'elles étaient
autorisées par l'ancienne prieure qui s'y
était toujours opposée, celles qui s'éiaienl
soumises à la régularité se virent perséculées
par celles qui voulurent vivre dans le relâ-
chement. Elles furent contraintes, pour se
mettre à l'abri île la persécution, de se disper-
ser de côté et d'autre chez leurs parents,
croyant y trouver un asile et di! la protec-
tion; mais il semblait que tout le monde les
abandonnait : leurs pro.ires parents, de con-
cert avec les religieuses relàcliées , em-
ployèrent toutes sortes de mauvais iraiic-
meiits pour leur faire quitter la résolution
qu'elles avaient prises de mourir dans la ré-
forme, et ils leur refusèrent tous les secours
dont elles avaient besou : il y en eut même
quelques-unes qui furent enfermées dans des
jjrisons.
Ces persécutions durèrent penlant près de
quatreans, jusqu'en l'an 1023, qu'elles trou-
vèrent le moyen d'écrire toutes ensemble au
grand maître Antoine de l'aulo, pour lui de-^
mander sa protection, el leur permettre do
persévérer dans la réforme. Non-seulemenl
il approuva leur résolution; mais il les as-
sura qu'il contribuerait à leur élablissemenl
en ([uelque lieu qu'elles voulussent alb-r,
mais qu'elles lui feraient plaisir de ch<ii-ir
la vil'.e de Toulouse. Elles y vinrent toutes
six l'an 1G2V, et choisirent pour supérieure
la mère de Mirandol, religieuse qui avait
beaucoup de capacité cl beaucoup de zèle
pour les observances régulières. Elle avail
été faite prieure de Eieux après la mort de l;i
mèriî de Vaillae. On ne sait si cette réforma-
trice lui avait résigné ce prieuré; ce qui est
certain, c'est q e la mère de Mirandol en
était prieure depuis la mort de la Mère do
\ aillac, el qu'elle espérait, par le moyen des
revenus de ce prieuré, venir plus facilement
à bout de leur él iblissemcnl dans Toulouse.
A peine y furent-elles arrivées, que lu
Commandeur de Montagu de Frumigièrcs
leurdonnaiin jaidin, une grange et toute
l'étendue d'une place que l'on appelait la
(Cavalerie de Saint-Cyprien. La donation fut
faite le 7 septembre l(i27, el fut approuvée
par le grand maiire de Paulo le 1" juil-
let 11)25. Non-seulement il voulut se char-
ger de leur établissement, en laisanl bâtira
ses frais leur monastère; mais il leur assigna
à chacune cent écus de rente pour leur en-
tretien, à prendre sur le trésor lommun do
l'oidie, dont la Ueligion s'est depuis rédi-
mée en payant le fonds de celte rente. Ainsi
le grand maître de l'aulo est reeonnn (lour
fondateur de ce monastère, dont la mère de
Mirandol, avec sa petite communauté de cini|
religieuses, fut mise en possession par le
chevalier de Tourelle le IJ septembre 1G28.
Le grand maîlre de l'aulo, pour témoigner
da»anl;;ge son allertion à celle communauté
nai>sante, voulut être leur sii|érieur, et que
par un privilège particulier elles dellendl^-
R77
MAL
seul à l'avenir des grands maîtres ses succes-
seurs, ;iu lii'u que les autres monastères de
cet ordre dépendent des gr;inils prieurs du
ressort des lieux où ils sont établis, et à cau-
se de l'éloignemenl qu'il y a de Toulouse à
Malte, il leur nomma pour protecteur le
commandeur de la Hiilière-Pola^lron, afin
qu'elles pussent s'adressera lui dans les af-
faires qui ne pourraient souffrir de délai; i e
qui a été continué jusqu'à présent, qu'elles
ont toujours eu un prolccleur nomme par le
grand maiire.
Ces religieuses pleines de ferveur, sachant
(|ue rtiospitalité est l'esprit de l'ordre de
t'ainl-Jean de Jérusalem aussi bien que la
défense de la foi contre les ennemis de l'IÎ-
glise, voulurent établir un hôpital pour y re-
cevoir les malades ; mais le conseil de la Reli-
gion s'y opposa, et on leur répondit qu'il
suffisait qu'elles participassent à la charité
que les Chevaliers pratiquaient avec tant d'é-
dification dans l'hôpit.il de Malte. Mais com-
me elles n'avaient point de constitutions, elles
jugèrent que les règles qu'elle- s'étaient
prescrites conforniément aux instructions
qu'elles avaient reçues de la Mère de Viiillac
pourraient à l'avenir être facilement altérées;
t'est pourquoi illes demandèrent au grand
iiiaitre des conslilutions , et le prièrent en
même temps d'ordimner que les supérieures,
qui étaient perpétuelles , seraient à l'avcnir
triennalcs, ce qui leur fut accordé; mais ce
ne fut que sous le grand maître Jean-Paul
de Lascaris, qui succéda l'an 1636 à Antoine
de Paulo , que leurs constitutions furent
achevées, et ce nouveau grand maître les ap-
prouva par une bulle du 14 juin 1644^.
Cesconitilutions conliennentdix chapitres.
Le quatrième, où il est parlé de l'élection des
prieures, ordonne qu'elles ne seront plus per-
pétuelles, mais triennal, s, et qu'elles seront
confirmées par le grand maître de l'ordre. Le
sixiènii-, qui traite de la réception des novi-
ces, parle de trois sorles de personnes que
l'on doit recevoir dans cet ordre, et de condi-
tions différentes. Les unes, destinées pour le
chœur, et qu'on appelle sœurs de justice, doi-
vent faire leurs preuves de noblesse comme
les Chevaliers, et ont seules voix active et
passive; d'autres, sous le nom de sœurs ser-
vantes d'office, doivent faire les mêmes preu-
ves (jue les irères servants d'armes , et les
troisièmes sont les sœurs converses, qui sont
destinées pour les plus bas offices.
Avant que de faire la relation des preuves,
il laui avoir assurance de la dot ou passage
de la prétendante, qui doit être de mille écus
pour les sœurs de justice, et de cinq cents
écus pour les sœurs servantes d'olfice, dans
lesquelles sommes ne sont point compris 1 a-
meublemeni de la chambre, les linges ordi-
naires, les babils de noviciat, et le premier
habit de profession que chacune doit appor-
ter aussi. Les sœurs converses, eu considé-
ration du service qu'elles rendent au monas-
tère, sont dispensées de la dot ; mais elles
doivent se fournir de> premiers habits cl de
l'ameublement , et elles ne sont point obli-
gées à d'autres preuves qu'à donner une
MAL 878
bonne attestation de leurs vie et moeurs, ci
qu'elles sont nées d> légitime mariage. La
prieure et le conseil peuvent néanmoins dis-
penser les sœurs servantes d'office de la
somme de cinq cents écus pour leur doi ou
passage, lorsque l'on connaît qu'elles ont de
b tnnes qualités et qu'elles peuvent rendre
de b ms services à la communaulc , et en ce
cas on peut se contenter de trois cents écus
pour le passade.
Les sœurs de justice sont obligées de réci-
ter en leur particulier le grand office selon
le bréviaire romain , lorsqu'elles ne peuvent
assisler au chœur, et les autres, soit servan-
tes d'office ou converses, doivent dire au lieu
des heures canoniales , en une ou plusieurs
fois, trente Pater et autant d'.ltc. Pour ce
qui regarde les jeûnes et mortifications, elles
prennent toutes ensemble la discipline tous
les vendredis de l'année, s'il n'arrive une fêle
solennelle ces jonrs-là. Elles jeûnent aussi
tous les vendredis, excepté dans le lempj
pascal, les trois jours de» Rogations, les veil-
les des fêles de la sainte Vierge, du très-saint
sacrement , de la Décollation de saint Jean-
Baptiste, de l'Exaltation de la sainte croi.\,
et le jour de saint Marc. Pendant l'avent et
tous les mercredis de l'année, hors le temps
pascal, elles font seulement abstinence. Elles
ont leurs heures marquées pour le silence cl
le travail en commun. Elles ne vont au par-
loir qu'accompagnées d'une écoule et le voile
baissé, et elles doivent s'abstenir d'y aller
pendant lavent et le carême et aux fêtes so-
lennelles.
Quant à l'habillement, les constilulions
ordonnent que leurs robes ou soutanes se-
ront de longueur couvrant les pieds sans
traîner à terre, que les manches seront assez
larges pour que les mains y puissent entrer
comniodément, que la matière en sera lé"cro
pour l'été, et plus pesante pour l'hiver, pon-
dant lequel elles pourront porter par-dessous
un habit plus fort d'élofie blanche, mais que
la soutane sera noire, si les chapitres géné-
raux n'en disposent autrement à l'avenir et
que la ceinture sera de laine noire. La [)rieu-
re porte la grande croix de toile fine sur
l'estomac par-dessus la robe, les autres n'en
ont qu'une petite au côté gauche sur le cœur.
Mais pour distinguer les sœurs de justice des
sœurs servantes d'oflice , les premières, à
l'exemple des Chevaliers, portent une croix
d'or cmaillée de blanc de lu valeur de quinze
crus , sans qu'il suit permis de les eiiricliir
d'aucunes pierreries ; et il est permis aux
sœurs servantes d'olfice de porter au doigi
aussi bien que les s;i'Urs de justice, un petit
anneau d'or de la valeur d'une demi-pislole,
où au lieu de pierreries il y a une crois
émailléc de blanc, et afin que les sœurs no
soient jamais sans leur habit, elles doivent
c<.ucher avec un pel.t scapulaire, sur lequel
est cousue une petite croix. Les manteaux à
bec sont on la forme ordinaire avec la grande
croix de toile blanche sur le côté gauche, et
le cordon où sont les instruments de la pas-
sion de Noire-Seigneur. Les sœurs de justice
portent ce manteau à lacomiuuuiua,à l'oriicu
!-:o nicTioNNAiRE DES (tunnF.s ncur.ir.ux. sso
liivin, cl quand la prieure oflicie, mais scu- nommé par l'ô^cniic ilc Cahors. I-c praml
leiiioiil à la messe cl à vC'pres, ri l> prieure prieur ilc S.iinl-dilli's, iioiiotisiaul cN arrèl,
t)orle ces jours- là dans les cérémonies, el ayant donné coiiiiiiission à un Chevalier pour
orsiju'elle donne l'iialiil, ou fail l'aire profes- visiter celle m.iison suivant 1rs anciens usa-
sion à (|ue'quc n ivire, l,i cloche, qui est une [;cs, sous prétexte ((u'il n'avait point de con-
cspèie de robe à grandes manches, ouverte naissance de ces arré s , M. de Uriqneville
par-devant avec la grande croix sur la poi- de la Luzerne, qui fut depuis évcque de Ca-
Irine cl le cordon de l'ordre. Les sœurs de hors, olilini un autre arrêt le 30 avril 1703,
justice peuvent aussi porter leurs manteaux qui lli déf. use au grand [trieur de Sainl-llil-
à bec au clneur ])cndant l'hiver, pour se fta- les d'user à ra>enir de pareilles cntrepiises,
ranlir du fnid, el celle qui est liebdomadiére el qui attribua de nouveau loulc jundiclion
le porte en loul temps ; les sœurs converses à l'évéque de Cahors sur celte maison,
ont un liabil plus grossier, mais de la même Ces religieuses ont des prieures perpé-
forme que celui des autres, et soni dislin- tuclles ; elles suivi ni les consiilulions qui
guces par le voi'e Idanc. leur furent données pir le grand maître
Il est permis à la prieure et au chapitre Guillaume de \illaret. lilllis portent sur leur
ou conseil, de donner la demi-croix à des soutane une croi'i d'or sur celle de li ile
donnés qui soient âgés de prés de trente ans. blanche, comme les religieuses de Toulouse,
Ils doivent faire le même serment que les au- mais elles ne poricnt point !c cordon de l'or-
Ircs donnés de l'ordre, mais ils sont dispenses dre sur leur manleau à Ix c : il n'j a que la
de donner acUiellemenl quelque chose , en prieure seule qui ait droit de le porter : leur
t'unsideration des services qu'ils doivent ron- haliillemenl est d'ailleurs presque semblable
dre ii la communauté, qui est obligée de les à celui des religieuses de Toulouse. C'est
nourrir el de les entretenir. Enfin le grand dins ce moMaslére <le Beaulieu que muuiul
maiire de Lnscaris dans ces conslitulicnis re- sainie Flore, religii use de cet ordre, l'an
commande à ces religieuses de se soaver.ir 12'jy. Los anciennes peintures la rcprésen-
de la Mère Galli' lie de Siinle-.\ni;e de l'illus- tent avec une soutane rouge, sur laquelle il
tre maison do \'aillac, leur réiormalrire ; ce y a une grande c oix blanche, avec un man-
qui fait voir qu^' le P. lîonanni, dans son Ca- leau noir, sur lequel il y a au côté gauche
laloguc des (Jrdres leigieux, s'est trompé, une crois blanche à huit pointes. Celait là
lorsqu'il dit qu'elle élalilil en France une l'ancien habillement des religieuses de ce
congrégation particulière do pieuses fi!Ies, monastère, et de celui de Fieux avant la
aux(|uelles elle donna le nom d'hospitalièr< s prise de Rhodes; mais dans la suite il y a eu
de ^ainl-Jean de Jérusalem, puisqu'elle n'a du changement dans cet habillement, que
été que la réformatrice de cet ordre en Fran- la vanité avait sans doute introduit, puisque
ce, qui y était déjà é'abli dès le tre z.ème le manteau était aussi rouge doublé d'her-
siècle. mine, comme on peut voir dans laOgurc iino
Les religieuses de l'hôpital de Beaulieu, qui nous avons lait giaver d'après le portrait île
n'ont pas voulu rece\oir la réforme de la Gabrielle de Tureniie d'Aynac, command.i-
Mère de V'aillac , se sont soumises dans la trice ou prieure du monas ère de Fieux, dé-
suite aux (>bservances régulières , el ne dé- cédée l'an lo:2i (l).Cel liabilienienl fut en-
pendent plus du grand prie-ur de Saint-liil- core changé après la prise de l'.hodes tiuant
le.'-, étant présentement suus la juridiction de à la couleur et à la forme, comme on (ieiil
l'évoque de Cahors. Ce qui donna lieu à ce voir dans la ligure que nous avons aussi f.it
changement , lurenl quelques désordres qui graver d'après le portrait de la .M^re de
arrivèrent dans celle maison pendant la visite \'aillac (2).
d'un Chevalier de l'ordre envoyé par le grand 11 s'est fait encore depuis quelques années
prieur de Saint-Gilles. M. Sevin , pour lors un autre établissement de religieuses du
évéque de (Cahors, en porta ses plaintes au même ordre, à Martel dans le tjuercy. Les
roi, qui nomma des commissaires pour in- Mères de Mirandol, religieuses du monastère
foroier de cette allaire, el, sur leur rapport, de Toulouse et nièces de la Mère de Miran-
le grand prieur de Saint-tjilles cl la prieure dol, dont nous avons ci-devant parlé, ont
de iieaulieu furent assignés au conseil de Sa commencé cet établissement. Ces reli;;ieuses
Majesté. Il n'y t ut (jue la prieure qui y com- dépendent immédiatement du grand maiire,
parut, et, par un arrêt du même conseil du 3 de même que celles de Toulouse dont elles
septembre 1G7^, contraciictoirement rendu ont p; is aus.si les constitutions et l'Iiabille-
cnlre la prieure el par délaul conire le grand ment. Tuu'c la dilTcrence qu'il y a entre el-
prieur. l'on ùla la juridiction ordinaire dans les, c'est (juc la supérieure de Martel est
telle maison au grand prieur lie Saint-Gilles, perpétuelle, cl (juc celle de l'oulouse est
cl elle fut attribuée a l'évéque de Cahors; on triennale.
laissa seulement au grand prieur de Saint- Mallbieu de Goussancourt, Mnrttjralog.
Gilles un droit lionorirniue (|ui consiste à des cheval, de MnUe. Le l'ère Tliomas d'A-
|)oiivoir V siter cet e maison une fois seule- quin, YiC île lu Mrrc Giillitiltc de Sainlr-
mcnt à chaque, iiinlaiioi) de grand prieur, ou .Inhc llilarion de Cosie, Eloije des futimes
par lui-ii.ê,iie , nu par commission donnée, à tllustics, loin. I. Cun'titiUimis iirs rc^iy/fii.xs
quelque Chevalier , mais (|ui ne peut faire la <lc Toulouse, Mânolirs coinmuniqin's por
visite qu'aec mipagnc d'un ecclésiastique M. l'ulibc de Turcnnc dWi/tuic, {;\. Mcmoin-i
(1) Vnij., i. U lin dii v.jl., les ii<" 21'' ;) '221. (2) Yo-J. il id.
8S)
MAU
MAR
«82
evroyés pur les rcliijicuscs de Toulouse en
1713.
MANTOUE (Congrégation de). Voy. Car-
mes DE L'IÏTROITE OBSEtlVANCE.
MAUBACU ET D'AROUAlSE (Des Chanoi-
nes RÉGULIERS DES CONGRÉGATIONS De).
Les différends que l'empereur Henri IV eut
avec le pape Grcgoire Vil, cl auxquels la
conduite tyrannique et scandaleuse de te
prince donna lieu, curcnl des sniles é|;alc-
menl funestes pour l'Eglise et ] our l'Empire.
Ce prince, méconlenl du pape qui avait mal-
Iraité ses ambassadeurs, et qui lui avait en-
voyé un nonce qui lui avait parlé avec me-
naces, se laissa aiscnicnl persuader par lo
c irdinal Hugurs et par des évêques ennemis
de (îrégoire, de le faire déposer d.ins une as-
semblée qu il fit à Woruis l'an 107(5, où se
trouvèrent un grand nombre d'évèqucs avec
ce cardinal, qui peu de jours auparavant
avait été déposé lui-même et excommunié
par le pape. Ce fut lui qui, conjointement
avec Guibert, évèque de R^ivcnne, avança
plusieurs choses contre la vie, la conduite,
l'élection et les constitutions de ce pontife;
sur cette accusation l'assemblée déchira qu'il
ne pouvait ôtic reconnu pour pape légitime,
et tous les évêques so iscrivireiit à sa con-
damnation. Le pape, de son côté, après avoir
cxco(nmuniéSigefroy, archevêque dcMayen-
ce, et suspendu les autres é\ êques d'Allemagne
(|ui avaient eu part à cette entreprise , dé-
car. i Henri déchu des royaumes d'Allemagne
t't d'Iia'.ie, cl ses sujets quilles du serment
de fidél té, ei prononça anathèine contre ce
piiiiie. Ce fut là l'origine du schisme (jui ne
(in I que par la mort de cet empereur, qui
jrrivu Tau 1100, aprèsavoir été dépouillé de
l'empire par son propre fils.
Ouoique cette excommunication eût fait
impression sur quelques esprits, et que la
[ilupart dt s évoques d'Allemagne eussent re-
connu leur faute, et se fussent réconcilias
avec Grégoire, néanmoins Otiion, évèque
deStrasbourg, n'entra pas d'abord dans leurs
sonti.icnts ; il persista dans le schisme jus-
que sous le pontificat d'Urbain H, et les peu-
ples deson diocèse, suivant le mauvais exem-
ple (ici eurpreiuierjjaslour, ne rccon naissaient
point non plus Grégoire pour chef de l'E-
glise. La rel gi(;n en souffrait, et elle était
presque éieinte dans l'Alsace, lorsiiue Dieu
suscita un saint homme, nommé Manegolde
de Lutembacli, pour la faire revivre en ces
quartiers. Ce fut environ l'an 10'J3 (lu'il
commença à prêchir puliliijuemcnl conire
le schisme, exhortant le peuple à rentrer
dans la bonne voie et à se soumettre au chef
de l'Eglise. Quoique ses discours, qui étaient
animés d'un grand zèle, fissent impression
sur les cœurs des sc!iismati(|U('s, une mor-
talité qui arriva dans ce temps-là, et qui
enleva en peu de temps une inlinilé de
monde, les toucha plus sensiblement; la
plupart changèrent véritablement, ils accou-
laienl en foule pour recevoir l'absolution
de !'excomrnunicalion,ct Manegi.lde, suivanS
le pouvoir qu'il en avait reçu d'Urbain M, la
leur donnait et leur enjoignait une péni-
tince ; ainsi on vit en peu de temps de graml.s
changomenls, et presque toute la province
se soumit à l'obéissance du pape.
Comme le clergé était tombé dans un grand
relâchement pendant le schisme, il se trouva
plusieurs préd es qui après leur conversion
se retirèrent dans les bois el les solilndes,
tant pour y mener une vie pénitente cl reti-
ré.^, que pour ne point communiquer avec
ceux qui persistaient d'obéir à l'empereur.
Mais Manegolde en rassembla quelques-uns
avec lesquels il voulut vivre en commun,
suivant l'exemi le des apôtres et des chré-
tiens de la primitive Eglise ; il fit à ce sujet
bâtir un monastère à l\iarbach, qui est uno
ville d'Alsace, ayant été aidé dans cette
suinte entreprise par un gentilhomme du
pays, nommé Burchard de Gcbcluisler, qui
contribua beaucoup pnr ses libéralisés à l'é-
difice de ce monastère, dont Manegolde fut
premier prévôt.
Ils renoncèrent à toute propriété, ne man-
geaient point de viande, ne portaient point
de linge, gardaient un étroit silence et pra-
tiquaient beaucoup de mortifications : ce qui
les rendit si rccoramandabics, que plusieurs
autres monastères s'étanl joints à celui do
Marbach, il devint chef d'une congrégation
Irès-considérable, qui commença à suivre la
règle de saint Augustin dans le douzième
siècle, à l'exemple des autres communautés
de chanoines qui avaient embrassé !a désap-
propriaiiou ; mais je doute fort qu'il y ait eu
près de trois cents monastères qui en dépen-
daient, comn-.e Mauburne el que'qncs autres
l'ont avancé; el supposé que cotte congréga-
tion ail éié si llorissanle, il ne reste plus de
mémoire d'aucun de ses monastères ; elle est
préscîitement sur le pied de celle de Saint-
Victor à Paris el de quelques autres qui
sont désunies el dont il ne reste plus que
l'abbaye qui eu était le chef, qui ail conserv é
les anciennes pratiques el constitutions de
l'ordre, et d'où dépendent quelques prieurés
qui ne sont que de simples cures. L'abbaye
deMarbarheu a plusieurs, el est en posses-
sion, conjointement avec les Chanoines Ré-
guliers de la congrégation de Lorraine, de
la cure di,- Saint-Louis à Strasbourg. Ils sont
habillés de noir avec une banderole de liu
lorsqu'ils ne sont [;oinl dans l'abbaye; mais
dans l'abbaye ils ont une soutane blani ha
avec un roclicl par-dessus. Ils portent l'été
au chœur une auinusse noire sur les épau-
les, qui pend en pointe derrière le dos et
descend un peu plus bas que la ceinture,
s'attaclianl par-devant avec un ruban bleu,
cl ils ont pour armes d'azur à un cœur do
gueules couronne d'or (1).
Quant à Maicgoldc de Lullcmbach, après
avoir Coni.'é cette congrégation, il ne discon-
tinua pas ses prédications pour ramener les
schismatiques au sein de l'Eglise : ce qui
lui allira beaucoup do persécution, princi-
(5) Voy., à la fin du vol., a" 225.
8A3
DICTIONNAIRE DES ORDRrS Rri.ICiri'X.
8Si
pnlpmcnl de li part de l'empereur, qui le fit
incllre en prison l'an 1098. C'est tout ce que
nous savons de In vie de ce saint homme qui,
iiu rapport d'Vves de Cliarlrcs, pa-sail pinir
un (les plus savants liouiuics du ouzième
sièelc.
Yoi/ex Francise. Guilliinan. Hit. de Epi-
fcopis Argenlinenlibus ïn Vila Olhonis, rpi-
si-iip. XLiii. Yv. Carnot. epist. 40, n/)i(r/ Dit
Chonr, Yeler. Hist. Franc. loin.W, pag.Sd.
fii'iquisiC. de ard. Canoiiicor. Itrgul. pag.
'.VS'.ict 3(i(i.l'enot, Hist. tripart. ('nnon. licgul.
Hb. Il, Clip. CG. Taiiibur. de Jitr. abb. disp.
2'f, qu(p>l. 4, (irt. 9.
K^^i la coiigrégaiiiin de Marbach eut pour
fondateur un homme zélé pour la gloire du
sainl-sicge et qui s'opposa f(irlemi>nt au
schisme causé par l'enipiTeur llciiri IN', la
eongré^alion d'Arouaise eut aussi pour un
de ses fijiilatenrs un saint homme qui ne
fut pas animé d'un moiiulrc zèle, et qui,
ayant été élevé au cardinalat par le pape
Pasi-al 11 et fait cvé()ue de Palestrine, fut
employé par ce ponlifo en plusieurs léga-
tions pour soutenir l'intértl de l'Hglise con-
Ire le même empereur.
Arouaisc, situé proche Bapaume en Ar-
tois, était un lieu qui servait de retraite aux.
voleurs ; mais environ l'an 1090 il fut sam ti-
(ié par la demeure de trois saints ermites,
savoir : Heldemar de ïournay, Conon ou
(Conrad, qui fut depuià cardinal, et Roger
d'Arras, qui bâtirent en ce lieu une cellule
ou oratoire qu'ils dédièrent en l'honneur de
la sainteTrinité et de saint Nicolas. Lambert,
évéque d'Arras, conûrma cet établissemenl
par SIS lettres du 21 octobre 1097, adressées
ù Conon. C'est ce qui fait que plusieurs ne
metlent le commencement de cette con2;réga-
lion ([u'cn celte année ; mais il paraît par
'CS mêmes lettres C|u'HeliJemar était déjà
jnori, et il est mar(]ué comme premier pré-
vôt élabli par Conon en 1090 dans le catalo-
gue des abbés de cette; abbaye, donné par
.M.M. de Sainte-Marthe, qui ont aussi rap-
porté son épitaphe, où il est qualifié de fon-
"lateiir de (•( lie abbaye, qui fui gouvernée
par des prévois jusqu'au temps de saint lîci-
iiard, <]ue (icrvais, qui était le troisième pré-
vol, cl qui avait succédé en li2V à lUchcr,
prit la qualité d'abbé, qui a été aussi dou-
iiée à ses successeurs.
Ce Gervais est qualifié instituteur de la
«•Diigréiialioii, peut-être à cause (lue sous
son gouvernement celte abbaye devint chef
(le vingt-huit riKmasIùres : mais il y a long-
temps qu'elle ne subsiste plus, cl le dernier
cliapilre général se tint l'an 1V70. Les ino-
uasières de Hennrin Ce'ilard à trois lieues
(le I)i)nai , de S.iint-Nicolas à Tournay, de
tihoques et de M.ireles en Artois, en dépen-
daienl, aussi bien que (eux de Werncsion,
Zunebcelv d Sietendal en l'Mandre, de Saint-
Jean à Valencienncs, de Sainl-Crépin et do
Saint-!,éger àSoissons. Kllc avait aussi qua-
tre prieurés eu Irlande, deux à Dublin, un
àHalhoy dans le comté de Kéri,et à llath'vélc
dans le comté de LimériK, cl (luebines au-
tres en An;;lelerie.
Ils étaient habillés de blanc, et au r.-jpport
du caidiaal de \'itry ils étaient austères, ne
mangeaient pnint de viande, ne portaient
point de liiiiie et gardaient un étroit silence.
Voyez Saminarlb. (l(dl. Chrislinn. lom. IV,
/(aç.Oo. l'enol, Ilisl. liii<nrt. Cnnovic. Regnl.
lib. Il, rnp.G'J. Lemire, Origine et instilutinn
de diterses congrég. sous In règle de suinl
August. Tambur. de Jure (dib. lom. II. i/i.«/iur.
2i, quœfC. k, nrl.l. Cardinalis de Vilriaco,
llisl. Occident, ctip. 2.'}.
Quand la congrégation d'Arronaire s'éta-
blit, elle eut une particularité qui nous parnit
semblable au droit liue les quatre premières
filles de Cîteanx cardaient sur le s;énér;il de
leur ordre {Voy. Cîtuxuik). Ain i l'abbé d'ilé-
iiin-Liétard, qu'on qdalifi.iil du prieur do
l'ordie, l'abbé de Ituisseauville, qu'on aiipe-
lait le sous-prieur, avaient, ronjointement
avec l'abbé de Sainte-Marie de Houlogne, à
qui on aurait pu donner le litre de tiers-
prieur, une sorte de juridicliiui sur le géné-
ral de loule la congrégation. Hélyot a nommé
neuf des monastères ou chanoinies qni s'ajjré-
gèrent à cet institut. Voici la nomenclature
des principale-i maisons qni entrèrent dans
celte congrégation, suivant le raii;; de leur
agrégation : 1° Arrouaise; 2° Hénin-Lié-
lard, diocèse d'Arras; 2° Sainle-Maric-au-
Bois, ou Uuisseauville, diocèse de Boulogne;
3' Saint-Marie de Boulogne; 4° Sainl-Créj)in-
en-Chail , sous les murs de Soiss'ins; îi"
Chauny, dit plus lard Sainl-Kloi-Fonlaine,
diocèse de Noyon; 0° Sainl-Vulmer de Bou-
logne; 7"Cysoing, diocèse de Tournay; 8 Saint-
Léger, àSoissons:0'Saint-.Mard de Tournay ;
10° Mazoul, diocèse d'Arras; 11' Beanlieii,
diocèse de Boulogne; 12° Clairfai, diocèso
d'Amiens; 1.3' Choques, diocèse de Saint-
Omer; ik" de Warneton , diocèso d'Ypres;
la" Snmbeck, diocèse d'Ypres; 10" Chàtillon,
diocèse de Langrcs; 17' Chalriees, diocèse dn
Châlons; 18° Doudcauville, diocèse de Bou-
logne; 19° Saint-Je.in de A'alenciennes ,
diocèse de Cambrai; 20" Pbalempin, diocèso
de Tournay ; 2I„ Sainl-Barlhélemy de Bruges,
ou dli(knul; 22 .Viilrey, diocèse de Toul;
23° Soctendael, diocèse de Bruges.
Eu peu de temps, uou-seuleuvent la Flan-
dre, mais l'Angleterre, l'Kcosse, la Bour-
gogne et les pays les plus éloignés, comme la
Pologne, reçurent de l'institut d'Arrnuaiso
des colonies de religieux, les prélats de ces
nouvelles maisons s'obligeanl à se rendre
chaque année dans celle d'Arrouaise, el d'y
assister au chapitre général de l'ordre.
Par une bulle datée de l.atran, le 15 d'a-
vril 1139, el adressée à tout l'onlre d'Ar-
rooaise, le pape Innocent 11 a[iproiivc les
constitutions de cet institut el l'ètablissemenl
de la règle de saint Au^^iislin dans les mai-
sons qui le composent. Cervais, fondateur do
la congréjialion, recul de saint Bernard lo
plan (le sa réforme ; c'est une preuve de plus
de l'influence de saint Bernard, (]ue les his-
loriens de sa vie ne devraient pas oublier.
Ciervais avait puisé h s principe» de son gou-
vernemenl dans l'nrdre de Ciieaux. Il avait
des frères tonvers qu'il faisait Irnvaillcr. II
im
MAH
M AH
8H6
avait aussi un nombre égal de converses
rc(i,iinlut.'S dans les habitalions dépendantes
du monaslère ; car, comme le dit Gautier, qui
a écrit l'histoire des commencements de
l'ordre, il recevait à la contersion presque
toutes les personnes des doux sexes qui se
Iircsentaient pour vivre sous ses lois. C'était
l'esprit du temps, dit Gosse, qui nous four-
nit ces détails, et nous y trouvons, nous, un
cx( mple de plus à ajouter à ceux de Fonte-
\rault, de Saint-Sulpice, etc., (ù il y avait
les deux sexes. ïans faire comme Robert
d'Arbrissel, Gervais, ainsi que saint Norbert,
reçut (outcs les femmes qui se donnèrent à
lui; il les plaçait d.ins un cloître séparé,
quoique dans un même monastère. Ce mé-
lange singulier occasionna dans la congré-
palion d'Arrouaise les mêmes abus que dans
l'ordre de Prémonlrc. On fut oliiijjé dans
celui-ci, vingt ans après sa fondation, de bâtir
pour les religieuses des maisons séparées :
les Arrousiennes ne furent supprimées que
dans le siècle suivant. Un chapitre général
et un concile provincial en ordunncrcnt suc-
cessivement l'exlinction. Au reste, Hélyol
n'ayant pas connu ces religieuses, nous leur
consacrerons un article dans le Supplément.
Les chapitres nombreux des constitutions
d'Arrouaise contiennent plusieurs belles
prescriptions qui ont beaucoup du rapport
aux usages monastiques. Les psaumes se
chantaient par cœur, cl cet usage dura jus-
(|u'au XV ir siècle. Tous les chanoines tant
lettrés que non lettrés devaient assister au
choeur, exre; té les infirmes, qui se tenaient
dans l'arrière-chœur in rétro choro. Le ré-
formateur, qui s'attacha spécialement à ré-
pler ce qui concerne l'ofiice divin, établit
une liturgie particulière, qui devint célèbre,
mais qui n'est plus connue aujourd'hui. Le
genre de vie fut tel à Arrouaise, que Cara-
niuel,abbéde l'ordre de Cîteaux, appelant les
religieux de cette congrégation Gei'vusiens,
(lu nom du réformateur, prétendait que ces
religieux n'étaient ni moines ni chanoines,
mais quelque chose entre les deux, qu'il ex-
primait par le mot Canonico-Cislercii"ns,c\.-
pressiou singulière et peut-être ridicule.
Avant et après la ré orme de Gervais, les
bulles des papes, les dé rets des éi êqucs, etc.,
concernant les religieux d'Arrouaise, leur
<>nl toujours donné le titre de chanoines.
Gervais, qui n'avait pas été élu en 112't,
comme le dit Hélyot, mais en 1121, donna,
malgré la réclamation de tout l'ordre, sa dé-
mission de son abbaye et du généralal, sur
la fin de l'année IIW. Il vécut encore dans
l'exercice de toutes les vertus jusqu'au 18
septembre 1171. Pour maintenir l'esprit re-
ligieux dans les chanoines qu'il chargeait
des cures, il y mettait plusieurs confrères
ensemble, avec l'obligation d'y vivre comme
dans la maison n.èrc. Gervais vil saint Ma-
laehie d'Armach et sain' Laurent de Du-
blin, embrasser sa réforme, qui a produit
plusieurs honmies remarquables, tels que
J{;tuitouin,cvêquodeNoyon; Milon, deuxième
du nom, cvcque de Térouanne, etc. Dans le
XII' siècle, sous Fulbert, troisième abbé, il
s'éleva un peu de trouble et un schisme dfins
l'ordre. Le général abdiqua l'an Util, et
m:^urut cinq ans après, le 2 ocioî rc. C'él.iil
un homme de mérite. Lnmbert, son succes-
seur, homme savant et de mœurs honnêtes,
n'avait point la vigilance nécessaire à sa
position et il laissa dépérir la discipline. Ce
fut dans la première année de son adminis-
tration que les reliques de sainte Monique
furent transférées d'Ostie à r;ibba\e d'Ar-
rouaise. Ce supérieur laissa, après treize ans
de gouvernement, le temporel de son abbayi;
dans un étatiléplorable.Sous l'abbé Pierrcl",
élu en l'an 1227, il y eut une réforme de
l'ordre.
Les religieux d'Arrouaise , sous l'abbé
Gervais, portaient un sc.ipulaire semblable à
celui des Cisterciens, pour le travail, mais
ni le travail des mains, ni le scapulairc ne
furent en usage dans toutes les maisons de
l'ordre. Au reste, dans l'inslitul d'Arrouaise,
on ne fit usage du scapulaire qu'autant que
dura la loi du travail des mains, cl que le
plus grand nombre des religieux fut composé
de frères lais. Lis cb..noi[ies arrouaisiens ne
portaient le surplis qu'à certains jours, à
certaines fêtes, et même à certaines heures.
Ainsi ils ne portaient pas le surplis à mati-
nes, ni aux jours de travail. Au xV siècle,
l'abb.iye d'Arrouaise fut léduiîe en cendres
par une armée {probablement celle de Louis
XI, qui ravagea l'Artois en 1475). Les reli-
gieux firent une quête pour la réparer, et
portèrent, suivant l'usage connu, leurs re-
liques de localités en localités, pour se pro-
curer des aumônes, en excitant la piété des
fidèles; mais les fidèles eux-mêmes étaient
dans la misère, la quête produisit peu. Dans
ce siècle les chapitres généraux n'avaient
plus lieu, mais la congrégation subsistait
encore, et l'abbé d'Arrouaise conservait sa
juridiction, du moins sur quelques membres
de son institut. Au xvr siècle, il en coûtait
beaucoup pour être religie ix à Arrouaise,
(l pour donner la preuve des exigences,
n(!us citerons un ou deux articles des objets
demandés. Ainsi le novice devait fournir :
« à ung chacun religieux, ung couteau ar-
genté de la valeur de viii s. — A M. l'abbé
une paire de couteaux de la valeur d'ung
noble. — Au prieur et au maître des enfaais,
à chacun une paire de xvi s. — An page de
M. l'abbé, vin s. — Au palefrenierdeMonsieur,
VI s. Tous les valets, jusqu'au dernier, étaient
couchés sur Vétnt de ces dons à faire, et cet
élut se terminait par celte phrase d'un sérieux
ridicule: «Avec loul cela il faut que le no-
vice soit bon enfant.» Il y avait encore d'au-
tres impôts de celle espèce, un par excmplo
pour être assis sur le banc de pierre, au
cloître et en chapitre. Ces usages, condam-
nab'es en quelques choses, et surtout dans
les monastères reniés , rcslèren". pourtant
dans quelques maisons jusqu'à la rérolution
de 1789.
Dans le même siècle(en î5G0],lcs religieux
d'Arrouaise furent, pour la première fois,
gênés dans l'éleclion de leur abbé, parle
gouvernement espagnol, maître alors îles
0)7
MCTIONNAinE IW-S OllWiF.S l!FJ ir.Ii-.lIX.
SSS
r.ijs-Iîas cl lîc I . FI.Tii(!ri',cl qui inipnsôipnl
le nom lie celui (ju'ils voulnicnl voir iilil é.
Celle éliclion iiilhieni-re cul lieu en ciïel.
lîienlôl r.ilili;i}c (l'Arri.u.iise olle-iiii^'riie ro -
liiiiriii 50US la jiiridiciion de ItMèiiiie il'Ar-
r.is. cl pL'ii à peu s'en .ill.iil rctle belle et
édllanlc roiiprépnlidn ! I.cs iiiallieurs de la
.guerre avaient réduit les Cliaiiuines à un
-' petit noiibie dans la maison; les aulres
._ claicnl, les uns ç.i et là ou clicz leurs p :i-
ren's. les aulres entrés dans quel ]ue aulre
inslilut, ou autre maison d'Arrouaisiens.
A ers la (in du ww siècle et au conimence-
nieiit du XTiii , il y cul une soi te de réforrnc
ri de résurreclion de la conpré2;aiiitn avec
un certain sucrè<. Ces lenlativrs édifiâmes
élaicnl dues à l'abhé Hallé, nui exp'ra dans
\lS >enlinK'nls de la plus vive pieté le 27
i"uillel 1710. Il eul pour successeur un nommé
>.iuibrinnes, nommé par le roi, et qui se fil
pourvoira Home, car les reli;;ieu\ relusaienl
de le nommer. Après la mnri de Dambrinnc-,
le roi donna l'ai biyc m conuiiende au car-
dinal lie Cesvres, a'clievéque do Bourges;
mais on refusa à IloniL' d'accorder des bulles
de conimcnd.ilairc pour une abbaye chef
«l'ordre, et en 172"> on fit à Arruuaise l'é'ec-
(ion (iiill:jcncéc par la nomination du roi)
de Philippe Lcscounhcnl, sévère, économe,
réfîulier, niais iniprudenl. Sous lui finit la
juriilclion d'Arrouaisc sur !:i maison de
(^lairfai, la dernière qu'elle eût conservée.
Cel abbé vaniteux filfaire lui-même l'épitaphe
ponijieuse que l'on voyait sur sa tombe et
que nous avons lue. Les a. très abbés, nom-
més p.ir le roi, furent tous des abbés régu-
liers et bcnils. Sous l'abbé l'abary, l'église
d'Arrouaisc, en reconslruclion depuis plus
d'un siècle, f.il enfin terminée. La première
p'crre de la nef et de la tour fut posée en
17-«0. Talary était encore abbé en 1788, et
vr;iisemb!ablcmenl l'ut le dernier supérieur
de celle congrégation, ne desservant plus
alors que trois cures régulières, cl qui avait
pour piieiir F. Go-se, religieux inslruil et
laborieux, (]ui a donné une Uisloire inléres-
^anle de son abbaye cl de soii inslilut. J'elle
fui la ccngrégalion d'.\rrouaise, qui a éié
gouvernée par cin(iuantc supérieurs, dont
lis (rois premiers porlèrenl lelilre de prévôt,
cl donl le second, Conon, devint évéiiuc et
c.inlinal ; congrég.ilion qu'IIélyol avail peu
connue, qui méritait de 1 élrc davantage et à
I. quelle nous aurions dû léservcr un article
éli ndu dans noire Supplément, artii le que
nous lui consacrerons peut-être, sans nous
borner à faire lonnaitre seulenienl les reli-
gieuses Arrouaisienuos, dont aucune histoire
lies ordres n.oiiastiques n'avait parlé avant
nous.
Iliftnire (h l'ahhaijc et de rmuiiiinr con-
grégtiiiun desCliuuninis Hàjulicrs d'An owiisc,
(iv< r. dis iwlrx critiiiues, liist .riiptrs cl diplu-
iiiut qnis; par M. (iosse, prieur d'.Vrrouaise,
de 1 ac.iileniie d'Airas, 1 vol. in-V'. Lilli-,
Danel, nyO. b-D-i;.
MARC (CiiEVALiKRS DE Saint-). Voyez
CiiMi'^sr:.
.MAiu: m; FLORRNCE ( dominicains i>r
i.A coNr.iiKiiATiON UE Saint-). Foi/. Lomuah-
DIK, III.
MAItC DE r.AVOTI ( Pomimcvin^ ib la
CONGIIÉGATION DE). Y OIJ . LoM IIAKDIK, lil.
MARC DR, MANTOUR ET DU SAINT-FS-
l'ItlT (Chanoines Uéglliehs de SAiNr )
(1 Venise.
La congrégation des Ciianoines Réguliers
de Sainl-Marc de Manicnic a eu pour l'oiula-
teur un saint prêtre nommé Albert Spiiiol.i,
qui, ayant conçu le iless' in de fumier un mo-
navtère de (Chanoines Réguliers, oblint imur
cet elTcl de l'abbé de Sainl-.\ndré de Man-
toue une vigne proche de laquelle était une
cbapcle dont quelques bourgeois de celle
ville étaienl patrons. Non-seulement ils cé-
dèrent leur droit de patronage en faveur de
cet et iblisscment . mais ils tirent don à ces
nouveaux Chanoines de quelques terres
lanl pour la eonstruclion de leur église et du
monastère que | oiir leur enlrelien, ce qui
fut confirme par le pape ("élcslin III, l'an
li'.)V. La même année, Henri, évê;|ue de Mao-
loue, posa la première jiierre de l'église, qui
fut dédiée sous le nom de Sainl-ÀIarc ; et
une dos princip;iles conditions qui fut stipu-
lée jiar l'acie do donation qui fut f.iile par
les bourgeois de .Mantoue des fonds et des
terres pour la faluique de citle église fut
qu'elle ne relèverait d'aucune au're église,
et serait chef d'un ordre sous le nom du
Saint- Ma.-c.
Quelques clercs s'y élaiil assemblés eu-
rent pour supérieur le même Spi lola, el il
leur prescrivit une règle qui lui approuvée
par le pape Innocent 111 , l'an 12()'i. lille fui
confirmée par Honorius III après avoir été
corrigée, ce (jne fit aussi (îré;;oire 1\ par sa
bulle de l'an 1-228, où celte règle est insérée
dans loule sa teneur. ("irégoirc X, Jean WII,
C.ilixte 111, Nicolas IV' el plusieurs aulres
souverains ponlifes ont accordé des privilè-
ges à ces Chanoines, iiui, selon Penot, ayant
clé réformés vers l'an l'ioi, n'embrassèrent
qu'alors la règle de saint Augustin.
Dans le commenremcnl de leur instiliilion
ils menaienl une vie austère. Ils ne con-
cliaient que sur des paillasses avec des lin-
ceuls de laine. Us jcùnaicnl depuis le diin.iii-
chc in Mbis jusqu'au mois de se[itembre,
outre l'avenl, les vendredis île l'année, cl
les jrûnes prescrits par l'Fglisc. Ils obser-
vaient un étroit silence, av.iienl deux heu-
ri s de travail dans la journée, et n'admet-
l.iienl aucun à la profession qu'il n'eùl
dix-sept ans accomplis. I eur habillement
consistait eu une soulane de serge bl.incbe
el un rochet. Lorsciu'ils jillaienl au rho'ur
ils avaient une moscl e ou prtil eamail el un
bonnet e.irré blanc avec une auiiiusse blaii-
clie qu'ils meltaient sur le br.is il).
(icllc coiigrégali .11 éiaUc mposéed'cnviroa
Il \'«-j., iU lin du vol., 1.» 2-26.
88!)
M\n
MAR
890
dix-huit ou vingt mnisims d'honimps et ijud-
qucs-unes (le filles, qui élaicnl silutn-s dans la
Loiiibardic el dans l'Iilal de ^'(•nise, et aprrs
avoir ncuri pendant près de quatre cents
air», elle diminua peu à peu el se vit réduiie
à deux couvenis où la rcj;ularilc n'était pas
mémo observée. Leinonaslère de Saiiil-Mare,
qui en élait le clief, fui donné par Guillau-
me, duc de Mantone, aux moines Camaldu-
li'S, l'an lo84, du consentement du pape Gré-
goire XIII.
Quelques-uns ont prétendu que cet ordre
di'S Chanoines Uéguliers de Sainl-iMarc de
IManlouc n'avait jamais eu plus de deux
maisons ; mais Scipion Agnelle Malïei, cvé-
<|uc de Casai, dans ses Annales d ■ M.intoue.
prouve le contraire par une huile du pape
Grégoire X, oii tous les prieurs des cou-
vents qu'ils avaient, sont nomin s, cl par
cette liulle le pape reconnaît que la règle de
CCS Chanoines avait été reçue et corrigéo
p.ir les papes Honoriusel Grégoire, ses pré-
décessi urs, et confirmée par Innocent IV
av.inl le concile général de Lyon. Un ancien
registre qui est conservé encore dans celle ab-
baye de Saint-iMarc qui était t!e l'ordre des
Chanoines Réguliers de Saint-Marc de Man-
loue, cl qui contient les chapitres qui ont été
tenus d.ins cet ordre depuis l'an 12i-',) jusqu'en
l'an 13i0, montre encore évidemment qu'ils
avaient plusieurs maisons, puisque dans le
chapitre de l'an 124^9 il y eut seize prieurs qui
y assistèrent, et que dès le temps que le pape
Honorius III confirma cet oidre en 1220, il y
avait pour lors déjà cinq monastères. (îelie
bulle élant adressée aux prieurs et couvents
des églises de Saint-Alarc de Manloue, du
Sainl-Espril de Vérone, de la maison de la
religion de l'arme, de Sainl-Eus( be de Sara-
tico au diocèse de Viccnce, de Sainte-Perpc-
lue à Faeiiza et à tous ciux qui à l'avenir
voudraient s'unir à cet ordre.
Voijez Scipion Agnetl. Maffci. Annal, di
Monluua. l'enot, liist. trijiart. Canonic. lie-
(jul. Paul Morigia, ILst. de toutes les relig.
Silvcslr. Mjurolic. Mar. Océan, di tut. (jti
Jlelig., et Philipp. Uonanni, Calalog. omn.
relig. oïd.
Nous joindrons aux Chanoines Réguliers
de Mantoue une autre congiégalion qui prsl
son origine à Venise sous le nom du Saini-
lîsprit, el qui lut supp imée par le pape
Alexandre Vil l'an 165G. liUe avait eu pour
fondateurs quatre noljles Vénitiens, U. André
t5ondiméro, 0. Michel Maurocini, D. Phi-
lippe l'arula et i). Fr.inçois Contarini, qui
Ions quatre, animés du même zèle et ayant
risiilu d';ibandonner le monde, se transpor-
tèrent au couvent de Nazareth situé dans les
lagunes de N'enise, qui élait occupé par des
Inimités de l'o.drede Sainl-Augusiin, cl sc-
iant mis sous la conduite de Gabriel de Spo-
lelle, qui en était prieur, ils reçurent l'habit
de cet ordre el en firent profession; mais
(luebiuc temps après, ayant obtenu le mo-
nastère de Sainl-Uaniel dans le l'adouan, ijui
leur avait clé donné par l'abbé conimeiida-
lairo, ils y allèrent demeurer cl l'aliuidon-
nèrenl presque aussilôl, y ayant été con-
traints pir criui qui succéda .1 cet abbé (|ui
les y avait inln duils: c'est pour(|noi ils re
tournèrent à Venise, où on leur donna le
monastère du Saint-Esprit, à trois milles de
celte ville. Ce fut là qu'ayant quitté leurs
habilsd'Ermitcs del'oidrede Saint-Augustin,
ils prirent celui de Chanoines Uéguliers avec
la permission de Martin V qui occupaii pour
lors la chaire de saint Pierre, et ils firent de
nouveau profession. Lorsque le |inpc Alexan-
dre VII les supprima, ils n'avaient qu'un
couvent et quelques hospices où il y aval'
peu de religieux et où ils vivaient dans un
grand relâchement. Morigia dit qu'ils étaient
fort riches, et qu'ils étaient habillés comme
les Chanoines Réguliers de Latran. D. An-
dré Biindiméro, l'un des fondateurs de cello
congrégation, a été patriarche de Venise, el
Philippe Parula, qui en élait aussi fondateur,
a été archevêque de Crète, appelé présente-
ment Candie. C'est dans cette abbaye du
Saint-Espril, qui forme une île proche do
Venise, que les ambassadeurs des princes
souverains reçoivent les compliments de la
République, avant que de faire leur entrée,
un noble accompagne de soixante sénateurs
allant trouver ces ministres dans l'église do
celle abbaye pour les conduire dans leurs
hôtols.
Voyez Penol, llisl. tripart. Canonic. /le-
qul. Itb. Il; Morigia, Hisl. de toutes les relig.
ï.b. I.
MARIE DE METZ (Saîntr). Voij. Ecinai..
MARIE DU PORT-ADRIATIQUE (Sainte).
Voy. Latran.
MARMOUTIERS ET DE FRANCE ( An-
ciennes C0NGKÉG4TI0NS BÉNÉDICTINES DE).
Voy. France (Congrégation de).
MARMUiNSTER. Voy. Lérins.
MARONITES (Moines [l])
Quriqu'il y ait une règle sous le nom
de Saint-Antoine, nous avons déjà dit que
tous les religieux qui se disent de l'ordre de
ce saint ne la suivent point. La plupart des
voyageurs nous ont voulu persuader dans
leurs relations que li's religieux copies sont
de l'ordre de Sainl-Macaire ; que tous les
Arméniens suivent la règle de saint Rasile,
cl qu'il se trouve aussi des religieux en
Orient qui suivent celle de saint l'acôine.
Scliooni'bcck, dans son Histoire des Ordres
religieux, en met même (luelqucs-uns di's
ordres de Saint-Sabas el de Sainl-Carilhon.
Mais plusieurs Levantins dignes de loi
m'ont assuré qu'il n'y avait parmi les difté-
rcnles sedcs de chrétiens en Orient, que
des religieux du l'ordre de Sainl-Anioine cl
de celui de Saint-Basile ; ce qui m'a été con-
firmé par M. Sapliar, évéque de Mardin en
Mésopotamie, que je vis é'antàRome en
1098, el qui me dil i\ue les religieux maroni-
tes, suriens, copies cl quelques Arméniens
étaient de l'ordre de Saint-Antoine, el que
les Grecs suivaient la règle de saint Basile,
(!) Voij., à la lin J.i vul., ii" i2
¥n
DICTIONN.MUE l»F.S OIU»UF.S nELIGIF.UX.
892
aussi bien qnc tes Molchilps, les CiéorgiL-ns
cl la plus ^raiidc [i;iriio dos Arméniens.
C'est donc nu lc:iioit;nn';e de ce prcial, qui
c l lui-iiH'me jaiobile ou surien, qucjc m'en
rappiirle; et je coriiinenceiai paries Maro-
nites, à qui l'on doit donner le premier r :np: ;
puisqu'il n'y a aueuti srhistnaii()iic parmi
eux, et que de tous eeux qui se sont séparés
do riîsîlise romaine, il n'y en a point qui se
soient réunis à elle de tneilleure fui el plus
sincèren)ont que les .Maronites.
C'est un peuple de l'Iiénicie qui habile le
mont Liban, entre FJiblis et Tripoli, et qui
est encore répandu dans la Syrie, la Syro-
phénieie, à Seyde, Raru', Tripoli, Alep et
dans lilc de Chypre. L' ur prinripale habita-
lion est néanmoins au miiil Liban, où ils ne
permettent à qui que ce soit de demeurer,
s'.l n'est catholique. Plusieurs auteurs ont
prétendu (jne le nom de Maronites leur a été
donné à cause d'un certain héréli(iue mono-
thélite nommé Maron, qui les pervertit et
dont ils ont suivi les erreurs pmdant prés
de cinq cents ans. .Mais ils n'en dctucureul
jias d'accord, el ils soutiennent qu'ils ont
pris le nom de Maronites à cause de saint
Maron, abbé. Fauste Naironi, qui a fait une
dissertation sur leur origine, dit ( De orig. et
relig. Mnronit.) qu'avant que l'hérésie eût
infecté la ^yric, il n'y a point de doute que
• eux qui y demeuraient no s'appiiassent
Syriens , mais que la plupart des Syriens
ayant suivi les erreurs de plusieurs héré-
siarques, ils ont pris les noms des sectes
que ces hérésiarques ont formées ; qu'ainsi
ceux qui ont suivi les erreurs de Macédonius
ont été appelés macédoniens; ceux qui ont
suivi Apollinaire, apollinarisles; que de Nes-
Jorius sont venus les ncNtoriens, d'Kutychés
les cutychiens et de J;icob les jacobitcs. Cc-
P' iiilani, lorsqu'il semblait que toute la Sy-
rie allait être pervertie, qu'elle allait entiè-
rement embrasser l'erreur et se diviser dcï
l'Eplise rom:iine, Dieu, dit-il, apjioi ta le re-
mède à un si prand mal, jiar le moyen île
saintMaron, abbé, qui non-seulement fortifia
plusieurs Syriens dans la foi qu'ils avaient
reçue des apôtres , mais persuada à un
prand nombre d'embrasser la vie monasti-
que. Ce saint, ajoute-t-il, virait vers l'an 400,
et SCS disciples ayant bâti plusieurs monaslé-
res dans la Syrie, dont le principal, auquel
ils donnèrent le nom de Saint-iM.iron , était
entre Apamée el Kmcsse sur l'Oronle, ils
suivirent les traces de leur maître, c'esl-à-
dire qu'ils fortifièrent de plus en plus quel-
ques Syriens dat)s la foi c.ilholi<iuc ; c'est
pourquoi ceux d'entre les Syriens qui n'é-
i;jient pas infectés du venin de l'hérésie, el
qui suivaient av<'c ces moines les dopoies de
l'Kglisc catholique, furent appelés Maroni-
tes, comme ayant persévéré dans la foi par
leur moyen el par celui de saint Maron.
Mais comme Fauste Naironi prétend ap-
puyer ce qu'il avance par l'aveu même des
jacobites et des monoihéli'es, principalement
d'un'l'hotiias, arclicvc(iue de^ fartai), que cet
évoque n'a vécu que vers le onzième siècle, et
^ucd'oillcurs les auteurs que cite cncoreNui-
roni rapportent souvent pour des choses an-
ciennes ce qui se passaitdeleur temps etqn'ils
ont même tiré des livres des Maronites de-
puis leur réconciliation avec Ronie, c'est ce
q\ii f.iit que ce que Naironi a donné pour
preuves convainc. mies n'a pu encore per-
suader plusieurs savants, que les Maronitis
aient toujours persévéré dans la foi eallioli-
((ue, et n'aient jias tiré leur orifjine de l'hé-
réti(]ue ^L^ron, (]ui était monolhélile. Il est
néanmoins bien diflieile de croire qu'ils
aient eu une telle orij;inc ; el s'il était vrai
qu'ils eussent pris le nom de Maroniles à
cause de cet hérétique, ils l'auraient sans
iloute quitte comme un nom infâme depuis
leur réconciliation avec l'Fg'ise romaine; de
même que les nestoriens qui, après avoir ab-
juré leurs erreurs, prennent le nom de chal-
déens, et les jacobites celui de suriens, com-
me dit encore Fauste Naironi, ([ui, pour
répondre à ceux qui prétendent (|uc les Ma-
ronites ont pris le nom d'un village nommé
M.ironia, dil qu'il se peut faire (jue saint
M iron soit né dans ce lieu, et qu'il en ail
jiris le nom, mais que pour eux ils ont pris
leur n<mi de saint Maron. Quoi qu'il en soil,
ils célèbrent la fêle de ce saint le neuvièuio
janvier, auquel jour il est permi> à ceux (jui
sont à liomc d'officier selon leur rite, dans
le collège que lîrégoire XIII y a fondé | our
ceux de cette nati m, laquelle n'a pis imité
les aulres OrienlaMx, qui pour la | lupirl
relombent aisément dans les mêmes erreurs
qu'ils ont abjurées. .Mais pour les Maronites,
depuis leur réunion avec l'Kglisc romaine,
ils sont toujours demeurés fermes dans la
foi calholiqne, dont ils firent profession en-
tre les mains d'Aimeric, patriarche latin
d'Anlioclie, vers l'an 1182.
Il y a parmi ces Maroniles des religieux
qui avaient autrefois sur le mont Lib-in en-
viron (luarante monastères, dont li plupart
sont abandonnés et ruinés, et qni étaient
bâtis sur des croupes de rochers si escarpés,
qui- ces lieux paraîtiaienl n'avoir jamais été
h.ibités, si l'on n'y voyait eecore les vestiges
de* anciens monastères, et si ceux qui sont
présentement habiles n'étaient aussi situés
d.'ins lies lieux déserts, entre des rochers af-
freux qui inspirent la pénitencr, it où l'on
ne peut aller ((u'on ne soil sensiblement
louché de dévotion.
Les uns sont conuiie stispeiulus, spéciale-
ment celui (la'on appelle Mnrfnlidi, et pour
y entrer il faut mouler avec une écliellc de
vingt-cinq [lie 's de hauteur. Les autres ont
leur entrée comme celle des cavernes. Celui
que saint llilariun fil édifier en l'iionneur de
s. tint Antoine est de difficile abord, mais on
y trouve de beaux jardin.iges el des vignes.
(;'esl l'endroit où les religieux font leur no-
viiial, el lorsqu'ils sont profès, ils vont de-
meurer dans les autres couvents, qui s.)nl
présenli;. lient au nombre di; dix, où dans
quelques-uns ils ont plus la comp.ignic des
tigres, des ours f^ auiris béte.i féroces, qno
celle des hommes, cultivant la tcre et les
vignes, iiourri>sant des vers à soie, s'occu-
paul à luire des nattes, |iriuiipaleiniMil les
893
MAR
MAR
834
ifieillai'ils qui ne peuvent plus faire tTo gros
tnivail.
Le jjlus affreux do tous ces couvcnls csl
celui qu'on appelle Marsaquin. 11 csl silué
dans les plus liaules montagnes du Liban,
sur un rocher fuit en préripice, dans un dé-
sert <iù il n'y a que des bêles féroces. Avant
que d'y enirer, il faut monter à une échelle
fort haute, et passer par-dessus un échafaud
de branchages d'arbres, qui conduit dans un
trou que la n;iture a fait à ce rocher, et qui
sort de porte et de fenêtre pour donner quel-
que clarté à une caverne au fond de laquelle
il y a quelques degrés taillés dans le roc pour
monter dans une autre caverne qui sert d'é-
fjlise, et qui ne reçoit point d'autre lumière
que celle que rend une lampe qui brûle de-
vant l'autel.
Le P. Eugène Roger, Récollet, qui a fait
la description de ces couvents dans son Voya-
ge de la terre sainte, dit qu'il fut en celui-
ci, où il trouva un religieux âgé de quatre-
vingts ans, dont il en avait passé plus de (in-
cluante en ce lieu, et qui était devenu si faible
cl si caduc, qu'il ne pouvait se remuer d'un
lieu à un autre. C'était pour celte raison que
le patriarche, son parent, voulut le faire
venir au monastère oii il faisait ordinaire-
ment sa demeure, afin qu'il y fût soulagé
dans sa vieillesse : mais ce bon anachorète le
pria de lui laisser finir ses Jours dans ce lieu,
ce que le patriarche lui accorda ; cependant,
comme il ne pouvait pas aller chercher de
l'eau au torrent qui passe au bas de la mon-
tagne , et qu'il faut descendre plus de deux
cents degrés pour en aller puiser, il lui dun-
na pour l'assister une religieuse, âgée d'en-
viron vingt-cinq ans , qui avait déjà passé
quelques années dans ce liéscrl, où elle avait
mené une vie cxcmilairc, vi\anl en véritable
Jinachorète. Celle religieuse, pour régaler le
r. Ro;:er et son compagnon, tira d'une peau
de chèvre du fromage un peu moins sec que
du plâtre, qu'elle émielta sur un morceau de
t:uir qui servait du nappe et d'assiette; elle
ajouta à ce mets deux poignées d'olives salées
l't séchées au soleil; et ayant fait chaulTer de
l'eau dans un pot, elle y délaya de la farine
de froment qui avait trempé dans du verjus ,
et fit cuire un peu de pain sous la cendre;
ensuite elle leur donna du vin dans une ca-
lebasse qui servait de verre.
Les autres religieux maronites ne vivent
pas partout avec tant d'austérité; mais ils ne
mangent jamais de viande sans une dispense
particulière de Rome. Ils usent d'œufs, de
îaiiage et de diverses herbes sauvages, com-
me lenouil, hysope, colocase, vwla insanna,
et quelques espèce.-, de chardons, faisant con-
fire toutes ces clioses avec du lait aigre dans
des peaux de bouc, pour s'en servir hors le
Icinps de leurs carêmes, pendant lesquels ils
n'usent point de laitage, mais bien de pois-
son, de légumes, de fruits, de salades, d'oli-
ves et de raisiné, qu'ils assaisonnent avec du
verjus, du miel ou suc de sumac.
lis observent cinq carêmes , savoir : celui
de la résurrection de Noire-Seigneur, qu'ils
commencent le lundi de la Quiuquagésiuie,
pendant lequel ils ne mangent qu'une fois le
jour, deux heures avant le coucher du soleil,
et s'absliennent aussi de manger des œufs,
du fromage et du laitage. Le second coiu-
meiice quinze jours avant la fétc de saint
Pierre, a laquelle il finit; et celui de l'As-
somption de la sainte Vierge commence aussi
quinze jours avant cette fêle. Le quatrième,
qui n'est que de huit jours, est en l'Iionnour
de riixallation de la sainte croix ; et le cin-
quième est de vingt-cinq jours avant la Na-
tivité de Notre-Seigneur, piMidanl lcs(;ueN
carêmes ils s'abstiennent aussi de lait et
d'œufs, mais ils peuvent manger du froma-
ge. Ils jeûnent aussi la veille de saint Maron,
et se conforment pour les autres jeûnes à
l'Kglise romaine.
Ils récitent leur office en langue syri ique;
matines cl laudes la nuit, prime, tierce cl
sexie,à la pointe du jour : la messe se dit
ensuite, se servant comme les Latins de pain
sans levain pour la consécration. Après la
messe ils vont travailler, chacun selon son
talent, jusqu'au diner ; après quoi ils retour-
nent au travail. Avant souper ils disent noue,
vêpres et compiles : îls vont ensuite au ré-
fectoire; et après le souper ils se retirent
tous pour prendre leur repos.
Les novices sont en h.ibil séculier pendant
trois ou quatre mois, selon la volonté du su-
périeur, qui leur fait faire profession quand
bon lui semble; c'est ordinairement le pa-
triarche qui I n fait la cérémonie, et en son
absence un évéque ou le supérieur du mo-
nastère. On s'assemble à l'église, où l'on ré-
cite un grand nombre de prières : on deman-
de au novice s'il veut faire profession et
s'eng.igpr dans la religion, et s'il répond (|u'il
y cousent, il est dès ce moment véritalilo-
nient religieux, les Maronites étant persuadés
que le consentement du novice renferme les
trois vœux de pauvreté, de chasteté et d'o-
liéissancc. On lui donne le petit capnce qui
le distingue des séculii rs, et la cérémonie se
termine par quelques prières. Ils ne p uvent
quitter l'Iiabit de religion sans cire déclarés
apostats, et ils sont punis très-sévèrement
par la prison ou p.ir d'autres peines, s'ils
quilteut l'habit. Us observent encore quel-
ques règlements qui leur ont été donnés par
le patriarche Etienne Aldoën , natif d'Aden,
dont les religieux maronites poursuivaient
la confirmation en cour de Rome, lorsque lo
P. Ronauni donna son Catalogue des Ordres
religieux , en 1706. Il dit qu'il y avait ])our
lors à Rome le P. (JabricI Hœva, Maronite,
qui y était venu pour ob'.enir cette coniirma-
lion du pape Clément XI.
Il y a aussi des religieuses maronites au
mont Liban , où elles ont deux cnuvents, et
gardent la clôture; et il y en a d'autres qui
vivent seules dans des solitudes et en ana-
chorètes. II s'en trouve pareillement à Alep,
mais elles ne gardent pas la clôture à caijso
qu'elles sont parmi les Turcs; néanmoins
elles demeurent deux ou trois ensemble chez
leurs parents, ne permettant à aucun homme
d'entrer dans leurs chambres, d'où elles ne
borlenl que pour aller ù l'cglisc Ks fêtes cî
8'J5 DICTIONNAIRE DES OnD'.'.KS Uri.ir.imX. 89ti
les dim.inclics. Kilos obscrvonl Irôs-rigou- criic priMnUVc, a culirpris \c nK^mo ilosspiii
rfusi'iuciil cl à la lolde la rcfilc t\c saiiil à un aulre (ji arlior du monl Liban ; cl d'au-
l'raniois, s-ms la jiiridirlion des liH. l'T. Ta- lies IîIIps se sont retirées dans dos erniila-
pui ins, doiil elles porlent l'Iial il. Mais li s po<. on elles proleiidriil passer lo reste de
ri'|i"iciisps du inonl l.ihan sont de l'oidro de Icirs jours dans la péniteneo. )i
Saint-Anio ne, diront leur (dCicc pu lan^jue Col auleiir pnraii pou inriirnic do ro qui
s\riaiiuo, aussi bien (]no les relij;ieux, cl rcsiardo l'Iiisli'ire niona-liiine d'OrionI, puis-
sônl habillées cnmnio eux, portant une luni- qu'il dit (|ui' Ton fait passer pour une chose
nue de serge brune, a\ee une ce iiture de admirable, ei tout à lait surprenante, (jue
cuir noir et une robe par-dessus, qui o.-l de depuis peu do len)|is il se soil établi au mont
uros camelnl do i'i>il île chèvre de eonleur île IJlian un monastère de filles, ce qui no s'é-
lumée cl ayant Ion jambes nues (1 ). l'oulc lail jamais vu en Orii'ul, à ce qu'il prétend.
la dilTéronro qu'il y a 'iilre ces religieux cl Les savants ne doineurcronl pas sans doute
ces relif^ieusi's do Sainl-Aiiloiuo , c'i si que d'aceord avec lui, que ce n'e>l que depuis
les relin'cux ont un eapuce de drap noir et peu que l'on voit des communanlés de filles
ne poricnl point de ( hemisrs, et que les rc- en Orient ; puisque l'bisloire ecclésiastique
li"ieuses en ont et mettent sur h ur lole un nous fournil une infinité d'exemples du ron-
vnile noir qui lov cou^re depuis la lole jus- Ira ro, et qu'il y a encore plu>iours monastè.
qu'aux pieds, telles si'iit presque toutes liilcs res do filles, tant grecques (in'arménionnos,
dos plus qualifiées et des plus nobles de leur nesloriciincs el nielchilcs en Orient, qui sont
nation : ain>i elles no manquent de rien, leurs si'us la domination dos Turcs, comme nous
parenis fournissant alionilammonl h leurs bc- dirons dans la siiile. ^L Simon a encore élé.
Soins. Llles s'oeeuj.ent néanmoins au travail m,,! infoimétle la rèule que suivent les Ma-
desinains, f niployant loprolit qu'ollcsen roli- ronilO' , !or^qu il dil qu'ils sent de l'ordre do
relit à roriiomonï do leur o;;liso; el elles oui Saint-lias le, car il est certain qu'.ls se di-
tes mémos joi'ines cl les inéiucs observances sent do l'ordre de Sainl-Aiiloino.
dos religieux. Les roli^iii u\ et les religieuses qui y de-
1\I. Simon, auteur du Dictionnaire de la nu urcnt dé|ieiub ni entièrement du patriar-
liildc (Toiii. L pag. ai2, au mol C .noiun ), chc, qui est aussi religieux et qui fail sa de-
impriipé pour la sicondo fois à Lyon en 171).'}, meure r.u inonaslère de Canobin (-2), siluô
du qu'on fail passi r pour une chose sur- (i.ms un affreux déscil, dans lequel il y a
prenante cl tout à fail admirable, que depuis environ vingt-cinq ou trente religieux. Son
peu de leiii[)s il se soil éiabli un couvent de revenu peut monter à vingt mille livres par
filles au mont Liban ; ce qui ne s'était jamais .-m, et consiste en vin, L'omonl, huile, suje et
lu en Orient. Il ajoute que la fondatrice ou liét.;il; il jiaje environ mille livres au paeha
institulrice de ce nouveau monastère était de Tripoli, <'t a sons lui six ou sept évoques,
une paavre fille qui s'occupait à l'éducation ;i\ec un ablié mitre qui demeure au monas-
de la jeunesse de son se\e, leur apprenait à 1ère de Mar-An(onois. 11 prend lo titre do
lire, à écrire et toutes les autres choses qu'ol- patriarche d'Anlioclie, que plusieurs papes
les sont obligées de savoir. « Klle fut, dil-il, [ui ont accordé, el est vêtu d'une longue
iiis|)iréc de Uiou d'assembler les plus graii- veste ou snulano de bleu lurquin. Il porte un
des el celles qui seraienl les plus |iri,>i'res à ^ros luiban t\i' toile de mémo couleur, aussi
lascconderdaiissasainleontroiirisejollcu'eul |;i,.n que les évoques; mais quand ces pro-
jias beaucoup de peine à les faire entrer |;iis vont à l'egliso ou ailleurs, ils ont sur la
dans sa pensée; el quoiqu'elles n'eussenl soutane une robe noire sans collet, a\ec un
jamais ouï parler de comir.unaulc, elles en eapuce de iiionie couleur, comme on peut
lomposèrcut une d'environ trente filles qui voir dans la figure du patriarche qiio nous
s )nl non-soulemeul l'éd-ficalioii des dire- avons fail graver (3;. M. lUchard Simon (au-
liens d(^ ce pays-là, mais i luorc des Sarra- irc (jne celui dont nous avons parlé', fai.<ant
sins. Leur pauvreté-est extrême ; leurs cellu- mention de l'éloclion de ce palriarcbo, dit
les, qui ne sonl que do chaume, sont bàlies que lo peuple y a beaucoup do part, car elle
autour de leur clapcllo ; et quoiqu'elles ilépond du corps de leur république, qui doit
n'aient rien ((ue le travail de leurs mains, el- reconnaître celui qui a été élu; m^iis que,
les tiennent pourlaul leur autel irè -propre- comme les eci lésiastiquos lienncnl le jire-
nicnl orné, et on ne peut rien voir de plus mier rang d.ins l'I^tat, aussi conlribueiit-ils
décent que leur chapelle. ICIIes éprouvent la le plus à l'élection. Douze des priinipaux
vocation de celles (]ui veulent entrer dans ■ prètns s'a>sembleiil dans le inon.istère de
leur compagnie par un noviciat de trois ans ; ('.;innl in, où ils procèilonl à l'élecliou du pa-
elles om|iloienl la nuit à la prière el à chan- tiiarrlio par la voie du sciiilin; et quand iis
|: r les louanges de Dieu, et le jour à lia- sonl tous d'accord, la république qui osl as-
vaillerdes mains, pour faire valoir lo peu de semblée, c'est-à -dire les eci lésiastiquos cl lo
bien ((u'clies possèdent aux environs de leur peuple, donnent leur coiiscntomcnt à cette
iiiunaslèrc. Une autre Dllc, à l'imitation de (élection. Comme il est néanmoins difficile que
(I) V^i/., il la lindii vol., 11° 2iS le principal mon^slcre cl le plus coiisiiléi;dile du
(•.;) Tous les viiy:ii;eiiis ilnniicnl à ce niniia'-lère le iiiimi Liban; cir C(ti:i>hiit on ar.ibe veiildire iim-
iiiiiii de rnnofciii pane ipi'ils l'ciilciidciil ainsi iiiiiii- nasliMC nii eonveiil. (.'ctl ce qui a élé ICMiarqué (lar
nici ; mais il y a de rapparcncc que les Maroiiiies M. l'aiilM' Ueii.iudcii
lie le iiuiniiicnl mum ijuc par excellence, cduhiic étant (5) \'oy , à la lui «1ii vol., n' ~-0.
fiOT M A 15
toulcs los voix concouri'iil ensemble dans le
scniliii, ii y a une secoiule inanicic (Je pro-
ci'der , ((ui est une esj èce de compromis;
c'esl-à-dire tjue de ces douze prêircs l'on en
choisit Irois au sort, ei ce-i trois font le p,i-
Iriurclie, qui est inétiie élu à deux voix ; en-
suite le peuple conlirnic celte élection par
son consciitemcnl, el le palrinrclic reçoit du
pape les bulles ilc conlinnation.
Dans ce nionaslère de Cuiiobin, aussi bien
que dans celui de Saint-Aiitoine et dans un
autre (]ui est au désert de Saint-Elisée, où
deriicure ordinairement un évéque, il y a des
cloches; mais dans les autres couvents, et
même dans les paroisses, ils n'ont pnur appe-
ler le peuple (ju'unc planche do bois su^iicn-
diie avec des cordes à quelques arbres, con-
tre laquelle ils frappent avec des massues de
bois.
Ce fut sur le mont Liban que M. Galaup
de Chastcuil, gentilriomme de l'rovenre, se
retira, vers l'an 1(;3I, pour y mener une v e
solitaire et [.énilenle. Les Turcs troublèrent
souvent le repos de sa solitude durant les
guerres contre l'émir Fecke-Edin; mais son
mérite faisait impression sur l'esprit même
des barbares. Il était si connu des i\Iaronites,
et ils en faisaient une si grande estime,
qu'après la mori de leur patriarche Georges
Ainira,ils le prièrent d'accepter cette dignité.
Il refusa cet honneur, el se retira ensuite à
Mar-Ëlicha , dans un monastère de Carmes
Déchaussés, où ii redoubla ses austérités,
qui lui causèrent une maladie dont il mou-
rut le 15 mai de l'an IGVi. 11 avait composé
dans sa soliiudc (|uel(]ues ouvrages sur la
Bible, qui restèrent avec ses autres livres
aux Carmes Déchaussés. Sa Vie a élé donnée
au public en 1G6().
!■ rancisc. Quarcsm. Elucidât. Terr. Sanct.
Davily, Descripl. de l'Asie cl de l'Afrique.
Le Eèvre, Théâtre de In Turquie. La Croix,
Turquie clirclieniie. Eugène Uoger, Y oijaqe
de lirrc sainte. Maimbouig, Scliisme des
Grecs. Jérôm. Dandini, Voyage uu monl Li-
ban, avec Us remarques de M. llicliurd Simon;
cl l'hilipp. Bonanni, CattUog. Ord. reliijios.,
\jart. I.
Les moines maronites sont encore aujour-
d'hui au mont Liban. On voit actnellement à
Roiui' trois monastères sous les désignât ons
suivantes : 1" Mtiroiiili Alepini di S. Antonio
abaie. 11. P. abbé D. Genalii) Zucclii, général,
résidant au monl Liban. I\. P. D. B isile Cia-
babi, abbé el vicaire général. 2* Maroniti
Litninesi di S. Antonio atiate. H. P. D. Emnii-
nuel Ciababi. général, résidant au mont Li-
ban. U. P. D. Libeo Mulaiiii, procureur géné-
ral, résidant à Borne. S" Anneni (moines ar-
Diéiiiens) di S. Antonio abale. B. P. D. Timo-
tbee Tellal, abbé général, résidant au mont
Liban. B. P. abbé D. Ar.-ènc Angiaiakian,
procureur général, résidant à Boiiie, près du
\'aticau. Voyez Akméniuns, tome 1'' de ce
piclionnaire, page 206. B-d-e.
MABTHE (AuGUSTiNES de Sainïk-) Voy.
AUGtSTlNES.
MARIHE (Des Filles HosriTALiÈnES de
MAR
Ji;)."»
Sainte-) en Bourgogne, ttvit dans le duché
que dans le comté.
Il y a un grand nombre d'hf'ipilaux, tant
dans le duché que dans le comié de liour-
gogne, desservis par des liospilalières, qui
tirent leur origine des Béguines de iMalines,
dont nous avons parlé préeédemmenl. I.c
plus ancien et le plus considérable de ces
liôpilaux est celui de B.aune, datis le di ciié
de Bourgogne, fondé l'an lVi3 par Nicolas
Holin, ciiancilier de Pliilippe le IJori, duc de
Bourgogne, qui (îl venir de Malincs six Bé-
guines pour en avoir soin. Pi. s ei.rs person-
nes, à rexem|:le (lu fondateur, y donnèrenl
di s sommes considérables, el le pape Nico-
las V conlirma toutes les donaiions (|ui y
avaient été faites. Cet hôpital fut bâti avec
beaucoup de magnilic.ence. Il y a une salle
fort longue, commune pour Ions les pauvres
malades, de quelque nation qu'ils soient,
qui y sont reçus avec btamonp de ch.inlé.
Au boni de cette salle, du côté de l'orienl, il
y a une chapelle disposée de telle sorte que
tons les malades peuvent commodément en-
tendre la messe et voir le saint sacrement
lorsqu'il est exposé. Derrière l'autel il y a
une autre s.illepour ceux ()ui sont dange-
reusement mala les, laquelle a ses o lices
paiticuliers qui y sont contigus. Derriè.e
cell" salle est un autre lieu destiné pour les
corps morts, avec plusieurs lavoiis et gran-
des tables de pierre. Le long de la grande
salle, du côté du midi, l'on trouve une
grande cour carrée, bnrdèe de galeri s hau-
les et basses. Le long des galènes hautes, il
y a plusieurs appartements pour recevoir
les personnes de condition, les gentilshom-
mes de quatre ou cinq liiuesàla ronde ne
faisant point dil'licullé (le se faire porter à
cet hôpital, où ils sont aussi bien traités el
soignés qu'ils le pourraient être dans leurs
châteaux. Chaque appaitemenl est composé
de chambre, antichambre, caliinel cl garde-
robe. Us Sont ri( hemrnt meublés, et dans
chaque chambre il y a trois lits, pour chan-
ger te malade selon les besoins. Chaque ap-
partement a son linge particulier , ses usten-
siles, ses meubles , et n'(mpruuie rien d'où
autre. Chaque chambre a aussi son nom,
comme celle du roi, celle des ducs de Bour-
gogne, el ainsi des autres. Non-seulement on
y re(;oit le.> gentilshommes , mais encore les
bouigeois les plus considérables de la ville.
Us font apporter de chez eux la viande, lo
|iain elle vu;, et payent les remèdes qu'on
leur donne : il n'y a que les meut)les et le
service des sœurs dont on ne demande rien ;
mais il n'y en a point qui en sortant ne laisse
quelque aumône par reconnaissance. Il y a
aussi des chambres le long des galeries bas-
ses, où l'on rei.oit ceux qui sont de moindre
condition, et qui y sonl traités el médica-
mentes aux dépens de l'hôpital, de la même
manière que les malades de la salle com-
mune ; mais s'ils veulent quelque chose de
plus, comme bois, viande et le service par-
ticulier de quebiues femmes, c'est à leurs
dépens. L'apothieaircrie est fort belle, el la
Bourgeoise, petite rivière qui a sa source à
859
DICTIONNAIRF, DES onOUES «EUGIF.HX.
»od
cinq renls pas de !a villo, passe au milieu ilc
1.1 lour, iloù c;ie se répaïul par plusieurs ca-
naux iiaiis lous les orCues : ce (]ui coiiliibuc
à la proprcli- Je col hop;lal , ou l'on ne sent
piiinl de niauvaisc odrur comme dans les au-
lnes.
Le plus célèbre hôpital du même inslilul,
après celui de Beauiie, csl l'hôpital de Cliâ-
lons-sur-Saônc. Il y en avait eu un de tout
leinps en celle vil'e ; mais ayant élé démoli
par ordre du duc de la Tremoille, i-ouver-
neur de liourj^ogne, sous prétexte de (jucl-
ques forlificalions ((ue l'on fil au n éine en-
droit, les liouri;('ois présciiUrenl une nquèle
au roi Frani^ois 1", l'an 1528, pour prier Si
Majeslé de leur accorder une pl.ice d.ins
la ville pour y bàlir un autre liôpilal. Ce
prince leur en accorda une dans le laubouri;
>aiiil-Aiidré ; mais comme elle joignait ù un
closde vl};ncappartcnanl àrévéque, quisuin-
l)lail\ ou loir apporter quelque opposition à (Cl
élablissemeiil, on leir en accorda une aulre
au f.iubourg J^aiil-Laurciil, où les fonde-
mrnis de cet hôpital furcnl jelés la mèuie
année, et la première i)ierrc posée par lus
éclirvjns l • l'J août. Le roi accorda raiinéo
suivaiilo des leilres d'amorlissemcnl, vou-
lant ([ue 1 cl liôp lai fût loujocirs sous la juri-
dlciioii de> bourgeois de la v.lle, et le pape
Paul III accorila, l'an 1538, des indulgences à
ceux qui le visilcraicnt et qui eonlribue-
raienl de leurs biens pour l'enlrclcnir. 11 est
aussi fort magnifique : il y a plusieurs salles
pour les maladrs, et on n'y est point ineoiu-
niodédela mauvaise odeur qui a coutume
d'infcdcr les aulres hôpitaux. Il y a toujours
pendant l'hiver un grand nombre de casso-
lell(setdc réchauds parfumes, cl pendant
l'été on altaclu- aux voûtes des vases qui
sont toujours remplis de toutes sortes de
(leurs. L'on admire dans celle maison quatre
jiraiides chamlircs hautes, tapissées de hau-
tes lisses et richement meublées, comme dans
Ihôpitai de l!eaune, où des personnes de
qualié se font perler, étant traitées dans
leurs maladies par les S.eurs Hospitalières
avec toute l'adre-so, la propreté et la dou-
ceur que Ton pourrait attendre de ceux que
le devoir et non pas la charité obligerait à
ces exercices, t^es chambres oui la vue d'un
côté sur la rivière el de l'autre sur la prairie.
Il y a une cuisine particulière pour ces
chambres. Le dortoir îles S(eurs est à côté,
et lous les ofli es de riii')pilal sont dessous,
jiussi bien que la cuisine, le rèfecloirc el
l'inlirmeric des Sœur.>. Il y a aussi une belle
apolliicaircrie. On y voit un jardin où il y a
lotiles sortes de simples, cl uu puits place au
milieu d'une cour ombragée dcquanlité d'ar-
bres, qui fournil par des canaux sullisam-
iiieiil d'(,-au à toute la maison.
Nous nu parlerons point en partit ulicr des
auties hôiiitaux que dcsserveiil ces Uospiia-
lières dans le «liiclie cl comté de lîourgogne,
où ils sont en grand nouilire, el qui se mul-
tiplienl tous h'.> jours ; nous nous conlenle-
roiis de dire que tes llospilalièies y pr.ili-
quenl | arlout également la charité à l'égard
des personnes de l'un et l'auire sexe. Klles
ne font (pie dos vœux simples d'obéissance
cl dechaslelè, pour le temps seulcmenlqn'cl-
les sont employées .lU service des p.iuvrcs,
leur étant libre de sortir cl de «luilter lli.ibit
quand bon leur semble.
La diffi'rence qu il y a cnlrc celles du du-
ché et ceries du comté, c'est que celles du
duché sont exemples de la juridiction des
ordinaires, par plusieurs bulles des souve-
rains pontifes ;( t que celles du comté sont
soumises a l'ordinaire, A la réserve des Hos-
pitalières de Dole, qui se sont main euurs
dans leur exemption, par un procès qu'elles
ont gagné contre l'archevêque de Resan(,-(in.
Les supérieures des exemples sont p rjié-
luellcs, el celles des soumises à l'ordinaire
ne sont que triennales. Les exemples sont
habillées l'été de blanc cl l'hiver diî gris, et
les aulres sont en tout temps habillées de
gris. Il n'y a pas lon!;lcmps que l'on aobli^^é
celles-( i a porter en loul temps le gris; c:r
elles portaient le blanc | endant l'été cooimo
les exemptes. Les unes el les autres onl un
gr.ind voile blanc, qui avance par-du\anl do
la longueur de quatre à cinq pouces, cl est
soutenu par du caiton. Elles onl aussi u»
bandeau sur le front cl une guimpe qui des-
cend jusqu'à la ccin'ure en din.iuuanl et
fais.'inl deux plis de tha(|ue (ôlé. La forme
de l'un cl l'autre habillement est toujours l.i
■ même ; et tant la jupe blanche de dessus que
la grise, qui est doublée de noir, sonl tou-
jours retroussées, s'atlachant oar der rièro
avec un i-rochet d'argent de la longueur do
cinq à six pouces, qui cn'ru d..iis deux agra-
fes aussi d'argent ^Ij.
Jaci|ucs Foilere , Ilisl. (ira couvents île
Sain(-Fr(inço:s et de Salnlc-t'lairc, de la pro-
vince de Siiinl-JJonavei liire, pny. '^'M. //i.<-
Idiie icclisiasliriue de Cfidlons, ;,«(/. 18S; f(
Mémoires nuiniisci its.
iMAIlTlN (Chanoim-s nu Saitii-) d'Hpcr^
nay. Voy. Jevn ue GiiAurnEs (Smvt).
MAUTVUSUANS LA l'ALKSl iMî. Voy.
CÔMK i:r Damikm (Saints).
.MATIIL'UINES. Foy TiUMTi; ( l'ii-KS on
DiiK DK i.A Sainte-)
Ma rilLIlUNS. Voij. TiiiMTAiiiEs.
MA r niiASUirnvui.i (iiKi oiiMEDE). Toy.
Amoink de I^astel-Saint-Jean.
MAUltl'UGlî. Voy. NivEiLE.
MAUil (I)i:s BiîNÉnicTiNS lt^:F0R\iÉs de i,\
C'iNiMiiaiATiON DE Saint-) en France.
De toutes les congrégations de l'ordre dO
."^aiiit-ltjnoit, il n'y en a p 'ini de plus illus-
tre, plus féconde en personnes savanles, et
qui rende plus de service à l'Iîglise , (p o
celle de Sainl-.Maur en France. Elle doit ses
commencements à la cougrégatlim de Siiint-
\'aiine, dont la ré|iiitaiion, se répandant de
lous cô'.és, invita plusieurs abbayes de
France à embrasser le même genre de vi«'.
La première qui dcm.inda à se soumelire à
l'ctroile ob>civaiice lut cellu de Saint Augus»
(I) I uj , ï la lin lin
901 MAI]
liti de Limoges. Elle avîfil été fondée envi-
ron l'an 542 par saint Hurice le Jeune, évo-
que de Limoges, qui y avait établi des cha-
noines; mais les Danois ayant entièrement
(lélruit ce monastère, il fut rétabli l'an 93ï
par Turpion, aussi évéque de Limoges, qui
au lieu de chanoines y mit des religieux de
l'ordre de Saini-Bonoîl. L'observance régu-
lière s'y maintint jusqu'à ce que cette ab-
baye étant tornliée en commende, et les re-
venus en ayant été dissipés par le peu d'éco-
nomie dis abbés, le relâchement s'y intro-
duisit, et elle était dans un état déplorable,
lorsque Jean Kegnault, dernier abbé com-
imndalaire, la soumit, l'an 1613, à la con-
grégation de Saint-Vanne. Plusieurs autres
abbayes s'y soumirent aussi ; comme celles
de Saint-Faron de Meaus, de Saint-Juiien de
Noaillé, de Saint-Pierre d'i Jumièges et de
lîeinay. Uom Didier de la Cour et lesaulies
supérieurs de la Réforme de Saint-Vanne y
envoyèrent des religieux, qui travaillèrent
avec succès à y établir la réforme. Mais les
diilicultés iiu'iis trouvèrent à réunir sous une
même congrégation ces abbayes et d'autres
plus éloignées qui deiiiandèrenl aussi la ré-
forme, leur fil prendre la résolution d'en
faire deux diiïcrcnles, dont l'une serait éri-
gée en Fiance et à laquelle les nionastères
déjà reformés serviraient comme de foude-
luenl. Ce projet fut approuvé dans le chapi-
tre général (jui se tint à Sainl-Mansuy de
Tout au mois de mai 1618. Ils permirent d<''s
lors aux religieux qu'ils avaient envoyés en
France de faire un nouveau Ciirps de con-
grégaiion composé des monastères où ils
avaient porté la réforme et de ceux qui
voudiaicnt l'ejnLrasser dans la suite ; et atin
d'entretenir dans les deux congréj^alioas
une union et une amitié inviolable, ils dies-
sèrcnl un acte, par lequel ils se promirent
les uns aux autres la participation aux priè-
res ei au'i autros bonnes œuvres, ce qui s'est
toujours pratiqué depuis.
Dom Laurent Bénard, prieur du collège
de Clu y, et qui avait été à Saint- Vanne
dans l'intention, ou d'unir son collège à celle
congrégation , ou de s'y faire religieux,
ayani renouvelé sa profession en présente
du tout le chapitre, conl'orméuienl à celle qui
se prati(|uail déjà dans cette congrégation,
et s'élani soumis à l'obéissance des supé-
rieurs qui la gouvernaient , retourna par
leur ordre à Paris, afin d'y travailler de tout
son pouvoir à l'exècuiion du dessein qu'on
avait formé dans ce chapitre tenu à Sainl-
Mansuy. Il était secondé par les l'P. dom
Anselme Rolle, dom Co.omban Régnier, dom
Adrien Langlois , dom Maur Tassin, dom
.Martin Taisnière et dom Alhanase de Mon-
gin, tous religieux de Sainl-Vanne et d'un
mérite distingué. Us obtinrent au mois d'août
de la tuènte année 1618 des lettres patentes
du roi Louis Xlli pour l'érection de la nou-
vel e congrégation, à laquelle ils donnèrenl
depuis, dans leur première assemblée gêné
raie, le noiu de Saint-.Maur, aimant mieux
prendre pour patron ce bienheureux disci-
l>le de sain', lieiioit que tout autre suinl tilu-
MAU
!;02
laire de qucl(]ue alii)ayc particulière, de piMir
de donner de la jalousie surtout aux plus
grands monastères qui auraient voulu peut-
être avoir la préférence.
Sitôt que les lelires patentes du roi eurent
été expédiées, plusieurs personnes du pre-
mier rang s'offrirent d'elles-mêmes à dom
Laurent Renard pouraccélérer le succès d'une
affaire qu'elles prévoyaient bien devoir tour-
ner à l'ulilité de l'Ivglise et à l'honneur du
royaume. Les principales de ces personnes
furent les cardinaux de Retz et de Sourdis,
les présidents Nicolaï et Hennei|iiiii et le
procureur général Moié, qui fut dans la suite
premier président et garde des sceaux. Lo
premier fruil de cette protection fut l'inlro-
duction de la réforme dans le monastère des
Blancs-Manteaux qui appartenait aux Guil-
lelmites. Le cardinal de Relz le fit agréer au
roi, et les Bénédictins en prirent possession la
5 septembre 1618. (]omme dom Laurent Bé-
nard, prieur du collège de Cluny, se mêlait
de cette affaire, c'est peul-élre la raison pour
laquelle ces Bénédictins Réformés, qu'on no
connaissail pas encore pour être de la con-
grégation de Sai!it-.Maur qui n'élait pas for-
mée, sont appelés de l'ordre de Cluny, dans
la requête que le provincial des Guillelmitcs
prosenia au roi pour rentrer dans la posses-
sion de ce monastère, aussi bien que dans
le plaidoyer de du Bouchel pour l'université
de Paris, qui prit la défense des Guillelmites.
M. Baillet, dans la Vie de saint Guillaume,
dit que ce furent les religieux de Sainl-Van-
ne qui établirent la réforme dans le monas-
tère des Blancs-Manteaux. 11 est vrai (|ue co
furent les religieux de cette congrégation
qui y furent introduits ; mais c'était au nom
de la nouvelle congrégation de Sainl-Maur,
qui n'était pas encore tout à fait formée,
comme nous avons dit, et ainsi ni les reli<
gieux de Cluny ni ceux de Sainl-Vanne n'oni
point été en possession de ce monastère,
mais bien ceux de la congrégation de SainU
Maur, qui y ont toujours demeuré depuis
qu'on obligea les Guillelmitcs à I ' quitter.
La réforme étant établie dans un monas-
tère de la capitale du royaume , s'étendit
bientôt par toutes ses provinces ; on pour-
suivit à Rome les bulles de confirmation do
la nouvelle congrégation. Le roi même vou-
lut bien employer sa recommandation au-
près du pape Grégoire XV, qui, à la prière
de Sa jMajeslé, érigea la congrégation de
Sainl-Maur, lui accordant les mêmes |)rivi-
léges dont ses prédécesseurs avaient gratifié
la congrégation du Mont-Cassin,, el la fai-
sant aussi participante des grâces octroyées
par Clément Vlll à celle de Saint- Vanne.
Ce même pontife nomma le cardinal de Relz
pour protecteur do la nouvelle congrégation,
cl supprima les anciens offices claustraux à
mesure qu'ils viendraient à vaquer , afin
qu'ils fussent désormais unis à la mense con-
ventuelle. Comme cette union des oilii.-cs
claustraux élailun point essentiel pour affer-
mir la réforme, elle fut encore confirmée à
la prière de Sa Majesté par le pa|ie Urbain
Vlll, qui accorda de nouvelles grâces à celle
903 DICTIONNMRR WS OP.ORKS UKI-ICIFAIX. 931
con<;ri''gali«)ii , roinmo il pnrail pnr sa hiilliî de nnil, mr-iiio oKiisDn iiici;talo . in'"i)u-«
ilii -21 j.iiiviiT li;-27. I. es bulles d"éri'clion ot veilles, iiumiics jcûni'S cl abslinciu'os, ci enfin
(le eoiiïiriiialioa do la con^iég.ilion de S.iiiil- même olicissaïu'c.
Maur furent fnliniiu-es par roflieial de l'ar- Ceux qui oui été les auteurs de celle r('-
clievèq le de Pans le lliinai 1()20. Si M ije>lé forme n'oiil pas préiendu Ulleinciil renfer-
accorda des lettres p.ilcntes des 15 juin Kl.'fl mer son utilité au dedans, qu'ils aienl aliso-
et l.ï mars Hùil pour l'exécuiion de ces bul- lunienl refusé de la faire passer au dehors
les, el CCS lettres |ialenlcs furent vériliées au pour le service de l'Iv^lise, puisque sans
parl-menl de Paris le 'H mars de la même parler des relij;ieux de citle congrégation,
iinnée. qui s'appli(]UCMl à la prédication cl au\ au-
l'endant qu'on Iravaillail ainsi A l'aff' r- très fondions du sareidoee, dans l'adininis-
missemenl de la miutelle congréf^alion, elle Ir.ilion des cures et autres j.ridiclioas ec<lé-
tais.iil de jour en jour du progrès : en sorte siasliciues, donl jouissent les églises de plu-
qu'il y avait déjà plus de quarante mo- sieurs de leurs abbayes, il y en a qui sont
na>téres qui avaient reçu la reforme, lors- destinés à l'instruclinn de la jeunesse , mais
qu'elle fui introduite dans la célèbre ab- principalement de la noblesse d.- c.nnpigne,
baye de Sainl-Deni'i en ll);i3. Elle augmenta ne pouvant leur refuser celte assistance (lue
encore eu 1C3G , par l'union qui y fui saint Benuil accorda de son temps à di»ers
faite de ct lie de Cliezal-Iienoîl ; cl elle est à seigneurs, par une charité si universellement
présent co!np:iséc de plus de cent quatre- pratiquée depuis dans l'ordre , qu'elle a
\ingls tant abbayes que prieurés eonven- passé en quelque façon pour une loi; et de
luel>, (|ui sont di\isé> en six provinces: sa- là se sont formés ( a l'exemple des ancien-
voir de lrniC(!, Normandie, Bourgogne, nos accadémies ouvertes autrefois dans 1. s
Toulouse , lirelagne et Chezal-ltenoit. lin monastères) quelques séminaires remplis de
parlant de la congrégation di." Cluny, nous jeunes eiif.ints de condition que l'on y envoie
avons déjà dit (jue celle de Saint-Maur de toules les provinces, mêmedes pays étran-
y fut unie en Iti.'jV, pour n'en faire qu'une gers, comme sont ceux qui sonlélaldis d.-.us
sous le titre de congrégation de Saint-lienoit, les abbayes ile 'l'yrun, de Pont-le-lloi, de
autrelois de Cluny et île Saini-Maur, cl que Saint-tiermer de Floix, au dioc"'se de lîeau-
cellc union fut cassée en Iti'ii par le pape vais el de Sorèzc en Laiii^uedoc. Dans ces
Urbain NUI, qui remit ci'S deux congréga- deux derniers ou y élève et enlrctienl un
l.onsaa mémeélaloù elles étaient aupara- nombre de gentilslioinnies yraM's, el dans la
v.inl. Celle de Saint-.Maur a été gouvernée diète tenue l'année 1708 on en a encore éla-
depuis ce lcmp>-là par un général, deux as- bli un troisième à N'crlou en l'relagne, par
sislanls el six visiteurs, qui sont élus tous la libéralité de M. le cardinal d'I'istrees, abbé
les trois ans dans un ciiapiire général, où de Saint- Ciermain des Piés. Outre la pieté
sont aussi nominés les supérieurs de ihaque qu'on inspire à ceux qui y étudient, on les
monastère; mais le général peut être tou- insliuil encore dans les belles-lelires , et
jours coniinué. Le P. I). Jean-tjrégoire l'a- comme ces séminaires on collèges sont situés
risse fut le |)reniicr général de cette congre- dans des lieux fort retirés, les jeunes gens y
galion ; il fut élu en 1G3) et mourut en l()'i8. sont d'ordinaire plus assidus à l'élude el
Prèsenlement la Congrégation est gouvernée moins distraits que dans les villes.
pardoin Cliailesdo l'ilostallerie. Outre ces séminaires ou collèges, il y a en-
Comme l'esprit de celle congrégation dès core plusieurs monastères de la congrè^M-
son origine a été de faire revivre celui de lion où il y agiand nombre de jeunes en.
saint IteiKiil par la pratique de sa règle, oa fanls que l'on y instruit dans les |)etiles
s'est ;!|ip iqué surtout à y former les jeunes classes, qui servent à l'Mglise cl y assislrnt
religieux, el pour ce sujet on a établi dans en surplis toutes les léies el dimanches,
ch.ique province un ou deux noviciats, d'où sans parler des autres où l'on reçoit avec les
Ceux qu On admet à la profess.on sont traiis- religieux les jeunes gens de la ville dans les
l'érès immédiatement après dans un autre cours de |)hiiosopliie et de théidogie.
monastère, où lun continue de les loruicr à La charité des premiers réformateurs no
la piélé et aux cérémonies pendant deux s'est pas bornée à l'instruction de la jeunessr',
ans. Ou les applique ensuite, pendanl l'espaïc car en rapiiclant de plus en plus les religieux
de cinq aulies aimées, à l'étude de la philo- aux exercices intérieurs du doitre, comnio
sopliii! el de la théologie, pour leur faciliter à leur véritable centre, ils ont trouvé le
rmlelligeuce de flicnture sainte el des saints moyen d'en oecnper un gr.iiid nombre très-
Péres. .Vprès leurs éludi-s ou leur l'ail faire utilement pour le public, en onlonn.inl dans
une année que l'on nomme de rciollcctiun, leurs con^lilulillns imprimées en IG'iti que,
parce que ce temps-la est di stiné à les pre- outre les éludes de philosophie et de theolo-
parer a la réception du sacerdoce, p.ir un gie, on établira encore dans quelques mo-
recueilleinenl plus grand et par une appliea- naslères des écoles de posiiive, de droit c.i-
lion plus entière aux seuls exercices spiii- non, de cas de conscience et des langues
luels dans ces dilïérenls nionasleres, par grecque ct hébraïque ; et c'est dans ces savaii-
l'squels ils sont obligés de passer comme les écoles que se sonl l't)rmés lanl de célèbres
dans tous les autres où ils sont ensuite en- écrivains que cette coiigreg.ition a produiis,
voyés par ordre dc> supérieurs. On garde qui ont donne au public plus de Ireiile volii-
une exacte uniinrmilé dans tous les cxcrci- mes renfi'rmanl une inlinite île pièces nia-
ce> : mêmes oflices divins, t^ail de jour que nusciitcs demeurées ju-qualors cnsoelics
00 j MMi M\U iior.
(latis les biliHollièques, et qui, p;ir un iravail fui allaqui- d'une paralysie, dont il niourul
qu'on ne saurait trop louer, en s'appliquaiil le 19 janvier 1710. Dom Tcissier a été chargé
à la révision des ouvrages enli< rs des PP. d(! la cuntinualion de cet ouvrage. Nous ne
grecs et latins et de plusieurs écrivains ecclé- parlerons point en particulier de tous les nn-
siasliques, ont déj'i donné de nouvriles édi- vraiJîes que nous avons des PP. dom Hugues
lions (le saint Irsnée, de saint Athanaso, Méiiard, dom Luc d'Achéry, dom Jean Gurct,
d'Eusèbe de f.ésarée, de saint Augustin, de doinNicolas le Nourri, dom ,lcan Mariianay,
saint Amliroise, d' saint Jérôme, de s tint dom Denis de Sainte-Marthe, dom Edmond
Hilaire, de saint Grégoire le Grand, de saint Marlèno, dom François Lanii, et de plusieurs
Bernard, de Grégoire de Tou-'S, de Viclor de auires éciivains de ci;tle congrégalion ; ce
Vite, d'Hildobert et de Marbodius. L'on verra que nous pouvons dire en géni'ral, c'est que
encore paraître incessamment do nouvelles les rcli;^ieux de la congrégation de Saint-
éiiilions de saint Jean Chrysostome, de saint Maur ont toujours su allier avec la science
Basile, de saint Grégoire de Nazianze, delà beaucoup de piélé, de modestie, d'humilité,
France chrétienne et de plusieurs autres on- de douceur et de simplicité, et c'c'.t là la
vrages, préis à meltre sous la presse, qui marque qui distingue les véritables enfants
sont encore les fruits des études dos savanis de celte congrégalion. Nous croirions néan-
reli'^ieux de celle congrégation , aussi bitn moins manqu'-r de reconnaissance si nous
((ue la paléographie grecque, ou Traité d<> passions sous silence le P. dom Michel Féli-
rOrigine el du l'rogrt's des lettres grec()ues, bien, qui a fait l'Histoire de l'abbaye de
((ue nous a donné en 1708 le P. dom Renard Saint-Denis en France, puisque nous nous
(le Monlfaucon, qui a aussi tr;ivaillé à l'éili- sommes servi si uliletnent de cet auteur
tion du saini Athanasa el fait d'aulrcs e\cel- dans ce que nous avons dit de l'andenne
lents ouvrages. Celle congrégalion lit une congrégalion de Saint-Denis et de la plus
perle considérable, le 27 décembre 1707, par grande partie de celle de Siint-Maur.
la mort de dom Jean Mabillon, académi- 11 ne nous reste plus qu'à parler de qud-
cien honoraire de l'académie royale des ques célèbres raonaslèics de celle illustre
Inscriptions et Médailles. Cet auteur a donné congrégation. L'abbuye de Saint-Germain
au public, pendant 73 ans qu'il a vécu , plus des Prés qui y est agrégée est une des p\a^
de trenle volumes dont les plus considéra- considérables du royaume. Elle fut fondée
blcs sont deux volumes in-folio de la nou- par Childebert, fils du grand Clovis, sous lo
velle édition du saint Bernard, un \olumc nom de saint Vincent, et n'a pris le nom de
in-folio de la Diplomatique , le Supplément saint Germain, évéque de Paris, qu'après la
de celle Diplomatique, neuf volumes in-folio mort de ce saint, (jui y l'ut enterré. Ouoi-
des Vies des saints de l'ordre de S,iiiil-Be- qu'elle fût autrefois hors de la ville, l'abbé
noît, et quatre aussi in-folio des An:iales de ne laissait pas d'y avoir quebjue juriJiclion
cet onire. Tous les savanis de Fr.nice el des spirituelle, qui s'étendit bien divanlago
pays étrangers ont regretté avec justice la lorsqu'on eut agrandi le faubourg où elle est
perte d'un si grand homme. situéi', et qu'il fut devenu un des plus grands
Après sa mort, D. Thierry Uuinart, le fidèle quartiers de Paris^ pouvant èlre comparé
compagnon de ses études, de qui nous avons aux pi is belles villes as Franco. Nou -seule-
une nouvelle édition de Grégoire de Tours, menl l'abbé de Saint-Germain avait toute
les Actes sincères des mar!yrs,la Persécution juridiction spirituelle et presque épiscop;ile
des \'andales, composée par Victor de \'ile, dans toule l'étendue de ce f inliourg, mais il
et plusieurs autres ouvrages, fut chargé par y avait encore haute, moyenne et basse jus-
Bcs supérieurs de coniinuer les ouvrages im- lice, el y pouvait donner des lettres de maî-
parfails de cet auteur; en clïel, perjonnc trise à toutessortcs d'ouvriers. Présentement
n'était plus capable que ce savant religieux les droits du celle abbaye sont bien diminués,
de les continuer, puisqu'il ai ait eu la priu- et, par un concordat passé avec rar( bevêquo
cipale part à l'édition des deiiv derniers vo- de Paris, on en a cédé à ce [irélat toute la
lûmes des Vies des saints de l'ordre de Saint- juridiction spirituelle, à condition que le
licnoit, qu'il était auteur des notes et des prieur de l'abbaye serait grand vicaire iié do
observations qui sont dans le corps de l'ou- l'archevêque de Paris, et (|ue l'abbé conscr-
vrage, qu'il avait aussi eu part aux qualre verait sa juridiction spirituelle dans l'mclos
volumes des Annales bénédiciiues, dont il de l'abbaye, qui contient quelques cours où
avait failles tables des principales matières, il y a des ouvriers qui y peuvent travailler
Mais lamorl l'ayanl aussi enlevé aux savanis librement sans cire maîtres. L'abbé est sei-
au mois deseptembre 170'.), dans la cinquante- gnourde Villeneuve-Sainl-Georges, Anlony
troisième année de son âge, dix-neuf mois Herny, elde plusieursaiitres villages aux en
après la mort du P. Mabillon, aunud il sem- virons de Paris. Cette abbaye a plus de 100,000
ble qu'il n'ait survécu que pour publier ses livres de revenu. Casimir, roi de Pologne,
vertus dans la Vie qu'il en donna ileux mois morl en France en 1G72, eu a été abbé et y
avant sa mort; le P. d im Hené .Massuet, à est enterré: elle est présentement possédée
qui le public est redevable de la nouvelle par M. le cardinal de Bissi.
eilition de saint Iréuée, fui chargé par ses Celle de Fécamp, qui futaussi unie à la cou-
supérieurs de travailler à la conlinualion grégaliun de S,nnl-Miiur,csi une des plus bcl-
des ouvrages de ces deux savants reli- les, des plus nobles et des plus riches du
gicux, et il était sur le point de donner royaume, l'.icbard 11 , doc de Normandie, li
un nouveau volume des Annales, lorsqu'il Ut élever sur un ancien édifice qui était bas
DiCTiONNAiRii or.s Okokes R! i.iGirux. IL 2'J
907
niCTioNNAiiiu iu:s oiiDuns m lic.u.i x.
906
et obscur; elli- cl bj(ie J;ins l'cnccinlc du
château, qui a ses fossés et pont<-levis. Ce
prince y mit tics Chanoiius Hégulicrs en la
place des religieuses qu'il y Imuva et qu'on
transféra à Montivilliers: il y fil f.iire un cer-
cueil de pierre où il voulut Aire inhumé aprùs
sa mori, et, alin de mériter la prâcc d'en faire
une qui fût a^réal)le aux yeux de Dieu en
rachetant ses péchés par les aunirtnes, il ne
manquait | a>^, tous les vendredis de l'année,
de le faire emplir de froment que l'on dislri-
huait aux pauvres avec vinpl sols d'argent ,
ce qu'il continua jusqu'à la Un de sa vie. Uo-
l.eil III, son successeur, augmenta les biens
de celle abl)aye, et fil venir des religieux de
Saint Bénigne de Dijon, auxquels il donna
droit de haute, moyenne et basse justice. Il
obtint même du pape Jean X>'l qu'ils fussent
indépendants de l'an hevêque de Houen. Celle
abbaye possède dix baronnics, dis hautes
justices et dix sergenleries, entre lesquelles
la barounie de Fécamp et celle de Virlleur,
qui font la mcnsc abbatiale, produisent plus
de soixante mille livres de rente à l'iihbé.
Non-seulcmonl elle est exempte de la juii-
diclion épi>copale, mais encore elle exerce
une juridiction presque épiscopale sur les
dix paroi>ses de la ville, et sur seize autres
situées dans le diocèse de Uouen, suivant la
concession faite à Henti, abbé de Fécamp,
par Hugues, archevêque de Uouen. L'ofiici.il
de Fécamp a droit de visite sur toutes ces
paroisses, y peut lenir synode et assemblée
de curés el y faire des rè;;lemenis.
L'abbaye de la Triiiilé de Vendôme fut
fondée l'an 10i2 par l.eoffroi ou Godefroi,
comte d'Anjou, en mémoire d'une vision di^
Irois étoiles qui lui avaient paru tomber
dans une fontaine voisine. Il y mit des reli-
gieux de lordic de ^aint-Henoîl, qu'il fil ve-
nir do .Marmoutiers , el non-st uicment il la
gratifia de plusieurs prérogatives, maisaus.si
il l'eniichil de \i pié. ieuse larme que Noire-
Seigneur répandit >ur le Lazare. Il l'av.iil
apporiéi' d'outre-mer dans un petit vase qui
n'avait ni soudure ni ouverture, et qui était
blanc par dehors comme du cristal. Celle ab-
baye est illustre [ ar le privilège que le pape
innocent III lui a accordé, que (|uiconque
en serai! pourvu se pourriil (jualifier cardi-
nal, du litre de Sainle-I'risce. Nous avons
parlé assez amplement des ahhaycs de Saint-
Denis en France, de Marmoutiers, de Saint-
Henipne de Dijon, de la Chaize-Dicu, de
Same- .M.ijour, duTiron, toutes abbayes
unies a la congré;;alion de Saint-Maur, et
qui é aient chefs autrefois de congrégations
.■luxqnelles elles avaient donné leurs noms ;
nous nous étendrions trop si nous Noulions
ra;i|orter l'origine et les prérogatives des
.lUtres nionasières (|ni coinposeni celte con-
grégation de Saini-.Maur. l'armi ccn mo-
nastères il y en a qu(lque>-uns qui ne .sont
point en coiiimcnde, comme les aliba\es de
S.iini-Autzuslin do Limogrs, de (^bczal-He-
ii'ili, de Saint-Sulpici' île Itourges, de Saiiit-
\ incenl du .M. lus tl de Sainl-.M.irlin de Séez,
(lui sont gouvernés par des abbes triennaux,
uumiués par le tliapitre général de la con-
grégation. Celle de Saiiit-.Vugusiin de Limo-
ges jouit de ce privilège à cause que la ré-
forme de France y a pris naissance. Il lui fut
accordé par le roi Louis XIIL Chezal-Uenoit
el lis quatre autres jouissaient de ce droit du
tem[)s «lU;- 1,\ congrégation de Chezal-Benoil
sulisis'ail. et il a élé conservé à la congré-
gation de Saiiil-Maur, qui a encore quelques
alibayes où les abbés sont réguliers, mais
perpétuels et à la nomination du roi.
Les religieux de celti" congré;:alion sonl
habités co;iime les réformés de Cluny. Ils
ont une robe et un siapuluire noir, et par-
dessus, quand ils sonl ;iu chœur ou qu'ils
vont par la ville, ils mettent une coule qui
n'est pas si ample que celle des moines du
Monl-Cassin. ni de ceux de Saint-N'aniie. Ils
reçoivent parmi eux des frères convers qui
sont habillés de niéiiie, et ils ont encoie
des frères (ommis qui ri tiennent leur habit
séculirr. M. lîulleau, auteur de l'Histoire
monastique d'Orient el de l'Histoire de l'or-
dre de Saint-lienoit, était frère co:nm s dans
celle congrégation. File a pour armes une
couronne d'épines au milieu de laquelle il y
a le mot Pax, surmonté d'une fieur de lis, et
Irois clous de la passion en pointe.
Chrunic. générales ciel ord. deSniiil-nenoil ,
lom. IV, cent Jv, chapitre 12. Doni Michel Fé-
libieii, Uift. de l'abbaije de Saint- Denis.
Sainte-Marthe, Gall. Christ., lom. IV. Her-
mant, EtaHisscmmi des ord. religieux, pag.
409.
La congrégation de Saint-Maur, qui con-
serve encore aujourd'hui, dans l'Fglisc il
dans le monde lilléraire, la répulatiun du
corps le plus laborieux que la lauiille béné-
dictine ail i)rodiiit, continua sous ce rap[iorl,
dans le x\iii' siècle, l'éloge qu'en a fait ci-
dessus le P. Helyol. Néanmoins, considérée
sous le rapport religieux, celte c ingrégation
était déjà, lors(;«ie notre auteur mourut, bien
lo.n de ces temps de ferveur el de simplicité
qui l'avaient distinguée dans les preniièros
années de son existence, et dans tes aildi-
tions niiu^ n'aurons guère à dire d'elle que
l'histoire de ses luttes contre raulorité de
l'E;;li-e et de son relâchement.
La bulle Unigcniius trouva un nombre in-
fini d'opposants d.ins ses monastères sur les
divers points de la Fianee. Hâlons-nuus
pourtant dédire qu'aiissitôtaprès l'aiiparition
de cc;lc constitu;iou, dom Lhotallerie, géné-
ral de la congrégation, quoii|n'il eût lui-
même étudié sous le f.iineux P. (îerberon, en
envoya des exemplaires dans toutes les mai-
sons de la reforme (en 171 i), avec ordre de
la faire recevoir au chapitre. Si tous les su-
périeurs généraux qui lui succedèrenl ne
furent pas .lussi zèles ([ue lui jiour la vérité
el l'obéissance au pape (tel d.nn ;\ayiloii,
par exemple), tous ne.inmoiiis, et quehines-
uns avec giaiid dévouement (tels dnm Tlii-
b.iud el autres), se montrèrent soumis el tra-
v.iillèrenl à propager parmi leurs leligienx
l'acceptation de la bulle; et co<iperèreni ,
plus <iu moins, aux mesures prises par l'au-
lorilé ecclésiastique et civile pour inainleiiir
la paix dans la congiég.ilion, réi'iiiner cl
rm
M AU
MAli
nio
punir ceux (jui portaienl le scandale en pro-
{)ageanl la résislance.
11 y eut, en effet, des scènes de scandale,
et nombreuses cl inconcevables :àlacclèbro
abbaye de Saint-Denis en France, trente-
doux religieux, gagnés par dom Louvard,
janséniste des plus fanatiques, et mort depuis
réfugié en Hollande, signèrent une requéle
au chapitre général, pour obtenir la permis-
sion d'adhérer incossammenl à l'appel des
quatre évoques. Dom Louvard appel a, en effet,
avec la communauté, peu de jours après, et
cet exemple fut suivi parla plus srande partie
de la communauté de Saint-Germain des
Prés. Près de quinze cents Bénédictins, et
toute la communauté de Saint-Denis, adhé-
rèrent à l'appel du cardinal de Noailles,
quelques-uns poussèrent le fanatisme jus-
qu'à écrire à l'arclievéque schismatique d'U-
irecht, ce qui était alors une preuve de zèle
à la mode dans le parti janséiiien. Dan^ plu-
sieurs lieux et en divers temps, plusieurs
des jeunes moines furent rejetcs de l'admis-
sion aux ordres sacrés par refus d'accepla-
lion de la bulle. On peut même citer des
communautés comme ayant été tout entières
dans un e.spril de révolte : telles celles de
Saint-Riquier , au diocèse d'Amiens; de
Sainte-Colombe, à Sons, etc. Il faudrait des
volumes pour renfermer tout ce que le jan-
sénisme fit faire de démarches, de résistan-
ces, de proclamations ou déclarations cou-
pables dans ces temps malheureux. Nous no
pouvons, dans cet article, qu'indiquer rapi-
dement queli|ucs-uns des faits au milieu de
faits sans nombre. Ainsi le chapitre général,
tenu en 1733 à Marmoutiers, fut une preuve
des plus tristes du mauvais esprit régnant
alors dans la congrégiitioa de Sainl-Maur ;
rar, les religieux soumis aux décisions de
l'Kglise ayantété seuls admis aux opéraiious
du chapitre, le nombre des votants fut r.'duil
extrêmement, et les choses slaluces dans
Cette asstiinblée furent loin de iruuverdans
les volontés la soumission qu'elles méritaient.
Il y eut même dans ces temps, et depuis,
des religieux prêtres df l'institut qui donnè-
rent dans les folies et les sci'nes ridicules
ries convulsions, et y prirent une part ac'ive.
Cependant il ne faut pas omettre de rappeler
ici qu'il y eut toujours dans cette famille dé-
solée des hommes qui cherchaient à y ra-
mener la paix et y maintenir la soumission
par leur exemple et leur autorité. C'est avec
bonheur que nous citons des noms qui se
distinguèrent par leur conduite, leurs senli-
inents catholiques, dom Thibault, dom Thuil-
lier, dom Conrude, dom Laprade, dom Vnl-
Ktat.dom laTaste, etc., etc. Kn 1734ou 1733,
quarante et un religieux, tous do Saint-Ger-
main des Prés, croyons-nous, écrivirent au
pape pour assurer à la constitution de Clé-
ment XI omnimoilam obedienliam.
Néanmoins, si les chefs et la plus saine
partie de la congrégation étaient restés sou-
mis aux décisions de l'Eglise, l'ospril philo-
(1) Celle requête parut peu de jours après impri-
mée en 6 pages in-i".
(2) 118 piiges in-4°.
sophique, qui domina le xviii' siècle, secon-
dant l'esprit de révolte né du jansénisme,
altéra profondément l'espritreligieuxdeceilc I
réforme, qui avait si fort édifié l'Eglise au I
siècle précédent. On a peine à croire, même '
aujourd'hui, que des Bénédictins de la célèbre
maison de Saint-Germain des Prés en soient
venus au point de faire la démarche que
nous allons faire conn:iître.
Le 15 juin 176.T, fut signée une requête (1)
par vingt-huit Bénédictins de l'abbaye de
Saint-Germain des Prés, demandant les choses
les plus étranges sous des prétextes spé-
cieux; peu de jours après, cette requête fut
présentée au roi. Les religieux qui l'avaient
signée demandaient donc à changer d'habit,
à ne plus dire matines pendant la nuit, à
n'être plus astreints à l'usage du maigre. Ces
moines relâchés couvraient avec art l'indé-
cence de leurs propositions. A entendre les
auteurs de la requête, ils ne désirent que
rappeler l'ordre à la règle primitive. L'ha-
billement est, selon euK, singulier et avili
aux yeux du public, il leur en faut un qui
soit reUijieux tt ecclésiastique, modeste et
décent. L'esprit profane et mondain qui a
dicté la requête se trahit ici un peu trop ou-
vertement : il se cache mieux dans les deux
autres articles. La nourriture est trop re-
cherchée, ils veulent qu'elle soit simple et
commune. Quant aux matines, qu'elles soient
remises à une heure qui ne laisse à personne
aucun prétexte pour s'en dispenser. D'ailleurs
des austérités aussi étrangères à l'esprit qu'à
la lettre de. la règle ferment la porte à quantité
de sujets, et empêchent les Bénédictins de
vaquer, comme autrefois, à l'éducation de la
jeune noblesse, etc. Le public, les évoques,
les bons religieux furent sc;indalisés d'une
telle audace dans le relâchement. Louis XV
chargea un de ses ministres de témoigner
aux supérieurs de la c ingrégation son ex-
trême méconteuleaient et son indignation
de la démarche des religieux de Saint-Ger-
main, et de prendre des mesures pour pré-
venir ou arrêter les troubles qu'eJle com-
mençait à c.iuser dans les provinces. Les
Bénédictins de la maison des Blancs-Man-
teaux firent une vigoureuse réclamation,
consistant dans une requête au roi el une
dissertation oii la discipline monastique est
vingée des outrages de la requête des religieux
de Saint-Germain. Pour transmettre ce mo-
nument de zèle à la postérité, les religieux,
des Blancs-Manteaux le firent imprimer (2).
Quelque temps après, il parut une autre ré-
clamation au nom du supérieur général, du
régime et de la plus nombreuse partie de la
congrégation (3j. Les audacieux ne se tinrent
pas pour battus : ils voulurent, au premier
chapitre général qui suivit leur requête,
poursuivre leurs projets et les faire préva-
loir. Le roi les déconcerta, en défendant au
chapitre de délibérer sur aucun des points
qui étaient l'objet de la requête.
Une innovation parut dans ce temps à
(7)) 53 pages iii-i°, doiii près delà moitié esl rem-
plie par les signatures.
911
DICTKI.NNMIIE DES OllUUKS KKMOIF.IX.
fll^
S;iint-Germ;iin ilps Pros. l'.llc pouv. il avoir
son ulilitc rérlle, romnio elle ;ivuil un cùlé
lirillant ou s|iocica\. On étal)Iil un bureau
lilléraire, qui que!quolois ne s liarinoiiisait
pas avec la \olonle ili s supérieurs. Hélas!
rcs lignalaircs de la roquèle. qui ét.iipnl
nombreux, suivaient déjà, sauf l'Iiabillo-
incnl, les disposilioiis de leur seandab'uso
rei|uétc; ils allaient (oui nu plus les dinian-
flics el fèlcs à la messe el à vêpres. (Juanl
,iux malincs, on ne les y voyait que la nuit
de Noël. Ils étaient habituellement à l'inlir-
ineiie, pour y fiire bonne clii^re. Le relà' be-
rnent se répandit dans les couvents des pro-
vinces. Là on abolissait sans formalité l'u-
sage du maigre; ici on relranch.iit l'ofiiec de
la nuit; ailleurs des repas, des concerts pro-
fanaient un séjour des iiié à la pénitence et
à la prière. On |u'Ut citer comme ayant donné
les premiers le scandale d'un grand relàcbe-
mcnt, les monaslères de Dijon. d'Auxcrre,
de Saint-l.oiner, au diocèse de Blois, o!c.
Dans celle dernière maison les choses allè-
rent au |ioinl (joe le roi y envoya des com-
missaires cl donna des ordres pour disperser
les religieux et leur en sub^tiluer d'aulres.
Nous donnerons au reste une idée suffisante
de l'étal auquel était réduite une ])artio de la
congrégation deSainl-.Maur,en disant qu'une
lo^c (i;- francs maçons fui, en 1775, établie à
Tilanfeui', lieu du di )cèse d'Angers, où la
rèiile «le saint lîenoîi s'éiablit d'abord en
France. Le vénérable de la loge fut le prieur
des Bénédictins de Saint-Maur, el vraisem-
blablement cette loge était dans l'ahbaye.
Le secrétaire des francs-maçons de cette
réunion était le P. prieur des Auguslins de
la communauté d'Angers; leur correspon-
dant à t'ars éiait u i nommé Tlieolon. qui
éiafl en même temps correspondant de la
loge de la ville de Fougères el auires. 0 tein-
pora! 0 nicice.v/
La commission des réguliers établie en
17G3, com]iosec de cinq évoques et de cinq
laïques, commission dont nous ferons cou-
iiailre, dans notre Supplément, l'occasion, le
but el les ravages, celle commission dont
nous ne pouvons parler ici que somm;iire-
ment, fui fune-leà la congrégation de Saint-
Maur connue à la plupart des sociélés reli-
gieuses, l'resque tous les corps en Fr.ince,
ii[irès les premiéies opérations de celte com-
mission bypocrilc, tinrent des assemblées el
se donniTeiil des cunstitiitions nouvelles ou
inodiliées. Dans leurs préfaces, ces constitu-
tions paraissent (luelquefois avoir été rédi-
gées [)ar des religieux (|ui croyaient bonne-
ment alors à une [lalingéuése <le la vie du
«loîirc. Les lléuédiclii;s de la congrégation
de Saiiit-iMaur nommèrent, en 17i>'.), une
commission pour rédiger leurs consiitulions
sur un nouveau plan. Ces eonstitufious pa-
niient en effet l'aiiné.? suivante en un v«i-
lum ■ in 8, sous ce lilic- : Itf/nhi S. /'. lirne-
(licli et cunstilutiones contjrcijntii nis Sancti
Mauri. Os consiitulions sont divisées en
deux parties généia.es, dont la première e>t
MMi.sarree à régler re ()ui concerne le >eV/iHic
ou la «onduilc geiiér île des nionaslèrcs. Klle
exl [larlagée en trois sections, dont les lilre»
rappellenl dans leurs termes la marche qu'on
suit ordiuairemenl en Irailant di^s malièresi
canoniques, .\insi, la première section parle'
des exercices régulieis. et par conséquent
de l'Fglise, de l'office divin, des vœux, di- la
réce| lion des sujets et des étrangers, des
études, du travail, etc. Le 1i' el dernier
cli;i|)ilre, qui traite des loulpes el des peines,
est composé de cinq articles. Par les nou-
velles prescriptions tout l'uflice est chanté
d.ins les monastères où il y a vingt-«|ualre
religieux, excepté compli^'s aux jours ordi-
naires. Dans les maisons de qu'nze religieux
au moins, on chan'ail loul aux grandes fêtes,
et pari ie des heures aux jours ordinaires: dans
les cotiveuts où il y avait moins de quinze
choristes , on chantait eU' ore moins que
dans ces derniers, etc. On conliiiuail de réci-
ter l'oKire de la sainte \'ierge, aux feries et
fêles simples. Les matines sont maintenues à
deux heures api es minuit. — On peut encore,
d'après ces consiitulions, recevoir les jeunes
postulants de quinze ans, mais ou ne leur
i'era prononcer des vœux qu'à vingt et uti
ans. Dans chaque pro^inee, des n:onaslères
sont a-sigiiés par les définileurs du chapitre
géuéral, les uns pour servir de premii'r ou
second noviciat, d'autres pour maisons d'é-
ludés, etc. La seconde section traite des per-
sonnes, par conséquent de tout ce qui regarde
les religieux choristes ou convers; la troi-
sième section, des cho^s temporelles , des
monastères, c'est-à-dire du chapitre el de ce
qu'on y agile, des édifices, des haliits, etc.
La seconde partie des constilulions pres-
crit ce qui regarde le ré(jimi général de la
congrégation , el est di\isée en deux sections.
Ouaranle-deux chapitres forment la première
section, Irailant de l'assemblée générale, des
élections, etc. La seconde section ist destinée
à régler le régime de la congrégation hors
le temps du chaiiitre général. Le supérieur
général doit être nécessairement profès de la
congrégation de Saint-.Maur, Français, cl il
reste soumis au chapitre géuéral. Il ne peut,
sous aucun iirélexte, user des insignes ponti-
ficaux, ni accepter un bénéfic" dans le sein
de la congrégation. S'il en acccf le un hors
de sa corporation, par là même sa démission
est donnée. Il doit consigner dans un registre
les choses remarquables qui se passent dans
l'année : disposition fort utile el qui aurait
bien dû être pri^cdans les monasicres dès leur
origine. Il est élu pour trois années, clc, elc.
Une disposition sage de ces constitutions,
propre à mainlonir la discipline, c'est que
les suj( Is ne sont point attachés à telle ou
(elle maison; ils restent à la discrétion du
supérieur, qui peul les envoyer d'un monas-
tère à l'autre, etc. La rédaclion de ces consti-
tutions avait été ronliêe à dom Perneiy, à
dom Jauiin. l'auteur des Peu'ées thêologi-
qncs, à dom la llivièrc; cl à dom ('léniencct.
On sait coniliien (C dernier étail janséniste.
Dom la llivière cl lui av.iient été imposés
.'lux capi.ulanis par les cotnmissairrs du roi
(|ui prèsiilaienl .lu chapitre. Ouanl à doiu
l'trnelv, après a\()ir lenuine son travail, il
913
MA 11
M AU
nii
alla à Berlin el y devint bibliolliécaire du
loi de Prusse. Les conslilutions fureni ap-
|)rouvées au chapitre général tenu à Mar-
iiiouliers en 17G0, puis autorisées civilement
par lellres patentes el enregislrcmcnl.
Quoiqur les nouveaux statuts n'eussent
rien décidé sur la composition d'un nouveau
bréviaire, la congrcgaiion ne laissa p.is de
céder au goût ou à la manie du siècle, et fit
un bréviaire nouveau pour son usage. On en
confia la rédaction à ilotn Fou'on, jaiisénisle
ardent, qui y mil des preuves nombreuses de
ses principes. Le psautier y a soulTerl quel-
que altération ; les prières les plus autorisées
et les plus anciennes y si;nt changét's. La
iio:i!enclature des saints du calendrier est en
conséquence des idées du léJai leur. Ce bré-
viaire parut en 1787 , en 4- vol. in 12, sans
approbation du général, cl sans mandement
qui le prescrive dans 1 1 congrégation. Oui
l'avait donc commandé? ce n'éiail pas I • bu-
reau /in^'rni're. supprimé depuis lnngtemps
par l'aulorilé civile. Ce bréviaire ne fu: point
rc-:ulièrement adopté. Un ancien prieur de
l'abbaye du Bec, Icquelen faisait usage, .ipri s
la révolution, nous a dit qu'on ne le récilail
pas encore dans son monastère. Il parait ce-
pendant qu'on coamiençait à s'en servir dans
quelques maisons quand la révolution frau-
i;aise éclat;i.
Les six |iroviiices dont parle ci-dessus !e P.
Hélyot étaient toujours les mémos. Entre les
180 abbayes ou prieurés qui les composaient,
ou voyait [ resque tous les célèbres monastè-
res bénédictins (le France. Ainsi, dans la pro-
vince de Normandie, on comptait Jumiéges,
Féeamp, Sainl-Wandrille, qu'on eût pu jadis
appeler l'asile des saints ; le Bec, jadis habité
parLanfrane el saint Anselme, Saint-Etienne
de Caen, le Mont-Saint-Michel, e!c. Dans la
province di; Bretagne, ou voyait les abbayes
de Saint-Melaine, à Bennes, de iîedon , du
prieuré de Lehoii, à Dinan , chel'-licu d'une
réf'irme particulière, avant son union , eic.
Dans la provinc(! de Fr.ince, on trouvait la
fan'.euse abbaye de Saint-Denis, maison d'é-
liules pour les religieux, Marniouliers, Saint-
Ormain des Prés , Saint Farou, etc. Les Bé-
nédictins de la congrégation avaient la di-
rection de]iiesque toutes les écoles militaires ;
ils avaient en outre plusieurs collèges pour
l'iiislruclion et l'éducation de la jeunesse, par
exemple dans l'abbaye de Tirou, au Perche,
où fut élevé l'abbé de\ illefroy, savant orien-
lalisle;dans l'abbaye de Pont- Levoy, diocèse
de Blois ; dans celles de Siiut-Germer , au
pays de Bray ; de Beaumont-en-Auge ; de
Sorèze,dans leLanguedof ;deSaint Jeaii-d'.Vn-
gely, eu Sainloiige ; de Bebais , eu Brie; de
Tlioissy, dans la piincipauté de D.mibrs ;
d'Au\erre.... sans parler de plusieurs mo-
nastères, surtout dans les campagnes, où les
religieux instruisaient les enfants.
Dans tout le courant du siècle, les Bcne-
diciins avaient conservé, UMigré leur- dissen-
tions intestines, l'habitude de leurs travaux
el de leurs publications précieuses. 1 savaient
au commencement du siècle établi, dans
l'abbaye de Saïul Flonut do Sauuiur , une
académie bien plus précieuse que le pré-
tendu bureau liilf'rnire. Celte académie ,
toute composée ib' sujets disliuiiurs par leurs
talents, el dirigée par un théologien habile
dans la science ecclésiastique, avait pour
objel l'élude de la théologie, mais sans s'as-
sujellir à la méthode de l'école. Les textes
originaux de l'Ecriture, les conciles, les Pè-
res, les histcu'ieus de l'Siglise , étaient les
^Ollrces où ils puisaient le goût véritable.
Là brillèrent dom Bivet et un grand nombre
d'autres. Avec la science ecclésiastique qui
légnait réellement dans la congrégation des
Mauristes, nous croyons pouvoir insinuer
que ne se trouvait point la science théologi-
que proprement dite, telle qu'on la trouvait
dans plusieurs membres de la congrégation
de Saint-Sulpicc , de celle drs Lazaristes, de
I institut des Jésuites , de la société des Eu-
distes, etc.
Eu 1770, on a publié Vllistoire lillëraire
(le la conqrégalion de Sninl-Maur , par doia
Prosjier Tassin, qui a mis dans ce livre des
preuves de ses préventions jansénisics, mais
qui fait bien connaître les travaux de sa cor-
poration, à dater de IGlSjusqu'à l'époqueoù
illivie son ouvrage au public. On peut con-
sulter aussi la liibUuijrapliic de la eongréga-
lion de Saint-Maur qui se trouve à la fin
d'une llisloirc de dom Mabillon, publiée jrar
M. Chavin en 18i3, Celte nomenclature ,
toute dél'ei tueuse et incomplète qu'elle est,
peut néanmoins donner une idée juste des
travaux de la célèbre congrégation. Nous
croyons devoir dire ici que pres(|ue tous ces
travaux étaient composés sous l'influenee de
l'esprit jansénisie. Quand la révolution dis-
persa les religieux , plusieurs entreprises
d'un gr;ind pris demeurèrent inachevées :
telles l'Histoire Littéraiie de la France, l'é-
dition des OEuvres de suinl Grégoire de
Nazianze, etc. — Nous allons donner ici
quelques détails sur linlérienr de la maison
des Blancs-Manteaux, la plus importante du
la congrégation sous le lapport littéraire,
après l'abbaye Saint-Germain des Prés. C'est
des Blancs-Manteaux que pari il celle re-
quête contre la demande scandaleuse des
vingt-huit Bénédictins dont nous avons parlé.
Aux Blancs-Manteaux b'S constitutions l'e la
réforme étaicut régiil:èremont gardées. Le
maigre était continuel, et on couchait sur
une paillasse piquée. Dom llaudiquei était,
lors de la suppression, pi leur de celle mai-
son, qui n'était pas abbaye. Là se trouvaient
plusieurs religieux dont le nnui est connu :
tels dom Foulon, l'auicur du bréviaire (|ue
nous avons mentionné plus haut ; dom Clé-
mencet, auteur (lu /'J/^ de vérifier les dates.
Ce religieux, qui ne manquait jamais il'as-
sister aux matines quoiqu'il fut âgé de 80
ans et qu'il eût une sonde, jouissait d'une
grande répuialion ; il était lié avec Bailly ,
depuis maire de Paris, reçut la visite du
prince Henri, frère du roi de Prusse, etc. ;
(iorn Déforis, qui avait commencé l'édition
des oeuvres de Bossuet . dom de Cognac
(notre lompalriote), qui travaillait au lîallin
Chrtiliana ; dom Labat, qui a duuué une
?l-
niCTIONNAinE DES ORDRES RF.I.iniEUX.
016
histoire de l'abbaye de S.iinl-Polycarpe ; dom
iMalhcrbc, qui Irâvaillait à une histoire du
bas Langurdoc ; dom Caffieri , frère du scul-
plcur, à qui sont durs les statues des quatre
Pères qui étaient aux Invalides ; dom Merle,
Réiièalopisle savant, consulté par les grandes
familles; dom (Juin(|uel, qui cultivait un pe-
tit jardin dans le quartier, s'occupait des
fleurs et connaissait moins les livres que les
tulipes et surtout les jacinllips. Uoiii Bris ,
procureur, n'égalait aussi les autres, ni «n
science ni en ferveur. On en peut dire autant
de dom Malvaux, religieux minoré, qui vi-
vait pourtant avec les savants dont nous
avons parle et ()ui nous a fourni ces détails
curieux. Tous ces religieux laborieux et en
apparence si réguliers étaient malheureu-
sement imbus des ernurs jansénistes. Celait
dans leur maison que se faisaient les abon-
nements aux fameuses i\ouve!les eccli'siasti~
r/nes , auxquelles Irâvaillait dom Déforis.
Presque tous doiinèretit aussi dans les er-
reurs de la C mslitulion ci\ilcdu clergé, et
quel(jues-uns dans des scandales inconce-
vables, comme ilom Foulon, l'aulcur du bré-
vi.iire, qui se retira à Montmorency, près de
Paris, et s'y maria avec une fem le qu'il
avait séduite depuis lon^icmps, ainsi qu'il le
déclara <i la municipaliié. Là vint aboutir
l'austérité qui avait sa base d.ms le jansé-
nisme. La mjiison des Dlancs-.Manleaux était
habitée par des religieux envoyés de toutes
les proviuces de la congrégation ; les reli-
gieux portaient le litre de conventuels ou
modérateurs.
La célèbre ab!)aye de Saint-Germain des
Près est assez connue; elle était comme le
chef-lieu de la congrégation de Saint-.Maur.
Le revenu de la mense abbatiale et de la
maison val.iit environ 30(1,000 livres, dont
les deux tiers allaient à l'abbé, qui était
corameiidalaire. On avait reconstruit, dans
le cours du dernier siècle, une partie du
clnîirc de ce monastère et deux grands corps
de logis. La bibliothèque de celle abbaye,
qui était la plus nombreuse après celle du
roi, avait été commencée par le P. Uubreul et
augmentée successivement. Dans le xviii'
siècle, elle fut eni ichie des bibliothèques de
l'abbé Jean d'issiré. s (1718), de l'abbé He-
nandot (17:i0), du chancelier Séguier, 7na-
nuscrits (en 1732), du cardinal de (îesvres
(174i), de M. de Harlay, conseiller d'I'tal (en
1762). Le tout donnait un cliilïre de 100,000
volumes imprimés et quin/e à vingt mille
manuscrits, dans toutes les langues. On y
trouvait le manuscrit des Pensées de Pascal,
qu'on a édité et dont on a tant [)arlc depuis
peu. Les abbés avaient autrefois toute juri-
diction lant «.pirituelle que temporelle .«-ur le
f.iubourg Saint-Germain ; le prieur de l'ab-
baye était vicaire général né et perpétuel de
l'auhevè'iue de Paris, et ce, jus(]u'à la dis-
persion. Le dernier général fut le H. P. dom
lihevreux. Les sujets n';ifllu.iient pas dans
les noviciats ; depuis lonstemps la congré-
gation était dans rus;ige de secourir les pa-
rents nécessiteux de ses membres, .^ans cette
œuvre de ciiarilc, elle eût eu fort peu dciios-
des réguliers lui
tulanls. La commission
avait nui, ainsi qu'aux autres institu's. Les
querelles intestines de la congrégation de
Saint-Maur auraient peut-être amené sa rui-
ne, si la révolution n'était venue hâicr sa
dii-solutiop. Dos troubles avaient encore eu
lieu peu d'années auparavant. Un chapitre
tenu à Saint-Denis avait été orageux, et les
di.-senlimenis, les plainies en étaient venus
au point que le parlement lui-même fil trois
ItimoirDanrci! au roi sur ces malheureuses
affaires. La dernière est datée ilu 1" février
ilHi). Toutes gémissent et crient sur les fu-
nestes opérations de la commission des ré-
guliers, qui en 1780 avait été dissoute, mais
créée de nouveau le mômej mr, sous un au-
tre nom. Celte fatale commission était alors
composée de cinq évoques , qui ne comp-
taient plus avec eux que l'un des cinq laï-
ques qui leur étaient jadis adjoints.
Les liénédictins de Saint-.Maur ((uittèrent
leurs riionaslères en 1792.
Dès l'an: ée 1815, après la première ren-
trée des Bourbons, quelques anciens reli-
gieux de (etle congrégation adress.''rent une
requête à Louis XA'Ill; ils représentaient
que SI on avait à reprocher à quelques
membres de leur corps l'oubli de leur régie,
il y en avait d'autres qui n'en avaient jamais
perdu l'esprit et les sentiments, et qui, au
milieu des orages, s'étaient conservés purs
et fidèles. Ils demandaient à ressusciter une
corporation non abolie par l'Eglise, qui pou-
vait être encore si utile à la société, aux let-
tres, à l'instruciion publique. Dom tîrou t
d'Arcy avait, nous a-l-il dit, prié M. de
Montesquiou d'obtenir du roi une ordon-
nance qui rétablit la congrégation. .M. de
Montesquiou y consentit, mais il répondit sa-
ge nent qu'il fallait (]ue les Bénédictins fus-
sent reunis avant que le roi accordai l'or-
doiinan' e, laquelle certainement ne sérail
pas refusée. A la seconde rentrée des Bour-
bon'.', le projet ayant pris plu < de consistance,
ou rechercha par la voie des journaux
l'adhésion des religieux dispersés qui vou-
draient contribuer à le mettre à exécution.
Il le fut en effet en 1810. L'association des
chevaliers de Saint-Louis faisait élever à ses
frais des enfants. Les Bénédictins furent au-
torisés par le roi à répondre à l'invitation
des chevaliers de Sainl-Louis qui leur pro-
posaient de se charger de leur ceuvre ; ils se
réiinirenlàSenlis,ilans l'ancien monastère de
la Piésentation, quiavailétéacquis à cetelTet,
et reçurent aussi d'autres enfants avec ceux
de l'association. Une [lartie des religieux re-
prit les exercices monasti(]ues et l'auire se
livra à l'instruciion. Mais nicilheurcusement
ils ne rep;irent point leur habit.
D,im M.'ir(|uet, ancien [irieur de l'abbayo
et diiecleur du collège royal de Ponl-I.evoy,
fut le premier «lirecleur do celle uiaiscm,
(ju'il n'eut |ias le temps de former au Rre do
ses désirs. Il inourul le '2 o 'lobre 1817, âgé
de 73 ans. et fut inhumé dans le cimetière do
Sentis, où l'on voit son épilaphe. Nous ne sa-
vons s'il el.iil propre à son (iMivre; il n'avait
réuni autour ilc lui que quelques vieillards,
017
MAU
MAU
ni 8
f|iii n'avaient point cette ferveur daction qui
ne se trouve gut^rc (inc dans des jeunes gens.
Dom Groult succéda à dom Marcjuet, cl di-
rigea létablisî-einent; il ii'avail liendece
qu'il fallait pour celte restauration, si ce n'est
du goût pour les ^'tablisse-nents religieux,
goûl édifiant qu'il garda jusqu'à sa morl.
L'établissement de Senlis ne fit point de su-
jets; le collège, fort mal tenu, se soutint
pendant dix ou douze ans. Le bâiiment, de-
venu la propriété de dom Groult, a é'.é laissé
par lui h la respectable congrégation de Pic-
pus, qu'il a faite sa légat lire et qui l'a vendu
à un habitant de Senlis. Celui-ci en loue ac-
luellciiiciit une partie au pensiunn.it de
Saint-Vincent de Senlis. C'est tout ce que
cette maison, témoin de si belles espérances,
garde aujourd'hui de son ancien ne destination.
La congrégation de Saiiit-Maur avait pris
jadis le nom de Congrégation Gallicane ou
de France. C'est aussi sous ce nom que s'est
formée la nouvelle société de Bi'uédiclins éta-
blie à Solcsmes, que nous ferons connaître
dans le volume de Supplément.
Régula S. P. Benedicti cl constitutiones
congregnlionis Sancti Mauri, in-8", Paris,
Desprez, 1770. Nouvelles ecclésiastiques. —
Ami de la religion. — Tableau de Paris,
par M. de Saint-Victor. — Elut de Paris,
par de Beaumont. — Notes prises passim.
B-D-E.
MAURICE D'AGAUNE (Des Chanoines Ré-
guliers DE Sâl.NT-) [t].
L'abbaye de Saint-Maurice en Valais, au
diocèse de Sion, eu Suisse, est très-illustre et
très-ancienne. Le corps de saint Maurice,
qui y repose avec ses compagnons, lui a fait
donner le n. m de ce saint martyr, et on la
nomme aussi d Agaune, à cause qu'elle est
si'.uée dans un bourg qui porie ce nom. Si-
gismond, roi de liourgogne, fut le fondateur
de cette abbaye, ou plutôt il n'en fut que le
restaurateur; car il y avait déjà une église
dédiée en Thonncur de saint Maurice, qui
avait clé bâtie vers la fin du v siècle, et même
il y aurait eu un monastère, si l'on pouvait
ajouter foi à la vie du saint Severin, qui en
a été abbé, laquelle a été écrite par Fiiusie,
où il est remarqué que le grand Clovis ayant
été malade pendant deux ans, et sa maladie
ayant commencé dès la vingt-cinquième an-
née de son règne, il ne fut guéri que par les
prières de saint Severin, que l'on fit venir
d'Agaune à Paris. Mais le doclc P. dom Ma-
billun fait remarque: que cela ne peut être,
puisque, selon le témoignage de Grégoire de
Tours, ce prince régna trente ans, et mou-
rut la cinquième année d'après la bataille de
Vouillé (l'an 511), qui n'arriva que dans la
vingt-cinquième de son règne. Après cette
bataille, où les troupes de Clovis rempor-
tèrent la victoire sur celles d'Alaric, roi des
Visigoths, qui y lut tue par Clovis (l'an 507),
ce prince, prolilanl de sa victoire, (it plu-
sieurs actions qui n'étaient pointd'nnhommc
malade. Il passa l'hiver suivant à Bordeaux,
dont il s'était emparé. Au printemps, i! prit
(i* Vvij., a h lin du vul., 11*231.
Toulouse, où étaient le» trésors d'Alaric. Il
vint ensuite assiéger Angoulèmc. De là il
alla à Tours, où, ayant reçu la robe consu-
laire et les ornemenis impériaux que lui
avait envoyés l'empereur Anastase, il s'en
revêtit dans l'église de Saint-Martin. A peine
fut-il de reiour à Paris, qu'ayant appiis la
moit de Sigeberl, roi de Cologne, il alla
pour s'emparer de ce royaume. Il songea
ensuite à se renlre maître de celui de Cam-
brai, dont Bagnacaire était en possession.
Toutes ces actions ne conviennent point à
une personne qui est retenue au lit à Paris
pir une fièvre qui le mine et le consume,
dit le savant bénédictin, qui ajoute que ce
saint Severin ne peut pas non plus avoir
guéri en allant à Paris, Eulalius ou Eula-
dius, évêque de Nevers, comme il est mar-
qué dans quelques manuscrits de la vie de
ce saint, |)uisque cet Eulalius n'occupait
point pour lors le sié^ie épiscopal de Nevers :
ainsi ce n'est point sur la vie de saint Seve-
rin, étrile par Fausle, que l'on doit s'ap-
puyer pour prouver l'antiquité du monastère
d'Agaune, et l'on n'a aucune preuve que la
règle de saint Basile y ail été observée dans
le v° siècle, comme quelques auteurs ont
avancé. Il faudrait auparavant prouver qu'il
y eût ru un menastère dès ce temps-là à
Agaune; mais il y a bien plus d'apparence
que la première fondation de ce monastère
fut faite par le roi Sigisinond, et qu'il joignit
ce monastère à l'église de Saint-Maurice,
qu'il fil réparer.
Ce prince, après la mort de Gondcliaud,
son père, succéda au royaume de Bourgogne
l'an 515, et après avoir abjuré l'hérésie d'A-
rius, dont les Bourguignons avaient été jus-
qu'ali rs infectés, il crut qu'il ne pouvait pas
donner des marques plus signalées de son
attachement à la religion calh jlique, que de
réparer avec beaucuup de magnificence l'é-
glise où reposaient les corps de saint Mau-
rice el de ses compagnons, et d'en confier la
garde à des moines qui y chantassent les
louanges de Dieu. Quelques-uns prétendent
qu'il lit celte fondation par un autre nsolif,
el que ce fut pour expier le crime qu'il avait
commis en faisant mourir son fils Sigeric.
(>e prince avait épousé en premières noces
Ostrog.tthe, l'une des filles dcThéodoric, roi
d'Italie; dont 11 eut, entre autres enfanls, un
fils nommé S geric. Après la mort de cette
reine, tl épousa une de ses servantes, qui,
ayant conçu une haine contre Sigeric, per-
suada àSigismond qu'il avait conspiré con-
tre lui pour se mettre la couronne sur la
tête. Siuismond, trop crédule, fit étrangler
son fils avec une serviette, comme il était
endormi ; mais aussitôt, touché de repentir (à
ce que disent ces historiens) 1 1 pénétré do
douleur, il fit bâtir te monastère d'Agaune,
l'an 522. Mais ce monastère et l'église de
Saint-Maurice étaient bâtis dès l'an 515, et
il est vrai que Sigismond, après le meurtre
de son Gis, se retira l'an 522 à Agaune, où
il passa plusieurs jours en jeûnes et en lar-
mes, au tombeau de saint Maurice, deaian-
ri3 DICTIONNAIRE DLS ORDntS liLLIGIEUX. p-ÎO
«i.iiil il Dieu dï'Ire puni en celle ^ ie pliiicM il.ins ce dernier près de trois cenls filles, qui
qu'en l'autre. Sa prière fui exaucée; lar élaient ausM partagées par bandes, à l'exem-
l'annéc suivante Ijl'i. il fut attaque par ("lo- pie des moines de Sainl-Maurice d'Agaunc et
•louiir, roi d'Orléans, et vaincu. Il se relira des reliiricuses de Itemireniont. Les moines
«iccrèlenicnt sur le haut d'une montagne in- de Saint - Maurice élaient di\isés, comme
iiccessilile, et tle peur que ses gens ne le li- nous avons dit, en neuf bandes; les reli-
^rassenl entre les mains des Français, il se gieuses de Remireniont en sept. Les autres
I oupa lui-même les cheveux cl se revêtit de en avaient plus ou moins; mais ils ne for-
l'Iiabit lnona^lique, dans l'intention de pas- niaicni tous qu'un chœur, qui était relevé
ser le reste de ses jours dans le monastère par un autre. Ce qu'il y avait de plus singu-
li'Agaune. ciinmc ceux qu'il croyait ses plus lier dans l'abbaye de Saint-lUquier, c'est que
fidèles servitiurs lui av.iient conseillé. Mais la eoinrnunaulé était composée de trois cents
à peine fnl-il arrivée la porte de ce monas- religieux. Il y avait outre cela cent enfants
1ère, qu'ils le livrèrent entre les ma:ns des qu'on y enseignait, et qui portaient aus>i
Français. Clodomir l'emmena revèlu de son l'habit monasli(iue. Ces trois cenls rel gieux
liabit monasiique avec sa femtne el ses en- et ces ( niants étaient partagés en trois
fants, et les mil en prison près d'Orléans, chœurs qui psalmodiaient continuelienienl
II les y garda jusqu'à l'année suivante 32V, jour et nuit dans l'église de celle abh.iye :
qu'il ré-solul de les r.iire mourir. Saint Avil, cent à la chapelle de Sainl-Sau\ eur avec
abbé de Micy près d'Orléans, dil à Clodomir trente-quatre enf.ints, cent à la chapelle i!c
•lue s'il épargnait ces princes dans la vue de SainlUiquicr avec Irente-lrois enf.inls, el
Dieu, il serait avec lui cl remporlerail des aulani de religieux el d'enfants à la cha-
>ictoires: mais que s'il les faisait mourir, il pelle de la Passion. Ils se Irouvaicnt tous :i
)>crirail de même avec sa fenmie et ses en- loules les heures canoniales; et lorsqu'elles
fants. Clo loniir se moqua de ce conseil, el étaienl finies, nn liers de chaiiue ch(rur se
lit tuer Sigismond, avec sa femme et ses en- retirait pour aller à se< affaires cl à ses be-
f nls. les lit jeier dans un pu:ls, et marcha s lins, pendant que les deux autres liers con-
çu Dourggne pour aller l'aire la guerre àtîo- linuaienl de psalmodier à voix basse, ("eux
domar, frère de Sigismond, où il fut tué lui- (lui étaient sortis étant retournés à l'église,
mèmedans uncombat près d'Autun, raii52.). il en sortait de chaque chœur autant qu'il
Il y eu a qui onl aussi prétendu (|ue c'é- en était entré, ce qui se pratiquait de nn'me
lait dans le nionastèie d'Agaunc (]u'on sui- lorsqu'il fallait aller au réfectoire ou prcn-
\ ait la règle de Taruat ; mais nous parlerons dre le repos.
' n un autre lieu de celte règle el de cel e L'abbaye d'.\;:aune , qui avait d'abord
qu'ensuivait à Agaune, en rapportant les une règle particulière, cl non pas la règle
ilifl'érentes règles qui ont eu C'>urs en Orci- de saint liasile, comme quelques-uns préten-
«lent : nous nous contenterons dédire à pré- dent , embrassa d.ms la suite celle de saitit
•«ent que Tarnat et .\gaunc étaient deux mo- Henoit. Mais les IJénédiclins en ayant êé
nastères différents, el que c'est à tort qu'ils chassés par l'empereur Louis le Délionnaire
ont él6 confondis par quelques historiens, l'an 82 't , on î^ubstitua à leur place des
puisque Tarnat é ail situé dans le Lyonnais Clianoines sèrnbers. Trenie ans après, ou
rroche N'ieniie, et qu'Agaunc élait dans le environ, cette abbaye ayant été donnée à
N'alais. Hubert, frère de Thielbe ge , femme de
Le premierahbé d'.Vgaunc fui Himncmon- Lothaire , roi de Lorraine , ses biens cl
de, que le roi Sigismond avait fait venir du ses revenus furent dissipés par la mau-
inonastèra de Gl■a^e; ce prince voulut que vaise vie de cet abbé, l'oflice divin fui
les religieux chantassent cont nuellemenl interrompu ; ce (|u'oii avait accoulumé de
jour el nuit les louinges du Seigneur. Ils donner aux ministres des autels élait dis-
l'taient divises en neuf bandes, pour se suc- Iriliué à des courtisanes, à des scélérats,
céder les uns aux autres, el chanter les heu- et employé pour la nourriture d'un grand
les canoniales ou nocturnes , matines , nombre de chiens ; il épousa même uni;
prime, tierce, scxte, noue et vêpres; on ne femme déjà mariée, qui, étant séparée
parlait pas encore pour lors des compiles, de son mari . était culrce dans un monas-
donl on doit l'inslilution à saint Hennit. En- léie, d'où il l'enleva. (^h.;rles le Chauve,
viron cent ans aupiiravanl celte sorte de après la mort de sa femme llerniinlrude .
psalmodie continuelle avait été instituée en ayant épousé, aussitôt qu'il en eut reçu la
Orient par siiint Alexandre, fondateur des nouvel. e, Uichil le, qu'il entretenait (onime
Acéinètes ( Loi/. .\('.i:Mi';TEsi, mais le monas- concubine, donna l'abbaye de Sainl-Mau-
lère d'Agaune fut le premier en Occident où rice au comte Itoson , frère de Ulcbilde,
elle fut établie; c'est ce qu'un a appelé en lequel se lit couronner quelque temps après
latin, Laus pereniiis; plusieurs autres mo- roi de Provence ou d'Ailes. .Mais dans le
nastères non-seulement d'hommes mais aussi neuv.ème cl le dixième siècle, on n'était
lie filles imitèrent celui d'.\gaune. lintre les \)i\< surpris de voir des abbayes entre les
hommes, les pi inci(iaiix lurent ceuxde Saint- mains des séculiers el de personnes !;n(iues
Kènigne de Dijon, de Saint-Denis en l'iance, et mariées. Souvent des hommes riaient
de Saint-Martin de Tours, île Saiiil-Uiquier, abbés de mon.isières de tilles, et des lilles
de Luseuil, et quelques autres, l'ariiii les ou f mines avaient des monasières d'Iiom-
monastères de filles, il y eut ceux de Iteiiii- mes, avec le titre d'abbés, et même on
reniont el de Saiul-Jcun de Lauiic. li y avail en donnait pour dol en mariage.
021 MAU
L'abbaye de Sainl-Mnuricc avait clé déjà
ravagée par les Lombards dès le viii'' siècle.
L'cmpcrnir Charlemagne l'avail fait répa-
rer, mais pllfi fut cncDre brûlée par les Sar-
rasins dans le \^ siècle; et 1rs observances
n'y furent entièrement rétablies que lors-
qu'on y eui mis des Chanoines Réguliers, ou
que les Chanoines Soculicrs qui y étaient
se furent soumis à la désapproprialion et
cureni reçu la règle de saint Auituslin ;
ce qui ne peut être arrivé qu'au commen-
cement du XII" siècle, ou sous le gouver-
nement de l'abbé Hugues, qui avait fait
rebâtir l'église, qui fut consacrée par le
pape Euiiène III l'an 1146. Ces Chanoines
furent en grand crédit; on en demanda en
plusieurs endroits , et ils formèrent une
ciingrégalion dont l'abbaye de Saint-Mau-
rice fut chef. Us portaient un camail rouge
sur le rochel ; c'est pourquoi Guillaume,
comte de l'onthiiMi , Tan 1210, leur assigna
tous les ans treize livres de rente sur
la halle d'Abbevillo , pour acheter vingt-
aunos d'écarlale pour leurs capuces.
L'on trouve dans le trésor des Charles
du roi {l{egist.iii,rium.83), des le'tres diî
r.dllaHme abbé et des religieux de cette
abbaye , de lan 1261, qui portent que
l'iiblié, voulant satisfaire la dévotion que le
roi saint Luuis avait de fonder des mai-
sons de cet ordre, et le désir que ce prince,
^tant dans son abbaye, avait manifesté de
posséder quelques reliques des saints mar-
tyrs de la légion de saint Maurice, il en
avait à cet effet lire quelques-unes du trésor
ile sou église, et les avait envoyées à ce
prince , qui les avait reçues solennelle-
ment en procession accompagné de plu-
sieurs prélats ecelésiastiques et séculiers, et
les avait fait porter dans la ville de Senlis,
[ our les déposer dans l'église ou chapelle
qu'il voulait fonder proche de son château ,
|irétendiint les disperser en plusieurs églises
et monastères de son royaume, où il ins-
tituerait des Chanoines. El, de crainte que
dans la suite il n'arrivât quelque dilTérend
entre lui et l'évèque de Senlis touchant
l'institution de ces Chanoines, il élail de-
meuré d'accord avec Robert, évéque de Son-
lis, que les Chanoines de son ordre que
le roi mettrait dans cette église ou cha-
pelle qui serait dédiée en l'honneur de la
sainte Vierge, de saint Maurice et de ses
compagnons, oliserveraient l'usage et les
cérémonies de l'Eglise de Paris, en faisant
l'office divin comme faisaient les chape-
lains de la chapelle du roi ; que ces Cha-
noines pourraient, du consentement du ro',
en recevoir d'autres sans ea demander per-
mission à l'évèque, qui ne pourrait les
oter pour quelque raison que ce fût sans
le congé du roi , si ce n'était pour cause
de scandale; que ces Chanoines, après la
mort de leur prieur, en pourraient élire un
autre de leur maison , ou d'une autre de
leur ordre sans sa permission ; que l'évè-
que de Senlis et ses successeurs y pour-
raient prêcher, confirmer, donner les or-
dres ci y faire l'office divin , en donnant
MAU
02"2
aele au prieur comme ils n'entendent pas
par là préjudicier aux libertés et privi-
lèges de cette église; qu'il n'y pourrait
faire la visite qu'une fois l'année, du con-
sentement du roi ; que s'il y a quebine
chose à corriger, il en avertira le prieur ;
et si la correction regarde le prieur, il en
donnera avis à l'abbé.
Les reliques des compagnons de saint
Maurice furent déposées d'abord dans une
petite chapelle , et saint Louis ne 6l bâlir
l'église de Saint-Maurice et le monasière
que l'an 1284, et y mil treize Chanoines.
Il y avait aussi un prieuré de cet ordre
à Semur, en Bourgogne, sous le litre de
Saint-Jean l'Evangéliste. Il semble que cet
ordre n'avait que ces deux prieurés en
Franee ; car, selon le raialogue des abbés
de ce monastère que MM. de Sainte-Mar-
the ont donné, Barihélemy de Gorlion ,
soisanle-huilième abbé, visila les prieu-
rés de Semur et do Senlis qui étaient en
France , et les réforma. L'empereur Ar-
noul est marqué dans le nombre des ab-
bés au même catalogue; mais il n'est pas
fidèle , et on n'y peut pas ajouter beau-
coup de foi.
MAURICE ET IIE SAINT-LAZARE (Diîs Chh-
V4LIERS DE l'ordrk DE Saint-) cti Savoii'.
La plupart des historiens qui ont parlé de
l'ordre de Saint-Maurice en Savoie en attri-
buent l'institution à Amédée, premier <luc de
Savoie, qui fut ensuite antipape sous le nom
de Félix V,el disent que ce prince, ayant
aliandonnè ses Etats à ses enfants , se retira
dans la solitude de Ripaille avec quelques
seigneurs de sa cour, où il institua l'ordre des
chevaliers de Saint-Maurice , voulant qu'ils
fussent vêtus d'une soutane et d'un chaperon
gris avec un bonnet, et les manches d'un
camelot rouge et une ceinture d'or avec un
manteau sur lequel il y avait une croix pom-
melée de taffetas blanc. Mais il est certain
que cet ordre n'a commencé que l'an 1572,
(ju'il eut pour instituteur le duc Emmanuel-
I hilbert, et que leur habit de cérémonie con-
siste aujourd'hui en une grande coule ou
manteau rouge cramoisi, doublé de taffetas
blanc , sur lequel il y a une croix aussi de
taffetas blanc pommelé et bordé de bandes
vertes aux quatre angles. Si l'abbé Giusii-
niani eût lu la bulle de Grégoire XIII, lUi 16
septembre de la même année, il n'aurait pas
dit, dans son Histoire des Ordres militaires,
(ju'on ne voyait point sur quel fondcmenl
lîarbosa avait mis l'institution de cet ordre
en l'an 1572, sous Emmanuel-Philhert, et
qu'apparemment il s'était trompé, ayant pris
l'union de l'ordre de Saint-Lazare qui fut faite
la même année avec celui de Saint-Maurice
pour l'institution même de celui de Saint-
Maurice, llest vrai que le pape GrégoireXIII,
par une bulle du IJ novembre 1572, unit
l'ordre de Saint-Lazare à celui de Saint-Mau-
rice; mais il n'y avait pas plus de deux mois
que l'ordre de Saint-Maurice avait été insti-
tué par le duc Emmanuel-Philhert, auquel le
pape en avait accorde la permission par un«
923 DICTIONN.Vir.t: DLS ORDRES liELir.lKVX. Oïl
«iilrc bulle du Ifi scpti m'iri' de la m(}me nn- le mnnlenu, eTceplé les prélats de l'onlrecjui
née, où il ii'e-l fa l .lu^ une iiienlion qu'il yeùl .'Craiciil clirvaliers de justice, et auraient fait
déjà eu en Sa» oie un ordre de Sainl-Mauriee. preuve de noblesse il).
Le pape y déci ire (|uc ee (jm porta ce Lorsqu'on reçoit ces Chevaliers à la pro-
princeà instituer ce( ordre, c'était p^urs'op- f ssoii, ils prorncl'enl d'(^Ire (idéles au duc
poser à riiérésie qui s'inlrodui.vait en le de Sa>oic et à ses succc seurs, <le porter
lemps-là d;in> plusieurs provinces, et dont les l'Iialiit et la croix de l'ordre, de venir au
frontières de Savoie étaient meiiai'érs à cause chapitre lorsqu'il se cclétirera, de dire cha-
du voi-ina',;e d<' (ienéve, qui était le rentre; qu'' jour le psautier abrépé en l'honneur de
de l'heresie de Calvin, d'où elle s'é:a l répau- Jsus-Chri>t, de la sainte Vierge et des saints
due aux environs, et par la bulle d'union que Maurice el La/arc , de jeûner les ve ndredi<
ce pape fil do l'ordre de Saint Lazare à celui ou sainedi<, de garder la chasteté conjugale,
de Sainl-Maurii e, le l.'J novembre de la tiiènie la charité et l'hospilalilé envers les lépreux,
.innée, il j répète l'instilulion qui avait éU'; d'observer les statuts de l'ordre, de m- point
faite depuis peu do celui de ."-ainl-Maurice aliéner les biens dépendants des commande-
sous la règle de Cileaux par le duc Emma- ries, cl de ne les point donner à ferme pour
iinel-riiilbcri, el dit qu'il ne fait celle union uii long temps, ni à bail emphyléoliiiue sans
(lu'.iprès avoir coiisdèré que ce serait un le consentement du duc de Savoie,
grand avantage d'unir l'ancien ordre de Deruard Ciusliniani, Ilisl. Clirnnolotj. (le
Saiiit-l,azare, (|ui n'avait plus de grand mai- (//(' Oïd. mil. Silvest. Maurol., l\Iar. Occan.
Ire et qui était beaucoup déchu de son an rf. /ll^ 7/i /v/jy. Mennenius, Herman et Schoo-
«ienre spicndeu-, à celui de Saint-Maurice nebeck , dans leurs //i'.vf. ils Oïd. mi'/i'r, el
qui ne venail que (b' naîlri! -.Si haiic tctcrem l'.ull. rooi.
{imlitiam) i!li novœcl rtunc nascenti (nljuuye- MAVLUL (SAixr-l. Vou. Somasqi ks.
T 6 mil S I j
On ne peut gu.'re lire cette bulle qu'on ne MLLGHI ILSG/'ORGIENS et MINGKÉLIENS
jette en même temps les yeux sur celle de (Des Moines .
l'iistituiion de l'ordre de Saint-Maurice , On appelle Melcliiies, dans le Levant, les
puisqu'eLes se Irouvcnl de suite loules deux, Syiiens ou Snriens, les ("optes ou Egyptiens,
dans le liullairc romain, el par conséquent ci les autres nations de l'Eglise orien'ale,
liarbusa , Tamburin et plusieurs autres écri- qui, n'étant pas de véritables Grecs, ont
vains ont raison de dire que l'ordre fie Sailli- néanmoins embrassé le sentiment commun
Maurice en Savoie ne fut irsiitué que l'an des tîic.s, el le nom de Melihilcs , c'esl-à-
lo72 par le duc lùiimanuel-Philbt ri. L'union dire royalistes, leur a été donné parce qu'ils
de celui de Saint-Lazare à «et ordre ne fut ont obéi aux décisions du concile de Chalcé-
faite qu'après la mort <leJannol deCastillon, doine avec l'emiiereur IMarcien.Ce furent les
qui en était grand mailrc, et qui mourut à sectaires du Lovant qui donnèrent ce nom
\erceil la même année L'S7i , comme nous ;iux orthodoxes (jui suivaient la religion de
avons dit ail curs. Cet ordre a pris depuis (•« l'emperedr , le mot de Mclchite venant du
temps-là le i;om de Sainl-.Maurici' et de Sain'- mol bel reu l\li Ircli. qui signilic roi ou prin-
Lazare. c:'. Mais b's Melchiies ne sont [las pour cela
Ces Chevaliers font vopu de pauvreté, d'o- présenlemenlorthodoses;carils onlvmbrasse
béissance el de chasielé conjugale. Ils sui- les erreurs des (irecs,ct il n'y a [loint de
vent la règle de (Mteaux , doivent combattre clireliens qui soient si fort opposés à la pri-
pour la défense de la foi catholique, peuvent niautédu pape. Il y a parmi eux des religieux
se m.riiT une fois seulement à une vierge, el des re'igicuscs qui suivent aussi avec les
et le pape Clément VIII leur acroida, en moines grecs la règle de saint IJasile. Les rc-
159G, de pouvoir posséder des benèficrs ou lij'cux ont deux beaux mon istères à Damas,
des pensions sur des bénéfices jusqu'à la elles religieusi s en ont aussi deux qui sont
somme de hOO écus. L'or. Ire a beauc aip de fort riches et éloignés d'une journée de la
commanderies et a deux principales luaisoiis, même ville. Elles gantent la c'i'ilure el ne
lune à Turin cl l'autre à Nice, où les Chcva- sortent point. Les Melchites onicient en hui-
liers viieiitcn commun. L'an lOli), le duc gu(? arabe. C'est ce que j'ai ajipris do [ilu-
(^harles-Emmauuel ordonna que la croix do sieurs Levantins, entre autres de M. Marc-
l'orilre serait blanche et pommelée par les Joseph, pjitriarche <ies iicsloriens , el de M.
bouts avec des bandes verlcs aux quatre an- Saphar, évéque de .Mardin.
gles pour II arquer l'ordre de Sa ni Lazare. I.es Géorgiens suivent en partie la scclc
Mais les (Jievaliers ne s'élant pas mis en pri- des Arméniens, el en partie celle des Grecs
ne d'excciiier les ordies de ce prince . la du- Le prince , quoique tnahomélan de religion ,
chesse Chrisime de France, veuve do N'iclor- nomme aux dignités ecclésiastiques, cl y
Amédée el itiliice de son îils, le iluc < Charles- c'ève ordinairement ses parenis. Leur reli-
Emmanuel II , fil exécuter rordoiin.'inci' du gion n'est guère dilTérenle de celle des ^Ln-
duc Charles-Einmanuel !", et marqua la préliens, el les uns et les autres n'ont seule-
grandeur des croix , défendant ans cleics < l menl que le nom de chrétiens, y en ayant une
aux leligieux chapelains lir l'ordre d'en por- grande partie qui ne sont pas baptisés, par
1er d'or émaillée de bl.iiic, comii.c les Clie- l'ignorance des én'iiues el des préiri-s, qui,
valu r^, devant la poitrine; mais leur ordonna la plupart, n<' savent pas la forme du baplé-
d'rn porter une de laine blanche cousue sur me. C'esl beaucoup lorsque IcCaHiolicos, qui
(I) !"!/., 8 lii liii(!ii vol., Il" îi'-Z.
32.-)
m EL
MIL
ÛIG
est le fhcfdu (lergô, sait lire, aussi bien que
li'S cv(''qiips qui n'ont aucun soin des âmes,
qui ne visitent ni leurs rglises, ni leurs dio-
cèses , et iloiil l'occupation ordinaire est d'ê-
tre dans des festins continuels elde s'enivrer
presque lous les jours. Leur principal revenu
consiste rn ce qu'ils retirent des femmes et
des enfants do leurs vassaux qu'ils vendent
aux TurM.
Ces peuples reronnaissaii nt autrefois le pa-
triarche d'Antioche ; maintenant ils obéissent
à celui de Constantinople, et ont né.inmuins
chacun unprimal de leur nation qu'ilsappcl-
lent Calholicos, et qui ont aussi chacun leur
juridiction particulière. Il y avait autrefois
riouze évêchés dans la Minjrrélie, dont il n'en
rcsie plus que six. Les autres ont été chan-
ces en abhayes, qui son\ iChiaggi, Gippurias,
Cu])is, Obhurgi, Séhastipol, qui a été ruinée
par les eaux, et Annrghia,
Les évêiiues y sont fort riches , surloul le
Catholicos, et la simonie est ordinaire parmi
eux ; car le Catholicos ne consacre point un
évoque, s'il ne lui donne cinq cents écus. Il
ne confesse que pour une bonne si'mme d'ar-
pent; et il y en eut un qui, ayant été mécon-
tent de ce qu'un visir ne lui avait donné que
cinquante écus pour s'être confessé à lui, ne
voulut pas le confesser une seconde fois qu'il
ne lui eût payé auparavant la première con-
fession. 11 ne célèbre point de messe qu'il ne
soil assuré d'avoir cent écus, et l'on double
ordinairement cette somme lorsque c'est une
messe des morts. Comme parmi les évêqucs
il y en a qui ne savent pas lire, ils appren-
nent une messe par cœur, qu'ils disent prin-
cipalement aux enterrements, après s'en être
bien fait payer, à l'exemple de leur Catholi-
cos. Il y a quelques moines qui ont le liirc
et le re\cnii d'un évèché, qui leur est accordé
par le prince, sans être consiicrés; mais,
consacrés ou non, ils ne laissent pas de faire
des prêtres | our de l'argent.
Ces prélats prétendent néanmoins être plus
saints que ceux de l'Eglise romaine , à
cause qu'ils ne mangent point de viande, de
même que les évêqucs grecs, et ils observent
avec le peuple les mêmes carêmes des Grecs.
C'est dans la pratique de ces jeûnes, qu'ils
observent très-mal , qu'ils font consister
tous les devoirs du christianisme. Les prê-
tres ne sont pas plus éclairés que leurs évê-
ques; s'ils savent lire, qu'ils aient appris
une messe par creur, et qu'ils puissent don-
ner à l'évêque la valeur d'un cheval, ils sont
ordonnés prêtres, et se marient autant de
fois que bon leur semble. L'on peut juger
si le peuple est bien instruit, ayant des pas-
ti urs si ignorants et si vicieux : aussi n'a-
t-il pas la moindre idée de la foi et de la re-
ligion, traitant de fables et de rêveries la
vie éternelle, le jugement universel et la ré-
surrection des morts.
Les Géorgiens observent mieux le jeûne
que les Mingréliens et font de plus longues
oraisons. Le prince contraint les ecclésiasti-
ques,et même les évêques, d'aller à la guerre.
11 donne son suflrage avec les évêqucs dans
(I) Voy., àla lindu vol.,n° 235.
l'élection du primat , et tous élisent celui
qu'il leur recoinoande. Ce prélat ne tient
]ioint le premier rang pour le spirituel: m.iis
le prince est le mailre absolu pour le spi-
riinel el pour le temporel, quoique maho-
mélan ; car le roi de l'ei se l'oblige d'embras-
ser la religion de Mahomet pour conserver
sa dignité dans sa famille, et les grands sei-
gneurs du pays se servent des prêtres comme
de valets, méprisent les évêques et les châ-
tient. Les Mingréliens ont plus de respect
pour les évêques, mais ils ont aussi un grand
mépris pour les prèlrcs, à cause de leur igno-
rance et de leur ivrognerie, et nn prêlre n'est
respecté que quand il dit la messe.
Les religieux mingréliens sont aussi igno-
rants que le reste du clergé, et ne sont p.is
mieux instruits des mystères de la religion.
On les appelle C(Vm, et ils son! hahil'és comme
les séculiers, avec cette différence que les
séculiers ont peu de barbe, et se rasent le
sommet de la lêle en forme de couronne,
coupant leurs cheveux en rond au-dessus des
oreilles, et que les religieux laissent croire
leurs cheveux et leur barbe. L'iiabillemenl
des uns et des autres consiste en une chemise
qui descend jusqu'aux genoux et qu'ils ren-
ferment dans un caleçon ou pantalon ; et
par-;lcssus ils mettent une espèce de veste
fort rourle, ou un feutre assez semblable à
la chiamydc des anciens, en passant la lêlc
dediins, et ils le tournent comme ils veulent,
du côté que vient le vent ou la pluie; car il
ne couvre que la moitié du corps, et ne des-
cend que jusqu'aux genoux. Leurs souliers
ne sont que d'une semelle de peau de bulflc
qui n'est point pré|iaréc , et celte semelle
s'attache aux pieds avec une courroie do
même peau qu'on lace par-dessus : que'q'ies-
uns disent qu'il n'y a qu«^ les religieux qui
portent celte espèce de veste (1).
L"on ne fait pas grande cérémonie pour la
réception de ces religieux. Leur vocation
vient de leurs parents, qui les consacrent
dès L'ur enfance en leur mettant sur la tête
une calotte noire qui leur couvre les oreilles,
leur laissant croître les cheveux, leur recom-
mandant de s'abstenir de manger de la viande,
el leur disant pour toute raison qu'ils sonl
Bères. C'est ce que les enfants observent,
sans savoir ce que c'est que d'êlre Bères.
On les donne ensuite à d'autres Bères pour
les élever, et ceux qui les donnent à des moi-
nes grecs réussissent mieux.
Les religieux géorgiens en savent un peu
plus que les Mingréliens, el la plupart des
chrétiens de la Géorgie sont instruits des
ni) stères du christianisme dans les monastè-
res,oii ils apprennent aussi à lire el à écrire.
Ces religieux sonl habillés comme les moines
grecs, el se disent, aussi bien que les reli-
gieux mingréliens, de l'ordre de Saint-Basile.
Il y a aussi dans la Géorgie et la Mingrélie
des religieuses. Comme les Géorgiennes sont
estimées les plus belles femmes de l'Asie, dès
qu'une tille est un peu grande on tâche de la
dérober, et d'ordinaire elle est enlevée par
quelqu'un de ses parcnis qui la va vendre en
f!<i7 niCTIONNAlIlE DES ORDRES RELIGItLX. 998
Turquie ou ei\ Perso. CVsl ce qui f.iil qtie mais celles qui soiil ;i la campagne ne sont
les pères el mères roiifcriniMit (le lioitne lu ure p.is plus propres que les é|;Iises pnioissi.iUs
leurs filles dans lies nuuinslères, où 1.1 plupart îles Miii;;réliens. Ceux qui dcmeurenl en
s'appliquent à l.i Icrlurcel jdenieureul loulc icrrc ^ai^lc sont unis et obéissent au p.ilriar-
!eur vie. L'on (lit qu';i(irès 1.1 profession, lors- clie de Jérusalem. Us ont abandonné les
qu'elles sont p.ii»eiine> à un certain â^e, saints lieux qu'ils possédaient, savoir une
elles ont permission de baptiser et même des cliapelles balies sur le mont Calv.-iire,
d'appliquer les saintes bu les aus>.i bien dans l'endroit où fut plantée la croiv de
qu'un évèque. Leur h ibillement est sembla- Noire-Seigneur Jesus-Clirisi, l.iqnellc dia-
ble à celui des aulres femmes {léorgiennes, j, elle ils jm aient oblenui' lorsque l'empereur
()ui sont loiilrs liabillée> à la persane. La i^olini.in entra dans Jérusalem. Ils ont aussi
d.lTerelice qu'il y a enlrr les religieuses et les (initié b' monastère de Sainte-Croix qui est .i
aulres femmes , c'est que l'Iiabiliemenl des demi-lieue de Jérusalem, dont l'église fut
religieuses est noir, ei (|ii'ellcs ont un voile bàlie a l'endroit où fut trouvée la vraie croix,
et un linge (|im leur couvre |iresqnc tout le Ils ont laisse ces églises en gage aux Grecs,
vis^!ge, de sorle qu'on ne leur \oit qiie les (lui avaient payé pour eus aux Turcs et aux
yenx, selon ce qu' m'a dit un ijrélic géorgien Juifs des sommes ton-idérabics. Parmi les
à qui je ni'en suis informé; ce loile estau-si niunaslères du mont .Mbos, celui qui porte
cunnnun aux aulres femmes pers mes qui en le nom des (léorgiens est destiné pour re-
ontdc différents pour la uiaisonet lorsqu'elles cevoir les religieux de celle naiiou, el le
sortent, y en ayant même qui les couvrent patriarclie de Constantinople envoie souvent
depuis la léle jusqu'aux pieds. 11 y a leau- en (îéorgie des caloyers |)our entretenir le
coup plus de monasièrcs de lilbs que d'Iioni- peuple dans le scbismc a\ec le pipe,
mes, (e (|ui f.iii que les femmes el les tilles Le cbevalier Cbardin et Tavernier, Voi/a-
sonl mieux instruites cl savent mieux leur ycs du l'erse. \.c \'. Lnmheri'i. dans le Recueil
religion (]iie les hommes. de Thrvenol, et dom Joseph Zampy, Théalin,
A rega:d des religieuses niingréliennes, licUtlion de Miiigrelie.
il y en a de plusieurs sortes. Les unes sont des Au dernier siècle, bs moines Melchiles
(illcs qui, ayant alleinl l'âge nubile, ne se orientaux avaient à Uuine le monastère de
«uucienl pas du m.iriage. Les aulres sont des Sainte-.Marie in IJumnicu. Aujourd'hui ils y
servantes qi.i, après la mort de leurs niailres, ont encore une maison gouvernée par le ré-
se font /?('»■£.< avec leurs niailressis. D'aulres vérendissiaie P. Joseph Ziegeb, abbé géné-
si>nl des veuves qui ne veiib al point se ma- rai et procureur. B-ij-e.
rier. D'autres sont des fema.es qui, après MEKCl (Uemgiel^e de ia). Voyez Mebci
avoir trop goû;é du monde, l'abandonncnl (Ordre de l\).
quand elles \ienni'nt sur l'à^e et qu'elles se »irc>/-i ir, ^ „.. . .\ m
^ • , ... i>. , I i' r Me.RCI (OnDBE de i.a) 1 .
voient inej rise. s. D aulres sont des femmes i.n.i.^. ^^v- ; i i
répudiée-, cl d'autres enfin se font religieuses § 1". Origine de l'ordre de yolre-Damc de la
par paiivrclé. Celles-ci demandent r..uiiione Merci pour la rédemption des captifs, avec
dans les églises, el on leur donne plus libe- la Vie de saint Pierre .\olasque, fondateur
ralcrnenl, en considcralion de leur b.iblt. de cet ordre.
Toutes ces religieuses sont vêtues de noir à 11 y a deux ordres dans l'Iîiilise dont la (in
la jersane, oui la léle couverte d'un voile de principiile est de délivrer des mains des inli-
la même couleur cl ne mangent jamais de .ides les chrétiens qui gémissenl sons le
viande. Elles ne gardent (las la cb'>lure et ne jo.jg d'une dure captivité : l'un est celui des
sont pas engagées pour toujours à la vie mo- l'rinitaires, dont nous parlerons en son lieu,
naslMioe, mais elles la peuvent 4iuii;cr quand (;i l'.iulrc est celui de Noire-Dame de la
il leur pl.iii. jMerci , dont nous allons parler. Le premier
P.irmi les Mingrclicns, il n'y a que les a l'.ivant.ige d'avoir eu Dieu même pour
églies c.iihédrales, celles des abbayes el cel- fondateur, qui , par des visions el des signes
les des lièris ()ui soient un peu propres, les niiraeuleux, a fait connaiire ses volontés
églises paroissi.iles étant plus sales que des dims rélaldissemcnl de ci'l ordre , auquel
.(.■labiés. Les ornements sacerd ilaux des évé- toutes It^s personnes de la sainte Trinité oui
qucs el des Itères sont aussi assez propres, eu part: c'est pourquoi il a pris le nom de
élant de soie el brodés d'or; mais ceux des la s.iiui.- Trinité. Mais ce l'ère des miséri-
prères séculiers, qu'on ajipelle p.ipas, n'ont eordes a voulu ausai qu'il V en eûl un sous
aucuni- ap|)arence, le jilus souvent, d'b.ibil- [^. nom de la très-sainle Vierge, qui appa-
Icments sacerdotaux, leur pauvreté les obli- ^ul à saint Pierre Nolasuue, Français de
geanlà seservir de qiielquegncnilledécbirée nalioii , |a)ur lui faire exeeuler celle (iilre-
eii guise de pluvial. Il y en a inèmeplusii-iirs pri>e.li'cst |)Our(|uoi l.i France se do t glori-
<iui diseiil la messe avec une simple chemise li,.,- (]';,voir fourni à l'Kglise les saints | er-
<!e tuile (|u'ils mellcnl sur leurs babils: aus-i ionnages doiil Dieu s'est seivi pour exeeuler
le peupb; n'a-l-il guère de dévotion à leurs si:r la terre ce qui avait éle projeté dans le
i:i. sses. On a plus de respecl pour la messe < jfl, en dioisissanl saint Jean de .Mallia, cl
des lières, (|ni ont d.ins leurs églises, en fort s.iinl Félix de Valois pour l'elablisscnenl
biin élal, les choses requises pour la celé- d,; l'ordre des Trinilaires , el sainl l'ieir«
hrer. Les (iéorgiens enlreliennenl assez N.dasque pour l'établissement de celui de
bien leurs églises qui soiil dans les villes ; Notre-Dame de la .Merci
(1; lui/, il U lin du vul., Icî 11' 2Ji à 1^.<.
«20
MEIi
Mf;p.
^'(^
Sainl Pieiro , suriioinuuî Nol.isqiio du nom
de son père, iiaquii au pays de Laiir iguais,
en Languedoc, vers l'.m 1189, dans un iioiirg
dudioièse de Saiiil-Papoiil , appelé /e I\l:is
lies santés Puetles, à une lieue de Casleliiau-
(iary. Il fut élevé dès sa jeunesse dans tous
les exercices de la noblesse, étant sorti
d'une des plus illustres fainillcs de tou e la
province; el ajaiil perdu son père à l'âiiedc
quinze ans, il demeura sous la lulclle de sa
mère, qui eût bien voulu l'engager au ma-
riage, en lui t'.iisaiil prendre un parti conve-
nable à sa condition , alin de trouver du
support el de la consolation dans ce soutien
de sa famille. Mais Pierre, inspiré de Dieu,
n'avait déjà que du mépris pour les choses
do la terre , et avait pris la résolution de ne
s'attacher qu'à Dieu. Il s'engagea néanmoins
à la suite de Simon, comte de MoiiIVrl,
d ins le même ten'ps que Pierre II, roi d'A-
ragon , se voyant attaqué de tous les côiés
par ses ennemis, confia ie prince Jacques ,
son fils et héritier presomplil", à ce même
comte, afin (ju'il lui donnât asile {tendant
les troubles de la guerre. Le comt:\ s'esti-
iuani honoré de la conduite du petit prince,
jeta les yeux sur Noiasque pour avoir soin
lie son éducation et lui servir de gouverneur.
Mais ce prince, qui avait é!é d'aiiord le gage
de l'estime que le roi d'Aragon taisait de 1 i
personne du comte de Moutlort, servit peu
de temps après de sûreté à ce méuie comt;' ,
contre la periidie du roi so:i père, qui, s'é-
tant ligué avec les comtis de Toulouse, de
Foix et de Cominge, cliels deshérétiquesal!.!-
geois, vint assiéger, l'an 1213, la petite ville
de Muret sur la Garonne av; c une armée de
cent mille hommes, et même de deux cent
mille, SL'Ion quelques hisloriens. Ce grand
nombre néanmoins n'étonna p;is le brave
comte de Montlort , qui, n'ayant au plus
que douze cents hommes, ne craignit point
d'attaquer ses ennemis, qu'il mit eu déruutf,
et gagna cotte fameuse l)atailie de Muret où
le loi d'Aragon fut tué. Ainsi ce prince, qui
quelques mois auparavant avait lui-même
remporté une victoire signa'ée sur les Sar-
rasins, dont cent mille étaient restés couchés
sur le champ de bataille , et qui quelques
jours après en avait encore battu plus de
cinquante mille, ne put résisler à une peti-
te armée de mille à douze cents hommes qui
combattaient pour la défense de l'Eglise.
Le comie de Aiontfort, qui d'ailleurs avait
toujours été ami du roi d'Aragon , ne put
s'empêciier de verser des larmes sur le corps
de ce prince. Quelques historiens ont avancé
(|ue ce ne lut qu'après la mort de cet iolor-
luné roi que le comte de iMontfort , qui avait
compassion de la faiblesse el de la minorité
du roi Jacques son (ils, âgé de six à s.pt ..n-,
qu'il retenait prisonnier à Carcassonne, lui
donna Pierre Noiasque pour gouverneur.
Mais que ce soit avant ou après la mort de
ce prmci', il est certain qu'il eut la conduite
de ce jeune roi, et qu'il le suivit à Barce-
lone lorsque le comte de Montlort lui eut
rendu la liberté l'an 1215. il tâcha de lui ins-
pirer la j)iétc envers Dieu el son Kglie,
l'imour de la justice et de la vérité, et de
l'accoutumer à toutes les pratiqurs convo -
riables à un prince chrélien. P.tur lui, ni les
divertissements de la cour, ni les fivi'urs de
son prince, ne l'empéchèienl (a^ de s'appli-
quer aux pratiques de la morli(ic;itioii et de
la prière. Il avait quatre heures d'oraison
ni irquées dans le jour, el deux la nuit. Il
s'occupait aussi à la lecture de l'Ivcrilura
sainte, et donnait aux exercices de la péni-
tence le temps qu'il n'était pas ob ii;é d'cni-
l)'oyer aupiès du roi. Il se senti! dès lors si
vivement touché de compassion pour les
pauvres chrétiens iiui étaient captifs sous la
puissance des M.iur(!s el des baitiares, qu'il
résolut de sacrifier ses biens à leur déli-
vrance.
-Mais quel fut son étonm ment et sa sur-
prise, lorsque, dans le temps (lu'il prenait
les mesures nécessaires pour exécuter cet'e
œuvre de miséricoide, la sainte Vierge lui
apparut, la nuit du prem er jour d'août 1218,
pour lui dire que c'était la vulonté de liieu
qu'il Iravaillâl à l'élablissemont d'un ordre
dont les religieux s'obligeraient par vœu
particulier de s'employer au rachat des cap-
tifs 1 (Jomme il ne faisait rien sans consulter
s;:inl Uaymond de l'égnal'oit, son confesseur,
qui n'était encore que chanoine de Barcelone,
il le fui trouver j)our lui communii|uer cetia
vision. Sa surprise aoginenla loisiu'il apprit
de ce sainl (|u'il avait eu la même vision, et
que 11 saints Vierge lui avait ordonné de le
fuiiifier dans ce dessein. Ainsi, ne doutant
poi:il (jue ce ne lui la volonté de Dieu, il lui
ren il grâces de l'avoir ch'.isi po.ir être l'ins-
trumoatile ce grand dessein, il le jiria d'ôler
tous les obstacles qui pourraient eu empê-
cher l'exécution, el de d uiipter tout ce (]ui
pov fiait y apporter de la résistance. Dès
lars ces deux saints ne songèrent plus qu'aux
moyens d'en procurer rcir.t: mais comme il
fallait le constiitemenl du roi et de l'évèque,
ils allé" eut trouver d'abord le roi, qui !-es
écoula avec joie, el ne pouvant contenir la
satisfaction qu'il ressentait de voir l'explica-
tion de la vision qu'il avait eue comme eux
la même nuit, il offrit de contribuer à cette
sainte entreprise par son au'orité et ses lilié-
ralités : il se chargea même de faire agréer
ce nouvel établissement à l'évèque de Barce-
lone, Berenger de la Palu, qu'il envoya eu
même temps prier de se rendre au palais.
Ils conléièrent ensemble sur l'apparition de
la sainte Vierge et sur les ordres exprès
qu'elle leur avait donnés à tous trois sépa-
I émeut. L'évèque trouva de la diflicullé dans
la fonilal;oii de cet ordr', à cause que le
concile de Latran avait défendu, il n'y avait
pas longtemps, qu'on n'établit aucun ordre re-
ligieux sans l'approbaiion et le consente-
ment du sainl-siege; mais, prévoyant d'ail-
leurs la grande utilité qui en rc viendrait à
riîglise, il y consentit, et crut qu'en celte
occas.on on pourrait se servir d'un induit
que les papes tirégoire Vil et Urbain H
avaient accoi dé au roi dom Sanche pour lui
et pour ses successeurs, en considération des
grands ser\iccs que ce prince avait rendus a
M
WCTlON.NAlliF, DFS ORDRES llF.LKilFXX.
l'Kgliso, en vertu duquel ils pouv.iienl ériger
dans luule l'ctcniiue de leurs l'ilals des pa-
roisses, des confréries , des rnoiiaslôres el
inéine des ordres religieux, sans qu il fiil
besoin de ronsuller le sainl-siégc.
Dès l'an llD'i, i)lusieurs penlilshommes
dc-i premières familles de Calalo^ne, exeilés
par rcxemjdi' (11' (]ui"l(]ues personnes pieuses
qui eniplojaii'iil leurs soins el leurs biens à
des œuvres de charilc el à raclieler des es-
claves eliréliens , fornièrenl entre eux une
rongrégalion que le roi Alphonse V appelait
ordiiiaireuienl son ouvrage, non-seuiein int
pour en avo r permis rétablissement, mais
pour y avoir donné des fonds considérables,
pour contribuer avec eux au secouis des
chrétiens qui et lient capiifs chez les Maures,
ou rcduiis à la nécessité. L'occupation de
ces gentilshommes était de servir les malades
dans les hôpitaux, de vi^iter les prisonniers,
de procurer des aumônes pour le rachat des
chreiiens, et de garder les cotes de la Médi-
terranée pour s'opposer aux descentes des
M.iurcs cl des Sarrasins.
La [ilus grande partie de ces gcntilhom-
ines cmbrasscrenl d'autant plus volonlieis
le nouvel ordre delà Merci avec saint Pierre
Noiasque, qu'ils se sentaient portés à conti-
nuer ces œuvres de miséricorde qui en
étaient la lin. Quelques prêtres qui étaient
agrégés à celle congrégation, dans laquelle
ilss'eiaient rendus recouimand^bles parleurs
exercices de charité, sollicitèrent aussi saint
Pierre Noiasque de les recevoir, ce qu'il lit
par le conseil de saint llajinond de l'égna-
i'orl, qui lui représenta que la perfection de
l'état religieux consistait dans l'union insé-
parable des exercices de la vie aetive et de
la contemplative, l'un regardant le service
de Dieu, l'autre celui du prochain. Saint
l'ierre Noiasque admit avec joie ces vertueuv
prêtres, qui composèrent avec les Chevaliers
l'ordre de Notre-Dame de la Merci, lequel
fut d'abord institué en qualité d'ordre mili-
taire; car les laïques qui s'y cngageaienl
taisaient profession d • delendrc la foi les ai-
mes à la main, et de s'opposer aux courses
des Maures.
Le jour de saint Laurent fut destiné pour
faire la cérémonie de rinslitulion de cel or-
dre. Le roi, accompagné de tonte sa cour et
des échevins de la ville de Itarcelone, se ren-
dit dans l'église cathédrale, appelée Sainte-
Croix (le Jérusalem. L'évèijue itérenger ofii-
cia ponliiiualement. Saint Uaymond monta
en chaire, el après l'évangile il i)rotesla de-
vant tout le peuple que Dieu avait révélé mi-
raculeusement au roi, à l'ierre Noiasque et à
lui-même sa volonté louchant l'inslitulioii de
l'ordre de Noire-Uame tie la Merci pour la re-
dem]ilion des captifs. A l'issuede l'ollrande, le
roi et saint Uaymond présentèrent le nouveau
londatetir à l'évéque, qui le ie\ élit de l'habit
de l'oriire. Saint l'ierre Noiasque, apiès l'a-
voir reçu, le donna connie principal londa-
lenrà treize genlilsliumme-, ()ui fiireiil (îuil-
lauiue de lias, seigneur de Montpellier ,
Arn.iud de Carcassonne, lils de la vicomlcs>c
dcNarbouiie, son cousin, lîernard de Corbare,
Uaymond de Montiolou, Uaymond île Mon-
cada, Pierre Ciuillaunie de Cervelon, Domi-
nique d'Os-o, Uaymond d'Ulrecht, (îuillau-
me de Saint-Julien, Hugues de Mallia. Uer-
nard d'Es'-om.e, Ponc("sS .lares, et Uaymont^
Blancs, tous ihcvaLers ou confrères de la
congrégation de Noire-Datiie de Miséricorde,
qui, outre les trois vieux (udinaires, en llrent
aussi un qualriènie, aussi bien que saint Pierre
Noiasque. par lequel ils s'obligeaient d eiii^a-
gerleur propres per-.onnrs, et de demeureren
captivité, s'il était nécessaire, pour la déli-
vrance des captifs.
Comme ils étaient six prêtres et sept che-
valiers, leurs babils furent dilTèrenls. Ceui
des prêtres consistait en une tunique ou sou-
tane blanche, avec un scipulaire et uni-
chape : celui des chevaliers élail b'.anc.iussi,
mais purement séculi. r, à la réserve d'un
petit scapulaire qu'ils metiaient sur leur ba-
bil. Le roi, pour témoigner son amitié à ces
nouveaux religieux, et leur donner des mar-
ques de sa proieclion, voulut qu'ils po las-
sent sur leur scapulaire l'écusson de ses
armes, qui étaient de gueules à trois pales
d'or, auxquelles il ajouta en chef une croix
d'argent, p.iur marquer le lieu de la naissance
de ces religieux, qui étaient presque tous
Franc lis, à cause qu'ils portaient aupar.ivant
cette croix dans leurs étendards, selon la re-
marque de quelques historiins, qui assurent
quelesFrançais qui coinbatlaienl en U-p.igno
contre les Maures portaient une iroii
blanche dans leurs drapeaux, pour se distin-
guer des Espagnols. (Juelques-uns ont néan-
moins prétendu que celle croix leur fui don-
née par l'évéque Uérenger de la Palhi .
comme étant les armes de son église qu'il
avait voulu joindre à celles du roi.
La messe étant achevée, ce pr.nce condui-
sit saint Pierre Noiasque avec ses reli-
gieux à son palais, dans le quartier qu'il
leur avait fait préparer pour leur servir de
monastère, qui a été le premier de l'ordre, où
ils gardèrent csactcmenl l.i manière de vie
(;ue saint Uaymo ..d leur prescrivit, en atlen -
d:;nt que le saint-siège leur eût déterminé
une règle particulière, et ils obéirent à sainl
Pierre Noiasque, que le bienheureux Uay-
mond eiablil aussi gr.uid commandeur. La
chapclledu roi d'Aragon, dédiée à sainte liu-
lalie, leur servit d'église, qu'ils possèdent en-
core à présent, le supérieur de ce monastèie
ayant la qualité de vicaire de la cour, et les
religieux celle de chapelains du roi.
Ces religieux s'employèrent d'abord à ra-
cheter quelques captifs, cl ne sortaient pas
pour cela des terres sujettes aux princes
chrétiens. Mais s;iint Pierre Noiasque leur
représenta que, pour la perleeiion de leur
ordre, il lallait encore p.tsser chez les inlidè-
les, et délivrer leurs frères de la cruelle
servitude de leurs ennemis, au danger même
d'y deiniurer en esclavage en leur place,
suivant le vieu qu'ils en avaient fait au
pied des autels. Il ne s'agissait pas d'y aller
lous à la lois, mais de dépuli r un d'enlio
eux pour ces saintes négociations , (piou
appela dès lors, conwne on les appelle eu-
^-^ Mi:n
corc à présiîiil, ré Icinploi'.i's. Il fut liii-
in<^ine rhoisi avec >iii s'^cond pour fraypr
;iux autres le chemin d'un voyage si p;'-
rillcnx. 1-e premier qu'il fil nu royau-
me de Valence , occi^pé pour lors par les
S.irrasins, fui fort Iicimtux. Il en fit un se-
cond au royaume de Grenade, (lui ne le
fut pas moins, de soitc qu'il relira quatie
cents esclaves d'enlre les mains des inlidcies
en ces deux expédiiions.
r,cs heureux comm 'ncemcnts donnèrent
(|nel(]uc répulali n à l'ordre de la Merci.
(Quoique le papi; rîonorius III l'eiit .ipjirouvé
de vive voix, saint Pierre NolaS(iui! jugea à
propos d'tu poursuivre la confirmation, et
pour l'oblenir il employa le nédil de saint
Hayniond, qui allait à Home où le pape Gré-
goire l\ l'avait appelé. Ce saint accepta vo-
lontiers celte commission, el trouva le pape
à Pérouse le l" décembre 1229, auquel il
présenta les frères Arnaud d'Aymeri el
Bernard de Corbaro, que saint l'ierre No-
lasque avait envoyés pour solliciter celle
confirmation ; le premier représentait les
chevaliers, el l'autre les prêtres de cet ordre.
Ils obtinrent du souverain pontife, l'an 1230,
ce qu'ils souhaitaient, après quoi ils se mi-
rent en chimin pour retourner en Caialogne.
L'ordre s'augmenlant de jour en jour, et
les fréquentes rédemptions, jointes à la vie
exemplaire des religieux, le rendant Irès-
célèhre, plusieurs gentilhomin:'S de France,
d'Allemagne, d'Espagne, d'Aiiiîielerre el de
Hongrie, embrassèrent cet institut. Leur
nombre fut si grand, que sainl Pierre No-
lasque, qui souhaitait depuis longicmps sor-
tir du palais où le roi lui avait fait l'honneur
de le loger avec ses religieux, prit occasion
de leur proposer la nécessité où ils étaient
de bâtir un couvent régulier où ils pussent
vivre dans une plus grande récolleclion, et
vaquer avec plus d'application à leur pro-
fession. C'est ce (jui fit qu'ils bâlireiil, l'an
12i2, un couvent magnifique par les libéia-
lilés du roi, par les aumônes île quelques
seigneurs de la cour el par celles du peuple
de liaicclone; c'est ce couvent (]ui est le ch'f
de leur ordre , et qui fut dédié à sainte
Eiilalie, vierge el martyre, patronne de la
ville de Barcelone.
Jusque-là ils n'avaient vécu que confor-
mément aux règlements el aux statuts qui
leur avaient été procrils par saint Raymond
de Pégnafort, qui peut passer pour le second
fondateur de cet ordre, ce qui dura jusqu'en
l'an 1235, que, souhaitant joindre à ces règle-
ments une des règles approuvées par riîglise,
saint Pierre Nolasque envoya sainl Kaymond
Nonat à Home en qualité de procureur géné-
ral de l'ordre, pour en obtenir une du pape
Grégoire IX, que ce saint trouva encore à
Pérouse, el qui leur accorda celle de saint
Au;;ustin par une bulle daiée du 8 janvier
1235, en confirmant derechef cet ordre.
Saint- Pierre Nolasque, ayant reçu celle
bulle, fil faire de nouveau profession aut
relig'eux qui se trouvaient au couvent, eu
faisant vœu de gauler la règle dt saint Au-
gustin, se conlenual de fLiire savoir à ceux.
qui étaienl dispersés dans pliisieiiis provin-
ces la confirttialion auihciilique do l'ordre,
et qu'ils eussent à observer la règle de saint
Augustin qui leur avait été donnée par le
paiie, avec les c lustiiulions qui leur avaient
été prescriles par saint H lyin )ad de Pégna-
fort. Mais deux ans après il jugea à propos
de rassembler tous les religieux à lî.uceloiifi
pour recevoir la [irofes^ion de (eux qui ne
l'avaient |)as renouvelée. Ce fui donc, dans
ce chapitre général, qui se lint l'an 1237,
qu'il fut oidonn.' qu'>»M recvr.iil p'us de re-
ligieux pour le chirur que de chevaliers.
Comme ces derniers et. lient véritablement
rel gieux et eiigaés par vani, ils assistaient
à tout l'office d vin, tant de jour que de nuit.
Lorsqu'ils restaient au couvent, ils mettaient
par-dessus leur habit, qui était semblable à
celui des séculiers, à la réserve du scapu-
lairc, une chape comme les religieux prêtres.
Les historiens de cet ordre prétendent que
celle crdoniance du chapiire donna lieu à
saiit Pierre Nolasque d'exécuter la résolu-
tion qu'il avait prise depuis longtemps de se
faire [iréire, et qu'il célébra sa première
messe à Murcie, après que le roi Jacques
d'Aragon en eut chassé les Maures. Ce sen-
timent a élé suivi par le P. Giry, Minime
( i' les des suints ), pour les raisons qu'en a
données le P. Mue Salmeron, général de cet
ordre, qu'il a trouvées convaincantes : c'est
néanmoins ce qui a persuadé M. Uaillel (t les
(/«< suintx) que ce saint n'a pas élé préire,
parce que le roi d'Aragon ne prit cette vil'e
que l'an 12IJ6, c'esl-à-dire dix ans au moins
après II mort de notre sainl, qu'il met en
125G. Mais cj n'est point celle raison de
M. H illet qui me détermine aussi à croire
que sailli P. erre Notas lue n'a pas été prêtre,
parce que ce saint aurait pu célébrer la
mess • d.iiis Murcie dès l'an 12'il, lor-que
(Ion Ferdinand, roi de Castille, par le Ir lité
(lu'il fil avec Alboaquis, ou, sebin quel(|ues-
uns, Aben-Hudiol, loi de Murce, l'une des
coiiditi MIS fut que ce prince maure demeu-
rerait v issal du roi de Castille, que les re-
venus de ce royaume seraient partagés éga-
lemeni, et que la lorleresse de Murcie serait
livrée à l'infant don Alphonse, ce qui fut
exécuté. Ce qui me convainc donc que sainl
Pierre Nolasque n'a point été prêtre, c'est
que, comme l'ordre de la Merci a élé un or-
dre militaire dans le commencement, il a été
gouverné par des commandeurs la'i'qucs, el
l'autorité a toujours élé entre les mains des
chevaliers jusqu'en l'an 1317, que le P. Kay-
mond Alberi, huitième général, fut le pre-
mier général prêtre : d'où je conclus que si
saint Pieire Nolasque avait été p. être, el
étant prêtre avait gouverné l'ordre en qua-
lité do général, les chevaliers la'jques n'au-
raient pas regarde comme une nouveauté
l'élection que firent les prêtres, dès l'an 1308,
après la mort d'Arnaud d'Aymeri, sixième
général, de la personne de ce Kaymond
Albert p ur lui succéder, et ils n'auraient
pas refusé de lui obéir en élisant de leur
côté Arnaud P»ossignol , chevalier laïque;
et le [lape Clémeul V, qui cassa l'élection
95r. nic.ri;>N.N.viu;. Dr.s oiuinKs m;i,u;ii:L\. ^^'"'
(le ce dernier, comnip n'élanl pns cnnoiii- osrlnvps chr6liens, on le cliaigea de chaînes,
que , ne l'oûl pas rcl;i'ili romin.indour pé- on le lit coinparaitrc en juslic , comme un
lierai de loul l'ordre p.ir autorité apo>to- voleur, un séducteur et l'auteur de la fuite
liijue, s'il y a^ail eu jusntie-li un exemple dos esilaves. Le cadi ou juge, ne trouvjint
de quel(]ue piéire qui eût été général, et il néanmoins aucune prouve contre lui, n'osa
n'aurait pas manqué d'approuver l'élection le conilamner ; m lis notre safnt fondateur,
d(! Haymoiiil Albcrl, qui était faite selon les désirant de souffrir et craisiianl qu'on ne lit
formes par le (lus grand nombre des caiiilu- quelques mauvais traitements aux autres
lanls. Mais le défaut que ce pape y trouva capliN à cetle occasion, s'offrit délie esclave
apparemment, c'est qu'on avait choisi un à la place des fugitifs. Leur maître, égale-
pi cire contre la c>utnme de l'ordre, et sans ment avare el artificieux, voulant avoir do
en avoir consulté le sainl-siége; c'est pour- l'aigent el se venger, aima mieux retenir le
quoi il élablil pour gênerai un chevalier, cl religieux qui acionipagiiail saint l'iene No-
il ordonna en même temps que, comme les lasque, lémoiguaiit vouloir envojer le sai: l
prêtres claienl eu jilus grand nombre, on en Lspagne pour f.iire la somme qu'il e\i-
élirait à ra\enir un prclre pour jiénéral, geail. Il lit meUre deux t;irtanes en mer, dans
après la mort d'Arnaud K"Ssi|itiol. l'une desquelles qui faisait eau de tous cotes.
Le chapitre généra' que saint Pi rre No- il le lit embarquer, avec ordre aux matelots
lasque avait coiivi;que à IJarcelonc l'an 1237, que, dès qu'ils seraieni en pleine mer, iis
roMimc nous aviins dit, ayant été termine, ahandunnassenl la larlane sans voile ni gou-
il aurait bien voulu eonlinuer ses cliarita- vernail, el qu'au retour ils feignissent «lui'
Ides fonctions de lé.lempleur; mais comme la tempête avait perdu le bàliment ou était le
le roi d'Aragon, aiirès la conquête de .Major- chrétien. Ci l ordre fut cxecuie, mais non
que sur les infidèles, porta ses armes d.nis pas avec le même succès que préiendail le
le royaume de Valence, l'interdiction du b.irhare; car Dieu garantit saint Piei re No-
comnii rce et les actes d'hostilités de part et lasque du naufrage, elle lil lieureusemenl
d'autre conlraignirenl saint P. erre Nolas ;|i:e abordi-r à Valence, lui ayanl servi de guide
d'interrompre ces pieux exercices d rant dans le chemin.
quelque leu'ps. Cependant cela ne laissa pas Etant arrive à liareelonc, il se démit de l'of-
d'elre avantageux à la rcdeniplion des cap- fice de rédempeur, qui, comme nous avons
lifs, tanl par les victoires fréquentes cl si- dit, était le nom qu on donnait à ceux qui
gnalées que le roi d'Aragon remporta sur les élaienl dépuiés pour aller chez les infidèles
infidèles, que par l.i fondation de plusieurs racheter les capiifs, cl ayanl as.semblé les
monastères de l'ordre qu'il fil dans les pays principauv. lie l'ordre, on procéda à l'éleclion
conquis, llluidnnnalecliâteaud'ljiiéza, eu re- d'un autre rédempteur. Le sort tomba sur
connaissante de la vliloire qu'il avait plu à Guillaume de lias, qui, l'an l:iV), lui aussi
Dieu de lui faire rem|iorter sur les ie.fidèles, élu général de l'ordre, lorsijue sainl l'icne
el il y lit bàlir un beau îuonaslère, qui esi de- Noiasque se démit pareillement de col office
venu célèbre d.ius la suilc sou^ le no::i de pour \ivre dans la retraite et l'obèissaiii e.
Noire- Dame de l'ueh, pour la dévotion (juc comme le dernier des religieux. Le saint
les peuples oui i ue pour une image de la fondateur, se voyant libre, se réduisit aux of-
sainte \ n-rge qu'on a trouvée dans la terre fiées les plus bas cl les plus humiliants de la
en travai.lant aux fondeiiien s de ce moii.is- communauté. Use chargea volontiers de celui
1ère. Le même loi ayanl pris ensuile la ville de faire ladislribulion dis aumônes à la jinrlc
de Valence, avec le secours de la noblesse du monastère, parce quecela lui donnailocca-
fianraise, la première adioii de ce prince, sionde s'entretenir avecles pauvres cl de les
après son entrée dans la ville, fui de faire ius'.ruire. Il alla visiter le tombeau de saint
consacrer la grande mosquée par rarehevê- Ka)moud .Nonat, qui étailmort il y avait déjà
que de Narbunne, pour servir d'église < athé- q. inze ans, et qui faisait bcauenup de uii-
drale sous le litre de SaiiU-.\ndré; el il dunua racles. Les chanoines de Colsonne, a qui ap-
aux religieux de la Merci une autre mosquée parlenait la chapelle où les reliques de ce
avec les bâtimenls joi^juanls pour en faire saint reposaient, rolTrirenl à saint Pierre
un monastère. Noiasque pour y bât.r un couvent de son or-
Saint Pierre Noiasque, après avoir accom- dre; il accepta leur olïre, prit possession de
mode cette maison et l'avoir mise eu bon éial cette cliapelle, el fil travailler à un nouveau
enire le> mains de quelques religieux, re- bdliment pour y loger les religieux.
l(nirna a ll.ircelone ; mais il n'y fut pas long- L'éclat des vertus de ces religieux el la bé-
lem|is sans se disposer à se mettre en eaui- nédiclion que Dieu répandit sur l'oidre de la
pagne pour s'aequilter de son t):fice de Merci portèrent la repulalion du saint Ion-
rédempteur. Jusque-là il avait racheté en date* r dans les liiux éloignes. Il ne ul pas
divers voyages plusieurs captifs qui étaient seulement honoré des rois ciiréliens d'IN-
cn re les mains des Maure» sur les coles pagne; saint Louis, roi de l'rance, touché
dlspagne; mais comme il avait été Ir.iite de ce qu il avait appi is de ses actions iner-
parioul avec beaucoup (l'honneur, el qu'il veilleuses et de la sainteté de sa vie, lui lit
ne clierchail )|ne le mépris el l'humiliation, savmr qu'il soutiailiit passionnément de le
il crut (pi'il les trouverait en Afrique. Lu voir. Le saini, de son cote, (iiii n'avait pis
cffil les infidèles de ce p.iys-lù lureiii moins moins d'ein, ressèment de voir ce prinrc si
Iraiiables que ceux d'E-iiagne, et cumiiie ou vertueux, prit occasion de l'aller lrou\er,
l'accusa d'avoir facllilé l'ev asion de quelques lorsqu'il vint dans le Languedoc ; our nu ll< o
9j7
MER
Sien
933
Raymond, comte de Toulouse, à la raison; cl
co:nnie le roi méditait son voyage de terre
sainte, il convia saint Pierre Nolasque de vou-
loir raccoiiipa|;ner. 11 reçut cette proposition
avec d'autant plus de joie, qu'il crut que c'é-
tait une occasion favorable pour retirer des
mains des infidèles un grand nombre de chré-
tiens qu'ils retenaient dans les fers, et il se
disposa à ce voyage, malgré son grand âge et
ses infirniilés corporelles. Mais son zèle fut
arrêté par une maladie fâcheuse qui le retint
au lit; de sorte que toute la rommunicalion
qu'il eut avec ce saint roi et qui continua
j(i^(|u'à sa mort, ne consista plus qu'en priù-
ri'S et en un conini;rco d'amitié toute pure et
toute spirituelle, que ce prince eut encore
soin d'enlreli'nir par letlrt's avec notre saint,
après son retour de la Palestine. Enfin saint
Pierre Noiasque ne pouvant résister à ses
maux, il y succomba et mourut la nuit de
Nuel de l'an 125G, étant Agé de soixante-sept
ans. Ceux qui oiU mis sa mort l'an 12'i9 se
sont peut-être f miiés sur ce que Guillaume
de IJas fut élu général de l'ordre la n'.ôine
année, mais ce ne fut qu'après la démission
volontaire du saint fondateur. Son corps fut
mis dans la sépullureordinairo des religieux ;
mais il fut levé de terre quatre-vingts ans
après par ordre du pape Kenoil Xli et trans-
porté dans une chapelle oà le peuple alla vi-
siter ses sainte- reliques pour obtenir son
intercession. I^e bruit de ses miracles et les
sollicitations des religieux de son ordre por-
tèrent le pape Urhain \'lll ei le canoniser
l'an 1628, et Alexandre \ Il fil mettre son
nom avec éloge dans le Martyrologe romain,
et oidonna qtje toute l'Eglise en ferait l'of-
fice sous le titre de semi-double, oflii e que
le pape (élément X, à la sollicitation de la
reine de France Marie-Thérèse d'Autriche, a
rendu douide comme celui des autres fonda-
teurs d'ordres.
Voyez Alphon. Ftemon. Ilisf. (jcneral délia
ord. de Nosi. Sù/nora de la Merced, lieiniird
de Vergas, Cliron. aacr. et milil. ord. />'. M.
de Mercedc. fJist. de l'ordre de Nod e-l)inne
de la Merci. Glo. Francesc. Olignano, Vil. di
S. Pielro Nolcscn. Pedro de S. Ceciîia, An-
md. de N. S. de Cautiros. L'Atotny, llistnire
de l'ordre de Notre-Dame de la Merci. Filipp.
de Guimerai!, //isr de la ord. deUa Mcrred.
linlhirium ord. S. M. de Merc. et Constit.
ejusdem ord.
§ II. Du progrès de l'ordre de Noire-D nm
de lu Merci après la mort de saint l'ierre
Noiasque, son fondateur,
La mort de saint Pierre Noiasque n'ap-
porta aucun changement dans l'ordre, puis-
quf, comme nous avons dit, ce saint s'étant
démis du gouvernement d!>. l'ordre, les reli-
gieux, qui s'étaient assemblés pour élire un
autre général, choisirent Guillaume de Cas,
' Français de nation , comme celui qu'ils
croyaient le pins propre pour exercer cet
emplui : ainsi Guillaume de Has, selon les
Annales de cet ordre, en prit le gouverne-
ment l'an 12W, en qualité de commandeur
général. Il comincnça les fonctions do son
lîICTIOri'NAlnE I>ES OrDI'.ES nELIOlEUX, II.
généralat par les visites des couvents de Per-
pignan, de Montpellier, de Toulouse, de Va-
lence et de quelques autres, et il fit élire dans
un chapitre général, qu'il convoqua à Barce-
lone la môme année, quatre dcfinitcurs géné-
r.iux, savoir : deux prêtres et deux cheva-
liers, afin que le général les pût consulter
dans les affaires importantes de l'ordre. Le
roi d'Aragon donna à ce général, tant pour
lui que pour ses successeurs, le tilrede ba"
ron d'Algar, au royaume de Valence, avec
voit délilcralive dans rassemblée des états
du royaume; et après que les Maures eurent
été entièrement expulsés de tout ce royaume,
il lui fit don aussi du château de Galinara,
avec ses dépendances et ses revenus, qii
étaient considérables ; niiis le roi ne jul dé-
cider Guillaume de Bas à l'accepter. Il lep é-
scnta à ce prince que cette place était de
trop grande importance pour être donnée à
des religie ix qui ne la | ourraieni pas gar-
der. Il racheta pendant son généralat, tant
par lui que par ses religi ux, quatorze cents
esclaves chrétiens; et se voyant âgé de plus
de quatre-vingts ans, il demanda qu'on reçût
sa démission, qu'on ne voulut pas accepter.
11 gouverna encore Tordre pendant une an-
née, ajirès quoi il mourut au mois de décem-
bre 12C9. H avait au,:menté l'ordre de plu-
sieurs couvents, dont les pr ncipauv furent
\'ich et Xativa.
Le P. B rnard de Saint-Romain, comman-
deur du couvent de Xativa, succéda à Guil-
laume de Bas l'an 1270. Ce général ayant vu
dans les visites de son ordre que les cou-
vents avaient presque tous des observances
différentes, il fil faire un recueil de toutes les
ordonnances qui avaient été faites dans les
chapitres généraux, et les réduisit en forme
de constitutions pour être observées dans
tous les couvents, afin d'y établir une unifor-
mité. 11 mourut l'an 1272, et eut pour suc-
cesseur Pierre d'Aymeri. Alphonse Remon et
quelques autres écrivains de cet ordre ont
cru que c'étail ce général qui avait dressé
les constitutions de l'ordre, et que des an-
ciennes ordonnances il en avait fait un
corps; mais les Pères de France, dans les
Annales du même ordre, prétendent qu'il fit
seulement recevoir et approuver celles qui
avaient été faites par les ordres de Guillaume
de Saint-Romain. L'ordre éi.mt compo é de
prêtres et de chevaliers, les uns pour vaquer
au service divin, et les autres pour trav.iiller
au rachat des c.iptifs, cette différence d'em-
ploi avait fait donner seulement par com-
mission une autorité absolue au prieur du
couvent de Barcelone sur les prêtres, et pour
faire garder exactement la clôture, le silence
et l'observance régulière dans les maisons.
Pierre d'Aymeri fit une entière séparation de
ces deux autorités, et, sacrifiant généreuse-
ment tous ses intérêts à la gloire de son or-
l'rc, il établit prieur général de tout l'ordre,
pour le spirituel, le bienheureux Bernard
Corbarie, prieur de Barcelone. La ditlerence
des états avait aussi introduit une manière
il'habiis différents : les prêtres portaient l'é-
cusson sur leurs chapes, et les chevaliers sur
30
039
niCTI NNAinF. DES OnDRF.S r.KLICIF.tX.
VM
leurs scapulairps. Ce fut s«)u-< ce général
qu'il fut ordonné que t.inl les pr^-'.rcs que les
chevaliers porieraieiit récussoii sur le soapu-
laire, conirne il avait été pratiqué dans le
commencement de l'ordre.
Après la mort de Pierre d'Aymeri, qui ar-
riva l'an 1301, il y eut schisme dans l'ordre :
car le commandeur do couvent de Barce-
lone, vicaire général établi par les conslitu-
lions de l'ordre, envoya des Ictlres d'indic-
lion aus vocaux pour se rendre à Barcelone,
aGn de procéder à l'élection d'un nouveau
général, cl le vicaire perpétuel de Notre-
Dame de Puch en envoya aussi pour convo-
quer le chapiire à l'uch. Le P. Pierre du
Fourny fut élu dans le couvent de Barcelone,
cl le P. Arnaud d'Aymeri à Notre-Dame de
Puch. Les religieux eurent recours au pape
Boniface Vill pour termi.icr ce différend, le
priint de commetlre à ce sujet l'archevêque
de Tolède ou l'évéque de Cordoue; mais la
mort de Pierre du Fourny, qui arriva quatre
mois après, les mil d'accord. Le P. Arn;iud
d'Aymeri fut de nouveau élu dans le chapitre
tenu à Barcelone, el son élection fut confir-
mée par le pape. Ce général Gt paraître
beaucoup de prudence par sa conduite; il fit
de beaux règlements pour rétablir la disci-
pline régulière et l'étroite olscrvance, qui
avait déjà beaucoup perdu de sa première
vigueur; il dissipa les divisions qui avaiei;t
partagé l'ordre à son cleciion; mais après sa
mort, qui arriva l'an 1308, il y eut de nou-
veaux troubles dans l'ordre.
Comme le nombre des pré;res excédait ce-
lui des chevaliers, ils élurent pour général
de tout l'ordre le P. Raymond Albert. Les
chevaliers, surpris de celle élection, se reti-
rèrent du chapiire et allèrent à Valence, où
ils élurent de leur cô'.é Arnaud Bossignol.
Le pape Cléinenl V cassa l'élection de ce der-
nier, comme n'étant pas canonique; néan-
moins , d'autorité apostolique , il l'établit
commandeur général de loul l'ordre par une
bulle du mois de février 130,S, qui portait
qu'il n'aurait qu'une simple juridiction sur
le loniporel de l'ordre, et qu'après sa moi t
on n'élirait plus pour général qu'un prctrc.
P.ir la même bulle, ce pape domia toute au-
torité spirituelle au P. U;iym>ind Aliiert pour
gouverner l'ordre dans les choses ((ui regar-
daient le service divin , l'observance des
constitutions el la vie régulière.
Après la mort d'Arnaud Rossignol, Albert
fui élu général de tout l'ordre. Le pape Jean
XXII confirma son élection ; el pour étouffer
toutes divisions dans l'ordre, il imposa si-
lence perpétuel aux chevaliers : ce qui dé-
plut tellement à ces dcrni>>rs, que la plupart
quitlèrent l'ordre de la Merci pour entrer
dans celui de Montésa, que le roi d'Aragon
venait d'établir nouvellcnient dans ses Étals
pour occuper les grands biens des chevaliers
'j'emplicrs , qui avaient été abolis daus le
concile de Vienne, et le pape approuva cette
translation. Peut-être que ( eux qui restèrent
dans l'ordre se séparèrent enlièremeiit des
prêtres et quittèrent 1 1 régie de sainl Auifus-
tin pourpindre ciHc de s lint Benoîiic.ir
Arnaud Wion, qui vi<vai( A la fin du xvr siè-
cle el au commencement du wir.assuie nufl
ces chevaliers suivaient en ce lemps-là la
règle de saint Benoit : ce qu'il dit avoir ap-
pris de ces mémos chevaliers, dont il rap-
porte la formule de la profession en ces
termes :
EgoN.,MilfsS.Mariirde Merccdeel Redein-
ptione cnptivorum, facio professioncm el pro-
miltoobeJieiiti(i!n,pauperiatcm, casiitatem .«er-
rare, Deo vivere, el comedere secundum legit-
lain S.llenedicli, et in Saracenorum polestulf,
si necesse fuerit, ad redemiilionemChristi fldt-
lium, detentiis inanebo (Wion, Lignum vilœ).
Ascagne Tambourin, de l'ordre deVallom-
breuse, rapporte aussi celle formule (/^eii/r.
Abbat., disp. 2'*, quœst. 5, n. 80), après Ar-
naud Wion, et ajoute que l'écusson qu ils
portent est différent de celui des religieux
de la Merci; en ce que ceux-ci oui dans
l'écusson une petite face d'or au milieu, sé-
parant les paies d'Aragon d'avec la croix
d'argent, el que le même écu est bordé d'or,
ce qui n'est point dans celui des chevaliers :
mais si cet écusson que Tambourin a vu
était semblable à celui que j'ai vu aus.si .i
un de ces chevaliers prétendus, il fiillait du
nécessité que dans cet écusson il y eût une
face d'or au milieu pour soutenir les pales
d'Aragon, et que l'ccu fût aussi bordé d'or,
puisque cet éca élait de métal percé à jour.
Ceux qui préleiidenl que les prêtres et les
véritables chevaliers, lorsqu'ils étaient unis
ensemble, ont toujours eu des généraux dil-
férents, se sont trompés. Il esl vrai qu ■ le
prieur de Barcelone avait autorité sur Inut
ce qui regardait le spirituel d.ins l'ordre;
mais il y avait au-dessus de lui un che\alier
laïque qui était commandeur général de tout
l'ordre. Aussi toutes les Annales de cet or-
dre, dans le dénombrement des généraux,
ne mettent le P. Raymond Albert, qui fut lo
premier général prêtre , qu'après Arnaud
Rossignol, ()ui était chevalier el septième gc
néral de tout l'ordre. L'on ne sait ce que vei.t
dire Schoonebeck [Uist. des Ord. milit., loni.
Il, p. 139), lorsque, parlant d • Bern ird de
Coibarie, il lui donne le titre d'iiisliiuteur de-,
moines de li .Merci, puisque dès le commen-
cemenl de l'ordre il y a toujours eu des jirê-
1res et des chevaliers. Il ne parail pas mieux
instruit de ce qui regarde cet ordre, lorsqu'il
ditque le huitième grand maître, après avoir
gouverné l'ordre pendant six ans. passa diiis
l'état ecclésiastique sous le nom de général,
puisque le huitième grand maître ou coni-
mamleur général fut le 1'. Raymond Albert,
qui aval toujours été au rang des prêtres
avant son élection.
Cet ordre tut cinq ans sans chef sous le
pontifical de Pie V, qui, à la prière de Phi-
lippe II, roi d'K'pajine, éiablit des visiteurs
pour réformer les couvents de l'ordre. Mais
pendant que ce pontife en rai>ait expédier
les brefs à Rome, le génér.il de cet ordre
étant décédé, les religieux élurent, en 15C^,
le P. Matliias Papinl, dans un ch.ipitrequi si;
tint ,'i Barcelone. Ce général, n'ayant pu ob-
tenir du pape la cunlirmallon de son élcc-
VA
v.m
H!Ef{
Ui
lion, cil niDiirul df clia^riii deux mois apri^s,
au conimciicemeiil de l'iuinée 15C9. Le p;ipe
défenilit aux religieux de procéder à une nou-
velle élection, voulant qu'elle ne se fît qu'a-
près que la visite aurait été faite par des re-
ligieux de l'ordre de Saint-Dominique, qu'il
nomma pour commissaires apostoliques. Us
employèrent cinq ans à faire la \isite de
tous les couvents de l'ordre, après lesquels
ils convoquèrent le chapitre général à Gua-
dalaxara, l'an 1574, ou le P. François de
Torres fui élu vingt-neuvième général. Los
commissaires apostoliques ordonnèrent que
les généraux, qui ;i valent élé jusqu'à ce temps-
là à vie, ne pourraieni plus à l'avenir exer-
cer cet office que pendant siv ans; et que
les commandeurs des couvenîs particuliers
ne pourraient exercer leur supériorité que
pendant trois ans ; ce qui a été observé jus-
qu'à présent.
Cet ordre s'est plus étendu dans l'Améri-
que qu'en Europe; il a huit provinces en
Amérique, qui sont gouvernées par deux vi-
caires généraux sous l'obéissance du géné-
ral de tout l'ordre, trois provinces en Espa-
gne, et une province en France, sous le nom
de Province de Guienne, de laquelle dépen-
daient autrefois le couvent et le ( ollége de
Paris, et le couvent de Chcnoisc en Brie,
que le cardinal de Vendôme , étant lé-
gat en France , sépara, en 1GG8, de celle
province de Guienni; pour les ériger en
congrég.ilion sous un vii-aire général. Le
roi confirma l'érection de cette congrégation
par ses lettres patentes do la même année,
ce qui fut aussi confirmé par une bulle de
Clément X du 2G novembre 1G72. 11 est sorti
de cet ordre trois cardinaux, savoir : saint
Itaymoiid Nouât, Jean de Lato, et le cardi-
nal de Salaziir, qui fut promu à cette dignité
par le pape Innocent XI. 11 y a eu encore
dans c<'l ordre un très-grand nombre d'ar-
chevêques et d'évêques, et il a fourni à l'E-
glise plusieurs siiints canonisés et des bien-
heureux, dont quelques-uns sont restés en
otage entre les mains des infidèles pour ra-
cheter un plus grand nombre de captifs, et
avoir lieu de travailler à la conversion de
ces barbares. De ce nombre fut saint Ray-
mond Nonat, qui demeura huit mois en capti-
vité, ayant enduré pendant tout ce temps des
tourments inouïs, jusque-là que les infidèles,
ne pouvant l'empêcher de prêcher la parole
de Dieu, lui percèrent les deux lèvns avec
un fer chaud, et lui mirent un cadenas à la
bouche pour l'emiiêcher de parler. Saint
Pierre-Pascal, évêque de Jaen, ayant em-
ployé tous ses revenus au soulagement des
pauvres et au rai bat des captifs, entreprit
aussi la conversion dc-s mahométans , eu q>u
le fit charger de fers et endurer de rudes
traitements. Le cleigé elle peuple de son
^Eglise lui ayant envoyé une somme d'argent
'pour sa rançon, il la reçut avec beaucoup
de reconnaissance ; mais au lieu de l'em-
ployer à se procurer la liberté, il en racheta
quantité de femmes et d'enfants, dont la fai-
blesse lui faisait craindre qu'ils n'abandon-
nassent îa religion chrétienne, et il den^eura
toujours entre les mains do ces barbares, qui
lui procurèrent la couronne du martyre l'un
1300.
Cet ordre a aussi eu pluirurs ccriva'n'î ,
entre les(|ucls il y a eu Aljihonse Uemon .
François Salazar, Nocl Gravcrius et Bernard
de Vergas, qui ont donné h'S Annales et les
Chroniques du même ordri'. Les PP. Zumel,
Mérino , Oligna^no et Salnicron ont donné
la Vie de saint Pierre Nolasque, leur fonda-
teur, et le p. d'Avril a aussi donné celle de la
Mèie Marie du Secours, première lierciaire
de cet ordre , dont nous parlerons dans la
suite.
Nous avons déjà décrit rhab^llement de
ces religieux, qui ont pour armes les mômes
que celles qui sont dans l'écusson qu'ils por-
tent sur leur srapulaire , ajoutant pour
devise : Rcdemplionein iniait Doininus populo
Sun.
Outre lis auteurs que nous avons déjà ci-
tés, voyez ceux qui ont parlé des ordres mi-
litaires, comme Giustiniani , Sclioonebeck .
Mennenius, Sansunio, etc. Jerom. Curila ,
lib. I de Rébus Arag., et Mariana, de Rebm
Jlispaniœ, lib. xii , cap. 8.
§ III. Des religieux Déchaussés de l'ordre de
Notre-Dame de la Merci, appelés aussi de
la Récolleclinn : avec la Vie du vénérable
Père Jtan-Buptiste du Saint-Sacramenl,
leur fundalntr.
Le P. Alphonse de Monroy, étant général
de l'ordre de la Merci, voulut y établir ur.o
réforme sur la fin du xvi* siècle, et destina
sept couvents à ce sujet dans la province du
Castillc, afin que les religieux qui souhai-
taient vivre dans une plus étroite obser-
vance que celle qui se pratiquait d;ins tout
l'ordre, pussent la pratiquer dans ces cou-
vents; mais il ne leur accorda cette permis-
sion qu'à condition qu'ils ne changeraient
])Oint l'habit de l'ordre, et qu'ils resteraient
toujourssoumisà l'ohéissancedes supérieurs.
Avec cette permission le P. Jean-Baptisio
Gonzalez, que le générai avait choisi pour
le chef cl le directeur de cette réforme, so
reiiia au couvent de Hueta, qui était le prin-
cipal dos sept qui avaient été destinés pour
y ()raliqiicr l'étroite observance. Mais on se
lassa bientôt de la ferveur de ce religieux ,
et com.me il avait attiré à ce nouveau genre
de vie un fumeux professeur de Salainaii-
qne, et qu'on appréhenda que cet exemple
d'humilité n'eût des suites et n'en attirât en-
core d'autres, le général reléj,'ua le P. Jean-
Baptiste au couvent de Itaizes dans l'Asturie,
et celte réforme, qui avait été commencée
par les ordres du général, lut presque dans
le même temps détruite aussi par ses ordres.
C'était au zèle seul et à la ferveur du P. Jeaii-
Bapliste que Dieu avait réservé l'ouvrage
do celte réforme, ev pour la commencer et
l'étendre, il n'eut pas besoin des anciens
couvents, mais il en fotida de nouveaux,
comme nous verrons dans la suite.
Il naquit à Huela d.ans le royaume de Cas-
lille, le 8 février 1533, de parents nobles de
l'ancienne fa.'iiilie des Gonzalez. Il fut élcv«
9i3
DICTIONNAIRE DES OROHES RELIGIEUX.
9'.*
dès SCS plos tendres années dans la crainte
de Dieu, et ce fut sur ce foiidimeiit solide
qu'il élaldit la règle do s.i conduite pour con-
server la pràce parmi les dangers IVéqiienls
ou les jeunes {{eus sont exposés à la perdre
avec l'innoccnco. Il s'appliijua de bonne
heure au\ études : on l'envoya pour cet ef-
fet à Madrid, où il apprit les premiers princi-
pes de la langue laiine. On ne vit jamais
d'écolier plus enclin à la vertu, et ses maî-
tres le proposaient à ses compagnons comme
le modèle qu'ils devaient suivre cl imiter.
Ses humanités étant achevées, il obtint per-
mission de ses parents d'aller éludior en phi-
losophie sous le P. C.hrislophe Gonzalez, son
Irère aîné, rcli.'icus de la Merci, que les su-
jiérieurs de la province de Cislillc envoyaient
enseigner au couvinl d'Olinédo. (^ommo il ne
se propiisail d'autre (in dans scséludcs ijucdc
s'en servir utilement pour son salut, il avan-
çait d'un pas égal dans la piélé et aux élu-
des; il fréqucnlait souvent les sacrements,
il assistait les fêtes cl dimanches au service
divin, il se rendait assidu à entendre la pa-
role de Dieu, et après avoir saiisfnl à ces
obligations, il ne tnanquait pas d'aller ser-
vir les malades dans riiôpMai.
Ce fut dan-i ces saints exercices de piété et
de miséricorde qu'il se senlil fortement ap-
pelé de Dieu à l'élat religieux. Il demanda
instamment l'habit de l'ordre de la Merci ai
commandeur du couvent d'Olmédo, qui le lui
donna avec d'autant plus de joie qu'il con-
naissait ^cs excellentes qualités. Il le reçut
l'an lo~2, et après l'année de noviciat il fil
sa profession. Huit jours après, on l'envoya
au couvent de Madrid, d'où il sortit l'an 1575
pour aller gagni;i le jubilé à Rome, avec la
permission de ses supérieurs. 11 n'entreprit
ce voyage que par un esprit de pénitence;
il le fil à pied, en mendiant son pain de porte
en porte et dans un si grand recueillement
d'esprit, qu'il ne parla à personne dans tout
le chemin que de clioses absolument i.éces-
saircs. Etant de retour dans sa province, l'an
1576, 011 l'envoya étudier en théologie à To-
lèd.', < ù, malgré toutes ses résistances et son
humilité, les supérieurs lui ayant fait rece-
voir les ordres sacrés, il dit sa première
messe l'an 1578. Ce nouvel état lui fut un
nouveau motil de s'avancer plus que j imais
dans la perfection ; on l'engagi a à prêcher
tl à confesser, et il réussit si bien dans l'une
et dans l'autre de ces fonctions, ([u'il gagna
un grand nomhrc d'ànies à Uieu.
Ayant appris que les religieux de son or-
dre avaient beaucoup soullert pour la foi
dans les Indes, priiK ipalement dans le IV-
rou, et combi n ils y avaient converli d infi-
dèles, animé d'une sainte émulation, il de-
manda à ses supérieurs la permission d'y
passer, pour participer aux travaux et aux
peines de ses frères. 11 y fil uu si grand pro-
grès d >ns le salut dis âmes par la sunlelé
de s.'i vie, par son exemple, par ses rares
vertus et par ses prédications tout embrasées
du fin de l'amourdiviii, qu'il retira un grand
nitnbic de païens da culte des idoles, et
qu'il les attira à la connaissance du > rai
Dieu; mais ce qui est >!igne d'admiration,
c'est (jue les rirlies es de ce pays-là ne Iq
tentèrent point, et il ne fit pas comme un
graml nombre de religieux de différents or-
dres qui en sont revenus chargés d'or el
d'.crjciil. .\près avoir employé le temps do
sa mission Irès-ulilemeiit au service de Dii'ii
cl du prochain, il retourna en Espagne, no
portant sous son bras que son bréviaire, cl
tenaiil il'une muin une léle de mort, sur la-
quelle il jel.il continuellement les yeux
pour se faire ressouvenir de ce qu'il élail el
de ce qu'il serait un jour.
Ce fut ce saint hoiiîme, si zélé pour la
gloire de Dieu el si amateur de la pauvreté,
que le P. Alphonse de .Monroy, général do
l'ordre de la Merci, choisit pour être le chet
et le directeur de la réforme qu'il avait en-
trepris d'établir dans son ordre ; mais qu i-
qu'elle eùl été détruite dans son co umence-
ment, comme nous avons dit ci-devant, le
P. Jean-Bapiisle Gonzalez ne perdit point
l'espérance de la voir rétablie; il chercha
les moyens d'y parvenir, il en forma les
projets, et ayant été rappelé du coment do
U./i/es et mis de famille au couvent de .Ma-
drid, il crut que Dieu lui présentait les
moyens d'exécuter son entreprise. Comme il
était sacristain de ce couvent, el que son
emploi l'obligeait de parler souvent à la
comtesse de Caslcllar, Ueatrix Ilamirez de
Mendoza, qui était une dame d'une grande
pieté, il prit la résolution de lui communi-
quer son dessein, dans l'espérance qu'elle
y contribuerait par ses libéralités. 11 ne so
trompa point: il recumiuanJa celle affaire à
Dieu, il olTrit à celle inieulion le saint sacri-
fice de la messe, il parla à cette dame de la
réforme élroite qu'il voulait établir dans
son ordre, el elle le fortifia dans celle résolu-
tion, s'olTranl de fonder deux couveu s de
Celte reforme dans ses terres.
Le général n'ayant pas voulu donner sou
consentement à rétablissement de ces deux
couvents pour servir de fond.-menl à cetls
reforme, la comtesse de Castellar s'adressa,
à son refus, nu pape Cléuii'iil Vill, qui lui
accorda deux brefs. Parle premier, il la dis-
pensait du vœu qu'e.le avait lait de f mder
un couvent de religieux de l'ordre de Saint-
Jerôme, d lui permettait d'en bàlir deux
aux leligieux de l'ordre de la Merci , et par
le second bref, il érigeait une congrégation
de religieux du même ordre, qui désire-
raient vivre dans l'elroite observame, de
laquelle il établit pour général le P. Bar-
Ihelcmy d'Alcala, religieux de l'ordre Ce
Saiiil-Jcrômc, à condition qu'il quitterait
Ihabil de son ordre pour prendre celui de
la .Merci, avec une autorité absolue d'y re-
cevoir les religieux de cet ordre, qui vou-
draient embrasser cette réforme, el les se -
culiirs (|ui se présenteraient pour recevoir
l'Iiabil; qu'il gouvernerait cette congrégalKui
jusqu'à ce qu'elle eùl huit couvents, > l que
s'il voulait persévérer dans l'ordre de la Merci,
il exercerait encore l'office de général pen-
dant SIX au».
Le P. Jcan-Bapliste, ù l'insu duquel la
9i5
MER
MER
9;u
comtesse de C;is(ellar avait obtenu ces brefs,
fui fort surpris (juand il eut appris ce qu'ils
conteiiJiiont. Il représenta à cette dame qu'il
n'avilit j.imais eu d'autre dessein que d'a-
voir quelques couvents, dans lesquels on
gardât la règle el les constitutions de l'or-
dre de la Merci à la lettre et sans aucune
dispense, sous l'obéissance du général de l'or-
dre, dont il ne se séparerait point, parce que
les religieux qui voudraient embrasser cette
observance ne voudraient pas se soumettre
à la conduite d'un étranger. La comtesse
approuva scsr;iisons; elle fil voir au géié-
ral les brefs qu'elleavait obtenus sur le refus
qu'il avait fait de consentir à l'établissement
des couvents qu'elle voulait fonder pour
commencer la réforme que le P. Jean-B.ip-
liste méditait, et l'attachement que ce Père
avait à l'ordre. Le général en fut si touché,
qu'il promit à la comtesse de favoriser cet
élablissomcnl, ft pour lui témoigner sa sin-
cérité, il dressa lui-même les constitutions
<|ui devaient être observées par les religi'eux
de celte réforme.
La comiesse, de son rô'é, pour avancer ce
grand ouvrage, lui promit de leur faire bâ-
tir incessamment deu\ couvents, et de les
doter de revenus suffisants , l'un dans sa
terre de Viso, à quatre lieues de SévilU-, et
l'autre à Almorayna, dans sa comté de Cas-
tellar, à trois lieues de Gibraltar et de l'évé-
ché de Cadix , s'engageanl encore de les four-
nir de meubles et d'ornements d'église. Elle
en passa contrat, qui fut ratifié dans le chapi-
tre provincial lenu à Guadalaxara le 20
avril 1603, où l'on approuva aussi rétablis-
sement de cette élroite observance et les
constitutions que les religieux qui l'embras-
seraient devaient suivre. A celle nouvelle,
le P. Jean-Baptiste el cinq compagnons aux-
quels il avait inspiré l'esprit de la réforme,
en prirent publiquement l'habit le jour de
l'Ascension, dans la chapelle de Noiro-Dame
du Remède, dans l'église des religieux de la
grande observance du môme ordre, et quit-
tant en même temps le surnom de leurs fa-
milles , le J.P. Jean-Baptiste prit celui du
Saint-Sacrement au lieu de Gonzalez.
Comme dan< l'établissement de l'ordre, le
roid'Aragun, Jacques I", donna un apparte-
ment dans son palais à saint Pierre Nolasque
cl à ses compagnons, de môme la comiesse
de Castcllar reçut d'abord le P. Jean-Bap-
tiste et ses compagnons dans son hôtel de
Madrid, où ils firent leurs exercices de dé-
votion et pratiquèrent les observances régu-
lières, pendant qu'on bâtissait les deux pre-
miers convenis de celle étroite observance.
Mais comme ces saints religii'ux ne respi-
raient qu'.iprôs la retraite cl la solitude, el
qu'ils étaient trop exposés au prand monde
dans la maison do celle dame, elle les envoya
d.ms son château de Ribas, bourg distant de
Madrid de trois lieues, et ils allaient tous les
jours célébrer la messe dans une chapelle
dédiée à sainte Cécile, qui était dans le même
bourg.
Quelques personnes trop attachées à leurs
propres inléréis, apprchendaul que ces reli-
gieux ne fissent un couvent d'un lieu qu'ils
n'avaient que par emprunt, leur firent d'é-
tranges vexations ; ils détachèrent leur clo-
che, renversèrent l'autel qui avait été dressé
pour célébrer la messe : l'évéque même se
joignit à eux, et défendit aux religieux de la
célébrer, non-seulement dans celle chapelle
de Sainte-Cécile, mais même dans l'église de
la paroisse, ce qui obligea ces religieux de
retourner à Madrid. M.iis les hiibitants do
Ilibas lurent si édifiés de leur vie exemplaire,
qu'ils firent ce qu'ils purent pour les retenir
dans leur bourg, ils prièrent la comiesse de
Caslellar de leur bâtir un monastère, et
celle pieuse dame leur accord.» leur deman-
de, promeliantque sitôt qu'elle auraitachcvé
les deux couvents qu'elle faisait bâtir en
Andalousie pour ces religieux, elle ferait
aussi commmcer un nouveau monastère à
Ribas.
Les bâliments de ces deux premiers cou-
vents ayant éié achevés avec le conseute-
ment de l'archevêque de Sévilieet de l'évéque
de Cadix, la comtesse de Caslellar alla en An-
dalousie disposer toutes choses pour recevoir
les nouveaux réformés, qui, s'étanl mis en
chemin pour aller prendre possession de ces
deux couvenis, reçurent de nouveaux cha-
grins à Séville de la part des religieux de la
grande observance, qui, étant scandalisés de
l'habillement de ces religieux réformés, leur
firent malicieusement cnlendre que le défini-
toire d'Aragon avait envoyé ordre de les ar-
rêter et de les obliger à retournera la grande
observance. Mais ces avis se trouvèrent
faux; le P. Jean-Baptiste el quelquis-uns de
SCS compagnons se rendirent à Almorayna
pour prendre possession de ce nouveau cou-
vent, où ils entrèrent l'an 1603; et ce cou-
vent, qui fut dédié à Notre-Dame des Rois,
fut le premier de la réforme. Les autres com-
pagnoii.'-. duP.Jeau-Bapliste, auxquels le géné-
ral avait donné pour commandeur le P. Jean
de Saint-Joseph, entrèrent dans celui de Viso
le 23 janvier de l'année suivante, 1604. Ces
deux nouveaux couvenis furent bientôt rem-
plis des principaux religieux de l'ordre, qui
s'y relirèrenl pour y vivie dans l'étroile ob-
servance. Le nombre s'olanl augmenté , la
comtesse de Castellir fonda un troisième
couvent dans sa terre de Ribas, comme vie.
l'avait promis au\ habitants de ce lieu, et la
même année le P. Jean-B:ip!i~te en fut pren-
dre possession. 11 se fit encore d'autres fonda-
lions quelques mois après, l'une à Séville,
l'autre à Rola, et dans la suile ce saint réfor-
mateur eut 11 consolaliou de voir douze au-
tres fondations, dont les plus considérables
furent à Madrid, à Salamau(|ue et à Alcala
de Hénarez. 11 s'en fit même jusque daas l.i
Sicile, où après sa mort le nombre des cou-
vents est devenu si considérable, (ju'on en a
formé une province particulière sous le nom
de Saint-Raymond, el ceux d'Espagne ont été
divisés en deux provinces.
Dieu fil connaître par plusieurs miracles la
sainlelédu P. Jeau-Bapliste, qui, apiès avoir
vécu dans sa Réforme quinze ans, tnourut à
Madrid dans le couvent de ceUe Réforme, au
917
mcTioNNAiiu-: Di:s oimiirs ui.i.if.iiux.
9 8
mois de nmi 1018. On l'enterra dans In sépul-
lure ordinaire des religieux ; mais l'annc'c
suivante, les supérieurs, à la sollicitation de
plusieurs personnes qui avaien' une singu-
lière vénération pour ee scrviieur de Dieu, le
Jevèrent de terre pour le ii ellrc dans un lieu
plus honorable. L'on trouva s^n corps aussi
eniier et aussi (Icxilile que s'il venait de mou-
rir ; sa langue était encore \ ei nieille, et Dieu
permit que re saint curps restât plusieurs an-
, nées en cil étal.
• L'Iiabillemi ni de ces relipieus esl sembla-
blc à celui clés C:.rn!cs Décliaussés, excepté
que le manteau est plus long (1;. Ils portent
aussi, comnic'ceux de la grande oliservance
de la Merci, l'écusson des armes d'Aragon sur
leur srapulaire, et leurs s:indales sont comnie
ceilcs des capucins. Paul V approuva leur lié-
forme l'an ll'OG. Grégoire \\', l'an 1G21. les
sépara enlièremcnl de ceux de la grande ob-
«arvancc.el Urbain VIII, la même année, leur
donna un vicaire général de leur Héforine,
qui fut le 1'. Jean Marolli, surnommé de Saint-
jiisepb, qui a beaucoup étendu celle Réforme
par la fondation de plusieurs couvents. Il y
a aus>i des religieuses de celle Réforme dont
nousall lis parlerdans leparagraphesuivant.
Le P. Pierre de Sainte-Cécile a fait l'Histoire
de celle Réforme, imiir.mée à Barcelone l'an
IGf.O.
^'oyez l'Histoire d-' l'ordre de Noirr-Dame
dr la Merti. Bernard de Verras. Chron. focr.
et milil. ord. B M. (le Mrrcede, inni. Il, § 5
et (). Pedro de S. Cecilia, Arinal, de l'ord. de
J>escalcos de N. S. de lu I\]crced. Reiicmlion
de captivos.
§ IV. Des relif/iewtes de /'or7re de Nolic-
Dame de la filtre', tunl de l(i ijrande obser-
rancc t/ue Dc'clunusées.
Si on avait égard au lon.ps do l'élabliNse-
menl du tiers ordre de la Merci, il devrait élre
appelé le second ordre, puisqu'il a été établi
avant les religieuses du même ordre, qui for-
ment néanmoins le second ordre; mais il esl
juste que des personnes séculières, qui ne
sont engagées à un état que par des vœux
simples, cèilenl la pré>éancc à celles qui
sont consacrées à Dieu par des vœux solen-
nels. Les premières nligieu^es de l'ordre de
la Merci furent établies ;'i Séville l'an 1368.
L'instrument dont Dieu se s('r\ il pour ce su-
jet fui le P. Antoine Vtlasco, rcligieui du
même ordre. Plusieurs personnes des pie-
inières rjmilies de la ville de Séville s'étant
mises sou< sa conduite el sa direction, il y
eul entre les autres Irois dames, d.rns les-
quelles il remarqua un si graml delacbmient
(les clioses de la terre, une union si grande
a\ec Dieu cl un si violent désir d'aspirer à
une vie plus parfaite, qu'il crul que Dieu les
avait choisies pour être les pierres fonda-
mentales d'un miinaslèic de lelig'cuses de
Notre-Dame de la .Merci, qu'il se sentait in-
lérieurcnienl inspiré de li.ilir pour servir de
retraite à quantité de lilles vertueuses qui
toujiiraienl depuis longtemps après celle Oc-
casion. Il reciiii:niai.da celte alT.iire à Dieu,
cl ajirès avoir longl< mps jeûne, prié, cl pra-
tiqué de ng. ureuses pénitentes, el dans le
temps qu'il prenait laiésoluiion de commu-
niquer son deS'Cin à ces dames, qui se noni-
mai .ni Mario t^.apata, Béairix de las lloelas
el Françoise Marlel, un jour de l'.Vssompiiou
de la sainte Vierge, elles le firent appeler à
l'églisi- , el lui diie!.l que Dieu leur avait in-
spiré la pensée de lomier un inonaslère pour
des religieuses de l'ordre de Notre-D.imo de
la Merci, et de le dédier sous le nom de l'.Vs-
somption de Nuire-Dame.
Le Père connut pour lors que le dessein
tiu'il avait projeté venait de Dieu; il leur de-
cla a ce qu'il av.iil fat depuis lonpiemps
pour obtenir cette grâce du C.el, il les fortifia
dans leur résolulion, et se chargea de solli-
citer les permissions U'-re^saires. Les ajanl
obtenues, tant du gr.in.l vicaire de rarche>é-
que de Séville, que du provincial de t'asMlle ,
il crut que, pour rendre cet éiablis~enu ni
plus solide, il fallait le faire confirmer par le
saint-siège Ces dames dépêchèrent un gen-
tilbomnie à Rome au bienheureux Pie V, qui
gouvernail pour lors l'Eglise universelle,
pour le prier d'agréer la fondation de ce mo-
nastère. Le pape y consentit et fil expédier
une bulle au mois de mai lol)8, par l.u|uelli)
il l approuvait el y dunn.iil son consenie-
nienl.
Sitôt qu'elles eurent reçu celte bulle, elles
achetèrent une grande place proche le cou-
vent des religieux de la Mert i pour la cnn;-
modilé du confesseur, et elles y firent bâtir
une église avec le monastère. Pendant que les
ouvriers travaillaient au bâtimee.t, I" P. \'é-
lasco dressa les constilulions que les reli-
gieuses devaient observer ; il les cnvoja au
chapitre général de duadalaxara, (ini se lini
l'année suivante, 1309. Lcchapilrc dcnna une
couunission à ({uebiues religieux pour les
examiner; el le monastère étant achevé, les
Irois dames fondalrices y entrèrent avec
quelques jeunes dtmoiselles. Le P. Vélasco
en fut établi vicaire perpétuel ; il leur dunna
publiquement l'habit de l'ordre, et deux ans
après le provincial, dans la visite qu'il fit de
ce couvent, ratifia et confirma les professions
de celles qui a\aienl prononcé leurs vœ;:x.
11 y a eu dans ce monastère plusieurs reli-
gieuses d'une vertu émiiienie, dont les prin-
cipales ont clé, la B..\nue de l;i Croi v, qui en
a été première supérieure; la Mère Anl<iinelle,
de l'Assomption de la maison d'Ai;uilar, l.i
Mère Augusline Menriquez. la Mère .\iine
des Rois, et la B. sœur Marie de lu Résurrec-
tion.
Comme, peu de temps après que le P. Jean-
Baptiste eut cl.'ibli la Rérorme des religieux
de la Merci, on établit aussi des mon isteri s
de religieuses de cette niême Rèfiirme, la
Mère Clémence de la Sainte- 'l'riniie fut liice
du mouaslère de r.\ssom|iliou de Séville pour
aller londer le premier monastère des re i-
gieuses Déchaussées ou de la RccoUecliun. II
fut élalili à Loia,<iui en a produit plusieois
(I) Voij., àiafiii du \ul., n"
919
MER
MKR
PSO
autres, comme à Séville, où il y en n encore
un de celle Réforme, deux à Madrid, donl l'un
a Hé fondé en 1G65, par le roi d'Espagne
IMiilIppe IV, en l'honneur de l'immaculée
Conception. Il y en a rnrore d'autres à Fuen-
les, à Archos, à Marchènc, à Ezicha vn An-
dalousie, à Thoro et Sanjago en Castille, el
en plusieurs autres lieux. Ces religieuses
sont habillées comme les religieux (1), el
après avoir prononcé les trois vœux essen-
tiels de religion, elles ajoutent : Je promets,
en tant nue mon étal le peut permettre, de va-
quer aux choses qui regardent le rachat des
captifs, et de donner ma vie pour eux, s'il est
iircessaire. Le P. Bonanni, parlant des reli-
gieuses de la Merci de la grande observance,
les a confondurs avec les filles du tiers ordre,
dont nous allons parler dans l'article suivant.
Voyez les auteurs ci-devant cités, et le P.
Bonanni, Catalog.Ord.relig., part. n,pag.87.
L'ordre de la Merci avait pris une certaine
exlension, mais fait peu de S'nsution en
France : il y avait donc plusieurs provinces
où il était presque inconnu. M. Gilles de la
B.Himc le Blanc, évéque de Nantes, les ap-
pela clans sa ville épiscopalc, et leur donna,
en 1G72, une maison nommée l'Ermitage de
Sainl-Similien sur les Hauts-Pavés. Ce prélat
n'avait fait que répondre au vren manifesté
par la province, et s'était assuré du conscn-
lement des états assemblés à Nantes, en
lt)63; mais cet établissement, n'ayant pas éié
autorisé par lettres patentes du roi, fui dis-
sous au bout de quelques années.
Le jansénisme pénétrait partout, dans les
lieux surtout où les évéques protégeaient
cette erreur. Quoique les Pères* de la Merci
n'aient pas donné beaucoup de scandales
sous ce rapport, cependant ceux de la maison
de Montpellier, sous l'épiscopat de Colbert,
codèrent à l'esprit de nouveauté et donnè-
rent quelques preuves d'entêtement sous son
sureesseur, M. de Charanci, qui chi'rcha à
réparer les maux causés par Colbert.
L'ordre de la Merci jouissait, même dans
le xix° siècle, d'une grande considération en
Espagne. Néanmoins il n'a point élé conservé
dans les suppressions presque générales
f.iites par les révo'ulioiis qui ont suivi la
mort de Ferdinand VII, si ce n'est dans les
couvents de femmes.
Au dernier siècle, il y avait à Rome trois
maisons de cet institut : l'une pour les reli-
gieux exhaussés, nommée Saint-André in
campo Vaccino; les deux autres, nommées
Saint-Jean m campo Mnrzo et Sainle-Marie
inMonterone, pour les religieux Déchaussés.
Les religieuses de l'ordre n'y avaient point,
croyons-nous, d'établissement, pas plus qu'à
Paris, où les religieux avaient deux maisons,
l'une rue des Sept-Vo:es, ainsi qu'un col-
lège, mais qu'ils furent obligés d'abandon-
ner au dernier siècle, pressés par la pau-
vreté. L'autre était située rues de Brac
el du Chaume, et l'on voit encore les ruines
lie cet établissement, où l'on avait fait, sur
les dessins de Culard, un portrait curieux,
dont on peut voir la description dans le Ta-
bleau de Paris, de M. de Saint-Victor. Les
religieux étaient au nombre de trente-cinq,
veis le milieu du dernier siècle, dans cette
communauté, où se faisait le noviciat. Pour
ce noviciat et pour la prise d'habit, les reli-
gieux prenaient 500 livres. Il fallait, dans
celle maison, que chaque religieux fournit
au moins 150 livres de pension viagère. Les
religieux avaient, en reconnaissance de leur
établissement, l'honneur de présenter à la
reine un cierge la veille de la Purification.
La maison de la rue des Sept-Voies, qui ser-
vait de collège destiné aux études de la Sor-
bonne, avait été fondée, en 1250, par Allain
d'Albert, fait inconnu à M. de Sainl-Victor.
Le général de l'ordre a toujours élé à Ma-
drid, mais probablement, depuis la suppres-
sion faite en Espagne, la >ui)ériorité a élo
donnée an vicaire général, résidant à Home,
qui était récemment le R. P. Thomas Miquel;
le procureur général était le P. Michel
Xianco , vivant peut-être encore l'un et
l'autre aujourd'hui.
Nouvelles Ecelésiasi:quef, année 1738 39.
— Tableau de Paris, par M. de Sainl-Victor,
tome II. — Elat de Paris, par M. de Beau-
mont. — Les Vies des sainis de Bretagne,
tome VI, édition de M. l'abbé Tresvaux.
B-B-E.
MERCI (Du Tiers Okdue de Notke-Damb
DE I,a).
Vers l'an 12G5, deux femmes illustres de
la ville de Barcelone, veuves de deux gen-
tilshommes très-considérables de la pro-
vince, se voyant sans enfants, résolurent de
triompher du monde en menant une vie di-
rectement opposée à ses fausses maximes ;
l'une s'appelait Isabelle Berli, et l'autre Eu-
lalie Pins. Eles prirent avec elles quelques
filles qui aspiraient au même genre de vie,
et elles se logèrent dans une maison proche
le couvent des religieux delà .Merci, où, après
avoir vaqué aux exercices de la prière et de
loraison, elles employaient au travail tout le
temps qui leur restait, pour distribuer aux
pauvres le profit qu'elUs en pouvaient tirer.
Pour marcher plus sûrement dans les
voies du ciel, elles choisirent pour leur père
spirituel et leur confesseur, le bienheureux
Bernard de Corbarie, religieux de l'ordre de
la Merci, pour lors prieur de leur couvent
de Barcelone, et cl'es firent sous sa conduite
des progrès si admirables, que, embrasées du
désir d'un état plus parfait, ces deux datnes
lui demandèrent, au nom de toutes leurs com-
pagnes, la grâce de porter l'habit du Tiers
Ordre de la Mi rci, à l'imitation des Tier-
ciaires de l'ordre de Saint-François cl de
celui de Saint-Dominique. Le bienheureux
Bernard de Corbarie, après les avoir éprou-
vées pendant quelque temps , cl voyant
qu'elles persévéraient dans leurs saintes ré-
solutions, regarda cela comme un moyen
que Dieu lui Iburnissaii d'établir un Tiers
Ordre de la Merci; il le proposa dans un
chapitre général au bienheureux Guillaume
(1) Yoij., à la fin du vol., u"» 258 el239.
9r:i
liIf.TlONNAIIŒ DI.S OlUiP.F.S HELICIF.IX.
9S2
de Bns, deuxième général de l'ordre, qui, du
consenlcmciit îles ilodiiileurs.lui donna cdiii-
niission pour faire cel ét.iblissemenl, el re-
cevoir puHiquonicnt à l'habil ces ïerluruses
dames el leurs compagnes, ri do leur pres-
rrirc une règle el une manière de vie, ce
qu'il execula l'an l:2G.'i, le jour qnc rilgiise
réit'br.iil la fêle de l'Aniioncialion de la
sainle Vierge, en présence d'une inlinité de
personnes de la >ille di' rarcelone. A ri)ITc.-
, loire de la messe qu'il ci'lé!ir;\ il fit un d.s-
cours sur l'excclli'nce de l'ordre de la Merci
fl sur la persévérance que ces dames avaient
• emoignéc pour s'y consacrer au service de
Dieu, et après leur avoir donné l'Iialiil de
l'ordre, il Us exhorta d'en dcnian lur l'es-
prit à I)iiu pour conlriluier par leurs au-
mônes, leurs prières et leurs larmes, au sou-
lagenienl corporel el .■■pirituel des pauvres
esclaves chrétiens, cl de s'exercer sans ré-
serve aux œuvres de miséricorde pour se-
courir les pauvres, assister les malades, vi-
siter les prisonniers, cl pour soulager géné-
ralement tous ceux qu'elles verraient dans
la misère el dans l'indigence. La cérémonie
élanl achi vée, loule la ville les reconduisit
de rég!ise cher cllis, où elles menèrent dans
les exercices de ce nouveau Tiers Ordre une
vie si sainte, que plusieurs sont mortes e::
odeur de sainteté.
lintre les autres fut s;iin!e Marie du Se-
cours, qui fui la supérieure de celle pcLlc
communauté, el reçut la première l'Iabit du
Tiers Ordre, les auires lui ayant déféré cet
lionneur à cause de son éminenle sainUlé.
l'Ile n.iquit à Barcelone, l'an 12'J1, de pa-
rens nohlos el riehes, et fut nommée .Marie,
l-llle (ommcnça dès son enfance à aimer
Dieu, à le jirier avec fervi ur, el à châtier
8i>n corps par des macérations près luc in-
croyables. Ivlle fit vffu de virginilé de bonne
heure pour se dég ger de toutes les pour-
suites du mariage, el par la proteciion de la
sacrée Aicrgc sa patronne, elle le garda jus-
q'i'à la mort. Ses parents l'avant laissée hé-
ritière de Irès-grands biens, elle n'en fut (]uc
l'ccononic fiour les distribuer aux pauvres,
aux prisonniers, aux malades, aux eaplils cl
à toutes sortes de nécessiteux. Et celle cha-
r.ié sans bornes lui acquit une si haute ré-
putation dans lîarcelone, qu'on lui donna
n)mniunémcnl le surnom de Secours au lieu
de celui de sa famille que les historiens ne
marfjueiil point.
Elle fui la pri mière, comme nous avnns
(Hl, qui reçut l'hahil du Tiers Ordre de la
Merci, el quoique les historiens de cet ordre
donnent à celle sainle la qualilc <le religieuse
«lu Tiers Ordre, aussi b rn qu'à celles qui
reçurent l'habil avec elles, il y a hien de
l'apparence qu'.iyanl demaiwlé eel habit ù
rimit.it on di's Tieiciaires des ordres de Saiiil-
François el de Sainl-l)oniini(]iie , elles ne
s'engagèrent roiiimc elles qu'à des vœux
.simples, el non pas à des \wu\ solennels
qui font le religieux, et ([ni sont un cr.ga-
gemi ni indissoluble qui le lie à l'ordre qu'il a
embrassé et l'enipèi lie de relonrni r dans le
monde.au lieu que le véritable esprit des
Tiers Ordres établis dans l'Eglise n'a point
été de lier ceux qui s'y engageaient, à moins
qu'ils n'y fussent engagés par des vu'ux so-
lennels, comme il est arrivé dans les Tiers
Ordres de Saint-François et de Saini-Uomi-
nique, < ù il s'est trouve des personnes qui
s'y sont consacrées a Dieu par des vœux so-
lennels ; ce (|uc sainle .Marie du Secours el
ses compagnes ne peuvent pas avoir fait,
piiisqu'e'.l s auraient été véritablement reli-
gieuses ; et en ce cas on n'aurait jias appe'^
leur ordre le Tiers Ordre, et l'on n'aurait
pas donné le second rang dans Tordre de la
Al<'rci à celles qui furi ni établies dans le
monastère do l'Assomption, l'au I0O8, près
de trois cents ans après rélablisseinenl de ce
Tiers Ordre. Il ne faut pas croire que les re-
ligieuses du monastère de Séville, el celles
qui les ont imitées dans ce genre de vie,
aient eu la préséance au-dessus de celles du
Tiers Ordre, à cause qu'elles ont gardé li
ckMure; car il y a un grand nombre de reli-
gieuses dans l'ordre de Saiul-Friinçois el de
Saiiit-D.imini'|ue qui sont du second ordre,
sans néanmoins garder la clôture, se coit-
formanl aux usages des pays où elles s int
établies; et si sainte .Marie du Secours et ses
compagnes ont vécu en commun..Uié, elles
ne doivent pas pour cela élre appelées reli-
gieuses, puisque nous voyous tous les jo;irs
des Ticrciaires vivre en communauté, comme
les Dons-i'ils, qui sonl duTiersOrdredeSaii:l-
François.quiont des églises ouverles, qui pra-
tiquent loutes lesoliservances de la vie régu-
lière, el qui néanmoins ne sont pas religieux.
Au reste, ce Tiers Ordre de la Merci est peu
connu préseiilement; nous ne vojons pas
même que les historiens de la Merci en aient
beaucoup parlé. Ils se sont conleulés de
donner la vie de sainte Mirie du Secours, qui
en a reçu l;i première l'habit, et à qui ils don-
nent sans fondement la qualité de religieuse.
Celle sainte mourut à Barcelone, l'an l'iSI,
cl fut enierrée dans l'égii-e des religieux de
la .Merci, où il s'esi fait plusieurs miracles à
son tombeau. Ce sacré corps est encore tout
enlier, aussi bien que celui du bienheuieux
Bernard de (^orb.irie, son direiteur. Il csl
maintenant dans une châsse, enfermé sous
qu.ilri! clefs, dont Tniic est entre les m.iins
de l'évéque, l'autre dans le dépôt du c uveut,
la troisième est gardée par les députés du
comic de <3ataIogne, cl la quatrième à la
disposition des consuls de la ville.
\'oyez 1.1 Vie de sainte Marie du secours
par le P. Atirri, les Annales et les Clirvni-
(/uet de l'ordre de la Merci.
M[:iU<: UE DIEU (CiKiics Bkgl'i.ikus nu
la), yoy. l'icoLiiS riKi'SES.
MES>INE. Voij. Boi l'.DOLiiG.
A'o)ez la Vie de sainle Marie du Secours,
parie P. Aiivri, les Annales cl les Chroni-
qms de l'ordre de la Merci.
MfiTI O DE I.A PÉNITENCE DES MABTYBS
CiiANoiNi s lu (il i.iEns UK No nu'.-DAM i-. dk;.
Il y a des auti urs i)ui ont confondu l'onlrc
de Noirc-Dame de Méirode la l'énilenee des
Martyrs, avec un ordr»- suppose de S.iinl-
Ucmelriub ; el d'autres en ont lait deux or-
yo3
MET
MET
954
(1res séparés. Lp P. Louis Torclii, relis'i^'iix
rie l'ordie de Sainl-Angusliii, dans rHistoirn
générale de sni ordre, qu'il toirimença à
donner au public en 1675, parle de celui de
Sainl-Démélrius, fondé, à ce qu'il dit, en
Pologne par quelques personnes pieuses,
vers l'an 1200, confirmé par le pape Alexan-
dre IV, el prélend que ces religieux portent
des habiis gris, sur lesquels il y a une crois
sur lin cœur.
Le P. Jérôme Roman, aussi religieux de
l'ordre des lïrmiles de Saint-Aui;utin, dit
qu'il y en a un sous le nom de la Pénitence
des Martyrs, fondé en lliilie sous le pontificat
de Clément V, l'an 1232, dont l'inslilut est
rie Ir.giT les pèlerins, cl que cet ordre s'est
tellement agraiiili, qii'il a été divisé in dix-
liuit provinces, ce qu'il a lu, dil-il, dans un
livre qui lui fut envoyé en Espagne par un
religieux de cet ordre ; il ajoute qu'il y en
avait d. ux monastères dans le royaume de
(jalice, l'un à Sarria et l'autre à Arzua, qui,
par ordre du pape Pie V et do l'Iiilippe 11,
roi d'Iispagne, furent incorporés, l'an 1507,
à l'ordre dos Ermites de Saint-Augustin.
Herrera, qui est encore un religieux du
mémo ordre, dit aussi que celui de la Péni-
tence di's Martyrs fui fondé en Italie, comme
il paraît pur des titres qui sont conservés
d.ins ces deux couvents; que ces religieux
portaient un h.ibit blanc avec une croix
rouge; et que d'Italie cet ordre avait passé
en Espagne, par le moyen do deux religieux
qui y étaient venus visiter le corps du l'a-
pôtre saint Jacques, et y avaient Ibiulé les
nionaslères de Sarria et d'Arzua; et Pierre
Crescenze dislingue aus^i l'ordre de Saint-
Déméirius d'avec celui de la Pénitence des
filyrtyrs.
Il est certain que ceux qui ont supposé
qu'il y avait un oidre de Sainl-Démétrius
se sont trompés, et que celui qui a le pre-
mier erré en cela et fait tomber les autres
dans l'erreur, aura sans doute pris S. M . De
Melro pour saint Démétrius. Car le vérita-
ble nom de l'ordre de la Pénitence des Mar-
tyrs est celui de Sainte-M.irie de Métro de
Uome, de la Pénitence des Martyrs.
L'on ne peut ajouter foi au P. Uoman,
lorsqu'il dit que cet ordre fut fondé l'an
1232, sous le pontificat de Clément V, puis-
(juc le pape Grégoire IX gouvernait |)our
lors l'Eglise, et (lue Clément V ne succéda à
Benoît que l'an 130i. On ne peut pas croire
non plus que cet ordre ait été si puissant en
Italie et divisé en dix-huit provinces ; (>uis-
qu'il a toujours été peu connu, et que les
i)istoriens en ont fait peu de mention, n'y
ayant même préscnfement aucun couvent
de cet ordre en Italie. S'il y en avait eu tant
de maisons et qu'elles eussent été divisées en
dix-liuil provinces, elles auraient été énon-
cées dans une prétendue bulle du pape Boni-
face VIII de l'an 1295, qui est le plus ancien
titre que les religieux de cet ordre puissent
produire; et dans celte bulle il n'y est parlé
(jue du monastère de Métro d»» la ville de
Kome, de Sainte-Elisabeth d'Ailesphcl, de
Saint-Pierre de l'île de , de Saiute-Croix
de Prague, de Saint-Bartliélemi de Podcrabi
et de Sainte-Marie d'Orlilz au diocèse de
Prague, de Sainl-Marc à Cracovie, cl de
Sainle-Marie au diocèse de Cracovie. Ils
n'ont néanmoins qu'une copie de celte bulle,
dont ils disent que l'original a élé perdu ;
c'est ce qui obligea le général de cet ordre,
l'an 1507, d'avoir recours au pape Jules H,
duquel il obtint une bulle où celle de Boni-
fiée Vlll est insérée, et Jules II ordonna
qu'on y ajouterait autant de foi qu'à l'origi-
nal : il avoue néanmoins que l'on n'a au-
cune connaissance à Uome de celte église
de Nitre-Darse de Métro, ni du lieu où clic
était située, et que ce que l'on en sait, ce
n'est que par la copie de la bulle de Boni-
face : Licel de dicta ccclesia liealœ Mariœ de
Métro, pncleri/uain pcr dictum Iransumptum,
nulla penitus noiitia hahe:it:ir, et locus ubi
dicta ecilesia fundala fuerat non rcperiatar.
Cependant il confirme ces religieux dans la
possession des monastères et des biens énon-
cés dans cette prétendue bulle de Bonifaco
VIII, il dans la possession de ceux qu'ils
avaient acquis dcpu s, dont il fait le dénom-
brement, qui n'est pas néanmoins bi< n
grand, car il ne consisie qiie dans les mo-
nastères de Sainle-Croix de Bisliyka en Li-
Ihuanie, de la Sain e-Trinité de Miedniki, cl
de la Sainte-Trinité de Twerec au diocèse de
Vilna.
Quoique ce monastère de Noire-Dame de
Métro à Rome, qui était chef d'ordre de «es
religieux , fût inconnu au pape Jules II, qui
avoue même qu'on ne s.iit pas le lieu où il
était situé, le général qui s'adressa à lui ne
laissa pas de prendre le litre de prieur de ce
couvent, comme il est porté par la bulle de
ce ponlife : Sane pro parte dilccli fûii Jonv-
ni$ prioris ecclefiœ S. M. Demetri de Vrhe,
ordinis S. Aujustini el ejusdem ordinis ge-
ncrnlis, nobis niiper edliibila pctitio conti-
nebat. On aura peine à comprendre comment
ce couvent de Rome, chef d'un ordre si con-
sidérable, qui était divisé en dix-buil pro-
vinces, selon quelques auteurs, ait tout d'un
coup disparu, sans qu'il soil mémo resté au-
cune mémoire du litu où il élail situé, et
(jue Jules II ail cru si aisément ce que ce
général lui avait exposé. C'est ce qui doit
rendre suspecte celle bulle de Boniface VIII
et celle de Jules II où elle est insérée, et
dont j'ai une copie qui m'a élé envoyée de
Pologne.
Quoique ce soit le seul litre que ces reli-
gieux puissent produire, ils ont néanmoins
bien d'autres prétentions louchant leur anti-
quité. Ils disent, aussi bien que les Croisiers
ou Porte-Croix ( Foi/. Croisieus), que saint
Ciel, l'an 78, a élé leur instituteur; que saint
Cyriaque, évéque de Jérusalem, a élé le res-
taurateur de leur ordre; qu'ils ont eu pour
législateur saint Augustin, dont la règle leur
a été donnée par les souverains pontifes ré-
cents; que leur ancien habillement était
celui des Chanoines Réguliers : qu'ils por-
taient une croix d'argent, cl quenuelqucs uns
prétendent que cette croix leur avait été don-
née par saint Cyriaque, en mémoire de la
955
DICTIO.NNAIHE DKS ORDRF.S RF.IJGIF.IJX.
955
vraie croix do Nolrc-Scigiiciiv Jésus-Chrsl
qu'il avait IrDUvéf : hislitutor nosterS. Cle-
(iis papa, reftiiuralor S. Cyrincu^ «inscopus
flitro$ohjmilriiius, et tandem legislatur S.
Augustinus, ctijtis reytilam a rccentioribus
ponlificihiis susi epimits. Cruris arijenUœ et
universi canonici habiius antii/uixsimus nobis
usus : snnt eliain ncnnulli i/ui ciucein nubis a
S. Cyrinco, in inciiioriain invenlœ par e\tm
ciucis dominicœ, (latiim fuisse asfeieiant.
r.'esi .'tiiisi qu'un religieiis de col ordre ilicril
leur origine dans un livre inipriuic-à \ ilna, et
qui a pour litre : 0//m>- tnisncniis Dei.
Nous ne nous arrè eroiis point à réfuter
CCS fables, el on peut voir ce que nous en
.ivons (lit à l'art. Ckoisikrs. Mais ctl auteur
en ajoule encore de plus grossières pour jus-
lilier le titre qu'on leur donne de Chanoines
Héijulirs de Sainte-Marie de Mclro de Rome,
de la Pénitence des iMartyrs. Il dit qu'il» sont
appelés Chanones Itégaiitrs, à la différence
des Moines, parce que leur ordre a paru le
premier dans 1 Kglise après !cs apôircs, et
«ju'on leur a donné la conduite des âmes ;
que l'on ajoute de sainte Marie Demelri (il
ne met pas de Mctro) à c^iusc du scapuîaire
que la sainie Vierge donn.i à saint Démé-
trius, consul romain, qui, ajanl été reçu
dans l'ordre par saint Ciel, l'amplifia dans
sa propre maison: (/f Home, p;iree que Cil
ordre fut le premier confirmé par le sainl-
siése, el qu'il a été le premier qui a ou des
monastères dans celle ville ;dela Pciiilcnv,
taiil à causu que dans le temps de la persé-
cution les religieux de col ordre se cachaient
liais les bois cl dans les cavernes, qu'à cause
(lue jusqu'au temps de la persécution ils
avaient clé les Pénilem icrs du pape ; el enfin
des un. Martyrs, à cause du grand nombre de
ces religieux qui répandirent leur sang pour
la défense de la fui. Ces religieux avouent
néanmoins que de ce t;raiid nombre de niar-
Ijrs ils n'ont seuenient connaissance que
de six, qui sont sainl Uémétriu<, consul ro-
main, sainl lilde , sainl Rajnauld, sainl
Lilièrc, sailli Concessc, sainl Ventura de Spo-
lelle.el sainl Cyriaque, évciiue de Jérus.ilem.
C'esl ce qui est aussi marqué dans ce livre
qui a pour litre : Opus misrrcntis Dci, que je
ii'.ii point vu, mais dont on m'a envoya un
estrail fidèle, la personne qui me l'a envoyé
ayant eu soin de marquer les pages, el elle
ajoute : Uœc reliilisse sulficiat, super yuibus
viri prudentis ac eruditi eslo judicium, regar-
dant aussi comme une chimère ces prelen-
tioDS.
«]'esl apparemmeut à ranso de ce saint
Dtmélrius, consul romain, qui n'a j.imais
exisié, u'y ayant point eu de consul de ce
nom sous les empereurs Néron, dalla,
Othon cl les autres, sous l'empire desquels
sainl Ciel a pu vivre, tant a\anl que pen-
dant son pontifical , que ces religieux pren-
nent daas leurs qualités celle de Chanoines
Régulier» de Sainte-Marie Demetri, au lieu
de de Métro, comme ils sont appelés par des
historiens polonais, par l'auteur du la Vie
du H. I.idislas, de l'ordre de Sainl-Fran(;(>is,
et dins le procès-verbal de la translation du
corps du |{. Mirliel (iedroc de leur ordre ,
signé par tous les religieux de leur couvent |
de Cracovic, donluous parlerons dans la '
suite.
L'on ne peut donc rien dire de certain
louchant l'origine de ces Chanoines que l'on
appelle communément en Pologne, deS^iinl-
Marc, à cause que leur monastère de Gra-
covie, qui est le principal de ceux qu'ils onl
en ce royaume, est dédié en l'honneur de
saint Marc l'Kvangélisle. C'esl pourquoi l'au-
leur de la \ ie du I?. Michel Gedroc dit qu'il
entra dans l'ordre de Saint-Marc. Tous les
liistui iens polonais qui ont parle de ces re-
ligieux conviennent qu'ils furent reçus dan»
ce royaume l'an 1-257 , et que ce fut liolcslas
le (Chaste , duc de Cracovie el de Sandomir,
qui les clab il à Cracovie, leur ayant donné
l'église de Saini-Marc, qu'il avail fondée
depuis peu ; et Dugioz ajoute que ces reli-
gieux avaient élé institués par le p.ipe Ale-
xandre l\ , qui surcéda à Innocent IV l'an
123'i-. Alexan 1er papa IV no'-atn rcliglonnn
M'ndictin'.ium de PœniCentia Marlyrum insti-
lait , cujus fratre.i el profe.<sores Cracoiiam
advenicnles, ISuIrslaus Pudicus Cracovierisis
et Sandomirie/isis dux bénigne appdialos
sui^cipil ; et ecclesia in sancti Marci l'vange-
tislœ lionurcm de noio fundola illis tocum
Cracoviœ contalit aniio 1257. Ily a néanmoins
quelques autres auteurs qui disent qMC cel
ordre fui instlué l'an 12o0 , coiimie on lit
dans la seconde conlinualion de la Chroni-
que de Thierry d Engeihusen, r-i|ipi)rlée par
M. de Leilinitz dans le second tome de son
Heiueil des écrivains de Ilrunswick.
Outre 11' nionaslcre de Saint-Marc de Cra-
covie, CCS religieux en onl encore quatre
autres en Pologne et un plus grand nombre
en I.itliuanie , dont les plus considérables
sont ceux de .Miedniki, fondé par Jagellon
dans le pahilinat de \ ilna, Widzinieiszki ,
Twcrc el Mikaliski. Ils en ont aussi qucl-
(liies-uns en Holiéine, dont un à Prague. Le
prcv(it de celui d(! Widziuieiski a dro.t de se
servr d'ornemcnis pontificaux.
Ces religieux ont aussi des cures qu'ils
desservent. Leur habil consiste en une sou-
tane blanche et un .scapuîaire de même cou-
leur, sur lequel il y a un co-ur surmonté d'une
croix rouge. Lorsqu'i's sortent ils mettent
une soutane ou veste noire (|ui cache leur ha-
bil blanc, et dans les fondions ecclésiasti-
ques ils ont un surplis el une mozeltc blan-
che ou camail par-dessus. Le P. Atlianascde
Sainle-Agnès, le P. Torclli et Crescenzc,
disent que leur tunique ou robe est grise.
Ils |)cuvenl en avoir porté autrefois de celle
couleur; mais, selon les méuioires q"i m'ont
été envoyés de Pologne en 170'i- el 1710,
leur habit est tel que je le décris (1).
Il y en a qui doutent s'ils sont véiilab'c-
menl Chanoines llégulicrs. Penoi cl le Paige
leur donnent néanmoins ce litre , el r'i'sl
peut-élre la qualité de mendiants qu'ils
(1) Voij., il la lin du vol., ii°' ^lO eliJI.
057
MIC
MIC
9:;8
prennent , ou du moins qu'ils prenaicnl aii-
Irefois, qui les aura fait exclure par quel-
ques-uns de l'ordre canonique. Celte qualité
de Chanoines Héguliers, conjointonienl avec
le nom de mendiants, leur est cependant
donnée dans le procès-verbal de la transla-
tion du corps du B. Michel Gedroc, religieux
de cet ordre , faite l'an 1G24 par un évèquc
(le Laodicée sulTraganl de Cracovic : Thomas
Ohorsik epiccopus Laodicensis suffraganeus et
Canonicus Cracoviensis piœ posterilati. Ad
Vei omnipolends gloriam mijorem et sanclo-
rum ejus honorem, nolum facimus et testamur
nos rogalos fuisse areligiosisPatribtis ordinis
Canonicorum Rigttlariuin Mcndicnnliwn S.
Malice de Melro de l'œnitenlia sanclorum
Marlyrum, ut ossa et cineies servi Dei B.
Michaelis Gedroc ordinis prœdicli , in lemplo
eorumdem religiosorum Cracoviœ S. Marco
dicalo sepulli , e sepulcro vcleri ob inajus
fidelium commodum levaremus, etc. {Apud
Bolland., toin. I Maii, in Vila B. Michaelis
Gedroc] Ce 15. iMichcl Gedroc descendait des
anciens ducs de Lithuanic, et mourut l'an
l'»83. Il se fait tous les jours plusieurs mira-
cles à son tombeau. Lorsqu'on fit la transla-
tion de son corps, le P. Jean-Baplisie, llalien,
religieux de l'ordre de Saint-François, élail
commissaire général de l'ordre de la Péni-
tence des Martyrs, comme il est porté par le
même procès-verbal de cette translaiion. Ils
ont eu aussi le P. Jacques Przirousoieclii,
qui est mort en odeur de sainicté, l'an IGS'J.
Voyez Peno', flist. Iripart. Canonic.liegul.
Le Paige , iî 6/îoï/i. Prœmon!<t. PielroCris-
cenzi ,Presid. roimji. llb.m, jiog. iJo.Crussen.
Monaslicon Augns'. jiarl. mi, cap. 1. Luigi
Torelli, Secot. Agnsliiiian., tom. IV. Bolland.
tom. I Muii, in Vil. D. Michaelis Gedroc.
Tambur., de jure AbOnlum, disput. 2'i-, quœst.
h. Athanasc dt; Sainle-Agnès, le Chandelier
d'or, et mémoires envoyés de Pologne en 170i,
et 1710.
MICHEL (Des Chevaliers ue l'ordrk de
Saint-) en France.
11 y a des auteurs qui prciendent que
Charles VU , ayant aboli l'ordre de l'Etoile
par le mépris qu'il eu fil en metianl le col-
lier decet ordre au cou du chevalier du guet,
et en ordonnant que ses archers porteraient
sur leurs hoquetons des étoiles , eut dessein
d'en instituer un autre sous le nom de l'ar-
change saint Michel , protecteur du royaume
de France , auquel il avait beaucoup de dé-
votion : ce que n'ayant pu exécuter, à cause
qu'il mourut qu Ique temps après, Louis XI,
.son fils , suivant les volontés de son père ,
avait institué cet ordre. Mais nous avons
fait remar(iuer, en pariant de l'onlri' d ■ l'E-
toile, que Chai les Vil n'avait point aboli cet
ordre, qu'il avait subsisté sous le règne en-
tier de Louis \1, et qu'il n'aviiit été supprimé
que sous Charles VIII. Brantôme remarque
que Louis XI n'avail pas eu tant d'amitié
pour Charles Vil , son père, pour qu'il i ût
voulu en garder le souvenir après sa mort ,
])ar rétablissement de l'ordre de Saint-Mi-
thul, qu'il n'iiufail l'ail que pour exécuter
ses volontés, et d'ailleurs il aurait attendu
un peu tard à les suivre , puisque ce ne fut
que l'an 1459, le neuvième de son règne,
qu'il institua cet ordre dans le château d'Am-
boise. Il ordonna qu'il n'y aurait que trente-
six chevaliers : il n'en créa d'abord que
quinze, s'élanl réservé de nommer les autres
au premier chapitre ; mais le nombre des
trente-six ne fut point rempli sous son règne.
Les quinze pnemiers qu'il honora de cet or-
dre furent Charles , duc de Guyenne ; Jean ,
duc de Bourbonnais et d'Auvergne ; Louis
de Luxembourg, comte de Saint-Paul , con-
nétable de France ; André de Laval , maié-
ch il de France ; Jean , comte de Sanccrre ;
Louis de Beaumont . seigneur de la Foréi et
du Plessis ; Jean d'Estouleville , seigneur de
Torcy ; Louis de Laval , seigneur de Chàtil-
lon ; Louis , bâtard de Roui bon , comte de
Boussillon , amiral de France ; Antoine do
Chabanncs, comte de Dammartin, grand maî-
tre de France; Jean, bâtard d'Armagnac ,
comte de Cominges, maréchal de France et
gouverneur du Dauphiné ; Georges de la rri-
moiiille, seigneur de Craon ; Gilbert de Cha-
banncs, seigneur de Curlon et sénéchal de
Guyenne ; Charles, sire de Crussol , sénéchal
de Poitou , et Tanneguy du Châtel , gouver»
neur de Boussillon el de Sardaigne. Il leur
donna un collier d'or fait de coquilles entre-
lacées d'un double lacs, posées sur une chalno
d'or , où pendait une médaille représentant
l'archange saint Michel terrassant le diable.
Ils étaient obligés de porter tous les jours cj
collier à découvert , sotis peine de faire dira
une messe el de donner une aumône de sept
sols six deniers tournois , excepté lorsqu'ils
éiaient à l'armée , en voyage, dans leurs mai.
sons ou à la chasse. Il» portaient pour lors
seulement une médaille attachée à une chaiiie
d'or ou à un cordonnet de soie noire, et ils ne
|)ouvaient la quitter dans les plus grands
dangers , même pour conserver leur vie.
Brantôme dit avoir été présent lorsque le roi
François I'' Ht une sévère réprimande à un
chevalier qui , après avoir été pris dans un
combat, avait ôtè la marque de sou ordre ,
afin de n'être pas reconnu pour chevalier do
cet ordre et ne pas payer une grande rançon.
Conformément aux statuts de cet ordre, lo
grand collier doit être du poids de deux cents
écus d'or el ne peut être enrichi de pierre-
ries. Les chevaliers ne le peuvent vendre ni
engager : il appartient à l'ordre , et après la
mort d'un chevalier , ses héritiers sont obli-
gés de le renvoyer dans l'espace de trois
mois et le mettre enlre les mains du tréso-
rier de l'ordre. Ils ne peuvent entreprendre
aucune guerre, ni s'engager dans une action
dangereuse , sans en avoir donné avis à la
plus grande partie des autres chevaliers et
les avoir consultés. Ceux qui sont Français
ne peuvent s'engager au service d'aucun
prince étranger , ni fjire de longs voyages
sans la permission du roi ; mais les étran-
gers le peuvent en le faisant seulement sa-
voir. Si le roi fait la guerre à quelque prince,
un chevalier de l'ordre , sujet de ce prince,
[icut prendre les armes pour sa délense;
Oo'J
DICTIONNAinE DES ORDRES REI.IGIF.UX.
9C0
mais si c'est ce prince qui déclare la puerrc
à la l-'ranci-, le ciievnlicr son sujel doit s'excu-
ser lie servir contre la France, et si son prince
ne veut |>as recevoir son excuse el le con-
traint de servir, pour lors il peut prendre les
iiru)' s contre la France, mais il en doit donner
ii\ is au chef de l'ordre et avcriirson souverain
que !.'il fait prisonnier de guerre un chevalier
de cet ordre, son confrère, il lui donnera la li-
berté et fera son possible pour lui sauver la
vie ; que si son prince n'v veut pas consen-
tir, il doit quitter son service. Le roi, de son
côl-é, s'engajjc envers les chevaliers do les
protéger el les maintenir dans tous leurs
droits et privilèges, de n'enireprendre au-
cune guerre ni aucune aiïairc de conséquence
sans les avoir auparavant consuHés et pris
leur avis, excepté dans les cas où les affaires
demandent beaucoupde secret et une prompte
exécution ; et les chevaliers promettent et
jurent de ne point révéler les entreprises du
souverain qui auraient été mises en délibé-
ration devant eux. Selon les mêmes statuts,
les chevaliers doivent être privés de l'ordre
pour cause d'hérésie, de trahison et de lû-
clieté , pour avoir pris la fuite dans le com-
bat. Ils doivent à leur réception quitter les
autres ordres qu'ils peuvent avoir reçus
d'autres princes, excepté les empereurs, rois
el ducs. Chaque chevalier est aussi obligé ,
à sa récepti(m, de payer au trésorier qua-
rante écus d'or ou l,( valeur, pour être em-
ployés en ornements pour le service de l'é-
glise , et à la mort <l'un confrère il doit faire
dire vingt messes et donner six écus d'or en
aumônes. Les ^laluls portent encore que,
pour remplir la place du chevalier décédé ,
ils doivent s'assembler avec le souverain el
donner leurs suffrages par écrit , mais cela
ne se |)ratiquc plus présentement.
L'église du Mo.it-Saini-Michel en Nor-
mandie fut destinée par Louis XI pour y cé-
lébrer les divins offices et recevoir les bien-
faits et l'oiidations qui seraient faites en fa-
veur de l'ordre. 11 semble ecpenitaiit que ce
prince changea de dessein et ()u'il destina
pour les cérémonies et les fêles de l'ordre la
chapelle de Sainl-.Michel dans la cour du 1'.;-
lais à Paris : car par ses additions aux sta-
tuts faites aux licssis-lès- Tours le 22 dé-
cembre li7G, il déclare (]u'il a fait vœu d'é-
tablir une collégiale en l'hunncur de Dieu ,
de la sainte \iergc et de saint Michel , et
ayant créé parles mén.es additions aux sta-
tuts un office de prévôt et maître des céré-
monies de l'ordre, il ordonna' qu'il aura soin,
entre autres choses, de poursuivre l'exécu-
lion de la fondation de celte collégiale ; (|u'il
en obtiendra les |)eroiissions ncrcssaires ,
tant des souverains pontifes que de l'ordi-
naire ; qu'il aura l'inspection sur les bàli-
in iiig qu'il prétend (aire faire au lieu où
fiera fondée cette cullé'^iate ; qu'il aura soin
des réparations et veillera a ce que l'ollice
divin suit fait par les chanoines, tant de nuit
que de jour ; et par ses lettres ()alenles du
2» du même moii, il lit la fondation de celte
(ollégrate pour dix chanoines , uo doyen et
on ehaoïru, huit cbaoclains, six enfants de
chcpur, un maitrc , deux clercs , trois huis-
siers ou bedeaux, un receveur et un con-
trôleur, pour faire l'oflice divin dans la cha-
pelle de Saint-.Slichel du Palais à Paris. Co
clia'pitrc devait élre immédiatemcnl soumis
au saiiil-siége et île nomination royale. Les
prébendes étaient de dix sols parisis par
jour. Le doyen devait avoir deux parts , lo
chantre une part et dence, <t les chapelains
demi-part chacun. Tour ce sujet le roi leur
donna et céda dix deniers tournois sur le.
droit ordinaire des gabelles qui se lèverait
sur chaque minut de sel. Le receveur devait
avoir quatre cents livres parisis de gages, el
le contrôleur deux cents livres. Le receveur
devait payer aussi au chancelier de l'ordre
huit cents livres parisis, au prévôt six cents
livres, au trésorier six cents livres, au gref-
fier quatre cents livres, et au héraut deux
cent cinquante livres. Sa Majesté voulut
que ces chanoines , chapelains et officiers
eussent leurs causes commi>es par-devant les
maîtres des requéle-i, qu'ils fussent exempts
de toutes charges quelconques et im| ositions
de la part du roi, de la v il!e, et <'e tous autres
privilégiés et non (trivilégiés, dont ils seraient
exceptés el déchargés. Mais cette fondation
ne fut point exécutée, et il ne se trouve point
que les assemblées et les fêtes de l'ordre se
soient faites dans cette église , ni même dans
l'église du Mont-Saint-Michel.
La veille de la fête de ce saint, tous les
chevaliers de l'ordre étant au lieu de l'asscm»
bice devaient se présenter devant le souve-
rain en son palais, avant les vêpres, el aller
ensemble à l'église, revêtus de manteaux de
damis blanc traînant à terre, bordés d'or
avec des coquilles et lacs d'amour en brode-
rie, el fourrés d'hermine, la tête couverte
d'un chaperon de velours ciamoisi. Le len-
demain, ils retournaient à l'éjilise pour en-
tendre la n<es-c; à l'offertoire, ils offraient
une pièce d'or, chacun selon sa dévotion; et
après l'office ils allaient dîner avec le roi.
Le même jour, ils allaient encore à l'égliso
pour les vêpres; mais ils étaient vêtus de
maiteaux iu)irs,a\ ec des chaperons de même
couleur, excepté le roi, qui avait un man-
teau violet. Ils assistaient <iux vigiles des
morts, cl le lendemain à la messe, à l'offer-
toire de laquelle chaque chevalier offrait iiu
cierge d'une livre, où ses armes étaient atta-
chées. Le jour suivant, ils relournai>'nt en-
core à l'église pour enendie la messe que
l'on chant.iit eu l'honneur de la sainte
Vierge; mais ils étaient habillés comme bon
U'Dr semblait.
Il n'y eut d'alxird que quatre officiers do
l'ordre, savoir : le chanceiier, le greffier, le
trésorier el le héraut, appelé Mont-Sa'Ul-
Michel. Ils avaient des robes longues de ca-
melot lilaiic, fourrers île menu vair. avec des
chaperons d'écarlaie; et le chancelier devait
êlre toujours ecclésiastique. Le prieuré de
Grandmont, dans le parc de \'inci'nne5, a été
pendant un temps considérable annexé à la
dignité de chancelier de l'ordre de Saint-
Michel. Le caidiiial de Lorraine, le cardinal
Gabriel le Veaeur, évêiiue d'Fvreux , cl l'hi-
961
MIC
MIC
962
lippe Huraut, comlc de Chiverni, chnncelii^r
de France, l'onl possédé en cette qunlité. Ci?
dernier en était prieur lorsque le roi Honri 1!I
fit, l'an ISSîp, un concordat avec François de
Neuville, génér.il de Tordre di' Granilinoni,
par lequel ce prieuré fut distrait de cet ordre
pour être transféré à ici autre qu'il pi lirait
H Sa Majesté, qui donna en éclianf,'e à l'ordre
lie Grandmoni le collège de Mignon, à Paris ;
en qui fut confirmé par le pape (jrégoire XII!.
Le roi introduisit d'ahord, dans ce couvent,
des Cordeliers qui l'abandonnèrent la nu'iniî
année, et il mit en leur place des Minimes
(|ui y sont restés jusqu'à présent. Ainsi lo
liire de prieur fui supprimé, et l'oflice de
chancelier de l'ordre de Sainl-Michul uni à
celui de chancelier do l'ordre du Saint-
Esprit, que ce prince avait institué en 1578.
Louis XI étant au Plessis-lès-Tours, l'an
ti76, avait ajouté à ces quatre offices un
prévôt maître des cérémonies, comme nous
avons dit ci-devant. Louis Xli, ayant con-
quis le royaume de Naples avec Ferdinand V,
roi d'Araii;on, qui devait se contenter pour
sa part de la Pouille et de la G;ilabre, le
reste étant demeuré aux Français, fit cheva-
liers de l'ordre de Saiiil-Michel : Troiano
Caraccioti, prince de Melphi et duc d'Atri,
grand sénéchal de Naples ; Bernardin de
Sanseverino, prince de Bisignano ; André-
Matthieu Aquaviva, duc d'Alri il prince de
Terrane ; el Jean-Antoine Caraffa , duc de
Madaloni. Mais les Espagnols ayant ensuite
chassé les Français de tout le royaume, dont
ils se rendirent uiaitres, ces seigneurs napo-
litains renvoyèrent le collier de l'ordre à
Louis XII, l'an 1511.
François 1" fil du changement à ce collier :
il lit ôtcr les doubles lacs pour mettre une
cordelière, lanl à cause qu'il s'appelait Fran-
çois, que pour conserver la mémoire d'Anne
de Bretagne, sa belle- mère qui l'en avait [irié
seloiiledireileFavin. Le môme roi ayant en-
voyé l'ordre de Saint-Michel à Henri VIII,
roi d'Angleterre, ce prince lui envoya aussi
l'ordre de la Jarretière ; et François l""',
l'ayiinl reçu, tint un chapilre des chevaliers
d,» l'ordre de Sainl-iMichel, devant lesquels il
fil lire les lettres d'Henri Vlll, par lesquelles
ce prince déclarait avoir accepté l'ordre de
Saint-Michel et avoir associé à celui de la
Jarretiire François 1" : c'est ce qui paraît
par les lettres de ce dernier que M. Aslimole
a mises à la fin de son Histoire de l'ordre de
la Jarretière, et que nous rapporterons ici.
François par ia grâce de Dieu rui de
France, i-eigneur de Gennes, souvifciin du
très-noble ordre de Monseigneur saint Michel,
ù tous ceux qui ces présent' s lettres verront,
Saluï, comme messire Artus Planiaginet, Vi-
comte de l'Isle, chevalier du très-digne ordre
de Monseigneur saint Genge^, messire Jean
Taillour, docteur ez loix, archidiacre de Buu-
kiiigam, vice-chancelier a'Angletirre, me: sire
Nicolas Corew, grand escuier d'Angleterre ,
mes>ire Antoine Ërowne, clievalier, et messire
Thomas Wriothes Jarretière, chevalier pre-
mier roi d'armes dadit ordre, ambassadeurs
commis el déléguez de la pari de très-haut et
très-puissant prince Henri par la même grâce
de Dieu roi d' Angleterre, seigneur d'Uyher-
nir dejfenseur de la foi, notre très-cher el
très-amé frère, cousin, perpétuel allié , confé-
déré, et bon compère, nous aient exhibé el re-
présenté certaines lettres patentes, dattées du
vingt-deuxième jour d'octobre 1527, signées
Sarnpson, et scellées en cire rouge du sceau
du collège et d'icelai très-digne ordre de saint
Georges, dit la Jarretière par la teneur des-
quelles qu'avons fait lire parJevant nous, et les
chevaliers de noire ordre de saint Michel, nous
apparoissoil /e< susd.amb issadeurs avoir plein
pouvoir, faculté et puissance de nous signifier
et présenter de la part de notre dit très-cher
fi ère et cousin souverain d'icelui très-digne
ordre de saint Ge irges, et aussi de l'amiable
association d'icelui , l'élection uniquem(nt
fiite de nous, pur iccux souverain et cheva-
liers d'icelui irès-digne ordre, et de nous prier
et requérir icelle élection accepter et prendre
le manteau et colli r et autres insignes de che-
valier dadit très-digne ordre, et fai e le ser-
ment selon les articles contenus au livre des
statuts dudit ordre , el que ont accoutumé de
jurer el promettre les chevaliers d'icelui, et si
la forme desdils serments ne nous était pas
agréable, leur était donné pouvoir de nous
dispenser de faire lesd. sermens on partie d'i-
ceux tels qu'il apparliendroil ; soi contentant
de notre simple foi et parole , sçavoir faisons
que nous aiant égard et considération à la
très-cordiale el Irès-entiere amour, alliance et
indissoluble et confédération perpétuelle, (jui
est entre noire dit très-cher el très-amé frère,
cousin, ailié peipctucl, et bon compère et
nous, et que de sa part il a accepté l élection
par nous et nos frères faite de sa personne an
très-digne ordre de saint Michel duquel nous
sommes souverains, avens pour ces causes et
autres à ce nous mouveans, accepté el accep-
tons icelui très-digne ordre de sainl Georges
dil la Jarretière, et ce fait nous sommes revê-
tus et affublés du manteau et autres insignes
dudit ordre à nous présentez et livrez par les
susd. ambassadeurs , et après les remercimens
en tels cas requis, avons fait le serment en la
forme el manière qui s'en suit: Nous François
par la grâce de Dieu roi de France, seigneur
de Gennes et souverain de l'ordre de saint
Michel, promotions en parole de roi de gar-
der et observer et à notre pouvoir entretenir
les statuts et ordonnances du très-digne
ordre S. (ii orges nommé la Janeliere en ce
qu'ils sont compatibles, non contraires, ne
derogeans à ceux lie nolrtf dit ordre de S.
Miehel, et pareillement des ordres que par ci
devant pouvions avoir pris des autres prin-
ces, t'n lémoing de ce nous avons fait mettre
le sceau dudit ordre aux présentes signées de
notre main. Donné à Paris le 10' jour de no-
vembre l'an de grâce mille cinq cens vingt-sept
et de notre règne le treizième.
Henri 11, ét.mt parvenu à la couronne de
France, ordonna, dans le premier chapilre
de l'ordre de Saint-.Michel, qu'il tint à Lyon,
où il fil son eniree l'an 15i8, que les cheva-
liers de cet ordre porteraient à l'avsnir le
manteau de toile d'argent, brodé à l'enlour
ECS MCTUNNAinF. DKS OUDRF.S RF.LIGUIUX. 9GV
(le sa (Ic'viso, savoir : trois croissants d'ar- et «li- sorvi, ps, et iiuc plusieurs étranpcrs
genl t'iitrclarcs de Iroplu'es, semés de I m- avaient surpris des rertilic.its do réceplioi»
g'ies el naninics de feu, avec le chaperon de sans ses ordres parliruliers, orilonna, le li
vcliiiirs rouge cramoisi couverl de l.i même juillet IGIJI, à tous ceux qui avai<-nt été reçus
broderie; «(ue le diancclior porterait le man- dans cet ordre, de porter ou d'envoyer aux
teau de velours blanc el le rhaperon de ve- <omniissaircs que Sa Majesté nomr.ia, les ti-
lours cramoisi; quo le prévôt et maitre des très et preuves de leur noblesse cl de leurs
cércniones, le trésorier, le greffier el le hé- services, l'iusieurs ayant ohéi, cl les autres
raut, auriiienl un manteau de satin blanc et ayant iiéglipé d'y satisfaite pjir la crainte do
le (baperon de satin rramoisi, et qu'ils por- faire connaître leur naissance el rimpossi-
Uraicnl une chaîne d'or au bout de bxiuelle bililé où ils se trouvaient de donner des cer-
peniirait sur l'estomac une coquille d'or seu- tilirats de leurs services, le roi fil, l'.in 1C05,
lement. Tous les chevaliers qui étaient pré- un nouveau règlement portant que tous les
seuls assistèrent avec le roi, pour la solen- statuts, ordonnances el rèi;leinenls faits los
n:lé de l'ordre, dans l'église cathédrale de de l'établissement de l'ordre de Saint-Michel
Sainl-Jean de Lyon, aux premières vêpres de par le roi Louis XI etdcpuis, ser.iieni inv io-
l.i fête de saint Micliel, el le lendemain à la lablenient observés ; que le nombre de cciiv
grand'messe et aux secondes vêpres. qui seraient admis à l'avenir dans cet ordre
S ais le règne des enfants de ce prince l'or- serait réduit à cent, outre les cheialiers du
die coinm nça à s'avilir par le grand nom- Saint-Lsprit, parmi lesquels il y aurait six
bre de chevaliers que l'on fit au delà de celui ecclésiastiques prélres âgés do trente ans l'I
porté p;ir les statuts, qui n'était que de trente- constitués en dignités d'ablés ou de c!;ar^es
six. François 11 en fildix-huil dans une seule principales des églises cathédrales et colle-
ci éalion à l'oissy l'an 1360, dont on murmura giates, et six olfiiiers des compagnies souve-
forl. L'annéesuivanteCharleslXen fitquinze raines ; à condition toutefois qu'ils firaient
dans uneproniolion àSainl'Germain en Laye. les mêmes preuves de leur naissance el de
On ajouta àcegrandnombrelrente-troischeva- leurs services ((ue les chevaliers militaires,
tiers dans une autre promotion, et, en 1362 lesquels auraient seuls le droit de porter l'or-
et 1367, on en fil encore vingt-deux. Les dre, de s'en qiia'ilier chcvaiirrs, el de jouir
Irouiiles de la France obligîrent depuis le des droits, privilèges et avantages y atlachés;
roi d'en f.iire d'autres, dont il y en avait faisant déleuses Irès-expresses à tous les a. •
(]uclques-iins qui n'étaient pas de naissance ; 1res, de quelque condition qu'ils fussent, de
car liraiilôme dit que le marquis de Trannes plus porter la qualité de chevalier ni bdil
lit donner cet ordre à son maître d'hôtel. Ces ordre, nonobstanl tous les brevets, lettres de
frè(|uenles promotions firent interrompre la cachet el certificats de réception qu'ils au-
pompe dos chapitres el des cérémonies où le raient obtenus, lesquels Sa M. ijesté déclara
roi assistait avec les chevaliers. 11 se fit plu- nuls et de nul effet: qu'à l'avenir nul ne
sieurs rece[. lions dans les provinces, avec pourrait être idmis à l'honn. ur de rece-
peu d'appareil, par les chevaliers de l'ordre voir i el ordre qu'il ne fut de la religion
à qui la commission était adressée. Le der- catholique, apostolique el roaiaine, de
nier chapitre où se trouva Charles iX lui ce- bonnes mœurs, âgé de trente ans, noble de
lui qui se tint dans l église de Nuire-Dame à deux races, el ayant servi Sa Majesté et l'E-
l'aris. la veille de saint Miche! de l'an 1572: lat en des emplois considérables dans les ar-
le roi prit sa place à main droite sous un mées, au moins l'espace de dix ans, et ceux
dais de drap d'or, el à la gauche il y avait un de justice pendant le même temps, et à
pareil dais sous lequel étaient les armes des cette fin celui que Sa Majesté trou*erail ca-
rois d'iispagne, de Danemark et de Suède, qui p;ible de recevoir cet honneur, obtiemtrail
étaient aussidievalieis de celordre.M.lc La- ui>c commission signée de sa main, conlre-
boureur dit qu'Henri III le supprima lacile- signée du secrétaire des ordres et scellée du
nient en instituant Celui du .^aint-Fs|iril, au- grand sceau de l'ordre de Saint -.Michel,
quel il le reunit. (;ependant ce prince, par la adressée au chevalier de l'ordre du Sainl-
crèalion de l'ordre du Sainl-Kspril, déclara Ksprit que Sa M.ijes é commeitrait pour in-
qu'il voulait el entendait que l'ordre de Saint- former des f.iils ci-dessus et examiner b s
Michel demeurât en sa force el vigueur, et preuves t. int de la noblesse que des scrviees:
qu'il fut observé comme il avait été pratiqué lesquelles étant faites seraient mises dans
de|iuis sa première institution. Fn efl'el tous un sac cacheté et scellé du cachet des armes
les chevaliers de l'ordre du Sainl-lîspril du commissaire avec son avis, cl délivrées
rrcnnent l'ordre de Sainl-Micliel la veille du entreles mains du chancelier des deux ordres,
jour qu'ils doivent recevoir celui du Sainl- pour en faire rapport a Sa Majesté, lai|uelle,
l^spril; c'est pour(|uoi leurs armes sont en- par l'axis des confrères (,u'i'lle appcllerail.
tourées des deux co. tiers, el ils sont appelés ordonnerait ce qui lui plairait sur la récep-
chevaliers de l'i rdrc ilu roi. lion ou exclusion de celui qui aurait été pié-
Le roi Louis XIV, ayant reconnu qu'il senié , el qu'à ré;;ard de ceux que Sa .Ma-
s'é'ail introduil une infinité d'abus el de co;.- jestè jugerait dignes de cet honneur, elle
Iraventions aux anciens statuts el règle- écrirait au commissaire de leur donner le
ments de l'ordre de Saint-Mii bel, qu'il èlait collier m la firine ordinaire et accoutumée:
avili en la personne de plusieurs parlicu- ((u'alin de m.iintenir et ordre dans la règle
liers qui se qualifiaient chevaliers de cet or- cl dignité coiven^ible, tous les ans, au jour
dre saub avoir fait preuves de noblesse cl fétu de saiiil Michel, tous les chevaliers
505
MIC
MIC
1366
s'assembleraient en chapitre dan.s la salle <ii's
Corcti'liers de la ville lie Paris, à laquelle as-
semblée présiderait le commissaire nommé
par Sa Majesté, et en son absem e le plus
ancien des chevaliers, où, après avoirassislé
en corps à la messe solennelle qui serait cé-
lébrée, l'on proposerait et l'on examinerait
tous les règlements nécessaires pour y»j-éus-
sir; que des délibérations il serait tenu re-
gistre par celui qui serait commis par le se-
crétaire des deux ordres ; et que les fais qui
seraient nécessaires pour la célébriition des
messes et des assemblées seraient pajcs sur
les deniers dti marc d'or, par les ordoun m-
ces du chancelier des deu\ ordres ; qu'aucun
des confrères ne pourrait se dispenser d'as-
sister au chapitre général, s'il n'avait une
excuse légitime, auquel cas il enverrait pro-
curation à lel des confrères qu'il aviserait
pour consentir et signer les propositions et
délibérations qui seraient prises au chapitre,
à la pluralité des voix ; que si, après avoir
été reçu dans cet ordre, aucun des confrères
changeait de religion, il serait obligé de re-
mettre son ordre entre les mains du doyen
des chevaliers sans qu'il pût continuer à le
porter tant qu'il ne ferait pas profession de
la religion catholique, apostolique et ro-
maine, sous peine d'être dégradé de noblesse;
comme aussi s'il arrivait qu'aucun des con-
frères fit quelque acte dérogeant à la no-
blesse <t à la dignité de l'ordre de chevalerie,
il serait déchu de tous les honneurs et avan-
tages qui y sont attachés et serait puai selon
la rigueur des ordunnances; qu'aucun des
confrères ne pourrait se dispenser de porter
la croix de l'ordre, qui serait de la même
forme et figure et plus peiite de moitié qiie
celle du Saint-Esprit, à l'exception de la co-
lombe qui est au milieu, au lieu de laquelle
seiait représentée en émail l'image de saint
Michel, laquelle serait portée en écbarpc avec
un ruban noir; qu'aux assemblées des céré-
monies et autres occasions où Sa Majesté
voudrait appeler des confrères de cet ordre,
ils seraient tenus de se rendre auprès dr sa
personne pour 1 1 servir où il leur serait com-
mandé; que tous les chevaliers et confrères
seraient obligés de porter l'épce, excepté les
six ecclésiastiques et les six qui seraient de
compagnies souveraines. Enfin Sa Majestéor-
doiina a ses ambassadeurs dans les royaumes
et pays étrangers, «ie s informer soigneuse-
ment du nom, des qualités et des services de
ceux qui prétendaient avoir droit de porter
les marques de cet ordre, pour, sur les mé-
moires qui lui en seraient envoyés, confir-
mer ceux qu'elle jugerait en être dignes ; et
cependant elle déclara nulles et de nul ellet
cl valeur les expédiions que les étrangi rs
en avaient obtenues, et les dispensa de l'ob-
servation du sermeot qu'ils pouvaient avoir
fait lorsqu'ils étaient entrés dans cet ordre.
Sa Majesté chargea ses mêmes ambassadeurs
de faire les instances convenables auprès de
l'ciiipereur, des rois, des souverains, répu-
bliques et puteiitals, dont ceux qui avaient
(1) Vci/.,àlaDudu vol., n' 242.
surpris de pareils certificats de réception se
trouvaient sujets , pour leur défendre de se
qualifier à l'avenir chivaliers de cet ordre,
jusqu'à ce qu'avec connaissan(e de cause
Sa Majesté leur eût conféré celte qualité,
comme supernuméraires et non compris dans
le nombre réglé de cent pour ses sujets, Sa
Majesté se réservant d'accorder ces grâces
honoraires sans limitation aux étrangers
qui les auraient méritées par leur naissance
et par les services qu'ils auraient rendus à
la couronne. Quoique par ce nouveau règle-
ment il soit porté que les chevaliers de l'or-
dre de Saint-Michel doivent s'assembler tous
les ans en chapitre aux Cordeliers de Paris,
et que leur croix doive être attachée à un ru-
b.in noir en écharpe , il y a néanmoins long-
temps que les chapitres ne se sont tenus, et ils
portent présentement par tolérance la croix
attachée à un ruban bleu, à la boutonnière
du justaucorps. Nous donnons ici l'haltille-
ment des chevaliers de cet ordr>',tel qu'il est
représenté à la Sjinte-Chapelle de Vincen-
nes (Ij.
Favin, Théâtre d'honneur et de chevalerie.
Le Laboureur , Additions aux Mémoires de
Cnstelnau. HernardGiustiniani, Hisl. di tutt.
gli Ord. milit. Munneuius, De Belloy, Hermau
etSchoonebeck, dam leurs llist. des Ordres
mililaires. Mezcray, Hiil. de France sous
Louis XI. Elie Ashmole, son Traité de C ordre
de la Jarretière. Francesco Caraccioli, 7V«-
poli sacra ; les statuts de l'ordre de Saint-
Michel ; et les Reihcrches historiques de l'or-
dre du Saint-Esprit, lom. III.
Outre ce que fit Louis XiV en faveur de
cet ordre, Louis XV lui donna aussi un nou-
veau lustre, en exigeant que tous ceux qui
seraient nommés chevaliers du Saint-Esprit,
seraient préalablement chevaliers de Saint-
Michel ; voilà ce qui expliquecette qualifica-
tion qu'on rencontre de temps à autre : che-
ralier des ordres du roi, et les statuts de (et
ordrefurentiéimprimésà l'imprimerie royale
en 1723.
Louis XIV, en 16G5, avait limité le nom-
bre des chevaliers à cen', outre ceux du
Saint-Esprit; Louis XVIII fixa aussi ce nom-
bre par une ordonnance du 16 novembre
1816.
Parcelle ordonnance, qui relève cette di-
gnité, abolie comme les autres chevaleries en
juin 1790, il est rappelé ou établi que l'ordre
de Saint-Michel est spécialement destiné à
servir de récompense et d'encouragcmeui
aux Français qui se distinguent dans les let-
tres, les sciences et les arts, ou par des dé-
couvertes, des ouvrages ou des entreprises
utiles à l'Etat. Il est également statué que
toute demande d'admission dans l'ordre est
adressée au ministi e de la maison du roi, qui
en fera son rapport à Sa Majesté, et propose
celles susceptibles d'être accueillies.
Le grand collier de l'ordre était en or, et
se composait dccoquillesd'argeutenlrtlacées
l'une dans l'autre par des aiguillettes d'or.
Ou suspendait au milieu une médaille re^^ré-
367
DICTION.NAint H..S
sotil.int sainl .Miiliol riuil.int nux picJs Ip
ilrai;on. La dccitialioii consi^kiil on une croix
d'or à liuii poinU'S oiiwiillées de lilanc can-
lonnocs di' q'ialrc lli-urs di- lis d'or, chargées
l'ii cœur d'un saiiil Micli'l foulanl aux pii'ds
If dragon, lo l'Ul de culcur naturelle. I.c<
chevaliers porl.iient sur Ifur veste un grand
ruban de soie Roir<', moiré, passé de l'épaule
droite au c6ié gauclie , auqu.'l élail attachée
la croix de l'ordre.
L'ordre de Sainl-Michel lenail comme le
milieu entre les ordres rcliirieux cl militai-
res, comme celui de Notre-Dame du Monl-
Cartnel et de Sainl-1-azare, et les ordres de
chevaleri'- qui étaient simplement n.ililaircs,
comme l'élail. par exemple, C'Iui des clieya-
li( rs de Saint-Louis. On dislinguail, dans
l'ordre de Sainl-Michcl, les chevaliers admis
des chevaliers reçus ; il y avait au^si à la îin
des chev.iliers hoiiorai-es. Kn 1789, rannéo
qui précéda la ^u|lpression, il y av;.il soix.in-
le-di\-huit chevaliers reçus, dont le deinier
(en 1788) élail M. Malhieii, mailrc de musi-
que de la chapelle, à Versailles, cl le plus
ancien (en 17V2) était le marquis de Roux ,
conseiller d'Elil, doyen de l'ordre, el de-
meuraiil a Marseille. Il y arail aussi alors
douze chevaliers siuiplement admis. On re-
çut, en 178-, deux autres chevaliers, cl on
uv.iil nrfmi.i, eu 1788, le baron Chuplal , que
D'^us ne voyous point au rang des douze in-
diqués ici. Il y euldeux nominalion'î en 1790,
cinq en 1797, une l'année suivanle el une
en 1800, faites par les Bourbons en l'exil. En
1815, au retour du roi, il y cul une seule
iiominalion, et on eu compta trente-trois eu
18l{), qui f'il l'année de la re>laural on de
l'ordre, par l'ordoimancc dont nous avons
pirlé. Il y cul des noininalioMs les années
suivanlrs, surlnnt en 1S11> cl 1821, m is sous
le roi Louis XN'lll il n'y eul point d'admis-
sions; ce piinec nomma aussi dès !810 et de-
puis des chevaliers bouor;iires résidant en
p.iys étrangers. Après une interruption de
plus de Ireulc-cinq ans, il y eul a Iteims ,
après le sacre de Charles X, une rcceplion
solennelle des chevaliers el cnmniaudeurs
des ordres du roi. Elle se fil L- luuiii .'iO mai
18-2.0, dans la cathédrale. Avant lacéiérnonie,
M. le dauphin recul, suivant la rè^le et l'u-
sage, chevaliers de l'ordre de Saint-Michel,
tous les chcvalie s qui .illaienl être reçus
chevali<TS du Sainl-Esprit. En 182G,il y eut,
le 2'> SPpleinbre, jour de saint M.chel, ;inni-
versairc de la naissance ilu dur de liordeaux,
convocalion du chapitre de l'ordre <le Sainl-
Miclicl, en la fête patronale de l'ordre. Le
baron de ISallainvILiers recul, en qu.ilité de
couiniissaire du roi, le serment des chevaliers
nommés de[)ui8 la restauration. On comptaii,
au commencement de l'année 18.'i0, 95 che-
valiers reçus el dix chevaliers honoraires.
A la PentecAle, le roi Charles X, ayant tenu
chapitre de l'ordre du Saml-Esprit el reçu
des chevaliers, admit aussi piéalablemcnl ,
confoi mément auxslaiuls, des candidats dans
l'ordre de S lin'- Michel, ('et ordre ,1 eé aboli
de fait p.ir l.i rcvolutinn de juillet 18.'i0.
Dutionnmrt dts Sciences ecrlesiinliqucs de
ORnuES UEi.iGiEUX. gcs
Richard. — Ami de la r^lii/ion. Almanurhs
royaux. lî-ii-E.
MICHEL (Chevaliers de Saint-). Voy. Am-
roi LK (Sainte).
MICUI:L de MURANO (Coxgbégation uk
Saint-). Vojj. Camaldulks, § II.
MILICE DE JÉSUS-CHRIST (CnKVAUi rs
DE la). Voy. PASsmN de Jésus-Christ.
MILICE DE JÉSUS-CHRIST OD DE LA
l'ENM'ENC'^E (Ordre de la'. Tiers Ordre
de Saint-Dowinique.
L'on ne sait point l'année de l'élahlisse-
menl du Tiers Or Iro dos Frères Prêcheurs,
qui est connu sous le nom de I i l'énitence «le
Saint-Diiminique. Tons les historiens con-
vienncnl que ce saint palriarclie de l'oidrc
des l'rères Prêcheurs établit un ordre mili-
l.iire sous le nom de Milice de .léNUs-Chrisl,
pour comballrc les ennemis de la foi ; mais
les écrivains de son ordre n ■ sont pas d'ac-
cord entre eux si ce fut du vivant de ce
sainl ou après sa mort que cette milice mil
les armes bas, el que ceux qui y étaient en-
pages, voulant se (•on^erve^ en société, pri-
nnt le nom de pcnitenls de Saint-Dominique
pour honorer la mémoire de li'ur saint iiisli-
luteiir. C'est ce qui a forme le Tiers Ordre
des Frères Prêcheurs, qui apparemm<'nl a
été si peu considérable pendant les deux
[ircniiers siècles de .^oii étaMisscmenI, que
l'anlV22on ignorait même quelle éiail la
règle que suivaient ceux el celles qui y
élaiinl ei;gigés, et qu'on ne savait pcul-él;e
par, (|uclle était l'origine de ce Tiers Ordre;
c'est pou quoi deux religieux du premiir
oidre, soit qu'ils en eussent commission de
leurs supérieurs, ou qi'ils voulussent reia-
1 lir el l'aire <onnaitre ce Tiers Ordre, Tu enl
une reclieci he exacte, en 14-22. de la lègU;
que suivaient les Frères et Sœurs de l;i Péni-
tence de Saint-Dominique, el après avo r
api orlé toutes les diligences nécess lires pour
ceia, ils ne purent rien trouver qui ne lui
conforme à ce qu'en avait d. j,i écrit le bien-
heureux Raymond deCapoue, > ingt-deuxième
gi ncral de cet ordre, dans le liuilièmc cha-
pitre de la Vie de sainte ('aiherine, qui .iva.l
et.; de ce Tiers Ordre, /'n/e.if, disent-ils, 7'» «cf.
de Reij.Terl. Ord., in fine Cansi. ord. l'nrd.},
uniteisis fidelilius, (/iialilir ego F . Tlionuis
de Senis unu ctim M . F. Ilarlholunufo de Se-
rtis, (iiubn de ordtne Prwdicntorum, anno Do-
mini U22 Venetiis exislentes et quandim vn-
luimits diligenliis inqicirenles de régula sm
stfilii Frnlriim et Sororiiin de Mi it a Jes.i
Clirisli, (le l'œnittnliit II. Dominici, ivreniwus
(HKinlum ud iuilium ejif^dein rei;ul(V Udilei ne
lid'irre, siciil pntet in legenda li. Calliarine
dr Senis siii.rnJicld, cttpilulo 8, ubi sic dici-
tur, elc.
Après un tel témoignage, je ne crois p;;s
que les religieux de Saint-liominique trou-
vent mauvais que je me roiiforme, louchant
l'origine de leur 'Tiers Ordre, à ce qu'en a
c( ril un de leurs généraux, le bienlieureux
Raymoi d de (Papoue; el si je préfère sou
seuiiiucnl à celui d'un auteur moderne, je
sf:9
MIL
MIL
-870
veux diro l'Anonyme, religieux prêtre du
prand couvent et roy;il collège des FF. Prè-
dieiirsdela rue Sainl-j.icuni'sà Paris, qui en
1680 a donné les règles de ce Tiers Ordre,
accompagnées d'explications sur chaiiue
chapitre et de quelques observations conte-
nant riiisioirc de ce Tiers Ordre.
Le bienheureux Kayniond de (Papoue, par-
lant donc de l'origine de ce Tiers Ordre, dit
que saint Dominique, tant par lui que par ses
religieux, triompha d'un grand nombre d'hé-
rétiques, tant en France qu'en Lombardic,
cl que dans la Lombardie seule il y en eut
plus de cent mille qui furent convertis par
sa doctrine et par ses miracles, comme on le
prouva en présence du pape (îrégoire IX,
d/ins le temps de sa canonisation. Cet au-
teur attribua la cause de tant d'hérésies à la
pauvreté où étaient réduits la plupirtdes
prélats de l'Eglise, dont les biens avaient été
usurpés par des laïques et rendus héréditai-
res dans leurs familles, ce qui faisait que les
hérétiques se souciaient peu des censures
ecclésiastiques qui n'étaient pas accompa-
gnées de la force et de la puissance pour les
faire exécuter.
C'était principalement en Italie que régnaient
ces désordres; c'est pourquoi saint Domini-
que, animé du zèle de la gloire de Dieu, vou-
lant conserver les droits de l'Fglise et lui
faire rendre les bit ns qui lui avaient été en-
levés par les hérétiques, assembla quelques
laïques pieux et dévots, et, éiant persuadé de
leur vertu et de leur courage, il en forma
une milice, dont le principal soin devait êlre
de recouvrer les droiis ecclésiasiiques qui
avaient été usurpés, de les protéger, et d'em-
ployer aussi leurs armes pour la destruc-
tion de rhérésic. 11 faisait prêter scnncnt à
ceux qui s'engageaient dans cet'c milice, de
s'employer de toutes leurs forces à ces bon-
nes œuvres d'exposer leur vie pour ce sujet
et même leurs bien?, et, afin que leurs fem-
mes ne les einpéch;:ssenl pas d'exécuter leurs
promesses, il les faisait aussi jurer qu'elles
ne s'oppusL'r.iient pas aux bonnes inlcnlioiis
de leurs maris, et qu'au contraire elles les
assisteraient de tout leur pouvoir. 11 donna
le nom de .Milice de Jésus-t]hrist à cette so-
ciété ; et, afin que ceux qui s'y engageaient
fussent distingués des autres laïques par
quelques mar(iues extérieures, il ordonna
tant aux hommes qu'aux femmes de porter
un habit noir et blanc, fiit do telle sorte que
quelque forniiî qu'ils donnassent à leur ha-
billement, ces ileu-i couleurs y parussent
toujours (1), et il leur prescrivit aussi certai-
nes prières | our les heures canoniales. Saint
Dominique, ayant ainsi établi cet ordre mili-
taire, li.ourut que'que t. inps après, et le
grand nombre des miracles qu'il fit après sa
mort le lit mettre au catalogue des sai;its par
le pape Grégoire IX, l'an 123't.
Les Frères et les ï?œurs de la .Milice de Jé-
sus-Christ, voul.int aus.si honorer d'une ma-
nière particulière la mémoire de leur institu-
teur que, l'Fg lise venait de reconnaître comme
saint, résolurent de changer le nom de Mi-
lice de Jésus-Christ en celui d- Pénitence de
Saint-DoMiinique. Ce qui les porta à ce chan-
gemeiit fut que leur milice ayant été établie
pour combattre à main armée contre les
hérétiques, et l'hérésie étant presque éteinte,
les armes matérielles leur devenaient inuti-
les pour combattre à l'extérieur, et ils ne
devaient plus combattre qu'avec la pénitence
et la mortification contre leurs propres pas-
sions ; ce fut donc la raison qui leur fit pren-
dre le nom de la Pénitence de Saint-Domini-
que. Leur no'ubre s'étant augmenté, et le
bienheureux Pierre Martyr, qui fut tué par
les hérétiques, étant entré dans cette société,
sou sang, qu'il répandit pour la défense de la
foi, acheva de délruirt» entièrement l'héré-
sie; car ce saint martyr remporta plus de
signalées vicloin s sur les ennemis de l'Eglise
après sa mort par ses miracles, qu'il n'avait
fait pendant sa vie; ainsi celte Milice devint
entièrement inutile, la cause pour laquelle
elle avait été étiblie ayant cessé.
Les hommes qui étaient entrés dans cette
Milice étant décédés, leurs femmes n'osaient
plus se remarier, et voulurent persévérer
jusqu'à la mort dans l'éiat qu'elles avaient
embrassé. Quelques femmes veuves qui n'é-
taient pas de cette Milice, et qui avaient
aussi résolu de persévérer dans leur viduilé,
se joignirent à ces Sœurs de la Péniience de,
Sainl-Domini(iue, elles pratiquèrent les mê-
mes observances pour l'expiation de leurs
péchés, et se multiplièrent peu à peu en
plusieurs endroits d'Italie. Elles eurent re-
cours aux FF. Prêcheurs pour 1 ur appren-
dre la manière de vivre qui avait élé pres-
crite par saint Dominique; mais comme el'e
n'avait pas été jusqu'alors rédigée par écrit,
le P. Munio de Zamorra, Espagnol de nation,
septième général de l'ordre des Frères Prê-
cheurs, mit par écrit la m.inière de vie que
les Frères et Sœurs de la Pénitence de Saint-
Dominique suivent à présent, et qu'ils appel-
lent règle.
C'est de cette manière que le bienheureux
Jlaymond de C pouc décrit l'origine et le
progrès de celte société de la Milice de Jésus-
Chrisl, et de celle de la Pénitence de Saint-
Dominiquo à qui l'on a donné de[iuis le nom
de Tiers Ordre deSaint-Dom nique; et il me
semble que l'on doit s'en rapporter plut<it à
un général de cet ordre illuslre des Frères
Prêcheurs, qu'à un particulier du même or-
dre, qui, pour donner au Tiers ordre de Sainl-
Duminiquc la préséance au-dessus de celui
de Saint-François, dit que ce fut du vivant
de saint Dominique même que les frères et
sœurs de la Milice de Jésus-Christ quittèrent
ce nom pour prendre celui de la l'énilence
de Saint-Dominique, et qui rejette, et le té-
moignage du bienheureux U.iymond de Ca-
poue, et celui de ces deux religieux, qui,
après une exacte recherche qu'ils Gient en
1*22 de l'origine de ce Tiers Ordre, certi-
fient qu'ils n'ont rien trouvé qui ne fût con-
forme à ce qu'en avail dit ce général danjs la
(Ij Voij., à la fin du vol., n" 215.
DjcrioNNAinE des Ordp.p.s nmr.iEux. il.
31
571 DICTIONNAinr. DES OPJiRF.S nELIf.lF.lX. 972
Vie de sainte Callicrlnc ilc Sienne. Cepcn- que celui de Saiiil Fiançois, parce que la
dant ces lémoi^napes scmhloiU iîlrp nutori ^-s rcRle que suivent les Frères et Sœurs do
de tout l'orlredes FF. Prêcheurs, puis luils celui de Saint-Dominique est plus obscure
se trouvent imprimés à la lin dis conslitu- que celle des Frères et Sœurs du Tiers Onlre
lions du i-n niior ordre dans un p' lit Iriité de Saint François, comme le remarque cn-
qui a pour titre : Tractnliis île iniiio et fun- corc r.Vnonynic, qui, après avoir montré la
tttilione Regul. Frnlrtim et Soror:i)n de Mili- ninformilé de ces deux règles, tant dans I lia-
litt Christi, d' Pœnilentia sancli Dominici, bllcment que dans les jeûnes et les absli-
sni Tei m Ordi'iis. ncnces, ajoute : Considcrnnt ensuite les yc n-
(> rcliuieux anoujme, parlant de plusii^urs des obscurités de la ràjle de notre Tiers Ordre
personnes de le Tiers Ordre qui ont soulïert en certnin^ endroits q<ii se Irnuvrnt vettc-
Ic m irtyre dans le Japon iLa manière de se 7n'-nt expliquées en celle dit Ti(rs Ordre de
donner à Dieu, etc., p. 'i2(i', leur donne le Sainl-Franç^'is, je ne doute point q^e, cf>-
nom de Frères ilu preniier T ers Ordre de 11 deux choses considérées, tout homme de bon
Milice de Jésus-Glirisi, el dit qu'il y a lieu sens qui ne sera point prévenu ne convienne
de croire (ju ils ont obtenu l'honneur du arec moi que li rèjle du Tiers Ordre de S. lint-
inartyrc de la foi, et la gloire d'èire Frères François n'ait été fuite par lui-même ou par
(lu premier 'lie: s Ordre de la Milice d.' Je- d'autres sur le modile de la nôtre antéri ure ,
sus-Christ par le mérite de leurs mortifi'ja- atec les éclaircissements de ce qu'on y n
lions précétienles dans le second Tiers trouvé d'obscur pour les paroles ou de difjiciU
Ordre de la l'éni ence de Saint-Doniinique. pour ('usaijc et li pratique.
Il semble en cet i ndroit que cet auteur, cou- .Mais où ctail-ellc cette règle de Sainl-Do-
liaiut parla frce de la vérité, reconnaisse niinique, po;ir qu'elle eût pu servir de mo-
l'onlre de la Milice de Jé-ns-Clirist el celui dèle à saint F'rançois, lorsqu'il a composé
delà Pénitence de Siinl-Dominique comme la sienne? I{st-il possible que, dans l'ordre
deux ordies différents, comme en eiïet ils le des Frères Prêcheurs, on n'ait point con-
sonl, I uisquc le premier était un ordie mi- serve l'original de lelle règl-, ou du moins
litaire, 1 1 le second un vcritai le Tiers (Irdrc, qu'il ne se suit poi.il trou\é un religieux ijui
nommé de la l'cnitence, à l'imitation de CI lui en ait f .il une cop e ? .Mais on n'avait garde
de Sainl-Frnnçois, qui était déjà établi. Ce- d'i n faire des copies, puisque, bien loin que
pendant cet auteur témoigne en plusieurs saint Dominique eût donné une règle par
endroits que ce n'est pas son intention d'en écrit aux Frères et Soeurs de ce 'l'ier- Ordre,
faire deux ordres dilTcrenis, et c'est en quoi c'est que ce même ordre ne fut établi qu'a-
ie trouve cet'.e manière de s'expliquer assez près sa mort, et que les règ'iinenis qu'il
p;.rlicul ère; car on n'a jamais dit, en faisant avait faits pour ceux qui s'engageaient dans
lin compte, un premier troisième, un second l'ordre de la Milice de Jésus-Christ n'a> aient
tr isième : el ce qu'il appelle second Tiers été donnés que (!c vive voix, et ne consis-
Ordre devrait être appelé <iuatricme ordre; talent, comme nous avons déjà dit, qu'en un
car saint François a\anl fondé son Tiers Or- certain nombre de prières q .'ils de>aienl
dre, on ne lui a don. é ce nom que prcc dire, dans le serment qu'ils devaient faire,
(Tu'il était le troisième, qu'il était précédé de cl dans la couleur de rhabillemenl qui dev.iit
celui des Sœur- Clarisses. ((ui était le second, être ncir el bl inc ; cl lorsque lo Tiers 0. dre
et qui n'avait été cta! li qu'apiès celui des se fut multiplié par le moyen des personnes
Frères M iieiirs, qui est le prenii r; c'est qui l'embrassèrent, ces personnes dem m-
pourquoi ri'lgli^e ciiinte d.ins l'oHice de te déreni aax reli:;ieux du premier ordre qui
^n\ni: Trcs orilines hic ordina!, primumqie demeurai"nl en Italie, quelle était la nia-
Fralriiin nominat Minoruni, Pniiper unique nère de vivre que saint DomiiiiqUi" a>ail
l'a Uomiiiarum médias, sed Pœnitcntiuni ter- prescrite pour ce Tiers Ordre. .Mais ils ne
lius scxum ciipit nlrumque, cl s'il en avait purent pas le leur dire, puisqu'il ne s'en
institué un quatrième, on l'aurait sans doute trouvai rien par écrit ; c'est pourquoi Mu-
appcle le quatrième ordre, el non pas le s.- nio de Zamorra, sept. èiiie généra", de l'ordre,
conil tiers ordie. l'"""" éirivit nue règle qui est l,i même que
Ce n'est point la pratique de nommer des c Ile qu'ils obseï vent aujourd'hui ; c'est ce
orthcs militaires des tiers ordies; si cela que dit le bienheureux Rajniunil de Capoue
(■tait il y aurail bien des tiers orilics dans en ces termes {Vit. S. l'alhar. cap. S) : Inde
l.'s oVdres de Saini-llasilc, de Saiut-.\ugii.st.ii paululim crcsccmcs in dire' sis Italiœ parti-
el de Saint-lîenoît, puisqu'il y a plusieurs bus, coeijerunt Fratrcs Prwd.cat ircs ibirlem
ordres militaires qui oui sui>i leurs rè'^lcs, mornnics ad infonnandum cas de modo ci-
el qnociue l'ordre mililaire de la Conception vendi e;ui a D. Dominico fuerat instilntus ;
de la sainte \'icige ait été sous la rè;,'le de quia vero ille n:odus scriptus non erat, qui-
Sainl-François , on in; le qui ilie pas pour dam M. G. qui lutins onlinis curam giretut
cela de second tiers ordre de Saint-François, s^ptimw, vocatus F. Munio, natione flispr-
Ainsi le Tiers Onlre de la l'cintenee de Saint- nus, m.dum illuin v vendi re In/il in scriplis
Dominique n'esl appelé Tiers Ordr<! que qnrm hodic htihent et lulijariler rrgula:ii vo-
poiir avoir été étaldi après celui des Frèies ninl. U est à remarquer que lîaymond de
i'récheuis cl cidui des religieuses. Capoue ne dit [las i] le le eéneral .Mui.io rc-
Jc ne crois pas qu'au, un homme de bon d'gea p ir é-vil la manère de vivre cl le>
sens convienne que le 1 iers Ordre do la l'c- lègleuient^ i|ui avaici.l été observes jus |iie-
iiilcuce de Saint-Doniiuiquc soit plus anci.n là dans ce 'l'ii-rs Ordre, cl que saut Donii-
CV3 MIL iMIL 07!
tiique avait prescrits, mais qu'il Lui- donna loncc de Saint - Doriiiiiiiiuc l'esomplion do
par écrit une manière de vivre qu'elles ob- toutes fliarges publi(|ues, comme tailles,
servent à présent, iiunlum illum vivendi re- dîmes, passages et logements de gens di>
dcgil in scriptis qaem hodie fuibcnt et vulga- gu; rre, dans toutes les terres de l'Iitat ecclc-
7iicr regulam appcllanl. siastique, comme si l'Jtalie ne comprenait
Mais peul-éire que c'< si inutilement que ([uo l'Eliil ecclésiastique, ce iju'il enlend
nous apporlons le témoigiuige du bieniieu- par ces mois , per universam llalium con-
reux Uayniond de Capoue, pni:.qm' l'Anu- itilulis.
iiyme le rejette, aussi bien n'élail-il pas re- Ne faut-il pas avouer que les Frères et les
connu pour général par les Français, puis- Sœurs de ce Tirrs Ordre de Saint-Dominique
que c'était durant le stiiisme ; c'est pourquoi jouiraient d'un beau privilège en Italie, s'il
il lui en faut donner d'aulras : c'est celui de éi;ut vrai que les pipes ïîonoiius lil et Gré-
Slichel Pio, qui, dans les Vies des hommes guire IX les eussent exemptés de payer les
illustres de l'ordre de Sainl-DoMiiuique, par- laiiics, les dîmes et toutrs sortes d'imposi-
lant du général Munio, dit (]u'il composa la tiens? Toulcs les villes et les villages d'Italie
régie que le 'liers Oidre observe à préseni, auraient sans doute voulu être de ce Tiers
compose la regola, cl>anno il présente quilli Ordre, pour jouir du même privilège et ne
del Tevzo Oïdine. Kt Vincent-Marie Fon- rien payer. Mais CiS souverains pontifes
tana, dans ses Moiiumenls dominicains, par- n'avaient garde d'accorder un tel privilège
tant aussi du même général, d.t qu'il près- à ce Tiers Ordre eu 1217 et J228. | uisqu'il
cri>it, l'an 1283, une règle aux F-ôres du ne lut institué que l'an 1234-, après la cano-
Tiers Ordre de Saint-Dominique : Fratribus nisalion de saint Duminique.
Tel ta Ordinis S, Dominici Munio regulum Les Frères du Tiers Ordre de Sainl-Fran-
prœscripsit. Ainsi ce n'est piint saint Doni- cois à qui cette bulle était adressée, Frulri-
nique qui a donné au Tiers Or 're (jui porte bas de Pœnitcnlia pr Jtulinm cunsCilmis,
son nom la règle qu'il suit à présent, c'est le n'élaient pas de iiiétne seatimenl (jue ceux
général Munio de Zaaiorra qui la composa du Tiers Ordre de Saini-Dominique, ils au-
l'an 12S5, et par conséquent elle n'a pas pu raient cru ;ai contraire qu'il y aurait eu de
servir de moiiôle à saint François pour cim- l'injustice de demander de telles exemptions,
poser l;i sienne, puis<iu'il était mort en 122G. puisqu'ils étaient tenus comme séculiers (car
Les historiens de l'ordre de Saint-Domi- ce n'était pas des léguliers qui étaient déjà
nique ont même bien de la peine à accorder établis qu'il s'agissaii) de loalribuer aux
leurs propres seniimenls touchant l'origine impositions et aux charges publiques; mais
(le leur Tiers Ordre; car Michel Pio {Hist. cuuune on les chargeait plus que les autres,
délia nobiU' prog. di san Domenico], après à cause du nouveau genre de vie qu'ils
avoir rapporté ro|iiuion de Castillo, (jui [iré- avaient embrassé, ils demandèrent, en ce
tend que saint Dominique ne l'instiua qu'a- qui regardait les iu)posiiions, de n'en pas
près son retour d'Espagne à Home, ce qui payer plus que les aulies habitanls des lieux
ne peut être arrivé, dit-il, que l'an 1219 ou où ils doniiuiaienl : c'esi ce qui est maïqué
1220, ajoute que c'est aussi son seatimenl , dans la même bulle, (jue i'Auonyine n'a pas
quoiqu'il ait parlé dans un autre endroit d'un lue sans doute : Unde iivs humililer supplica-
priulége accordé par le pape Honorius 111, s!is,ui lobis tnisericordiler digiiaremiir
I'anl217, aux Frères du Tiers Ordre de Saint- ne plus (juain leslri cives impositione unerum
Dominique. H étail donc inutile après celte uggravari possilis.
rélractalion de rapporter dans toute sa le- H est donc inutile d'alléguer des privilèges
neur la bulle de (irégoire SX, du m des c ■■- en faveur du Tiers Ordre de Saint Dumini-
lendes d'avril 1228, qui eoniirme ce privilège que avant l'an i2'-i'i-, puisqu'il ne fut élabli
accordé par Honorius Hl, non p,is aux Fr.-i- qu'après la mort de saint Uominiiue, lors-
res du Tiers Ordre de Saint-Dominique, que le pape Grégoire IX le canonisa, et qu'il
comme plusieurs écrivains de cet orilre le a été fondé sur I s débris de celui da la
prétendent , mais aux F'è.es du Tiers O.dre milice de Jésus-Christ qui étal devenu inu-
deSaint-François,(iuionl toujours eléappelés t.le, comme le lapporle le bienheureux Kay-
absolumentparlessouverainspontifes, depuis mond de Capouc. La règle que le P. Munio
leur iiremière inslKulion jusqu'à présent, les de Zamorra é rivit pour les Frères et S:vurs
Frères de la Pénilence, et non pas les de te 'iiers Ordre ne fut approuvée par le
Irères de la Pénilence de Saint-François, pape Innocent Vil que l'an 1403, et fut con-
comme il est marqué par celte bulle do Gré- firmée par Eugène IV l'an 143). Il y a dans
giiire IX, qui est aiîressée Fratribus de Pœ- ce Tii rs Ordre des (illes(jui font des vœUK
nitentta per Ituliam co.isliliiti^:. Et les reli- solennels, et sont véritablement religieuses ;
gieux de la Pénitence de Jésus-l'hiist, qui elles ont plusieurs monaslères, et leur ha-
avaient plusieurs maisons en Italie, auraient billcmenl est semhlahle à celui du S( conJ or-
eu plus de droit de s'aliribuer cole bulie, dre; elles n'ont pas tant d'auslérilés, car elles
que n'eu ont lu les Dominicains de l'ailri- peuvent i>orter du linge et maiiger delà viande
lu: F aux Frères de leur Tiers Ordre, comme trois fois la semaine. Selon la règle, elles ne
a fait encore l'Anonyme du couvent de la dc^vraient perler que des voiles blancs, mais
rue S aial-Jac(|i!es, qui la met au rang des il y a plusieurs monasières où elbs en porteul
privilèges accordés à ce 1 iers Ordre, et (lui de nous. Il y a aussi plusieurs villes d'iialie
dit que le pape honorius III accorda (lar ce où il y a des personnes de ce Tiers Ordre
privilège aux Frères et Sœurs de la S'èui- haliliee ; e:i religicus-s, (luoiqu'cUes demcu-
fi?-! niCïIONNAiriF. DES ORDIŒS UKI.IGIEUX. 97fl
nul iljiis leurs maisons particulières. H y o des VV. PP. Augustin Adorno. Frunçon
«u dans ce Tiers Ordre doux sainli-s c.ino- el Augusiin Cardccioli, leurs futula etus.
hisé.^S savoir, sainl,- Cailu-rin.. d. SuM.ru- j;j j^, ci rcs Uésiuliors Mineur, ne pc.vcr.l
H sainle Kose de L.m;.. cl idusi, ur, Inc-n- f ,j^^ renw.nler loriBino de leur . onu-repalion
heureuses comme luj;ride de Me, J ar- ,^^, ,., ,-„, j^ ^,,, ^j-^, j,^ pn-lendenl
Kuer.le de Hongrie, S.hylle de IMvie. M.m- .,^ ,„„i,„ .^,||^ ., ^,^^ ■ j^^ ,^^ j^ ,^„j^
Kurne du Ll.aicau «,oloml.c d^ Hiel. , p, ni , inquanle ans auparavanl ,.ar lahbé
Uzanne de Mj.utoue, Maigucilc de Savo.e, .io;ichim, cl que c'esl d- 1 ur ordre qu'il a
l.uie la tliasle, clc. ,.„„ly parler, lorsiiue, d ms ses f.ommcnlai-
Le r. ronanni, de la compagnie de Jésus, '"*'' *"•■ i'-Vpocaljpse, .1 a du : Sur.jet enim
dans Sun Calalogue des Ordres reiijjieux . "''''" <J>'>y^etur novus ,tnon est, ,mlut,m.
parle de certaines relisieuses T,erciaires de »'"'* tcsi'bus, et acctnct,,leu,p>r zona Mais
l'ordre de Saint- Uominiiue. instituées ; ar ^■«'«■"c '."" " f.JO"'^ t'^s h aucup de fm aux
le I'. Jé.ome l'iccini. Vénitien, religieux do- l"-"i'l'f 'es de 1 abl.,'- Joaehim. nous passerons
n.inicain. Mais comme dans un endroit il dit '"V;^ silence 1 app.cMion que les Clercs Uc-
quecc fui l'an UIS:!, et dans un autre que ce P"'""^" ^ '"«^"'■s fo"' .'>ur or ire des paroles
fui Tan 1G:8. nous ne pouvons rien dire de "^l 'îl;"!''';/ aussi lue,, que ccr a.ne aulie
rcrlain touchant le temps de celle inst.lu- Pr'.'pl'H'ç d un saml E.mlien, prêtre, qu, vi-
lion, sinon qu'elle se lit à Conégliano dans la ''" f" J-^P^gne, a ce qu. l on prelcn I vers
Marclie Trévisane, cl que la prennère reli- ''-' ' ^'^''^''■' '!"'• ^^ »■' '"S historiens de cet
IMCuse fut la Mérc Hj ae inthe lîosso, Veni- ;."';;' ^.«^ 'rcomman l.ul en cspnt aux supé-
iienne. Elles eurenl eneoie un m.nlistère à l''"'' '^^ °"^'': '"/"; ^f^ ^''^r'!' »^7"l;e'S
Macérala. l'an l(ii=0. dont l'église fut dédiée ^''■"^"■•«' "« {"-'.an de le v^ouloir admet re
sous le litre du Sainl-Sacreinenl, ce qui a fZZn^'V "-^'P""' T" T"/-^;' '"' "
fait donner aussi le même nom à ces reli- ^ P^"^""', 'i^ /'"'V ''.^'^^ '*^"'i •'«'"11'.'""'"'-
Uieuses. quoiqu'elles n'aienl que la règle du tTl ^^ ^^'.-''.''« pl"SH-urs ordres qu. prc-
Tiers Ordre de Saint-Dominique. Leu.s con- ^'"^"'^ ^^ «"^ «'«^ anl.quiles chimériques.
sliiu;i .ns sont néanmoins Irès-ausières. car Ce qui csl certain, c'est quclean-AuRuslin
elles ne iiorleni que des chemises de serge , Adorne, de l'-incicnnc famille des Adorno
ne dorment que sur des paillasses , le plus de Gènes, fui le l'ondaleiir do la congrégation
souvent sur des planches ; elles ne mangciil des Clcics llégiiliers Mineurs. Les particira-
jainais de viande, sinon dans les maladies rites de la vie de ce saint fondateur de, uis sa
par ordre du mcdcein ; elles jeûnent sept naissance jusqu'à lélahlissemenl de son or-
mois de l'année, elles ont deux heures d'o- dre nous sont inconnues. C'est sans aucun
raison mentale. Chaque jour elles se lèvenl fondement que .M. Ilerinant a dil, dans son
la nuil pour dire matines, el il y en a ton- Hisloire de l'etahlisse.nent des ordres reli-
jours quelques-unes en prières devant le Rieux.quc.lean-Aiigustin Adorne, étantenânc
saint Sacrement. Quoiqu'e les ne s'engagent de se consacrer a Dieu d.ms la religion, < hoisil
pis par vœu à la clôture, elles l'olisrrvenl l'ordre des Frères Mineurs, dans lequel il en-
néanmoins fort rigoureusement, el elles ne "'■'» e' d'où il sortit depuis. Les mémoires qui
parlent jamais à la grille que le voi;e baissé, '"'""l cte mis entre les mains avec I' livre
J.cur habit es! sembluble à celui des autres intitule: Delhi venerubile riUgionede Cliinict
reli-ieuses de l'ordre de Saint-Dominique, -l/i'iori. imprimé à Lcssc en lO'tT, n'en font
sinon qu'elles ont des saulaies de bois. Quel- P»i"t mention, tl nous apprennent seulement
qt:cs-une.i metlcnl des bas il d'autres vont qu'Adornc retournant de la cour d K'^pagne
les 1) cds nus. ^' pas--ani par Valence, le bienheureux l.ouis-
IJiTlrand, de l'urd c de Saint-Ddimnique, so
Voyez Ilernaiulo de Casti'.lo, Juan Lopez, j,.|a à genoux devant lui, en di^ant à c ux
Anlon. \\cmcn'\, Hist. de S. DomiiH/. y de su qui étaient présents qu'il devait être le fon-
onif H. Thomas .Maluend, /Jiuu./. /'ne./. Gio diieur d'un ordre qui sérail très-utile à l'ii-
Michcl Pio, Délia vcbil. profien. de S. Domc- gUse, ce qui pourrait elre arriic vers l'an
iiic. Vincent Mar. Font., iMunument. Dnin- 158.'). Adorne ne songe;iil i on.t pour lors à
nie. Tnielnl. de inilio el fnnd. Idg. FF. et jirendreriial it ecclèjiaslique, mais peu à peu
Sor. de Mitilin Cliristi de Pœnilcntid S. Do- \■^ g,àcc, faisant imiuession sur son cirur. le
minifi seu Tert. Ord. in pne. Const. ord. porta à r. noiicer aux v.iniiéi du siè< le pour
Pnrd. La tiuiuirrc de se donner à Dieu dons g', mplojer au service de Dieu cl au salut du
le siècle, ou Ifs RUjles du Tiers Ordre de lu prochain : il prit les ordres sacrés cl fut h >-
Pénilme de Su nl-Dominiiiue, pnr un rdi- noré du sacerdoce.
gieux prêtre du grand couvent, t royulc^d- ^^ f^„ , ^ ,^,,, ^.^, ,
eye t/e././<.yVec/,purs, de. Philip, lionnuni. ,,^^,^j^^ j^ ^^,, minisière, il travailla avec
Uilulog. omnmm ord. rcUyios. part, ii, m i,,.,,,,^,,,,,,^ j(.i^ p,r ses cxhorl:Uions au sa-
*■" '*■ lut du prochain, cl se sentant inspiré lie Dieu
Nous dirons au Supplément l'étal du TIits de l'omler un nouvel ordre religieux, dont le
Ordre de Saiiil-I)iimini(|ue acliiellemcnl en principal insliiul fijl de mêler la vie active
France, où il a cie modilie par le U. P. La- avec la conlemplative, il se retira vers le dé-
rordairc. H-n-R. sc.l di- \al'omlireusc en Toscane, où pen-
dant qnaraiile jours il se d'sposa à exécuter
KINEUUS (Ci.BHCS Uioi'i.iURs), '.tcc la Vie ce te cnl éprise p r des jeûnes continuels,
077
MIN
MIN
973
(!cs péiiilcni'is cl des inorlificalions siir[ire-
ii.intes. KiMiil ;ill6 ciisuile à Naples, el pri.iril
un jour avec ferveur cl.ins l'cglise di's liicii-
ivibles pour que Dieu lui fil connaîlrc plus
panlciiiièrcmenl sa volonlc, il se senlil iiité-
ricuremeiil pressé d'exéiuler son dessein, et
il lui sembla même que Dieu lui commandait
de le faire, et qu'il lui en prescrivait les
moyens. Il ne doula plus que ce ne lui la
volonté de Dieu, lorsque deux personnes
d'une des plus illustres mais )ns dts Naples,
qui furent François el Augustin Caraccioli,
se furent jointes à lui pour l'aider dans sou
eiilreprisr. 11 alla à Kome avec François Ca-
raccioli pour obtenir du pape Sixte V la per-
mission de fonder sa congrégation. Plusieurs
prélats cl quelques-uns de leurs parents, sa-
chant qu'ils étaient proche de 15ome, envoyè-
rent des carrosses au-devant d'eux ; mais,
pour éviter ces honneurs, ils se délourncrent
el enlrcrent ilans celte ville par nue autre
porte; ils allèrent même demander l'aumône
aux Capucins, el lurent fort contents de se
trouver avec les pauvres à la porle de ce cou-
vent el de manger avec eux.
Le crédit qu'ils avaient à Rome par le
moyen de leurs parents el de leurs amis fit
qu'ils obtinrent du pape ce qu'ils demandaient,
cl ce pontife leur accorda, le 1" juillet 1588,
un bref par lequel il leur penncttail d'ériger
une congrégation de Clercs Kégul ers, défaire
des vœux solennels, d'élire un supérieur, el
de prescrire des règl.'meiits pour le miintien
de ce'le ( ongrcgation. Il les reçut sous la
protection du saini-siége, et co:iHne ce pape
avait été Frère Mineur, il donna à ces Cle.cs
Itéguliers le nom de Mineurs, quoi(iue lin-
lenlion d'Adorue fût de leur d .nner celui de
Mariani, à cause de la dcvolion qu'il por'.ail
à la sainic Vierge. Ils retour, cent ensuite
à Naples, où ils jelé;enl la ii;cme année les
fondements de ce', ordre dans l'église de Sainte-
Agnès. Grégoire \1\' leur accorda, l'an 15 !1,
tous les privilèges d ni jouissiiienl les Théa-
lins, Clément Vill les confirma dans la suilc.
Paul V^ les (il pirliiipanls de lous les privilè-
ges qui avjiienl été accordes par ses prédé-
cesseurs aux autres ordres religii'ux, el ils
en ont encore reçu d'autres dans la suite.
Adorne, a|irès rètablissemeiildcsa coigé-
galion, pratiqua toutes les verius dans u:i
degré éminent. Ses austérités étaient grande s,
son humilité profonde, son oraison presque
continuelle, employant ordinairement sept
ou huit heures à l'oraison mentale; mais où
il faisait paraître plus de dévotion, c'c'ait
lorsqu'il célébrait la sainte messe, employant
aussi beaucoup de temps à s'y préparer et à
faire son aciion de grâces. Il essuya beau-
coup de falgues pour l'agrandissemenl de
son ordre. Il fut en Espagne pour y faire des
établisseu]cnls,maisce fui iniiti!emi'nlàcause
des contradictions qui s'y trouvèrent pour
lors, el cène fut qu'après sa mort que ses
religieux y sonl entrés el y ont ob'enu plu-
sieurs maisons qui sont divisées en plusieurs
provinces. Comme il ne faisait ses voyages
qu'à pied el en demandant l'aumône, ses fa-
ligues jointes à ses ausièritcs abrésèreul ses
jours; car, n'ayant encore que quarante ans,
il mourut à Naples, le 21 septembre de l'an
1591, après avoir vécu dans sa congrégation
deux ans et demi.
Après la mort de Jean-Augustin Adorne,
François Caraccioli prit le gouvernement de
l'ordre, qui s'agrandit notablement par son
moyen, ayant (ait plusieurs fondations en
Italie cl en l'Espagne. Il avait un zèle infali-
g ible, il était toujours occupé à la prédica-
tion ou à la confi ssion, et il fil un grand
nombre de conversions. Quoique élevé à la
qualité de chef de son ordre, il se regardait
comme le moindre de ses frères, el ce fut
celte humilité qui le fil renoncer à la supé-
rioriié, quoiciu'il eût été élu général perpé-
tuel. Il s'exerçait aux emplois les plus vils.
Il aimait si fort la pauvreté que lorsqu'il
voyait quelque religieux qui avait une mé-
chante robe, il la lui demandait aussitôt pour
s'en revéïir, el il lui en donnait une bonne.
11 invenlait lous les jours de nouvelles aus-
lérilés pour mortifier son corps. Il demeura
plusieurs mois sous un ei-cilier, où à peine
il pouvait s'étendre. Il portait jour el nuit
une ceinture de fer, il dormait sur des plan-
ches, il jeûnait trois fois la semaine, etioules
les veilles des fêtes de la Vierge au pain el à
l'eau; et il prenait la discipline toutes les
nuils. p]nfin, après avoir été en pèlerinage à
Notre-Dame de Lorelle, cl reloiirnanl à Na-
ples, il passa par Agnone dans rAbruzze,où
on lui offrit un établissement. Il y tomba ma-
lade chez les PP. de l'Oratoire el mourut le
i juin 1608.
Le troisième fondateur, AiigtisUn Carac-
cioli, quitta une riche abbaye pour se join-
dre aux deux autres londa'.eurs. Il les imita
dans toutes les vertus, principalement dans
la pauvreté. Son humilité était si grande, qu'il
ne voulut point accepter la charge de général
de l'ordre; et. sur la proposition que lui fil
un cardiaal d'un évêché qu'il lui voulait
procurer, il se jeta aussitôt à genoux et renou-
vela le qualriè. ne vœu qui se fait dans cet
ordre do ne prétendre à aucune dignité. Il
voulait toujours dépendre d'un supérieur.
Ce fut l'iibèissance qui lui (il arcepter l'ofiiee
de [)refel et les autres emplois dont les su-
périeurs le cbargèreiit, et il mourut le 28
mai 1015, étant âgé de soixante ans.
Cel ordre a présentement plusieurs mai-
sons, qui sont divisées en (]ualre provinces,
dont il y en a deux en Espagne, sous le titre
de provinces de Casiille et d'Andalousie, et
deux en lia ie, sous le litre de provinces de
Naples el de Rome. Le général était d'abord
perpétuel, ensuite il s'élisait tous les six ans,
mais le pape Alexandre \'ll ordonna qu'il
serait à l'avenir perpétuel coiiirae il l'avait
été dans le commencement. Ces religieux ont
dans plusieurs villes deux maisons, comme
à Rome, à Gênes et à Palerme ; et dans d'au-
tres trois, comme à Naples et dans quelques
villes d'Espagne.
Leur principal inslitiil consiste dans les
exercices de la vie active et contemplative ;
comme nous avons dil, ils l'ont quatre vœux
solennels, de pauvreté, de chasteté, d'obéis-
373 n:CTIONN.\inF: des Or»DRES REUniF.UX. D80
sanre cl de ne prélendre à aucune tli^nilé tl'Urbin, les recommanda au duc d'Urbin, N.
Iiors de la lelijîioii. Aces quatre vœux ils de la Itovore . qui noii-soiilcincnlb s établit
ajoutent un srrmeiil (le u' incliMidiC à au- à llastcl-Durantc cl à IVs.iro, mais leur donna
(•une di^uilo d.inS l'ordre, et tous les ans, la encore sa bibliiithcque composée de plus de
\ eillc de l'Hiiiplianie, ils renouvci enl leurs trente mille volumes.
vœux. Ils ont une InMire d'oraison p ir jour, Il y a eu <lans cet ordre fdusieurs écrivains
le niati 1 et le soir, e; tour à loiir ils liint une cclètires, comme le P. Kapliael Aver-a de
heure d'or, i-oii qu ils appellint l'oraison cir- Sainl-Si'verin au r^iyaunie de Naples.qui,
cul. lire. Deux fuis le jour ils font l'esamen sous le pontificat d'inno'enl X et celui d'A-
de conscience, ils s'einpl lienl à la prciiic.i- lexandre VII, fut consultcur des llites et de
lii)ii et à la confession dans leurs proires Vltidcx, ci qualifh'aleur du Saint-Oflice ; il
églises, el ils font encore des missions. Ils nfusa les é'. écbés de Norcra il de Nardi. I.e
visitent les piisons cl les iiùpilaux, et, tant de 1'. l'bilippe Suadagnoli ensei;.'na pendant
jour que de nuit, i'. y en a toujours quelques- plusieurs années l'ariibo dans \o. colléjie de
uns qui son! destinés pour aler assister les la Sapience à Home ; il laissa quelques ou-
ma'ades, lorsqu'ils y sont appelés. Ils ne vrages en celte langue, ([iii furen! imprimés
mangent de la viande que trois fois la se- par ordre d'Urbain Vlil. Le V. Launnt du
maine, et, outre les jeûnes commandés par l'ont, neveu du pape Léon XI, a fail des
riîglise, ils jeûnent encore l'avcnt, les deux cnmmentaTCs sur le livre de la Sagesse el
derniersjoursducarnaval el tous les vendre- l'Evangile de saint Mathieu. Le P. Antoine
di-de l'année, et ilspreiinenl encore Cî'sjours- l'ara a donné deux volumes de Ihéologie
l.'iladisci| liiie.()ulre(esmortilicalions,ili onl scolastiiiuc. Le P. Antoine Uosendca travaillé
encore une manière de iiénilence qu'ils ap- sur la même matière. Les PP. lîlaise Vaxen,
pelleiit au-si circulaire. Tous les jours, hors Jerdinc Prado, Antoine Vasquez et Jércme
les fêles de précepte, il y en a un qui porte Sakedo ont donné qiiel.]ui's liisloires ; le P.
le lilice, un autn- qui prend la discipline, el Thomas Hurlado, Espagnol, a laissé treize
un qui jeûne au pain el à l'eau, lequel esl volumes do scolaslique et de morale. Le P.
obligé de porter sa pit;ince du réfectoire à Eoimanucl Felguera en a donné trois sur Uî
DU pauvre, auijuel il doil faire quelque ins- droit canon et la théologie mora'e, le P. Be-
Jrurlion. fo'' l^emy, neuf volumes sur dilTérentes ma-
ils onl des maisons de quitre sortes. 11 y tières, le P. Jean de (luevara a aus>>i laissé
m a (ju'il'» ap[ client maisons d'exercices, où plusieurs volumes sur dilTerentes n)a!ières:
l'on s'occupe à procurer au prochain loutes je passe sous silence les autres, qui sont en
les assistances spiriluelles dont il a besoin, trop grand nombre.
d'autres qui son l des li nées pour l'éducation lly en a eu aussi plusieurs qui se sonl dislin-
dcs novices d'aolres sous le titre de collé- gués par la sainteté de leur vie, comme le P.
ges, où l'on ensiignc toutes sortes de scien- Eugène Hurtado, >incenl Siribella, Joseph
ces. non-seulemcnl à leurs propre- religieux, Imperalo, qui aida beaucoup le P. François
mais encore aux (crsonnes du dehors qui C.iiMCcioli dans la fondatiun des couvents
veulent venir à leurs leçons. Enfin ils ont d'Espagne et refusa rarchevéché de Manfre-
des ma.sons (]u'ils appeilenl ermitages, où donia ; Barthélémy Simonli, Paul Masio,
ils vivent dans une grande letrailo el dans la Laurent du Pont, Benoît Cappello, Gouzalo
pratique de l'oraiscn el de la pénitence la Eeniacidez, Pierre Sousa et plusieurs autres,
plus sévère, et, afin de n'être point troubles Le P. Thomas Lolii, confesseur du pape
dans leurs exercices, l'église de ces sortes Innocent X, fut fait par re pontife évéque
d'ermitages esl d.;us liniéneur de la mai- de Cérène i» ;)nr/i6îis, prélat de la congréga-
son, el l'enlrée en esl inlerdiie ;ru\ séculiers, lion des Réguliers, el vicaire de l'église de
Les supérieurs ne pi'uvenl pas contraindre S rinte-Marie Majeure à llome. Sons le pon-
aucun religieux à y aller demeurer, il n'y a tilical d'Innoccnl XI, le pritx'c Ernest de
que le zè'e, la ferveur el le désir d'une plus Crouy, voyageant en Italie cl étant enlro
grande perfeclioii qui poi lent les religieux dins l'églis ■ de Noire-Dame de Lorelle, fui
à vivre dans ces soliiudes, cl ils doivent en si louche de la sainlelé de ce lieu, qu'il re-
iibleuir la permission des su|iérieurs. 11 y a nonça aux erreurs de Lulber, dont il f.iisail
lie ces sortes d'ermilagos hors la ville de .Na- prulession. Etant venu à Uomo, il lit abjora-
pb'S cl hors la ville de Lisboini'^, el il y a lion entre I s mains du pajjc et cntr.i dans
peu de bonnes villes el d'nniver>iles en lis- l'ordre des Clercs llégnlicrs Mineurs, où, peu
pagne où ils n'aient des collèges. de temps après avoir élé promu au sarer-
Cetle congrégation s'est augmentée encore doce, il mourut dans de grands sentiments
sous le gouvi rnemeiil do P. P.ix, qui eu a de piété, ayant beaucoup cdifié cesreligi ii\
élé général et (]ui a fail des élablissem uls par son humililé el par la vie austère (ju'il
nouveaux, deiiv en Italie, à Pisloie d.ins av.iil menée.
Il Toscane, el .à Sai l-ticnest dans la Marche Ces religieux, entre antres privilèges, oui
d'Ancône, el d'autres en lispagne, comme à une chaire au collège de laSapie:ice à Kome,
\'alencc et en d'autres villes de ce royaume où ils enseignent la philosojihie, el il y en a
où ces religieuv sont fort eslimés. Le pape loijours un qui esl rousulleur de /'/ti'/f.r, re
«.lénienl \'lll les reconmiandi à l'liilip|)c II (|ui leur a été accordé par le pape Alc\aii-
lorsqii'ils Miulurenl faire leur premier é!a- dre \TI et confirmé [lar le pape .\lexandrc
blissemeni dan> ses Et. ils, ol Philippe III, sa- ^■III. Il y en ;i cniore un qui est examina-
clianl qu'il, voulaient s'établir dans le duché leur synodal, cl celle charge fut confcréo
381
MÎN
MIN
fiS2
p;ir Innocent XI ..u 1'. Philippe iiruliior, fa-
meux llié;)logien et procureur généivil de cet
ordre.
Ces Clercs Réguliers sont habillés à peu
près comme les au' res Clercs Kégnliers(1),ox-
ceplé que leur robe est serrée d'une ceinture
de cuir, et que les manches de celte robe ne
sont point serrées au poignet, mais qu'elles
sont un peu larsres. Ils ont pour armes la
résurrection de Nolre-Seigiicnr, avec cette
devise: Ad majorem Resuif/entis (/luiinm.
Voyi'Z le livre intitulé. Délia V. relifiionc
(h Pad. Chierici Regnlari Minori. Ignazio de
Vives, Yiladel P. Franc. Caracciuli. Auberl
le Mire, de Confjreg. Clericorum in C(:mmiini
vivenlium, et Regtdœ et consliluliones Cléri-
cal iim in congrcg. vivenlium. Pielro Crescen.
Prœsidio Rom. Silvest. Maurol. Mar. Ocenu.
di lui. le relig. Ascag. Tamhur. de .lure abb.
August. fiarbosa, de Jure. Kccle». Ilcrmaiit,
SchoonebeketConanni, Uist. des Ordres Re-
ligieux.
Au dernier siècle les Clercs Réguliers
Mineurs avaient à Rime deui maisons,
l'une à Saint-Laurent in Lucinn, laulre à
?aint-Vincenl et Saint-Anastaso o Trsvi.
Aujourd'hui, ils existent encore et ils ont
pour procureur général le P. Joachim Meli.
On attendait l'élection du vicaire général.
B-D-E.
MINEURS (Fb^resI. Vo}/. Phanciscains.
MINGRÉLIENS (Moines). Votj. Nîelcuitis.
MINIMES Religieuses. Voy. Mi.-vuies (On-
DiiE des], § II.
MINIMES (Ordise des).
§ I '. Des reli(,icux Minimes, avec la Vie de
saint François dePaule, leur fondateur.
Les religieux Minimes prétendent avoir
quelques prérogatives au-dessus des auires
religieux, et les surpasser par l'austérité:
c'est pourquoi le P. Joseph-Marie Perimezzi,
religieux Minime, d.ins la Aie qu'il a donnée
de saint François de l'aule, fondateur de cet
ordre, entre plusieurs dissertations qu'il y
a jointes, tant sur l'âiie de ce saint, son pays,
sa famille, son érudition et son voyage en
France, que sur d'autres sujels qui regar-
dent les actions de sa vie et l'ordre qu'il a
fondé, en fait une pour prouver que le vœu
de la vie quadragésimale, qui est le dislinc-
lif de cet ordre, lui donne ui:e supériorité de
mnrtificalion sur ceux des Chaitreus et des
ordres Mendiants. Mais je crois que, pour
en juger sainement, il aurait fallu que le P.
Perimezzi ciit aup'aravant éprouvé l'absti-
nence de viande des Chartreux, dans les plus
grandes maladies, leur silence et l'usage
continuel du ci!;ce, la grande pau\reté des
;iulres, leurs voyages à l'apostolique et la
nudité des pieds. On ne peut pas nier néan-
moins que ce vœu de la vie quadragésimale
ne rende leur ordre fort austère et ne les as-
sujelli^se à une morlification continuelle ;
mais qu'ils surpassent en cela tous les reli-
gieux, c'est ce qu'on ne peut leur accorder
sans faire tort à plusieurs saints instituts et
réformes, qui sont la bonne odeur de Jésus-
Christ, et auxquels on ne peut disputer une
pénilence beaucoup plus austère (jue n'est
celle des Minimes.
Cet ordre aeu pour fondateur saint Fran-
çois de Paule, ainsi appelé du lipu de sa nais-
sance dans la Calabre cilérieure au royaume
de Naples. 11 vint au monde vers l'an 141(5,
ses parents l'ayant obtenu de Dieu par l'inter-
cession de saint François d'Assise, aui^uc! ils
firent vœu et dont ils lui donnèrent le nom
par reconnaissance. Son père se nomm lit
Jacques Marlorille et sa mère Vienne de
Fuse. do, laciuelle eui une sa'urnomméeîîri-
gitte, mariée à Ai.toine d'Alesso, son cousin
germain, dont deux enfants vinrent en France,
l'un desquels, Pierre d'Alesso, se fit reli-
gieux dans l'ordre des Mininies, et l'autre,
Antoine d'Alesso, épousa Jacqueline ou Jac-
quetle Molandrin. De ce mariage vint Jean
d'Ali'sso, qui delà sœurde l'évéqued'Orlé.ins,
Mathurin de la Saussaye, mère de l'évéquo
Jean de Morvilliers, garde des sceaux de
France, eut Michelle, mariée à Nicolas le
Clerc de Courcelle; Anne, femme d'Olivier
le Febvre d'Ormesson; François, qui épousa
Marie de Vigni ; André, qui épousa Marie d,'
Longucil ; Madeleine, femme de Pierre Chail-
lou, qui tous ont eu des descendants, qui,
quoique fort recommandaMcs par leur pro-
bité et les grandes charges auxuuelles ils
ont été élevés en Fra.'.ce, se sont tenus p'us
honorés d'être jietils neveux de; saint Fran-
çois de P lule, que de la qualité de présidents,
de conseillers d'Elat, de maîtres des requê-
tes et autres semblables (ju'iis ont portées :
c'est pourquoi le P. CU'.ude du Vivier, reli-
gieux Minime, ayant écrit en 1620 que saint
François de Paule élait fils unique, il-i en fi-
rent des plaintes au général de cet ordre,
qui ordcmna au P. du Viv er de se rétracter;
elle P. Cliapat écrivit ensuite pour prouver
que saint François de Paule avait eu une
sœur mariée à André d'Alesso.
Ce saint, qui avait été reçu du ciel par ses
parents, étant regardé p r eux comme un
dépôt qui leur était confié, ils relevèrent
dans tous les exercices dedcvoliou capables
de le rendre agréable aux jeux do Dieu,
auquel, en conséquence de leur vœu, ils se
croyaient obligés de le restituer. Comme il
se trouva porté do lui-même à la piété, son
éducation leur coula peu ; cir dès sou en-
f.inre il aima la solitude, l'abslinence et l.i
prière ; il n'eut poiat d'autres maîtres qu'eux
jusqu'à l'ûgo de treizeans, (luils crurent qu'il
était temps d'accomplir le vœu qu'ils a» aient
fait pour sa naissance et qu'ils avaient re-
nouvelé depuis pour sa conservation : pour
lurs ils le dunnèreni aux religieux de Saint-
François, qui le reçurent dans leur couvent
de Saint-Marc, ville épiscopale de la môme
province. Ce fut là que le jeune François,
animé par les bons exe nples de ces saints
religieux, et prévenu des grâces du ciel, com-
mença cette vie austère qu'il pratiqua jusqu'à
(1) Voij., à la Cil du vol , n' iU.
'83 DJCTIO.N.NAmE DES
1.1 mon. Il surpassa en \c\i de temps les re-
ligieux les plus robustes tt les plus fcTv.'iiis
dans l'exacte observance d<; la rèn!c; il
s'interdit dès lors l'us/i^'c du linge, el s'abstint
de manger de 1 1 viande, quoiqu'on en man-
geât dans celle maison, selon l'usasedes Mi-
neurs, auxquels elle n'est pas défendue par
leur rèijie. Il y pissa un an sans faire pro-
fession, et ayant été rendu à ses parents, ils
lemcnèrenteiisuitcen divers pèlernages, à As-
sise à Ni)tro-[)ime des Angos, àLorctteelA
Rorn.\ visitant les p us célèbres monasièrcs de
leur rou'c, elles lieux qui èl lient les plus fré-
quentés par la dévotion des fidèles. Elanl
retournés à Taule, François se retira m un
endroit solitaire, éloigné' du la ville de cinq
cenis pas où ses parenls, qui avaient con-
sen'i à sa retraite, procurèrent sa subsistance
pendant quelque temps, afin «lu'élant dis-
pensé delà peine d'en aller chen her, il pût
vaquer aux exercices de la retraite sans
distraction. Mais ce linu, qui appartenait A
ses parents, ne lui semblani pas ass-z éloigné
pour éviter la conversation des hommes, à
cause des visites fréquenies qu'il y recevait,
il ne s'y arrêta pas lonïtimps; el cherchant
une solitude plus écartée, il alla se cacher
dans le coin d'un rocher, où il trouva moyen
de se creuser une loge. Quoiqu'il eût à peine
quinze ans lorsqu'il s'y renferma, il n'eut
pas besoin de la conduite d'aucun maître
pour régler sa vie dans la pénilenre et les
exercices spirituels. Il n'avait point d'autre
lit que la pierre même du roc, point d'aulres
.alimenîs que les herbes cl les racines d'un
petil bois voisin, ou ce que lui fournissait la
iharilcd,.' ceux qui le visitaient en ce lieu.
Il portait un rude ciliée sous un habit fort
vil, el meiiail une vie semblable à celle des
solitaires de la Thébaïde.
Sa réputali )n serépand.t bienlôldan* lotile
la Calabre ; plusieurs personn s voulurent
être les témoins el K-siuiilaleursde ses vertus,
et il ne put résister huk instances (lu'on lui fit
d'en recevoir (lu/rjuesuns et d'i'n prendre la
conduite, quoiqu il ne fût âgé que de dix-nenf
ans. (^e fut l'an 1V3d (|u'il commença d'avo r
des disciples, av.-c lcs:|uels il sorlil do celte so-
litude pour retourner auprès de P.iu e li.ms un
lieu qui app.irtenail à ses parenls, où il jcla
les fondements de son ordre. Ils y liâiireiil
des cellules avec une clia|)('llc où ils chan-
taient ensemble les louanges de Di u ; et
comme celle cl.apelle clait ap;iare:nment dé-
diée à saint François d'Ass se, on leur don-
n.i le nom t\'h'rmites de Sainl-Françoix. Ils
Técurent ensemble prés de dx ans; mais les
iiabilanis de l'ilernc, ville siluéc aussi dans
la Calabre prache Cariali et du dioc.'sc de
F.ozensa , souliailanl avoir part à la béiié-
ditlion que ces saints soliiaires ailiraient
sur les habiianls de l'aule, su(iplièrenl le
saint de venir chez eux, el s'oiïrirenl de lui
donner un lieu pour y bâtir un cnuvent.
Paul di^ Kcndac, gentilhomme de ccttV ville,
qu'il avait reçu au nombre de ses enfants,
joignit ses prières à celles de ses compatrio-
tes pour le faire consenlir à b ur accorder
celle grâce. Il se rcudl enfin à leurs ins'a:!-
ORD'.IES KKLIGIEU.X. OSI
ces, el ayant pris quelques autres religieux
ave? lui, il vint établir sa second'» colonie à
l'aiernc en \ïï\. Le nombre de ses disci-
ples augmentant avec les charités des per-
sonnes de pielé qui contribuaient au sonlie i
de son nouvel institut, il prit la résolution
en t'i-52 de bâtira l'aule, avec la permission
de 1*3 rrhos. son évé(jue, un monastère d'une
juste étendue et une Eglise [dus f.pacieuse.
Hu (luoi il fut aidé par saint François d'As-
sise, qui lui appaul dans le temps i]u'il com-
menijait cet édifice, et lui Ht prendre de nou-
veaux ali,'uemenls. La même année U53, il
fit un Iroisiè ne élablissemenl à Spezano-le-
(irasid, aussi du diocèse de Cozensa, et jcla
encore les fondements d'un nouveau cou-
vent à Cortone en IVGO.
Le saint visiiait ces couvcn!s, allant de
l'un à l'aul'e tant pour l'avancement de
leurs édifices que pour le gouvernement de
ses religieux, qui n'avaii^ni poinlencore d'au-
tres règles que celés qu'il leur donnait do
vive VOIX avec les exemples de sa vie ; mais
il fui oblige de les qu'ller pour un temps. Le
bruit de ses vertus el de ses miracles s'était
tellement répandu en Sicile, qu'il n'y avait
point de ville dans tonte celle ile qui ne sou-
liaitât avec aideur jouir de sa présence;
surtout les habitants de Milazzo le dcman-
daienl avec instance et lui envoyèrent des
députes pour le prier de venir établir chez
eux une comuiunaulé. .\insi, après avoir
donné ses ordres pour le gouvernemenl de
ses maisons de Calabre, il paitil en liG'i-
avec deux de ses religieux pour aller en Si-
cile, où il arriv.i heureusement à la faveur de
son ma ni eau qu'il étendit sur la mer et qui lui
se-vitde vaisseau elà ses deux compagnons,
à la lion le et au grand élonnement de quelques
mariniers qui, voyant sa grande pam ri-lé,
lui avaient refusé le passage dans leurs bar-
ques. Liant donc alionlé en Sicile, il alla à
Milazzo, où il fut reçu comme un .inge des-
cen lu du ciel, et où on lui bâtit en peu de
temps un couvent qui fut le premier de son
ordre en ce royaume, et qui donna bien-
tôt naissance à d'au res qu'on y fonda. Le
saint fonla'eur, .iprès y avoir demeuré près
de quatre ans, retourna en li08 en ('a'abre,
où il assista les pauvres dans une extrême
famine qui afiligeail loule celle province, r|
peu de temps a|irès il fut invite d'aller com-
mencer un nouveau monastère de son ordre
A Carigliano dans le diocèse île Uoss.ine.
Cependant les actions prodigieuses qu'il
faisait de lemps en temps faisant grand bruil
par loule l'Italie, le pape Paul II voulut en
avoir des nouvelles assurées, et envoya pour
cela un de ses c.imériers à l'archevêque de
Cozensa, afin qu'il s'en informât pli'inemenl.
L'archevêque, (|ui connaissait la sainlelc du
serviteur de Dieu, parla avantageusement do
lui à ce prélat, et lui conseilla d'aller à
Paule, afin de l'inlerroger lui même, de l'exa-
miner, cl de ne rapporter au pape que ce
qu'il aurail vu. Le camérier le crut, el sans
donner avis de son voyage, il se rendit au
plus loi a l'.iule. Dèstiu'il vit sainl François,
il voulut lui baiser les mains par iespi:cl ;
985
MIN
M N
933
mais le saint s'en défendil avec beauco«i)
d'humilité, lui disant qu'il était plus à pro-
jos qu'il lui rendît lui-même ce devoir,
comme à celui qui élail honoré drpuis (renlc-
Irois ans de la difjuilé sacerdotale ; ce qui
étant vrai surprit le camérier, ijui, voulant
exécuter sa commission, l'entrelinl de sa vie
et de celle de ses disciples, et commença à la
laser de rigueur indiscrète el d'une siiij;ula-
rilé dangercusi^ sur quoi il s'étendit fort au
Jong. Le saint l'écoula tramiuillement, mais
comme il s'agissait de soutenir l'établi sè-
ment de la vie quadiagésimale dont il avait
reçu l'ordre du ciel, il prit des charbons ar-
dents entre ses mains, el les tenant long-
temps sans se brûler, il dit au prélat que,
puis()u'il voyait ce qu'il f.ii ait par la vertu
de Dieu, il ne devait pas douter aussi qu'é-
tant assisté de cette vertu on ne pût supp )r-
ter la vie la plus austère el les plus gramies
rigueurs de la pénitence. Le camérier, ef-
fr.ij'é de ce prodige, voulut se jeter à ses
pieds pour lui demander excuse et riM-evoir
sa bénédiction, mais il en fut empi'cliô par
le saint, qui lui demanda au contraire la
sienne avec tant d'Iiumililé, que celui ci le
quilla autant cdiTié de la sainteté de ses dis-
cours el de sa profoiide humilité, (lu'étonné
de ce qu'il lui avait vu faire. I! en informa
le pape et toute la cour romaine: ce qui fat
une grande disposition aux grâces que le
saint-siége accorda depuis à l'ordre des Mi-
nimes, mais principalement à celle d;^ son
approbation aullienliquo qu'il reçut en li73,
sous le ponlifioal de Sixte IV qui avait suc-
cédé à Paul 11. Dès l'an 1471, Pyrrhus, arche-
vêque de Cozcns I , avait aciordé à saint
François de Pauli; beaucoup de privilèges
pour son ordre dans toute l'étendue de su:i
diocèse, avec pcrniission d'y faire de nou-
veaux établissements. Geoffrni, évèque de
Saint-Marc , examina ces privilèges parordre
du pape Sixte IV, l'an li7.3, et sur le rap-
port qu'il en fit, ce pontife approuva cet or-
dre sous le nom iVEriniles de. SuinlFran-
çois. Le même Sixt ', ayant examiné lui-
même ces pri^iléges, établit l'ann/c suivante
saint François de Paule supérieur général de
sa congrégation, qu'il exempta de la juri-
diction des ordinaires.
La bénédiction sensible que Dieu répan-
dait Si.r cet ordre, qui s'augmentait i!e jour
en jour par les nouveaux é'ablis-ements
qu'on offrait à ce saint fondateur, lui attirait
l'amour el la vénération des peuples, qui ve-
uaienl à lui de toutes parts comme au dépo-
sitaire des grâces et des faveurs célestes. Le
souverain pontife et tous les prélats de Cala-
bre n'étaient pas moins persuadés de sa sain-
teté qui le rendait digne de l'admiration de
tout le monde ; mais cela n'empêrha pas
qu'il ne fut persécuté par son propre prince
Ferdinand I ^ roi de Naples et |)ar ses deux,
(ils, le duc deCalabre el lecardinal d'Aragon,
sous prétexte de la liberté qu'il prenait de
bâtir des monastères el de faire de nouveaux
établissements dans le royaume sans permis-
sion. I/(in prétend que le saint avait choqué
aussi le roi FerJjnand par quelques avis im-
portants qu'il lui avait fait donner pour le
bien de sa personne el de son Etat, el qui
plurent encore moins à ses enfants, qui abu-
saient de son autorité el profitaient de ses
exactions. Ce prince, animé contre le saint,
sachant qu'il était dans sou couvent de Pa-
terne, y envoya un capitaine de galère avec
des soldais pour se saisir de lui et l'emme-
ner prisonnier à Naples. Celle nouvelle jeta
la consternation dans le pays. Les habitants
de Paterne s'employèrent avec zèle auprès
du capitaine pour le déto^urner d'arrêter le
saint, lui remontrant que ce serait attirer
sur lui el sur toute la maison royale la to-
lère de Dieu el le fièau de son indignation. 11
ne laissa pas de vouloir exécuter les ordres
qu'il avait reçus ; mais lorsqu'il eut vu saint
François de Paule n qu'il lui eut signifié la
volonté du roi, il fui si louché de son humi-
lité el de lu d spo^itiun où il élail de le sui-
vre, et surtout des discou:s adajirahles qa'il
lui tint, qu'il s'en retourna à Naples sans
rien faire. Il dit au roi ce qu'il avait vu et
entendu, el lui fil si bien comprendre le dan-
ger qu'il y aurait eu d'enlever le serviteur de
Dieu au milieu des peuples qui le regardaient
comme un saint, (ju'il le fil résoudre à le
laisser en liberté.
Cependant le brun (le sa sainlelé el de ses
miracles s'étant répandu au d.'ià de l'Italie,
vin!, jusqu'à la cour de France, où le r ti
Louis XI élail dang^îreusement malad;' dans
le châleau du Plessis-lez-Tours. Ce prince,
qui avait un grand attachement pour la vie,
avait épuisé l'art dos médecins el usé de tous
les remèdes imaginables pour rétaitlir sa
santé ; ces secours ayant élé inutiles, il avait
eu recours à des moyens surnaturels pour
l'obtcn r du ciel par des vœux, des neuvai-
nes, des pèlerin.iges et autres dévolions;
mais comme cela avait élé inutile jusqu'a-
lors, il crut que saint François de Paule, qui
élail le thaumaturge de son temps, pourrait
faire quelque miracle en sa faveur, et obte-
nir de Dieu saguérson parses prières. 11 lui
(il d'abord écrire pour le convier de le venir
trouver en Franci', où il lui promit lous les
avantages qu'il pourrait souhaiter pour ré-
tablissement de son ordre el pour lui-même.
Le saint, qui était morlau monde, ne se laissa
pas toucher par ses promesses, auxquelles
il préféra les douceurs et les biens célestes
dont il jouissait dans sa solitude, dont il ne
voulut point sortir malgré les instances d'un
si grand monarque ; c'est pourquoi Louis XI
en fit parler au roi de Naples par son ambas-
sadeur. Ce prince fit son possible pour per-
suader à saint François de Paule de donner
cette satisf iclion au roi de France, mais ce
fut encore inuiilemcnt. Enfin Louis XI s'a-
dressa au pape Sixie IV, qui envoya deux
brefs à ce saint homme, par lesquels il lui
ordonnait de se rendre piomptemonl à la
co'ir de France. Il n'en fallut pas davantage
pour le délermiaer, et la voii du souverain
pontife fiil pour lui comme un ordre venu du
ciel. Après avoir réglé ce qui lui parut plus
important pour l'administrât on des couvents
de Galabrc et de Sicile, il partit le 2 février
"87 DICTIONNAIIÎF, DF.S OUDUES riEI.lGIia'X. ms
li82aTcc le inaîlrc (I'IkUcI du mi qui IVlail cntcmirc que la vio des rois aussi bien que
vMiii quérir. Il fut reçu à Nnples avec la <ello d'S aiiircs hommes i(anl entre les
iii(<mc pompe (|uc <i c'eùl élé un louai apo>- mains de Dii-u, qui a complé lous nos jours,
toliqiie ou le rui nuMuc. Feriliiiaïul, avec ses il falLiit s'adresser à lu' par b priùre pour
enfants et ce qu'il y avail de (jr.mds sei- conn.iîire sa volonté ri s'y soumetire aveu-
pneurs ;'i s.i (oiir, alla-aii dov.inl di! lui, cl la plémont. Le roi jo fil losi'r dans la basse-
foule du monde élail si L-rand'" que, sans la cour de son cliâleau, en uii«' petite maison
diligence lin prinre de l'arcnte, lis d'i roi, proc lie la cliapel c de ^aint MaKiiieu, atin do
qui l'avait élé quérir jusqu'à Salcrnc, il eùl pouvoir ji)i:ir plus faiiicmenl de son ciiInMicii
c:é inipossiliic de le faire passer-. p.ir le moyen d'un ncininié Ambroise Iloni-
A Komc le pape lui lit rciiflredrs honiiciirs baut, qui s.ivail également le laiin, le frança s
que l'on n'y nccordail pis mr'ino aux prin- cl lilalicn, cl donu i cliariic à deux ofieiers
es. Les cardinaux le vsiièrent en cérémo- d'avoir soin de sa subsistance et d' celle do
nie, et en trois diiï^Mcnlcs audiences parlicu- ses religieux (lu'il avail amenés avec lai. La
lières qu'il eut du p.'pc. il !ul as-is dans un v!>néralion qne le roi, les princes et les sei-
i.iuleuii égal à celui de Si Sainteté, qui l'en- pneurs de la cour les mieux sensés avaient
Iretinl chaque fois pend ni l'espnci' l'c trois P'iur ce grand servilcur de Dieu, n'empé-
ou qnaire heures, (le pontife voulut l'élever cli i pas que plusieurs courtisans plus versés
aux dignités ci clésiastiqiies, mais le saint dans les manières du uKmde (pie dans celles
s'en défendit avic beaucoup d'h milité, cl des saints ne se moquassent de lui et ne Tap-
n'accepla . de tous le; pouvoir, que lui o.Tril pelassent par dérision le hon Itomtiie, le lour-
I • pape, que celui de bénir d^s cicrgi'S et des nani en ridicule sur ses habiis, ses cheveux
i- apelets pour faire ses présents en France, qi'il ne coupait point, cl surtout sur son exté-
co qui fui la sourie d une iniitii o de niirac'es rieur négligé. Le médecin du roi, Jacques
ciu'il fil en ce roy lunii'. Il parla à Sa Sain- Coclicr, ne fut pas des derniers à le railb-r,
télé du vœu de la vi:' quidrag' siniale qu'il y 6l ni c\ci(é par sa jablu^ie; mais l'année
Viiulait établir dans fcn ordre; niais coaime suivante il s;' réunit avec le saint pour dispo-
le pape faisait beaucoup de dilficulîé pour le ser eiiiin le roi à la murt qu'il a| préheniiait
lui accorder, le saint, sans insister davanlage, tant. Saini François fit sa principale alTaire
[rit par la main le cardinal de la Kovère, et di- ce dernier devoir, et il obtint par ses pric-
dii au pape qo ■ celui ri ferait ce que Sa S.iiu- rcs aujirès de Pieu et par la force de ses ex-
lelc avait tant de peine à faire, lui prédisant hortalions le changement du cieur du roi, qui
5'ar là qu'il ^erail pape; ce qu'il confirma mourut entre ses mains lei aoûl de l'an 14S.{,
l'ncore à ce cardinal lorsqn'il se réfu'jia en avec une soumission parfaite à la volonté do
b'rance sous le (o^ tilicat d'.Vlexandre VI; et Dieu, après lui avoir recommandé ses trois
en effet il le fut depuis sous le nom de Ju- ci.fanis et le repos de son âme.
les 11, el il approuva la régie des Slinimes Charles ^ 111, ayant succède à Louis XI,
avec le quatrième vœu de la vie quadragési- honoi a nore saint d'une manière encore
inale. plus particulière que n'avail fail le roi son
Peu de temps après, ce saint ambassadeur père, ne voulant rien faire que par ses avis
alla s"eiiibar{|uer à Ostie po :r prendre la dans toutes les choses qui regardaient sa
route de Fran e, cl dans presque 'ons les cimsciene.e el môme celles de l'Etal : il le vi-
endioits <.ù il pa^sa, il laissa d s mariiu s du silail souvent el le f.iisail venir dans sou ca-
pouvoir qu'il avait reçu de Dieu, pnrles gué- bincl; il lui fil tenir le dauphin son fils sur
risons miraculeuses (;u il lii. Le roi Louis XI, les f mis de bapléme, et voulut même qu'il le
apprenant s(Mi arc i\ée en France, en cul tant nommât: il lui fit bâlir un beau couvent
lie joie qu'il lit présent au porteur de cetio ilans le parc du l'Ies is, au lieu appelé les
nouvelle d'une liour>e de dix mille écus, qui Monlils, avec une pension sullisante pour lui
était la somme iiu'il f is.iil donner lous les et ses religieux, et un autre à Amboise, sur
mois à son méilecin depuis .-a dornii're mala- la place mi-me où il l'avait reçu à son ani-
d e. Sachant que le s.iint appro( hait de la vée en France, lorsqu'il n'élail encore qiio
Touraine, il i nvoya or r^" au dauphin de dan| hin, et voulut que les religieux de ce
F'.ance, son fils, (|ui fut depuis roi sous le monasière fussent eniretenus sur les revenus
nom de (lliarles \ni,de l'al!er recevoir n annuels de ses finances. Son affection pour
Ainboise : ce q l'il lit avec tous les lémoigna- ce saint homme no se borna joint à lui fure
ges possibles d'estime el do icspect, et de- du bien dans ses lilals. Llani à Uouieen IVi).'),
puis ce temps-là ce jeune prince l'aima cl où il aiait fait une entrée Iriomphanle, et où
l'honora comme son propre père. Le loi ne le pape Alex.indre \l l'avait piorlamé empe-
sa conicnla pas d'avoir envoyé son lils le re- reur de ConslanlinO|)le; il y fonda un autre
revoir : sachant qu'il était | roche de Tours, couvent do sou ordre sous le nom do la
il voulut aller lui-mémo au-dovant de lui Sainte-Trinité au iMont-rincio, qui, selon les
avec toute sa cour cl le reçut avec aui.inl inlenlions de ce prince, approuvées |)ar no-
d'bonneiir cl de soumission ()ue si c'eol été le tre saint el conlirmées par les sou>erains
pape. Il se jeta à genoux devant lui, le con- poutib's, n'a été jusqu'à présent rempli que
jurant lie faire en sorte que Dieu voulût lui de religieux fiançais, sans (|n'aucun autre,
prolonger la vie. Le .^ainl lui npondit ce de quelque nalioii qu'il soit, y puisse seule-
qn'iine ; ersonne au- si humlil(! el ;ii.l:int pé- nu ni coucher une nuit, non pas même le g6-
ni'iréc di> les|irit de Dieu (|n"il l'était dev.iil neral, s'il n'est pas fianç.iis.
lepondic à une pareille dcuiunde, lui liisaul l'eu de temps «près que /co saint fondateur
98!)
MIN
MIN
000
ont établi son ordre en Franco, il eut la con-
solation de le voir établir en Espagne, sous
les rois catholiques Forilinand et Isabelle, y
envoyant pour cet eiïet des religieux du cou-
vent du Plessis- lez-Tours, auxquels on
donna un couvent à Malaga, où ils furent
nommés les Frères de la Victoire, à cause
de la prise de cette ville sur les Maures, que
Ferdinand attribua aux prières de saint Fran-
çois, qui enfin (omposa sa première règle en
iV93, et la fil approuver par le pap" Alexan-
dre VI , à !a recommandation du roi de
France, et ce ponlife cbang.-a le nom d'Er-
iiiiles de Saint François d'Assise, (jne |:or-
taient ces rclig'cux,en celui de Minimes des
Frères Ermites de François de Paule. Ce fut
aussi la même année que l"on jeta les f mdo-
ments du couvent de Nigeon prôs Paris, dont
la reine \niie de Bretagne se rendit fonda-
trice, et l'on donna à ce couvent le nom des
lions Ilomines, qui lui est resté jusqu'à pré-
sent, à cause du nom de Bon Homme, qu'on
avait donné à leur fondateur, comme nous
avons dit ci-dessus. Le même Alexandre XI
confirma en l'iOo toutes les grâces que ses
prédécesseurs avaient accordées à cet ordre,
«tlui communiqua encore tous les privilèges
des religieux mendiants.
Deux ans après, c'est-à-dire en IVOT, le
saint fondateur envoya de ses religieux en
Allemagne, à la prière de l'empereur Maximi-
lien. Ils y établirent d'abord trois couvents
qui ont servi de pépinière aux autres que
l'on a de|)uis balisdans le même pays. L'an-
née suivante li98, Louis Xll étant parvenu
à la couronne de Francis par la mort do
Charles VIII, qui arriva à Amboise, comn)e
le nouveau roi avait toujours été éloigné de
la cour, et qu'il ne connaissait pas saint
François de Paule, il lui laissa d'abord la li-
berté de s'en retourner en Italie ; mais ayant
appris à cette occasion la valeur du trésor
(ju'il allait perdre, il révoqua sa permission,
et voulut encore enchérir sur ses préiéres-
seurs en affection et en bienfaits à l'égard du
saint, de ses religieux et de ses neveux; en
quoi les uns et les autres furent Iden servis
par l'aichevéque de Koiicn, Georges d'Am-
boise, ministre d'Etal, qui avait été fait c.ir-
dinal l'année de l'avènement de Louis Xll à
1,1 couronne.
Ce prince non-seulement agréa comme
avait fait son prédécesseur les bulles de
Sixte IV et d'Alexandre VI en faveur de l'or -
(Ire des Minimes, et en ordonna la publica-
tion, mais Fan loOO, pour donner plus de
force à cette ordonnance, il la conlirnia en-
core par d'antres lettres patentes et donna
pouvoir au saint homme de bâtir des cou-
vents dans tous les lieux de son obéissance,
les exemptant de toutes sortes d'iniposltions,
de subventions et de subsides. L'an 1501,
saint François de Paule ayani [)erfeclionné
sa première règle, et ayant réduit en dix cha-
pitres les treize dont elle ét:iit d'abord com-
po ce, ayant aussi établi la vie quadragé.'-i-
iiiale en vœu, et ayant dressé une règle pour
les personnes de l'un et l'autre sexe qui vi-
vent dans le monde, il fit encore approuver
ces deux règles parle p ipc Alexandre VI, en
1302. Il retoucha ensuite ces deux règles.
auxquelles il fit quelques changements , et
les présenta au sacré cidlége dos cardinaux,
(jui les ayant trouvées conformes aux sacrés
canons, elles furent confirmées par une
bulle du m5aic Ab xandre VI, qui, outre les
privilégias des quatre ordres mendiants dont
jouissait celui des Minimes, le fit encore par-
ticipant de ceux qui avaient été accordés aux
Ermites de Saint Jérôme de la congrégation
du l)i<nheureux Pierre de Pise, et tous ces
privilèges furent confirmés en 1503 par le
p.!pt' Jules H, qui y en ajouta encore de
nouveaux et nomma pour protecteur de cet
ordre le cardinal Bernardin de Garv.ijal, (luc
le saint fondateur lui avait demande. Enfin
l'an 1303, saint François de Paule ayant
mis la dernière main à ses deux règles, et eu
ayant fait une troisième pour des religieuses,
le même pape les ajiprouva et les confirma
par une bulle du 23 juillet de la même
année.
Le saint ajouta encore à ces trois règles
d'autres ouvrages, savoir un Correcloire,
dans lequel il marque les pénitences qu'il
faut imposer dans son ordre pour les trans-
gressions des commandements de Dieu et de
l'Eglise, et les prévarications de la règle ;
un Cérémonial, dans lequel il prescrit ce que
l'on doit observer dans la récitation îles of-
fices divins et dans les fonctions ecclésias-
tiques. Le Correcloire fut aussi approuvé par
Jules II, qui donna encore une autre bulle
l'année suivante en faveur des religieux de
celordre contre ceux qui voulaient les em-
pêcher de jouir de leurs privilèges , et, pour
les y maintenir, Sa Sainteté leur donna des
conservateurs.
Peu de temps aprè-. Dieu fit conmîlrc au
saint fondateur qu'il ne tarderait pas à le
retirer de ce monde, pour lui donner la ré-
compense promise à ceux qui l'.iimenî et
qui le servent fidèlement jusqu'à lafin.Quoi-
qi'il se fût toujours préparé à la mort pen-
dant tout le temps de sa vie, il voulut s'y dis-
poser d'une manière encore plus parï'iite,
car trois mois avant que de mourir, il de-
meura caché dans sa cellule du couvenl du
Plessis-lez-Tours sans se communiquer aux
hommes. Ce fut le jour di^s Uami'aus. de l'an
1307, ou sur la fin de l'an loOG, comme l'on
comptait alors les années en Fiance, qu'il
lut attaqué d'unL- fièvre qui devait terminer
sa vie mortelle. 11 ne \oulutpas néanmoins
qu'on eût aucun soin de lui, ni qu'on lui
donnât aucun soulagement. Le jeudi saint il
asseoibla, selon l'ordonnance de la rôg'e, les
religieux dans la sacristie, qui tenait lieudj
chapitre, pour leur recommander l'aniourdc
Dieu, et la charité entre eux, la fidélité à
leur règli', et principalement l'cxaclitudo
daiij l'observance delà vie quadragésimale,
qui les distingua. t il'avecles autres religieux.
De là il se fil conduire à l'Eglise, où, après
s'èire eoafessé, il recul la sainte em jiarisliu
en la manière que ses religieux la reçoivent
ce jour-là, c'est-à-dire les pieds nus et le
coi duu au cou. On le reconduisit ensuite à sa
• cllule. appuyé sur les brns df ses r(>li;;icux.
l'n Flore lui ilciirinil.i s'il voul.iil qu'on lui
l.ivâl les pieds l'aprosiliiiée, suiv.iiu la coi-
liiino de riî;,'lise, il lépondil ijue imn, m.iis
^! • bicno.N.NAiiu; Dts or.ui'.LS ullu;ii:l'\. 002
feu par des calholiiiues zélés, qui se inêlè-
reiil pjniii les soldais rahlnisles dans la
cliambre où se rouiineltait le sacrilégo ; ol
r- ,---,- ,„ „ dans la suite des lc;iips ils furent distribués
pie le Inidernai 1 on ferail de son corps te à diverses églises,
que l'on voudrait. Kii eiïel, il m lunil le len-
dcm.iiii, qui él.iit le vcndr.ili saint, deuxième Le saint fondalc'.ir ayant nommé, quelque
j )ur d'avril. L'uiiinion commune o>l que ce temps avant sa mori, pour vicaire général en
saint avait pour lors [)rès de. (]u;i;re-vinf;t- sa place jusqu'.iu pre uier chapitre, lo P.
onze ans. Le I'. (liry, provincial de son ordre Uernardin de Cropu'ato, provincial de la
en la province de France, a fait voir, dans province de Touraine, celui-ci indiqua le
une disserMIion qu'il donna en 1(580, que ce chapitre général pour le mois de déc nibro
sentiment devait élre. suivi plutôt que celui de la même année l.'iOT. H se tint à Rome,
du P. Papebrocli, qui dit (ju'il n'avait que et le P. François liinet, pour lors correcteur
soixante-neufans, l'ayant fait nailre en r;38. du com cnt dé la Trinité à Home, y fut élu
('e savant .lésuile s'est ensnile rendu aux {léuéral le premier janvier 1508. L'ordre
raisons du P. (îiry, cl le P. l'érimi'z/i, aussi était pour lors divisé en linq provinces, qui
de l'ordre de< .Minimes, qui a donné, comme étaient celles d'Italie, de Tours, de France,
nous avons dit, la \ie de ce saint, y a joint d'Espagne et d'.MIemajine; mais co orne l'or-
l.i disserl.ition du p. (iiry, cl n'a pas manqué di'e s'e^t si fort multi|iiié dans la suite, qu':l
il-.> rapporter la rétractât on du P. Papebrocli. a présentement environ quatre cent cin-
Lccops do saint François de Paule lut quante couvents, il est divisé en Irenl ■ et
I orlé dans ré|;lise de sou couvent, où il de- "ne provinces, dont il y en a douze en lla-
i:ieura pendant trois joars sans que l'on (lût lie, onze en France et en Flandre, sept en
l'enterrer, à cause de la faraude afducncc du l'-spaijne et une en .\llemagne. Ces religieux
peuple qui venait pour le voir et l'honorer; ont même pissé dans les Indes, où ils ont
el il ne fut mis en trrre i,ue le lundi de Pâ- «luelques couvents qui ne composent p.is de
qui's. La durbesse de lio'.irbon, lille de Louis provinces, et qui relèvent immédiatement
XI, et la comtesse d'Anj;oulénie, mère du du général, aussi bien (pic les couvents de
loi François!", ayant appris qu'on l'avait ' " ' ■ — -
la Triiiilé du mont Pincio, de Saint-François
de Paule, el de Saint-François delli' l'raite
à Rome. Dans ce premier chapitre gé éral,
aii.,,i,.l I, ..>'>,•, i;.«.il .1.. C..../....r,l. „ .1.. I* 1^..
mis en terre, n'en farcit pas contentes, à
cause principalement que ce lieu étail fort - -■ ..- , , ^. ......
humide et sujet aux inonda'ions de fa rivière auquel le cardinal de Senogalia, de l'ordre
du Cher; c'est pour(]uoi elles obligèrent, le 'les Mineurs, présidait en l'absence du car-
ji'Udi suivant, les religieux de le lever de dinal Carvajal, protecteur, il fut ordonné,
terre: il fut encore exposé (ilusieurs jours sur la difficulté (juc quehiues-uns faisaient
sans se corrompre, et on le plaçi ensuite An recevoir la règle de saiiil François de
dans une grolle de maçonnerie, bien vofitée Paule cl de se soumettre au vœu de 1 1 vie
et ornée, qui fut faite au fond de la cba|ielle quadia;;é>imali', que ceux qui s'y oppose-
que l'on avait cho sie d'abord jiour le lieu r.iienl «-l ne voudraient point accomplir ce
de sa sépulture. L'on commença dès lors à V(cu, seraient privés de tous droits de suf-
rédanier son intercession el à lui farc des frages dans les élections: ce (lui produisit
viL'ux pour obtenir par son moyen les fa- "" bon effet, car tous les vocaux se jetèrent
veuis du ciel. On travailla i eu de temps aux pieds du ca dmal et lircnl de nouveau
après, même du régne dj Louis XII, et sous profession entre ses mains de la quatriènuî
le ijonlilicat d- Jules II, à faire des informa- règle de saint Fr. niçois de P.uile et du vœu
lions juridi(|ues des .clions saiiites de sa vie il': i-'i vie quadragé^imale. D'abord les géné-
cl de ses miracles. Qielqnes-uns veul ni raux ne lurent (jue pour trois ans, et ils
que sa béatilicalion ait été faite le 7 juillet commencèrent à i'étre pour six ans en IGO.J,
I.)I3, mais on ne laissa pas de poursuivre P"i" autorité du s.iint-siegc. Le premier qui
depuis les mêmes procédures en France, en exerça col olli e pendant six ans fut le P.
Calabre, et dans les autres endroits où Ion Etienne Augi r, Franrais, (jui fut élu dans
savait (lue le saint avait été. Ce fut le pipe le cha|)ilre général qui se tint aliènes, et (|ui
Léon \ qui le canonisa en 1511). Son corps était le Irente-lroisième (pii s'était tenu dans
fut conservé précieusement dans l'église de l'ordre. Ceux qui ont droit d'assister à ces
son couvent du Plessis, jus(iu'à ce que, l'an chapitres généraux sonl le général, les col-
1502, 1. s huguenots (|ui mettaient la Fr.ince lègues généraux, les provinciaux, le zêleur
en combustion y ét.inl entrés les armes à la ou procureur général, seulement qu.ind le
main pour le saccager, comme ils avjiient ('h,i|)iire se tient à Rome 'm aux environs.
lait en divers endro Is du roy.'iuine, tirèrent Les vocaux des chapitres provinciaux qui se
son corps du tumbe.iu où ils le trouvèrent tiennent Ions les trois ans sonl les provin-
< iicore ci.uverl de sa peau, i|uoiqu'il y eût ci.iux. les collègues, les correcteurs cl un
!).j ans qu'il fùi morl, le IrainèrenI, revêtu de commis de ch upie province. Il y avait autre-
ses habits comme il et.iit, avec une corde fus (|uatre vigiles ou visiteurs génér.ius,
<|u'ils lui mirent au cou, dans la rhambic (jui étaient élus dans les chapitres généraux
'îestinée pour rerevoir les hôtes cl l'y lirù- et (jui'.ivaienl ilroit d'y assister, aussi bien
li'rcnt avec le bois du grand crucifix de l'é- q le les collègues provinci.iux el deux coin-
glise (ju'ils avaient .inaché. Ses ossements mis de cb.iquc province, m lis les vigiles ont
furent né.inuioins pour la [duparl retirée du élc supprimés, cl Icj collègues pruvinciaux
093
MIN
n'y nssislonl plus, (Ikkiuo proviiirp y en-
voyant s(!ulemonl un coniiiiis.
Nous avons tlil qufi lu rrylL' de saint Fran-
çois (!o Paul- conlenail dix ciia|)ilr<'s; cl'e
commence par l'observance des préceptes
et des vœux. Ainsi, tous les fièi es observe-
ront les commaniicmcnis de Dieu et les pré-
ceptes de l'iiplise. Ils rendront obéissance au
pape, cl prrmKttront de garder jusqu'à la lin
(le leur vio les vœux d'obi'issance, de cli.is-
Iclé, de pauvreté et de la vie quadra^ésimale.
Ceux qui voudront entrer dans l'ordre ne
pourront y être reçus (ju'en qualité de frères
clercs, de frères lais, ou de fières oblals,
et demeureroMl tout le res.te de leur vie dans
l'état de leur prc.fession. L'habit des frères
clercs et des frères liis sera long jus-
(;u'aux talons, d'une éto'.îe vile, di- laine u i-
lurellcnient noire et sans teinture. Le cha-
peron sera aussi de la même couleur, et des-
cendra devant et derrière jus |u"au iiiilii u
de la cuisse ou à peu près (Ij. Ils auront ea-
core une ceinture de laine de scn)blalile cou-
leur, nouée de cinq nneuds, et ils ne pourront
jamai. ni jour ni nuit quitter le cordon, ni
l'baldt, ni le chaperon. Ils se serviront à
leur choix do soc [ues on de siiidaies, fa tes
de génois eu de feuilles de palniier, ou de
paille, ou de cor le, ou l'e jonc, ou bien ils
pourront se servir de souliers ouverts par-
dessus, si ce n'est qu'une pressante iséres-
silé ou la di.;pense des supérieurs ne les
exempte d'yller nu-pieds : il y a plus de cent
ans que cetic dispense leur a été accordée,
it ils sont piésenlemcnl chaussés.
Quant aux oblats, ils auront un habit de
la même couleur, qui n'ira que jus.iu'au
gras de la jambe ou environ et ne descendra
pas plus bas. Ils auront aussi un cordon
noué seulemcnl de quatre nœuds. Ils seront
chaussés, et porteront un ch.ipeion Isonni'le
avec sa cornette, ou bien un bonnet décent
et commode, suivant que la qualité du pays
le requerra. U sera permis à tous les frères
de porter sous leur habit, selon leurs besoins,
des tuni(iues de ule étoffe et de petites lu-
ni(]ues de serge, comme aussi des hiuls-de-
rhausses et des bas-de-ch.iusses raisonna-
blement étendus sur les gcmux. Ils pourront
encore i-e servir i leur volonté d'un man-
teau qui sera de la couleur de l'ha'jit, au-
quel sera attachée une cuculle propre à cou-
vrir la tête, laquelle cueulie srra courue
par derrière. Les oblats se servi, o t à leur
discréiion, tant au dedans qu'au dehors du
couvent, d'un petit manteau fermé t!e la lon-
gueur de leur habit ou environ, sans cipui e
ni cuculle. Us pourront tous dans les voya-
ges se servir, avec la permission du correc-
teur, d'un âne pour monture, et au défaut
d'une, le correctoire leur permet de se servir
de mulets et même de chevaux, s'ils ne trou-
vent point de mulets.
Les l'ières t;ui auront été reçus pour le
chu'ur suivront eu tout l'ordre et le calen-
drier de riiglise rotnaine, et s'acquitteront
des ollices ditins, eu observant toutes les
(!) Vcy , à h fin du vol., ii"^ 21,'i el2.G.
MIN 9,0.i
cérémonies, selon l'usage de la même Kglise.
Les frJ.es convers diront pour lo.iiines
trente fo's l'oraison dominicale et la salu-
tation angélique, dix pour laudes, douze
pour vêpres, ajoutan; aux dernières saluia-
tions le Gloria /'rt^ i ; et, pour l'olfice des
morts, ils diront tous les jours dix Puler et
autant li'Ave, ajoutant à la fin du dernier le
Requiem atcriumi. Quant aux oblals, ils di-
ront pour matines < iugt Pater, et pour cha-
cune des autres heures cin.] et autant A' Ave,
ajoutant à la fin du dernier le Gloria Palri,
Cl, pour l'olficedes n;orls,ils diront cinq au-
tres Pater tous les jours < t aul.iul i\'Ave,
jijoutant au de: nier le Ileijuicm.
Tous les frères s'.ibiliendr nt enlièrenient
de viandes grasses ou pasca'es; el, pour faire
de dignes fruits de pénitence, ils observeront
la vie (luadragésimale jusqu'à ce point de
ne point manger de chair ni d'aucune chose
qui tire son origine de la chair; et ainsi non-
seulement la ciiair et la graisse, mais aussi
les œufs, le beurre, le fromage, et loules sor-
tes de laitages, et mêm ■ tout ce qui en est
composé ou formé, est absolument défendu,
tant au dedans qu'au dehors du couvent à
tous les frères, t.:nl clercs que lais el
oblats, si ce n'est dans les gr.indes maladies:
car si quelqu'un tombe malade, il doit être
conduilpar l'infirmierdans l'infirmerie claus-
trale, où on doit le secourir avec beaucoup
de soin, le nourrissant des viandes de carême
qui seront les plus propres pour le soulager :
mais si la maladie augmente, il doit être
cou-luil dans l'infirmerie extérieure, bâtie
dans la clôture du couvent, où on lui donne-
ra tous les aliments propres pour rétablir
sa santé, qui seront jipportés par un autre
cndr lit que par le cloître du couvent, qui
doit être éloigné de l'infirmeiie pour le
moins de cinqu;mlc pas, et personne n'y
peut enirersans la permission du supérieur.
Quant aux jeûnes, ils sont ainsi prescrits.
Les Frères c ercs et les lais jeûneront
également depuis le lundi de la Quinquagé-
siuic jusqu'au s imedi saint inclusivement ,
cl depu s la fêle de tous les Sa-nls jusqu'à
Noël exclusivemenl. Us jeûneront aussi tous
les autres jours or.lonnés par l'Eglise, et
tous les mercredis et vemlredis de l'année,
excepté le jour de Noél , quand il arrivera
un vendredi. Pour le, oblats, ils jeûneront
seulement tous les vendredis de l'année,
et depuis la fête de sainte Catherine jus-
qu'à Noël exelusivement , et tous les jours
ordonnés par l'Eglise. Aucun des Frères
ni des oblats ctaiil en santé ne peut être
exempt du jeûne, ^inon dans les voyages;
néanmoins les su|iérieurs peuvent, [our de
j isles raisons, dispenser les uns et 1 s autres
de chacun de ces jeûnes en particulier.
L'exercice de l'oraison leur est recom-
mandé, et, afin qu'ils aient plus de f.icilitc
])our b'y adonner, ils doivent garder l-
si encc en tout temps d;ins l'église , dans
le cloitre , dans le dortoir, au réfectoire ,
durant la première et la sec n 'e table, el
V'Vi
DICTIONNAIRE DF.S ORDRES RELIGIEUX.
996
en lotis licii\ l'oTiiis l'heure de co.-nplies
jusqu'à piliiios (lu jour suivant. Les su-
périeurs o;il le noui de correeteurs, afin
qu'ils se ciirriijenl premièrement eux-uic-
ines, cl qu'eiisuile ils corrisîeiit les .lutres.
Tous les ans, le j:)ur de s.iiiil Michel, ces
forrecicuis sont élus par les religieux de
eliaque couvent, el ne peuvent exercer eet
office que pendant un an , sans pouvoir
.sortir du couvent pendant ce leuips-là , si
ce n'est pour de justes causes, après en
a>oir donné connassa-.ire au (■ha[)itre cl
demandé le consenlemenl des anciens du
cDiivcnl. \'oici la formule des vœux Oe cet
ordre.
Je Frère \. voue el promets à Dieu lotit-
puissant , à la bicnlieiireuse Vierge Marie , à
toute la cour céleste, et à vous, mon révé-
rru l l'ère N. et à ccl ordre sacré , de demeu-
rer ferme , et de l'.ersister tout le temps de
ma vie sous la manière de vivre el la règle des
Frères minimes de Saint-François de faute,
laquelle est approuvée par noire très-saint
l'ère le pape Jules II , après Alexandre ]' l,
d'iieureuse mémoire, aussi pontife de Rome,
en virant avec persévérance sous les vœux
de piiucreté, de cU isttlé el d'obéissance , et
de la rie de carême , suivant les ddtcrmi-
iialions et les circonstances inarquéd et pres-
i rites dans la même règle. Les ohlals ajou-
tent , Et de plus je promets garder la fui
à ce même ordre, et de représenter fidèle-
ment les aumônes qui lui seront faites.
Cet ordre a produit plusieurs personnes
qui se sont ren'ues recommandables par
leur piété et par leurs écrits ; il y en a «u
aussi plusieurs qui ont clé élevés aux di-
i;nilés de l'Egiisi'. Les SI nimes de France
ont donné des évèqucs aux ligliscs de .Mar-
seille, de Màcon et de Riez. Louis d'Allichi,
évéque de Riez, religieux du même ordre,
en a ilonné une Hi^ioire en Iran.-ais ; le
P. di' 1 1 Noue, une ClironiqiiC en latin; et
le l*. de Monloïa les .Vnnales en espa<;nol.
Le 1*. 'J'Iiuillier a donné une Histoire par-
ticulière de la province de France sous le
litre de .lonrn.il des rolij;ieux cl religieu-
ses de l'ordre des Minimes de la province
de France et une trailuciion lie la Règle,
du Currcctoire el du (X'rémoni.il, avec des
remarques liis'.oriijues sur ces trois o i-
V rages.
Cet ordre a pour armes le mol Ciiahitas
d'or entouré de rajuns de mène en ch imp
d'azur.
Francise. Laiiovius, Chrnnicon générale
Ord. Minlm. Louis l)oiii d'.Miihi, Hisl.
<;én'rale de l'ordre des Min-.m s. Luc de
.Slon'oi'a, Clironic. générale de la orden de
!»s !\liniiiios. Ilil.irion d.ïCoste. Ilist. Ca-
tliolique. liollanil. .ici. Stnct., lom. 1 Apri-
/i<. Giry cl Itaillel, Vies des saints, i2 Avril.
Ilallazar d'.Vvila, Mauiiiahis Minim. Uené
l'Iinillier, Tra luction de lit liègle, duCorrec-
loire el du Cérém mi il des Hliuimcs, avec des
remarques historiques.
Au dernier siècle, les Minimes avaient à
Home rini] maisons, dont l'une, L'i Trinité
du Mont , api>arlcnail aux Franç.iis. Ils
complaienl six provinces en Fspngne. deux
m lisons à Paris et ce le du ito s de \'ineen-
nes (dont les liâtimenls et l'enclos s ni con-
servés jusqu'à < c jour). L'ordre des .Minimes
a donne en France l'exemple de la soumis-
sion à la IJuUe Unigemlus et s'esl attiré ca
conséquence la criiique des jansénistes dans
leur tia/elte. Le réfecioire de la maison de la
Place-Royale, aujourd'hui servant de caser-
ne , élail immense, éclairé par neuf croi-
sées, décoi-é de b;.'lles pei.ilures. La bi-
bli.jliiéque (le ce monaslère élail composée
d'environ 26,000 vol unies, y compris plusieurs
manuscrits. Les .Minimes ont donne aux let-
tres plusieurs celebriléi, el nous comptons,
parmi les Français, les l'P. Niceron. Mer-
senne, Plumier, Avrillon , Le Clerc , De
Coslc, Giry, Monteynard. Le noviciat se
faisait à Paris, dans la 2° maiso i située
à Chaillot el nommée des lions- Hommes. La
dot elail de ItiO) livres. Le géncr.il, à l.i
fin du dernier siècle, était le R. P. Séraphin
Delera. Aujourd'hui ces religieux ont sept
maisons dans les Etats soumis à l'empereur
d'Aulrichi', «omprenant environ 3'i0 indiii-
diis. L- général est le P. Louis C'inli , rési-
dant à Rome. Ce procureur général esl le
P. Gaspird Monlenero. Dans notre dernier
voluriie nous pailerons des elTorts tentés par
le P. .Monteynard, et du succès obtenu par
M. l'alibé licuf p"ur le rétablissement des
Witiimes français. Voyez Minimes au Sup-
plément. D-D-E.
§ II. Des Religieuses de l'ordre des Minimes.
Les historiens français de l'ordre di's .Mi-
nimes se plaignent des historiens espainoN
du même o:dre, de ce qu'ils n'ont donné
que for! peu de connaissance de l'origine des
religieuses .Minimes qui ont pris naissa'ice
en Espagne. Tout ce que l'on en sait, c'est
que don Pierre de Lucena Olit , ne s'elanl
pas contenté d'avoir fondé un couvent de
Minimes dans la ville d'.Xndojar, donna en-
core sa propre maison pour y liâlir un mo-
naslère de religieuses du même ordre, dont
deux de ses peliles-lilles furent les pre-
mières qui y prirent l'habit de cet ordre
en li95. Files le reçuienl des mains du
P. Germain Lionel, religieui français , que
saint F'r.inçois de Pauie avait envoyé en
ce royaume avec quel;|ues autres pour y
établir son or. Ire. H est cert.iin (ju'il n'y
avait point piur lors de règles pirlicnlié-
rcs pour ces religieuses , et que ce ne fui
(lu'en IJiOG, c'est-à dire au le;nps que le
saint fondateur changea quelque chose de
la prc;nièrc règle pour les religieux, (|u'il
songea ù en donner une aux religieuses.
En efTel, par l.i lettre qu'il écrivit au pajie
Jules II la même année, il lui témoi};na
qu'outre la règle d.- ses religieux qu'il a
beaucoup perfectionnée . el celle pour les
personnes de l'un et l'aolrc sexe qui vi-
veoi dans l<' monde, il en a comjiosé une
troisième pour des religieuses.
Le P. .lean du R >is, aussi Français, qui
fui le premier directeur de ce monastère,
901 M N MIN 9tl>>
ol Ifts autres qui lui succédèrent , les !ji)U- tluj.ir, dont on ait connaissance, est celoi
vernèrenl apparemment jusqu'à ce temps- dn Xérès de la Frontéra , (;ni fui fondé
là sur la première et la sccondi» refile, l'an 1524. Il se fit i nrorc d'autres étaldis-
autant que leur sexe le permettait. Saint soments en Espagne, comme à Archidona,
Fr.mçois de Paule, pour marquer son al- Baïza , Con'oue, Séville, Fnentes de Léon,
feclion envers cette nouvi Ile colonie de Anleiuera et autres lieux. Ces reliy;ieuses
vierges, leur envoya à chacune en loOii l'urenl inlioduiles en Sicile par Hector Pi-
un chapelet, qui était le présent ordinaire gnateili, qui en élail vice-roi, et qui, no
qu'il fils. lit à ses amis et aux l)ienf.,ilcurs se conlLiitiint pas d'avoir fondé un cou-
de l'ordre ; il n'y av;iit pas pour lors plus vent de religieux de cet ordre à Paler-
(le huit religieuses dans ce monastère. L : me , voulut être aussi fond iteur d'un cou-
P. de la Noue, dans ses Chroniques de l'or- vent de r. ligieuses Miniiiies qu'il lit lia ir
dre, reinar(iue que ces chapelets étaient do en 1532 dans la môme ville, et qui dans
gui de cliéne qui, élant travaillé autour, la siiiie est devenu plus considérable par
représente de tous C('>té-. une croiv enioiiree la libéralité et la magnificence de Plil-
de rayons : ce que les écrivains cspagn Is lippe 111 , roi d'Iispagne. Enlin, en lu2î,
de ce môane ordre ont publié comme une il se fit un éUiblissemcnt de ces religieuses
merveille, quoiqu'il n'y ait rien que de esi France dans la ville d'Abbeville; la Mère
naturel; il csl vrai qu'ils produisaient des lîabrielle Fouquart en fut fondatrice. Elle
effels admirables et miraculeux, priiicifja- était fille de François Fouquart , receveur
lenienl dans la guérison des malades; niai'i des tailles de la même ville et de Marie
c'était en vertu de la hénédirlion qut^ le Gaisier ; elle avait toujours eu dessein d'être
saint leur donnait en conséquence du pou- leligieuse, mais après la mort de sou père,
voir qu'il en avait reçu du pape. Ces icii- ayant été obligée d'obéir à son oncle, qui
gieuses avaient été jusque-là sons l'obéis- avait conclu son mariage avec un homme
sance du correcteur des Minimes du cou- veuf qui était fort riche, on la maria à
vent d'Andujar, mais le saint fondateur les l'âge de vingi-six ans. Deux ans après, son
mit sous celle du provincial d'Espagne. t\\iri étant mort, elle résolut du quitter
La règle qu'il leur donna est peu dilTé- le momie. Elle fut la première qui reçut
rente de la quatrième qu'il donna aux reli- l'habit du Tiers Ordre de Saint-François'de
gieux , ne s'y trouvant point d'antres chan- Panle à Abbeville en IGOl, et fut pendant
gements que ceux que la diversité du sexe vingt ans correctrice de quelques filles el
a nécessairement obligé d'y faire: les mè- femmes séculières de ce Tiers Ordre. Elle
mes vœux , les mêmes jeûnes , les môuies vécut quatorze ans en communauté avec
observances du silence et de la modesiie y quelques tilles dévotes qui avaient fait aussi
sont ordonnés, et ce sont partout les mé- profession de ce Tiers Ordre, el e.le em-
lues termes, excepté lorsiiue ce sont des ploya ce temps-là à traiter de l'élablissc-
règlemenls [iropres pour des filles el ()ni luent de religieuses Minimes; mais les re-
né peuvent pas C')nvenir aux hommes. Ou li^ieux. s'y opposaient toujours, el ce ne
ne voit point qu'on ait parlé de celte rc- fni que l'an 1G21 qu'elle ob int le con-
gle dans le piemier chapitre général qui scnloinent du P. Uivôre, pour lors visi-
se tint à Home eu J507, elle y fut néan- teur général des iMinimes , qui la reçut
moins reçue avec celle des religieux , puis- pour être religieuse du second ordre, lui
((uc la même bulle approuve l'une el l'an- d .nna le voile el à treize autres fill s de
trc. Tous les m •na^lères des religieuses sa communauté, après en av ir obtenu
Minimes qui ont élé fondes dciiuis ce temps- la pcrm ssion de l'èiêque d'Amiens : quel-
là , tant en France qu'. n Lalie et en Espa- qaes religieux du même ordre y formè-
gne , l'ont été sous l'obligation de celle reiil encore de nouvelles oppositions , mais
règle, qu'on y a toujours observée fort etac- <'l'es furenl enfin levées par le pape (îré-
lement : la différence qu'il y a enire les goire XV, {\u\ érigea celle maison en mo-
rorreilrlces de ces religieuses et les cor- nas'.ère par Uiie LiuIIh du 10 juin de l'an
recteurs des rcligi:'ux , c'est que les cor- 1C23. Elles fir(nl profession en 162'i. en-
rectrices ne sont élues que tous les trois Ire les mains du P. Nicolas Lesguillier, qui
asis, et que les correcicurs doivent être avait élé commis à cet effet par le car-
élus tùus les ans. diual lîippolyle Aldolirandin , protecteur
Le second monastère de religieuses ^ii- de l'ordre, et par le P. Cyrille Gamarl ,
nimcs fut aussi foinlé en Espagne, à Gia , pour lors général. La Mère Fouquart fut
au diocèse de Séville en 1509; mais les établie correctrice de c' nouveau monas-
(larmes s'élant opposés à cet établ ssemesil , tèro , i;ù, après avoir encore vécu plu-
à cause que ce monastère élail trop procbe sieurs années dans les e\erciees de pieté
d(,' leur couvent, cl que par un de leurs et de mortificati.n , elle mourut sainle-
[uiulégcs on ne peut bâtir des maisosis re- mont en 1839. Il s'est fui depuis un aulre
ligieuses qu'à une distance de près de cent élablissenient de ces religieuses dans la
quarante toises de leurs couvenis , ces reli- v lie de Soissons.
pieuses îMininies furent transférées ailleurs ; Comme, dans le temps que l'on faisait réta-
mais le; historiens espagnols ne font poiut blisseuient du uionaslére d'Abbeville, le P.
mention du lieu où elles forent tiansié- Louis Ojni d'Aliichi, depuis évéïjue de liiez,
rées. I^e plus ancien inonaslère de cet or- écrivait son Histoire générale de l'ordre des
dru au même royaume, après celui d'An- Aiinimes . il n'a pas parlé des rcligicnsi s de
!\f)0 mCTIONNAlIlE DF.S OUDKKS lU'Llf.lECX. 1000
col or.lic cil Franco, mais il adonné lis Vies l'usage di- IT-iilisi' roiii linc, rt ceux qui ne
(li^ (luolques rcl pieuses cs|iai;iio!fs et ila- soiil pas obligés do rériler le hré» i.iire doi-
lii>nn«s (|iii sont niorlis en répiilalion di- sain- ^ rnl iliro pour malincs srpl Putei a autant
lolé. Il (iil (|u'ca l'année (lu'il écrivait , ijui d'Ave, srjil pour laudes, cinq pour vêpres et
éiail en loâj , il y ai ail trois cents religieu- trois pour toniplies et pour i liacune di-'* au-
>es de cet oidrc en onze couvcnls; ainsi a»cc Ires heures, ajoulani au dernier le (ilorix
les deux d'Ablieville et celui de Soissons, il l'alri, et Ions les jours ils doivent dire ea-
V aurait quatorze nioiiastèri s de relijjienses corc tniis autres l'a'.er et autant d'.iie pour
Minime». Leur liali.t est semblilile a celui les défunts, et à la lin du dernier le liequiem
(les religious de cet ordre : nous eu donnons œterimin. Ils doivent s'accuserdc leurs péchés
deux CNlampes. dont l'une représente une de aux confesseurs qui leur sont assignés par
ces religien.>.es sins iiKinleaii et l'autre en le correc eur général île l'ordre des Minimes,
inan'.eau et en habit de tbieur (1). et communier le jeudi sainl , le jour de Pà-
l'rancisc. Lanoiius, Chronic. ijeneral. orcl. ques . à Noël , à la l'enlcc'ite et à la fête de
Miniiii. Lou'S Uoni d'.Ulielii , IJist. (jéiu'ra'c l'Assoniplion de Nolrc-Dame. Ils assisteront
de l'ordre dis Miitime.t. Lucas de Alontoïa , a la messe avec beaucoup de respect cl payc-
Cronicii gênerai de la onien de lus Dlinimos. ronl les dimes ()u'.ls dniveiil à leurs curés,
llil.irion de Cosle, Eloijes des Dames illustres, Ils d ivenl fuir le ii.oadL- et les emplois des-
lom. U. Ignace de Jési.s-Marii>, llist. d' Ah- lumnétes, éviter les festins et 1. s vanités du
bevxlle, cl Kené Tbuillier, Tiadiiction desr'- siècle. L'abstinence de \ iando leur est oïdjii-
(y/f.<, currecloire el cnétitonial des Minimes, née depuis la lèic de sainte Luce jusqu'à Noél
ivec des rciiifirques Itisioriques. escluM»emeni, cl Ir is jours avanl les qua-
, _ , Ire jours de communion prescriis [)ar 11 règle,
.MIM.MLS (1 lEi'.s Ohdhi: uks). .^^^^- ,,ip„ ^j,,,, ,y,,^ ^^^ mercrod s de l'année.
Le T. ers Ordre des .Minimes pour les pcr- Les confesseurs peu\e:;t neaamoins dispen-
sonnes de l'un el l'autre exe (jui vivent dans si r du jcûi'c el île l'abstinence ceux qu'ils
le monde avait élc établi par sainl l'rançuis j"i?cnt à [)ropos, el peuvent changer ces j 'û-
ne l'anle dans la (lalabre, loiigtemps av.-uU ics en d'auires (rn\res de piété. On accorde
qu'il vînt en France, car, p:'.r les piocès faits aux Frères el aux Sicurs la Lberlé d'obser-
111 Italie pour sa canonisation, l'on voit qu'il vei- la vie (luadragésimale , s'ils ont assez de
recevait des personnes séculières en cc;le ferveur pour la pratiquer. Les vêlements
congrégation, et qu'il leur donnait le petit exiérieurs seront, selon leur étal et 1 ur con-
c ir Ion , qui est 1 1 mar()ue de cet ordre. Le dition , enliéremenl ou presque semblables
procès même qui fui fail à Aliilie porte que, pour la c .u'eur aux habits des religieux .Mi-
lorsqu'il y passa pour aller eu France, il y ninns. Les Frères el les Sœurs lecevronl
laissa une-communauté de Tierciaires, au avec dévolion di s correcteurs de l'ordre, ou
nombre de dix-sepl, qui avaient pour correc- de quelqu'un coniiiiis (lar eus, un cordoi»
Iricc une S;rur nommée i'i'rnc, et pour con- noue seulement de deux mpuds. et apiès un
fesseur et directeur un prêtre qui s'appelait temps cunveu.ible , s'ils désir, ni persévérer
Serr.i, qui était aussi de ce Tieis Ordre. Mais dans l'observance «le celé règle, ils feront
il ne paraît p.is que s.iint Franeois de l'aule aussi profession entre leurs mains. Us peu-
ail dressé en Italie aucune règle |)our le gou- veul dès le b,is âge recevoir le cordon, mais
vernemenl et la direction de ce Tiers Ordre, la profession m' se d il faire qu'à l'âge de
Les buiis exemples de sa vie el les I cens (luinze ans. iMilin, pour l.i conduite de celic
spirituelles que lui el ses religieux faisaient congiégalion de fidèles di' l'un el de l'autre
assidiinient a ceux qui se rangeaient sous sa sexe, les pro» inciaux de l'ordre des Minimes
conduite, leur lenanl lieu de règle cl de sta- ou les siipér. cars m.ijeurs lui assigneront en
tuls jusqu'à ce (,ucn(in,cn laOl, l.irsqu'il chique lieu un correeleur ou une correctrice
relouiba la règle qu'il avait fai e pour se* qu'ils pourront eux-mêmes changer toutes
religieux en 1 V'.I.'J , il en fil en même temps les fuis (ju ils le jugeront à propos. Ces cor-
une pour son Tiers Ordre dont il obtint l'ap- recteurs cl «orrictrices doivent s'appliquer
probalion du pape Alexandre \'l , l'année de tout leur pouvoir à assou| ir les procès et
suivante lo02. Cette aiiprcbalion fui reno i- les disputes qui peuvent naire enlre les Frè-
velée par le même pape, de lavis el du c mi- res 1 1 les Su; irs, et à les remetlre p.ir ciia-
sentementdes cardinaux en suite de quel(|ues rite dans la piix el dans l'union d'une ami-
changements (juc le sain! fit à ses règles, el, lié sincère. Ils doivent tous avoir un grand
l'.iiinee loOd, elle le fut |dus solennelleuient aoicur les uns pour les autres et ne pont
par le pape Jules II, qui, joignant en emb'c roujîir de s'appeler muluelleinenl Frères et
Il règle des religieux, celle des relii;ieuse> et Scrnrs, et comine tels ils doi»eni se v siter et
celle du Tiers Ordre, et n'en faisant qu'un se consoler les uns les auties d.iiis leuis r.f-
corps, les confirma toutes par une même fiiclions, leurs adversilés el leurs maladies,
liullc. \'oilà en abrégé la règle que saint François
Celle règle du Tiers Ordre des Minimes de 1'. iule prescrivit aux iières el aux Sœurs
• onlieni sept chapitres. I^lle ordonne aux de son Tiers Ordre. Nous avons dit que l.i
Frères el aux Swînrs l'oliserviincc des com- marque de cet oïdie est un cordon noué île
mandements de Dieu et de l'Fglise. (^eux {jui deux nieuls. tjuoique la ressenibl inre que
sont clercs doivent réciter l'ohicc diuii selon leurs habits doivent avoir avec ceux tic» leli-
(I) Vuy., i.l5finilu\ol.,ir' liiV VI 248.
<0C1
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1C02
gieux Mimmps no soif que par r.ippnrl à la
couli ur t't mm pas à la form;-, il j a néan-
moins (lis pays ou les Ticiciaires de cet or-
dre s'Iiabillenl (li< nicino que les Frères el les
Sœurs de ce même ordre. Ils fonl profession
en ces termes :
Je, N-, promets à Dieu lout-piiisscnl el à
toute la c ur céleste el à tous, mon révérend
Père N.. d amender de plus en plus mes yiK/'urs
et ma vie et d'observer autant que je le pour-
rai les préceptes salutaires de la rèi/le des fidè-
les de l'un et l'autre sexe, lie l'ordre des lili-
nimes, confirmée par notre saint-père le p:pe
Jutes //, el d'obéir mir successeurs de saint
François de l'aule, les currectiui's généraux
de cet ordie des Minimes, et de suivre les bons
conseils et les instructions de ladite règle , el
de procurer Vlionnew et l'utilité dudit ordre.
J'Jn foi de quoi foi signé et marqué de ma
main ce présent écrit pour témoignage de ma
profession, en ce couvent des Frères Minimes
de N., elc.
L'an 1531), quelques filles de ce Tiers Ordre
qui vivaient en commun dans la ville de To-
lède en Espagne depuis environ cinq ans,
dans une maison particulière d'où elles ne
sortaient que ] our aller à l'Eglise entendre
la messe et recevoir les sacrements, voulu-
rent changer leur maison en un monastère
et faire des vœux solennels sous la troisième
règle des Minimes. Elles s'adressèrent pour
cela au cardinal Pucci,prolecleur de l'ordre,
qui, approuvant leur dessein, parla au papa
Paul III, qui érigea celle maison de Tterciai-
res en un monastère sous le liire de Jésus-pl-
Marie et i'obscrvaHce de la troisième règle
des Minimes de S.iini-François de Panle, leu^
permettant de faire les vœux solennels de
cliasleté, pauvreté et obéissance, et leur ac-
cordant tous les privilèges dont jouissaient
les religieux et relif;it'uses du premier eldu
second ordre. Ces religieuses, quui(|ue a|)-
prouvées parle pape, ne purent jau)ais obt'-
nir le consentement lies supéricui s de l'orde
pour y être reçues sous leur juridiclion. lilles
présentèrent d'abord pour ce sujet tine re-
quéle au chapitre général assemble à Frèjus
rn 1-Ï47; mais leur demande ne fut p dut ac-
cordée non plus que dans les (hapiires gé-
néraux qui se tinrent encore à Fiéjus en
1336, et à Valence en 1561; quoique la reine
d'Espagne , Isabelle de France, s'intéressa!
pour elles, lout cela fut iîiutiie. Cette prin-
cesse les faisait subsister par ses aun ônes,
mais après sa mort la ville se voyanl cliaigce
de ce soin, ilcnianda au cardinal do (Juiroga,
Jirchevé(iue de Tolède , d'en éire docliargée.
Ce prélat transféra ces lel gicuses, do leur
coiisenlenient, dans nu aiiirc uionasièrc ap-
pelé Noirc-D.iuie de la SJIanclie. où elles de-
nirurèrcnl quelque Icnips avec l'baljit île Mi-
niu:es , et Cirent un si grand progiès dans la
verlu (lUe quelques-unes d'enlre elles soat
mortes en odeur de sainteté. Ce. sont les seu-
les rcligieus"s Tierciaires qu'il y ait jamais
ou dans cet ordre, (jui ayant été abolies à
cause de leur grande pau\relé, n'onl jam.iis
<'lé rétablies : ainsi le Tiers Ordre des iMini-
n;es ne comprend (|ue des personnes sécu-
f'îCTKlNNAIRE DE'i OrDIIES BF-LIGICUI^. II.
lières de l'un et laulre sève parmi les(jucl!es
il y a eu le bienheureux Grâce de Valence.
Les Minimes prétendent ((ue Louis XI, Char-
les VIII et Louis XII, rois de France, étaient
de cet ordre aussi bien qiC saint François
de Sales, évê;jue do tjenève.
Francise. Lanovius , Chronicun générale
M inimomm. Louis D(mi d'Atlicbi, llist. Gê-
ner, de l'ordre des Minimes. Lucas de Mon-
loïa, Chronic Gêner, de la orde i de los Mini-
mos. René 'l'huillier, Traducli n des règles,
correctoire et cérémonial des âlinimes avec
des remarques listoriqucs. François Giry,
Préface de la règle du Tiers Ordre des Mini-
mes ; et Baltazar d'Avila, Manipulas Mini-
morum.
MINISTRES DES INFllMES (Hlercs Uégu-
i.iERs), appelés aussi du bien-mourir, avec
lu S'ie du vénérable P. Camille de Lellis,
leur fondateur.
Voici un ordre dont la fin, selon l'inten-
lion du fondateur, cla t de rendre au pro-
chain toutes sortes d'offices de miséiicoide ,
tant corporels que spirituels. Les religieux
de cet ordre ont même jcndanl quelque
temps eu le soin des hôpitaux, donnant aux
malades toute sorle d'assistances en leur
administrant leurs besoins, leur donnant à
manger, faisant leurs lils, les nettoyant ei
faisant à leur égard les fondions de servi-
teurs. Mais les nifîèrends qu'ils ont eus ave
les administrateurs des hôpitaux donT ils
avaient le soin, et dont le plus souvent ils
voyaient employer bs revenus à d'autres
usages qu'aux besoins des malades, leur ont
fait abandonner le soin des hôpitaux pour
s'appliquer uniquement à la visite des ma-
lades, s'obli^eanl p ir un quatrième vœu de
leur donner toute sorle d'assistances spi-
rituelles it (le les assister à la mort, méuic
dans le teu.ps de pete, ce qui leur a l'ait
donner le nom de Minislrcs des infirmes eu
du bisu-mourir , comme on les aprc.le ei;
Italie.
Camille de Lell s fut l'instiluleur de ce
saint ordre. Il naquit à IJuechianicu , petit
bourg de la proiiaca de l'Abruzze dans le
royaume de Nap!cs et du diocèse de Théate,
le -23 mai 1550. Son père qui était boiiime
d'armée négligea l'é iucation de son (Ils, dont
la naissance avait été en qucb|ue façon mi-
raculeuse, puisque sa mère ne l'avait mis au
monde que dans une extrême vieillesse, et
lorsqu'il n'y a»ait aucune appa cnee (ju'elle
dût avoir d'cnfanls, plusieurs années s'ètant
même écoalées depuis qu'elle avait encore
mit; au monde un auire g;iiçon, (jui mou-
rut en bas âge. A la \éiité Camill' fut en-
\oyéauii écoles, mais lout le progiès qu'il
y fit fut d'apprendre à peine à lireel à écrire,
ne s'appliquanl qu'à jouer couliiiuellement
aux cartes et aux dés.
A l'âge (le dix-buil ans, il suivit la profes-
sion des armes comme son père, qui voulu!
lui l'aire faire sa première campagne au ser-
vice des N'énitiiMis, qui étaient en guerre
jiour lors avec les 'l'urcs. Comme ils étaient
à Ancônc sur le point do s'embarquer pour
;:2
«005 DICÏIUNNAIHE DKS OKhllES KELIGIEIX. Ji fi;
I.,i»<pr à Venise, ils lombèrenl tous doux tirninle misère. Les c.ipucins de la ville cic
«i;in^ercuseiiionl malades, te qui leur fil M. iicrédoiiia auxquels il demanda la iharili',
.ibanil 'nner ce dessein; el lorsqu'ils eom- en ayani eu com|iassii)n, lui donnèrent (juel-
inencèrenl à se mieux porter, ils prirent la iincs morceaux de drap de la couleur de
lésolnlion du relouiiier chez eux; mais à h'urs h ibils pour le revêtir; et comme ils
peine furent-ils arrivés- à S.iint-Lupidien faisaien' travaillera la construction de quel-
|. roche I.orelle, que le père de Gimille , se ques édifices, Camille s'engagea à y servir
sentant iilus mal, ne put passer plus avîinl et de mand-uvi e, dans l'espérance de gagner
mouiul qni'l(]ues jours après, ne laissant ()ur|(|ui' argent pour se mettre un peu à Ta-
peur tout bien à Camille i|ue l'épèc et la bri ile> rigueurs de la saison et retourner
cape ( coiiinie l'on dit ordinairement). Sa ensuite à la guerre au printemps, si l'occa-
mère é'.ail morte aussi ((uelques années au- sion s'en présentait, sans perdre l'inrlinalion
paiavant, ce qui augmentai! son chagrin, el du jeu, (|ui éiait si forle qu'il j .ua un jour
pour comble de malheur, il lui \inl un uleè- jusqu'à sa chemise.
re à la jambe gauche, qui fut à peiin' ;;ucri. Le séjour que (Camille fil chez les capu-
qu'un autre plus grand et qu'il porla lonle cins fut un clïct de la Providence divine ()ui
sa vie parut à la jambe droite. Il continua voulaii le f.iire rentrer en lui-nié liC el l'at-
ncanmoins son chemin el passa par Feimo, tirer à son sirvice. L'hiver ne se passa pas
«)ù il fil quelque séjour à cause d'une petite sans qu'il fil réllcxion sur sa vie déréglée, il
lièvre donl il fut travaillé pendant quelques enfui vivementlou lié, ellil \a'u denlrerdans
jours. l'ordre de Saint-François, pour y f.iire péni-
Ce fut dans celle ville que Dieu qui voulait tence de ses fautes; il demanda avec tant
alliicr Camille à lui, commença à lui faire d'instiinccs l'habit aux PP. Capucins qu'ils le
cimrevoir du dégoût pour le monde. La ren- lui accordèrent, et ils le reçurent en qualité do
contre qu'il fit de iiuelques rel gieux de l'or- Frère lai; mais son ulcère s'él int rouvei I, on
drc de Saiiit-Framois fui ce qui y donna le renvoya. Comme il avait été guéri de (elle
lieu. 11 fut si édifié de leur manière humble, plaie à l'hôpital do Saint-Jacques des Incura--
modeste et retenue, qui n'inspirait que de la blés à Home, il y retourna jiour y servir en-
dévoiion et de la piété, qu'il lésolul d'en'rer core les maladi's. Il s'y comporta d'une autre
dans liMir ordre cl de renoncer entièrement manière qu'il n'a tait l'a t la première fois ; il
;iu siècle. 11 fui pour ce sujets Aquila,où un avait entièrement changé de vie, il était dr-
de &es on. les était gardien du couvent de venu un autre homme, et il fut pendant lu
Saini-noiiavenlure ; il lui communi(|ua sou séjour qu'il fit dans cet hôpital l'exemple des
dessein <t lui demanda l'habit de son ordre; aulri s serviteurs.
mais soit à cause de ses incommodités, soit Après y avoir demeuré quatre mois, et sa
que ce Père ne lui trouvât pas une vocation plaie s'élanl refirmèe, il retourna à .Manfre-
assez forte, il nc\oulutpas lui accorder sa doiiia pour reprendre l'habit chez les PP.
demande; en cITet le temps de sa conversion Capucins (|ui le lui donnèrent piur la seconde
n'était pas encore arrivé. fois et le renvoyèrent aussi quelque temps
Il demeura quebiue temps à Aquila d'où après, voyant ijue sa plaie s'étail encore
il alla à Kome, pour se faire guérir de son rouverte. Camille voyant donc (lu'il ne pou-
ulcère, cl ayant jippris que dans l'Iiôpital de vail être reçu dans ci t ordre, prit la résolu-
i^aiiitJaciiues dts Incurables il y avait d'ha- lion de se consacrer entièrement au service
biles chirurgiens, il se présenta pour y être des malades. H retourna (lour cet efl. l à
reçu au nombre de ceux (|ui ont soin des Uome, il rentra dans l'Hôpital de Saint-Jac-
maladis , dans l'espcrancc qu'eu même ques, et comme il n'y avait pas I 'Uglemps
temps i;n aurait soin de sa plaie ; mais après que l'économe en était sorti, i l q;ie les ad-
y avoir demeuré (juclciues mois, il fut mis minislraieurs avaient cxpèrimenle quelle
dehors jiar l'éconouie, a cause de son humeur était I i vertu de Camille la seconde fois ((u'il
(|i.erelleusi' cl de son inclinatiim pour le était entre, iN lui donnèrent cet emploi,
jiu, qui était si grandi', que, quittant sou- Le vomi qu'il avait fait d'être de l'ordre de
vent le service dis malalci, il soil.iit de ^"aint-Fraiiço s lui liomiail du scrupule, son
riiopilal pour aller jouer. Il y resta iiéaii- esprit n'était point en repos ; c'est pourquoi
moins sur les promesses qu'il lit de se tendre ii se présenta pour la Iroisième fois aux Ca-
plus assidu à son dctoir ; m.iis le maître de pucins afin d'èlre reçu parmi eux ; m lis s. n
l'hôpital lui a\a;it trouvé des caries sous le ucère fut encore un obstacle à sa dem.iiu.'e.
( hcvct de son lit, il lut renvoyé et on n'eut Du an après il postula clu'/. les Cordeliers. au
plus d'égard aux promesses qu'il fil qu'il se- couvinl d'Aracœli à U iine, et la méaie rai-
rait plus exact à rem[ilir ses devoirs. son ayant aussi empêché s;i réception, il ne
Comme la giierreqne les \'èniliens avaient songea plus à Tordre de Sainl-1- rançois. Il
avec les Turcs n'était (las encore tennincc , lui vint en peiisé<; de former une congrega-
el (lu'ils faisaient de nouvelles troupes, Ca- lion de que. ques personnes séculières qui
mille s'enrôla à leur service, l'an lolU». .Mais s'unissent ensemble pour s'employer au ser-
ceite guerre étant (inie et les troupes ayant vice des malades. Cv fut Tau lo82 que cini]
été licenciées, il eut le même sort que les |iersoiines se joignirent à lui pour cet effet,
autres soldats i|ui s'en retournent les mains Ils s'asueinblaient tous les jours dans un pe-
V ides. Comme e'ét. lit en hi<er, (jui! le froid lit oratoire qu'ils avaiiiit dressé d..ns un lieu
était rude, qu'il était presque nu et qu'il n'a- rciire de cel hôpital, où ils se lenilaient tous
\jii point d'argent, il se v.t léduil dans une les jours (lour lairc ciiscmble leurs prièies
W<--> MIN MIN lj.6
et leurs oruisons. Ils ne cli.mgèrenl point sauce, et un quatrième d'a-sisler les ina-
pour cela leurs liahils séeuliers ; mais le ilé- lailes à la mort, uicmo au temps de pesic.
mou prév()\anl le progrès qu(; celte congre- Il leur permit aussi d'élire un prêtre entra
galion naissa.ile ferait un jour, et de quelle eux pour supérieur qui ne pourr.iit exercer
utilité elle serait pour le salut des âmes, son office que pour trois ans, et de eh rcher
lâcha de la détruire dans von couiuienreouMil. des aumônes par la ville. Ce fut eu vi i- u de
Ceux qui présiilaient au gouvernemiMil decet ce bref (jue Ca:iiille, d'une commune voi\
liôp lai, n'ayant pa< assez examiné les iuteii- l'ut élu pour supérieur le vin;,'(icine avril de
tiens de Camille de Lellis, et regardant ce la même année. Iinuiédialemeut après son
qu'il avait fait comme une nouveauté, fiiciit élection, ayant pris un cooipag-iion, il fut
ôîer l'oraloire ; mais la nuit suivante Dieu dans Rome pour y demander la charité-
consola ce saint fondateur, l'ayant evhorié mais comme ils n'étaient pas connus, on les
à persévéri r <lans son cntn prise et lui pro- prit pour des vigab inds el ils ne rappor-
metfaiit de l'aider en tiut. tèrent «elle première fois qu'un pain et (juel-
Camille ayant été console par celte vision, (jues fruits,
résolut déformer sa congrégaiion hirs <le Le cardinal de Mondo\ i, qui aiailohlcnu
l'hôpilal; i prit co.iseil d'un de ses amis qui du pape la cmPir nation de leur congié-'a-
lui dit que tant (ju'il serait dans l'étal séi u- lion, olitint encore un second bref du -Jg juin
lier il n'auiait pas beaucoup de disciples, et de la même année, (|ui leur permeliaii de
qu'il lui couseill.iit de se fiif prêtée. Il mettre sur leurs habits une croix tannée
suivit cet avis, et Camille à l'âge de trente- poor les distinguer de? autres cleics ré"u-
deux ans apprit les rudiments de la langue tiers. Us n'avaient pas pour lors d'église ni
I iline, et n'eut point de honte à c<'l âge d'oraloire pour y pouvoir celélirer la messe
J'aller au collège des Jésuiies pour y f.iire et ils étaient obligés de sortir tous lc> jours,*
ses études et de commencer p .r la ixième. tant les prêtres que ceux (]ui ne l'étaient pas.
II y (it tant de progrès qu'en peu de temps pour aller dire ou eniendre la messe aux
on l'admit à la prêtrise, une personne de Jésuites, où ils avaient choisi leur confes
piété qui fut informée des intentions qu'il seur. C'est pourqu'ii ils résolurent de quitter
avait de fonder une congrégation lui ayant la miison qu'ils ne tenaient i|u'à louage ans
f>iit une pension de trente-six ccus romains lioutiqnes obscures, et ils obtinrent à cer-
pour lui servir de titre. laines conditions de la sociéié du (i nfaloii
Peu de leoips après qu'il eut reçu les or- l'église de la Madeleine proche la Uotoude
dres sacrés, les administrateurs de l'hôpital avec (juclques maisons coniiguës, où ils vin-
dc S. linl-Jacques lui donnèrent la desserte de rent demeurer au nombre de douze ou
l'église de Notre-Dame des Miracles proche (juinze. Sur la fin d i dernier siècle (es re-
le Tibre. Camille croyant (ju'il pomail li- ligienx ont fait rcbâir celte cg ise de fond <'u
hrement en ce lieu donner comm ncement comble, et elle esl une des plus belles d(!
à sa congrégation, se démit de son emploi Kome, et mt aussi accompagnée d'un très-
li'économe de l'bopilal, et au mois de sep- beau monastère qui est regardé comme le
tembre 1584, sous le pontificat de Cié- c'ief de cet orJre.
gcre XIII, il prit possession de cette église Leur nombre s'étanl beaucoup augmenté
el du couvent qui y était coutigu, et il fit dans ceUe nouvelle demeure, Camille fit un
prendre jour lors à ses compagnons l'habit *o}"geàNaples pour y faire un établissement,
long, tel que le portent les ecclésiastiques ; el y mena avec lui douze personns de s.î
mais ils ne demeurèrent pas longtemps en ce congrégation. Le cardinal Pallolti, voyant
lieu. Ouelques-uns ont écrit qu'ils furent de quelle utilité elle ét.iit, olîrit à Camille
contraints d'en sortir à cause qu ils n'en un autre établissement à Bologne dont il
avaient pas obtenu la permission du pajie, était archevéïjue. Camille refusa ses olYres,
et d'autres disent, avec plus de vraisem- s'excusanl sur le peu de prêtres qu'il avait
blauce, que Caniille ne l'abamionna (ju'à la plupart de ceux qui composaient sa con-
cause qu'étant tombé ma ade avec ses com- grégation ne pouvant cire promus aux or-
pagnons, il cr.it que le voisinaj;e du Tibre y dres sacrés faute de tilres pati imoni.uix ;
avait pu contribuer. Lu effet les religieux mais ce prélat lui répondit qu'on y pouvait
pénitents du Tiers Ordre de Saint-François remédier en érigeant sa congrégation eu
de la congrégation de France appelés Picpiis, ordre religieux. 11 en conféra avec le car-
qui ont aciirié depuis ce couvenl, oui expé- dinal de Mondovi (lui en élail le protecleur,
rinieiité (jne l'air y est très-mauvais, ce qui et tous deux en jj,,rlèrcut au pape Cré-
leur a fait aussi quitter ce lieu sans en aban- goire Xlli, qui rrnvnya cctie affaire à li
donner la propiiéié, et Camille de Leiis en congrégation des nies. Ce lioiitile étant moit
étant sorti, loua une maison dans le quar- sur ces eniref.iiles, celte ougrcgalion ne tut
lier i\u\)\\ u\)\'ti\U- des Iioiiti(ine ohscui es. érigée en ordre religieux que p;ir le pape
Si congrég;ition s'augiuentant de jour en Grégoire XIV, par un bref de l'an l.'iOl, (|u'il
jour, il résolut de lui donner le tilie île Mi- signa quebjues heures awuii (jnede mourir,
nistres des inlirenes, au lieu qui- josi|uc-là Le bref approuvait aussi leur maniLM-e do
elle avait été a[)pelée la congrégation du vivre qui avait été dressée par Camille da
i'. Camille. Le pape Sixte V rajjprouva par Lellis, et dont un des principaux ai liclesétaii
un. bref du 8 mars lliSli, el leur p nuit de que leur pauvreté devait être semblable a
vivre en coinniunaulé, de faire des vœux celle des ordres mendiant» qui ne possèdent
siaipics de pauvrc'.é, de tliaslele et d'oliéis- aucun fonds ni revenu, el vont de parle eu
'007 mCTIONNAinE DES ORDRES RELIGIEUX. 1008
porte rrceioir les aumi'mcs des ndî-les; que maison avail coiil»aclé<s el qui se tnonlaiont
l'on éliail uii ni-iiéral doiil 1". fil oc sérail à plus Je m uf mill.' crus romains. Ce qui lui
|ier| élu I. el qu'il aurait quatre cuiisullcurs laisail de la peine était lie v< ir (jue la suciéié
dont l'offirc seriiit ;iu.sï.i perpéluel : qu'aus- du Goiifalon , à qui apjjarlenait la plus
silôl qu'il ) aur.iil unucncr^il, il> feraient (sraude pariio des maisons qui claieni lonli-
eiilre ses mains les Vd-iix soleunels de pau- gués à l'éiçlise de la M.ideleine, el doni ils
Trelé, lîe cliasleic. li'ol éissaiire, el un qua- avaient faiT leurd( ni. uie.nese \oy.ini point
Irième d'assister los malades à la m rt, qui pajc^' des loyeis qui lui étaient dus, avait
est le propre de rel institut; que le nonji re lait saisir ec qu'ils pnu>aieiil avoir, princi-
des Frères laïques serait plus ^:ranil que piilernenl une maison qu'un de leurs liienl'ai-
relui des prêtres : qii'ils (le:neur<r.iieni jour leurs leur av.iit aelietee pour a-^randir leur
el nuit dans le^ liojiitaus pi>ur a^oir soin d( s d.ineure. Dieu y p urviil peu de temps
malades et qu'ils n'en exigeraient aucune ré- après; car le cardinal d Monilovi élanl mort
tiibulion, mais qu'ils leeevraient seulement au mois de décembre lo!)2, il leur laissa t >u»
ce que les admii.isiral^ urs des hôpitaux vou- ses biens, les ayant faits ses légataires un:-
draient leur donner; qu'alîn d'eire plus as- versels. (Je cardinal avail ordonné | ar son
sidus aux hôpitaux, ils seraient exen)(its lest;imeul ((u'il seriil enterré sans aucune
d'aller aux processions el d'assister aux au- pompe: mai> les religi us qui éla.enl obligés
1res fondions publiques où Ic-i religieux se- de laire les frais funéraires, voulurent ic-
raicnl appelés, et qu'il y aurait une maison moigner leur reconnaissance envers leur
particulière destinée pour élever les novices, hienlaiieur, el ils ublinienl pern.ission du
Le pape les exempta par le même bref de la pape de lui laire d. s obsèques dignes du
jiiridicl on des urainair. s, les soumit immé- rang qu'il ;>vaiî occupé dans l'Eglise,
diaicmcnt au saint-siège, el les lit partici- La congièg.ilion s'augmenta ensuite par
panls des privilèges ijui avaient clé aicordés deux établissements qui se firent à .M lan et
aux ordres de Sainl-l'enoit cl des .Mendiants, à liènes l'an lO'Ji. Ce fut à Milan ((uc (Jamiilo
à ceux de la compagnie de Jé>us, des Cha- de l.eilis, qui avail un désir ardent de se
noines tl des clercs réguliers, leur défendant dévouer en ièremeiilau service des malades,
après leur profession siilcnnelle de (jasser vou, ut se charger du soin de tout .'h.''|ilil
dans un autre ordre, excepte da;is celui des el y remplir avic ses rcligiiux tous les em-
('hartreux. Inmicenl IX ayant succédé à pois des serviteurs et autres personnes qui
Grégoire \1V, coufirnia (elle < onizrcgation, étaienl établies pour le service des malades;
cl comniil rarchevcque dlvid;iure, Paul mais ii y trouva de la ci nirad.ctiou dais
.Mberi, pour recevoir la profession de Ca- quelques-unsdcscs religieuxqui ne pouvaient
mille, (jui, ayanl pronomé ses vous entre apprQU\ er ce changement, comme contraire
les mains de ce prélat, prit sa place cl reçut à leur premier insiiiut. qui ne les engageait
celles d>; ses confrères le 8 décembre de la qu'à 'a visite des malailes et à les assister
même année. spirituelleme l tant de jour que de nuit.
Après celle profession solennell •, Caiviille Celle contestation dura quelques années jus-
s'employa au service des mala lii a\ec plus (ju'en l'an IGOO, (|u'elle fui terminée par
de zèle el de ferveur; et le feu de sa charité (^Iciienl A'III, lomiiie nous dirons ci-après,
s'alluma davantage, élanl oblige de faire par Ce pontife ayanl envoyé des troupes en Hon-
vœu ce ((u'il ne faisait anparai ant que par gi ie l'an io'Jo, pour le rceouvremenl de Slri-
chariié. Clément Vill avant sr.ccédé à Iniio- gonie dont les Turcs s'éiaient em()arcs, or-
cenl IX, Camille apprelienda qu'il ne fùl pas donna à CauiiTe de Lellis de donner huit de
favoralile à sa congrégation , à cause (|u'il ses religieux pour servir d'aumôniers dans
s'é ait opposé, n"é:ant que car', nal, à ce celte armée.
<iu'i s fissent des vaux sul.nai Is. l'our sonder Camille, nonobstant l'opposition de sa cou-
quelles étaient les disj osilions de ce ponlife, grégalion, se chargea de l'hôpital de MiLm,
il le supplia do vouloir confirmer de nou- el avail dessein de faire la même chose d.ins
veau sa eongrégaiiun el les privilèges qui lui les autres villes. On assembla, l'an loOi), un
avaient été ac(Oiilés par ses prédécesseurs. chapitre général à Komr pour élire quatre
Mais il Irouva le pajie dans d'.iulres senti- consiiileurs auxquels on doiin i le so n de
nicnts (ju'il n'avait cru; iion-seulemiMit il dresser les consi niions qui do\aieut servir
confirma la (ongrégalion des .NJiiiisires des à l'avenir de lèglrments a la congreg ilion.
Infirmes au mois d.- mais l.>'.!2 el les piivi- (Camille lit ce qu'il ])Ut pour y persuader ù
légcs que ses prédécesseurs lui avaient ac- ses religieux d'aece|)ier le soin des liôjiil.iux,
cordés, mais il lui en donna encore de nou- mais il ne put rien gagner sur leurs esprits,
veaux. et le pape même lui imposa .-ilence là-d ssu>,
Après que Camille de I.cllis eul obtenu lui ordonnant de vive voi\ de no ri n inno-
cellc confirmation, il retourna à Naples pour ver. Celle même année ce siinl fonilaleur ne
y recevoir la iirofcssioii de ceux qui y de- put res sier au c.irdinal l'alottc qui lui de-
ineuraienl, el il alla à son lourcii pèlerinage mandaii îles religieux pour faire un établis-
a Loretie pour leiiilre grâces à la sainte senient à Uologne, el il lui en envoya l'an
Aierge de la firolec;ion qu'elle avail donnée 1j'J7.
a sa congiéL-a'ion, el des fiveiirs iju'il en L'an lîiOO, le sciond cîiapilre général se
avail reçues en son particulier, lùani de re- liiil aussi à Home. Le foinlaleiir proposa de
l')ur à Rome, il el il en p "ine de Irouur lis nouveau que l'on reçût la minière il'assis'er
moyens j-our acquitter les délies q: e Itur les malades qu'il avait établie ù .MJan ; il y
lOO
MIN
MIN
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Iripiiva (le nouvelles. difQciillés, mais se coii-
fiaiil que Dieu approuvait son dessein, il
«ic se rebuta point, et après avoir patienté
pendant cinq ans, les consulleurs lui accor-
dèrent enfin sa demande, on dressa de nou-
veaux rè|;lements par lesquels il était pmnis
de prendr.e le soin des hôpitaux: le pape
Clément ^'lil les apjjiouva l'an 1600.
Il y eut celte année une autre fondation
à Mantoue,el suivant le pouvoir que les re-
lif-ieiix en av;iienl reçu du pape, ils prirent
le soin de l'Iiôpital de f'errare l'an 1GU3. Au
coiTiniencement de l'année suivanle, ils se
rhargèrent des hôpitaux de l'Annonciadc des
Incurables et de Saini-.lacques des Espa-
gnols d.ins la ville de Napls ; mais ayant
quitté depuis cet emploi, iis ont fait dans la
même ville irois élablissements considéra-
bles. Il se fit e^icore la même année plusieurs
nôtres fondations, et le pnpe Paul V étant
monté sur la chaire de saint Pierre au mois
lie mai 1G05, il divisa cette congrégation en
cioq provinces, savoir, de Rome, de Milan,
rie Naples, de Bologne et de Sicile. Camrlle
de Lellis voyant sa congrégation établie so-
lidement, se démit de sa supériorité dans un
chapitre général qu'il convoqua à Home au
mois d'octobre 1G07, et le P. RIaise Opjierti
lut élu en sa place en qualiié de vicaire gé-
néral et ensuite de général dans le chapitre
qui se tint l'année suivante. En lGl.3, on
tint le qualrième chapitre i;énéral où le P.
Antoine de Nigrellis prit le gouvernement de
cet ordre.
Cao.ille de Lellis se voyant ainsi délivré
rie tout embarras jiril de nouvelles forces
pour marcher dans la voie de perfection. Il
tiisait dans ce renouvellenieiil de vie qu'il
ne lui fc^stait plus que de pleurer le teraps
qu'il avait passé sans f.iire aucun profit, el
qu'il fallait qu'il se remplît de bonnes œu-
vres, afin d'eire toujours prêt lorsque Dieu
l'apjiellerail de ce monde. En effet il emiloya
les années qui lui restaient de vie à l'orai-
son, à la contemplation, aux exercices de
rharitéet de mortification, el mourut à Rome
plein de bonnes oeuvres le ik juillet 1614.
Son corps fut mis dans trois cercueils enfer-
més l'un dans l'autre, deux de bois et l'autre
di' plomb, et fut enterré dans l'église du mo-
tiasière de la Madeleine qui est la première
maison de cet ordre.
A la .iiort du P. Camille de Lellis, sa con-
grégation était composée de seize maisons
en llalie et do quebjues autres en différents
jjays qui étaient divisés en cinq provinces,
comme nous avons dit ci-dessus. Il y avait
environ trois ceiits religieux, el il en était
mori plus de deux cent vinf;t à cause des
malades qu'ils avaient conlractées dans les
liôpiiaux. Urbain Vlil, l'an Î637, sur cequ'il
y en avail dans la cooijréïali m qui préten-
d.iienl que leeiiapitre général devait se tenir
tous les trois ans, el (|ue les au'resau con-
traire soutenaient qu'il ne devait se tenir que
tous les six ans, jugea eu faveur de ces der-.
Iiiers, ordonnant qu'il se tiendrait tous les
(I) Voij., il la iiii du vol., ii» 249.
sixans.InnocentXréduisil les cinq provinces
à deux, savoir, à la province do Naples, qui
devait aussi comprendre la Sicile; cl la pro-
vince de Rome, qui devait renfermer toutes
les autres provinces ; mais l'an 1635 Alexan-
dre \ Il changea encore cet ordre, el divisa
leurs nmnastères en (luaire provinces. Ces
Clercs Réguliers sont habillés co.nmc les ec-
clcsiasliques, et portent, pour se dislinguer,
une grande croix tannée sur le côté gauche
de leur soutane et de leur manteau (1), et
dans la maison les Frères lais, qui en-
trai'nt aussi autrefois dans les charges, por-
tent le bonnet carré comme les prêtres et les
clercs. Ces Frères lais prétendaient même
avoir le pas au-dessus des clercs; mais le
pape Alexandre VII, par un bref de l'an 16i)2,
ordonna que, tant dans les fonctions publi-
ques que dans les particulières, les clercs
auraient toujours la préséance.
Outre les quatre vœux solennels, ils font
encore quatre vœux simples, le premier de
ne rien changer ni consenlir que l'on change
rien dans la manière qu'ils gardent touchant
le service qu'ils rendent aux malades, à
moins que ce ne soit pour un plus grand
bien ; le second, de ne point consentir qu'ih
puissent jamais rien avoir appartenant aux
hôpitaux; le troisième, de ne se procurer au-
cune dignité hors la religion, et de n'en ac-
cepter aiîcune sans dispense du pape ; le
quatrième, d'avertir les supérieurs s'ils sa-
vent que quelqu'un se procure ces dignités.
Ils fout deux ans de noviciat, ils ne sont
point obligés à réciter les heures canoniales
au chœur, à cause de leur occupation, ni
d'assister aux processions. Ils font une heure
d'oraison le jour, et ils ne jeûnent que les
vendredis de l'année, outre les jeûnes pres-
erils par l'Eglise. Le général et les quatre
consulteurs ou assistants élisent les provin-
ciaux, les préfets, les \isiteurs et autres of-
ficiers. Le général el les consulleurs sont
élus dans un chapitre général qui se tient,
comme nous avons dit, lous les six ans. Ils
ont des maisons de profession, des noviciats
et des infirmeries. Les maisons de noviciat
et les infirmeries peuvent posséder des ren-
ies, ce qui n'est pas permis aux maisons
professes, qui ne peuvent avoir qu'une mai-
son de campagne, aiin que les religieux puis-
sent y aller prendre l'air el se récréer. Il y
a dans cet ordre des prêires, des Frères
convers et des oblals ; les deux premiers
sont obligés par vœux solennels, les oblals
font seulement des Vieux simples, et sont
employés aux oifices de la maison.
Cet ordre a passé d'Italie en Espagne, où
ces religieux ont quelques maisnns. Il y a
quelques villes en llalie où ils en ont plu-
sieurs, comme Rome où ils en ont deux ,
Naples où ils en ont trois etc. Ils ont aussi
eu plusieurs personnes parmi eux qui se
sont distinguées par leur sainteté et par
leurs écrits. Le P. Jean-Baptiste Novati, qui
a élé général de cet ordre, a donné plusieurs
ouviagcs de piélé au public. Le P. François
♦"" DîCTIONNAIRF DES 'JP.nr.rS RF.I.IGIF.LX. 1012
i!el Cihi.î'rr, qui fol (lu p'-iiérnl m 1G99. a pnr los rôno\ii>n< quf ce Irisie sppcl.iclr lui
rnrorp ^Icmlii ccllp cnnjirrg i(ioii pnr plu- f.iisnit f.iiiT . rôlloxions «itii, suivies du cli.i-
^icu^s (■l.iMisscmi'n's qu'il lui a procuras : f;rin (|u'ille ml de la mort dp son père qui
clic porlp po<ir .nrnips d'nzur à une rroi\ .irriva pendant un voya^je qu'elle fil aux
tannée l'am un uvale rayonné d'or, l'écu eaux de Furpes avec une de ses lanlcs, arlie-
linihré d'une ruuronup. vèrent de la déterminer à prendre le parlj
Te!. Flall ix, Vil. Camilli de Lcllis. La de la piéié et de la dévotion, dont elle roui-
niéme par le P. Jean Rapt sie Uos>-i. Cosme mcnra dès lors à faire ses prinripales otcu-
Lpuzo, ArvdI. li'tiri. Clrr-ir. lirfjvL Mivistr. pa'ions.
u)firm. Memorir Isioriclir, de J. Chierici llr. Klle épousa en lGi5 Jean-Jacques de Reau-
iiolnri Minisiri de gli !n/?rmi. Ascap;. Tarn- harnais, seigneur de Miramion, conseiller
l)ur. de Jur. AIjIkiI., disp. 21, qua-sl. k, n. 87. au parleiiicnt de l'ans qni, fonrlié des pieux
Itiill. Rom. l'iiiijpp. Ronanni, Cnlidog. Ord. e\ern[)les de sa femme, voulal les imiler el
firlig. el Dlrwoires enroyr's de Home. mourut dans celle heureuse dis] osilion à
Le pape Renoît XI\ héailGa Camille de râf;e de vingl-sepl ans, la laissant pmsse de
Le'lis en 17'»2, el le ( anonisa en l"'iG. C s (|uatrc mois el demi, â'iée seulement de seize
religieux avaient autrefois A Rome les mai- ans. Rtant malade à l'extrémité dans ses
sons de Saint' -Marie-Madeleine. Sainte-Ma- rourlies, el'e fit un voeu à la saine V erpe.
rie in Treri, Saint-Jean dclla Malvn. Ils ont alln que son enfanl reçût le haptème; el elle
aeluellcment pour préfet général le \\. P. accoucha heureusement d'une lil'e, qui fut
Antoine Scalabriui, et pour procureur pé- dans la suite mariée à M. de Ncsmond, Mai-
néral le P. Louis Rofrni. [^es prétendus Frè- trc des requêtes, et (]ui dejiuis a été jirési-
res el Sd'urs de Saint-Camille, qu'on essaya «Icnl à Morlier. La seconde année de son veu-
d'élablir en Fr p e sous la reslauralion, vage, on lui lit des propositions de mariage
n'cnt jamais été canoniip emeni institués, au\.|uelles c'ie ne voulut point entendre,
et leurs maisons n'ont point eu l'approha- ce qui inila si fort la passion de celui qui la
lion ecrléMa^tiqiic et sont tombées. Leur rei lienhaii, que peu de temps après il la lit
fondateur éiail un homme marié, qui se fil enlever lorsqu'elle allait faire ses dévotions
ordonnera Rome par supercherie, cl mourut flu mont Valérien, avec m dame de Mira-
rn France dans une maison d'aliénés. R-d-::. mion, sa belle-mère. Dès qu'elle se vil entre
>jir> 4 »»ir.vTi-c7 /r. c- ^ les mains des ravisseurs, elle demanda à Dieu
MIRAMIONLS (Des filles de Sunte-Ce- j^ j^j conserver tout son jugemeni, de lui
m;v.ève COMMUNEMENT APPELEES LES ), donner du courage ei des f ,rccs pour se dé-
rape In \ te de madame de Miramion, leur fe„dre, et surtout de lui faire la (.race de ne
fondatrice. lepoinloffenser. File fut piusdeqiiaranteheu-
Quoique la communaulé des Fi'Ies do res sans miiiger, c'e-l-à-dire, depuis son eii-
Sainlc-fleneviève à Paris ait été fondée dés lèvemcnt jusqu'à ce qu'elle lût arrivée à
l'an lf).'?l), par mademoiselle RIosset, néan- Launoy, à trois lieues de Sens, au (diàieau
tnoins l'union qui a élé faite de celle com- de M. de Russi-Kabulin, auteur de l'enlève-
miinaulé avec une autre <)ui fut fondée par ment, à qui on avail persuadé qu'el e écoii-
madame de .Miramion, les grands biens que terail les propositions de mariage qu'il lui
celle dame lui a procurés, cl les règlements feiail lorsciu'elle serait eu son pouvoir :
qu'elle lui a prescrits , lui ont fail donner mais voyant sa fermeté, et craignant les sui-
.ivec justice le tilre de fondalrire des Filles tes de son enireprise, il cessa de la sulliciler
lie Sainte Geneviève. File naquil à Paris le cl l.i rend t maîtresse de sou sort el de sa li-
'2 no\embre KJ-iO, et reçnt le nom de Marie bcné. On lit des jioursuilcs contre .M. de
'^iir les fints de ba|téme. l'Mle eut pour père . Russi. m.iis elle lui pardonna chrétienne-
Jacques Ronneiu, seigneur de llubelle, et ment, à la prière de 1\1. le Piincc. à condi-
pour mère .Marie d'Yvri. Dès l'âge de neuf lion qu'il ne se présenterait jamais dcvaul
ans ((u'elle perdit sa mère, elle jugea du n)al- elle.
Iieur qu'il y a d'être séparé de Dieu éter- Au retour de cet enlèvement, elle fut ma-
ncllcment, p,ir l'affliction qu'elle eut d'èirc lade <à la mort, el reçut l'exlréme-oiiction
séparée de celle qu'elle aimait le plus ici-ba^. avec lous les sentimenis de piété que l'on
C'est pourquoi, afin «le s'assurer la (Misses- pouvait attendre d'une àme qui se disposait
sion de ce bien infini, toulo jeune (in'elle à aller jouir de la |)résenee de Jésus-C,lirisl ,
était, elle fuyail les plaisirs et les divertisse- (|u'elle avail choisi pour son éponv : mais la
meiits autant qu'il lui étail possible, per- I'ro>idence qui voulait s'en serv ic pour le
siiadéc (ju'ils ciaienl très-préjudiciables à bien spirituel et teuiporel du proclia n. lui
l'âme. ayant renvoyé l.i saule, ellesoiigea plus(|ue
A l'ilge de douze ans elle prenait soin des jamais à serwr Dieu, l'n jour de l'Ilpiph.i-
malades de la maison ; et, un jour des Rois, nie, demandant à Dieu ce (|u'ellp pouvait lui
un palefrenier se mourant au niomenl (|ue olïrir, à l'exemple des rois (|ui curent le
tout elaii en joie, elle se ileroba pour aller le bonheur île l'adorer dans la crèche, elle se
voir expirer; ce qui fit une telle impression seiilil !out émue et ciui eiiiendre une voix
sur sou esprit et sur ses sens, qu'éiant re- qui lui disait : C est Ion rnur i/nr je veux, el
lournée dans l'assemblée, plie se dispensa (/u il snil à moi sans j)aria'/e; ce (jui eut pour
di' danser a un bal, sous prétexte qu'elle no elle laiil d'allrails et de charmes, qu'elle re^-
fC poi tait pas bien ; ce i)ui paraissait \érita- la en méditation ()u.ilre heuies, [lend.inl
Ijlciiioul sur son vis.ig' qui ctait tout ciiangé lesquelles elle goûtait de si grandes consoîa-
1013
MIU
MIR
MU
lions, que son Ame m é(ait pénétrée d'une
joie loiite sainlc et salutaire. Elle fil à râ.L;e
lie dix neuf ans une relraite chez les Sœurs
•le ta Ctiarité, pendant laquelle elle conçut le
dessein de se fiire Carmélite, mais son con-
l'i'sseur l'en ayant empêchée à cause de sa
(ille qui a^ait bcso n de ses soins, elle se
contenta de faire vœu de chasteté dans une
autre relraite qu elle fil peu de teinps après
celle dont nous venons de parler.
Sacli/irité pour le prochain élait si grande,
qu'elle nourrissait une vingtaine de petites
filles orphelines dans une maison proche
Saint-Nicola'i-des-Chami)s, et leur fournis-
sait des niaîlrcs-es pour leur apprendre à
servir Dieu oi à travailler. Klle assistait sou-
vint les malades de l'Hôlel-Dieu, afin de se
mortifier, é'ant naturellement délicate. Son
iliiecleur l'engagia à une retraite d'un an,
pour vaquer uniquement à sa perfection ,
sans s'adonner aux œuvres de piété à l'égard
di! prochain, dont on ne lui permit l'exercice
qu'à la fin de l'année. On la fit Irésorière des
pauvres de la paroisse de Saint-Nicolas-
des-Champs; et comme c'était dans le temps
des guerres civiles, et que le nombre des pau-
vres élait fort grand dans Paris, son zèle
trouva de quoi s'exercer, leur faisant distri-
buer plus de di'ux mille potages par jour,
sans parier des autres charités secrètes
(ju'elle faisait aux pauvres honteux avec
tant de générosité, que la misère augmentant
et ses revenus n'y pouvant pas suffire, elle
vendit son collier de perles vingt-quatre mille
livies, et un an après sa vaisselle d'argent,
dont le produit lui ervil à taire des missions,
à établir des écoles pour la jeunesse, et à des
charités pour les pauvres nialad 's de la cain-
pagno, dont elle voulut prendre elle-même
le soin, apprenant pour cet effet à saigner,
à médicamenter les plaies, et à composer
•les onguents et autres choses nécessaires,
dont elle avait un cabinet bien garni, pour
tous ceux qui avaient recours à sa charité.
Après qu'elle eut marié mademoiselle do
Miramion à M. deNesmond, elle crut ne de-
voir pus songer qu'à sa propre perreciinn;
c'est pourqnoi elle rechercha avec empres-
sement tout ce qui pouvait y contribuer.
Elle relira chez elle en 1630 vingt huit reli-
gieuses des froiitièr. s de Picardie, dont les
couvents avaient été ruinés par les guerres :
elle les nourrit à ses dépens pendant plus
de six mois, et ne cessa cette héroïque cha-
rité qu'après avoir trouvé moyen de les pla-
cer dans d'autres maisons, ou de les ren-
voyer chez elles lorsqu'elles purent y retour-
ner sans aucun danger.
Nous avons déjà rapporté à l'art. LiziRis-
T! s de qui'lle manière elle cimlribua à l'éta-
blissement des missions é rangères pour la
conversion des infidèles, mais sa charité n'en
demeura pas là, car les dé>ordres de la
guerre et la minorité du roi ayant occasionné
et fait triompher le vice, celle généreuse
servante de Jésus-Christ travailla à en dimi-
nuer le progrès, en faisant enfermer dans
la communauté des Filles de Sainte-Pélagie,
qui subsiste encore aujourd'hui, quelques
filles des plus scandaleuses, dans Tespéranre
que les autres, intimidées, se contiendraient
davantage , et même pourraient changer
de vie.
Ce fut par un effet de celle même charilé
que, pour exécuter le projet qu'elle avait fait
depuis longtemps d'établir une maison do
filles qui licndraiMil des petites écoles à la
campagne, panseraient les blessés et assiste-
raient les malades, elle alla demiurer en
IGGl dans 'a rue S linl-Antoine, où avec quel-
ques filles qu'elle trouva disposées à se sa-
crifier pour le prochain, elle vécut en com-
munauté sous la protection et le litre de la
Sainte-Famille, et dans l'observance de quel-
ques règlements que M. de Festel,son direc-
teur, leur avait faits cfuelque temps avant sa
mort; ce qui dura jusqu'à ce que , étant al-
lée demeurer dans la paroisse de Saint-Ni-
colas du CharJonnet , Dieu , qui par ses
inspirations était l'auteur de ce pieux des-
sein, lui donna les moyens de le perfection-
ner, ce qui arriva de la manière suivante.
Dès l'an 1636 , une communauté de Fil'es
sous le titre de Sainte-Geneviève avait été
établie par Mlle Blossel, comme nous l'avons
déjà dit. Ces filles s'occupaient au travail ,
récitaient le petit offii e de la Vierge en com-
mun, fréquentaient les sacrements et étaient
assidues aux offices divins de la paroisse
de Saint-Nicolas du Chardonnei , dans la-
quelle elles demeuraient. Rlb s visitaient les
malades, s'exerçaient dans la pratique de
toutes les vertus, et lâchaient d'inspirer le
même esprit aux autres personnes de leur
sae, autant par les instructions charitables
qu'elles leur donnaient, que pir leur bon
exemple. Pour ce sujet elles pren;iient des
pensionnaires, tenaient les petites écoles,
faisaient des conférences entre elles et étaient
dans le dessein de recevoir aux exercices
spirituels cellesquidésircraienl serelirerchez
elles lorsqu'elles auraient assez ile logement
pour cela, comme aussi d'aider les pauvres
gens de la campagne, en y allant enseigner
et établir d 'S maîtresses d'école. Elles avaient
pris sainte Geneviève pour leur patronne, à
cause qu'elles demeuraient au pied de la
montagne sur laquelle reposent les sacrées
reliques de celte sainte bergère, et elles étaient
établies en corps de communauté séculière
sous l'autorité de l'archevêque de Paris et
par lettres patentes du roi. La conformité
qu'il y avait entre celle communauté et celle
(le la Sainte-Famille établie par madame do
Miramion porta cette sainte femme à vou-
loir unir sa communauté avec celle de sainte
Geneviève ; ei Dieu ayant inspiré à plusieurs
des filles de cette dernière communauté un
grand désir de s'unir aussi à madame de Mi-
ramion et à ses filles , elles ne purent s'em-
pêclier de lui «>n faire la proposition et à M.
Fcret , supérieur des deux communautés ,
qui fit plusieurs assemblées pour conférer
sur l'utilité de cette union et sur les moyens
de la faire réussir; après plusieurs prières et
bonnes œuvres que l'on fit pour obtenir do
Dieu des lumières et la déclaration de sa vo-
lonté, elle fut enfin conclue le ik août, veille
1015 DICTIONNAIRE DES ORDRES REUGIELIX. lOIC
•le rAs«omplion dp !,i sniiilc Virrpr, en pré- rollos (iiii nvnicnl iloiiiniidé l'union. Une .■in-
>enre cl du consiMUrnuMii de M. l'érct. Le tre com nui 11,111 le clablie à la Te lé-soiis-
contral fui r.iil aM'c l'aîTréMioiit de l'arche- .louare ayant aussi demandé vn KiOj riinioii
véque de l'aris , Hardouiu de Perclivc , le avi c les filles de Sain'e (îcnevièvc, madame
14 sepleinlT,- KiOo , cl cel inslilul fui ;:p- île Mirainion les fil l(!Ules venir à l'aris l'une
prouvé cl confirmé en ll'OS fiar le cardinal afirès l'autre pour les inslruire, et alla en-
de N'eiulome, le;;;!! a lulcrr vn France. suiie à la Fcrlé-sous-Joiiae les établir eu
Ces deux couimunaiilés ayant élc ainsi présiMiie de l'cvéquc de Meaux, SI. licnigne
réunies, iiadame de .Mir;iuiion donna soixaiile liossuei , qui prêcha sur ce sujet avec bcau-
inille livres pour fonder plusieurs places, et coup d'éloqueiu e.
\\. Fcrel travailla à des conslitulions qui, Les troupes qui passèrent ou séjournèrent
outre qu'elles renfermaienl les règlemenls à Melun l'an 1(173 y ayant causé des maladies
de l'une cl de l'aulre de ces comniunaulés couia^iruses , pi'rsonnc n'osait soulager les
(excepté quelques-uns dans l'exoculion des- malades qui y moiirairnl au nonibrc di- plus
quels l'expérieirc avail fait conn litre beau- di' cent par junr, ei la plupart dans les rues
coup de difiicullé). éiaient remplies de sain- abandoiini's de l ail le monde et privés de
les pr;;liqui\s capaMes d'entrcienir le bon tout secours humain. ALidamc d' Mirainiun
ordre dans la maison et h- bon exemple au en fu! si lour.liée qu'elle y alla elle-niiuie ac-
dchors. Ces conslitulions furent approuvées compaf;nce de cliiruriiiens et des sœurs de la
par M. de ilarliy de Ch invalon. arilKvèque Cliariié, ranima par sou exemple ceux q 11,
de l'aris, au mois de lévrier 1074; on les par leur condiiiou, devaient assister les ma-
présenta cnsiMte au roi, qui, par de non- lades , en;.'a;;ea le-; mipisirals de donner un
velles lellres palcn'es qui lureul ciiref;!-- lietj pour faire un hôpital dans lequel elle lit
lécs au parlement la même année, autorisa porter les nieutdes de sa terre de Uulelle qui
riinion qui avait été faite de ces deux com- n'était jas éloiffuée de celte ville, y étaldit
niuuaulés, el les cliangenienls qui avaient des sœurs de la Cli.irité, cl y lit Iransporter
été faits aux premiers régleiiicnls. ÏMadamc 1 -s malades qu'elle pansait elle-même, les
de .Miramion, qui avail été élue supérieure csliortanl à souffrir patiemment leurs maux
cl qui encourageait les filles de Saiute-Cene- et à recevoir la iiiorl avec soumissioa aux
■»icvc par son exemple à la pratiijue exacte ordres de la divine providence, qu'elle les
lie leurs rè);les, leur (it acheter, l'an 1070, la forçait en quelque f-iion d'adorer par les
maiso 1 où elles sont prc;entemenl, sur le charitables soins qu'elle avait d'eux cl par
quai de la Tournelle, el leur donna encore les secours qu'ils recevaient de ses liberali-
dix mille livres. Jusque-là elle avail fait lés. L'hôpital pénéral n'en ressentit pas
toute la dépense de la maison; mais voyant moins les effets dans quelques années de di-
qU'- les filles, par leur économie et par la selle, aussi bien que les pauvres pour Ics-
r'reptiou de celles qui avaicnl embrassé quels elle ranima son zèle dans le temps de
l'inslilul, étaient en état de subsister par la famine dont la France fui afiligce eu I09i.
«Iles-mêmes, elle ne leur donna plus que Car. sans parler de ceux auxquels elle don-
quiiize cents livres par an pour sa pension, nail l'aumiuie, elle s'.ippliqua avec une cha-
qu'elle leur a lo jouis payée jusqu'à sa rite héroïque à soulager ceux ijui étaient
jnoil, vivant comme les aulies Sd'urs el ne malades à rnôlel-l)i<u, dont le nombre se
vo.ilanl point de dislinclion , quoique sa montant à six mille avail obligé les religieu-
.-ante fût fort faillie et sujeile à de grandes ses de cel In'ipital à en melire plusieurs dans
inlirmités; et elle leur déclara qu'elle voulait un même lil; attaqués de ilillerenles mala-
exéculcr les cons'itulioiis en se démcItaiU dies iju'ils se cnmmuuiiiuaienl, ils étaient
de la supériorilé [lerpéluelle. Mais ces filles, dans un éial si déplorable, que cette saintiî
persuadées qu'elle leur él.it encore néces- femme, pénétrée de coiiipass on pour eux,
saire, eurcnl recours à .M. Féret, Icursupé- consei.la aux adminislrateurs de celle mai-
rieur, el enlin à larclievéque de Paris, qui son des pauvres d'ouvrir l'Iiôpilal Saiul-
lui ordonna de n'abandonner la supériorité I ouis ; ce qui . yani élé ap;irou»e, et le soin
qu'avec la vie. '"' a\ant été donné de préparer tout ce qui
La rcpuiaiion de ces filles a^ant pas^é clait nécessaire pour les y reccvor, ou yen
dans les provinces, une conimunauié élallic transporta un.- parte , qui , en 1 lissanl plus
depuis louglempsà Amiens députa, l'an 1070, de place à ceux qui reslaieul à l'ilolel-Dieu,
•leux filles à madame de Miiamion pour lui .s'en Irouvérent eux-mêmes beaucoup soula-
ileinander ses conseils. Klle les relira chez gés et moins en danger de perdre la vie,
file pendant un mois el les renvoya char- comme l'expérience le fil coiinailr,' par le
niées de ce qu'elles avaient vu. il en revint grand noaibre de ceux qui en rechappaienl.
(l'aiitres qui lui ,:c:iiaudèrent l'union de leur File n'ouhliail pas pour cela les pauvres
communaiilé avec celle de ses filles, leur ha- lioiil' ux de sa parois e. et faisait faire cbe/
lut et leurs coiisliUiiions, ce qui étant appuyé elle de deux j'iurs l'un du pola;e pour eux.
«le la reco:i.maiidalion de M. l'evéïiue d'.\- eaip!«iyaiil ulileiuent b s charilcs du roi, dont
miens et lie .M. Chauvidin , iub ndaul de l'i- Sa .Majesté l'avait chargée api es la mort de
«ardie, elles obtinrent <.e qu'elles soiiliai- m id.inoiselle de Laïuoigiioi qui aiait eu
laii'ut; riinion fut l'aile dans l«'S hirmc», el aussi le même emploie L'année suivante,
mail une de .Miramion all.i à Amiens, où elle l'bôpilal général ne pouvant soulcnir ses dé-
biissa «bux lilles lie sa coinmuiiaulé, «|ui fi- penses, les direcleurs voulurent renvoyer la
real (ai e le uoviti.il, cl rei.ureut a liustitut plus grande lariie des pauu-cs, mais uiddaïue
1017
Min
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J0!8
de Miraniion trouva des rcssonrres pour
l'empêcher aussi bien que pour inainlcnir
l'hôpilat (les enfaïUs trouvés, qui était fuit
embarrassé de pourvoir à la subsistance de
ces pauvres innocen(s.
Sa maison avait toujours été ouvoilc aux
pers<innes de son sexe qui s'y présentaient
pour ^'>' retirer à des>ein d'y faire cliacune
en particulier les exer( ices spirituels, mais
ayant iniendu parler d:i fruit ((lie faisiienl
en I{reta{j;ne les Maisons de retraite ( Fo!/.
cet article), et qui s'étalilissaionl aussi pour
les homnics au n<)vici;it dis Jésuites de Pa-
ris , elle entreprit d'exercer la même ( harité
pour les femmes ; elle en olilint l'apréinenl
du roi, quoique ce piince l'eu' refusé quel-
(jues années auparavant à d is personnes de
I iélé qui avaient eu lo même de sein. Sa Ma-
jesté voulut même y conlrihuer en lui en-
voyant six mille livres. L'archovêqui! de l'a-
ris approuva aussi ce dessein, nomma des
confesseurs pour les retraiies, et voulut qu'à
l'avenir la maison de niadauie de Miramion
lui honorée de la présence perpétuelle du
saint sacrement, et qu'on l'exposât tous les
soirs penilani le s.ilul, tant que dureraient
les retraiies. Comme pour ces exercices pu-
hUcs il fallait agrandir la maison, on en
acheta une voisine qui coûta soixante-quinze
mille livres, dont madame de Miramion en
donna quinze, madame de Guise six, ma-
rlame Voisin et ma lame Duhoussel autant,
et plusieurs personnes inconnues envoyè-
rent aussi des sommes eonsidéiables. La
maison fu! réparée et divisée en cinquante
chambres ou cellules séparées. On y lit un
réfectoire , une salle d'exercices et autres
lieux réguliers, et cela avec tant de propreiê,
queces réparations montèrentencoreàplusde
vingl mille livres. Deuxanss'écoulèreutavant
que celle maison se trouvai prêle. Madame de
Miramion en réfjla le spirituel el le IcmporcI,
et ordonna que les retriiles des dames dure-
raienlsept jours prndant lesquels elles cou-
cheraient toulesdansla maison où l'on poisr-
rait en loger cinquante, el que les retraites
des pauvres ou des femmes et des filles de
médiocre condition no dureraient que cinq
jours; qu'on en pourrait recevoir jusqu'à
six-vingts cliaque foi^, mais qu'on ne retien-
drait à coucher que celles qui viennent île la
campagne; qu'à l'égard de celles de Paris,
elles relournei aient lous les soirs chez elles
el reviendraienl les matins, et qu'on les nour-
rirait touti s.
Madame de Miramion paya toute seule les
premières retraites des pau\res, et quelques
personnes de piélé y contribuèrent dans la
suite. Il n'y a emore qii'une des quatre qui
se [ont par an qui soil fondée, mais enallen-
dant qu'elles le soient, le roi y pourvoit par
ses libéralités. Le^ PP. Jésuites et les prêtres
(lu séminaire d-cs Missions Eirangères foui à
i'allirnative les reiraites des liâmes deux
lois I année, et (elles des pauvres quatre l'ois.
Le proTiod respect que madame de Mir;imiiiu
cul toujours pour les prêtres lui fit f irmcr
le dessein de travailler à rél.ililissemrnt de
diverses maisons etclésiastiiiucs : l'une pour
renfermer ceux qui ne seraient pns réglés,
une autre pour Ci'ux qui sont obligés de ve-
nir à Paris solliciler des affaires, el une troi-
sième pour servir de relraite à ceux que l'àce
et le travail ont mis hors d'état de servir l'E-
glise. Mais le temps et les moyens lui ayarit
manqué, .M. l..- card:n;:l de Noailles, archevê-
que I e Paris, y suppléa en élal)lissant la
communauté de Saiiil-!'"ran(;<)is de Sairs, qui
pour cet effet jouit du prieuré de Saint-De-
liis de la Charte à Paris.
Enfin madame de Miramion, épuisée de
forces et succombant p )ur ainsi dire sous le
p lids de ses morlinealions, tomba malade le
il) mars 1G9G. Ses vomisscmcnis continuels
l'empêchèrent d'abord de recevoir le sairit
viatique, mais en aynnl été délivrée par une
grâce spéciali' de celui qu'elle avait aimé el
servi avec lant de fidébté, elle le reçut enlin
el inournl le 2'^ mars, ayant ordonné par son
testament qu'on l'enlerrerait loinme une
simple fille de Sainle-Genevièvc. Six piuvres
portèrent son corps à la paroisse, où il fut
enterré dans fe cimelière, et son creur fut m s
dans la chapelle de sa communauté, où tou-
tes les bonnes œuvres que l'on y taisait de
Son vivant ont clé depuis rontinuées et même
augmentées par le zèle et la ferveur de ses
filles, qui, faisant leur possible pour imilT
son amour pour Dieu et sa charité pour le
prochain, se sont toujours conservé jusqu'à
présent l'estime de tout le monde et la bonne
odeur de Jésus-Christ par la fidélilé avec la-
quelle elles s'acquiitent de toutes leurs obli-
gaiions el praliques de piélé, el par la charilé
(ju'elles exercent envers le prochain, ensei-
gnant à lire, écrire et travailler aux petites
filles, qu'elles éièvenl en même tem|is à la
connaissanee des mystères de notre sainte
religion et aux praliques d'une véritable
piélé, en recevant d;ins leurs maisons les
maîtresses d école qui désirent éprouver
leur vocation et se former à cet emploi, en
allant en campagne, lorsque les évéqucs el
les curés le demandent pour établir et dres-
ser des maîtresses, en faisant dans leurs mai-
sons pour l'instruction des personnes de leur
sexe une lecture ou conférence familière sur
les choses nécessaires au salut, sur les ver-
tus et sur les obligations de leur état pour
passer la vie saintement, en admettant chez
elles celles qui drsirenl faire les exercices
spirituels, en assistant spiiiluellemenl el
corporcllemcnt les pauvres malades et les
blessés des paroisses où elles sont établies,
liu'elles soignent el pansent, et auxquels
cl es fournissent , aillant qu'elles en ont le
moyen , les onguents et antres remèdes
(ju'elles jugent nécessaires pour leur gué-
rison.
Les sœurs ne sont reçues à la cninmu-
n.:uté qu'à vingi ans accomplis et après deux
ans d'épreuve. [îllos ne font iioint de vœux,
mais soit que la prctendanle apporte quel-
que chose en fonils ou en argent ou une
rente viagère, soit qu'elle n'aijporle rien, on
passe un (oniral cnlre elle et la supérieure
avec ses conse:llères, par le juel il est porié
que, outre les autres clauses dont on est
'•in nicTioNNAinEDES onnRKsiiEi.ir.iKLix. 1020
conviMui, I:i pr('loii(l,)iilo aynnt lu ri lien Les bâtiinenls sont aujourd'hui une pliarma-
enl<'n(lu 1 s coasltuti ms, elle s'y somm>l el cic ccnlriile. IJ — u— e.
s'obline rie l'S nbserver. cl (iiie l.i romimi- •n^i'^n.o^n r^f^ ,r.
n.iules-o!)li^re à l,i nourrir et enlretonir, lanl •>">LUICORnE (Dks nEi.i,:iEisrs de Notre
rn s.nlé no-cn maladie, pend.iiil lo.t le l]^yv■. ve) nier h^s \ ,fs du vrucrable l'.re
l.-M,ns q.rell,- ser;. .1.. même corps, ri d'oh- -^"7,"** *""'''/"': H'^''";".'"- f','''; '" '"<-
server reciproniien.eni leseoi.slilulions à son »<:>-'>l'le Mère M',ne-Madeleine de la Tn~
éR.irl. elpo rlors..M.journ..iniué, les stru s ""e , nus^i fondalnce et première religieuse
asscnihlées dnns leur or.iloire, le supérieur y ''^ 01 aie,
clanl, la préliiidiinle lui dcrtiaiideirèlre reçue l.e P. Antoine Yvan, instituteur de l'ordre
au corfis de romaïuiiaulc poury vivre suivant d s religieuses de Noire-Dame de Miséri-
les roiisiiluli'ius. Le sunérieur demande si corde, n.Kjuil à llians, bourir de Provence,
elle a les voi\ de In eotnuiunar.té. cl I r su- du diocùse d'Aix, le 10 novenilirc 1570. Ses
pcrieiire l'en ayanlassuré, il dé lare à haule piVe et mère ayant élé mieux pourvus di's
voix qu'elle est reçui'. Tel esl leur enga^je- bénédictions de la );r;kc que îles bii-ns de la
mcnl et la cérémonie de leur réi'eplion. l'orlune, supportaient leur iiuliuenrc avec
Ces lilles dirent lo is les jours en commun une gr.inile rési;;nalion, nian^^eaut leur pa n
le petit office de la \'ierg;(! et font une heure à la sueur de leur visag.'', el ne vivant que
d'or-ii on mentale, demi-heure le tn.itin el du travail de leurs mains. Anloiiie n'avjiit
demi-heure après comp'ies. Tons les ans que trois ans lorsque son père moiirul, el le
elles font une retraite de huit ou dix jours Seicriieur lemoif^na dès lors qu'il l'avait pris
au temps que la su[»oricure juire le plus corn- sous sa |)roleclion, le préservant de la ma-
inode. Elle peut aussi accorder à <iuelques- ladie contagieuse qui avait enlevé son père,
unes des sœurs un jour de retraite chaque quoique- sans aucune préciulioTi ileùlcou-
tnois. Unefoisia semaineellesiloiveiil s'assem- clié avec lui pendant tout !e temps dosa nia-
Ider pour s'ac-uscr devant la supérieure de ladie. Il ne contracta rien de la bassesse de
Irois ou quatre fautes (irincipales cl esté- son exlra( lion. Dès son enfance il ne fit pas
rieures qu'elles pourraient avoir commises, nioins paraître d'int linalion pour la verlu,
"ipécialemenl contre les conslilul ons. Leurs que d'aversion pour le vice. Prévenu des
habits, linge et ameublements sont en com- bénédictions de la grâce, il faisait tléjà con-
mun. Leur iiahil de des-us el la seconde naitrc ce (ju'il serait un jour : ou remar-
jupe sont d'élolTe de laine noire, cl la jupe «itiait en lui un airde [jieté qui le faisait dis-
de dessous de laine grise ou noire, le linge tinguer des autres, et un graudamour pair
de dessus simple et uni, celui de de>sous de l'auslérilé de la vie, les pénitences du corps
toile commune forle et de durée. Tout le et pour tout ce qui donne aux autres enfants
reste doit être simple et d'un prix médio- de l'horreur pour la religion.
cre(i). Klles doivent avoir la gorge el les On ne saurait exprimer les soins quM prit
bras si modestement couverts qu'on ne les et les divers moyens dont il se servit dès
puisse voir. Leurs cheveux ne doivent point l'âge di' six à sept ans pour se porliT de lui-
èlre abattus, el elles garilent en loul l'uni- même à l'étude. N'ayant pu èlie reçu dans
formilé. Les sneurs domestiques ou servant 'S les écoles à cause qu'il n'avait pas de (juoi
•I' - -- - - , -1- " -'- ■.
meurer dans la maison el s'unir à la coin- il ur'-éiait les mêmes écoliers dans les rues
fouiiaulé pour servir Dieu plus parfaitcmi'nt lorsqu'ils sortaient de i'ecole ou qu'ils y al-
(I aidera plusieurs bonnes d'uvn s que les laient, et p:r le moyen de quebjues fruits
so'urs pratiquent A l'égard du prochain, elles que si mère lui donnait |iour son diner el
les peuvent recevoir en qualité d'associées, dont il se priviit, il les engagent à lui don-
Ces associées ne sont obligées qu'à une an- ner ((uelquc leçon. De ( e le manière il com-
nce d'épreuve, elles n'ont point de voix ac- mença à ap|;>-,'iulre h lire; mais ayanl été
live el passive, cl ne peuvent être mises dans reçu au nomlire des enfants île ( bœur dans
les charges qui sonl électives. la paroisse du lieu de sa naissance, cet em-
L'alihè de Choisy, Fie f/e madame de Mi- ploi lui donna occasion d'augmenter sa piété,
raini'on, et les constitutions des lilles de et lui servit de motif pour se porter à l'élude
Saiiile-deneviève. Il y avait dans la maison aicc plus de ferveur ; car, s'acquitlant de soi
des Miraniioiies ciiHiuan'e cellules destinées lou' lions avec une modestie el une exacli-
aux personnes du sexe qui disiraienl pa-ser Iule merveilleuses, il trav.iillait sans re-
quelques jours dans la reiraiie et la penilon- lâche h .•ipprendre h lire, avec d'autant plus
ce. luette maison n'.i poiu été rétablie, comme d'a( plicalion iju il était aide par (juelques
le dit M. de Sain!-\"ictor dans la t' cdiliun préires de 1 1 paro sse.
lie son TalileiHi lii^lorif/ue et piilnresque de .Xprès qu'il se lut .'ipidiqué pendant quel-
l'iirif. Les religieuses de la Miscricord'' , ques .innées aux fonctions ecdési.islques en
'font nous allons parler à rarilclc suivant, qu;ilile d'enfant de clni'ur, la divine l'rovi-
1 ont tenue à loyer [leiidant quelques années, drnce lui donna les moyens d'apprendre le»
(I) Voij.. iil;. fin ilii Vi.l., 11" «.M).
in:i
MIS
praliquos des vertus relia:iPiises, le faisniil
recevoir ;iu sprvicedcs PI'. Minimes du coii-
venl de Pourrii^res, éloigné de deux liiui's
du bourg de Uiaus. On rcronnut dans ce
couveal qu'il étnil naturellement porté à
praver et à peindre, et sans aucun maître il
apfirit de liii-incmc ces deux arts. Il se ca-
cliait souvent pour s'y exercer, et y em-
ployait le temps qu'il pouvait dérober à ses
autres occupations. .Mais il lit m eux paraî-
tre les allraits de son âme à la solde piélé,
commençant dès lors à fréquenter les sac e-
menls. Il s'adonna à l'oraison mentale, qui
fut depuis l'exercice le plus ordinaire de sa
vie. Il se perfectionna dans la lecture cl dans
l'écriture, et ces Pères lui donnèrent même
«les comiiiencements de la lani^ue latine.
Dans ce temps-là la Provence ayant été af-
nifjée d'une grande famine, les personnes les
plus riclx's lurent contraintes de renvoyer
leurs domcsiiques, et les PP. Minînvs, ré-
duits à celte exirémilé, renvoyèrcnl aussi
Antoine Yvan, quoiqu'il leur fût très-utile
et qu'ils eussent beaucoup d'alTection pour
lui. fl se trouva dans une désolation extrê-
me, ne sachant à qui avoir recours jour
pouvoir subsister et continuer ses études,
car il n'avait ni parents ni amis qui pussent
l'assister, et sa mère qui était la seule per-
sonne à lanuelle il eiît pu recourir, avait
elle-même beaucoup de jieine à gagner sa
vie.
Dépourvu de toutes les commodités de la
vie cl abandonné de toutes les créatures, il
se retira dans un bois, où pendant dix ou
douze jours il ne .vécut que d'Iierbes et de
racines, et il était e\po-é tant de jour que
de nuit aux injures de l'air : mais enfin crai-
gnant de mourir de faim ou d'êtie dévoré
par quelque bêle s luvage, it résolut de quit-
ter le bois et d'aller dans des lieux où il pût
trouver quelque retraite plus favorable, et
comme il ne voulait être à charge à per-
sonne, ayant anras^é du bois, il eu lit un fa-
got qu'il mil sur ses épaules dans le dessein
de le vendre et d'employer l'argent à ache-
ter du pain. Enfin ildescenditdela montagne,
tout exiénué par la faim et les autres incom-
modités q'i'il avait soulTertes, il se trouva
même si faible, que, ne pouvant porter son
bi)i-., il eu! de la peine à loiilinuer son che-
min. Pour lors, les larmes aux yeux, il se
p'ai'j;uit amoureuseiiienl à Dieu de son ex-
liême m sère, le priant de ne le point aban-
donner. Il entendit en môme temps une voix
<lans le bois, qui lui dit qu'il ne s'attristât
pas, que Dieu aurait soin de lui. L'impres-
sion que celte voix lit dins son cœur lui .ser-
vit comme de nourriture : il prit de nou-
velles forces, et ne doutant point que Dieu
n'en lût l'auteur, il se confia entièrement à
sa divine providence.
Il alla dans la ville de Perluis, où pendant
quelques jours il gagna sa vie en faisant des
i-'iiages qu'il vendait aux écoliers et aidant le
clerc de la paroisse à sonner les cloches el
à f.iirc! les autres fondions de son emploi ;
ni<iis il ne larda pas d'éprouver ce que celle
voi.v qu'il avait entendue dans le bois lui
M's j.rs
avait dit, car (in lui donna la conduite de
quelques jeunes gen il s hommes pour leur ap-
prendre à lire. Il eut le moyen dans cette
ville de frcqurnier quelques peinires et il se
perfectionna dans la peinture. Il s'occupait à
l'élude avec tant d'ap[)licalion et de zèle ,
que , ses autres etnpiois ne lui permcllanl
pas d'y va(iucr pendant le jour, il y passait
souvent les nuits eiilifres. Outre la fiéiiiien-
tation des sacrements, il récitait cha(iuc jour
le petit office de la Vrerge. Il prenait souvent
la disci[)line, jeûnait lous les mercr. dis , les
vendredis et les samedis, et continuait exac-
tement la praiique de ses oraisons mentale*
qu'il avail commencée dans le couvent des
.Minimes de Pourrières.
Comme l'on n'enseignait que le commen-
cement de 11 grammaire à Perluis , c'est ce
qui l'obligea d'aller à Arles pour y appren-
dre la philosophie ; mais n'ayant i as iiu trou-
ver de quoi subsis'.er, il fut contraint d'en
sortir pour venir à Avignon où il s'adn ssa
au P. César île Bus, fondateur de la congré-
gatio.i des PP. delà Doctrine ch élieiine, qui
connaissanl sa piété , le reçut au nomiire de
ses disciples qui vivaient pour lori sans au-
cune obligation de vœu, comme nous avons
dit ailleurs. Mais il n'y resta pas longlem|)s,
parce iiu'ayant clé trouvé propre pour les
services domcsiiques , on ne lui permettait
pis d'aller au collège pour y éiudicr. Il en
Sortit donc avec la permission du P. César de
lîus et vint a Carpeniras, où ii entra chez un
particulier en qualité de préci'pteur de sou
lils, sans aucun autre salaire que li nour-
riture. 11 était si mal vêtu et ses habits i laient
si déchirés, qu'il n'osait pre-qne sortir de sa
chambre ni a 1er au collège ; mais le père de
sou écolier fut si content de la bonne édu-
cation qu'il lui donnait, (iii'il le fi! haliilleret
le pourvut de linge e! de toules les autres
choses qui lui étaient nécessaires.
De Carpeniras il alla à L\on où il subsista
quelque temps enseignant à écrire ; mais il
n'y resta pas longtemps , car outre que son
occup.ilion ne lui donnait pas as^ez de loisir
pour étudier , l'amour de la pureté qu'il ché-
rissait plus que toutes les sciences, le lit sor-
tir bienôt de cette ville. Il s'y était logé sans
y penser dans une maison qui n'éiait pas en
bonne réputation. D'abord il ne s'en aperçut
pas, parce que, s'appliquanl sans relâché à
des choses sérieuses et bien contraires au
vice, il ne prenait pas garde à ce «lue l'on
f.iisait dans cette maison ; miis enfin il eu
fut averti el il leconnul lui-même par quel-
(]ues réilexions qu'il fit , qu'en diverses ren-
contres on avait dressé des pièces à sa pu-
reté et qu'il y était en dangrr de la perdre.
Il résolut d'eu sortir à l'iieuro même, etcrai-
gnanl de courir le même dai;ger dans une
vile qu'il ne connaissait pas, il sortit de
Lyon pour retourner en Proveme.
Dieu enfin récompensa les peines du P.
Yvan, le faisant admettre à la dignité du sa-
cerdoce, comme il l'avail désiré dès les pre-
mières années de sa vie , ce qui arriva l'an
1113(5 , dan-, le irentième de son âge. Il avait
reçu les quatre mineurs , \e sou.s-'diaconat ot
4023 mCTlONNAinK DtS OllMI-S REIJGIKUX. I^îl
le diflconnt <lr ilirTrrnls é\oqucs ri il fui ad- jinsser Ips forces hii i ainps. Mais los gens de
mis à !a prt'liisc p ir l\\(''(nie île Soiifz. Dès liicn eurent toujours b( aucoup d'eslinie pour
qu'il lui prèlie , il leltuirna à llinn dans le sa viTlu. Le curé de lirijimiles, qui ?tait per-
dessei'i d'ii'i-isler cl docoii-oler sa iiiùre. qui suad-^ du grand tuionl qu'il avait pour la
d lis les infiMnilés de son âne olanl i rivée conduite des âmes, «oulul l'avoir pour vi-
. es bic! s de la foruine soulTrail de j;randes ciire, et l'eu pria avec tant dinsiance, uu'.l
inronunoili'é-.ll P il s»'" ''''s«^<"'''sde Uian«, yconsenlil: tuais ce ne lut qu'à condilimi
.■fin cl'ctn- plus en étal de f urnir à sa mère qu'il eonlinuerail le genre de \ie qu'il menait
li-s choses donl elle avait besoin , parla|reant dans son ermitage , à l'cNcplioii des auslé-
|i> ri sie iii d.'ii\ paris, do:il l'une elait pour rilés qui étaient incompolilde'* avei- sa pro-
ies pauvres et l'autre i our ses pressantes né- fession. I.e curé de Brignol s fut si c<lifié de
cissiies. S'S veriis élaieni trop éclatantes sa conduKe qui) lui résigna S'U héiiélice ;
pour demeurer longlemps cacliéfs dans les mais comme il fui coiil. sié au I'. Yvan , il
liasse)., ce qui fi' q'-i'il ne larda pas à avoir aima mieux l'abandonner que de soutenir un
di's emplois confoiines ù son zèle. Ses suné- procè». 11 prit ensuile la direction de la clia-
licurs lui I onnèrenl la cure de la Vcrd rc pelle de Noire-Dame de Heauvezet à Aix, et
qu'il fui oblige de quillcr peu de temps après il eut le soin de la confrérie d,- la Miséri-
pour prendre celle de Couiigiac, et il s'ac- corde. Ses pénitences el ses morlilicalions
quitta de cette cliarg-avec la sainteté , le lui ayant causé une grande maladie, il les
zèle el la vigilance d'un bon i-.a-!(eur. relranclia pour obéir à sou prélat; mais il
(juoi<iu'irfr;l Irès-circonspecl dans loules redoubla ses soins el ses travaux envers le
«es actions el qu'il eût lonjours de grandes prochain, el. la peste ajant infecté la \ille
appréhensions d'èire troni|ié , il succoaiba d'Aix, il s'exposa au péril de la mort pour
néanmoins à une Icnlalion de vaine gloire el le service du peuple. L ! m ilaiie ajanl cesse
d'aoïour-propre (jue lui suggéra le démon iiu et lobules choses se rétablissant dins leur pre-
siiiet de ses prédications. Il s'était contenté mier état, l'église de li Madeleine, qui est
(le parler au peuple avec la siuiplirité du une paroisse de la ville, se trouva sans
cœur, cl ses discours pleins fie zèle et d'à- pasteur cl sans prêtre, la maladie ajanl été
niour'pour Dieu lui avaient attiré une appro- si violente qu'elle avait enlevé la plus grande
I ation générale, ayant toujours eu un grand parlie des paroissiens el les qu ilre vicair.-s
I. ombre" d'auJileurs à ses sermons. Il se que le chapitre de la cathédrale, qui en est
trouva néanmoins de-; personnes qui lui per- curé primiii ', y avait établis : c'c^it pouriiuoi
s'iadcrenlde s'appliquer à la composilion de il jeta les yeux sur le P. Yvan pour en rem-
ses sermons avec pins d'étude , d'y observer pitr la première place; mais ayant été en-
|.s règles de la rhétori iue et de ne pas né- eorc obligé de quitter cet emploi , i pr t la
glif^er la politesse do langage, lui persuadant résolution de se retirer chez les PI', de l'O-
(jue par ce moven il serait plus eslioié, qu'il raloire, où Dieu l'appelait pour un temps ,
p 'urrait subsister plus honorablement et ob- afin de commencer son grand ouvrage de re-
tenir | lus aisén eut quelque bon bénéfice qui tablis^emrnl de l'ordre de Noire -Dame île
lui donner. lit de quoi f. urnir à ses aumônes. Miséiicorde. Il n'y avait pas longtemps qu'il
II se laissa al er à leur av^s : il se relâi h i était chez ces l'I'. , lorsque Dieu lui envoya
dans ses exercices de chanté ei de dévotion, la première fille de cet ordre. Cette fille so
parce que donnant trop de temps à l'élude de sentant appelée à une haute perfection de-
la prédication , il n'en avait pas assez pour mandait depuis lon,;tcmps un confesseur fi-
les autres pratiques qui regardaient sa per- dèle qui fjt .selon le cœur de Dieu et qui l'ai-
(iM-tion et la eoniluitc de sa paroisse. Mais il dàl à aceomplir sa volonté. D'un autre côté,
découvrit bientôt le piège que lui avait len- il y avait longtemps que b- P. 'Vvan désirait
du l'eniienii du genre humain, el pour répa- voir celle fille que Dieu lui avait fait eon-
rcr la tante qu'il avait faite d'avoir donné en- naitie dans ses oraisons.
Irée en son cœur à la vaine gloire cl à l'am- lille se nommait Ma leleine Martin et naquit
liition, i! se démit de sa cure et se retira dans à Aix en Provence l'au l(>12..lusqu"à cequ'elle
un ermitage où il demeura pendant neuf ou connut le P. Yvan , toute sa vie n'avait été
dix ans, pratiquant les ausé.itcs des anciens qu'une mortiiicaion conlinuellc ; car étanl
.inacliorèles. Il ne teangcait que des légu- encore enfant, sou plus j;rand plaisir était de
mes, d 'S r.icines , des herbes et des fruiis , se faire atlaclier à une croix par ses com-
et jamais ni chair, ni poisson, pa? même des pagnes qu'elle défiait de se mortifier de la
nufsiiidii lait ge; encore ne mangcail-il manière qu'elle le ferait, et ciur.til iiu-| ieds
qu'une fois le jour après les quatre heures sur des dindons qui lui meltaienl les pieds
du soir. Il laisait orainairemenl quatre ca- cl les jambes tout en sang. Ses leùnes et ses
renies l'année , pendant lesquels il ne man- oraisons ctaienl jiresqiie continuels , et elle
geaii que de deux en deux jours et quelque- passait pn sque touics les nuits à prier Dieu,
fois plus raremenl. Kiifin , les viandes ex- l'Ile eut quelque amitié pour un jeune liom-
iraordinaires donl il se servait les diinanches lae qni la rediercbail en mariag- avec ein-
il les fêles solennelles n'elaienl que le pain, prcssen cnt, mais lomiiie Dieu lavait desti-
Ic vin, l'huile Cl le s I. née pour être la iiicre d'un grand nombre de
Lorsqu'il était cure de Couli,;iiac, on l'ac- vierges qne son Fi:s avait choisies pour être
rusa d'être sorcier el magicien, on fil la mê- ses épouses , un jour qu'elle priait avec Ur-
rne chose lorsque dus sa s(dilude on lui vil veur dans la chapelle de .Sainte-Marthe à
pratiquer drs ausiéri; s qui ^cmblairnl sur- laraHon, il lui donna un si grand mépriii
10.25 MIS MIS !02(i
(lu nionde, que colic siiinle fille n'i-ul plus à fiili'i' do (ouk- l;i ville l'ill s ne furcnl p.!»
raveiiir r.ucune aiVeciion pour les créalme-. MMilciiieiil allaiiuéos en linr honneur, files
Elle persuada aussi le înépris du moîiile à ci'- KtiufiViieiit aussi he.mcoup d'im oiii;iioditcs,
lui qui la leclierciiiil en mariage, et lui lit er. ce que !a p rsécuti.iii fui cans,' ((u'c les
sisr ce suj(l un discours si pi 'in d'cnciioii , inanqîièreiil de ce qui cl;iit néce.-saire à la
<]Ui' le jeune lionuiie pril l.i résohilion d'ein- vie. Les filles n'osaient s'adre>iser à leurs
brasser la vie religieuse et enlra dans loi- parent'*, à cause (ju'ellc'; étaient dau'i la cou-
dre de Saiiil-Françiiis. Celte sainte fille ne {;rég;lioii coiilre leur volonté. Une granilc
donlant i oint que Dieu ne l'appelât à une dise Ite dans la ville d'Aix survint piiur lor ,
liaule perlecliou , iomn)e nous avons dit, qui l'ut tin nou^ eau surcroît de p( ine dans
(herclia un corifessenr zélé, et s'éiant adres- leur indigence, tout ce qui était né essaire à
sée au P. Yvan , sans le connaître , elle fut la vie étant hors de piix. et ne recevant au-
fort surprise l<)rs(ju'il l'appela par son nom run secours, parce que la calomnie faisait
el qu'il lui découvrit ce qu'elle avait dans qu'elles étaient ahaiiaonnées de tout le
son intérieur, jusqu'à la nioindie de ses peu- monde.
sces el de ses alîerlions. Elle connut parla Comme la Sœnr Madeleine Martin était
que c'élail le confesseur ijue Dieu lui avait reconnue pour la foi-.daleiee ei la [derre fon-
desliné, et dès lors ces deux, l'crsonnes furent damenlale de celle soc:élé, e'étiit elle que
étroitement unies par h' lien de la grâce et l'on allaquail plus parliciilièreiiîenl. Les uns
de lacharilé. l'appelaient folle, d'autres un - v; gabondi-,
Le 1'. Yvan prit un soin parlieulinr de la ceux ci une amliitieuse, ceux-là une posse-
conduite de M deleine Martin, et il n'outdia die, les enljints lui jeaieni des piètres quand
ni peine ni travail pour la préparer à l'ac- elle allait [lar la ville. On la chargeait din-
coinplissinient des dfsseins de la divine pro- jures ijuand un la renconttait dans les hôpi-
videiice. Ouel'liiti^ "i"'"' se passèreni pendaiU taux, on s'en prenait ncaie à sa mère eu
Icscjnels il eoulinua ù exerci r sa (lénitenle lui disant (|n'elle devait l'en retirer et ne lui
dans toute? les pratiques de la vi S(>iriluelle. pas permettre de voir le P. Yvan ni de lui
Madeleine étant tombée malade, tout le temps parler. Enfin on la sulli( ita si for(ca:eiit de
('e sa maladie ne fut pn sqiie qu'uir conli- détourner sa fi le du dessein qu'elle lémoi-
nucl recueillement oîi Dieu l'attira pour l'in- gnait avoir, et que loul le m -nde taxait de
struire pleinement du dessein qu'il avait que folie et d'extravagance, qu'elle alla dans
l'on fondât l'ordre de Nolic-Dame de Misé- celle m lisnn dans le dessein l'en retirer sa
riconle, et des moyens (in'elledevaitemplojer fille et de l'emmener avec elle dans sa m.ii-
avec le P. Yvan pour l'élahlir. Enlin le temps son, el p;!r ce nio^en de détruire la con^ré-
arriva que le P. Yvan s'étanl trouvé dans gition, i-uisqiie sa fille en était le prinnpal
une assemblée où l'on délibérait sur les appui. Mais, ô merveille surprenanle! Dieu
moyens d'él;ildir une congrégation de filles donna au contraire des forces -i la i^œur Ma-
conforme à celle que Dieu lui avait inspirée, deleine pour retenir sa mère avec elle. Dieu
el ce bon prcire ayant dit qu'il y avait long- parlant par sa boiiehe, tiiurha si vivement
temps qu'il avait conçu ce dessein et que le cœur de celte femme, qu'elle prit la ré-
Dieu l'avait inspiré à quelques filles qu'il solution de resler dans la congrégation, où
dirigeait, chacun en particulier l'encouragea e^le afiporta loul le bien (|uilui restait, el
à travailler à cet étab issemeni, et peu de elle fut depuis ap[>elée dans l'or ire Marie'de
jours après il acheta une m lison pour y as la Charité, à cause de la ch.irilé qu'elle
sembler les premières filles de celte congre- avait exercée toute sa vie.
ga'io"- L'une des plus grandes peines du l'onda-
Ce lut donc vers l'an (033, que la Mère leur fut de n'avoir pu obtenir la permission
Madeleine AJartin avec une compagne entra de célébrer la messe dans la peiile chapelle
dans celte maison. Elles fiiieni lU peu de que ses filles avaient préfiarée <l;ins leur mai-
temps suivies de sept ou huit autres filles, son, ce qui leur causait l:e^iucoup rS'incom-
On ne saurai! croire les austérités qu'elles nodités ; car elles ne pouvaieirt p,is vivre en-
praliquèrent dans ce commencement ; .e lièrement séparées du eemirierce du rhonde
jeûne, le cilice, la retraite, l'oraison, le Ira- el garder une es(>èie de clôiuie, étant eon-
vail el les autres exertii es que l'on pratique tiamtis de sortir tous les jours pour a 1er
dans les religions les plus léforniées, étaient ciiteedre la messe. Un an et demi s'éiat déjà
continuels dans cellecongréyation naissa te. é'i ulé depuis l'clahli semer.l de celie cou-
Les vérins éniinenles i.ue le P. Yv.m voyait grégalion qui s'élail fait du coiisenlemenl
praliijuer à Ses filles lui faisaient espérer du cardinal Alphonse-Louis de Hichelieu,
(lue Dieu bénirail son entreprise et la ferait archevêque d'Aix, qui s'ét.iit déclaré le pro-
heureusement réussir à sa gloire, il avait lecteur du P. Yvan, m;iis ce | rélal ayant été
sujet de s'en réjouir, mis peu de tenij^s transfère à l'ar clievi ché de Lyon, son snc-
après, sa joie fui changée en tristesse : tonte cesseur Louis de Itrclel ne fut pas d'abord si
la ville d'Aix se souleva contre sa congrega- favorable à noire fondaleur, et se rendit
lion, ce fui un murmure universe . On atta- 1res difficile à lui accorder les permissions
(lua la réputation des filles, on ne parlait liécessaires pour l'alL'rmissement de sa coi.-
d'elles qu'avec mépris, on les outr;;gca môirie. giégalion. Le P. Yvan lui ayant demandé
Li s parents de ces filles venaient tous les permission de célébrer la sainte iiiesse dans
ji/urs '.es trouver pour leur faire quitter leur la chapelle de ceUe n:aison, e ce prélil ayant
voealioii sous prclcite qu'elles claient la élé obligé de s'absenter pour les aO'ai;ei de
1('27 niCTÎONNAUii: |tESOIil>I\KS UF.I.ICn.LX. T'ÎS
son (lioc(^so, rCMiil lo rcqiièle du P. Vi.iii de cdii'-enlir qu'clps fissent ce \a'u li i ria
cuire lis in.iiiis de son craiid vicaire, nui deux t'VL'(|iics île voir le I'. Vv;in i-l m s li les,
;i>.int enfin accordé celle penuissi-in mil pour les dissuader de le fiire. Mais ces pré-
béiiir la cliapi'lle le jour de saiiil Thomas l.its, après avoir croulé leurs raisons, eu fu-
ap(')lre, de l'iin tG3i-, cl y célébra le premier renl si louches, qu'au lieu de presser le 1'.
1 1 messe. L'archevè(|ue à sou retour vint Yvan et lc> filles de sa congréj^alion, de ne
faire la visile de celle maison, el fui si édiiié plus soii<^er à ce vou el de chaii<;er de sen-
de la coiidule que l'un l u.iil dans la cou- lioicnl, ils chan'.;èren: eux-mêmes de scnli
{;ré;;alion, qu'il l'approuva cl ratifia les per- nienl, is devinrciU es inolecleurs de In
inis>ions que sou iiraud v icaire avail don- coiig'é ation, et aïireut de; iiis si puissam-
nées; il en accorda iiiétne de nouvelles, nieni sur l'espril de l'arche» é(|iie d'Aix ,
nlTraul sa proleciion au I'. Yvan el à ses qu'mcore bien ((u'ils ne pussent pas liri per-
lilles. Quelque leuips après, comme on cher- siiadir d'approuver le vou dont il ilait i]ues-
e II a il dans la \ i lie d Ait des personnes d'une lion, ils lui persua lièrent au moins de laiser
solide vertu el d'une piélé éprouvée pour noire foiulatrur el ses lill-s dans la pratique
liiir commeltie le soin el la conduite des de leurs exercices ordinaires, el de leur per-
fiil' s l'éiiiliiiles que l'oi» avait nouvellemenl inellre la i onlinualion (!■ leur enlri prise,
renfiMinées dans une maison particulière, juMiu'à ce que Ir temps eût mii us fait con-
l'ari hevéfine d'Aix , à la soUii italion de ii.iî re la volonté du ï^eitineur.
<]ue!qur9 personnes qui ne pouvaient souf- Cependant, le monasière étant achevé. les
iVir la congrégation du P. Yvan, fit la pro- filles de celle congiégalion y enliérent le
I osilion aux filles de la Miséricorde d'ac- jour de la sainte \"ierge de l'an lli.'iH, y avant
ceper cet emploi, et sur le refus qu'elles eu été londuiles par les principales dames île la
firent à cause qu'il élait conlraire à l'esprit ville. 11 ne restait plus au P. Yvan, pour Tar-
de leur institut, toute la ville se souleva de compliss ment de son dessein, que d'oMenir
iiouvrau contre elles, et l'archevêque vou- des supérieurs le pouvoir de lier ses lil e^
l.iit élre oliéi; mais jiar r«iilremise di- l'ar- par dis vœux solennels et de changer leur
ihevèque d'Arles cl de l'évêqui' de Fréjus, congrégation sécul ère en un institut régu-
la persécution lessa, et l'archevêque d'Aix lier. Célailcc qui était le plus difficile et ce
permit .iux filles de la Miséricorde de vivre qui deinandail de plus grands soins, car l'ar-
ilans la pratique de leurs exercices ordinal- chcvôque s'était assez déclaré qu'il ne soitl-
res. Ce prélat les attaqua néanmoins de nou- frirait aucun nouvel ordre rcli;;ieux dans
veau, il voulut savoir si elles avaient dcsse n son diocèse. lîLes pass. renl un an dan-, leur
de rester dans léial séculier, ou si elles vou- nouveau mou:islérc en habit séculier, mais
laient s'engager par des vœux solennels cl menant une vie retirée el autant régulière
faire un nouvel ordre : comme il eut appris que les religieuses les plus réformées de
la résolution oii elles étaient de se faire reli- l'Eglise; et, lorsqu'elles s'y aile idaicnt le
gicuses, il les voulut ohliirer à faire choix moins, elles oblinrenl du vice-légit d'Avi-
d'un ordre déjà appri u»é. 11 (Ma au P. Yvan gnon une bulle |iar laqiirlle il leur donna l
la conduite de ces iilles, quelques Pères de la pouvoir de cho sir une règle approuvée, de
compagnie de Jésus en furent chargés el en faire les vœux de religion el de dresser d s
rendirent un si bon témoignage à l'archcvé- constitutions.
(juc, que ce prélat leur rendit son cslime et L'archevêque d'Aix fui forlemenl sollici'é
son alVeclion. par les auiis de celle congrégation de rece-
Le P. Yvai», pendant ce lemps-là, voyant voir celle bulle; leais il ne voulut point i n
que ses Filles étaient mal logées, ache a une entendre parler, it protesta qu'il ne perinci-
placepoury bâtir un monastère, et, pendant trait jamais l'élablissement de ce nouvel or-
que lOn iravaill lit à l'edincc matérielles die. (Cependant le lomte d'.Mais, gouverneur
PP. Jésuites, (lui avaient été chargés de la de Prufcnce, iblint du loi des lelires paten-
conduile de ces Iilles, s'employaient à l'a- les du 13 novembre ll)3',), qui permettaient
vancemenl de l'édilice spirituel. La coiifiaice d'criger cette (Oiumunaulé en mjiism reli-
que ces filles •■urent en eux les encouragea, gieuse. L'archevêque d'Aix, nonobstant ces
par l'avis du P. Yvan, a leur dci tarer le des- lettres paientes, ne voulait point donner son
sein principal de leur congrègalion (lu'illes conseniemeiil pour cet élahlissemenl. (Juel-
n'avaienl encore osé dceouviir aux supé- ((ues ninis se passèrent encore, et eiilin il se
rieurs, qui était que, si Dieu leur faisait la laissa lléchir et recul la bulle. Il donna l'ha-
grâce d'être religieuses, elles s'obligeraienl bit de religion aux six premières filles de la
par vd'u de recevoir dans leur ordre !es congrégation; la s(i<ur M.idileine Marlin U'.
pauvres ilemoisellcs et les autres filles d'une reçut la première, el changeanl son nom, on
condition honnête , avec la dot qu'elli s au- lui donna celui de Mai ie-Madeli lue de l.i
raient, si grunde ou si petUe qu'elle |)ûlé re, Trinité. La cérémonie de celle pri>e d'habit
pourvu qu'elles connussenl qu'elles fussent se fil la seconde fête de la l'entec("i e de Tau
bien ajipelèes. Ces Pères approuvèrent leur 11)3'.); quelques iimis après, Taichevêque
rcMiliiliuii, quoiqu'ils prévissent bien les donna eiicnre l'habit de novice à six ;iulre5
obstacles et les dilficullés qu'il faudrait filles, et Tannée suivante elles lirenl profe-^-
vainire. Lu eflel, lor^qu'ils Teurenl proposé sein. Les r.onslilulions furent dressées par le
h Tarehevéïiue de la part ilo ces filles, leurs P. Yvan el aiprouvées par Taiihevéquc
adversaires aigrissant de (ilus en plus Tes- d Aix, après que les diflicullés louihaiit !.■
pril de ce I rélul contre c les, Tcmiiéchèrcnl quatrième vœu eurent été levées. Le fonda-
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MIS
M! S
1(::.0
leur aynnl ciisuilo eMvu3é à Uiuno pour faire
conliniipr p.ir le papi^ Urbain V'Iîl ce que
l'archevêque avait réjilé Jans cel inslilut, il y
eul encore do nouvelles difficiillés loiichanl
11' quatrième vœu; mais enfin Sa Sainteté
l'approuva par un bref du 3 juillet 1G'*2 : ce
qui l'ut confirmé par un aulre bref du pape
Innocent X du "2 airil 1GV8; et le tout fut
auiori-c par leltres pilenles du roi, enregis-
liées au parlement d'Ais 1 1 ensuite à celui
de Paris.
Il y avait environ dix ans que cet ordie
était établi à Aix sans qu'il eût fait aucun
progrès; mais le bruit des merveilles que
Dieu y avait opérées et la haute cstinie des
vertus du P. Yvan et de ses religieuses cxci-
lèrenl plusieurs personnes à demander et à
procurer l'établissement du même ordre en
d'autres villes. La première qui demanda de
ces religieuses fut l'aldiesse de Saint-Georges
d'Avignon , qui voulut se servir d'elles pour
mettre la réforme dans son monastère et
embrasser son institut : ce qui ne réussit pas
par l'opposition des religieuses de ce tno-
nasière, qui ont pris dans la suite l'habit de
l'ordre de la Visitation de Notre-Dame. Les
relij;ieuses de la Miséricorde furent deman-
dées par les bourgeois de Marseille, qui leur
donnèrent un établissement dans leur ville
l'an lGi3. Elles ntoui nèrt'nt la même année
à Avignon, où elles tirent une nouvelle fon-
dation; et l'an 164-8 elles furent appelées à
Paris, où elles s'établirent au faubourg Saint-
Germain, dans la rue du Colombier; m lis
elles ne prirent possession de leur monastère
que l'an 1651. Ce lut là que le fondateur,
après avoir travaillé si uiilement pour cet
ordre, mourut le 8 octobre 1633. Il l'ut en-
terré dans l'épaisseur du mur qui sépare le
chœur de l'église, et le P. Léon, Canne des
lîillelles, prononça Siin oraison funèbre eu
présence de la reine Anne d'Autriche, qui a
toujours protégé cel ordre.
Après la mort du P. Yvan, la Mère Marie-
Madeleine de la Trinité fit encore deux fon-
da ions : l'une à Arles, l'an 11164, et l'autre
à Salon, l'an 1662. Tout le re-te de sa vie se
pas-'a dans les souffrances et les persécutions
domestiques dont Diîu voulut éprouver en-
core sa vertu. Etant de reinur à Paris, le
confesseur de son monastère fit soulever
conlre elle une pa- lie de sa communauié, et
on la contraignit de retnumer à Avignon.
On l'accusait entre autres choses d'avoir
chargé sa maison d'un t'op ;;r,ind nombre de
pauvres lilles de qualité qui n'avaient pres-
que rien apporté pour fouriiir à leur entre-
tien. Celte conduite si charitable lui suscita
aussi des perséculi 'US dans quelques au'res
de ses monastères. D'un autre côté. Dieu lui
envoya plusieurs maladies où elle fit paraî-
tre une constance admirable cl une parfai e
résignation à sa volonté; mais la dernière
diint il voulut encore l'éprouver fut l'an
1678. Etant en son inonastèie d'Avignon, elle
fut attaquée le 20 janvier d'une bydropisie
gan;;renee intérieure et extérieure, et telle
que les chirurgiens qui l'ouvrirent après sa
mort, proteslaical qu'elle aurait dû uiuurirdo
ce mal dix ans plus tôt. Sa patience fut néan-
moins si grande, et elle s'esliinail si heu-
reu>e de soulïrir, qu'elle ne pouvait assrz
parler du bonheur des âmes qui souffrent
avec amour; et si elle témoignait quelque-
fois de la joie dans le moment qu'on la
tournait ou (ju'ou lui faisait preu'lre ui,e
aulre posture, ce n'était que parce que si s
douleurs augmentaient extra irdinairrmeni ;
et c'était dans le fort de ses douleurs qu'on
lui entendait dire nuit et jour (|u'e'le ne vou-
lait que l'accompissemcnt de la volonté de
Dieu.
L'archevêque d'Avignon la visita trois fois
pendant sa maladie; le \ice-légit l'alla voir
aussi, connaissant sou mérite extraordinaire
et r cas tout particulier que le pape Inno-
c nt XI faisait d'elle. Enfin, après avoir reçu
pour la dernière fois le saint sacrement,
quelle av.iit déjà reçu plusieurs fois dans
celle maladie, elle donna la bénédi; tion a
ses filles et à ses monastères, ei rendit sou
âme à Dieu dans celui d'Avignon, !e 20 fé-
vrier 1678. Son ciirps fut ex|iosé pendant
deux jours dans l'église, pour sati>faire à la
dévotion du peui le, et le quatorzième jour
après son décès le P. provincial des Pères da
la Doctrine Chrétienne prononça sou oraison
funèbre en présence de l'archovêiiue , du
vice-légat et d'un grand concours du peuple.
Elle a laissé des avis et des instructions pour
ses religieuses, qui ont été trouvés parmi ses
écrits, et qui ont été insérés d.ins sa Vie,
écrite par le P. Piny, Jac d)in.
La fin [irincipale pcjur laquelle cel ordre
de Notre-Dame de Miséricorde fut établi a été
pour servir d'asile aux pauvres demoiselles
et autres filles d'une condition honnête, qui,
étant appelées à l'état religieux, n'ont j),is
de quoi se l'aire recevoir dans les autres
monastères, ni assez de bien pour se ma-
rier selon leur qualité : de sorte que les
religieu.îes de cet ordre fout une profession
expresse de les recevoir avec eu qu'elles
peuveni apporter, pourvu qu'on reconnaisse
en elles les qualités requises, et (|ue le m;i-
nastère ait de quoi subsister, lA afin que cet
esprit de recevoir les pauvres demoiselles
avec le p u qu'elles ont persévère dans cet
ordre, et qu'il ne soit pas permis aux reli-
gieuses de s'en dispenser sans des causes
légitimes, outre les trois vu'ux essiiitiels du
religion, elles eu font un quatrième, par le-
quel e les s'obligent de ne refuser jamais
leur suffrage à une fille pour la seule insuffi-
sance de sa dot, selon leur bulle et leurs
constitutions, c'est-à-dire selon les modéra-
tions que les supérieurs y ont mises.
Le travail est une des principales obliga-
tions des filles de cel ordie, pour sujiplee'',
par le gain qu'elles en reçoivenl, à rinsnfli-
sance du la dot des pauvres filles, et elles y
emploient tout le ti mps qui leur reste après
leurs exercices de nligion. Cette obligation
du Iraviiil va même plus loin ; car, enrore
que les maisons soient suf.isamment reniées
pour pouvoir recevoir un certain nombre de
religieuses sans dot, elles ne sont p;is moins
tenues de travailler, el pour lors le profil de
Ï05I DlfTIONNAlKE DtS or.DP.ES UELIt.IiaX. 1035
leur tr;ivail ili>il olre ilislribuc aux autres II ne reste plus aujourcriiui des niona-
maisoiis de l'ordre qui eu oui besoiu. ou au stères de ci'l institut que la niaisui) de l'aris.
soul.igeiiieul des pauvres inouaslèies des ('et élablisseinciii de Paris était, avant l.i
auires ordres, ou à des rmiilles indi;;entes. rcvululiou de 1789, situé rue du \ ii-us-Co-
l'our encourager les lilles à travailler avec loinbier, sur la paroisse de Saiul-Sulpice.
moins d"iiicouiiiiO'lilc, le fondateur, avec le Les religieuses ijui le composai nt lé^lstè-
Ciiii-enlemenl des supérieurs, a choisi une rent tcuies aux innovations du temps, cl
régie forl douce, qui est celle de saint Au- d incurér.iit lidèles jusqu'au mome;il de
gU5iin,et a Jresscdes consliluiions trv's-nio- leur soilic île la maison, sortie qui eut lii'H
Jerées loiicliaul le vivre, le vôiir et le dor- le 3 sipteiubre 1792. Il n'y avaii, da:is la
iuir, el leur a même donné un oKlce fort cliapelle du mona-tère ab.indiMuié, qu'un
court et fucile à réciter, (jui e.'-l le petit oflicc tableau de Noire-Dame des Seirl-Douleurs
de la Vierge. A la vérité, la clôiurc y est qui frappât raiterilion des connaisseurs, cl
Irès-evaeleaient gardée : elles vont rare- l'on ignoïc le nom du peintre à (|iii il était
ment aux grilles, et elles observent les pra- dû. 0"a"'' 'es religieuses quiilèrenl leur
tiques de l'oraison, du silence el des autres cloître, elles elai nt au nombre de quinze
V(itus religieuses qui e;ir sont nécessaires cliorisles et cin(j converses professes. Il y
pour l'aceomplissenicnt de leur dessein, qui ai ait li' même noinbie de religieuses vers le
est encore d imiter la vie que la mère de milieu du d; rnier siècle, d'après VElat ou
Dieu a menée sur la terre après l'A-scnsion Tableau de Paris, de Hcauriiont. Suivant cet
de son Fils, laquelle a été Irès-relirée, éioi- auteur, les postulantes fournissaient 300
gnée de la fréqucniatlon des hommes, el mé- livres pour les dix-hu t mois que durait le
lée d'action et de contemplation. noviciat, et de plus yOOO livres pour la dot el
Leur liabiilemcni consiste en une robe de UlOO livres pour les frais d'h.ibillemenl et de
gris maur et un scapula.re de serge blanche, profession.
sur lequel elles portent un crucifix attaché lin quittant la maison en 1792, les reli-
à un ruban noir. Dans les cérémonies el gicuses se lii-persèrent dans Paris ; mais
lorsqu'elles approeiienl de la sainte table, quoii)ue vivant séparément, elles gardaient
elles inetlenl un manteau aussi de gris-maur la soumission à la supérieure, et, au bout
el [lortenl un voile noir el la guimpe comme de l'année, versant en commun le fruit du
les autres religieuses (1). travail de toutes, on reversait ég ilemenl sur
A'ojez la Vie du P. Yvan par Gilles Gon- la tête de chacune le |;ro(il de touies. Klles
doin ; son Eloge par le P. Léon, Carme des avaient quitté leur habit nionnsti(iue, mais
lîilleltes, le Recueil de ses Itltrex, la Vie de la elles portaient un uniforme noir el modeste.
Mire Murie-Madelcine de la Trinité, par le Ce genre de vie est, suivant nous, ailmi-
P. A'.exandre Piuy, Jacobin, et celle qui a rable. Ces filles gardaieni l'esprit religieux,
été composée par le 1'. Gi osez, de /a corn- el doivent en cela servir de modèle au\ insi-
pu'/iue ileJcsus. tuls qui comnieiicenl. \ ers la Gn du deini'^r
L'ordre ou congrégation de Notro-Dime siècle, elles se réunirent dans une maison
de la Miséricor.le ne s'établit point hors de tenue à loyer, rue i;e la Chaise. Alors elles
France , el quoique nous disions nous- se décidèrent, par mesure de prudence cl
môme dans l'article de la //inyru/j/aj uni- pour subvenir à leuis besoins, à prendre des
rerse!'.e consacré au P. Yvan, que les reli- élèves, à iustiuire, ce qu'elles ont continue
g'euses de cet inslitul s'clemlirenl principa- jusqu'à ce jour, car elles ont un pensionnat,
lement dans le midi, elU-s n'eurent iJOurlant ce qui n'entrait pas dans lis [remicrps dis-
que six maisons, qui étai iil celles d'Aix, (>osilions de leurs statuts, ^■raisembl,lble-
d'Arles, d'Avignon, de Marseille, de Paris et oient, elles contiiiueront toujours celte œu-
de Sancerre. Le xviii' siècle,'q\ii suiiil celui vre fructueuse pour elles cl pour le pru-
de la fondation , n'était malheureusement cha<n.
guère propensioiiné à propager des liiaisous En qiiillanl leur loyer de la rue de la
de ce genre. L'esprit du jansénisme, qui s'in- Chaise, les Religieuses l'c la .Miséricorde
sinuait partout, aura peut-être fait quelques allèrent haliiti r sur le (juai de la Tournello,
ravages dans rinstitut de la iMiséricordc. paroisse Saint-Nicolas du Chardounet, où
Nous n'en avons aucune preuve , seuleaieat elles I. mère il la maison des anciennes Mira-
noiis savons que par préeauîion ou par re- miones ou lilles de Sainte-;. eneviève, (|ui est
iiiède on lit pendant quelque tciinis signer aiijouid hui la phariiiaeie centrale d. s liôpi-
une deelaratiiin de soumission el île foi par taux, et (|u'elies occopèicnl six ans. De là,
les jeunes professes. Sans autre motif que ciles se transpoi lèrent à la i uc Neuve-Sainl-
le désir ilu ciiangemcnt, dnq | rofesses de Kii<'nne, el y prirent en location l'ancien
cbu'ur et une converse obtinrent de Mgr de monastère des religieuses de la congrégaiion
Joigne, en l'iSti, des obédiences pour aller de N )tre-Daoie, et y re tercnl pemlant neuf
de la maison de Paris à celle de Saiicerre. années. Unlin la resta ^ration des ItourUons
Ce fait , sans importance en lui-même, sera en F/ance donnant à I i rellgiin des espé-
jugé à sa valeur par le lecteur, qui aurait r.inres (lui, litlas ! n'ont p,i.s été cntièremeul
lorl, peut-être, d'y trouver d'une manière réalisées, elles se déterminèrent à acheler le
sensible une preme de l'esiiiil qui commcii- bual où est leur nionasière actuel, qui était
^'ait à régner dan5 les commjuautes. Une maison pariiculière, rue Niuve-Saiflle-
(I) Voi/., à h (iii du vol., les ii" 251 el 2£i2.
i033
»]0L
MdL
10" i
Geneviève, paroisse Saini-Médanl, au faii-
bnurg Sailli-Marcel. Eu ISiS, elles compleiit
leur vingt-huitième année de séjour dans cet
établissement, quViles ont changé en mo-
nastère, et où elles ont bâti une chapelle, il y
a dans cet ordre, en c mséquence d'une ap-
parition faite, dit-on, autrefois à la maison
d'Aix, une dévolion particulière au soulage-
mont lies âmes da purgatoire. On célèbre
p,!ur elles un salut tous les lundis, et le
preitii r lundi du mois l« saint saciemenl
esl exposé pendant la journée ; on fait un
sermon au salut du soir. C'esl la fèie de la
Compassion de la sainte Vierge qui est la
titulaire ou vocable de l'église de celte con -
grégation.
Les religieuses de la .Miséricorde prirent
(les aspirantes dès le temps de leur réunion
dans leur première maison, mais elles ne
reprirent l'haliitde leur ordre que plusieurs
années après le concordat entre Pic \ il et le
gouvernement franc lis.
La maison est aujourd'hui gouvernée par
ia révérende Mère Saint-Basile, qui remplit
la place de supérieure depuis trente ans ,
sauf les intervalles nécessités par les consli-
lutions. Madame Saint-Basile Hubert, native
de Dieppe en Normandie, est une îles an-
ciennes religieuses de la rue du Vi. ux-Co-
lombier, et aujourd'hui octogénaire ; elle est
la plus âgée des deux qui re>lenl. L'ordre
lui doit en partie sa conservation cl l'état où
il est actuellement. La communauté e>.t com-
posée, au moment où nous écrivons ceci,
de seize professes choristes et onze ren-
verses. Le régime esl absolument le mémo
qu'autrefois, sinon qu'elles ont des élèves
pensionnaires, comme nous l'avons dit ci-
dessus.
RenseiQiicmenta fonrn's par la révérende
Mère Saint-Basile Hubert, supérieure de la
Miséricorde. — If tut de Paris, in-8", par
de BeauniDiit. B-l--e.
MiSJlON (PuÉTRES DE la). Yoy. L.VZA-
KISTES.
MOCTÉIÎ. Voi/. Irlande.
MODlilSTES. Voy. Dijiesses.
MOLUA. Voy. Irlande.
MOISEVAUX. Voy. Lérins.
MOLCK ET D'AUTRICHE (Des anciennes
coNGHÉGAiioNS i)e), OU U €st parlé des con-
grégations qui sulisislent présentement en
Allemagne.
La célèbre abbiye de Molck, appelée vul-
gaireniciil Mdek, située en Autriche sur le
Danube, el du diocèse de Passaw, a donné
son nom à une congrégation de Bénédictins
en Allemagne. Léopold P% marquis d'Au-
triche, fui le fondateur de cette abbaye. Ce
pr/nie, après avoir pris possession de l'Au-
triche qui lui avait été donnée par l'empe-
reur Henri 1°' l'an 028, selon quelques au-
teurs, cl selon d'autres l'an 933, à condition
<|u'il s'opposerait aux Hongrois qui faisaient
souvent des incursions dans l'empire, se vit
i'abord obligé de porter ses armes contre
S: s nouveaux sujets, dont il y en avait quel-
ques-uns qui ne voulaient pas le reconnaî-
DlCTIONiH. DES Oi'DRES RELIGIEUX, il.
tre pour souverain. Les habitants de Meick,
qu'on nonunail pour lors Eisenburg, furent
de ce nombre ; mais le marquis d'Autriche
les ayant obligés par la force des armes à se
souineilrc à son obéissance, il établit dans
ce lieu la capitale de ses Etats et y lit sa de-
meure, aussi bien que ses successeurs, jus-
qu'en l'an 1110, que la ville de Vienne fut
reconnue pour la capitale de l'Autriche.
Léopold fil bâiir à Meleli une église qui lut
dédiée en l'huniieur de saint Pierre et de
saint Paul. Il y mil douze chanoines sécu-
liers qui y dunieurèrenl jusqu'en l'an 1089,
que Léopod 11, surnommé le Bel, les en oli
el subslitua en leur place des moines liéné-
diclius, qu'il lit venir de l'abbaye de Sahlaf,
en Italie, auxquels on donna pour premier
abbé Sigisbold.il y en a qui prétendent qui!
par les soins de cet abbé il se forma dés
lors une congrégation de quelques monas-
tères de l'ordre de Sainl-Denoîl en Allema-
gne, qui reconnurent pour chef l'abbiyc de
.Uekk; mais on n'en apporte aucun^' preuve :
le P. Anselme Schramb, religieux de cette
abbaye, qui en a donné la chronique en 1702,
reconnaît qu'on ne trouve aucun titre qui
puisse le justifier ni donner une connassame
certaine de ceîte congrégation. Il e.4 vrai
qu'il dil qu'il cioil qu'elle a subsisté; mais
il n'est fondé en cela que sur le limoignago
de quelques auteurs modernes, entre autres,
de Nicolas Sezygliescki, qui, dans son Ai/uila
Polono-Iienedict.na, a avancé que celle con-
grégation avait clé instituée par l'abbé Sigis-
bold l'an 1122, tl qu'elle avait fieuri dans
plusieurs monaUèris d'Allemagne. Mais il
avoue en même temps que cet auteur s'est
trompé en faisant Sigisbold instituteur de
celte congrégation l'an lli2, puisqu'il était
mort dès l'an lîlo. Ascagne Tambourin ri
quelqui s autres ont dil aussi qu'elle fut ins-
liluce par Sigisbold l'an 1122, et ils ont jijouté
que l'église de Melek fut consacrée pur le
pape Cilixte 11. C'est encore u.ie erreur que
1« P. Schramb rélute, puisque, selon lui, ce
fui Uldaric, évéquc de Passaw, qui la coii-a-
cra l'au 109J, il que dans l'année 1122, que
1 on prétend que cette consécration se fit par
Calixle H, ce pontife confirma à Home les
exemptions qui avaient élé accordées à ccllo
abbaye. Toutes ces contrariétés fout bien
voir qu'on ne peut faire aucun f inJ sur l'au-
torité de ces écrivains, et que tout ce qu'ils
disent ne peut donner aucune corlilude de
celte congréj^ation. Mais, supposé que l'abbé
Sigisbold en eût vérilahlemeiu formé une qui
prit le nom de Meleli, elle ne subsisia pas
longtemps; celle dont nous parlons ici el qui
a porté ce nom, ne commença que plus de
trois cents ans après la mort de cet abbé, au
lemps du concile de Constance, qui fut oa-
verl l'an !il4, cl elle doit son commence-
menl au zèle el à la piété d'Albert V, archi-
duc d'Autriche, qui fui ensuite roi de Hon-
grie et de Bohême, et enfin empereur sous
le nom d'Albert II. Ce prince, qui avait en-
voyé des ambassadeurs au concile de (Cons-
tance, après l'élection qui y fut failc de Mar-
tin V pour souverain ponlife, leur ordonna
33
1035
do lu féliciter de sa pari et de lui demander
dos coinniissaircs apostoliques pour réfor-
mer les monaslèrcs des ordres de Sainl-Au-
puslin et de Saint-Bt'iuiîl, silués dans ses
i;ial8. Ce pape lui accorda sa demande, et
nomma, l'an lil8,pourcommissaires aposto-
liques, Nicoliis de Mazen, auquel il joignit
cinq religieux bénédictins, profèsdu monas-
tère de Sublac , en Italie. C^omme l'alibaye
de Mclek était la plus considérable de l'Au-
triche, ce fut par elle que l'on commença l:i
réforme, dans l'espérance que l'on eut que
les autres, à son exemple, la recevraient vo-
lontiers; cl afin de mieux l'affermir, le même
Nicolas de Mazen fut élu abbé le Melck par
autorité apostolique, après la démission vo-
lontaire de l'abbé Jean de Flemniing; les
cinq religieux qui étaient venus avec lui
pour établir celte réforme, furent incorporés
à ce monastère; et comme ils étaient profès
(lu monastère de Sublac, et que celui de Me-
lck avait d'abord été formé par des reli-
gieux que le marquis d'Autricbe Leopold 1"
avait fait aussi venir de cette abbaye, le ré-
formateur jugea à propos de faire observer
à Melek b s mêmes constitutions que l'on
gardait à Sublac, et elles furent reçues par
toute la communauté, composée de ces cinq
religieux cn\ojés par le pape, de huit an-
ciens religieux, et de quatre autres qui y
étaient entrés pour y vivre dans une obser-
vance [dus régulière. Plusieurs monaslèrcs
d'Allemagne se soumirent aux mêmes lois,
cl qnelqiii'S-uns eurent pour abbés des reli-
5ieu\ qui furent tirés de celui de Mclek, en-
tre lesquels furent ceux d'Obemburg, de
Cclle-Maiic, des lîcossais de Vienne, cl un
en I»trie. Ils se disaient tous de la congréga-
tion de Melek, quoiqu'ils ne dépendissent
point de cette abbaye, et qu'ils ne fussent
point unis ensemble sous un ( licf : ils se
conlenlaicnt d'avoir les mêmes observances,
et s'ils avaient besoin <!e visite, ils avaient
recours au pape pour avoir des visiteurs, ou
bien les princes dans ks Ktals desquels
étaient siiués ces monastères en deman-
daient eux-mêmes, lorsque le relâchement
commençait à s'y introduire. Ceux de l'ab-
baye de Melck, p:)ur mainienir leur réforme,
demandirent une visite apostolique , l'an
liSO, au pape Nicolas V, qui leur donna
pour visiteurs l'abbé de Cclle-Marie, le pré-
vôt de Saintc-Doroihéede Vienne et le prieur
de la Chartreuse de Maurbach. Ils firent de
nou\elles conslitutions, mais peu dilTérentes
des premières qu'ils avaient reçues au com-
mcnci ment de leur réforme. L'on ne ch iii-
gca rien de tout ce qui regardait le cérémo-
nial et la lécilation de l'office divin, et les
unes cl les autres ne tendaient qu'à fair.' ob-
server la règle de saint lienoîl dans lonlc sa
pureté, l'usage de manger de la \iande cer-
tains jours de la semaine n'ajanl pas été en-
core introduit dans les monastères de l'Alle-
magne, qui n'obtinrent ce priwiége (ju'envi-
r<in rcnt ans après. Olle visite de l'abbaye
de Mclek fut cause que le cardinal de Cusa,
légat du même Nicolas V en Allemagne ,
vojanl que lobscrvance régulière élaii fort
DICTlONNAIllE DF.S ORDRES RELIGIEUX. lOM
relâchée dans les monaslèrcs do l'ordre de
Sainl-Rcnoit du diocèse de Saltzbourg, nomma
des rommissaires l'an l'»5t pnurles réformer.
Les visiteurs députés parce légat lurent les
abbés de Celte-Sl.irie et de Saint-Marlin des
Ec )ssais de Vienne, avec un religieux de
l'abbaye de Melek. L'année suivante on fit
aussi une visite dans l'abbaye de Cclle-Marie,
qui fut faite par lesahbés (Je Alelek el de Saint-
Martin des Kfossais de Vienne.
L'abbaye de Melek se maintenant toujours
dans la ferveur et dans l'observance exacte
de la réforme qu'elle avait embrassée, plu-
sieurs abbés d'Allemagne résolurent de for-
mer ensemble une congrégation sous un
chef, d'embrasser les observances de .Melek,
et de se conformer entièrement, pour les cé-
rémonies el la célébration de l'olfice divin, à
celles qui se pratiquaient en ce monastère.
Dès l'an IVGO ils avaient fait quelques t 'nta-
tives pour procurer celte union, el ils turent
encore pour ce sujet des chapitres provin-
ciaux en liGi, li67 et liTO. .Mais dans ce
dernier, qui fut tenu à Krphord, et où dix-
sept abbés des diocèses de Saltzbourg, de Fri-
singue, de Passaw, de Drixen, d'Augsbourg
et de Constance, se trouvèrent ou envoyèrent
leurs procureurs, il fut résolu que, comme la
réTorme avait commencé dans le monastère
de Melek, tous les autres monastères s'y con-
formeraient pour le cérémonial ecclésiasti-
que et la récitation de l'office divin, ils ne
s'arrêtèrent qu'à cet article, fiuoiqu'ils eus-
sent proposé d'abord les trois autres suivants:
1* de tenir des chapitres provinciaux tous
les trois ans el non pas tous les ans, comme
il se pratiquait dans la province de Mayencc;
2°queles Pères du chapitre pourraient dépo-
seras abbés pourdes fautes notables ; .3" enfin
que l'on établirait des visiteurs pi)ur tous
les monastères qui entreraient dans l'union.
Ils indiquèrent un autre chapitre à Pa>sav»'
pour l'année siiivanie; mais le nombre des
abbés et des procureurs des absents ne fut
pas si grand que dans celui d Krphord, et
ceux qui s'y trou\èrenl résolurent encore de
se conformer pour les cérémonies de l'église
à l'abbaye de .Melek ; mais il n'y eut point
de congrégation formée et soumisi* à un chel
ou supérieur général, cela n'ayant été e\é-
cué que sous le ijontilical du pape Ur-
bain VIII.
(iaspar,abbé de Melck, avait invité, dès l'nn
1G18, les abbés d'.Vutriche à venir à Melek,
aiin de convenir ensemble des moyeis né-
cessaires pour former une congrégation dans
cet archiduché. Lesabbés de Kremb—Muns.
ter, Garsten, des Ecossais de Vienne, d .\1-
tembourg,Goll\veii h el Celle-Marie, s'y Irnu-
vèrcnl et résolurent de s'unir ensemble et
de former une congrégation sous un chef.
Le piicur de Garsle.n avait déjà dresse des
constitutions pour être observées dans celte
nouvelle congrégation. Elles furent exami-
nées dans l'assemblée, ()ui trouva qu'elles
étaient trop générales, et qu'elles ne pou-
vaient être également observées dans les mo-
nastères. On chargea Ueiiu'r, prieur de Mc-
lek, d'en faire d'autres qui convinssent à
1037
MOL
MOL
iOU
lous ers monastères. Mais les Iroublos que
les prolc'slants avaient oxcilés presque dans
le même temps dans la Bohême cl dans l'Au-
iriclie, obliijèri'nl les abbés de différer l'éla-
lilissement de leur congrégation jusqu'à l'an
102 i, qu'il fut fait. Guspar, abbé de Melek,
était mort, et Uiiner, sous-prieur, qui avait
clé cbargé de dresser les constitutions de la
congrégation, lui avait succédé. La première
chose qu'il fit après avoir reçu du souverain
ponlife la confuination de son éloclion, fut
d'inviter les abbés d'Autriche de se trouver
à Melek pour conclure cet élablissemenl,
dont le projet avait été dressé dès l'an 1C18.
Il s'en trouva onze qui y donnèrent les mains,
et qui reçurent unanimement les conslilti-
lions que l'abbé llcinér avait dressées. Ils
écrivirent à Constantin, alibô de Saint-Ba-
voiit, de la congrégation du Mont-Cassid, et
le prièrent d'in ilcmander la confirmalion
fiu pape Urbain \'III, qui l'iiccorda par s m
bref de l'an 1623. Ces constitulions furent
imprimées l'année suivante. Cette congiégi-
lioii était pour lors composée des abbayes de
Melek, Col twexb,Krcmbs-.M uns ter, Li ni bach,
des Ecossais de Vienne, de (îarsten, d'AI-
lembourg , Monsée, S<'iUensladen, Kleinck
cl Cellc-Marie. Elle devait être gouvernée
par un président ou supérieur général, qui
devait élre élu tou» les deus ;ins, et qui pen-
dant ce lemps-là devait fa ro une fois la vi-
site de tous le- monastères. Jl devait aussi y
avoir un visiteur dans chaque province, qui
devait faire tous les ans la visite des monas-
tères de cette province, à moins que le pré-
sident ne \d fît lui-même.
l'eu de temps après il se forma une autre
congrégation en Souabe; mais, l'an 1(530,1 on
proposa de réunir toules les congrégations
d'Allemagne et de n'en faire qu'une, et même
d'y faire entrer lous les monastères qui n'é-
taient d'aucune congrégation. L'abbé d- Ful-
des, qui était pour lors de la congrégation de
Bursfeld, conçu tic premier ce dessein. Il obtint
permissiDn du pape et de l'enifcieur de faire
une asseniblée générale de tous les abhéi
d''Allei)iagne. Elle se lit à Balisbonne au mois
de mars IGIJO. L'abbé de Fuldes y présida et
y assista au nom de la con'^régalion de Burs-
leld ; l'abliéde Ki cmbs-Munslcr, au nom de
la congrégation d'Autriche; les abbés d'An-
(lechs et de l'rufeniag, comme députés des
autres abbés de Bavière, cl le I'. Boniain
ILiy, comme procureur de la congrégation de
Souabe. On y dressa seulement les prélimi-
naires de cette union, et l'on convoqua une
auire assemblée générale p .ur l'année sui-
vante, qui devait se tenir encore à Uaiis-
bOMue. L'abbé de Fuldes s'y trouva aussi,
avec les abbé^ de Saint-Maurice et d'Iïasla-
fellpourla congrégation de Bnrsfeld. L'abbû
d'Oclilcnbusen, visiieur de la congrégation
lie Soualie, s'y trouva pareillement au nom
de celle congrégation. Les abliés de Garslen
et le pi leur de (îoltwcich furent dépulés
par la congrégation d'Autriche, et l'abt)é de
Saint-Pierre de Sallzbourg représentait les
abbés de ces diocèses, il y lut résolu que
chaque monastère garderait ses observances
particulières ou qu'ils feraient union avec 11
congrégation de Bursfeld, jusqu'à ce que l'on
eût pris d'autres mesures dans la promièro
assemblée qui se tiendrait et où deux abbés
de chaque province se trouveraient. On en-
voya des procureurs à Rome et à la cour im-
périale pour infiirmer le pape ,el l'empereur
de ce qui s'était lait et avoir leur consente-
ment pour former cette congrégation géné-
rale de tous les monastèresd'AlIcmagne. Mais
dans le lemps que l'abbé de Saini-l'ierre de
Sallzbourg, qui avaitéiédépulé deTassemblée
pour aller dans tous les monastères solliciter
les abbés d'entrer dans cette union, se dis-
posait à exécuter sa commission, l'irruption
que 1rs Suédois firent dans l'empire en rom-
pit lous les projets. Elle n'eut point lieu, et
tout ce que produisirent les assemblées qu'on
avait tenues fut l'érection de la congrégation
de Sallzbourg, composée des monasiô es de
ce diocèse, qui s'unirent ensemble, lanl)i'i.l,
dans un chapitre qui se tint à Sainl- Pierre
de Sallzbourg, où se trouvèrent l'abbé Je ce
monastère a\ec ceux da Sainl-\'it cl do
Bourn. Les abbés dO^siak cl de Sainl-Paul
y envoyèrent leurs procureurs. Cette con-
grégation subsiste encore, ayant présente-
ment neuf monastères. Celle d'Autriche se
maintenait encore l'an 1G4-4-, comme il paraît
par quelques bulles du pape Ui bain Vlil, qui
lui accorda cette année des indulgences :
mais II semble que par la. mort de ce pape,
qui l'avait approuvée, et qui arriva presque
dans le même temps, elle ail été éteinte, car
il n'en est plus fait mention depuis ce iemps-
là. Les congrégations qui subsistent en Al-
lemagne présentement sont celles de Hursfeid
dont nous avons rapporté l'origine dans notre
premier volume; de Suisse, de Saltzliourg, qui
ont chacune neuf monastèr, s ; de Souabe au
diocèse de Constance, qui a onze monastères •
de Souabe au diocèse d'Augsbourg, qui ,i seul
monastères; d'Alsace Brisgaw, quia cinq mo-
nastères, et de Bavière, qui a dix-neuf mo-
nastères. Cette dernière lut érigée sous le
nom de l'Ange Gardien oudesExempls, sous
le pontifical d Innocent XL Le président ou
supérieur général esl élu tous les Irois ans
et le premier chapitre su tint à la fin de l'aii
1686.
(Quoique les monastères d'Allemagne qui
suivaient les cérémonies et observances de
Melek, ne fissent point un corps de con"ré-
gation avant leur union, (|ui se fil en 162J
(comme nous l'avons dii ci-devantj, ils se di-
saient cependant de la congrégation et do
l'union de Melek: car lorsqu'un voulut unir
ensemble les réformes de Alelek, de Casiel
cl de liursfeiil, comme nous avons dii en
parlant Je ces deax dernières congrég. liions
les monastères qui suivaient les dillérenies'
observances de ces réformes envoyèrent des
députés au rhapilre provincial qui se tjnl,
l'an 1W6, à Salgenslad, où ceux delà réforsne
de Melek prirent la qualité de députés de
l'uinoii de iSlelek, aussi bien que ceux des
congrégations de Casiel ei de BursfeM, qui se
diieiit dèj)ulés de l'union de ces congréga-
lians, comme il paraît par les actes de ce
4033
nicTioNNMnr nF.soKnJif.s rkligif.ix
1;'.:»
f hapilrc : Depiilali rcro Pulrefet commiffnrii
vosiri lii sunl, ex unionc Mellicensiwn <e-
rcrendissimi ]'a(res in Klcliingen cl H'iblln-
t/en, ex nnionc Ccflellensiiim S. .¥,<jidii in
Morim' erga et S. Cntcis m n'erden; ex
unione liuifildensiitm in mnnte S. Jacobi ex-
tra murosMo(junlinosel S. Martini Spnnheim.
AdscIiihis Schramb. (^Iironie. Mellieense,
scn Atinales Monasl. Melliceiisis.
MONS. Voy. Niviii.i.E.
MONT-CAU.MEL. Yoij. CAnMÉUTES et
Carmes.
M0NT-CAUMP:L (Dk L'ARCHicONFnATKnNnÉ
DE Notiu;-I)ame du) « Rome.
Si nous avons parlé à l'.irt. Carmes ilc la
roiifréric du ScapulitiiR de la sainte ^'icrpc
('•lahliedans l'ordre dos Carmes, où l'on donne
a cens nui s'y font insiTire un petil scapu-
laire composé de deux rubans auxquels sont
allacliés deux morceaux de drap do trois eu
quatre pouces en carré, ce n'a été que pour
faire >oir l'erreur où était tombé le P. l'ape-
liroch, en croyant que les religieux de Saint-
François nedonnaicnlàleur tien iaircs qu'un
cordon, et les Carmes aussi à leurs lierciuires
ces sortes de si apulaires, notre dessein n'é-
tant pas de parler des simples confréries
dans cette histoire. Mais comme nous y fai-
sons aussi entrer les congi égalions et s ciétés
séculières, il semble que l'on doit melire en
ce rang les confréries qui furmenl des espè-
ces de sociétés et qui sont distinijuées par des
babils particuliers, qui ont des statuts cl des
règles, des églises, des ciiuelicres, qui font
publiquement des processions sous leurs
croix parti( ulières, qui la plupart n'admet-
tent les confrères qu'après avoir été éprou-
vés pendant un certain temps, sous la con-
duite d'un maître des novices, cl qui sem-
blent former un corps dans l'Eglise.
Telle est l'arcbiconfraternilé de Notre-
Dame du Alonl-Carmel à lîome. 11 y en avait
aulre^)is une sous ce nom dans l'église de
Saint-Chrjso;;one qui appartient aux Car-
mes de la congrégation, de Mantoue; mais
ayant été presque abandonnée, on en érigea
une au'.re dans la même église, l'an 15'i..'J,
sous !e litre du Sainl-SacremeiU et de Sainte-
Marie mère de Uieu du Carmcl. La confrérie
de Nuire Dame semblant avoir été supprimée
jiar l'union qui en avait é:é faite avec celle
du Sainl-Saercnient, le pape Clément \'I1I
l-ermil (jue Ion en insliluàl une autre sous
le nom de Noire-D.ime du Monl-Carmel dans
l'église de Sainte-.Marie-dcs-Monis, qui ap-
partient aussi aux Carmes, mais qui ne dé-
pend d'aucune congrégation ni province,
étant immédialemenl soumise au général,
comme nous avons dit ailleurs.
Les confrères qui furent associés à celte
confrérie curent d'aburd une chapelle dans
celte église; mais alin d'avoir plus de liberté
pour faire li urs exercices, ils ont depuis fail
bâtir un oratoire au mont Magnanopoli, où
ils s'assemblent pour y réciter en commun
l'ullicc de la Vierge, et et y faire célébrer les
(I) y l'y., -i \.\ fil) (lii v.,!.,!!» 2."..
di\ ins oflices. Leor h.ibillement consiste en
un sac de couleur tannée, auquel est atlaclio
un rapuce qui leur cotiv re le visage, descen-
d.anl en pointe jusqu'à la ceinture, n'y ayant
que deux petits trous à l'en Iroit des yeux,
afin qu'ils puissent voir et n'être point vus.
Leur sac est lié d'une ceinture de cuir, cl ils
ont sur les épaules un camail ou niozellc de
serge blanche (1). Quoique cette confrérie ail
le lilre d'archiconfralernilé, elle ne jouit pas
néanmoins du privilège ilcs autres archicon-
fralernUes qui sont ainsi appelées à cause
qu'elles sont chefs et supérieures générales
des confraternités qu'elles agrègent à leur
institut, qui doivent observer les mêmes rè-
gles cl les mêmes statuts, et porter leur ha-
hilli'mcnl ; mais le général île l'ordre dis
Carmes, ou ceux à qui il en donne commis-
sion, ont seuls le droit d'ériger de< archicon-
frjiternités ou confraternités de Nolre-I)au)e
du .Monl-Carmel.
Carol. IJarlhol. l'iazza, Opère pie di Borna,
part. M, Irait. 6, cap. 13.
MONT-CARMRL ET DE SAINT-LAZAUE
DE JEIU'SALEM (Des (.hevai.iiiis de i.'ou-
ore royal, imii.itaire et hospitalier uk
Notre-Dame du).
Nous avons dit, en parlant de l'ordre de
Saint-Lazare, qu'il avait toujours subsisté
en France, quoiqu'il eut été supprimé par
Innocent S'il!, l'an 1'»'J0; qu'après son ré-
tablissement par Léon X, il y avait eu des
grands maîtres de cet ordre en Dalie. qui se
disaient grands uiaflres de l'ordre de Saint-
I^azare de Jérusalem par tout le monde ,
quoi(iu'il y eût de véritables et légitimes
grands maîtres eu France <;ui avaient ^ue-
cédé les uns aux autres sans interruption
depuis l'èlablissemenl de l'ordre ; el qu'enfin
le pape Grégoire XIII avait uni cet ordre,
l'an lo72, à celui de Saint-.M.iurice en Sa-
voie, nouvellement institué par le duc Em-
manuel l'Iiilbert. sans que celte union ait
porté préjudice à l'ordre de Saint-Lazare en
France, dont le roi Henri I\" donna la grande
maîtrise à Philberl de Nérestang , qui fui
aussi premier grand m.iilre de l'ordre de
Notre D.ime du iMonl-Carmel que ce prince
institua dans son ro\aum<'. Le IV Toussaint
de Sainl-Lue dit {Abrcijc liisl. de l'ordre de
Sainl-Liiziire, p. lli) que le roi ne fil celle
institution de l'ordre de Notrc-hame du
Mont-Carmel, que pour faire lleurir davan-
tage celui de Saint-Lazare 1 1 lui faire rc'^ti-
tuer les biens qu'on lui avait usurpés en
unissant l'ordre du Mont-Carmel à celui de
Sainl-l.azare. M. Ilerman [irélend qu'.\imar
de Chattes, qui était gr.ind maitre de ce der-
nier, ((ineiit ren\ie de le remelire dans son
[ireinier lustre, mais qu'ay;inl elé prévenu
parla mort, l'hilbert de Néicstang lui su -
céda dans ce dessein, el employ.i si heureu-
sement son pouvoir auprès d'Henri 1\', que
ce monarque avant poursuivi à Koine le ré-
tablissement de ccl ordre, il oblinl du pape
l'aul y l'ellel de sa demande, p.ir une bulle
fort avantageuse donnée l'an 1GU7; mais que,
lOil
MON
comme fc priico vou'ul, à riinilalion du duc
de Savoie, juiiidrc aussi un autre ordre à
celui de Saint-Lazare pour lui doinier un
nouveau relief, il établit celui île Nolrc-Danie
du Monl-Carmel. l-e P. iSonanni a avancé
{Calalog. Ord. milit., n° G't) qu'Aimar de
^Chattrs, étant grand maître de l'ordre de
Saint-Lazare en France, conçut le dessein de
le rétablir enllÎMcmerit et de lui fiiire resti-
tuer tous les biens qui lui avaient été ô!cs,
mais qu'étant mort avant que d'avoir exé-
cuté son dessein, Pliilberl de Nérestang, qui
\"\ avait succédé dans la grande maîtrise,
alla à Kome, où il obtint du pape Paul V
qu'à l'avenir son ordre serait appilé l'ordre
de Notre-U.inie du Mont-Carmel.
Mais tous ces auteurs, sans paiIer de plu-
sieurs autres, ont été contre la vérité de
l'histoire. Henri lY n'institua l'ordre de No-
lie-Dame du Mont-Carmel que pour donner
des marques de sa piété ci de sa dévotion
envers la sainte Vierge. 11 écrivit à son am-
'la^sadcur à Rome pour obtenir du pape
i'uul V l'érection de cet ordre et sa coufir-
niation par autorité apostolique: ce que ce
pontife accorda par une bu le du IG février
i()07, par laquelle il donna pouvoir à ce
prince de nommer le grand maître de cet or-
dre, lequel pourrait créer autant de cheva-
liers que bon lui semblerait. Il permit à ces
chevaliers de se marier, cl, après la mort do
leur première femme, de passer à de secondes
noces, et d'épouser même une veuve. 11 les
obligea à faire vœu d'obéissance et de garder
la chasteté conjugale, et leur accorda la per-
mission de pouvoir avoir des pensions sur
toutes sortes de bénéfices eu Franco, quoi-
qu'ils fussent mariés et même bigames, sa-
voir, le grand maître, jusqu'à la somme de
quinze cents ducats d'or, et les chevaliers
jusqu'à cinq cents ducats d'or de la chambre
apostolique, ces deux sommes évaluées à sis
mille livres, monnaie de France. El dans
celte bulle il n'est nullement fait mention de
l'ordre de Saint-Lazare , non plus que
dans une seconde que le même pape donna
au mois de février de l'an 1G08, par laquelle
il prescrit à ses chevaliers leurs oblig.iliou'i,
qui sont de faire leur profession de foi avant
leur réception à l'ordre, de se confesser et
communier le même jour qu'ils recevront
l'habit, de poricr sur leurs manteaux une
croix de couleurlannée.au milieu de laquelle
il y aura l'image de la sainte Vierge, de faire
vœu d'obéissance et de chasteté conjugale,
de porter les armes contre les ennemis de
l'Eglise, lorsqu'ils en seront requis par le
sainl-siége et le roi très-chiélien ; de réciter
tous les jours l'office de la sainte Vierge ou
sa couronne, d'entendre la messe les "jours
de fête et les samedis, de s'abstenir de viande
les mercredis, de se confesser et communier
le jour de la fête de Notre-Dame du Mont-
Carmel que l'on célèbre le 19juillet, des'as-
sembler le même jour (our réiébier cette
fête, et de payer au trésorier do l'ordre les
responsions par rapport aux commanderies
qu'ils posséderont.
Le toi, au mois de juillet 1608, voulant
MON 10 ',2
doter ce nouvel ordre de Noire-Dame du
Mont-Carmel et pourvoir à son établissement,
supprima par ses lettres patentes l'office di-
grand maître de l'ordre de Saint-Lazare, et
unit toutes les commanderies, prieurés cl bé-
néfices qui appartenaienl à cet ordre et
étaient en la collation de ce grand maître,
à l'ordre de Noire-Dame du Monl-C;irmcl ;
ainsi ce ne fut point ce nouvel ordre qui lut
uni à celui de Saint-Lazare, comme ont écrit
plusieurs auteurs, mais l'ordre de Saint-La-
zare qui fut uni à celui de Notre-Daenc du
Monl-Carmel. V^oici les lettres de ce prince.
Henri, pur la (jrdce de Dieu roi de France
et de Navarre, A tinis cnix qui ces présentes
lettres verront. Notre saint-père le papeaijant,
à notre supplication faite par notre iimbassa-
deiir, résidant près sa personne, par su bulle
du XIV des kulendcs du mois de mars dernier,
<rigé il institué en notre roijaume nn ordre
à litre de la Vicrç/e Marie ou Notre-Dame de
Mont-Carmel , ainsi que le comicnl la bu'le
dont copie est ci-alt,chi'e sous le conlre-scei,
savoir faisons que nous ayanl bien agréable le
contenu en ieelle, et désirant en ce qu'il nous
sera possible pi omouroir à l'ctubiissimeul
d'icelui, orner el eniichir de méiites conve-
nablrs à lu splendeur d'icelui, pour l'uug-
mentaiion de la gloire de Dieu m celui notre
dit royaume, que nous espérons devoir réussir
à ladite institution, avons, de notre certaine
science, puissance et autorité royale, éteint et
suiiprimé, éteignons et supprimons par ces
présentes l'étal de grand maître de Saint-La-
zare,qui a eu ci-devant lieu en notre dit royau-
me, el en ce faisant avons toutes etcliariincs les
commanderies, prieurés el bénéfices, de quel-
que qualité et condition qu'ils snient, qui ont
été sous ledit litre et en la collation, provision
et autres dispositions du grand maître, unie.":
et annexées el attribuées, unissons cl annexons
et attribuons audit ordre el milice de Notre-
Dame de Mont-Carmel, pour dorénavant cire
tenus, possédés eldcsservis par le grand maître
qui sera par nous établi ; et les commandeurs,
chevaliers et autres officier s, qui seront créé s par
ledit grand maître, en vertu du pouvoir qui lui
sera donnépour cet effet, nonobstant to:is sta-
tuts et institutions à ce contraires, et nonobs-
tant oppositions ou appellations quelcon-
ques, desquelles si aucunes interviennent nous
avons retenu et réservé, retenons et réservons
la connaissance etjuridiction à nous et à noire
conseil d'htat, et icelle interdite et défindue,
interdisons et défendons à toutes nos cours et
juges quelconques. Si donnons en mandement
à nos limés el féaux conseillers, les gens te-
nant noire grand conseil, que ladite bulle et
cesdites présentes ils fassent enregistrer, cl le
contenu d'icelles observer inviolablement, sans
permettre qu'il y soit contrevenu en aucune
sorte et manière, car tel est notre plaisir, etc.
Et afin, etc. Donné à Fontainebleau au mois
de juillet l'an de grâce 1G08, el de notre règne
le dix-neuvième.
Le roi donna ensuite la charge de grand
maître de cet ordre à Philberl do Nércslant;,
gentilhomme do la chambre cl meslre do
camp d'un régimcnl d'infjuteric, qui avait
I0i3 DICTIONNAIRE DES ORDRES RELIGIEUX. 10i4
posstvlé aui'ara\ant colle de grand maître de pour l'union de ces deux ordres, conPirmaiit
l'ordre de Sainl-Laz/ire. Il en préla scrmcnl tous le» privilogi'S qui avaient élé accorda»
entre les mains de Sa Miijfslé, qui, par un à celui de Sainl-Lazarc par les papes Pie IV
acte du dernier octobre de la même année, et Pic \'. La nièine année le roi pourvut lo
déclara de nuuvoiiu (]ue les cotnniandcries, marquis de Néresl.iiiir, fils de Cliarles-Ailiille,
prieurés et autre* bénéfices de l'ordre de de la charge de grand maître. Il en préla
Saint-Lazare, qui étaieiil en France et dans serment de fidélilé enlre les mains de Sa
les terres et pays soumis à l'obéissance de Majesté, qui lui donna la croix de cet ordre.
Sa Mtijeslé, seraient affectés et apparl'en- Il partit ensuite pour aller commander l'es-
draient aux grand m;illre, clievaiiers et olfi- cadre des vaissi'anx destinés pour la Mjreié
cicrs de l'ordre du Monl-Garmel, et qu'ils du commerce de l'Océan. Il ohlinl. en U>72,
en jouirai'-nl de même que s'ils élaienl ou un édil du roi qui télablissait les cliexaliers
avaient élé faits chevaliers de l'ordre de du Monl-Carmcl et de S.iinl-Laz ire dins
Sainl-L.izare ; et Sa Majesté ordonna aussi tous les droits (pii .ivaicnt a| parienu à leur
«lu'en conformilé de la bulle de Paul V ces ordre, et qu'ils pouvaient avoir perdus, qui
chevaliers jouirùient des pensions dont il confirmait l'union de ces deux ordres, et
lui plairait les gratifier sur les évéchés, ab- leur donnait l'adminislratiiiu pcrpéluclle des
bayes ou autres bi'uéfices consistoriaux qui nialadreries, liôpilaux, maisons-Dieu et aii-
claient à sa collation, quoiqu'ils fussent ma- très lieux dans le royaume, où l'Iiospilalilé
r'és.Surquoi l'archevéquedeliour^es, André n'était pas observée, et qui unissailà l'ordre
Fremiol.porlanllaparoleau nomduclergéde de Notre-Dame du Rlont-f'armel les biens
France, dans la remontrance qu'il fil au roi la de quelques ordres ii ililaires et hospitaliers.
inémeannée.priaSaMajeslédcnepas permet- qui par cet édil ét.iienl réputés éteints d
Ire que leschevaliers de Notrc-Uamedu Mont- supprimés en France, spéiialement les or-
Oarmel (qu'il appelaitchevaliers de l'Annon- dres du Saiiit-KspritdeMont|)ellier, de Sainl-
cladc), engagés dans le mariage, envelo|ipés Jac(|ues de rjipée, du Saint-^épiilcre, de
dans les affaires du monde, et de qui le bras Sainle-C.liristine de Somporl, de Nolrc-Dame
destinéauferdevail être plutAt couver! desang dite Teutonique, de Saint-Jacques du llaut-
quedelafumécdesencensetdessacrifices, mis- P.is ou de Lucqucs, et de Sainl-Louis de
senties mains ^urles labUs sacrées, prissent Bouclieraumoiil; pour des b'ens et revenus
les pains de p' oposition,cl cnlreirissenl sur de ces ordres, nialadreries, hôpitaux, ni.ii-
les revenus qui u'é'aient voués que pour les sons-Dieu et autres lieux, ainsi réunis à
lévites cl pour ceux qui o'.lraient à l'iiutel. Le l'ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel cl
roi ré|ondil aux prélals, pour ce qui regar- de Saint-Lazare, en élre formé jiar le roi dis
dail les chevaliers de r.\nnonciadi' dont ils cominanderies, desquelles Sa M;ijeslé et les
parlaient, qui! en avait institué l'ordre sous rois ses successc urs auraient, en qualité do
le nom do la Vierge Marie dite du Mont-Car- chefs siuveiains de cet ordre, l'entii're et
mel,à cause de la particulière confiance que, pleine disposition en faveur des officiers de
à l'exemple des ducs de Bourbon et Veuilo- leurs troupes qui se feraient admettre dans
me, ses aïeux, il avait toujours eue au se- cet ordre, et sur ces comniandcries y affecter
cours cl aux prières di- cette sainte \'ierge; telles pensions qu'elles pourraient cl de-
qu'il leur avait assigne non pas les revenus vi aient jiorter. Sa Majesté voulut aus^-i ((ne
ecclésiastiques, mais seulement ceux des sur cescommanderies l'on prît, par forme de
hôpitaux et comniandcries qui avaient autre- rc>ponsiou et de contribution, les deniers
lois appartenu eu sou royaume à l'ordre de nécessaires pour aider et subvenir a l'enlre-
Saiiit-Laz,:re, el que s'ils av.iient outre cela tien des hôpitaux de ses armées et places
quelijues peliles pensions, c'était le pa[)a frontières où seraient reçus les officiers et
qui les leur avait accordées. soldais blessés et malades, ayant jugé ci tlo
application plus conforme aux intentions
(,l,ude, marquis de Nereslang, fils de Phil- ^^,^ fondateurs des lieux pieux, à présent
beri, fut reçu en survivance dans la ch.iigo ^^^,■^^ „j, ^ presque plus de lé; reux dans le
de grand ùiaiire en Kill. Charles, marqui.s de royaume, voulant néaimioiiis que ceux qui
Nereslang, fils de Claude, la posséda en 1039, seraient attaqués de ce mal fussent tous lo-
après le décès de son p. re. sur les provisions „^.s dans un même lieu aux dépens d,' Tor-
du roi Louis XIII. Charles-Achille_de Ne-- dre, conformément à son institulion. Et pour
reslang, second (ils de Claude, en fut aussi iv.xéculion de cet édil et connaitro de tous
jiourvu, en Uikh, par le roi Loui'i \l\ . Ses i^^ procès et différends qui n.iîtraicnt pour
provisions lui donnaient la qualité de crand raison des choses y contenues le roi réso-
niailrc de l'ordre de Notre-Dame du Mont- [^ j-^tahlir une chambre composée d'offi-
Carmel et de Saint-Lazare de Jciusalem. Il ^.^^,^^ j^^ pi„^ considérables de son conseil,
fut confirmé dans cette charge par une bulle ^„ laquelle chambre les procès cl différends
d'Innocent X, cl dejniis c- temps l.i le grand seraient juijés en dernier ressorl. lui doii-
m.iltre et les chevaliers prirent le nom de „.,„, pouvoir d'enregisln-r toutes déclara-
< licvjilicrs de Notre-Dame du Monl-Carnicl ,i„„s ^.^ arrêts, faire des règlements tels
et de Sainl-Lazarc do Jérusalem. qu'elle jugcraii à jiropos, et subléléguer, en
Le roi confirma encore l'institution de cet cas di; besoin, tant en matière civile que cri-
ordre, au mois d'a\ril lOli'i, et le c.irdinal de niinelle; l;i(|uelle diamlire durerait tout le
Vend<'inie, éianl légat a Litière en France du temps que Sa M.ijeslé jii.'erait luv essaire el
l ape Clémeiil IX, donna une bulle l'an itilJS à propos pour le bien d> s affaires do l'urdrc,
10 iS
MON
MON
1046
»e réservant de la révociuer et supprimer
lorsuue bon lui seniblor.nl.
Le grand mallre de Nérestang, pour par-
venir à l'eséculion de cet édil, conToqua
un chapitre général à lîoigny, qu'il indiqua
au 19 lévrier 1673. Mais avanl qu'il se tînt,
,11 se démit volontairement de sa charge de
grand mallre entre les mains du roi. Les
chevaliers, en ayant eu avis, assemblèrent
leur chapitre général le il janvier 1673, et
I réseutèrent une requête au roi, parlaqui-lle
ils suppliaient Sa Majesté d'unir la charge
de grand maître de leur ordre à sa couroiiiio
et d'agréer la poslulaiion qu'ils avaient fiile
de M. le marquis de Louvois pour gouverner
l'ordre en qualité de vicaire général.
Le roi déclara qu'il ne pouvait alors unir
à sa couronne la grande maîtrise, mais qu'il
agréait l'élection qui avait été faite par pos-
tulation dans le thapitre, du marquis de
Louvois pour régir les alîaires de l'ordre
sous son autorité. Sa Majesté fit expédier des
provisions de grand vicai e en faveur du
inarquis du Louvois le i février 1673. Il fut
reçu dans le chapitre de l'ordre en cette qua-
lité et confirmé dans le chapitre général qui
se tint le 10 ilu même mois à Boigny. On
poursuivit en cour de Rome les bulles de con-
firmation. M. Co iu(iin, docteur de Sorbonno,
y (ut envoyé pour les solliciter, mais ce fut
inutilement; car le pape Clément X ne les
voulut point accorder, ce qui n'empêcha pas
le marquis de Louvois de gouverner toujours
l'ordre et de recevoir les chevaliers.
L'édit de 1G72, nonobst.int les opposilions
de Louis-Nicolas Parnajon, général des Cha-
noines Hospitaliers de l'ordre du Sainl-Esprit
de Monlpe lier, et celles des prétendus che-
valiers du même ordre, fui enregistré au
grand conseil le 20 lévrier 1673. Le roi, con-
formémenl à cet édit, ayant établi une cham-
bre royale à l'arsenal de Paris le 8 janvier
de la môme année, ordonna, par ses lettres
patentes du 22 février, qu'il y serait aussi
enregislié; ce qui fut fait le 23 du même
mois. Cette ch.imbre était composée d'un
conseiller d'Etat ordinaire, de huit conseillers
au grand conseil, et d'un procureur général.
Sa Majesté, par ses lettres du 2i mars 167i,
déclara que dans l'ailminislratioa des hôpi-
taux et lieux pieux, accordée à l'ordre de
Nolre-Dami! du Mont-Carmel et de Saint
L.izare par cet édit de 1072, elle avait en-
tendu comprendre les hôpitaux fondés pour
la réception des pèlerins et des pauvres pas-
sants, et par un autre édit du mois d'avril
1675, elle déclar.i ((ue, conforniément à celui
de 1672 et à sa déclaration de l(i74-, l'oidre
de Notre-Dame du Monl-Carmel et de Saint-
Lazare de Jérusalem serait mis en possession
et saisine de l'administration de tous les hô-
pitaux, maladrrries, commanderies et autres
lieux pieux qui lui avaient été accordés,
même de ceux t|ni avaient été ci-devant con-
cédés et accordés par Sa Majesté ou autres,
à quelques communautés ecclésiastiques ou
laï(iues, régul.ères ou séculières, lors de leur
fondation, premier établissement ou dotation,
de (juclquc qualité et ordre qu'elles l'uiïeiit.
Voulant néanmoins que les hôpitaux, mala-
dreries, commanderies et autres lieux pieux,
qui étaient actuellement possédés par des
comumnautés tant séculières que régulières,
et qui leur avaient été abandonnés et unis
lors de leur fondation, dotation, et pour
servir à leur premier établissement, conti-
nuassent de jouir comme par le passé de
leurs bâtiments, églises, chapelles, lieux ré-
guliers, autres logements, jardins et clôtures
y joignant, soit que lesdits bâtiments et clô-
tures fissent partie des bâtiments anciens du
ces hôpitaux, maladreries et lieux pieux, en-
semble de tous les autres fonds et revenus
que ces communautés pouvaient avoir ac-
qi^-is depuis leur établissement, et que sur
tous les biens, droits et revenus dépendant
desdits hôpitaux, maladreries, i ommanderies
et autres lieux pieux, distraction serait faite
au profit desdites communaulés de la moitié
de ces fonds et revenus (les charges ordi-
naires préalablement détruites), pourvu tou-
tefois que lesdits revenus n'excédassent pas
la valeur de deux, mille livres par an; cl
qu'au cas que Icsdils revenus excédassent
celle somme, il serait fait seulement distrac-
tion du tiers au profit de ces communauté»
pou rieur entretien et subsistance; et à l'égard
de l'hospitalité pour laquelle ces lieux pieux
avaient été spécialement fondés, Sa Majesté
voulut qu'elle fût dorénavant exercée par
l'ordre de Notre-Dame du .Monl-Carmel cl do
Saint-Lazare.
11 y eut, par le moyen de ces édits et dé-
claration, un grand nombre d'hôpitaux,
maladreries et lieux pieux qui fun ni unis à
l'ordre de Notre-Dame du Monl-Carmcl et
de Saint-Lazare, et dont l'on forma cinq
grands prieurés et cent quarante-cinq com-
manderies. Le roi, par ses lettres patentes
du 28 décembre 1680, fit l'érection de ces cinq
grands prieurés, et Sa Majesté dressa encore
des règlements louchant la manière de par-
venir aux commanderies, tant anciennes
que nouvelles. Le» cinq grands prieurés qui
furent érigés, furent celui de Normandie,
dont la résidence était au Mont-aux-iMala-
des près de Rouen; celui de Bretagne, dont
le chef-lieu était à Auray, et avait pour an-
nexe la commanderie de Blois ; celui de Bour-
g;»gne, dont la résidence était à Dijon ; celui
de Flandre, dont le chef-lieu était à Lille;
et le cinquième était celui de Languedoc. t)i»
établit aussi un conseil de l'ordre à l'Arsenal,
qui fut composé du vicaire général, du chan-
celier, du procureur général, du grand maî-
tre des cérémonies, du trésorier, du secré-
taire et de cinq conseillers de l'ordre.
Mais après la murldu marquis de Louvois,
arrivée le 16 juillet 1691, les affaires de cet
ordre changèrent de face. Sur les remontran-
ces que firent au roi queli|ues ordres qui
a^ aient été déclarés éteints ou supprimes de
fait ou de droit, et dont les biens avaient
été unis à celui du Mont-Carmcl et de Saint-
Lazare par l'édil de 1672, Sa Majesté nomma
des commissaires pour l'examen de cet edit;
et après que les commissaires eurent écouté
les raisons des parties et eu eurent fail rap-
I«li7 DICTIONNAIRE DES OUHRES RELIGIEUX. 10«
port au ri>i. Sa M.ijcMo, par un mitre ôdil «In tanné aniaranle pl do sinopio, orU-o d'or, cl
in.iis de raars 1G;*3, révoqua cplui de lti7>, g'é'cndani par les extrémités jusqu'aux bord»
désunissant de l'ordre do. Notre-D;]iric du de la dalmaliquc. Dessus celle dalmalique il
Monl-Carmelelde ^ami-Lazare, les maisons, porte un manicau long de velours amarante,
droil.s biens et revenus, qui élaiei;l possédés, doublé de .«alin verl, semé de lleurs de lis
avant le premier éilil, par leso.dres du d'or el de diilTres de doubles M pour l'ordre
Sainl-Esprilde Monlpsllier. de Saint Jacques du Monl-C.im'el, et de doubles I. enlrelaeés
(le 1 Epéc de l.ucquis, du Saml-Sépulcre, de d'un S poi:r l'ordre de S;iint-Lazare, avec
Sainte-Cbrisline do Sompori, de Noire-Dame une bordure autour du manteau composée
dite Teutonique, de Saini-Louis de lîouchc- du mé;i e ebilTre. posées entre trois eouron-
raumont, et autres ordres bospiialiers, mil!- nos, et un carioijciie où est le chilTre du
tair s, séculiers et ré-uliers; commeaussi craiid maître . de (leurs de lis avec deux pâl-
ies maladieriesct léproseries, bôpitaux, ho- mes en sautoir derrière, et de trophées, le
tels-Uieu, maisons-Dieu, aumôncries, con- lout en broderie d'or. Le collet de ce man-
freries, cliapeles et autres lieux pieux du le;iu est de satin vert, sur lequel ?ont les
royaume, même ceux destinés pour les pè- némes ornements en broderie qu'au bord du
lerinset les pauvres, uns à l'ordre de Notre- même manteau, et du côté gauche csl la
Dame du Monl-Carmel et «le Saint-Lazare croix de l'ordre aussi en broderie,
par ledit de 1G7:2 et déclarations intervenues i .■ . •■, . . , ,. ,, ,,
en conséquence, soit que ces hôpitaux ou . L habillement des chevaliers est semblable
lieux pieux fussent possédés en titre de béné- ^ "'"' ''" f^'"^,'"' '"■i"re. excepté que le man-
ficcs ou de simples administrations, et quoi- '^^" ''^^ seulement bordé d'un petit galon
que l'hospilalilé n'y fiil pas gardée. Sa Ma- ° ""■' *''"'* ^"*="" ^"'"''^ "' ■'"''"^'^ *''"'"-
jeslé voulut que les biens et revenus pos- n;c"ls au bord el au reste du manteau, qui
sedés avant cet édit de 1G72 par les ordres " '1 ''""" """ P'"* '^^ '''*"'^' ' ^^ '^ ^^'"^ "^'^ ''^
du Sainl-Lspritde Montpellier et les autres "almatique n csl point non plus orlee d'or,
leur fussent rendus et restitués, el maiulint comme celle du grand maître. Les chapelains
les chevaliers de Nolrc-Dame du Mont-Car- «"' ""^ soutane de moire amarante, avec un
mol et de Saint-Lazare dans la possession ••'>< '"'l P-'ir-dessus; el dessus ce roehel un
des commandcries. i.rieurés, hôpitaux et '^'""•■"' ^""' '^'^ '"""'' amara»"'. au côte
autres lieux qui leur appartenaient avant Rauch.' duquel il y a aussi la croix de l'or-
j-rt édit. "'^ *"' •"'oderie. L habillemeiil des f.ères ser-
Au m'ois de décembre de la même année, ^ants consiste pareillement en une dalmati-
Sa Majesté nomma pour grand maître de cet ''"'' '''' *^'l" '''^"'-'' **"•" laquelle il y a aussi
ordre M. le marquis de Dangeau, qui en ""e croix écarlclee de lanne amarante cl de
celle qualité lui prêta serment de fidélité le ^'""P'"> '»»'« q"' "'''«' MU alaisée. Sur celte
18 décembre 1093. Le 29 janvier de l'an- "almalique ils portenl un manteau, seule-
née suivante, 1G%. il se rendit dans l'église ""^"J,''^' "'ap amarante, borde d'uu peut ga-
des Carmes des Billettes, où il jura sur les . " '' "'''*'' ^^ '^^'^ gauche de ce manteau est
saints Evangiles d'obse. ver et de faire ob- '*""" '"édaille en broderie. Le héraut porte
server par les chevaliers les statuts de cet "'"' '^''•■"atique de velours amarante, sur
ordre. Ensuite les anciens chevaliers lui pré- 'aq"e 'c par devant, par derrière el sur les
lèrenl obéissance, et après la messe il en (il '"-'iH-hes, i y a les armes de I ordre en bro-
irentc-cinq nouveaux, auxquels il donna l'é- ?,'^'""'. '^ °''' ' ^''l' su'''"""lc d une couronne a
pée, la croix et le livre des règles I aniiquc; sur la manche droite il y a cent, en
■jùsquc-Ià ces chevaliers n'avaient point ';'"!;? "^'"î;''" broderie : Ordre de\olre-l!(uHe
en d'habits de cérémonie, ils portaient seu- d» ^lonl-Carmel ; et sur la manche gauche :
IcmenI à la b«iutonnière du justaucorps, com- * nt-Laznre.
me ils portenl encore à |)réseul, une croix Les Uiis el les autres, à la réserve des cha-
d'or à huit raies, d'un côté émaillée d'ama- pelains, «|ui oui un bonnel carré, «ml une t«)-
ranle avec l'image de l,i Vierge an milieu, el que de velours n«jir, ^ur laquelle il y a une
de l'autre côté émaillée de sinople avec l'i- aigreltc noire, accompagnée de deux plumes,
mage de saint Lazare aussi au milieu, elia- l'une amarante cl l'autre verte. Ils ont tous
que rayon ])oiumelé d'or, avec une (leur de t'es bas «le soie amarante et des souliers de
lis aus i d'or d.iiis chacun des aigles de la velours de mému couleur, dont les oreilles
croix qu'ils attachent à un ruban de couleur sont de salin ^erl en Irodcrie d'or. Les no>i-
amaranle; et les fières servants ne portaient, ces ont un pelil manteau de satin vert, au-
couime ils font encore à présent, qu'une mé- Hui 1 il y a une espèce de capuce attaché par
daille aux menus émaux, aitachée à une derrière; l'huissier n'a qu'un justaucorps de
cli.iîne sans ruban. Mais M. le marquis de drap amarante, el précède dans les ceremo-
Dangeau a ordonné des liab ts p«)ur les céré- "'es les chevaliers, portant sur l'épaule une
moines, et qui sont dillércnts selon la qua- masse de vermeil. 11 y a encore l'huissier tle
lilé des chevaliers. l'ordre, qui a seulemeul un jusiaueoi ps vio-
L'Iiabillement du grand maître consis!een Ici el porte une masse de venucil (IJ.
une d.ilmati«iue de sailli bl.iuc, sur la«|uelle Ils s'assemblent ordinaircmeni aux C:i-
til y a par devant cl sur les manches uue mes des Itillelles , mais ils solennisciil la fél-
icroix large de quatre pouces, écarlclée de de Nutrc-Dame du Moiil-Carmel el celle de
(: ) Voy j l.i lin «lu v(,l. 1,»» 2i,li .60. ^
10.: 9
SÎON
MON
iO.^O
saint Lazare dnns l'église de Saint-fjcrm.iln
lies Prés, oii ils se trouvent tous en habit du
cérémonie.
Pour être reçu dans cet onire, il faut faire
preuve de nGhlcsse de trois quartiers, t lU
(tu côté pati'rnel que in.ilenicl. Le grand
maître peut néanmoins dispenser de la ri-
{,'ueur d s preuves de noblesse ceux qui ont
rendu des services considérables au roi ou à
l'ordre, et les recevoir chevaliers de grâc?.
Los ccclési.isliques qui veulent faire preuve
de nob'esse tiennent rang parmi les cheva-
liers de justice, et il y a encore des chape-
lains et des frères servants qui ne sont pas
nobles. Les chevaliers, tant ecclésiastiques
que laïques, payent pour leur passage d.ins
l'ordri^, mille livres, et les chapelains et les
frères servants, cinq cents livres.
Voici <e qui se prati(|ue à leur réception
et à leur profession, conformément au nou-
ve.iu céiémonial imprimé en 170:!. La messe
étant linie et le grand maître ou son repré-
sentant étant assis dans un fiutenil, l'ofti-
rianl, revêtu d'une chape, fait les bénédiclions
de la croix et de l'épie, .iprès (luoi le no-
vice, <|ui a toujours été à genoux, pendant
ces bénédicli'ins, se lève et va se présenter
devant le grand maître, <iui lui àil: Que de-
mandez-vous? Le novice répond: Je vous
supplie très-humblement. Monseigneur, de me
donner Vi.rdre de cheviderie de Notre-Dame
de Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jéru-
salem. Le grand maître lui dit : Vous me de-
mandez une grâce qui ne doit être accordée
qu'à ceux que le mérite en rend dignes autant
(fus la noblesse de leur naissance, et qui sont
disposés à la pratique rfev œuvres de miséri-
corde envers les pauvres de Jésus-Christ, et à
rrrser lew sang pour la défense de la religion
chrétienne et pour le service du roi. Nous
avons appris par des prewes certaines que
les conditions et dispositions nécessaires à lu
grâce que vous nous demandez se trouvent en
TOUS, ce qui nous a mus à vqus l'acrorder,
Eles-i ous disposé à vous serrir de votre épée
pour la défense de l'Eglise, le service du roi,
l'honneur de l'ordre et la protection des mi-
sérables? Le novice répond: Ou\ Monsei-
gneur, avec l'iiidr de Dieu. Ensuite le grand
maiire lui dit: Je mis vous recevoir dans
l'ordre royal, militaire et hospitalier de No-
tre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare
de Jérusalem, au nom du Père, et du Fils, et
du Saint-Esprit. Il f.iit, en prononçant ces
paroles, le signe de la croix sur li; novice,
il se lève de son f.iuleuil, tire son épée du
fourreau cl en donne deux coups, l'un sur
l'épaule droite, l'autre sur l'épaule gauche
du novice en lui disant: Par Notre-Dame du
Mont-Carmel et par sa'nt Lazare, je votis fais
chevalier.
Le nouveau rhe\ aller se met ensuite à
genoux devant le grand maître, ei leçoil de
lui i'éjjée en baisant la ma'n du grand maî-
tre, (jui, en lui donnant l'épée, lui il il : Servez-
vnus de votre épée scUin l'esprit de la religion,
et non pas selon le mouvement de vus pas-
sions, et souvenez-vous que roii< n'en devez
jamais frapper personne injustement. Cheva-
lier, soyez désormais vigilnnt au service ds
D'eu et de la religion, obéissant à vos supé-
rieurs, soumis () lettrs ordres et patienta leurs-
corrections. Sachez que les lois de la reUgion
où vous êtes entré vous obligent à l'exercice
de toutes les vertus chrétiennes et morales, it
à les porter à un plus haut point que ne fuit
le commun des chrétiens.
Le grand maître, en donnant la croix au
nouveau chevalier, lui dit encore: Je vous
donne lu croix de notre ordre; vous la porte-
rez toute votre rie nu nom de la sainte Tri-
nité, Père, Fils et Saint-Esprit . Elle vous doit
faire souvenir de la passion de Noire-Sei-
gneur, et vous engage à l'cbserrancedes saintes
règles et des statuts de la religion. Elle est
ornée de fleurs de lis, pour vous enseigner la
fidélité que vous devez avoir pour le service
du roi, dont In piété et le zèle ont donné de
l'appui et de la gloire à notre ordre. Il lui
donne ensuite Je livre des prières et statuts
de l'ordre, en lui disant : Je vous donne
aussi le Ivre des prières et des statuts de no-
tre ordre ; vous y apprendrez quels sont vos
devoirs.
Après ces cérémonies, le nouveau cluv,;-
lier, ayant les mains posées sur les saints
Evangiles que lient le grand m.iîlre, pro-
nonce à haute voix ses vœux en ces termes :
Moi N. promets et voue à Dieu tout-puissant,
à la glorieuse Vierge Marie, mère de Dieu, â
saint Lazare, et à Monseigneur le grand maî-
tre,d'observer toute ma vie les saints comman-
dements de Dieu et ceux de la sainte Eglise
catholique, apostolique et romaine ; de servir
d'an grand zèle à la défense de la foi, lors-
qu'il me sera commandé par mes supérieurs,
d'exercer la charité et les leuvres de miséri-
corde envers les pauvres, et particulièrement
les lépreux selon mon pouvoir, de garder au
roi une inviolable fidélité; et à Monseigneur
le grand maiire, de lui rendre une parfaite
obéissance, et de garder toute ma vie la chas-
teté libre et conjugale. Ainsi Dieu très-bon,
très-grand et très-puissant me soit en aide, et
les saints Evangiles par moi touchés. Si l'on
reçoit un étranger qui n'est pas sujet du roi,
il dit seulement, de garder à Monseitinenr
le grand maître une fidélité inviolable, de lui
rendre une parfaite obéissance, elc.
Après que le nouveau profès a prononcé
ses vœus, le grand maître lui dit : i'cnez
présentement que je vous embrasse et que je
vous reconnaisse comme notre frère e! cheva-
lier de notre ordre, et en cette qualité défen-
seur de la foi. fidèle serviteur du roi, protec-
teur des pauvres, et sujet et soumis à nos rè-
glements. .Allez remercier Dieu de la grâce qui
voui est faite et signer votre profession et
vos vaux. Si c'est un étran;,'cr, ou retranche
aussi ces trois mots : Fidèle serviteur du roi.
Quoique l'on voie des armes de la pliipail
de ces chevaliers entourées d'un collier, ils
ne le portent pas néanmoins dans les céré-
monies, c collier n'ayant pas été encore ap-
prouvé par le roi, comine l'ont clé les habits
que M. le marquis de Dangeau a ordonnés
pour les céréiuonics aux l'élcs sulcnneres et
aux grandes assemblées de; l'ordre depuis
!05l DICTIONNAIIIE DES ORDRES IlELICIEUX. Iu52
«in'il on csl prand miîlrc. Ce collier, qui est un concordat avec les chevaliers de Saint-
d'iir, est (oinposcdi' chiffres qui (losii^iicnt le Lazare; le 11 octobre, ils ob;iiirenl de
lumi lie 1,1 saillie N ierge par ces doux lellrc» Louis W un hicvot qui perinil aux cliaiioi-
M el A, enlrolacées l'une dans l'autre : entre nés réguliers de S.iiiil-lluf de poursuivre en
ces cliilTios il y a trois giosses perles, el au cour de Itoiiie 1 ur séiularisalion, etc. , et
bas du collier pend la crois telle ((ue nous l'union de lours biens à l'ordre de Notrc-
l'avons deerile. reiii-élie que ce collier Dame du Mont-Cariiiel ol de Saiiil Lazare.
pourra être auloriié par Sa Majesté lors- L'assemblée du cler-é de France, en 1762,
(lu'clle approuvera les nouveaux slaUils de blâma el réprouva ce susdit concordai qui
l'ordri' auxquels l'on travaille actuellement ; lui avait été déféré, et se p!ai},Miit à Home,
car sur les dilToreuds survenus depuis quel- Clément XIII ne voulut poinl accorder aux
qu -s années entre le grand maître el lechan- deux ordres ce qu'ils deniandaienl. Clé-
celier de l'or Ire, qui tint donné lieu à plu- nient XiV fut moins difficile, mais néan-
sieurs faclums de part et d'autie, le roi moins n'agit que parce que, dil-on, il se
ayant nommé des commissaires pour en con- laissa surprendre. 11 donna, le l'^ iuil-
naîlre, il a élé ordonné que l'on tien Irait lel 1771, un bref qui sécularisait les mem-
un chapitre général, où l'on dresserait de bres de l'ordre de Sainl-Uuf supprimé, el
i:mneaux statuts pour servir à l'avenir de les unissait à l'ordre de Sainl-Laz:;re. L'af-
rè^liiiienls uniformes dans l'ordre, et ce clia- faire était déplorable sans doute, mais de-
pi're s'est tenu au mois de décembre de l'an- vail être finie, puiscjuc le pape avait pro-
n.'o dernière. nonce. Il n'en fut p:)int ainsi. Le clergé de
Bernard (iiusliniani, Ilist. chronuhg. di France, réuni en 1772, fil tous ses cITorls
liitti (jli Ordini miliion'. V. a Sanclo An- | our empêcher l'exécution du bref. Dans
drea, Ilist. (jcncral. Fri:lium Discalccato- sou as emblée du 23 juin, il entendit un
rum ord. D. M. Yirg. de Monte Carmdo. rapport admirable sur ce maliieureux inci-
'l'oussa ni de Saint-Luc, Abrégé Itisl. de dent, et, chose étonnante I cet excellent rap-
l'itislitution de l'ordre de j\olre-Dame du port était de IJiienne, archevèiiue de Tou-
Mont-Citrmel. Du môme, Office à rusage des louse, qui devait bientôt contribuer si lar-
cher(diers de cet ordre, avec leurs rèyles et gemenl à la de^truclion de l'état religieux
slatiils, cérémonial de /a réception el proffs- d.ins noire pays. Le bref lui révoqué par une
s on des mêmes chevaliers, et plusieurs fac- bulle du 10 décembre 1772, eoulirmée par
lums el mémoires conecrnanl cet ordre. lettres pr.tencs du 18 janvier 1773, enregis-
II semblerait qu'après les décisions ou ar- liées le 27 février suivant. Celle bulle ras-
réts de deux souv.rains pontifes, l'ordre de sura le clergé sur les projets d'envahisse-
Saint-Lazare eût dû élre regarde comme nient de l'ordre de S, lin -Lazare. Celui-ci,
éteint en France ; loin de là, il s'y est main- au moyen d'un dédommagement accordé par
tenu, el a()rès sa renaissance, dans son union le clergé, renonça pour toujours non-seule-
avrc l'ordre du Mont-Carmel, il est devenu ment à toute pielention sur les biens de
plus brillant qu'aupara\ant, el mémo, par Sainl-Uuf, des Célesiius ou de toute autre
une disposilion toute contraire à c- (jui s'est congré^'ation, mais à toute espèce de répeli-
vii dans les autres onlres, eelui-ci a été (dus lion des biens qu'il pouvait croire lui avoir
uissanl à ses dernières années que dans apiiarlenii et dont joui.saienl les hô,)ilaux,
l
es siècles précédents. Il est vrii qu'il n'é- et génèralemeiil tous les établissements ee
lait plus guère considéré (luc romine cheva- clésiasti(]ues séculiers ou réguliers.
lerie honorifique, au lieu d'être regardé Ce n'était pas sculeinenl auprès des cha-
comme ordic religieux, ainsi qu'il l'avait noines de Sainl-Uuf que l'orilre de Sainl-La-
élé à son origine. zare avait fait des lentalives d'invasimi,
(-0 qu'il y a de plus surprenant, c'est qu'un mais il avait été autorisé par un brevet ,i
ordre entièrement el uiiiiiueiiient religieux, traiter avec les Céleslins ; plusieurs ordies
l'oidrc de Saint-Uuf, ait clierché, ail obtenu avaient été tenlés, cl spécialement les Anlo-
son union canoni()ue à l'ordre des chevaliers nins, (jui heureusement résisiéreni, et iiui,
de Sainl-I^azare et du .Monl-tlarmel. par des molifs plus nobles, s'unirent a x
Les deux institiils Iravaillérenl à cette clie\aliers de Malle, qui les firent bientôt so
réunion par des motifs convenables dans repentir de celte union.
les chevaliers du Mont-Carmel, mais peu ,■. , ,, / m » i ^ ■ , r
I ,1 , , , 1 c ■ I I r Grands mal r es de l ordre de Sam -Lazare et
lionorables dans les chanoines de Saint-Kuf, i i r, ■
„._i . , i • , 1 1 -, commandeurs de ItOKini/.
car ils n y cherchaient ((U une voie honnête •' ■'
pour quiiter leur règle el leur sainte proies- Frère Gérard (suivant le P. de Saint-Luc).
• ion. Nous parlerons plus longuement de Thomas de Semville, maître el procureur
cette affaire à l'arlii le Uuf ,Saini-), mais général de l'ordre el chevalerie de Sainl-
nous devons en donner ici une idée sufli- Luire de Jérusalem el chapitre de Hoigny.
santé; cl cela se commença avant l'édilqui Frère Jean de Paris, mort en 130';. — le
créa, en l'OH, celte commission si funeste 1*. de Sainl-Lue, |iag. l'iS, IV'.t, cite cette
aux ordres moiiaslii|iies en France, el ilonl inscription de la Sainle-Cliapelle de Hiigny :
nous ferons connaître 1 esprit, surtout dans Ct-(jil frire Jvan de Paris, chevalier, jadis
iioire Supplément. tnniirc de l'ordre de Sainl-Ltzare de Jérusa-
Le projet avait été formé par l'abbé de lem. qui trépassa l'an de grâce i'èKYv, le tuniii
Saint-ltufel quelques meiibres de sa con- dcu.ncmr jonr du mois de janv:er. Pr^cz Dieu
grégaliou. Le o jaii>ier r/LO, ils pa.'ièrenl pour idiue du défunt.
1053
MON
MON
1054
Frère Jean di! Gouras, cliof maître de
tout l'ordre de Saint-Lazare de Jérusalem.
Jean de Bennes, chef général et maître de
tout l'ordre de Saint-Lazarr, tant deçà que
delà la mer. Il est enterré à Boigny, et on
lit ce qui suit sur sa tombe : De Beîniîs,
chevalier, jadis maître de l'ordre de Saint-La-
dre de Jérusalem. (Tout le reste est efTacé
jusqu'à ces mots :) Priez Dieu pour l'âme du
défunt.
Pierre des Buaulx, maître de tout l'ordre
de Saint-Lazare de Jérusalem.
Frère Pierre Le Cornu. — Diins son ou-
vrage, Saint-Luc dit que, dans un acte capi-
I ni, lire du mardi des féiies de la Pente-
côte 1481, il est l'ait mention que ledit Le
Cornu avait succédé au grand maître d. s
Kuaulx, rt ([u'il prenait dans cet acte la qua-
lité de chevalier, grand maître de tout l'urdre
et noble chevalerie de Saint-Lazare de Jéru-
salem, deçà et delà la mer.
1488. Frère François d'Amboise, maître
et chef général de tout l'ordre de Saint-La-
zare de Jérusalem.
I'i94-, 150(1, 1511. Frère Agnan de Mareuil.
1521. Frère François de Bourbon. — Saiut-
Luc cite un aveu du 18 juin 1521.
154-7. Fière Claude de Mareuil. — Saint-
Luc cite l'arrêt du parlement du 16 fé-
vrier 1547, où ledit Claude de Mareuil est
établi commandeur de Boigiiy et maître gé-
néral de 1 ordre de Saint-Lazare de Jérusa-
lem. Cet arrêt est aux archives. Il y en a
d'autres du dernier janvier 1544, du 20
août 1547, 18 aoiil 1548, 15 juin 1549,
18 uillel 1551.
Frère Jean de Couli. — Saint-Luc cite un
acte capilulairc d'un chapitre général tenu à
Bogny aux fériés de la Pentecôte, dans le-
qu. I ledit frère Jean de Conti est élab i maî-
tre général de tout l'ordre de chevalerie de
Saint-Lazare de Jérusalem deç'i et delà la
mer, et donne à un chevalier natif de Cala-
bre i'ailministialion des biens dépendant de
l'ordre du territoire de Suessano dans la
Touille, à la charge de 220 llorins.
Frère Jean de Lévi. — Saint-Lui; dit qu'il
fut pourvu de cette charge par Henri 11,
iiu'il obtint des bulles en cour de Home, et
(|u'il se démit de sa charge entre les mains
du roi. Il cite un arrêt du grand conseil du
10 décembre 15G5, dans lequel ledit de Lévi
est nommé prieur et commandeur du prieuré
et commanderie de Boigny, grand maître et
administrateur de l'ordre de Saint-Lazare.
1567. Frère Michel de Seure. — Aux ar-
chives , arrêts du parlement du 18 jan-
vier 1571 et 1574, où ledit de Seure est établi
chevalier de l'ordre de Saint-Jean de Jérusa-
lem, commandeur de la commanderie de
Poigny, grand maître et administrateur de
aaint-Lazare de Jérusalem.
1578. Frère François de Salviati. — Ar-
rêts du parlement de Paris, 31 août 1584,
^9 janvier, 8 avril et 24 mai 1585, 8, 10,
22 mai, et 5 août 1586, 9 et 10 mars loS7,
cl 4 juin 1597.
1004. Philipcrt de Nérestang, grand maître
de l'ordre de Saint-Lazare, sur lu déuiiasion
de Charles de Gayant, el grand maître de
l'ordie de Nolre-Dann' de Monl-Garmcl.
1(J12. Claude de Nérestang, grand maître
de Saint-Lazare et de Notre-Dame de Monl-
Carmel. ?
1639. Charles-Achille, marquis de Néres-
tang, reçu en survivance, le 16 aoiit.
1645. Ledit Charles-Achille, marquis de
Nérestang.
1673. François Le Tellier, marquis do
Louvois, granil vicaire général de l'ordre do
Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-
Lazare de Jérusalem, sur la démission vo-
lontaire de M. Charles-Achille, marquis de
Nérestang.
1693, Philippe de Conrcillon, marquis de
Dangeau.
1721. Louis, duc du Chartres, puis duc
d'Orléans.
Après la mort de M. le duc d'Orléans, ar-
rivée en 1752, le roi fut quelques années
sans donner de grand maître aux ordres
royaux, militaires et hospitaliers de Notre-
Dame de iMoni-Carmel et de Saint-Lazare de
Jérusalem. Déterminé enfin à en nommer
un, il lit choix, en 1757, de M. le duc de
Berri, fils de France, et le pape Benoit XIV,
mort en 1758, accorda à ce prince les bulles
nécessaires, qui lurent enregistrées la môme
année au grand conseil. Et attendu la trop
grande jeunesse dudit prince, Sa Majesté
nomma, au mois de jniii de l'année susdite,
M. Louis Phelypeaux, comte de Saint-Flo-
rentin, conseiller en tous ses conseils, mi-
nistre el secrétaire d'Etat, pour régir, admi-
nistrer el gouverner lesdils ordres, jusqu'à
ce que le nouveau grand maître frit en âg<3
d en prendre par lui-même l'administration.
Le roi, voulant aussi aviser aux moyens les
plus propres pour que lesdils ordres pus-
sent se soutenir avec splendeur , ju[':ea à
propos d'expliqner par un nouveau règle-
ment sci intentions sur le nombre des che-
valiers dont il veut qu'ils soient à I avenir
composés, et sur les qualités des personnes
(|ui y seront admi-es. Ce nouveau règlement,
daté du 15 juin 1757, est compi is en xv arti-
cles, dont les principaux sont : Que nulle
personne ne pourra être reçue et admise à
l'avenir par le grand maître desdits ordres,
qu'elle n'ail fait ses preuves de la religion
catholique, apostolique et romaine, et celle
de quatre degrés de noblesse paternelle seu-
lement, le novice compris ;qL;e le nombre
des chevaliers sera fixé à l'avenir à cent, y
compris les ecclésiastiques, qui ne pourront
y occuper plus de huit places, et qui seront
obligés aux mêmes preuves que 1rs cheva-
liers laïques ; qu'on recevra, par préférence
à toutes autres considérations, les person-
nes qui seront ou qui auront été employées
au service de Sa Majesté dans l'intérieur du
royaume, près de sa personne, dans les cours
étrangères ou dans les places ou emplois
de confiance; qu'il faudra avoir l'âge du
30 ans accomplis pour être reçu, ou au
mi)insde25ans accomplis, au cas que quelque
raison particulière oblige à admettre quel-
qu'un au-dcisous de l'âije de 30 ans; qu'il
«035 nir.TION.NAmE DES ORDRES RELIGIEUX. 10.i6
ne sera plus rcru à l'.ivciiir dans Icsdits or- nboli, avait été absorbé par l'ordre du ^lont-
ilres, des clirva'.iers de ^ràce. commaiulcurs, Carinel. sous la icllre duquel nous les avDiis
fondateurs ni servants ; qiic le droit de plarés ici. Il est vraisemblable que cet ordre
passag'' cl autres frais «jui seronl payés i):ir religicuv et militaire est pour toujours aboli
1 liacuH lies elievali'rs qui seronl à l'avenir en France, où il a disparu par le faii,à la
a Imis dans lesdils ordres, sera fixé à la révolution de juillet 1830. — Almanarh
s. mime de 1,000 livres, el le droit des oflicicrs Royal. — Mémoire sur l'état religieux et sur
à ce le de 120 livres, pnur être distribuée la commission établie pour les Ré(/ulieni,\i\-V2
1 iilrc eux suivant l'usagi' jusqu'à présent (par l'abbé iMej). — Dictionnaire de Mo-
t)hservé, indépenJarn'iient des lumoraires du réri, édition de 1759. — Histoire des ordres
généalogiste; que les chevaliers porteront roi/aiix, hospitaliers el militaires de Saint-
au cou la croi» desdits ordres attachée à un Lazare de Jérusalem et de Motre-l)i:me du
ruban de couleur aniarante , et dans les jî/onr-rdcmc/; Liège el Bruxelles, 171."), in-i",
occasions de céréuionie ils porteront la par Gaulliar de Sibcrl, etc. B-d-e.
croix ainsi cl de la manière dont il en a élc
usé iusqu'à présent ; que ceux des gentils- MON l'-CVUMEL (Tiers Oiidre du).
hom'mes qi-i ai^ronl été élevx's dans lécolc ^^ forigine du Tiers Ordn des Carmes el des
royale militaire el que >a Ma.csle jug.ra a g^,^^„ ^^ „,^,„^ ^^j,.^_
propos d adinc lire iLins l.sJits ordres, y se-
ront reçus, en faisant également preuves de Le P. Papebroch s'est trompé lorsqu'il dit
la reliii'idn et de la noldesse, co'.mnc les an- {Itespoits. ad P. Sebastianum a S. l'auto, art.
1res; mais qu'ils pourront y être admis (]uoi- 20, n. 10) que la marque ()ue les religieux
((u'ils n'aient pas l'âge prescrit, el que le de S.iinl-Frauçois doiuitnt à leurs lierci.iires
nombre de cent suit i empli, el aussi avec est un cordon, et que celle que le-, ("armes
I xemp'iion du droit de passade el de tous donnent aussi à leurs tierciaires est un petit
3'.! es droits. Ces règlements ont éié laits seapulaire en forme de billettes. C'est ainsi ,
et arrélés à Veisailles, le roi y étant, le dit-il , que les Français nomment de petits
13 juin 17."i7, el imprimés à l'inipriinerie morceaux di; drap longs el carrés; el c'est
royale, in-'r". aussi pourquoi l'on a donn^' à Paris le nom
Il y tut encore une confirmation des or- de Hilletles aux Carmes qui ne sont pas dé-
dres du .Moiit-1'.armel el de Saint-Lazare, chaussés.
par Louis XV eu 1770. Lorsque la révolu- Pre.niércmenl il n'est pas vrai que les
li(m, en 1790, le 20 juin, abolit les ordres de Cannes de l'Observance de llcnnes , qui sont
cbevaleii ', tiins, etc., le grand maîlre el ciu\ (ju'on nomme Dilleltes à P.iris, aient
chef général de celui-ci était .\ioNsi:;i ii, de- été ainsi appelés à cause du sca[)ul.iire en
puis Louis XVllI. Le coaile d'Agoull éiail forme de billet es qu'ils donnent aux per-
prevùt el maître des cérémonies ; Gaultier de sonnes qui ont dévotion de le recevoir, car
Sibert était historiographe, cl il a justifié il y avait déjà plus de trois cents ans ((uc ce
cetli! fonction en doiiniiit en eflel l'Ii.sloire nom était iloiiné aux religieux liospilaliers
de l'ordre. Il y eut un grand lUiiubre declie- de la Charité de Notre-Dame, qui cédèrent,
val ers nommés en 17S8; nous ignorons s il l'an 1G;!2, à ces religieux C.irmes le couvent
y a eu des promo'.ions po-térieuies à celle des lUlleltes, qui fut bili l'an 129'+ eu la rue
d.ite. D.ins un chapitre tenu ci avril 177'i-, il des Jardins, appelée dans la suiic des Hillet-
fut ordonné à lous les clievaiiers el com- tes, à la place de la maison d'un juif (|ui avait
inandeurs de porter une croix verte à huit fait plusieurs outrages à la sainte liostie, qui
pointes, cousue sur l'habit, et dans les ce- depuis ce Icmps-là a été conservée avec beau-
rémoiiies sur le manteau, et depuis 1778 coup de vénération dans l'église de Sainl-
cetic croix était en paillons d'or vert. Jean en Grève; et qiioi(|ue les Français
A la restauration, cet oïdie reprit son rang donnassent autrefois le nom de billelles à des
ri ses digni es. Le roi fut toujours désig.^e pièecs d'èlolTc d'or, d'argent, ou de c u'eur,
comme [iroteileur, mais il n'y eut pas de plu. longues que lirges, ()ui se cousais ni
grand maitrc iioiiuné, ni de promotions fai- par intervalle sur les habits i our leur servir
les, quoique nous croyions (ju'uae ordun- d'ornement, el qu'on a depuis transportées
iianci' royale ail été rendue, en iiovem- surlesécis, comme on peut voir ilans les
lire 1810, en faveur de l'ordre de Saint-La- armoirii s des maiso:is d • Clioiseul , de Heaii-
lare. M. Silvcstre reprit les fonctions de manoir el de plusieurs autres, néanmoins
héraut d'armes, (lu'il avait avant la révolu- ce mot a eu plusieurs si^nilicalions, ( l se
lion. M. lia' ier lut liisloriogra|)hc; les the- prend encore pour une enseigne en forme de
\aliers eurenl un chapelain en lilre à \'er- liari Ici qu'on met aux lieux i ù l'on doit
sailles, M. l'abbé Picot. Ces trois derniers \iédV,*^ [Dictionnaire universd de Trévoux, iiu
vivaient encore en 18'Î0, cl l'ordre comptait mot ISiiiiiTTic). Ainsi il y a bien de l'appa-
alnrs (juaujrze chevaliers. Louis XVIII, étant renée (|ue le nom de iîillette, qui a été donné
a Mitlau, avait nommé le baron de Ureisen, d'alord au monastère q.ic les Carmes occu-
officier russe, à la dignité de chevalier d'/iiyn- peut à présent depuis l'an 1032, le>iuel leur
neu' de l'ordie de Sainl-Lizare. fut < éde cl qui a ele bàli , comme nous avons
Presque lous les historiens, les Indien- dit , dès l'an 12 IV, vient de ce qu à la maison
t-urs, etc., éci ivcnt Ordres de Saint-Lazare du juif i|ui fut démolie il y a. ail pour ensei-
tt du Monl-t'armd léunis.... C'est mie er- gne trois ou quatre billel'es, comme remar-
rtur ou un oubli. L'ordre de Saint-Lazare, que le !'■ du lir^uil dans les Au iquite.< du
io:.7
MON
SîON
I )h^
Paris (liv. ii.paR. 977), si ce n'e t ,(1il ce Pèic,
que l'on no voulût dériver ce nom du mol la lin
bilis aira, delà colère et fureur de ce juif.
Il n'est pas vrai non plus que les religieux
de Saint-François donnent à leurs liorciaires
ii« cordon , cl les Carmes un petit scapulaire
composé (le deux, pelils morceaux de drap
carrés. Le P. Papctroch a sans doule con-
fondu les confrères du cordon de Sainl-Fran-
çois et du scapulaire des Garnies avec les
lierciairi's de ces ordres. 1! y a ce| endanl une
fjrande différence entre les uns et les autres;
car quoique le mol deconfrériesoil fort liono-
r.ible, et qu'on entende par là plusieurs
pcrsiinnes unies cnfembic par les liens de la
« harilé pour s'emiilojcr à de bonnes œu-
vres, et que ces sortes do confréries aient été
approuvées par le sainl-sié;;e ou par les
évêques des lieux où elles sont établies,
néanmoins les règlements et ce qui sort à y
maintenir une observance uniforme ne sont
que sous le nom de statuts, et il suffit pour
y entrer do se faire enregistrer dans la liste
lies confrères ; au lieu que ce qui sert à
maintenir l'observance parmi les tierciaires
es! sous le nom de rè^le, et qu'il faut que
ces tierciaires soient éprouvés [lar un noviciat
d'un an, au bout duquel ils font profession
avec des vœux simples. Quoiqu'on ne puisse
pas dire qu'ils soient religieux, à moins
«ju'ils ne soient engagés par des vœux so-
lennels, comme les religieux Pénitents du
Tiers Ordre de Saint-François elles religieu-
ses du Tiers Ordre de Saint-Dominique, ce-
pendant leurs congrégations sont de vérita-
bles ordres, parce que, dans le cas dont il
s'agit, lo mot d'ordre signilie une manière de
vivre ordonnée sous certaines règles el céré-
monies pratiquées pai' ceux qui s'y engagent,
et celle manière de vivre a élé approuvée
sous le nom d'ordre par plusieurs souverains
pontifes, comme on peut vo r par les bulles
doNicolas IVen faveurdes tierciairesde Sainl-
François, d'Innocent \'iï pour ceux di' Saint-
Dominique, de Marliii V pour ceux des
Servîtes, d'Iiugène IV et Martin V pour ceux
des Âugustins, de Sixte IV pour ceux des
Carmes, el de Jules II pour ceux desiMinimos;
et lorsque les papes ont parlé du cordon de
Sainl-François ou du scapulaire des Carmes,
ce n'aétéquj sous le nom de confiéric.
Ce fut le pape Sixte V qui institua à Assise
colle du cordon do Saint-François l'an 158G.
Mais il n'est pas si aisé de savoir le tem[is
que la confrérie du Scapulaire a été établie.
Lezanedil que les p;ipe> Ftienne V, Adrien M,
Sergius III, Je. in X, Jean XI el Sergius IV ,
ont remis la troisième partie de leurs péchés
à ceux qui entreraient dans celle confrérie :
de cette manière le bienheureux Simon Sl.'k,
qui deux ans avant sa mort reçut des mains
de la sainte Vierge le scapulaire qu'elle lui
ordonna de faire porlor aux religieux comme
la marque de leur ordre, n'étant mort qu'en
j 12Go, et Etienne V ayanl élé élu pape en 81G,
el ayant accordé, selon les Carmes, des in-
dulgences aux confrères du Scapulaire, il
s'ensuivrait que la confrérie du Scapulaire
était établie plus de koO ans avant qu'on eût
songé seulement à parler de scapulaire parmi
les Carmes.
Mais pourquoi la confrérie du Scapulaire
n'jurait-elle pas élé établie plus de quatre
cents ans avant que les Carmes eussent porté
le scapulaire, puisque leur troisième ordre a
été institué, selon quelquos-uns de leurs
écrivains, plus de deux mille ans avant que
l'on eût connu le premier? Entre les autres,
Didace Martinez Coria, dans un traité parti-
culier qu'il a fait de ces tierciaires, imprimé à
Séville en 1502, dit qu'ils descendent immé-
diatement du piophète Elle, aussi bien que
les Carmes. En effet, entre les grands hommes
qui ont fait profession, à ce qu'il dit, de ce Tiers
Ordre, il met le prophète Abdias qui vivait
huit cents ans avant la naissance do Jésus-
Christ, et il a cru que cet ordre serait aussi
beaucoup honoré, si aux personnes de l'autre
sexe qui en ont aussi fait profession il joi-
gnait la bisaïeule du Sauveur du monde, sous
le nom emprunté de sainte Eméreniienne.
Pour prouver l'antquiié prétendue de ce
Tiers Ordre, il rapporte les bulles de Léon I\',
d'Etienne V, d'Adrien II et des autres papes
dont nous venons de parler, qui ont aussi
accordé, à ce qu'il prétend, la rémission de la
troisième partie de leurs pochés à ceux de cet
ordre le jour qu'ils prendraient l'Iiabit: mais
nous avons assez réfuté ces prétendues bulles
à l'article Carmes ; c'est pourquoi nous n'en
parlerons pas davantage, et nous nous con-
lenterons seulement de faire remarquer deux
contradictions manifestes dans lesquelles
Coria est tombé.
^L' première, c'est quo col auteur parlant
d'un Tiers Ordre du temps des propholes, on
doit présumer qu'il y en avait doux autn s
dilTérenls. Cependant il dit que lorsque les
Carmes eurent reçu le baptême des mains des
apôtres mêmes, ils se divisèrent pour lors eu
trois classes avec des manières de vie dilîé-
rcntes : que la première fut celle des re-
ligieux qui vécurent en congrégation ;
que la deuxième fut celle des religieuses qui
vécurent aussi eu coiigrogalioii avec vœu
de clôture, et qu'enfin la lioisième fut celle
des tierciaires, qui vécurent avec leurs fem-
mes el leurs parculs dans leurs maisons, les
uns et les autres sous la règle et les préceptes
du sacré ordre du Aiont-Garinel. Ainsi , s'ili
n'ont commencé à se séparer el à former trois
dilïérentos classes qu'après avoir élé baptisés
par les apôtres, il s'ensuivr. it que le pro-
phète Abdias el la bisaïeule de Josus-Clirisl
n auraient pas élé plutôt du Tiers Ordre des
Carmes que du premier ou second ordre,
supposé qu'il y en eût un , puisqu'il n'y avait
point encore de-séparalion.
La seconde coniradiclion que je trouve
dans Coria, c'est qu'ayant dit qu'il n'est pas
vrai que saint François soit le premier qi,i
ait institué un troisième ordre, il conviens
ensuite que le pape Sixte IV, l'an 147G, donna
permission au prieur général, aux provin-
ciaux, aux prieurs locaux de l'ordre dos
Carmes et à ceux qui tiendraient leurs pla-
ces , de pou.voir donner l'habit régulier el la
règle de leur ordre aux personnes de l'un et
DSO
DICTIONNAmK DKS OnDHES RKLIGIKLX.
lO'iO
de l'autre soxp qui se proscnlcraionl pour le
recevoir, de inêini; que les Manlclées cl l'in-
zoclies (1). ou les Frères de la Pénitence du
liers Ordre des .\!iiii'urs, cl de ceux des Frè-
res Prêcheurs et «les Ermites de Sainl-Au-
^usliii, et d'admellrc aussi au mémo lial)it
les viirtres, tiKilroncs, veuves el f<mi»ies ma-
riées; (ï où l'on doit conclure que si le pape
Sisle IV a permis à l'oidrc des Carraes de
recevoir ces sortes de personnes comme ceu\
qu'on recevait dans l'ordre de Saint-Fran-
çois, c'est qu'ils n'en recevaient pas .uipara-
^ani, el par conséquent «lue le Tiers Ordre
de Sainl François est plus ancien que celui
des Carmes.
Silvera, fimcux écrivain de cet ordre, a
été, ce mi^ semble, plus sincère quet'oria, el
sans faire remonter leur Tiers Ordre au
temps du prophète Elie, il avoue do bonne
foi que non-seulement il n'a commencé que
sons le poniilicat de Sixte IV, en verlu de la
bulle de ce pape de l'an liTG, mais même
que saint Fr.inçois est le premier qui a ins-
titue un Tiers Ordre en 1221, pour des per-
sonnes de l'un cl do l'autre sexe, auxquelles
le pape Nicolas IV prescrivit une règle;
qu'ensuite les autres ordres, à l'imitalion de
ce >craphiquc Père, onl eu des Tiers Ordres
qu'ils onl établis; et que lorsque l'Eglise
chante dans son olfice celle an ienne -.Tresor-
dine.</4(c oni<na/, elle entend ()u'il a clé le prc-
mierqui ailélabli irois ordres diflérenls; voici
ces paroles : Hnitc faniltiitem recipiendi ac
admillcndi Teitiarios habent ordines Mendi-
Ci!7ites. et primo sanctus Frnnciscus hujiis
Sdcii (irdinis patriarclia, instiluil Frnlres el
Sorores liujus ordinis de l'œnilentia anno
1221. hjus leijulnmprœscripsit Nicolatis IV,
anuo 2 iui poiitificaCus. l'ostca lero aliçe re-
li'jionrs nd p/its imilalioncm eiiam Teriiurios
instiiueruni ne Itdbuerunt; et Ecclesid, dnin
cnnil de S. Francisco : Très ordines hic ordi-
nal, inleliig t quoi ipse fuit prinais qui lios
très ordinaiil ac inslituit (Silvera, Opusc.
var. resol. 3S). Lezana dit aussi la mémo
chose; il trouve seulement à redrc que Ca-
sarubios ail avancé que sainl François était
le seul qui eût établi un Tiers Ordre, puis-
que, dil Lezana, il y en a qui prétendent que
saint Dominique, à son imilali )n, en a aussi
insliiue un. El qu mvis ipse Casurub. in coni-
pend. vcrh. Teriinri\, num. 2ï, § Sciendum
est itl eriiis. diciit quod solus S. /'. Francis-
lus Fralres <l Sorores Teriii Ordinis scu de
]'(e)iilenli(> inslitueril, ul propler ca de eo ca-
unt Fcclesia, Très ordines hic ordinal, etc..
(lia tamcn eliam hoc Inbunnl S. Dominiro,
el (licHiilsdum illa de fi. tj-ancisco iliri ub
Fcclesid, qnia ipse prinius'omnium fait, et
S. Ilomnicus ad ipsiits imilalioiiein (Lezan.i,
Suinm. qn. Rerjul. l 1, cap. IV, de Terlianis,
num. 8). Kl après avoir dit en un autre en-
droit qne la rè;:le d'S lierciaires des Mineurs
n'oblige à aucun pèche, il ajoute qu'il en esl
de même des lierciaires des Carmes, parce
qu'ils n'ont été approuve» qu'à l'i.i.ilation
(1) On appelle Manielécs cl Piiizochcs en Italie, cl
néaies en Ksiiagiie, ccrlaines fciiinics Inbillëcs en
rcir'icuaci, 'l'ii suiil do ipitlq'ic Tiers Ordre cl dc-
de ceux de Saint-François e! de Saint-Domi-
nique : Idem dico de Terlinriis nostri ordi-
nis, eo quod ad instar Tcrtiariorum Prœdica-
torum et Minurum npprobanlur aSixtuH'
{Ibid. num. 20 .
Ce n'est donc que l'an 1117 que le Tiers
Ordre des ("armes a romn.encé i-n vcrlu do
la bulle de Sixie 1\', qui esl le Mare magnum
de l'ordre des Carmes. Les frères el soeurs
de ce troisième ordre n'avaient point autrefois
d'aulrerègleque cdleqne le palriarchC.Mbeil
avait donnée au premier ordre ; mais ils en
curent une dans la suite, cjui fut dressée
par le P. rhé^dore Stratius , général des
Carmes, vers l'an l(i35, cl elle a été léforniec
l'an jfiTS, p ir le P. lùnilc Jacomelli, vi-
caire général de cet ordre, et contient pré-
sentement dix-nciif chapitres, (^oiforménienl
à cette règle, on pcul rece»oir dans ce Tiers
Ordre toutes sortes de personnes de l'un et
de l'autre .'■exe, ecclésiasliques et laïques,
filles, veuves ou fernmes mariées, puni vu
qu'ils soient tous d'une vie exemplaire,
qu'ils aient une grande dévotion envers la
sainte \ierge, qu'ils ne soient point déjà re-
çus et profès dans un autre Tiers Ordre,
qu'ils ne soient point suspects d'hérésie ou
de désobéissance à la sainte Eglise romaine,
qu'ils n'aient point quelque notable diffor-
mité de corps, ni de maladie ou incommodité
qui puisse donner aux autres une aversion
naturelle poureux, qu'ils aient hounèlemenl
de quoi vivre, ou au moins qu'ils puissent
gagner leur vie dans une vacation honnélc.
Ayanl été reçus, ils fonl un an de novui.it,
après lequel i\> font profession en la manière
suivante : Moi pire \. ou stiitr A', fais ma
prof ssion, et promets ubédirnce el cliastrlé à
Dilu loHt-puissant et à la li. Vierge Marie
du Monl-Carmel, el au rëvérendissnne l'ère
N., f/énc'ral dudil ordre, il à ses successeurs,
selon la règle du Tiers Ordre, jusi/uù la mort.
Ceux qui sont clercs doivent dire l'.ifnce di-
vin selon l'usage de l'Eglise de Knnie ou de
leur propre diocèse; Icslaniueslellrésledoi-
vent réciter selon l'usage de l'ordre des Carmes,
ou bien le petit olfice de la \ ierge, el ceux
et celles qui ne savent pas lire doivent diio
pour matines vingt fois Pater nosler, el au-
tant de {-n^ Ave Mario, excepté qu'aux di-
manches el fêtes solennelles ce nombre doil
être doublé. Ils en disent sept pour piin:e,
tierce, sexte, mine et compiles, cl pour vê-
pres quinze. Ou'.rc les jeunes qui soni iiisli-
lués et commandés par l'h^i^lise. ils doivent
s'abstenir de liande et jcûni^r durant l'avcnl
el tous les vendredis de l'année, exeeplé ce-
lui de l'octive de Pâques. Ils sont encore. ibligés
0 jeûner les fêles de l'Ascension, de la Pente-'
côte, du sainl sacrement, de la Nativité, Présen-
tation, \'isilalion,Parincatioii, Assompti 'U et
Commémoration de la s.iiiitc Vierge ; cl de
tous les mercredis et samedis, depuis la fêle
de la sainte croix inclusivemcMil jusqu'à
l'avcnl, cl depuis la N.itivité de Noire Sei-
gneur jusqu'au carême. En loul temps cl en
meurenidans leurs maisons particulières, soil seuli^s
ou avec lcu''S parenis.
lOPl
MON
MON
m2
tout lieu, ils gardent l'abstinenco de viande
los mercredis cl samedis, exceplé le jour de
la Nalivllé de Nolre-Seigncur. O'ianl à l'ha-
hillemenl, les Frères et Sœurs doive ni avoir
une robcoulunique longue jusqu'aux lalons,
liranl sur le noir, ou rousse sans teinture, cl
par-dessus une ceinture de cuir noir, large
de deux doigts, lis doivent porter par-dessous
la tunique, selon la coutume du lieu, le sca-
pulaire de six pouces de large et de telle lon-
gueur qu'il descende plus basque les ge-
noux, ils doivent avoir aussi une chiipe
Iilaiichc à la façon d'un manteau descendant
jusqu'à mi-jambe, et ils la peuvent m6nie
porter en public oîi la coutume le permet.
Les Sœurs ont un voile blanc sans guimpe
ni linge au front et à la gorge ; néanmoins,
dans les pays où ces sort-s d'habits ne sont
point en usage parmi les tierciaires, ils peu-
vent être habillés comme les séculiers en re-
ten int la couleur tannée (1).
Coria prétend que les chevaliers de Malle
dans leur origine ont été du Tiers Ordre des
Carmes. Il dil que le B. Gérard, leur fonda-
teur,était frère conversdel'ordredes Carmes,
cl que sous l'autorité du général il institua
un nouvel ordre de religieux tierciaires sous
l'habit et la règle de celui du Mont-Carmel,
pour combattre contre les ennemis de la foi
cl gar 1er la terre sainte, et qu'on leur donna
un couvent qui appartenait aux Carmélites,
(|ui demeuraient dans le saint sépulcre et
qui furent transférées dans un autre. Saraceni
CL Munoz sont aussi de ce sentiment ; mais ils
confondent ce B. Gérard, instituteur des che-
valiers de Malte, avec un autre saint Gérard,
évéque cl martyr, et premier apôtre de Hon-
grie. Allègre, voyant que cette opinion n'était
pas soulenablc, puisque cet apôtre de Hongrie
est mort, selon le soniimcntde presque tous
les écrivains, l'an lûi2, èl que le B. Gérard n'a
institué l'ordie des chevaliers de Saint-Jean
de Jcrus.ileni que l'an 1099, il en a fait deux
saints différents, et tous deux enfants du pro-
phète Eiie. Mais je ne crois pas que les che-
valiers de Malte soient de ce sentiment, non
plus que les bénédictins qui reconnaissent
i'apôlre du Hongrie pour appartenir à leur
ordre, comme ayant été religieux delà célèbre
abbaye de Saint Georges-le-Majcur àA'enisc.
MONT-CASSm (CoNGRÉGATiox Dc), appelée
aussi de la Grutle el de Saint-Benuit.
Quoique, dès les premières années do l'é-
tablissemcnl de l'ordre de Saint-Benoit , il
semble qu'il ait été divisé en plusieurs con-
grégations, elles ne formaient pas néanmoins
de corps distincts et séparés. La [première
q;ii ait pour ainsi dire formé un ordre non-
vcno sorti de la tige de celui de Saint-Benoît,
est celle de Cluny, qui ne fut fondée que
1 an 910. La plus ancienne de ces congré-
gaiions est celle du Monl-Cassin , ainsi
appelée du nom de ce célèbre monastère,
chef de tout l'ordre de Saint-Benoît. On lui
a donné aussi le nom de la Sainte-Grotte, à
cause du monastère qui a été bâti où était la
grotte ou caverne qui servit de premièrt^
demeure à saint Benoîl, lorsqu'il se relira à
Subiago; quelques-uns ont aussi donné a
cette congrégation le nom de saint licnoîl,
patriarche de cet ordre. Il ne se passa rien
de considérable sous le gouvernement de
l'iibbc Constantin, quisuccôd.ià saint Benoit.
Siinplicius, qui prit la place de Constanlin,
contribua beaucoup à la propagation de cet
ordre, ayant publié la règle du saint fonda-
teur, qui n'était guère connue que dans les
monastères qui avaient été fondés de son
vivant, cl il excita les autres commun luiés
religieuses à la recevoir et à s'en servir
pour perfectionner leurs observances.
Vital et Bonit furent abbés du Mont-Cas-
sin après Simpiicius ; mais le gouvernement
de Bonit ne fut pas tranquille. Ce fut de
son temps que la prédiction de saint Benoit
s'accomplit. Ce saint avait averti ses disci-
ples que tous les éditices du Mont-Cassin
seraient renversés par les Lombards. H n'a-
vait pu détourner ce mallieur, ni par ses
prières, ni par ses larmes; il avait seule-
menl obtenu de Dieu que tous les religieux,
échapperaient des mains de ces barbares. La
chose arriva comme il l'avait préilile l'an
580; les Lombards, conduits par un de leurs
chefs, attaquèrent de nuit les monastères et
s'en rendirent les maîtres. L'abhé Bonit el
ses religieux ne laissèrent pas de se sauver ,
emportant avec eux queli)ues meubles et
quelques livres, entre lesquels étaii l'auto-
graphe de la règle et le poids du pain, avec
la mesure du vin qu elle prescr t pour le re-
pas. Ils vinrent à Uome, où ils fuient favora-
blement reçus du pape Pelage II, qui leur
permit de bâtir près le palais de Latran un
monastère sons le titre de S.iint-Jean-Bap-
lisle, deSainl-Jean l'Evangéliste cl deSainl-
P.mcrace.
Il y avait près de cent quarante ans que
les Bénédictins demeuraient dans ce monas-
tère, ayant presque perdu l'espérance de re-
tourner à celui du Mont-Cassin, qui, selon
toutes les apparences, devait demeurer en-
seveli sous ses ruines. 11 avait servi pendant
un temps de ret aite aux bêtes sauvages ;
mais quelque» soiilaircs cl anachorètes y
avaient établi leur demeure l'an 110, lors-
que le pape Grégoire II, qui appliquait tous
ses soins à faiie lleuiir I état monastique,
après avoir non-seuletnent lait rétablir à
Borne plusieurs monastères ruinés, en avoir
fondé de nouveaux et changé même sa mai-
son en un nionastère, songea à relever les
bâtiments de celui du Monl-Cassin. l'étronax,
qui fut l'instrument dont il se servit pour
exécuter son dessein, étant venu à Rome
pour y visiter les saints lieux, avait peu!-
être eu dessein de fonder quelque monastè-
re ; mais le pape Grégoire lui persuada d'al-
ler au iMonl-Cassin, el l'engagea de travailler
au létab issemcnt de ce monastère. On ne
sait s'il était déjà engagé dans la profession
monastique, il est sûr au moins qu'il était
originaire de Bresse, et qu'il joignait à une
(1) Voij., à la (in du vol., n"' 201 el 202.
10G3 DICTIONNAIRE DES ORDRLS RELIGIEUX. fflf.i
iiol)ic -Jxlraclion bcnuriup lin piélc^. Il alla régulic tc;;: Tasie el Reirudc b.'itiiciU, à «ua-
ilonc an Miml-r,is>in 1 an 7:20; Il cominoiiça Irt" mille-, ilu Moiil-Cassiii, le nioiia-lùrê di;
à le rcbàlir, el forma u;:e notnelle commu- l'ioinbarole, où files se relirèrenl el vécurrnl
iMulé qui fui composcn de «luelqucs religieux dans l'observanee d'une ex.icle disci|ilinc.
(]u'il avait amènes de Rome et de la plus La i epulal on île l'abbé Pétronax s'el.iit ro-
{{ranile p.irlie lie ces solitaires qu'il y trouva ; pindue dans les pajs éloij;nés. Saint Boiii-
il gouverna cc'.te cnniinui.aiite en qualité lace, arche\équc de M.ijence, ayant lait bà-
d'abbé : il y balil deux monastères, le prin- lir la célèbre abbaye de Fuldeen Allen>agnp,
lipal >ur la iiionlagne, à l'enlroit mènir où dont le prince l'.arïomaii fut foiidaleur, [)uis-
il éiait du temps de saint Benoit, l'autre sous qu'il donna L' lieu sur lequel elle fui I âtic,
le titre de- Saint-Sauveur, proche le cliâleau désigna pour premier abbe de ce niun.istère
de Cassin, au pied de la mont igne, aux en- saint Stunne. Mais voulant que la règle de.
virons duquel l'on a bàli depuis la ville de saint benoît y fût exaclement obser\ce, il
Saint-(ierrnain. Il restaitd' l'ancien monas- envoya ce nouvel abbé au iMonl-C;issin pour
tère une tour que l'on \oit encore aujour- y remarquer soigneusemenl et les ub-crvan-
d'hui, el où, selon un ancien maiiu-cril, à ces et les usages, afin de les faire pratiquer
certaine fête de l'année ( peut-être était-ce ensuite à Fulde. Gisulplie, duc île liénéV' ni,
celle de saint Henoll ) les Urecs el 11 s Laiins édifié de l'exacte observance des reliai ux
faisaient l'ofllce : ce qui fait douter si l'abbé 'lu .Mou!-Cas>in, leur donna le lerri;oire d'a-
l'étronax institua dos moines grecs dans le lentonr. l.a duclussc Seauniperge, sa femme,
monasièrc de S.iiut-Sauvcur, ou s'il avait voulant imiter sa pieté, convertit en une
établi des moines grecs et des latins dans église, qui fut dédiée en l'honneur de l'apôtre
celui d'en haut, ou si les grecs ne venaient sainl Pierre, un temple qui se trouvait dans
point d'un cerl.iin m maslèrc voisin pour le chàieau de l^assiu, et qui y avait élé bali
célébrer l'oflice dans celui du Mont-Cassin. p ir les païens pour y honorer leurs fausses
Mais comi-ic Léon d'Ostie dit que les moi- divinités. Un des sujets du duc de Iténévent
lies des deux monaslères de Cassin se Irou- olîril aussi au mo laslère de S nn(-Benoil une
valent le mardi de Pâiiues dans l'église pa- église de Saint-Cassicn qu'il avait lail bâtir
roissiale de Sain'-I'ierre dans la ville de à Cingle, avec les lerres qui eu dépend ient,
Salnt-Cermain, que l'on appelait pour lors ce que ce prince confirma, el l'abbé l'étro-
de Saint-Pierre, <>ù ils célébraient la messe uax, de sou consenlement, fil b.ilir au même
avci: ui cliaiit piiêlé lie gec cl de lalin jus- lieu un monastère pour des religieuses. Le
qu'à la fin di; l'Lvangile , et que celle solen- pape Zucharie, pour temo gner au^si l'estime
iiité subsistait encore du temps de l'abb,' qu'il faisait de cet abbé el de ces religieux,
Tbeodemarc. comme il parail par ses lettres les protégn.iit en toutes sortes de renconires.
a i'empeieur Cliarlemagne, il se peut faire 11 leur envoya la icgle écrite de la main de
que celle solennité ait été insliluée par l'abbé saint Benoît avec le poids du pain et la me-
l'étronax. sure du vin qu'elle prescrit, qui avaient été
Dieu donna une grande bénéiliction à ses autrcfoi.; portes à Home. H leur donna des
travaux, cl sa communauté devint fort nom- livres de l'Ecriture sainte et des ornements
breiise en peu de temps : il y eut même des pour leur église. II evempta leur mona tère
princes qui voulurent être de ses di>ciples , cl les autres i;ui en dépendaient de la juri-
coaimeCarloinan, duc el prince des Français, diition des é>éques, et entre autres priv i-
lils du fjmcux Charles Alariel, m ire du p,i- legcs il leur accorda la permission de cnan-
1 lis. Ce piince, (pii avait eu en partat;e l'Ai- ter a la messe les dimanches et les fêtes le
leniagne el la Thuringe , après avoir soumis (iloiia in exccisis, ce qui n'était pas pour lors
par la lorce de ses armes, avec le secours de permis à toutes sories de prêtres, comme on
Pépin son frère, ces peuples qui s'étaient ré- le peut voir par la bullo de ce paj)e du 18
voilés en plusieurs rencontres, renonça à fe> rier 7'il, qui est insérée d uis le Itnllaire
ses Ltals el »iiit à Rome, où il reçut, l'an 7i7, de celle congrégation. Lnfin l'abbo Pelro-
la lonsure c éricale el l'habil monastiiiue des nax, après aM)ir gouverné ci lie a! baye pen-
m.iins du pape Zicharie. 11 se retira ensuite dant trente-Jeux ans, mouiut le 30 avril 750.
sur le mont Soracte, où il joignit à une 11 eut pour succrsseur Opial, qui crut que
église de Saint-Silvestre qui y était déjà, un par le crédit du prince t^arloman, religieux
moiiasti re (ju'il fit bâtir, el où il demeura de son abliaye, il pourrai! recouvrer le corps
quelque temps; mais s'y trouvant trop im- de sainl Benoil, qui avait été porte en Frame
purlune de visites, il alla au Mont-tjassin avtc celui de sainte Scidastique près de cent
pour y vivre sous l'obéissiinre de l'abbé Pé- ans auparavant, par saint Aigniphe, ()ueMon-
trona\. 'l'rois ans après, l'an 730, Rarliis, mol, abbé de Fleury, avait envoyé au Mont-
qui, otaiil duc d' Frioul, f.it choisi par les (bassin pour dieiclier ce précieux trésor.
Lombards pour succéder à leur roi Luit- (lu'il trouva ensevili sous les ruines de l'c-
prand, conçut laiil de mépris des clioses du glise du monastère. Optât envo\a de; ses re-
monde, ()ue, suivant l'exemple dol>arloman, ligiciix au pape Zach.iiie pour lui demander
il alla trouver à Rome le pape Zacliarie, des lettres de recommandaliun auprès du roi
dont il recul la tonsure cléricale el l'babil de France, et le prier d'employer sou auturité
monastique. Tasie, sa femme, et sa fille lie- pour contraindre les religieux de Fleury à
Irude, priri'iit aussi l'habil de religion, et le restituer le corps de leur saint fondateur,
pepe les envoya tous au monastère du iMonl- Mais ceux qui furent envoyés en France ne
Cassin, où Rai liis se soumit aux observances réussirent pas dans leur ambassade, «luoi-
)W:>
MON
MON
lOCG
Hu'ils eussent la prnlpciion du roi, qui en-
voya (les personni'S .i FIcuiy pour enlever
«le lorce le corps de saint .!{( noU ; car ceux-
ei, nj.int été couverts de lcnM)res en entrant
ilans l'église, en furent tellement tro iblés,
'lu'ayani demandé pardon à l'alibé et aux re-
ligieux, ils retiuruèreiil vers le roi ; el l'ar-
chevcque de Rouen, qui était porteur des or-
dres de ce prince, se conlenUi de demander
(luelque peu des reliques du saint, pour les
envoyer au Mont-Cassin,arin que ce lieu, qui
avait clé il'uslré p;ir sa présence, ne fùl pas
privé tout à fait d'un si grand trésor.
Les richesses de cctle abbaye et les monas-
tères de sa dépendance ausnientaienl do
jour en jour ])ar la libéral. té de ilusieurs
personnes qui y donnaient tous leurs biens.
Sous l'abbé Thoinichis, qui succéda à Gra-
lian l'an 76G, un gentilhomme de Béncveut,
iiiimmé Léon, se donna avec tous ses bii>ns
au monastère du Monl-Cassin : la donation
l'ut écrite de sa propre main el fut mise à
l'endroit où avait éié autrefois le corps de
saint Benoit. Elle contenait entre autres cho-
ses que tous ses serfs ou esclaves, auxquels
il venait de donner la liberté, seraient vas-
saux de l'abbaye; qu'eux el tous leurs biens
dépendraient d'elle, et que tous les mois il y
en aurait quatre qui ne s'occupera cnl qu'au
servie* des religieux et leur oliéiraiont <n
tout; qu'ils ne pourraient vendre qu'enire
i!u.x leurs biens et s'en faire donation l'un à
l'autre, el que les biens de ceux qui mour-
raient sans enfanls appartiendraient au rao-
naslérc, mais que les moines ne pourraient
vendre leurs enfants comme esclaves, les de-
vant regarder comme personnes libres.
Charlemagne, étant en italie l'an 787, alla
par dévotion au Mont-Cassin, el se reconi-
manda aux prières des religieux : il li-ur ac-
corda des letlres pour les maintenir dans la
jouissance de leurs biens; il confirma leurs
privilèges, leur en accorda de nouvearx cl
leur conserva le droit qu'ils avaient d'élire
leur abbé. Théodemar l'était pour lors : ce
fut dans ce voyage qu'il d manda à Charle-
magne le monastère de Glanfcuil, fondé en
France par saint Maur, se piaigi ant à ce
prince et au pape Adrien 1" d>; ce que c.' mo-
nistère de Glanfcuil, qui dépendait dans son
origine de celui du Mont Cassin, en avait élc
disirait, et de ce qu'il ava t élé dépouillé de
ses biens par l'abbé Gaïdull'e, qui était un
Ircs-méihanI homme. Le pape et l'empereur
eurent égard aux remonlrances de l'abbé
'J'héodemai ; Glanfeuil fut restitué au Mont-
Cassin; et il fut ordonné que ((uand l'abbé
scr.iit mort, celui du Mont-Cassin en nom-
merait un autre qui recevra. t de lui la béné-
diction et irait tous les cinq ans au .Mont-
Cassin, où il prendrait la place du prieur.
r.,cs moines de Saint-I^laitr-des-Fossés près
l'aris, chez lesquels on porta le corps de
saint Maur l'an 8GS, par les ordres du roi
Charles le Chauve, dans la ciainle des Nor-
mands, qui ravageaient la France depuis plu-
sieurs années, assujettirent à leur monastère
relui de Glanfeuil ; mais ceux du Mont-Cas-
sin le réclamèrent une seconde fois cl porlè-
DlCTIONHAlBE DES ObDIIES RELIGIEUX. 11.
rent leurs plaintes au pape IJibain II, qui,
ayant vu la bulle d'Adrien I", leur fil resti-
tuer ce monastère, qui a élé de leur dépen-
dance pendant près de deux siècles.
TanMis que les Normands ravageaient la
France et réduis, ;icnt en cendre-; la plus
grande partie des monastères, les Sarrasins
en Italie ne causaient pas moins de maux.
Ils pillèrent le territoire de Rome, saccagè-
rent le bourg de Sainl-l'icrrc, cl l'église de
ce prince des a[iôlres ne fut pas à l'ahri de
leurs insultes. Ils allèreni au Mont-Cassin
pour me Irc encore ce monastère dans le
même état de dé olalion où la fureur des
Lombards l'avait aut efois ré luit, n'y avant
pas laissé pierre sur pierre. Mais Dieu écouta
les prières des religieux, qui se couvrirent de
cendres et de ciliées, cl la nuit (lue les bar-
bares avaient choisie pour ravager le mo-
naslère ayant été employée à la prière et à
l'oraison, il fut pour cette lois préservé de
leurs insultes; car, par un miracle surpre-
nant, lorsque les Sarr sins se disposa eni à
passer la rivière de Liris ou de Garillan, lo
temps, qui élail extrê ueuicnt serein, chan-
gea tout d'un coup : il tomba une pluie si
prodigieuse, que cette rivière déborla, et les
Sarrasins furent obligés de s'en retourner,
s'élanl contentés d'avoir brûlé deux prieurés
des dépendances du Mont-Cassin. Bassace
était pour lors abbé de ce monastère. C'était
!a couiuinc de tenir, le dernier jour d'août,
un chapitre général, où se trouvaient les re-
ligieux des monastères de la dépend.mct' de
celte abbaye. L'abbé les entrclena t des de-
voirs de l'observaiice, et les exhort.it à s'en
bien acquiller. Le jour suivant on faisait le
choix de ceux qui devaient demeurur dans
chaque [iri 'uré, où on les envoyait pour y
exercer les l'ouitions qui leur é. aient com-
mises.
Bassace, qui avait gouverné celle abbaye
|)endant dix-huit ans, étant mort l'an 856,
iîcrthaire, l'un de s s disciples, fut élu en sa
place; et comme il voulut mellre à couvert
son monastère de toutes insultes, il l'envi-
ronna de tours et de fortes murailles, et com-
mença à bâtir une vil e aux environs de ce-
lui de Saint-Sauveur, au pied de l.i montagne.
Il fit d'autant plus aisément celle dépense,
que son abbaye augmentait chaque jour en
richesses par l.'-s grandes donations que l'on
y faisait. Mais ces précautions furent inuti-
les; car les Sarrasins étant retournés au
Mont-Cassin l'an 8GG, ils y firent quelque
dégât et jetèrent des meubles el des orne-
ments d'église dans le fleuve, ou les brisè-
rent; mais ils cpargnèrcnt pour lors les bâti-
ments, moyennant une soin me d'argent qu'on
leur olîrit. Attirés cependant p ir les graniles
richesses qui élaient dans (C monastère, ils y
relournôrenipouruiie troisième lois, l'a n88i.
Us attaquèrent le monastère d'en haut le 4
septembre, et le réduisirent en cendres, et
six semaines après ils en firent autant à ce-
lui de Saint-Sauveur au bas de la montagne.
Us tuèrent au pied de l'autel de saint Martin
l'abhé B«!rlhaire, qui comme un bon pasteur
s'exposa à la mon pour conserver son trou-
34
1(07 DICTIONNAIRE DF.S ORDRKS HEUGIEUX. Kfii
peau, car lous sps rcligicus 6rlinppèrc'.:t à les obser»ancp,s régulières pour \\srr i\ l,i
la rage tic rcs l),irl>nn's, cliarun ciii|K)iianl f ri;oii des soculicrs, te pape A);apol II, l',;ii
ce qu'il |ioiiv,iil du Ircsor do leur é'^lise cl O'iO, à la sollicitali m de l'ai be Baudouin,
lies aulri's meubles. Us se rclirèrciil à Tcaiic, obligi-a ces rel!j;ii'uv de relouriicr au .Minii-
«lans le prii'uri' do Saini-Uciudl, où ils du- ('assin, pour y \iMe dans les observances
reiit pour abbo Aiiizelar, qui élail prieur ré;;ul ères. Ils n'y allèronl nea:m)iiins qne
du Monl-Cassin, cl (pie ^"n mcrllo li( 6lc\er suos l'alibé Aligerne. (jui fui élu l'an '.IV'.I, il
sur le sioi;o épi«ropal de Tcaiie. Douv ans ic ninnastère, qui éliil demeuré pendani
après, il enirepril do rétablir le moiiaslére soixante el dix-scpl ans (Oiiine de-erl cl
de Sainl-S.iuveur; ee qui ue lui fui p is difli- ab.indnnné, depuis sa dernére desir'ie ion
cile à excculer, parce que es biens du Mont- par les Sarrasins, fui t'c nouveau habile par
Cassin s'accrurent beaucoup pendant son une nombreuse cornu uuauie qui se furina
adminisiralion. L'abbé l,éon,ran'JDV,lilrebà- dans la suile, où l'on \it en (juchiuc f ç n
tir celui du Monl-Gassiu, vingl-sepl ans après revivre l'esprit de leur foudaleur sous le ;;ou-
sa deslruclion. Un accident imprévu réduisit \erneinenl d'Ali^ierne, qui, comme un autre
en cendres celui de Tcano, où la pluparl des Pélronax, a été le reslauialeur, noa- seule-
livres du ,Moni-(]a>sin furent biûles, avec ment des édifices ma criels de celle abbaye,
l'auloiraplie d.' la règle de saint Ueuoil. Li s mais encore de l'observance régulière. Il fit
reli.ieux n'abandounèrent pas pour cela aclie\cr les bàlimenls (;ui avaient été coni-
Tèane: ils y reslcrcnl enc re jusqu'en l'au mencès par les abbés Léon el Jean, el rc-
915, que l'abbé Léon étant mort, el ne s- couvra la pluparl des biens qui avaient élu
Irouvanl personne |iarmi les religieu>L capa- usurpés par les comlcs de Toaue el d'Aqiiino,
ble de lui succéder, Landulpbc el Anlénul- ce qui lui attira beaucoup de persécutions,
plie, princes de Capoue, prièrent un saint pi iucipalement de la pa l d'Adenulphe,
homme nommé Jean, qui él.iil an hidiacre comle d'Aquino, qui, vojaut qu'il lui rede-
de IT-glise de Capoue, de prendre le giiuver- mandait ce qu'il avait usurpé à sou monas-
nement de cette (ommunaulé d- Téane. Il tère, el que, sur le refus qu'il en avail lait,
l'accepta, prit l'habit monasiique, el ayant cet abbé en avait porté ses plaintes à Lan-
été élu abbé par les religieux, il les fit con- dulpbe, prince de Capoue, il en fol si irrité
senlir à venir demeurer à Capoue. Mais qu'il le lit enl. ver, et l'.iyani fait couvrir
comme il n'y ava t point de monastère en d'une peau d'ours, il l'exposa à des ebiens
cette ville, cet abbé acquit, par échange de pour servir de spectacle au leuplo. Miis le
relnide Saint-Vincent de Voltorne, une petite prince de Capoue, voulant venger raffronl
6"lise à la porte Saint-Auge, où trois moi- l'ail à Aligerne, commanda à Aiicuulpbe do
ne« fort vieux demeuraient, dans une petite le venir trouver. Ce comle aima mieux se
maison qui n'était bâtie que de bois. Il y fit révolter contre son prince que d'oliéir, ce qui
construire, par les libéralités de plusieurs obligea Landulphe de venir à A(iuiiio avec
personnes, une église en !'honne> r de saint des troupes. Adenulpbe, s'y voyant assiégé,
Benoît, avec un monastère où il assembla et ne pouvant éviter de tomber entre le»
plus de cinquante religieux. mains do son seigneur, se mil une corde au
Quoique le monastère du Mont-Cassin fût cou el se fil ensuite con luire par sa lemme
inliabilé, il élaitcepcndanl toujours reconnu en la présence du prince pour implorer sa
pour le chef de tout l'ordre. Le pape Ma- clémence; mais Landulphe le livra ainsi lie
rin 11 lui accorda plusieurs privilèges ran'Jl'*, entre les mains de l'abbé Aligerne, et lui fit
et le main inl dans la possession de tous ses restituer lous les biens qu'il avait pris à son
biens cl de tous les monastères tant d'Iiom- abbaye.
mes que de filles qui étaient de sa dépen- 11 y a de l'apparence que l'observance ré-
dame, et confirma le droit que les religieux guilère, qui avail été rétablie au .Mont-Cas-
avaietît d'élire leur ablie. Le I'. Mabillon dit sin par l'abbé Aligerne, so itlril queUjue al--
que ce pape accorda à col abbé la permission teinte sous le gduvirneincnl de Manso i, qui
déchanter à la m sse.los fêles et dimanches, lui succéda l'an'JSG.el qui, bien loin de suivie
le 6'/or(a m cxcc/si.s; mais ions avons re- ses traces, mena au contraire une vie tout
marqué ci-dessus (|uc le papeZacbarie avail opposée, ijui ressentait plus celle d'un sécu-
acconté aux religieux de celle abbayo la lier adonné à ses plaisirs, que celle ii'un suc-
inèmc grâce deux cenU ans auparavant, ccsseur de saint Benoîi. Il se faisait suivre
l'eul-étre ce savant bénédiclin a-l-il trouvé ordinairement par un grand nombrcile <lo-
la bulle de Zacharie su-pccle, ce qui l'a pu mesiiques vêtus de soie : il avait de grands
(•in|iëeber de parler de ce privilège plus lot équipages et fréquentait souveiU la cour de
qu'eu l'an OW, et il .n'a pas apparemment l'empereur. L'envie de doiiiincr lui fil cnm-
rombaltu celte bulle |)<uir ne pas laire de mencer une forteresse où s tint Tliom is d'A-
peine aux Bénédictins de la i ougrégation du (|uin a pris naissance dans la sute; ce qui
Monl-l'.assin,qui comptent fort sur toutes les donna île la jalousie aux princes de Capoue,
bulles in-érées dans leur Bullaire, quoique qui appréhendaient qu il ne voulut se rendre
cejiendaiil il j eu ail plusieurs de douieuscs, iiiaiire de loulc la province. Alberic, evéqiie
principalement celles du pape /acharie. de .Mars;co, qui av.iit envie île semparei de
Comme li s princes de t;apouc avaient as- l'abbaye du Mont-Cassin pour la donner a iin
sujctli te monastère de Sami-Henoil de Ca- fi s qu il avait eu d'une concubine, pr.iliiant
puue à lur dominatioii, ce qui avait clé de la jalousie des iirincos de Capoue. con-
cause que hs religieux avaient abandonné vint d'une somme d'argeul avec quelques
1069
M,>N
MON
Iu7v»
liKurgfois (!o Capoue i'( quelnues mi'-chanls
iniiiiies. pour se saisir de rabi)é cl lui crevur
l(Sjcux: (■«■iix-ci ajaiit exéculé leur pro-
messe l'an 990, ils iniri ni les jeux de (et
abbé dans un lingo pour les porier à ccl in-
digne prélal, afin de rtcevoir de lui la ré-
compense de leur crime; mais, par un juste
jugement de Dieu, ce méchanl évèque niou-
rulàla même heure i|ue Mansoii avail été
privé de la vue.
Coinoie il esl plus ai'iéde tomber dans le
relâcheincnt que de s'en rcl. ver, il et à
croire que les religieux du Moiil-Cassin ne
profitèrent point ni des avis ni de l'exemple
(|ue leur donna leur abl c Jean 11, successeur
de Mansoii, qui élail un tiès-saint homme,
et que ce fut ce qui l'obligea à renoncer à
celle dignité, pour se retirer dans une soli-
tude avec cinq ou ^is religieux qui voulu-
rent apparc nmcnt éviter le relâchement.
Cem qui restèrent au iMoiit-(]assin ne profi-
lèrent pas davantage des instiuctions que
leur donna Jeaji lli, qui fut élu aprè^ ja de-
mission volontaire de Jean II. Cet abbé fit
paraiire beaucoup de cousiancc el de gr.in-
deur d'âme dans toutes les adversités qui lui
arrivèrent pendant les douze années de son
gouvernenienl : car pendant qu'il ne son-
geait qu'à embcll.r l'église, à faire de noii-
veaux bâtiments et à augmenter le nombre
des monastères de sa dépendance, un grand
Ircmblenienl de terre, qui dura pendant
quinze jours, endommagea noiablement l'é-
glise. D'un aulre côté, les princes voisins,
par les vexations qu'ils lui firent, l'obligè-
rent de se retirer à Capoue; et ses moines,
pendant son absence, lui a^anl suscité une
persécution d niestiiiue, le déposèrent et
élurent en sa place un a >tre abbé. Mais le
schisme ne dura que sept mois, et les Irou-
liks ayant été apaisés, l'abbé retourna au
Monl-Cassin, oîi il mourut l'an 1010. Ce que
l'on pourrait condamner dans la conduite
lie cet abbé, c'est d'avoir de son vivant fait
reconnaître pour son successeur, par une
partie de ses religieux, un de ses parents, qui
Il était encore (|uu novice ; ce qui causa un
nouveau schisme.
11 y eut un troisième schisme en 112G et
un quatrième l'an ji38, et de temps en temps
le monastère se trouvait vexépar la tyrannie
des seigneurs voisins. L'an 10.J0, Pandulphe,
prince de Capoue, s'empara de f;resque tous
les bourgs et villages qui lui appartenaient,
(tout il mit en possession les Normands, qui
suivaient son parti et qui étaient pour lors
répandus dans l'Ilalii". 11 enleva les vases
s icrés et les ornements, et donna le gouver-
nement de la ville de Saint-Germain et du
iiitinasièrc du Monl-Cassin à Todin, l'un des
serviteurs de celte abbaye, qui traita les
moines avec tant de dureté, qu'il lit manger
les serviteurs dans le réfectoire, où juscpi'a-
lors aucun laïqui' n'avait été a Imis, et qu'un
jour de l'Assomption de la Vierge ils ne pu-
rent pas avoir de vin pour dii'e la messe.
Richer, qui fut abbé en 10:17, fut obligé de
lever des troupes pour recouvrer les terres
oui avaient éic usurpées. Il disputa le pas-
sage du Garill.in aux conVe* d'^iuino et
aux Normands qui étaient avec eux; mais
ayant été forcé, il fut fait prisonn er, et pi-n-
danl quinze jours tout le territoire de Cassin
fut en proie à l'ennemi. L'abbé, ayant été mis
en liberté, all.i en Allemagne, d'où il ramena
des troupes avec le secours disqiie'Ies il
contraignit les Normands qui occupaient
les terres de l'abbaye de lui prêter serment
de fidélité; mais ils le violèrent peu de temps
après, car se voyant en grand nombre, ils
bâtirent le château de Saint-André pour leur
servir de place d'armes et de retraite, sans
avoir ég ird aux dcfen-es de l'abbé, qui eut
recours alors aux armes spirilneres de la
prière, et qui, par le secours de saint Renoil,
fit plus qu'il n'aurait fait avec des troupes
réglées: car les Normands étant tenus au
Mont-I^assin sous l;i (onduite de Kitdolphe,
sous prétexte detraiter de paix, mais en effet
dans le dessein de faire [irisonnier l'abbé ou
de le tuer, ils entrèrent dans l'église comme
piiur faire leurs prières, ayant laissé leurs
armes à la porte, suivant la coutume de ce
temps-là, auquel il n'était pas permis d'en-
trer dans l'église avec des armes. Les ser-
viteurs de l'abbaye s'en étant aperçus, se
saisirent d«s armes et des chevaux des Nor-
mands, sonnèrent le tocsin pour faire prendre
les armes aux habitants des lieux c rconvoi-
siiis, et se jetèrent sur les ennemis, en tuè-
rent plusieur- et firent prisonnier Kodolphe,
leur chef, avec plusieurs autres ; de sorte
qu'eu un seul jour les moines du Monl-Cas-
sin recouvrèrent tous les lieux qui avaient
été usurpés, à la réserve des châteaux de
Saint-Victor et de Saint-André, dont ils chas-
sèrent aussi, quelques jours après, les Nor-
mands ; après quoi l'abbé, ne se fiant plus à
leur serment, fil cntoun r de murs tous les
( hâleaux qui dépendaient de l'abbaye, et y
mit garnison.
Le monastère du Monl-Cassin prit un non-
veau lustre sous le gouvernement de l'abbé
Didier, depuis pape sous le nom de V icior III,
qui est regardé comme un des restaurateurs
(le celte célèbre abbaye. Il fit abatte l'an-
cienne église l'an lOGii, et en fii rebâtir une
autre avec toute la magnilitence possible,
ayant fait venir de Rome, avec b(viucoufi de
depinse, des marbres, des colonnes, des ba-
ses et autres matériaux. Il envoya inème jus-
qu'à Gonstantinople pour faire venir d'ha-
biles architectes. L'église fut achevée au
bout de cinq ans, et la dédicace s'en fit avec
beaucoup de solennilé et un grand concours
de prélats; car il y eut dix arcbevcqucs et
qii.irantc-lrois évoques qui y assistèrent avec
Hichaid, prince de Capoue, son fils et son
frère, Gisulphe, prince de Salerne, et Lan-
dulphe, prince de ISénévent, et plusieurs au-
tres seigneurs. L'abbé Didier ne se contenta
pas d'avoir fait rcbâiir l'église, il ajouta en-
core plusieurs édifices au monastère, dont
les richesses augmentèrent dans la suite par
les grandes donations qui lui furent faites.
Le schisme (jui arriva dans l'Kglise l'an
ILJO, a près la mort du pape Honori us II, pensa
causer encore la ruine de ce monastère. Le
\i:i niCTIONNAIHE OF.S OUDRr;S UELir.lELX. 10-2
même jour qu'liiiitifoiil 11 fui élu caiioiiii]u.'- I.i's évononicnls 1 •« plus romarfjiiaMi'S rjui
incnl pour siincsseur il'llono. ius , le cinli- ariivorciil dans la suite dan< «•t'ili- alih je
liai Pierre de Léon, ay.inl une pui -saule fac- regardent le tioiivei iieinciil spirilurl. I.or.-—
tain dans Koine , se lit aussi prnclainer pape que saint Cclelin fut éle>é sur la tbaire de
sous le nom d'AnacIcl 11. La France, l'Aile- sainl Pierre, l'an 12'JV. il nnl au Monl-Cas-
iiiafcne cl l'Anglrlcv re reeonn. lissaient Inno- siii, et \oulant l'unir à la longrégalion (ju'il
lenl. L'Iialie suivit Icpali d'Aiiailct , qui, a^ail fondée et qui a porté son nom^ il prr-
poury attirer Ki'ger, duc de 1.1 l'ouill -, cl se suada aux religieux de quitlir leur lialiit
le rendre plus favoiable, érigea ses Hais en pour | rendre celui de sa congrégation, qui
royaume sous le nom de Sicile. L'empereur était gris et d'une élolT.' irès-ïrossiére. Il y
J.o h lire elanl venu en Italie pour rétablir le envoya près de (inquanle religieux de celte
pape Iniiocenl sur son siégi' , se lit conroii- coiurcgalion nouvelle, et y nomma pour ab-
i:cr parce |)oiil:fe dans le palais de Latran , lé Aiigelar, qui ct.iildc la inéine congréga-
el sa présence pacilia tous 1rs troubles. .Ma s titin cl qui ne gouverna que cinq mois ; car
à peine ce prince ful-il parii , que Uiiger, s'é- le pape sainl Celeslin ayant renoncé celle
lan' mis en campagne avec une .armée, s'em- même année au poutilical , lîoiiifare \'I11 ,
parade presqu.- toutes les l rrcs du sainl- (|ui lui succéda, cassa tout ce qu'il avait
siège. L'cmpeieur, qui n'iivail rien diminué lait, excepté les cardinaux. Les Célesllns
(le son affeclio i pour l'Lglise , relourna en sortirent du .M iit-Cassin, cl i! fit rendu aux
Ita ie avec une puissan e année. Pendant Héni'diclins.quilepos-édèrcnlet élurenlleur.s
qu'il était en cliemin , Guarin , cliancelicr de abbés jUM|u'en l'.m LUS . qu'aprôs la mort
lloger , voulut coulraiiidre le^ moines du de l'abbé Isuard. le pape Jean XXII en don-
Mont-Cassin d'abandonner leur iiionaslèieen- na l'administration àOdon, patriarche d'A-
Irc les mains de ses gens pours'opposcrà l'cm- lexandrie; et après la mort de ce prélat, qui
pereur ; mais ils n'y voulu, eut pas consentir arriva l'an l.'J23 , le même pape ér gea le
et déclarèrent qu'il-, coinbaltraient jusiju'à la .Munt-l^assin cl tout son territoire en évéclié,
mort , el (iu'ils soufTriraicnl plutôt d'être ré- et supprima la digiii é d'abbé. Il y eut neuf
diiils à iiiangif la cbair des chevaux, des évciiues de suite, el après la mort d'Ange
chiens el des rais , que de consentir que leur des Ursins, qui fut le dernier, el q li mourut
mon;:stère lombâl entre les mains des sécu- l'an 1367, Urbain \',considéra'il que, pendant
liers. Sénicrecl, qui êiail pour lors abbé, près de quaranle-ijnatre ans que ce monas-
crnyant lléchir l'fsprit du chancelier, lui en- tère n'.ivail point eu u'ab es, l'observance
voya douze de ses plus anciens religieux nu- régulière en avaii clé presque bannie , lui
p.ieds, pour le prier de leur accorder d i resli iia le litre d'abbaye, ei supprima la di-
temjiS, alin de convoquer 'e chapitre gêné- pnilé épisi opale ; il iiril ce monastère sous
rai pour prendre l'avis des rel'gieux qui de- sa protection, en fut lui-niènie abbé, et le fil
incuraicnl dans les monastères de l.i dépen- gouverner par ses p'ocureurs jusc(u'ei» l'an
dance du Monl-Cassin. La communauté con - l-i70 , qu'il mourui. AprJ's sa mort, Uarthé»
duisil CCS douze religii ux à la porte du mo- lemy de Sienne fut élu abl-é l'an l.'37l. Mais
naslèic, fon lant tous en larmes ; ils rentré- quoique le pape eût érigé le Mon -Ca>sin el
renlcnsuile dans l'égliseï II frappant leur léle tout son territoire ci évccbé, l'on peut dire
contre le pavé, ils implora eut la miséricorde qu'il ne lit pas un nouvc au dioeèse , puisiiuo
'le Dieu el le sei ours de saint Benoit. Ils li - les abbés du Monl-C.issin avaient toujours
r. ni des proccssioas où ils porlèrenl, entre eu une juridiction presqueépisropalcccmmo
autres reliques, du bois delà vraie croi\ , ils l'ont encore. Ce pontife ne démembra neii
un bras de l'apôlre sainl Mallhieu et un Iras des aulreu diocèses pour former celui de Cas-
dc sainl Maur : ce qui ayant irrite davantage sin ; el lorsque le | ape Urli.iin V supprima
le chancelier, il menaça de faire couper le la dignité episcop.ile, il ne diaii^iui rien do
nez et les lèvres à Ions les religieux, et leurs la juridiction de l'abbé du Mant-Cassin, qui
habits jusqu'à la moitié des cuisses. assenibic un synode, con ère I s ordres mi-
L'abbé Scnioreci, voyant qu'il n'y avait plus neurs, non-seulement à ses religieux, mais
d'espérance de le llècliir . mil son inon.islère .'iu\ seculii rs qui soni de -^a jui idicliun, leur
sous la proleclion de Landulplie de Sainl- donne le sacrement de conlirm ilion, el jouit
Jean, qui tenait le parti de l'empereur. Il y de plusieurs droits qui n apparlicnuenl
envoya des soldais et y vint Ini-méme peii qu'aux évêques.
(le Iciiips après. .Mais dans le temps que le Après qu;- le pape Urbain V cul rendu le
chancelier de Hoger mciiac.iil de venir rui- lilre d'abbaye à ce monastère, il fut toujours
lier le monas'.ère, il inoiirut suhilcnicnl. goiivernépardes abbés réguliersjusqu'en lan
L'ali'.ié Sèniorecl étant mort aussi l'an li;i7, l't'>'i. Pyrrhus Tomacelli, aj anl été élu en
il y eut quelque division entre les religieux l 'jlO, gouverna celte abbaye pendant dix-huit
lie celle abbaye au sujet de l'élection d'un ans; mais ay.inl voulu retenir le château do
nouvel abbé. Uaynaud de Toscane , selon ce Spole le coiiire la volonté du pape Kiigène IV,
que dit M. An','e lie la Noce, fulelu lumiiliuai- ce ponlile le fit enfiTiner dans le château
renieiil, el rei'unnut d'abord l'anlipape Aiia- S.iinl-Ange, oùilmouiul l'an l't37, après
rlfl. Il se soumit cependant à l'obéissance avoir été privé de son abbaye peu de temps
d'Innocent II par rei'.lrciiii.-c île l'empereur auparavant. Llle demeura sans chef pendant
l.olhairc, et fut enfin déposé, apr.s que le huit ans el demi, jusqu'en l'.in r»'i(j, qu'An-
papc eut fai! examiner sou élection, qui ne loiue C iraffa, dernier abbe régulier perpé-
te Iroma pas canonique. lue!, lui élu pour la gou-eriier. Mais aprèï
1073
MON
MON
{0T4
s.i inori, qui arriva l'a» IVo'î, ce inonaslèie
fui donné en commonde au cardinal Louis
Siara'npi, patriarche d'Aquilée. Le second
ablié coniinendalaire fui le pape Paul 11, qui
le fil gouverner par ses légais depuis l'an
l'!65 jusiju'à sa mort. Jt-an d'Arfigon, fils de
Ferdinand, roi de Naples, l'obtint en uitc.
Knfin II- cardinal Jean deMédicis, qui fut en-
suite pape sous le nom de Lé lû X, m avant
été pourvu, s'en dcmil entre les m;iiiis da
pa(;e Jules II, qui l'unit, l'an loOi, à la con-
grégation de Sainle-Ju^line de P.idoue, dont
nous par'erons dans la suite. Mais avant
celle union il y a de l'apparenci' (jne l'iin-
cienne cong égation du .VI )nt-Casî in ne sub-
sistait plus, et que lesdilTérent s rcvulutions
arrivées dar.s le gou' ernemenl spirituel do
cette abbaye avaient empêché la tenue des
chapitres généraux.
Si l'on veut ajouter foi à ce que d sent
\Vion et quelques autres auteurs, l'atibé du
filonl-Cassin se qualifiait patriarche de la
sainte r('li;;ion, duc et prince do tons les at-
liés et religieux, vice-chancelier da l'empire,
chancelier des royaumes de l'une et l'autre
Sicile, de Jérusaletn el de Hongrie, comte et
recteur de la Champagne, terre de Labour
et provinces maritimes, vice-emponur et
prince de la pais ; mais si cela était vrai,
M. Ange de la Noce n'aurait pas manqué
d'en parler. Il païaît seulement par la chro-
nique de Paul, diacie de celle abbaye, (]uq
l'empereur Lothaire donna à l'abbé Gnibalda
le litre de chancelier et de grand chapelain
de l'empire et celui de prince de la paix, et
M. Ange de la Noce dit qu'il est le premier
baron du roya;:me do Naples. Ponce, abbé
de Cluny, s'élant rencontré à Rome avec
l'abbé du Mont-Cassin dans un concile, et
ayant voulu s'attribuer la qnalilc d'Abbé d; s
abbés, on lui demanda si Cluny avait co,:,-
muniqué la règle de saint Benoit au .Mont-
Cassin, ou le Mont-Cassin à Cluny; et ayant
confessé ce qu'il ne pouvait nier, on inféra
que c'était avec justice ciue l'abbé du Mont-
Cassin prenait ce titre, qui lui avait été ac-
cordé par les souverains pontifes, parce que
celait du Mont-Cassin que la règle de saint
Benoît s'était répandue par tout le monde.
C'est pour celle raison que saint Odilon, qui
était aussi abbé de Cluny, s'élant trouvé au
Mont-Cassin el ayant été prié d'y célébrer la
messe solennelle avec la crosse en main, ne
■voulut jamais paraître avec t elle marque de-
vant le chef des abbés, c'est-à-dire devant
l'abbé du Mont-Cassin.
Voy. Léon d'Oslie, Chronic. mona-lerii
Cnssin. cum notis Angeli de Nuce. Anton,
'l'ornamira, Orig. e Prog. délia coiig. Cassi-
nense. Arnold Wion, Lii/'ium titœ. Bulteau,
llist. de l'ord. de Saiut-Be.ioil. D. Jean Ma-
billon. Annal. Binedict. Cornel. Margarin,
liullar. Caunnense (1).
JIONT-CASSIN (CoNGBÉOATioN du), autre-
fois de Sainte-Justine de Padoue.
Les Bénédictins de Cluny. dans le temps de
leur ferveur, avaient rét;ib!i l'ordre de Saint-
(1) Voy., à la (in Ju vu!., n"' 265 riOi.
Benoît en Italie dans son ancien lustre; on
les y avait appr-'és de tontes (larls pour ré-
former les plus célèbres monastères et y
faire revivre lesobservances régulières; m;iis
ils abandonnèrent dins la suite ces obser-
vances, el tombèrent dans un si grand relâ-
chement , que, sur la fin du xiv siècle et au
commencement du xv, à peine Irouvait-on
en Italie un mona lèie, suit de la congréga-
tion de Cluny, soit des autres congrégations
de nmines Noirs, où la règle de saint Benoît
fût suivie et oti les religieux en connussent
même les principales obsevances. Cette rè-
gle n'était plus connue que dans les congré-
gations réformées , oii les religieux , qui
étaient dans leur ferveur, s'cttidiaienl à la
pratiquer fidèlement; et mê i e il est proba-
ble que le grand relâcliement où étaient
tombés les muines Noirs en Italie obligea
les fondateui'S de ces congrégations à pren-
dre dans leurs habillements des couleurs qui
les dislinguassenl de ces moines relâchés.
La célèbre abbaye de Sainte-Jusline rie
Padoue fut du nombre de celles que les reli-
gieux de Cluny possédaient. Dès l'an 1316,
elle avait é'é tellement ruinée par les guer-
res qui désolèrent l'Italie , qu'il n'y restait
que trois religieux en l'iO", lorsque le pape
Grégoire XII donna celle abbaye en cutn-
mende au cardinal de Bologne. Ce prélat,
ayant compassion de l'élat déplorable de ce
monastère, qui n'avait aucune clôture et où
des ménages entiers d'hommes et de femmes
demeuraient, y Dt venir des religieux du
Mont-Olivct pour y réiablir les observances
régulières, ce qu'il fit approuver par le sou-
verain pontife, et les trois religieux de Cluny
furent contraints d'en sortir. Mais ceux-ci
eurent recours à l'au'orilé de la république
de Venise, qui les rétablit dans ce monastère
et renvoya les leligieux du Moiit-Olivet dans
ceux de leur congrégatinn. Le cardinal de
Bologne, en ayant eu avis, se démit de cette
abbaye enire les mains du pape, et sollicita
Sa Sainteté de la donner à un abbé réj^ulier
qu'il jugerait piopre pour réformer ce mo-
n;istère. Le pape révoqua la bulle qui unis-
sait l'abbaye de Sainte-Jusline à l'ordre du
Mont-Olivet, et la conféra à Louis Barbo,
noble Vénitien, qui était potir lors prieîir
des chanoines séculiers de Saint-Georj^es
1» AUjha à Venise. Il avait refusé quelque
temps auparavant l'abbaye de Saint-Cypr:eii
de Murano, que ce même pontife lui avait of-
ferte, el cela par rattachement qu'il avait
pi'ur sa congrégation qu'il ne voulait point
quitter ; mais ayant été de nouveau pourvu
de l'abbaye de Sainte-Justine de Padoue l'an
li08, et le pape lui ayant commandé de I ac-
cepter, dans l'espérance qu'il avait qu'il y
létabliraitlesobservances régulières, il obéit
aux ordres du souverain pontife, prit l'habit
(le l'ordre de Saint-Benoît, et prononça ses
vœux entre les mains de l'évêque lie Trifern»
ou de Castel, qui lui donna aussi la bénédic-
tion abbatiale, le.'î février l'iOO, en ayant eu
coinmissinn du pape.
1075
niCTIONNAIRR OKS OUOriES REI.if.IF.I X.
10-6
Louis B.irbo, ayanl pris possession du mo-
nastère de Sainie-Jusliiie, commonca par
faire rebâtir les lieux répulicrs rt ictiielire
la clôlnre ; mais rommo il n'y trouva que
ces trois religieux ili- t^luiiv, et qu'il n'aurait
[lU nvec un si petit noinlirc prati(|ucr tout
ce qui est prrs rii d.iiis la rè^lc de saint Ue-
noil, tant imur ce qui rci;ardt' les offires di-
vins que les ol'seï vances régulières , il de-
ni.'inda deux autres religieux à l'alibé de
Saint-Michel de Murano, de l'ordre des Ca-
malilulcs, et fit venir enrore deux < lianomes
de la con^rétration de Saint-Georges in Al-
fj'in : quoiqu'ils fussent lous di' dilTérentes
fongrépations, et (ju'ils eussent aussi des
liabillements diiïén'nl^, ilscon\en;!ie il néan-
moins rns' mbie dans les obsirvanccs régu-
1 ères, qu'ils pr.ili(juaiciil coufonnémenl h la
règle de saint Uenoil et aux rcgUinetits qui
fuient dressés par Louis U irbo, dont Dieu
bénit les lionnes intentions : car il reçut dans
la su'te un si grand nombre de novices, que
le monastère de Sainte-Jusline ne lut pas
suffisant pour loger Ions les ri ligieux qui se
rangeaient sons sa conduite, de sorte qu'il
10 ni obligé de faire de nouveaux élablissc-
menis. Le premier fut à Bassano proche Pa-
doue, où il acheta une église dédiée aux
saints martyrs Ilerningore et Fortun it, à la-
quelle él it atlaciié un ancien niomislère qui
avait autrefois appartenu à des religieuses,
et après en avoir fait reb'ver les bâtiments,
il destina ce lieu p uir y élever les novices.
Les bourgeois de \'érone lui ayiinl offert
un établissement dans leur ville, il y lit aussi
réparer un ancien monastère appelé Noire-
Dame df Caretta.qui avait été ruiné par les
uuerres et par les al bés conunendalaircs ;
mais l'ayaiii abandonné quelquelempsaprès,
et celé aux religieux de Samt-l'rançois, il
lil bâtir un aiiire monastère sur le mont
Agilano, proche une église qu'on avait con.-
nicncé à bâtir en l'honneur des apôtres saint
Jarijups et s lint Philippe ; et ce fut pour lors
qu'il durma le nom de Sainte-Jusline de l'a-
doue à sa congrégation.
Les habitants de Milan, qui vou'aient ré-
parer l'.ibbaye de Saint-Denis, qui était toute
ruinée, dcmaudèronl de-, religieux à Louis
Barbo pour y rétablir la discipline monisti-
que, ce qu'il leur accorda bien volontiers,
l.a répulalion dL' ce réformateur se ré-
(land.int p.ir toute l'Ila'ic, il fut invité par
plusieurs princes et piusie irs seigneurs
do leur envoyer des religieux pour réfor-
mer les miiiia>tères de moiUi'S Noirs situés
dans les terres de leurs dé|)endances ;
mais il ne voulu! point a( rcpUr ceux qu'on
lui offrit, (ju'à condilion ()ue les abbés com-
memlaiaires ne se mêleraient plus <lu spiri-
tuel, et (|u'après leur murl la congrèg^ition
aurait une entière aulorilé ^ur ces monas-
tères, où elle mettrait lel supérieur que bon
lui semblerait, et <)ue les neligieux (jui y fe-
raient profe>sion promettraient oliéis^ance à
la congrégation. Il en aicepta quelques-uns
à ces ctindilions ; le premier fut l'.ibbaye de
Sainic-.M.irie de Florence, dont un ( ertaiii
N coIjs Vas'on ilail abbc ti:nincuJuta il'.
C'était un homme violent et emporté, (ini
avait toujours les armes à l:i main et (jui
était à la tète de plusieurs scélérats, compa-
gnons de ses crimes ; mais ayant clé toncbé
par les disrours de Barbo dans nni> conver-
s.iti.in (|u'il eut avec lui, non-seulemeni il
lui donna son abbiye, mais il pi it l'iiabit de
l'ordre de Saini-Benoit e! mourut sainicincnt
djiis le monastère de l'adoue.
La c<in;:régation augmentant tous les jours,
Louis Barbo en demanda \:i confirmaiion au
pape Martin Y, l'an l'il", lorsque ce pontife
passa par Milan, à son retour du courile de
Constance où il avait été élu ; ce qui lui lut
accordé sans difficulté. La congrègalion fil
ensuite de nouveaux p og es, on lui donna
la célèbre abbaye de Saint-Benoit de l'oli-
rone dans le duché de .Manlou -. Les reli-
gieux deCluny la pos>éilaient et n'y vivaii nt
pas avecplusde régulariléque d insles antres
monastères. Ciui de Gonzague en était abbé
cominendalaire ; il avait souvent exhorté ces
religieux à réformer leurs mœurs coi rom-
pues , mais ses exhortations n'ayant eu au-
cun effet, il sollicita .Martin V d'unir C'> mo-
nastère à la congrégation de Sainle-Jusiiniî
de Padoue. L'union de eeitc fameuse abbaje
lui donna beaucoup de lustre, qui augmenta
encore davan'age par l'union qui y fui faite
de la basilique de Sainl-P.iul à Home et d-
Saint-Georges le .Majeur à N'enise, de Saint-
Sixte à Plaisance et de plusieurs autres fa-
meux monastères. Le nombre en étant beau-
coup augmenté, on lint le premier cb.ipilre
général, l'an l'rii, dans ral)lia\e de S.iint-
Itenoit de Polirone, où Lo lis Barbo fut du
pour premier président général de la con-
grégation, et tous les ans on lint de pareils
chapitres généraux ; ce qui fut encore ap-
prouvé par .Martin V, qui ac<ord,i beaucoup
de privilég.'S à cette congrégation et permit
de faire de nouvelles constitutions. Eugène IV
lui accorda d'autres piiviléges et fit des rè-
glements pour les chapitres généraux. Enfin
Louis Barbo , appréhendant (pi'après sa
mort l'abbaye de Sainte-Justine ne retombât
encore en commende, se démit de cette ab-
baye en laveur de sa congrégation, d.ins le
chapitre général qui se tint à N'enise l'an
l'tS'T. .\prés cette démission, Louis Barbo
voulut mener une vie privée ; mais le pape,
qui conn.'iissait son mérite, ne \oiil.'int pas
qu'une ^i grande lumière restât cacliée dans
une solitude, Ini donna l'évéché de Trévisc.
Après avoir gouverné ce diocèse pendant
l'espace d'«'n»iron (jualreans, ;ivec tout le
zèle et la vigil.ince d'un saint pasteur, il
mourut dans le monastère de Sainl-Georges
le .M.ijeur à Venise l'an lii.'L cl son corps
lut jioité à S lintc-JusIinc de Padoue, comme
ii l'avait ordonné.
t'.elte eongregalion a porté le nom de
Sainte-Jusiuie de l'adoue jusqu'en l'an \IH)\,
(|ue le monastère du Munl-Cassin y ayanl
été uni après la démission qu'en lit le cardi-
n.il de .Mé licis, qui en était abbé commenda-
t.iire, et qui fui pape dans la suite sous le
nom de Léon X, le pape Jules II voulut
qu'elle qiiilijl le nom de Sainte-Justine p'ur
ro77
MON
MON
1078
[ironilre celui du MoiU-Cassin, qui é(nil chif
lie tout l'ixdre, et qu'on l'appelât à l'aveiiii-
la fongrégatiou du Mont-Cassiu autrefois de
Siinlc-Jusliue : elle a environ qiialre-viugl-
quinzc monastères célèbres et environ une
centaine de pelits de la dépendance do ces
célèbres, linlre ces p tils rnonaslères il y en
a environ une Irent >iiic où il n'y a que des
abbés titiil.iires qui n'y font pas ménie leur
résidence. Tous ces mon l'tères sont divisés
en sept provinces, qui sont celles de Rome,
iie Napiis, de fi cile, de '^o^ca^e, de Venise,
de Lombardie et de Gènes. Le monastère de
lA'rins en Provence esl aussi de ci lie con-
grégaiion et de la provin c de Toscane. Il y
a aussi des monastères de filles qui dépen-
dent d.' cetle congrégation. Tous les abbés
se serïi-nt d'ornements poulilicaux, même
les abbés titulaires, et donnent les quatre
mineurs à leurs religieux.
r^e plus célèbre monastère ilo celte con-
grégation est celui du Mont-Cass n, dont
nous avons déjà amplement parlé dans l'ar-
licle précédent, et qui surpasse par sa ma-
gnlficence tous les autres monastères d'Ita-
lie. Celui de Sainte-Justine de l'adoue peut
tenir le second rang. Il renferme six cloî-
tres, plusieurs cours et jardins. L'église, qui
I st très-grande, esl pavée de marbre noir,
blanc e. ronge ; l.i couverture de l'église est
chargée de neuf dômes. Il ne se peut rien
voir de plus beau (pie le maitro-autel. Il y a
tians celle église v.ngl-qualre chapelles de
marbre dont tous les dessins sonl dilTérents,
el l'on prétend que celle abbaye a soixante
m;lle duats de revenu. Celle de Saint-Be-
noît de Polirone, à do ze milles de Manloue,
esl d'une \asle étendue. Il y a un clos de
quatre milles de tour. Les religieux y sont
1 )ujour>i au nombre de cent prêtres el qua-
ranie frères. Us sont seigneurs spirilu> Is et
temporels de plusieurs villages, el curés pri-
mitifs de trinte-huil paroisses, qu'ils peu-
vent tenir eux-mêmes, aussi bien que celles
qui dépendent des autres nio laslères de
celte congrégation, en vertu des privilèges
qui lui ont été accordés par les souverains
pontifes. Cette même abbaye de Saint-Be-
(loil possède autant de teries que trois mille
paires de bœufs en peuvent labourer. Celui
de S.iinl-Séverin de Naples est aussi très-
magnifique. Il y a trois beaux cloîlres, donl
l'un est orné de piintures exquises à fres-
que, et un autre est de marbre blanc de Car-
rare, à colonms d'ordre dorique. Le dortoir
répond à cetle magnificence. L'église esl
aussi très-belle. Le niaitre-aulel est isolé et
entouré d'une balustrade de marbre. Le
pavé du chœur est aussi de marbre; les
sinlles des religieux, qui sont de biis do
noyer à feuillages, cl tournée! cbacune
(l'une manière dilîérente, oui coûté seize
mille écus. Nous avons déjà parlé du monas-
tère de Cave et de quelques autres qui ont
été unis à c 'lie con,'régalioa, aussi bien que
l'église de .Montréal en Sicile, où les reli-
gieux de celte congrégation tiennent lieu de
ch;inoincs.
Leurs constitutions furent de nouv^'au ap-
prouvées par le pape Urbain ^'I^ l'an 1IJ4-2.
Conformément à ces consliiutions, ils ne doi-
vent point manger de viande au réfectoire;
mais les supérieurs en peuvent manger
avec, les hôtes de la congrégation et les an-
ciens, Ci les prêtres de la maison dans la
chambre de l'abbé : ils en peuvent aussi man-
ger en voyage et hors le monastère avec per-
mission. Il y a néanmoins quelques monas-
tères où on en mange trois f 'is li semaine,
comme dans ceux de Sainl-P.iul à Home,
Sainle-Mariedc FarTe, Saint-Nicolas du Lido
à Venise, et dans celui d'Ast, à cause du
mauvais air : ce qui et aussi permis d.ins
tous les monastères de la congrégation où
il n'y a pas douze religieux de conmunaulé.
Les supérieurs doivent aus i permeltre d'en
mangej pendant quelques jours dans toute la
congrégation, immédialcmenl avant l'avcnt
el le carême. Ils doivent jeûner tous les ven-
dredis de l'année, et ils ne doivent point
manger ces jours-là ni œufs ni laitage, non
plus fiu'aux jeûnes d'Eglise; ce qui leur est
iiéinmoins permis aux autres jeûnes de rè-
gle, qu'ils commencent à la fêle de l'iixal-
lalion de la sainte croix, et qu'ils finissent
aa commencement du carême, qu'ils fi vent
au lundi d'après Ij Quinquagésiine. Ils sont
dispensés du jeûne aux fêtes de saint I\Iat-
Ihieu, de la Dédicace, de saint Michel, de
.saint Placide, de sainte Justine, le jour de
Noèl, les trois fêles qui suivent el quelques
autres; el les jours de jeûne deiègle ils ont
le soir à la collation du pain avec quelques
fruits.
Leur habillement consiste en une robe el
un scapulaire assez large, avec une coule
fort ample, et ils portent toujours un cha-
peau lorsqu'ils sortent. Quoique l'usage des
chemises de toile leur soit défendu, si eu
n'est dans les maladies, on leurpermet néan-
moins de porter un suaire de toile grossière
sous leur tunicelle de ser^'e. Us donnent le
nom de pétition à ce qu'on appelle profes-
sion dans les autres ordres, el après leur an-
née de noviciat ils prononcent leurs vœux
en ces termes : In nomine Dumini N. J. C.
Amen. Anno Nativitatis ejasdem N., die N.,
Ego domnus N., de tali loco,pio)nilto slabili-
latein meam, el concersioncm morum meorui»,
et obedientiam sccundnm reçjtilain S. Benc
dicti, corain Deo et omnibus sanctis quorum
reliquiœ habentur in hoc mona^ilerio S. .V.
de N-, in prœ^entia II. P. />• N. ejusd. mona-
sterii abbalis [lel prioris) el monaclinrum
ejusd. monastcrii sub coiujregalione Cassi-
nensi. Ad cajus rei fidem hanc petitionem
manu propria subscripsi die quo supra. Leurs
frères convers sonl appelés Frères Commis.
Il leur esl permis de sortir de la con'^réga-
tion ; et, pendant qu'ils y demeurcnl, ils sont
obligés de garder la chasteté, la pauvreté et
l'obéissance. Us ont pour habillemenluiie tu-
nique el un manteau de bleu obscur, qui esl
fermé de tous côtés, à l'exception de deux
ouvertures pour passer les bras; el ils por-
tent sur l'épaule un capuce en manière d,;
chausse. Ce capuce ne leur sert qu'après l.i
mort pour les enterrer. Dans l'état ccclc-
1079 DICTIONNAIRE 1>KS ORI'UF.S Ki:l,U;iFAX. rM
ïiasliiiuc ils onl ;'i celle grande robe ou mnn- huile d.^ la cond.inin.ilion d.-^s Templiers, par
leaii ilonl uotin \en:)iis tle parler (liu\ tnin- l.i.niflle il imissail l-ms leurs biens à l'onlrc
ches (le la largeur de ileu\ pieds de ri>i : ils di's llospilaliers ; mai-; Sa Saiiilclè, faisant
s'en siTv;ilenlaulrefi);s pour aller rn ville ; alieiiliini à la demande iti- ce priiiee, en e\-
inais prc-enl(Mi!( ni ils si'servenlde manli'a.i\ eepta tous les biens qu'ils possédaient dans
laits eoiiune ceux des séculieis, n'.-yanl eou- les royaumes d'Kspajine , et afin de ne rien
ser\é'iu man eau monacal (lue la seule cou- f,iir(î sans connaissance de cause, av mt que
l.'ur; ils n'y portent point le capuce sur d'aecordcrau roi sa demande, clleécrlvilà tous
l'iipaiile CD !ime les antres (1). les princes (jui p .ssi'daienl les royaumes
Le chapi re gêné al de celle con!;r(>gaii'in d Ksiiagne, qu'ils lui envoyasst ni des person-
«e t'ent tous les ans, le troisième dimanche nés de pro!iili\ capables de lui bien expli<ini r
ii'apr(^s Pàiines, an(iuel les suiiéiieiirs e! un les raisons qu'i's avaient pour que ces biens
(li'pul(i de chaîne maison sont obli}j('S d" se (jnj (jiaienl dans leurs (lepi'n(lanc( s ne fus -
irouvi r, excei)lc ceux des maisons éloigix-es, M-iit pas soumis à la loi geni-rale.
(jui n'y viennent ()Ui' tous les deux ans. Ton» Le roi irAra;;on, qui n'av lit p dni d'anUe
les sup('Micurs se démetleni de leurs ofli» es tnotif ({tie celui (juil avait dëjà fait allégu( r
ilans ce cliapilre. cl après leur démission par >es ambassadeurs, fil r( présenter de nou-
on y élit neuf définit eurs, dont il y en a un veau au pape, el d,;ns des l'Tines plus pres-
qui est pié.-idctit du cliapilre. l'endanl qu'il sant<, li nécessi'é (lu'ii y avait d'établir un
tliire, todie l'aut iirilé sur la cou'^régation ré- nouvel ordre militaire pour résister aux
Mde dans ces définiteurs, et toutes les al- maures de Grenade, cl afin qu'' Sa Sainlelé
fiinsquila concernent étant réglées, les n'eût aucun soupçon sur la sincérité de ses
neuf di finileurs procèdent à l'élcclion d'un intenlions, il ordonna à ces mêmes ambas-
présid.nide 1 1 ( ongié^çalion, qui doit è:re sadeurs de lui dire que s'il voulait lui accor-
aiiisi élu Ions les ans. der sa demande, il donnerait à cet ordre
Celle congrégation a pour armes d'azur à M )ntésa, dans le royaume de Valen'-c, q'ii
trois mon agnesde sinoplc, s'irmontecsd'une était une place forle et imprenable; mais
croiv patriarcale, avec ce mot l'AX. (jn'cu cas (jirils vissent qu'il persistai dans
Jaeobus Cavacius, llisl. rirnohii S. Justi- ja res dulinn qu'il avait prise d'unir les biens
tuF l'nlav nr. D. l'ictro .\nionio ïornamira, des Templiers situés dans son royaume à
Orijin^. e Proqessi tlclli congregutione Cas- joiilre des Hospilalic s, ils lui déelarassenl
ainenap. l}id!(iriii')i Cassincnse el Constitutio- qu'il sérail ibligc, pour la stjrelé de ses litat*.
nés ejiis I. ordiiiis. de s'emparer de dix-sepl placs fortes qui
I.a congrégation du Monl-Cassin existe ;ivai< ni appartenu aux 'l'empliers, el de rele-
loujours, et se livre à la culture des Ictlres nir les revenus qui en dépcndaienl pour cn-
el à l'érndilion ecclésiastique. Elle avait (retenir les larnisons. Le pape m urut sans
deux maisons à Uomc au dernier siècle, avoir rien déterminé; mais son sui cesseur
SaiiU-Citlixle el S dnl-l'aul-hois-des-Mnrs. Wan XXll .ircorda A ce prince ce qu'il (le-
Celte dernière maison est toujours habité» miiid, ut, el l'ordre d ■ Monlésa Inl inslilué l'an
ict peui-é:rc l'autre aussi) par ces Bénédic- 13l(), sous le nom de Noire-Dame de Monlesa.
lins qu'on appelle r'j>.'î/Tic3î. Le pre'.si'/etU ac- On donna ;i cet ordre tous les biens que les
luel est le U. 1*. abbé D. Maur liiiii, et le Templiers possédaient dans le royaume d(i
iirocureiir général de la congrégation esl le X'alencc, el même ceux (|ui apparteiiaicni à
U. r. ai bé dom Vincent Uini. B-n-i:. l'ordre des Hospiialiers de Saint-Jean de Jé-
MONT DE L\ CDUllONNE. Voy. C\- rusalem, auxquels on donna pour les dédom-
...,„„,,.. mager les biens qui avaient aussi appirtenu
..^.,..,.. ^/^.^i.iTi^ .r f- .,.„ aux emiiiers dans I Aragon. (,e lurent dix
MONTK-CORHULO. \ oy. Écoi.ieus i.. ,,„,,,|i,ri , le l'ordre de ("alalr.iva qui pri-
IJoLOGNE. renllesprem'ersrhabilde l'ordrcde Monlesa:
MONTE-OUTONO. Voy. AiGusrivs. Alvarez de l.uria el M' ndosa, aussi cheva-
MONTES V ET DE SAINT - CKOKOES licrs de Calatrava, en dressèrent les slalnts,
D'aLFAMA (I^hkvu.ieks oes onnnics m:). ;"t la prière du roi d'Aragon eidu grand maîlri<
Le pape Clément V ayant résolu d'unir les de l'ordre de Calatrava, dom Carcias Eopez
biens de l'ordre des Templiers à celui des de l'adilla : ce qui laii qu'il a loiijonrs été
Hospitaliers de Saint- Jean de Jérusalem, de la dépendance de celui de Calatrava et
J.icques, roi d'Aragon, supplia ce iioniifc, par soumis à la juridielion, visite el correclioii
le moyen de ses alllhas^adeurs ([u'il avait du grand maiire de cet ordre, conjoinicmeni
envoyés an concile de Vienne, que les biens avec l'abbé de Sainte-Croix, ou à son refus
e
des Templiers en son rovaume ne fussent avec celui de \ aldégna, tous deux de l'ordr
point unis àloidredes Hospiialiers, niai> de Citeaux ; et ces deux abliés ne voulant pas
qu'ils fussent assignés [loiir la fondanoii d'un accompagner le grand maîlre de l^ilalrava
noiiv(d ordre militaire, dont le principal ins- dans celle visite, il la peut faire seul ou noiii-
iiiiil serait de faire la guerre aux maures; mer des commissaires.
et afin d'exciler le pape a lui accorder sa de- Le premier grand maître de IMonlésa fol
iiiandc, il l'informa de I el.il du rovaume de ('iiiilliiime Eriili. Il y en eut niialorze de
«Irciiade, cl du grand nom'.re d'inlidèles qui s'.iile, cl le dernier fui dom l'ierrc-Louis
y élaienl. Nonobstant celle demande du roi Calcerande Itorga ; car après sa mort l'bilip-
d'Aragon, le pape ne l.iihsa pas de donner 1 ; po M, roi d'E pagne, fui déclaré par le [lapo
(I) Vny., à la lin du vol., Ictir' i'i'j el 206.
1081 MON MON lorî
adm'nistrjili'iM- porpétiiel de cet ordre; ce q'ii Icsiino, ils avaient la mnrcjuc de cet ordre,
fui aussi accordé pour ses suceesseiirs. (|iii était imc étoile à cinq rais (2).
Ces ciievaliers portent une croix de pneu- Les iniidèlcs s'ct;int enfin emparés de la
les pleine sur un habit blanc (1). Us olitinrcMt Terre-Sainte, les chevaliers de Mont-Joie,
di' grands privilèges cl immunités des papes aus^i bien que les autris, lurent conirainis
Alexandre IV, Sixie IV, Jules 13, Léon X, de se retirer en Liirope; et aliii de troiner
Clément VII et Paul IIL mais particulière- un lieu qui leur fût commode p'ur y faire
nient di- Léon X, qui leur accorda les mêmes leur demeure, ils p;ircounirenl plusieurs pro-
exeiiiplions, privilèges cl immunités dont vinces, et s'arrétèreni enfin d.ns la Casiille
jouissaient ceux de Calatrava. et de Pdul III, et dan s le royjiunii' dr V.ilence, nù les princes,
(lui leur permit de se marier et de tester. (jui avairnt connu leur valeur, leur fir. ni de
Us reçurent la bulle de ce pape dans leur grands dons. Al|ilionse IX leur ayant donné
ihapilre général qui se tint l'an 1572. le cbâleaii de Mnnifrac, ils chaii^^è; ent de
L'ordi e de Saiiil-Cii'orvres d'AUania fut ins- nom dans la Casiille, en preiianl celui de
litué l'an 1201, à Sa:nt-Ccorges d'Allama, Moiillrae ; mais à Vaknce et dan-, les autres
dans le diocèse de Torlose, et fut approuvé lieux où ils s'éla'eiit établis, ils forent lou-
par le saint-siége l'an I36j; il fui uni à ce ui jours appelés de Mont-Joi •. Knfin, lan 1221,
de Moniésa l'an 1399 par l'anlipipe (Je- le roi Ferdinand, surnommé le Saint, voyant
noît XUI, qui était reconnu pour légitime que cet ordre él.iit beaucoup déchu de sa
pontife en lispagne, et cetie union l'ut conlir- première splendeur, l'incorpora et l'unit à
i;iéc dans le concile de Constance. celui de Calalrava.
Silvest. Maurcil. Mar. Ocenn. di txilt. gli 11 y a plusieurs auteurs qui parlent des
relig. , lil). II. Du Poi, Histoire de la rondain. chevaliers de Truxillo comme d'un ordre
des Templ. Mennenius, lîernard Giusiiniani, séparé de celui de Mont-Joie, et qui disent
Merman et Sclio mebecii, dans leurs /Vi'ii. i/fs la ménie chose de celui de M.mifr.ic; mais
O: d. inilit. comme il y en a d'autres q;ii n'en font c[u'un,
MON'l'-FHAC. Voyez Mont-Jcie. nous les jo gnons aussi ensemble. Les clie-
.MONl'-JOIE (Des cnr.VALiEKs de l'ordiie valiers de ïroxillo liraient leur origine de
i>e), nppelé.i aussi de L'ont frac el de Truxillo. ceux de Mont-Joie, cl ont été ainsi appelés
Après (juc (jodefroy de Bouillon rui cou- à caos > que le roi Alphonse IX leur donna
qnis la Terre-Sai;ile, on bâtit aux environs aussi dans la C>astille la ville el le pays de
lie Jérusalem deux villes, dont la première, 'J'ruxillo avec Sania-Croce, Albana, Cabagna
qui n'en était pas fort éloignée, était située et Zaferillo. Ces places avaient éîé conquises
sur le sommet d'une mont igne, d'où les | è- sur les maures; mais ces infidèles les ayant
lerins qui venaient visiter les saints lieux reprises peu de temp'i après, et les cheva-
pouvaient découvrir cette sainte cité. L'autre liers de Truxillo n'ayant plus de retraite,
en était éloignée d'environ deux lieues, et furent incorporés dans l'ordre d'AIeantara.
était aussi située sur une montagne proihe Qmique nous ayons mis celui de Mont-Joio
de Bethléem el de la Tour d'Ader, ou du lieu sous la règle de saint Basile, en suivant l'o-
">ù l'ange annonça aux pasteurs la naissance pinion la plus cionmune, il y en a néanmoins
du Sauveur du monde, d'oîi les pèlerins qui quelques-uns qui le mettent sous celle do
aillent à Bethléem pouvaient aussi décou- saint Augustin, et d'autres qui prétendent
vrir cette ville; et ces deux nouvelles villes qu'il fut soumis à l'ordre de Cîleaux.
furent appelé'S Mont-Joie, peut-être à cause Mennenius, De/ùiV." equest. Ordin. Chry-
de l'allégresse et de la joie que faisaient pa- sost. Henriquez, Menolog. Cislert. Francise,
rattre les pèlerins en découvrant de ces mon- Quaresmo, Elucid. Terrœ snnclœ, I. I, lih. ii,
tagnes les saints lieux où Jésus-Christ avait c. 5G. Mendo, De Ordinibus Milil. Franc,
pris naissance et avait répandu son sang pré- Rades, C/iron. de Caiiitrata, c. 18. Hernian.
cieux pour notre ré.leniption. el Schoonebeck, dans leurs llisl. des Oïd.
Il se forma dans le même temps un ordre Milit.
militaire pour la défense de ces saints lieux MONT-LUCO (Ermites de). Voyez Jean-
ol des pèlerins qui les ven;:ient visiter ; el Baptiste (Krmites iie Saint-).
comme ces deux villes avaient le nom de MDNTMAHTIIK (Des Ueligieuses Bénédic-
Monl-Joie. el que les chevaliers y établirent tines Béeormées de), ai-er /n Fie rfe /« rf^Dr'-
letir première detneure, ils en prirent le uooi. rende mère Marie de Beauiilliers, leur
Alexandre lîl approuva cet ordre l'.m 1180, réformatricr.
à 00 que l'on prétend, el donna aux cheva- Ce sérail trop entreprendre de vouloir
liers la règle de saint Basile. Us portaient parler de tous les monastères de filles do
sur un habit blanc une étoile rouge à cinq l'ordre de Saint-Benoît qui ont été réfor-
rais, et il y a quebiues écrivains qui leur niés; le nombrceii est trop grand, el ilyasi peu
donnent une cro x rouge semblable à celle de différence dans les observances et dans
des Templiers. Schoonebeck, qui est de ce l'hab IlemenI, que le réeil en serait plus eii-
iiombre, se contredit lorsque, parlant de ces nuyant qu'agréable: c'est pourquoi nous
derniers, il dit qu'ils portaient une croix nous contenterons seulement de parler des
rouge pour marque de leur ordre, el qu'en réformes établies par les révérendes iiièrcs
parlant des chevaliers de Truxillo il dit aussi ^ ariede Beauviiliors, abbesse de Montinar-
que, tirant leur origine des chevaliers de ire ; Maiieleinc d'Escoubleau de Sourdis, ab-
51onl-Joic, lorsqu'ils lurent chassés de la Pa- besse de Noire-Dame de Saint-Paul proche
(tj Vpij , a 1,1 lia du vol , ii"'i07. (2) Voy., à la fin du vol., :i° î(J8.
K-83 DICTiONNAIfUC UES OBliUES UEI.IGIEUX. JOSi
Pe iiiv.iig; cl Margtiorilc d'Arhoiizzc, .ibbcssc 1 :bor ii'in ilo la m;iison. l'Ile fut l<)n;:l(>nips
ilii \',il-iii'-(irâr,", foiiiMie les jiliis lélèlircs sous gri^nctière, Iravnillaiit avec les sœurs
ic'foniinlrirrs de col nrdic en l-"r.mee. converses à faire du p;iin, qnoitiu'elle fût fnrl
Sur 1,1 lin du W siècle Ji'an Simon, év(5- delicale ; el ay.inl un jour voulu porter un
que de Pari<, avail coninieiué à iravjiil er à firdeau Irop pesant, elle se rompit une cote,
1.1 rifornie di-s nionaslères de Benedrclines «lui, n'ajani pas élé bien remise, lui causa
dans Son diorèse; l'abtiaye de Clielles fut l.i beaicoupdedouleurs le resledeses jours. I^lle
premii're à >e sounielire à 1 i reforme, et la vivait ainsi conl n'e sous la cou luilc de sa
<l(\lure y fut établie ( n t 'lOD. Jean le de la taule, lors'iucM. du l'ri'sne, conseiller d'l'"lat,
Kivièri-, qui en était abbesse, pour donner s. ^n beau-frère, obtint po relie du loil'ab-
exemple à ses reli;;ieuses. fut la première qui bnje de Montmartre procbc l'.iris, dont il lui
lit v(pu decloturc, rllesal)besses ne furent en- envoya le bre>et pendant qu'il f.iisait sollici-
suiie qii ' triennales: ce (jui dura jusqu'en ter à Hume l'expédiiion de ses bulles, (jui ne
l'an l.")»3. qu'elles recommencèrent à être furent données que di'U\ ans après, t-omoie
()< rpétoel!es. Ittiennc l'oiic!ier, qui fui évé- elle soubailait toujours vivre dans l'obéis-
que de Paris ajirès la mort de Jean Simo", sanie, elle fui ra\ie du retardement qu'il y
son prédécesseur, voulant cuniinuer ce que eut dans l'expédition de ses bul'cs, et i)en-
Ci'lui-ci avait commencé, élahlil la réforme da;il ce temps- là elle ne voulut poini érrire
dans les abbayes de .Montmartre, .Malnouc à son beau-frère, afin qu'étant sc.indalisé de
et quelques autres, et dressa des constitu- son silence et clm(iuô du peu de recounas-
iions pour les religieuses béncJiciincs de son .sance qu'elle lui témoignait de l'atlenliun
diocèse. M lis cette rcform:> ne subsista pas qu'il avait à lui faire plaisir, il négliijeâi la
I ingti'm[)s ; car l'abbaye de Monlmarlre poursuite île ce te affaire cl cessât de Iravail-
étanl tombée dans le reiâcliemeiit, aussi bien Ici' pour elle. Mais il ne se rebuta point de
que plusieurs autres, on n'y gardait plus au- ce procédé, étant persuadé que l'éloign 'inent
cuiie observance régulière, lorsque Marie (|u'elle faisait paraître pour accepter cetleab-
de It' auvilliers en fut nonnnco abbesse baye l'en rendait plus digne ; elle y consentit
l'an la'JC». à la Qn, quoique sa tanleeûl f.iit son possi-
lîllc naquit, l'an loTi-, nu cbàteau de la I le pour l'en détourner, àcause que l'abhaye
l''erté-llubeit en Sologne, et elle eut pour de Montmartre était forl décriée par le peu du
père C'Iititile de lîeauvilliers, coiiite de Saint- régularité di'S religieusesqii y denvuraien!.
Aignan, et pour mère Marie Babou de la Les bulles ayant élé e\(ediees l'an 1598,
IJourdaisière. Elle fut mise dès l'âge de sepl deux religieuses de Montmarlie allèrent à
ans dins l'ai. baye de l'erray auprès d'une de l'eaumout quérir leur nouiclle abbesse.
ses tantes, sœur de sa mère, qui en était Etant arrivée à Paris, elle eut Ibonnenr do
abbcss '. Elle n'y demeura que trois ans: car salurle roi, i|ui lui donna deux mille érus
sa tante c^ani iimrte, e le cnira dans l'abbaye pour commencer à réparer les ruines de sou
de Iteaumiint, où une autre de ses tantes monastère, où elle entra le 7 février de la
était aus«i abbesse. A p<'ine eut-elle atteint même année, et elle fut mise en possession
l'âge de douze ans, qu'elle demanda l'Iia'; it par le prieur de Saint-Victor, grand vicaire
avec tant d'insiance. qu'on lui accord.i sa du cardinal de fiindy, évôijuc de Paris, lletle
demande; et étant arrivée à sa (luinzième an- cérémonie fut le cornu encement de ses in-
née, elle commença sm noviciat, et prononça quiétudes, se voyant cliargéc d'une maison
SOS V(rux à râi;e de seize ans, l'an 1390, en pauvre et déréglée. l'Hle y trouva trente-trois
présence de plusieurs pi-rsonnes d(^ (jualilé, religieuses résolues du vivre à leur mode ei
qui admiraient sa ferveur elcjui s'étonn lienl de s'opposer à tout le bien qu'elle voudrait
qu'une demoiselle si jeune, et qui était une procurer, à l'exception de deux que Dieu
des pins belles personnes de son temps, mé- avait clioisies pour être les pierres fonda-
prisàt le monde si généreusement et avec mentales de la reforme qu'elle y élablll.
tant de joie et de satisfaction. Le mémoire qu'on lui donna du revi'uu de
A peine eut-elle achevé son sacrifice qu'i lie l'abba} e était de deux mille livres, sur quoi il
prit une forte résolut on de se rendre lidè'e fallait payer dix mille livres de délies. La
a sa vocation, ce f|u'clleexécuta toute sa vie; grange était saisie pour ce sujet, la crosse
y étant excitée d'un cftié par les bons avis engagée pour deux cents écus, les fernici
de sa tante, qui l'exhortait tous les jours de données à vil prix à cause des pots de vin
tendre à la perfection sans écouler les repu- qu'on avait exigés, et la m.ison tellement
gnancesdela nature ; elde l'autre, parl'exein- dépourvue de meubles, qu'on n'en trouva
pie de la mère de Sourdis, sa cousine pas assez pour lui garnir une ibambre. Il
germaine, (|ui par son grand mérite et ses fillul que .M. du l'resne meublât la nouvelle
rares vertus fui depuis abbesse de Notre- alibesse di'puis son litjusqu'.i la baUerie de
Dame de Saint-Paul, et reforma ce monas- cuisine : entre ces mouilles il lit tendre dans
tère. ("était une religieuse exai le aux obsor- sa chambre une belle tapisserie ; mais cette
vances régulières, c dont 1 s discours éiaionl vertueuse fille la fil oter, parce ()ue cela rcs-
si pieux e: si fervents, que la mère de Iteau- sentait trop l,i v.inité, pour laque. le elle avait
villiers recherchait avec empressement ses beaucoup d'horreur.
conversations, dans lesquelles elles s'oxci- Celle grande misère tompon^llo n'était pas
laicni mutuellement à la pratique des vertus, ce qui inquiétait la jeune abbesse: sa grande
I. 'abbesse de He.iumoni exerçait sa nièce douleur procéd,iil des derèglemiiits dos an-
dans les emplois les plus humbles cl les plus cicnucs religieuses, et son unique s lulagc-
108Î5
MON
MON
1J8G
mont était dans la conversation de ces deux
religieuses qu'(ile voyait portées au bien el
qui étaient prêtes à donner les mains à la
réforni.'. Les désordres de cetie maison al-
laient à l'escèi. il n'y avaii ni clôture, ni
pauvrelé obser\ée; les enlrelieiis de galan-
teries y étaient fort fiéquenis : s'il y en avait
q lelqut's-unes qui jeùnaii^nl conrorinénieiil
à la règle, c'était malgré elles, parce qu'elles
n'avaient ni argent ni amis, el qu'elles ne
pouvaient pas fairt" bonne chère comn)e les
aulrcs. M. liu Fresne leur ay.mt donné douze
niuiils de vin, et leur envoyant tnules les se-
tnaini.'S un veau et un m luton, la n >uv( Ile
abbesse établit p ir ce moyen le souper eu
conunun, qui n'était (joinl en usage, pirce
(|ue cil ique religieuse prenait sou repas à
l'heure qu'il lui plaisait, et que burs amis
h'ur en procuraient le moyen; mais celles
qui assistaient à ce souper ne voulaient point
écouler de lecture ni garder le silence.
Celles qui souhaitaient la réforme ne man-
geaient que du pain fort bis, cuit avec du
chaume faute de b<)is, el les jours d'absti-
nence on leur servait du potage sans beurre
avec des œufs crus qu'elles apprêtaient au
réfectoire. Enfin la misère était si grande que
M. du Fre-ne, en ayant été averti, leur donna
quatre mille cinq cents livres pour acheti^r
du bois pour les chauffer et pour d'autres
provisions. Il leur envoya aussi beaucoup
de choses dont elles avaient besoin, et il ob-
tint encore du roi pour elles quelques som-
mes d argent, qui. étant assez considérables,
li'ur facilitèrent les moyens de réparer un
peu le mauvais ordre dans lequel était l'e-
lal du monastère, et l'on se servit de l'argent
que la dépositaire gardait aux particulières,
pour eiiipècher la vente du ble qui était sai^i.
Les religieuses en murmurèrent beauC'iUp,
il y en eut même quelques-unes qui atten-
tèrent à la vie de labbesse, à laquelle elles
donnèrent d.ux fois du poison, qui, par un
m racle de la puissance de Dieu, n'ayant pas
eu son efff t, ne servit qu'à les aveugler da-
vantage, en sorte qu'elles résolurent d'y em-
|)loyer le fer en la f.iisanl poignarder ; il y
eut pour cela des assassins apostés : ce qui
était fort facile, puisi|ue c'était l'ordinaire de
voir les amis des religieuses passer une par-
lie d(! la nuit avec elles. Mais un drs com-
plices, dont Dieu toucha le cœur, en ayant
averti une des coiilidenles de l'abbesse, elle
évita encore ce coup ; ce qui fil que ceux qui
avaient l'adminjstration de l'abbaye l'obligè-
rent de sortir du dortoir commun el de se lo-
ger dans une cbanibre oii il y avait double
porte, commandant à deux sœurs converses
de probité d'appiêter c^' t|ui serait nécessaire
pour sa nourriture, avec défense aux autres
d'entrer dans la cuisine. Et la dépositaire,
qui était une de ces anciennes religieuses qui
souhaitaient la réforme, prit soin aussi qu'on
ne lui présentât rien qu'elle n'y eût go.ité la
première.
Au milieu de tant de fâcheux accidents.
Dieu consola notre abbesse par la visite du
( ardiiialdeSourdis, art hevéquede Bordeaux,
son cousin germain, qui s'intéressa beau-
coup pour elle et lui servit à mettre la ré-
forme d.ins cotte abbaye ; mais parce qu'il
ne pouvait pas être si souvent auprès d'elle
qu'il eût été nécessaire pour ce sujet, il lui
donna pour direcle'ir le P. Benoît de Caiifeld,
capui in, qui était un religieux d'une gramie
vertu. Le cardinal de Sourdis informa cepen-
dant l'évéqui; de Paris des désordres de cette
maison, el ce fut à sa sollicitation qui; ce
prélat vint à Monlmarlre et commanda à l'ab-
besse et à toutes les religieuses de ne plus
souffrirquclaclôtun- fût si mainbservée chez
elles, comme étant le moyen le plus court
pour retrancher les scandales et commen-
cer une vie conforme à leur état. Ce discours
fut très-mal reçu des religieuses : elles se le-
vèrent toutes ensemble el parlèrent confusé-
ment, sans avoir aucun respect ni pour lo
lieu où elles étaient, ni pour la dign té épis-
copale, et elles s'emportèrent en des injures
qui firent horreur à l'assemblée. La conclu-
sion fut que l'évéque donnerait ordre à son
grand vicaire de prêter main forte à l'ab-
besse; ce qu'il n'exécuta jias néanmoins,
D. eu le permettant ai.isi pour éprouver de
plus en plus la fidélité et la constance du l'ab-
besse.
Le P. Benoît Canfeld fut d'avis qu'elle
déposât la prieure el les autres officières qui
ne voulaient point do réformi'. Elle tint le
chapitre pour cet effet , elle établit prieure
l'une des deux religieuses qui avaient désiré
la réforme, et fit r.mtre cellerière et maî-
tresse des novices. Elle donna la clef de la
porte à la plus raisonnable des autres, mais
elle s'en réserva une, afin qu'elle ne pût être
ouverte sans sa permission. Toutes les an-
ciennes se levèrent a»ec grand bruit; elles
chargèrent l'abbesse d'injures , protestant
qu'elles ne lui obéiraient jamais, et peu s'en
fallut qu'elles ne la frappassent.
Les choses étaient en cet état lorsque lo
P. Benoit , s'en retournant en Angleterre ,
oii le désir du martyre l'appelait , après
avoirprocuré le relourdu P. Ange de Joyeuse
dans son ordre, il l'obligea de s-rvir de pro-
lecteur à l'abbesse de iMontmarlre ; ce qu'il
exécuta avec beaucoup de zèle. Il gas-'na là
jeunesse par sa douceur, de sorte ()u'il ne
demeura (jue huit di'S plus anciennes qui vé-
curent en leur particulier, sans vouloir se
soumettre aux observances régulières, étant
toujours opposées aux desseins de l'abbesse,
La clôture el le réfectoire commun furent
les deux premiers articles do la réforme ;
peu à peu quelques-unes des anciennes se
joignirent à celles qui s'y étaient soumises
les premières, el l'on commença à voir
beaucoup de changement dans ce monas-
tère.
Au mois de juillet 139:), le roi accorda en-
core à M. du Fresne l'abbaye de Saint-Pierre
de Lyon pour une de ses sœurs. Il l'olTrii à
l'abbesse de Montmartre, croyant lui rendre
service, en la tirant d'une maison ruinée
pour l'établir dans une autre riche et magni-
fique ; mais après avoir consulté le Seigneur,
elle connut que sa volonté était qu'elle ré-
faruiàl le monastère de .Monlmarlre : ainsi
I0S7 D;CTION.N.\mE bKS OUDUES RELIGIEUX. I0S8
olle |iréforarox6c!ilion ilc la volonté ilc Dieu Iraiiites do rester à l'infirmcrip, où «-lies se
à sa propre satisfaction. L'année suivante, |ini;;ii'iil avec de Icnss manteaux de futaiiie
ijui était relie du jjraïul j ibilé, elle denrin la Id.inciie atlailiés a^ec des rubans de c<ni!our,
au pape Clémenl Vlll la permission d'éliro n'osant pis parait c en cet éqiipn'^e en pré-
iin \ i ileur pinir sa coinnrinanté, en roui- «ence de leur abliessc et des autres reli-
pnnirassocialioMconlr.ictéeavccsix maisons <; eu-es.ilonl la simplicilé faisait honte à leur
loulesenni'mies delà reforme, san>. le ronsen- i.mbilion et à leur \anilé.
leiiient dcsiiueles on ue pouv lil rii'n faire. I)eu\ des anciennes ipii étaient les plus
\l. (le Sil'eri était pour lors ambassadeur à op;i0sé 'S à l'abliejse s'eiant d ins la suite ré-
Kome, où il /lurait pu traverser cette alTiire , comiliées pai faileineiil avec elle, les antre»
ayant une tante cl deii\ cousines germaines suivirent bientôt leur exoinple, de sorle<iu'en
à Montmartre ; mais elle fut conduite avec ileux aiinées de lemjis li réforme fut pre-que
tint de seiTet (lu'il n'en eut aucune connais- et ildie dans IMontinarlrc. Il se présiM^a un
sanre : rabbcs>e obtint du pape un bref qui si grand nombre de tilles pour y être ri'cues,
lui donnait pouvoii- de réformer sa maison cl ()Me, i.endani près de soixante aiiS que Ma-
d'elire son \isiicur en particulier, indepen- rie de I! -.imi lier> en a été alibessi', on pn-
dammenl lies auli es monastères desquels il tend (ju'elle a donné l'habit à deux cent
lui permettait de se séparer. î lie i\'envoya vingt-sepl filles: par ce moyen cl par la
exprès pers iUiic à I eb'clion du nouvran vi- bonne conduite des abbesses qui loi ont suc-
«ileur dos six maisons Associées, alin d^' pcr- cédé, dont il y a eu des princsses d' la luai-
ilre son privilège , ce qui fut un nouveau su- son de Lorraine, cette abbaye est devenue
jet de murmure parmi si'S lilles ; mais elles une des plus pui^santes et des plus riches du
furent lien surprises lorsqvi'on leur fil la royaume. Enfin, cette pieuse abbesse cul la
lecture du bref du pape: elles enri ni pour consolation de voir tontes les anciennes qui
I )ps un peu plus de respect pour l'autorité l'av aienl tant fait souiïrir, se prosterner à ses
lie li'ur supérieure, et l'on vil plus de dispo- pieds pour lui demander d'être tr.iilées
sition à la réforme qu'il n'y en avait eu jus- comme les autres, en renonçanl à toute pro-
qu'alors. priclé, et voulant suivre la règle de saint
L'abbesse n'avait pas voulu se faire bénir IJenoît exact. ■ment : ainsi elle n'eut plus de
pendant tous les irou'iles et les inquiétudes peine à poursuivre la réforme,
causés par larésislnice et l'ob^lioalion de L'abbesse de lîeaumonl sa tante av.iil puis-
ses rel gieus'S ; mais prévoyant qu'ils s'a- samin.nt travaillé pour l.i faire nommer sa
paiseraienl dans peu, elle s'y prépara pai' la e >adjuti'ice ; elle en obtint enfin le brevi'l du
relr;iite, l'oraison et l.i confc>sioa générale roi l'i la conlirmalion eu cour de Uonie. Il
(b' lous les p( c'.iés de sa vie. La cérémonie était porté lians les bulles qu'elle ne serait
se fil le dimanche dans l'octave des Uois : point obligée de quitter l'abbaye de Mont-
elle fui bénite par le cardinal de Sou dis, cl martre qu.' six mois après la mort de Tab-
le I'. Ange de Joyeuse y prêcha. Depuis ce besse de licaumonl ; de sorte qu'elle porta
joiir-!à elle redoubla son zèle , croyant cnq ans ta quai lé de coadjutrice avec cel'e
qu'elle était obligée plus que jamais d • Ira- d'abhcsse, et pendant c,' tenu s-là elle fil tra-
vailler à la réforme de son abliaye. l'eu vailK'r aux bâtiments de Montm.irlre; en
après elle reçut trois filli^s à qui elledonna quoi elle fui aidée p.T Ji. de Fièiie, sou
l'habit, dont l'une était pour le chœur et les beau-f:ére, qui donna encore deux mille écns
deux autres converses. pour fermer un clos di- vignes qui etiil entre
Les religieuses do Montmartre portaicnl le Monastère cl la chapelle des Martyrs ;
pour lors des habits bl mes comme les c'ia- mais il n'eut pas la satisfaction de voir cet
noinesses (I); mais l'abbesse prit le noir et ouvrage achevé, étant mort en l'année 1010.
le donna à colles qui co'iseniirenl à ce chan- Il or''onna par son testament que son corps
gement ; ce qui fut contesté à l'ordinaire par serait porte à .Montm irire, où il lassa en-
les anciennes, qui en firent leurs plaintes au core trois cent irente-iiu.itre ivres de rente,
cirdinal de Ketz : ce qui obligea ciitc émi- et deux mille li\res en argent comptant,
ncnco d'envoyer son grand vicaire j our pour faire prier Dieu pour le repos de soi
apaiser ces troubles, en ordonnant à l'ab- àmc. On trouva dans son cabinet le dessin
bosse de ne rien f lire de nouveau contre l'ii- d'un bâtiment qu'il voulait faire à la chapelle
sage de la communauté, nesvoul.inl pas que des Martyrs, et qu'il aur.iil exécuté, si la
l'habit fût (lilTereul entre elles. Klle répondit iii()rt ne lui en eût p.is ôté l»pouvoir; m.iis
avecassez de fermeté qu'elle était résolue do- madame de Près ne, sa veuve, suivit ses in ton-
héirà ses ordres, pourvu qu'ils ne fus'^eiil pas lois quelques années après, et contribua à
opposés aux vœux isse:itiels. En effet elle la fondation d'un nouveau monastère altc-
repril l'habit blanc, non pas de la manière uaiit celle église des .Martyrs, auquel elle
que ses religieuses prétendaient; car elle se donna deux mille sept cents livres de rente
revêtit d'une grosse serge de liine blaneh.' pour la nourrituri' de dix religieuses, à con-
natiirclle sans avoir été blanchie au foulon, diiion que l'abbesse, sa sœur, fournirait le
avec un surplis de toile pareillomeiil gros- même nombre, et que celte église serait
sière; de sorte que les autres qui chcrch lient toujours desservie par vingt religieuses.
la vanité dans leurs élolTes bien blanches et Jusqu'à ce temps-là on avait porté l'Iialiit
dans 11 urs surplis de toile fine el empesée, blanc dans la maison avec un surplis, lommc
furent rem[)lics de confusion el se virent cou- nous avons dit; niait l'abbesse écrivit à
(t) I 01/., » la lui Jii v!,t., :i- 2!.'.
lOSO
MON
MON
1190
Home et olitiiit du papp un lircT pour proii-
dre rinbil noir, ce qui s(> (il s;ins juinme
coiilriidiclion, non-sculcnieni pane que Isiu-
les les anciennes élaienl décédées, isiais en-
core par la profonde si;Uinission que la coni-
mun.iulé avail pour ses ordres. Klle s'acquil
nni' si grande eslinie au dehors, que plusieurs
nioiiasïèics d • France , qui désiraioni em-
brasser la réforme, lui demandaient ses avis
et s'e limaient heureux d'avoir des filles éle-
vées (le sa main . pour les conduire, cl il est
>orti de Montmartre , du temps de celle ali-
besse, plus deciiiquniile relij;ieuses pour al-
ler réfiirmer, établir ou gouverner des mai-
sons de l'ordre. Le prieuré de la Mlle-l'E-
véque à Paris, sous le titre de Noire Daim de
Grâces , Cul un de ceux à la fondation des-
quels elle contribua ; elle y envoja , l'an
1613, huit religieuses du clneur et ('eus c -ii-
vcrses sous la conduite d'une su|)érieure , et
ce prieuré a éié, pendanl plu!-i>'ur< anué.'s ,
dépendant de l'alibaye de Montmarlr(!; mais
à présent il n'y est plus soumis, ayant obtenu
de ilomc des bulles de séparatioi.
Après la mort de l'a! besse (!.■ HîaumonI,
Marie de lieauvillicrs, qui était sa coadju-
trice, fui obligée d'y ailer: elle partit de Pa-
ris le 2 avril Itili, el y arriva le 18 du méuic
mois; mais elle n'y deineuia que si\ mois,
el re ourna à Montmarire qu'elle v.e put se
résoudre d'aliandonner, sedémellant de l'ab-
baye de Beaumont en laveur d'Anne îiabou
de la i'oiir'lais;ère, sa nièce, (ju'elle emiu' na
avec elle pour former son espiit sur les
exemples de ses filles, en atiendant cjue ^es
bulles fussent expédiées.
Ayant léglé loules choses dans son mo-
nastère, elle fit imprimer ses constitutions
pouraiïermir la rélorme, et atiii i\ao les filles
qui se présentaient tous les jours pour être
reçues fussent informées d'abord de leurs
oliiigalions. Elle sépara ensuite sa commu-
nauiéen deux, afin (]iic l'office divin fût cé-
lébré dans l'église des Martyrs, comme il
l'était au monastère d'en haul, el elle fit
faire une belle galerie [lour la communica-
tion des deux monastères; mais présente-
ment les religieuses demeurent toutes au
monastère d'en bas et ni; vont clianler Tof-
fice à l'égl.se d'en haut qu'à certains jouis.
Enfin Marie de Beauvilliers Sainl-Aignan,
après avoir gouverné l'abbaye de Montmar-
tre pendant près de soixante ans, el y avoir
rétabli les observances régulières, mourut
le 21 avril 16o7, étant âgée de quatre-vingi-
Irois ans. La princesse Françoise de Lor-
raine de (îuise lui succéda et conserva dans
cette maison la régularité, ce qu'ont fait
aussi les auires abbesses jusqu'à pré.^enl.
Le village de jMontmarire, où est siluée
l'abbaye à laquelle il a donné son nom, se
nomme en latin Mons Marii/rum, à cause
(|ue saint Denis et ses comiiagiiuns y souf-
frirent le martyre. On l'appelait an'ienne-
menl le Mont de Mercure, à cause qu'il y
(i; Qui reinpl ss:iit les fonctions de diacre, et pniir
sous-ili-icre le \i. Pierre de Cluny. L'église dos Ué-
nédiciiiies eslaujourd'lnii régli-.e paroissiale de M.oii-
uiarire. Le uiuaasière est prcs'pie tout délrtiil; il
avail en ce lieu un tcm, le dédié à celle fausse
ilisinilé. On y a bâti depuis une (hapellesur
le penchant de la montagne du côté (le Paris,
en mcmoi e du marlyre de saint Denis, fiille
fut donnée avec ses (ié|iendances, par Guil-
laume i', évéi;uc de Paris, l'an 1098, aux
n ligieiix du monastère de Saint-Martin des
Champs à Pars; mais, l'an 1133, ou 1134-,
Louis VI dit le Gros, et sa femme Alix, leur
('onnèrent, en échange de celte église et di s
îevenus qui y étaient affectes, le pri'Hiré de
8aint-!)eni-' de la Chartre, el non-seulement
fondèrent l'abbaye diml nous venons de par-
ler, mais firent aussi rétablir la chapelle des
Martyrs. Le pape Eugène II! dédia l'église
des religieuses le 21 avril, et celle des Mar-
tyrs le 1 " juin (le l'année 111G, ayant pour
l'un de ses assistants dans cette cérémonie
saini Bernard, abbé dt- Clairvaus. (1). L'ha-
billement (ie ces religieuses est semblable à
celui des autres Bénédictines réformées dont
nous avons donné le dessin au tome pre-
mier.
Jacqueline Boueitc de Rlemnr, Eloges des
personnes illustres en piéléde l'ordre de Sainl-
henoil. Thomas Corneille, Diclionn.ire yéo-
graptuijue, et Moreri, Diel. hiilorique, au
mol MdNTMAUTBt:.
MONT- OLIVE r (De l'oiidue de Notkk-
Damk m ), avec la Vie du bienheureux lier-
nird Ptolomde ou Toloniei, [ondaleur de
c. l ordi e.
La congrégation des moines bénédictins (2)
du Monl-Olivet en lialie reconnaît pour son
fondateur le bienbeun ux Bernard Ptoloméu
ou Tolomei, gentilhomme de Sienne, (|ui re-
çut au baptêaïc le nom de Jean. 11 s'attacha
à l'élude de la philoso.hie, (ju'il enseigna
publiquement, 1 1 il élail esliuié un des plus
savants hommes de son lem[is. Un jour qu'il
se préparai! à expliquer une question diffi-
cile, dans le teiiij)s qu'il demandait l'alleii-
lion à ses écoliers, il devint tout d'un coup
aveugle; mais ayant recouvré la vue par
l'intercession de la sainte Vierge, il fit vu'U
de se consacrer à Si n service et l'e renoncer
au monde, lin ( fl'et, piur s'ac(iuilter de sa
promesse, la prem ère fois qu'il remonta
dans sa chaire après avoir indiqué le jour
de la dispute, oiî il se trouva un grand nom-
bre d'auditeurs, au lieu de leur ji rer des
sciences profanes, il ne les entretint que des
choses célestes, et leur fit un discours si pa-
lbétii|uc sur le mépris du monde et sur le
bonheur de l'élernité, que [ilusieiirs de sea
auditeurs en furent vivement touchés el ré-
solurent de changer de vie et de renoncer à
toutes les vanités du siècle. Il leur en donna
lui-même l'exemple l'an 1313; car, ah.indon-
naiit ses parents et ses amis, il se retira dans
la soliiude, accompagné d'Amb.oise l'icolo-
mini el de Palricio Patrici, tous deux séna-
teurs de Sienne, (lui, ayant eu le bonheur
de se trouver dans celle assaniblée où il ava.l
prononcé ce discours surle mépris du monde,
n'en reste plus que quelques fragmenls,el inie partie
(ie la place (pi'il occu|)iiil esl aiijoiird'liui le Inu où
Snht les sialioiis du Calvaire. 1)-d ë
(2) Votj., a la fin du vol , ii* i'O.
»0!ll
niCTlONNMRE I»ES OiiDUKS IlEI.ICli: L'X.
1(î>-:
lui 6laionl roiii'vnMi-s i)o lonr roiiversion cl
le vouluri'iit siiivro d.uis s.'i relr.'iile.
Il y av.lit im lira noiiinio Acnnn, l'Ioipiié
d'environ ((uiiizi' milles ili- la ville de Sienne.
Ce lieo.niii .ipp irlciiail à 'l'oloniei, était fort
|)r();)re à leur dessein : ear il élail désert el
iuh.iliile; une nionlapne s'y élevai! au-des-
sus de quelcjnes aulres; des |)récipircs qui
s'y Iroiivaiful en quelciuos Pnilri>ils le ren-
daient eu quidque farou affreux; mais d'un
autre rôle un feuillage épais d'une iufinilé
il'arhres de toutes façons, qui en tout temps
t()n->ervn>ent leur vi rdurc, joint au doux
inurinurc de plusieurs pelits ruisseaux, qui,
eu se précipitant avi'c impétuosité, arro-
s.iicnt ce lieu eliain|iétrc, lui donnaient des
aitrails charmants pour des personnes qui
voulaient vivre dans la solitude.
Ce fut au ni lii'u de ces rochers que Toln-
mei se donna cniièreinent à la contempla-
tion des choses divines, macérant son corps
par des veilles el des jrùnes continuels, por-
lant le ciliée et couchant sur la dure. Ils de-
viurent en peu de temps un modèle de per-
fection: ce qui lit que plusieurs personnes,
attirées par la sainteté de leur vie, renoncè-
rent aussi au monde pour se joindre à eux.
(Juoique ces saints solitaires vécussent dans
une grande retraiie et s'occupassent unique-
ment de' l'afl'aire de leur salut, il y eut néan-
moins des gens malintentionnés qui formè-
rent des accusa' ions contre eux el les dénon-
cèrent au papo Jean XXII , comme des
no\ateurs et des personnes qui semaient des
hérésies. Le pape les lit venir devant lui
pour rendre compte de leur conduite. tTétait
l'an i;JI9 ; ce pontife tenait pour lors son
siège à Avignon ; Tolomei y envoya deux de
ses religieux po ir informer Si Saintelc de
leurs senlinients tonclianl les dogmes de
l'Kglise ; et ce pontife, n'y ayant rien trouvé
que de très-ortliodo\e, consentit ((u'ils de-
meurassent ensemble dans leur solitudi-, et
les envoya à (lui de l'ictramala, évéqne
d'.\rezzo, .ilin qu'.l leur donnât une des rè-
gles déjà approuvées p.ir ri';.;lise. (^e prélal
eut dans le même temps une vision dans la-
quelle il lui sembla voir la sainte Vierge (lui
lui mettait en main l.i règle de saint lîennît,
el lui ordonnait de la donner avec un habit
hl;inc à des personnes ()ui étaient devant lui.
Il coiinnt pi'u de temps après ce que signi-
tiait celte vision, lorscpic ces ermites qui
avaient été trouver le pape ci Avigmin lui
présentèrent les lettres de ce pontile, par
les(]ii('lles il lui ordonn lit de leur donner
utie règle. Il ne douta poiiii alors ()ue la vo-
lonté de Dieu ne fût (pi'ils suivissent celle de
saint lîenoit, et que ce nouvel ordre devait être
suns 1,1 proiei lion de la sainte N'ierge. Mais
avant que d'ériger ce nouvel institut en ordre
légulier, co.iformé. lient .iiix intiMitions du
pape, il voulut encore coiisult(<r le Seigaeiir,
et |i)ignit à la prière un jeune de (rois jour.s,
■ iprès lesquels, ne doiil.int plus que C(> ne lût
la volonté de Dieu, il alla, la même année
1310, au Val d'Acona, où il revêtit d'habits
blancs rolomci et ses compagnons , leur
(1) Voy., à 1j fin d.i vol., n» -271.
ordonnant de suivre la règle de saint Be-
noit jl ). Il voulut que ceitc; roiigrèg.ition fût
sous 1.1 proteclion de la sainte \ lege, el
comme il donna l- nom de Mout-Ohv t à ce
Val d'.Vcona. peut-être ,1 cause des oliviers
dont celle montagne était remplie, peul-étre
aussi pour faire ressouvenir les religieux que
par 1.1 mur(:ricatiun ils devaient être cruci-
fiés avec Jésus-Christ, qui la veille de sa
passion avait sué sang et c;iu dans le Jardin
des Olives, cette congrégntii)n fut fondée
sous le litre de Notre-Dame de .Moiil-Olivet,
el Tolomei prit le nom de liiTiiiril, au lieu
lie celui de Jeun, qu'il avait reçu au bap-
tême.
Il ne restait plus que de donner un supé-
rieur à cette nomelle co igrêgation. Tous
les religieux jetaient le> yeux sur leur digne
fonil.iieur ; mais son liuiiii ile l'emiiécha d'ac-
cepter cette charge, aimant mieux obéir <|ue
de commander. A son refus, le preniiersupe-
rieur et général de cet ordre fut le 1'. l'a-
Irice l'alrici, i]ui fut élu la même année.
Ambroise l'icolumini lui surcéda l'année sui-
vante 1;J20. Simon de 'riiure fut élu pour
troisième général en 1321; mais après son
année d'exercice, il fallut enfin que le bien-
heureux Bernard Tolomei céd.it aux solli-
cilaliuns de ses frères, qui ne voulurent
puint élire d'autre supérieur que lui en 13J2,
cl il exerça cette charge pendant vingt-sejit
ans, quoii{u'il fil tous les ans de nouvelles
tentatives p lur être déchargé de cet emploi,
alin de se remettre sous le joug de Tobcis-
s.inre.
l.es hisloricnsde cet ordre, parlant de la
ferveur de ces religieux dans le commence-
ment de leur élablisscnienl, disent qu'ils ne
pralii)uaient pas seulement des mortifica-
tions en secret, mais quMs en faisaient plu-
sieurs en public. .\ peine donnaient-ils un
peu de repos à leurs corps ; ils se levaient
la nuit pour dire matines, el croyaient que
c'était une chose indigne de leur eial et trop
sensuelle que de se rciioser après avoir dit
leur office ; ils employaient à l'oraison le
temps qui leur restait jusiju'à prime. Ils
eiaii'ut extrémemeni sob;cs dans leur inan-
pcr. Outre les jeûnes ordonnés par riîgliS'i
el par la règle de saint Benoit, ils en obser-
vaient encore beaucoup d'autres, ne se con-
tentant ces jours-ià iiue de pain et d'eau. Ils
ont élé iiicine plusieurs années sans lioire de
Vin , et pour n'.ivoir pas occasion d'en
bi)ire,ils arrachèrent leurs vigne^ el Atèrenl
de leurs mon islères les tonneaux el les vases
destinés pi>ur meitre le vin. Mais celte grande
rigueur leurayanl tellement épaisé les forces,
qu'ils tombèrent tous mala les, ils pratiquè-
rent le conseil que l'api^tic saint Paul donnait
à son disciple Timothée, qui était de jiren-
dre un peu de vin pour soulager son eslo-
mac : on leur en servit donc, mais si f.iible
el si g.ilé, (|u'il ne pouvait pas be.iucoiip
conlribiier à leur santé. Ils ont néanmoins
cli.Migé de senliinint dans la suite ; car ils
on; inséré d.ins leurs coustitulions que l'on
gar.lerail le meilleur vin cl que l'on ven-
1(p-
MON
MON
l'jni
cliail le plus ni.iuvais ; que l'iihlié n'aurait
point (Je viu particulier; qu'il y uiellrait de
l'eau aussi bien que ses religieux; et que
quand on serait obligé d'acheter du vin, on
aclièleraii toujours le ineilli-ur : Meliora vi-
lla pro moïKichurum usu serveniur. prjora
veiidanlur. A'ibns hwo eodeim/ue vino bene
w/ua diluto utiilnr ctiin suis monacliis, neque
ci liceat seursum aliquod vini doliwn pro se
(anCurn servare. Si vinum emenditm erit, ema-
tttr iliiid cjiind iiielius eril (l.ouel, pag. 2, c.ip.
30). Liur silence les faisaii admirer de tout
le monde. Ils ne couchaient que sur des
paillasses étendues sur le planrher et suis
couvertures : leurs habits n'étaient qne d'é-
toffes grossières, et selon Morigia ils por-
taient des sandales de bois.
Une vie si exiraortiinaire excita la curio-
sité de plusieurs personnes qui y venaient
de touies parts pour voir ces nouveaux soli-
tairrs, qui par leur molestie et douceur
semb nient plutôt des anges que des hommes
mortels ; les princes, les prélats et les gens
qui se trouvaient snffisainnient pourvus des
biens de la fortune, s'eslimant heureux de
contribuer à l'iigranilissemcnt d'un ordre si
saint et si agréable à Dieu, oITrirent à Ber-
nard de nouveaux établissements, dont il
en accepla quelques-uns. I^e premier fut à
SieuTie, où un l)ourgeois de cette ville fit
bàtr un monastère qu il dota de revenus
suflis;ints pour l'enlrctien de plusieurs reli-
gieux. Gu. de l'ielramala, évcque d'Arezzo,
en fil bâtir un autre dinssa v Ile épi^copile.
Le troisième l'ut fondé à Florence l'an 13 ii.
Le qnaliiènie à Caniprena, dans le terr;li)ire
de Sienne. I.e cinquième à Vollerre , par
Itainnuse, évéque de cette ville, l'an 1339.
Le sixième à S.iinl-Geminien. Le septième à
Eugubio, pai Piirie Gabrieli, évciiue de cette
vi'le ; et le huitième à l'oligni. Ils en eurent
encore dans la suite à Kome et en d'autres
endroits. Le saint londaleur, après avoir ac-
cepté la fondation de Sli nne, avait fait de
nouveau approuver son ordrepar Jean XXII,
l'an 132^, et il fut coiifirinc dans la suite
par le pape Clément \i et par plusieurs
autres souverains pont fes.
La peste étant entrée en ltalir,ran 13'i8 ,
y fit un grand ravage. Elle enlevait tou' les
jours un grand nombre de peisonnes, qui la
plupart mouraient sans assistance. Bernard,
animé du zèle de la rharilé, exhorl i ses re-
li;;ieux à secourir ceux qui en él.iienl atta-
qués; et pour leur donner l'exemple, il all.i à
Sienne, où le danger était plus évident, et
sans craindre la mort, il exjiosa géiiéreu-e-
menl sa vie pour le salut ri une infinité d'à-
mes qui seraient péries faute d'assistance. Il
ne leur donnait pas seulement les seco:irs
spirituels dont ils avaient besoin, il pansait
encore leurs plaies, les portait en terre, el
s'employait jour et nuit à ces actions de
chaiiié. Ses religieux furent aussi l'rap[)es
de cette maladie, comme il l'avait prédit, el
plusieurs en moururent. Elle ne l'épargna
pas lui-même, et s'en voyant attaqué il se
l'ouciia sur un pauvre lit, où il se disposa à
la moil par la receiitijii des sacre acnls de
l'Eglise ; et après avoir fait un disconrs a
ses religieux, pour le^ exhorter à la persé-
vérance, il éleva ses yeux au ciel, recom-
manda son âme à Dieu, et mourut comblé
de mérites le 2t) août de la même année 1348 .
étant dans la 76' de son âge et la 35" de sa
conversion. Sa fêle ne se lait néanmoins que
le 21 d'août, au(|iiel jour son nom se trouve
dans le martyrologe romain, y ayant été in-
séré par ordre du pape Innocent XL Clé-
ment X avait permis d'en réciter l'office à
pareil jour, et Alexandre VIII en a approuve
un office propre, pour être récite dans tout
l'ordre de Saint-Benoit.
Après la monde ce saint fondateur, Fran-
ceschini Tracozzano d'Arezzo lui succéda la
môme année, et gouverna l'ordre dix-huit
mois. Il eut pour successeur Haynier de
Sienne, l'an 1350, qui fut derechef élu l'an
13G9. Il paraît par le catalogue des géné-
raux qu'ils commencèrent pour lors à être
triennaux ; ce qui dura jusque sous le gou-
vernement de Jérôme Miraballi, qu'ils fu-
rent élus tous les deux ans, et continués
j)Our deux autres années : ce ((ui du a encore
jusqu'en l'an 1V97, que l'on ordonna qu'ils
n'exerceraient leurolfice que pendant deux
ans seulement, et qu'ils ne pourraient êiro
continués pour deux autres années. Ils ob-
tinrent le généralat pour quatre ans, l'an
1570 , sous le gouvernement de l'rotais
Canluri , de Milan. Il tut enfin réduit à
trois années, l'an !58i, sons !e généralat de
Mar- Cappitagerani, et on ordonii qu'il
serait choisi alternativement dans l'une des
provinces de l'ordre ; ce qui s'observe encore
à présent ; mais il y a eu des généraux (jui
ont été continués par nu oriié du pape ,
comme il arriva à l'ég.ird de Dominique
Pueroni de Crémone, qui fut continué pour
trois ans par Urbain VIII, l'an 1630.
Ces religietix ont élé appelés pendant un
long temps les frères erini es du ^lont-Oli»el ;
mais sous le généralai île Matthieu d'A versa,
le pa(ie Paul III leur permit de preudie le
niim de Dom, conformément à la règ'e de
saint Bcnoi . l'ie II, parlant de c t ordre dans
l'une de ses bulles, dit qu'il a eu de faibles
commencements, qu'il a clé augmenté par
la dévotion des fidiles, qu'il a l'.iit un heu-
reux progrès <'t qu'il était répandu dans
toute l'Italie. En etïet, il se trouve encore,
tant en Italie qu'en Sicile, quatre-vingts
monastères de cet ordre , dans la plupart
desquels il y a giaud nombre de religieux.
Ces monastères sont divisés en six provinces,
dont trois sont au delà el trois en deçà des
monts Apennins, par rapport à la ville de
Kome el au inonaslére chel d'ordre du Mont-
Olivel, qui était autrefois du diocèse d'Arezzo
et présentement de celui de Pienzi. Ce mo-
nastère est si vaste et si spaci ;iix, (|ue l'em-
pereur Charles V y logea avec p us de deux
mille personnes de sa siiile. Les jiapes Pie lî
el Paul Ili y ont aussi élé reçus, ayant avec
eux plusieurs cardinaux el prélat^; et lors-
que Pie II y alla, il déf ndit aux personnes
de sa suite u'y manger de la viande, quoique
ce fût un jeudi, par respect pour la sainteté
1035 nir.Ti. NN\i!;i: DIS onniu.s iiF.i.ir.iiix. loio
de ce lion cl rmir '.es observances îles rcli- coup plissé par (îerrièro. cl loisq.iMs «ont
uioux. q: 1 n'en iiiaiii^eaiiiit pis pour lors. .'iii cliccur iN iiielleiit une coule ù la manière
Les i.liiés généraux de cet ordre y font leur des liénédiclics, la(|iiclle ils por:cnl encore
résidence, et on y ticnl ordinairein 'ni les (;u ind ils \onl en ville, avec un chapeau
chapilies généraux. Lon ne \oil gi ère de blarc doublé de noir jusqu'aux bord-; leur
mona^lèics plus inagni'iiiues que ceux de liabil esl d'une serge trés-line. L'haliil de
Sainle-Marie du .Moiil-Ollvel de Naples, el de leurs convcrs (1) esl loul dilTéreil de celui
Sainl-Micliel in lioscu à Bologne; re ni de des religieux du clia-ur : ils oui un:" pelile
Naples a plus de vuigl mille écus romains de srMilanc qui leur tombe jusqu'aux genoux,
revenu, et la ronimuiKiu é y est coujpciSCB Ih portent d ms li- mou, isière un pelil hon-
ordinaircmcnl de quairo- v ingis religieux. net f lit comme c lui des prêtres séculiers , à
l,c ri.i de Naples .\l| hnnse lit beaucoup d- la reserve qu'l n'cbl ijui- de serge blan-he
bicu à ce monastère. Il demeura;! souvent sans carlo i : ce qui (ail qu'il n'a pas une
avec les religieux et I s servait même quel- l'orme trop régulière. Lorsqu'ils sont dehors,
qucfo:> à table, par un esprit de dévotion et ils ont un grand manlrau sans colli l el qui
l'c respeci qu'il .ivait pour ces serviteurs de est tout froncé : il est vrai que. dans plu-
Dieu, il y a mcorc beaucoup d'aulres mo- sieurs maisons, ils sor'enl avc" un manlcau
na^tères, qui ai)i.rochcnl de ceux de Naples liianc l'ail comme celui des sculiers, mais
il de i'.ologne pour la i iches^e el la magni- c'est un relàchemcnl ; car dans les monaslè-
liccnce, comme ceux de Saint- Victor de ^L- i es où il y a soixante religieux , ils n'en ont
lan, de Saillie Mai ie-aux-Bo s en Sicile, de point d'aulrc» q;:c les |iremiers; ils portent
Saint-l'ierie (i'iivgiibio, de Sainc-.Maiie du dehur- un cha::eau b'aac par-dessus et noir
Mont-Olivet de Florence, de S .inl- Ponlicu par-dessous ; ils ont un rabat d' serje f.iil
de Lucciui's. l'c Sainl-l'iuorges de Fcrrare. lie comme celui d'S prélres séculieis . q l'ils
Sainle-M.irie in 0 gnno de Vérone, de Saint- | orient tant au dedans qu'au dch(.rs du cou-
Benoit de l'adou •, de Saint-Nicolas de Rotin- vi ni.
po, du Sainl-Sépuli-ie de l'Iaisance, el de Les religieux de cet ordre (on! proTession
Sainl-Lauienl de Crémone. Ils avaient autre- de 1 1 règle de saint l'cnoî'. imis miligée par
fois di ux monas'ères en Hongrie, qui leur leurs couslitulions. Ils se lèvent la nu t pour
avaient été donnes par l'einpcriîur Sigis- dire nialines ; après landes ils vont au cha-
inond.et qn'i's ont abandonnés dans la suite pitre, où chacun se proslerne devant le sn-
à c luse de l't loignemeni. pcrieur el ne se relève point qu'il ne leur ail
Ces ri ligienx oui éié en si grande estime, enjoint une pénitence oa ([u'il ne leur a t or-
qu'on les a souvent choisis pour réformer donné de se relever. Tous les diuianclies,
(ks nnoiastères. Le jape Grégoire XII, n[irès cou plies, ils se ircuvent à une confé-
vovanl que l'obseï vaiice i égulière avait été rcnce de cas do conscience oa de la sainle
en.ièrcmeiil bannie di' eeli i de Sainlc-Justine Lcriliire. Ils ont, dan- q i li]ues-uns de leurs
de l'a. loue, leur donna ce monastère l'an nioiaslèrcs, des lecloursd'huuianilés, de phi-
l'iOS, où ils ont demeuré jusqu'à ce que la losophie, de Ihéolouie et d'Kiriiure sainle,
republique de Veni-e bs obligea d'eu sjrtir qui, à raison de leurs empois, aussi b\. n
I oiir le rendre aux Bi'nédiciins, qui y ont que dans les autres ordres, sont <lispcn-<s
jeté les fondements de la célèbre réforme qui de l'ollice, mais ils dniveni toujours assister
a pris le nom de ce monaNtèrc. Les papes et à l'oraison menlale. Ouoi^n'ils en.seignenl
les princes ont accorde beaucoup île privilé- la doclrinc de saint 'l'Iioinis, ils ne soni pas
t;es à cet ordre. L'euipi reur Charles V, élanl lrlle'..':ent .illachés à s 'S senlimi nls qu'ils ne
a Vilb fiancbe de Nice, le mil sous la prolec- s', n écarlenl qui Iquefois, et ils ne sonl pas
lion de l'empiri', par ses lelties palenles du d'arC'Td en liien des choses avec les Iho-
17 juin IojS. Jean XXII et Jules II le mirenl ni.sti s.
sous cille du saint-siége. (iregoire XI Ils jeûncnl, pendant l'au'oainc, les lundis,
exempta ces religieux de la juridiction des les mercredis el les vend: cdi , aussi bien que
cvèqies, el voulut que bs abbés supérirurs les ^amellis (lendant lou e l'année, à ciuse
des monas'ères exetças-enl leur ofliee et lis- que leur ordre esl sous la proleclion de la
seni les fonctions d'abbés de même que s'ils sainle \iergc. Ils mangent ■ e la viande Iro s
avaient ricu la benédiclion abbatiale. Les fuis la semaine; mais les novices, pendanl
mêmes Jules et l'ie II perinirenl aux reli- leur année de probalion , n'rn m.ingent
gieux des autres i.rdrc-, excepte aux Char- point, el ils ne reçoivent jiarmi eux que des
ireux lie passer dans celui du Monl-Olivel. personnes nobles : ce qui semble ne.inmoins
l'ie IV ap;'rouva le piivilége qui leur avait conlrauc à la règle de sainl Ueiioll, qui .id-
éte aciordé d'élire un c.irdinal prutecliur. nu t egalcmeul les nolib s el le> roluriers.
i'.e II les lit eiii ore jiarlicipants de tous les L ordre e>l gouverne ; ar un général, i|ui
iiri»ilé|ics , exemptions el iiiunnniles dont a pour .issistanls un vicaire gênerai el six
jouissaient les religieux de l.i congrégation visiteurs. Il y en avait .tutrelofs Ivuil; mais
du Miint-Cas-in , el il y a peu de souverains sons le généralat de l'roiais Canoluri , de
ponlitesdoni <\> n'aient nçu quelques gûc;s .Milan, ce uoiiibre fui red lit à six, pour ré-
el quelque^ privilèges. * pondre aux six provinces de cet ordre. Il-
Ces religieux sonl habillés de blanc, et leur s'issrmhicnl tous lis ans el r.)rmenl li!
tiabillemenl coiisisle en une robe el un sca ■ d. (iniioire, où on délibère ile>; alTaircs de
julaire, auquel est altaclic un capucc beau- la tongregalion el où on élit les snpe
( U Voy., i la iiii tlu vol., n"' iTi èi 2T0.
«r.DV
MON
MON
IftPS
rii urs ilps mnisons ol les autres officiers. Ces
assistants sont élus dans les chapitres p;énc-
i;iiix par voix secrètes, cl l'on observe dans
léleclion du géncriil et du vicaire général
rallernalive pour les provinces , en sorte
que la provinre d'où est le général no peut
en avoir un autre que dix-huit ans après, et
on n'élit jamais pour général celui qui quille
la fonclion de vicaire général, ni pour vicaiie
général un religieux de la môme province
que le général.
Les monastères sont gouvernés par des
supérieurs (jui prennent le lilre d'abbés ,
qu'ils conservent toute leur vie, quoiqu'ils
ne soient plus supérieurs. Riant supérieurs
ils peuvent se servir d'ornements pontifi-
caux, quoiqu'ils ne reçuivent pas la bénédic-
tion abbatiali'. Ces abbés sont élus dans le
défiiiiloire : l'abbé général en propose Iroi'^,
cl lorsqu'ils ont été aii;réés,on les ballotte
avec des fèves, et celui qui a plus de voix
csl censé élu. Il faut qu'ils aient clé aupara-
vant ou vicaires, ou maîtres des nv)viccs, ou
lecteurs, ou qu'ils aient exercé quelque em-
pl.i. Ils ne sont que liois ans dans leur of-
lice, aussi bien que le général et les visi-
teurs, mais ils peuvent êlre continués dans
la même ni;iison ou envoyés pour sujiérieurs
dans (l'aulres. Clément X accorda à ces reli-
gieux douze abbés titulaires , c'est-à-iire
deux dans chaque province; mais ils n'en-
trent point dans le gouvernement de l'ordre
ni des monastères pjirliculiers ; ils n'ont que
voix passive dans les chapitres généraux
tant qu'ils sont titulaires.
Le général a toujours avec lui un ihan-
cclier et un secréljie qui lui sont donnés
p;ir le d fliniloire , qui lui pro|.osc deux
sujets pour chacun de ces offices , aussi
bien que pour le procureur général en
cour de Uoihe , qui se fait aussi dans le
dilfiniloire , en gardant aussi l'alternative
pour 1rs provinces. Le général a dans le
diffiniloirc deux suffrages. Il doit avoir,
pour être élu, au moins vingt ans de re-
ligion , le vicaire général et les visiteurs
dix-huit, cl les abbés quinze. Le général
doit faire sa visite dans tout l'ordre une
fois pendant son triennal, et tous les ans
par dtux commissaires du nombre des vi-
siteurs ou des abbés. \ la fin de chaque
triennal, le troisième dimanche d'après Pâ-
ques, le chapitre général se tient au mo-
nastère du Mont-Olivel, chef d'ordre , où
tous les abbés onl droit d'assister, aussi
bien qu'un discret de chaque maison , qui
est élu sans avoir besoin du consentement
du supérieur, et, pendant tout le temps du
chapitre, Il n'esl pas permis de manger de
la viande.
Cet ordre a produit plusieurs personnes
rccommandables par la sainteté de leur
vie, comme les bienheureux Bernard To-
lomcj , fondateur, cl s^s deux compagnons,
Pairice Palrici et Ambroise Picoloinini ; le
bienheureux Bernard de Verceil , qui fut
en Hongrie pour y faire les deux établis-
sements que cet ordre y a eus ; le bien-
heureux Jérôme de Corsica , qui , après
Diction. oe$ Ordres REi.itiiFis;. il.
avoir porté longtemps les armes , se fil
oblat de cet ordre, et mouiul l'an IViO;
le bienheureux Jérôme de Manloue , (]ui
vivait aussi dans le quinzième siècle , et
dont le corps fui trouvé sans aucune cor-
ruption cent ans après sa mort ; le bien
heureux Jérôme Mirabelli de Napics, que
ses grandes vertus firent élire pour f:éné-
rai , quoiqu'il n'eût pas trente ans ; le
Père Jacques dcl Carpe, dont Bucelin fait
mention dans son ménologe de l'ordre de
Saint-Benoît ; les J'ères Antoine de Bar-
gue, Grégoire Amatisci, l'abbé Maure de
Pérouse , cl deux frères oblats , dont l'un
est le frère François de Vérone, et l'au-
tre le frère Daniel de Foligni.
Ceux qui ont été élevés aux dignités do
l'Kglise sont en gr.;nd nombre : il y en a
eu qui onl rempli les sièges épiscopaux
de Todi , d'Iniola, de Torlonc, de Cluse,
de M.irsiiio, du Pouzzoles, d'Aqui et do
quelques autres. Nous nous contenterons
d'en rapporter les plus récents, comme doai
Bomualil Tancredi de Sienne, qui fut fait
évoque de Alontalcino en 1694; dom Jean-
François Rigamomi de Uome, fait évéquu
do Cervia, en 1707, par Clément XI, qui
a encore donné les évéchés de Colle cl da
Cluse, le premier à doni Dominique Bal-
lati de Sienne, (l le second à don Caïe-
tan-Maric lîargali, aussi de Sienne. Ils
onl eu aussi aulrefois deux précepteurs du
Saint-E-pril do îîome : le premier fui dom
Benoît de Sienne , nommé piir Al'X.indro
VI, l'an 150.J, et l'autre fut dom Evangé-
liste Toriiioli de l'érouse, évéque' de Cilla
di Casii'llo, nommé par le pa| c Paul V,
l'an 1620. Cet ordre prétend avoir aussi
eu deux cardinaux , savoir : Georges Mar-
tinutius, archevêque de Sirigonie, et Pierre
Tartaro; mais Ls Bénédictins du Mont-
Cassin leur disputent celui-ci, cl l'autre
appartient à l'ordre de Saint-Paul Ermite,
comme nous avons fait voir en parlant do
cet ordre. Les religieux du Rlont-OIivet
convicnnenl à la vérité que le cardinal
Tarlaro a été abbé du Monl-Cassin. mais
ils prétendent que l'abbé André demanda,
l'an 1370, à Rainier, général du Moni-O.i-
vct, des religieux de cet ordre pour rétablir
la discipline régulière au Monl-Cassin, cl
qu'entre les religieux qui y furent envoyés
André Favenlini en fut abbé aussi bien que
le cardinal Tartaro, qui avait été aupara-
vant prieur du monastère de Notre-Dame-
la-Neuve à Rome, de l'ordre du Monl-
Olivct. Ils prétendent aussi que le cardiiial
Ardicin de Porte de Novarrc quitta la pour-
pre pour prendre l'habil de leur ordre
l'an 1495. Nous ne rapporlerons pas non
plus tous les écrivains de cet ordre qui
sont en trop grand nombre. Dom Second
Lancelot de Perouse a donné l'Histoire de
cet ordre qu'il a coniinuéc jusqu'en 1018;
on a encore de lui (luclques ouvrages, il
élail venu à Paris pour y en faire impri-
mer quehtues-uns, et il y mourut le l.'S
janvier 16i3. Il n'esl pas vrai qu'il ait été
général de son ordre, comme quelques-uns
35
lOOO KICTIONNAIIU-. l)i:S OtinRES RELIGIEUX. 1100
ont avancé; il n'a élé qu'abbé. Domi Au- aShnyc s Inéc près d'Arras, a olc ainsi a|i-
piisliii Lancelol, son frère, aussi rclisjioux pdoà cansequc sainlliloi, suivant ranriciuic
du Monl-Olivi'l, a fait impriinor pareil- tiadiiion. s'y relirait quelquefois, lorsqu'il
Jemenl quelques ouvrages à Uome , l'an se sé|iarail du n:onde pour vaqaer plus libre-
1G39. Cet ordre a pour armes irois mon- nient aux exercices de l'orai-nn (t de la ron-
laines d'argrnl , surmontées d'une croix lemplation. Il y en a qui pré endeni qu'il y
de "ueules en champ d'or, accompagnée de fil bàlir une chapelle. U'aulres disent que ce
deux rameaux d'oliviers sortant des mon- fnt saint Vindicien, évéque de C.mbrai.à
j.,r;i,ps, cause de la dévolion qu'il portail à saint
Il y. a aussi un monaslère de" filles de Kloi ; mais Gazel, dans son Histoire ecclé-
rel ordre à Hilonto, au royaume de Na- siasiique des Pays-I!as. rapporte ainsi cc:lo
pies. Le l'ère Honauui , dans son calalo- fondation. Il dit que saint Lloi lit dresser un
eue des ordres religieux, avoue bien qu'il oratoire sur une montagne à deux lieues
y a des religieuses de tct nrdie, mais il d'Arras, qui relient encore le nom de saint
dit qu'il n'a trouvé dans aucun aUrur le Lioi, 1 1 (]u'il y assembla dix ou douze per-
lenijjs de leur instilulion. 11 ajou'e seule- sonnes qui y vivaient comme d<!s enniles.
ment que Lancelol, dans l'Histoire de cet Saint V ndicien, évè [ue de Cambrai, édilio
ordre, rapporte que le bienheureux .lour- de leur eonversalion. s'y retirait souvent, 1 1
dain, qui en était général , fonda, Ta-i 1359, voulut même élre enterre dans celle église,
deux monastères à l'adoue, l'un pour des qui, ajaul depuis élé brûlée et ravagée avec
lionimes , l'autre pour des filles. On ne tout le pays par les Normands, environ l'an
trouve point cependant le nom d-. ce gé- 880. fut abaudonnéo ; en sorte que ce lieu
r.éral dans le Catalogne des généraux de devint un dcscri plein d'é|>ines et de ronces,
cet ordre, qui, en 131)9, avait pour gé- dont la sépulture de saint \'in(lliien fui cou-
néral S hius de Florence, qui le «ouverna verte, lîlle demeura inconnue jn-qu'à ci^iue
pour la première fois pendant douze ans, Dieu l'eut miraculeusement découverte du
jusqu'en l'an 1309, et {|ui eut pour suc- temps de l'évèque Fulbert, l'un de ses siic-
eesseur Uainier de Sienne, qui fui élu pour cesseurs, qui y lit bàlir une nouvelle église
la iroisièmc fois, i^a première religieuse qu'il consacra eu l'honneur des apoircs saint
de cet oidre fut la mère Françoise Lé- Pierre cl saint Paul, ayant élé assisté i ar
phanle de P.ilerme, qui avait d'abord élé les libéralités de l'empereur Olhon, son pa-
reli'Meuse de l'ordre de Sainte-Claire, mais rcnt. VA au lieu des crmiles qui y étaient par
qui, ayant fait bâtir un m Miastère, em- le passé, il y mit huit chanoines séculiers,
brassa avec qucbjues con.pagnes l'ordre qui y demeurèrent jusqu'en l'an lOtiti, ou
(lu Monl-Olivel, l'an 151o, avec la pcr- environ, (lue saint Liellicrt, aussi évéque de
mission du pape Léon X, qui la nomma Cambrai, voyant qu'ils s'arquillaient mal de
abbessc perpéiuelli! de ce nionisl re , où leur devoir, les en fil sorlir, ei substitua en
elle mourut en odeur de saiuleté. L'ha- leur place des chanoines qui vivaient en
billemeiit de ces religieuses consiste en une commun, auxquels il donna p ur premier
robe blanche, un scapulaire tie même cou- abbé Jean. Koberl le Frison, co.nte de Flau-
leur et un voile noii'. Au chœur elles ont dre, augmenta la fondaiion de C'iie église,
une coule blanche (1). comme avaient fait l'evéque Fulbert et les
Second Lancelol, Ilisl. OliveUmn. Paul, seigneurs de Couey. L'abbé Jean gouverna
Carpenlarius . Vil. H. Jlcnwrdi JHolomwi ; celle abbaye pendant quar.inle an-, cl, l'an
ta màne en italien par le P. LnmlxirdcUi , 1-219, Kicliard de Sassy, l'un de ses sueces-
de lord, de Snim-Duminiiixte. Conslitulio- seurs, fil bâtir l'cgase en l'elal qu'on la voit
nés Montis OlivcH. Sihesl. Maund., Mar. préseuleuicnt.
Occan. di tutti (jli Rclig. lib. iv. Paolo Mo- Ce monas'ère devint c immc un séminaire
rigia , Uist. di tnlt. Itelig. Ilerman , Ilist. de sainis évéïiues et de grands hommes.
des Ofilrcs religieur. Vh\\\p. Itonanni, Ca- Hugues, troisième abbé, assista au conclu
Udog. Ord. relig. l'art, i, et H'cmoire.'i com- de Lalran, tenu sous le pape Innocent 11.
tnunigués pr les religieux de cet ordre du Uadulplie, son successeur, assisia à celui de
inonastcre de Siiinte-!\l(irie-la-Neuvr à Rome, 'l'ours sous le pape .Mexandre III. Jean 11
Les religieux olivctaius existent en- obiiut du pape Lucius 111 la permission do
core, et ils ont à Home cl en Ilalie pour pouvoir porier la n^ilre et les autres orne-
général le P. abbé dom HenoU lielliui, et menls ponlilic.iux, el fut pnurvu par le pape
pour procureur général le P. abbé dom Urbain III il'nn évcche eu Orient. Etienne
Ilcrnard de llossi. Il y a aussi à Home ac- de Firmom ml, seizième abbé, assisia au
luellemcnl les liénédn lines-Olnclainis, niais concile de Lyon cl i.e voulut point accepier
que nous voyons, sans saioir ponrijuoi, l'évéché d'.Vrras qu'on lui ofl'r.l. Le pa,'C
rangées dans le Cracas au nombre des Adrien H' fut élevé pendant sa jeunesse dans
Oblote.t ffinx cl(>t:(re. B-o-s. celle abliaye, d'où sont sorlis Jean, évéque
.MON TPFLLII'.H. Vot/rz Fsi l'ir (Saint-), de 'l'érouanne, Ursion de Verdun, Cérard de
M (NT SAINT- l'M, 01 (Ciumuni.s nficui.inus Tonrnay, Ciuillaume de \aison, et Pierre do
i>\'. i.A co\r,\\ki:.\MO\ mjd'Ai rus, el de .Sisinl- Colmicu, carilinal, de Rouen. Ivlle avait des
Aubcri de ('ambrai. couslitutions pariiculièrcs qui furent re^'ues
Le mont Saini-E.oi, qui est une fameuse par plusieurs autres tonununaulcs de cba-
(!) \oy. ^ la fin du vel., n' ' 2"4 el iVo.
1101
MON
MON
1102
noines réguliers des Pajs-Iîas, et on Fr.infc
[lar ceux tleSaint-Jean desJumcaux. Us soul
habillés de violet, et ont un rocliel par-des-
sus leur souliine; au ciïœur ils nietient une
aumusse noire sur le bras pendant l'été, ei
la chape noire pendant l'hiver avec un grand
camail ilj. Les novices de cetle alihaye portent
encore la robe de peaux, qui était autrefois
commnneà tous les chanoines, et s'appelait
pelliceum, d'où vient le nom superpelliceum
ou surplis, comme remaiiiue le l'ère du
Mouline).
La même année 1066, que saint Lietlierl
mil des chanoines vivant en conmiun et dans
une entière désappropriition, au inontSaiiil-
liloi, il en mil aussi dans l'abbaye de Saint-
Aubert, située à Cambrai, dont il ôta les
cbanoines qui ne voulurent point renoncer
à la propriété et vivre en commun : il
donna à ces nouveaux ch.i noines lîernard
pour preijiier abbé, et ses surcosseurs de-
vaient éire élus et tirés du corps du chapitre
auquel il donna pouvoir de conférer les pré-
bendes. Il y a de l'apparence que ces cha-
noines avaient les mém s constitutions que
ceux (le Saint Eloi, puisqu'ils étaient aussi
habillés de violet et avaient le même fon-
dateur.
Sanmarlh. Gall. fliristi<in. Du Moulinet,
Iliib. (les cliunoin. Regul.;clGazcl, llisl. Ec-
cUs. des l'ays-Biis.
MONT-SEGESTRO. Voyez Jérôiue (Ermi-
tes VK Saint-).
MONT-VIEHt'iR (Iîénéoictinsde l'ordre nu),
avec la i iede saint Guillaume de Verceil,
fondateur de cet ordre.
Saint Guillaume, (oiidaleur de roidr(! du
Miinl-Vierge, nai|uit à \ crci'il en l'icinonl,
de paients nobles et reconimandubl. s par
leur vertu. Les ayant perdus prcsiiue au
sortir du berceau, il fut élevé par un de ses
pioches parents jusqu'à l'âge de quinze ans,
que, coiiiniençant à senlir dans son cœur
un grand amour pour Dieu et un penchant
pour la retraite, il résolut, dans un âj,'e si
tendre, de soumettre sa chair à l'espril,
avant qu'elle lui livràtdes assauis pi'ur en-
gager son cœur dans les liens d'un monde
ciirrompii, qu'il uiéprlsait avant iiicme que
d'en connaître bien la vanité, au moins par
expérience. C'est pourquoi, malgré les biens
<loe ses parents lui avaient laissés en mou-
rani, il prit le parti d'embrasser une vie pé-
nitente, de renoncer à toutes choses, et d'a-
bandonui r jusiju'à son pays pour l'amour
de Jé.sus-Chrisl qui faisait tout l'objet de ses
désirs; il se revêtit pour cet efl'el d un habil
d'ermite, et entreprit le voyage de Sainl-
Jac(|ues en Galice. La longueur et la diffi-
culté d'un si grand pèlerinage, la grossièreté
de son habil, auquel il n'était p;is accoutu-
mé, la pauvieié volontaire (|u'il exerça pc ii-
d;int toute la route, étaient sans doute une
pénitence bien rude pour un enfant qui avail
été élevé jusqu'alors d'une manière fort dé-
licate. Cependanl toutes ces peines ne furent
(1) Voy., Il la (in du vol.. n' 275.
pas suffisanlcs pour contenter son cœur déjà
insatiable de mortifications; car il voulut
faire ce chemin nu-pieds, portant sur sa
chair deux cercles de fer qiii ne lui donnaient
aucun relâche ni jour ni nuit. Quand il fut
de retour à son pays, bien loin de songer à
se procurer quelque soulagement en quitlml
ces cercles, et en se dédommageant de toutes
les autres peines qu'il avait endurées par la
faim, la soif et les autres incommodités, il
se proposa un autre pèlerinage en Palestine,
pour aller visiter le saint sépulcre à Jérusa-
lem; mais Dieu, qui l'avait clioisi pour le
fondateur d'un ordre religieux, lui ôla la
pensée de faire ce voyage lorsqu'il s'y pré-
parait, et lui inspira celle de se retirer dans
une solitude.
Pour le faire avec moins d'obstacles, il
passa au royaume de Naples, et y choisit
pour retraite le Mont-Laceno, dans la pro-
vince de la Pouille, où il trouva saint Jear»
de Matera, dunt on parlera à l'article Pul-
SANo. Ils demeurèrent quelque temps en-
semble, aussi bien que sur le Mont-de-Co-
gno, où ils firent encore quelque séjour.
Mais saint Jean de Matera l'iiyant quitté
pour prêcherdans lîarri, et s'étanl retiré en-
sui.e au Mont-Gargan, où il fonda l'ordre do
l'ulsano, saint Guillaume quilla aussi le
Moni-de-Cogno et vint dans la prncipaulé
ultérieure, où il choisit pour sa demeure le
Moni-V irgiien, qu'on appelait ainsi à causo
du séjour qu'on prétend que le poète Air-
giie y a lait; mais cette montagne changea
de nom après que notre saint y eut fuil bâ-
tir une église en l'honneur de la sainle Vierge,
et fut nommée pour cet elïet le Mont-yienje.
11 ne fut pas longtemps en ce lieu sans y
être visité d'une inlinité de personnes (]ui y
accoururent au bruit de sa sainteté, les uns
pour lui demander des instructions saliiîai-
res, et d'autres pour se recommander à ses
prières. Il se trouva parmi ce grand nombre
plusieurs prêtres séculiers des lieux voisins,
qui, touchés de ses entretiens, se jetèrent a
SCS pieds pour le supplier de leur permeltru
de demeurer avec lui, afin d'être les compa-
gnons de sa pénitence. Il ne pul refuser leur
demande, et leur fil bâtir des cellules sur la
même montagne; et c'est ce qui commença
la congrégation du Monl-Vierge, dont iljcia
les fondeiiienls l'an 1119, sous le pontificat
de Calixte 11.
Ces ermites ne vivaient d'abord <]uo d'au-
mônes; ils pratiquaient une grande absti-
nence: l'oraison et l'union avec Dieu étaient
leur principale occupation. Ils macéraient
leur corps par de grandes austérités, le tra-
vail des mains était en usage parmi eus;
mais queliiues mois s'étant écoulés dans ces
sortes de pratiques, ils murmurèrent contre
le saint fondateur sur ce qu'étant prêtres il
les occupait à des exercices vils: ils voulu-
rent êlre employés aux loncliims Me leur
n)inislère, et obligèrent le saint à bâtir unn
église où ils pussent célébrer la messe et
assister aux divins ofûcej.
1IC3 niCTION.NAIRF, DES OllDUES ItELlCIEUX. liOi
Le saint les foiitenl.i, el fil bâtir une s.iinl homme ne fis'icnl impression sur l'cs-
église qui fut consacrée en l'Iioniiciir «Je la pi il de ce priiue, traversèrent ses pieux dos-
iamle Vierge par l'cièiiue d'Avellino. Ce fui seins par la calomnie qn'ils vuscitèrenl con-
pour lors que le pape Calixte 11 approuva Ire lui, làclianl d;' le l;;ire passer pour un
cette ciingréiialion , et accorda liraucoup h) pocnte, qui cacli.iil sous un extérieur de
d'iniulgeiices à ceux qui visileraienl l'é^ilise pieté un cœur reinj;!! lie passions et de vii es ;
du ^loul-^'iorge. Les grandes aumônes qu'on et aliu de mieux réussir dans leur tnau^ai<
y faisa t, et que sa. ni Guillaume, après eu dessein, ils firent venir une rourlisane (lui
avoT pris le nécessaire, distritiuail ensuite pr itnil de le faire tomber dans les IIIl-Is
aux p..uvres, exciiérenl de nouveaux mur- quelle lui tendrait pour (Orroinpre sa clias-
nuires parmi les rcli;;ieux, dmil le nombre lelé: le roi y consennl, el celte femme ini-
éiail 1). aucou]) auguienié. Ils trouvèrent pudique alla trouver le saint avec tous 1 s
mauvais de ce qu'il était si liber. il des au- cli,;rmes qu'elle crut capables pour lui ins-
mônes (jui étaient données pour leur entre- puer de 1 amour, et, par des discours lascifs,
lien cl leur subs siance ; ce qui pouvait eau- elle le pressa de consentir à ses désirs. 11 fei-
ser la ruine de leur monastère: ils .^e plai- j;n t d'y acquiescer, à cond tio:i qu'elle se
gnircnt a ssi de ce que les règles qu'il leur couclier.iil dans leméme lil «lu'i; piépûrerait
prescrivait étaient trop austères el imprati- pour lui. Elle s'imagina sur celle réponse
cables, lui demandant qu'il eût à se relâcher avoir remporté la vicioire : elie alla bien
de la sévérité de son inslilut. Ce -ainl fonda- joyeuse en porler la nouville au roi ; mais
leur fit ce qu'il put pour arrêter leurs mur- elleful bien surprise, lorsque l'Iieuic durcn-
mures, sans vouloir |iuurlant rien changer dtz-vous étant arrivé ■ el étant entrée dans
dans les pralii)ucs de pénitence qu'il leur le lieu destiné à sa prétendue conquête, elle
avait prescriles; mais loyanlque toutes ses n'y trouva qu'un lit de charbons ardent-, s r
remontrances étaient inutilis, il prit le parti lesquels le saint se cou.ha, l'inuiant à faire
de les abandonner, il leur (loni;a pour su- la inoiuc chose; el e.le fut eiiiore piusélonuéi!
périeur le bienheureux Albcrl, leli^iicux de voir que le fi'u ne faisait aucun mal au
d'une sainte vie, et ((ui sut, tant par sa pié- serviteur de Dieu. Ce prodige la toui ha si ti-
té qui' par ses belles manières, ramener à vement ((u'tl'e res ihit de changer de vie, el
leur devoir Cis esjirits inquiits, el les faire ;iyaul demandé pardon au saint, elle voulul
vivre selon les règlis qui leui avaient été vivre sous sa conduite. Elle vendit tout ce
prescriles. Le sainl fond.ileur, après élre qu'elle avait, et du prix qu'elle en relira, le
sotido .Monl-^ierge avec cini] religieux qui sainl fonda un monastère de filles à \'cnosa,
ne vi ulurenl |o:iit le quiUer, fonda de non- q'.ii fut achevé par les libéra. i es du roi Uo-
veaux monaslères, duui le premier l'ut à !?er- ger. Ce. t.; courlis. ine y prii l'iiabil de l'ordre
ra (-ognala ; il en bàtil ensuite deux autres d.i sainl iond.ieur, el se sanciilia dans «e
à Ciugli.to, proche la vile de Nusco, l'un uion.i.sière, dont cile fut ensuite supérieure,
pour des hoi! mes, l'autre pourdes filles, avec Les pénitences cl les auslérilé., jointes ;iux
une cg:ise commune pour les deux nionas- attes des vertus les plus héroïques <iu'ello
lèics, laquelle fui dédiée en l'honneur du pralicjua depuis sa c^uncrsiou, lui ont me-
Sauveur du monde. 11 rassembla un grand li.éapièssa mort le titre de l)i''iiliiu:euse,
nombres de vierges d.ins le mon. istère destiné éiaiil co nue ^ous le nom de la 6iea/iei(reu»c
pour les pcrsoniii s de leur sexe, qui y vi- Ajti's de Venins:!.
vaiciit dans une grande abslincnce. Jamais Ap^ès ce miracle le roi Roger cul une si
elles ne buvaient de vin, non pas même dans grande estime pour sainl Cuillaume, qu'il
les maladie-, et elles s'abstenaifiil en tout fil bâtir plusieurs moaastères de son ordre,
U'inps de l'usage de la vianle et de l.'Utes non-seuleiiienl dans le royaume de Naples,
>orles de laitages ; trois fois la semaine elles mais encore dans celui de Sicile. Le premier
niangi'aient des herbes crues avec du pain, qu'il fonda fut à l'alerin.' sous le nom de
et les autrrs jours on ne leur servaii qu'un :i(ii)it-Jcan ties Lritiites. visa vis son pal.iis.
seul mets acconinodé à l'huile: depuis la 11 en fonda aussi un autre dans la nièojc
fêle de tous les saints jusqu'à la Nati\ité de \ ille poui des vierges, sous le uoiii de Suinl-
Ixolre Seigneur, el depuis la Sepiiiagésimc Snuvcur; el li (iremière qui y prit riinbilfot
jusqu'à l'àques, elles jeûnaient tous les jours la princesse Constance, sa tille, laquelle fut
iiu pain et à l'eau. Les hommes ne vivaient tirée dans la suite de ce mipiiaslére, dont elle
pas dans leur monastère d'une manière moins éiait supérieure, et rele\ée de ses vieux par
austère; de sorte que ce monasière de llu- le pape Celesliu Itl, pourepousr Henri \ I,
glielo devint tiès-considéral.le dans la suite, fils de l'empereur Fridéric Ùarbe-Roussc. (!e
lanl par sa pietcque par ses grands rcv(.'.ius prince lil encore bâtir un autre monastère
qui se iiiuntèiunt à plus de vingl mi. le du- de religieuses à Messine, a|)pelc le monus-
,cats. Ici e du M ont-V icrfje. cl v.ulrv: ceux qu'il fonda
La sainteté de Guillaume se répandant de ilans le royaume de Naph s, il y eul ci lui do
toutes iiaris, Hoger, roi de Naples e; de Sicile, \ enosa jiourdes religieuses. Le nomlire dis
ic lil venir auprès de lui pour se servir de ses monastères de filles de l'insiilul de saint
fo:iseils. Le sainl piolita de c lie occasion Cuillaume fui si grand, qu'il y eu a qui pré-
pour porter ce prince à bannir de sa cour le lendent (|u'il y en eut jusqu'à cinqua.ile;
dérég:emenl el le scandale. Les couriisansde mais à peine à p'cseiil eu irouve-l-un deux
Hoger, qui ne rcspiraioiit que les plaisirs el ou trois, dont les religieuses oui môi c
le luxe, appréheudaul que les discours de ce quitte l'hjLil et l'iustilul du .Monl-Vicrge,
nos
MON
MON
liOG
quoi(iuc celui (!e Messine en relieiine encore
le nom.
Sailli Guiliaump, apris avoirdeineuré quel-
que temps d.ins suii inoiiasière de Païenne,
où il av<iil fait venir d s religieux de son
propre monaslère du Mont-A'ierge, que le
i)ienheureux Albeit lui avait envoyés, quilia
la Sicile pour retourner dans le royaume de
Naples. Il alla visiler les nligieux du Monl-
Vierge, qui avaient été longtemps privés de
sa présence: il y fit quelque séjour, e! sen-
tant par l'épuisement de ses iorci'S et l'ac-
croissemenl de ses infirmités qu'il ne pouvait
vivre longtemps, il se retira au monastère de
tli glielo, où il mourut le 2o juin 1142, lais-
sant une nombreuse postérité, dont il donna
la conduite au bienheureux Albert, qui ne
voulut pas nér.nmoins accepter cet emploi;
mais on l'.e voulut point en élire un autre
qu'après sa mort qui arriva l'an 1149; ainsi
il est reconnu pour le second général de cet
ordre.
11 eut pour sncresseur le bienheureux Ro-
bert nui relr;;ncha quel(|ue cliose des gran-
des austérités auxquelles saint Guillaume
avait obligé ses reli;.'ieux ; et comme ce saint
ne leur avait rien laissé par écrit, il mit son
ordre sons la règle de saint lienoîl par auto-
rité du pape Alexai'.dre II!. Ce ponlil'e l'ap-
prouva derechef, et prit sous la protection
i!o sainl-siége le mcmastére du Mout-Vicrgo.
.li'an,succes-( ur de Uobeit, fit rebâtir l'église
d.' ce chef J'ordre avec beaucoup de magni-
(idncc, et elle fut consacrée par le papeLu-
cius iV, eu présence de quinzi' évéqucs et de
cinq abbés, et lui accurda beaucoup de pri-
vilèges, di)iit le P. dom Gabriel, quatiiènie
ab'é, obtint la confirmation du p.'pe Célcslin
lii. Jean, deuxièmedu nom et huitième abbé,
ainpl;fi I l'ordre par la loiidation de plusieurs
inoiiaslèies, et il alla toujours en .luguieii-
tanl, tant que les relij^icux vécurent en paix
et en union, et qu'ils obs<'rvèreiil invio'able-
iiieiit leur règle. Mais étant loiiibés dans le
relâchement, l'espiil de discorde se glissa
parmi eux, e! après la mort du gènér<;i Pb;-
lipp!', dix-biiitième abbé du Mo.t-^'ieige, ne
pouvantcoiivcnir pour l'élection d'un succes-
seur, chaque monastère fut gouverné pirdis
doyens cl des prévôts, qui étaient absolus et
iii'l('pendanls, l'ordre n'ayant puintde chef.
Niais dom Pierre, relig eux du .Mnnl-\'ierge,
alla iriiuviT le pape Clément VI à Avignon,
et obtint de ce pont.fe, l'an 1349, l'abb lye du
Monl-\'iergc et le gou^ ernement de l'ordre,
qu'il tint pendant ijuarante ans: ainsi les re-
li;^ieux perdirent le droit qu'ils avaient d'é-
lir.' leurs généraux. Après la mort du géné-
ral dom Pieir -, ai-r vai' en 13SI, Barli.'elemy
(ut général juscju'eu l'an l.i'M, et eut pour
succesyeur Palamides, cpii permuta l'abbaye
du Mont-Vierge pour célk' de Sainl-Pierre i.d
Ara avec le cardinal Ik'g ,es , deCiiypre, qui
fut le premier abbé couimendalaire du Mont-
Vierge, et mourut l'an l'i33. Le second fut
le cardinal Guillaume, de Chypre; le troi-
sième le cardinal J^an d'Aragon, fiis du roi
Ferdinand ;le quatriènu le cardinal Oiivierf];;-
rafl'a, arthcv6(iue de Naples, qui ôla à ce
nvnaslère le riche trésor qu'il conservait du
corps de saint Janvier, dont ce cardinal en-
richit son église. Enfin le cinquième et der-
nier abbé commend.itaire fut le cardinal
Louis d'Aragon, neveu du roi de Naples, qui
ninit celle abbaye entre les mains du pape
Léon X, à rond.tion qu'elle serait unie pour
toiijoui s à l'hôpital dd'AnnonciadedeNaples;
ce qui fut exécuté l'an 1515, et les gouver-
neurs de cet hôpital en prirent possession le
18 décembre de la même année. Ces'^gouver-
neurs, qui sont ordinairement cinq genlils-
hoinmeset quatre lîourgeois, mirenlau Mont-
Vierge un sacristain, qui y tenait lieu d'abbé,
et un de ces gentilshommes disposait de tou-
tes choses, et nommait m^me te supérieur,
qui n'avait qi.e le litre de vicaire et peu d'au-
torité sur les religieux, n'ayant pas même le
pouvoir de les envoyer aux ordres. Ce gen-
tilhomme donnai! les prieurés de l'ordre à
ceux (lui lui en offraient davantage, et tout
se faisait au nom du sacristain, que les gou-
verneurs changeaient quand Ion leur sem-
blait: de sorte que le plus souvent c'était un
préire séculier, sans science et sans expé-
rience, et quelquefois l'évéque de Lésina,
qui est une ancienne ville ruinée qui appar-
tii ni présentement à l'hôpital de l'Annoii-
cia^le.
L'ordre du Mont-A'ierge se vit par ce moyen
à deux doigts de sa perte; il ne fut pas seu-
leiient dépouillé de ses revenus qui étaient
considérables, puisque le seul m mastère du
ftlont-Vierge possédait les baronies de Mer-
cU'(;liano,Spedaletto,Mugna.;no et Quairclle,
a^ecle (ief de Monle-Fnscoli, d'où dépen-
daient Li-Felici, San Jacomo, FerUilario,
Terra Fs'ova, San .Martino et Pietra(!elli Fusi;
mais élant sans chef, et pour ainsi dire sans
supérieur, les religieux tombèrent dans un
grand reiàchemcnl, et les études eu furent
enlièreiiienl bannie.-.
Les gouverneurs de riiôpital de l'Annon-
ci:ide, pour faire consentir plus volo Micrs le
pape léonXà l'union qu'ils d'.iiiandiieiil du
monaslère du Mont-Vierge et de ses dépen-
dances à cet bôpiial, représealèrcnt à Sa
Sainteté que tous ses revenus ne montaient
au plu3 qu'à trois cents dueals, et qu'ainsi le
nombre des religieux ni l'obseivauce régu-
lière ne diminueraieiil pas dans ce monas-
tère ; c'est ce qui lit que ce ponlii'e conseniit
à cette union par son bref de l'an 1515. Jiais
les religieux du Monl-Vierge appelèent au
papL'uiêmede ce brei' qu'ils supposèier.l sub-
reptice et obrcptice; puisque les revenus
du Muni- Vierge se montaient à des sommes
bien plus considérables qu'ils n'avaient ex-
posé au pape. Ce qui leur fut d'autant plus
facile à prouver, que, sans les revenus des
terres de Mercugliano, Spedalello, Mugnano
et les autres, on vendait tous les ans pour
l ois cents ducats de châtaignes qui se re-
cueillaient sur la montagne, et pour p'us de
quatre cents ducats de bois qu'on coupait au
nH'mee:idroit,et que les religieux a valent tou-
te juridiction spirituel le et temporel le dans les
terres qui avaient été unies à l'hôpital de
l'Anuonciade, et duul ucuumoius il n'était
ilo7 DICTIO.NNAIUE DES OflDRES RELICIFUX. 1l(i8
fait aucune mention dans le bref. On n'eut bulle de Pie \. Cependani, comme tui n'y
«lucun éffard à leurs rcmontr.iucps, et ils se avait pas rtimpris les \a.«saux des d-r-
\ireiil dans la deiiendaiice des laïnues, ce rc'i de .Mercu|^liano, Spedalello , MugraiHi,
i|ui dura jus()ue sous le poiitifirat do Pie V. dt-llc Ouaiirelle et les autres, sinon qu'on
!\lais a»aiit qu'ils fussent délivres de cette les obi çcail à servir en personne le ^lo :t-
ser> iliide, Alphonse l'iscici'llo, l'un des jjou- \ieriîe, demeurant au surplus sous la juri-
verni'urs de l'AnMonciade, s'élant trouve à diition temporelle de rii(\pilal (juidevait nom
un chapitre des re!ij.Meux de ce! ordre, et mer lis «iflieiers d^' justice; ces vassaux ap-
Toy ml l'Ifinoranco où il était plonge, la plu- jircliendant depcr.lre leurspriviléses.s'.idrc^-
p.irl des reli;:ieux ne sachant même ni lire sèrent à cr niéme pontife jiour le prier de leur
ni éiiire, il leur donna piMir supérieur, en permettre de rester toujours vassaux du
«jualilc de vicaire général, le P. doin Uarbalo .Mont-Vierge; ce que le pape leur accorda,
l'errato dclla Candida, qui était le moins ordonnant qu'ils ne pourraient jam is élre
>L;norant de ces religieux et le plus zélé pour vendus ni échangés, et qu'ils seraient tou-
tes observances régulières. Ce vicaire gêné- jours vassaux du Mont-Vierge qui en aurait
rai, avec l'assislance de ce gouverneur, éta- le domaine direct.
b il un séminaire et des études au Mon!- ,p pouvoir que ce pape avait accordé au
V lerge, d ou il est sorti dans la suite de très- sacristain de l'Aunon. iade sur 1rs religieux
hahiles gens, qui se sont rendus recomman- ^^ Mon'-Vierge ét.il d'assislrr à leur cha-
dabl s dans 1 ordre par leur science et leur pj,re général pour l'élecliou d'un vicaire gé-
'""'."■ . ■ ^. ■ ,1 r. . . néral, et les religieux qui se trouvaient gre-
Jean-Louis r.scicello élan gouverneur de ,.^.^ j^ur supérieur, pouvaient appeler do
1 Annoneiade en loGo les exhorta a repren- i^^^s ordonnances à ce sacristain, qui eu
dre les observances régulières et a règle de ■ ,^ g„ j^rnier ressort. Mais Sixic V, qui
saint Itenoit. qu ils avaient abandonnée. Ils ^^y.,;, succédé à Pie V, croyant qu'il ne cun-
suivirent son avis ; mus ne pouvant execu- y,.„;,jt ^^ sacristain de l'Annor.ciade.
1er ce dessein, tant qu ils seraient gouvernes „„oique régulier cl évé.iue conformément à
par des séculiers, ils eurent recours au pape i,^ ^,^^^^^, ^,^, ^on prédécesseur, se mélàt des
Pie l\ pour être alTiambis de cette servi- affaires des religieux du Mont-V.ergc. el
lude, et depuleient vers ce pontife le vicaire ,., .,„i ,„é,j,eque lesacrisiainqui vêtait pour
général duuj Oarbato, qu ils élurent dans i„rs, n'était ni réguli. r ni évèque, ex. m,.ta
leur chapitre comme procureur pour aller a ^^,^^^ |^.^ religieux de cet ordre de sa luridic-
Uome avec quel lues autres religieux, cî ils i|„„_ ^^^■^ faisant défense, sous peine d'excom-
prireni pour leur protecteur le cardinal „u,„icaiion. par sa bulle de l'an i: 88. de se
Sforzr-. Le pape Pic 1\ etanl mort comme ils i,.„uver à l'avenir à leurs chapiires. ni de se
sollicitaient la r, stitulion du Mon!-\ lergc el ,„^^:pr des affaires de l'ordre,
de leurs revenus, ils n obtinrent ce (lU ils de- ... . j ■ .• • - . ■
m.indaientque sous le pontificat de son s. c- ''^""'e re, ululions arrivées en cet ordre
ccsseur Pie V, qui, nonobslant les opposi- ''" "^•".'«'"' ,»"""" les observances régulières,
lions du procureur de l'Annonciade, délivra et quoique le pape Pic V eut fait aire quel-
l'onlredu Mont-Vierge du gouvernement des '!"'? reglemenU pour les y lelaMir, il n y
séculi.rs, défendant ;;ux gouverneurs de f»^'"' '1""" P*^"' "°'^''î^'' ^^ '-""^ents qut
l'Annonciade de s'en n.êler à l'avenir, el les avaient re,.us, et ou la règle d;- saint I5e-
cassa l'union qui avait élé faite de ce mo- "«'l e'a't pratiquée M.iis, 1 an lo9G, le pape
nasière avec l'hôpital de l'Annonciade ; il le (-lo'.'ent MU voulut inlro.iuTe une reforme
soumii néanmoins au sac.islain de cet hc^pi- fri'"''"lc dans tout 1 ordre Pour ce effet il
tal, (i<;urvu qu'il fût régulier cl évéquo, '-omma commissaire apostolique le Ptre Jean
como.e il paraît par le bref de ce poniife du l''"''l^"^'\ fondateur des clercs réguliers de
7 mars 1.507; mais il ne rendit pa' les rc»c- '« •^'^'^^ <>;' ^''^" ''^ l-"cques. 11 lui donna
nus do Mont-Vierge aux religieux. !1 ordonna P"''^'""; ''"^ ^'^"" '""'' 1''^ .^•""*''"'s de ce
seulement que les gouverneurs de l'Annon- «""dre.de supprimer ceux ou on ne pouvai
ciade donneraient tous les ans. à chaque rc- P^^* pratiquer les observan, es régulières et
ligieux pour son entrelien, vingt écus ro- de ne reserver que ceux qu il rouverait les
mains, et que de cinquante-trois prieurés P'"^ commodes pour c.la, c! dans bsquels
qu'il y av.il alors dans l'ordre, on les rédui- «" potirraii mclire pour le n oins douze reli-
rait au nombr. de dix-huit aux frais de l'hô- P."^"V " '."' rccoom.anda sur toutes choses
pilai, qui ferait toutes les dépmses pour d en bannir la propneie el de rétablir la vie
faire acVonimo.ler les lieux réguliers , ail» commune dans les monasières ou clic n était ^
que les n ligieux y pussent vivre en commun p-'s observée.
et y garder les observaneis régulières. Mais Ce l'ère exécuta les volontés du souverain
les gouverneurs, appréhendant que la de- ponlifi', et malgré les ofiposiiions de qiiel-
pcnse des réparalions de ces monastères no ques religieux, il établit la réforme dans iout
se montât trop haut, firent un concordai la loidre, «l dressa des eonslitulioiis (|ui lurent
même année avec les religieux, par lequel api rouvees par Sa Saintele, et qui y sont
crux-ci abandonnèrrnt à riiôpital de l'An- encore en pialique. Le même reformaieur
nonc ade environ tiois mille ducats de rente, assigna à i es religieux le IJréviaire des l'.i-
et riiôpilal leur céda tout le reste des r.ve- mil<'s Camaldnlcs de la rongregalioii du
nus qui dépendaient du monasière du .Mont- Mont-de la-Couronne, qu'il fit impiimer l'an
Vierge, lequel accord fut couliruié i^ar une 1!J'J7, et leur ordonna (lue, dans six mois, ils
1109
MON
MON
1110
fUisenl à réciter l'office divin conformcmenl
à co fîféviairo
l'aul V, confirnicint co que le Vvrc L\M)nar(Ji
fivail fait touchant la suppression des po:ils
moiiaslèrc's de cet ordre, fixa, par mie liiil'c
de l'an 1611, le nombre descouvcnis qui dc-
vaienl rester, et celui des religieux (jiii y de-
va eut denicurcr. il ordonna qu'il n'y aurait
qu(; vingt-quatre monaslèi es ; que dans celui
d 1 Monl-Vierge il y aurait toujours cent re-
ligieux, dont la moitié seraieui prêlris ; lians
le mniiastère de Naples, seize religieux ; dans
celui de C isamaricana, quitorze, el dans
ceux de C.ipoue, de T( rra-l^inla, de Terra-
CandiJ;i, de l^lauriliani, d'Aversa, de Home,
de Guglieto, de la Touille, de Montefalco et
d'Arjisnso, douze religieux; et que ces mo-
nastères seraient gouvernés par des ahhés.
Onze aulrcs sont noaimés dins l<i même bu le,
dans les(|uels il ne pouvait y avo r que six
religieux, gouvernés seulemeut par des
prii urs, qui pourraient succéder aux abbés
des autres monastèies en cas de décèS ; que
ces onze prieurs seraient amovibles, et (ju'on
en cliraittrois pour aller au cli;ipilre généra!,
auquel le doyen, les définileurs, les visiteurs,
le procureur général en cour de Uome, tous
les abbés et le maître des novices, auraient
voix, et que tous ces abbés jouiraient des
mêmes droits, privilèges, immunilés elexemp-
lions, que ceux de l'o de des Camaldule-.
Le même pontifeordonna ciuore que dans
vingt-quatre autres ma sons, nommées d.ins
son bref, on n'établirait aucune commu-
nauté, et qu'on y inverrait seulement deux
religieux, dont l'un scnitprére pour y dire
la messe, et l'autre couvers, pour avoir son
des revenus, les(iiiels religieux seiaicnl ré-
pulés de la famille du monastère, auquel la
maison où ils demeureraient serait annexée.
Il coi\sentit aussi qu'on mil cinq rrligieux
dans les monas(ères situés dans les dépen-
d;inces du Mont-Vierge, et où ils faisaient
les fonctions de curés, et qu'il y en eût trois
dans celui de Pouzzoles, comme servant
d'hospice au monasléi e de Naples : dans tou-
tes les autres niais( ns de l'ordre, ou n'y de-
vait envoyer qu'un frère convers ou ohiat,
pour avoir soin des ornements de l'église et
des revenus.
Il y a aussi dans ce bref des règlements
concernant le gouvernement de l'ordre : au-
cun abbé, prieur ou cellérier, ne peut exer-
cer ces offices dans son pays. Le monastère
du Mont-Vierge , chef d'ordre, et celui de
Sainte-Agathe à Kome, sont destinés pour y
recevoir des nov tes, et il ne peut y avoir
dans tout l'ordre plus de trois religieux du
iiiême pays. On doit établir deux monastères
pour y élever les jeunes gens, jusqu'à ce
qu'ils soient ( rétres, ou au moins sous-dia-
cres : la forme de l'habit des convers cl des
oblats y est prescrite.
L'on voit par ce bref qu'il y avait encore
sous le pontiHcai de Paul V un grand nom-
bre d<i monasières de cet ordre, el quoiqu'il
y en eûi eu plusieurs du vivant même du
fondateur dans le royaume de Sicile, il n'en
restait alors que doux ou trois qm élaicut
du nombre de ceux où on ne devait envoyer
qu'un prêtre et un couicrs : tous les autres
en ce royaume avaient déjà été supprimes
ou donnés en comniende dès l'an 1410, el
entre I s aulres, celui de S;iint-J«'an des Er-
mit'S à Palerme, qui était un des plus con-
sidérables de cet ordre en Sicile, oii il n'en
reste aucun à présent. L'ordre du Mont-
Vierge ne subsiste plus à piésenl que dans
le royaume de Naples et dans (jucbiurs lieux
de l'Etal ei clé^iastique, où il a an pins qua-
rante-sept maisons.
Le général de cet ordre est triennal el
abbé du Mont-Vi.rge ; il se qualifie seigneur
spirituel et temporel de Mercugliano, Speda-
letto el de toutes les terres qui dépendent do
son abbaye. Il se sert d'orncmcnls pontifi-
caux et donne les ordres mineurs, non-seu-
leuicnt à ses religieux , mais encore aux
clercs séculiers qui demeurent dans les ter-
res de sa dépendance.
Le Mont-Vierge est fort élevé e! couvert de
neiges ( n tout temps. Le monastère n'est pas
bâti au sommet de la montagne, mais dans
le mil eu. il esl très-magnifujuc et contient
plusieurs corps de logis. Les religieux n'y
mangent jamais ni viande, ni (va's, ni lai-
tage, ni fromage, non jias qu'ils y soient
obligés par leurs conslilulions, mais parce
que Dieu a consacré ce lieu à la pénitence :
ce qui esl si manifeste, que si l'on y i orle de
la viande, des œufs, du fromage, même du
suif de chandelle ou quelque autre graisse,
l'air s'obscurcit tout d'un coup; il s'élèvo
d s tempêtes et des orages furieux, mêlés
d'éclairs et de tonnerre qui paraît prêt à
tomber; ce que les séculiers, <]ni ont voulu
porter de la viande ou de la graisse, soit par
curiosité, soil par ignorance, oui ex péri -
meule plusieurs fois. C'est ce que rappor-
tent tons les historiens qui ont parlé du
Muut-\iergi', et dont le cardinal des Ursins,
aicbeiêque de Bénévenl, rendit lénioignago
l'an 17i:8, par un acte anlhenti(iue , où.
a; rès avoir parlé de l'image de la sainte
Vierge, qui est révérée en ce lieu, et de la
manière qu'elle y a été portée, il finit par ces
paroles : Uoc prœ cœteris memoriœ dignuin
perhibetur, qiiod ad hoc asceleriuin nec cciro,
nec caseum, riecova, nec opis qnodcunque
lacterium, ncque scbuceœ candelœ pcrdccem
milliaria undique versuin ditci qwmnt; slutim
eniin cœlum falgurat ac tonat frangore, im-
mensœ erumpunt pluviœ; œsliioque lempore
viyere consuevit prœfali popicli innumeri
concursus, kutnmœque devotionis. Nos ipsi
qui semel atjue ilerum cunqregationis Mon-
tiS'Virginis visilatorem egimus apostolicum
et ad idem asceterium aiit pro electione abba-
luiii generalium, suminis ponlificibus deman-
dcntibus, vel pro eoruindem soUmni benc-
dictione pluries accessimus , oculati lestes
faiinus : ac proinde, in horum omnium et sin-
gulorum fjdem, pra'senics nosira manu sub-
sciiptas, nostroqiie sigillo obfirmatas expe-
dietulaïf jnssimus. Dalnin Benevnli ex noslro
archie/iiscopio hac die 9 viensis Januarii
17(îti. Il fait un froid extrême sur celte mon-
tagne , et aux uiuis de juillet et d'août les
t»5' niCTtO.NNAIHE HKîj OÎUmKS liLLICItUX. 1112
T.li(,'iru\ sont qMrl(iuofi)is obli-és de se leur lélc cl ilesciiuliiil sur loiir gorge en
I iMuffcr. A iiiMlre inillcs au-Jessoui ilu forint' de guimpe, cl cllfs |>orl.iieiil par des-
iiKin.islere. il y .1 un lieu forl agréahic, où sus un grand voile noir fort délié; el dans
loules clioscs nécessaires à ia »ic alpondenl. leurs cérénionies elles avaient un manteau
J.e lieu s'appelle Lniretn; on ja liàli une traînant jusqu'à lerrc (i). Le principal me-
liellc ludrmerie, qui pourrait passer pour nasière de ces (illcs était à Coglirlo, qui ct.iil
un Ires-beau monasItTC. On n'y peut pas double, comme nous avons dit. La supérieure
non plus p.irler m viande, m œufs, ni lai- y avait la qualité dahbesso , cl pouv.iil por-
tage Ainsi les religieux el les personnes 1 t la crosse, aossi bien que l'abbé du ino-
seculiér.'S, môme les elrangeis, quand ils nasière des boinmcs, qui se servait d orne-
sonl a lexlrcmiledemalaiie, n'en m.ingeiii nionls ponlincaux. Ce mo.iasièrc avait plus
pmnl. Leux qui y ineureiil sont portés au de vingt mille ducats de revenu, dont l'bo-
iiioiiasiere d'en liaul pour y être enterrés. Il piol ,1e l'Annonciade à Naples a dissipé une
ne laisse pas d'y avoir beaucoup de fontaines (rrande partie, aussi bien ijuc les abbcs com-
Mir cette montagne, nonobstant sa hauteur. incndaiaires : il n'y a plus présciiteincnl que
II s y t.ouve aussi beaucoup de pâturages ; douze reli-ieux. Ce moiiasl.rc porte le nom
il y a même un pre qui a trois miiles de de saint Ciuill.iuinc, à cause que ce saint
tour, cl ou y recueille du blé cl de l'avoine, fondateur v a clé enterré. Cet ordre a donne
Les religieux de cet ordre sont babilles de qiie!(]ues pVéîals à l'K^lisc el quelques écri-
Idanc. Leur babil ordinaire consiste eu une vains.
r.)l)e cl un s apulaire, et ils portent au Silv'cslr. Mau-ol. Mare Océan, di (ut. gl.
cliaMir el diins les villes où sonl situes leurs Itelir/. !ib. 11. Tbomas a Coslo, Isloria del
monastères, une coule euiumc les Itenédic- Sngrdliss. Iitogo ,li Votile Ver /ne. Ciacomo
lins ;li. Silve.slre .Maurolic dil que de son Jonlaiio, Chronic. di Munie Yer.'iuc Félix
lenips i.s ne porta eut point de c.ul.'S, mais Henda, et Jaconi. Jordano, Vit. S. (iiiild.
s.ulemcnt un scapulaire a^ec un capuce cl Ihillar. Rom. Haillcl, V!es des SS. el l/cmoi-
un mintcau blanc a la minière des ermites. res enrnijr's jmr les rr'ii;inix de tel ordie di
Quclquelois, quand ils vont seuls par la ville, couvent'de Sninle-Agallie à Home en 1701).
Ils ont un mihteau blanc a la maîiière de Les religieux de cel ordre a»aient, X
celui des ecclosiasliques, avec un chapeau lîonie , le monastère de Siin'e-Agathe .les
blancdouble par dessous d'une toile noire (joibs. Nous ne voyous j.as qu'ils ai.iit au-
jusqu aux bords, l's ont pour armes d'or à j„urd'liui de maisons dans cette ville,
trois luoiitagiies de sinoples , surmoatées H-n-E.
d'une croix de gui ules, eiiloiirce par le haut »in;>[vî"»vr 1^ - r,.- e ■■
d'nn cercle de mcn.e couleur, el Jccosiée de ''^l^''i^î^> J • ' oyez Citiîaux. § M.
ces deux lettres M cl V. L'Iiabiileiueiit des MOU I' (Kuluks du la). \ oyrz. Paui. (En-
religieuses consistait aussi en une robe f'tn'i^s dk Saiint-J.
blanche, serrée d une ceinture de (ur blaiic, MOUl'AKK. loiyr: Latuan, § IIL
avec uu scapulairc ; uu lio-e eulorlillail MUNSTKU-IJKLISK. ro//c- Nivi:i.i.l:.
NAHBONNE (Dks Fhèhf.s MiMcrns niî i.a cette rongrégniion naissante que l'on accusa
CONCRKGATioN DE) tl des Sj) it tlnels . de suivre ia doctrine 1 1 1rs eiTi'u sdeTerre-
Dès l'an 1290, quelques religieux de l'ro- Jean Obie, ■•ifin de l'éioulT.'r dans son
veiicc el de cette partie de la Fra"ce que commcucemi'iil en la rcnlanl sispeete d'bé-
l'oii nommait ancie.iiiemeni Franci' Narbon- résie.
iiaise, voulant conserver l'esprit de pauvre- Ce Pierie-,lcui Olive et lil un religieux de
lé, déclamèrent fortement contre ceux (]ni l'ordre de la province do l'rovcme el de
étaient tombés dans le relàclicuienl ; mais la cusio lie du Narboiine. il avait loijours
lorsipie la c nigrégalion des Krmites Cél(!s- fait professi ui d'une grande pauvrdé, pour
tins eut éé supprimée, comme nous avons latiurlle il était si zélé, q:c, non content du
dil, et (ju'uiie partie de ceux qui en étaient la pratiijuer, il 1 éprenait libroioenl ceux i|ui
i'ul cl;er( lie un as;le chez ces religieux zélés la Iransgiessaieul, dont il se (it par cet en-
de France, iioii contents de blâmer cl de droit auiaiit il'cuncinis ; mais coiuini' la ver-
cond;ininer une conduite si contraire à l'es- lu ne peut s'attirer la haine des vicieux sans
prit de leur saint fondalcur, se trouvant un en même lemps se faire aimer cl honorer
nombre suriisant pour composer une cou- des verlucux. ce sainl religieux eut de véri-
grégatioa, ils en conimcncércnt une qui prit tables amis qui lui fur. ni .■itlicliés par les
le nom de Narboiine, à laquelle s'unirent liiMls d'une piété solide el sincère, el qui no
.'iiis^i certains autres religieux zélés de la servirent pas peu à le consoler dans les cba-
pro» iiicc de Toscane, qui prenaient le nom grins tiu'il recul dans la suite, dml le pre-
<le F' rères Spirituels. Le reste de l'ordre, qui iiiier fut r.iccusaliuii qui fui faite contre lui
formait la plus grande partie cl que l'on ap- dans le cli .p tre général (ju: se tini à .Siias-
pelail l.i coaimunaulc , se souleva contre bourg l'an IiS2, de blâmer (■oiitiniielleiiieul
(1) yo'j.,3 la fin dii T.d., n''»i'/7,278, 270ci280 (i) Ver,., b la lin dii vol., n"» 2SI et !»82.'
l.i communauté, ri (i'nvoir avancé iilusioiirs (iii(ii(]u'il cûl été rcnvojé ahsoiis e! déchré
liérpsirs dans ses ccrils ; le cli.ipilre ordonna innoconl par ie chapilrc f,'oiiéral, ils cotili-
(liic le général, faisant sa visite en Franco, nuèrcntà causer tant de divisioiis el de schis-
informeraitjuridiquomonlconire la conduite mes dans sa province, que sa ddcirino, ou
de ce reli2;ieux et examinerait ses ccrils. Kn du moins celle qu'ils prclcndaienl avoir ap-
effel, le général, étant en France, ordonna prise de lui, devint oilieuse à toute la com-
qu'on lui mît <n main tous les écrits de munauié de l'ordre. Enfin, après avoir fait
Pierro-Jcan d'Olive, qu'il donna à examiner encore une déilaraMon publique sur ce qu'il
à quatre docteurs et à trois bacheliers do pensait de la pauvreté et de l'usage des clm-
l'univetsilc de Paris, Ions religieux de l'or- ses, qui était conforme à celle qu'il avait
dre, qui jugèrent, soit par prévention ou par faite dans le chapitre général de Paris, il mou-
complaisance , quelques-unes des proposi- rut dans le comenl de N.irbonne l'an 1297.
lions que d'Olive avait avancées, comme Dieu voulut faire connaître sa sainielé et
daiigereusci , et d'autres comme j cuvant son iunocence par les miracles qui se firent
avoir un mauvais sens : ce qui fit qu'Olive, à son tombeau ; mais cela nempccha pas
dont les intentions étaient droites et soumi- que les nligieux de la communauté ne le
ses à l'Kglise, se rétracta et acquiesça à la persécutassent encore après sa mort, l'accu-
censure (jui avait été faite de tes ouvrages ; sant d'hérésie et condamnant sa doctrine :
ce qui sans doute aurait apaisé toutes clio- ils oMinrcnl môme du général Jean di- Muro
ses, si quelques religieux, soit par zèle in- que l'on défendrait aux religieux la lecture
discret, soit par un allacliemcnl outré à sa de ses ouvrages, et que ceux qui en auraient
personne, n'avaient obligé par leurs plain- seraient obligés de les metire entre les mains
les réitérées et excessives contre les Irans- des supérieurs. C'est ce qui fut cause de la
grcsseurs de la pauvreté, le pape NicoU'^ IV persécution que l'on suscita contre Ponce
à donner ordre, en 1290, à Raymond Gau- C irbonelle de ISottingat, personnage illus-
fredy, pciur lois général, d'imposer silence tre par sa science et par la sainteté de sa
et nién;e d'agir contre les sectateurs de vie, et qui avait clé le tn.iîire de saint Louis,
Pierre-Jean d'Olive, comme pnrturhateurs de évcqut' de Toulouse; car sur ce.qu'il ne voulut
la paix par leur orgueil qui leur faisait nié- pas donner quelques traités (lu'il avait de
priser et blâmer la conduite de leurs frères Pierre-Jean d Olive, qu'on lui demandait poui-
qu'ils regardaient comme beaucoup aa-des- les mettre au leu, il fut mis en p'i>on et
sous d'eux dans le cîicniiît de la perlection. soufl'rit beaucoup de maux : il y en eut
r,n conséquence do cet ordie, il y en eut aussi plusieurs autres qui furent ciiargos de
plusieurs qui furent arrêtés cl envoyés à fers et enfermés très-élroitemeut p'iur le
iierlrand de Cigotére, qui exerçait l'office nicme sujet ; ce qui causa encore des divi-
d'inquisitcur dans !e comîat Venaissin : il sions eidesschismesJans d'autres provinci s,
s'en trouva à la vérité quebiues-uns qui, où les religieux, sous piélextc de rélortnir
soit par enlétenieul, soit pour se distiiigu>'r l'ordre, se disaient sectateurs et disciples de.
des autres aux dépens de la foi et de riio;i- Pierre-Jean Olive. C'est pourquoi dans le
neur, avalent des sentiments dangereux ; chapitre général qui se tint l'a.n 1;î02, les
mais aussi il faut avouer que le plus griiud supérieurs, voulant remédier à ces iroubb'S
nombre de ces piisonnitrs n'étaient coupa- et prévenir les suites fàiheuses qu'il; pour-
blcs que par l'attachement qu'ils avaient raient apporter dans la suili-, dél'endir<'nt
peut-être eu avecceux qui, sous un extérieur sous de grosses peines la lecture des om ra-
composé et zélés en apparence, cachaient grs de l'ierre-Jean Olive, et celle défense
un venin dont ceux-ci ne s'apercevaient ])as, dura jisque sous le pontificat de Sixte iV ,
ne (■acliant pas même de quoi il s'agissait, et qui, les ayae.t f.iit exaniner, déclara qu',!
lie se défiant aucunement de leur malice n'y avait rien dans ces écrits de contraire à
qu'ils couvraient d'une piété feinte et d'un la foi ni aux bonnes i:i(cur>i.
zèle apparent pour la régularité. Cependant, malgré toutes les précautions
Pierre-Jeau Olive s'élant trouvé au chapi- et les diligences des supérieurs, la discorde.
Ire général qui se tint à Paris l'an 12'J2, on qui s'était ainsi glissée dans l'ordre, éi laia
lui demandace qu'il pensaitdel'usagedes clio- plus ouvertement l'an 1310. Le nombre des
ses <iui étaient accordées aux Irères, et s'ils religieux de la communauté de l'ordre était
et lent tenus à l'étroit et pauvre usage de ces bien plus considérable (juo celui des Frères
choses : il reconnut qu'ils n'étaient pas Spirituels , ou sectateurs de Pierre-Jean
tenus à un plus pauvre usage ni à une autre Olive, et ceux-ci, manquant de force et d'au-
manière de vie qu'à cel'e ijui élait énoncée torilé, se trouvaient tous 1rs jours molestés
dans la déclaration que le pape Nicolas ill par les autres qui les voulaient détruire, ou
avait faite sur la règli>, et que la communau'.é obliger de s'unir à eux ; mais les Spirituels
de l'ordre praticjua.l; qu'il n'avait rien dit ni aimèrent mieux endurer des traverses cl des
écrit qui y fût contraire, et que s'il lui était persécutions qucde consentiràcette réunion,
échappé quelque chose à ce sujet(ce qu'il ne prétextant (ju'il ne leur était pas permis do
croyait pas ), il le révoquait. Le chapitre re- s'agréger à des personnes qui ne voulaient
eut sa protestation (jui semblait devoir apai- pas observer la règle, et péchaient tous les
ser toutes choses. Mais il y eut de ses sec a- jours contre la pauvreté. Comme c'était en
leurs qui, au lieu d'imiter sa soumission et Provence (lu'il y avait le plus de division ,
sa bonne foi, lui firent un tort considérable Uaiuiond de ^'illeneuve, Provençal et méde-
liar leur culclcuieul et leur imprudence ; car ciu de Charles le Boilcux, roi de Napics cl
1113 DICTIONNAIRE DES OUnUF.S UEI.IGIF.LX. 1115
romie de Provence, poussée par l'alTeclion C('ppn<lant Gonzaive, gcréml ilc IDnlrp,
(jn'il portnil à l'ordrn, etnploya le crédit de ne vo\niil que Irop la vorilé des | lalnli-s ijue
son maître pour prier lo pape Clémeni \' de faisaient les Spirituels, el voulanl prévenir
faire assembler les priiieipaiix el les plus li s suiii's fine pourrait avo'r la CDiiiiaissanee
7.1 lésdeciiaiiue parti, afin de trouver (juelque qu'ils dduiiaicnl des désordres de la coni-
nniédc à ces désordres. Le pape acquiesça mun'uîc, indiqua, la nièmc année 13îi>, un
à la demande de ce prince, el l'assenib ce fui chapitre général à l'adoue, dans lequel ou
iii'liquée à Malausanni-, dans le comlal d'A- fil plusieurs rè'^lcinents KUilre les relàche-
<ignon, où se trouvèrent, du côté des Spiri- nicnls (jui s'élaienl introduits, pai ticulièri--
ti:els. Uaiinond (îaufredy, qui avait été gêné- ment pour la réception de l'ar^eisl, pour la
rai ; Ul ertin de Casai, ïlaimond de Giniac, trop grande cur^o ilé des bàlinienis, el pour
pnivineial d'Aragon ; Guillaume de Corné- l'usage de la vian le, qu'on déteriniiia au dî-
iion, custode d'Arles, et quelques autres ; et ncr seulement. .Mais pendant que le chapitre,
pour la eoinmunaulc de l'ordre, Gon/alve, se tenait à Padoue, et (jue les conférences
qui en cl.iil général ; Alexandre d'Aîexan- continuaient à Avignon, les Frères ï^piri-
drje, qui l'a été depuis, el plusieurs autres, lueis, dont la plus grande partie étaient ea
L'on tint devant le pape plusieurs confc- Provence et m Toscane, étaient fort nial-
rences à ce sujet, dans lesquelles chacun trailés. Les Provençaux se pouvaient plus
avait la liberté de défendre sa cause. Uai- aisément défendre de celle persécution quo
niond G.iulredy el Uhorlin de Casil se plai- les Toscans, parce qu'ils étaient près du
giiaicnt des transgressions évidentes de la pape : le qui lit que Ks Toscans, voy.inl quo
pauvreté, qui étaient tolérées par les supé- i'ordonnancc que ce pontif," avait donnée en
rieurs, qui n'en faisaient aucune'corredion. leur faveur ne les mettait pas à couvert des
Alexandre d'.Mexandrie, qni pari lil pour la insultes de leurs adversaires, se séparèrent
comnjuiiaulé de l'ordre, disait que ceux qui de l'ordre el élurent un général, qu'ils vou-
prenaient le nom de Siiirituels étaient des lurent faire confirmer par le pajie ; mais leur
noialeurs, qui voulaient se distinguer des entreprise fut regardée comme un ailental
aulres. el qui suivaient la doclrine de Pierre- qu'on ne devait poini souffrir, et qui doi.nait
Jean (Mive, qu'il prétendait avoir donné lieu lieu par sa témciilé de croire ou au moins
à tous ces troubles. Ils alléguèrent plusieurs de douter que les crimes donl on les aecu-
preuves jjour appuyer ce qu'ils avaient sait étairiu véritables, ce qui fut cause que
avancé ; mais ces conférences ne servirent de ceux qui les protégeaient les abandonnèrent,
rien, car les choses parurent si brouillées. Le général de l'ordre voulant profi er de
que le pape ordonna que les deux partis cette occasion pour m.iinlenir la cauve de la
iiiittraient 11 urs raisons par écril,el nomma communauté, fil la visite de la province de
six commissaires puur examiner les prélen- Toscane, et employa toute son autorité pour
lions des uns et des autres; el parce que les réduire à l'obéissance et à l'exacte prali-
les frères qui se disaient de la communauté que de cette p luvrelé, dont les transgres-
avaicnt fort maltraité les Spirituels, et qu'ils sions leur étaient si sensibles et si insiipiior-
les menaçaient encore , le pape les prit sous tables dans les reli,;ieux da la communauté :
sa protection, exempla de la juridiction des c'est pourquoi il écrivit une lettre au pro-
supérieurs tous ceux qui avaient été appelés vinci.il, avec ordre de la faire lire dans tous
pour déf.ndre cette cause, tandis qu'elle du- les couvents, par laquelle il lui commandait
rerail, et délendit sous peine d'excommuni- de désappropi ier les religieux de toues les
caiion de leur faire aucune peine, ni à au- rentes, vignes, possessiims, et aulres choses
cun autre de leur parli. «lui pouvaient av dr été introduites contre la
Ces Frères Spirituels, après avoir consulté pauvreté, avec défense d'eu recevoir à l'a-
cnsemble, composèrent, conformément à venir.
l'ordre du pape, une requête dans laquelle Quoique les Pères Spirituels fussent beau-
ils citaient toutes les transgressions qui se coup déchus de l'estime que l'on avait pour
conimctiaicnt contre la règle, el la iirèsentè- eux, et nonobstant l'avantage qoe le gi'iié-
renl à ce iiontil'e, qui l'envoya au cardinal rai de l'ordre lirait de ce qu'ils élaiint aban-
prolecteur el au iiénèral, afin qu'ils en pris- donnés de ceux qui les avaient protégés
sent une cojiie. L'b'rliii de Casai, qui était avant l'éleelion inconsidérée qu'ils firent
plus piqué que les autres dans celte aflaire, d'un général de leur corps, cepend,int les af-
parce c|u'on lui avait objecté plusieurs cri- faires n'en étaient pas plus avancées, et
mes, fit un traité sous le nom de Ïlaimond restèrent toujours indécises jusipi'à l'an-
(laufredy, où il expliquait plus clairement née 1312, ([u'elant rapportées et examinées
*ingl-cini) Iransgressionsdes préceptes de la dans le concile général de Vienne, elles
règ e, et dix qui étaienl contre la déclara- commencèrent à changer de face par les dé-
lion de Nicolas III. Le général el ses adhé- cisions de ce concile, qui lurent en faveur de
rcnts répondirent à ces deux écrits, (|u'ils 1;" communauté; car le pape ayant tenu un
regardaient comme injurieux à l'ordre, consistoire secrel le 5 mai. l'on y décréta
Lber in de Casai lit bientôt après une repli- contre l'beitin de Casai et ses adhérciils,
(pic à cette ^cpon^e, sur laquelle les autres que la manière de vie de la communauté de
ne demeurèrent pas dans le silence; en sorte l'ordre était permise et sulfisaiite pmir la
que deux ans s'ecoulérml dans ces contesta- vraie; observance de la règle; cl le lendemain
lions, sans cjuc les affaires en lussent en ce pontife fil publier dan> la Iroisième ses-
(uuillcur étui. sio.i du coiuilc une bulle par laquelle il du-
Il 17 NAR NAR 1H8
clur.T, (Milre autres choses, qi!e Ic's Frrros Mi- qui ciaiirnail qu'im ne lui fil l'f la poiiu',
nciirs par lur profession no sont pas plus parée (m'il avait jîri-i le parti des Spirituels
obliges aux ptéeeptes île rKvanjjilc que les avec plus de chaleur que les autres, ayanl
autres chieticns : il y marqua les endroits de enlciidu celle décision du souverain pontife,
la rèj{le qui olili^ent ; il défendit de quêter s'écria: Père saint, sauvez-moi selon voire
de l'argent, d'avoir rerouis à des amis spi- parole; et afin de se le rendre favorahle, el
rilucls (jour rn recevdir, hors les cas portés qu'il lui accordât sa protection, il lui repré-
parla règle ou la déclaration de Nicolas III, serita qu'il était venu par ses ordres, qu'il
do mettre des ironcs d ins les églises, et dé- avait bcaucouji souff?rl de la part de ses en-
clara que les Frères Mineurs ne pouvaient iKinis, qu'il savait que la persécution aiig-
pas hériter. 11 déffiidil aussi les celliers el menferail, s'il le livrail entre leurs mains;
greniers dans les couvents, où le< aumônes et qu'ainsi il lui deiiaandait la permission
suffisairnl pour l'enlreiien des religieux ; en- pour lui cl pour les religieux zélés pour
fin il résolut et termina la principale diffi- l'observance, de se séparer d'eux, afin d'ob-
cullé dont il s'agissait, en déclarant que les server plus commodément el sans être in-
religieux, en vertu de la rèt;le, sont obligés quiétés la règle, selon les déclarations qu'il
à de (laiivrcs usages qiii sont conter.us dans y venait de faire. Mais le i)ape lui refusa sa
ce le règle, selon la manière qui y est près- demande : ce qi:i acheva de déconcerter les
crile. Spirituels, dont quelques-uns relournèrei.t
(JuanI à la doc'rine de Pierre-Jean 0 ivc, à l'obéissance des supérieurs, et les autres
sur b-Kiiulle il y avait de grandes disputes, se retirèrent en différentes pro>inces pour y
il fut résolu que le pape censurerait trois de vivre dans l'indépendance. Mais les ccn-^u-
ses propositions : la première, que l'essence res que le pape fulmina con!re eux les firent
divine engendre et est engendrée; la se- revenir à l'union de l'oidre, et ils reconnu-
condc, que l'àinc de l'homme, comme rai- rent leur faute. Uberlin de Casai obtint
sonn.iblc, n'est l'as la forme de son corps ; néanmoins dans la suiiedu pape Jean XXII,
el la troisième, que Jésus-Chrisl reçut le l'an 1317, la permission de passer dans l'or-
coup de lance avant qu'il fût moit ; el p >ur drc de Saint-Benoît, donl il prit l'habit dans
le resl<", l'on en remit l'examen au ch:ii)itre l'abbaye de Gcmblours en îir;ibant.
général, a\cc pouvoir d'en oidonner ce A|)rès la nvirt de Glémenl V cl du génér.il
qu'il j;:gerait <à propos. Les défenseurs d'O- Alexandre d'Alexandrie, la vaeancedu sainl-
li\e, (lui par ces déeisions se voyaient frus- siège el du généralat de l'ordre donna lieu
1res de iciirs espérances, cherctiai.l à cou- aux Frères Spirituels de reprendre leur prc-
vrir ladhérence el raltacheinenl qu'ils mier dessein de se séparer de la conimu-
avaenl j o;;r les sentiments de cet auteur naulé de l'ordre. Pour l'exécu'.er, ils s'as-
sous un spécieux prétexte de charité et de semblèrent au ncnibre de six-\ ingts dans la
justice, se ]ilaignireiit de ce qu'on trailiit Provence et le Languedoc, et avec le se-
avec trop de sévérité un homme qui s'était cours de plusieurs séculiers, ils s'empaiè-
loujours soumis à la correcliftn de l'Eglise, reni par force des couvents de Narbonne et
ci disaient que si quelque point de sa doc- de îiéziers, élablireni un custode et des gar-
Irine niérit.iit la censure, il n'était pas juste diens, changèrent la forme de leurs habits,
d'en commettre le jugement des autre- aux et reçurent indilTéremment ceux des autres
supérieurs de l'ordre, qui s'étaient déclarés provinces qui se voulurent joindre à eux.
ses parties, et qui l'av^iient pcisécuié du- Les habilanis de Narbonne cl de Béziers les
ranl sa vie el après sa mort, cl que pour sept appuyaient, les regardant tomme les disci-
cu huit articles que l'on n'approuvait pas, pies de Pierre-Jean Olive, qui avait été no-
il était bien dur et extraordinaire que l'on vice à Béziers, el était mort à Narbonne, où
condamnai tous les autres, puisqu'il s'était l'on dit qu'il faisait alors beaucoup de mi-
Irouvé de célèbres auteurs qui, s'ct.uil racles; et ceux de la province de Toscine se
trompés en quelques choses, n'avaient pont retirèrent en Sicile. Mais le général Michel
été condamnés dans tous leurs ouvrages, de Césène, qui ne fut élu que dans le chapi-
Mais les advers: ires d'Olive l'emportèrent ire général cui se lint à Naples le dernier
sur ses défenseurs, et empêchèi eut qu'on ne jour de mai 131G, quoique son prédécesseur
changeât rien de ce qui avaii été résolu. Alexanare d'Alexandrie fût mort dès le mois
Bzovius atiribue encore d'autres hérésies à d'octobre 131!p, pria le pipe Jean XXII de
ce religieux, mais sans aucun fondement. faire rentrer dans l'union de l'ordre ces re-
Lc pape, qui ne cherchait (lue la paix el ligieux qui s'en étaient ainsi séparés. Ce
l'union, ne se contenta pas de faire ces rè- pontife écrivit à Fridéric, roi de Sii ile, pour
glemenls, ci de recommander à tous les su- remettre entre les mains des supérieurs
pér leurs de l'ordre de f.iire observer exacte- ceux qui étaient dans ses Etals, qui n'a-
nienl la règle, selon la déelaralion qu'il lei;r vaieat pas voulu se soumettre à l'ordon-
avail donnée; il leurordonna de plus de Irai- nance de son prédécesseur Clément V ; et
1er avec un esprit de charité et sans aucune pour ceux de Languedoc, il leur envoya
distinction les religieux qui avaient été sous- Bertrand de la Tour, provincial de Ijuienne,
Iraits de leur juridiction pendant ces dispu- afin qu'il tâchât de les ramener à leur de-
les, et même de Its élever a^JX charges voir par les voies de la douceur; mais ce
conune les autres, et à ceux-ci de se sou- moyen ayaul été inutile, Bertrand leur si-
inettre à l'obéissance, et de s'unir à l'ordre gnifia de la part du pape qu'ils eussent à
dans un esprit de paix. L'bertiu d • Ca^al, 'luitlcr leurs babils courts et étroits, avec
1K9 DICTIONNAIKK DES ORDRES RELIGIEUX. 1120
leurs pctilc rapuces : ils r('poii(lircnl que ce jamais r6us>;ir dans leurs prrlenlioiis, fil une
f|u'il (Icmand.iil clail une di-s cliosos ;iux- iioim'llc déiiaralion qui se trouve parmi ses
Hueilcs ils m- devaient pas ol-.éir, puisque i:\lrava^anles. De verl>,^rnm si<inip:(iiinnp,
l"liabit qu'i's a\aienl pris élail confo: me à où, après avor approuvé celle, de Nico-
l'cspril de saiiil rr.inçois et à sa rèf-le, el las )ll cl de Clément V, il ordonna à tous les
iju'ils ne croyaient pas airir en cela coulre r<'lipieu\ de se souineilre pour ces deux ar-
ia déclaration de Cléuieiit V. Mais Bertrand tii les au jugemen' de leur^ supérieurs.
ji^rsislMUl à dire que le pnpe a>ail alisolu- Le p.ipc ayant donc olili<;c les Frères Spi-
inenl desapprouvé cet liahillement, el qu'il rituels de se réui.ir à l'ordre, cl ordonné A
avait ordonné qu'à l'é'aril de la qualité et la Michel de Monaco, inquisileur. défaire le
forme di s habits les reli^'ieux devaient obéir procès à ceux qui rcfu<eraieni d'obéir, ceux
à leurs supérieurs, et leur ayant signifié le qui jjurenl écliapper à la reiherclic qu'on
c mmiandemenl (|uc leur faisait ce pontife (le eu fil, s'enfuirent en Sicde, pour se joindre
se réunir à l'ordre el se soumettre à leurs à quelques-uns de leurs compagnons qui s'y
supérieurs , ils eu appelèrent au pape étaient retirés auparavant; et persistant à
futur. ne vouloir point reconnaîlie les supérieurs
Jean XXII, en ayant été av.-rli, ordonna de l'ordre, ils élurent ponr cénéral Henri de
aux ofliciaux de Téziers cl de Narb )nne de Ceva. delà province de fiéncs qu'ils crû-
tes ciler juridiquement à comparaître en sa renl le plus propre pour les soutenir dans
présence dix jour-, après la sip;nificaliou qui leur rébellion. Celle témérité irrita leurs
leur en aurait été faite, il fallut obéir à un parties et les juges : on ne se coTilcnla pas
<^rdre si précis. Quarante six sorlirenl du de les piuirsuivre cumme désobéissants, on
couvent de Narbounc, et seize de celui de leur imputa encore des hérésies, et des vingt-
[iéziers. Il y en cul encore d'autres qui S2 cinq Sjiiriiuels qui avaient été arrêtés à
j'iii^nirenl à eux, cl étant .irrivés un peu Aviu'non, il y en ( ut quatre qui furent brû-
lard à ANigno ', au lieu d aller au couvent, lés à Marseille comme hérè;iques, pour
i s passèrent la nuit à la porte du palais du avoir toujours soutenu <iue les préc pies de
p;ip<'. Le lendemain ils furent inlroiiuits à la règle étaient indispensables. Un rin-
iaudienee, el écoulés fort patiemment par le quième se reconnut et fut c n amné .à uno
pontife, qui, a\ant jugé leurs raisons frivo- prison perpétuelle, cl les autics vin;;l désa-
les, leur eomm.inda de se siiumeltrc à leurs vouèrent pulliquement ce (ju'ils avaient
su|)éricurs ; cl si:r ce qu'ils refusèrent de le avancé. Kn'in, par une bulle du 2'} jan-
fiiic, Sa Sainteté les fil arîêler, et donna vicr l.'ilH, le pape cond.imna les Spirituels
commission de vive voix seulement à Mi- comme scandaleux, apostats, schisma iques
chel de Mo:ia;o. religieux de l'ordre et in- et hérétiques, et les supérieurs de l'ordre re-
q/isiteur de la foi, de proiéder contre eux, prirent encore l'examen de la do Irine ilo
comme ctinl suspects d'hérésie cl rebelles rierre-.Iean Olive, cl la firent condamner en
à l'i-lg'ise. Quelques-uns rcronnurenl leur plusieurs chefs.
faute ; mais il y en eut vingt-cinq qui pcr é. f „,. Wadini;., .l»u)a/. ;Ui»o,-., tom.II el III.
vererenl dans leur opinialreie soutenant Dominic. de Gubernatis, Or/). .S>ra»/,iV., lom.
que le p .pc oITensa l Dieu | ar le comman- j^ |,,,^ ^^ „p_ (; j,.,rc de Lisbonr.c. Chronij.
.leineni qu il leur laisait. Ils ajoul;iicnl que ^j, l'g,.^,., ^^ Sainl-Frauçois, lom. il.
Cieinenl V s ciait trompe dans sa decl.iration
au sujet de la furoie des habits, des celliers NAVlî'.E ou NEF. Voijrz Ciioi.saxt (Ciie-
cl des greniers qu'il avait permis dans quel- VAi.iiius du).
iincs coiivcnis ; (jne ceux qui vivaient selon
«elle déclaration se damnaient ; eue la règle NESTOP.IENS (Des Moïses).
de s.iiiit Fran oi^ n élail pas dinérenîe de
rtîvangile, el (pie le pa|)e ne pouvait dispcn- Les Nesloriens sont les peuples d'Orienl
scr personne des obi galions ((u'clle conte- qui suivent encore aujourd'hui les erreurs
ii.iil. Le p.ipe élai l informe de ces e\trava- (le Neslorius, éu'qiic de Constanliuople, qui
gances , fit expédier une cotnniission en (ul i ond.imné dans le (oncilo d'Fpliése. Do
forme à l'inquisiteur, |;our procéder contre toutes les héré-ies, c'est celle (lui s'est le
eux comme hérétiques. plus étendue; car non-seulement les chrc-
Les deux grands points de ce différend tiens (| .i habitaient la Mésopotamie, et un
consistaient ij.ms la forme derii.ibii, eldaus irès-grand nombre d- ceux qui demeuraicnl
les pr<)\ is;ons de blé cl devin; les Frères au dee.à de l'iùiplirale, en fuient inferlés,
Spiiiluels préteudaienl que ceux qui se di- mais elle se répandit au delà du Tigre, et
«aient de la communauté ne pouvaient p,:s même juqu'aux Indes cl aux cxtrém tés
perler des habits amples et longs, cl de de l'Asie. Plusieurs auteurs ont écrit ((ue les
lionnes étoffes, avec de grands capiu es, mais Nesloriens sonl gouvernés par deex patriar-
K'uleoieiit d(! pauvres habits cour ts el étroits, chcs, dont l'un est le chef des Cb.ildéens as-
a^cc de petits capuces ; Cl blâmaient les pro- syriens oriintaux, et l'aulre de ceux (|ue
visions de blé el de vin, qu- ceux de la l'on nomme absolument Nesloriens. Mais
communauté l'ais;iient aussi dans le lem|is M. Itenaudul, dans sou (]u;ilrième tome de
de 11 m lisson cl des vendanges, (|uoi(|u"elles \i\ l'ctj)i'tuilv de ht fui. faii reman|iier que
ne provinssent (juc d'auMK'ines. C esl pour- l'on ne doil point ajouter loi à ces auUiirs,
quoi le pape, afin de leik humilier davaniage, il (|u'il n'est pas viai «nie le patriarcal ait
ij leur ùler loul suji.'l d'espérer de pouvoir été divisé, parce (luî les pilriarchcs lies
H2I NKS
Ncsloriens ont résidé tantôt à Mosul, tantôt
à Diaibékir.
Mais quoiqu'ils aient ilpnicuré qiiel(juc-
fiiis à D arbéLir, leur séjuisr ordinaire e.sl
néanmoins ;iu inonas ère, d'IFoinioz, éloijjnj
de ia ville lie Mosi'.l d\-iiviron Irois lieue> :
c'esi ce que j'ai appris du patriarche Mar-
Jiiscph, ('(lie j'ai vu élant à Uoine en 1098.
Ce préial état autrefois 1 ■ plus grand enne-
mi ijiie 1' s calhoiique^ eussent en ces (]uar-
tiers. M>is Dieu l'ajanl iouclié, il vint à
Rouie pour se faire instruire et s'éclaircir
sur quelques diflîculxs i;u'il avait. On lui
(il uiie mauvaise réceplion, sur ce que l'on
«royail sa conveisi: n feinte et dissimulée,
et on le regarda con;ine un espion , ce qui
ne ic lebula [.(.inl. 11 reconnut cniiôrenicnt
ses erreurs, et étant retourné en son pays,
il lcmuiyn;i plus de zèle pour la dclcni^e de
la relig on catholique qu'il n'en avait fait
paiaiire pour la coniballre. La cour de Uonie
en ayant clé avertie parles riiissio: naires,
lui fil f ire excuse du mauvais accueil qu'on
lui avait fait. Le pape lui envoya le pullium,
rt la proiiaiji^ndn f^de lui assigna une pcnsi ii
de cinq ccnis é us. Les amt)assadeurs des
princes ca.hoHques employèrent leur crédit
pour le l'aire cunfiruier palriarclic pai- un
coinm; ndi ment exprès liu Grand Seiyn;'ur;
mais dans la suite ses travaux el ses taii^çues
lui ayant afi'iiiili la vue, il Ct élire en sa
place, pour p ilri.uciie, un jeune homme très-
calholique ei très-savant, qui s'appelle aussi
Mar-Joscpli, et qui s'eni|jloye tous les jours
avec beaucoup de suc es à la conversion de
celle naimn. L'ancien palriarclie Mar-Jo-
6Cj)h revint à Uome, où il est moi t depuis
quelque temps, après avoir demeuré [ihi-
sii urs années i!ans celle ville. H a^ail un
neveu prèire à Paris, qui y est morl, après
y avoir demeuré pendant près de viagt an-
nées. H se nummail M. Dominique oa AbJe-
lahad. C'est de lui que j'ai api ris les parti-
cularités suivantes, pour ce qui concerne les
Rloincs Ni-sioriens.
Ces reli;;ieux se disent tous de l'oid.e de
Saint-Antoine, quoiqu'ils n'en suivent pas
la règle, non plus que les Maroaiies, les Ar-
méniens, Il s Copies cl les autres doni nous
avons déjà parlé, n'ayant pour rè^le que
certaines observances communes |)our tous
les monaslères, où elles sont lorl mai gar-
dées, n'y ayant dans la plupart de ces mo-
naslères que fort peu de subordination, à
cause ((ue les su éi leurs n'osent repicndre
les religieux ni les cliâlier, dans l'appiclien-
sion qu'ils ont qu'ils ne se fassent mahomè-
tans.
Les monastères de ces religieux Ncslo-
riens sont en assez grand nombre; mais la
plupart abandonnés, pi incipalemenl ceux
qui sont le Ion;; du Tigre, et il y a fort peu
de relip,ieux dans les autres, excepté dans
celui d'Hormoz, qui est le plus cunsi iérable,
d.ins lequel il y a environ cinquanle reli-
j;ieux. Ce monastère, qui, lomme nous avoiis
itil, est le séjour oniin.iire du j atriarche,
NES
1 122
tire son nom d'Horsmisdas, l'un des saints
des Nesloriens. 11 y a quelques autres mo-
naslères en Perse, donl le plus considérable
est proche de Tauris. Il y en a aussi dans le
pays de Karie, sous la domination des lurcs,
dans lesquels il n'y a qu'un ou deux, reli-
gii'ux.
l'armi tous ces couvents il s'en trouve en-
viron une vingtaine qui sont douilles pour
les religieux et les religieuses, sépares néan-
moins d'habitation, mais dont l'église < si
commune pour les uns et les autres. Ce sont
Tes religieuses qui nourrissent les Moines.
Ils se lèvent à minuit pour réciler leur of-
fice, ct font la prière le soir et le matin. Fen-
dant le jour, ils vont travailler a la cam-
pagne, et les religieuses liur apprêtent ■)
manger pour leur retour. M. Abdel.ihad m'a
aussi assuré qu'il se trouve parmi les Nes-
toriens des religieux de l'ordre (l'on saint
ermite qui élat n;itif de Mésopotami', dont
les couvents on: été ruinés par les Turcs;
c'est pourquoi ils demeurent avec ceux di;
l'ordre de Saint-AniOine, (jui ont pres(juo
les mêmes observances, n'y ayant de la dif-
férence que dans leur o:Gce, ceux de l'ordre
de ce Siint crm te, dont il ne m'a pu dire le
nom, récilant plus de ps lumes que les au-
tres. 11 y en a d'autres léanmoies qui m'ont
aussi assuré que parmi les Ncsloriens il n'y
a qu ■ des religieux de l'ordre de Saint-An-
lo ne.
Quoi qu'il en soit, tant les religieux Nes-
loncns que les religieuses, ils ne mangent ja-
tn lis de viande, ni beurre, ni lainage in tout
temps, et pendant leurs carêmes ils ne man-
geai poinl de poisson el ne boivent point de
vin ; ce qui li'ur est commun avec tous lis
séculiers de cetie secte, (jui jeûnenl aussi
tous les mercredis el les vendredis de l'an-
née. Ces carêmes sont au nombre de six, sa-
vo r :1e grand carême de l'Eglise univer elle,
([u'ils commencent le lundi d'après le di-
maneho de la Quinqua^csime, ct pendant
le(juel lis ne mangent qu'au soleil i ouchani ;
Cilui des Apôtres, qui commence quin/>;
jours avant la fête de saint i'iene; celui de
l'Assomption de Notre Dam:-, qui dure aussi
quinze jours, aussi bien que celui de lExal-
talion de la sainte croix ; celui d'Elie ou des
Ninivites, qui n'est que de huit jours ; et ce-
lui de la iNaiivilé de Noire-Seigneur, qui
dure vingl-cin(| jours.
L'habillement de les religieux consiste en
une soutane ou veste noire serrée d'une
ceinture de cuir, et une robe par-dessus,
comme celle des Arméniens, avec des man-
ches assez amples: ils ne poiieni point du
capuce, et ont seulement un turban bleu (Ij.
Les religicusessonl habillées de même; elles
mettent seulement des linges noirs autour
delà tête, qui leur couvrent la menloc jus-
qu'à la bouche, cl ont par-dessus ces linges
uuii espèce de voile noir fort petit, <iui s'at-
tache sous le meiilon, comme on peut voir
dans la figure que nous en donnons (2) Il
laut que les religieuses aient p.lus de ijua-
(1) Voij , à Ij fin di; vol., ir 2 ô.
(2) Voij., à la lin du vol., n" 281.
4jij5 DICTIONNAIKE DES OUniiF.S UEUr.irUX. 1124
ranio ans pour recevoir l'hiibil monasliiinc, inonlre (iiio cVl.iil la couliinic en ce Icmps-
p.irco qu'on .ippiolioiide «(u'elles ne sorl.nl là que l'on coup.1l les cheveux en forme de
pour se niaiier ; ce qui n'cmpèehc p,is qu'il couronne ;iux reli;;ieuscs cl aux vierges qui
n'y fin ail lrès-sou>enl qui ne le tiiS!.eiit, se consacraienl à Dieu, comme remarque le
aus^i bien que des Moines, ((ui quillenl au>si savanl I'. Mabillon, qui ajoute que le counle
qml(uuf.)is leur haliil pour se marier, el de Lcplines ordonna, au tonlraire, que l'on
même quoiqu'ils soirnl prèlrcs: cf que leurs raser.iil enlièrcmeul les ilieveux des rcli-
cvèques lolèrenl malgré eux ; car s'il y en gicuses qui ser;iicnl lombées dans quelques
a nuel-iues-uns qui s'opposent à cel abus, crimes. Gcrlrude eul .lulanl do joie de voir
les relifîieux qui veulent se marier en de- ses cheveux coupés, que les autres tilles eu
mandent permission au paeli i ; el pour lors avaientde voir les leursbien rrisé> etarrangés,
l'évêque est obligé d'y consenlir, de crain c cl se gloriliail de porlrr une couronne pour
«lue celui qui la demande ne se lasse turc, l'amour de Jésus-Chrisl. Saint Aniand solli-
Vollà ce que cause l'hcrésie, le schisme et cita ensuile Ille de bâtir un monastère pour
le peu de disripliiie qu'il y a parmi la plu- s'y retirer. Nivelle, petite ville de liralianl,
part des religieux d'Orient", (lui se sont sous- dans le diocèse de Namor, entre Mo; s el
trails de l'Eglise romaine, el qui soûl plu- Bruxelles, lui pirul favorable à ce dessiin.
tôt religieux" de nom qu'- d'effet. Le peu qu'il llte y lîlj.ler les fondements d'un monastère,
y a de religieux Nestoriens dans les mouas- el lorsqu'il lut achevé, elle s'y relira a\cc sa
teres, qui"sonl la plupart abandonnés, fail fille qui en fui la première nbbcsse, ayant
qu'on ne leur fail po:nl faire de noviciat, pour lors vingt cl un ans; car elle ne n cul
Aiirôs (ju'ils ont resté quelques jours <n ha- le voile que sept ans après que sa mère lui
bit séculier, on leur donne l'habil nionasli- cul coupé les cheveux, el elle ne prit le gou-
que, el ils déclarent en le prenant qu'ils pré- vernemenl du monaslcre que l'.in O'»'. La
tendent être de l'ordre de Saiiil-Anloine, ou conduite de celle jeune abbcsse ju-tilia fort
de ce saint crinile dont nous avons parlé, avanlageusemeul le choix de sa u ère, qui
C'est eu quoi consiste toute leur proCession, mourut l'an Go2, après avo r élé sous la dis-
celui <iui leur doiiue l'habit niellant le nom ciplinc de sa lille pendant cinq ans, et (îer-
d'un de ces saiiils d.ins les oraisons qui se Irudc se démit de sa charge d'albcsse trois
disent en ces sortes de cérémonies, le tout ans avant sa mort, (jui arriva le 1" mars de
en langue svriaque ou (hahléeune, ((ui est lan Oj'.t.
la langue dans laquelle les Neslonens ofli- Le chapi!re de Nivelle est cemposé do
cicnt.l7esl ce que j'ai appris de M. Ablt- quarante - deux cli;.noinesses qui doivent
Lihad qui était lui-même Neslorien, ou plu- avoir f.iil preuves de neb'esse de quatre ra-
lot Chaldéen, nom que les Neslori( ns cou- ces, tant du lolé paternel que du côté lualer-
vcrlis à la foi prémuni, en quillanl celui do ntl. Le jour de leur réie|ition, qui se lait
Neslorien comme un niuii infime. auc beaucoup de pompe el de magninrcnre,
NEUTllES. Voyez Berlega... ^'."« «oui aussi reçues chevalières de S.inl-
•' rr o Giorges. On leur présente un carreau de ve-
MCOLAS (Saint-) uArennes.To//. Sicile, lours, sur lequel elles s'agenouilbnl pen-
NICOLAS DE FOULQUE-I'ALkNK. Vutjrz dani la messe. A l'Evangile elles li, nu. ni à
JÉiiôvii: (Ervutes 1)E Svixr-). la mam une épée nue, el â la lin de la messe
NIDER.MUNSTER. Voyez Cologne. i>" gi'ulilhomme, après leur avoir donné
I accula. le, leur donne trois coups du plat de
NIVELLE (r.nANOiNESSES de), de Mena, de ,-,|,^,y j,,,^ ic dos, et les reçoit ainsi cheva-
jymtlmi<je,du Deiiain et de <iin:tques aiiliis |it.,-os de Saint-tîeorges. Leur liabillcment
lùiix en l'ianlre. consiste eu un corps de jupe blanc avec des
Il en est de même des chanoinesses sécu- bandcsd;; velours noir par-devuUt. des nian-
lières de Flandre que de celles dont nous ches de loile fort ample s, un aulre morceau
avons [larlé, ayant élé aussi reli;.':ieuses dans de loile qu'elles meilenl depuis Li eeiulurejus-
Icur origine. Celles de Nivelle furent fondées qu'à mi-jaiiibes, et fait en façon desurplis. Elles
pr llle ou Idubergc, femme de Pépin de ont par-ilessus un manteau noir douMedher-
Landen, prince de Braliant, mair.' du palais mine. Elies ont aussi une fourrure de pelil-
cl ministre ib s rois d'Austr.isie. Après la gris au bas de h ur jupe, une Iraise autour du
ii.ort de sou luari, ((ui arriva l'an GiO, cl.iut cou, il la lèle couverte d'un voile blanc, de
âgée de quaranle-liuil ans, elle se consacra soie (1). L'abbessc est dame de Nivelle, laiil
à Uieu el rerut le voile des mains de saint au spirituel iju'au temporel. Il y a dans le
Arnaud, cvê(iue de .M.iestricht. l-es enlaiils mèmech.ipitredeschanoinesiiui l'uni ImrM'r-
qui lui restaient <le si.n mariage élaieiil v;ce dans une égli^e voisine, cl en certains
Grimoald, qui lut aussi irare du | al.iis en jours de l'année ils viennent d.ins le eluiMir
Aiisira'iie, à la place de srm père; Brglic, des clianoiuesses, où ils psalmodient avec
qui épousa Ansigi!'le,li's(le.saint Aniouhl, el elles. D.ins le chapitre l'abbesse préside .aux
Gerliude ipii n'avait que (]U.itnr/.e nus ; mais eli'.nuiiies el aux chanoinesses, et ils poiir-
apprélicnilniit que celle jeune firiiiiesseiie se v yen: tous eusembleauxbénélicesvac. mis par
laissAl enirjiîiicr aux plaisirs du iiioiule,. elle l.iinoilou i>ar le inari.ige des chanoinesses.
lui coupa les cheveux en l'orme dii couronne, Ju.in. Mabill. A:tn(il. on/.. S'. Btncd.. tom. I.
pour lui faire recevoir aprijs le voile; ce qui Yep z, Cluon. géucral. de l'ordre de 5ui/U-
(I) Vui/., il 1.1 (iii du volume, i.»» iS'J et îSU.
l,I2ï NIV NIV 112G
iieno'il, lom. 11. Modesie de Saiiit-Amable, qui lui onl été ôlées. Ce chapitre est composé
7)/o«a)c/(/e sam(e de France; et Bousaingaul, dej trente chanoiiicssi-s. Il y a aussi eu des
Voijnfje des Pays-lias. chanoines dan> celte église, niais les chanoi-
Les chanoinesses de Mons reconnaissent nesses les en ont chassés, et ils n'y font
saint? Vaudru pour leur londairice. Elle point de service, si ce n'est quelques (.rières
était fille du comte Walbcrt, prince du sang qu'ils sont obligés d'y venir dire ions les ans.
royal de Franco, el de la princesse Bertille, Nous donnons ici Irois dlîérentes fl^ure-i de
et fut mariée au comte Madelgairo, plus l'habillement de ces chanoinesses" (i) : la
connu sous le num de saint Vincent des Soi- première représente l'habillement qu'elles
gnies, qui se sépara d'elle pour se faire re- portent pendant la première année de leur
ligieux à Aumont-sur-Sambre. La sainte, réceptiitn ; la seconde, Ihabillemenl qu'e les
après cette séparation, deuieura encore deux ont pendant la seconde année; et la troi-
ou trois ans dans le inonde ; mais ayant pris siènic, celui qu'elles portent toujours après
la résolution d'y renoncer, elle se retira, par ces deux premières années, pendant les-
l'avis de saint Guilaiiv, son directeur, en uîi quelles elles sont appelées écoiières. I<;iies
endroit solit.iire di; la montagne de Castril- sont obligées de faire jurer la véiilé des
loc. Elle fil acheter la place par un seigneur preuves de leur noblesse par deux gentils-
nommé Hidulpbe, qui est aussi honoré hommes ayanl l'épée nue à la main,
comme saie.t, et qui avait épousé sainte Aïe, Sainte Aldegonde, sœur de sainte Vaudra,
sa parente, lille le pria d'y l'aire préparer voulant l'imiter dans le renoncement qu'elle'
une cabane où elle pût se renfermer pour av.iil fait au monde, et éviler les poursuiles
servir Dieu. Uivlulphe fit plus qu'on ne lui d'un seigneur qui la recherchait en mariage,
avait demandé; il hàlil sur la place qu'il sortit seirèlemeiit du châleau de Courlso"re|
avait achetée un monastère magnifi (ue, qui où sa mère, ijui était veuve, demeurait, et
ne convenait point à la pauvreté que sainte se relira dans un lieu solila ic appelé Mel-
A'audru voulait embrasser. Elle ne voulut bode, et aujourd'hui Maub.'ugc, sur la Sam-
point y loger, et le ciel favorisant son incii- bre, où elle demeura quelque lemps cachée,
nation, il arriva peu de jours après qu'un Elle alla trouver en-iuile saint Atiiand, qui
vent impétueux renversa ce bâtiment. Saint était au monastère d'Auinonl, et sainl'Au-
llidulphc, pour se conformer au désir de la bert, de qui elle reçut le voile de reli 'ieuse
sainte, lui bâtit une peiite cellule avec une cl l'hahil monastique. Etant reloiii né;- à
chapelle, où elle alla demeurer après avoir i\laubeuge, elle vendit tout ce fju'elle avait
reçu le voile sacré des mains de saint Au- de pierreries et de joyaux, et en distribua le
bTl, évéquede C:imbrai. PiUsieurs femmes prix à diverses églises el à d'aulres lieux do
nobles voulurent se mettre sous sa conduiie. piété, auxquels elle donna les biens qu'elle
Le liiu parut trop étroit à sainte Aldegonde, avait en fonds de terre. Elle !it bâiir un mu-
sa sœur, pour y recevoir les personnes qui naslère à Maubeuge, el en fil consacrer l'é-
se présentaient à sainte Vaudru; c'est pour- glise par saint Auherl, sous l'invocation de
quoi elle l'exhorta de venir avec ses reli- la sainte Vierge. E!le y assembla un grand
gieuses dans le monastère qu elle avait lait nombre de vierges el y mit aussi des reli-
bâtir à Maubeuge; mais Vaudru, qui n'ai- gieux pour leur administrer les sacrements,
ni-ail que la pauvreté, ne voulut pas quitter Enfin, après avoir gouverné sa communaiiio
sa solitude, qui devint en si grande réputa- pendant plusieurs .innées, elle mourut l'.in
lion et si fréquenlée, qu'on y bâlit une vilie G33. Celles qui sont venues après elle om
considérable qui est aujourd'hui la capitale renoncé, vers le douzième siècle, aux vœux
du Hainaut, et ce pauvre monastère a été solennels pour se séculariser aussi bien que
changé en un riche chapitre de chanoi- celles de Nivelle et de Mons, et onl formé lo
nesses. Sainte Vaudru mourut l'an 1358, et se chapitre de Maubeuge. Ces chanoinesses ont
voyant proche de sa fin, en présence des re- le gouvernement de la ville et de son terri-
ligieux et des religieuses (car ce monastère toire, el la juridiclion soit au civil, soit au
était double) elle nomma, pour lui succéder, criminel. Elles faisaient autrefois battre tous
Ulfetrude, sa nièce, qui n'avait que vingt les ans certaines petites monnaies de plomb
ans, mais qui avait toujours été élevée sous appelées Miles, avec l'effi-ie de sainte Alde-
ses yeux depuis le birceau. gonde. Douze de ces petites pièces reve-
Les comtes de Hainaut prenaient autrefois naient à un denier ou gros de Flandre, et
la qualité dabbés séculiers, avoués, gardes, avaient cours dans tout le Hainaut jusqu'à
juges, prutecieurs et défenseurs tant de celte Bruxelles.il ne suffii pas, pour cire reçue
église que des bie\is qui en dépendaient, chanoinesse de Maubeuge. de faire preuve
niellant en leur place pour gouverner les de noblesse de seize (|uarliers, il faut que la
filles une abbesse qui avait une si grande noblesse soit si ancienne qu'on n'en con-
aulorilé et préémineuce, que c'élait elle qui naisse pas l'origine : l'hibillcment que ces
recevait el mettait en possession du comté chanoinesses portent présenleiiient est peu
de Hainaut et de la dignité abbatiale les nou- ou point dilîérent de celui des autres chanoi-
V!'aux comle-^. Ils faisaient serment demain- ne-ses de Flandre. Ain>i nous nous conlen-
fenir les privilèges, iiherlés, exemptions et terons de donner ici un dessin d'un haliil-
posscssions de cette abbaye; mais elle a Icment que portaient autrefois les abbesses
perdu depuis plusieurs terres et juridictions de Maubeuge, Ici qu'il se Irouvc dans un
(1) Yoy., à la fin du vol., ii"» 287, 288 cl 289.
11-2: DÎOTIONNAIUK Dl S OIU)r»i:S UELRilKL'X. ItQS
anci<'nmnni!S<Tildc!'alib.iy(>dcS;iinl-.\m.iiul, il y a aussi dix i liaiiniiics qui leur servent
qui cousis ail on un voili- b'aiic obscur, un do cli.ipclaiiis. ('.os cb-noiiicsscs n'onl jamais
niaiilcau violel parspiiu- do flours, une mbo «'U d'aliliossos ; los conilos t\:- Flamlrc m oui
rouge bo (Ice de peiil-^^ris, tonibaiil jusqu'à toujours 6:0 le* abbés, cl en cotle (jiiaiilé ils
iiii-janilio, sous l.iquol c il y en ;ivail une dis]iosonl des préb-iides lorsqu'elles v .kiuoiiI.
aulre bl.iu lie, (|ui drscendail jusqu'aux la- Les principales (iigni'.cs de ce cha|iilre sont
Idus (Ij. Pour ce (jiii refïarde le nianlean, le celles de prévoie , de do>cnne, d'escolàlre
1'. .Maiiillon croil que les fleurs dont il e t el de cbanîrc. l'illes ont la collai on de plu-
senié so l de l'invenlion du peintre; c r il sieurs bénéfici-s el cures. Ces ( hanoinesscs
dilque I on trouve dans un autre maiiusciil [lortenl un surplis clam au clhrur, aiec uii
du coniMiciicornenl ilu onzième siècle, une lon{{ nianleau noir doublé d'Iierniine.
autre abbessequi a le nu'ine babil el le inéuie Joan. ^labi Ion , Anval. nrd. S.Iicneil.,
nianUau, tuais sans ileurs, el qu'elle e>l ac- lun. I. l'elr. Coëns, Disquiait. Il islui ii\ de
conipagnée dune religieuse qui n'a pour ha- vrvjine liefjhinarum neli/ii. .Molesle de Sainl-
bilr uienl qu'un voile el une coule : ce (jui A'.unlûa, Hlon ncliie saiule de i'ranrc.
roiilirinc ((ue ces cbanoinesses oui été oiigi- F.e chapitre des chanoinessiîs de Munsler-
naircaient relij.'ieus.cs. fielise, au dioC' se de l,ié;;e, a élé aussi dans
\oycz pour Mon^ cl Maubcuge, Joan. Ma- snn ori{;iiie un inonasièi-' de rellj;ieiisi s bàii
liill., .4nN(i/. orJ. S. lieneiL, loni. I. Yèpes, par sainte Landrade. Mlle élail n lm c ou pe-
Chroiiir/. (jvnérnl. de l'ord. de Saint-Benoît, lile-(i;le de saint ArnouM de Mclz, el, selon
lom. II. Slodeste de S.iinl-.\niab!e, Monnr- (luelques-uns, tille d'Ansi^ilde cl de saiiilo
r/u'e sainte de France. l'.iiusiuiraul, Voijn,c liejjhe, cl sciMir di' l'(''|iiii d'ilérislal. Ajanl
des Payt-Das; c\.{jm\c\M\viïin, llisl. des Pays- passé ses preinièies années avec beaucoup
Bns. de piété, si'S paicnls la voulurent ir.arer;
Sainte Be^he, qui éait ai:ssi sriMirde sainte mais elle leur détlara qu'elle \oulail icsier
rierlrude,se voyant veuve du du;; Ansinille, vjcr|,'e.(;'esl pourquoi ils lui donnèrent toute
<|ui avail clé assassiné, el duquel elle avait la liberté qu'elle souhaitait pour se eonsa-
eu l'epin d'Héi islal, i]iii fui père de Charles crer ()lus parfaitement au service de Dieu.
Martel, ne voulut point écouter les proposi- Klle se lit accommoder une pelile cellule, et
lions qu'on lui fil de passer à de secondes mena une vie pénil<iite et solitaire, sans
noces, l-ille alla à Rome et obtint du papu (luillcr encore sa famille; elle se revèlii d'un
Adeodal des reli(ii;es de quelques saints, ciliée, cl par-dessus d'un habit forl simple
avec un morceau de la vraie croix, des pier- et scmbl.ible à celui des servantes. Son
res leinles du sang de saint liîienne, el une amour pour la conlemnlalion la pressait fort
partie des chaînes de saint Pierre, liile lonrta de se retirer dans le tféscrl; mais elle élail
à son relour. l'an G9(), le monasière d'An- relenuc par la considération de sa jeunesse
donne, situé entre Naniur el Uni, proche la el par la crainte d'a!:anlonner des piuvrcs
rivière de Mcnse ; cl en mémoire des se|)l «inclle assistait. Ouand elle fut plus âgée,
principales églises de i\oine qu'elle avail vi- cile se rot ra dans un bois <|iii élaii si allreiix
siléis, elle en fil bàlir sept à Andenne, dont par la iniillitude de hèles farourhcs doni il
la principale fut dédiée en l'iionneur de la était remjili, qu'on l'apiieîait liellun, ou //<■-
sainte Vierge, el les six autres sous l'invo- Ir^iitc ds bi'les. Apre, la vision d'une croix
c.lion de saint Sauveur, de saint l'icrrc, de éclatante qui lui aiiparul dans ce bois, elle
saint Jean, de saint Klienne, de saint M.chcl y fil bâtir une église qui fui dédiée par saint
el de saint Lambert , cl elle [lartagea à ces Lambert , évoque l'ie iMaésliicbt. l'iusieurs
églises les reliiiues (|u'elle avail apportées filles cl veuves se icn>iiiont au; rès de la
di; lîome. Il ne Lii restait plus qu'à peupler sainlc pour iiniler ses vertus, cl iravai Lt à
ce monastère de religieuses d'une -ainle vie. lur salut sous sa direction. Telle fui l'ori-
II ne lui en p.irut point de [ilus parfaites que gine du mon.rsièi e de liéiise, (|ui prit ce no'ii
celles qui avaient etc formées par sa sœur après avoir quitté celui de />'(''/«'i lU /{c'/'diVe
sainte Ijorlrude. Kilo fut à Nivelle pour ce d<s InHv.i, qu'il portail auparavani, el l'on a
sujet, cl Agnè-i, qui en élail pour lors ah- bàii une pelile ville du même nom à un (juart
hcssc, lui en accorda six, el pour comble de de lieue tie ce monasière. La morl de ci'ltc
laveur elle lui donna des livri^s et une partie sainte fondatrice arriva vers l'an C'JO ou (191,
du lit de saillie Gertrudc, (jui attira une nou- cl ce monastère a été changé en une commu-
vclle bénedictionsurces habilantsd'Andenne, iiaulé de filles nobles, qui ont renoncé aux
en faveur des(juels Dieu fil pluNicurs mira- vceux solennels, pour se marier quand h ■»
ries, lanl pour maoirester la sainteté de sa leur semble, à l'exemple des antres chaiioi-
siTvanle ([ue pour rérompenscr la dévotion liesses. L'on voit dans celle abbaye une li-
dc ceux qui riiivo([uaienl dans leurs besoins. corne i|ui a six pieds el demi de long : on
Sainte He^he en fui la première supérieure : tient ()u'olle y a éle apporlée par une fille
Si's religieuses s'cng igèreiil au service de d'un duc de llrelagne, qui se (il chanc)inesse
Dieu pour toujours et par une staliililo per- en ce lieu, el qu'à cause d'elle celte abbuyo
polucile.mais elle ne les gouverna pas long- lut nommée VMtbayi' itc Saint- Amour.
temps, élinl morli' ileux ans après, Ce mo- Modeste de Saini-Amablo, l/o/ur r/ii'f sninle
nasière a ete change en un chapitre de rha- dr l-'ranrc; cl Ihouias Corneille, Dut. géo-
uoincsses qui sont au nombre de Ironie, cl (jnijili.
(il V(iy., a la fin du vol., 11' -l'ii.
\m
ivoru
NOEU
lITiO
Le bourg de Duonfininj!; ou Dulicns, qu'on
nomme piésonienifiU Denuin, et qui est sur
le chemiu de Vnlenciennes à Douai, est re-
comm.'inJablc par une abhaye de chanoines-
ses séculières, que les IJi'iiédiciins mettent
encore au nombre de celb's qui étaient au-
trefois di^ leur ordre avant qu'elles SI' fussent
sécnlariséos. FJIi' fui fondée par saint Adel-
bert, comie (fEsIrevan. et sa femme sainte
Heine, nièce du roi Pépin, vers l'an 76i, se-
lon la plus commune opinion, et, selon d'au-
tres, l'an 750. Ils donnèrent tous leurs biens
à dix lilles qu'ils avaient eues de leur ma-
riiige;rl l'aînée, nommée Rninfrède, (al la
première alibesse de ce monastère, où ses
Keuis firent vœu avec elle de chasteté, et
ont toutes méi ilé, par leur vie exemplaire et
leurs grandes vertus, d'être révérées comme
saintes. Après la m irl de saint Adelberl,
saiuîe Reine, n'ayant plus rien qui la reiînt
dans ie monde, se relira avec ses filles dans
le monastère ilc Denain, et soit à cause qu'elle
en est la fondatrice, ou qu'elle en ait été vé-
ritablement abbesse, les peintres ont accou-
tumé de la représenter avec un voile blanc
sur la tète et une crosse à la main. IJaudery,
évéque de Noyon, (jui vivait au commence-
ment du douzième siècle, et qui a écrit la
chronique des évè(]ues d'Arras et de Gnm-
brai, parlant de cette abbaye, dit qu'elle fut
fondée par sainte liainfrède, qui en fut ab-
besse ; que (|uel(|ue temps après ce monas-
tère déchut beaucoup de sa splendeur, et
tomba entre les mains de certains chanoines;
mais que le comte Baudouin, par les sollici-
tations de l'évêque Gérard et de Leduin,
abbé de Saint-Waast, le rétablit dans son
prem er état, y taisant revivre la discipline
régulière sous la lèijle de saint Henoîl et la
conduite de l'abbesse Ermentrude.
Cvs cbaiioinesses étaient autrefois dames
du comté d'Oslrevan ; mais la souveraineté
de ce comté étant venue au roi comme comte
de Hainaut, les chanoinesses ont seulement
conservé le titre de comtesses d'Oslrevan.
Ce chapitre est com|iosé de dix-huit chanoi-
nesses, qui doivent faire preuves de noblesse
de huit quartiers. Leur habit est assez sem-
blable à celui des chanoinesses de Nivelle, à
l'exception qu'elles n'ont point de fr;iise, et
qu'elles ont seulement un mouchoir de cou
attaché avec trois rubans noirs (1) : elles ont
aussi à Iturs corps de jupes quel(|ues bandes
(le velours noir de plus {|ue celles de Nivelle;
et quand elles i-ont hurs du chœur, elles
mettent par-dessus leurs babils un ruban noir
brodé d'or, auquel est "attachée une médaille
d'or avec l'image de sainte Hainlrède, qui est
reconnue pour patronne de cette abbaye.
Joan. Miibill., Annal, ord. S. Bened. Mo-
deste de Saint-Amable, Momtrcidt sainte de
F lance; el Thomas Corneille, Diction, géa-
(jraphif/ue.
NOIJLE-MAISON ( Chevalieiîs de l^ ).
l'oj/cî Etoile.
MOûUD (Chevaliers du), ou du Snint-Es-
prit un droiC-d.sir, nu royaume de Nnples.
Uohcrt le Bon et le Sage, roi de Naples, rjui
(I) Voij., à la fin du vol., n° 291.
UlCTlO^'^'AIllE UFS Ohdres nEnuiri.x. 11.
éiait de la maison d'Anj lU, ayant perdu
Charles de Sicile, son fils unique, voulut don-
ner un mari aussi de la maison d'Anjou h
Jeanne, (ille aînée du même Charles. Itans
cette vue il lit venir à Naples, l'an 1333,
Charles II, roi de Hongrie, son neveu, et An-
dré, fils puîné lie ce prince, qui fut fiancé,
le 18 sepiembre, avec Jeanne, sa cousine
issue de germain. Cette princesse était fiour
lors dans la neuvième année de son âge;
André en avait sept. Mais ce mariage ne fut
point heureux, les inclinations d(! ces deux
époux ne s'accordanl point. Le roi llobi-rt
avait tâché lie leur inspirer des sentiments
d'uniin, et il avait par sa prudence contre-
balancé les divers mouvements de ces deux
e-prils. Mais après sa mort, (]ui arriva l'an
loi3, ils ne gardèrent plu-, de mesures;
Jeanne ne voulait pointqu'André prit la qua-
lité de roi ; et ces contestations durèrent jus-
qu'à ce qu'Elisabeth, reine de Hongrie, ayant
fait un voyage à Naples, persuada à Jeanne,
qui était sa belle-fille, de se faire couronner
avec André son mari. Cette cérémonie se fit
avec beaucoup de magnificence, en présence
de quatre cardinaux que le pape Clément VI
envoya à Naples. Cela ne réunit pas néan-
moins ces deux esprits; le malheureux An-
dré fut étrangle dans la ville d'Aversa l'an
ISVo, et la reine fut soupçonnée d'avoir don-
né son consentement à ce meurtre.
Cette princesse épousa, l'année suivante,
en seconde, noces, Louis de Tarente, (jui
était aussi soncousm; mais Louis, roi do
Hongrie, ay.int passéen Italie avec une puis-
sante armée, pour venger la mort d'André,
et s'étant emparé de la ville île Naples, Lo'.iis
de Tarenle et sa femme lurent obliges de se
réfugier en Provence, qui appartenait aussi
à cette princesse, et ils ne retournèrent à
Naples que l'an 1352, après avoir conclu la
paix avec le roi de Hongrie, par l'entremise
du pape. Ce fut pour lors que Louis de 'iTa-
renie, en mémoire de ce qu'il avait été cou-
ronné roi de Jérusalem et de Sicile le jour
de la Pentecôte, institua un ordre militaire
sons le nom du S.iint-Esprit au droit-désir,
plus communément connu sous le nom de
l'ordre du Nœud, à cause que les chevaliers
portaient pour marque de leur ordre un
nipud en forme de lacs d'amour, ce piiiice
ayant voulu exprimer par ce nœud, comme
disent quelques auteurs, rattachement (|ue
les sujets devaient avoir pour leur prince, et
réciproquement le prince pour ses sujets.
Cependant le véritable nom de cet ordre éltît
relui du Saint-Esprit au droit-désir, comme
il paraît par les statuts qui furent dressés
par l'instituteur, et qui commencent ainsi :
Ce sont les chapitres faits et trouves pur le
très excellent prince monsriijneint' roy Loijs,
par la grâce de Dieu roy de Jérusalem et de
Sicile, aile oniieur du Saint-I'.fpril, trou-
veur et fondiur de la très noble compagnie du
Saint-Esprit au droiL-desir, commencée le,
jour delà l'enlhecoitel'andcgrac( M.CiX'.LlI .
Nous Loys par la grâce de Dica roi de Jéru-
salem et de Sicile, aile onneur du Saint-Eê—
36
('.31
DicTioNNMiir: DES (MU>ni:5 nr.i.iGMxx.
i:32
prit, Irijui-l iour pur sa gra. e noua fusmcs
couronnez de rus royaumes, en rss ncement
ri acroissemenl ti'onnrur, avons ordonné de
faire une Compagnie de Chernliers qui seronl
appeliez les Cluraliers du Snint-Èsprit au
druil-desir, rt tes d. Clirvnliers seront m
nombre de trois cnt; desquels nous comme
iroureur rt fondeur de celte compagnie, sr-
mni princeps: et aussi doivent Ctre tous nos
successeurs roy< de Jérusalem et de Sicile, lit
i) tous ceux que nous avons cslus et esliront à
esire de la dite compagnie, faisons à scavoir,
(/ne nous pensons à faire, se Dieu plaît. In
])reiniere [este au chastel de l' lùif rnrliaiité du
merveilltux pcril, le jo}ir de la Pculhecosie
pmchiiine venant. <t pour ce tous 1rs dessus
dits cootpngnons gui bonnement pourront,
soient au'ltl jour, audit lieu, en telle manière
comme cy après sera det isé: et a doncques
sera plus a pluin à tous les compagnons parle
de celte malieire.
Prciiiii'renieiil ils devainiil jurer qu'ils don-
iioraicnl aide et secours à ce prince de loul
leur pouvoir, soit à la guerre, soil en toulcs
aulres ocrasiori'*. Tous les clievaliers de-
vaient porter un ncrui de telle coul irr qu'ils
voiilaieni sur leurs habiis, on un endroit où
il ptjl être ru, et dessus ou dessous le nœud
ils devaient niottre ce.-, paro'es: se Dieu plais.
Li' \endredi ils devaient porter un cliapcron
noir avec un nœud do soie blanclie sans or,
argent ni perles. Si un chevalier, s'etanl
trouvé dans quelque action, avait été hiessc
o'.i avait blessé son eniieini, et qu'il eût rem-
porté l'avantage, il devait porter dès ce jour-
l.'i son nœud délié, jusqu'à ce qu'il eût été
au saint sépulcre. Son nom devait être écrit
sur le nœud, qu'il devait poiler ensuite lié
comme auparavant aveo ces paroles, (7 a
pieu à Dieu, et dessus le nœud un ray ardent
du Saint-lîsprit: ce qui était appaicmmenl
une (le ces flamines en forme d.- langue do
fi;u sous la figure desquelles le Saint-Esprit
ilcscendit sur les apôtres dans le cénacle.
Ils devaient porter aussi une épée, sous le
pommeau do laquelle leurs nom et surnom
élaienl écrits avec ces ])aroles:5e Dieu plnist.
ils jeûnaient tous les vendredis de l'année,
ou bien il leur était libre d- donner ce jour-
là à manger à trois pauvres en llionneur de
Dieu 1 1 du Saint-Hsprit.
'l'ous les ans ils se trouvaient à Naples le
jour de la l'entecôte, au cbâle.iu de l'Oliuf,
et comme les étrangers et cens qui 6 acnl
de pays éloignes étaient obliges de faire des
déi'.enses pour leur voyage, le roi les rcm-
l'Oursail des frais qu'ils avaient faits. Ils
a\ aient dans celle assemblée des li.ibils
b:anes. Ils y devaient parler par écrit tous
les faits (l'armes qu'ils avaicntaccomplis dans
l'année, et ceux que l'on tronvail les plus
considérables él.iient écrits dans un livre
(lu'on appelait le livre des ai cnements aux
cltcvalieri de la Compagni- du Saint-Esprit
ait droit dtsir. Si ((ueliiuc chevalier avait
fait une action indigne, il devait se trouver à
pareil jour au château de l'Oliuf, vêtu de noir
avec une flamme sur le cœur el ces mots en
gros cararlérc;: J'ai es;,érancc au Saiul-l's-
prit de mu grande honte amender. Il no man-
geait point ce jour-là avec les chevaliers,
mais seul au milii-u de la salle où le prince
et les aulres chevaliers mange.iienl: ce qui
durail jus()u'àce que le prince avec son con-
seil l'eût rétabli en son honneur. Il y av it
aussi dans le même château une table t|ne
l'on appelai! la table désirée, où mangeaient,
le jour de la l'enlecôte, tous les chevaliers
qui pendant l'année avaient délié le no-ud.
Ceijx qui avaient fait les plus belles actions
él.iient assis à la place la plus honorable de
la table ; et s'il y en avait quelqu'un qui per-
lât son nœud relié avec une llainme, on lui
mettait sur la léie une couronne de laurier.
La fêle étant finie, on tenait un chapitre
dans lequel il élail permis de retrancher ou
d'ajouter aux statuts ce (|ue l'on croyait
plus convenable pour l'honneur et l'avance-
ment de l'or. Ire. Un chevalier qui avait dé-
jà reçu quelque ordre avant que d'être admis
dans celui du Saint-Esprit au droit-dé-ir,
devait le quitter, ou ne le pouvant pas faire
honnêtement, celui du Saint-Esprit devait
être le premier, et dans la suite il n'en de-
vail recevoir aucun sans la permission du
prince; mais on ne devait pas la lui deman-
der qu'on n'eût porté le nccnd relié avec l,i
(lamme. Après la mort d'un chevalier les pa-
rents élaienl obligés de porter son épée au
prince, qui, après l'avoir reçue, faisait dire,
huit jours après, lit! office solenml pour le
repos de l'àme du chevalier décédé. Tous les
autres y assislaicnl. Le plus proche parent
ou un ami du défunt prenait son épée par l,i
pointe el l'olTrait sur l'autel, étant suivi du
prince cl des ;.utres chevaliers qui accom-
pagnaient celle épée jusqu'à l'autel. Ils so
meltaienl cnsuilc à genoux, priant Dieu pour
l'àme du chevalier décédé, et après le ser-
vice on attachail celte épée à la muraille do
la chapelle : un devait mettre dans l'espace
de trois mois une pierre de marbre i>ù
élaienl m,;rqucs le nom du chevalier, le lieu
el le jour de sa morl. S'il avait porté la
flamme sur le no'ud, on ajoutait sur celte
pierre d- marbre une llanime d'où sortaient
CTS paroles: Il a.heva sa partie du droit-de-
sir, el chaque thevalier était encore obligé
(le lairc dire sept messes pnur le repos de
son àme.
Telles étaient les principales obligations
des chevaliers de l'ordre du Sainl-Espnt
au droit-des.ir, prescrites par leurs statuts
qui contenaient vingt-trois chapire*, anx-
q'jcls on ajouta cet autre l'an i'.i'i'i , qui
marquait aux chevalii'rs en quelles occa-
sions ils pouvaient délier le nœud : J tcm ,
il est déclaré pur ce dernier chapitre rjoûiè
m la première feste passée de la l'eniecusle
l'an de grâce l.'J.'i.'}, que nul compignon dn-
dit ordre n'en pcitsse deLer le nru , .fiiion
pour la manière qui s'eu.-iuit : l'e.W à sca-
voir que se aucun des compagnons dell'ordre
se trouvera en au'un fait d'armes la ou le
notniire de tes tr.nemis seront cintiuaiilc har-
bus ou uuties et la pari du Chevalier d'il-
(irdre n'en s'eslenlit plus que le nombre
d: ses adversaires, se ledit CItevulier .-f pvu-
H53
NOl
NOl
voit pour son honneur tant uvancirr qu'il
put eslre le premier à ferir el envayr les
irinemis , ou se il piiuvoil prendre le ca-
pitaine de ses ennemis , et la pn de la ba-
taille sera honorable pour la part dudil
Chevalier dcU'ordre ; il ptiet deliir le neu.
Item se aucuns desd. cumpof/nons dell'or-
dre se Irouroicnt en aucuns faits d'aimes la
ou le nombre de leurs ennemis fussent trois
cent barbus on plus, et ta part des Cheva-
liers dell'ordre non g'estendit outre le nom-
bre des ennemis , el les Chevaliers ou Che-
valier delVordre fussent les premiers fereous
en la bataille ou eschielle des ennemis, et
que la fn de la bataille sera honorable pour la
part desdils compagnons dell'ordre : eux pa-
vent deslicr le neu en la manière susdite si
notoirement que chacun soit tenu monsirer
au prince, et à son cunseil , de son bien
fait vrayrs enseignes.
Louis lie Taiciile n'ayant poiiil eu d'en-
fants, cet ordre fui aboli aprôs sa mort
par les désordres el les révolutions qui
jirrivèrcnt au royaume de Napics. L'on
aurait ignoré les statuts que «e prince
avait prtscrits aux chevaliers de cet or-
dre, si l'original n'était tombé au pou-
voir de la république de Venise, qui en
fit présent à Henri 111, roi de France et
de Pologne, lorsqu'il passa à Venise à son
retour de Pologne. M. Le Laboureur les
a fait imprimer dans ses additions aux
Mémoires de M. de Castelnau. La inc-
ir.oiie de cet ordre s'est toujours conservée
à Naples par le moyen des armes et des
tombeaux de plusieurs de ers chevaliers,
que l'on voit en différents endroits de cette
ville, et paiticulièremenl dans l'église ca-
thédrale, où est le tombeau de Colluîio
liozzulo, <iui avait délié le nœud et l'avait
relié à Jérusalem , comme il paraît par
l'épitaplie de ce chevalier, au bas de ci lie
de son père , qui était chevalier de l'or-
dre de l'Etoile. JJic jiicet UreuHus miles Col-
lutius Buzzulus, filius ejus, qui fuit de socir-
lalc Nodi, illuslris Ludovici , reijis Siciliœ ,
quein nodum in cuinpali bello vicloriose dis-
solvil, cl diclum nodum religavit in Jéru-
salem; qui ubiti ann. Domini M. CCC. LXX,
die VIII Scptembrù, IX indictione.
Cet Ofdre était aussi sous la proiection
de saint Nicolas, évéquc de Mire; et sur
le tombeau de Hubert de lîursenza, qni
est dans l'église de Sainte-Claire à Naples,
l'on voit les armes de ce chevalier du Nœud
entourées d'un ruban au haut duquel il
y a le nœud de l'ordre et au bas l'image
de saint Nicolas. Les d.fi'érenis bablllemenls
de ces chevaliers (1) que nous donnons
ici, sont ^lirés de la bibliothèque du roi,
où ils sont représeniés en miniature.
IJernard Giustiniani , Ilisl. di tutti ql%
Ord. militari. Schoonebeck , Ilist. des Or-
dres militaires; et Le Laboureur, Mémoiies
de Castelnau, lom. 11, pag. 895.
NOllŒS (SoEuns). Voijez CiiLlites.
NOLI (CuANOiNESSES de), dans l'Eial de Gé-
(1) Vuij., n la (in du vu!., n"^ 2j2, ■!<):, et 'iW.
nr.»
nés, cl autres communanlcs de filles sou-
mises â l'ordre île Suint-l-ranrois.
Nicolas des IJrsins , comte de Soleto, no se
content.'» pas de faire réparer , l'an 13o'^ , 1«
monastère des reliîiieuses de Sainte-Claùo à
Noii , dans l'Ktal àv. Gènes, sous le litre de
Saint-Jaci|nes ; mais par une piété autant
particulière que sainte, il y fonda aussi un
collège de chanoim-sses, auxquelles il donna
le soin d'y él ver de jeunes filles dans Ii
piété, jusqu'à ce qu'elles fus>enl eu .i{;e d'em-
brasser un état. Ce fondateur leur prescri-
vit une manière de vie par des (ousiitutjons
qu'il dressa, et qui contenaient quarante et
un chapitres, dont le cinqu^ième fait mention
d'une bulle de Boniface VIII , qui approuva
celte société. H divisa cette communauté en
trois classes : la première fut de chanoims-
ses destinées au service divin ; la seconde fut
de filles séculières , et la troisième de sœurs
converses, destinées nu service d 'S autres. !!
commit aux premières l'éducation des filles '
séculières, jusqu'à ce qu'eLes eussent fait le
choix, ou (le rester dans celle maison en y
gardant la clôture, ou de se faire religieuse"^
Clai isses dans le monastère de Sainl-.lacques,
ou de se marier. Ces chanoincsses devaieril
réciier l'office selon le bréviaire des Frèr. <*
Mineurs, solenuiser toutes les fêles des saints
de cet ordre , dont elles devaient avoir tou-
jours un religieux pour confesseur. Leur ha-
bit était aussi en quelque façon scmblaole ,i
celui des religieuses de Sainte-Claire, n'eu
étant distinguées que par un surplis qu'c lies
portaient sur une robe grise, lice d'une corde
blanche; el elles avaient pour chaussure des
socques ou sandales de bois. Les filles sécu-
lières el les sœurs converses destinées pour
le service de la maison, avaient auisi une
roiie grise avec un manteau de même li);
les sœurs converses devaient réciter jtour
leur office autant de Pater et d'.4tc que saint
François en a ordonné par sa règle pour
les frères lais de son ordre. Cette maison
et le monaslère de Sainl-Jacciues ont été sou-
mis dans la suite à la juridiction de révé4|oe
de Noli ; mais les chano.uesses el les reli-
gieuses Clarisses ne quittèrent point le bré-
viaire, l'habit , ni la direction des religieux
de Saint-François.
Luc"Wad,ng.' Annal. Minor. iom. VHI, «</-
dit. ad lom. IV, n. 3.
lintre les monuiiienls de piélé qui ont été
érigés en Espagne |iar les soins el les libé-
ralités du cardinal Ximenès. archevêque de
Tolède, et les religieux de l'ordre de Saint-
François , il y a deux monastères de reli-
gieuses du tiers ordre du même saint Fran-
çois, tous deux siius le litre de Saint-Jean de
la Pénitence. Le premier fut fondé à Aicala
par ce cardinal, l'an loO'j, pour Irente-îrois
religieuses , dont le nombre ne peut être
augmenté , el il y joignit une communaulé
de pauvres demoiselles , sous le nom de
Sainte-Elisabeth, qui devaient être soumises
à la conduite de ces religieuses, jus(|u'à ce
qu'elles fussent en étal d'être mar.éis ou
C-) V'V
liii (lu vol., u"' 2"5 et ''9j.
IT15 DlCTIONNAmE DES ORDHKS nRl.lCIELX. tl/lG
li'tMre ifIii;ioiisc<:, nvcc ordre que si elles f.ii- Après que Ferdinand Corltz ml ci>n(iiits
s.iienl cliinx de l.i vie roli(;ieuse, le inonas- le Mi'xi(|ii(> pour le roi d'lisp;i;,'ne , ls.il>c|le
1ère scriiil «)bli(;é de les rcce\oir ; el que si de l'orluii.il, lemnie de l'onipeieur l.harles Y,
elles voulaii'Ul se marier , il fournirait leur > envoya des reli^ieii.ses Clansses et du lieis
di)l, njanl laissé pour cel effet des fonds ordre de Sainl-François , qui y firent plii-
sufiisdnl'i. ^ieurs clablisseincnts , roniMie à Ziiclntnilci ,
(Jelle lonilatian ayant réussi, il en fit une Tetzeuci, (Juauslliitlani, 1 elmanaci, l'apea-
seinldablc à Tolède, où il (il bàlir, e . 1511, ca, 'l'Iievaraiia et autres lieux. L'on fonda
un monastère sous le même litre de Saini- auprès de leurs monastères di s coiiimunau-
Jian de la l'enilencc, dans ieqiid il y a oidi- lis de jeunes lilles indiennes pour être ele -
naircment plus de qiialre-vingls relifjieuses ^ées sous leur conduite , el pour y être ins-
(|ui font prolVssion,conimerellesd'Alca!a,de truites des mystères de la reliui'U el de tous
la troisième règle de saint François; el pro- les ouvrages qui lonvieiineni aux personnes
ibe ce monastère il fonda aussi une ccmmu- de leur sexi^. Ces communautés de lilles in-
naulé de deux cents jeunes demoiselles, qu'il dicniies sont si considérables , qu'elles sont
mit sous la coiuluile de quelques-unes de ordinairement de quatre ou cinq (cnts lilles.
ces religieuses. I.c pape Léon X lui accorda Luc NN'ading, Annal. Minor. lom. \\\\, ad
un bref pour rcl effet en lolV, par leiiucl il ann. Io30, n. 1.
lui permit qu'onire les rentes ci les revenus Le même Wading , de Gubernatis , le P.
considérables qu'il i.ffi'Ciailà celte maison , Artus du Alouslier it qurlques autres liistu-
li y pût unir deux ou liois bénéfices et même r.en> , ont fait mention d'un ordre sous le
davantage, soit qu'ils fu^sent .^imples ou à nom de l'.\scensioii de Nolrr-Scigneur , (jui
«barge d'àmes ; et cela non-seulement pour embrassa la règle des Frères Mineurs ; mais
rentrelicn des religieuses cl des jeunes de- comme ils n'onl point dit en quel lieu, pour
moisillcs, mais pour aider à marier ces der- quelle fin , ni en ((uelle aimée cel ordic d été
iiiérei après qu'elles auraient demeuré six institué, nous n'en jioiivons rien direiion plus,
ans dans la comm.naulé, ou pour servir de Luc Wading, lom. \ IIL ad ann. Ia2'{,
liot à cel c.N (jui voudraient être religieuses n. IV. Dominic. de tiubernalis, Or/>. iltriz/^/iif.
dans le moiia>tère. riiilippe 11, roid'Espagiie, lom. IL Artus du Mouslier , Mariynilny,
angmenia de quarante le no:i:biede ces de- t'randscaiium. Mjiioel da Esperanca, UtsI.
moiselles , voulant que ces quarante places Suaficu, part. i.
lussent remulies par les filles de ses olficiers L'annaliste des Frères Mineurs prétend
du seiond rang, ayant assigné pour chacune qu'ji y ;, eu des recluses de l'ordre de l'An-
de ces demoiselles cinq cents ecus d'or, soit nonciade dans l'église de i^aint-I'ierre du
pour élre religieuses, soil pour être mariées. Vatican , à Home, se fondant , à ce qu'il dit,
t:«lte communauté de jeunes filles subsisle sur une bulle du pape Léon X, de l'an 1313,
encore; mais celle d'Abala fut trunsfene par laquelle ce poniifc, en accordant aux re-
d.ns la suite à Madrid, cl fut mise sous la di- ijgieuses Annonciades des dis Vertus les
lection des Augu-lines Décliaussees du mo- ,„èmes grâces qu'il avait accordées aux re-
nastèie de Sainle-Lli.sabclb , el soumise à la ligieuses Clari^ses , déclare qu'il veut que
juridiction du grand aumônier. les quatre recluses de l'église de Sainl-l'ierre,
Luc Wading, Annal. Minur. lom. VIII, ad qui y demeuraient dan.s la eliapclle de failli-
ann. lîiO'i, n. 58; d Mémoires manuscrits. André, jouisseni des mêmes grâces pendant
A l'imiiation du cardinal Ximenès, Ferdi- (^ temps qu'elles ^ demeureraient, ou dans
nind de Silva , comle de Cifuenles , fonda quelques autres lieux où elles garderaient le
dans sa ville de Cifuenles, l'an lo2o, un cou- niéine genre de vie. Cel auteur n'ayant pu
\ent de religieuses du tiers ordre de Saint- tro'jver à quel dessein elles avaient été reii-
François, sous le nom de Notre-Dame de fermées dans celte chapelle , quelles étaient
llelhleem, pour les demoiselles et suivaiiles |^,„,.s fonctions, ni quand elles en sont sor-
d<. sa leniine, qui, éliiiil demeurées sans mai- Hes ^ jc conlenle de dire qu'elles étaient de
tresse parla mort de celle dame, témoigné- l'ordre de l'AnnonciadeMuaiscomme Léon X,
renl à ce romie qu'e. les voulaient se coiisa- i|;,„s la même bulle, parle aussi des r, li-
crer à Dieu. Il fil venir pour cet i ffel drs re- gjeuses du lieis ordre de Saint-François . il
ligieuses ilu monastère de Sainl-Jcan delà y a plus d'apparence que ces rerlu>esclnient
l'enitence de Tolède, qui demcnrèreni avei plutôt de celui-ci que de celui des Annoncia-
les nouvelles religieuses, jusqu'à ce que leur ^\^.s^ puisque ces dernières n'ont pas passe
monastère fût achevé , clonl elles ne prirent en Italie.
possission que l'an L'i^lj. A coté de ce mo- Luc Wading, ylunn/. ;Vi»ior. lom. Vlll. ad
iiaslère (n'y ayant qu'un mur de sép ar.ilion), ann. I,'il3, n. il; cl Dominic. de Gubemalis,
il lundi aussi une communauie de filles, ()ib. Serapliic. [oin. l\.
semblablcà celle de Tolède, qu'ilsoumil aussi
à la con luile des religieuses : leur église est NO.M DE jViSUS (Dominicains ok t.* co\-
commune , mais I 'Urs chœurs sont séparés, ciiKGAriON du Saint-). Vvycz Louiiaiidik.
■aussi bien que leur demeure. Il y a ordmai-
le icnl dans ce inonaslère plus de (luarante NOTRE-DAME. Voyez Charité. — Com-
rrligienses, (|uisoiit, aussi bien que la coin- pmjmi;. -- CoNciiùr. \tion . etc. — Voyez la
itiuilaulé d<- lilles séculières, sous la juridic- dés gnalion particulière des lustiluls consa-
l.oii des religieux de l'ordre de Saint-l ran- crés à la sainle \ ierge, sous le litre : Noirk-
\'01i.
D\Mi:.
1137 NOT
NOTRE-DAMlî DE CHAUITÉ ( 1\ku
GIIÎUSIÎS DE I.'oitDRE De).
C'est avec justiie que In R. P. Eudes ,
frère de M. Mézcraj , historiographe do
France , doii être mis au nombre des fonda-
teurs d'ordres, puisque non-seulement il a
tonde la congrégation des Prêtres Mission-
naires de Jésus et Marie, rommiinémenl ap-
pelés les Eulisles, tuais que l'ordre de Notre-
Dame de Charité lui est aussi redevable de
son élahlissenienl. Nous avons donné la Vie
(le ce grand serviteur de Dieu {Voy. Eudes),
et nous allons rapporter ici l'étiiblissern; iil
(le l'ordre de INoIre-Dame de Charité, ( oinnie
étant soumis à la règle de saint Augustin.
L'ordre de Notre-Dame de Chanté porte
avec justice ce nom, puisque la charité même
cil a été la fin principale, ayant été établi
pour travailler à la conversion des âmes i)é-
cheresses ; l'on ptut dire que c'est un ou-
vrage de la grâce, et le fruit des prédications
(lu P. Eudps; et suivant le sentiment de cet
homme aposlolicjue , il a pris son origine
dans les sacrés cœurs de Nolre-Seigni'ur et
de la sainte Vierge, embrasés du zèle du sa-
lut des âmes. Ce lervcnt ministre duSeigneur
travaillant ùu\ missions d;jns les années
1038, 1639 et IG'iO, avec un zèle infatigable,
plusieurs filles cl femmes, d'une conduite
peu réglée, furent si vivement touchées de
ses discours, qu'elles le vinrent trouver, le
priant de leur donner un lieu de reluge pour
y faire pénitence de leur vie déréglée, et
quelques-une> lui avouèrent que la néces-
sité était la cause de leur désordre. Ce saint
liomnic les ajanl aidées par ses aumônes ,
et n'ayant point de lieu de retraite , il les
commit aux soins de quelques personnes de
piéié.
linlre autres personnes il y eng.igca une
fi'mnie fort simple appelée Madeleine l'Amy,
qui, quoicjue pauvre des liieus temporels ,
élail néanmoins riche en piété et remplie de
chariti'. V.l.c les rc(:ut dans sa maison , les
iîisiruisail, leur apprenait à travailler , et
fournissait à tous leurs bi-soins parle moyen
(les aumônes (|u'ou lui faisail. Un jour que
celle bonne femme était à sa porte, elle vit
passer le P. Eudes accompagné de M. de
l!ei iiières , de M. et de madame de Camilly
et di; (jui'lques autres personnes d'une piété
dislingu;'e;elles'écria daiisun transport plein
«le zèle : Où allez-vous ? sans doute vous
allez dans les éijlises ij manijer lcsitna(jes,aprés
ijuoivouscroyrz être biendévots; ce n'est pas
là 011. gii lelicvre,mais bien à travailler à fon-
der une maison pour ces jiaitvres filles qui se
perdent faute de moyens ei de c nduile. Ce
discours rusli(ii.e, mais plein d'ardeur , qui
ne fut d'abord qu'un sujet de risée à la com-
pagnii', ne laissa pas de produire dans la
sniti' de bons elTels , particulièrement dans
l'espril du 1'. Eudes, q.ii voyait depuis long-
tetnps la nécessité qu'il y avait d'établir dans
la ville de Caen une pareille maison, il se
déiermina à y travailler tout de bon, après
que ( ette bonne femme l'eut encore une fois
NOT
tl>8
exhorté à le faire, comme il passait encore
devant sa maison avec les mêmes personnes
dont nous avons parlé, et qui concertèrent
dès lors ensemble des moyens ((u'il fallait
prendre pour ce nouvel établissement. L'on
conclut qu'il fallait prendre une mai'^on à
louage : l'uu promit de payer le loyer, l'au-
lie de la fournir de meubles. Il y en eut aussi
qui otTrirent de donner du l)!é pour faire
subsister ces pauvres tilles. La nraison fui
louée, et, le 2o novembre Hiit , elles y l'u-
renl renfermées sous la conduite de quelques
filles dévoles.
Le nombre des pénitentes s'augmenta en
peu de temps ; Le P. l^uiics les visitait sou-
vent, les consolait, leur donnait de bonnes
instructions, et ne négi geail rien de ce qu'il
croyait nécessaire à leur avancement spiri-
tuel et temporel. Il leur fit observer la clô-
ture, et par la permissinn de .lean d'AuRen-
nes, pour lors évêqiie de Bayeiix.l'on érigea
dans celle mai>on une petite chapelle, où le
P. lîudcs et quelques autres de ses mission-
nairis disaient tous les jours la sainte messe
et administraient les s.icremenis aux person-
nes qui y dcincuraienl. Enfin les écbcvins de
la ville, voyant l'utilité de cet étahlisscmenl,
y donnèrent leur consentement.
Le P. Eudes \oyant que les filles dévoles
qui s'employaient à rinslruction de ces pé-
iiiicnles se désistaient (acilenient <i ; cette
o'uvre de charité, à la réserve d'une de ses
nièces, que ses parents, par inspiration divi-
ne, avaient associée dès l'âge de onze ans à
ces pieuses dames, il jugea à propos de don-
ner la direction de ces pénilentes à des per-
sonnes religieuses, soit (]ue l'on en fît venir
de quelque monastère ou que l'on établit un
nouvel ordre, où les personnes qui y fe-
raient profession, outre les trois vomix de
relif;ion, en feraient encore un quatrième,
de s'employer à la conversion des péniten-
tes. Le dernier evpédient fut trouvé le plus
avantageux, et l'on obtint du roi Lou s XIII
des lettres i)atenles, au mois de noviMnlirc;
1(1^2, par lesquelles Sa Majesté permettait
d'établir dans la ville de ('aen une comiuu-
naiité religieuse où l'on ferait profession de
la règle de saint Augustin ei un vau parti-
culier de travailler à l'instruction des filles
et fenmies pénitentes qui voudraient s'y reti-
ler pour un tein|is. Il y a bien de l'apparence
(juc l'on mit d'abord ces lilles pénitentes
sous la conduite des religieuses ûf Noire-
Danse du Refuge; el il semble que ce soit le
sentiment de M. liuet (l),évêque d'Avran-
ches. Voici ce qu'il en dit : « Celte «ominu-
nauté prit d'abord le tiire de Notre-Dame du
Kefuge. Après la fondation de AL de Lau-
grie, l'on reçut des religieuses d'un institut
pariitulier, employées à la conversion et à
la conduite des filles et femmes aspirant à
changer de mœurs el à faire péniience da
liurs dérèglements passés. Au mois de no-
vembre 1GV2, ces pénitentes olitinrent des
lettres patentes qui leur permettaient de se
mellrc sous la condaitc de celte comnui-
(I) lliici, Aiiiiiiitiiés de lavillede Caen.
ii-,:> DK.Tio.NN.MKF: DKS onortES urLiciiaix. mn
n.Ttil/' rpIijiîeMsc. " ('c n'élMient p.is pciil-f'lrc
li'S iiilenliciiis ctii P. Kiulcs : c'i-sl i.our(iu ù
01 cnrp qu'on iili'o. quVIIo rôsuhil do l'oin-
_. , , brassor. lillo on fui la piorrc ftMid iinonlalo.
If» inéiiloircs que j'ai on main disiMilqne los ayant rerii la premii^ro l'Iiahil de col ordro
lions disscins du V. lùidos furonl li'ahord au mois de février 1('.'»5, el l.i seconde qui le
Iravirsés, que l'un fil nailrc un grand nom- recul fui la nièce du P. Kudes, de laquelle
lire di' difficullés qui paraissaienl insurmon- nous avons déjà parlé. Elle prit le nom de
tailles, in.iis que sa constance vainquit toulcs sœur Marie de la Nalivité, el vécut toujours
ces oppositions, ot qu'ayant dessein que les dans une observance si exacte de ses rc;;les
religieuses di' rd insiilut fussent formées se- el de ses conslilutions, qu'elle a élé supé-
liin l'esprit de saint François do Sales, il tra- ricure pendant cinq triennaux.
valll.i avec M. ot m;idanie de Camilly à obte- Lorsque l'on délibéra sur la manière do
nir de l'évéqui- de Hayeux des religieuses do 1 liabillement (1) que los religieuses deva onl
la Visilaiion pour les gouverner d'abord. En ]U)rtor. l'on convint qu'il serait blanc, pour
olTel , la mère Françoise-Marguerite Palin signifier la [uiroté dont elles devaient f.iire
futchoisie (lour être supérieure, et elle arriva profession, pour combattre el détruire dans
m celte maison le 10 août de l'année 1C!^'^, le cœur des pénitentes le vice qui y esl op-
.iccnmpagnée de deux autres religieuses du posé. Cet haliil consiste en une robe, un sca-
niéme ordre, cl tirées du monastère qu'elles pulairc et un manteau, le tout de même cou-
oiil à Caen. leur. Elles onl un voile noir pour couvrir
Ce fi;t pour lors que l'on commença à leur tète, ot portent sur le scaimlairo un
exercer dans los pratiques de la vie reli- ca*iir d'argent où est gravée en relief l'image
giense plusieurs personnes de piéié et de de la sainle \'ierge ti>na;il l'eiifiint Jésus en-
vitIu, iiui devaient ronsaiTcr leur vie à Dieu Ire ses bras, le co'ur eiivininnè de deux
da 8 col instilut. Lo I'. l'Eudes travailla à branches, l'une de roses et l'autre de lis , ol
dresser les règles cl les consiiintions de ces elles ne quillcnt point ce cœur, tant le jour
nouvelles religieuses cnnforniémenl à colles que la nuit, pour se souvenir qu'elles doi-
de la \'i!-ilation , y ajoutant seulcmenl quel- veni avoir gravées dans leurs cœurs les ima-
«pie chose de propre à l'insliiut , suivani la ges de Jésus cl de Marie,
fin pour laquelle il élail établi. Il donna dos La persévérance de la première novice fut
règles pour les filles ot Us femmc^ péiiilon- éprouToc pendant plus de seiil années, per-
les, voulant qu'elles eusienl un apparlemi'nl sonne ne s'otant déclaré fondateur de ce
enréremenl séparé, cl qu'elles ne fussent ja- monastère pendant ce Icmps-là. Mais . l'an
mais re(,-nes pour élre religieuses, quoi- IGoO, M. Leroux de Langrie, président au
quVlli s fussent |.arf.ii!emenl converties, el parlement de Uouen, s'en rendit fmidaleuc,
'Mie!i|ne talent et capacité qu'elles eussent, el Edouard Mole, évoque de Itayoux. ((iii s'é-
II ordonna seulement que celles qui auraient î.iit toujours opposé à cet élablissomeut de-
vocilion pour la vie religieuse seraient en- puis (lu'il était parvenu à cetévéché. donna
voyécs en d'aulres maisons, où l'on pourrait enfin son consenlement l'an IGol, le S fê-
les recevoir si on les trouvait capables pour vrier, jour dédié el consacré au sacré dvur
«;e!a, comme il est déjà arrivé à plusieurs, cl dc la sainte A'ierec. C'est pourquoi le S.iinl
que les autres seraient remises entre les instituteur a voulu que l'on célébrai tous les
niiiins dc leurs parents, ou qu'on leur cher- ans, ce jour-là, avec beaucoup de solennité,
cluîrail (iuol()ue honnête établissement. l'anniversaire de l'établissement, el que colle
Le bon ordre cl la régularité que l'on ob- léte fût aussi titulaire de la congrégaiion.
servait on celle maison faisaient trouver à Se voyant assuré d'un fondateur cl du
celles qui s'y étaient retirées le joug du Sei- consenlement de révé(|ue , il sollicita de
cnour doux cl agréable, ot elles éprouvaient nouveau pour avoir des religieuses de la
le bimbeur <le leur état. Mais cette paix et Visilalion, qu'on cul beaucoup de peine à
celle Iranquillilé furent troublées par l'élec- obtenir; mais cnlin la mère Marguerite l'a-
lion que l'on lit, au couvent de la \'isilat:on, lin y retourna le 1'» juin de la mémo année,
de la mère Marguerite Patin pour supé- el, le 18 de ce mois, les cérémonies do l'éla-
rieure. Son départ causa beaucoup de don- hlisseinonl furent failes parlegrand vicaire de
lour, el pendant son absence les dilficullés lévéque de liaycux. Le pape .Mexandre \ll
de rétablisvoment augoionlèreni : ce qui érigea celli' congrégation en ordre reli-
obligen le s deux religieuses de la Visilalion gieux par une bulle du '2 janvier KKIG, à la
qui y ciaionl restées de retourner en b-ur sollicitation des abbés du Val- lUcher et de la
monastère. Mlles laissèrent le gouvernement Trappe, qui étaient pour lors à Kome pour
de la in.iisou à une demoiselle (lui élal pour los adairos de lour ordre. L'évêque de
lors novice, nommée soiur Marie de l'As- IJayeux, François de Nesmond, ayant reçu
somption d • 'l'aillefi'r , qui avait eu la gêné- celle bulle, témoigna aux filles de cette con-
rosilé de quillor son pays et ses parents en grégation (lu'ollcs étaient libres de relourner
l'année lO'i.'i, après avoir enleiidu prêcher le dans le monde, les vceux (]u'ellos avaient
P. Eudes el vu les merveilles que Dieu ope- fuis jusqu'alors n'étant (|ue situfdes. Il leur
r.iil par le moyen de C' l homme apostolique. ordonna même dc sortir de la clôture pour
Ivlle lui découvrit le dessein qu'elle avait dc élre examinées de nouveau sur leur voca-
consai-rer au Seigneur; et il ne lui eut lion. Elles obéirent à leur prélat . mais sans
se
pas pluiol parlé d(- cet institut , i]ui n'était ilonncr aucune mar<iuc d'inconstance dans
(I) Vwj.. > la lin du vol., n" 207 Cl SOS.
mi
NOT
NOT
1 1 i2
!e «^énéroux dessein qu'elles avaient ciilrc-
pris : fuièles à celui qu'elles aviiicnt clioisi
Iiour leur époux, elles (icmamlèient avec
empressement de fiiiie les voeux solennels.
l.e jour (le l'Ascension fut choisi pour en
taire la cérémonie, el ces innocentes victi-
mes s'esliraèreni heureuses de renoncer en-
tièrement à la lerre diins un jour que Notre-
Seigncur 1 avait quillée. L'évêcjue de Bayenx
ce élira la messe en leur chnpelle; le P. Eu-
des y prêcha en présence do ce préiil, (jui
reçut les va;ux de ces nouvelles religieuses.
La mère Mar^uerile l'atin con'.inua de les
gouverner jusqu'à sa mori, qui arriva l'an
J6(>8, et depuis on a élu pour supérieures
des reli^ieus' s de cet institut, qui s'est mul-
tiplié par l'établissement que l'on fil à Ren-
nes l'ail 167V. 11 s'en e-t fait un aulre à Guin-
gamp, d.ms l'évêché de Tréguier, en 1678, et
un aulre à Vannes en 1G83.
Le P. Eudes a voulu que dans cet ordre la
dévotion aux Cœurs de Jésus et de Marie fût
en particulière vénération. La l'ôlc tlu Cœur
do la sainte Vierge se solennise le 8 février.
Elle a commencé l'an 16!t3, et a été approu-
vée par quinze tant nrchevêiiues qu'évéques
de France, el autorisée par les souverains
pontifes, qui ont accordé beaucoup d'indul-
genies le jour de cette fête, aussi bien que
pour cel e du Cœur de Jésus , qui se célèbre
le do octobre. 11 y a des nlfices propres pour
ces deux fêles, qui ont été dressés par le P.
Eudes. 11 y a eu dans cet ordie plusieurs
personnes qui se sont rendues reconimanda-
bles par la sainteté de hur vie, entre auires
la mère Marie de l'Enfant Jésus de Foule-
bieu, qui, après la mort de son mari, Jean
Simon, chevalier stigneur d;' Bois-David, ca-
pitaine aux gardes françaises du roi, se con-
sacra au service des pénitentes dans le nio-
nasière de Caen, où elle est décédéc en odeur
de sainteté le 30 janvier 16G0, avant qu'il eût
été étal-li en ordie religieux [lar le souverain
pontife.
Ces religieuses ont pour armes un cœur,
sur lequel est l'image de la sainte Vierge
tenant entre ses bras l'enfant Jésus et envi-
ronnée de deux branches, l'une de roses et
l'autre de lis.
M. Huet, évoque d'Avranches, Origines de
la villi' de Cavn. Hermant, Hlsloire des Or-
dres rel.gicux, tome IV; et Mémoires envoyés
par In révérende mère Muric-lsidore Uellouin,
su'.iériearr du monastère de Caen.
Le P. Hèlyot ne connaissait que quaire
élablisscmenls de l'ordre de Nutre-l)an)e de
Chaiiié, savoir : ceux, de Caen, de Bennes ,
«le Giiingamp cl de Vannes; mais cet ordrj
s'est lic;iucoiip étendu depuis, et il esi au-
jourd'hui plus brillant et plus répandu qu'il
ne l'a jamais été. ^i l'on éprouvait quelque
étoiinemenlde voiruninslitutdecegenre éta-
bli aussitôt dans une villeiellequeGuingamp,
([uiesl aucentred'un pays mor;ilet religieu'.
el tenant un rang peu important dans la pro-
vince de Brel.îtgne, on devrait être encore
plus surpris de ne pas le voir appelé à Paris,
où l'exercice de son zèle paraîtrait si pré-
cieux el si fjcilemenl utilisé. 11 y fut appelé
par le cardinal d<' Nosilles, ainsi que nous
l'avons dit ci-dessus à rarlicleM,vDixoNNKT-
TKS ; nous donnerons ici plus de détails, et
nous donnerons aussi un précis historirpic
de l'établissement de la capilab' depuis son
ori!,Mne jiisiiu'à ce jour.
En 1720, le cardinal de Noaillcs se trou-
vant dans l'embarras <!e changir les reli-
gieuses qui gouveriiaient les filles pénilentos
de la Madeleine, près du Temple , après
avoir essuyé le refus de |)ius:eins commu-
nautés de Paris, fut conseillé de demander
d;'s religieuses de Vordre de Noire-Dame de
Cltariié, dévoué spécialement nu saint des
femmes pénitentes, et d'en faire venir de la
ville de (juingamp, où elles avaient un mo-
nastère, celles des maisons de Vannes, de
Bennes et de 'l'ours ( fondation récente )
n'ayant pu en accorder. Les liaisons parti-
culières qui exist; ient entre le cardinal de
Noaillcs et l'évêque de Trèguier firent espé-
rer au premier qu'il réussirait de ce côté-là,
(îningamp étant dans le diocèse de son
ami. En rlTet, sans nième consulter la com-
niunaué, l'cvèiiue de Trèguier promit ce
qu'on lui demandait, et écrivit ensuite à ses
religieuses, qui firent en vain, iirès de lui el
du cardinal, de nombreuses représentations
pour motiver un refus. L'évêque donna des
obédiences à c'nq religieuses de chœur, sa-
voir : la mère de L) lirève, dite i\larie du
Cœur de Jé-us. supérieure actuelle de Cuin-
gamp, pour être également supérieure à
Paris ; la mère Lo>!, sa propre nièce, dite
Marie de Sainte-Thérèse, pour assistante; la
mère Chevalier, dite Slarie de l'Ascension ;
la mère Ledu-Uubot, dilc Marie de l'Enfant
Jésus; la mère Bossinot, dite Mariede Sainte-
Céleste ; et à une converse, savoir la sœur
Le Guiader, dite Mari;- de Saint- Erançois de
Sales. La supérieure, en acceptant, mil
pour condition qu'on ferait à Paris rétablis-
sement d'une maison de son or.ire. Les six
religieuses partireni de Guingamp le 9 avril
1720, séjournèrent quelque temps chez leurs
sœurs de Tours et arrivèrent le dernier jour
du mois à Paris, où elles furent imniédiate-
nicni conduites aux Madelonnetles. 11 était
huit heo^-es du ;oir, les deux communautés,
religieuses et agrégées, les reçurent à la
fiorle, les conduisirent processionnellemenl
au ehœur et au chapitre, où l'on chanla le
Te Deurn. Cependant les religieuses péniten-
tes de celte maison, surprises de les voir au
nombre de six et ne s'attendant point à ta
réforme qui allait être mise dans leur mai-
son pour le spirituel el le temporel, les tris-
tes mets qu'on leur servit au souper leur
firent deviner la dureté qu'elles devaient at-
tendre de leurs hôtesses. Pour mieux com-
prendre leur position, il faut se rappeler que
la maison des Madeionnelles, rue des Fou-
laines, àParis.élail composée dedeux classes
(le pénitentes, dont l'une était formée parde vc-
riiables religieusis professes, 1'. mire par des
filles agiégécs, qui poilaieni un cosiume el
suivaient une règle, et qu'il y .iv;iit enoulre les
pénitentes , qui n'éiaient là ijue pour un
leuips limité. Toutes ces femmes avaient eu
Ili5
DICriO.NNMIlK DES OUDItES UELIGIELX.
(lil
peur Ie.'< d.r ii;<'i- succossi\ ciiifiil, los \is l;tii-
«Jines, les L'rsuliiies, t-lc., iloiil files su|'|)()r-
laiciil le j'ius ■ivcc grande peine, dcsiranl se
giiuvcM lier flics ■inêiiK'S.
La l'rovicipiice niéiiappa anx religieuses
de Notrc-Uanic de Cliaiilc deux amies qui
inérileiil d'c'.re connues îles leileurs, car
< Iles devinrent leurs iirotcclrices el l'inslru-
nienl dont Dieu se servit pour etalilir la mai-
son de Sainl-Miclicl à Taris. L'une ii<' ces
femmes veiliieu-es était la marquise de
Cray, restée veuve à l'âge de viiigi-ileus
ans, lors(]ue son mari, lieulenanl général
d'artillerie, allait devenir maréelial de Fran-
ce. Celle lenirne d'un grand mérite, consa-
crant sa viduité à la retraite, était pension-
naire en chambre .lU couvent des .Madelonnet-
Jes. i'.lle se lia bientôt avec les religieuse' arri-
vées de Bretagne el leur procura !a conna.s-
sauce el l'amitié de madem'iiselle de Chausse-
rais. Celle-ci avail aussi au couvent des Made-
lonneltes un apparletnent avec issue hors la
l'iiilure, mais elle demeurait ordinairement
à sa maison cle Madiid, à une lieue et demie
<'c Paris. Fille du niar(|uis de (^liaus-erais ,
douée d'un esprit supérieur, édilianle pai- sa
condiii:e, mademoiselle de Ciiausserais s'elail
concilié l'estime de la cour de Louis XIV
el du roi lui-niéme, qui lui fit liâlir, (]uand
elle >c relira, une jolie maison dans la cour
du château de .NLidrid, et surtout de la du-
chesse douairière d'Orléans, dont I Ile avail
été d.ime d'iioiuieui-, el (lui lui l'aisail irois
visites par semaine à Madiiil. On regardait
comme un avantage d'être protégé par ci lie
femme remarquable, ijui s'était donné lo
droit de remonlranee au régent. Trois mois
après leur arrivtc, les religieuses de Notre-
Dame de Charité \irenl à l.i Madtdeme celle
liemoiselle ple^ enue eu leur faveur par la
nianiulse de (>ay. Le cardinal se tiouvail
en même temps a la maison, mademoiselle
de Chaus.serais lui dit qu'il fallait garder
|iour loiij urs les nouvelles religieuses à
Paris, el (ju'elle contribuerait av(cSon Lmi-
nence à l' ur établissement. La chose eut
lieu biiniôl, comme nous allons le voir;
mais il faut remarquer auparavant tout ce
iju'eureni à soulfiir les mères «(ui gouver-
narenl la Madeleine. Files rétablirent l'ordre
dan.-, le mural el le temporel de celle mai-
son ; mais elles suscilèrenl (onire elles leur
propr<; confesseur, que les religieuses cl
agiégées pénitentes de la maison avaient fait
enlrerdans leur complot ; et même la reli-
gion de l'abbé Dorsanne, grand vicaire cl
leur supérieur, fui surprise. L'afl'aire s'a-
paisa à leur justilicalioii el à leur avantage.
In 172), elles denianiièrenl leur retour à
<'iiiingam|). ]>e cardinal les exiiorta a la pa-
lieiiic. rius laril, voyant la bonne volonté ilc
niadeiiioisille île Chausserais reiroidie, elles
deuiandèrent leur départ avec plus d'inslau-
ce, pinsanl avec raison que ce serait le
moyen de hâter l'execuiion de la promesse
pour rélablissemeiit de l'aris. Il enarri\a
«■ouimi' elles avairnt désiré et prévu. On
Ifuroffiit de le^ intioduiic dans une des
luaisunsde l'euilenk-sdcjà éljbUc>,u>aissau$
lellres patentes ; elles refusèrent (fe se ren-
dre ,'i ce proi édé indélicat et injuste. M.ide-
iiioiM'lle de Chausserais chargea son inien-
daiil el .M. Legraiid, curé de la Sainte-Cha-
pelle, de lui chercher une maison pour
faire l'élablissemenl, l.indis qu'elle-même
demanderait des Irtlres patentes. Tout réus-
sit, malgré de nombreuses dilfi' ultés. On
a hela , des diniers de mademoisei:e do
Chausserais, une maison bourgeoise dans la
rue des l'osles, près de la rue de r.\rbalèle, à
gauche en quillant celte dernière rue el
dans la place ociupèe drpuis par laeiiminu-
iiaulé des dames de l'imm culée Conception,
près ue en face de la cominunautc ac-
tue.lc des religieuses de la .Mi H-rico de.
Deux des religieuses venaient chaque joui-
de la maison des ^^ldelolmetles faire tra-
vailler les ouviiers qui mettaient le local en
éial de recevoir celles (|u'ou attendait de
tiuingainp. Le 2i juin 1724, elles arrivèrent
au nombre de i.ix. Dès le 21), l'abbé Dor-
sanne avail béni la maison et la ()elite cha-
(lelle, qui fut dédiée sous rinvocalion de
saint .Michel. I.e duc de Noailles voului lilier
de ce nom le hou>eau monaslère, parce
(lu'il avail de la dévotion à saint Michel, cl
surtout parce que sous le titre de lltli-
gieuses de la Charité ou aurait pu confon-
dre les Kudistes avec des communautés ou
des Dames de la Charité. Les mémoires ma-
nuscrits de la maison de Saint-Michel rap-
portent une prédiction faile, en 1(585 , à la
jeune de La Grève, (|ui lui annonçait qu'elle
deviendr.iil une pierie fuiidaiiieiil.ile dans
l'inslil 4, et fondilr.ce d'une maison de l'or-
dre à l'aris.
La m.iison de la rue des ^'o^les n'était que
jMovisoire dans la pensée de loni le moiiile,
et la communauié lit toujours des reclier-
clies pour s'établir plus grandement, l'ille lit
même successivement qui Iqiies acquisiliuns,
qui, résiliées plus lard, lui uccasionnérenl
des délies, dont le malaise se lit toujours sen-
tir. Nous signalerons Mirtoul l'achat irréllc-
chi de l'abbaye de Sainte l'errine, à la \'il-
leitc, atiandonnée par les chanoinesses qui
se reliraient à Cbaillot.
L'élablisseiiient de l'aris reçut plusieurs
sujets remarijuables, entre autres la uiece
de mademoiselle de Chausserais. L'inlerêt
que celle demoiselle avait porte à la finda-
tion des religieuses de Nolie-Daine de Cha-
riti: était d'autant plus admirable (|u'elle
i\\ ait une sorte d'aversion pour les religieux
el le.i reliuieuses, au point ()n'on n'osait par-
loir de celles-ci devant elle. Cela venait sans
doule d'un mélange do jansénisme à sa piéle
|)lus ou moins solide, cl nous le croirions
d'aulant plus volontiers que le leslament
avantageux dont elle avail flallé ses pro-
tégées lut changé à l'epoiiue de sa mort, el
cela par l'inlluence du pièlre janséniste qui
la confessait.
Quoique consolidée, la maison de Saint-Mi-
chel. <pii avait des pénilenles el remplissait
son qualriènie vœu, ne lut jamais bien nom-
breuse el éprouva jusqu'à liii la géiic causcu
par les délies duul nous avons parle
t\K
NOT
L"orage léi olulionii.iire vint fr.ippiT c<'l
ordre comme Ions les nulres insiituls reli-
(lieus. Les commissaires de l'assenibléu na-
lionale, section de l'Observatoire, posèienl
les scellés dans la maison de Sainl-Midiel, et
signiflèrent aux religieuses d'en sortir sous
huit jours. Gelle->-ci louèrent une maison sur
la chaussée du Maine, près do la barrière ,
et s'y réuniren'. au nombre de seize; cinij
prirent une autre détermiiialion sous divers
prétextes. Les religieusis dans leur petit
élablissimentobsci vèrenlleurièglele mieux
possiblf. lîlles étaient si pauvres, qu'elles
manquaient de toul cl IravaiUairnt nuit et
jour pour avoir de quoi subvenir aux pre-
miers besoins de la vie. Celles qui ne pou-
vaient coudre, à cause de leur grand âge,
allaient dans la campagne ramasser du bols
el glaner dans la Siii on. Un homme cliari-
lable, voyant que c'étaient dos religieuses,
leur donna du blé, du pain et des légumes,
el leur dit de venir toutes les semaines en
chercher autant.
il ) avait alors dans la communauté une
des mères nommée Marie du Cœur de Jésus
(le La Grève, vraisemblablement de la même
famille que celle dont nous avons parlé au
commencement de la fondation. Comme elle
clail de famille noble, l'autorité l'exila à
Montrouge, où d'ailleurs une gramb- laiitu-
do lui fut laissée, el ses sœurs prirent soia
d'elle. Au reste la petite communauté no-
made avait a peu près tous les secours spiri-
tuels qu'elle lecevail auparavant dans la
communauté. Ln 1799, ayant perdu leur
supérieur, M. labbé Lemoiiie, elles deman-
dèrent M. Uuclaux du l'uget, qui leur a con-
tinué ses soins jusiu'e.i 1818. La même
année elles élurent pour supérieure la
mère Duquesne, dite Marie de l'Enfant Jé-
sus, et Cl tte élection fut confirmée au nom
de Mgr de Juigné. Dès le 21 juillet, trois
postulantes prirent l'habit dans la petite
communauté, qui portait, à ce (ju'il paraît ,
son costume nmnastiquc. L'année suivante,
une autre postulante prit l'habit, et depuis
lors, des sujets lurent reçus, mais les supé-
rieurs ne permettaient à la profession que des
vœux simples, peut-être veut-on dire par ces
mots des vœux temporaires.
Nous citerons encore un fait qui, apparle-
n.intàLCl ordre en parlieulier, apprend néan-
moins ce qui se passait quelquefois alors dans
les autres congrégations, el fait épisode à l'his-
toire tlu temps. La mère Marie de l'Enfant Jé-
sus allait à la halle, portant un panier. Les
marchandes de poissons lui donnaiein parcha-
rilé, l'une du merlan, l'autre des morceaux
d'anguille; d'autres marcliandes lui lion liaient
du beurre, des légumes, et en lui donnant ( es
diverses cliuses, elles lui disaient toul bas :
« l'i iez pour nous, cai' nous voyons bien ([ue
vous êtes religieuse. » Un jour la petite com-
munisuté n'avait que liente sous, et la mai-
son ne possédait ni pain, ni beurre, ni ab-
solument rien pour le diner. La sœur Alarie
de l'Enfanl Jésus, st: confiant en la Provi-
dence, résolut d'aller à la haie, el (|uoi-
t}u'elle dûl à diverses macchaudes el que la
NOT trif»
pauvreté (Vc SCS vètemenis ne ftil [las cajia-
hle de lui obtenir un nouveau crédit, ,'i peine
les femmes de la halle la virent-elles, qu'el-
les lui crièrent: «Viens, ma cocolle, il y
a longtemps que nous ne l'avons vue. C'est
parce que tu n'as pas d'argent pour nous
payer, n'esi-ee p :s ? Viens tout de même,
lu ne nou< dois plus rien. I) pnis que nous
te donnons, nous vendons mieux.» En parlant
ainsi, ces bonnes femmes lui donnèrent
tant de marchandises, qu'elle fut obligée
d'en mettre la moitié chez une personne de
sa connaissance.
Pend int que cet acte de charité bruyante
avait lieu , une personne charitable avait •
envoyé à la comtnunaulé du pain, de la
viande, du lait, de la farine, dis œufs, du
beurre. Un marchand de vin, voisin de la
maison, leur donna du vin. Une dame leur
donna 500 fr. pour p lyer un semestre de
leur loyer. Ainsi Dieu console quelquefuis
ses nmis avec abondance de faveurs. l'Ius
souvent il prolonge leurs épreuves sur la
terre.
En 1802, le cardinal Caprara et l'archevê-
que de Paris permirent à une des religieu-
ses de porter iliabil séculier el de soriir de
la clôture pour les affaires de la maison.
Quelques jours étaient exceptés de cette dis-
pense.
La mère Duquesne, après trois ans passés
dans les fondions de supérieure, fut élue de
nouveau el continua jusqu'à sa mort à jouir
d'une grande considération dans une mai-
son qu'elle avait, plus (|uc toute autre peut-
être, conli ibué à rétablir et consoli^ler. Elle
fut cependan! impl quee dans une aflairt;
fâcheuse, qui devait amener nécessairement
des préventions funestes à son monastère.
Une conspiration contre Buonaparte avait
compromis quelques personnes, qui cher-
chèrent tous les moyens d'échapper au dan-
ger qui les menaçait. Un des principaux
conjurés connaissait une dame pensionnaire
de la maison provisoirede Saint-Michel, qui
ne pouvait encore être souniiiC à une clô-
ture absolue. Ce conjuré se cacha pendant
vingt-quatre heures peut-être dans celle
maison , el évidemment la complaisance
de la mère Duquesne se prêia à cet acte de
charité. La police fui instruite de tout. Plu-
sieurs des conspirateurs furent arrêtes, et la
mère Duquesne elle-même lut mise en pri-
son. L'instruction el les débals du procès
prouvèrent qu'elle n'avait rien fait d'illégal,
l'homme caché dans sa maison n'y ayant
point demeuré le lemps nécessaiie pour
qu'on fit légalement la déclaration de son
séjour , etc. La mère Duquesne fut ac-
(luitlée. Le plaidoyer remarquable de son dé-
fenseur a été imprimé, ainsi que tontes les
pièces de ce procès qu'on peut consulter.
Dieu permit que la maison deSaini-Michel
n'en soulîrîl point, liuonaparle même accorda
son eslimo el une sorte (l'attachement parti-
culier à la mère Duquesne, dont l'élablisse-
ment eul |iart aux bienfaits que le gouver-
nement impérial accorda, en 1808, à un grand
nombre d'établissemeuls de charité. Les rc-
ii:7 DiCTioNNAiu;: itr.:^ oiinius i-.ixicikijx. lus
li^ietisos «.'•.•l.iic'iil iH.iblics (l:ins l'ancion mn- femme expùrimeiitéc, qui s'.ipciTiil liipiiiot
iiasiôrc di'S Visilimdiiios ilo l.i rue Saint- i|ui' le prélal iic s'eiileiidait guère aux éta-
I.iciiues, où elles sont aujourd'hui cl auiiucl lilisscmenls do relii^icusc-;, el qui, pour no
elles oui pi)rlé le noui de tnonasière de Sailli- pas se roinprouKtlre avec lui cl fuir la sii-
Miclicl, Mius lequel seul il esl aeluellcuiciit périorilé qu'il senihlail lui deslitier, s'a-rré-
cniiuu. I^lles élaicul alors au nouihre de goa. aiii-i que sa S(Bur, à la l'uniinniiaulé
viuï:t-neuf 'l jouissaieiil déjà d'un secours de Quiinperlé, di'ja rél iblie. Néannioius le
niiiiuel de 8 100 fr. donné par le you\erne- pr6l il. (jui du moins irétait poinl impérieux
jneul ioi()érial. cl conservait toujours le même désir, (il des
Après la révolution de juillet IS^ÎO, M. do tcnl^ilives du colu des dames de rancitMUic
Qiieleu.en bulle à la h lioe de l'esprit iné- maison de Monlhareil. La ma son des scrnrs
Milieux qui ré'.Miait alors, avuil vu le palais de In t>oix de Sainl-ISrienc avait é'.é vendue
(ircliiépiscop.ii (letriiii, et s'était vu lui-mémo comiîie pro])riélé nationale. U.n acquéreur
réduit à clienluT quelque part une demeure, était disposé A en revemlre un tiers, (pii fa -
(^e prélat lo^ea surtout en deux commuuau- sait sa portinti; les auriennes propriétaires
lés religieuses, celie du Saci é-Cœur, rue de ne voulaient el ne pouvaient point se cou-
Vareiines, cl celle de Saint-Michel. Dans tenter de celle porliuu rétrécie. Sur le refus
cette dernière maison, où il a séjourné il'a- des ssrursdo la CmiK et même sur leur invi-
liord el longtemps (ce qui valut à l'él.iblisse- lati u, les religieuses do Monlhareil, de con-
ineul visite et ve\;)liou du commissaire de ccrt .ivec M. Cafarclli, raclictèrenl cette por-
police du ([uartiei ), il élail accompagné de tiou de maisou et s'y étahlirenl, voyant
son vicaire général, l'abbé Desjardins, qui (|u'ili'S n'avaient plus l'espérauie de len-
y mourut, (!t auprès diiqtiel nos alTiires nous Ircr dans leur ancienne propiiclé , qui
l'jnt souvent appelé nous-ménic dans l'iii- pourtant n'avait point été vendue. Celle
térieur du couvent. acquisition n'eut lieu qu'ajirès des dilli-
Auj"urd'lii:i la maison de Saint-Michel, cillés nombreuses et au bout do plu-
toujonrs dans un état (irospère cl édifiant, a sieurs années de tentatives. En atlen-
ponr supérieure la rcvcrende mère '"*, ap- dant l'achat do colle muison ou de toute
pelée de l'établisseme l de Sainl-Bricuc. autre, les religieuses venues do Oninliu
C'est à cotte dame pieuse et niéritanlc que piirsnt à loyer une maison où elles pas-
nous avons obligalion d'une partie des fa^ts seront deux ans il firt nt leurs premières
historiques consignés dans c; t article addi- c'.ecliaiis. Le 29 scptombro 1808, clio'i s'y
lionnel. trouvèrent au nombr(; de douze, les proiniè-
La maiso I lie Giiinganip, d'où était venue res étaient arri\ ces rjueiiiiies jours aupara-
la l'olonii' de l'aris, était connue sous le nom vaut; le 11 octobre leur oraioire fut bénit
de Montbaroil, et el!e continua ses œuvres par M. Fioyl, et on y laissa le saint sacre-
charilables jusqu'à l'épocjuc «le la première ment. Les éledions eurent lieu le (limancho
révolution IVaiiçaise. Les religieuses qui 'il novembre suiv.inl. Elles lurent précédées
riiai.ilairiit furent expulsées de cet établis- d,; (juclques difiiiullés élevées [lar révé(|ue,
sèment le 2 octobre 17:12, cl reçurent dé- q ii. croyanl, po;ir ainsi dire, aw.ir alTaiio à
fciise de se réunir ailleurs. Cependant, après des demoiselles séculières pic. ises, qu'il au-
qni'lqucs années, oa permit à qu'lques-nncs rail à façoiui' r à la vie religieuse, voulait
lie se réunir à (Juintin. Llles conservaient leur donner un habil uniforme, noir, avec
le désir et longlcmps gardèrent l'espérance u:ie petite coiffure comme ccl'e des veuves
de ri'iitrcr dans la maison de Monlhareil. du pays. l'allés n'y voulurent point consentir
Vivant sans clôture, elles édifiaiint la ville cl rappelèrent (|u'elles avaieiit un costume
iMi convcriissaiil (|uelqucs filles égarées et de leur ordre, (|u'cllis prendraient {]uaiid
ilonnanl 1 insirucliun aux petits enlanls des c les pourraient garder la cirilurc; car elles
deux ^e\es ilans un local spécial à chacun, allaient aux ollices des églises, el le coslumo
Les liabilanis de tjuinlin, ayant acquis par moiias;i(nio blanc était trop saillant aux
souscription leur ancien couvenld'Ursulines, yeux des habitants de Saint-lirieuc, i|iii n'a-
l'ollrii eut aux religieuses de Monlhareil, (|ni, valent jamais eu de rolgieuses vêtues ainsi,
gardant leurs espérances, refusèrent el en- L'évéïjue éleva d'antres dillieullés sur les rè-
gagéient mémo les Ursulines à le reprendre, gles cl la rénovation des vo'iix, el leur dc-
prometlant do les seconder el d'aller même m indail un abrégédeleurs con^titutions. Les
pr.ndie leur demeure provisoire dans leur seurs lui montrereni le livre même des con-
coiivent restauré, en y louant des cellules ; sliliilions, disant qu'cdlcs s'y conformeraient
ce que l'une fil ioimédiatemeiil , ce qucî les en tout ce qui serait possible. Non, point cela,
autres auraient l'ai , si la l'rovidenre n'avait disait l'évêque ; i éiliiiscz-lcs à un abrégé;
roiuluit ailleurs leur exislence et l'exercice diles quel sera l'ordre cl montrez-moi la
de leur zèle, de la manière que nous allons règle «luc vous vous prescii c, et je l'ap-
fjiro connaître. prouverai. Los Sd'urs voy.lienl qu'il ne con-
jM. Cafarelli, évéîiue do Saint - Hrienc , coail pas ce que c'était ()uo des rcligieu-
voyanl des comiiiunau es se restaurer dans ses. .Malgré la peine qu'elles <'n re-senlaienl,
son diocèse, était (leiiié de n'en point avoir elles lireiit un certain règlcmenl des exerci-
d.ins sa ville episeopale, el lit, avec raison, ces selon les consliluiions, le monlrèrenl à
des efforts pour y en établir. Ces en'oris se révé'|iie, <|ni s'en contenlaci y lit ajouter une
portèr.-ni d'abord du ci'ité des Ursulines, et formule de renouvellenienl des vieux, quilo
Il Iraila avec la U .M. .Mélanie de KcrvéganI, rcconnaiss lil comme supérieur immédiat el
ii;o
NOT
NOT
l'.m
lui faisail promesse li'olx-iss.inro ; r,ir il voii-
lait cctto obéissance des religieuses. Cellrs-
ci y cunspniireiil, mais avec peine, craignant
avec r.iison {\uc l'évêqne, parlant de celle
aulorilo excessive cnUe ses maitis, ne les
obligeât ou à quoiqucs ch:irgts qui ne se-
raient point de leur profession, ou à demeu-
rer dans le petit local qu'elles occupaient
()rovisoirenienl.
Elles firent à leur tour des objections et
représentations fondées, Dec<in><cnianl à faire
des vœux que pour un an, lesquels encore
n'auraient que le sens donné par leurs con-
siilutions. L'évéque, apaisé par la so-ur
Sainte-Scolaslique, consentit, nialgréla peine
qu'il éprouvait. A la cérémonie des éleciions
le> religieuses prirent leur CdSiume monasti-
que et se tinrent dans la salle attenant à
l'oratoire. L'évéque, entrant avec des ecclé-
siastiques, fut frappédece si)ec!arleinatlcndu
qui lui causa de la joie et une sorte de res-
pect pour les religieuses. Les suffrages se
réunirent en faveur de la mère Corbel, dite
Marie de Sainte-Scolastique. C'était elle qui
avait eu le plus de part aux soins, aux dé-
marclies qu'il avait fallu faire pour l'étahlis-
sen)entde l'institut à Sainl-Brieuc, et la re-
connaissance do ses sœurs lui donna, ainsi
qu'à l'autre triennal, celte marque de con-
fiance, quoiqu'elle n'eût ni l'Instruclion ni
i'espérience nécessaires pour celte haute
position, et elle s'acijuilta fort bien de ses
obligations. La maison que la petite com-
munauté tenait à loyer appartenait <à l'esti-
mable famille Sebcrt, qui montra les meil-
leures dispositions en faveur des religieuses,
les secourut de ses services et de ses au-
mônes, leur donna une de S(;s filles j)0ur i)os-
lulanle (la deuxième du nouvel elahlisse-
iiient), et mérite d'être signalée ici à la re-
connaissance du diocèce de Saint-Iirieuc.
Cependant les religieuses, logées étroite-
ment, soupirant toujours aprôs Montbareil,
sollicitées par leurs sœurs des maisons de
Vannes (à la Chartreuse) et de Renne-, pen-
saient à se réuniraux premières et traaiaient
seules liîur petii complot, quand un jour un
jeune ecclésiasiique du diocèse, M. l'abbé
l'resvaux, devenu depuis grand vicaire et
officiai, et acluclleiiienl chanoine de Notre-
Dame de Paris, ayant eu communication de
leur projet, en prévint l'évéque, qui se hâia
d'ouvrir une souscription dans son cha|iitre,
et engagea immédiatement la cominunaulé à
conclure l'achat de la maison des sœurs de
la Ooix, où elles sont aujourd'hui, ainsi que
nous l'avons dit. Elles y entrèrent le lundi
des Uogaiions de l'année 1810. Le 29 décem-
bre 18t"2, elles donnèrent l'habit à leur pre-
mière postuliinte, et ce jour est celui qu'elles
prennent pour date île l'install, lion dans
l'établissement. La veille, I evcque av lit dit
la première messe à l'église qii'o:i venait de
racheter d'un au're a'quéreiir. Tout cejuur,
le zélé prélat n'avait cessé d'y travailler,
allant jusqu'à prendre le rabot pour faire
aviincer l'ouvrier qui mettait (aux frais de
révè(]ue lui-ii!criK') des baguettes dorées aux
deu3 tablc'iu-i du rtlablc.
La maison de Rennes, comme on l'a vu
dans le texte d'Hélyol, clait une des pre-
mières fondations de l'ordre. Elle sera la
dernière dont nous rapporlerons la restau-
r.ition avec qi.elques dct ils. Celle restaura-
tion est due au zèle de la mère Helliard d'Au-
I erleiiil, diie Marie de Sainle-Eugénie, et
connue à Rennes sous le nom de la mère
Eugénie. Nous avons cniendu dire dans
cette ville que la maison de Saint-Cyr lui
avaitété/iccordéeparBuonaparteà l'occasion
d'un berceau riche el précieux, travaillé par
les soins et les mains de la mère Eugénie, et
envoyé par elle au roi de Home. Rîais il est
impossible qu'il en ait été ainsi, carie pré-
tendu roi de Rome naquit en î8ll, el la mère
Eugénie h, bitait dès lors, el depuis plusieurs
années, la maison de Sainl-Cyr. Celle mère
Eugénie, que nous avons vue nous-méme,
n'availpas,diî-on, tcmt ce qu'il fallaitde pru-
dence el de lad pour le succès de l'œuvre à
laquelle son z.'de lavait portée, etqui a pour-
tant réussi. L'ancien é ablissemenl des reli-
gieuses de Nolre-Daoïe de Cbarilé,;') Rennes,
élait cette maison dite de laTnnilé, située près
(Je la cathédrale, rue de la Monnaie, dans la-
quelle des préires fidèles furent incarcérés
pendant les orages de la première révolu-
tion, laquelle fut depuis, ju-qu'en 1820, le
grand séminaire diocésain, où nous avons
pris nous-mêiiie l'habit ecclési.istique. Celte
maison aujourd'hui est entièrement détruite,
et le lieu qu'elle occupait est une rue et une
place publique. La maison de Saint-Cyr, à
I exlrémiié d'un faubourg, était l'un des
deux monastères r|ue les Calvairiennes
avaient à Rennes. La ui're Eugénie se pro-
cura donc celle maison; mais ses anciennes
compagnes, eiîrayées d^s delUs qu'elle avait
contraciées et clio juées du litre de fonila-
trice qu'elle avait pris ou olilenu, ne vou-
laient point se réunir à elle. M. Enoch, évé-
que de Rennes, pour consolider l'établisse-
uieiit, s'adressa et demanda une roliyicuse
à Madame - mère et au cardinal Eesch.
Ceux-ci toulureiit que la religieuse qu'on
enverrait à Rennes fût lirée de la mais >n do
Paris, à laquelle en conséquence l'évéque eu
fit la demande.
M. l'abhé d'Asiros donna obédience pour
cette translation à la mère d'Epry, dite mère
de Sainte-Pélagie, qui reçut aussi uik; aceep-
laiion et permission de l'évéque de Rennes,
qui la nommait supérieure dans une ce Iule
dont nous avons vu la teneur. La mèro
Sainte-Pélagie trouva la maison dans le plus
grand dénuement el ciidellée de 32,000 fr.
Elle ne perilit point courage, et s'adressa au
préfet du d8|iartement, qui lui alloua uu se-
cours. .Vadauie - mère lui diiniia aussi
une aumône, et Buonaparte, sur le vu d'une
re(iuéte, alloua sur le budget des cultes un
secours annuel de 4,000 fr. , continué jur-
qu'à ce jour et doublé. Les sujets ne venaient
point ai.giiienler la communauté; la restau-
ration des Bourbons, qui fut une occasiou
d'élan à lant d'autres èlablissemeuls, ne til
ai ruii mouvement sensible ou st.'.blc à celui
lie l'iL'ism s. Cependant, lîous voyons dau^ ie
Il M DICTONNAmii DES ORDRES RELICIElJX. IIM
tableau des .is^oc iations dccliarilé qui dépu- conslilué chef-lieu d'une nouvelle branche,
liToiil au rliapiire pénéral ciMuoqiié par dé- avec généralal ilans la personne de la su|ié-
cret du 30 se|)l<nilire 1.H17, que les Dames rieure d .\n};ers. cl une légè-^e niodilicalion
du Jiefitgr de Hennés sont an nomtirf de dans li- CdSturMc. Le pape a approuvé celle
douze; qu'elles demnndeni la mniaon de Saint- conçréjçalion nouvelle, qui a eu une prompte
Ci/r pour lei(r établissement , ru qu'elles extension el dont nous dirons rtiisloire dans
payent le loyer de la maison qu'elles huhi- noire Supplémrnl ; mais les anciennes mai-
tei'i... (Juiii' qu'il m soit, les sujets man- »"ns licnnenl à ce qu'on fas^c bien la dis-
quaienlà cet élahlisseinenl. On cnfit venir de tini lion qu'il y a enire elli s et la famille
la maison de Caen, en 18IS, et nous vîmes, d'Angers. La nouvelle fondai on du Mans
à Louvi;:né-du- Déserl, la colonie de quatre élait de la lillalion d'Angers; mais elle a
religieuses (lu'on envoyait, el qui se relire- (luillé celle observance pailiculièrepour reu-
rcnl au bout de quelque temps. D'anciennes H'c'' dans la corporation des amienncs niai-
religieuses de la maison de la Trinilé con- s""», avec lesquelles elle a établi la corres-
senlirent à se réunir à S.iinl-f.yr, el propo- pondance cormnuiie.
sèrenl à la mère Sainle-rél.igie de faire une tlelle correspondance est un usagf qui de-
éleclion. Celle-ci leur ré|)ondil qu'elle était ^rail être établi enlreles mai-ions îles autres
supérieure et qu'il n'était pas nécessaire de ordres. Les maisonsdeNolre-Dame (leChari^o
faire une élection. L'évèque de Rennes, qui s'écrivent les unes aux autres dos lettres
clail alors M. Charles Mannay, se nièla de ''""l ""i"^ avons vu un très-grand nombre,
l'alTaire, el la mère Sainle-Pélagie demanda i'' >' consignent loul ce qui se passe d'inle-
son retour à Paris, oii elle revint le 20 jau- rissant dans leurs maisons. Le ncueil do
\ier 1821. On fil revenir à Saint-Cyr quel- *'i'* lellres, s'il était donné au public, forme-
qnes mères de la mnison de Caen, quelques ""ail un volume à la fois édifiant il episo-
anciennes de Rennes se réunirrnl à elles, dique.
M. Mannay les installa solennellement, re- '■'•■»' "n grand avantage pour l'ordre de
cul la rénovaiion de leursva'ux-, elM. l'abbé ^'<)l^< -Dame de Charité que d'avoir, ainsi
•■.arnier, son grand vicaire, ilepuis évèque de •l"f '"» Kudisles, propagé le premier la
Vannes, fil un beau discours à celle cérémo- Oevo:ion au sacré Cœur de Jésus et aopar i-
iiie, dont nous fûmes témoin, el dans la- *'i"l I" dévotion au sacré Cœur de .Marie,
quelle nous remarquâmes que la mère lîu- aujourd'hui si lépandue parmi les fidèles,
génie ne renouvela point ses vœux. Les reli- cl qui fait l'espérance qu'oui les hommes
gienses de Rennes «lurent pour supérieure •'■enses el religieux de \oir la foi se mainte-
la mère Vauourlin. dite deSainl-Am- nir en France au milieu de tant d'onues.
broise, et depuis lors leur maison, qui nous Annales manuscrites de l'ancienne maison
avait paru si dénuée, a obtenu un état pros- ''c l'avis. — Item de la nouvelle. — liensei-
père. ijnemtnls fournis par la rétérende Mt're "",
lùifin, la quatrième maison nommée par supérieure de la maison Saint-HIicli.-l, à Pu-
le P. Ileijot csl.cllc de Vannes. M. l'abbé ""«. professe de la maison de Saint-lhieuc
Dcshayes, mort supérieur des Mission- — ^'^lemoires de philosopliie, d'iùsloire, dt
naires de Saint Lannnt-sur- Sèvre , el si morale et de liltcralurc. Uniu- W. — Corns-
C(;nnu par son zèle et ses bonnes œuvres, pondance de plusieurs communautés de l'or-
les réiinil, après la révolution, à la Char- «^'e- — Histoire manuscrite de la v>aison de
lietise pr,s d'Auray, où il éla't alors curé. Sainl-Jirieuc. R-o-i:.
Kn 1811, un décret impérial approuvant la NOIKI'-DAME DE SAINT-P.VUL flUi.iGiKU-
inaison de Nunl-Iirieuc dont nous avons ,,., BÈMinicriNES RiiroiniKEs i.K) , près
parle, (ut refuse a celle de la Chartreuse, neauvais, arec la Vie de de la It. M. Madc
qui se din.e-serenl celle annec-la, parce .|ue ,^,,-,j,, d Escoubicau de Suurdis, leur rcfor-
M. Deshayes, voulant que la maison prit matrice
soinjdes souids-nuiels, exigeait que les jeu-
nes religieuses missenl loul leur lemps à L'abbaye de Notre-Dame , communément
l'élude des sciences qui les rendraieni aples ap|)elee de Saint-Paul à cause (ju'elle est si-
à cette bonne (Puvre. Cinq des religieuses tuée dans un village de ce nom à une lieue
se reiirérent à Saint-Rrieuc. L'ordre de No- de lîeaiivais, est une des plus anciennes et
tre-Dame de Charité est aujourd'hui bien des plus célèbres de France. l'^lle l'ut fondée
plus étendu (ju'antrefois. Outre les maisons par C.hilpéric, roi de France, vers l'an 580.
de Caen, de Rennes el de Cuingamp {à Saint- On ne sait rien des premières abbesses qui
!!ricucl, de La Uochelle el de 'l'ours. ()ui oui l'ont gouvernée jusqu'en l'an (i(v2, si ce n'est
élé rélaldies, l'inslilut a aujcurd'hui des que sainte Angadresmc y fut einoyée p.ir
eLiblissenienls à Toulouse, à Nantes, à sainl Oneu, an hcvéque de Roncn, pour eu
Lyon, à \'ers,iill< s , à .Marseille, à N'alcnce, être abbesse; el on n'est pas mieux insirnit
à lies.in^ou , à Rlois , à .Monlauban (!l au de ce (|ui est arrivé à celli! .ihb.iv e depuis la
Mans. mort de celle saiiile, qui ai'ii\a l'an (07,
Nous croyons ces trois ileriiiers plus nou- jusqu'en l'an 8(i0 , qu'elle fut enliéreinenl
veaux que ceux qui les prétèdenl. Le nu)- deiruile par les Normands, doni les reli-
naslèrc! de 'l'ours a envoyé une colonie à gieuses évilèrenl la luieur el la hailiarie ru
Angers ; mais cet élahlisseinenl d'Angers, se nfugianl dans la ville de Heanv.iis avec
« tmiiii sons le nom de Maison du liim P.is- le corps de sa'nle Angadresme. (]i>miiuMl n'y
ttiii d'Au^jeis, s'est s.é)iaré des aulrcs, s'est avait point d'.ipiiartnce de les voir hicntùl
jir;
NOT
NOT
1161
rétablies, Rudes I ', cvéqiie de Beauvais,
voyant que les seigneurs voisins et autres
jiersonnes séculières s'emparaient tous les
jours des Itiens de cotte abhiiye, demanda la
jouissance de ces biens au pape Nicolas 1"'
et au roi Charles le Cliauve, afin qu ils fus-
sent unis et incorpoésà la niense épisco-
pale; ce qu'il oblitil l'an 8G3, à condjiion
néanmoins qu'il Dourrirail et entretiendrai!
les religieuses sorties de ce monastère, et les
rétablirait le plus tôt qu'il lui serait possible.
L'évèque de Beauvais , ayant accepté ces
eoiidiliuns, se mit en possession du revenu
de cette abbaye, sans aucune opposition do
la part des religieuses. Il en disj^osa comme
de son propre; ce que firent ausvi ses suc-
cesseurs, sans songer à la réparation ni au
rétablissement de ce monastère, quoiqu'ils y
fussent obligés; mais Drogon étant monte,
dans le x' siècle, sur ce siège épiscopai, fil
IravailliT en diligence au rétahlissemenl de
ce monastère, et lui rendit tous ses biens,
avec !e village de Saint-Paul. La première
.•ibbesse de ce nouveau monastère fut une
saillie fiile appelée lierthe, qui y établit les
observances régulières. Elles y lurent main-
tenues par celles qui lui sutcéilèrent, et il
s'y présenta un si grand nombre de filles
dans la suite, pour y prendre l'habit de
l'ordre de Saint-Benoît, que ce monastère de
Saint-l'aul n'étant pas suffisant pour les
contenir touies, on bâtit quatre prieurés, où
on envoyait des religieuses qui élaieiii tou-
jours soumises à l'abbesse de Saint-Paul. Le
premier fut fondé à Potumereux, b' second à
Ezenuille près de Pans, le troisième à Sainte-
Hove-aux-Cbamps, et le quatrième à Eplu-
ques. La clôture l'ut établie à Saint-P.iul par
Pernelle ou l'clronille de Coudiène, qui avait
été élue abbesse l'an liGO; elle dressa aussi
des constitutions qu'elle fit approuver et con-
firmer par Jean de Bar, évéqtie de Beau vais ;
mais il y cul des abbesses ilans la suiie (jui
négligèrent de les faire observer. La clôture
ne fut plus gardée, et si de temps en temps
il y avait quelques abbesses qui rétablis-
saient les choses, il en venait d'autres qui
les détruisaient. Cependant les désordres ne
furent pas si grands dans celte abbaye que
dans une infinité d'autres, où les religieuses
menaient une vie toute séculière. Mais sous
le gouvernement d- Charlotte dô Pcllevé,
nièce du cardinal de ce nom, le monastère
ayant beaucoup souffert par la famine ((ui fut
presque universelle vers l'an 1586, et ayant
été brûlé deux fois par accident et une fois
p.ir la fureur des soldats du comte de Uein-
grave, les religieuses furent obligées d'en
sortir pour aller chez leuis parents, où elles
ne s'embarrassèrent guère des observances
régulières. Mais Madeleine d'iiscoubleau de
Suurdis, qui succéda à Charlotte de Pellevc
r.in 1596, rétablit dans ce monastère la par-
laite observance et remit cette abbaye pres-
que dans le premier étal de sa fondation.
Madeleine d'Escoubleau était fille de Fran-
çois d'Escoubîcau, mar(]uis d'AUuis, gou-
verneur de Chartres, premier écuyer de la
giaude écuiie et chevalier des ordres du roi,
et d'Isabelle Babou de la Bourdai-ièrc. Elle
naquit comme par miracle, lorsqu'o.i la
croyait étouffée dans les entrailles de sa
mère, qui, accouchant au septième mois de
sa grossesse et épuisée de forces par les
grands efforts qu'elle avait faits pour mettre
au monde une autre fille dont elle était
grosse en même temps, fit désesi>érer que
celle-ci pût venir à lion terme, d'autant plus
qu'il y avait déjà un jour que la première
était née sans qu'il y eût aucune apparence
favorable pour la seconde. Dès l'âge de sept
ans elle fut envoyée à l'abbaye de Be^umont,
sous la conduite de sa tante qui en était
abbesse, et qui l'éleva jusqu'à l'âge de seize
ans, qu'elle fut nomméi; p.ir le roi Henri IV
à l'abbaye de Notre-Dame de Saint-Paul près
de Beauvais. 11 y eut à ce sujet quelques di-
visions dans celle maison, où des religieuses
prélendaient maintenir le choix qu'elles
avaient fait d'une religieuse d'entre elles
pour abbesse; mais tout fut pacifié à l'arri-
vée de Madeleine d'EscoubIcau de Sourdis.
qui prit possession de celte abbaye le 11
avril 1596; elle y fut reçue avec beaucoup
ile joie par toutes les religieuses qui étaient
naturellement portées à la parfai'e obser-
vance et aux exercices de leur profession;
mais comme celle nouvelle abliesse n'avait
encore que l'habil île novice, elle ne prit
l'administration du temporel qu'au mois de
septembre suivant, qu'elle fit sa profession.
Quoiqu'elle n'obtint ses bulles que cinq ans
après, à cause de son jeune âge, elle no
laissa pas de conduire celle maison, tant pour
le spirituel que pour le temporel, sous la di-
rection de l'évéque de Beauvais : sitôt qu'elle
cul ses bulles et qu'elle eut éié bénie par
Henri d'Escoubleau de Sourdis, évê(jue de
Maillczais, son oncle, elle travailla, par le
conseil de ce prélat et du cardinal de Sour-
dis, son frère, à remettre en vigueur dans
cette maison la parlaiie observance des rè-
gles; elle fut beaucoup aidée dans celle en-
treprise par les Pères Bénédictins réformés
de lacongrég ition de Saiiit-N'annes et par le
P. Ange de Joyeuse, capucin, aussi bien que
par le P. Honoré de Champigni, du même
ordre. La clôture y avait déjà clé réiablio
par ses soins, malgré les oppositions t. ml du
dedans que du dehors; ainsi il ne restait plus
qu'à réiormer quelques abus qui s'étaient
glissés dans les observances régulières. Elle
commença par remettre l'usage des chemises
et des draps de serge aussi bien que celui
de dormir avec l'habit : elle rétablit le tra-
vail en commun, qui coramenç i à se faire
dans sa chambre en silence, après lequel
elle ne manquait pas de leur faire une exhor-
tation pour les animer à la pratique de la
rèt;ie. Elle établit les matines après minuit,
suivant l'ancienne pratique de cette maison.
Elle s'étudia surtout à faire célébrer l'office
divin avec l'tionneur et la majesté convena-
bles ; et elle ôta certains privilèges d'exemp-
tion par lesquels les religieuses prétendaient
avoir droit de se dispenser certains jours de
matines et des heures canoniales. Elle re-»
trancha aussi les abus des conversations se-
Il
DICTIONNAll'.E DES OnDUEÇ HELlCirci X.
l!.':o
riiliircs (Inns les l'Hirs et dans les parloirs,
qu'elle (il fermer le jour el l:i nuit, ii!l«i (juc
(lersonne ne parlai sans sa pernii-si'i<.
Ouaiil à rabslinencf pcrpéluelic ite la vi inile,
l'Ile avait (le.sscin (le Tiiilroduire; mais elle
en fui dissuadée par l'évèciue de Beaiivais et
par quelques autres personnes qui lui con-
seillèrent d'en pernieilrc l'usa^ic iriis fois la
semaine, tanl à cause de la délicatesse el do
l'iniirtuilé de la plupart des religieuses de sa
cnnimunaulé, qui souffraient beaucoup de
l'air incommode el malsain de leur monas-
tère, qu'à cause de la difliculiè qu'il y avait
d'avoir du poisson pour le grand nombre
qu'elles étaient.
Il y avait encore à réformer l'habit que
l'on y portait depuis cent ou si\-viiij;ls ans,
qui consistait en un surplis de toile noire
par-dessus la robe (1). Quelques religieuses
s'opposèrent forlement ci ce changement;
l'cvéquc de Ceiuvais ne l'approuvait pas
non plus, mais elle surmonta enrore toutes
<es diflicullés et fit prendre à ses religieuses
l'habit qui est commun a:ix autres rc ligicuses
de cet ordie, qui consiste dans la robe, le
scapulaire et la roule. Kniin elle n'omit rien
piur faire revivre l'esprit de sa nt Benoît
•tans son ab;aye, en en reiranclianl les abiiS
('.) Voij., à la lin du vol., n» 2a9.
qui s'étaient f{!isscs dorant 'o ma'lieiir des
guerres. Elle fil dresser un formulaire dî»;
constitutions qu'eil'' fil obscr\cr à li lettre,
après les avoir tait recevoir par la roramu-
naulé, qui s'engagea à ne faire j imais aucun
cbangcmenl dans la pratique de luul ce qui
y était lontinu. Celle acceptation se fil le 10
février île l'année 1600. La sainteté de ces
religieuses se répandit de tous côtés; plu-
sieurs supérieures de différents monastères
nrièrenl l'abbessc de Saioi-l'aul de leur en-
voyer de ses filles pour y rétablir la régula-
rité : ce qu'elle accorda à quelques-unes,
entre autres à celles de Sainle-Austreberle,
près de .Montreuil, el de Saint-.Xniand de
huuen. Elle envoya aussi les règlements qui
avaient éié faits pour le bien de son mouiis-
tère aux abbesses de Vlllc-Chasson, de Neu-
bourg, de ISellefonds el de quelques autres
monaslèr< s qui les avaient demandés. Enfin
labbesse de Saint-l'aul, après avoir gouverné
ce monastère pendant soixante-neuf ans, et
y avoir établi une parfaite observance, mou-
rut le 10 avril llitJo, étant âgée de 85 ans.
Clironiq. général, de l'ordre de Salnl-lie-
iioil, tom. \ 1.
>()riU:->ALVEUR. Voyez Sauveur.
NUYS. Vvyez Val-Vekd et Vindesi;im.
ARTICLES ADDITIONNELS.
BEP.NARDl.NES .RErjciEisEs).
Les religieuses lîernardines (1), suppri-
mées comme tous les autres insliiuls , en
1790, ont mis, généralement parlant, peu
de zèle à se rétablir en France. iSous
aurons à parler de la conscrvalion de l'or-
dre p.irnii nous, puisque les religieuses
de l'ort-Hoyal et celles de la Trappe en
font partie ; mais de l'observance commune
de Ctleaux, il n'y a tout au plus que trois
ou r|uatre maisons, peul-èlre moins encore,
()iii se soient reeonstiluées. Nous citerons
celle ipii existe à Saint-I'anl-aux-ISois , dio-
cèse de Soissons, et une aulre au diocèse
<!e Cambrai. Celle-ci a élé formée par les
anciennes religieuses, de l'abbaye de l'Iines.
i;u l'année IHlï , elles firent qufbiues tenta-
tives pour prendie l.i réforme de la Trappe.
f/évéquc, (juoique ancieu constitutiomiel ,
ïecondail leur désir. Une colonie de qucl-
«liies lra]ipistes du monastère Sainlc-Ca-
Ihcrine de l.awil , s'y rendit sous la con-
duite de la mère (iirlrude, religieuse el
.sd'ur de la supérieure de celle dernière
maison. Des raisons parlieulicres empé-
chèrenl celle réforme, cl les Dames Trap-
pisles revinrent à leur monastère de La-
val. Les nernardines ont une maison à
Home, dirigée p.ir des prêtres séculiers;
«Iles e i ont peu, croyons-nous, dans l'Ita-
lie; quelques-unes d ins les autres con-
trées de l'Europe , el même en Anglcierre.
puisque le monastère des Dames 'Ir.ip-
] isles a|ipartieul à cet institut. Il doil en
conserver quelques-unes dans les coniréec
occidentales de la Uussie . et même dam
les Klals autrichiens : cepend.inl nous n'en
trouvons aucune indiquée dans la statisti-
que des communautés de ce dernier pays,
que nous avons acluellemenl sous les jeux.
Si.'us terminerons ces additions par quel-
qnes détails parlieulicrs sur la maison lUî
Sainl-l'aul-a x-Hos. Celle maison fut for-
nïéc quelques .-innées après le concordat,
par le zèle d'une anc ennc Rernanline ,
madame Pauline du Castcl , qui s'associa
plusieurs de ses anciennes compagnes, <•!
qui gouverna sigemeul sa nouvelle com-
munauté jusqu'à sa mort, arrivéi' en l'an-
née 1833. .Madame Stéphanie d'Alineomt
lui a succédé dans la place de supérieure.
Celte communauté était, en 1830, com-
posée de seize religieuses de ch<i'iir, huit
S(rurs converses, et cjualre postulantes, lilie
suil, avec la règle de saint Benoit, mitigée,
ries constitutions appri.u\ees par l'evéque
de Soissons, qui en est le supérieur.
{Noies recueillies passim , cl d'un mémoire
fourni pur la révérende mère Stéiihnnie rf'-J-
Imcaurt.) H-D-f.
(I) Vt.i/. r.irl. l!i iiN.uuiiNF.s, loin. 1''', cil. U'-'i.
1137 ARTICLES A[)D; TiONNF.l.S.
FXOLES CHUÉTIENNRS , dtc. (I^.
« Fn 177G, les Dames de Snint-Mnur
( c'est à-dire les s:rurs de rKnfaiit-Jésus
dont il est parlé dans cet article ) furent
cliargôcs du pensionnat de Lévignac , au
diocèse de Toulouse, établi sur le modèle
de relui de Saiiit-Cyr. L'ii stitut comptait
environ cent maisons et six cents sujets
en exercice à lépoque de 1789 ; la mai-
son clicf-lieu jouissait alors de vingt mille
livres de renie. Mais nous ne devons pas
omettre qi:e la congrégalion primitive s'é-
l.'iit partagée en deux, dont l'une, sous
ce nom de Dames de Saint-Maur , s'était
propagée principalement dans le Midi, et
nous en avons donné pour exemple leur
pensionnat de Lévignac ; l'autre , dite de
la Providence , avait formé plusieurs mai-
sons en Normandie et en Picardie. Mais ,
en 1791, les Uaines de l'instruction chari-
table furent L'bassées de tous leurs élablis-
fcments. » {Ilislvire des Ordres reWiicux ,
par M. Henrion , tom. II, p. 303.) Comme
c(;tle utile congréjialion a eu une existence
nouvelle et paraît être sur un nouveau
pied depuis l'année 1896, nous lui con-
sacrerons un article spécial , dans le Sup-
plément, sous le liire de Dames de Sainl-
Miiur, qui lui semble plus convenable
aujourd'hui, ou plus communément donné,
que le nom de Filles de l'Enfant-Jésus.
Les sœurs de V linfant-Jésus , qui s'étaient
fort répandues dans tous les quartiers de
l'aiis, étaient considérées comme une fonda-
tion de madame Dourdin , supérieure de tout
l'inslilut. Au milieu du dernier siècle, l.i
maison élail composée de trente religieu-
ses, et elle servait de noviciat à tous les
établissements des provinces. On n'exigeait
point de dot des sujets qui se présentaient ,
mais on leur demandait 1200 livres de
pension pour le noviciat, qui durait deux
ans , ai rès i.ix mois de po--lulût. B-d-l-.
FIIANCISCAIISS EN GÉNÉRAL (2J.
L'état où se trouvait le corps vénérable
de saint François d'Assise depuis sa mort
est resté longtemps inconnu. Une Iradilion
erronée faisait très-souvent écrire que le
saint fondateur élail debout , les yeux fi-
xes vers le ciel , el dans l'altitude de con-
templation qu'il eût pu prendre pendant
sa vie. \'oiii ce qu'il y a de vrai sur sou
inhumation el sur l'état de ses précieuses
reliques. Le corps de saint François avait
été mis dans une urne de pierre el in-
humé d:ins l'église Saint-George. En 1230,
deux ans après sa canonisation , il fut
Iransféré, par les teins du P. Elle, qui
iiciait plus général alors, mais qui don-
nait à l'ordre toute son inielligence et tout
son zèle; il fut transféré, disons-nous,
dans l'église i euve bâtie sous son invo-
cation. Dans la crain-'.e de voir son insiitut
pri\é par une spoliation quelconque de ce
(1) Vo,j.
C-. I l-2i.
sacré dépôt , cl de dom^er une occasion
d'ètonnement aux esprits faibles, qui sa-
vaient que le corps de François était de-
tenu flexible au moment de son décès ,
mais qui ignoraient que depuis ce temps
il était entré en putréfaction , le P. Elle ,
par une précaution étrange , fit transférer
le corps dans l'urne, et le fit enlever, par
une violence simulée , par les bourgeois
d'Assise , qui expulsèrent tout le monfic
de l'église et l'enlerrèrent si seciètemeni,
qu'un très-peiit nombre connut la place
de celle sépulture dans l'église , et ijue,
ceux qui la connaissaient étant morts, per-
sonne ne sut véritiblement où la cher-
cher. Le pape, qu'on avait imprudemment
laissé dans l'ignorance de la précaution
dont nous venons de parler, fulmina con-
tre les prétendus coupables, mais on l'a-
paisa bientôt , en lui expliquant les faits
et leurs mollis. On doit en juger ainsi ,
puisque les Frères Mineurs ne quittèrent
point celle église , quoique le souverain
pontife eût mis le couvent en in erdt ,
avec défense d'y tenir le chapitre général
de l'ordre, jusqu'à ce qu'on lui eût fail
sa'.isfaclion.
Ces précautions firent qu'après la mort
du petit nombre <ie témoins qui avaient
assisté à ces funérailles jusqu'à la fin ,
on perdit bientôt la connaissance exacte
du lieu où François avait élé inhumé.
Aussi les anciens historiens de sa ^ ie se
contentent de dire en général ({u'on con-
serve son corps dans l'église basse du cou-
vent d'Assise , sans rien désigner ni sur
l'état ni sur le lieu où il est.
11 faut convenir qu il est bien surpre-
nant qu'on ait altendu jus(iu'à nos jours,
dans l'ordre puissant el fameux des Fran-
ciscains , à recherctier avec ardeur les reli-
ques du saint fondateur ! Paul V, en 1007,
voyant les discussions qui régnaient entre
les religieux sur l'état de ces précieuses
reliques , défendit de faire aucune fouille
dans l'église et le couvent d'Assise pour
les trouver. En 1773, le P. Papinio , gé-
néral des Conventuels , fit , avec la per-
mission du saint-siège , des fouilles qui
furent sans résultat.
Après la chute de lîuonapa-le , en 181V,
les fidèles d'Italie reprirent l'habitude de
fréquenter le pèlerinage de Saiiil-Kraneois
à Assise, et on y en voit une foule considé-
rable à l'époque de la fêle de Notre-Dame
des An^^es, qui se célèbre le 2 août.
En 1818, avec la permission du sou-
verain ponlife Pie Vil, le lî. P. Joseph-
Marie de Bonis, supérieur général d(! soi»
ordre, fit fouiller de nouveau; el après un
travail opiniâtre, continué pendant ein-
quanle-deux nuits , et ce en gardant le
(ilus grand secret, dans la nuit du 12 dé-
cembre 1818 , on découvrit , sous I auiet
de l'église basse ( car il y en a deux su-
perposées , el non trois, coir.mc plusieurs
l'ait. Ecoles chrétiennes, ci-déssus, ["i] Voy. l'an. Fiianciscai.ns, ci-dessus, coi. 5;Gv
Hr,?, DICTIONN VIRE DES ORDRES RELIGIIXX. <1C0
l'oiii cru \ le ci>rps du saint f.indnloiir. Il dr> sos branrlios. A.luollomcnl encore los
tallail une reccMUKiisf.anco aullicniique de Clarisses, 1rs Capucins, les n ligieux de
<es précieux rc.slcs. I.e pape . qu'on in- la reforme de Sainl l'ierre d'Aleanlara, etc.,
lorina aussiiol de la dèeouveile, nomma rappcllonl ce (ju'elait l'inslilul des Frères
Ml. e coinriiission composée de Icvéque d'As- Mineurs au treizième siècle; cl dans cha-
siso et de quatre evéques voisins de cette que province de l'ordre, on tient à con-
ville , jiour examiner < l iirononcer sur l'i- server, dit-on . au moina une maison de
dentité du corps i!e s.iinl François. L'en- récolleclion , où la lègle est observée aiec
qiiéie eut le résull:il ilcsiré et prévu ; deux plus de ponclualilé. Ainsi, par exemi)le ,
nilIal•le^ opi^rés par l'inU-rccssinn de .>.aint jusqu'à la suppression récente des ordres
l'iançois , dans ces circonst.inces , vinrent religieux en Espai;ne , sous le règne d'isa-
oncMC ajouicr à la cerliludc qu'on a\ait belle . des qnaranli'-sepi couvents que pos-
constatée , cl il ne put rester douteux séilail la province des Observantins de Mur-
P'nir personne que les reliques qu'on avait cie ou tlarltiagène, il y avait sept ou huit
découvertes sous l'auiel d'Assise, où la maisons de Kdculleciins , c'est-à-dire de
ir.idiiion plaçait celles de sa Ht Fr.in.ois , religieux destinés à mener celte vie de rê-
ne fussent le-i reliques de saint François, collection.
On publia à liome , aussitôt après la fin II y a encore dans la province de Gènes,
de lenquète, un mémoire, format in-l", en Italie, cette suldivis on de celle province
ilenviron deu\ à trois cents pages. M. l'abbé en cusiodies, comme on a vu dans le récit du
Tresvaux , aujourii iiui chanoine de la nié- P. Héljol que cela se pratiquait aulrefois
iropole de l'aris, ayant reçu du P. de Bonis dans les provinces trop étendues. Celle pro-
un exemplaire de ce Mémuire , en corn- vin <• de Gènes est donc sululivisèe en quatre
posa, en l'année 1820, une traduction abré- custodics: on assure que cette distinction
gée , qui est restée manuscrite. Il esl à dans la même famille occ isionne des intérêts
rcgretier qu'elle n'ait pas été donnée au de parti dans les assemblées prov inciales, ce
public ; il est vrai qu'une relation de la qui peut nuire à l'esprit de charité el à l'in-
découverte des reliques de sainl François lérèl général. 11 n'<n faut être ni sur[)ris ni
se trouve dans la dernière édition de lin- scandalisé; tel est le sort des choses que
léressante Vie de ce saint , composée par traitent les hommes, et souvent cet inconve-
le P. (^balippe. nienl est le Iruil de bonnes intentions.
L'ordre de Saint - François d'Assise est Aux détails donnes sur Tordre eniier par
peut-être celui qui a reçu dans l'Eglise le le P. Héljol, nous pouvons ajouter que les
plus d'extension aiéme numérique ; il a Frères Mineurs eurent des élabli^S'uneiiis
surpassé, croyons - nous , non - seulement considérables en Angleterre. Saint François
tous les autres instituts d'Occident , niais y envoya, en 121'J, Ange de Pise avec huit
même ^ill^lllul connu eu Orient sous le nom autres doses religieux. Ils arrivèrent tous à
de Sain -Itasile ; car celui-ci est subdivisé en Douvres en 1220, el fondèrent un couvent ,i
plusieurs société? qui n'ont point le même Cantorbéri ; peu de temps après, ils en Ion-
lien commun que les Frères Mineurs. dèrent un autre à Norlhamplon, qui devint
Ce genre spécial . connu sous le nom de fort célèbre. Celui qu'ils avaient à Londres,
Mendiants , a amené une phase nouvelle près de Newgate, fut fondé, en 1306, par la
dans l.i vie monastique , et semble ne pou- reine Marguerite, seconde femme d'K-
voir être striclemenl designé que sous le douard !"'. Il y avait une magnilique liiblio-
noin de vie religieuse, car il lient une sorte llièque, qui avait éié donnée aux religieux,
lie rang mitoyen entre les ordres tout à l'ait en li29, par sir lUcbard N\'hilliiiglon, alois
monastiques et les sociétés régulières et inaire de Londres. Lorsqu'on eut détruit les
séculières qu'on vit surgir en Occident deux monastères, ou (il de celui dont nous (lar-
ou trois siècles après lui. Cette phase nou- Ions un hôpital où étaient élevés- giiairc
velle esl due au zèle des fondateurs, auv cents enfinis, qu'on appela. t les nifatii.i
be-oins des diverses épo(]iies, .lU mouvc- bleus. Nous ignorons si ce grand hospice
ment particulier de l'Lsprit-Sainl, et non existe incore sur le même pied,
pas uni'iuemenl à toutes les causes que Les Franciscains avaient en Angleterre
semble assigner , en p.irlant des Frères csiviron quatre-vingts couvents , iiidépen-
.Alincurs, un aulcur estimable qui a é( ril damunnl de ceux des femmes de leur ordie,
dans ces derniers temps (1). Nous ne sa- <|ui, selon Tanner, n'ctaient pas fort nom-
vons pourquoi cet écrivain instruit compte brcux. La principale maison des Clarisses
au nombre' des réformes des Franciscains était |rès d'AIdgale ; elle fui hàlie par lilan-
la congrégation des Silvcslrins , qui est che, reine de Navarre, cl par I^dm iiid, son
une réioriiie ou corporation dans I ordre mari, <|ui était fils de lienri ill, Irèri; d L-
de Saint-T.enoit. duu.ird I", et comte de Lanc.isler de Leices-
Si Toriire de Saint-François a subi les ter et de Darby. Ces (]lari>ses éiaieni du
conséiiuences n.iturelles a la faiblesse hu- noinlire rie celles f|u'on appelle Urb.inistcs.
inaine, en dégénerani de sa première 1er- Outre le nom de lilarisscs, on leur donnait
venr, il esl certain qu'il a dans lous les cnc<ue le nom de Mmores.'<rs. Ou ap|ielail
temps, et même de nos jours, conseive leurs couvents ,l/l;io»ic.<. Lors de la ihstru,-
ceile ferveur primitive en quchiucs unes lion des monastères, celui d. s (^l.lrl^scs d.iut
(1) llnluire dct Uiilict religieux, |i.Tr M. Ileiniaiil, tnni. l"', liv. u.
1161
il
ARTICLES ADDITIONNELS.
li!'2
il s'agit fut changé en un magasin d'armes.
Sou nom est resté à la partie de la ville où il
était, et on l'a donni^! aux nouveaux édifices
qui s'étendent usqu'à la campagne.
Pour connaître l'état (lorissuiil dont jouis-
saient les Franciscains en Angleterre, et le
nombre des giands hommes qu'y produisit
leur ordre, on peut consulter la bonne his-
toire de la iirovincc anglaise de ces religieux;
le P. Davenport dans son Supplein. Hisloriœ
provinciœ Afifjlicanœ, et Slévens, iWo»ia«a'-
con Anglicanam, tom. 1. Celle ancienne pro-
yijice fut rétablie par le P. Jean Jenpings,
qui jeta les fondeijienls du célèbre couvent
des Franciscains, à Douai, vers l'an 1617.
De tous les religieux de cet ordre qui ont
fait revivre en eux l'esprit de saint François
dans les derniers siècles, on peut citer avec
Godescard le P. Paul de Sainte-Madelèno
(Henri Heart), comme oo peut le voir dans
sa Fie, qui a éié publiée, et dans ses écrits.
On a vu le chiffre auquel le P. Hélyot éle-
vait la totalité des monastères de l'ordre des
Franciscains. Leur nombre était beaucoup
plus considérable avant la destruction des
jnonastères en Angleterre et dans les con-
trées du Nord. Sabellicus comptait en 13^0,
quinze cents maisons de Franciscains, et
00,000 religiei x. 11 y a ici éyidemment une
erreur m moii>s dans le nombre (|es uiaispns
faite par le copiste de Sabellicus.
Aujourd'hui le nombre des maisons de
l'ordre est bien rétinit, et à dater des inno-
vations faites dans le dernier siècle et sur-
tout des révolutions dont l'Europe a été bou-
l.eversée dans ces derniers temps, l'institut de
St-Françoisa disparu de plusieurs contrées.
Il a pou de couvents, même en Italie, compa-
f aliyement à ce qu'il y en possédait autrefois.
En France, il était fort répandu et y pos-
sédait les branches principales de l'ordre.
Leurs établissements étaient faciles à comp-
ter au moyen de diverses statistiques qui
avaient été publiées, et M. HermanI, dans
son Histoire des Ordres religieux, en a fait,
comme pour les autres ordres qu'il a pu
connaître en détail , l'énumération cu-
rieuse, avec la date de leur fondation.
Le grand couvent de Paris n'appartenait à
aucune province, et il dépendait immédiate-
ment du général. Ce couyent avait été fondé
vers l'année 1217. C'était, pojir la France, le
collège général de l'ordre. Lps natiqns étran-
gères y envoyaient autrefois des jeunes gens
pour les éludes. Depuis, il n'y avait plus que
les seuls Français d'admis, mais ils y ve-
naient (!e toutes les provinces du royaume.
On y faisait prendre le grade de docteur,
dans la faculté de théologie, à quatre sujets
par chaque licence, et cette licence, comme
nous l'avons dit imus-même dans plusieurs
articles publiés par les journaux , durait
deux années. Au piilieu du dernier siècle, la
communauté était poinposee d'envfrou pcnt
vingt religieux ; ce nombre avait diminué à
l'approche de la révolution. Cette célèbre
maison est aujourd'hui l'hôpital, dit (ie la Cli-
nique, rue et en face de l'Ecole de Médecine.
En conséquence des mesures que prit le
DicTiONNAïUE nES Orubes religieux, h.
gouvernement trançaîs sous Louis X\', me-
sures qu'avait amenées et que dirii^ea le
trop fameux lîrienne. arclievécjue de Tou-
louse et depuis cardinal, avec quelques au-
tres évéques prasciuc aussi malintentionnés
et aussi méprisaliles que lui, piusi urs or-
dres religieux, menacés d.iiîs leur existence
(plusieurs périrent), firent de nouvelles coii-
siitutions^ et les diverses branches do Fr;in-
ciscains subirent aussi celle rôvolulion, qui
amena le relâchement dans les ordres qui
ne furent pas détruits. I/elîet le i)lus remar-
quable de celle révolution funesl' fut, dans
l'ordre de Saint François , la réunion des
Conventuels et des Observantins en un seul
corps ; union que demandèrent les Obser-
vantins eux-mêmes, quoiqu'elle les poriâi
au relâchement. Nous raconlcrofis cette
union des deux observances avec quelques
détails à l'article Oushrvantins ; nous nouç
bornerons ici à en consigner le résultai. Les
Observantins avaient huit irovintes en
France, et les j[lonventuels, trois seulement.
Celait aux Oliservantins qu'était donné le
nom de Cordeliers; il était général après l'u-
nion. Les Observantins se réunirent par dér
pûtes, à Paris, en 1769, et les Conventuels à
Aix, l'année suivante. L'effet comme le buj
de ces chapitres nationaux fqt de faire inter-
venir, le 23 juin 1770, un arrêt du conseil dq
roi, ordonnant un chapitre national, cou>-
posé d'un (Jéputé de chaque, province d^s
Observantins, et de six députés pour les
trois provinces des Conventuels. Ce chapitre
se tint en effet, la niéme année, au grand
couvent de Paris, le 17 septembre et jours
suivants. On y adopta, sauf quelques chan-
gements, les constitutions rédigées à Aix
par les Conventuels, et tirées des constitu-
tions urbaines. Deux députés furent envoyés
à Rome pour consommer l'union ; le P.
Pourret de la part des Conventuels , le P.
Husson, de la part des Observantins. Ci's
deux députés furent parfaitement reçus dij
pape Clément XIV, ancien conventuel, cl du
général des Conventuels, qui vit finir le
temps de son gouvernement précisément à
l'époque de leur séjour à Rome. Son succes-
seur, le P. Marzoni, auparavant procureur
général, fut élu le 18 mai 1771, et le pape
présid.i avec trois cardinaux l'asscnitiléc où
se lit l'élection. Par une faveur qui doit pa-
raître singulière, le souverain ])ontifc nomma
vocaux dans cette élection le P. Husson et
son secrétaire , qui sqffragèrent en effet ,
quoiqu'ils fussent encore Observantins et
sous la dépendance du général de leur ob-
servance. L'union fut consonuiiéc dans les
séances subséquentes du chapitre général,
et le pape d(^nna uq bref conûrmatif le U
août suivant. Ainsi fut consommée celle
réunion des Observantins avec les Conven-
tuels, et ce n'étaient pas ceux-ci qui l'avaicnl
recherchée. Celle affaire, qui montre à quel
point de relâichement étaient venus certains
insliluls en France, surtout sous rinfluence
de la commission des malheureux évéques,
offrit plusieurs incidents et détails curieux ;
nous en parlerons, disons-nous, plus ioij.
37
ItG'i
DICTIONNAIRE DRS ORDRES RELIGIEUX.
iiei
piionicnl A l'arlirlo ()nsi:iiv antins. Il nous
Millil de (lii (• ici c|ut' l'Iiabil el It-s roulumes de
l'ohscrvniice do St-rr;in(;<)is.iv;iieiil disparu en
Kr.incc avant la dcslruitioii dos monastères.
Los conclusions de celte malheureuse com-
mission des rcf;uliers dans l'edil porté en
17C8. et confirme dm ans plus tard, prescri-
vant (|ue tous li's monastères libres ne ren-
fermant p.is seize religieux de cho'ur, et les
moiui'.tères liés à des congrégalions n'en
reufeniiant pas huit ou neuf, seraient sup-
primés, ces conclusions dison:<-nous, ne fu-
runl pas rigoureusement suivies, car à l'é-
ji()i]ue de la révolution plusieurs maisons,
flans tous les ordres, n'avaient que trois ou
ijuatre i-ujcis. Les Franciscains , surtout
idnventuels , et même des Hécollels, elc,
étaient dans ce cas.
Nous dirons lout de suile que l'assemblée
Tiatioiiale, ayant détruit les ordres religieux,
ilé( réta, le 18 lévrier 171)0, que la pension
des .Mendiants serait dilTérenle et au-dessous
de celle des religieux non Mendiants. Les
C.ordeliers du grand couvent de l'aris en-
voyèrent une adresse à ^as^emblée natio-
nale. Dans cette adresse, qui a été ioipri-
inée, ils avouaient qu'ils se faisaient gloire,
il est vrai, d'être de celte classe de religieux
qui, étalilis pour prêcher l'Kvangi'e et sans
autres fonds que la Providence, n'avaient
jamais eu défense, par leurs constitutions,
tle posséder des immeubles; qui au con-
traire en avaient , par la succession des
temps , suflisammenl amassé pour donner
une honnête subsistance aux religieux et
l'enlrelion des couvents. Mais, disaient-ils, si
l'assemblée constituante appelle Mendiants
uniquement les rdigicux qui vivent de quê-
les journalières, alors ils ne pouvaieni, eux
Conventuels, se reconnaître dans cette caté-
gorie, puiscjue chez eux, comme chez les
moines, chaque religieux, avant l'émission
de ses vœux, est afiilié à une maison quel-
conque, et ce, sous jjeine de nullité des
vœux, chaque maison n'en prenant que ce
qu'elle en peut nourrir. Leurs constitutions
anciennes et nmdernes, surtout celles enre-
gistrées au parlement, en 1771, sont la preuve
de leur possession de biens immeubles, per-
mise d'ailleurs au concile de Trente. Ils ajou-
taient que dans l.i déclaration de leurs biens,
faite au mois de janvier à la municipalilé de
l'aris, ils produisaient plus de trente mille
livres de renies foncières, sans compter la
partie de leur local occupée depuis le mois
de septembre par le bataillon soldé du dis-
trict qui porte leur nom {District des Corde -
liers), et dont le loyer pourrait êlrc évalué
au moins à six mille livres, et sans y com-
prendre d'autres retenus, éventuels à la vé-
rité, mais qui n'ont rien, disaient-ils, de
commun avec le produit de la quéle et de la
men licite. C est sur <e qu'ils sont rentes cl
non Mendiants, qu'ils étaient com.oris au
nombre des i ontribuables dans les iinposi-
lions du cierge, et que la chambre ecclésias-
tique du diocèse les a taxés, ajoutent-ils. à
la bomiiie de iUKi liv. 15 décimes. La maison
lie l'uris ne doit rien, son avoir surpassant
ses dettes de plusieurs mille livres, elc. Ce
raisonnement, bien que contestable au point
(le vue canonique peut-être, avait pourtant
son poids de\ani l'assemblée naiionale.
Néanmoins mius croyons que l'assemblée at-
tachait au nom di^ Mendiants le sens qu'on y
attache commuiiéincnt dans 1 Kglise. L'a-
(Iresse dont nous parlons était signée du
H. P. Claudc-.Agréve Lacombe, ganlieii, qui
a survécu à la révolution, et n'est mort (|u'a-
près la restauraiion des liourbons. Il avait
rétabli à Paris l'arçliiconfrerie du Saint-Sé-
pulcre, dont la légalité a soufl'erl quelque
contestation. Mlle était également signée du
sccréairc du chapitre, le P. Joseph Jiour-
gnde, que nous avons connu nous-mème, et
qui n'est mort qu'après la révolution de 1830,
étant aumônier de l'hospice de Bicêtre.
A l'époque de la révolution , plusieurs
Franciscains cédèrent au mouvement du
jour, et l'histoire conservera le no n scanda-
leux du P. Chabot, capucin. En revanche, on
trouve, à l'art, de ces religieux, un exemphi
éilifiant.qui c.impense largement ce fait isolé.
Au dernier siècle, les Franciscains ont
continué les servies qu'ils rendaient à l'K-
glise dans le ministère de la prédication, de
la direction des consciences, des missions à
l'intérieur et à l'étranger, et mêaïc de l'en-
seignement. Ils ont fourni aussi à l'Eglise
des prélats, des cardinaux ; ils ont eu même
le triste honneur d'ajouter un cin(|uième
pape aux quatre qui avaient été jadis tirés
de leur corps, et ce cinquième pape est le
P. Canganelli, portant le nom de Clément XIV.
Il était de la famille des Conventuels, et il
eut la faiblesse de céder aux inslances qui-
la philosophie cl l'impiélé lui faisaient faire
par l'organe des princes, surtout de la fa-
mille des Baurbons, pour l'abolition des Jé-
suites. Depuis l'époque à laquele le P. Hc-
l)ot s'est arrêté dans leur histoire, ils ont
continué de donner au ciel des saints et des
bienheureux, sortis des différentes branches
de leurs familles, et à la terre des exeu)ples
d'héroïsme et de perfection.
Ils avaient à Home, au dernier s ècle,
trois maisons d'Observantins, cinq ou peut-
êlre six maisons d'Oiiservantins réformés ;
une maison de Capucins ; quatre maisons,
plus un collège pour les missions d'Orient,
occupés par les Conventuels ; deux maisons
de religieux du tiers ordre; une maison de
reformés du tiers ordre; en somme dix-sept
ou dix-huit maisons d'hommes : une d'Ur-
banistes ; deux de Capucines ; quatre de re-
ligieuses du tiers ordre; en toial, sept mai-
sons de femmes, sous la direction de prêtres
séculiers ; trois de Franciscaines de l'obser-
vance, une de Capucines ; en tout, quatre de
femmes, dirigées par les religieux de l'ordre.
Lorsque le calme se rétaMit en Kurope,
après les secousses révoluiionnaires arri-
vées à la lin (lu dernier siècle et au comineii-
cernent de celui-ci, un grand nombre de mai-
sons de Franciscains, qui aï.iient disparu, se
rouvrirent et reçurent des sujets nouveaux.
L'indre a des <-ouvenls actuellement, non-
seulement en Italie, mais en dtfl'crents États
IIGS
ARTICLES ADDITIONNELS.
tlC6
de l'Allemagne, du Nord, tels que l'Ansle-
lerrc, l'Irlande, la Holhindo, la Belgique, etc.,
mais aussi en France el dans toutes les con-
trées méridionales. 11 a des missionnaires
partout el aussi dans les pays protestants.
La Russie, dans ses actes brutaux contre le
catholicisme, sous l'empereur actuel, a fait
ressentir ses injustices aux Franciscains
comme aux autres ordres religieux. Dans la
seule province de Mohilow deux cent vingt-
un monnsièrcs furent supprimés en 1832;
sur ce nombre, il y en avait sejU de Capu-
cins,cinq restèrent; trente undeFranciscains
de la commune observance, dix restèrent ;
deux de Franciscains réformés, un resta.
11 y a actuellement 706 couvents dans
les Etats de l'empereur d'Autriche, entre
lesquels on compte 2W maisons de Francis-
cains ; 98 de Capucins. 11 y a aussi 137 cou-
vents de femmes, au nombre desquels sont
dix maisons d'Elisabéthines, cinq maisons
de Franciscaines, six de Clarisses propre^-
ment dites, deux de Capucines,
Nulle part l'ordre de Saint-François d'As-
sise n'avait été aussi florissant qu'en Espa-
gne, et, après les bouleversements dont nous
venons de parler, il s'était rétabli au point
qu'on voyait dans ces derniers temps cent
religieux dans le couvent de Barcelone. Il y
avait dernièrement, si nous sommes bien in-
formé , quatre provinces d'Observantins ,
distinguées chacune par la couleur de l'habit,
des religieux. Ceux de Barcelone, que nous
venons de citer, étaient vêtus d'une tunique
bleue. Cette couleur parut nouvelle en
France, lorsque les religieux espagnols y fu-
rent transférés en qualité de prisonniers,
sous le règne de Buonaparte, car on ne con-
naissait point chez nous de Cordeliers bleus.
Les dispositions insensées prises par Fer-
dinand VII mourant ont amené en Espa-
gne le rè^ne d'Isabelle et tous les malheurs
qui ont résulté de la régence tyrannique et
impie de ia reine Christine. Un des coups les
plus sensibles portés à la religion a été la
destruction des ordres religieux, à l'excep-
tion des Ecoles Pies, conservées sans doute
])ar le motif que nous avons indiqué ci-des-
sus à l'article de cet institut. Trois monastè-
res d'hommes on tété conservés pour pépinière
ou séminaire des missions étrangères ; or,
de ces trois monastères, deux appartiennent
à l'ordre de Saint-Augustin, un à l'ordre de
Saint-Dominique. L'ordre de Saint-Fran-
çois n'a point été apprécié. Quand on chassa
les religieux de leurs asiles, il y a quelques
années , le syndic ou maire de la ville de
Zehcgin conserva encore pendant six ou
huit mois les Franciscains de cette localité,
disant qu'il répondait du mal qu'ils pour-
raient faire. La maison (|u'il maintenait
ainsi était de la province de Carthagène et
occupée par des Pères missiannaires; elle
était une de ces maisons de récolleclion que
nous avons mentionnées ci-dessus. Les Mur-
ciens vinrent brutalement la faire évacuer.
L'ordre de Saiiit-François qui sert encore
l'Eglise dans les deux Amériques, dans les
Mussions orientales, dans le Levant, a tou-
jours l'insigne honneur de desservir l'église
du Saint-Sépulcre, où le g.irdien a les insi-
gnes pontificaux pour célébrer. 11 a aussi
une maison à Bethléem.
On voit aujourd'hui à Rome les supérieurs
desObservantins dont le corps est divisé en
provinces ultramontaines (aujourd'hui sans
supérieur, à moins qu'il n'ait été nommé de-
puis peu) el provinces cismonlaines, qui ont
pour ministre général le R. P. Joseph-Ma-
rie d'Alexandrie de Sicile, et pour procureur
général, le P. Louis de Lorctte. — Le supé-
rieur des Observantins réformés, qui est le
II. P. Ange de Locara, procureur général.
— Le P. N., procureur général des Réformés
de Saint-Pierre d'Alcantara. — Le supérieur
des Frères Mineurs conventuels, qui est le
11. P. Ange Rigoni ; el leur procureur géné-
ral, qui est le P. Jean Ferrini. — Le ministre
général des C:ipucins, le P. Eugène de llu-
nielly ou dellumilli, et leur procureur gé-
néral le P. Louis de Baguaja. — Le général
des Franciscains du tiers ordre, le P. Ga-
briel Conticelli , et leur procureur général,
le P. Sauveur Guerri. L'ordre a aussi ac-
tuellement à Home quatre maisons de fem-
mes, dirigées par des prêtres séculiers; ce
sont les Clarisses Urbanistes; les Francis-
caines «lu tiers ordre ; les Capucines ; les
religieuses réformées du tiers ordre, à Saint-
Ambroisc ; jet deux maisons, les Franciscai-
nes de l'observance el les Capucines, diri-
gées par les réguliers.
En France, dans les contrées du midi,
quelques ermites portent le costume du tiers
ordre régulier de Saint-François; le ticr^
ordre séculier est conserve à Paris et en
plusieurs localités; il y a aussi en plusieurs
villes des maisons de Clarisses ou de reli-
gieuses du tiers ordre ; nous avons vu à
l'article Capucins , que cette édiOanle ré-
forme est aujourd'hui vivante parmi aous.
On a fait aussi, depuis la restauration des
Bourbons, diverses tentatives pour rétablir
des maisons d'hommes des autres branches
de l'ordre. Vers 1818, le P. Humbcrt, proje-
tant ia résurrection des Conventuels, publia
un petit prospectus, qui excita la critique
des jansénistes dans le premier volume
de la Chronique religieuse. 11 n'avait pas,
croyons-nous, ce qu'il fallait pour ressusci-
ter l'institut, non plus qu'un laïque, M. Tis-
sot, di.l P. Hilarion, qui vécut, jusqu'en 1830,
avec quelques personnes auxquelles il fai-
sait porter l'habit des Récollets. — Actuelle-
ment, sous la bienveillante protection de
l'un des plus dignes évêques de France, qui
comprend ce (jue vaut l'état religieux, Mgr
Parisis, évoque deLangres, dont le nom est
héni dans toute l'Eglise, on essaye de réta-
blir l'ordre de St-François, à Monligny. A la
Icte de cette entreprise inériioirc est notre
pieux ami, le R.P.Charles Pouzzot, profès chi^z
les Conventuels de Rome, en 184.6. Si, comme
nous en avons l'espérance. Dieu bénit celte
palingénésiede l'ordre, nous lui cons.icrerons
un article dans le Supplénieiit. B.-d.-e
BIBLiOTHECA
-pNaviensia
N° I. — Ancien Pciiéilictin de l'ab- N° 2. —Ancien Bénédicliii de l"ab
b:iyi> de Salni-Den.is, en habil or- bayft de Saint-Denis, en habil Je
dinaire de la maison. cbœur.
N" 3, — llosptalicie de Dijon.
^" \. — Uinicsse.
N° 5. — Urli^ii'Mse lin ii;iriline rt'- N" 0.
fiiirnoc de la tongiégiillon tic la
Divine-Providence el de Saiiu-Her-
nard.
Piêlio lie la lliicliiue (^l.i'
tienne, en l'ijnco.
^'' 7.—^ Piètre de la Doclrinc cliié-
tienne, en Italie.
N» 8. — Ueliyiciise de l'ordre de
Saiiit-Duminique, en habit ordi-
naire dans la maison
N'' 0. — Ucliyieiisc de l'ordre de
Sainl-Doiiiinique, avec la tiiapu.
N" 10. — .\ncienne rolij^iense de lor-
drc de Sa:iil-Doniinl(|iie non ré-
foriiici! , du inoiiastèio de Saint-
liaitliélemy, à Aix en Provence.
IS" II. — Rcligiouse de l'ordre de
Saiiil-Doiniiiiinie <lii inoiiaslèrc de
Monllleury, en habit d'biver.
N" 1"2. — An<:ien liaijillement des Re-
liijii'nx lie l'orilrc <le S.iinl-Doniini-
iiue, depuis biir é(ablibsein_iil jus-
qu'en l'an 12iy.
N^ 15. — Ri'li^'iciix tic l'onlre de N° 14. — Religieux de l'ordre de N° 15. — Frère Convers de l'ordre
Sainl-I)l)lnillillll^ , en habit otdi- Saiiil-Doiniiiiiiue , avec la chape de 3aim-Uoiiiin;(nip.
iiaire dans la maison. liOire.
N' 10. — tiii valirr du Dragon rcn- N" 1". — Giicvali'.T de l'Ai-lc Idanclic.
N" 18. — Chevalier du Tusin.
N" 18 bh. — Cheyalierdc rAii»le
Noirf,
N° 19- — (t''ligieiix Iiospiialici- de N- 20. — Frère des Eo'cs Chréiini-
Nolie-Damc de l'Echelle. ncs el Cliai ilables.
N'2t. — Clerc Régulier pauvre fie la N':21 ftis. — Clmnoino. n(!i;iillcr de N" 22. — Cliaii.'iiio R.'giilier i e S ;iiu-
Mcre de Oicu des Ecoles l'ieiiscs. . .Moiilo-Corbiilo , en llalic. Ciisine-lci! Tuiirs.
?*• 2S. — nïcvaîior de l'Kcu J'or.
N° 21. — ClicvaliiT il<' rF.U'|iliaiil et N' 2"). — Aiirioiini' liospilaliôrc du
<lc Uaiicliiotii, fil l*aiieiiiaik. li'-is onlre Je Suiiii-Fraii(;ois, diii;
de lu Celle.
^' 2v. -• llu.-.|iila!ieie du iiiéMie or-
dre, Mile su;ui' de la Kadie.
^■ -27. — Fille de 1 tid.njl-Jeslls.
N' 28. — rdianniiie R('giir.cr de IVt-
ilie de Sailli Jaiques de rFiiée, <ii
liabil de ville.
^'■ ^i). — (;ii:innino Uc;uli.r ilfl l'or- IS° 30. — Uitli^iinsc cliOv:ili("'ic il- N'âl. — Rcligieus" o!icv;ilit';io «II-
(lie (II- Saint-Jacques de l'Eiiéu, cii l'orilio de Saiiil J:i((iiils de l'Epcr, l'oidrede Saini-Jacqucs de l'K|ié.:i
ttilbil de eliœur. (mi habit uidiiialre. en liabit de chœur.
N" 52. — ClicvaliiT de l'ordre de N" 5.3. — Chevalier de l'ordre de
Su iilJari|iics de l'Kpée, en Espagne. Saiiit-Jacnucs de l'Epée, en Tor-
llli,':d.
N' 54. — Cl;cvulier de l'Epeion.
N" 3S. — Moine df l'orJre des
Eàclnvuns.
N" 36. — Novici> lie l'ordre du Saini-
Lspiit.
N" 57. — Clifvnlier de l'oidrc du
Saiiil-I'.s|iril in Fraiite, iii lialit do
ctii'oiiioiiie.
M
\
i
i
iV 58. — r.liaiioiiie répiilicr cl jiospi-
ulirr de rordic du S.tiiit Ks|iril, m
lialiil di; (lueur, en Italie.
N' 59. — riianninc l('^■n1io^ i-l lio-.pi-
lalicr di' l'urdie du Saint Kspiil, en
|j;<liil de \illi', < n II. die.
N" .Kl. — ('.li.iniiiiic lépulicr tu liefipi-
laliiT de l'oidicdii Sainl-Kspnl eu
France, en lialnl de ilnenr i'Iiiïer.
i^'
Ueligieux du même orJrc Cii
Fiance.
N'i2. — Channine lésnlicr it hositi-
l.-ilicrile l'onlrH du Saiiil-Ksprir on
riilogne, en habil de cliœui-, iniii
riiiver que Télé.
N° ;4^. — Reli','iiMise liospiialirre de
l'ordredii S liiil-E.spi il, on iiiaiilciui,
dans le comté de BourfîognG.
N" 15. — Ri-lisieuso hospiialicre de
l'ordre du Saint-Esprit , dans le
omnic di'Roursogiic, en liabit or-
dinaire dans 1.1 maison.
N" 45. — Ri'ligiruse Imspitalicrc de
l'ordri' du bainl-Espril , en habit
ordinaire.
N° 46. — Religieuse du même oïdie
N° i7. — Rcli^icus élliiopiiri.
N" i8. — Roligipiix éiliiopicn. de Tins- ^" 49.
lilul lie l'iibbé Euslaclie.
ndis'euoc ciliiopioniie.
N' 50. — Chevalier de l'ordre de N 51 — Cli.i|)« iain du môme ordre, N" b-2. — Frère sériant de l'ordre di
hamt Eiiciiiie , en habit de ccrc- en liabii ordinaire. Sainl-Elienne.
nioiiic.
I
W° 53. — Religieuse de l'orJre île N° 54. — Religiensn de l'ordre de
Saint- Klieiiiie, en liabil ordinaire Suiiil Ëlieniie, en habit de cliœuir.
dans l.i tnaison.
N" 55. — Chevalier de l'Etoile.
N° 56. — Béné.liclin Exempt, repré- N" 57. — Même rell;^i('ux, représenté N" 58. — Religieux de Cilc.iux de U
semé par devant. pardcniérc. icfornie de Feiiillaiis.
N- 59. —Religieux iiil'onné de Saint- N'60. — Religieux coiivcrs, du môme N° 61. — Religieuse Kcuillanie.
Bei'iiaid, en lialie.
ordre.
N' fô. — Moine de Fonl-Avelano
avani lu 1 t'Iàcliciucnl.
N" G"i. — Miiinc de FoniAvclane,
apics le iclàclienienl.
N" 04. — Hclipiouse do I onieiiMiil',
coninie elle.', élaienl anciennemeiil
N' 65. — Religieux de FonievrauU N" 66. — Religieuse de FonlevraiiU, N" 67. — Religieuse de Fontevrault,
coinnic ils étaient aiicieMiieincnt. en hnWU ordinaire dans la maison. en babit de cliœur.
In» 68. — Religieux de Fontevrault, N" 69.
<: en lialiii ordinaire, sans chape.
Religieux de Fontevrault, N* 70.— Choalicr de l'ordre des Fous
avec la cliaps.
ti°1\. — llaliilleniriil (le Sailli- l'raii- N- 7"2. — Incirii iKiliillcnnnl ilcs Bi r- N° 73. — Chevalier de l'ordre île la
Ç'iis, lii'é sur plusieurs oii^iiiaiuL. gcis, du loiujis ilc. S linl-Kiaiiçiiis. glorieuse Vierge 5larie.
f " '<*• — Chevalier supposé de
rorJrc de Frise.
N" 75. — Al'be (lu iiKMiiikleie do
rescaia.
N" 7G. — .Ancien relij?ieii\ de FiiMoS,
on liabil ordinaire dans la niaisou.
N' 77: — Anciftil religif ux de Fuldes, N* 78.— Chanoine régulier delà Con- ti' 79. — Clianoine régulier de l.i
en liabit de cliieur. grégalion de France, en habit de Congrégation de France, en habit
chœur l'été. de chœur l'hiver.
N» 80. — Chevalier de l'ordredeSaiiU- N» 81.- Chevalier de l'ordre de Saini- N' 82. - Chevalier couronné de l'or-
Geoiges, dans la Carinthie , en ha- Georges, dans la Cariniliie. drc de Saint-Georges , en Allema-
liil d'éulisc. S"f-
DicriONX, UES Ordrks religieux. II.
33
s*. 85. — Cheval cr supposé de l'orJre
xle Siiiiil-Georges, à IU)inc.
84. — Chevalier rie l'ordre de
Saiiil-Gcorgcs, à Ravenne.
N° 85. — Chi v.ilier supposé ilc l'ordre
dc'SaiiU-Gi'orgps, à Céne^.
.S* JMÎ — Chanoine séculier de h Con-
I^M'galion de Saiiit-Gcorges in Al-
ç'iii.
N" 87. — Ancien rhnnniiie sértilii r
de l'ordre île Saint Cn r^cs iii M-
glia, en Sicile.
N» ÎW. — Chevalier de l'onlrc de
S.lillI-CcK'OII.
N° 89. — Olianoine régtilier de l'ordre N° 90. — Religieuse de l'onlre de N" 91. — Sœiir converse de l'ordre
(le Saint-Gilbert de Siiiipiitigliani, Sainl-Gilberl de Siinpringliain, en de Sainl-Gilbert de Slitiprin^bani,
en Angleterre. Angleterre. cm Aii-;lel(iîre.
N'92.— Ermite de Saint-Jean-Bap- N-flô. — Habillement de Saiiil-Kiicniie N° M. — Relig'env de l'ordre de
tible de la Pénitence. de Graniniont. Grandniom.L'n lialiilor.iinaire dans
la maison.
■R* 95. — Ri'ligioiix lie l'unlrc
Ginndnionl, rn liahit tie rliœiir.
U N'
9G. — Ri-llt-iciix (ie l'orJre de
Gi'a>:(lii)»iit réroriné.
N" 97. — Hospitalière du tiers ordre
de Saint-Fraiicois,dite sœur Grise.
N» 98. — Hospiialièrc du licrs ordre
de Saiiii-l'"iaiiçois, diteswiir Grise.
N" 99. — Aiifieiine liosplulièic du
I iers ordre lie S;ii:il-lr;\!.i;cils, à.Muiis,
dilc sueur (îr se.
^•■ 100. — Ilospimlière réfomice du
liiMS ordre de S;iinl-Fraiiçois, à
Miiiis, dite sœur Grise
N" 10t. — ehevalière de la Haehe, N» 102.— Chevalière de l'Ecliarpe.
i° 103. — Clievaliète do l'ordre du
Cordon, ou- de la Coriklièio.
N" lOi. — Chevalière de l'ordre des
Esclavos du la Verlu;
N" lOS.— Chevalière delà Vraie Cl uix.
N» 106. — Vici i;e de Ihill , c:i li:i|jii
ordinaire ilar.s la niai!>0n.
Viergo «le Hall, ca bahit
(le ville.
N° 108. — Vierge de C isilglione
N° ion — Kdigiciise .le l'orlre «lo
i'Assoinpiion «le Noire -l>aiih', en
Franco.
N' 110. — KilinMiise «le lordre de N"
rAssoiniiiJnii ilo .Nolie-ltjiiio, en
ll.il..-.
ni
Ch.-V.IJMT
roius.
lie l'oiJie de
N" I M. — Collier «le r,.n"ro de nioi
niini'.
N« 113 —GoUier de Tordre de l'Epi. N° lU — Religieux liospitalier de N" H5„ —Religieuse liospiiaiière d»}
l'ordre de la Charité de Sainl-Hip- l'Hdtel-Dieu de Paris, cii liabil de-
poiyle. cérémonie.
N' 116. -Ancien religieux hospiialior N» 117. - ndigiensf l>...pi aiic.v ,1c N" 118. - Chevalier de Sainl-Huberî^
de riIôlcl-Dicu de Paris. Tllold Dieu deP-tiis, e . habi o;J.-
naucbcn
uiillcMiialaJcb.
N" 1 19. — Religieux humilié, dit Ber- N» 120.
reiiii de la l'éniieiice du premier
ordre.
Religieux humilié du Irdi- N" l£l — Re!igieiise liiiniiliéo.cimiiiie
sicnie ordre. c!l s étaient .iiic ciiiieiiitiit
N° m. — Religieuse liuniiliéc. N°123. — Ancien moiiicda la Palestine. N° lâi. — Moine Jacobitc ou Syrien.
N° 12.S. — Religieux hospilalier de N° I2(). —Chevalier de Sainl- Jacques. N* 127.— Clievalerde Sairii-Aiiloine.
l'orilic de Sailli-Jacques du Haut-
Pas.
N« 128. — Chevalier de la Jairclièrc. N° 120. —
Eruiiie de Saini-Jcan- N° 130. — Ermite de la Poiic Ange-
Baplislc liqucà Uon.c.
N i;0 /ii.<. — Eiiii:cs c >!oii!e-Liico.
.N ' 13t. — Chanoine r(";jnliir el liosiii-
laliorilc S^iiiil-Jran Ba|(lislc de Co-
vontiy, en Aiiylolcnc.
N" 152. — Ancien Clinnoinc régulier
«le l'Abbaye de Saint-Jean, à tliar-
lies.
N' 13") — Aiirifn Chanoine réjjnlier de
l'Aljbaye de Sainl-Dcnis, à Ueinis.
N" 151. — Ancien Chanoine n'yiilicr
de Sainl-Lô, à Uoiien.
13,S. — Ancien chanoine régulier
ilii rticiirc des Ociix-.Vnianis.
N" 156. — Ancien Chanoine ré(;ulier N" 137. — Ancien Chanoine régulier N° 138. —Cliannine régulier i!e Klos-
de Sainl-Marlin d'Epernay. de la cathédrale d'U/.ès. terneuhurg, en Alloniai^MC.
N- I39._|{éli^'ieu■< liospilalior de l'or- N" 1 W.— RL■Ii^ienx de la Réforme de N* 141.— Chanoine ré^'ulicr de Saiul-
dre de Saiiii-Jran de Di-c. Gcnlil de Spolètc. Ican des \jg los.
•
N° m. — Clievalionli' l'urdrc île Saiiil-
Jeaii el Je Sainl-Tlioncis.
N' i 43— Chanoine scciilicT, de la Coii-
grégalion de Sainl-Jeaii l'iivaiigé-
lijle, en l'oiUiijal.
N" ii-l. — Ri'ligieiix cniiilc ilc Saint-
Jérôme, en Espajine, en liabil oïdi-
iiaire dans la maison.
N* 1 15. — Religieux ermite tic Saint-
Jcroiiie, en Espagne, allant par la
ville.
N" llli. — RcliBicnsc de l'ordre tics
eiiniicb de SaintJcioine, en Espa-
N° 117. — Ancien lialiillcntont des rc-
ligicuv ei miles de Saint-J(!iorac,dc
la (:onKri'"^;iti(ni du bieiil.uiir. u.v
l'ierie de Pisc.
N" 148. — Religieux ermite de Saint-
JiMonir, (l(^ la Congrégation du bicn-
heiiiciix ricrie dcPise.cii lialiit or-
dinaire.
N* Ii9. — Religieux ermite de Saint-
Jérôme, (le la Congrégation du bien-
heureux Pierre de Pise.
N" i.'iO. — Religieux ermite de Siint-
Jérônie , ré'brniéde la Congrégation
du bienheureux Pierre de Pise eu
Allemagne.
N'ISt. — Religieux ermite de Saint-
Jérôme, de la Congrégation de Fie-
soli.
N° IS'l. — Moine de Saint-Jéiôme en N" 153.-
Ilalie, en liabii ordinaire dans la Italie,
maison. vilh'.
■ Moine de Saint-Jérôme en
avec la coule, allant |iar la
N" I5i. — Religieux J^siiaïc de Saint- N° I5i.— Religieuse Jésuale deSaiiil- NM56. — Jcsuitp.eD haliit ordiiaire
Jéiome. Jt;;tlnie. dans la maison.
N* 167. — Jésuilc, dans un autre lia- ^ 158. — Jcsuito en habit de ville. N« 1.S9.— Missionnaire JfiRuile, en lia-
billcnienl de ma son. ''il •'«-• n>an,laiin à la (.Iniie.
N° 160. — Missionnaire Jésuite, en ha- N° 4C1. — Missionnaire Jésuite, au
bit orilinaire, à la Chine. royaume de Tunquin.
N° lC-2. — Missionnaire Jésuite, au
royaume de Madure.
N° IC3. — Sœur de la société du Uon-
Jcsus.
N" 1C4. — Clerc régulier du Bon-
Jésus.
^" ICo. —Sœur do Sii. l-Jciscpli.
N° 166. — Sœur de la Congrc^galion de
Saim-Josi'pli pour le gniiverncment
des oi'pholincs, à liordeaux.l
N° 167. — Sœur de la Congrég.ilinn
des filli's de Sainl-Joseph, diics de
la Providence.
N* 168.— Ancien liabillemont des re-
ligieuses delà (".oiigréij.aioii deSainl-
Josepl), dius de la Trinilc cicée.
^• IG!>. — Religieuse de la Congri'ga-
tioiid. Saini-.I()M ididiiedelaTrinilé
crtce.eii liabil oi dinaiie.
N- 170. — Ucligicusn de I.i Congréga-
lion de Saiiil-.l i>cpli, dile di; la Tii-
iiilé crééccnli.iliilde ilneiir .
N* 171. — Sœur delà Congrcgaiion de
Sainl-.losppli , pour rélncalioii des
lillcs orplieliucs, a lluucii.
N-173. — Ancien hal)illement des re-
ii;;ieu3es hospitalières de Saint-Ju
scp!i.
N» 173. — Religieuse de l'ordre des N°17i.—Cliaiioino régulier delà C in-
lios|iilalicres de Sainl-Joscpli. grégaiion de Lalr.m, en liabil ordi-
naire.
N°175 — Clianoiiierégulierdela Con- N" 476. — Clianoinc régulier de l'an- N" 177 — Clianoine régulier de Laln.n,,
grégalion île Lalraii , en liabit de eienncCongrégatioii cJe Sainte-Marie en PoI(>î;ii«,
vill(\ du port Adriatique.
Dictions des Ordri-s rci igiei \. II.
33
I7S. — (;iiaii(iiiic's-ie léiîulière lie N°179. — Chaitoinessc régulière de N- 180. — Chanoinesse régulière de
Laii :iii, Lii lialiit oicliiuiire. Lalran, en uabil de cliœur, l'élé. Latraii, en habit de chosur l'hiver.
N° 181. — Chaiioiiu'sst; régulière do .N" 18-2.— Cliaiioinc règulii r de hiCnn- N* 185. — .\ii(ieii haliilleiucnl suppose
l'abliaye de Cliaillot, prés Paris. grcgatioii d.^ Saint-Laiireiil d'Oiilx. (l'im ilievalicr de Tordie de Sailli-
Lazare.
N" 184.— Ancien liabillcmcnl ileschn- N» IS5.— AtRieii Iiabillemenl des clie- N» 186. —Moine de S.iitil-Chaiiton.
valieis de l'ordfe de Saiitl-La/.arc, valiers do Tordre de Saint-Lazare,
dans le xvi' sictle. dans le xv' siècle.
Bi» 187, — Moine de Sainl-Salias. N" 188. — Prêtre delà Mission. N° 180.— Moine de l'abbaye de I.érins.
N» 190. — Religieuse de Tarascon.
N» 191. — Religieuse de Masmunsicr,
ou Moisevaux.
N" 192 — Chcvali.r JuLis.
^» 193. - Religieuse l.ospilalicre de N° 194. - Religieuse hospitalière de N- 19.S. - Religieuse hospitalière .te
Loches, en liahil ordinaire des joui-, Loches en hahitde chœur, a cor- Loches avec au grand voih'. dans,
ouvrier». lains jours el dans iinohjnos ivre- les grandes icivindiiiis.
nioiiii'.s.
N» 190. -Sœur converse hospitalière N» 197. - Religieux du iroisiéme oi- N» 198. -ClievaUei; gin -.1 cr
de Loches. dre de Sainl-Fiançois, de la (.011- de l ordre de baiiil-L us.
grégaiiou de Louibardie, cti liabit
ordinaire dans la maison.
N„ ni - R,.|;-o.,x ,1c r,.nl,c do >a ?i" 200. - Religieux de Tonlre de la N" 200 /„-s.-ATicien lial.illemenl des
P, IM. n,l.„.e.ix(ic K.i.nc (it -.1 Madeleine en Alleina^ne. religieuses du mimaslcie des (.Les
pénilentes à Paiis , avaiil leur ru-
iormc.
PénileniT de la Madeloino.
^'' 200 ter. — Ancien habillement des
religiensos liu nionasléie des filles
(lénilenlos à Paris, après leur ré-
foniio.
N° -201.
■ Kelinieiise itïaJelonnellc
à McU.
N" â02. — Mailelonnctte de la Contre- ■
galion do Saiuie-Marie Madeleine. f
K' iOi /lis. — Madelonnel'.n de la Con
j;iépjiion de Sainlc-Marilie.
N°203. — Chevalier de l'ordre deSaiiiI-
Jeaii de Jcrnsuleni, faib:iiit ses ca-
ia>an' s.
XO',. — Gi nn I cM.iiiii
S.iiul J .\i\ ,!e Jj
(II' l'iiiihe du
;;...l m.
N« 203. — Cliftvalier de l'ordre de
Snin(-Jean de Jérusalem avec le
nianicau à bec.
N-iJOO. — Ancii'ii cliivalicr de l'oidre
de Saiiil-Jeaii de Joiiisalem.avi c le
iii;iiilean à Ijcc, dans le mv siècle.
[V'o 207. — Clievaller grand croix de
l'ordre de Sainl-Jea:i do Jeiiisu-
lein.
N* iOS. — Clirvalier grand croix de
l'ordre de Saint-Jean do Joiiisaleni.
allanl au conseil.
p^o 201). — Chapelain de l'ordre de
Sainl-Joan de Jérusalem, en haliil
de ville.
N' 210. — Cliaiirlain de l'ordre
Sainl-Jean ilc .iernsalein, en linhit
d'église, à Mullr, avec le ciuiiail
violet.
N" 21 1.— Ancien lialiillenicnl îles Cliii-
pçlaiiis (lo l'ordre de Sainl-J.an de
Jûnisuluiii.
.V 212. — L.' R. Kaymonil du Pny,
lirfiinifir grand inailro do l'ordre de
Saiiil-Jeaii do Jérusalem.
N' 213. — Prieure du nionaslcie de
Sixi'nc, des iiligicuses l'c l'ordre île
Suiiil-Jean de Jérusiul m.
N" 211. — Ueli^ic.use de l'ordir do
Sailli- J< an drictusaleni, du luonas-
léie de S.xeni', en liai il d enlise.
N" 215.^ Aucun lialiillenient îles re-
ligieuses lie roidio de Sainl-.lran
deJcrn>alein, ilu uionablèrede Pis-e.
N» 2l(i. — Religieuse de l'ordre de
Sainl-.lean île Jérusaleiii, du inuliab-
leie de I'ibO.
N" 217. — Rclisieirse de l'oidre ilc
Sailli .1 an ileJcnisaliMn, du inoiias-
tcre iW Kluronce, en liabit mJiiiaire.
fit .. i' U T^t^jii
r "218. — Ri-li;,'ioiisc l'.e l'ordie de
i^ainl-J''aii de Jc'insaVin du inimas-
leie de Florence, en liabit de céré-
iiioiiic.
N" 2in. — Ilaldlleinpni <les religieuses
de Sainl-Jeaii de Jérnsalem de l'hô-
pital de Beaulieu. dans le coniiien-
ceiiient de leur élalilisseiiienl.
R' 2i(). — Haliilleiiient des reli^inises
de Sainl-Jean de Jcritsalcni,de l'Iin-
pilai de Beaulieu, avant la piiso de
llliu.Ics.
N" 221. ^ R(!lij;ieuse de l'urdre di'
Saint Jean de.lcrusaleni, dn nionas-
lere de Tuuliiuse , eu lialùt ordi-
naire.
N» 222.— Ancien liabilleinont des re-
ligieuses de l'oidre de Saiiil-Jian clo
•lérnsalein.de lliopilal de Beaulieu,
après ia priso de Rhode:-.
N' 225. — RL-licifuse de l'ordre «le
Saiiit-JiMii de Jcriisalcm du nioiia-
slcrc de Toulouse , en liabil de
clKJUiir.
N" 224. — Prieure du nionaslcrc des
reli;;ieiises de l'ordre de Siilnl-Jr:iii
de Jériisaleui, à Toulnu*', en liabil
de léréuionie.
N" 223. — CliaiioÏMC régulier de Mar-
bak, eu Al>aee.
N° 22fi. — Cliaiioine n'i;ulicr do l'aii-
(ii'iiiif Ciiiigrégalioii do S:iiiil-Mai( ,
d'; Mauluui'.
N" 227. — Moliic Maroiiie.
.^" .28.— IVclisi.irse M;ir irl-
K" 221) — r;ilriaitlio il. s Maroiiiies.
M" iJO.— Hosiiitalièrc Je Sainlc-
Marllio.
N' i'A — Cliaiioiiic rédiilier il,: Saiiil-
Mauiicc ii'A;;aiuio.
N" '202. — ClievaliiT île ronlrc ilc
Sjiiil-llauiiuc cl Sainl-La7.a!C.
N" -235. — Moine Miniçrélicn.
N" 2ôi. — .\iiciiii cIn'NalIfi- ilr l'jrilre
do Noti-.-l'a:in; de lu .Ho à.
^•' 235. — Reli^'ieiix He l'orilrc <Ie
Nolre-Danie de \a Merci, en liabil
unlNiaiic dans la maison.
N° 23G. — Religieux de l'ordre (If.
Notre-Dame de la Merci, avec la
cliape.
M» 257. — Religieux décliaussc de l'or-
dre d« Nutre-Duuic de la Merci.
N" 25S. — llcligifiisc de l'ordii
iN'olie-Danie de la .Mertj.
do
N' 2r.9. — Iti'ligieiisc dé liai s éo dp
l'or :re de .Nirirc-Paitii; di: la Mcui.
N" 2111. -Clianolir r '
il'- l;l l'i'IliU'Ilii' i).-,
Iiil lie rlni;iir.
-iilicr de l'ori'rc
.M;irlvis,en lia-
N" 211. — Chanoine régulier de la
Pénitence des Martyrs.
N" 2 i-2. —Chevalier de Sninl-Mitlicl. N* 243. — Cliev;ilier de loidie de la
Milice de Jésus- Clirist.
^ tf 243 bis. — Sœnr dn tiers ordre de
Saint-Doini liiiiie de la Congiéga-
lioii de la M. lice de Jésus Cliijil.
N" 244. — Clerc réiiulier mineur.
N° 24S. — IWli^ieux M iiinie, saii»
nuinleiiu.
N" 2l(i. — R.'ligicux Miiiiiii ', avec K; N" '2'i7. — R.lipieuse .Minime avec 1« N" 24S. — I5clii.'i.iise Miiiin e, ^a;ls
iiiaiilinu. manteau. iiiaulrati.
K'2J9.— Cli-rc rc);iilicT, iniiiisiic lies N" 2u0.— l'illc ilc Saillie -(iriic> lève. .N -2 1— U li i, use ilc l'onlrc de
iiiliiiiics. .Niilr. -Dame de l.i M s.m coule, eu
li.il i. iiiil:iiairi'.
N° '232. — U li-i use de l'oidie de N" 253. — Fièie do rarcliiroiifialcr-
NoiroDaine de Miséricorde, e:i lia- niié de Notre-Dame du Moni-Cai-
bit (le céi'éiiioiiie. niel.
N° 251. — Grand maître de l'ordre de
Notre-Dame du M()iii-Cann<;l, tl de
Saint-Lazare de Jérusalem.
N° 255. — Chevalier de l'ordre de N° 250.— Chevalier ecclésiastique de N" 257. — Frèro si>rvant de l'ordre do
Notre-Dame du Moiit-Carmel, et de l'ordre de Notre-Dame du Mont-Car- Nolre-Daiiie du Moiit-Carniel, et d3
Saiiii-l^zare de Jérusalem. mcl et de Sainl-Lazare de Jérusalem. Saini La/are do Jéi usaient
N" 2')8.— Novice de l'ordre t\e. Nulrp-
0:11)10 du Moril-Carmel.el de Sainl-
La7.ure de Jéiusalem.
M" 2o0. — Iloraiil de l'ordre de Nolre-
Damc du MAiii-Carmcl, et de Saint-
Lazare de Jéiusalcin.
N" 2G(>.— lliiissiorde l'ordre de Notre-
Dame du Monl-Caiincl, et ilc Sain. •
Lazare de Jérusalem.
fi' itil. — Frc.-e du tiers ordre des
Caniii'S.
N" Hii. — Sœiir du tiers ordre des
Cannes.
N" i65. — Bcnédiciin ilii Monl-Cassin,
en liabil de eliœnr.
N"2W.-Boi,r(liclinil.i Mont-Cassin, N' 205.— Frère convors .lu Monl- N' 2i;r,. —Frère coi.vrr^ .lii Mûnt-
pii li;il,ii onliiiaire dans la maison. Cassin. en habit ordinaire dans la f assin, en lialiil de ville.
maison.
N« 267. -Chevalier de l'ordre de
Moiitesa.
N" i68. — Chevalier de l'ordre de
Mont-Joie.
N" 2(i9. — Ancienne fiéiicdieline de
Montmartre, avant la réforme.
DicioNN. DES Okdbics religieux. II.
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N 270. — lîoïK'iliciin tld Moiii-Olivot, N' 271. —Bénédictin du Monl-Olivet N° 272. — Ficro convers du Mont-
ni li;il<ii oiiiiii.iiri' dans b maison. on habit de chœur Cl de ville. Olivet, en habit ordinaire dans la
maison.
N" 275. — Ficre conviis du Moi.t- N' 27i.— Itéiiodicliiie du Monl-Olivct N" 275.— lîénédiciiiic u Mont-Olivri
OllT. lc:i biibil di: >illo. fii iiabil ordinaire dans \.\ ui.usoii. en babil do nœur
N" 27G.— Clianoiiic régulier de Saint- N° 277. — Rcligiciu du Monl-Vieig.s N" -278.— R lis^'n'iix du Mnni-Vioigc,
Eloi d'Anas. couiuic ils ctaieiil anticiiiicmoiil. ou liabil or.Uuairo dans la uiaisoi).
N" 279. — Religieux du Miml-Viergo, N" 280. — Religieux du Moni- Vierge, N" 281. -Religieuse du Mont-Vierge,
en lialiit de elia"ii-. cji iialiit de ville, li)rs(|irils vi,iit j;,, i^m u,'jiiiaiie dans la maisuii.
sruU.
N" 2S2. — Religieuse du Moril-Vieri-'c,
cil lialiii (le céi'émuiiie
N' 283. — Moine Nesloricn.
N" 2;'4. — Religieuse Ncstoricniie.
N» 485. — Cliaiioiiiessc (le. Nivelle, en
Ii3lill «l'église, culiliili; elles élaieiil
aiiciciiiieiiieiil.
N" 280. — Cliaiioiiresse (fc Nivdl.' en
lialiil (leglise, cuiiuiie elles sont
piéseiileiiieiil.
N 287. — Clianoincsse de .Mans , pi
h.iliil (le ('li(i;(ii', la |ireiiiiè:r uiiiiiM
(le su i(''('e|i|i(iii.
N'> 288. — Clinnoiiiesse île Mons, en N" 289 — Cliaiioiiiessc ilo Mous, on W° 290. — Alibfsse de fthuiijengc,
lial)ii lie cliœiir, la deuxiènie aiiiice liabJt de cliionr, la lioisicine année coniuie elles étaient anciennement,
de sa icccption. de sa réception.
N» 291. — Clianoinessede Denain, en N" 292. — Chevalier de Saint-Esprit N" 293. — Chevalier Ou Saint-Esprit
habit de cliœur. au Di oit-Désir, ou du Nœud, en ha- au Droit Désir, le cliaperon en léic
bit de l'ordre, avec le Saint-Esprit. cl le nœud d'or sur la poitrine.
N"20't. — Olicvalier du Saini /■,'.s|irii
au Uioil-Ucsir, avec le luantLau.
N" 21).'). — Cliaiioincssc ilo Nuli.
N 2',iii.-- Saur converse (le Noii.
N" 297. — Ucligii-usP. de l'ordre di; N" 298. — Roliftinnso do l'ordre de N" 299. — Ancienne Bénodiriine de
Noire-Oaiiio di (^harilii, eu liaMl N.)lr(' Pâme de C a'ilé, iii lialiil de Ndire-l'ame de Saint-Paul de liiau-
'jrdiiiai;:'. iéié!ii'«iiiv'. v;iis. avaiil la léloruu'.
Paris. — liniu-iuieric J.-P. MICM:.
La Bibliothèque The Library
Université d'O^t^S^r^jg^n versity of Ottawa
Echéanc^ ^I^MV j Date Due
0 4 OCT. 1989
Il'-!vv .„ _.^^._.
CE BL 0031
.N5 V021 1863
CCO HELYCT, PIER DICTICNIMAÎ
ACC# 1318558